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CONSTRUCTIONS PARTICULIÈRES
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5^ AKNÉE.
INTRODUCTION.
(1844.)
La Revue de ï Architecture et des Travaux, Publics entre aujourd'hui dans sa cinquième année; elle n'est donc-
plus à l'état d'essai, sa durée n'est plus une chose problématique.
Nous ne rappellerons pas les marques d'approbation et de haute estime données souvent aux principes qu'elle
professe par les corps artistiques et savants; mais à ceujf qui voudraient s'éclairer sur sa véritable valeur, nous
dirons : Jetez les yeux sur notre passé.
Ajouterons-nous maintenant un mot sur l'avenir? Ferons-nous de nouvelles promesses en terminant la première
page de notre cinquième année? En thèse générale, non. Nos principes sont connus, et la manière dont nous les ap-
pliquons l'est aussi. Nous nous bornerons donc à énumérer quelques-uns des travaux que nous avons mis sur le
chantier, et dont certains sont déjà presque terminés.
Et d'abord nous publierons un travail historique et pratique sur VAlhambra; huit ou dix planches l'accom-
pagneront, et un grand nombre de gravures sur bois, insérées dans le texte, en feront comprendre les détails, ^e
Club de la Réforme, ce monument d'architecture privée dont M. Ch. Barry vient de doter Londres, sera donné avec
ses détails de construction, de service, de chauffage, de ventilation, etc. Un travail complet sur le chauffage et la
ventilation des édifices publics et des maisons particulières, des théâtres, des hôpitaux, des collèges, des écoles,
des tribunaux, des sécheries, des buanderies, des serres, etc., sera fait par un homme de l'art à qui la science et
l'expérience sont également familières. Des modèles nouveaux de maisons particulières, ainsi que d'écuries, de
cuisines, etc., seront également donnés à nos lecteurs. Mais ces travaux pratiques ne nous empêcheront pas de
traiter, comme par le passé, les théories d'art et de science, et l'histoire non plus, cette génératrice du présent,
ne sera pas plus oubliée que pendant les années précédentes; et si l'Alhambra et Fart indigène nous en laissent
la place, nous évoquerons aussi les débris de l'art antique de la Grèce.
T. V. 1
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
TOMBEAU DE CHARLEMAGNE
A AIX-LA-CHAPELLE,
Paris, 17 dcccnibic 1843.
Monsieur le Directeur,
Pendant que vous prolongiez vos intéressantes reclierclicssnr l'é-
tat de l'art et de l'industrie dans un des principaux centres d'activité
duglobe, je me trouvais à Aix-la-Chapelle, en présence d'un art qui
ne vit plus, mais dont on ne saurait trop, à mon avis, réveiller le
souvenir et révéler les grandeurs. Je parle de la magnifique orfè-
vrerie du Moyen-Age, dont nous sommes si pauvres en France, et
dont l'Allemagne est encore si riche. L'impression vive de sur-
prise et d'admiration qu'éprouvent unanimement à son aspect les
nombreux étrangers qui visitent chaque jour le trésor d'Aix-la-
Chapelle durant la saison des bains, me persuade que la reproduc-
tion du système architectural de ces brillants édifices de métal se-
rait appelée aujourd'hui à un succès assuré auprès des hommes de
goût aussi bien qu'auprès du peuple, si l'artiste moderne savait, à
force d'observation et d'amour, s'inspirer du génie des anciens,
tout en profitant des procédés plus avancés acquis à notre époque.
Vous verrez, je l'espère, un essai de ce genre à la prochaine Expo-
sition de l'industrie nationale : puisse-t-il mériter vos suffrages à
quelques égards, et préparer la solution du problème!
Je ne pouvais pas séjourner à Aix-la-Chapelle sans donner plu-
sieurs jours d'étude au vénérable et imposant édifice, le seul, si je
ne me trompe, qui soit authentiquement l'œuvre de Charlemagne.
N'est-il pas étrangeque la docte Allemagne se soit bornée, jusqu'à
ce moment, à en publier des dessins, sinon inexacts, du moins fort
incomplets, alors qu'il s'agissait d'une page aussi capitale de l'his-
toire de l'art? Je dois à l'obligeance de M. l'inspecteur des travaux
publics de la province d'Aix, le conseiller d'architecture Craemer,
des plans et des coupes relevés par lui pour servir à la restauration
dont il est chargé, et j'ai fait moi-même coter et profiler toutes les
moulures et les corniches à toutes les hauteurs. Je m'occupais de ce
travail lorsque j'eus le plaisir de faire la précieuse connaissance
d'un homme de talent que vous connaissez par ses ouvrages.
M. le baron deGuast, l'auteur du travail intitulé Ravenna, venait
d'être nommé inspecteur-général des monuments historiques de
Prusse, et il commençait par Notre-Dame d'Aix-la-Chapelle son
examen des richesses archéologiques de l'Allemagne septentrio-
nale. En poursuivant ensemble quelques recherches, nous avons
trouvé plusieurs bases en pierre appartenant aux colonnes de mar-
bre delà galerie, un couronnement d'architrave destiné, sans au-
cun doute, à porter les petits cintres insérés dans le vide des gran-
des arcades supérieures de l'octogone, ainsi qu'une autre pierre
de couronnement qui nous a semblé avoir du appartenir au mur
où étaient découpés les trois petits cintres, et sur lequel s'ap-
puyait le second ordre de colonnes. Peut-être serait-il à désirer
que, dans les restaurations commencées, on reproduisit modeste-
ment ces diverses moulures, au lieu de puiser dans l'éternel Vi-
gnole des profils qui n'auront jamais, quel que puisse être leur
mérite propre, celui d'être en harmonie avec le style carlovingien.
Cette considération sera, je le crois, vivement sentie un jour, lors-
que le mouvement imprimé depuis quelques années aux études
d'archéologie du Moyen-Age se sera répandu partout en Europe.
Je pourrais, si vous le désiriez, revenir ailleurs sur ces questions.
Pour aujourd'hui, permettez-moi de me borner a vous donner
quelques renseignements exacts sur deux faits que les récits des
journaux ont étrangement dénaturés : l'ouverture de la châsse de
Charlemagne, faite en ma faveur, et les fouilles pratiquées quel-
que temps après dans la cathédrale par M. d'Olfers, directeur-gé-
néral des Musées de Berlin, qui a bien voulu m'inviter à y prendre
part. Pardonnez-moi quelques détails : tout ce qui touche la dé-
pouille mortelle d'un homme qui est resté une des plus grandes
gloires de la France et du monde ne peut être sans intérêt pour
vos graves lecteurs.
Nul n'a jamais révoqué en doute, ainsi que quelques-uns ont
paru le supposer, l'existence du corps de Charlemagne dans la
grande châsse romane placée autrefois au fond du chœur, derrière
le grand-autel, et conservée aujourd'hui dans le trésor. Quoi qu'il
en soit des poétiques descriptions qui se lisent en plusieurs chro-
niques estimées, relativement à la manière triomphale dont le
corps du grand monarque aurait été disposé dans son sépulcre, ou
Othon III l'aurait, dit-on, découvert en 1001, assis sur un trône
d'or, la couronne en tête, couvert du manteau impérial, la main
gauche appuyée sur un riche évangéliaire et tenant de l'autre un
sceptre d'or; ce qu'il y a de certain, c'est que Frédéric Barbe-
rousse, ayant obtenu de l'antipape Pascal la canonisation de
Charles, releva ses ossements, au milieu d'un grand concours d'é-
vêques, afin de les offrira la vénération des peuples. Or, on sait
que l'usage universel était de renfermer les reliques, à cette occa-
sion, dans des châsses d'autant plus splendides que le donateur
était plus miignifique et le saint plus vénéré. Celle qui porte le
nom de Charlemagne, à Aix-la-Chapelle, a dti être exécutée dans
ce but, et achevée, sinon sous Frédéric, du moins peu d'années
après lui, à ne s'en tenir qu'aux simples inductions archéologicjues,
puisque le style de la grande couronne de lumière qui porte les
noms de cet empereur et de sa seconde femme Béatrix, est le
même roman fleuri qui s'épanouit sur la chîisse, et que les bas-
reliefs de l'une présentent les mêmes profils que les sujets gravés
de l'autre. D'ailleurs, tous les historiens de l'Église étaient d'ac-
cord sur ce point, depuis les Noppius, les de Beck et les Meyer,
jusqu'au dernier qui vit encore, le docte abbé Quix, qui a bien
voulu nous faire part du fruit de ses longues études locales. Je
n'avais donc pour ma part aucun doute sur ce fait; mais cette cer-
titude ne diminuait aucunement ma curiosité, elle l'excitait au
contraire. J'étais vivement désireux de m'assurer que les reliques
de saint Léopard, déposées par Frédéric dans le même cercueil,
RKVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
ainsi que l'affirmait de Beck, n'étaient pas confondues avec celles
de Charlemagne. Je voulais confronter ces derniers ossements
avec ceux que l'on conserve séparément dans trois reliquiiires du
XlVe, du XVe et du XVI» siècle, afin de constater l'identité du
corps. Enfin, je n'étais pas sans espoir de rencontrer dans l'inté-
rieur de la châsse quelque acte antique jetant un nouveau jour
sur les faits, ou de trouver du moins les précieuses étoffes que le
magnifique Frédéric devait avoir employées pour ensevelir celui
qui était de sa part l'objet de tant d'admiration et d'amour.
J'osai donc solliciter du chapitre d'Aix une faveur inouïe, à
laquelle je ne pouvais avoir d'autres droits que le désir et l'espé-
rance de contribuer par quelques travaux d'histoire et d'art à faire
mieux connaître l'incomparable trésor de la basilique carlovin-
gienne(l). Mon indiscrète demande rencontra une bienveillance
que je ne saurais assez reconnaître. M. le prévôt Claëssen consentit
à ce que la chûsse fût descendue de la place élevée où elle se con-
serve, et voulut présider lui-même à son ouverture. Nous eûmes
beaucoup de peine à découvrir le secret de la construction. En
vain, les premières plaques d'émail enlevées, cherchions-nous à
pénétrer dans les jointures des épaisses planches de chêne; nous
les trouvions partout fortement assemblées. Ce fut seulement après
deux heures de recherches que le mot de l'énigme se rencontra.
Les ouvertures avaient été pratiquées au milieu de chaque versant
du toit, et les portes qui les fermaient se trouvaient fixées par des
liens de fer sous les plaques de cuivre. Quand ces liens eurent été
détachés, ce ne fut pas sans un religieux saisissement que nos re-
gards avides pénétrèrent dans l'intérieur. Nous y aperçûmes d'a-
bord une feuille de parchemin, puis des étoffes et des ossements
disséminés, la plupart d'une bonne conservation. Le parchemin
était un acte du chapitre, qui remontait à l'époque de Louis XI,
et constatait que l'os de 1 "avant-bras avait été extrait de la châsse
à la demande de ce prince, pour être placé dans un reliquaire dû
à sa libéralité. L'avouerai-je? Je brûlais d'envie de tenir entre les
mains les étoffes dont j'entrevoyais le dessin et les couleurs, et qui
me semblaient accuser par la grandeur du style l'époque du rival
de Philippe-Auguste ; mais une main du XIX^ siècle pouvait-elle
bien, sans frisson, remuer les cendres d'un Charlemagne, dç celui
dont le nom s'accole à ceux d'Alexandre, de César, de Napoléon,
et reste, à mon avis, le plus grand de tous? Nous eûmes cette au-
dace. Il fallait bien d'ailleurs examiner en détail l'état de ces au-
gustes restes pour en dresser procès-verbal et procéder à la con-
frontation désirée.
On eut bientôt la garantie que la châsse renfermait seulement
un corps, auquel il ne manquait, à peu de chose près, que les
grands ossements conservés à part. On vit aussi que les traditions
appuyées sur Eginhart relativement à la haute stature du grand
homme n'avaient rien d'exagéré : son fémur fut trouvé de 52 cen-
timètres.
Il nous restait à étudier de près ces étoffes contemporaines
de nos plus grands monuments, et dont l'ornementation devait
d'autant plus exciter notre Intérêt que chaque branche particulière
de l'art a eu ses traditions et gardé son faire propre, ainsi que nous
le voyons dans la sculpture en pierre et dans les ivoires, dans la
peinture sur verre, la peinture en émail et celle des manuscrits.
(I) Un de nos hommes d'État les plus distingués, qui partage entre l'iiis-
icirc et l'art les loisirs que lui permet la politique, m'exprimait dernièrement,
à Aix, la conviction que ce trésor est le plus précieux de l'Europe.
Pour développer ces étoffes à loisir, nous enlevâmes avec le plus
grand respect la poussière sacrée dont elles étaient couvertes ; je pus
alors en prendre des calques précis. L'une (il ne s'en trouvait que
deux) était ornée de fleurs rouges, bleues, blanches, vertes et jau-
nes, sur un fond violet, et tissue en soie, mais d'un caractère artis-
tique moins prononcé : c'est elle qui renferme en ce moment la dé-
pouille de Charlemagne soigneusement enveloppée.
L'autre , tissue en sole et en fil , nous apparut magnifique de
forme et d'harmonie de couleurs. Sur un fond rouge amarante
étaient semés de larges ovales, au centre desquels s'avançaient des
éléphants richement caparaçonnés. Les broderies des encadrements
et la rose jetée au centre des vides laissés entre les ovales, rappe-
laient ces crêtes fleuronnées qui se découpent sur les châsses du
xiie siècle; au-dessus et au-dessous des éléphants, se dessinaient,
sur les fonds, des végétaux que l'on eût dit avoir servi de type aux
arbres de Jcssé que nous admirons à Saint-Denis et à Chartres.
L'effet général avait quelque chose de celui des vases étrusques.
D'où provenait ce splendide travail ? Était-ce un produit de l'Al-
lemagne? Frédéric l'avalt-il fait venir de l'Italie ou de la Sicile?
Etait-ce un ouvrage latin, grec ou arabe? Notre faible science hési-
tait, quand tout à coup une inscription se découvre, une inscrip-
tion tissue dans l'étoffe : elle était écrite en grec ; mais en grec du
Moyen-Age. Faut-il le dire? elle nous refusa d'abord son secret. Je
me plais ici à rendre hommage à la bienveillance d'un membre de
l'Institut, qui passe à bon droit pour un des plus habiles hellénistes
d'Europe. M. Hase, à qui je fis aussitôt parvenir un calque de l'in-
scription, n'eut besoin que d'une seconde pour lire :
-j- Par Michel, intendant du trésor privé et du palais,
}- [Et par] Pierre, gouverneur de Négrepont. Deuxième indiction.
Les fonctions du premier personnage, à la cour des empereurs de
Constantinople, correspondaient exactement à celles de notre in-
tendant de la liste civile et de la maison du roi.
Rester l'unique possesseur d'un dessin d'aussi grand prix m'eût
semblé de l'égoisme ; j'en fis prendre une copie, à la demande de
M. d'Olfers, pour qu'il pût en faire hommage à Sa Majesté le roi de
Prusse; et j'autorisai M. de Hafneràle reproduire dans le bel ou-
vrage qu'il publie à Manheim, sur les costumes du Moyen-Age, sans
renoncer toutefois à l'imprimer moi-même.
Cette belle étoffe n'est pas la seule que nous ayons décou-
verte. Malgré tous les chocs que la jolie ville d'Aix, placée sur la
principale route de l'Europe, a pu recevoir dans les grands conflits
du dernier demi-siècle, le vigilant amour de ses habitants pour leur
trésor avait toujours su le soustraire au vandalisme des vainqueurs.
Je le savais, et j'en étais encore plus porté à soupçonner que plu-
sieurs objets précieux attendaient au fond des vieilles armoires le
regard de l'antiquaire. En effet, grâce à la complaisance de
51. l'abbé W idenhaupt, custode du trésor, je rencontrai quelque
part, parmi les vieux meubles de l'église, une caisse en bois de
chêne remplie de saintes reliques, de celles probablement que Ion
aura retirées des nombreux autels aujourd'hui détruits : quelques-
unes étaient enveloppées dans des soieries des XI^ et XII>^ sïècles,
de la plus grande beauté. Pourquoi faut-il qu'il soit si diffîcile de
faire jouir le public de ces trésors sans s'exposer à de pénibles sa-
crifices? 11 serait digne de» gouvernements d'apprécier les grands
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
8
travaux qui remplissent véritablement de grands vides, et de favo-
riser d'une manière spéciale ceux qui ajoutent des valeurs incon-
nues et importantes à la somme de matériaux que chaque siè-
cle met en œuvre, pour créer l'art qui le caractérisera dans l'a-
venir.
La châsse de Charlemagne était refermée , quand arriva
M. d'Olfers, dont le voyage avait pour but des fouilles à prati-
quer sous le sol de l'église. Voici à quelle occasion. Durant l'hiver
dernier, M. le prévôt Claëssen, ayant fait creuser sous celle des
arcades du portique qui est contiguë à la sacristie, avait découvert
un caveau renfermant un cercueil en plomb ; mais les recherches
s'étaient arrêtées là ; car le roi avait exprimé le désir d'être averti
des premières découvertes avant qu'on passât outre. Le conseiller
intime, directeur-général des musées de Berlin, venait de sa part
pour faire ouvrir le cercueil, avec l'autorisation de l'Ordinaire, et
continuer les fouilles.
Nous y avons consacré une partie des nuits d'octobre. Un sa-
vant distingué, qui a publié une notice pleine d'une rare érudition
sur le palais de Charlemagne à Aix, et qui prépare, depuis dix an-
nées de recherches, un travail sur la basilique carlovingienne,
M. le professeur Bock, s'était joint à nous, ainsi qu'un jeune prince
dont le nom doit être doublement cher aux amis de la religion et
de l'art, M. le comte de Furstemberg, qui décore en ce moment,
avec une splendeur digue d'un souverain, son église d'Apollinaris-
berg. Nous espérions posséder aussi Mgr. le coadjuteur de Cologne,
dont on sait les travaux archéologiques; malheureusement, il
avait alors à remplir un douloureux devoir auprès de sa mère
mourante.
Pour se rendre compte de nos fouilles , qu'on veuille bien se
rappeler le plan de l'église. Il forme au centre un octogone entouré
de deux portiques intérieurs superposés, lesquels sont renfermés
dans un mur polygonal à seize angles. Vis-à-vis de la principale
entrée, trois faces de ce mur ont été enlevées pour ouvrir les porti-
ques sur le chœur, plein de magnificence, bâti à la fin du XIV" siè-
cle. L'entrée est formée d'un porche surmonté d'un étage, ainsi
que les portiques intérieurs. Son rez-de-chaussée était jadis ouvert
sur la voie publique, et c'était dans un des angles que se voyait
avant la révolution le tombeau du grand artiste à qui l'on doit la
construction du chœur. Gérard Chorus fut au même degré homme
de bien et homme de génie ; ses compatriotes eurent pour lui au-
tant d'amour que d'admiration, et, vraiment, c'est beaucoup dire à
leur louange et a la sienne. La reconnaissance publique fut portée
jusqu'à fonder à perpétuité une lampe qui devait rester nuit et jour
allumée devant sa tombe. Nous avons trouvé et religieusement re-
cueilli ses cendres éparses, pour les renfermer dans une caisse de
plomb, et les replacer au même endroit. Espérons que bientôt on y
pourra relire la vieille et naïve inscription :
Il Gcrartius Chorus miles virtute sonorus
« Magnanimiis inultuin, scelus hic non liguit in uUum.
« In populo magnus, in clerc milis ut agnus. »
A peu de distance de l'entrée, et au Sud de l'église , se trouve
la chapelle Hongroise. D'anciennes fouilles, décrites par les vieux
historiens d'Aix, avaient fait découvrir, vers le centre, un grand
bassin en pierre, regardé par les uns comme un des bains ro-
mains restaurés par Charlemagne, et estimé par d'autres un bap-
tistère chrétien. L'exploration de cette partie et de quelques autres
a été remise à l'époqûè des grandes restaurations qui se préparent;
mais nous avons trouvé sous la voûte du portique la plus rappro-
chée de la chapelle dont je parle, outre un fragment de voûte assez
mystérieux, de larges briques romaines qui ne nous ont pas permis
d'hésiter entre les deux opinions. La première s'est trouvée en ou-
tre pleinement confirmée par une fouille faite au centre même du
dôme. On voit aujourd'hui en cet endroit, et au niveau du sol, une
vaste table de marbre noir sur laquelle se lit une inscription pleine
de grandeur en sa brièveté : carlo mao.no. Que couvrait ce mar-
bre? N'était-ce pas dans ce centre de l'édifice qu'a>ait été creusé le
mystérieux caveau, à la voûte dorée, où, selon les chroniqueurs,
Charles, grand dans la mort comme il l'avait été dans la > ie, avait,
durant trois cent cinquante et un ans, depuis la fin de 814 jus-
qu'en 1166, continué de tenir le sceptre de sa main glacée, et
porté, sans céder sous le poids, la couronne impériale? Les tradi-
tions locales, les récits même venaient confirmer cette présomption
vraisemblable. Un vieillard nonagénaire nous cita sur les lieux la
conviction des vieillards qu'il avait entendus dans sa jeunesse.
Mieux que cela, nous trouvons l'architecte qui avait à s'accuser
d'avoir enlevé dans le chœur, au tombeau d'Othon III, la large table
de marbre; il tenait de la bouche de l'évêque d'Aix sous Napoléon ,
Mgr. Berdolet, qu'une fouille pratiquée sous ses yeux en cet en-
droit avait réellement fait découvrir le sépulcre de Charles.
Ces renseignements pris , on se met à l'œuvre ; mais , chose
étrange, point de caveau, et point d'indice qu'il en eût jamais
existé 1 Seulement, à une profondeur de deux mètres, et dans la
direction de la chapelle Hongroise, c'est-à-dire du Nord au Sud,
nous trouvâmes un canal de bains romains en briques larges et
épaisses; et au delà un mur allant de l'Est-Sud-Est à l'Ouest-Nord-
Ouest, sans nul rapport possible avec l'église. La question du ca-
veau n'est pourtant pas entièrement résolue, puistjue la partie
orientale de l'église n'a pas encore été explorée.
Notre curiosité fut au contraire consolée quand nous fûmes aux
deux extrémités des portiques intérieurs, sous les deux voùtesd' arête
qui touchent les trois arcades ouvertes sur le chœur. Le cercueil en
plomb, entrevu durant l'hiver précédent, à droite en entrant, était
précisément celui de ce saint Léopard dont nous avions vainement
cherché les cendres dans la châsse de Oiariemagne. L'inscription
suivante était gravée sur un des versants du couvercle :
K Clauditur bic magnus Leopardus nomine clams
« Cujus sub obscquio regnabat tertius Otto. »
Le tombeau correspondant était celui de sainte Couronne :
nous lûmes, à la même place, sur lâchasse de plomb :
» Clauditur hoc tumulo martyr Corona bcnigna
« Tertius hic Ccsar quam duccns conderat Otto. »
Mais, désappointement cruel! Malgré des murs de quatre-
vingts centimètres d'épaisseur, revêtus à l'intérieur d'un ciment
aussi dur que le grès, l'humidité avait pénétré dans les caveaux mal
protégés par les grandes assises qui les couvraient. Les saints corps
qui avaient déjà reposé quelques siècles dans les catacombes de
Rome, avant de prolonger à Aix un sommeil de huit cents ans,
étaient tombés en poussière, et il en était de même des précieuses
étoffes qui les avaient sans doute jadis entourés.
Monsieur le Prévôt a conçu l'excellente pensée de faire graver
chacune de ces deux inscriptions sur un marbre que l'on introduira
au milieu du pavé à l'endroit précis où reposent les corps saints;
il nous a également fait part de quelques autres projets qui lui
vaudront la reconnaissance des antiquaires aussi bien que celle
des fidèles. Le trésor est aujourd'hui placé dans des armoires qui
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
10
déparent entièrement une charmante petite cliapelle du XV« siècle.
Il espère faire agréer du roi sa translation dans la spacieuse cha-
pelle Hongroise, rotonde décorée par l'impératrice Marie-Thérèse;
là seraient élevées, seulement à hauteur d'appui, et dégagées de
toutes parts , les longues et merveilleuses châsses de Notre-
Dame et de Charlcmagnc , tandis que les autres morceaux d'orfè-
vrerie, les bronzes, les ivoires, les manuscrits, les étoffes, les
émaux, les peintures sur bois à fond d'or, étaleraient Icui'S riches-
ses le long des murs circulaires. Dans ce projet, l'élégante cha-
pelle du XV^" siècle, délivrée des meubles qui l'encombrent, s'ou-
vrirait de nouveau sur les bas-côtés de l'octogone; les dentelles de
pierre suspendues à ses murs reparaîtraient dans leur ensemble; il
ne manquerait plus pour rendre à ce monument son antique ma-
gie, que les apparitions de la peinture sur verre.
Agréez, etc.
Abthuk MARTIN.
ÉQUATIONS
DE L'ÉQUILIBRE D'UN CORPS SOLIDE,
déduites
nu l'KlNCIPE DES VITESSES VIRTUELLES (1).
La déduction que je vais donner de ces équations me paraît
plus naturelle, sinon plus rationnelle, que celles qui sont données
dans plusieurs ouvrages de mécanique.
Je dirai de plus, que si on veut tenter de déduire rationnellement
les équations d'équilibre du principe des virtuelles, on ne pourra
employer de méthode qui ne revienne au fond à celle qui va servir
de base à ma démonstration.
Pour justifier la nécessité d'introduire dans l'enseignement de la
mécanique une démonstration des équations de l'équilibre d'un
corps solide, fondée sur une méthode analogue, je dirai quelques
mots sur les déductions données par MM. Poisson et Bellanger,
(1) Nous appelons l'attculion de nos lecteurs sur le travail de M. Yvon
Villarceau,que nous donnons ici. Ce nidnioirc ne doit pas «trc considéré comme
un travail absolument isolé ; il est l'introduction indispensable, et la base
même d'un autre mémoire du même auteur, consacré à l'étude des voûtes,
et que nous publierons procliaincment.
dans des ouvrages consacrés à l'enseignement de la mécanique.
Toutefois, afin qu'on ne donne point à ma critique une portée
qu'elle ne doit point avoir, je rappellerai qu'il existe aujourd'hui
deux modes distincts d'enseignement de la mécanique. Dans le
premier et le plus ancien, on commence par la statique, et les
équations de l'équilibre sont données généralement sans le secours
du princijie de.i vitesses virtuelles.
Le second mod£, dont l'introduction est due à M. de Prony, et
le perfectionnement à M. Coriolis, a été appliqué avec succès
dans l'enseignement fait par M. Bellanger à l'École centrale et a
l'Ecole des ponts-et-chaussées. On y commença l'étude de la mé-
canique par celle des lois du mouvement d'un point matériel;
de là, au moyen de la considération des actions mutuelles, on
passe au mouvement d'un système de points matériels, ou des
corps tels que la nature nous les présente. On arrive ainsi, bien fa-
cilement, au principe des vitesses virtuelles, et on fait de celui-ci
la base de toute la statique.
Le premier de ces deux modes d'enseignement a reçu de nom-
breuses modifications, et les plus illustres géomètres y ont apporté
des perfectionnements. Malgré cela, la nécessité du second a été
vivement sentie par ceux qui enseignent les applications de la mé-
canique à l'industrie ; et à cause décela, il me parait convenable
que ceux qui ont en vue les progrès des sciences appliquées,
viennent, sans fausse modestie, déposer le fruit de leurs re-
cherches au pied de l'édifice élevé en commun par messieurs
les professeurs et ingénieurs.
Cette distinction étant établie entre les deux modes d'enseigne-
ment, et je dirai presque entre les deux théories mécaniques, je
rappellerai l'énoncé du principe dus vitesses virtuelles, tel qu'il est
donné par M. Bellanger; cet énoncé est le suivant :
Pour qu'un corps solide soit en équilibre sous l'influence de
forces extérieures déterminées, il faut et il suffit que la somme al-
gébrique du travail virtuel de ces forces soit nulle pour tous les
mouvements du corps compatibles avec la condition de solidité.
Passons maintenant à la déduction de ce principe, que donne
M. Poisson, pour établir les équations de l'équilibre d'un corps
solide.
M. Poisson conçoit que, le corps prenant successivement trois
mouvements de translation, parallèlement aux trois axes coordon-
nés, et trois mouvements de'rotation autour de ces axes, le prin-
cipe des vitesses virtuelles soit applicable à chacun de ces mou-
vements , et il en tire les six équations connues de l'équilibre d'un
corps solide ; il ne cherche point a démontrer que si l'équation des
vitesses virtuelles est satisfaite pour ses six mouvements, elle le
sera pour tout autre, ce qu'il eût été indispensable de faire, s'il
n'eût pris le soin de démontrer déjà, dans la première partie de son
Traité de mécanique, les conditions de l'équilibre, au moyen des
méthodes employées dans le premier mode d'enseignement dont
nous avons parlé. Du reste, M. Poisson indique suffisamment,
dans son savant mémoire sur le mouvement d'un corps solide ,
qu'un déplacement quelconque d'un corps solide peut être obtenu
au moyen de six mouvements successifs, qui sont des mouvements
de translation parallèles à trois axes, et des mouvements de rota-
tion autour de chacun d'eux.
En un mot, M. Poisson n'avait pas besoin d'insister sur cette
déduction, puisqu'il avait démontré les conditions de l'équilibre
par une autre méthode.
Disons maintenant en quelques mots l'usage que fait M. Bellan-
11
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
12
ger an principe des vitesses virtuelles, pour arriver aux conditions
d'équilibre d'un corps solide.
Après avoir établi ce principe et quelques théorèmes sur l'é-
quivalence des forces, il l'applique aux six mouvements de transla-
tion et de rotation que considère M. Poisson, et en déduit six con-
ditions; puis il fait voir, au moyen de ses théorèmes sur l'équi-
valence des forces, que, si ces six conditions sont satisfaites, la
résultante de toutes les forces extérieures est nulle.
La rigueur de ses démonstrations est incontestable ; mais la mé-
thode me parait avoir pour inconvénient, qu'elle suppose chez ce-
lui qui l'établit la connaissance anticipée du résultat ( I ). Il est vrai
que M. Bellangcr examine les six mouvements dont nous venons
de parler, comme les plus simples, autrement, ou ne verrait pas
comment il serait porté à les examiner de préférence à d'autres.
Lors même qu'on ne voudrait pas admettre que la connaissance
du résultat a pu guider dans le choix des six mouvements en ques-
tion, il faudrait convenir, du moins, que cette méthode n'est nulle-
ment indiquée par le principe des vitesses virtuelles, qui suppose
un mouvenjent quelconque, et non pas la connaissance des six
mouvements en lesquels un mouvement quelconque peut être dé-
composé.
Je vais maintenant passer à la démonstration des équations de
l'équilibre d'un corps solide, que je me propose principalement
d'établir dans ce mémoire.
DÉMONSTBATION.
Comme je dois faire usage de la transformation des coordonnées
rectangulaires, et de formules qui s'y rapportent, je vais exposer
succinctement ces dernières.
Considérons un système d'axes coordonnés rectangulaires X,
Y, Z, et soient x, y, z, les coordonnées d'un point M, rapportées
à ces axes dont 0 est l'origine.
Considérons ensuite un autre système d'axes rectangulaires
J,, F,, Z,, et soient x,, j/,, «,, les coordonnées du même point
M, relativement à ces derniers.
Désignons par», p, les trois -j coordonnées de l'origine 0, du
second système, relativement au premier, et parallèlement à a-, y, z.
Posons pour abréger :
co» (a?,, a;)= a, cos[œ,,y]^b, cos {œ^, z] ^= c, \
cos{y,,x) = a\ cos(y„y) = b', cos(y^,z)=c, i (l)
cos(z„x)=a", cos{z„y) = b", cos[z,, z)=c", )
Maintenant, si l'on remarque que x est la projection de 0 M
sur X, laquelle est égale à la projection du contour formé par les
droites a, ^, T, x,,y,,z,, et terminé aux points 0 3/; on aura, en
observant que p est perpendiculaire à X, et ayant égard aux éq. (l):
j; = a4-a:,o + »/,o'-f:,a", \
de même y = ^J^a:,b^y,b' -\-z,b", l (2]
2 = T+aj, c-\-y, c'-f-r, c", )
J'ajoute ici la démonstration de la valeur du cosinus de l'angle
de deux droites.
(1) Les méthodes de démonstration fondées sur la connaissance de résul-
tats énoncés, ont l'avantage de confirmer des vérités soupçonnées, entrevues ;
mais, d'un autre côté, elles ont le grand désavantage de ne guider en aucune
manière dans la recherche de la vérité. Or, il reste tant à faire aujourd'hui
dans la mécanique appliquée, qu'on ne saurait trop recommander l'usage et
le choix éclairé des méthodes d'investigation.
Menons, par l'origine des coordonnées, deux droites D et JJ pa-
rallèles aux droites données. Prenons sur D une longueur r, et
soient a", y, z, les coordonnées de son extrémité; projetons r sur
D', et soitp cette projection, en aura :
cotiD, I»'i = ^.
r
Désignons par >., «., v, les angles de D avec A', 1', Z, et par '.', u.',
v', ceux que D' fait avec les mêmes axes.
La projection p sera égale à celle du contour formé par x, y, z,
donc:
X cns >.' -j- y co$ u.' -\- z co» •,'
r
cos [D, U]
X y r
mais cos ). = — , (0« "■ = , en» < = — ,
r r r
donc :
cos [D, D'] = cos x cos >.' —- cos u. cos u! -j- cos -, cos •,'. (3)
Si les deux droites [D, D'] coïncident, on a : x =: >.', u = u! , etc.,
cos [D, D) = l, et il vient, pour la somme des carrés des cos des
angles qu'une droite fait avec trois axes rectangulaires :
cos' >. -f- cos' u. -\- cos' * = 1 . (4)
Nous ferons maintenant remarquer que les neuf cosinus qui en-
trent dans les éq. (2) sont liés entre eux par les équations sui-
vantes, tirées de la formule (4) :
o" 4-6' -f c' =1, \
a"-ffc" +c"=i, (5)
a"'-f i"'-f c"' = l; )
De plus les axes X,, Y„ Z,, étant rectangulaires, on a :
Cos[X,, F,)= 0, cas [Y,, Z,) = o,cos{Z,, X,) = o, et en appli-
quant la formule (3), il vient :
a a' -]- b b' ~ c c' = o, \
a'a"-^b' b" -^c' c" = 0, S (6)
a" a -\-b" b -f- c" c =0, )
Les neuf co«inu« [a, b, c, etc.) sont donc liés entre eux par six
équations, d'où il resuite qu'on ne peut s'en donner que trois arbi-
trairement.
Ces formules préliminaires étant démontrées, nous allons main-
tenant aborder la question de mécanique qui nous occupe.
D'abord, donnons la traduction analytique du principe des vi-
tesses virtuelles énoncé ci-dessus.
Soit P, l'une des forces extérieures appliquées au corps solide
considéré ; ds, l'élément de courbe décrit par le point d'application
de P dans le mouvement virtuel ; x, y, z, les coordonnées de ce
point d'application relativement à des axes rectangulaires.
En désignant par P', ds', x', y', z', P", ds", x", y", z", etc.,
des quantités analogues relatives à d'autres points,
Le principe des vitesses virtuelles se traduira dans la formule :
P ds cos [P, ds) -\- P dscos {P, ds') -f P" ds" cos (P", d*"] -f etc.
;= 0, et si l'on désigne par 2 une somme de termes composés de la
même manière, au moyen de quantités analogues, ou pourra écrire
plus simplement :
z P ds cos [P, ds) = 0. (7)
Nous donnerons une autre forme à cette équation en introdui-
sant à la place de ds, les accroissements dx, dy, dz, des coordonnées
du point auquel elles se rapportent.
Pour cela, soient x, a, v. les angles de la direction d'une force P,
avec les parties positives ou négatives des axes x, y, z (on devra seule-
ment avoir le soin de prendre les çnêmes parties de ces axes pour
13
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DKS TRAVAUX PUBLICS.
lï
toutes les forces) ; si nous remarquons que les cosinus des angles de
dûC dy dz , „ , , > -
</s avec les trois axes sont: —, ~-, -p, la formule 3 donnera:
as ds ds
Coi [P, ds) = COSX—-J- cos u. - - -j- cas i -^, et l'équation (7) de-
dS u*i Uo
viendra :
2 P [cas xdx -\- cas ['■ dy -f- cos idz]^ o; (8)
Or, les quantités P cosX, P cos r^., P cos •>, ne sont autre chose
([ue les composantes de /'suivant les tro^s axes, et si, pour plus de
simplicité, nous désignons ces composantes par X, Y, Z, ou si nous
posons :
P cos X = A', N
P cos }>.= ¥, I (9)
P cos -1 = Z , J
nous pourrons encore donner celle aulic forme plus simple à
l'équation du travail virtuel :
^[Xdx^Y dy + Z dz] = 0. ( 1 0)
C'est sous cette forme que nous allons l'appliquer à la recherche
des conditions d'équilibre d'un corps solide.
Concevons que le système des axes X,, Y,, Z,, soit lié invaria-
blement au corps solide, et que a;,, y,, s,, soient les coordonnées
relativement à ces axes, du point d'application M de la force P. Dé-
plaçons le corps solide dans l'espace, d'une manière quelconque; les
coordonnées x,,y,, z^, de Jf ne varieront pas; mais si x, y, z dé-
signent les coordonnées du même point, relativement à des axes
fixes X, Y, Z , ces coordonnées varieront dans le premier instant,
de dx, dy, dz; les coordonnées «, p, -j', de l'origine du système mo-
bile varieront de d%, d?,d-i, tandis que les cos des angles que font
les axes de ce système avec les axes fixes, varieront de da, da'..,
db, db'., etc.
Et réciproquement, si on déplace d'une manière quelconque le
système des axes mobiles, ce qui ne se peut faire qu'en déplaçant
l'origine et faisant varier les angles de ces axes avec les axes fixes,
de manière à conserver toutefois la perpendicularité de ces axes
mobiles, les coordonnées x, y, s, de M varieront, sans que ses coor-
données x,,y,, 2, varient.
Je vais exprimer les variations de x, y, z, en fonction de celles
de a, P, 7, a, a'.., b, b'.., etc. Supposant donc ces variations infini-
ment petites, ij me suffit de différentier les équations (2), en y re-
gardant a?,, y,, z,, comme des constantes. J'obtiens ainsi les équa-
tions différentielles :
dx = rfx -[- X, rfa -(- y , da' -\- z, da", \
dy = d3 -j- ar, rfô -f- y , db' -\- z, db",
dz =^ d-i -f- X, de + 2/, dC -\- s, de",
En mettant ces valeurs dans l'équation (lo)
que a, p, f, a, b, c, etc., et leurs différentielles, restent les mêmes
pour tous les points du corps, ce qui permet de mettre ces diffé-
rentielles en facteurs communs des termes des sommes 2, il
vient (12) :
d7.^X-\-da^Xx,-\- du ^Xy,-j- da" ï X s, \
-i'd?xY-\-db-^Yx,~^db':iYy,-{-db"^Yz, ( (12)
-{-df^Z + dc^Zx, + dc'y.Zy, 4- dc"iZz,^o.}
Les cos a, a'.., etc., étant liés entre eux par les sixéq. (5) et (O),
nous allons exprimer leurs variations, au moyen de trois seule-
ment d'entre elles.
Pour cela, je différcntie les équations (5) et (6), ce qui donne :
II
et observant
a da -\-b db -\-c de = 0,
a' da' -\~b' db' -{-c de =0, J (13)
o" da" -\- b" db" -j- c" de" = o,
a da -j- o' da -\- b db' -\- b' db -}- c de -\- c' de = 0, \
a'da'-\-a"da-\-b'db"-\-b'db'-\-cdc"-\-c"dc'=o, | (l4)
a" da-\-a da" + b" db -f bdb"-]- c" dc-\-c de" =0, )
Il resterait maintenant à éliminer six des variations da, da',
da", etc., entre ces dernières et l'équation (12); mais nous pou-
vons profiter de ce que la position initiale des axes mobiles est
entièrement arbitraire, pour simplifier considérablement nos équa-
tions.
Comme rien ne fixe la position de ces axes mobiles, nous pou-
vons les faire coïncider à l'origine du mouvement avec les axes
fixes.
De cette manière, lésa;,, y,, z,, de féquation (12) se transfor-
meront en x,y, z, et les équations (l) donneront :
a = 1, J = 0, c =rz 0, \
a' =0, b' = i, f' = 0, ( (là)
a"= 0, b' = 0, c" = 1, 7
Ces valeurs réduisent d'abord les équations (13) à :
da =0, \
db' = 0, > (16)
de" = 0, j
Au moyen de celles-ci et des précédentes, les équations (14) de-
viennent :
da' -\-db = 0, \
db" -Jr de = 0, } (17)
da" -\~ de ^ 0, 1
d'où : da = — db \
db" = — rfc' (18)
de == — da" -'
en mettant ces dernières valeurs et celles données par les équa-
tions (IG) dans l'équation (12); puis, réunissant en un seul les ter-
mes affectés des mêmes facteurs différentiels, il vient :
dxiX-{'dc' ^{Z y— Yz)
-f dp ^ r + rfa" 2 (\y z — Z x) (19)
-\-d-i%Z -}-db ^(Yx — Xy) =0
Or, cette équation, qui n'est qu'une transformation de l'équa-
tion (10), devant, suivant le principe des vitesses virtuelles, avoir
lieu, quel que soit le mouvement du corps, compatible avec les con-
ditions de solidité, et ces conditions ayant été satisfaites, puisqu'on
a exprimé que les trois coordonnées x,, y,, z,, de chaque point 3/,
relatives aux axes liés au corps solide, sont invariables , ne peut
avoir lieu qu'autant que les coefficients des six variations dx, d?, rff .
de' da" db, qui restent entièrement arbitraires, sont égaux séparé-
ment à zéro. En égalant donc à zéro ces coefficients, on aura les six
équations nécessaires et suffisantes pour l'équilibre d'un corps
solide :
2T=0, ^{Zy-Yz] = 0,\
ïY=o, 2{Xz — Zx) = 0.} (JO)
27=0, 2(Fx — Jy) = 0,'
Les trois premières expriment que la somme des projections des
forces extérieures sur chaque axe est nulle ; les trois autres expri-
ment que la somme des moments des forces extérieures par rap-
port à chaque axe est aussi nulle.
15
REVUE DE L ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
IG
On peut, au moyen des équations (9), donner à ces six équations
la forme suivante :
^Pcosx=0, \
V /> fosp= 0, I
2 jP fo« V = 0, (
21)
[y cos 1 — s cos u.
[z cos''- — X cos V
I — 0
= 0
iP
S. P [xcos [j. — y' cos X) = 0
Telles sont les équations qu'il s'agissait de déduire du principe
des vitesses virtuelles.
Y VON VILLARCEAU.
DE X>A TIIiIiA PIA DU VATICAN
BATIE PAR PIKRO LICOBIO ,
ît di l'Mnîj! publiî m ti MMmt pat MU. Jilis B0UCH8T, irthilttl!, il MOUl-ROCanTÎ, imkt it l'iistiliil,
La Villa Pia n'est pas, à proprement parler, un monument public;
elle n'est pas, non plus, précisément une habitation. C'est un lieu de
repos et de retraite, une sorte de boudoir pontifical, où, descendu
du trône de saint Pierre , le successeur de l'Apôtre put venir
causer familièrement avec ses intimes ; une délicieuse oasis jetée
sur le chemin aride et brûlant des grandeurs de l'Eglise, où, le
front libre de la tiare, il put se reposer quelquefois à l'om-
bre, loin des pompes du Vatican, à l'abri d'une splendeur parfois
importune, dans une atmosphère embaumée par les fleurs et
rafraîchie par les eaux desfontaines. C'est une fabriquedans un jardin
que le Napolitain Paul IV avait demandée au Napolitain Pirro
Ligorio; Paul IV mourut, et ce fut à son successeur. Pie IV,
aussi Napolitain, que l'artiste livra son œuvre; mais ce jardin est
celui du Vatican, et cette fabrique fut bâtie pour un pape, usui-
que suo et succedentium sibi pontificum, à son propre usage et à
l'usage de ses successeurs, ainsi que le frère du fameux marquis
de Marignan l'a fait graver sur la façade du bâtiment principal.
Commandée par un pape qui disait le jour de sa consécration :
« Je veux être servi magnifiquement, ainsi qu'il convient à un
souverain pontife, » et dont la magnificence sut effacer en effet
celle des Jutes II et des Léon X ; achevée par un Médicis que ses
contemporains n'ont pas trouvé indigne du surnom de prolec-
teur des muses; élevée sur les dessins d'un artiste admirateur
passionné de l'arttique, la Villa Pia, pour n'être que l'enfant d'un
caprice, n'en a pas moins revêtu un caractère de richesse et de
somptuosité que le burin est presque inhabile à reproduire et la
plume complètement impuissante à faire comprendre. Dans cette
œuvre de fantaisie, mais d'une fantaisie qui n'épargne rien, ni les
ressources de l'art, ni la richesse des matériaux, on fouleaux pieds
les faïences émaillées, les mosaïques de toutes les couleurs; à l'ex-
térieur, le stuc poli, et découpé en de gracieux ornements, recouvre
les briques des murailles ; tandis qu'à l'intérieur les marbres les plus
précieux, le jaspe et le porphyre s'étalent sur les parois de l'édifice,
s'élèvent en colonnes, s'arrondissent en statues allégoriques, ou bien
se creusent en vasques et en bassins sans cesse rafraîchis par des
eaux vives ; les coupoles détachent leurs reliefs dorés sur des fonds
de coule.urs harmonieusement assemblées, et la fresque, ce com-
plément indispensable de tout édifice italien, déploie ses splen-
deurs au milieu des plafonds et dans les cartouches assez vastes
pour ne pas gêner ses franches allures.
Alors que Pirro Ligorio élevait la Villa Pia dans le jardin du
Belvédère, en face de la loge de Bramante et à côté de la coupole
de Michel-Ange, l'Italie était en proie à cette passion contagieuse
de l'antique qu'on a désignée sous le nom de Renaissance, et qui
déjà avait franchi les Alpes pour venir chez nous imprimer son
cachet au front des châleaux de Fontainebleau et de Chambord;
chaque jour, le sol fouillé livrait à l'admiration des artistes de
nouveaux débris du vieux monde romain , les temples des
dieux païens et les anciens palais des premiers Césars. Rome
surtout, Rome, fière à bon droit de son passé et riche déjà de son
présent, labourait son sol en tous sens pour en arracher ces pré-
cieux témoins de sa primitive grandeur. Des chapiteaux, des sta-
tues, des colonnes, des monuments entiers sortaient de terre
comme par enchantement aux acclamations d'une foule d'artistes
dont l'imagination et l'ardeur s'échauffaient à l'aspect de ce bel art
d'une grande époque.
Mais dans cette foule, l'homme le plus enthousiaste, le plus '
vivement impressionné peut-être, fut Pirro Ligorio. Issu, dit-
on, d'une famille noble, né sans le savoir à côté de deux villes
antiques à peu près entières sous la cendre du Vésuve, bien jeune
encore, il avait senti, à la vue des rares morceaux antiques alors
exhumés dans sa patrie, se développer son goût pour le grand art
qui l'appelait à lui. Élevé dans la carrière des lettres, il devint
artiste. Laissez-le grandir, et vous le retrouverez bientôt sur le
cadavre de la vieille Rome, infatigable à dessiner chaque volute,
chaque rinceau, chaque profil que l'autopsie met à découvert,
complétant d'après ses propres inspirations les fragments mutilés,
restituant à sa façon les morceaux que le temps a rongés. Plus
tard, vous le verrez luttant par l'intrigue contre le vieux Michel-
Ange, qu'il accuse, sans trop de scrupule, de radoter. Appelé deux
fois à mettre la dernière main à l'œuvre du grand maître à qui
la mort avait ravi le bonheur de voir briller enfin le signe de la
rédemption sur le dôme de Saint-Pierre, deux fois les écarts de son
imagination turbulente, qui veut modifier les dessins du Buona-
rotti, lui font retirer cette mission délicate, à laquelle fesprit froid
et calme de Vignole convenait mieux.
Descendu des combles de Saint-Pierre dans les jardins qui voi-
lent de leur verdure le pied du Mont- Vatican, l'artiste peut res-
pirer à son aise ; il ne trouve plus là ni rival à combattre, ni
plans primitifs qui tiennent son génie en bride. Le voilà seul avec
sonimagination, s'exerçant sur ses études du passé , et leseoffres dans
lesquels il puise sont de toute la chrétienneté les mieux remplis.
17
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TKAVAUX PUBLICS.
18
il saura laisser onnière à l'une, et n'oubliera pas qu'il peut dis-
poser (les nu 1res.
Faut-il maintenant s'étonner qu'un simple abri dans un jardin
soit si splendide ? Faut-il s'étonner encore que, sous un toit bâti
pour un pape, pour le chef de l'Eglise du Christ, l'antiquité
païenne soit évoquée tout entière, et non pas seulement dans la
forme de ses colonnes et de ses chapiteaux, dans les profils de ses
hases et de ses corniche-i, dans ses détails de sculpture et d'or-
nement, mais dans sa religion même, dans ses idoles et dans ses
(lieux allégoriques '? C'est la conséciuence nécessaire du génie de
l'artiste qui présida à cette œuvre, et surtout des circonstances
au milieu desquelles ce g(mie s'est développé et qui ont favorisé
son expansion.
A cette époque, où tous les arts interrogeaient l'antiquité pour
apprendre d'elle ce ({ue c'étaient que le beau et la poésie, les dieux
du paganisme, chantés par les poètes, durent avoir accès dans la
demeure des papos, ces protecteurs nés des grandes et belles
choses, et à plus forte raison dans un lieu de repos et d'a-
gréable délassement. On peut donc voir sans étonnement la poé-
sie d Homère à côté des sublimes récits de Moïse, les divinités
d'Hésiode auprès des versets de l'Évangile. M. Raoul-Rochette,
dans le texte historique qu'il a ajouté aux beaux dessins de J. Rou-
chet, voulant prévenir ce que celte discordance pourrait "soulever
de répulsion parmi nous, se hâte de stigmatiser l'ignorance el le
faux zèle qni se scandaliserait à la vue des figures et des groupes
profanes dont s'encadrent les sujets bibliques aux portes de Saint-
Pierre de Rome. Mais, M. Kaoul-Rochette l'avouera, chez les prê-
tres d'une religion qui commande la chasteté, la poésie, pour être
empruntée aux anciens, n'en doit pas moins être chaste, et de
l'aveu môme du savant antiquaire, le poète qui a fait la Villa Pia
n'a pas été toujours chaste dans toutes les stances de son poème. Pas
plus que l'honorable secrétaire perpétuel de l'Académie des Reaux-
Arts, nous ne trouvons étrange (jue cet accouplement du profane
et du sacré ait eu lieu ; pas plus que lui nous ne condamnons l'em-
ploi de la poésie antique par les artistes du XV!» siècle, quand
cette poésie se maintient dans de certaines limites; mais en les ex-
pliquant, nous ne prétendons pas toujours les légitimer; et dus-
sions-nous tomber en désaccord positif avec M. Raoul-Rochette, nous
n'en soutiendrons pas moins que l'abus des dieux païens dans les
édifices religieux du christianisme ne constitue pas le moindre
défaut de la Renaissance, et que si Michel-Ange n'a pas toujours
été à l'abri de cette fâcheuse influence, c'est que le grand Michel-
Ange lui-même a fait taire parfois sa raison pour prêter l'oreille
i\ux sophismes éphémères de la mode. La Lusiade est un poème
admiré de tout le monde; mais quel est l'homme sensé qui ferait
un mérite au Camoëns d'avoir mis Vénus aux prises avec la vierge
Marie ? On l'eu excuse, mais on ne l'en loue point.
Lue fois en verve d'admiration pour la générosité des artistes
et des papes qui donnaient si gracieusement l'hospitalité à Jupiter
et à Léda auprès de Jésus^Christ et de ses apôtres, l'auteur ne
devait pas s'arrêter en chemin, et il lance une condamnation som-
maire contre le ijoùt aride cl la triste nudité des églises gothiques.
Vous appelez aride le goût qui a brodé les ogives et les clochetons de
Saint-Oucn, (jui a découpé avec tant de variété et tantde richesse tou-
tes les galeries, tous les angles , toutes les nervures de la cathédrale
d'Amiens ! Vous appelez tristes et nues ces églises dont les portails
s'élancent dans les airs, tout couverts de leurs légions de saints éche-
lonnés ainsi sur la route des cieux ! Vous accusez d'aridité et
de triste nudité ces immenses et somptueux vaisseaux où chaque
pierre est sculptée, où chaque sculpture a sa signification, où cha-
que morceau de leurs resplendissantes verrières est une histoire ou
une allégorie 1 Si leurs voûtes sont aujourd'hui froides et blanches,
que ne vous en prenez-vous aux badigeonneurs modernes qui ont
passé la brosse par dessus les rinceaux de feuillages et les ciels
d'azur parsemés d'étoiles d'or, qui ont soigneusement gratté à
vif les tuniques des saints et les feuilles des chapiteaux, de
peur que la postérité ne sache qu'il y eut là jadis toutes les cou-
leurs de l'arc-en-ciel I Mais cessez de vous tenir les yeux résolu-
ment fermés pour vous écrier ensuite qu'il fait nuit en plein jour;
cela n'est ni juste ni digne du savoir et du goût de M. Raoul-F.o-
chette. Autant que vous nous sommes admirateurs sincères de l'an-
tiquité et aussi de la Renaissance italienne; mais nous ne saurions
applaudir à l'intolérance, nous ne pouvons pas raisonnablement
renier un art qui a fait les Noti'e-Dame de Paris et de Chartres,
celles de Reims et d'Amiens. Nous concevons parfaitement tout le
plaisir qu'on peut éprouver à la vue de la naissance de Vénus et au
milieu des faunes et des nymphes du Vatican; cependant nous
aimons autant les savoir là que dans nos cathédrales. Mais reve-
nons à la Villa Pia.
Faire la description d'un édifice sans le secours du dessin est
chose toujours difficile pour l'écrivain et incomplète pour le lec-
teur : aussi n'est-ce pas une description détaillée que nous allons
faire, mais un simple coup d'oeil que nous allons jeter sur l'intime
retraite d'un pape; deux beaux dessins de M. J. Rouchet, les
/•'/. 1 et 2, serviront à la fois de spécimen pour faire apprécier la
parfaite exécution de sa belle collection de la Villa Pia, et à nous
faciliter notre tâche.
La Villa Pia s'élève, nous l'avons dit, au pied du Mont-Va-
tican, mais en partie sur sa rampe, de façon que, pour maintenir
le niveau du sol, on a dû faire un remblai vers la partie anté-
rieure de la Veilla. Celle-ci se compose ( Voy. PI. i ) de quatre corps
de bâtiment complètement isolés, savoir: d'un Catin ou logis
principal ; d'une Loge ou portique ouvert qui lui fait face, et de
deux petits arcs posés symétriquement aux extrémités d'une cour
ovale située entre les quatre bâtiments.
En arrivant en face de la Villa, c'est l'élévation extérieure de
la Loge qui se présente d'abord aux regards. Sa base se baigne dans
les eaux d'un nymphée et s'enrichit des dieux de la Fable, de Cérès,
de néréides, et de quatre vigoureux satyres ou atlantes qui font
mine de porter un balcon supérieur, mais qui en réalité ne portent
que des corbeilles de fleurs.
Le balcon dont nous venons de parler est au niveau du sol de
la cour, et forme, avec une galerie, tout l'intérieur de la loge que
couronne de chaque côté un fronton triangulaire, tandis que les
deux faces latérales de cet édicule sont couronnées par des fron-
tons circulaires. A droite et à gauche du soubassement extérieur
de la Loge, deux escaliers en pierre montent et viennent aboutir
à l'entrée des petits arcs qui donnent accès dans la cour, au milieu
de laquelle un bassin de marbre violet reçoit l'eau que vomissent
deux dauphins portant deux enfants. Autour de cette cour régnent
un petit mur de clôture et un banc en stuc et en pierre.
Si l'on est entré par la gauche, on trouve à droite la Loge, dont
la galerie est entièrement ouverte sur la cour et sur le balcon, et
dont quatre colonnes soutiennent de chaque côté les retombées de
la coupole. Cette galerie est pavée en mosaïque, et ses deux extré-
mités, terminées en hérpicycles, sopt ornées de quatre statues de
T. V. -î
19
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
20
muses dans des niches, et de deux fontaines en marbre blanc. Le
système de décoration de la coupole mérite de nous arrêter un
instant; aussi bien, en le décrivant et en le critiquant nous aurons
à peu près décrit et critiqué tout le système décoratif de la Villa
Pia ; la forme et les détails varient, mais le principe est partout
le même. .
Au-dessus d'unesériedeconsolesqui s' appuientsur l'entablement,
c'est-à-dii-e au point de naissance de la voûte, s'élève, en manière
de second étage, une riche colonnade d'ordres et de détails variés,
que surmontentdes frontons de formes également diverses. Vue sur
le dessin géométral de M. Bouchet, cette colonnade est d'un bel
effet, parce que les axes des colonnes sont alors en ligne droite ;
mais quand on songe qu'en épousant la courbure de la coupole, ces
colonnes et leurs bases décrivent une ligne courbe, on ne peut
s'empéchér de déplorer l'erreur dans laquelle l'artiste est tombé
et l'étrange oubli qu'il a fait de la véritable fonction de la colonne.
Une vérité que l'architecte ne devrait jamais perdre de vue, c'est
que la colonne est un membre principal et non pas un accessoire,
un point d'appui et non pas un simple motif de décoration.
En principe, il n'est jamais permis de simuler, même en stuc, une
construction irrationnelle ou impossible, sous peine de révolter le
bon sens et de choquer le bon goût.
Ce n'est certainement pas aux sources antiques que l'architecte
de la Villa Pia a été puiser de pareilles inspirations.
Si nous n'avions à envisager l'œuvre de Pirro Ligorio que sous
le point de vue des détails, nous n'aurions qu'a admirer et à ap-
plaudir. Ces arabesques et ces tritons qui courent le long des frises,
ces rinceaux et ces feuillages qui encadrent ici la fable d'Adonis,
là l'histoire de Moise, peintes de la main de Frederigo Zuccberi,
ont une grrtce et un charme presque inimitables; et si jamais ar-
tiste sut faire excuser le contact du sacré avec le profane et har-
monier ensemble des éléments si opposés, certes ce fut bien celui
qui bâtit la Villa Pia.
En face de la Loge s'élève le Casin, ouvert aussi sur la cour, et
répétant la disposition et la galerie de la Loge. Quatre colonnes
isolées livrent entrée par trois entrecolonnements, et, conjointe-
ment.avec deux soubassements à pilastres qui forment comme à la
Loge les deux extrémités de la façade, soutiennent un attique si-
mulant presque un premier étage; seulement, ici l'attique est plus
élevé, et au lieu d'être surmonté d'un fronton, il porte un second
étage. Le centre de l'édifice est bien accusé par des trumeaux cou-
verts d'arabesques qui montent à l'aplomb des pilastres du soubas-
sement, et encadrent à la fois et le centre et les deux côtés en se re-
liant entre eux par les frises au-dessus de l'attique et de l'étage.
A l'étage nous voyons trois fenêtres à plates-bandes surmontées de
cartouches dans la partie centrale, et dans chacune des parties
latérales, une niche à plein cintre avec sa statue; au-dessous,
dans l'attique, au lieu des trois fenêtres et des deux niches, nous
trouvons cinq baies figurées et deux cartouches ronds, ou plutôt
cinq cadres contenant des sujets sculptés, des faunes, des nymphes
couchées ou sortant du bain, etc, etc. Au-dessus des trois cadres
du centre de l'attique, au milieu duquel brille l'écusson du pape,
porté par des génies, on lit l'inscription commémorative de l'a-
chèvement de la Villa Pia par Pie IV. Il serait superllu d'ajou-
ter que tous ces cartouches , toutes ces baies vraies ou figurées,
ont entre eux les mêmes axes verticaux. Cette façade harmonieu-
.sement distribuée et richement décorée, pèche peut-être par une
profusion de détails et par un oubli trop fréquent de la vérité.
Ainsi, à ne consulter que l'élévation du Catin, on pourrait croire
que ces trois divisions bien tranchées correspondent à trois pièces
différentes à l'intérieur, l'une, grande, au centre, et les deux autres,
plus petites, aux extrémités; mais si nous interrogeons le plan, nous
voyons qu'au rez-de-cliaussée comme à l'étage c'est une seule et
même galerie qui occupe toute la façade. Ce défaut , car c'en est
toujours un, excusable quelquefois dans nos maisons modernes, ou
tant d'exigences et de besoins divers vieunentcoutrarier et modi-
fier la pensée de l'artiste, ne l'est point à la Villa Pia , où l'ar-
chitecte n'avait pour exigences à ménager que les lois du vrai et
du beau, pour besoins à satisfaire que la plus élastique fantaisie.
Adossé à la montagne qui l'abrite de ses ombrages, le Ccuin
présente dans son plan un parallélogramme allongé dont le grand
axe traverserait le coteau ( Foy. /'/. l). Ce parallélogramme est
flanqué à sa partie postérieure de deux petites ailes de surface et
de hauteur inégales, dont l'une, à droite, £, contient l'escalier, et
dont l'autre, D, plus élevée d'un étage en manière de belvédère,
forme au rez-de-chaussée un cabinet de travail. Ce cabinet C et
cet escalier sont séparés entre eux par un petit salon B que pré-
cède une longue galerie ou grand salon A, précédé lui-même de
la première galerie transversale, ou vestibule F G, que nous avons
dit s'ouvrir sur la cour et faire le pendant symétrique de la Loge.
Mais ce'vestibule, plus long que la grande galerie n'est large,
s'avance un peu en saillie sur les deux élévations latérales, ainsi
qu'on peut le voir en jetant un coup d'œil sur le plan.
En entrant dans le vestibule, nous nous trouvons en face d'une
Diane d'Ephèse avec ses nombreuses mamelles; à droite et a
gauche sont deux portes, l'une figurée, l'autre donnant accès daus
la grande galerie. Comme ceux de la Loge, les hémicycles sont dé-
corés de statues et de fontaines; la coupole présente des compar-
timents surmontés de frontons coupés, genre de décoration qui
rentre dans l'espèce que nous avons déjà critiquée, et qui a le.
défaut de former des jeux de ligne discordants. L'histoire d'Adam
et Eve est peinte à la voûte par Santi di Tito, au milieu de têtes
de Jupiter et de Junon. Cette galerie, toutefois, porte un cachet de
grandeur et de variété dont notre Planche 2 peut donner une idée.
Les détails surtout sont pleins de richesse et de gnlce, et la
frise, où l'on voit courir des enfants ailés sur des chars, peut passer
pour un modèle du genre.
Les murs sont revêtus de mosaïques ; le pavé est fait de faïences
coloriées, et la coupole est partout peinte et dorée.
Un goût plus pur, mais moins large peut-être, préside à la dé-
coration de la grande salle ; nous ne trouvons plus là de ces sem-
blants de constructions imaginaires, et {'histoire delà Vierge al
des Apôtres, peinte par Zuccheri, n'a pas trop droit de se scandaliser
de sou entourage. La couleur joue là un rôle plus important que
la sculpture, et daus plusieurs de ses parties la coupole rappelle les
peintures des maisons de Pompeïa.
Dans le petit salon B, même genre d'ornementation et de pein-
ture; seulement le profane envahit quelques compartiments de
la coupole, où les fonds blancs et la couleur dominent comme dans
la grande galerie.
L'iinjtatiou de construction reparait dans la voûte du cabinet
de travail. Elle représente une série d'arcades soutenues par des
termes et figurant un portique. Ces arcades , remplies de peintures
sacrées et profanes, présentent un aspect à la fois simple et gran-
diose.
Nous n'en finirions pas si nous voulions décrire les ornements
2i
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
•22
de l'escalier, de l'étage supérieur, et des deux édicules qui servent
d'entrées à la cour.
L'étage supérieur reproduit exactement le plan du rez-de-chaus-
sée; la petite galerie nous a paru d'un style plus pur que celui
de la plupart des galeries inférieures; il est presque exclusive-
ment copié sur l'antique.
Au-dessus du cabinet de travail se trouve une chambre à cou-
cher fort peu décorée et qui ne parait pas avoir été jamais habitée.
Dans un de ses angles est un petit escalier qui donne accès à un
3e étage de ce corps de logis, qui forme belvédère à la hauteur des
combles, et d'où la vue s'étend sur les jardins du Vatican et sur le
splendide palais des papes.
Les murailles de la Villa Pia sont, pour la plus grande partie,
bâties en briques et revêtues de stuc à l'extérieur aussi bien qu'à
l'intérieur, procédé de construction qui n'offrirait que peu de chan-
ces de durée sous un ciel moins serein que celui de l'Italie.
Si nous résumions en quelques mots les traits saillants qui ca-
ractérisent l'architecture de la Villa Pia, nous pourrions dire que
cette architecture est une imitation de l'antique dans ses formes et
dans ses détails, mais de l'antique encore imparfaitement connu, et
suppléé souvent par l'invention gracieuse et brillante d'un artiste
chez qui la pensée de détail dominait presque toujours celle de
l'ensemble, et chez qui l'imagination féconde ne laissait pas tou-
jours place à la raison. Aussi la Villa Pia n'est-elle pas un chef-
d'œuvre à nos yeux, bien qu'elle étale sur ses murs des trésors
inépuisables de décoration; mais à ce seul titre déjà elle était digne
d'être mesurée et dessinée par M. J. Boucbet, dont le crayon est
à la fois plein de sentiment et de correction, deux qualités qu'il
est aussi rare que précieux de trouver accouplées, et sans lesquelles
pourtant un artiste ne saurait être complet.
Les vingt-trois grandes planches qui, avec la description de
l'édifice et la biographie de l'architecte savamment esquissées par
ja plume brillante de M. Raoul-Rochette, complètent le volume de
la Villa Pia, sont dues au burin de M. Hibon. L'exécution en est
fort soignée, et le trait généralement pur.
Pirro Ligorio n'a guère bàli que la Villa Pia (l) ; mais, devenu
vers la fin de sa vie l'architecte du duc d'Esté, Alphonse IF, pour
^qui il n'exécuta jamais de bien grands travaux, il eut le loisir, dans
cette espèce de sinécure, de réunir et de classer les innombrables
dessins dont il composa les trente-cinq volumes qui nous sont res-
tés de lui sur les antiquités romaines. Dans ces dessins, l'artiste a
souvent mis du sien, et leur incorrection a soulevé plus d'un débat.
Une restauration de la Rome des Césars qu'il fit aussi, et qui, à
l'époque où il vivait, pouvait avoir quelque appai'ence de vérité,
n'est guère considérée aujourd'hui que comme une œuvre d'imagi-
nation. Comme la plupart des artistes de son temps, Pirro Ligorio
l"ut peintre aussi bien qu'architecte, et l'on cite de lui quelques fres-
ques, mais surtout un grand nombre de frises et d'arabesques, dont
on décorait alors les façades des maisons; Pirro Ligorio mourut à
Ferrare en i.'iSO.
Alphonse de GALONNE.
(1) On lui attribue aussi le palais Lancellotti à Rome, dont la façade grave
et sévère est toute en refends. Après une inondation du Pô qui avait endom-
magé plusieurs édifices i Ferrare, ce fut lui qui fut appelé A les réparer.
M. Raoul-liochcHe pense i\\\e la jolie iu!(a dEste, à Tivoli, pourrait bien être
aussi l'œuvre dp cet arcliitecte.
£I>II.IT£ FAKISIXNNB.
Conseil Municipal dk Paris.
On a remarqué avec surprise, lors des récentes élections des
conseillfirs municipaux de la ville de Paris, que les candidats qui
briguaient l'honneur de concourir à l'administration de la ville
se préoccupaient peu de faire connaître quelles étaient leure idées
relativement aux grandes mesures d'édilité'qui intéressent l'en-
semble de la capitale. A en juger par les discours prononcés, il
semblerait qu'un seul candidat eût parfaitement compris la vé-
ritable solution qu'il importe de voir adopter pour concilier les
intéix'ts jusqu'ici divergents des deux grandes fractions de la
ville qui occupent les deux rives de la Seine. M. Victor Consi-
dérant, dans une note adressée aux électeurs du 10* arrondis-
sement, a formulé à la fois la critique des administrations pas-
sées et le principe de conduite qu'il conviendrait d'adopter pour
l'avonir. Les électeurs du 40« arrondisseuient paraissent avoir été
vivement frappés des vues exposés par M. Considérant , puisqu'ils
lui ont délégué le soin de les représenter au conseil municipal, m
Nous reproduisons la note de M. Considérant. Nos lecteurs
s'apercevront ([u'elle s'accorde en tout point avec tout ce que
la Revue a publié sur l'édilité parisienne. Espérons que les mem-
bres nommés par les autres arrondissements seront plus explicites
au sein du conseil qu'ils ne l'ont été devant les électeurs.
Noie sar le» laterCis généraux de la ville de Pari», et spécialement
du dixième arrondissement.
A MM. LES ÉLECTEURS DU DIXIÈME ABRONDISSEMEKT.
Décadence du 10' arrondissement. — l.e 10« arrondisscinent est le
troisième pour l'étendue du territoire. En 1831, il él.Tit encore le pre-
mier pour le chiffre de la population à domicile.
Dix uns plus tard, pciiilant que tous les autresarrondissemenis avaient
vu s'accroitre celle population dans leur sein, le lO" était le seid oii
elle eût fléchi. La décadence estsi rapide, que, depuis 1831, le 10* arron-
dissement a perdu environ 3,000 domiciliés, et s'est vu altcliu-et dé-
passé successivement par cinq ariondissements : le 1", qui, pendant
que nous perdions 3000, gagnait le chilfn; énorme de 23,000; le 3',
qui augmeiiiall de 16000; le 2' et le 6% de 15000 ; et le 8« de 13000.
La valeur localive sur laipiellc est assise la contrlbiulon dos palenles,
mesure, comparativement du nlolns, l'acllviié du grand commerce dans
les divers arrondissenienis. Cette valeur, messieurs, a diinituié
100 mille fr. dans noire arrondissement, pendant qu'elle augmentait de
plus de 4 millions dans le 1", le 2' et le 3% réunis.
Enlin, dans le conrani de l'aïuiée 1842 seulcnieni, nous perdions 83
électeurs, pendant (|ue le 2« arrondissement eu g.ignait 249.
Ces chiffres, messieurs, ne sonl que trop ëloquenis. Ils prouvent la-
coniquement que le mouvement funeste qui déplace si rapidement la
richesse, la populaiion active elle commerce de Paris, sévit peut-être
plus fort sur le 10' arrondlssemenl que sur tout autre. Examinons de
plus près ce mouvement.
Prodigieux accroissement des quartiers du nord-ouest, He. — Lel^ei
le 2'arrondisssemenl (nord-oueslde Paris) voient s' accroître prodigieu-
sement chez eux la population riche, le commerce de luxe, et les quar-
tiers voisins, en allant à l'est, leur population commerçante. Sous Tin-
fluence du môme mouvement, les Batignolles, d'une part, par la proxi-
mité des quartiers de la haute banque, des boulevards et des ibeiires;
REVUE DE L ARCHITËCTUUE Eï DES TRAVAUX PUBLICS.
Si
«l'aiilre pari , La Chapelle, la Villeiie cl Beicy, par la pos-esiosn des
bouches d'arrivage des canaux , el par le quasi-monopole de rimniense
approvisionncmeiil de Paris , se sont développés, el oril grandi comme
de vigoureux parasites. An cotilraire, les villages élevés autour de Paris
sur la rive gauihe (Ausierlitz, la Glacière, etc.), végclenl misérable-
ment; Grenelle se meurt sous le vent meurtrier du désert des Invalides;
le Gros-Caillou reste dans un déplorable état de stagnation, et les ber-
ges abandonnées de la Seine attendent eu vain l'acliviié et la vie tout
le long et au delà du développement littoral de notre arondissemcnl.
Toute la partie centrale du vieux Paris et les trois arrondissements
de la rive gauche, ou bien ressemblent à des cloaques, comme la Cité,
les marchés, les quartiers des Lombards, des Arcis, du Louvre, de
rHôlel-de-Ville , de la Monnaie, de l'École de Médecine, de la Sor-
bnnne et de Saint-Jacques, ou bien, comme le Gros-Caillou, le quartier
Saint-Marcel et Pile Saint-Louis s'étiolent dans un Isolement de plus
en plus fâcheux.
Parlialitc clinquante dans la itislrilmlinn des améliorations. — Mais
qu'y a-l-il d'étonnant dans cette inégalité révoltante de la fortune des
divers quartiers de la ville, quand on voit que, dans l'espace de huit
années, de 1831 à 1838, 11 millions ont été dépensés en travaux d'em-
bellissement, d'assainissement et de luxe, sur la rive droite, tandis que
800 mille l'r. à peine (1) ont été consacrés à la rive gauche! quand on
voit, de 1851 à 18il, l'agrandissement de la voie publique porter, pour
la rive droite, sur 38 rues, et coûter 13 millions, tandis que, dans le
même laps de temps, il n'a été touché qu'à 13 rues el qu'il n'a pas été
dépensé 2 millions sur la rive gauche (2) ! Et cependant, ce qui achève
le tableau, la charge de l'impôt, particulièrement de celui des portes et
fenêtres, pèse beaucoup plus lourdement sur la rive gauche que sur la
rive droite.
Ce n'est pas ici le lieu d'accumuler cl d'examiner tous les griefs. Ce
que je me borne à signaler suffit pour démontrer combien seraient hors
de compte ceux qui croiraient qu'une grande pensée de justice disiri-
butive et d'égalité proportionnelle domine déjà dans les conseils des ad-
niiiiistrations supéiieurcs.
Question du déplacement de la population active de Paris. — Depuis
longtemps pourtant, des mandataires zélés de la population parisienne,
des membres éclairés de notre conseil municipal, ont signalé la gian-
deur du mal el appelé l'attention du gouvernement sur les moyens d'ar-
rêter ce déplorable déplacement de la population, qui en esl la cause
fondamentale, et qui laisse et laissera de plus en plus derrière lui des
ruines el des pertes incalculables (3).
L'éUide détaillée de ce problème ne serait point à sa place dans une
note consacrée à l'examen rapide des intérêts spéciaux du 10' arron-
dissement; mais je ne laisserai pas que de poser ici le vrai principe de
la solution. Ce principe, le voici:
Principe fondamental de la solution de la question.— Les déplace-
ments successifs des foyers d'activité de la population parisienne ne
seront définitivement arrêtés que du jour où l'administration aura
compris la nécessité de créer, sur les bords de la Seine, au centre de
figure de la ville, dans le berceau même de Paris, un foyer supérieur de
vie, de plaisirs et d'affaires, doué d'une force louie-puissante d'attrac-
tion, et dominant en beauté , en richesse, en vitalité et en grandeur, tous
les autres points de la capitale.
C'est donc sur le centre et sur la Cité, sur les quartiers environ-
nants et principalement sur les rives de la Seine, que doivent se porter
(1) Les chiffres exacts sont : 11 357 634 fr. et 833 612 fr.
(J) Les cliiffrcs exacts sont : 15 131 192 fr. et 1 897,435. Voir les comptes-
rendus annuels du budget de la ville.
(3) Voir les travaux publiés par MM. Rabusson, Lanquelin, de Cbabrol-
Chaméane, Pérignon, Schniit [Moniteur Parisien), Barrière {Débats), Dau-
banton, par la Gazette municipale, et enfin le travail de M. Perreymond,
dontlcs cinq premiers chapitres sont publiés dans la «etuct/erJrfAftectureef
des Travaux Publics.
désormais, dans l'intérêt bien entendu de toute lu ville, les ciïorls de
radiuinistralion cl de la haute cdilité parisienne, et les libéralités trop
hâtivement prodiguées aux boulevards et aux quartiers excentriques et
aristocratiques du nurd-ouesl.
La régénération de la Cité el des quartiers qui l'environnent, le per-
cement de voies de communication allant du centre à la circonférence,
la parfaite navigabilité de la Seine, et rembellisseinenl bien entendu et
productif de ses rives : voilà, suivant moi, le point capital, le principe
fixe el supérieur seul capable de donner de l'unité el de la force au
système jusqu'ici éparpillé el incohérent de l'édililé parisienne, el de
répandre de proche en proche, du centre aux extrémités, le bien-être,
l'aciiNité el la vie dans tous les membres du grand corps.
Mon opinion sur le système général de l'administration de la ville
étant sommairement établie, je passe à l'examen des intérêts spéciaux
du 10' arrondissement; je me bornerai, pour être bref, à trois obser-
\ allons principales.
Le 10* arrondissement a eu le malheur d'élre placé en face des
demeures royales el des jardins royaux, el d'en être séparé par un
(leuve.
1'" Observation. — Sacrifiée det besoin* du iOt arrondissement u
des conditions purement décoratoires. — Cette position a fait sacrifier
les besoins les plus essentiels, les plus vitaux de nos quartiers riverains,
à des conditions exclusives de décoration ibéàirale. L'absurde dove-
loppemenl de cette façade sans profondeur, plaquée comme iitie loile
de fond devant le collège des Quaire-N'alions [actuellement l'Instilul),
qui étrangle le quartier de la Monnaie et intercepte le débouché des
rues de Seine el Mazarinc sur le quai Mala(|uais, n'a été dressé en face
du Louvre que pour donner aux fenêtres de ce palais une perspective
d'opéra. L'activité, la vie de tout un quartier, n'ont été si fâcheusement
sacrifiées par l'archilecle Levcau, que pour élever à l^uis XIV une
déplorable Dallerie en pierre de taille (1).
L'Hôtel des Invalides, l'École Mililaire, n'ont-ils pas élé disposés
également sous l'empire d'une préocciipalion fxc/u»ff« de perspective
décoratoire pour les Champs-Elysées et le royal chemin de Versailles
cl de Saini-Cloud, sans aucune considération des intércis vitaux des
quartiers dont ces espaces immenses devaient faire, en quelque sorte, '
des îles inabordables, et que pourtant leur voisinage de la Seine et leur
position à l'aval de Paris destinaient naturellement et essentiellement
à une vie commerciale, abondante el active ? iN'est-il pas honteux qu'on
ail laissé jusqu'ici dans le déplorable ciat d'abandon el même d'insalu-
brité où nous le voyons, un développement de terrain aussi important
que celui qui est compris entre le haut de la rue de Sèvres ella Seine,*
notamment les points situés le long de l'avenue marécageuse de Lo-
vvendal, cl de l'avenue de Breieuil, ainsi que les environs de la place
Dupleix?
Je ne multiplierai pas davantage les exemples ; ceux-là suffisent pour
faire comprendre aux intéressés qu'ils doivent à l'avenir peser sur
l'édililé supérieure, pour la forcer à savoir combiner les grands aspects
et les lignes monumentales qui conviennent aux rives d'urt fleuve qui
traverse une capitale comme Paris, avec les besoins essentiels des popu-
lations qui habitent ces rives.
2-' Observation. — Abandon fâcheux du canal de l'Yvette — En
1772, M. de Parcieux présenta à l'Académie des Beaux-.\ris un projet
de la plus haute importance, qui consistait à amènera Paris la rivière
(1) Oonsultersur ce sujet le bon projet de M. Léon de Labiirde, pour l'amé-
lioration et l'embellisseinent du 10' arrondissement. « Le» eau, dit M. de
« Laborde, en élevant .sou édirice sur le passage de tout un quartier, en trans-
o formant en impasses des rues actives, des débouchés nécessaires, ne se préoc-
« cupait que d'une cliose, ne travaillait que dans un but : donner à Louis XIV,
« assis dans son Louvre, le plus beau spectacle; à la Seine, la plus belle <lé-
« coration ; en un mot, il regarda devant lui, sans réfléchir qu'il y avait quel-
« que chose derrière. Or, c'est nous qui sommes derrière, et qui, depuis bientôt
ic deux siècles, souffrons de cette flatterie d'un courtisan. »
REVUE DE L'ARCHIl ECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
20
(le l'Yvetle (1) ; à fournir aiix besoins donicsliqncs cl à rassainisseinent
de lu rive gauche tout eulière dos eaux abondantes ; à procurer enfin à
celle rive des avantages analogues à ceux que le canal de l'Ourcq a
faits à la partie seplentrionale de la capitale. L'exécution de ce projet
baulcuicnt appuyé par tout ce que l'Académie renfermait alors de
savanis illustres, repris et commencé sous Louis XVI (!"80), par
M. Defer de La Nouerret, a éié déiilorablement sacrifiée en 17^7 à
l'inilnence égoïste de quelques intérêts particuliers. En 1821, M. l'in-
génieur C.-J. Minard esl revenu de nouveau à celte idée : il a obtenu
l'approbation dn Conseil des Ponls-et-Chaussées (séance du 10 sep-
tembre 18-22) pour le projet d'un canal qui, partant de la vallée de
l'Yvette, et aboutissant, barrière Saint- Jacques, à un bassin semblable
•à celui de La Villetle, amènerait à bas prix à la ville des eaux d'une
exeellenie qualité, ainsi que les matériaux de pavage et de construc-
tion tirés des riches carrières au long desquelles le canal devait être
.creusé.
Le niveau de ce bassin Saint-Jacques, qui donnerait 8 mille mètres
cubes d'eau par jour, serait à im 40 au-dessus du point le plus élevé de
Paris (l'Estrapade près le Panthéon), c'esl-à-dire à 15 mètres plus haut
que le niveau du bassin de La Villetle.
Le puiis de Grenelle étant insuffisant pour subvenir aux besoins
domestiques et à l'assainissement des trois arrondissements de la rive
gauche, ceux-ci sont intéressés à la reprise d'un projet dont l'exécu-
lioii, due à cette rive, épargnerait chaque année d'ailleurs, à l'État, à la
\ ille et aux particuliers, des dépenses considérables.
On peut évaluer, en effet, à plus de 40 raillions les économies qui
eussent été réalisées depuis 20 ans dans Paris, si ce canal, dont le devis
ne s'élevait qu'à 2 millions et demi, eût été exécuté (2).
3' Observation. — Question de la navigalion de ta Seine. — La
construction (les canaux Saint-Denis et Saint-Martin a eu pour objet
d'abréger le trajet de la Brielie-Saint-Denis à l'amont de Paris. Or, ces
canaux allongent en réalité de beaucoup le temps qu'exigerait le trajet
par la Seine, si la navigation de la rivière était libre dans la ville. En
elfei, dans l'état actuel des choses, l'enconibrement est tel qu'il ne faut
quelquefois pas moins de quinze jours pour traverser le canal. La tra-
versée lie ce canal coule, en moyenne, au commerce, 600 fr. parbaleau
de 500 tonneaux. Par la Seine, le trajet durerait deux jours cl coulerait
à peine lîiO fr.
La libre navigation de la Seine dans l'intérieur de Paris esl un point
sur le(|uel nous ne saurions trop nous efforcer, dans rintéiét colleclif de
(1) L'Yvette prend sa source à 8 kilomèlres de Clievicusc, et n'a (jnc 30
à 32 kilomèlres de cours.
(2) Voir le Projet de canal et i\c chemin de fer pour le transport des paies à
Paris, etc., par M. C. J. Minard. Tout réceiiimeiit, Al. Itadiguel vient de pré-
senter au Conseil général lui projet de dénvaliou de la Marne, qui remplirait en
partie, pcut-élre, l'ohjel du canal de l'Yvelle. C'est une question à étudier.
Mottvement général de l'approvisionnement par eau de la capitale —
l'aris reçoit, par le petit cabotage et par le nouage, 2 000 000 tonneaux de
marciiandisesdc toute espèce, quanlilé presque double de celle que reçoivent
nos principaux ports dj mer réunis.
Celte masse énorme de marchandises est apportée dans les ports de Paris et
de la banlieue (La Villetle, Bercy, la Gare, Grenelle) par un nombre de 20 Â
22 000 bateaux, et do 3000 à 3800 trains de bois, suivant que les eaux de la
Seine sont plus ou moins favorables a la navigation.
10 AOO de ces bateaux et 2 200 trains de bois se déchargent en amont de
Paris (Sud-Est), c'est-à-dire de l'cxtréniilé Est de la Cilé en remontant vers
Bercy et la Gare.
9500 bateaux déchargent & La Villetle et le long du canal Saint-Martin (Xord-
Est de Paris).
nco bateaux et 1200 trains de bois déchargent en aval (Sud-Est de Paris)
c'est-à-dire depuis le pont des .Sainls-Pères jusque vers Grenelle et Passy.
En d'autres termes, tandis que 20 000 bateaux et 2200 irains de bois dé-
chargent en amont ou au Nord-Est, 1800 bateaux et 1200 trains de bois seu-
lenienl arrivent en aval '.
la capitale cl dans rinlérélparliculicr du 10" arrondissement, de vaincre
l'inertie et la mauvaise volonté (je justifierai celle expression) de
.M. Teste, minisire des Travaux Publics. Examinons d'abord la i|uestion
dans ses rapports avec le 10° arrondissement.
lilat du Gros-Caillou , de la rive du U)" arrondiitemenl el drt ports
intérieurs. — Certes, les habitants du quarlier des Invalides avaient
conçu les plus belles espérances lorsqu'ils virent, au prix de plusieurs
millions, le bras de la Seine du coté de Grenelle creusé el disposé pour
former une gare belle el .spacieuse, l'ile des Cygnes iransforniée en
promenade, une estacade surmontée d'une passerelle, réunir le quai
d'Orsay à celle île, un chemin de fer, enfin, se déployer de la gare à
l'entrepôt du Gros-Caillou. Vain espoir! l'ile des Cygnes a perdu soti
estacade; la gare ne reçoit que quelques bateaux de charbon, el le Gros-
Caillou n'a pas vu s'accroître, le moins du inonde, sa prospérité cl son
activité.
C'est qu'avant de construire le port qui doit recevoir les navires, les
marchandises, et appeler le mouvement commercial, il faut que le port
soit abordable.
Or, la voie qui doil rendre à la vie tous les ports de l'intérieur de
Paris, qui doit lutter énergiquemcnl contre les funestes cffels du dépla-
cement de la population, appeler à une nouvelle existence le vieux
Paris central el larive gauche, c'est la Seine, la Seine rendue libre cl
navigable dans la traversée de Paris et de la banlieue.
Celle grande vérité, messieurs, a déjà élé fortement sentie par le
Conseil municipal, qui n'a pas craint de voler plusieurs millions pour
convertir l'île Louviers en poris de déchargement el en magasins de
marchandises. L'ancien développement, l'ancienne prospérité de la
hanse parisienne (le commerce par la ïeine), se sonlceriainenienl, lors
de celle résolution, présentés à la pensée des modernes cchevins de la
ville de Paris.
Si l'indusirie et la ville ont dépensé des million» pour la construc-
tion de l'entrepôt du Gros-Caillou, des ports el des bas-ports de l'an-
cienne île Louviers, des ports Saint-Paul, des Sainls-Pères, d'Orsay el
de la gare de Grenelle; si tous les travaux en aval el une jiariie des
travaux en amont du vieux Paris sont restés el restent stériles el im-
productifs, il esl du plus haul intérêt d'en signaler les causes.
Principe du développement commercial. Explications de l'inégalité
de dislribnlionducommerce d'approvisionnement par eau. — Kn principe.
messieurs, l'activité commerciale ne saurait se développer sur des points
dont les communications sont en grande partie coupéis. Si ce prin-
cipe esl vrai, rien n'est plus simple que de savoir pourquoi les ports des
Saints-Pères et d'Orsay, pourquoi les berges de la rivière devant les
Invalides el le Champ-de-.Mars, pourquoi la gare de Grenelle, sont
frappés de marasme el de mort, tandis que La Villetle, Bercv, la Gare,
monopolisent au détriment de tout le reste de la ville, el surtout du
centre et de la rive gauche, l'immense approvisionnement par eau de la
capitale? — C'esl parce que leiiorj el l'amont de Paris communiquent
avec la haute Seine, la basse Seine et leurs affluents, rivières et ca-
naux; tandis que le centre el l'aval de Paris ne communiquent qu'avec
la basse Seine seulemeni. Le commerce ne peut se conlenler d'une
liberté de communication incomplète à ce point. Voilà pourquoi l'a-
val de Paris est abandonné, tandis que l'amont cl le canal de la Seine à
la Seine aiiirent tout à eux, el avec une telle puissance, qu'ils s'en-
combrent, s'engorgent chaque jour davantage de bateaux, de marchan-
dises, de magasins et d'cntrepôis.
La libre navigalion de la Seine dans Paris, vivement réclamée par le
Conseil général, appuyée par M. le préfet lui-même, et entravée par le
ministre des Travaux Publics, est donc la condition sine qua non de la
revivificalion commerciale des quartiers riverains de l'aval cl du centre.
Sans celle liberté de navigation, il faut renoncer à jamais voir s'élever
le long de la rive, et surtout à l'aval du 10* arrondissemenl, les cntre-
pôls, les élablissemenls el les centres de commerce, qui y seraient si
bien placés, cl qu'il esl si urgent d'y ailircr pour conlre-Uilanccr les fà-
27
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
38
dieux effets de l'isoleinenl produit par le développement exagéré qu'oc-
cupent sur ce point les propriétés de l'État, et pour éviter le fâcheux
encombrement de ramoiii.
Examinons, pour nous édifier sur le sujet, les chiffres généraux de
l'approvisionnement par eau de la capitale.
Celle disproportion effrayante atteste, dans la répartition des avan-
tages généraux, un déni de justice et un renversement de toutes les no-
tions du droit et de l'économie distributive, d'autant plus flagrants que
la basse Seine et ses affluents (l'Oise, l'Aisne, l'Eure, l'Escaut, les
Canaux du Nord) fournissent à l'approvisionnement de Paris plus de
720 000 tonneaux de marchandises qui vont, en presque totalité, dé-
boucher au haut de la ville!
Voyons niaiiitenani comment la question se présenle.
Èlal de la question. Les compagnies el le minisire des Travaux Pu-
blics. — En fait, l'aval et l'intérieur de Paris ont été, par la eonslnic-
lion des canaux du Nord-Est, et par l'obstruction de la Seine inlra
muros, sacriiiés au développement exagéré du Nord et de l'Est.
Le mouvement des approvisionnements par eau de la capitale ayant
doublé depuis vingt ans, et s'accroissant prodigieusement encore tous
les jours, il arrive maintenant que l'amont et les canaux, qui accaparent
presque tolalenieiit ce mouvement énorme, sont encombrés et se
plaignent de pléthore. 10 000 bateaux et 2200 trains se déchargent à
ramont de Paris, 8,400 bateaux se déchargent le long des canaux Saint
Denis et Saint-Martin ; les Compagnies des canaux ploient sous le faix
de leur monopole. Eh bien! savez-voiis ce que veut l'ime de ces Com-
pagnies? Elle veut que l'on ajourne indéfiniment les travaux de naviga-
tion delà Seine, et qu'on autorise, à La Chapelle, la con.structinii d'un
nouveau bassin pour y faire refluer le trop-plein de ses bateaux (1).
(1) En 1337, MM. Zliendreconçurentridée d'ouvrir un second bassin entre I.a
Villette et La Cliapelle-Saint-Dcnis, bassin qui devait être alimenté par les eaux
de La Villette. L'ingénieur de la Compagnie concessionnaire des canaux de
l'Ourcqet Saint-Denis, M. Vulgncr, dressa le projet. Le Conseil municipal re-
jeta cette proposition dans le mois d'avril 1838.
MM. Zliendre s'adressèrent qnelque temps après à M. le directeur de»
Ponts-ct-Cli;ussées. M. le directeur invita (mai 1839) M. le préfet de la Seine à
soumettre ce projet aux enquêtes prescrites par la loi du 9 juillet 1833. M. le
préfet arrêta qu'il serait ouvert une enquête administrative à l'HOtel-de-Ville
de Paris et à la sous-préfecture de Saint-Denis. Une commission fut nommée
pour centraliser et étudier les résultats de cette double cnciuête. Cette com-
mission se prononça contre le projet dans le mois de juillet 1839.
La chambre de commerce, consultée sur le même sujet, jugea que le nou-
veau bassin serait utile, s'il était mis en communication directe avec le canal
Saint-Martin, s'il était revêtu en pierre, etc. ; en un mot, la chambre de com-
merce imposait de grands frais à MM. Zhenore.
L'affaire en ét;iit restée là, lorsque M. le ministre des Travaux Publics, quel-
ques mois plus tard, invita M. le préfet à lui renvoyer toutes les pièces de
cette affaire, en les accompagnant de son avis. M. le préfet, au lieu de ré-
pondre immédiatement au désir du nnnistre, eut la bonne et louable idée de
consulter de nouveau le Conseil municipal, qui maintint avec fermeté son opi-
nion défavorable.
Or, pendant que M. le ministre des Travaux Publics manifestait ainsi une
vive sollicitude pour un projet énergiquement repoussé par le préfet de la
Seine, par le Conseil municipal de Paris, et préjudiciable aux intérêts généraux
de la ville, il opposait toute sa force d'inertie et toutes les lenteurs d'un
ajournement systématique au projet de navigation intérieure de la Seine, qui
a toute la sympathie de l'Hôtel-de-Ville, du commerce, de la marine, et en fa-
veur duquel le Conseil municipal n'a pas seulement persisté à réitérer ses
vœux auprès de l'administration supérieure, mais encore n'a pas craint d'en-
gager déjà plusieurs millions dans les travaux de l'Ile Louviers. L'Ile Louviers,
anciennement appelée Bonde des Barres, et, plus tard, des Javeaux, appartient a
la ville de Paris depuis le 6 juillet 1705. Cette ile a été achetée à M. de Balzac
d'Antragues : la ville l'a payée 61 500 livres. L'île Louviers rapportait depuis
trente ans à la ville une rente annuelle de ao 000 fr.
Si les Compagnies des canaux de l'Est, dont les bénétices présumables avaient
été calculés sur un mouvement annuel de 600 bateaux, craignent de voir faiblir
Heureusement pour Paris, le Conseil municipal a repoussé cette pré-
tention exorbitante, qui n'allait à rien de moins qu'à accroître encore
et consommer pour l'avenir le sacrifice des quartiers centraux et de la
rive gauche à une localité extérieure.
.Malheureusement, par contre, celte Compagnie a un avocat très-
puissant au ministère des Travaux Publics. — M. le ministre des Tra-
vaux Publics était lui-même, en effet, l'avocat en titre de la Compa-
gnie des Canaux de l'Ourcq et Saint-Denis, avant de prendre posses-
sion de son porlefcuille; et nous ne sachions pas qu'il ail renoncé a
tout jamais à cette position et aux avantages qui y sont joints.
Le projet de navigation de la Seine dans Paris, étudié depuis six ans par
M. l'ingénieurPoirée, élaboré et modifié par diverses commissions, Tive-
ment approuvé par le Con.seil général et par le préfet de la Seine, est indc'-
fininientajourné par .M. le ministre des Travaux Publics. — Voila les faits.
Utilité de ta publicité des faits. — Ces faits, il est bon qu'ils soient
connus, il est bon que les quartiers riverains, les quartiers centraux
el la ville entière, sachent comment le beau fleuve qui traverse Paris
pourrait devenir enfin, pour Paris entier, tout ce qu'il peut être, c'est-
à-dire une source féconde de vie et de prospérité, et comment ce grand
bienfait est ajourné indéfiniment et ne s'accomplit pas. Il est bon sur-
tout que ces choses se sachent au monieiil où les citoyens ont à nommer
leurs mandataires au Conseil général.
Sur la question qui vient de nous occuper, comme sur d'autres, la
fermeté de ces mandatsiircs et la publicité pourront seules venir à
bout de certaines résistances.
N'oublions pas, quant à la question vitale de la navigation de la Seine,
que la concession de la C*uM|iagiiie des rénaux du nord-est de Paris
ne finit que dans soixante-dix-huit ans; n'oublions pas que de puissants
intciêts, toujours actifs, toujours sur le qui-vive, luttent de toutes leurs
forces contre les améliorations indispensables à la régénération du vieux
Paris et de la rive gauche.
Si les citoyens ne s'éclairent pas sur les grands intérêts de la ville,
s'ils ne prennent pas des mesures énergiques pour forcer l'inertie ou le
mauvais vouloir de l'administration supérieure, si la publiciione s'en
mêle pas, si les électeurs ne nomment pas pour les représenter des.
hommes profondement pénétres de la gravité des questions qu'il s'agit
de résoudre, capables d'en élucider, d'eu poursuivre et d'en obtenir les
solutions, rien n'arrêtera le flot de celte puissante marée, qui eniniiiie
et concenire au delà de la capitale, au nord-esi, le niouvemeiil tout
entier du grand commerce d'appiovisionnement, et, dans les régions
excentriques du nord-ouest, le foyer des affaires de la B:inque, du luxe,
des plaisirs et de raciiviié urbaine. .Malheur alors au vieux Paris el
aux trois arrondissements de la rive gauche, que le commerce cl la vie
délaissent de plus en plus, dont toutes les propriétés sont menacées
d'une dépréciation qu'accélérera bieniôt l'influence combinée des têies
de chemins de fer du Havre, de Lille, de Strasbourg et de Lyon, si l'on
ne s'oppose pas vigoureusement à renvabissement du monopole du
nord et du noid-ouest de la rive droite!
Coup d'œil sommaire sur le budget municipal. — L'adminisiratton
de la ville roule sur un budget annuel de 42 millions.
Si nous jetons un coup d'œil rétrospectif sur l'ensemble des dépenses
de la ville pendant quarante-trois ans, de 1707 à 18iO, dépenses por-
tant sur une recette totale de 1 534 3(>2 449 fr., nous trouverons entre
autres faits, et en chiffres ronds, que l'on a dépensé :
Pour fumées de feux d'artifices et fêtes publiques 16 000 000
Et pour quais, pavages neufs, trottoirs et carrières sous Paris
(catacombes)j seulement 11 000 000
les revenus de l'énorme mouvement actuel de 8400 bateaux, sur lequel elles
opèrent, est-il juste que la ville et l'industrie perdent les intérêts engagés dans
la construction des ports et des entrepôts, et que les besoins de la ville en-
tière et des quartiers riverains soient sacrifiés au développement exagéré de la
richesse de ces Compagnies ?
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REVUK DK L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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Pour grands travaux d'arclil lecture, dont partie ont été dé-
truits, n'oul jamais servi, ou ont changé de destination. . . . 88 000 000
L'État, de son côté, pendant le même laps de temps, dépen-
sait à Paris, pour des travaux du même genre, environ. . . . 200 000 000
Et pour agrandissement de la voie publique, seidement. . . 33 000 000
Pour la garde nationale 20 000 000
Pour la garde mimiclpale 67 OOO 000
Pour la préfecture de police 148 000 000
Et pour égouts, distribution des eaux, disposition d'assainis-
sement, etc., seulement 14 000 000
Certes, on petit être ami des fêtes publiques, des beaux-arts et de
l'ordre, sans croire nécessaire de sacrilier l'assainissemenl et la circula-
tion, ces deux premiers besoins d'une immense population agglomérée
sur un petilespace, à des dépenses évidemment exagérées. Il est urgent
(pie l'on songe enfin à eiiirerdans une voie nouvelle, et que la régéné-
ration du vieux Paris et des rives de la Seine devienne l'objet des études
de l'administration, et remplace, dans son budget, les dépenses déco-
raioires prodiguées à des quartiers jusqu'ici, et proportiounellenient,
beaucoup trop avantagés.
Grande rue delà Croix-Rouge au quai Conli. — Après la question
d'adoption d'un plan d'ensemble, destiné à arrêter le déplacement de
la populaiion par le remaniement du vieux Paris central, et par la libre
navigation de la Seine; après la question de la distribution d'eaux
abondantes dans tons les qtiarliers tie la rive gauclie, et des autres
ipbjels ci-dessus indiqués, se présentent, pour le dixième arrondisse-
ment, les amélioraiions à l'aire dans les quartiers Sainl-Thomas-d'Aqiiin
et de la Monnaie. Nous dirons brièvcmeni, à cet égard, (ine ces amélio-
rations doivent avoir pour base le percement d'imc artère qui, partant
de la Croix-Ronge, ot'i aboutissent les grandes voies de loutes les bar-
rières du sud-ouest, prenant le quartier de la Moimaie en écharpe et
déblayant les abords de l'abbaye, déboucherait entre le pont des .\rts
et le Pont-Neuf. Un nouveau pont à voitures prolongerait cette rue
jusque devant la colonnade du Louvre (1).
Le faubourg Saint-Germain se trouvant alors environné de quartiers
llorissants et commerçants, se verrait rappelé à la vie et au genre de
prospérité (|ui convient à ses établissements publics, à ses vastes hôtels
et à sa magnifique position.
Je termine par une remarque qui semblera bien vulgaire a quelques-
uns peut-être, mais qui ne manque pourtant pas de sens à mon avis :
c'est que les quais qui bordent le dixième arrondissement, les plus
beaux quais de Paris, ne fournissent même pas, dans l'état actuel des
cho.ses, des éléments de vie et d'exploitation suffisants pour attirer l'é-
tablissement d'une voiture omnibus qui les desserve ! En bonne édilité,
cependant, les deux rives de la Seine devraient être les deux plus
puissantes artères de la circulation de la ville.
Je ne parlerai pas ici de la suppression indispensable des péages des
ponts, de la péréquation des impôts qui pèsent trop lourdement sur la
rive gauche, ni de ipielques autres questions qui doivent être résolues
au mieux des iniétèts des classes pauvres et des quartiers les plus en
souffrance. Les solutions de ces questions dérivent évidemment des
principes supérieurs de justice, d'égalité et d'économie distributive que
je m'eflforce de faire prévaloir.
Situation des Hevenus, Dépenses, Embellissements,
Travaux commences et projelés de la Ville de Paris, au 2a décembre 1843.
Depuis plusieurs années, M. le préfet de la Seine prononce, en
présence des membres de la Chambre du tribunal de Commerce et
des quarante notables commerçants désignés par eux, un discours
sur la situation administrative de la Ville de Paris, lors de l'ou-
(1) Voir le projet de M. L. de Laborde, cité plus iiaut.
verture de la séance qui a lieu au Palais de la Bourse, pour le re-
nouvellement annuel des cinq membres sortant de la Chambre de
Commerce.
Nous aimons à voir ainsi le premier .magistrat municipal venir
présenter le tableau des intérêts parisiens devant des hommes ex-
primentés dans la pratique et la triture des affaires.
La spécialité de notre journal ne nous permettant pas de donner
intégralement le discours de M. le comte de Rambuteau, ce n'est
pas à nous non plus de porter un jugement sur l'ensemble des
différentes parties administratives et statistiques que M. le préfet
a traitées dans son allocution. Nous nous renfermerons dans la
question de l'assainissement de Paris, qui, au point de vue de l'uti-
lité, occupe évidemment le premier rang; telle est aussi la pensée
de M. le préfet, pensée qu'il a formulée très-explicitement et avec
une précision mathématique dans les paroles suivantes :
« Ce qui excite le plus. Messieurs, ma sollicitude, c'est l'assai-
« nissemement de la cité. Et ainsi que j'en prenais l'engagement
« il y a dix ans, je n'ai pas cessé un instant de chercher à donner
« aux Parisiens de l'air, de l'eau et de l'ombre. »
Oui, assainir une ville, c'est lui donner de l'air, de l'eau et de
l'ombre; mais combien cette tâche est difficile lorsque l'on doit
lutter contre des constructions entassées les unes sur les autres,
lorsque d'infatigables spéculateurs envahissent la plupart des en-
droits encore libres ou plantés d'arbres, lorsqu'en un mot l'on
doit lutter contre le fait et les conséquences d'un héritage du passé,
accepté forcément sans bénéfice d'inventaire, et contre les vues
égoïstes de l'intérêt personnel livré à lui-même!
Aussi nous permettrons-nous de faire observer à M. le Préfet
et aux membres du Conseil municipal, que leurs Iwnnes et pater-
nelles intentions à l'égard de l'assainissement de la capitale res-
teront à l'état de désir dans notre siècle, si pour parvenir à cet
heureux résultat on n'a pas recours A de grands moyens.
Est-ce à dire que nous méconnaissions ce qui a été fait, même
d'après les idées reeues dans les bureaux de l'administration? Non;
mais nous trouvons les moyens suivis jusqu'à ce jour trop au-
dessous des besoins de la ville, de la dignité de la municipalité de
Paris.
On le voit, il s'agit ici de haute édilité, si l'on veut réellement
donner de l'air et de l'ombre aux populations qui se pressent
et s'étouffent dans des quartiers, comme ceux des Halles, des Ar-
cis, où l'habitant n'a à sa disposition que 7 mètres d'espace :
comme ceux des Lombards, Montorgueuil, de la Banque, de la
Porte Saint-Denis, Sainte-Avoye, de l'Hôtel-de-Ville, Saint-Ho-
noré, Bonne-Nouvelle, Saint-Maitin-des-Champs , Saint-Kusta-
che, du Mail, de la Cité, Saint-Jacques, du Palais-Royal, du Mar-
ché Saint-Jean, etc., où l'habitant ne trouve encore en moyenne
que de 10 à 1 1 mètres carrés d'espace.
Aussi lorsque, vis-à-vis d'aussi grands et d'aussi pressants
besoins , nous voyons la ville hésiter devant un emprunt
spécial pour cet objet, nous nous demandons avec étonnement si
les administrateurs de notre puissante cité ont médité profondé-
ment sur ses immenses ressources et sur des combinaisons finan-
cières propres à arriver à un résultat bien déterminé. Nous regret-
tons dç voir M. le préfet s'exprimer en ces termes sur ce sujet :
« Deux motifs se réunissent pour nous empêcher de précipiter ce.*
« travaux (ceux d'assainissement). Le premier est la nécessité de
« pourvoir à tous les services par les ressources ordinaires, sans
« engager l'avenir, sans se lancer dans la voie des emprunts.
31
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
32
<( moyen extrême, qui, pour une ville comme Paris, ne doit être
<i employé qu'avecla plus grande circonspection et dans de graves
« circonstances. »
Et pourtant lavilledeParisauraacquittéunedettede 197 millions
en moins de 30 ans, et elle sera entièrement libérée en 1854; et
quelles plus graves circonstances peut-il exister en dehors de la
nécessité de donner de l'air pur et de l'espace, ces deux conditions
essentielles à la vie?
L'administration ne représente-t-elle pas les intérêts collectifs
des habitants? C'est donc à elle de remettre l'équilibre là où un es-
prit étroit d'égoisrae sordide sacrifie la santé et le bien-être des
populations.
Aiissi serions-nous les premiers à demander au public le plau-
dite cives des comédies des anciens Romains, et nous serions cer-
tainement entendus de la population parisienne, qui ne manquerait
pas d'applaudir si, à son prochain discours, M. le préfet proposait
un emprunt de 100 millions pour exécuter les travaux les plus ur-
gents d'assainissement.
Le principe financier une fois adopté d'ouvrir pour ce premier
des services publics un emprunt spécial assez considérable pour
que l'on ne fut pas obligé de vivre au jour le jour et de conti-
nuer forcément le vicieux système actuel , qui n'a pu encore
consacrer que 2 millions par an à ses travaux sur la voie pu-
blique, quoique le développement des rues de Paris soit de 720 ki-
lomètres ( 180 lieues ), on serait forcément entraîné à suivre
un système d'amélioration diamétralement opposé, c'est-à-dire
celui qui substituerait des places plantées d'arbres à nos car-
refours sales et étroits, quelques larges rues à une foule de ruelles
inutiles et infectes, et faciliterait ainsi à l'industrie particulière la
reconstruction des maisons par îlots, et non une à une, seul moyeu
(jui puisse conduire à doter de cours l'intérieur des deux tiers des
habitations de Paris.
Ces travaux entrepris sur une grande échelle, c'est-à-dire pro-
portionnellement aux immenses besoins existants, font craindre à
M. le préfet « des perturbations dans les propriétés qui se trouve-
« raient atteintes ou menacées, et dans les prix des matériaux
« et de main-d'œuvre. »
Ces craintes sont mal fondées; car, d'une part, les propriétés ga-
gneraient à cette transformation, et, d'autre part, des ouvriers sans
ouvrage tendent toujours les bras à la sollicitude de la société.
Que M. le préfet de la Seine et les membres du conseil munici-
pal se posent carrément le problème de l'assainissement de Paris,
et nous sommes convaincus que leur intelligence sera frappée de
la facilité des moyens d'exécution. En toute chose, c'est le fil d'A-
riane qu'il faut trouver, c'est l'épée d'Alexandre qu'il faut savoir
prendre soit pour sortir du labyrinthe des petites idées, soit pour
couper le nœud gordien qui enlace toutes les questions envisagées
au point de vue des car, des mais et des si.
Nous félicitons donc grandement M. le préfet de la Seine de ne
pas avoir oublié l'engagement qu'il a pris de donner aux Parisiens
de l'air, de l'eau et de l'ombre; nous lui rappellerons seulement
que nos poitrines haletantes et oppressées demandent l'application
la plus prompte de cette grande et noble pensée. Voici, du reste, les
propres paroles de M. le comte de Rambuteau :
«C'est avec une saiisfaclion toujours nouvelle que je vois revenir
l'époque qui ramène l'occasion de me trouver au milieu de vous, et
de présider ces solennités auxciuelles concourt rélile du commerce de
Paris.
« Je ne saurais, en effet, rester indiiïéi'enl à ce mouvement qui ap-
pelle ici (les notabilités nouvelles, et à ces réunions dans lesquelles je
puis vous parler de noire grande cité. Car vos études, messieurs, sont
liées à la situation financière de Paris, à fctat de son commerce, à
l'aisance de sa population, aux cITorls de l'adminisiralion municipale,
comme aux amélioralions qu'elle a le lionlieiir de réaliser.
Proiluilt de l'oclrvi.
« Le mouvement d'accroissement que je vous annonçais au mois de
juillet dernier dans ces produits de l'ociroi s'est iiiniiileiiu, et le chiffre
de ces produits, qui, en I8i2, avait éprouvé quelque diminution et ne
s'était élevé jusqu'au 22 décembre ipi'à 2!) 724 941 fr., est aujourd'hui
de 31 442 83C fr., d'où résulte une augmentation de 1 7l7i)lofr. qui
■l'atteint pas encore cepeiidaiii le chiffre de 1838. Les buissons et les
combustibles ont particulièrement augmenté.
Travaux de l'tlùtcl-de-Ville.
«Nos travaux, messieurs, soil pour enibellir, soit pour assainir la
ciié, ne se sont pas ralentis. L'Hôtel -de-Ville, lerniiiié complètement
à l'extérieur, touche à sa lin. Il a fallu se rendre compte des repar.i-
tions et de la liaison de l'aiicicn hôtel avec les nouveaux bàlimcnis.
ainsi que des excédants des dépenses inévitables dans une entreprise si
grande, et exécutée si vivement. Le conseil municipal, après un exa-
men approfondi, n'a pas hésité à continuer son œuvre et à voter tous
les crédits nécessaires.
«Les anciens bâtiments ne contenaient que 17() employés; l'Hôtel
actuel en renfermera 418, de manière ii concentrer cl ii réunir tous ses
ser\ices, qui autrefois se trouvaient disséminés au loin, soit dans l'hô-
tel de la rue Grange-Batelière, soit dans des maisons dont la valeur ou
la location représentait, pour la ville, un capital de plus de 5 millions,
sans parler des sommes qui, lors des fêles publiques, étaient dépensées
en constructions provisoires, et qui, de 18IU à 1850, se sont élevées du
5à 6 millions.
« Les bureaux de l'Hôtel-de-VilIc occupent maintenant 171 pièces ou
16 000 mètres superficiels, au lieu de 40OO mètres; lorsque les deux ga-
leries intérieures, que l'on reconstruit dansée moment, seront livrées à •
quelques fractions de divisions que l'on a été obligé de restreindre mo-
mentanément, les services auront deux fois plus de place que par le
passé.
« Les salles consacrées au conseil municipal, au conseil des hospices,
au conseil du monl-de-piété, aux archives, à la bibliothèque, aux so-
ciétés savantes, ne sont pas moins spacieuses; l'utilité et la convenance
se trouvent donc ainsi réunies à la grandeur et à la beauté impos.inte
du monument municipal, dont il n'est pas un habitant de Paris qui ne
puisse aujourd'hui se montrer fier à juste titre.
Bâtiments de la Cour des Comptes ; Préfecture de police.
« Les localités de l'ancienne cour des comptes viennent d'être dis-
posées pour la préfecture de police, et les travaux ont été conduits de
manière ii concilier les besoins de l'administration et ceux de l'habita-
tion particulière du préfet.
Eglises nouvelles et travaux d'utilité publique.
« La rampe monumentale de la place Lafayette, qui est destinée ii
donner accès à l'église de Saint-Vincent-de-Paul et aux rues latérales,
vient d'être terminée; c'est une notable amélioration qui était vive-
ment réclamée par les habitants du quartier Poissonnière. Ce quartier
va être légalement vivifié par la gare du chemin de fer du nord.
« L'église pourra être livrée au culte dans le courant de l'année pro-
chaine.
« La ville de Paris sera bientôt en mesure de commencer la construc-
tion de la nouvelle église Belle-Chasse, dont les terrains seront livrés
incessamment par le domaine.
« Le temple des Billeltes ne suffisait plus aux besoins de la popula-
tion protestante de la confession d'Augsbourg : un nouveau temple a
33
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
34
été disposé, rue Cliaucliat, et l'administration poursuit en outre, avec
une vive sollicitude, ralTeclalion au culle reformé des anciens bâti-
ments du Pantlieniont, rue de Grenelle-Sainl-Germain, affectés par
l'Empereur à cette destination.
« La construction de la nouvelle maison d'arrêt, rue Traversière
Saint-Antoine, est en pleine activité. Il en est de même du nouveau
marché Beauveau, que la ville fait établir dans le quartier Saint-An-
toine.
« Les travaux nécessaires pour .ippropricr les greniers de réserve
au service d'approvisionnement de la capitale sont en cours d'exé-
cution.
« L'ancien corps de garde de la Bastille vient d'être remplacé par
une construction plus en harmonie avec la décoration de cette place.
a La fontaine monumentale de Saint-Sulpice a été commencée au
mois de juillet dernier.
« La fontaine Molière, aux dépenses de laquelle la ville de Paris a si
noblement contribué, va être inaugurée. Enfin, la restauration des co-
lonnes de la barrière du Trône est presque terminée, et des crédits
sont votés pour la reconstruction et l'amélioration d'une autre barrière
importante, celle de la Râpée.
« Mais ce qui excite le plus, messieurs, ma sollicitude, c'est l'assai-
nissement de la cité. Et, ainsi que j'en prenais l'engagement avec le
Roi, lorsqu'il y a dix ans j'étais appelé, comme préfet de Paris, à l'hon-
neur de lui adresser pour la première fois la parole, je n'ai pas cessé
un instant de chercher à donner aux Parisiens de l'air, de l'eau et de
l'ombre.
Service des eaux.
« Les travaux exécutés tout récemment au canal de l'Ourcq nous ont
permis d'accroître le volume de ses eaux de 1340 pouces, tandis que le
puits artésien de Grenelle, qui fournit 2 000 000 de litres d'eau par vingt-
quatre heures, nous donne les moyens d'alimenter tout le quartier du
Panthéon, où de vastes réservoirs viennent d'être disposés à cet effet.
« La longueur totale des conduites d'eau est de 191 kilomètres, ei
indépendamment des services généraux, la ville distribue aujourd'hui
de l'eau à plus de 100 fontaines publiques, à ISOO bornes-fontaines et
à 2S00 propriétaires qui ont pris des abonnements pour autant de mai-
sons; en 1852, le nombre de ces abonnements n'était que de 700.
« Quand le projet de barrage de la Seine et de turbines au Pont-Neuf
aura reçu son exécution, tous les besoins de la capitale seront large-
ment satisfaits.
Plantations.
« L'ombre, messieurs, n'est pas moins nécessaire que l'eau à la salu-
brité des grandes villes. On sait quelle influence les masses de verdure
exercent sur la pureté de l'air, qu'une agglomération considérable de
population tend sans cesse h vicier. Aussi, depuis que les constructions
multipliées ont fait disparaître des jardins privés, j'ai cru du devoir de
l'administration d'y suppléer, autant que possible, en conservant les
plantations publiques déjà existantes, et en en créant de nouvelles. De
li» ma persévérance à planter les quais, les places et quelques grandes
rues, comme les boulevards. Et chaque année, les votes du conseil mu-
nicipal m'ont fourni les moyens de réaliser ces dispositions.
« Les plantations des quais ont dû être suspendues surquelques points
du côté des Tuileries, à cause du service des bateaux ; mais elles seront
reprises avec activité aussitôt que le chemin dehalagequi va être établi
sur la rive inférieure de la Seine, du Ponl-Royal au pont de Grenelle,
aura été exécuté.
Voirie de Paris.
« Chaque année voit aussi les travaux de voirie donner plus d'air à la
ville, en même temps qu'ils satisfont aux besoins impérieux d'une cir-
culation toujours croissante, et de plus en plus active.
« Mais deux motifs se réunissent pour nous empêcher de précipiter
ces travaux. Le premier est la nécessité de pourvoir à tous lès services
avec les ressources ordinaires sans engager l'avenir, sans se lancer
dans la voie des emprunts, moyen extrême, qui, pour une ville comme
Paris, ne doit être employé qu'avec la plus grande circonspection el
dans de graves circonstances.
« Le second motif est tiré des immenses difficultés d'exécution, et
des perturbations qu'apporteraient infailliblement, el dans les pro-
priétés qui se trouveraient atteintes ou menacées el dans le prix des
matériaux el de la main-d'œuvre, 50 ou 60 missions de travaux instan-
tanément votés.
Amélioration de la voie publique ; rue$ nouvelles,
« La ville, depuis dix ans, a consacré 21 000 000 fr. à l'amélioration
de la voie publique (1) ; c'est une moyenne d'environ 2 millions par an,
qui pourra être portée bientôt à 5 millions, sans compter les sommes
qui doivent être employées pour l'acquisition des maisons el des ter-
rains nécessaires à Pagrandissement de la halle centrale el de ses
abords, dont les projets sont à l'étude.
« Celte année, nous avons continué les travaux de la me Rambu-
teau, et les maisons comprises entre la rue Saint-Denis et la rue des
Piliers-Potiers-d'Etain sont aujourd'hui en démolition.
« Dans la Cité, la rue Conslaniine sera entièrement terminée dans le
courant de la campagne prochaine.
«Nous nous sommes occupés des abords de l'Hôtel-de-Ville; les
maisons retranchées par suite de la continuation de la rue Lobau vien-
nent d'être démolies, et la maison, place de l'Hôtel-de- Ville, 8, au coin
de la rue du Mouton, doit disparaître au 1" avril prochain.
« Entre la rue Blanche el la rue de Clichy, la rue Moncey a été
récemment ouverte.
« Les expropriations exigées par l'achèvement de la place de la Ma-
deleine sont terminées. Le conseil municipal vient de voter les dépen-
ses nécessaires pour l'ouverture d'une rue de 60 mètres, aussi large
que la rue de la Paix, en face des débarcadères des chemins de fer de
Saint-Germain, de Versailles el de Rouen.
« La rue Samson, autrefois interceptée entre la rue Neuve-Saint-
Nicolas el la rue des Marais-Sainl-Martin, a été élargie à douze mètres.
La rue Neuve-Saint-Jean, dans le même quartier, reçoit aussi d'impor-
tantes améliorations.
« Plusieurs maisons ont été acquises pour l'agrandissement de la
place Saint-Sulpice et de la rue Vaugirard, près du Luxembourg; enfln
dans le courant de l'année, il a été accordé 561 permissions de voirie
pour des constructions à l'alignement sur une longueurde 1 1 189 mètres.
L'élargissement des rues Rar-du-Bcc et du Pelil-Hurleur a été déclaré
d'utilité publique, et on s'occupe dans ce moment des formalités néces-
saires pour l'expropriation des maisons. Enfin l'on continue à étudier
le projet d'une rue nouvelle entre les places Saint-Sulpice et Sainl-
Germain-des-Prés.
« L'administration ne perd pas de vue les quartiers excentriques, et
c'est dans le but de les vivifier el d'y accroître la population qu'elle
s'occupe de plusieurs projets, dont les plus notables dans ce moment
sont : l'achèvement du boulevard de la Contrescarpe, destiné à établir
une communication plus facile et plus directe de la gare du chemin de
fer d'Orléans à la place Mazas el à la place de la Bastille; et la suppres-
sion des contre-allées des boulevards Beaumarchais el des Filles-du-Cal-
vaire, sur lesquelles seraient élevées des consiruclions nouvelles. Celle
dernière mesure aura l'avantage de faire disparaître des terrains vagues,
en donnant en même temps à ce quartier une grande valeur, une cir-
culation constante, et toute la sécurité désirable.
« Ainsi , messieurs, toutes les fois que l'exécution de projets utiles
et sagement médités aura été arrêtée définitivement, l'administration
(1) De 1834 au 1er janvier 1843, la ville aura en cuire employé 5î 747 08» fr.
au paiement des emprunts coulractés de 1808 & 1832, principal et intértts.
T. V. 3
35
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
86
s'empressera de les faire connaître, comme elle saura toujours aussi se
défendre de ces publications prématurées que l'on réclame quelquefois
pour ce qu'on appelle des plans d'ensemble, et qui n'auraient pour ré-
sultat que de compromettre les intérêts de la ville aussi bien que ceux
des particuliers.
ProjeC de conslruclion d'un nouvel hôpital.
« Un projet qui, dans un autre ordre d'idées, n'intéresse pas moins
vivement la population, est celui d'un nouvel hôpital dans le quartier
Poissonnière. Je m'en occupe toujours avec persévérance, car toute
celte partie de la ville ne possède pas un seul établissement de charité,
et, d'un autre côté, le nombre des lits et des hôpitaux n'est plus en rap-
port avec les besoins toujours croissants des habitants de Paris.
«Celle grande mesure sera le complément des améliorations qui sont
exécutées habituellement chaque année par l'administration des hos-
pices.
Bâtiments pour les écoles primaires.
«Les écoles excitent aussi tout l'inlérêl de l'administration munici-
pale. Un nouvel et spacieux établissement d'instruction primaire, dont
la dépense est évaluée à 200 000 fr., s'élève dans ce moment rue de la
Roquette, et plus de 300 000 francs ont été en outre consacrés aux écoles
et salles d'asile de la rue du Faubourg-Saint- Honoré, de la rue du Re-
nard-Saint-Méry, et de la rue des Blancs-Manteaux. L'administration a
pris à la charge de la ville de Paris l'école primaire supérieure, fondée
par M. Goubaux, rue Blanche, et elle s'occupe de notables réparations
et améliorations dans les collèges Louis-le-Grand, Henri IV, Bourbon et
Rollin.
Ports et bassin de la Seine.
« Enfin, messieurs, parmi les travaux qui intéressent plus particuliè-
rement le commerce de Paris, nous devons vous rappeler oeux qui ont
pour but d'améliorer ou d'achever nos ports.
« Toute la partie qui s'étend entre le pont d'Arcole et le pont Marie
vient d'être terminée, et peut être livrée immédiatement au commerce,
à l'exception d'une vingtaine de mètres superficiels, où l'on a conservé
quelques arbres qui doivent disparaître par la suite, si l'expérience dé-
montre qu'ils sont nuisibles au service.
«On continue aussi à travailler au port de l'île Louvier. On s'occupe
aussi de la construction d'un bas-port dans le bassin de l'Arsenal. Enfin,
la ville sollicite avec instance le concours du gouvernement pour l'achè-
vement des bas-ports de l'hôpital et du quai .Malaquais, dont elle a voté
l'exécution en ce qui la concerne. D'un autre côté, l'étude des projets
pour l'amélioration de la navigation de la Seine dans Paris est très-
avancée; ces projets viennent d'être approuvés par le conseil général
des Ponls-et-Chaussées; ils seront soumis incessamment à l'autorité
supérieure, qui pourra faire dans sa prochaine session ses dis|)Ositions
pour obtenir les crédits nécessaires à l'exécution des travaux.
Voies de communicalion , rues, pavage.
« Les voies de communication du département de la Seine reçoivent
tous les développements que peuvent exiger les besoins de la circula-
lion générale cl de diverses localités. C'est dans ce but, et pénétré de la
nécessité de compléter ces grands travaux, que le conseil général de la
Seine vient de voter sa prolongation d'une imposition spéciale qui de-
vait expirer en 1834, et qui sera continuée encore pendant six années.
« Dans l'enceinte de Paris, la nouvelle disposition des rues bombées,
si intéressante pour l'assainissement de la voie publique cl la circula-
tion des voitures, et qui se lie au système général d'égouts et de trot-
toirs, s'élend de plus en plus. Nous comptons 230 kilomètres de rues
ainsi convertis en chaussées bombées, ld5 kilomètres d'égouts et loO
kilomètres de trottoirs. Au nombre des travaux de ce genre qui sont en
cours d'exécution, on doit citer ceux de k rue du Faubourg-Sainl-.Mar-
tm, qui consistent dans le remaniement général du pavé avec adoucisse-
ment de sa pente, larges trottoirs et plantations, et qui sont évalués
à 440 000 fr., sur lesquels les propriétaires riverains ont concouru pour
une somme de 100 000 fr.; grand et utile exemple qui vient d'être imité
pour les trottoirs des Champs-Elysées, auxquels les propriétaires de l'a-
venue, depuis le rond-point jusqu'à la barrière, ont contribué aussi pour
une somme importante.
« Quant aux essais de perfectionnement dans le système du pavage
des rues, ceux qui ont été tentés dans les rues Montmartre et Saint-
Honoré, et qui se composent de pavés longs, tajilés avec soin, n'ont
soulevé d'objections que sous le rapport de la dépense de premier éta-
blissement, qui est plus considérable. Mais il est certain que l'entretien
en sera moins coûteux, et que la circulation en sera beaucoup plus fa-
cile.
Résumé.
«Tels ont été, messieurs, les travaux les plus importants de l'admi-
nistration municipale pendant l'anné qui vient de s'écouler. Sa con-
duite, comme vous le voyez, est réglée sur ses devoirs, ei son respect
pour les droits comme pour les intérêts de tous.
«C'est l'administration du père de famille qui cherche à améliorer
sans cesse, contente si chaque jour elle fait un peu de bien, et qui n'ou-
blie jamais que les mêmes principes qui président à la conduite des
grandes fortunes parlicidières doivent, sous plusieurs rapports, se re-
trouver dans la direction des finances de la ville qui a l)esoiri de crédit,
de loyauté, d'exactitude et de prévoyance poar tous les événemenU.
Heureuse mille fois la ville de Paris de pouvoir développer les immenses
ressources de son commerce et de sa puissance industrielle, elle se doit
à l'empire des lois et de sa liberté, à la marche des institutions fondées
en juillet, et surtout au monarque qui dirige avec tant de sagesse les
destinées de la France. »
— ".*nT»0-i
BIBLIOGRAPHIE .
ViGNOLE Centésimal,
Pat H. r.-i. kaARD. iitJuttcU.
Peu d'hommes ont été plus prônés et plus décriés que Jacques Ba-
rozzio, dit de Vignole, du lieu de sa naissance. Après avoir été encensé
durant deux siècles sous le vocable de législateur de l'archileelure, on
a vu tout à coup, de nos jours, jîcs autels abandonnés, ses lois tom-
bées en désuétude, et son nom même livré au ridicule parmi les ar-
tistes, lui, l'un dfs ariisies les plus féconds de la renaissance italienne.
Gloire et mépris, c'est surtout son livre sur les Ordres qui lui a valu
l'une cl l'autre ; mais celte gloire était légitime, ei pourtant ce mépris
s'explique. Mettons pour aujourd'hui l'artiste hors de cause, pour ne
parler que du législateur.
A l'époque où vivait Vignole, tous les regards étaient tournés vers
l'antique ; l'art antique seul avait ses droits bien établis dans la cilé des
papes, dans les somptueux palais des prélats cl des princes de l'Italie.
Les architectes dirigeaient exclusivement leurs éiudes vers l'antiquité
romaine, la seule, il faut le dire, qu'il lût à leur portée d'étudier. La
Rome d'Auguste sortait du sol fouillé de la Rome moderne, mais mutilée,
par fragments; et ceux d'ailleurs qui voulaient apprendre ce bel art
de bâtir n'étaient pas tous à Rome, n'avaient pas tous sous la main des
débris de monuments antiques dont ils pussent mesurer les proportions.
Faire à cette époque un livre qui donnât pour chacun des cinq or-
dres usités des mesures relevées d'après ces fragments, et modifiées ou
37
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
38
justifiées d'après d'aulrcs fragments, en un mot, une moyenne propor-
tionnelle entre tous les détails de même nature appartenant à un
même ordre , exprimer cette moyenne par une unité qui pût être com-
prise dans tous les pays, c'était rendre à l'art un service immense, in-
contestable; c'est ce service-là que Vignole a rendu.
Spécialement chargé, par l'Académie d'Architecture qui venait de se
fonder à Rome , de relever pour elle les monuments antiques épars sur
le sol romain ; nourri de bonne heure dans les discussions d'art ; obser-
vateur calme et judicieux d'ailleurs, à qui une longue pratique avait
rendu familières toutes les proportions des divers ordres, nul peut-
être, plus que Vignole, n'était capable de faire le livre qu'il a fait.
Mais, nous l'avons dit, Barozzio n'avait eu entre les branches de son
compas que les débris de l'art romain ; et quels débris, si on les compare
à tous ceux que nous pouvons mesurer aujourd'hui! Depuis lors, sans
parler des monuments étrusques et de tant d'autres qui sont "sortis
peu à peu de leurs tombes, nous avons trouvé deux villes entières dont les
splendeurs couvaient depuis dix-sept siècles sous la cendre du Vésuve.
Depuis lors aussi, un jour est venu où nous avons découvert la Grèce, ce
jardin des Hespérides qu'on savait bien, au temps de Vignole, renfermer
des trésors, mais dont le Turc s'était constitué le dragon et en défendait
impitoyablement l'accès. Faut-il donc s'étonner que Vignole n'ait pas
tenu compte de ce qu'il ne connaissait pas, de ce qu'il ne pouvait pas
connaître, et qu'il ait fait des lois différentes de celles qui ont dû pré-
sider à la construction des plus beaux monuments de l'antiquité?
Si, à ces causes de désuétude, nous ajoutons l'abus que la spécula-
tion et l'ignorance ont fait d'un nom illustre, en publiant sous le titre
classique de Vignotes une multitude de recueils indigestes où la faus-
seté des proportions rivalisait avec la grossièreté des profils et le mau-
vais goût des ornements, nous comprendrons facilement le mépris où
ce nom est tombé chez ceux-là précisément dont la nature artistique
et le goût développé par la vue des formes simples et pures de l'anti-
quité eussent été le plus sympathiques au mérite de Vignole, au temps où
celui-ci vécut. Si spolier un homme de ses œuvres pour s'en attribuer
le mérite est une action criminelle, combien n'est-il pas plus criminel
encore de prostituer un beau nom pour l'afficher au front d'une œuvre
mauvaise, ainsi qu'à un pilori de honte et de Uétrissure?
Mais hâtons-nous de prévenir une erreur imminente, et d'informer
nos lecteurs que le livre de M. Renard-Perrin n'est pas de ceux qui
feront tort à l'illustre Vignole. M. Renard-Perrin a reproduit, sans
prendre sur lui de les modifier, les proportions et les formes de l'archi-
tecte du palais Caprarnle, et il a traduit en français le texte italien
qui est consacré à l'explication des planches. Mais là ne s'est pas
bornée sa traduction : il a traduit aussi la mesure universelle de Vi-
gnole, le module, en langage décimal, si toutefois il nous est permis de
parler ainsi; et c'est là ce (|ui distingue particulièrement le livre de
.M. Renard-Perrin de tous les livres de même espèce publiés jusqu'à ce
jour.
Vignole, on le sait, avait divisé son module, c'est-à-dire le demi-
diamètre de l'extrémité inférieure du fût de la colonne, en douze parties
pour les ordres toscan et dorique, et en dix-huit pour les ordres ioni-
que, corinthien et composite. Ces parties, souvent trop grandes pour
mesurer les membres les plus délicats, étaient elles-mêmes divisées en
fractions duodécimales, système alors généralement admis pour tou-
tes les divisions de mesures. Le système de division duodécimale avait
certainement des avantages réels, comme par exemple de permettre
un grand nombre de subdivisions sans tomber dans des fractions de
fraction. Mais sans discuter ici les raisons qui pourraient justifier
noire prédilection pour le système duodécimal plutôt que pour le
système décimal, il nous suffira de remarquer qu'une fois ce dernier
admis et surtout commandé comme mesure générale, il n'y avait plus
à balancer; il devait être appliqué aux proportions des ordres aussi
bien qu'aux autres parties de l'architecture ; mais remarquons en
même temps que, dans cette circonstance, il n'y a pas un seul avantage
résultant de son emploi qui n'eût pu aus-i bien résulter de l'emploi
du système duodécimal, dans l'hypothèse, bien entendu, que dans ce
dernier cas on ferait usage de douze chiffres et du zéro, au liea de neuf
chiffres et du zéro. C'est ce qui nous empêche d'attribuer exclusi-
vement au nouveau système, ainsi que l'a fait M. Renard-Perrin,
tous les avantages qui résultent de sa méthode. En effet, voici ces
avantages : 1" unité de mesure pour tous les ordres; 2* suppression
des anciennes fractions de parties, et par conséquent des longues opé-
rations qu'elles traînaient à leur suite; 3" faculté que possèdent les
quantités décimales, et, par suite, centésimales, d'exprimer instanta-
nément par leur nom le rapport de la partie fractionnaire avec l'unité ;
4" l'emploi possible des divisions de la mesure légale (du mètre) pour
meitre un ordre en proportion. Nous le demandons, lequel de ces
quatre avantages n'eût été aussi facilement obtenu à l'aide d'un système
duodécimal bien et complètement organisé? Mais le nouveau système
présente une unité d'ensemble que n'offraient certainement pas les à'm-
sions duodécimales combinées avec l'emploi d'un système de numération
décimale ; d'ailleurs, le système décimal, nous le répétons, est aujourd'hui
obligatoire de par la loi. Cette dernière raison, bien que l'obligation ne
s'étende pas explicitement jusqu'au module, est pour nous tout à fait
concluante, en raison des avantages qui découlent toujours de l'unité
de système, et des remerciements sont dus à coup sûr à M. Renard-
Peirin pour les efforts qu'il a faits en vue d'atteindre cette unité.
M. Renard-Perrin divise donc le module en cent parties égales qui
se trouveront par cela même proportionnellement égales aux divisions du
mèlre, et, partant de ce principe, il cote toutes les planches de Vignole
avec un module centésimal. A cela il ajoute, dans des tableaux fort
bien faits et fort commodes, toutes les mesures des ensembles et des
détails donnés par Vignole pour chaque ordre, avec leurs traductions
en divisions centésimales en regard ; de sorte qu'à la rigueur, et pour les
ornements exceptés, on pourrait, à l'aide de ces tableaux, s'épargner
l'usage des planches. A cet effet, et pour faciliter l'emploi de ces ta-
bleaux, il donne un nouveau procédé qui permet de mettre en peu de
temps un ordre en proportion. Ce procédé, dont nous ne pourrions
guère donner ici que la théorie, repose sur les propriétés que possè-
dent les triangles d'avoir leurs deux côtés coupés en parties propor-
tionnellement égales par toutes les lignes menées parallèlement à leur
base.
Cette méthode, à la fois prompte et d'une précision mathématique.
suffirait à elle seule pour établir la supériorité de ce nouveau Vignole
sur tous les autres. M. Renard-Perrin complète aussi le tracé géomé-
trique de la volute ionique, dont Vignole n'avait indiqué que la première
révolution, et il termine son livre en donnant une échelle des dixmes
appliquée au module.
Le Vignole centésimal est un livre fort utile qui lèvera pour l'élève
un nombre infini de difficultés que le mélange des systèmes ancien et
nouveau n'eût pas manqué de jeter sur sa route. L'étude de l'architec-
ture est déjà assez complexe, assez universelle, pourrions-nous dire,
pour (juc les hommes de mérite s'efforcent d'en aplanir les voies. La
stricte obéissance aux lois de Vignole n'est point chose à craindre pour
les jeunes élèves, et ces lois peuvent fort bien servir de guide aux in-
dustriels, qui commettraient, sans ce premier secours, des fautes dont
l'énorniilé ne manquerait pas de corrompre promptement le goût des
classes ouvrières, et on verrait bientôt partout le caprice se substituer
à la règle. Aussi, tout en désirant voir promulguer un jour un code
plus complet et plus juste que celui du législateur italien, nous croyons
qu'il peut encore, même aujourd'hui, servir, sinon de type, au moins de
règle générale.
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
to
Résumé Statistique
de la GompMbllllé de la ville de Paris, depalR 17»7 Jasqa'i J8»0
Inclosivemeui ,
Par M. MARTIN SMUIMÉOII.
Les personnes qui sentent comme nous la haute direction que doivent
imprimer, par son exemple, le département de la Seine et la commune
de Paris aux autres départements et aux autres communes de France,
comprendront tout l'intérêt qui s'attache à la publication de l'ouvrage
de M. F. -P. -Martin Saint-Léon : Résumé slalislique des recettes et des
dépenses de la ville de Paris pendant une période de quarante-quatre
ans, de 1797 à 1840 inclusivement (1).
M. Martin Saint-Léon avait déjà publié en 1833 un résumé des re-
cettes et dépenses de la ville de Paris pendant trente-trois années
(de 1797 à 1850). travail qui avait obtenu une mention honorable de
l'Académie des Sciences. (Séance du 8 décembre 1834.)
La nouvelle publication de M. Saint-Léon est encore plus importante
que sa première , car non-seulement elle donne les résultats des dix
années écoulées, de 1831 à 1840, mais encore l'auteur a fait suivre
chaque chapitre de notes explicatives d'un très-grand intérêt , qui don-
nent une idée aussi exacte que possible des rouages administratifs de
la ville de Paris.
Les personnes qui connaissent la nouvelle méthode de comptabilité
adoptée par la ville, conformément aux différentes instructions minis-
térielles, et l'ordonnance royale du 1" mars 18.35, relative aux comptes
des communes, sauront gré à M. Saint-Léon d'avoir adopté un système
uniforme, moins propre peut-être à faciliter ce travail de contrôle, qui
consiste à s'assurer si chaque allocation a bien reçu l'emploi pour lequel
elle avait été votée , mais beaucoup plus commode à coup sûr pour
(1) Chez P. Dupont, rue de Grenelle-Sl-Honoré, 55.
faire des études sur les dépenses elTectnées aux dilTérents chapitres
du budget communal ; études si nécessaires pour s'éclairer sur l'impor-
tance relative de ces chapitres, et de nature à assurer dans l'avenir l'em-
ploi le plus rationnel des revenus de la ville.
L'auteur a eu aussi l'attention de joindre aux tableaux des dépenses
des tableaux dans lesquels est marquée la proportion de toutes les dé-
penses principales par rapport à la dépense totale, travail qui rend ex-
trêmement facile la comparaison des ilépenses faites pour un même
objet à différentes périodes.
Veut-on savoir, parexemple,dansquelle proportion de la dépense totale
se trouve celle relative aux travaux d'architecture pour les édifices des
cultes pendan t les deux périodes de 1821 il 1830et de 1831 à 1840?Ontrou-
2-243
vcraque, dansia première période, cestravauxentrentpourr--—— de la
lUI)t/00
dépense totale, tandis que, pendant la deuxième période, ilsnesontquede
817
100000'
Veut-on savoir les dépenses de la préfecture de police? On
trouvera qu'elles ont été pendant la première époque de
15956
1000(10
et pendant la deuxième de
6921
etc., etc.
100000
Nous aurons peut-être occasion de revenir sur l'important travail
de M. Martin Saint-Léon.
Panorama D''ÉGypTE et de Nubie ,
Pv IL H. fillAO, otliilitii.
Nous avons eu déjà l'occasion, il y a trois ans ( voy. vol. II. cul. 337 ),
d'appeler l'attention de nos lecteurs sur le bel ouvrape que M. Il Ho-
reau publie sur l'Egypte cl la Nubie.
Vue intérieure de la mosquée du Morislan au Kaire.
41
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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Depuis lors, nous avons vu, dans une séricdc trois planches que l'on
peut juxtaposer, le Kaire se dérouler à nos yeux, le Kaire tout entier,
avec ses minarets, ses mosquées, ses tombeaux, sa grande citadelle;
puis sont venus les détails, la vue de la grande rue, avec ses maisons
bizarres aux couleurs variées, la mosquée du sultan el Moyed, celle du
A/orisian, dont nous donnons ci-conlre une vue intérieure, etc.
Plus loin, nous quittons la ville des vivants pour visiter celle des
morts, nous remontons jusqu'à sa source le fleuve du passé : nous
sommes au pied du monument le plus élevé, sinon le plus ancien du
inonde, de la fameuse pyramide de Gyseli, dont la construction est at-
iribuée par Hérodote à Chéops, premier roi de la quatrième dynastie.
Puis viennent les autres pyramides, ces fastueux tombeaux qui ont
traversé plus de quarante siècles. Là-bas, c'est la place où fut Mem-
phis; il ne reste de celle grande el fameuse cité qu'une seule pierre ;
mais celte pierre, qui ait mètres 50 centimètres de longueur, repré-
sente un de ses plus fameux rois, Rhamsès II. Pour aller aux ruines de
Tbèbes, la ville aux cent portes, H. H. Horeau passe par Beni-Hassan,
près dui|uel il dessine les tombeaux creusés dans le roc de l'ancienne
Bubasle, el plus loin le célèbre temple de Denderah, construit en grès
et commencé par Cléopàlrc. Ici nous sommes à Thèbes : voilà Karnac,
voilà Luxor, avec leurs portes triomphales, leurs avenues plantées de
sphinx, leurs pylônes, leurs obélisques, leurs statues gigantesques, la
grande salle hyposlyle, dont on voit ci-dessous la vue générale; puis
la ville qui sort en partie de ses ruines et qui vient ranger ses temples
/IkTITEUJ! i» m
Grande salle hyposljle de Karnac.
elses palais devant les yeux du lecteur. M. H. Horeau en est là de sa
publication, et ce qui en a paru nous fait vivement désirer d'en voir
bientôt mettre au jour la suite.
PUITS DE GB.ENEX.I.E.
Manière de se débarrasser des Sables qvi en trouçlent
LES Eaux.
M. Leforl, ingénieur des eaux de Paris, a communiqué à l'Académie
des Sciences, le 8 janvier dernier, une note par laquelle il donne avis
que les eaux du puits artésien de Grenelle sont déjà distribuées dans
plusieurs fontaines du faubourg Saint-Jacques. Une distribution géné-
rale dans tous les quartiers de la rive gauche aura lieu lorsque les réser-
voirs seront terminés, el ils n'attendent plus que leur enduit.
.M. Leforl annonce cnsuile que les eaux de cette source ont été
ironblées dans le conranl de décembre dernier. Sans attribuer po-
sitivement ce phénomène aux secousses du tremblement de terre qui
s'est fait soniiren Normandie vers le milieu de ce mois, il fait néan-
moins ressortir la coïncidence de ces deux événements, qui se sont
suivis de près. M. Arago pense que la perturbation survenue dans la
limpidité des eaux du puits de Grenelle quelques jours après le trem-
blement de terre observé en Normandie , peut très-bien être la consé-
quence de ce grand phénomène de la nature, dont les secousses auront
détaché une certaine quantité de terre et de sable des parois des ca-
naux souterrains qui alimentent le puits de Grenelle. On a remarqué
que les eaux des sources se troublaient presque toujours à la suite des
iremblements de terre dans les'conlrées où ils s'étaient fait sentir, no-
tamment lors du grand tremblement de terre qui dévasta Lisbonne.
S'il survenait souvent de semblables troubles dans leSeaux du puits
de Grenelle, ou bien s'ils duraient longtemps, il serait à craindre que
les tuyaux de conduite fussent bientôt engorgés par le dépôt des terres
et des sables en suspension dans l'eau. Pour prévenir cet inconvénient.
M. Leforl a fait établir, près du tube ascensionnel, une cuvette dis-
posée pour recevoir l'eau à sa sortie du tube. L'eau s'échappe de
celte cuvette par un écoulement de superficie. La cuvette est équilibrée
par des conlre-poids, de manière à lai faire conserver sa position nor-
male tiint que les eaux gardent leur limpidité; mais aussitôt qu'elles se
troublent, leur pesanteur spécifique augmente à cause des sables et des
terres qu'elles charrient; l'équilibre se trouvant alors rompu, la cuvette
exécute un mouveihenl de bascule el fait ouvrir un orifice de décharge
qui donne à l'instant issue à l'eau du puits dans l'égout de l'abaiioir.
k3
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURMCS.
L'eau cesse alors de couler dans les tuyaux de conduite jusqu'à ce que,
les eaux ayant recouvré leur limpidité, la cuvelte reprend sa position
normale, et le service des eaux est remis en activité. Avant l'établisse-
ment de la cuvette, c'était un homme qui en remplissait les fonctions,
mais avec moins de régularité; car si l'eau se troublait pendant la nuit,
le gardien ne pouvait en dire averti sur-le-champ.
Ce moyen est très-iiigénicux sans doute, mais il a le très-grave incon-
vénient de priver d'eau plusieurs quartiers de la ville pendant un temps
illimité; car les troubles peuvent fort bien durer plusieurs semaines.
Ne vaudrait-il pas mieux construire h proximité du puits artésien une
citerne d'épuration analogue à celles dont les Romains munissaient la
plupart de leurs aqueducs? On ferait passer dans cette citerne toute la
m;isse d'eau fournie par le puits ; elle serait combinée de manière que
la vitesse de l'eau serait réduite à un état voisin de la stagnation, et don-
nerait aux matières tenues en suspension le temps de se déposer. Sa
capacité serait proportionnée à la quantité maximum de dépôt fournie
dans un temps donné et démontrée par l'expérience. Si cette quantité
était telle qu'on fut obligé de donner à la citerne des dimensions exor-
bitantes, il vaudrait mieux faire alors deux citernes jumelles dont l'une
fonctionnerait pendant qu'on curerait l'autre, et vice versa. Ou bien en-
core on pourrait disposer le fond de chaque division de la citerne en
pente, en forme d'entonnoir à un ou plusieurs compartiments, munis
chacun d'une douille recourbée, dont l'ouverture serait fermée par un
obturateur à vis de pression, qu'on ouvrirait de temps en temps pour
faire évacuer le sable.
Si la ténuité des matières en suspension dans l'eau était telle qu'elles
ne se déposassent pas toutes dans la citerne, il y aurait peu de probabilité
que le surplus se déposât dans les tuyaux. Si cependant on s'apercevait
qu'il s'y fit quelque léger dépôt, il serait facile de l'expulser en lâchant
dans les conduites un contre-courant partant des réservoirs et descen-
dant vers la source, en ouvrant la décharge de l'abattoir. Cette opéra-
tion se ferait pendant la nuit, et le service des eaux n'en souffrirait pas.
Nous savons que la grande pression qu'on aurait à supporter rendrait
assez difficile l'établissement d'une citerne d'épuraiion en maçonnerie,
mais on pourrait la faire en fonte, capable de supporter trois ou quatre
atmosphères dç pression (I).
H. JANNIARD, architecte.
ANAIiTSE DE POTERIES DIVERSES ,
Paru. BIKTHIEK.iDjéiiiior dis oiiw.
( Elirait des Annales des Mines. )
Le principal objet de cet examen a été de rechercher quelle était la
nature de la matière colorante. Les échantillons de poteries dont j'ai
pu disposer m'ont été remis par M. Brongniari, et provenaient de la
collection dejjf manufacture royale de Sèvres.
Poterie Étrusque.
Fragment de vase épais de quelques millimètres, orné de reliefs peu
saillants. Sa pâte est d'un gris noir, mais on y dislingue une multitude
de petits grains blancs ; à la surface, la couleur est uniforme et sans
taches blanches. Le fragment ne s'est pas délayé dans l'eau, mais sa
poussière a fait pâte au bout d'un certain temps. Lorsqu'on soumet
cette poussière à la lévigation, on en retire une quantité considérable
de sable quartzeux.
Par calcination et grillage, cette poterie, réduite en poudre fine, perd
0.11 de son poids, et devient d'un rouge de brique peu foncé en s'ag-
glutinant sensiblement. Quand on la traite par l'acide murialique, il se
manifeste une légère effervescence, et il se dissout de l'oxyde de fer,
un peu d'alumine et un peu de carbonate de chaux. Le résidu est d'un
gris noir; il perd 0.03 de son poids par le grillage et devient parfaite-
iiienl blanc, ce qui prouve que sa matière colorante est due au char-
bon. La proportion de celui-ci peut être évaluée approximativement à
0.01. L'analyse donne :
Oxyde de fer et alumine 0.14
Carbonate de chaux o.Ol
Charbon (environ) o.Ol
Sable et argile 0.7*
Eau combinée à l'argile et au fer 0.10
d.OO
(1) On sait que l'élévation de la colonne d'eau du puits de Grenelle au-des-
sus du sol est d'environ 30 mètres, ce qui équivaut à la pression de trois at-
mosphères.
Cette poterie a dû être fortement desséchée, mais non enite.
POTERIB G.U.LO-ROXAINE.
Cette poterie a été trouvée à NoyelIcs-sur-Mer (département de la
Somme). C'est un fragment du bord arrondi d'un vase, et épais d'en-
viron deux centimètres. La pâte paraît être homogène à l'œil nu, ou du
moins on n'y aperçoit que de très-petius points blancs; elle est grenue
et d'un noir mat.
Calcinée dans un creuset couvert, elle perd 0.8 de son poids et reste
noire; ensuite, par le grillage, elle ne diminue presque pas de poids et
prend seulement une teinte qui lire sur le brun. Traitée par l'acide
muriatique bouillant, avant d'avoir été calcinée, il se dissout 0.15d'alu-
raine colorée parde l'oxyde de fer, et environ 0.1 1 de carbonate de chaux .
Le résidu desséché pèse 0.80; il est noir, mais par le grillage il se déco-
lore complètement, quoique lentement, et le résidu est parfaitement hiani.
La matière colorante est donc charbonneuse, mais de diflicile combus-
tion. La perte est de 0.07, mais cette perte comprend l'eau combinée
à l'argile; on n'en a pas déterminé la proportion. L'analyse a donné :
Alumine et oxyde de fer solubles 0.15
Matières terreuses insolubles (».73
Carbonate de chaux 0.01
Eau et charbon 0.05
1.00
Poterie de l'Ouio (Amérique).
Fragment de vase arrondi de quelques millimètres d'épaisseur. Sa
pâte est d'un gris noir foncé, grenue et molle, et elle est mouchetée
cà et là de points blancs plus ou moins gros; sa poussière est de cou-
leur cendrée.
Par calcination elle perd 0.10 de son poids, et elle devient d'un
rouge brique peu foncé. Lorsqu'on la traite avant calcination par l'a-
cide muriatique, il y a une effervescence assez vive, et il se dissout 0.1 1
de carbonate de chaux et 0.14 d'oxyde de manganèse, mêlé d'oxyde de
fer et d'un peu d'alumine. Le résidu desséché est dun gris noir; quand
on le grille après l'avoir fortement desséché, il perd une portion de
son poids qui revient à 0.05 du poids total de la poterie. L'analyse
donne :
Carbonate de chaux 0.11
Oxydes de manganèse et de fer et alumine 0.14
Argile et sable 0.70
Eau et charbon , ." 0.05
1.00
kb
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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POTEBIE MODERNE DU HaVRE.
Fragment de pipe de la manufacture de M. Ledemandé. Sa pâle est
parfaitement homogène, à cassure grenue presque unie et noire.
Par calcinaiion et grillage, cette poterie devient blanclie et perd
0.033 de son poids. Traitée par l'acide muriatique avant calcinaiion, il
se dissout 0.17 d'alumine, légèrement colorée par de l'oxyde de fer, et,
en outre, une trace de carbonate de chaux. Le résidu est d'un noir
grisâtre; après qu'il a été desséché à la chaleur sombre, il pèse 0.78 ;
ensuite, par le grillage, il se décolore complètement, et il se réduit à
0.77. La perle 0.01 représente la proportion du charbon ; mais cette
proportion doit être un minimum, parce que, comme ce charbon est
très-combustible, il est possible qu'il s'en brûle une petite quantité
pendant la calcinaiion. L'analyse a donné :
Alumine soluble 0.170
Argile insoluble 0.780
Charbon (environ) 0.010
Eau 0.025
0.985
Celte poterie est très-bien fabriquée; elle a dû être soumise à une
véritable cuisson, à l'abri du contact de l'air.
DU COURS BISANirUEI. DE M. CHETHEUXi
SUR LA LOI DC CONTRASTE SIMULTANÉ DES COULEURS.
Dans le premier volume de cette Revxie, nous avons rendu compte
du livre de M. Chevreul sur la loi du contraste simultané des couleurs.
Nous revenons aujourd'hui sur les travaux de ce savant professeur, à
l'occasion des leçons publiques qu'il fait, tous les deux ans, dans une
des salles de l'établissement des Gobelins.
Nous avons suivi assidûment les séances du cours que M. Chevreul
vient de terminer, et nous nous faisons un devoir de communiquer à
nos lecteurs une remarque pénible que nous y avons faite. En vain nos
regards ont-ils cherché les peintres et les architectes parmi les qua-
rante ou cinquante auditeurs qui venaient écouler les leçons de l'habile
observateur. A quoi attribuer cette absence des artistes?
M. Chevreul, membre de l'Académie des Sciences, administrateur
du Jardin du Roi, professeur de chimie appliquée à la teinture, est
connu dans le monde savant, mais ses travaux sur la loi du contraste
des couleurs n'ont pas encore brisé la cloison qui sépare le monde
savant du monde artistique, et l'artiste est resté jusqu'aujourd'hui à
peu près insensible aux avances que la science lui lait.
Puis lesjournauxqui se donnent pour mission de tenir les artistes au
courant des choses qui les intéressent, gardent à l'égard de M. Chevreul
un silence dont nous avons peine à nous rendre compte. Quoi qu'il en
soit, il résulte de celte apparente indillérence des organes de la presse,
que les cours de M. Chevreul se font en quelque sorte à huis clos, et
que ceux là à qui il pourrait venir le désir d'y assister ne saventsouvenl
ni où ni quand ce cours a lieu.
L'absence de renseignements, ou, ce qui est pire, des renseignements
inexacts ont fait croire aux artistes que les leçons de M. Chevreul ne
s'adressaient (|u'aux indu.slriels, aux fabricants de papiers peints, aux
tapissiers, aux brodeurs, aux teinturiers, etc. Nous avons à cœur de
réparer une erreur qui ressemble de si près à une injustice.
Les travaux de M. Chevreul sur les couleurs s'adressent avant tout
aux artistes, et, ceux de nos lecteurs qui ont pris connaissance du tra-
vail publié par nous en 18'i0 sur ce sujet en conviendront, les lois que
M. Chevreul enseigne aux Gobelins sont indispensables aux peintres.
indispensables aussi à rarcbiteclc, qui, faute de cette science, prodigue
bien souvent beaucoup d'argent pour ne produire qu'un médiocre ou un
mauvais effet.
M. Chevreul, dans son cours, enseigne à l'artiste, par des expériences
nombreuses, toutes les modifications qup les couleurs exercent les unes
sur les autres, soit qu'on les mélange, soit qu'on les juxtapose. Au
moyen d'une table d'une construction aussi facile qu'ingénieuse, il rap-
pelle au peintre tous les phénomènes de la coloration; et la théorie est
si simple en elle-même qu'il suffit au professeur de trois leçons pour en
compléter la démonstration. Puis il passe à l'examen de toutes les ap-
plications que l'on peut faire des lois du contraste, dans l'architecture,
pour la décoration extérieure et intérieure des édifices; il s'étend sur
le choix, la répartition des objets colorés qui servent à cette décora-
tion, tels que les vitraux, les peintures, les tapisseries, les objelsd'ameu-
blement, etc., etc. M. Chevreul applique ensuite sa théorie à la jarrfi-
nique, ou art de créer et de disposer les mas!-es de verdure dans les
jardins, de distribuer les fleurs, etc., d'après leurs diverses couleurs.
Arrivant à la peinture, M. Chevreul passe en revue les différentes ap-
plications qu'on peut faire de ces lois, depuis la peinture monumentale,
la grande peinture, jusqu'aux papiers peints; rien n'échappe à la sagacité
du professeur, ni le costume d'uniforme pour les troupes, ni celui de
fantaisie pour les femmes, ni les procédés tirés de la loi du contraste,
pour modifier à volonté les carnations. En un mot, la théorie du con-
traste est développée dans presque toutes ses applications.
Si ce cours est favorable aux industriels, à qui M. Chevreul indique
des procédés tendantà concilier la plus grande économie d'exécution et
de dépense avec une notable amélioration de produits et de prix, il n'est
pas moins précieux aux artistes, à qui il enseigne les loisfixes auxquelles
ils ont occasion de recourir à chaque instant; il leur apprend à se défier
des illusions d'optique; il leur enseigne ii contrôler les yeux du corps par
ceux de l'intelligence, et les fait arriver d'un bond à des résultats qu'ils
n'eussent peut-être jamais obtenus même par un long tâtonnement.
Unde nos plus importants foyers d'industrie, Lyon, a donné récem-
ment un honorableexemple aux autres villesde France en invitant M. Che-
vreul à y faire un cours, en vue de perfectionner l'industrie des étoffes.
Nous espérons bien que l'enseignement officieux et tout spontané que
M. Chevreul professe tous les deux ans au fond d'un des faubourgs de
Paris, deviendra bientôt un enseignement officiel, annuel et central. Il
n'est personne connaissant les utiles travaux de M. Chevreul, qui ne
désire leur voir prendre incessamment la place h laquelle ils ont droit
dans l'enseignement public des Beaux-.\rts.
CHRONIQUE..
SOMM.\IRE : Inaiiguralion de la Fontaisk-Moliki\k. — Travaux de bilumagc jui
Champs-Elysées. — Ponl-des-Arls.
Alors que tomes les villes en France et à l'étranger élèvent à l'envi
des monuments aux grands hommes qui ont l'ait luire sur elles quelques
rayons de leur gloire, il semblait que Paris seul voulût se soustraire à
ce noble enthousiasme, à ce mouvement spontané, et laisser dans un
oubli coupable les illustrations de son passé. Paris n'avait pas, il faut
l'avouer, pour dire au peuple et à l'étranger qu'il était né quelquefois
des hommes de génie dans son sein, un seul véritable monument, à
moins que l'on ne veuille considérer comme remplissant ce but les fi-
gures qui nichent dans la façade de l'Hôtel-de-Ville ou bien les sia-
ines de monarques que Ion voit galoper ou se croiser les bras sur
quelques places publiques. Sommes - nous plus riches aujourd'hui
qu'on a inauguré la Fonlaine-iloliére'! Pouvons -nous considérer
comme un monument et surtout comme un monument digne de
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REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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Molière, le frontispice de livre illustré quon a inauguré le 13 de ce
mois dans la rue de Richelieu.
L'inauguration de ce frontispice, — ce n'est pas nous, au moins, qui
invenlonsce mol ; il est emprunté tout entier à la louange que le journal
officiel le Moniteur a faite de la Fon<aîne-J»fo/!«re, — l'inauguration de ce
frontispice, disons-nous, a été faite avec une certaine pompe. On avait
tendu de velours rouge la maison où Molière mourut le 17 février 1673,
et qui s'élève presque en face de la fontaine; de nombreux gendarmes
interdisaient à la foule l'accès des alentours. A onze heures et demie,
un cortège composé du conseil municipal, des députés j|e la Seine, des
cinq Académies, de la commission de souscriplion, de gens de lettres,
d'auteurs dramatiques et d'arlisies de différents théâtres, est venu voir
tomber la toile grise qui cachait depuis plus de deux ans ce que, dans
noire naïveté, nous appelions encore il y a (|uinze jours le monument de
Molière ; puis, quatre discours ont été prononcés ; dans l'un il fui ques-
tion de l'élargissement de la voie publique: c'était celui de M. de Ram-
buteau ; le second faisait l'éloge de l'Académie Française : il était de
M. Etienne, l'académicien. M. Samson, du Théâtre-Français, est
venu ensuite parler du comédien. Quant au quatrième discours, il nous
a appris que, « grâce à Molière, la science était restée, et que le charlata-
nisme avait disparu. «L'orateur était M. Arago.
Une boîte en plomb, contenant les œuvres complètes de Molière et
quelques feuillets sur sa vie, a ensuite été déposée.... devinez où; je
vous le donne en mille. — Dans le piédestal, sans doute, dans le son-
bassement... — Vous n'y êtes pas : sous le trottoir '.'.'. — Nous n'avons
pas besoin défaire observer combien la place est heureusemcni choisie.
Les journaux artistiques et même politiques ont presque tous dit leur
mot sur la Fontaine-Molière; mais les uns' ont dit blanc, les autres noir.
Il serait assez curieux de rapprocher ici ces avis divers si messieurs les
critiques d'art ne s'étaient abstenus, suivant leur louable habitude, de
justifier leurs affirmations ou leurs négations par des arguments; il est
si commode en effet de dire : «Ceci est beau, cela est laid, » sans expo-
ser le pourquoi !
Nous voyons venir d'abord le Moniteur, qui proclame dans ses co-
lonnes oflicielles et parfois oflicieuses, que l'œuvre de M. Visconii est
un frontispice; — nous sommes complètement de son avis. L'Artiste,
lui, l'appelle un beau bahut flamand ! A la bonne heure ; M. Visconti
doit se trouver fier d'avoir mis le grand moraliste dans un beau
bahut flamand, et les souscripteurs doivent être bien heureux d'avoir
fait élever un meuble à la mémoire de Molière. Nous voulons bien ac-
corder » l'Artiste qu'il y ait dans le monumenf de M. Visconti quelque
chose d'un bahut, pourvu qu'il nous fasse grâce des deux épilhèles; car
nous ne voyons pas en quoi pourrait être beau ce mélange de lignes
sans unité, de colonnes qui ne portent rien, de piédestaux qui mon-
tent l'un sur l'autre. Quant à être flamand, c'est peut-être à cause
des chapiteaux italiens que l'Artiste lui a donné ce nom ; on avait pour-
tant pris le soin d'annoncer au public que M. Visconti s'était efforcé, —
qui l'eût crn"! d'imprimer à l'ensemble de la construction le caractère de
l'architecture du siècle de Louis XIV.
M. Pradier a orné chaque côté de la fontaine d'une figure de muse, que
l'on appelle, l'une muse grave, l'autre muse enjouée. Nous voudrions
bien savoir laquelle des deux est grave, laquelle des deux est enjouée.
Sur les pancartes que tiennent ces jeunes divinités nous lisons accou-
plés, d'un côté le Misanthrope et M de Pourceaugnac, de l'autre, le
Médecin malgré lui et VÉcole des Femmes. Est-ce Saganarelle qui est
grave ? est-ce le Misanhrope qui est léger ? Auquel croire ? Pour nous,
ces deux muses, puisque muse» il y a, nous ont paru toutes deux fort
enjouées, fort gaillardes même. Il faut avouer que M. Pradier pos-
sède à un haut degré le talent de prêter à ses femmes une forme
voluptueuse, et de faire, avec un ciseau d'une admirable facilité, de fort
jolies statuettes plus grandes que nature. Il est difficile de trouver
dans la réalité une étoffe plus moelleuse que les draperies de marbre de
M- Pradier.
Quant à Molière lui-même, il semble profondément affligé de la
niche qu'on lui a faite. Mais nous ne voulons pas empiéter ici sur le do-
maine des études esthétiques, réservé pour les colonnes plus graves de
la Revue; nous ne saurions nous empêcher d'ajouter, toutefois, que, si
M. Visconti a voulu, dans la Fontaine-Molière, nous présenter un fron-
tispice de son talent, nous avons tout lieu d'être inquiet surla beauté fu-
ture des pages à vignettes qu'il va étaler sur les parois de la cave fu-
nèbre qu'il creuse aux Invalides en l'honneur de Napoléon. La Fon-
taine-.Molière n'a pas coulé moins de 178,000 francs.
— On vient d'étendre dans les conlre-altées de Vavenue des Champi-
Élisées une couche de bitume large d'environ 3 mètres; c'est fort
bien. Mais il existe dans Paris une multitude de rues cl de ruelles
fangeuses trop étroites, bien souvent, pour livrer passage à une
voiture, et où le piéton ne se hasarde qu'en tremblant, tant le pavage
en est abrupte cl glissant, tant les immondices (|ui le convient rendent
ces voies impraticables, tant elles ressemblent, en un mot, à des tuyaux
d'égout plutôt qu'à des passages destinés à l'homme ! Il serait facile
pourtant de rendre cescloaques habitables. On pourrait daller ces ruelles
en bitume dans toute leur largeur et les transformer ainsi en espèces de
passages découverts, semblables aux lanes de Londres, dont l'accès
serait défendu aux voitures. En faisant exécuter un pareil travail, l'ad-
ministration rendrait, en attendant mieux, un grand et véritable service
aux quartiers du centre de Paris, où ces petites rues se croisent en tous
sens et à l'infini; c'est même là une chose de première nécessité
qui avait droit de passer avant le dallage des contre-allées des Champs-
Elysées.
Au rond-point, on a fait suivre complaisamment au sentier bi-
tumé la courbure des plantations, tandis que, pour couper court, le
piéton est obligé de traverser la boue épaisse et glissante de deux
chaussées dont les bas-côtés ne sont point pavés ; on eût bien pu
continuer le bitume en ligne droite en employant le système de
M. de Coulaine (I), dont on vient de faire l'essai à l'entrée de la rue
LafUtte, c'est-à-dire sur l'un des points les plus fréquentés de la ca-
pitale. Depuis six semaines environ qu'il est établi, cet essai ne pa-
rait pas avoir souffert aucune altération. Il est, dit-on, question d'ap-
pliquer ce système dans toutes les parliesdes Champs-Elysées qui étaient
auparavant macadamisées; et déjà dans l'avenue dite de Marigny, pa-
rallèle à la rue du Faubourg-Saintllonoré, on a préparé le cailloutis qui
doit recevoir le bitume.
— On réinstalle en ce moment sur le pont des Arts les candélabres
qu'on en avait enlevés pendant quelques jours pour les approprier à
l'éclairage au gaz. Enfin ce malheureux pont va donc sortir de sa trop
longue obscurité. On devrait bien aussi achever de renouveler les plan-
ches du tablier. L'an dernier, on avait donné pour cause à l'interruption
de ce travail indispensable, le manque de sapin convenable dans Paris
et l'impossibilité de le faire venir pendant l'hiver. Il y a plus d'un an de
cela; depuis lors, nous avons vieilli d'un printemps, d'un été, d'un
automne et presque de deux hivers, et le sapin n'est pas encore arrivé.
GÉSAB DALY,
Direcicur rédacteur en cher.
(1) Ce système a été décrit en détail dans le quatrième volume de cette
Revue, col. 300.
Paria. — Typographie Licrampe et Coiiip., rue Damielte, i.
.'Ù-I.s^ ('"J.-
■r ,v .'-.TraviUt^PuHu^ /'uru/ùj^ c/c fu/ ^tf/vAr/û N''~
' BtiuJiti iel
h'.fc: .
PLAN GENERAL DE LA VILLA PIA.
Revu^ û'^dc tArduùrciurc-a Ja rr^vaJix,Fuil,t^. Pan,, fiu^ rUFurstem^trç. N'i
m ^. FI l
, J -8û UCÂ.A^ diii:
VUE INTÉRIEURE DU VESTIBULE DE LA VILLA FIA.
(Rome).
49
REVUE DE L'ARCHITECTUHE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
so
-=^vï,^;g£^fcS^
L'ALHAMBRA.
Nous aurions voulu donner aujourd'hui le commencement de la
description de l'Alhambra, dont la vue générale est représentée
dans notre PL 3 ; mais la distribution des matières de ce numéro
de la Revue nous engage à remettre ce travail à une prochaine
livraison. La vue générale de l'Alhambra, que nous donnons PL 3,
et tous les autres dessins que nous donnerons plus tard de ce
merveilleux monument, et qui en reproduiront toutes les vues
principales, ainsi que des détails de sculpture très-curieux et
d'autres détails relatifs aux voûtes de cet étonnant monument,
sont dus au crayon de M. Owen Jones, architecte anglais, et in-
contestablement l'artiste qui a le plus sérieusement étudié le chef-
d'œuvre arabe.
M. Owen Jones a eu l'incroyable patience de prendre des em-
preintes, soit au moyen du moulage en plAtre, soit par le procédé
de l'estampage avec du papier non collé, de toutes les décorations
qui couvrent les parois de l'Alhambra. Le grand ouvrage in-folio
qu'il a publié sur l'Alhambra témoigne suffisamment, du reste, de
sentaient, de son courage et de son amour de l'art. Cet ouvrage doit
se composer de deux volumes grand in-folio ; il ne reste plus à pa-
raître que la seconde partie du deuxième volume. La première
partie du deuxième volume, qui nous est parvenue tout récem-
ment, est exclusivement consacrée à reproduire les détails les plus
intéressants de l'ornementation riche et variée que les artistes
arabes ont répandus avec profusion sur tous les murs de ce palais
de fées. Les détails reproduits en couleur et en or sont tantôt au
quart, tantôt à la moitié, et parfois de la grandeur même de l'exé-
cution.
Mais ce n'est pas dans cette partie de la Revue que nous devons
nous livrer à des descriptions bibliographiques; toutefois, comme,
nous devons à l'obligeance de M. Owen Jones de pouvoir donner
à nos lecteurs des dessins précis de l'Alhambra, il était juste de li-
vrer à l'appréciation de nos lecteurs les motifs de notre entière
confiance en ces documents.
DU COMITÉ HISTORIQUE DES ARTS ET MONUMENTS.
Les temps ne sont pas encore très-loin de nous où des savants et
des artistes illustres discutaient sur la question de savoir si les pro-
grès de la civilisation moderne étaient en effet réels. Les uns opi-
naient en faveur de l'état sauvage, d'autres soutenaient la supério-
rité des civilisations mi-barbares de l'antiquité, et un petit nombre
seulement s'attachaient à faire comprendre l'importance des con-
quêtes matérielles, morales et intellectuelles faites dans les derniers
siècles. Chacun se bornant à examiner une partie seulement de la
question, trouvait aisément à critiquer les théories de ses adversai-
res et à établir l'excellence de la sienne.
Les études historiques se font de nos jours d'une manière plus
philosophique; on comprend que chaque société a eu sa fonction
spéciale dans l'œuvre de progrès général opéré depuis l'existence
de l'homme par les efforts synergiques de l'humanité entière,
et on se garde de conclure de telle supériorité spéciale d'une so-
ciété sur une autre, à la supériorité absolue de celle-là sur celle-ci.
De ce que les Grecs, aux beaux temps de leur histoire, ont porté
dans certaines parties des arts libéraux un sentiment spécial dont
la puissance ne se fait plus reconnaître dans les œuvres de nos ar-
tistes modernes, chacun ne se hâte plus de conclure à la supério-
rité absolue des Grecs, même en matière d'art ; car il est des ex-
pressions admirables dans le langage des arts, que les artistes
européens du Moyen-Age, les Arabes, les Indiens, etc., ont su in-
ven!er, et dont les anciens n'ont même jamais soupçonné l'exis-
tence. Tl est vrai que pendant longtemps les critiques, les artistes
modernes et les archéologues, n'ont pas su apprécier ces merveil-
les qui étalaient cependant leurs mille beautés aux regards de tous;
c'est que l'habitude de conclure du particulier au général venait
encore ici troubler les regards : — les œuvres de l'antiquité étaient
belles, admirables ; donc les principes de l'art antique devaient
régir l'art lui-même, et cela sans égard aux circonstances si variées
de lieux, de temps et de mœurs; — de là les églises chrétiennes en
forme de temple, les barrières-temples, prisons-temples, hôpitaux-
temples, bourses-temples, etc., etc.
L'introduction de l'élément philosophique dans les travaux his-
toriques modernes a fait apporter un esprit moins étroit, moins
exclusif dans l'étude de l'histoire de l'art, et par suite dans la pra-
tique de l'art lui-même. Mais toute chose a sa contre-partie ; et
cette tendance à chercher dans les leçons de l'histoire un guide pour
déterminer la marche qu'il faut imprimer aux choses pratiques et
actuelles de la vie, rend plus important et plus indispensable que
jamais de bien connaître tous les faits historiques. La constatation
des faits est absolument nécessaire pour faire contre-poids aux
erreurs monstrueuses qu'on fait découler si fréquemment, s^it de
faits incorrects auxquels on applique des principes philosophiques
irréprochables en eux-mêmes, soit encore, et beaucoup plus sou-
vent, de faits mal étudiés et incrustés tant bien que mal dans un
système philosophique absurde, — erreurs qu'en France on formule
aussitôt en principes politiques ou sociaux, au grand danger du
repos et de l'intérêt publics. — Suivant nous donc, les études his-
toriques exercent une action très-prononcée surdes idées qui influent
puissamment sur la marche du gouvernement et de la société.
L'esprit philosophique se trouve aujourd'hui dans des condi-
tions de développement telles qu'il n'est pas besoin de s'inquiéter
sur son avenir; mais il importe plus que jamais d'étudier les fait»,
afin, précisément, de créer les conditions dans lesquelles cet esprit
philosophique puisse le mieux s'exercer au profit de la science et
de tous.
Il est évident que l'étude des archives historiques d'un grand
peuple ne saurait être l'œuvre d'une seule personne, ni même de
T. V. 4
51
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
mille personnes qui ne seraient pas organisées de manière à concou-
rir à l'accomplissement d'un même plan de travail. Aussi M. Gui-
zot, alors ministre de l'Instruction publique, proposa-t-il au roi la
création d'une commission qui serait chargée de diriger « le grand
travail d'une publication générale de tous les matériaux impor-
tants et encore inédits sur l'histoire de notre patrie. » Cette propo-
sition, faite le 31 décembre 1833, fut agréée le 18 juillet 1834. Les
membres de cette commission devaient surtout faire exécuter des
recherches dans les différentes collections et bibliothèques, et di-
riger le dépouillement des nombreux manuscrits qu'elles contien-
nent et qui recèlent le secret de tant d'événements encore impar-
faitement connus ou même complètement ignorés.
Mais l'histoire d'un pays ne se trouve pas tout entière dans les
manuscrits et les chroniques; la littérature, les arts, les édifices,
les médailles, etc., fournissent aussi des renseignements précieux
sur le passé, des renseignements auxquels nul autre genre de do-
cument ne saurait suppléer. M. Guizot comprit, dès l'origine, l'im-
portance des études de cet ordre; car, déjà en novembre 1834 (l),
il déclarait au roi que l'histoire des arts devait occuper une place
dans « le vaste ensemble des recherches qui embrassaient toutes
« les parties de l'existence et des destinées nationales. Aucune
a étude peut-être, ajoutait M. le ministre de l'Instruction publi-
« que , ne nous révèle plus vivement l'état social et le véritable
« esprit des générations passées, que celle de leurs monuments re-
« ligieux, civils, publics, domestiques; que celle des idées et des
« règles diverses qui ont présidé à leur construction ; l'étude, en
« un mot, de toutes les œuvres et de toutes les variations de l'ar-
« chitecture, qui est à la fois le commencement et le résumé de
« tous les arts.
« Je me propose, ajoutait M. Guizot, de faire incessamment
« commencer un travail considérable sur cette matière : je m'ap-
« pliquerai à faire dresser un inventaire complet, un catalogue
« descriptif et raisonné des monuments de tous les genres, de
« toutes les époques, qui ont existé ou existent encore sur le sol de
« la France. Un tel travail, en raison de sa nature spéciale, de
« son importance et de sa nouveauté, doit demeurer distinct des
« autres travaux historiques dont je viens d'entretenir Votre Ma-
« jesté; aussi mon intention est-elle d'en confier la direction à un
(i comité spécial, et d'en faire l'objet de mesures particulières que
(( j'aurai l'honneur de proposer à Votre Majesté. »
A la commission chargée de l'étude des documents écrits, il fal-
lut doue bien ajouter un comité spécialement chargé de diriger les
recherches archéologiques. Le 10 janvier 1835, M. Guizot créa
donc le comité « chargé de concourir, sous la présidence du minis-
tre, à la publication des monuments inédits des sciences et des
arts considérés dans leurs rapports avec l'histoire générale de la
France (2). »
Ce comité se subdivisa en deux sections ; l'une s'occupa de la
littérature, de la philosophie et des sciences, et l'autre se con-
sacra exclusivement aux arts.
Il paraîtrait que cette organisation rencontra quelques obstacles
dans la pratique, et que la section du Sous-Comité des Arts se trouva
trop à l'étroit, et incapable, par conséquent, de se développer
dans la proportion de son importance; aussi, le 18 décembre 1837,
M. de Salvandy, devenu à son tour ministre de l'Instruction pu-
(1) Rapports au Koi et pièces, p. 23.
(2) Bulletin du Comité historique des Ans et Monuments, \" numéro, p. 3.
blique, érigea-t-il le Sout-Comilé de» Arts en Comité de» A ri» et Mo-
numents, comité qui fut chargé « de publier tous les documents
n inédits relatifs ci l'histoire des arts chez les Français; de faire
« connaître tous les monuments d'art en France dans tous les
« genres : monuments religieux, militaires et civils ; de faire des-
« siner et graver, pour les conserver à l'avenir, les œuvres remar-
« quables d'architecture, de peinture, de sculpture en pierre, en
« marbre et en bois; de donner des instructions sur la conscrva-
« tion matérielle des ruines, statues, tours, chapelles, cathédrales,
« qui intéressent la religion, l'art ou l'histoire; de faire des re-
n cherches sur l'histoire de la musique à toutes les époques du
« Moyen-Age; enfin, de préparer les matériaux pour une histoire
« complète de l'art en France. »
M. de Salvandy, désireux de faire représenter dans le nouveau
comité les intérêts de tous les arts, fit adjoindre de nouveaux mem-
bres à ceux qui avaient composé l'ancien Sous-Comiti de» An», et
aux membres résidents (à Paris) (l) on ajouta encore des membres
non résidents, choisis parmi les antiquaires les plus distingues des
départements (2). Ainsi constitué, le comité commença par choisir
des correspondant» officiels dans les départements (3) et même à
(1) ilembrts résidents (nous avons fait préciser d'un * les noms îles mem-
bres de l'ancien Sous-Comiti des Arts) :
MM. Gasparin (comte de), pair de France, président du comité; — * Ampère
(J.-J.), professeur au Collc'ge de France, membre de l'Institut; — Barre,
graveur général des monnaies; — BasUrd (comte Auguste de); — Bottée
de Toulnion, liibiiotliécaire au Conservatoire de musique; — Delécluie;
Grange (marquis de la), député; — Grillon, membre du Conseil municipal
et des bâtiments citils ; — Héricart de ïliury (vicomte', membre de l'Insti-
tut; — * Hugo (Victor), de l'Académie française; — Labordc (comte Léon
de), membre de l'Institut; — 'Lenoir (Albert), architecte;— * Lenormani
(Charles), membre de l'Institut, conservateur de la bibliothèque Royale;
— *Lc Prévost (Auguste), député, membre de l'Institut; — 'Mérimée, de
l'Acadi'mie française, inspecteur général des monuments historiques; —
Montalembcrt (comte de), pair de France; — Passy (Antoine), député; —
Robclin (Charle.i), architecte; — Sainte-Beuve, de l'Académie française,
conservateur de la bibliothèque Mazarine; — Salvandy (comte de), de
l'Académie française, député; — Saulcy (de), directeur du Musie de
l'Artillerie, mrnibre de l'Institut; — Saussaye (de la), correspondant de
l'Institut; — Sclicffcr (Ary); — Schmit, maître des requêtes au conseil
d'État; — Taylor (baron), inspecteur général des établissemenU des beaux-
arts; — Texier (Charles), commissaire royal près les établissements des
beaux-arts ; — Varcollicr, chef du secrétariat-général à la préfecture rie
la Seine; — 'Vitet, conseiller d'État, député, membre de l'Institut; —
*DidrOD, de la bibliothèque Royale, secrétaire du Comité.
W Membres non résidents :
MM. Castcllanc (marquis de), à Toulouse ; — Caumont (de), i C«en; — Chau-
drue de Craxannes (baron), sous-préfet, i Castel Sarrazin; — Denis
(Alphonse), député du Var, à Hyères; — Devic (monseigneur), é(éque de
• Belley; — Deville (Achille), i Rouen; — Donnct (monseigneur), arche-
vêque de Bordeaux ; — Gasparin (Auguste de), ancien député de la DrOme,
à Orange; — Gerville (de), à Valogncs; — Jaubert de Passa, i Perpignan;
— Jouannct, bibliothécaire à Bordeaux; — Lagoy (marquis de), i Salnt-
Remi ; — Saint-Méniin (de), conservateur du Musée, à Dijon ; — Thévenot,
i Clerniont-Ferrand.
(') Correspondants nationaux :
Ain.
Aisne. Uoii,M. Van Cleemputle, architecte ; —Nogentel, H Souliac-Boileau •
— Soissoss, M. Poquet, prêtre. '
Allier. Moulins, M. Batissier ; — SoBtiGM, M. ChambOD, curé.
A^>et (Basses-).
Alpes (Hautes-).
Ardêche. Rosières, M. Guérin. prêtre.
Ardeones. Chahleville, M. Hubert, professeur de philosophie.
Allège.
Aube. Troyes, m. Arnault, peintre; M. Bourcelot, curé de Saint-Urbain.
Aude. CARCissosNE, M. Cros, directeur du Musée; — NiHBOsm, M. Tournai,
secrétaire de la Commission arciiéologique.
Areyron.
53
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
54
l'étranger (1), car il voulut porter son attention jusque sur l'in-
fluence que la France avait pu exercer sur le développement des
arts dans les autres pays.
Bouches-du-Rhône. Aix, M. Porte (Jcan-Baplisto), M. noiiaid, bibliothécaire.
— Arles, Jl. Clair, avocat, M. Huard, directeur du Musée.
Calvados. Uayeux, M. Lambert, bil)liotliécaire , M. Tboniine Desraazuros,
vicaire général ; — Caen , Décbaudé d'Anisy; — Louvagny, Beaurepaire
(comte de).
Cantal.
Charente. Angoclême, M. Michon, prêtre.
Charente-Inférieure. Rociiefort, M. Lessoii, correspondant de l'Institut.
Cher. Bolbces, M. Girardot (baron de), conseiller de préf. , M. Ilazé, peintre.
Corrèze.
Corse.
Côte-d'Or. Beaune, M. Foissel (Théodore), juge au tribunal; — Dijon , M. Sa-
got (Emile), architecte; — Magny, M. Gavean, maire.
Côtes-du-Nord.
Creuse.
Dordogne. NoNTKOs , M Verneilh (Félix de).
Doubs. PoNTARLiER, M. Deniesmav, député.
Drôme.
Eure. Bernât, M. Nicl, ancien sous-préfet.
Sure-et-Iioir. Chartres, M. Durand (Paul), M. Pie, chanoine honoraire; —
Dreux, M. Tillenl.
Finistère.
Gard. Nîmes, M. Pelet (Auguste).
Garonne (Haute-). TocLOCSE, M. Duniège; M. Gnillermy (Ferdinand de).
Gers. Al'ch, M. Canéto, supérieur du petit séminaire.
Gironde. Bordeaux, M. Diuihot , architecte, M.Durand (G.-J.), architecte
de la ville, M. Lamothe (Léonce de).
Hérault. Béziers, M. Portalon (de); — Montpellier. M. Jubinal (Achille), pro-
fesseur h la faculté des lettres, M. Renouvier (Jules).
Ille-et-Vilaine. Rennes, M. Langlois, architecte.
Indre. Chateauroux, M. Leroy (Ferdinand), préfet; — Lerlanc, M. Trcmblaye
(de la), sous-préfet.
Indre-et-Iioire . Tours, M. Aubineau (Léon), archiviste, M. Bourassé, profes-
seur d'archéologie an petit séminaire, M. Manceau, chanoine honoraire:
— Amboise, m. Cartier.
Isère. Grenoble. M. Pierangéli, juge au tribunal; — N.-D. -de-l'Osier,
M. Dassy, prêtre; — Vienne, M. Delorme, bibliothécaire et conservateur
du Musée , M Mermet.
Jura. Lons-le-Saulnier, M. Monnier (Désiré); — Saint-Claude, M. Comoy,
architecte de l'arrondissement et de la ville.
Xiandes.
Iioir-et-Cher. Vendôme, M. Launay, professeur de dessin au collège.
Zioire. MoNTBRisoN, M. Soultrait (Georges de).
lioire (Haute-). Le Puy, M. Aymard (Auguste), M. Becdelièvre (vicomte de).
lioire-Inférieure. Nantes, M. Fournier, curé de Saint-Nicolas.
Iioiret. Orléans, M. Pensée (Charles); — Noyon-sur-Vernon, M. Crespy-Le-
prince (baron de) ; — Gien, M. Marchand, ingénieur.
Ziot.
Iiot-et-Garonne. NÉRAC, Samazeuilh, avocat.
Iiozère.
Maine-et-loire. Angers, M. Godard-Faultrier, directeur du Musée, M. Grille
(Fr.), bibliothécaire de la ville; — Saumur. Joly-Leterne, architecte.
Manche. Avranches, M. Mangon-Delalandej — Coutances, M. Dclamarre,
vicaire général.
Marne. Chaloss, M Champenois, curé de Notre-Dame; — Chaltrait, M. Mel-
let (comte de), membre de la Commission arcliéologique de la Marne ; —
Reims, monseigneur Gousset , archevêque, M. Durand (Hippolyte), archi-
tecte, M. Paris (Louis), bibliothécaire archiviste.
Marne (Haute-). Langres , M. Fériel, procureur du roi; M. Péchinet,
architecte ; — Montierender, M. Astier (vicomte d').
Mayenne.
Meurthe. Nancy, M. Guerrier de Dumast, président de l'Académie Stanislas;
— TouL, M. Delalle, curé de l'ancienne cathédrale.
Meuse.
Morbihan.
Moselle.
Nièvre. La Charité, M. Grasset (Auguste) ;— Neters, M. Duvivier (Antonl).
Nord. Douai, M. Coussemaker (de); — Lille, M. Contencin (de), secrétaire
général de la préfecture.
Oise. Beativais, M. Barraud, directeur du grand séminaire; — Clermont,
M. Woillez (Eugène) ; — Senlis, M. Poulet, prêtre principal du collège.
Orne.
Pas-de-Calais. Calais, M. Pigault de Beaupré ; — Clermont-Ferband, M. Mal-
lay, architecte, professeur d'archéologie au grand séminaire
Nous avons fait connaître l'organisation au moyen de laquelle
se rattachent les uns aux autres les travaux des divers comités
spéciaux chargés de poursuivre les études de notre histoire natio-
Puy-de-Dôme. IssoiRE, M. BraTard, architecte; — Nescbers, M. Croizet, curé.
Pyrénées (Basses-).
Pyrénées (Hautes-).
Pyrénées-Orientales. Pekpighan, M. Henry, bibliothécaire.
Rhin (Bas-). Strasbourg, M. Klotz, architecte de la cathédrale ; — M. Pcrriii,
architecte ; — M. Schneegaus (Louis), archiviste.
Rhin (Haut-J.
Rhône. Lyon, Monseigneur le cardiiLTl de Bonald, archevêque; — M. Bonne-
fond, directeur du Musée; — M. Coinarmond, conserialeur des musées
archéologiques; — M. Dupasquier (Loui.s), architecte, professeur à la Mar-
tiniére.
Saône (Haute-).
Saône-et-Iioire. .\uTUN, M. Dcvaucoux, secrétaire de l'évéché; — Maçon,
M. Ragut, archiviste-bibliothécaire.
Sarthe. Mans, M. Richelet, bibliothécaire; — M. Tournesac, prêtre , profes-
seur d'arcliéologie ; — Solesmes, M. Guéranger (Dom), abbé des bénédictins.
Seine. Paris, M. Denierson, curé de Saint-Germain-l'Auxerrois; — Pascal,
prêtre.
Seine-Inférieure. Dieppe, M. Féret, bibliothécaire. — Roien, M. Barthélémy,
archileclc; — M. Cochet, aumônier du collège royal.
Seine-et-Marne. Bourron, M. Oudin, curé ; — Donnemarie, M. Teste-d'Ouet
(Alexandre) ; — Meaux, Mgr Allou,éïêque; — Melik, M. Rosny (Lucien de).
Seine-et'Oise. Étami-es, M. Mont-Rond (.Maxime de); — Montfort-l'Amauey,
M. Robert; — Poissy, M. Saint-Clair (de), colonel; — Rambouillet, M. Mou-
tié, membre de la commission archéologique; — Saint-Cyb, M. Boisselier,
peintre, professeur de dessin à l'école militaire; — M. Dussicux, répéti-
teur d'histoire  l'école militaire ; — Versailles, M. Emaux.
Sèvres (Deux-). Niort, M. Segrélain, architecte.
Somme. Amiens, Mgr Mioland, évêque; — M. Duthoit (A.), Sculpteur; —
M. Duval, chanoine honoraire de la cathédrale; — M. Goze; — M. Jour-
dain, chanoine honoraire de la cathédrale; — M. Woillez (Emmanuel);
— LiANcouRT, M. Escalopier (comte de 1').
Tarn. Rabastens, M. Clausadc (Gustave de).
Tarn-et-Garonne.
Var.
Vaucluse. Avignon, M. Chanibeau , conseAateur du musée Calvet; — M. Re-
quien.
Vendée.
Vienne. Poitiers, M. Cliergé (Charles de), membre de la Société des anti-
quaires de l'Ouest ; — M. Rédet . archiviste.
Vienne (Haute-). Limoges, M. Boullé, architecte; — Saint-Bonkct, U. Texier,
curé.
Vosges. Saint-Dié, Mgr Gros, évêque.
Yonne. Auxerbe, M. Quanlin, archiviste; — Sens, M. Petit (Victor); — .M. Tarbé.
Algérie. Alger, Berbrngger, bibliothécaire ; — Oran, M. André, procureur du roi.
(1) Correspondants étrangers :
En Allemagne: MM. Boisserée (Melchior), à Munich; — Boisserée (Sulpice),
correspondant de l'Institut de France; — Gaertner, architecte, à Mu-
nich ; — Geissel (Mgr), coadjuteur de l'archevêque, à Cologne ; — Kiesenet-
ter, conseiller à la cour de Vienne; — KIcnze (de), architecte du roi à
Munich; — Knapp, architecte aulique du roi de Wurtemberg, à Slullgard;
Lassaulx (de), architecte du gouvernement, à Coblentz; — Heide-
loff, secrétaire de l'académie Albert-Diirer , à Nuremberg; — Moller,
architecte, à Darmstadt; — Raczinski (Athanase, comte), à Berlin ; —
M. Roisin (Baron Ferdinand de), à Bonn; — Waageii (docteur), directeur
delà galerie royale, à Berlin.
En Angleterre: MM. Britton, antiquaire, à Londres; — Donaldson, vice-prés,
de l'Institut royal des architectes britanniques, à Londres; — Gally-Knight,
membre du parlement; — Halliwell (James-Orchard), secrétaire de la société
des antiquaires de Cambridge, à Londres; — Heywood-Hawkins (J.),
membre du parlement; — Longueville (Jones), maître ès-arts à l'uni-
versité de Cambridge; — Michael (Jones), membre de la Société des
anti()uaircs de Londres; — Way (Albert), directeur de la Société de
Londres; Welby Pugin, professeur d'archéologie an collège d'Oscott,
près Birmingham; — Wliewel , professeur de géologie, Â Cambridge;
Wright (Thomas), à Londres, correspondant de l'Institut de France.
En Belgique : MM. Beanffort (comte Amédée de), président de la commission
royale des monuments à Bruxelles; — Delepierre , membre de la Société
des beaux-arts de Gand, â Bruges; — Febry-Rossius, docteur ès-leltres et
en philosophie, à Liège ; — Jénicot, directeur de la restauration de Saint-
Jacques , à Liège ; — Le Maistre d'Anstaing, i Tournai; —M. Reiffen-
berg (baron de), conservateur de la bibliothèque, i Bruxelles ; — Schayes,
attaché aux archives de Belgique, à Bruxelles.
56
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
nale ; mais désormais nous nous attacherons exclusivement, ainsi
que le veut la spécialité de la Revue, aux travaux du Comité Histo-
rique des Arts et Monuments.
Les cadres de la nouvelle armée d'archéologues une fois bien ar-
rêtés et en partie remplis, M. le ministre de l'Instruction publi-
que adressa aux correspondants du comité une circulaire destinée
à faire bien comprendre à chacun d'eux quelle était sa fonction, et
de quelle manière il convenait de la remplir; voici cette circulaire :
Monsieur,
Je vous ai demandé il y a quelque temps de diriger vos recher-
ches sur les documents inédits relatifs à l'histoire de la philoso-
phie, des sciences et des lettres : il me reste maintenant à appeler
votre attention sur un autre ordre de documents non moins im-
portants, mais qui demandent des investigations d'un genre tout
particulier.
Depuis les Gaulois jusqu'à nos jours, des monuments de toute es-
pèce ont couvert le sol de la France. Quelques-uns ont complète-
ment disparu ; d'autres, encore en grand nombre, restent debout
ou nous sont signalés par leurs ruines. Ces monuments, qui révè-
lent à l'artiste les variations successives de l'art et du goût, peu-
vent aussi fournir à l'historien d'utiles indications sur l'état poli-
tique, intellectuel, moral et industriel de chaque siècle. Tantôt
c'est une inscription qui se déroule sur le bois, sur la pierre, sur
le verre ou sur le métal : le monument alors fait l'office d'un ma-
nuscrit; tantôt c'est la grandeur des constructions, le caractère du
travail, la nature et le choix des emblèmes, qui deviennent autant
de révélations pour l'historien, et qui mettent en relief des faits
que la lettre morte des documents écrits ne pourrait pas même
laisser apercevoir.
Il n'y a pas encore longtemps qu'on a reconnu combien les
études historiques doivent emprunter de secours à l'étude des mo-
numents. Les hommes laborieux des deux derniers siècles, qui ont
sauvé d'une destruction inévitable un si grand nombre de chartes
et de pièces manuscrites en les faisant revivre par leurs patientes
transcriptions, ont laissé se dégrader et s'écrouler sous leurs yeux
cette innombrable variété de monuments que les siècles passés
avaient entassés sur tous les points du royaume. Si des dessins et
des descriptions fidèles nous en avaient reproduit les formes et les
dimensions, si seulement un relevé exact nous en donnait le dé-
nombrement, que de problèmes pourraient être résolus! que de
lumières sur des questions à jamais douteuses!
Il est trop tard pour réparer ce déplorable oubli; mais plus nos
regrets sont vifs, plus rigoureux est le devoir de ne pas mériter à
notre tour les reproches des siècles à venir. Nos richesses monu-
mentales, quoique décimées depuis cinquante ans, égalent encore
en beauté et surpassent en variété celles de tous les autres pays
de l'Europe. Notre premier soin, assurément, doit être de travail-
ler à leur conservation, de les entonrer de respect et de prolonger
leur durée. Mais, quoique nous fassions, ces pierressontpérissables,
etlejourviendraoiila postérité en cherchera vainement la poussière.
Qu'il en reste au moins une image, un souvenir. Que partout où un
monument existe aujourd'hui on sache à jamais qu'il a existé; que
ses proportions, sa figure, son importance, sa destination, soient
religieusement conservées, et que les historiens futurs puissent en
retrouver dans tous les temps une trace impérissable.
C'est pour accomplir cette œuvre difficile, ce travail tout nou-
veau, qu'on fait appel à la patience et aux efforts de MM. les cor-
respondants. Il s'agit de dresser la carte monumentale de la France.
Les 37 200 communes devront être visitées, explorées en tous
sens. Il ne faut pas qu'il existe un seul monument, un seul frag-
ment de ruine, à quelque siècle, à quelque civilisation qu'il appar-
tienne, sans qu'il en soit fait mention, ne fût-ce que pour constater
qu'il ne mérite pas qu'on l'étudié.
Sans l'assistance active et laborieuse de MM. les correspondants,
un tel plan serait chimérique. N'oublions pas que chaque jour voit
disparaître quelques-uns de ces monuments dont nous voulons
perpétuer le souvenir. Ceux que les années épargnent encore, l'i-
gnorance les mutile ou les profane. Il faut donc que cette vaste
stîitistique , sous peine d'être impuissante , soit promptement
terminée. C'est assez dire que, pour en recueillir les éléments. Il
est nécessaire que de toutes parts et en même temps on se mette à
l'ouvrage.
Mais ici une difficulté se présente. Une œuvre confiée a tant de
mains à la fois ne manquera-t-elle pas d'ensemble et d'unité? La
science archéologique ne possède pas encore sa nomenclature. Que
de disparates, que de contradictions et d'obscurités, si chacun dé-
crit les monuments avec une phraséologie particulière, s'il juge de
leur antiquité d'après des systèmes différenU î Cette bigarrure
nous jetterait dans un vague et dans une indécision qu'un travail
scientifique doit éviter à tout prix. Aussi ai-je pensé qu'il était in-
dispensable que le comité institué pour présider à ce genre de tra-
vaux indiquât à MM. les correspondants, dans des instructions
précises et techniques, le plan d'après lequel les recherches de-
vront être entreprises, les expressions qui devront être consacrées
à la description de telle ou telle partie des monuments, et, enfin,
les signes caractéristiques qui serviront à les classer et à détermi-
ner l'époque qui les a vu construire. Ce n'est qu'en se conformant
à ces instructions et en les suivant littéralement qu'on évitera
toute ambiguïté, et que nous pourrons donner à l'ensemble du
travail cette unité qui seule peut en assurer le succès.
J'ai l'honneur de vous transmettre dès aujourd'hui la première
partie des instructions adoptées par le comité, savoir : celles qui
se rapiwrtent aux monuments élevés en France avant l'établisse-
ment définitif du christianisme, soit par les Gaulois, soit par les
Grecs et les Romains, et celles qui concernent les monuments
chrétiens. M. Albert Lenoir a rédigé la partie de ces instructions
En Espagne : MM. Alvarez, architecte, â Madrid ;- Aniat (monseigneur), évêqiie
de Zamora ;-Bretoii de los Herreros don Manoel), bibliothécaire de la reine •
-Carderera (Valentin), antiquaire, à Madrid ; - Castellanos (don Basilio)'
conseryateur du Cabinet de la reine; -Cépéro, chanoine de la cathédrale à
Sévillei—Rocca de Togores, de l'Académie espagnole à Madrid
En Grèce : MM. Maurocordatos (Georges), professeur à l'Uni'versité, à Athènes •
— Pittakys, inspecteur des antiquités, à Athènet. ' • » i •
En Italie : MM. Baini (abbé,, directeur de la musique de la chapelle pon.ifi- ''"' ^ '" '*" ^"^ '""""'"«'"f* religieux et Civils des Gaulois.
" ' " " '^'^sGrecs, des Romains et des chrétiens, jusqu'au XI' Siècle; M.
P. Mérimée s'est chargé des voies et des camps; à M. Ch. Lenor-
mant appartiennent les instructions sur les monuments meubles:
armes, poteries, ustensiles et monnaies. Ultérieurement seront
publiées les instructions relatives aux monuments chrétiens du XI»
au XVI' siècle.
, 1 Tï „ • -~ — .—ile pontkii-
cale, à Rome; _ Cordero de San-Qui„tino (comte), à Turin; _ Lacroix
(abbé), clerc national, à Rome; -Marmora (délia), général, aTuri„--Mi
nard, (chevalier), vice-président de l'Académie des Beaux-Arts, â Rome'-
Santm, (abbé), à Rome;-Secchi (abbé), censeur de l'Académie pontificale
i Rome; _ Serra di Falco (duc de) à Palerme ; - Visconti fchevalier
Pierre-Hercule,, c«nm,issaire des antiquités pontificales, à R„,"z
<letti, conservateur du Musée, à Milan.
57
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
58
Je n'ai pas "besoin de vous dire qu'indépendamment de cette
division chronologique en deux grandes époques, païenne et chré-
tienne, nos monuments se subdivisent naturellement d'après leur
destination. On peut les classer en religieux, militaires et civils.
Cet ordre sera celui des instructions suivantes, et en outre elles
distingueront encore, dans chacune de ces trois classes, deux
sortes de monuments, les monuments fixes ou constructions adhé-
rentes au sol, et les monuments meubles, afin de rendre moins
confuse et plus accessible aux recherches cette multitude presque
nfinie d'objets.
Recevez, monsieur, l'assurance de ma considération distinguée.
Le Ministre de l'Instruction publique.
Des instructions annoncées dans cette circulaire, trois ont été
déjà publiées et ont rendu de grands services, mais elles n'ont ja-
mais été dans le commerce; de sorte que les architectes, les ar-
chéologues et les amateurs, totalement étrangers au comité, n'ont
pu se les procurer; en outre, l'édition des deux premières instruc-
tions relatives à l'archéologie monumentale est aujourd'hui com-
plètement épuisée; nous avons donc demandé et obtenu l'autori-
sation de reproduire ces deux premières instructions dans nos
colonnes, comme déjà nous y avons reproduit la troisième, relative
à l'Histoire de l'architecture militaire {Voy. vol. iv, col. 33). Nous
donnerons la première partie des Instructions dans notre prochain
numéro. César DALY.
EQUILIBRE
DES VOUTES EN RERCEAUX CYLINDRIQUES,
dans lesquelles
LES PLANS DE TÊTE SONT PERPENDICULAIRES A l'aXE.
(Voyez col. 9.)
_ NOTA. Nous engageons ceux de nos lecteurs qui seraient peu familiers avec
I analyse mathématique, à ne pas négliger cependant d'examiner ce travail qui
donne le moyen de résoudre graphiquement un certain nombre de problèmes.
S I. — La théorie que nous allons exposer permet de résoudre
les diverses questions qu'on peut se proposer sur la stabilité des
voûtes. Les équations généralesauxquelleselle nous conduira seront
surtout utiles pour diriger les ingénieurs dans l'établissement d'une
voûte projetée ; tandis que si on les applique à l'examen de la sta-
bilité d'une voûte donnée, elles indiqueront une stabilité aussi
parfaite que possible, lorsqu'elles seront satisfaites; et dans le cas
contraire elles serviront à déterminer les forces ou charges qu'il
faudrait ajouter à la construction pour que cette stabilité absolue
eût lieu. De cette manière, il ne faudra pas conclure en général
que telle construction qui ne satisfera pas complètement à nos
équations sera dépourvue de stabilité, mais seulement que cette
stabilité ne sera pas aussi grande qu'elle eût pu être; et l'on
pourra juger, jusqu'à un certain point, du degré de stabilité, par
la connaissance que fourniront nos équations, des forces ou
charges qui devraient être ajoutées pour la stabilité absolue.
S'il s'agissait de fixer les limites de la stabilité d'une construc-
tion donnée, on ne saurait mieux faire à cet égard que d'employer
les méthodes graphiques ou de calcul indiquées par M. Rellanger,
dans les feuilles lithographiées de son cours de mécanique appli-
quée, fait à l'école Centrale et à l'école des Ponts-et-Chaussées.
§ II. — Considérons une portion de voûte comprise entre deux
plans parallèles atix plans de tète et distants de la quantité >. qu'on
supposera égale à l'unité linéaire , ou infiniment petite si l'on
veut.
Supposons la voûte divisée en voussoirs infiniments petits, par
des plans de joint normaux aux courbes d'intrados et d'extrados,
comme l'indique la figure 1. Nous ferons passer par les centres
de gravité des voussoirs ou des trapèzes qui leur servent de ba-
ses, une courbe C C que nous nommerons courbe des centres fie
gravité. Dans le cas général d'intrados et d'extrados non paral-
lèles, nous concevons les plans de joint menés normalement à la
courbe de» centres de gravité des voussoirs que ces plans serviront à
déterminer.
Désignons par :
X, y, les coordonnées d'un point C de cette courbe, rapportées
à des axes rectangulaires, l'un horizontal, l'autre vertical ;
a, l'angle de la tangente en ce point, avec l'axe des x ;
ds, l'élément d'arc ;
dP, le poids du voussoir infiniment petit, dont a; et y sont les
coordonnées du centre de gravité;
2', la pression totale exercée sur la face A B, normalement à
cette face, par la partie supérieure de la construction ;
î", la pression totale exercée normalement sur la face A' fi' con-
sidérée comme appartenant à la partie D' de la construction , par
la partie de la construction supérieure à A' B' ; à cause de l'action
égale à la réaction, la partie D' exercera sur A B', considéré comme
appartenant à la partie C C, une réaction précisément égale à T' et
en sens contraire de celle-ci.
Désignons de plus par dF une force extérieure différente des
précédentes, agissant parallèlement aux plans de tète, sur une
étendue infiniment petite xrf» du système considéré et passant par
le point (a;, y).
Nous examinerons, en leurs lieu et place, les circonstances que
pourra présenter la position du point d'application de cette force.
Nous la supposerons du reste uniformément repartie sur l'arête
qui répond au point [x, y], (Cette hypothèse est satisfaite si l'on
suppose >. infiniment petit).
Nous désignerons par dF, , dFy , les composantes de cette force
suivant les axes Xet Y.
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
60
§ III. — Pour établir maintenant les équations d'équilibre, nous
allons faire encore deux hypothèses :
D'abord, imaginons que sans altérer en rien le poids des vous-
soirs et la position de leur centre de gravité, on leur donne la forme
indiquée dans la flg. (2), c'est-à-dire qu'on les taille de telle ma-
nière qu'ils ne soient en contact que suivant les arêtes ou gé-
nérati'ices qui ont leurs pieds sur la courbe des centres de gra-
vité, C C.
Ensuite nous ferons abstraction des frottements et de la résis-
tance qu'oppose l'adhésion des mortiers au glissement des voussoirs
les uns sur les autres.
Il est évident que si l'équilibre peut exister dans un système
établi suivant ces hypothèses, il existera à fortiori lorsque l'on
remplacera le contact de deux arêtes par celui de deux plans de
joints, et que l'adhésion des mortiers ainsi que le frottement se-
ront rétablis , le rôle de ces dernières forces étant de s'opposer au
mouvement qui tend à se produire.
Seulement, il faudra remarquer que la pression totale T, qui se
répartirait également sur tous les points du plan de joint, dans le
cas où elle passerait par le centre de gravité de ce plan, ne se par-
tagera pas également entre tous ses points, à cause que les centres
de gravité des faces des voussoirs ne se trouvent pas sur la courbe
C, mais se projettent sur le point milieu de l'épaisseur de la voûte.
Les centres de gravité des volumes des voussoirs se projetant plus
près de V extrados que ceux des faces de joint, on voit que lorsqu'on
remplacera les arêtes de contact par des faces de joint, la pression
par unité de surface sera plus grande vers l'extrados que vers l'in-
trados. Mais les distances des points de la courbe C aux points mi-
lieu de l'épaisseur qui leur correspondent étant très-petites, ainsi
que nous le verrons plus bas, nous ne tiendrons généralement pas
compte de cette inégale répartition des pressions; la pression
maximum ne différera donc que très-peu de la pression moyenne.
Il y aura un grand avantage à ce que la résultante des pressions
passe très-près du milieu de l'épaisseur ; car si la voûte est sou-
mise accidentellement à des charges auxquelles on n'aura point eu
égard en fixant les conditions de son établissement, l'action de
celles-ci sera, tant que l'équilibre pourra subsister, de déplacer le
point d'application de la résultante des pressions, en faisant varier
son intensité. Or, pour que cette résultante puisse se déplacer dans
un sens ou dans l'autre, sans trop se rapprocher de l'extrados ou
de l'intrados, il est évident qu'elle doit passer par le milieu de
l'épaisseur, lorsque les surcharges dont il s'agit n'ont pas lieu ,
c'est-à-dire lorsque la voûte est seulement soumise à l'action des
forces qu'on a fait entrer dans le calcul de son établissement.
§ IV. — Ceci posé, considérons l'équilibre d'une portion quel-
conque C C de voussoirs du système de la fig. (2); soient x, y, et
.r', i/', les coordonnées de C et C.
Les forces extérieures à ce système sont :
1° La pression T agissant en C.
2° La pression î" agissant en C.
3» Les poids dP des voussoirs.
4° Les autres forces extérieures dF qui agissent sur les divers
points du système.
Ces diverses forces étant dans un même plan, trois des six con-
ditions d'équilibre d'un système solide sont satisfaites (l), et il ne
reste qu'à appliquer les trois autres.
(1) On verra, dans le paragraphe suivant, comment nous concevons qu'on
Deux de ces équations expriment que la somme des projections
des forces extérieures sur chacun des axes X et Y, est nulle.
La troisième exprime que la somme des moments de ces forces
ou de leurs composantes, par rapport à un troisième axe perpendi-
culaire aux deux premiers, est également nulle.
En égalant à zéro la somme des projections des forces extérieu-
res sur l'axe des .r, et observant que la projection des poids dP
est nulle, il vient
Tcota. — Fcoja'-f- / dF^ = 0. ;i)
En projetant ces forces sur Taxe des y, et égalant la somme des
projections à zéro, on obtient
T sin 0.— T sin a' -f f'^ dF^ -f f^ dP = o. [2]
En faisant la somme des moments par rapport a un axe perpen-
diculaire au plan des x, y, et passant par le point 0, puis l'égalant
à zéro, on obtient cette dernière condition
a- iTim » — a:'r »i« «' — (y Tfo» a — y' T f o« «') -f f xdF^
-Sx y'^'-'^Sxy'''^' "^
Or, remarquons que ces équations devant avoir lieu pour un in-
tervalle quelconque C C, compté sur la courbe des centres de gra-
vité, auront encore lieu lorsque cet intervalle sera ionnimeut petit
et égal à rf*.
Dans ce cas x deviendra x -\- dx, et les quantités a' et F.qui
sont des fonctions de x, deviendront a -f rfa, et T-j- dT, de telle
sorte que l'on aura
Tcos a' — Tcosaz=( T~\- d T) cos {a - di —Tcosx=d{ Tcot «) ;
on aura de même
T sino.' — Tsin a. = d{ T sin »; .
tandis que les intégrales contenues dans ces mêmes ciduiMiii* se
réduiront a un de leurs éléments.
En supposant donc l'intervalle C C inOniment i)etit, et ayant
égard aux remarques précédentes, nos équations (l), (J), (i), de-
viendront
— d(rfo«a)-f dF, =0, .(4)
— d {Tsin a) -f rfF, -j-dP = o. (s)
— d(x Tsin a)-)-d(y Tfo» a) -\-xdF^ — ydF. + ydP = o.[6)'
Sous cette forme, il est facile de voir que la 3' éciuation est une
conséquence des deux premières. Pour rendre ceci évident, nous
allons transformer les deux premiers termes de l'équation (6) ainsi
qu'il suit :
— X d [T sina.) — T sin a. dx -\- y d {T eos a.) -\- T cos a. dy;
or, en observant que l'on a
(in o =
les termes
deviennent
dy dx
— Tsinadx-^ Tcosady
et se détruisent. De cette manière, l'équation (6) devient
— xd {Tsin a) -f- y rf ( 7' co» a) -f x rfF, — y dF, -f- y d/» = o.
On voit maintenant qu'elle se compose du 1" membre de l'équa-
pnisse appliquer à un système de corps solides les équations d'équilibre d'un
système solide.
61
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
tion(5), multiplié par x, et du fr membre de l'équation (4), pris
en signe contraire et multipiié par y, le tout égalé à zéro.
L'équation (6) n'est donc qu'une déduction des deux précédenr-
tes; elle y est comprise implicitement, et, de cette manière, il suf-
fira d'avoir égard à ces deux premières équations , que nous écri-
rons ainsi :
d. Tcosa. :=^dF^ ,
d. T sin a = dF,
71
§ V. — Les équations précédentes sont celles qu'il s'agissait
d'obtenir. Elles sont suffisantes pour assurer l'équilibre du sys-
tème. En effet, bien que les six équations de V équilibre d'un corps
solide , appliquées à l'ensemble d'un système de corps solides ,
comme nous l'avons fait § IV, soient insuffisantes pour en assurer
l'équilibre, elles suffisent cependant, étant appliquées à l'une quel-
conque de ses parties, pour nous en fixer les conditions. Or, nous
avons précisément appliqué ces équations à l'équilibre de l'un des
voussoirs, en supposant l'intervalle CC infiniment petit ; de telle
sorte que nous aurions pu nous contenter d'établir immédiatement
les équations (4), (5) et (6).
Avant de nous servir des équations (7) pour résoudre les di-
verses questions dont elles peuvent fournir les solutions , nous al-
lons les transformer.
Pour cela, soit t= AB l'épaisseur de la voûte au point dont x
et y sont les coordonnées, t la pression moyenne sur la face A B,
lorsque les surfaces de contact sont rétablies; d'après la remarque
du § m, la pression maximum par unité superficielle différera peu
de t dans le joint .4 Jî , et nous aurons
r=xa, '\
d'où J
1. ''^ r , V
2 C05 a =; X E t — ;- ' V (8)
T sin a = X 6 1
ds
dy
ds
Nous allons inaintenant calculer la valeur de dP. Nous désigne-
rons parra le poids de l'unité de volume des matériaux dont es^con-
struite la voûte.
Le volume d'un voussoir sera
Jst,
en appelant t la largeur il/ M' Fig (3) du voussoir, prise au milieu
de l'épaisseur, et l'on aura
rfP = oXsi; (9)
il reste à exprimer i en fonction de ds, qui est mesuré sur la
courbe des centres de gravité, et non pas sur une courbe qui passe-
rait par les milieux des épaisseurs.
Considérons le voussoir projeté en DE D'E', et déterminé par
les plans normaux S E,S E' , faisant l'angle dm..
Soient : S le centre de courbure de la courbe CC;
G le centre de gravité du trapèze infinitésimal DE D'E';
f=^SG, rayon de courbure ;
r = uS, distance de la surface élémentaire uu' au centre de
courbure.
S= KG, distance du centre de gravité au milieu de l'épaisseur.
La surface élémentaire uu vl pour expression
r rfct dr;
son moment, par rapport à un plan perpendiculaire à f et passant
par S, est
r« d»- d a.
La surface totale base du voussoir est
e t = t (p — ^)da;
et son moment
f 8 (P S) rf «. ,
En égalant la somme des moments au moment total , et obser-
vant que le facteur commun da disparait de l'équation , on aura
\ r'dr = pe(p — J),
Jp-*-i'
ou
(?-»+i0'-(p-»-ï0' , .,
=p'(p— î).
En effectuant le développement et réduisant, il vient
(P-'V-P(P-J) = -;V'«.
On en tire, en divisant par p' et résolvant
(10)
(On ne conserve ici que le signe convenable devant le radical.)
On peut aussi prendre la valeur du rapport i dont nous aurons
besoin plus loin ; cette valeur est ''
l=\/l2|(l-i). iiobis)
Quant à la valeur de _, elle se déduit de l'équation ci-dessus
P
i^'-i^-^'-^y
(n)
En multipliant le numérateur et le dénominateur de cette va-
leur par
.(. + \/.--^),
on a cette autre expression
"p*
(116m)
de laquelle on tire, pour valeur approchée alix quantités près du
4e ordre
P "p*"
(«)
Cette ex pression confirme ce que nous avons avancé § III, sur la
petitesse de la distance G K.
Pour former la valeur de dP, nous rappellerons que nous avons
trouvé
e t = e ( p — J ) rf» ;
or, on a
di
d a=^ — ,
P
donc
..■=.rf, ^1--).
Au moyen de cette valeur, l'expression (9) devient
dP = uXtds ( •— ~ )•
(IS)
En mettant les valeurs (8) et cette dernière dans les équa-
tions (7), et divisant tout parla constante x, nos équations d'équi-
libre deviendront :
67
et d'après l'équation (20),
REVUE DE L'AKCHITECTURE ÇT DES TRAVAUX PUBLICS.
88
P =
(22)
cos ■
En divisant les équations (21) et (22) membre à membre, il
vient
-=-,, (23)
ou il cause de la valeur de a,
L'intégrale de cette expression , prise entre les limites » et x,
divisée par x, est
— = /c tapg — r , i'J5)
En mettant pour- , sa valeur générale donnée par l'équation
? S
(10 bis), il vient après réductions faites, pour la valeur de - ,
c*
I
Cette équation fait voir que — , qu'on a regardé comme constant
P
dans l'intégration, l'est effectivement. De cette manière, les équa-
tions (19), au lieu d'être des intégrales approchées, sont des inté-
grales exactes de l'équation proposée. En substituant dans la va-
leur de- , celle de — , que nous venons de trouver, et réduisant,
P ?
il viendra
e c 1
-^ ' ' (<.»
La comparaison de cette équation avec l'équation (23) donnera
ensuite, pour la valeur de u.'
,"• ^ ."• 1
(2J
L'équation (22) fait voir que cette quantité u.' est encore égale
au rayon de courbure relatif au sommet de la voûte.
L'équation (24) permet de donner à -une autre expression ; en
effet, en multipliant cette équation et celle qui donne la valeur de
- , membre à membre, il vient
d'où
et en mettant pour p, sa valeur (22),
■î= ^
cos —r
1^
27
Il peut être utile encore de connaître le poids d'une partie de la
voûte comprise entre le sommet et un plan normal correspondant
à l'abscisse x.
Ici l'expression générale du poids élémentaire donnée par l'équa-
tion (i3), donne, en mettant pour e et ds, leurs expressions (20) et
(21) , puis ayant égard aux relations établies plus haut :
CI
1-
?
dP
,
xtc
dx
(^
co«*
X
cette dernière expression est celle du poids par unité de longueur.
On peut avoir besoin de la longueur d'un nrc de notre courbe,
comptée du sommet; sa différentielle est, d'après l'expression (ao) ,
dw
di
X
eot—r
On en tire en intégrant
s = u' log lang- (y + f ^ )•
M)
Remarques sur la courbe représentée par l'équalioii
—7 = — log cos — .
•"• f*
§ X. Cette équation ne contenant que le seul paramètre u. , il
en résulte que toutes les courbes construites avec cette é(|uation et
des valeurs diverses de ce paramètre, sont, comme les diverses pa-
raboles du 2« degré, des courbes semblables.
Nous avons vu que ce paramètre n'est autre chose que le rayon
de courbure du sommet, et qu'il ne dépend que de la nature des
matéiiaux et de l'épaisseur de la voûte au sommet.
Sa valeur est
Cette première remarque est Imjwrtante, parce que l'on pourra
construire une fois pour toutes la courbe dont il s'agit, sur une
échelle quelconque ; et par ce nloyen on pourra, à l'aide de cette
épure, résoudre graphiquement un certain nombre de problèmes ,
ainsi que nous le verrons plus bas.
§ XL La courbe est symétrique par rapport à l'axe des y, puis-
que deux valeurs égales et de signe contraire de x donnent la
même valeur de y.
L'ordonnée croit d'une manière continue de — , = o, à — = — ;
[«■ ."^2
elle devient infinie pour cette dernière valeur : donc la courbe a
une asymptote parallèleàl'axedesy.situéàladistance — i^'iducôté
des X positifs. Il en est de même du côté des x négatifs. Donc une
première branche de la courbe est renfermée dans un intervalle
compté sur l'axe des x, égal à ^j.'.
X t: 3 ~
Pour— , > et < le cosinus est négatif, et son logarithme
devient imaginaire; la courbe n'a donc pas de points situés dans
" . 3 it , ,
l'intervalle compris entre x = — u. et— — -.x . La grandeur de cet
intervalle est encore ^a'. A la limite -^ — u'.lecosinus redevient
2 •
positif, et la valeur de y réelle, en commençant par être in-
finie.
Elle va en diminuant depuis — " u.' jusqu'à 2 s/, delà même ma-
nière que de X ^ — _" u-', à a; = o. Au delà elle rtprend les méme«
69
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUHLICS.
70
valeurs qu'elle a reçues déjà pour les valeurs de a; > o. Cela tfent
à ce qu'on a cos [■2m- + o) = cos 0.
On voit donc que la courbe se compose d'une infinité de bran-
ches égales entre elles, séparées par des intervalles égaux à :: ,«.',
comme l'indique la figure 4.
dy
Cette courbe présente la singularité, que la valeur de -7-,
dx
donnée par l'équation (19), est réelle pour toute valeur de x; et l'on
sait que la valeur de-^, donnée en fonction de x, suffit pour dé-
dx
terminer la forme de la courbe. De cette manière, la forme de la
courbe se trouve déterminée dans les intervalles /, /', etc., qui
n'en renferment aucun point.
Nous savons du reste que les constantes (jui proviennent de
dy
l'intégration de —- = f x, ne servent qu'à fixer la position de la
courbe dans son plan, et qu'elles n'ont aucune influence sur sa
forme.
On est donc conduit à admettre qu'il doit exister des branches
de la courbe dans les intervalles / et 7', dont la forme est identique
avec celle des autres branches, ayant les mêmes asymptotes et
même direction d'axes, mais dont on ne peut assigner la position
du sommet, attendu que dans ce cas le log cos, et par suite la va-
leur de y, se composeiît d'une constante imaginaire, et d'une partie
variable réelle. Tout ce qu'on peut dire, c'est que le sommet de
ces branches est situé à une distance imaginaire de l'axe des x.
Nous verrons , à propos des voûtes en dôme , que pour réaliser
toutes les solutions d'une certaine question fournie par une même
équation, il faut avoir égard à l'existence de ces branches imagi-
naires /„ /', etc.
Tracé de la courbe et des normales. Intrados et extrados.
§ XII. S'il s'agit de calculer les ordonnées de la courbe, éq. (l9),
pour une valeur donnée de u.' , on observe d'abord que le log. qui
entre dans cette équation est un log. hyperbolique ou népérien.
Or, on sait qu'un log. de cette espèce s'obtient en divisant le log.
vulgaire ou à base décimale par le module
., = 0,43429 448... (30)
Si donc nous désignons par ].cos le log. décimal d'un cosinus,
donné par les tables ordinaires, et si nous remarquons que ce log.
est toujours trop fort de 10 unités, nous aurons, pour l'équation
transformée
Pour éviter cette transformation , voici comme on s'y pren-
dra :
On calculera d'abord la distance du sommet 0 à l'asymptote la
plus voisine ; cette distance, que je désignerai par a, sera, selon ce
qui a été dit § ( r 1), donnée par l'équation
a t
d'où
a = (*
(32)
Cette distance a représente un intervalle de OO"; on la di-
visera donc en un nombre entier de parties, comme, par
exemple, 9 ou 18, etc.; ces parties correspondront alors à des in-
tervalles de 10" ou 5". On retranchera ensuite de 10, les I. cos des
angles correspondants à chaque point de la division.
M''
On calculera ensuite la valeur de —, et en multipliant chacune
des quantités obtenues précédemment par cette dernière, on aura
la valeur des ordonnées qui répondent aux abscisses marquées par
les points de division. La position S du centre, de courbure au
sommet s'obtiendra en portant la distance ."-' de 0 vers Y.
§ XIII. — S'il s'agit simplement de tracer l'épure indiquée § X ,
et pour laquelle la grandeur de «.' est indifférente, on posera — = i ,
ce qui réduira la valeur de y à
y= 10 — 1.
(33)
I. cos —,
10
ou bien
Dans ce cas, la valeur de. a sera, d'après (32), ^ale à -^ •/; en
effectuant le calcul, on trouve pour cette valeur de a, le nombre
0,65178 76...
Après avoir porté la longueur représentée par ce nombre, à,par-
tir de l'origine, sur l'axe des .r, et l'avoir divisée en parties égales,
comme ci-dessus, on écrira les nombres de degrés correspondants.
La valeur de l'ordonnée s'exprimera par 1 0, moins le 1. cos de ce
nombre de degrés; on pourra éviter de faire la soustraction, en
traçant une droite MM' parallèle à l'axe des a-, à la distance
OjW=1, et portant, à partir de cette droite vers l'origine, la partie
décimale du l. cos, lorsque la caractéristique sera 9. Si elle était 8,
on ferait la même opération , en comptant les distances à partir
d'une droite située à la distance 2, et ainsi de suite.
On fixera la position du centre de courbure du sommet en por-
tant, dans ce cas-ci, la valeur
V =0, 43429448...
de 0 vers 1'.
Je rapporte ici les valeurs des 1. cos de 10° en 10°, telles que les
donnent les tables.
•= 10
l. cos ■
31
X
Ici l'angle -, estexprimé en rapport d'arc au rayon ; pour trou-
X
ver le I. cos dans les tables, il restera donc à exprimer -; en de-
u.
grés, ce qui se fera en écrivant
Ix I80o\
1. cos \ —
NOMBRE
NOMBRE
de
L. COSINUS.
de
L. r.OSINDS.
DEGRÉS.
DEGRÉS.
0
10,
50
9,80807
10
9,99335
60
9,69897
20
9.97299
70
9,53405
30
9,93753
80
9.23967
AO
9,88425 i
i
90
— Infini.
7J
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
n
La courbe, Fig. 5, eàt tracée par la simple application de ces
valeurs (l).
§ XIV. Pour tracer actuellement les courbes intrados et ex-
trados, il fautconstruire les normalesaux divers points de la courbe.
Pour cela, traçons de part et d'autre de l'axe des y, un quart de
cercle, du point S comme centre et avec [/.' pour rayon; la longueur
du quart de circonférence OR est égale à ya' , ou à la droite
OA=a, équation (32).
Divisons en outre ce quart de circonférence de la même manière
que nous avons divisé OA, et joignons les points de division avec
le centre. La droite divisée OA pourra être considérée comme le
développement de l'arc divisé 0 R.
Cela posé, proposons-nous de mener une normale en un point N
de la courbe; nous mesurerons sur l'arc OiV, une longueur OF
égale à l'abscisse OP du point N. Cette mesure sera très-facile à
prendre au moyen des divisions marquées préalablement. Je dis
maintenant que si l'on joint PS et qu'on mène par le point N une
parallèle à P'S, cette parallèle sera la normale qu'il s'agissait de
tracer. Pour le prouver, nous ferons observer que. l'angle de la nor-
male avec l'axe des y, est précisément égal à l'angle * de la tan-
gente avec l'axe des œ, ce qu'il est facile de voir : or, d'après la
première équation (l9), on a
tang «• = tang
d'où
^■]
X
(35
d'un autre côté, on a
Soit [Fig. 6) ime normale l E menée par un point G de la
courbe, et construite par la méthode précédente ; soient, *■ le point
milieu de l'épaisseur de la voûte, E un point de Vextrado*, /un
point de {'intrados. Nous avons
kT^YÏ = 'it,i = ~KG,
GlË=\t-n, «7=;i-|-j,
et en prenant les valeurs (21) et (27) de « et de *,
CE
X
cot —
cot
cette expression et celle de 67 , à cause de a = — r , deviennent
GE
COS a ' COâ »
cas et
Si nous faisons pour abréger
''=tc(< -:-f ). '.=îf(> +î-^). («•)
il viendra
GE=
Gl
c
COI %
!3T)
^o«, OP' OP X
anale OSP = — ,- = --—="7 >
|A ,7. Ji.
donc, en vertu de l'équation précédente,
OSP =<^;
donc la droite PS fait avec Y le même angle que la normale, ou,
en d'autres termes, la normale au point N est parallèle à P' S. Il
suit de là que, pour mener des normales par les points I, 2, 3, 4,
ô, 6, 7, 8 de la courbe, il suffira de mener par ces points des paral-
lèles aux rayons de l'arc OR, qui aboutissent aux divisions 10°,
20°, 30°, etc.
§ XV. Construisons maintenant les courbes extrados et intra-
dos.
(1) L'épure ci-dessus peut encore être plus facilement tracée au moyen de la
règle à calcul.
L'une des échelles divisées qui se trouvent au dos de la réglette, l'échelle dite
des sinus, donne, pour la distance du trait correspondant à 90", à celui marqué
par un autre nombre de degrés, une longueur égale au I. cosecant» de ce der-
nier, multiplié par l'unité linéaire de la reff/e. Or, les 1. cose'c. sont. égaux aux
I. sec. des <;onipléments, ou à — 1. cos. Si l'on prend donc pour rayon les
0,43429 de l'unité linéaire de la régie à calcul, et qu'on trace le quart de cercle
ci-dessus et son développement, en changeant seulement le sens de la graduation,
c'est-à-dire en écrivant 90», 80°, 70°... 10», 0°, au lieu de 0°, 10°... 70», 80°, 90°,
on n'aura qu'à prendre pour ordonnées correspondantes à ces points de divi-
sion, les longueurs comprises sur la réglette entre 90» et les nombres de degrés
de cette nouvelle graduation.
Ainsi, les régies à calctil de 26 centimètres, fabriquées par M. Gravet, suc-
ces.scur de Lenoir, et qui portent le nom de ce dernier, sont construites avec
une unité linéaire égale à 12':'n^5; d'où résulte que, pour construire l'épure avec
ces règles, il faut prendre un rayon égal à 0,43429.12':°', 5, ou environ 5^,429.
cas a co$ <*■
Pour construire ces quantités, menons l'ordonnée du point G, et
prenons CL =- r., G L — r^, puis menons par L et L des paral-
lèles à l'axe des .r; je dis que les parallèles rencontreront la normale
aux points E et /, et détermineront ainsi un point de i'exiradotet
de Vintrados.
En effet, la normale faisant l'angle » avec l'axe des y, l'angle
L G £ de la normale , avec une parallèle à Y', et son opposé, sont
égaux a », et les deux triangles rectangles dont ils font partie
donnent
Gl ^r^ GL'
GE =
Gl
eos*
COS''
ce qui vérifie les équations (37).
Donc, pour tracer Ve.rlrados et ïiniradot, après (ju ou aura
construit les normalesaux divers points, par la méthode du § XIV,
il faudra calculer les valeurs de m et n, par les équations (37), et
porter ces quantités sur l'ordonnée de chacun des points de la
courbe, en dessus et en dessous, à partir de ces points, puis mener
des parallèles à l'axe des .r, par les points ainsi déterminés. Ces pa-
rallèles couperont les normales en des points appartenant à l'extra-
dos et à Vintrados.
Second Phobléme.
Etablissement d'une voûte non chargée, devant recouvrir un espace
d'une largeur donnée.
§ XVI. — S'il fallait en toute rigueur résoudre cette question,
voici comment on procéderait :
Soient g [Fig. l) la demi-ouverture donnée de la voûte;
f, la flèche inconnue R D ;
c, l'épaisseur donnée de la voûte au sommet.
On calculera d'abord la distance 0/) = ti,, équation (37), au
moyen de la 2<" équation (30) ; puis on exprimera que la courbe
passe par le pointai', en mettant ses coordonnées dans la 2* équa-
tion (19).
73
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
n
Calculons donc ces coordonnées :
Je mène par le point ilf une parallèle à l'axe des x ; puis obser-
vant, d'après le § XV, que les projections verticales GL'{Fig.(>),
des distances de la courbe des centres de gravité à Vintrados, sont
constantes et égales à i, , j'en conclus j4 /*=»),, ou B F = «, =
OD ; de là résulte, pour la valeur de l'ordonnée de M,
ij=l)F=JD^f;
d'un autre côté, on a
a:'=FW=:,g+FM,
et à cause de i* ^ ilf = a,
x = g-{-AP tang « = 3 -j-r^, tang »;
or, l'angle a, d'après (35l, a aussi pour valeur — ^ , donc, d'après
l'équation (21 his), e étant la base des log. népériens, on a
22/
(39
— 1.
Mettant dans l'équation (l9) cette valeur de x, il vient pour la va-
leur de y ou f
— ; = log COS \ ; /
40
Telle est l'équation qu'il faudrait résoudre par rapport à f. On
voit qu'il est impossible de le faire autrement que par tâtonnement,
à cause de la présence de f comme exposant sous le radical ; mais
le terme en n, peut être négligé dans une première approximation ;
et si l'on substitue la valeur trouvée de f dans l'exponentielle, la
•2° valeur approchée sera toujours assez exacte.
On peut remarquer que la valeur dé g peut rendre le cos négatif ,
d'où résulterait une valeur imaginaire de f. Il serait impossible,
en effet (Voy. Fig. •>), de recouvrir un espace dont la demi-largeur
excéderait — i^', en employant notre courbe, et n'ayant pas égard
aux épaisseurs.
Si on donnait à Ja fois la demi-ouverture g ef la flèche f, il fau-
drait tirer de l'équation (40) la valeuv de i^-'; et à cause que «, est
une fonction de [j., équation (36), et par suite de f^', par l'équation
(24), de laquelle on tire
,^,{;+W<-4)
il y aurait à mettre pour yi, sa valeur en fonction de (a' ; or, on pourra
se contenter de mettre jji'pour ja dans 1^,, ce qui donnera ici une
exactitude suffisante. De cette manière, l'équation (40) devien-
drait
f
-}- log cos
. _ \ ^ /= 0.141]
[A ^ p. ^
Ayant résolu cette équation par tâtonnement, l'expression (28)
donnerait la valeur de t en fonction de jx'; on connaîtrait ainsi la
valeur de la pression par unité de surface, qui aurait lieu dans
toute l'étendue de la voûte ; et si elle se trouvait inférieure à la ré-
sistance de la matière employée, on pourrait établir la construc-
tion au moyen de la valeur trouvée de fi', en procédant cemme il
est indiqué § XII, XIV et XV.
Résolutian graphique des questions précédentes, au moyen de l'épure
de la Fig. (5).
§ XVII. — On supposera, pour plus de simplicité, que la gran-
deur de la demi-ouverture et celle de la flèche (si celle-ci est don-
née) ne sont pas fixées d'une manière si absolue, qu'on ne puisse
diminuer l'une et l'autre d'une fraction de la demi-épaisseur de la
voûte.
Si la demi-ouverture est donnée, et si l'on se donne également
le poids et la résistance de la pierre , (a' sera connu par l'équa-
tion (28), tandis que l'épaisseur c, au sommet, restera arbitraire.
Construisons une échelle telle que la valeur trouvée de y-' soit
représentée par OS de notre épure ; mesurons à cette échelle une
longueur égale à la demi-ouverture g donnée, augmentée de la
demi-épaisseur de la voûte ou environ, et menons une parallèle à
l'axe des y, à cette distance ; elle rencontrera la courbe en un
certain point, et l'ordonnée de ce point sera la flèche de la voûte,
augmentée d'environ sa demi-épaisseur.
On aura ainsi la portion de courbe qu'on devra employer.
Au moyen de l'épaisseur donnée, on pourrait construire l'intrados
sur l'épure, et la parallèle à l'axe des y déterminerait, par son in-
tersection avec l'intrados, la portion de courbe qu'on aurait à ap-
pliquer.
Cette solution exacte nécessite la construction de l'intrados,
tandis que la précédente, qui n'est qu'approchée, ne nécessite que
la construction d'une ligne droite.
Dans l'un et l'autre cas, les dimensions trouvées doivent être
mesurées à l'échelle qui donne OS = "•'.
§ XVIII. Étant donnés fetg, trouver approximativement (Ji'par
un tracé.
Je reproduis dans la Fig. (8) l'épure de la Fig. (5). On prendra
parallèlement à OF et OX, deux longueurs OF, FH, proportion-
nelles à fetg, puis on joindra OH.
Par le point de rencontre M avec la courbe, ou mènera parallè-
lement à X, la droite MP, qui représentera la demi-ouverture g,
tandis que OP représentera la flèche f. En effet, on a la propor-
tion
MP
OP
FH
OF
9
r
or
dans tous les
cas, OS
représente
fji'; on aura
donc
o~s
f
OP
_ 9 ,
MP
d'où
, OS os
OP ^ MP
Si on veut mesurer ja' à l'échelle qui donne OF = f, FH = g,
on prendra sur OH, 0L= OF, et on joindra P eti-; puis, me-
nant par S une parallèle S M', à PL, on aura
OS
OP
OJ/'
ÔL
OM'
OF
OM
f '
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
76
Donc, à cause des équations précédentes, f^' = OM'; ;/ est ainsi me-
suré à la même éclielle que/", lorsqu'on fait 0F= f.
On n'a donc, pour cette solution, qu'un très-petit nombre de
lignes à tracer. On discutera, comme au § XVI, la possibilité d'ap-
pliquer cette valeur de "•' ; et si on en veut avoir une valeur plus ap-
prochée, il faudra avoir égard à l'épaisseur de la voûte ou tracer
la courbé d'intrados au moyen de l'épaisseur à la clef supposée
donnée, en opérant à l'échelle qui donne OP = f et PM == g.
On recommencera alors le tracé, et on déterminera le point M, en
mesurant f à partir de Vinlrmlos, et prenant ce point 31 sur V in-
trados; on tirera de là la valeur de «•', qui convient à la construc
tion.
ï'^ siu 6 — ri sin ')' = »,
ou
Tboisième Application.
§ XIX. — La courbe dont nous nous occupons peut encore être
utilement employée pour la construction d'une voûte qui devrait
recevoir l'action d'une charge distribuée uniformément sur sa lon-
gueur, et agissant sur une étendue déterminée.
Par exemple, la voûte devrait servir de base a un mur ou à une
• autre voûte, comme l'indiquent les Fig. (9) et (lO).
Le casde la Fig. (lo) renferme évidemment celui de la Fig. (9) ;
nous allons indiquer comment notre courbe s'applique à ce dernier.
Nous supposons données, Fig. (11), les positions des points Q,
Q' et F, puis la direction et l'intensité de la résultante R, dont les
composantes sont : la poussée exercée normalement sur le vous-
soir VC par la charge supérieure, et le poids inconnu de ce vous-
soir. Toutefois, ce dernier poids pourra toujours être supposé
connu avec une exactitude suffisante, à cause que la résultante R
sera peu influencée par l'erreur qu'on pourrait commettre en fai-
sant une hypothèse sur ce poids. Le point F est pris sur la direc-
tion de la résultante R.
Soient : P l'angle de R avec un axe horizontal ; a et a' les angles
des pressions Jet T qui ont lieu sur les faces ^ et ^4' du voussoir
VC, avec le même axe (tous ces angles étant comptés dans le même
sens, comme l'indique la figure).
Nous allons étabhr les équations d'équilibre de ce voussoir, sou-
mis aux trois forces R, Jet F, situées dans le même plan.
En projetant ces forces sur les axes horizontal et vertical,
Fig. (12), et égalant à zéro les sommes des projections, il vient
R cos f,— TcOtr,. — T COS a = o.
R sin p — T sin". — 2" sin a' =
Il reste à égaler à zéro la somme des moments autour d'un axe
perpendiculaire au plan XY.
Pour plus desimplicitédansles calculs, et pour réaliser de bonnes
conditions de construction, nous prendrons les points d'applica-
tion des forces Tet T, sur une perpendiculaire à la direction de R,
et à égale distance de part et d'autre de cette direction.
Désignons par z la distance inconnue CFde cette perpendiculaire
au point F, et soit l la distance de A et A' au point C, qu'on pourra
prendre égale à la demi-épaisseur ou à peu près, de la voûte ou du
mur qui charge le voussoir F. Nous prendrons pour axe des mo-
ments, afin de ne pas introduire la force R, la perpendiculaire au
plan des œ, y, menée par le point C. Abaissons les perpendiculaires
t P et CF sur Tet T; soient désignés par e et e', les angles des
droites l avec J et J', il viendra, en égalant à zéro la somme des
moments de ses forces
::)
{41 bit]
T sin <!--= r sin 6'.
Or, les triangles opposés TVV, AVC donnent, en éualant la
somme des angles non opposés
90" -)-» = 180° — ^ 4- a.
Les triangles opposés TU V, A' U C , donoeut de même
'JO'-f- 6'= 180° — a'-f f».
On tire de ces équations , après avoir retranché 90' des deux
membres de chacune d'elles
lin 6= «» ( ^ — «),
tin »'= co» ( p — «').
En substituant ces valeurs dans l'équation des moments, il
vient
Teotifi — «)= rco«(p — a"i.
Cette dernière équation, combinée avec les équations [a\], four-
nit un résultat éminemment simple : en effet, passons les termes
en Jet T dans les seconds membres, et divisons ces deux équa-
tions membre à membre, R disparaîtra , et il viendra
sin p Ttin a.-\- T tin «"
rot^ T ron « -f T cot a''
d'où, en chassant les dénominateurs
T tin p co« « -|- r tin p cot «' = Ttin « co# p -i- T tin « cot <* ,
en passant les termes en Tdans le premier membre et ceux en T
dans le second, puis ayant égard à la formule du sinus de la diffé-
rence de deux angles, on aura
T tin\^ — n) — — T lin (& — «V
En divisant membre a membre cette équation et l'équation des
moments, T et T' disparaîtront, et l'on aura
long ( p — a ) = — tang ( p — «' ;
d'où l'on tire
P — »=— (p — «') +!»«
OU bien
Nous remplacerons l'équation des moments par cette dernière,
qui est beaucoup plus simple. Les conditions d'équilibre du vous-
soir F se trouvent donc maintenant exprimées par le système des
équations (41) et (42).
Les pressions 7' et 7" peuvent être éliminées dese(juatious(4l),
en observant qu'elles devront être produites par l'action de vous-
soirs appartenant a des arcs de voûte terminés en A et A', lesquels
voussoirs ont des épaisseurs i et i, déterminées par les relations
si l'on fait pour abréger
R' =
R
les éq. (41 ) donneront
/î' f o» p = t co» » -j- t' cot %,
R' sin p = I «m a -(- t'fina'.
Or, on aura, pour les arcs dontil s'agit, d après les équations (37),
et en observant qu'ici co» »' est négatif ( 1 )
t COI a. = c , t cot a' ^= — c.
En substituant ces valeurs et reprenant l'équation (42), on don-
(1) Les épaisseurs de la voûte s'oblenaiit en fonclioii de l'épaisseur au som-
met, e et c' désignent cesépaisseurs, c'est-à-dire celles qui auraient lieu au som-
met de voûtes non chargées, ayant aux points A et 4' les épaisseurs qui con-
viennent à ces points dans le cas qui nous occupe.
77
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
78
liera la forme suivante aux trois équations d'équilibre du vous-
soir V:
R' cos p = c — c \
R' sin p :^ c lang » — c tamj »•' ;
(43)
§ XX. — Il s'agit maintenant de faire passer par les points
A, A,, A',A\, des arcs de notre couri)e, équation (19), en satis-
l'aisaut à la condition que les pressions extrêmes en A et A' aient
les intensités et les directions déterminées parles équations (41) Us
et (42).
L'équation (19) étant celle de la courbe rapportée à son sommet,
pris pour origine des coordonnées, devra être transformée : en dé-
signant généralement par j) eXq les abscisse et ordonnée du som-
met, on aura, pour l'équation rapportée aux mêmes axes que
p et g
~ — ~= — iog cos { -'-
ou bien
y— 9
cos
(V
(44)
et
dy_
dx
= ta
"9 (
■q)
(45)
Nous désignerons par a, 6, a', b', les abscisses et les ordonnées
des sommets 0 et 0' des courbes passant par A A , , A'A' ,, rappor-
tées aux axes JT et F qui se coupent en F.
Soient x,, ?/„, x\, y\, les coordonnées des points A et A' : nous
allons d'abord calculer ces quantités ; or, ces coordonnées sont les
projections des contours VCA, VCA', sur les axes correspondants;
il vient donc, à cause de F C = z, et de ^ C = .4' C = 5 :
x^ = z co* p -|- Ç sin p ,
y„ = 2 sin p — 5 cos p ,
x\ = z cos p — 5 sin p ,
>j\ = zsin p 4- ? C0-' P-
Soient : x,, y,, les coordonnées du point vl,; et a ,, l'angle de
la tangente à la courbe en ce point. Pour calculer ces coordon-
nées, nous rappellerons seulement, d'après les équations (36) et
(37), que la projection verticale P Q, de A,Q,h pour valeur
'^'T'i' + Tj)
La projection horizontale PA, aura pour valeur PQtang PQA , ,
ou PQ tang a, , ce qui donne
PA.
1 _c_
6 fA
tang a,
(46)
on aura ainsi, en employant les lettres indiquées sur la Fig. (Il
Soient x',, y\ , les coordonnées de A', ; puis a', , l'angle de la tan-
gente en ce point, avec l'axe X, angle qu'on supposera obtus.
comme l'indique la Figure ; on aura, en remarquant que tang a, est
négative, et employant les lettres de la Fig. (il)
147)
Au moyen de ces valeurs, il sera facile d'exprimer qu'un arc de
notre courbe passe par les points A, A,, et qu'un autre passe par
les points A',A^. Pour cela, nous prendrons l'équation de la
courbe, sous la forme donnée par la 2« équation (44).
En mettant successivement dans cette équation les valeurs cor-
respondantes de a; et y pour les points A, A,, puis, pour p et q, les
coordonnées a et 6 du sommet 0, d'une part ; en mettant, d'autre
part, les valeurs correspondantes de a; et y pour les points A', A', ,
et à la place de j) et g les coordonnées a', b', du sommet 0', on aura
les quatre équations suivantes
cos
cos
b — yo
b~y.
(a — x\ \
-yo
(48)
Avant de transformer ces formules, nous ajouterons les valeurs
de tang a, tang a,, tang a', tang «',, qui entrent dans les équa-
tions (43) et (46). En les tirant de la 3» équation (44), et prenant
les signes qui se rapportent au cas de la Fig. (l l), ces valeurs sont ( i )
2 [y-b] \
tang % =^
tang o.'=- —
l,tango.,=
2 iy'-b')
k49)
— tftanga.'
Actuellement on remarquera que les équations (43), (45), (46),
(47), (48) et (49) sont au nombre de 19, et contiennent un nombre
d'inconnues précisément égal ; ce sont : loles quatre coordonnées
des deux sommets ; 2° les deux épaisseurs en ces sommets ; 3° les
huit coordonnées des quatre extrémités des deux arcs de voûte ;
4° les quatre tangentes relatives à ces extrémités ; 5° enfin la dis-
tance z = VC.
Le problème est donc mis en équation, et il n'y a plus qu'à ré-
soudre le système des 19 équations précédentes, par approxima-
tion, soit au moyen du calcul directement, soit en s'aidantde con-
structions graphiques.
Résolution du système des équations précédentes par des approxi-
mations successives.
§ XXL — Pour rendre la première approximation plus exacte,
on pourra faire une hypothèse sur les valeurs dePA,, PQ, P'A\,
P' Q\ hypothèse qui sera suggérée par l'habitude qu'onaura des con-
structions, autrement on pourrait la négliger. De plus, on observera
que si le voussoir F se réduisait à un point, les trois forces T, T. R
passant par ce point, il n'y aurait plus que deux conditions d'équi-
libre à remplir : ce sont celles indiquées par les deux premières
équations (43); dans ce cas, on ferait donc abstraction dela3«. On
se placera dans des conditions peu différentes, en faisant une hv-
(1) Il sera mieux, pour les signes, d'employer la valeur (5î) ci-après.
79
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLiCS.
80
pothèse convenable sur la valeur de z, après avoir pris pour l la
demi-épaisseur de la voûte qui ciiarge le voussoir V. Or, comme il
ne s'agit ici que d'une approximation, 11 sera inutile de se trop
préoccuper de cette valeur hypothétique de z.
Ceci posé, nous allons diviser la !■■= équation (48) par la 3", et
nous aurons
y. — y»
eos\
et en développant
COS —y- COS — f- -f- sin
(1 [i.
=: e
- stn
y,— y.
a œ, , . a . X,
cas —r cas —, — \- sin -y stn — -
(A (A JA [A
ou bien
W X Or
COS — °— -f- S"» -^ '""S — r
y- K^ V_
^1 , . ^1 <*
COS —7- 4- stn —7— tang — 7-
M- a "•
y, —y.
d'où l'on tire ,
y—Vo
e
a
u,*
X, x^
COS ; COS — p-
U. (A
tang y ~
sin
X^
y— yo
".' . X,
— e Stn — -
u.
f50l
ou cette autre valeur plus symétrique
y. Vo
[A X,
e COS — .
- e COS — r
tang — p =--
(5o) bis.
y,^ y,
V-' . X, u! . xo
e stn — ; e sin — p-
|A jA
Nous joindrons à cette équation la seconde équation (48) résolue
par rapport à 6, et il viendra
* — y. . / a — ^. \
,~^ = lOg COS I ,-!- l.
(51)
En traitant de la même manière les deux autres équations (48),
on aura les deux équations suivantes
valeur du 2' membre). La valeur de a étant ainsi déterminée, on
calculera i au moyen de l'équation (51), en prenant les précau-
tions indiquées relativement aux angles et aux logarithmes népé-
riens.
Tout ce qui vient d'être dit sur le calcul de a et b, au moyen des
formules (50) et (51), s'appliquera au calcul de a' et b' par les for-
mules (52).
On pourrait calculera, a, etc., par les formules (49), que j'ai pré-
sentées sous cette forme, seulement à cause de l'élimination qu'on
eût pu se proposer de faire ; mais, outre que ces formules laissent
les signes des tangentes indéterminées, il sera plus simple et plus
sûr, pour les signes, d'écrire d'après la 3« équation (44)
«•„ — a , , x\ — a'
~ f
* , = ; h m r . '
-\- m-a.
'53;
X.
+ IW 7t,
54)
COS
— e
COS
tang
y o
sin — j- e
sm
(52)
V — v' .
log COS
a' — x ,
Disons maintenant l'usage qu'on devra faire de ces formules :
Ou calculera a;„,i/o,x,, y,, en faisant, sur les valeurs de leurs par-
ties inconnues, les hypothèses indiquées ci-dessus. Cela fait, l'une
des deux équations (5o) donnera la valeur de -, , par la tangente de
cette quantité (il va sans dire que les tables donneront un nombre
de degrés, qu'il faudra multiplier par — ^ , pour avoir la valeur du
a
rapport — , qu'on prendra positif ou négatif, selon le signe de la
Si quelques-uns de ces angles sont négatifs par ces formules, on
pourra leur ajouter 180»; l'angle a lui-même pourrait dépasser
180°; il pourrait donc se faire, suivant le cas, que l'on dût ajouter
180° même à un de ces angles, donne positif par les formules pré-
cédentes.
Au moyen des valeurs de a et a, on calculerae et c' par les deux
premières équations (43)
R tin ft — eotfi tang a'
c = ,-- i
t X tang a — tang a f
R tin fi — COS f) tang » i
t ). tang » — tang a'
Les angles», a', etc., viennent d'être déterminés s.'iii>ii\<)irigard
à la 3' équation (43). qui lie ces angles a l'angle ;'.. Il est donc
probable que cette dernière équation ne sera pas satisfaite par les
valeurs résultant de la première approximation.
§ XXIL Nous allons résumer les calculs qui se rapportent a la
première approximation.
On formera les valeurs des huit coordonnées au moyen des
équations (45), (46) et (47), et des hypothèses indiquées au com-
mencement du § précédent ; on calculera ensuite a, b, a, b', par
les formules (5o), (5l) et (52); puis les valeurs de a et a', etc., par
les formules (53) ; enfin les valeurs c et c' seront fournies par les
équations (54).
Ces calculs n'offrent aucune difficulté.
On aura trouvé la solution du problème si les valeurs calculées
de a et a' satisfont à la adéquation (43),
a -(- a' == 2 P ± mr, (iS)
dans laquelle m pourra être égal à o, j ou — 1. Maison ne rencon-
trera jamais juste par le premier essai. Il faudra donc recommen-
cer. Ici se présentent deux cas : ou bien les valeurs de r et c' qu'on
aura calculées se rapprocheront sensiblement de celles qui résul-
tent des hypothèses faites primitivement, ou bien elles s'en écar-
teront notablement. Supposons que ce soit ce dernier cas qui ait
lieu : alors on se servira des valeurs calculées pour fixer celles
des huit coordonnées en conservant la même valeur de z; on pour-
suivra les calculs, et on devra trouver alors des valeurs de c et c
peu différentes de celles résultant du premier calcul ; mais l'équa-
tion (55) pourra n'être pas satisfaite, et on retombera daps le pre-
mier cas; alors on procédera ainsi qu'il suit.
Dans le premier cas, après avoir calculé la valeur de
81
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
82
a 4.» — 2p4;WJiv, on fera varier z, et on calculera les huit
coordonnées au moyen des valeurs de c, c, », »', etc., qui ontservi.
de base aux calculs précédents ; on continuera les calculs, et on
prendra la nouvelle différence « -|" « — "f^^ »»« ; si elle est de
même sens que la précédente, il faudra recommencer les calculs
en faisant varier z en sens contraire, et on pourra trouver une dif-
férence de §ens contraire à la précédente. Une simple proportion
suffira ordinairement pour fixer la valeur de z, qui rendra nulle la
différence dont il s'agit, lorsqu'on aura fait varier z de manière à
obtenir deux différences de signes contraires; et sans recommencer
les calculs pour cette valeur de z, on pourra se contenter de sim-
ples proportions pour fixer les corrections à faire aux autres in-
connues, en comparant leurs variations à celles de z.
§ XXIir. Indiquons maintenant comment ces calculs pourront
être remplacés par des constructions.
La quantité u.' étant fixée par la nature des matériaux qui en-
trent dans la construction des deux arcs de voûte,, on aura recours
à l'épure du § XIII. On prendra la longueur OS, pour représenter
la valeur de «•' qu'on aura adoptée, et l'on construira les données de
la Fig. (il) à l'échelle qui donne la longueur OS, pour la valeur
de (a'. Sur cette construction, on fixera à peu près les positions des
points A, A^, A ,A\, de la Fig. (il), en ayant le soin de prendre
les points A, A, sur une perpendiculaire à^la direction de R, et à
une distance égale à la demi-épaisseur de la voûte supérieure
(Foy. § XXI). (Ce que nous venons d'indiquer est effectué dans la
Fiq. (14), que notis supposons rapportée à la même échelle que la
Fiq. (13). Cette dernière représente l'épure du § XIII). Cela fait,
on joindra [Fig. 14) les points AçXA^, puis les points A, A ^ , par
des lignes droites. Ensuite, considérant la droite AA ,, on mè-
nera [l'ig. 13) une suite de droites faisant avec OS le même angle
que celle-ci fait avec FF, et du même côté; on tâchera, par des
tâtonnements très-courts, d'en tracer une telle, que la corde de l'arc
qu'elle interceptera sur la courbe [Fig. 13) soit égale k AA^\ on
déterminera de même une autre corde égale à A A',, (ces tracés sont
indiqués dans la Fig. (13) par les mêmes lettres). Les arcs inter-
ceptés ainsi seront ceux de la courbe, qui devront être transportés
parallèlement en A, A,, et^',^', [Fig. 14). On mènera des nor-
males et ensuite des tangentes, par le procédé du § XIV, aux
points A et A [Fig. 13); les tangentes ^T, A' I" seront transpor-
tées parallèlement dans la Fig. (14), et l'on'mesurera leurs angles
a. et a' avec l'axe des x. Les équations (54) devront être ensuiteap-
pliquées au' calcul des épaisseurs au sommet cete', des arcs de
voûte passant par A,A^, A,A',; puis, au moyen de la 2-^ équation
(36), et par le procédé du § XIV, on construira les points de l'in-
trados qui correspondent aux points A, et A\ de la Fig. (13), en
employant les épaisseurs c pour le premier, et c' pour le second.
On transportera ces points dans la Fig. (14), de manière que, dans
cette Figure et la Fig. (13), ils occupent les mêmes positions par
rapport aux cordes ^.4,, A A\. Si on avait bien choisi les posi-
tions de A, et A,, les points ainsi transportés coïncideraient avec
ces derniers; mais il n'en sera jamais exactement ainsi.
Dans un 2<- tracé, il faudra changer la positiondes points A,, A, ,
ainsi qu'il va être indiqué ; ou mènera par Q et Q' des parallèles
aux normales de la F/g. (13), menées par ^4, et^', ; on prendra sur
ces normales des distances égales à celles qui séparent les points
«n/rarfos ci-dessus, des points correspondants de la courbe. On dé-
terminera ainsi de nouvelles positions de A, etyl',; puis, sans
changer les positions des points^ et A, on recommencera tous les
tracés précédents, et on calculera de nouvelles valeurs de c et e',
qui ne différeront pas sensiblement des premières. Il reste actuel-
lement à déterminer la position du point C. Pour cela, on notera
la différence a -)- a' — fi + mr , qui résulte du tracé précédent, et
on fera varier la position du point C, dans un sens qu'indiquera
clairement le tracé, attendu que l'équation des moments est équi-
valente à la condition, que les directions des trois forces situées
dans un même plan se coupent en un même point. On verra donc
bien facilement s'il faut relever ou abaisser le point C, en considé-
rant les trois intersections de T, T' et R, qui devraient avoir lieu
en un même point. Après avoir déplacé le point C, on recommen-
cera les tracés et le calcul de c et de c', dont les valeurs ne devront
pas sensiblement différer des précédentes. Il ne faudra généralement
qu'un petit nombre d'essais pour arriver à faire coïncider les inter-
sections de 7', 7^ et iî, ou rendre nulle la différence a-|- a.' — p+m^r.
On voit du reste que, s'il fallait flxer dans la Fig. (14) les
sommets des deux arcs de courbe, il suffirait de transporter la
courbe de la Fig. (13), de manière à faire coïncider, dans les deux
figures, les points qui sont indiqués par les mêmes lettres.
Le problème se trouve donc actuellement résolu d'une manière
complète.
§ XXIV. Nous terminerons ce que nous avions à dire sur les dif-
férentes applications de la courbe que nous venons d'employer, en
ajoutant que les pressions sur les pieds-droits, aux naissances des
arcs de voûte, ont pour valeur x e t, en général ; or, t et à sont
constants, £ est l'épaisseur aux naissances ; il résulte de sa va-
leur (21), que la poussée horizontale T cos a, a pour expression
simple, dans toute l'étendue d'un même arc de voûte, itc.
Dans un prochain article, nous traiterons la question de l'établis-
sement des voûtes des ponts, qui se rapporte en partie à notre
première série,
YVON-VILLARCEAU.
NOUVEAU TOIT PL.\T BITUMINEUX EXPÉRIMENTÉ,
d'une exécution simple,
A LA PORTÉE DE TOUT LE MONDE
Nous avons donné l'an dernier (vol. IV, coL 161 et 205) la tra-
duction des procédés inventés par M. Dorn pour la confection des
T. V. 6
83
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
8^
toits d'argile bitumés ; mais nous apprenons qu'il n'y a guère que
les travaux exécutés sous les yeux du maître qui aient offert un
résultat satisfaisant.
Cependant ces essais ne seront point stériles ; ils ouvrent une
voie nouvelle que d'autres parcourent avec fruit. Déjà, dit-on,
les toits en terrasse remplacent les toits inclinés à Berlin, et l'on
en voit aussi beaucoup dans les autres parties de la Prusse. Les
toits plats ne conviennent pas seulement aux climats méridionaux ;
ils ont, même dans nos contrées, des avantages incontestables sur
les toits inclinés; l'hiver, la neige en est plus facilement balayée
que sur les combles inclinés, à moins toutefois que l'angle de ceux-
ci ne soit assez aigu pour que la neige glisse sur ses parois sans s'y
attacber; et l'été, rien n'est plus agréable que ces terrasses élevées
où les familles peuvent passer leurs soirées loin du bruit de la
rue, au-dessus des couches malsaines de l'air, au milieu de petits
jardins improvisés.
Nous reproduisons ici , sur cet important sujet, une notice com-
muniquée au Bulletin du Mtisée de V Industrie par M. A. Lefran-
çois, architecte français établi depuis longtemps en Allemagne, et
dans laquelle il décrit un toit plat de son invention, pouvant servir
au besoin de réservoir d'eau en cas d'incendie.
Les nombreux avantages que présentent les toits plats à couver-
tures bitumineuses : l'aspect gracieux qu'ils donnent aux con-
structions, l'espace qu'ils font gagner, le bas prix de leur exécu-
tion, leurs dispositions faciles à comprendre et à la portée de toutes
les intelligences, avantages auxquels se joint encore celui de parer
à la communication des incendies, me font espérer que ces couver-
tures reprendront auprès du public la faveur qu'elles ont momen-
tanément perdue.
Depuis bientôt deux ans j'ai fait une couverture de ce genre,
fruit d'une combinaison nouvelle, sous les auspices de la Société
Agronomique d'Altmark. Cette couverture est surtout appro-
priée aux constructions agricoles, et destinée à abriter, pendant
l'hiver, les dernières récoltes qui ne peuvent être engrangées.
Je crois pouvoir en donner des détails assez précis pour que cha-
cun puisse l'exécuter lui-même.
Préparation des substances qui entrent dans la confection du nouveau
toit bitumineux.
Il faut faire choix d'une argile douce, plus maigre que grasse,
sans aucun mélange de corps étrangers; vous l'humecterez d'une
quantité d'eau suffisante pour lui donner une ténacité moyenne.
A cet effet vous la déposez dans un bac à chaux, ou tout simple-
ment sur une mauvaise porte ; vous l'y étendez et la piétinez bien.
Après l'avoir corroyée et parfaitement piétinée, vous préparez une
certaine quantité de bourre bien battue à labaguette pourqu'elle ne
soit point par paquets, mais au contraire bien divisée; vous reten-
dez également sur l'argile, et vous recommencez, pour bien opérer
le mélange, à piétiner celle-ci pour l'incorporer avec la bourre.
Vous relevez l'argile à la pelle à plusieurs reprises, et piétinez en-
core, en mettant, à mesure que le mélange s'effectue, un nouveau
lit de bourre ; vous corroyez de nouveau le mélange jusqu'à ce
qu'enfm il en résulte un amalgame et une union parfaite des deux
substances, à peu près deux tiers d'argile pour un tiers de bourre.
Mais comme l'argile plus ou moins grasse exige des proportions
différentes, vous n'avez qu'à faire subir une petite épreuve a ce
mortier en en étendant une épaisseur d'environ 3 centimètres
sur une planche que vous exposez au soleil. Si à la dessiccation le
mortier résiste, demeure sans fentes ni crevasses, c'est que le mé-
lange est bon ; dans le cas contraire, c'est-à-dire s'il est fendillé et
lézardé, c'est qu'il n'y a point assez de bourre.
Lorsque le mélange argileux est obtenu de la manière qui vient
d'être décrite, il ne s'agit plus que de l'étendre à la main ou avec
une truelle sur le lattis de la construction, le plus régulièrement
possible, et à une épaisseur d'environ 3 centimètres.
Le lattis sera composé de lattes de 8 centimètres de largeur à
peu prèsj sur 35 mill. d'épaisseur, et placées à 15 miil. de distance
l'une de l'autre ; ou bien le lattis sera formé de planches refendues
bien assujetties, espacées comme les lattes; ou bien encore, et par-
ticulièrement pour des constructions rurales, de perches fendues
dont les bouts seront alternés, et qui, bien entendu, seront fixées
sur leur plat, le tout posé sur un chevronnage solidement établi
auquel on donnera une pente de 2 à 8 centimètres par mètre, plus
ou moins, à volonté. On aura soin que le lattis soit de bois et que
les éléments soient solidaires entre eux, de manière qu'en mar-
chant dessus, aucune de ses parties ne fléchisse sous les pieds.
L'argile étendue sur ce lattis, par une belle journée d'été, et
bien séchée, sans fentes ni crevasses (s'il s'en trouvait de peu mar-
quées, vous les rempliriez avec un peu d'argile tres-délayée et
assez claire pour qu'elle put s'inliltrer dans les interstices:, vous
disposez une marmite ou une chaudière de la contenance de 8 à
10 ou 12 litres, selon l'étendue de toit que vou4.avez à enduire;
vous l'emplissez aux trois quarts de goudron de charbon de terre,
et, par un feu doux et clair, vous l'amenez a l'ebullition, en ayant
soin de tenir la marmite close avec une feuille de tôle, dans la
eraiiite que le feu ne se communique au goudron. Vous prenez
de ce goudron bouillant dans un vase portatif en terre cuite auquel
vous adaptez une anse en corde pour vous donner la facilite de
le saisir, et vous étendez largement et promptement sur votre toit
le goudron toujours très-chaud et liquide, pour qu'il pénètre pro-
fondément l'argile (l).
Le lendemain, le temps continuant à être favorable, vous dispo-
sez une quantité de toile en rapport avec l'étendue de votre toit :
cette toile doit être très-grossière et forte; celle que Ion emploie
à la confection des sacs pour mettre le grain est la plus propre a
cet usage. Vous commencez à poser le premier lé sur la planche
saillante de l'égout du toit; vous le fixez avec du goudron mêlé
d'un sixième de poix sur ses bords et par des clous fichés à de pe-
tites distances , seulement sur les bords inférieurs des planches de
l'égout. Les autres lés se posent de même et de manière a ce que
leurs bords se recouvrent de 5 à 6 centimètres, et toujours impré-
gnés de goudron-poix et lixés par de petits clous alors plus espacés
entre eux ; et ainsi de suite, jusqu'au faite du toit. Si celui-ei était
circulaire, il est bien entendu qu'il faudrait couper, coudre et fixer
la toile par lé en pointes, dans la forme de ceux de parapluies.
Tout le toit ainsi recouvert de sa toile bien tendue, sans aucun
pli, vous délayerez de l'argile bien claire, et, avec une brosse ordi-
naire et commune que vous tremperez dans cette argile, vous en
enduirez fortement toute la toile. Après quelques heures d'un grand
(1) Voy., pour les instruments dont on se sert dans l'exécution de ce» tra-
vaux, l'anicle 7'oi(i p/at», inséré dans le vol. iv, col. 151 et 205, de la A«vue
de V Architecture et des Travaux Publics.
85
REVUE DE L AKCHITEGTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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soleil, tout l'appareil ainsi disposé étant bien sec, vous apprêtez
votre marmite pour donner une nouvelle couche générale de gou-
dron, celui-ci préparé comme précédemment, avec cette différence
que vous mettez dans la marmite, aux trois quarts pleine de gou-
dron, un Kilogramme de poix et un kilogramme de résine. Après
un quart d'heure d'ébullition de ces substances, vous en emplissez
votre pot de terre, et vous retendez à profusion en le versant même
par parties et l'étendant rapidement au pinceau, par un soleil
ardent, et le goudron le plus chaud possible. Une seconde personne
a côté de vous, munie d'un tamis rempli d'un bon ciment de tuile
pulvérisée, tamise et recouvre de ciment, à une épaisseur d'envi-
ron 7 mill., le goudron, que vous étendez de manière à ce que l'on
puisse marcher sur le toit sans que le goudron s'attache aux chaus-
sures.
, Lorsque vous avez terminé cette opération, vous prenez une
batte quadrilatère en planche de ô centimètres d'épaisseur, de
•iO centimètres de longueur sur 33 centimètres de largeur, emman-
t'hée dans son milieu d'un bâton de l"» 20 de longueur.
Vous battez modérément et à plusieurs reprises toute l'étendue
du toit, pour incorporer ainsi profondément et solidement le ciment
dans le goudron.
Vous laissez la dessiccation de ces matières s'opérer pendant deux
ou trois jours, et un matin, avant que le soleil ne soit très-élevé,
vous prenez un balai et balayez tout le ciment qui n'a pu adhérer
au goudron. Vous donnez, dans des circonstances absolument sem-
blables, une seconde couche de cette préparation, telle quelle vient
d'être présentée et décrite, et la couverture est entièrement ter-
minée, lien résultera une plate-forme régulière, unie, d'une teinte
rougeàtre ou brunâtre, légèrement mélangée de l'une et de l'autre,
dont la composition offrira en peu de temps la dureté de la pierre,
et par conséquent sa solidité (l).
Ce toit, tel qu'il vient d'être décrit, a répondu complètement
depuis deux ans à ce qu'on en attendait , c'est-à-dire qu'il n'a pas
éprouvé la moindre aHération : ce qui me laisserait croire que je
ne suis pas éloigné d'avoir atteint le maximum de solidité cherché.
Cependant, s'il arrivait qu'il dût subir quelques additions ou per-
fectionnements subséquents pour satisfaire pleiuement aux vœux
de la Société centrale d'Agriculture de Marienwerder et de mes ho-
norables collègues d'Altmark, je les prie de croire qu'ils pourront
toujours compter sur mes efforts pour répondre à leurs désirs.
A. LEFRANÇOIS,
Architecte de Jardins, membre collecteur de
la Société agronomique d'Altmark.
(1) En donnant à la couverture une couleur blanchâtre, au moyen d'une der-
nière couche de sable blanc < on trouverait l'avantage de maintenir la chaleur
de la terrasse à une température moins élevée, condition surtout importante
lorsqu'on doit habiter la pièce immédiatement au-dessous de la terrasse. A dé-
faut de sable blanc, on pourrait se servir de chaux.
[Note du Directeur delà Bévue.)
DE X.A KESTAUHATION PROJETEE DES VITRAUX
DE CHARTRES
Nous donnons ci-dessous une lettre de M. Arthur Martin re-
lative au projet de la remise en plomb des vitraux de la cathédrale
de Chartres. Les longues et persévérantes études que M. Arthur
Martin a faites de nos anciennes verrières, et l'admirable ouvrage
qu'il a publié de concert avec M. Charles Cahier sur les vitraux de
Bourges, donnent un grand poids à sa parole. Quant à notre propre
sentiment , ceux de nos lecteurs qui se rappellent notre article sur
la restauration projetée de Notre-Dame de Paris { Voy. vol. iv,
col. 137) le connaissent déjà. Nous pensons que dans l'état actuel
de nos connaissances des arts du Moyen-Age, on ne saurait ap-
porter trop de réserve et de prudence dans tous les travaux de
restauration. Avant d'oser substituer aux feuillets perdus d'un
vieux livre des pages nouvelles, sous prétexte d'achever l'œuvre,
il faut au moins comprendre la langue dans laquelle ce livre est
écrit. Or, que connaissons-nous, par exemple, des principes de la
symbolique qui dirigeait les travaux du sculpteur, du peintre ver-
rier et de l'architecte du Moyen-Age? Où sont les études sérieuses
qu'on a faites sur les rapports numériques des membres principaux
des églises gothiques? Quels étaient les principes géométriques
adoptés par les tailleurs de pierres dans la construction des voûtes?
Lesquels de ces principes étaient adoptés indifféremment par toutes
les écoles de tailleurs de pierres, et lesquels caractérisaient plus
spécialement telle ou telle école? A quels signes extérieurs recon-
naît-on les travaux exécutés par les différentes écoles de tailleurs
de pierres? etc., etc., etc., etc. Soyons donc francs, et avouons
que les plus avancés de nous en sont encore à l'alphabet, et que,
dès lors, la prudence au moins est une nécessité, chaque fois qu'il
s'agira de remanier les trésors artistiques de nos édifices gothiques.
Voici la lettre de M. Arthur Martin :
Monsieur le directeur,
La nouvelle de la mesure si grave que le ministère des Cultes
est, dit-on, sur le point d'adopterau sujet des vitraux de Chartres,
inspire un juste effroi aux amis de plus en plus nombreux des
vieux monuments de notre pays. Ni les bienveillantes intentions
du ministre, ni la probité connue du manufacturier, ne sauraient
changer la nature des choses et rassurer les esprits. Il est indubi-
table pour quiconque sait les difficultés pratiques d'une remise en
plomb de nos antiques verrières, qu'elle ne peut s'opérer sans de
nombreux accidents et des pertes a jamais regrettables. Un très-
87
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
86
grand nombre de verres importants brisés aujourd'hui en plusieurs
morceaux, mais solidement retenus par les réseaux de plomb, se-
ront définitivement perdus ; un nombre très-probablement plus
grand encore se briseront pour la première fois dans le transport,
ou entre les mains du metteur en œuvre. Je parle de choses que
j'ai déjà vues. Enfin le besoin d'établir quelque harmonie de ton
entre les parties d'une même verrière rendra de nouveaux sacrifi-
ces indispensables; et pour ce qui est de l'arrangement des verres
conservés et du renouvellement des verres détruits, que n'a-t-on
pas à craindre? Comment l'artiste verrier reproduira-t-il avec vé-
rité une foule de scènes ou de détails de scènes dont le sens lui
restera caché? Comment sans de longues études, dont le loisir est
impossible au milieu des opérations commerciales, découvrira-t-il
le secret de tant de pages mystérieuses dont la science a jusqu'ici
négligé l'explication? Ne faut-il pas à ceux qui font de ce genre
d'études leur occupation habituelle, de longues heures, souvent
de longs jours d'une patiente observation et de laborieuses re-
cherches, pour parvenir à se rendre compte soit des formes altérées,
soit de l'énigme qu'elles recèlent ? Je demande si des vitraux re-
nouvelés comme on l'entend auront plus de mérite désormais,
aux yeux de la science, que des miniatures repeintes et des sculp-
tures repiquées. De grandes valeurs monumentales dont la France
a droit d'être fière, puisque aucune contrée de l'Europe ne possède
sur ce point le vingtième de ses richesses, auront donc pour jamais
disparu de notre sol. En vérité, il est permis de s'en émouvoir, et
il est trop juste de faire un appel à l'opinion pour conjurer le
nouvel orage qui menace, plus sérieusement que ceux de l'atmo-
sphère, les trésors de théologie, d'histoire, de poésie légendaire et
symbolique que nous admirons à Chartres.
J'ai trop longtemps contemplé, examiné, étudié les verrières de
la plupart de nos cathédrales, pour n'avoir pas le droit d'avoir
une opinion ; et mon amour pour ces peintures , où se réflé-
chissent nos vieux âges, me fait éprouver le besoin de l'exprimer.
Non, je ne pense pas qu'il soit si urgent d'appliquer à nos monu-
ments chéris d'aussi violents remèdes; je ne pense pas qu'il y ait
lieu d'acheter si cher, près de 300,000 francs, des restaurations
qui ressembleront tant à des ruines aux yeux de tous les connais-
seurs.
J'ai la conviction qu'avec de modestes dépenses confiées aux an-
tiquaires de la localité, à ceux qui auront nécessairement pour
leur cathédrale quelque chose de l'affection qu'inspire l'héritage
paternel, et qui seraient heureux d'offrir une collaboration à la
fois habile et désintéressée ; j'ai la conviction que l'on pourrait
pourvoir à tous les besoins urgents, et conserver nos verrières au
moins pour un demi-siècle. J'ai encore devant les yeux un esti-
mable verrier attaché à celle de nos cathédrales qui est la plus
riche après celle de Chartres. Il jugeait d'après l'expérience, et
soutenait avec connaissance de cause que quinze années d'un
traitement de 800 francs lui eussent suffi pour renouveler tous les
plombs de toutes les verrières. Qu'on n'en doute pas, les chiffres
effrayants que l'on a prononcés décroîtraient prodigieusement si
l'on ne dédaignait pas les mesures plus simples conseillées d'ail-
leurs par certaines convenances envers les contrées, aussi bien que
par la prudence et par l'économie.
Au fait, que faudrait-il avant tout? Des fers renouvelés, de sim-
ples consolidations, de pauvres verres de couleur teints dans la
pâte à la place des verres blancs. Je dis uniquement des verres
teints, parce que ma pensée bien réfléchie est qu'il faut en effet
préférer, pour masquer les vides peu considérables, des verres qui
s'harmonisent par leurs couleurs avec le reste du tableau, sans
tromper par une restauration trop habile l'œil de l'observateur et
dévoyer la science. Il est clair que ce système ne saurait être snivi
quand il s'agit de produire des médaillons nouveaux ; jnais si ces
nouveaux médaillons devaient se confondre par leur effet avec le»
vieilles peintures, que des inscriptions mettent en garde contre
l'erreur en même temps qu'elles serviront à donner bon exemple
à la postérité. Que faudrait-il encore pour nos verrières? Des gril-
lages extérieurs tels que la cathédrale de Bourges a le bonheur
d'en posséder. Et cette précaution, ce n'est pas seulement contre
les vents et la grêle qu'elle est devenue indispensable, mais bien
aussi contre les insultes de l'enfance, moins habituée qu'en d'autres
temps à respecter les choses belles et les choses saintes.
Si le ministère des Cultes a des fonds à consacrer en faveur de
nos cathédrales, ces grandes splendeurs monumentales de la
France, que les amis de l'art religieux qui ont quelque accès dans
ses bureaux se fassent donc un devoir de l'éclairer sur les dépenses
vraiment utiles et pressantes. Non, ce que les besoins actuels ré-
clament, ce ne sont pas ces restaurations qui se poursuivent de-
puis quelque temps aux portails sculptés de nos basiliques; res-
taurations trop souvent de pur caprice, dont l'inévitable résultat
est d'enlever aux monuments une partie de leur signification an-
tique, et par conséquent de leur prix ; ce ne sont pas les désas-
treux projets d'une remise en plomb générale, telle que celle qui
va peut-être ruiner Chartres, qui menace Bourges, que Lyon a
subie, et qui a déjà enlevé toute valeur archrélogique à une des
verrières de Strasbourg; mais la simple conservation des édifices;
et, certes, il en est beaucoup dont l'existence est gravement com-
promise.
Que l'on détruise, si l'on veut, les constructions ou les accessoi-
res en désaccord avec les monuments, mais seulement lorsque ce»
accessoires n'ont par eux-mêmes aucune valeur d'époque ; encore
faut-il redouter ici les erreurs des architectes ou des antiquaires,
d'autant plus tranchants, on le sait, qu'ils sont moins instruits, l'ar
exemple, que l'on fasse disparaître à Notre-Dame de Paris les
malencontreux marbres qui masquent les colonnes de l'abside;
que l'on remplace l'insignifiant autel ; que l'on dégage l'arcade
centrale et la partie supérieure de celles du chœur, obstruées par
des tableaux dont la place serait mieux ailleurs, qui n'applaudirait
à une telle mesure? Mais enlever le monument de Louis XIII, la
boiserie de Louis XIV, ce serait frapper de grands souvenirs his-
toriques et détruire des valeurs d'art.
Veut-on favoriser l'art moderne , rendre nos cathédrales plus
dignes du vrai Dieu et d'un grand peuple? En vérité, l'on sera
moins en peine de trouver des thèmes que de rencontrer le génie
qui devrait les remplir. Qui empêcherait de faire un appel à la
peinture sur verre pour embellir les fenêtres veuves de leurs vieux
vitraux? Que ne propose- t-on de solennels concours pour les chai-
res à prêcher, les autels, et toutes ces décorations indépendantes
de l'édifice, mais indispensables, et honteusement livrées jusqu'ici
aux exploitations du commerce? On pourrait presque dire que
l'orfèvrerie religieuse n'existe pas à l'état d'art. Et pourtant qu'il
serait aisé, pour peu qu'on le voulût, de réaliser, avec la moitié
des fonds qui se consument de la manière que nous avons dit,
toutes ces merveilles de magnificence de l'orfèvrerie du Moyen-
Age, qu'il nous faut aller aujourd'hui chercher péniblement à tra-
vers l'Europe 1 C'est après avoir mesuré, dessiné et peint les plus
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
90.
magnifiques ouvrages de ce genre, qui soient, si je ne me trompe,
conservés aujourd'iiui, que j'exprime ma conviction profonde. Oui,
nous pourrions, dans des conditions de dépenses tout à fait acces-
sibles, reproduire ces ensemlîles où le repoussé, la ciselure, les
nielles, les filigranes, les pierres, les cristaux et les émaux sédui-
sent tout à la fois par l'élégance des formes, l'harmonie des cou-
leurs, la variété des contrastes, et les graves ou naïves pensées
des représentations. Quelle mine féconde de motifs d'art fournirait
à l'architecte, au ciseleur, à l'émailleur, à l'orfèvre, tout cet anti-
que ameublementdenos temples, dont les noms eux-mêmes ont en
partie disparu? Pourquoi ne songerait-on pas à faire reparaître au
milieu de nous les vastes couronnes de lumière telles qu'on les
conserve encore à Aix-la-Chapelle et à Hildesheim ; et les ambons
revêtus de marbre et de fines mosaïques comme en Italie, ou de
plaques de métal doré enrichi de pierres, comme en Allemagne;
et les ciborium s'élançant avec majesté vers les hautes voîites et
couronnant l'autel de leurs arcades dorées; et les devants d'autel
de métal savamment ouvragés ; et les couvertures d'évangéliaires,
où l'or et les pierres relèvent la pâleur des mystérieux ivoires; et
ces croix processionnales couvertes de filigranes et d'emblèmes;
enfin ces châsses émaillées qui s'élevaient autrefois en pyramide
derrière les grands autels, et dont les pierreries étincelaient aux
rayons convergents des vitraux peints de l'abside? Espérons que
toutes ces belles choses des temps antiques seront de nouveau
connues, c'est dire qu'elles seront goûtées ; espérons que, grâce
au zèle des antiquaires qui exhument en ce moment tous ces sou-
venirs si longtemps oubliés, les artistes, guidés par des représenta-
tions et des descriptions fidèles, sauront créer pour l'art et pour la
piété des beautés et des jouissances nouvelles. Le comité des mo-
numents attaché au ministère de l'Instruction publique peut rendre
à cet égard de vrais services au pays à mesure que s'accroîtra son
influence. Nous formons le vœu q;tie le ministère des Cultes, chargé
seul de nos cathédrales, juge également à propos de s'entourer
des lumières qu'apportent les hommes spéciaux, d'autant plus
qu'il s'agit d'études toutes nouvelles, et en faveur desquelles le
gouvernement n'a pas encore créé d'enseignement public.
J'oserai émettre un autre vœu : c'est qu'on rende au clergé ca-
tholique la justice de l'entendre dans sa propre cause, parce qu'il
est une foule de questions appartenant au dogme et à la liturgie
où le prêtre est évidemment le seul homme qui ait compétence.
Recevez, etc.
Aethub MARTIN.
ï!r»o
OITTERTUIIE DU UTOWEAU MUSÉE D'ANTIQUITÉS
NATIONAI.es a Ii'HOTEI. de CIiUNT.
Aplusieurs reprises déjà nous avons eu l'occasion d'entretenir nos
lecteurs du Musée d'archéologie nationale, projeté au palais des
Thermes et à l'Hôtel de Cluny. Ce Musée a reçu aujourd'hui un
commencement de réalisation. Une partie des salles basses de l'hô-
tel, les chapelles basse et haute, quelques pièces du premier étage,
et entre autres la chambre dite de François I^r, vont être incessam-
ment ouvertes au public, qui pourra alors étudier à son aise la pré-
cieuse collection de M. Dusommerard. Cette collection, on se le rap-
pelle, fut acquise l'an dernier par l'État, ainsi que l'hôtel, à la suite
du rapport de M. Arago, dont nous reproduisîmes les passages les
plus intéressants. [Voyez vol. IV, col. 216.)
Nous ne reprendrons point ici l'histoire du palais des Thermes
et de l'hôtel de Cluny. On la retrouvera complète, à peu de chose
près, dans le rapport du savant député. Nous rappellerons seule-
ment que le palais des Thermes, bâti par Constance Chlore, à ce
que l'on croit, fut successivement habité par les Césars et par plu-
sieurs rois de la première et de la seconde race; .sans doute il
avait été déjà singulièrement modifié par ces derniers, et il le fut
probablement plus encore par ceux aux mains destjuels il passa,
après qu'il eut été donné par Philippe-Augusteà Henri, son cham-
bellan, en 1218. Il devint la propriété des abbés de Cluny seule-
ment en 1 340, époque à laquelle Pierre de Chasius, abbé de Cluny.
en fit l'acquisition, acquisivit domum quœ dicilur palatium de Ter-
minis, seu de Thcrmis Pariéiis, ainsi que le dit la chronique de
Cluny. Située à quelques pas de leur collège de la place Sorbonne,
cette propriété convenait à merveille aux abbés pour en faire leur
pied-à-terre pendant leur séjour à Paris. L'un d'eux, Jean de
Bourbon, commença la construction de l'hôtel actuel ; mais sa
mort, arrivée en 1485, interrompit les travaux pendant cinq ans.
Ils furent repris en 1490 par Jacques d'Amboise, abbé de Cluny,
évêque de CIcrmont , frère du fameux cardinal ministre de
Louis XII. Tout porte à croire que les travaux n'étaient pas au-
core bien avancés quand Jacques d'Amboise les fit reprendre. Par-
tout dans l'hôtel on retrouve l'écusson des d'Amboise surmonté
de la crosse pastorale, et dans plusieurs parties extérieures, entre
autres sur les murs de la grande tourelle de l'escalier principal,
dans la cour, on voit l'écaillé du pèlerin, attribut de saint Jac-
ques, patron du frère du cardinal.
L'idée de faire avec les ruines du palais romain et l'hôtel de
Cluny un musée national qui put combler le vide laissé par la des-
truction du musée des Petits-Augustins, appartient à M. Albert
Lenoir, qui exposa au Louvre, en 1833, un projet de réunion de
ces deux édifices. Cette réunion s'opérait au moyen d'une galerie
de style roman , seule construction à élever, et dont la place était
tout naturellement marquée dans la petite cour qui sépare la
grande salle des Thermes de l'hôtel de Cluny lui-même, et qui est
aujourd'hui encombrée d'ignobles constructions en plâtre servant
d'ateliers de lithographie, etc.
Chargé dc^à des travaux de consolidation du vieux palais des
Césars, M. Albert Lenoir devint tout naturellement l'architecte de
l'hôtel de Cluny après son acquisition par l'État, et fut ainsi ap-
pelé à réaliser au moins une partie du plan qu'il a exposé il y
a onze années. Espérons qu'on ne tardera pas à compléter l'œuvre,
et qu'on profitera des heureuses dispositions qu'offre l'hôtel de
Cluny, non-seulement pour exposer le plus avantageusement pos-
sible la belle collection Dusommerard, mais aussi pour montrer
aux artistes et au public l'image de ce qu'était l'intérieur de l'ha-
bitation d'un grand seigneur au commencement de la Renaissance.
M. Albert Lenoirn'a eu à sa disposition, pour commencer, qu'un
crédit assez limité (20 000 francs). Il fallait d'abord songer à con-
solider les parties de l'édilice qui, sans donner précisément de l'in-
quiétude, pouvaient néanmoins empêcher l'aménagement du musée
Dusommerard. Tels étaient les plafonds du rez-de-chaussée, dont
les poutres s'étaient brisées. Ces poutres avaient été soutenues
dans toute leur longueur par des murs de refend qu'on avait bâtis
pour approprier les grandes pièces de l'hôtel aux besoins des diffé-
rentes professions qui en occupèrent successivement les diverses
91
REVUK DE L'ARCHITECTUBE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
92
parties. L'architecte a dû enlever ces murs, et les poutres se se-
raient certainement affaissées sous la charge des planchers, s'il n'a-
vait pris soin de les soutenir par des piliers qui sont en bois et
auxquels il a donné une forme octogonale et appropriée au style de
l'édifice.
Tous les métiers qui ont quelque rapport avec l'imprimerie sem-
blaient pour un temps s'être donné rendez-vous à l'hôtel de Cluny,
et réunir leurs efforts pour le détruire; mais, grâce aux soins et au
luxe qui avaientprésidé à sa construction, il a pu arriver jusqu'à
nous, et les mutilations dont il a été victime sont généralement plus
uravcs à l'intérieur qu'à l'extérieur. Néanmoins, il n'a pu être
soumis à tant de vicissitudes, dont la plus cruelle fut sans doute la
crise de 93, sans avoir bien souffert dans ses détails.
A peine aujourd'hui ébauchée, la restauration entreprise par
M. Albert Lenoir a déjà livré bien des secrets de l'état primitif.
L'hôtel de Cluny, comme beaucoup de nos lecteurs le savent,
iorme trois des côtés d'un quadrilatère dont le quatrième, du côté
de la rue des Mathurius, est fermé par un mur d'environ 6 mè-
tres de hauteur. On a retrouvé dans le haut de ce mur des restes de
créneaux, et un peu au-dessous, des traces et des morceaux de sup-
ports en fer qui ont dû porter une sorte de chemin de ronde en
bois, d'où il eût été facile de faire vigoureuse résistance en cas
d'attaque par la rue des Mathurins. Une petite porte percée au pre-
mier étage de l'aile droite de l'hôtel, à la hauteur même du che-
min de ronde, et dont l'ouverture biaise serait, dans le cas con-
traire, difficile à expliquer, semble avoir été faite pour conduire à
cette espèce de balcon intérieur.
Ces traces de dispositions militaires, — on en retrouve aussi
et de mieux accusées encore à l'hôtel de Sens, à la maison de Jac-
ques Cœur, à Bourges, etc., — sont parfaitement justifiées par les
besoins de l'époque à laquelle elles remontent. Il fallait alors faire
soi-même la police et défendre souvent sa demeure contre les atta-
ques nocturnes, ou même, pour peu que l'on fût puissant et qu'on
eût des ennemis également puissants, contre des entreprises quasi-
régulières que la royauté elle-même n'avait pas toujoui-s la force
ni peut-être le vouloir de réprimer.
D'un dessin varié et d'une extrême délicatesse, la galerie qui
règne le long du toit, du côté de la cour d'honneur dont nous ve-
nons de parler, se trouvait rompue en plusieurs endroits, et partout
les jours en avaient été bouchés avec du plâtre ; elle court mainte-
nant sans interruption au-dessus de la corniche, et l'on peut en ad-
mirer les gracieuses découpures.
Au rez-de-chaussée, en jetant à terre les cloisons modernes, on
a trouvé qu'originairement il existait près de la grande tourelle,
dans le corps de logis principal, une grande salle communiquant
avec les salles voisines, plus petites, par des portes à cintre sur-
baissé , ornées de moulures gothiques. Le dessus des portes est
décoré des armoiries des d'Amboise, aussi bien que les corbeaux
qui soutiennent l'extrémité des poutres.
Le premier étage n'est point encore restauré, et ne sera livré que
plus tard au public. Il reproduit la distribution du rez-de-chaussée :
une grande pièce centrale communiquant à d'autres salles plus
petites par des portes ornées. On a retrouvé dans ce premier étage
les restes de la décoration d'une grande cheminée ainsi que des
fragments de ses sculptures.
La pièce la plus importante de l'édifice, la chapelle haute, est
dans un état de conservation des plus heureux ; mais il n'en était
pas de même de la chapelle basse. Le sol de cette chapelle avait
été considérablement exhaussé, des sculptures avaient été brisées,
des consoles et une colonnette entière enlevées ; un petit escalier a
vis, conduisant à la chapelle haute, avait été coupé, et les débris
de sa rampe, taillée à jour, avaient servi, ainsi que plusieurs sta-
tues, à bâtir un mur dans l'épaisseur duquel il se perdait. Nous
aurons tout dit sur ces dévastations si nous ajoutons que cette
pièce avait servi dans le temps de salle de billard. Aujourd'hui, le
sol primitif a été remis à découvert, on en a retrouvé le dallage
en partie conservé; l'escalier et sa jolie rampe ont été restaures,
mais il reste encore à reparer les sculptures. Quant aux statues
retrouvées dans la muraille moderne, ce sont sans doute celles
des membres de la famille d'Amboise, qui figuraient dans la cha-
pelle haute, et dont parle Piganiol de la Force dans sa Description
de Paris (1) : « Contre les murs, dit-il, sont placées par groupes,
en forme de mausolées, les figures de toute la famille de Jacques
d'Amboise (2) et celle du cardinal ; la plupart sont à genoux avec
des habillements de leur siècle, très-singuliers et bien sculptés. »
Ces statues portent des traces parfaitement conservées de peintu-
res et de dorures, et, chose digne de remarque, on y reconnaît aisé-
ment que, pour obtenir un certain effet de rouge brillant, on a rom-
mencé par dorer les parties à peindre ; puis on a passé par la-des-
sus une espèce de vernis rouge assez transparent pour que le
brillant de l'or se fit jour au travers. On ne reconnaît pas immé-
diatement la présence de l'or a l'aspect seul de la peinture, mais
une fois que les parties écaillées ont révélé le secret de l'effet, l'œil,
instruit pour ainsi dire du procédé, retrouve aisément l'éclat de
l'or combiné avec la couleur propre du vernis.
Dans la salle dite de François 1", voisine de la chapelle haute,
et dont la croisée s'ouvre, comme celles de la chapelle, sur le
jardin derrière l'hôtel, M. Albert Lenoir a retrouvé quelques fai-
bles traces d'une décoration peinte qu'il a reproduite et complétée
dans le même style. Ces peintures offrent une analogie frappante
avec les peintures antiques que l'on voit dans les restes des habi-
tations romaines en Italie, et elles pourraient bien être l'œuvre de
ces artistes italiens que Charles VIII et Louis .\II firent venir en
France à la suite de leurs guerres d'Italie. Du reste, on retrouve le
chiffre de Charles VIII sur le chapiteau du pilier central de la cha-
pelle basse.
En attendant que la galerie romane, entre le palais des Ther-
mes et l'hôtel de Cluny. reçoive son exécution, M. Albert lenoir
a établi un escalier provisoire qui conduit dans la grande salle
basse des Thermes et qui permet de visiter a la fois les deux édifices.
Les travaux que l'on exécute à l'hôtel de Cluny ont à nos yeux
un double intérêt: ils doivent doter la ville de Paris d'un musée
dont l'importance et l'utilité sont aujourd'hui bien reconnues, et
rendre à son état primitif une habitation particulière qui date d'une
des époques les plus intéressantes de l'architecture privée. >e
fût-ce qu'à ce seul titre, Ihôtel de Cluny mériterait déjà toute I»
sollicitude du gouvernement.
Alphonse de CALONiVE.
(1) Toiii. VI, pag. 306.
(2) La chapelle, qui n'est pas bien grande, dcvaU en être encombrée; car ils
étaient dix-sept enfants. Ces statues étaient posées ti une certaine hauteur sur
un corps de moulures très-saillant et orné.
93
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
9k.
SOCIÉTÉ CENTRALE DES ARCHITECTES FRANÇAIS.
SÉANCE GÉNÉaALE DU DIMANCHE ta JANVIER 1844.
Présidence de M. Bloiiet.
La séance est ouverte  midi, en présence de plus de soixante membres;
dans le cours de la séance, leur nombre s'élève à cent deux.
Il est d'abord donné lecture de la lettre suivante :
A mestieurs les Membres de la Société centrale des Architectes.
« Paris, 13 janvier tSH.
II Messieurs,
« Obligé de retourner à Lyon pour y diriger cl surveiller les travaux du l'a-
lais-de-Justice, j'éprouve le regret de ne pouvoir partici|)crà vos travaux et à vos
délibérations ; je sens même une sorte de confusion de n'êlre pas un agent plus
directement utile de l'œuvre d'organisation que nous avons entreprise. Je dois
être d'autant plus sensible aux témoignages d'intérêt et d'affection que vous
m'avez donnés en me nommant de nouveau votre président.
«Veuillez, messieurs, en recevoir mes sincères remercinients, et rester bien
persuadés que, du jour où vous jugerez utile de désigner pour cette fonction
un autre de nos lionorables confrères, vous me trouverez toujours heureux de
porter simplement le titre de membre de la Société centrale.
K Je suis, messieurs et honorables confrères, avec la plus haute considéra-
tion, votre bien dévoué et affectionné confrère.
Cl BALTAno père. »
Le secrétaire principal fait remarquer que M. lîaltard ne reste pas aussi
étranger aux travaux de la Société qu'il a la modestie de le penser. Le dernier
conseil a eu la satisfaction d'être présidé par lui ; et, à Lyon, il fait partie de
la Société académique d'Architecture, formée à l'instar de la Société centrale,
et ayant le même but.
Il est également donné lecture d'une lettre de M. Herbault, membre non
résidant, demeurant à Amiens, qui expose plusieurs idées relatives aux publi-
cations que la Société pourrait entreprendre, etc. Le secrétaire principal rap-
pelle que déjà plusieurs collègues ont adressé des lettres contenant des idées
utiles; il propose d'engager le conseil à en faire l'examen. Cette proposition
est adoptée.
Le président communique les lettres d'adhésion de MM. A. Leclerc et Huvé,
membres de l'Inslilut ; Godeboeuf, 2" grand prix et prix départemental ; Dela-
croix, Doisnard et Grillot, architectes des départements du Donbs, de la Man-
che et des Vosges, tous admissibles de droit, les trois premiers à titre de mem-
bres résidants (et déjà classés à ce titre dans les sections), et les trois autres à
titre de membres non résidants. Il proclame leur admission définitive, ce qui
porte, dès à présent, le nombre total des membres de la Société à deux cent
vingt-sept.
Compte-rendu par le secrétaire principal sur les mesures d'installation et
autres opérations du bureau et du conseil pendant le premier semestre
de l'exercice 1843-1844-
Il Messieurs,
Il Les statuts portent (art. 33) qu'il vous sera rendu un compte détaillé des
travaux du bureau et du conseil à la fin de chaque année ; mais, nos exer-
cices devant courir du \" juillet au 30 juin, c'est nécessairement après cette
<lernière époque que ce compte général devra vous être présenté. Toutefois,
nous avons pensé que cette forme pourrait également être employée à la fin de
chaque semestre pour vous faire connaître les opérations du bureau et du con-
.«eil pendant ce laps de temps, et qu'elle devrait surtout l'être cette première
fois, où il importe de nous informer des mesures d'installation dont nous avons
eu à nous occuper.
u Aussitôt après sa constitution, votre bureau s'est empressé de pourvoir à
l'expédition, tant des lettres qu'il était nécessaire d'écrire à chacun des fonc-
tionnaires élus par vous pour leur annoncer officiellement leur nomination,
que de celles que vous aviez jugé vous-mêmes devoir être envoyées aux mem-
bres des précédentes réunions préparatoires qui ont amené la formation de la
Société.
«Quant i celles que vous aviez également votées à MM. les ministre de l'In-
térieur, des Travaux Publics et du Commerce et à M. le préfet de Police,
pour les remercier de leur coopération à l'approbation de la Société, et leur
donner connaissance de sa constitution définitive et de sa composition, elles
ont dû être écrites au nom du conseil, comme mandataire de ta Société et
ton organe auprès de l'autorité (aux termes de l'art. 45 des statuts) ; et, sur
les propositions du bureau, il en a été adressé également pour faire connaître
la constitution et la composition de la Société, 1° aux divers autres ministres;
2° à M. le préfet du déparlement; 3° i M. le président du conseil général des
bâtiments civils; 4" â M. l'intendant-général de la liste civile; 5" à MM. les
présidents et vice-présidents des deux Chambres, du Conseil d'État , de la
Cour des Comptes, de la Cour de Cassation, de la Cour royale, du Tribunal de
première instance et du Tribunal de commerce; 6" aux présidents de chacune
des académies qui composent l'Institut; 7° enfin aux présidents de la Société
d'Encouragement (dans le local de laquelle vous avez tenu vos premières séan-
ces), de la Société libre des Beaux-Arts et de la Société royale des Antiquaires
de France.
Il H a été répondu à votre président par M. le secrétaire perpétuel par inté-
rim de l'Académie des Inscriptions et Belles-Letlrej, pour lui témoigner, au
nom de l'Académie, l'intérêt qu'elle prend à la formation de la Société, et l'es-
poir que nous ne négligerons pas les recherches qui se rattachent a l'histoire
de l'art, et que nous communiquerons à l'Académie nos travaux de ce genre. .
Il Vos statuts et règlements ont en outre été publiés par M. Daly, dans la
Revue de l'Architecture, et par M. Sageret,dansr.4rmuatrcdej bâtiments. Ce
dernier y a également reproduit la liste complète des membres de la Société.
II L'un des premiers soins de votre bureau avait été également de préparer
pour cet exercice un budget qu'il a communiqué au conseil dès sa première
séance, et dont nous constatons souvent ici les résultats totaux :
Il Vos recettes s'élèveront à 6531 fr. » c.
(1 Vos dépenses à 2600 »
Il Différence 3631 fr. n
Il Dont une partie pourra être placée en fonds de réserve et une partie ap-
pliquée aux dépenses extraordinaires que vous pourrez approuver sur des pro-
positions spéciales. Parmi les dépenses ordinaires portées dans ce budget, est
comprise la location de ce local que votre conseil a cru devoir être nuiotenu,
au mdins provisoirement, et pour lequel un engagement a en conséquence été
consenti pour le courant de cet exercice.
II Le compte qui vous sera rendu dans cette séance par M. le secrétaire-tré-
sorier, vous fera voir que les prévisions de votre budget sont déjà en partie réa-
lisées.
II Votre conseil a fixé ses réunions au deuxième jeudi de chaque mois ; et sa
première préoccupation a dû être de satisfaire à l'art. 44 des statuts, qui veut
qu'aucune délibération 7>e puisse être prise qu'en présence de deux tiers au
moins du nombre total de ses membres. Diverses mesures avaient été propo-
sées à cet effet; mais le conseil a pensé, et l'événement a justifié cette opinion,
qu'il suffirait, quanta présent, et des convocations motivées du président, et
de la tenue exacte de feuilles et de tableaux de présence, exigés d'ailleurs
pour toutes vos réunions par l'art. 8 des statuts. Ces tableaux sont placés sous
vos yeux.
Il Le conseil a particulièrement été occupé, pendant cette première session,
dos demandes en e/ection, qui ont été présentées au nombre de vingt-quatre (I);
vous avez été appelés vous-mêmes à les examiner préparatoirement en sections,
pt vous allez avoir à vous prononcer par un scrutin définitif.
Il Plusieurs autres objets ont également occupé le conseil.
II L'un de nos collègues, M. Brunet-Debaines, a adressé deux propositions.
Il La première exprimait le désir que, chaque année, un tableau indicatif
des membres de la Société fut déposé dans les différentes cours et tribunaux
ainsi que chez tous les officiers ministériels et dans les administrations
auxquelles la connaissance peut en importer. Le conseil a pensé que ce vœu
était rempli, du moins autant que le permet la situation actuelle de la Société,
par l'envoi, précédemment indiqué, des statuts et de la composition de la So-
ciété, aux présidents et vice-présidents des différents tribunaux; envoi qui
pourra être suivi de celui de la liste générale, que vous devez publier chaque
année aux termes de l'art. 2 des statuts.
II Par sa seconde proposition, notre collègue émettait le vœu que la Soclécé
arrivât à des travaux effectifs, et que, pour en raeiliter les moyens, il fill créé
({) Nota. Une vingt-cinquième demande, celle de M. Pétiaux, architecte de Va-
lenciennes, est parvenue trop tard pour pouvoir être eiaminée dans la dernière
réunion des sections ; elle leur sera soumise dans leurs prochaines réunions.
95
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
90
des commissions spéciales d'art pratique, de voirie, de conlenlieiix, ainsi que
pour ce qui concerne les honoraires des arcliilcctes.
i( Le conseil a trouvé, dans les développements de celte proposition, des ob-
servations utiles et qu'il importera de ne pas perdre de vue; mais il a pensé
que la création de commissions spéciales permanentes introduirait une nou-
velle organisation dans celle qui résulte des statuts et règlements, lesquels
laissent d'ailleurs au conseil et à la Société la faculté de former au besoin les
commissions qui pourraient être nécessaires pour l'examen de telles ou telles
questions.
K C'est ce qui a en effet eu lieu pour une question de mitoyenneté, dont
l'examen a été proposé par votre secrétaire principal. Comme il importait de
réunir, pour l'examen d'une question de cette nature, tous les documents que
pourraient donner les différeuts membres de la Société, le conseil a engagé les
sections à en faire un examen préparatoire et à désigner chacune un membre
pour faire partie d'une commission spéciale (1) qui, après un examen appro-
fondi, communiquera son rapport au conseil.
Cl Notre collègue M. Pcllieux, sur la présentation qui lui a été faite, ainsi
qu'à vous tous, du diplôme voulu par l'art. 3 des statuts, a émis le regret qu'il
ne portât que la signature d'un de vos vice-présidents, en l'absence de notre
vénérable président et de votre secrétaire principal, et le désir que, ainsi que
cela avait effectivement eu lieu pour les lettres de nominations primitives, ce di-
plôme portât les noms de tous les membres du bureau.
« Telles avaient en effet été aussi les premières vues de votre bureau ; mais le
conseil avait remarqué que, ce diplôme n'ayant qu'un caractère provisoire,
ces deux signatures suffiraient quant à présent. Il n'a pu qu'apprécier, du
reste, les considérations exprimées dans la lettre de M. Pellieux, el il se
propose d'y porter la plus grande attention lors de l'examen qu'il compte
faire, dans l'une de ses plus prochaines séances, des mesures relatives i une
sorte de concours auquel pourraient être appelés les différents membres de
la Société pour l'étude d'un diplôme définitif Ainsi que d'une medaiHe de la
Société.
«Un membre du conseil, M. Moreau, lui a soumis, dans sa dernière séance,
une proposition de la plus haute importance, puisqu'elle concerne l'ensei-
gnement. Forcé de s'occuper de préférence des objets qui devaient vous être
soumis aujourd'hui, le conseil a du ajourner à sa prochaine séance l'cvamen
de cette proposition.
« Le temps lui a également manqué pour entendre la lecture de questions
adressées par un autre membre du conseil, M. Danjoy, relativement i la dé-
linilion qu'on doit attacher aux mots architecte, architecture, etc., et aux
inductions qu'on doit en tirer. Ce sera également l'objet des prochains tra-
vaux du conseil.
« Sur la proposition de notre collègue M. Girard, deux propriétaires ont,
par un compromis, chargé votre président de désigner l'un de vous, au ju-
gement duquel ils entendent s'en rapporter comme arbitre, pour la solution
de plusieurs questions relatives à un compte de mitoyenneté. Votre président
se propose de désigner à cet effet M. Paul Lclong.
«MM. Carilian-Gœury et Victor Dalmont vous avaient adressé, lors de votre
dernière réunion générale, une demande tendant à obtenir l'autorisation de
prendre le titre de libraires de la Société centrale des Architectes. Cette
maison de librairie est en même temps fort ancienne, fort importante et tout
à fait spéciale pour l'architecture; votre conseil a donc pensé qu'il ne pou-
vait y avoir qu'avantage à accéder à leur demande, et nous vous en soumet-
tons en conséquence la proposition.
«MM. Guichard et Vasnier, greffiers de bâtiments, ont offert à votre prési-
dent leur concours entièrement gratuit à titre de sous-secrétaires, archivis-
tes et bibliothécaires. Le conseil n'a pu que leur savoir infiniment' de gré de
cette offre obligeante; mais il a considéré : 1» qu'il ne conviendrait pas que
la Société acceptât des services gratuits d'autres personnes que ses membres;
20 qu'aux termes des statuts, ses seuls membres aussi peuvent remplir les
fonctions dont il s'agit. Il a donc pensé que la proposition de MM. Guichard
et Vasnier ne pouvait être acceptée, mais qu'il y avait lieu de leur en témoi-
gner vos remercîmonts.
« Enfin, un propriétaire s'est également adressé a votre président pour le
prier de lui hive savoir s'il devait continuer des poursuites judiciaires inten-
tées contre son voisin pour raison d'affaiblissement apporté au mur mitoven
(1) La commission est composée de MM. Danjean, Petit de Villeneuve Girard
Mmon), Garuaud, Brunet-Del,aisnes, Renié, Chabrol, Gourlier el Vigoureui.
qui les sépare, par suite de U reconstruction i l'alignement de U façade de
ce dernier; mais votre conseil a ûù remarquer qu'une insiance Judiciaire
étant déjà commencée, vous ne devez aucunement intertenir en pareille cir-
constance, surtout lorsqu'une seule des parties intéressées s'adresse i vous.
Il Tel est, messieurs, l'ensemble des opérations de votre bureau el de
votre conseil pendant le premier semestre qui s'est écoulé <lepuis votre con-
stitution définitive. Le conseil a pensé devoir faire imprimer le bulletin de
vos deux dernières réunions générales, et l'adresser 1 chacun des membres
résidants ou non résidants, afin que tous soient parfaitement informés de*
actes de la Société. Vous penserez probablement qu'il doit en éire ainsi du
présent compte-rendu, et, en général, du procès-verbal de cette séance.
(/.a iuite au prochain numéro.)
CHRONIQUE.
— M. César Dalv, archilecle, directeur de la Revue de V Àrchtlreture
el des Travaux Publics, vient d'éire élu membre honoraire el rorres-
pondiinl lie Vlnstilul royal des Architeclrs Urilanniques. On se nip|>elle
que .M. César Daly a dijà été l'objei, l'an dernier, d'une faveur analogue
de la pan de l'Académie royale des Beaux-.\rls de Sio< Lholm.
L'fnsft(u( britannique a déclaré vouloir ainsi témoigner de son estime
pour les travaux publiés par notre compatriote sur les diverses bran-
ches de l'architecture. Nous reproduisons ici la lettre de M. le vice-pré-
sident de l'Institut.
26 Janvier MU.
Monsieur et cher ami.
J'ai le plaisir de vous informer que les membres de Vlnstilul des
Architeclrs Britanniques, dans leur séance du lundi 22 de ce mois, se
sont fait l'honneur de vous élire membre honoraire el correspondant de
leur corps. Les membres de l'Iiistilut. justes appréciateurs des ou-
vrages par lesquels vous avez contribué à rehausser notre b<'l art, sont
heureux de vous offrir ce témoignage de leur respect et de leur estime.
Celte sociéié étant établie pour l'avancement et la culture de l'art, par
des investigations dans les diverses branches de science qui s'y ratta-
chent, les membres osent espérer que vous voudrez bien leur tran«-
nieilre de temps à autre les communications que vous jugerez devoir
icndre à cet objet, soit en théorie, soit en pratique.
Quand notre pays aura la satisfaction de vous posséder, soyez assuré.
que les membres de V Institut des Archilecles Britanniques, tant collec-
tivement qu'individuellement, s'empresseront de vous faciliter les objets
de votre voyage, et de vous convaincre par tous les moyens en leur pou-
voir de leur respect pour un confrère si distingué.
Je saisis cette occasion de vous exprimer la considération avec la-
(|UL'llc je suis.
Monsieur et cher confrère.
Votre serviteur et ami très-Qdéle,
T. L. DoNALDSon.
— L'espace nous manque aujourd'hui pour reproduire les observations pré-
sentées par la Société des Architectes à la Chambre des députés relativement
à la loi des patentes, et dont l'effet, comme on le sait, a été de soustraire les
arcliitcctes à la patente et de les faire assimiler, sous ce rapport, aux autres ar-
tistes. — Nous sommes aussi contrainis de remettre i notre prochain numéro
plusieurs articles qui n'ont pu trouver place dans celui-ci. Nous aurons égale-
ment à parler de deux Revues d'archéologie dont nous venons de rece«oir les
prospectus, et de plusieurs nouveaux projets d'Opéra récemniei-t èclo», entre
autres celui de M. H. Horcau, architecte, el celui de M. Meynadier, auteur de
travaux curieux sur la ville de Paris ; tous deux ont choisi i peu près le même
emplacement, au point de rencontre des boulevards Montmartre el des Italiens,
et leurs plans ont entre eux certaine analogie, bien que sans doute chacun ait
été conçu et élaboré dans l'ignorance la plus complète d'un travail rital.
Nous comptons publier le travail de M. H. Meynadier.
César DALY,
Directeur rédacteur rn chef.
PAaiS - TTP. LtCRllfPli ET CDU»,, «CE OAMIETTE , S.
=^ -S
&a _
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Rtrrutf' (^rraJfiU l'ArchÀtci:ture fl i/t-s TraDiUdicPiU>lu»\ Pa^U, /t^^-- de Fm'sttmhrr^, N"6
Vol i. PI. 4.
Fig.z.
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llJiOKlfc Dt L KyUlLlbKt UtD VUU il.^ m jiLlULAi
T.niie !(i5il('iillf lie r vi'chilcrluii' .1 .l'v i mh,, )MiMii-.s fins, nie dp Kur>ti-mlirt's , l;
Vol. S l>l.
l'orlc (lu .lu.^cinciil ou de la .lii-licc.
Vup inli'iiciiic dp r.\lc;izid);i.
«OxM'ii .loues •Ici.
PALAIS DE L'ALHAMBRA
( G R K N A U E )
97
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
98
L'ALHAMBRA.
Beaucoup de personnes, qui ignorent h la fois la langue d'Ho-
mère et celle de Virgile, savent cependant que l'Iliade et l'E-
néide existent ; elles ne connaissent pas davantage les idiomes de
la Grande-Bretagne et de l'Italie, et cependant elles vous parle-
ront du Paradis perdu, de Milton,et de V Enfer, du Dante. Quelque
chose de pareil se passe parmi les architectes : peu d'entre eux ont
visité l'Espagne, et cependant tous connaissent l'existence de VAl-
hambra; quelques-uns ont lu des récits pittoresques qu'en ont faits
des voyageurs, mais combien peu ont étudié le chef-d'œuvre
arabe 1
Pour la grande majorité des architectes français, l'Alhambra est
encore quelque chose de fantastique qui appartient au royaume
des fées. Le Château rouge de Grenade (l) se marie dans leur esprit
aux contes des Mille et une Nuits, dont les héros vivent familière-
ment avec des magiciens , des génies et des goules. Et de même
qu'ils ont peine à comprendre comment les récits des Mille et une
Nuits peuvent rappeler, ne fut-ce que de loin, la vie réelle d'une
race nombreuse d'hommes en chair et en os, de même aussi ils ont
quelques difficultésà se figurer, d'après la description desvoyageurs,
quel peut être le caractère précis du célèbre palais arabe, qui sem-
blerait couvert d'or et de pierreries.
Et en vérité, pourrait-il en être autrement? Combien de pré-
jugés les nations de l'Occident, qui sont le plus immédiatement en
contact, n'entretiennent-elles pas déjà les unes contre les autres,
uniquement à cause de quelques différences dans les habitudes de
la vie, différences, d'ordinaire, cependant très-fondées en raison?
Et quels jugements erronés ne porteront-eHes donc pas sur des
choses et des hommes qui offrent, pour ainsi dire, une négation
perpétuelle des principes reconnus par tout l'Occident ?
Comment en effet justifier d'après les règles de l'art antique les
formes variées et surprenantes de l'art arabe? Où peut-on décou-
vrir, dans les célèbres poétiques d'Aristote, d'Horace et de Vitruve,
les principes de l'étonnant poëme bâti par les rois de Grenade ?
Nulle part, assurément; et cependant l'Alhambra est un chef-
d'œuvre.
(1) Alhambra, en arabe, signifie le rouge.
Que conclure?
Y aurait-il par hasard deux poétiques, cent poétiques? et celle qui
a régi le monde antique, et que nos académies ont ressuscitée depuis
quelques siècles, correspondrait-elle seulement à une forme parti-
culière du beau? ne serait-elle qu'une des touches d'un merveilleux
clavier dont le jeu complet réclamerait le concours de toutes les
races humaines qui habitent les diverses zones du globe ; clavier
dont les accords seraient destinés à se perfectionner et à s'accroître
en éclat, en richesse et en variété, dans la proportion même des
progrès des races humaines vers l'unité universelle ; clavier dont
jusqu'aujourd'hui les hommes n'ont jamais pu entendre ni même
pressentir le jeu complet?
Nous l'avouons, telle est en effet notre pensée. La nature elle-
même ne varie-t-elle pas les formes, les couleurs et les essences de
ses productions suivant les diverses régions de la terre? La végéta-
tion du Nord est-elle la même que celle du Midi? Le chien-cheval
du Kamtchatka ressemble-t-il au chameau de l'Arabie, à l'éléphant
de l'Inde, au llama du Pérou?
Les races humaines ne sont-elles pas aussi différenciées de
couleurs, de formes, de caractère, de langage et de goût? n'ha-
bitent-elles pas des climats différents nécessitant des costumes et
des régimes différents? Comment se pourrait-il donc que ces races'
si dissemblables au physique et au moral, ne le fussent pas dans
leur manière de sentir et de concevoir le beau? Evidemment cha-
cune d'elle a son sentiment spécial d'art, son beau particulier,
&a poétique, enfin, et il ne serait pas plus raisonnable déjuger des
manifestations de l'art chez les divers peuples de la terre, d'après
le sentiment d'un seul peuple ou d'une seule race, qu'il ne serait
raisonnable d'imposer aux habitants de pays différents le même
costume et le même régime alimentaire.
Pour un disciple rétif de Vitruve et d'Aristote, l'Alhambra,
comme les grottes d'Elora et les tours de porcelaine de la Chine,
doit nécessairement appartenir tout entier au monde de la rêverie
et du caprice. Il serait donc à propos peut-être, avant de pénétrer
dans la forteresse musulmane, et pour ne pas nous livrer à de
fausses interprétations en expliquant le génie arabe à l'aide du gé-
nie greco-latin francisé, de tâcher de glaner auprès des Arabes
mêmes quelques notions sur leur goût, sur leur idéal du bon et du
beau, idéal nécessairement en rapport avec l'état climatérique, les
productions et l'aspect de leur pays, en rapport aussi avec leurs
mœurs et leurs croyances religieuses.
L'Arabie, c'est l'empire du feu. Presque jamais de nuages dans
le ciel, de pluies ni de brouillards sur la terre ; des vents brûlanis;
des tourbillons de sables que soulève le vent du désert; nulle ri-
vière navigable, à peine quelques légers filets d'eau ; çà et là des
sources abreuvant des pâturages isolés et séparés par des déserts
inhabitables. Des tribus d'hommes, sur ce sol ainsi morcelé, voya-
geant surtout la nuit, et réglant leur route à l'aide des étoiles, cam-
pent sous des tentes, montent des chameaux, des coursiers, les
meilleurs de l'univers, et, par des guerres intestines, se disputent
les rares pâturages de ce sol brûlant; aticune forél, enfin une na-
ture triste, presque dépouillée, ardée par les rayons d'un soleil
vertical.
En résumé, l'Arabie est une terre généralement aride, où pres-
que jamais l'œil du voyageur ne repose sur une vqiétation riche et
puissante, où jamais son oreille n'est frappée du mugissement des
fleuves, mais où cependant l'on rencontre encore de loin en loin des
oasis fraîches et ombreuses offrant les plus heureux contrastes avec
T. V. '
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REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
100
l'aspect stérile et infécond du reste de la contrée. L'idéal du bon et
du beau doit donc nécessairement s'allier, dans la pensée de l'A-
rabe, avec l'idée d'une grande fécondité, de délicieux ombrages et
d'eaux abondantes ; aussi, avec ces données, et en se rappelant l'in-
fluence excitante des climats secs et chauds sur les sens, on
se trouvera en mesure de créer de toutes pièces le paradis de
Mahomet.
En présence de l'aspect monotone de son pays, d'un spectacle
d'une si désespérante uniformité, l'Arabe, obéissant à ce besoin de
variété qui le domine, se réfugie, par une réaction très-naturelle,
dans un monde idéal que son imagination ardente peuple de créa-
tions poétiques, conformes au génie caractéristique de sa race.
Admirateur fervent des merveilles de la magie, dont la puissance
s'exerce par l'intermédiaire des anges et des génies, il croit aussi à
l'influence directe des corps célestes sur les destinées individuelles
des hommes. Toutes ces notions de magie et d'astrologie se lient
intimement avec les croyances religieuses de l'Arabe, qui linit
si bien par se créer, comme au dedans de lui, un monde idéal en-
tièrement indépendant de la vie qui l'entoure, que ce monde et
ces existences prennent pour lui un relief presque égal à celui de
la nature même. Couché à l'ombre, loin de tout bruit, aspirant
lentement la fumée du tabac, il oublie volontiers la vie extérieure
pour se concentrer plus entièrement dans l'idéal qu'il s'est créé.
Tels sont les besoins de la nature arabe, besoins que le Koran et les
traditions religieuses de l'islamisme satisfont pleinement; de laces
extases qui les saisissent souvent, ce fanatisme religieux qui leur
a doimé le pouvoir d'agir si puissamment sur le monde.
Et lorsqu'on se rappelle que la religion, toujours le plus puis-
sant agent d'union d'un peuple, est presque l'unique lien des
tribus sans propriété foncière , on comprend aisément que la loi
religieuse devienne identique avec la loi politique, que son in-
fluence se reconnaisse en tout et partout, et que ce soit même la
religion qui attache les sujets à leur chef. Pour compléter donc no-
tre notion sur le beau idéal des Arabes, ouvrons le Koran. Nous y
verrons comment les circonstances physiques de climat, etc.,
ont d'abord agi fortement sur la conception religieuse, et nous
reconnaîtrons ensuite combien la conception religieuse a dû réa-
gir puissamment à son tour sur le caractère de l'art arabe, puis-
qu'elle a pu lui donner, dans des pays différents, une unité de
caractère qu'il n'eût pu conserver au même degré sans cette puis-
sante influence. Pourrions-nous mieux faire, d'ailleurs, pour con-
naître l'idéal du bien-être arabe, que de choisir le li\ re du Pro-
phète, le livre que tout disciple de Mahomet révère comme la
parole de Dieu même, comme le code parfait, la source de toute
science, de tout art; le livre enfin « sur lequel il n'y a point de
doute (Koran, ch. ii, v. 1), qui est une révélation du souve-
rain du monde, — que l'esprit fidèle (l) apporta d'en haut, — et
déposa sur le cœur de Mahomet, afin qu'il fût apôtre. » (Koran,
ch. XXVI, V. 192... 194.)
Voici, après une lecture attentive du Koran, quelques-uns des
passages que nous avons cru devoir extraire de ce livre :
« Annonce à ceux qui croient el qui pratiquent les bonnes œuvres,
qu'ils auront pour demeure des jardins arrosés de courants d'eau. »
(Ch. Il, V. 23. )
« Tous ceux-là éprouveront l'indulgence du Seigneur et habiteront
(1) L'ange Gabriel.
éternellement des jardins arrosés par des courants d'eau. Quelle est
belle la récompense des vertueux! » (Ch. m, v.150.)
L'exclamation qui termine le verset précédent, ce ci;i d'admira-
tion exprime énergiquemeut le prix que les Arabes attachent à une
belle végétation , à la fraîcheur des eaux , à cette image d'une
oasis céleste. Voici encore la même pensée, la même admiration :
« Ceux qui écouleront Dieu et l'apolre seront iiitroduils dans les j'ar-
dins arrosés par des courants d'eau; ils y (lemcurcronl éternellement .
C'est un bonheur ineffable '. » (Ch. iv, v. 17.)
Au fur et à mesure que nous avancerons dans le Koran, nous
verrons se compléter de plus en plus le tableau du paradis. Dans
les trois premiers chapitres, il n'est parlé simplement que de
jardins arrosés de courants d'eau : dans le quatrième chapitre ,
le Prophète ajoute un nouveau détail :
« Ceux qui croiront rt qui pratiqueront les bonnes œuvres seront in-
troduits dans les jardins arrosés de courants d'eau; ils y demeureront
éternellement ; ils y trouveront des femmes exemptes de toutes souillures
el des ombrages délicieux. » (Cb. iv, v. 60.)
Nous allons donner encore quelques-uns de ces extraits pour
que notre lecteur soit parfaitement édifié sur le caractère du bon-
heur idéal des Arabes; il nous sera ensuite facile de remontera
l'origine de certaines dispositions caractéristiques du lieu de féli-
cité rêvé par les disciples de Mahomet.
« Dieu a promis aux croyants, hommes et femmes, tes jardins baignés
par des rivières; ils y demeureront éternellement ; ils auront des habi-
tations charmantes dans les jardins d'Édtn el une grjce infinie de
Dieu. C'est un bonheur immense! « (Cb. ix, v. 73.)
« Ceux à qui nous avions précédeminenl promis de belles récompenses,
seront éloignés de ce séjour terrible ( l'enfer). Ils n'entendront pas le
moindre bruit, etc.. . » (Ch. xxf,v. 101 et 102.)
« Ceux qui auront cru el pratiqué les bonnes œuvres se divcrlironi
dans un parterre de fleurs. » (Ch. xxx, v. 14.)
« Quant à ceux qui craignent leur Seigneur, ils auront au paradis
des appartements au-dessus desquels soni construits d'autres apparte-
ments (I) ; à leurs pieds coulent des ruisseaux. » (Ch. xxxix, v. 2t.)
« Voici le tableau du paradis qui a été promis aux hommes pieux :
des fleuves dont l'eau ne se gâte jamais, des fleuves de lait dont le goùl
ne s'altérera jamais, des fleuves de fin doux a boire, des fleuves de miel
pur, toutes sortes de fruits et le pardon des péchés. En sera-l-il ainsi
avec celui qui, condamné au séjour du feu, sera abreuvé d'eau bouillante
qui lui déchirera les entrailles? » (Ch. xLvii, v. 16 el 17.)
« Ceux qui craignent la majesté de Dieu auront deux jardins.
« Lequel des bienfaits (.'e Dieu nierez-vous?
« Tous deux ornés de bosquets.
a Lequel, etc.
0 Dans tous deux, deux sources vives.
« Lequel, etc.
« Dans tous deux, deux espèces de chaque fruit.
« Lequel, etc.
« Ils se reposeront accoudés sur des lapis en étoffe de iot< brochée
d'or. Les fruits de deux jardins seront à la portée de quiconque voudra
les cueillir.
a Lequel, etc.
« Là seront déjeunes vierges au regard modeste, que n'a jamais tou-
chées ni homme ni génie.
(1) Sans doute des maisons i plus d'un étage, des habitations élevées et d'un
caractère monumental.
101
REVUK DE LAUCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
102
« Lequel, eto.
« Elles ressemblent à l'hyacinthe et au coniil.
« Lequel, etc.
« Quelle est la récompense du bien, si ce n'est le bien ?
« Lequel, eic.
« Outre ces deux jardins, deux autres s'y trouveront encore.
« Lequel, eic.
« Deux jardins couverts de verdure.
« Lequel, etc.
« Où jailliront doux sources.
« Lequel, eic.
« Là il y aura des fruits, des palmiers et des grenades.
« Lequel, e(c.
« Là il y aura des vierges jeunes et belles.
« Lequel, etc.
« Des vierges aux grands yeux noirs, renfermées d^ns des pavillons.
• « Lequel, etc.
« Jamais homme ni génie n'attenta à leur pudeur.
« Lequel, etc.
« Leurs époux se reposeront sur des coussins verls el des lapis ma-
gnifiques.
«Lequel des bienfaits de Dieu nierez-vous?
Béni soit le nom du Seigneur, plein de majesté et de gloire!»
(Ch. XLvi, V. 46.... 78.)
Lorsque l'événement (le jugement dernier) arrivera.
Alors vous, hommes, serez partagés en trois troupes.
Les hommes de la droite (oh ! les hommes de la droite !)
Et les hommes de la gauche (oh ! les hommes de la gauche!).
Et les premiers seront les derniers;
Ceux-ci seront les plus rapprochés de Dieu ;
Ils habiteront le jardin des délices.
(II y aura un grand nombre de ceux-ci parmi les peuples anciens,
Et un petit nombre seulement parmi les modernes),
Se reposeront sur des sièges ornés d'or et de pierreries.
Accoudes et placés en face les uns des autres ;
Autour d'eux circuleront des enfants éternellement jeunes.
Avec des gobelets, des aiguières et des coupes remplis d'un vin ex-
quis.
Dont ils n'éprouveront ni maux de tête ni étourdissements;
Avec des fruits dont ils sont friands,
Et de la chair de ces oiseaux qu'ils aiment tant.
Autour d'eux, des vierges aux yeux noirs, pareilles aux perles dans
leur conque :
Telle sera la récompense de leurs œuvres.
Ils n'y entendront ni discours frivoles ni paroles criminelles;
On n'y entendra que les paroles : Paix, paix!
Les hommes de la droite (qu'ils seront heureux les hommes de la
droite !)
Séjourneront parmi les arbres de lotus sans épines.
Et les bananiers chargés de fruits, du sommet jusqu'en bas.
Sous des ombrages qui s'étendront au loin,
Près d'une eau courante.
Au milieu de fruits en abondance
Que personne ne coupera, dont personne n'interdira l'approche ;
Et ils se reposeront sur des liis élevés.
Nous créâmes les vierges du paradis par une création à part;
Nous avons conservé leur virginité (1).
Chéries de leurs époux el d'un âge égal au leur,
Elles seront destinées aux hommes de la droite ;
(1) Les Moslims croient que les viergcsdu paradis ne perdront pas leur virgi-
nité par la colîabltation avec leurs époux du paradis.
( Il y en aura un grand nombre parmi les anciens.
Et un grand nombre parmi les modernes.
Et les hommes de la gauche (oh ! les hommes de la gauche !)
Seront au milieu d'un vent pestilentiel el de l'eau bouillante.
Dans V ombre d'une fumée noire.
Dans l'ombre qui n'est ni fraîche, ni agréable.
Autrefois ils menaient une vie pleine d'aisance;
Ils persévéraient dans une haine implacable.
Et disaient :
Quand nous serons morts, quand nous serons devenus poussière et
os, serons-nous ranimés de nouveau,
Ainsi que nos pères les anciens?
Dis : Les anciens comme les modernes
Seront infailliblement rassemblés au rendez-vous du jour fixé d'a-
vance ;
Puis vous, hommes plongés dans l'erreur, vous qui ne croyez point.
Vous mangerez le fruit d'un arbre, le fruit du zakoum;
Vous vous en remplirez le ventre;
Ensuite vous boirez de l'eau bouillante.
Comme boil un chameau altéré de soif.
Tel sera leur festin au jour de la rétribution.
(^Koran, ch. lvi, v. 7, .... 5(j.)
Que rencontrons-nous dans ces tableaux du paradis? des plaisirs
sensuels, des oasix d'une perfection idéale, des eaux abondantes, des
orôrc^magnifiques, de la verdure, des fleurs, des fruits, l'absence de
tout bruit de nature à troubler la quiétude voluptueuse du bienheu-
reux qui se repose sur des coussins verts brodés d'or et habite des
tentes de perles et de pierres précieuses. Et si maintenant nous
voulions compléter notre analyse en recherchant quelles sont les
peines que le Koran annonce aux infidèles, aux hommes de la
gauche, nous trouverions qu'elles forment, avec les délices du pa-
radis, la même antithèse que la douleur fait avec le bonheur. Aux
citations précédentes sur la géhenne, nous ajouterons encore cel-
les-ci :
« Ceux qui traitent d'imposture le livre (le Koran) connaîtront la vé-
rité un jour; alors, les colliers aux cous el enchaînés, ils seront livrés
au feu. ))(Ch. XL, v. 72,73.)
a L'arbre de zakoum sera la nourriture des coupables, il bouillon-
nera dans leurs entrailles comme un métal fondu,
« Comme bouillonne l'eau bouillante.
« On criera : Saisissez les méchants, et versez sur leur tête le tour-
ment de l'eau bouillante. (Ch. xlv, v. 43, 48.)
« Dieu dira aux gardiens de l'enfer : Saisissez-le et liez-le;
« Puis chauffez-le au feu de l'enfer.
« Chargez-le ensuite déchaînes de scixante-dix coudées.
« Car il n'a pas cru en Dieu le Très-Haut.
« Aussi aujourd'hui, il n'a plus de protecteur,
« Ni d'anlre nourriture que le pus. » (Ch. lxix, v. 30, 36.)
« La géhenne sera toute formée d'embûches ;
« Ils n'y goûteront ni la fraîcheur, ni aucune boissoA,
« Si ce n'est l'eau bouillante et le pus. » (Ch. lxxix, v. 21, 25.)
Nous connaissons maintenant le paradis et la géhenne de l'Arabe ;
nous savons ce qu'il aime et admire, ce qu'il espère obtenir et oc
qu'il désire éviter; aussi, en attendant qu'il lui soit donné de pé-
nétrer dans les jardins arrosés de fleuves d'une eau qui ne se gâte
jamais, de fleuves de lait et de miel ; qu'il lui soit permis de con-
templer la beauté des houris aux yeux noirs, de se promener sur
des tapis de fleurs, et de se reposer à l'ombre des arbres à plusieurs
fruits, on comprend que l'Arabe ait appliqué son génie à modeler
son habitation terrestre d'après son idéal du séjour céleste , idéal
03
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
10'»
né d'ailleurs sous la double influence du climat de son pays et de
la nature de sa race, et par conséquent parfaitement en rapport
avec les besoins physiques que l'architecte doit toujours respecter.
Une retraite inaccessible à tout étranger, éloignée de tout bruit
extérieur, de tout ce qui pourrait le troubler dans ses rêveries et
dans ses jouissances, telle est la première condition d'une bonne
habitation de musulman; là, couché sur des divans, dans des salles
fraîches ou sous de belles galeries à jour dont les parois sont cou-
vertes de dorures et de peintures aux couleurs éclatantes, ou bien à
l'ombre d'une riche végétation, les yeux charmés par des pcirterres
de fleurs, l'ouïe doucement caressée par le murmure des eaux qui
retombent des vasques des fontaines et rafraîchissent l'air, l'Arabe
se croit au comble du bonheur réservé aux humains ici-bas.
Quelques-uns de nos lecteurs s'étonneront peut-être que nous
soyons allé en Arabie et que nous ayons voulu même visiter le para-
dis et la géhenne, pour y rechercher l'explication de quelques-uns
des caractères de l'architecture arabe en Espagne. Nous prierons
ceux-là de vouloir bien se rappeler que les musulmans sont peut-
être les plus fanatiques de tous les sectaires religieux , que pour
eux le Koran est à la fois le code législatif parfait, l'arbre de la vé-
ritable science, le livre inspiré, la parole de Dieu; et ils compren-
dront qu'une foi si entière dans la vertu absolue du Koran a dû
nécessairement exercer une immense influence sur l'esprit des po-
pulations musulmanes, et établir dans la législation et les mœurs
de ces sectaires une uniformité que les exigences matérielles des
climats différents sous lesquels ils vivent n'aurait pas seule fait
naître, et qui a dû nécessairement se retrouver dans l'art, qui n'est
que la forme sous laquelle se manifeste extérieurement la vie inté-
rieure.
Pour juger donc du mérite de l'architecture des Arabes en Es-
pagne , il n'eût point suffi de consulter les besoins matériels, qui
sont les conséquences du climat d'Espagne ; il fallait encore étudier
le beau idéal arabe , devenu le beau idéal de tous les musulmans,
turcs, égyptiens, etc., qui est exprimé dans le Koran, livre qui fut
formulé en Arabie , sous l'influence de la nature arabe pure , et
par conséquent quelque peu différent de ce qu'eût été un tel livre
écrit sous l'influence du climat d'Espagne, devant le spectacle d'une
nature riche et verdoyante. Il nous fallait donc bien consulter le
Koran, et, pour mieux pénétrer son esprit, il était utile de rappeler
les conditions physiques du pays qui l'avait vu naître et avait pu
exercer de l'action sur son caractère.
Nous terminerons ici nos considérations préliminaires, et nous
aborderons l'étude de l'Alhambra en prenant pour guides les
dessins que M. Ow en Jones a publiés sur ce beau monument , et
qui forment un livre qui est lui-même un monument digne en
tout point de l'œuvre arabe.
MM. Owen Jones, architecte anglais, et Jules Goury, architecte
français, venaient de parcourir ensemble l'Egypte pour étudier
les restes précieux de l'architecture arabe que cette contrée possède,
et étaient encore hâlés du soleil qui rougit depuis trois mille ans
les monuments de Sésostris, lorsque, l'enthousiasme dans l'âme,
la santé et la vigueur au corps, ils se retournèrent vers l'Ouest et
arrivèrent, au milieu de l'été de 1834, à l'extrémité de l'immense
plaine qui s'étend au pied des montagnes neigeuses de la Sierra-
Nevada, devant les quatre collines qui portent la ville de Grenade.
Les Arabes s'étaient emparés de l'Espagne en deux ans ; il avait
fallu huit siècles de combats pour les en chasser, et ce fut sous les
murs de Grenade que fut enfin renversé, pour ne plus se relever en
Espagne, le fier drapeau des enfantsd'Islam. Ce fui aussi àGrenade.
dans les murs de l'Alhambra, que succomba le pauvre Goury ; il y
mourut du choléra, six mois après son arrivée. Le vivant cependant
était encore plus à plaindre que le mort.
Digne Owen ! tu n'as pas voulu que le non» de ton ami fut sans
auréole; tu as inscrit son nom, avant le tien, sur le frontispice du
livre monumental dont tu as fait seul plus des trois quarts, et tu as
dédié l'œuvre entière à la mémoire de Goury. De telles actions ho-
norent les arts, de telles amitiés font gémir sur les préjugés natio-
naux.
Voici comment est décrit, dans le livre de M. Owen Jones, la
plaine qui se voit de la hauteur où est assise la forteresse de l'Al-
hambra : « Au Nord-Ouest s'étend à perte de vue la délicieuse
Véga (l), parée d'une verdure éternelle, et arrosré par de nom-
breux ruisseaux qui descendent des hauteurs environnantes; là,
l'oranger, le citronnier, la vigne et le mûrier déploient une luxu-
riante végétation. « Ce lieu, dit l'historien arabe de Grenade, sur-
« passe bien en aménité et en fertilité la célèbre Gantah ou prairie
« de Damas, et on ne peut le comparer qu'à un paradis terrestre. •
Rien ne peut, en effet, égaler le charme magique de cette plaine,
qui, sans être cultivée autant qu'elle pourrait l'être, ni avec la
même habileté que les Maures y apportaient, est néanmoins un des
lieux les plus ravissants que l'œil du voyageur puisse contempler.
L'effet en est encore rehaussé par des groupes de fermes d'une
blancheur éblouissante qui brillent à travers le feuillage verdoyant,
et par d'innombrables carmènes (2} ou villas qu'un poète arabe a
comparées assez heureusement à autant de perles orientales enchâs-
sées dans une coupe d'émeraude. .\ ces avantages du sol vient
encore se joindre la salubrité du climat (3), qui était proverbiale
comme elle l'est encore parmi les Maures du rivage opposé, qui
vinrent plus d'une fois à Grenade pour y chercher la santé. Les
fraîches brises de la Sierra-Nevada rafaichissent l'atmosphère dans
les jours les plus chauds de l'été, et le printemps y tient constam-
ment la place de l'hiver. Doit-on s'étonner alors que les Maures
aient quitté à contre-cœur un pareil séjour, et que Grenade soit
encore aujourd'hui le sujet favori des chants populaires d'un peu-
ple qui ne cesse de soupirer et de prier pour le rétablissement de
son empire? »
La construction de l'Alhambra ne date pas de l'époque la plus
florissante de la puissance arabe en Espagne. Les chefs mu-
sulmans, en guerre les uns avec les autres, n'étaient déjà plus en
mesure de repousser avec avantage les attaques constantes des
chétiens, qui les refoulaient de plus en plus au midi. En 1238,
Jacques I", roi d'Aragon, s'empara de Valence, tandis que Ferdi-
nand III de Castille prenait possession de Cordoue, l'ancien siège
des Califats d'Occident. Les populations musulmanes reculaient
de toutes parts devant les progrès de la Croix. Cinquante mille
(l) Baga, de l'arabe bekah, qui signiHe « lieu entre deux monlagnes, valWe
ou plaine cullivée.
(3) Le mot cannen vient de l'arabe karm, Tigne, à la calture de laquelle les
jardins avaient d'al>ord été destinés.
(3) « Plus salubrc que l'air de Grenade » est un proverbe encore usité en
Afrique. Ibn AI-KhatUs, dans M)n traité sur la peste (Bib. Esc. n» 1780), dit
que les deux Tontaines appelées Jj/n ad dama (fontaine des larmes), et Al-
Fakar, étaient considérées comme ayant des propriétés médicinales, et que
des malades du Maroc et d'autres parties de l'Afrique occidentale venaient i
Grenade pour éprouver l'effet de leurs eaux. Ayn ad dama a été corrompu par
les Espagnols en Dinadawer.
^05
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
106
Maures quittèrent le royaume de Valence à la suite des succès de
Jacques d'Aragon, et trois cent mille familles maures quittèrent
les villes de Séville, de Xérès et de Cadix, lors de leur occupation
par les Castillans. Ces mcrtheureux allèrent pour la plupart, dit-
on, s'établir dans le royaume de Grenade, dont la capitale devint
le séjour des savants, des artistes, des poètes et des familles illus-
tres qui fuyaient devant les armes chrétiennes, et déjà l'on pouvait
pressentir que Grenade serait un jour l'héritière de toutes les gloi-
aes et de toutes les splendeurs musulmanes, autrefois répandues
entre tant de villes fameuses.
On suppose que' ce fut vers ce temps, le milieu du treizième
siècle, que furent jetées les fondations de l'Alharabra. Quelques-
uns en attribuent la construction à Mohammed II; d'autres en font
remonter l'origine à son père Ibn-al-Ahmar. Mais il est temps
de pénétrer dans la forteresse elle-même, qui occupe, comme
on peut le voir [PI. 3), le sommet d'une colline qui commande
la ville de Grenade, et d'où la vue s'étend au loin. Les limites du
plateau de l'Alhambra sont entourées de murailles garnies de
tours, et c'est après avoir traversé les beaux jardins qui s'éten-
dent au pied de l'acropole musulmane et en avoir gravi la hau-
teur, qu'on pénètre, par la porte de Justice (Voyez PI. 5), dans
l'enceinte intérieure.
CÉSAR DALY.
[La suite prochainement.)
— aOB» &CCaB>-
PREMIERE INSTRUCTION DU COMITÉ HISTORIQUE
DES ARTS ET MONUMENTS.
MONUMENTS FIXES.
PREMIÈRE ÉPOQIE. — l!NDÉPE\DA\CE GALLOISE.'
PREMIERE PARTIE.
MONUMENTS RELIGIEUX.
§ I. — Religion des Gaulois.
A très-peu d'exceptions près, les monuments gaulois portent tous
le caractère religieux. Nous aurons à peine quelques mots à dire
sur les vestiges de constructions militaires et d'habitations civiles
que certaines provinces peuvent posséder encore, tandis que les
monuments consacrés, soitàlaDivinité,soit à la mémoire des morts,
sont tellement nombreux, qu'ils méritent une étude sérieuse et
toute particulière. Malheureusement , pour obtenir des notions
exactes sur ces monuments, il nous manque une donnée première.
Nous ignorons presque entièrement quelles étaient les croyances
religieuses des premiers Gaulois : les monuments écrits ne nous
l'apprennent pas, et les monuments figurés ne nous fournissent au-
cun renseignement, ne nous conduisent à aucune induction qui
résolve le problème. Les pierres dites Druidiques ne révèlent point
un culte qu'on puisse définir: elles n'indiquent aucun attribut
spécial de la Divinité. Il est presque impossible de ne pas leur
reconnaître un caractère religieux, mais ce ne sont que de gros-
siers symboles de l'idée qui s'empare de tous les peuples à leur
naissance, l'idée de la puissance créatrice de ce monde. Avant de
comprendre Dieu, l'humanité l'adore ; pour l'adorer, il lui faut
une image, et cette image est nécessairement aussi informe que
l'idée qu'elle représente est obscure. Il est donc probable que lors
même que nous pourrions ressusciter les cérémonies dont ces pier-
res druidiques furent sans doute témoins, nous ne leur trouverions
aucun sens précis, aucune signification déterminée : en un mot,
nous n'avons rien de net, rien de clair à apprendre sur ta reli-
gion des Gaulois, tant qu'ils demeurent indépendants, et que
du fond de leurs forêts ils échappent à toute influence étrangère.
Mais un jour moins douteux nous éclaire dès que la civilisation
grecque et romaine commence à prendre racine sur leur sol : alors
l'image de la Divinité n'est plus quelque chose d'inerte, d'enve-
loppé, d'inintelligible : elle se personnifie et revêt une foule de
figures à la fois. variées et caractéristiques. Dans cette multiplicité
de dieux qui apparaissent tout à coup, et qui disputent aux blocs
druidiques leurs adorateurs, tout n'appartient pas cependant à li-
mitation et aux influences extérieures; une forte empreinte natio-
nale et indigène s'y fait toujours sentir. A l'exception de ce que
nous appellerons la religion politique, religion imposée à la Gaule
par ses vainqueurs, la nouvelle manière d'adorer la Divinité ,
quoique d'origine étrangère, n'en est pas moins toute gauloise.
Partout, il est vrai, vous retrouvez le culte d'Auguste et delà Vic-
toire. C'est là le mot d'ordre du conquérant, c'est une consigne
officielle et partout semblable. Mais, quant aux formes et aux dé-
nominations purement religieuses appartenant au culte romain,
vous ne les voyez se répandre qu'en subissant une foule de muti-
lations et de travestissements. Les cultes de Minerve, de Cérès, de
Neptune, sont très-rares : il n'y a guère que cinq divinités qu'on
rencontre assez généralement honorées dans toutes les parties de
la Gaule : Hercule et Mercure, chacun avec des attributs particu-
liers et complètement gaulois; Jupiter, tantôt purement celte,
quand il porte le sagum et le vase à boire de nos ancêtres, tantôt
participant du Sérapis égyptien, alors que le modius est placé sur
sa tête ; Bacchus, qui paraît avoir été importé principalement par
les Grecs, à en juger par les noms de Dionysius, Eleutherius, qui
lui sont presque toujours donnés ; et enfin la Déesse Mère intro •
duite par les Phocéens, comme Diane éphésienne, renouvelée sous
la forme phrygienne après l'établissement des Galates en Asie et
par suite des rapports que ces peuplades émigrées conservèrent avec
la mère patrie. Cette Déesse Mère est tantôt l'Isis égyptienne, tantôt
la Vénus grecque : elle semble composée des lambeaux de toutes
sortes de croyances que les Gaulois, dans leurs courses aventu-
reuses, avaient empruntées à des civilisations plus avancées que la
leur.
Mais ces cultes d'emprunt, ces bigarrures exotiques, ne pénétrè-
rent jamais bien avant dans les mœurs. Les vieilles superstitions
domestiques avaient des racines plus profondes, et devaient être
bien autrement vivaces. Pendant que de fragiles idoles se succé-
daient au gré de l'imagination capricieuse d'un peuple avide de
nouveautés, on voyait se perpétuer ces adorations vagues, mysté-
rieuses, indéterminées; ces pratiques de théurgie naturelle, pre-
miers instincts d'une société demi-sauvage , et qui , pendant si
longtemps, avaient été son unique religion. Aussi lorsque le chris-
tianisme s'en vint planter la croix sur le sol des Gaules, il eut bon
marché de tous ces autels élevés par ordre des empereurs : il mit
107
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
108
bientôt eu poussière toutes ces images importées de l'Asie ou de
Rome; mais il lui fallut transiger avec les croyances indigènes,
r.es puissances invisibles, ces femmes mystérieuses qui, sous le
nom de fées, exerçaient un si merveilleux empire, continuèrent
dbabiter leurs grottes et leurs forêts; la vénération attachée aux
montagnes, aux sources, aux rochers, se perpétua de siècle en
sieclc^et de nos jours on peut encore en retrouver des traces dont
l'étude est pleine d'attraits, et qu'il importera de constater (l ).
Ainsi trois époques bien distinctes dans la religion des Gaulois :
d'abord une adoration des puissances mystérieuses de la nature,
adoration qui s'adresse à des symboles dont il nous reste encore
des vestiges, mais dont la véritable signification nous échappe; en-
suite, sous la domination étrangère, invasion du polythéisme grec
et romain; mais, pour se faire accepter, il faut que ce polythéisme
se déguise, et qu'il laisse subsister à ses côtés les vieilles croyances
nationales; enfin, lorsque le christianisme a terrassé le polythéisme
grec et romain, un reste de vie anime si fortement encore les su-
perstitions primitives, que de nos jours, après tant de siècles, nous
en apercevons les dernières lueurs.
Nous n'insisterons pas plus longtemps sur ces observations
préliminaires, et nous passerons immédiatement à l'étude des mo-
numents.
§ H. — Pierres dites Dbuidiques.
On trouve en Fiance, comme dans tout le Nord de l'Europe, un
vaste système de monuments qui, sans offrir aucune des conditions
de l'art, présentent cependant entre eux assez de similitude pour
. faire reconnaître qu'une même pensée présidait à leur exécution.
Ces monuments se composent en général de fragments de ro-
chers, de pierres dont la forme est plus ou moins irrégulière, dont
les dimensions sont plus ou moins grandes, tantôt isolées, tantôt
disposées en groupes d'après des lois qui paraissent constantes.
Dans les contrées qui offrent des restes de ces monuments, les
premières études doivent faire distinguer les masses élevées à main
d'homme de celles que la nature s'est plu à isoler.
Lorsqu'on aura constaté par l'aspect du terrain que le transport
et la pose de ces pierres ne peuvent être que le résultat des efforts
de l'homme, la qualité de la roche, la distance du gisement qui en
fournit la matière, la direction qui put être suivie après l'exploi-
tation jusqu'au lieu où le monument fut consacré, présenteront des
observations importantes à consigner.
On notera les dimensions des monolithes, en hauteur, largeur,
épaisseur ; leurs distances respectives , s'ils forment un groupe.
J)ans ce travail géométrique on devra employer le mètre comme
unité de mesure
On désigne par le nom de Men-hir ou Peulvan les longues pier-
res debout et isolées qui se présentent fréquemment dans l'Ouest de
la France. Les traces de rainures ou d'inscriptions, les intentions
de sculpture et d'ornements qui pourraient s'y rencontrer doivent
être levées avec soin.
Men-Hir.
(1) On examinera les traditions qui prêtent des vertus miraculeuses aux
sources et fontaines; ou indiquera aussi les clairières et carrefours des forêts,
liabilés par les dames ou fées, les excavations, les grottes, les pointes de ro-
chers, les falaises, elc , <,ue la superstition révère, et qui sont en général dés.-
Buésparles noms de châteaux du Diable, maisons de Gargantua, roches aux
Fées, baumes des Dames, etc.
Fig.X.
Les pierres druidiques sont rarement seules dans une même con-
trée; les rapports qui existent entre ces pierres seront le sujet
d'un plan mesuré si elles sont voisines, d'une triangulation si les
distances qui les séparent ne permettent pas de juger d'abord de
leurs positions relatives. Des men-hirs, désignés sous le nom de
hautes bornes, paraissent situés sur les frontières des nombreuses
provinces qui formaient la Gaule : ces monuments peuvent guider
dans l'étude des divisions positives de la topographie antérieure i\
la conquête romaine.
Dse pierres debout, alignées comme des arbres, occupent une
superficie considérable; tel est l'aspect que présente le monument
de Carnac : cette disposition est désignée par les noms d'aligne-
ment, d'allées non couvertes. Des groupes de pierres alignées ou en
cercles présentent à leur sommet des mortaises qui furent desti-
nées à recevoir des architraves; les portes rustiques qui résultent
de cette disposition se nomment Lichavens ; l'étendue des mor-
taises, leur disposition, la distance qui les sépare deux à deux, se-
ront des sujets d'études mesurées et dessinées.
Cromlech.
Fig. 2.
Les cercles de pierres, les combinaisons elliptiques ou en spirale
formées par des roches peu élevées semblent tenir à des idées as-
tronomiques; ces courbes, de quelque nature qu'elles soient, doi-
vent être levées géométriquement; il importe de reconnaître le
nombre des roches qui les composent. Leur ensemble est désigné
par le nom de Cromlech.
Des masses placées en équilibre sur des bases solides peuvent
recevoir un mouvement d'oscillation plus ou moins développé;
d'autres roches tournent sur un pivot; nommées pierres branlan-
tes, pierres croulantes et tournantes, elles seront examinées et re-
produites, les unes de manière à faire connaître le degré d'incli-
naison qu'elles peuvent prendre relativement à l'horizon , les
109
REVUE DE L ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
110
l'ierre tournante.
autres dans leur mouvement de rotation comparé à celui de la
boussole. On cherchera leur centre de gravité et les moyens qui
purent être employés dans la pose.
On nomme Dolmen une table de pierre formée d'une masse
plate portée horizontalement par plusieurs roches verticales. On
considère ces monuments comme des autels gaulois.
Dolmen.
Fig. 4.
Le demi-dolmen est une pierre inclinée qui est soutenue par une
de ses extrémités seulement, l'autre posant sur le sol. On exami-
nera si le demi-dolmen ne serait pas le résultat d'accidents arrivés
à un dolmen complet.
Demi-Dolmen.
Fig. 5.
La table des dolmens est quelquefois percée d'un ou de plusieurs
trous; il est important d'étudier si toute la superficie de la pierre
offre une pente ou des rainures dirigées vers les points perforés ou
vers les extrémités. L'orientation du monument peut servir à fixer
son origine et ne doit pas être négligée.
Le nom d'allées couvertes est donné à de longues suites parallè-
les de pierres dressées et portant des masses placées horizontale-
ment pour former un toit. On examinera avec soin ceux de ces
monuments qui, par leur symétrie, par l'étude apportée dans la
pose et l'ajustage des pierres, pourraient indiquer un progrès
dans l'exécution, et faire entrevoir l'usage dinstruments tran-
chants.
Allée couverte.
Fig. 6.
Des pierres enchaînées deux à deux, des roches de formes sin-
gulières ou présentant un passage au milieu de leur masse, des
blocs de matières précieuses (l) et de produits naturels fort rares
dans une contrée, sont devenus des sujets de pèlerinages en raison
des vertus que leur attribue la superstition. Abandonnées à elles-
mêmes, loin des routes et de toute habitation, d'autres pierres
conservent des traces d'usages inconnus; elles seront toutes des-
sinées et accompagnées des traditions alors que la moindre indi-
cation démontrera qu'elles ont été travaillées ou seulement trans-
portées par les hommes.
On décrira scrupuleusement les terrains voisins des monuments
druidiques, et, dans le cas où des fouilles y auraient été pratiquées,
un procès-verbal évitera pour l'avenir de nouvelles et infructueu-
ses recherches.
Les pierres consacrées par la tradition gauloise sont de nature à
être exploitées de nos jours par l'industrie ; on s'efforcera de sau-
ver de la destruction ces monuments historiques.
(1) Aérolithes et masses de métaux natifs.
§ III. R ARROWS ET TOMBELLES.
L'usage de décorer et de protéger les sépultures par des monti-
cules ou tombeaux en terre fut presque universel dans l'antiquité.
On trouve en France de nombreux exemples de ces tombeaux, qui
paraissent avoir été élevés, soit par les Celtes, les Kimris et les
Gaulois, soit, après eux, par les Romains, et enfin par les peuples
du Nord.
Fig. 7.
Les dimensions de ces collines factices varient en raison du
lit
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
lis
nombre d'individus qui y furent inhumés : leur forme est allongée
à la base lorsqu'on a voulu en faire des sépultures communes,
nommées depuis ossuaires; elle est arrondie quand l'inhumation
est simple. Le squelette est placé sur le sol ; sous la tète se trouve
assez généralement une arme; une grosse pierre couvre la partie
supérieure du corps; des ossements d'animaux l'cutourent quel-
quefois. Ces sépultures doivent être fouillées en les coupant en croix
par le milieu.
Une coupe indiquant le gisement des corps et leur position orien-
tée, des mesures de diamètre et de hauteur, un plan de ces fouilles
et un procès- verbal, tels sont les travaux qu'exige chacun de ces
barrows.
Lorsque la tombelle, par sa grande étendue, peut être considé-
rée comme un ossuaire, elle présente des dispositions intérieures
de plusieurs natures : des chambres sépulcrales formées de pierres
brutes, réunies comme des dolmens, renferment uh ou plusieurs
individus couchés ou assis ; des couloirs conduisent à ces cryptes,
et souvent une galerie commune est destinée au service de tous les
caveaux.
Dans d'autres exemples, une chambre allongée, formée comme
les galeries couvertes, réunit les corps qui reçurent une sépulture
commune; enfin, dans ces ossuaires, les constructions sont quel-
quefois en pierres cimentées : c'est alors qu'en étudiant les divers
ustensiles trouvés dans la sépulture on peut décider si elle est
gauloise ou romaine. Les fouilles de ces ossufiires demandent plus
de soin que celles des tombeaux simples, afin de ne pas les détruire
en les ouvrant. Si la colline factice est allongée, elle peut être en-
tamée par une des extrémités, ordinairement soumises à l'orienta-
tion.
Dans les plans et coupes, tracés avec beaucoup de soin, le nom-
bre et la forme des pierres brutes qui composent les cryptes sont
des détails importants à indiquer.
Une couche d'argile était ordinairement placée dans les parties
basses pour les préserver de l'humidité : les procès-verbaux doi-
vent faire mention de cette circonstance.
Les tombelles sont quelquefois réunies en grand nombre ; elles
forment alors des cimetières près des oppida, dans leur enceinte, ou
sur un champ de bataille. Placées sur une même ligne, il est néces-
saire d'en indiquer la direction orientée, ainsi que les hauteurs
respectives.
Les tombelles funèbres arrêtées à leur base par un cercle en
pierres brutes ou appareillées peuvent offrir d'utiles observations
relatives à la construction. Les galgals sont formés de pierres
amoncelées.
DEUXIÈME PARTIE. — MONUMENTS MILITAIRES.
Les collines factices ne furent pas toutes destinées aux sépultu-
res : ou en voit qui sont tronquées par le haut, entourées d'un
fossé, et qui peuvent être considérées comme des forts destinés à
défendre un point important; le nom de Mottes leur est assez gé-
néralement donné. Une coupe de terrain doit indiquer si des tran-
chées voisines ou des ravins naturels ne lient point ces forts à un
système de défense plus étendu.
Dans les plaines sujettes à Inondation il peut arriver que des
cônes en terre aient été élevés comme lieux de refuge.
Ces mottes sont à peu près les seuls vestiges de monuments à
proprement parler militaires qu'on puisse faire remonter à l'époque
de l'indépendance gauloise. Toutefois on trouve aussi dans quel-
ques provinces de vastes enceintes, construites évidemment de
main d'homme, et qui, trop irrégulières pour être des camps ro-
mains, sont, d'après toutes les probabilités, l'enveloppe extérieure
de ces oppida dans lesquels se réfugiaient les populations gauloises
à l'approche de l'ennemi. Les archéologues ne s'accordent pas sur
la question de savoir si, indépendamment de ces lieux de refuge,
les Gaulois avaient des villes permanentes fortifiées, dans l'accep-
tion que nous donnons à ce mot. Quoi qu'il en soit, on recher-
chera dans les masses mêmes des talus qui forment la clôture des
oppida, si quelques traces de constructions militaires ne s'y seraient
point conservées; on y pourra trouver des renseignements utiles
pour résoudre la question relative au mode d'appareil adopté par
les Gaulois.
TaoiSIÉ.UE PARTIE. — MONUMENTS CIV1I.S.
Les oppida ou enceintes fortifiées des Gaulois ne présentèrent
probablement point à l'intérieur les dispositions d'alignements et
de rues comme nos villes; on n'y trouvait que les conditions d'un
lieu de refuge ou ca$tnim. Les habitations qu'elles renfermaient
ne furent donc que des demeures incommodes dont on peut trou-
ver le souvenir en examinant le sol de ces enceintes, en y faisant
des fouilles dirigées avec soin. M. Féret a reconnu, dans la cité de
Limes, auprès de Dieppe, des habitations composws de fosses cir-
culaires qui probablement étaient recouvertes de branches d'ar-
bres.
On trouve dans plusieurs parties du Berri, mais principalement
dans l'arrondissement d'Issoudun, de vastes excavations en forme
de cônes tronqués renverses, dont la courbe est trop régulière pour
ne pas avoir été faite à main d'homme. On les appelle dans le pays
raardelles, margelles ou simplement marges, et la tradition leur
assigne une haute antiquité. Elles sont placées d'une manière Irré-
gulière dans les champs, quelquefois réunies en grand nombre dans
un petit espace; mais toutes, sans exception, offrent ce caractère
particulier, de ne laisser apercevoir dans les environs aucune trace
du déblai auquel leur construction a dû donner lieu ; et cependant
le volume de ce déblai se monte, pour quelques-unes d'elles, à
1 1 000 mètres cubes. Leurs dimensions sont tn's- variables; il y en
a de 150 mètres de large et de 6 à 8 mètres de profondeur; géné-
ralement elles sont moins grandes.
Jusqu'à présent on ignore l'usage auquel les mardelles ont pu
servir. On les rencontre dans toute sorte de terrains, de façon
qu'on ne peut les considérer comme produites par l'extraction de
matériaux employés dans les constructions. Les paysans préten-
dent qu'elles servaient «i mettre des troupes en embuscade; cette
opinion n'est pas plus vraisemblable que celle qui tendrait à voir
dans les mardelles de vastes silos. Il est du reste à remarquer que
plusieurs d'entre elles sont l'objet de croyances superstitieuses.
Les mardelles ne sont pas seulement particulières au Berri ; elles
paraissent exister aussi en Ecosse, et on les rencontre en assez
grand nombre dans plusieurs cantons de la Normandie.
IDEIXIÈME ÉPOQIE. — COLO\ISAT!0\ GRECQUE.
PREMIÈRE PARTIE. — MONUMENTS RELIGIEUX.
La colonisation grecque, répandue sur tout le littoral de la Mé-
113
REVUE DE LARCHITECTUKE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
114
diterranée, occupa. les côtes méridionales de la France : peut-être
même doit-on reconnaître la présence antérieure des Phéniciens ou
des Ligures dans quelques constructions et excavations situées
vers les bouches du Rhône, et analogues à celles qu'on désigne
abusivement sous le nom de constructions cyclopéennes.
Construclion cydopéenne.
Fig. 8.
Dans les recherches relatives à ces faits importants, on considé-
rera comme de nature à éclaircir la question toutes constructions
qui portent le caractère de l'antiquité, quels que soient d'ailleurs
les formes et l'appareil des pierres qui les composent. Des dessins
exactement mesurés et donnant les contours des pierres sont indis-
pensables à cette étude.
Marseille, Antibes, Agde et les autres colonies helléniques dont
la désignation manque au texte de Scylax doivent présenter encore
des souvenirs de leur origine.
Marseille, centre de la colonisation, a été trop négligée jusqu'à
ce jour sous le point de vue de ses relations avec le monde connu
des anciens, et sous celui de son étendue, de ses monuments reli-
gieux et civils. Son acropole décrite par Strabon et César, l'en-
ceinte de la ville, les envahissements de la mer, l'emplacement et
l'étendue de l'ancien port, sont des sources d'investigation dont on
comprendra toute l'importance.
Dans la première période de la puissance hellénique, les temples,
composés d'une étroite cella entourée de colonnes, présentent
toujours les formes simples et sévères de l'ordre dorique; les tri-
glyphes et le chapiteau en l'orme de coupe surmontée d'un épais
tailloir sont des caractères trop connus pour qu'il soit nécessaire de
les développer ici.
L'église cathédrale de Marseille, située dans l'ancienne ville ,
peut fournir, ainsi que Saint-Sauveur et d'autres édifices religieux,
quelques notions relatives aux temples célèbres de l'acropolis et
de la ville antique. C'est parmi les matériaux qui servirent à la
construction de ces églises qu'on peut rencontrer quelques frag-
ments grecs; les fouilles exécutées dans les environs pour les par-
ticuliers seront suivies avec soin. Les anciens édifices extérieurs
des autres villes de la côte déjà mentionnées plus haut, et qui
purent appartenir à la colonisation grecque , seront de même
l'objet d'investigations minutieuses de la part de MM. les corres-
pondants.
Pendant la seconde période de l'art grec, les ordres ionique et
corinthien se développèrent, et les temples prirent un autre as-
pect : les chapiteaux se décorèrent de palmettes et de feuilles d'o-
livier ou d'acanthe finement découpées, creusées en biseaux et à
vives arêtes. La légèreté du dessin, la représentation fidèle et dé-
licate des productions de la nature, tels sont les caractères distinc-
tifs de l'ornementation grecque de cette seconde époque. Dans les
détails d'architecture, les profils des corniches et des architraves,
des bases et de leurs supports, sont profondément refouillés et des-
sinés avec énergie.
Au bas de Vernègues, près de Pont-Royal, sur la route d'Orgon
à Lambesc, se voient les restes d'un temple qui, par ses proportions
et ses détails, par le style de ses ornements, peut être considéré
comme appartenant à l'art hellénique.
Feuille grecque.
Fig. 9.
Les autels des Grecs présentent les formes les plus variées; des
ornements d'architecture en décorent la base et le sommet. La
sculpture y reproduit souvent les attributs des sacrifices ou des
divinités auxquelles ils furent consacrés; quelquefois la représen-
tation de ces divinités elles-mêmes. Élevés dans les temples ou
isolément dans les campagnes, ils offrent un égal intérêt ; MM. les
correspondants signaleront toute découverte de cette nature; des
dessins seront joints aux descriptions, et feront connaître, s'il
y a lieu, les constructions accessoires, telles que fondations et mas-
sifs de pierre qui auraient servi à consolider l'établissement de ces
autels.
Les tombeaux peuvent être classés au nombre des monuments
religieux. Dans tous les lieux où les Grecs ont établi des colonies,
ils ont laissé des témoins de leur respect pour les morts. Des stèles
en marbre ou en pierre, des colonnes plus ou moins élevées, sont les
monuments funèbres les plus communs en Grèce et sur le litto rai
de la Méditerranée.
Slèks.
Fig. 10.
Fig. H.
Un ouvrage publié à Marseille en 1773 a fait connaître un
grand nombre d'inscriptions grecques gravées sur des tombeaux.
Elles n'ont pu disparaître entièrement du territoire marseillais ;
si de nouvelles recherches mettent sur les traces de ces stèles ou
des monuments de même nature qui pourront sortir des fouilles
postérieures, il est nécessaire de les faire réunir dans un musée :
ces dispositions s'appliquent à toutes les villes de la colonisation
grecque.
Il est à souhaiter que ces richesses ne passent point à l'étraDger,
ce qui est arrivé pour une statue de style grec ancien, peut-être
T. V. 8
115
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
116
celle de la Diane éphésienne adorée à Marseille, et que possède au-
jourd'hui la galerie Albani à Rome. ^
A défaut d'inscriptions grecques sur les stèles ou marbres d'une
autre forme, on en reconnaîtra l'origine par la finesse des orne-
ments, par des palmettes légères ou des rosaces gravées au
sommet.
Palmellei grecques.
Fig. 12.
Le territoire marseillais conservait encore dans le siècle dernier
quelques monuments funèbres qu'on attribuait aux Grecs; au ha-
meau de la Pêne était une pyramide dont ou pourra retrouver quel-
ques traces.
Enfin sur le sol de la Provence l'influence de l'art hellénique
s'exerça sur les monuments funèbres de l'époque romaine. Le
grand tombeîiu de saint Remy en serait une preuve suffisante ;
MM. les correspondants peuvent trouver dans cette transition une
suite d'observations curieuses à consigner.
DEUXIÈME PARTIE. — MONUMENTS MILITAIRES.
Les Grecs ont connu l'art de protéger par de fortes murailles
leurs villes et les citadelles qui les dominaient. Durant la première
période hellénique les constructions militaires furent composées
de pierres irrégulières , et communément désignées sous le nom de
murs cyclopéens; alors quelques tours pesantes s'élevèrent en
saillie sur les courtines : l'irrégularité de l'ouvrage indique clai-
rement l'état encore primitif de la civilisation. Nous avons déjà
signalé plus haut ce mode de bâtir et la nécessité d'en dessiner avec
soin une à une toutes les pierres, afin de déterminer d'une manière
précise le caractère de la construction.
La Grèce, en se plaçant dans une voie de progrès, améliora son
système de défense : les pierres furent taillées à l'équerre et pri-
rent des formes régulières ; mais, par une combinaison sagement
entendue, on évita de réduire leurs dimensions en abattant les
angles qu'elles présentaient en sortant de la carrière ; il n'est donc
pas rare de rencontrer des assises équarries sur leurs lits , mais
dont les extrémités se joignent par des lignes inclinées, courbes
ou anguleuses, comme on le pratique de nos jours dans les gros
libages de fondation. Enfin un troisième système de construction
militaire se présente chez les Grecs; les pierres y sont parfaitement
régulières et bien dressées sur toutes les faces. C'est ainsi que fu-
rent construites les longues murailles d'Athènes et l'enceinte de
Messène. Des tours rondes ou carrées s'élèvent à des distances cal-
culées sur la portée du trait.
Quant à la forme des clôtures de villes, elle fut subordonnée à
la nature du sol. On suivit le contour des collines, on s'éleva jusqu'à
leur crête, s'appuyant sur des roches escarpées, ou se protégeant
par un agger et des fossés profonds.
L'Étrurie , dont les relations avec la Grèce furent pour ainsi
dire continues, put avoir, en raison du voisinage, quelque in-
fluence sur les colonies méridionales des Gaules. Les villes de
cette partie de l'Italie présentent un fait curieux, relatif a la i»-
liorcétique antérieure à celle des Romains. On y reconnaît que
les Étrusques n'ignoraient i>as l'art de prendre des angles pour
défendre un point important de l'enceinte d'une ville. Tous ces
faits sont signalés à MM. les corresiwndants pour attirer leur
attention sur les murs militaires qui pourraient être attribues à
la colonisation grecque dans les contrées méridionales de la
France.
TROISIÈME PARTIE. — MONUMENTS CIVILS.
Les constructions civiles des Grecs présentent une grande va-
riété de formes, dont les éléments simples se trouvent dans leur»
temples.
L'agora ou place publique , le ttoa ou portique , la basilique ,
les propylées, étaient des édifices composés de galeries à colonnes
dont l'espacement était subordonné à l'emploi du bois ou de la
pierre, à l'étendue des architraves qui reliaient ces colonnes entre
elles. Sans doute la France ne possède aucun de ces monuments
grecs au-dessus du^sol ; mais les fouilles peuvent mettre au jour
quelques soubassements d'édifices composés de pierres rapportées,
ou, selon l'usage des Hellènes, taillées dans la roche vive. Il est
donc nécessaire d'eu signaler les dispositions principales. Établies
ordinairement avec de larges pierres, ces substruclions [wrlaient
l'aire du monument, et de nombreuses marches profilées a l'entour
donnaient de toute part un accès facile. Les déUiils d'architecture
ainsi que ceux des temples pourront présenter le style dorique
décoré de triglyphes; des traces de coloration y seront minutieu-
sement recherchées, non-seulement sur les parties planes, mais
encore sur les moulures courbes et dans les refouillements; des
terres cuites peintes y étaient souvent appliquées.
Terres cuUe$ coloriiet.
Fig. 13.
Pour ce qui concerne la sculpture d'ornement dont furent déco-
rées les faces intérieures ou extérieures des édifices grecs , nous
avons donné à l'article qui concerne l'architecture sacrée les ren-
seignements dont MM. les correspondants pourront faire usage.
Les côtes méridionales de la France, par la nature des rochers
qui les composent, offrirent aux Grecs les moyens de creuser faci-
lement des ports, d'établir des môles selon l'usage consacré dans
leur patrie; ces colons actifs et intelligents aidèrent par l'industrie
aux dispositions que fournissaient les localités. On examinera sur
les côtes tout ce qui pourrait indiquer leur présence.
Les maisons grecques servirent de modèle à celles des Romains:
nous traiterons avec détails, dans un article intitulé Constructions
particulières, cette partie importante de l'art antique en France.
(La suite au prochain numéro. )
117
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
118
GRANDES PORTES D'ATELIER.
Notre PL 6 représente deux espèces de grandes portes d'atelier;
l'une (Fig. 1 , 2 et 3), tournant sur des gonds ordinaires, et l'autre
(Fig. 4, 5, G et 7), glissant sur un chemin de fer suspendu. Ces
deux portes ont été exécutées à Birmingham, à V Engine House
de la station du London et Birmingham railway, et sons la di-
rection de M. Dockray, l'ingénieur en chef de la ligne. A la vérité,
notre planche représente les murs de Y Engine House dans un état
qui serait de nature à satisfaire plutôt les amateurs du pittoresque
que les actionnaires du chemin ; aussi notre conscience nous oblige-
t-elle à convenir que les lierres et les mousses que notre graveur a
traités avec une si rare habileté de burin sont purement fictifs; et
si dans le dessin original notre crayon s'est permis quelques lazzi
pittoresques, nous nous devons de déclarer qu'il y avait loin de là
à ce vernis d'abandon et de désolation que le graveur a étendu sur
son œuvre, et qui ferait croire vraiment que non-seulement les
locomotives sont depuis longtemps abandonnées, mais que les che-
mins de fer mêmes ont cédé le pas à la navigation aérienne.
A l'exception donc des herbes parasites que nous n'avons pas
voulu faire effacer, tellement elles sont bien exécutées, mais que
le lecteur voudra bien supprimer par un effort de sa pensée, la
Fig. l nous représente la face extérieure de l'entrée principale de
l'Engi ne House de Birmingham. Cette entrée, dont le dessus est
occupé par un réservoir d'eau, en fonte, est accompagnée à gauciie
d'une fenêtre pareille à celle qui est figurée à droite dans notre
planche, et dont le châssis est en fer. La Fig. 2 représente cette
porte vue de l'intérieur du bâtiment. La tige qui porte le pivot du
gond est scellée par une de ses extrémités entre deux pierres
( voy. Fig. 2). La Fig. 3 montre comment la partie scellée se
bifurque, et la Fig. 2 comment chaque patte se courbe en dessous
pour se cramponner dans la pierre.
L'extérieur de la porte Fig. 4 est le même, sauf les proportions,
que celui de la Fig. i. La coupe Fig. 5, dont la partie principale
est représentée à une échelle double par les Fig. 6 et 7, montre
les détails du moyen adopté pour la suspension et le glissement
des vantaux de la porte. Ce système de porte à coulisse ou à che-
min de fer est plus coûteux que le système ordinaire à gonds, mais
il est extrêmement commode lorsque l'atelier est petit, ou que l'es-
pace est trop précieux pour que l'on consente à perdre l'emplacement
nécessaire à la manœuvre de portes à gonds.
Les portes à coulisse pourraient recevoir de nombreuses et
utiles applications dans nos édifices publics et dans nos maisons
particulières. Césab DALY.
DU CHAUFFAGE ET DE LA VENTILATION.
Ce n'est que depuis quelques années qu'on s'occupe avec succès
du chauffage et de la ventilation des établissements publics et
particuliers. Cette partie importante de l'architecture n'est pas
encore enseignée à l'Ecole des Reaux-Arts, et les architectes, géné-
ralement, l'ignorent. On sait fort bien donner à un édifice les dis-
positions que le confortable réclame, ainsi que les proportions
voulues par notre amour des belles formes ; on détermine
assez bien les dimensions des divers éléments d'un bâtiment : murs,
pièces de charpente, de fer, etc., en vue de leur résistance néces-
saire; mais l'édifice sorti des mains de l'architecte est le plus sou-
vent un être encore sans vie ; c'est un superbe cadavre sans appa-
reil respiratoire; il y manque la circulation de l'air pur nécessaire
à l'alimentation des personnes qui l'habitent, et les moyens de faire
évacuer l'air vicié, dont il est important d'organiser l'écoulement
au fur et à mesure de sa formation.
Quand il est question de faire progresser lart, nos artistes savent
fort bien déclarer qu'il faut étudier et imiter la nature ; que n'en
font-ils autant à propos du chauffage et de la ventilation des édifices?
Us verraient, par exemple, que les êtres animés sont tellement orga-
nisés que le seul fait de la respiration suffit pour opérer au dedans
d'eux un phénomène de combustion qui entretient la chaleur dans
tout leur corps, et pour décharger les poumons des gaz délétères
dont il importe de les débarrasser.
Que les architectes , dans les demeures qu'ils construisent , ne
cherchent-ils aussi à satisfaire simultanément aux besoins de la
ventilation et à ceux du chauffage?
Dans notre Introduction au volume de cette année, nous avons
pris l'engagement d'entretenir nos lecteurs à ce sujet. Nous nous
sommes adressé en effet à M. RénéDuvoir, dont la grande expé-
rience en cette matière est connue, et nous l'avons prié de com-
muniquer à nos lecteurs quelques-unes des dispositions adoptées
par lui dans sa pratique journalière. Nous lui avons proposé de
monter à la tribune que nous avions élevée en fondant cette Revue,
et d'expliquer lui-même à notre public les dispositions de quelques-
uns des principaux appareils construits par lui dans divers établis-
sements, tantôt pour les chauffer et les ventiler par les différents
systèmes de l'air chaud, de l'eau chaude et de la vapeur, et tantôt
pour le service des bains, du blanchissage, de la cuisine , etc.
M. René Duvoir a accepté notre proposition, et nous donnons
aujourd'hui ses premières communications à nos lecteurs.
CD.
Calorifèkes Ventilateubs a aib chaud qui se placbst
DANS LES Pièces a Chauffée.
Nos constructions, tant publiques que privées, ont été rarement
bâties en vue d'un système général de chauffage ; aussi s'y trouve-
t-il bon nombre de pièces tellement disposées qu'il faut les chauf-
fer directement, attendu l'impossibilité où l'on se trouve fréquem-
ment de les mettre tous en rapport avec un même calorifère ;
tels sont, par exemple, la plupart des appartements à loyer de
Paris , car les propriétaires n'y ont pas encore pris le parti de
chauffer leurs maisons au moyen d'un système de chauffage géné-
ral, qui cependant donnerait évidemment de notables économies.
119
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
lao
Nous avons cherché à remédier d'une manière simple à ces in-
convénients. Nous chauffons l'air extérieur destiné à la ventila-
tion de la pièce en le faisant passer par un appareil que nous
établissons dans la pièce même qu'il s'agit de chauffer.
La prise d'air doit avoir les dimensions suffisantes pour fournir
le volume d'air nécessaire au plus grand nombre de personnes que
la salle doit contenir. Un registre placé dans le conduit permet d'en
faire varier la section suivant le nombre de personnes qu'y s'y
trouvent momentanément.
Description des petits Calorifères à air chaud, PI. ^ .
Les Fig. 1 et 2 représentent: la première, une coupe verticale;
la deuxième, une coupe horizontale suivant x x [Fig. i) d'un ca-
lorifère du plus petit modèle.
F, foyer en fonte avec grille pour la combustion de la houille, et
cendrier au-dessous. Les produits de la combustion s'élèvent dans
le cylindre en fonte F pour redescendre dans le cylindre en tôle
C, qui enveloppe complètement le cylindre en fonte. De là, ils vont
gagner la cheminée par un tuyau Z), muni d'une clef /{ ; c est un
couvercle en tôle qu'on peut facilement enlever pour le nettoyage
de l'appareil.
La porte P du foyer glisse dans des coulisses, et son mouvement
est réglé par un contre-poids p, au moyen d'une chaîne qui passe
sur une poulie m. Cette porte peut ainsi fermer plus ou moins l'ou-
verture du cendrier, et produire une combustion plus ou moins
active.
L'enveloppe extérieure du calorifère se compose : l" d'un so-
cle en tôle A A , portant une moulure en cuivre; 2° d'un cylindre
en tôle B B, monté sur le socle ; 3" d'un marbre K, qui recouvre
l'appareil.
L'air extérieur, appelé par un canal H, arrive sous le cendrier,
monte en s'échauffant à la fois contre les parois du foyer, le tam-
bour de circulation de la fumée et l'enveloppe extérieure B B,
qui est chauffée par rayonnement; il sort ensuite de l'appareil par
la bouche de chaleur I, qui règne sur toute la circonférence du
calorifère.
Les Fig. 3 et 4 représentent : l'une, la vue extérieure ; l'autre,
une coupe d'un calorifère de plus grande dimension.
La Fig. 5 est une coupe suivant x x de la Fig. 4 ; et la Fig. 6
est une autre coupe faite suivant y y de la même Fig. 4.
F, foyer en fonte disposé pour brûler de la houille sur une grille
g, au-dessous de laquelle se trouve le cendrier L.
G, cylindre en fonte surmontant le foyer, bouehé à sa partie su-
périeure par une plaque en fonte et par un couvercle en tôle , et
muni latéralement d'une buse. C'est par cette ouverture que les
produits de la combustion se rendent dans le tambour annulaire
C C [Fig. 4), dans lequel ils descendent pour s'échapper ensuite
par le tuyau à fumée D. fi est le registre de ce tuyau.
ce est un couvercle qui rend le nettoyage facile à exécuter.
Une porte à coulisse P [Fig. 3) est équilibrée par un contre-poids
p [Fig. 4), dont la chaîne passe sur la poulie m.
La cloche du foyer repose sur une plaque M M M [Fig. 6), qui
esta jour afin que l'air appelé puisse s'introduire dans l'appareil.
Cette plaque est supportée par un socle en fonte A.
B, enveloppe extérieure portant un marbre K, et muni de
larges bouches de chaleur /.
ff, canal d'arrivée de l'air extérieur. L'air, qui s'échauffe
surtout par son contact avec les parois du tambour à fumée,
dont la disposition présente dans un petit espace une tres-
graude surface, prend encore de la chaleur au foyer en fonte
et à l'enveloppe extérieure, qui est chauffée par rayonnement.
Les portes à coulisses peuvent être remplacées par des portes de
foyers et de cendriers en fer ou en cuivre se fermant au moyen de
loquets ou de boutons tournants. Pour les calorifères de collèges et
de pensions, l'ouverture et la fermeture des portes s'effectuent au
moyen de clefs, afin que les élèves ne puissent toucher au foyer.
Pour les maisons particulières où l'on brûle du coke, afin de
rendre le ramonage moins frwiuent, on peut modifier l'appareil de
manière à rendre facile le chargement par le haut. Une ouverture
circulaire, que l'on Iwuche par un couvercle en cuivre, est alors
pratiquée au centre du marbre, et au-dessus du foyer est adapté un
autre couvercle en forte tôle qu'on enlève au moyen d'une clef
lorsqu'on veut y jeter la charge de combustible nécessaire à l'ali-
mentation du feu.
Ces appareils se construisent également avec des foyers appro-
priés à la combustion du bois.
Quand ces calorifères sont destinés à chauffer alternativement
ou à la fois plusieurs pièces contignes a celle ou doit se trouver
l'appareil, on remplace l'enveloppe extérieure en tôle par une con-
struction en biscuit ou en faïence, et Ion établit à la partie supé-
rieure de l'appareil un réservoir à air chaud dans lequel viennent
puiser les bouches de chaleur. Dans cette disposition comme dans
les précédentes, on se réserve les moyens d« charger les foyers par
la partie supérieure (i).
Dans plusieurs collèges, on s'est servi avec succès de ces appa-
reils, qui conviennent parfaitement au chauffage des classes, des
salles d'études et des dortoirs, par cette double raison qu'ils pro-
curent à la fois une chaleur convenable et une ventilation abon-
dante, condition hygiénique de la plus haute importance pour les
pièces où plusieurs personnes se trouvent réunies.
Nous en avons placé au collège royal de Saint-Louis, à l'École
Normale, aux collèges de Moulins, de Tournon. d'Amiens, de Ro-
dez et d'Avignon, dans les écoles de MAcon et dans un grand nom-
bre de maisons particulières, où ils ont donné de bons résultat.-;
comme chauffage économique et salubre.
Ils conviennent également au chauffage des appartements. On
peut les monter et les démonter aussi facilement que tous les poêles
ordinaires.
Ce système, dont M. Péclet a approuvé l'usage dans les colk^'cs,
se combine avec le système de ventilation indiqué dans son instruc-
tion sur l'assainissement des écoles, instruction sur laquelle nous
aurons occasion de revenir à propos du chauffage des écoles et des
appareils à air chaud.
Salles de Bains et de Bains de Pieds.
La santé et la propreté exicent l'usage frwjuent de bains entiers
et surtout de bains de pieds; mais ce service rencontre toujours
(1) Nous donnons ici les prix de quelques-uns de ces appareils Nos lecteurs
se trouveront ainsi plus en mesure de comparer entre eux les avantages des ca-
lorifères de M. Rdiié Diivoir et ceux de tout autre système. (Ao(e du direct.)
N° 1. Diamètre 0 30 vaut 60 fr.
N" 2. Diamètre 0 40 vaut 80
N° 3. Diamètre 0 50, socle en fonte vautl20fr
N° 4. Diamètre 0 50, socle en cuivre vaut 140
131
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
1^
des obstacles dès qu'il faut l'organiser sur une grande échelle,
comme dans les collèges, les pensions, les hospices, etc.; nous
avons cherché à le faciliter en rendant plus commodes les vases
destinés aux bains de pieds.
La PL 8 représente a la fois la salle où se prennent les bains
^ entiers et celle où se prennent des bains de pieds seulement, telles
qu'elles ont été construites au collège royal de Rouen. Ce plan est
celui que nous avons eu le plus souvent occasion de mettre à exé-
cution ; l'expérience a prouvé qu'il est tout à fait approprié à
l'usage des collèges et des pensions.
La Fk/. 1 représente le plan des deux salles, et la Fig. 2 l'éléva-
tion de la salle des bains de pieds.
Chaque bain de pieds est fixé devant un banc où sont indiquées
les places des élèves. Pour faire le service on dispose l'eau à la
température convenable dans une des baignoires ou dans un ré-
servoir. On ouvre une soupape; l'eau s'échappe par nn tuyau mis
communication, au moyen d'un embranchement, avec chacun des
bains de pieds, et s'élève dans tous au même niveau.
On les vide tous ensemble en ouvrant un robinet placé à l'ex-
trémité opposée de la conduite; et pour laver celle-ci on y laisse
couler de l'eau propre pendant quelques instants. De nouveaux
bains de pieds peuvent être disposés immédiatement après. Une
fois l'eau chauffée, le service complet des bains de pieds s'effectue
en moins d'une demi heure.
Des salles de bains et des services de bains de pieds ont été
aussi établis, d'après notre système, dans les collèges de Saint-
Louis à Paris, de Toulouse, de Pau, de Bourges, de Poitiers, de
Bordeaux, de Tournon, de Moulins, de Nantes, de Versailles, d'A-
vignon et de Montpellier; d'autres sont eu voie de construction (l).
RENÉ DUVOIR.
EXPOSITION 9UINQnEBTNAZ,E DE ^'INDUSTRIE
FRANÇAISE.
Les pavillons qui doivent recevoir cette année les produits
de l'Industrie nationale, sont situés dans le grand carré des
Champs- Elysées.
On sait que cette exposition est, depuis près d'un demi-siècle,
errante et nomade sur le sol de Paris. Les différents gouverne-
(1} Le prix des bains de pieds avec leurs tuyaux conducteurs et raccords en
cuivre est ;
Pour les bains de pieds, en zinc 15 fr.
Pour les bains de pieds, en cuivre 25
ments qui se sont succédé ont bien compris l'importance de ces
exhibitions, mais ils n'ont pas encore cru devoir dresseï- un temple
au génie industriel de notre pays, un temple digne des merveilles
qu'il doit contenir.
Ainsi, sous le Directoire, en 1798, l'exposition eut lieu au
Champ-de-Mars; en 1801 et 1802, dans la cour du Louvre; en
1806, sur l'esplanade des Invalides; en 1819, 1823 et 182", dans
la cour et dans cette partie des bâtiments du Louvre qui avoisi-
nent la colonnade; en 1834, sur la place de la Concorde; enfin en
1839 aux Champs-Elysées, où elle n'occupait que 16 500 métrés
carrés de terrain.
Les travaux du va^te bâtiment en planches qui sert cette année
à recevoir les produits industriels sont assez avancés pour qu'on
puisse juger de l'effet définitif. L'architecture de ce monument, sans
rien offrir de remarquable, répond cependant à ce qu'on pouvait
en attendre. La distribution parait avoir été bien comprise, et le
jour surtout se distribue fort également. L'ensemble du bâtiment
forme un long parallélogramme dont la superficie est de plus de
deux hectares (22 000 mètres carrés).
INous ne dirons pas aujourd'hui à quelle occasion cette noble et
grande pensée d'une exposition des produits de l'Industrie nationale
vint à François de Neufchàteau, ministre de l'Intérieur (17!)8), et
comment le public accueillit avec acclamation, avec enthousiasme,
cette bonne nouvelle, qui était une conséquence naturelle du droit
de propriété qu'on venait d'accorder aux inventeurs sur les fruits
de leur génie.
En attendant, nous croyons utile de donner la circulaire que
M. Cunin-Gridaine, ministre de l'Agriculture et du Commerce, a
fait adresser aux préfets. Le lecteur verra que ces pièces sont écri-
tes dans un esprit de progrès assez large, et peuvent faire pressen-
tir que l'Industrie nationale, les produits du travail, les droits des
travailleurs, sont à la veille d'occuper le rang qui leur est dû.
Circulaire de M. U ministre de V Agriculture et du Commerce, adressée
aux préfets des départements.
.Monsieur le Préfet, mes lettres des 6 el 8 octobre dernier vous ont
fait coniiailre l'iiitenlion du Gouvernement de ne rien négliger pour
donner à la prochaine exposition des produits de l'industrie lout l'éclat
que comporte cette grande solennité.
Depuis cette époque, je me suis occupé de la disposition des bâti-
ments nécessaires pour l'exposition ; les travaux de maçonnerie, que
les gelées pouvaient empêcher ou interrompre, sont achevés depuis un
mois; les autres travaux, adjugés en totalité, sont en cours d'exécu-
tion ; une superlicie de près de 20,000 mètres, entièrement couverte,
recevra les produits du travail national, et déjà le degré d'avancement
des travaux et l'activité avec laquelle ils se poursuivent me donnent la
certitude qu'aucun obstacle n'en prolongera l'exécution au delà de l'é-
poque fixée pour leur achèvement.
Je viens aujouid'hui, monsieur le Préfet, vous entretenir de la direc-
tion à imprimer aux opérations des jurys chargés de l'admission des
produits.
Le droit de travailler est un droit garanti à tons par nos lois moder-
nes, et le travail l'origine la plus noble de la propriété; chacun peut
donc se glnrilicr à juste litre de ses œuvres et prétendre à l'honneur de
les exposer. Mais les jurys ne doivent pas perdre de vue que les expo-
sitions de riiulustrie, comme l'indique leur litre, ont une spécialité
marquée dans les limiles de laquelle les adiiiissions doivent être rigou-
reusement renrermées. Au début de l'institution, tous les produits pu-
rent être admis indistinctement. La France n'avait pas encore conquis
1«3
REVUE DE LARCHITECTUKE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
la»
parmi les peuples manufacluiicrs le rang que sa richesse, son inlelli-
genceeisoii aciivilé lui assignent, et les expositions n'étaient encore
alors, pour ainsi dire, qu'un appel au génie des arts industriels.
Depuis, l'industrie a grandi sous la protection des institutions du
pays et sous l'influence de la paix et de l'ordre intérieur; la science a
éclairé sa marche; la méc;inique a centuplé ses forces, et le travail na-
tional exploite aujourd'hui en grand toutes les branches de la produc-
lion.
Ce résultat, que je suis heureux de eonslaler, commande au Gouver-
nement de réserver les honneurs de l'exposition aux produits qui oc-
cupent dans la consonimalion une place assez notable pour mériter
véritablement l'iulérèt et l'attention publique. Cette mesure contribuera
à donner à cette belle et nationale institution le caractère sérieux et di-
gne qui convient à la grandeur de la France et à l'imporlance de son
commerce. Les jurys comprendront, en outre, la nécessité de n'admet-
ire que des objets recomniandables par leur bonne fabrication.
Si le but de nos expositions n'est pas d'offrir à la curiosité publique
le vain étalage de stériles chefs-d'œuvre, il n'est pas non plus de rece-
voir sans choix les produits de toute nature qui peuvent être présentés :
l'un et l'antre inconvénients doivent être évités avec le même soin.
Tous les arts industriels qui fournissent aux besoins de l'homme con-
tribuent au bien-être delà société et concourent au développement de
la richesse publique ; leur utilité seule donne la mesure de leur valeur
relative, et cette base est la règle la plus sûre que le jury puisse adop-
ter pour l'appréciation des produits qui lui seront soumis.
En effet, un produit isolé, fût-il un chef-d'œuvre de patience ou d'a-
dresse, un modèle de richesse ou d'élégance, s'il n'a été obtenu qu'à
prix de travail ou d'argent, n'a pas, lui-même, une valeur industrielle
qu'on doive particulièrement encourager ; souvent même de pareils
travaux sont pour leur auteur une cause de mécompte et de ruine. Mais
il n'en est pas de même d'un produit en réalité plus modeste, s'il satis-
fait à un besoin commun, si sa bonne fabrication en assure le bon usage,
si son bas prix en généralise l'emploi. Ce produit a une véritable va-
leur industrielle, et sa place est marquée à l'exposition.
Les jurys auront donc ii considérer :
La nature des produits;
Leur qualité ;
Leur valeur industrielle et commerciale.
1. Les objets qui appartiennent à la science et aux beaux-arts doivent
être écartés avec soin. Je rangerai particulièrement dans cette catégorie
les objets d'art proprement dits, les systèmes planétaires et autres, les
méthodes d'enseignemeni, les appareils médicaux, les pièces anatomi-
ques, etc D'antres expositions leur sont ouvertes, et ils ont leurs
juges dans les sociétés savantes et dans les académies des arts et des
sciences.
Il en est de même de ces spécimens d'invention ou de perfeclionne-
mentdoni les résultats, purement théoriques, sont encore sans appli-
cations matérielles, et qui n'ont reçu aucune sanction de la pratique.
Il convient d'attendre, à leur égard, que le temps les ait fait passer du
domaine de la science dans celui de l'industrie.
D'im autre côté, le jury central de 1839, en signalant la convenance
d'interdire aux exposants la distribution de toutes cartes, adresses et
prospectus, a demandé qu'on cessât d'admettre certains objets qui, aux
dcn\ières expositions, occupaient ime place considérable, et qui appar-
licniieut plutôt à la confection qu'à la fabrique: je veux parler des vê-
tements, corsets, perruques, souliers, socques, etc.; et, en second lieu,
lies préparations alimentaires, boissons, cosmétiques, médicaments, etc.
Toutefois, je dois expliquer que cette exclusion ne saurait s'appliquer,
à l'égard des substances alimentaires et des cosmétiques, qu'aux pro-
duits qui n'ont été, en dernier lien, que l'objet d'une mauipidalion ac-
cessoire ou d'une simple mise en forme.
Enfin, monsieur le Préfet, je n'ai pas besoin de vous rappeler que
les jurys départementaux ne doivent ni admettre, ni laisser expédier au-
cuns produits chimiques ou autres, qui seraient susceptibles de s'en-
flammer spontanément, .soit dans le transport, soil sous la tenipéniiure
élevée des salles de l'exposition. On ne saurait, à cet égard, déployer
trop de sévérité pour prévenir les accidents.
II. La bonne qualité des produits est une des conditions essentielles
pour leur admission ; mais, par là, je n'entends pas i-xclu!>ivemenl ces A
qualités recherchées par les classes riches de la société, et que seules
elles peuvent payer convenablement ; ce n'est là qu'une exception, l-i
qualité qu'on doit exiger est celle qui résulte de l'emploi intelligent des
matières, de la régularité de la fabrication, de la pureté des formes ou
des dessins, de la solidité des couleurs ou des apprêts.
Quelques fabricanl>, au lieu d'envoyer à l'exposition les types ordi-
naires de leur fabrication, se croient obligés de faire exécuter à grands
frais, pour cette époque, des produits exceptionnels, des pièces d'expo-
sition. En cela ils méconnais.seMt le but de l'institution, qui n'est pomt
d'établir un concours entre les f.ibricants sur la seule comparaison des
objets exposés, mais de faire connaître l'étal vrai des dilTerenles bran-
ches de la fabrique. D'un autre côté, en se présentant avec des produits
exécutés en dehors des conditions normales, on se met en contradiction
avec la notoriété publi(|ue et on court la chance d'être mal classé : ce
qu'on fait le mieux, en effet, c'est ce qu'on fait joiirncllemenl, et, en
visant à l'extraordinaire, on perd li' bénéfice de sa spécialité.
III. Le jury de l'exposition de 1859 s'est préoccupé particulièrement,
dans l'appréciation des objets exposés, de la valeur industrielle et com-
merciale lies produits. Il a considéré, avec toute raison, que le prix est
un des [irincipaux éléments de la perfection, comme l'utilité est la me-
sure la plus vraie de la valeur réelle des choses.
Les jurys départemenlaux sont composés d'hommes trop positifs
pour ne pas tenir le plus grand compte de cette considcralion. La ré-
duction dans les prix, lorsqu'elle n'est achetée par aucune altération de
la qualité, constitue un progrès véritable; et ce progrès, en niellant la
marchamlise à la portée d'un plus grand nombre de coiisomm^icurs,
estfa\oiable an développement du travail, par l'augmenlalioii de pro-
duction qui en est la conséquence.
Lurs des dernières expositions, mes prédéccs.seurs avaient demandé
que le prix de chaque article fût soigneusement indiqué. Le jury ceD>
irai avait vivemenl appuyé cette mesure. Je vous invile, monsieur le
Préfet, a insister particulièrement sur ce point. Sans la tonnaissance
exacte des prix, le niériie relatif des produits et leur véritable valeur
commerciale ne peuvent être sainement appréciés, et le jury central se
trouvant, à leur égard, .sans moyens de remplir la mission qui lui est
confiée, pourrait être obligé de les mettre hors de concours.
Telles sont, monsieur le Préfet, les recommandations générales que
je vous prie de soumettre au Jury constitué dans votre département ;
placé sur les lieux, coimaissant do longue date l'importance des éta-
blissements, la nature et la qualité de leurs produits, il peut avec sû-
reté en faire l'application, et son témoignage, donné sans esprit de lo-
calité comme sans faveur, ne peut manquer d'être, pour le jury central,
un élément précieux d'appréciation. Veuillez, en outre, avertir le jury
de votre département, que, comprenant toute la difficulté de sa inis.siun
et voulant donner force à ses décisions et le défendre lui-même contre
les influences qui pourraient entraver l'accomplissement de sa tâche,
j'ai décidé que le jury central poui rail refuser l'exposition des produits
qui n'auraient pas été soumis à son examen préalable, ou qui, par une
cause quelconque, ne se trouveraient pas dans les conditions que je
viens d'énumérer.
A la réception de celle lettre, vous aurez, monsieur le Préfet, à faire
ouvrir, à votre préfecture et dans chaque sous-préfecture de votre dé-
partement, le registre d'insciiption des déclarations des fabricants et
industriels qui se proposent d'exposer ; ces déclarations devront indi-
quer :
Le nom du fabricant, la nature de son industrie, son domicile, le siège
et la date de fondation de son établissement, le nombre d'ouvriers qu'il
123
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
12Ô
emploie dans ses ateliers et le nombre de ceux qu'il fait travailler en
dehors; lu nature et la force de son moieur, le nombre de ses niélicrs,
feux, fours, forges, etc.; la i|uantité de matières premières qu'il met
en œuvre; l'iniporlance annuelle en qnaniilé et en valeur des produits
qu'il livre, soit au commerce intérieur, soit à l'exportaiion; les avanta-
ges que présente l'établissement pour la localité, les médailles ou ré-
compenses bonorifiques qu'il a pu obtenir.
De son côté, le jury, à mesure que ces déclaiationslui seront remises,
constatera, autant que possible, l'exaciilude des renseignements consi-
gnés dans ces déclarations, et recueillera toutes les informations néces-
saires pour l'examen <lcs produits de chaque éiablisssenient et pour la
rédaction de la note qui devra en accompagiier l'envoi.
Vous savez, en outre, monsieur le Préfet, (ju'aux termes de l'article S
de l'ordonnance royale du 5 septembre 1845, les jurys départementaux
n'ont pas seulement la missidu de prononcer sur l'admission des pro-
duits présentes pour l'exposition; ils ont encore à signaler au Gouver-
nement les industriels qui, par la fondation d'établissements ou par des
inventions ou des procédés nouveaux, non susceptibles d'être exposés,
auraient contribué aux progrès des arts et manufactures depuis la der-
nière exposition. Les jurys, je n'en doute pas, apprécieront toute l'im-
porlance de l'intérêt de cette partie de leur tâche, et en ne négligeant
rien pour déterminer les grands établissements à prendre au prochain
concours la part que leur rang leur assigne, ils seront heureux de pou-
voir signaler les noms des industriels, chefs d'atelier ou simples ouvriers
qui, par des perfectionnements pratiques ou des procédés ingénieux,
auraient rendu des services à l'industrie : ce sont là des titres honora-
bles à la reconnaissance du pays, et le Gouvernement, sur le rapport du
jury central, saisira avec empressement l'occasion de mettre ces titres
sous les yeux du Roi.
Veuillez, monsieur le Préfet, m'accuser réception de cette circulaire,
cl recevoir l'assurance de ma considération la plus distinguée.
Le Ministre Secrétaire d'Etat de l'agriculture et du commerce,
Signé : L Cunin-Gridaine.
La circulaire suivante apprendra à nos lecteurs les mesures
prises par M. le ministre du Commercer pour régler l'admission
des produits proposés pour l'exposition, les cas d'exclusion et les
mesures d'ordre adoptées dans l'intérêt de tous :
Monsieur le préfet, au moment où les opérations du jury de votre
département, chargé de l'examen des produits destinés à la prochaine
Exposition, touchent à leur terme, vous avez à vous occuper de leur
expédition et de la rédaction des pièces qui doivent les accompagner.
Comme aux précédentes Expositions, les objets expédiés doivent
être détaillés dans un bordereau indiquant le nom et le domicile de
chaque fabricani, le nombre et la nature de ses articles, les médailles
et récompenses honorifiques qu'il a pu déjî» obtenir.
Vous trouverez ci-joint, monsieur le Préfet, un modèle de ce bor-
dereau; il ne devra être rempli qu'au fureta mesure des expéditions,
et il ne devra comprendre que les produits effectivement expédiés. Ce
bordereau me sera adressé directement, par la pnst«, en triple exem-
plaire, et de manière à ce qu'il me parvienne toujours avant l'arrivée
des colis.
Un de ces exemplaires est destiné au jury central de l'Exposition ; à
cet exemplaire sera joint, pour chaque exposant, un bulletin indivi-
duel contenant les divers renseignements réclamés par ma circulaire
du IS décembre dernier; on y inscrira, en outre, les observations et
annotations particulières du jury départemental, propres à faire con-
naître l'importance réelle des établissements et les titres des fabricants
aux récompenses nationales. Ce témoignage, émanant d'hommes si
compétents, sera pour le jury central un utile élément d'appréciation.
On devra joindre au bulletin les notes et documents qui auront pu être
fournis par chaque exposant. J'ajoute que si un fabricant présentait
en même temps des objets d'une nature complètement différente, il
serait nécessaire de lui affecter un bulletin distinct pour chaque vaiure
de produits.
Le second exemplaire du bordereau est destin:; h l'administration cen-
trale. Il m'est nécessaire pour la correspondance avec les préfectures,
avec le jury central et avec l'inspecteur de l'Exposition. Dans la colonne
d'observations de ce bordereau seront reproduites les notes du jury dé-
partemental inscrites sur le bulletin indivlifuel.
Enfin, le troisième exemplaire du bordereau est indispensable pour
le service de l'inspecteur; ce bordereau ne reproduira pas les annota-
tions du jury, mais il devra être accompagné, pour chaque exposant,
d'une carte dont le modèle est ci-joint, et qui servira pour la réparti-
tion et le classement des produits dans les différentes divisions de
l'Exposition. Il est bien entendu que, comme pour les bulletins indivi-
duels, il devra être fait autant de cartes qu'il y aura de produits d'une
nature diffcrenlt.
Les produits pourront être reçus à l'Exposition à partir du 23 mars
courant; ils devront tous être arrivés avant le 13 avril prochain. Ils se-
ront adressés à l'inspecteur de l'Exposition, aux Champs-Elysées, et
chaque envoi devra être accompagné d'une lettre de voilure timbrée,
indiquant le nombre, les numéros et le poids des colis, la nature des
objets, ainsi que le prix du transport et la durée de la route. Il ne de-
vra être ajouté au prix du transport aucuns frais à rembourser. Un du-
plicata, sur papier non timbré, de la lettre de voiture, sera joint à
l'exemplaire du bordereau destiné à l'inspecteur de l'Exposition. Les
voituriers arriveront exclusivement par le quai de la Conférence; la let-
tre de voiture devra en faire mentioti. Enfin ,1a voie du roulage ordi-
naire ou celle de la navigation devront être exclusivement adoptées.
Je vous rappelle d'ailleurs, monsieur le préfet, que certains produits
bruts, tels que les minerais, granits, marbres et autres objets analogues,
ne doivent être envoyés que par échantillons. Je dois vous avertir en
outre que le Gouvernement ne répond pas des pertes ou dommages ré-
sultant, soit pendant la route, soit dans le cours de l'Exposition, des vi-
ces d'emballage, de la détérioration naturelle des produits, ni des acci
dents ou événements de force majeure, même de celui d'incendie. Les
exposants doivent en être expressément informés, afin qu'ils puissent
faire assurer leurs produits, s'ils le jugent convenable, ou rester leurs
propres assureurs. Toutes les précautions ont d'ailleurs été rigoureuse-
ment prises contre les risques du feu ; et, à cet égard, je vous rappelle,
monsieur le Préfet, la recommandation que je vous ai faite de ne lais-
ser admettre aucune substance susceptible de s'enflammer spontané-
ment ou par le simple choc.
Ma circulaire du 13 décembre dernier a recommandé aux jurys de
signaler particulièrement à raiiention du Gouvernomenl les industriels
qui, par des inventions ou des procédés nouveaux, ont contribué, de-
puis la dernière Exposition, aux progrès des arts et manufactures. Leurs
noms devront être inscrits, avec le rapport du jury, à la suite de ceux
des exposants, sur les deux exemplaires du bordereau destinés au jury
central et à mon département.
Enfin, monsieur le Préfet, je vous prie de faire remettre sous vos
yeux les instructions adressées à votre préfecture les 9 octobre 1858
et 18 janvier 1839, lors de la dernière Exposition, et je vous invite à
vous y conformer avec soin pour tout ce qui concerne les mesures d'or-
dre propres à provenir dans l'admission et l'expédition des produits
l'encombrement et la confusion.
Veuillez, monsieur le Préfet, m'accuser exartemeni réception de la
présente circulaire, et recevoir l'assurance de ma considératimi la plus
distinguée.
Le Ministre Secrétaire d'Etat de l'.'^gricullure ei du Commerce,
Signé : L. CUNI.N-GRIDAINE.
i27
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS
iK
DE IiA POZ.ICI: DU ROUI.AGE.
Le projet de loi sur la police du roulage, amendé l'an dernier
par la chambre des députés, vient d'être amendé de nouveau par
la chambre des pairs. Depuis plus de dix ans que ce projet de loi
est l)allotté d'une Chambre à l'autre, plus la discussion se prolonge,
moins la question semble s'éclaircir. En dernier lieu surtout. les
systèmes les plus divergents ont été produits; on s'est étayé des
faits et des expériences les plus contradictoires. Cependant, tous
ces faits sont probablement exacts ; les expériences ont été faites par
des hommes très-habiles ; ceux qui raisonnent d'après ces faits et
ces expériences ne sont pas des esprits faux : il doit donc y avoir au
milieu de tout cela quelque malentendu. Ce malentendu le voici :
dans tout le cours de ces interminables discussions on parle tou-
jours des routes en général, sans établir aucune distinction entre
celles qui sont bonnes et celles qui sont mauvaises. Cependant,
l'action du roulage est totalement différente dans les deux cas : il
n'est donc pas étonnant que l'on arrive à des conclusions tout à
fait opposées. Pour peu qu'on eût voulu faire une distinction indis-
pensable et examiner séparément ce qui se passe, 1" sur de mau-
> aises routes ; 2" sur de belles routes, on eût éclairci bien vite une
question fort compliquée en apparence, mais, en réalité, extrême-
ment simple.
Lorsqu'une route est rouagée, raboteuse, lorsqu'elle offre une
résistance inégale, et des trous ou des flaques plus ou moins pro-
noncés, alors les voitures agissent sur elle par choc, par force vive,
et lui font d'autant plus de mal qu'elle est plus mauvaise. Dans ce
cas il y a écrasement, désagrégation, défoncement. Dans ce cas,
pour un tonnage donné, les forts chargements sont , sans aucun
doute, plus à redouter que les faibles chargements. C'est un fait
analogue à celui du coup de mouton qui agit sur un pieu avec une
toute autre efficacité que mille petits coups de marteau. Dans ce
cas encore, les jantes étioites peuvent offrir moins de garanties que
les jantes larges. Enfin, la vitesse ajoute considérablement aux dé-
gradations, attendu que l'intensité des chocs est proportionnelle à
cette vitesse.
Sur de belles routes, au contraire, à surface unie, ferme et éga-
fement résistante, les chocs disparaissent, et les voitures n'agissent
plus que par simple frottement. Dans ce cas, il n'y a plus de dé-
gradation proprement dite; il n'y a que de l'usure, et une usure
uniforme et insensible qui ne nuit en rien à la viabilité. Dans ce
cas, pour un tonnage donné, les lourds chargements ne sont pas
plus à craindre que les faibles chargements, les jantes étroites ne
sont pas plus à craindre que les jantes larges, le frottement étant,
comme on sait, proportionnel au poids, quelle que soit l'étendue
des surfaces de contact. Dans ce cas encore, la vitesse a plutôt
des avantages que des inconvénients, car elle tend à diminuer le
frottement, en soulevant, pour ainsi dire, les voitures, par un effet
analogue à celui qui se produit dans la marche des bateaux rapides
sur les canaux.
On objectera peut-être que la surface des routes, même les plus
belles, n'est ni assez unie, ni assez ferme pour que la loi du frot-
tement lui soit rigoureusement applicable, et l'on pourra craindre
qu'avec une entière lii)erté le roulage n'adopte des jantes tellement
minces, tellement tranchantes, que la résistance des chaussées, qui
est loin, après tout, d'être indéfinie, ne se trouve forcément en dé-
faut. Mais il ne faut pas oublier que la solidité des roues exige
une certaine largeur dans les jantes, et que cette largeur est en-
core bien supérieure à celle qui pourrait donner quelque Inquié-
tude pour la conservation des routes. Il serait tout à fait impossi-
ble, par exemple, de faire porter une lourde charrette sur des jan-
tes de deux centimètres. Eh bien! il a été constaté qu'une chaussée
en bon état résisterait parfaitement a des jantes aussi minces. On
peut faire observer encore que dans les localités où il n'existe pas de
ponts à bascule et où le roulage jouit, par le fait, d'une liberté en-
tière, on ne lui voit pas employer des jantes beaucoup plus étroites
que celles généralement en usage; c'est, nous le répétous, qu'il y
a une limite naturelle imposée par le besoin de solidité des roues,
et Ion pourrait descendre beaucoup au-dessous de cette limite,
sans avoir rien à craindre pour la résistance des chaussées.
Ainsi donc, les restrictions relatives aux chargements et à la
largeur des jantes, restrictions qui peuvent être nsotivées sur de
mauvaises routes, deviennent complètement inutiles sur de belles
routes. Il suit de la que toute la question se réduit à maintenir la
surface des chaussées constamment unie et ferme, de telle sorte
que le roulage n'agisse sur elle que par voie de frottement. Ce
n'est donc plus eu réalité qu'une simple question d'entretien.
Ceci ét^ibli, il y a lieu de se demander maintenant : 1" s'il existe
en effet des méthodes d'entretien pouvant réaliser le parfait état
des routes dont nous avons parlé; 2" si leur application n'entraî-
nerait pas dans une trop grande dépense.
En premier lieu, oui, il existedes méthodes d'entretien procurant
en toutes saisons des routes unies et fermes, à peu près exemptes de
poussière et de l)oue, et sans aucime apparence non -seulement
d'ornières, mais des moindres frayés. Ces méthodes sont parfai-
tement connues aujourd'hui ; elles sont appliquées dans un certain
nombre de départements, et tout le monde, à peu près, les ingé-
nieurs comme le publie , parait d'accord sur leur efficacité. Il
ne s'agit donc pas de procédés à découvrir, ou bien de procédés
dont le succès est plus ou moins problématique ; il s'agit de procé-
dés aujourd'hui consacrés par l'expérience, et qui ne se sont trou-
vés nulle part en défaut, même sur des routes d'une fréquenta-
tion tout à fait exceptionnelle, telle que la grande avenue de Neuilly
aux Champs-Elysées, et beaucoup d'autres que nous pourrions citer.
Quant a la dépense que ces procédés exigent, comment pourrait-
elle être plus grande que dans tout autre système? Les dégradations
et l'usure sont en raison inveree de la bet.uté des routes, et sur des
routes parfaitement belles il n'y a plus de dégradations propre-
ment dites, et l'usure se trouve réduite a son minimum. Or, le tra-
vail de l'entretien consiste à réparer les dégradations ou à restituer
l'usure. Comment ce travail pourrait-il augmenter à mesure que
les dégradations diminuent'? comment arriverait-il à ^on maxi-
mum lorsque les dégradations disparaissent? Une telle opinion
n'est pas soutenable, elle est contraire à la nature des choses, qui
veut qu'ici, comme dans une foule d'autres circonstances, l'écono-
mie soit un des plus précieux attributs de la beauté.
L'emploi du système d'entretien le plus parfait, c'est-à-dire du
système qui maintient au plus haut degré l'uni et la dureté des
routes , telle est donc la solution bien simple de cette question de
la police du roulage, si longuement et si vainement controA ersée
depuis plus de dix ans. Eh bien ! cette solution si simple résout en
même temps une foule de questions secondaires, dont divei"s ora-
teurs se sont plus ou moins préoccupés dans les deux Chambres.
Ainsi, on a parlé de l'amélioration de la race chevaline, dans
l'intérêt des remontes de la cavalerie ; mais on n'a pas pris garde
129
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
130
que ce sont les routes qui font les chevaux. Sur de mauvaises rou-
tes, les chevaux lourds sont une nécessité; les chevaux fins, ailx
allures rapides, seraient bientôt perdus. D'ailleurs, la vitesse de-
vient impossihle sur de semblahles routes, parce qu'elle augmente
considérablement le tirage. C'est le contraire qui arrive sur de
belles routes ; le tirage y diminue bien plutôt avec la vitesse ; en-
suite, les chevaux fins n'y sont plus soumis à ces efforts saccadés
et inégaux qui les ruineraient promptement, et ils peuvent déve-
lopper leurs enjambées en toute assurance, le sabot étant toujours
certain de retomber sur une surface unie et ferme. La vitesse ayant
une grande valeur, l'emploi de ces chevaux devient donc éminem-
ment avantageux, et dès lors il ne tarde pas à se généraliser, comme
on le voit aujourd'hui eu Angleterre. En résumé, la nature des che-
vaux qui circulent sur les routes est en rapport forcé avec l'état
de ces routes ; si elles restent mauvaises, on aura le cheval de char-
rette actuel ; si elles deviennent belles, on aura les chevaux fins et
rapides, si précieux pour les remontes de la cavalerie.
On signale et ou déplore les mauvais traitements que les char-
retiers font éprouver à leurs chevaux; c'est en effet quelque chose
de révoltant. Mais la dureté, pour ne pas dire la cruauté qu'on re-
proche avec raison aux charretiers, ne cessera qu'avec le mau\ ais
état des routes. C'est la nécessité de surmonter un obstacle, de s'ar-
racher d'un mauvais pas, qui les habitue à forcer et à maltraiter
leur attelage. Si les routes étaient parfaitement belles et le tirage
égal, la force des chevaux serait en rapport avec le travail qu'on
aurait à exiger d'eux, et il n'existerait plus aucun motif pour les
accabler de coups, comme on le fait aujourd'hui. Une grande amé-
lioration s'opérerait en même temps et par cela même dans le mo-
ral des charretiers, qui n'ont pas moins à gagner que leurs che-
vaux au parfait état de la viabilité. Ainsi la beauté des routes,
qu'on poursuit en vue d'un intérêt purement matériel, sert aussi
des intérêts d'un ordre plus élevé, qui sembleraient n'avoir rien à
lui demander. C'est une suite de cette gi'ande loi de solidaiité qui
établit une intime et si heureuse liaison, quoique souvent inaper-
çue, entre les améliorations de toute sorte, aussi bien de l'ordre
moral que de l'ordre matériel.
La fticilité du croisement ou du déplacement des voitures est en-
core une conséquence Haturelle du bon état des routes. Une lourde
charrette, engagée dans des ornières profondes, n'est pas libre de
ses mouvements, et la plupart du temps il lui serait impossible
d'en sortir pour céder une partie de la voie. Au contraire, sur des
routes unies et fermes, rien ne s'oppose à ce qu'elle se range
promptement et livre sans difficulté le passage nécessaire. La beauté
des routes a donc l'avantage de diminuer de beaucoup les dangers
de la circulation ; toutefois, elle ne suffit pas pour les faire entiè-
ment disparaître, et un ensemble de mesures préventives et pénales
est en outre nécessaire pour réaliser autant que possible cet im-
portant résultat.
Nous croyons que l'administration ne se préoccupe pas assez de
la police du roulage, au point de vue de la sécurité publique. L'u-
tilité de cette espèce de police est cependant moins contestable et
d'une tout autre importance que celle relative à la conservation
des routes. Qu'est l'écrasement en pure perte de quelques mètres
cubes de pierre, auprès d'un bras ou d'une jambe cassée ? Veiller
à la sûreté de la circulation sur la voie publique constitue pour
l'administration, non-seulement un droit incontestable, mais un
devoir impérieux dont l'accomplissement, il faut le dire, laisse
beaucoup trop à désirer. |
Ce n'est pas que la loi actuelle du roulage, comme celle projetée,
ne comporte des mesures de police proprement dite; mais il arrive
malheureusement que ces mesures sont fort mal exécutées, par
deux motifs : 1" parce que la plupart des délits sont portés devant
l'autorité locale, qui ne condamne presque jamais; 2° parce que les
amendes sont, dans tous les cas, beaucoup trop faibles pour décou-
rager les délinquants et pour stimuler le zèle des agents qui ont à
dresser des procès-verbaux.
Chose incroyable, les délits qui peuvent compromettre la vie des
voyageurs sont punis d'une amende de l fr à 5 fr. seulement,
quand ceux auxquels on attribue , peut-être à tort, quelque dé-
gradation des routes, comme le défaut de largeur des jantes, l'ad-
dition d'un cheval de renfort, etc., sont punis par des amendes de
50 fr. et au-dessus! ]l va sans dire que les gendarmes ne se font
pas faute de dresser des procès-verbaux pour cette dernière espèce
de délits, pendant qu'ils négligent complètement les autres. On
sait, en effet, qu'ils ont droit au tiers des amendes, et l'on conçoit
que le tiers de 50 fr. puisse offrir un utile stimulant à leur zèle ;
mais, en bonne conscience, que peut-on espérer d'une prime de
66 centimes? H y a plus, l'autorité locale, devant laquelle sont
portés les délits, ne donne habituellement aucune suite aux pro-
cès-verbaux ; elle est trop près des délinquants pour agir avec une
entière indépendance et une juste sévérité; dès lors, à quoi bon
verbaliser et se faire des ennemis en pure perte? Les délits dont il
s'agit ne seront réprimés d'une manière efficace que lorsqu'ils seront
passibles de plus fortes amendes, et qu'ils ressortiront des conseils
de préfecture, sans préjudice du renvoi des délinquants par devant
les tribunaux ordinaires, pour ce qui regarde les peines corpo-
relles.
La limitation du poids absolu des chargements et celle du nom-
bre de chevaux attelés de file nous sembleraient devoir s'ajouter
aux mesures qui ont pour objet la police proprement dite, c'est-à-
dire la sécurité de la circulation. Un chargement qui dépasse cer-
taines limites présente toujours quelques dangers, surtout dans les
traverses des villes et villages et dans les fortes pentes. Quant aux
attelages de sept à huit chevaux de file, comment est-il possible de
les diriger avec la précision et la promptitude nécessaires, sans
crainte d'accidents? On ne devrait pas, selon nous, tolérer plus de
quatre, et peut-être plus de trois chevaux de file. Si le roulage
trouvait du bénéfice à employer des attelages plus nombreux, il
n'aurait qu'à mettre les chevaux sur deux rangs, et il serait ainsi
naturellement conduit à remplacer la charrette à deux roues par le
chariot à quatre roues. Ce changement, si désirable dans l'intérêt
de la circulation, n'imposerait d'ailleurs rien d'onéreux à l'indus-
trie des transports, dans l'hypothèse de routes en parfait état; car
alors le tirage n'est nullement augmenté par le plus grand nombre
de roues, pendant que l'on utilise beaucoup mieux la force de l'at-
telage.
En résumé, nous pensons :
1<> Que la police du roulage, en ce qui regarde la conservation
des routes, a d'autant moins d'importance, que les routes sont plu*
belles ; que sur des routes en parfait état elle devient complètement
inutile, et que, dès lors, tout se réduit à une simple question d'entre-
tien, laquelle parait aujourd'hui théoriquement et pratiquement ré-
solue ;
2° Que c'est la police proprement dite, celle relative à la sécurité
publique, qui doit appeler surtout la sollicitude de l'administration ;
que cette police devrait donner lieu à une répression plus étendue,
T. V. 9
tsi
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
132
plus efficace, et qu'à cet effet il conviendrait d'élever le chiffre des
amendes, d'attribuer la connaissance des délits aux conseils de pré-
fecture, et aussi d'assigner une limite au nombre de chevaux attelés
de file, et même au poids absolu des chargements.
Un ingénieur en chef des Ponts-et-Chausséks.
OBSERVATIONS
PRÉSENTÉES PAR LA SOCIÉTÉ DES ARCHITECTES
SUR LA LOI DES PATENTES (1).
La Société centrale des Architectes ne date que d'hier, et ce-
pendant son existence a déjà été signalée par un bienfait dont
tous les architectes se ressentent; car c'est grâce à l'activité
intelligente et aux considérations fondées qu'ont fait valoir
les membres de la commission nommés par la Société pour
étudier cette question des patentes, que les architectes jouissent
aujourd'hui d'être exempts de payer une patente qui les assimi-
lait à des Industriels. Nous aurions voulu faire précéder le rap-
port rédigé par la commission de la société, d'un aperçu histori-
que des débats que cette question des patentes a déjà soulevés dans
d'autres temps à propos des architectes : M. Gourlier avait bien
voulu même nous communiquer une liste très-intéressante des di-
vers mémoires et bien à consulter à cette occasion; mais l'éten-
due du rapport que nous donnons ci-dessous, le peu de place qui
nous reste dans ce numéro, et l'impossibilité de retarder encore
d'un mois la reproduction du document que nous donnons au-
jourd'hui, nous privent de cette satisfaction.
Le projet de loi sur les patentes ei le rapport imprimé de M. Viiet,
au nom de la commission de la Chambre des Députés, intéressent à un si
haut degré les architectes dans leur position sociale, qu'ils ont cru de-
voir appeler spécialement sur ce sujet l'aticnlion des Chambres et du
Gouvernement.
1° Qu'est-ce (]u'un arcliitecie?
2° Qu'est-ce que la patente?
3° Quel motif y a-t-il pour qu'un architecte y soit soumis ou en' soit
exempt?
La solution de ces questions conduira à examiner la profession
d'architecte d'après les définitions qui en sont adniises généralement
et d'après la position qu'ils occupent, et cellç surtout qu'ils devraient
occuper.
L'examen de la patente nous donnera lieu d'apprécier la nature de
cet impôt en nous appuyant sur des discussions législatives, sur le texte
(le plusieurs lois, et enfin sur le rapport même de la commission char-
gée de donner un avis à la Chambre des Députés sur le projet du gou-
vernement.
On lit dans le Dictionnaire de l'Académie, au mot Architecte :
« Celui qui exerce l'art de l'archilecture, l'ar< do bâtir; artiste qui
compose les édifices, on déierinine les proportions, les disiribulions.
(1) La Société, présidée par M. Blouet, le 25 février 1844, a approuvé les
observations qui suivent, et qui lui avaient été soumiser, par une commission
composée de MM. Gourlier, Dcjoly, Morean, Léon Vaudoycr et de M. Charles
Uoiiault, rapporteur.
les décorations, les fait exécuter sous ses ordres cl en règle le» dé
penses. »
On remarquera d'abord que c'est avec inteniion sans doute que l'on
a répété trois fois le mol art dans cet article si court. On voit bien qu'il
est dans l'esprit de tous que l'architecte est un artiste, c'esi-à-dire un
homme qui exerce une profession éiiiiueniroeiil libérale et non pas in-
dustrielle.
Voyons maintenant ce que c'est que la patente dans l'étal actuel de
la législation (i):
« La patente est un impôt de qualité auquel sont soumis ceux qui
exercent le commerce, certaines professions ou certains emplois.
« Les personnes suivantes ne sont pas sonmi.ses à la patente, sa-
voir : Les fonctionnaires publics et employés salariés par l'Étal, en ce
qui concerne seulrment l'exercice de leurs fonctions...
« ... Les peintres, graveurs, sculpteurs, coiisidcrég comme artistes,
et Revendant que le produit de leur art; les médecins, chirurgiens,
pharmaciens attachés aux armées, aux hôpitaux civils ou militaires, ou
au service des pauvres, par nomination du Couverncrocnl ou des auto-
rités constituées, soit qu'ils exercent ou non leur an chez des parlicu-
liers. »
Le 17 février 1791, l'Assemblée nationale décréta qu'il y aurait un
dioit de paiento.
Dans l'esprit de cette loi, on assujettit tontes les professions à la p:i-
tente, et l'on spécifia seulement les exceptions.
Le 4 thermidor an III (2i juillet ITitS), la t;onveniion, plus libérale
sous ce rapport, exempta géiiéraleincnl les arts, niéiiers ou professions,
et n'entendit y comprendre que le commerce.
C'est donc par une extension en faveur du Use que certaines profes-
sions ont été soumises à la patente.
On voit le progrès qu'a fait cet inipôl, qui a été généralise pour toutes
les professions, dont quelques-unes n'ont été exemptées que par
exception.
.\près avoir rappelé la définition du mol architecte donnée par l'A-
cndémie, et la législation actuelle des patentes, nous avons cru conve-
nable d'entrer dans l'examen du nippon de la comiiiis»ion delà Cham-
bre des Députés, qui nous a pani être le document le plus propre à
jeter de la lumière sur la question qui nous occupe.
Nous lisons, à la page 14 du Rapport de la commission, un paragra-
phe qui semble n'avoir pas de rapport direct avec les architectes, car
une fois l'impôt établi, il ne nous appartient |ias de discuter son mode
d'application.
Voici ce paragraphe :
« Il y aurait bien un moyeu de les reiidi c t lUt.ii es et »erieux Jcs pro-
jets d'assiette de l'impôt) : ce serait de donner aux répartiteurs le droit
de l'aire "des investigations sur les livres et sur les registres de chaque
patentable, afin de constaler l'état réel de leurs affaires. »
L'esprit de la loi des patentes se retrouve ici tout entier. Il s'agit
d'im impôt appliijué il l'industrie, au commerce où les livret sont néces-
saires.
Mais les architectes ne sont pas ncgociani!<, et ne sont pas même
obligés d'avoir de livres ni de registres île commerce; cela seul montre-
rait que la patente s'applique ii tout autre profes>ion qu'à celle d'ar-
chitecte.
On n'a jamais songé, dans l'usage, à rendre les aichilettes jusiicia-
hies du Tribunal de coumicrce; et il est sans exemple qu'un architecte
ait siégé comme juge consulaire. Sous ce point de vue ils ne sont donc
pas susceptibles d'être patentés.
On lit également, page 74 du Rapport :
« I a patente est, 'a vrai dire, l'impôt des professions non ela$*ét$,
non organisées, dont l'accès est libre à tout le monde. Elle est le passe-
port au moyen duquel on entre dans ces professions. »
(1) dictionnaire de Législation usuelle, de H. de Chabrol.
133
REVUE DE L'ARCHITECTURE
*
ET DES TRAVAUX PUBLICS.
13i
Si la palenie ('lail vérilablement applicable à lonles les professions
non classées, non organisées, dont l'accès est libre à loul le monde, elle
(levrail s'appliquer aux arlisi<ïs , aux savauls, aux hommes de let-
tres, etc. ; car ce sont là des professions non classées, non organisées,
dont r accès esl libre à loul le monde; ol ccpeudatit ni le gouverneiuciit
ni la cuinmission n'ont eu l'idée de les imposer.
Nous puiserons dans le rapport mémo largumenl le plus fort en fa-
veur de l'exempliou réciaiui'c pour les architectes. Cet argument a été
présenté en faveur des médecins. Ces deux professions ont une telle
analogie, que tout ce qui s'applique à l'une peut s'appliquer à l'autre
sous le rapport de la patente.
Nous allons transcrire les paragraphes du rapport relatifs à l'exemp-
tion réclamée en faveur des médecins. On verra qu'en subsiiliianl seu-
lement par la pensée le mot architecte au mot médecin, tous les raison-
nements restent parlaiicincnt logi(|ues.
Voici ce qu'ont lit aux pages 77, 78,79, 80 et 81 du Rapport de
M. Vitei:
« S'il est jiisic d'exempter de la patente les olliciers ministériels,
parce qu'ils sont soumis à des charges particulières qu'on peut appeler
l'impôt spécial des oITices, un motif du même genre ordonne d'affran-
chir les professions dites libérales. On peut, jusqu'à nu certain point,
considérer comme leur impôt spécial le sacrilice de temps et d'argent
nécessaire pour acquérir soit un diplôme, soit les cimnaissances sans
lesquelles nul ne peut avec succès embrasser ces sortes de profes-
sions.
« Aussi, jamais lacontribulion des patentes n'a-t-elleétéimposéeni aux
avocats, ni aux professeurs ou instituteurs, ni aux artistes, ni aux ac-
teurs, tii à aucune personne possédant un de ces arts (|ul s'acquièrent
par de longues études, et qui s'exercent par une simple dépense d'in-
telligence et d'activité.
« Toutefois, il est une exception qu'on a peine à s'expliquer, une pro-
fession qui remplit au plus haut degré les conditions auxquellesl'exemp-
lion de la patente semble toujours attachée; la profession de médecin
n'a jamais joui ju,squ'à présent de cette exemption, sauf dans des cas
où elle lui était accordée en échange de services publics et gratuits.
« Cette anomalie ne peut se comprendre que quand on remonte à
l'époque où fut organisé le système des |iateutes, et quand on examine
ce qu'était alors, ce qu'est encore dans certaines conditions la profes-
sion de médecin. Depuis 1792 jusqu'à présent il fut permis à tout
homme, fùt-il sans études, sans lumières, sans instruction, d'exercer la
médecine, à la seule condition de se faire délivrer une patente qu'on
accordait indifféremment à tous ceux qui se présentaient pour l'ob-
tenir.
« Ici, nous ne pouvons que répéter ce que nous disions tout à l'iieure
à propos des oinccs. Quand une profession est ouverte à tout venant,
la patente n'est pas seulement légitime, elle est nécessaire; mais quand
la profession est soumise à des règles, à des conditions; quand il n'est
plus loisible d'y pénétrer comme on veut, soit parce que l'exercice
n'en est confié qu'à un nombre limité de personnes, soit parce qu'il y a
des épreuves de capacité à subir, alors la patente ne peut être deman-
dée que par une sorte de méprise, par un malentendu, et un oubli des
principes sur lesquels repose cette nature d'impôt.
« Il suit de là (pie les médecins devraient être exemptés de la contri-
bution des patentes à dater du jour où la loi de ventôsean XI vint réta-
blir la médecine dans son état normal, etc.
«Néanmoins, depuis celle é[)oque, ils ont toujours été et sont encoie
patentés, mais ils n'ont pas cessé de faire les plus vives protestations.
Ils demandent avec raison pourquoi les avocats jouissent d'une immu-
nité qui leur est refusée. Quelle est en effet la différence entre le di-
plôme d'un avocat cl celui d'un médecin? Si l'on compare la durée des
éludes, le nombre des épreuves, la longueur du noviciat, c'est plutôt
an médecin que l'exemplimi paraîtrait due.
« Pour justifier la préférence que le projet de loi accorde aux avo-
cats, l'exposé des motifs se f(mde sur ce qu'ils n'ont pas d'action,
comme les médecins, pour le paiement de leurs honoraires. Mais cette
interdiction ne résulte d'aucune loi. C'est une mesure de discipline in-
térieure à laquelle on ne sait que trop qu'il est aisé de se soustraire On
ne peut donc s'appuyer sur un tel motif pour exempter les uns el im-
poser les antres.
« Il n'y a pas de milieu, selon nous: il faut soumettre à la patente
les avocats comme les médecins, ou il faut accorder aux médecins
l'exemption qui esl acqui.se aux avocats.
« Knire ces deux partis, nous ne pensons pas que vous puissiez hé-
siter. Si vous demandiez une patente à l'avocat, vous déviiez nécessai-
rement en demander une à l'artiste, et à quiconque exerce une profes-
sion libérale. Toute distinction serait arbitraire et injustifiable. Il vous
faudrait imposer en masse les uns comme les autres. Or, indépeinlam-
ment des difficultés d'une telle entreprise, il esl encore un motif pour
ne pas assirjetlir b la patente ces sortes de professions : c'esi qu'il esl
presque impossible de distinguer ceux qui les ont embras.sées sérieuse-
ment de ceux qui ne les exercent que nominalement : personne ne fait
du commerce ou de l'industrie en amateur, tandis qu'on peut très-bien
être avocat, artiste, médecin même, sans plaider une cause, sans ven-
dre un tableau, ou sans voir un inabide.
« Comment sortir de ce dédale? Comment trouver des conditions
équitables pour appliquer l'impôt? N'esl-il pas plus simple, plus natu-
rel et plus juste de réparer la longue erreur commise envers les méde-
cins? Déjà, en ^826, le gouvernement, |iar l'organe de M. Cuvier, re-
connaissait devant la Chambre des Pairs que cette erreur devait avoir
un terme, et peu s'en fulliit ipie les Chambres ne consacrassent alors
l'exemption que nous vous demandons de prononcer aujourd'hui.
« La seule considération qui ponrrait-contre-balancer tant de raisons
d'équité, ce serait l'intérêt du trésor. Sans doute, en exemptant les
médecins, vous renoncez à un produit, sans <|u'il soit possible d'en
préciser le chiffre. Mais s'il fallait absolument compenser cette perle,
s'il fallait demander non-seulement aux médecins, mais aux avocats,
et à quelques autres professions libérales, une addition à leurs charges
actuelles, ce ne serait qu'à la condition de trouver telle autre taxe
mieux appropriée à la nature de ces professions, et plus facile à asseoir
é(|uitablement que le droit de patente.
« Votre commission se borne à émettre celte idée. Il ne Ini appar-
tient pas de l'approfondir, el elle vous demande seulement de décider,
quant à présent, (|ue l'exemption dont jouissent les avocats sera com-
mune aux médecins. »
Ces arguments n'ont pas, ce nous semble, besoin de commentaires,
et nous ne pourrions donner de meilleures raisons que celles (|ue l'on
vient de citer.
Nous allons transcrire textuellement tout le paragniphe du Rapport
qui est relatif aux architectes, et nous chercherons à combattre les mo-
tifs qui ont été allégués contre nous, el qui paraissent avoir été réfutés
d'avance dans le rapport même.
Voici ce que dit le Rapport à la page 8â :
« Toutefois, comme on s'étonnera peut-être que les architectes ne
se trouvent pas coinpi is dans la même catégorie que les peintres et les
scul|iteurs, il esl bon d'en dire un mol. A coup sûr, s'il s'agissait d'une
question d'art, l'arehitecture devrait marcher de pair avec ses deux
sœurs ; mais il ne s'agit que de professions, el celle de l'architecte dif-
fère, sur beaucoups de points, des deux autres. L'arcbiiecle n'invente
pas seulement des plans d'édifices, il les fait exécuter; il emploie à lu
fois des dessinateurs pour copier ses projets et des commis pour dres-
ser ses devis. Son atelier est aussi un bureau; il esl expert en même
temps qu'artiste; il s'occu|ie de la valeur des choses tout aussi bien
que de leur beauté; on ne doit donc pas s'étonner que dans cette situa-
tion mixte, ayant, pour ainsi dire, deux caractères, il se trouve par
l'un d'eux assujetti à la paienle. Nous n'avons pas pensé qu'il y eût de
suffisants motifs pour l'en affranciiir. »
fS5
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
136
La commission semble elle-même s'être préoccupée de Pétonnement
que Ion éprouverait de voir r,ircliiieclure séparée de ses sœurs la
peinture el la sculpture.
Jules Romain, Léonard de Vinci, Raphaël, Jean Goujon, Puget et
tant d-aulres architectes étaient en même temps sculpteurs et peintres.
Michel-Auge, en dirigeant les constructions de Saint-Pierre de Rome,
se croyait tout aussi grand artiste que lorsqu'il peignait la chapelle
Sixtine.
Il nous a suffi de rappeler quelques passages du Rapport de la com-
mission des patentes pour faire voir comment, sans forcer aucun rai-
sonnement, tous les arguments présentés en faveur des médecins peu-
vent s'appliquer aux architectes. Il ne nous reste plus qu'à combattre
les motifs que l'on allègue pour distinguer l'architecture de la sculpture
el de la peinture.
Ce que la commission dit de l'architecte peut également se dire du
sculpteur et même du peintre. Le sculpteur ne compose pas seulement
une statue, il la fait exécuter, et pour cela il emploie des mouleurs, des
metteurs au point, des praticiens; souvent même il fournit la luatière,
plâtre, bois, marbre ou bronze, à laquelle il a donne la forme que
son génie lui a inspirée ; et, sans cesser d'être artiste, il est obligé
de faire acte de fournisseur, de passer des marchés pour son compte.
Il en est de même du peintre, qui a aussi ses employés, ses aides,
SOS dessinateurs de perspective, etc.
Enfin, l'un et l'autre sont souvent aussi nommés experts, comme
rarcliitecte, et peuvent avoir à s'occuper de révalualion des choses de
leur art, de leur profession.
Et cependant on ne leur a jamais demandé de prendre patente.
Sous ce point de vue, l'architecture pourrait donc être considérée
comme une profession participant moins à l'industrie que ses sœurs;
car elle ne fait aucun acte de commerce pour son compte, comme nous
venons de le voir pour le sculpteur.
Veut-on trouver une autre comparaison prise dans la profession d'a-
vocat? L'avocat a, comme l'architecte, un bureau, des employés qui
compulsent ses dossiers et préparent son travail, de manière qu'il n'ait
plus qu'à mettre en œuvre leurs résumés. Seulement, au lieu de s'ap-
peler secrétaires, les employés de l'architecte s'appellent dessinateurs,
vérificateurs, etc.
Dans les constructions dirigées par des architectes, tout ce qui ne
ressort pas de l'art proprement dit paie patente. Tous les entrepre-
neurs et fournisseurs sont soumis à cet impôt. Ce n'est que la partie
intellectuelle, l'âme, en un moi, de toutes les professions qui s'y ratta-
chent, que nous voulons placer en dehors d'une charge applicable seu-
lement à des objets matériels.
Qu'y a-t-il enliii de plus libéral que les professions représentées à
l'Institut? Eh bien ! l'architecture a une classe à l'Académie des Beaux-
Arts; et il arrive, par une bien étwnge anomalie, qu'un membre de
l'Académie qui produit ainsi la preuve la plus éclatante de la libéralité
de sa profession, sera soumis à une patente (pie l'esprit du législateur a
toujours spécialement appli(|uéc aux professions industrielles.
Parmi tous les membres de l'Institut, les huit architectes qui y siè-
gent seraient seuls patentés, à cause de la profession qui lésa conduits
à l'Académie.
On a pu remarquer que pour exempter les médecins, on leur de-
mande seulement de faire preuve de la profession libérale qu'ils exer-
cent. Ou leur demande l'exhibition d'un diplôme. Il est juste que l'Etat,
eu voulant dégrever de l'impôt une profession libérale, ne dégrève pas
une profession industrielle; nous demandons seulement que l'architecte
véritable, c'est-à-dire celui que les longues études théoriques dans les
arts et dans les sciences rendent digne de «e titre fasse preuve de sa
(|Halilé, et qu'alors il soit exempt de riinpôl qui se rattache à l'in-
dustrie.
Cette question, touchant de la manière la plus vive à l'existence so-
ciale de l'arcliitecte, ne peut être traitée d'une manière incidente.
La Société des archiiecles y reviendra cerlainemenl plus lard. Nous
demandons seulement qu'il soit admis en principe que les architectes
proprement dits ne soient pas soumis à la patente. Nous aurons ensuite
à examiner quelles sont les personnes qui se trouvent dans celle claase,
et quelles preuves claires, faciles à apprécier, elles peuvent donner
pour se faire exempter
Ces preuves auront acliiellement un caractère transitoire ; mai» lors-
que, par suite des travaux ultérieurs de la société, la position d'archi-
tecte sera définie, comme celle des médecins, nous espérons que tous
ceux qui rempliront les conditions que la profession libérale d'archi-
tecte exige, seront exemptés de la patente.
, CONCLISION.
En résumé, considérant combien il serait Tàcheux de laisser passer la
loi qui louche à leur position d'artistes, sans faire une réclamation juste
et (|ui ouvre enfin les yeux des législateurs sur celte importante ques-
tion, les architectes demandent de n'être pas soumis h la patente. Ce-
pendant, pour que les agents de fadminislration chargés d'appliquer la
loi sachen t quelles personnes elle atti-inl, (piellcs personnes elle exemple,
il est nécessaire de définir d'une manière précise ce que l'on doit en-
tendre par architecte.
Jusqu'à présent, c'est la patente clb'-ménie qui a donné cette qua-
lité à un grand nombre de personnes qui n'y ont pas d'autre litre. Si
l'on pouvait trouver une autre dénomination que celle d'archiiecle pour
qualifier ces personnes, nous proposerions d«f dire que, pénéraicmeni,
les archiiecies .seraient exempts de la patente ; mais, dans celle impos-
sibilité, il nous a paru convenable de demander l'exemption pour les
architectes qui, par leurs éludes, par les épreuves d'admission dans
les écoles et par leur position actuelle, offrent des garanlies de capa-
cité el d'instruction qu'on trouverait loulnalurellemcnl dans la présen-
tation d'un diplôme.
Nous demanderons de faire considérer par mesure provisoire comme
ayant donné une preuve sufTisanie de leur qualité d'architecte, et par
conséquent de leur droit à l'cxcnipiion, h s catégories suivantes, qui
ont d'^i illeurs servi à la constitution de la Société des architectes :
t" Les architectes, membres de rinslilut;
2" Les architectes, professeurs à l'École royale:
3° Les architectes, membres du conseil des bâtiments civils;
4° Les archiiecles en chef, adjoints ou inspecteurs de la couronne,
des ministères, et, en général, des administrations publiques;
S" Les architectes en chef des départements et des chefs-lieux de dé-
partement;
6° Les architectes qui ont remporté le I" ou le 2* grand prix, ou le
prix départemental, ou un accessit au grand prix, ou au prix départe-
mental;
7° Les architectes médailllstcs de l'Ecole royale et des écoles pu-
bliques des départements, et ceux qui justifieraient de leurs études el
de leur capacité par des certificats régulièrement émanés de ces
écoles;
8* Les architectes, enfin, qui exercent l'art sous le rapport seulement
théorique et sous les points de vue liisioriqties, archéologiques, etc.
Les exemptions ci-dessus cesseraient d'a\oir lieu si les architectes
pour qui on les réclame faisaient l'entreprise et se livraient ainsi à des
opérations industrielles, au sujet desquelles la patente devrait leur être
imposée comme entrepreneurs.
lïOSC
137
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
138
SOCIÉTÉ CENTRALE SES ARCHITECTES FRANÇAIS.
SÉANCE GÉNÉRALE DU DIMANCHE 14 JANVIER 1844.
(Suile cl Hn. Yoy. col. 93.)
Compte-rendu de la situation de la caisse, par M. le secrétaire-trésorier.
n II restait en caisse à l'époque de la séance générale du
27 juin 1843 OOl fr. 15 c.
11 II a été reçu depuis et jusqu'à ce jour 2050 »
Total 2051 15
11 Les dépenses faites depuis ladite séance jusqu'à ce jour se
sont élevées à • 1076 60
(1 Reste en caisse 1574 55 »
Rapport de messieurs les censeurs sur les comptes-revdus qui précèdent.
Il Messieurs,
« D'après le règlement constitutif de notre Société, vous nous avez fait
l'honneur de nous donner la qualité de censeurs. A ce titre, notre devoir est
de surveiller tous les actes de la Société, de tenir la main à ce que ses statuts
et règlenienLs soient strictement observés, et de vous faire à ce sujet, lorsque
nous le croyons convenable, toutes les observations nécessaires.
Il Tous les ans, à la fin de notre mission, nous devons vous faire un rapport
détaillé sur l'état de la caisse, vous faire connaître ce (|ui s'est passé de plus
important pendant l'année, et quelles sont les améliorations possibles, en rai-
son de l'état de la Société et de ses moyens.
11 Nous ne devons pas aujourd'hui remplir cette tâche honorable et difficile;
l'année n'étant point achevée, nous ne pourrions vous rendre compte de ce qui
doit encore se faire; mais nous avons cru devoir profiler de celte réunion se-
mestrielle pour vous faire^connaître d'une manière générale et sommaire l'étal
actuel de la Société, si des difflcidtés résultent de l'application do son règle-
ment, si tous les articles en sont scrupuleusement observés, et enfin la vérifi-
cation que nous avons faite de la caisse, à l'époque où la Société a été définiti-
vement constituée.
Il Lors de l'organisation définitive de la Société, le 27 juin 1843, le nombre
des membres qui la composaient était de deux cent dix; il est aujourd'hui de
deux cent vingt-sept. L'adhésion de plusieurs arcliitectes honorablement placés
confirme l'importance que prend la Société, les .services qu'elle peut rendre
aux progrès de l'art, et la juste considération (|u'elle doit acquérir en s'occu-
pant de travaux utiles qu'elle a mainlenant à peine ébauchés.
11 Beaucoup de demandes en élection ont été faites; il y a eu aussi beaucoup
de propositions d'admission par les différentes sections, sanctionnées par le
conseil; quelques-unes ont été ajournées ou rejetées faute de renseignements
suffisants, mais avec cette réserve de ne jamais blesser les convenances, et
néanmoins d'étendre profondément les investigations sur la capacité, la moralité
et le droit des demandeurs, investigations d'autant plus honorables pour ceux
qui en sont l'objet, quelque profondes qu'elles soient, qu'elles ont pour but de
ne rien allier d'impur à la Société centrale, dont tous les membres doivent être
solidaires de leurs actions, et sévères scrutateurs des fautes qu'un seul pourrait
faire, si, en ayant connaissance, les autres les toléraient et ne les blâmaient pas.
« Sous ce rapport, nous n'avons qu'à approuver tout ce qui a été fait à cet
égard, en désirant toutefois que l'on puisse apporler quelques perfections pour
faciliter la connaissance plus parfaite de la moralité et de la capacité de reux
qui se présentent, sans que les recherches, en cas de refus, puissent être pour
eux un sujet d'offense.
(I Aux termes de votre règlement, le conseil s'est réuni chaque mois. La dif-
ficulté d'être en majorité est très-grande. Il avait été proposé, pour y obvier,
d'infliger une amende aux membres absents sans justification. Mais, jusqu'ici,
des convocations motivées ont suffi pour atteindre le but. »
[MM. les censeurs entrent ensuite, sur les diverses dépenses et recettes,
dans un examen développé, après lequel ils s'e.rpriment ainsi qu'il
suit ) ;
■1 Tous ces détails nous ont paru exacts, et nous nous plaisons à l'annoncer
à la Société. Dans les recettes, quelques inscriptions de noms avaient été ou-
bliées; cette confusion, inliérenle à une administration qui n'était pas com-
plètement organisée, a été rectifiée, et ne se renouvellera plus; et il y aura un
compte ouvert pour chaque sociétaire.
u Toutes les dépenses, ainsi que nous l'avons dit, sont exactes. Elles ont été
ordonnées par M. le prési<leiit et faites par le concours du trésorier et des
agents, (|ui doivent être sous leurs ordres.
11 Tous les reçus sont réguliers; rien n'a été fait inutilement.
u II résulte de ces détails que la recette totale, à l'époque de la constitution
définitive de la Société, était de 2430 fr. c.
a Que les dépenses, à la même époque, s'élevaient à. . 1828 85
11 Qu'il restait en caisse 601 15
11 Qu'il y avait à recouvrer . . 710
Il Et qu'il restait à payer en impressions, location de
salles, frais d'organisation et antres, environ 300
11 Nous venons de vous faire connaître quels étaient les résultats des paie-
ments successifs faits depuis l'origine jusqu'à l'époque de la constitution défi-
nitive de la Société. Dans nos remarques nous ajouterons que MM. les prési-
dents se sont fait un devoir de payer les premiers leur cotisation; que le bu-
reau a également fait son versement; qu'il y a peu de retardataires; que Ton
s'est présenté chez tous les sociétaires pour obtenir les premiers recouvre-
ments; que l'on ne peut signaler aucune perte accidentelle; que les reçus ont
été , sans en excepter un seul, faits régulièrement ; que les recettes sont in-
scrites immédiatement et au fur et à mesure qu'elles sont opérées, à la demande
du président et du trésorier; que ces recouvrements se font par le sieur de
Lalaisse, qui est obligé d'en rendre compte aussitôt an trésorier et au président
pour en obtenir décliarge ; que les ordres de dépenses d'administration sont
émanés du président, qui vérifie les factures et en ordonnance le paiemeuL
11 II nous resterait à faire le projet des dépenses pour l'année courante. Ce
projet vous a déjà été soumis par la commission et nous a paru bien conçu ;
nous croyons devoir y renvoyer, ne voulant pas fixer plus longtemps votre at-
tention sur cet objet. »
On passe ensuite à la délibération des propositions qui résultent du compte-
rendu sur les opérations du bureau et du conseil, et notamment de celle qui est
faite d'accorder à MM. Carilian-Gœury et Victor Dalmont, l'autorisation de
prendre le titre de Libraires de la Société.
Un membre du bureau exprime l'opinion qu'il pourrait y avoir inconvénient
à accorder celte autorisation; qu'il n'y aurait là aucun avantage pour la So-
ciété, mais seulement pour les postulants; qu'il en résulterait une espèce de
monopole, et que la Société pourrait se trouver embarrassée si elle avait par la
suite quelque raison pour vouloir retirer celle autorisation soit au titulaire
même, soit à un successeur auquel il l'aurait transmise.
Ces observations sont appuyées par plusieurs membres, et d'autres pensent
que si l'autorisation est accordée, il faudrait qu'elle ne fût que personnelle , et
que la Société se réservât le droit de la retirer.
Un autre membre du bureau rappelle d'abord que ce qui a décidé le con-
seil à proposer unanimement d'accorder l'autorisation, c'est qu'il s'agit d'une
très-ancienne et très-bonne maison de librairie, qui ne paraît laisser à craindre
aucun inconvénient. Il ne pense pas d'ailleurs que la Société ne doive faire que
ce à quoi elle pourrait avoir un intérêt positif, et il regarde du reste comme
très-sages les reslriclions qui ont été proposées.
Ces observations sont également appuyées par plusieurs membres, et l'un
d'eux les motive sur ce que presque toutes les institutions analogues accordent
des autorisations semblables.
Un troisième membre du bureau, en appuyant également ces dernières pro-
positions, remarque que peut-être il y aurait à^examiner si la Société ne pour-
rait pas y trouver elle-même quelques avantages ; ei, sons ce rapport, il pro-
pose l'ajournement, dont la demande est également appuyée.
La question étant mise aux voix, une forte majorité se prononce contre U
proposition.
L'assemblée approuve unanimement les autres propositions, ainsi que l'en-
semble des opérations du bureau et du conseil pendant le semestre écoulé.
On s'occupe ensuite des élections.
Le bureau fait remarquer d'abord que, bleB qu'aux termes des statuts, il »e
doive y avoir aucune discussion sur les candidats, il lui est impossible de ne
pas donner lecture d'une lettre qui lui parvient à l'instant, et par laquelle l'un
d'eux se défend de l'impulalion qui lui aurait été faite de s'«tre IWré i diffé-
rentes entreprises.
Après cette lecture, un membre, sans se prononcer ni pour ni contre, re-
139
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
UO
marque que cette lettre forme im nouveau document qui n'aurait peut-être pas
clii êlre lu, et qui se trouve n'avoir été aucuiieuieiu discuté. Dans cette position,
il pense qu'il faut ne pas se prononcer aujourd'hui sur le caiididat dont il
s'agit, et le renvoyer à un nouvel examen, ce qui permettra de s'en occuper
dans six mois, an lieu de le renvoyer à un an. Cette opinion est appuyée par
plusieurs membres, et notammciit par plusieurs des présentateurs du candidaL
lille est, au contraire, contestée par plusieurs membres, qui pensent qu'il y
aurait le plus grand inconvénient à revenir ainsi sur des opérations terminées,
01 qui réclament l'application pure et simple des statuts.
Il est donné lecture des articles des statuts et des règlements relatifs aux
■éleclions, mais dans lesquels ce cas n'est pas prévu ; d'après quoi plusieurs
membres pensent qu'il faut adopter la voie la plus large et la plus favorable
aux candidats, c'est-à-dire l'ajournement, qui ne préjuge rien.
L'n de messieurs les censeurs pense que, s'il y avait eu désistement on
une demande de sursis du candidat, on si ses présentateurs déclaraient avoir
mission de la réclamer en son nom, il faudrait y acquiescer ; mais que, dans le
cas contraire, on doit se prononcer sur l'élection ; seulement, il pense que
l'incident mérite d'être examiné en principe par le conseil. Ces observations,
sont appuyées par plusieurs membres.
D'autres membres sont d'avis que, dès que les opérations sont terminées,
le désistement ne pourrait aucunement être admis. Ce principe est contesté
l>ar d'autres membres, mais M. le président fait observer que cette question
n'est pas posée.
L'ordre du jour est réclamé, appuyé et adopté par une grande majorité.
Le bureau fait en outre connaître qu'un candidat, qui s'était d'abord dé-
sisté, a depuis retiré son désistement.
D'après le désir de l'assemblée, il est ensuite donné lecture des résultats des
scrutins préparatoires qui ont eu lieu dans les sections, tels qu'ils sont con-
signés dans des tableaux mis en plusieurs exemplaires sous les yeux de la
Société. Il est d'al)ord procédé à un scrutin secret entre quatre-vingt-treize
membres présents; mais le nombre des bulletins ne paraissant pas en rapport
avec celui des volants, ce scrutin est annulé, et 11 est procédé à un nouveau
scrutin entre soixante-douze membres présents, d'après lequel les candidats
ci-après, ayant réuni plus des deux tiers des voix des membres présents
(nombre exigé par les articles 2A des statuts et 38 du règlement), sont dé-
clarés élus, et ceux qui ont droit i être membres résidants répartis par le
sort dans les sections ainsi qu'il est indiqué ci-après :
SIeiiibres résidants
', l'remi,
MM. QllCHERAT.
DUPAEC.
Poulain.
BtOT.
PiLlARD.
Oalhost.
Magne.
Chalakgf..
Periaix.
Brcyèbe.
Peise.
Janniasd.
Oebressekne.
Deschamps (P).
Tessier.
Membres non résidants.
MM. Brbset-Debaines, au Havre, et Dbphot, à Bordeaux.
Le nombre total des membres de la Société est ainsi porté à deux cent
quarante-quatre.
Plusieurs membres remettent une noie qui exprime le regret que la Société
ne soit pas représentée à l'inauguration du monument de Molière.
La séance est levée à quatre heures.
ère section.
Deuxième section
Troisième section.
' Quatrième section.
! Cinquième secl ion
Sixième section.
Septième section.
Huitième section.
Neuvième section.
CHKOmQVZ.
SoMMAiRK. — Le réservoir du Puiti de Greoelle et l'écuiWD de la Tille de Pirii. —
Nouveaux cabinets inodore». — Guichet du Carrouiel : un remrde pire que le
mal. — Une réclame en Tiveur de la proprelé et de la nnté publiques. — Simple
dialogue à propos d'un paliis pour l'Industrie Irançaife. — Projet de loi sur
l'achévcraenl du Panthéon. — Percement d'une noarelle rue. — t'a irchiiecle
millionnaire. — Trés-iraporlanle découverte. — Pdilicatiom RocriLLU : An-
nales archéologiques.
Un iiiiniensc réservoir vient d'être construit place de l'Estrapade,
près du Panlliéon, pour recevoir les eaux du puils de Grenelle , qui
de là se ré|i.iiiJroiil duiis lus alentours pour alimenter plusieurs fon-
taines CM construction ou projetées. Sur le mur du réservoir, en face de
la |>lace de l'Estrapade , on a sculpté un grand écusson de la ville de
Paris; cet éciisson se trouve encadré dans un miitirdu style de la Re-
naissance, dont les sculptures ne manquent ni de grâce ni d'élégance.
Par malheur, la délicaicsse même de ces sculpiures .<<'h:irnionise fort
mal avec la construction simple et rustique de l'immense muraille
qu'elles décorent.
— Parmi les améliorations dont la ville de Paris est le tbéilre jour-
nalier, nous ne devons pas oublier de signaler ces petites maisons en
bois d'un usage indispensable, que l'on vient de placer sur plusieurs
points de la capitale, et qui sont desiinccs à remplacer ces inlecis ca-
binels inodores que l'on relépuaitauparavanl, avec i-i peu de prévoyance
et si peu de soucis pour rugréinent public , dans des passages étroits
et obscurs déjà assez malsains par eux-mêmes. Le modèle adopté réu-
ni! à i'avanlage immense d'cire isolé de toutes part celui de l'élégance
et de la propreté qu'exige impérieusement le grand jour. Ces pelite>
maisons sont en bois et décorées de pilastres dans le style de la Reoais-
sance; elles sont peintes en chamois clair de deu.v tons. Elles sont cou-
vertes en lames de zinc, et font pendant, pour la plupart, aux petites
maisons des gardes préposés aux statitms de fiacres, et concourent arec
elles à l'embellissement des places sur lesquelles elles sont situées.
— On a obtenu un résultat moins heureux en voulant régulariser un
mal qui rongeait à sa base le vieux guichet du Louvre en face du
poni du Carrousel. L'obscurité du lieu, les caviiés inlériearrs du gui-
chet et son éloignemeiit des maisons, en avaient fait comme la sentine
du quartier. Les urines séjournaient entre les pavés, contre les murailles,
et s'infiltraient ensuite entre les pierres de la fondation. On a voulu
mettre bon ordre à cet étal de choses, ei pour cela, on a construit,
de chaque côté des deux entrées, deux sialles en pierres. Par malheur,
au lieu de creuser un conduit qui put mener les urines justpi'à la ri-
vière, on s'est coiilcnlé de leur ouvrir une issue à hauteur du sul, vers le
centre de la chaussée du guichet ; de cette façon, l'urine séjourne uu
peu moins , il est vrai , au pied des murs , mais elle forme des mare*
sur le pavé, et les voitures en passant la font jaillirdetouscAtés; comme,
déplus, ces appareils, précisénieni en raison de leur destination , ap-
pellent à eux un beaucoup plus grand, nombre de personnes que les
coins du guichet tels qu'ils étaient auparavant , il se trouve que le mal
est encore aggrave : le guichet est devenu presque impraticable.
A ce. propos, qu'il nous soit permis de demander pourquoi on n'ou-
vrirait pas à côté du guichet, un autre guichet exclusivement consacré
à l'usage des piétons, ainsi qu'il en existe déjà dans d'auires parties du
même monument.
— On ne doit pas craindre de répéter les lionnes choses. Une pre-
mière, une seconde, une dixième fois, on peut avoir parlé à îles gens
distraits, préoccupés d'autres idées. Répélons donc qu'il serait facile de
convertir les ruelles de nos villes, actuellement si infectes et si dégoû-
tantes, en patiaget découverts, propres et habitables, semblables aux
141
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
iki
lanes de Londres, qui, elles aussi, ctaienl affreuses à voir il y a quelque
quinze ans, mais qui sont niainlenanl irès-ahordables.
Loin de nous la pensée de hlàmer l'administration au sujet des
travaux d'améliorations et d'einbellissomcnis (jn'elle tffeclne sur les
points les plus brillants de la capitale; nous ne venions pas nous arrêter
à la blâmer de la sollicitude qu'elle témoigne en faveur des quartiers pri-
vilégiés : boulevards, quartiers de la Madeleine, Sainl-Honoré, etc. ;
toutefois, nous l'engageons à se rappeler qu'il y a des milliers d'indi-
vidus qui grouillent dans la fange de ruelles infectes, faute de quel-
ques mètres du bitume que l'on coule pour l'agrément des promeneurs
sous les arbres des Champs-Elysées.
— Avant de quitter les avenues de l'immense promenade plantée par
Colberl, arrêtons-nous un instant au grand carré des [êtes. C'est là
que, pour cette année encore, s'élève le temple éphémère de Vindus-
Irie française.
Une question tonte naturelle vient se poser sur les lèvres, lorsqu'on
jette les yeux sur cette immense construction, eu pensant qu'après
avoir servi pendant quelques mois de cet été, elle sera déiruiie comme
ses aînées, et que toute celte main-d'œuvre et bonne partie des maté-
riaux seront perdus sans retour. — Pourquoi, se demande-l-on, ne
point bâtir un édifice durable, digne de son objet et de la France, qui
puisse, hors des temps d'exposition, être utilement employé à d'autres
usages? — A cela on peut faire une réponse tout aussi simple que la
question : — Pour élever un palais de l'indiislrie, durable, digne de son
objet et de la France, il ne faudrait pas moins de iO millions, tandis
que nos baraques en planches iienous coûtent guère que bOO 000 francs
tous les cinq ans, ce (lui représente un capital de 2 millions seulement.
Nous ne disconvenons pas qu'il serait infiniment plus agréable d'avoir
un monument permanent, mais nos moyens ne nous permellent pas de
nous donner ce luxe. Ce n'est pas la bonne volonté qui nous manque,
c'est l'argent. — A pareil argument il n'y a guère de réponse, à moins
que vous ne teniez en réserve une heureuse combinaison grosse des mil-
lions demandés, et nous engageons les deux interlocniems à méditer
longuement le travail que celle Revue a publié dans le courant de l'an
dernier sous le titre : Éludes sur la ville de Paris; peut-être y trouve-
ront-ils le moyende s'entendre.
— On va enfin régulariser les abords du Panthéon, don, la base est
restée si longtemps masquée par des palissades en planches, si peu
en harmonie avec la splendeur de l'édifice. Un projet de loi, len-
danl à approuver les conventions faites à ce sujet entre la ville de Paris
et l'État, va être présenté aux Chambres. Le même projet de loi em-
brasse aussi la régularisation des abords de la Chambre des pairs. On
sait que l'arcbilecte du Panlhéon est M. Destouches, ancien" pension-
naire de l'Académie de France à Rome et chevalier de la Légion-
d'Honneur.
Nous ne saurions trop louer celle tendance de l'administration à
mettre la dernière main à tous ces édifices commencés et restés ina-
chevés depuis si longtemps. Rien n'est plus Irislc à voir que ces murs
qui noircissent avant même que d'avoir élé converis, et dont les pierres,
déjà désagrégées, sont suspendues au-dessus des échafauds dressés
pour leur construction. Ces jeunes ruines portent en elles un cachet de
faiblesse et d'impuissance qu'il imporie d'effacer, et bien qu'on ail déjà
l)eaucoup fail pour cela, il y a cependant beaucoup à faire encore pour
achever tous les monuments commencés dans Paris.
— La rue projetée depuis longtemps pour mettre en commnniciUion
avec la rue Tronchel la station des cheniinsde Versailles, (le Sairil-Gerina In
et de Rouen quiestsituécrue Saini-Lazare,vaêire incessaumieni exécu-
tée. On s'occupe en ce moment de l'expropriation des terrains. Cette
nouvelle voie va encore embellir le quartier de la Madeleine, déjà si
privilégié. Ceci appelle tout, nalurellemeni une comparaison entre les
faveurs donlon inonde cette paitie de la rive droite de la Seine, et celles
que l'on semble refusera la rive gauche. Sur celle dernière, les em-
barcadères sont relégués aux barrières, alors qu'il serait si facile et si
urgent de les amener plus |irès du centre. Il est question, toutefois, de
faire entrer dans Paris le chemin de fer de Versailles (rive gauche) et
d'établir son embarcadère vers le point de rencontre des rues de Sèvres
et du Cherche-.Midi. Mais ce n'csl encore là qu'un projet.
— M. Canonica, académicien, architecte des palais royaux de Milan
et de Moiiza, chevalier de plusieurs ordres, est mon dernièrement à
Milan. Il était né à Tesserte. près de Liigano. ■ Son nom, dit la Ga-
zelle de Bd/e, figure avec honneur dans l'histoire de rarchiteclure mo-
deine de l'Italie. Un grand nombre d'édifices ont été construits sous sa
direction dans plusieurs villes du nord de l'Italie. Il laisse une fortune
considérable dont il a consacré, une partie à fonder des étalilissenients
de bienfaisance. Il a légué à la commune de Tesserte, dans le canton du
Tésin, où il est né, 40 000 livres pour fonder nn hospice destiné aux or-
phelins; il a établi un prix annuel d'aichileclure de 40 000 livres, w
La Gazelle de Bàlc se trompe sans doute; elle a probablement vouju
dire que le riche architecte avait légué une somme de 40000 livres pour
la fondation d'un prix annuel, ce qui est déjà fort raisoimable. Du reste,
(lédueiion faite de ces divers legs, il reste encore à ses hériiiers une for-
tune de plus d'un million ; ceci doit engager nos jeunes adeptes dans
l'art d'Iciiuus à ne pas désespérer encore de l'avenir et à ne point briser
leur compas.
— Parmi les conquêtes archéologiques de cette fameuse expédition
d'Egypte qui a su déposer dans ce pays des Pharaons, tombé alors dans
la barbarie, le germe fécond de notre civilisation industrielle, l'une des
plus importantes est celle de la Pierre de Roselle , de celte célèbre in-
scri|Hion qui devait donner la clef des mysiérieux chraclércs du lan-
gage hiéraliqne des Égyptiens, rendre la voix aux monuments de l'an-
tique Egypte, muets depuis lani de siècles. Par malheur, celte pierre
éiait brisée; à celle inscription précieuse, il man(|iiait un fiagmenl.
Un journal anglais (Lillerary Gazelle) annonçait, il y a peu de temps,
qu'un second exemplaire, mais complet celte fois, de la même in-
scription, venait d'être trouvé. Notre savant antiquaire M. Letronne
publia à ce sujet, dans les Débals, un article trop intéressant pour que
nous ne le reproduisions pas en entier :
Très-importante découverte. — tel esi le titre (Mo$l importani
Discovery) que porle un article inséré dans le dernier numéro de la
Gazelle tilléraire de Londres, du 10 février; cl si la découverte qu'il
annonce esl bien réelle, comme il n'est guère possible d'en douter,
l'épithèle de Irés-imporlante csl parfaitement mérilée.
Il ne s'agit, en effet, de rien moins que d'un nouvel exemplaire com-
plet de la fameuse inscription de Roselle, qui aurait élé trouvé dans
l'île de Méroé par M. le docteur l.epsius, chef de l'expédilion scientifi-
que envoyée par Sa Majesté le roi de Prusse pour explorer la vallée du
Nil.
On appréciera toute l'importance de celle découverte, si l'on se sou-
vient que le bloc de granit appelé pierre de Rosette, du nom de la ville
où il a été découvert par les Français en 1799, porte sur une de ses
faces trois inscriptions superposées, les deux premières en égvpiien.
écrites, l'une eu earacièrcs hiéroglyphiques ou sacrés, l'auire eu carac-
tères démotiques ou populaires, et la iroisiènu- en grée, el que chacune
d'elles n'est qu'une expressicui différente du même décret rendu à
Memphis par les prêtres égyptiens, en rhoiineiir de Plolémée V, dit
Epiphane.
La découveriede ce documeiildii premier ordre produisit, au com-
mencement de ce siècle, une sensation exiraordinaire; car elle ranimait
loul à coup l'espoir, alors presque eniièremeut perdu, de retrouver l'i-
diome et les systèmes graphiques de l'ancienne Egypte, au moyen de la
comparaison de trois textes, dont l'un était parfaitement connu. Elle
143
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
iki
fut donc le signal du reclierfclies poursuivies par les premiers savants
de l'Europe, les Silvcslre de Sacy, les Akerlihid, les Tliouias Young el
lesChampollion, pour ne ciler que les plus illustres.
Chanipoliioii est celui qui a le plus avancé le déchiffrement des deux
traductions égyptiennes, puisqu'il est parvenu à une transcription prcs-
(|ue complète du texte intermédiaire, ei, par le rapproclienienl d'une
foule d'indices, à une intelligence très-avancée du texte sacré, comme
l'alteslent et sa Grammaire égyptienne et son Dictionnaire hiérogly-
phique.
Mais les efforts de ce génie pénétrant, comme ceux de ses devan-
ciers, ont été, en partie du moins, arrêtés par cette fâcheuse circon-
stance, que le texte hiérogly|)hi(|uc est réduit au tiers environ de l'é-
tendue qu'il avait primitivement, la partie supérieure ayant été emportée
avec im éclat de la pierre.
A en juger par les pas immenses que l'interprétation des hiéroglyphes
a faits, malgré ce grand obsiacle, on peut croire qu'elle serait à présent
bien avancée, si l'on avait pu, dès l'origine, s'appuyer sur une compa-
raison complète des trois textes. Or, sur le nouvel exemplaire trouvé
par M. Lepsius, le texio liiéroglypliiqneesJ exlrtiordinairemerrl bien con-
servé {ihe hieroglyphic portion is unusually perfect), selon l'expression
de la Gazette littéraire, et l'on peut croire à l'exaclilude du fait, puis-
qu'il est consigné duns une lettre adressée par le docteur Lepsius à
M. Bunsen, ministre de Prusse à Londres, qui est lui-même un savant
très-distingué, occupé depuis longtemps de grands travaux sur l'histoire
et la chronologie égyptiennes.
C'est assurément là une des nouvelles les pins intéressantes que pût
recevoir le monde savant. Dans l'état où se trouvent maintenant les
études égyptiennes, ce lexle hiéroglyphique complet doit les éclairer
d'une vive lumière. Ici va donc se présenter une épreuve décisive pour
le système de Champollion, qui, dans ce qu'il a d'essentiel et de fonda-
mental, a obtenu, dès l'origine, et conservé depuis, l'assentiment des
plus habiles philologues de l'Europe. Niebidir l'avait proclamé la plui
Mie découverte historique des temps modernes ; Silvestre de Sacy a plu-
sieurs fois exprimé l'opinion qu'un Sfcond monument, tel que l'Inscrip-
tion de Roseite, ne ferait qu'en confirmer les bases, et cette confiance
est encore partagée par tous ceux qui ont pris la peine d'étudier avec
.soin les écrits de Champollion; ainsi ils n'auront probablement nulle
inquiétude pour celte gloire de notre siècle et de notre pays; mais la
vérificaiion n'en sera pas moins attendue avec grand intérêt par tons
les amis de la science hisloriqué.
Du reste, la décoiiveite d'une nouvelle copie du décret de Memphis
n'a en elle-même rien qui puisse surpiendre.
Dans un récent ouvrage (1), j'ai indiqiu', pour stimuler et soutenir le
zèle des voyageiirs, tous les motifs qui donnent lieu de croire que des
fouilles bien dirigées devront amener tôt nu tard la connaissance soit
d'un nouvel exemplaire de l'inscription de Rosette, soit de toute antre
inscription bilingue analogue, donl l'étude comparée, ai-je dit, fournira
le moyen de déchirer tout à fait te voile que notre illustre Champollion
a si heureusement soulevé.
Mais ce qu'il y a de vraiment extraordinaire dans la découverte an-
noncée, c'est qu'elle ail été faile, non en Egypte, mais à Méroé. Cette
circonstance, sur laquelle l'auteur de l'ariicle dans la Gazette littéraire
de Londres n'a fait aucune remarque, comme si elle n'avait rien que de
naturel, est cependant tellement inattendue, qu'il n'est pas un homme
•nstruit qui ne soit lenié de la croire historiquement f>Tes(\ue impossible
En effet, le décret des prêtres Egyptiens, transcrit sur la pierre de Ro-
sette, ne concerne que l'Egypte dans toutes ses dispositions ■ il y est dit
qu'un exemplaire doit en être envoyé et déposé dans les divers temples
du pays. C'est donc en Egypte seulement qu'on devrait en trouver des
cop.es, depuis la mer jusqu'à Pbiles, ou tout au plus dans la portion de
la Basse-Nubie qu'on appelait le dodecauhmnon (espace de douze
schœnes), qui se terminait à Hitra-Sycaminot, limite niéridiouale de la
domination des Piolémées et des Romains.
Quant à Méroé, contrée reculée si loin vers le midi, elle fit partie
d'un Etat indépendaul appelé \e royaume d'Ethiopie, t\w arrivait au nord
jusque vers la secumie cataracte. 11 coidinait donc au royaume d'Egypte.
De là des guerres continuelles, dans lesquelles les Ethiopiens ont pu
être souvent battais; mais rien n'annonce que les Ptoléniécs aient ja-
mais porté leurs armes jusqu'à Méroé, encore moins que cette preM|u'ile
ait jamais fait partie intégrante de l'Egypte. Or, c'est, à ce qu'il semble,
ce qu'il faudrait conclure de la présence à Méroi d'une copie du décret
rendu pai' les prêtres de .Memphis. Je passe sous silence bien d'autres
considérations, qui toutes feraient ressortir rintTai(ftn6/anre du fait.
De cette invraisemblance, je ne conclus pas que le fait n'est pas vrai;
je veux dire seulement qu'il parait contraire à toutes les inductions
raisonnables i|u'on peut tirer des faits connus. Si donc il se cunliroie
que la pierre a été trouvée à iltroé, ce sera une nouvelle preuve des
immenses lacunes qui restent encore dans riiisloin- de l'Egypte, sous
la domination grecque. C'est surtout à propos de celle branche si im-
|iorianle de l'histoire de l'anticinité, qu'après même les plus grands ei-
furts pour lâcher de savoir quelque chose, il ne doit rien coulera un
esprit sincère de dire : ^antum til quod neseimut! »
LETRONNE.
PiBLicATiONS NOUVELLES. — Sous cc titre : Annales archéologiques,
l'un de nos collaborateurs, M. Didron (de la Bibliothèque Royale, secré-
taire de la commission des arts et monuments au ministère de l'Iii-
struction publique], vient de commencer la publication d'une Revue
meiisuelle, spécialement consacrée à l'élude de l'archéologie et si la dé-
fense de ses intérêts. Dans son introduction, M. Didron annonce qu'il
s'occu|iera tout parliculièiemenl de l'étude de nus antiquités nationales
du Moyen-Age, sans toutefois négliger absolunienl les études de l'anli-
quité païenne.
Vqici le sommaire du premier numéro des Annalri archéologiques :
Sommaire du l" numéro.
Introduction.
Iconographie chrélienne (Le Nimbe), par M. Didion.
Peinture sur verre, par .M. Lassl's.
.Musée des Thermes et de l'hôtel de Cluny, par M. Kcrdinand DE GuiL-
UERav.
.Mdanges. — Chape de Charles Vil. — Cadres en bois, sculptés au
XVI' siècle. — Adhésion et encouragements.
Dessins.
Vingt gravures sur bois lepresenlant diverses ligures nimbé>'S.
Vitrail de Saint-Germain-rAuxerrois, gravé sur cuivre.
— Iconographie chrétienne : Histoire de Dieu, par M. Didron, de la
Bibliothèque Royale, secrétaire du comité histori<|ue des artsel monu-
ments. Un volume grand in-4°, imprimerie royale. Ce volume, dont
nous ne pouvons pas donner l'analyse aujourd'hui, se compose de plu-
sieurs chapitres dans lesquels l'auteur traite sucessivement du Nimbe.
de \' Auréole, de la Gloire, de Dieu te Père, de Dieu te Fils, du Sainl-
Espril et de la Trinité.
(1) Recueil des Inscriptions grecques et latines de l'Egypte, 1. 1,
p. 832.
Cbsab DALY,
Direeltur fidacteur en cluf,
membre de l'Acatléinie royale drs Bcaui-.\rts de Siocktioiiii, el membre
honoraire cl correspondanl de l'Inslilul royal des Arctiileclcs brilanoiqurt.
PAMS. — TVP. LlOKvlIPE BT COUP., RUE DAMIITTE, ï.
R^vuc (^ffléra/^ de^ l Archùfcturt^ e/ des Trapau^x Pijhlirs Pnris, Rue de Furstemhrrtf , N" 6 .
Vol', PL
Fia.J.
Fi^.6.
fu/ 3
Fi^2.
Fùf^4-.
Fi^.S.
ScHéUe en Pieds «wv t-t-*-H î 1 f 1 —
~\c F Jet n^ .X é^ M 7-
; rtioA Dalv del.
GRA-NDES PORTES D'ATELIER.
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Revue- Générale de LAirJutectuie. eX des Travaux jPuiàcs 6 , Rue de Rirstemhero . Pa/à
roi. 5. PL S
Fio-. 1 .
Fier. 2.
/<» MW>-W.
Ayié- Dtaoir dW.
S IRm^M- irJftHÊtm^ jtmfy
SALLE DE BAINS ET DE BAINS DE PIEDS, DU COLLEGE R': DR ROUEN.
(Construite d'après le svslèmc dr M' Kèné DuvoirJ.
11^3
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
146
^ 'Zi'ÀM
INSTRUCTIONS DU COMITÉ HISTORIQUE
DES ARTS ET MONUMENTS.
MONUMENTS FIXES.
(SUITE, voy. col. 97.)
TROISIÈME ÉPOQUE. — COPJQIÊTE ROMAIIVE.
PREMIÈRE PARTIE. — MONUMENTS RELIGIEUX.
L'histoire de l'art présente une troisième et brillante période,
déterminée par l'arrivée de César sur le sol des Gaules. Les Ro-
mains y apportèrent une civilisation qui changea la face de toutes
les productions antérieures.
De toutes parts des camps s'établirent pour étendre et conserver
la conquête ; des silos, des magasins militaires furent placés sous
leur protection, et les premiers autels des divinités romaines s'éle-
vèrent devant les tentes consulaires. Les alliances avec plus d'une
république gauloise commencèrent les mélanges de religion et de
mœurs signalés au début de ces instructions, et l'art italique, prê-
tant son secours aux druides , interpréta leurs idées religieuses et
les traduisit sur des monuments durables. Les soldats romains,
exercés dans l'art de bâtir et dirigés par d'habiles artistes, en im-
posant aux Gaulois la théogonie, les lois, les usages de l'Italie, les
dotèrent de nombreux édifices analogues à ceux de la métropole,
et toutes les constructions de la Gaule furent soumises au niveau
d'une même équerre, à la liaison d'un même ciment.
C'est particulièrement au début de ces importations étrangères
que l'art peut être qualifié de gallo-romain, par la liaison in-
time qui s'établit alors dans les productions des deux peuples ;
c'est donc à cette époque que MM. les correspondants pourront
attribuer en général les monuments de sculpture offrant des divi-
nités étrangères à Rome, des costumes, des usages du peuple sou-
mis. On y pourra rencontrer des représentations de druides, des
noms gaulois écrits en caractères romains , mais faciles à recon-
naître aux racines et aux terminaisons barbares ; des emblèmes,
des nombres mystérieux, des branches de gui ou de chêne, des in-
struments sacrés ou d'un usage inconnu. On aura scinde recueillir
tous ces renseignements précieux ainsi que tout ce qui pourrait
mettre sur les traces de la religion des druides, des divinités lo-
cales, enfin de tout ce que le ciseau italique a pu conserver de sou-
venirs gaulois.
Une importation qui doit dater de cette première époque de la
domination romaine, et dans laquelle on trouvera de nombreux
éléments d'étude, c'est la fabrication des terres cuites. On exami-
nera les puits d'exploitation, les fours à cuire , les dimensions et
les formes données aux briques et aux tuiles qui, selon Vitruve,
furent établies sur des mesures gauloises.
Tuiles romainet.
Fig. 14.
Des marques de fabriques ou de localités pourront s'y rencon-
trer. On fera les mêmes applications aux poteries et aux vases de
toute nature, ainsi qu'aux antefixes placées devant les toits.
Fig. 15.
Fig. 16
Il sera utile de suivre 4'exploitation des pierres, des marbres,
des granits, tant pour les édifices à construire sur le sol que pour
l'exportation en Italie. Les Gaulois furent employés à ces travaux,
et les carrières pourraient fournir des notions relatives aux moyens
mis en œuvre pour détacher les masses, ainsi qu'aux instruments
en usage dans ce genre d'exploitation.
Quant à l'architecture de cette époque de transition, elle doit
être complètement dans le style romain , puisque tout porte à
croire que les Gaulois n'avaient point d'art établi sur des règles ;
quelques usages indigènes conservés dans les édifices élevés par
les nouveaux constructeurs pourraient donc seuls faire reconnaître
les monuments contemporains de la conquête. On peut attribuer à
l'époque de la première occupation militaire des Gaules les maga-
sins souterrains et les silos dans lesquels les Romains renfermèrent
des provisions de guerre. On doit indiquer les coupes de ces silos,
les moyens d'y puiser, de les clore, et même de les défendre des
surprises de f ennemi.
T. V. 10
14.7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Itô
Silos.
Fig. 17.
Maîtres eufin de nos riches provinces, les vainqueurs pensèrent
à s'y établir d'une manière durable. Les villes qu'ils fondèrent dans
les Gaules se distinguent des établissements antérieurs à la con-
quête par l'heureux choix des localités et par la réunion de tout ce
qui pouvait contribuer à la prospérité d'une colonie.
Un lieu élevé, dominant toute la surface que devait occuper la
ville , était consacré à la citadelle et renfermait les temples des
grandes divinités. Cette première disposition reconnue, on exami-
nera si les citadelles ou acropoles romaines ont conservé des restes
de murailles militaires et de contre-forts destinés à soutenir les ter-
rains et les rochers; on étudiera les cheniins ou escaliers favora-
bles à l'arrivée des troupes, au transport des machines de guerre,
enfin aux pompes religieuses que les solennités conduisaient aux
temples. On cherchera sur ces points culminants les traces qui
pourraient indiquer la formeet l'étendue des remparts, ainsi que
les dimensions des temples des divinités protectrices de la cité.
Lorsque les citadelles furent établies postérieurement, elles étaient
situées en dehors de l'enceinte. Un plan topographique des locali-
tés, dessiné sur une grande échelle, doit servir de base aux opéra-
tions qu'on se propose de faire sur une ville antique. Les décou-
vertes successives, tracées exactement aux lieux où elles seront
faites, établiront de la clarté dans le travail.
L'intérieur d'une ville romaine, divisée en quartiers ou régions,
contenait un forum ou place publique, un marché, des carrefours ;
c'est sur ces points importants qu'étaient placés les temples des
divinités, souvent remplacés par des églises. On cherchera les sou-
venirs de ces édifices dans les légendes sacrées et dans les tradi-
tions. Près des marches étaient les autels de Mercure, d'Isis, de
Sérapis; ceux d'Apollon et de Bacchus avolsinaient le théâtre;
Hercule avait ses temples auprès de l'amphithéâtre et du cirque.
La position d'un temple une foisreconnueparles traditions ou les
monuments littéraires, on devra en chercher les traces positives
dans les substructions de l'église ou des édifices d'une autre espèce
élevés au même lien. Toutes les attaches ou ruines qui, dans les
environs, pourraient se lier au monument principal ou à l'enceinte
sacrée qui l'entourait, seront relevées avec soin dans leurs direc-
tions relatives et placées sur un plan mesuré et orienté. Ce qui
regarde les temples s'applique de même à tout autre édifice an-
tique, de quelque nature qu'il soit.
Lorsque les restes du temple paraîtront au-dessus du sol , un
dessin géoraétral donnera l'état présent des ruines en les déga-
geant des constructions modernes qui pourraient y être enclavées.
Les moulures ou membres d'architecture seront levés avec préci-
sion et dans le galbe exact de l'original , la partie la plus intacte
étant choisie pour cette opération ; une lame de plomb appliquée
sur la pierre peut en donner les courbes exactes, pour les reporter
sur le papier. On obtient le même résultat, et directement, en tra-
çant le profil sur un papier passé dans le joint de deux pierres, si
les moulures y sont bien conservées.
Les membres d'architecture trop grands pour subir celte opéra-
tion seront cotés avec soin et relevés à l'équerre et au (il à plomb.
Les détails ornés, tels que chapiteaux , frises , décorations de
toute espèce, seront dessinés de manière à reproduire exactement
le caractère de la sculpture. C'est de la sévérité de ces dessins et de
l'exactitude à rendre les formes que dépend l'assignation de l'ége
du monument dont on donnera la réduction.
Feuille d'olivier.
Feuille d'acanthe.
Fig. 18.
Fig. 19.
L'architecture gallo-romaine offrira, dans les ornements et dans
les profils de moulures, une richesse d'invention, une variété de
formes, qui pourra faire distinguer les compositions dans lesquelles
se manifestait le génie inventif des Gaulois. L'exécution de ces dé-
tails d'architecture est assez grossière dans les régions septentrio-
nales ; on y reconnaît l'usage du trépan pour obtenir les effets
d'ombre et de lumière.
Ces fragments précieux ne peuvent être étudiés avec fruit s'ils
ne sont mesurés avec tous leurs détails, dessinés géométralcment
et dans leur état brut. Les profils et un plan indiquant la décora-
tion des plafonds, des sculptures placées sous les modillons et lar-
miers, sont encore des travaux indispensables pour expliquer
complètement l'ensemble de ces monuments. On peut recommander
l'emploi de la chatnbre claire pour en dessiner les ornements avec
vérité, et, s'ils sont peu saillants, un estampage en papier offre
une reproduction encore plus fidèle.
Cette opération consiste a appliquer sur la sculpture de peu de
relief un papier sans colle et légèrement mouillé, comme on l'ena-
149
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
150
ploie dans l'imprimerie, et à y faire paraître les formes les plus
délicates, et même le grain de la pierre, en appuyant d'abord avec
un linge, puis avec une brosse.
Les procès-verbaux de recherches mentionneront les divers
marbres, schistes et autres matériaux employés dans les édifices ;
leurs qualités , le pays où ils furent exploités ; s'ils sont exotiques
ou produits par le sol.
Le plan général de la ville antique recevra l'indication des
fouilles successives dont on a conservé le souvenir ; les fragments
placés dans les musées ou dans quelque autre dépôt municipal se-
ront, autant que possible, rattachés à la fouille dont chacun
d'eux est sorti. Une classification par numéros peut suffire à cette
opération.
Indépendamment du plan des édifices dont les murs sont encore
debout, on dessinera géométralement les mosaïques et pavés indi-
quant l'étendue des monuments qui ne s'élèvent plus au-dessus
du sol.
Dans la fouille de ces édifices , le plus petit fragment d'architec-
ture, une feuille de chapiteau, une moulure ornée, un détail, quel-
que peu important qu'il paraisse, doit devenir une source d'obser-
vations utiles ; on ne peut oublier qu'en sauvant ces fragments on
contribue à former une suite de faits qui, tôt ou tard , trouvent
leur place dans la vaste collection des connaissances archéolo-
giques.
Ce qu'on a dit précédemment des autels des Grecs peut s'ap-
pliquer à ceux des Romains : diversité dans les formes, décoration
d'architecture et de sculpture, emblèmes de sacrifices et de vic-
times, jusque-là complète analogie ; mais une exécution peu soi-
gnée, des profils de moulures plus composés et d'un galbe moins
pur, la sculpture d'un dessin moins noble, caractérisent les autels
élevés sous la domination romaine et les font différer de ceux des
Grecs.
Les inscriptions suffiront pour faire distinguer les autels votifs,
lorsqu'ils seront privés d'ornementation et qu'ils n'offriront rien
de plus que des cubes de pierre ou de marbre, comme on en voit
souvent de consacrés aux nymphes ou à quelques divinités locales
du second ordre.
Certaines cérémonies romaines ont donné naissance à des mo-
numents sacrés inconnus aux Grecs; dans les tauroboles on éleva
des autels d'une forme particulière : une table percée d'un grand
nombre d'ouvertures recevait la victime ; sous cet autel s'admi-
nistrait le baptême de sang. La France possède un de ces monu-
ments de superstition; les nouvelles découvertes dans ce genre se-
ront étudiées et dessinées par MM. les correspondants.
Enfin nous signalerons une dernière classe de monuments reli-
gieux, les bornes Termes ou Hermès, qui servaient de limites
entre les provinces ou les propriétés particulières, et qui, répan-
dues dans les campagnes, recevaient à certaines époques de l'an-
née les vœux des cultivateurs.
DEUXIÈME PARTIE. — MONUMENTS MILITAIRES.
§ I. Enceintes.
L'enceinte primitive de Rome avait enveloppé le Palatin dans
une forme carrée : un grand nombre de cités romaines présentent
cette disposition, particulièrement sur les pays de plaines. Les
murailles, protégées à leur base par un fossé et un agger, étaient
construites de plusieurs manières. On désignera la façon de ces
murailles; des dessins géométraux indiqueront si elles sont fa-
briquées en grandes assises réglées, en moellons smillés, ou par
encaissement.
Les grandes assises peuvent être établies en liaison comme on
pose les briques, c'est Vinsertum des Romains. L'opus incerlum
est formé de pierres irrégulières.
Opus incertum.
Fig. 21.
Dans la structure des Grecs et les constructions delà république
romaine, une pierre en boutisse, dont l'extrémité seule était ap-
parente, se plaçait entre deux pierres offrant toute leur longueur.
Structure greequt et de la Jiépublique.
Fig. 22.
On nomme revinctum ou construction cramponnée celle dont
les pierres formant les deux parois du mur sont liées avec des
crampons. Le nom de maceria se donne à la construction com-
posée de blocs de pierre placés à sec. sans liaison de mortier. La
base des murailles est souvent établie de la sorte.
Les moellons smillés (similes) peuvent être taillés en losanges
et figurer une maille ou réseau : cette structure est appelée opu»
reticulatum.
Opus reticulatum.
I ' i ' ( ' I^-^
Fig. 23.
Le nom d'isodomum était donné aux constructions de moel-
lons placés à plat, mais égaux en hauteur; \e pseudisodomum était
composé d'assises de moellons inégaux.
L'emplecton forme un encaissement de moellons reliés par des
assises de briques. En France la décoration de terres cuites mêlées
aux constructions est très-variée. Des losanges et autres figures
géométriques se reproduisent à plusieurs hauteurs dans les nui-
railles : c'est vers le Ras-Empire qu'elles se multiplient et pren-
nent toutes les formes.
151
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
152
Emp leeton et maceria.
Fig. 24.
Dans les contrées maritimes et auprès des fleuves qui roulent
des galets, les Romains ont fait usage de ces cailloux, et, les in-
clinant les uns sur les autres en forme d'épi ou d'arête de poisson,
en ont formé un ouvrage qu'on nomme opus ipicatum.
§ II. Portes.
Les portes situées au milieu des grandes faces des murailles de
ville étaient en général protégées par des tours crénelées ; le che-
min de ronde arrivait aux portes de la ville dans une petite en-
ceinte formant double défense sur ce point. La porte de ville of-
frait ordinairement deux voies consacrées , l'une à l'entrée ,
l'autre à la sortie des chars : les murs de Nîmes etd'Autun ont en
outre des ouvertures pour les piétons. Ces dispositions curieuses,
ainsi que les moyens de clôture, le mouvement des herses, le biais
des murs pour le jet du trait, seront indiqués aux plans, coupes et
façades des portes. Tous les vestiges de scellement, de ferrure, de
trous voisins des entrées, qui pourraient expliquer l'arrangement
des barricades, ou palissades établies en cas de siège, seront me-
surés avec soin et placés dans les dessins géométraux.
Porte de ville.
Fig. 25.
Le chemin de garde passant sur la muraille était orné au-dessus
des portes par des arcades à jour ou toute autre décoration. On
examinera dans ces arcades si des appuis permettaient de com-
battre comme dans les parties de la muraille où étaient établis des
créneaux.
§ III. Voies antiqdbs.
Les caractères principaux des voies romaines connues en France
sont :
Leur peu de largeur : elles dépassent rarement 6 ou 7 mètres;
Leur forme bombée ;
Leur direction presque toujours en ligne droite ;
Leur situation sur les plateaux ou à mi-côte des hauteurs;
La profondeur de l'empierrement divisé en plusieurs couches
distinctes de matériaux : on en compte quelquefois jusqu'à quatre,
chacune de plusieurs pieds d'épaisseur.
On peut ajouter, mais seulement comme un indice accessoire
auquel il ne faut pas attacher trop d'importance , l'emploi de terre
glaise, ou de masses de terre cuite , ou enfin de briques ou de
tuiles dans les couches inférieures.
La couche supérieure, mmma eruêla, se compose de cailloux ou
de pierres de toutes dimensions, quelquefois taillés et présentant
alors l'apparence du petit .appareil des constructions romaines.
Quelques voies antiques, surtout dans le Midi, sont au contraire
pavées de pierres énormes taillées irrégulièrement, mais assem-
blées avec beaucoup de précision.
Voie romaine.
Fig. S6
Ailleurs, lorsque les localités l'exigeaient, on a taillé les ro-
chers au pic, de manière à former souvent des excavations très-
considérables'(i ).
Dans les pays plats beaucoup de voies antiques se distinguent
par leur exhaussement au-dessus des plaines environnantes. Plu-
sieurs offrent l'aspect d'une muraille épaisse élevée de plusieurs
pieds au-dessus du sol.
Voie romaine.
Fig. 27.
Les caractères que nous venons d'énumérer ne sont point tel-
lement constants et absolus que lorsqu'ils se présentent on en
doive toujours conclure l'existence d'une voie antique; et par
contre, les exceptions ou des caractères très-différents ne prouvent
point toujours une origine moderne. Dans tous les cas on devra
tenir compte des circonstances locales, qui peuvent avoir beaucoup
d'importance pour décider la question ; par exemple, le voisinage
d'une voie antique bien constatée ; celui d'un camp ou d'un grand
établissement romain. On jwurra s'aider encore, mais avec réserve.
des témoignages historiques que nous ont conservés les géographes
anciens.
En examinant une voie antique on devra noter :
Sa direction ;
Son étendue, ses lacunes, ses embranchements ;
La nature des matériaux et leur épaisseur.
On fera connaître si elle est encore en usage ou si elle l'a été
anciennement, enfin si l'on y a fait des réparations plus ou moins
modernes.
On recherchera si des bornes ont existé ou existent encore le
long de ces chemins ou aux environs; si l'on en a déplacé quel-
ques-unes.
Il est important de copier les inscriptions de ces bornes, ou,
mieux, de les estamper.
(1) Voyez le vol. II, col. 4 de celle Revue, et la Planche I du même toI.
153
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
ibk
On examinera si les distances indiquées par ces inscriptions sont
exprimées en milles romains ou en lieues gauloises. (Les premiers
de 1000 pas ou tiers de lieue, les secondes de 1500 pas ou demi-
lieue.)
Quelquefois on trouve sur le bord des voies romaines des pyra-
mides ou des tours pleines (sans escaliers ni chambre intérieure),
dont la destination est fort problématique. On décrira minutieuse-
ment ces constructions, et, s'il est possible, on en donnera des
plans et des dessins. On recherchera également si, dans le voisi-
nage de ces routes, il n'existe pas des tombeaux, des substructions
de maisons, soit en j?roupes, soit isolées.
Autant que possible on devra tenir note des noms modernes des
hameaux, et même des fermes que traverse une voie antique ; ces
noms pourront quelquefois mettre sur la trace de nouvelles dé-
couvertes.
Les voies traversent les torrents et les fleuves sur des ponts anti-
ques qu'on étudiera dans tous leurs détails de construction et d'ar-
chitecture.
§ IV. Camps et Enceintes antiques.
Il existe en France un grand nombre d'enceintes formées par
un fossé et un amas de terre, ou bien par une muraille de pierres
sèches. Leur origine, leur date, souvent même leur destination,
sont très-difficiles à déterminer. Non-seulement les camps des peu-
plades barbares, gauloises ou étrangères, qui ont fait la guerre sur
notre territoire depuis une époque fort antérieure à la conquête de
César, jusqu'au VIII« ou IX' siècle, peuvent se confondre avec des
camps romains, mais encore des enceintes ayant une destination re-
ligieuse ou civile peuvent quelquefois être prises pour des ouvrages
militaires. C'est ainsi que plusieurs monuments celtiques sont en-
vironnés d'un large fossé et d'un parapet en terre. D'autres fois
des enceintes semblables entourent des tumulm. Dans une foule de
cas, ce n'est que par l'observation de bien des circonstances acces-
soires que l'on arrive à connaître l'origine de ces monuments. On
ne peut donc trop recommander de décrire minutieusement tous
les objets antiques trouvés sur les lieux : médailles, armes, pote-
ries, meules à grain, ustensiles de tout genre, même les ossements
d'animaux, si l'on en découvrait en grand nombre; leur espèce et
leur gisement pourraient fournir des renseignements utiles.
Les enceintes dont la destination militaire paraît le mieux con-
statée, et dont on peut rapporter l'érection à une époque anté-
rieure à la conquête, se trouvent en général sur des plateaux éle-
vés ou escarpés, dont elles suivent les contours les plus irrégu-
liers. D'ordinaire elles se composent d'un mur en pierres sèches,
qui sert en quelque sorte de parement à un agger de terre plus ou
moins épais. Les pierres sont brutes le plus souvent, quelquefois
grossièrement équarries, plus rarement elles sont liées les unes
Mut d'enceinte.
Fig. 28.
aux autres par des tenons de bois à queue d'aronde.
Pierres liées.
Fig. 29.
Les formes des enceintes en terre, que l'on peut regarder comme
des camps, sont trop nombreuses et trop variables pour qu'on es-
saie de les décrire ici. Un grand nombre présentent ce rapport,
qu'elles ont une petite enceinte intérieure presque toujours conti-
guë à l'enceinte principale.
■ Camp.
Fig. 30.
Quant à leur origine, il est difficile de la constater autrement
que par la découverte des objets antiques qu'elles peuvent renfer-
mer. On conçoit en effet qu'avant l'invention des armes à feu,
tous les retranchements temporaires ont eu entre eux la plus
grande ressemblance, quel que fût le peuple qui les eût construits.
Cependant, lorsque quelques-uns de ces camps offrent un tracé
conforme aux règles de la castramétation chez les Romains, on
peut présumer qu'ils ont été élevés par ce peuple, et à une époque
où ses légions avaient encore conservé leur antique discipline.
Nous rappellerons donc sommairement l'ordonnance des camps
romains, telle que nous l'ont transmise les auteurs militaires.
Anciennement, c'est-à-dire sous la République et dans les pre-
mières années de l'Empire, les camps étaient carrés, entourés d'un
rempart en terre avec un fossé en avant, d'une largeur et dune
profondeur correspondant à l'épaisseur et à la hauteur du rem-
part, ce dernier n'étant composé que des terres retirées du fossé;
dans la suite on leur donna la forme d'un parallélogramme rec-
tangle, quelquefois avec des angles arrondis, les grands côtés étant
aux petits dans le rapport de trois à un.
D'ordinaire les camps avaient quatre portes, une sur chaque
face; quelquefois un ouvrage avancé, un rempart avec un fossé
s'élevait en avant des portes. Le rempart du côté opposé à l'en-
nemi avait souvent une hauteur sensiblement plus considérable
que celle des autres faces du camp.
Coupe de rtmpart.
Fig. 31
jgg REVUE DE L'ARCHITECTURE
Les lieux que les généraux romains préferaient pour établir
leurs camps étaient principalement les larges plateaux à proximité
des cours d'eau, ou bien les plaines. Pour eux une hauteur escar-
pée était une mauvaise position, et leur pratique constante était
de faire niveler le terrain occupé par leurs troupes.
On ne peut qu'inviter les correspondants à joindre a leurs mé-
nioires sur les camps antiques un plan détaillé non-seulement des
retranchements, mais de leurs environs, avec des coupes du fosse,
du rempart, et, s'il se peut, de tout le terrain qu'embrasse 1 en-
ceinte fortifiée. Il est essentiel de marquer à quelle distance du
camp se trouve un ruisseau ou un étang. Enfin l'on recherchera
si dans le voisinage il existe d'autres retranchements, et si des de-
couvertes d'objets antiques ont été faites aux environs.
§ V. FOETlFICATIOiNS PEKMAiVEXTES.
ET DES TRAVAUX PURLICS.
TROISIÈME PARTIE. - MONUMENTS OVILS.
156
Nous avons donné, colonne 1 1 2, quelques renseignements sur les
fortifications permanentes des Gaulois.
II y a lieu de croire qu'après la conquête, les Romains, voyant
leur domination affermie, ne fortifièrent point les villes qu'ils bâ-
tirent ou qu'ils occupèrent. Campées sur les frontières orientales,
leurs légions arrêtaient les incursions des barbares, et un très-petit
nombre^de troupes suffisait à maintenir l'ordre dans les provinces
ajoutées à l'empire. Les troupes étaient ou réparties dans les sta-
tions militaires, stativa castra, ou bien elles occupaient certaines
forteresses ou citadelles à proximité des grandes villes.
Dans la décadence de l'empire, les invasions des barbares firent
sentir le besoin de fortifier les villes, pour les mettre à l'abri du
pillage. Les travaux entrepris à cette époque portent l'indice d'une
grande précipitation, et d'ordinaire on remarque que les murailles
sont bâties avec les débris de grands édifices, comme si on les avait
sacrifiés pour en tirer des matériaux à l'approche du danger. Les
progrès de la religion chrétienne expliquent encore comment un
urand nombre de temples furent démolis alors, et leurs matériaux
employés à ces fortifications.
Presque toutes les murailles construites à cette époque se font
reconnaître facilement par les blocs énormes qui en forment les
assises inférieures, et dont un grand nombre présentent des mou-
lures, desbas-relifs ou des inscriptions. En général, le haut des
murs est à petit appareil interrompu par des lits de briques ou de
tuiles. Quelquefois certaines parties du parement extérieur pré-
sentent une espèce de mosaïque grossière, par la combinaison de
pierres noires et blanches et de briques rouges. Il faut noter l'é-
paisseur du ciment qui sépare les pierres, en général beaucoup plus
considérable que dans les premiers siècles de l'architecture ro-
niaine.
Les tours sont rondes plus souvent que carrées, ayant le même
diamètre à leur base qu'à leur sommet, et fort rapprochées les unes
des autres. En œuvre, leur diamètre est rarement de plus de 5,à
6 mètres.
Les observations qu'on devra faire sur ces fortifications sont
les mêmes que celles qui s'appliquent à tous les édifices du même
temps.
On trouve quelquefois, sur des bas-reliefs ou des mosaïques, des
renseignements curieux sur l'art de la guerre chez les anciens, des
représentations de machines de guerre, de tours, de remparts, de
tentes, etc. En décrivant ces monuments, on doit toujours y join-
dre des dessins ou des calques, s'i y a lieu.
Les édifices publics desRomains prirent un grand développement
sur le sol des Gaules. Ces constructions sont aussi imi)orUintesque
toutes celles qui jusqu'ici ont été signalées à MM. les correspon-
dants ; leur étude peut offrir un grand nombre de faits nouveaux.
§ I. POBTS.
Si la ville romaine qu'on étudiera est maritime, on tracera sur
le plan général l'étendue et l'emplacement des ports marchand et
militaire,. l'arsenal, les magasins, le phare, les jetées, et tous les
détails de marine que pourraient produire les fouilles, si le port est
à sec.
Au profil des quais on joindra un détail de la construction desti-
née au soutènement des terres, des notes sur les mortiers hydrau-
liques, l'exploitation de la chaux, etc.
§ II. Aqueducs.
On suivra le cours des aqueducs, non-seulement dans les vallées
et dans les plaines qu'ils traversent sur des constructions apparen-
tes, mais encore dans les montagnes percées, sous le pavé des
villes, et partout où passèrent les canaux. Dans l'étude générale de
ces aqueducs, depuis la source jusqu'aux citernes ou réservoirs cy|i
reçurent les eaux, on fera un travail de nivellement pour connaî-
tre les siphons et autres moyens en usage chez les Romains ; on
pourra compléter ainsi nos connaissances sur la science hydrauli-
que des anciens.
Le cours des tuyaux de plomb ou de terre cuite distribuant les
eaux dans la ville sera relevé lorsque des fouilles les mettront à
découvert. Les lieux où purent être situés les châteaux d'eau, fon-
taines ou lavoirs, seront donnés par le nivellement des terrains et
le cours de ces tuvaux.
Tuyaux en terre.
Fig. 32.
z:
Fig. 33.
J'uj/au en plomb.
'WlÊmS)
Fig. 31.
Les mastics et revêtements intérieurs des conduits et des piscines
seront l'objet d'une étude spéciale, ainsi que les dépôts tartreux
des eaux, et tout ce qui peut indiquer la durée de leur passage ou
de leur séjour.
Les Orientaux ont conservé l'usage de retenir dans les vallées
les eaux pluviales ou celles qui coulent lentement des montagnes,
par des digues solides, derrière lesquelles ils établissent des fon-
taines commodes et des lavoirs publics. Ces constructions étaient
connues des anciens; la France en possède des traces auprès d'Aix;
il est important de les signaler et de les étudier, non-seulement
comme des monuments de la domination romaine, mais encore
dans le but d'en faire] connaître l'usage, et de le renouveler dans
des contrées dépourvues d'eau courante.
§ III. Thermes.
L'examen des aqueducs se lie à celui des bains publics et parti-
culiers, désignés chez les Romains par les noms de thtrmœ et 6a/-
157
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
158
nea. Les thermes, si multipliés dans l'antiquité, et dont les Gaules
ont conservé de nombreuses ruines, s'élevèrent auprès des sources
thermales, dans l'enceinte des grandes villes et quelquefois extra
muros. Lorsque la ligne des canaux d'aqueduc aura dirigé les étu-
des vers les ruines que la tradition ou les dispositions elles-mêmes
pourront faire considérer comme appartenant à un édifice consacré
aux bains, un plan général sera levé ; on y indiquera les arrivées
des eaux avant leur emploi, et les aqueducs de dégagement lors-
que, par l'usage des bains, elles étaient mises hors de service.
Un réservoir étant nécessaire pour réunir ces eaux avant leur
arrivée aux piscines ou grands bassins , de même qu'aux bains
particuliers, on en cherchera les traces en amont du cours d'eau.
Toutes les directions que devaient suivre les tuyaux de distribu-
tion, soit vers l'hypoeauste ou fourneau destiné à chauffer les
bains, soit aux baignoires avant et après l'usage, seront étudiées
de manière à bien expliquer les fonctions de chaque conduit.
Si des souterrains destinés à servir de magasins aux com-
bustibles, de salles de service, d'hypocauste pour chauffer les
bains, etc., se rencontrent dans les ruines de l'édifice, ils seront
l'objet de plans particuliers ; les divers niveaux des salles, leurs
usages respectifs, tels que bains froids, bains tièdes, étuves, etc.,
seront expliqués au plan; leur forme, et la place qu'elles occupent
dans l'établissement, guideront pour ces désignations.
Si quelques traces de mosaïques ou de décorations intérieures,
telles que peintures, stucs, marbres incrustés, se rencontrent dans
les ruines, elles seront recueillies et dessinées avec précision, en
couleurs et dans le caractère de l'antiquité.
L'orientation du plan est nécessaire comme vérification de plu-
sieurs préceptes de Vitruve relatifs aux bains. Des coupes sur
chaque salle indiqueront sa forme et sa construction.
§ IV. Pbétoikes.
Les capitales de province doivent seules renfermer les restes de
palais impériaux ou de prétoires ; ces grands édifices, qui ne reçu-
rent les souverains que pendant leurs voyages dans les Gaules ,
furent plus spécialement réservés aux chefs qui commandaient
l'occupation.
' Cette considération doit les faire envisager sous le point de vue
militaire autant que sous l'aspect civil : l'emplacement qu'ils oc-
cupèrent fut donc ordinairement choisi de manière à dominer le
pays, à tenir les routes stratégiques sous la dépendance du préfet,
à relier avec les camps d'occupation toute la ligne militaire.
Lorsque ces conditions de localités seront reconnues dans les
ruines d'un grand édifice que les traditions pourront indiquer
comme un prétoire, le relevé du plan y fera distinguer les grandes
salles d'audience, un tribunal et de vastes habitations. Près de
cet édifice les nivellements de terrain pourront indiquer la surface
d'une place publique ou forum, convenable à la réunion d'une
partie de l'armée et de la population. On devra, par un examen
scrupuleux de l'enceinte, s'assurer des relations qui pouvaient
être établies entre le palais prétorien et les murailles de la ville ;
la même étude s'appliquera aux portes placées sur la voie mi-
litaire.
Les plans, coupes et façades indiqueront exactement l'état ac-
tuel de l'édifice; les détails de construction qui pourraient offrir
de l'intérêt seront signalés aux dessins et dans les descriptions.
S V. Abcs de tbiomphe.
Les trophées militaires, arcs de triomphe, colonnes historiques,
multipliés en France par l'art italique , sont des monuments iso-
lés dans lesquels la richesse de l'architecture fut plus ou moins pro-
diguée selon l'importance des faits mémorables dont ils conservè-
rent le souvenir.
Les arcs de triomphe, placés, selon l'effet qu'ils devaient pro-
duire, avant l'entrée des villes, à l'alignement des remparts, dans
l'intérieur de l'enceinte ou à la tète des ponts, présentent des as-
pects variés.
Les plus simples, ouverts d'une seule arcade, offrent une masse
décorée de colonnes saillantes, au milieu desquelles la sculpture
monumentale a figuré les statues des peuples vaincus. Les orne-
ments de l'archivolte, des arcs doubleaux et de la voûte sont imités
des productions du sol, heureuse idée que l'art du Moyen-Age de-
vait développer plus tard.
Fig. 35.
D'autres arcs sans colonnes engagées, sont décorés de pilastres,
de bas-reliefs figurant les faits remarquables de la guerre. Les plus
riches monuments de ce genre sont percés de trois grandes ar-
cades égales en hauteur.
Fig. 36.
comme on en voit un exemple à Reims, ou d'arcs de dimensions
différentes : tel est celui d'Orange.
Fig. 37.
Les dessins géométraux de ces édifices, tous construits en
pierres de grandes dimensions, feront connaître la disposition de
REVUE DE L'AIICHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
160
159
lappareil, les moyens de construction employés pour obtenir des
voûtes durables bien que refouiilées de caissons sculptés. On aura
soin d'exprimer toutes les assises de pierres par leurs joints hori-
zontaux et verticaux ; on ne négligera point les trous régulière-
ment placés qui pourraient indiquer des inscriptions ou des orne-
ments en métal.
Tous les attributs sculptés seront dessinés dans leur caractère :
ils sont de nature à expliquer des usages inconnus ; on y voit des
enseignes militaires, des vêtements curieux, des armes, des ma-
chines, etc., etc. Les têtes d'esclaves ou de vaincus placées dans
les impostes et les frises seront aussi l'objet d'une étude spéciale ;
leurs caractères anthropologiques peuvent donner les moyens d'as-
signer l'âge du monument.
Les fruits, les feuillages et leurs fleurs employés dans l'orne-
mentation seront dessinés avec assez d'exactitude pour qu'on
puisse y trouver des notions positives sur les productions anciennes
du pays.
S VL Colonnes histobiques.
Les colonnes historiques, indépendantes des fêtes triomphales
et ayant pour but de perpétuer le souvenir d'un fait isolé, se trou-
vent dans les campagnes aussi souvent que dans les villes ; elles
s'élèvent au lieu même où's'était livrée une bataille, où avait eu
lieu un événement digne de mémoire.
Fig. 38.
Les bas-reliefs placés sur les piédestaux, les ornements d'architec-
ture qui couronnent les embasements, ou qui décorent la colonne
elle-même, pouvant être en rapport avec le motif qui fit consacrer
le monument, seront dessinés avec assez d'exactitude pour qu'au-
cun détail n'échappe à l'investigation.
Si la colonne est tronquée dans sa hauteur, ce qui n'arrive que
trop souvent à ces constructions offrant peu de résistance, on cher-
chera dans tous les environs les fragments qui pourraient s'y rat-
tacher et la compléter. Le style de la sculpture est le meilleur
moyen de rapprochement dont on puisse faire usage en pareil cas.
Les mesures peuvent aider encore à relier à la masse principale les
détails dispersés.
Les piles isolées et élevées sur une base étroite, les tours mas-
sives et dans lesquelles on ne peut reconnaître un but d'utilité,
pourront être classées dans ce genre de monuments.
Fig. 39.
S VII. Jecx publics.
Les jeux publics établis dans les villes romaines nécessitèrent
la constniction d'édifices capables de réunir la foule des specta-
teurs ; à l'emploi du bois ou substitua bientôt celui de matières
plus durables, et, dans les colonies fondées par les empereurs avec
tout le luxe des grandes cités, on éleva des monuments spéciaux
aux jeux scéniques, aux combats d'animaux, aux courses de tout
genre; les grandes villes de la Gaule offriront donc collectivement
aux études de MM. les correspondants le théâtre, l'amphithéâtre et
le cirque. Lorsqu'une ville sera considérée comme une colonie du
second ordre, elle pourra se voir privée d'un de ces immenses
édifices ; le cirque, fort rare dans les Gaules, fut supprimé le plus
souvent, et les courses s'établirent sans frais dans la plaine.
L'amphithéâtre, qui offrait dans son enceinte plus d'un genre
de combats, manque rarement aux colonies de quelque impor-
tance, et ses jeux, conservés jusqu'aux premiers siècles de la mo-
narchie, nécessitèrent alors quelques constructions dont on re-
trouve les traces. Le théâtre, enfin, réunit tous les divertissements
donnés aux populations lorsqu'il fut le seul édifice consacré aux
fêtes; MM. les correspondants rechercheront les souvenirs histori- •
ques de ces jeux publics, et devront, selon l'étendue des villes, ren-
dre compte de leur importance; les camps ou grandes stations mi-
litaires pourront aussi conserver les traces de théâtres.
Chacun de ces monuments présente des formes distinctes , des
dispositions spéciales, qui doivent être étudiées dans tous leurs
détails.
§ VIII. Théâtre.
Le théâtre des Romains était le plus répandu dans les Gaules ; il
différait de celui des Grecs par la scène, beaucoup plus étroite, et
par l'absence du thymelée ou orchestre avancé, destiné aux récita-
tifs et aux choeurs. Il se composait de deux parties bien distinctes.
La première, tracée sur un plan demi-circulaire, contenait les
bancs des spectateurs. L'économie, la facilité d'exécution avalent
fait établir dès l'origine cette portion de cercle dans le liane d'une
colline, dont la pente favorisait la pose des gradins.
Une galerie à colonnes régnait au sommet, et formait la tribune
des femmes, et plus souvent celle des esclaves; cette galerie était
quelquefois en bois. Dans cette division importante du théâtre, on
étudiera les dégagements favorables à l'arrivée et à la sortie de la
foule, les vomitoires ou débouchés pratiqués dans les corridors
pour faciliter le classement des spectateurs sur les bancs et dans
les précinctions, grandes divisions des places par castes et profes-
ir.i
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
tes
sions; enfin, sous les gradins, on suivra les traces des voûtes ou
Théâtre.
fiij. iO.
cases qui recevaient des vases eu l)rouze destinés à porter la voix
des acteurs jusqu'aux places les plus éloignées.
Lorsque des fouilles s'opéreront sur le sol inférieur de cette por-
tion demi-circulaire des tiiéàtres, MM. les correspondants y cher-
cheront les traces de pavés mosaï(|ues, indication de l'importance
que prenait cette place réservée aux premiers magistrats. Des au-
tels, et même de petits édicules consacrés aux dieux qui présidaient
à la scène, pourront s'y rencontrer aussi bien que dans quelque autre
lieu de la salle. Sur le sol inférieur, appelé de nos jours le parterre,
s'amoncelèrent les débris de sculpture et de décoration , qui , tom-
bant de toutes parts, s'y réunirent par la nature même et la forme de
l'édifice. C'est là que les fouilles mettront au jour les fragments
les plus précieux.
La seconde partie du théâtre contenait la façade, \e iproscemum
ou avant-scène, les salles des mimes et toutes les dépendances né-
cessaires aux spectacles; elle était sur un plan rectangulaire et
formait le diamètre ou la corde de l'arc destiné à la foule.
Le proscenium, décoré de marbres, de bas-reliefs, de colonnes,
ornait le fond de la scène réservée aux représentations ; ïhyposcc-
nium, mur peu élevé, qui du sol inférieur gagnait le niveau de la
scène, était aussi enrichi de sculptures. Des portes situées au fond
sur le proscenium, et dans les faces latérales, communiquaient aux
salles des acteurs, et donnaient entrée aux chœurs, aux processions
et à toute la pompe des spectacles. Ces détails de décoration et
d'usages seront consignés dans des coupes levées géométralement
sur toutes les parties importantes ; elles compléteront les dessins
généraux de l'édifice.
On recueillera tous les détails de scellements qui pourraient in-
diquer les attaches de bas-reliefs et de marbres incrustés ; les trous
placés de manière à expliquer les moyens de couverture en char-
pente sur l'avant-scène seront mesurés et placés scrupuleusement
sur h s dessins.
Les escaliers situés près des façades seront figurés aux plans,
avec le nombre et la disposition des marches nécessaires pour arri-
ver au sol des divers planchers. Sur les élévations on détaillera les
moulures de décoration, les appareils des cintres, les proportions
des étages et de leurs ouvertures. Au sommet des édifices on re-
cueillera tout ce qui pourait expliquer les moyens employés pour
tendre le velarium sur la totalité du monument : des consoles sail-
lantes en marbre ou en pierre recevaient un système de charpente
à cet eftiet. On cherchera près des théâtres les traces des portiques
couverts, destinés à recevoir la foule, dans le cas où la pluie sur-
venait au milieu des jeux. Ces portiques, composés de plusieurs
rangées de colonnes, offrirent des dispositions carrées, ou de
formes irrégulières, selon que les localités permirent de les étendre.
Des temples furent quelquefois élevés dans leur enceinte; des plan-
tations en faisaient une promenade publique semblable à nos espla-
nades.
§ IX. Ahphithéatbe.
Double théâtre par sa forme et sa superficie, l'amphithéâtre,
commun en France, présentait une constructiou immense sur un
plan elliptique. Placés près de l'enceinte des villes, pour faciliter
l'introduction des animaux qui devaient combattre, ainsi que pour
le transport des victimes au delà des murailles, ces monuments
offraient à l'extérieur plusieurs étages d'arcades continues, sur
une longue courbe décorée de piliers ou de colonnes.
Am/ihilhéàtre.
Fig. 41.
L'architecture des amphithéâtres, exécutée dans des caractères
pesants, vigoureux et convenables au sujet, doit être étudiée spé-
cialement par MM. les correspondants, et mesurée avec assez de
soin pour conserver à tous les détails leur physionomie particu-
lière.
Dans i'attique, au sommet de la façade, une suite non interrom-
pue de consoles en pierres percées verticalement d'un large trou
recevaient, comme autour des théâtres, des pièces de bois dres-
sées, et de l'extrémité desquelles partait un système de câbles ten-
dus vers le centre de l'édifice, pour supporter un velarium destiné
à mettre la foule des spectateurs à l'abri.
Consoles.
Fig. M.
Les moyens employés pour placer les poutres du vtlarium, pour
soutenir le tirage des toiles par la combinaison des bois; le nu-
mérotage des consoles pour l'ordre établi dans le service ; les scel-
lements de fer qui, sur les bancs ou dans quelque autre point de
l'édifice, indiqueraient des auxiliaires au système des câbles, com-
T. V. Il
REVUE DE LARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURI.ICS.
IM
pléteiont les études relatives à cet abri léger. Les écoulements des
eaux pluviales, les détails de construction, les attributs sculptés,
les décorations plaquées, etc., etc., sont des sujets dobservation
qui doivent être recueillis, décrits et dessinés.
Immédiatement derrière la façade se tro^ivait à chaque étage
une grande galerie de circulation qui faisait le tour de l'édifice.
Destinée à recevoir la foule non-soulement à l'époque des jeux,
mais à tout moment de la journée, cette galerie contenait des bou-
tiques, et faisait de l'édifice un bazar, qui réunissnit les habitants
et les étrangers. De plain-pied avec ces galeries ou par des esca-
liers multipliés, on se rendait aux loges des spectateurs par les
vomitoires disposés pour donner entrée aux diverses préciiictions
de gradins. La foule réunie dans ces édifices immenses trouvait
place sans désordre par la belle disposition des issues; toutes les
combinaisons de dégagements fournies par le plan, la facilité de
classement dans les précinctions, la division des loges, les inscrip-
tions de corporations gravées sur les bancs, la place assignée à cha-
cun, depuis la tribune de l'empereur et des premiers magistrats
de la colonie jusqu'à la place étroite du dernier des spectateurs,
présenteront des détails curieux à examiner.
Les inscriptions indiquant les restaurations faites dans l'édifice,
et à défaut d'inscription les différences notables que présenteront
les matériaux dans leur nature même, ou dans la manière dont ils
furent employés, serviront de guide pour. étudier les révolutions
qui s'opérèrent à diverses époques ; on y reconnaîtra la continua-
tion des usages qui maintinrent les jeux de l'amphithéfUre jus-
qu'aux premiers temps de la monarchie.
Arrivé enfin au sol de l'arène, on étudiera sa forme par un re-
levé des courbes ; dans le podium ou clôture formée de pienes
dressées, qui séparait les spectateurs du péril des jeux, on trou-
vera les quatre portes donnant entrée aux animaux et aux combat-
tants. On examinera scrupuleusement les moyens employés pour
clore ces portes, ainsi que toute autre partie de l'édifice ; les scelle-
ments fixés au podium et indiquant des barrières de métal, qui
protégeaient plus complètement les spectateurs contre les dangers
de l'arène; enfin on pourra trouver les traces d'un euripeou canal
placé dans quelques amphithéâtres à la base du podium, pour éloi-
gner encore les animaux.
Si des fouilles pratiquées dans l'étendue de l'arène mettent au
jour des substructions étroites, on y reconnaîtra des canaux con-
venables à l'écoulement des eaux ; plus étendus, ces conduits pour-
raient former un système d'aqueducs liés aux citernes et châteaux
d'eau de la ville : on y verrait alors un moyen d'amener l'eau dans
l'arène pour des jeux nautiques. Un troisième motif enfin peut être
attribué aux constructions trouvées sous le sol central de l'amphi-
théâtre, c'est, à savoir, une suite de corridors destinés aux machi-
nistes, qui faisaient paraître des décorations.
En France , des amphithéâtres creusés dans le roc sont tracés
sur des plans en polygones plus ou moins réguliers.
§ X. ClIiQUK.
Beaucoup plus allongé que l'amphithéâtre, le cirque fut destiné
■ aux courses de toute espèce et particulièrement à celles des chars :
deux lignes parallèles de gradins ou de talus en terre, peu élevés,
se développaient sur une grande étendue; reliés d'un côté par une
portion de cercle, les bancs y prenaient la forme d'un théâtre ; au
fond était une tribune, plus souvent une entrée dans la carrière.
A l'extrémité opposée, les lignes parallèles étaient réunies par une
construction oblique, dans laquelle des remises de chars ou earcere*
fermées de grilles servaient de |)ointde deparl aux courses.
Cirqu*.
!
i I
r-
Fin. ^<'
Au centre de la carrière cl dans le sens de sa longueur, un mur
peu élevé , formant l'arête ou épine de l'éilifice , elait construit,
non parallèlement aux bancs des spectateurs, mais dans une incli-
naison telle qu'au moment du départ tous les chars avaient le même
avantage de distance.
A chaque extrémité de l'épine, trois iMimes en marbre, isolées
entre elles et enrichies de sculptures, gtiidaient les courses et de-
vaient être doublées un certain nombre de fois; des obélisques,
des statues, des machines ingénieuses, \w\\v donner le signal du
départ, et jusqu'à des bassins ou Ion abreuvait les chevaux, ou
Ion puisait pour rafraîchir les roues des coureurs, étalent ranues
sur cette épine.
La France a conservé des ruines de ces édifices de luxe et de
plaisir, et plus d'un hippodrome dont les constructions auraient
disparu pourra se reconnaître aux formes des terrains, aux pentes
alignées des collines voisines des villes, à des terrasses couron-
nant des arènes naturelles. C'est alors qu'on cherchera les rap-
ports que présentera la longueur avec le stade ou les mesures ro-
maines, qu'on déterminera sur les plans l'inclinaison des taretres
et de l'épine, qu'on calculera le nombre de spectateurs que conte-
naient les gradins. Dans les villes, ces études, plus difficiles en
raison des percements de rues et des maisons placées sur le sol des
cirques, nécessiteront dans les caves et les substructions des édi-
fices particuliers des recherches minutieuses de tout ce (|ui peut en
faire partie. La grande étendue de ces monuments ne permit sou-
vent d'établir que des bancs en bois : dans ce cas, on retrouvera
l'enceinte générale, qui fut aussi solidement construite que si elle
avait été destinée à supporter des gradins en pierre.
§ XL BASiLigrcs.
La présence d'une basilique était une condition indispensable
aux villes qui devaient être élevées au rang de municipe ; cet
édifice, placé sur le forum et consacre aux transactions de négoce
ainsi qu'au tribunal, était la bourse de nos villes modernes.
La distribution intérieure, uniquement formée j>ar des colon-
nes isolées, l'absence des voûtes en pierres remplacées par des pla-
fonds en bois, le peu d'épaisseur qu'une construction aussi légère
avait fait donner ordinairement aux murs extérieurs, telles furent
les causes de la destruction presque générale de ces monuments
Un autre motif de destruction non moins puissant fut l'emploi
166
REVUK DE L'ARCMlTKGTLRK ET DES TRAVAUX PUBLICS.
16G
((lie les pi'emieis chrétiens firent des riches colonnes de ces basili-
ques d'usage civil, pour en décorer leurs basiliques religieuses éta-
blies sur des dispositions analogues. La grande similitude qui régna
entre ces deux genres d'édifices doit faire éviter à MM. les cor-
respondants de confondre les ruines d'une basilique romaine avec
celles d'une église primitive; l'étude des détails de construction,
des ciments, des fragments d'architecture, pourra déterminer l'u-
sage primitif du monument. L'orientation du plan peut encore
servir de guide dans les recherches.
basilique.
'accnnn.n;
jJDDGDaj
IC'CCDDDD;
□DDOGCC
ccaconcX
aD:::iDcan:
acidnnnri^
Fig 44.
I
Le plan allongé des basiliques offrira une vaste circulation sé-
parée de la nef centrale par deux ou quatre rangs de colonnes.
Au fond, une disposition demi-circulaire indiquera le lieu qu'oc-
cupait le tribunal ; les angles du plan pourront donner 'es indica-
tions d'escaliers desservant l'étage supérieur, composé d'une ga-
lerie ouverte* sur la nef. Lorsqu'une fouille sera suffisamment
étendue pour permettre d'attribuer à un édifice de ce genre les
constructions mises au jour, après le relevé du plan et les autres
travaux déjà indiqués, on cherchera dans les fragments des détails
suffisants pour compléter les deux ordres d'architecture inté-
rieure.
Les gradins du tribunal, l'exhaussement de son sol au-dessus de
celui du monument, les traces de clôture et d'appui qui pourraient
indiquer une distribution d'ordre et de police intérieure, offriront
des observations neuves; l'orientation du plan et la facilité de ses
abords vers la place publique et les rues adjacentes compléteront
les dessins géométraux.
^ XII. Co.NSTiu t■rl0^s pauïicijlièhes.
La distribution intérieure des villes antiques à l'égard des rues,
des carrefours, des places publiques, était établie sur un plan
régulier lorsque le terrain le permettait. Généralement les percées
principales n'ont point changé dans les cités modernes, malgré
les accumulations de murailles de tous les âges et les pavements
successifs. On doit donc s'attendre à rencontrer, dans les fouilles
qui couperont les rues principales, des traces de voies romaines
plus ou moins rapprochées du sol actuel ; on étudiera la fabrication
de ces voies et leur pavement. Les substructions des maisons ré-
cemment établies sur les rues antiques sont souvent maçonnées
avec des pierres enlevées à ces chaussées, qui, pavées eu roche
dure, en lave ou en granit, offraient un opus incerlutn formé de
masses épaisses et faciles à reconnaître.
Les insulœ ou iles de maisons, comprises entre les rues, étaient
comme de nos jours divisées en lots-plus profonds que larges. L'ha-
bitation romaine, plus commode à tous égards que celle des Gau-
lois, s'y établissait avec ses distributions intérieures, et soumise
aux lois de mitoyenneté.
La façade, ouverte d'une ou plusieurs boutiques, avait de plus
un passage conduisant à un espace plus large nommé atrium, et
dont le centre était occupé par un bassin destiné à recevoir les
eaux pluviales; les pièces disposées autour de l'atrium étaient
celles qu'habitaient le maitre et sa famille.
Maiiont.
rn I
I-
l-
Fig. 45.
Si le propriétaire était un riche citoyen, une seconde cour ou
péristyle entouré de chambres plus vastes, d'un triclinium ou salle
a manger, de pièces de luxe, etc., formait son habitation réservée.
Les villes antiques ont trop souffert en France pour qu'on puisse
trouver des habitations entières; mais plus d'une mosaïque de Iri-
clinium, plus d'un pavement de boutique ou de quelque pièce de
luxe ont arrêté la pioché des terrassiers. Dans le cas où MM. les
correspondants auraient connaissance d'une découverte de ce
genre, non-seulement ils dessineront la mosaïque, et s'opposeront
fi ce que sous prétexte de spéculation elle soit détruite, mais
encore ils devront la faire couvrir de manière à la préserver de la
ruine.
Établies dans un climat tout autre que celui de l'Italie, les mai-
sons de la Gaule offriront une circonstance que MM. les corres-
pondants ne doivent point négliger. Des hypocaustes ou calorifères
souterrains répandaient la chaleur par des tuyaux de terre cuite
placés sur les parois des appartements; ils offriront une étude cu-
rieuse non-seulement sous le point de vue archéologique, mais
encore sous celui des améliorations à faire à nos maisons moder-
nes (l). On y pourra faire des observations intéressantes sur la na-
ture des combustibles.
Ilypocauste.
=5^! 'r,i»'»r*=*.'-<»«.
Fig. 46.
Dans le lieu le plus retiré de l'habitation, les divinités laraires
étaient déposées dans une petite chapelle plus ou moins décorée :
(1) Ces calorifères sont de petites dimensions; on ne doil pa* les confondre
arec ceux des bains.
167
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
168
c'est à ces monuments qu'on pourra trouver des peintures curieu-
ses; elles seront copiées avec les couleurs antiques, ainsi que toutes
celles qui auraient fait partie du décor intérieur de la maison. Les
enduits qui portent des peintures doivent être étudiés dans leur
composition.
Le balneum ou bain privé se présente rarement dans les maisons
romaines; la Gaule en a donné quelques exemples : il serait im-
portant de recueillir ceux qui se présenteront à l'avenir.
Des caves ou celliers se rencontrent dans les fouilles qui s'opè-
rent sur les villes antiques pour établir des constructions moder-
nes, et quelquefois dans des lieux isolés. Les amphores destinées
à contenir les liquides étaient plantés dans le sol de ces caves, et
rangées sur une ou plusieurs lignes.
Les fours à cuire le pain, les fourneaux à cuisine.
Meule à bras.
F.g. M.
les meules à bras, les moulins, seront recueillis comme des dé-
tails de nature à faire connaître une partie de l'industrie gallo-ro-
maiue.
MouHn.
Fiij. 48,
Des puits, des bassins à laver ou destinés à recevoir les eaux
pluviales dans Vatrium et dans les péristyles, des piscines d'une
plus grande étendue et situées dans les jardins, tels sont les dé-
tails qui pourront se présenter dans les maisons particulières des
villes.
Puits.
Fig. 49.
On poun-a reconnaître au sol qui couvre aujourd'hui les con-
structions, si elles étaient entièrement établies en pierre; les mai-
sons de bois étaient communes dans le Nord. La campagne peut
offrir aussi des notions sur les habitations de riches citoyens qui
pendant l'été s'éloignaient des affaires. Le Laurentin ou villa de
Pline, les nombreuses maisons de Cicéron, sont assez, connus par
les descriptions pour qu'on y retrouve tout le luxe des habitations
de la ville. Les moyens d'étude indiqués précédemment sont donc
applicables aux constructions particulières qui se trouveront rx/ra
muro».
Les travaux agricoles groupèrent des fermes ou habitations ru-
rales pour l'exploitation des terres; la distribution de ces bâti-
ments, les destinations diverses des corps de logis, tels que gran-
ges, étables, etc., devront être indiquées par les plans; et de la
nature de ces corps de fermes pourront quelquefois se tirer des in-
ductions sur le genre de culture autrefois en usage dans telle ou
telle province.
M. Féret a fait dans la Normandie des observations de ce genre
qui ont produit d'heureux résultats.
Aux instructions qui précèdent, et qui s'appliquent aux monu-
ments au-dessous du sol comme à ceux que des fouilles anciennes
ou récentes mirent au jour, on doit joindre quelques observations
relatives aux découvertes à faire, et à la direction à donner aux tra-
vaux de terrasse.
L'inspection souvent répétée d'un terrain qui présentera des
chances de succès aux explorations, y fera reconnaître certaines
ondulations prolongées, d'une couleur différente de celle de Vku-
mus des environs, et empruntée des ciments, des débris de terre
culte et de pierre calcaire.
Si le sol est livré à la culture, la germination plus lente sur les
murs cachés près de sa surface fera voir à l'observateur des nuan-
ces dilTérentes dans la verdui-e; par le plus ou nioins de force
dans la végétation, on pourra suivre les constructions antiques
dont souvent le plan entier est dessiné par des lignes de plantes
étiolées.
Api-ès les pluies abondantes, non-seulement le sol emprunte ses
nuances des débris qu'il renferme, mais encore des éboulements'
s'opèrent, et peuvent mettre au jour des constructions, des pote-
ries, des pierres gravées et des médailles.
Dans les contrées maritimes ou sur les bords des fleuves, les
orages entraînent des portions de terrain considérables ; les obser-
vations de MM. les correspondants doivent se diriger vers les rives
ainsi entamées.
Il n'est pas moins ordinaire dans les montagnes de voir les tor-
rents causés par les fontes de neiges déchausser les constructions
antiques, entraîner dans les ravins des fragments prwieux, des
médailles et autres objets.
Jamais, en aucune circonstance, un terrain ne doit être rétabli
à l'état qui précédait l'exploration, sans que des dessins et des
procès-verbaux ne constatent les découvertes, et ne les fassent con-
naître dans tous leurs détails de nivellement, de dispositions gé-
nérales et particulières, et dans tout ce qui est relatif à la construc-
tion et à l'emploi des matériaux.
On doit veiller à ce que les ouvriers, entamant la terre avec pru-
dence, et ordinairement à la l)éche, ne brisent point les mosaïques
ou les sculptures , ne détruisent pas les lignes de distribution,
qui, dans les maisons, présentent souvent l'épaisseur d'une seule
brique.
( La suite au prochain numéro. )
169
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
170
DU CHAUFFAGE Eï DE LA VENTILATION.
CHAUFFAGE A LAIK CHAUD.
Le chauffage à l'aie chaud est, dans hien des eircoustaiices, d'un
emploi plus économique et plus commode que celui de tout autre
système ; tels sont les cas où il s'agit d'échauffer promptement des
pièces, des édifices, dont il n'est fait usage que pendant un temps
limité, comme les tribunaux, les salles de spectacles, les salles des
cours, etc., etc.
Toutefois, de graves défauts, qui semblaient inhérents au chauf-
fage par l'air chaud, en avaient restreint l'usage. L'air chaud ob-
tenu par des surfaces métalliques chauffées jusqu'au rouge, était
sec, malsain et d'une odeur désagréable ; sou passage à travers
l'appareil le viciait au point de lui enlever les qualités propres
à la vie de l'homme et de lui communiquer des propriétés nuisi-
bles. Il s'agissait donc de construire un calorifère dont les sur-
faces destinées à chauffer l'air ne pussent point rougir, et qui pût
donner à l'air une quantité de vapeur en rapport avec sa tem-
pérature.
Voici la description de l'appareil au moyen duquel nous avons
satisfait à cette double exigeance.
DESCRIPTIOiN d'un CALOBIFÎîRE VENTILATEUR EN FONTE.
La Fig. l de la Planche 0 est la vue extérieure de l'appareil du
côté du foyer.
La Fig. 2 est une coupe verticale suivant la ligne a b, de la
Fig. 3.
La Fig. 3 est une coupe horizontale faite suivant la ligne brisée
e fg h i II de la Fig. 2.
La Fig. 4 est une coupe verticale faite suivant la ligne c d de
la Fig. 3.
Mode de combustion. — Le foyer se compose d'une cloche en
fonte A, fondue en deux ou trois pièces selon les dimensions de
l'appareil. La hauteur de cette cloche est assez grande pour que la
flamme, en s'élevant d'abord verticalement, donne à l'air brûlé
qui descend par les tuyau x\B, C, l), H, F, et li', C, D\ E', F, un
tirage sulfisant pour produire l'appel d'air nécessaire <t une bonne
combustion.
G est la grille en fer sur laquelle se place le combustible et qui
sépare le cendrier du foyer.
// est la porte du cendrier, ordinairement ouverte quand la com-
bustion doit être active; elle est munie d'une porte à coulisse, la
seule qu'on ouvre quand on veut diminuer la consommation du
combustible.
/ est une première porte de foyer ; elle est destinée au nettoyage
de la grille et sert à l'introduction des copeaux et du papier qu'on
enflammé pour allumer le calorifère.
La deuxième porte K est destinée au chargement du foyer ; c'est
par cette ouverture qu'on introduit la masse du combustible, qui,
en se consumant lentement, doit dégager la chaleur nécessaire à un
chauffage d'air pendant 10 à 12 heures.
Dans les calorifères de différentes grandeurs, la distance entre
cette porte et la grille, ainsi que le diamètre du foyer, sont- cal-
culés pour produire des consommations déterminées de com-
bustible.
La partie inférieure de la cloche est garnie, jusqu'à une hauteur
qui dépasse un peu la porte de chargement, en briques très-ré-
fractaires, formant le foyer proprement dit, qui s'opposent à ce que
le contact et le rayonnement du combustible en ignition fassent
rougir les surfaces métalliques.
Circulation de la fumée. — Arrivés à la partie supérieure de la
cloche .\ , les produits de la combustion se divisent et parcourent
en descendant les deux séries de tuyaux It, C, D, E, F, et B', C,
D', E', F, placés de chaque côté du foyer, et dans lesquels la
répartition de l'air brûlé et sa vitesse sont parfaitement égales (i .
L'air brûlé se réunit à la partie inférieure du tambour L,
[Fig. 3 et 4), dans lequel il s'élève pour gagner le tuyau à fumée
qui le surmonte.
N [Fig. 3 et 4) est la porte du foyer d'appel i>our produire de
suite un bon tirage quand on allume le calorifère pour la première
fois, ou lorsqu'il s'est entièrement refroidi.
C'est aussi par cette porte qu'on opère le ramonage de la che-
minée, sans être obligé de démonter le tuyau à fumée.
Le nettoyage des tuyaux de circulation s'effectue avec la même
facilité : il suffit d'ôter les tampons t t t... qui ferment les extré-
mités des tuyaux pour que l'on puisse enlever la suie.
Echauffement de l'air. — L'air arrive de l'extérieur par deux
conduits M, M' (Fig. 2), qui le distribuent sous toute la longueur
des tuyaux F, F'; cet air, en s'élevant, rencontre des surfaces qui
se trouvent à des températures de plus en plus élevées, et s'échauffe
progressivement.
Les conduits M M' communiquent également avec les espaces
circulaires compris entre la cloche du foyer A , le tambour à fumée
et les enveloppes concentriques eu maçonnerie, qui augmentent
les surfaces de chauffe.
Tout l'air chaud se réunit à la partie supérieure du calorifère
dans un réservoir de chaleur 0,d'où il s'écoule par les tuyaux P P',
P" [Fig. 2 et 4), pour se rendre dans les lieux où il doit être utilisé.
Dans quelques appareils, pour diminuer les dimensions du calo-
rifère, on supprime la construction en briques qui entoure les cy-
lindres A L. Cette disposition est représentée Fig. 4.
En conservant au cylindre du foyer cette chemise en briques, on
(1) Ce fiiit, constalc dopuis longtemps, a il6 vérifié par M. Péclet, qui a
donné de ce plicnoniènc une explication aussi simple que claire dans sonTrailt
de hi cha'eur. (Vol. II. § ISS»)
171
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
172
se réserve la possibilité d'avoir à la partie supérieure une chambre
à air chaud, qui se trouve à une température plus élevée, et qu'on
peut employer au chauffage des pièces les plus éloignées.
Pour conserver à l'air chauffé l'état hygrométrique de l'air ex-
térieur, nous avons adapté au calorifère l'appareil suivant :
Entre les cloches A L est placé horizontalement un tuyau en cui-
vre Q, représenté Fig. 5. Dans toute sa longueur, la partie supé-
rieure de ce tuyau est percée de petits tmus. Une de ses extrémi-
tés sort du calorifère et reçoit dans une sorte de godet f une
bouteille renversée g remplie d'eau. L'eau se met de niveau dans
toute la longueur du tuyau, et produit une quantité de vapeur
toujours en rapport avec la température de l'air qui traverse le ca-
lorifère. Cette vapeur se mêle à l'air chaud et arrive avec lui aux
bouches de chaleur. Il suffit de remplir le matin la bouteille d'eau
pour toute la journée.
Les conduits M M', qui amènent l'air froid au calorifère, com-
muniquent avec un canal en briques , dont l'ouverture , située
au dehors, est protégée par une grille en fonte. Cette prise d'air
extérieure a l'avantage de ne fournir à l'appareil que de l'air pur
et jamais d'air mêlé de fumée ou de cendres, ce qui pourrait ré-
sulter d'une négligence ou d'une maladresse du chauffeur, si la
prise d'air était ouverte dans la cave où se trouve le calorifère.
A l'avantage de ne point rougir et de fournir toujours de l'air pur
convenablement chargé de vapeurs, cet appareil joint encore, sous
le rapport de sa construction, celui de la facilité du service et du
ramonage. Le foyer, placé à peu de distance de la façade du calo-
rifère, est à portée du chauffeur L'appareil est construit entière-
ment en fonte et présente une grande solidité ; les joints, montés a
brides et à boulons, obvient à tous les inconvénients produits par
1.1 dilatation incessante des coffres et des appareils en tôle, dont le
clouage laisse toujours échapper la fumée dans les réservoirs à air
chaud. La disposition des surfaces de chauffe de chaque côté du
foyer permet de donner à ces calorifères peu de hauteur et de les
placer dans des caves peu élevées.
La marche de l'air chaud s'y effectue en sens inverse de celle de
la fumée : cette disposition est la plus avantageuse pour réchauf-
fement de l'air; elle permet de diminuer les surfaces de chauffe et
d'utiliser le combustible aussi complètement que possible.
Le foyer est disposé de manière à brûler du coke et toutes les
houilles sèches, mais l'anthracite offre une supériorité incontes-
table sur les autres houilles ; avec ce combustible on peut ne char-
ger le foyer qu'une seule fois le matin pour toute la journée. Il en
résulte qu'un seul homme peut faire le service d'un grand nombre
de calorifères ; il suffit de disposer les foyers le soir, pour n'avoir
le matin qu'à allumer les feux.
Le Conseil royal de l'instruction publique a autorisé l'établisse-
ment de ces calorifères ventilateurs pour le chauffage de l'École
de Droit de Paris, des collèges d'Amiens et de Dijon, et de l'Aca-
démie de Dijon. Le Conseil général du département de Saône-et-
Loire les a adoptés à la suite d'un concours ouvert à cet effet, pour
le chauffage de la prison cellulaire de Châlons. Enfin plusieurs pa-
lais de justice en font usage, et beaucoup d'hôtels de Paris sont
également chauffés par ces appareils (l).
(1) Le prix de ces calorifères varie suivant l'espace à chauffer :
Le N" 1 vaut 800 francs.
Le K" 2 — liiOO
Le N" 3 — 2200
Ces calorifères con>ienneut tout particulièrement aux hôpitaux,
bureaux, tribunaux, collèges, théâtres, à tous les lieux enfin qui
exigent une température régulière et de l'air pur.
Lorsqu'il est nécessaire de porter uue partie de la chaleur à une
grande distance, nous remplaçons les briques garnis.sant linté-
rieur du foyer, par une chaudière destinée a établir un chauffage
par la circulation de l'eau chaude pour les parties éloignées. >ous
reviendrons plus tard sur cette question en traitant du chauffage
■par l'eau chaude.
RÉ>k DLVOJR.
DU BLAN(;HlS.SA(iK
Al>P/HElL DE LESSIVAGE PAR CIBCULATIO.N. — pLAK DVKÈ
BLANCHISSERIE.
Outre les établissements consacrés spécialement u l'industrie du
blanchissage du linge ou des étoffes, il existe un grand nombre
d'hôtels, de châteaux, de collèges, d'hôpitaux, de prisons, etc.,
dans lesquels larehitecte est souvent appelé a établir une blanchis-
serie pour le service même de la maison. Toutefois, maigre ces
nombreuses applications, les procédés de blanchissage et les sys-
tèmes de distribution générale d'une blanchisserie sont restes long-
temps dans l'enfance, et nous croyons utile de portera la connais-
sance du public les résultats de nos travaux et de notre expérience
sur cette mat'ère.
Le blanchissage, comme on sait, consiste en neuf opérations
principales :
1" Le triage, opération qui a |)our but de distribuer le liime à
blanchir en plusieurs tas suivant son degré de (inessc et de saleté;
2" Le trempage, ou première imbihition d'eau froide que Ion fait
ordinairement subir au linge dans des baquets;
3" L'egfangeage, ou lavage du linge, aussi dans l'eau froid»-, |>iiiii
enlever le plus gros de la malpropreté. Cette opération, faite pres-
que toujours d'une manière brutale au moyen de baltes en bois,
est souvent nuisible au linge;
4" Le coulage, qui consiste à faire passer a travers le linge une
dissolution alcaline de soude ou de potasse (les cendres de bois
servent aussi à cet usage). Cette dis.solution doit être presque a
l'état d'ébullition pour que son effet soit complet. C'est la ro|)era-
tion capitale dii blanchissage:
.5° Le mvonnage, dont le but est d'enlever complètement les ta-
ches qui auraient résisté aux opérations précédentes.
6» Le rinçage, complément du savonnage pour enlever l'eau de
savon.
"o L'égouttage, dont le nom indique assez l'objet; ■
8" Le séchage, qui doit compléter l'évaporation de l'eau contenue
dans le linge.
0" Enfin le pliage et le repassage, auquel se rattache le racoœ-
modage des accrocs faits au linge;
On conçoit, de prime alwrd, que ces travaux successifs doivent
Le N" 4 — JOOO
Le N» 5 — aoOO
Ces calorirères sont garantis pour 10 ans.
Le prix des conduits et des bouches de chaleur u'est pas compris dans le urif
ci-dessus.
VJ3
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
171
être distribués dans une l)Ianchisserie de telle façon que les pièces
affectées à leur usage se trouvent placées dans un ordre de succes-
sion analogue à celui qui existe entre les diverses opérations, ainsi
que nous venons de l'indiquer, de manière que le service de l'une
n'entrave pas le service de l'autre. Ce n'est pourtant pas ce que l'on
rencontre dans toutes les blanchisseries. Trop souvent, même dans
les constructions élevées spécialement pour cet usage, on voit les
différents services confondus ensemble ou trop écartés les uns des
autres; ainsi tous les services relatifs au lessivage se trouvent dans
un bâtiment, tandis que tous ceux relatifs au séchage sont placés
dans un autre; de là perte de temps pour les transports, et compli-
cation dans le travail. Nous nous sommes donc posé pour problème
à résoudre, de construire une blanchisserie disposée de telle façon
que tous les travaux pussent se faire simultanément, sans interrup-
tion, et de manière à employer le moins de bras et de temps pos-
sible.
Mais la solution du problème général d'une bonne blanchisserie
renferme celle d'uu problème particulier, celui du coulage des les-
sives.
Nous examinerons d'abord ce détail isolément, et nous repren-
drons ensuite l'étude de l'ensemble de la blanchisserie.
Xoitvel appareil de lessivage par circulation.
Le coulage des lessives, tel qu'il est fait ordinairement, présente
de graves inconvénients : dans ce système, on fait chauffer la les-
sive dans une chaudière en fonte, en tôle ou en cuivre, placée dans
un massif de maçonnerie au-dessus d'un foyer à bois ou à charbon ;.
un robinet adapté à la partie inférieure de la chaudière sert à faire
couler la lessive, arrivée à l'état d'ébullition, dans des seaux que
l'on vide ensuite dans le cuvier où se trouve le linge déjà trempé.
Ce cuvier, tout à fait indépendant de la chaudière, placé à un ni-
veau supérieur, est recouvert d'une toile grossière ou charrier sur
laquelle on place de la cendre de bois.
L'eau chaude, versée sur la cendre, s'empare peu à peu des sels
solubles que celle-ci renferme, et forme une dissolution alcaline
qu'on nomme lessive, et qui n'agit, comme moyen de blanchiment,
que par le carbonate de potasse qu'elle contient. On forme souvent
et avec avantage la lessive, en mettant avec l'eau dans la chaudière
une quantité déterminée de sel de soude ou de potasse pour donner
à l'eau le même degré alcalimétrique. La lessive iiltre à travers
la toile et tombe sur le linge , qu'elle traverse avant d'arriver
au fond du cuvier. Un robinet placé au bas du cuvier lui donne
issue sur un conduit en bois ou en tôle qui la verse dans la chau-
dière, où elle entre de nouveau en ébuUition pour être reversée en-
suite dans le cuvier. Quelquefois la chaudière n'est pas même
munie d'un robinet, et il faut puiser la lessive à la main.
Ce système grossier présente les inconvénients suivants :
La vapeur qui se dégage de la lessive pendant le transvasement
emplit la pièce destinée à ce service, obscurcit l'air, se condense
sur les plafonds et sur les murs, qu'elle détériore, et occasionne
une perte de chaleur, et par suite de combustible, qui devient con-
sidérable quand on agit sur une grande échelle.
Le transport et le transvasement rendent le service pénible, oc-
cupent des bras, sont l'occasion d'un écoulement d'eau qui salit le
sol ; nouvelle perte de chaleur.
Ensuite, quelque soin qu'apportent à leur besogne les hommes
chargés du transvasement, la lessive arrive au cuvier à des tempé-
ratures inégales, et trop souvent ils sont victimes d'accidents con-
tre lesquels la prudence ne les défend pas toujours.
Enfin un coulage fait par ce procédé n'exige guère moins de
dix à douze heures de travail.
Dans l'appareil que nous allons décrire, ces inconvénients dis-
paraissent, comme nous le verrons plus loin.
La PL 10 représente deux de ces appareils placés l'un près de
l'autre , ainsi qu'ils doivent l'être dans la buanderie.
La Fig. 1 donne l'élévation de l'un et une coupe verticale
de l'autre, faite suivant la ligne brisée j k l m de la Fig. 2 . de
manière à montrer le mode de circulation de la lessive. La Fig. 2
représente le plan de ces mêmes appareils, à des hauteurs diffé-
rentes.
A est une chaudière cylindrique en cuivre dont le cou-
vercle est maintenu exactement fermé au moyen d'une vis de
pression ; sur ce couvercle est disposée une soupape à flotteur,
qui ne s'ouvre que quand le niveau du liquide est descendu à
une certaine limite.
B B' [Fig. l) , cuviers dont les douves en bois de chêne épais
sont maintenues par des cercles de fer. A une petite distance du
fond de chaque cuvier se trouve une grille en bois e e {Fig. 1 et 2),
supportée par des morceaux de bois découpés en arcade, afin
de ménager à la lessive un espace libre où elle puisse se réunir.
C'est sur cette grille qu'on entasse le linge sale après le trempage.
Un couvercle en cuivre C C est attaché à une corde qui passe
sur des poulies fixées au plafond , et vient s'enrouler sur l'arbre
d'un treuil DD' , qui sert à élever ou à descendre le cou-
\ercle.
a a et 6 6 ( Fig. i ) sont les tuyaux de circulation de la les-
sive ; le premier traverse le fond du cuvier, s'élève au centre
jusqu'à la partie supérieure, et se termine par un champignon c,
qui projette le liquide chaud dans toutes les directions. Le. second
tuyau ramène la lessive dans la chaudière. Dans ce tuyau on
a placé une petite soupape d ( Fig. l ), qui ne s'ouvre que quand
une assez grande quantité de liquide s'est réunie au fond du
cuvier. EE' [Fig. 1) est un espace vide ménagé dans la maçon-
nerie pour la pose des tuyaux et leurs réparations.
F est le fourneau en briques. La construction de son foyer
et des carneaux est appropriée à la nature du combustible qu'on
doit brûler sur la grille. Les produits de la combustion circu-
lent deux fois autour de la chaudière ,' et se rendent dans la
cheminée T.
Voici quelle est la marche d'opération dans l'un des appareils.
On met le sel de soude ou de potasse au fond du cuvier, et on y
verse de l'eau jusqu'à ce que la chaudière soit remplie, et que
le niveau du liquide soit arrivé à la hauteur de la grille sup-
portant le linge. On place le linge d'une manière régulière sur
la grille en bois ee, sans trop le tasser, et on abaisse le cou-
vercle du cuvier. On fait du feu dans le foyer et on porte le
liquide à l'ébullilion. La pression de la vapeur fait monter la
lessive dans le tuyau aa et la projette contre le champignon r .
qui la répartit uniformément sur toute la surface du linge. La
lessive traverse toute la masse et se réunit à la partie infé-
rieure du cuvier ; le niveau du liquide s'abaisse dans la chau-
dière À et ouvre la soupape * , en même temps que la pression
du liquide sur le fond ouvre la soupape d ; alors la lessive
revient à la chaudière pour se chauffer de nouveau et retourner
dans le cuvier. Cette circulation de la lessive bouillante &'ef-
175
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
no
fectue d'elle-même , et produit un lessivage prompt et parfi.it
de toute la masse du linge (l).
Dans ce système , on le voit, les inconvénients que nous avons
signalés n'existent plus. Une fois le linge placé dans le cuvier,
on ferme le couvercle. Il n'y a plus qu'à faire du feu; la lessive
se verse d'elle-même sur le linge aussitôt quelle a acquis la
température nécessaire, et retourne ensuite à la chaudière. Cette
circulation, ainsi rendue intermittente, empêche l'écoulement de
s'établir par une seule voie , ainsi qu'il arrive presque toujours
avec les appareils à jet continu. La personne qui était occupée
au coulage devient inutile , puisqu'il suffit d'alimenter le foyer
de temps en temps. Ce coulage, fait à vases clos qui conservent
toute la chaleur du liquide , n'exige que de quatre à six heures
pour un cuvier de 2 mètres de diamètre.
Il résulte de l'emploi de ce système de l'économie sur la main-
d'œuvre, sur le combustible , et , comme le linge , mieux chauffé,
s'y nettoie beaucoup plus facilement, il en résulte encore de
l'économie sur le savon employé et sur le temps des laveu-
ses (2).
Après des expériences comparatives avec d'autres systèmes ,
il a été adopté par les hôpitaux civils et militaires de Paris;
l'emploi journalier auquel il a été soumis a constaté qu'il remplit
toutes les conditions désirables.
Voici sur cet appareil l'opinion de M. Payen, rapporteur du
jury central de l'exposition de 1839 :
« L'ingénieux appareil de lessivage de M. René Duvoir, ré-
cemment amélioré , facilite le chargement et le déchargement al-
ternatifs de deux cuviers servis par une seule chaudière.
« Une disposition convenable opère , avec réchauffement gra-
duel des lessives , des aspersions et des circulations intermit-
tentes qui excluent les inconvénients des fausses voies de filtrage.
« Le. système de lessivage de M. Duvoir est employé avec
succès dans plusieurs établissements publics et blanchisseries
particulières. »
Le jury de l'exposition nous a décerné la médaille d'argent.
La Société d'encouragement , sur le rapport favorable fait par
M. Herpin au nom du comité des arts économiques , nous a
aussi décerné , en 1837 , la première médaille accordée aux ap-
pareils de blanchissage.
Ces appareils fonctionnent dans les hôpitaux Saint-Louis et
(1) Le prix de i;es appareils est fixé suivant la capacité du cuvier. Dans le
prix sont comprises toutes les fournitures et constructions, l'appareil étant
livré prêt à Tonctionner, sauf le terrassement et la maçonnerie pour les grandes
dimensions.
Cuvier de 1°" « de diamètre. 660 fr.
1 20 — 700
1 30 — 000
1 45 — 1100
1 60 — 1200
1 80 — 1500
2 )i — 2000
2 30 — 2500
2 50 — 3000
3 » — 4000.
(2) A l'hospice delà Salpêtrière, le coulage de 1500 draps coûte :
Sel de soude, AO kilog. , à 50 c 20 fr.
2 hectolitres de charbon, à 3 fr. 30 c. . 0 60
Total 26 60
de la Salpétrière, à Paris; dans les hôpitaux militaires do
Charonne, du Gros-Caillou, de Rayonne , de la Ro<*lielle, etc. ;
dans ceux de Vernon , de Gisors , de Rcauvais , etc.; dans les
collèges royaux de Versailles, de Moulins, de Toulouse; dans
les maisons centrales de Poissy , Gaillon , Clermont , Fonte-
vrault. Embrun, Mont-Saint-Michel , Nîmes, Montpellier, etc.;
chez plusieurs grands blanchisseurs : M. Dulud a Keuilly, madame
Lefèvre à Versailles , etc. ; pour le blanchiment du lin , chez
MM. Feray et comp. , à Essonne , et à la filature de M. Des-
portes-Vincent , à Amiens. Il en a été également construit pour
la blanchisserie générale de Neufchâtel ( Suisse], à Mexico , etc. ,
ainsi que dans beaucoup de chAteaux , entre autres chez M. le
vicomte d' A cy , à Villers-aux-Érables (cet appareil est le premier
que nous ayons construit, en 1835), cher. M. le vicomte de
Chezelle, M. le manjuis de Nieul , M. le baron Bœderer, M. le
baron de Pontalba, etc.
Revenons maintenant aux dispositions générales d'une blanchis-
serie entière.
Jilanchifftrie.
La PI. 1 1 représente la coupe longitudinale et le plan de ce que
nous appellerons notre type.
A est la salle dans laquelle s'effectue le triage du linge sale.
B , la buanderie, dans laquelle on opère le blanchissage du linge
proprement dit, et tégouttage.
C est la pièce doit le linge est enlevé pour être distribué dans
les séchoirs aux étages supérieurs.
D, séchoir à air chaud pour les temps humides.
K, séchoir à air libre pour les temps socs.
F, salle où s'opèrent le repassage et le raccommodage.
Dans la buanderie B se trouvent réunies les différentes opéra-
tions du lessivage. Le premier travail, le trempage, s'opère dans le
bassin on pierre d; et comme le trempage. Vettangtuge et le rinç-age
ne s'effectuent jamais simultanément, il y a économie a se servir
du même bassin pour ces trois opérations.
bb, cuviers à lessive dans lesquels ou dispose le linge pour le
lessivage, comme nous l'avons vu dans la planche pn-cédonto.
It, treuils servant à manœuvrer les couvercles des cuviers.
Dans le dessin, l'un des cuviers est supposé fermé, et l'autre
est découvert, afin de montrer la répartition de la lessive sur le
linge.
flfl. bouilleurs dans lesquels on chauffe la lessive. On voit dans
l'élévation la coupe d'un des fourneaux qui enveloppent le bouil-
leur, avec un foyer et des carneaux à fumée.
Les produits de la combustion passent sous le sol dans un con-
duit en briques, qui est indiqué en lignes ponctuées sur le dessin, et
se rendent dans la cheminée h, qui monte dans l'épaisseur du
mur.
Des cuviers le linge passe dans les bassins à eau chaude e c,
dans lesquels it subit l'opération du savonnage, puis de là dans
le bassin d, où il est rincé, pour être déposés ensuite sur les che-
valets e e e e, où il s'égoutte.
L'eau chaude servant au savonnage provient des chaudières, qui
sont munies à cet effet d'un robinet r. [PI. lO.)
Le linge blanchi et égoutté arrive dans la pièce C. Pour les blan-
chisseries importantes, il est bon de placer dans cette pièce un sé-
choir à force centrifuge, pour priver le linge d'une partie de l'eau
qu'il contient avant de le porter aux séchoirs à air.
17-
RKVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
178
Dans les petites blanchisseries, on porte le linge aux séelioirs
après l'égonttage.
Le linge est placé dans une caisse en bois p qu'on peut élever au
moyen d'un treuil q, sur lequel s'enroule une corde qui est attachée
à la caisse, et qui passe sur des poulies de renvoi fixées à la partie
supérieure du bâtiment.
Le linge est élevé, soit au deuxième étage, pour y être étendu
dîins le séchoir à air libre E quand le temps est sec et chaud, soit
au premier étage, pour y être séché par l'air chaud, dans le séchoir
D, par les temps froids et humides.
L'établissement de deux séchoirs présente des avantages sous le
rapport de l'économie de combustible, puisque le séchage à l'air
libre, quand il peut s'effectuer, ne coûte rien ; mais il ne peut avoir
lieu constamment ni surtout régulièrement. Dans tous les cas,
dans un séchoir à air libre, les murs doivent être percés de très-
larges croisées, fermées en partie par des jalousies mobiles. Les
traverses en bois qui servent à l'étendage doivent être assez écar-
tées les unes des autres, et placées dans le sens des courants d'air
qui s'établissent par les croisées opposées, afin de présenter plus de
surface à l'air.
Dans un séchoir à air chaud, le séchage peut toujours s'effectuer
en peu de temps et avec régularité. Aussi dans toutes les grandes
blanchisseries de toiles, calicots, etc. , et dans les fabriques de draps,
opère-t-on le séchage dans des séchoirs à airchaud, et renonce-t-on
complètement au séchage à l'air libre. Le séchoir D est plus petit
que le séchoir E, et les traverses en bois qui supportent le linge doi-
vent être plus rapprochées, afin qu'il y ait moins d'intervalle entre
les pièces étendues. Il faut toutefois que cet intervalle soit assez
grand pour que les pièces de linge ne puissent adhérer l'une avec
l'autre.
L'air chaud s'obtient au moyen d'un calorifère /" situé au rez-de-
chaussée, h est le tuyau à fumée, qui s'élève dans la cheminée jus-
qu'au-dessus du toit et se termine par une lanterne x, destinée à
assurer à l'appareil un bon tirage indépendant de la pluie et des
coups de vent. L'air chaud se rend dans le séchoir par un tuyau g
qui le conduit dans un récipient en briques i i, construit au milieu
du séchoir et percé latéralement de bouches de chaleur fcfe, fermées
par des registres à coulisses qui permettent d'obtenir par chacune
d'elles une égale vitesse de l'air chaud.
/ 1 sont des cheminées d'évàporation percées <à leur partie infé-
rieure d'ouvertures m m par lesquelles entre l'air humide du séchoir
pour s'élever jusqu'au-dessus du toit. Ces cheminées sont toutes
recouvertes de chapeaux en tôle o o qui les préservent de la
pluie.
Du séchoir le linge passe dans la pièce F, destinée au raccommo-
dage, an pliage et au repassage.
Dans la blanchisserie que nous venons de décrire nous avons
cherché à placer chaque appareil dans les conditions qui nous ont
paru les plus favorables; nous allons indiquer les avantages des
dispositions que nous avons adoptées, afin que dans l'étude d'un
établissement de même nature, on puisse tendre à les obtenir autant
que l'espace et la forme de l'emplacement le permettront.
La buanderie proprement dite, c'est-à-dire la pièce dans la-
quelle s'effectue le blanchissage, est au rez-de-chaussée. Le sol
est dallé et incliné de manière à favoriser l'écoulement des eaux
qui se répandent à terre. Les foyers des appareils de lessivage et
le foyer des calorifères sont groupés à côté l'un de l'autre, ce qui
rend le service facile pour un même chauffeur, et permet de n'a-
voir qu'une seule cheminée pour les deux appareils de chauffage.
Dans cette pièce, les bassins sont placés de manière à ce que les
laveuses soient bien éclairées. C'est pour cela que les murs sont
percés de très-grandes ouvertures fermées par des châssis vitrés.
On conçoit qu'il serait facile et économique de distribuer l'eau
dans la buanderie de façon à épargner son transport à bras
d'homme.
Le séchoir à air libre est placé à l'étage le plus élevé, afin qu'il
soit mieux aéré.
Le séchoir à air chaud est au premier et se trouve dans une po-
sition favorable pour ne transmettre que peu de chaleur par le
plancher et par le plafond. Les murs latéraux doivent être le plus
épais possible ou à doubles parois, et être percés de très-petites ou-
vertures fermées par des croisées doubles, afin de diminuer la perte
de chai eur.
Quand le séchoir à air chaud est à l'étage supérieur, dans un
grenier par exemple, il faut le couvrir d'un double plafond. Les
autres conditions sont de lui donner peu de hauteur et seulement
les dimensions suffisantes pour contenir le linge à sécher.
Il vaut mieux, quand cela est possible, que le séchage s'effec-
tue dans le séchoir en deux opérations consécutives, qu'en une
seule dans un séchoir de plus grandes dimensions.
L'établissement de séchoirs et d'étuvesse présente très-fréquem-
ment dans la construction des usines et des manufactures, et les
moyens de séchage varient avec la nature dès produits à sécher.
Aussi reviendrons-nous sur ce sujet pour donner quelques détails
sur les dispositions de séchoirs et d'appareils que nous avons em-
ployés pour différents modes de séchage et dont l'application nous
a donné de bons résultats,
RENÉ DUVOIR.
SAXiOMT DE 1844.
Pourquoi ta presse parle si peu de l'exposition des projets
d'architecture.
C'est un des grands regrets de nos confrères de province que de
ne pas assister à l'exposition annuelle des dessins d'architecture
au Louvre. La presse quotidienne, qui consacre régulièrement un
certain nombre de feuilletons à décrire les principales oeuvres de
chaque Salon, se renferme exclusivement dans la peinture et la
sculpture; c'est comme si l'architecture n'existait pas pour nos cri-
T. V. 12
179
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
180
tiques d'art, et leurs écrits n'apprennent aux architectes des dé-
partements absolument rien sur le sujet qui les intéresse.
A la vérité, le silence de la presse quotidienne s'explique assez
facilement par son ignorance d'un art qui s'appuie à la fois sur
les sciences exactes et sur tous les arts du dessin. Il est très-facile
à un critique quelque peu familier avec les formes littéraires, de
promener ses lecteurs au milieu des tableaux et des statues du Sa-
lon, en s'exclamant sur la couleur de celui-ci, les formes de celui-
là, exclamations entremêlées d'anecdotes plus ou m;)ins amusantes,
d'observations quelquefois spirituelles, mais qui n'ont souvent que
peu ou point de rapport avec les travaux exposés. Les critiques qui
se contentent ainsi de nous faire connaître leurs impressions per-
sonnelles comme si elles devaient être nécessairement celles de tout
le monde, ne ressemblent pas mal à ce roi de Pologne qui, lorscju'il
avait bu, voulait que son peuple fût ivre. Ces Messieurs, pour
être parfois amusants, n'en sont pas moins cruels pour les expo-
sants, et ne satisfont qu'à moitié la portion sérieuse du public ;
mais ce n'est pas non plus à celle-là qu'ils s'adressent ; le plus sou-
vent ils ne veulent qu'amuser leurs lecteurs, donner aux abonnés
du journal un moment d'agréable distraction, et assez fràiuemment
ils y réussissent.
L'analyse des projets d'architecture n'offre pas les mêmes faci-
lités que celle de la peinture ; devant ces ligues rigoureuses tracées
à la règle et au compas, développées conformément à de certaines
règlesde proportion, le spirituel critique se trouve embarrassé; son
allure, naguère si libre et si plaisante devant les tableaux et les sta-
tues, devient subitement embarrassée; il ne comprend pas, ou, s'il
comprend quelque chose, c'est la nécessité de faire des études spé-
ciales et sérieuses pour avoir le droit de juger des œuvres qui
relèvent de notre bel art. Or, les hommes qui ont consacré de lon-
gues années à l'étude des sciences et des monuments, ont acquis
souvent un sérieux et une gravité d'esprit qui se concilient dif-
ficilement avec le laisser-aller d'idées qui caractérise d'ordinaire
la littérature des feuilletons. Le savant ne veut parler que pour
instruire, et se tait de préférence à risquer une pensée incomplète.
Le feuilletoniste ne craint qu'une chose, c'est d'ennuyer ; aussi
jamais il ne creuse une idée : il craindrait trop de fatiguer son pu-
blic, qui cesserait de s'abonner au journal. 11 respecte peu l'intelli-
gence de l'abonné, il la suppose toujours au plus bas, et dès lors il
s'efforce de captiver son monde par des récits piquants, des anec-
dotes bizarres; il image et brillante son langage, et joue des feux
d'artifice devant l'imagination du lecteur, qui n'a pas besoin d'a-
voir pris ses degrés à l'Université pour s'en amuser. On le voit,
ces conditions ne sont pas très-favorables à la prise en considéra-
tion des travaux d'architecture; car ici il ne suffit plus d'une ai-
mable gaieté servie par une plume facile et animée.
Nous avons eu la curiosité de parcourir à peu près tous les prin-
cipaux comptes-rendus de Salons qu'on a faits depuis qu'il existe
des expositions publiques de beaux-arts à Paris; et à partir de Di-
derot jusqu'aux critiques de nos jours, nous n'en avons pas ren-
contré deux qui aient parlé des projets d'architecture avec quelque
étendue. Les Salons de Diderot, qui ont servi de modèle à tant de
critiques de ce siècle-ci, ne font mention qu'une seule fois de l'ex-
position de l'architecture, et alors même, au lieu de nous dire quels
étaient les projets exposés, leurs défauts et leurs qualités, l'auteur
se lance dans une dissertation sur l'Église de saint Pierre de Rome ;
il paraît disposé à nous entretenir de tous les monuments qu'on
voudra, pourvu que ce ne soit pas de ceux de l'exposition. Les
imitateurs de Diderot ont généralement exagéré encore la réserve
de leur modèle, au point de ne plus parler du tout d'architecture;
peut-être ont-ils eu raison.
Mais comme les architectes de province et les étrangers savent
cependant qu'il y a au Salon de cha(iue année une exposition d'ar-
chitecture, ils sont assez naturellement portes à la supposer en rap-
port avec la réputation et le talent reconnu des architectes de Paris,
dont les artistes étrangers viennent si souvent admirer les tra-
vaux. Il n'en est rien cependant; notre exposition d'architecture
est vraiment misérable; sur 2423 sujets exposes au Salon de cette
année, il n'y a que 21 sujets d'architecture! Et pourtant combien
d'architectes de talent et déjeunes gens pleins d'imagination et de
sève, qui ne demandent qu'à donner des preuves de leur habileté
et de leur savoir !
Comment on pourrait donner vne grande importance aux txpoti-
tions annuelles d architecture et les rendre tiiê-pmfitcMe*.
Il est vraiment bien fâcheux qu'il ne se trouve pei-sonne auprès
de Sa Majesté, qui aime avec tant de passion le noble art de l'ar-
chitecture, pour lui rappeler combien il serait utile d'encourager
les architectes, par des médailles et des récompenses honorifiques,
à exposer leurs idées sur les travaux d'embellissement dont nos
\illes sont susceptibles, sur les améliorations a introduire dans les
dispositions des principaux monuments publics, théâtres, palais de
justice, prisons, collèges, etc., qui sont répétés dans toutes les prin-
cipales villes de France, et qui coûtent au pays des sommes si
énormes. Si notre voix pouvait parvenir jusqu'aux oreilles du roi.
nous lui dirions :
« Sire, jamais sous aucun de ses rois, même pendant le règne de
Louis XIV, la France n'a exécuté d'aussi grands et d'aussi impor-
tants travaux de construction que pendant le règne de Votre Ma-
jesté. Depuis 1830, Paris s'est presque complètement Iranforme;
il y a quatorze années, elle était la ville des monuments provisoi-
res et des monuments en construction ; des édifices importants _\
attendaient depuis des siècles qu'un roi, ami des arts et de l'ordre,
voulût leur achèvement. Le Panthéon, la Madeleine, l'église Saint-
Vincent de Paul, l'église de Saint-Denis, l'église Saiut-Eustache,
la Sainte-Chapelle, la place de la Bastille, la Colonne Vendùme,
l'Arc-de-Triomphe de l'Étoile, l'Hùtel-de-Ville, la Chambre des
Députés, le Palais du quai d'Orsay, le Palais des Beaux-Arts, le
Palais-de-Justice, la Place du Carrousel, les Champs-Elysées, le
Muséum d'Histoire Naturelle , l'Institution royale des Sourds-
Muets, etc., etc., etc., etc., ont été achevés ou entièrement con-
struits dans ces dernières années. Les municipalités des différentes
villes du royaume semblent rivaliser de zèle; les rues s'élargissenl
et se rectifient, des eaux limpides, chaque année de plus en plus
abondantes, lavent nos ruisseaux et entraînent dans les ^outs
publics les boues et les détritus que n'enlèvent pas les balayeurs...
H Et cependant ces merveilleuses constructions, ces progrès évi-
dents, ne sont encore que peu de chose auprès de ce qu'on pourrait
réaliser dans un prochain avenir. Que Votre Majesté daigne faire
pour les architectes ce qu'elle fait chaque année pour les peintres
et les sculpteurs; qu'elle fasse annoncer que désormais il y aura
au Louvre une exposition annuelle et spéciale d'architecture, dont
les sujets seront distribués en trois catégories correspondant aux
trois faces sous lesquelles on peut envisager l'architecture, c'est-
à-dire, 1" dan» tes rapports atec l'art ; 2° dans ses rapports avec la
181
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
182
ncience; et 3° dans ses rapports avec les besoins de la vie; que ces
trois catégories seront donc ainsi composées :
a 1" Des sujets conçus en vue des progrès de l'art proprement
dit, tels que les dessins des vieux monuments, les études compa-
ratives des ordres ou des divers styles d'architecture, etc. ;
« 2° Des études de construction pure, de machines employées
dans l'exécution des travaux, etc. ;
« 3° Des projets d'établissements publics, de maisons particu-
lières, de distribution d'eau, d'égouts, en un mot de tout ce qui
intéresse la beauté, la salubrité et la prospérité des villes. Que les
ingénieurs aussi soient invités à envoyer leurs projets à cette expo-
sition, et qu'auprès des études relatives aux villes ou centres où se
groupent les populations , on puisse examiner les études des voies
de communication, routes, canaux, chemins de fer, ponts, etc.,
destinées à faciliter et à activer les rapports des villes entre elles.
« Que Votre Majesté fasse connaître que chacune de ces catégories
deviendra l'objet de récompenses spéciales en rapport avec l'im-
portance des travaux exposés, que l'architecte et l'ingénieur pour-
ront espérer de se voir récompensés en exposant des travaux vrai-
ment importants et de nature à éclairer les administrations sur des
points d'intérêt public, d'art ou de science, et il n'est pas douteux
que l'annonce d'une telle exposition ne devienne à l'instant un sti-
mulant des plus actifs, d'où résulterait l'éclosion d'une série d'i-
dées précieuses pour l'Etat et pour les particuliers. »
Une telle exposition formerait une transition et un lien entre
l'exposition de peinture et de sculpture, et l'exposition des pro-
duits de l'industrie ; l'exposition de l'architecture serait comme
le centre et le foyer des deux autres : car, enfin, que sont la pein-
ture et la sculpture, sinon les deux instruments au moyen des-
(|uels l'architecture complète les décorations qu'elle imagine? Et
combien d'industries y a-t-il qui soient absolument étrangères à
l'art de bâtir et de décorer les édifices et les maisons qui composent
nos villes, à la construction des ponts, des routes et des canaux, à
l'ameublement et au chauffage de nos habitations, à l'éclairage de
nos rues, etc., etc.?
C'est par Vnrchiteclure que Vart entre en relation avec la science,
c'est par elle que le sentiment du beau pénètre dans les travaux in-
dustriels, enfin c'est surtout l'architecture qui développe le luxe,
au sein duquel Vtifilc et le beau communient ensemble.
Nous engageons ceux de nos lecteurs qui en auraient le loisii',
a bien méditer la corrélation de ces trois termes : Peinture-sculp-
ture, Architecture, Industrie; nous pensons que là pourrait fort
bien se rencontrer la véritable solution du problème tant débattu
de la construction d'un palais définitif pour les expositions pu-
bliques.
Sujets archéologiques : MM. Clerget, Delbrouck et Denuelle.
Sur les 21 sujets d'architecture exposés, il y a 10 études archéo-
logiques et 1 1 études de projets divers.
Parmi les dessins archéologiques, nous avons remarqué la res-
tauration du Temple de Diane Leucophri/née , à Magnésie (Asie-
Mineure), par M. Clkroet, ancien grand prix de Rome. Nos lec-
teurs se rappellent peut-être que les frises sculptées de ce beau
monument ionique furent apportées récemment à Paris par les
soins d'une commission nommée par le gouvernement et dirigée
par M. Ch. Texicr, l'auteur de plusieurs articles importants de
cette Revue. On assure même que M. Fontaine prépare au Louvre
une salle pour leur exposition permanente; en attendant, ces vé-
nérables vestiges d'un autre âge sont abrités sous un auvent en
planches qui les dérobe un peu à l'influence des intempéries at-
mosphériques, et tout à fait à l'ardeur studieuse des artistes.
Les dessins de M. Clerget sont au nombre de sept ; ils sont remar-
quablement bien exécutés et doivent être très-exacts, car M. Clerget
était lui-même attaché en qualité de dessinateur à la commission
chargée de retirer d'un terrain marécageux et de rapporteren France
les curieux fragments que nous possédons. Nous ignorons si ces des-
sins sont déjà la propriété du gouvernement, ou s'ils appartiennent
à M. Clerget ; mais, dans ce dernier cas, nous pensons que le gouver-
nement ferait bien de les acquérir et de les suspendre dans la salle
même où seront exposés les fragments de la frise. Ce serait ajouter
un nouvel intérêt à ces débris que d'en faire bien comprendre l'état
primitif au moyen de la restauration de M. Clerget; ce serait aussi
venir en aide à un habile artiste, victime des injustices de la for-
tune. Nous ne connaissons de M. Clerget que ses œuvres, mais
cette connaissance est plus que suffisante pour motiver le vœu que
nous formons. Ajoutons, du reste, que cette manière de faire con-
naître l'origine et le but primitif des fragments importants de nos
musées au moyen de dessins et de légendes explicatives, mériterait
d'être généralement adoptée. Ces vestiges qui paraissent aujour-
d'hui sans but, dont le lien avec le passé n'est pas évident, pren-
draient alors de la vie et révéleraient du vieux monde mille ex-
pressions qui nous échappent aujourd'hui ; l'imagination reporte-
rait chacun de ces débris à sa place primitive, si bien qu'une
promenade dans les musées donnerait une idée plus réelle des
sociétés passées que six mois de lecture ; le public s'instruirait en
s'amusant, et le goût des arts, qui exprime le raffinement du sens
public, rencontrerait plus d'occasions pour se développer.
L'art antique n'est pas à la mode aujourd'hui ; après avoir régné
pendant trois siècles en maitre absolu et exclusif, il perd à cette
heure son crédit et tombe dans une disgrâce imméritée. Le tra\ail
de M. Clerget est le seul qui soit venu témoigner puissamment du
merveilleux goût du monde païen.
M. Delbrouck a exposé un dessin géométral de la Porte d'Ar-
roux, qui donnait entrée à la ville d'Augustodunum (Autun ; mais
cette étude est incomplète, les détails manquent, et le rendu même
pourrait être plus heureux. Toutefois si M. Delbrouck est un jeune
homme qui s'occupe, comme nous le pensons, à compléter ses étu-
des d'art, nous le félicitons de savoir résister à l'entraînement de
la mode : les études de l'art antique seront toujours indispensa-
bles à l'architecte, et bien que nous soyons d'avis que pendant
longtemps on l'a trop exclusivement cultivé, cependant une reac-
tion exagérée aurait des conséquences déplorables; et on ne tarde-
i-ait pas à voir tout sacrifier à la déesse de la fantaisie. Il y a dans
l'art antique bien entendu un bon sens si imperturbable, un goi'it
tellement sûr, une prudence et une expérience si consommées ,
qu'il est impossible à l'artiste qui s'en est occupé sérieusement de
ne pas apporter ensuite dans ses compositions quelques-unes des
qualités que nous signalons, et qu'il importe surtout de cultiver
chez les architectes, car les essais de nos confrères intéressent lar-
gement la fortune publique et privée.
M. Dkniielle a exposé une suite d'études de l'art de la dicora-
tion en Italie à différentes époques. Ceci est un travail sérieux qui
a demandé des efforts longs et persévérants. C'est surtout de la pein-
ture et de la mosaïque que M. Denuelle parait s'être occupe, du
moins ce sont là les sujets des études qu'il a exposées. Pour bien
183
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
i6k
pomprendie les principes de l'art de décorer les édifices, M. De-
niielie a pensé avec raison qu'il était indispensable de considérer
celui-ci comme le complément de l'architecture, d'y voir le subor-
donné et l'instrument d'un autre art. Partant de là, il se mit sous
la direction de l'habile architecte du palais des Beaux-Arts, et après
quelques années d'étude dans l'atelier de M. Duban, il partit pour
l'Italie; son professeur l'avait engagé à y aller étudier l'art de la
décoration à ses différentes époques.
M. Denuelle nous montre au commencement de sa série d'e-
tudes des décorations intérieures d'Herculanum et de Pompeï:
à la bonne heure! voilà un bon point de départ; les artistes de la
Renaissance se sont inspirés de l'antique, souvent ils l'ont inter-
prété, quelquefois ils l'ont même copié. Pompei et Herculanum
fournissent d'ailleurs des modèles de décoration dans lesquels l'or-
donnance des parties et l'entente des couleurs méritent toute notre
admiration. Après les peintures antiques est venu le tour des mo-
saïques; la Sicile, Florence, Venise, ont offert des champs féconds
aux travaux de notre moissonneur, qui nous montre la mosaïque
qui décore le cul de four de l'abside de San-Miniato, à Florence
(XII^ siècle), et le plafond de la sacristie de l'église de Saint-Mare,
à Venise (fin du XV' siècle).
Le grand art des mosaïstes revivra-t-il encore un jour? Quelques
personnes en doutent, et cependant, pour la décoration de nos
grands édifices publics, on ne saurait trouver de peinture aussi mo-
numentale ni formant au même degré partie intégrante de l'édifice ;
la mosaïque est essentiellement de \ei peinture construite, elle forme
une transition entre la peinture et l'architecture. Les peintures sur
toile, encadrées et suspendues aux murs de nos édifices, nuisent
n l'unité de l'architecture ; la peinture à fresque est déjà un im-
mense progrès pour la décoration intérieure, mais celle-ci même
n'a pas la solidité et le caractère pour ainsi dire architectonique
de la mosaïque, qui est une peinture en pierre et qui résiste à tontes
les intempéries. Espérons que nos enfants, moins pauvres que
nous, feront revivre glorieusement un art si bien fait pour s'allier
à l'architecture.
Après avoir rendu hommage à l'École des Mosaïstes de Palerme,
de Montréale, de Saint-Marc, après avoir étudié les Écoles con-
temporaines fondées par les Cimabue et les Giotto, régénérateurs
de la peinture en Italie, et salué les œuvres de leurs élèves, les
Gaddi, les Simone Memmi, etc., notre jeune voyageur arrive à la
Renaissance. La Renaissance, c'est la fleur épanouie dans toute
sa fraîcheur, et qui répand partout ses arômes enivrants ; c'est Bru-
neleschi, c'est le Bramante; c'est la vigueur de Michel-Ange, la
pureté de Raphaël, la fougue et la grâce de Benvenuto. A ceux-ci
succèdent Jules Romain , Vasari , Zuccari, etc., et déjà nous nous
trouvons sur la pente de la décadence. Chaque époque a eu ses
grands peintres décorateurs, et M. Denuelle a voulu suivre pas à
pas les diverses expressions de son art depuis les temps antiques
jusqu'au XVI« siècle. On le voit, c'est un résumé de cette étude
qu'il a exposé, en choisiss;int des sujets dans chacune des grandes
époques de l'art de la décoration : les peintures de Pompeï et
d'Herculanum y reproduisent le style de la peinture antique ; — la
coupe d'une des travées de l'église de Saint-François-d'Assise et le
détail d'une des voûtes de la chapelle supérieure donnent des
exemples de peinture de la fin du XIII'= et du commencement du
XIV« siècle; le cul de four de San-Miniato montre quel était le
caractère des mosaïques du XIII' siècle, et la sacristie de l'église de
Saint-Marc offre un exemple intéressant de mosaïque du W' siècle
La Renaissance est représentée par trois décorations de xoùtes,
dont deux ont été peintes par Raphaël au Vatican, vers isio, et
dont la troisième, qui fait pjirtie des salles Bortrhia, fut exécutée à
la même époque par Pinturicchio d'après les dessins de Raphaël.
Finalement, le déclin de l'art décoratif est montré dans une vue
perspective de la bibliothèciue du Vatican, peinte par Frédéric
Zuccari en Iô90.
Tous ces dessins, exécutés avec un talent très-réel, témoignent
puissamment en faveur de leur auteur, et nous autorisent à féliciter
à la fois le maître qui a si bien guidé son disciple, et l'élève qui a
su mettre si bien à profit les conseils du maître.
Les autres sujets archéologiques du Salon se composent des
Etudes d'après les encadrements des Loges de Raphaël au Vatican,
de M. Victor Baltard (études très-bien exécutées, et qui (mt en
outre, pour le public artiste qui visite l'exposition, l'avantage ac-
cidentel de rendre plus complète encore la suite des études déco-
ratives si bien commencées par M. Denuelle; ; des Détails de l'arc
d'Orange, dessin bien rendu, bonne étude, de M. Joret; une petite
mine de plomb de M. B<ks\vil\vali), représentant la porte Sainte-
Anne de l'église cathédrale de Paris, et exécutée avec la fidélité
qu'on lui connaît; et enfin un intéressant travail de M. Ri pbich
(Robert), représentant l'état actuel de Véglise des Templiers de
Montsaunès, arrondissement de Saint-Gaudens {Haute-Garonne:,
monument curieux de la seconde moitié du XII* siècle.
César DALY.
[La suite au prochain numéro.)
bibuogb.aphiz.
De la grande circulation dans Paris, et du Livrk
DE M. HiPPOLYTE MeYNADIER :
Paris SAas le poiDl de vue pilltresque el ■oianeiilal, on ElrmeiiLs d'un plan fiténl
d'ensemble de ses Iravani d'art el d'ulililé pnbliqne.
La libre circulation dans les rues de Paris devient de jour en
jour plus difficile, et quatre causes principales tendent constam-
ment à accroître et à perpétuer ce grave inconvénient :
1° L'augmentation de la population;
2° Le gros roulage et le mouvement qu'entraîne la distribution
des denrées et des olyets de toute espèce pour l'approvisionnement
d'ur>€ population toujours croissante;
3° Le changement qui s'opère dans nos mœurs et dans nos usa-
ges, et qui nous pousse à vivre beaucoup plus hors de chez nous
qu'au coin du foyer de famille, à rechercher les rendez- vous publics,
et par conséquent à multiplier le nombre des équipages, des voi-
tures, des omnibus, etc., pour y parvenir plus vite et plus com-
modément ;
r La disproportion qui existe entre les travaux d'élargisse-
ment des rues et l'accroissement de la population.
Tous ces mouvements divers obstruent et rendent impratica-
bles des rues faites sous l'influence d'autres besoins et d'autres
idées, et les accidents qui en résultent augmentent d'une manière
effrayante. Il y a dix ans que, sur une population totale de
800 000 habitants on comptait dans l'année iô4 blessés et 4 tués
i8S
RKVUb; DE L' ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
186
par suite des difUcultés et des désordres de la circulation ; aujour-
d'hui, dans le même intervalle de temps, sur plus de 900 000 lia-
bitants on compte 700 cas de blessures et 30 cas de mort.
Dire que le moyen de soustraire les habitants de Paris à ces
malheurs consiste à ouvrir de plus larges rues, et à les tracer de
manière à établir un système de grande circulation capable de
desservir tous les quartiers, c'est dire sans doute une vérité, mais
une vérité de La Palisse. Cependant il faut bien la répéter, et la
répéter même à satiété, puisque les bureaux de l'Hotel-de-Ville,
et ceux des ministères des travaux publics et de l'intérieur, se re-
fusent à l'admettre, toute simple qu'elle est.
Nous devons donc applaudir, nous qui avons prisa tâche d'étu-
dier les questions de haute édilité parisienne et de présenter au
public et aux administrations spéciales les résultats de nos recher-
ches à ce sujet, nous devons applaudir et voir avec bonheur les
efforts des hommes qui s'occupent sérieusement des moyens de
rendre les rues de Paris plus praticables et de les mettre plus en
harmonie avec les nouveaux besoins que nous nous sommes créés ;
aussi nous croyons nécessaire de donner à nos lecteurs une idée
d'un travail intéressant, publié il y a quelques mois sur cette ma-
tière par M. H. Meynadier.
Pour mieux faire sentir toute l'importance des travaux de ce
genre, rappelons sommairement les conditions que devrait remplir
un bon système de circulation dans Paris.
En parcourant les grands ilôts de maisons qui forment la capi-
tale, l'observateur est frappé de trois graves inconvénients :
1° L'entassement de la population des vingt-huit quartiers pla-
cés au centre de la ville, c'est-à-dire sur un territoire qui ne me-
sure pas la cinquième partie de lasuperlicieoccupée par la capitale.
Plus de la moitié de la population parisienne, en effet, est îigglo-
mérée sur cet espace si restreint ;
2° L'absence de larges voies parallèles à la Seine, pour mettre
les différents quartiers du centre et ceux d'une même rive en com-
munication entre eux ;
3° Le singulier contraste qu'offrent certaines rues perpendicu-
laires à la Seine, qui, vastes et spacieuses à l'entrée de la ville, se
resseï lent de plus en plus à mesure qu'elles s'approchent du cen-
tre, où la population est plus condensée.
Ainsi, sur les trente-trois barrières de la rive droite, il n'y a, du
côté de l'Est, que les barrières de Rercy et du Trône ; du côté de
l'Ouest, que celles du Roule, deNeuilly etdePassy,qui trouvent un
prolongement facile dans le centre de la ville, par les quais et par
lis boulevards intérieurs. Les quatre autres barrières principales,
celles de LaVillette, du Combat, de La Chapelle, de Monceaux, ne
peuvent arriver au centre que par des rues impraticables qui vont
sans cesse se rétrécissant.
L'absence de voies de grande circulation parallèles et perpendi-
culaires à la Seine, dans les quartiers du centre, explique com-
ment, dans l'immense massif de maisons compris entre la rue de
Richelieu et la place Royale, il existe un quartier, le Marais, qui ne
participe en rien au mouvement et à l'activité des autres quartiers;
et comment ceux des Halles, des Lombards, des Arcis, de Sainte-
Avoye, du Marché-Saint-Jean, etc., se corrompent de plus en plus
dans une affreuse saleté, privés d'air, de lumière et d'eaux suffi-
samment abondantes.
Et pourtant, dans cette partie centrale du Paris de la rive droite,
comme sur toute cette rive, depuis la Seine jusqu'aux pieds des
plateaux de Ménilmontnnt, de Belleville, de La Villette, de Mont-
martre et de Chaillot, il n'existe pas, à proprement parler, de diffi-
cultés de terrain : le sol de la rive droite est presque partout uni-
forme; que sont, en effet, les buttes de Saint-Roch, de Bonne-Nou-
velle, du Temple, de Saint-Gervais?
Sur la rive gauche, les communications sont restées dans un
état plus déplorable encore. Comment s'opère I& circulation dans
ce vaste chaos de maisons compris entre le Jardin-des-Plantes et la
rue des Saints-Pères? Des ruelles tellement sinueuses et des pentes
si mal conduites qu'elles repoussent le mouvement plutôt qu'elles
ne l'attirent et le facilitent.
Si, sur la rive droite, nous avons rappelé l'état d'isolement du
Marais, l'état de pourriture des quartiers des Halles, des Arcis, etc.,
que dire du quartier Saint-Marcel et du Gros-Caillou (Invali-
des) , localités entièrement en dehors de tout mouvement et plus
étrangères au progrès parisien que n'importe quelle petite ville de
France? — que dire de l'état de dégradation du quartier Saint-Vic-
tor, de Saint-Jean-de-Latran, de la rue Mouffetard, en un mot de
tout le versant de la montagne Sainte-Geneviève jusqu'à la Seine?
Le déplorable état de ces quartiers s'explique également par
l'absence de voies de grande circulation allant du centre à la cir-
conférence, et surtout parce que, dans cette partie de Paris, il
n'existe pas une seule grande artère parallèle à la Seine qui ratta-
che entre eux les différents tronçons des larges rues qui partent
des barrières et se continuent dans de belles proportions jusqu'aux
approches des quartiers centraux, où elles s'étranglent tout à coup
quand elles devraient précisément s'élargir davantage.
Ainsi, les grandes routes qui aboutissent aux barrières de Sèvres
et de Vaugirard trouvent bien un prolongement jusqu'à la Croix-
Rouge; — celles des barrières d'Enfer et d'Arcueil jusqu'à la place
Saint-Michel ; — celle d'Italie jusque vers le Panthéon ; mais com-
ment ces rues sont-elles mises en communication entre elles et
avec les quais?
Tout le mouvement qui afflue par les rues de Sèvres, du Cher-
che-Midi et de l'Ouest, converge sur le Pont-Neuf par les ruesol)-
struées et étroites du Four, de Bussy et Dauphine.
Tout le mouvement concentré à la place S<iint-Michel n'a d'issue
un peu praticable que par les rues Monsieur- le-Prince et de l'O-
déon, d'où il se précipite encore au Pont-Neuf par la rue Dau-
phine.
C'est ainsi que la rive gauche a le double désavantage de voir
s'accumuler presque tout le gros roulage sur un seul de ses points,
sans que pour cela ce point soit habité ou vivifié par le grand com-
merce : loin de là, la rue Dauphine et le Pont-Neuf ne servent
que de transit aux marchandises, qui toutes vont accroître l'acti-
vité de la rive droite, précisément parce que/e commtree ne sait où
s'arrêter, où se placer dans l'étnt actuel de cette rive. Il ne reste
donc aux habitants de ces rues que le désavantage d'un encom-
brement insupportable et tyrannique.
Est-ce à dire que nous méconnaissions les difficultés de tenain
que présente la montagne Sainte-Geneviève, et les diflicultés plus
grandes encore offertes par le passfige de l'étroit bassin de !a
Bièvre?
Non ; mais nous savons aussi que cette difficulté de terrain pour-
rait facilement être tournée et surmontée à peu de frais par l'adop-
tion d'un plan général de grande circulation, qui réunirait les dif-
férents quartiers d'une même rive à ceux du centre et aux deux
grandes divisions de la capitale.
Mais si les besoins que nous venons de signaler sont nombreux et
187
RKVUK DE I/ARCHIThXrURR BT DKS TRAVAUX PUBIJCS.
188
piessanis; si, comme nous le prouverons, ils peuvent être satis-
faits dans l'espace de dix ans, il faut se préoccuper de travaux plus
pressants encore, puisqu'ils sont indispensables pour fixer la
grande base de la circulation générale de la ville.
Ces travaux sont ceux qui doivent rendre la Seine navigable
dans l'intérieur de Paris et faire disparaître les obstacles qui l'ob-
struent depuis des siècles, obstacles qui ont forcé le commerce par
eau de l'approvisionnement de Paris à s'entasser à l'amont et sur
les canaux Saint-Martin et Saint-Denis, et à laisser désert l'aval et
le centre.
Les quais, alors, ces uniques et larges voies qui traversent Paris
dans son plus long diamètre, acquerront toute l'importance que
leur donne leur position centrale, puisqu'ils longent une grande
partie des vingt-huit quartiers du centre que nous avons vus con-
tenir plus de la moitié de la population ; les quais deviendront, soit
par terre, soit par eau, les deux bases de la grande circulation dans
l'intérieur de Paris.
On le voit, pour répondre à ce programme, il ne s'agit pas de
demi-mesures, il ne s'agit pas d'élargir de quelques décimètres les
principales rues de Paris.
Non, il faut prendre la ville dans son ensemble, et, tout en tenant
compte d'une manière absolue des monuments historiques, et d'une
manière relative des intérêts individuels , c'est-à-dire, tout en
cherchant à harmoniser ces derniers avec l'intérêt général de notre
grande cité, il faut aller au fond des choses, établir un système de
grande communication bien lié, bien un, capable de donner en
même temps une libre circulation, et d'assainir les quartiers les
plus infects par de larges coupures pratiquées dans les massifs des
vieilles maisons qui les composent.
Ce n'est donc pas nous qui traiterons d'utopies et de visions
chimériques les vues et les projets de M. H. Meynadier; nous nous
hâtons au contraire de le féliciter d'avoir donné à son livre le sous-
titre d'Eléments d'un plan général, carce mot eVfnien/» indique que
M. Meynadier n'a pas dit toute sa pensée sur cet important sujet ;
et en effet, selon nous, si M. Meynadier se fût arrêté là où s'arrête
son livre, il n'aurait pas atteint le but qu'il s'est proposé : celui de
remanier Paris dans son ensemble afin d'établir une complète har-
monie entre les grands travaux déjà accomplis et ceux qui restent
à faire.
Le projet de M. Meynadier se divise en trois parties bien dis-
tinctes : la première comprend les travaux qu'il propose pour doter
Paris de grandes rues, et pour assainir de nombreux quartiers,
tantôt par de larges carrefours et tantùt par la création de squares
ou places plantées d'arbres. La seconde traite de la distribution,
dans Paris, des établissements que l'État et la Ville doivent con-
struire. Dans la troisième, l'auteur propose la vente de certaines
propriétés de nulle valeur artistique ou historique, appartenant à
des administrations publiques, et dont le produit serait affecté à la
construction des établissements publics dont il parle dans sa
deuxième partie.
M. H. Meynadier prend pour base de son projet de grande viabi-
lité les trois quartiers qui se suivent et qui se trouvent juxtaposés
entre les deux rues Saint-Martin et Saint-Denis et leur prolonge-
ment, c'est-à-dire le quartier des Lombards (de la place du Chàte-
let à la rue aux Ours); — le quartier de la porte Saint-Denis (de
la rue aux Ours au boulevard Saint-Denis); — le quartier du fau-
iiourg Saint-Denis ( du boulevard Saint-Denis aux trois bar-
rières Saint-Denis, des Vertus et de La Villette). C'est à la cour
Batave (au-dessus de la rue Aubry-le-IJoucher), que M. Mey-
nadier place son centre d'opération; il y construit un large car-
refour circulaire ou rond-point, dans lequel il fait passer trois
grandes rues qui partagent, suivant plusieurs directions, le grand
massif du vieux Paris de la rive droite, compris entre les quais de
cette rive, le Louvre, la Bourse, le marché du Temple et la bi-
bliothèque de l'Arsenal.
Mais entrons dans quelques détails sur les vues de M. Meynadier.
RIVE DBOiTE. — Grande rve du Centre. Cette rue, projetée par
M. Meynadier, part de la place du Chàtelet, vis-à-vis le pont au
Change, s'ouvre un large passage à travers les rues ignobles et in-
fectes qui, du nord de la place du Chàtelet, forment entre les rues
Saint-Martin et Saint-Denis un Inextricable labyrinthe justfu'au
boulevard Saint-Denis ; puis de ce boulevard, cette grande rue du
Centre, se maintenant toujours parallèlement et à peu près a la
même distance, entre le prolongement des rues Saint-Martin et
Saint-Denis dans les faubourgs de ces noms, arrive à gauche de
la barrière des Vertus (côté ouest), et se relie, par deux embran-
chements, aux barrières de la rue du Faubourg- Saint-.Martin
(barrière de La Villette) et à la barrière Saint-Denis.
La Grande rue du Centre aurait trois ronds-points : l'un, comme
nous l'avons dit, à la cour Batave, l'autre près du marché au four-
rage Saint-Denis et de la rue boulevard de La Fayette; le troi-
sième au mur de l'octroi (barrière des VertusV
Rue du Nord-Est. Cette nouvelle rue partirait de l'angle .\ord-
VM de la place^de l'Oratoire et de la place du Louvre (rue des Pou-
lies-Saint-Honoré), arriverait au rond-point de la Grande rue du
Centre (Cour Batave], passerait, en faisant un angle aigu avec
cette rue, entre le Temple et le marché des Knfants-Rouges (.Nord
de la rue de Beauce, Marais), traverserait le boulevard du Temple
et arriverait au Sud de la barrière Ménilmontant. Cette rut du
Nord-Est aurait également trois ronds-points : le premier, com-
mun avec celui de la Grande rue du Centre, le deuxième par de la
le canal Saint-Martin, près la rue Saint-Maur (Est de la rue Neuve- .
Popincourt); le troisième au mur de l'octroi.
La rue de C Arsenal, proposée par M. H. Meynadier, partant du
quai des Célestins (Ouest de la Bibliothè(|ue de l'Arsenal), se di-
rige au Nord-Ouest de Paris, faisant avec la Grande rue du Centre
un angle égal à celui que formerait avec cille-ci la rue du Nord-
Est. De là elle arrive à la place de la Boui-se, à langle formé par les
rues Notre-Dame-des-Victoires et des Filles-Saint-Thomas. Cette
rue de l' Arsenal anvait deux ronds-points: celui commun aux deux
rues du Centre et du Nord- Est (Cour Batavcj, et un second qui se
trouverait à l'Est du marché Saint-Jean, et au Nord-Est de l'é-
glise de Saint-Gervais.
Rue de l'Hôlel-de- Ville. Cette rue, proposée et adoptt-c sous
Louis XIV, acceptée par tous les gouvernants qui ont admi-
nistré la France depuis ce temps , et toujours sur le point
d'être construite, est encore cependant à l'état de simple projet.
M. Meynadier la fait partir du chevet de Saint-Germain-l'Auxer-
rois, d'où elle se dirige sur la place de la Bastille (côté Ouest', en
passant entre la place du Chàtelet et le commencement de la
Grande rue du Centre, au Nord de THôtel-de-Ville, et en traversant
le rond-point de la rue de l'Arsenal, à l'Est du marché Saint- Jean.
Au point de départ de cette rue de VBôtel-de-Ville, M. Meyna-
dier aurait une grande place autour de Saint-Germain l'Auxer-
rois, etc.etc. PERREYMOND.
(La suite au prochain numéro.)
189
RKVUE DE L'ARCHITKCTIJRK KT DES TRAVAUX PURI.ICS.
190
CHRONIQUE.
SoMMiiBK.— Appel a kos Lkktkurs ; — Musée ili-s Tlicriiics ; — Munumenl de
Larroy ; — Slalues comniémoialives daus lis dciiarlemoiils; — Théâiredc Dunkor-
qiie ; - Fouilles à Bavay ; — lloles d'une villa gallo-romaine déjouverlc près d'E-
Irclat. — ClIAUFFAGK RT VRNTIHTION DKS PRISONS CELLUI.ilnBS.
Appel a nos Lectuurs. — Nous voudrions pouvoir enregistrer
chiique mois tous les monuments qui s'achèvent, tous ceux (|ui se
commencent et tous ceux qui se projettent. Malheureusement, ces faits
n'arrivent pas tous à notre connaissance, ou bien, s'ils y arrivent,
c'est trop souvent par la voie des journaux de localités , et trop sou-
vent aussi les faits annoncés par des hommes éirangers:» la spécia-
lité sont inexacts, incomplets ou exagérés. Ils sont encore liien au-
ircmoni défigurés quand ils ont passé par l'intermédiaire de la pressi;
quotidienne de Paris. Nous i;royons donc devoir ici renouveler l'appel
que nous avons fait souvent à nos abonnés, à nos correspondants na-
turels, et les prier, au nom de l'intéiét commun, de nous tenir au
courant de tout ce qui intéresse l'art de bâtir dans leur pays. Certes,
si chacun d'eux nous envoyait seulement dix lignes tous les trois mois,
nous arriverions il pouvoir leur offrir une chronique des plus utiles
et des plus attrayantes. Et pourtant dix lignes sont bientôt jetées à
la poste. Nous avons l'espoir que ce nouvel appel sera entendu de
nos lecteurs; nous prendrons le soin, d'ailleurs, de le leur renouveler
■souvent, alin qu'ils ne l'oublient jamais.
— Le conseil municipal de la ville de Paris vient d'adopter le projet
irélargisscrnent de la rue des Mathuriiis-Saint-Jacques, en face du
musée d'archéologie nationale (hôtel de Cluny). On s'occupera plus lard,
dit-on, d'isoler ce monument et les restes du palais des Thermes des
\ieillos masures en plâtre au milieu desquelles ils se trouvent encais-
sés. Ainsi nous verrons chaque jour se former et grandir ce musée qui
\ient de naître, et qui sera si précieux pour les ariisles qui voudroni
faire des études sérieuses et réfléchies. Déjà plusieurs dons sont venus
enrichir la collection Diisommcrard. M. Sanson-Davilliers, membre du
conseil général de la Seine, vient de donner : 1° une bague à pierre el
cassoletie; 2° deux vases en terre, couleurs rouge et grise ; 3" un collier
ou bracelet en ambre ou verroterie ; i" une boucle ; 5" un style ; 6° une
bague à chaton; 7° des anneaux, chaineites et ornements en bronze ;
8" un glaive; 9° une hache en silex ; 10" el quatre escbinisles, alismans
renommés chez les Gaulois et appelés œufs de ser|)enl. Tous ces ob
jets, trouvés dans la propriété de M. Sanson-Davilliers, à Hérouval
(Oise), sont de l'époque gallo-romaine. Depuis, il a envoyé un cercueil
en pierre et d'autres objets de la même époque.
il avait été déjà donné dernièrement, par M. le baron Taylor, un cha-
piteau et une console en marbre provenant d'une église chrétienne
ir.\ihènes.
Précédemment un estampage en plâtre, de la belle console de Saint-
Michel de Dijon, avait été envoyé par M. de Saint-Mesmin, conservateur
du musée de Dijon.
M. A. I.enoir a aussi donné une remarquable tapisserie du temps de
Louis XII, et un chapiteau ionique provenant du châieau de Madrid,
construit au bois <le Boulogne par François 1", el détruit à l'époque de
la Révolution.
Nous souhaitons vivement que ces exemples trouvent de nombreux
imitateurs.
M. A. Lenoira retrouvé chez un marbrier deux pierres tombales d'ab-
bés de Cluny. Ces abbés sont représentés sur ces tombes dans leur
grand costume, et les inscriptions font connaître leurs noms et la date
de leur mort. Il est bien désirable que ces morceaux préci<'ux soient ac-
quis par le ministère pour le musée.
— Nous avons annoncé l'an dernier qu'un monument allait éire élevé
à la mémoire de Lnrrcy, l'illuslrc chirurgien en chef des armées de
l'Empire. La commission de la souscription ouverte à cet effei a émis
le vœu que ce monument fût placé dans la cour de l'hôpital militaire
du Val-de- Grâce, et le ministre de la Guerre a donné son assentiment
à ce projet. L'exécution sera confiée à .M. David (d'Angers), auteur
déjà , comme l'on sait , de la statue du célèbre physiologiste Bicliat.
— Dans les départements, on voit chaque jour les populations décorer
leurs places et leurs promenades publiques des statues de leurs illus-
trations ; ce noble élan d'orgueil a toutes nos sympathies , non pas seu-
lement parce que son but est élevé, mais aussi parce qu'il est bien
propre à inspirer aux ariisies de généreuses pensées, à réveiller dans
leurs cœurs ces grands sentiments d'art qui s'engourdissent et meu-
rent au contact permanent des travaux de pure spéculation. La ville
de Caen va élever un monument au célèbre mathématicien Laplace :
Quimper prépare un piédestal à Fréron , l'adversaire savant et acharné
de Voltaire, le frein, l'on pourrait dire, s'il était permis de com-
parer les intelligences à des machines, le frein de cette puissante lo-
comotive qui emportait le XVIII" siècle à travers les hasards d'un dé-
raillement. Le Havre, de son côté, s'occupe d'un monument à Gi-
simir Delavigne. Nous avons vu dernièrement dans la cour du Louvre
la statue en bronze de Diiquesne , œuvre remarquable et originale de
.M. Dantan atné. Elle est aujourd'hui en roule pour Dieppe, pairie de
l'illustre amiral. Duquesne succédait à Lnpérouse, qui, lui aussi, est
allé décorer une place publique d'Alhy , sa ville natale. Le Lapéroiise
était aussi en bronze et de .M. ilaggi. On nous promet pour l'été la
figuie d'un troisième marin , de Jean-Barl , ce fameux loup de mer à
qui Dunkerque dut en grande partie^ sa prospérité el son importance
militaire sous Louis XIV. Tout dans celle ville reconnaissante , mais,
hélas, bien déchue, tout rappelle son héros favori ; on n'y jure que par
lui, elle Dunkerquois a sur Jean-Bart quelque anecdote toujours prête.
La statue du héros flamand doit décorer une place qui déjà porte
son nom.
— Près de là, dans la même ville, s'achève un théâtre bâti sur des
proportions assez vastes. La forme extérieure de ce monument a cela
de parliculier, qu'elle esl en partie circulaire. L'entrée principale
s'annonce par un parallélogramme en saillie, servant de péristyle
au rez-de-chaussée et de foyer au premier. Le péristyle est d'ordre
ionique. Ce théâtre, commencé depuis longues années, a été termine
par .M. Develle, architecte de la ville, jeune artiste distingué. Par
malheur, dans ce travail, .M. Develle avait à suivre Jes plans de son
prédécesseur, el (piand l'atlièvemeiudu inonumenl. fulconlié à ses soins,
il était trop tard pour en niodilier sensiblement les dispoi-itions.
— On sait combien d'objets intéressants et précieux pour l'archéologie
les fouilles faites à Bavay (ancienne Baviacum) ont déjà mis à jour.
Dans la parlic où elles s'exécutent aujourd'hui , on a découvert un
{^raiid nombre de voies qui se croi.sent en lous sens, ce qui porierail
.1 penser (pie ces voies ne sont autre chose qiie les rues de l'ancienne
ville romaine. Il parailiail que leur sol, pour la plupart, serait fi.riiK-
d'une première couche épaisse d'environ 15 centimètres , cl composée
de cendres bien tassées, mélangées de charbon. Sur celte couche se
liouve un lit de grosses pierres posées à plat : ce lit a de 5U à 60 cen-
limètres d'épaisseur. Les vides qui existent entre ces pierres sont éga'
Icment remplis de cendres cl de charbon. Un second lit d'une é|wis-
seiir de 40 à 50 centimètres, aussi formé de pierres, mais moins
grosses que les précédentes, et liées ensemble par du gravier, est
siirmonlé d'un troisième lit composé de pierrailles , de tuileaux
concassés et de gravier, de 70 à 80 ceniimèlres d'épaisseur. En quel-
ques endroits , on remarque une couche de ciment , épaisse de 15 à IH
cciilimèties; mais il reste peu de vestiges de celte première couche,
que le soc de la charrue a détruite. Ces chaussées avaient donc de
\m 90 à 2"" 23 d'épaisseur totale.
Dans la incnie ville, derrière l'église, on a irouvé sous une ca\e
les restes d'un hypocausir.
191
RKVUK DK LAUr.HITKCTURK ET DKS TBAVAUX PUBLICS.
192
r>liisiciirs aiilres décoiivcrles ont élé faites rrceinmenl à Buvay ,
mais elles consisleni presque toiiies en poteries, ustensiles en bronze,
monnaies, fie.
— Sur ini aiilre point de la France, sur les côtes de la Manche, au
village de Bordeaux, près de l'ancienne station romaine d'Élrelal ,
des fouilles dirigées par M. l'abbé Cochet, aumônier du collogc royal
(le Uouen, ont amené aussi des découvertes. On a trouvé sous le sol
des restes de constructions romaines qui durent faire partie d'une
villa. Dix-sept bases de colonnes ont fait reconnaître une galerie qui
devait être formée de dix-neuf colonnes. Un tronçon de fftl a donné le
diamètre de 4G ceutirnèlres. Les bases sont es|(acées entre elles de 2°"
20, et la galerie devait avoir une longueur de 54™ SO. Elle est suivie
d'un cryplo-porlique qui lui donne nu développement de 113 mètres;
loutefois sa largeur n'est que du 2"" 50. On a trouvé dans le sol plusieurs
objets de tuilclie en bronze, des armes, des poteries, des débris de
ciment colorié eu rouge, (|ui sans doute recouvrait les murs, des mé-
dailles, des hameçons, des ossements d'animaux, et une grande quan-
tité d'écaillés d'buiires.
Un fait remarquable s'est présenté dans ces découvertes : les seules
médailles trouvées sont du llaul-Empire. Dans la noiice publiée sur
ce sujet par VÉcho du Monde savant, M. l'abbé Cochet entre sur
ce fait dans des considéiations que nous allons reproduire.
« Il est remarquable, dii-il, que dans la plus grande partie des mo-
numents romains visités dans nos contrées, on n'a trouvé que des mé-
ilailles des premiers siècles. Il en a élé ainsi dans les maisons gallo-ro-
maines de .Maulévrier, de Bracquemonl, d'Éticlat et de Château-Gaillard.
Il est digne de remarque que le même fait existe en Basse-Normandie,
ei qu'il a élé observé par les antiquaires. « Quant aux médailles trou-
vées dans noire pays, dit M. Yaiigcois, de l.aigle, il est un fait sur le-
([iiel nous devons appeler l'atlenlion de nos lecteurs : c'est qu'elles sont
lotîtes du Haut-Empire, c'est-à-dire du temps des premiers empereurs
romains. Nous n'en connaissons pas de postérieures à Gralien, mort à
Lyon en 583. On doit conclure de là que l'occupation de notre pays par
les successeuis de César a cessé peu après la fin du IV» siècle.»
«Mainicnaiiton demandera peut-être comment le grand édilice a péri.
Voici ce que j'ai jiu lire au sein iiiêtne des ruines explorées. Toute la
surface du moiiumcul était recouverte d'une couche épaisse de char-
bons et de cendres. Jamais elle n'avait moins de 20 centimètres, et par-
fois elle s'élevait h la profondeur de 1 mètre 60 centimètres. L'incendie
qui dévora cet édifice avait élé si violent, qu'il avait fondu les méiaux,
brûlé les ossefnents et calciné les plus durs silex.
« Eh bien, cetle destinée de notre monument a été celle de toutes les
villas de la Gaide et de tous les établissements romains dans nos con-
trées. Fouillez le sol de la France septentrionale, et vous trouverez
partout une couche épaisse de cendre qui recouvre les ruines comme
un vaste drap mortuaire. La trace des incendies est pai tout vivante sur
le sol, et, semblables à la lave des volcans éteints, de noiis brandons
semblent dire qu'un océan de feu a autrefois ravagé celte terre. L'his-
toire se tait sur notre pays à l'époque gallo-romaine. Le silence du
tombeau enveloppe la plupart des élabliss.-meuis romains que nos bê-
ches découvrent, et de lotîtes les pages de leur histoire, nous n'en pou-
vons lire qu'une seule, la dernière. Oh! celle-là, c'est qu'elle est écrite
en lettres de feu.
« Interrogez donc les hommes qui ont fouillé le sol de la France et de
l'Angleierre. Demandez à ces patients antiquaires qui ont cherché avec
lanl d'ardeur à lire dans le grand livre que la terre recouvre, et tous
vous répondiont unanimement que dans ce pays le monde romain a élé
la proie de violents incendies.
« M. Fallue, qui a ex|doré les boids de la Seine, qui a fouillé les villas
de Maulévrier, du Lendin et de Sainte-Croix-sur-Aizier, les a trouvées
couvertes de cendres séculaires, et lorsque plu> tar.l il a demandé aux
collines d'HarlIeur les restes de Caracolinutn, il les a trouves couveils
de cette noire pon.ssière qu'il appelle l'accompagnement obligé de tout
établissement gallo-romain. M. Gaillard, dans le kilnéaire de Lille-
bonne, a vu des poutres et des lattes carbonisées. M. Duméril, en fouil-
lant à Vieux, près Caen, a trouvé le sol qui couvrait celte ville antique
plein de charltons, de cendres et de tuiles noircies par le fea. « A la pro-
fondeur de 66 centimètres, dit-il, le terrain loui entier était recouvert
d'une couche uniforme et horizontale de matières brûlées qui n'avait
pas moins d'un décimètre d'épaisseur. »
« C'est ainsi que se trouvent confirmés, après quatorze siècles, les ré-
cits des historiens qui nous ont raconté d'une manière si lamentable les
invasions des Barbares. Dès l'an 259, les Allemands commencèrent à
ravager la Gaule, se frayant ainsi un passîigc vers l'Italie. Du temps de
l'robus (277) l'invasion devint générale. Les Francs, les Saxons surtout,
se montrèrent par milliers sur les côlcg de la Manche; tous les poris
en furent encombrés. Probus défendit vaillamment le rivage, et après
mille combats, il parvint à rétablir momentinenient la paix. En 282, les
ennemis revinrent à la charge. Carrausius, liomine courageux sorti
du peuple, les tint en échec pendant sa vie ; mais après sa mort ils re-
commencèrent leurs irruptions avec tant de violence, que la Gaule-Bel-
gique devint un vaste désert, inculte, inhabité, et silencieux comme la
mort. Ce fut à cetle époque, sans donle, que notre liitoral prit le nom
de Saxoniquc : liUut Saxonicum. A la lin du III* siècle, ConsUnlin
rendit la paix .. ces peuples par la prise de Gessoriacum. (Boulogne.)
« Pourtant ce n'était qu'au V' siècle que la Gaule devait arriver à
l'apogée de ses malheurs. Vers l'an 400, nous voyons apparaître des
masses de Barbares ; ce sont les Sucvcs, les Alains, les Vandales, les
Gèles, les Goths et les Bnrgondes. C'est une tempête effroyable, un
déluge de ravageurs : debacchantibus bvrbarit. Ils sortent tomme des
nuées de s les points de I horizon. Pendant dix ans, ils déchargeiil
sur notre pays toute leur rage, loiite leur fureur barbare. Tout nage
dans le sang, tout devient leur proie. Incubai barbariei seva lempertat.
S'ils se rencontrent, c'est pour se dévorer les uns les autres, et ils ne
s'accordent que pour détruite et pour brûler.
« La plus redoutable invasion fut celle dont saint Jérôme nous a con-
servé le souvenir. Elle eut lieu pendant les années 409, 410 et 411. Ce
fut dans ce vaste bassin des Gaules, depuis le Bhin jusqu'aux Pyré-
nées, une effroyable marée de B.irbares. L'on vit des llou de peuples
aller et revenir comme les Ilots du déluge, euntet el redeunltt, et pro-
duire parmi nous un déluge universel. On a compté jusqu'à dix peuples
à la fois ; les Quades, les Vandales, les Sarmates, les Bnrgondes, les
Allemands, les Allains, les Gépides, les Hernies, les Saxons et les Pan-
noniens. Les grandes métropoles, telles qu'Amiens, Arras, Tournay,
Mayence, Reims, Thérouenne, Spire, Strasbourg, Lyon et Narbonne,
disparurent dans les (lam-nes. C'en était fait du monde, si l'arche du
christianisme n'egt surnagé sur les eaux de ce nouveau déluge. »
CaicrriGE et vEKTiLiTion DES PBisoKs ccLLCLAiiies. — Dans un moment où
tout le monde s'occupe des prisons cellulaires. Il importe que les arcl.llecles
soient bien renseignés sur loui ce qui concerne la ventilation et le chautTage de
ces édifices. L'homme renfermé pendant plusieurs mois consécutifs, ei même
parfois pendant plusieurs années dans une étroite cellule, devient plus que tout
autre sensible aux changements de la température, et réclame plus que tout
aulrc aussi un air pur el sain. Dans un de nos numéros prochains, M. René Du-
voir donnera un travail dans lequel il mettra sous les yeux de nos lecteurs les
différentes dispositions d'appareils de chauffage et de ventilation adoptées par
l'administration pour les besoins des prisons. Nous espérons que cetle publica-
tion, faite à propos, sera de nature à épargner beaucoup de recherches el d'em-
barras à ceux de nos confrères qui voudraient s'occuper de la question des
prisons.
CÉsAB DALY,
Direclnr rédacteur en ektf,
membre de f .Académie royale drs Beau \ -Ans de Sioi-kholm, el membre
honoraire cl correspondant de l'Institut rojal dos Archilecles brilanniquct.
I-ABIS. — TVP. LtCRAUPK KT COUP., llrE DtUIETTK, 2.
Revue, &fnéraU^ de i'Ârchit&cM/re' et dej' J'ravaux Publia 6 . Rua de. Furstcmierq . Paru-.
Vois PI g
Ki()'.U.
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CALORIFERE VENTOATEUR EN FONTE,
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B-n^nf r-,-Jn^rn/f^ cL^ l'Architcciure et de^ f'rauazis J\Uiius . 6. Rue iJjr lAx/'sùuîiha-a .Fn/ij-.
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^^^^:ssmS^s^^m^s^^mm/^A^^^^^^\
Ràit^ J)ia>eir dci .
aW^rm^ jolf.
BLANCHISSERIE.
Système ie M'^ Reae Duvoir .
193
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET J)ES TRAVAUX PUBLICS.
Ifé
^HK
MIKHK INSTRUCTION DU COMITK HISTORIQUE
nKS ARTS ET MONUMENTS.
{Siiilc l't lin. Vmj col. 97 cl U.ïJ.
MONUMENTS MEUBLES.
l'HEMIERE EPOQIE. — I^DÉPE^D\!VCE CAILOLSE.
Les monuments meubles de cette époque qu'on découvre habi-
tuellement sur le sol de la France sont :
I" Des armes,
■2" Des ustensiles d'un usa|,'e civil ou religieux,
3" Des poteries,
4" Des monnaies.
Les armes gauloises, defer onde bronze, antérieures à l'influence
grecque ou à la conquête romaine, sont ou inconnues ou très-dif-
ficiles à distinguer. Les haches en silex, d'un emploi beaucoup
plus religieux que guerrier, paraissent appartenir à la civilisation
aborigène; mais on ne peut douter que la population gauloise n'ait
continuée faire, dans les temps romains, un usage commémoratif
de ces objets.
On a constaté, en fait d'armes et d'ustensiles purement gaulois,
l'emploi du silex, de la pierre ollaire et de l'os. Certains bijoux
d'or, par le caractère du travail, peuvent être attribués à l'époque
primitive ; quelques anneaux , bracelets et colliers de bronze
offrent, sous le rapport de l'attribution, le même degré de proba-
bilité. Les poteries gauloises ne se distinguent des gallo-romaines
que par l'imperfection du procédé céramique ; on n'y rencontre,
en général, ni symboles ni représentations ; leur étude intéresse
spécialement l'histoire des arts industriels.
Les monnaies purement gauloises sont, en revanche, très-nom-
breuses : on en connaît en or, en électrnm, en argent, en bronze
et en potain. .Nous en parlerons bientôt dans un chapitre consacré
spécialement à la numismatique.
En gén(''ral, on doit recommander une surveillance exacte, un
•soin persévérant et minutieux dans tout ce qui concerne les inves-
tigations gauloises. 0\> a vu tout ce que l'étude des tombelles , des
ossuaires, des oppida, des temples et enceintes druidiques pouvait
produire de précieux résultats. Le terrain compuis dans ces en-
ceintes et celui du voisinage ne sauraient être négligés. Les
moindres vestiges du séjour de l'homme ou des animaux domes-
tiques dans ces localités peuvent conduire à des inductions cu-
rieuses (i).
DEl'XIÈME ÉPOQlE. — COLOMSATIO\ fiRECQlE.
On trouve dans le Midi de la France un grand nombre de mon-
naies grecques, quelques rares inscriptions, des marbres plus rares
encore, des figurines et des ustensiles de bronze, des débris seide-
ment de vases et de bijoux.
l^ne mine, jusqu'à présent beaucoup plus riche que celle des
marbres ou inscriptions appartenant aux villes grecques de la
Gaule, est celle des figurines de bronze, de travail indubitable-
ment grec, que le goût des riches amateurs a dû , dès les temps
antiques, faire affluer sur notre sol. Il est, du reste, à peu près
inutile de donner aucune instruction précise à ce sujet, les monu-
ments de cette espèce se recommandant d'eux-mêmes par le mé-
rite de l'art, et la matière dont ils sont formés ne présentant aucun
appAt à la cupidité.
On doit recommander aux correspondants de recueillir avec le
plus grand soin , sur le sol des villes grecques, les moindres frag-
ments qui pourraient nous faire reconnaître avec certitude de quel
genre de poterie les Grecs de la Gaule faisaient usage.
TROISIÈME ÉPOQlE. — COXQIÊTE ROMAINE.
Le plus grand nombre des monuments antiques qu'on découvre
sur le sol de la Gaule appartiennent à l'époque de la domination
romaine. On peut diviser les monuments en cinq classes princi-
pales :
1° Les inscriptions et marbres;
2° Les vases et bijoux en or et en argenl ;
3° Les bronzes ;
4" La poterie et les verres ;
:>" Les monnaies et médaillons.
§ I". Tnscbiptio^s et Marbbes.
Les inscriptions, n'offrant aucune valeur commerciale, sont pai
cela même les plus faciles à conserver de tous les monuments. Un
travail utile à entreprendre dans tous les lieux qui fourmillent
d'inscriptions romaines , c'est de former un recueil exact de toutes
celles qui se trouvent dispersées dans les maisons et incrustées
dans les murs, en indi((uant la position et la proportion de cha-
cune d'elles. Les correspondants feront bien de ne pas réserver
pour leur propre usage de semblables recueils, s'ils en possèdent
d'anciens, ou s'ils en forment eux-mêmes de nouveaux. On doit
les engager à déposer au moins une copie de ces recueils dans la
bibliothèque publique la plus voisine de leurs résidences. Beaucoup
de personnes croient faciliter la lecture des inscriptions en rem-
plissant d'une teinte rouge le creux des lettres : on doit s'abstenir
(1) Nous reconiiiiandons, comme un modèle dans ce genre de reclierches, !••
travail que M . Féret, de Dieppe, a publié sur la cit* do I.imes. — Mimoiret de
la Scciété drs Aniiquairet de Xormandie, lonie III.
T. V W
198
REVLK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
196
de cett« opération, pour peu que les linéaments tracés sur la pierre
ou le marbre présentent la moindre incertitude.
Les correspondants doivent suivre avec soin les démolitions
d'anciens édifices et les constructions nouvelles. Il leur sera tou-
jours facile d'obtenir les pierres ornées d'inscriptions, an moins
pour l'échange de pierres nues de mêmes dimension et qualité.
S'ils rencontrent à cet égard de la résistance chez les construc-
teurs et démolisseurs, ils chercheront à obtenir au moins que les
inscriptions ne soient pas retournées ou couvertes de ciment ou
d'enduit dans la construction, etqu'on les place à portée de l'œil des
passants. On recommande aux correspondants qui se seraient pro-
curé par ces soins assidus des inscriptions antiques, de n'en décorer
leurs habitations qu'au cas où eux-mêmes occuperaient le sol d'une
ville antique, et où leur résidence serait trop éloignée d'un musée
de ville ou de département. Le mieux, toujours, est de faire trans-
porter les inscriptions au musée, à la bibliothèque s'il n'y a pas de
musée, à la mairie s'il n'y a pas de bibliothèque.
On doit veiller avec la même attention à ce que des bas-reliefs
ou des figures de ronde-bosse ne soient pas employés comme ma-
tériaux ordinaires dans les constructions nouvelles. A moins d'un
mérite d'art tout à fait extraordinaire, il ne faut pas exposer les
marbres aux risques des transports. Les correspondants averti-
ront, autant que possible, de leur erreur, les propriétaires de
marbres qui se soumettraient à des dépenses considérables d'em-
ballage et d'expédition, dans l'espérance, presque toujours trom-
pée, de tirer commercialement parti de la vente des marbres an-
tiques. Les marbres, comme les inscriptions, doivent autant que
possible rester dans la localité qui les a fournis. Les marbres inté-
ressants par l'art ou le sujet sont rares; comme renseignement
local , il n'en est aucun qui ne soit digne d'attention.
§ II. Vases et Bijoux km or et en abgent.
Toutes les fois qu'un correspondant aura connaissiince de la
découverte de vases ou de figures d'argent, de bijoux d'or et autres
objets en matière précieuse et menacés d'être anéantis par le creu-
set, il devra, autant que possible, se transporter de sa personne
sur le lieu delà découverte, donner avis au propriétaire de la valeur
d'affection qui s'attache aux objets antiques de cette nature, em-
pêcher par toutes les voies de persuasion que les objets ne soient
transportés chez les orfèvres, les suivre chez ces derniers s'il y a
lieu, et réveiller chez eux le sentiment intéressé qui peut assurer
la conservation des monuments.
Quand ce premier danger est passé, les objets en matière pré-
cieuse s'écoulent naturellement par les voies du commerce des an-
tiquités. Pour peu que la masse de chaque découverte soit consi-
dérable, il est bien difficile que les propriétaires trouvent dans les
ressources locales un moyen d'assurer la possession de tels monu-
ments au pays qui les a produits. Les correspondants doivent au
moins s'employer pour qu'il reste dans le plus prochain musée au
moins un échantillon des monuments découverts, ou suppléera
leur absence par des empreintes et des dessins.
§ III. Bbokzes.
On comprend sous ce titre : I" les fragments de statues colos-
sales ou de grandeur naturelle, les figures, et généralement toutes
les représentations en grand et en petit d'hommes et d'animaux;
2° les armes, vases, instruments et ustensiles d'un usage militaire,
religieux et civil ; 3° les décrets et actes civils sur tables et lames
de bronze.
La plupart des bronzes, comme les marbres, n'intéressent que
les localités dans lesquelles on les trouve. Pour peu qu'on habite le
sol d'une ville antique, il est aisé de formera peu de frais des col-
lections dans lesquelles figurent :
Des représentations plus ou moins grossières de divinités ro-
maines ou gallo-romaines ;
Des fers de lance, des haches et des épées en bronze, des débris
de casque et de cuirasse ;
Des débris de vases religieux , domestiques ou funéraires ;
Des clefs, des fragments de revêtement, des clous, des fibules.
des boutons, des cuillers et autres objets qui se rapportent aux ha-
bitations, aux vêtements et à la nourriture des Romains.
On joint aisément à de telles collections des épingles en os. des
ustensiles en plomb, etc. Les instruments de fer se trouvent en gé-
néral trop oxydés pour que la forme n'en soit pas complètement
altérée; toutefois on peut tirer de ces instruments de bonnes indi-
cations. Les cachets de médecins oculistes, les tessères des gladia-
teurs, sont au nombre des objets les plus précieux pour l'étude des
mœurs antiques ; les fibules et autres objets en bronze qui pré-
sentent des vestiges d'émail, doivent être recueillis avec grand
soin, comme propres à éelaircir une partie peu connue de l'indus-
trie des anciens.
En général, dans la formation de semblables collections, com-
posées d'objets dont la valeur commerciale est limitée, les corres-
pondants ne devront s'attacher qu'aux monuments qu'ils auront
vus, pour ainsi dire, sortir de terre sous leurs veux. Dans la plu .
part des départements , les objets de comparaison sont trop peu
nombreux pour que chacun puisse espérer d'habituer ses yeux a
distinguer avec certitude les monuments réellement antiques des
monuments falsifiés dont le commerce abonde : mieux vaut un
choix très-borné, mais sur, qu'un ramas d'objets sons authenticité,
au milieu des(|uels se perdent ceux qui méritent une véritable
confiance.
Les objets réellement précieux en bron7e ne courent pas le
nsfjue d être anéantis. 11 n'y a pas d'année qui n'amène à la sur-
face du sol de la France un certain nombre de figurines de bronze
tout à fait dignes d'admiration. Le devoir des correspondants devra
se borner, en ce qui concerne les bronzes, à stimuler l'amour-
propre encore plus que l'intérêt des possesseurs, à les engager a
déposer dans les collections locales les figurines , armes , vases et
ustensiles qui leur appartiennent , plutôt qu'a les faire passer dans
le commerce ; à s'efforcer enfin de leur faire comprendre (ju'a
l'égard des prix d'affection, les bénéfices sont presque toujours
nuls pour les premiers détenteurs.
§ IV. Tefires cuites, Potehifs et Verreries.
Le territoire de la Gaule fournit abondamment des vases de
terre rouge avec des ornements ou des figures en relief. Ceux de
ces vases qu'on trouve entiers et intacts sont, comparativement,
rares et assez précieux ; la plupart portent au-dessous du culot une
inscription latine qui est le nom ou la marque du fabricant.
On découvre moins fréquemment d'autres vases d'un usage évi-
demment funéraire, dont la couverte, d'un noir ardoisé, et l'ex-
trême légèreté, rappellent la fabrique de la Campanie. Ces vase."
19-
REVUK DE LARCHITEGTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
198
offrent pour ornements de simples rosaces, et presque toujours
l'inscripUon AVE, en peinture bianclie superposée et incorporée
par la cuisson à la couverte noire. La cassure de ces vases montre
une pâte d'un rouge assez vif.
Les amphores de simple terre cuite, et les autres débris appar-
tenant à la poterie domestique, offrent un beaucoup moindre in-
térêt.
On ne remarque pas une très-grande variété de sujets parmi les
llgurines de terre cuite qu'on découvre ordinairement sur le sol de
la France. Nous devons principalement signaler des figures de Ve-
nus Genitrix, des animaux de différentes espèces, et surtout les
bustes embrassés d'Isis et de Sérapis, et autres vestiges de l'infil-
tration des religions égyptiennes en Gaule; le travail de ces figures
est rarement fini et délicat.
La verrerie antique consiste surtout, dans notre pays, en urnes
de verres destinées à renfermer des cendres. On en découvre un
grand nombre, et souAcnt de remarquables pour la forme et la di-
mension. A côté de ces urnes se recontrent presque toujours de pe-
tits lecijthus, ou vases à parfums, improprement nommés lacryma-
toires.
Il n'est aucune partie de la France qui ne puisse fournir des
monuments analogues à ceux que nous venons de décrire, en assez
grande abondance pour que les musées, et, à défaut des musées,
les bibliothèques des villes n'en soient pas pourvues.
§ V. Numismatique.
Les monuments numismatiques qu'on découvre sur le sol de la
Gaule appartiennent à diverses origines, et peuvent être distingués
eu plusieurs classes ; on y trouve des médailles grecques, des mé-
dailles gauloises et des médailles romaines.
Marseille doit être considéré comme la source et le point de dé-
part de l'émission des monnaies grecques dans la Gaule. Les autres
\illes grecques de la côte ou de l'intérieur, telles qu'Antibes (An-
tipolis), Agde (Agatha), Rhodanusia, Béziers (Beterra), Avignon
i Avenio), n'étaient que des colonies ou des dépendances de la mé •
tropole phocéenne. Les monnaies à légende grecque de ces villes
reproduisent en général les types et la coupe des médailles mar-
seillaises. Les villes de la côte indiquent le développement de la
prospérité commerciale de Marseille : celles de l'intérieur, l'accrois-
sement du territoire que Marseille dut à la faveur des généraux
romains Marias et Pompée, et dont la plus grande extension pré-
céda d'un petit nombre d'années la l'uine politique de Marseille,
("est là une opinion que M. le marquis de LaGoy a développée avec
beaucoup de talent et de vraisemblance dans une récente publica-
tion (l), et qui nous parait devoir être consacrée par la science.
Autrefois on ne connaissait de .Marseille que des médailles assez
uniformes de types, et dont presque aucune n'excitait l'intérêt par
la singularité des représentations et la rareté des exemplaires. Nous
devons depuis peu d'anriées a M. le marquis de La Goy (2) la
connaissance des plus anciennes monnaies de Marseille, dont les
t> pes et la fabrication rappellent l'origine asiatique des Marseillais.
Le même savant a publié les médailles grecques de Glanum, au-
jourd'hui Saint- Remy ; de Ca;nicense, peuple dont le territoire est
(1) .YoMVc sur rattribvdon de quelques vv'dinlles des Gai.Ies. Aix. 1837,
iii-ft", pages 3 cl suiianics.
(2) IHi<-rii>(iim de quelques médailles inédles. .Six, 183'i, in-i".
inconnu; de Nîmes, de Sénas, et même des Tricoriî, peuple du
Dauphiné. La fabrication de ces dernières pièces est postérieure au
don que César fit aux Marseillais d'une partie considérable du ter-
ritoire de la Gaule, et antérieure à la prise de Marseille par le même
général.
Toutes ces monnaies, ainsi que celles de Marseille, sont d'argent
ou de bronze ; on n'en a pas découvert en or jusqu'à ce jour.
Il est difficile de saisir la liaison qui a pu exister entre la numis-
matique grecque de Marseille et celle des Gaulois proprement dit.*:
et même il est permis de douter que l'exemple des Marseillais ai'
été fructueux en dehors de l'influence directe de Marseille et de»
villes qui lui étaient soumises (i). Plusieurs siècles après l'établis-
sement des Phocéens sur nos côtes, la conquête de la Macédoine
par les Gaulois parait avoir propagé l'usage de la monnaie dans
l'intérieur de la Gaule. Les conquérants ayant rapporté dans lu
mère patrie un nombre prodigieux de doubles statères en or de Phi-
lippe, fils d'Amyntas, le cours de cette monnaie s'établit dans la
contrée et donna lieu à l'établissement d'ateliers monétaires, dans
lesquels on imita d'abord grossièrement le type macédonien du
bige au revers du buste d'Apollon, mais où le caprice des artistes
gaulois introduisit bientôt une fouie de variantes plus ou nioin;»
bizarres, et quelquefois tellement accumulées qu'on a peine à re-
connaître la trace du modèle. Grâce à ces altérations, la diversité
des types s'établit enfin dans la Gaule; la monnaie d'argent, imi-
tée des deniers consulaires romains, et celle de bronze, furent frap-
pées avec infiniment plus de liberté dans le choix des types que ia
monnaie d'or : les animaux sacrés de la Gaule, les emblèmes ca-
ractéristiques des divers peuples y trouvèrent leur place. Au moyen
d'un alphabet en usage chez les Gaulois, où l'on remai'que le mé-
lange des lettres grecques et des lettres latines, le nom, tantôt des
chefs, tantôt des peuples, souvent de tous les deux ensemble, fut
reproduit sur les médailles. On déterminerait difficilement l'époque
à laquelle cet usage s'établit chez les Gaulois; mais c'est jm-u .'c
hasarder que d'en placer l'introduction après la réduction de la
Gaule narbonnaise en province romaine, l'an I2I avant Jésu^-
(Ihrist. La plupart même de ces pièces paraissent avoir ete frappeo
au milieu des circonstances critiques qu'amena l'entreprise de JuU n
(lésar, et pour subvenir aux besoins de la guerre. On a lu a\ec
certitude, sur les médailles, les noms d'un assez grand nombre de
chefs dont César fait mention dans ses Commentaires, ceux d'.4Mi-
biorix, Litavicus, Adcantuanus, Duratius, Tastjeius. On s'est même
llatté récemment, mais avec moins de probabilité, d'avoir re-
trouvé sur une médaille d'or le nom de Vercingetorix. Ces re-
cherches, poursuivies autrefois avec plus de zèle que de lumièro.
prises récemment d'après des principes plus fixes (2 , ont encoii'
besoin de se régulariser pour produire tous leurs fruits. La fixation
définitive de l'alphabet gaulois, les limites de l'emploi exclusif de>
caractères grecs, les règles qui ont du présider aux désinences de
mots, et qui doivent conduire a distinguer positivement les noms
(1) Les monnaies d'argent qu'on découvre principatemeni à Vieille-Toulou>c
el au revers desquelles on remarque une espèce de croix a\ec divers atihlmis.
paraissent plutôt appartenir & la civilisation ibérique qu'à la ciiilisaliou gau-
loise. Feu Tôclion regardait ces pièces comme imitées des monnaies d'argcDl d.-
Hlioda de la Tarragonaisc. M. Cliaudruc de Crazanne préparc un travail impo: -
tant sur cette question.
(2) La Hevue de la I\'umismalique française, qui a conimeucé de paraUrc j
Blois en 1830 sous la dircclion de MM. Cartier et de la Saussaye, a noial>leqieul
contribué aux progrès de celle élude.
199
RKVUK DK [.'ARCHIThXTURK ET DES TRAVAUX PUBLICS.
SM)
(les peuples de ceux des chefs, quaud les légendes ne sont pas mu-
lilces, toutes ces questions réclamcnl iapplication d'esprits pa-
tienls, méthodiques, et plus curieux d'accroître le domaine de la
certitude que celui des aperçus sans consistance.
Cette étude philologique devra précéder et amener le classement
régulier des types, et l'appréciation des médailles sans légende, qui
constituent la grande majorité des monuments numismatiques de la
Gaule. On fera d'abord une large part à ce que les antiquaires ont
i)[>pe\é plagia barbarorttm, c'est-à-direà ces pièces qui ne sontqu'une
contrefaçon plus ou moins habile, plus ou moins grossière, des mon-
naies rapportées de la Grèce. Le gisement de ces contrefaçons est
extrêmement étendu ; il compi-end non-seulement le territoire de la
(iaule, mais encore tout le pays qui s'étend depuis le Rhin jusqu'à la
Macédoine, en traversant la Norique, la Pannonie, la Thrace occi-
dentale et l'Illy rie. Les pièces d'or au type de Philippe sont plus com-
munes en Gaule; les tétradrachmes d'argent, imitées des pièces du
même prince, extrêmement abondantes dans la Hongrie et les con-
trées plus au Sud encore, sont, ou très-rares, ou extrêmement gros-
sières de fabrication sur notre sol. Sansattribuer à des populations
(l'origine gauloise toutes ces contrefaçons, on ne peut s'empêcher
de constater l'analogie decaractères qu'elles présentent toutes entre
elles, et de se rappeler en même temps le long séjour des tribus
gauloises à l'Ouest et au Nord de la Macédoine, séjour qui remonte
a plus d'un siècle avant la conquête de ce royaume sur Ptolémée
Céraunus (l'an 278 avant Jésus-Christ).
Outre ces pièces d'or et d'argent, les Gaulois employaient pour
les transactions les plus ordinaires, des signes monétaires d'une
nature spéciale, et particulièrement des rouelles évidées de bronze
ou de potain, dont on retrouve fréquemment la ligure parmi les
accessoires des Phtlippes d'or contrefaits dans la Gaule, et même
de quelques monnaies de Marseille. Ces rouelles paraissent avoir
constitué une de ces monnaies courantes (l) les plus anciennement
usitées dans la Gaule; les pièces de bron/e ou de potain appartien-
nent sans doute à un Age plus voisin de la conquête romaine ; les
pièces de potain en particulier sont reproduites par le même pro-
cédé que les rouelles, c'est-à-dire coulées ou plutêit soufflées dans
un moule. Les pièces de potain ne portent jamais de légende, mais
des attributs limités à chacun des peuples qui en faisaient usage.
Le classement des pièces dé potain et de bronze sans légendes ap-
partient aux antiquaires dispersés sur le sol de la France; eux
seuls peuvent constater rigoureusement les limites dans lesquelles
(m trouve principalement et en grande abondance des types iden-
tiques, et en inférer l'attribution à tel ou tel peuple dont le terri-
toire était contenu dans les mêmes limites. Le même genre de re-
cherches, suivi avfc persévérance et bonne foi, peut mettre sur la
voie du classement des imitations des Philippes, toutes les fois que
ces imitations se distinguent par l'addition ou là substitution d'at-
tributs bien déterminés. Les personnes éloignées du centre des étu-
des ont, quant au point que nous venons d'indiquer, un avantace
signalé sur les antiquaires de la capitale. Les correspondants re-
connaîtront à cet égard ce que leur position a de favorable, et ne
négligeront pas d'en tirer parti.
(1) M.F.deSaulcy a donné "ne exccllenle notice sur les «o«f//cs mor,c7airei
des Gaulois, dans la It.iue Numi,maliquefrar,enise, lom. I-, p,g. ,c9.,j.
MÉOAILLES ET MÉDAILLONS GrECS, GaIILOIS ET RoUAIMS.
Bien que la monnaie romaine en Gaule ait été soumise aux rè-
glements généraux de l'empire, et que par conséquent il soit
l)resque toujours impossible de distinguer les pièces frappées dans
cette province de celles que les ateliers de l'Italie ont produites, il
est certains types, tels que celui de l'autel de Lyon , sur les mé-
dailles d'Auguste et de Tibère, qui présentent un intérêt local.
Outre cela on connaît, de l'époque primitive, des monnaies colo-
niales de Cavailhon, Mmes, Vienne, Lyon, et de la ville de Rus-
cino, qui a donné son nom ù la province de Roussillon, et sur les
débris de laquelle Perpignan s'est éle^é.
Les monnaies de certains empereurs qui n'cnit régne que sur la
Gaule, tels qu'Albin, Tétricus, Victorin, Marins, Postume, etc.,
sont évidemment l'œuvre des artistes gaulois. On remarque avec
surprise, à l'époque de Tétricus et de Postume, la grande supé-
riorité des monnaies fabriquées en Gaule sur celles de Valérien,
de Gallien et des autres princes qui possédaient alors l'Italie.
On distingue les pièces d or en médaillons et mnlailles. Les
médaillons sont des pièces excédant le minlule ordinaire, d'un
poids supérieur à la monnaie courante , et qui , fabriquées en
petit nombre, pour des occasions solennelles, n'ont probablement
jamais été mises dans la circulation.
Les médailles d'or du module de Vaureu», et qui plus tard ont
servi de modèle au solidas, ou sou d'or des empereurs earlovin-
giens, ont été si multipliées dans notre pays, <|u'au commence-
ment de la troisième race elles figuraient encore au nombre des
monnaies courantes. Les grands bronzes de fabrique romaine con-
tinuent, dans le Midi de la France, d'être reçus pour In valeur
d'un décime.
Le sol de la Gaule a fourni à diverses reprises des médaillons
très-rema«iuables. Ceux qu'on avait découverts a Cherbourg et a
Boulogne-sur-mer avaient surtout fixe l'attention. Il ne reste plus
de ces précieux monuments ([u'un des médaillons trouves a Cher-
bourg.
La tête de I^a>lianus, l'un des trente tyrans dont la vie a été
écrite par Trébellius Polliou, peut être considérée comme la plus
rare de celles qui appartiennent en propre a la Gaule ; on dis-
tingue ensuite, par ordre de rareté, celles de Marins, de Victorin.
de Tétricus le fils, d'Albin, et les beaux revers de Postume re-
présentant les travaux d'Hercule.
On ne doit nullement se régler, pour l'argent et le bmn/.e. sur
les raretés de l'or. Telle tête précieuse en or, par exemple celle dt
Tétricus le jière, se rencontre par milliers en argent, ou plutôt en
bronze muci. En général, on ne doit s'attacher, tant dans largent
(|ue dans le bronze, qu'aux médailles dune Iwnne conservation, a
Celles dont les légendes et les types sont lisibles : les autres
n'offrent ni intérêt, ni valeur.
Pour l'acquisition et le classement des médailles, les collecteurs
(les départements se règlent avec raison sur le livre de M. Mion-
net, intitulé Du prix c( de lu rareté de* médaillex romaines. Mais
beauccnip, faute d'avoir lu avec l'attention convenable lesobserva-
li(nis dont ce livre est précédé, ignorent comment on doit faire usage
des descriptions et des évaluations de M. Mionnet. Il fant toujours
se rappeler, en prenant ce livre :
1" Que tout revers non décrit par M. Mionnet est commun, et
par conséquent n'augmente pas la valeur attribuée a la tête:
2" Que pour toutes les pièces dont l'évaluation ne s'eleve pas
301
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
^»i
jiu-dessus du taux moyen, cette valeur même ne peut être attri-
buée qu'fiux échantillons dont la conservation est parfaite.
La chance des fouilles peut, il est vrai, donner un revers ou
une tète entièrement nouveaux. Mais d'abord ces occasions sont
infiniment rares; puis, pour quiconque a quelque peu manié les
médailles romaines, les types inconnus présentent quelque chose
d'insolite qu'on ne saurait confondre avec les types vulgaires. En
cas de doute on fera bien de ne pas s'en tenir à l'ouvrage de
M. Mionnet, et si l'on n'a pas à sa disposition la doctrine d'Eckhel,
on devra consulter les anciennes collections de Tristan, de Vail-
lant, de Morell, de Banduri, de Beauvais, etc., moins rares dans
notre pays.
Il est utile de noter avec soin, dans toutes les découvertes de
médailles, même les plus communes, jusqu'à quelle époque re-
montent les pièces les plus anciennes, et jusqu'où descendent les
plus modernes. Dans toutes les fouilles de monuments antiques,
les médailles sont l'indice le plus sûr des limites chronologiques
dans lesquelles se sont prolongés l'usage et la fréquentation des
édifices.
Les médailles, comme les autres monuments de métal , sont
exposées non-seulement à être détruites par la fonte, mais encore
à être altérées par des nettoyages ou des restaurations miilhabiles.
On peut tracer à cet égard quelques règles dont l'application ne
présente aucun inconvénient.
Les pièces d'or peuvent être soumises à l'action de l'eau-forte;
c'est un moyen sur d'en enlever le tartre , et de leur rendre leur
fraîcheur primitive , sans leur faire subir la moindre détério-
ration.
L'argent, très-souvent altéré dans le sein de la terre par une
oxydation profonde, ne supporte alors d'autre mordant que le jus
de citron ou une dissolution très-étendue d'ammoniaque. Ces
substances opèrent lentement, mais à coup sûr.
Tous les acides ou alcalis, même les plus faibles, altèrent le
bronze. Pour nettoyer les pièces de ce métal, on n'a d'autre res-
source que les agents mécaniques. L'emploi de ces agents récla-
mant une habileté et une expérience particulières, on recommande
a ceux qui découvrent des monuments antiques de s'abstenir com-
plètement de tout nettoyage des bronzes.
Les jmtines ordinaires, et surtout les patines vertes, les plus
communes dans notre pays, n'ont rien à craindre de l'emploi de
l'huile. On peut faire usage de ce préservatif quand la surface du
monument est ferme et d'un beau poli; on doit s'en abstenir com-
plètement si la patine est friable ou sujette à l'exfoliation, si un
séjour dans un terrain volcanique lui a donné cet aspect bleuâtre
et grenu qui est le propre des monuments découverts aux environs
du Vésuve.
L'huile siccative, au contraire, doit être immédiatement appli-
((uée aux plombs, qu'elle empêche de se réduire en pous-
sière.
Les vases (jui portent une couverte métallique se nettoient
convenablement à l'eau seconde.
La surface des terres cuites, offrant souvent des Jraces d'en-
duit et (!e peinture, doit être lespeetée avec le plus ^rand scru-
pule.
Nous ne pouvons terminer ce qui concerne les monuments
romains sans appeler l'attention sur les découvertes propres à
eclaircir l'histoire des procédés que les anciens ont appliqués aux
ouvrages d'art. Cavlus a décrit les vestiges d'une fonderie an-
tique (i), trouvés en 1737 au revers de la colline de Montmartre;
Grivaud de La Vincelle a fait connaître l'existence de fours à
potier découverts dans les jardins du palais du Luxembourg, et
consacrés à la fabrication de vases gallo-romains (2). Les débris
d'ateliers monétaires, et les coins qu'on y rencontre parfois, les
moules en terre cuite qui ont servi dans les camps à couler des
deniers romains sous les règnes de Septime Sévère et de ses fils, ne
doivent pas moins fixer l'attention ; rien ne saurait être minu-
tieux dans l'étude et la description des usines antiques.
CIVIL1S.\TI01N CHRETIEiNiXE.
MONUMENTS FIXES
l'itEMli:ilH PARTIE. — MOMME.\TS HHKilIlX.
STVI.I-: I.ATIX.
Première périmlc. — lh'|iiiis les premiers siècles du Chrisliaiiisiiie juiiqu'au M' siècle (iti.
ÉPOQIJE MÉROVINOIEiNNE.
Lorsque sur le sol des Gaules les Romains construisaient la plu-
part des monuments religieux, civils et militaires, décrits dans les
instructions précédentes, une religion nouvelle s'élevait à côté du
paganisme, qu'elle devait renverser un jour. Poursuivis de toutes
parts au nom des empereurs et de leurs préfets, les premiers apôtres
chrétiens ne purent songer à construire; aussi les persécutions qui
ensevelirent les premières cérémonies religieuses dans les catacom-
bes de Rome et de l'Italie en général, produisirent-elles des effets
analogues dans les Gaules ; plus d'un évèque assembla les fidèles
dans des réduits souterrains formés par la nature ou produits par
une industrie antérieure.
Ces lieux obscurs et isolés ne purent offrir aux pompes reli-
gieuses une étendue qui leur permit de se développer ; à peine trou-
vait-on dans ces cryptes la place d'un autel et celle que devaient
occuper quelques fidèles. Aucun style d'architecture ne décorait
encore ces étroits sanctuaires ; de faibles essais de peinture y re-
traçaient d'une manière barbare le Christ et sa mère, les iniaues
des apôtres et des premiers martyrs.
11 est peu de villes anciennes qui n'aient garde le souvenir des
persécutions, et qui ne renferment quelque saint lieu consacre par
le sang des chrétiens. Lorsque ces s<juterrains présenteront seule-
ment des excavations pratiquées dans la roche et n'auront aucune
trace de maçonnerie, MM. les correspondants en relèveront le plan
avec soin à la boussole, en indiquant les divers niveaux du ter-
rain, en examinant si dans les niches ou refoui llements des pa-
rois, des bancs étendus ou des sièges isolés n'ont pas été pn»ti(|ues
dans le massif. Si quelques traces de sculpture ou de peinture,
d'inscription et d'ornement, sont conservées sur les parties travail-
lées de la montagne, on tes étudiera avec soin; on recherchera les
(1) liecueil d'antiquités, loin. H, p. 390, il loin. III, |>. 392-9j.
(2) A ntiquilés gauloises et romaines, recueillies dans les jardins du palais
du sénat. Paris, 1807. In-i» cl allas iii-fol.
(3) Voir Ifi Cours a'aiiliqiiilfe clirélicimes de M. <l« Cauiiioiil.
203
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Mi
issues bouchées par des blocs de pierre, qui pourraient conduire à
quelque catacombe, ossuaire ou charnier, pratiqué dans un caveau
contigu. On devra chercher sur le sol l'emplacement que pouvait
occuper l'autel, soit qu'il ait été conservé dans la roche, soit qu'on
l'ait placé après le travail d'excavation.
Si la crvpte se développe au point de former plusieurs nefs, on
indiquera sur le plan la direction de ces nefs, leur orientation, les
chapelles qui s'y rattachent, les moyens employés pour leur don-
ner de la lumière. On pourra trouver des traces du bassin destiné
nu baptême par immersion, et les rigoles pour y conduire les eaux
et les détourner après la cérémonie. Les traditions populaires atta-
chées à ces premiers monuments du christianisme doivent accom-
pagner les dessins et les notes explicatives de l'état des lieux.
Si des travaux de maçonnerie se présentent dans ces voûtes
souterraines, on y reconnaîtra la fabrication antique à la présence
des briques alternées dans du moellon piqué avec soin et bien ap-
pareillé.
Lorsque la persécution présenta moins de rigueur, on osa con-
struire quelques enceintes sacrées devant ces grottes converties en
sanctuaires. Ces constructions, le plus souvent exécutées à la hâte
et sans les ressources de l'art de bâtir, présenteront plus d'une ob-
servation utile à consigner; on y pourra reconnaître plusieurs épo-
(|«es dans la maçonnerie, souvent refaite en partie, ou modifiée
dans ses formes générales.
Les apôtres et les martyrs, soumis à la loi qui fit placer les cime-
tières hors des villes romaines, furent ensevelis d'abord loin de
l'enceinte, dans le lieu des sépultures communes ; un tombeau leur
l'ut consacré ; il devint un point de réunion pour les fidèles. Sur ces
monuments ou mémoires s'élevaient des chapelles de peu d'éten-
due; la sépulture conservée sous l'autel y prit le nom de tnarlyrium
ou confession. C'est donc à quelque distance des anciennes en-
ceintes de villes que MM. les correspondants doivent diriger leurs
recherches pour trouver les fondations pieuses de l'Église primi-
tive. L'aftluenee du peuple fit bientôt augmenter la superficie des
premiers édifices ; auprès d'eux s'élevèrent des chapelles secondaires
qui formèrent un ensemble où l'on doit reconnaître l'origine des
basiliques, des abbayes et de leurs dépendances.
Du jour où Constantin permit au christianisme de sortir des ca-
tacombes, les temples s'élevèrent sur toute f étendue de l'empire,
une ère nouvelle s'ouvrit pour les arts, et l'architecture religieuse
piituaissance. Mais l'antiquité exerça d'abord une grande influence
sur les travaux des premiers chrétiens.
Cet art se divisa bientôt en deux rameaux bien distincts : le pre-
mier, qu'on peut appeler style latin, fut adopté par l'Eglise latine,
se développa grandement dans Rome, et se répandit dans le Kord
de l'Italie, dans les provinces illyriennes, l'Allemagne, les Gaules
et l'Espagne, enfin dans tout l'empire d'Occident. Basé sur les
principes sages de la construction antique, il fut adopté par les
Goths, les Vandales, les Lombards, dans toutes les provinces sou-
mises par ces peuples barbares L'imitation presque servile des dé-
tails de l'architecture romaine caractérise cette première période.
L'autre style primitif, formé de même d'éléments romains, et trans-
planté à Constantinople, y prit sous le ciel de l'Orient une phy-
sionomie particulière qui lui valut le nom d'architecture byzantine;
introduit en France par des relations fréquentes avec Byzance, ce
st\ le, riche en inventions nouvelles, ne fut chez nous qu'une im-
portation.
Après les dévastations dont la France fut le thcî\tre pendant
les VIII' et IX" siècles, on dut songer à réparer les pertes causées
par la guerre. Les basiliques latines étaient incendiées, mais on
n'avait pas oublié leurs dispositions premières, consacrées par les
usages et favorables aux cérémonies ; on reproduisit donc le plan
latin. Quant aux chapilcîjux, aux entablements transmis par l'anti-
quité à l'architecture latine, ils avaient disparu pour la plupart;
dans les provinces méridionales, de nombreux monuments païens
servirent encore de modèles, mais partout ailleurs il fallut créer
ou s'inspirer de formes étrangères.
C'est alors que les chapiteaux cubiques créés en Orient, les mou-
lures profondément dessinées à l'instar de celles des Grecs, les
coupoles et les pendentifs inventés à Byzance, vinrent se lier aux
dispositions latines pour former un style mixte nommé architec-
ture romane.
Affranchis des règles de l'antiquité, les artistes chrétiens se li-
vrèrent alors à toutes les combinaisons de l'art de bâtir; ils éle-
vèrent les voûtes des temples à une hauteur prodigieuse, inventè-
rent des nervures pour les rendre durables, des contre-forts et des
arcs-boutants pour les soutenir; et lorsque l'ogive, plus élancéi;
que le plein-cintre, plus vigoureuse par la combinaison de ses cla-
veaux, vint s'associer aux inventions antérieures, on vit naître un
quatrième système nommé style ogival ou gothique, développe-
ment de tout ce qui l'avait précédé, dernière période de l'art chré-
tien.
Ces différentes phases de l'architecture seront développées dans
les instructions suivantes jusqu'à l'époque de la Renaissance, que
caractérise le retour aux formes consacrées par l'antiquité.
Premier ijrstime d'architecture chrétienne.
BASILIQUES LATINES [i).
PLA^s.
La forme des basiliques primitives fut longtemps variable. « t
ne devint fixe qu'après la stabilité de l'Église. L'isolement, les in-
(luences locales, l'absence d'unité, contribuèrent plus d'une fois a
faire adopter des dispositions incommodes, étroites et {teu conve-
nables au but qu'on se proposait. L'église latine n'offrait point
l'ensemble et la puissance qui la caractérisa plus tard, et les con-
structions religieuses étaient loin de présenter encore ces vastes
conceptions au.vquelles s'intéi-essait toute la chrétienté, et qu'éle-
vaient des populations entières. Constantin lui-même avait donne
l'exemple de cette irrégularité qui régna d'abord dans la disposi-
tion des églises; à Rome, à Constantinople, dans la Palestine, il
avait consacré des temples dont le plan était indifféremment un
cercle, un polygone ou un parallélogramme.
Quelquefois même ces formes se combinèrent entre elles, et plus
(l'une basilique primitive présenta une nef carrée précédant un
sanctuaire complètement circulaire. Le temple élevé par Perpétuus
sur le tombeau de saint Martin, auprès de Tours, fut, sur le sol des
Gaules, le plus bel exemple de celte disposition curieuse, inspine
peut-être par un souvenir du Saint-Sépulcre.
(1) Pour l'élude des basiliques lalinos, nous renvoyons nos lecleurs au pre-
mier volume de celle Revue, où il irouicra la question irail^e avec des (K'volop-
menls, des détails, et des illustrations que le cadre et l'objet même des Instrw ■
lions ministérielles ne pouvaient pas comporlcr. (Xole de M. Ccsar Uiily '
206
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
20«
Enfin des absides demi-circulaires appuyées contre les murs des
basiliques allongées, ou sur les pans coupés des temples en poly-
gone, complétèrent les éléments des premiers plans chrétiens.
Mais, lorsque les cérémonies furent établies sur des règles cer-
taines, on sut bientôt reconnaître parmi ces formes variées celle
qui convenait le mieux au nouveau culte, et, dans tout l'empire
d'Occident, la plupart des églises s'élevèrent sur un parallélo-
gramme (l)
Baptistères.
Devant les basiliques primitives, extérieurement à Yatrium, et
quelquefois aussi dans son enceinte, s'élevait un petit édifice in-
différemment carré, circulaire, hexagone, octogone, ou en forme
de croix grecque : il était destiné aux cérémonies du baptême.
Fiy. 50
Fig. 51.
Fig. 52
Fig. 53.
Au centre, un bassin profond prenait, le plus souvent, la forme
de l'édifice, sous l'invocation de saint Jean-Baptiste. On y rece-
vait, de la main de l'évêque, le baptême par immersion. Les caté-
chumènes étaient plongés dans la cuve, qui se remplissait par une
rigole souterraine, et se vidait par le même moyen. Le bassin était
souvent environné d'une galerie de colonnes destinées à porter le
plafond ; une ouverture éclairait l'édifice par le haut ; les bancs des
catéchumènes se plaçaient autour à l'intérieur. Vis-à-vis la porte
d'entrée, placée en regard de celle de la basilique, l'image de saint
Jean présidait à la cérémonie. Les baptistères, peu commodes en
raison de leur distance du temple et de la position qu'ils occupaient
relativement à l'axe de Yatrium, furent quelquefois rattachés à
l'ensemble de l'édifice par des portiques. On les établit encore sur
la face latérale des basiliques, pour éviter les inconvénients qu'ils
présentaient devant l'entrée principale.
Plus tard, la fontaine du baptême fut introduite sous le porche,
qui prit le nom de catéchumène , puis dans l'enceinte même de la
basilique, où elle occupa une chapelle particulière dans les nefs la-
térales. Ces diverses positions des fonts de baptême doivent être un
sujet d'étude pour MM. les correspondants.
Les formes variées auxquelles fut soumis le bassin destiné à la
cérémonie n'offriront pas moins d'intérêt que les diverses places
qu'il occupa au dehors ou au dedans de l'enceinte des édifices sa-
crés. A l'origine du christianisme, on fit usage de cuves en granit
ou en marbre, qui, dans l'antiquité, décorèrent les bains publics;
mais, loin des grandes villes, on dut y suppléer par une construc-
tion facile. Des tablettes de pierre, bien jointes, furent disposées en
polygone ou en carré; dressées autour d'une aire en béton qui de-
(1) Reproduire ici ce que contiennent les Instructions sur les plans, les élé-
vations et les (lélails des basiliques latines, serait répéter ce qui a été décrit
d'une manière heancoup plus étendue et plus complète dans le premier volume
de cette Revue. Nous y renvoyons encore une fois nos lecteurs, qui y trou-
veront une série de dessins et de plans que ne donnent pas les Instructions.
(.Yole de M. César Daly ]
vint le fond de la cuve, elles formèrent un bassin asse^ grand pour
contenir plusieurs personnes à la fois. Les marches disposées au-
tour permirent d'entrer plus facilement dans l'eau.
Fonlt baptismaux.
Fig. 56.
La sculpture d'ornement et les incrustements en marbre cou-
vrirent les faces extérieures du bassin. Souvent sur ces pierres de-
bout, de petites colonnes furent placées aux angles pour fixer une
clôture.
Fig. 57.
Lorsqu'on abandonna l'usage de plonger les catéchumènes dans
le bassin, il se ferma par un couvercle mobile qui permettait, au
moyen d'une ouverture étroite, de puiser avec un vase l'eau du
sacrement ; cette mutation dans le rite conduisit à resserrer la cuve,
et à la réduire au point où nous la voyons de nos jours.
L'architecture des baptistères, en harmonie avec la décoration
des basiliques, fut soumise aux mêmes conditions. Dans les grandes
villes où les édifices païens présentaient de riches matériaux, ces
monuments furent décorés avec leurs dépouilles : les colonnes en
marbre, les portes de bronze, les pavés en porphyre, s'allièrent aux
mosaïques et à la peinture. Dans les villes «econdaires, les mu-
railles nues furent élevées jusqu'à une hauteur suffisante, sans
autre décoration que les fenêtres qui éclairaient l'édifice; une sim-
ple charpente couvrit ces baptistères isoles. Dans le Mown-Age on
leur appliqua les perfectionnements apportés dans l'art.: ils furent
soumis à tous les styles d'architecture qui se succédèreut«n Eu-
rope.
AtTF.LS ET Ciboires.
Lautel des basiliques latines est ordinairement un tombeau en
marbre, en granit ou en porphyre; la forme est celle dune cuve
ou d'un sarcophage carré. Enlevés aux édifices païens, ces monu-
ments, qui renferment les reliques des saints martyrs, sont sou-
-207
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
MS
\ent décores de sculptures chrétiennes, exécutées dans le style an-
tique, et ajoutées après coup. Sur la table sont gravés les attributs
(lu christianisme : l'alpha et l'oméga, le labarum, la palme, etc.
Fig. 58.
\u-dessousde l'autel est pratiquée une petite case voûtée, ou-
verte, dans le sens de la nef; c'est le marlyrium ou confession,
destiné il contenir les reliques des martyrs. Ce lieu est décoré avec
l)paucoup de luxe, et prend quelquefois un développement tel,
(ju'on y descend par un grand nombre de marches, disposées en
avant ou sur les côtés de l'autel ; il devient alors une crypte des-
tinée à rappeler les souterrains des catacombes. Le Moyen-Age
donna au marlyrium assez d'étendue pour en faire une église sou-
terraine, presque aussi vaste que celle qui s'élevait au-dessus du
sol.
Les cryptes primitives se présentent sous des dimensions res-
treintes; elles peuvent être voûtées ou simplement formées de
grandes tables de pierre ou de marbre, dressées et superposées de
manière à rappeler les plafonds des carrières qui servirent de sé-
pulture aux premiers martyrs.
Cfborium.
Fig. .59
Aux quatre angles de l'autel principal, ou maitre-autel, s'élèvent
des colonnes précieuses, surmontées de chapiteaux et d'un enta-
blement en marbre formant un dais au-dessus de la sainte table ;
cette décoration est le ciborium. On y prodigua, dans les premiers
siècles du christianisme, tout le luxe des métaux et des pierreries ;
les plus anciens, décrits par les auteurs, étaient surmontés d'un
fronton ; on sait qu'il en existait aussi de couronnés par quatre pe-
tits arcs, un sur chaque face de l'autel.
Les basiliques latines présentent, en avant du sanctuaire, un es-
pace carré, entouré d'une clôture en marbre, richement ornée de
mosaïque et de sculpture; cette enceinte forme le choeur. Des
bancs en marbre y sont consacrés aux clercs ; un riche pavé dé -
core le sol. Les ambons destinés à la lecture de l'épitre et de l'é-
vangile s'élèvent sur les faces latérales de la clôture. Construits en
marbre ou en pierre, ces ambons présentent d'un côté un pupitre
élevé que supportent de petites colonnes, et auquel on arrive par
plusieurs degrés; de l'autre côté est une chaire à laquelle on monte
par deux escaliers. Auprès de cette chaire, sur un des pilastres qui
la décorent, s'élève une colonnette enrichie de mosaïques : elle est
destinée à porter le cierge pascal (l),
Ambon.
DU (H.41IFFAGE ET DE LA VK.NTILATION.
FOURNEM DE (.1 ISINE l'OI H LES COLLÈGES, LES Hôl'n \r\ , ETC.
La cdlIcclioM d'appareils et de fourneaux (|ue nous a\oiis com-
binés pour le service de la cuisine se compose de plus de cinquante
modèles différents. Celte collection ne peut trouver place dans cette
Revue ; nous donnerons seulement deux planches, l'une d'un four-
neau destiné à l'usage des collèges, hôpitaux, communautés, pen-
sions, a tous les grands établissements enfin; c'est celle dont nous
allons donner la description. L'autre se composera de fourneaux
de cuisine de maisons particulières, et sera l'objet d'un prochain
article.
C'est après avoir fait de nombreux changements et d'importants
perfectionnements aux appareils que nous avons successivement
établis, que nous sommes arrivé à la combinaison de ce fourneau,
au moyen duquel se fait l'emploi le plus utile du combustible, et
qui présente toutes les facilités désirables pour le service.
Description du fourneau de cuisine.
La Fig. I, PI. 12, représente le fourneau vu de fece ; la Fig. i',
(1) Celte première Instruction se termine par un cliapitre sur le styto
byzanUn , que nous ne reproduirons pas ici par la même raison qui nous a
fait retranclicr la plus grande partie du cliapitre consacré à IVludc Un style
latin. Ceux de nos lecteurs qui voudront consulter le premier volume de cette
/ieiue, y trouveront une élude sur le style byzantin beaucoup plus complète
que ne l'est celle des Inslrucliont.
Nous avons reçu d'un de nos confrères une lettre relative à quel ,ues passage»^
de V Instruction que nous achevons aujourd'hui. Nous comptons donner cette
j lettre dans notre prochain numéro. {Note de M. César Daly.)
âO»
REVUE DE LARGHITECTUllE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
210
le [liai) (lu fournenu fait au niveau de la plaque supérieure. La
Fig. 3 est la vue latérale du cùté de la ligne xx', et la Fig. 4
donne la vue du eèté opposé y y' [ Fig. 2 ).
Ce fourneau est divisé, à proprement parler, en deux parties,
l'une antérieure, A. B, (', D, (jui est le fourneau proprement dit;
l'autre postérieure, /{, //, E, où se trouvent l'étuve et la chau-
dière.
Toutes les faces verticales du fourneau sont en fonte; l'intérieur
est en briques; la partie postérieure est également revêtue de
fonte dans les fourneaux que nous construisons maintenant. Une
plaque A A... [Fig. 2), également en foute, recouvre le fourneau.
La construction intérieure en briques , dans laquelle sont mé-
nagés lescarneaux à fumée nécessaires au ciiauffage des bassines,
du four, du grilloir et de toutes les autres parties du fourneau ,
concentre la chaleur sur les joints où elle est nécessaire, et empêche
les plaques des côtés de trop se chaufl'i'r et de rendre ainsi le ser-
vice pénible pour le cuisinier.
La plaque A yl est percée de trois ouvertures. (Vvy. Fig. 2.) Deux
ouvertures rondes sont destinées à recevoir, l'une la marmite à pot-
au-feu li, l'autre la bassine à légumes C; la troisième ouverture,
qui est carrée , et qui se trouve au-dessus du foyer principal, est
bouchée par de petites plaques en fonte D. Ces plaques peuvent
être remplacées facilement quand elles ont été brûlées par l'action
de la chaleur. C'est sur cette partie D du fourneau que se fait la
préparation des mets qui exigent une température très-élevée. Les
petites plaques D peuvent être enlevées et remplacées par une
troisième marmite quand les besoins du service l'exigent.
T, robinet à colonne et à col de cvgue pour verser l'eau dans
toutes les bassines et marmites qui sont sur le fourneau, r , ro-
binet d'arrêt qui empêche qu'on ne verse de l'eau sur le fourneau
en fermant le col de cygne.
/ ( Fig. 1 ) est la porte du foyer principal ; K, la porte du
cendrier.
M I Fig. 3 ] est la [mite d'un foyer additionnel destiné à chauffer
la mai'mite à pot-au-feu avant la préparation des autres aliments.
N est la porte du cendrier. G est un grilloir à cùtelettes , dis-
posé de manière à faire sortir par la cheminée les vapeurs qui
se dégagent pendant la cuisson.
/' i Fig. 4 ) est un four pour les rôtis et la pâtisserie ; au-dessous
est établi un petit foyer 0, dans lequel on peut brûler quelques
morceaux de charbon pour donner plus de couleur aux grosses
pièces cuites dans le four.
Deux petites portes à coulisses se trouvent , l'une sur la porte
du four, l'autre dans la plaque du fond (|ui le sépare du conduit
a fumée. On peut donc établir dans le four un courant d'air qui
entraine la vapeur qui se dégage pendant la cuisson , et qui donne
aux viandes cuites de cette manière l'apparence et les qualités (|ui
caractérisent les rôtis cuits à la broche.
La cuisson des autres aliments s'effectue dans des casseroles
placées sur la plaque A , qui les chauffe plus ou moins, suivant
la position qu'elles y occupent.
Dans la construction en briques, qui forme la partie postérieure
du fourne lu , se trouvent :
1" Une étuve E, chauffée par les produits de la combustion,
qui circulent autour d'elle avant de se rendre dans la cheminée.
C'est dans cette étuve qu'on maintient chauds les plats préparés
avant l'heure des repas;
2° Un ré^ervoir à eau chaude //, fournissant par le robinet R
l'eau nécessaire aux besoins de la cuisine, et dont la capacité est
telle, qu'il peut servir en même temps à la préparation des bains
entiers et des bains de pieds. Un tuyau (lui n'est pas figuré sur le
dessin conduit l'eau chaude à la salle de bains. '
Un petit foyer L ( Fig. 3 ) permet de chauffer ce réservoir quand
on a besoin d'eau chaude le matin a>ant d'allumer le fourneau ,
ou le soir, quand il est complètement refroidi.
Le foyer principal, quand il est en pleine activité, dégage assez
de chaleur pour chauffer foules les parties du fourneau. Des re-
gistres en fonte, placés sur les côtés, permettent d'obtenir une
égale répartition de la chaleur dans le fourneau, ou de faire va-
rier la température d'un côté ou de l'autre, suivant lu nature des
mets que l'on préi»are.
Pour enlever les vapeurs qui se dégagent des bassines ou des
casseroles, il est bon d'étid)lir au-dessus du fourneau une hotte
qui communique avec une grande cheminée, dans laquelle il s'é-
tablira toujours une ventilation naturelle. Il vaut mieux encore
faire monter dans cette cheminée le tuyau a fumée du fourneau ,
dont la chaleur activent encore le tirage, qui n'est jamais trop
considérable.
Nous avons établi sur ce modèle les fourneaux de cuisine des
collèges d'Amiens, d'Avignon, de Bastia, de Clermont, de Douai .
de Limoges, de Lyon, de Metz, de Moulins, de Nîmes, d'Orléans ,
de Rhodez, et avant ceux-ci les fourneaux de Bordeaux, de Bourges,
de Montpellier, de Nantes, de Pau, de Poitiers, de Toulouse et de
Versailles, qui sont moins perfectionnés que celui que nous venons
de décrire.
Les dimensions de ces fourneaux varient avec le nombre des
personnes auxquelles ils sont destinés. Nous avons quatre modèles
de différentes grandeurs (l), mais on comprend qu'il est facile de
modiliei- chacun de ces modèles de manière a le rendre applicable
à la préparation de mets plus abondants ou plus varies que ceux
qu'on prépare dans les collèges. Il suffit d'allonger la partie anté-
rieure du fourneau de manière à pouvoir placer, derrière les deux
marmites représentées sur le dessin, deux autres bassines ou une
bassine et un hain-marie.
Celte dernière disposition convient surtout aux hôpitaux, pour
lesquels il est quelquefois encore préférable de n'ajouter qu'un sh-uI
bain-marie de grande dimension, qui prend alors une forme al-
longée, et s'élève devant la partie postérieure du foiu'ueau sans
gêner le service des autre parties.
Nous avons construit sur différents modèles des fourneaux
d'hôpitaux qui sont d'un service également facile, et qui fouctiuu-
nent avec économie dans les hôpitaux des Enfants trouvés d'An-
goulème, de Chàteaudun, de Gisors, de Vernon, etc., etc.
Eq font)-. En ToDU «*rc baguette rticaivr»
(1) N° 1 pour 150 personnes, 1800 fr. 2000 Ir.
2 _ 200 — 2000 2200
3 — 250 — 2Î00 2400
J _ $00 — 2i00 WOO
Les pièces en cuivre se paient à pan.
Il faut tl'ordinaire une niaruiilc pour le pot-au-feu, lieux bassines pour le^
ragoûts, et un réservoir i eau cliaude contenaut SOO litres. Le prix du cuivre
est approximativeuicnt :
Pour le N" 1 500 fr.
2 550
3 600
A 700
T V. »^
215
RKVUE DE LARCHITKCTURK ET DES IRAVAUX PUBLICS.
216
denier, pour dissimuler lirréguUtrité de la place du Carrousel , la
divise en trois cours dinégales o;,}indeurs; il établit, devant
chacun des palais, une cour reclnn-uiaire qui débouciie sur une
grande cour centrale de forme elliptique et largement ouverte aux
extrémités du grand axe: de cette manière, les promeneurs de la
cour centrale jouiraient de la vue presque entière des façades du
Louvre et des Tuileries; les regards ne seraient plus choqués du
défaut de pnrallélisme entre les ailes qui réunissent les deux palais;
et la façade intérieure de chacune de ces ailes, dont l'architecture
est si disgracieuse, se trouverait a peu près cachée par les deux
grandes galeries formant les côtés de la cour elliptique du centre.
L'emploi de la forme courl.e, pour dissimuler le non parallélisme
des bâtiments, est, suivant nous, une idée susceptible d'être heu-
reusement dé\ eloppée.
Ajoutons que, dans la solution de cette question si controversée,
il importe de ménager à traveis la place du Carrousel des passages
extrêmement larges et faciles pour la circulation publique. C'est
la un besoin d'autant plus impérieux, que le nombre des voitures
s'accroît tous les jours, et que celte masse immense des deux palais
avec leurs vastes cours et le jardin des Tuileiies, interposée entre
les deux grandes fractions de la ville (la rive droite et la rive
gauche), obligea de longs détours, rend ainsi les communications
difficiles, et entraîne une perte de temps et de travail fort regret-
table.
Du projet de Fontaine gothique de M. lierthelin [Max).
M. Berthelin (Max) a exposé un projet de fontaine gothique
qu'il propose de faire construire sur la place lîellechasse, en face
de l'église future de Sainte-Clotilde ; c'est une jolie composition
qui montre que l'auteur connaît sa Notre-Dame de Paris. L'en-
semble de la fontaine est d'un effet très-agréable ; mais si M. Ber-
thelin tenait particulièrement à l'emplacement qu'il lui destine,
l'exécution du monument serait menacée d'un ajournement in-
défini ; car le projet de cette malheureuse église de Sainte-Clotilde
n'est pas encore arrêté, bien que M. Gau, comme chacun sait, ait
achevé ses plans depuis longtemps ; bien plus, voilà qu'on nous
assure que les plans de ^L Gau n'ont pas l'assentiment de quel-
ques personnes influentes; il faudrait pourtant bien se décider.
Finalement, si ces plans rencontrent une très-grande résistance,
n'y aurait-il pas moyen d'indemniser l'artiste de ses travaux et
d'ouvrir un concours public où M. Gau serait admis à disputer le
prix? Quand les plans de la future église gothique seront définiti-
vement arrêtés, on sera plus en mesure déjuger de l'à-propos de
la fontaine, que, du reste, M. Berihelin consentirait sans doute
à construire aussi bien ailleurs que sur la place Bellechasse.
Des emljcllissemcnts partiels de la cathédrale de Paris, proposés
par M. Couder {Atnédée). — De l' unité dans les décorations inté-
^y'Xienres.
Les cmliflliiscmenls partiels de la cathédrale de Paris, proposés
par M. Couder» dénotent une imagination chaleureuse et colorée,
mais qu'(m voudrait réglée par un goût plus sévère et plus difficile.
M. Couder nous montre comment il entendrait disposer et décorer
le maitre-autel, la chaire, te banc d'œuvre ; comment il voudrait
costumer les suisses lors des solennités nalionaUs; quelle pourrait
être leur tenue aux fêtes de l'Église. Il a exposé encore un dessin
de bannière de la Vierge et un dais. L'architecture de M. Couder,
nous l'avons dit, n'a pas été assez rigoureusement étudiée. En exa-
minant ses dessins, on reconnaît aisément le pinceau d'un habile
décorateur, mais on y devine aussi l'artiste peu familier avec le
cise.'iu et la pierre de taille. M. Couder manie plus habilement les
étoffes que la truelle; ses suisses ont une allure superbe; les bro-
deries en or et les draperies du dais et de la bannière sont d'un
effet de luxe extrême.
Quelques personnes ont beaucoup ri de cette espèce d'accouple-
ment d'architecture religieuse et de costume de suisse; pour nous,
cette étude simultanée du la déc ration du temple et du costume
des serviteurs de l'Église nous parait non-seulement très-conve-
nable, mais même foit heureuse ; nous nous plaisons à y reconnaître
un besoin A'unité qui fait honneur à M. Couder. Le temple, sans ses
cérémonies, est comme endormi ou mort : c'est lorsque les prêtres
officient revêtus de leurs costumes traditionnels, (|ue des nuages
d'encens se déroulent en montant \ers les voûtes, que les chants
sacrés se marient aux sons de l'ui^u', et qu'un peuple entier s'uuit
dans un même élan d'adoration et de joie religieuse, c'est alors,
et alors seulement, que le temple vit et ((ue l'artiste reconnaît la
pleine réalisation de sa conception. Décorer l'intérieur d'une église
sans tenir compte des costumes des serviteurs du temple et même
du caractère général des costumes des fidèles, ce serait travailler
en dehors des conditions de l'unité; ce serait apporter à la décora-
tion de la maison de Dieu moius de souci qu'on n'en apporte à
embellir l'intérieur d'un théâtre, d'une salle de bal ou de concert.
/>« projet de cathédrale de 3t. tiarnaud. — Le* artiste» oui brsoin
le» uns des autres. — II» devraient n'associer plus fréquemment
pour étudier des projets.
Peut-être ferait-on un médioci-e plaisir à MM. Couder et Gar-
NAUDcn trouvant de l'iiiialosicentre leurs talents; et peut-èlre même
seraient-ils encore moius llattés, si, après leur avoir accordé une
imagination très-riche, très-brillante, on ne leur reconnaissait pas
au même degré la puissance de la raison, la sévérité, la délicatesse
du goût; tel est cependant notre sentiment, et, en l'exprimant ici,
nous croyons rendre un hommage sérieux aux deux artistes. Ne
sommes-nous pas tous, en effet, complémentaires les uns des au-
tres? Tel dont la fantaisie vi\e et riante vient de créer une char-
inaute composition, n'est-il pas souvent heureux de consulter tel
autre, son ami, dont l'esprit, moins agile mais plus tenace, s'est
rendu maître dans le domaine de la science? Y a-t-il quelqu'un
parmi nous qui pui>se se passer du secours de tous les autres? Et
dès lors est-il raisonnable d'ambitionner simultanément toutes les
qualités? Autant vaudrait se faire bon Dieu tout de suite.
Disons-mieux : y eut-il jamais dans le monde, surtout parmi
ce peuple des artistes, tous plus ou moins hommes de sentiment,
de verve et d'inspiration, y eut-il jamais des misanthropes ré-
solus à se tenir absolument à l'écart de leurs semblables? Nous
l'avouons, nous n'avons nulle croyance dans les contes bleus qu'on
débite sur Michel-Ange. Tout artiste a besoin d'applaudisse-
ment, de gloire, de triomphe; il s'inspire à la chaleur de son
cœur, à son ardeur sympathique pour les beautés de la nature, à
l'amour, à l'amitié, aux grandeurs de l'ambition, aux charmes
de la famille ; et lorsque son imagination exaltée lui révèle un
spectacle qui lui parait sublime, il crie à pleine poitrine et ap-
pelle le monde entier à admirer avec lui la création de son génie;
217
RKVUE DK LARCUrrKCTimE KT DKS TRAVAUX PURl.ICS.
■IlH
il vous dira qu'elle est admirable et vous demandera avec un naïf
orgueil de lui rendre hommage. La nature de l'artiste est pleine de
religieuse sympatiiie et de vanité.
Lorsque dans mes promenades solitaires, dit .lean-.Iaeques, je ren-
contre un bel arbre, je me retourne instinctivement pour chercher
un ami, j'éprouve le besoin de dire à quelqu'un : « Voyez le bel
arbre, m Oui, nous avons besoin les uns des autres ; nos instincts,
nos goùls, sont \ariés comme les fondions (|ue l'iiomme est des-
tiné à remplir, .lamais le monde ne connut un artiste également
éminent dans tous les arts, non plus que dans toutes les branches
d'un même art; l'architecture de Raphaël n'est pas d'une supério-
rité bien remarquable, et il trouva à Venise des maîtres pour le
coloris. Que les artistes ne s'offensent donc pas lorsqu'il arrive à
un critique de ne pas leur accorder au même degré toutes les qua-
lités. Si chacun pouvait se passer des autres, la sociélé serait sans
but, et l'affection même serait sans raison.
Il arrive assez souvent de voir deux artistes associer leurs efforts
pour un même projet; c'est tantôtdeux architectes dont l'un est bon
constructeur et l'autre bon dessinateur; c'est tantôt un architecte
et un sculpteur. Nous aimons à rencontrer ces associations, et nous
pensons qu'un jour elles te développeront plus l'égulièrement.
Il est des gens qui disent ne pas comprendre comment un même
travail d'art peut être fait pardeux ou plusieurs personnes associées;
c'est ([u'elles envisagent mal la question. Le germe, l'idée mère
d'une conception d'ait, appartient nécessairement à un seul ; mais
entre ce germe et l'éclosion complète de l'idée, il y a un in-
tervalle énorme qui suppose une élaboration considéiable et qui
peut avoir exigé les connaissances les plus variées, le concours de
plusieurs sciences, de plusieurs industries. Or, ces arts, ces sciences,
ces industries, constituent autant de spécialités et peuvent être cul-
tivés par autant de personnes différentes. Dans le fait, aujourd'hui
même, c'est par le concours de toutes ces spécialités que les projets
s'élaborent le plus souvent et se complètent ; seulement cela se fait
irrégulièrement, et le projet ou le monument est attribué à une seule
personne au lieu de l'être à un groupe dont elle était le chef ou
le directeur général. A la Renaissance, lorsqu'il y avait vrai-
ment des écoles d'art, c'est-à-dire des groupes d'artistes se rat-
tachant à une même doctrine d'art, il était très-commun de voir
plusieurs disciples travailler à une même œuvre sous la direc-
tion du chef de l'école, et s'en distribuer les diverses parties con-
formément aux aptitudes et à l'habileté de chacun. Un de nos amis,
M. William Haussoulier, jeune peintre plein de goût, d'intelli-
gence et d'amour pour son art, s'était proposé de publier un écrit
sur les œuvres de Raphaël, étudiées de ce point de vue. M. Wil-
liam Haussoulier est depuis (|uelque temps en Italie; espérons
qu'une main amie lui fera passer ces lignes sous les yeux, et
qu'elles lui rappelleront un ancien projet dont la réalisation serait
digne de lui it utile aux arts.
La cathédrale de M. Garnaud témoigne des belles qualités et des
défauts que nous avons signalés dans les compositions déjà exposées
par cet artiste aux Salons précédents.
Us monuments d'architecture, par leur nature même, ne sont pas
tous an même deyré des œuvres d'art. — De l'Hôpital projeté par
M. Dttpuy (Dominique-Jean). — Est-Il bon d'accumuler les fw-
pitauar dans les villes?
Il y a des travaux d'architecture qui ont surtout un caractère
d'utilité, et avec lesquels les .sentiments du cœur n'ont pas un
rapport direct : tels sont les marchés publics, les égouls d'une
ville, les halles aux vins , au blé, etc. D'autres, au contraire,
s'adressent directement aux sentiments du cœur : tels sont les
tombeaux, les monuments élevés aux grands hommes, les ares
de triomphe, etc. D'autres, enfin, ont un caractère univers»! :
telles sont les églises, les... Mais nous ne voulons pas faire aujour-
d'hui une classification systématique des différents genres de con-
structions; nous voulons seulement constater que les unes ont sur-
tout pour objet de satisfaire à des besoins de première nécessite,
tandis que d'autres, quoicjue d'un caractère plus élevé, ne sont pas
au même degré l'expression d'un besoin immédiat et absolu; — que
l'expression artistique ne saurait être également élevée dans tous
les travaux d'architecture ; — que les uns sont essentiellement des
œuvres d'art et s'adressent au sentiment et à l'idéal; que les
autres sont essentiellement des œuvres industrielles destinées a
satisfaiie aux besoins de la vie matérielle. Mais ajoutons cpie
tout monument de la dernière espèce, c'est-a-dire simplement
ù'utilité, peut être élevé au degré supérieur, et devenir, dans une
certaine mesure, une œuvre de charme, et même de poésie. On
comprend aisément, en effet, que les marchés publics pourraient
revêtir les aspects les plus variés et les plus agréables; que les h<'i-
pitaux, au moyen de jardins, de parterres de fleurs, de fontaines ou
de cours d'eau, etc., pourraient inspirer un sentiment de bien-être
aux malades , et donner l'espoir d'une santé prochaine à tout ve-
nant : des bas-reliefs à l'extérieur, des peintures à l'intérieur, en
glorifiant les souvenirs de haute charité qui s'attachent à quel-
([ues beaux noms, éveilleraient de bons sentiments dans le cœur
de l'homme souffrant, et fortifieraient sa conliai»ce dans la cha-
rité de ses frères. Mais l'état de nos finances ne permet que ra-
rement de faire qu'un monument d'utilité publique soit aussi un
monument d'agrément public, et trop souvent ce sont les monu-
ments publics qui enlaidissent les rues de nos villes : témoin la
façade postérieure du palais de l'Institut, l'hôpital de la Charité.
sur la rue des Saints-Pères , presque tous les collèges , les caser-
nes, etc., etc. ; mais évitons d'inutiles critiques de détail, et re-
tournons à l'exposition.
C'est un projet d'hôpital que M. Dupuv ( Dominique- Jean a
exposé ; on comprend dès lors le but de la digression qui précède.
Kn France et dans tous les pays du monde civilisé, c'est un usage
généralement adopté d'accumuler les hôpitaux dans les villes.
Nous déclarons ne pas apercevoir l'excellence de ce système. Peut-
être est il fondé sur queiciue bonne raison qui nous échappe en et-
moment ; mais il nous semble qu'il suffirait d'établir dans le^
villes un petit nombre d'hôpitaux pour les malades dont le trans-
port offrirait du danger , pour donner des secours immédiats aux
blessés , etc. , et qu'il serait bon de transporter la grande masse
des malades et des convalescents dans des hôpitaux ruraux situes
au milieu des champs et des bois , où l'air est pur, et où le tym-
pan n'est pas meurtri tout le jour durant par les bruits discor-
dants et mortels de nos villes. Il est vrai que les élèves en mé-
decine n'auraient pas des occasions aussi fràjuentes d'étudier les
différentes maladies qui aftligent l'espèce humaine: mais esl-il
nécessaire d'entretenir la maladie chez les uns pour rechercher Us
moyens de la guérir plus facilement chez les autres? C'est une
question qui mérite examen. Toutefois, nous ne livrons pas ce>
idées comme le résultat d'une longue et sérieuse réflexion ; nous
nous sommes promis, au contraire, de commencer prochai itemenl
219
REVUK DE LAIICHITKCTURK KT DKS TRAVAUX PUBLICS
SÎO
une étude approfondie de la question des hôpitaux , et, en atten-
dant, pour rendre pleine justice à M. Dupuy, nous l'avons prié
de nous communiquer par écrit l'ensemble des raisons qui l'ont
influencé dans la composition de son projet, qui témoigne, comme
on le verra, d'études très-sérieuses et très-persévérantes. Nous fai-
sons graver le projet de M. Dupuy ; nous remettrons donc à un
prochain numéro le mémoire qu'il a bien voulu nous adresser, et
dont la lecture fera certainement grand plaisir à nos confrères.
Du Projet de Mairie de M. Lacroix (Eugène).
La Ville parait désireuse de terminer la placeSaint-Sulpice, dont
un des côtés est déjà occupé par l'église et un autre côté par le
séminaire. On sait que M. Visconti construit au centre de la
place une fontaine qui devra être alimentée par les eaux du
puits de Grenelle ; il ne reste donc qu'à régulariser deux des côtés
de la place pour que l'ensemble soit complet. La Ville s'en occupe,
car elle a acheté l'hôtel Choiselat, sis à l'angle de la place, sur
le côté opposé à l'église, pour y établir la mairie du 11* arrondis-
sement, actuellement située rue Servandoni.
Ce système d'approprier à de nouveaux usages des bâtiments
primitivement construits en vue de services très-différents, est
rarement heureux. On est tout d'abord frappé d'une économie
immédiate, mais on calcule rarement à quel prix déftnitif on l'a-
chète ; les pertes de temps et d'argent, les désordres de toute nature
qui résultent d'une disposition architectonique peu en rapport
avec les besoins du service journalier, sont rarement évaluées à
leur véritable chiffre. Dans une mairie on rencontre plusieurs ser-
vices différents, chacun avec son cortège de bureaux, de salles, etc.,
et il importe au public, dont le temps doit être ménagé, que
les bureaux et accessoires de ces services ne soient pas enchevê-
trés les uns dans les autres, mais que chacun soit au contraire
aisément et directement accessible à tous ceux qu'y appellent
leurs affaires.
Un hôtel de mairie est affecté au service : 1" de la mairie pro-
prement dite ; 2» de la justice de paix; 3" de la garde nationale.
Dans la mairie on doit trouver :
1" le bureau du maire;
2" id. du secrétaire;
3" — des certificats de vie;
4" — du recrutement;
."i" — des élections ;
6" — de la garde nationale ;
7" — des mariages, des naissances et des décès ;
8" la salle des mariages.
La justice de paix comprend :
r une salle d'audience ;
2" le cabinet du juge de paix ;
3" une antichambre;
4" le bureau du greffier;
5" le greffe.
L'élat-majur de la légion réclame :
1" une salle de discipline avec cabinet pour les délibérations;
2" une salle pour le conseil supérieur;
3" un cabinet pour le major;
4° un cabinet pour le secrétaire du major;
.5° une salle des adjudants-majors ;
6" un dépôt d'armes.
Il faut ajouter aux détails des service spéciaux que nous venous
d'énumérer, trois autres éléments qui, sans former partie inté-
grante d'aucune des trois grandes divisions ci-dessus analysées,
doivent cependant exister dans toute mairie, ce sont : une salle
pour les élections, un poste de garde nationale et un logement de
concierge.
Toutes ces divisions doivent communiquer facilement les unes
avec lesaulres, et cependant elles doivent rester distinctes, autant
que possible, pour éviter la confusion.
M. Lacroix prétend, et nous sommes disposé à l'admettre, que
l'hôtel Choiselat ne peut satisfaire à ces données; qu'on serait
obligé de fractionner les services; d'établir une partie de la justice
de paix au rez-de-chaussée et une autre partie au premier étage;
que les bureaux de la garde nationale subiraient un fractionnement
analogue ; qu'il en résultera de la confusion ; que tel qui a affaire
au greffe, et qui veut aussi parler au juge de paix, sera contraint
de monter au premier, de traverser des corridors, où il pourra se
tromper de bureaux deux ou trois fois, et peut-être manquer
l'heure de l'audience; que d'ailleurs l'hôtel Choiselat n'est pas dans
l'alignement de la rue du Pot-de-fer ; qu'on sera donc obligé de
retrancher une partie des bâtiments en aile. Par toutes ces raisons,
assez valables ce nous semble, M. Lacroix a pensé qu'il serait utile
i\ l'arrondissement et digne de l'administration de bAtir une mairie
de toutes pièces et distribuée de manière à satisfaire à tous les be-
soins du programme.
Une autre question qu'il faudrait considérer, et qui sera résolue
dans quelques mois , c'est le prolongement projeté de la rue des
Petits-Augustins, qui traverserait la rue Sainte-Marguerite, la
rue du Four-Saint-Germain , et aboutirait à la rue du Vieux-
Colombier.
Pour mettre cette rue en communication directe avec la rue du
Pot-de-Fer, il faudrait égiwirrir la place Saint-Sulpice, et, par con-
séquent , retrancher une partie des maisons contiguès à l'hôtel
Choiselat. Pour faire ce retranchement, il parait que la Ville doit
acheter tout l'Ilot de maisons compris entre la place Saint-Sulpice,
la rue du Vieux-Colombier, la rue du Gindre et la rue Mézières.
La Ville doit aussi continuer la rue Madame jusque dans la rue
du Vieux-Colombier, et la rue du Gindre, qui en est le prolonge-
ment, serait alors élargie. Tous ces alignements donneraient une
nouvelle vie au faubourg Saint-Germain , et feraient de la place
Saint-Sulpice une des plus belles places de Paris.
Dans son projet, M. Lacroix a profité de tous ces alignements,
et il a placé sa mairie dans l'axe de l'église Saint-Sulpice, avec
entrée sur la place et sortie sur la rue Madame.
M. Lacroix a cru devoir réunir à cette mairie les écoles com-
munales, une succursale de la caisse d'épargne et un bureau de
bienfaisance, toutes choses communes à l'arrondissement et sous
la surveillance immédiate du maire.
Dans son projet, ou trouve, en entrant par la place Saint-Sul-
pice, au rez-de-chaussée, à droite, l'état-major de la garde na-
tionale ; à gauche, la justice de paix ; au fond de la cour, la salle
d'élection ; au premier étage, la mairie proprement dite ; en entrant
par la nouvelle rue Madame, les écoles des filles et des garçons avec
préaux couverts et découverts ; les bureaux de vaccine, de bien-
faisance et la succursale de la caisse d'épargne.
La caserne étant à deux pas, rue du Vieux-Colombier, il n'a pas
cru devoir ajouter un poste de pompiere.
Tout ce travail, bien étudié, bien rendu, mérite l'attention de
331
REVUK DK LARCHITKCTLRK KT DKS THAVAl X PUBIJCS.
232
la Ville, et nous engageons M. Lacroix à faire connaitre son projet
à toutes les notabilités de l'arrondissement qui seraient en mesure
de contribuer à le faire adopter par l'administration.
Du pnijel de Palais de l'Industrie et du, projet d'Hôpital, par
M. Matjne. — Faut-il bâtir un palait définitif punr h s exposi-
tions de r Industrie '.'
M. Magne est un ancien lauréat, et, comme tous ceux qui ont eu
l'honneur de remporter le grand prix, il trouve dans son crayon et
son pinceau deux instruments dociles, qui se prêtent avec une
miraculeuse souplesse et infiniment de charme à exprimer toutes
les conceptions de leur maître. M. Magne a abordé deux sujets
très-intéressants, et qui ont tous les deux la valeur de l'à-propos ;
l'un est un projet de palais p<mr l'exposition des produits de l'in-
dustrie et pour r exposition annuelle des arts; dans l'intervalle de
ces expositions il servirait de bazar; — l'autre est un projet d'hô-
pital pour les convalescents.
Le premier projet de M. Magne se rattache à une question éco-
nomique importante. Les constructions provisoires qui servent dans
l'état actuel à l'exposition quinquennale de l'industrie française se
modifient chaque fois dans leurs formes et dans leurs dimensions :
c'est qu'il faut avoir déjà fait, pour être assuré de bien faire ; c'est
surtout pour l'architecte que l'expérience du passé est le flambeau
de l'avenir. Connaissons-nous bien, à l'heure qu'il est, toutes les
conditions que devrait remplir un palais pour l'exposition de
l'Industrie? Est-il bien suffisant, en effet, de distribuer plus ou
moins régulièrement, sur un grand espace, les mille [jroduits et
inventions du génie français? Ces machines éparses,- inertes, sans
vie et sans mouvement, sont-elles suffisamment compréhensibles?
Ne conviendrait-il pas, par hasai'd, de les faire fonctionner, pour
mieux faire juger de l'aisance et du moelleux de leur mouvement,
du rôle bien déterminé de chacun de leurs éléments ? Une exposition
de l'industrie doit-elle être faite uniquement en vue de la production
et de la consommation actuelle, et ne devrait-elle pas servir paral-
lèlement, et dans une certaine mesure, à l'éducation du peuple, à
l'éclosion des vocations? Il est important de rappeler ici un fait qui
mérite l'attention de nos gouvernants : c'est que, dans le rapport de
la commission de la chambre des communes d'Angleterre, nommée
en vue d'étudier les causes de l'infériorité des arts du dessin indus-
triel dans la Grande-Bretagne comparativement à l'état de ces arts
en France et sur le continent, il y a eu une espèce d'unanimité
parmi les artistes anglais et étrangers consultés à cette occasion, pour
déclarer qu'il fallait attribuer le laffinement généial du goût fran-
çais au grand nombre de musées répandus dans toutes nos villes
et constamment ouverts au public. N'y aurait-il pas une influence
analogue à espérer de nos expositions industrielles, bien conçues et
bien exécutées ? On le voit , les premiers éléments du problème
sont à étudier; oui, les premiers ; car, suivant quelle loi ferait-on
même la distribution des produits? quelles limites conviendrait-il
de donner à l'édifice? etc., etc. Avant de faire une botte, on prend
les mesures du pied, on en étudie les fonctions et les mouvements
nécessaires. Avant de faire un monument, on en étudie les besoins,
et on les écrit sous forme de programme. Or, ici, le programme ne
nous parait pas avoir été suffisamment étudié. Que M. Magne ne
s'offense pas de notre critique, elle laisse intact son talent d'ar-
tiste ; mais la rédaction seule du programme d'un palais définitif
de l'industrie suppose la solution d'une série de questions écono-
miques, administratives, scientifiques et artistiques, des plus diffi-
ciles et des plus ardues. Ce n'est plus ici comme pour un collège,
une église, un théâtre, une mairie, une caserne ; un palais pour les
expositions est un monument sans tradition dans le passé. De\ant
ce travail, l'artiste est réduit presque à ses seules forces; il lui est
impossible de consulter l'expérience, difficile de prévoir les besoins
et le rôle exact de l'industrie dans l'avenir. Les bâtiments pro^i-
soires construits tous les cinq ans ne coûtent pas 400,000 fr. : c'est
80,000 fr. par an. 80,000 fr., à raison de 5 pour 100, corres-
pondent à un capital de 1,600,000 fr. Or, nous le demandons, que
coûterait un palais définitif qui couvrirait 20 hectares de terrain,
comme les bâtiments actuels, ou même davantage, car la quantité
des produits envoyés à chaque exposition croit suivant une pro-
gression des plus rapides? Ne craignons pas de le dire, c'est le
programme qu'il faut étudier et creuser longtemps avant d'alwr-
der la solution architecturale d'un palais définitif des expositions,
et ce programme, nous voudrions le voir étudié par un groupe
d'hommes réunissant plusieurs spécialités.
Toutefois, à la suite de ce qui précède, il est juste d'ajouter les
considérations que M. Magne fait valoir en faveur de son projet.
Son idée de bazar, d'ailleurs, peut conduire peut-être à la solution
de la question économique; car un bazar est une exposition per-
manente des produits de l'industrie, et un bazar peut rapporter
de bons revenus; cependant on ne saurait se dissimuler que cette
transformation offre des difficultés.
« Ce nionuniCMl, d'une coiistruclion dur.tbie, élevé .nu centre des
quartiers commerçaiils de Paris, serait destiné .i recevoir les productions
del'iiidusirie, dont l'exposition revient tous les cinq ans, et leslable.iu\
exposés annuellement an innsée du Louvre; ce qui éviterait l'inconvé-
nienl de masquer, comme on est obligé de le faire, faute d'espace, les
collections dos maîtres de l'Ecole ancienne. Enfin, après la durée «le
ces diverses expositions, celte construction serait convertie en forum
ou bazar, réunissant, pendant toute l'année, des productions itc toute
sorte, classées dans les différentes divisions disposées à cet elTet.
« Une grande cour centrale, ornée dt plantations, «le fontaines,
d'exèdres. et recevant au centre la statue équestre du ron«lateur du
monument, serviraii de lien «le promenades publiques, et ferait de ce
bazar un lien de commerce et d'agrément.
« Jnscpi'à présent Ton avait reculé devant l'établissement d'un nio-
nuuicnt de ce genre; en effet, il n'était point possilile d'affecter nn«-
somme «le plusieurs millions à l'érection d'un palais qui aurait en pour
toute destination l'exposition quinquennale des produits de l'indusirie.
Avec notre programme, toutes les dimcultés s'aplanissent, car la con-
versi«in des salles d'expositions en bazar pendant dix mois de rann«M-
produirait au gouvernement un revenu assez élevé pour qu'on pAiabor-
«ler sans obstacles la question de dépense.
« Des divers emplacemcnis que nous pmposons, l'un des plus conve-
nables est celui qu'occupe l'ilol circnn.scril par le quai Pelletier, les
rues Plancite-Mibray et des Arcis, la me de la Verrerie et la pl.-ice «le
ril«Jtel-de-Ville; en effet, les constructions renfermées dans le cercle
((lie nous venons de tracer sont généralemenl de peu de valeur. Nous
ne préien«lons pas cependant nous en tenir à cet emplacement : Il en
existe lui autre, moins convenablement situé, il est vrai, mais qui réuni-
rail toutes les conditions possibles d'économie quant à l'expmprlaliun.
Il est situé entre la rue Saint-André-des-Arts, le coté giuiche de la cour
du Commerce, la rue de l'Ecole-de-Médetine et les rues du Paon et «le
l'Eperon.
« Nous avons adopté provisoirenuMil remplacement le plus rappnx-hc
du Palais du Louvre.
±2^
REVUE DE l.ARCHITECTLIŒ ET DES TRAVAUX PUBLICS.
00
•Il
Dispositiom générales.
« En regard du quai, se développe une façade d'une longueur de près
delroiscenls mèlres, décorée d'un inagnilique porliqne d'ordre corin-
ihien; au cenlre, l'entrée publique, et aux deux exlréniilés de la cour,
deux vastes entrées pour les voilures et le passage des dilférenls pro-
duits qui devront être exposés.
«Au premier plan, un double portique, l'un de dix nièlns sur la enur,
l'autre de vingtsur le quai, pour la libre eireulalion des visilciirs, don-
nant accès à droite et à gaiicbe aux différentes galeries et aux vastes es-
caliers conduisant au premier élage, oii sont exposés les bronzes, l'orfè-
vrerie, les vitraux et lesobjelsde commerce les plus usuels.
« La façade princifiale, formée dn porli(pie dont nous avons parlé,
reçoit, au dessus de l'eulablernent de l'ordie, un grand atlique décoré
des statues en marbre ou en bronze des bonimes célèbres donl les pré-
«ieuscs découvertes bâtèrent le progrès d<- l'art industriel; Galilée, Gu-
leuberg, Lapeyroiise , Benvcnuio Cellini, l'apin , Peyronnet, Jac-
qnart,elc. ViennenI ensuite, sous le soflile de l'ordre Inférieur, les génies
de second ordre, avec la représenlalion des productions remarquables
qu'ils ont exposées.
« D(!rrière celle galerie, s'élève, au second plan et au premier élage,
un portique qui règne au pourtour de la cour, servant de cominunica-
lion entre les <liveiscs galeries d'exposition.
« La cour ceuirale, de forme carrée, offrant un développement de plus
de cent mètres sur cbaque face, esleniourée de portiques simples sur
les faces lalérales, et doubles sur les faces principale et posiérienre.
Ces promenoirs desscrveni les différentes galeries, facilitent la circula-
lion, et décor'eni syniélriqucmciil les qualre côiés de la cour servant de
lieu de promenade publique, {l'alcnlihus inlrà publicis horlibus.)
« En proloiigenienl du porliipie ouvert .sur le qiiai.s'élendenl, à dioite
et il gauche, des galeries d'exposilion de vingt mènes de largeur aux-
quelles sont adossés les escaliers donl mms avons parle plus haut, con-
iliilsant à l'clage supérieur et disposes dans l'axe des porli(pies de com-
munication sur la cour; ces premières galeries communiquent avec
d'auires de même largeur, s'eiendant parallèlement aux faces lalérales,
iliinl elles occupcnl tout le développement ; celles-ci donnent encore
accès à une triple galerie, de niénie laigenr que les précéilenles et dis-
posée parallèlement à la face principale et aux galeries dont nous avons
(larlé en premier lieu; elles sont séparées de celles-ci par des
cours secondaires seivaul il éclairer et veniilei les galeries qui leur sont
adossées.
« Les diverses galeries donl nous venons de djcrire la dispusilion
offieni à rez-de-chaussée des catégories distinctes poui' l'exposiiion des
différents (iroduits; les machines, les foules, les lustres, les tapisse-
ries, elc , un corps de gaide et un logement de gardien (ilacés à proxi-
mité des entrées, complètent les dispositions du rez-de-chaiissée.
u Les grandes divisio'nsque nous avons enumerées se retrouvent au
premier élage avec les subdivisions nécessaires dont nous avons déjii
parlé. Cet étage admet encore, sur la face posiérienre et d.ms la lon-
gueur lin dévelop|ieinent de la cour, les liigenieiits d'uiiadminislialenr,
les bureaux et quelques pièces de dépendance.
L'ensemble des conslructions couvertes offre une siipeilieie de
ri3,000 mèlres par élage.
Les hôpitaux de Paris s'encombrent chaque jour, et chaque
jour les chefs de service sont obligés de renvoyer un certiiin nom-
l)re de malades pour faire place à de nouveaux sujets affectés de
maladies aiguës U en résulte que ces malades, à peine entrés dans
leur convalescence, se trouvent, en quittant les salles, sans moyen
d'exislence ; ils sont la plupart sans argent, et leur état de santé
ne leur permet pas de travailler pour en gagner. Et cependant
leurs besoins deviennent alors plus impérieux ; la guérisou peut-
elle en effet s'opérer sans le setcurs de oiédicaments et d'une ali-
mentation substantielle? On comprend la funeste inniienee de In
misère et des privations de toute espèce sur des organisations déjà
usées par lenial : les rechutes sont nombreuses, inévitables, et sou-
vent plus graves que l'affection primitive.
Tels sont les motifs du projet que M. Magne compte soumettre
au Ministre de l'Intérieur, et dont il donne la description en ces
termes :
« Le convaleseenl admis dans l'asile travaillerait dans un des nom-
breux ateliers qui y esisieronl; la durée de son travail de chaque jour
serait proporlionnéc il ses forces; l:i il recevrait des aliments subslan-
tiels, de bon vin, enfin tous les soins que ri'clanierait son élal.
« A la sortie de l'asile, le eonvaleeceni recevrait une somme qu'on dé-
terminera ultérieurement, on bien, il serait placé dans les ateliers de
Paris par les soins d'une commission atta( bée ii l'éiablissemenl.
« On aurait ainsi rempli le double but de raelire I ouvrier dans un élai
de.sanlé qui puisse lui permettre île gagner sa vie cl lui assurer de
l'occupai ion à sa sortie de l'asile.
« L'établis.senienl que nous proposons, situé hors Paris, en bon air.
cuniiendrait 2000 convalescenis des deux sexes, répartis dans deux
grandes divisions sans communication entre elles.
« \ l'entrée, le logement d'un concierge , un vaste parloir et le
local des médecins ei de leurs aides, une salle d'opération el un
dépôt, dans le cas où l'étal du malade ne permettrait pas de le transpor-
ter dans un des hôpitaux où l'on devrait traiter son affection.
« Ces conslructions seraient séparées, par une première cour de ser-
vice, du local administratif et religieux, placé en avant de la grande
cour centrale qui distribue à droite et ii gauche les ateliers de luule
sorte pour les deux sexes, ainsi que les galeries de communication aux
promenoirs couverts.
« Li partie postérieure de la cour reçoit de grands réfectoires, les
cuisines avec dépôt de subsistances, des bains, des piscines, enfin une
cunslruction complètement isolée des aleliers el des promenoirs, el af-
fectée au logement des sœurs hospitalières, avec lingerie, ouvroir,
buanderie, lavoir, séchoirs, et un réservoir distribuant l'eau dans toutes
les salles.
Il Pour assurer la libre circulation de l'air, les bâtiments spi-cialenieni'
destinés aux convalescents sont séparés par des cours d'une étendue
convenable, plantées d'arbustes elde Heurs, et où des lileis d'eau entre-
tiennent la fraîcheur.
Il Eu outre des dispositions que nous veimns de mentionner, le rez-de-
chaussée comporte encore de vastes promenades plantées d'arbres, dé-
corées de fontaines el servant d'enceinte aux constructions ; des écuries
el remises, des hangars, des latrines, enfin une ferme avec toutes ses
dépendances.
« .\n-dessus des c<uistructioiis du rez-de-<baiissée, s'élèvent deux
étages de doiloirs admettant 1000 lits dans chaque division.
« Une chapelle placée an premier étape est disposée de façon à ne
laisser aucune communication entre les deux sexes : elle coinporle aussi
des tribunes ; celle des administrateurs et celle des .sœurs placées au-
de-siis de la Sacristie.
Projet lie décoration d'un Plafimd, yar M. Suulnirr [Jn'ef;.
Nous ne nous rendons pas bien compte de la fantaisie de .M. Saul-
nier (Julesl, qui a expose un projet de dirorution d'un plafond pour
un établissement public. Cette idée d'isoler un plafond de la salle qu'il
recouvre, de le décorer sans égard pour l'influence de celte déco-
ration sur celle des murs de la même salle; tout cela nous semble
tellement en dehors des habitudes d'tinité et de mesure que l'étude
de l'arcliiteclure communique d'ordinaire à l'esprit, et que le talent
évident de M. Saulnier permet de lui supposer, que nous nous
225
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
226
sentons lancé dans une multitude d'hypothèses, pour expliquer la
présence au Snlon de ce fragment isolé; mais comme ces hypo-
thèses, en fin de compte, seraient sans aucun effet utile, nous nous
contenterons de passer outre, en reconnaissant toutefois le mérite
aussi bien que l'originalité de M. Saulnier.
Derio' dessins de maisons, par M. Ed. Renaud.
Nous terminerons ce compte rendu par la mention des travaux
de M. Ed. Renaud, qui a exposé les dessins de deux maisons con-
struites sous ses ordres et d'après ses plans : l'une, sur la place
Saint-Georges, a été déjà publiée par nous dans notre volume de
l'an dernier; l'autre est située rue Fontaine-Saint-Georges, n" 20.
Nous engageons ceux de nos lecteurs qui passeraient de ces côtés
à visiter ces maisons; la décoration et les sculptures en sont tout à
fait remarquables.
Nous espérons qu'un jour on se décidera à offrir des récom-
penses honorifiques aux architectes qui auront beaucoup fait pour
augmenter le comfortable de nos intérieurs, et faire pénétrer dans
la masse de la population, par le bon goût de leurs décorations, un
sentiment convenable des belles formes. Il serait bon que les façades
des maisons et des édifices publics fussent considérées davantage
comme moyen d'épurer le goût du peuple.
Les gravures de M. Huguenet.
Nous ne saurions clore notre compte rendu du Salon de 1844
sans dire un mot des gravures d'architecture exposées par M. Hu-
guenet. Il est impossible, croyons-nous, de rien faire en ce genre
de plus pur, de plus précis. Le Portail de Notre-Dame de Brou et
la Façade de la maison, place Saint-Georges, n° 26 (la première est
une œuvre de grande dimension) sont des travaux où la constance
de l'artiste marche de pair avec son talent. Prenez une loupe, et
regardez les frises, les chapiteaux de cette maison, vous les verrez
se couvrir de feuillages, de fleurs, et se peupler d'animaux. Grâce
à la puissance de la lentille, cette façade devient un monde. Nous
conseillons à nos lecteurs cette expérience; elle leur est facile, puis-
qu'ils ont la planche entre les mains (l).
CÉSAR DALY.
EXPOSITION DE Z.'IIiri>TTSTRIE DE 1844.
(deuxième article, Voy. col. 121.)
HlSTOaiQUE DES EXPOSITIONS ANTÉEIEUUES.
La Convention était sortie victorieuse des luttes civiles et de la
guerre étrangère. Il fallait asseoir sur des bases inébranlables la
prépondérance des nouvelles idées en France et en Europe. Cette
(1) Voir cette planche dans le â« volume de cette Revue (année 184$).
grande mission échut en partage au Directoire, qui avait recueilli
le pouvoir des mains de la Convention, Le cabinet de Vienne était
loin de vouloir la réunion définitive de la Belgique à la France;
pourtant la Convention avait voté cette réunion avant de se séparer.
Le Directoire forma donc de vastes plans de campagne. Les trois
grandes armées de la République, celles de Rhin-et-Moselle, de
Sambre-et-Meuse et celle d'Italie, étaient là pour répondre à l'ap-
pel de la patrie. Bonaparte conçut la grande pensée de frapper
l'Autriche dans ses possessions de la Lombardie, et de trancher
avec l'épée la ligue de l'Autriche et de la plupart des petits Etats
d'Italie. Cette merveilleuse campagne, qui commença par la vic-
toire de Montenolte (12 avril 1796) et finit par celle de Neumark
((«■•avril 1797) et le glorieux traité de Campo-Formio (i7 oc-
tobre 1797), incorporait la Belgique à la France, et étendait les
limites de la République jusqu'aux Alpes et au Rhin. Le Direc-
toire prépara une fête triomphale pour recevoir le jeune général de
l'armée d'Italie, qui venait lui présenter le traité de Campo-Formio.
Cette solennité nationale eut lieu dans la grande cour du Luxem-
bourg le 10 décembre 1797.
Après des discours de Talleyrand, de Barras et de Bonaparte
JoubertetAndréossy s'avancèrent en portant le drapeau de l'année
d'Italie. La vue de ce drapeau, qui était destiné à décorer la salle
des séances publiques du Directoire, souleva des acclamations in-
finies. Les inscriptions" étaient en lettres d'or. — D'un côté, en
grands caractères, se lisait :
« A l'armée d'Italie, la pairie reconnaissante ; »
et de l'autre :
«L'armée d'Italie a fait cent cinquante mille prisonniers; elle a pris cent
soixante-dix drapeaux, cinq cent cinquante pièces d'artillerie de siège, six
cents pièces de campagne, cinq équipages de pont, neuf \aisseaux de 04
canons, douze frégates, douze corvettes et dix-huit galères. — Armistices avec
les rois de Sardaigne, de Naples, le Pape , les ducs de Parme, de Modènc.
. — Préliminaires de Léoben. — Traités de paix de Tolentino, de Campo-For-
mio. — Donné la liberté aux peuples de Bologne, Feriare, Modène, de la Ilo-
magne, de la Lombardie, de Brescia, de Bergame, de Mantoue, d'une partie
du Véronais et de la Valtelinc ; aux peuples de Gènes, aux fiefs impériaux , aux
peuples des départements de Corcyre, de la mer Egée et Illirique. — Envoyé
à Paris les chefs-d'œuvre de Michel-Ange, de Titien, de Paul Véronéte,du
Corrége, de l'Albane, des Carrache, de Raphaël, de Léonard de Vinci, elc
— Triomphé en dix-huit batailles rangées, Monlenotte, Millc^imo, Mondovi,
Lodi, Borghetto, Lonato, Castiglione, Rovercdo, Bassano, Saint-Georges, Fon-
lana-Niva, Caldiero, Arcole, Rivoli, la Favorite, le Tagliamenlo, Tarvis, Neu-
niarck. — Livré soixante-sept combats.
A l'ombre des lauriers de la campagne d'Italie, la confiance,
l'espoir, reparaissaient dans la République. Le Directoire avait déjà
commencé à remettre quelque ordre dans les finances et dans
l'administration ; Vindusirie allait renaître. Le Directoire décréta
que l'anniversaire de la fondation de la République serait célèbre
par une fête grandiose. Surpasser les dimensions matérielles de
cette fête immense de la Fédération du Champ-de-Mar» (14 juil-
let 17 90) eût été impossible; la pensée qui avait animé cette gi-ande
cérémonie populaire n'existait plus : il fallait en trouver une autre,
digne d'être mise en parallèle avec la fête militaire qui venait d'avoir
lieu dans la grande courdu Louvre. Le ministre de l'Intérieur, Fran-
çois (de Neufchàteau), intelligent appréciateur des arts utiles, eut
cette noble pensée : il proposa une Exposition des produits de l'In-
dustrie nationale. Cette idée fut accueillie avec enthousiasme. La
gloire des armes n'absorbait pas toute lactiviténiitionale. La France
avait déjà la conscience de sa haute destinée industrielle.
T. V. 15
227
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
2i»
L'exposition fut ouverte le troisième jour complémentaire de
l'an VI (10 septembre 1798). Voici comment le Moniteur rapporte
cette solennité :
\ dix heures pr(!ciscs du malin, le ministre de l'Iutéiicur s'est rendu à la
maison du Charnp-de-Mars, et de là au lieu de l'exposilion, par le milieu du
<ii(|uc. Celle marche a été réglée ainsi qu'il suit :
1° L'école des trompettes ;
2" Cn détachement de cavalerie;
3° Les deux premiers pelotons d'appariteurs;
4" Des tambouis ;
5" Musiipie militaire à pied;
6" Un peloton d'infanterie;
7" Les hérauts;
8" Le régulateur de la fête;
0" Les artistes inscrits pour l'exposition;
10" Le jury, composé des citoyens Darcet, membre de l'Institut national;
Molard, menihre du Conservatoire des Arls et Métiers; Chaptal, membre de
l'Inslitut national; Vion, peintre, uiend)re de l'Institut national; Gillet-Lati-
Hionl, membre du ronscil des mines; Duqucsnoy, de la Société d'Agriculture
du département de la Seine; Moilte, sculpteur, membre de l'Institut national;
Ferdinand Berthoud, horloger, membre de l'instilut national; Gallois, homme
de lellres, à Auteuil, associé à l'InsliUit national;
110 Le bureau central;
12° Le minisire de l'Intérieur;
13° Un peloton d'infanterie.
Le ministre et le cortège ont fait le tour de l'enceinte consacrée à l'exposi-
tion ; et, comme le temple à l'industrie n'était point terminé, le ministre s'est
placé sur le tertre du Champ-de-Mars ; il y a prononcé le discours suivant, à la
suite duquel la musique a exécuté un air patriotique :
Citoyens,
Us ne sont plus ces temps malheureux où l'industrie enchaînée osait Â
peine produire le fruit de ses méditations et de ses recherches; où des règle-
ments désastreux, des corporations privilégiées, des entraves fiscales, étouf-
faient les germes précieux du génie; où les arts, devenus cn même temps les
instrumenls et les victimes du despotisme, lui aidaient à appesantir son joug
sur tous les citoyens, et ne parvenaient au succès que par la flatterie, la cor-
ruption et les humiliations d'une honteuse servitude.
Le flambeau de la liberté a lui, la République s'est assise sur des bases iné-
branlables; anssilôt l'industrie s'est élevée d'un vol rapide, et la France a été
couverte des résultats de ses efforts. Les agitations politiques, inséparables des
rirconstances, des guerres inléricures et extérieures, telles que les annales du
monde n'en offrent point d'exemples, des fléaux et des obstacles de tous les
genres, se sont en vain opposés à ses progrès : elle a triomphé des factions, des
circonstances, de la guerre; elle a vaincu tous les obslacles, et le feu sacré de
l'émulation a constamment agrandi la sphère de son activité.
0 vous qui douteriez encore des avantages inestimables d'un gouvernement
libre, fondé sur la vertu et l'industrie, parcourez tous les départements qui
s'honorent d'appartenir à la grande nation; comparez les produits de leur
agriculture avec ceux qu'ils donnaient sous l'influence du despotisme; com-
parez les ateliers nombreux qui se sont élevés du sein des orages, et même sans
espoir apparent de succès, et dites-nous ensuite si la richesse du Peuple n'est
pas encore une conséquence nécessaire de la liberté ; dites-nous, si vous le pou-
vez, quelles seront les bornes de l'industrie française lorsqu'elle pourra se li-
vrer à toute son énergie, lorsque les canaux du commerce seront rouverts, lors-
qu'elle se verra ombragée par l'olivier de la paix.
La paix! ce mot chéri retentit dans tous les cœurs; mais si le gouvernement
ne néglige rien, en conciliantla gloire de la Nation et les intérêts de l'humanité ;
s'il est convaincu que la prospérité de la République doit avoir pour bases l'a-
griculture, les manufactures et le commerce, il vous appartient peut-être plus
(|u'& lui, artistes républicains, de hâter le moment où vous pourrez jouir de ses
bienfaits.
Parmi les nations policées, les arts seuls peuvent consolider la victoire et assu-
rer la paix. Les ennemis les plus acharnés de la République, vaincus et humiliés
par la valeur de nos frères d'armes, se consolent quelquefois en se repaissant
de la folle espérance de faire triompher leur industrie; c'est à vous de détruire
ce prestige par l'efficacité de vos efforts ; c'est à vous de leur montrer que rien
n'est impossible à des hommes libres et éclairés; c'est i vous d'égaler et de
surpasser vos rivaux, et vous en avez les moyens. La nature, aussi libérale pour
le pays que vous habitez qu'elle parait avare pour la plupart de ceux qui vous
envient, est secondée encore par la forme de votre constitution et par les lumiè-
res multipliées qui vous environnent.
Il manquait peut-être un point central i votre émulation ; l'industrie, cn dis-
persant ses produits sur la surface de la République, ne mettait pas les artistes
A portée d'étalilir des comparaisons, qui sont toujours, dans les arts, une source
de perfectionnements; d'ailleurs, le gouvernement lui-même pouvait craindre
(le laisser dans une obscurité décourageante les talents distingués qui honorent
les déparlements les plus éloignés du lieu de sa résidence.
C'est pour procurer aux artistes le spectacle nouveau de toutes les industries
réunies, c'est pour établir entre eux une émulation bienfaisante, c'est pour
remplir l'un de ses devoirs les plus s;icrës, pour apprendre à tous les citoyens
que la prospérité nationale est inséparable de celle des arts et manufactures,
que le gouvernement a approuvé la réunion touchante à l'inauguration de
laquelle il m'a chargé de présider aujourd'hui, et qu'il en a fixé l'époque  celle
de la fondation de la République.
Ce spectacle, en effet, est bien vraiment républicain ; il ne ressemble point i
ces pompes frivoles dont il ne reste rien d'utile.
Les artistes auront enfin une occasion éclatante dese faire connaître, et l'homme
de mérite ne courra plus les risques de mourir ignoré, après quarante ans de
travaux.
Tous les citoyens vont s'instruire et jouir a la fois, en venant contempler ici
l'exposition annuelle des fruits de l'industrie française.
Les savants, les hommes de leitres viendront étudier eux-mêmes les progrès
de nos arls; ils auront enfin une base pour asseoir la technologie ou la théorie
instructive des arls et des métiers.
Celle science était presque entièrement Ignorée, quand l'Encyclopédie en traça
la première ébauche. Ce sont des écrivains français qui ont jclé les fondements
de celte étude intéressante. Il est réservé à la France d'en réunir tout le système
et d'en faire un objet d'enseignement public : peu de connaissances humaines
sont plus dignes de cet honneur.
En effet, la technologie ouvre à l'esprit un champ bien vaste. L'écoinmiie ru-
rale, la minéralogie pratique, tirent du sein de la nature des matières premières
que les arts et métiers savent approprier i l'usage des hommes cl aux divers
besoins de la société. Ces besoins sont la nourriture, le vêtement, le logement;
mais les arts ne s'en tiennent pas i ce qui pourrait être strictement nécessaire
pour y pourvoir & la rigueur. S'ils s'étaient bornés li, la vie humaine aurait été
bien triste et bien sauvage. Pour mieux répondre i nos désirs, et pour nous
rendre heureux par nos propres besoins, les arts étendent leur carrière ; ils ere-
bellissent leurs produits ; ils mettent tour à tour à contribution les trois règnes
de la nature et les quaurc parties du monde. Ils Joignent l'élégance 1 la commo-
dité; et nos jouissances varient, et nos goOls sont flattés, en même temps que nos
besoins se trouvent satisfaits.
Ces arts, que l'idiome de l'ancien régime avait cru avilir en les nommant
arts mécaniques , ces arls abandonnés longtemps à l'instinct et à la routine,
sont pourtant susceptibles d'une élude profonde et d'un progrès illimité. Bacon
regardait leur histoire comme une branche principale de la philosophie. Dide-
rot souhaitait qu'ils eussent leur Académie ; mais que le despotisme était loin
d'exaucer son vœu ! Il n'envisageait dans les arts que des esclaves d'un vain luxe,
et non des instruments du bonheur social. Aussi la plupart de ces arts sont
restés dans l'enfance, parce qu'on les a méprisés. Cependant l'Industrie est fille
de l'Invention, et sœur du Génie el du Goût. Si la main exécute, l'imagination
invente et la raison perfectionne. Les arts les plus communs, les plus simples en
apparence, s'éclairent au foyer de la lumière des sciences; et les mathématiques,
la physique, la chimie, le dessin, appliqués aux arls et métiers, doivent guider
leurs procédés, améliorer leurs machines, simplifier leurs formes, et doubler
leurs succès en diminuant leur main-jl'œuvre.
Ali ! rendons enfin aux artistes la justice qui leur est due! que les arts nom-
més libéraux, bien loin d'affecter sur les autres une injuste prééminence, s'atta-
chent dé.sormais à les faire valoir ! Que l'éducation publique fasse connaître k
nos enfants la pratique et la théorie des arts les pins utiles, puisque c'est de
leur exercice que notre commission fait sagement dépendre l'admission des
jeunes gens au rang de citoyens (1) ! Que, tous les ans, ce temple ouvert a l'in-
dustrie par les mains de la liberté, reçoive de nouveaux chefs-d'œuuc '. Qu'une
émulation active, animant i la fois tous les points de la République, engage las
(' Les jeunes gens ne peuvent être infcrils sur le registre civique s'ils ne prouvent
qu'ils savent lire el écrire et exercer une profession mécanique {Conililuliiin, lit II .
art. t-2,>.
229
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS,
230
arlisles, les fabricants en tous les genres, à venir disputer l'honneur de voir
distinguer leurs ouvrages et d'entendre leurs noms retentir dans la fête auguste
qui ouvre solciinellenient l'année républicaine! Que pour mériter ces lionneurs,
ils tâchent à l'envi de perfectionner les produits de leur industrie; qu'ils s'ef-
forcent de leur donner le caractère simple, la beauté des formes antiques et un
fini plus précieux, un lustre plus parfait encore que celui dont se vanlent, avec
tant d'alTeclalions, les manufactures anglaises! Français régénérés, vous avez à
la fois des modèles ù surpasser et des rivaux à vaincre! Si les nations les i)lus
libres sont nécessairement les plus industrieuses, à quel degré de gloire et de
prospérité ne s'élèveront pas les arts vraiment utiles chez un peuple qui a
voulu qu'on ne put être citoyen sans exercer un de ces arts, et avec un gouver-
nement qui s'honore lui-même de l'éclat qu'il se plaît à répandre sur eux I
Le Directoire exécutif a vu avec peine que le temps n'ait pas permis, cette
aimée, de donner a cette cérémonie intéressante l'appareil et la solennité dont
elle est susceptible ; mes yeux cherchent «n vain, dans cette enceinte, les pro-
duits de l'industrie d'un grand nombre de départements qui i, peine ont pu
recevoir l'annonce de ce concours nouveau dans les fastes politiques de l'Eu-
rope. Mais si celle idée vraiment patriotique a pu exciter quelques regrets
parmi ceux qui sont dans l'impossibilité de concourir à son exécution ; si ceux
même qui sont assez heureux pour y concourir regrettent de n'avoir pas été
préNcnus plus tôt, et de ne pas offrir à l'estime publique des produits plus par-
laits, le but du gouvernement est rempli. L'an VII de la République montrera
dans son cours tout ce que peut l'émulation sur un peuple libre et ami des
arts.
Vous qui les cultivez avec tant de succès, secondez les efforts constants d'un
Kouvernenient paternel ; vos intérêts sont les siens : les arts ne peuvent régner
qu'avec la liberté. Vous êles les ennemis les plus dangereux pour les ennemis
(le la République ; les victoires de l'industrie sont des victoires immortelles.
Réunissez donc tous vos moyens, toute votre activité pont présentera l'Europe
étonnée, à la fin de l'année qui va s'ouvrir, le spectacle le plus imposant et le
plus auguste que puisse donner un peuple civilisé. Que dès le mois de messidor,
il parvienne de tous les départements des échantillons de loutes les espèces d'in-
ilustrie, que le gouvernement soumettra à l'examen d'un jury, et qui ne seront
admis à cette exposition qu'après cet examen. Que cette admission soit déjà un
honneur dont les manufacturiers français soient jaloux , et que les couronnes
décernées ensuite le 1" vendémiaire par le Directoire exécutif, soient la récom-
pense la plus flatteuse à laquelle un républicain puisse aspirer !
Pour moi, citoyens, celle qui touche le plus mon cœur, celle qui excite toute
ma sensibilité, je la trouve dans la mission honorable qui m'est aujourd'hui
lonflée par le Directoire; et si j'ai pu réussir à vous pénétrer de ses véritables
sentiments et de sa bienveillance pour les arts, si j'ai pu vous inspirer ceux
qui m'animent, si j'ai pu augmenter encore et éclairer votre amour pour la
République, ce jour sera le plus beau de ma vie.
Le ministre de l'Intérieur,
François (de Neufchâteau).
Tfois jours après l'ouverture de V Exposition, ou le cinquième
jour complémentaire de l'an VI, le jury, sur la demande du gou-
vernement, désigna les douze exposants des produits qui lui sem-
blaient les plus remarquables:
C'étaient MM. BBEaiiET [horlogerie]. — Lenoir [instruments de
mathématiques]. — Didot et Hebhan [typographie, édition de Vir-
liile). — Ci.ovET [fabrication d'acier]. — Dihl et Guebhabd [ta-
hleau.r en porcelaine). — Des.\bnoj) [cheminées et poêles]. — Comé
crayons). — Deharme [tôle vernie] tous de Paris. — MM. Julien,
(le Scine-et-Oise [coton filé à la mécanique). — Pavn fils, de Troyes
bonneterie). — Gremokt et Babré, de Bercy (toiles peintes). —
PoTTEB, de Chantilly [faïence blanche).
Quelque temps après, François (de Neufchâteau) adressa aux
autorités départementales des circulaires annonçant que les expo-
sitions seraient annuelles.
Les deux expositions suivantes, 19 septembre 1801 (an IX), I8
septembre 1802 (an X), eurent lieu dans la cour du Louvre, à l'é-
poque du consulat, sous le ministère Chaptal. Ces expositions furent
de véritables triomphes pour les arts chimiques et mécaniques. Le
métier Jacquart, qui devait porter une si grande réforme dans la
fabrication des étoffes façonnées, affranchir des millions de jeunes
ouvrières de maladies et de difformités cruelles, apparat en 1801.
Rappelons aussi que c'est à cette époque (t) brumaire an X; que
fut fondée la Société d' Encouragement qui a fait tant d'efforts pour
hâter le développement de l'industrie nationale.
La quatrième exposition fut ouverte le 25 septembre 1806. Les
laines et les draperies, la fabrication du coton et la production de
la soie, formèrent les parties les plus importantes de cette exposi-
tion.
Avant d'arriver aux expositions qui eurent lieu sous la Restau-
ration, nous devons citer le nom des hommes qui guidèrent l'indus-
trie de leurs enseignements et de leurs exemples, à travers les in-
certitudes de ces époques guerrières, les Chaptal, les Douglas, les
Conté, les Berthollet, les Oberkampf, les Edouard Adam, les Jac-
quart, les Ternaux, les Monge, les Prieur, les Vauquelin, etc., etc.
Le système continental et les guerres qui eurent lieu depuis
1806 avaient ralenti l'essor de l'industrie française; mais quelques
années de paix suflirent pour rallumer le génie industriel de la
France. La Restauration compte trois expositions : celle de 1819,
sous le ministère Decazes; les deux autres en 1823 et 1827, sous
le ministère Villèle. Toutes trois eurent lieu dans la cour du
Louvre.
Le rapporteur de l'exposition de 1819 était M. Louis Costaz; les
deux autres expositions furent décrites par M. Héricart de Thury.
Ces expositions furent remarquables par les draperies et lainages,
le filage de la laine peignée, la production et le travail de la soie.
L'industrie métallurgique, la production de l'acier, les préparations
chimitiues, etc., etc., firent aussi de grands progrès sous la Restau-
ration. C'est de cette époque que date aussi l'immense développe-
ment de l'industrie parisienne , développement que, d'un certain
point de vue, on pourrait considérer comme monstrueux lorsque
l'on considère les conséquences funestes qui résultent de sa con-
centration sur un seul point du territoire.
La chute de la Restauration et les mouvements populaires
des premières années du nouveau gouvernement reculèrent jus-
qu'en 1834 l'exposition qui devait suivre.
Une ordonnance rendue le 4 octobre 1833 disposait que l'ou-
verture de cette nouvelle exposition aurait lieu sur la place de la
Concorde le 1" mai 1834. Quatre bâtiments d'égales dimensions
(76 mètres de long sur 47 de large) furent élevés sur le terre-plein
de cette place ; ils étaient ainsi disposés :
Sud-Est. — Côté des Tuileries et de la Seine.
Sud-Ouest. — Côté des Champs-Elysées et de la Seine.
Nord-Est. — Coté des Tuileries et du Garde-Meubles.
Nord-Ouest. — Coté des Champs-Elysées et du Garde-Meubles.
Les sept années d'intervalles qui s'étaient écoulées entre les
deux expositions de 1827 et 1834 n'avaient pas été perdues pour
l'industrie; à côté des nouveaux perfectionnements apportés par
des noms déjà célèbres dans nos manufactures, de nouveaux noms
se firent connaître, toutes les branches d'industrie étaient repré-
sentées, et soixante-quinze départements avaient coopéré à cette
grande œuvre nationale. Nos départements montueux ou presque
déserts avaient seuls manqué à cette solennité : c'étaient les dc"-
partements des Pyrénées-Orientales, des Alpes (Hautes et Basses^
de l'Aveyron, du Cantal, de la Corrèze, de la Corse, du Lot, du Vnr,
des Landes, de l'Allier. Le nombre des exposants était d'un tiers
plus considérable qu'en 1827.
L'exposition suivante eut lieu le I" mai 1839, sous le grand
•231
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
•232
carré des Tuileries, dans une galerie en huit longues salles occu-
pant ensemble une superficie de IC 500 mètres carrés.
On admirait surtout, dans cette dernière exposition, les grands
progrès faits par la filature à la mécanique de la laine et du lin, les
machines à feu, celles à papier continu; on admirait aussi la limpi-
dité, la taille et les formes élégantes de nos cristaux, le flint-glass
Kt le crown-glass, les maroquins, les soieries, les châles, les mouL-
selines unies et brodées, les marbres des Pyrénées, les pierres litho-
graphiques, la bougie stéarique, la soudure du plomb par lui-
même, le bronze laminé pour doubler les vaisseaux, etc., etc.
Voici, dans l'espace de 40 ans, la progression du nombre des
exposants :
1" exposition, 1798 : 110 exposants; — 2«, 1801 : 220; —
3", 1802 : 540; — 4», 1806 : 1422; — 5«, 1819 : 1622; —
fie, 1823 : 1648; — !<■, 1827 : 1795; — 8% 1834 : 2447; —
y, 1839 : 3381.
Le mouvement industriel commercial et agricole de la France
date de Henri IV et de Sully, de l'administration de ces deux grands
hommes qui se complétaient l'un l'autre. Avant leur règne on ne
trouve que quelques édits qui renferment des dispositions utiles à
l'industrie, notamment ceux de Louis XL Après eux, Richelieu et
Louis XIII dressèrent un autre théâtre à l'activité fébrile de la
France. L'industrie fut encore oubliée au milieu des agitations de
la noblesse et des partis qui vinrent se briser devant l'épée et
la hache du tout-puissant cardinal. — Vint ensuite Colbert. Ce
grand maître comprenait la puissance et la gloire du travail ; aussi
ne négiigea-t-il aucun moyen pour diriger toutes les forces de la
nation vers ces nobles manifestations de l'esprit humain. Il appela
en France les grands industriels et les premiers savants de l'é-
poque; il créa de magnifiques ateliers pour les premiers, des
chaires pour les seconds. Bientôt la France égala les plus belles
productions des pays voisins, quand, malheureusement, la révo-
cation de redit de Nantes arrêta de nouveau la grande impul-
sion donnée au travail national. Alors la France rendit à l'étrangei»
les trésors industriels qu'elle en avait reçus, trésors qu'elle avait
fécondés de son génie; le Nord de l'Allemagne, l'Angleterre, profi-
tèrent de celte fatale mesure.
Vers la fin du XVIIP siècle, en 1776, Turgot attaqua de front
les maîtrises (i) et jurandes, qui pesaient sur l'industrie et sur
le génie des inventeurs. Il succomba dans la lutte, car pour briser
cette pesante chaîne séculaire, il fallait le bras de tout un peuple;
il fallait qu'un homme comme Necker (1784) vint sonner le tocsin
avec son fameux com-pte rendu, qui constatait, aux yeux du peuple
affamé, l'inégalité devant la loi, l'inégalité en matière d'impôt.
La France entrait dans une nouvelle phase économique. Le
mouvement intellectuel du XVIII» siècle, poussé par le torrent po-
pulaire, fit irruption partout. Dès lors tout s'opérait au nom de la
liberté et de l'égalité, jusqu'à ce que la dévorante activité de la
France, en passant par les mille champs de batailles de la Répu-
blique et de l'Empire, vint s'abattre, haletante et oppressée, de-
vant l'Europe coalisée et le trône de ses anciens rois.
Au milieu de ces grandes crises, au milieu de ces profonds sou-
lèvements, les idées extrêmes se heurtèrent ; leur choc fit briller
(1) On eiuendait par mailrise le liiie de maître en tel art ou tel métier. Ce
litre s'acquérait à certaines conditions déterminées, et conférait, entre autres, le
pri>ilége d'appartenir à la corporation d'art ou de métier dont on avait acquis
la maîtrise.
aux yeux des plus clairvoyants cette vérité : que la puissance du
travail ne pourra atteindre son apogée de gloire et de stabilité que
par les idées et l'esprit d'association, qui fait converger à leur
centre unique les efforts et les intérêts de tous.
Pour arriver à ce grand résultat, l'émulation est certes un puis-
sant moyen; les obstacles disparaissent là où l'aiguillon de l'amour-
propre et les encouragements de toute espèce mettent eu jeu les
ressorts de l'activité humaine ; aussi avons-nous rappelé avec une
sainte reconnaissance la pensée de François de Neufchàteau, qui
inaugura les expositions industrielles; aussi avons-nous voulu
citer les paroles remarquables qui se trouvent consignées dans son
discours de 1 798, et rappeler la pompe avec laquelle cette solen-
nité a été inaugurée.
Maintenant que le génie de la France a fécondé cette belle pen-
sée, que des merveilles de plus en plus étonnantes viennent con-
stater la grande part que notre pays peut revendiquer dans le tra-
vail des autres peuples, il ne nous reste plus qu'à ouvrir les portes
de l'Exposition aux génies inventifs de nos voisins, à entourer l'Ex-
position de tous les prestiges d'une fête nationale, et à appeler l'at-
tention des hommes qui président aux destinées de la France sur la
réalisation immédiate de cette grande pensée que Turgot formulait
il y a soixante-huit ans, que Louis XVI prononça, et que la pos-
térité fera graver en lettres d'or sur les tables de la loi :
« Dieu, en donnant à l'homme des besoins, en lui rendant ne-
« cessaire la ressource du travail, a fait, du droit de travailler, la
« propriété de tout homme , et cette propriété est la première, la
« plus sacrée et la plus imprescriptible de toutes. »
PERBEYMOND.
De la Grande Circulation dans Paris , et nu Livre
DE M. HiPPOLYTE MeYNADIER.
Paris siHK le point de rue pilloresqae cl monumeoUi , ou Elémenls d'uu plau «ûirral
it'ensemble de ses Irava» d'arl el d'ulililé publi<|ne
(Suite et Bn. Voy. col. «84. )
BivK GAUCHE. — Prolongement de la Grande rue du Centre par
le Pont-au-Change, la nie de la Barillerie (façade du Palais-de-
Justice), le pont Saint-Michel, jusqu'au carrefour des rues Racine,
de l'École-de-Médecine, des Mathurins5aint-Jacques, etc. — Re-
dressement ou élargissement de la rue de La Harpe depuis ce
point, e^ de la rue d'Enfer, qui en forme le prolongement. Jus-
qu'à la btirrière de ce nom.
Ouverture d'une rue A, qui partirait d'une place à ouvrir au-
tour de Saint-Séverin, se dirigerait an Sud du marché Saint-Ger-
main, et arriverait au boulevard des Invalides vis-à-vis l'avenue de
Tourville.
Percement d'une rue B, qui de la Halle aux Vins (à peu près au
milieu de la rue des Fossés-Saint-Bernard) aboutirait à la rue de
Seine, vis-à-vis la rue Jacob (autrefois du Vieux-Colombier), en pa.s-
sant au Nord de Saint-Séverin ;
D'une rue C, qui de la mairie du 10' arrondissement arrive-
rait derrière l'Institut, où M. Meynadier propose une place semi-
•233
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
234
circulaire pour faciliter la viabilité sur ce point, sans démolir les
deux avant-corps de l'Institut ;
D'une rue D, partant de la rue de Fieurus (Ouest du Luxem-
bourg), au boulevard des Invalides (avenue de Tourville), etc.
A ces différentes rues de !«' et de 2" ordre, aux ronds-points ou
carrefours circulaires que nous avons indiqués, et au centre des-
quels s'élèveraient des monuments, M. Mejnadier ajoute encore
des squares, ou places plantées d'arbres, et des parcs. Ainsi, il trans-
forme les terrains de l'ancienne île Louviers en une promenade
plantée d'arbres. Il découvre largement les abords de Notre-
Dame, en abattant l'Hôtel-Dieu et les bureaux de l'administration
des hospices (parvis Notre-Dame) ; il déblaie les alentours jusqu'à
la rue de la Cité, depuis la Seine et jusqu'à la rue Saint-Chris-
tophe ; il couvre de plantations l'espace libre qui en résulte (du
Petit-Pont au pont de l'Archevêché) .
L'ignoble enclos de l'ancienne commanderie de Saint-Jean-de-
Latran (Sud du Collège de France), compris entre les rues des
Noyers, Saint-Jacques, des Carmes et la place Cambrai, se trans-
forme également en un jardin.
La place Saint-André-des-Arcs est agrandie et forme un square.
Sur la rive droite, les abords du Conservatoire des Arts et Mé-
tiers sont élargis et plantés d'arbres. Une partie des jardins du pa-
lais de l'Elysée-Bourbon est livrée au public, etc., etc.
M. Meynadier demande pour la capitale un parc à l'instar du
Regent's Park de Londres. Il propose de l'établir dans la plaine de
Monceaux, entre le mur de l'octroi et celui de l'enceinte continue.
Ce parc aurait d'immenses proportions, et il enclaverait dans son
étendue le parc actuel de Monceaux. On arriverait à ce parc delà
place de la Concorde et du rond-point des Champs-Elysées , par
deux nouvelles rues en ligne droite qui partiraient, la première à
gauche de l'aile Ouest du Garde-Meubles, passant au Nord de l'É-
lysée-Bourbon (rue du Faubourg-Saint-Honoré), et la seconde au
Nord du rond-point (ruede Montaigne). Les deux rues aboutiraient
devant le parc de Monceaux, rue de Valois, près de la rue de Mes-
sine.
M. Meynadier passe ensuite à la distribution des établissements
publics sur les différents points de la capitale. Il ménage le grand
effet monumental et pittoresque de Paris (et nous l'en félicitons) là
où la nature et la raison l'ont plus particulièrement indiqué, c'est-
à-dire sur l'immense ligne des quais, convenablementélargis et dé-
gagés sur certains points.
Les monuments et les établissements publics dont M. Meynadier
réclame l'exécution ne sauraient être considérés comme lesconsé-
([uences d'une folle rêverie; il propose l'achèvement du Louvre, la
reconstruction de la Bibliothèque Royale et de l'Archevêché , la
construction d'un Opéra définitif, d'un hôtel ou palais plus central
pour les autorités militaires de la ville de Paris, qu'il place sur le
quai des Grands -Augustins, à la Vallée, etc.
Il demande, pour les soldats de la garnison, des casernesplus sa-
lubres que celles qu'ils occupent maintenant; il croit pouvoir les
établir dans les édifices qui servent actuellement d'abattoirs ; et
on construirait de nouveaux abattoirs hors du mur de l'octroi.
M. Meynadier s'occupe également du Champ-de-Mars.
On sait que l'architecte Gabriel (l), qui construisit en 1751 l'É-
cole Militaire et ses dépendances, avait donné, dans l'origine, des
(1) (Jacques Ange), né i Paris en 1710, niorl vers 1780. C'est son grand
l>ère, Jacques Giibriel, nioil on 1686, qui a construit le ( liateau royal de Glioisy.
proportions convenables à l'esplanade du Champ-de-Mars; mais
elles furent restreintes au ["juillet ( 790, époque a laquelle les Pa-
risiens établirent, à l'occasion de la fête nationale de la Fédération,
du 14 juillet 1790, les talus que l'on voit encore aujourd'hui. Plus
tard, les contre-allées, derrière le talus, furent plantées de quatre
rangées d'arbres. Ces différents travaux réduisirent la largeur du
Champ-de-Mars de plus d'un tiers ; les évolutions militaires en
souffrent : le front d'un régiment de trois bataillons ne peut se dé-
velopper sans que plusieurs compagnies n'aillent rompre en mon-
tant sur les talus.
M. Meynadier supprime les talus et les contre-allées; il con-
struit plus loin, au-dessus des fossés, d'autres talus en maçonne-
rie formant gradins, qui présenteraient ainsi, sur un développe-
ment de seize cents mètres, deux vastes amphithéâtres, d'où des
milliers de spectateurs pourraient embrasser du regard cette grande
place qui est à la fois un champ de manœuvres et un hippodrome.
Le dessous de ces gradins, soutenu par des voûtes, deviendrait
d'immenses magasins dans lesquels M. Meynadier propose de réu-
nir le matériel d'équipement militaire, de literie, etc., qui se trouve
maintenant éparpillé à Panthcmon (rue de Grenelle), à Saint-Jean-
de-Beauvais (près la place Maubert), aux Champs-Elysées (près la
rue de Chaillot), à l'.^rsenal (rue de Sully), et dans la rue de Si'-
vres. Les autres administrations, la Liste civile et la Ville, pour-
raient également y avoir des emplacements.
Dans la crainte que, pour l'érection de grands et utiles édi-
fices, l'Etat ne soit pas disposé à ouvrir des crédits spéciaux
et suffisants, M. Meynadier a cherché le moyen de les créer sans
qu'il en coûtât rien aux contribuables. Voici ce qu'il propose,
après avoir recherché et dressé la liste d'une série de propriétés et
d'établissements sans valeur historique ou monumentale, appar-
tenant à l'État, à la Ville et à la Liste civile, qui n'en a que l'u-
sufruit; après avoir reconnu que ces propriétés représentent une
somme d'au moins 70 millions, M. Meynadier en propose l'aliéna-
tion, à laquelle se prêteraient, par un intelligent accord, l'État, la
Liste civile et la Ville; il applique le prix de ces ventes à la con-
struction des monuments en question.
M. Meynadier s'occupe aussi du déplacement des grandes hfilles; il
les place au point de rencontre des deux grandes rues de vnâiel-tle-
Ville et du Centre (place du Châtelet), en démolissant, sur une su-
perficie d'environ 40 000 mètres carrés, les vieilles et infectes ma-
sures comprises entre cette place et la rue Aubry-le-Boucher. Cet
emplacement est évidemment préférable à celui qu'occupent mainte-
nant les halles; la ventilation y serait bien plus facile, et les causes
d'insalubrité que ces marchés entraînent avec eux seraient •:ran-
dement affaiblies.
Enfin, et pour compléter autant que possible la série des tra-
vaux proposés par M. Meynadier, nous dirons qu'il indique, sous
le nom de Stades de la banlieue, un système de boisement (virtiel
sur plusieurs points du territoire aux alentours de Paris; ces plan-
tations, tout en contribuant à la beauté et à l'assainissement des
communes rurales du département de la Seiue, contribueraient
grandement aussi à l'embellissement de la capitale. Et eu vérité.
cette pauvre banlieue, déboisée, nue, pelée, défoncée, boulexerset-
de mille façons, par l'exploitation trop souvent inintelligente des
carrières et par l'établissement, inutile bien souvent, d'un inextri-
cable labyrinthe de routes et de chemins, a grandement besoin d'un
peu de hautes futaies et de verdure. Ce serait lui rendre une partie
de son éclat d'il y a soixante ans, lorsque des parcs, des châteaux
235
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
23C
et de vertes remises flattaient encore les yeux des voyageurs , et
donnaient aux abords de la capitale un aspect riant et plantureux.
Nous avons cherché à donner l'idée la plus exacte possible du livre
de M. Meynadier ; nous avons fait précéder de quelques réflexions
sur la grande circulation dans Paris, la description des travaux de
viabilité, d'assainissement et d'embellissement pittoresque et mo-
numental qu'il propose. Nous devrions maintenant apprécier la va-
leur absolue et relative de l'intéressante publication de M. Meyna-
dier; mais, comme nous aurons maintes fois l'occasion de reve-
nir sur la grave question de la viabilité et de l'assainissement de la
capitale, nous flnirons cet aperçu en engageant vivement les per-
sonnes qui s'occupent de haute édilité , à méditer le livre de
M. Meynadier, qui mérite à plusieurs égards d'être pris en sérieuse
considération.
PERREYMOND.
DU HÈGIiEBIENT SES MÉMOmES.
Hise au concours d'un iravaii sur les prii de règlement pour la maçonnerie.
Nos lecicurs se souviennent sans doute que l'an dernier {Col. 363
et 412), après avoir établi par une crilifiiie raisonnée que les livres qui
servaient à fixer le prix des travaux divers de bâtiments étaient singu-
lièrement entachés d'erreur et d'arbitraire, nous fîmes un appel à tous
ceux que ces questions iiiiéressent, aux entrepreneurs, aux vérificateurs,
aux architectes, etc.; nous engagions surtout le conseil général des
bâtiments civils, et la Société centrale des Architectes français, à s'oc-
cuper de la solution du problème.
Voilà que déjà les chambres des entrepreneurs, frappées de la justesse
(le nos observations, s'empressent de fournir les documents qui peuvent
aider à celle solution. La chambre des entrepreneurs de menuiserie a
publié réccmnient un livre sur sa spécialité, intiiulé Tarif et détails
de la menuiserie, pour servir de base aux règlements de façons ri four-
nitures.
De son côté, la chambre des entrepreneurs de maçonnerie vient
d'ouvrir un concours pour lui iravaii de même nature en ce (|ui con-
cerne sa spécialité.
Nous ne pouvons qu'applaudir à ces efforts, ci nous engageons vive-
ment MM. les entrepreneurs de serrurerie, de peinture et de vitrerie, d ■
charpenlerie, etc., à suivre l'exemple de leurs confrères et à fournir
aussi leur contingent d'expérience pour qu'ensuite le conseil des bâli-
iiients civils ou la Société des Architectes, après avoir contrôlé ces
éléments divers, en puisse faire comme un code auquel leur approbation
donnerait force de loi.
Voici les termes mêmes dans lesquels est conçue la résolution prise
à. cet égard par la Chambre des entrepreneurs de maçonnerie :
La Clianibre syndicale des entrepreneurs de maçonnerie de la ville de Paris
et du département de la Seine, vivement préoccupée du désordre qui règne
dans l'appréciation et la fixation des prix des ouvrages de maçonnerie, a dit
chercher à en connaître les causes j il lui en a été signalé plusieurs à la tète des-
quelles se placent :
1° Les rabais excessifs consentis dans les adjudications et les marchés onéreux
souscrits par quelques entrepreneurs ;
2° La publication d'ouvrages nouveaux sur les prix des bâtiments, qui ne sont
réellement que des compilations non raisonnées d'anciens prix abaissés outre
mesure, sans motifs apparents;
3° La facilité avec laquelle certains vérificateurs, s'appuyant sur ces ou-
vrages, fruits de documents inexacts, appliquent leurs prix aux mémoires qu'ils
sont chargés de vérifier et régler, et en font ainsi supporter les fâcheuses con-
séquences à la généralité des entrepreneurs.
Dans ces circonstances graves, la Chambre, considérant et reconnalssaru ,
— Sur la première question :
Encore bien que les rabais excessifs consentis dans les adjudications soient
faits par des personnes qui n'ont ni les mêmes capacités financières, ni le*
mêmes moyens d'éludé et d'exécution, ni la même expérience ;
Et que les marchés souscrits â des conditions onéreuses soient malheureuse-
ment la conséquence ou d'une position embarrassée ou d'une ignorance sur
lesquelles ont élé fondées des spéculations que la justice a déjà flétries ;
Toujours est-il que le bon marché et les rabais énormes que sollicitent le»
propriétaires et les administrations n'ont souvent lieu qu'aux dépens de la bonne
construction et parfois de la probité;
Que trop d'exemples seraient à citer, même dans les travaux que l'Étal cl la
ville de Paris font exécuter à grands frais ;
— Sur la deuxième question :
Que jusqu'à ce jour, malgré de bonnes intentions, la publication de traités
sur les prix de maçonntrie n'a élé qu'une compilation et une spéculation, et
non un travail utile;
— Enfin, sur la troisième quesiion :
Que si les résultats erronés d'appréciations faites légèrement ont été cause
de contestations entre les propriétaires et les entrepreneurs, il faut reconnaître
que les rabais sans frein, les marchés onéreux ont pu cl dû induire en erreur
les personnes qui se sont occupées sérieusement de prix de bâtiments;
Qu'on ne saurait trop tôt y pouvoir;
A iRKÊTÉ ET DÉCIDÉ, dans sa séance du 11 atril del8AA:
Qu'une série de prix de maçonnerie raisonnée, et qu'on devrait intoquer
avec confiance, en cas de discussion, servirait i atténuer le mal, sinon i y re-
médier entièrement ;
Qu'à cet elTet, il serait fait appel aux lumières de toutes les personnes qui
s'occupent de comptabilité en matière de construcUon ;
Que ces personnes seraient invitées à puiser aux véritables sources les élé-
ments nécessaires à la composition d'un ouvrage sur les prix de maçonnerie, ri
sur le mode le plus juste de mesurage;
Que ce Iravaii serait l'objet d'un concours ;
Qu'il no s'agit point dans l'espèce d'un ouvrage dont les prix soient élevés,
mais bien d'établir un travail sérieux, raisonné et rrai autant que pos:>ible dans
toutes les parties;
Qu'il devra comprendre :
1" La valeur des diverses natures de matériaux employés pour les irataux de
maçonnci'ic dans la ville de Paris et le département de la Seine avec et sans les
droits d'octroi ;
2° Les dépenses de toute nature pour leur mise en œuvre, telles (|ue laillcv .
bardage ordinaire et extraordinaire, pose, etc
3° Les déchets sur les matériaux pour arriver à leur mise en œuvre ;
4° Les faux frais de toute nature pour voitures, chevaux, magasins. chantier>,
commis, outils, équipages, etc. ;
Généralement tous les éléments qui entrent dans la composition i'\.iriF iies
prix;
5° Les bénéfices légitimes qui doivent être accordés sur les travaux ;
6° Et enfin le mode de mesurage applicable à chaque nature d'uuvrage<
après la mise en œuvre.
Il sera indispensable de faire sentir la dilTérence entre les grands travaux ,
ceux dits ordinaires et ceux d'entretien.
Tous ces prix seront considérés comme étant payés suivant les usages de l'ad-
ministration.
La Chambre syndicale pense qu'il devra résulter de la réunion de tous ces
éléments des prix assez justes pour concilier les intérêts opposés des proprié-
taires et des entrepreneurs.
C'est à ces fins qu'elle oITre, à titre de rétuunéralion, aux persoinies qui au-
ront traité d'une manière claire et raisonnée de toutes les matières énoncées (i-
dessus, savoir :
A celui qui aura mérité le n" l" une somme de 1500 fr.
A celui qui aura mérité le n" 2 une somme de 600 fr., et aux quatre cuvrag's
Jugés les meilleurs après les deux premiers, des médailles d'honneur dont la
valeur sera pour chacun de 100 francs.
Les ouvrages des divers concurrents devront être déposés au secrétariat dt
la Chambre, rue Grenier-Sainl-Lazare, 16, au plus tard le 1" février 1843.
Chaque ouvrage, au lieu de signature, portera une devise répétée sorl'enve-
loppe de la lettre qui contiendra le nom de l'auteur.
237
REVUE DE L'ARCHITECTURH: ET DES TRAVAUX PUBLICS.
238
Ces ouvrages seront examinés et jugés par une commission spéciale que dé-
signera ultérieurement la Chambre des entrepreneurs.
Le résultat du travail de cette commission sera proclamé en séance pu-
blique; les lettres qui porteront les mêmes devises que les mémoires couronnés
seront ouvertes, et le président, en faisant connaître le nom des auteurs, distri-
buera les prix.
Il est expressément entendu que tous les ouvrages récompensés soit par des
sommes d'argent, soit par des médailles d'honneur, deviendront la propriété
delà Chambre syndicale, qui en fera tel usage qu'elle jugera convenable.
Fait et arrêté en séance de syndicat, le 11 avril 1844.
Signé : Letellier Delafosse, Président ;
Marquet, Vice-Président ;
G. Caliou, Vice-Président ;
Maïet, Trésorier ;
Declodx, Secrétaire ;
DoucuiN, Vice-Secrétaire ;
Panier et Victor Lehaire, Délégués près du syndicat.
CHRONIQUE.
Sommaire : La restauration de Noire-Dame de Paris confiée à MM. Lassus et Vio-
let-l.cduc — Les splendeurs de l'Hôlel-de-VilIc cl la fango des halles. — Ue-
plàlrago du mur de la tcrnsse des Tuileries. — Arc de triomphe romain de Djo-
iiisah. — Théâtres incendiés. — Monuments commcmoralifs dans lesdéparlemcnts.
— Incendie de la flèche de la calhédrale de Laon. — Cathédrale de Rennes. —
Travaux du château de Pau. — PDBLICATIO^s nouvelles.
— « Par une décision du 30 avril dernier, .M. le garde des sceaux,
ministre de la Justice et des Culies, adoptant l'avis émis par le conseil
des liàlinienls civils sur le concours ouvert pour la resiaiiration de
Noire-Dame de Paris, a confié à MM. Lassus el Viollet-Leduc la direction
de celle imporianle restauration. Ces architecles devront se mettre en
mesure de commencer le plus loi possible les travaux de consolidation
que réclame ce monumenl. » Telle est la nouvelle qu'on a pu lire der-
nièrement dans tous les journaux. Puisque le sort en est jeté el qu'on
va enfin porter le marleau sur les nmrs vénérables de Noire-Dame,
nous nous félicitons de voir des artistes tels que MM. Lassus et Violiel-
Leduc chargés de ce difficile travail ; loutefois, engageons-nous ces
messieurs à modérer le désir qu'ils ont de « rendre à notre belle ca-
thédrale <ou<e sa sp/cndcwr, de lui restituer toutes les richesses dont
elle a été dépouillée.» Qu'ils prennent garde que celle lâche qu'ils se
sont imposce, disent-ils dans leur Rapport adressé à M. le Ministre des
Cultes sur leur projet de restauration, ne soit au-dessus, nous ne di-
rons pas de leurs forces, mais au-dessus de l'état acluel des sciences
archéologiques, où lanl de doutes tiennent encore indécis les hommes
même les plus savants. Nous engageons ces messieurs à lire l'ar-
ticle publié l'an dernier dans cette i{««ue, sur la restauration projetée
de Notre-Dame (vol. IV, col. 137) : «Notre avis, dision.s-iious à la fin de
ce travail, notre avis est qu'on doit se borner à peu près à de simples
travaux de consolidation, el qu'on soit très-ménager du marteau. Dans
vingt ou trente ansnos éludes seront beaucoup plus avancées, cl alors on
pourra peut-cire montrer plus de hardiesse; et quant à l'effet de
splendeur qu'on voudrait obtenir pour mieux honorer le culte,
nous pensons que le moyen le plus elficace et le moins dangereux
consisierail à remplacer partout les vitraux blancs modernes par
ime série de belles verrières. Nous eussions désiré voir borner les
projcis lotit siiii|ilemeiii :
« i° Aux grands travaux de consolidation absolument nécessaires pour
conserver l'édifice ;
« 2° S l'enlèvement de certaines des superfetations ajoutées au
XVIII' siècle, partout où l'on serait sûr de retrouver la conslruction
ancienne sous le rcvôlemcnt moderne;
«5" A un déliadigcoiinago général, opcinlion qui ccinduirail peut-
être à quelques travaux de peinture qu'il faudrait limiter le plus pos-
sible ;
ni" A la composition d'une suite de verrières, étudiées en vue d'un
effet général (voir nos observations relatives à la peinture sur verre,
col. 126), et dont l'ensemble formerait un enseigncuienl régulier <i
attrayant des vérités de l'Église. »
— On assure que les frais de construction du nouvel Hotel-de -Ville,
en y comprenant les démolitions qu'il a fallu opérer dans ses abords, ne
s'élèveront pas à moins de 18 millions. Le vai.sseaii que la ville de Paris
porte dans ses armes doit être un galion, dit la Revue de Paris, et le
mur d'enceinte qui protège les recettes de l'octroi prend tous les carac-
tères des mines du Pérou. Dix-huit millions pour le logement d'un pré-
fet! Bien des rois en seront jaloux. Lorsque nous voyon-. faire de pareilles
dépenses pour ce qu'on pourrait appeler avec raison un objet de luxe,
nous nous demandons s'il n'est pas odietix de laisser croupir dans la
fange des halles et des quartiers voisins, une population de plusieur>
centaines de mille âmes, alors qu'on pourrait, presque sans bourse dt;-
lier, lui donner de l'air et lui bâtir des rues propres et larges.
— Le mur qui soutient du côté du quai la terrasse des Tuileries diit
du bord de l'eau, était depuis longtemps dans un triste état de dégrada-
tiim; pour y leniédier, on vient défaire à ce mur un large joinloicment
en plâtre «[ui ne vivra probablement pas plus de deux hiveis. La couleur
pâle du plâtre se raccordant fort mal avec le ton noirâtre de la vieille
pierre, on a rétabli l'harmonie des nuances en recouvrant la surface en-
tière d'un badigeon gris-verdâire. Le plâtre, peu satisfait sans doute dt
se voir ainsi affublé dans son neuf, repousse tant qu'il peut le malen-
contreux badigeon. Celui-ci, quoique posé d'hier, s'écaille et se délaclx
en maints eudroiis.
Pour compléter la restauration du mur, les maçons chargés du join-
tolemenl, non contents d'avoir bouché toutes les cavités peiiies et gran-
des qui î7/us(ra!en< la dégradation générale de la surface, ont pris sous
leur bonnet, sans doute, l'idée de murer jusqu'aux restes des vieilles
gargouilles qui déversaient les eaux pluviales de la terrasse sur la voie
|)ublique. Il s'ensuit qu'aujourd'hui 20 mai. les eaux tombées sur la ter-
rasse, ne trouvant plus leurs issues accoutumées, se faisaient jour au
travers des joints du mur el jaillissaient sur le trottoir à la grande slupé-^
faction des passants. Il semblait que celle muraille vénérable vint d'être
frappée çà et là de la verge de Moïse.
Des gargouilles d'atienle dispo.sées sous le trottoir do quai annonceni
qu'on a l'intention de poser des tuyaux de descente pour l'écoulement
des eaux de la terrasse. Le retard qu'on a mis à poser ces tuvaux faii
présumer qu'ils ont été commandés ad hoc el que nous trouverons dans
leur forme un nouveau modèle à imiter; car si l'on n'eût eu qu'à le>
prendre chez le marchand, nous aimons à croire qu'ils seraient en placi
depuis longtemps.
Si c'est par économie qn'on a fait le jointoiemeni en plâtre, il es;
permis de dire qu'elle n'est pas heureuse; car le plâtre dure fort peu
lorsqu'il est exposé à l'humidité qui Iranssude constamment au traver>
des murs de lerrassc. Il eût beaucoup mieux valu faire ces joints en
ciment romain, dont la résistance aux iniempéries de l'air est inlinlnieni
supérieure à celle du plâtre, surlout sur les parties humides. La cou-
leur de plusieurs de ces ciments, s'harmonisant avec le ion foncé de la
vieille pierre, eût évité l'emploi d'un badigeon menteur. Les ciments, il
est vrai, coûtent beaucoup plus cher que le plâlro; mais si l'on met
dans la balance le prix du badigeon nécessiié par remploi de cedernier.
on trouvera la différence beaucoup moindre dans la dépense. Quant à
la durée, il est inconstable que le mode proposé remporte de beaiironii
sur celui qui a été employé.
— Le gouvernement vient, dit-on, d'envoyer plusieurs ariisies en
Afrique avec la mission de faire transporter à Paris l'arc de triompht
239
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
210
romain de Djonisali. La hauteur de cet arc est de H mètres ainsi que
sa largeur. Il n'est percci que d'une seule arcade, liaute de 6 mètres
sous clef, et large de 4 mètres. Une inscripilon est placée sur l'attique.
Ce monument a plus de quinze siècles. On dit qu'il sera placé au mi-
lieu du Carrousel.
— Ce serait un triste et long relevé à faire que celui de tous les
iliéàtres qui ont été détruits par le feu; il n'est guère de salles de
spectacle à Paris qui n'ait été reconstruite une, deux et même trois
lois à la suite d'incendies.
L'an dernier, les théâtres de Berlin et du Havre étaient la proie des
flammes ; au mois de mars de cette année, le théâtre Adelphi à Glascow
prenait feu pendant une représentation à bénéfice, et la foule, en se
précipitant dans les corridors et dans les escaliers, renversait tout sur
son passage; plusieurs personnes furent blessées. Dernièrement (le
7 mai), le théâtre de Manchester était, lui aussi, complètement consumé.
Le même jour, celui de Birmingham a failli brûler. Knfin, il y a peu de
temps, l'incendie couvait au milieu des décors du Théâtre- Française
Paris, et un de ces soirs la salle de l'Opéra brûlera comme déjà elle a
failli brûler l'an dernier, lors de l'incendie du Gymnase-Enfantin. A la
vue de ces fréquents sinistres, on se demande s'il ne serait pas d'ur-
fc'ence publique d'obliger les villes et les sociétés particulières de cons-
truire des salles de spectacle incombustibles. Plusieurs salles, nous le
savons, sont déjà dans ce cas ; mais nous insistons pour qu'on rende
cette mesure générale pour tous les nouveaux théâtres à construire en
France.
— Enregistrons encore aujourd'hui quelques-uns de ces témoignages
(l'affection et de reconnaissance donnés par les cités des départemenls
aux hommes qui les ont illustrées.
Une commission vient de se constituer à Bourges, à l'effet d'élever
un monument à Cujas dans la ville qui fut, comme l'on sait, le prin-
cipal théâtre de sa gloire. Toulouse, sa patrie, lui doit aussi un monu-
ment, ne fiil-ce i\ue pour réparer l'injustice que celte ville lui fit de
méconnaître longtemps son mérite.
Des habitants de Lyon ont conçu le projet d'élever une statue sur la
place du Petit-Change, dans le quartier Saint-Paul, à Gerson, qui est
mort dans celte ville en 1429. M. Fulchiron, depule du Rhône, ligure,
(lit-on, pour 3000 francs sur la liste de souscription. C'est à Gerson,
chancelier de f Université de Paris, savant théologien et auteur présumé
de Vlmilalion de Jésus-Chrisl, que furent dues en partie les libertés de
l'Église galicaiie.
La ville de Châleauroux va aussi avoir son monument commémo-
ralif. Une souscription a été ouverte pour y élever une statue au noble
et digne compagnon d'exil de Napoléon, au général Bertrand, à qui elle
a donné le jour. Cette glorification des sentiments généreux est bien
faite pour inspirer une conception grande et élevée; il y a dans un tel
monument quelque chose de plus à exprimer que la gloire d'un général
d'armée.
De son côlé, le conseil municipal de ^anci a volé une somme de
3000 francs pour le monument à élèvera la mémoire de M. Mathieu de
Dombasie, et a décidé que la place du collège s'appellerait désormais
place Dombasie.
La société d'émulation du Jura a volé par acclamations l'érection
d'une colonne sur le monticule de la Croix, qui domine le village du
Quiniy, où Charles Nodier s'est marié, et où est née sa fille. Cette co-
lonne portera pour inscription : Au bon Charles Nodier.
— La foudre est un des plus fréquents agents de destruction des
tlèches aiguës de nos cathédrales, et il serait bien à souhaiter que l'on
employât tous les moyens que la science nous donne pour les mettre à
l'abri de cet ennemi terrible. Combien de chefs-d'œuvre n'avons-nous
pas vus périr dans les Uammes! combien de trésors u'ont point été per-
dus à jamais pour l'art, faute d'une dépense minime, si on la compare
aux pertes qu'elle eût prévenues I L'incendie récent de la flèclie de Laon
vient d'en fournir un nouvel exemple.
« La tour du cloître, dit \e Journal de fAitne en racontant ce sinistre,
cette construction si svelte, si légère, si aérienne, qui compte de la base
à la plate-forme supérieure environ 85 mètres d'élévation, est encore
exhaussée d'un clocher en flèche d'une dizaine de mètres. Ce clocher,
de forme hexagonale, et qui est terminé par un globe sur lequel est
fixé un ange aux ailes éployées et portant une croix, présente dans sa
partie inférieure un campaiiille dans le(|uel sont placés la cloche et les
timbres de l'borloge. L'ange, haut d'un mètre à un mètre et demi, est
en plomb, et du poids d'environ 50 kilogrammes ; le globe qui le pori«
est en cuivre ; les six pans formant la flèche sont recouverts de lames de
plomb. »
C'est à quelques mètres au-dessous du globe que la flèche a été frappée
de la foudre. Le feu prit à la partie inférieure du clocher : il était bien
diflicile de combattre un incendie à une pareille hauteur. Toutefois l'eau
fut montée sur la plate-forme de la tour, et à l'aide de pompes à main
on essaya de combattre le feu. Bientôt tout le clocher s'écroula, en-
traînant dans sa chute le globe et lange qui le surinoniait.
Heureusement celte chute n'a occasionné aucun des graves accidents
que l'on pouvait redouter. L'incendie s'est arrêté là; mais la flèclie de
l'horloge, restaurée il y a vingt-trois ans, devra être reconstruite en
entier.
— La première pierre d'une église vient d"étre posée à Moulins, et une
cathédrale vient d'être terminée à Rennes. Cette cathédrale avait été
commencée en 1787, par M. Bureau de Girac, évéque de Rennes à
celle époque. Interrompue pendant la Révolution, cette construction
fut reprise en 1811 : les travaux ont donc duré vingt-cinq ans.
— Au chàleau d'Henri IV, à Pau , les travaux se poursuivent celle
année avec une activité remarquable. Plus de cent ouvriers, en y
comprenant les hommes employés aux carrières, sont en ce moment
occupes à tes travaux de restauration. La façade du Sud est ter-
minée jusqu'à la corniche. Le balcon nallend plus que la balustrade,
et . au dire du Mémorial de Pau, il promet d'être d'un effet inagiii -
fique. La première voûte de la façade de l'entrée principale est achevée. .
A l'inlérieur, les travaux sont poussés avec la même vigueur. Un pas-
sage couvert et souterrain pour communiquer aux cuisines est com-
mencé; il traverse la grande cour intérieure du château. Les cuisines
sont à la veille d'être terminées. On a utilisé les caves pour ce service.
Plblic.\tioss NOIVKLLES. — Moyen-Age monumental et arthéoto-
gique. — La 42' livraison se compose des planches suivantes : Portail
de l'église Saint-Martin, à Ponl-à-Mousson (Meurthe) ; — Chapelle du
château de Vincennes;- Portail latéral Sud de Saint-Ouen à Rouen ;
— Entrée du palais épiscopal et porche latéral du Nord de la calhédrale
de Chartres; — Fontaine des Lions, à l'Alhanihra de Grenade; — Frag-
ments de la porte du Nord, calhédrale de Bâie.
La 45« livraison contient les planches qui suivent : Façade de Saint-
Maclou, à Rouen, avec l'ancienne flèche détruite en 1794; — Intérieur
de l'église Saint-Etienne, à Caen; — Maison de Jacques Cœur, à
Bourges; — Sainte-.Marie-du-Moni, près Carenlan ; — Planche de dé-
tails : A , détails de l'intérieur de la calhédrale de Mayence; B, ancienne
porte dans la salle capitulaire ; — Détails du cloilie Saint-.\ubin , à
Angers.
CÉSAB DALY,
Directeur ridarteur en chef,
membre de l'Académie royjle des Beaux-Ans de Sloclibolm, et membre
honoraire et correspondant de l'Inslilut royal des Archilecles brilannique «.
Faris. — Typographie LiCRàhpb et Comp., rue Damielle, *.
Ratme, GenrraM i^- L'ArrJutectiir& at de^ Trcit/uitij:: fahUc^ . ^) . Jiur de. I^'ursteTnbcra . Paru
Vol. 6. Pi
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iiii;i(iiii:i!i)iiiiiiiiii(iiiiubuiiiiuiijfiiiiiiiii!!!i):i;::Q^iiii'a!!ij!:L:;::^;!!iïïii!!ii!!li!Li:..l
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M» RENE DUVOIR.
241
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
242
DEUXIÈME INSTRUCTION DU COMITÉ HISTORIQUE
DES ARTS ET MONUMENTS (1).
MONUMENTS FIXES.
CIVILISATION CHRETIKINNE.
ST¥I.E ROMA^' EX STII.E CiOTIIIQUE.
du Xle au XVle siècle.
C'est à partir de la résurrection de l'art, dans les premières
années du X^ siècle, qu'ont été construits presque tous les édifices
religieux que les correspondants de la commission rencontreront
dans leurs recherches. A partir de cette époque aussi, les églises
n'ont guère cessé d'offrir une distribution constante, ramenée
dune manière assez fidèle (sauf les proportions et quelques ad-
jonctions indispensables) au type de la basilique romaine. Cette
distribution n'a même reçu jusqu'à nos jours qu'une modification
importante par le prolongement des collatéraux autour du chœur,
qui date des premières années du XII" siècle.
Plus les églises construites sur un autre plan sont rares, plus
elles devront être étudiées avec soin, chaque fois qu'on en ren-
contrera.
A partir de ces premières années du Xl« siècle , nos temples
ayant pris des proportions de plus en plus étendues, et en rapport
avec les masses de population qui s'y pressaient aux fêtes solen-
nelles, la réunion des travaux de plusieurs générations, le plus
souvent même de plusieurs siècles, devint indispensable à leur
achèvement ou a leur appropriation. Chacun de ces siècles, cha-
cune de ces générations, dédaignant de s'astreindre, surtout dans
les détails, à un plan primitif, qui, d'ailleurs, la plupart du temps.
n'avait pas été rigoureusement arrêté, a imprimé un caractère
particulier à son œuvre.
C'est donc en détail et pour ainsi dire pied à pied qu'il faut
aller chercher, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, sur chacune des
portions d'un ensemble si compliqué et presque toujours si hété-
rogène, la date particulière que les arts du Moyen-Age y ont in-
scrite. Pour ne pas s'égarer dans une pareille analyse, il est né-
cessaire de la conduire avec beaucoup d'ordre. Nous pensons qu'il
pourra y être procédé d'après la marche tracée dans les divisions
suivantes :
Chapitre l. Ensemble de l'église.
Chapitre IL Examen détaillé de l'extérieur.
Chapitre III. ï^xamen détaillé de l'intérieur.
Chapitre IV. Dépendances, constructions accessoires ou ana-
logues.
CHVPITRK I.
KNSEMBLE M L'ÉGLISE.
(1) Nos lecteurs IrouveroiU dans le cours de celle Instruction une sërie de
Ijiavures qui ne sont point dans la publication ministérielle et qui donnent un
intérêt de plus à ce travail, ilc^jà si intéressant d'ailleurs.
Ce chapitre se composera de cinq paragraphes, savoir :
§ I. Orientation de l'édifice.
§ II. Plan par terre.
g m. Dimensions générales.
§ IV. Système général et matériaux de construction.
§ V. Distribution générale.
§ I. Orientation.
Tout le monde sait que, longtemps avant le XI" siècle, les églises
ont commencé à être dirigées, autant que possible, vers l'orient,
soit pour que le soleil en éclairât l'intérieur de ses premiers rayons,
soit afin que les fidèles qui viendraient y prier eussent la face
tournée vers la contrée qui fut le berceau du christianisme. Lors-
qu'une d'elles a été construite depuis cette époque dans une autre
direction, ce qui est ordinairement dû à des circonstances particu-
lières de localité , il est indispensable d'en faire l'observation. Nous
pensons même que l'on doit tenir compte de l'inclinaison, souvent
très-marquée, que présente l'axe de la plupart des églises par rap-
port à l'orient vrai, inexactitude qui peut tenir, soit au peu de
soin apporté par les constructeurs à établir une orientation exacte,
soit, comme l'ont supposé quelques antiquaires, à ce qu'on se sera
dirigé sur le point du ciel où se levait le soleil à l'époque de l'ou-
verture des travaux.
Si les églises étaient toujours, sauf ces légèies inexactitudes,
dirigées de l'occident vers l'orient, ainsi que cela arrive le plus
ordinairement, il suffirait d'employer la mention des points cardi-
naux du ciel pour éviter toute confusion dans la désignation de
l'emplacement respectif de leurs parties, et surtout de celles qui
sont répétées des deux côtés de leur axe ; mais comme il n'en est
pas toujours ainsi, on a eu recours à divers moyens d'éviter toute
confusion. Ainsi l'on dit qu'un objet est à la droite de l'axe de
l'église, ou du côté de l'épitre, lorsqu'il se trouve à la droite d'un
observateur qui aurait la face tournée vers le chevet et le dos vers
le bas de l'édifice. Dans le cas contraire on peut dire que cet objet
est à gauche ou du cùté de l'évangile. Lorsqae l'orientation est
normale , on peut sans inconvénient se servir des expressions de
méridional et de septentrional, qui ont alors l'avantage de donner
à la fois l'orientation relative et l'orientation absolue des (wints
dont il s'agit.
T. V. 16
2i7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
2Ï8
eristie. Le XII" siècle, en les prolongeant au delà du sanctuaire, où
ils prennent le nom de pourtour du chœur, y a ajouté une série de
chapelles correspondant à chacune de ses travées.
Saint-Germain-des-Prés.
Fig. 6.
Plus tard cette ceinture de chapelles se prolongea au delà des
transsepts, jusqu'à l'autre extrémité de la nef.
Les collatéraux, quelquefois doubles dans les grands édifices,
c'est-à-dire partagés en deux, dans le sens de leur longueur, par un
Kotre-Vamt de Paris.
t'y 7.
rang de piliers ou de colonnes intermédiaires, y sont souvent aussi
pourvus de galeries supérieures qui en doublent l'étendue.
Ils manquent dans les chapelles et dans la plupart des églises de
petite dimension.
Saint-Jean de Beauvait.
Fig. 8.
E. LES TRANSSEPTS.
Les transsepts, construction transversale à la nef et aux collaté-
raux, comme l'indique son nom, et placée aux deux côtés de leur
extrémité voisine du chœur, existent d'une manière plus ou moins
marquée dans quelques basiliques primitives. Ils furent de très-
bonne heure adoptés et développés pas les architectes chrétiens,
auxquels ils fournissaient l'occasion d'imprimer à leurs édifices un
caractère particulier de consécration religieuse en leur donnant la
forme d'une croix. C'est ce qui les a fait appeler en France la croi-
$ée ou Ui croiiillom de l'église.
Église de Rosheim.
Ihj. S).
Après les collatéraux, ce sont eux qui ont reçu les premiers au-
tels secondaires introduits dans nos temples, dont la disposition et
le rite primitifs n'en comportaient qu'un. Souvent même leurs ab-
sides sont mieux caractérisées et de plus grande dimension que
celles des collatéraux, destinées, dans l'origine, à un autre service,
comme nous l'avons dit.
Les transsepts manquent dans les chapelles et souvent dans les
petites églises. Ils sont répétés deux fois dans quelques grands édi-
fices, de manière à ce que le plan figure une sorte de croix de Lor-
raine ou archiépiscopale.
249
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
230
Fig. 10.
On dit qu'une église est en forme de croix grecque, lorsque la
nef, les transsepts et le chœur sont de même dimension ; et qu'elle
A^'-\
6-V \
I
k
Fig. 11.
représente une troix latine, lorsque la nef est plus longue, confor-
mément à l'usage le plus habituel.
1^
\
v^^
Fuj. 1-2.
Quelquefois cette croix est renversée , le croisillon le plus long
étant celui qui se trouve occupé par le chœur.
Fig. 13.
F. LHS PORTAILS. ,
Il n'y avait, dans les églises primitives, qu'une seule entrée don-
nant sur Vatrium. Cette entrée est aujourd'hui représentée par le
grand portail , ordinairement dirigé vers le couchant , mais quel-
quefois , ainsi que le porche, reporté au bas de l'un des collaté-
raux, surtout dans la plupart des églises à contre absides, dont nous
allons parler.
Notre-Viime de Poitiers.
Fig. U
Outre ce portail principal, portion de l'édifice où les arts du
Moyen-Age ont souvent déployé le plus de magnificence, il est rare
qu'on n'en rencontre pas d autres, et particulièrement sur la face
extérieure des transsepts. Ces entrées de l'église, étant d'une grande
importance sous le rapport de l'ornementation, seront décrites avec
beaucoup de soin et de détails, et l'on devra, entre autres circon-
stances, examiner si elles font partie du plan de la masse de l'église,
ou si elles lui sont, soit postérieures, soit même antérieures, comme
cela arrive quelquefois.
251
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
252
G. LE POBtHE.
Le porche est cette portion de l'édifice ordinairement exté-
rieure, qui était destinée, suivant les rites de la primitive Église,
à mettre à l'abri des injures de l'air, mais en dehors de l'assemblée
des fidèles, les catéchumènes et les pénitents. Ces rites ayant été
abandonnés depuis un grand nombre de siècles, leur suppression a
entraîné, à une plus ou moins longue distance, suivant les localités,
celle de la distribution qui y correspondait. La présence du porche
est donc un signe notable d'ancienneté et de fidélité à la liturgie
primitive, qui doit le faire signaler et décrire avec une attention
particulière toutes les fois qu'il a été construit dans cette intention.
Mais il faut soigneusement distinguer ce porche normal des di-
verses constructions, tant intérieures qu'extérieures , qui ont été
confondues avec lui sous la même dénomination , savoir :
A l'intérieur :
Le porche en forme de coupole, imitation de l'église du Saint-
Sépulcre, placé à l'entrée de quelques-unes de nos églises ro-
manes;
Le Temple, à Paris.
Fig. 15.
Le porche accidentel, formé par la base d'un clocher placé sur le
milieu du portail ,
Sainte-Radegonde , à Poitiers.
Fig. 16.
OU résultant de l'étranglement que produisent, dans le plan de ce
même portail, les bases de deux clochers latéraux,
Monréal [Sicile).
Fig. 17.
OU enfin produit par le retrait des portes en arrière de la masse du
portail.
Cathédrale de Reims.
Fig. 18.
A l'extérieur :
Le porche-péristyle, imitation, aussi complète que l'a comporté
la capacité des constructeurs du péristyle antique, non-seulement
dans sa masse, mais encore dans ses moindres détails de disposition
et d'ornementation.
Saint- Vincent , à Rom t.
t--3
Fig. 19.
Un y trouve quelquefois les traces de l'emploi de rideaux ,
destinés à préserver les assistants du soleil et de la pluie.
Le porche-tribunal , ordinairement supporté sur deux colon-
nes , dans la décoration desquelles il entre presque toujours des
figures de lions.
Sainl-Zénon , à Vérone ,
Fig. M.
On sait qu'au Moyen-Age c'était à la porte des églises que
se rendait souvent la justice , et que s'accomplissaient certJiins
actes authentiques, ainsi que le rappellent les formules initr
leones et à la porte du moutier. Quelquefois ce porche-tribu-
nal , au lieu d'être appuyé sur le portail , l'est sur le porche
religieux , et constitue alors un véritable avant-porche.
Le porche militaire , construit en avant du portail pour en
défendre au besoin l'entrée , est ordinairement couronné de mâ-
chicoulis ou de créneaux (l).
(1) Pour de plus amples détails sur ces constructions militaires, voir, dans le
vol. IV de cette /l«t)ue, les articles intitulés : .<lrcA«7ec(i«remiIt(atre du Moyen-
Age, col. 337, 385 et 433.
253
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
La- Ferlé-Saint-Aubin, en .Sologne.
3»
t'iy. 21.
Fig. 22.
Il se réduit quelquefois, à l'exemple des moucharahis orien-
taux , à une simple saillie des étages supérieurs , supportée par
des mâchicoulis (l).
Fi(j. 23.
Fig. 24.
Le porche de décoration , souvent fort orné et fort saillant ,
ajouté , en avant du portail principal , ou même de quelqu'une
des portes latérales , dans un simple but d'ornementation , or-
dinairement après coup et à une époque peu ancienne , lors-
que la tradition du porche primitif était depuis longtemps perdue.
Fil/. 25.
Enfin le porche-auvent, construction légère placée en avant
de l'une des entrées de l'église pour la défendre des injures
de l'air.
(1) Foj,. col. 387, vol. IV, de ceUc Revue.
Fig. 26.
À Beimt (détruite).
Fig. 27.
On trouve souvent, sur les bords du Rhin, et plus rarement
en France, des églises dans lesquelles le porche est remplace
par une ou trois contre-absides. Dans ce dernier cas , les deux
latérales servent ordinairement de passage. La principale est
occupée, tantôt par un autel où l'on officie quelquefois, tantôt
par un chœur de chantres, mais plus souvent par les fonts
baptismaux.
Cathédrale de Trêves.
Fig 28.
On sait que le baptistère , primitivement placé au milieu de
['atrium ou parvis, a été reporté, à l'époque de la suppression
de cet atrium, dans l'intérieur de l'église, où il a occupe divers
emplacemeuts (le plus souvent à gauche), et pris plusieurs for -
mes, quelquefois même celle d'un petit édifice complet insère
dans le grand.
255
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
25«
H. LES CLOCHERS.
Les clochers, dont le nom indique suffisamment la destina-
tion, sont encore une adjonction faite par le cliristianisme au
plan de la basilique romaine, pour y placer les instruments au
moyen desquels s'introduisit, à une époque très-reculée, l'usage
d'appeler les fidèles à la prièi'c. Les plus anciens que l'on con-
naisse sont des tours rondes, isolées de l'église, comme on a
souvent continué de les placer en Italie , et beaucoup plus ra-
rement en France. Par la suite les clochers remplirent en même
temps une autre destination , celle d'annoncer, du plus loin pos-
sible, au voyageur, l'emplacement de l'église. C'est pour satis-
faire plus complètement à ce dernier service , aussi bien que par
des motifs de décoration et de magnificence , qu'ils ont été éle-
vés quelquefois jusqu'à des hauteurs prodigieuses. En France ,
dans les plus anciennes églises, le clocher principal couronne
ordinairement le centre de l'édifice au point de jonction de la
nef, des transsepts et du chœur.
Notre-Dame de Dijon.
Fig. 92.
Dans les grandes églises épiscopales ou abbatiales, on en
compte quelquefois jusqu'à sept ou huit, mais ordinairement
trois, savoir : un principal au centre de la croisée, et deux
secondaires aux côtés du grand portail. Ceux-ci rappellent, par
leur position , et souvent par l'infériorité de leurs proportions ,
les clochetons dont était flanquée primitivement la façade ex-
térieure de V atrium.
I. LA SACRISTIE.
La sacristie, dont tout le monde connaît la destination et
l'emplacement habituel dans le voisinage du chœur, est moins
une portion intégrante qu'une dépendance de l'édifice , presque
toujours ajoutée après coup dans nos églises romanes et go-
thiques , et moins importante par sa décoration propre que par
les objets précieux qu'on y dépose. Nous la mentionnons ici
cependant, par la raison que c'est au moins un accessoire in-
dispensable et que son existence date de la primitive Église ,
comme nous l'avons dit ci-dessus.
(La suite au prochain numéro.]
ÉQUILIBRE
DES VOUTES EN BERCEAUX CVLINDRIQL tS
(DEOXIÈME ARTICLE. Voir COl. 51.)
§ X\V^ — Nous avons réussi à traiter les questions de l'article
précédent, sans nous écarter en rien de l'exactitude mathématique,
et aussi sans apporter dans les calculs une complication sensible-
ment plus grande que si nous ne nous étions point astreint a toute
cette rigueur. Aujourd'hui nous serons obligé de nous en dépar-
tir, tant à cause des difficultés que nous présenteront les intégra-
tions, qu'à cause de l'indétermination des problèmes (|ue présente
la question des voûtes de pont on arches, question que nous allons
aborder dans cet article. Toutefois nous serons en droit de consi-
dérer comme suffisamment exacts, les résultats analytiques aux-
quels nous parviendrons en négligeant de certains termes très-
petits, tels que — dans les équations (t4), lorsque nous aurons
P
vérifié que la plus grande valeur de ces termes, déduite de nos ré-
sultats, conserve effectivement le degré de petitesse (|ue nous leur
avons supposé. Quant à l'indétermination du problème en lui-
même, nous en ferons l'objet d'une courte discussion dans le para-
graphe suivant.
Voùles ou archet dan* letqutlU* le» pressions extérieures ou charges
sont indéterminées.
§ XXVl. — Nous supposons données, dans noire première série
de questions, la pression t par unité de surface, et les forces exté-
rieures F différentes des poids des voussoirs, en fonction de r. En
laissant de côté, pour le moment, les arches dans lesquelles les faces
normales de joint s'étendent jusqu'au tablier (i), nous allons faire
voir que, dans tous les autres cas, In répartition de la charge sur
(1) Nous ferons remarquer que dans ces voûtes, l'épaisseur esl une certaine
fonction de l'abscis.se, donnée par la condition de l'Iiorizontalilé de Vexlrados;
rétablissement de ces voiiles se rapporte à la deuxième .série de questions,
dans laquelle on se donne e et F. [F est alors égal à zéro.) Ce n'est donc point
ici le lien de traiter cette question ; mais nous avertissons, dé» à présent, qu'elle
n'est point indéterminée, et ne présente que des difficultés d'intégration, dont
on parvient à se tirer en négligeant des termes peu influents.
337
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
258
les différents voussoirs, dépend de la pose des assises horizontales
dont les extrémités s'appuient sur les reins de la voûte, et du tas-
sement qui se produit après la construction. Les circonstances de
Ja pose et du tassement, dépendant entièrement du soin qu'appor-
tent les ouvriers dans la construction, et de la nature des mîité-
riaux employés, et le tassement dépendant lui-même de la pose ,
on voit qu'il devient impossible de tenir compte exactement, dans
le calcul, de ces circonstances si variables. C'est à cette variation
que tient l'indétermination des forces F exercées par les assises
horizontales sur les voussoirs. Pour en bien comprendre les effets, il
nous suffira d'examiner les cas extrêmes que peut présenter la pose
des assises horizontales. Ces cas extrêmes n'ont lieu que très-ra-
rement; quelques-uns d'entre eux peuvent même ne jamais se ren-
contrer; mais on concevra que nous les considérions de préférence,
et» remarquant que les résultats que peuvent fournir les cas pra-
tiques ordinaires, seront nécessairement renfermés entre ceux que
fourniront les cas extrêmes que nous allons passer en revue.
§ XXVII. — Le plus souvent, dans les constructions de voûtes
chargées, les voussoirs ne se terminent point vers Yeœtrados par
une surface cylindrique ayant cette courbe pour directrice, mais
bien par deux surfaces planes, l'une horizontale passant par l'arête
supérieure du voussoir, l'autre verticale et passant par l'arête in-
férieure située sur Veœtrados. Au moyen de cette disposition en
escalier, on met de niveau les faces horizontales des voussoirs avec
celles des assises de maçonnerie qui forment la charge de la voûte.
Nous considérerons d'abord diverses circonstances de la pose
des assises, diins cette disposition par rapport aux voussoirs. Il
est clair que les facis verticales des assises peuvent être plus
ou moins serrées, et même que la face verticale de contact d'une
assise avec le voussoir peut ne supporter aucune pression, soit
pendant la pose, soit après que le tassement a été produit; cela
dépendra principalement de la pose de l'assise considérée, et de
celle des assises voisines. Il pourra donc y avoir un plus ou moins
grand nombre de voussoirs dont les tètes ne recevront des assises
aucune pression horizontale, de même aussi que, pour d'autres
\oussoirs, ces pressions seront plus ou moins considérables. Main-
tenant, la pression verticale qu'une pierre appartenant à une as-
sise exercera sur la face horizontale de la tête du voussoir corres-
pondant à l'assise inférieure, dépendra de plusieurs circonstances,
telles que l'exécution plus ou moins parfaite des surfaces de joint,
et la longueur de la partie de la pierre considérée, engagée entre les
assises supérieure et inférieure, du côté opposé à la tête du vous-
soir ; on conçoit encore une exécution ou une pose assez impar-
faite pour que quelques-unes de ces faces horizontales de joint,
comnmnes à l'assise et au voussoir inférieur, ne supportent au-
cune pression ; de même aussi que ces pressions pourront être
considérables, comme dans le cas où la pierre dont il s'agit aurait
une plus grande épaisseur vers la tète du voussoir que vers le côte
opposé. Les pressions verticales exercées sur les têtes des voussoirs
par les assises pourront donc, comme les pressions horizontales,
varier dans des limites très-étendues. 11 est permis même de se
représenter un cas dans lequel les pressions horizontales et verti-
cales seraient nulles : ce serait celui où le système des assises hori-
zontales pourrait de lui-même se tenir en écpiilibre, comme dans
les constructions égyptiennes; alors la \oùte serait touchée sim-
plement, sans être pressée par ces assises, et ne serait d'aucune
utilité dans la construction, de telle sorte qu'on pourrait la sup-
primer, tandis qu'elle devrait se tenir en équilibre d'elle-même si
on voulait la conserver.
De ce qui précède il faut conclure qu'il est impossible d'assi-
gner aucune valeur déterminée aux composantes verticale et hori-
zontale de la force extérieure F, dans la disposition que nous con-
sidérons ; il est donc également impossible de les soumettre à aucun
calcul précis. Lorsque, néanmoins, ces composantes pourraient
être déterminées, nos formules (H), qui expriment les conditions
de la plus grande stabilité, ne s'appliqueraient que dans le cas
particulier que nous allons examiner. Ce cas est celui où la résul-
tante des pressions horizontales et verticales est normale à la courbe
des centres de gravité. En effet, la force dF, appliquée à chaque
voussoir infiniment petit, est supposée passer par le point de la
courbe correspondant à ce voussoir; or, si le point d'application
de cette force est un point de Vextrados du voussoir considéré,
cette force ne peut passer par le centre de gravité sans être nor-
male à la courbe; tandis que si elle était appliquée au centre de
gravité, elle pourrait avoir une direction quelconque. On se ren-
dra compte de la nécessité qu'il en soit ainsi , sans recourir à nos
équations, en considérant l'équilibre d'un voussoir éléraentaire.
Appliquons l'équation des moments, en prenant un axe parallèle à
celui de la voûte et passant par le centre de gravité du voussoir.
Le moment du poids du voussoir sera nul, à cause de la position
de l'axe. Les moments des pressions exercées par les deux vous-
soirs contigus, et que nous supposons agir tangenliellement à la
courbe des centrée de gravité, auront pour valeur le produit de
forces finies par des droites infiniment petites du second ordre :
mais ces moments sont de signe contraire, et la différence des for-
ces qui entrent dans leur composition est infiniment petite; la dif-
férence de ces moments est donc une quantité infiniment petite du
troisième ordre. Si nous supposons maintenant que la force dF ne
passe point par le centre de gravité, elle produira un moment infi-
niment petit du premier ordre, qui ne saurait être équilibré par le
précédent, qui est du troisième. Au contraire, le moment de la
force rff serait équilibré, si la résultante des pressions des voussoirs
voisins passait à une distance convenable du centre de gravité ;
mais nous avons vu, à la fin du paragraphe (III), combien il im-
porte, pour obtenir la plus grande stabilité possible, que cette
résultante s'éloigne peu du milieu de l'épaisseur; nous devrons
donc, en nous tenant au point de vue de cette grande stabilité,
examiner principalement le cas où la résultante des forces exté-
rieures, différentes du poids du voussoir, est normale à la courbe
des centres de gravité. Dans le cas particulier des forces dF nor-
males, nos équations (t t) peuvent prendre une forme qu'il est inté-
ressant de faire connaître.
Transformation des équations d'équilibre, dans le cas des force»
normales.
§ XXVIII. — Nous allons donner à la force dF, dont les com-
posantes entrent dans les équations ( 7 ), une expression appropri»^
exclusivement au cas où cette force est normale à la courbe des
centres de gravité. Nous supposerons que cette force soit dirigée
vers le centre de courbure; s'il en était autrement, il suffirait de
changer son signe. Soit .V la force normale par unité de surface,
qui aeit sur l'élément superficiel dont ds est la base et x la lon-
gueur, nous aurons
dF = N >. ds.
T. V.
17
239
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
200
L'angle de cette force, avec l'axe des x, est 90 + * ; celui que fait
sa direction avec l'axe des y, est «. Les composantes de dF suivant
ces axes, sont donc
db\ — — N X sin% ds, dFy= Nxcoso.d». (56)
Substituant ces valeurs dans les équations (7), elles deviennent
d. Tcosx= — Nt. sin * ds, d. T sin a. — Nxcosa. d.i -)- dP.
En multipliant, d'une part, la première de ces équations par
co-ia, la deuxième par «m a et ajoutant; puis, d'une autre part,
multipliant la première par sin a , la seconde par cot a , et retran-
ciiant, on aura les deux équations
cos^-d. l'cosx-}-sin nd.Tsin % = sin xdP ,
cas a d. T sin a. — sin a d. Tcos a = co« a dP -f- Nxdt ,
en observant que le facteur sin* a-f- cos* « de N\ds,se réduit à
l'unité. Maintenant, la différentiation donne
d. T cos ^^ cos a. dT — T sin a do. ,
d. T sin OL = sin X dT -\- Tcos %da.;
et l'on voit que pour former, avec ces expressions, la valeur des
premiers membres des équations ci-dessus, il suffit de multiplier
la première par cos a , la deuxième par sin » , et d'ajouter, puis
ensuite de multiplier la première par sin ol , la deuxième par
cos 1 , et de retrancher; on en tire immédiatement
dT ^= sin xdP, 1 . .
Td x = cos ,.dP-^ Nids. ] ^ '
On peut actuellement mettre à la place de TetdP, leurs valetirs
(8) et (13); il vient de cette manière
d. zi = mil l j sin a ds, ï
it dt = oa [ I — - j cos <i.dt-\-N ds. \
(58)
rablement la construction de la courbe. En nous reportant a la
valeur de T, § (V), nous pourrons écrire
tt = Q; (60)
d'où il résulte que si l'on fait la pression ( par unité de surface,
constante , l'épaisseur i sera également constante. Nous allons
appliquer les équations précédentes à un exemple.
Equilibre d'une voûte soumise, soit intérieurement, toit extérieure-
ment, à la presiion d'un liquide, tt dans laquelle on néglige le
poids des voussoirs par rapport à cette pression.
§ XXX. — SI la masse liquide presse extérieurement la voûte,
nous prendrons pour axe des x, une droite horizontale parallèle
aux plans de tête, située dans le plan du niveau supérieur. De
cette manière, la pression normale .Y aura pour expression, sui-
vant les lois connues de l'hydrostatique,
iV=D,y, \(i\)
en désignant paro, le poids de l'unité de volume du liquide; la
force N aura du reste le sens supposé dans la mise en équation
S (XXVIII). En mettant maintenant dans la deuxième équa-
tion (59) les valeurs de Q et de N (60) et (61), il viendra
<
I — :
(62)
Telles sont les équations transformées que nous nous proposions
d'obtenir. Nous ferons remarquer toutefois qu'on pouvait obtenir
immédiatement ces équations, en égalant à zéro les sommes des
projections des forces qui sollicitent un voussoir sur des axes, l'un
tangent à la courbe des centres de gravité, l'autre normal à cette
courbe. Il faut seulement alors faire attention à ce que, si l'on
prend pour l'un des axes la normale menée par l'une des extrémités
de l'élément ds, la projection de T sur la partie de cet axe dirigée
vers le centre de courbure est nulle , et la projection de la
force T-\-dT sur la même partie, s'obtient en multipliant par —
co«( 90 — dx], ou — sindy. ; la composante a dès lors pour expres-
sion — Tdci. , en négligeant les infiniment petits des ordres supé-
rieurs. Les autres composantes s'obtiennent sans difficulté
§ XXIX. — Lorsqu'on est fondé à regarder comme négligeables
lès poids dP des voussoirs par rapport aux autres forces ([ui les
sollicitent , ce qui serait sensiblement vrai , par exemple , dans un
sjstèmelormé d'arcs de fer, de fonte ou de bois soumis à des char-
ges considérables, les équations (57) se réduisent à
dT=o, rdx=xNds.
La première de ces équations s'intègre immédiatement; nous
désignerons la constante par Q ï. , et si nous observons que l'ex-
pression du rayon de courbure est = = —, nous aurons
T=Q', (? = -Vf. (59).
On voit que, dans cette hypothèse, la pression tangentielle to-
tale Test constante, et le rayon de courbure en raison inverse de
la pression normale N; cette dernière remarque facilitera considé-
et il restera à déduire de cette équation celle de lu courbe , par voie
d'intégration.
Si la masse liquide, au lieu de presser Vexirados, était au con-
traire en contact avec Vintrados, comme dans les conduites d'eau
souterraines, nos équations s'appliqueraient encore eu changeant
le signe de N, ou simplement celui de o, ; mais à cause des circon-
stances particulières que présente le mouvement des eaux, relati-
vement aux pressions exercées sur les parois des conduites, il fau-
drait placer l'origine des coordonnées à la hauteur du niveau
supérieur d'un manomètre à air libre, qu'on mettrait en communi-
cation directe avec le liquide en mouvement. Lors<|ue ce niveau
s'élèvera au-dessus de la voûte, .V étant négatif, la valeur de Q
sera négative, parce que, dans la deuxième équation (59). le rayon
de courbure est supposé positif; il en résultera (|ue les valeurs de T
et t deviendront .lussi négatives. Cela signifie que les voussoii's
devront agir les tms sur les autres par tractions, et non eu se
repoussant. Ces tractions pourront être, en partie, produites par
l'adhésion des mortiers, et, au besoin, par des liens de fer établis
entre les voussoirs consécutifs. Dans certains cîis du mouvement
des eaux, il pourra se faire que le niveau du manomètre descende
au-dessous des parties les plus basses de la voûte, et alors tous
les y seront négatifs , ce qui rendra négative la valeur de — ,
équation (62), et par suite, positive celle de t, à cause du signe
de o, : il est évident que, dans ce cas, la voûte recevra, de dehors
en dedans, des actions égales à l'excès de la pression atmosphérique
sur la pression totale de l'eau dans la conduite en chaque point.
Ce résultat est conforme à celui que fournit l'équation (61), car a,
et y étant négatifs, iV devient positif.
En laissant de côté le cas ou une partie des ordonnées serait posi-
tive et l'autre négative, afin de ne pas trop compliquer la question,
nous résumerons la discussion précédente, et nous confirmerons
les conséquences auxquelles nous sommes arrivés, en interprétant
l'équation (02).
Cette dernière nous montre que toutes les fois que y sera po-
2G1
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURMCS.
•262
sitlf, c'est-à-dire lorsque la voûte sera chargée extérieurement
d'une masse liquide, ou pressée intérieurement par un liquide en
repos ou en mouvement, mais de telle sorte que le niveau supé-
rieur du manomètre s'élève au-dessus de la voûte , le rap-
port — sera positif; et l'équation restant la même, la forme de la
courbe sera identique dans ces divers cas, toutes circonstances res-
tant égales d'ailleurs. Elle montre encore que, dans le cas de la pres-
sion intérieure et des ordonnées négatives, le rapport ci-dessus
devient négatif, de manière que, si l'on change y en — y, la forme
(le la courbe reste encore la même; seulement elle est disposée
en sens contraire du précédent et symétriquement par rapport
à l'axe des y. Nous n'aurons donc qu'à intégrer généralement
t
l'eqnation (62) , en regardant — et y comme des quantités po-
sitives.
Avant de passer à l'intégration de l'équation (G2), nous ferons
remarquer que — exprime la hauteur d'une colonne du fluide con-
sidéré, qui produirait, par son poids, la pression ( par unité de sur-
face. Pour plus de simplicité dans l'écriture, et rendre notre équa-
tion homogène, nous poserons
i c^
63
et elle se réduira à
2y
m
IiUéyralion de l'équation —
2y_
§ XXXI. — La question que nous avons présentée dans le para-
graphe précédent, quoique en apparence purement théorique,
n'est cependant point à négliger sous le point de vue des applica-
tions prati(|ues. Indépendamment de l'intérêt qu'elle peut mériter
comme conception théorique, sa solution doit surtout d'abord être
considérée comme une solution approchée de plusieurs problèmes
importants , que nous essaierons de perfectionner ultérieurement.
Nous espérons qu'en vue de ce résultat, on voudra bien nous par-
donner l'étendue des développements analytiques dans lesquels
nous allons entrer.
On peut, dans l'équation ci-dessus, mettre pour p son expression
ordinaire donnée § (L\), et l'on obtiendra très-facilement une pre-
mière intégrale en multipliant les deux membres de l'équation
par dij ; mais la forme à laquelle on arrive ne met pas aussi facile-
ment en évidence les circonstances générales de la forme de la
courbe, que celle qu'on obtient en mettant pour p une expression
équivalente, dans laquelle m\ prend y pour variable indépendante
au lieu de œ. En employant cette dernière, nous aurons
+
/ doc- \ V
V + if)
le signe -)- devant être employé dans le cas où la courbe tourne sa
concavité du côté des x positifs, et le signe — dans le cas con-
traire, afin que le rayon de courbure reste positif; mais nous allons
voir qu'il n'y a point à se préoccuper de cette circonstance ,
attendu que le double siune va disparaître. En posant s = -— , l'ex-
pression précédente prend la forme
+ dz
lydy
(t-fz').
L'intégrale du premier membre s'obtient immédiatement au
moyen des formules de réduction des exposants dans les expres-
sions différentielles binômes ; si on ne veut pas recourir
à ces formules , on écrira le numérateur de cette manière
dz [\ -\- z' \ — «' dz, et le premier membre, abstraction faite du
double signe, se réduira aux deux termes
dz zdz
^i~.
z' ( l -h ^' ) •
on appliquera au second de ces termes le procédé de l'intégration
par parties, et l'on obtiendra une intégrale égale et de signe con-
traire à celle du premier terme ; l'intégrale du premier membre se
réduira à
± î
Mettant maintenant dans cette intégrale, à la place de z, sa va-
leur, effectuant l'intégration du deuxième membre de l'équatiou
proposée, puis désignant une constante par fe*, il \iendra
dx
— dy
— Jt'
|/-
dx*
dy*
(65)
dx
on voit que k est l'ordonnée du point pour lequel on a — == o,
c'est-à-dire du point de la courbe auquel la tangente est parallèle a
l'axe des y ou verticale. Pour résoudre cette équation par rapport
dx
à — , il faut d'abord élever ses deux membres au carré, ce qui in-
dy
troduit c* à la place de c', de sorte que les hypothèses de c* po-
sitif et de c' négatif conduisent au même résultat, ainsi que nous
l'avons déjà observé plus haut. Achevant le calcul, il vient
y«-A'
dx
1^
y
— I
(6C)
OU cette autre équation, dans laquelle le signe du deuxième mem-
bre est changé,
r — k}
+
dx
1/'-^ |/
.+-'■;'■■•
(671
dx
§ XXX IL — La valeur de -^ pouvant être arbitrairement prise
avec l'un ou l'autre signe, tandis que sa grandeur absolue reste la
même pour des valeurs égales et de signe contraire de y, il est facile
d'en conclure que la courbe est formée de deux branches symétri-
ques par rapport à l'axe des x. Tout ce que nous pourrons dire
sur la branche située du côté des y positifs, s'appliquera donc à
l'autre branche. Nous nous occuperons seulement de la pre-
mière.
L'équation (67) donne la valeur de + x, égale à l'Int^rale du
produit de son second membre par dy; d'où il résulte qu'à une
valeur de y répondent deux valeurs égales et de signe contraire
263
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
2G4
pour X. La courbe est donc encore symétrique par rapport à l'axe
des y.
Nous avons déjà reconnu que k est l'ordonnée du point auquel
la tangente à la courbe est verticale; nous aurons pareillement les
ordonnées des points correspondant aux tangentes horizontales,
en égalant à zéro chacun des deux facteurs formant le dénomina-
doc
teur de l'expression de — : désignons donc par h et A' ces ordon-
nées, il viendra
A''= /f^ + c' . ) ^
La plus petite de ces ordonnées, h, répond à la tangente hori-
zontale supérieure; la plus grande, K, répond à celle inférieure.
On reconnaît aisément, en considérant le dénominateur de l'équa-
doc
tien (66), que la condition pour que la valeur de —reste réelle, est
exprimée par + -, <l ,
inégalité qui se résout en les deux conditions suivantes
y^ > fc* - c* , y' < ft* + e' :
il résulte de ces inégalités et des équations (68), que la branche
inférieure est comprise entre deux parallèles à l'axe des x, menées
aux distances h et K de l'origine.
En ne considérant que le signe supérieur dans (67), on voit
qu'en supposant dy positif et partant de y^A, dx reste positif,
jusqu'à ce que l'on ait y = k; l'abscisse va donc en croissant dans
cet intervalle : au-delà, le 2' membre devient négatif, et par suite
dx ; l'abscisse décroit jusqu'à ce qu'on ait y = h'.
§ XXXIII. — Le reste du cours de la courbe, que n'indique pas
l'équation différentielle, est mis en évidence par l'intégrale de l'é-
quation (67), que nous allons calculer. Cette intégrale peut être
réduite aux fonctions elliptiques : nous ne nous arrêterons pas à
cette forme de l'intégrale, mais nous allons la développer eu
série. Pour cela, nous poserons
au moyen de ces valeurs, on donne à celle de x, la forme
y'
ç = '
au moyen de ces valeurs, l'équation (67) se transforme en
dx 19 rfe
m
±'k
\/l_Ç» V/l —6»
En élevant la quantité sous le premier radical à la puissance — j,
au moyen de la formule du binôme ; puis multipliant les termes
du développement par Ça et indiquant l'intégration, il vient
l'intégrale du 2* membre se résout en une somme d'intégrales,
dont chacune s'obtient sans difflcultés par les formules relatives
aux différentielles binômes. Nous allons présenter le résultat du
calcul, et pour simplifier, nous poserons :
A = (^f ç. _L(i:-Y2^i I (1:^')* L' re I (lil:!:!^ '"•";
\îl '> \^\i.'.l 6 "^ ~\j.4.6/ 8.10 •= l^\s.4.6.8/ lO.U.u'
L t. .
-f- etc.
T^ I.t \l.3 T^ 3 ^ ^ I Î.4.6.» \ 1.S.5 I J!
4- 4- 6*) 5» + hli^ l±l± I ±i 6« 4- -i- 6» + _L 0«\;« > (70)
'si I Î.;..1S \l.3.5.7 1^5.5.7 1^ 5.7 1^ 7 j^ / \ '
-)- etc.
' '^ ».*•« >!.» 1^ 4 / ^ I Î.t..l0 \î.4.6 T^ 4 , "
-f -f 6*) ',« + Ll^ (±1:1 I J_' 9. +i. 6V + i_66U» + elc
8 / ' s.*..i4 \ï.4.«.8 i^».6.« ~e.» I « /^ -t-eic,
+ 2 -r- = contt -\- A angle [eot = •] -f (iBÇ-f C») l/l — »» ,
n
On peut déterminer la constante de manière que l'on ait x = o
pour y = h, les équations (68) et (69) donnent alors »= i, et la
précédente donne
0 = contt -)- A amw ;
mais l'angle donné par son cosinus contient imphcltement 2mv, de
sorte qu'on peut omettre la constante ; il vient alors pour l'équa-
tion de la courbe
± X = — Aangle[eo$ = »]-{- — (Bî+C())l/i — »» . (71)
Nous indiquerons immédiatement qu'il résulte d'un examen
attentif, qu'on doit exclure de la suite des angles donnés par 6,
l'angle négatif égal en valeur absolue au plus petit des angles
positifs que peuvent fournir les tables, et ceux qu'on pourrait
former en donnant à cet angle négatif l'accroissement général
2mir; tandis qu'on peut former avec le plus petit angle positif et
cet accroissement, une série de valeurs de x qui ap|>artienneut
également à la courbe et sont séparées par des intervalles égaux à
k-A.
Il résulte de là que la courbe est composée de portions super-
posables, transportées parallèlement à l'axe des x, de manière à
laisser, entre deux de ces portions consécutives, l'intervalle A«j4,
En faisant y = k et désignant par g l'abscisse correspondante,
puis observant que 6 se réduit alors à zéro, il vient
k h
± g = — A(4m-^ î]^-\- ~ 'm ;
le point placé sur B indique qu'on doit faire e ^ o dans sa valeur.
(Ici on s'est gardé d'écrire (4 m + i) —, à cause de la remarque
qui vient d'être faite sur le choix des angles).
Eu désignant par g' l'abscisse correspondante à y =A',ou celle
du point le plus bas de la courbe, on aura, en observant que e de-
vient égal à — 1 , pour cette valeur de y,
I<es plus petites valeurs positives de g et g sont ^ ^tAk -f- i B^,
et ; T^Ak, tandis que l'intervalle commun qui sépare les autres va-
leurs est T'A k.
§ XXXIV. — Il resterait maintenant à dire comment on passera,
des données, à la Naleur des paramètres qui entrent dans l'équa-
tion (71). Nous considérei'ons seulement le cas particulier où l'on se
donnera la position du plan des naissances et celle du sommet de
la voûte, et nous supposerons que l'on exige que la tangente à la
courbe soit verticale à ses extrémités : ceci revient à dire que l'on
se donne k et h.
La valeur de c', déduite de l'équation (68), est
c'- = k'- — A' ;
puis ou a, pour l'ouverture totale de la voûte entre les deux nais-
sances, le double de la plus petite valeur de g, ou
~Ak-{-Blk,
2 '
la valeur de l étant, d'après (68) et (69),
265
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
266
Enfin, s'étant donné la pression ( constante ou variable arbitrai-
rement, l'équation (63) donnera, pour l'épaisseur de la voiite,
_ k' — W-
'~ ' ■ (72)
2 ^ '
a,
§ XXXV. — La valeur de^quenous rapportons ici, indique
h
que le rapport — doit être voisin de l'unité , afin que nos séries
soient assez convergentes pour les calculs numériques; l'équa-
tion (71) ne peut donc être appliquée facUement au calcul relatif à
des voûtes peu chargées au sommet. Nous allons donner une autre
série qui a l'avantage de faciliter les calculs numériques, pour des
valeurs petites de h, lorsque celles de y ne s'approchent pas trop
de A'; mais cette nouvelle série ne manifeste pas les retours de la
courbe aux mêmes formes, lesquels résultent de (7i).
Si l'on met dans (67), à la place de k^, sa valeur/*'-)- c', il vient
-\- dx =
|/^
y* — à'
dy.
2c'
puis en posant :
<p = .
y' - h'
2c'
on donne au facteur de dy la forme -
1 — <?
. . Développant
1/2 <? l/l— io
ensuite la puissance — \ , donnée par le second radical , et mul-
tipliant le résultat par l — ç, on a d'abord
VT
;-?
).S.5 5 / 9 \*
--ïX7r(TJ-*"^-'
de sorte qu'il reste à intégrer une suite de termes de la forme
l/r
— 1
d.
Au moyen des formules déjà citées, on fait dépendre toutes ces
intégrales d'un logarithme ou d'un Snglt hyperbolique. (Nous dési-
gnons ici par des lettres gothiques, les Sinus, Cosinus et .J^nglts hyper-
boliques.) On arrive ainsi, en supposant x = o, pour y := h, à
la formule suivante :
+ 1^2
X
■■ 3njlf
Cos
J.S.5 i.s 1
1.3.5.7 1.3. S 9
+1.3.» i.s 7 - 1,3
1.4.6 i.t 6 :.4
_±_y (y' ,V i ' 3 15,
r,''-\~etc.
+
».e J.4 6
s. 5. 7 1.3.5
4.6.» ~J
4 h [h^ ' ) ( i i'
' 6
> i.4.6 >
6 A U'
-fe/c.
» I.J T
■etc.
7 1.3.5 »
T J.4.S T"
73
8 A \ A' /
i 1.3.=
I >.4.«
etc.
— etc.
dans laquelle on peut écrire ■ 'og -?- 4" \/ "li ' . « 'a
place de 3njlf Ci>s = -|- .
Enfin nous indiquerons une autre série semblable à la précédente
poin- la forme et la valeur des coefficients; elle s'obtient en pro-
cédant comme il vient d'être indiqué pour celle-ci, mais en
remplaçant /t' par A' — c', de sorte qu'il suffit de changer, dans
cette série, A en A', puis c' en — c*, et c en c \/ — i; ce facteur
imaginaire rend réels les radicaux du second membre, tandis que le
produit l/ — 1 angif Co3 = — se change en — anj/e fo«= , I.
Tous les termes de la valeur de + ar deviennent ainsi réels et al-
ternativement positifs et négatifs. Dans cette série, qui remet en
évidence la périodicité d'y, les x sont comptés depuis le point de
tangence inférieur, c'est-à-dire qu'on a x = o, pour y = A'.
Les séries que nous venons de donner peuvent être utiles dans
d'autres occasions; mais je dois dire que le tracé de la courbe au
moyen du rayon de courbure calculé par l'équation (G2) en fonc-
tion de l'ordonnée, est susceptible d'une très-grande précision, sur-
tout lorsqu'on se sert, pour le calcul de ?, de l'ordonnée du milieu
de l'arc auquel on applique le rayon c. On a du reste une vérifi-
cation de l'exactitude du tracé, en le continuant jusqu'à l'horizon-
tale inférieure, attendu que le point inférieur obtenu par le tracé
doit se trouver sur cette horizontale , à laquelle répond l'ordon-
née A'. Nous donnerons, dans un des numéros suivants, une épure
représentant ce tracé, et les particularités que présente la forme de
la courbe que nous venons de discuter brièvement.
YVON VILL.\RCEAU.
DE L'HUMIDITE DANS LES CONSTRUCTIONS
ET DES MOYENS DE LA PRÉVENIR ET dV REMÉDIER.
Nous avons eu déjà plusieurs fois l'occasion de faire part à nos
lecteurs de communications intéressantes qui nous ont été faites
2G7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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sur cet important sujet par MAL Janniard, Polonceau, etc.(l).
La question est trop grave pour que nous ne nous empressions
pas de donner place dans nos colonnes à un remarquable travail
qui a valu dernièrement à son auteur, M. Léon Vaudoyer, un prix
de 2000 fi'ancs proposé par la Société d'Encouragement pour la
meilleure instruction tliéorique et pratique sur les moyens de pré-
venir ou de faire cesser les effets de l'humidité dans les construc-
tions. C'est d'après le Bulletin même de la Société que nous re-
produisons le mémoire de M. Léon Vaudoyer :
INSTRUCTION THÉORIQUE ET PRATIQUE
1 " Sur les diverses causes de l'humidité cl de set inconvénienU quant aux
couslruclionsen général et aux lialiitulions;
2'' Sur les différents moyens soit de prévenir ces inronvénienls tort rie
l'exécution des constructions, soil de tes faire cesser el de s'en préserver
dans les constructions existantes, |i:ir M. Léon Vaudoykr, iircliileclc.
DES DIFFÉRENTES CAUSES DE LHIMIDITÉ.
L'iiuinidiié qui se produit dans les constructions est duc à diverses
causes; elle se manifeste de plusieurs iiianicresdaiis la partie inférieure
des bàiinicnis. Dans les rez-de-chaussée, l'humidité pénètre soit par
les murs mêmes, soit par le sol.
Les murs dont se composent les constructions sont de deux espèces :
les murs de face, c'est-à-dire ceux qui déterminent le périmètre ex-
li'iieur d'un bàlinient, et les murs de refend, qui, compris enire les
premiers, servent .^ former les divisions principales dont se compose
rerisend)le des distributions intérieures.
On voit d'après cela que les murs de face ont nécessairement une de
leurs parois exposée à l'extérieur, puisqu'ils ont, comme toutes les con-
slriiclions, leur base sur le sol naturel et qu'ils sont en contact direct
avec ce même sol dans la bantenr de leur fundalion et dans la hauteur
lies caves ou d'un éiane souterrain, s'il y en a ; seulement, dans ces
derniers cas, le contact n'a lien que d'un seul côté.
Les conditions dans lesquelles se trouvent les murs de refend sont
toutes difrircnles, car, s'il y a des caves, ils ne se trouvent en contact
direct avec le sol que par leurs fondations, et, à partir du niveau du
sol intérieur, leurs parois seront à l'abri de toute influence exiérieuic
de l'athuisplicre. Examinons selon quelles lois l'humidité s'introduit
dans ces deux espèces de murs.
D'après les lois physiques, l'humidité du sol tendant constanunenl à
pénétrer, n'importe dans (|iielle direciiou, les corps hygiomètriqnes
qu'elle rencontre, il en résulte que les murs des bâtiments emprunte-
ront au sol imc certaine dose d'humidité par tous les points où ils se
irouveroni en coniact direct avec lui ; c'est-à-dire, s'il y a des caves,
les murs de face par leur base et par une de leurs parois, et les murs de
refend parleur base senleiueut. S'il n'y avait pas de caves, les murs de
refend et les murs de face se trouveraient exactement dans la même situa-
tion à l'égard de leur partie située au-dessous du niveau extérieur du sol.
Mais sont-ce là les seules causes de l'humidité qu'on signale ordi-
nairement dans les parties inférieures des Itàiiments? Certainement
non; et il est facile de démontrer que pour les nmrs de face il en est
d'auires qui, pour être moins constantes, n'en sont pas moins très-
directes; nous voulons parler de l'eau de la pluie (pie le vent chasse sur
les parois des murailles, dont le pied se trouve ainsi mouillé , tant par
l'eau qui frappe direclemenl sur la surface du mur que par celle qui re-
jaillit sur le snl , ou par celle encore qui descend le long de la façade.
Pour peu qu'on suppose un bâtiment ayant un comble dépourvu de
chenean, l'on imaginera facilement le surcroit d'himiiditéipie procure-
ront dans le bas des murs de lace les égonttures de ce comble.
1) Toi/, col. 1C2, vol. I; col. 481, 58i et siiiv., vol. II; col. S.'î el siiiv.,
vol. III.
Ainsi donc, nou'< pouvons considérer dé.sormais comme suATisnin-
ment établi que, dans les constructions tilles qu'un les fait générale-
ment, riininidité pénètre dans la partie inférieure des bâtiments, l°par
le pied des innrs; 2° par les parois de ces murs en coniact direct avec
le sol; 5" par les surfaces extérieures de ces murs exposées à la pluie
et à l'humidité de l'atmosphère. Il est bien entendu que l'Influence de
ces causes diverses s'exerce en raison de la nature du sol . du climat
dans lequel les bâtiments se trouvent situés de leur orientation, de la
nature des matériaux employés dans la construction, des différents
modes de construire, et enfin de toutes les conditions particulières dans
lesiiuelles les bâtiments en question peuvent .se trouver placés.
Outre l'hunùdité qui pénètre dans les murs par les voies que nous
venons d'indiquer, nous devons signaler celle qui se manifeste à la sur-
face même du sol intérieur des rez-<le chaussée, et expliipier de quelle
manière elle peut y parvenir.
Si le sol intérieur d'un bâtiment est établi, soil à l'aide d'un dallage
quelconque ou même d'un carrelage, on d'un plancher direcieiucnt sur
le sol naturel, il est certain que le terre-plein au-dessous du sol con-
tenant d'une part son humidité propre, et de l'autre celle qui y péné-
trera tant à travers les murs que par-des.<oiis les fondations de ces
mêmes murs, il existera ainsi une humidité constante dans toute l'é-
tendue du rez-de-chaussée, susceptible d'exercer son influence sur les
corps qui se irouveroni en coniact direct avec la surface du sol. On a
souvent pensé que, pour diminuer cette influence, il sullisait d'élever
le sol intérieur des rez-de-chaussée à une certaine hauteur au-dessus
du sol extérieur; mais ce moyen ne saurait avoir l'etrieacité qu'on
s'en promet qu'autant qu'on pratiquera ou des caves nu un isolement
au-des.sous du sol, car on pourra ainsi trouver le moyen d'aérer b«-au-
coup plus facilemenl; et la partie inférieure des murs de face, le plus
exposés à l'action de la pluie, se trouvant ainsi en contre-bas du sol
intérieur, ils ne | ourront plus transmettre an-dedans du bAliment l'Iiu-
mi<liié qui pénétrera les parois extérieures. Nous verrons plus loin que
ces dispositions sont d'ailleurs insuffisantes; nous nous conlenterons
pour le moment d'établir, 1°que, sauf des précautions partiuidières, le
sol du rez-de-chaussée d'un bâtiment quelconque, établi au niveau
même du sol extérieur et directement sur ce sol, lui enq)runtera (nie
bumiilité constante; 2° que si le niveau du sol intérieur est plus élevé
que celui du sol extérieur, mais qu'il soit de même éudtli direcieiiieiit
sur le terre-plein compris entre les murs du bâtiment, il conservera à
irès-pcn de chose près les mêmes chances d'humidité que dans le pre-
mier ras, élaiil supposé d'ailleurs dans les conditions analogues; 3°(|ue
ces chances seront tiès-noUiblemenl diminuées si le sid intérieur est
établi au-dessus des caves; 4° enliii qu'elles seront encore moindres
sans être toutefois annulées, si ce sol eslà la fuis sur cave et élevé à
une certaine hauteur au-dessus du sol extérieur.
Quant aux causes auxipiclles devront être attribués ces différents
résultats, elles nous paraissent trop faciles à déduire pour qu'il soit né-
cessaire d'entrer à ce sujet dans d'autres détails. Nousajouteronssenlc-
menl que ces causes dépendent des conditions particulières dans les-
quelles les bàiiments peuvent se trouver, et qu'il sérail trop difficile et
trop long de spécifier.
Parmi les diverses causes qui influent sur la proportion dans laquelle
l'humidité progresse dans les rez-de-chaus.sée, il faut mettre en pre-
mière ligne celles qui résultent de la nature même du sol sur lequel
les cunstnictions sont établies.
Ou conçoit de plus que la nappe d'eau peut se rencontrer à une plus
ou moins grande profondeur de la surface du sol, qu'un bâtiment se
trouvera pins on moins rapproché d'un fleuve et exposé à la crue des
eaux, que les sols sont de différentes natures, comme les rochers, les
craies, les glaises , les terrains sablonneux, etc., et que, par consé-
(picnt, ils peuvent être plus ou moins peruiéakk'S et plus ou moins ac-
cessibles à l'humidile.
Quant à l'inilueucc du climat, elle est trop bien reconnue pourqn'd
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rkvuh; dk i;architkcïlre et des travaux publics.
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soil nécessaire ilc nous y anèier; il en esl de même des inllnences di-
verses qui résulienl incoiileslabiement de l'oiienlalioii des bàiinienls.
tn examinant quatre (açades situées dans des expositions différentes,
on pourra reconnaître que celles exposées à TOuesi et au Nord ont à
subir une influence funeste de la température, tandis que, sur les autres,
cette influence s'exerce bien moins sensiblenienletse trouve d'ailleurs
combattue par l'action salutaire du soleil (1). l'armi les conditions par-
ticulières qui peuvent influer sur la plus ou moins grande l'aciliié avec
la(|uelle l'huinidité pénétrera dans le sol avoisinant les bâtiments, il
laut en mentiotmer une qui est sans conliedil la moins équivoque:
c'est celle dans laquelle se trouvera un lei raiii pave conq)aré à un ter-
rain qui ne le sera pas. Ainsi, en songeant à la quantité d'eau que la
pluie répand sur \;\ surface du sol d'une ville, et pour l'écoulement de
laquelle on est obligé de construire des égoutsd'un immense dévelop-
pement, on se convaincra que cette quantité d'eau est en moins dans
l'intérieur du sol; rien n'est plus frappant, par exemple, ([ue la dMlé-
rence qui existe entre riiumidilé du terrain d'un jardin et celle du ter-
rain d'une cour pavée ou dallée, et dont les pentes seront réglées pour
faciliter l'écoulement des eaux. On peut facilement en conclure (pie les
constructions en contact avec l'un ou l'autre de c»s terr.iins seront
placées dans des conditions bien ditréreiilcs quant à rbiiinidilé qu'elles
peuvent leur emprunicr. Pour ajouter encore une des situations parti-
culières dans lesquelles les bàiinients peuvent se trouver placés, nous
citerons celle par suiie de laquelle un bâtiment élevé sur une déclivité
se trouve adossé d'un côté à un terre-plein, et par conséquent domine
par un sol en penie dont les eaux tendent à descendre vers la con-
struction et à y cnlrcleiiir riiumidile, si l'on n'a pas soin de prendre
des précautions pour l'eu garantir.
Il peut encore se présenter pour les constinctioiis une iiifiiiiié de
conditions particulières dont il nous semble que cbaciin peut se ren-
dre compte et que nous nous dispenserons d'énumérer, tant à cause de
la difliculté qu'il y aurait à les prévoir toutes, que pour ne pas nous
étendre trop longueiiieiit sur ce point.
Maintenant que nous pensons avoir suflisaminent démontré quelles
(1) L'action salulaire du soleil doit êlre prise selon nous en grande consi-
dération ; l'expérience le prouve : ainsi, par exemple, dans notre climat, quoi-
que le vent du Sud cliasse la pluie sur les façades qui se tiouveiu à cette ex-
position, ce sont cependant celles qui restent le moins humides et qui se dé-
tériorent le moins rapidement, tandis que celles exposées au Xord et qui n'ont
à redouter que les pluies chassées par le vent du Nord-Ouest, ont bien plus à
souffrir des variations de l'atmosphère; c'est donc principalement à l'action du
soleil que ces effets doivent être attribués , car l'influence que peut exercer sur
ces façades le vent du Nord ou du Nord-Est nous senil)le très-secondaire, l'.n
Italie, il tombe annuellement une plus grande quantité d'eau qu'en France, et
cependant les constructions ont bien moins à redouter l'humidité, grice  la
elialeur du soleil, qui, alternant avec les causes qui pourraient la produire, les
rend presque nulles. C'est surtout la constance de l'humidité qui est nuisible.
A Paris, il suffit d'examiner les façades dos bâliincnts situés an Nord et de les
comparer avec celles des édifices situés au Midi, pour se convaincre de la diffé-
rence notalile qui existe entre eux.
En France, les façades placées dans les conditions les plus défavorables sont
celles exposées à l'Ouest, car elles reçoivent la pluie directement et le soleil
ne leur parvient que lorsque, rapproché de l'horizon, il a perdu sa force. Los
façades au contraire exposées à l'Est se trouvent dans les conditions les plus
avantasenses , car elles sont entièrement i l'abri de la pluie, et sont frappées
pondant une grande partie de la journée par les rayons du soleil.
En admettant que les façades exposées au Midi sont dans une condition plus
favorable, il est bien entendu qu'il faut faire la jiart de l'altération que peuvent
éprouver ces façades par suite du mauvais emploi ou de la mauvaise qualité
des matériaux. Nous citerons comme exemple plusieurs parties de la galerie du
Louvre, sur le quai, où certaines pierres se trouvent enticreincnt dééoiuposées,
tandis que les parties qui les avoisinent sont dans un état de conservation
très-satisfaisant. Ce bâtiment est d'ailleurs resté dans les condilious les plus
pernicieuses, puisque la partie qui avoisine te pied du mur n'est pas même pavée.
sont les difl'éreiiles causes de l'iiumidiié, quelles sont les voies qu'élit?
siiitpiMir aileiudre et envahir les cuiistriictioiis, les conditions diverses
et particulières qui peuvent influer sur la proportion dans laquelle son
action se produit et s'exerce sur ces mêmes constructions, tant il l'iu-
lérieur qu'à l'exiéiieur, nous allons nous occuper d'en signaler les in-
convénients, et rechercher quelt uraienl le» moyens, $oil Je let prévenir
lors de l'exécution des conslructiont, soil de les faire cesser ou de s'en
préserver dans les conslructiont existantes.
Pour bien faire ressortir les incoi:vénienls résuliant de l'huniidiié ipii
pénètre dans les coiisiructions, il importe d'éiablir d'.ilioid que les
obstacles qu'elle pourrait rencontrer dans la nature des matériaux sont
loin d'être tels qu'on semble les supposer ; car, liâlons-nous de le dire,
les matériauv employés habituellement dans les constructions, buis,
britpies, moellons, pierre tendre, pierre calcaire, sans en excepter
même il.' marbre et le granil, sont tons plus ou moins hygrométriques :
c'est-à-dire que, plongés dans l'eau ou maintenus dans une atmo-
sphère humide, après les avoir préalablemi.-nt pesés dans un élat de
sécheresse complète , il n'en est aucun qui, pesé de nouveau, ne
donne nu poids supérieur, résultant de la dose d'humidiié qu'il aura
absorbée.
Ce n'est donc pas iitiiqiiement par l'emploi de telle on telle pierre
qu'on pourra combattre eulièremcnt l'humidité, qui tend coiisianniienl à
pénétrer les corps hygrométriques qu'elle rencontre; Gir l'huniidiié que
renferme le sol à une certaine profondeur tend incessamment à envahir
les parties desséchées momentanément par l'air atmosphérique ou le
soleil; c'est-à-dire que, quand Ihuinidilé disparait de la partie supé-
rieure du sol, f.iiite de pluie, elle tend constaiiiinent à y revenir des
couches inférieures, par l'effet de la capillarité, comme l'humidité
qui alimente les racines des arbres et qui leur parvient souvent d'une
grande profondeur. Mais pour rendre cet ellèt encore plus sensible.
supposons une colonne monoliilie de pierre, de granit même si l'on
veut, dont le pied sera baigné dans un bassin plein d'eau ; supposons
de plus que la totalité de la colonne soit à l'abri du contact de
l'air aiinosplieri(pie, qu'elle puisse être, |)ar exemple, placée sous
Pour les bâtiments dont les faces sont exposées au .Nord, outre les inconvé-
nients que nous venons de signaler, il en est un autre bien reconnu mainte-
nant, et ancpiel on n'est pas encore parvenu à remédier : c'est une es|>èce
d'araignée qui se loge dans les trous des pierres cl fait autour de ces nous
une toile rayonnante et plate qui n'a pas moins de 13 à 20 centimètres de cir-
conférence : ces toiles, qui, dans certaines natures de pierre, deviennent très-
nombreuses, conservent la poussière qui s'y attache et font autant de lacbei
noires qui produisent l'effet le plus désagréable sur les surfaces des monuments,
comme on en peut juger par les façades de la .Monnaie, de l'Instiiul, etc.; do
plus, celte poussière, qui dcviontainsi inhérente aux parois des murs, forme
éponge, conserve l'Iiumidilé qu'elle reçoit de l'atmosphère et devient irès-nui-
silile à leur conservation.
Nous pensons donc que les monuments ont besoin d'être entretenus, et qu'ils
doivent être époussetés et brossés à certaines époques, tous les cinq ou dix ans,
par exemple, et de plus il serait à désirer qu'à l'aide d'une préparation chi-
mique appliquée sur les pierres, ils pussent être préservés des insectes dont
nous venons de parler.
Lors de la restauration de vieux édifices, quand on déj^ire rendre i la pierre
sa couleur primitive, on sait que ce résultat peut être facilenirnt obtenu à
l'aide d'un procédé très-connu qui a été employé avec succès aux balustrades
de la place de la Concorde, au Collège de France, etc. En recoiiiniandanl l'em-
ploi de ce moyen, nous voulons surtout nous élever contre le système de grat-
tage, qui doit être proscrit : 1° en ce qu'il altère la forme de l'architecture, et
2" en ce qu'il enlève à la pierre la croûte, la patine, qui s'est formée par le (cm|is
sur sa surface et qui contribue à sa conservation.
Les observations que nous avons faites i l'égard dos bâtiments exposés au
Midi ne sauraient être appllrablos aux constructions en pans de bois, auxquelles
au contraire cette exposition est très-nuisible; car le bois privé d'air qui subi)
alternativement l'inOuencc de l'humidité et de la grande chaleur est sujet à
pourrir facilement.
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REVUE DK L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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une (loclie d:itis laqiiellcî on aiiniil fait le vide; il esl consiaiit
(luaii boul d'iin certain temps riiumidiié s'introduira dans le frti
de celle colonne, qu'elle la pénétrera , s'élèvera sans cesse et
finira par gagner le sommet, en admetlanl toujours qu'aucune cause
de dessèchement extérieur ne sera survenue (1).
Servons-nous encore de l'exemple de celte colonne pour démontrer
que riiumidiié n'abandonne jamais les corps qu'elle a envahis, el ne
pciilêlre absorbée que par l'action de l'air ou de la chaleur, .^insi, sup-
posons que celte colonne saturée d'humidité soii, par un moyen quel-
conque, sécliée dans sa partie supérieure ; l'humidité disparaîtra dans
les panics où l'air ou la clialoiir qu'on aura fait agir l'auront attcinle de
manière à l'absorber; mais l'humidilé de la pariie inférieure viendra
bientôt envahir de nouveau la partie séchée, aussitôt que les causes de
sécheresse auront cessé.
>"ons concluons de là que l'humidilé qui renconire un corps hygro-
mélri(nie le pénètre en tous sens d'une manière toujours croissante, si
elle n'est comballue par une aciion séchante ou absorbante.
Ainsi donc un mur construit en pierre de n'imporie quelle nature
pourra être pénétré par l'humidilé qui existe dans le sol et qui s'intro-
duira dans loules les direclions, par tous les points où ce mur sera
on rontacl direct avec le sol. Ajonions que la dislance à laquelle at-
teindra celle humidité ne saurait cire Hélerminée, qu'elle peut s'élever
irès-haut au-dessus du niveau du sol, et que si, arrivée à un ceriain
poin", sa progression devient plus lente, c'est reffet du rapport qui
cxi.îl : eiiire les causes par lesquelles cette hiimidilc est produite, et
l'influence ncutralisanie delà tempéralure de l'almospbère, rapport en
raison duquel l'équilibre ( herche à s'élablir. On comprend très-bien
que la partie inférieuie d'un mur pénéirée d'ime certaine dose d'humi-
dité an conmiencemenl do l'été, le sera dans une proportion sensibb'-
mcnl moindre à la fin de celle saison, surtout s'il leçojt l'aciion direct-
du soleil, et que l'hiver suivant l'humidilé atteindra de nouveau les
parties dont elle aura été momenlanémenl repoussée (2).
Des Incosvénie.nts dp. l'hlmiditè
Quoique les inconvénients de l'humidité soient bien connus, nous
crovoiis devoir, avaiit d'indiquer les moyens que nous proposons pour
lisconibaitre. rappeler ici les principaux : il faut mettre en première
li-jne l'iiisalubiiié résultant de la permanence de l'Iimnidilé dans les
lieux habiles, puis la desiruclion qu'elle exerce sur tous les ohjeisqui
sont de naïuie à en souffrir; ainsi les enduits se détruisent et tomheni,
les lambris, les planchers et les parquets pourrissent, la peinture farine
cl se détache, les papiers s'imbibent et se décomposent, les étoffes s'al-
lèrcni, les meubles, les tableaux, les livres, et enGn tout ce qu'on esl
dans l'usage de conserver dans les appartements est exposé à une dété-
rioration certaine. De plus, le corjis même des murs en élévation con-
struits soit en pierre, en maçonnerie, en briiiuc ou en pans de bois,
subit une délérioraiion progressive qui peut devenir nuisible à leur so-
lidité. Sui- les parements extérieurs, la dégradation commence par les
joints, pour lesquels ou n'a [las toujours soin d'employer les mortiers
(1) On (lit lics-souvent : L'Immidilé monte toujours, et on semble donner à
penser que, pour envahir un corps hygrométrique, l'iuniiidllé doit venir de bas
m liant, tandis qu'il faut hien qu'on saclie que l'IiuniidiKS envahit les corps
liygiom(5lri(|»es dès (|u'cllc les concentre soit horizontalement, soit verticale-
ment, n'importe enfui dans quelle direction ils se présentent; ainsi, en suppo-
sant la colonne que nous avons prise pour exemple, couchée horizontalement,
et sa base seule baignée dans l'eau, l'Iiumidité l'envaidrait absolument connue
dans le premier cas.
[*: (2) C'est à tort qu'on fait exécuter les travaux de peintures intérieures et ex-
térieures à l'époque du printemps; c'est à l'automne que ces travaux pourront
être faits avec bien plus de succès, d'après ce que nous venons de dire de l'in-
Duencequela belle saison exerce sur les parties des constructions exposées i
l'hnnfulité.
qu'il conviendrait (1). lien résulte (el cela sera toujours difficile k cviier)
que la subskince qui est interposée entre les assises de pierre, élanl or-
dinairement plus perméable que la pierre elle-même, se décompose la
première, i|ue le joint se creuse, et que l'humidilé, trouvant un point
il'arrèl, séjourne enire les deux arêtes. Ces parties humides subissant
ensuite les alternalives de la gelée, du dégel et de la chaleur, finisMiit
par se décomposer el tombeni en pous.sière.
Le joint se trouvani ainsi élargi, nlïrc encore plus de prise à la des-
iruclion, et si l'fin n'y porte prunqitemeiit un remède efficace, l'humi-
dité y développera des végcUtions qui accélèrenl la ruine de la ron-
struction, à laquelle de nombreux insectes viennent encureconiribuer(â).
Uiitre ces inconvénienUi luaiériels iiihéreiiis à nuire manière «le con-
struire, il résulte de ce système d'inierpositiun de mortier entre lei
pierres un effet très-désagréable à l'œil, et qui détruit l'unité des formes
archiieciurales, comme on peut en juger par les colonnes de la Made-
leine, du Panihi'on, de la Rourse, ou par la construction de l'arc de
iriomphe du Carrousel, qui a cependant été faite avec le plus grand
soin (5).
(La suite prochainement.)
(1) A l'occasion des inconvénients qui résultent de l'humidité, ce serait le cas
d'entrer dans les diverses cunsidératinns que comportent la composition et
l'emploi des mortiers ; nous serions très-disposé à le faire, mais nous crain-
drions de trop nous écarter du sujet qui nous occupe, et nous préférons d'ail-
leurs renvoyer aux tra\aux remarquables de Vicat, qui a traité la question des
mortiers avec une grande supériorité.
(2) Il importe d'établir que l'humidité qui pénètre dans les constructions en
pierres ne peut être nuisible à ces constructions lorsqu'elle est constante et que
les pierres n'ont pas à subir les alternatives de l'humiililé, de la sécheresse, de
la gelée, etc. C'est ain.si que les pierres des ponts qui sont rnn.siammeni sous
l'eau ne se détériorent pas, taudis que la zone de celles qui, par l'alternatite de
la crue el de la diminution des eaux, sont exposées i être lanlOt baiKné<>s, tantôt
découvertes, subit une épriuvc i laquelle elle ne peut résister qu'un certain
temps. C'est précisément cette zone qu'on a ut1 réparer entièrement aux piles
du Pout-iVruf. Pour preuve de la uon-déconqiusilion des |>ierres maintenues
dans une liumidilé constante, nous citerons encore celles qui se trouvent dans
les carrières, et les pierres qui séjournent au fond des rivières. Ainsi dunr,
dans un bâtiment, les parties de nuirs au-dessous du sol n'ont rien à redouter
pour leur conservation des rlTets de l'Iiumidité.
(3) Certes, avec notre manière de construire, l'emploi d'un hou mortier est
une chose très-essentielle; mais il est un autre système de cousirucliou qui
serait l)ien préférable s'il pouvait être adopté : c'est relui dans lequel ou peut
se passer de toute espèce de mortier ou ciment, quand on construit eu pierres de
taille ; c'est le système suivi par 1rs anciens depuis la plus haute antiquité jus-
qu'aux temps de barbarie qui suivirent la chute de l'empire romain, et qui con-
siste à poser les assises à pierre sèche, sans l'introduction d'aucune cnmposi-
lion factice. Ces constructions sont préférables i celles que nous exécutons jour-
nellement, sous le double rapport de la stabilité et de la durée ; car, d'une pan,
cette manière de construire exige que les surfaces des lits des pierres soient par
laileunnt planes et que la superposition des a.ssises ait lieu très-exacteuicul; et.
d'une autre part, la finesse extrême des joints qui n'existent pour ainsi dire pas,
ne laisse aucune prise à la destruction ; aussi l'expérience de plusieurs siècles a-
t-elle fait reconnaître qu'une telle construction, lorsque les matériaux sont de
bonne qualité, est pour ainsi dire impérissable. Jamais les Grecs et les Ro-
mains n'ont construit autrement, soit en marbre, soit en pierre, et des exem-
ples tels que le Colysée, le pont du Gard, les Arènes de Muies, etc., ne peuvent
laisser aucun doute sur l'excellence de ce système.
Non contents d'une telle perfection, les anciens ont pris un surcroît de pré-
rantiOMS à l'égard des monuments de pierre, en les révélant très-souvent d'un
stuc, afin de dissimuler encore plus complètement les joiuLs et de préserver en
même temps la pierre, toujours plus ou moins poreuse, descITelsde l'intem-
périe de l'atmosphère. Ce stuc, dont l'épaisseur n'était pas d'un millimètre, res-
semblait beaucoup plus à une couche de peinture qu'à un enduit ; de sorte qu'il
pouvait être applique non-seulement sur les parties lisses, mais également sur
les sculptures. Quanta sa durée, elle ne pentêtre conslestée, puisque aujoiir-
il'hui Uiêmo. dans les monuments où ces stucs datent de près de deux milleans,
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REVUE DK LARCHITECTUKE ET DVJi ÏHAVALX PUBLICS.
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bibi.10grafhi1:.
Notice Biographique
sur loiiis:\le\andre l'IlL, airliileclc, rcligipuï de l'ordre de Sa'iil-Ddriiiiiiquc,
PAR M. AM. TKVSSIEn.
Le 20 iiviil 1840, le lendemain du jour de Pâques, un jeune
homme, un artiste, franehissait les barrières de Paris et s'achemi-
nait vei's la Ville Eternelledes Césars et des papes. Qu'allait-il faire
à Rome'? allait-il, comme tant d'autres, étudier l'art anticjue sur
les monuments mêmes de l'antiquité? allait-il, las enfin de n'en
voir que des copies et de ramper sans cesse à la suite des traditions
d'école, interroger lui-même les débris du passé, pour reb<\tir en-
suite, dans son imagination, la Rome des païens? — Non ; car nul
peut-être, plus que ce jeune architecte, ne fut antipathique à l'art
païen : et s'il fût allé l'étudier dans ses domaines, c'eût été pour le
combattre, et non pour le reconstruire. Qu'allait il donc faire dans
la ville sainte? Esprit profondément religieux, ferxeut, il allait,
on ne saurait les déiaclier de la pierre par aucun moyen. On conçoit tout ce
(|u'un tel système aurait d'avanlageux dans la construction pour la conservation
de nos monuments, savoir : la |)ose des pierres à pierre sèche, et l'application
il'un stuc susceptible de les préserver des ravages de notre climat. Au premier
abord, la constructiiin à pierre sèclie semble présenter de graniles difficullés
par le soin extrême qu'elle exige dans la taille des pierres; mais il nous send)le
cependant qu'à l'aide de moyens mécaniques peu compliqués, on pourrait sup-
pléer .1 ce (|ue le travail de Ibomnie aurait de trop dispendieux. Quant aux
stucs à appliquer .sur la pierre, s'il ne s'agis.sait que de reproduire ceux des
anciens, rien ne serait plus facile; mais II faut faire la part de la diflércnce des
climats, et il est probable que le sluc antique ne se comporterait pas en France
comme en Grèce et en Ilalie; c'est donc une composition analogue qu'il s'agit
de préparer, et en cela l'état des connaissances que nous possédons en chimie
nous permet d'espérer que ce résultat pourra être procliainemcnt obtenu. Ce
n'est pas un simple vœu que nous émettons, c'est presque une prédiction que
nous prétendons faire ; car on ne peut que déplorer cette fureur de grattage et
(le blanchissage qui s'est emparée de nous depuis quelques années; et, d'un
autre côté, rien n'est plus déplorable que l'état dans lequel se trouvent nos mo-
numents de pierre construits avec le plus de luxe.
C'est donc en présence du portiiiue de la Madeleine que nous disons sans hé-
siter : Dans dix ans ce porUque recevra ou une peinture, ou un stuc, ou une
composition quelconque qui dissimulera les joints, les préservera des atteintes
de l'humidité, et conservera «1 la pierre une teinte égale qui permettra de jouir de
l'ensemble des proportions de l'architecture.
Si nous sommes entré dans quelques développements au sujet du mode sui>l
par les anciens dans leurs constructions de pierre, c'est dans le but d'appeler
l'alteiiUon de la Société d'Encouragement sur une question qu'il nous paraît es-
sentiel de livrer à l'étude des personnes capables de la résoudre, dans l'intérêt
de la conservation et de la durée de nos monuments nationauv.
par un sacrifice solennel, se vouer entièrement au service de Dieu ;
il allait prendrede s mains du père Lacordaire le cilice dominicain,
illustré déjà piir tant d'artiNles fameux.
Riche des qualités qui font espérer les grands artistes, plein
de foi en la puissance de son art, doué d'un sentiment remar-
quable, (|uoique très-exclusif, de l'architectine qu'on peut appeler
chrétienne, et noinri, par l'étude et la discussion, des auteurs re-
ligieux du Moyen-Age, sans lesquels on ne saurait comprendre
l'art de cette époque, ce fut après de longs travaux et des fatigues
sans nombre, au moment même où il voyait enfin la fortune ou
plutût l'équité lui sourire, ce fut alors que Louis-.4lexandre Plel
prit la détermination, longtemps préméditée, d'entrer dans l'ordre
des frères prêcheurs, que l'abhé Lacordaire venait de rétablir en
France. Dire comment, après s'être abandonné aux joies mondai-
nes autant qu'tiii autre, après avoir été disciple de Huche/, et avoir
navigué longtemps dans les eaux d'un rationalisme quelquefois
sceptitpie, il en vint à celte foi ardente et complète qui lui fit tout
sacrifier, parents, amis, fortune, c'est faire l'histoire de toute sa
vie; c'est ce qu'a fait M. Am. Teyssier, dans le livre qu'il a mo-
destement appelé une Notice biographique.
M. Teyssier passe rapidement sur les premières années de son
ami. ^é à Lisieux en IS08, PicI, à l'âge de vingt-quatre ans, avait
déjà traversé les classes d'un collège, la boutique d'un droguiste et
l'étude d'un notaire. Profondément dégoûté des deux professions
dont il avait fait l'essai, professions si opposées aux besoins de sa
nature, il revint irouver son père : « Je serai architecte, ou je ne
serai rien, » lui dit-il. Il est rare de rencontrer une vocation si net-
tement accusée.
A l'âge de vingt-quatre ans, Fiel vint donc se faire archi-
tecte à l'école de M. Debret; mais bientôt il quitta l'atelier pour
se livrer entièrement à ses propres inspirations. Enthousiaste pour
l'art du Moyen-Age, et particulièrement pom- l'art de cette époque
glorieuse du Moyen-Age qui a produit presque toutes nos grandes
cathédrales, il fut désireux de suivre au delà du Rhin le mouve-
ment parallèle de l'art allemand ; il voulait apprendre aussi par
lui-même la vérité sur ce mouvement artistique de l'Allemagne
moderne, dont quelques écrivains faisaient un si grand éloge. Pour
étudier le passé, il visita Strasbourg, Fribourg, Chaffliausen, Ans-
bourg, W eissemhourg, etc., mais surtout Nuremberg; il se pro-
mena dans Munich pour interroger le présent. A son retour, il pu-
blia son Voyage en Allemagne dans F Européen. Quelques travaux
d'architecture pratique lui furent aussi proposés vers celte époque,
et il fut prié de faire le plan d'une église gothique pour la ville de
Nantes. Son projet fut d'abord accepté ; mais plus tard, quand l'ar-
tiste eut fermé sur lui la porte du doitre, ce même projet fut re-
poussé. Piel fit aussi les dessins d'une église de même style pour
un village de Franche-GoiTité. Ces travaux d'application se ma-
riaient chez lui à des travaux théoriques, dont le Voyage en Allt-
magne n'iivait été que le prélude. Il fit dans l'Européen le compte-
rendu du Salon t'e 1837, et publia ensuite un travail eiifi([uv sur
le Temple de la Madeleine, comme il l'appelle, et enfin une
Déclamation contre l'art païen. Dans ce deniier morceau, qui
est très-court, il semble avoir résumé toutes les pensées dévelop-
pées dans ses précédents écrits, afin de formuler un anathème plus
puissant.
En contact fréquent avec des hommes d'une foi robuste, uni
par les liens de la plus fraternelle amitié avec celui qui ve-
nait le premier de répondre à l'appel du père Lacordaire et de
T V. 18
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
276
prendre à Rome, dans le monastère de Sainte-Sabine, l'habit de
moine dominicain, profondément croyant lui-même, Piel marcha
vite dans la voie de l'apostolat. Le frère Pierre, après lui avoir ou-
vert le chemin, n'éprouva pas de grandes difficultés à l'attirer au-
près de lui. A peine Piel était-il arrivé à Rome, que le frère Pierre
mourut dans ses bras; mais ces deux frères ne devaient pas être
séparés longtemps : quinze mois ne s'étaient pas écoulés, que leurs
âmes étaient déjà réunies. Piel mourut au monastère de Bosco,
en Piémont, à peine Agé de trente-trois ans.
M. Teyssier n'a pas voulu s'étendre sur les mérites que pou-
vait avoir Piel comme artiste. « J'ai laissé, dit-il, à dessein, le
front de mou ami découvert, afin qu'une main plus digne pût
y déposer une couronne. « Toutefois l'artiste, dans Piel, se lie
si étroitement à l'homme, qu'en nous traçant les traits de l'homme,
M. Teyssier a dessiné aussi le portrait de l'artiste tel qu'il s'est
peint lui - même dans ses écrits ; la physionomie de Piel est
d'ailleurs tellement tranchée , qu'on la saisit au premier coup
d'œil, et qu'elle reste profondément gravée dans la mémoire.
Pour Piel, il n'y eut qu'un seul art véritable : l'art chrétien; et il
appelle l'art gothique du XlIP siècle la synthèse chrétienne. Dans
les écrits de Piel, partout on reconnaît que c'est bien là l'idée qui
domine et qui génère pour ainsi dire toutes les antres. Pour Piel,
la cathédrale du XIIl" siècle était l'expression la plus complète
possible du christianisme catholique, et il en conclut que la cathé-
drale chrétienne, par sa forme et sa beauté, est autant supérieure
au temple païen que le christianisme l'est lui-même à la religion
païenne, et il ressort évidemment des écrits de Piel que, de spé-
ciale qu'elle a pu être d'abord, cette proposition avait fini par
prendre dans son esprit la plus grande généralité, et par s'appliquer
à l'architecture entière des deux époques. A la vérité, Piel n'est pas
le seul qui ait formulé cette doctrine, car nous avons vu soutenir,
par des hommes de véritable mérite d'ailleurs, la proposition géné-
rale de l'absolue supériorité de l'art du Moyen-Age sur l'art an-
tique. Ce sont les prémisses de ce raisonnement qu'il faudrait
commencer par établir. De ce que l'architecture, qui est comme
Vepitome de l'industrie et des arts d'une époque, est nécessaire-
ment une expression (Idèle des sociétés contemporaines, et de ce
que les idées religieuses d'une société sont supérieures à celles
d'une autre société, il ne faut pas se hâter de conclure qu'il y aura
nécessairement aussi une inégalité correspondante entre les archi-
tectures de ces deux sociétés. La religion est la base des sociétés;
— d'accord, mais elle n'en est pas l'unique élément; — puis, si
d'un côté il faut convenir que le christianisme n'a pas eu constam-
ment en vue le développement de l'art lear le principe de la mor-
tification des sens n'a pas toujours été, à coup sur, favorable aux
progrès des beaux-arts, qui réclament au contraire des sens très-
rallinés), et que de l'autre il faille admettre que le sensualisme
païen avait initié les artistes antiques à une connaissance bien in-
time des proportions et des formes du corps humain, qui offre dans
son mlmirable harmonie le style de toutes les beautés physiques,
ces deux faits viennent ébranler singulièrement, ce nous semble,
la proposition de Piel ; d'ailleurs, qu'on place côte à côte les sculp-
tures du Parihénon et celles, par exemple, de la porte royale de
lacathédrale de Chartres, et qu'on dise ensuite laquelle, de l'œux re
païenne ou de l'œuvre chétienne, est la plus belle sous le rapport
plastique.
Mais nous ne voulons pas pousser cette discussion pkis avant au-
jourd'hui. Nos lecteurs savent quelle est notre admiration pour les
merveilleuses créations du Moyen-Age, que nous avons tant de
fois défendues contre les attaques des amateurs exclusifs de l'an-
tique; mais nous ne saurions offrir les chefs-d'œuvre de l'antique
en holocauste au génie du Moyen-Age. Chaque époque a eu sa fonc-
tion à remplir, et l'humanité présente jouit des travaux de toutes
les époques passées. L'antiquité s'est préoccupée surtout du côté
physique et sensuel de l'art, même dans son symbolisme si poé-
tique et si admirable; le Moyen- Age a cultivé surtout l'élément
spirituel. Quant à nous, tâchons d'associer ces deux éléments; et
pour cela, au lieu de mépriser les conquêtes du passé, sachons en
profiter, et ne sacrifions ni l'imagination à la raison, ni la raison à
l'imagination ; mais persuadons-nous bien que les œuvres seules
qui satisferont à ces deux exigences seront dignes de nous.
Si nous nous sommes laissé entraîner a dire ce qui précède et a
parler des écrits de Piel, c'est moins pour en faire ici la critique que
pour établir en passant l'inanité des doctrines intolérables en matière
d'art. Les théories de Piel réclameraient, pour être discutées à fond,
plus de place que n'en peut offrir un simple article bibliographi-
que. En parlant d'esthétique, nous aurons plus d'une fois l'occa-
sion de les appeler sur le terrain de la discussion ; nous en com-
battrons certaines parties , mais d'autres parties nous serviront
d'auxiliaires pour repousser les injustes attaques des détracteurs de
l'art chrétien ; car, nous le répétons, nul ne fut, plus que Piel ,
antipathique au paganisme; nul non plus ne s'est plus vigoureu-
sement constitué le champion de l'architecture que nous appelons
gothique.
Alpho.\se HE CALO^^E.
XKCilULOGIE.
NOTICE SVB, X.A VIK ET X.E8 TRAVAUX
du iicDleiiaul-coloarl Pierrr-Auloisf (ll\l(..
Depuis le commeiicemcnt de ce siècle, deux hommes ont renouvelé
les mélliodes de la lopogmphie ex.iclf. L'un, le lieiilenanl-coloiiel du
génie Clerc, s'est consacré aux plans à grande échelle , du — — au -— — .
(|iii servent aux ofliciers du génie militaire, aux ingénieurs tics Ponis-ei-
Chaussées, et qu'on appelle levers-nivelés par courbes burizonlalcs ;
l'autre, le chef 'l'escadron d'état-major Maissiat, aux plans à petite
échelle, du au j^^. qui représentent par des hachures le re-
lief du terrain, etserveiiidc niiiiuie à la nouvelle carie de France. Le
premier a fondé, pour le génie miliiaiie, la brigade topographlque ; on
peut dire que l'autre est encore, vingt ans après sa mon, le maître de
tous ces jeunes et habiles oineiers d'élal-major qui lèvent aujourd'hui
h'S détails de la nouvelle carte de Prance, ce grand niunumcnl scienti-
lique dont l'avancement fait chaque jour mieux apprécier le mérite. Ce
sont ses méthodes qu'ils suivent, ses Instruments qu'ils emploient, ses
Idées qu'ils a|i|)llipicnl après lui.
Bien qu'ils aient eu en vue des objets un peu difTérents, M.M. .Maissiat
cl Clerc sont arrivés tous deux à ce résultat, que, pour le détail des
levers à grande ou à petite échelle, il fallait se servir uniquement de la
boussole; que, malgré sou peu d'cxactiiude apparente, c'était encoie
l'iiistrumeiil par excellence, parce que l'Indépendance des observations
rachetait leur faible degré d'exactitude. Mais celle boussole éUiit devenue
dans leurs mains un inslrumenl nouveau doim.int les angles avec le mé-
ridien vrai, porlanl un niveau à bulle d'air cl une alidade à limcitc mo-
2T7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
278
bile, sur un cadran vertical, salisfuisanl enfin à tous les besoins du
topographe.
On peu! (lire que c'est au perfeciionnement de cet instrument que
ces deux bouiuies ont consacré leur vie, car les améliorations qu'ds ont
a|)port(!es aux mcibodes des levers topograpliiques sont la conséquence
des améliorations faites ù la boussole ; et dans l'application le com-
mandant Maissiat paraît avoir été plus loin que le colonel Clerc, puis-
qu'il a su faire un plus grand usage du cadran vertical de sa boussole.
C'est dans CCI le voie qu'on doit clierclier les derniers pcileclionneinenis
à apporter aux méthodes du colonel Clerc.
(>es deux hduinies, nés tous deux au milieu des mouiagnes, et, cimse
remarquable, dans la même ville et la même année, partirent en même
lemps dans le bataillon de volontan'es de l'Ain. Leurs premiers pas
dans la carrière furent rapides; mais la nalure de leurs travaux nuisit
prohablement à leur avancement ; ils ne voulaient que l'aire de la topo-
graphie. Toute leur vie ils reslèreni amis, se communiquant récipro-
quement les amélioralions ipi'ils apportaient à la science chérie qu'ils
n'ont cessé de cultiver jus(|u'à leur dernier soupir. Qu'il nous soit
permis aujourd'hui de payer un tribut d'éloges à la mémoire du lieu-
tenant-colonel Clerc. Ce sera expliquer les services (|u'il a rendus au
génie niiliiaire dans l'art des levers nivelés. Nous tâcherons, dans un
autre arllcle, de passer en revue la vie et les travaux du commandant
Maissiat; ce sera l'aire l'Iiisloricpio et reypo^itiou des mélliodes suivies
pour le lever et la rédaclion des déiails topographiques de la nouvelle
carte de France. Quant aux déiails biograpbi(|nc$ qui suivent, nous les
devons tons à une commnnicaiion de M. Baidin, ancien élève de l'école
Polytechnique, qui a fait déjà plusieurs biographies du lieutenant-colonel
Clerc.
Cleiic (Pierre-Antoine), lieutenant-colonel du génie en retraite,
commandant de la brigade topograpbique et de l'École des gardes du
génie, professeur de topographie à l'École Polytechnique, puis à l'École
d'application de l'artillerie et du génie, chevalierde la Légion-d'Honneur
et de saint- Louis, membre du conseil municipal de Meiz ; né à Nantua,
dépariemcnt de l'Ain, le 8 novembre 1770; mort à Metz le 18 juillet
1843.
Le jeune Clerc étudiait l'architecture à Nantua, et cidtivait ses heu-
reuses dispositions pour les arts , lorsqu'il s'élança avec enthousiasme
dans les bataillons des volontaires de l'Ain. Il fit comme sousoflîcier,
eu 1792, I7il5, et dans les ans II , III et IV de la République, les cam-
pagnes des armées du Rhin. Sergent-major au 5= bataillon de l'Ain,
renfermé dans le fort Vauban, il s'y montra comptable généreux et im-
prévoyant, comme il le fut toute sa vie ; il était déjà du petit nombre
de ces hommes qui, dit-on vulgairement, n'ont rien à eux.
Il fut incorporé dans les bataillons de sapeurs du génie lors de leur
organisation à Weissembourg, et, eu 1797, il était capitaine en second
aux années du Danube et du Rhin. Il éiail au siège de la léte du pont
de Manheiin, au blocus de .Mayence de l'an VI, au passage du Rhin
par Moreau, au siège de la télé du pont d'IIuningue, prenant part à
toutes les reconnaissances. Le 26 germinal au VIII, le ministre de la
Ciierre écrivait de sa propre main au citoyen Clerc, capitaine au3« ba-
taillon de sapeurs : — « D'après le compte favorable, ciloyen, qui m'a
éiè rendu de vos talents et de voire conduite, je me suis déterminé à
vous enqiloyer auprès de moi ; je vous invite, en conséquence, à vous
rendre au ministère de la Guerre. Le secrétaire-général vous indiquera
les fonctions qui vous seront conliées.
« Salut et fraternité, Caiinot. «
Le capii.iine Clerc se trouva ainsi détaché du corps du génie, pour
être employé, dans le cabinet particulier du miusitre, à la rédaclion des
caries destinées aux opérations et aux journaux milit:iires de celte
époque. Il remplit ces fonctions jusqu'à la chute du ministère dirigeant.
— Belle position pour un jeune capitaine ! On voidnten faire un aide-
dc-cainp; mais le régénérateur de la topographie, qui n'avait (|u'uiie
I seule ambition, celte de décrire les formes du terrain, aima mieux
rester capitaine de sapeurs.
Le nouvean ministre, en l'appelant près de lui, eut soin de lui laisser
' continuer ses études. Dès ce moment il ne fit plus que de la topogra-
phie. Il s'occupa, outre son service ordinaire , d'expéiiences relatives
à l'art des levers, et c'est alors qu'il parvint ii rendre applicable aux
levers topographiques la méthode ingénieuse de Philippe liuache , à
représenter le terrain par la projection horizontale des sections faite.*
par des plans horizontaux èquidisUints, méthode que le corps du génie
s'ell'orçait d'introduire, qui permet de résoudre sur nue seule projection
tous les |»r(djlèmes que la géoméirie descriptive ordinaire résout avec
deux, mais à la(|uelle manquaient des méthodes faciles et sûres de
faire le lever du terrain. Vers 1807, sa réputation le lit appeler à l'É-
cole Polytechnique, pour y fonder renseignement de la lopogripliie
pratique, à laquelle il venait d'ouvrir une ère nouvelle. Il fonda alors,
à ses frais, une École d'élèves topographes à qui il enseignait ses mé-
thodes.
Eu 1809, le capitaine en premier Clerc passait du <lépdl de la guerre
au dépôt des rortifications, et on le chargeait de diriger l'exécution de
la carie-relief ilu golfe de la Spezzia, dans la ri\ière deGéucs. Ce grand
iravail, qui ne fut terminé qu'à la lin de 1811, l'ut si bien accueilli
que l'habile artiste fut nommé chef de bataillon et chevalier de
la Légion-d'IIonneur. A celte occasion, l'Enifiereur dit au ministre
(le la Guerre: ((Puisqu'il ne veut pas demander la croix, il faut la lui
donner. »
Le relief, grand morceau de 5 mètres de long et de 4 mètres de large,
fut mis sous les yeux de l'Kmpereur, qui alla pins loin, qui voulut mou-
ler dessus tout boité, pour mieux voir ces formes dont riniiiaiion lui
paraissait merveilleuse. L'auteur tremblait pour son œuvre ; .sa crainte
éiait extrême. Il se fâcha, et très-fort même, mais en vain : il avait af-
faire à trop forte partie. C'est alors que Napoléon, satisfait, lui dit :
(( Que demandez-vous '? — Donnez-moi de la topographie à faire, sire.
— Ou vous en donnera. El l'entretien (init là.
Tandis que SCS topographes construisaient le relief de l'ensenible, Ir
capitaine Clerc exécutait lui-même la partie qui renfermait le pointa
fortifier, et qui devait lui servir à démontrer les avantages de sa mc-
thodi' pour la description des formes du terrain. C'est sur ce morce.iu.
resté entre les mains de sa famille, que le grand bnnnne marqua d'nii
Irait grossier au crayon, religieusement respecté depuis, Ja pn!>iiioii
d'un fort à construire: précieuse relique, supérieure à beaucoup d'autres
auxquelles un engouement peu éclairé a donné parfois tant de valeur.
Eu 1813 et 1814, le commandant Clerc exécutait avec ses élève.*
topographes, réunis en nue brigade provisoire, les levers nivelés «If
Cherbourg, du plateau du moiil Cenis, des iles d'IIyèrcs, de Colcyne et
(le C'iblentz.
Alors eul lieu l'organisafKUi de la Brigade lopographique, (|ui. peu
après, fut siqq)rimée et remplacée par l'Ecole des gardes du génie, que
le chef de bataillon Clerc organisa et commanda. Celle-<-i, su|iprimée
à son tour, devint nue nouvelle brigade lopographique, qui, reprenant
les travaux coinu;ericés, exécuta les plans niveb-s des villes de .Metz,
Toiil, .\larsal, Ritche, Avcsnes, Maubeuge, Landrecies, etc.
En 18-Jt), celte importante direction fut confiée au capiiaine Duniay,
et le commandant Clerc passa à l'École d'application de l'aiiillerieel du"
génie pour y enseigner les levers militaires. t"est dans cette position
qu'arriva l'époque de la retraite , souvent si regrettable |iour les
bounnes d'clile, pour lesquels on vaudrait une modification à la loi:
.M. le colonel Bergère, commandant alors l'école de .Metz, lui expri-
mait ainsi les regrets et l'estime du conseil de l'École de Metz :
(( Si le moment du repos est arrivé pour vous, mon cher colonel, vos
(( nombreux travaux resteront pour fournir d'utiles secours à ceux
(( qui voudront apprendre comme à ceux qui voudront enseigner un
(( art qui vous doit ses plus notables progrès. L'Ecole Polytecbuique
(( Cl l'École d'application en conserveront la précieuse tradition... »
•2T9
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
280
Le lieutenant-colonel en retraite ne cessa pas d'être professeur; il fit
plus ; il devint anlenr, et il écrivit non plus seulement pour les élèves
de l'école de Meiz, pour ces jeunes ofliciers quil aimait tant et qui le
lui rendaieni si bien , mais pour toutes les personnes qui ont besoin de la
i.opograpbie. et qui, si peu préparées qu'elles soient en dessin et er\géo-
niéirie, veulent l'crnienient s'insiruire.
Qui n'aime à lire ces anciens traités sur la peinture, le dessin, la
perspective, la géoniéirie pratique, tels qu'où les faisait anirefoisdu iemp<
de Clairaiit et de Bezoul, ces deux auteurs admirables de simplicité, de
clarié et d'élégance, si neufs encore aujourd'hui, et cependant si ou-
bliés? Ces traités, écrits avec naïveté, avec peu ou point de prétention :i
la science, et qui semblaient ne donner que îles résultats d'expérience,
prenaient l'élève par la main et le conduisaient, — un peu lentement,
il est vrai, mais d'un pas assuré, — juste au but qu'il avait besoin
d'atteindre pour pratiquer tel ou tel art. Il en est, dans le nombre, qui
sont de petits cbefs-d'œuvre.
C'est vraiment une nouveauté assez piquante qu'un ouvrage fait de
celle façon aujourd'hui. Cette idée ne pouvait venir qu'à un praticien
consommé, cxetnpl de toute prétention scientilique, enthousiaste de
son art, et désireux, avant tout, d'en populariser les préceptes, les
exemples et les procédés d'exécution. Tel auteur, tel livre : un homme
profondément versé dans la pratique, et qui a produit de grands Ira-
vaux lopograpliiques, devait, avant tout, penser à faire un guide, tni
manuel pour l'enseignement de la topographie et du dessin tout h la
fois, à rédiger un traité de topographie pure, c'est-à-dire dégagée de
considérations enipvnnlées à la géodésie.
Il est des hommes qu'on dit loul d'une pièce, qui se vouent à la
solution d'une question, empruntée par les uns à la théorie, et par
d'autres à la pratique. Ce parti pris, cette pensée unique devient pour
eux un niailre, nu tyran ; ils sont heureux ou malheureux par elle. Ils
accuseiil de froideur, quelquefois d'injustice, les personnes qui ne sen-
tent pas comme eux, qui n'ont pas leur passion.. Oublieux d'eux-
mêmes, ils ne savent rien demander pour eux; mais, en revanche, ils
son! toujours prêts à demander, comme prêts à donner, pour raccoin-
plissement de leurs travaux de piédilection. Liants, faciles, bienveil-
lants dans le commerce ordinaire de la vie, ils sont rarement les mêmes
dans les relations qui se rattachent à ces travaux. A quclipics-uns de
ces traits, quel est celui de ses anciens élèves (|ui n'a pas reconnu
rexccllent.commandaiit Clerc? Quel zèle, quel dévouement pour son
art! Avec quelle délicieuse bonhomie il s'épanchait avec nous! Quel-
quefois le sourire naissait sur nos lèvres, mais le respect l'arrêtait
aussitôt, tant il est vrai que tout sentiment vrai et profond plait et im-
pose il la fois! Ces caractères rares, rares de nos jours surtout, ac-
complissent de bonnes et grandes choses, mais trop souvent à leurs
dépens.
C'est pur un travail assidu, incessant, opiniâtre, dont cet homme au
caractère de fer était seul capable, qu'il est parvenu à rédiger les trois
volumes de son Essai; c'est par le sacrifice de .ses faibles ressources,
c'est en se génani, en gênant sa famille, ipi'il a pu les faire imprimer.
Fortune, santé, famille, tout appartenait à la topographie, à l'art qui
lut tonte sa vie l'objet de son culte. En véritable prédestiné, il fut
frappé par la Uiort au moment où son œuvre d'ici-bas fut accomplie.
Il était déjà Irès-mala.le lorsque le 5* volume sortait des mains de
l'imprimeur; il en sortait, et les frais en étaient dus: pensée qui fut
pénible, accabbinle, mortelle peut être, pour cet homme désintéressé
jusqu'à la lierié. — Les anciens élèves du commandant Clerc — et ils
sont nombreux — et les admirateurs de sou beau Udent achèteront
l'ouvrage de leur célèbre maître. Ils paieront ainsi une dette honorable.
N'est-il pas juste que l'œuvre éteigne la dette de l'ouvrier?
«Placé à la tête de la brigade topographique, il en organisa les Ira-
vaux d'une manière tellement parfaite, que depuis viugi ans ses mé-
thodes s'y sont conservées complètement intactes. »
Résumons-nous sur VEssai de M. le lieutenant-colonel Clerc, sur son
œuvre capitale, car il enseigne la doctrine dont ses beaux plans nivclé«
ne sont que des applications. Ce livre, qui ne suppose que les notions les
plus ordinaires de la géométrie élémentaire, et peu ou point de dessin
linéaire, sera reçu avec empressement et recoimaissance. Sa méthode
est lellemenl simple et graduée, que chacun y apprend, chemin faisant,
ce qu'il a besoin de savoir pour aller plus loin, et pour arriver, en défi-
nitive, à faire le dessin topographiipn; le plus compliqué. Ce livre, ré-
digé suivant l'esprit des anciens livres d'art, est paiTaitenient approprié
au but que l'auteur s'est proposé. Ce n'est qu'en se plaçant à un autre
point de vn(! ipie le sien, que l'on pourrait être tenté de lui reprocher
des longueurs. On ne doit pas oublier, en lisant ce livre, que l'auteur a
pris systématiquement le parti de conduire l'élève pas à pas, et de par-
eiMirir avec lui toutes les ligues, de s'arrêter à tous les points, de mesu-
rer toutes les distances, de les inscrire, de les dessiner avec lui.. . Certes,
l'homme déjà instruit, déjà familiarisé avec les spéculations des sciences,
ne s'astreindra pas à cette marche didactique; il tournera souvent le
fneillet et ira plus vite au but. Quant à l'étudiant, peu versé dans les
sciences et abandonné a ses propres forces, mais qui, en revanche, est
doué de curiosité et persévérance, il ne trouvera rien de trop dans son
guide. D'un autre côté, intéressé qu'il sera par .ses progrès successifs,
il marchera dans cette étude avec confiance et sans fatigue. On com-
prend donc que le livre de M. Clerc convient auv habiles comme aux
novices, car l'art y est en entier pour tous. Indocli diseant el ameni
meministe péril i.
— «^c-
NOTES ET OBSERVATIONS
DE M. H. JANISIARD,
relatives à la preniièn; Insiruriioii du Comilé histori(|tie des .Iris el floiinmeBbs
Un de nos rédactetirs, M. H. Janniard, nous a adressé, ninsi que
nous l'avons dit dnns notre dernier numéro, (|uel(|ues observations
(|uc lui a suguérées la lecture de la première Instruction du Comité
liitlorique des Art» et Monuments, dont nous venons d'ncliever la
piihlieation. >ous nous faisons un plaisir de communiquer les notes
de M. H. Janniard à nos lecteurs, persuadt-s qu'on ne saurait trop
porter de lumières dans les recherches que l'on fait sur le domaine
d'un passé trop souvent nébuleux.
MARDELLES OU MARGELLES (Voy. COl. 113, VOl. V).
Les antiquaires pensent que la forme régulière de ces excavations
doit faire attribuer leur origine à la main des hommes. Nous croyons
qu'il faut les ranger dans la catégorie des phénomènes naturels, et que
ce sont tout simplement des fontii qui se sont formés par l'élioulement
de la voùie de cavernes naturelles et inconnues. Voici sur quoi nous
basons notre opinion.
Nous avons observé dans les bois de Quemigny, près Dijon , plu-
sieurs groupes d'excavations tout à fait analogues aux margelles, par
la régularité de leur forme, et par l'absence de tout déblai dans le voi-
sinage. L'une d'elles surtout, de 5 mètres de diamètre, nous frappa par
l'analogie de sa forme avec celle du puits militaire dit trou de Loup ; sa
profondeur est égale à son diamètre supérieur. Ses berges sont si ra-
pides, qu'on ne peut y descendre qu'en s'aidant des loufles de bois qui
y sont implantées. Non loin de là sont deux autres excavations ilu
même genre et d'une même profondeur, mais d'un diamètre dix fois
plus grand.
Ces excavations sont toutes dans ime argile j:iunâtre ayant beaucoup
d'analogie avec la terre à Uiur. Elles sont situées à l.i naissance d'un
petit vallon sur un plateau peu élevé, à l'Est du village.
28 (
UliVUK DK LARCHITKCTURK ET DKS TRAVAUX PUBLICS.
282
A environ 3 kilomètres à l'Otiesl, duns un iiutre bois et tians une posi-
lioti ;in:il()giie, se trouve un autre groupe île deux lions du iiicnie sjeiire,
mais beauconp plus petits, creusés dans une teire île même nature. Ces
excavations existiiil depuis un temps inimémotial. Le fond et les parois
se sont couvirts de végeialion ; les renards et les blaireaux y creusent
volontiers leurs retraites.
Ces deux groupes de Margelles sont séparés par un large vallon cul-
tivé, allant du Sud au Nord. Au milieu de ce vallon, à peu près sur le
passage d'une ligue droite qui réiiiiirail lis deux groupes précédeuls,
mais sur un plan beaucoup plus bas, se formait, il y a une virigiaini'
d'aunécs, une excavation cylindrique d'environ 2 mètres de diauiède.
Chaque année le fond baissai! d'environ 50cenlimèlres, et tous les deux
ans au moins le propriéUiire du lerralu élait obligé de rétablir le ni-
veau, en apportant quelipies tombereaux diî terre. Enfin, fatigué de ne
pouvoir assouvir la faim de ce gouffre naissant, il fil creuser le trou jiis-
(|u'à environ 2 mètres de profondeur, et le remplit de menues pierrailles
sur le.squelles on rejeta une partie des terres. Depuis ce temps, la dé-
pression n'a plus paru, à la surface du moins; mais il est probable que
l'affaissement des terres se continue soulerrainement ; les pierrailles
formant voûte, soutiennent momenianément la coiicbe supérieure , ei il
n'est pas impossible qu'il se fasse subilcment un fontis [irol'oud. Il est
fort probable que si l'on eût laissé agir la nature, l'excavation se se-
rait couiiuuée, et par l'éboiilement progressif des parois, de cylindrique
qu'elle él.iil, elle aurait pris la forme d'un cône renversé.
.Mais un fait plus récent est venu nous coulirmer dans nom; opinion
sur l'origine des margelles. Vers le milieu de 1845, sur un plateau cul-
tivé, et à quelques centaines de mètres du deuxième groupe d'excava-
tions, il s'est formé un fontis presque cylindrique de 2" 50 de diamètre,
dans un sol de terres jaunes argileuses de même nature que lesauires.
Il y a tout lieu de penser que ces diverses excavations ont une origine
commune : l'ébonlemeut de la voûte de cavernes inconnues, par suile
de l'action des eaux souterraines, ou par toute autre cause. La na-
ture a, pour ainsi dire, été prise sur le fait dans les deux derniers
exenipb^s que nous avons cités. Dans le premier, il y a eu commence-
ment d'exécution ; dans le second, l'acte a été accompli.
On ne coniiait pas de cavernes dans le pays, mais il en existe cepen-
dant; le fontis qui s'est fait en 1843 le prouve assez, et l'exislence de
plusieurs sources torrentielles dans le pays nous l'a fait d'ailleurs for-
tement présumer.
Il u'v a jamais en de carrières souterraines; tous les matériaux s'ex-
ploitent à ciel ouvert.
Une personne éclairée m'a dit avoir vu sur le plateau de Belleville
des excavations analogues aux margelles, et qui ne sont autre cliose que
des fimtis formés par l'ébonlemeut des carrières à plâtre, et auxquels le
tem|>s a donné une forme évasée par le haut.
On sait que les fnnlis ont en général la l'orme d'un cône tronqué, ou
dune pyramide à base polygonale plus ou moins irrégulière. Petit à
petit les terres des parois retombent dans l'excavation en prenant un
talus plus ou moins prononcé, selon leur nature. Le iron se régularise,
s'arrondit, et prend enlin la forme d'un cône renversé à base circulaire
ou elliptique.
Au surplus, il est un fait que tout le monde a été à même d'observer :
c'est que la nature tend toujours à arroiulir les corps. La coupe des
monlagnes alfecle toujours la forme arrondie, sauf (luelques cas excep-
tionnels, <|uand ce sont des montagnes eu roches très-dures qui ont
été violemment séparées par de grands calaclysines, et dont alors les
angles saillants correspondent à des angles rentiants de la monlagne,
qui n'en est .séparée (pie par un précipice. Quelle que soit la forme
de la base d'un fontis, si la partie supérieure du sol dans lequel il se
forme se compose d'une assez forte couche di' terre ou de sable, la ca-
vité s'arrondit d'une manière d'amant plus régulière (pie les terres
sont plus meubles et plus homogènes. Ce phcnon eue peut s'expliquer
par la théorie des voûtes.
Quelle que foit la forme de l'orifice par lequel du gable s'écoule, le
monticule qu'il produit dans sa chute prend toujours la forme d'un
cône à base circulaire, si l'ouverture n'a pas une grande différence de
longueur dans les deux axes; ou elliptique, si l'ouverture est Irès-
allongée.
Nous pensons donc que les margelles du Berri et autres doivent élre
restituées au domaine de la géologie.
{La tuile prochainemenl.)
CORIIXSFOIin>ANCK.
Les Pierres du lemple ijc Diane Leucopliriuée eiposres au\ injuri;<i de l'air.
À monsieur César Dalv, rédacteur in ch'fde la Itevuf.
Monsieur,
Dans un article sur le Salon de ISii, publié dans l'un des derniers
niiniéros de la Revuede l'ArchilecCure (vol. V, col. 178), et comme pré-
liminaire de l'hommage que vous rendez à la belle restaiiraiiou du
temple de Diane Leucophrinée , par M. Clerget, vous dites que les
fri.ses sculptées de ce magnifique monument de l'art grec sont ahrilées
sons un auvent en planches ipii les dérobe aux injures de l'atmosphèrr
et à l'ardeur studieuse des artistes.
Les renseignements qu'on vous a donnés sur ce fait ne sont point
exacts; on vous a dit ce qui devrait cire et non ce qui est. Si (pielque
chose dérobe ces sculptures aux investigations des artistes, ce ne peut
être que la consigne (|ui ferme la porte à tout venant, plutôt qu'une
couverture (pielconqiie. Rien, hélas! ne les garantit des intempéries de
l'air, et elles sont ainsi depuis leur arrivée dans le jardin du Louvre.
Lorsque la Revue les annon(.a, il y a plus d'un an, je lis vainement plu-
sieurs fois le tour du Louvre pour apercevoir la baraque qui devait
les recouvrir; ce n'est que six mois après que je les aperçus eu pas-
sant.
Ces marbres gisent, alignés, sur trois rangs, non loin de l'ancien em-
placement des lombes de juillet, sous l'herbe du jardin de la colonnade,
comme les lignes des guerriers prussiens sous les neiges du champ de
bataille d'Eylau. Leur développement paraît élre de 80 mètres environ.
Près des bas-reliefs, on remarque un magnifique sarcophage grec qui, si
l'on eu juge bien à distance, m'a semblé n'avoir pas d'égal dans la col-
leciioii du Musée.
Il serait bien déplorable qu'une longue exposition à l'air et à la pluie
fit perdre à ce beau monument funèbre le beau ton jaunâtre i|u'il doit
sans doute à son long séjour dans la terre, et qui lui donne nue fraî-
cheur admirable.
J'aime à espérer comme vous, monsieur, qu'on prépare à ces iulé-
ressants débris un logement dans les galeries du Louvre. Ils ont déjà
passé un hiver sous l'herbe. C'est la position la plus meurtrière qu'on
puisse infliger à des objets d'art ((uelcmiques, dans notre climat froid et
humide. Ou ne pourrait traiter avec plus d'indifférence de simples
moellons Combien ces précieux restes passeront-ils encore d'hivers
en cet état? Ces hivers ne seront peai-éire pas aussi doux que le pre-
mier.
Ou ne conçoit pas comment un tel acte d'insouciance peut avoir liou
sous les murs mêmes du superbe monument un l'on réunit à si grands
frais, depuis des siècles, les objets d'art de tons les temps et de tous les
pays. C'éiail vraiment bien la peine de les retirer à grands frais des
marais du Méandre; la vase, du moins, plus soigneuse que nous, les dé>
rubaitaux injures de l'air.
J'ai observé bien des fois que les pierres placées sous l'herbe se dé-
iruisaienl plus vite qu'en toute autre circonstance. L'herbe rnirelient
l'humidité, tout en laissant un libre passage i l'air : ainsi, pendant les
283
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUJ5LICS.
•28 V
gelées, ces deux ngenls dcsiructeiirs, presque Incries quand ils sonl sé-
parés, se trouvent ici combinés de la manière la |ilus funeste. Quelle
que soit la gélidité d'une pierre, si elle est complètement purgée d'Im-
midilé, la plus forte gelée n'a aucune action sur elle.
J'admets que les marbres sont en général assez réfractaires à l'action
de l'air atmosphérique pour que nos plus fortes gelées ne puissent les
faire éclater même quand ils sont humides; mais le rontacl de l'air
corrode toujours leur surface et enlève aux ouvrages d'art l'épiderme
que leur (il le ciseau de l'artisle. Les lichens, les mousses, s'altaehent
promptemeni, cl il est fort difficile de détruire les taches qu'ils y ont
laissées.
J'ai vu des marbres slaluaires, desgraniis même, se décomposer as-
sez rapidemenlà l'air; entre aulres, une sialue en marbre du gladiateur
mourant, placée dans le jardin du château de la Muette. Elle se dégrade
sensiblement, et sa surface tombe en poussière comme certains grès
dont la gangue est imparfaite. Il ne serait pas impossible que les mar-
bres du temple de Magnésie fussent d'une nature analogue, ou que leur
long séjour dans le limon du marais, auquel ils doivent sans doute leur
couleur brillante, les eût prédisposés à céder plus facilement aux atta-
ques de notre climat rigoureux.
Je fais avec vous des vœux, monsieur, pour que le logement qu'on
leur prépare au Louvre soit prêt avant l'hiver prochain ; car je crains
qu'on ne leur fasse pas de toiture provisoire,
.agréez, etc.
H. JANNIARD,
archilecte.
ACADEMIE DES SCIENCES.
Existence de Toréls de cèdrps dans l'Algérie, el emploi de ce bois dans les conslruc-
tions mauresques. — ^otc de M. Vicat sur les pouzzolanes arliflcielies.
Dam» la séance du 10 juin, .M. Bory de Saint-Vincent a donné
comniuuicaliou à l'Académie de quelques notes prises par M. le ca-
pitaine Uurieu de Maison-Neuve, membre de la commission scientifi-
(|ue de l'Algérie, sur les cèdres de l'Atlas et sur l'emploi de leur bois
dans les constructions mauresquesd'.\lger. M.Durieuen a rencontré de
vastes forêts sur les versants méridionaux; maison retrouve dans ces fo-
rêis des traces d'incendies allumés par les pâtres, el plusieurs arbres de
ilimensions énormes gisenl déracinés par les ouragans. L'orage et le feu
ne sont pas les seuls agenis destructeurs de ces arbres superbes ; les
montagnards, auxquels les colons demandent le bois de construction
nécessaire aux mai-sons qui s'élèvent comme par eucbanlement. cou-
pent sans choix tout aibre qui se trouve à proximité, el détruisent
souvent, pour obtenir la plus médiocre pièce de charpente, des colos-
ses de végétation respectés par mille tempêtes. L'adminisiraiion prend
aujourd'hui des mesures pour arrêter ces dégâts et régulariser les
coupes.
Au temps même de la domination turque en Barbarie, le bols de
cèdre, que les savants de l'Europe ne soupçonnaient seulement pas y
abonder, était fort employé dans Alger même, concurremment avec les
troncs de certains genévriers, qui viennent assez gros dans les dunes
de quelques points des côtes. On employait surtout les branches cylin-
driques qui ironique cinq à six pouces de diamètre ou un peu plus,
el par lionçons de quelques pieds de longueur, pour soutenir oblique-
ment les saillies produites en dehors des maisons mauresques par la
place qu'occupe le divan , meuble indispensable dans la longueur
des bâtiments étroits où se plaisent les familles musulmanes. Ce sont
tics pièces pareilles des mêmes bois, qui servent aussi comme d'arcs-
boulants entre les côtés des rues si étroites d'une ville où touies les
maisons s'appuient les unes contre les autres, et deviennent, pour ainsi
dire, solidaires par le secours de ces sortes de bûches, que les passants
voient à haulcuis diverses au-dessus de leur tête, fixées en lra\ers d'un
mur à l'autre, d'une manière si disgracieuse, mais pourtant fort mo-
tivée par la fréquence des treinblemenis de terre et parla nature des
matériaux qui entrent dans les constructions.
Ainsi donc, quand les cèdres antiques du Liban auront complètement
disparu, ce qui, au dire des voyageurs, ne doit point larder à arriver,
nous retrouverons cette essence précieuse dans les montagnes de
l'Atlas et sous notre main.
— Dans la séance du 17 juin , le savant ingénieur JW. Vieat a fait
part à l'Académie de la note suivante, sur les condiliom auxquelles utic
pouzzolane artificielle doit tatisfaire pour convenir à l'eau de mer :
« Toutes les argiles qui contiennenl assez de carbonate du chaux
pour qu'après cuisson il se soit formé un silicate d'alumine el de
chaux en proportions quelconques , mais lellcs cepend: nt que la
chaux fasse au moins la dixième partie de l'argile allaqiiéc, toutes ces
argiles, disait-on, sonl propres à fournir des pouzzolanes arlihcielles
propres à l'eau de mer. Seulement, il ne faut leur appliquer que le
degré de cuisson nécessaire à la décomposition en carbonate de chaux
(8 à 10 degrés du pyromètre), et ne pas le prolonger au delà
du temps nécessaire à cette dccomposilion. La potasse caustique, ajoii-
lée en proportions de 5 p. 100 à une argile pure , remplace efficace-
ment le carbonate de chaux.
« Il suit de là que la condition â remplir pour qu'une pouzzolane
convienne à l'eau de nier, c'est que l'argile y ait été attaquée par un
fondani, mais à tel point (|ue les principes ne soicni pas trop foriemeni
lié> par cette combinaison. Dans ces cas, l'argile forme immèdiatemeni
par voie humide, avec la chaux éteinte qui intervient pour la confecliun
du béton, une combinaison nouvelle qui n'est point décomposée far le
sulfate de magnésie de l'eau de mer.
a J'ai trouvé un moyen très-siinple pour être maître de la duiéo
Cl de l'intensité du feu appliqué aux argiles sous forme pulvéruleiile
el en grand. »
>:©:c
CHRONIQUE.
SoMMiiRS : Séance du Conseil municipal de Paris, questions des embarcadères elde
la voirie de Monltaucon. — Médailles pour les ciposinls de produits dp l'indas-
Irie. — Note statistique sur les cloches en France. — Dock de carénage flollanli
Marseille. — Ancien projet de portail pour la cathédrale de Barcelone. — Travaux
exécutés a l'Acropolisd'Athénes. — Constructions romaines ilécouvcrtes à Paris. —
Pl'BLICATIOX MOUriLLES.
— Dans sa séance du 51 mai dernier, le Conseil mimicipal de Paris,
consulté sur le tracé du chemin de fer de Paris à Strasbourg el sur
son entrée dans la capiUile, a pris une délibération qui, on va le voir,
est lout-â-fait conforme aux idées que nous avons souvent émises
relaiivemenl à l'influence future îles stations sur le déplacement de
la population parisienne. Voici les conclusions de la commission,
composée de .MM. Perret, Perricr, Lanquetin, Frédéric Moreau, Ilé-
rard, Thayer, cl Victor Considérant, rapporteur:
<t Jeter encore (dit -elle) au nord ou nord-ouesl de Paris, la téie
du chemin de fer de Strasbourg, ajouter à ces poitits, beaucoup trop
puissants déjà pour l'avenir de la ville, une virtualité nouvelle, ce
serait aller contre toutes les doctrines de haine édiliic, de sagesse et
d'avenir.
« Pénétrée de ces priix ipes. qui sont les vôtres, votre commission a
formulé celle première cuiieliisioii lu'gaiivc :
« Il importe au plus haut degré aux iiiléiéts actuels el à venir de
la cité parisienne, que la léle du chemin de fer de l'.XIIemagne ne
soit pas placée dans les régions du nord et du nord-ouest de la
ville.
« Le débarcadèic du cheniiii de fer de Strasbourg doit être placé,
28J
RKVUli DK L'ARCHITECÏL'RK ET DES TRAVAUX PUBLICS.
280
aulaiil que possible, en sens inverse du moiivemeiU de déplacenienl
lie la population, afin de contre-baiaiicer de, toute la force qui lui est
propre les causes de la déviation qui cniraînent aiijourd'lnii le centre
de lacliviié et des affaires exlérieureineiit à l'assietie naturelle de
Paris.
0 L'emplacement le plus capable de satisfaire à cette liante consi-
dération est, aux yeux de votre commission, renfermé cuire la bar-
rière du Trône, la rue du Faubourg-Saint-Anloine, le boulevard Con-
trescarpe et la Seine.
« Nous avons donc l'Iionnenr de vous inviter à peser de lonte votre
autoiilé pour que la tcle du chemin de fer ne soit, en aucun cas,
portée au nord au delà de la ligne du faubourg Saint-Antoine ; mais
que, au contraire, elle soit le plus possible rapprochée de la rivière,
sans vous arrêter aux considérations de dépense d'un nouvel embar-
eadèro.
tt Vous prouverez ainsi à l'administration supérieure toute l'im-
poitance que le Conseil municipal de la Ville attache à combaiire le
déplacement de la population.
« En résume, votre commission est unanime pour demander, et
demauiler avec énergie, que l'enlrée à Paris soit située dans les limites
que nous venons de rappeler, à l'exclusion formelle de tout autre
cmplaoeineni.
Ces conclusions ont été adoptées à l'unanimité.
— Dans une antre séance, le Conseil municipal s'est aussi occupé
de la suppression de la voirie de Montfaucon, question toujours
ajournée jusqu'.i présent. Le projet éiaii toujours de laiic Iranspor-
ter les vidanges dans la forêt de Bondy, au moyen de bateaux her-
métiques. M. Arago a émis sur ce point un avis nouveau. Suivant lui,
il serait facile do faire passer les vidanges jusqu'à l'emplacement qui
leur est destiné, au moyen d'une conduite armée d'un refouloir.
M. Gay-Lussac, consulté à cet égard, a fortifié l'opinion de son col-
lègue de l'Institut , et le Conseil a adopié les vues présentées par
M. .\rago. Mais une commune voisine s'est opposée à l'exécution de
la mesure, et l'aU'aire a été portée au Conseil d'Étal. On espère qu'il
statuera promptemcnt et que la ville pourra bientôt exécuter un pro-
jet si important pour la salubrité publique.
— On a frappé celte année, à la .Monnaie, soixante-quinze mé-
dailles en or, trois cents en argent, et une beaucoup filus grande quan-
tité en bror.ze. Toutes ces médailles sont destinées aux exposants des
produits de l'industrie que le jury central doit désigner au minisire du
Commerce.
En 1859, il a été décerné quatre-vingt-dix-sept médailles en or,
irois cenis médailles en argent, et (piatre cent dix-huit en bronze. Les
médailles en bronze pour celle année sont au nombre de près de cinq
CPIllS.
— M. rarcbevéque de Bordeaux vient de publier un long et intéres-
sant mandement sur les cloches. On y remarque la noie suivante :
Il est un diocèse en France, celui de Belley, où, depuis vingt ans,
on a relevé ou construit à neuf et pourvu de cloches de toutes les di-
mensions, plus de deux cents clochers. Il n'y a pas de village en Lor-
raine qui n'ait recouvré ses anciennes sonneries, et l'on retrouve encore
dans les tours des églises cathédrales de Paris, de Lyon, de Ueims, de
Poitiers, de Strasbourg, de Nanci, de Uoiien, d'Amiens, de Sens et de
Vendôme, les célèbres bourdons qui en faisaient la gloire. On vient de
doier les clochers des cathédrales de Nantes, de Chartres et de Rodez ,
de sonneries supéiieuies à celles dont elles avaient été dépouillées.
L'une des nouvelles cloches de Rodez pèse 17 000; celle qui va être
refondue pour Nolre-Dame-de-la-Garde, de Marseille, pèsera 22 000.
— La chambre de commerce de .Marseille vient de décider la coii-
siruction prochaine d'un dock de carénage lloliant, destiné au radoub
des navires de haut-bord, et notamment des bâtiments à vapeur, qui jus-
qu'à présent avaient été forcés d'aller se ravitailler à la Seyce ou à Tou-
lon. Ce sysième de docks n'est pas nouveau ; les État.s-ljnis l'ont adopté
avec succès; il en existe un à Rotterdam, et on en construit un au
Havre.
— Nous venons de recevoir d'un de nos correspondanis d'Espagne
la copie d'un ancien projet de portail pour la cathédrale de Barcelone.
Ce projet, qui date de la fin du style ogival, présente touies les qualités
et tous les défauts de celle époque de décadence. Ses détails soni sin-
gulièrement légers et élégants, mais l'ensemble manque peut-être de
celte grandeur et de cette fermeté qui caractérisent le style gothique
de la belle époque; toutefois on ne peut se lasser d'admirer l'imagina-
lion féconde de l'artiste qui a lissé, pour ainsi dire, celle riche dentelle.
Le dessin original de ce projet, que l'on croyait perdu, a élé retrouve
pendant les deiniers troubles dans les ari:hives de l'Archevêché. Quels
que soient l'imporlance et le mérite de cette composition, si les troubles
qui ont récemmeul bouleversé Barcelone n'avaient dû produire que ce
résultat, ce serait un dessin trop chèrement acheté.
— Une lettre écrite d'Athènes en date du 21 avril 1844, insérée dans
le journal anglais The Alhenœum, contient des détails intéressants sui- les
importants travaux exécutés à l'Acropolis par les soins de la Société
archéologique, ainsi que surles monuments précieux que l'on y admire
encore aujourd'liui. Nous empruntons à l'Écho du Monde savant l'ex-
trait suivant, qu'il a fait de cette lettre : On a conservé les mesures an-
glaises.
Aidée par les souscriptions du comité anglais, la Société archéolo-
gique a leiininé la restauration du temple de la Victoire aptère ( sans
ailes). Celte restauration éiait de la plus urgente nécessité; car les
premiers travaux qui avaient été faits n'avaient pas été terminés, et déjii
une des colonnes que l'on avait remises en place était tombée de nou-
veau. L'on a rétabli un cbapiieau et un tambour pour une colonne,
ainsi que plusieurs pièces transversales de marbre; les architraves ont
été replacées sur les colonnes, ainsi nue toute la frise du côte oriental.
Le tout a été solidement rattaché ensemble, et l'on a placé en sùreie.
dans le temple même, les trois reliefs de Victoires ailées qui faisaient
panie d'une balustrade qui entourait l'édifice. Quoique les restes de
celte balustrade existent encore au côté septentrional du temple, on a
cru plus convenable de les conserver séparément. Il manque encore
deux pièces de la frise, probablement perdues dans la maçonnerie du
bastion turc silué au-dessous, de même que quatre autres pièces qui se
trouvent dans le Musée britannique; néanmoins l'effet que produil le
temple est parlait quant à sa façade principale. Les bases de toutes les
colonnes dil Proiiylee ont été depuis longtemps dégagées de la terre
qui arrivait au milieu de leur hauteur, et maintenant la Pinacolheca
l'orme un Musée disposé avec ordre pour la conservation des inscrip-
tions cl (les petits rragmenis de sculpture. Du Propylée au Parliienon,
et du Parihéiion à l'Ereclithcium, tous les décombres ont été enlevés.
de telle sorte que le grand temple a repris son magnifique effet; il est
cependant à regretter que les frais considérables de ce travail ( sur
(|uelques points la terre et les pierres s'élevaient à 10 pieds) aient em-
pêché de terminer le déblaiement et d'enlever les gros blocs de mar-
bre qui encombrent encore la place. Pour éviter de fortes dépenses ei
pour conserver néanmoins un grand nombre de fragment» de sculpture
de diverses époques, le conservateur des antiquités les a implantés dans
de petits murs de plâtre qui nuisent à l'effet général. Lorsqu'on aura
pu déblayer le grand espace silué derrière le Parihenon à l'extrémité
orientale de l'Acropolis , ces restes pourront être disposés convena-
blement et prendront place dans un musée acropolitain.
L'intérieur du Parihéuon a élé débarrassé de lu mosquée turque qui
eu occupait le centre, et si maintenant l'on pouvait aussi le dégager
des vidumineux fragments de l'église chrétienne située à son extrémité
287
REVUEDE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUI5MCS.
28S
..rieniale, lo.ilc son éien.lue se déploierait de nouveau avec son antique
beauté; nù:mi.i()ins il y manquerait toujours l'intérieur des tolonnes, qui
a disparu totaictiiont, grâce
aux arci)ilef:tes turcs et chrétiens. On a
parfaitement reconnu la position de la statue d'or et d'ivoire de Phi-
dias, ainsi que celle de la statue colossale de Minerve.
Ce qui fait le plus .rhouneur aux travaux du conservateur des anti-
quités et il la Société archéologique, en la reconslruciion «lu mur méri-
dional de Minerve Poliade, et la réparation du portique des Cariatides,
de même que le dégagement complet de l'Erechtheiuin et du Cecro-
pium. à l'exception de son portique septentrional, l/allrniion .le la So-
( iété archéologique s'eçl portée sur ce portique, qui sert mainleiiant de
m.iaasin à poudre, et le comité anglais a mis en réserve le peu de fonds
qui lui restent jusqu'à ce que l'on puisse commencer ii s'occuper de ce
bel objet.
Lors(|ue l'on voit l'Acropolis dans son état actuel, l'on reconnaît que
le premier grand ouvrage que doive maintenant entreprendre la Société
archéologique consiste à dégager le portique de l'Éreclitlieiumet a ouvrir
la belle porte qui s'ouvre vers le temple ; il est à regretter que l'on n'ait
pas même la somme peu considérable qu'exigeraient ces travaux. Une
commission française, sous la direction de M. Le Ras, vient de passer
huit mois à mouler et à dessiner les nmnumenis de l'Acropolis. Les ar-
tistes français viennent de dresser un échafaudage au moyen duquel ils
pourront mouler l'angle .Nord-Ouest du Parihénon; ce magnilique mo-
dèle comprendra la p.iiiie supérieure des colonnes, la frise, l'entable-
ment, et il donnera une idée exacte des proportions colossales de l'é-
difice entier.
Parmi les nombreuses inscriptions de l'Aciopolis qui ont été publiées
dans les éphémérides de la Société archéologicpie, il en est trois ou
quatre qui présentent un intérêt particulier : ce sont l'inscription de
la base de la statue votive de Minerve Hygie, mentionnée par Plui-irque
dans la vie de Péricics et par Pline; le catalogue des contributions
payées au trésor du Parthénon par diverses villes, et la description,
le prix et la distribution de l'ouvrage relatif à la construction de la
lotigue muraille.
Il reste encore noiidnc de statues et de reliefs qui mériteraient d'ê-
tre moulés. Si les musées d'Europe contribuaient aux Irais de l'opéra-
tion, ce seraient les suivants : dix pièces de la frise du Parthénon, une
métope, la Victoire ailée quittant ses sandales, et une autre appelée le
Taureau de Marathon, reliefs appartenant à l'exterieurdu temple de la
Victoire aptère, avec une portion d'un iroisièine (|ui cojisi.-te en une
lielle petite statue de f.iuiie, de 2 pieds de haut; Cérès ou Diane sur
un char, dans uti style qui rappelle celui des marbres de Xante; huit
des petits reliefs sépulcraux et autres conservés dans la Pinacoihèi|iie;
plusieurs beaux fragments de petites statues, dont trois conservés dans
le portique d'Adrien ; un torse de Cupidon , un hardi reliOf sépulcral
de 5 pied^ de hauteur, représentant un vieillard et un jeune homme;
àne statue drapée d'une manière remarquable, du meilleur temps,
haute de 6 pieds, trouvée à Andros; —sa tête manquait et avait été rem-
placée par nu buste romain, comme le montre la fracture du cou : — un
petit relief, avec l'inscription Athena, etc. ; la statue colossale <rErieli-
thonius, encore en place deriière le temple de Thésée, haute de 8 pieds,
sans tête; la statue colossale de Minerve Vietrix, remari|uable pour son
exquise draperie, sans tête, près du Theseium. Dans le Theseiiim. le
curieux relief, haut de 6 pieds, d'un guerrier avec son épieu, avec des
restes considérables de couleurs ; un ouvrage d'Aristeion, de rancieiuic
école de Sycione; une belle figure du meilleur temps, bien conservée,
à l'exception des jambes aii-de.-sous du genou et des bras, haute de 5
pieds, appelée Apollon à cause dti serpent qui se trouve à sa base; luie
statue que l'on regarde comme un Apollon lyeien, haute de H pieds;
un beau petit Silène avec Bacchus enfant sur ses épaules, haut de 5
pieds; un Pan, de 5 pieds; un beau petit Terme de i pied et demi, avec
trois tètes de la Diane triforme et une d'Hermès; un relief sépul-
cral, de 5 pieds sur i, représentant un jeune homme, un chien et un
jeune garçon; un autre de même grandeur, avec femme, nourrice, en-
fant et ami ; —ces deux pièces, d'un très-beau relief, .sont d'admirables
spécimens du style sépidcral ordinaire qui vient après la meilleure pé-
riode de la sculpture athénienne; — plusieurs autres reliefs de faibles
proportinns et de moindre importance.
.On n'a pas fait de fouilles en dehors de l'Acropolis, et il n'est pas
probable que l'on en fasse; car le gouvcrnemriit grec manque de
fonds pour cet objet, et la loi défend à tout individu d'emporier de
Grèce des objets antiques. Une circonstance à déplorer, est que la ville
est bàlie sur des restes anciens, et l'on ne peut gm-re espérer de décou-
vertes à Athènes ailleurs que dans l'Acropolis. Néanmoins divers motif»,
portent à croire que d'autres endroits seraient plus productifs, s'ils
étaient l'objet de recherches archéologiques.
En exécutant des fouilles pour fonder les caves d'une maison
dans la rue Constanline, entre les mes de Perpi',;nan et de la Licoriu'
(île de la Cité, a Paris), on a découvert des restes de constructions ro-
maines, et entre autres un hypocauïte. un aqueduc qui s'étend plus loin
que les débris trouves, plusii'nrs murs indiquant des distributions d'ap-
partements, et un mur Irés-long s'étendant parallèlement ii la rue Con-
siantine. Le peu d'épaisseur des murailles semblerait donner à penser
que cette ( onsti iiction appartenait à une riehc habiialion plutôt qu'à
un monument public.
Publications noivf.lles. — Les I4« et 15' liviaisons de la Slatitti-
que mmiummlalc de Purit, publiée par M. Atberl Lmoir pour le minis-
tère de rinslriiction publique, viennent de paraître, et la l»eaulé de l'éxe-
cution surpasse telle de toutes les livraisons précédentes, et les
planches (jnelles contiennent sont du plus haut intéiêt. La 14* livraison
forme, avec la 13'. précédemment parue, une monographie complète de
l'ancienne église de l'abbaye Sainte-Geneviève, détruite pendant la Ré-
volution, et dont il ne reste plus aujourd'hui que la tour qui fait partie
des dépendances du collège Henri IV. Ou s;iitquà celte aniiipie abbaye
viennent se rattacher les premiers souvenirs historiques de la monarchie
française. Au centre de l'église on voyait la statue couchée de Clovis, ac-
tuellement dans les caveaux de Saint-Denis, et une chapelle, située
derrière l'abside, était placée sons l'invocation de saiiiicClotilde. L'église
dont .M. Albert l.enoir reproduit anjourd'lnii le.s plans, coupes, éléva-
tions cl détails, est du XP.sièclc; la façade, toutefdis. et la partie siipé-
lieure delà nef, sont du Xli' siècle, et la tour date du XIV« Les chapi-
teaux du chœur, publiés en grands deuils, sont de curieux ccbantilloiis
<le l'architecture du XI' siècle. Pour compléter ee travail, lanleur y a
joint le dessin de deux chùsses de la patronne de Paris, lune du XIIP.
l'autre du XVIl» siècle.
La IS' livraison contient : 1° deuv planches repréientanl l'clévalion
principale et différents détails de l'hôtel Torpaiiiie, eonslriiit à Paris
vers la fin du XVI' siècle. Ce qui en reste est à l'école îles Beaux-Arts.
Deux antres planches reproduisent divers chapiteaux et inscriptions
lie l'église Saint-Gerui:'.in-des-Piés. Une antre représeiiie les quatre
faces d'un tombeau gillo-romain trouvé en 180fi rue Vivienne, aiiv-
quelles .M. Albert Lciioir a ajouté une restauration. Vient ensuite l'an-
cien hôtel des Ursins, situé dans l.i Cité, sur le bord de la Seine, vis-à-
vis la place de l'Hôtel de- Ville. Cette livraison se termine par un plan
de Moniniarire avec indication de tontes ses antiquités.
CES Alt D.\LY.
Directeur, rrdncleur en chef.
membre de l'Académie royale des Iliaui-Arls de Slocliliolro, et minibre
lionoraire el correspondant de l'Insiilul nival des Arcliil' clés lirilanniqiii-»
l'AIIIS. — TVP. I.«CI!AIII>r KT COUP., liKt, DiHIETTK, 2.
28'J
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
290
'HIiSTOIj
DEUXIEME INSTRUCTION DU COMITÉ HISTORIQUE
DES ARTS ET MONUMENTS.
CIVILISATION CHRÉTIENNE.
STYLE ROMAN ET STYLE GOTHIQUE.
(SUITE , voy. col. 241.)
Cllli'ITIU; II, — EXA11E\ DÉTAILLÉ DE L'EXTÉRIElIt DE L'ÉGLISE
Avaut d'indiquer les formes et les caractères par lesquels peut
se distinguer à l'extérieur chacun des membres de l'église que nous
venons d'énumérer, il est indispensable de jeter un coup d'œil ra-
pide sur les objets qui doivent figurer dans ces descriptions, soit
qu'ils appartiennent exclusivement à l'extérieur, ou que nous
puissions les rencontrer également en dedans de l'édifice.
A . Le pi'emier examen portera sur le système et les matériaux
de construction, qui devront être signalés toutes les fois qu'ils
présenteront quelque caractère particulier, différent de celui de
la masse. ( Voyez ce que nous avons dit, § IV du chapitre précé-
dent, col. 243.)
H. Les murailles peuvent être complètement lisses sur leur sur-
face extérieure, ou décorées, soit de quelque ornement courant, tel
que des stries verticales, horizontales ou obliques, des nattes
[Fiij. 30l, des compartiments (F((/. 31), des imbrications [Fi(j. 32),
des damiers [Fig. 33), des bossages; soit de quelque renflement
ou moulure horizontale, tel que cymaise, larmier ou imposte; le
plus souvent elles sont pourvues, surtout en dehors, d'un soubas-
sement très-caractérisé.
Saint-Èlienne {Beauvais).
l]l||i|f|Mi|!IM!Mi|ii|Hi|niii|,|,,.
■■■' , =
Pifj. 30.
Fig. 32.
Fig. 33.
C. Elles peuvent être nues ou pourvues de colonnes, pieds-droits
ou pilastres, libres ou engagés, en supportant, soit un amortisse-
ment, soit un couronnement, soit une architrave.
L'amortissement est la partie supérieure dune baie, lors(|u'elle
va en diminuant vers le sommet.
L'amortissement est ordinairement curviligne et prend alors le
nom d'arcade.
L'arcade peut être à jour ou figurée, nue ou décorée d'une ar-
chivolte soutenue par deux des supports que nous venons de men-
tionner, ou par deux consoles.
Dans le cas où c'est une série d'arcades (arcature) qui repose
ainsi sur de simples consoles, elle devient un couronnement.
[Voyez ci-après D.)
Ailleurs, des arcades ainsi soutenues par de simples consoles al-
ternent avec d'autres, qui reposent sur l'un des supports que nous
venons de citer, ou sur un simple ressaut de la muraille.
On rencontre fréquemment aussi, mais plus à l'intérieur qu a
Textérieur, si ce n'est pourtant dans les baies des clochers, deux
arcades secondaires inscrites dans une arcade principale de courln-
semblable ou différente, et soutenues par une colonne centrale ;
au-dessus de cette colonne se trouve ordinairement un œil-de-
bœuf, destiné à alléger le plein de l'arcade, et le plus souvent de
forme circulaire et rayonnante.
Fhj. 3i.
Fiy. 35.
Le contour de cet œil-de-boeuf est tantôt uni, tantôt découpé
en lobes, d'abord au nombre de trois ou quatre, puis se multi-
pliant de plus en plus. C'est là l'origine de ces quatre-feuilles et de
ces trèfles que nous verrons figurer si souvent en creux et comme
taillés à l'emporte-pièce au bord des parties pleines, dans les
églises gothiques.
L'œil-de-bœuf et ses variétés se trouvent encore employés, soit
des deux côtés d'une arcade ornée, soit isolés comme celui dont
nous venons de parler, au-dessus de chaque colonne d'une arca-
ture.
Outre les séries de colonnes et d'arcades, ou en rencontre en en-
trelacements. II faut alors, non-seulement les signaler, mais en-
core rendre compte avec un soin particulier, et autant que possible
fournir un dessein exact, sur une échelle étendue, des courbes
principales et de celles qui résultent de leurs intersections.
T. V 19
291
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
292
Fig. 36.
Fig. 37.
Fig. 38.
La colonne et l'amortissement méritent chacun un examen par-
ticulier et approfondi.
A. La colonne se distingue du pilier par la présence d'un cha-
piteau et ordinairement d'une base.
Cependant il existe un genre de support Intermédiaire, la co-
lonne-pilier, toujours remarquable par sa pesanteur, et qui n'est
munie à son sommet que d'un cordon et d'un tailloir, ou de l'un
des deux seulement.
La colonne est complète lorsqu'elle se compose d'une base, d'un
fût et d'un chapiteau; incomplète lorsqu'elle manque, soit de base
(quelquefois avec une portion du fût), soit de chapiteau.
Dans le cas où ce sont la base et une portion du fût qui man-
quent, ce qui existe peut être désigné sous le nom de demi-colonne,
et repose soit sur une console, soit sur une simple retraite des
tambours inférieurs; quelquefois aussi ces derniers manquent
complètement. Quand on rencontrera des faits de ce genre, on de-
vra examiner s'ils tiennent à la construction primitive ou s'ils
sont le produit d'un remaniement postérieur ayant pour but de
donner du jour ou de l'espace, comme cela arrive le plus commu-
nément.
Cathédrale de Jteims.
Coulommieri.
Fig 40.
Fig. 41.
Fig. 42.
La colonne peut être simple ou composée.
Elle peut être ronde a; munie d'une arête mousse b ou aiguë c;
elliptique d ; carrée e (et alors elle prend le nom de pied-droit) ;
rectangulaire et engagée dans la muraille (et alors elle s'appelle
pilastre f) ; ou prismatique g.
D
A
G G P K
Fig. 43.
Sa base peut reposer immédiatement sur le sol ou être portée
sur un socle et entourée d'une plinthe.
Cette base peut être formée ou décorée soit de figures humai-
nes, soit de représentations d'animaux et en particulier de lions
(surtout dans les portails ou les porches), soit d'ornements cou-
rants.
Saint-Denit.
illllil'lllll liiiiiil
Fig. 44.
FiSr. 45.
293
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
99k
Elle peut encore être munie ou non d'appendices en forme de
pattes ou de feuilles aux quatre angles du socle.
SainlGermain-des-Prés (Paris).
Fig. iC.
Considéré sous le rapport de sa forme, le fût peut être fuselé a,
renflé b, en balustre c, cylindrique d ou conique e.
n ^1
Fig. 47.
Sous le rapport de sa disposition, il peut être simple a, croisé b,
entrelacé c, brisé D, noué E, ou annelé à divers points de sa hauteur F.
c
Fig.
48.
Sous le rapport de sa surface, il peut être lisse, cannelé avec ou
sans rudentures A, verticalement, horizontalement, ou en spirale b,
losange c, strié, gaufré d, chevronné e, contre-chevronné f, tordu,
rubanné, imbriqué G, et contre-imbriqué, natté, godronné II, frctté,
chargé d'enroulements, d'entrelacs, d'animaux ou de personnages
rampants autour de lui, ou d'une figure humaine engagée; il peut
même être remplacé par cette figure :
fiatisbonne.
Ftff. 51.
Quoique les colonnes romane et gothique ne soient pas assujet-
ties à des proportions rigoureuses, on devra toujours indiquer le
rapport du diamètre du fût ou de ses diverses parties, s'il n'est pas
cylindrique, avec sa longueur.
Dans certaines contrées du royaume où l'architecture antique
n'a jamais été complètement perdue de vue, on trouve la colonne
corinthienne plus ou moins exactement reproduite par les artistes
du Moyen-Age. Souvent, au lieu du type classique, ils en ont
adopté constamment la variété qu'ils avaient plus particulièrement
sous les yeux dans les monuments du pays, de manière à former
ainsi de petites écoles locales, reconnaissables h ce caractère. C'est
par une circonstance de ce genre que le pied-droit et le pilastre can-
nelés avec rudentures dominent exclusivement dans les églises de
Vienne et de tout le territoire dAutuu.
Partout ailleurs même, excepté quelques exemples très-rares de
formes ioniques ou doriques, le chapiteau du Moyen-Age se com-
pose ordinairement d'une corbeille et d'un tailloir, de manière à
rappeler plus ou moins fidèlement les formes corinthiennes où
I composites de l'architecture antique.
295 REVUF. DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
- La corbeille peut être cjlindrique {Fig. ôS et 53), cubique Normandie.
Saint-Gcrmain-des-I'rés. Le Pin
[Normandie).
590
Fig. .V2. Fin- 53.
Cathédrale de Verdun. Cornelo.
Fig. 55.
Fig. 50.
Fig. 57.
{Fig. 54, 55 et 56), conique(F4j. 57) (en crtne tronqué et renversé),
cordée [Fig. 58) (en cœur), pyramidale [Fig. 59 et 60) (en pyra-
?iiide tronquée et renversée), ureéolée [Fig. 6l) (resserrée un peu
Cologne.
Venise.
Fig 5H.
Fig. 59. Fig. 60.
Venise.
Palais, dit de Constantin
Conslantinople'.
Fig. 61.
Fig. 62.
nu-dessous de son sommet), campanulée [Fig. 62) (en forme de
cloche), infundibuliforme (Fig. 63 et 64) (présentant la forme d'un
entonnoir ou d'une corbeille proprement dite, à bords plus ou
moins évasés) ; godronnée [Fig. 65), scapboïde [Fig. 66).
Fig. 6ô.
Fig. 66.
La décoration du chapiteau peut appartenir à la peinture ou a
la sculpture, ou, comme cela arrive souvent, à l'une et a l'autre a
la fois. Quand il est resté lisse, cette circonstance indique quelque-
fois que l'on a eu l'intention d'y employer la peinture exclusive-
ment. Il faut distinguer ce chapiteau de celui qui a été gratté
après coup, aussi bien que de celui cpii n'est qu'épannelé, c'est-a-
dire où les masses d'ornement ont été réservées dans l'attente d'un
travail de ciseau qui n'aura pas eu lieu.
On rencontre encore des chapiteau.x où l'ornementation de
sculpture, quelquefois la plus délicate, a été recouverte de plâtre
pour faire place à des peintures. C'est ordinairement au XIII' siècle
qu'a eu lieu cette substitution de la couleur à la forme.
En général, toutes les fois qu'on trouvera du plâtre ou du badi-
geon sur un point susceptible de décoration, on devra s'assurer de
ce qui peut exister dessous.
Quand l'ornement de la corbeille appartiendra à la sculpture,
outre les caractères provenant de son exécution plus ou moins dé-
licate, plus ou moins fouillée, il sera nécessaire d'examiner si cet
ornement se détache en plein relief de sa surface, s'il y est engagé
ou s'il est pris à même sa masse, de manière que son contour y soit
évidé en creux.
Cet ornement peut se composer d'objets empruntés à la figure
humaine, au règne animal, au règne végétal, à l'économie domes-
tique, la parure, la broderie, la passementerie, la sparterie, etc.
La figure humaine parait s'être introduite dans cette partie de la
colonne par la substitution d'un personnage complet au mascjue
antique qui forme quelquefois le fleuron du chapiteau corinthien.
Vienne (Dauphiné).
Sainl-Gtrmain-dts-Près.
fig. 63.
Fig. 6i.
Fig. 67.
Fig 68.
Elle y présente quelquefois des scènes historiques ou religieuses,
avec ou sans inscriptions explicatives, et alors on dit que le chapi-
teau est historié.
29-;
UKVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Normandie.
Sainl-Denis (caveau royal).
Fiij. 69.
Fiij. 70.
1! est symbolique quand les figures, avec ou sans mélange d'a-
nimaux, annoncent une intention symbolique, soit qu'on ait réussi
ou non à en saisir le sens.
Saint-Gaudens {'-nmlé de Comminges).
Enfin la composition peut être purement de caprice, quand ces
figures sont groupées dans une simple combinaison de fantaisie ou
d'ornementation.
Toutes les fois que des démons se rencontreront parmi ces per-
sonnages, on devra indiquer s'ils sont figurés avec des masques
sur le visage ou d'autres parties du corps; sous la forme de Pans,
avec un visage humain barbu, des cornes et des pieds de bouc ; ou
enfin sous une forme purement animale ou monstrueuse.
Dans les églises romanes, les personnages ou les groupes sont
souvent destinés, surtout à l'extérieur, à montrer les vices et les
crimes dans toute la difformité de leur physionomie et de leurs
actes, ou bien déjà soumis aux châtiments que leur infligeait la
theodicée bizarre et raffinée du Moyen-Age. Lors même que ces
figures offensent la pudeur, on y reconnaît, sinon toujours une ni-
tention sérieuse et morale, au moins ordinairement l'absence de
cet esprit hostile contre les ministres du culte, dont l'affaiblisse-
ment du sentiment religieux amena si souvent la manifestation,
quelques siècles plus tard, dans la décoration des églises.
Quand l'ornement des chapiteaux appartient au règne animal,
il faut distingiier soigneusement si les animaux représentés sont
indigènes, exotiques, monstrueux ou fantastiques. Dans les deux
premiers cas, on devra citer les espèces toutes les fois qu'elles
pourront être reconnues avec quelque certitude. Dans le troisième,
on devra également signaler celles qui seront entrées dans la com-
position des monstres, lorsqu'elles seront suffisamment caractéri-
sées. Les animaux exotiques sont ordinairement empruntés à l'O-
rient, et il est rare que les animaux fantastiques ne proviennent
pas aussi de quelque tradition mythologique, superstitieuse ou
fabuleuse de l'Orient.
Quelquefois la corbeille ou même le chapiteau entier sont i-em-
placés par une figure d'homme ou d'animal, supportant le tailloir,
l'archivolte ou l'imposte.
Fig. 72.
Les objets appartenant au règne végétal qui figurent le plus
souvent sur les chapiteaux, sont les feuilles, les fleurs et les fruits.
Les premières feuilles qu'on y rencontre sont la feuille d'eau imi-
tée de l'antique ;
^
Fi;/. 73.
Fùj. -*.
puis les palmettes, Iîj feuille bordée de perles, et d'autres types ap-
partenant soit à la flore, soit à la décoration orientale.
Saint-Denis.
Fig. 75.
C'est au XIII»" siècle que commence à s'y introduire l'imitation
des feuilles indigènes. Les premières en date sont souvent digitees,
palmées ou ternées ; on reconnaît celles de lierre (Fij. 76), de vigne
Fig. 76.
299
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS
Notre-Dame-de-Parit.
300
Fig. 77.
vierge [Fig. 7 7), de vigne [Fig. 78), de quintefeuille [Fig. 79), de né-
iiupliar, de bouton d'or [ranunculus acris], de chêne {Fig. 80), de
Fig. 78.
Sainte-Chapelle.
Sainte-ChaprlU.
Fig. 79.
Fig. 80.
fraisier, de roseaux ; puis les formes incisées, iaciniées, lyrées, run-
cinées, lobées, sinuées, frisées, pinnatifidcs; la mauve frisée, le chou
Cluny.
F,g 81.
[Fig. 81), le chardon, le houx, la chicorée. Ici encore on devra si-
gnaler toutes les espèces que l'on pourra distinguer avec quelque
eerlitude, et toutes les formes que la nomenclature de la botanique
permettra d'indiquer avec précision. Les observateurs étrangers à
l'étude de l'histoire naturelle pourront consulter à ce sujet quel-
([w médecin ou quelque pharmacien du lieu.
Un chapiteau très-gracieux, qui se rencontre souvent dans le
^idi de la France, consiste en une longue feuille repliée à plu-
sieurs reprises en boule sur elle-même.
Parmi les fleurs, nous citerons la rose, employée avec prédilec-
tion dans les églises placées sous l'invocation de la Vierge ;
fig. 82.
Notre-Dame-âe-PaTi$.
F'U-
parmi les fruits, les raisins et la pomme de pin ; parmi les objet.s
empruntés à la toilette, les perles et les godrons.
Le chapiteau de petite dimension conserve ordinairement ses
quatre cornes très-visibles jusqu'à la fin du XIII* siècle; il devient
Fig. 8t.
au XIV* infuiidibuliforme (en entonnoir), orné de deux rangs de
feuilles, dont l'inférieur se détache quelquefois au point de le faire
paraître double ; nu XV^', il raccourcit de plus en plus jus(iu'a ce
qu'il s'efface complètement, et puis soit remplacé au XVI<- par le
retour aux types classiques.
La colonne et le chapiteau de grande dimension ne suivent pas
exactement les mêmes phases. Après s'être montrés au XI* siècle
avec une corbeille chargée de quelques fleurons simples et d'une
exécution pesante, ils présentent au XII*, sinon une grande pureté
de formes et de proportions, au moins fort souvent un goût exquis
dans le choix et l'exécution de l'ornementation de la corbeille.
Dès cette époque on les trouve souvent employés dans une portion
de l'église pour faire contraste avec celle qui porte sur des piliers
composés. Au Xlll* siècle il y a déjà un déclin sensible dans la dé-
coration de In corbeille, le plus souvent cylindrique, et hérissée de ces
développements végétaux en crosse auxquels on a abusivement
donné jusqu'ici le nom de crochet.
Saint-Denis
Fig 85.
301
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DKS TRAVAUX PUBLICS.
302
Au XIV"", elle raccourcit et présente deux étages de feuilles fri-
sées sous un tailloir qui a passé de la forme carrée à l'octogone.
Au XV«, ce tailloir s'arrondit sur une corbeille de plus en plus ché-
tive et méconnaissable, jusqu'à ce que l'une et l'autre finissent par
disparaître entièrement.
Le tailloir ne doit pas être examiné avec moins de soin que la
corbeille. A ce que nous venons de dire des diverses formes succes-
sivement imprimées à son contour, nous devons ajouter qu'avant
l'époque où il affecte la forme carrée, ce contour se compose de
(juatre faces concaves, soit que la concavité résulte d'une courbe
DU de lignes di'oites brisées.
Fig. 86.
Il- sera indispensable de tenir compte de sa proportion, du profil
vertical ou en retraite de sa tranche, des diverses pièces dont il est
quelquefois formé, des inscriptions qu'il peut porter, et enfin de
son ornementation, souvent assez compliquée.
Dans les combinaisons que les colonnes présentent deux à deux,
elles peuvent être doublées (l'une derrière l'autre), accouplées
(placées de front) ou en retraite (diagonalement l'une par rapport à
l'autre).
J
'^' - fev
Figr. 87.
Quelquefois ces groupes de colonnes supportent en commun un
véritable entablement.
L Amortissement. L'amortissement peut être rectiligne ou cur-
viligne.
L'amortissement rectiligne peut être en mitre [Fig. 88 et 89) ou
en encorbellement (/^«j. 90, 91).
Fig. 88.
Fig. 89.
Sainte-Marie de Toscanella.
Fig. 90.
Fig. 91.
L'amortissement curviligne est, comme nous l'avons dit, l'ar-
cade.
IL Arcade. L'arcade peut être simple ou composée. Dans ce
dernier cas, elle est ordinairement trilobée (formée de trois
lobes ou divisions distinctes); elle peut encore être complète ou
incomplète, c'est-à-dire dépourvue de tout ou partie de l'un de ses
côtés. L'arcade incomplète se rencontre surtout dans les collaté-
raux et les arcs-boutants ; elle prend le nom d'arc rampant.
^
Fig. 92.
L'arcade romane est celle qui est engendrée par un seul arc de
cercle; l'arcade gothique résulte de deux arcs au moins, formant
un angle à leur sommet.
On doit distinguer quatre espèces d'arcades simples appartenant
à l'architecture romane, savoir : 1° l'arcade romane surbaissée,
formée d'un arc moindre que le demi-cercle ;
Sainte-Marie de Toscanella.
Fig. 93.
2° l'arcade semi-circulaire ou à plein cintre, dont le nom in-
dique suffisamment la forme, et qui est le type habituel dans lar-
chitecture qu'elle caractérise ;
. Fig. 9«.
3° l'arcade romane en fer à cheval, formée d'un arc dont la cour-
bure se prolonge au delà du demi-cercle ;
•*
303
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS
Saint-Germain-des-Prés.
304
Fi g. 95.
Fi g. 9G.
4° l'arcade romane surhaussée , formée d'un arc semi-circulaire ,
dont les c6tés se prolongent parallèlement au-dessous de son
centre ;
Fiy. 97.
Fig. 98
Fig. 99.
et enfin, une seule espèce d'arcade composée, savoir l'arcade trilo-
bée romane.
Fig. 100.
Quelquefois les deux premières de ces arcades , et la troisième ,
qui est d'origine byzantine, sont employées concurremment dès
le XI" siècle ; la quatrième appartient plus particulièrement au XII^,
et se rencontre surtout dans les chevets et autres portions de l'é-
glise où les supports sont accidentellement rapprochés ; la cin-
quième est aussi ancienne que les trois premières.
L'arcade gothique simple peut présenter jusqu'à sept formes
différentes, dont les cinq premières existent dès le XII' siècle, et
les deux dernières au XV' seulement.
La première de toutes en date offre ce qu'on peut appeler un
plein-cintre brisé : c'est l'arcade gothi<|ue évasée, dont les arcs ont
leurs centres placés en dedans de son contour, et quelquefois si
près l'un de l'autre, qu'il faut l'examiner avec beaucoup d'atten-
tion pour apercevoir la brisure presque insensible qui la distingue
du plein-crntre roman.
/
--..^C.
F'g. 101
F-g tO-2.
Immédiatement après on trouve l'arcade gothique aiguë, dont
les arcs ont leurs centres en dehors de son contour;
Fig. 103
Fig. 10t.
puis l'arcade à tiers-point, dont les centres, placés à ses deux ex-
trémités inférieures, forment un triangle équilatéral avec le point
d'intersection ;
Fig. 105.
Fig. KG
l'arcade lancéolée, foimée de deux arcs, dont la courbure se pro-
longe jusqu'au-dessous de la ligne des centres ;
305
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
906
Fig. 107.
Fig. 108.
et, enfin, l'arcade gothique surhaussée, dont les arcs dépassent ,
comme ceux de la précédente, la ligne des centres, mais en pre-
nant une direction parallèle.
Fig. 109.
Les deux formes particulières au XV« siècle sont : l'arcade go-
thique prolongée, dont les arcs s'étendent aussi au delà de la ligne
des centres, mais en prenant une courbe différente et beaucoup
plus longue; et l'arcade gothique surbaissée, dont les arcs ne des-
cendent pas jusqu'à la ligne des centres.
Fig. 110.
L'arcade trilobée quitte en même temps que l'arcade simple ,
c'est-à-dire au Xlh siècle, la courbe semi-circulaire, pour prendre
la courbe gothique. On la trouve souvent inscrite dans une ar-
cade romane; puis, plus tard, dans une arcade gothique; puis,
enfin, contournée et dénaturée dans les lignes flamboyantes du
XVe siècle.
C'est à une époque postérieure au XII" siècle que s'introduit l'ar-
cade à contre-courbure, formée de deux arcs convexes placés au-
dessous de la ligne des centres;
Fig. m.
puis l'arcade en talon, formée de quatre arcs, dont les deux supé-
rieurs sont à contre-courbure comme les précédents, et les infé-
rieurs à courbure ordinaire ;
^-
Fig. 112.
et l'arcade en doucine, formée pareillement de quatre arcs, mais
dont les supérieurs sont au contraire concaves, à sommet brisé ou
arrondi, et les inférieurs convexes. Ces deux dernières formes n'ont
été employées en grand qu'au XV' siècle.
Ftg. 114.
Il en est de même de l'arcade en anse de panier, formée d'un arc
très-surbaissé, flanqué d'arcs d'un rayon beaucoup plus court à
ses deux extrémités, et qui, dans les constructions supérieures au
sol, ne parut gtière avant cette époque.
y^
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.i.
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--■■' i "\-.......--''
*
Fig. 115.
T. V.
30
307
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Place des Trois-Couronne$ {Paris). , Clocher d'Arnay {Lyon).
30^
Fig. 116.
Il ne faut pas la confondre avec la baie rectangulaire ou carrée à
angles arrondis en arc, qui n'en diffère qu'en ce point, que ses arcs
latéraux sont réunis par un linteau ou plate-bande rectiligne, au
lieu de l'être par un arc surbaissé.
Fig. 117.
Fig. 118.
L'arcade en anse de panier normale offre pour courbe généra-
trice l'ellipse prise dans le sens de son grand diamètre.
A partir de la Renaissance, l'arcade est toujours ou surbaissée,
ou semi-circulaire, ou semi-elliptique.
Les claveaux de l'arcade peuvent présenter, soit une alternance
de couleurs, soit une alternance de saillie ;
Fig. 120.
Fig. 121.
leur coupe, leur combinaison, l'épaisseur et le profil de leurs joints
sont encore dignes d'examen. Dans certaines contrées on les trouve
souvent disposés sur deux rangs engrenés; leur intrados peut être
découpé plus ou moins profondément, soit en dents de scie aiguës
ou mousses ,
Angltlerr».
Fig 122.
soit en lobes arrondis, ou en contre-lobes.
Sainte-Marie de Toseanella.
Fig. 123.
Fig. 121.
Au XVe siècle, cet intrados se prolonge en légères coutre-arcj»-
tures découpées a jour.
Château de Pierrefonds.
Fig. 119.
Fig. 1-25.
309
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
3t»
D'abord simple et plat dans l'arcade gothique comme dans l'ar-
cade romane, il se décore, soit d'un l'essaut, soit d'un tore ou bou-
din ; celui-ci se subdivise ensuite en plusieurs cordons ou nervures
ordinairement placés en retraite, d'abord toujours saillants, puis
l)ientôt poussés en creux en même temps qu'en relief, à mesure que
le support se complique lui-même.
FiiJ. 126.
Fig. 127.
Fig. 128.
Ces nervures prennent une première arête, tantôt mousse et tan-
tôt aiguë, puis plusieurs; enfin , à l'époque de la suppression du
cliapiteau, elles descendent jusqu'à terre ou viennent mourir sur
les tambours du support.
3. Archivolte. L'archivolte est la décoration dont l'arcade est
bordée; elle peut être simple ou multiple, et, dans ce dernier cas,
les archivoltes secondaires dont elle se compose sont placées en
retraite sur un pareil nombre de cintres. Il faudra remarquer si
cette retraite a lieu par ressauts réguliers et égaux, pris à même le
plein de la muraille.
Sainic-Murie de Toscanella.
H<j. lii».
L'archivolte repose toujours sur le tailloir du chapiteau, sur une
imposte, sur un entablement ou sur une console.
L'ornementation de l'archivolte commence, dans le Nord, parle
tore simple a , tordu b, ondule c, guivré d, chevronné e.
Fig. 132.
contre-chevronné f ou rompu o, les méandres h, les fleurons de-
f <f. 13».
Fig. 133.
tachés I, les pointes de diamant i, les têtes de clou k, les ro-
Fig. 137.
Fig. 138.
settes , les becs d'oiseaux , les masques et autres objets toujours
311
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
312
Fig. 1*1. fig. 1*2.
en relief, dont il est plus facile de donner l'idée, au moyen d'un
croquis, que de les assujettir à une classification complète et
méthodique. Au XIP siècle, arrivent les enroulements a, les en-
trelacs B,
Aix (Provence). Aix (Provenre).
les rinceaux, les dessins courants, les feuillages, que le XIII"
porte à toute leur perfection ; c'est lui qui commence à chercher
les modèles de ces derniers dans la flore indigène, aussi bien qu'à
border l'archivolte de trèfles et quatre-feuilles en creux, et a orner
son contour extérieur de crosses et autres expansions végétales.
Au XIV°, l'archivolte participe de la sécheresse et de l'uniformité
de l'ornementation générale aussi bien que de sa nature purement
indigène. Au XV' siècle, toutes les formes végétales riches et com-
pliquées que nous avons indiquées ci-dessus, à l'article du chapi-
teau, comme caractérisant cette époque, appartiennent encore da-
vantage à l'arcade, et viennent se développer par groupes ou isolé-
ment dans sa masse, dans les épanouissements latéraux dont elle
est bordée ,
Saint-Denis.
Saint-Gel vais
{Paris).
Clermoiit
[dessin non exécuté).
Fig. 145.
Fig. 146.
Fig. 147.
dans le fleuron qui la couronne, et, enfin, dans les pignons plus
ou moins aigus et flamboyants qui la circonscrivent, jusqu'à ce
que la Renaissance vienne proscrire tout ce luxe de végétation
pour y substituer les moulures empruntées à l'architecture an-
tique.
D. On n'observe de véritable entablement, au Moyen-Age, que
dans ces monuments du Midi de la France dont les constructeurs
n'ont jamais entièrement perdu le souvenir des types classiques ;
encore la mauvaise proportion des profils et l'oubli de quelque
partie importante trahissent-ils toujours le peu de savoir et d'habi-
leté de l'imitateur.
Cathédralt d'Avignon.
Fig. 148.
Nous ne pensons pas que les saillies correspondantes du sommet
de la muraille, dans les édifices romans et gothiques, puissent
être sans inconvénient réunies sous le même nom, et nous préfé-
rons les désigner sous celui de couronnement. Le plus ancien de
ces couronnements consiste ordinairement en une corniche plate
ou arrondie, souvent même richement décorée, supportée par des
modillons d'une forme particulière, représentant l'extrémité sail-
lante des solives du plafond de la basilique primitive.
Sainte-Marie de Toeeanella.
iAiXtJLUJLtJUUkJL J t
Fig. 119.
On a donné le nom de corheaujc à ces supports souvent carrés
ou rectangulaires, et se terminant par une partie ornée qui offre
tantôt des têtes ou des figures complètes d'hommes ou d'animaux,
tantôt la représentation des objets les plus divers et les plus bi-
zarres, quelquefois même les plus inconvenants. Ordinairement
ces corbeaux, en s'éloignant de leur type parallélipipède primitif,
s' évident à leur partie inférieure par une échancrure plus ou moins
caractérisée, plus ou moins heureusement motivée, de manière a
se rapprocher plus complètement de la forme du modillon ou de
celle de la console.
Fig. 150.
313
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
31'»
Quelquefois, et surtout dans les églises de la Bourgogne et de la
Champagne, on remarque qu'ils sont amincis en dépouille vers
leur extrémité.
L'ornementation des corbeaux, souvent très-variée, devra être
décrite avec soin aussi bien que celle de la corniclie; cette der-
nière perd souvent sa direction purement horizontale pour se dé-
couper en arcatures d'abord rectangulaires ou semi-circulaires ,
puis bientôt pointues ou trilobées, d'abord sans complication, puis
bientôt avec contre-arcatures et contre-corbeaux ; tantôt tout ce
système de couronnement repose sur de légers pieds-droits, pi-
lastres ou ressauts; tantôt ces supports alternent avec des cor-
beaux.
liords du Rliin.
Ratitbonne.
Ftg. 151.
Fig. 152
Quand les corbeaux supporteront le couronnement d'un pignon
ou d'un fronton, il faudra examiner s'ils suivent l'inclinaison du
rampant ou s'ils sont perpendiculaires à l'horizon.
Le plus souvent chaque arcade est munie d'un corbeau; quel-
quefois, enfin, les arcades pourvues de corbeaux alternent avec
d'autres qui en sont dépourvues. De même qu'on trouve ainsi des
arcades sans corbeaux, on peut également rencontrer, soit plu-
sieurs rangs superposés de corbeaux et demodillons, soit des cor-
beaux sans arcades et même sans couronnement, qu'il faut dis-
tinguer de ces harpes ou pierres d'attente destinées à former
liaison avec une continuation postérieure de la muraille, aussi
bien que d'autres pierres saillantes engagées dans la maçonnerie ,
et de la destination desquelles il est quelquefois fort difficile de
rendre compte.
Au-dessous du couronnement règne, dans certains édifices, un
ornement horizontal tenant lieu d'architrave; ailleurs des briqnes,
des incrustations, des inscriptions, et, au XIIP siècle, des trèfles ou
quatre-feuilles en creux
yormandie.
53 S3
Fig. 153
annonçant une intention de frise. Enfin , à ces divers couronne-
ments succèdent, au XIV" siècle, un bandeau semé de feuilles in-
digènes ;
I^ Ménil-Aubry
tiy. lui.
au XV*, la guirlande de l'époque ;
Le Ulénit-A ubnj .
liy. 155.
au XVI', les imitations plus ou moins pures, plus ou moins heu-
reuses de l'entablement antique.
Tombeau de Brezé (Rouen).
T^
Fig. lâfi.
Il existe peu de corbeaux dans les couronnements de l'Est et du
Midi de la France; le plus souvent ils y sont remplacés par de
petits modillons supportant de légères arcatures de très-peu de
relief; ce couronnement suit la ligne du toit, même le loug des
pignons; il doit son origine à l'imitation d'arcatures de briques
sans saillies , surmontées d'un massif d'autres briques disposées
en opus spicatum ou arête de hareng, qui forment le sommet
de la muraille dans quelques constructions romaines des bords du
Rhin.
Bords du Rhin.
Bords du Rhin
Fig. 157.
(La tuiu au prochain numéro.
315
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS,
3te
DE L'HUMIDITÉ DANS LES CONSTRUCTIONS
ET DES MOYENS DE LA PRÉVEMK ET d'y REMÉDIER {{)
SUITE. ( Voyez col. 200 de co vr.lunie.)
Imperfection des moyem employée pour combattre les effet» de
l'humiditc.
Oii s'est beaucoup plus appliqué jusqu'à présent à eoinballre les ef-
feis (le l'Iiiiiiiidllc ul ses iticofivciiicnts il:ins les liàiimenis déjà cou-
su iiiis, qu'on ne s'est occupé (le les prévenir dans les nouvelles con-
slruclions.
(1) Notre collaborateur, M. H. Jamilard, qui s'est occupé longtemps et tout
pai ticuliéiement des moyens à employer pour combattre ou prévenir rhumiUit(ï
dans les constructions, nous a adressé plusieurs notes et observations sur le ira-
\a\\ de M. Léon Vaudoyer. Nos lecteurs nous sauront gré de les publier ici cl
lie donner ainsi un prix nouveau au mémoire déjà remarquable d'ailleurs ((ue
la Société d'Encouragement a jugé digne d'être couronné. Quelques unes de ces
notes nous sont arrivées trop tard pour qu'elles pussent accompagner la pre-
mière partie parue dans notre dernier numéro ; nous les donnons ci-dessous avec
renvois aux paragraphes auxquels elles se rapportent.
— Cvl. 209, paragraphe 1". u Les façades exposées à l'ouest et au nord, dit
l'auteur, ont à subir une influence funeste de la température, tandis que sur les
autres celte influence s'exerce bien moins sensiblement, et se trouve d'ailleurs
combattue par l'action salutaire du soleil. »
Il est cependant des pierres qui se détériorent plus vite au Midi qu'au Nord,
témoin la galerie du Louvre du côté du Sud, citée par l'auteur de ce mémoire
dans la note suivante, et les collatéraux du Sud de Notre-Dame de Paris, qui
ont été réparés de ce côté et qui étaient en bon étal au Nord. Il esl présuniable
pourtant que l'on a employé la même pierre sur les deux facesà des niveaux cor-
rispondanis; car il est d'usage de constniire en.semblc les deux côtés opposés
d'une même travée de bâiiment. Le moellon de plâtre aussi se détériore vite
an Sud cl dure longienips au Nord.
— Col. 270, paragraphe 1" de la note. L'auteur parle d'une sorle d'arai-
gnée qui se loge dans les trous des pierres et contribue à leur destruction.
Une autre es|iéce d'insectes plus funeste encore, de la famille des abeilles ou
(les guêpes, se creuse un logement dans les veines tendres de certaines pierres
dans les murs exposés au Sud.
Ils agrandissent constamment ces cavités, en arrachant avec leurs pinces et
leurs pattes l'espèce de sable provenant du détritus de la pierre, et finissent par
donner à la surface l'aspect d'un mur vermiculé.
Nous ne serions pas surpris que la façade du Sud de la galerie du Louvre
dût en grande partie ses dégradations à ces insectes, et que ceux-ci ne soient
point étrangers à la décomposition de la face Sud de Notre-Dame.
l'our cornliiilire les ofTcls de l'iiumidité, on a eu généralement re-
cours à des enduils ou à des ciments diis hydrofuget, qu'on a appli-
qués sur les parois intérieures des murs, de manière à substituer, à
l'aide d'nn nouvel enduit sup|>(>sé imperméuble. une siirrace sèclie à
une surface plus ou moins liiiniide.
Sans entreprendre d'analyser la coniposiiion et la qualili; des diffé-
rents ciments employés pour cet usage, ni prétendre apftrécier le degré
d'ellicacilé qu'on a pu leur reconnaître, nous n'Iiésitons pas cependant
à dire que loutt-s les compositions pinson moins savamment combinées
ne sont qu'un remède lr(''.s-iin|iarf:iit el presi|iie nul. en ce qu'il ne dé-
truit pas la ('anse preini(-rc et réelU; dn mal qu'on cberclio :i combattre.
Or, riinmidilé esl un Iléaii ayant une action conliinic qu'on ne peut ar-
rêter, et qui ne peut èlre amoindri ou anéanti que par l'action de l'air.
Nous ne craignons donc pas d'avancer (|iie tous ces prétendus endinls
liydroHiges ne sont que des palliatifs susceptibles de dissimider plus ou
moins longtemps le mal sans jamais l'anéantir: qu'ils ont même souvent
le grave inconvénient de l'augmenter, en diininnanl les cbances d'ab-
sorption, et qu'au lien d'aider au dessccbemcnt dés constructions, ils
contribuent à y maintenir l'hiimidilé, dont les causes premières sub-
sisient toujours et dont les effets désastreux continuent à exercer une
funeste influence. Il faut toutefois faire queUptes rcscrves en ce qui
concerne l'emploi de ces divers ciments, selon leur espèce et leurs
propriétés, dans certains cas particuliers. Ces réserves sont surtout ap-
plicables à l'enduit de M.M. Thrnard cl il'Arcet. qui, dans les données
auxquelles il doit satisfaire, a obtenu un succès incontestable et déjà
sanctionné par une expérience de plusieurs années
t;'csl donc le principe même dn mal qti'd faut considérer, afin de le
neutraliser s'il est possible : car c'est en l'arrêtant dès son origine que
l'on |tarvicndra à en annuler les effets. Les causes de rhnmidité ci de
sa progression étant mainienani connues, il sera pins facile de trouver
les moyens de la prévenir et d(; la combattre : ces moyens doivent tou-
jours avoir pour but d'empêcher l'Iinmidité de pénétrer dans l'inlérieur
— Même note deux paragraphes plus loin :
Le procédé dont parle l'auteur sert à nettoyer la surface de la pierre, en lui
laissant toutes ses taches un peu moins foncées seulement II consiste dans rem-
ploi d'une eau vraisemblablement alcaline ou acidulée. Cette eau ne laisserait-elle
pas dans la surface de la pierre un principe délétère qui pourrait se développer
plus tard? Il serait bon de laisser passer un certain nombre d'années sur les
objets mis en ex|)éricnce, avant d'employer ce système de nettoyage aux monu-
ments plus précieux. (Note dé M. //. J .)
— Col. 271, paragraphe S*. ■• La distance! laquelle atteindra cette humidité
ne saurait être déterminée. »
Cela dépend de la nature plus ou moins hygrométrique des matériaux em-
ployés. Le plltre, par exemple, al)sorl>e l'eau avec une telle rapidité, que
nous avons \\i l'iiumidité s'élever de 1» JO en quelques Jours dans une cloison
légère baignée par une nappe d'eau de O"" 05 de profondeur seulement. Aussi
nous ne saurions trop recommander de proscrire impitoyablement le pliire,
même comme enduit, dans toutes les parties d'un édifice quelconque, à partir de
la plus basse fondation jusqu'à l" 00 au moins au-dessus du sol intérieur. Il
fautfaire l'enduit intérieur en mortier ou ciment, à partir du sol jusqu'à la hau-
teur du stylobate ou de la plinthe en bois, si c'est dans un lieu habité, et ne Ja-
mais faire d'enduit extérieur, ni même de jointoiement en plâtre, au-dessous de
1.1 hauteur d'appui, excepté les cas où l'on aurait appliqué une feuille de plomb
ou une couche de bitume sur l'arasement des murs au niveau du sol. Mais alors
il est indispensable que le plomb ou le bitume traverse l'épaisseur de l'enduit
lui-même en l'établissant sur une légère retraite ménagée exprès dans la base
(lu mur, et excédant l'épaisseur de l'enduit; autrement celui-ci scr» irait de con-
ducteur à l'humidité du sol.
Nous avons remarqué que les cloisons légères en plâtre établies sur coulisses
en bois posées sur le carrelage des rez-de-chaussée étaient moins sujettes à l'hu-
midité que celles qui sont à nu sur le carreau ou sur fondation. Ce préservatif
sera encore plus efficace si l'on enduit de goudron la face inférieure de la
coulisse.
[Notes dtil. II. J.)
317
REVUE DE LAUCHlTECTURIv KT DES TRAVAUX PUBLICS.
318
des murs; car, (lès que les murs en seront pénétrés, il est ù peu près
irnpossiiile de lu détruire [i).
Moyens de prévenir la inconvcnienls île l'humidité lors de l'exéculion
des conslructions.
C'est surtout au moment où l'on entreprend les consiriiclions «lu'il
iniporle de prévenir les inconvénienls de l'Iuiniidilé, car les moyens :'i
employer ne seraient plus applicables après les travaux terminés.
(^(■s moyens variant selon les matériaux avec lesipiels on construit,
nous indiquerons successivement ceux qui sont applicables aux con-
structions en pierre, en moellon, en bri(iue, en pans de bois, et nous
examinerons les dispositions particulières à adopter, quand on voudra
on non l'aire des caves, ou utiliser un étage soulerrain.
L'alteulion devra se porter d'abord sur la manière d'élalilir les fon-
dations, et, à cet égard, nous recommanderons un béton compose de
(1) Il n'pst pas impossible de détruire les inconvénienls de l'Iiuinidilé des
nun's, niC'nie dans nn ancien baiinionl. Le moyen (|ne nous allons proposer n'est
pas tellement coûteux (pi'on ne puisse l'employer dans des maisons de (juidcpic
importance. Nous devons exposer préalablement que nous avons la con\iction
que l'humidité qui su nianifesie dans les nuirs des rez-de-cliansséc n'a pas
d'autre origine que celle du sol d'où elle remonte, sauf cpiekpies cas excep-
tionnels où les nnns sont exposés au contact d'un courant d'ean on de
vapeur.
Ce moyen consiste & ouvrir avec une scie à dents un joint entre deux assises,
le plus près possible du niveau du sol du rez-de-clianssée , mais toujours eu con-
irc-bas. Après avoir prolongé le trait de scie sur une longueur de 1°> 00, plus un
moins, selon que l'état du mur et la prudence pennetti ont de le faire, on glissera
dans le Joint une feuille de plond) goudronnée qui remplira le joint le uneux
|)ossible; on contimiera l'opération sons l'étendue de tous les murs, en ména-
geant toujours, à l'extrémité par laquelle doit se coiuinuer l'opération, un pas-
sage suffisant pour la scie, afin de n'être pas obligé, à cha(|uc station, de refaire
un trou de trépan pour l'introduction de la scie. Comme il restera toujours entre
les rives des deux feuillos de plomb ^oisines un joint par où l'innnidité pourrait
encore .s'introduire lui peu, il serait bon d'y injecter dn goudron minéral chaud
avec une ]>oinp3 foulante à main.
t;e procédé n'est pas purement conjectinal, nous eu avojis lait l'application à
mie cloison légère construite sur fondation en moellon dans un sol très-humide.
L'humidité, (pu s'élevait du sol à une hauteur d'environ 75 cenlimèlres, était
telle que les rideaux d'un lit qui y était adossé s'y pourrissaient. Kous conseil-
lâmes au propriétaire dq faire scier la cloison horizontalement au niveau du sol,
et d'y passer une feuille de plomb; il le fit, et l'humidité n'a ))lus reparu
depuis.
Si l'oiiératiou que nous proposons devait se faire dans un édifice important,
nous conseillerions découler dans le trait de sric dti plomb fondu jusqu'au rouge,
afin que chaque coulée se soudât à la rive de la précédente. Une trijigle de fer
plat introduite sur la rive opposée avant la coulée du plomb et qu'on retirerait
ensuite, ménagerait un passage à l'introduction de lascie poin' la section suivante.
On n-.alerait le plomb de chaque côté quaiul il serait refroidi. Le plomb étant
trop mou. luius voudrions qu'il fût allié d'un peu d'élain. On poin-rait aussi
injecter dans le joint du bitume ciiand an moyen d'une pompe foulante. Nous
voudrions que dans ces deux derniers cas le joint fût préalablement éclianUé, soit
par un courant d'air chaud qu'on y ferait passer au moyeu d'un tirage ou d'une
pression artificiels, soit par un jet de gaz à l'instar dj celui des appareils pour
la soudure autogène.
Nous savons que, pour chasser complètement l'humidité d'un mur salpêtre,
il faudrait en expulser d'abord le salpêtre lui-même. La science ne nous a pas
encore doupé ce moyen; mais nous ne désespérons pas de le voir surgir nu jour
au milieu des nombreuses découvertes de la chimie, qui en produit rarement de
plus utiles.
Une fois qu'on aurait intercepté la communication de la partie salpêtrée avec
le réservoir commun, le sol, au moyen de l'iiUerposition d'une lame imperméable,
on pourrait alors attaquer sérieusement le salpêtre introduit dans le nuu-. Comme
ce sel tend toujours à sortir au dehors du mur eu forme d'effiorescences ou de
cristaux , c'est là que la science pourrait le saisir après qu'on lui aurait coupé
toute communication avec sa source. (/Vote de il. H. J.)
bon mortier de meulière concassée, de ponzzolaiie et de silex (I) Ln
lianleiir de c<; lit de béton sera iiécess.ii rement proportionnée an poids
qu'il devra supporter; celte baiiteiir une fois déterminée, on aura soin
d'araser ce massir avec nn enduit de mortier bydranjiqne; cet enduit
étant bien pris, on cominencera à poser les pierres, pour les joints des-
quelles on emploiera également du mortier liydraulique Quand on sera
ainsi p.'irverni un peu au-dessous du niveau (hi s(d intérieur du rez-dc-
cliaiissée, on appliquera, sur le lit supérieur A, Pig. 1 (PI. 2), de la
dernière assise et dans toute releiidiie du mur, urie feuille de plomb
irès-mince (2); on bien, après avoir préalablemenl faitsécher cette assis*-,
on étendra sur sa surface horizontale un enduit bitumineux aussi mince
(|ue possible, pourvu (|u'il pénètre dans In pierie cl qu'il en bouche tous
les pores (3). Cette oper:jtion teruMnée,on conlinnera la pose des assises,
mais eu ayant soin de choisir des pierres calcaires de Iwnne i|iialilc;
car, quoique toutes les pierres soient plus ou moins hygrométiiqucs, il
faudia toujours employer cellei qui le seront le moins, ou plutôt eii-
(1) Consulter, pour la composition des bétons, les ouvrages de M. ViciT, et
choisir les bétons dont les qualités particulières ont été reconnues par l'expé-
'■'«"<=«• (A'ote de fauteur.)
(2) Voir les coL 162, vol. 1", 481, vol. II, et 23, vol. III de cette Revue, i
propos de l'emploi du bitume, comme moyco d'empêcbcr l'humidité de mouler
dans les murs. Nous pensons que le bitume, dont l'emploi peut varier de beau-
coup de façons, est généralement préférable an plomb, qui se déchire au moin-
dre tassement et livic passage à l'humidité. [.\ule du directeur.)
(3) Il est à craindre qu'une feuille de plomb très-mince ne soit bientôt détruite
par l'action du principe caustique de la chaux (et c'est ce qui est arrivé à un
de nos confrères), ou qu'elle ne se trouve percée à jour sou» la pression du mur
par les moindres aspérités des lits de la pierre. 11 faut que celle feuille ail au
moin.-i deux unllimètres d'épai-sseur, cl, connue nous l'aions dit dans notre pre-
mière note, nous voudrions qu'on doiuiât au plomb de la fermeté par un alliage
d'étain, et que les surlaces fussent goudronnées.
On reproche au plomb interposé entre deux assises l'iiiconvéuienl de se lami-
ner sous une forte charge, et l'on a attribué directement ce phénomène à la
mollesse du métal. Nous pensons qu'on doil l'imputer principalement à une
autre cause.
La résistance du ploud) à l'écrasement est, d'après Navicr {Bésisla-ice des
matériaux), de ICO kilos par centimètre carré, ou 1 000 000 de kilos par mètre
carré. Nous avons calculé qu'un mur plein eu roche, de 0» 30 d'épaisseur cl de
20'" 00 de hauteur, chargé de six planchers plafonnés et carrelés, cl d'un comble,
exerçait sur sa base, et par cljatpie mètre linéaire de façade (é<|uivalcnl à O-SO
carré) une pression de 30 040 kilos, ce qui équivaut  6 kilos par centimètre carré;
or, 6 : 100 :: 1 : 16. 666; le plomb aura donc une résistance près de «lix-sept
fois supérieure à la pression d'un pareil mur, cl en supposant ce mur porté par
des supports isolés, tels que des piles ou des jambes étrièrcs dont la section liori-
zontale ne serait que de 1/5 de la totalité, le plomb aurait encore une résistance
plus que triple, quoique la charge fût quintuple. Enfin , une feuille de plomb
pourrait porter, sans se laminer, un mur en pierre de Uillc dure de 400 mètres
de haut. Nous avons peu de clochers qui dépassent le quart de cette hauteur.
On ne peut donc, tout en reconnaissant l'ciret de la continuité de la pression
pendant un long espace de temps.admeltre que le laminage observé soit le ré-
sultai de celte pres.sion.
On doil, selon nous, attribuer cet inconvénient à la dilaUtion. Le plomb est
le plus dilatable des métaux solides, et il est si mou, qu'une fois dilaté par la
chaleur, il éprouve peu de retraite quand la température baisse. Pour peu qu'il
soit gêné dans son mouvement de contraction, il reste pre.sque au point ou l'a
porté la dilatation. C'est à celte propriété qu'on doit les plis ((ni se font si fré-
quemment aux chéiieaux en plomb exposés au soleil. Or, la lame de plomb pri-
sonnière entre deux assises de pierre ne peut se dilater verticalement à cause de
la charge qui la prcs.se et de la mollesse du métal (car il faut distinguer ici la
force d'inertie par laquelle le plomb résiste à la pression, d'avec la force vite
qu'il lui faudrait pour soulever, par le simple effet de la dilaution, le poids qui
l'accable). Sou expansion ne peut donc se faire que dans le sens horizouul; les
riviis de la feuille de plomb désafllcurcnt les parements du mur, et une partie
de la masse se refoule sur elle-même, ce qui nous est démontré par le
mat âge.
Ce désaflleurement se fait nécessairement aux dépens de l'épaisseur de la lame.
3J9
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
320
(Oie, pour celle pariie inférieure des hàiinienis exposée aux iiilluences
aliiiosplioriqiies, celles qui sont le moins snscepiibles de se décompo-
ser, snrionl si elles ne soni garanties par anciin moyen particulier. Il
csl à remarquer que la manière doni se coniporieiil les pierres dépend,
pour corlaincs d'enlre elles, des conditions dans lesquelles elles se
tioiivenl employées: ainsi, par exemple, telle pierre qui se conservera
parfaiicnicnl, placée .i une certaine lianleur au-dessus du sol, sera au
contraire liès-pnMDplenieiil délriiiie si elle en esl rapprochée (I). La
pierre de rile-Adani, diie de l'Abbaye-du-Val, celle de Sainl-Leu, elc,
sont dans te cas. I.a pierre de Cliérence, qui csl Irès-dnre cl peul être
soumise à une forte pression, ne se décompose jamais; mais elle est
cxlrêmemenl poreuse, cl laisse tamiser l'eau comine un filtre. Les mê-
mes observations s'appliquent aux mortiers, dont les uns sont excel-
lents quand ils sont maintenus dans l'iinmidilé, lainlis qu'ils seraient
très-mauvais exposés à l'air ou à la chaleur.
L'interposition d'une lame de plomb on dune substance bitumineuse
qui a déji) été employée avec succès a pour but d'arrêter riiumidilé que
la partie inférieure du mur pourra recevoir du sol ; h la vérité, le lit de
béton, que nous avons recommandé comme base du mur, laissera dif-
licilemcnl pénéircr riiumidilé qui pourrait s'y introduire par celle voie;
mais il importe d'arréler celle à laquelle le mur esl exposé par ses deux
parois. Les mêmes précautions devront être prises pour les murs on
pans de bois de refend, surlonl s'il n'y a pas de caves. Quant aux murs
délace, ils en réclament encore d'aniros pour bsj:araniir des atteintes
de rimnddilé atmosphérique dont ils auiont loujoiirs plus ou moins à
sowllVir, siflon leur exposition. La feuille de plomb, qui esl efficace pour
condialue cl anèlir l'Immidilé provenant du s(d, ne peut neutraliser
les effels de l'humidité de ratmos|)bère : en elTct, si l'on place celle
lenille au niveau du sol extérieur, toute la partie inférieure du mur,
au-dessus de ce niveau, restera exposée à riiumidilé, et cette humiilité
gagnera l'inlérieur. Si au contraire on met la feuille de plomb au-des-
sus du sol extérieur, et qu'on élève d'auiaiil le niveau du sol intérieur,
la partie iiiféiiture du mur restera exposée au double incoiivénieiit de
l'humidité provenant du sol et de celle de l'aimosplière, par conséquent
à toutes les chances de deslruclion que nous avons signalées. Il reste
donc un point essentiel à déterminer, savoir, de préserver le pied des
murs de face des effcUsde l'humidité de l'atmosphère, à quelque niveau
que soit établi l'obstacle destiné à arrêter rhiimidiié du sol.
On peul indiipier, comine un excelleni préservatif contre l'hiimiilité
atmosphérique, un revêtemenl de dalles de pierre appliqué dans le lus
des murs de face; ces dalles, en pierre calcaire de bonne qualité, au-
ront au moins un mètre de hauteur, et plus s'il esl possible; elles de-
vront être posées pierre à pierre : et il esl indispensable de ménager un
petit intervalle pour la circulation de l'air enire les dalles de revèie-
ment et le paremonl du mur dans lequel elles seront agrafées. Comine
surcroît de précaution, la face intérieure des dalles serait imprégnée
Quand la température baisse, la relraiie ne peul se faire que dans le sens verlical,
d'après les raisons données plus haut, et toujours aux dépens de l'épaisseur; et
comme celle alternative de dilatation et de retraite a lieu continuellement et
autant de fois qu'il se fait de grandes variations dans la température atmosphé-
rique, il s'ensuit que l'épaisseur de la lame de plomb, diniinuanl toujours on
se répandant latéralement, finit par être réduite i> zéro, ou à peu près. Voilà
pourquoi nous conseillons de donner de la fermelé au plomb par un alliage d'é-
tain, de zinc ou de régule, combiné toutefois de ni.nniérc à lai.sscr au métal une
certaine élasticité, sans le rendre plus oxydable. Nous préférerions l'étain pur,
mais il csl un peu clier. Le mètre carré de 0" 002 d'épaisseur pèse 15 Jjilos et
loùterail 30 fr., tandis que le plomb de O^OOa pèse 23 kilos et coûte 16 fr. 10
centimes. (.Vo(e de M. IT. J.)
(1) La position plus ou moins élevée d'une pierre au-dessus du sol n'entre
dlreclement pour rien dans ce fait. Il suffit que la pierre gelive soit imprégnée
d'humidité pour se détruire à la gelée si elle y est sensible; mais, quelle que
soit la gélivité d'une pierre, jamais elle ne sera attaquée par la gelée la plus in-
tense si elle est sèche. (lYo/c de M. II. J .)
d'un enduit bitumineux, et leur partie supérieure couverte d'une assise
de pierre dont la taille ou le profil serait tel que l'eau ne pût y sé-
journer. Il esl évident qu'avec ces précautions, ni la pluie baltaiii con-
tre Je mur, ni celle qui rejaillit sur le sol. ni l'eau qui descend de I»
partie supérieure, ne pourront pénétrer le mur proprement dit, et que,
si les dalles de revêtement se trouvent momentanémeiil humides, elles
sécheront irès-promplemenl et ne communiqueront point leur humidité
passagère au corps du mur dont elles sont isolées (1). On obtiendra,
en outre, par ce système, l'avantage d'éviter, dans la partie Inférieure
des bâtiments, les joints horizontaux, ceux dans lesquels un emploie du
mortier, eiqiiisonl les plus sujelsàsedélériorer(2). (Voyez F/j.l, PL 18.)
Lorsqu'aux précautions que nous venons de recommander on aura
ajouté soit un revers de pavé bien fait, sur ciment, soit, ce qui esl pré-
férable, un enduit d'asphalte de A'^fÀi de large, avec une pente suf-
fisante, tout le long du pied du bâtiment, on aura complété les moyens
les plus simples et les plus indispensables pour prévenir les inconvé-
nients de riiumidilé qui peul s'introduire par les murs dans l'inlérieur
des bàiimenls. Mais le système de revêtement, qui esl d'une exécution
facile lorsque les murs de face sont en ligne droite et sans saillies no-
tables, rencontrerait de grandes difliciillés pour des façades d'édifices
dont le style d'architecture motiverait un grand nombre d'à varil-corps,
d'arrière-corps, de parties s;iillanles, etc., comme on le remarque dans
rintérieiir de la cour du Louvre. Dans ce cas, ce système devra être
modifié, et même quelquefois abandonné; il faudra alors élever sensi-
blement le niveau du sol intérieur au-dessus du sol extérieur: et, pour
suppléer aux bons effets du revêtement, ou choisira d'excellents maté-
riaux; il sera nécessaire d'apporter le plus grand soin dans la construc-
tion, el de donner aux niurs une plus forte épaisseur (5). Un moyen à
(1) Ce système de dallage est très-souvent pratiqué uniquement dans ce der-
nier but; nous désirons qu'il puisse £lre exécuté de manière! obtenir le double
résultat que nous venons d'indiquer. Pour cela, il suffirait d'éviter, ainsi qu'on
a cuutRnie de le faire, de couler en plâtre, ou même en mortier, le vide qui
reste entre les dalles et le mur; car la circulation de l'air entre les parties ex-
posées à l'humidité et colles qu'on veut préserver sera toujours le meilleur
moyen d'arriver au résultat que nous proposons. La pierre de Cblteau-Landon,
el, à sou défaut, le liais, doit être préféré pour cet usage. Le soubassement dés
faces latérales de l'église de Notrc-Dame-de-Lorettc a été revêtu de dalles de
Châieau-Landon, qui, depuis vingt ans, se sont maintenues dans un état de con-
servation parfaite. (fiolt dé l'auteur.)
(2) Si les dalles de revêtement sont enduites de bitume à l'inlérieur, il est
inutile de les isoler du corps du mur, car cette disposition est très-\icieuse,
attendu que des dalles aussi minces ne résisteraient pas à un faible choc. Les
dalles de Notre-Daine-de-Lorette, citées dans la note précédente, ont 15 à 20
cenliinèlres d'épaisseur et ne sont point isolées, si nous a^ons bonne mémoire.
Ellesont vraiscinblalilemenlété posées pluscn vue derapparcll que comme moyen
hydrofugo Au surplus, si ces dalles ont la propriété de repousser l'humidité,
nous ne les accepterons pas comme un exemple de bonne coiistruciion. Une
partie de l'épaisseur du mur est portée par elles, cl pour peu que les deux
ou trois assises de pierre ordinaire qui forment le surplus aient des joints un peu
lâches qui se contractent sous la charge, le revêtement peut courir quelques
risques; mieux eût valu faire l'épaisseur entière en Château-Landon.
Nous ne partageons pas l'opinion de notre confrère sur les revêlements en
dalles minces qui se posent habituellement au bas des murs en moellons, autant
dans le but d'empêcher la destruction de l'enduit par l'action de l'huniidité ou
du choc des corps étrangers, que pour empêcher l'humidilé extérieure de péné-
trer dans l'inlérieur. Ce moyeu, d'après la manière vicieuse de poser ces dalles,
produit souvent l'ofTet contraire; car comme elles sont trop minces en général,
et que c'est à peine si l'enduit recouvre une petite partie de leur épaisseur, il
s'ensuit que les eaux pluviales qui coulent du haut du mur s'introduisent der-
rière la dalle. Nous avons vu plus d'un exemple de ce fait.
(Mole de M. II. J.)
(3] C'est surtout dans de semblables conditions qu'il serait i désirer qu'on
pût construire à pierre sèche, du moins dans une certaine hauteur.
Pour se convaincre de l'inlluence qu'exercent, sur la durée des édifices, le
m
REVUE DE LARCHn KCTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
l'aide duquel on peut obtenir un très-bon résulial, consiste à bien chaus-
ser la constriiciion, c'est-à-dire à élever les iriurs de face sur une sorte
de soubassement qui, par sa hauteur et son cnipaioniciit, puisse con-
tribuer à éloigner du pied du mur les chances d'humidité. Pour rendre
notre idée plus sensible, nous citerons comme exemples la façade de la
Monnaie, sur le quai, les faces latérales de l'édllice du quai d'Orsay et
la façade du grand corps de bâtiment de l'école des Beaux-Arts; la
plupart des palais d'Italie sont élevés sur des soubassements de ce
genre. Il serait à désirer que celte espèce de banquette fût creuse Inté-
rieurement, afin de pouvoir y établir une circulation d'air : dans tous
les cas, les pierres (|ui la recouvriront devront éire bien choisies et
avoir une penle suffisante pour faciliter l'écoulement des eaux (1).
(Voyez \aFig. 2.)
choix (les inalériaux et le soin apporta dans la manière de conslruire, nous cile-
roiis l'aiicleu Louvre, qui date de trois cents ans, et dont les soubassements,
bien qu'on n'ait pris aucune précanlion parliculière, sont encore dans un élat
• de conservation très-salisfaisant. Il paraît qu'autrefois on se préoccupait da-
vantage de la bonne qualité des matériaux : nous rappellerons à cette occasion
que lorsque, sous Louis XIV, il fut question d'achever la construction du
Louvre, Colbcrt chargea une commission d'architectes de visiter les monuments
de Paris et des environs, afin de reconnaître la qualité des pierres dont ils
étaient bâtis, le plus ou le moins d'altération (ju'elles avaient éprouvé, et les
carrières dont elles avaient été tiréos. Le rapport de cette commission existe en
manuscrit à la Bibliothèque Royale (*). Un travail analogue a été ordonné et
exécuté dernièrement en Angleterre, pour les pierresqni doivent être employées
dans la construction du nouvel édifice destiné au Parlement; ce travail a été
imprimé. {\ote de l'auteur.)
(1) Selon nous, cette banquette pleine, telle qu'elle est disposée dans la Fig. 2,
doit produire l'effet opposé à celui qu'on lui attribue; nous le démontrerons
plus bas.
Notre confrère attribue l'origine de l'humidité des rez-de-chaussée ù trois
causes : 1' à l'ascension de l'eau des terres dans le corps des murs et dans le
sol même des logements par la capillarité des matériaux; 2" au rejaillissement
des eaux pluviales tombées sur le sol au pied des murs, et a» à l'humidité de l'air
ambiant.
Nous pensons qu'il faut d'abord écarter la troisième cause, car si l'air am-
biant peut communiquer l'humidité dont il est quelquefois saturé aux murs des
rez-de-chaussée., il la coinmuniqiiornit tout aussi bien aux murs des étages su-
périeurs, Â nu degré décroissant peut-être à mesure qu'on s'éloigne du .sol des
émanations duquel il tire son liuniidité ; encore faudrnil-il supposer aux maté-
riaux des propriétés absorbantes, telles que celle des murs salpêtres. L'air
ambiant n'est jamais assez constamment himiide pour qu'une phase sèche ne
vienne enlever aux murs le peu d'humidité que leur aurait donnée une phase
aqueuse. Ce n'est guère que dans les cours étroites et profondes où l'air est
stagnant, dans les caves et les souterrains, que l'air salure d'eau peut avoir des
effets sensibles, parceque là les phases humides sont plus nombreuses que les
phases sèches, ou, plutôt, sont constantes.
L'air humide (sauf les cas de présence du salpêtre) contribue plus à l'Iiumi-
dité des murs par son inaction, c'est-à-dire en n'évaporant pas l'humidité du
•sol à mesure qu'elle s'élève dans les murs, que par son action directe , en l'y
introduisant lui-même. Il y contribue encore, eu ce qu'étant spécifiquement
plus léger que l'air sec, il oppose à l'humidité ascendante une pression plus
faible. C'est pour ces deux cau.ses que nous voyons, principalement pendant
l'hiver, l'humidité s'élever à sou maximum de liautenr dans la base des murs,
et baisser progressivement à mesure que l'air de l'été devient plus chaud et plus
sec; l'auteur le dit lui-même, col. 271. L'air humide est donc, d'après ce que
nous venons de dire, un agent négatif j)lutOt que positif.
Quant 'à la banquette à laquelle on suppose la vertu de détourner l'humidité
provenant des éciaboussurcs des eaux pluviales, elle nous semble, d'après
la figure, produire l'effet contraire. Elle fa»orise l'ascension de l'humidité du
sol en présentant une iilus large section horizontale aux molécules d'eau ascen-
dantes, et elle élève plus près du niveau du sol intérieur la zone frappée par
les éclaboussures, et celles-ci mouilleront indubitablement le mur au-dessus do
(•) M. Héricartde Thury en donne un extrait dans sa description des catacombes
lie Paris, p, t58. (Noie de M. H. J.)
Ces précautions, qui entrainent à d'assez fortes dépenses, ne sont ap-
plicables qu'à des consiruciions monumentales, pour la conservation et
la durée desquelles on ne doit rien négliger. Aussi, dans les cas que
nous venons de supposer, il faudra non-seulement conserver la leuilli-
de plomb, mais peut-être même en placer à deux hauteurs différentes,
A et U; de plus, il conviendra d'adopter, pour riiiiérieur des murs du
rez-de-chaussée, un système de revêtement avec isolement, soit en mar-
bre, soit en pierre, soit en menuiserie, selon la destination de celle
partie de rédifice, mais toujours dans le bnl d'éviter l'humidité qui pour-
rait traverser la partie inférieure du mur, laquelle ne se trouve pas ga-
rantie à l'extérieur dune manière complète (I). Derrière ces revèle-
mt-nts, il conviendra aussi de hitumitier les parois du mur (2). (Voyez
la Fig. 2.)
la feuille de plomb. Car, en définitive, l'air qui circule dans le vide de la ban-
quette n'est autre que l'air ambiant, qui, s'il est humide sous la galerie comme
au dehors, ne peut être d'aucune utilité. Mais il est plus humide encore .sous la
banquette, puisqu'il se cliargc en outre de l'humidité qui s'cxbnlc des parois de
cette banquette.
Dans la figure 2 surtout, il vaudrait mieux supprimer complètement la
banquette creuse ou pleine, ainsi que nous l'indiquons dans la Fig. 11. Dans
la Fig. 2, la pluie tombant sur la banquette rejaillit àAO ou 50 rcniimétres sur le
pied du mur, c'est-à-dire évidemment au-dessus de la feuille de plumb/? placée
dans le joint; la moulure elle-même en reçoit beaucoup par sa position saillante,
et la feuille de plomb est impuissante pour la repousser, taudis qu'en suppri-
mant la banquette et laissant la feuille de plomb à la hauteur actuelle, jamais
les éclaboussures ne l'atteindront. Si ces banquettes existent à plusieurs pa-
lais d'Italie, pays peu accessible à l'humidité, n'osKe pas plulOt pour éloigner
les dépôts d'iumiondices du pied des murs, ou dans un but décoratif, ou bleu
pour offrir un siège aux passants, comme à l'arc de triomphe de l'Étoile, que
pour garantir ces murs des eaux pluviales? Ne perdons pas de vue que ce sont
les éclaboussures de la pluie ou de l'égout des toits, rejaillissant sur le sol, qui
mouillent surtout le pied des murs, plutôt que la pluie qui fouette sur leur
surface, et qui peut humecter tout aussi bien le premier étage. Ne perdons
point de vue que trois princijjcs d'humidité agissent simultanément à la base
des murs en temps de pluie : lo l'humidité du !^ol ; 2° la pluie qui tombe obli-
quement sur le socle; 3" les éclaboussures tant de la pluie qui tombe directe-
ment sur le sol que de celle qui toml)e de l'égout du toiu
Nijus ne saurions donc trop recommander, à ce propos, l'usage des cbéoeaux,
et même de simples gouttières, poin- préserver le pied des murs des éciabous-
.surcs des eaux de l'égout, qui agissent infailliblement, quelle que soil la direc-
tion de la pluie, et longtemps après qu'elle a cessé , et tombent avec plus
d'abondance, tandis que la pluie ne tombe directement sur la face des murs que
quand elle est poussée par le vent.
Il importe que le bord du chéneau soit le plus près possible du bord do
l'égout; car toute l'eau qui tonii)e dans la zone comprise entre ces deux ligues
retombe au pied du mur, à moins qu'elle ne soit en contre-pente , ce qui est
fort rare. Nous citerons comme d'excellents exemples les chéneaux établis, par
notre savant confrère M. Hittorff, au Cirque-Olympique et aux pavillons des
Champs-Elysées , ainsi qu'à l'église de Sainl-Vincenl-de-Paul. Nous y ajouterons
les chéneaux que nous avons proposés, d'après notre propre expérience, dans
le quatrième volume de la Iteviie-, VI. 3. (iVote de il. U. J.)
(1) On conçoit que la dépense que nécessiteront des travaux de ce genre est
trop variable pour pouvoir être établie dans cette instruction, qui est faite dans
le but de servir pour tous les cas analogues et imprévus qui peuvent se pré-
senter. (Xote de fauleur )
(2) Nous ne pouvons être de l'avis de l'auteur sur l'isolement du revêtement
en marbre; car cet isolement lui Ôterait toute solidité, à moins de donner une
grande épaisseur aux dalles, ce qui augmenterait considérablement la dépense.
Si l'on bitumine la paroi du mur, il n'y a nul inconvénient à sceller les dalles au
mur au moyen d'un bon ciment (*). (Xott de M. B. J.)
(') N'est-ce pas ici le cas de rappeler, en la proscrivinl, la déplorable habitude de
nos marbriers modernes, qui ne connaissent que le pUtre pour scellemeni, même de-
puis que r.irl des constructions a été doté de si bons ciments?
Los Romains, qui furent, sans contredit , les plus fameux faiseurs de placages en
marbre qui aient jamais existé, ont revêtu de marbre la surface entière d'édifice;
considérables, tels que le Panthéon et le temple de Vénus 1 Home, etc. ; ils se sont
T. V. 2i
323
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
324
Tels soiil, en résumé, les moyens qu'on pourra employer avec quel-
que succès pour prévenir l'huniidlléqui pénèlrc par les murs de face et
les murs de refend, dans les conslruciions en pierre de taille.
En exaniinanl les moyens applicables aux conslruciions en moellon,
nous serons amenés à reciuinaîirc qu'ils devront être les mêmes que
ceux indiqués pour les cas généraux des bàlimenls en pierre. Nous
ferons observer, toutefois, que le manque de liaison qui résulterait de
rinlcrposilion de la feuille de plomb, eu égard à une moindre épaisseur
donnée aux murs, exigerait quelques combinaisons que nous laissons
au j{igement des consiructeurs, si mieux ils n'aiment recourir à l'em-
ploi du bitume, qu'on peut appliquer de plusieurs manières, soit en in-
terposant, dans la construction, à la hauteur où l'on voudra arrêter
l'Iiuinidité, une ou deux rangées de briques biluminées à l'avance, soit
en coulant le bitume sur place, soil en faisant usage de moellons fac-
tices, composés de morceaux de meulière liés entre eux avec du bi-
tume, et susceptibles d'adbérer suflisaniment avec le mortier.
Si les murs de face, ou au moins leur partie inférieure, sont construits
en pierre meulière, on pourra se dispenser du revêtement de dalles ; car
le paiement d'un mur en meulière et bon mortier hydraulique, bien
rocaille extérieurement, n'aura, pour ainsi dire, rien à redouter de
riiumidité. Lorsqu'on ne pourra disposer que de matériaux de mauvaise
qualité pour la pai lie inférieure des murs, et qu'on n'en trouvera aucun
pour faire le revêtement que nous avons indiqué, il faudra couvrir cette
partie d'un enduit de bon mortier bien lissé; il est inutile d'ajouter
qu'on doit proscrire totalement l'usage du plâtre dans les constructions
qui avoisinenl le sol.
Dans les localités où l'on emploie généralement la brique pour les
constructions, il faudra la choisi)' de bonne qualité pour les murs de
face, et surtout pour les parties voisines du sol. Dans ce cas, le meil-
leur moyeu de garantir les parements extérieurs de l'humidité et de
l'empêcher de pénétrer dans les murs, consisterait à employer des bri-
ques dont la face extérieure serait bituminée, ou, mieux encore, revê-
tue d'cuiail (1). Il est bien entendu que les joints seront toujours faits
(l ) L'application de l'émail sur la terre cuite date de la plus haute antiquité : les
murs de BabyloneeldePersépolis étaient revêtus de briques émaillécs de diverses
couleurs, et, depuis, on en retrouve des exemples dans des monuments de dif-
férentes époques. Nous ne savons pourquoi l'usage des terres éinallléesa été
abandonné; mais II nous semble qu'on a trop négligé les avantages qu'on peut
en retirer. Depuis des siècles, les Orientaux sont dans l'usage de revêtir les
murs intérieurs de leurs habitations de carreaux en faïence, qui ont l'avantage
de leur procurer de la fraîcheur, tout en les préservant de l'humidité. L'Espa-
gne leur a emprunté cet usage; en Hollande, on fait généralement usage des
carreaux du même genre, pour les revêtements Intérieurs des rez-de-chaussée,
sans doute comme préservatif contre l'humidité, qui est très à redouter dans ce
pays. Dès le XV= et surtout au XVI« siècle, on introdui-sit en France l'emploi
des carreaux de faïence pour le carrelage des appartements les plus simples
comme les plus recherchés ; on en voyait encore. Il y a peu de temps, aux châ-
teaux d'Anet et d'Écouen ; il est évident qu'au rez-de-chaussée ce genre de
carrelage devait avoir la propriété d'empêcher l'humidité de se produire a la
surface du sol. On a fait aussi usage de tuiles émaillées pour les couvertures, et
on a même appliqué ce genre de décoration aux façades des mai.sons, comme
bien gardés sans doute d'employer à cet usage le plâtre ou toute autre matière aussi
périssable. Nous avons trouvé dans l'édiflce gallo-romain du Nord de Montmartre,
celte terre classique du plaire, nombre de fragments d'un revêtement en marbre
dont l'épaisseur n'était que de o™ 015 ndllira , et des bandeaux dont l'épaisseur
n'excédait pas Om 018 milliin., et qui, cependant, étaient scellés avec du mortier
de chaux cl ciment. Ce ciment est encore si foriement allaché au marbre qu'on ue
l'en arrache pas facilement; quoique appliqué sur un sciage, le mortier semble
adhérer plus foriement au marbre qu'à lui-même. L'emploi du plâtre esl si com-
mode et la routine si fort enracinée, que si les architectes ne forcent à la longue
ks marbriers à employer d'autres moyens, il est présumable qu'ils ne changeront
pas de méthode. C'est pourtant à l'emploi du plâtre qu'on doit les dégradations qui
auront complètement ruiné, u'ici à peu d'années, les revêtements en marbre des
piédestaux des statues du Uusce des Antiques, notamment de ceux dans lesquels on
a incrusté des bas-reliefs, qui sont dans un état déplorable. (f(ule de U. H. J.)
en bon mortier. Nous pensons aussi que, dans ce genre de construction,
une rangée de briques bituminées peut avantageusement remplacer la
feuille de plomb, selon la différence qui en pourrait résultrr pour la
dépense, eu égard aux pays dans lesquels on construirait, il est certain
qu'on obtiendrait de bons effets du bitume employé dans la consiruclion
en brique, en remplacement du mortier, ainsi que cela se pratiquait
dans lanliquité. On sait, en effet, que les constructions de Babylone
étaient composées de briques unies entre elles par du bitume mêlé de
roseau haché, et nous ne savons pas pourquoi on ne chercherait pas à
faire de nouveau l'application de cet ancien mode de consiruclion. Seu-
lement, dans ce cas, il faudrait que la quantité de bitume étendue entre
chaque rangée de briques, eût la nmindre épaisseur possible, et con-
servât une certaine élasiicilé; car, si le bitume est cassant et sec, il ne
résistera pas à la pression, et il pourra survenir des tassements dans la
contlruction. L'introduction de roseau ou de paille hachée nous parait
devoir remédier à cet inconvcnienl.
A l'aris, où l'on ronslruit souvent en pans de bois, sans prendre au-
cune précaution contre l'humidité, on se contente de poser les pans de
bois au-dessus d'une ou de deux assises de pierre, ou même sur un
soubassement en moellon ou en brique ; la partie inférieure du pan de
bois est composée de pièces horizontales appel<ies lablièret basses, qui,
dans toute leur étendue, se trouvent ainsi en contact avec ce soubas-
sement en maçonnerie ou en pierre, lequel n'est souvent qu'à O" 50 au-
dessus du sol; ces sablières, destinées à recevoir le pied de toutes les
autres pièces du pan de bois, sont par là exposées à une humidité
constante et pourrissent très-promptemenl.
Il importe donc, lorsqu'on construira en pans de bois, de redoubler
de précautions; dans ce cas, la feuille de plomb sera indispensable, et il
conviendra de l'interposer entre l'assise sur laquelle doit reposer le
pan de bois et la sablière basse de ce pan de bois.
Selon la nature des matériaux employés pour lu construction infé-
rieure, on pourrait substituer à la feuille de plomb une préparation hy-
drofuge appliquée avec soin sur la inaronnerie servant de base au pan
de bois. Il conviendra de faire ce soubassement le plus haut possible,
et, pour les pans de bois de face, nous renverronsaux observations que
nous avons faites à l'égard des murs (1).
L'humidité contre laquelle nous venons d'indiquer différents moyens
on le volt encore i Beauvais. Le château de Madrid était célèbre par la beauté
des ornements de faïence dont il était revêtu extérieurement, et qui étaient dus
au célèbre Césa délia Kobbia. Nous pourrions, au sujet des terres émaillées ,
entrer dans de plus grands développements, mais ils seraient étrangers à la ma-
tière que nous traitons : nous nous bornerons i appeler l'attention de la So-
ciété d'encouragement sur une fabrication dont s'est honorée autrefois notre
industrie nationale, et qui semble être aujourd'hui tombée dans un oubli com-
plet. (Mote de Couleur.)
(1) Malgré les résultats que promettent les précautions que nous venons d'in-
diquer, nous conseillerons, pour plus de sûreté, de ne jamais construire en
pans de bois dans la hauteur des rez-dc-chaus.'^ée, ni dans les. façades exposées
au Sud ou à l'Ouest ; car le bois, enveloppé de maçonnerie et privé d'air, est
exposé à pourrir promplement. C'est dans le but d'assurer la conservation du
bois qu'on le couvre d'une couche de peinture^ et souvent on produit l'elTet
contraire. Pour que la peintiu-e conserve le bois, il faut qu'elle ne soil appliquée
que lorsque le bois est complètement sec; sans cela, elle confine à l'Intérieur
l'humidité préexisianle, et cette humidité, ainsi emprisonnée, est un germe
de destruction. Le bois a besoin d'air, et, quand il est parfaitement sec, il peut
être presque impunément exposé aux variations de l'atmosphère. Ainsi, par
exemple, dans nos vieilles villes de France, on voit des façades de maisons en
pans de bois, qui datent de trois cents ans, oit les bois, dépouillés depuis long-
temps de leur ancienne peinture, sont, il est vrai, rongés à leur surface par l'in-
fluence de la pluie et du soleil, mais le cœur eu est sain et conserve sa force.
C'est par une raison analogue que la charpente des combles ne pourrit jamais.
Au marché des Blancs-Manteaux, la charpente, qui avait été peinte, a été pour-
rie au bout de vingt-cinq ans, el vient d'être remplacée par une charpente de
9&
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
préservatifs esl sculemenl celle qui peut pénétrer dans la partie infé-
rieure des bâtiments, par la voie des murs, soit intérieurs, soit exté-
rieurs; il nous reste à nous occuper de celle (|ui s'introduira directe-
ment par le sol, selon qu'il y a des caves ou qu'il n'y en a pas.
Il y aura toujours avantage, pour l'assainissement des bâtiments ha-
bités, à les élever au-dessus de caves, et l'on conçoit que ce système
de construction devra diminuer sensiblement les chances d'humidité et
rendra plus faciles les moyens de la combattre. Dans un bâtiment élevé
sur caves, les murs de face ne seront pins en contact avec le sol que
par leur base et par une de leurs parois, et les murs de refend par leur
base seulement ; de plus, le sol du rez-de-clinussée sera ainsi sur vonte,
au lieu d'être directement établi sur la terre. Cependant les avantages
d'un rez-de-cbaussée élevé sur caves ne sont pas tels qu'on pourrait le
croire, et, quelque bien aérées que soient les caves, leur voûte contient
encore une certaine buniidité qui se produit sur les dallages, les carre-
lages et les planchers, et dont il importe de se garantir.
Dans le sol d'un rez-de-cbaussée sans caves, l'humidité se manifeste
constamment à la surface, si l'on n'y apporte un remède efficace.
Quand ce sol est plancbéié ou parqueté, l'action de l'humidité n'est
point directe, les planchers ou les feuilles de parquet étant posés sur
des lambourdes, qui les isolent cl forment un espace vide entre
le plancher ot le sol ; mais les lambourdes étant en contact avec
le sol, subissent l'action permanente de l'humidité, se trouvent
bientôt pénétrées, et ne tardent pas à pourrir. Il est donc nécessaire,
dans ce cas, de substituer au sol naturel un sol factice et imperméable,
qui permette d'établir le plancher à l'iibri de celte humidité inlérieiire
et ascendante. Le moyen qu'il conviendrait d'adopter serait de couvrir
le sol d'un lit de béton hydraulique deO^lo d'épaisseur au moins, sur
lequel on étendrait une couche d'asphalte de O" 005; sur ce nouveau
sol, ainsi composé, on pourra, en toute sûreté, établir les lambourdes
et les parquets (1).
Ce que nous venons de dire des planchers à établir dans les rez-de-
chaussée sans caves s'applique aux dallages de marbre, de pierre et de
terre cuite, et les moyetis à employer pour les préserver de l'humidité
seront les mêmes que ceux qui viennent d'être indiqués ; seulement, au
lieu d'appliquer l'enduit hydrofiige sur le béton. Il faudrait peut-être
eu recouvrir les dalles mêmes, ainsi que MM. Thénard et d'Arccl l'ont
conseillé. Quant au béton, qui, par économie, pourrait être supprimé
au-dessous des parquets, il est indispensable au-dessous des dallages
fer (*). Nous ne prétendons pas cependant que la peinture ne puisse contribuer
à préserver les bols exposés aux inlluences atniospliéri(|ues, mais seulement il
importe de l'appliquer à propos et de manière à ne renfermer aucune humidité
Intérieurement; ainsi, par exemple, les faces des fenêtres et des portes, expo-
sées à l'extérieur, ont besoin d'être peintes aussitôt qu'on les met en place ,
mais il est iiiulile de peindre leur face intérieure, qui est abritée, et, en laissant
ainsi une face sans peinture, lu sécheresse pourra s'opérer bien plus facilement.
Nous pensons dune que nos ancêtres avaient raison de laisser les pièces des
pans de bois et les solives de leurs planchers accessibles à l'air. L'art d'ailleurs
s'était emparé de ces dispositions et en avait su tirer un excellent parti. On
sait quel charme présentent à l'œil les boiseries en bois naturel, ainsi qu'on
était dans l'usage de les faire anciennement. {Note de l'auleur.)
(IJ Un enduit général en bitume est un excellent moyen, nous dirons même le
meilleur moyen d'assainir les rez-de-chaussée ; mais 11 esl nécessaire qu'il soit
recouvert d'une couche de béton ou du moins d'une aire en mortier sur la-
quelle on scellerait les lambourdes : autrement on courrait risque de voir celles-
ci s'enfoncer dans le bitume pendant lis grandes chaleurs, à cause de la faible
surface de ces supports. Cet enduit géjiéral en bitume recouvrira rigoureuse-
ment la rive de la feuille de plomb passée entre deux assises des murs, comme
on le voit dans la Fiy. 11. {i\ote de M. If. J )
(•) (.'est au gouilronn.igc dont ils furent rei'ouvcrls qu'on doit, «ans nul doute, la
rapide destruction des Imtiaux en bois des sorilles de l'église de Saint-Uerniain-
en-Lajre, qui se sont complétimenl pourris. (ffpU d» M. H. J.)
de pierre ou de marbre, a«n d'éviier les tassements el d'obtenir un ni-
veau parfait (1).
L'expérience a fait reconnaître que le sol des rez-de-chaussée même
élevés sur caves n'est pas entièrement exempt d'humidilé, et voici les
observations que nous avons faites à ce sujet : pour niveler le sol du
rez-de-cbaussée , on est dans l'usage de remblayer le vide qui reste
au dessus de l'extrados des voûtes de caves avec des gravois, des éclats
de pierre, etc., sans mortier, et l'on pose les dallages immédialemerii
sur ces remblais ; on a remarqué que, dans les vestibules, les escaliers,
et, en général, dans les lieux qui ne sont pas bien clos et où peut (lé-
nélrer l'humidité de l'air extérieur, les dallages, ainsi posés, ne restent
jamais dans un état de sécheresse parfaite, et conservent des taches lin-
inides. Cela peut s'expliquer de la manièi-e suivante ' l'humidité qui se
développe et séjourne sur des dalles de pierre, surtout quand une tem-
pérature douce succède à un très-grand froid, pénètre dans l'inlérienr
de ces dalles, les traverse, et s'introduit uu-dessous sans qoe jamais
l'action de l'air puisse parvenir il l'atteindre. Celte humidité, ainsi con-
centrée entre les dallages et les voùies de caves qui elles-mêmes
sont humides, ne peut que s'accroître ; de sorte qne. lors même que la
surface extérieure des dallages est séchée par l'atmosphère, l'humidité
leur parvient de nouveau de la partie inférieure avec laquelle ils sont
en contact. Si ces inconvénients sont moindres dans les parties bien
closes, et à cause de la chaleur qu'on y enlrelienl en hiver, ils s'y ma-
nifestent cependant quelquefois, surtout dans les lieux qui restent in-
habités; et, comme ces inconvénients sont dus à l'humidilé qui existe
dans les voûtes et dans les murs des caves, nous conseillons de poser
sur béton les dallages des rez-de-chaussée, même lors(iu'il y aura des
caves. Dans les lieux les plus exposés à l'humidité de l'atmosphère, on
pourra employer un enduit hydrofuge indépendamment du béton. L'hu-
midité qui s'introduit par les voûtes des caves esl tellement reconnue ,
que nous recommandons de ne pas même élever tme simple cloison
dans un rez-de-chaussée sans prendre les mêmes précautions que pour
les murs qui ont leur fondation dans le sol, c'est-à-dire d'iniei poser,
sons le pied de ces cloisons, soit une feuille de plomb, soit une prépara-
tion hydrofuge (2).
(1) Tous les dallages en pierre des reE-dc-cltaussce de l'école des Beaux-Arts,
celui de la salle du Jugement dernier, sont posés sur béton et se sont maintenus
dans uuétat de sécheresse parfaite, quoiqu'il n'y ait pas de caves.
Pour le dallage de la nouvelle galerie d'agriculture au Conservatoire des arts
et métiers, les précautions ont été encore plus grandes; je l'ai fait établir sur
une aire d'asphalte et de béton superposés. Voici comment on a procédé : le
sol a été d'abord bien nivelé et bien battu, puis on a étendu, sur toute la sur-
face, de la terre a poêle à 3 ou 4 centimètres de hauteur. C'est sur le sol ainsi
préparé qu'a été étal)lie l'aire d'asphalte de 10 a 15 millimètres d'épaisseur, et
sur celte aire le béton de 10 à 12 centimètres, destiné à recevoir le dallage qui a
été posé sur un lit de mortier fin. Le béton, disposé ainsi au-dessus de l'aire
d'asphalte, se prête mieux à la pose des dalles; car, si l'aire d'asphalte était
établie au-dessus du béton, elle ne se marierait pas aussi bien avec le mortier
indispensable pour obtenir, lors de la pose, une certaine élasticité (*).
[Xote de l'nuteur.)
(2) Ce qui donne une si grande humidité au sol des rez-de-cliausséé établis
sur vofites de cave, c'est qu'on a conservé à Paris et aux environs la funeste
habitude de hourdcr ces voûtes en plâtre. On a reconnu la nécessité de faire les
murs en mortier jusqu'au premier étage, el l'on fait les voûtes en pMtrc: an-
ciennement même on les enduisait en plâtre. Ou sait pourtant que cette mj-
lière a beaucoup d'affinité pour l'eau : elle absorbe l'humidité constante de
l'atmosphère des caves; elle s'en sature et la monte, par l'action delà capillarité,
ju-qu'au sol du rez-de-chaussée. Le plâtre se salpêtre à la longue, et ses rfTcLs
n'en sont que plus désastreux. On n'a donc rien de ndcux 1 faire que de le
proscrire des voûtes connue on l'a proscrit des murs. Cela sera un peu noins
connnode à exécuter, mais beaucoup plus salubrr. (.Yo»e de il. II. J.)
(*) Il vaut niit'ux que l'aire d'asphallo soit posée enlic diui bèloiis; ce movra
serait lurtout inappréciable pour les magaslDS i poudre. (.Vo/« de M. tt, J.i
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Un autre moyen dVliiblir les dallages ou les parquets des rez-de-
cbaussée consiste à élever, sur le sol ou sur les voûtes des caves, de
petits murs parallèles et régulièrement espacés, en moellon, en meu-
lière ou en briques. On posera sur ces murs le plancher ou les lam-
bourdes, destinés à porier le parquet, ou même un dallage, si la di-
stance des murs a é.é calculée en conséquence. On pourra, pour plus
d'économie, se contenter de points d'appui isolés. Dans tous les cas, le
dessus de la maçonnerie de ces murs ou de ces petites piles sera cou-
vert d'une prépanilion liydroliigo. Au moyen de ce système de con-
struction, le niveau du sol intérieur devant être établi en couire-haut
de celui du sol extérieur, on fera circuler l'air au-dessous du plancher;
à l'aide d'ouvertures ménagées dans le bas des murs, cet air servira à
activer le tirage des foyers placés à l'intérieur des habitations, et i! pro-
curera une fraîcheur agréable en été (t et 2). (Voy. Fig, 3.)
Lorsque le rez-de-chaussée est assez élevé au-dessus du sol exté-
rieur, on peut utiliser l'étage souterrain, qui, par sa disposition, cesse
véritablement d'être une cave ; alors les précautions à prendre pour
éviter les effets de l'huniidiié seront différentes de celles que nous avons
indiquées. Ainsi, en faisant sentir la nécessité d'arrêter l'humidiié pro-
venant du sol, nous avons établi rob>tacle là où cette humidité deve-
nait réellement nuisible, et nous avons dit qu'on pourrait la laisser en-
vahir les parties des murs en contre-bas du niveau extérieur du sol, où
elle ne présente pas le même inconvénient; mais, si l'on veut rendre
un étage snutermin habitable, il conviendra, après avoir établi les fon-
dations en béton, d'opposer à l'humidiié qui pénétrera les murs par leur
base, soit du plomb, soit un enduit hydrofuge, qu'on interposera au
niveau du sol de cet étage. (Voy. Fig. 4.) Après avoir pris pour l'é-
tablissement de ce sol l'une ou l'autre des précautions indiquées, et de
préférence celle qui consiste à ménager un isolement, il faudra songer
à se garantir de l'humidité qui pénétrera à travers les murs dont l'une
des parois est en contact avec le sol. A cet effet, nous conseillons,
pour les constructions monumentales et en pierre, d'élever de ce côté
un conire-mur en meulière, susceptible de recevoir un enduit hydrau-
lique imperméable, comme ceux des fosses (3). Un moyen plusécono-
(1) Les anciens, jaloux d'assurer la plus grande durée à leurs niomimcnls ,
avaient adopté un système analogue pour leurs dallages : ils construisaient, sur
le soi, de petits massifs carrés en brique, assez rapprocliés pour supporter de
grands carreaux en terre cuile, formant un premier dallage; ils les couvraient
d'une couche de mortier assez grossier, mais d'excellente qualité, de 2 ou 3 cen-
timètres d'épaisseur, puis d'un enduit de mortier plus fin, sur lequel ils po-
saient les dalles de marbre ou les mosaïques qui composaient le sol intérieur de
l'édifice. Ce mode de dallage était généralement employé pour les bains, où
l'on en profitait pour faire circuler de l'air cliaud ; on le trouve également ap-
pliqué aux dallages des temples, où il n'avait sans doute d'autre but que d'é-
viter l'humidité. Dans les iiabitalions antiques, le sol des pièces à rez-de-chaus-
sée était composé de mosaïques qui, par leur nature, étaient peu accessibles à
l'humidité, et, de plus, ces mosaïques étaient posées sur un lit de mortier.
{Note de l'auteur.)
(2) Mais en liivcr il pourrait apporter un froid insupportable en passant
par les joints des dalles qui lui laisseraient quelques issues , et lors même qu'il
ne pourrait pénétrer par là, si l'on employait le moyen usité par les Romains
et cité par l'auteur dans la note ci-dessus, il refroidirait tellement le dallage
que sa température deviendrait incommode.
L'auteur du Mémoire ne nous dit pas (du moins nous ne l'avons pas compris)
s'il rejette directement cet air extérieur dans l'appartement ou bien dans la
ventouse du foyer. Dans ce dernier cas, si on le faisait passer dans un appareil
calorifère adapté au foyer, l'air arriverait chaud dans l'appartement ; mais le
refroidissement du dallage et la possibilité des vents coulis doivent ne faire
adopter ce moyen qu'avec quelque réserve. (iVote de M. H. J.)
(3) Les enduits des fosses, qui sont généralement en mortier de chaux hy-
draulique ou en ciment romain, sont loin d'être assez imperméables pour
empêcher l'humidité de passer (*). Il faut bien distinguer l'eau i l'état de liquide
l") Nous avons eu occasion de ciiir dans un autre article l'application d'un enduit
inique et sans doute aussi sûr consisterait à enduire la paroi extérieure
du mur d'un enduit hydrofuge ou d'une couche de bilumc. Si le mur est
en moellon, en brique ou en meulière, le contre-mur deviendra inutile,
l'enduit pouvant s'appliquer directement sur ces matériaux. On pour-
rait aussi, en établissant un conire-niur très-mince (1) en brique, isoler
ce contre-mur de la surface du mur (ju'on voudrait préserver (21. Si
enfin l'étage en question exige un état de sécheresse parfaite, on aura
de l'eau divisée à l'état moléculaire qui constitue l'humidité. Dans le premier
cas, elle n'agit que par l'action de la gravitation, c'est-à-dire de haut en bas, et
encore horizontalement i cause de sa mobilité. Dans le deuxième cas, clic agit
dans tous les sens, même de bas en haut, par l'action de la capillarité uu par
l'affinité de ses molécules pour celles qui constituent la matière à traverser;
elles s'y élèvent d'autant plus que celte affinité est plus giande. L.cs seules
limites peut-être de son ascension dans un corps perméable, sont celles où la
puissance évaporatoire de l'air ambiant fait équilibre i l'action capillaire.
Un simple enduit en ciment ou mortier, quoique doué d'affinité pour l'eau,
un simple tissu même, peuvent s'opposer au passage de ce liquide i l'état cou-
lant ou considéré comme corps; mais nous n'en connaissons aucun qui puisse
s'opposer au passage de l'eau à l'état moléculaire, c'est-à-dire à l'humidité.
Les métaux et les matières vitrifiées compactes peuvent seuls intercepter l'hu-
midité par l'extrême ténuité de leurs porcs, bien <|u'ils aient de l'affinité pour
l'eau ; et les corps gras, tels que les bitumes, résines, graisses, etc., quoique po-
reux, sont imperméables à l'eau dans ses deux états, à cause de leur manque
d'affinité, ou plutôt de leur répulsion pour ce liquide. ré|inl*inii (|ui s'oppose à
l'action de la capillarité.
Nous avons vu du béton qui, quoique fort dur, laisse passer l'eau comme une
éponge. Nous ne prétendons pas toutefois que ce fait soit général, et nous de-
vons ajouter qu'il entrait un peu de ciment dans sa composition, outre la chaux
hydraulique.
Tant que le béton est en travail, c'est-àKlirc tant qu'il est Jeune, il absorbe
l'eau, qui tend à le traverser et se ^as^imile; c'est pour cela qu'il sèche sous
l'eau ; mais il n'y a pas de raison pour que cela soit éternel, et au bout d'un
certain nombre d'annéi'S il doit être salure, et nous douions qu'il en absorbr
encore; il laissera donc passer l'humidité par ses pores quand il sera vieux et
ne pourra plus se l'assimiler. {Kote de M. H. J.)
(1) Le contre-mur ndnce sera bientât collé contre le mur par la poussée des
terres, à laquelle il ne pourra résister; mais, ne le fùt-il pas, si linlervalle csi
très-petit et non aéré, il .servirait fort peu. Il faut (|ue le vide ail une certaine
largeur cl qu'il y ait courant d'air; autrement l'air, excessivement chargé de
l'humidité constante qui y arriverait, pénétrerait les murs. L'enduit bitumineux
proposé par l'auteur est bien préférable, en ayant soin toutefois de le souder
avec la feuille de plomb interposée entre deux a.ssises au niveau du soi. Il faut
encore, comme condition indispensable, que l'enduiten bitume soit étendu entre
deux béions, surtout i l'étage souterrain, pour empêcher son soulèvement par
quelque subite in\asion d'eau. Il faudrait aussi que la couche de bitume appli-
quée sur le parement du mur fi"il recouverte d'un enduit en mortier, [Kiur em-
pêcher qu'à la longue les corps durs et anguleux ronicnus dans les terres ne
vinssent à crever le bilumc. I.e procédé de goudronnage récemment appliqué
au pavé des rues est appelé à nous donner un jour des moellons et des pierres
imperméal)les pour la construction de la base des murs.
(/Vote de .M. P.J)
(2) En Angleterre, où l'on construit en brique, on a souvent recours à un
contre-mur semblable, avec isolement. Dans certains cas, on a appliqué avec
succès, sur la surface des murs qu'on voulait préserver, un lit de tuiles très-
dures, bien enduites de bon ciment. Nous ajouterons que, pour arrêter l'hu-
midité provenant du sol, les Anglais ont remplacé le plomb par un lit d'ardoise
noyé dans une couche de mortier ; mais il est permis de douter de l'efficicité
de ce moyen .
Du reste, les fondations et les massifs en béton sont généralement adoptés en
Angleterre, ainsi que l'application d'une feuille de plomb dans l'épaisseur des
murs. {Pfote de l'auteur.)
de ciment romain de Sa *cenlimèlres d'épaisseur, pour recevoir la partie de< solives
d'un plancher élevé d'environ 60 centimèln-s .lu-dessiis du «n| extérieur. Ce pré.«er-
vatif n'a pas empêché l'humidité de s'élever la première année i 0 60 au-dessui du
sol du rez-de-chaussée, ou à peu près 90 centimètres au-dessus de l'enduil en quci-
tion. Ce fut bien pis les annnes suivantes.
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REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLFCS.
330
soin d'y établir un bon syslème de ventilation, et d'appliquer, sur les pa-
rois intérieures des pièces de cet étage, soit des préparations liydro-
fugcs, soit des lambris en bois.
EnOn il est une dernière disposition qnc nous avons mentionnée et
à l'égard de laquelle il est nécessaire de prendre des procanlions par-
ticulières contre l'Iiumidité: c'est celle d'un bâiiinenl élevé à mi-côte et
adossé en partie au terre-plein de celle côte, (le manière que, d'un
côté à l'autre, il y ait la dilTérence d'un étage. Dans ce cas, il (audra
construire préalablement un mur de souléiiemenl en bons matériaux ,
destiné à maintenir les terres et les eaux de la pariie supérieure. Entre
ce mui', qui devra avoir une épaisseur et un talus convenables, et sera
percé de barbacanes de distance en dislance, et le mur de l'Iiabilation ,
on ménagera un espace voûté de 1 ou 2 mètres, formant un corridor
dont le sol, au pied du mur de terrasse, aurait une pente régli'c pour
l'écoulement des eaux. L'air pouvant ainsi circuler librement entre la
face de l'habitation et le terre-plein, on n'aura à redouter, pour le mur
de riiabitalion, que riiuinidilé à laquelle est exposé un bâtiment placé
dans les conditions ordinaires. C'est par une disposition analogue (pi'on
cherche à préserver les orangeries et les serres chaudes des effets de
l'humidité et du froid. (Voy. la Fig. 5.)
Les murs de terrasse servant à soutenir des terres destinées à être
plantées en jardin se trouvent aussi dans le même cas, ei, si l'on ne
prend pas des précautions particulières, leurs faces seront prompie-
ment déiériorées par l'humidité constante que la terre leur communi-
ipiera : le mieux serait donc de les construire en meulière et bon mor-
lier, ou bien, s'il ne pouvaiten être ainsi, il conviendrait alors d'élever
nu conlre-nuir en meulière avec enduit qui, non-seulement préserverait
le mur extérieur des eff. ts de l'humidilé, mais permettrait en même
temps de combiner un syslème d'écoulement pour les eaux qui s'inlil-
trent dans les terres (1 et 2).
Quoicpie les principes ipie nous venons de poser au sujet des moyens
a employer contre les effets de l'hinnidilé soient applicables à tous les
genres de constructions en général, nous croyons devoir, pour satis-
faire au programme proposé, dire quelques mots concernant les con-
structions rurales et indusiiielles.
Les constructions rurales se compo.<ent de bàlimenis d'habitation et
d'exploitation. On comprend que les premiers se trouvent dans les
mêmes coudiiions que tous les autres, cl qui; les travaux à cnlre-
prendre contre l'humidité seront analogues ;i ceux dont nous avons
déjà parlé.
Quant aux bàlimenis d'exploiialion, tels que buanderies, laiie-
ries, etc., qui par suite <le l'emploi aliondant de l'eau, ne peuvent pas
être considérés comme exposés à souffrir de l'humidité, il sera facile, à
l'aide do dallages ou d'enduiis bien faits, et en ménageant avec soin
(1) Les célobres jariliiis de l'Isola-Bella sur le lac Majeur sonl en parlic éta-
blis sur un sut factice qui a éli siuclevé au-dessus du niveau des eaux à l'aide
d(! constructions ; mais, dans ces constructions destinées à supporter des terres
dans lesquelles crois.senl des arbres de haute liitaic, on a en soin de inéjiager
des écoulenieiUs pour l'eau de la pluie, qui, sans cette précaution, d'ailleurs
pnrrailcnicnt entendue, aurait prunipteinent miné ces substructions, dans les-
quelles, en outre, on peut circuler librement. {/Voie de l'uuteur.)
(2) Un endint en bitume appliqué sur la face du mur du côté des terres, plus
un conlre-nmr en pierres sèches, ilont les cavités faciliteraient la libre circula-
tion des eaux, qui s'écouleraient ensuite par des barbacanes ménagées au tra-
vers de la base du nuu- de revêtement, serait bien moins coûteux. Il faudrait
(pie le contrc-ninr fût porté, dans toute son épaisseur, sur inic retraite de la
basse fondation, disposée en forme de caniveau, par un enduit hydraulique con-
duisant l'eau dans les barbacanes. I^a basse fondation serait ainsi préservée de
l'action des eaux, cl la poussée des terres diminuée; car on sait que les terres,
surtout les argiles et les marnes, poussent davantage quand elles sont saturées
d'eau ; mais il faudrait un enduit en mortier entre le bitume et le conlre-nuir.
Ce moyen serait plus écouomiipie que les cavernes voûtées d'Isola-Bella ou deBa-
liylone. {Note de .17. //. J.)
récoulement des eaux, d'éviter les infiltrations, soii dans le sol, s«iit
dans le pied elles parois des mnrs (1). Les autres bâtiments d'exploi-
tation, comme écuries, vacheries et bergeries, sont exposés auv incon-
vénients résultant de la vapeur qui se dégage du corps des animaux ei
vient se condenser sur les parois des murailles et du plafond; cette va-
|)eur est irés-miisibie a la conservaiion des buis, qui finissent par pour-
rir; les moyens à employer pour combattre son influence consislcnt
dans un bon système de ventilation, établi de manière à ne pas nuire
au régime hygiénique des animaux. De plus, il conviendra de laisser les
solives des plafonds apparentes, plutôt que de les envelopper de plà-
tie; si l'on n'est pas arrêté par la dépense, on remplacera les planchers
de bois par des planchers en fer et poterie.
Les habitations des paysans méiitenl une attention particulière; car.
si l'économie la pins stricte doit présider à leur construction, la salu -
briié est pour elles une condition non moins e.ssenlielle; or, pour les
garantir de l'humidité, nous recommanderons les moyens déjà men-
tionnés, savoir : obstacle interpo.sé dans l'épaisseur des mnrs contre
l'humidilé du sol, enduit hydrofiige on enveloppe avec isolement sur
les parois exposées ii la pluie, sauf le choix et la valeur des substances à
employer, selon les pays dans lesquels on aura ii consimire; mais ces
moyens étant dispendieux et d'une exécution diflicile, nous pensons
que c'est autant par \,i dis|)osition desconslrnciioiis que par la forme à
leur donner qu'on parviendra à obtenir le ré.-nliat désiré. Ainsi nous
conseillerons aux paysans de ne pas habiter les étages bas, d'abriter les
façades de leurs deaieures par des toits très-saillants, d'en paver le
pourtour et de ménager des pentes pour les eaux, de choisir cnlin une
exposition convenable, d'occuper de préférence les pièces exposées à
l'Est, etc. Nous ue saurions mieux rendre noire idée qnVn prenant
pour exemple les chalets de la Suisse, dans lesquels les conditions que
nous venons d'énnmérer se trouvent très-bien remplies, et qui, par
leur construction ingénieii.se et pitloresqiie, méritent d'être pris pour
modèles d'habilalious rurales.
Parmi les constructions industrielles, celles qui n'ont à craindre que
l'humidité du sol ou de l'atmosphère se trouvent dans les conditions or-
dinaires, et les préservaiils que nous avons indiqués leur sonl applica-
bles. Quant aux établisscmcnls qui, par l'usage auquel ils sonl consa-
crés, sont exposés à une humidité provenant d'autres causes, nous pen-
sons qu'il sera bien plus lacili! de les en préserver. Ainsi les papete-
ries, les lavoirs de laine, les leintnrencs, raflineries, etc., dans lesquels
l'eau doit circuler et séjourner, senmt aisément garantis de l'humidité
accidentelle que le besoin d'eau pourrait occasionner; les moyens .i em-
ployer seront réglés sur la manière dont les constructions seront dis-
posées pour l'écoidementprontpt et facile de l'eau, et d'après le'svstèaie
de dallage ii adopter pour éviter les fuites et les infilli allons. L'eau
qu'on introduit volontairement dans les bâtiments n'est jamais à crain-
dre, parce qu'on s'en rendra facilement maître; tandis que l'huraidilé
(1) Dans tous les lieux oti l'eau doit s'écouler sur le sol el où elle peut filtrer
par les fissures qu'elle rencontrerait, il sera nécessaire d'apporter !e plus grand
soin dans l'établissement des dallages. On obtiendra un bon résultat en em-
ployant les enduits d'asphalte, qui permettent d'éviter les Joints. Le problème
d'un dallage sans joints est un des plus utiles que l'industrie ait été appelée i
résoudre; si l'on considère l'influence pernicieuse de notre climat sur les dal-
lages extérieurs, composés de plusieurs pièces, et qu'on fixe sou attention sur
ces grandes surfaces d'asphalte, à l'aide desquelles le sol de la place Louis XV
est en partie couvert, on ne peut s'empérher d« rccuiinaltre les avantages
qu'on doit se promettre de l'applicatiou du bitume pour remplacer les dal-
lages ronipo.sés de morceaux plus ou moins grands. L'asphalte naturel cl les
produits bitumineux ne sauraient cependant £lrc appliqués dans les localités
qui réclament un certain luxe; et c'est pour y suppléer qu'on a essayé de plu-
sieurs substances colorées et susceptil)lcs de se prêter aux exigences de l'art.
Tels sont les pavés à la vénitienne, les bitumes végétaux, el autres compositions
qui ont pu être employées avec succès dans les intérieurs, mais qui, en général,
ont mal réussi au dehors. (A'ote dt Cauttur.)
331
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
332
iiihérenie au sol ainsi que celle de l'alinosplière onl une :iciion con-
siaiiit! qu'il ne laul |ias négliger et contre laquelle il faut réunir tous
ses efforts.
Dans les établissements où l'emploi de la vapeur exposerait les con-
siriiclioiis à (les inconvénients d'un autre genre, on parviendra à les
éviter par une vcnlilaiion Itit-n entendue (I).
Nous terminerons nos ohservations sur les différentes chances d'hu-
midité auxcinelles les constrnclions peuvent être exposées, en parlant
de l'humidlié qui se manifeste par la partie supérieure des bâtiments
couverts en terrasse. Dans notre climat, la construction des terrasses
exige le plus grand soin, et, comme ou les établit généralement sur des
planchers en bois, il iiuportc que leur revêtement ne soit pas expose à
se fendre parle retrait ou la flexion des solives qui les supportent. Le
plomb est inconleslablemenlce qu'il y a de mieux pour parer à cet in-
convénient; mais, comme il doit avoir nue certaine épaisseur, il entraîne
à une assez forte dépense. Le zinc n'est applicable qu'aux teriassessur
l('si|nclles on ne marche pas (2). On a cherché à suppléer au plomb
par des enduits imperméables; l'asphalte a été employé avec succès;
seulement il Tant (|ue ces enduits n'éprouvent pas, par le froid, un re-
trait trop sensible et capable de produire des tissures, et qu'en même
temps ils ne soient pas exposés à se ramollir par la chaleur au point de
ne pofivoir y marcher sans y laisser rcminciiile des pieds. {'>}. Avant
(1) Dans les ateliers où il se dégage beaucoup d'eau à l'état de vapeur, tels
(|ue les papeteries mécaniques, teintureries, buanderies, etc. , celle vapeur se
cundcnse sur les murs, et surtout sur les plafonds, d'où elle retombe en guutles
d'eau sur les ouvriers, les machines et les produits, auxquels elle cause un no-
table duniniage. Ensuite les plafonds, s'il y en a, l'absorbent, et les solives du
plancher sont bientôt pourries. II faudrait que la partie supérieure de l'alelier
fût toujours en forme de vuùtc le plus surhaussée possible, ou de plans inclinés
recouverts d'un enduit bien lisse et imperméable autant que possible, ou de
feuilles de métal. Les voûtes ou rampants seraient reçus sur une imposte ou
cordon creusé en gouttière et garni eu métal, ou enduit inqierméable avec
tuyaux de décharge pour les eaux de condensation. Celles-ci , au lieu de re-
tomber, comme nous l'avons dit, couleraient à droite et à gauche en sultant
les retombées, et seraient reçues dans les gouttières, qui les porteraient au de-
hors. {ISote de M. II. J.)
(2) Le zinc d'une certaine épaisseur, le n" 20, par exemple, est excellent
|)Our terrasse; mais il faut qu'il soit et dilatation parfaitement libre. Nous avons
fait des terrasses de 4 à 5 mètres de largeur, soudées d'une seule pièce, qui se
sont bien comportées. Lorsque nous avons fait démolir l'ancienne usine des
l)ains d'Engliien, nous y avons trouvé des doublages de planchers en zinc n° 20
posés depuis vingt ans, cl encore en bon état. Ils portaient cependant des réser-
voirs pleins d'eau.et même des fourneaux en briques qu'on cltaulTait nuit et Jour
dans la saison. Ces charges rendaient la dilatation captive. On jetait sur le dou-
blage tout le charbon de terre qu'on brûlait, on y posait et on y laissait tomber
a chaque instant les pelles ringards et une foule d'autres ustensiles; enfin, on
ne le ménageait pas plus qu'un dallage. La température y était toujours très-
élevée, et le zinc était presque constamment couvert d'eau, tantôt froide, tantôt
chaude, qui découlait des réservoirs. Ces eaux ont la propriété d'attaquer le zinc
plus que le plomb. Eh bien ! malgré tout cela, nous avons eu rarement des ré-
l)arations à y faire. Nous avons utilisé la plus grande partie de ce vieux zinc à
faire des revêtements de murs. Le plomb eût moins bien résisté. Les planchers
de la nouvelle usine sont doublés de la même manière; ils sont encore bien plus
chargés que les autres, et la température s'y élève à 40 degrés centigrades.
Nous pensons que le zinc est susceptible de faire de magnifiques terrasses,
quand l'industrie nous aura donné des feuilles de ce métal aussi grandes que
celles qu'on obtient du plomb ; car ce qui nuit le plus au zinc en grande surface,
c'est la multiplicité des soudures, qui rendent la dilatation irrégulière. Son grand
défaut est .sa sonorité sous les pieds des passaut.s.
(3) Les enduits bitumineux ne valent rien sur des surfaces Hexibles comme les
planchers; car aussitôt que, par l'action du soleil et de l'air, la partie huileuse
et volatile du bitume s'est évaporée, le bitume perd toute son élasticité et devient
tellement cassant, (pie le moindre jeu des bois, la moindre retraite par le froid,
le brise. Nous avons eu plus d'une fois l'occasion de reconnaître par expérience
cette vérité; après avoir dépensé beaucoup en réparation sur des terrasses vieilles
d'appliquer l'enduit bitumineux, on établira une aire en carreaux de
terre cuite, ainsi que cela a été fait avix succès aux trottoirs du pont
des Saints-Pères, et l'on combinera, s'il est possible, un système d'iso-
lement (|ni permette à l'air de ciicider au-dessous du sol de la terrasse.
On a reconnu aussi qu'en uppli(|uaut sur les enduits de bitume de la
couleur blanche ou diminuait les effets de la chaleur.
il est encore une autre voie par laquelle riiiiniiiiité ou au moins les
infiltrations de l'eau peuvent se produire dans les bâtiments et devenir
très-nuisibles: c'est celle de tuyaux de di^seente mal disposés; il ne suffit
pas, en effet, de recueillir les eaux des combles, il faut encore les con-
duire jusqu'au sol. Les tuyaux de descente employés à cet effet ne
pouvant souvent pas être fixés contre les façades, on est réduit à les
éiablir à l'Iniérieur des bâtiments : dans ce cas, ou ne doit point les en-
c:isirer dans les murs; car il serait impossible de découvrir les inllltra-
tions qui se produisent, et qui, pouvant devenir considérables dans les
temps de gelée, causent de grands dommages anx(|uels il sera presque
impossible de remédier. Nous pensons, en principe, que les tuyaux de
descente doivent être apparents et accessibles, et que, lorsqu'on est con-
traint de les placer en dedans des bâtiments, la meilleure manière d'at-
teindre ce double but sera de les établir d.ins des cspèi;es de grands vides
en inaçuiiiierie, ménagés dans la construction, comme des tuyaux de che-
minée, et assez larges pour contenir un ou deux tuyaux de fonte ou de
plomb et livrer passage à un homme dans toute leur hauteur, a l'aide
d'échelons scellés duis les murs (I).
Tel est le résultat de nos observations sur les inconvénients que peut
occasionner l'humidité, et le pr<iduii des études que nous avons faites
pour p.irvenir à lescombailre. On nous reprochera peut-être de n'avoir
en bitume, nous avons toujours été obligé de les refaire, et, mieux, de le* rem-
placer par des combles.
Au surplus, quelle que soit la nature du couvert d'une terrasse sur charpente,
il est indispensable, comme le fait remarquer l'auteur de ce mémoire, d'aérer l<>s
vides entre les solives. Cela se fait quel(|uefois, mais en général d'une manière
vicieuse. Si l'on pose l'aire ou le plancher qui doit porter la terrasse immédia-
tement sur les solives, l'aérage détient très-compliqué, puisque, si le dessous des
solives est plafonné, il faut un ventilateur aux deux extrémités de chaque entre-
vous. (On ne fait le plus souvent qu'une ouverture ù une seule extrémité.)
Mais quelque Im>u que soit l'aérage et quelque imperméable que soit le rccou»
vrenient de la terrasse, il est rare que la face supérieure des solives en contact
avec l'aire ne soit pas plus ou moins pourrie, surtout si l'aire est en plltre. Cet
inconvénient, qu'on attribue en général , mais souvent i tort, i l'eau qui peut
traverser les pores du plomb ou du bitume, vient de l'humidité de l'air qui se
trouve reuferuiée dans l'épaisseur du plancher, et qui se condense sous l'aire
parle refroidissement subit de l'atmosphère. Ensuite les solives, dont les fibres
sont dilTéremnient disposées. Jouent d'une manière dilTérente par l'effet des
variations atmosphériques, en se haus.sant nu se baissant alternativement, ce qui
brise les enduits bitumineux quand ils ont perdu leur élasticité.
On obvie i ce double inconvénient, et l'on rend la ventilation très-facile, en
posant en travers des solives une série de lambourdes arrêtées avec des clous
sur chaque solive. On obtient ainsi un grillage qui relie les solives entre elles, et
neutralise leurs mouvements dans tous les sens. Le mouvement de bas en haut des
lambourdes est fort peu redoi'tal)le, vu la faiblesse de leur action verticale; d'ail-
leurs, retenues par des cUms sur les solives, et chargées du poids de l'aire, elles ne
peuvent faire de mouvements sensibles. Ces lambourdes reçoivent i elles seules
l'impression de l'humidité de l'aire, et comme elles ne sont que des pièces se-
condaires, leur détérioration par l'humidité compromet peu la solidité du plan-
cher. Il sera bon, au surplus, de recouvrir leur face supérieure d'uue couche de
goudron avant la pose de l'aire.
Quant à la ventilation, on conçoit qu'elle sera aussi bonne que facile à établir,
au moyen d'uue .seule ouverture, ou, mieux, de plusieurs ouvertures à chaque
extrémité du bâtiment, <laiis le sens de la longueur des lambourdes. Les vides
entre les solives seront en communication par les vides entre les lambourdes,
et le courant d'air longitudinal parcourra principalement la région des lam-
bourdes où il est le plus utile. (.Vote de J/. //. J.)
(1) On voit un exemple de ce système à la chapelle du nouvel hospice de
Charenton. C'est aussi dans los constructions de cet hospice (|u'on a peut-être.
333
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
33^
pas assez précisé la iialuie des obstacles à opposer à l'Iiuinidilé, en né-
gligeant d'indiquer les substances qui doivent entrer dans la composi-
tion des enduits bydrofuges. Nous répondrons que cette question, toute
spéciale, n'est pas de noire ressort, et que la Société d'encouragement
semble l'avoir compris ainsi, en proposant pour cet objet un prix dis-
tinct. Quant aux laits pratiques reconnus par l'expérience, qui auraient
peut-être dû accompagner celte insiruction, il faudrait qu'ils pussent
être basés sur une expérience de plusieurs années pour être de quelque
valeur.
Ce sont donc surtout des principes généraux que nous avons voulu
établir; quant à la manière dont l'humidité agit dans les constHiclions
et aux moyens de la combattre, ces principes peuvent se résumer
ainsi :
1° L'humidiié étant un des plus grands fléaux que nos constructions
aienlà redouter, il faut la prévenir et l'arrêter avant qu'elle atteigne les
parties où elle deviendrait nuisible.
2° Les seuls obstacles à lui O|)poser sont le plomb, les enduits com-
posés de cor|)sgias, bitumineux ou résineux, et quelques morliers pré-
parés pour cet usage.
ô" L'isolement et la circulation de l'air sont les meilleurs moyens
d'empêcher l'humidiié de communiquer avec un corps quelconque.
4" Lorsqu'on ne pourra pas garantir les constructions par les moyens
ordinaires, il faudra employer les matériaux les moins hygrométriques
et les éloigner le plus possible du sol.
5° Il y aura toujours avantage à prévenir les effets de l'humidiié
pend.int la consiniclion, car il sera difficile de la combattre quand elle
se produira dans des bâthnents existants, et il sera impossible de l'en
chasstr.
6° Avani de commencer une construction , il faudra étudier par
quelles voies l'humidiié pourrait s'y introduire, arrêter à l'avance les
obstacles qu'on a l'inieniion de lui opposer, puis déteiminer les points
où ces obstacles devront être placés cl leur nauire, eu égard aux diver-
ses condiiions parliculières à ces constructions.
(La fin prochainemcnl.)
pour la première fois, eu le soiii d'introduire une feuille de plomb sous tous les
murs (■). On y a fait également un heureux emploi de l'asphalte.
{yole de l'auteur.)
— Malheureusement, ce moyen, très-coûteux et occupant une grande place,
ne peut être employé que dans les grands édifices, lels que la Madeleine, où
nous l'avons remarqué; il ne faut guère songer à l'appliquer aux construclious
ordinaires. Mais, dans celles-ci, si l'on veut éviter l'effet jusqu'ici peu gracieux
des tuyaux de descente apparents, et qu'on veuille les loger dans l'épaisseur
des murs, voici comment on pourrait opérer pour avoir toute sécurité contre
les infiltrations.
Si le mur était en pierre, on pratiquerait à chaque assise, avant la pose, un trou
dont le diamètre excéderait de à ou 5 cenlimètres environ la grosseur du tuyau ;
on placerait le tuyau au centre du trou de la pierre, et on coulerait dans le vide
annulaire du bitume bien chaud et assez gras, à mesure qu'on poserait les
assises, en ayant bien soin de ne pas laisser tomber de plâtre, mortier ou pous-
sière, dans le vide à chaque rcpri.se. On aura ainsi un double tuyau imperméa-
ble. Le bitume interceptera les fuiles qui pourraient survenir à la foule, et
pourvu que le tuyau soit droit dans toute sa hauieur et muni par le bas d'un
coude bien arrondi, les engorgements seront faciles i dégager.
Si le tuyau devait être posé dans un mur en moellons, brique ou autres
menus matériaux, le tuyau serait d'avance revêtu de bitume et blo(|ué dans la
maçonnerie, en ayant soin de faire un nœud a chaque jonction.
(Note de M. ll.J.)
— Nous pensons, nous, qu'il serait mieux encore de laisser les tuyaux appa-
rents et d'en faire des motifs d'ornementation, plutôt que de les cacher dans les
murs. Nous disons même que logiquement il en doit être ainsi.
(Ao(e de M À. de C.)
(•) Nous avons lu quelque part, il j a dix ans, que ce moyen clail connu des Ro-
mains. {Note de M. H. J.)
CHRONIQUE.
SoiiMAiBE. -Monde M. Le Hère; -M. LebasenGrèce;- Ussuiue» de Philippe
Auguste et de saint Louis, le donjon et la chapelle de Vincennes; — t)eui pierrr»
colossales; Travaux de la place Vaihuhert; - Infortunes des candélabre» du
Honl-Uoyaletdela rue de Rivoli;- Drmolilion de la chapille de» Aniionciade»
bleues, à Saint-Denis; — Transport d'un phare en Angleterre. — Po»uc»Ti3ii»
MOGTELLES.
— M. Le Père, archiiecle du gouvernement, membre de l'Institut
d'Égypie, vient de mourir à Paris dans sa (|uatre-vingi-troisième année.
Nous publierons prochainemcnl une notice biographique sur ceiMriisie
distingue.
— M. Lebas est en ce moment en Grèce. Il revient de C.trie, où l'on
dit qu'il a fait des découvertes archéologiques de la pins grande impor-
tance. 11 doit faire exécuter incessamment des foitilles dans les ruines
de Delphes. A Athènes, M. Lebas a fait mouler, pour l'Ecole des Beaux-
Arts de Paris, les plus beaux restes de sculpture qu'on y admire en-
core aujourd'hui ; avant la lin de son voyage, il espère, dit-on, faire
exécuter des modèles complets des quatre plus beaux temples qu'ait
élevés l'antiquité.
— Depuis quelque temps, des échafaud.ages sont dressés pourélever,
sur les colonnes de la barrièie dti Trône, les slatues de saint Louis ei
(le Philippe Auguste. Les faces des statues seront tournées vers Vin-
cennes , dont ces deux rois ont bâti le célèbre château. On parle de
détruire le donjon et la chapelle; nous n'osons croire vraiment à l'exé-
cuiion d'un pareil acte de vandalisme et de barbarie, et nous repoussons
ce bruit comme une calomnie.
— On vient de bàlir à la barrière de la Gare deux pavillons en pierr«
de taille, destinés aux bureaux de l'octroi et au corps de garde. Chacun
de ces pavillons sera siirmonlé d'un fionloi» triangulaire formé d'une
seule pierre colossale. Ces deux pierres n'ont pas moins de 5 mètres
de longueur, et elles ont environ H mettes cubes chacune. Près
de là on consiruit les ma.ssifs de maçonnerie destinés à soutenir
le quai d'Austerlitz. En face le Jardin du Ifoi, la place Valhubcrt se
découpe en tioltoirs triangulaires et en chaussées. Celle place, qui
n'était point pavée, avait assurément besoin d'être améliorée, mais il
nous semble qu'on eill pu le faire sans nuire à la ciiculalion. Les
chaussées ménagées entre les irottoiis sont trop étroites, snrloui du
côté du Jardin dit Itoi. Lors des jouis de reunions ou de pronien:ides
aux galeries du Muséum et au jardin, les voitures slalionnaient devant
la grilb;; aiijiiurd'bni, elles doivent aller stationner loin de l.i. dans la
rue de BiiU'on ; il serait donc à propos d'ouvrir une nouvelle grille sur
cette (lerniùie rue. Une autre observation : les pierres qui forment les
angles des plates-bandes destinées à encadrer lesirnltnirs, sont cniiitées
suivant une ligne courbe, mais de façon à ce que cette courbe, d'un trop
grand rayo ait pas les lignes d'angle pour Ungentes. Celle coupe
produit le plus mauvais effet, el nous ne comprenons pas que l'adoii-
nistraiion ail accepté de pareilles pierres. Les vides laissés enire les
plaies- bandes, d;iiis les espaces triangulaires, sont remplis jusqu'à
335
REVUK DE I;ARCH1TECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
336
piéseiil avec de la terre. Y pl;inler:i-l-on des arbres, y élèvera-t-on
des fontaines, ou bien y coulera-t-oii de l'asplialie? Nous l'ignorons
encore.
— iN'oiis avons signalé dans le temps (vol. il, col. 49) la rupinre
d'un des candélabres du Poni-Koyal par le choc d'une voiture. Nous
prédisions alors que, malgré les chas.se-roucs en fonle posés depuis
l'accident à chacun d'eux, les candélabres des angles seraient atteints
par la circonférence des roues. Cette prédiction vient de se réaliser pour
la deuxième fois au premier angle toiirnani, côté du (|uai d'Orsay.
L'un dos candélabies de la rue de Rivoli, ipii, par la grosseur et la
forme conique de lenr base, semblaient défier le choc des plus fortes
voitmes, vient aussi de succomber. Il s'est brisé en trois morceaux
dans sa chute.
C.e candélabre a été rompu dans son scellement par le vice de con-
forniaiion du scellement lui-même, qui, an lieu de former une surface
conique ou cylindrique coniinue, est divisé en quatre branches par
quatre cchancrures en arcade. Ces écliancrures enlèvent au moins
les trois quarts de la force du scellement. Comme il faut un passage
aux tuyaux à gaz, ou pourrait les remplacer par des trous, ou bien com-
penser par un l)ourrelet au pourtour la diminuiion de la section du scel-
lement. Les candélabres de la rue de Rivoli soni d'assez forte proportion
pour ne redouter aucun choc de voiture, s'ils n'avaient pas de vice de
conformation on de matière.
Il y a quelques jours, nous avons vu dans la même rue des ouvriers
occupés à en remplacer un autre qui avait .subi le même sort.
Voilà donc cinq accidents du même genre arrivés en deux ans à
notre connaissance, les trois derniers à peu près dans la même se-
maine. Quand on pense aux terribles résultats qui pouvaient advenir
de la chute de masses de fonte de 4 à 5 mètres de hauteur sur deux
des trottoirs les plus fréquentés de Paris, ou ne peut s'empêcher de
frémir. Espérons que, bien que par un hasard loni providentiel on
n'ait eu à déplorer la mort ou les blessures de personne, ce n'eu sera
pas moins un avis salutaire pOur radmiiiistration, qui fera désormais
mieux combiner les proportions de ses candélabres, et ne recevra que
des fontes de bonne qualité pour leur confeciion. La Revue donnait
à ce sujet dans son 111° volume, colonne 459, des renseignements qui
pourront être utiles.
— On vient de démolir le couvent des Annonciades bleues à Saint-
Denis. La charpente du dôme de la ch.ipelle de cet établissement reli-
gieux , qu'on aperçoit à gauche en entrant dans la ville, est démolie
depuis plusieurs mois. La maçonnerie elle-même doit bientôt être at-
taquée.
11 existe encore dans l'intérieur du dôme, bàli par Davillers, archi-
tecte de Louis XV, une série de bas-reliefj d'un irès-bou travail, qui
ne tarderont pas à être convertis en moellons.
Il y a deux bas-reliefs demi-circulaires de 4 mètres de diamètre ;
quatre bas -reliefs carrés de 2"° 00; quatre autres oblongs, aussi de
•2 mètres; plus huit tympans ornés d'anges, et quatre clefs très-riche-
ment ornées; plusieurs portraits dans des médaillons.
Transport du phare de Sulhertand, en Angleterre. — Le phare con-
struit à Sutherland en 1802 a 76 pieds anglais de hauteur sur un dia-
mèlre de 15 pieds i» sa base; son extrémité supérieure est un peu co-
nique vers la lanterne. Il est construit eu pierres polies, et renferme
dans son intérieur un escalier en spirale. Son poids total est de 338
tonnes; concentré sur une surface de 162 pieds carrés seulement, il
offrait de grandes difficultés pour le transport de sa masse. Néanmoins
M. Murray proposa de tenter l'opération pour éviter les frais considé-
rables qu'auraient occasionnés l'établissement d'un phare temporaire et
la construction d'une tour nouvelle sur le nouveau point où l'on se pro-
posait de l'établir. Il basait d'ailleurs sa proposition sur l'exemple des
États-Unis, où l'on a réussi à transporter des maisons entières. Une
circonstance accidentelle vint hâter l'adoption du projet de M. Murray;
en effet, la mer fit une brèche considérable à la jetée sur laquelle
la tour était posée; aussi se mil-on à l'ouvrage le 13 juin 18il.
Des maçons commencèrent par percer des trous dans lesquels on
introduisit des poutres qui furent reliées en une base .solide; sous celle-
{ ci, et direcleinent sous l'édifice, furent ensuite placés 140 rouleaux de
i fer de fonte qui glissaient sur 8 lignes de rails de fer; des contre-foris
I extérieurs soutenaient la masse de la tour, et reposaient sur des pièces
de bois glissant elles-mêmes sur d'aiitris pièces; le frottement était
I adouci à l'aide de savon et de plombagine. Les moteurs de cette énorme
I masse élaienl des crics qui la poussaient et des vis qui la liraient, ainsi
, que trois puissants cabestans mis en jeu par 18 hommes.
Le 2 du mois d'août , la masse entière fut éloignée de sa première
position de 28 pieds 6 pouces vers le nord , et par cette première opé-
ration elle se trouva sur la ligne de la nouvelle jetée. Ou changea alors
la position des rouleaux cl des poutres de glissement de manière à leur
faire suivre d'abord une courbe de 647 pieds de rayon et ensuite une
ligne droite dirigée vers l'est. Dès lors- la mas»; entière fut mue en
avant avec une vitesse de 33 1/2 pieds par heure, de telle sorte qu'en
quatorze heures de marche elle parcourut une dislance de 447 pieds.
Il fallut perdre beaucoup de temps pour changer les rails et les poutres
et pour les poser solidement, à mesure que la niasse avançait; aussi ce
ne futque le 4 octobre que le phare arriva à l'extrémité de la jetée, où
de nouvelles fondations avaient été préparées pour le recevoir. Lorsqu'il
y fut arrivé, l'on retira l'une après l'autre les poutres qui lui avaient
servi de base pendant son voyage, et l'espace qu'elles occupaient fui
rempli de maçonnerie solide. En résultat définitif, la tour s'est trouvée
établie dans sa nouvelle place avec une solidité telle que l'on n'a pas
remarqué la moindre crevasse dans ses murs. Pendant tout le temps du
transport, l'on a constamment entretenu pendant la nuit de la limiiëre
dans la lanterne, comme de coutume.
La dépense totale de ce travail important a été de 827 livres ster-
ling ; or, l'on a reconnu que l'on a fait une économie de 893 livres ster-
ling en adoptant le parti de transporter la tour déjà existante, au Heu
d'en consiruirc une nouvelle.
PUBLICATION NOUVELLE.
Encyclopédie de$ chemins de fer et des machines à vapeur. — Sous
ce litre, M. Félix Tourneux, ingénieur, ancien élève de l'École Poly-
technique, a publié un volume grand in-18, qui rendra, croyons-nous,
de grands services aux gens du monde qui s'intéressent aux grandes'
questions de progrès industriels, en mettant à la portée de chacun la
technologie des chemins de fer el des machines à vapenr, restée trop
longtemps l'apanage exclusif des gens spéciaux. On ne craint guère que
ce que l'on ne connaît pas, et si nous voyons encore quelquefois les en-
gins de la locomotion rapide inspirer la terreur et l'effroi, la cause en
est dans la profonde ignorance où se trouve la généralité du public sur
les combinaisons souvent si simples des appareils, dont on se fait des
fanlômes. Aujourd'hui, d'ailleurs, que les chemins de fer tendent à
devenir les voies ordinaires de communication , et que les machines i\
vapeur sont nos coursiers habituels, il n'est plus convenable d'ignorer
eniièreinenlles noms des principaux éléments qui les composent. Nous
ne considérons pas, toutefois, le livre de M. Félix Tourneux comme
exclusivement utile aux gens du monde; il peut l'être encore à tous
ceux que leur art met en rapport direct ou indirect avec les fabriques,
les chemins de fer, la navigation à vapeur, etc., et qui pourtant n'ont
pas besoin de faire sur ces sujets de profondes éludes.
Erratum.
Col. 287, 2* ligne : Au lieu de : néantnoint, il y manquerait toujours
l'intérieur des colonnes, lisez : néanmoins, il y manquerait toujours les
colonnes intérieures.
L'un des rédacteur» :
ALPHONSE DE GALONNE.
PARIS. — TTP. LlCRlVPK KT COMP., KCB D4aiRTT( , 3.
337
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Saint-Gervais.
338
DEUXIÈME INSTRUCTION DU COMITÉ HISTORIQUE
DES AUTS ET MONUMENTS.
(SDITE, voy. col. 241 et 289).
CIVILlSATrON CHRÉTIENNE.
STILE noMAM ET STTI.E CilOT II IQ UE.
OHAHIIHI! II. — DÉTAILS EXTÉIUEIRS DE L'ÉGLISE.
(SCITS.)
E. Le couronnement porte une couverture en terrasse, en dôme
ou à comble ; ces divers modes de couvertures, et surtout le der-
nier, qui est le plus fiéquent, doivent donner lieu à l'examen de
tout ou partie des points suivants :
1» Les diverses inclinaisons successives du toit dont on pourra
trouver la trace ;
2" La nature de la couverture actuelle et des couvertures anté-
rieures ;
30 La décoration, les dessins, jeux de couleurs, figures en re-
lief et en entailles, inscriptions, que peut présenter cette couver-
ture ;
4° L'ornement de faîtage en pierre ou en plomb qui en dé-
core quelquefois le sommet, le fleuron ou l'acrotère qui le ter-
mine;
Auvergne.
Fig. l.VJ.
Normandie.
Fig. 161.
Fy,. 162
5° Les couvre-joints et leurs anteflxes;
6" Les frontons et pignons plus ou moins aigus à leur som-
met , souvent flanqués d'autres antefixes de grande propor-
tion ;
Saint -Trophime {Àrlet).
Fig 163.
Fig. 16».
t'ig 165.
7° Les chéneaux et gargouilles, toutes les fois qu'ils mériteront
quelque attention par leur forme, par leur exécution, ou par In
présence d'une inscription;
Saint-Sulpiee, à Pierrefimdt.
Fig. 160.
Fig. 166.
T. V.
sa
339
REVUE DE LARCHITKCTURE ET DF.S TRAVAUX PURI.ICS.
3W>
8° Les objets dont la ligne extérieure du chéneau est bordée,
et qui sont ou un épanouissement de ce même cliéneau (balus-
trade),
Sainl-Gervais {Paris).
Ifig. 167.
OU une dépendance du toit en terrasse (créneaux),
burit de la Loin.
Fig. 108.
on un couronnement militaire (mâchicoulis).
Enceinte d'Aigues-Mories. Château de Mehun.
Fig. 169.
Fig. 170.
L'ornement de faitage et la balustrade suivent les révolutions
successives de l'ornementation. 11 faudra donner la figure ou tout
au moins l'indication précise du motif adopté dans leur décoration;
aux XV' et XVP siècles, cette décoration se compose souvent, pour
la balustrade, d'une inscription en caractères gothiques gigantes-
(|ucs, dont le texte (ordinairement une antienne ou prière) devra
être relevé en entier.
/•'. Les murailles des églises ont trop de portée, soit à raison de
leur hauteur et de leur écartement, soit à cause de la poussée des
voûtes substituées aux plafonds de la basilique primitive, pour
qu'on n'ait pas senti de bonne heure le besoin de les renforcer de
distance en distance; l'architecture romane y avait pourvu au
moyen de contre-forts que l'architecture gothique a développés
plus tard dans ses ares et piliers butants.
Les premiers contre-forts sont remarquables par leur peu de sail-
lie ; ce sont ou des colonnes plus ou moins complètement enga-
gées, Fig. 171, ou des pilastres assez grêles, Fig. 172, souvent
même de simples ressauts, Fig. 173, interrompant de distance en
Fij. 171.
Fig 172.
distance le plein de la muraille comme les chaînes de pierre, et
quelquefois remaniés ou renforcés plus tard pour en augmenter la
résistance. Ils s'élèvent d'ordinaire jusqu'au couronnement; néan-
moins on en rencontre (jui se terminent par une retraite en lar-
mier, Fig. 174, en c6ne, Fig. i7J,ou en pignon, Fig. 170, avant
Fig. 171.
Fig. 175.
Fig. 176.
d'y atteindre; il en est enfin qui constituent de véritables demi-
tours pouvant servir à la défense de l'édifice ; leurs dimensions vont
toujours en augmentant, et leurs larmiers en se multipliant, à me-
sure que l'édilice s'élève et que la voûte s'y introduit.
Trive$.
Fig. 177.
341
REVUE DK L'ARCHITECTUKE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
3fc2
On doit quelquefois distinguer les contre-forts en inférieurs et
en supérieurs : les premiers sont alors ceux qui, appartenant à une
portion secondaire de l'édifice, descendent jusqu'à terre; les se-
conds, qui, même après l'introduction des arcs-butants, ne consis-
tent souvent qu'en une simple colonne engagée, ne sont que le pro
longement extérieur des piliers ou colonnes qui soutiennent et sé-
parent les travées de la nef principale et du chœur.
Cologne.
L'architecture gothique, chez laquelle le besoin de soutènements
extérieurs existait bien plus fortement encore, réclama des appuis
plus efficaces pour comprimer les voûtes élancées de ses nefs prin-
cipales et de ses chœurs; c'est alors qu'arrivent les premiers arcs-
bubmts partant du contre-fort inférieur, et allant de là s'appuyer
sur le contre-fort supérieur. Quelquefois ces arcs-butants primitifs
sont pleins, ou percés seulement soit d'un œil-de-bœuf pour en al-
léger la masse, soit d'une baie de communication. Mais bientôt la
saillie toujours croissante des portions principales de l'édifice, et la
forme en ogive de leurs voûtes, obligent d'en étendre les soutène-
ments, quelquefois doubles, bien au delà de tout ce qui les entoure ;
c'est alors que le contre-fort inférieur s'allonge en pilier butant, et
S:iint-Denis.
Snint-Gervais {Paris).
ron, appli(|ué sur une de ses faces ; puis il reçoit dans sa partie su-
périeure des arcs plus ou moins complets qui vont s'appuyer con-
tre les murs extérieurs de In nef ou toute autre partie élevée, pour
maintenir la poussée des voûtes, et forme ainsi une ceinture quel-
quefois double de piliers et d'ares-butants.
Dans certains cas, cette ceinture de piliers butants est placée
en dehors des murailles secondaires de l'église, ou n'y a été rat-
tachée qu'après coup par l'adjonction d'une série de chapelles à
son plan primitif; plus rarement ces piliers, isolés de la masse de
l'édifice, ont été liés les uns aux autres par une série d'arcs la-
téraux.
Quelquefois, comme dans la Sainte-Chapelle de Paris, les arcs
et piliers butants ont été remplacés par de longs et étroits contre-
forts projetés jusqu'à une distance notable de l'édifice.
Charirei.
Fig. 181.
L'ornementation des contre-forts et des piliers butants se com-
pose d'abord, pour les premiers (quand ils ne consistent pas en d e
simples colonnes, pilastres ou ressauts], tantôt de colonnes latéra-
les, tantôt d'imbrications ou contre-imbrications figurées sur leurs
diveVs larmiers ;
Normandie.
Fig. 179. Fig. 180.
s'arme lui-même souvent d'un petit contre-fort secondaire ou épe-
Fig 182.
pour les seconds, d'un pilier carré, pesant et court, soutenaut
un arc plus ou moins complet, qui n'offre guère dans l'origine
d'autre vide qu'une espèce de passage pratiqué à travers une mu-
raille pleine; cette muraille, que remplacent quelquefois des co-
lonnes et arcades rayonnant d'un centre commun, porte une gout-
tière qui se bifurque souvent autour du pilier butant, pour rejeter
U3
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
;r»v
au loin, au moyen de gargouilles, les eaux des toits supérieur et
inférieur. Au XIII" siècle arrivent les légers clochetons carrés,
souvent à jour, les édicules avec ou sans statues, les arcs-butants
élancés et quelquefois doublés, les pignons figurés, les crosses et
autres expansions végétales indigènes.
Notre-Dame
de Parii.
Notre-Dame
de Reims.
Fig. 183.
Fig. 184.
Fig. 185.
Au X1V«, les ornements s'amaigrissent; le clocheton se ferme,
et ses angles, au lieu de suivre ceux du pilier, se portent souvent
au milieu des faces de ce dernier; au XV^, le pilier butant, après
s'être pour ainsi dire complètement \égétalisé dans sa partie su-
périeure, hérissée de crosses, de bourgeons, de fleurons, et de tout
ce luxe d'une foliation indigène, riche et compliquée, que nous
avons déjà eu occasion de signaler, y joint les statues, les niches,
les dais travaillés à jour.
Fig. 186.
Fig. 187.
A la Renaissance enfin , toute cette brillante ornementation cède
la place, d'abord à des arabesques et à tous les caprices de l'époque
Fig. 188.
de transition, puis aux consoles renversées et autres lourds appuis
de l'architecture italienne [Fig. 189).
Èylite de la Sorbonne {Paris).
^
^
^
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f
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- ^
^ 1
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---au — J 1
Fig. 189.
On rencontre rarement en France, mais plus souvent en Angle-
terre, des'piliers butants, octogones ou hexagones, ceints, h leur
sommet et à divers points de leur hauteur, d'une couronne de cré-
neaux libres ou engagés.
Nieuport.
Fig. 190.
34.5
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
3^6
Les murailles de toute église sont nécessairement percées de
deux espèces de baies : les fenêtres et les portes. Nous nous occu-
perons d'abord des premières.
[La suite au prochain numéro.)
DES ECURIES AU PREMIER ÉTAGE.
Dans toutes les grandes villes il y a des quartiers privilégiésqui,
par leur position ou le caractère de leur entourage, appellent puis-
samment les populations : c'est tantôt l'aristocratie qui se laisse
attirer, comme au West End, à Londres, et tantôt ce sont les amis
de la vie facile et élégante, ou bien de riches commerçants, comme
du côté de la Madeleine et de la rue Neuve-Vivienne, à Paris. Mais
cette affluence, toujours croissante, finit par faire angmenter le
prix des terrains au point que la valeur du sol atteint et parfois
même dépasse celle des constructions qu'on y élève ; alors l'éco-
nomie de surface, question toujours importante dans les construc-
tions urbaines, devient la base même des combinaisons de l'ar-
chitecte.
Les remises et les écuries dont nous avons donné les dessins
dans les PL 14, 1.5, 16 et 17, ont été construites dans le quartier
le plus aristocratique de Londres, près du palais de lord Stafford,
dont elles sont une dépendance. Elles ont été élevées vers la fin de
l'an dernier (1843), sur les dessins de M. Ch. Barry, esq., architecte
dont le nom est devenu européen, et dont les œuvres renferment
toujours d'utiles enseignements.
Il fallait remiser environ seize voitures, et trouver des écu-
ries pour vingt-quatre chevaux; de plus, il fallait loger les co-
chers, les palefreniers, les postillons, et disposer des emplacements
pour chacun des services particuliers, magasin, sellerie, galerie de
pansement, etc., qui se rattachent nécessairement à un tel établis-
sement.
Dispositions générales.
M. Barry, ayant calculé que les remises avec leurs dépendances
occupaientà peu près la même surface que les écuries avec leurs dé-
pendances, résolut de superposer l'un à l'autre, et d'économiser
ainsi la moitié des terrains, de la cou\erture, de la charpente, et
des fondations que les dispositions ordinaires auraient demandées.
Il disposa les remises au rez-de-chaussée, et les écuries au pre-
mier étage; bien entendu, il fallut donner aux murs du rez-de-
chaussée un peu 'plus de force que dans l'hypothèse d'une con-
struction sans étage.
En consultant la PI. 1 4, on verra le plan du rez-de-chaussée et
celui du premier étage. On remar(|uera que la façade postérieure
{II B) est trés-irrégulière : c'est que l'établissement touche de ce
côté à une propriété voisine sur laquelle on bâtira sans doute
avant peu ; c'est ce qui explique aussi l'échancrure triangulaire
et la retraite qui se voient au plan, et qui donnent des moyens
d'éclairage et de jventilation qui subsisteront dans le cas même où
le voisin bâtirait immédiatement contre l'établissement.
E A (voyez PI. 14, plan du rez-de-chaussée) désigne la façade
principale.
En franchissant le passage qui donne accès à l'intérieur on se
trouve dans une cour entourée de quatre corps de bâtiments, cha-
cun à un étage. Nous examinerons d'abord le plan général du rez-
de-chaussée ; nous monterons ensuite au premier.
En consultant le plan on verra que le devant est occupé, à gauche
en entrant, par les logements du cocher en chef et de ses subordon-
nés, et à droite par les logements du palefrenier en chef et de ses
garçons d'écurie; on verra que les remises sont établies sur les deux
côtés de la cour, et que dans le fond on a disposé la salle à mander
des domestiques, le calorifère (dont plus loin nous parlerons plus au
long), le trou à fumier, la première rampe du plan incliné qui con-
duit au premier étage, des loose box, le magasin, et une petite cour
dans laquelle cstune chaudière. L'inspection delà PL 15, qui donne
une vue de la façade principale, deux coupes longitudinales et une
coupe transversale, servira beaucoup à faire comprendre les dispo-
sitions des lieux.
Passons maintenant au plan du premier étage. L'axe de la pre-
mière rampe du plan incliné se trouve sur le prolongement de l'axe
de l'entrée principale de l'établissement; à partir du premier palier,
deux rampes se présentent conduisant, l'une à gauche et l'autre à
droite, aux deux galeries de pansement, qui s'étendent parallèle-
ment aux écuries et sur la même longueur. Sur le devant, à gauche,
au-dessus des logements des cochers, sont : une sellerie avec sa
chambre de nettoyage et deux logements d'aides-palefreniers; a
droite se trouve aussi une sellerie avec sa chambre de nettoyage et
une chambre à coucher. La sellerie de droite est beaucoup plus con-
sidérable que la sellerie de gauche; c'est peut-être parce que la pre-
mière est destinée à recevoir les plus fortes pièces : les harnais pour
les attelages, par exemple. Faisons remarquer, en passant, combien
cette séparation de la sellerie et de la salle de nettovage importe à
l'entretien de la propreté et à la conservation des harnais, etc. ; trop
souvent, ces divisions sont négligées; on évite aussi par économie
de faire des cheminées, qui permettent cependant de combattre les
effets de l'humidité, et qui facilitent beaucoup le travail du net-
toyage ; à la vérité, ces économies sont quelquefois obligws, mais
trop souvent aussi elles résultent d'un faux calcul.
Un petit approvisionnement de fourrage peut se mettre dans les
combles qui surmontent le corps de bâtiment de l'avant et celui du
fond.Lavoituredefoin s'arrête sous laported'entrée, et son déchar-
gement se fait par une trappe dont on voit la di$(>osition PL 15,
dans la coupe longitudinale faite suivant la ligne A B du plan. On
charge le comble du bâtiment du fond par la lucarne ( voy., PL tS,
la coupe long, suivant .4 B). Lorsque nous avons pris ces dessins,
à la fin de l'an dernier, le bâtiment n'était pas encore entièrement
fini ; aussi nous apercevons-nous maintenant d'un oubli que nous
avons fait relativement au mode de distribution du fourrage dans
3i7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
3W
les écuries ; toutefois, il nous semble que ce service pourrait se faire
ainsi : les galeries de pansement avancent chacune de quelques
pieds (1) dans le corps de bâtiment de l'avant (voy. PL 14). On
pourrait faire une trappe au-dessus de chacune de ces parties, par
laquelle on passerait le foin ; de cette manière le service serait direct,
le foin ne serait Jamais sali, circonstance désirable pour ne pas dé-
goûter les chevaux, et il n'y aurait que peu de perte; de plus,
comme chaque galerie de pansement est séparée de son écurie par
une cloison, les miasmes ne monteraient pas dans le grenier à four-
rage, autre circonstance qu'il importe de prévoir et dont généra-
lement on s'occupe fort peu. Il est vrai qu'en consultant, PL i5,
la coupe faite suivant E F G H An plan du rez-de-chaussée,
on s'aperçoit que le mur de séparation du grenier et de l'é-
curie ne monte pas assez haut pour que cette séparation ait lieu
complètement; mais peut-être le mur transversal qui sépare la
chambre de nettoyage de la chambre à coucher d'un aide-pale-
frenier monte-t-il jusqu'à la couverture, et ferme-t-il le grenier
de ce côté; une disposition analogue permettrait la même supposi-
tion pour l'extrémité.
Les Remises.
Chaque remise est divisée en quatre compartiments destinés à
contenir chacun deux voitures à la file ; les entrées se ferment au
moyeu de portes pleines, et une douce température y est mainte-
nue pour empêcher l'action de l'humidité et des grandes variations
atmosphériques, qui feraient jouer les bois, détruiraient les ten-
tures et pourriraient les cuirs des voitures.
Toutes ces dispositions sont parfaitement sages, et témoignent
f» la fois du bon goût et du sentiment d'ordre et d'économie bien
entendue de l'architecte et de Sa Seigneurie ; mais au milieu de la
satisfaction que nous fait éprouver ce tableau d'ordre luxueux,
devant ces équipages aux riches tentures, devant toute cette ma-
tière inerte qui ne subira jamais les extrêmes du chaud et du froid,
il nous semble entendre encore les frissons glacés des pauvres en
haillons qu'on rencontre dans toutes les villes de la Grande-Bre-
tagne ; nous voyons encore ces faces maigres et bleues, ces pieds
nus sur lesdalles boueuses, ces grosses mains rouges et crevassées,
cette horrible saleté, livrée de la misère et de la dégradation mo-
rale, et ce spectacle affreux nous émeut profondément. Nous ne
demandons pas à nos confrères de nous excuser d'une digression
aussi étrangère au but de cet écrit : pour être artiste, on n'en sent
que plus profondément, on n'en est que plus ardent à réclamer la
suppression de toutes les laideurs et par conséquent de toutes les
misères. Ajoutons toutefois qu'on aurait le plus grand tort de voir
dans ce rapprochement même un reproche indirect à l'adresse de
lord Stafford. Sa Seigneurie, au contraire, est un des plus fer-
vents et des plus éclairés protecteurs des beaux-arts; on le dit d'une
grande magnificence et d'une grande charité.
LaPL 1 G donne les dispositions du système adopté pour le chauf-
fage des remises ; il consiste dans une circulation d'eau chaude.
(1; Nous avons donin; toutes les dimensions en pieds et pouces anglais, at-
tendu que, de celte manière, on évite une série de petites fractions que la con-
version en mesures françaises ferait naître, et qui cmpêclieraient de saisir faci-
lement les rapports des dimensions entre elles. Les pieds s'indiquent par un
accent aigu ' et les pouces par un double accent " ; ainsi, 6'.0" signifie 0 pieds
6 pouces.
système aujourd'hui très-connu et dont nous ne ferons que rappeler
le principe. Au-dessus du foyer (nous en avons désigné la place en
traitant des dispositions générales du plan du rez-de-ehaussée) est
une chaudière du sommet de laquelle part un tuyau qui, après avoir
circulé dans toutes les pièces à échauffer, revient déboucher dans le
bas de la chaudière; au fur et à mesure que le feu chauffe les couches
inférieures de l'eau de lachaudière, leur densité diminue, elles mon-
tent, et sont remplacées par d'autres couches plus denses, c'est-à-
dire plus froides, qui se chauffent et montent à leur tour, et ainsi
de suite. Il s'établit de cette manière un mouvement de circulation;
l'eau chauffée s'engage dans la branche supérieure du tuyau, ré-
pand peu à peu sa chaleur dans l'air ambiant, et, ainsi graduelle-
ment refroidie, revient, par la branche inférieure du tuyau de circu-
lation, se rendre dans le b;is de la chaudière ; là, elle s'échauffe de
nouveau, remonte et recommence sa course. Au sommet de la chau-
dière est une disposition (jui a pour objet d'empêcher que des acci-
dents n'arrivent par suite de l'expansion de l'eau, en conséquence
de son élévation de température et de la formation même d'une
certaine quantité de vapeur. Cet appareil a été établi par M. Price,
de Londres.
Le tuyau à eau chaude circule dans un canal creusé dans le sol
de chacune des pièces qu'on veut chauffer ; ce canal est couvert
d'une plaque de métal percée de nombreuses ouvertures pour que
l'airde la pièce puisse aisément venir en contact avec le tuyau.
Comme il fallait échauffer à la fois les remises de droite et les
remises de gauche, on a adapté deux tuyaux de circulation à la
chaudière, et en examinant la PL Ifi, on pourra en suivre aisément
les différentes circonvolutions. Les deux branches du départ se
distinguent parfaitement ; mais les branches de retour, en entrant
dans la chambre où est établi le foyer, se trouvent dans un même
plan vertical, et on n'en peut donc voir qu'une seule. Nous avons
donné trois sections du canal de conduite qui compléteront l'intel-
ligence de ce qui précède.
Les Ecurie*.
Pour l'ensemble des écuries, consultez les W. 14et 15; pour les
détails, voyez la PL 17. Les écuries contiennent 24 stalles
divisées en deux groupes de 7 et deux groupes de ô. Chaque écurie
a sa galerie de pansement, dont elle est séparée par une cloison en
bois garnie de fenêtres vitrées pour l'éclairage des écuries. Afin que
cet éclairage fût plus complet, on a établi des châssis vitrés dans la
toiture au-dessus de la galerie. Voyez cette disposition dans la
PL 17 (coupe suivant L M). On remarquera que par cet arran-
gement les chevaux reçoivent toute la lumière par derrière, dispo-
sition excellente. L'écurie est garnie d'une boiserie jusqu'à la hau-
teur de 6' 6" environ; les séparations des stalles sont fixes, avec des
embases et des mains-courantes en fonte; les mangeoires aussi sont
en fonte et munies en avant d'un rouleau cylindrique. Les râteliers
en fonte forment des quarts de sphère; on en voit un qui est indi-
qué en ponctué dans la PL 17 (voy. coupe suivant L 3/). ■
Service général de propreté.
Au premier palier du plan incliné qui sert à monter aux écuries
se voit une ouverture K qui communique avec le trou à fumier
(voy. PL 14). C'est par cette ouverture qu'on jette les balayures
des écuries et des galeries de pansement. Cette position, parfaite-
ment centrale, économise le travail.
3W
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
3Ô0
Les moyens adoptés pour l'écoulement des urines, des produits
des cabinets d'aisance et des eaux pluviales, ont été aussi parfaite-
ment étudiés ; chaque stalle pouvant être occupée tantôt par une
jument, tantôt par un cheval, on y a disposé en conséquence deux
systèmes de rigoles extérieures et de communication avec les tuyaux
d'écoulement cachés dans le sol : a désigne à la fois le point le
plus bas de chaque stalle et l'ouverture grillée par laquelle leseaux
s'échappent; a désigne aussi une grille d'écoulement. Dans la ga-
lerie il a fallu pourvoir ù l'écoulement des eaux provenant soit des
chevaux en pansement, soit même de la pluie, car cette galerie n'est
fermée du côté de la cour que par une balustrade (voy. PL 17). Une
rigole règne d'un bouta l'autre de la galerie, et les lettres e,e, indi-
quent les ouvertores grillées par lesquelles les eaux s'écoulent.
Toutes ces ouvertures , a, a, a... a', a a... e, e, communiquent
avec des canaux d'écoulement dont les directions et les dépendan-
ces mutuelles sont indiquées, PL 14 (plan du premier étage), par des
traits ponctués. En y regardant, on verra que les tuyaux d'écou-
lement de chaque écurie, avec ceux de sa galerie de pansement,
convergent vers huit points c, c, c,... qui désignent le sommet de
huit tuyaux verticaux dont on trouve les extrémités inférieures
marquées en c', c', e'. . dans le plan du re/.-de-chaussée. Là, au
moyen d'embranchements, ces huit conduits verticaux se dégorgent
dans trois conduits horizontaux, d, d, d, qui eux-mêmes déversent
leurs eaux dans un même conduit rf', d', d' , qui se rend directement
dans le trou à fumier.
Les eaux pluviales qui tombent sur le toit ou dans la cour sont
également entraînées dans le trou à fumier ; celles qui tombent sur
la couverture sont reçues dans des chéneaux desservis sur la cour
par quatre conduits verticaux qui arrivent en t\ t\ t', t', et se
déchargent presque directement dans les conduits principaux d',d'.
Les chéneaux extérieurs communiquent avec les conduits ce, ce'..
Les eaux de la «our s'échappent par les ouvertures /", /", f, f. qui
sont les {X)ints les plus bas delà cour et qui communiquent par des
embranchements avec les tuyaux d', d'.
Les produits des cabinets w, w, sont également entraînés dans le
trou à fumier, comme on le voit sur le plan.
Conslrucliong.
Les murs sont en briques recouvertes d'un ciment imitant la
pierre; ils reposent sur des massifs en béton, genre de fondation
très-généralement adopté en Angleterre. Les répartitions des re-
mises sont formées de piliers en pierre et de colonnes en fonte ; les
pieds de celles-ci sont engages dans des embases en pierre. Les con-
structeurs anglais se servent souvent aussi d'embases en fonte sous
lesquelles ils placent une lame de plomb. Kous avons dessiné cette
disposition parmi les détails delà PL 16. Tous les linteaux qui sup-
portent le sol du premier étage sont en fonte; on en voit les plans,
formes et dimensions dans la PL 10. Des voûtes en briques repo-
sent sur ces linteaux, et leurs retombées sont recouvertes par de
petits voùtains qui aident à arvaser le sol de l'étage. Les voûtes au-
dessous des écuries sont toutes recouvertes d'une couche de bitume
(voy. PL 1"), et les voùtains servent de canaux pour porter les
eaux jusqu'aux conduits verticaux c' c'... Le sol au-dessus des voù-
tains étant rendu de niveau par de la maçonnerie, et une petite
fondation étant réservée pour porter les panneaux de séparation des
stalles, on a établi une aire générale de béton dans toute l'étendue
des écuries, et là-dessus on a coulé une aire générale d'asphalte.
Une a.ssise de pierres minces ou de dalles relie la corniche exté-
rieure de l'édifice avec le mur, et neutralise l'effet du surplomb.
{Voy. PL 17).
Cesab DALY.
DE L'HUMIDITÉ D.\NS LES CONSTRUCTIONS
ET DES MOYENS DE LA PRÉVENIR ET d'v REMÉDIER.
MEMOIRE DE M. LÉON VAUDOVKR.
(Suite cl du Voy col. 2«e et SIS;.
Moyens de faire eetser let inconvétiienli de l'humidilé ou de t'en pré-
server dans les cons(ruelion» txitlantet.
Après avoir indi(pié les moyens de prévenir les iiicoiivéïiiciiu de l'Iiu-
inidilé lors de la corislriiciion des bàtiinerits, il nous reste à nous oc-
cuper des moyens à employer pour les faire cesser et pour s'en garantir
dans les consliiiclioiis existantes.
Nous avons déjà l'ail ressortir rinsulTisance des enduits ou peinliires
hydrofiiges pour aiteiiulre le but qu'on se propose ; nous examinerons
s'il n'y aurait pas de moyens plus effioaces pour y parvenir.
Supposons que les murs du rez-de-chaussée d'un bâtiment soieni
envahis par riiuiniditc cl que des elTlorescences extérieures indiquent
que l'intérieur de ces murs est salpèlré; loin de clicrclier à renfenner
rhiimidité dans le mur, il faudra iion-sculcnient lui laisser la possibililc
d'être absorbée par l'air ambiant , mais encore l'aire tous ses efforU
pour en alténuer les causes. A cet effet, on établira des cour.mts d'air
le long des murs , eti contrebas du sol, on fera des caves s'il n'y en a
pas, on posera des revèlements extérieurs cl intérieurs (1), on prendra
eiilin des précautions analogues à celles que nous avons déjà prescri-
tes lors de la construction des bâtiments, en tant qu'il sera possible
de les mettre à exéculion; mais, dans le cas où ces précautions ne
pourraient cire prises après coup, comme cela arrivera souvent, ou.
si malgré cela, les elTels de riiuuiidilé conliuuenl à se manifester, il
fauilra avoir recours à de nouveaux moyens que nous allons décrire.
Pour éviter que l'Iiumidité exislanl dans un des murs d'un bàiinieni ,
eu se produisant à la surface intérieure de ce mur, pénclre dans les
lieux habités, le meilleur parti à prendre est d'élever en avant de ce
mur une cloison en briques dures posées de champ, reliée de dis-
(1) Los revêtements inipcrniéables appliqués aux deux faces d'uo mur sont
plus pernicieux qu'on ne croit. Ils peuvent conduire l'buuiidilé du rci-Ue-
chaussiiti au premier étage en lui dlant tout moj'cn de s'tivaporer par l'acUixi
de l'air; iraus en avons fait plus d'une fuis l'observation. Des revêtements en
zinc, perlés d'abord a une liauleurplus grande que celle où s'cicvail riiumiUité
apiiarciitc, ont été dépassés. Ou y mit successivement des hausses qui rurcal
dépassées A chaque liivcr. Nous rimes exécuter, il y a cinq ou six ans, daiu un
vieux mur de refend, une reprise en sous-œuvre qui ne s'élevait qu'a 1 miu-e
au-dessus du sol. Cette reprise Tut faite en meulière et mortier liydraulique.
On TutoiiliRé de reposer les lambris de liautcur recouvrant les deux laces Un
mur avant que la reprise fl'it complètement sèche ; eh bien , au bout de quelques
mois, l'huuiidiié, ainsi encaissée, gagna le plafond, élevé à plus de 2 luètres au-
dessus de la reprise. Depuis ce temps il a été impossible de faire disparaître les
taches d'humidité i la corniche. Le vieux mur étal^ salpêtre , et tout nous fait
craindre que les portées des solives du premier plancher ne se pourrissenL
'{Sou dt St. H. J.)
351
REVUE DE L'ARCHITECTURK KT DES TRAVAUX PUBLICS.
352
tance en dislance avec le mur même , mais de manière à laisser un
intervalle de 2 ou 3 centimètres qui permette à l'air de circuler entre
le mur et cette cloison , dont l'épaisseur sera celle d'une brique de
0"° 05. Pour surcroît de précaution, les briques recevraient, sur leur
paroi inlérieure, une couche de bitume, surtout celles qui seraient en
contact avec le mur, et la surface apparente de celle cloison serait re-
couverte d'un enduit de plâtre qui, étant bien sec, pourrait recevoir
les lémures ou le papier qui, pour plus de précaution, pourraient être
posés sur porte-tapisseries. Ce système offrirait toutes les garanties
désirables , et on n'aurait plus rien à redouter de rbuniidité, dont le
corps du nmr continuerait, il est vrai, à être pénétré, mais qui serait
sensiblement diminuée parle courant d'air établi entre la cloison et la
surface du mur (1). Pour plus d'économie, on pourrait appliquer sur le
mur humide des montants et des traverses de bois, sur lesquels on
clouerait des lattes qui recevraient ensuite un enduit, et formeraient
ainsi une cloison très-mince et isolée du n)ur; mais ces montants se
trouvant exposés à rimnjidité du mur avec lequel ils seraient en con-
tact, on ne pourrait s'en promettre une longue durée; il faudrait, dans
ce cas, goudronner les bois, ne les appuyer tonire le mur que de dis-
tance en distance, ou intei poser du plomb du coté où ces montants se-
raient exposés à rinfluencc de l'humidité; de plus, une circulaiiun
d'air sera toujours nécessaire (2).
Le principe du revêtement isolé est de tous les moyens celui qu'on
doit préférer, par les raisons déjà déduites; mais comme, dans certains
cas, il faut éviter de diminuer la grandeur des pièces par celle doublure,
qui aura au moins 7 à 8 centimètres y compris l'isolement, nous exami-
nerons s'il n'y aurait pas quelque autre système à adopter.
Si le mur dont il s'agit sépare deux pièces, et qu'il soit nécessaire de
se préserver de l'humidité de chaque côté de ce mur, on devra adopter
le système de la cloison isolée : car, si l'on appliquait directement sur
le nmr, soit un enduit, soit une composition, ou un revêlement imper-
méable quelconque, l'humidité, ainsi emprisonnée, augmenterait et
exercerait des ravages qui , pour n'être pas apparents , n'en seraient
pas moins très-funestes. Si, au contraire, l'humidité ne se manifeste
que dans une des deux pièces, et qu'on parvienne à la neutraliser d'un
seul côté , elle augmentera évidemment du côté opposé, mais sans être
aussi nuisible que dans le premier cas, puisque du côté qu'on n'aura
pas préservé elle pourra recevoir l'influence de l'air et être alternative-
ment absorbée dans une certaine proportion. Nous pensons, dansée
cas, qu'on pourrait, à la rigueur, éviter l'isolement et appliquer directe-
ment sur une des parois de ce mur les enduits ou revêlements qu'on
considérera comme les meilleurs préservatifs ; nous devons dire, néan-
(IJ C'est par une disposition analogue que les anciens assainissaient les piè-
ces destinées aux bains ; non-seulement ce genre de revêtement isolé les pré-
servait de l'Iiumidité et du froid, mais il leur permettait, en outre, de faire
circuler la chaleur derrière les parois des salles, comme nous avons déjà vu
qu'ils la faisaient circuler sous les dallages. Dans l'aiiliquité, on fabriquait des
tuiles de terre cuite qui, par leurs dimensions et leur peu d'épaisseur, se prê-
taient on ne peut mieux à ce genre de revêtement. On conçoit, en effet, que
ces cloisons auront toujours l'inconvénient de diminuer l'étendue des pièces
dans lesquelles elles seront pratiquées ; il y aurait donc avantage à ce qu'elles
fussent aussi minces que possible, et l'on y parviendrait en fabriquant des es-
pèces de dalles spécialement destinées à cet usage; mais, en tout cas, la terre
cuite est la matière qui nous paraît la plus propre à remplir le but qu'on se
propose. (^'ote de l'auteur.)
(2) Les lambris en menuiserie ne sont autre chose que des cloisons isolées
analogues à celles que nous proposons, et il est bien constant qu'en lambris-
sant, en partie ou en totalilé, si c'est nécessaire, une pièce dont les murs sont
humides, on aura beaucoup fait pour se garantir de l'humidité; mais néan-
moins on pourra encore en redouter les effets si l'on n'a pas soin d'établir
derrière ces lambris une circulation d'air capable d'en atténuer la cause prc-
niièrc et d'assurer la conservalion du bois, qui devra de plus être gou-
dronné. (7Vo(e de l'auteur.)
moins, qu'il y en a peu qui conserveraient longtemps nue adhérence
complète avec un mur dans lequel l'huniidiié continuerait à exister, sur-
tout sur les murs de pierre, qui se prctenl diflicileiueni à l'applicaiioii
des enduits; c'est pounpioi nous préférons à un enduit appliqué une
composition susceptible de pénétrer dans l'inlérienr du mur, quelle que
soit sa consiruclion, telle que celle proposée par .MM. Tkénardttd'Arcet,
qui nous semblent avoir résolu ce problème avec succès. Cei enduit
pourra égalenu'nl élre apliqué à l'inlérienr d'un mur de face, pourtu
qu'il soit dans une exposition favorable, car, l'une des parois recevant
l'influence de l'air, l'humidité ne sera pas concentrée dans l'intérieur du
mur.
Malgré les avantages incontestables qu'on peut, dans certains cas, se
promettre de l'enduil d'Arcet, on pourrait employer avec succès un sys-
tème sans isolement, composé de carreaux de faïence vernissés, posés
avec un bon mortier; mais ce genre de revêtement n'étant pas appli-
cable à toutes les pièces d'une habitation , nous pensons qu'il suffira de
retourner les carreaux en plaçant l'émail du côté du mur. La face brute
serait susccpiible de recevoir un enduit quelconque, et par conséquent
tel genre de décoration qu'on voudrait. Ce revêtement pourrait être
aussi composé de carreaux ou de tuiles de Bourgogne, biluminées. En
rappel.int ici ce (jue nous avons dit sur l'emploi de terres émaillées,
nous pensons que , dans plusieurs circonsl.Tiices , on peut les employer
avec avantage. Déjà des bouchers et des charcutiers de Paris ont adopté
ce genre de revêlement, qui recevrait une utile application dans cer-
taines usines, dans les laboratoires, dans les cuisines, etc. On pourra,
à l'aide de revêtements de ce genre, qui sont en usage dans plusieurs
pays, se garantir de l'humidité cl obtenir facilement une gtande pro-
preté.
Un autre revêtement à appliquer sur les murs, et dont l'ellicacité
est reconnue, consiste dans des feuilles de plomb extrêmement minces,
étendues sur toute la surface; nous n'hésitons pas à en recommander
l'usage, pourvu que l'on ait soin de ne les appliquer que sur une seule
face ; car, autrement, l'humidité préexistante dans le mur s'y trouverait
hermétiquement renfermée. La seule difOculié que présente l'emploi
des feuilles métalliques consiste dans le choix de la composition à em-
ployer pour les coller, afin qu'elle puisse sécher facilement et se fixer
sur les cmluiis de difl'érenles natures sur lesquels on peut avoir à les
appli(|ucr. Il est inutile de dire que, quand on voudra appliquensur le
mur, soit l'enduit d'Aretl, soit un ciment ou une composition hydrofuge,
ou même un revêtement posé sur mortier, il faudra dépouiller le mur hu-
mide de son enduit, le laisser sécher pendant quelque temps, et refaire
ensuite un nouvel enduit (1).
Résun)ant les moyens à l'aide desquels on pourra comballre avanta-
geusement l'huniidiié dans les consiructions existantes, nous recomman-
derons particulièrement :
1° Le système de revêlement avec isolement et circulation d'air;
2° Pour les cas où les préservatifs pourraient s;ins inconvénient
élre appliqués directement sur le mur, l'enduit d'Arctt et les enduils
de bitume, les feuilles métalliques, les carreaux émaillés ou biiu-
minés.
Quant à l'humidité qui pénétrerait dans les lùtimenis existants, par
le sol même, il sera facile de .s'en garantir par des moyens qui devront
être les mêmes que ceux que nous avons déjà indiqués en Iraitant des
précautions à prendre lors de la construction. Une aire générale d'as-
phalte étendue sur le sol sera toujours le moyen le pins simple et le
plus sur pour éviter l'humidité quand il s'agira d'un rez-de-chaussée
sans cave au dessous.
(1) C'est ici le cas de remarquer que les enduits de mortier de sable et
chaux hydraulique, lissés à la truelle, qui sont excellents pour résister à l'hu-
midité, sont tout à fait impropres à recevoir la peinture à l'huile, qui ne peut
y adhérer et se décompose. (i\o/e de l'auteur )
353
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
354
Il n'y a, suivant nous, aucun moyen d'éviler les dangers que pré-
sente l'habitation de constructions trop récemment exécutées; pour
hâter, dans ces cunstruclions , i'évapumtion de l'humidité, il faut avoir
recours à la circulation d'un air vif ou chaud.
Insalubrilé des rei- de-chaussée .
On a dernièrement Inséré,, dans quelques journaux , un article ainsi
conçu :
« Des recherches statistiques opérées dans les hôpitaux de Paris ont
«constaté une mortalité effrayante dans la chisse des portiers, qui, avec
(I les habitants des rp/.-dechaussée, forment presque exclusivement la
u totalité des malades atteinis de philiisie et de rhumaiisme aigus. Ces
«calculs, présentés à l'Académie de médecine, semblent devoir pro-
« voquer, près du conseil de salubrité, quelques mesures hygiéniques
« relatives h l'hahitaiion du rez-de-chaussée. »
Les termes de cet article sont trop généraux pour pouvoir être dis-
cutés, et nous n'adopions les faits qu'il avance qu'avec une extrême
réserve; car il nous semble difficile d'arriver, par une semblable sta-
tistique, à établir une moyenne à peu près exacte, quand on pense à
toutes les circonstances qui, en pareil cas, doivent être prises en con-
sidération, telles que l'exposition des lieux habités, les conditions de
construction, d'aérage, de situation, dans lesquelles ils se trouvent;
l'âge des personnes qui les habitent, leur état de santé normal anté-
rieurement à la situation accidentelle dans laquelle elles se trou-
vent, etc. , etc. Néanmoins la question mérite d'être étudiée sérieuse-
ment, et nous essaierons, sinon de l'entreprendre, au moins d'émettre
quelques idées à ce sujet.
En général, à Paris, les rez-de-chaussée habités sont dans des con-
ditions très-défavorables quanta la salubrité; la plupart donnent sur
des cours (les rez-de-chaussée sur les rues étant ordinairement occunés
par les boutiques), où ils prennent le jour et l'air; ces cours, le plus
souvent étroites et profondes, sont entourées de bâtiments élevés qui
empêchent le soleil d'y pénéirer. Si l'on ajoute à cet inconvénient la
nature des constructions dans lesquelles aucune précaution n'est prise
contre l'humidité, on comprendra combien il peut être dangereux d'ha-
biter des lieux semblables.
Mais un rez-de-chaussée situé sur le derrière d'un hôtel, ou même
d'une maison de moyenne importance, et élevé convenablement au-
dessus du sol, à l'aide de vastes caves ou d'un étage souterrain, dont
les pièces auront une hauteur convenable et seront ouvertes sur un
jardin ou sur une vaste cour, au midi ou au levant, pourra toujours
être habité sans danger. Ce serait donc à tort ()u'on soutiendrait que
tous les rez-de-chaussée sont insalubres. Les rez-de-chaussée ne sont
dangereux à habiter que lorsqu'ils sont humides, privés d'air, de lu-
mière et de soleil, el, à cet égard, les demeures des portiers sont dans
les conditions les plus déplorables. Outre ces inconvénients, les portiers
sont encore exposés à des courants d'air continuels, parla situation de
leurs loges, généralement placées au pied des escaliers et sous les
portes cochères. Par là on peut juger (|ne d'autres causes que celle de
l'humidité contribuent à l'insalubrité de certains rez-de-chaussée et
particulièrement à celle des loges de portiers, et qu'en remédiant, dans
une consirueiion, aux inconvénients de l'humidité, on n'aura pas tout
fait pour la rendre saine el habitable (1).
(1) A Londres, on est parvenu à rendre sains et habilables, non-seulement
les rez-de-chaussée, mais aussi des étages situés en contre-bas du sol des rues.
Ces étages sont préservés de l'humidité du sol par un isolement assez large qui
favorise la circulation de l'air ; de plus, la grande largeur des rues et le peu
de hauteur des maisons permettent au soleil de pénétrer, même dans celte
partie inférieure des habitations, où, d'ailleurs, on ne couche pas; et, comme
l'exposition de leur façade varie, on a soin de réserver par derrière un espace
assez vaste, planté ordinairement en jardin, sur lequel s'ouvrent les fenêtres
de la face opposée à celle de la rue. Cet étage n'a donc aucun des incouvé-
A Paris, avec nos rues étroites, nos maisons d'une hauteur déme-
surée, nos cours humides et sombres, il est impossible que certaine
rez-de-chaussée puissent être habités sans inconvénient; el il serait
préférable de les utiliser de toute autre manière. Quant aux demeures
réservées aux portiers, il y a de la cruauté à forcer des hommes à
vivre dans des lieux essentiellement inhabitables. Celle question nous
semble donc mériier de fixer l'attention, et nous émettons le vœu
qu'elle puisse être prise en grande considération par le conseil de
Salubrité.
Inconvénients de l'humidité sur les œuvret d'art.
indépendamment des désastreux effets de Thumidilé sur les consinic-
tions en général et dans les lieux habités , nous devons signaler ceux
d'un autre genre qu'elle peut exercer sur les œuvres d'art placés à l'in-
térieur et à l'extérieur des édifices.
La peinture appliquée sur les monuments mêmes doit l'être dans les
conditions de durée les jilus rassurantes, pour remplir convenablement
son but.
Les anciens nous ont laissé, à cet égard, des exemples que nous ne
nous attachons pas assez à suivre. En examinant les peùitures antiques
encore existantes dans les ruines de Pompéîa, qui, après être restées
enfouies pendant quinze siècles , nous apparaissent encore aussi
fraiches, aussi éclatantes que si elles venaient d'être terminées, il est
impossible de ne pas proclamer rexcellence des moyens employés pour
leur donner une aussi longue durée. Les Allemands ont fait , à ce sujet,
des recherches irès-minuiieuses, et ils paraissent être parvenus à des
solutions presque certaines, autant qu'il est permis d'en juger par
quelques résultats satisfaisants obtenus à Munich.
11 est certain que, soit par la nature des matériaux employés à la
construction, soit par la composition des mortiers et des enduits appli-
qués sur les murailles, soit enfin par la manière dont les couleurs
étaient préparées et étendues sur les surfaces à décorer, il n'était sorte
de précautions qu'on ne prît pour lutter contre les chances de desiruc-
tion qui auraient pu résulter des variations de l'atmosphère, dans un
climat cependant plus favorable que beaucoup d'autres (1).
Le caractère de durée fut toujours celui que les hommes cherchèrent
à imprimer h leurs œuvres. Aussi, plus tard, voyons-nous les chrétiens
remplacer, par des mosaïques composées de matières indestructibles,
les procédés de la peinture des anciens. Enfin, quand la renaissance
des arts eut rendu plus exigeant sur les moyens d'exécution, les Ita-
liens employèrent la peinture à fresque, à laquelle nous devons les
principaux chefs-d'œuvre de l'école florentine et de l'école romaine.
L'usage qu'on a voulu en introduire en France, et qu'on s'est trop
hàié de proscrire, par des motifs qui ont peut-être été avancés avec
trop de précipitation , nous engage à donner quelques explications sur
la matiière dont les fresques se font en Italie et sur les causes qui en
ont assuré le succès.
Eh Italie, on bâtit moitié en. pierre et moitié en briques; les murs
intérieurs et les voûtes sont ordinairement en briques; de sorte que,
lorsqu'ils sont destinés à être décorés de peintures, ils sont plus propres
à recevoir des enduits et se prêtent, par conséquent, bien mieux aux
nients d'un étage souterrain, et il présente, d'ailleurs, l'avantage de permet-
tre aux eaux ménagères de s'écouler directement dans les égnuts, sans parcou-
rir, comme à Paris, le sol de la voie publique : quant à l'imniidité, toutes les
précautions sont prises (lour s'en garantir, et ces précautions, sur lesquelles
nous avons pris des renseignements sur les lieux, sont tout 1 fait analogues 1
celles que nous avons réunies dans cette Instruction. (Voyez t'ig. 9.)
[Kote de l'auteur.)
(1) On ne peut douter que le mode employé dans les peintures de Pompéia,
qui n'étaient que de simples décorations, n'ait été le même pour les peintures
historiques et monumentales dont parlent les anciens auteurs.
(A'o/« dt l'auttuT.)
T V. 23
355
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
55C
procédés de la fresque. En France, et à Paris paniculièremeiit, où la
pierre abonde, on construit les monuments tout en pierre, et c'est sur
des murs pareils qu'on a voulu essayer de faire des peintures à fresque.
Les principaux inconvénients d'une telle construction, pour ce genre
de peinture , sont d'abord la difficulté d'appliquer un enduit sur un
mur de pierre; puis la pierre est une niaiicre spongieuse très-impres-
sionnable aux iniluences atmosphéri(|ucs et aux effets de Ibumidité en
général, si nuisible dans notre climat. Si l'on ajoute à ces inconvé-
nienls, contre lesquels on n'a peut-être pas assez essayé de lutter, la
difficullé que présentent les procédés d'exécution, on s'expliquera
pourquoi on a renoncé à la peintuie à fresque; mais comme on ne pou-
vait renoncer à exécuter des peintures monumentales, quelques peintres
ont adopté la peinture à la cire, comme jie présentant pas d'embns et
permettant, tout en conservant le mat de la peinture à fresque, d'ar-
river à une richesse de tons supérieure. D'autres, lidèles à la peinture
à l'huile, ou ne voulant pas accroître les diflicultés matérielles de
l'exécuiion, se sont contentés de peindre sur les murs préparés à l'aide
de l'enduit d'Arccl, comme ils auraient peint sur une toile. Ces divers
systèmes ont été mis en prali(iue sur les murs de pierre, ce qui, selon
nous, ne doit être nullement rassurant pour la durée de ces peintures,
surtout lorsque ces murs sont exposés aux influences les plus nuisibles
de l'atmosphère : car alors, quelles que soient les précautions prises à
rinlérieur, l'humidité qui pénètre dans le mur, par le sol d'abord, et
par les parois exléileures ensuite, finira par atteindre l'intérieur à tra-
vers les pierres, qui sont le plus souvent tendres, et, par conséquent,
spongieuses. Nous ajouterons que, d'après la manière de construire à
Paris, les joints des murs en pierre ont environ 1 cenliniètre d'épais-
seur et sont en mortier ou en plâtre , de sorte qu'il est irès-diflicile
qu'une préparation quelconque, appliquée sur le mur, agisse de la
même manière sur les joints que sur la pierre ; cette préparation péné-
trera différemment dans la pierre et dans le ciment ou le plâtre. L'air
exercera, par la même raison, une influence toute différente sur les
pierres et sur la matière dont les joints seront faits, cl ces joints de-
viendront bientôt apparents (1). On peut en conclure qu'on ne saurait
hésiter sur la manière de construire les murs destinés à recevoir des
peintures, soit à fresque, soit à la cire, soit à l'huile. Ces murs doivent
être construits ou en pierre de meulière, ou en bri(pies, afin d'être sus-
ceptibles de bien recevoir les enduits et de pouvoir ainsi éviter l'incon-
vénient des joints. Lorsque la stabilité de la construction ou rordon-
nance extérieure exigera que tel mur soit en pierre, il sera facile de le
revêtir intérieurement d'une doublure de briques; ce qui aurait le
double avantage d'éviter les inconvénients auxquels sont sujets les
murs de pierre, et de préserver la peinture de toute humidité, si l'on
a soin surtout de laisser un isolement suffisant entre la construction de
briques et celle de pierre (2).
(1) Déjà on peut remarquer cet effet ilaus les peintures exécutées dans cer-
taines parties de l'église Notre-Dame-de-Lorette. Ce que nous venons dédire
à l'égard des murs est également applicable aux peintures sur voûtes en pierre,
quant à la difficulté d'appliquer un enduit et i l'apparition des joints.
[Note de l'auleur.)
(2) Le Jugement dernier, qui vient d'èlre exécuté à Munich par iM. Corné-
lius, a été peint à fresque sur un double mur de briques isolé du mur exté-
rieur, auquel il n'est relié que de distance en distance, pour en assurer la soli-
dité. La copie du Jugement dernier de Miclicl-Ange, exécutée par Sigalon, a
été placée à l'école des Beaux-Arts avec les plus grandes précautions; celte
copie, qui est sur toile, est entièrement isolée derrière, et deux étages de
planchers la rendent accessible dans toute sa hauteur. Nous croyons donc qu'on
s'est trop hâté de proscrire la peinture à fresque, et l'argument si souvent mis
en avant, qu'elle ne peut résister dans notre climat, nous semble tout à fait
sans fondement; rien ne serait plus facile que de parvenir à exécuter des fres-
ques tout aussi duraliles que celles d'Italie, pourvu qu'on se donnât la peine
de prendre les précautions nécessaires. [Note de l'auteur.)
Les réflexions qui précèdent nous ont été suggérées par la belle
peinture de M. Delaroche à l'école des Beaux Arts, pour la durée de
laquelle nous ne sommes pas sans inquiétude. Nous regrettons que,
dans cette circonstance, on n'ait pas ein[)loyé le moyen que nous avons
indiqué plus haut de la doublure de briiiues, et qu'on ait ainsi livré à
la pierre une œuvre aussi capitale; aussi nous craignons qu'elle n'ait
beaucoup à redouter de l'influence pernicieuse de notre climat. Le mur
sur lequel celte peinlure a été exécjilée est en pierre; il n'y a pas de
cave sous le sol, cl sa surface extérieure est exposée au couchant;
dans de telles conditions, ce mur est snjet à s'inipn-gner d'humidité,
tant par sa base que par ses parois extérieures exposées à la jdnie. Cette
humidité, en pénétrant forcément dans le mur, se propagera, et Unira,
dans un délai plus ou moins long, par atteindre la surface intérieure.
l'ci\i\u\l d'Arcct, appli(pié à l'intérieur, parviendra-l-il complètement
à l'arrêter? telle est la question ; car la coupole du Panthéon, exécutée
d'après les mêmes procédés, est dans des conditions toutes différentes,
et ne saurait être (irise pour exemple.
Si l'humidité exerce son action sur les peintures faites dans l'inté-
rieur de nos monuments, celle action sera bien plus directe et plus
nuisible sur les oriiemenls de sculpture placés à l'extérieur, surtout
quand ils sont eu pierre; dans cette circonstance, l'enduii Thénard el
d'Arcel sera d'un grand secours. Sa composition et la manière de
l'emplover sont trop connues pour qu'il soit nécessaire d'entrer dans
de plus amples détails à cet égard. M. Kiif<, entrepreneur de pein-
ture, en a fait d'heureuses applications : s'occupant plus particulière-
ment de la peinture à la cire, il était, plus qu'aucun autre, à portée de
se livrer au perfectionnement d'un procédé de ce genre; les travaux
déjà exécutés par lui pour préserver des ouvrages de sculpture en
pierre des eff'eis de rhumidilc ont pleinement réussi ; nous citerons
entre autres les quatre groupes de l'arc de triomphe de l'Étoile , les
huit statues assises de la place de la Concorde, et les deux bustes qui
décorent l'entrée de l'école des Beaux-Arts.
M. Ftwe', après avoir appliqué à chaud l'enduit hydrofuge, le couvre
de deux ou trois couches de peinture à la cire, de telle couleur qu'on
désire, et à laquelle il donne l'apparence du grain de la pierre. La pré-
paration hydrofuge peut également être appliquée avec avantage sur
les monuments funèbres exécutés en matériaux susceptibles de se dé-'
lériorer facilement, sur des parois de muraille, même extérieures,
pourvu qu'elle prévienne l'envahissement de l'humidité , el qu'elle ne
la concentre pas.
Dans noire climat, le marbre même n'est pas exempt des atteintes
de l'humidité; lorsqu'elle séjourne longtemps, el que la poussière s'y
attache, elle engendre des lichens qui finissent par noircir el former
une croiite qui enlève au marbre sa trans()arence et à la sculpture son
effet. On a cru pouvoir préserver le marbre de ces effets, en l'impré-
gnant d'une composition à l'aide de laquelle il devait rester pur el
conserver sa couleur naturelle. Le premier essai de ce genre a été fait
sur les sculptures de la fontaine de Grenelle; l'autre, à notre connais-
sance, sur le piédestal de la slalue de Louis XIV, de la place des Vic-
toires. Non-seulement ces essais n'ont point réussi, mais ils ont en-
crassé les marbres el en ont altéré la couleur au point de les ramener
à un état pire que celui où ils se trouvaient après avoir été abandonnés
.à l'intempérie des saisons. Nous en concluotis que, pour conserver le
marbre, il est inutile d'employer des compositions arliGcielles; que
cette matière n'a rien à redouter de l'humidité, si ce n'est quelques
lichens et des taches plus ou moins désagréables â la vue, et qu'il suffit
d'épousseter, brosser et laver les monuments de marbre exposés a l'air
tous les cinq ou six ans, si on veut leur rendre leur état primitif.
En terminant cette instruction, nous sommes loin de prétendre avoir
résolu toutes les questions qui se rattachent à celle de l'humidité et de
sa funeste influence. Toutefois, en passant en revue les faits principaux
qui peuvent se produire, nous espérons avoir établi quelques principes
généraux, susceptibles de servir de base à des études plus complètes
3&7
RKVUK DK L'ARCHITECTURE ET JJKS TRAVAUX PUBLICS.
358
et plus approfondies, ei que rexpérience seule pourra rendre con-
cluantes. *
Explication des fiyuns de la planche 18.
La Fig. 1 indique la manière la plus sinfiple dont on pourrait établir
le revêlement extérieur en d:ilips de |)ierrc.
A, mur ; U, leuille de plomb appliquée sur le lit supérieur de la der-
nière assise ; C, planclior posé sur lambourdes et béion; D. lambris de
menuiserie formant rc\êleuienl intérieur; £, revers en asplialle sur
béton, nécessaire pour proléger le pied du mur; F, dalles en pierre,
avec isolement; G, vcnlonse destinée à introduire l'air dans le vide
laissé derrière les dallis.
Fig. 2. Disposition d'une banquette saillanie destinée il proléger le
pied d'un monument, avec revêtement analogue à celui de la figure
prccéilcnie.
A, mur; B, leuille de plomb; C, dallage posé sur bélon ; D, revête-
ment en marbre ; E.. dalles extérieures séparées du mur; F, banquette
saillante au pied du mur; G, ventouse pour l'inlroduclion de l'air dans
l'intérieur de la bancpiclte; U, conduit servant à introduire cet air dans
les pièces du rez-de-chaussée, où il pourrait servir à alimenter les
foyers.
Fig. 5. Dallage établi sur de petits murs en maçonnerie avec iso-
lement.
Fig. 4. Dallage établi sur constructions en briques avec isolement.
Fig. 5. Coupe d'un étage souterrain dans lequel on voudrait éviter
les inconvénients à l'aide d'un contre-mur en meulière avec enduit hy-
draulique.
A, mur souterrain; fi, conlre-niur en meulière avec enduit hydrau-
lique; C. mur supérieur; D, extrados de la voûte; E, plancher.
Fig. C. Revêtement de briques établi dans le même but. Dans l'un
et l'autre cas, on placera des feuilles de plomb ou de tout autre obstacle
imperméable à deux hauteurs différentes F et G; H, revêtement en
briques isolé du mur souterrain, avec enduit hydraulique.
Fig.'l. Coupe d'une habitation située sur la déclivité d'une colline.
Pour éviter les inconvénients de l'humidité, on propose de laisser un
isolement notable A entre les bâtiments et le terre-plein, d'établir avec
le plus grand soin un mode convenable pour l'écoulement des eaux par
une rigole B. enfin de tout disposer pour faciliter le plus possible la
circulation de l'air. A l'orangerie de Versailles , qui est adossée à un
terre-plein, l'écoulement de l'eau provenant du sol supérieur a été éta-
bli avec le plus grand soin, afin de préserver le mur de soutènement
des inconvénients de l'humidité.
Fig. 8. Cloison de briques sur champ, formant revêtement avec iso-
lement sur une face de mur humide.
La Fig. 9 indique la disposition générale des plus simples maisons
de Londres : on voit que le sol des rues est toujours exhaussé au-
dessus du niveau du sol naturel, afin que l'étage inférieur consacré aux
dépendances, cuisines, etc., ne soit pas précisément un étage souter-
rain et que les eaux ménagères puissent s'écouler directement dans les
égouts. L'isolement qui existe entre les murs de faoe et la voie publi-
que forme une espèce de fossé ou petite cour basse, Irès-commodc pour
le service. Lorsque ce fossé est assez large, on y dispose un escalier
extérieur qui permet de communiquer du dehors dans l'étage bas sans
passer dans l'intérieur de la maison. La cave placée sous le trottoir
serti contenir le charbon de terre, qui peut y être introduit par un trou
percé dans la voûte.
A, égout de la ville établi au-dessous de la chaussée fi (1); C. cave
creusée sous le trottoir Cet dont la voûte est percée d'un trou E, pour
l'introduction du charbon; F, fos-sé on petite cour basse; G, étage bas
consacré au service; H, sol d'un petit jardin ; J, palier à mi-oUge;
A', niveau du sol naturel.
Fig. 10. Plan du rez-de-chaussée de cette maison.
Addiliont de M. H. J.
Nous avons apporté aux dispositions de la Fig. 2 quelques mod (1-
cations indiquées dans la Fig. \ 1 , d'après les motifs donnés dans noire
note, col. 321. A, corps du mur en pierre; B, feuille de plomb posée
au-dessus de la moulure du socle, au lieu d'être en dessous; C, dal-
lage; D, revêtement en marbie scellé au mur; E, couche de bitume
posée entre deux bétons et soudée exactement à la rive de la feuille de
plomb; F, socle en pierre dure et compacte , dune seule assise, por-
tant 0°" 70 d'épaisseur au moins, pour ([iie le rejaillissement des eaux
pluviales ne puisse le dépasser; G, enduit eu asphalte, engage dans une
feuillure pratiquée sous la banquette //, et posé sur bélon.
Dans la Fig. S, il est indispensable de prolongera feuille de plomb
ou l'enduit en bitume F jusqu'au parement du contre-mur fi, et de.re-
couvrir ce parement d'un enduit en bitume soudé à la couche horizon-
tale fi, et se prolongeant jusqu'à l'assise saillante ; autrement l'Iiumidilé
entrerait entre la rive de la couche de bitume F et le parement du con-
tre-mur B, plus dans toute la hauteur de la face verticale de ce con-»
tre-mur; car si le contre-mur B est imperméable, il faut faire le mur
entier de la même manière et supprimer la feuille de |)lonib F, qui se-
rait superflue; si, au contraire, il n'est pas imperméable, et nous en
sommes convaincu, il faut absolument jirolonger le préservatif par-
tout où l'humidité peut passer.
Fig. 6. On mettrait une couche de bitume entre le mur cl le pare-
ment en brique //, dans toute la hauteur, en ayant soin de souder cet
enduit à la couche F. Il serait bon qu'on endui.-ii également le dessous
de l'assise saillante, afin que lliumidite ne pût remonter par là. Dans les
Fig. 5etC, il faudrait que le dessous des bunbourdes arrivât au niveau
de la feuille de plomb G, comme dans la Fig. V».
Fig. 7. La voûte souterraine A sera recouverie d'une chape en bi-
tume se mariant avec la couche de bitume ou la feuille de plomb que
nous proposerons de passer sous le mur de face coniigu. Il serait en-
core mieux que le biiiime du mur se prolongeât jusqu'à linirados de la
voûte yl, en suivant un joint entre deux rangs de voussoirs. Celte couche
de bitume dans le joint intercepterait l'humidilé, qui s'iufillrerail dans
l'épaisseur de la voûte par les terres adossées au mur. Et si l'on voulait
rendre le passage voûté A parlaiicmenl sain, il faudrait que lu chape
de la voûte se prolongeât sur toute la hauteur de la face extérieure du
mur adossé au terre-plein, et traversât même l'épaisseur du mur à sa
base.
La Fig. H est, comme nous l'avons dit plus haut, une modiCcaiion
à la Fig. 2.
(1) Il se trouve dans le dessin original une erreur que nous nous sommes
fait un scrupule de reproduire exactement, en indiquant toutefois par un tracé
ponctué la construction véritable, telle qu'on la voit à Londres, et telle qu'elle j
doit tire. En effet, si les eaux ménagères étaient amenées par un conduit ayant
son issue à la partie inférieure de l'égout, comme on le voit dans le dessin, il
arriverait souvent que ces eaux, au lieu de s'écouler, reflueraient dans la cuisine;
il y a plus, par les temps de pluie, l'eau des égoult, qui monte fréquemment
jusqu'à la voûte, inonderait infailliblement l'étage inférieur de la maison, dont
le sol est ici presque au même niveau que celui de l'égout. I,e conduit des eaux
de cuisine doit venir se décharger dans l'cgoul par le haut, comme les lignes
ponctuées de la ligure 9 l'indiquent.
—90t>—
359
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBIJCS.
MO
PROJET D'HOPITAL POUR 800 MALADES.
Depuis longtemps les hôpitaux àe Paris ne suffisent plus aux
besoins de la population.
La plupart ont été établis dans des édifices bâtis originairement
à l'usage des communautés religieuses, et auxquels on a ajouté des
constructions accessoires pour les mieux approprier à leur desti-
nation nouvelle.
Malgré ces modifications, ces accroissements successifs , malgré
les elTorts tentés pour améliorer le service et augmenter le nombre
des lits, on peut dire que Paris ne possède pas encore un hôpital
qui présente un ensemble satisfaisant.
Aucun ne présente une disposition largement comprise , offrant
à la fois toute la salubrité possible , la meilleure répartition dans
le service de santé, une surveillance active, une grande facilité
dans le service général, et la plus grande économie : toutes con-
ditions cependant indispensables à remplir.
Ces motifs, et l'insuffisance toujours croissante des lits pour
les besoins de la population, ont fait sentir le besoin d'uu hôpital
nouveau, construit sur des données positives.
C'est donc agir dans l'intérêt public que de rechercher les
moyens d'obtenir tous les avantages que nous venons de signaler.
La tâche est difficile, rien de ce qui existe n'étant directement
applicable à la solution du problème.
Pour atteindre le but que nous nous sommes proposé, nous
avons dû nous tracer un programme renfermant toutes les con-
ditions à réaliser dans la disposition de ce plan.
Ces conditions sont essentielles; la plupart sont indépendantes
de l'art , et toutes ne peuvent être bien comprises qu'après des
études sérieuses faites dans les hôpitaux mêmes, à la suite d'entre-
tiens avec les chefs de service, seuls aptes à sentir les inconvé-
nients ou les avantages de telle ou telle distribution.
Voici la série des questions auxquelles il fallait trouver une
réponse satisfaisante avant de pouvoir rédiger même le pro-
gramme d'un hôpital :
r Quelle quantité de malades devrait contenir un hôpital?
2° Quelle serait la meilleure disposition générale à donner aux
salles ?
3° Quel nombre de malades devrait contenir chaque salle î
4" Quelles sont les dépendances indispensables de chaque salle,
et de quelle façon devraient-elles être disposées?
5» Quels sont les besoins et les convenances de la pharmacie et
le ses dépendances ? '■
6" Quels sont ceux de la communauté des religieuses ?
7° Quelle est la meilleure disposition à donner aux bains et à
la cuisine?
8° Aux séchoirs et à la lingerie?
9° Quelle devrait être l'importance de l'administration; la
composition de son personnel ?
10° Quelles devraient être la disposition et les dimensions de
la chapelle?
tl° Quelles sont les dépendances d'un hôpital, et comment doi-
vent-elles être distribuées par rapport à l'édifice principal ?
12° Quelles dispositions convient-il de prendre pour l'assainis-
sement de tout le rez-de-chaussée et pour le service général ?
Sans entrer dans les détails , tels sont les principaux articles
dont la solution est nécessaire pour la rédaction d'un bon pro-
gramme â'bôpital.
Je vais maintenant rechercher la valeur et la raison de chacun
de ces différents articles, les rapports qu'ils ont entre eux, et
le genre de construction le plus convenable à adopter sous le
triple rapport de l'art, des convenances et de l'économie.
Aidé du mémoire de l'Académie des Sciences, de renseigne-
ments que m'ont fournis des personnes spéciales d'une grande
autorité, et des observations que j'ai faites directement sur les
hôpitaux de France et des pays étrangers, j'essaierai de motiver
chaque partie du projet que je propose en allant au fond des con-
sidérations qui m'ont déterminé. J'ai l'espoir qu'il ressortira de
cette discussion quelques avantages qui ajouteront à l'utilité du
projet.
1° Quel nombre de malades doit- contenir tin hôpital?
On s'accorde généralement à reconnaître que le nombre de six a
huit cents est celui qui satisfait le mieux aux raisons d'économie
administrative, et([ui permet les soins les jjIus assidus et la surveil-
lance la plus parfaite. Pour le bien-être des malades, il faut s'at-
tacher a éviter la confusion dans le service, et il est de l'intérêt
de l'administration que l'ordre le plus parfait règne dans toutes
les parties de l'établissement.
Ces conditions importantes ne pourraient pas être bien remplies
dans un hôpital qui contiendrait deux ou trois mille malades; un
hôpital aussi vaste présenterait en outre de graves inconvénients :
on ne pourrait construire d'ailleurs un établissement aussi vaste
qu'à une grande distance de la ville, à cause de l'immense em-
placement qu'il exigerait pour satisfaire aux conditions de salu-
brité ; il serait moins à la portée des malades et recevrait moins
proraptement les secours des médecins. Les proportions limitées
auxquelles on s'accorde à donner la préférence me paraissent très
convenables. Suivant les besoins de la population, qui peut s'aug-
menter encore, on pourrait, dans la suite, établir de nouveaux
hôpitaux aux extrémités de la ville où la nécessité se ferait le plus '
sentir; de cette façon , les secours ne cesseraient pas d'être immé-
diats, et seraient également répartis entre tous les habitans (l).
2° Quelle ferait la meilleure dinposition générale à donner aiuc
salles ?
La disposition générale d'un hôpital, la surface de terrain qu'il
con\ ient de lui donner, doivent être l'objet d'une appréx;iation bien
réfléchie. Pour laisser le moins de doute possible sur la validité
des motifs qui m'ont dirigé dans la disposition des salles que je
propose, je procéderai par l'exposé des différentes dispositions qui
ont été prises à différentes époques et qui sont à présent condam-
nées.
Une commission de l'Académie des Sciences, dans un travail
sur les hôpitaux qui date de 1 785 ( voy. les Mémoires de l'Académie
des Sciences ) , déplore qu'à V Hôtel-Dieu les salles soient si ramas-
sées, pour la plupart doublées dans leur épaisseur, et qu'il y ait
autant d'étages superposés. Ces défiiuts réunis dans un même édi-
fice constituent un vice tellement capital , qu'il suffit de le signaler
pour qu'il soit apprécié à l'époque où nous sommes.
(1) Évidemment M. Du Puy raisojine ici d'après ce fait, qu'aiijourd'liui les
médecins cliargés de visiter les hôpitaux ne s'y consacrent pas exclusivement
et n'habitent pas i'hdpital même; mais c'est là une circonstance qu'on pourrait
changer dès demain. Si on admettait l'utilité de transférer les hôpitaux i U
campagne, on y enverrait des médecins résidants.
361
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
863
La même commission eut à examiner un projet d'iiôpital qu'on
proposait d'établir sur l'emplacement de l'Ile des Cygnes ; les diffé-
rentes salles de malades rayonnaient à partir d'un centre commun
où on avait étal)li la cliapelle. La commission blâme avec raison
cette disposition, dans laquelle les bâtiments forment entre eux des
angles aigus vers leur point de convergence ; l'air des salles ne
peut pas être changé dans les parties qui s'approchent de la cha-
pelle, il ne peut y avoir qu'un échange de mauvais air d'une salle
à l'autre, les croisées des bâtiments voisins étant très-rapprochées
entre elles.
Les différents hôpitaux d'Italie, presque tous disposés et bâtis en
vue d'un effet d'art, ont généralement les salles disposées en croix,
ce qui reproduit en partie aux angles des salles l'inconvénient d'y
conserver un air corrompu.
Les salles disposées dans des pavillons isolés doivent donc l'em-
porter surtout autre système; c'était aussi la pensée delà commis-
sion, et di'jà nous avons vu plusieurs applications de cette disposi-
tion, par exemple au nouvel hôpital de Bordeaux, et à Paris à
l'hôpital Beaujon. Mais on se plaint de ce que les pavillons de
malades sont beaucoup trop rapprochés à l'hôpital de Bordeaux,
et, en outre, de ce qu'ils sont reliés à leuts deux extrémités par
des bâtiments formant ceinture. Cette disposition nuit en effet à la
circulation de l'air, et ne remplit pas absolument cette condition
essentielle de salubrité suivant laquelle chaque pavillon devrait-
former en quelque sorte un petit hôpital isolé.
Les pavillons annexés à l'hôpital Beaujon, quoique très-mal con-
struits et d'une distribution intérieure très-vicieuse, offrent cepen-
dant une proportion assez convenable entre leur développement et
l'espace qui les sépare; la nécessité qui les a fait ajouter successive-
ment à l'établissement primitif nous fournit par hasard un exem-
ple de la simplicité et du complet isolement que nous recherchons.
J'ai cru devoir disposer de la même manière les pavillons prin-
cipaux de mon projet; ils ne sont réunis que par la galerie qui
entoure la grande cour centrale et qui les dessert tous, en les re-
liajit en même temps aux autres corps de bâtiments, à l'adminis-
tration, à la chapelle, aux bains, à la pharmacie, à la communauté
des religieuses, à la cuisine, etc. J'ai voulu qu'il en fût de même
pour les pavillons des nourrices et des enfants ; ils communiquent
également par leur entrée à la grande cour, qui leur donne accès à
tous les bâtiments, tandis que l'air circule librement à leur extré-
mitéqui donne sur les dépendances : de cette façon, les six pavillons
principaux et les deux pavillons particuliers sont tous dans les
mêmes conditions. Ils ont leur entrée sur la galerie à des distances
à peu près égales, et chacune des croisées des salles débouche sur
un espace libre. Je crois devoir dire quelque chose de la néces-
sité de joindre aux pavillons principaux les deux pavillons dont je
viens de parler : l'un serait affecté aux femmes enceintes et aux
nourrices ( les premières au rez-de-chaussée et les secondes au
premier étage), et l'autre servirait aux enfants des deux sexes, sé-
parés pareillement. On devra reconnaître qu'il est convenable,
dans un hôpital aussi important que celui que je propose, d'ajou-
ter ces deux pavillons, et de leur donner une position particulière
et spéciale à leurs attributions, qui ne demandent pas un aussi
grand développement que les pavillons principaux. On en appré-
ciera la nécessité en songeant à l'insuffisauce des lits destinés aux
enfants malades, au petit nombre de lits affectés aux nourrices,
et enfin au besoin, malheureusement trop fréquent, de diminuer
le nombre des femmes qui se présentent à la clinique et à la ma-
ternité, établissements trop souvent désolés par des épidémies
meurtrières.
J'ai pensé que les pavillons principaux pouvaient être à deux
étages ; chacun contiendrait trois salles de malades, y compris celles
au rez-de-chaussée. Il a paru pourtant préférable à la commission
des savants (Mémoires de l'Académie des Sciences) de n'avoir que
deux étages de malades ; mais nous devons considérer qu'ils étaient
sous l'impression des observations qu'ils venaient de faire dans dif-
férents hôpitaux où les salles étaient ramassées et comprises dans
des bâtiments trop rap[)rochés ; il n'était pas étonnant alors que l'air
corrompu, qui ne pouvait pas se renouveler, parvint dans les étages
supérieurs et y rendit la mortalité plus grande. Je crois devoir
faire observer que dans les conditions nouvelles où se trouvent les
salles ainsi disposées dans des pavillons tout à fait isolés, quand
l'air purpeut librement circuler, quand il peut si facilement chasser
les miasmes impurs qui se forment dans les salles, par l'action di-
recte que lui offrent des croisées convenablement placées, toute
inquiétude doit cesser; d'ailleurs l'économie de terrain, la promp-
titude dans le service, fout aussi un devoir impérieux de ne pas
trop disséminer les salles.
« Quel nombre de malades devrait contenir chaque salle ?
On admet généralement que chaque salle doit contenir de 30 à
40 lits; ce nombre satisfait aux prescriptions de l'Académie, aux
exigences du service de santé, aux conditions d'une surveillance
facile, et à l'économie administrative. Les salles de malades, dans le
projet que je propose, contiendraient trente-deux lits, et il y aurait
à l'extrémité deux chambres séparées, qui contiendraient chacune
trois lits, dont deux seraient affectés à des cas très-graves, et celui
du milieu à un malade convalescent qui pourrait avertir les sur-
veillants, si l'état de ses voisins réclamait des secours immé-
diats.
Les grandes salles auraient 34 mètres de long, 9 mètres de large,
et 5 mètres de haut, ce qui fournirait pour chacuu des malades
48 mètres cubes d'air respirable, quantité requise par l'Académie.
La largeur des salles, portée à 9 mètres, permet d'éloigner les lits
des murs à une distance de 50 à 60 centimètres, eu sorte qu'il est
possible de passer derrière la tête du malade, et de lui apporter tous
les soins que son état peut réclamer. Cet isolement facilite aussi
l'entretien de la propreté et la libre circulation de l'air.
Je n'ai pas cru devoir placer les convalescents dans un pavillon
séparé ; quelques personnes pourtant admettent cette distinction :
elle ne fait rien à la disposition du projet, car il serait facile d'af-
fecter un pavillon aux convalescents, ou de disposer pour eux d'un
étage dans chacun des pavillons. Mais les malades qui entrent en
convalescence ne sauraient être mieux que sous la direction de la
personne q\ii les a traités. D'ailleurs, mettrait-on les convalescents
fiévreux avec les blessés"? Dans quelles proportions les uns seraient-
ils aux autres? Qui serait chargé de ce service? On sent bien qu'il
existe une grande lacune pour ce qui concerne les convalescents
proprement dits à leur sortie de l'hôpital; du repos, un air sain et
une bonne nourriture seraient bien désirables pour eux ; mais il y
a loin de ceux-ci aux malades entrant en convalescence, à ceux qui
viennent d'échapper aux accidents aigus et qui doiventjusqu'à leur
sortie rester sous la surveillance du médecin ou du chirurgien, sous
peine de tomber dans de graves rechutes.
Cette séparation, d'ailleurs, ne me parait pas présenter un grand
363
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
364
avantage dans un hôpital bien disposé, où toutes les précautions
sont prises pour le bien-être de chacun.
Quelles sont les dépendances indispensables de chaque salle, et de
quelle façon seront-elles disposées.
En face des escaliers qui arrivent dans les vestibules communi-
quant de chaque salle principale à la galerie, je propose d'établir
une pièce servant à la sœur surveillante, qui pourrait aussi servir de
salle d'opérations. La commission, dans le mémoire de l'Académie,
réclame seulement une salle d'opérations pour les opérés de chaque
sexe, et plusieurs personnes sont de cet avis; mais il faut considé-
rer qu'à l'époque où cette nécessité fiit sentie on opérait les malades
dans leur lit, que leurs voisins entendaient leurs cris, étaient té.-
moins de leurs angoisses ; cette situation leur causait une appré-
hension horrible lorsqu'ils devaient être eux-mêmes opérés, ou
bien leur rappelait des souvenirs qui pouvaient leur être préjudicia-
bles s'ils l'avaient été déjà. En consacrant aux opérations une pièce
en dehors de la salle, on obvie à ces inconvénients, sans être obligé,
comme dans l'adoption d'une salle commune, de transporter loin de
son lit un blessé dont l'état peut être par cela seul très-aggravé. Il
peut arriver aussi que plusieurs chefs de service aient à opérera la
même heure; en adoptant le parti d'une salle unique, il y af rait
impossibilité de le faire. Si pourtant une opération présentait un
haut intérêt et qu'elle vînt réunir un grand nombre d'étudiants,
alors elle pourrait être faite dans les salles de clinique.
A l'extrémité de chaque salle, au bout du corridor qui sépare les
deux pièces attenantes, et au-dessous de la croisée qui fait face, je
propose d'établir un fourneau dit laboratoire, pour les tiàanes, et
où l'on puisse au besoin faire chauffer un bain. A droite seraient
les latrines, et à gauche une petite pièce contenant une baignoire.
Il y a des malades affectés de péritonites , de hernies, de rhuma-
tismes, auxquels on prescrit un bain auprès de leur lit, de peur
d'occasionner de graves accidents par le transport. Le milieu des
salles dans leur longueur serait occupé par des meubles servant à
la fois de tables et d'armoires pour le linge, coupés par des pas-
sages et des poêles, si ce système de chauffage était adopté.
Deux moyens se présentent pour supporter les planchers des salles,
les voûtes et maçonneries n'étant pas applicables, parce qu'elles
prendraient trop de hauteur, ou parce qu'elles exerceraient trop de
poussée sur les parois des pavillons ; j'ai cru devoir indiquer des
poteaux en bois supportant les pièces principales des planchers,
comme procédé le plus économique; mais je proposerais avec plus
de confiance des fermes en fer formant une voûte plate légère-
ment arrondie aux naissances, et garnies en poterie; le nettoyage
sn-ait plus facile, la construction entière des pavillons à l'abri du
feu, et la dépense pourrait être compensée en évitant ainsi l'em-
barras des poteaux ; on pourrait alors diminuer d'un mètre la lar-
geur des pavillons, sans que la largeur des salles diminuât elle-
même; je pense que ce système plus nouveau, également appli-
cable, ne manquera pas d'obtenir la préférence.
La pharmacie et ses dépendances. — La communauté des
religieuses.
Ces deux corps de bâtiments, par leur importance et leur desti-
nation, paraissent bien devoir faire pendant aux bâtiments d'admi-
nistration que j'ai placés en avant de l'édifice ; je n'ai pas hésité à
leur assigner cette place dans la disposition générale, elle me pa-
raît satisfaire à l'art comme aux convenances; ces quatre corps de
bâtiments limitent semblablement la partie principale de l'édifice
et laissent dominer les pavillons de malades, qui, placés au centre,
jouissent de l'avantage d'être entourés de tout ce qui concourt au
service de santé.
La communauté des religieuses, à droite, contient au rez-de-
chaussée un réfectoire avec oratoire et plusieurs pièces servant de
dépendances. Au premier étage seraient placés le dortoir, une infir-
merie-et quelques chambres particulières au logement des sœurs,
dont le nombre peut s'élever à cinquante.
Le corps de bâtiment à gauche contient entièrement au rez-de-
chaussée tout ce qui concerne la pharmacie, une salle principale
pour la distribution des médicaments, plusieurs officines et cham-
bres de dépôt.
Quelles sont les meilleures dispositions à donner amc Bains et à la
Cuisine.
Les bains et la cuisine nous semblent devoir être placés au
centre de l'édifice, et avoir en même temps des issues sur les dé-
pendances. Les bains se trouveront ainsi à la portée des malades ,
et il serait facile d'en accorder aux personnes du dehors, qui pour-
raient y parvenir sans entrer dans l'hôpital. Quant à la cuisine, sa
position centrale facilitera la distribution des aliments sur tous les
points de l'édifice , en même temps que son issue sur les dépen-
dances permettra de s'approvisionner, de laver les légumes, et de
se débarrasser des ordures, sans être obligé de passer par l'inté-
rieur. A cet effet, j'ai placé les bains à droite et à gauche dans le
bâtiment du fond, entre la grande cour et les dépendances ; chaque
partie, pour chacun des deux sexes, contient douze cabinets. La
cuisine se trouve pliicée entre les deux parties, de façon à ce qu'un
système commun de chauffage puisse servir à la cuisine et à la pré-
paration des bains. Une petite pièce au centre contient le réser-
voir d'eau chaude; elle est entourée de cabinets où l'on pourrait
tenir du linge chaud et déposer le combustible.
Ce système, adopté au grand hôpital de Florence, permet de
donner un très-grand nombre de bains dans lajournée, sans occa-
sionner une plus grande dépense de combustible.
Auprès de la cuisine, à droite et à gauche, se trouve une pièce as-
sez vaste pour y déposer les provisions qui doivent servira la con-
sommation de la journée.
Les Séchoirs et la Lingerie.
Les séchoirs seraient placés au-dessus des bains, et le chauffage,
déjà commun à la cuisine et aux bains, pourrait aussi le devenir
aux séchoirs. La situation de ces derniers entre la grande cour et
les dépendances serait d'ailleurs la plus favorable pour le séchage
à l'air libre par les temps secs.
La lingerie serait placée au premier étage au-dessus de la phar-
macie et dans le prolongement des séchoirs. Dans cette position,
le linge y serait facilement recueilli au sortir des séchoirs, raccom-
modé, rangé et réparti de nouveau dans les salles.
Quelle sera l'importance de l'administration. Personnel qui doit la
composer.
Les bâtiments d'administration doivent être situés en avant de
l'édifice. J'ai cru devoir les partager en deux corps de logis, car
l'administration forme deux parties bien distinctes : l'administra-
365
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
366
lion proprement dite, ou direction de l'établissement, et les salles
de consultations et les logements du personnel des internes. Néan-
moins il faut que ces deux parties soient reliées de façon à ce qu'elles
puissent communiquer chacune avec le reste de l'édifice, au rez-
de-chaussée et aux étages supérieurs. C'est pourquoi j'ai cru devoir
faire passer en façade la galerie qui dessert tous les bâtiments ; je
pense que cette disposition est aussi convenable au point de vue
de l'art qu'à celui des besoins de l'établissement , car elle annonce
au premier coup d'œil le principe de distribution large et favorable
à la circulation de l'air qui règne dans tout l'intérieur de l'édifice;
de plus, les bâtiments de l'administration occupent une surface de
terrain assez considérable pour qu'il me soit possible de ne les sur-
monter que d'un étage, en sorte que les pavillons de malades puis-
sent dominer dans la pensée architecturale comme la cause pre-
mière de l'édifice.
Chacun des corps de bâtiments d'administration a une entrée
particulière ouvrant sur la galerie de service intérieur.
Celui de droite contient, au rez-de-chaussée, un concierge gardant
la porte s'ouvrant pour la consultation, une salle de consultation
pour quarante personnes, un bureau des malades admis à la con-
sultation, deux cabinets de consultation des médecins et chirur-
giens, une salle de gardes pour deux internes, une salle de garde
des pharmaciens.
Le premier étage serait divisé en nombre suffisant de chambres
pour y loger les élèves internes en médecine, chirurgie et phar-
macie, au nombre de trente.
Le corps de bâtiment de gauche contient au rez-de-chaussée un
logement de concierge, les bureaux de l'économe, ceux du direc-
teur et les bureaux communs aux employés, une grande salle pour
le conseil des médecins et des administrateurs.
Au premier étage seraient disposés les logements du directeur ,
celui de l'économe, celui de l'aumônier et ceux des employés.
J'ai pensé qu'il était convenable de disposer deux salles de clini-
que, de chirurgie et médecine; je les ai placées au rez-de-chaussée,
adroite et à gauche, àl'extrémité des bâtiments d'administration. On
peut y parvenir sans entrer dans l'hôpital et sans gêner le service
particulier de l'administration. Il me semble nécessaire que les
médecins et chirurgiens puissent professer dans le lieu même
où les appellent leurs occupations principales.
Disposition et dimensions de la Chapelle.
Les dimensions de la chapelle doivent être proportionnées à l'im-
portance de l'édifice: il n'y a ordinairement qu'une petite quantité
de malades en état de s'y rendre. Pourtant j'ai pensé qu'il était
bien de lui donner quelque étendue , surtout en la plaçant de
manière à ajouter au caractère de l'édifice ; les malades pourraient
y arriver à couvert par la galerie, qui peut aussi servir de prome-
noir au rez-de-chaussée et au premier étage; derrière le chœur de
la chapelle se trouvent, au rez-de-chaussée, deux pièces servant
de sacristie et dépendances ; au premier étage une tribune affectée
aux religieuses, où elles peuvent arriver séparément; au-dessus
est placé le clocher, qui domine tout l'édifice.
Quelles sont les dépendances d'un hôpital; quelles sont celles qui
doivent se rattacher à l'édifice principal et celles qui doivent en être
séparées.
Les dépendances de cet édiûce sont considérables; j'ai remarqué
qu'elles avaient toujours été traitées trop négligemment et avec
insuffisance; elles contribuent pourtant beaucoup à l'ensemble des
bâtiments indispensables, et peuvent nuire considérablement à la
salubrité, si elles participent trop de la partie principale.
Peut-être l'économie du terrain, réunie à la pensée architectu-
rale de laisser dominer le corps de l'hôpital , est-elle la cause
qui les a fait toujours sacrifier: il est facile pourtant d'apprécier
les inconvénients graves qui peuvent résulter de la trop grande
proximité de la buanderie, de la salle des morts, etc.
Pour opposer à ce défaut commun à tous les hôpitaux que j'ai
visités, une disposition nouvelle qui soit prise en considération, j'ai
cru devoir étendre assez les dépendances pour qu'il soit facile d'en
apprécier les avantages, mais de façon à ce qu'il soit possible de les
réduire, si la disposition du terrain l'exigeait ou si l'on croyait
devoir supprimer quelques-uns des bâtiments qu'elles contiennent.
A droite de la porte de sortie sur la voie publique, dans la partie
la plus éloignée des constructions principales, se trouve la buan-
derie dans un corps de bâtiment complètement isolé, et n'ayant
qu'un rez-de-chaussée composé de la salle pour (««an^er le linge, et
de salles de dépôt.
A gauche et dans un corps de bâtiments semblable et symétrique
au précédent, se trouvent la salle des morts, la salle d'autopsie et la
petite chapelle des morts.
Aux extrémités de ces deux corps de bâtiments sont disposées
les parties principales des dépendances ; elles sont bâties en ailes
composées chacune d'un rez-de-chaussée et d'un premier étage.
Le rez-de-chaussée est occupé par des magasins, des remises pour
quelques voitures, et par des salles de dépôt formant vestiaire
pour recevoir les vêtements des malades, et les y conserver pendant
le temps de leur séjour dans l'hôpital.
Le premier étage de ces deux corps de bâtiments est occupé par
les infirmiers et les personnes de service des deux sexes.
Quelles sont les dispositions à prendre pour l'assainissement de tout
le rez-de-chaussée, et pour le service général.
Pour combattre les effets incessants et fâcheux de l'humidité,
j'ai pensé que, bien que l'air circulât librement entre les pavillons,
disposés autour de la grande cour et séparés par des jardins, il était
convenable qu'ils fussent construits sur caves; un tiers de la hau-
teur desdites caves se trouve au-dessus du sol ; elles sont tellement
aérées qu'elles peuvent servir de magasins de toutes sortes, pour le
combustible, les vins, l'huile, etc. Elles s'ouvrent à l'extrémité
des pavillons surun chemin de ronde qui rend leur accès très-facile;
elles peuvent servir à l'établissement de calorifères, et elles contien-
draient les fosses d'aisance, dont la vidange se ferait aisément par
le chemin de ronde, qui, par ses communications avec les dépen-
dances, peut satisfaire à toutes les exigences de service d'emmaga-
sinage et de débarras, sans que l'intérieur de l'hôpital ait jamais k
en souffrir. Je crois que l'on ne saurait trop insister sur les avan-
tages à retirer de cette disposition, qui exige, il est vrai , un peu
plus de terrain, mais qui laisse sans entraves le service intérienr,
évite l'aspect dégoûtant de quelques transports indispensables, et
empêche des dégradations.
Je dois faire observer que le chemin de ronde se trouve un peu
en contre-bas du sol de la cour, de sorte que l'eau pluviale dans les
jardins et celle des toits s'écoulent rapidement par le chemin ; au
moyen de cette disposition, il suffit de quelques marches pour
367
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
368
entrer par la grande cour dans les salles ; et à leur extrémité, celles-
ci sont assez élevées au-dessus du chemin de ronde pour qu'il soit
facile d'entrer de ce côté dans les caves. [Voyez la coupe PL 19.)
Evaluation des Dépenses.
Cethôpital, qui contiendrait sept cent quatre-vingts malades, oc-
cuperait trente-six mille cent soixante mètres superficiels de terrain,
dont environ huit mille mètres superficiels de bâtiment , construc-
tions principales et dépendances; en y appliquant le prix ordinaire
de revient constaté dans des travaux de ce genre, et qui s'élève
en moyenne à la somme de cinq cents francs le mètre superficiel,
on arrive à un résultat de quatre millions. Cette dépense ne doit
pas dépasser les prévisions de l'administration ; le terrain pourrait
seul paraître un peu considérable, mais, ainsi que je l'ai fait obser-
ver quand j'ai parlé des dépendances, celles-ci pourraient être ré-
duites; néanmoins il serait désirable de ne rien retrancher et de
laisser aux malades tous les bénéfices de la disposition que je
propose.
. DU puy,
archilecle.
LÉGENDE DE LA PLANCHE 19.
A, bâtiments d'administration,
o, salle de cours.
B, B..., pavillons de malades.
C, Pharmacie, et au-dessus lingerie.
c, salle de distribution des médicaments.
D, Communauté des religieuses.
d, réfectoire des religieuses.
E, bains, au-dessus séchoirs.
F, cuisine.
G, chapelle,
fl^, fl^..., dépendances.
h, chapelle des morts ; derrière, salle d'autopsie.
h', buanderie, et derrière dépôt de linge.
O, O..., chemin de ronde.
J, J..., jardins.
NOTICE BIOGRAPHIQUE
sua M. J.-B. LEPÈRE, architecte.
LePère ( Jean-Baptiste ) , architecte , membre de l'Institut d'E-
gypte, chevalier de la Légion-d'Honneur, naquit à Paris le 1" dé-
cembre 1761.
Fils unique de parents peu fortunés, ce fut dans l'école gratuite
que le jeune LePère commença par apprendre à dessiner et à s'ap-
proprier les premières notions de la géométrie; attiré par un
penchant naturel vers le perfectionnement de ses premiers essais,
il continua de les cultiver et suivit avec zèle les cours publics. Joi-
gnant à ses études favorites celles des hautes mathématiques, de
la physique et de la chimie, il fit en même temps l'apprentissage
de plusieurs métiers nécessaires à l'exploitation des arts mécani-
ques et à la pratique de l'architecture. Muni de ces richesses, désor-
mais sou seul patrimoine, impatient d'exercer son savoir et animé
de l'amour des voyages, qui fut toujours sa passion prédominante,
il s'embarqua en 1787 pour l'ile Saint-Domingue. Chargé d'élever
plusieurs habitations considérables, il exécuta ces constructions
avec des nègres auxquels il enseigna lui-même à manier les outils
du charpentier et ceux du maçon. Des offres avantageuses lui fu-
rent faites dans cette contrée, mais la certitude de pouvoir acqué-
rir une grande fortune ne pouvant balancer en lui celle de se voir
circonscrit dans un cercle d'occupations trop restreint pour sa
jeune imagination, et son désir d'acquérir de nouvelles connais-
sances, il quitta l'Amérique, et revint à Paris vers l'année 1789.
M. LePère, alors âgé de 29 ans, y reprit ses études, en y
employant tout le temps que pouvaient lui laisser les différentes
occupations auxquelles il dut'se livrer pour pourvoir aux besoins
de son existence. Tantôt employé pour la composition et l'exécu-
tion de plusieurs bâtiments (tarticuliei's, tantôt relevant les plans,
ou travaillant dans les bureaux avec d'autres artistes, il eut éga-
lement à se livrer à l'application de ses bonnes études dans l'art,
de la perspective, en composant et en traçant sous la direction de
M. Antoine, peintre, une grande partie des décorations d'archi-
tecture du nouveau théâtre de la Comédie-Française.
Cependant, ne trouvant dans ces occupations trop peu lucratives
aucun moyen de satisfaire à son continuel désir de voyager, afln
d'acquérir de nouvelles connaissances par la vue et l'étude des
monuments antiques, M. LePère se présenta en 1796 à l'appel du
gouvernement d'alors pour se réunir à une expédition destinée a
être envoyée à Constantinople, afln d'y établir des fonderies de
canons. Admis au nombre des artistes et des artisans dont cette
expédition devait se composer, il s'embarqua avec ses compagnons
de voyage à Toulon, pour se rendre de là directement par msr au
lieu de leur destination. Mais, harcelés par la flotte anglaise, nos
voyageurs durent se jeter dans le port de Gènes, où, à peine échap-
pés aux poursuites des Anglais, ils se virent exposés à devenir les
victimes d'une émeute populaire.
M. Pampelone, chef de l'expédition, proposa alors de continuer
le voyage par terre, et 40 personnes seulement , de 70 qu'elles
étaient, adoptèrent la proposition. M. EePère, sTu nombre des pre-
mières, vit avec une grande satisfaction ce changement de route,
qui lui procura la facilité devoir une partie de l'Italie, de la Dal-
matie, de la Bosnie, de la Turquie européenne, d'étudier les mo-
numents^ si variés de caractère et de style des villes de "tortone ,
Parme, Plaisanèe, Bologne, Rimini, Zara, Sebenico, Traunick ,
Sarajevo, Pristina, Philipopoli et Andrinople.
Arrivé dans l'ancienne Byzance, et choisi parmi ceux des mem-
bres de l'expédition qui furent acceptés par le gouvernement turc,
M. LePère sut bientôt se faire remarquer par sa capacité, la variété
de ses connaissances, et par la douceur et la bonté de son carac-
tère. Chargé de diriger les travaux de la construction des bâtiments
et des machines pour l'établissemeat et l'exploitation des fonde-
:509
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
370
ries, il fut distingué par le capitau-pacha, le visir et les a>itres
officiers turcs, qui lui firent des offres brillantes pour se l'atta-
cher et pour lui faire adopter la religion musulmane. M. Le-
Père refusa, et ce refus, tout en lui conciliant l'estime générale,
nécessita son départ. 11 quitta Constantinople après deux an-
nées de séjour et revint à Paris. Une destinée plus brillante lui
était réservée : l'expédition d'Egypte se préparait; reçu parmi les
hommes distingués qui concoururent à immortaliser par leurs
travaux cette héroïque entreprise, son nom leur fut associé de la
manière la plus honorable.
En 1798, M. LePère quitta pour la troisième fois sa patrie.
Embarqué sur la flotte, il arriva bientôt à Alexandrie, où commen-
cèrent les premiers travaux des artistes et des savants auxquels
nous devons le grand ouvrage sur l'Egypte.
Presque toujours à la tête de ces belles et souvent périlleuses
entreprises, M. LePère mesura et dessina la colonne de Pompée,
les obélisques, les Pyramides, les tombeaux, les temples, et tant
d'autres monuments remarquables de l'antique splendeur des
Égyptiens. Chargé en outre de la direction de l'établissement du
([uartier général et des hôpitaux, il composa, sur la demande
du général Kléber, un projet pour un vaste hôpital que l'on devait
exécuter à Alexandrie, et sur celle du général en chef, un projet
d'embellissement pour la place d'Esbékir. Ce projet, composé d'un
portique circulaire, offrait quatre entrées principales, et au centre
une colonne triomphale ornée d'eaux jaillissantes; la place ainsi
entourée était destinée, selon les différentes saisons, tantôt à être
une promenade publique où les piétons pouvaient s'abriter de l'ar-
deur du soleil sous de vastes colonnades, et tantôt à servir de
bassin pour recevoir les bienfaisantes inondations des eaux du Nil,
sur lesquelles les habitants du Caire aiment à se balancer dans de
petites barques. Cette belle composition, que le général en chef
avait approuvée, aurait été réalisée si elle n'eût eu le sort de tant
d'autres conceptions du génie de Bonaparte que sa destinée l'em-
])êcha d'exécuter.
Après la conquête de la Haute-Egypte et la formation des diffé-
lentes commissions composées de savants et d'artistes, M. LePère
se livra de nouveau avec ardeur à l'investigation des monuments
antiques. Il en étudia toutes les parties avec un rare soin et une
exactitude scrupuleuse. Relever minutieusement les plans, dessi-
ner a\ec la plus grande fidélité toutes les formes architectoniques
et toutes les sculptures, rechercher les moyens dont les Égyptiens
avaient pu faire usage pour travailler et mettre en œuvre les
énormes blocs de granit employés dans leurs colossales construc-
tions, telles furent les continuelles occupations de M. LePère,
qui, comme il le disait souvent, furent les plus beaux moments
de sa vie. Aussi sou portefeuille devint un des plus riches et des
plus intéressants pour la partie d'architecture. Ses compagnons de
voyage y eurent souvent recours, soit pour compléter leurs travaux,
soit pour y chercher une garantie de l'exactitude de leurs propres
relevés. Heureux de laisser à chacun une part de gloire dans la
magnifique publication du grand ouvrage de l'Egypte, il cédait
avec plaisir une part de ses richesses à ceux qui avaient été moins
heureux dans leur récolte, appliquant ici, comme dans toutes les
autres circonstances de sa longue vie, cette maxime, « que la véri-
table fortune du riche est sa générosité. » Les gravures qui por-
tent son nom, généralement, les plus intéressantes de louvrage,
dépassent le nombre de cinquante.
Revenu en France, M. LePère fut nommé en 1802, par le
premier Consul, architecte de la Malmaison. H occupa cette place
pendant quelques années sans y trouver une occasion favorable
pour développer ses nombreuses connaissances et sa capacité
comme architecte distingué. Ce ne fut que vers l'année 1805 que
cette circonstance se présenta. A cette époque, l'Empereur ayant
ordonné l'exécution du projet d'ériger à la gloire de la Grande
Armée une coloinie triomphale revêtue de bas-reliefs en bronze,
dont la matière devait être tirée des canons pris sur l'ennemi, M.
le baron Denon fut chargé de la direction de ce monument, et
M. Gondoin, qui en avait été nommé l'architecte, présenta plusieurs
moyens d'exécution auxquels on ne crut pas devoir se confier.
L'Institut, consulté par M. Denon, reconnut lesinnombrables diffi-
cultés de cette construction, et adopta l'idée présentée par l'archi-
tecte, de faire élever une colonne provisoire de la grandeur de In
colonne définitive, afin de pouvoir se servir de ce modèle pour y
prendre avec certitude les dimensions, la forme et le galbe des bas-
reliefs en spirale, ainsi que les détails et les épures nécessaires â
l'exécution de ce vaste ensemble. Ce moyen, qui présentait un sur-
croit de dépenses considérables et surtout une grande pertede temps,
sans offrir la certitude d'un résultat satisfaisant, et dont l'adop-
tion aurait peut-être amené l'abandon de ce beau monument,
suggéra à M. Denon 1 idée de consulter M. LePère. Celui-ci, ad-
mis à examiner les moyens d'exécution présentés, et après en
avoir signalé le côté faible, développa de suite, avec une clarté et
une précision telles, la manière dont un pareil travail devait èUv
dirigé, que M. Denon l'adjoignit immédiatement à M. Gondoiu.
S'occupant aussitôt à fixer ses premières idées sur le papier, M. Le-
Père présenta ses dessins , où tous les problèmes étaient réso-
lus; le nombre, les dimensions, la forme de chaque pièce de
bronze, avaient été déterminés par des calculs. La manière dont
M. LePère fixait ses pièces sans aucun scellement dans la pierre
et sans qu'elles pussent souffrir de la dilatation et de la condensa-
tion du métal, parut à la fois si simple et si ingénieuse, que son
projet fut adopté sur-le-champ et approuvé pour être mis à exécu-
tion. M. Gondoin, en artiste capable déjuger et de rendre justice
au talent, s'honora lui-même dans cette circonstance; car, après
avoirexaminé les dessins de son nouveau collègue, il dit à M. Le-
Père : « Je ne vois rien à ajouter à votre travail ; vous serez chargé
de tout, je ne puis que m'en rapporter ii vous. »
M. LePère dirigea en effet, à lui seul, cette vaste entreprise.
Ses connaissances en mathématiques, ses fortes études en mécani-
que, son habileté à imaginer des instruments particuliers, a guider
de ses conseils, appuyés sur sa propre expérience dans la pratique
de presque tous les métaux, tantôt le ciseleur, tantôt le sculp-
teur ou le fondeur, tout lui fut d'un grand secours et concourut à
la parfaite exécution de ce monument national. Toutefois, pendant
les quatre années employées à son achèvement, il n'y eut peut-
être que lui qui fut bien convaincu de la réussite de son travail ;
car, comme tant d'autres artistes dont le génie sut concevoir des
productions au-dessus des intelligences ordinaires, il eut à com-
battre bien des doutes, bien des incertitudes, bien des entraves
que l'ignorance accumulait à l'envi autour de lui; il vainquit
néanmoins toutes ces difficultés, et la colonne de la Grande Armée
fut achevée et découverte le 25 août 1810. Depuis cette époque,
ce monument eut à résister aux vains efforts d'une stupide popu-
lace, qui ne put l'ébranler ni par la force du nombre, ni par celle
des chevaux qu'elle amena à son secours pour en arracher la
statue de l'Empereur; mais ces impuissants efforts, ni l'action
T. V. 2i
371
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
art
du temps, n'ont pu, depuis trente-quatre ans, que témoigner du
rare mérite de l'artiste qui a élevé ce glorieux trophée.
En applaudissant au succès du travail de M. LePère, l'Empereur
le nomma, en 1811, son architecte à la division de Saint-Cloud. Il
y construisit le nouveau bâtiment du grand Commun, et exécuta
les préparatifs de la grande fête célébrée le 23 juin 181 1, à l'occa-
sion de la naissance du roi de Rome.
M. LePère fut également chargé, eu 1811, de la construction
d'un obélisque destiné à perpétuer le souvenir de la conquête de
l'Egypte, et qui devait être placé sur le terre-plein du Pont-Neuf
Il fit pour cette construction des études du plus haut intérêt, au-
jourd'hui une des richesses de son portefeuille. Conçu sur une
échelle plus colossale qu'aucun des obélisques de l'antiquité, dont
le plus élevé, cité par Diodore de Sicile, ne compte que 47 mètres
ou 1 48 pieds, cet obélisque devait avoir 57 mètres ou 1 80 pieds. De-
vant être construit en granit de France par assises de moyenne hau-
teur, la combinaison des moyens d'exécution que M. Le Père avait
trouvés rendait l'apparence de ces assises imperceptible et la
solidité aussi durable que celle d'un obélisque monolithe : des bas-
reliefs disposés horizontalement en couvraient les quatre faces, et
pour en faciliter l'exécution dans une matière aussi dure que le
granit, M. LePère trouva le moyen de sculpter et de polir cette
matière aussi facilement que le marbre. Dans ses études sur les
monuments de l'Égj'pte, cette recherche l'avait déjà fort oc-
cupé.
Ce travail fut interrompu en 1814, et M. LePère construisit
depuis sur le même emplacement le piédestal sur lequel est élevée
la statue de Henri IV.
En 1822, M. LePère fut nommé architecte du château de Fon-
tainebleau, place qu'il perdit après la révolution de 1830.
M. LePère fit encore les dessins de la plupart des médailles
exécutées sous la direction de M. Denon, en mémoire des hauts
faits de l'Empire. Il composa également l'appareil si simple au
moyen duquel fut montée sur le sommet de la colonne la statue
de l'Empereur, et il imagina ce remarquable et merveilleux mé-
canisme pour accorder le piano à l'aide de la vue seule et sans le
secours de l'ouïe : invention capitale, que, d'après un rapport de
l'Institut (Académie des sciences et des arts), on peut considérer
comme le plus grand perfectionnement du piano.
Chargé de la construction de la nouvelle église de Saint-Vincent-
de Paul, travail commencé en 1824, et auquel il associa, dès
l'origine, son gendre M. Hittorff, M. LePère mourut peu de temps
avant l'ouverture de ce temple au culte. Les décrets de la Provi-
dence l'ont privé du bonheur qu'il désirait tant pouvoir goûter
encore : celui de voir ce grand et magnifique édifice achevé, d'ad-
mirer, brillant de toutes ses richesses, de toute sa splendide pa-
rure, l'enfant qu'il voulait avant tout beau et fort : deux qualités
dont son âge, disait-il, lui avait fait craindre de ne pouvoir le doter
sans le concours d'un jeune collaborateur.
En pensant à tout ce qu'il a fallu de dons naturels pour arriver,
sans autre secours que celui de sa propre volonté, à des positions
aussi belles, aussi érainentes que celles occupées par M. LePère,
on doit s'étonner que tant de moyens, joints au caractère le plus
honorable, ne lui aient pas ouvert les portes de l'Institut, alors
que bien peu de ses membres avaient pu s'y présenter avec des
travaux aussi importants que l'exécution de la colonne de la place
Vendôme et les magnifiques dessins et restaurations des monu-
ments de l'Egypte. Mais peu ambitieux, incapable de faire agir
d'autres influences que celles que le titre d'artiste et ses qualités
d'homme de talent lui donnaient, il renonça facilement à la re-
cherche d'une distinction pour l'obtention de laquelle, se plaisait-il
à dire, « il fallait avant tout se faire frère quêteur, » fonction qui
ne pouvait pas aller à l'homme qui avait toujours aimé à donner
l'aumône, mais non pas à la recevoir.
A ses qualités distinguées dans les arts et dans les sciences, M. Le-
Père réunissait les qualités morales qui en faisaient l'homme le
plus vénérable, le plus aimable et le meilleur que l'on put voir :
à sa grande force d'âme, à sa fine intelligence, il joignait une
bonté de cœur ineffable. Jamais, on peut le dire, il n'a su ce que
c'était que de ne pas aimer, de ne pouvoir pas être aimé. Jamais
sa modestie ne lui fit envier personne et croire qu'il pouvait être
envié. Ceux qui l'ont connu dans l'intimité savent ce qu'il y avait
de noble et de vertueux dans cette belle et excellente nature.
M. LePère était un de ces hommes rares dont on ne se figure pas
la fin possible. Son cœur était si bon, sa douceur si grande, l'éga-
lité de son caractère si exceptionnelle, son encourageante affection
pour la jeunesse si bienveillante, que la pensée de voir finir une
vie si pure paraissait impossible. Cependant la mort est venue le
frapper presque inopinément, au moment où lespoir de le voir
longtemps encore au milieu de sa famille semblait le mieux fondé.
Les regrets de tous ses amis, de toutes les personnes qui l'ont
connu, ont été aussi sincères qu'unamines.
Il ne pouvait en être autrement d'un homme après la mort
duquel M. Jomard écrivait :
a Je n'ai connu dans le voyage d'Égyple aucune personne plus digne
« d'estime et d'altachemenl, pour le caractère et la délicatesse des sen-
« tinienls, comme pour le talent et le roérile joints à la modestie ; »
et à qui, de son vivant, le général en chef de l'armée d'Egypte,
Menou, avait écrit du quartier général d'Alexandrie, le 5 floréal
an 9 de la république :
« Votre conduite, citoyen, annonce un homme entièrement dévoué
« à son pays et à la république, et qui ne se dirige que par les principes •
« de l'honneur. Je vous avais déjà voué mon estime depuis longtemps;
« votre courage, en rest;int au Caire, m'inspire pour vous tous les au-
« 1res senlimenls. Vous acquérez des droits imprescriptibles à la recon-
« naissance nationale. Soyez assuré que je les ferai valoir auprès du
« premier Consul avec toute l'énergie dont je suis capable. »
M. LePère termina le 16 juillet 1844 sa longue carrière, à
l'âge de plus de quatre-vingt-deux ans. La vie d'un tel homme ,
qui, ami des Berthollet, des Monge, des Fourrier, vit ses travaux
réunis à ceux de ces grands citoyens; qui, architecte de Napoléon,
vit attacher son nom aux plus grandes entreprises contempo-
raines, envisagée depuis son obscur point de départ jusqu'à son
glorieux point d'arrivée, doit servir d'exemple pour stimuler le
génie à marcher dans la voie du travail et de la vertu : car elle
apprend à ne pas désespérer de la Providence, qui n'oublie pas tou-
jours le talent le plus modeste et la plus sévère probité.
373
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
37fc
SrOTES ET OBSERVATIONS
DE H. H. JANMABD,
rclalives à la Première iiislruclion du Comilé historique des Arls et Hoiiuments.
(SCITK ET Fin.)
Pyramides et tours pleines {voy. col. 153).
Ces coiislruclions qui se trouvent quelquefois sur le bord des voies
romaines n'étaienlelles pas des points de repère, ou des signaux, ou
des peints de ralliement militaires, ou enfin des monuments coinmé-
moratifs (lo combats? L'observation de leur position topographique et
surtout (le leur position relative, s'il s'en trouve plusieurs dans le même
canton , peut jeter un grand jour sur la destination de ces petits
monuments. N'était-ce (loinl aussi ce (|ue dans le Moyen-Age on ap-
pelait des mon<s-joj>, et dans quelques provinces du Midi des pires-
longues? Selon M. Langlois, dans sa notice sur l'incendie de la cathé-
drale de Rouen : « On appellait mtmls-joie, mons gaudii, des monticules
artificiels élevés en forme de pyramide, des piliers en maçonnerie, des
poteaux et quelquefois même de grands arbres, objets ordinairement
décorés d'un crucifix ou d'une ligure de la Vierge; ils servaient d'in-
dices itinéraires aux voyageurs et aux pèlerins, que réjouissait cette
vue ; ils leur montraient le chemin et semblaient les approcher du
terme de leurs fatigues. »
« Les monts-joie se composaient quelquefois de simples arbrisseaux,
ou de genêts dont on nouait les sommets d'une manière particulière,
et au pied desquels on accumulait un monceau de pierres blanches.
Ces remarques étaient pour les passants ce que sont les brisées pour les
chasseurs. »
On conçoit toute l'utilité de ces points de reconnaissance dans ('es
temps où la France, beaucoup moins peuplée qu'aujourd'hui, était cou-
verte de vastes terrains incultes et déserts, entrecoupée de forêts, et
où les voies de communication étaient rares et mal tracées.
De l'opinion de Caylus sur le monument romain de Montmartre
(rot/, col. 2l'8,.5' vol.)
Nous ne pensons pas qu'on doive prendre au sérieux l'opinion de
Caylus, qui veut absolument que le nionumeni de Montmartre ait été
une fonderie parce qu'il y a vu les débris d'une espèce de fourneau,
dont il ne donne pas même la description.
L'abbé Lebeuf, contemporain de Caylus, et savant non moins recom-
mandable, a, lui aussi, visité les ruines de cet édifice, et a suivi les tra-
vaux des fouilles oiïicielles faites en 1737. Il a rédigé, sur ce sujet, une
notice insérée au Mercure de France, janvier 1758, page 47, cl il en
fait mention au troisième volume de VUisloire du diocèse de Paris,
pages 'J6 et 119. « Cet édifice était, dit-il, partagé en plusieurs cham-
bres : dans l'une était une ouverture semblable à un fourneau. Il y a
trouvé quelques pierres plates, ciselées et ouvragées, des tuyaux en
terre cuite, qui devaient y amener les eaux de la fontaine voisine. » Il
présume que cet édifice renfermait des bains.
Feu .M. Jollois, l'un des membres les plus distingues de l'Institul
d'Egypte, a fait mettre à découvert la surface entière de la fondation
de cet édifice en 1840. Il nous a dit à nous-niéme qu'il croyait que
celle construction était une maison de campagne dans laquelle se trou-
vait un bain.
Voilà donc deux antiquaires, tout aussi rccoiumandables que Caylus,
qui pensent que c'était un bain et non une fonderie. Le fourneau, prin-
cipale base de l'opinion de Caylus, a été aussi observé par l'abbé
Lebeuf; el, a défaut de description, on peut loul aussi bien supposer
qu'il a pu servir à chauffer un bain qu'à chauffer un creuset.
Ainsi que nous le disions dans une notice insérée dans le deuxième
volume, colonne 2H de la Revue, nous y avons trouvé des fragments
de plaques de marbre blanc, recouverts d'une couche d'incrustation
lamellaire, évldeiiiment produite par le stgoiir des eaux. Ces fragments
app:irlenuienl prob;iblement à un réservoir d'eau revêtu en marbre, et
nous en avons conclu qu'il pouvait avoir servi à un bain (1). Nous y avons
Irouvé des débris de moulures en marbre blanc, et des morceaux d'en-
duit recouverls de peintures à la manière étrusque. Tous ces fragments
aiinoncenl un édifice décoré avec luxe. Où a-l-on vu des fonderies in-
crusléesen marbre? Il y a toiii lieu de croire que les Romains, si luxueux
d'ailleurs dans leurs édifices, non-seulement ne prodiguaient pas les
matériaux précieux dans la construction de leurs usines, mais qu'ils n'y
apportaient pas même la solidité, qui él;iit le caractère dislinclif de leur
manière de bâtir. S'il en eût été autrement, on retrouverait souvent des
vestiges de leurs élablissemenls industriels. Mais de telles découvertes
sont excessivement rares, el se reconnaissent plutôt aux débris nom-
breux des objets fabriqués qu'à l'imporUince des constructions; ce qui
fait croire qu'ils les conslruisaienl, comme les modernes, très-légère-
ment. Au surplus, on ne trouve sur l'emplacement du monumeiii de
.Montmartre aucun fragment de scories. Ces matières soni de nature à
se conserver éternellement, et le sol de la prétendue fonderie devrait en
éiie jonché.
Caylus, il est vrai, y a trouvé aussi des fragments de creusets dont il
ne donne pas la description. S'il était permis de faire des conjectures
sur les creusets observés par Caylus, voici ce que nous dirions : Fro-
doarl, écrivain du dixième siècle, dit (tome VI II du Recueil des Historient
de France, page 198), que « lors du renversement de cet édifice par
une tempête, en 94i, on vil des démons, sous la forme de chevaliers, se
servir, poursaper ses murailles, des pouires qu'ils avaient extraites des
ruines d'une chapelle voisine qu'ils venaient de détruire. »
Si Frodoart, homme instruit, a pu croire à l'histoire des démolisseurs
infernaux, à [ilus forte raison le peuple ignorant et superstitieux a-i-il
été la dupe de la vision merveilleuse. Cette tradition a dû laisser dans
les esprits une horreur profonde pour ces ruines, que personne n'osa
visiter de longtemps. Or, serait-il impossible que des faux monnayeurs,
gens assez sceptiques, comme tous les fripons du même genre, eussent
profité de la terreur générale qu'inspiraient ces ruines et qui en éloi-
gnait vraisemblablement les visiteurs, pour établir leur lalioraioirc
dans quel(|ne réduit encore intact? Cet édifice ne fut pas enlièiement
(1} Ces revélemciits n'ont que 15 iiiilliDiètrcs, et le bandeau 18 niilliniètrei
d'épaisseur. Ils étaient scellés avec du mortier de cliaux et ciment de brique.
Ce mortier paraît avoir adliéré au marbre, quoique sur sciage, plus rortement
qu'à lui-même, puisque tous les TragmeDU que nous avons observés portent
encore des arracbements de mortier sur presque toute leur surface. Il semble,
d'après l'inspection d'un de ces fragements, qu'on recouvrit la surface du sciage
d'un frottis ou d'un gobelis de mortier a\ant la pose; peut-être était-ce no
moyeu de faire prendre iniru\ le mortier à la surface du sciage.
Nous recommandons cette observation aux architectes qui ont occasion de
faire exécuter des placages en marbre, car, comme il faudrait changer de sys-
tème, il est douteux que les marbriers cux-uiémes s'y décident iamais; il y a
peut-être bien un peu plus de travail, puis il faudrait surtout sortir de la routine,
ce qui n'est pas cliose facile. Nos marbriers ne connaissent que le plitre, ma-
tière détestable quand elle est employée dans des lieux humides.
Les Romains connaissaient le plitre, quoiqu'ils fussent les plus fameux fai-
seurs de placage qui aient jamais existé, puisqu'ils révélaient en dalles de mar-
bre de grands édifices tout entiers, tels que le Panthéon, le temple de Vé-
nus, etc. Il est présumable qu'ils connurent le plltre de Montmartre, puis-
qu'ils construisirent dans cette localité plusieurs monuments, dont celui qui
nous occupe était assis à un mètre près .sur la haute niasse de plltre ; ils n'oM
pourtant pas employé au scelloment de leurs dalles, non plus qu'aux enduits,
cette matière qu'ils avaient cependant sous la main.
375
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
376
(iiiiriiil par la Icmpêie et les dénions de 9 14, pnisiine Sauvai (^n^tiji. de
Paris, 1011)6 I, page 3V9) dit qu'en 1618 (près de sept siècles plus
lard) il restait encore un grand pan de mur et une statue dans une
niclie, qui furent renversés par un ouragan le 20 octobre.
Ainsi, d'une part, la présence des accessoires d'une maison somp-
tueuse, tels que revêments en marbre, sculpture d'ornement e( statues,
peintures, etc., et enûn très-solides constructions ; d'autre part, l'ab-
sence d'objets qui accoMipagnent toujours les usines niétallurgifiues,
tels que les scories provenant de la fusion des métaux. Le nom même
de temple de Mercure que lui donnent les anciens auteurs, s'il ne prouve
pas que ce fut réellement un temple, fait du moins présumer que cet
édifice avait un aspect monumental que n'ont pas les usines. Tout, enfin,
concourt à démontrer que ce n'était pas une fonderie, mais bien un
établissement de bains, ou plutôt une maison de campagne avec bains.
IVOUVEILE MANIERE
SE CONSTRUIRE IiES VOUTES DES ÉGOUTS DE PARIS.
Depuis quelques années, l'on construit à Paris des voûtes d'égouts
(Pune épaisseur de 0"" 13 seulement, en moellons faclices, sur murs
pieds-droits de 0" 55, en blocage de meulière et mortier de cbaiix liy-
drauliqiic.
On a sans doute éprouvé soigneusement la résistance de ces voûtes,
dont l'épaisseur nous semble bien légère pour porter une couche de
terre de 2 à 3 mètres de hauteur, et conlinuellement ébranlée et tassée
par le roulis d'innombrables voilures.
Ces voûtes sont extrailossées conccntriquement, et la grande dilTé-
rence d'épaisseur (|Qi existe entre elles et leurs pieds-droits est rachetée
par le premier rang de voussoirs portant à l'extérieur un congé qui se
prolonge sur la largeur entière de l'arrase du mur.
Les joints longitudinaux sont tous perpendiculaires à la courbe, qui
est un plein cintre.
Ces moellons sont fabriqués sur place avec de petites meulières
jetées à bain de mortier dans un moule en bois. Le mortier se compose
de parties égales de ciment romain et de sable dc' rivière. On le gichc
avec de larges truelles en fer dans de grandes auges ouvertes par devant.
Le mélange du sable et du ciment se fait d'abord à sec, et, après
qu'on y a mis la quantité d'eau nécessaire, on le brasse vigoureusement
avec la truelle, en le poussant allernativement d'un bout à l'autre de
l'auge.
Le moulage se fait en enfonçant dans un bain de mortier, dont on
remplit le moule, des quartiers de meulière qu'on a soin de laisser ap-
parents sur les quatre faces qui doivent former joints. Ces joints con-
servent ainsi des aspérités pour donner prise au mortier dans la pose.
Les faces d'intrados et d'extrados ne laissent voir que le mortier, dont
la surface s'est parfaitement lissée sur les parois du moule.
Il y a deux sortes de moules, l'un pour les voussoirs portant congé,
l'autre pour les voussoirs ordinaires y compris la clef. Cette dernière
espèce de moule a la forme d'une caisse carrée sans fond, composée
de fortes planches de chêne réunies par des charnières en fer et soli-
dement barrées. Deux des côtés de la caisse correspondant à l'intrados
et à l'extrados sont cintrés. Les deux autres, correspondant aux deux
joints de Ic'te, sont droits et sont munis, du côté de l'intrados, d'un
prolongement servant de manche pour saisir le moule. Les deux côtés
ouverts corresponilent aux joints de douelle. Celui du dessous se trouve
fermé pendant le moulage par la surface inclinée de la table sur laquelle
on le pose. Les deux côtés munis d'un manche sont réunis au côté
formant extrados par deux paires de charnières en fer ; mais par l'extré-
mité dont le prolongement sert de manche, l'un est invariablement fixé
au côté faisant intrados, et l'autre est réuni à celui-ci par une mortaise
carrée recevant un tenon. C'est par ce joint que s'ouvre le moule ;
l'assemblage est maintenu par un ressort et un mentonnet.
Pour ouvrir le moule, on décroche le mentonnet, on saisit ensuite
les deux manches avec les mains ; on é<:arle le moule, les charnières se
développent, et le voussoir se dépouille aisément. Les moules pour les
voussoirs du premier rang ont un côté de plus correspondant au congé.
Ils se développent de la même manière que les autres, dont ils ne dif-
fèrent en outre que par leur profil.
Chaque atelier est muni d'une vingtaine de moules alignés en di-ux
séries, et comprenant chacune une espèce de voussoirs. Le travail se
fait en suivant méthodiquement les deux séries de moules qu'on remplit
par un bout de la ligne tandis qu'on les vide de l'autre. Le nombre des
moules employés doit être calculé sur la vitesse de prise du ciment, et
ils sont sans doute assortis de manière qu'en les remplissant tous al-
ternativement et avec ordre, il n'y ait pas de double emploi dans la fa-
brication.
7«««
PRIX PROPOSES PAR LA SOCIETE D'ENCOURAGEMENT
POUR Ii'INDUSTRIE NATIONA1.E.
EXTRAIT DES PBOGBAUSIES.
Prix pour la fabrication des briquet, tuitet, carreaux et aulree produite
en terre cuite.
La Société d'encouragement.
Considérant quelle est d'Importance de la fabrication des briques, tuiles, car-
reaux et autres produits en terre culte, pour les constructions et pour l'Indus-
trie en général, et combien II importe d'améliorer cette fabrication, de la rendre
moins coûteuse et de la multiplier autant que possible, et surtout d'en Intro-
duire l'usage dans les localités où II n'est pas encore établi, i cause de l'igno-
rance des procédés ou de leur Imperfection, ou enfin de leur trop grande .
cherté;
Considérant, en outre, que les procédés de cette fabrication sont extrême-
ment variables, en raison, soit de la nature et de la consistance particulières
des terres dans chaque localité, soit de la nature même des produits à fabri-
quer, soit enfin des habitudes locales, etc.:
Qu'en conséquence, si, dans certaines localités, l'ensemble des procédés de
ce genre de fabrication réclame des améliorations plus ou moins importantes,
il est possible que, dans beaucoup d'autres, une partie seulement de ces pro-
cédés soit susceptible d'être améliorée ;
Et que, d'ailleurs, dans un art aussi important et aussi répandu, il importe
de laisser aux Inventeurs et aux Industriels la faculté d'exercer leurs recher-
ches sur l'objet qui leur paraîtra ou plus urgent ou plus facile à traiter,
A cru devoir diviser ainsi qu'il suit le prix unique qu'elle avait précédem-
ment proposé pour ce genre de fabrication.
i" Procédé propre à opérer, plus économiquement ou plus parfaitement
qu'on ne le fait ordinairement, la division des terres dont la préparation
exige cette division.
La Société d'encouragement propose un prix de la valeur de cinq cents
francs pour celui qui, soit dans une manufacture déjà existante, soit dans une
manufacture nouvelle, aura Inventé et mis en usage un procédé quelconque
pour opérer, d'une manière plus économique ou plus parfaite qu'on ne pour-
rait le faire par les procédés ordinairement employés, la division des terres
qui, en raison de leur ténacité naturelle, réclament cette opération préparatoire.
La Société a principalement en vue les terres de la nature des glaises de
Vaugirard, Vanvcs, Gentilly, etc., dont la consistance saponiforme et la forte
ténacité rendent celte division assez longue et assez difficile.
377
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
378
On sait qu'elle s'opère ordinairement, soit lorsque cette glaise est fraîche-
ment tirée, en la coupant en tranches plus ou moins épaisses au moyen d'un
couteau à deux mains, soit, lorsqu'elle est sèche, en la concassant et en la
laissant ensuite tremper le temps nécessaire.
La Société ne prescrit aucune condition quant au moyen de division et à la
nature du procédé à employer; elle demande seulement que ce procédé soit,
i perfection égale, plus économique que le procédé ordinaire ou plus parfait,
i dépense égale.
La comparaison à établir entre l'ancien et le nouveau procédé devra être ap-
puyée, l''de certificats autlicnliques constatant, d'une part, quels étaient la na-
ture, les avantages ou les inconvénients, et enfin le prix de main-d'œuvre de
l'ancien procédé, et, d'autre part, quels sont ceux du nouveau procédé; 2" de
la production d'échantillons authentiques de briques, tuiles, carreaux ou au-
tres produits, tant crus que cuits, fabriqués, les uns suivant l'ancien procédé,
les autres suivant le procédé nouveau.
On devra aussi faire connaître d'une manière exacte la nature et la con-
sistance ordinaires des terres, et en fournir des échantillons également authen-
tiques.
Si le nouveau procédé est mécanique, on devra produire des dessins détaillés
de machines, accompagnés d'une description exacte.
2° Mélange et corroyage des terres.
La Société propose un prix de la valeur de cinq cents francs pour celui
qui, dans les mêmes circonstances que ci-dessus et sous les mêmes conditions,
aura inventé et mis en usage un procédé quelconque pour opérer, d'une ma-
nière plus économique ou plus parfaite qu'on ne pourrait le faire par les pro-
cédés ordinairement employés, le mélange et le corroyage des terres.
Les concurrents devront fournir les mêmes documents que pour le prix pré-
cédent.
3" Procédé de rebattage et de réparage.
La Société propose un prix de la valeur de cinq cents francs pour celui qui,
dans les mêmes circonstances que ci-dessus et en remplissant les mêmes condi-
tions, aura inventé et mis en usage un procédé quelconque pour opérer, d'une
manière plus économique ou plus parfaite que par les procédés ordinairement
employés, le rebattage et le réparage des briques, tuiles, carreaux, etc., etc.
On devra s'attacher à ce que ce procédé assure, aussi complètement que pos-
sible, la régularité et la parfaite conformité de formes et de dimensions des
briques, tuiles, etc.
La Société admettra, pour concourir successivement à ce prix et sous les
mêmes conditions que ci-dessus, l'auteur d'un procédé qui aurait l'avantage de
dispenser des opérations de rebattage et de réparage, sans aucun inconvé-
nient pour la bonté et la perfection des produits fabriqués.
Les concurrents devront fournir les mêmes documents que pour les prix pré-
cédents.
4° Cuisson.
La Société propose un prix de la valeur de mille francs pour celui qui, dans
les mêmes circonstances que ci-dessus et en remplissant les mêmes conditions,
sera parvenu à rendre la cuisson plus parfaite, plus siîre, plus égale ou plus
économique, soit au moyen d'une meilleure construction et disposition des
fours, soit au moyen de meilleurs procédés d'enfournement, de conduite du
feu, d'emploi des combustibles, etc., etc.
On devra, indépendamment des documenls précédemment indiqués, produire
les plans, coupes et profils de construction et de disposition des fours, l'indi-
cation du mode d'enfournement, de la (|uantité des produits enfournés, de la
nature et de la quantité des combustibles, et enfin des procédés de cuisson et
de conduite du feu, le tout authentiquement cartifié.
Dans le cas où les avantages qu'il est nécessaire d'obtenir, sous le rapport de
la cuisson, ne seraient atteints qu'en partie par les concurrents, par exemple,
s'il y avait seulement amélioration de la construction ou disposition des fours,
sans amélioration des procédés de cuisson, ou vie» versa, la Société se réserve
la faculté de réduire le prix à moitié de sa valeur.
5» Vernissage.
La Société propose un prix de la valeur de mille francs pour celui qui,
dans les mêmes circonstances et en remplissant les mêmes conditions que ci-
dessus, aura inventé et mis en usage un procédé de vernissage des tuiles,
carreaux et autres produits, plus parfait ou plus économique que les procédés
ordinairement employés.
Il est désirable que ce procédé puisse être mis en usage d'une manière satis-
faisante, sans exiger une seconde cuisson. On devra faire connaître, d'une ma-
nière exacte et suffisamment détaillée, les matières employées au vernissage,
ainsi que la manière de s'en servir.
Au besoin, on fera connaître également la disposition du four ou le mode
particulier de cuisson que le procédé pourra exiger.
Dans la cas où ce procédé ne remplirait qu'une partie des avantages désirés,
par exemple, s'il exigeait une cuisson particulière, et qu'en conséquence il n'y
eût qu'une faible économie, comparativement aux procédés actuellement usitéf,
la Société se réserve la faculté de réduire le prix i moitié de sa valeur.
6° Extraction de la glaise.
La Société, considérant que l'extraction de la glaise de» environs de Paris et
de diverses autres localités se fait ordinairement par puits et galeries souter-
raines, et que les procédés employés pour cette extraction sont fort imparfaits
et assez coûteux, quoique peu lucratifs et fort dangereux pour les ouvriers, en
raison des nappes d'eau dont les bancs de glaise sont toujours accompagnés;
Que cette extraction importe non-seulement à la fabrication des briques,
tuiles, carreaux, etc., mais encore à celle des poteries, faïences et autres;
Et enfin que l'amélioration du mode de cette extraction intéresse en même
temps ces différentes fabrications, ainsi que le bien et la sûreté des ouvriers
glaisiers.
Propose un prix de la valeur de cinq cents francs pour celui qui aura in-
venté et mis en usage, soit dans les carrières de glaise des environs de Paris,
soit dans celles d'autres localités où l'on extrait de la glaise à peu près de
même nature, un procédé d'extraction plus sûr, plus facile ou plus économi-
que que celui qui est actuellement en usage.
On devra faire connaître, par un mémoire sufOsamment détaillé et accompa-
gné de dessins nécessaires,
1" Le gisement de l'espèce de glaise dont il s'agit, la profondeur à laquelle
elle se trouve, la hauteur des bancs et la nature de ceux qui lui sont super-
posés ;
2° Le mode d'extraction présentement en usage, la nature, les formes et di-
mensions des outils et ustensiles qu'on y emploie ; les inconvénients qu'il pré-
sente, particulièrement quant à la sûreté des extracteurs ; le prix de main-
d'œuvre qu'exige le procédé ;
3» Et enfin les détails du nouveau mode d'extraction, la nature et les formes
des outils et ustensiles qu'il exige, les avantages qui en résultent et le prix de
main-d'œuvre auquel il donne lieu.
Tous ces documents devront être accompagnés de certificats authentiques cl
dûment légalisés.
Enfin on y joindra des échantillons de la glaise dont il s'agit el des produits
à la fabrication desquels elle est employée.
Le concours restera ouvert jusqu'au 1»' janvier 1845. Les prix seront décer-
nés dans la séance générale du deuxième semestre de la même année.
Prix pour des moyens de prévenir ou de faire cesser les effets de l'humlditi
dans les constructions.
La Société d'encouragement décernera des médailles d'or, de platine, d'ar-
gent et de bronze : 1° à ceux qui, sans embrasser l'ensemble de la matière i
traiter dans une instruction théorique et pratique sur les diverses causes de
l'humidité et de ses inconvénients, et sur les moyens, soit de les prévenir lors
de l'exécution des constructions, soit d'y remédier dans les constructions exis-
tantes, en auraient du moins traité complètement une partie distincte; J« a
ceux qui présenteront des procédés dont l'application sera reconnue sûre et
facile, mais qui seraient de nature à n'être employés que dans ceruins cas
particuliers.
Les médailles seront distribuées dans la séance générale du deuxième se-
mestre de 1845.
Le concours restera ouvert jusqu'au 1" janvier de la même année.
Prix pour le perfectionnement des appareils et protidi* detlinit au bltm-
ehissage du linge.
1° Pour l'introduction, dont les buanderies, d'appareils perfectionnés d*
lessivage.
Des travaux remarquables sur le blanchissage économique du linge ont été
379
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
380
entrepris par des savants très-distingués, et l'on doit à leurs recherches un
grand nombre de perfectionnements fort importants.
Mais les découvertes de la science ne se sont point encore popularisées parmi
les nombreux blanchisseurs de la capitale et des environs; les perfectionne-
ments n'ont pas encore pénétré dans leurs ateliers.
Néanmoins il est certain que des appareils établis d'après les méthodes per-
fectionnées, soit par la circulation de l'eau cliaude, soit par affusion, soit par
la vapeur, offriraient de grands avantages en produisant tout i la fois un blan-
chissage plus parfait et une économie notable dans la dépense.
C'est dans le but de répandre les bons procédés de lessivage que la Société
d'encouragement accordera des médailles aux blanchisseurs qui auront établi
chez eux des appareils perfectionnés de lessivage, et qui justifieront s'en ser-
vir avec succès depuis plus d'un an.
Ces médailles seront décernées dans la séance générale du deuxième semes-
tre de 1843.
2* Pour le perfectionnement des appareils dt lessivage par la vapeur.
L'emploi de la vapeur a, sur les autres procédés, l'avantage de ne mettra
jamais le linge en contact qu'avec de l'eau pure et distillée, au lieu de lessive
sale et colorée; de nettoyer et d'enlever complètement les substances grasses
dont le linge est imprégné.
Mais une opinion généralement répandue contre le lessivage àla vapeur, c'est
que le linge traité de cette manière est exposé à être altéré ou même brûlé.
Néanmoins on se sert d'appareils à vapeur depuis trente ans à l'hôpital Saint-
Louis, dans l'administration des lils militaires; depuis plusieurs années, par-
ticulièrement, dans les hospices de la ville de Poitiers; Hjamnis l'on n'y a vu
les accidents dont il s'agit, et qui ne sauraient provenir que d'une manipulation
excessivement défectueuse et de la négligence la plus entière.
L'addition d'un tube latéral qui permet de reconnaître s'il y a trop ou pas
assez de liquide dans l'intérieur de la chaudière est un heureux perfectionne-
ment ajouté à l'ancien appareil de Curaudau, et il a pour effet de prémunir
contre tout danger d'altération du linge.
Mais la Société d'encouragement accueillerait avec empressement de nouvel-
les améliorations dans les appareils de lessivage à la vapeur, et qui auraient
pour résultat d'assurer le succès de l'opération en diminuant la surveillance et
le travail des personnes chargées de la diriger.
C'est dans ce but qu'elle accordera un prix de la valeur de mille francs à
ceux qui auront apporté des perfectionnements importants aux appareils ac-
tuels de lessivage par la vapeur.
Bien que, dans l'état actuel de la science, le lessivage à la vapeur mérite la
préférence sur tes autres procédés, la Société n'entend pas accorder à ce sys-
tème une préférence exclusive ou absolue; elle décernera également des ré-
compenses à ceux qui auront amélioré notablement les bons procédés ou appa-
reils de lessivage par affusion, circulation, etc.
Ces prix et récompenses seront décernés, s'il y a lieu, dans la séance géné-
rale du deuxième semestre de 1845.
IS'ota. — Les concurrents devront aussi porter leur attention sur les moyens
d'éviter ou de diminuer les inconvénients que présentent les manipulations du
linge imprégné de liqueur alcaline. Cette opération répugne beaucoup aux ou-
vrières à cause de l'action très-vive et douloureuse que l'alcali produit sur leurs
mains.
Si la chaudière et le cuvier à vapeur étaient parfaitement joints, on pourrait
éviter la manipulation dont il s'agit, en imprégnant le linge de lessive alcaline
dans le cuvier à vapeur même, l'y laissant macérer pendant le temps néces-
saire, ayant soin seulement de vi<ler en grande partie la chaudière avant d'al-
lumer le feu.
3° Pour la détermination des causes d'altération des tissus par la vapeur
et les lessives alcalines.
Si des tissus ont été aliérés ou brûlés dans l'opération du lessivage par la
Tapeur, il faut attribuer cet accident, soit à un excès d'alcali, soit à une pres-
sion extraordinaire de la vapeur et à une élévation considérable de tempéra-
ture dans l'intérieur de l'appareil, par suite de l'obturation accidentelle des
conduits de vapeur.
Il devient donc fort important, non-seulement pour la question qui nous oc-
cupe, mais encore pour celle du blanchiment en général, de connaître le degré
de température, de pression et d'alcalinité auquel les tissus commencent i être
altérés.
Tel est l'objet de la question suivante, que la Société d'encouragement met
au concours :
Déterminer par l'expérience l'action que l'eau, la vapeur, les UssiMS
alcalines plus ou moins denses, plus ou moins caustiques, exercent à des
températures et iout des pressions plut ou moins élevées, et pendant un
laps de temps plut ou moins long, sur les tissus de lin, de chanvre et de
coton, de diverses finesses et qualités.
La valeur du prix sera de deux mille francs.
Il sera décerné, s'il y a lieu, dans la séance générale du deuxième semes-
tre de 1845.
Les concurrents devront mettre les commissaires de la Société â même de ré-
péter les expériences et de vérifier l'exactitude des faits qui seront énoncés
dans les mémoires, qui devront être présentés au concours avant le 1" jan-
vier 1845.
L'air atmosphérique contenu dans l'appareil, étant fortement échauffé, peut
aussi occasionner, l'altération des tissus; il importe d'étudier cette action et de
tenir compte des résultats auxquels elle peut donner lieu.
4° Pour le perfectionnement des rouet ou autres machinet propres à laver
le ling».
Les roues à laver (voir le Bulletin de la Société d'encouragement, vingtième
année (1821), p. 51, et mars 1839) sont employées avec succès pour le blanchi-
ment des étoffes; on en a fait d'utiles applications au blanchissage du linge;
mais le degré de vitesse à imprimer i la roue, afin que le linge soit suffisamment
secoué, retourné et imprégné de lessive ; la disposition la plus avantageuse de
l'intérieur des compartiments ; la forme, les dimensions les plus convenables i
donner à la roue, etc. ; tous ces objets n'ont pas encore été précisés ni étudiés
d'une manière satisfaisante.
C'est afin d'arriver à la solution de ces Intéressantes questions que la Société
d'encouragement propose un prix de la valeur de cinq cents francs à l'auteur
du meilleur travail qui lui sera présenté sur ce sujet :
Déterminer, d'après t'expériene» et la théorie, les conditions de forme et
de vitesse, ainsi que les dimensions les plus convenables à donner aux roues
à laver le linge.
D'autres machines à laver agissant par pression, torsion ou percussion (washs-
tock), [Bulletin, vingtième année), sont employées aussi dans les manufactures,
et il serait possible d'en faire d'utiles applications au lavage du linge.
La Société accordera un prix de la valeur de cinq cents francs à celui qui lui
présentera la meilleure machine de ce genre propre au lavage du linge.
Ce prix sera décerné, s'il y a lieu, dans la séance générale du deuxième se-
mestre de 1845.
5° Pour le perfectionnement des appareils, machines et procédés pour ca-
landrer, moirer, plisser, repasser et sécher le linge.
La Société accordera des médailles et des récompenses aux personnes qui lui
présenteront les meilleurs objets en réponse 1 cette partie du programme ; elles
seront distribuées, s'il y a lieu, dans la séance générale du deuxième semes-
tre de 1845.
OOMDITIOXS CÉXÉIIALES 1 REMPLIR PAR LES COXCCRKEXTS.
1* Les modèles, mémoires, descriptions, renseignements, échantillons et piè-
ces destinés à constater les droits des concurrents, seront adressés francs de
port au secrétaire de la Société d'encouragement pour l'industrie natio-
nale, rue du Bac, 42, hôtel de Boulogne ; ils devront être remis avant le
1" janvier de l'année de la distribution des prix : ce terme est de ri-
gueur.
2" Les procédés ou machines seront examinés par des commissaires que la
Société désignera.
3° Les membres du Conseil d'administration et les deux censeurs sont exclus
du concours.
4" Les autres membres de la Société sont admis à concourir; les étrangers
le sont également.
5° Les concurrents sont avertis que la communication qu'ils font à la So-
ciété de leurs procédés ne peut leur tenir lieu d'un brevet d'invention, et que,
s'ils veulent prendre le brevet, il faut qu'ils le fassent avant de se présenter
au concours.
6° Les brevets d'invention n'étant délivrés que sur la description détaillée
381
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DKS TRAVAUX PURLICS.
383
des procédés, et chacun, d'après la loi du 5 juillet 1844, pouvant en prendre
connaissance (1), la Société se réserve expressément la faculté de publier, en to-
talité ou en partie, les découvertes qui auront obtenu les prix et médailles;
mais les concurrents ne pourront user de cette faculté, sous quelque prétexte
que ce soit.
7° Les auteurs jugés dignes d'une récompense, qui ne se seraient pas pour-
vus d'un brevet d'invention et qui désireraient garder le secret de leurs procé-
dés, seront tenus d'en déposer sous cachet la description, dont l'exactitude
devra être attestée par un membre du comité compétent. La durée du dépAt
ne pourra excéder quinze ans, à l'expiration desquels la description sera
publiée.
8» La Société conservera les mémoires descriptifs et les dessins qui n'auront
point été couronnés; mais elle permettra aux auteurs d'en prendre copie, et
elle leur rendra les modèles.
9» Les concurrents ne mettront pas leurs noms à leurs mémoires ; ils y met-
tront seulement une devise, et ils joindront aux modèles, mémoires ou échan-
tillons, un billet cacheté renfermant la même devise, leur nom, et l'indication
de leur domicile.
10° Les concurrents qui auraient traité plusieurs des questions mises au con-
cours sont invités i envoyer des mémoires séparés sur chacune d'elles.
11° Les médailles ou la somme seront remises â celui qui aura obtenu le prix,
ou i son fondé de pouvoirs.
Approuvé en séance générale, le 29 mat 18ii.
Le baron THfiNARD, président;
FRANCœUR, DUMAS, vice-présidents ;
CL. ANTHELME COSTAZ, JOMARD, secrétaires-adjoints.
>e®Sfi
CBROUflQUE.
Sommaire : Travaux de la ville de Paris, jardin du Luxembourg. - Un marché aux
fleurs à la place Saint-Sulpice. - Bibliothèque Sainte-Geneviève. - Concours
pour un grand ihéâtre à Toulouse. - École centrale des ans et manuraclurcs,
distribution des diplômes et des certificats.
Différents travaux importants el utiles s'exécutent en ce moment sur
différents poinis de la capilale. Nous sommes loin, on le sait, d'être
d'accord avec Tadministration sur la manière dont le remaniement de
Paris doit s'opérer, el sur les plans d'enscnii)ie à suivre dans l'édifica-
tion du Paris moderne; mais nous nous sommes toujours empressés de
lui donner nos éloges quand des travaux de détail nous ont semblé
faits, sinon d'un point de vue d'ensen^ble bien compris, du moins
en vue d'une amélioration réelle et immédiate. Nous nous refusons à
croire aux plans d'ensemble de la ville, dont cependant les discours du
préfet viennent deux fois par an éblouir les myopes, quand nous voyons
une rue arlère telle que la rue Rambuleau former des coudes en maints
endroits comme une rue du Moyen-Age, alors que chacun bâtissait sa
maison à sa guise, tantôt suivant une ligne, Uintôl suivant une autre,
et que les rues se formaient comme par hasard de la juxtaposition for-
tuite d'habilaiions, en l'absence de tout conirôle directeur ; nous nions
absolument l'existence de ce plan d'ensemble quand nous voyons re-
bâtir des maisons neuves sur les terrains de l'ancien Vaudeville, c'est-à-
dire dans le prolongc-mcnt de la galerie inachevée du Louvre et de la
rue de Rivoli; quand nous nous rappelons surtout avoir vu, il n'y a
guère plusd'un an, des ouvriers occupés à niveler les terrains, à bitumer
les trottoirs, à planter les arbres du boulevard Malesherbes, près de la
Madeleine, ce fameux boulevard si pompeusement promis, si longtemps
(») Loi du 5 juillet 18«. « An. 25. Les descriptions, dessins, échanlillons et mo-
dèles des brevet» délivrés resteront jusqu'à l'expiration lics brevets, déposés au mi-
nistère de l'.igriculturc et du commerce, où ils seront communiqués, sans frais, à
toute réquisition. Toute personne pourra obtenir, à ses frai.«, copie dcsdilcs descrip-
tions et dessins, suivant les formes qui seront déterminées par l'an. 50. »
annoncé, ce boulevard impossible, depuis plus de cinq ans qu'une rue
nouvelle, la rue Lavoisier.est bâtie 8ur son axe; plus impossible encore
aujourd'hui, que de vastes maisons en pierre de taille et à cinq étages
viennent de s'élever comme par ench;inlernent, justement à son entrée,
sur les terrains qu'il devait traverser. Voilà pourtant ce que deviennent
les beaux projets de la Ville : aussi les promesses de M. le préfet nous
trouvent-elles sceptiques; pour y croire . nous attendrons désormais
qu'elles se soient réalisées; quant au plan d'ensemble, il y a long-
temps que nous n'y avons yamai< cru.
Parmi les améliorations partielles dont nous parlions plus haut, il en
est une (|ue nous nous reprocherions de passer sous silence; nous vou-
lons parler du dégagement que l'on crée à la partie du jardin du Luxem-
bourg qui longe la rue de Vaugirard, el de la démolition de ces ignobles
masures qui la privaient de la vue et de l'air du jardin. Ce n'est point pré-
cisément à la Ville que sont dus ces travaux ; ils sont l'œuvre du gouver-
nement : mais ils se railachenl trop élroiiement aux intérêts de la ville
pour les en séparer. Quand toutes ces vieilles maisons seront démolies,
on élèvera une grille sur toute la longueur du jardin.
A l'intérieur du parc , on a fait depuis quelques années plusieurs
améliorations. On a élargi, d'un côté du moins, la grande avenue dite
de l'Observatoire, el pour cela, il a fallu f^ire un remblai considérable
du côté des pépinières du sud-ouest. On a commencé dans certains en-
droits le remblai de la partie opposée. Il nous semble qu'on pourrait
facilement, el sans travaux considérables, faire entrer définitivement
les pépinières et le jardin de la Faculté de médecine dans l'ensemble
du parc; les différences de niveaux pourraient être sauvées par des
pentes dont l'elTel pittoresque animerait celte partie si monotone du
jardin. On travaille aussi à renouveler les informes statues qui le dé-
parent depuis trop longtemps de leurs membres mutilés. On a déjà
placé un Hercule d'une beauté de formes assez suspecte, et près de là
la Velléda de M. Maindron. Cette œuvre remarquable exhale un par-
fum de mélancolie qui arrête le promeneur el le force à rêver. Bien-
tôt, dit-on, la sombre druidesse verra disparaître son entourage païen;
les Vénus, lesJVulcain, les Bacchus, feront place à sainte Clutilde, l'é-
pouse du vainqueur de Tolbiac; à Blanche de Casiille, la mère du roi
saint et guerrier qui bâtit la chapelle de Vincennes, la Sainte-Chapelle
et une partie de Saint-Denis; à sainte Geneviève, la pauvre bergère,
palroiie de Paris; à Valentine de Milan, la malheureuse épouse du duc
d'Orléans assassiné en 1507 par les hommes de Jean Sans-Peur; à Ma-
rie Stuarl, celte autre princesse malheureuse qui paya si cher sa beauté
et ses amours; à Jeanne d'Albret, la mère de Henri IV; à Marguerite
de Provence, l'épouse de saint Louis; et enfin à Jeanne Hachette,
l'héroïne de Beauvais. H est une autre Jeanne qui, nous l'espérons, ne
sera pas oubliée dans relie glorilication des gloires féminines de la
France; il est aussi une autre Marguerite pour laquelle nous demandons
un piédestal: l'aimable sœur de François I" ne mérite- t-elle pas une
place sous ces poétiques ombrages, entre Marot et Ronsard?
— On démolit sur la place Saint-Sulpice toutes les vieilles masures
qui l'emcombraient encore, el quelques ouvriers se hàUnl lentement
autour de la fontaine de M. Viscunti. Après maint et maint essai en
plâtre, l'architecte a enfin trouvé le galbe qu'il lui convenait de donner
à sa grande vasque en marbre; s'il ne fait pas un chef-d'œuvre, ce ne
sera pas faute d'avoir cherché. Quand le sol de la place sera complète-
ment aplani, el que les eaux du piiiis de Grenelle couleront du sommet
de la motitagne qu'élève M. Visconti, alors on ap|)ellera les marchands
fleuristes de la capilale au pied des jeunes ormeaux; ce sera le cin-
quième marché aux fleurs de Paris, et le seul sur la rive gauche. Le
plus animé d'entre eux est celui du quai aux Fleurs, dans l'ile de la Cité,
et par conséquent au centre de la ville. Les autres sont situés, l'un au
pied de la .Madeleine, un auire autour du Chàteau-d'Elau, et le troisième
à la place Royale, c'est-à-dire tous trois sur la rive droite, tous trois
presque sur la ligne favorisée des boulevards du nord; cl pendant que
383
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
381
les jolies habitantes de celte heureuse rive s'enivraient à leur aise des
parfums de la rose et du jasmin, la pauvre griselte du fauljourg Saint-
Germain était obligée d'aller chercher jusque sur les bords de la Seine
l'œillet qui devait décorer le jardin de sa fenêtre. Il y avait là injustice,
et nous félicitons M. le préfet du gracieux projet qu'il a conçu en faveur
de cette aimable population du sud.
— On a enfin posé, sur l'emplacement de l'ancien collège Montaigu,
la première pierre de la nouvelle bibliothèque Sainte-Geneviève. La
construction de cet édifice est, .comme on le sait, confiée à l'intelli-
gence de M. Henri Labrouste.
Concours pour un grand théâtre à Toulouse. — La place principale de
Toulouse est située à peu près au centre de la cité, et s'étend devant
l'Hôtel-de-Ville, ou, comme l'appellent les Toulousains, le Capitale.
Les côtés nord et sud de celte place sont occupés par des maisons par-
ticulières de construction nouvelle, qui sont d'un dessin uniforme et
d'un assez bon effet. Le Capitole , flanqué d'une rue à chacune de ses
extrémités, occupe tout le côté Onest de la place, tandis que du côlé
Est on voit encore une masse de maisons informes, sales et hideuses,
dont on fait bien de vouloir se débarrasser au plus tôt. C'est sur l'em-
placement de ces masures, et vis-à-vis de l'Hôtel-de-Ville, qu'on veut
élever un théâtre monumental.
La situation nous paraît assez bien eniendue: elle est centrale ; la
place du Capitole rendra les abords du théâtre faciles, et en établissant
des rues sur les trois autres côtés du monument, celui-ci se trouvera
complètement isolé, circonstance très-importante pour un théâtre.
On voit actuellement exposés dans la grande salle de peinlure du
musée de Toulouse, près d'une vingtaine de projets de théâtre; c'est
que l'administration a ouvert un concours public pour son théâtre de
la place du Capitole. Nous disons un concours pu6/îc, et c'est presque un
ton, car peu d'architectes en dehors de l'enceinte de la ville sont in-
struits de ce concours, et nous-mêmes, qui publiâmes tout au long le
prospectus que l'administration nous avait adressé, relatif au concours
(non suivi d'effet) de son Hôiel-de-Ville, il nous a fallu venir à Tou-
louse pour apprendre l'existence de ce nouveau concours.
On comprend que nous ne pouvons pas analyser ici successivement
chacun des projets exposés, mais nous devons déclarer que ce concours
nous a révélé des éludes certainement plus avancées que nous ne
comptions en voir. Bon nombre de concurrents ont ménagé des entrées
couvertes pour les voitures, et des galeries au pourtour du monument,
qui dispeuseraieni de ces affreuses marquises et autres appendices dont
on affuble tant d'édifices publics. Quelques-uns ont donné une forme
circulaire à l'extrémité du théâtre occupée par la salle, mais ces tenta-
tives sont généralement assez malheureuses; nos théâtres modernes sont
accompagnés de tant d'accessoires étrangers aux théâtres antiques, que
la satle est loin d'occuper, comme autrefois, la majeure partie de la
surface horizontale du monument. Il n'est donc plus nécessaire au
même degré d'accuser la forme spéciale de la salle.
D'autres concurrents avaient composé leur façade principale (celle
qui donnerait sur la place) dans le style du Capitole, monument bâti il
y a cent ans environ, et qui ne manque certainement pas de quelque
grandeur, mais qui ne saurait être présenté aujourd'hui, cependant,
comme un modèle à imiter. On comprend que l'intention de ces mes-
sieurs était de donner un caractère d'un«7eà la place. Le côté Nord de
cette place reproduit en effet exactement le côlé Sud; ils auront voulu
qu'il y eût de l'analogie entre le côté Ouest et le côté Esi; ce désir se
comprend, mais il ne conviendrait pas d'y sacrifier un monument aussi
important que le sera le nouveau théâtre; car, nous le répétons, le Ca-
pitole, qu'on accepte volontiers pour son propre compte tel qu'il est, qui
est d'ailleurs un legs de nos ancêtres, ne saurait cependant imposer ses
formes molles et un peu lourdes au nouvel édifice qu'on veut con-
struire.
On nous a donné, comme les auteurs des projets qui nous avaient le
plus frappés, MM. Chambert, l'architecte du déparlement; de Bonald,
architecte de la ville, Delort, Deprato, Villeneuve et Gonin ; mais nous
sommes d'autant moins certains de rexactitude de ces renseigiien)ents,
qu'il nous est arrivé d'entendre altribuer le mêtne projet à deux auteurs
différents, et réciproquement. De toute façon, les concurrents qui l'em-
porteront (il paraît qu'il y aura trois prix) pourront s'en applaudir, car
leur victoire ne sera pas sans quelque gloire.
ECOLE CENTRALE DES ARTS ET M.VNUFACTURES.
L'École centrale des Arts et Manufactures vient de terminer, selon
l'usage , son année scolaire, par la distribution des diplômes d'ingé-
nieur civil qu'elle décerne à ses élèves les plus distingués. La sévérité
des épreuves par lesquelles il faut passer pour l'obtenir, fait de ce
diplôme une des plus honorables récompenses qu'un jeune homme
puisse ambitionner à la fin de ses études, cl une des plus solides ga-
ranties de succès à son entrée dans la carrière de la haute industrie.
A la dernière exposition des produits de l'industrie nationale, trois mé-
dailles d'or ont été accordées à d'anciens élèves de celte école.
Trente-trois diplômes-ont été délivrés cette année. Dans la liste qui
suit on remarquera des jeunes gens de diverses nations.
DIPLÔMES D'INGËNIEIB.
Mécanicient. — MM. Schmerber, de Mulhouse; Goeti, de Genève;
Lagrafel, de Marseille; Bcnoit-Duporlail, de Paris; Coulera, de Mul-
house; Lemaire, de Maubeuge: Saulnier, de Paris.
Comlructeurs. — M.M. Zanolini, de Bologne (Italie); Davasse, de
Toulouse ; Poucet, de Montmerle (Ain) ; Pollack, de Peslh (Hongrie) ;
Muller, d'Altkirck; Coghlan, de Killarney (Irlande); Zawadski, de
Dombrowski (Pologne); Malher, de la Louisiane; Guelle, d'Andeville
(Eure) ; Séguin, d'Annonay ; Salleron, de Paris; Nillis. de Paris; Hu-
bert, de Mous.
miailurgitlet. — MM. Desforgcs, de Paris; de Gispert, de Barce-
lone; Jelowicki, de Werda (Pologne); Guillaume, de Paris; Dumler,-
de Namur; Leniuhot, d'Arbois (Jura).
Chimistes. — MM. Le Royer, de Genève; Knab, de Tarare; Curlel,
de Quers ; Duclos, de Grenoble ; Terrisse, de Bolle (Suisse) ; Clausz, de
Landau ; Guérard-Deslauriers, de Caen.
CERTIFICATS DE CAPACITÉ.
Mécaniciens.— MM. Boulté, de Paris; Alberge, de Dinan ; Carbon-
nicr, de Rouen ; Marais, de Louviers.
Constructeurs. — M.M. Corneck, de Vcrneuil; Dupuy, de Martel;
Rollit, de Sainl-Jean-en-Boyan ; Sonnlag, de Louisbourg ; Richard, de
Paris ; Riche, de Gray.
MétaUurgisles. — M. Demoly, de Lons-le-Saulnier (rappel du certi-
ficat obtenu au dernier concours).
Chimistes. — MM. Brissout de Barneville, de Paris; Dony, de Fri-
bourg; Sudre, de Bordeaux.
L'un des Rédacteurs ,
Alphonse de GALONNE.
Pahis. — TïP. Lacrampg et Comp., bue damiette, 2.
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PROJET D'HOPITAL
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385
REVUK DE L'ARCHITECTURE KT DES TRAVAUX PUBLICS.
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DEUXIÈME INSTRUCTION DU COMITÉ HISTORIQUE
DES ARTS ET MONUMENTS.
(SUITE, voy. col. 2il, 289 et 337.)
CrVUCISATION CHRÉTIENN-X.
STYLE ROMAN ET STYLE GOTHIQUE.
CHAPITRE II. — DÉTAILS FATÉWEURS DE L'ÉGLISE.
(SUITB.)
G. Les fenêtres peuvent être en arcade , en œil-de-bœuf, ou
rectangulaires; percées dans la muraille à angles droits, ou éva-
sées, soit à l'intérieur, soit à l'extérieur, en meurtrières.
E^S
Fi'j. 191.
Dans la basilique primitive, l'abside en était dépourvue. En-
suite elle en admit une ou trois à sa partie supérieure ; plus rare-
ment et postérieurement elles y furent pratiquées en nombre pair.
C'était surtout par ces fenêtres de l'abside et par celles des fa-
çades que l'édilice était éclairé, plus que par les baies, tantôt en
arcade, tantôt en œil-de-bœuf, des murailles latérales. On sait
d'ailleurs que les grandes fenêtres ne furent d'abord qu'un groupe
de petits jours réunis et inscrits dans une baie figurée. Sur les fa-
çades romanes, on rencontre, soit les trois fenêtres de front de la
basilique , surmontées ou non de lœil-de-bœuf du fronton, soit ces
mêmes fenêtres dans une autre disposition (2 et l], soit deux fe-
nêtres latérales, soit enfin une grand baie circulaire à meneaux
massifs et rayonnants, motivée ou par la forme carrée de l'étage
de la façade dans laquelle elle est inscrite, ou par le souvenir de
cet ancien œil-de-bœqf du fronton primitif, dont nous venons de
parler.
Dans l'examen des fenêtres romanes , il sera toujours nécessaire
de remarquer si ce sont de simples baies percées à travers le plein
de la construction , ou si le contour en est dessiné par un enca-
drement de pierres d'une coupe particulière , destinées à former
cintre , comme c'est le cas le plus ordinaire.
Fig. 192.
Fiff. 193.
Fig. I9i.
Fig. 19.Ï.
Fig. 196.
Quelle que soit la nature de l'arcade, on devra toujours indiquer
le rapport de la hauteur de la fenêtre avec sa largeur. Jusqu'à une
époque avancée, les pieds-droits sont ordinairement munis de co-
lonnes, ou tout au moins d'une imposte à leur sommet.
La fenêtre romane en arcade peut présenter les formes semi-
circulaire, surbaissée ou trilobée. En fer à cheval, elle ne se ren-
contre guère que dans des baies secondaires.
Ces fenêtres peuvent être réunies en groupes, deux à deux ou
trois à trois, de dimensions pareilles ou inégales, inscrites ou
non dans une baie principale figurée, ou dans un système d'ar-
cature extérieure, soit d'une manière continue, soit par alter-
nation avec des arcades figurées. Il en est de même pour l'œil-
de-bœuf.
Fig. 197.
T. V.
35
AKi
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
388
Cloiire à Coloiim'
Fig. 198
Il est rare, en France, de trouver eelui-ci employé isolément
dons le système général de fénestration d'une église; mais il y
a été souvent combiné avec la fenêtre en arcade, soit qu'il en
surmonte le sommet, soit qu'il alterne avec elle.
Sans elle, on ne le voit guère que dans les façades principales,
ou il s'étend et s'agrandit de manière à envahir une grande par-
tie de leur surface , et prend alors le nom de Rose. C'est dans les
roses romanes que se présentent les premières nervures en pierres
(meneaux) , qui forment les compartiments de la fenêtre ; ces me-
neaux y sont toujours disposés en roue, soit qu'ils représentent
des colonnettes supportant des arcades, ou bien des balustres.
Siiint-F.tfenne île Beauvais.
t'iij. 199.
La fenêti'e simple à arcade pointue arrive avec l'arcade go-
lliique; elle est d'abord aiguë, surhaussée ou trilobée, rarement
à tiers-point, quelquefois à contre-courbure, jamais lancéolée.
.Cette première fenêtre gothique se combine , soit avec elle-même,
soit avec l'œil-dc-bœuf.
Fi'j. 200.
F.(j. H)l.
Fiij. 203.
Les groupes qui en résultent sont souvent inscrits dans une
baie figurée a arcade , d'abord romane, puis gothique. Le plus
simple de ces groupes se compose de deux fenêtres étroites en
arcade , ordinairement surmontée d'un œil-de-bœuf intermédiaire,
le tout rassemblé dans une arcade principale figurée. Il en en-
vahit de plus en plus les parties pleines, jusqu'à ce qu'il les ait
réduites aux dimensions de meneaux. Le premier de ces meneaux
est toujours perpendiculaire jusqu'à la hauteur de la naissance de
l'arcade, où il se bifurque. Peu à peu les meneaux perpendi-
culaires et les œils-de-bœuf se multiplient dans une arcade prin-
cipale ou fenêtre élargie, et ayant passé de la courbe aiguë à la
courbe à tiers-point ou évasée.
Enfin les meneaux circulaires du sommet ne sufllsent plus ni
aux besoins de l'ornementation, ni à la solidité des châssis vitrés.
Ils se ramifient dans leur intérieur, d'abord en découpures lobées
ou segments, le plus souvent au nombre de six ou de trois, puis
en combinaisons trop variées pour qu'il soit possible de les dé-
crire ici , mais toujours engendrées par des courbes circulaires
et rayonnantes. Telles sont les transformations que subit la fenêtre
gothique, depuis une époque avancée du XIT siècle jusqu'à la
fin du XIII*, et après les(iueiles elle preud le nom de feiiélre
rayonnante.
Fi';. 2:t.
Fis- 201.
389
RKVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
390
Il llll'illllllliuiiiiiiillltiiliill II
pig. iOô.
Suiiil-Jedn-tU-I.iilrun [l'aris).
Cette fenêtre s'élargit encore au XlVe siècle, de manière à enva-
hir souvent tout l'espace compris entre les contre-forts, et passe
(le l'arcade évasée à l'arcade surbaissée, sans jamais s'arrêtera
l'intermédiaire (le plein cintre). En même temps les meneaux
se compliquent et s'évident de plus en plus en véritable den-
telle ou filigrane de pierre, mais sans cesser de conserver le
cercle pour courbe génératrice de toutes leurs ramifications su-
périeures, avec cette différence, que ce n'est plus seulement le
cercle en repos, mais souvent aussi les projections du cercle en
mouvement.
La fenêtre en rose suit les mêmes phases, et s'agrandit de plus
en plus, sans cesser d'appartenir au système rayonnant.
Vers le commencement du XV" siècle s'accomplit une im-
portante révolution dans la forme et la combinaison des meneaux.
Après que toutes les combinaisons possibles de l'œll-de-bœuf,
de ses divisions et de ses projections ont été épuisées dans une
fenêtre de plus en plus surbaissée, elles s'en trouvent à cette
époque définitivement exclues pour être remplacées par un autre
système où figurent bien encore quelquefois les projections du cercle,
mais qui se distingue du précédent par la direction toujours ascen-
dante de ses parties, au milieu d'une variété infinie déformes, ren-
fermée dans une arcade le plus souvent surbaissée ou en anse de
panier. Malgré tout le caprice de ces formes, il est rare qu'elles
ne consistent pas, surtout pendant la première moitié du siècle.
en un groupe de triangles ou de quadrilatères curvilignes, ou
autres courbes composées finissant en pointe et présentant quelque
analogie avec une flamme droite ou renversée ;
Saint-Gervaii [Parit).
Fin. i07.
c'est ce qui a fait donner à la fenêtre du XV» siècle le nom de
flamboyante , \oys même que ses meneaux représentent toute autre
chose : par exemple, des fleurs de lis ou des étoiles, ainsi que
cela arrive assez souvent en France, surtout dans les fenêtres de
la grande proportion (l).
Une autre baie du XV» siècle, beaucoup plus fréquente en An-
gleterre qu'en France, est la fenêtre perpendiculaire à meneaux
purement verticaux jusqu'à leur sommet, ou s'y croisant par de
simples bifurcations parallèles au contour de l'arcade, qui dans ce
cas prend une coupe moins surbaissée.
Anijtelerr».
Samt-Gervait {Paris).
t.y. "iOS.
fi.
(1) N'ous pensons qu'on peut donner le nom de lyntpan i cette portion su-
|i(^ricurc de la fenêtre comprise cuire les deux cOtés de l'arcade, toutes les fois
([lie son tracé olTiira l'cniprciiilc des deux systènips dont nous venons de parler,
cl par coiist'qnfnt une st'paratiun bien iranchoe a>ec les meneaux perpenditv-
laircs de la masse de la haie, l.cs lntcrv.illcs circonscrits entre ces derniers s'ap-
pelleront desjouri, et le Titrage qui les occupe ie)t panneaux. Xous propose-
rons enfin de désigner par le nom de réseau dt la fenitrt ce que les .\nglais
appellent tracery, c'est-à-dire l'espèce de broderie en lientelle produite par
l'ensemble des meneaux.
39t
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBf.ICS.
Église d'Écouen.
392
Fig. 210.
A partir de la deuxième moitié de ce siècle, les meneaux ad-
optent des directions de plus en plus arbitraires dans une large
baie ordinairement évasée par le haut en anse de panier, afin d'of-
frir un plus vaste champ à l'art du peintre verrier; ils s'y appe-
santissent aussi de plus en plus, jusqu'à ce que le retour aux types
de l'architecture classique les en bannisse complètement.
Après l'introduction de la fenêtre flamboyante on ne trouve plus
de traces de l'emploi de l'œil-de-bœuf que dans ces grandes roses
terminales qui continuent d'occuper le sommet des façades et des
pignons. Les meneaux compliqués de ces roses subissent la même
révolution que ceux de la fenêtre à arcades , et présentent un
champ pins favorable encore aux gracieux et légers épanouisse-
ments du système flamboyant. Là c'est du centre qu'ils partent,
comme dans la rose rayonnante ; mais la différence du réseau qu'ils
produisent ne permet pas de se méprendre un instant sur leur na-
ture et leur date.
tig. 211.
La fenêtre rectangulaire ne se rencontre guère qu'au-dessous
des autres baies ; elle remplace quelquefois, du XIII' au XV' siècle,
les galeries ou les arcatui-es figurées qui y régnent ordinairement;
moins apparente et moins décorée que les précédentes, elle n'offre
ordinairement que des meneaux perpendiculaires.
fîcnnrn'S.
Arles.
Fig 21 i.
'•^
{} 1
Fiij. 21 j.
Enfin, dans quelques églises, les roses des transsepts et même
celles du portail sont remplacées par de grandes fenêtres à arca-
des tout à fait hors de proportion avec les autres, et beaucoup
moins favorables à la décoration extérieure que les baies circulaires.
Cette substitution se rencontre, au reste, beaucoup moins fréquem-
ment en France qu'en Angleterre. Nous leur donnerons le nom de
fenêtres composées lorsqu'elles seront formées d'une grande quan-
tité de petites fenêtres distinctes et pourvues de leurs meneaux ,
groupées en étages décroissants au moyen de précinctions horizon-
tales.
A l'extérieur, l'ornementation de la fenêtre cintrée ressemble
beaucoup à celle de l'arcade proprement dite, dont elle n'est guère
qu'une variété; tantôt soutenue ou divisée par une ou plusieurs
colonnes, tantôt n'offrant qu'une imposte ou une console pour
support à son archivolte, elle est souvent liée à la fenêtre suivante
par un cordon gracieux, résultant de la liaison de l'ornement exté-
rieur de cette même archivolte avec l'imposte. Un autre système
très-élégant du XII' siècle consiste à percer la fenêtre aiguë de
cette époque dans un groupe d'arcades romanes entrelacées dont
elle occupe les intersections.
/ ../ -ii-J
Fij. 2IU.
Aux XI' et XU' siècles, les séries d'ornements courants ou déta-
chés sur l'archivolte; aux XIIl' et XIV*, plusieurs archivoltes en
retraite soutenues par un pareil nombre de colonnettes ou pieds-
droits, ou bien venant mourir sur les faces des contre-forts voisins ;
au XV', la guirlande de l'époque avec ses crosses et ses expansions
symétriques, le tout souvent inscrit dans un pignon figuré de
même nature ; au XVI', les moulures renouvelées de l'architecture
antique : telles sont les principales formes que revêt cette ornemen-
tation, parallèle à celle de l'arcade ordinaire, comme nous l'avons
déjà dit.
Quant à la fenêtre en rose, son ornementation extérieure se
compose fréquemment d'une moulure circulaire ou triangulaire
curviligne, renfermant, soit des figures qui sont parfois des zodia-
ques, ou bien d'autres moulures appartenant également au cercle
et à ses fractions.
393
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURUCS,
a»i
Fig. 217.
Souvent la moulure principale, au lieu d'être fermée iuférieu-
rement, repose sur deux consoles ou deux groupes qui en tiennent
lieu.
Il y a peu de portions de l'église qui aient été soumises à plus
de déplacements et de remaniements que les fenêtres; c'est pour-
quoi, après avoir examiné et décrit celles qui existent aujourd'liui,
on devra rechercher avec le même soin les traces (quelquefois
difficiles à retrouver sous le badigeonnage) de toute fénestratioii
auti'riciire.
[La fuite au prochain numéro.)
ÉQUILIBRE
DES VOUTES EN BERCEAUX CYLINDRIQUES
{TROISIÈME IRTieLE. VoiV COl. 57.)
Construction de la courbe dont l'équation est ^y = • — ,
§ XXXVL — Le tracé géométrique de cette courbe ayant une
grande analogie avec celui des courbes en anses de panier, que
nous donnerons plus bas en traitant de l'équilibre des arches de
pont, et présentant du reste un peu plus de simplicité, nous allons
le décrire brièvement.
La quantité c qui entre dans l'équation ci-dessus n'est point une
des données immédiates; nous allons la déduire graphiquement
deccllesque nous avons choisies [paragraphe 34), lesquelles sont k
et h. Nous rappellerons que ces quantités sont liées entre elles et à
h' par les équations (68), et nous renverrons pour leur significa-
tion géométrique et mécanique aux paragraphes 32 et 30.
Ayant porté d'abord [Fig. !,/*{. 30) a partir de l'origine Odes cooF'
données, et dans le sens des y positifs, les distances ^J('= A, OS=h,
on construira le triangle OBC rectangle en B, avec * |)our hypo-
thénuse et h pour l'un des côtés de l'angle d.'oit; le troisième coté
BC sera la valeur de c, d'après la l" équation (68). Décrivant en-
suite sur BC une demi-circonférence, puis la divisante» deux par-
tieségalesau point WetjoignantZ)C,onauraZ*6' = ~>-- d'après la
relation connue entre la diagonale et le côté du carré. On prendra
sur une parallèle à Taxe des a-, menée par le point C, une longueur
AC = BC == c, puis, joignant 0.4, on aura OA = h', d'après la
2e équation (G8). On portera ensuite cette longueur de 0 en E, et,
d'après ce qui a été démontré dans les parauraphes précédents, les
parallèles menées par Eet S renfermeront la branche inférieure de
la courbe en lui étant tangentes, tandis que la parallèle menée par
le point C contiendra tous les points de la courbe en lesquels la
tangente est parallèle à l'axe des y.
Pour tracer la courbe maintenant, il reste à déduire de soit
équation même le rayon de courbure p correspondant à chaque or-
donnée y; on pourra le faire très-rapidement au mo>en de la règle
à calcul, car en retournant la réglette et mettant son origine sous le
trait qui repond à — .les quotients de cette quantité par chaque va-
leur de y se trouveront sur la réglette au droit du trait corres-
pondant à chaque diviseur, sans qu'il soit nécessaire de la dépla-
cer. Si on veut remplacer le calcul par une construction, on re-
marquera que p est une troisième proportionnelle aux quantités y
c
et -y — -, ou, si on l'aime mieux, cette dernière est une moyenne
proportionnelle cnlre ? et y. On pourra employer la construction
que fournit le théorème de la tangente moyenne proportionnelle
entre la sécante entière et ta partie extérieure dans le cercle. Pour
cela, ayant construit deux droites rectangulaires, TL, TV [Fig. i],
— c
on prendra Tt/ = -——ou DC de la Fig. 1; puis, d'un point
y 2>
quelconque pris sur TV, comme centre, on décrira un arc de cercle
PTP' tangent en Tix la droite TU. Si dès loi-s»du point L' comme
centre, avec une longueur donnée y pour rayon, on trace un arc
qui coupe le premier en un point P, et que Ion prolonge la drsite
r/* jusqu'à ce qu'elle rencontre de nouveau le premier arc en un
point P', la distance UP' sera la valeur cherchée de ?, en vertu du
théorème de géométrie sus-énoncé. On pourra construire plusieurs
valeurs de ? correspondant à différentes valeurs de y, avec un
même are tangent; mais il conviendra de le changer lorsque le lieu
des intersections sera mal déterminé : il sera facile d'en tracer
d'autres qui présentent de meilleures déterminations.
Il reste encore à faire une construction préparatoire qui consiste
a mener par un point tel que le point C, une série de droites Cg,
Cg'yCg", etc., faisant entre elles des angles égaux assez petits,
comme 5" ou 10", ce qui sera facile au moyen d'un rapporteur; il
faudra seulement que la pix-mière de ces droites, a (wrtir de l'axe
des y, fasse avec celui-ci un angle qui ne soit que la moitié des
angles des auti-es droites. Pour enectuer un tracé rigoureux, il
faudrait changer de rayon de courbure à cluiquc arc infinimeat
395
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
390
petit de la courbe que l'on tracerait avec ce rayon ; comme cela est
impraticable, il faut se contenter de l'approximation que l'on ob-
tient en traçant, avec le même rayon, un arc de courbe correspon-
dant à un angle seulement très-petit des normales extrêmes, et c'est
cet angle que nous faisons de lO"; or, comme la courbe est ici sy-
métrique autour de l'axe des y, si l'on veut appliquer le même
rayon de courbure à une étendue qui ne soit que de 10", il faut
changer de rayon apiès la construction d'un arc de 5" de part et
d'autre de l'axe des y.
Maintenant, ayant construit le rayon de courbure qui répond à
y =^li, au moyen du tracé précédent, on en portera la longueur
de 5 en R, et du point R, avec ce rayon, on traceraun arc de cer-
cle indéfini SS, ; puis, par le point R, on mènera une droite RG
parallèle à Cg ; l'arc SG sera un arc de la courbe. Pour construire
l'arc suivant, on supposera que le milieu de cet arc est en S, sur
le prolongement de l'arc SG ; alors, au moyen de l'ordonnée du
point i',, on construira la valeur du rayon de courbure correspon-
dant, que l'on portera de G en R, ; avec ce rayon, et de R, comme
centre, on tracera l'arc indéfini GS,; puis, par le point R ,,oi\
mènera R^G' parallèle à C(j', et si l'on a bien choisi la position de
S,, ce point se trouvera au milieu de l'are GG' ; s'il s'en trouvait
trop éloigné, il faudrait recommencer, en prenant pour le point S,
le milieu de l'arc obtenu par cette première détermination, et l'on
obtiendrait alors une exactitude suffisante.
On voit que les autres arcs partiels de la courbe se construiront
de la même manière, et qu'il suffira de continuer le tracé jusqu'en
S'. Le reste de la courbe se déduira de sa symétrie autour des axes
OS, 0' S' et OX. Cette construction étant continuée par la pensée
indéfiniment dans les deux sens, on reconnaîtra très-clairement le
cours de la courbe, tandis que nous n'avons pu le faire que péni-
blement au moj'ende son équation en coordonnées rectangulaires.
On s'assurera à la fois de l'exactitude de la méthode graphique
que nous donnons ici, et de celle de l'exécution des tracés, en ob-
servant que la parallèle à OX, menée par le point C, doit passer
par le point auquel la tangente est verticale, c'est-à-dire qu'ici
cette parallèle devra couper en deux parties égales l'arc de lO"
correspondant. D'un autre c6té, le point le plus bas doit se trouver
sur la parallèle ES'. On peut pousser plus loin les vérifications, en
calculant, au moyen de (73), la valeur de ar qui répondàj/ = fc;
or, un tracé fait sur une échelle assez grande donne une longueur
CI sensiblement égale à celle résultant de l'équation (73).
Nous donnons [Fig. 3), sur une petite échelle, la forme générale
de la courbe, dont la Fig. 2 ne présente qu'une partie. Enfin,
pour rendre évidente par un exemple l'influence de la variation
du rapport des quantités h et k, nous donnons [Fig. 4) une con-
struction dans laquelle ce rapport diffère beaucoup moins de l'unité
quedans laprécédente(l); on remarque que l'ouverture se rétrécit et
que la courbe se rapproche du cercle, avec lequel elle se confon-
drait si l'on avait h = /.■. Dans ce ciis, la courbe n'aurait de di-
mensions sensibles que si h et k devenaient ensemble infinis. On peut
donc regarder le cercle comme étant l'une des limites de la courbe
qui nous occupe.
Des considérations analogues nous montreront que la forme des
arches de pont doit se rapprocher d'autant plus du plein-cintre que
la charge au sommet est plus considérable.
(1) La Fig. 10 «st la reproduction, sur une plus petite échelle, de la partie
(le la courbe fig. li, située au-dessous de l'axe des x.
Equilibre bes abches chaugées d'us massif tebminé supé-
bieiikement par un plaîf hobizontal.
S XX\ VII. — Nous pensons avoir suffisamment indiqué les cau-
ses de l'indétermination des pressions extérieures aux voûtes char-
gées, dans le mode de construction en usage aujourd'hui (l), pour
qu'on ne s'imagine pointque nous venions présenter la théorie de l'é-
quilibre d'un système établi dans les mêmes conditions; nous avons
fait comprendre (§ XXVII) l'impossibilité de cette théorie. Nous
avons de plus ajouté que nos équations générales ne s'appliqueraient
ici que dans le cas où la résultante des forces extérieures serait nor-
male, et nous avons reconnu que cette condition est une de celles
qui servent à fixer la plus grande stabilité du système. Il convient
donc actuellement de rechercher une disposition des matériaux qui
assure la direction normale de la charge de la voiite, en permettant
dévaluer son intensité en chaque point. Ayant obtenu les diverses
équations relatives à ce nouveau système , puis en ayant déduit
les formes et dimensions principales qui en résultent, il y aura à
examiner si on ne pourrait pas attribuer les mêmes formes et di-
mensions aux arches à construire suivant le mode actuel , c'est-à-
dire aux arches surchargées d'un massif formé d'assises horizon-
tales. Il pourrait se faire, en effet, que, dans cette circonstance,
la résultante des pressions extérieures indéterminée à priori se
trouvât en définitive, après la construction, peu différente, pour
l'intensité et la direction, de celle qui aurait lieu dans le mode de
disposition de la charge dont nous allons nous occuper. Or, on
conçoit que l'expérience doit principalement être consultée à cet
égard, et si elle venait à confirmer les prévisions de la théorie rela-
tivement à la possibilité de construire des arches de ponts ou de
viaducs suffisamment solides et souvent beaucoup plus légères que
le plus grand nombre des constructions de ce genre, tant anciennes
que modernes, il y aurait grand a\ antage à appliquer cette théorie,
aujourd'hui qu'on est sur le point d'entreprendre de nombreuses
lignes de chemins de fer, dont la plupart nécessiteront des travaux
d'art d'une grande importance. On conçoit, d'un autre côté, que
nous ne pourrons guère chercher la confirmation de notre nouvelle
théorie dans la comparaison des dimensions principales des ponts
actuellement existants, avec celles qui pourraient en résulter;
ces ponts n'ayant point été construits pour jouir de la très-
grande stabilité que nous voulons atteindre en faisant en sorte que
la résultante des pressions sur les joints normaux passe très-près
du milieu de l'épaisseur. (Les ingénieurs, aujourd'hui, font seule-
ment en sorte qu'elle ne passe pas trop près de Vinirados ou de
l'extrados dans l'état normal de la voûte, ou lorsqu'elle n'est point
soumise à des surcharges accidentelles.)
Ceci posé, nous allons décrire et étudier la disposition de la
charge, qui lève l'indétermination.
Disposition de la charge extérieure d'une arche, donnant liruà des
pressions normales déterminées.
% XXXVIII. — Cette disposition est représentée dans la Fig. 5.
On y a exagéré quelques dimensions, pour rendre sensibles cer-
(1) Nous avons reproduit, Fig. 8 et 9, les diverses circonstances c.iaminécs
dans le paragraphe 27. La prcinière de ces ligures présente une voùtc séparée
du massif qu'elle devait supporter; la seconde se rapporte i la discussion de»
autres cas.
397
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
398
taines particularités qui eussent échappé dans un dessin dont
toutes les parties seraient faites à la même échelle. Nous suppo-
sons toujours la voûte divisée par une série de plans normaux à la
courbe des centre» de gravité, et infiniment rapprochés. Chaque
voussoir infiniment petit se trouve compris d'une part entre deux
de ces plans consécutifs , puis d'autre part entre la surface intrados
et une surface parallèle à la courbe des centres de gravité. Comme
l'épaisseur est supposée varier d'un voussoir à l'autre, ainsi que le
rayon de courbure , on voit qu'il doit résulter de cette construction
une surface extrados dentelée au lieu d'être unie. La raison de
cette forme des voussoirs à l'extrados est dans la nécessité où nous
nous trouvons de rendre les pressions extérieures noi'males à la
courbe des centres de gravité ; ce qui aura lieu en faisant abstraction
du frottement, dont nous ne tenons point compte, ainsi que nous
l'avons annoncé, <§ III. Du reste, nous ferons remarquer que nous
n'établissons cette discontinuité de la surface extrados que pour
nous conformer, dans notre théorie, à une rigueur mathématique
aussi grande que possible , tandis qu'en ayant égard au peu de dé-
faut de parallélisme de Vexlrados et de la courbe des centres de gra-
vité, on devra, dans la pratique, substituer à la surface dentelée de
Vextrados une surface continue; il n'en résultera qu'une très-lé-
gère inclinaison de la pression extérieure sur la normale, dont il
nous eût été impossible de tenir compte dans la théorie. Nous sup-
posons maintenant qu'on applique contre la face extrados du vous-
soir une pierre prismatique de forme déterminée ainsi qu'il suit :
par l'arête supérieure du voussoir considéré, on mènera un plan
horizontal ; puis, par l'arête supérieure du voussoir situé immédia-
tement au-dessous du premier, on mènera un plan vertical ; l'espace
compris entre ces plans, d'une part, puis, d'autre part, entre la sur-
face extrados du voussoir considéré et le plan très-étroit faisant partie
du plan de joint des deux voussoirs , cet espace, dis-jc, limité par
les plans de tète, formera le volume du solide prismatique dont il
s'agit; sa base est circonscrite par le contour quadrangulaire
A B D E , Fig. 5. La base de ce prisme se réduirait dans la prati-
que au triangle A B/); à cause de cela, nous appellerons ce prisme,
pour abréger, prisme triangulaire. Pour l'exactitude de la théorie,
nous supposerons que la face correspondante iiE D ne touche pas le
plan de joint commun , afin de n'avoir point à tenir compte de la
pression à laquelle elle pourrait donner naissance. Enfin nous sup-
poserons qu'un autre prisme à base rectangulaire A B G H charge
la face horizontale AB du premier prisme. Il suflira de concevoir
chaque voussoir accompagné de la sorte de deux prismes , l'un
triangulaire et l'autre quadrangulaire, pour se faire l'idée de la
disposition que nous allons étudier.
Il va sans dire que tous les prismes quadrangulaires sont limités
supérieurement par un même plan horizontal dont le niveau ne
doit pas être inférieur à celui du point le plus élevé de Vexlrados.
Pour compléter notre description , nous ajouterons que la voûte
s'appuie inférieurement contre une pile ou culée prolongée jus-
qu'au niveau supérieur des prismes quadrangulaires, de manière à
encaisser ces derniers et à recevoir la poussée horizontale qu'ils
exerceront. On observera en passant que la construction des sur-
faces extrados continues a été souvent pratiquée , et que les pierres
correspondant à nos priâmes irianijUlaires sont alors le prolonge-
ment des assises horizontales; en conservant ce mode de construc-
tion par assises horizontales, il serait bon néanmoins de séparer les
prismes triangulaires de ces mêmes assises ; on les ferait alors avec
une pierre plus dure, afin de ne pas briser leurs angles : ou évite-
rait ainsi la rupture des voussoirs, qui a lieu souvent dans la dis-
position en escalier que nous avonsdiscutée § XWII, et de plus on
arriverait à produire des pressions normales dont l'intensité reste-
rait seule indéterminée, en négligeant le frottement.
§ XXXÏX. — La question (jue nous avons à résoudre, relative-
ment au système que nous venons de décrire, consiste à déterminer
la forme de la courbe de* centres de gravité, et l'épaisseur qui cor-
respond à chacun de ses points; car, suivant les données de In
("série de questions, nous pouvons prendre / arbitrairement,
et la valeur de F résulte de la disposition du système ; nous avons
donc à déterminer les valeurs de y et i en fonction d'x.
Dans le système que nous examinons, la seule force extérieure F,
que reçoit un voussoir A E M N, est la pression normale exercée
par la face A E du prisme triangulaire correspondant, en faisant
abstraction du frottement. Quant au frottement, nous pourrions
ajouter qu'il serait nul, si l'on admettait que les faces A E, B D, du
voussoir fussent en contact parfait au moment de la pose; ou, du
moins, il n'aurait lieu qu'en vertu de la compressibilité de la ma-
tière du prisme, qui lui permettrait de descendre en suivant ta
surface extrados du voussoir. Nous <levons donc appliquer Id les
équations (58), appropriées exclusivement au cas des forces nor-
males. Nous les transformerons seulement en écrivant dans la
première, rfy, à la place de siny. ds, et jrf» dans la deuxième, à la
place de ds, ce qui la rendra divisible par do. ; elles deviendront
d.it = uii 1 \ dij
}COg%-
f74l
Il faut maintenant exprimer la valeur de N; nous la déduirons
de la considération de l'équilibre du prisme triangulaire; mais au-
paravant, pour simplifier les notations, plaçons l'axe des x dans
le plan qui limite les prismes quadrangulaires à leur partie supé-
rieure; puis, .r et y étant les coordonnées du point C, situé sur
la courbe des centres de gravité, désignons par x' et y' les coordon-
nées du point A de Vextrados, situé sur la normale passant par le
point C, et par x" et y", celles du point J/ de V intrados, situé
également sur cette normale; S étant toujours la distance du mi-
lieu de l'épaisseur au point C, et observant que l'angle de la nor-
male avec l'axe de^y est a, les valeurs de y' et y" seront
'I \ ^
./=y-f |- t-}-jjco««. J
(75)
Les forces que reçoit le prisme triangulaire sont au nombre de"
quatre ; ce sont les trois pressions exercées perpendiculairement
sur ses faces AB , AE, BD, puis le poids de ce prisme.
La force exercée perpendiculairement sur la face .4 B est égale
au poids du prisme quadrangulaire dont la base est A BGH; en
négligeant le frottement que ce prisme pourrait éprouver sur ses
faces verticales de la part des prismes adjacents, nous désignerons
cette force par dQ, et le poids de l'unité de volume de la matière
des prismes quadrangidaires par u, ; de cette manière, en obser-
\ ant que .1 B est égal à d.r' , on aura
dQ = a,iy'dx'. ;7G)
La force que le prisme triangulaire reçoit du voussoir normale-
399
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
400
ment à la face A E, est égale à celle qu'il exerce sur ce voussoir,
et que nous avons désignée (§ XXVIII) par iVxJ».
Enfin , nous désignerons par (IH, la pression horizontale que
le prisme quadrangulaire adjacent exerce sur la face verticale BD.
Quant au poids lui-même du prisme triangulaire, 11 constitue
une force infiniment petite du deuxième ordre, à cause des deux
dimensions infiniment petites de ce prisme, et il ne doit point en-
trer dans des équations entre des quantités infiniment petites du
premier ordre.
En égalant maintenant à zéro les sommes des projections des
autres forces, sur deux axes, l'un vertical, l'autre horizontal,
on aura
(IQ — A'/, tis C0S3. = 0, dll — iV/. ds sin » ^ o.
Eu passant les seconds termes dans les deuxièmes membres ,
puis divisant la seconde de ces équations parla première, il vient
dfï
^Q=tanga,
d'où l'on tire , en mettant pour dQ sa valeur (76),
d // ^ CI , ly dx' tangy.. (77)
Nous reviendrons sur cette équation , dont nous donnerons la
signification lorsque nous aurons à en faire usage ; nous la lais-
serons de côté actuellement, pour nous occuper de la première des
deux précédentes. En y mettant pour dQ la même valeur que ci-
dessus, puis, f(/» à la place de ds, on en tirera
COSa. d%
Pour calculer le coefficient différentiel-- , observons que dx oxy
di
AB est la différence des projections des droites AS et DS sur un
axe horizontal; la projection de la première est une fonction de
a; ou de»., ayant pour expression (s+ï* — ^)«m«; la seconde
projection est une fonction semblable relative à a.-\-dt., dans la-
quelle seulement p conserve la même valeur, car le centre du cercle
osculateur au point C'est en S' et non en S; on aura donc la va-
leur de ,- , en prenant la dérivée de l'expression précédente par
dy.
rapporta œ , et regardant p comme constant dans la différentiation;
il viendra ainsi
dx , , , », , . di.i
— — = ( p -f- i s — #) CO» a -j- sm a -^-—
UT. d
— H)
et l'on aura par suite
Ni= u,y p4~î ^ — S -\- tango.
d[jj-ri)
do. y
Maintenant nous ferons t constant, par les raisons énoncées
[§ VII), et nous poserons
= ».
(78)
de sorte que [a désigne, comme s'il s'agissait de liquides, la hau-
teur due à la pression t , et i le rapport de la densité des matières
du massif à celle de la voûte ; quand elles seront de même densité
que celles-ci , on aura i = 1 .
Substituons la valeur précédente de Ni dans la deuxième équa-
tion (74), et divisons-la par ci, il viendra, en vertu des conven-
tions que nous venons d'établir,
£a = £(p_-S)co»a-l-iy I p+îi — ^-f-fanga ^'"j"
70)
Quant à la première de ces mêmes équations, en ayant égard
a ce que ( est constant, elle donnera, étant divisée par «,
di / ^ \du
or, nous avons vu ( § V ), que la quantité - est du deuxième
P
ordre de petitesse , lorsqu'on considère - comme étant du premier ;
en négligeant cette quantité devant l'unité , nous pourrons donc
intégrer l'équation précédente, et si nous désignons par t„ l'épais-
seur qui répond au point dont y» est l'ordonnée, nous aurons,
pour l'intégrale ,
loK-
y — y»
d'où, e désignant la base des logarithmes hyperboliques,
y-y.
(8.)
Nous remarquerons seulement que le terme négligé introduisant
des erreurs du deuxième ordre dans l'exponentielle , l'erreur sur t
est réduite au troisième ordre à cause du facteur to, qui est du
premier.
Il resterait maintenant à porter cette valeur de i dans (79) , et à
effectuer l'intégration de l'équation du deuxième ordre qui en ré-
sulterait, après avoir substitué aussi la valeur de y' et celle ? en
fonction des coefficients différentiels du premier et du deuxième
ordre; l'équation s'élèverait même au troisième ordre, si l'on con-
servait le terme affecté de langea, à cause de d^ qui s'exprimerait
en fonction de rfp ; mais nous ne tenterons point l'intégration , nous
appliquerons seulement à sa construction, des méthodes graphiques
analogues à celles décrites § XXXVI , et nous indiquerons la ma-
nière de calculer l'abscisse et l'ordonnée de la courbe , représentées
par l'équation (79) transformée, par le procédé connu des quadra-
tures.
Avant de continuer les calculs , nous allons montrer que si on
suppose négligeable le poids de la voûte devant la charge, et la
matière de cette voûte assez résistante pour que l'épaisseur t et S res-
tent toujours très-petits, on retombera sur l'équation (02); d'où
il résulte que la construction sera dans le cas d'une voûte chargée
d'un liquide dont le poids serait ci,. En effet, dans cette hypothèse,
il faut faire ci = o , ce qui rend u. infini, et l'équation (80) donne t
constant. Divisant ensuite l'équation (79) par », et observant
que '4 =: — , le premier membre devient — ; à cause que i devient
i a, o,
infini, le premier terme du deuxième membre devient nul; et
comme nous négligeons les termes qui dépendent des épaisseurs
par rapport à p dans la parenthèse, y se réduit en même temps à
y, ce qui donne py pour la valeur du deuxième membre. On re-
tombe donc ainsi sur l'équation (62). De cette manière, la discus-
sion de la courbe que représente cette équation s'appliquera sen-
siblement aux voûtes d'épaisseurs très-petites , par rapport aux
charges. On doit voir maintenant pourquoi nous avons discuté si
longuement dans les paragraphes (3l) et suivants, l'équation (62)
qui n'est qu'un cas particulier de l'équation plus générale (79) , à
laquelle il eût été difficile d'appliquer une discussion aussi étendue.
Le tracé que nous donnerons ci-dessous de la courbe représentée
par cette dernière , nous confirmera dans l'identité de ses caractères
principaux avec celle donnée par l'équation (62).
401
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
U»
^ XL. Pour rendre possible la construction de l'équation (79),
nous avons encore à faire disparaître la dérivée qui entre dans la
parenthèse du deuxième membre. Nous dirons dès à présent que
par la suite nous ferons complètement abstraction de ce ferme in-
troduit par le défaut de parallélisme de Vexirados et de la courbe
des centres de gravité ; mais afin de prévenir les difficultés que
pourrait faire naître la présence du facteur tang a qui pe\it devenir
fort grand , et même infini , nous devons entrer dans quelques dé-
veloppements il cet égard.
Nous calculerons d'abord dS ; pour cela élevons au carré les deux
membres de l'équation (10 bis) § V, nous en tirerons
12
en différentiant , il viendra ensuite
rfJ =
i dz d?
_P ?__
S
1 — 2 -
Avec cette valeur, on formera facilement la suivante
rf(ie_J) • V ' » p ^ f /(/«"^ fd~x
dx
82)
1 — 2 —
P
Or, en mettant dans l'équation (80), à la place de dy, sa valeur
p siriT. dx , on aura immédiatement
dt I S\ £ .
— • = 1 ? sin X ;
dx \ 9 j y-
il ne reste donc plus qu'à former la valeur de rf?. Pour cela , ob-
servons que cette dernière expression étant du premier ordre de
E
petitesse à cause du facteur — , la dérivée précédente est une
quantité du même ordre. Si nous voulons obtenir sa valeur ap-
prochée aux termes près du troisième ordre , il suffira de calculer
dp ,
— avec une exactitude approchée seulement aux termes près du
dx
premier ordre, à cause du facteur du deuxième ordre qui l'accom-
pagne. Or, transportons la valeur («2) , dans laquelle nous négli-
gerons les termes de deuxième ordre, dans l'équation (79), nous
aurons d'abord
diit — S)
p «n a,
(82 bis]
et l'équation (79) deviendra, aux termes près du deuxième ordre,
,u. = e(p_J)cosco.-f ,y f p-f-'e — S
sin X tang X t
zr^ ?
Si l'on différentie maintenant cette équation , et qu'on rejette en-
suite tous les termes du premier ordre qu'elle pourra contenir, ce
qui réduira dy à dy, on aura, aux termes près du premier ordre,
rfo p dy
dx y dx
Nous avons dû conserver les termes du premier ordre avant la dif-
férentiation , parce qu'il pouvait se faire , comme cela arrive sou-
vent, que l'ordre de petitesse de quelques termes s'abaissât d'une
unité (nous remarquerons que la diffère ntiation de l'équation (62)
fournit directement ce dernier résultat); observant que l'on a
dy = p sm« dx , la valeur précédente pourra s'écrire
d? p"
dx
: sin X.
82 Irr]
Substituant cette valeur et celle de -,- dans (82;, on aura, aux
dx
quantités près du troisième ordre,
Cette valeur étant mise dans l'équation (79), on aura, au même
degré d'approximation , d'après la remarque faite ci-dessus sur
celui de la valeur de « ,
eu. = tf 00 1 X
+ 'V , pH-ï« — 5-|-ï?«na'anj«j /l— i-^ ^^""vj )'
Il faut encore faire disparaître i de cette équation , au moyen de sa
valeur approchée (l2) § V; on aura ainsi
tu. = tp cot a
-i-jyj p + .._.■. ^ _f.i.„„ a, anjafi:::!!-!!) j.
( f \ ."• y )
Cette équation est du deuxième degré en p à cause de la présence
de ( en diviseur ; mais en regardant le très-petit terme qui le con-
tient comme une quantité connue, nous pourrons en tirer une va-
leur de p , en résolvant cette équation comme une équation du pre-
mier degré , et nous aurons
. , l £ sin X tang « / « ' \ )
f = e p-^; . i83)
tcosx-\- iy ! 1 -I- tin X tang x —
Cette équation et l'équation (8 i) sont la base des calculs et con-
structions qui vont suivre.
Examinons d'abord l'étendue dans laquelle il peut être conve-
nable d'en faire usage : on voit que pour des angles x très-voisins
de 90°, les termes affectés de tang%, et qui étaient restés très-pe-
tits pour des valeurs moindres de a, vont devenir très-grands et dé-
passer l'unité qui les précède dans l'une et l'autre parenthèse; dès
lors le rayon vecteur paraîtra varier suivant une loi différente de
celle qu'il aura suivie jusque-là; lorsqu'on fera »= 90°, la valeur
de p se trouvera réduite à
J
' l '■ ^y I
expression très-petite en général et fort différente de celle qu'où
obtiendrait en négligeant les termes en tang a, dont l'influeDce était
à peine sensible auparavant. Cette circonstance parait devoir faire
considérer l'équation (83) comme inexacte pour des valeurs de » voi-
sines de 90°. Il ne convient plus, en effet, d'employer alors les ter-
mes affectés de tang », parce que dans l'établissement de cette équa-
tion nous avons considéré ces termes comme très-petits, et que celle-
ci n'est sensiblement exacte qu'à la condition qu'ils restent tou-
jours tels; il semblerait même qu'alors cette équation ne devrait plus
être d'aucun usage : néanmoins, nous reconnaîtrons par la suite,
au moyen de la concordance entre les résultats qu'elle fournira et
ceux obtenus par une voie différente, qu'on peut appliquer cette
équation en toute sûreté entre — 90° et -f- 90*, en supprimant les
termes qui suivent l'unité dans lesparentlièses du numérateur et
du dénominateur de son deuxième meml)n\ On remarquera da-
bord que, tant que » ne sera pas très-voisin de 90", l'erreur qui eu
résultera sur p sera du deuxième ordre. En effet, supposons la fra<>-
tion qui suit < dans la valeur de p réduite en série suivant les puis-
sances de «, tous les termes dont il s'agit, étant du premier ordre,
T. V. ' 26
i03
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Mk
donneront lieu à des termes de cet ordre et des ordres supérieurs;
et leur produit par t qui multiplie cette fraction donnera lieu à des
termes du deuxième ordre. D'ailleurs, si l'on remarque que la sup-
pression de ces termes a pour effet de diminuer en même temps le
numérateur et le dénominateur de la valeur p, on doit voir qu'il
tend à s'établir une espèce de compensation, par suite de l'influence
contraire qu'ils exercent sur cette expression. S'il restait quelque
scrupule relativement à ces termes, on pourrait en tenir compte
jusque vers 85» ; mais il faudrait s'arrêter là, car ces termes deve-
nant très-considérables, on serait en droit de croire que les termes
négligés des ordres supérieurs acquerraient alors des valeurs dont
il faudrait tenir compte également ; ou , si l'on veut, la valeur
de p, formée ci-dessus par les seuls premiers termes d'une sé-
rie, cesserait d'être convergente. Dans ce cas, il y aurait à calcu-
ler à part l'équilibre du voussoir ou des voussoirs compris entre
8.50 et 90°, ce qui n'offrirait aucune difficulté lorsqu'on aurait
donné arbitrairement une forme à Vintrados et à Vextrados dans
cette étendue; mais, nous le répétons, après nous être convaincu
de la concordance des résultats, on peut appliquer en toute sûreté
l'équation (83), en réduisant les parenthèses de son second mem-
bre à l'unité. Elle devient alors
P = s-^C. (84)
Comme dans cette équation et dans (si), nous négligeons les ter-
mes du troisième ordre, et même des termes du deuxième ordre,
dans la valeur de p ; il n'y aura point à tenir compte de J dans les
valeurs de y et y" dont nous ferons usage, soit dans le calcul, soit
dans le tracé de la courbe des centres de gravite; il ne sera néces-
saire d'y avoir égard que lorsqu'il s'agira de calculer ou tracer
Vextrados et Vintradns.
Lorsque le massif de maçonnerie qui charge la voûte et la voûte
elle-même sont construits de matériaux ayant la même densité, »
devient égal à l'unité. Cette circonstance simplifie l'équation pré-
cédente et le tracé de la courbe qu'elle représente. En effet, les or-
données des points de Vintrados et de Vextrados qui répondent à
la même normale, diffèrent entre elles d'une quantité égale à la pro-
jection verticale de l'épaisseur; il en résulte
y" = 1/ 4- t cas «,
équation qu'on obtiendrait par la soustraction membre à mem-
bre des équations (75). Au moyen de cette relation et de «= l ,
l'équation (84) se réduit à
P=A;{(--iy'). (85)
Calcul des coordonnées de la courbe des centres de gravité.
§ XLL Pour procéder au calcul des coordonnées ou au tracé
géométrique de cette courbe , que nous donnerons plus bas , il est
nécessaire de connaître à priori les quantités u. , e, et y,, les deux
dernières de ces quantités étant , comme nous l'avons dit , l'épais-
seur et l'ordonnée au sommet ; or, les données immédiates de la
question sont ordinairement la demi-ouverture de la voûte et la
llèche ou hauteur sous clef, puis la charge qui doit s'élever au-
dessus de la clef. Ces données , ainsi que nous le verrons plus bas,
suffisent pour déterminer "-, e, et y, , de telle sorte qu'alors "■ ne
sera point , dans tous les cas , une quantité arbitraire , comme on
aurait pu le croire , du moins lorsqu'il s'agira de voûtes en anse
de panier terminées verticalement, ou de portions de voûtes dans
lesquelles on fixera la direction du dernier plan de joint. 11 parai-
trait donc convenable de commencer par indiquer la manière de
déduire ces dernières, des données ordinaires de la question , et
nous l'eussions fait, s'il nous eût été possible de présenter des
intégrales peu compliquées de l'équation (84); mais, comme la
détermination que nous donnerons repose sur le calcul des coor-
données ou le tracé géométrique de la courbe , nous commence-
rons par exposer l'un et l'autre de ces procédés.
Supposons donc que par un moyen quelconque, l'on ait déter-
miné les valeurs exactes ou approchées des troisquantitésfx, e,, y,,
de manière à satisfaire exactement ou à peu près aux données
immédiates, on aura recours aux relations suivantes obtenues ci-
dessus, que nous réunissons ici
y — Vo
y' = y — ^icofct,
dy^fsinoidt.
' « co« a -f- l'y'
y" = y+T'co«»,
da; := p cos't. d%.
(86)
dp = «'« a. du.
y
Nous allons employer ces relations , non au calcul des coordon-
nées d'un point isolé , mais bien pour calculer les différences finies
\y, \jc , des coordonnées successives de points correspondant
à des normales faisant entre elles l'angle constant A» : de cette
manière a. sera ici la variable indépendante, et y, 2-, ainsi que
leurs accroissements , seront des fonctions de % et a». On voit
qu'il suffira, connaissant des valeurs de y, x, correspondant à a, et
ayant calculé celles de Ay et sx, d'ajouter celles-ci aux pre-
mières , pour obtenir les coordonnées y -f- Ay, a; -|- a ar , qui cor-
respondent à l'angle a-f-A«. Quand on aura continué ces cal-
culs de proche en proche jusqu'à la plus grande ordonnée, toutes
les coordonnées intermédiaires se trouveront en même temps cal-
culées, et leurs valeurs seront aussi vérifiées, si celles des coor-
données extrêmes le sont.
Il faut donc, avant tout, avoir les valeurs initiales des varia-
bles; or, nous supposons connus y, et c, ; d'ailleurs, si l'on fait
passer l'axe des y par le sommet, on aura en même temps a: = u
et a = 0 , en ce point.
Pour passer de là aux valeurs suivantes, il reste à calculer les
différences "finies Ay , \x. Fixons d'abord le degré d'approxima-
tion avec lequel il convient de le faire. Si l'on veut que les plus
grandes valeurs de y et de ar ne soient point en erreur de quantités
de l'ordre des épaisseurs, ou du premier ordre , il sera bon, pour
éviter l'accumulation des erreurs provenant des différences succes-
sives, de pousser l'exaclitude de celles-ci jusqu'au deuxième ordre
inclusivement. Or, en supposant que l'on fasse Aa de 5° à 10* ,
cette quantité exprimée en rapport d'arc au rayon , pourra être
E
considérée comme étant du même ordre que — ou du premier ,
?
et les mêmes puissances de ces quantités, ainsi que leurs produits
de même degré , seront aussi de même ordre. Cela posé , pour ob-
tenir des valeurs de Ay et ax exactes aux termes près du troi-
tième ordre, on pourra profiter d'une proposition due, je crois,
à Legendre, et qui aurait l'avantage, si elle était plus connue, de
simplifier beaucoup certains calculs d'approximation en fixant le
degré de celle-ci. On la démontre du reste facilement au moyen du
théorème de Taylor. Cette proposition peut recevoir l'énoncé sui-
406
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
«M
::l
(87)
vant : Si dans un système d'équations différentielles du premier ordre, I
on change les différentielles en différences finies , on peut donner
aurésultat un degré d'exactitude qui s' étend aux termes du deuxième \
ordre inclusivement, en augmentant en même temps chaque variable
dépendante ou indépendante de la moitié de sa différence finie.
Appliquons cette proposition aux équations (86) en dy et dx, nous
aurons
Ay = ( p -|" 7 'i? ) «"»(<» -r i Aa ) Aa
\x = ( p + i '^? ) co« ( « -]- { ^7. ) A».
équations dans lesquelles il faut mettre pour Ap, sa valeur appro-
chée seulement aux termes près du deuxième ordre , puisque Ap se
trouve multiplié par a»; or, l'équation (82 ter), reproduite ci-des-
sus, est inexacte dans les termes du premier ordre ; mais en chan-
geant les d en A , les facteurs du premier ordre que nous intro-
duisons réduisent l'inexactitude au deuxième ordre ; il faudra donc
employer la valeur suivante
P
As =
y
-Sin a Aa.
(88)
Ajoutons encore qu'à cause du même facteur a« dans Ay et
^x , la valeur de p dans l'expression de ces quantités n'aura pas
besoin d'être exacte dans les termes du deuxième ordre, et que
celle donnée (86) , dans laquelle on a négligé des termes de cet
ordre, convient encore très-bien ici. Les formules (86), (87) et (88),
employées simultanément, sont donc assez, exactes pour le degré
d'approximation que nous voulons obtenir. Pour les appliquer
commodément, il faudra dresser un tableau dans lequel on ouvrira
des colonnes pour les valeurs correspondantes de
=-., E, p, Ap, y, ^y, x, \x, y', y".
Au moyen des valeurs initiales données, il deviendra facile de
calculer les valeurs initiales qui restent inconnues; puis, en ajou-
tant Ay à y, et Aa; à x, on aura les valeurs de y et a; corres-
pondant à la deuxième valeur de a, ce qui permettra de calculer
de nouveau toutes les quantités qui suivent a dans la colonne ho-
rizontale du tableau que nous Indiquons ; en comparant la première
et la deuxième valeur de p , on se convaincra que la valeur appro-
chée donnée par l'équation (88), qui, si elle étaitexacte, devrait être
égale à la différence de ces deux valeurs, n'eu sera pas assez éloi-
gnée pour ne pas justifier son usage dans les équations (87). En con-
tinuant ainsi de proche en proche , on formera les valeurs corres-
pondantes de e , y et a;, et le cours de la courbe, ainsi que les épais-
seurs, se trouveront déterminés. Enfin , pour appliquer ces violeurs
a la construction de Vintrados et de l'extrados, il faudra encore
e'
calculer pour chaque point celle de 5=-rî — , quantité qui sera
P
généralement très-petite et qu'on pourra négliger le plus souvent.
Cette distance étant portée sur la normale à partir de la courbe des
centres de gravité et vers le centre de courbure, on aura ainsi la
position du point milieu de l'épaisseur, et par suite les points cor-
respondants de Vintrados et de Vextrados, en portant la demi-
épaisseur de part et d'autre. Si on voulait calculer les coordonnées
des courbes intrados et extrados, il faudrait augmenter les valeurs
de y' et y" inscrites à notre tableau, de la quantité S cosct, et on
calculerait x' et x" par les équations suivantes
x' = X -\- ( j £ — S) sin a, x" =x — [\ i -\-^)sin a.
Quant aux circonstances dans lesquelles il conviendra d'effec-
tuer les calculs que nous venons de développer, nous dirons que,
s'il ne s'agit que d'étudier un projet, on pourra se contenter de la
méthode graphique que nous allons donner ci-dessous, laquelle
dispense d'exécuter les calculs précédents. Si , de l'élude du projet,
on doit passer à l'exécution , comme il sera le plus souvent impos-
sible de construire l'épure à la grandeur d'exécution , il deviendra
alors nécessaire d'exécuter les calculs de notre tableau pour déter-
miner assez exactement les coordonnées; d'ailleurs, pour un ou-
vrage important , on ne doit pas reculer devant les quelques heu-
res de travail qu'ils pourraient exiger. On s'est donné souvent la
peine de faire des calculs aussi compliqués que les nôtres , alors
qu'il s'agissait d'anses de panier à plusieurs centres, se rappro-
chant plus ou moins des ellipses , lorsque rien , théoriquement du
moins, n'indiquait la nécessité de se rapprocher de formes rigou-
reusement déterminées ; ne conçoit-on p<is dès lors qu'on pourrait
consacrer tout autant de temps à des calculs reposant sur une
théorie mieux fondée, j'ose le croire, que celles parvenues à ma
connaissance, qui ont été émises sur le même sujet?
Tracé géométrique de la Courbe des centres de graeité, de l' Intrados
et de l'Extrados.
§ XLII. Nous renverrons, pour ce qui concerne les données du
problème, aux observations présentées au commencement du para-
graphe précédent, et nous supposerons de même, déterminées, les
quantités u.,e. ety,. Aprèscequenousavonsditdansleg XXXVI sur
la manière de tracer une courhe au moyen de son rayon de cour-
bure, nous croyons superflu de revenir sur ce genre de construc-
tion; nous avons donc seulement à indiquer comment on obtiendra,
par un tracé, le riiyon de courbure lui-même, dont la valeur diffère
ici de celle qui a été employée § X XXVI. Pour abréger les descrip-
tions, et nous renfermer dans les cas pratiques les plus ordinaires,
nous supposerons les matières du massif de même densité que celle
de la voûte (quand on aura compris le tracé que nous allons don-
ner, on imaginera facilement ce qu'il y aurait à faire s'il s'agissait
de densités différentes). Dans le cas particulier que nous considé-
rons, la valeur de ? est fournie par l'équation ( 85 ) ; mais pour
n'avoir point à tracer de lignes qui excèdent considérablement celles
qu'il s'agit d'obtenir, il convient de multiplier et diviser le
deuxième membre par un nombre surpassant notablement l'unité;
nous emploierons à cet usage le nombre 5, comme fort convenable
à notre objet, et nous aurons
y ^ '
Voici maintenant comme il faudra procéder : on calculera, au
moyen de l'équation (81), une valeur de » correspondant à In plus
grande ordonnée que l'on ait à considérer, puis une ou deux autres
valeurs, correspondant à des valeurs de y intermédiaires entre y.
et la plus grande ordonnée; cela sera suffisant, attendu que la
courbe logarithmique, représentée par l'équation ;8l) (en prenant
y et « pour coordonnées), se confond presque avec une ligne droite,
dans l'étendue que l'on a besoin d'en considérer; ceci tient à la
grandeur de "• par rapport à y — y,. On prendra, d'une part, la moi-
tié de chacune des valeurs de t, y compris «,, et de l'autre, on les
multipliera par 5, ce qui reviendra à avancer la virgule d'un rang
vers la droite dans les précédentes; puis on les portera perpendicu-
lairement à l'axe des y, à partir de lextrcmité des ordonnées auv
quelles elles correspondent. On aura ainsi déterminé la position de
points appartenant à deux courbes distinctes EE et E'E', Fig, 6,
PL 20, qu'on joindra par des traits continus. Cela fait, on prepdra,
'1.07
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLFCS.
408
sur une perpendiculaire à l'axe des y, CD= j^ C O, puis 0 J/
= V 1^- Si l'on veut faire le tracé en changeant le rayon de c ur-
bure de lO" en lo», il faudra tracer autour du point C, et en par-
tant de l'axe des y, une suite de droites divergentes Cg, Cg etc.,
faisant entre elles l'angle constant de 5", ce qui sera vite fait au
moyen d'un rapporteur. Ces constructions préparatoires serviront
pour toutes les valeurs de p.
Actuellement, supposons qu'on ait déjà tracé une portion de
la courbe des centres de gravité, en partant du sommet, et qu'on
soit parvenu en un point Gm , on prolongera le dernier arc au delà
de ce point, puis on fera une hypothèse sur la position du point V,
qui doit se trouver, si l'hypothèse est exacte, sur le milieu de l'arc
suivant qu'il s'agit de tracer. Par ce point on mènera une droite
faisant avec la normale passant par Gm un angle de 5", c'est-à-dire
parallèle à celle des droites divergentes Cg, qui suit celle parallèle à
cette normale. Menant ensuite VP parallèle a l'axe des x, on aura
Q Q, = -p £, et P Ç = 56. Ou portera la demi-épaisseur Ç 0, de part
et d'autre du point U sur la normale , et l'on aura la position des
points U, U", ayant pour ordonnéesi/' et y" d'après (8f>). On mènera
par ces points, des parallèles à l'axe des a;, d'où il résultera 0Q' =
y',0Q"=y",PQ=:5i; et à cause de CD = -^OC,ox\ aura Q'L^
■^OQ' = -^y'. En menant, par le point C, PtP'parallèleà l'axe des
y, onauraf 'y '^i*0 = S6. Tirons maintenant la droite OP 'pro-
longée indéfiniment, puis portons, de M en N, vers 0, la longueur
MN=Q'L, cequi donnera 0 N= -ri^ — tt!/'; je disquelalongueur
N K, déterminée par l'intersection de la droite OP" avec une pa-
rallèle à l'axe des x menée par le point N, sera la valeur cherchée
dep; en effet, les deux triangles rectangles semblables OKN,
0 P" Q", donnent la proportion
TF ÔÎV"
F^ ~ W '
ou, d'après les déterminations que nous venons d'effectuer,
ô = y" '
Or, cette proportion, comparée à l'équation (89), donne évidem-
ment KN^?, ce qu'il s'agissait de démontrer.
Ce rayon étant porté de Gm en Rm , on tracera de ce point, avec
le même rayon, un arc indéfini, puis, par Rm, on mènera une droite
faisant l'angle de 10° avec la normale Gm Rm, ce qui déterminera
l'étendue de l'arc Gm Gn ; on pourra alors vérifier si l'on a bien
choisi la position du point U qui devrait se trouver sur le milieu
de cet arc. Si l'erreur parait trop grande, on recommencera en par-
tantdu milieu del'arc ainsi déterminé, comme il aété dit§XXXVI,
relativement au tracé d'une autre courbe du même genre. Nous
avons supposé le tracé de la courbe parvenu à un point Gm , pour
mieux caractériser nos constructions; mais il est visible que ce point
peut être pris sur l'axedes y, et alors on commence la construction
par le procédé que nous venons d'indiquer pour la continuer.
Enfin , la quantité ^, dont nous n'avions pas besoin de tenir
compte pour effectuer les calculs et tracés des épaisseurs et de
la courbe des centres de gravité , ainsi que nous l'avons démontré
plus haut, doit cependant être prise en considération pour le tracé
de Vextrados et àeY intrados; sa valeur, que l'on peut mettre sous la
forme S ^= 0,083 — , pourrait être construite par le procédé des troi-
sièmes proportionnelles; mais il sera plus court, pour ceux qui
font usage de la régie à calcul, d'effectuer le calcul, a»i moyen de l'é-
quation précédente; on n'aura de cette manière, suivant l'expres-
sion habituelle, qu'un seul coup de règle à donner. D'après la si-
gnification de la quantité S, on voit que, pour obtenir la véritable
situation des points de Vintrado» et de l'extrados, il suffira de por-
ter cette quantité vers le centre de courbure, à partir des points
U, V" en u',« ".Ces points u et u" appartiendront donc aux courbes
extrados et intrados. La plus grande valeur de * aura lieu au point
le plus bas de la courbe, et l'on jugera en calculant cette valeur si
elle est assez petite pour qu'on puisse en faire abstraction.
Nous indiquerons ci-après le moyen qui se présente de vérifier
l'exactitude des tracés.
Détermination de l'épaisseur à la clef, et de la pression dans les
joints, au moyende la demi-ouverture, delà flèche ou hauteur sous
clef, et de la charge au-dessus de la clef. Poussée contre les culées.
§ XLin. La détermination dont il s'agit s'obtiendrait au moyen
de l'équation' de la courbe des centres dti gravité , ou des intégrales
de l'équation différentielle du deuxième ordre résultant de l'élimi-
nation de £ entre les équations (81) et (84). A défaut de ces inté-
grales, nous aurons recours à la considération, soit de l'équilibre
de la voûte, soit de l'équilibre du massif qui la charge. Nous ob-
tiendrons ainsi, sans avoir recours aux procédés de résolution des
équations différentielles, une intégrale du premier ordre de l'équa-
tion dont il s'agit.
Revenons à l'équation (77), et fixons le rôle de la force élémen-
taire dH dont elle donne la valeur. En vertu des équations dont
cette dernière est tirée, dH est d'abord la composante horizontale
de la pression normale exercée sur un voussoir. Nous ajouterons
que cette force, à cause de l'égalité de Vaction à la réaction, est en
même temps la force horizontale que le massif reçoit du voussoir
dans le sens positif de l'axe des x, par l'intermédiaire du prisme
triangulaire. Cela posé, partageons la voûte et le massif par un
plan vertical passant par le sommet de la voûte, et considérons l'é-
quilibre d'une des parties de la voûte, terminée d'un côté par ce
plan, et de l'autre par un plan normal quelconque. En n'ayant d'a-
bord égard qu'aux forces horizontales principalement utiles à no-
tre objet, ces forces sont : la poussée totale >-«,<, exercée au som-
met par l'autre portion de la \oûte, les forces dfl, et la compo-
sante horizontale de la réaction exercée contre le dernier plan de
joint, dont la valeur est ).<6 cosx. En iiyant égard au sens de ces
forces, on obtient la relation
l '^
dll -\-xti cosx.
(90)
Considérant maintenant l'équilibre du massif, les forces hori-
zontales qu'il reçoit sont d'une part les mêmes forces dH, et de
l'autre, la réaction horizontale totale contre le plan vertical qui li-
mite la partie considérée du massif, laquelle est égale et contraire
à la poussée horizontale qu'il exerce contre l'autre partie du mas-
sif adjacent à la pile ou à la culée. Il est ici naturel de représenter
cette force totale par H, car, à cause du sens de ces forces, il vient
dH.
(91)
409
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
MO
Dans le cas oii l'on considérera rtiction du massif tout entier,
si l'on affecte de l'indice ( toutes les quantités qui se rapportent à
l'extrémité inférieure de la voûte, on ol)tiendra le point d'appli-
cation de cette résultante, en égalant son moment à la somme des
moments des composantes dH; or, remarquons d'abord que le
point d'application de la force dH est un point de Vextrados ayant
pour ordonnée y', de sorte que nous pouvons changer les limites de
l'intégrale précédente en y\ et y\, à la condition d'exprimer rf//
en y' et dy'. Désignons par u l'ordonnée du point d'application de
la résultante, nous aurons
H.
!/,
Vo
y'dff:
d'où nous tirerons
1
ydH.
(92)
y-
Enfin, on pourra désirer connaître le poids d'une des portions de
la voûte et du massif correspondant. En considérant l'équation de
l'équilibre du système ainsi formé, qui se rapporte aux forces ver-
ticales, on voit que les seules forces verticales qui le sollicitent sont
le poids P lui-même de ce système, et la composante verticale de
la réaction de la culée contre le dernier plan de joint, dont la va-
leur est X( s, «ma, ; on aura donc P par l'équation
P = },U, un a, = oXas, sin a, , (93)
de laquelle il serait facile de déduire le volume des matériaux, si la
densité du massif était la même que celle de la voûte.
Il reste maintenant à substituer la valeur de dH dans les équa-
tions précédentes, et à effectuer les intégrations. Pour rendre
possible ces dernières, nous avons à exprimer lang «■ qui entre
dans (77), en fonction de tangi.', «■' désignant l'angle de la tan-
gente à ['extrados avec l'axe de x, et les angles * et a' se rappor-
tant à des tangentes menées par des points situés sur une même
normale à la courbe des centres de gravité. Soitf la différence très-
petite de ces deux angles, nous aurons
a = a'-|-^,
et de plus (voyez Fig. 5)
tangi -■
'JE (? + i^-^)''»'
en négligeant dans cette équation les termes du deuxième ordre
et des ordres supérieurs, on aura, par l'équation (82 bis),
£
7 r= Y —suit-.
U
Maintenant , développant tang a suivant les puissances de 7, au
moyen du théorème de Taylor, et s'arrêtant au terme du premier
ordre, on aura
e sini
tanna = 1anq'^ 4-} r—ri
■' ^ ' ' Jjl cos «
<m pourra de plus, sans altérer l'approximation, substituer dans le
deuxième terme, sin a à la place de sin a, ce qui donnera
tang 0.= tang ^ I 1
2u- cos X
puis observant que l'on a
dx' lang %' = dy' ,
on pourra mettre la valeur de dH (7 7) sous la forme suivante ;
dH
— <a,/.y'dy'(i-\--~ , ).
' •* •' \ ' iiLcasv. I
Nous devons placer ici une remarque que nous eussions peut-
être dû faire plus tcH; c'est que la valeur de _«. peut être considérée
comme une quantité du premier ordre de grandeur, ce qui rendrait
le rapport — du deuxième ordre de petitesse ; en effet l'équation (84)
donne pour la valeur de --, — — î, en négligeant les termes du
. xy
premier ordre; mais par suite de la convention établie sur l'ordre
de grandeur de — , son inverse - est du premier ordre de gran-
P t
deur ; il faut donc que sa valeur soit de cet ordre, et à plus forte
a
raison '—,, qui est une quantité plus grande (l). Nous sommes donc
autorisés à considérer le terme qui suit l'unité dans la parenthèse,
comme étant du deuxième ordre, tant que cos% ne sera pas trojf
petit, ou que > ne dépassera pas 85° environ. Dans ces limites, on
aura donc une expression exacte aux termes près du deuxième or-
dre, en écrivant
dH=a,xy'dy'. (94)
Il y a plus : si nous supposons, comme cela aura lieu dans la réa-
lité, la surface extrados continue au lieu d'être dentelée ainsi que
nous l'avons supposée pour l'exactitude de la théorie, il faudra
écrire a' au lieu de a dans les équations sur lesquelles est établie
l'équation (77), ce qui la fera coïncider avec celle que nous venons
d'obtenir. Nous aurions pu supprimer tout d'abord les termes qui
proviennent du défaut de parallélisme de l'extrados avec la courbe
des centres de gravité; mais il était bon de voir que ce défaut de
parallélisme n'introduit dans les équations définitives que des er-
reurs du deuxième ordre et des ordres supérieurs.
§ XLIV. — L'équation (94) montre que la pression trans-
mise aux culées est la même que celle qui serait produite par
un liquide dont le poids serait ci, ; la même hypothèse rend nulle
la dérivée
do.
, — S
et la valeur de iV qui en résulte est
-, y' I 1 -\-— I ; elle n'est donc que très-peu différente de la
pression que produirait le même liquide sur la voûte; mais la pres-
sion iV est appliquée à la surface élémentaire xd», et l'on doitavoir
^ ds = N" ds, en appelant A" la pression par unité de surface sur
l'élément xds de Vextrados; il résulte de cette équation et de la
valeur précédente N" = a, y'. Notre hypothèse sur la disiKnition
des matériaux qui chargent la voûte revient donc à supposer qu'ils
(1) On conçoit que nous avons dû, à défaut d'autre mélliodes plus prfebes,
employer la considération des graudciirs de divers ordres, pour classer les
termes et exclure ceux dont l'importanco était négligeable; niais on doit anssi
comprendre que celle classification ne peul avoir rien d'absolu, que des termes
supposés d'un certain ordre peuvent . par suite de valeurs parliculiires des va-
riables dont elles dépendent, acquérir des valeurs qui les rangent dans uu ordre
durèrent ; il faut donc vérifier dans les applicaiious, si les termes considérés, par
suite des valeurs numériques admises, n'acquierrent point une importance qui
les ferait sortir des Hmiies assignées à leur degré de pelilesse. La remarque que
nous venons de faire rend effectivement le produit (_u de l'ordre de j', et non dn
premier ordre de petitesse; mais elle n'infirme point des résultats des paragra-
phes précédents, ce dont on peut s'assurer en effectuant les transformations que
nous nous sommes borné i indiquer; et l'on verra que nous avoni conservé eflec-
tivement tous les Icrmcs qui devaient rester dans les équations.
m
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
M2
[y —Vo-
agissent sur elle et sur les piles ou culées, comme un liquide de
même densité.
En intégrant l'équation (94) entre' les limites y/ et y, il vient
d'après (9l) et les observations relatives aux limites,
2
OU \ (95)
H^.Mv-y:)^
La poussée est ainsi exprimée par le poids d'un prisme droit
ayant pour densité celle du massif, et dont la base serait un tra-
pèze ayant pour ses deux bases parallèles, les coordonnées des
points extrêmes de Vextrados et leur distance verticale, ou la flè-
che de l'arc considéré. En mettant cette valeur dans l'équation (92),
puis effectuant l'intégration indiquée, au moyen de (94), il vient,
pour l'ordonnée u du point d'application de la résultante des pres-
•sions horizontales exercées par le massif sur la culée,
„ ,y'"—y»"
ou
yr-y.
, yo"-\-yo'y.'+y,"
(95 big)
yo+y:
eu faisant disparaître le facteur commun y,' — y,'.
Contentons-nous d'ajouter en passant que, lorsqu'il s'agira de
calculer l'équilibre de la culée, pour tenir compte des actions exer-
cées par la voûte et le massif, il suffira de considérer en même
temps que la force H, dont nous venons de fixer la grandeur et la
direction, la pression i^t e, exercée par la voûte sur la culée, suivant
In tangente au dernier élément de la courbe des centres de gra-
vité.
La valeur précédente de H étant substituée à l'intégrale qui la
représente dans (90), en ayant égard à ce que l'on a, d'après les
équations (78),
on aura
■y-liy' + yo
(95 ter]
Nous allons faire voir que cette expression est précisément une
intégrale première de l'équation (84). En effet, différentions-la en
remplaçant préalablement le produit des deux facteurs en y' par la
différence de deux carrés, puis remplaçons d e par sa valeur tirée
de (80), en y négligeant le terme du deuxième ordre, et transpo-
sons ensuite, il viendra
/ • ' 1 ^ '^y'
[i£ «m «=: (ty 4- 6 co« a) -p-;
a»
mais on a, en négligeant S devant j t, et faisant sxn a! = sin a, ce
qui est exact aux termes près du deuxième ordre,
dy' dy" ds' ■ , ■ , ,
~r =^^ T- =*'"*? -t--0''
a» ds da. \ \ > I
substituant cette valeur dans l'équation précédente, enlevant le
facteur commun sin «■, et négligeant le terme du deuxième \ e' cos a,
on aura, en tirant la valeur de p,
."■—7 «y
£ COS a.-\- %y
Cette équation n'étant autre que l'équation différentielle du
deuxième ordre (84), il est donc démontré que l'équation (95 ter]
en est l'intégrale première.
C'est l'équation (95 ter) qui va principalement nous servir pour
établir une des relations cherchées entre les données d'un projet
d'arche, et les constantes nécessaires pour effectuer le calcul des
coordonnées ou le tracé géométrique.
Elle pourrait être utilisée dans le calcul des coordonnées, mais
nous avons préféré, pour l'analogie du calcul et du tracé, partir
de la valeur du rayon de courbure et de l'épaisseur; nous indi-
quons ainsi les procédés qu'il y aura à suivre lorsqu'on pourra ob-
tenir le rayon de courbure en fonction des coordonnées et de leurs
différentielles du premier ordre. Du reste, elle sera employée avan-
tageusement pour vérifier l'exactitude des calculs, attendu que les
valeurs de e et y, relatives à la valeur extrême de a, devront satis-
faire à cette équation ; tous les calculs intermédiaires se trouveront
donc en même temps vérifiés ainsi que nous l'avons dit § XLI.
§ XLV. — Les données ordinaires d'un projet d'arche sont :
la demi-ouverture g, la hauteur sous clef à partir de naissances ou
la flèche /", enfin la hauteur h de la charge au-dessus de la clef. On
a coutume de ne point avoir égard à cette dernière dans le calcul
d'une arche, et cependant elle mérite plus d'attention. Disons d'a-
bord que celte hauteur provient ordinairement, dans les ponts,
d'un lit de maçonnerie reposant sur le plan horizontal tangent a
\' extrados, d'une couche de cailloux, d'une autre de sable, et enfin
du pavé lui-même, quant à la chaussée ; dans les ponts-canaux,
plusieurs de ces couches sont remplacées par une couche d'eau.
Nous remplacerons pour le calcul, la hauteur de chacune d'elles,
par la hauteur d'une couche de la matière du massif qui aurait
le même poids, ce qui se fera en la multipliant par le rapport de la
densité propre de cette coucheà celle du massif, et ce sera la somme
de ces hauteurs réduites que nous désignerons par h. Enfin, nous
ajouterons à ces données l'une des deux quantités u. et «,.
La première de ces quantités a est liée à la pression dans les
joints par l'équation (78). Elle exprime, ainsi que nous l'avons
dit ailleurs, la hauteur d'une colonne de la matière considérée dont
le poids produirait sur une base horizontale la pression qui a lieu
dans les joints normaux. Son usage ici est le même que celui des
hauteurs manométriques dans la mécanique des fluides ; il a, comme
ces dernières, l'avantage de rendre plus saisissable à l'esprit l'in-
tensité des pressions, que tel ou tel nombre de kil. par mètre carré.
U sert d'un autre c6té à rendre les équations homogènes, de telle
sorte qu'il n'y entre plus que des lignes et des rapports. Cette quan-
tité ;a n'est pas toujours donnée a priori, elle peut résulter de con-
ditions particulières; mais elle ne doit jamais dépasser une limite
fixée par la résistance des matériaux. Navier, dans stm Résumé des
Leçons sur l'application de la mécanique n° 176, fixe la limite des
pressions qu'on peut employer avec sécurité dans les arches, à
610 kil. pour une surface de 25cent. carrés, d'où l'on déduit «• =
100 mètres , en prenant pour poids du mètre cube, nr = 2440 kil.,
c'est le poids du liais de Bagneux; les autres pierres employées
aux environs de Paris donneraient une valeur de u. un peu plus
forte à cause de leur moindre densité. Suivant Navier, on ne s'ex-
poserait donc point à trop charger les voûtes toutes les fois que ix ne
dépasserait pas 100 mètres (l).
(1) Xous pouvons donner un exemple Trappant dans lequel on reconnaîtra
facilementque celte valeur a été dépassée : les piliers prismatiques de l'aqueduc
de Spolette ont plus de 100 mètres de hauteur, et sont de plus cliargés d'une
413
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
kik
Nous dirons toutefois que les épaiseurs déduites de la valeurde.u-
que l'on aura fixée au-dessous de too mètres, pourront bien assurer
la stabilité de l'arche en ayant égard seulement à son poids ; mais si
les épaisseurs se trouvent petites, il conviendra, à cause des sur-
charges, de diminuer |a, ce qui aura pour effet d'augmenter les
épaisseurs. La valeur de u. n'est donc point absolument arbitraire.
La considération de l'angle a, du dernier plan de joint avec la
verticale, va nous servir à distinguer deux classes d'arches dans le
système de construction qui nous occupe : 1" les arches dans les-
quelles l'angle «, a une valeur moindre que 90", et qui correspon-
dront pour nous aux arches dites en arc de cercle; 2" les arches en
anses de panier, qui ont lieu toutes les fois qu'on se donne «, =90".
Les joints, dans l'un et l'autre de ces cas, sont supposés ne pas
s'étendre jusqu'à un même plan horizontal, comme cela a lieu dans
quelques arches en arc du cercle. Dans le premier cas, l'angle «,
n'ayant pas de valeur nécessairement déterminée, ix peut être pris
arbitrairement ainsi que nous allons le voir; dans le second au con-
traire, a, recevant la valeur particulière de 90", u. cesse d'être arbi-
traire, et prend une valeur résultant de la condition a, =90". En
effet, en laissant de côté la constante y, dont la valeur est, à * près,
A-|--j-E,, les constantes distinctes que nous avons à considérer
sont/", g, h, «., £,,«,, c'est-à-dire au nombre de (î. Or l'équation (95 1er]
va nous fournir, comme intégrale première de (84), une relation
entre ces constantes, au moyen des valeurs que prennent les varia-
bles correspondant au dernier plan de joint; la deuxième intégrale
ou l'équation de la courbe des centres de gravité fournirait une se-
conde relation à laquelle nous suppléerons par les quadratures ou les
tracés décrits ci-dessus. Ces six constantes ne sont donc liées entre
elles que par deux équations, d'où il suit qu'on peut prendre arbi-
trairementquatre d'entre elfes, et que les deuxautres s'en déduiront ;
or, les trois premières étant données nécessairement a priori, on
ne peut donc prendre arbitrairement que l'une des trois quantités
u-, £ o et a, formant un groupe qui doit être réduit à deux, parce
qu'on n'a ei) général aucune raison a priori de fixer la valeur
de So •
Transformons donc maintenant l'équation (95 ter), de manière à
y introduire les données. Nous égalerons pour cela deux valeurs de
l'ordonnée du point inférieur de l'mirado^; l'une se compose de l'or-
donnée du point inl'érieur de Vextrados et de la projection verticale
de l'épaisseur, l'autre de la somme des longueurs h, e», et f; on a
donc
»/',-}-£, co««,=A + s,-|-/';
mais h n'est autre chose que y',, d'où résulte
«/'■— 2/'. = ^ — s,*-»-'*, +/".
et 2/', + '/. = ^— ^ eo«a,+/"4-2/i,
en ajoutant à chaque membre de la première, la quantité 2 y\ ou
son égale 2 A. Or, en appliquant l'équation (95 ter] aux valeurs rela-
tives au dernier plan de joint, c'est-à-dire en affectant de l'indice 1
toutes les variables, et substituant les valeurs précédentes, puis,
posant pour abréger
:=E. — -, co«»,,
il vient
2u.
+ /"+2A),
96
énoniie coiisliuclioii à leur partie supérieure; d'où il est facile de conclure, mal-
gré le défaut d'indication sur la dureté et la densité de la pierre, <;ue la valeur
de jx, à la partie inférieure des piliers, doit dépasser 100 mètres.
é(iuation du deuxième degré en z, dont on tirera plus facilement la
valeur de z en la résolvant à la manière des «luationsdu premier
degré, en négligeant d'abord z au deuxième membre, à cause de
sa petitesse relativement à Fi; on aura ainsi
(97)
z = ■
(t-^-')
mais d'un autre côté t, estliéà t. par l'équation (81), dans laquelle
il faut mettre pour y — y, sa valeur facile à constater, /" -j-
7 (', — «, cas a,) ou f-\--TZ; on en tire
/•4-T^
(98)
1 — cotf-, e
Cette dernière équation, jointe à celle (97) qui exprime la valeur
de l'auxiliaire z, constitue la seule relation exacte qu'il nous soit
possible d'établir directement entre les constantes et les données du
problème, relation qui, on doit le remarquer, necontient point la
quantité j. Nous allons voir maintenant commenton peut suppléer
à celle qui nous manque.
§ XL VI. L'équation provenant de l'élimination de z entre les
deux précédentes, contient e,, «, et pi; nous avons vu qu'on ne peut
se donner qu'une seule des deux dernières quantités, de telle sorte
que si on connaissait l'une des deux autres, l'équation dont il s'agit
servirait à faire connaître la troisième. A défaut de la connaissance
de deux de ces quantités, nous attribuerons une valeur approchée
à l'une d'entre elles, et nous indiquerons ci-dessous la manière de
la calculer. Au moyen de cette valeur approchée, de celle don-
née, et de la troisième qui s'en déduira par les équations (97)
et (98), puis de la relation y,^A-}--i-t^ , on connaitra les trois
quantités u., e,, y, nécessaires au calcul des coordonnées ou au tracé
de la courbe des centres de gravité indiqué §§ XLI et LXII. Il sera
suffisant ici de s'en tenir au simple tracé, en calculant la valeur de
8 seulement pour le point le plus bas de la voûte. Si le tracé est
exact, la normale passant par le point le plus bas de l'intrados, ou
correspondant à la flèche f, devra faire avec l'axe des y, l'angle a,
donné ou supposé ; mais l'abscisse de ce point ne se trouvera exac-
tement égale à g, qu'autant qu'on sera tombé sur la véritable va-
leur de celle des trois quantités î*, €„, », qu'on aura déterminée ap-
proximativement. On fera dès lors varier cette quantité, que nous
désignerons par o, pour n'avoir point à nous répéter, de telle sorte
que o représente (a, «„ ou », , suivant les cas ; or, par le théorème de
Taylor, on a, en considérant g comme fonction de »,
dg
,d'g
"^=-^7 4« +7-rT^»'-f etc.;
o« du
(99)
en ne tenant compte que du premier terme du deuxième membre,
et désignant par j,, l'accroissement de g produit par l'accroisse-
ment », de o, on aura, par cette formule ,
d'où l'on tire la valeur de la dérivée ; et en la substituant dans le
développement ci-dessus, il vient
»,
9,
pour la valeur approchée de l'accroissement a» qui pourra produire
l'accroissement aj constituant la différence entre la valeur donnée
de g et celle fournie par le tracé. Ce qui précède revient a effectuer
415
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
416
une simple proportion. On fera un troisième tracé avec la valeur de
o corrigée. Si la valeur de g qui en résulte n'est pas assez appro-
chée de celle donnée, pour qu'on juge nécessaire de faire un nou-
veau tracé , l'emploi de la formule (99) , avec deux termes au
deuxième membre, fournira une grande précision, à moins qu'il n'y
ait aucune solution, caractère que l'on reconnaîtra à la grandeur
que prendra le deuxième terme relativement au premier, et que
ferait apercevoir le tracé de la courbe des erreurs, lequel montrerait
cette courbe s'approchant, puis s'éloignant ensuite de l'axe, sans
l'avoir rencontré. Pour déduire de trois tracés la valeur exacte de
n, on choisira celui des tracés qui donne le résultat le plus appro-
ché ; soient alors g,, j,, les différences des valeurs de g dans les
deux autres avec celles du premier et correspondant à des diffé-
rences ',, o, de o, obtenues de même; en substituant ces valeurs
dans l'équation (99) et faisant pour abréger
dg , d'g
o — -7-7 0 = 1 -J-T'
du ua
(100)
on aura
ff, = «', + K';
On tirera ensuite de ces deux équations les valeurs de a et defc :
l'équation (99) deviendra ainsi
AJ=-OAo+ fcAa',
d'où l'on tire pour valeur approchée aux termes près du troisième
ordre
1 b
Atr=— ^g A^-
a a
(10.)
Au moyen de cette équation, ou aura la correction Aa qu'il reste
à ajouter à i pour obtenir, par un tracé définitif, l'annéantisse-
ment de l'erreur Aj qui reste encore dans le tracé le plus approché.
On aurait pu développer Aa en fonction de Aj, et éviter le retour
que nous venons de faire ; mais nous avons préféré le développe-
ment (99^, pour nous conformer aux procédés de résolution des
équations numériques, dans lesquels on calcule immédiatement les
dérivées.
Calcul des valeurs approchées do-,, e„ et |j.. Cas des archet dites
en arc de cercle.
§ XLVII. Nous avons vu que dans ces arches, l'angle « , n'est
point fixé a priori, et que u. reste arbitraire. Pour obtenir une va-
leur approchée de *■ , nous observerons que la courbe intrados dif-
férera peu en réalité d'un arc de cercle. Or, si elle était en effet un
arc de cercle, on déduirait très-simplement l'angle «, de la flèche f
et de la demi-ouverture g, de la manière suivante : menons, dans
cette hypothèse, la corde qui joint l'une des naissances au sommet
de Vinlrados; l'angle de cette corde et de la corde de l'arc 2», com-
pris entre les deux naissances, sera inscrit au cercle et aura pour
mesure la moitié de l'arc compris entre ses côtés ou | », ; la tan-
gente de cet angle a évidemment pour expression — . On recon-
a
naîtra dans les constructions, que l'angle ainsi déterminé sera un
peu trop fort ; nous écrirons donc
tang^y.,<C~. ■
102)
On pourra dans la première approximation prendre — pour la
valeur de cette tangente ; il y aura seulement à prendre », plus pe-
tit dans le deuxième tracé. Toutefois, dans les tracés successifs, il
faudra déduire la valeur correspondante de e», de l'équation (98),
après avoir calculé l'auxiliaire z par (97).
On pourra observer que f, et par suite z, étant assez petits par
rapport à (a dans le cas actuel, il pourrait devenir nécessaire de cal-
culer l'exponentielle qui entre dans (98) avec une assez grande
approximation, afin d'avoir une valeur suffisamment exacte de e„;
pourévitercet inconvénient, on développera l'exponentielle en série,
en se contentant de deux premiers termes qui suivent l'unité, ce
qui sera toujours assez exact ; puis en mettant 2 sin ' î», à la place
de 1 — cos a, , on aura
2«ft'T«
-,^.jj+ii^^im
etc.
I
(103)
( !* \ ."• / )
Malgré cela, on pourrait croire que la valeur de «, serait indé-
terminée pour des valeurs très-petites de fet par suite de a, ; pour
faire voir qu'il n'en est point ainsi, nous allons considérer le cas
extrême où l'on supposerait f et », infiniment petits. Cette hypo-
thèse réduit la valeur de « à
ifh
-, , et la valeur de «« donnée par
tn
l'équation précédente, en ne conservant que les inflniments petits
de l'ordre le moins élevé, devient, après avoir divisé le deuxième
membre haut et bas par f.
2/-
[y. — ih) (u — ii/j)
Or, il est facile de voir que se donner f et g infiniment petits,
revient adonner le rayon de courbure intrados ="„ au sommet, et
que la valeur de », en résulte ; en effet, on a évidemment
-4 = »,. 2/'?„" = 9,,
la première de ces é(iuations ayant lieu suivant l'expression de
l'angle de contingence, et la seconde résultant d'un théorème connu
de géométrie élémentaire; on déduit de ces équations, par l'élimi-
nation de g ,
2/- Pc" '
or, en recourant aux équations du § XL, on reconnaîtra que
tous les termes qui entrent dans les valeurs des différentielles
de i « et de >, ont pour facteur sin », et par suite sont nuls au som-
met, d'où résulte en ce point le parallélisme des trois courbes, in-
trados, courbe des centres de gravité et extrados. Le rayon de cour-
bure p»" est donc celui (i„ de la deuxième courbe diminué de ^k, au
terme près S, qui est du deuxième ordre. Substituant cette valeur
dans l'équation précédente et portant le résultat dans la valeur
de e„ on en tire, en négligeant les termes du deuxième ordre et
considérant - comme facteur de cet ordre , d'après la note du
M- *
§ XLIII.
■iih
fo= to
ih
relation identique avec l'équation (84) appliquée au sommet de la
voûte, et qui montre que t« est déterminé, en même temps qu'elle
établit la concordance de nos résultats.
La valeur de e„ étant déterminée par (103), et y» ayant pour va-
leur A-|- ^e„, les quantités nécessaires aux calculs ou constructions
se trouvent fixées, et pour leur correction, il suffira d'appliquer
les procédés du § XLVI en faisant a — », .
4.17
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
M8
Enfin, nous préviendrons l'objection qui pourrait être faite en
disant qu'on peut faire immédiatement une iiypothèse sur la va-
leur de e» au lieu de considérer », ; nous dirons à cela, qu'il eût
toujours fallu trouver une valeur approchée de So, pour ne pas se
jeter dans des tâtonnements illimités, ce que nous avons fait en
partant de «, ; d'un autre e6té, on se priverait d'une vérification
importante, qui consiste en ce que l'angle «, résultant des tracés ou
calculs et qui correspond a la flèche f, doit se trouver identique
avec celui d'où l'on est parti, quelque fausse que soit l'hypothèse
sur sa vraie valeur.
C'a* des arches en anse de panier.
§ XLVIIl. — Ici l'angle limite a, est égal à 90», et la va-
leur de ,"■ s'en déduit nécessairement, § XLV. Cette valeur par-
ticulière va simplifier les équations (97) et (98); elle réduit en ef-
fet 2 à £û et, par suite, la dernière de ces équations à une identité,
tandis qu'on tire de l'équation (96)
Cette équation fera connaître la valeur de pi relative à toute va-
leur hypothétique de e»; nous allons maintenant calculer une va-
leur approchée de cette dernière quantité par les considérations
suivantes. Il résulte de l'examen de nombreux tracés que la forme
de Vintrados est à peu près celle d'une ellipse dont les deux demi-
axes seraient f et g, avec cette différence que l'intrados présente
plus de convexité entre le sommet et les naissances, que la demi-
ellipse. Cette circonstance indique que le rayon de courbure de
l'ellipse au sommet est plus petit que celui de Vintrados; or, nous
avons expliqué, dans le paragraphe précédent, le parallélisme des
trois courbes au sommet ; notre remarque revient donc à dire que
le rayon de courbure de l'ellipse ayant fetg pour demi-axes, aug-
menté de la demi-épaisseur au sommet, est moindre que le rayon
de courbure de la courbe des centres de gravité en ce point. Écrivons
cette inégalité en mettant pour le rayon de courbure de l'ellipse,
g'
sa valeur connue — , et pour celle de p» le deuxième membre de (8-1)
divisé haut et bas par i, il viendra
1 ^o < 'o
^+A
Or, faisons remarquer que les matériaux du massif n'étant ja-
mais plus denses que ceux de la voûte, i est un nombre < 1 ; si donc
nous remplaçons t par l'unité, dans le dénominateur du deuxième
membre, ce dénominateur se trouvera diminué, et par suite le
deuxième membre augmenté; nous aurons donc a fortiori, en mul-
tipliant les deux membres par ce dénominateur ,
■j( eo + A ) + i e„' + feo A <
— I- -Jl
toi'-
Mettant à la place de -^, sa valeur tirée de (104), il viendra
t
après réductions
+ ''<
t/'
(105
r
— I
Telle est l'inégalité qui servira au calcul de la valeur approchée
de £„. J'ai trouvé par de nombreux tracés, que la valeur moyenne
de io-\-h s'écarte peu des (piatre cinquièmes de la valeur du
deuxième membre de cette inégalité. On pourra mettre à profit
cette remarque, d'abord pour les tracés successifs indiqués plus
haut, puis aussi pour se faire une idée apprwhée des dimensions
auxquelles on arrivera au moyen des valeurs donnés de /, g et h,
sans recourir au calcul de la courbe ou aux tracés ; en effet, on
tirera «■ de l'équation (104), et l'on déduira le poids de In demi-
voûte, de l'équation (93), qui se réduira h ->■ i^», (la valeur de «, s'ob-
tient par l'équation (81) en y faisant y — yo = /'-|-ît«).
Connaissant maintenant u,v-^\-y<,^=h-\-\u, on aura tout ce
qu'il faut pour effectuer les calculs ou constructions, et la correc-
tion de la valeur de •, s'opérera par les procédés du ^ \LVI en
faisant " = t„.
Nous ferons remarquer que l'inégalité ( 105) donne l'épaisseur
totale to-f-A, formée de celle de la voûte à la clef et de la hauteur
de la charge, en fonction de la flèche et du surbaissement, au moyen
duquel le dénominateur du deuxième membre peut être calculé;
cette épaisseur totale n'est donc point liée directement à l'ouver-
ture 2g, mais bien à la flèche. Faut-il attribuer a cette circonstance
l'inutilité des efforts tentés jusqu'ici pour lier directement l'épais-
seur à la clef à l'ouverture des arches en arc de cercle ?
Présentons encore quelques observati(>ns, afin qu'on ne soit pas
tenté de tirer défausses conséquences de l'inégalité (l05). Si on
donne les valeurs de fetg égales, ou s'il s'agit de plein-cintre, on
trouvera '. -(- A infinis; cette conséquence n'est point absurde :
nous avons reconnu, en effet, que plus les charges sont considéra-
bles, et plus lu forme de la voûte doit se rapprocher du plein-cintre,
avec lequel elle ne se confond que dans le cas d'une charge totale
infinie; mais est-ce à dire qu'une arche en plein-cintre cessera d'ê-
tre stable pour des charges finies? Non, et l'expérience prouve ef-
fectivement le contraire; mais ce qu'il est permis de conclure, c'est
que la résultante des pressions dans ces voûtes ne passe pas par
le milieu de l'épaisseur, et que dès lors, à épaisseur égale, elles jouis-
sent d'une moindre stabilité que si leur forme était déterminée par
nos équations. On voit pareillement que ces conditions de grande
stabilité ne seront point remplies dans les arches chargées ayant
une flèche plus grande que leor demi-ouverture, car nos équations
donneraient dans ce cas une épaisseur totale négative, ce qui est
absurde. Enfin, l'équation (i 05) pourra conduire à une épaisseur
totale évidemment trop considérable, donnant lieu à des pressions
très-petites dans les joints, ce qui serait contraire aux principes de
l'économie dans les constructions: ce sera l'indication quela voùie
pourrait être avantageusement surbaissée ; il u'y aura aucune dif-
ficulté à le faire, puisqu'il suffira, pour avoir la même hauteur
totale sous clef, d'exhausser les naissances. Si l'éjwisseur était évi-
demment trop petite, et donnait lieu par conséquent a de Ires-
grandes valeurs de !^, ce serait l'indication d'un trop grand surbais-
sement, auquel il serait moins facile de remédier.
S XLIX. — En jetant un coup d'oeil rétrospectif sur la théo-
rie que nous venons de développer, on reconnaîtra sans peine que
nous avons suivi, dans l'exposition, une route inverse de celle
qu'il convient de suivre dans les applications: mais on devra, ce
me semble, rester convaincu qu'il eût été, sinon impossible, du
moins diflkile de nous faire comprendre en procédant autrement.
Nous espérons faire disparaître les difficultés qui pourraient être
restées dans l'esprit du lecteur, quanta I application de notre théo-
rie, en en présentant quelques exemples dans notre prochain ar-
T. V. «ï
419
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
430
ticle. En attendant, nous présentons {Fig. r) un tracé d'arche en
anse depanier, danslequel nous avons choisi pour données la flèche
et la demi-ouverture de l'arche du milieu du pont de Cravant, en
supposant i^ 1 et/* = o. (Perronuet donne l'élévation de cette
arche, daus son ouvrage sur les ponts, sans indiquer la partie de
la construction supérieure au plan horizontal tangent à Vextrados).
En faisant les tracés successifs que nous venons d'indiquer, on
trouve précisément l'épaisseur à la clef qui a été adoptée par l'in-
génieur chargé de construire ce pont. Cette épaisseur, qui est de
l"" 43, répond à une valeur de u. égale à 20"" 1 environ, quantité
fort au-dessous de la limite 100 mètres. On doit regarder ces ré-
sultats comme indiquant une très-grande stabilité, si la forme de
l'arche, dans ses autres parties, diffère peu de celle déterminée par
notre tracé; mais on doit aussi considérer la conception de ce tra-
vail comme peu économique, à cause de la faible charge qu'y sup-
portent les voussoirs dans les joints normaux. Si on eût augmenté
le surbaissemeat en élevant en même temps les naissances, on eût
pu adopter une moindre épaisseur à la clef, correspondant à une
charge dans les joints représentée par le poids d'une colonne de 50
à 60 mètres de hauteur.
YVON VILLARCEAU.
TaolS JOURS A ROUEN.
iNTfiODUCnOX.
Que dire sur Rouen qui n'ait déjà été écrit cent fois, et par des
plumes assurément plus éloquentes que la mienne ? En me priant
de lui donner un travail sur cette ville, le directeur de la Revue a
Imposé une rude tâche à un simple voyageur, qui n'a pu là passer
que" trois jours à prendre quelques notes presque illisibles, encou-
rant le nez en l'air par les rues de cette curieuse capitale du pays
normand, de cette ville de paix et de travail, où l'on semble avoir
voulu enterrer la guerre en plantant de vieux canons de fonte en
guise de chasse-roues aux angles des maisons, et retourner ainsi
le sens de ce vers de Virgile :
Et curvae rigidum falces conllantur in enscm.
L'instrument destiné à renverser les murailles devient ici, par une
heureuse métamorphose, le protecteur de ces mêmes murailles.
Il faut s'attendre à trouver dans ces lignes une œuvre incohé-
rente et saccadée plutôt qu'un travail suivi, peu ou point de pit-
toresque, et pour cause; mais quelques observations et réflexions
qui pourront être utiles à ceux qui s'occupent de la restauration
des édifices du Moyen-Age. J'ai semé çà et là quelques mots de
critique, parce que la critique, quand elle est consciencieuse et
mesurée, est toujours utile au progrès.
A Rouen, l'on ne saurait parcourirqu'un bien petit nombre de rues
sans voir poindre au milieu des tristes mais pittoresques maisons
en bois des derniers siècles, quelque curieux fragment d'architec-
ture de la grande période qui commence au Xl« siècle et finit à la
Renaissance.
Pauvre art chrétien ! vaincu et détrôné par l'art païen, traité
de barbare pendant trois siècles, le voilà qui relève aujourd'hui la
tète et menace à son tour de terrasser son rival I
Pourquoi les beaux-arts en général, pourquoi en particulier
l'art sublime des Ictinus, des Vitruve, des Pierre de Montereau,
des Philibert Delorme, etc., est-il soumis aux caprices de la mode,
à ce mouvement de bascule qui semble être depuis un temps
immémorial l'état normal de l'esprit humain , dans les arts aussi
bien que dans les choses futiles?
N'avons-nous pas vu l'art chrétien lui-même plus inconstant
encore que l'art païen, son prédécesseur et son maître, s'engager
aussi dans cette voie de versatilité? N'avons-nous pas vu la svelte
basilique latine, fille aînée de la basilique païenne, céder la place
à la lourde architecture romane, et celle-ci chassée par le style
ogival ? N'avons-nous pas vu ce dernier, majestueux et sévère au
XIII' siècle, riche et élégant au X1V«, élégant et féerique au
XV«, dégénérer et passer à l'état hybride sous l'influence de la ré-
surrection de l'art païen, et enfin complètement anéanti par celui-ci
au XVI» siècle? et ce dernier lui- même, après nous avoir laissé de
délicieux témoins de son séjour parmi nous, passer par un état de
décadence progressive, pour arriver enfin, au bout de deux siècles
et demi, à l'époque moderne, véritable Babel architecturale, cette
époque de transition unique peut-être, où tous les systèmes, jadis
alternativement vainqueurs et vaincus, se disputent la place? Le-
quel d'entre eux restera maître du terrain? Ni les uns ni les autres
probablement. Un art nouveau surgira sans doute de ce chaos
moderne. Il ne sera pas l'œuvre d'un seul, mais celle de tous.
Chacun apportera sa pierre à l'édifice commun.
Voilà trois siècles que l'architecture roule sur des réminiscences
ou plutôt sur des imitations. Il faut sortir de cet état de servage. Les
innombrables ouvrages qui se publient depuis un siècle sur lar-
chitecture de tous les temps et de tous les pays, sont d'un mer-
veilleux secours pour nous rendre savants dans cet art sublime,
pour nous donner d'excellentes inspirations, et pour préparer cet
enfantement d'un art nouveau. Celui-ci, quoi qu'il fasse, et par
suite même de l'abondance des matériaux , s'affranchira difficile-
ment de toute réminiscence.
Mais nous voici loin de Rouen.
Je disais donc que cette ville possédait encore bon nombre d'édi-
fices publics et de maisons particulières du Moyen-.\ge et de la
Renaissance. Plus d'une fois au détour d'une rue, l'image élancée
d'un clocher gothique encore chargé de ses riches festons de
pierre, vient frapper les regardsde l'observateur. Si l'on cherche l'en-
trée de l'édifice, on la trouve souvent affublée d'une enseigne de
commerce ou de quelques oripeaux de rouenneries. A l'intérieur,
le bruit du marteau ou de la hache , le bourdonnement des engre-
nages et des métiers, ont remplacé les sons harmonieux de l'orgue
et la voix grave et cadencée des chantres. Si la rapide destruction
de ces édifices ne s'ensuivait pas, s'ils étaient propres et bien en-
REVUK DE LARCHITKCTLRE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
im
tretenus, on pourrait en prendre son parti; mais il n'en est rien.
C'est assez le propre des villes construites en bois de conserver
longtemps leurs bâtiments particuliers. C'est dans celles-là qu'on
retrouve le plus fréquemment des maisons du Moyen-Age. Doit-on
en conclure que les constructions en charpente durent plus long-
temps que celles en pierre? Cela pourrait bien être, car elles sont spé-
cifiquement plus légères; les tassements y sont plus rares et surtout
moins graves ; l'assemblage des bois en rend toutes les parties so-
lidaires ; elles peuvent éprouver des surplombs considérables sans le
moindre danger : aussi a-t-on souvent échelonné les divers étages
en saillie sur la rue, au détriment de la salubrité. Les maisons en
maçonnerie se détruisent plus vite par la disjonction des matériaux
produite par les tassements et les secousses , par désagrégation
plutôt que par décomposition des matériaux eux-mêmes. Les mai-
sons en bois périssent par la décomposition sollicitée par l'humidité
ou l'action des insectes.
Gardons-nous bien toutefois d'en conclure qu'il vaudrait mieux
construire eu bois qu'en pierre; car si les constructions en char-
pente placées dans des conditions favorables ont des chances de
longue durée, n'oublions pas qu'il suffit parfois de quelques jours,
de quelques heures même, pour réduire en cendres une ville tout
entière.
Les Rouennais échangent aujourd'hui volontiers leurs vieilles
cages en bois pour des maisons neuves en maçonnerie à quatre ou
cinq étages, dans la construction desquelles ils suivent pas à pas le
système parisien. Dieu veuille toutefois que les intéressants dé-
bris de l'architecture du Moyen-Age ne soient pas trop tôt lem-
placés par les bâtiments modernes !
La CATHÉDiiALE. — Les travaux de la cathédrale sont à peu
près suspendus depuis longtemps, et le noble édifice ne parait pas
devoir recouvrer de sitôt ses membres mutilés par les éléments et
par les hommes. Les clochetons-contre-forts que M. Alavoine fit
élever il y a douze ans de chaque côté de la façade, sont restés en
masse comme il les a laissés, et il se passei'a sans doute encore bien
des années avant qu'on y appelle les sculpteurs. Ces contre-forts
sont une répétition des deux riches avant-corps qui flanquent le
portail principal. Si les deux nouveaux arrivés n'eussent été néces-
saires pour la consolidation de la façade, on eût fort bien fait de
ne point les élever (l) : ils gâtent la symétrie de l'ensemble.
Quelques échafaudages placés en haut de la façade semblent
annoncer qu'on a l'intention de rétablir les trois grands clochetons
ou édicules qui, avec celui qu'on voit encore, couronnaient jadis
(1) J'étais à Rouen il y a une douzaine d'années, lorsqu'on plantait les pilotis
qui portent la fondation du contre-fort près la tour Saint-Romain. Les pieux
sont en fonte, de forme cylindrique , d'environ Om 08 de diamètre sur environ
1m 50 de long; on les enfonçait àla niasse très-près les uns des autres. M. Ala-
voine, en employant ce système, en attendait sans doute un double résultat:
1" celui de consolider le sol en le resserrant entre les pieux en fonte; 2° celui
de le solidifier A la longue parla combinaison des oxydes du fer avec les terres
environnantes, combinaison qui forme, comme on sait, un produit très-dur,
compacte, et susceptible d'étendre indéfiniment ses dimensions en tout sens à
mesure que l'oxyde du fer pénètre les terres liumidcs. Ce qui me fait penser que
telle était l'intention de l'architecte, c'est qu'il n'a point fait peindre les pieux.
Le sol dans lequel ils furent plantés n'étant pas rempli d'eau, mais seulement
humide, des pieux en bois s'y fussent promptement pourris, et U s'en fftt suivi
de graves inconvénients. L'usage des pieux en sable était encore fort peu connu
i cette époque.
le grand portail. Ils furent renversés par un ouragan en 1683 (l).
On aura une idée de la force de l'ouragan qui renversa ces clo-
chetons, quand on saura que celui qui reste, et que j'ai mesuré, a
■1 mètres en carré a sfi base. La pyramide octogone <|ui le termine,
et dont la base est d'environ 3 mètres et la hauteur de 8 mètres,
est portée par huit piliers séparés entre eux par autant d'arcades
à jour de 4 mètres de haut. Les quatre piliers diagonaux ont i" 6o
de culée sur 0" 10 d'épaisseur. Les quatre piliers intermédiaires
ont 0"" 90 de culée sur O" 40 d'épaisseur. Si le corps de la pyramide
est plein (et rien n'annonce le contraire), son cube serait d'environ
1!) mètres et son poids de 4ô 600 kilog.; mais en le supposant
creux, et en portant son enveloppée 0" 20 d'épaisseur. Il pèserait
encore environ 22 600 kilog.
Ce clocheton fut vraisemblablement garanti du sort de ses frères
jumeaux par la tour Saint-Romain, près de laquelle il se trouve,
bien que cette tour fût sous le vent. D'après les indications de
Farin (Hist. de Rouen) sur la marche de ce météore, je conclus
qu'il devait venir du sud-ouest et passer diagonalement entre les
deux tours. La pression des colonnes d'air qui frappaient le clo-
cheton se trouvait neutralisée par la réaction des colonnes d'air
réfléchies par la tour Saint-Romain, tandis que la projection ver-
ticale des trois autres clochetons, faite parallèlement à la direction
du vent, tombait dans le vide qui sépare les deux tours, et au-
cune réaction ne pouvant contre-balancer l'impétuosité du vent
direct, ces clochetons furent renversés. Il suffisait, du reste, que la
tour Saint-Romain ralentît la vitesse de la colonne d'air au milieu
de laquelle se trouvait le clocheton, pour qu'il fût préservé (2).
La chute de ces clochetons fit à la voûte de la nef une brèche de
1 1 mètres de long et C de large, et brisa le positif de l'orgue.
Le positif actuel porte le cachet du XVII' siècle, et il repose sur des
piliers et des arcades en bois du XV*^ siècle, restes vraisemblable-
ment du positif détruit. Cet ouragan causa, selon Farin, pour plus
de 200 000 écus de dégât dans la cathédrale. Il renversa aussi les
clochers de Saint-Michel et de Saint-André, endommagea celui de
Saint-Laurent, et abattit plusieurs clochetons de la tour Saint-
Ouen, quoiqu'ils fussent scellés en plomb.
La porte d'entrée du portail principal, en bois dechèno, est ornée,
autouides panneaux, d'une simple bande d'arabesques du XV1«- siè-
cle d'un très-bon style. On vient malheureusement de l'erapàter
de peinture à l'huile. Pourquoi ne se borne-t-on pas à nettoyer
et à reboucher les crevasses en mastic à l'huile couleur de bois, et
à passer une couche d'huile grasse sur le tout? Ce portail est d'une
richesse de détails incomparable. Sur le tympan de la porte se dé-
ploie un arbre de Jessé disposé avec beaucoup de goût et de légè-
reté. L'ébrasement est décoré avec élégance : on y compte plus de
(1) Dans le commencement de ce siècle, plusieurs communes du déparienient
de la CAte-d'Or, sur une étendue de quinze lieues, furent ravagées par un mé-
téore dont les effets furent encore plus terribles.
Si des masses aussi compactes et aussi lourdes que les clocbetoos de la ca-
thédrale de Rouen ont pu être renversées par un ouragan, que ne doit-oo pas
craindre pour l'avenir du monument de Juillet, qui n'est qu'un tube de métal
de 10 à 15 niillimètrei d'épaisseur sur Jm 60 de diamilre, et d'une hauteur toute
de 43m 37 pour la partie en bronze seulement. La surface normale est d'en-
viron 109 mètres carrés, déduction faite du tiers pour les parUes cylindriques.
La seule résistance que ce monument oppose i l'action du vent est son poids,
qui est de 183,781 kil., et repose sur une base de Cm 30 de cOlé, sans autre
scellement que celui de la rampe de l'escalier.
(2) Depuis que ces lignes sont écrites (juin), on a rétabli l'un de ces docbe-
tons, le plus voisin de la lour de Beurre.
423
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
434
mille figurines de 20 à 30 centimètres de haut, sculptées à travers
une profusion d'ornements qui se dégradent tous les jours de plus
en plus. On y laisse nicher les hirondelles, et, outre la saleté que
ces oiseaux laissent autour de leur demeure , les gamins sont oc-
cupés du matin au soir à les dénicher à coups de pierres. Le choc
de ces projectiles a tellement piqueté la surface du portail , qu'à
une certaine distance on ne distingue rien qu'une surface grisâtre
et monotone d'un effet désagréable. Serait-il donc si difficile de se
défaire des hirondelles et des gamins? Quelques coups de balai
pour les unes et quelques incarcérations pour les autres en au-
raient bientôt fait justice. Un lavage à la brosse rude rendrait à ce
portail une grande partie de sa splendeur, en faisant disparaître
le piquetage produit par le choc des pierres.
On a enfin débarrassé la cour des libraires, qui sert d'atrium au
transsept du nord, des chétives baraques qui l'obstruaient à droite
et à gauche. Cette démolition a mis à découvert, de chaque côté, une
suite d'arcades romanes dont les unes, percées dans le mur du bâ-
timent de la bibliothèque du chapitre, sont ornées d'archivoltes;
les autres, sous l'ancien réfectoire, ont seulement les arêtes abat-
tues. Les deux arcades jumelles qui donnent entrée à cette cour et
qui sont si agréablement couronnées d'une galerie à jour, ont en-
core leurs portes en bois du XV= siècle assez bien conservées, quoi-
qu'elles n'aient d'autre abri que l'ébrasement voûté sous lequel
elles se développent, et qu'elles ne paraissent pas avoir jamais été
peintes.
Dans les parties de cet atrium qui touchent à droite et à gauche
le portail et font suite aux arcades romanes , la démolition des
échoppes a mis à découvert une série d'arcades ogivales d'un beau
travail qui décoraient le mur d'appui d'une grande verrière du
côté de la bibliothèque et d'une fausse verrière de répétition du
côté du réfectoire. Malheureusement, les boutiquiers, pour agrandir
leur réduit, ont enlevé les colonnettes qui recevaient la retombée
des arcades, et qui, si l'on en juge par ce qui en reste, étaient
couronnées de chapiteaux très-délicatement sculptés. Des animaux
fantastiques en haut relief décoraient les retombées des archivoltes
immédiatement au-dessus des chapiteaux. Ils ont été abattus
comme ces derniers. On a poussé l'audace jusqu'à trancher un
pilier de 0°" 80 d'épaisseur séparant deux arcades romanes. Si l'on
en juge par l'admirable conservation des parties englobées dans le
comble des baraques, et épargnées par les Vandales parce qu'elles
ne pouvaient les gêner, l'établissement de ces constructions para-
sites dut suivre de très-près l'achèvement de cette partie du
portail.
Par une fatalité bien déplorable, les monuments du Moyen-Age,
à peine sortis du ciseau des artistes qui y déployèrent tant de
génie et tant d'amour, ont été confiés à des mains insouciantes qui,
au lieu de se faire un devoir, un bonheur de les conserver, les ont
misa la merci d'une foule de trafiquants de bas étage. Jésus-Christ
chassa jadis à coups de fouet les vendeurs du temple de Jérusalem ;
mais ses représentants ici-bas, loin de suivre un si noble exemple,
ont livi'é les parvis de presque tous les temples chrétiens aux ven-
deurs du dernier ordre ou aux bedeaux, véritables termites achar-
nés à la destruction de ces édifices religieux.
Heureusement qu'aujourd'hui l'on revient à des idées plus con-
formes à la dignité des églises, en les débarrassant de l'ignoble en-
tourage sous lequel elles furent ensevelies au Moyen-Age et dans les
siècles suivants. La ville de Rouen, où l'audace des envahisseurs a
été portée à son comble, semble se décider à regret à cette œuvre
de purification ; car jusqu'ici Ton n'a vu disparaître que les échoppes
de la cour des libraires ; je me trompe, on a fait aussi quelque
chose à Saint-Maclou. Mais nous autres Parisiens, ne nous appe-
santissons pas trop sur les échoppes qui obstruent les flancs des
églises de province et ne dépassent pas la plupart du temps l'appui
des verrières du rez-de-chaussée : à Paris on a fait les choses plus
en grand ; ce sont des maisons à cinq étages qui enlacent et étouf-
fent toutes les églises du Moyen-Age, à. l'exception de la cathé-
drale. Pourquoi la capitale ne donne-t-elle pas aux départements
l'exemple du déblaiement général ?
Si le beau portail qui, de la cour des libraires, donne entrée à
l'église, a perdu les onze statues qui peuplaient ses niches, il con-
serve encore en assez bon état un grand bas- relief dans son tym-
pan , et les nombreux anges qui décorent les refouillements en dais
de son archivolte ; mais ce portail possède encore, sur les faces des
dosserets échelonnés dans l'ébrasement, cent cinquante-six médail-
lous-quatre-feuilles inscrits dans des carrés rangés en colonnes. Ces
médaillons renferment chacun un sujet biblique, évangélique, allé-
gorique ou apocalyptique, d'une grande variété de composition. Les
triangles mixtilignes qui occupent l'intervalle entre les médaillons
et les carrés circonscrits sont remplis par des reptiles et des pois-
sons fantastiques, de 0" 08 à 0" 10 de long, à tête d'hommes, de
démons ou d'animaux d'une grande originalité, au nombre de plus
de neuf cents. Je laisse aux Champollion de l'art chrétien le soin
de déchiffrer cet immense tableau hérioglyphique. Le portail de la
Calandre possède un nombre plus considérable encore de médail-
lons disposés de la même manière , mais de sujets différents et
moins bien conservés, et il ne manque que les têtes à ses onze sta-
tues.
Les piliers extérieurs des collatéraux du nord, du côté de la cour
dite de l'Albane, s'élèvent sur d'anciens piliei-s portant encore les
naissances des nervures et les impostes d'une suite de voûtes
d'arêtes qui devaient recouvrir jadis le cloître construit pour
l'usage des chanoines de la cathédrale, lorsqu'ils vivaient en com-
munauté avant le XIV* siècle. Ce cloître existait dans tout l'es-
pace compris entre la tour Saint-Romain et la bibliothèque.
Il est rare que dans la reconstruction des grandes églises aux
XIII*, XIV' et XV" siècles, on n'ait pas utilisé une partie des sub-
structions de l'édifice primitif. Tel est l'avantage des constructions
bien établies. Mais comme le plan était presque toujours changé,
il arrivait souvent que des parties sur fondations neuves cor-
respondaient à des parties élevées sur fondations vieilles. S'il ne
s'en est pas suivi des tassements dangereux, on le doit sans doute
à la bonne construction des fondements neufs, et surtout à la len-
teur de l'exécution de l'édifice.
De quelque côté qu'on se dirige sur la métropole en suivant le
prolongement de ses axes, on arrive presque au pied des murs
sans cesser de voir la tète tronquée do la ileche en fonte s'élever
au-dessus des pignons, tant cette flèche domine par sa hauteur
les autres parties de l'édifice.
La pyramide en fonte qui remplace l'ancienne aiguille en char-
pente, est octogone en plan, et à jour, dans toute sa hauteur. Elle
s'élève sur la tour carrée en maçonnerie qui surmonte la croisée de
l'église.
Au lieu de s'appuyer sur le couronnement du mur de la tour,
la flèche est portée par des racinaux en fonte qui descendent
presque jusqu'à l'extrados de la voûte intérieure de la tour, à
environ 12 mètres au-dessous du couronneir.ent. Au moven d'une
^35
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
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tranchée faite dans l'épaisseur du mur de l'étage supérieur, chaque
montant des racinaux repose en entier sur le corps du mur de l'é-
tage inférieur de la tour, et non sur la voûte elle-même. Pour re-
cevoir les patins des racinaux, on a incrusté dans le mur trois as-
sises de pierre dure en encorbellement, formant ensemble une
saillie de 20 centimètres, indépendamment d'une retraite de 50 cen-
timètres à partir du fond des tranchées. Cette retraite offre donc
une très-grande solidité; mais, pour que le poids de la flèche en
fonte fût réparti également sur toute l'étendue de la retraite en
pierre dure, il eût fallu raccorder les patins avec les montants au
moyen de très-forts congés capables de résister à la flexion. Des con-
tre-fiches, placées dans les plansdesquatre murs, relient les montants
entre eux et reportent la charge vers les quatre angles. Huit autres
contre-fiches, disposées comme les arêtes d'une pyramide octogone,
s'appuient par le bas sur le pied des montants et se réunissent au
centre, à la hauteur de l'arasement de la tour, pour soutenir le
noyau de l'escalier, formant l'axe de la flèche et de toutes les en-
rayures qui s'y réunissent. Ainsi, par cette ingénieuse combinai-
son, le poids entier de la flèche en fonte, qui sera de 600000 kilog.,
est reporté sur les quatre murs de l'étage inférieur de la tour. La
voûte n'aura pas même à porter le poids de l'enrayure inférieure
placée à la base des racinaux ; car cette enrayure, ainsi que toutes
celles qui sont au-dessous de la plate-forme en fonte qui est à la
base de la flèche, est suspendue par d'énormes boulons en fer
forgé au centre de la pyramide creuse formée par les huit contre-
fiches centrales. Ainsi ces huit contre-fiches portent tous les objets
qui exercent une gravitation quelconque sur l'axe de la flèche,
soit en dessus, soit en dessous de leur sommet, tandis que les ra-
cinaux rangés sur le périmètre intérieur de la tour en pierre sont
chargés du poids de toutes les parties extérieures de la flèche.
Celle-ci est tout à jour, et l'aspect en est maigre. Cette maigreur
est encore augmentée par quatre grandes arcades entièrement
vides, de 3 mètres de large sur 9 à 10 mètres de haut, percées dans
les faces principales. Chacune de ces arcades sera plus tard enca-
drée par les rampants d'un pignon aigu hérissés de crosses, et la
flèche sera flanquée de quatre grands clochetons en fonte à jour,
élevés sur les quatre angles de la tour en pierre. Cet accompagne-
ment diminuera sans nul doute la maigreur de l'ensemble, qui ne
serait pas supportable si l'escalier central et sa cage ne lui don-
naient un peu de corps, en empêchant les rayons visuels de tra-
verser aussi facilement la tour. La maigreur qu'on reproche aux
meneaux de la flèche ne vient certainement pas du manque de lar-
geur;— ils ont I .s centimètres et les plus grands vides n'ont que
0™ 50 de large; — mais elle est due à leur manque d'épaisseur, car,
comme ces membres en général empruntent une partie de leur
effet de la perspective et que leur profil est ordinairement double,
ceux-ci étant simples, l'effet est manqué (l).
Il eût fallu doubler le profil de ces meneaux sur la profondeur,
c'est-à-dire rapporter à l'intérieur, comme doublage, des meneaux
pareilsàceux actuels, qui n'ont que 15 centimètres de profondeur
et sont creusés en forme de gouttière à l'intérieur. En les doublant,
ils eussent eu par conséquent 30 centimètres de profondeur ou
épaisseur sur lâ centimètres de largeur.
C'est une erreur que de considérer une colonne, un meneau, etc.,
comme de simples supports dont on ne doit exiger que la résis-
(1) C'est 11 une des eoiiséquciiccs nécessaires de l'emploi de la fonte 3u\ lieu
cl place de la pierre et avec des formes créées pour elle. {Nute de M. A.deC.)
tance suffisante aux fonctions qu'ils doivent remplir. Outre les
conditions de stabilité, l'art exige encore impérieusement celles
des formes extérieures, la combinaison, les proportions relatives
de certaines parties entre elles.
Si les belles colonnes que les Grecs ont léguées a notre admira-
tion n'eussent été destinées qu'à servir de supports, leurs propor-
tions, leur espacement, qui furent fixésaprés de longues études pra-
tiques et qui ne peuvent être changés notablement sans altérer plus
ou moins leur bon effet, eussent varié comme la résistance de la
matière employée à leur construction.
D'ailleurs, les colonnes sont dix fois plus solides qu'il ne faut
pour porter la charge qu'on leur a confiée dans la plupart des ap-
plications; mais comme elles étaient généralement placées à l'exté-
rieur, il fallait qu'elles pussent résister par leur masse à la pous-
sée au vide.
Des considérations climatériques entrèrent aussi pour quelque
chose dans la comiK)sition des ordres grecs. N'est-ce pas ce sol sou vent
bouleversé par des tremblements de terre qui nécessita la fermeté
de lignes et le peu d'élévation des monuments de la Grèce an-
cienne et moderne? Que deviendrait dans ce pays notre architec-
ture ogivale?
Quoique l'apparence semble indiquer le contraire, il en est pour-
tant de même des colonnettes du style ogival, dont les proportions
sont extrêmement variables et ne sont assujetties à aucune règle;
mais on les a toujours groupées soit avec des piliers dont elles ne
forment pour ainsi dire que les cannelures, soit avec d'autres co-
lonnettes pour en former un faisceau qui puisse non-seulement of-
frir une solidité réelle, mais encore une masse exempte de mai-
greur. Quand les colonnettes groupées avec un pilier ou une gi-osse
colonne sont isolées et d'une longueur notable, on a été forcé de
les relier en une ou deux places sur la hauteur avec le pilier par
dos crampons en fer.
Si dans quelques cas assez rares les constructeurs gothiques ont
placé des colonnes grêles isolément pour porter la retombée des
voûtes, comme, par exemple, au curieux réfectoire de l'abbaye de
Saint-Martin-des-Champs a l'aris, la maigreur de ces colonnes
fut motivée par la nécessité de ne point obstruer l'espace. De gros
piliers eussent empêché la plupart des convives de voir le frère
charge de faire la lecture ou le sermon pendant les repas, et eussent
gêné le service. L'intention de ne pas gêner est rendue évidente
par les colonnes engagées dans les murs, qui, au lieu de descendre
jusqu'à terre , sont portées par des culots. Les colonnes isolées
étant dans l'axe de la salle, n'éprouvent aucune poussée latérale et
n'ont à résister qu'à la pression verticale des voûtes.
Pour éviter l'effet désagréable de la longueur démesurée deees
colonnes, dont l'élévation est de plus de vingt diamètres, on les a
divisées en deux étages par un anneau saillant, au niveau duquel
règne le culot qui porte les colonnes engagées.
Dans la construction des meneaux des verrières du Moyen-.\ge,
les roses surtout, qui se ramifient en courbes si légères, si gra-
cieuses, si variées, se contre-butant les unes les autres, et dont le
motif parait emprunté au règne végétal, il semble qu'on se soit
plus préoccupé d'amoindrir autant que possible le réseau de pierre
au profit des jours qui les dix isent. H n'en est rien cependant ; les
règles de l'esthétique ont encore là régné en souveraines.
On voulait obtenir une grande masse de lumière, r-u plu-
tôt augmenter le plus possible la surface de ces mosaïques dia-
phanes, de ces tapisseries lumineuses qui alternent si heureuse-
42-
REVLE DE LARCHITKCTLRE Eï DES TRAVAUX PUBLICS.
438
meut, si indispensablemeut, avec l'opacité, avec la froideur des
murailles. Il fallait une charpente pour soutenir les frêles panneaux
de verre qui devaient la transmettre diaprée de mille couleurs,
tout en nous préservant des intempéries de l'atmosphère; il fallait
que cette charpente fût le plus mince possible ; mais les règles du
goût, plus encore que celles de la solidité, établirent entre les pleins
et les vides des proportions en dehors desquelles on tombe plus ou
moins dans la lourdeur ou la maigreur. Que la pierre fût dure ou
tendre, on s'en écarta le moins possible. J'ignore si les architectes
du Moyen-Age ont jamais pensé au fer pour former les meneaux ;
en tout cas, ils ne l'ont pas employé.
Les commotions les plus redoutables pour les meneaux étant
celles dont la direction est perpendiculaire au plan de la verrière,
on donne aux meneaux une plus grande épaisseur dans ce sens.
Mais pour éviter la lourdeur que la perspective n'eût pas manqué
de leur donner par suite de cette disposition, on amincit leur face
intérieure et extérieure en forme d'aiêle saillante, élégie de
moulures. Leur section transversale put ainsi être à peu près in-
scrite dans une losange dont le grand axe est perpendiculaire au
plan du vitrail, au lieu de l'être dans un rectangle orienté de la
même manière; on obtint alors la plus grande somme de résistance
sous la moindre section.
Je pense qu'on pourra faire de magnifiques meneaux en fonte;
mais on rencontrera de graves mécomptes toutes les fois qu'on vou-
dra profiter de la plus grande résistance relative des métaux pour
amincir outre mesure les colonnes, les meneaux , ou tous autres
supports dont tes proportions sont le fruit des longues études des
hommes de l'art, sanctionnées par les siècles. On ne pourrait
impunément s'écarter de ce principe même dans la sculpture; je
dirai plus, on ne peut pas toujours copier servilement la nature
dans l'ornementation architecturale, ni même dans les accessoires
de la statuaire. Une feuille, une draperie détachée, ne peuvent,
sans paraître maigres, être réduites à une épaisseur, je ne dirai pas
égale, mais voisine de la nature. Les feuilles des chapiteaux en
bronze de l'arc de triomphe des Tuileries, par exemple, sont ex-
cessivement maigres, parce qu'on a profité de la ténacité du métal
pour se rapprocher des proportions de la nature. On ne fait pas
les draperies d'une statue en bronze aussi minces qu'une étoffe,
quoiqu'on ne les fasse pas cependant aussi épaisses que celles en
marbre.
Depuis quelques années la manie du bon marché a enfanté les
cuivres estampés en remplacement des cuivres moulés, pour la mou-
ture des porcelaines. Quoique les proportions des premiers les rap-
prochent plus de la nature, dont les unes et les autres sont une imi-
tation, et quoique leur exécution soit quelquefois plus fine et plus
pure, ils n'en font pas moins un effet tellement mauvais que les
personnes de goût n'eu voudront jamais. Cela tient-il à l'habitude
précédemment contractée de voir les choses? Je ne le pense pas.
Cette habitude peut bien avoir quelque influence momentanée sur
les hommes accoutumés à raisonner les choses; mais si elle avait
un pouvoir absolu, il n'y aurait plus alors de règles dans les arts,
il u'y aurait pas de ligne de démarcation entre le beau et le laid.
Mais je m'aperçois un peu tard que j'ai profité de ma position
aérienne sur la flèche de la cathédrale pour me lancer dans les es-
paces imaginaires.
La construction de la flèche est aujourd'hui arrêtée à 2 mètres au-
dessous de l'encorbellement qui doit porter la lanterne supérieure
a environ 20 mètres du sommet. Cette lanterne, dont le diamètre
sera de 4 mètres, formera un délicieux belvédère, le plus élevé
peut-être de tous ceux qui existent. Il s'e1è\eraà environ I2.S mètres
au-dessus du sol. Huit grandes volutes formant l'eucorbellement
recevront les huit piliers-butants de la lanterne, taudis que huit
colonnettes intérieures soutiendront le pyramidion aigu qui cou-
vrira la lanterne et terminera la flèche. Celles-ci iwrteront la re-
tombée des arcades. De la base des piliers-butants s'élanceront huit
gargouilles, et de leur sommet des arcs-boutants s'appuieront sur
la prolongation de la flèche. Une galerie annulaire de 3" 50 dedia-
ir.ètre régnera au pourtour de la lanterne.
Au centre de la flèche s'élève une double tour ronde concentri-
que en fonte à claire-voie. Dans l'espace annulaire qui sépare les
deux tours, se développe un bel escalier en hélice aussi en fonte,
La tour extérieure forme la cage et la tour intérieure le noyau de
l'escalier. Les enrayures de la tour centrale sont en forme de rose
à jour à huit lobes. Les enrayures qui contre-butent les huit arê-
tiers de la flèche viennent s'appuyer sur le périmètre de la cage.
L'escalier se divise en trois révolutions ou étages principaux,
dont l'emmarchement diminue par retraite. La dernière révolution
qui partira de la base de la lanterne tournera autour d'un noyau
réduit à un diamètre de 15 centimètres. Cette dernière révolution
sera pour les plus hardis visiteurs qui voudront monter jusqu'aux
limites extrêmes de la flèche.
L'enveloppe extérieure de la flèche se compose de huit surfaces
découpées à jour et encadrées entre huit arêtiers. Chacun de ceux-
ci est formé par un cours de fortes pièces en fonte ornées de crosses
en forme de volutes, d'un style équivoque. Ces pièces sont reunies
entre elles, sur la hauteur, par des collets boulonnés, et doublées à
l'intérieur par une série de plaques de 50 centimètres de large, for-
mant feuillure de chaque côté de l'arêtier pour recevoir les me-
neaux à jour des faces de la pyramide.
Toutes les pièces de fonte ont été imprimées au minium. Cette
peinture se détache déjà des parties anciennes. On lui a substitué la
peinture galvanique, dont on semble plus satisfait ; mais elle n'a
pas encore subi une assez longue épreuve (l).
(1) Il serait bien i désirer qne la chimie, qui nous donne tous les Jours tant
de produits d'une utilité problématique, trouvSt un enduit inattaquable aux in-
tempéries de l'air, et qui put garantir le fer de l'oxydation pendant des siècles.
Dùt-on employer le feu pour fixer cet enduit à la surface du fer, ce ne serait
certes pas un empêchement à son application. On a bien trouvé un procédé
pour fixer un émail blanc sur des ustensiles de cuisine en fonte, pourquoi n'en
trouverait-on pas un pour la couleur de pierre, de bronze, ou toute autre
nuance? La galvanoplastie nous tirera un jour de ce mauvais pas.
M. Alavoine a fait un pas de géant dans l'art d'appliquer le fer fondu i l'ar-
chitecture monumentale. Il a senti quel immense parti nous pourrions tirer
du moulage de la fonte pour l'ornementation de nos édifices publics; mais si la
science ne nous dote d'un enduit indestructible, il faudra presque y renoncer.
Ce n'est pas que le fer exposé au grand air, même sans aucune peinture, ne
puisse se couvrir, avec le temps, d'une espèce de patine brune; mais quelle
aCTrcusc couleur! Quel parti pourrait-on en tirer pour l'elTet monumental? Il
est probable qu'on regrettera un jour, si ce n'est déjà, d'avoir fait en fonte
les belles fontaines de la place de la Concorde et des Champs-Elysées à Paris,
au lieu de les faire en bronze? La perte des dorures primitives et la couche
annuelle de peinture qu'on est obligé de leur donner auront bientôt compense
l'économie qu'on a pu faire sur la maUère. En bronze, on eût pu les faire de
moitié moins épaisses, et, partant, à peu près de moitié moins pesantes. Les
frais de modèle et de n)ain-d'œu\re étant égaux dans les deux cas, on n'eflt
donc eu que la différence du prix de la matière.
A la colonne de la grande armée, la main-d'œuvre est revenue à trts-pcu de
chose près au même prix que le bronze, c'est-à-dire à 3 francs le kilog. (Je
i'»29
RKVUK DK L'ARCHITKCTLRK KT DKS TRAVAUX PUBLICS.
km
Du point où se termine aujourd'hui la flèche, à en\ iron 1 30 mè-
tres du sol, et où l'on ne peut arriver pour le moment qu'avec une
échelle, on jouit d'un magnifique panorama. Sous ses pieds les
combles de l'église, et en avant les tours du portail, sur le sommet
desquelles, malgré la distance, la vue plonge à tel point que vous
avez peine à vous persuader que ce sont bien ces mêmes tours du
haut desquelles vous contempliez l'instant d'auparavant un peuple
de mirmidons circulant dans les rues de la ville ; ce sont les tours
elles-mêmes qui sont devenues lilliputiennes. Le regard pénètre
dans la tète découverte de la tour de Beurre comme dans un puits,
et l'on prendrait volontiers pour des insectes les corneilles qui
volent incessamment de l'une à l'autre.
Sur le premier plan, la ville, et son port couvert de nombreux
vaisseaux, dont les mâtures s'élèvent à la hauteur des muiscms.
Sur le deuxième plan, au nord, une enceinte de montagnes dis-
posées en hémic3cle dans lesquelles s'enfoncent de jolis vallons;
sur la pente des coteaux brillent, à travers de verdoyants bosquets,
de jolies villas.
Au delà du fleuve, qui semble la corde de l'arc formé par les
montagnes, on voit Saint-Sever, les vertes prairies et les villages
qui l'entourent. Cette vaste plaine est fermée à l'horizon par des
montagnes basses, couvertes de forets qui semblent s'appuyer à
droite et à gauche sur le fleuve, qui les sépare des côtes élevées do-
minant sa rive droite.
La balustrade en pierre qui entoure le comble de la nef a été
refaite en partie depuis l'incendie de 1822. L'entablement qui la
porte est fort endommagé par l'intempérie de l'air. Cet état de dé-
gradation est dû sans nul doute à l'infiltration des eaux pluviales
qui a lieu dans le joint mal fermé qui sépare le relief du chéneau
en plomb, de la base de la balustrade (l). L'eau qui s'infiltre sous le
plomb, ne pouvant s'évaporer par l'action de l'air, pénètre dans le
corps de la pierre, ce qui donne prise à la gelée. Aussi vaudrait-il
mieux ne pas garnir le chéneau et laisser couler l'eau à nu sur la
suppose qu'on ait aclieté le métal.) La niaiii-d'œuvie pour le fer doit Être la
même, ou à peu près. La valeur du fer fondu, deuxième fusion, est à celle du
bronze ;: 1 :8; nous prendrons ces deux cliifTies comme expression de la va-
leur respective des deux métaux, et nous dirons pour le bronze : main-d'œuvre
= 8 ; métal = 8, ou 8 -f 8 = 16 ; et pour le fer 8 -f 1 = 0. Mais nous avons
dit (luc le puiils du i)roiize pouvait être réduit à moitié de celui du fer, à cause
de sa plus grande ténacité; nous aurons ainsi 8 -f 4 = 12. Ainsi le fer étant
= 9 et le bronze = 12, nous aurons enfin 9 : 12 :: 3 : 1. Le prix du fer sera
donc égal aux 3/4 de celui du bronze, pour travaux tirés à un seul exemplaire,
bien entendu.
Je donne ces calculs approximatifs pour démontrer que tant que nous
ne trouverons pas une couverte indélébile pour le fer, il y aura économie mal
entendue à faire certains monuments en fonte de fer plutôt qu'en bronze. 11
faut convenir que des fontaines sont plus sujettes à la détérioration que
des objets moins exposés à l'humidité; car les colonnes lampadaires de la
place de la Concorde ont moins souffert que les fontaines.
(1) Les constructeurs anciens, non plus que la majeure partie des modernes,
ne savaient pas fermer convenablement le joint entre le bord d'un chéneau et
le mur. On se contentait de faire une rainure dans laquelle on incrustait tant
bien que mal le bord du chéneau lui-même, qui souvent était en plomb fort
épais. Au premier effet de dilatation un peu |>rononcé, le métal, en s'allon-
geant, avait bientôt brisé le chétif solin en plâtre qui calfeutrait le joint.
Il vaudrait inOniment mieux recouvrir le relief du chéneau d'une bandelette
de plomb mince, incrustée par petites parties dans une rainure étroite et pro-
fonde, et scellée avec du mastic, si c'est dans la pierre, ou bien scellée en plâtre,
li c'est dans un enduit en plâtre, en ayant soin, si l'on y met des clous, de ne
pas enfoncer leur tête jus(|u'au métal, afin de laisser un espace pour la prise
du plâtre.
pierre comme à Saint-Ouen, dont l'entablement est bien consené.
L'entablement de la cathédrale de Paris est en assez bon état, quoi-
que son chéneau ne soit pas garni. Il serait intéressant de recher-
cher l'état des entablements d'un grand nombre d'édifices du
Moyen-Age à ehéneaux garnis ou non garnis, pour s'assurer du
moyen le plus avantageux.
Lorsqu'on est entré dans la nef de la cathédrale, le premier ob-
jet qui vous saute aux yeux est le lourd jubé d'ordre ionique en
marbre blanc, qui sépare le chœur de la nef. Ce n'est pas que ce
jubé soit de mauvais goût par lui-même; mais il est eu désaccord
complet avec le reste de l'édifice. C'est cependant à la déplorable
manie de suivre la mode en architecture comme en autres choses,
que nous devons les disparates choquantes qui déprécient tant
l'architecture de la plupart de nos édifices religieux.
Je fais des vœux bien sincères pour qu'on débarrasse la cathé-
drale de Rouen de ce malencontreux hors-d'œuvre. Je me garderai
bien toutefois de dire qu'il faille l'envoyer dans les magasins du
marbrier. On pourrait très-bien l'utiliser à la décoration de quelque
salle des fastes à l'Hôtel-de-Villc ou tout autre édifice public. Quoi-
qu'il ne soit pas d'un style irréprochable, il est d'une grande ri-
chesse, et, placé à propos, il pourrait produire un très-bon effet.
Comme à Notre-Dame de Paris, les collatéraux sont percés du
côté de la nef de deux étages de grandes arcades en ogive. \ Paris,
les arcades supérieures s'ouvrent sur une galerie régnant sur toute
l'étendue du premier rang de collatéraux, et sont garnies d'une
balustrade. Mais ici les arcades du deuxième étage, aussi larges que
celles du bas, ne sont que de simples baies s'ouvrant sous le vide
des voûtes assez élevées des collatéraux, et comme elles sont sans
balustrade, elles ne font pas bien. On ne se rend pas compte de
prime abord de celte disposition peu gracieuse, et qui parait sans
motif. Mais si l'on examine la face des piliers de la nef du côté
des collatéraux, on aperçoit à chaque pilier une espèce de balcon
semi-annulaire formé par l'élargissement de la saillie du ban-
deau d'appui des arcades de l'étage supérieur. Chacun de ces bal-
cons repose sur cinq colonnettes portées par un encorbellement
placé au niveau de l'imposte des arcades inférieures. Ces saillies
ont été disposées, sans nul doute, pour communiquer d'une arcade
à l'autre en passant derrière les piliers, et font présumer que les
arcades supérieures devaient former tribune au moyen d'une ba-
lustrade, qui n'a sans doute jamais été posée. De petits culots en
bossage sur le pourtour des saillies qui contournent les piliers, de-
vaient recevoir les montants principaux de la balustrade, et une
porte percée dans le mur à côté de l'orgue devait donner entrée
aux tribunes. Je n'ai pas eu le temps de chercher à ni'assurer si
la balustrade avait existé, ce que je ne crois pas. Celte disposition
n'existe pas autour du traussept ni autour du chœur; les deux
étages d'arcades n'en font qu'un seul. H semble qu'ici le clergé,
plus ombrageux que celui de Notre-Dame de Paris, ait voulu, eu
supprimant le balcon au pourtour du chœur, empêcher les regards
indiscrets du public de pénétrer dans le sanctuaire.
Si l'on n'a pas mis de balustrade aux tribunes de la nef, en re-
vanche on en a mis une fort riche à une tribune placée derrière
l'orgue, au bas de la grande rose, dont elle masque une partie.
La chapelle qui sert de vestibule à la sacristie est fermée du
côté de l'église par une délicieuse clôture en pierre à claire-voie eu
style du XV« siècle, couronnée de clochetons et de dentelures du
meilleur goût. Des colonnettes détachées, d'une merveilleuse légè-
reté, ornent le pourtour des murs de ce gracieux vestibule. Il est
4.31
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
i*9i
fermé par une porteen fer du XV' siècle, garnie d'une très-riche ser-
rure de la même époque. Pourquoi faut-il qu'on ait obstrué cette
belle clôture d'une énorme armoire en bois qui la couvre tout en-
tière? Nous souhaitons vivement que MM. les ecclésiastiques, pro-
tecteurs naturels des édifices religieux, apportent plus de soin aies
préserver des ])rofanations de leurs sacristains.
La statue de Richard Cœur-de-Lion, découverte en 1838 sous le
pavé de la métropole, est toujours piteusement couchée au pied
du superbe monument du cardinal Georges d'Amboise. Elle semble
implorer de ce prélat magnifique une position plus honorable
dans son église.
Le transsept est à triple nef, chose assez rare, et décoré dans la
partie du sud de superbes vitraux, dont l'un est malheureusement
enfoui à moitié dans une des baraques qui obstruent cette belle
métropole ; double motif pour appeler le marteau sur ces construc-
tions parasites, qu'on ne saurait raser trop promptemcnt. Mais il
est à craindre qu'une partie de cette belle verrière ne se trouve
détruite quand on aura détaché le plâtre qui recouvre les verres
et les plombs. L'enlèvement de ces baraques rendra le jour aux
nombreuses sculptures de retour des contre-forts du portail.
Mais quittons ce beau monument, dont nous n'avons raconté que
quelques maigres épisodes, et rendons visite à l'église de Saint-
Ouen, son heureuse rivale.
H. JANNIARD, architecte.
[fji suite prochainement.)
-^>;iS?>— -»■
CBROMIQUX.
SoMMAiiiE : Lu liippodrome à Paris. — Iiiauguralion des églises Sainl-Vincenl-de-
Paul el de La Villelle. — Grand viaduc sur la Loire. — Pt'Bt.icATloN ^0CTR|.LB :
llistriirc de l'Art monumental, par M. L. Balissiér.
— Les jotn-naux quotidiens ont .innoncé dernièredient qu'un cirque
:dlaii êirc consirtilt près de I'îiic de l'Étoile, sur des proporiions im-
menses, si loulefois on les compare avec celles de nos cirques et de nos
théâtres modernes. Ce cirque, auquel on donne le nom d'Hippodrome,
doit s'élever sur les plans el sur les dimensions des amphithéâtres
;nili(|ues; il contiendra, dit-on, sept mille personnes, et servira à des
courses de chevaux et de chars, à des luîtes, à des simulacres de com-
bats, à des marches triomphales; il n'y manquerait que les bêtes cl les
gladiateurs pour en faire un cinpie romain. Cci édifice colossal devra
être bâti en deux mois! Sans refuser créance au récit des journaux,
qu'il nous soit permis de relever une erreur que plusieurs d'enire
eux ont commise. Ils se sont figura, que puisque ce nouveau cir-
quedevaii être copié sur l'antique, il serait nécessairement découvert ;
et lii-dessus, donnant l'essor à leur verve caustique, ils taisaient nom-
bre de plaisanteries fort spirituelles sur l'agrcmeui des filuies d'orage et
des coups de soleil. Ces messieurs n'onl sans douie jamais In ce vers
de Juvénal :
Et pueros indé ad veubia raptos.
ils sauraient sans cela que le Yelarium mettait la population romaine
A l'abri des coups de soleil et des orages.
— On vient d'inaugurer à Paris un des monuments les plus impor-
tants qui aient clé bâtis dans ce siècle ; nous voulons parler de l'église
Saint-Vincenl-de-Panl. Ce n'est pas que, sur plusieurs points de la
France, on n'ait déjà élevé des momnnents ijcancoup plus considé-
rables par leurs dimensions, mais il en est pou, suivant nous, qui mé-
ritent plus que celui-ci de captiver l'attention du public. Celle nouvelle
église semble marquer une ère nouvelle pour noire peinture monumen-
tale, et son aspect intérieur réfuie victorieusenieni tout ce qui a pu
être dit contre l'emploi de la couleur dans la décoration des édifices
religieux. Mais là ne se borne pas M. Hitiorffdans son œuvre; bientôt,
plusieurs parties de l'extérieur seront elles-mêmes revêtues de pein-
tures, et ceci est une tentative plus hardie encore el qui éveillera
sans doute bien des critiques. Les anciens peignaient-ils extérieu-
rement leurs édifices? Il n'est plus guère possible aujourd'hui d'en
douter; mais là n'esi point la question. S'ils l'ont fait, eux qui avaient
un goût si pur Cl si délicat , il nous est sans doute permis de croire
qu'ils avaient de bonnes raisons pour cela ; mais quand même ils ne
l'eussent point fait, serait-ce une raison pour que nous ne le fassions
pas? Qui pourrait être assez insensé pour venir fermer à l'an les che-
mins de l'avenir, et dire : « Les anciens se sont arrêtés là, vous n'irez
pas plus loinl » Alors que tout marche el progresse dans le monde phy-
sique et iniellectuel, seraii-il raisonnable de vouloir mettre obstacle au
développement de l'une des plus belles fractions de son intelligence?
Ce sont là pourtant des idées reçues et prônées quelquefois: l'exclusi-
visme, en matière d'art, n'est pas même chose si rare qu'on ne puisse
lui compter de chauds partisans et de puiss.inls champions; nous
voyons parfois, avec peine, des hommes de mérite s'égarer dans ces
fausses voies. Le domaine de l'art est vasie; chaque forme, chaque
époque peni y vivre à l'aise sans coudoyer les autres. Appliquons-nous
à la recherche du beau, plutôt que d'émousser nos armes pour con-
quérir à tel système d'art sur tel autre une prédominance imaginaire.
Nous reviendronsen détail sur l'œuvre de M. Uitiorff, dans un tra-
vail spécial sur ce sujet Nous espérons accompagner ce travail de
plusieurs gravures.
— On a aussi inauguré une nouvelle église à La Villeltc. C'est une
œuvre charmante due au talent de M. Lequeux, el dont nos lecteurs
nous sauront gré de leur donner prochainement l'élévation cl les
détails.
— Un de nos correspondants nous écrit que toute la rive gauche de
la Loire, aux environs d'Orléans, esl alarmée par suite du rétrécisse-
ment qu'ont fait subir au lit de la rivière les ingénieurs chargés de la
construction du grand viaduc du chemin de fer de Vierzon. En présence
des calamités récentes dont frémissent encore les rives de la Saône et
du Rhône, nous croyons que l'administration devrait s'émouvoir aux
plaintes des riverains de la Loire. Nous souhaitons vivement que le
fait par nous signalé provoque de la part de messieurs les ingénieurs
une justification qui dissipe les craintes des riverains alarmés.
Publication nouvelle. — il vient de paraître la première livraison
d'un livre intitulé Hittoire de l'Art monumental, par M. L. ftitissier.
Il formera un volume grand in-S" composé de 64 livraisons; le texte
renferme un grand nombre de gravures sur bois fort belles. L'étude
de l'archéologie est aujourd'hui le complément indispensable de toute
éducation artistique et littéraire, et ce livre rendra un grand service à
cette science en mettantàla portée de tous, les connaissances générales
éparses jusqu'à ce jour dans une foule de livres fort coûteux et souvent
indigestes. Remercions donc .M. Batissier, auteur déjà des£/*'men<id'Xr-
rhéologie, de ce qu'il a fait pour propager et faciliter chez nous létudc
de cette science. Nous reviendrons sur ce livre dans un article spé-
cial, et nous donnerons alors à nos lecteurs quelques spécimens des
belles gravures qu'il contient.
L'un det Rédacteurs ,
Alphonse de GALONNE.
Pahis. — Tvp. Lacrahpe et Coup., rce dahiette, 2.
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REVLI-: J>Ii LAUCHITECTUHK ET I)KS TU WMA l'I nucS.
Sainl-Jtan dt Btauvoii (Purli,
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-^jr-rt> '" i.
DEUXIÈME INSTRUCTION DU COMITE IIISTOIUQUE
DES AIITS ET MONUMENTS.
(SUITE, vo'j. roi. 2il, 289, 337 et 385 )
^68»-
CIVFLISATION CIIKETIENNE.
STii. E ■tun.t:\ i:t htyi.e uotiiiqije.
(lIAITiriK il. — OÉTAII.S KXTÉItlElRS DK l/KCLISE.
(nriTi.)
//. Les murailles d'une église sont encore percées de portes. Ces
baies, d'une autre nature que les précédentes, peuvent être pincées
soit au milieu de façades plus ou moins richement décorées, soit
ça et là sur un point quelconque du pourtour. Nous décrirons
bientôt les premières en traitant des portails : les secondes, beau-
coup moins importantes par leur masse et leur ornementation,
n'en devront pas moins être examinées avec d'autant plus de soin
(|ue, mémo dans les églises très-rustiques, il est rare qu'elles ne
présentent pas quelques parties décorées et caractéristiques.
C'est ainsi qu'il sera toujours nécessaire de constater :
I» Si elles appartiennent à la construction primitive, si elles
ont été pratiquées après coup, ou si au contraire elles ne se
trouvent pas aujourd'hui supprimées et bouchées;
2" Si la baie est pourvue d'un amortissement rectiligne ou cur-
viligne, et dans ce dernier cas quelle est la forme de l'arcade; si
c'est au contraire un rectangle à linteau ou à plate-bande; si les
angles n'en sont pas arrondis en arcs, soit complets, soit seule-
ment figurés, ou occupés par une console plus ou moins ornée;
Fiç. 218.
3° S'il y a quelque chose n remarquer sur les faces interienre on
extérieure des pieds-droits; s'ils présentent des colonnes, pilastre*
ou figures placés de front ou en retraite, et des archivoltM cor-
respondantes ; et quelle est la décoration du tympan :
4° Ce qu'il peut y avoir à dire du linteau, du pmrr miiral
quand i! existe, et enfin des battants mêmes, considérés sous le
triple rapport de la sculpture en bois, de la ferrure et de la serru-
rerie.
Nous recommanderons particulièrement l'examen de la eottp<-
des claveaux qui composent le cintre de ces portes secondaires.
quelquefois fort compliquée dans l'architectore romane et l'arcbi-
teclure orientale.
/. Ces murailles peuvent encore présenter des pierres cfaargéfs
d'inscriptions tuniulaires ou de toute autre nature, soit engagée*
dans leur masse, soit encastrées dans leur revêtement ; quelque-
fois même de véritables tombeaux placés sous leur abri. Comme,
cependant, ces derniers y sont beaucoup plus rares qu'à l'intérieur
des églises, c'est dans le chapitre suivant que nous nous réser\r-
rons d'en traiter. Quant aux inscriptions, d'autres instruction»,
que le comité se propose de publier, mettront à portée de recon-
naître, à l'inspection des caractères, I.t date de ces monument*
écrits. Nous nous contenterons d'avertir ici qu'on devra tonjour»
en prendre une copie complète (à moins que ce ne soient d'iosipii -
fiantes fondations du XVI* et du XVII* siècle, dont il ne fiiadra
donner qu'une analyse succincte), et, de plus, en relever fidèle-
ment l'empreinte par des procédés mécaniques toutes les fols
qu'ils présenteront ou quelque singularité dans la forme des ca-
ractères, ou quelque difficulté dans leur interprétation, ou quel-
que intérêt particulier dans leur texte. Il faudra encore examiner
si les pierres qui les portent ont été
t" Posées avec intention de les y graver sur place;
3» Engagées fortuitement dans la construction ainsi que cela
est arrivé le plus souvent pour celles qui sont chargées d'inscrip-
tions antiques) ;
3* Encastrées dans le revêtement pour asMrcr kor conser-
vation ;
4° Rap|>ortées après coup ;
i" r>rave«-s accideutellcment et sans préméditation, postenev;
rement à la construction.
Il serait très-long d'enumerer toutes les portions de 11 snrihee
extérieure et intérieure d'une église oà l'on peut feneontrw des
T. V. M
453
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
^36
inscriptions. Les recherches à faire sous ce rapport ne sauraient
être trop minutieuses; mais il est surtout indispensahle de noter
les cas où elles auraient été placées dans une intention marquée
d'ornementation, ainsi que cela arrive souvent dans les balus-
trades des W' et XVl" siècles, et plus anciennement au-dessous
du couronnement, en place de frise.
Relativement au sens de ces inscriptions, elles doivent être
classées en explicatives ou accidentelles. Celles-ci, qui peuvent se
rapporter à toutes sortes de faits, sont ordinairement beaucoup
moins intéressantes que les premières, dans lesquelles on rencontre
(les renseignements du plus grand prix pour l'histoire de l'édifice
et celle de l'art. On les distingue encore en chronologiques ou no-
minatives, suivant qu'elles fournisseat, soit la date de construc-
tion ou de consécration detoutou partie d'un monument religieux,
soit les noms du fondateur ou restaurateur, du pontife qui l'a
béni, de l'architecte ou de l'artiste qui a concouru à l'élever, le
réparer ou le décorer; enfin, elles peuvent être peintes, gravées,
soit en creux, soit en relief, ou incrustées.
Les mêmes soins doivent être apportés à la recherche et à la
copie exacte des portraits, écussons, emblèmes, devises, cimiers,
marques, chiffres, outils caractéristiques de certains corps de mé-
tiers, qui se rencontreront à l'extérieur ou à l'intérieur des églises,
et qui y auront été placés pareillement dans l'intention d'indiquer
quelque date, quelque nom propre de famille, de corporation,
d'artiste ou d'individu quelconque, soit qu'on ait déjà réussi ou
non à en saisir la signification.
K. Ce que nous venons de dire de la possibilité de rencontrer
des inscriptions sur toutes les portions de la surface d'une église est
encore plus applicable à l'ornementation : il n'est, eu effet, pas un
point de cette surface où la fécondité des arts du Moyen-Age n'ait
trouvé l'occasion de suspendre quelque areature, quelque orne-
ment détaché ou courant, quelque bas-relief, quehiuc statue. On
ne devra omettre aucun de ces objets, ni négliger d'y chercher les
renseignements qu'ils peuvent fournir, soit à la fixation de la date
du monument, soit à l'histoire de l'art.
Au XI« siècle, la statuaire présente deux types très-distincts :
l'un, court et rond, aussi dépourvu de noblesse que de beauté, est
évidemment le travail d'ouvriers ignorants, abandonnés à leur
libre arbitre, travaillant sous l'impulsion de l'art romain dégénéré
ou de leur grossier instinct personnel; l'autre, apporléde Constan-
tinople, où la statuaire s'était retrempée au L\« siècle, sous la do-
mination de la dynastie macédonienne. Cette influence byzantine
continua jusqu'au XII 1' siècle, par l'envoi non interrompu de re-
liquaires, de manuscrits, de galons, d'étoffes, de broderies, de
peintures, de sculptures et même d'artistes, d'agir sur l'art occi-
dental en concurrence avec ses inspirations indigènes; c'est sur-
tout dans les contrées les plus voisines de la Méditerranée qu'elle
prévalut. On la reconnaît aux proportions géométriques des figures,
aux plis comptés et parallèles des draperies, aux vêtements, qui
sont ordinairement la tunique et le manteau bordé de perles, de
galons, et renfermant des pierres précieuses enchâssées; à l'ab-
sence de perspective dans les pieds et genoux, qu'on figure très-
ouverts pour éviter la difficulté des raccourcis; aux chaus-
sures, quelquefois très-riches, toujours pointues, et suivant sou-
vent le ressaut du support ; aux yeux saillants, fendus, et retrous-
sés à leur extrémité extérieure; aux sourcils arqués, et enfin au
détail minutieux des cheveux.
Dès ce même siècle, mais surtout au XII*, survint un nouveau
type, caractérisé par l'allongement hors de toute proportion des
personnages, qui semble avoir eu pour but de leur imprimer un
caractère au-dessus de l'humanité, mais qui peut avoir été mo-
tivé par la forme étroite des emplacements destinés h les recevoir.
L'expression grave et religieuse de ces figures, la beauté souvent
exquise et la tranquillité des types, le parallélisme exact des plis
pressés dans lesquels elles sont comme emmaillottées, la fidélité et
le fini consciencieux des moindres détails, attestent qu'une main
consacrée a passé par là ; qu'elle a suivi des proportions conve-
nues, une sorte de canon dont il semble qu'il ne soit pas permis
de s'écarter. C'est à la même époque qu'on s*appli(|ua à reproduire
la ressemblance individuelle, ou portrait, sur les tombeaux, et
qu'on l'obtint par le procédé sûr et expéditifdu moulage.
Mais c'est le XI1I« siècle qui est l'époque de plus grande splen-
deur de la statuaire du Moyen-Age comme de tous ses autres arts ,
d'une soumission complète au joug de l'autorité ; celui-ci y arrive
à une liberté sage et grave, alliée à une verve admirable d'exécu-
tion, qui se manifeste dans le jet heureux, dans les poses natu-
relles, dans les plis simples et gracieux des figures, dans leur mo-
delé déjà très-bien senti, mais surtout dans l'expressioa de foi
vive, de ferveur religieuse qu'il sut alors leur imprimer et qu'il
ne retrouva plus depuis. L'habitude du moulage, récemment in-
troduite, comme nous l'avons vu, contribua probablement d'une
manière puissante à faire abandonner les types de convention des
âges précédents pour y substituer le type indigène qui règne ex-
clusivement dans lej> productions de cette épo(jue.
Dès le XIV' siècle, les plis des draperies commencent à se tour-
menter; fe grotesque, la satire antimonacale et anticléricale, a
faire invasion daus le domaine de la statuaire, qui a passé des
inspirations purement religieuses et personnellement désintéres-
sées du cloître à l'impulsion des intérêts et des passions terrestres
de l'ouvrier laïque, non encore digne du nom d'artiste. Il règne
une grande inégalité dans les ouvrages de ce siècle de transition :
les uns présentent toute la verve et tout le charme de l'âge précé-
dent ; dans quelques autres on voit poindre déjà les défauts et les
qualités de celui qui suivra, et en certaines contrées l'influence
du goût germanique aux plis collés, aux poses maniérées, aux
étoffes amples sur des figures maigres; mais là où il se montre avec
son caractère propre, ce caractère n'est plus inspiré et n'est pas
encore exact ni spirituel : les figures présentent dans leurs sur-
faces plates peu de sentiment du modelé, mais au contraire les
traces d'un travail expéditif, plutùt que le fouillé délicat du ci-
seau. Les sujets changent en même temps : ce ne sont plus ces
compositions symboliques et symétriques, remarquables par l'har-
monie des pleins et des vides, qui occupaient les tympans et les
parties lisses des portails, ni ces saints personnages inscrits dans
des arcatures, à l'imitation de celles qui existent sur certains
tombeaux antiques, ni ces nimbes de diverses formes caractéris-
tiques des siècles précédents, offrant l'image du Christ ou de Dieu
le père, entouré d'anges adorateurs, des quatre évangélistes, ou des
vieillards de l'Apocalypse. Au lieu de toutes ces physionomies con-
stamment ferventes et sérieuses, l'art, redescendu sur la terre, y
groupe de nombreux personnages appartenant à la nature vul-
gaire et n'exprimant désormais que ses passions. Un autre carac-
tère de ces compositions est qu'elles ne représentent plus que des
événements positifs, soit qu'elles en prennent le sujet dans les ré-
cits de la Bible, dans le rapprochement de l'ancienne et de la nou-
velle loi, dans les traditions de la Légende dorée, dans la vie du
437
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
438
patron de l'église ou dans les croyances consacrées relativement à
la résurrection des morts et au jugement dernier. Sans doute tous
ces sujets s'y étaient déjà montrés, mais ils n'y dominaient pas
exclusivement, et ils y étaient considérés d'un point de vue plus
- élevé.
C'est encore à cette époque que les figures grotesques ou mon-
strueuses , offrant quelque rapport avec celles que les ouvriers
du XI*-' siècle avaient souvent placées autour des églises comme
type d'une nature abâtardie par le vice et le péché , et qu'un goût
plus épuré en avait ensuite bannies, reviennent s'y montrer, non
plus cette fois dans un but moral ou purement plaisant, mais dans
une intention railleuse et satirique dirigée contre le culte lui-
même et surtout contre ses ministres.
Au XV' siècle, le sculpteur s'élève au rang d'artiste, et l'on
sent à la fois l'empreinte des prétentions de l'atelier dans les
poses et les physionomies exagérées des figures , aussi bien que
dans le jeu de plus en plus tourmenté des draperies , et le fruit
des études de ce même atelier dans l'habileté à rendre les moin-
dres détails du modelé de la chair vivante et morte, et l'expres-
sion des passions humaines. C'est surtout dans la représentation
en marbre ou en albâtre des têtes et des mains sur les tombeaux ,
ainsi que dans la composition des petites figures exécutées de
même avec des matériaux précieux que se déploya cette habileté
du XV° siècle à faire vivre et surtout à faire pleurer ses personna-
ges. Quant aux nombreuses statues dont il peupla les portails et
les piliers butants de ses églises, exécutées à la hâte par des artis-
tes secondaires, elles présentaient au contraire peu de relief et de
vie. Il faut distinguer dans cette période l'école de Charles VIII et
de Louis XII, aux figures de peu de relief, pourvues de détails
anatomiques plus marqués dans la sculpture d'ornementation ;
cette école fleurit particulièrement sur les bords de la Loire.
I^'art continua de marcher dans les mêmes voies pendant les
premières années du siècle suivant jusqu'à l'introduction de l'école
milanaise, au travail vulgaire, expéditif et maniéré, particulière-
ment dans la pose, les cheveux et les draperies de ses personna-
ges; c'est ensuite qu'arriva l'école de Michel-Ange, et que fleu-
rirent à la fois Sambin en Bourgogne, les frères Genty à Troyes,
BenvenutoCellini et Paul-Ponce Trcbati à Paris, au dessin savant,
au relief plus marqué, aux poses académiques, aux muscles et
aux traits fortement accentués. On sait avec quelle rapidité elle
étouffa la statuaire fine et svelte de Jean Goujon , et à quels dé-
plorables excès d'exagération , de maniéré dans les cheveux et les
draperies, elle se porta, avant d'être à son tour remplacée par le
goût flamand sous le règne de Henri IV.
La sculpture d'ornementation a suivi, au Moyen-Age, à peu près
les mêmes phases que l'imitation de la nature humaine; tantôt
byzantine et tantôt rustique , au X^ siècle, mais habile à produire
de grands effets par des procédés peu compliqués et par l'opposi-
tion des parties lisses avec les parties décorées; elle commença au
XII° à s'approprier, non-seulement les rinceaux , les entrelacs et
quelques autres des motifs courants les plus gracieux de l'art an-
tique, mais encore l'imitation des produits d'une nature végétale
et animale fantastique on étrangère, et jusqu'à des zodiaques ou
des calendriers; sous des architectes ecclésiasti(|ues, qui , satisfaits
de diriger la masse, abandonnaient les détails à l'inspiration de
leurs subordonnés, elle imprima une admirable variété aux chapi-
teaux, dont elle porta la décoration à son plushaut point de perfec-
tion , aux archivoltes, aux tympans et à toutes les autres portions
ornées de l'architecture romane. Le XIII' siècle fut pour elle (ii
ce n'est dans dans le chapiteau j , comme pour la statuaire, l'épo-
que ta plus brillante de tout le Moyen-Age; celle où, employant
indifféremment dans ses compositions l'ogive et le plein-cintre,
l'ornement symbolique, l'ornement exotique et l'ornement indi-
gène, elle imprima un relief plus vif, un modelé plus parfait que
par le passé à ses enroulements et à ses guirlandes. Mais bientôt
la révolution qui avait fait passer du clerc à l'architecte de pro-
fession la direction des travaux ecclésiastiques, introduisit de la
sécheresse et de la négligence dans les détails, en même temps
qu'elle fit faire à l'art du XIV' siècle un grand pas \ers l'unité
d'ornementation. C'est alors qu'arrivent les feuilles détarkées, iso-
lées et de plein relief, souvent aiguisées en longues et fioes den-
telures, et que les dais en saillie commencent -à se multiplier.
L'ornementation s'appesantit au XV' siècle sous les lignes tour-
mentées et contournées du gotlii(iuc flamboyant, sous je goiit des
tours de force et l'affectation de science, sous cette profusioD de
végétation indigène et vulgaire qu'elle fit germer de toutes les
saillies , de toutes les arêtes, de toutes les cavités, et à l'ombre de
laquelle vinrent s'abriter des légions de statues, avec leurs niches
et leurs dais. Après avoir épuisé l'imitation de la nature végétale,
la dentelle et la broderie eurent leur temps, puis les arabesques.
puis cette ornementation de la Renaissance, d'abord \i\e , fine et
légère, tant qu'elle resta fidèle a la division des parties, puis
devenue massive, exagérée et sans esprit, quand elle brisa ses li-
gnes ou força ses proportions; en général, l'alliance avec le gothi-
que abâtardi du XV* siècle, commencée sous Louis XII, se pro-
longe pendant les premières années du règne de son successeur;
c'est ensuite qu'arrive la jolie colonne de petite proportion, remar-
quable par la saillie du stylobate, par la co»iuetterie de son cha-
piteau et de son eutablement , par la variété et la finesse de sou
ornementation , que rend plus piquante le contraste des surfiMes
lisses. Malheureusement, ce brillant rameau de l'art de la Renais-
sance fut bientôt étouffé chez nous sous la réunion des parties et
les proportions exagérées des objets décorés qui en furent la suite,
aussi bien que sous les lourdes et bizarres importations des goûts
florentin et vénitien, dont le développement presque parallèle jeta
de bien plus profondes racines dans notre sol. En beaucoup d'en-
droits même ce fut sans intermédiaire que l'art passa du flam-
boyant gothique à ce que nous pourrions appeler le flaratwyant
de la Renaissance, tant ou y retrouve la même pesanteur des mas-
ses , le même abus des lignes brisées et contournées, la même pro-
fusion d'ornements et la même absence de critique dans leur choix,
le même goût pour ces porle-à-faux , ces culs-df -lampe et ces clefs-
pendantes , au moyen desquels les voûtes de nos églises semblè-
rent souvent rivaliser avec celles des cavernes a stalactites. On
peut ajouter que cette seconde dégéneration fut encore plus fâ-
cheuse que la première , puisqu'elle faussait à la fois le type chré-
tien et le type grec, et que trop souvent elle ne rachetait pas
même par le mérite et la grâce de l'exécution, les inconvenances
et les disparates d'une composition païenne et thcAlrale jusque
dans l'intérieur des églises , assemblage bâtard d'inspirations grec-
ques, romaines, florentines et vénitiennes.
Ce n'est point ici que nous traiterons de la peinture appliquée à
la représentation de la figure humaine ; ses compositions apparte- •
nant d'une manière à peu près exclusive à l'intérieur des églises ,
nous la réserverons pour le chapitre suivant. >ous ne croyons de-
voir parler maintenant de cet art quecomme appliqué à l'omemen-
i.39
ftEVUE DK LARCHIÏECTIJUK KT DES TRAVAUX PUBLICS.
UO
tation. La peinture et la mosaïque étaient arrivées dans notre cuite
avec la basilique même, et la première surtout ne cessa jamais de
concourir à la décoration des églises ; aussi trouvons nous dès le
\l' siècle les teintes plates employées pour faire valoir ou rem-
placer les reliefs, les refends substitués aux bossages, et jusqu'à
des rinceaux et autres ornements courants présentant plus ou
moins le caractère roide et anguleux de l'époque ; mais c'est au
XII' et au XIIP que la puissance et le charme, nous pourrions
presque dire le besoin pour les yeux, d'une coloration brillante et
variée, furent plus généralement sentis, et qu'elle arriva dans nos
temples comme auxiliaire, souvent môme en remplacement de la
sculpture d'ornementation, probablement par suite du contact que
les croisades avaient établi entre nos devanciers et des populations
plus méridionales chez lesquelles florissait déjà cet élément de dé-
coration. Bientôt naturalisé chez nous, il s'y combina merveilleu-
sement avec la lumière colorée de ces vitraux éclatants dont le
XIII' siècle dotait en même temps nos églises. Aussi n'y eut-il pas
seulement introduction d'une couleur brillante dans l'ornementa-
tion, mais encore quelquefois réaction de cette même couleur con-
tre la forme, réaction attestée par le plâtre appliqué sur des chapi-
teaux, sur des moulures, sur des archivoltes de l'exécution la
plus délicate , pour y substituer, au simple clair-obscur de la dé-
coration sculptée, les splendeurs d'une riche décoration peinte.
Au reste, cette préférence donnée à la couleur ne survécut pas au
contact qui l'avait importée chez nous, et l'auréole dont elle avait
ceint l'art des XII' et XIII" siècles ne brilla pas même sur celui
qui les suivit immédiatement. L'ornementation peinte ne disparut
pas de nos églises après l'abandon de ce luxe de couleurs, mais
elle y fut employée sSbrement, et cessa d'empiéter sur le domaine
de la sculpture. On devra, toutes les fois qu'on en rencontrera les
traces, en étudier avec un soin particulier les procédés, les cou-
ches successives, les motifs, les détails souvent très-fins et ti-ès-com-
pliqués, et enfin les effets plus ou moins éclatants, quand on par-
viendra à les découvrir, soit sous les repeints, soit sous le badi-
geonnage que les générations intermédiaires, et surtout la nôtre ,
ont prodigués si déplorablement pour anéantir tout vestige de cette
branche importante de l'art du Moyen-Age. Quelque modernes que
soient les repeints, il faudra examiner scrupuleusement s'ils ne
doivent pas être regardés comme une reproduction plus ou moins
fidèle de la décoration primitive : c'est ce qu'on reconnaîtra aux
motifs d'ornement qui y figurent ; toutes les fois , par exemple ,
que ce sera quelqu'une des variétés du chevron , du méandre , ou
d'autres moulures n'ayant pas survécu à l'époque de transition,
on pourra affirmer que c'est jusque-là qu'il faut remonter au moins
pour trouver la date du premier travail, dont les générations in-
termédiaires aurontrespecté la pensée dans leurs restaurations sou-
vent maladroites , mais toujours moins funestes que le badigeon-
nage.
C'est surtout à l'extérieur que la recherche de l'ornementation
peinte devra être faite avec le plus de soin , à raison des causes plus
puissantes de destruction qu'elle y aura rencontrées. Ainsi il ne
suffira pas d'explorer les couloirs et autres parties intérieures des
porches et des portails , les chapiteaux , les statues , les colonnes ,
les dais , les couronnements , il faudra encore s'assurer si les par-
ties lisses des murs , l'extérieur de l'abside et du chœur , ou toute
autre surface où sa présence n'a pas été soupçonnéejusqu'ici, n'en
renferment pas quelques vestiges, qui acquerraient alors une haute
importance pour l'histoire de l'art.
Les mêmes recherches devront s'appliquer aux incrustations,
émaux, verres, mosaïques, alternation de matériaux discolores,
tels que marbres ou briques , et en général à tout ce qui a eu pour
but d'imprimer à l'ornement un caractère polychrome. Les incrus-
tations surtout méritent une grande attention par les procédés va-
riés et souvent compliqués qui ont été employés dans leur prépa-
ration , tels que Its pâles, les mastics, enduits brillants formant
une sorte de stuccature ordinairement rouge , chargés d'ornements
dorés ou discolores présentant quelque relief. Pour recevoir ces
enduits , les surfaces lisses ont parfois été sillonnées de stries dont
il sera nécessaire de tenir note, lors même qu'elles seront restées
libres. Toute cette ornementation polychrome remonte aux mêmes
époques que la brillante ornementation peinte dont nous venons de
parler. Il est certaines contrées de la France , telles que l'Auver-
gne , par exemple , où elle a pris un plus grand développement et
forme une portion notable de l'art. C'est surtout dans les portails,
les couronnements, les absides, les faces terminales des transsepts,
qu'on en doit chercher des traces. Toutes les fois qu'on rencon-
trera un ornement en creux, tel que trèfle, quatre-feuille, œil-de-
bœuf ou autre, il faudra s'a.ssurer s'il n'a pas été rempli dans l'o-
rigine par quelque incrustation.
Nous allons maintenant reprendre chacune des grandes divi-
sions de l'église à l'exlérieur , pour indiquer sur quels points de
chacune d'elles devront plus particulièrement porteries recherches.
(La fin prochainement.)
DU CHAUFFAGE ET DE LA VENTILATION.
(*e article )
Chauffage et Ventilation des écoles et des salles d'asile.
Au nombre des salles de réunion qui ont le plus besoin de ven-
tilation, se trouvent eu première ligne les écoles et les salles d'asile.
Aux causes ordinaires de l'altération de l'air, la respiration et la
1 transpiration, vient encore se joindre dans ces endroits la mal-
: propreté des enfants. Aussi la sensation que ceux-ci éprouvent en
, entrant, l'hiver, dans les écoles chauffées au moyen des anciens
i poêles est-elle des plus désagréables ; souvent même l'absorption
kki
RKVUE I)K [/ARCHITKCTLUE KT DKS TRAVAUX PUBLICS.
Mi
de cet air insalubre compromet la santé des élèves et celle des maî-
tres. C'est donc une question grave que celle de l'assainissement
de ces localités : aussi nous allons en entretenir aujourd'hui nos
lecteurs.
M. E. Péclet, inspecteur général, qui s'est beaucoup occupé de
cette question, a fait paraître en 1.S'12 un mémoire détaillé (t) dans
lequel se trouve indiqué le système de chauffage et de ventilation
([ue nous avons appliqué depuis au chauffage des (îcolcs, avec les
améliorations que notre pratique nous a suggérées. Nous allons
donner la description du système, tel que nous l'établissons au-
jourd'hui.
Les appareils de chauffage sont des calorifères à air chaud placés
dans les salles elles-mêmes, afin de ne pas perdre leur chaleur
rayonnante.
Ils sont au nombre de deux, et posés à une extrémité de la salle,
du cote de l'estrade, pourque le maitre puisse facilement en diriger
le service.
Les tuyaux à fumée s'élèvent d'abord verticalement au-dessus
des appareils, et traversent horizontalement la salle dans toute sa
longueur, pour monter ensuite dans une cheminée en maçonnerie
construite à l'extrémité de la salle opposée aux calorifères.
Cette cheminée descend jusqu'au niveau du sol de la classe, où
elle aboutit à un coffre horizontal percé d'ouvertures qui servent
à l'évacuation de l'air de la salle.
Les calorifères sont ceux dont nous avons donné la description
dans un article précédent [col. 21 1). Us se composent d'une cloche
en fonte, garnie intérieurement, dans la partie qui forme le foyer
proprement dit, d'une garniture en briques réfractaires qui em-
pêche le métal de rougir, et d'une enveloppe en tôle, percée à la
partie supérieure de larges bouches de chaleur. C'est par ces ou-
vertures que sort l'air chaud appelé du dehors au moyen des con-
duits en briques établis sous le sol et débouchant sous les appareils.
Cet air chaud, lancé à une extrémité de la salle en grande abon-
dance, est appelé à l'autre extrémité par la cheminée de ventilation.
Le tirage y est déterminé par réchauffement de l'air, au moyen de
la chaleur perdue des tuyaux à fumée qui la traversent.
La planche 21 représente une école chauffée et ventillée suivant
le système dont nous venons de donner une idée.
La fig. 1 est une coupe longitudinale de la salle, la fig. 2 une
coupe tranversale , et la fig. 3 le plan représenté à une échelle
moindre de moitié.
A. A. Calorifères à air chaud.
a. a. Portes de chargement.
6.6. Portes par lesquelles on met sur la grille le petit bois néces-
saire àallumer le charbon, et qui servent en même temps à faciliter
le nettoyage de la grille.
ce. Portes de cendrier.
B.B. Tuyaux à fumée traversant la salle dans toute sa longueur
avant de se rendre à la cheminée de ventilation, où ils se réunissent
pour monter au milieu et s'élever au-dessus du toit.
L'extrémité du tuyau est recouverte d'un chapeau en tôle qui le
préserve de la pluie.
(1) Ce Mémoire a élé adopté en séance du Conseil royal de l'Instruction pu-
blique, qui en a volé l'impression à 1000 exemplaires, et la distribution à
MM. les recteurs des académies, à MM. les Inspecteurs cl sous-inspecteurs
primaires, et à MM. les préfets der, départements. On le trouve i la librairie
de Paul Dupont, rue de Grcneilc-Saint-Honoré, 55.
d.d. Registres placés dans les tuyaux à fumée pour régler le ti-
rage, et par suite l'activité des foyers.
E.E. Conduits pratiqués sous le sol pour l'arrivée de l'air exté-
rieur dans les calorilëres.
g.g. Ouvertures des prises d'air recouvertes de grilles en fonte,
qui les préservent de l'introduction de corps étrangers, et qui i>ont
cependant faciles à enlever pour le nettoyage des conduits.
f.f. Registres en tôle servant à régler l'admission de l'air dans
les appareils.
C. Cheminée de ventilation.
l. Chapeau en tôle préservant l'ouverture de la cheminée de la
pluie et des coups de vent.
D.D. Coffre en maçonnerie ou en bois communiquant avec la
cheminée et servant à répartir l'appel dans toute la largeur de la
salle.
t.t.t... Ouvertures percées sur la façade de ce coffre pour l'intro-
duction de l'air dans la cheminée. Ces ouvertures augmentent de
dimensions à mesure qu'elles s'éloignent de la cheminée, de ma-
nière à donner chacune passage à un égal volume d'air. Des re-
gistres en tôle à coulisse, placés devant chacune d'elles, permettent
d'obtenir aussi exactement que possible cette régularité dans la
ventilation, et de produire le chauffage sans renouvellement d'air
t.vant l'arrivée des élèves dans la classe.
h. Trappe en bois qui se meut dans des coulisses et ferme
une grande ouverture percée à la partie supérieure de la cheminée.
Cette ouverture sert, l'été, â produire une ventilation naturelle, et
l'hiver, à laisser échapper momentanément un grand volume dair
chaud quand on a fait trop de feu dans les calorifères, et que la
température de la salle est trop élevée.
Pour obtenir dans la cheminée de ventilation une plus grande
surface de chauffage et donner par conséquent une plus grande
vitesse à l'air qui la traverse pour s'échapper au dehors, il vaut
mieux ne pas réunir les tuyaux a fumée eu un seul, mais les faire
monter tous les deux séparément dans la cheminée, en les espaçant
de manière à ce qu'ils divisent la cheminée dans la longueur en trois
parties égales. Cette disposition présente encore un autre avan-
tage: c'est que les deux appareils sont complètement indépendants
l'un de l'autre , et qu'on peut n'en allumer qu'un seul quand le
temps n'est pas très-froid, ou que l'un des calorifères est en répa-
ration.
niRECTIOn DBS AFPABEILS.
Chauffage sans ventilation. — Avant l'arrivée des élèves il faut
échauffer les classes le plus promptement possible ; on tient alors
fermés les registres d'introduction de l'air dans les calorifères et
les registres de ventilation. Ou ouvre les trappes percées a la partie
inférieure des calorifères pour produire une circulation de l'air de
la salle dans les appareils. On produit alors le chauffage sans ven-
tilation et on chauffe plus promptement les salles.
Chauffage avec ventilation. — Quelque temps après rarrivéedes
enfants , il est nécessaire de produire un renouvellement d'air et
de continuer le chauffage pour maintenir l'équilibre de tempéra-
ture. On ferme alors les trappes qu'on avait maintenues ouvertes
avant la classe, et on ouvre les registres des prises d'air et les re-
gistres de ventilation, de manière à produire le chauffage avec Ten-
ti lotion.
U3.
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
U4
Ces registres permettent de régler la ventilation proportionnelle-
ment au nombre d'élèves qui sont dans la classe.
Ventilation sans chauffage. — On peut, l'été, produire la venti-
lation par l'air froid au moyen des mêmes appareils. Il suffit de
placer à la partie inférieure de la cheminée un petit foyer d'appel
(|uipourra être un réchaud, pourbrûler delà tannée, ouunebrai-
sière à poussier de chaibon de bois.
Une porte en tôle fermera l'ouverture par laquelle on introduira
le petit foyer dans la cheminée.
L'appel produit dans la cheminée par réchauffement de l'air,
aux dépens de la chaleur dégngée par le foyer d'appel , détermi-
nera un appel d'air froid par les prises d'air. Cet air traversera
l'appareil pour sortir parles bouches de chaleur, et renouvellera
l'air de là salle en se rendant à la cheminée de ventilation, par la-
quelle il s'échappera dans l'atmosphère.
RÉSULTATS DES EXPBBIENCES FAITES SUR CE MODE DE CHAUFFAGE
ET DE Ventilation.
Pour donner une idée des résultats obtenus par l'emploi de ces
appareils dans les écoles, nous citerons un ^trait d'un rapport du
docteur Béhier au Comité central de l'Instruction primaire.
« La commission dite de chauffage, nommée par le comité cen-
tral , a bien voulu me charger de constater les résultats de l'em-
ploi de l'appareil de M. René Duvoir, d'après les systèmes indiqués
par M. Péclet, pour le chauffage de l'école de la rue Neuve-Cocjue-
nard (école de garçons, M. Brunier, instituteur) d'abord, et ensuite
pour le chauffage des deux écoles de la Halle-aux-Draps.
« Ce sont ces résultats que je vous demanderai la permission de
vous exposer.
« Cet examen, selon le vœu de la commission, doit embrasser les
trois conditions du degré de chauffage obtenu, de la ventilation que
doit produire l'appareil, enfin de la quantité de combustible dé-
pensé.
<( Pour ce qui est de l'élévation de la température obtenue, elle a
toujours été satisfaisante, souvent même trop considérable momen-
tanément, surtout pour les écoles de la Halle-aux-Draps, où la di-
rection de l'appareil est encore peu habituelle, et surtout à cause
de l'élévation de la température extérieure pendant les mois qui
viennent de s'écouler. A l'école de la rue Neuve-Coquenard , la
teujpérature a toujours été de 12» 2 R. Elle s'était élevée entre 13
et 14" R., comme moyenne, aux écoles de la Halle-aux-Draps.
a L'école de la rue Neuve-Coquenard est dans des conditions de
chauffage qui rentrent dans la catégorie la plus ordinaire. Pour les
écoles de la Halle-aux-Draps, au contraire, on doit reman[uer, à
part la grandeur de ces salles, qui doit modifier la grandeur de
l'appareil ; on doit reconnaître, dis-je, que le mode de clôture de cet
établissement offrait des conditions très-défavorables : le plafond,
qui a la forme d'une voûte plein-cintre, est composé seulement de
planches recouvertes de toiles, au-dessus desquelles se trouve le
toit du bâtiment. La température a été constamment assez élevée
dans ces écoles, et même, à certains jours, trop élevée, comme je
l'ai dit.
« 11 me parait hors de doute que l'appareil, dans les deux loca-
lités où il a été employé, a été un moyen de chauffage toujours
suffisant. Le témoignage des instituteurs est formel à cet égard.
« Cette température est toujours uniformément répandue dans
les différents points de la salle. Contrairement aux autres poêles,
qui chauffent surtout les ix)ints les plus voisins, l'appareil n'est pas
sujet à ce rayonnement circonscrit. En effet, comme vous le savez.
Messieurs, les parois du calorifère lui-même sont entourées d'un
second manchon de tôle, laissant entre le foyer et lui une dislance
de plusieurs centimètres, cavité qui communique directement avec
la prise d'air extérieur; ce n'est donc pas en échauffant les cou-
ches d'air les plus rapprochées que 1 appareil agit, mais, au con-
traire, l'appel exécuté par la cheminée de ventilation attire l'air
extérieur de la prise d'air, et c'est après s'être chauffé à son passage
dans la cavité qui entoure le foyer et que circonscrit le manchon,
que cet air traverse la pièce et va se rendre dans la cheminée, par
laquelle il s'échiippe pour être remplacé par un nouvel air aussi
préalablement chauffé par l'appareil au moment de son entrée.
C'est ce passage perpétuel de l'air chauffé qui répand ainsi une
chaleur uniforme dans tous les points de la pièce. Aussi, dans les
trois établissements, des thermomètres ont été placés à trois points
différents, un à l'estrade de l'instituteur, un au milieu de l'un des
côtés de la classe, le troisième au niveau de la cheminée d'appel ;
toujours les deux derniers ont marqué la même température ; celui
de l'estrade est toujours un peu au-dessous, d'un demi-degré à peu
près, ce qui s'expliquerait soit par la présence d'un châssis voisin
dans les trois cas, soit plutôt parce que l'estrade, située, dans les
trois cas, un peu en arrière des appareils et entre eux, est moins
directement placée dans le sensdu courant d'air chaud qui s'établit.
Du reste, cette différence, sensible au thermomètre , n'est nulle-
ment appréciable comme variété de sensation.
«Dans ces deux localités, l'élévation de la température n'a
jamais été accompagnée d'altération appréciable dans l'air. Loin
d'y rencontrer cette odeur souvent pénible que présentent certaines
écoles pendant l'hiver, l'air m'a toujours paru pur et sans odeur.
C'est là l'effet de la ventilation opérée par l'appareil. Cette ventila-
tion est considérable. Dans l'école de la rue ISeuve-Cociuenard, elle
s'était élevée terme moyen à 978,36 mètres cubes par heure, ce qui,
pour cent quatre-vingts enfants de sept à dix ans, donne 5,43 mè-
tres cubes par chaque enfant pour chaque heure.
« Aux écoles de la Halle-aux-Draps, la ventilation ne peut pas
être très-rigoureusement et scientificjuement constatée. On a bien
trouvé diins la cheminée d'appel de chacjue école une ventilation
de 1 1 à 1300 mètres cubes par heure ; mais la hauteur des croisées
et leur mauvaise fermeture font qu'il s'échappe de la salle une
quantité d'air chaud assez considérable , qui diminue la vitesse
qu'on trouve dans la cheminée. Mais si l'on peut difficilement
faire l'appréciation mathématique, on peut constater pratiquement
que l'air ne porte à l'école des garçons, comme à celle des tilles,
aucune mauvaise odeur; la respiration est facile; les conditions de
salubrité me paraissent aussi complètes que possible. On conçoit
très-bien qu'un air aussi largement renouvelé soit pur et sans alté-
ration.
« La dépense de combustible, d'après les expériences faites, varie
de 20 à 2â kilogrammes de houille par jour pour l'école de la rue
Neuve-Coquenard, et de 40 à 50 kilogrammes pour chacune des
écoles de la Halle-aux-Draps. »
Les expériences faites par le docteur Béhier prouvent bien que
sous tous les rapports, élévation de température, renouvellement
de l'air et économie de combustible, nous avons satisfait à toutes
les conditions imposées
Nous pouvons encore préciser par des nombres les bons effets de
!M
REVUE DK L'AUCHirr.CTURK KT DKS TRAVAUX PUBLICS.
ii9
ce moyen (l'assainissement des écoles, en donnant les résultats '■
d'expériences faites comparativement snr la composition de l'air
pris dans les salles chaiil'rées à la manière ordinaire, et dans les
salles que nous avons ciiauffées et ventilées.
Ces expériences, faites sous les yeux de M. Dumas dans son labo-
ratoire par M . Félix Leblanc, sont décrites dans un mémoire ayant
pour titre Recherchex sur la composition de tair confiné, et inséré
dans les Annales de physique et de chimie, 3°" série, tom. X. Voici
ce qu'on lit page N du numéro de juin 1812 :
V. Salle d'asile pour l'enfance, deuxième arrondissement , rue
Neuve-Coquenard. — « L'aira étérecueilli dans une petite pièce basse
« et étouffée, dite le préau, où les enfants séjournent pendant les
« beures de récréation, surtout lorsque le temps ne permet pas la
« sortie à l'air libre. Cent seize enfants de trois à six ans, tant filles
« que garçons, séjournaient alors depuis trois heures dans cette
« pièce de 230 mètres cubes de capacité ; l'odeur qui y régnait était
« forte et désagréable, bien que la porte fût entr'ouverte et un va-
« sistas béant au plafond. L'analyse a indiqué :i millièmes d'acide
'( carbonique, et une diminution d'oxygène sensiblement propor-
« tionnelle. »
« Salle d'école primaire, deuxième arrondissement. — « Cent
« quatre-vingts garçons de sept à dix ans; séjour continu de une
« heure à cinq heures. Cette salle est la seule (1812) encore qui soit
« ventilée par les appareils construits par M. René Du voir, d'après
« le système de M. l'éclet. Pendant l'hiver, le chauffage a lieu à
« l'aide de l'air chaud amené par la ventilation. .l'ai successive-
0 ment examiné l'état de l'air vers la fin du séjour obligé des en-
« fants : 1" La ventilation étant à son maximum; 2° notabrement
affaiblie, un seul poêle fonctionnant; 3° tout moyen de ventilation
« étant interdit et la salle complètement close ; on s'est efforcé de
« se placer d'ailleurs dans des conditions semblables. »
« Ventilation complète. — « Dans le premier cas, la ventilation
« étant de 1,080 mètres cubes par heure, c'est-à-dire G mètres
« cubes environ par enfant et par heure, la quantité d'oxygène dis-
« parue dans cette atmosphère a été de IG dix-millièmes; la quan-
« tité d'acide carbonique pouvait donc s'élever au plus à deux mil-
« lièmes. Aucune odeur ne régnait dans la salle ; la respiration
« n'y était nullement gênée. Température 17°. »
« Ventilation imparfaite. — « Le volume d'air écoulé par la
« cheminée d'appel était de 837 mètres cubes par heure ; la pro-
« portion d'acide carbonique a été trouvée de 47 dix-millièmes;
« l'air était loin, on le voit, d'être ramené à son état normal. »
« Salle fermée. — « Tout étant parfaitement clos, on recueille
« l'air au bout du même nombre d'heures de séjour, et l'on trouve
« 87 dix-millièmes d'acide carbonique. L'atmosphère était lourde,
« l'instituteur se plaignait de la chaleur, et attendait avec inipa-
« tience le moment de pouvoir ouvrir les fenêtres. La température
« intérieure n'était que de 1 8". Le thermomètre extérieur marquait
« 16° ; l'air un peu agité. »
Cette comparaison nous parait décisive en faveur de l'applica-
tion de ce système, qui, partout où il a été employé, a donné les
meilleurs résultats qu'on puisse désirer sous le rapport du chauf-
fage et de la ventilation.
On peut s'en convaincre en visitant les écoles dans lesquelles il
a été établi, savoir, à Paris : l'école delà rue >enve-Coquenard ;
L'école de filles et l'école de garçons de la Halle-aux-Draps ;
Les écoles et salles d'asile de la rue du Renard-Saint-Méry ;
Celles de la rue des Ulancs-Manteaux ;
L'école supérieure de la rue Neuve-Saint-Laurent;
L'école de la rue des Brodeurs ;
Kt les autres écoles de Vaugirard, de Bercy, de Noirmoutiers, etc.
Re-^é DUVOIR.
DE L'HUMIDITÉ D.\NS LES CONSTRICTIONS ,
DES MOYENS DE L\ PRÉVENIR ET u'V REMÉDIER.
COMPLtlIEM DES AWOTATIONS UOITÉES il MÉMOIRE DE I. IÉ0\ UlDOïEI.
Nous ne saurions trop insister, comme le fait l'auteur du re-
marquable mémoire que nous avons annoté, sur la nécessité de
prendre toutes les mesures possibles pour préserver les l>Atiments
en construction de l'invasion de l'humidité. Nous le demandons,
non-seulement pour la santé des hommes et pour la conservation
des objets à leur usage, mais encore pour la conservation de quel-
ques-unes des parties constitutives des édifices eux-mêmes. Nous
citerons pour exemple les dallages en marbre des salles du Musée
des Antiques, au Louvre, qui sont dégradés par l'humidité, et
pourtant la plupart de ces dallages ne datent guère que de la fin de
l'Empire. Là belle mosaïque dont la Melpomène colossale est entou-
rée se boursoufle de toutes parts, et est menacée d'une destruc-
tion très-prochaine. Il n'y a cependant guère plus de trente ans
qu'elle existe. Qu'on la compare à celles que les Romains nous ont
laissées depuis tant de siècles, et qu'on retrouve encore en si bon
état sous le sol de nos campagnes ! Il n'y a pas lieu de douter que
la mosaïque du Musée n'ait été détériorée par l'humidité du sol,
concentrée par l'huile avec laquelle on lustre la surface de la mo-
saïque et qui s'est opposée à l'évaporation ; peut-être même est-
elle posée sur plâtre. Nous connaissons le goût des modernes pour
ce détestable moyen de scellement.
En résumé, nous dirons qu'il faut couper le mal à sa racine.
Tous les revêtements posés après coup ne font que le déplacer, et
ne sont que des palliatifs et non des remèdes.
Si, par économie, on ne voulait mettre du plomb ou du bitume
que dans les murs, voici de quelle manière nous proposerions de
l'établir d'après notre propre expérience.
Dans les rez-de-chaussée qui doivent être carrelés ou dallés sur
terre-plein ou voûte de cave, la couche de bitume doit être posée
dans les murs, à 2 ou 3 centimètres en contre-bas du dessus du
carreau. Si on la plaçait beaucoup plus bas, Ihumidite pourrait
pénétrer horizontalement du terre-plein dans l'épaisseur de la
tranche du mur comprise entre la couche de bitume et le plan du
carreau , et remonter ensuite verticalement dans le mur, à moins
qu'on ne recouvrit d'un enduit imperméable la face de cette franche.
Si, au contraire , la couche de bitume ou la feuille de plomb était
posée dans un plan plus élevé que le carreau , l'humidité du sol, ar-
rêtée dans sa marche ascensionnelle par la couche de bitume, se
répandrait latéralement, et se ferait jour dans les appartement surs
4W
RKVLE DE L'ARCHIThXÏURK KT DES TRAVAUX PUBLICS.
4i8
toute In liauteur de la tranche comprise entre le plan du carreau
et la couche du bitume (1).
(1) Nous avons observé un phénomène qui vicnl à l'appui de nos conjec-
luies.
Dans une maison de campagne où nous avons fait rapplicatlon du bitume au
Jiiveau du sol du rez-de-chaussée, dans l'épaisseur des murs seulement, se
trouve un caveau dont le dallage est de 0"' 50 en contre-bas du sol du rez-de-
chaussée, et par conséquent de la couche de bitume. La partie inférieure des
murs, construite en meulière et mortier de chaux hydraulique , avait reçu un
enduit en mortier de chaux et ciment de brique , à partir du pavé jusqu'à 0"' 30
au-dessus de la couche de bitume. L'enduit était fait depuis quatre ou cinq
uiois, quand une forte gelée, ayant pénétré dans le caveau, détruisit l'enduit
dans toute la partie comprise entre le dessous de la couche de bitume et le
pavé. La décomposition du ciment était d'autant plus complète qu'on se rap-
prochait plus de la couche de bitume; mais toute la partie de l'enduit qui se
trouvait au-dessiis de cette dernière est restée parfaitement intacte, et la ligne
de démarcation était bien tranchée suivant la couche de bitume.
Ce phénomène peut être attribué à l'action de l'humidité provenant du sol,
qui, ayant empêché la dessiccation du ciment dans la partie de mur au-dessous
de la couche de bitume, a laissé plus de prise à la gelée , tandis que l'enduit
qui dépassait la liauteur de la couche de bitume, se trouvant préservé de l'hu-
midité du sol, était suffisamment sec pour braver la gelée.
L'état de décomposition plus complet du ciment dans le voisinage de la cou-
che de bitume, qui, plus bas, pourrait être attribué i deux causes : soit i ce
que cette partie plus endommagée se trouvant plus éloignée du sol considéré
comme réservoir de chaleur relatif, pendant les grands froids, a pu être saisie
plus vigoureusement par la gelée à cause de cet éloigncment même ; soit enfin ,
ce qui nous parait assez possible, que les colonnes humides arrivant verticale-
ment du sol et horizontalement du terre-plein , c'est-à-dire dans deux direc-
tions perpendiculaires (sur l'autre face du mur le terre-plein arrivait au ni-
veau du bitume ,) se soient décomposées mutuellement en une direction dia-
gonale, comme les courants de deux rivières affluentcs, et soient venues sortir
avec abondance à l'angle formé pai' la face verticale du mur du cïveau et la
couche horizonlale de bitume.
Pour nous assurer de la réalité de ces conjectures, nous avons fait l'expérience
suivante, qui nous a paru assez intéressante pour la décrire ici.
ABCD (Fig. 2, /'/. 22) est un paralléliiiipèdc en plâtre à modeler de 0"» 12
sur 0"" 10 de section , et Om âo de hauteur, vu par une de ses faces latérales.
Il est divisé dans sa hauteur en quatre parties ou étages par quatre latnes de
plomb horizontales , dont la première EF, placée à 0" 12 au-dessus de la base
CD, occupe toute la section du solide, moins \m espace en £, de Cm 02 de
large sur toute la profondeur. La deuxième lame , Gf7, est placée à Cm 10 au-
dessus de la première, et disposée de la même manière, excepté que la solu-
tion de continuité // est placée en sens inverse. La troisième, /J,et la qua-
trième, KLy sont placées dan» le même plan et séparées par un intervalle de
Om 02 de large.
Le solide en plitre' ainsi préparé fut placé debout dans une caisse en xinc
MSOPQR, divisée dans sa longueur en deux sections; la première B.I/iV n'a-
vait que Om 02 de profondeur, tandis que l'autre, OI'QJl, s'élevait jusqu'au ni-
veau de la première lame de plomb , à O" 12 au-dessus du fond.
Par celte disposition, l'une des faces du solide en |>lâtre formait l'une des
quatre parois verticales du compartiment OPQR, et pour intercepter toute
communication entre les deux parties de la caisse, le Joint entre le solide et les
l'.arois avait été luté avec de la glaise.
Chaque compartiment fut rempli d'eau jusqu'au bord. Par cette disposition,
le solide en plâtre était censé représenter une tranche de mur assise sur un sol
humide et appuyée par une de ses faces à des terres humides.
Nous allons indiquer maintenant la marche suivie par l'infiltration des deux
nappes d'eau dans le solide.
L'humidité pénétra dans le plâtre dans deux directions perpendiculaires entre
elles. La nappe inférieure s'élevait verticalement, et la nappe latérale marchait
horizontalement en suivant la face inférieure de la feuille de plomb, comme
l'indiquent les flèches dans la figure. Le profil des deux colonnes humides for-
mait d'abord une éqiierrc i angle rentrant assez vif. Peu â peu l'angle s'arron-
dit et finit par former un quart de cercle assez régulier. Cet arrondissement
indique l'action d'un courant diagonal, résultant de la réunion des deux cou-
rants perpendiculaires. Ce courant se trouvait doué d'une plus grande vitesse
Il est essentiel pour la pose des seuils de nitinager d'avance une
entaille d'une profondeur sufïlsante à chaque baie de porte, et
(contrairement aux l(>is de la mécanique), parce qu'il se composai! de la réunion
des deux courants perpendiculaires qui lui fournissaient une somme d'humidité
plus considérable envahissant avec plus de rapidité les porcs du solide.
La vitesse du courant horizontal partant du réservoir latéral était sensible-
ment plus grande que celle du courant ascendant. (La dilTérence moyenne
était :: 32 : 27. ) Cette différence résulte de ce que le mouvement de chaque
colonne humide était soumis à l'action de deux puissances différentes. La vi-
tesse des filets de la colonne borizontalc résultait de la pression latérale du li-
quide contenu dans le réservoir supérieur, ajoutée â l'attraction capillaire, tan-
dis que la vitesse des filets de !a colonne ascendante se composait de l'attrar-
lion capillaire alTaiblie par la gravitation, qui tendait â faire redescendre les
molécules par leur propre poids.
D'un autre cdté, la marche respective des deux colonnes, très-rapide pendant
les premiers instants, se ralentit sensiblement au bout d'un quart d'heure, puis
elle suivit une progression croissante à mesure que le front de chacune dimi-
nuait, ou, autrement, â mesure que les côtés de l'angle formé par le profil des
deux colonnes décroissait. On peut attribuer ce phénomène directement à
cette décroissance ; car, à mesure que la surface du front de chaque colonnr
diminuait, le cube de chaque tranche d'une épaisseur donnée diminuait égale-
ment, et la masse d'eau fournie par les réservoirs pouvant être toujours la
même, fa vitesse des filets d'eau envahissants devait augmenter en raison in-
verse. Il y avait convergence des deux colonnes envahissantes.
Aussitôt que la colonne horizontale fut arrivée i l'extrémité E de la lame de
plomb, l'humidité jusqu'ici contenue par la face inférieure de celte lame s'é-
lança dans l'espace que lui laissait l'interruption de l'obstacle qui la contenait,
et le profilde la section humide qui tout à l'heure était un arc de cercle concave,
prit une double courbure en forme d'5qui fut bicntCt eOacée et convertie eu
une courbe unique convexe.
De ce moment l'humidité suivit une marche rayonnante dont le profil était
une sorte de quart de cercle , dont le centre se trouvait entre le milieu de la
solution de continuité de la lame de plumb EF, et la rive de cette dernière.
Ce quart de cercle s'appuyait par le bas sur le dos de la feuille de plomb, rt
par le haut â l'arête du pilier en plâtre. \
La progression était décroissante par la raison inverse des causes qui la ren-
daient croissante dans la section inférieure. A mesure que le développement des
zones envahies augmentait , leur largeur diminuait dans un temps doimè.
Mais cette largeur augmenta légèrement aussitôt que la courbe atteignit par
le haut le dessous de la feuille de plomb GH , et par le bas l'arête vcrticali-
du prisme en plâtre. De convexe qu'elle était, la courbe prit une triple cour-
bure par l'inOcxion de ses extrémités , puis elle ne forma plus qu'une seule
ligne concave. Lnfin , l'humidité franrliit le passage laissé par la feuille deplonih
GH , â peu près de la même manière qu'elle l'avait fait â celui de EF. Elle
suivit ensuite une marche analogue à celle qu'elle avait prise à partir de £ , jus-
qu'à ce qu'ayant atteint l'intervalle JK , une partie des filets humides s'y en-
gagea, tandis que lo reste se dirigea vers les points / et G.
La colonne qui franchit le passage JK décrivit alors une courbe rayonnante
un peu plus ouverte que le demi-cercle, et dont le centre se trouvait au quart
de la distance JK du côté de K. Nous penstnis que celte courbe eûtété en demi-
circonférence de cercle parfaite, si l'intervalle JK edt été très-étroit, car la
différence entre le demi-diamètre et la Oèclie d'une des courbes moyennes
était très-faible. Ici, l'attraction capillaire étant le seul générateur du mouve-
ment, la régularité de celui-ci ne pouvait être troublée que par le défaut d'ho-
mogénéité du solide.
Nous avons indiqué par des lignes courbes très-légères les contours de la
section transversale des colonnes humides mesurées dans des intervalles de
temps égaux , et par des flèches la direction de leur marche.
La vitesse fut tantOt croissante , tantOt décroissante , suivant que le dévelop-
pement du front de la colonne diminuait ou augnienlait. Mais la vitesse moyenne
fut constamment décroissante à mesure que l'eau s'élevaiL Ce n'est qu'au bout
de cinquante heures que l'humidité parvint au sommet du solide en plâtre. La
hauteur de celui-ci étant de 0™ AO, la vitesse moyeiuie verticale a donc été de
om 008 par heure; mais les di.iphragines en plomb ont beaucoup allongé la
distance réelle parcourue que nous avonsjtrouvéc de O" 50 en suivant les diago-
nales; la marche réelle a donc été de 0*" 01 en moyenne par heure.
L'eau absorbée a été d'cnviroo les S/8 du cube du solide en plâtre. Notre in-
^w
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
khO
d'enduire cette entaille de l)itume sur le fond et sur les côtés.
Nous avions oublié cette précaution à la première application ((iie
nous fimes du bitume à la base des murs. Les maçons cassèrent le
bitume pour la pose des seuils, et l'bumidité s'est élevée dans les
tableaux de toutes les portes. Elle ne s'est élevée que là.
Nous donnons dans la planche 22 deux figures, dont la première
indique la manière d'appliquer le bitume dans différents cas. La
partie à gauche représente la coupe d'un édifice dont les caves se-
raient exposées aux inondations et qu'on voudrait rendre parfaite-
ment saines.
La fondation serait établie sur un massif général de béton A ,
d'un mètre d'épaisseur au moins sous les murs, et réduit à une
épaisseur moindre sous le sol des caves. Cette diminution progres-
sive d'épaisseur aura la forme d'une voûte renversée arasée de ni-
lention était de mesurer la dépense d'eau respective de cliaque réservoir, mais
le lut en glaise laissant passer de temps en temps des fuites d'eau du réservoir
supérieur dans l'autre, nous dûmes y renoncer. L'humidité suivait une marclie
analogue sur la face opposée à celle c|ue nous avons représentée dans la figure;
mais la vitesse était moins grande ((ue dans cette dernière, ce qui fait que le
solide de révolution décrit par les zones humides, au lieu d'être une portion
de cylindre, était une portion de cône.
Nous attribuons ce défaut de parallélisme dans la marclie de l'humidité plutôt
à ce que l'iui des côtés était moins sec, qu'à la différence de densité dans la
masse du plâtre. Apres l'expérience, le prisme eu plâtre se trouva criblé de pe-
tits trous assez profonds sur la face en contact avec l'eau du réservoir latéral,
tandis que la base qui plongeait dans le réservoir inférieur se trouvait intacte.
Nous sommes porté â conclure de là qu'aussitôt que l'humidité eut passé de
l'étage inférieur du prisme ù celui au-dessus, le réservoir latéral ou supérieur
fournissait seul, on à peu près, toute l'eau absorbée par le reste de la mafse.
Les nombreux trous qui la pénètrent ont été évidemment faits par le passage
des filets d'eau qui pénétraient dans le plâtre et en ont dissous les molécules. La
mauvaise qualité du lut ne nous permit pas de vérifier cette conjecture, en me-
suiant la dépense d'eau respective des deux réservoirs.
De cette expérience, nous concluons : 1° que l'humidité, comme la chaleur,
pénètre les corps de proche en proche dans toutes les directions, et que, quelle
que soit la forme primitive du générateur, si la section de celui-ci est plus pe-
tite que l'espace à envahir, elle décrit toujours à la lonsue un solide à surface
de révolution, en supposant, bien entendu, une parfaite homogénéité entre les
parties du corps soumis â l'expérience;
2» Que l'humidilé d'un terre-plein pénètre plus vite dans le corps d'un mur
(pie celle du sol de la fondation , à intensité égale, bien entendu. Et nous ajou-
tons, par induction, qu'elle marche encore plus vile de haut eu bas que dans
le sens horizontal ;
3" Que pour empêcher rhumidilé de monter dans les mur'S, il est indispen-
sable que la couche de bitume ou la feuille de plomb placée cuire deux assises
traverse l'épaisseur entière de la masse du mur et l'enduit lui-même s'il y en a,
sous peine de voir l'humidité monter dans l'épaisseur de cet enduit comme elle
a passé en E el en II; et que toute crevasse ou solution de conliiiuilé comme
JK la laissera passer dans le corps du mur;
â» Que toutes les fois qu'on voudra assainir un étage adossé à un terre-plein,
il faudra que la face du mur du côté des terres soit revêtue d'une couverte im-
perméable ou qu'elle soil parfaitement isolée.
Nous ne donnons les résultats de cette expérience en miniature , faite â la
bâte , que pour ce qu'ils valent. Nous ne l'avons exécutée que pour nous assurer
de la validité de nos conjectures. Il faudrait qu'elle fût répétée en grand sur la
plupart des matières qui entrent dans la construction des bâtiments, telles que
mortiers , ciments , bétons , plâtre , pierres dures el tendres, maçonnerie en blo-
cage de moellon, brique ou meulière, hourdés en morlier ou plâtre, etc., dispo-
.sés dans la construction d'un bâtiment fait exprès, dont les quatre faces seraient
orientées , et où l'on ferait en sorte de rassembler le plus grand nombre de cas
possible. Il faudrait . eu beaucoup de circonstances, se servir de l'hygromètre,
du baromètre et du thermomètre. Il faudrait y consacrer au moins une année
entière en observation as.iidu« , et une grande dépense ; il n'y a guère qu'une
administration qui puisse les prendre pour son compte. »>
veau. Sur ce massif bien dressé, on établira une couche de bitume
B, dont on aura soinde recouvrir les jonctions d'un doublage en
bitume bien chaud, ou, mieux encore, dune deuxième couche gé-
nérale recouvrant exactement les joints de la première.
Quand le mur C sera élevé sur la couche de bitume , on rerou-
vrira sa face extérieure d'un enduit de bitume parfaitement son-
dé à la couche B, et protégé par un contre-mur eu brique />,
hourdé en bitume. L'enduit en bitume se prolongera sous la face
inférieure de la pierre saillante E, afin que l'humidité ne puisse
pénétrer par la.
La couche de bitume du sol des caves sera recouverte d'un mas-
sif de béton F, arasé de niveau , dont la moindre épaisseur au bas
des murs pieds-droits des voûtes sera de O" 20. Ce deuxième mas-
sif de béton est destiné à garantir la couche de bitume de tout cho<-.
et surtout à la maintenir contre la pression ascendante de l'eau
pendant l'inondation. Cettedestination explique pourquoi on donm-
plns d'épaisseur au béton supérieur au milieu de la cave qu'a celui
des cotés.
Si la profondeur des caves était très- considérable et que l'inou-
dation s'élevât très-haut (à 3 on 4 mètres an-dessus du sol , par
exemple) , il faudrait alors porter l'épaisseur du massif de béton A
à 1" 50 , et même audelà, si l'intervalle entre les murs était consi-
dérable.
Quoique l'assainissement des caves par le mn en que nous pro-
posons doive détruire, ou du moins diminuer considérablement les
chances d'humidité dans le rez-de-chaussée , nous proposons néan-
moins de placer une feuille de plomb G dans l'épaisseur du mur, et
de recouvrir le sol entier d'une couche de bitume, comme nous
l'avons indiqué dans la Fig. li , PI. 18.
La partie à'droite de la coupe , Fig. 1 , représente l'étage sou-
terrain d'une maison de ville ordinaire que l'on voudrait rendre
parfaitement sain , soit pour y faire un café ou restaurant , soit
un magasin. La couche de bitume placée sous le sol entre deux
bétons traverse toute l'épaisseur du mur et se prolonge sur la face
extérieure du mur, où elle est protégée par un conlre-mur en bri-
ques de champ dont l'arasement s'emboite dans une rainure creu-
sée dans la saillie de l'assise, au niveau du sol. Cette rainure sera
remplie de bitume à la pose de la pierre. Le sol du rez-de-chaussée
est disposé comme dans la partie à gauche, et reçoit un parquet dont
les lambourdes sont posées sur une couche générale de mortier.
La Fig. 2 représente le prisme en plâtre sur lequel a été faite
l'expérience de la marche de l'humidité.
Les flèches indiquent la direction des courants humides, et les
lignes droites ou courbes tracées sur la surface, les contours des
zones humides à chaque période de la durée de l'expérience. .\ l'é-
tage inférieur, les zones humides de forme angulaire ont été enva-
hies par période d'un quart d'heure, et les zones courbes des trois
autres étages l'ont été par période d'une heure.
H. J.\NMARD.
jrchitrctr.
T. V.
455
REVUK DE L'ARCHITECTURE ET DliS TRAVAUX PUBLICS.
456
mois dans l'ouvrage intitulé Paris sous le point de vue pittoresque
et monumental, nous ne pensions pas que la question ferait
d'assez rapides progrès pour obtenir de l'autorité des arrêts ten-
dant à des solutions sérieuses, malgré leur constitution provi-
soire.
Pour rendre plus sensibles nos fictions, et sans manquer ce-
pendant au respect que nous devons au vieux tbéàtre, nous rap-
pellerons quelquefois ses défauts, à titre de renseignements; puis,
au fur et à mesure que nous décrirons notre édifice, nous efface-
rons graduellement son aine du sol : le plan que nous mettons
sous les yeux de nos lecteurs indique lui-même ce calcul de notre
esprit.
Si j'avais pour lecteurs et pour juges tous les amateurs de l'O-
péra, mes lecteurs et mes juges seraient très-nombreux ; les uns,
liarfaitement éclairés, connaissent toute la science des mots et
tous les mots de la science; les autres préfèrent les dénomina-
tions avec toute leur simplicité française. Pour ceux-ci, que je
crois en majorité, je suiMai autant qu'il me sera possible le con-
seil du trop regrettable Charles Nodier : je reculerai devant l'abus
de la technologie; et, à l'aide de mots usuels que tous comprennent,
je tâcherai d'atteindre mon but.
J'ai parlé de fictions; mais c'est une erreur. Personne ne se
trouve plus que moi dans les réalités, car il me parait presque im-
possible de donner un plan descriptif d'un édifice sans l'avoir
jamais vu. Je ne connais ce talent qu'à l'auteur de la fantastique
ou philosophique abbaye de Thélème; ou, même encore, à l'ingé-
nieux auteur de la restitution de cette abbaye du bon plaisir. Mais
le jeune professeur qui défend du haut de sa chaire les droits de la
nationalité française en signalant le système d'attaque encore voilé
des rêveurs germains, Charles Lenormant, avec ses connaissances
variées et sa facile éloquence , peut entreprendre des lAches qui
sont autant de succès pour lui, et qui n'offriraient à nous que des
périls et des chutes. Aussi déclarons-nous avoir vu, bien vu l'édi-
fice que nous allons décrire : il a été érigé tout entier à notre plus
grande satisfaction. Essayons de mettre notre lecteur à même de
le juger.
La Pbomenade pittobesque.
Le jour où j'aperçus l'édifice pour la première fois, je venais du
bas du boulevard, du côté du temple de la Madeleine, que je pré-
férerais pouvoir appeler tout simplement l'église; j'avais parcouru,
peu d'instants auparavant, les abords des Champs-Elysées, la place
Louis XV, et j'étais sous ce charme où me laisse la vue de ce Pa-
ris, plus royal sur ce point qu'aucun des points du royal Versailles.
L'air était pur, le ciel n'avait aucun nuage, le .soleil était encore
attaché sur les flancs du sud de notre Observatoire, et fun des cô-
tés du boulevard allongeait de grandes ombres obliques jusqu'aux
pieds des façades opposées que l'astre éclairait de tous ses feux.
Entre ces rayons voilés et ces rayons lumineux, pour la première
fois, peut-être, j'oubliais, en passant devant la rue de la Paix, de
tourner mes regards vers la spirale de bronze allemand, dont la
légende a le rare mérite d'être écrite, d'un bout à l'autre, dans les
n à cet é^ard , ne trouva pas (l'autre expédient que de demander à S. IM.
u Louis XVIII une bagatelle de 487 493 fr. 14 c.
Il II n'y avait eu qu'une erreur de 1 387 495 fr. 14 c. sur des travaux évalués
« 900 000 fr., et qui se sont élevés à 2 ÎS7 495 fr. 14 c. »
Il y a de quoi dégoûter à jamais du provisoire.
termes les plus français, sans l'aide de l'Académie. J'aimais à voir
de cette ligne étendue les profils du monument nouveau que je
découvrais par gradation, cttiui me paraissait admirablement bien
placé pour ajouter a la décoration splendide de Paris, au charme
de ses effets pittoresques, et non pour être seulement compté,
comme grand nombre de nos édifices, sur le mort tableau des pro-
priétés de l'État.
Au point où en est Paris avec sa décoration pittoresque et mo-
numentale, tous les grands édifices, à peu d'exceptions près, que
l'autorité a la noble mission d'y fonder, ne doivent s'élever, selon
nous, et chacun en raison de l'utilité de sou appropriation, que sur
l;i double ligne des quais, ou sur celle de nos lioulevards. Ainsi,
malgré tous nos respects pour les actes émanés de l'esprit ({ui do-
mine l'une de nos plus libérales institutions, nous n'avons pu croire
à l'immuabilité d'une décision récente, un peu menaçante par la
forme, très-désastreuse au fond, qui eut privé l'Opéra de ses plus
vivifiants éléments. L'acte qui devait traîner l'Académie Royale
de Musique sur l'un des points les plus encombrés de la ville et
des moins propres n lui offrir les dégagements qu'imposent les be-
soins de la circulation, n'a pas résisté à la censure d'une journée
de publicité; il se trouve déjà rapporté dans les consciences, nous
n'en doutons pas : il était bien permis aux plus sages de se trom-
per, et, devant une erreur, nous n'avons pas arrêté notre édifi-
cation.
Avant de me trouver sur l'arrière du théâtre de l'Opéra-Comique,
auquel il faudra toujours reprocher de n'avoir pas eu le courage de
tourner sou visage du cùté du boulevard comme les braves du mé-
lodrame, j avais compris les principales dispositions extérieures
du nouvel Opéra. Vous voyez, lecteur, que déjà notre récit devient
de l'architectonographie... pour cette fois, passez-nous ce mot,
((ui n'est pas de notre facture, mais (lui rend fidèlement le sens de
la tâche que nous nous sommes imposée.
De là je jouis de l'effet général du monument. Il me rendait
bien raison de tout ce (|u'un peuple avancé doit tirer de la concep-
tion des édifices destinés à la décoration de ses villes. Il répondait
complètement aux seules conditions qui justifient les sacrifices
pécuniaires que la raison a mission d'offrir aux caprices de lart.
Je voyais les résultats d'un travail de l'imagination approprié aux
besoins réels de la chose publique. Il y avait là, ou, du moins, cela
me semblait tel, éclat, utilité, et parfaite harmonie avec les goûts de
la population parisienne.
Le choix d'un emplacement (lourun édifice, l'art de bien déter-
miner son assiette, sont d'une si haute importance et cela se né-
glige tant), que j'attribuais une partie de mes impressions à l'heu-
reuse position du monument.
' Il est exactement placé, je parle de sa façade et j'indique le
point central de cette façade, au point de rencontre du boulevard
Montmartre et du boulevard des Italiens, du c(')té de la rue Graniie-
Batelière, de telle sorte que ladite façade de soixante-quatre mètres
se développe symétriquement, moitié sur l'un, moitié sur l'autre
de ces boulevards, ainsi qu'on en peut juger avec le plan de
l'édifice.
Si j'ai pu apercevoir une portion de sa façade dès le boulevard
de la Madeleine, et la découvrir entièrement vers le boulevard des
Italiens, avant la post-face du.théàtre de l'Opéra-Comique, on con-
çoit que le promeneur doit se trouver dans les mêmes conditions
de développement de vues en venant du boulevard Poissonnière;
et ce sont ces développements immenses qui se présentent d'une
khi
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
US
façon si pittoresque, sous des jours si différents, qui me font dire,
après toutes les autres eonsidératious que j'ai présentées dans mon
ouvrage sur Paris, que le choix de cet emplacement, la position
inathématique de l'édifiée, sur le point que je viens de décrire,
justifient les sacrifices pécuniaires, je le répète encore une fois ,
que la raison a mission d'offrir aux caprices de l'art.
Au lecteur qui a le plan sous les yeux, il est inutile de faire re-
marquer que ce n'est pas exclusivement sur les terrains de la mai-
rie du deuxième arrondissement que s'allongent les cent vingt-trois
mètres environ qui forment la longueur du vaste parallélogramme
dans lequel sont renfermées toutes les choses dont j'ai à parler;
mais j'ai à faire remarquer, toutefois, (jne la rue Pinon, au moyen
d'une ccharpe faite aux maisons des n°^ 8 et lo, forme le prolon-
gement direct de la rue Grange-Batelière, qui a trouvé passage sur
la cour de la mairie (1) ; que l'église de la Rédemption, nouvelle-
ment créée dans le forum de la douane, se trouve séparée de
l'Opéra, ce qui est convenable, par les maisons bAties sur les
terrains de la mairie vers le sud. Ces maisons forment l'un des
cotés de la place de l'Opéra, vers l'arrière-faeade de cet édifice, où
nous avons placé les dépendances de son service.
Puisque les plâtres et les sapins de la rue Lepelletier n'ont pas
encore entièrement disparu du sol, avons-nous dit, il faut remar-
quer que le nouvel édifice ne s'étend pas sur le terrain de la salle
et du théâtre. Une de ses façades latérales seulement, eel'e tournée
vers l'ouest, passe à un mètre environ de l'angle nord-est de l'an-
cienne baraque : ce qui veut dire qu'au besoin, on peut toujours
chanter, danser, festoyer, rue Lepelletier, jusqu'au jour de la prise
de possession du nouveau monument.
Portions des terrains de la rue Piiion et de la rue Grange-Bate-
lière appartenant à la Ville, portion de l'hôtel n" 1 de cette der-
nière rue, portions des maisons n"** 2, 4, 6 et 8, je dis portions,
car il reste à chacune de ces propriétés des délaissés magnifiques
dont les propriétaires peuvent tirer le plus grand parti, ont fait les
frais de l'emplacement du nouvel Opéra et des deux rues, d'environ
quatorze mètres, qui bordent ses deux côtés.
Le sacrifice de la ville en faveur de l'Opéra se borne à l'abandon
de la loge de portier de son ancienne deuxième mairie, — dévoue-
ment aux besoins de la voie publique (2), — se manifeste par l'aban-
don d'une partie des terrains de la cour et de ceux de l'emplace-
ment des bâtiments; mais l'aliénation des grands lots b, e, d.
(1) La veille du terrain pris sur la rue Piiion, pour y bâtir dans les condi-
tions monumentales indiquées, compenserait, à peu de chose près, ce n'est
pas douteux, la valeur des deux Immeubles à démolir marqués e, f. A in-
dique l'hôtel même do la mairie; 6, c, des lots de terrains à aliéner; d indique
également une aliénation imporlaulc d'un délaissé sur la vieille rue Grange-Ba-
telière, résultant du changement de sa direction h son extréniilé de l'Ouest.
(2) Cette situation exige de moins grands sacrifices qu'on ne se l'imagine, en
raison du prix des terrains dans le quartier.
Les hôtels nos 2, !i, 8, conservent des délaissés assez considérables pour avoir
encore de grandes façades. Ils ne perdent qu'en profondeur. Le n " 2 conserve
sur le boulevard un quart de son étendue.
L'hôtel n" 0 n'a que son avenue un peu raccourcie et ne perd aucun b.1ti-
nient, aucune façade. ^
Les dispositions nouvelles, relatives à la voirie, donneraient une bien plus
grande valeur aux boutiques, qui seraient en rapport avec les côtés latéraux de
l'Opéra.
L'immeuble n" 1 ne serait lui-même enlamé qu'en partie, et des façades d'un
grand prix seraient données à ses profondeurs.
Nous ne demandons que lumières et impartialité pour l'exauicn do la quos-
lion.
sa propriété, est ce que nous appelons les compensations avec le
tour du bilton.
Je me hôte de dire que les galeries dites passages de l'Opéra
restent intactes dans cette transformation, et qu'une issue monu-
mentale, qui les met en communication avec la nouvelle rue, rem-
place le couloir infect où les potentats de l'Opéra refoulent leurs
peuples pendant livrcsse du banquet.
Et tout ce quartier de bas-fond, si mal coupé, si disgracieux,
malgré l'éclat de sa position, ne peut qu'être avivé au moyen d'ou-
vertures nouvelles, qui mettent la rue de Provence en commuDi-
cation directe avec le boulevard. Par suite de l'insuffisance de la
rue du Faubourg-Montmartre pour l'écoulement des flot» de po-
pulation qui s'y jettent du matin au soir, d'autres ouvertures de-
venues indispensables, il importe de le constater, ont été combi-
nées dans le but de les diviser utilement, comme rexi<:ent les rè-
gles d'une voirie intelligente. Ces percements ont été faits dans le
(lanc nord de la rue Grange-Batelière et dans celui des jardins de
l'hôtel d'Ogny, g, dit Aguado, qui, selon nous, aumitdù devenir la
mairie du deuxième arrondissement (l),' de telle sorte que, par la
démolition de portions de quatre maisons seulement, la rue Vi-
vienne se prolonge jusqu'à la barrière Rochechnuart.
L'enlèvement d'un cinquième bâtiment, rue du Faubourg-Mont-
martre, crée une autre rue dans l'axe de la mairie de notre projet,
et une belle architecture de plus se trouve ainsi mise en relief au
profit de tous. ^
Ces travaux, combinés avec ensemble, ont pour résultat l'amé-
lioration des voies de communication, le complet assainissement
et lembellissement monumental d'un quartier, à cet égard. Ires-
mal partagé.
Sur notre plan , ou remarque l'indication d'une nouvelle me
partant de l'angle ouest de la rue Richelieu, et aboutissant vers
l'angle des rues Vivienne et Saint-Marc, pour donner encore une
issue sur la place de la Bourse.
Cette rue, qui ne sert, en quelque sorte, qu'à la syroélrie du
plan, sera peut-être jugée impraticable. S'il y a difficulté à l'exé-
cuter, qu'on n'y pense plus : elle n'est pas indispensable pour
compléter les magnificences de la position ; mais nous croyons que
les propriétaires eux-mêmes des immeubles qu'elle traverserait
auraient intérêt à ouvrir à leurs propres frais cette nouvelle voie.
L'ExTÉBiEin.
Un théâtre d'Opéra particulièrement, un théâtre cloué au sol du
quartier actuel, dit de l'Opéra, doit s'unir par ses formes à mille
pensées de plaisirs, et là, pour toucher plus de sens, l'hannonie
(1) On ne comprendra jamais que l> ville, qui avait à cboiMr poorsa mairie,
entre l'hôtel d'Ogny et l'hOlcl d'Eichtal, ait donné ses ftriténntta à ce dernier.
qui est mal situé et qui n'olTre pas l'éleiidue nécessaire anx Iwsoiiu de celle
mairie. Là encore une de ces fausses mesures dont II sérail diflirile de jnstiirr
les motifs, surtout quand on volt sur le plan les deux graotb lois k du Jardia,
qu'elle aurait pu utilement aliéner.
Disons, Â cette occasion, i|ue notre plan était dressé, rommiiniqué coalden-
Ucllement, cl connu par conséquent, avant la dernière «ente pobiiqae de l'Mlci
Aguado. C'est depuis cette époque seulemeni que d'actifs spécalatcws oatai-
ircpris de faire des passages dans la direction niéaie des rues que no«s aioaa
tracées. Ce fait, qui enrichira les spéculateurs démontre la jostcue de ito*
observations, et puisqu'il s'agit de voies utiles à la cIrtulaUoi), rues on passades,
l'opération devait être entreprise par la tille : nous n'avons pas besoin de dé-
velopper lîos motifs; ils se comprennent suIBsamineat.
459
RKVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
4t)0
doit se trouver dans l'image, comme elle doit se trouver dans Its
sons.
Au point de vue architeetonique, l'auteur s'est proposé d'oc-
cuper par un monument splendide la place tout exceptionnelle
qu'il assigne à l'édifice. Il s'est pioposé de trouver des combinai-
sons d'effets qui répondissent à ces deux propositions : il a voulu
que les rapports entre le pittoresque et les besoins de la distribu-
tion générale fussent toujours réglés ou tempérés par la raison.
La façade principale, étendue d'environ 64 mètres, n'est
guère plus large que celle du blokaus de la rue Lepelletier.
Elle présente un composé de portiques à jour, de conditions di-
verses, accusant trois étages, encastrés dans deux pavillons, utiles
contre-forts, qui donnent h cette architecture légère, l'aplomb, le
sérieux, la fermeté, qui doivent caractériser une construction mo-
numentale. Reste à voir si le but est atteint.
Le Porche.
Celte fois, un parti qui n'est pas sans difficultés, se trouve fran-
chement abordé ; il est commandé par la nécessité. Les specta-
teurs d'élite, disent les flatteurs, qui hantent le théâtre, veulent
descendre à couvert. Un auvent, la marquise, misérable excrois-
sance qui pend sur le mur d'un édifice, perd en quelques semaines
la fraîcheur de ses peintures, et même, dans toute la coquetterie de
sa jeunesse, dénature l'œuvre de l'artiste. Donc, dans toute combi-
naison monumentale, la marquise devient impossible, et nous ne
nous souvenons de celle de la rue Lepelletier et de celles si malheu-
reusement appendues aux murs de la Madeleine, de celle encore
accrochée sur la porte principale du musée, que pour bannir leur
usage. Un second moyen, pour la descente de voiture à couvert,
a été employé dans diverses salles : quelquefois on a pratiqué
un couloir sous l'aplomb des banquettes du parterre ; mais ce cou-
loir, d'effet peu attrayant, a le manifeste inconvénient, par suite
de la disposition obligée de ses deux ouvertures, de se trouver à
l'état de violente ventilation ; et c'est à l'heure où les femmes ont
le plus à craindre cette ventilation, qu'elles en sont le plus mena-
cées. Pour descendre à couvert devant la face principale de l'édi-
fice, où l'on doit trouver son entrée principale, il fallait un porche:
ou a mis un porche.
Il est composé de neuf grandes arcades qui l'éclairent sur sa
face, 1. Deux autres arcades sont ouvertes sur ses flancs pour le'
passage des voitures, qui peuvent s'y trouver simultanément au
nombre de quatre ou cinq ; mais chaque baie, sur la face, est assez
large (S"" 25 environ) pour permettre aux voitures en queue de se
dégager les premières, si celles en tête se trouvent les dernières à
se débarrasser de leur fardeau.
Ce porche, placé en avant-corps, avec saillie de sept mètres,
supporte, à l'aplomb de ses pieds-pilastres, un autre ordre de por-
tiques à jour qui répond à un besoin d'une autre nature, 2, Hàtons-
nous de dire qu'en avant du porche une gare ou trottoir X pour
les piétons relie le boulevard Montmartre au boulevard des Ita-
liens, et ne laisse pour le passage des voitures que deux coupures.
Elles n'offrent pas plus d'inconvénients pour la sûreté des piétons et
leur repos, que lescoupures faites sur le boulevard même des Ita-
liens par les rues Laffltte et Lepelletier ; et sur le point où se trouve
fixé l'étlifice, il y a, et il y aura, moins de circulation de voitures
(c'est évident pour quiconque connaît le quartier) que vers les
autres coupures indiquées.
La Tebbasse couvbbte.
Nous n'avons pas sous notre ciel accidenté cette température
également chaude qui commande en Italie, et plus encore sous les
tropiques, des dispositions utiles aux besoins du corps, et qui sont
favorables à des combinaisons d'architecture d'un grand effet;
mais n'avons-nous pas aussi nos jours et nos nuits d'air plus pe-
sant? ne sentons-nous pas le besoin alors de combattre cette in-
commodité? et si nous devons la trouver dans un lieu de plaisirs,
pourquoi nos calculs se refuseraient-ils à priver nos sens des dou-
ceurs et du bien-être qu'ils réclament? L'architecture serait in-
firme si elle ne satisfaisait pas à tous les besoins de notre nature
infirme.
En Italie, cette construction serait une loge; en attendant que le
mot soit plus généralement compris à Paris, nous l'appelons bour-
geoisement terrasse couverte.
Mais nous n'excluons pas la poésie que nous trouvons unie à cette
combinaison architecturale.
La voyez-vous cette loge, le jour, avec ses arcs et ses pilastres
déliés, ajustés sur les arcs et les pieds-pilastres du porche, vivant
l'un et l'autre de toutes les lumières, de toutes les ombres que notre
ciel, mille fois changeant, donne à leur combinaison pittoresque?
La voyez-vous, le soir, avec son architecture découpée, dont les
pleins font ombre et dont les vides resplendissent de l'éclat des feux
qui les éclairent?... Voyez circuler dans ces vides de feu, de votre
place du boulevard, ces hommes, ces femmes aux mœurs élégantes,
que la fortune et le plaisir ont réunis, et vous aurez, vous, prome-
neur, observateur, philosophe, un spectacle ravissant. Dut cet effet
ne se produire que pendant les cent vingt jours de l'année qui nous
font craindre ou espérer de chaudes soirées, la création de cette
loge serait suffisamment justifiée; et tout directeur de l'Opéra re-
connaîtra qu'elle donne un puissant attrait de plus à son attrayant
spectacle.
Bien que très-déliés par rapport à leur écartement et à l'éléva-
tion de l'arc, les pilastres du porche, soit du premier, soit du se-
cond rang, ont une fermeté que rend plus sensible celle des lignes
de l'ornementation. Cette ornementation, entièrement étudiée pour
laisser à la loge supérieure tout l'éclat que son rang réclame, offre
une combinaison d'effets qui résulte de l'union de la sculpture et
des peintures sur la lave émaillée et de l'émail ombrant, riches
émeraudes qui doivent un jour jeter la variété de leurs feux sur les
plus riches parois de nos édifices pour y briller éternellement ,
sans altération, et nous rendre fiers de pouvoir montrer, au moyen
de ce mariage mixte de notre pierre volcanique et de deux élé-
ments artistiques d'invention nationale, des types d'architecture
splendide, plus somptueux, plus originaux, plus durables encore
que les marbres orgueilleux dressés par les Palladio et les Sca-
mozzi.
Sans développer aucune explication relative aux détails de l'or-
nementation, disons que nous voyons dans tout le parcours de la
longue ligne de l'entablement une frise où Lechesne, cet habile tail-
leur de pierre, ornemaniste de la frise de la maison dorée et des
ressauts du brillant manoir de la rue Fontaine-Saint-Georges, a
laissé l'empreinte de son ciseau facile.
Comme la raison et le goût s'unissent pour faire une règle à
l'architecte qui superpose plusieurs étages ou plusieurs ordres, de
couronner son œuvre par une importante corniche, et d'amortir.
k6\
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
«•3
sinon de supprimer, celle de tous les ordres interposés, celle du
porche est étudiée en ce sens.
L'architecture de la loge est comprise en vue de produire un
de ces effets qui tiennent simultanément de la distribution des
masses , de la combinaison des détails et de leur mise en rapport
absolu avec l'emplacement de l'édifice, c'est-à-dire avec son orien-
tation propre à déterminer les angles de lumière, sous les influences
desquels le monument doit vivre.
Est-ce un calcul toujours établi, toujours imposé, de nos jours
surtout?. . c'est ce que je ne crois pas, et, selon moi, c'est un grand
mal.
Et , de plus , toute la masse de cette architecture , sur les faces
antérieures, postérieures et latérales, car il doit y avoir unité de
vues dans toutes les parties, est encore comprise pour satisfaire à
une somme d'idées que l'on suppose plus généralement répandues
chez le peuple pour lequel on a fait l'édifice, et qui , après tout,
pourrait en solder le compte.
L'auteur s'agenouille devant le grand œuvre des Grecs, parce
qu'il est sensible à l'inappréciable pureté qui le distingue; mais il
n'a pas oublié que la France compte des génies qui l'ont dotée
d'une architecture où le sentiment et l'imagination, toujours gra-
cieusement enlacés, si l'on peut dire, donnent à mille combinai-
sons gracieuses un cachet tout national.
En s'inspirant de la pensée dont s'animaient les maîtres du
XVI' siècle, il a voulu donner à son édifice le caractère propre
à sa destination, mais il n'a pas voulu imiter ce qui pour nous
n'est pas imitable , même le théâtre dû aux munificences d'Au-
guste; il a voulu essayer d'offrir, avec des combinaisons mixtes,
différentes de celles de l'antique, et non servilement Renaissance,
un œuvre capital : sa hardiesse sera justifiée s'il a obtenu l'éclat,
la gaieté , le festoyant, la noblesse , qui doivent former le carac-
tère de cet édifice. On voit que la question est encore à l'état de
problème.
Le portique de la loge est formé d'arcades à plein-cintre , égales
en largeur à celles du porche (environ trois mètres vingt-cinq
centimètres, avons nous déjà dit), et soutenues sur de fermes pi-
lastres, ornés sur leurs quatre faces de cette lave émaillée si peu
connue , si peu appréciée par conséquent , et que nous nous
sommes efforcé de préconiser dans unautre travail , en indiquant
son origine, ses qualités, et l'emploi que les arts doivent en faire ( 1 ).
En dessinant et en ciselant ses frises, le sculpteur a pu jouer
avec les fictions mythologiques , ce qui est toujours permis et de
bon goût dans ces parties de l'ornementation j mais cette fois les
statuaires n'ont pas usé aussi largement de cette licence.
Appliquée à la grande décoration de nos édifices, la statuaire
doit avoir, enfin, une tout autre signification que toutes ces imi-
tations mortes de la vieille mythologie, si loin de notre génie na-
tional , si loin des mœurs , des besoins , des croyances de cette
époque : il y a des croyances encore. La statuaire a d'autres élé-
ments pour nous impressionner; eu disant nous, j'entends parler
des masses et non des esprits cultivés qui savent admirer dans le
sanctuaire de nos musées les chefs-d'œuvre des âges mytholo-
giques.
Depuis longtemps les muses, cette très-admirable création du
génie antique, sout tombées dans un état de vulgarité désespérant
(1) Voir Paris sous le point de vue pittoresque et monumental , cha-
pitre XXXV.
pour la dignité des doctes sœurs, si compromises par les arf hitectés
de nos théâtres, qui, faute de pouvoir les compter toutes dans un
ajustement complet, les ont désunies, ce que ne veut pas l'antique.
Celte fois, disons-nous, le ciseau de David, de Duret, de Trl-
quetti, et de leurs plus célèbres émules, a reçu mission de nous
offrir l'image des compositeurs, des poètes illustres qui ont Jeté le
plus de charme, le plus d'éclat, le plus d'hamaonie sur la scène
lyrique.
Tout l'effet de l'édifice n'est pas dans ce vaste porche , dans cette
grande loge à jour qu'il supporte hardiment , ni dans la longue
terrasse découverte qui règne au-dessus de cette loge et qu'on voU
comme celle du dessous, ornée o'arbustes et de fleurs, faisant ri-
deau de fond aux statues de marbre qui s'harmonient si bien avec
cette verdure; cet effet résulte de la grande combinaison architec-
toniquequi forme tout l'ensemble de la façade, dont l'unité n'e«t
pas brisée par lavant-corps décrit, quoique les distances diverses
d'où l'on peut apercevoir le monument doivent modifier sensi-
blement les aspects de cette architecture pittoresque.
Les jours du porche et de la loge tendent à rendre moins dur le
ressaut de cette partie de la construction , et permettent de sentir
la liaison du corps principal de l'élévation avec les deux parties de
droite et de gauche , qui forment ainsi deux pavillons en retrait
par rapport à lavant-corps.
Ces pavillons, d'au moins douze mètres de face, donnent de ta
fermeté à cet ensemble festoyant.
Ils sont là, pour ainsi dire, en contre-forts. Aucsi ne présentent-
ils, dans presque tout leur ensemble, que des murs pleins avec des
moulures et des tympans sculptés. Sur lun , on voit le génie de la
musique; sur l'autre, celui de la poésie dramatique. Dans ces con-
ditions, nous acceptons l'allégorie.
Au rez-de-chaussée, ces pavillons offrent deux principales ou-
vertures. L'une accuse une galerie latérale, 3,-ouverle dans toute
la longueur de l'édifice; l'autre accuse un péristyle, 4, sous
lequel la galerie a sou issue.
Au-dessus de la corniche du premier étage de ces pavillons se
développe un soubassement portant unattique, sans jours, avec
un large tympan couvert de lave émaillée. Sur l'un, ce sont les
trouvères et les conteurs , offrant à Charlemagne leurs tensomt et
leurs sirvcntes, éléments de l'intime union, en France, de la poésie
dramatique et lyrique ; sur l'autre , c'est Louis XIV fondant, par
son acte de concession en faveur de l'abbé Perrin et du marquis
de Sourdéac, notre Académie royale de Musique.
Les angles de cette partie des pavillons sont ornés, sur chaque
face, de cariatides demandées au talent si suave, si gracieux , si
fécond de Pradier; en cet endroit , il fallait lutter avec Jean
Goujon.
Au-dessus de la corniche supportée par les cariatides, on dis-
tingue un ajustement de figures couchées couronnant celte partie
de l'édifice.
Ces figures sont appuyées d'une part contre un cadran marquant
les heures; de l'autre, contre celui qui marque les variations du
temps. De l'une et de l'autre part, ces figures représentent le Si-
lence et l'Attention. Cette ornementation s'harmouie avec les autres
sculptures que je viens d'indiquer et sert à donner plus d'ampleur
aux pavillons.
Le socle qui porte le cadran est surmonté , «n outre , d'une ban-
nière déployée seulement les jours de représentation.
Ces deux pavillons sont reliés, dans l'étendue de la face, par une
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REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBIJCS.
46'»
galerie tomposant le ileinier étage de l'édifiée. Cet étaj;e est t-ii
retrait, à l'aplomb de l'arrière du porche et de la terrasse qui le
couronne.
Nous allons apprécier les effets de cette combinaison architecto-
rale au point de vue pittoresque et monunncntal ; nous allons ap-
précier son utilité pour les spectateurs.
Cet attique élève à' 30 mètres environ une façade dont la lon-
gueur est de C-1 mètres ; c'est un parti franc dans la composition
de l'édifice. Il fallait des hauteurs à l'intérieur; il ne s'agissait donc
pas de les dissimuler à l'extérieur. Cela n'empêche pas la surélé-
vation du toit du théâtre dans les proportions qui lui conviennent.
Cet attique est en rapport avec les quatrièmes loges fixées nu
niveau de son soubassement. Et les spectateurs de cette rangée ,
ceux de l'amphithéâtre, ceux des cinquièmes, peuvent se promener
l'été sur la terrasse découverte, placée en avant-corps , et qui sert
de toiture à la terrasse couverte du premier étage. L'attique lui-
même, intérieurement, sert de foyer aux spectateurs de ces trois
catégories de places. Plus modestes dans leur toilette, plus timides
dans leurs allures, ces spectateurs évitent en général la promenade
du grand foyer ; mais ils apprécient le délassement que procure un
vaste et sain promenoir dans nne salle de spectacle.
Au point de vue monumental et pittoresque, en attachant à ce
dernier mot le sens que je lui attribue, je reconnais qu'à partir du
pied de l'édifice, tant qu'on n'a pas atteint la distance de 1 4 mètres,
l'ensemble que forment les portiques à jour du porche, ceux de
la loge, et les statues qui chantournent la dernière ligne de cette
loge, offre un corps complet ne laissant pasà l'imagination le be-
soin de percevoir d'autres lignes sur des plans plus reculés.
Mais lorsqu'on s'éloigne davantage, les statues de marbre, qui
ont le ciel pour toile de fond , à cette distance , changent d'aspect
au fur et à mesure que l'architecture s'élève comme un rideau der-
rière leur fine silhouette, qui se dessine alors sur l'attique , avec
lequel leurs contours s'harmonient sans confusion ; et l'espace de
!) mètres qui les sépare reste toujours sensible à l'oeil. L'atti(|ue se
trouve bientôt complètement développé depuis le sommet de son
soubassement jusqu'à la flambante antéfixe qui le couronne.
Un toit voûté, bouclier d'écaillés métalliques émaillées, à croupe
arrondie sur la face antérieure, s'élève au-dessus de son large sou-
bassement, dans des proportions de hauteur assez ménagées pour
ne pas en faire un corps en disparate avec des combinaisons archi-
tectoniques systématiquement marquées par des vides nombreux.
En s'éloignant au delà de 46 mètres , le soubassement de l'attique
devient également visible , et successivement dans des proportions
de hauteur convenables à la distance où l'on est. A 100 mètres en-
viron , il est complètement découvert.
On peutconcevoir l'utilité de ces gradations d'effets pittoresques,
qui ne font rien perdre à l'architecture de son caractère monumen-
tal et de son unité.
La distance qui se trouve entre la façade de la loge et la façade
de l'attique a permis de donner à celle-ci une richesse qui ne nuit
aucunement à la splendide décoration de la loge.
Des descriptions plus détaillées à cet égard entraîneraient à de j
trop longs développements. Nous avons dû nous borner à l'indica- '
tion des masses et des principaux détails formant l'ensemble de
la distribution toute spéciale d'une façade étudiée dans ses rap- ,
ports avec les conditi^ps de sa situation pittoresque et les besoins |
de son appropriation. |
Un jeune artiste plein d'avenir, élève d'un de nos plus grands
maîtres, et qui se dévoue peut-être en assujettissant son udent re-
marquable à nos vues personnelles, M. Eugène Lambert, rendra
plus sensibles et plus appréciables, avec son facile crayon et les
trésors de son ornementation , ces calculs qui restent encore im-
palpables sous notre plume impuissante.
Les autres explications qui seront données touchant la distribu-
tion générale du plan justifieront peut-être les dispositions a indi-
(|uer et celles déjà indiquées; nous poursuivons.
Le PoiRTOUB.
Sur les côtés latéraux , au rez-de-chaussée , à travers les percées
de larges et hautes arcades , la lumière se répand abondamment
sur deux galeries ouvertes, 3, reliées en tète par un vestibule d'ar-
gle, 4, au péristyle, 5, de la face antérieure, et en queue par un
porche étiibli sur la post-face. Il n'y a donc pas solution de conti-
nuité dans l'abri ouvert en tout temps aux promeneurs qui veu-
lent circuler autour de l'édifice.
Au-<lessus de l'architrave, dans toute la longueur des faces la-
térales, des consoles supportent un balcon à balustres de pierre et
à forte saillie. Comme ornement, il anime l'aspect de ces façades;
comme utilité, pendant le mauvais temps il sert d'auvent aux
humbles, sortis du théâtre par les issues secondaires, et qui n'ont
pas d'é(|uipages plus ou moins légalement armoriés, avec licence
pour franchir la barre du grand porche. Là, on peut se jeter dis-
crètement dans un fiacre salutaire en passant sous cet abri, et bra-
ver ainsi les attaques de l'averse.
Le premier étage offre dans toute sa longueur de longues fe-
nêtres étroites et cintrées avec ornementation. Au-<lessus de l'en-
tablement qui les surmonte s'élève encore un petit étage carré,
percé de mezzanines, qui supporte lui-même un autre entablement
couronné par une galerie de balustres; c'est tout ce ([u'on peut
apercevoir de l'édifice en parcourant les rues latérales : les au-
tres parties de l'élévation se trouvent dans un profond reculement.
Cette élévation, cependant, a un caractère monumental, caries
monuments d'une grande cité ne servent pas seulement à décorer
la rue ou la place qui les contient; une ville ne se juge pas d'un
jwint de vue aussi restreint. Elle a sa grande physionomie, qu'on
apprécie des points élevés d où l'on découvre tout l'ensemble de
ses édifices. Il n'est donc pas permis, du moins pour ceux qui ont
quelque intelligence de la dignité d'un grand peuple et du soin
(ju'il doit mettre à se faire honneur de tous ses travaux, il n'est
pas permis de couvrir un monument de sa capitale comme on
couvrirait une grange.
L'ëtfige en reculement est un attique formant en quelque sorte
le soubassement du toit immense qui couvre entièrement la salle
et le théâtre. Cet attique, orné et coupé par de larges mezzanines
convenablement coordonnées, s'harraonie avec la voVite métal-
lique du toit, disposée dans toute la longueur du faite en une
vaste plate-forme, semblable, pour la disposition générale, à la
plate-forme de la belle toiture qui couvre le Thé.'itre-Français au
Palais-Royal; mais cette plate-forme est ornée dune riche balu-
strade' largement décorée, qui complète ce magnifique couronne-
ment.
La façade postérieure est développée sur une place ou fraction
de rue de Tô mètres de large. Elle fait partie des bâtiments plus
particulièrement affectés au service de l'administration. Son ar-
chitecture conserve au rez-de-chaussée les mêmes dispositions que
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M6
celle des façades latérales, les arcades à jour ; mais, au-dessus des
arcades, il n'y a plus qu'un seul étage, peu élevé même, afin que
plus de jour vienne éclairer l'itilérieur des pièces ouvertes sur la
cour de l'administration.
Pour quiconque connaît les lial)itiides des sept cents artistes ou
emploj'és divers inscrits au tableau de l'Académie Royale de Mu-
sique, pour quiconque connaît bien la nature du service de cette
vaste administration, l'utilité de la cour n'est pas douteuse ; elle
est un élément de l'ordre qu'il convient de maintenir parmi cette
active peuplade. Sans pénétrer plus avant à cette heure dans la
distribution de la partie de l'édifice consacrée à l'administration,
remarquons autour de cette cour, au rez-de-chaussée, une ga-
lerie, 6, libre à la circulation, sous, laquelle comparses et autres,
esclaves de l'heure militaire, toujours réunis à l'avance, peuvent
attendre, défendus contre l'injure du temps, que le concierge leur
ait ouvert leur loge commune. Cette galerie est d'ailleurs utile
pendant tout le cours de la journée aux divers agents du service
continuellement eu ciiculation dans l'établissement, et c'est tou-
jours en vue de rendre moins fréquents les accidents qui peuvent
résulter des caprices de notre climat, qu'un porche est également
établi vers la post-face, 7. Après minuit, par la pluie, par la neige,
il ne convient pas de faire stationner, dans une cour ou dans une
rue, les artistes énervés par les travaux de la scène, et qui atten-
dent pour rentrer au foyer domestique l'arrivée d'un équipage
payé ou à payer.
Sur plusieurs des pieds-droits que supportent des archivoltes ,
vers les faces postérieures, latérales, et particulièrement sur ceux
qu'on remarque à la base des pavillons d'angle, vers la face anté-
rieure, on a disposé des tables de marbre, encadrées sous un gril-
lage, qui servent à l'apposition des affiches de toutes les dimen-
sions, afin que ce placage, disposé avec quelque symétrie, ne fasse
pas tâche sur l'édifice.
Le Pbemieh Pas.
Le public de l'Opéra, qui forme d'innombrables catégories dont
l'appréciation donnerait matière à mille fois vingt volumes de
mille romanciers plus ou moins moralistes, ne se trouve séparé, à
certains égards, qu'en deux grandes divisions bien distinctes, à
riieure du spectacle.
La division des lions en loge. Il n'est pas de sa dignité de s'ar-
rêter à la porte pour payer: elle passe..., on la salue. — La division
(les amateurs qui traite comptant comptant avec le buraliste.
Elle offre des philosophes venus de tous les points du globe, qui
s'ébahissent, après trois heures de queue, au premier coup de com-
mandement du chef d'orchestre, sans avoir négligé de faire petite
monnaie pour l'impôt forcé des cannes et parapluies, gênante
institution, née des gourdins de Gernianicus. Le dépôt est établi
sous le vestibule d'angle, 4.
Les amateurs, cette fois, n'aurontplus àse plaindre : si on ne leur
donne pas de banc pour attendre, assis, l'heure des jouissances pro-
mises par la réclame, on leur offre du moins de longues galeries
couvertes, sous lesquelles la pluie et la boue ne les atteindront pas;
sous lesquelles, en été, ils respireront librement un air qui ne
sera pas vicié; sous lesquelles, en hiver, leurs pieds humides se-
ront séchés en les posant sur des plaques chauffées par de bien-
faisants calorifères; ainsi, le philosophe peut attendre une heure
de plus. Une heure de plus, dans la durée de la queue, c'est une
fascination pour le passant; à cette vue, il se laisse détourner de
projets antérieurs. Jl est clair qu'il y a économie pour le directeur
à bien chauffer ses plaques.
Dans toute la longueur de cette galerie, la queue se forme sur
trois rangs, entre le muret une balustrade de fera demeure, qu'il
n'est pas permis aux plus lestes d'enjamber, 8. Et pour éviter les
cris des personnes trop pressées par la fouie, d'ordinaire assez
folle, on a établi, de distance en distance, des barrières mobiles
dans l'entre-deux desquelles trente personnes sont renfermées très
à l'aise. Cette barrière, connée au poignet et a l'oeil d'un municipal,
ne s'abaisse, par un petit mouvement mécanique que le brave
tient entre les doigts, que lorsque la série qui précède a fait place,
en avançant, à la série qui la suit; de cette manière, plus de con-
fusion, et tout y gagne, même la morale.
Près de chaque barrière, il y a une porte permettant à toute per-
sonne qui serait indisposée, ou qui aurait à sortir un moment, de
s'échapper et de revenir prendre sa place, ce qui n'engendre au-
cune difficulté, ni avec le sergent de ville, ni avec les divisions du
bout de la colonne.
On arrive ainsi, sans lutte sérieuse, auprès du bureau des bil-
lets, 9, ouvert sous le vestibule d'angle, 4, de la face antérieure .
où le public qui ne s'est pas engagé derrière la balustrade de fer
peut encore circuler librement, comme s'il n'y avait pas de specta-
cle, comme s'il n'y avait, pas de foule dans l'attente.
Disons en passant que ce bureau touche à une salle, lO, où la
prudence administrative maintient pendant le spectacle son es-
couade de sûreté, convenablement placée hors de tout contact Inu-
tile avec les spectateurs paisibles : elle ne doit devenir apparente
qu'au moment du danger.
Avec son billet pris, l'amateur entre dans une voie toute tracée,
où nous le suivrons pour connaître ses impressions et recueillir
des notes fort exactes.
Voilà beaucoup de temps passé a l'examen de l'extérieur, a
l'inspection minutieuse des précautions prises pour rendre agréa-
bles tous les abords du théâtre ; mais nous avons à dire encors
quelques mots des précautions prises pour combattre avec succès
les habitudes d'un public qui souille, avec impudeur et sans façon,
le pied des édifices, et plus particulièrement celui de toutes les
salles de spectacle. A Paris, le théâtre des Variétés, place sur le
boulevard , est le seul préservé du mal : cette exception prouve
combien il est facile de le prévenir.
Des bornes, convenablement élevées, dont le pied est baigné
par un bassin d'eau toujours vive, sont placées le long du trot-
toir, contre le pied-droit de chaque arcade des galeries latérales;
— leur forme carrée, avec moulures à très-forte saillie sur chacun
de leurs angles, les rend parfaitement utiles au service que la dé-
cence leur réclame. Il serait difficile de demander davantage, d'ob-
tenir davantage.
Là encore la lave émaillée, déjà utilisée a\ec avantage à cet
égard, sert tout à la fois à la propreté et à la décoration.
Dès que le prix du billet d'entrée est soldé, le garde municipal
de planton contre la chatière du buraliste invite à passer vive-
ment dans le grand vestibule.
Cette espèce de salle des pas-perdus, i, d'environ lO mètres de
large sur 40 de long, à voûte un peu surbaissée, avec arêtes de
cloitre, s'appuie sur les pieds-droits qui séparent les vingt-deux ar-
cades qui forment son ensemble.
En raison de sa position, ce vestibule, à l'heure du spectacle.
1. V. 30
'1.67
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est toujours éclairé, été comme hiver, par la lumière artificielle,
ce premier agent des illusions du théâtre, et qui, là, jaillit de vingt
candélabres.
L'esprit d'ordre qui a réglementé le mouvement de la foule, pour
la prise des billets, est encore très- significatif en cet endroit.
On n'y voit plus ni gardes municipaux, ni sergents de ville, qui
fout si bien nu dehors, mais dont l'aspect est trop sévère pour l'In-
térieur : on les laisse aux abords du porche, dont ils ont la police
à très-juste titre. Là, on voit seulement des sergents de l'Académie
Royale de Musique, et c'est tout autre chose.
Ils sont vêtus d'un beau costume, et chargés de maintenir le
silence dans cette station, dont l'utilité est bien plus vivement sen-
tie au moment de la sortie, puisque c'est là que [actionnent éveil-
lés, à moins qu'ils ne sachent dormir debout, les gens voués aux
dignes de la terre. Si ces gens n'ont pas tous la jouissance d'un
siège, on leur a du moins assuré à tous celle des calorifères, quand
il y a lieu.
Trois issues, au centre du vestibule, fermées seulement par des
portes battantes, rendent facile l'accès de la salle au public venu
de droite et de gauche par les galeries latérales, et à celui venu par
les porches ; ces portes sont gardées par des suisses, avec halle-
barde, magnifiquement habillés, et de fort bonne mine.
Quatre braves vétérans, de haute stature, à moustaches grison-
nantes, payés et vêtus à l'heure, font leg frais de cette représen-
tation.
Des jeunes gens à la livrée de l'Opéra, — toutle monde a livrée, —
ont mission d'ouvrir les portières des voitures enfilées sous le por-
che, fiacres ou modestes équipages privés d'un laquais, afin de leur
éviter le secours, assez suspect, des ouvreurs officieux, qui n'ont
pas toujours en partage la politesse et la propreté.
L'Intéeiedb.
Avant de passer entre les suisses, il est à propos de rappeler, ou
d'apprendre à ceux qui l'ignorent, que toutes les parties de la dis-
tribution, du côté de la salle, doivent rester dans des conditions
secondaires relativement à cette salle, malgré la magnificence rela-
tive qu'on peut leur donner; c'est-à-dire que la salle, étant la
partie principale de l'édifice, aucune autre partie, soit vestibule,
soit escalier, soit foyer, ne doit pas, par suite d'imprudentes com-
binaisons, amoindrir feffet, le grand effet, que doit produire la
salle proprement dite.
Il y a des théâtres où la sévérité des vestibules, des escaliers et
du foyer, laissent, malgré de grandes qualités architectoniques, le
publie se refroidir avant d'avoir vu la scène.
Il y a de beaux théâtres où l'ennui est incrusté sur le marbre et
la pierre qui les onient. C'est que tout, dans cette importante com-
binaison, doit avoir des proportions affectées, pour ainsi dire, aux
sens du public. Nous ne parlerons pas de règles ; en architecture,
il vaut mieux les sentir que de les définir; mais nous dirons que
ces proportions doivent être déterminées par une parfaite connais-
sance des besoins réels et non imaginaires, par une connaissance
de la disposition d'esprit la plus générale, sous l'empire de laquelle
se trouve conduite la masse du public qui hante le spectacle ; nous
dirons qu'il faut bien connaitre la propriété de chacune des parties
de l'édifice, et l'usage que l'administration, que le public en font;
mais il ne s'agit pas, là, d'aller jamais contre les impressions de la
foule : il faut, au contraire, s'en rendre l'esclave.
Il faut, dans une salle de spectacle, que le public se trouve,
avant tout, entendons-nous bien, gaiement et commodément logé.
L'abus de dispositions affectant de trop grandes vues monumen-
tales, quand il ne faut les développer que d'une manière toute con-
ditionnelle, pourrait produire sur l'esprit du public l'impression
contraire à celle signalée. Voyons si ces principes ont eu quelque
application dans l'édifice que nous décrivons.
J'ai foulé le pavé de bois du porche et des rues qui entourent
l'Opéra; j'ai foulé les dalles de liais du premier vestibule; j'ai
passé entre les suisses immobiles, et je suis sur les dalles de marbre
du deuxième vestibule, il.
Là, on ne peut avoir de fâcheuse méprise, et demander l'échange
de sa contremarque à un abonné courtier-marron. Le chef du con-
trôle, homme grave, vêtu comme un notaire, est assis au milieu du
sauctuaire, sur un siège élevé d'où son œil d'aigle aperçoit et juge
tout d'un seul regard ; et les changeurs, divises autour de leur chef,
pour recevoir ses inspirations, sont distingués du public par un
surtout de couleur voyante, qui n'est pas une livrée, et qui leur
sied à merveille.
Si l'on court au parterre, on aperçoit facilement une des deux
voûtes, qui portent une inscription significative, 1 2 : ce sont les deux
premières ouvertures que l'un distingue à droite et à gauche. Après
avoir parcouru seulement cinq mètres de plain-pied, on trouve, au
premier retour d'équerre, un escalier à rampe droite, de quatre mètres
de large, aboutissant à l'entrée de ce parterre, 13, et l'on peut
remarquer d'utiles précautions prises pour assurer la prompte et
facile évacuation.
Eu sortant par les grandes issues du parterre adhérentes au
palier en forme de mitre, 13, qu'on reconnaît sur le plan, le pu-
blic descend le large escalier par lequel il est monté; mais, par-
venu au pied de cet escalier à rampe droite et de peu d'élévation,
au lieu de repasser sous la voûte, 12, qui le rejetterait dans le
vestibule, 10, par où doit circuler la presque totalité de la foule
descendue des étages supérieure, il passe, lui, devant une grille
qui lui intercepte le passiige dans ce moiueut, et, sans aucun
détour, il arrive directement par une sortie non indiquée sur le
plan, mais que l'examen fait comprendre, sous le grand vestibule,
vis-à-vis la deuxième arcade, en rapport direct, de chaque côté,
avec la deuxième arcade de la façade du porche.
De là, ce même public peut, sans cohue, sans gène aucune, se
répandre sous les vestibules d'angles, sous les galeries du pour-
tour, et gagner les rues, les passages qui lui conviennent.
Incidemment, avant de quitter le parterre, puisque nous parlons
des choses quand nous les rencontrons, sans nous détourner pour
les aller chercher, disons que, pour rendre plus agréable aux ha-
bitués de cette section des places la fréquentation de toutes les
parties de la salle, où le public doit être admis sans exclusion,
sans exception, une autre issue a été ménagée sur le même
palier 13 déjà indiqué. Cette issue met le parterre eu communi-
cation directe avec un autre palier 14, d'où il peut gagner, soit
le grand escalier 14 de communication de tous les rangs de
places, soit le grand escalier d'apparat, qui seront l'un et l'autre
décrits ultérieurement, mais au moyen desquels on peut, en sor-
tant du parterre, atteindre, par des voies convenables et agréa-
bles, et non par des couloirs et des escaliers en casse-cou, les
foyers, la grande loge, les grands corridors.
Dégagés du parterre, dont la constitution exige, pour ainsi dire,
des exceptions dans la distribution de toute salle de spectacle ,
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REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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voire même dans celle de l'Opéra, nous voilà ramenés sous le pé-
ristyle pour voir la foule monter le grand escalier d'apparat, et pour
la suivre bientôt, d'étage en étage, gravissant les marches des
grands escaliers de communication, redescendant, remontant et
redescendant encore.
Les Escaliers.
Dans la distribution générale d'une salle de spectacle, et d'une
salle d'Opéra particulièrement, les escaliers ont une importance
de premier ordre.
Les diverses constructions de salles que l'on connaît ii'offrent
peut-être pas, à cet égard , l'application d'un système qui réponde
parfaitement aux conditions de cette partie du service. Nous de-
vons le penser , puisque nous voyons sans cesse des projets où
chacun apporte des idées différentes les unes des autres, en ce qui
touche les moyens défaire disparaître facilement et promptement
la foule de l'intérieur d'une salle de spectacle.
Si les escaliers sont bien disposés pour la sortie, ils le sont bien
pour l'entrée. Convenablement disposés pour l'entrée, ils ne le sont
pas toujours bien pour la sortie. Faute d'avoir distingué ces deux
conditions différentes, on a souvent commis de graves erreurs de
distribution dans cette partie d'étude architectonique. Si nous
avons pris quelquefois plaisir à observer les exigences de la foule
dans ce grand vaisseau qu'on appelle l'Opéra, il n'en est pas qui
aient plus constamment fixé notre attention que celles manifestées
pendant la descente et la sortie.
L'intérêt de l'observation a produit des réflexions, et les ré-
flexions nous ont fait pencher pour un système.
Il en est un, qui n'est pas le nôtre, que nous voyons et que nous
avons vu préconiser; les séductions qu'il offre dissimulent trop
ses dangers. Nous essaierons d'arracher le voile doré qui les cou-
vre ; nous essaierons de lui opposer les avantages que nous croyons
attachés à celui (jue nous adoptons.
Souvent et longtemps nous avons cherché la meilleure combi-
naison applicable pour cette partie essentielle de la distribution.
Nous avons reconnu, et tout le monde à cet égard sera de notre
avis, qu'il ne devait jamais être question des escaliers tournants;
mais serons-nous de l'avis de tout le monde en affirmant que pour
tous les escaliers du public, les escaliers a rampe droite, à fré-
(jueuls re|)os et à retour d'équerre , sont à tous égards, et dans
toutes les circonstances, les préférables, préférables à ceux compris
entre deux murs parallèles ?
Ce n'est pas d'aujourd'hui que l'on connaît les escaliers droits
de cette sorte , descendant du faite à la base d'un édifice et offrant
des paliers ou repos à chaque division d'étages.
L'escalier d'honneur du Luxembourg est fait ainsi, et nous sa-
vons tous que le théâtre antique d'Herculanum possédait des esca-
liers combinés dans ce système, bien que les deux murs affectas-
sent la ligne circulaire de l'amphithéâtre, ce qui, selon nous,
n'ajoute rien aux qualités ou aux défauts du système , en tant
qu'on voudrait en faire l'application à nos théâtres ; la chose
n'est donc pas nouvelle.
Avec ce système appliqué aune salled'Opera, le spectateur, prêt
à descendre de l'étage des cin(iuièmes, peut voir le spectateur sorti
du rez-de-chaussée, arrêté au bas de l'escalier, quand son pied, à
lui, reste encore sur la dernière marche, un peu plus près du pa-
radis.
Les promoteurs de ce système, que j'ai le regret de combattre,
car il y en a qui sont gens de grand talent, lui trouvent un im-
mense avantage pour faciliter l'écoulement de la foule dans le cas
d'un incendie du théâtre, événement pres(|ue impossible, pendant
les représentations, dans un théâtre construit avec des précautions
convenables.
Mais c'estavec la prévision de ce danger qu'il faut les combattre.
Quel est l'effet de cette disposition t On crie... Au feu ! — Les
femmes, jeunes et vieilles, — il y en a de cette série à cette heure-là,
— les hommes, jeunes et v ieux , n'ont qu'un but, c'est la sortie ! Il y
aurait des exceptions peut-être nombreuses , mais enfin la masse
effrayée serait bientôt sur ses paliers respectifs, et couvrirait
comme un essaim cette longue échelle, chargée siibilcraent de mille
spectateurs. Ce chiffre n'a pas d'exagération.
Si les plus pressés de descendre étaient au paradis, transformé tout
d'un coup en enfer par l'effet de ces métamorphoses si familières
à l'Opéra , que feraient-ils?... Comptant sur la force de leurs jar-
rets, sur celle de leurs poignets, ils se précipiteraient comme une
avalanche. Les plus faibles , les plus délicats s'affaisseraient; étouf-
fées, les femmes ainsi torturées jetteraient leur dernier soupir; et la
dernière porte, celle au bas de l'échelle, encombrée de morts et
de mourants, ne serait plus dégagée que pour pourvoir à de lamen-
tables funérailles.
Avec des escaliers fractionnés par étage , avec de nombreux pa-
liers et de fréquents retours d'équerre, la foule des étages supérieur»
n'est pas moins empressée que dans les conditions précédentes;
mais elle trouve, dans celles-ci, de continuelles barrières qui l'em-
pêchent de concevoir la pensée de se lancer comme un jet du haut
en bas. Ces obstacles, ainsi répétés, permettent à ceux dont la rai-
son a plus de puissance, de se retirer à l'écart au moyen des issues
que l'on retrouve à chacun des retours d'équerre, et par lesquelles il
faut inévitablement s'échapper. La foule, après un premier moment
de panique, cède aux influences de la sagesse; elle devient d'autant
moins dangereuse qu'elle est considérablement divisée; le calme
se rétablit, et l'écoulement complet se fait alors sans accident.
Mais au théâtre d'Herculanum comment aurait-on fait? nous
dira-t-on. Les anciens n'avaient pas de chandelle pour jouer la co-
médie; le ga/. n'éclairait pas le masque de leurs tragédiens; dans
leur spectacle en plein soleil il n'y avait donc pas de motif pour
crier... Au feu!... hors le jour où Herculanum, son théâtre, la
\ ille entière étouffa sous les cendres brûlantes du Vésuve.
La question des escaliere étant ainsi tranchée , revenons au
deuxième vestibule, 1 1, où nous verrons l'application du système
qui, selon nous, doit prévaloir : de là, nous pénétrerons avec plus
de méthode jusqu'au ceeur de l'édifice.
Voyons si tous les dégagements qui sont ménagés sont en parfait
rapport avec les habitudes du public de l'Opéra , et n'oublions pas
que les habitudes sont impérativi>s : nous ne voulons pas dire
qu'elles doivent être contraires au progrès.
La distribution de ce vestibule est faite pour que le public com-
prenne facilement la direction qu'il doit prendre et qu'il ait le
moins d'hésitation possible à s'engager dans les diverses ouver-
tures par où l'on peut parvenir aux places que chacun doit occu-
per ; car, il faut qu'on le sache encore, ce public si intelligent a
toujours eu besoin, prétendent les contrôleurs , qu'une pantomime
expressive, aidée quelquefois par de significatives paroles, lui tese
bien comprendre son chemin.
Cette distribution, dans ses rapports avec les escaliers , est fiiitv
Mi
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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afin (le produire sur l'imagination du public une impression assez
favorable pour exciter en lui cet entrain qui lui fait attacher plus
(le prix, en (luekjue sorte, au spectacle qu'il va voir. Il y a eu étude
à cet égard , il y a eu étude encore pour que toutes les combinai-
sons de distribution répondissent autant que possible à tous les
caprices de droit de In brillante foule qui hante l'Opéra.
Ce vestibule a douze mètres d'étendue sur chacun de ses c<ités.
Cette dimension, qui ne laisse pas le regard se perdre dans un trop
grand vide, ce qui compromettrait d'autres effets d'architecture
qu'il serait maladroit de sacrifier, s'agi'andit à l'œil cependant par
la combinaison de jours ménagés pour faire valoir des escaliers dis-
posés d'une façon pittoresque, festoyante et monumentale.
En entrant sous ce vestibule, on a en face de soi un large esca-
lier de plus de huit mètres d'ouverture, mais seulement élevé de
quelques marches ; son ouverture est encadrée sous une arcade
surbaissée dont l'archivolte repose sur de solides colonnes qui lais-
sent des vides à droite et à gauche.
Du centre du vestibule, l'œil aperçoit facilement aux deux ex-
trémités du premier palier, IG, qu'on atteint au bout des cinq ou
six marches indiquées, la base et le faîte de deux belles ram-
pes, 17, de quatre mètres, qui tendent au premier étage ; ces ram-
pes à jour sont bordées de balustres en marbre.
De ce même point, l'œil suit facilement le public qui monte ces
rampes; il le voit s'avancer vers le haut, passant sur le premier
retour d'équerre, 18, deuxième palier de l'escalier d'apparat,
franchissant les marches qui y adhèrent; et il ne le perd de vue
qu'au moment où il atteint le troisième palier, 19, quand, enfin,
il va toucher le plancher du premier étage.
Dans cette combinaison , nous trouvons des effets qui ont de la
magie; ils résultent du jeu (jue produisent les vides ménagés pour
que l'on puisse découvrir le mouvement de la circulation, même de
tous les points des escaliers.
Plus loin , nous ferons remarquer le rapport de ces effets avec
ceux de même nature obtenus avec les autres grands escaliers, i .5,
établis sur les Cijtés.
En ce moment , essayons de faire comprendre , à l'aide de la
simple description, l'effet que produit, du même point de station ,
le vaste salon ellipsoïde que le plan n'indique pas, et qui se trouve
ouvert sur toute la largeur du premier palier, en face des marches
qui le relient au vestibule.
Ce salon , placé sous l'amphithéâtre et sous le parterre, offre des
combinaisons architectoniques qui s'harmonientavcc le système de
vides calculés pour le jeu des escaliers. Des colonnes supportent sa
voûte, et trois larges ouvertures, adhérentes au palier, permettent
son accès.
Son utilité ne saurait être contestée. Les spectateurs descendus
des loges, et qui comptent sur un équipage , au lieu de se jeter dans
le vestibule pour y attendre les gens à la recherche de leur voiture,
se retirent du côté du splendide salon et attendent là , à l'abri de
tout froissement de la foule empressée de disparaître, que le signal
du départ leur soit donné par la livrée, qui , pour être utilement
aperçue, n'a pas besoin de s'avancer au delà de l'entrée du deuxième
vestibule, 1 1 .
Ce salon de station est décoré avec luxe ; la statuaire en fait
presque tous les frais, et sa forme y prête. Il fallait une opposition
à la décoration de la salle et du grand foyer, dont nous n'avons pas
dû parler encore.
Ce salon , indépendamment de ses larges ouvertures du côté du !
vestibule, a plusieurs issues qui le mettent en communication soif
avec d'autres parties de l'intérieur, soit avec l'extérieur, par les
galeries latérales.
ISous aurons peut-être occasion de revenir plus lard dans cette
station ; mais nous repassons actuellement sur le palier , cardinal
pourainsi dire, afin de continuer nos pérégrinations et de reconnaître
progressivement l'effet pittoresque des escaliers (jui n'ont pas en-
core été décrits, ainsi que leur rapport avec les effets de l'escalier
d'apparat.
Lorsqu'on a atteint le deuxième palier, 18, de l'escalier d'appa-
rat , on a en face de soi , à une distance de 4 mètres euN iron , sous
une voûte servant de passage, le grand escalier 15, qui dessert,
de haut en bas, tous les divers rangs de loges sans exception. Il
y a à la base une issue directe sur une galerie intérieure adhé-
rente h la galerie latérale de l'extérieur de cet escalier, de manière
qu'en sortant d'un lieu très-chaud, pour aller dans un espace sou-
vent très-froid ou très-frais, on passe par une utile gradation de
température, sans ([u'on soit exposé, par la position des lieux, a
une mortelle ventilation.
Nous avons dit (|ue pendant les entr'actes, le parterre jouissait
d'une issue directe pour atteindre les foyers, en passant sur le grand
palier 14, qui, à la hauteur de l'entre-sol, se trouve en communica-
tion avec le grand escalier des c<ités, 15, et que nous voyons encore
en communication avec le grand escalier d'apparat, à la hauteur de
son deuxième palier, 18. C'est parcelle communication que les
personnes destinées à l'orchestre public et aux loges du rez-de-
chaussée arrivent très-directement à leur place, en passant par
l'ouverture que nous voyons sur le plan, contre celle réservée au
parterre, et qui reste fermée lors de l'arrivée. Ces personnes, on
le voit, passent alors devant le grand escalier 15, qui conduit, au
besoin , à tous les rangs de loges.
Cet escalier suspendu dans sa cage, où il reste à jour, a 4 mètres
de large, et seul il serait suffisant pour assurer le prompt dégage-
ment de la salle, car l'escalier d'apparat, indispensable sous le ra|v
port de la décoration architectonique, et qui ne s'étend que jusqu'au
premier étage, offre un luxe de facilités pour ce dégagement.
Si l'on stationne, au moment de la sortie, sur le deuxième pa-
lier, 18, de l'escalier d'apparat, on découvre de cette position, non-
seulement les personnes qui sont encore sous le vestibule, celles
qui entrent sous la rotonde décrite, celles qui montent au premier
étage par les escaliers d'apparat de droite et de gauche, mais encore
celles qui circulent sur le grand escalier, l.'>. placé en reculement
sous la voûte.
Bien que séparées de fait des personnes qui circulent sur les es-
caliers d'apparat, et qu'elles ne peuvent rencontrer dans leur
course, celles circulant sur le grand escalier se trouvent, pour le
coup d'œil, faire masse avec elles.
En outre, par suite de cette combinaison d'escaliers a jour, 9, mis
ainsi en rapport pour la vue, les pci-sonnes qui se trouvent en même
temps sur les escaliers en reculement, à la hauteur du palier 18
de l'escalier d'apparat, se voient réciproquement des deux points
extrêmes de la grande largeur de l'édifice. Cependant, elles sont
séparées par deux sections de l'escalier d'apparat, qui se dévelop-
pent, entre les points où elles sont posées, sur une longueur de 40
mètres, où tout est fractionné de manière à produire d'heureux
effets de perspective. Ce n'est pas tout.
Depuis le deuxième palier, 18, sur lequel nous venons de faire
une pause, l'escalier d'apparat reste entièrement à découvert jusqu'à
VIS
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
VJ^
une grande élévation ; en sorte que l'observateur placé au premier
étage sur le large palier, 20, qui unit le grand foyer du public à
toute la partie des premières loges, peut, en s'avançant vers les ba-
lustrades, jouir de l'effet général de ces escaliers et voir leur phy-
sionomie animée, soit au moment de l'arrivée, soit au moment de la
sortie. De là, son œil est maître de toute la surface qui se déroule à
ses pieds.
Il faut voir du haut de ces balcons si variés, et à la lumière com-
plètement éblouissante du gaz, ce mouvement des femmes qui vont
remonter en équipage. Elles sont toutes du même âge, elles sont
toutes charmantes dans ce parterre jonché de fleurs, de plumes, d'é-
toffes soyeuses, si elles portent les dentelles, les pierreries et les
parfums, talismans sans prix, qui les font vivre et briller cent
ans.
Le Foyeb , LA Tebrasse couveete et les Salo
NS.
Nous sommes trop près du foyer pour ne pas y passer d'abord.
Il importe qu'on se rende bien compte de la véritable destination
d'un foyer du public à l'Opéra ; car cette destination détermine
d'une manière al)solue sa distribution, sa forme, ses dimensions: à
cet égard, il ne peut y avoir de doute.
Le foyer n'est pas un salon dans lequel des groupes se forment
et restent longtemps stationnaires ; où l'on marche le chapeau à la
main, avec la discrétion des gens bien appris, appelés à une récep-
tion privée; ce n'est pas non plus une bourse où le vendeur se pose
avec ses savantes combinaisons devant l'innocent acheteur, et réci-
pro([uement; ce qui ne veut pas du tout dire qu'on n'y fasse pas
d'affaires, qu'on ne s'y arrête pas pour y donner la main la plus
pure à la main la plus perfide. Avant tout, le foyer est un prome-
noir où des amis, et on en a toujours beaucoup dans ce pays-là, se
tiennent par le bras et forment invariablement une double ligne de
circulation, allant d'un bout à l'autre de la longueur ; et quand un
provincial, s'il y a encore un provincial, rend bon compte dé ce
qu'il a fait à l'Opéra, il dit .l'ai été me promener au foyer.
Il n'est donc pas possible de concevoir pour cet usage autre chose,
si on ne veut errer, qu'une galerie, la plus longue possible, c'est-à-
dire longue de toute la largeur d'un théâtre, et qui n'ait en largeur
que ce qu'il faut pour de bonnes proportions, et pour que le public
comprenne bien comment il va former sa double ligne de prome-
nade, avec toute l'aisance nécessaire cependant, afin que les ébahis,
épars sur tous les points, ne soient ni heurtés ni bousculés par le
flot qui monte et par le flot qui descend.
Voilà les principales conditions du foyer , auxquelles il ne faut
pas manquer d'ajouter celles-ci : 11 y a des gens qui trouvent char-
mant de s'asseoir sur de molles banquettes et d'observer le mouve-
ment de la circulation ; il faut bien les satisfaire. Il y en a d'autres
qui aiment à trouver dans une partie plus retirée, mais non trop
éloignée de cette foule qui éieetrise et qui ranime la verve, un coin
où les amateurs de causeries peuvent plus facilement se circonscrire ;
jusqu'à ce jour, on a peu satisfait à cette exigence de l'esprit.
Le foyer, c'est, on le voit, un bien important accessoire dans la
distribution d'une salle de spectacle. C'est là que le public va cher-
cher le moyen de rendre à des membres engourdis par une
trop longue immobilité , toute leur élasticité première ; c'est là
qu'il va chercher un air qui sera toujours plus pur que celui respiré
dans une salle échauffée par deux à trois mille spectateurs et par une
myriade de lumières; c'est là, enfin, que pendant le petit nombre
de veillées consacrées accidentellement aux plaisirs charivariqae»
du bal masqué , il va chercher... pas autre chose que ce qu'il y va
chercher un jour de grande représentation.
Dansées conditions, voyons si le foyer de l'Opéra a reçu de no-
tables améliorations ; mais n'allons pas examiner si on pourrait ac-
cidentellement, très-accidentellement, en faire une balle de
concerts.
A l'Opéra, ta seule salle de concerts permise, spéciale?... mais
c'est la galle de spectacle avec son rideau baissé plus ou moins re-
culé.
C'est une utile idée, sans doute, d'avoir mis le foyer de l'Opéra
en communication dans toute son étendue, ou à peu près, avec une
terrasse couverte, à l'abri de la pluie par conséquent, offrant, l'été,
tous les avantages d'une allée de jardin illuminée, et l'hiver, tons
les agréments d'un jardin d'hiver.
N'ai-je pas justifié cette disposition nouvelle, où je vois les fem-
mes venant s'asseoir au milieu des arbustes distribués sous cette
architecture pittoresque, et stationnant, à la grande satisfaction du
glacier, devant ces larges balcons étincelants de clarté, d'où elles
peuvent embrasser, à droite et à gauche, une immense étendue de
boulevards, et d'où elles peuvent, ce qui a du prix encore, être
vues de tout ce qu'elles voient ?
Deux tambours en fer, servant de support à des fleurs, sont
placés vers les extrémités de cette loge; ils ne déparent pas l'ar-
chitecture, et le glacier fait de leur intérieur exigu, mais suflisant,
un dépôt provisoire de son officine.
Au besoin, sans aucun doute, les portiques extérieurs de la loge
peuvent être clos, et, dans ce cas, elle ne forme plus, avec le fover,
qu'une double galerie fermée; c'est la serre près du salon.
Pour mon compte, j'aime peu les clôtures , les fermetures provi-
soires, car, souvent établies pour quelques heures, l'insouciance, la
paresse, les maintiennent contre la raison et les cris du public; cet
inconvénient ne pouvait empêcher de concevoir et de construire la
loge. Les moyens mécaniques, à l'Opéra , ont une puissance indé-
finie. Des stores, faciles à rouler et à dérouler, sont étiiblis de ma-
nière à rester fermés seulement pendant les soirées trop froides,
et sont disposés très-utilement pour garantir l'intérieur des attein-
tes des courants d'air. Leur clôture est parfaite , et leur transpa-
rence, qu'augmente le grand feu des lumières, laisse a larcbitec-
ture extérieure le caractère qui lui est propre pour la décoration
même du boulevard et de la ville.
Cette loge a sept mètres de largeur; le foyer en a dix; deux de
plus que celui de la rue Lepelletier; cependant la longueur est la
même, ou à peu près.
Plus large de deux mètres que le foyer de la rue Lepelletier,
celui-ci a des dispositions particulières qu'on doit apprécier.
Laissons de côté les avantages de sa communication a> ec la l<^ ;
avantages qui, l'été, aux Joui's les moins favorables pour le pro-
duit des recettes , se traduisent par l'arrivée d'un plus grand
nombre de spectateurs de distinction, voues a la divine fl&uerie de
la terrasse.
D'après les habitudes du public , puisque la circulation au foyer
se fait sur deux lignesparalleles,s'etablissant toujours plus près des
murs, dans le sens longitudinal, il était plus rationnel dofTriraux
promeneurs une double ouverture qui leur permit, sans briser leur
double ligne de circulation, de pénétrer facilement dans les salles,
22, qui ne sont qu'une division architectonique du foxer, cl qui,
rue Lepelletier, furent disposées, originairement, l'une pour rcce-
W5
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
voir le comptoir du limonadier, l'autre pour subir le triste étalage
du bouquiniste vendeur de pièces de théâtre.
Actuellement, un comptoir placé comme précédemment est en-
core occupé par le glacier, l'autre par une bouquetière : il y a riva-
lité pour exciter le goût et l'odorat.
Ce n'est pas dans ces portions du foyer que vient se réfugier la
causerie intime : elle s'évanouirait entre les biscuits du limona-
dier, et les papillons nourris des roses de la bouquetière.
Sur le côté de chacune de ces deux portions du foyer, il y a un
salon, 23, d'environ dix mètres sur huit, dont l'accès reste d'au-
tant plus facile qu'il a des ouvertures directes sur le foyer et sur
un palier adhérent au corridor des loges.
Ces deux salons sont publics, très-publics et très-visibles, bien
qu'ils soient assez retirés pour être plus à l'abri du bruissement
de la foule. On est tenté d'y entrer, parce qu'on y voit de moelleux
divans, des fauteuils confortables , un éclairage harmonie avec les
peintures attachées aux murs et au plafond, etqu'enfln les pieds
n'y foulent que des tapis ; mais sur la porte de l'un il y a : Salon des
. compositeurs; et sur l'autre : Salon des poètes. Oh ! alors à moins
d'appartenir à l'esprit de l'Institut par le présent, le passé ou le
iutur, on s'incline et l'on passe outre. Les initiés font exception ,
ne s'effraient pas ,. entrent , causent , entendent causer, et font
bien.
Au nombre des particularités de la distribution du grand foyer,
il y en a une d'un gri^nd intérêt.
Comme au grand foyer de la rue Lepelletier, le grand foyer a trois
portes au milieu de sa longueur, pour qu'on y pénètre du côté de
la face des corridors du premier étage. Mais à l'ancien foyer, ces
trois ouvertures, tout à fait incomplètes, laissaient à désirer, quand
les spectateurs sont nombreux , et particulièrement au moment
de la reprise du spectacle après un entr'acte.
Dans ce moment, la foule engagée vers les extrémités pagne
difficilement les issues du milieu pour retourner à ses places
respectives ; et à cet égard on a pu remarquer des inconvénients
réels , résultant de l'empressement de tous à reprendre, à la même
minute, mille places restées vacantes. *
Dans le foyer nouveau, il y a les trois portes du milieu ; il y a
aux deux extrémités , sans compter les issues peu secrètes malgré
ce que j'ai dit , qui permettent de trouver un passage fort large par
le salon des poètes et par celui des compositeurs , deux autres ou-
vertures pour communiquer directement avec les corrdors. Ces
ouvertures sont placées aux deux bouts du grand foyer, avant les
sections de galerie où se trouvent le comptoir du glacier et l'éta-
gère de la bouquetière.
Remarquons leur utilité incontestable; mais examinons aussi
l'effet pittoresque qui résulte de leur combinaison arebitectonique.
Cette ouverture donne inmédiatement sur un couloir ou pas-
sage, 24, large de quatre mètres, dont un côté est bordé par les
deux portes du salon, 23, des poètes ou des compositeurs , l'autre
par une balustrade à jour d'où le regard plonge dans le vide du
grand escalier d'apparat. Ce couloir est ainsi jeté comme un pont ;
et, de dessus son tablier, l'on découvre encore, même daus l'extré-
mité opposée, la plus grande partie de l'escalier d'apparat, et les
balcons des corridors de face appartenant aux loges des deuxièmes
et des troisièmes. L'on découvre encore tout l'ensemble des paliers
et des corridors du premier étage dont nous allons nous occuper,
et qui sont disposés comme on n'a pas encore eu le soin de le faire
jusqu'ici dans aucun théâtre. En outre, de ce même point on dé-
couvre l'escalier secondaire de la tète de la salle , placé au bout du
corridor, lequel offre encore une rampe droite se développant en
face du passage ; eu sorte que les personnes qui viennent des
étages supérieurs par cet escalier, reconnaissent tout d'abord
le moyen d'arriver facilement au foyer, et jouissent de loin des
effets de perspective produits par cette disposition.
Il en est de même pour les personnes venues des étages supé-
rieurs par les dégagements que nous avons du nommer les grands
escaliers, i ô. En mettant le pied sur la dernière marche qui adhère
au corridor, et en faisant un retour d'équerre, du côté du foyer,
elles jouissent instantanément du même coup d'œil.
Mais avant d'entrer dans plus de détails en ce qui concerne les
corridors , répétons , si nous l'avons déjà dit , que ces grands esca-
liers à rampe droite avec paliers à retour d'équerre, sont disposes,
depuis le plus haut étage jusqu'au rez-de-chaussée, auquel ils
aboutissent, dans une cage où leur -rampe reste vide et dégagée
du côté où se replie le retour d'équerre. Cette rampe est garnie
d'une balustrade à jour ; et cette disposition permet encore de voir,
de quelque point que ce soit de l'escalier, le mouvement de cir-
culation qui a lieu dans tout son développement, sans avoir à re-
douter, on le comprend, les accidents gra\esqui résulteraient de
la disposition que je me suis permis de condamner.
Les Cobbidobs.
Les corridors... On a cru vraiment, jusqu'ici, qu'il s'agissait de
disposer un couloir plus ou moins étroit, pour que les gens qui ne
craignent pas de se frayer passage à coups de coudes pussent ga-
gner, avec l'aisance qui leur est propre, le numéro de leur loge :
c'était une erieur de goût et de convenances.
Ne faut-il pas que les femmes, qui ne risquent point d'habitude
leur toilette du soir dans une foule en circulation aussi cavalière-
ment animée que celle du foyer de l'Opéra, puissent trouver, lors-
que la mauvaise saison doit les priver dune courte excursion vers
la terrasse, un endroit à proximité de leur loge, où il leur soit
possible de faire quelques pas sans ressentir l'embarras qu'elles
éprouvent quand elles deviennent, isolément et un peu trop long-
temps, un objet de curiosité pour de trop nombreux regards '?
Aussi les corridors actuels ont-ils, dans toutes leurs dimensions
respectives, une largeur double, au moins, de ceux de lOpera de
la rue Lepelletier. Au lieu d'afi'ecter, comme ceux-là, une forme
circulaire commandée par la courbe de la salle, ils offrent une
disposition plus nouvelle, d'où résulte quelques-uns des effets pitto-
resques que j'ai décrits en partie en parlant du rapport des es-
caliers avec ces corridors.
Le périmètre dans lefjuel se trouvent compris ces corridors, et
auquel adhèrent les escaliers d'apparat sur toute une ligne, est
un parallélogramme, en sorte que le corps de la salle, de forme cir-
culaire, reste isolé au milieu de ce carré, 25, \ers trois de ses côte».
En décrivant les corridors du premier étage, je décris ceux des
étages supérieurs, qui ne diffèrent de ceux-là que par quelques
motifs de décoration.
Il eût été oiseux d'exagérer les dangers du feu dans les dépen-
dances d'un théâtre où les mesures les plus efficaces pour le pré-
venir et le combattre avec succès ont éle assurées, ainsi qu'il sera
démontré plus tard. Ce n'est donc pas par crainte du feu que tous
les corridors ne sont pas parquetés : ils sont couverts de dalles
mosaïques, parce qtic le moinement qui s'y fait, en général nu pas
477
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
«78
de course, au commencement ou à la reprise du spectacle, rendrait
dangereux, pour tous ceux qui n'ont pas le pied léger, un plancher
ciré, où des glissades deviendraient fréquentes. D'une autre part,
le piétinement sur le hols, je le crois du moins, aurait eu pour les
personnes déjà réunies dans la salle un retentissement désagréable
au moment où toutes se disposent à l'attention : ces efforts pour
éviter le bruit, on le verra bientôt, ont encore été poussés plus
loin (I).
Même en vue de tout accomplir pour satisfaire aux besoins du
confort, il n'eût pas été possible de couvrir de tapis tout l'espace
des corridors d'une salle aussi vaste, fréquentée par un public aussi
nombreux. La poussière, les déchirures, les difficultés de l'entre-
tien, seraient de nature à jeter bien des inconvénients sous les pas
des promeneurs, et ce serait payer un peu cher les quelques secon-
des de course sur ces lames chaudes et moelleuses.
Mais une exception a son utilité. Nous avons parlé des femmes
qui fuient le mouvement trop brusque des flots du foyer : elles re-
cherchent pendant les eutr'actes les sièges, disposés en quelque
sorte comme de discrets parloirs, contre la paroi du corridor oppo-
.sée à celle qui forme l'enveloppe de la salle ; eh bien, assises sur ces
sièges, les femmes aux pieds délicats eussent trop souffert sur une
pierre ou sur un bpis trop dur. Sur ce point, dans toute l'étendue
rectiligne du corridor, en avant de ces sièges qui n'offrent chacun
que trois ou quatre places aux causeurs, et qui sont tous séparés
par des piédestaux ornés, on a jeté une longue bande de tapis.
Au-dessus des sièges sont des glaces décorées architectonique-
ment, qui répètent les bougies artificielles qui les éclairent, la ligne
circulaire de l'enveloppe de la salie, les pilastres et les portes dé-
corées qui en font l'ornement; elles répètent encore, par l'effet
oblique, l'architecture d'une partie des escaliers d'apparat et du
grand foyer; elles font voir mille fois le mouvement de mille pro-
meneurs, et reproduisent autant de fois tous les vases aux formes
élégantes, distribués au foyer, sur les rampes des escaliers, dans
les corridors mêmes, et dans lesquels on voit, en toutes saisons,
des arbustes, des fleurs véritables ou artificielles, sans avoir l'air
de l'être, et qui donnent à tout cet ensemble une distinction qui
contribuera longtemps au succès de l'enl reprise théâtrale, sans
qu'elle puisse craindre de voir autre part une semblable concur-
rence.
Aux étages au-dessus des premières et au-dessus des deuxièmes
loges, les panneaux des murs rectilignes des corridors sont décorés
seulement d'arabesques, parce qu'à ces étages le jeu des glaces
n'aurait plus le même intérêt, n'ayant pas i\ répéter des parties
aussi essentielles d'architecture.
En montant à ces étages supérieurs, on retrouve encore des
balcons ouverts sur l'escalier d'appm-at; ils s'étendent chacun
sur une largeur de 40 mètres, et sont seulement fermés par une
rampe à riches balustres à jour, sur laquelle s'appuient tous les
curieux avides de tout ce mouvement, de tous ces effets variés,
(fue produisent, avec toutes leurs combinaisons, les escaliers, le
grand foyer , et ses portiques à jour, qui s'harmouient avec les
portiques de la grande loge.
Au rang des quatrièmes loges, à celui des cinquièmes, caché
mystérieusement derrière l'amphithéâtre, dit des quatrièmes à l'O-
(1) Dans plusieurs coustiuclioiis on a fait une utile application du pavé mo-
saïque en bois de boul. Ce pavé, ainsi que les dalles mosaïques, n'a pas de
sonorité.
péra, paradis au mélodrame et puulaHler aux Funambules, on ne
jouit pas de tout ce prestige, mais il s'en trouve ud autre la que t'oD
sait également apprécier.
Si, par suite de leur position dans la salle, ces places élevées
doivent inévitablement, malgré les effort» de l'art et de la science,
ressentir plus de chaleur que celles des étages du dessous, il faut
convenir alors, qu'au point de vue sanitaire comme au poini de vue
spéculatif, il était convenable de combiner, dans la distribution ar-
chitectouique, une disposition utile pour compenser cet inconvé-
nient, qu'on ne détruirait pas complètement sans nuire à des con-
ditions d'acoustique qu'il faut, bon gré mal gré, ménager, ce qur^
nous verrons plus tard.
Il ne faut donc pas contester l'utilité du foyer placé de plaiu-pied
avec les corridors des quatrièmes loges, et que le public doit tra-
verser pour arriver sur la plate-forme qui couvre la loge. En vue
d'une utile spéculation, cette plate-forme est livrée aux intraitables
fumeurs, qui sont en proie, sans intermittence, à un appétit de ci-
gares et de cigarettes.
Ce que j'ai dit des effets pittoresques de la loge est également
juste pour cette terrasse élevée, d'où l'œil découvre encore un ma-
gnifique spectacle sur les deux longs rayons illuminés de nos bou-
levards.
En redescendant au premier rang des loges par où je veux faire
mon entrée dans la salle, je n'oublie pas de remaniuer les acces-
soires utiles, dépendants de la division de cette salle, et qu'on ne
pouvait omettre dans une aussi importante distribution, occes-
soire^trop complètement négligés jus(|u'ii ce jour.
Ainsi, au premier étage, qu'on \}eut considérer comme le point
central des dépendances de la salle, on a placé, à proximité des
foyers, deux pièces, 20, une à droite, une à gauche, où se trouve
réuni, en un complet état de service, tout ce qui peut être néces-
saire pour offrir de prompts secours à toute personne qui se
trouverait gravement indisposée. Ces deux salles , parfaitement
aérées et loin du bruit, répondent, par leur distribution et leur
ameublement, à toutes les conditions utiles pour un traitement
réclamé à l'improviste; l'une est destinée aux hommes, l'autre aux
femmes. A l'étage des quatrièmes loges, deux autres pièces sont
également affectées au même service; et toutes ces pièces sont sous
la surveillance des médecins et des inspecteurs de la division de la
salle.
Dans la distribution des étages intermédiaires, on trouve un
bureau pour ces inspecteurs ; celui des médecins se trouve natarel-
leraent dans les salles de secours.
Le commissaire de police n'est jamais oublié; son bureau, plus
rapproché des éléments du tumulte, est placé au rez-de-cbaussee ;
il adhère au corps de garde précédemment indiqué.
Du c6té opposé, se trouve placé le bureau ou les agents de comp-
tabilité et les contrôleurs vérifient les billets, de diverses valeurs.
qui ont servi de passe-port au public admis dans la salle. Du c»\té
de ce bureau de vérification, on trouve encore la loge du gardien-
concierge, détenteur des clefs de la section de l'édifice destiné ao-
public.
Puisque je me suis promis de tout voir et de tout décrire, ma
tAche est d'entrer dans des détails bien minutieux. Je n'esquive
rien, car il n'y a rien là qui soit inutile.
Sur divers paliers des grands escaliers, IS (ne confondons pas
ceux-ci avec l'escalier d'apparat \ on remarque des issues avec
portes battantes; elles offrent le libre accès de cellules que je ne
kl9
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
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puis nommer autrement, qui sont parfaitement entretenues par
des gardiennes pincées pour eu avoir la surveillance spéciale. Et
ce lieu discret, disposé pour que les femmes elles-mêmes puissent
y pénétrer ou en sortir sans éprouver aucun embarras, tapissé
d'émail, assaini par l'eau, n'incommode jamais, ni la salle, ni les
• corridors, ni les escaliers ; à cet égard, il n'y a rieu de connnun
avec les dispositions de la salle de la rue Lepelletier.
Avant que la main de l'ouvreuse de loge mette sa clef dans une
serrure où elle pénètre sans ferrailler, ce que j'expliquerai, j'ai en-
core à dire que ces femmes fonctionnaires, dont la civilité ne fait
jamais défaut au public de l'Opéra, j'aime à leur rendre cette jus-
tice, ont été, elles-mêmes, par suite de l'esprit d'ordre, de l'esprit
réglementaire que j'ai fait remarquer, assujetties à une tenue uni-
forme. Cela s'Est fait ainsi , et avec beaucoup de convenances ,
pour les vivandières de nos régiments : je n'établis pas autrement
l'analogie.
N'oublions pas que les pelisses, les châles, le» manteaux, etc.,
sont un embarras pour la loge, et que cet embarras, venu du dehors,
passe, en général, sur les bras de l'ouvreuse.
Là, ou n'a pas voulu que des vêtements de femme, toujours dé-
licats, exigeant des soins, fussent jetés pêle-mêle dans un coffre
d'armoire. Au bout de chaque corridor il y a un cabinet spécial
où tous ces objets sont déposés avec ordre, sur des supports- nu-
mérotés.
Ce casuel des ouvreuses ne pourrait être supprimé sans faire
craindre une révolte au sérail, car le banc, cet autre impôt, plus
illégal, a été mis hors d'œuvre par suite de la bonne distribution
des loges, et de la bonne combinaison des sièges.
Les Loges.
Les clameurs, tout ce qui peut se traduire par un son , n'ont
droit de franchise, à l'Opéra, que dans les régions de la scène. Dans
toutes les autres parties, le génie du silence étend ses ailes pour
étouffer le moindre bruit qui pourrait s'élever. Voilà pourquoi la
vieille serrure des loges, véritable quincaillière, a été remplacée par
une petite mécanique à ressort qu'un cylindre mobile, dans la main
de l'ouvreuse, ouvre toujours sans aucun bruit; et cette fermeture
nouvelle offre à l'intérieur une petite bascule en saillie horizontale
sur laquelle il suffit de peser légèrement avec le doigt pour ouvrir
la porte, sans craindre de déchirer ses gants ou de casser ses
ongles.
Et cette porte , que je n'ai pas encore ouverte à mon lecteur, est
I arfaitement ajustée dans la feuillure de la baie, ne se déjette pas,
n'a- pas de jours qui incommoderaient le spectateur en établissant
de fâcheux courants d'air, et tourne facilement sur ses gonds si-
lencieux.
Pour éviter tout bruit insolite, les angles intérieure s'appuient
sur des bourrelets élastiques. Les portes ont un vasistas également
exempt de tout changement de forme par l'influence atmosphéri-
que ; sa glace se baisse ou s'élève à volonté et sans efforts, en glis-
sant entre ses bourrelets au moyen d'un bouton convenable.
Pour faire cette porte , dont le panneau et le châssis sont en fer,
inaperçus toutefois, il a fallu unir l'art du mécanicien à celui du
tapissier. Puisque ces habiles gens se sont associés pour assurer le
bien-être dans l'intérieur de la loge, il convient également de ne
pas passer devant leur travail sans l'avoir fait apprécier.
Il n'y a plus de banquettes à l'Opéra ; ce théâtre, pourpeu qu'il
eût tardé de comprendre son public , eût été devance dans cette
bienheureuse réforme par les successeurs du vieux Séraphin , Sé-
raphin, qui réformait si peu et dont l'àme a dû gagner les limbes,
si le ciel lui a tenu compte de toutes les innocentes joies qu'il a
mises au cœur des enfants.
Les loges sont plus spacieuses que celles de la rue Lepelletier;
elles ont 40 centimètres de plus eu profondeur, parce que, dans ce
sens seulement , on sentait la gêne. Dans la largeur, il n'y a que
très-peu de différence, celle nécessaire pour établir, sur les deux
côtés de chaque loge, des accotoirs indépendants des loges adhé-
rentes, et placés au-dessous de la division chantournée qui marque
la séparation de chacune de ces loges. Avec cette disposition , les
attitudes plus nonchalantes et plus gracieuses aussi remarquées chez
les habituées des loges de face , se sont acclimatées dans les loges
des côtés.
Les sièges (ceci est absolu pour tous les rangs de loges) assurent,
par leur élasticité , un facile repos , d'autant plus complet que les
jambes ne sont plus forcément repliées sous un angle trop droit.
Une utile disposition vient encore en aide à la gracieuse indolence
des femmes : sans être en tout conformes a un fauteuil, ces sièges
ont deux bras convenablement allongés , évidés en dessous, et qui
ne causent aucun embarras dans la loge , mais qui servent alterna-
tivement d'utile appui au côté droit , au côté gauche , sans que ce
soit un système de bascule. Ces derai-fauteuils sont presque entiè-
rement recouverts d'étoffe. Ils n'ont de bois visible qu'à leurs pieds,
garnis de roulettes pour rendre plus faciles tous les mouvements des
spectateurs des loges.
Et comme les considérations de propreté ont fait sentir que des
tapis de pied seraient un luxe mal entendu pour les loges du public,
celles-ci , au lieu de l'incommode tabouret qu'exploitaient les ou-
vreuses, sont meublées de tabourets garnis montés sur des roulettes
en cuir, et qui passent, à volonté, de dessous les pieds sous le fau-
teuil, auquel ils sont étroitement liés.
Inutile ici de faire remarcjuer le soin qu'on a pris d'empêcher
qu'aucune loge reçût , des locataires à l'année , une décoration dis-
semblable de la décoration générale; inutile de dire que des patères
convenables et parfaitement bien scellées tiennent aux parois de la
loge; et nous entrons enfin dans une salle que son auteur a voulu
rendre la plus vaste , In plus brillante des salles de l'Europe, qu'a-
niment encore les chants de l'illustre Rossini.
HippoLYTE MEYNADIER.
(La suite au prochain numéro,)
A NOS LECTEURS.
M. C^ar Daljr, charge tlrpnli) \r mol» de jnlllpl dcrnlrr d'unr inl*«lon
liiiponaiiir du Koavf nirnirnl , rM de rrlour i ParN, apr^ uor ali»rnce
beaucoup plus longue que celle qu'il s'adendall à (aire. C'est ansrz dire
que la cause de nos retards a cessé et que nous allons répai^r le temps
perdu.
.\ous somines auiisl en relard envers plusieurs de nos correspondant»
qui nous ont adressé des lettres que le manque de place nous force i re-
mettre au prochain numéro. >ions les remercions de leurs intéressante*
communications, et nous les prions bleu de croire que nous ne les atlons
pas mises en oubli.
L'un des rédacteurs :
ALPHONSE DE CALONNE.
iir. i^cbàDpk et coup., bue damikttr . 2.
lUvue Gèn-crala lù?^ l'Jrc/ûéccture- eC-eÙ!s Travaux. /^U^a: /ùi^- {/c J''iirsfcfn6tTfû. N' f
Vol S. n 22
1. ^ra
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ML'HUICIDÎTE
DANS LES COHSraiCnCHE
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MJitfuiiarJ j'^
Reruf ^eneraU ,& /'Jn-Âi/^ràur e/ ,/Kr FroJ^aiu-- AMa' r,ir,s. M,r J;i,jUmùr,y.jV' â.
HMe^naJifT e/e/
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HIPPOTYTÏÏ MFYWADIFR
481
REVUE OK L'ARCHITFXTURK ET DES TRAVAUX PUBLICS.
Funlevrault.
MS
(SUITE ET FIN, voij. col. 241, '28U, 337, 385 cl 433.)
-€i)»-
CIVILISATION CHRÉTIENNE.
STII.E BOMAN ET STVI.E GOTHIQL'E-
CHANIKK II. — DÉTAILS KXTÉIUEIRS M L'KGLISE.
A . Dans les églises romanes, l'abside est l'une des portions de
l'édifice le plus soigneusement bâties et le plus richement décorées,
même à l'extérieur, où aucune construction secondaire ne la
masque ordinairement. Lors même que lesautres murailles seront
nues et rustiques, il faudra examiner si elle ne s'en distingue pas
par quelque recherche dans le choix et la disposition des maté-
riaux, dans les contre-forts, la décoration des fenêtres et le couron-
nement; si elle n'est pas pourvue de colonnes ou de sculptures,
surmontée soit d'une galerie où l'on puisse circuler, soit de mâ-
chicoulis ; tenir compte du nombre et de la situation des fenêtres,
ainsi que de l'intériorité du toit par rapport h celui dii chœur. Quand
il n'existe pas d'abside, ces recherches devront se porter sur le
chevet.
Dans les églises où ce chevet n'est apparent à l'extérieur qu'au-
dessus du pourtour du chœur et de ses chapelles, il prêtera matière
à moins d'observations ; néanmoins on devra encore en examiner,
comparativement avec le reste de l'édifice, les fenêtres, les revê-
tements, le couronnement, les contre-forts, les piliers et arcs-
butants.
DEUXIEME INSTRUCTION DU COMITÉ HISTORIQUE
DES AIITS ET MONLMENTS.
I
Fig. 220.
B. Le chœur est encore une des portions les plus soignées de
l'église romane, et il appellera les mêmes investigations que l'ab-
side. On examinera, entre autres choses, si son toit, plus élevé que
celui de l'abside, n'est pas inférieur à celui de la nef principale.
Dans l'église gothique, le chœur se confond à l'extérieur avfc !«•
chevet ou partie supérieure du sanctuaire, et devra être soumis
aux mêmes recherches.
6'. La nef principale, malgré son importance dans la eonstror-
tion, dont elle forme la masse centrale, offre peu de prise à l'obsrr-
vation du côté extérieur, toutes les fois qu'elle est accompagna de
collatéraux et de chapelles, puisqualorselle ne présente de visible
que les revêtements de sa muraille supérieure, les fenêtres dont
elle est iiercéc, ses contre-forts et arcs-butants, son couronnement
et son toit. Cependant elle est souvent ornée, dans l'architectare
romane, d'areatures plus ou moins riches; mais à mesure que la
date du monument s'éloigne de ce stvle, les baies des fenêtres
s'élargissent de plus en plus aux dépens du plein de la muraille,
de manière à finir par envahir tout l'espac»' compris entre les con-
tre-forts.
Toutes les fois qu'au-dessus des collatéraux on pourra aperce-
voir l'arcature ou fenestration inférieure de la nef principale, ordi-
nairement cachée par la toiture actuelle de ces mêmes collaténint,
on devra en tenir compte, ainsi, en général, que de toutes traces
d'anciennes baies, aujourd'hui supprimées et remplacées par
d'autres, ou remaniées.
D. Les collatéraux prêtent beaucoup pins anx rrcherche» dans
T. V. Jl
«83
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
hSk
l'église romane, où ils sont ordinairement dépourvus de chapelles
contemporaines le long de la nef. Il faudra examiner leurs baies
de portes et de fenêtres, anciennes, nouvelles et remaniées, leurs
contre-forts et piliers butants, leurs couronnements, leur couver-
ture actuelle et les vestiges que l'on pourrait trouver de cette toi-
ture primitive, presque horizontale, qui souvent laissait à jour lar-
cature ou fenestration inférieure de la nef principale et du chœur,
dont nous venons déparier; enfin la face plate, ou pourvue d'une
abside plus ou moins prononcée, pleine ou percée d'tme ou plu-
sieurs biiics, par laquelle ils se terminent à l'orient. S'ils se pro-
longent autour du chœur, on devra encore signaler la disposition,
la forme et l'orientation de leurs chapelles, dont l'autel est tantôt
parallèle à celui de ce même chœur, et tantôt rayonnant de son
centre vers les divers point de I horizon.
La chapelle de la Vierge, brillant hors-d'œuvre ordinairement
ajouté après coup à l'extrémité orientale du chœur, et n'y tenant
quelquefois que par une étroite galerie, réclamera une attention
particulière, surtout quand elle formera comme une petite église
distincte, h la suite de la grande. Enfin il sera nécessaire de sou-
mettre au même examen les autres chapelles placées le long des
collatéraux proprement dits, et de s'assurer de l'époque à laquelle
elles auront pu être ajoutées à la construction primitive. Parmi les
questions auxquelles donneront lieu ces chapelles, nous ne devrons
pas oublier celle de leur toiture continue et distincte et propre à
chacune d'elles, et alors pyramidale, conique ou en coupole.
E. Les transsepts'sont encore l'une des portions de l'église les
plus accessibles aux regards et ordinairement le plus richement
décorées, au moins sur leur face terminale. Dans l'architecture
romane, ils sont le plus souvent munis d'absides dont il faudra
signaler la situation , l'orientation , la courbe plus ou moins com-
plète, quelquefois même n'atteignant pas le revêtement extérieur,
et enfin la hauteur, qui s'arrête dans certains cas à la naissance
d'un étage supérieur. Ou devra non-seulement les examiner sous
tous les rapports déjà indiqués, mais encore donner une descrip-
tion détaillée de leur ornementation, surtout lorsqu'ils forment
façade et portail. Cette ornementation rivalisant alors avec celle
du portail principal, on entrera à son sujet dans des détails qui
vont être indiqués ci-dessous [G).
F. Nous avons énuméré les diverses variétés de porches que
l'on peut rencontrer à l'entrée des édifices religieux ; tout ce qui
en sera apparent à l'extérieur devra être relevé et décrit à part
quand il présentera quelque caractère distinct de celui des con-
structions voisines. Cette description piécédera ou suivra celle du
portail, selon que le porche sera lui-même en avant ou en arrière
de ce portail. Dans le cas où il ne consisterait qu'en quelques
constructions légères et sans caractère, destinées seulement à pro-
téger comme auvent le bas du portail et l'entrée de l'élise contre
les intempéries de l'air, il suflira de les mentionner.
G. Nous avons déjà parlé de la plupart des objets et des formes
qui peuvent entrer dans la construction et la décoration d'un por-
tail ; néanmoins l'accumulation en est quelquefois si considérable,
que nous croyons devoir les rappeler ici d'une manière plus métho-
dique. Nous pensons donc qu'il sera bon de les passer en revue
dans l'ordre suivant :
1° Le plan par terre (ou ichnographie ), quelquefois accidenté et
brisé, soit par la présence d'un porche extérieur, soit par les sail-
lies des supports, soit par la retraite des baies, soit surtout par
l'embasement d'un ou plusieurs clochers.
2° Le système général de construction et de décoration, les pro-
portions générales, la nature et la forme des revêtements, les co-
lonnes, pieds-droits, pilastre» et contre- forts appartenant à l'en-
semble.
3° Le couronnement général ; la forme du pignon ou du fronton
-dont il est surmonté.
A" Le rez-de-chaussée ; ses parties pleines, ses portes avec leurs
pieds-droits, arcades en retraite, colonnes, archivoltes, statues,
niches et dais; leurs linteaux, tympans, piliers centraux, battants,
ferrures et serrures; ses fausses baies ou baies figurées; son orne-
mentation et son couronnement distincts, s'il y en a.
5° Chacun des étages supérieurs, à partir du rez-de-chaussée ;
leurs parties plaines, colonnes, arcades, roses, fenêtres, galeries
libres ou figurées, ornementation et couronnement particuliers.
0". Les pignons ou frontons, et les ornements ou baies qui peu-
vent s y trouver inscrits ; les galeries libres ou figurées qui les sur-
montent quelquefois; l'acrotère qui les termine; l'inclinaison ac-
tuelle du toit, et toute trace d'une inclinaison antérieure différente.
7° La façade des collatéraux quand elle est distincte de celle de
la nef principale.
8° La base des clochers du [)ortail quand elle constitue pareil-
lement un corps distinct de la façade principale.
Nous n'essayerons pas d'établir l'énumération complète de tout
ce qui peut entrer dans la décoration d'un portail. Cette décoration
est quelquefois si riche et si variée, qu'il faudrait sortir du cadre
de nos instructions pour en prévoir tous les détails et toutes les
combinaisons. Ce serait d'ailleurs nous assujettir à une répétition
inutile de ce que nous avons dt^à dit. Les personnes qui auront
bien, voulu méditer avec attention les indications précédentes ar-
riveront au portail avec une masse de connaissances déjà suffisante
pour juger avec rectitude du système de la construction de chacune
de ses parties, aussi bien que pour les décrire avec précision. Nous
nous contenterons de les prévenir que c'est là principalement que
la sculpture du Moyen-Age a étalé ses compositions synd>oliques,
historiques et astronomiques, ses rapprochements de l'ancienne et
de la nouvelle loi, des vertus et des vices.
Les zodiaques et les calendriers se rencontrent le plus souvent
le long des pieds-droits des portes. Les premiers représentent les
signes des constellations que parcourt le soleil; les seconds, les
mois de l'année, caractérisés par l'occupation spéciale à chacun
d'eux, pour diverses classes ou professions de la société. On devra
examiner, dans les deux cas, les singularités et anomalies que peu-
vent présenter ces figures, soit dans leurs formes, soit dans leur
nombre, soit dans leur disposition.
Un autre genre de figures que l'on rencontrera souvent dans les
portails et les porches extérieurs, et(|ui semblent appartenir d'une
manière particulièrea cette façade extérieure de l'édifice, sont les
lions, comme nous l'avons déjà dit. Les formules que nous avons
citées autorisent à penser que la présence de ces figures était obli-
gatoire , au moins à certaines époques et dans certains pays, pour
leur imprimer un caractère solennel et régalien, soit comme siège
de justice ecclésiastique ou civile, soit comme emplacement affecté
à certains actes qui devaient être entourés d'une grande authenti-
cité. Plus de semblables idées sont éloignées de nos mœurs, et plus
on devra mettre de soin dans la recherche de ces lions, qui fig\irent,
tantôt sculptés isolément et portés sur des colonnes en avant du
monument, tantôt amoncelés en groupe dans des sty lobâtes , des
chapiteaux ou des impostes.
&85
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
IM
Nous avons déjà signalé le goût de nos devanciers du XIII' siècle
pour tous les jeux de la lumière décomposée ou réfléchie. C'est à
eux que l'on doit les verres colorés que l'on trouve dans les revê-
tements de certains portails et clochers, et qu'ils y appliquèrent
quelquefois sur de vastes surfaces. On peut concevoir l'effet mer-
veilleux qui en résultait quand le soleil venait à les frapper de ses
rayons. Il subsiste malheureusement bien peu d'exemples et même
de vestiges de cette splendide décoration, dont les moindres par-
celles devront être recherchées et signalées (il.
H. Nous avons indiqué les circonstances qui introduisirent,
postérieurement à son origine , les clochers dans le plan de la ba-
silique chrétienne, et nous avons fait remarquer combien il était
rare de les rencontrer en France isolés de l'église , comme cela a
fréquemment continué d'avoir lieu dans d'autre» contrées, et par-
ticulièrement en Italie.
Au W" siècle, et le plus souvent à partir de cette époque, le clo-
cher unique ou le clocher principal, quand il y en eut plusieurs,
fut placé au centre de la croisée. Cette circonstance, qui l'a fait
reposer sur les quatre piliers centraux de l'édifice, lui a imprimé le
plus souvent aussi la forme quadrangulaire au moins à sa base. Il
en est de même, au reste, des autres constructions de ce genre,
toujours appuyées sur des masses rectilignes, quel que soit leur
emplacement. Dans les clochers élevés, cette forme s'arrondit
plus ou moins vers le sommet, par les soins qu'ont pris les con-
structeurs d'abattre une ou plusieurs fois icsangles, dans le passage
d'un étage a un autre, de manière à présenter quelqu'un des poly-
gones engendrés par le carré, quand la décroissance ne va pas
jusqu'au cercle proprement dit. Dès une époque fort reculée on a
commencé à employer à l'établissement de clochetons l'espace laissé
libre par les quatre premiers angles abattus.
Lgliss d'.linay [Lyon],
à la masse de l'église, et auquel on a donné le nom de hniterne. Ot
étage , très-apparent au dehors , présente souvent , dans ses revê-
tements, son ornementation, les baies dont il est percé, les contre-
forts ou clochetons destinés à le consolider, des faits particuliers,
dont il sera nécessaire de tenir compte.
Les clochers ont reçu divers noms, suivant leurs forme*. On le»
a appelés tours, lorsqu'ils finissent brusquement en terrri«seou par
un toit peu visible;
l¥otre~Damé-dc-l'artt.
Fig. 22t.
Il est l'are (jue le clocher central ne porte pas sur un étage ajouté
(1) On uoiive un exemple très-intÉicssani de ce système de décoration à la
catliédrale de Tours, que M. Giiérin, arcliitccte du département d'Indre-el-
Loirc, a commencé de restaurer.
Derrière le verre, on trouve tantôt des feuilles de métal et tantôt de la pein-
ture.
A la catliédrale de Nantes le verre est remplacé par l'ardoise, dont la couleur
contraste avec celle de la pierre de manière i faire croire par moments que les
réseaux ornant les faces de la maçonnerie sont garnis de verre.
(iVo(« de .M Césnr Daly.)
Fi<j 2:H.
pyramides, quand la construction se termine en pointeau moyen
de retraits successifs rectilignes ou curvilignes; flèches, dans le cas
où le sommet en est surmonté d'un toit aigu; dômes, si ce loit
s'arrondit en segment sphérique ou en pyramide curviligne; ai-
guille quand il présente un c<\ne ou une pyramide trés-allonj;<-e 1 1
tout d'une venue.
Normandie.
Sclnt-Dtnit.
t î;
487
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DKS TRAVAUX PUBLICS.
488
Fig. 225.
Fig. 226.
On lencontre encore, surtout dans les campagnes, le cloclier à
deux ou quatre pignons, dont la masse quadraugulaire est termi-
née par un toit à pignons peu aigus ;
Fig. -227.
Fig. 228.
le clocher à toit de charpente, constituant une portion notable de
sa niasse; le clocher de charpente revêtu de plomb ; le clodier de
charpente couvert d'ardoise ou de bardeau ; le clocher arcade, com-
posé d'une simple arcade à jour, sous laquelle la cloche est sus-
pendue.
.Midi de la France.
Fig. 229.
Les principaux faits à examiner dans la description d'un clocher
sont :
1° Son emplacement;
2° Le plan de sa base e.t les modifications qu'éprouve ce plan ;
8" Les matériaux et le système de construction ;
4° La hauteur jus(|u'au sommet, et la hauteur des diverses par-
ties, quand elles établissent des divisions apparentes ;
5" La forme, les revêtements, l'ornementation de la masse, puis
de chacun des étages, en allant de la base vers le sommet, y com-
pris ses parties constituantes, telles que contre-forts, colonnes, ar-
cades ou amortissement, baies ouvertes ou figurées, et dans le pre-
mier cas pourvues ou non de divisions horizontales formées par
des précinctions, des larmiers ou des abat-sons ; fenêtres, œils-de-
bœuf, clochetons, édicules, niches, dais, statues, couronnements ;
6° Le couronnement terminal , les frontons , pignons , mâchi-
coulis, créneaux, corbeaux, corniches, balustrades, antefixes, ai-
guilles, clochetons ;
70 Le toit, sa forme, sa hauteur ; la matière dont il est couvert ;
le nombre de ses faces, les œils-de-bœuf et autres baies dont il est
percé; l'ornementation de ses arêtes et de ses faces, en relief, en
intaille ou en couleur ; les imbrications ou contre-imbrications qui
peuvent y être figurées;
8" La matière et la forme de la croix par laquelle le clocher se
termine le plus souvent en France; les objets qui pourraient l'ac-
compagner ou la remplacer.
Nous avons indiqué ci-dessus les divers points d'une église où
l'on peut rencontrer des clochers ; toutes les fois qu il en existera
plusieurs, chacun d'eux devra être décrit avec des détails propor-
tionnés à son importance. On distinguera par le nom de clocheton
ceux qui sont secondaires ou qui, même isolés, n'ont jamais été
destinés à recevoir des cloches, mais seulement à concourir à la
décoration de l'édifice. En France, dans les églises épiscopales et
abbatiales, le nombre des clochers est le plus souvent de trois, sa-
voir : un principal au centre de la croisée, et les autres aux deux
côtés du portail.
L'ornementation du clocher se compose, aux XI* et XII"" siècles,
d'arcades superposées par étages (ordinairement au nombre dt-
deux, dont les inférieures sont figurées et les supérieures libres .
Pour peu que ces baies offrent quelque étendue, une colonne cen-
trale les subdivise en arcades secondaires. La décoration de ces di-
vers amortissements, de leurs archivoltes, colonnes ,* impostes ;
des contreforts, ressauts et revêtements, est souvent fort riche,
et présente un caractère remarquable d'unité et de fermeté.
Plus tard, les arcades du clocher s'allongent en lancette, n'offrant
plus qu'un seul étage; la colonne centrale devient prismatique et
annelée à un ou plusieurs points de sa hauteur; elle finit par dis-
paraître de l'arcade, de plus en plus aigué, bordée de colonncttes
et d'archivoltes en retraite. C'est alors qu'arrivent les toits élancés
en pierre, chargés d'imbrications figurées. Souvent, à cette der-
nière époque, le clocher central devient secondaire, de principal
qu'il avait été jusque-là.
Au XIV* siècle, la baie perd ses colonnes et son ornementation
fine et délicate. Plusieurs ressauts, larmiers ou abat- sons viennent
la diviser de nouveau à l'intérieur. Les contre-forts des quatre an-
gles se renflent et se prolongent en clochetons arrondis. Les cré-
neaux et mâchicoulis, plus ou moins ornés, signalent l'introduction
du clocher comme poste militaire dans la tactique de l'époque.
Avec le XV« siècle arrivent les baies évasées ou surbaissées ,
pourvues de meneaux au moins à leur partie supérieure, et d'abat-
sons au-<lessous ; la division des étages marquées par des larmiers
extérieurs, les lignes contournées et flamboyantes, les arcs ram-
pants et autres ornements de détail de l'époque, décrits ci-dessus ;
^89
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
MO
leur exécution d'abord fine et légère s'appesantit à mesure qu'elle
approche de la Renaissance.
C'est encore au XV^ siècle qu'appartiennent les clochers de char-
pente revêtus en plomb, et que ce système de construction permit
de hérisser de crosses et autres expansions végétales.
Sainte-ChafelU.
i,:db^
Fig. 230.
Le XVI' substitua à tout ce luxe de pointes et d'aiguilles plu-
sieurs ordres superposés, d'abord d'un travail fin et délicat , puis
en moindre nombre, de proportions forcées, et ce que nous avons
appelé /îam6o)/ant de la Renaissance, avec ses bossages , ses sur-
laces rustiquées et son ornementation incohérente et théâtrale. En
général , à mesure qu'on revint plus complètement à l'imitation
bien ou mal entendue de l'antique dans l'architecture religieuse, le
clocher devint plus embarrassant à placer, à élever à une hauteur
considérable et à décorer. Aussi son importance n'a-t-elle fait que
décroître de jour en jour , jusqu'à ce qu'on soit prochainement ra-
mené à l'isoler de nouveau de la basilique, comme à l'époque de
son introduction.
!. Ainsi que nous t'avons déjà dit, il est rare qu'à partir du
Xl° siècle la sacristie soit une portion constituante de l'église ou
se distingue par les soins apportés à sa décoration extérieure.
Comme cependant l'un ou l'autre de ces faits peut se rencontrer ,
il sera toujours nécessaire de l'examiner et d'en rendre compte sous
ce double rapport.
Fin de la deuxième Inslruclion du Comité historique des Arts et Monu-
ments, rédigée par MM. P. Mérimée et Albert Lenoir.
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ÉCOLE FLOTTANTE DE NATATION
(dite bains d'orléans),
CONSTRUITE SUR I.A GAROBTNE DEVANT BORDEAUX,
A'ifrh les pians et soos la direclioo de S. J. LAFARGIE , ardiJIfrtf. '
Cet établissement fut soigneusement examiné par moi lors de
mon passage à Bordeaux il y a quelques mois, et la description qui
suit, ainsi que tous les dessins qup la Revue donne aujourd'hui,
ont été faits d'après les documents qu'à ma prière l'habile auteur
des bains flottants a bien voulu m'adresser.
J'eusse été heureux de communiquer aux lecteurs de la Reçue
les dessins et les descriptions de plusieurs autres constructions et
monuments importants , récemment exécutés .dans le» villes que
j'ai eu l'occasion de visiter ; mais tous nos confrères des départe-
ments ne m'ont pas tenu parole en m'envoyant les documents
qu'ils m'avaient promis. J'ai eu plus d'une fois lieu de m'aperce-
voir qu'il fallait renouveler fréquemment la même demande auprès
d'eux pour leur persuader qu'elle était réellement sérieuse; je pro-
fite donc de cette occasion pour assurer ceux auxquels j'ai adressé
des propositions de cette nature, et qui ny ont pas encore re-
pondu , que c'est avec chagrin que je reste sans reccToir de leurs
nouvelles. Je remercie ceux qui ont compris, comme M. Lafargne,
que, pour opérer un pellicment général parmi les architectes, il
faut reconnaître l'inlluence de la preste et en profiter. Par la prettt,
on communie à distance, la parole franchit l'espace, et Ion se
communique réciproquement sa pensée, plus commodément mtae
que de vive voix; car on réfléchit davantage en écrivant, et puis,
verba volant, scripta tnancnl, on peut revenir à loisir sur ce qui est
écrit, de telle sorte qu'une publication périt>dique permet à chacun
de choisir son heure pour s'entretenir avec ses confrères. >ons in-
sistons donc auprès des architectes de province, pour qu'ils nous
envoient chaque mois le bulletin de ce qui se fait dans leur «lepar-
tement de nature à intéresser l'histoire, la théorie et la pratique de
l'architecture, pour qu on nous tienne régulièrement au courant
des projets qu'on médite, des édifices qu'on construit, des recher-
ches archéologiques qu'on entreprend, etc. Quand bien mêtne il ne
serait rien fait dans le mois, nous toudrion* qu'on nom Catmiimtél.
car une correspondance régulière nous arrivant de chaque dépar-
491
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS,
kn
tement, en en faisant le dépouillement, nous serions conduits à des
réflexions sur l'activité relative des départements et à chercher
pourquoi cette activité se montre si énergique d'un côté et si dé-
bile de l'autre.
CÉSAB DALY.
Cet établissement repose principalement sur deux flotteurs en
fer (tôle) , en forme de fuseau et tronqués dans le haut; ils sont con-
struits ainsi pour présenter moins de résistance au flux et au reflux .
Ils ont 48 mètres de longueur, et leur plus grand diamètre est de
2"" 20; leur poids est de 32000 kilogrammes. Leur tonnage, calculé
à un tirant d'eau de l^lO ou du rayon, est de 1.51 tonneaux, sur
lesquels il faut déduire le poids d'environ 1.5 tonneaux que produi-
sent les constructions en bois au-dessus de la ligne de flottaison.
II reste donc, déduction faite, 136 tonneaux correspondant au
poids de 2ôoo personnes , poids que l'établissement peut porter
avec toute la sécurité désirable.
Quoique le chiffre de 2.500 soit bien plus considérable que celui
des personnes ordinairement réunies aux bains, la sécurité est
d'autant plus grande que le poids des 2500 personnes est considéré
comme supporté par les flotteurs seulement, tandis que, le plus
grand nombre des baigneurs étant presque constamment dans
Ueau , leur poids diminue selon le principe bien connu d'Archi-
raède.
Pour régler le tirant d'eau d'une manière précise et pour donner
aux bassins plus ou moins de profondeur, les flotteurs sont munis
de robinets et de pompes pour y introduire ou en expulser la quan-
tité d'eau suffisante; de plus, deux cloisons en tôle avec robinets
de communication divisent chaque flotteur en trois compartiments,
de manière à pouvoir réparer un accident sans être obligé de met-
tre à sec un flotteur entier.
L'établissement est ainsi composé :
Un grand bassin.rectangulaire de 30 mètres de longueur sur 12
mètres de largeur et ("-fO de profondeur ordinaire. Il est facile,
comme on la vu plus haut, d'augmenter ou de diminuer cette der-
nière quantité. Ce bassin est commun à tous les baigneurs.
Aux extrémités sont deux autres bassins de forme hexagonale,
chacun de 12 mètres sur 10 mètres; ils sont séparés du bassin
principal par une claire-voie mobile servant à préserver du tu-
multe les personnes qui désirent se baigner tranquillement. Au-
dessus de celte séparation s'étendent, à chaque extrémité, deux
galeries transversales supportant les pavillons.
La plate-forme, ou plancher du fond des bassins, est faite avec
de fortes longrines longitudinales en sapin du Nord, liées A des tra-
verses en même bois par des boulons en fer à écrou ; de fortes plan-
ches sont clouées sur les traverses à 0°'02 de distance de l'une à
l'autre, afin de laisser écouler la vase. En cas d'accident, des plan-
ches pareillement disposées sont clouées au-dessous des longrines.
Ce plancher est fixé aux flotteurs par des colliers et des supports
en fer avec des pièces de bois moisées verticalement à chaque tra-
verse, et venant se lier au plancher des galeries.
Le pourtour des bassins est fermé par une claire-voie; tous les
angles sont bien arrondis ; tous les bois, taillés de manière à donner
toute sécurité aux baigneurs et à garantir les flotteurs de tout choc
nuisible. Le long de cette claire- voie est fixé un banc dans l'eau,
sous les galeries, afin de pouvoir prendre des bains assis lorsqu'on
le désire.
L'enceinte extérieure et les bordages sont faits en fortes plan-
ches de sapin fixées horizont<dement sur une charpente parfaite-
ment assemblée, et composée de pièces verticales et horizontales en
bois de sapin liées ensemble par des croix de Saint-André. Une
grille en fer est établie à chaque extrémité des bordages, afin de
laisser un libre courant à l'eau et d'empêcher les corps étrangers
de s'introduire dans les bassins.
A i" 20 au-dessus de la ligne ordinaire de flottaison et au pour-
tour des trois bassins, sont établies des galeries couvertes commu-
niquant à vingt chambres disposées pour les baigneurs du grand
bassin ; chaque chambre contient douze petites armoires pour ser-
rer les habits d'autant debaigneurs. En outre de ces 240 places au-
tour des galeries longeant les bassins particuliers, se trouvent 56
cabinets pour les baigneurs (pii désirent être seuls pour se préparer
aux bains. Les cabinets particuliers, les chambres et leurs armoi-
res sont marqués de numéros correspondant a ceux placés sur les
caleçons de chaque baigneur, de telle sorte qu'il ne peut y avoir de
confusion lorsrju'on reprend ses vêtements.
Au niveau des galeries et au centre se trouvent, en entrant, un
péristyle et les bureaux du Contrôle; vis-à-vis, un salon servant de
café ; aux extrémités des pavillons sont les chambres de l'adminis-
tration et du gardien , quatre lingeries et dépôt des ustensiles né-
cessaires, plus quatre sièges d'aisance; le tout ayant issue sur les
galeries.
Une tente, combinée de In manière suivante, couvre les bassins,
pour la commodité des baigneurs. Cette tente est composée de pan-
neaux mobiles reposant sur de légères fermes en fer et en bois. Des
bandes de toile goudronnées de 0'"02 de largeur sont clouées sur
des cadres en bois à 0'"02 de distance de lune à l'autre, entrelacées
de manière à se couper à angles droits et à former un damier a
jour. Cette combinaison amortit l'ardeur des rayons du soleil ,
laisse librement circuler l'air et offre un coup d'oeil très-agréable.
La charpente des galeries, des chambres et des pavillons est re-
couverte de fortes toiles passées à une peinture préparée avec plu-
sieurs corps gras combinés pour une longue durée.
Les deux pa\illons éle^cs au-dessus des galeries transversales
viennent rompre la monotonie d'une longue ligne horizontale et
fournir en outre des dépôts de linge, quatre terrasses servant d'é-
gouttoirs pour le linge mouillé qui a servi aux baigneurs, et 32 ca-
binets ordinairement réservés pour les pensionnats.
L'établissement est mouillé dans la rade par le moyen de quatre
fortes chaînes ancrées, deux en aval et deux en amont , avec leurs
bittes disposées de mnnière à manœuvrer facilement au flux et au
reflux.
Un pont mobile en bois à deux travées, reposant sur un ponton,
sert de communication entre le quai et les bains.
Telles sont les dispositions générales de ces bains flottants, ter-
minés depuis 1840 (juin).
Cette construction ayant été faite à terre, sa mise à l'eau offrit
d'assez grandes difficultés. L'architecte directeur des travaux, éga-
lement chargé de cette opération, fut assez heureux pour la voir
réussir; au bout d'une heure, cette vaste construction, qui semblait
fixée au sol, assise sur un plan incliné combiné d'une manière par-
ticulière pour vaincre les diflicultés que présentait le déplacement,
franchit l'espace qui la séparait du fleuve et s'avança tranquille-
ment sur l'eau, en présence des autorités de la ville, et aux accla-
mations de plusieurs milliers de personnes réunies sur le rivage.
Cet établissement, que monseigneur le duc d'Orléans daigna
honorer de son auguste patronnage, fut entièrement construit dans
493
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
iM
l'espace de deux mois; on y reçoit gratis les soldats de la garnison
et les élèves des écoles gratuites. Ouvert au public après un exa-
men et un rapport favorables de MM. les ingénieurs des ponts et
chaussées à M. le préfet de la Gironde, rien n'est venu troubler la
confiance publique , la solidité de ce curieux établissement , qui
procure un ornement à la rade et un délassement salutaire aux
habitants de Bordeaux.
CHAUFFAGE ET VENTILATION DHOPITAL.
Dans le système de chauffage et de ventilation que nous allons
décrire, on s'est proposé d'obtenir, le plus simplement et le plus
économiquement possible, les résultats suivants :
Produire une ventilation qui suffise pour renouveler l'air d'une
salle d'hôpital en moins d'une heure, et qui corresponde au moins
à 20 mètres cubes par heure et par lit.
Répartir cet air dans toutes les parties de la salle, de manière à
fournir à chaque malade un air dont la pureté indispensable à sa
guérison lui procure une respiration facile, et dont la chaleur le
maintienne dans un équilibre de température qui souvent ne lui
est pas moins nécessaire.
Obtenir à volonté l'uniformité de température et de ventilation,
ou produire autour de certains lits, pour des raisons quelconques,
une ventilation et une élévation de température plus grandes que
celles dont les autres malades ont besoin.
Exposé du système de chauffage et de ventilation.
Dans chaque salle du rez-de-chaussée sont deux calorifères
rectangulaires en fonte et en tôle, disposés pour brûler des houilles
sèches. Dans ces appareils, l'air extérieur, appelé dans un canal
en maçonnerie, arrive sous le foyer, s'échauffe, et s'échappe dans
toutes les directions par de larges bouches de chaleur. L'intérieur
de chaque calorifère est en fonte, et ne peut jamais rougir; la par-
tie qui reçoit le rayonnement du foyer forme un bain de sable
destiné à tenir chaudes les tisanes des malades. Ce bain de sable
est accessible des deux côtés sur la plus grande dimension de l'ap-
pareil, auquel on donne une forme allongée pour qu'il reste plus
d'intervalle entre les lits et chaque calorifère, (à's appareils sont
ceux que nous avons décrits dans un précédent article (Voy. PI. 13
et col. 211).
Au premier étage, se trouvent deux calorifères semblables. La
fumée des calorifères du rez-de-chaussée monte dans les appareils
du second pour se réunir à celle de ces derniers. En sortant de ce
second appareil, la fumée s'élève verticalement, traverse le plan-
cher, et monte dans la cheminée de ventilation, où elle produit
un échauflement de l'air, suffisant pour l'appel que nécessite le
renouvellement continuel de l'air dans les salles.
Sous le rapport de l'économie de combustible, cette disposition
ne laisse rien à désirer. Les produits de la combustion, après avoir
élevé la températxire de l'air appelé de l'extérieur pour le chauffage
des salles, chauffent encore l'air vicié dans les cheminées pour pro-
duire la ventilation. Enfin, on profite du rayonnement des appa-
reils et de celui des tuyaux à fumée.
L'égalité de température dans toutes les parties de la salle se
trouve déterminée par l'aniformité de la ventilation, qui distri-
bue également l'air chaud autour de chaque lit. Les conduits à
fumée sont disposés de manière à rendre les nettoyages faciles et
aussi rares que possible.
Vemtilatiob.
Les calorifères sont placés de manière à ce que l'air appelé de l'ex-
térieur, et qui s'échappe par le» bouches de chaleur, ait auUntde
chemin à faire des deux côtés pour arriver aux parties de la saile
qui en sont le plus éloignées, c'est-à-dire que la distance qui les
sépare est à peu près double de celle qui existe entre chacun
d'eux et l'extrémité de la salle qui en est le plus rapprochée.
Pour que l'air chaud soit réparti uniformément dans toutes les
parties de la salle et autour des lits, des cheminées de ventilation
sont placées entre chaque paire de lits, et munies cbacone d'un ori-
fice fermé par une trappe dont on peut régler la position de ma-
nière à obtenir exactement une égale vitesse d'air par toutes le»
ouvertures.
La partie inférieure de cette cheminée est disposée en table de
nuit, à deux portes, pour le service des lits entre lesquels elle se
trouve. De petits trous permettent qu'il s'établisse un faible cou-
rant d'air, de manière qu'il ne puisse jamais se dégager dans la
salle d'émanations qui affectent désagréablement l'odorat. A la
hauteur des lits et à portée des malades, les cheminées de venti-
lation portent au-dessus des tables de nuit de petites tablettes en
bois servant à poser les verres et les tasses dont les malades peu-
vent avoir besoin.
Les dimensions des cheminées s<mt calculées pour une ventila-
tion de 800 à 1 000 mètres cubes par heure et par salle, c'est-à-dire
à plus de 20 mètres cubes par heure et par malade.
Au premier étage, des chemine^ de ventilation semblables se
trouvent entre les lits; mais elles ont des dimensions plus grandes,
parce qu'elles doivent encore servir au passage de l'air appelé du
rez-de-chaussée.
Sous le comble, les cheminées partielles se réunissent dans
deux cheminées générales construites en plâtre, et dans lesquelles
la ventilation s'opère par réchauffement de l'air contre les tuyaux
à fumée. A la partie supérieure, les cheminées sont fermées, et l.i
sortie de l'air s'effectue latéralement par quatre ouvertures, fer-
mées en partie par des volets reliés deux à deux par des tiges arti-
culées, et disposées de manière a ce que le vent qui agit dans une
direction et ferme l'une des ouvertures, ouvre forcément celle
qui est opposée et favorise par conséquent l'évacuation de l'air
appelé.
Ce projet a été reconnu comme le meilleur de ceux qui ont été
proposés au concours pour les salles de sorofuleux a l'hôpital des
enfants malades. ISous y avons établi les appareils de chaufTai^
semblables à ceux que nous avons représentés dans la PI. 13 de
cette année. Quant à la ventilation, l'administration ne l'a pas
jugée indispensable à l'assainissement des salles de malades, et
notre système, bien qu'approuve par la commission, n'a pas été
exécuté à Paris : il l'a été dans l'infirmerie du collé||:;e d'Orléans.
Lbgekde db la planche 17.
Fig. t. Coupe longitudinale d'une partie d'un corps de bâ-
timent.
495
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
496
La Fig. 2 est une coupe transversale faite par le milieu d'une
des petites cheminées de ventilation placées entre les lits.
a, calorifère à air chaud en fonte, avec bain de sable, étuve, et
larges bouches de chaleur pour le rez-de-chaussée.
a', calorifère semblable pour le premier étage.
6, tuyaux à fumée du rez-de-chaussée.
c, tuyaux à fumée du premier étage.
d, conduit qui amène l'air extérieur.
g, g, g..., cheminées de ventilation pour le rez-de-chaussée.
e, e,e, tables de nuit ventilées.
», i, t..., orifices de ventilation dont l'ouverture est réglée par un
registre à tourniquet.
h h..., cheminées de ventilation du premier étage recevant l'air
vicié qui est appelé par les tables de nuit de cet étage et par celles
du rez-de-chaussée.
Il, conduits horizontaux recevant l'air appelé par les petites
cheminées, et le conduisant à une cheminée principale m.
0 0, système de volets reliés les uns aux autres, et disposés de
manière à ce qu'il y ait toujours au moins deux ouvertures de
libres, quelle que soit la direction du vent.
René DUVOIR.
L'OPÉRA ,
Etudes théoriques et pratiques d'un théâtre pour l'Académie Royale
de Musique.
6CITE. ( Voye: col. Aï3 de ce volume.)
L\ Salle. — Sa DiSTBiBtxiON.
Dans toutes ses parties, l'art a de la grandeur, même lorsqu'il
s'agit d'un intérieur de salle de spectacle pour une société blasée
par l'excès de la civilisation.
On peut lutter encore dans ce cercle étroit pour satisfaire à la
fois aux conditions de l'utile et du beau. Mais avec les données
artistiques qui dérivent des habitudes de notre société moderne,
on ne pourra jamais obtenir dans l'ensemble d'une salle de spec-
tacle, et particulièrement d'une salle d'Opéra pour Paris, qu'une
perfection très-relative.
J'aurai à parler de l'acoustique , de la lumière artificielle qu'on
nomme éclairage, sans oublier de faire sentir la différence notable
qu'il doit y avoir entre les conditions de l'éclairage de la scène et
celles de l'éclairage de la salle, que sépare, en fait, une imper-
ceptible démarcation.
J'aurai à parler de perspective avant mèmed'aborder la descrip-
tion du théâtre.
J'aurai à parler, avant tout, de la forme de la salle, si rigoureu-
sement commandée par les besoins qui se rattachent aux précé-
dentes propositions.
Dans les théâtres modernes, compris l'Opéra, qui a été souvent
accusé de n'être qu'un spectacle pour les yeux, on doit parfaite-
ment entendre de tous les points de la salle; mais la scène, à
moins de sacrifier des combinaisons faites pour assurer à la plus
grande masse possible des spectateurs le plus de jouissances pos-
sible, ne peut être également bien vue de partout.
Dans tout théâtre lyrique l'ouïe doit jouir d'un privilège; mais
voulant concilier, autant qu'il se peut, ses exigences avec celles de
la vue, nous avons fait des efforts pour que le sacrifice ne fut pas
absolu. En effet, si des spectateurs se trouvent placés sous un
angle qui ne leur permette pas de voir le développement de tous les
accessoires scéniques, ils peuvent jouir au moins de la vue de tout
un côté du tableau ; et plus rapprochés de la partie qu'on appelle
avant-scène, la seule où soit réellement portée l'action du drame,
il s'ensuit, pour eux, que le sens le moins favorisé sous un certain
rapport, se trouve, sous un autre, plus favorisé par ce rapproche-
ment.
Ce n'est pas tout, qu'on le remarque bien ; le spectacle est con-
sidéré ici dans ses rapports avec les mœurs, les goûts, les usages
très-justifiables, très bien calculés, très-bien entendus, de notre
société moderne; je le répète. Et ces spectateurs eux-mêmes,
qui savent très-bien, avant d'entrer dans la salle, qu'ils pourront
être placés de la manière que j'ai dite, et qui ne s'en plaignent pas,
recherchent au contraire par calcul, tous les habitués de l'Opéra
le savent, ces places spéciales d'où la vue atteint bien autre chose
qu'un chAssis couvert de toile peinte, et d'où soi-mén)e on est vu
de la plus grande masse possible des spectateurs, ce qui est d'un
prix inestimable pour quelques-uns, — je dirais pour tous si je ne
respectais les exceptions.
En effet, dans les classes où l'on veut avoir l'air de vivre avec
distinction, le plaisir, les émotions qui naissent du spectacle sont
appréciés certainement ; mais ce spectacle perdrait son principal
attrait s'il était rendu dans une salle où chaque sjjectateur, aux
prises seul avec le drame, se trouverait hors des conditions où le
placent nos habitudes. En deux mots, il faut qu'une salle de
spectacle, et celle de l'Opéra spécialement, malgré ses vastes di-
mensions, pré.senfe les spectateurs dans des conditions presque
semblables à celles qu'offrirait une réunion dans un salon ; il faut
que chacun ait son rôle de représentation ; on y va pour voir, on y
va pour être vu. Tous sont autant là pour ce spectacle de la salle
que pour le spectacle de la scène. Pour nous, la salle doit donc tou-
jours par sa forme, par sa distribution, par sa décoration , satis-
faire à cette impérieuse exigence : tel a été le principe dominant
de la nouvelle étude.
Le plan qui répond le mieux aux conditions qu'impose le sys-
tème que nous défendons, et nous avons, ailleurs, de plausibles
motifs de justification, est, sans contredit, le plan circulaire;
c'est-à-dire celui où le plan de la salle, figurant un cercle, laisse a
la scène une ouverture qui varie entre le quart et le cinquième de
sa circonférence.
Dansce dernier parti, plus favorable qu'un autre aux disposition.s
symétriques, les spectateurs se trouvent, par rapport les uns aux au-
tres, dans la situation la plus convenable pour jouir du coup d'oeil
général qu'offre la réunion du public, l'ensemble de toute la salle,
qui devient ce qu'elle doit être chez nous, j'ose le dire, un vaste
et magnifique meuble, une étagère splendide, brillante de variété
et de mouvement, sous laquelle se cache un peu la trop grande pré-
tention monumentale que les anciens, dans leur condition diffé-
rente, devaient faire valoir.
Mais si vous entrez dans le parti des anciens, ce que j'ai cru pos-
sible comme tant d'antres, sans avoir nourri trop longtemps ce-
pendant cette erreur de jeunesse, vous faites un hémicycle, vous
497
RKVUE DK L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
«M
voyez alors de toutes les places ou à peu près ; mais l'effet scénique
perd de sa magie, et le spectacle si animé et si utile de l'intérieur de
la salle est annulé; le théâtre, sans charme, n'est plus ajusté aux
mœurs de la société française du XIX" siècle.
.le n'examinerai pas successivement les plans de salles circon-
scrits entre ces deux principes. Je me horne à dire que les plans
qui se rapprochent le plus du premier, se rapprochent le plus de
notre perfection relative ; et que les plans qui se rapprochent du
principe antique, s'éloignent le plus de cette perfection.
La forme circulaire n'est pas seulement préférable par les rai-
sous qui viennent d'être exposées : elle se prête encore à une meil-
leure distribution de la lumière dans la salle, ce qui n'est pas sans
importance; il y a là un attrait qui influe sensiblement sur les dis-
positions du spectateur. En outre, je crois cette forme encore par-
ticulièrement favorable à l'émission de la voix.
Pour de tels avantages, on peut, sans de grands inconvénients,
priver quelques spectateurs de la vue d'une fraction des arrière-
plans du théâtre, surtout quand leur rayon visuel s'étend entière-
ment sur une vaste avant-scène, surtout quand dans sa traversée
oblique du théâtre l'œil saisit environ les quatre cinquièmes de l'é-
, tendue de la toile de fond : dans ces conditions, je ne sache pas
que ce soit perdre une portion appréciable de spectacle.
La salle de la rue Lepelletier est en quelque sorte notre spéci-
men. Elle brille en partie par toutes les conditions que nous avons
développées, et nous devons dire que toutes les combinaisons utiles
qu'offrent sa forme et le principe dominant de sa décoration ap-
partiennent au génie de Louis, grand architecte, qui a bâti le Pa-
lais-Boyal et la salle des Français , monuments où les défauts
n'obscurcissent pas les grandes qualités; qui a bâti, pour sa gloire,
le magnifique théâtre de Bordeaux, où l'on retrouve, dans le plan
de la salle, quelques-unes des dispositions que le même architecte
introduisit dans la salle d'opéra de la rue Richelieu, effacée du sol
après le sanglant attentat, et qui servit de modèle à la salle de la
rue Lepelletier.
Les modifications apportées au plan primitif de Louis dans
le contour de la salle de la rue Lepelletier, ont donné peut-
être un peu plus de pureté à quelques lignes ; mais à tous autres
égards , en tout ce qui a rapport à l'effet général , elles m'ont paru
insensibles. Les modifications faites à la coupe du plafond ne nous
ont pas paru aussi heureuses que les premières.
J'ai rempli un devoir en attribuant au célèbre Louis tout ce qui
lui revient de cet important travail , car le plan de la salle de
la rue Lepelletier, comme celui de l'ancienne salle de la rue
Richelieu, — je répète plan de la salle, — me parait offrir
dans son ensemble, à peu de chose près, la plus heureuse des dis-
positions.
J'ajoute que la distribution générale de la salle de l'Opéra de
Paris présente, sans nul doute, les plus utiles conditions pour
faire, au point de vue de notre société moderne , la plus ma-
gnifique des salles de l'Europe.
Après cette profession de foi, nous sommes plus à l'aise pour dé-
fendre le parti que nous avons pris.
La nouvelle salle , comme celle de la rue Richelieu , çopime
celle de la rue Lepelletier, affecte la forme circulaire. Pans sa
distribution, nous trouvons pour les musiciens un vaste orchestre,
développpé sur toute la largeur de l'avant-scène.
Puis vient l'orchestre du public, pour lequel nous n'avons encore
pu trouver d'autre nom que son nom bâtard, comme tant de
noms appropriés aux choses du théâtre , cela soit dit sans inten-
tion d'allusions.
Les sièges de cet orchestre sont autant de fauteuils élastiques, a
do.ssiers un peu renversés, avec des accotoirs pour chaque bras, qui
sont séparés de ceux du fauteuil voisin par une division en sur-
élévation.
Le rapprochement de ces places avec la scène fait leur pius
grand mérite : c'est leur principale distinction ; elle se paie douUe,
et ce n'est pas trop.
Vient ensuite le parterre, qui, toujours placé entre l'orchestre
et l'amphithéâtre , diffère des anciens parterres par des disposi-
tions spéciales dont l'utilité n'est pas contestable.
L'espace entre chaque rang de ses places est plus considérable
que celui que l'on trouve au parterre de la salle Lepelletier. A ce
dernier, il y a 32. â centimètres; au nôtre, il y a 4â centimè-
tres. Il n'atteint pas la largeur de l'écartement des rangs de
l'orchestre et de l'amphithéâtre , mais il est suffisant pour que des
hommes de taille élevée ne soient pas condamnés, pendant six
heures de plaisir, à souffrir la plus incommode immobilité.
Le siège joue un rùle important au parterre : il sert au repos
comme partout quand il est bien conçu ; mais il est aussi un obsta-
cle à la circulation, et, bien ou mal conçu, il fera toujours obstacle.
Donc, le plus grand écartement dont nous venons de parler rendant
plus facile cette circulation , offre encore un avantage important
sous ce rapport, car on sait par combien de discourtoises apostro-
phes sont accueillis les retardataires qui s'engagent malencontreu-
sement dans les défilés trop étroits de nos parterres.
Je conteste l'utilité d'un couloir permanent pratiqué au centre
du parterrre ; et, d'ailleurs, il forme une ligne vide d'un effet dés-
agréable.
L'écartement entre les rangs et la disposition des si^es obvie à
tous ces inconvénients.
Chaque place dont la largeur est déterminée offre pour siège un
fauteuil, mais qui diffère de ceux que nous avons mentionnés.
Ce fauteuil est combiué pour que les membres du corps qui
réclament un appui constant rencontrent toujours cet appui con-
venable ; et MM. les tapissiers de l'Opéra ont encore prouvé là
que pour être bien assis, même sur un siège élastique , il convient
de poser la base du corps sur un point moins élevé que la ligae des
jarrets, et qu'il convient toujours d'avoir le corps penché en arrière.
Les tapissiers ont encore eu soin de donner assez de profondeur à
ces sièges pour que leur rebord, encore suffisamment élastique,
pût soutenir les cuisses au pli du jarret.
Voici seulement la particularité qu'offrent ces fauteuils : ils ont
un dossier mobile et cependant très-solide, mais qu'on doit tenir
rabattu sur le sié^e , soit avant le lever dq rideau après l'entrée
dans la salle, soit pendant les entr' actes; on se conforme facile-
ment à cet ordre, qui a son utilité.
Ces dossiers, aiijsi rabattus , offrent une surface unie et solide
sur laquelle, au moment des entrées et des sorties, la circulation se
fait sans çont(;stalions, avec la plus grande sùrele ; voiln le par-
terre.
Nous trouvons enfin l'amphitliéàtre, dont l'existence n'est jas-
tifiée que par la nécessité de ne pas mettre le parterre, un peu moa-
vant de sa nature, en contact trop direct avec les premières loges.
L'amphithéâti-e, disons-nous, favorise par son rapprocbemenl
des premières loge*, ce qui fait sa distinction, n'est plus qu'une an-
nexe de l'orchestre, et n'a de remarquable que la disposition de
T. V. ?*
499
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
500
ses fauteuils, imaginés pour nous laisser jouir, avec la plus grande
aisance, des agaceries lointaines de la scène, que rapprochent les
puissants télescopes de Lerebours ou de Chevalier.
L'admission des femmes à l'amphithéâtre avait l'inconvénient
de rompre l'harmonie qu'offre au coup d'oeil la sévère uniformité
du parterre, et nuisait à l'effet des toilettes des premières loges :
l'aspect de la salle y perdait. La plupart des places qui s'y trou-
vaient occupées par des femmes, très-empanachées sans aucun
doute, étaient toujours des places improductives : c'était la tapis-
serie drapée par le distributeur du billet de faveur. Tous ces atours
de toilettes, un peu excentriques quelquefois, des rentières en re-
traite de l'Académie royale de Musique, mais qui ne manquent pas
d'éclat, ont été plus heureusement distribués dans les loges des
divers rangs qui, à tous égards, sont plus convenables pour des
femmes, même lorsqu'elles sont pensionnaires de l'Opéra.
Quatre étages de loges se développent autour de la salle.
• A partir de l'avant-scène, la salle est divisée en trois grandes tra-
vées principales, séparées par de plus petites travées conr,prises cha-
cune entre deux colonnes. Chaque côté de l'avant scène est com-
posé de deux petites travées formées par trois colonnes, et l'ou-
verture de la scène constitue une quatrième grande division. La
circonférence de la salle se trouve donc coupée en quatre grandes
sections, par quatre sections plus étroites dont les deux de l'avant-
scène sont doubles. Sur les quatre groupes de colonnes s'appuient
quatre grands arcs surbaissés couronnant les quatre grandes di-
visions et portant la coupole. Cette disposition établit une notable
confraternité entre cette salle et ses deux aînées de la rue Riche-
lieu et de la rue Lepelletier.
A la droite et à la gauche du parterre on remarque encore les
loges dites de rez-de-chaussée.
Puis, dans le haut, au quatrième étage, vis-à-vis l'ouverture
de la scène, au fond de la salle par conséquent, il y a une rangée
de loges découvertes sur leurs quatre faces, ce qui est une inno-
vation, et qui n'ont que deux fauteuils dans leur profondeur. Der-
rière ces loges, le public peut deviner, mais ne le voit pas, un
amphithéâtre qui a conservé le nom d'amphithéâtre des quatrièmes.
Derrière cet amphithéâtre, plus vaste que celui de la rue Lepel-
letier malgré ses premiers rangs changés en loges, viennent encore
les loges traditionnelles du cintre, que l'administration, selon ses
vues et ses besoins, peut supprimer ou rétablir à volonté.
Une vaste coupole circulaire, conçue à peu près comme celle de
Louis, complète jusque-là la ressemblance de l'œuVre du présent
avec l'œuvre du passé. Voyons les dissemblances : elles sont d'une
très-haute importance.
Aux deux anciennes salles, le plancher de la scène prend nais-
sauce à peu de distance du pied de la colonne qui marque la sépa-
ration de la salle et du théâtre. 11 résulte de cette disposition que la
voix de l'acteur, surtout si un courant d'air est accidentellement
produit de la salle au théâtre, va se perdre dans les ciels et les ma-
chines, au lieu de suivre la direction que lui donne l'émission.
A cet égard, j'appuierai mes observations sur une autorité, et
j'espère qu'aucun artiste ne viendra me démentir.
Adolphe Nourrit , non moins célèbre par son talent lyrique que
par le talent qu'il apportait à l'exécution du drame; Adolphe Nourrit,
que d'inhabiles décisions rejetèrent trop loin ; Adolphe Nourrit,
courageux pour devenir grand artiste , et sans force pour se jouer
de l'injuste intrigue; Adolphe Nourrit, qui fut le meilleur guide de
l'administration dans l'art difficile de la mise en scène, nous dit un
jour, avec cet entraînement qu'on lui a connu : << Je voudrais
que l'avant-scène fût jetée plus loin dans la salle. Plus je me
rapproche du public, plus je me sens animé; mon illusion, à moi,
devient complète ; ce public fait partie de l'action ; si je pouvais
agir au milieu de lui, il me semblerait, pour ainsi dire, qu'en cher-
chant à le toucher de mon gantelet je trouverais pour appui le bras
de mes chevaliers!... »
Je ne puis rendre le mouvement, l'expression, unis à ces paroles
saisissantes, pour moi du moins ; mais je compris la pensée de
l'artiste, et voilà pourquoi II m'a paru indispensable, dans la nou-
velle salle, de satisfaire à cette condition en donnant naissance a
l'avant-scène à partir de la base de la deuxième colonne, et, pour
répondre au vœu de Nourrit , de placer ainsi le chanteur sous la
coupole même de la salle où doit rayonner sa voix.
Il résulte de cette disposition que, des places d'avant-scene, on
voit presque constanmient l'acteur de profil, inconvénient bien
faible à nos yeux, car ceux appelés à connaître la valeur de l'ob-
jection qui pourrait être faite à cet égard, savent, ou peuvent sa-
voir, que, vu des loges dites du manteau d'arlequin, situées sur le
théâtre, le spectacle, loin de perdre en attraits, y gagne peut-être
encore. J'ai toujours vu ces places-là très-recherchées; non poui»
tout ce qu'on peut supposer, mais parce que de là, l'effet de la re-
présentation est exceptionnel, original et plein d'intérêt. Ayant
fait admettre des personnes du monde dans une de ces loges du
théâtre, celle du maitre des ballets, elles s'étonnèrent comme nous
de reconnaître à la danse de Marie Taglioni, plus de perfection ,
plus de rectitude, plus de vigueur, plus de suavité même qu'on
n'en supposait à l'inimitable sylphide en la voyant de la salle que
ses élans électrisaient.
Ainsi placées, ces personnes, qui se trouvaient dans un reeule-
ment plus prononcé que ne doivent l'être les spectateurs des loges
situées au-dessus de l'avant-scène, regrettaient peu, sous le charme
qui les captivait, de ne pas voir les toiles de fond du théâtre. A des
degrés différents, il y aura toujours assez de tiilentsà l'Opéra pour
exciter pareil intérêt chez un nombre suffisant de spectateurs : les
loges d'avant-scène ne seront donc jamais désertées.
La distance entre l'acteur placé sur l'avant-scène et les premiers
plans des décorations n'est pas, malgré le développement de cette
avant-scène dans la salle, plus grande là que dans la salle de la
rue Lepelletier.
En effet, dans l'ancienne salle, les loges du manteau d'arlequin
dont nous venons de parler, et qui ne peuvent être considérées
que comme une création abusive dont nous sommes parfaitement
a même de signaler les inconvénients, font porter sur un second
plan le premier châssis de décoration. En outre, ces loges para-
sites ont rendu impossible, ainsi que j'en administrerai la preuve,
l'application rationnelle du plus sensible et du plus efficace per-
fectionnement ([ue soit susceptible de recevoir l'éclairage scénique.
Ces loges, créées d'abord pour les maîtres du chant, les maîtres
des ballets et le machiniste en chef, ne sont jamais occupées par
ces fonctionnaires durant leur service : à quoi bon les avoir?
Les six loges de cette nature, si ce n'est huit, établies progressi-
vement deux par deux, au théâtre de la rue Lepelletier, puis suc-
cessivement améliorées, c'est-à-dire agrandies au détriment de la
scène, et qui, d'obscures et cachées, ont fini par se découvrir comme
les loges davant-scène, ont été effacées du plan du nouveau théâtre ;
et leurs usufruitiers privilégiés, qui les défendaient sans trop de
conscience, ont trouvé une compensation dans le partage de quel-
501
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
ques loges de la salle, parce qu'un abus finit par être un droit, et
que ces droits d'abus en France sont, malgré nos belles paroles, ce
que nous nous plaisons à respecter; nous sommes si bons enfants!
Mais, du moins, les trente ou quarante spectateurs qui se réfu-
giaient dans ces retraites illicites sont devenus, en prenant place
dans la salle, un élément du personnel appelé à la meubler, comme
on dit à l'administration.
Dès lors, le premier châssis de décoration a pu être plus rappro-
ché et de l'avant-scène et de l'acteur qui y agit, et l'éclairage scé-
niqueapu recevoir son importante, son indispensable amélioration.
Quant aux deux loges du plancher de l'avant-scène, situées
dans des conditions assez difficiles à qualifier, et qui sont nuisiblcsà
l'ensemble de la représentation , j'en demande mille pardons aux
abonnés qui les recherchent, elles ont été judicieusement suppri-
mées.
Au reste, cette saillie de l'avant-scène existe dans certaines
salles lyriques de l'Italie, dans les plus vastes, et, si je ne me
trompe, il faut attribuer à cette utile disposition une partie des
avantages qu'offrent ces salles pour l'émiasion de la voix.
Il s'agissait de faire la plus belle salle connue avec beaucoup des
éléments de l'architecte Louis, parce que ceux qu'il a laisfés se
trouvaient réellement les plus puissants; et. les améliorations ap-
portées à sa pensée, s'il y a amélioration, ne viennent que du pro-
grès général qu'ont pu faire les idées depuis l'époque ou parurent
ses œuvres.
Les proportions de la salle nouvelle sont plus vastes que celles
de la salle Lepelleticr; il le fallait pour atteindre le but proposé ;
mais il ne fallait pas se Iwrner à dire : Je ferai une bien grande
salle, et la faire; il fallait encore que toutes ses proportious fus-
sent harmoniées et ré[>ondissent, malgré leurs grandes dimensk»»,
aux conditions rigoureuses qui constituent les avantages d'une
excellente salle de spectacle.
J'ai mission de prouver que rien n'est exagéré dans les propor-
tions de la nouvelle salle ; et mes preuves, je les trouve dans le ta-
bleau ci-joint, qui reproduit exactement les proportions respectives
des principales salles de l'Europe.
Tableau comparatif des dimensions des principaux théâtres de l'Europe, et de celles du théâtre décrit dans ce mimoirt ,
servant à la justification des proportions de ce dernier.
DÉSIGNATIONS
DES DIMENSIONS RELEVÉES.
Dislance enlre l'appui des loges des pre-
mières et la rampe
Distance de la rampe au rideau
Dislance depuis le rideau jusqu'au fond du
Ihéâlre
Total de la dislance enlre l'appui des pre-
mières loges cl le fond du Ihéâlre
Diamètre de la salle mesuré entre les appuis
des loges de eôlé
Largeur de l'ouverlure de la scène
Différence entre l'ouverture de la scène et le
diamètre de la salle mesuré entre les appuis
des loges de côté
Maiiraum du, retrait des loges de coté, par
rapport i l'ouverture de la scène
Hauteur de la ligne supérieure do la corniche
sur la<|uelle s'appuie la coupole, prise au-
dessus du poini le plus bus du parterre —
Hauteur depuis la corniche jusqu'au point le
plus élevé de la coupole
H,iuleur maximum de la salle
Largeur du théâtre entre les murs ou pieds-
ilroils des retraites de? décorations
18.25
8.00
10.50
36.75
18.30
11. 75
6. 55
15. 7.^
1.50
«7.55
i6.50
19.00
4.80
25.10
46.90
15.10
12.40
3.00
m. c
20.50
2.75
27.20
50 45
Sl-tftMSBOlG
ir. c
18.40
4.10
•27.60
50.10
19.00 17.00
IS.SO 45.50
5. 70
1.50 2.85
15.15
1.15
14.30
28.00
18.40
2.50
20.90
29.90
1.50
0.7.-.
15.00
1.05
19.75
3,40
25.50
48.65
17.75
(7.20
O.Î7ï
16.25
1.60
IG.05
24.00
17.85
2S.0O
20.80
0.50
4*. 10
51.40
19.50
12.70
6.80
3.40
«6. OU
1.50
17.50
22.90
m. c.
19.00
4.80
39.20
53.00
16. «0
13.50
2.70
1.33
14.50
Î.OO
16.50
24.75
m. c.
23.75
5.50
23.90
53.13
21.70
15.00
6.70
18. SO
1.50
19.80
26. 35
m. c.
23.70
5.eo
22.60
-1 PUIS.
14.50
3.30
31.00
30.60
3
25.00
51.90
33.65
«5.90
6.75
3.35
24.60
0.65
25.35
30.40
38.70
«4.50
H.UO
3. M
«.15
«S.SO
3.00
I7.S0
34.60
48.40
30.30
«3.30
7.00
5.50
«6.00
4.00
10.00
35.80
À
23.00
B.
5.00
r,
50. UO
57.00
D.
34.00
E
17.50
F.
6.50
C
5.35
30.80
4.30
.1.
M. «5
J.
58.30
OBSERVATIONS.
A. Aui théâtres de Milan cl i Napkt. le»
ipeclaieurs dr> loge* de bec Mal pUcn a
e plus grande dislance de la sc^ae que dan*
une plu
la Mlle
decrile daa> ce meaioirc.
B. Dans d'autres Ibéltm les aTint-wéDct
sont plus avancée» dan» la Mlle que rellr
du théâtre que nous décrivons.
C. le Uiéllre de Turin e«i celui ou celle
distance est le plu» considérable; elle 5'e*t
inférieure que de 80 ccoiiméuc» à celle qu'on
trouve dan» le Ihéltrc décnl dan» ce némoirr.
D. Celle grande largeur, donnée i la talle
décrite dan» ce meinaire, e*l uule pour la
beauté des proportions, mai» ne pn>doil.
pour le» ipeclateur» placé» »ur le» coté*, »«-
cun reculcmenl eiagére (Voir plot bu, le
niaiimuni du retrait de» loge» <e cAlé).
E. Celle ouverlure au ibéilre Aleuadcv, «
Sainl-Féter»bourg , n'e»l inférietirt que de
50 centimélre» a l'ouverture de \a Mfw dé-
crite dan» ce mémoire.
F. A cel égard, cette fallc i, pour le point
vifuel, un avantage »ur la lallc de la rac t*-
pelletier.
a. Lm salles qui semblent offrir i e#l éfird
une amélioration »o«l oMoaae*, •! «Me
forme n'est plu» adroini^. T>'»llleuft._ »■
rjison de sa plu» grande ouverture de tcàmt,
notre salle reprrnd de notable» avantage»
puisqu'on découvre une plu* grande »urt«c^
du Iheâlre.
n 1 r« hjiiietir» «onl «opérieore» «il «e-
,„r,', , ' :.s de l'Open d« U rar
1 , « n'atirignrni p»» celle»
la luulcur Jt San-<Jrlor»lde$"JSdeptt»»
que celle de la talle U-pelletier.
J. La largeur totale du plancbet du Iktl
ire rsl de 58" » en ; comprenanl le«re-
iraile». Ce» mraur», ou »e logeai le» d*e«»»-
lion» de ».rvi.e, n'riisirnl p»» da»»i« p«u|art
de» Ibéilre». A rttperi de rni», le» ■•cbé-
niili'S le» noinmciil »•»■
En comparant attentivement , on reconnaîtra peut-être que
les proportions de la nouvelle salle ont été étudiées en vue de pro-
duire un ensemble plus irréprocbable qu'aucun de ceux offerts par
les salles dont je mets les proportions sous les yeux de mes lec-
teurs.
Ce tableau, selon moi, tranche nettement d'importantes ques-
tions.
Encore une fois, ce n'est pas à tailler plus long et pl«» to*»»
qu'on a voulu s'amuser ; on a voulu harmonier toutes te» diwiilii»»
pour présenter un ensemble pluttSt grand par la jusl«»e da ff^
503
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
50^
portions que par une grande superficie , ou par un grand cube
d'air.
Puisque nous sommes encore à l'examen de la salle , laissons le
théâtre de côté et ne le faisons entrer dans cette discussion qu'a-
vec les parties avancées qui sont communes à cette salle.
On voit sur le tableau que le diamètre de la salle que nous décri-
vons est plus grand que celui d'aucune autre salle ; mais on doit
voir aussi que l'acteur, par suite des utiles dispositions de l'avant-
scène, ne reste pas aussi éloigné des spectateurs qu'à la Scnla de Mi-
lan, qu'à San-Carlo de Naples, deux salles essentiellement favo-
rables à l'action lyrique, malgré leurs vastes dimensions.
Qu'on ne s'étonne donc pas des résultats obtenus avec les pro-
portions de la salle décrite : éloignement convenable entre le
spectateur et l'acteur ; facilité |K)ur le chanteur d'émettre sa voix
sans efforts et d'en faire parvenir les intonations dans toutes les
parties du vaisseau avec toute la justesse qu'on peut désirer , s'il
chante juste, bien entendu.
J'ai ouï dire à un chanteur d'un talent consommé, auquel l'art a
di\ le plus utile concours pour la réforme musicale qui, dès 1820,
s'est opérée dans les usages du chant à l'Opéra, — je nomme
M. Levasseur, — qu'à son début à la Scala, il éprouva beaucoup
plus de facilité pour émettre les sons de sa voix qu'il n'en a jamais
éprouvé au théâtre de la rue Lepelletier. Cet exemple ne serait
pas le seul à citer; mais comme le caractère de M. Levasseur per-
met, aussi bien que son talent, de le prendre pour autorité, j'ai cité
ce fait afin de prouver qu'une grande salle ne constitue pas tou-
jours une difficulté pour le chanteur.
J'ajoute ce que j'ai observé moi-même. A l'occasion du sacre de
S. M. le roi Charles \ , feu M. le duc de Doudcauville, alors nii-
Yiistre de la maison du roi, donna à l'hùtel ministériel une fête à
laquelle nous eûmes l'honneur d'être invité. Le programme pro-
mettait plaisirs et surprises; deux nains, précurseurs de Tom
Pouce, furent annoncés comme des géants. On offrit pour inter-
mède une petite pastorale lyrique passablement rococo, mais qui a
pu servir à nos observatioHS.
Le jardin était richement illuminé et orné de décorations peintes,
tout comme à l'Opéra ; et le paysage de Ciceri luttait même heu-
reusement avec la natnre : le tableau ne paraissait avoir d'artificiel
que la lumière.
Je fais mes excuses de cette révélation, non au consciencieux mi-
nistre que la France regi-etta deux fois , non même à .M. le duc de
Northumberland, ce brillant chevalier de la Jarretière, cet ambas-
sadeur extraordinaire de la nation la plus commercialement phi-
lanthropique, ce roi de la fête, qui se réjouissait naïvement de la
pastorale, mais à l'ordonnateur, directeur de l'Opéra (M. Dubois),
qui en avait eu la sublime conception.
L'horloge marquait minuit. Madame Dabadre, en souliers de
satin blanc , la houlette à la main , debout, le dos appuyé contre
un moulin à vent de Ciceri, ailé comme un moulin de Montmartre,
madame Dabadie, plutôt l'Estelle de M. de Florinn, les pieds posés
SUT un gros tabouret de velours pour les préserve»- de la fraîcheur
de l'herbette, chantait à grandes rouJades, et, si j'ai bon souvenir,
appelait Némorin.
Pour la moralité , vu l'heure avancée, nous vimes apparaître à
cet appel le mari de la chanteuse, le formidable Dabadie. Placés
à plus de 20 mètres des fenêtres des salons du rez-de-chaussée, de-
vant lesquelles se tenaient les auditeurs, ces chanteurs émettaient
ainsi en plein air des sons qui parvenaient très-facilement jusqu'à
l'entrée des salons , et l'on ne s'aperçut pas que les deux artistes
fissent plus d'efforts qu ils n'avaient l'habitude d'en faire à l'Opéra
pour se faire entendre.
J'en conclus que les sons de la voix, dans des circonstances don-
nées, parviennent facilement, sans se dénaturer, à une plus grande
distance qu'on ne l'a souvent admis; et si notre citation ne tenait
pas déjà une place un peu large, nous rapporterions d'autres faits,
à cet égard, très-curieux.
Acoustique.
Puisque nous sommes appelé à parler de l'acoustique, nous
aurons à examiner si les règles de cette science ne rencontrent pas
dans l'application de ces Imprévus comme il y en a souvent ailleurs
pour dérouter la science humaine.
Nous allons voir si la salle en question nous offre, à l'égard de
la conservation du son, le résultat d'études plus avancées que les
études qui ont pu aider à la construction des salles de spectacle
élevées jns(|u'à ce jour dans le monde connu.
Un homme d'esprit, dont les opinions pénétrèrent souvent dans
le conseil de l'Académie royale de Musique, avant, pendant et
après les phases de sa direction, car il fut directeur de l'Opéra,
avait présenté plusieurs considérations à son ministre, pour le dé-
cider à mander expressément à Paris deux architectes Italiens,
l'un de Milan, l'autre de Naples, et tous deux d'origine bien au-
thentiquement constatée, afin de leur faire construire une salle
modèle d'Opéra : car, selon lui, les architectes italiens seuls réu-
nissaient toutes les qualités propres à cette œuvre... Louis XIV
avait bien appelé le Bernin pour lui faire un Louvre, qu'il ne fit pas,
heureusement pour Perrault, pour Louis XIV et pour la France,
à notre avis.
N'importe, malgré le jeu des ressorts de l'Opéra près du mi-
nistre-guerrier. Mars ne tomba pas dans le filet qu'on lui tendait,
du reste de très-bonne foi, et nous ne vîmes pas naiire à Paris
un illustre bâtard de la Scala et de San-Carlo (i).
Nous ne contesterons jamais aux artistes étrangers les qualités
individuelles qui peuvent distinguer chacun d'eux ; et jamais pré-
jugé national ne nous rendra injuste envers le talent, envers le
génie. Mais nous ne voudrions pas que, par légèreté, des adminis-
trateurs dans un pays comme le nôtre, où l'administration a une
action aussi forte et aussi directe, vinssent nous offrir comme la
conséquence exclusive du savoir et du calcul, des résultats heureux
(1) On ne songe pas, que nous sachions, à imiter aujourd'hui des architectes
italiens i venir nous construire une Académie royale de Musique, et nous re-
grettons que notre collalmrateur se soit aventuré dans une question dont nous
ciierclions en vain l'à-propos, mais qui peut aigrir, suivant nous, des siiscepti-
l)ilités légitimes qu'il convient de toujours respecter. Le tliéâtre de la Scala est
une œuvre trop belle pour que nous, artiste, nous entendions volontiers traiter
ses enfants de « bîiards! » Nous avons fait ces observations à M. Meynxdier., es-
pérant, n'hésitant nténie pas à croire que nous serions écoute, et (juc ce hors-
d'œuvre à propos de nos confrères d'Italie, hors-d'œuvre qui nous paraît, à
nous, couiplètenient sans utilité, serait supprimé; mais M. Meynadier, qui est
certainement cependant un des hommes des moeurs les plus douces que nous
connaissions, a tenu absolument a maintenir sa rédaction; il n'a voulu qu'en
adoucir la forme, et nous avons dû l'accepter ainsi modifiée, sous peine de voir
priver nos lecteurs de Pensemblc du travail de M. Meynadier. L'auteur a-t-il
des raisons secrètes de nature i lui faire attribuer de l'à-propos à celte digres-
sion? nous l'ignorons entièrement {Note de M. César Daly )
505
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
S06
qui ne sont dus peut-être en plus grande partie qu'à des causes
purement locales et accidentelles.
Honneur aux architectes italiens, en tout ce qu'il ont produit
de grand, de beau, et d'utile; mais déclarons que nous n'avons
trouvé nulle part aucune raison qui pût nous faire admettre, ni
sous le rapport de i'acoutisque, ni sous celui de l'art de la dis-
tribution des intérieurs, ni sous celui encore de l'art de la distri-
bution pittoresque des masses extérieures , que les architectes
italiens de notre époque fussent plus capables que les architectes
français de combiner et de construire la meilleure des salles de
spectacle.
Encore une fois, sans nier le mérite relatif de quelques-uns
des édifices napolitains, lombards, romains modernes, génois,
consacrés aux représentations scéniques, déclarons, ce qui pour
nous est incontestable, qu'en ce qui concerne l'acoustique, les
Italiens n'ont jamais établi un principe fixe, invariable, qui pût
servir de base à la construction d'un théâtre.
Ce n'est même pas d'eux que nous avons appris à connaître
les causes les plus facilement appréciables des avantages acousti-
ques de quelques-unes de leurs salles de spectacle : les causes les
plus directes de ces avantages, savoir: l'intluencedé leur climat,
un air moins chargé d'humidité, rendu par conséquent plus élas-
tique, donnent aux édifices de leur pays de très-utiles conditions
de sonorité.
Ce ne sont pas lés Italiens qui nous ont dit : Pour que, dans
un vaisseau donné, le son frappe l'oreille de toute son inten-
sité, il faut que ce vaisseau soit composé, le plus possible, des
corps les moins vibrants; au contraire, au sein de toutes les
commissions administratives qui ont pu traiter de la construc-
tion d'une salle d'Opéra, les artistes ultramontains, compris
musiciens compositeurs ou exécutants, auxquels, par parenthèse,
on a accordé aussi à cet égard un peu trop de confiance, en
sont toujours reveous à leur funeste conseil de considérer l'or-
cliestre, la cavité dans laquelle on est forcé de l'enfouir, avec sa
double mission de s'harmonier pour les besoins simultanés de la
salle et de la scène, comme un instrument d<ins lequel la vi-
bration doit s'opérer, ainsi qu'elle s'opère, ou à peu près, dans
un tuyau d'orgue ou dans le coffre d'un violon. De là ces in-
ventions proposées de placages en bois dans tout le pourtour de
la salle, ces planchers, ces doubles planchers; ces inventions de
tambours sous orchestre, soit métalliques, soit de peau d'àne, qu^
quelques-uns proposèrent, qu'on essaya, et qui sont essentielle-
ment contraires aux bons effets qu'on doit attendre de l'émission
des sons. Ce fut aussi l'erreur de J.-.T. Rousseau.
Ainsi donc, en tout ce qui touche lu question difficile de l'a-
coustique, la lumière ne nous est pas venue de l'Italie; et sous
tous les autres rapports, sous le rapport de l'esthétique, nous ne
croyons pas que les architectes italiens du dix-neuvième siècle
soient supérieurs aux architectes français. Nous n'avons voulu
attaquer le mérite de personne; nous avons voulu attaquer un
préjugé, et rétablir un équilibre.
Lorsque le gouvernement conçut le projet de faire une nou-
velle salle des séances de la Chambre des députés, ce fut vers
1827 ou 28, si nous ne nous trompons, il s'occupa sérieusement
de la question de l'acouStique. Nous ne saurions dire tout ce qui
-fut mis en œuvre à cet égards mais si quelque commission spé-
«taie fut nommée pour enrichir cette salle de toutes les qua-
lités acoustiques dont elle pouvait avoir besoin, nous devons
nous étonner de la trouver si peu favorable à rémission du «on.
A cette occasion, voici entre autres choses ce que fit le gouver-
nement : il chargea les architectes entretenus à cette époque
a la villa Médici, de prendre des informations pour reconnaître
l'état de la science acoustique des Italiens.
L'un d'eux, qui nous a rapporté cette circoDstance , M. J.-B.
Lesueur, dont le nom est à jamais inscrit sur les pierres histo-
riques de notre Hôtel-de- Ville, nous dit que la mission lui parut
délicate ; mais il ne la déclina pas.
Il chemina ; il arriva au théâtre de Tordino, dont les construc-
tions, scienlinquementcalculéesenccqui concerne l'acoustique, au-
raient dû, sous ce rapport, présenter les plus signincatifs résal-
lats. C'était l'opinion du constructeur et celle des gens de la
science; mais, contrairement à leurs prévisions et par un de ces
ricochets dont ils n'ont pas expliqué le phénomène, Tordino
manque absolument de sonorité.
Le Tibre, qui le baigne, a été accusé de lui avoir vole cette so-
norité; c'est peut-être vrai; mais M. Lesueur, 'pas plus que nous,
pas plus que d'autres, n'oserait, après l'accusation, condamner le
fleuve pour celte spoliation.
Tordino, on le comprend, n'est pas venu en aide aux faibles
poumons de notre législature.
Le cadre de ce travail ne me permet pas de m'étendre au-
tant que je le voudrais en citations d'ordre primordial, si je puis
dire, pour préparer la conclusion et la défendre en quelque sortr
par un bastion de faits antérieurs vieux comme le monde ; cepen-
dant, sans en développer les causes qui se sentent, après les
observations déjà faites, faisons remarquer que la sonorité de
nos vastes basiliques est d'autant plus sensible que les noeuds
de vibration y sont plus rares; et que dans les salles de spectacle
l'impuissance de la sonorité est d'autant plus manifeste que les
nœuds de vibration y sont plus frétiueirts.
Cela dit, ajoutons encore, à titre de considération préalable,
qu'il est bon, en toutes choses, de savoir vivre, et, autant que faire
se peut, bien vivre, avec le mal qu'on ne peut empêcher.
Nous nous expli(iuons. Il n'y a pas d'intérieur pour lequel les
règles de l'acoustique soient plus absolument exigibles, — en tant
qu'il y a règles, — que pwir une salle de spectacle. Eh bien! tons
les éléments de coustmction, de distribution, de décoration, qui
participent à sa fonnation, sont en général les éléments les plus
contraires aux conditions de l'acoustique.
Il faut donc trouver un moyen ternie, à laide des lumières que
produit l'observation des faits, pour combiner l'arrangement le
moins défavorable aux effets que l'on veut obtenir. Et alors,
sans avoir prétendu une perfection impossible, on aura des ré-
sultats qui seront du moins aussi satisfaisants qu'on est en droit
de les exiger dans la situation actuelle des choses, dans la situa-
tion où nous pouvons nous placer en observant les limites que l'in-
telligence humaine a tracées jusqu'à ce jour a la science de l'a-
coustique.
Il faut, dans une salle de spectacle, que le son arrive jusqu'à
l'ouïe des spectateure, autant que possible directement , et par le
moins de réflexions possible.
Il faut, en quelque sorte, que la détonation de chaque son se fasse
sous le vaisseau même, sans que des corps propres a la transmif-
sion des sons les laissejit séchapper au dehors.
Il faut que la salle seule dévore le son; il faut qu'il y naisse et
qu'il y meure.
507
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
508
Mais quf nous serions fou si nous prétendions que ces conditions
• pourraient être satisfaites d'une manière absolue dans une salle de
spectacle, comme elles pourraient l'être dans une vaste sphèrecreuse
dont toute l'enveloppe, parfaitement homogène , serait formée du
coi'ps le moins vibrant, le moins propre à la transmission du son I
Ne voit-on pas déjà que le bois, que les plaques métalliques ne
sont pas nos principaux matériaux? Étant forcé cependant de les
employer quelquefois , nous ne l'avons pas fait sans combattre
autant que possible leur pernicieuse influence.
Qu'on veuille bien reconnaître encore, avant d'aller plus loin, que
les corps absorbants sont moins nuisibles aux effets utiles de l'a-
coustique que les corps vibrants ; car si le son émis a une puis-
sance convenable, proportionnée à la capacité du vaisseau sous le-
quel il devra se dilater, les corps absorbants, placés dans certaines
conditions ne produiront aucun mal, ou le mal sera tres-limité ,
puisque, autant qu'il est possible de le conjecturer, il y aura moins
de réflexion, moins de nœuds à redouter.
Les laines qui nous couvrent, les soieries, les fins tissus de mille
sortes, les fauteuils, tous les sièges, les accotoirs garnis de crin et
de velours, les tentures indispensables à la décoration de parties no-
tables, objets qui sont tous autant de corps absorbants , qu'on ne
saurait proscrire en vertu d'une loi d'acoustique quelconque, peu-
vent donc avoir, sous des rapports très-importants , une très-
grande utilité relative.
La puissance de la voix humaine est plus grande qu'on ne le
croit généralement , avons-nous déjà dit, en citant l'exemple que
nous donna le couple Dabadie.
Mais cette puissance dépend, ceci nous parait encore un fait
indubilal)le, de l'art avec lequel le son est émis. Telle voix, rela-
tivement plus puissante, produira des sons moins intenses que
telle autre relativement moins puissante, parcette seule raison qu'il
y aura une différence dans la manière d'employer l'instrument
humain.
Un homme dont les artistes n'apprécient pas encore la savante
méthode, peut-être parce que sa méthode est plutôt une science
qu'un art, Delsarte, dont le nom grandit cependant , malgré les
préjuges qu'engendre la rocailleuse routine , Delsarte, savant ar-
tiste, observateur profond, parvient, par sa manière déposer la
voix du sujet qu'il étudie et qu'il enseigne , à faire émettre sans
efforts pénibles, par des natures chétives, des sons d'une très-
grande intensité. Ainsi, par ses soins, une jeune fille d'une com-
plexion délicate, aux membres fragiles, à la poitrine resserrée, au
souffle impuissant quand il s'agit pour elle de parler , chante par
les moyens de Delsarte, et sa voix a plus de puissance que des in-
struments puissants qui ne peuvent la couvrir.
Il y a dans la nature des conditions extrêmement favorables au
transport du son, compris celui qui part de la voix humaine ; mais
comme il n'y a rien de moins visible, rien de moins saisissable que
le son, la théorie relative à cette faculté de transmission qui se
produit avec la vivacité d'un phénomène électrique, est très-riche
de conjectures ; et jusqu'à ce qu'un génie, encoreà venir, ait formule
les règles de l'acoustique, prenons cette science tellequelle est dans
son infirmité présente, et contentons-nous de ce que nous donnent
les faits que nous pouvons observer, sans avoir la prétention d'en
connaître et d'en déterminer toutes les causes.
Dans la nouvelle salle, autant que possible, on a essayé de di-
minuer les causes qui semblent les plus propres à la multiplication
des nœuds de vibration ; autant que possible, on a disposé les corps
pour que les ondes sonores, dans leur course rapide de 340 mètres
par seconde, vinssent frapper des surfaces privées de la fa-
culté de les multiplier, comme les multiplieraient des surfaces réflé-
chissantes ; car nousavonsdit qu'il valait mieux que le son parvint
à l'oreille du spectateur directement, que d'y venir par réflexion.
Mais le résultat sera encore assez utile sous le rapport de la net-
teté, si le son venant à l'oreille est seulement un premier effet re-
fléchi.
Au milieu d'un chaos de phénomènes si souvent inexplicables,
retenons tous ceux que la raison peut comprendre. Ainsi, à l'éganl
d'une partie spéciale et capitale, la coupole, nous faisons des ef-
forts pour diminuer le nombre des effets réfléchis, et combattre, au-
tant que nous le pouvons, l'effet des insaissables nœuds de vibration :
le profil de notre coupole n'est pas en anse de panier comme celle de la
salle Lepelletier; nous sommes revenu un peu à la courbe que Louis
donna à sa coupole de la rue Richelieu ; mais, pour que cette cou-
pole ne serve pas en quelque sorte de timbale vibrante, répercu-
tant des sons profitables seulement aux pompiers mis en observa-
tion dans les vides qu'on trouve entre le dessus de la coupole et le
dessous des combles, — qu'on remarque bleu ceci, — la voûte n'est
formée ni d'une calotte métallique, ni même de poteries creuses,
qui, de leur nature, sont essentiellement vibrantes : elle est formée
d'une maçonnerie pleine, compacte, suffisamment épaisse, com-
posée des matériaux les moins propres h la transmission des sons.
Nous sommes en lutte systématique contre quelques portions des
surfaces qui produisent d'inutiles effets réfléchis en cequi concerne
le son, et nous disons quelques, parce que d'abord nous devons
reconnaître notre impuissance pour les attaquer toutes, et que
toutes peut-être, ainsi que nous l'expliquerons plus bas, ne sont
pas rationnellement nuisibles.
Dans cette lutte, nous attaquons, lorsque cela nous parait néces
saire, des saillies qui multiplieraient ces surfaces selon nous nuisi-
bles; ainsi, nous n'avons donné, ce qui n'est peut-être pas classi-
que, qu'une saillie pour ainsi dire insensible à la corniche sur
laquelle nous faisons porter la coupole.
Dans cette autre lutte systématique contre tous les corps vi-
brants que nous avons la puissance d attaquer, nous n'avons pas
manqué, au risque d'encourir le blâme de tous ceux qui voudraient
qu'une salle d'Opéra ne fut qu'une vaste contre-basse, de former
également de matériaux pleins les dix colonnes qui supportent
exclusivement, en apparence du moins, tout le fardeau de la
coupole.
Les rangs de loges en étagères, enveloppés dans tout leur pour-
tour par un mur massif d'environ 80 centimètres d'épaisseur, sont
donc fixés sur un corps sans vibration.
L'appui de ces étagères se trouve monté sur une construc-
tion de fer qui a permis de donner aux loges une saillie d'en-
viron 2" 50.
Cette disposition d'armatures et de solives en fer cramponnées
sur le mur offre assez de solidité pour que l'appui, c'est-à-dire le
devant des loges, soit formé d'une construction de briques pleine.»,
rendue inébranlable par des griffes de fer convenablement agencées.
Cette bâtisse en porte-à-faux , ce qui ne lui ote pas son in-
attaquable solidité , cache sa pesanteur sous ses tentures
veloutées ; car, selon nous, en passant nous le répétons, dans
une salle de spectacle, les corps absorbants, convenablement équi-
librés, sont moins contraires aux effets utiles de l'acoustique que
les corps vibrants.
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REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
510
Le plafond des loges, nous dirons notre raison à cet égard, est
formé de plaques émaiilées, pleines et unies, faisant corps avec une
aire en plâtre convenablement épaisse, qui sert de plancher à l'é-
tage supérieur.
Il y a là, suffisamment ménagée, une surface propre à réfléchir
les sons ; mais, dans ce cas, nous sommes loin d'en craindre les
effets, car nous admettons qu'ils ne sont, d'une manière appré-
ciable, que le résultat d'un premier et seul jeu de réflexion , qu'il
faut rechercher pour établir quelque équilibre entre tous ces corps
([ui agissent de façon si opposée, mais si directe, dans la question de
l'acoustique. Nous pensons que dans le vaisseau de l'Opéra, pour
l'utile répercussion des sons, il nous a fallu une suffisante quantité
de surfaces réfléchissantes, car nous croyons que les effets qu'on
doit attendre du jeu des ondes sonores seraient très-incomplets si
l'on voulait que tout un intérieur de salle de spectacle, pour faire
opposition aux corps vibrants, ne fût qu'un corps absorbant ouaté,
bourrelé, étoffé comme la chancelière dans laquelle nous chauf-
fons nos pieds. Dans l'acoustique, l'imprévu frappe, déroute, et la
science n'est plus que conjecturale.
L'émail que nous employons est le produit d'un esprit inven-
teur qui s'est plus d'une fois signalé par d'utiles découvertes. Le
baron de Bourgoing, ministre de France a Munich, que distinguent
les plus aimables qualités de l'homme du monde, et dont le carac-
tère est un des plus honorables et des plus appréciés du corps di-
plomatique, s'est livré, avec le plus grand succès, à l'étude des
sciences et des arts; inventeur de ces ingénieux tableaux litho-
phaniques aujourd'hui connus du monde entier, il a complété cette
première découverte par l'invention de sou émail ombrant, que
nous avons plus haut succinctement signalé.
Cet émail ombrant, qui n'est autre chose que du verre de cou-
leur en fusion coulé sur un biscuit de terre composée, sur lequel on a
formé des ornements au moyen d'un moule en relief semblable au
moule du tableau llthophaniqiie, est appelé ombrant parce que la
masse d'<5mail de couleur qui tombe dans la partie la plus creuse
forme l'ombre du tableau, et que celle qui adhère aux surfaces les
moins profondes forme les clairs.
Il y a dans ce procédé une gradation de ton inappréciable qu'il
serait peut-être difficile d'obtenir par un procédé de peinture. La
suavité que cette particularité donne aux images reproduites par
l'émail ombrant est telle, que les sujets qui ont le désavantage, ce-
pendant, de n'offrir qu'une seule couleur, toute de convention,
tantôt bleue, tantôt brune, tantôt rouge, tantôt verte, etc., excitent
un intérètqui peutseprolonger parla méditation; c'est du moins ce
((ue nous avons éprouvé. Quand le sujet de l'image est bien choisi,
ainsi reproduit, il ac(iuiert un charme indéfinissable. Mais ce n'est
pas sous ce rapport que nous a\ons à apprécier l'émail ombrant;
nous avons à signaler ses qualités en ce qui est relatif à son em-
ploi dans la décoration monumentale, soit extérieure, soit inté-
rieure.
La fixité de ses couleurs, qui sont inaltérables, leur variété,
leur éclat, se prêtent à mille combinaisons mosaïques du meilleur
effet, et nous préconisons l'utile mariage, pour la décoration de nos
édifices, de la lave émaillée et de l'émail ombrant, ces deux belles
inventions françaises qui brillent par des qualités distinctes, mais
qui se ressemblent par de précieuses conditions de durée.
En l'absence de M. de Bourgoing, retenu trop longtemps hors
de France par ses devoirs diplomatiques, son ami, le baron du
Tramblay, consacre une partie de son temps et de sa fortune à faire
faire une marche rapide à la fabrication de cet utile produit cé-
ramique.
Nous aurons encore l'occasion de signaler un autre utile emploi
de cette découverte pour un des besoins importants du théâtre ;
revenons à l'acoustique.
Par suite de notre système, le parterre repose sur des voùte« en
maçonnerie et non sur un bâti en bois, comme nous le trou\oos
rue Lepelletier; mais deux conditions d'hygiène pour les specta-
teurs commandent de placer leurs pieds sur du bois ou sur des
tapis, et non sur le carreau, qui, l'été, leur serait plus nuisible
encore que l'hiver.
L'amphithéâtre, l'orchestre du public, sont dans les mêmes con-
ditions; et l'orchestre, l'orchestre proprement dit, celui des musi-
ciens, se trouve placé, sans plancher vibrant cette fois, dans une
construction de maçonnerie. J'indiquerai plus loin quelques par-
lies de sa distribution intérieure.
Les arcs surbaisses qui supportent la coupole et qui repo»eiit
eux-mêmes sur les colonnes servit à la décoration et a la di-
vision de la salle, sont en maçonnerie, et présentent une surface
de matériaux pleins comme ceux de la coupole elle-même.
L'amphithéâtre des quatrièmes offre également une construc-
tion massive, combinée pour éviter toute vibration.
Sans passer des à présent sur le théâtre, nu delà de rayant-
scène, disons que cette avant-scene, en raison même des aftinites
établies par le corps du chanteur entre sa voix et le corps vi-
brant du plancher, auquel se$ pieds adhèrent , exigeait quelqwii
dispositions utiles. Un plancher vibrant, placé si près de la voix
du chanteur, doit absorber, en raison même de ses propriétés vi-
brantes, une portion appréciable des sons émanant de cette \oix.
qui, se dilatant dans toutes les directions au moment de leur déto-
nation, viennent frapper ce plancher, qui s'empare ainsi de quel-
({ues ondes sonores au profit de l'espace vide conservé au-dessous
(lu plancher.
A ce mal il n'y avait qu'un remède :
Le iproscenium, où se passe presque toute l'action dramatique,
et qui n'est jamais assujetti â l'action du machiniste, est ordinairr-
ment formé d'un plancher monté comme les autres parties do
plancher du théâtre. Ces planches, d'environ quatre centimètres
d'épaisseur, sont fixées à demeure et ne subissent aucune trans-
formation pour les effets de la scène.
Dans la nouN elle salle, toute une partie avancée du pnMrrniwm
repose sur une voûte épaisse, à dessus plot, sur lequel le plancher
est fixé. Mais comme les exigences de la danse ne sont pas de la
même nature que celles du chant (on voit que les difficultés nail»
sent de la contradiction même des besoins , un plancher trop &mt
aurait eu des inconvénients. Toutefois celui de la partie la plus
avanct'e de l'avant-scène a pu recevoir une épaisseur de 8 cen-
timètres; et toutes les fractions en sont jointes à rainure et par-
faitement assemblées. Nous avions tort d'appeler cela «n remède:
ce n'est qu'un palliatif.
Pour en finir avec les dispositions de ra\,iiii-.>.reiu' relnlntT» au
chant, j'ajouterai que la coquille du souffleur que Rossini fit ad-
mettre à l'Opéra, sans doute parce qu'il la jugeait indispensable, n
reçu une transformation utile, devenue possible par suite de la dis-
position donnée aux appareils d'éclairage de la rampe, et que je
ferai connaître plus loin.
Cette coquille, d'où le souffleur poursuit l'acteur de ses insuffla-
tions plus ou moins heureuses, est placée dans |■orche^t^e, hors de
511
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLrCS.
51S
la ligne de la scène, et dans des conditions telles que le soiiflleur
\ oit, qu'il est vu et entendu de la scène, sans jamais montrer ses
oreilles aux spectateurs, qui lui refusent obstinément toute espèce
de sympathie.
Prêt à faire la description de la décoration de la salle et celle de
sou éclairage, deux questions que je crois étroitement liées, je dois
dire préalablement que les dispositions auxquelles donneront lieu
cet éclairage et cette décoration pourront bien se trouver quel-
quefois en opposition avec certains principes de l'acoustique, tels
que nous les avons exposés; mais n'avons-nous pas dit que tout
était de convention au théâtre et que les principes absolus ne sau-
raient s'y maintenir intégralement? on y vit beaucoup avec les
moyens termes, et ce sera probablement toujours ainsi.
Toutefois, avant de m'engager dans les questions indiquées, j'a-
jouterai que, pour rendre plus insensible l'effet des corps vibrants
lorsqu'on est en quelque sorte forcé de les employer dans la con-
struction, on les combat avec les armes que l'on peut trouver.
Ainsi, par exemple, les portes des loges sont de véritables portes de
prison dissimulées sous des ornements trompeurs, et que les doigts
les plus délicats, je l'ai déjà dit, ouvrent et ferment à volonté
et sans effort. Ces portes, en bois de chêne, avec coulisseaux en'
fer pour le jeu des vasistas, n'ont pas moins de 3 centimètres
d'épaisseur; mais ce corps, rendu moins xibrant par une plus
forte épaisseur, est recouvert en partie par un corps absorbant, ce
que nous verrons plus bas. Donc, sur ce point, par cette combi-
naison, nous évitons tout à la fois l'effet des surfaces réfléchissantes
et la transmission du son à l'extérieur.
Moins le son se répercutera à l'extérieur, moins seront affaiblies
dans la salle la puissance de la voix, celle des instruments, et peut-
être sera-ce un bon moyen pour rendre aux basses toute leur
valeur : on sait qu'elles ne l'ont pas dans les salles construites sur
les principes que nous avons combattus.
Nous n'avons pas tout dit à l'égard des questions d'acoustique,
que nous quittons en ce moment; mais, sans briser l'enchainemeiit
de nos observations, en traitant plusieurs des sujets qui suivent,
qui sont aussi de premier ordre et qui, par la force même des
choses, s'entremêlent à cette importante question, nous y serons
successivement ramené.
Vues sub la Décoration de la Salle.
La décoration d'une salle de spectacle doit tenir essentiellement
du genre de spectacle pour lequel elle est faite ; elle doit dépendre
des mœurs, des habitudes des spectateurs. Cette décoration doit en-
core dépendre de l'état des modes, du costume de la société pour
laquelle elle est faite.
On conçoit parfaitement que la salle de l'Opéra de Londres , ou
toutes les femmes sansexception assistent au spectacle, parées comme
jiour le bal ou pour des grandes soirées, et parées comme se parent
les Anglaises, autant par l'éclat de leurs cols de cygne sans voile pu-
dique, que par les plumes, lesfleursetles plus riches bijoux , puisse,
aprèscette brillantedécoration, la plus séduisante sanscontredit , se
passer de moulures, de reliefs, de savantes peintures, et que le public
de ce monde-là, après le rafraîchissement annuel des parois de la salle
par la voie d'une détrempe uniforme, n'ait plus à demander à l'en-
treprise théâtrale que son brillant mais très-incommode éclairage.
A l'Opéra de Paris, malgré les progrès d'un luxe que les censeurs
trouvent immodéré, et malgré les ingénieux artifices de la toilette
des femmes du monde élégant , l'ensemble de la salle ne peut pas
briller complètement par les mêmes raoyensqui font briller la salle
de Londres.
Ce qu'il importe encore d'observer pour la décoration d'une
salle d'Opéra à Paris, comme pour celle sans doute de tous les
pays, il ne peut y avoir d'exception à cet égard , c'est un parti d'or-
nementation qui n'efface pas trop les femmes qui sont jalouses de
l'effet qu'elles tendent à produire, et qui n'efface ni les décorations,
ni les costumes de la scène, pour lesquels les eutrepreneui-s font
tant de sacrifices.
Et cependant, il faut que tout l'ensemble de cette salle, en même
temps qu'il offre à la vue un sage repos, soit noble et plein d'éclat.
A chaque pas, avec de telles conditions qui constituent presque des
contradictions, il y a des périls imminents pour le décorateur de
la salle. Il ne peut les détourner que par une habile distribution de
tous ses moyens de décoration, parmi lesquels il doit comprendre
les femmes qui vivifleront ses étagères.
Il faut, ce qu'on n'a pas obtenu jusqu'à ce jour, moins par la dif-
ficulté de le faire que par l'absence d'un bon calcul, il faut que la
salle décorée, quelle que soit sa décoration, soit longtemps somp-
tueuse et ne soit pas seulement propre pendant un an, et puis
malpropre, enfumée jusqu'à la prochaine restauration qui vient
dévorer un capital qu'on eut mieux employé eu donnant plus de
solidité aux éléments de la première décoration.
Nous avons dit que l'éclairage de la salle se rattachait a son
système de décoration, nous ne nous éloignerons donc pas trop de
notre sujet, vers le(|uel nous re\iendrons plus tard, en passant des
n présent à la question générale de l'éclairage.
{La tuile prochainement.)
Hippolyte MEVNADIER.
IXE DKCOIVERTE IHI'0RT\!VTE
POUH L'ASSAINISSEMENT DES VILLES.
Il existe à Paris, comme dans presque toutes les grandes villes,
un nombre considérable de foyers d'infection produits par la fer-
mentation putride des urines répandues sur le sol ou vei-sées dans
des tinettes mises à la disposition du public.
Les rues de Paris ayant un développement de 7 20 kilomètres
(180 lieues), on peut calculer qu'il existe dans nos rues plus de
513
RKVLE DK L'ARCHIÏKCTURK KT DES TRAVAUX PUBLICS.
5H
30 000 de ces foyers d'infection, en les supposant distribués à 20
mètres de distance l'un de l'autre, ce qui est au-dessousde la vérité.
Il serait donc d'une grande importance pour la salubrité publi-
que, de prévenir, par un procédé économique, la décomposition
des substances que renferme ce liquide, et d'empècber ainsi les
odeurs nauséabondes et insalubres qu'il dégage de se répandre
dans l'atmosphère.
Ce problème vient d'être résolu par un moyen aussi simple qu'é-
conomique. 11 suffiten effet de mettre le liquide en contact avec du
goudron de houille, pour le préser\er de la fermentation ammo-
niacale, et lui conserver toute son acidité.
Un kilogramme de ce goudron suffit pour empêcher la fermenta-
tion de ce liquide dans un vase d'une capacité de 100 litres. Ce
même goudron, conservant son efficacité pendant plusieurs mois,
et ne valant que 8 francs les 1000 kilogrammes, il s'ensuit qu'on
peut désinfecter 1000 tinettes, contenant chacime 100 litres, ou
100 000 litres, avec une dépense de moins de 8 francs.
Or, sur un million d'habitants que renferme Paris, on peut
compter que 300 000 personnes répandent dans les rues, pendant
12 heures sur 24, 300 000 litres de ce liquide; la dépense pour
nous préserver de ces émanations putrides serait donc insigni-
fiante, quanta la matière désinfectante.
Il reste à calculer si les appareils ad hoc qu'il faudrait placer çà
et là dans nos rues, pour que les urines fussent mises en contact di-
rect avec le goudron, constitueraient une dépense exorbitante qui,
au point de vue économique, pourrait en quelque sorte empêcher
la mise en pratique de cette utile découverte.
Avant de répondre à cette question, il est bon de savoir si les
matières contenues dans ce liquide peuvent être utilisées.
Il sert à différents usages :
1° Employé dans les arts, on profite des réactions alcalines qui
s'y développent pour le dessuinlaye des laines, la teinture en cou-
leurs rouges, dans la draperie.
2° Employé dans l'agriculture, il constitue l'un des plus puis-
sants engrais que l'on connaisse. Berzelius, Payen, ont démontré
qu'il contient une proportion plus considérable de matière
organique azotée que le guano, que l'on va chercher si loin.
M. Schattenmann (Académie des sciences, 13 novembre 1843) a
prouvé que des dissolutions de sels ammoniacaux (hydrochlorate,
phosphate ou sulfate) activent beaucoup la végétation et donnent
des résultats très-avantageux sur les prairies, les orges, les avoi-
nes, etc. On se sert aussi en agriculture des urates, c'est-à-dire d'un
mélange d'urine et de plâtre.
On voit de quelle utilité peut être ce liquide. Aujourd'hui, les
fabricants qui en font usage le recueillent dans les casernes ou au-
tour de quelques monuments publics ; ils fournissent des tinettes
et des futailles pour le contenir. Mais l'accumulation de ces liquides
en putréfaction présente deux graves inconvénients. L'un est l'é-
manation insalubre; le second, la perte des sels ammoniacaux vo-
latilisés pendant leur dépôt dans les tinettes.
L'emploi du goudron de houille obvie à ces deux inconvénients.
Reste à chercher un moyen pour concentrer sous un petit volume,
soit par l'élévation artificielle de la température, soit par une ven-
tilation convenable, toute la force des substances salines que l'u-
rine contient (lOO grammes par litre). On pourrait, pour attein-
dre ce but, combiner une sorte de grand réservoir peu profond, et
dans lequel une ventilation active serait organisée. Nous laissons à
messieurs les architectes le soin de résoudre ce problème.
La ville de Paris, qui se fait déjà une rente considérable par la
vente des matières de Montfaucon, des boues et de tous les détritns
quiserecueillentdans les rues, pourrait, en exploitant cette noavfife
industrie, s'assurer de nouveaux revenus. On sait que lesselsammo-
iiiacaux tirésde l'urine pure sont de beaucoup plus riches en azote que
les sels ammoniacaux ordinaires que livre le commerce, et qui sont
extraits de plusieurs substances ou des eaux vannes de Montfau-
con (l). Ces derniers sels se vendent auprix defio centimes le kilo-
gramme. Employés pour fumer des terres, 2 kilogrammes sont né-
cessaires pour saturer à un degré cent litres d'eau (aérometre de
Baume). Cette quantité peut fertiliser âO mètres carrés de terrain.
Or, à prix égal et sans compter la plus grande action fertilisante
des sels ammoniacaux tirés directement des urines, on trouve que
les 300 000 litres de ce liquide (pie Ion pourrait réunir, produiraient
3000 kilogrammes de sel ammoniacal par jour, ou une valeur de
plus de coo 000 fr. par an. Et comme nous proposonsà la ville Vfx-
ploitation de ce nouveau produit, il est hors de doute que les frais
d'établissement de cette industrie, fussent-ils même frcf^onsidé-
rables, seraient couverts au bout de quelques années.
Mais, sans nous arrêter à ces considérations économiques, il est
évident que la ville devrait, dans l'intérêt de la salubrité publique,
adopter et faire adopter ce moyen préservatif, lors-même que ce
liquide ne serait pas utilisé, et qu'après avoir stationné sur le gou-
dron de houille il irait se déverser dans les égouts.
Ainsi une ordonnance de police municipale suffirait pourqu'il fut
placé dans les établissements publics, près des monuments, dans
les vespasiennes, dans les prisons, dans les écoles, les salles
d'asiles, etc., etc., des tinettes renfermant du goudron de houille.
Les marchands de vin, les traiteurs, etc., devraient également être
tenus d'en avoir. Enfin la ville ferait les frais d'établissements des
appareils à goudron, et par cette réforme elle serait conduite a
mieux distribuer et à mieux protéger les constructions utiles dont
nous parlons. La moralité, aussi bien que la santé publique, n'au-
rait qu'à y gagner.
M. le préfet de police vient de faire afficher un avis par lequel il
invite les habitants de la capitale à se montrer plus soucieux , à
l'avenir, de la propreté de leurs rues et des monuments publics, en
utilisant k's vespasiennes (\ue l'administration municipale a fait con-
struire sur les boulevards et sur les quais. Les personnes qui conlre-
viendraient à cet avis seront passibles de peines (î).
Pour notre part, nous félicitons M. le préfet d'avoir pris cette
détermination, et nous croyons qu'elle aura l'assentiment gênerai.
Mais combien cette mesure n'acquerrait-elle pas de force et de
puissance sur l'opinion publique, cette grande souveraine des
mœurs et des usages, pour contraindre les récalcitrants a se confor-
mer à cette utile loi municipale, si rétablissement des nouveaux
appareils dont nous parlons préservait tout le monde des funestes
émanations qui se dégagent à chaque pas dans nos rues !
Le public se ferait alors son propre gardien ; personne n'oserait
enfreindre le nouvel arrêté dès qu'il aurait été imposé dans un double
intérêt de convenance et de salubrité publiques.
La découverte du procédé désinfectant dont nous venons de faire
lutrevoir l'importance sous le triple rapport de la salubhté publique.
(t) Les sels aminoiiiacaux artiBcieb n'alMuiionncnt que l'aiole qalls nmftr-
nirni, tandis que l'urine conlieni, en ouU« des Mb MiaNBiiCMX, m
lion consiil<'rable ilurtSe qui est elle m<aw trts-riclw ea atote.
(S) Voir plus IoId notre Camxiovi.
T. V. M
51 J
REVUK DE L ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
ÔK,
des arts manufacturiers et de l'agriculture, est due ft M. le docteur
Heury Bavard, connu par ses travaux sur l'Iiygiene publique, et
surtoutpar ses publications sur la topographie wédicaleûe plusieurs
quartiers de Paris (l).
Nous avons vu et répété les expériences de M. Bajard, et la
simplicité de son procédé pour arrêter la putréfaction des urines
permet à tout le monde d'en ccnstater comme nous les heureux
résultats.
PERREYMOND.
BIBI.IOGRAPHIE.
CONSTBUCTIONS RuBALES.
Nous avons souvent regretté qu'on se fut si peu occupé de
l'étude de l'architecture rurale; la moindre amélioration dans
cette spécialité s'adresse immédiatement à des millions d'individus
et produit une somme de bien-être immense. Certes, il revient
d'ordinaire moins de gloire à qui s'occupe de la construction éco-
nomique et saine d'un logement de métayer, de la bonne distribu-
tion et arrangement des bâtiments d'une ferme, qu'à l'auteur d'un
grand monument public; mais cependant celui qui se consacre à
l'étude de ces modestes constructions, en vue de les perfectionner,
fait une œuvre digne et bien louable. On ne saurait trop recom-
mander à la gratitude publique des hommes comme Franklin,
Parraeutier, Cadet de Vaux, Loudon, etc., etc.
On nous assure que les campagnards du Midi doivent beaucoup
aux efforts de M. le marquisde Saint-Félix de Mauremont, ancien
préfet du Lot et ancien députe. M. de .Mauremont est l'auteur
d'un traité d'architecture rurale, et il est déjà parvenu, dit-on, à
introduire d'importantes améliorations dans la manière de bâtir
en usage chez les paysans et les fermiers des environs de Ville-
franche (département de la Haute-Garonne).
M. le marquis de Saint-Félix de Mauremont n'est pas un simple
amateur; il parait avoir fait ses études d'architecte d'une manière
régulière, et quoique entraîné plus tard dans la sphère politique et
"littéraire, l'amour de notre bel art ne l'a jamais abandonné, et au-
jourd'hui nous recevons d'un savant antiquaire, M. du Mège, que
chacun connait et apprécie, quelques lignes sur une nouvelle pu-
blication de M. le marquisde Saint-Félix de Mauremont. Nous ne
connaissons pas ce nouvel ouvrage, mais nous nous rapportons
avec confiance à l'appréciation éclairée de M. du Mège.
Traité historique et descriptif, critique et raisonne dks ordres D'AR-
CHITECTUKE, avec un nouveau système simplifié, accessible à toute
nature de matériaux, et suivi de leurs divers accessoires; ouvrage
servant d'introduction développée a l'architectire rirale. accom-
pagné d'lne biographie des architectes et d'ln- vocabulaire lm-
VERSEL, avec. 32 planches. Par A. J. M. de Saint-Félix , marquis
DE Mauremont , comte de Cajarc , membre de plusieurs sociétés sa-
vantes, chevalier de l'ordre souverain de Saint- Jean de Jérusalem,
de l'ordre royal de la Légion d'honneur, eic. (2).
L'architecliire n'est p.is seulement un art, comme le pensent quel -
•lues l.ouimes du monde; c'est aussi une science qui est basée sur plu-
(1) Voir le âc volume de la Revue, col. 33.
(2) Ouvrage iii-4"; se vend à Toulouse, chez Doutadoure, imprimeur-libraire,
sieurs niiircs, qui s'eiiricliil de leurs dofoiiveries, cl ijiii jijouio purs,-
.sainniciil an buiiliciir des peuples , ainsi qu'à leur |:li)iiu. S()n>
Louië XIV, un pocie pouvaii bien chercher à en rabaisser un autre en
lui donnant répilhèle de maçon; mais Maiisard cl l'enault, en France,
.'ijonlalcnlauv illuslralioiis du granil siècle, laiulisque, arcliilecle aussi,
Vauban élevait les buiilovnnis qui devaient arrêter les efforls des enne-
mis de la patrie. Si, à l'époque où nous vivons, l'arcliiieciure ne multi-
plie pas ses chefs-d'œuvre, si les genres soni confondus, i\ l'on donne
à lin temple grec le nom d'église, si l'on substitue des formes lournun
tées on des lignes peu liannonicuscs aux adorables caprices de la Re-
naissance, aux exemples donnés par Palladio, il est des esprits supé-
rieurs qui veillent r.uiiener aux vrais principes,- en ponant les liiinièreii
dans le chaos des idées, en fixant pourclmquc genre de consiructioii
le style qu'il faut suivre, les maximes qu'il ne faut jamais abandonner.
Parmi ces hommes recoinmandables, il faut siirloni distinguer M. de
Saint-Félix Maiireinoni, auieiir de l'Arcuitecture bubale théorique et
pratique, ouvrage dont les éditions se sont multipliées, et qui méritait
bien le succès qu'il a obtenu. Maintenant, dans l'ouvrage que nous an-
nonçons, M. de Sailli-Félix donne un iraiié complet des ordres d'archi-
tecture, «l ce traité est destiné ï servir d'introduction à son Archilec-
lure rurale. Dans sa prt'face ainsi que dans le chapitre premier de son
nouvel ouvrage, l'auteur examine rnpidemenl les nonvraux genres ad-
optés, et faii ainsi une histoire abrégée de l'art. Invinciblement attaché
par ses études à rarchiteetnre grecque, il ne considère celles des autres
peuples, et siii tout des modernes, que comme une dégénérescence ,
une sorte de dégradation; mais en cela il nous permettra de ne pas être
de son avis; les Grecs oui emprunté aux Égyptiens une partie, si ce n'est
tout leur système de construction. Ils ont amoindri les masses, donne
plus de légèreté, plus d'élégan.ce aux formes. Ils ont perfectionné l'art;
ils l'ont surtout assoupli, si l'on peut s'exprimer ainsi, à leurs croyan-
ces, à leurs besoins, à leurs haliiiudcs.
Les Romains ne firent qu'imiter ou copier les Grecs; mais de nou-
velles nécessités naquirent avec une religion nouvelle adoptée par des
peuples jusqu'alors inconnus. Les temples du polythéisme ne purent
suflire au culte chrétien. Tout le peuple devant participer aux mystères,
mêler sa voix à la voix des piètres chantant les hymnes sacrés, et en-
tendre les instructions données par les ministres de sa religion, il fal-
lut des édifices appropriés à ces nécessités. Dès lors l'architcclure
romane fut créée. Ellq emprunta bientôt à l'Orient, à Ityzance, la ri-
chesse des décorations intérieures, et pendant plusieurs siècles ce
genre fut le seul en honneur dans la clirélicnté. Mais rarchileciure fit
au XIV« siècle des progrès Immenses. Alors la science éleva ces voUies
si hardies et si solides à la fois que nous admirons encore. La sculp-
ture d'omeincnlaiion, qui avaii abandonné les gracieux contours des
chapiteaux corinililciis, et qui ne ciselait plus les élégants rinceaux de
l'acanie, abandonna aussi les chapiteaux romans, devenus, par les
histoires que l'on y représentait, des pages détachées des livres saints.
La sculpture seconda les efforts de rarchileciure sa soeur, et l'on a
douté pendant quelque temps que le ciseau ait pu façonner en feuilles
si légèrement découpées, ces dais, ces pyranildions qui coiironueni
avec tant de légèreté, avec tant de charme, les h.irdie$ constructions
du XV' siècle. Ce n'était point assurément une dégénérescence: c'était
le progrès le plus marqué, c'était pent-élrc ce que l'art pouvait créer
de plus grand, de plus majestueux, de plus surprenant à la fois.
Après cet elTort, l'art chrétien devait ou demeurer stalionnaire, ou
rétrograder vers les temps antiques. Il y eut nue époque de tran.<iition,
ce fut celle de la Renaissance. .\près elle on renonça à toute création, on
redevint Grec ou Romainjctc'est ce que beaucoup de personnes croient
être aujourd'hui le seul moyen d'atteindre le beau, de lutter avec les
rue Sainl-Iiomc, 41 ; à Paris, chez Pierre Bertraivl, rue Saiiit-.\ii<lré-des-Arls,
38, ei chez Audrel, rue du Paaii, 8.
517
UEVUE DK LARCHITKCTl KE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
5f8
plus grnii lis génies des (emps passés; nous croyons <|uc cetifi pensée est
une erreur. Clia(|ue édifice doil, par son style, indiquer sa dcsiinaiion.
Dans rilcllénie, dans tout le inonde romain, cm reconnaissail un lempic
à sa l'orme, loiijoms à peu |)rès la nième. On ne se Ironipail point sur
la dcsiinaiion d'un tel édifice. .Mais olcz à la Madeleine son l'ronton et
ses statues, opère/, de inênic à Notre-Dame de Lorciie, et cotiinie ces
l'rontons, ces colonnes, ces l'ormes, ont été donnés par nous ii des bàii-
nients avant une loul antre destination, itersonnc ne reconnaitra dans
ces deu.x constructions ce que nous nommons des églises. Avouons ce-
pendant qu'il est sans doute des édifices où les formes grecques peuvent
être adoptées avec avantage. Une imilation d'un tein[de de l'œslinn
pourra fort bien devenir, dans nos villes, une halle ou un marché cou-
vert. Tous les édifices ruraux, à l'exception peut-être de l'hahifation
il'ini grand propiiétaire, perivenl affecter ces formes élégantes et éco-
noniiciucs (|ue l'art inventa dans la Grèce, et c'est ce que ,M. de Sainl-
Félix propose. En substituant, en cllet, ce style aux formes grossières
de nos édifices ruraux, on fera ini immense progrès. Il m; faudrait pas
cependant charger de scnlptmes délicates ces bâtiments destinés seule-
ment à des usages utiles, et à ce sujet, on doit lire et V ÀrchileHure
rurale de M. de Saint Kélix et le traité que nous venons d'annoncer.
Lii se trouve un nouveau sytème, simplifié, accessible ii tonte nature de
matériaux, et suivi de leurs divers accessoiresi C'est ce système que
nous devons examiner dans un prochain article, et qui, nous le disons
d'avance, parait remplir tontes les conditions exigées pour opérer une
heureuse révolution dans nos constructions rurales. Là il y aurait aussi
un progrès réel, et tous les bons esprits applaudiront aux savants ef-
forts de l'auteur de cet excellent livre.
Le Ch" Alexandre du MÈGE ,
Diri.'clciir du Jlusée de Toulouse.
A M. César Dalï, directeur de la Rnnt de FArrUteclure ti det
Travaux public».
Ainsi que vous m'en avez manifesté le désir, j'ai l'honneur, iiiunMeur.
de vous adresser quelques notes sur les travaux exécutes ou en iraiii
d'cxcciitinn dans nos localités. Si je ne l'ai pas fait plus l6t, veuillez
en accuser le nombre de mes occupations et non ma bonne volonté.
D'après un relevé fait it la {tf-éfecturc du déparienieul du llaut-
Rliin, et contenu dans le rapport du préfet au conseil géoëral, il j
été affecté par les communes ii la cous ruclion de maisons d'éculc!» .
églises, presbytères, corps de garde, ponts, etc., du 1*^ janvier IStVi
au I" janvier 1844, la i-onimc de 5,221,123 fr. Scenl., pour 464 projets.
Les trois arrondissements formant le département ont contribué daos
celle dépense de la manière suivante :
Arrondissement de Colinar . '-'.i02,G40fr. 74 cent.
de Relfort 1.153,370 •■
dAltkirtb l,CC.'>,li4 31
CORRESPONDANCE.
SoiMAiBii/ Nouveaux parquets fabriqués à Strasbourg. — Travaux réceimnenl acbe-
vés, ou en tiain d'e\éculionei projelês dans le déparleriieiil du llaul-Ithin ; ré-
llexions sur l'art moderne. —Travaux en cours d'exéculion ,i Dordeaux ; projet
d'hôlcl des postes dans celle ville; travaux qui s'exécutent dans les environs;
ctaieau de Pau, etc.
A M. César Daly, directeur de la Revue générale de lÀrchilecture et des
Travaux publics.
Monsieur,
Permettez-moi de vous recommander une industrie nouvelle de notre
vieille cité de Strasbourg. M. Charles Bluincr est parvenu, par des pro-
cédés particuliers, à vaincre certaines diflicnltés dans le travail du bois,
et à taire des parquets ordinaires el à dessins mosaïques à la fois d'une
grande précision, d'une solidité parfaite el d'une extrêine modicité de
prix. Je puis en toute confiance vous le recommander, et je vous serais
bien obligé s'il vous était possible de transnielire ma recommandation
à nos confrères, par l'organe de voire excellente Revue.
M. Blnmervous fait remettre deux feudles de parquet qu'il vous prie
de vouloir bien conserver chez vous, alin de les montrer à messieurs les
architectes qui seraient désireux de les voir; il y joint aussi un cahier
de planches représentant les principaux dessins qu'il exécute, avec les
prix' du mètre carré de chacun d'eux pour Strasbourg et pour Paris.
Veuillez, agréez, etc.
J. A. WEYER,
A rchitecle.
Somme totale. . 5.221,125 fr. (M ceni.
Grâce à ces travaux, le département du Haut-Rhin, récemment en-
core l'un des plus aiTiérés quant ;i l'inslruction primaire, se trouve
maintenant l'un des mieux dotés sous ce rap|Mjri. Remarquons en
passant que c'est à partir de la promulgation de la loi du 30 juin 1833
sur l'instrucilon primaire que date celle impulsion.
La réaction en faveur de l'architecture gothique, unie à la réaction
religieuse, a sauvé bien des monuments d'une ruine certaine; elle a
provoqué en France la construction d'une foule d'églises dans le style
du .Moyen-Age, et l'achèvement d'un grand nombre d'autre» com-
mencées dans les siècles derniers, et dont les travaux étaient re<tés
suspendus pendant nos tourmentes révolutionnaires.
Le Haut-Rhin voit actuellement s'achever la nouvelle église d»-
Guebwiller; en 1844, on a exécuté un étage d'une des deux tours de
la façade ; le style du monument est celui de l'époque de Louis XV.
Les travaux de celte tour sont évalués à la somme de SO i 60 mille
francs.
Relfort verra de son côté la deuxième lourde son église construite
en 1843. L'adjudication des travaux, évalués à 27 ou 28,000 francs.
est <léjà faite. Celle église est d'un style plus sévère que celle de
Guebwiller, et elle porte le cachet du règne de Louis XVI.
Dans la partie haute du département, on commence plusieurs églises.
Altkirch a adjugé les travaux de la sienne, évalués à 160,000 francs.
et en a conlié la direction à M. Bolz, architecte à Paris. Elle est conçue
dans le style byzantin.
Dannemarie fait reconstruire le vaisseau ^e son r^usc p.iiuî9.-uic
el conserve la tour. Ce travail, adjugé pour environ 60,000 francs,
est dirigé par M. Lejeiine, architecte du département.
Bavilliers a commencé cet automne les travaux de son église, éra-
lués à 70,000 fr. C'est à M. Poisal qu'est conlié ce travail, qui sera
exécuté dans le style dit XII* siècle.
Tels sont, monsieur, les principaux travaux qui s'exécutent dans le
département. Bien d'autres encore sont en projet, et parmi cenx-ci.
une salle de spectacle pour Colmar, trois églises pour Uulbooie ; maà%
les fonds manquenl pour le moment.
Après avoir clos cette sèche énumération, penneltez-moi qnehpMS
réilexions sur l'étal d'isolement et d'anarchie dans leqad firent le»
architectes, et par suite duquel l'art marche an hasatd et mrs di-
rection. Lors de la discussion de la loi des patentes, le ministre pru-
inil de s'occuper de l'organisation en corps des architectes. CeUc
promesse serail-elle oubliée?
4ujourd'hui chaque artiste, avec les élemenu qu'il a acquis el les
recherches qu'il peut avoir faites, tente un effort pour se dctorrasser
des langes de la routine. Le slylc de l'empire n'est plus guéie repré-
senté maintenant; on a vu lui succéder a la 'fois à peu près lOM le»
j styles connus, le gothique, les fornics de la Renaissance, la capricieasc
519
RKVUK Di: r;AI\CHITKCTLRK KT DKS TRAVAUX PLBI-ICS.
520
fantaisie du lemps do Louis XV, le liyïanliii même, loulos imltaiions
plus ou moins adroites, mais pas un slyle oiij,'inal et qu'on puisse
appeler national. Chacun de son côic a cherché, mais personne n'a
trouvé. Celte recherciie, qui ne peut guère être l'œuvre d'un seul homme,
ce hut que chacun individuellement ne peut atteindre, ne pourrait-elle
pas être l'œuvre de l'association des artistes entre eux? Ces grandes
sociétés de Franr»-.Vafons, qui, à une époque barharc, portèrent si
haut l'idéal du beau dans l'art chrétien, ne pourraient-elles pas re-
naître aujourd'hui et produire les mêmes résultats? L'Allemagne
semhie pouvoir répondre alTirmativement. L'académie de Munich, puis,
samment secondée par les efforts d'un monarque intelligent, a créé
et met en pratique ce qu'elle appelle le slyle nouveau de T Allemagne.
Composé d'éléments divers rattachés entre eux avec étude, sinon avec
beaucoup de goût, ce slyle a l'inappréciable avantage de se prêter
an climat et à la nature des matériaux du pays. Je l'ai vu employé
dans le grand-duché de Bade, aux bâtiments du chemin de fer de
la rive droite du Itliin. A Carlsruhe, l'école polytechnique, l'académie
et plusieurs autres élahlissemenis piddics sont conçus dans ce style.
On y voit encore une caserne qui peut donner une idée de l'effet qui
peut résulter de son emploi, même dans des conditions très-écono-
miques. Tout dans ce pays rappelle ce siyle adopté; les particuliers,
les ingénieurs des travaux publics, le génie militaire, en impriment
le cachet à leurs travaux. On n'y retrouve plus ces loilrds détails
affectionnés par le génie militaire français. C'est cho.se en rffit digne
de emarque, qu'en France, dans ce pays qui a la prétention, jus-
tifiée du reste, d'être le premier dans les arts, les diverses adminis-
trations, qui tomes sont des branches de l'État, st'inblenl prendre à
tâche de d(!menlir cette renonimée. Nous accordons suis restriction
nos éloges au génie civil et au génie militaire français pour leurs
lonnaissancos dans les parties théoriques et pratiques des conslruc-
lions, mais nous ne saurions leur reconnaître un mérite égal dans
les parties purement artistiques.
Telles sont, monsieur, les réflexions que j'ai cru devoir vous sou'
mettre à vous, le directeur d'une Uevne qui est et tloit cire un lien
entre les divers membres de notre grande et noble famille. Qu'il mon
exemple, chacun de nos confrères en fasse autant, et nous verrons
bientôt, grâce à celte œuvre d'association, l'art sortir de l'anarchie où
il est tombé aujourd'hui.
Veuiller, agréer, etc..
X.
Archilecle.
.\ M. César Daly, directeur de la Revue de l'Architecture et des
Travaux publiet.
Monsieur,
.\ votre passage à Bordeaux, vous avez bien voulu me demander
de vous donner de temps en temps quelques nouvelles sur les con-
slruîtious exécutées ou projetées à Bordeaux et dans ses environs;
je viendrais aujourd'hui vous en entretenir, si vous-même n'aviez pas
visité récemment noire ville, et si, par conséquent, vous n'étiez pas
au courant presque aussi bien que moi.
Je ine contenterai de vous apprendre que les travaux de notre Pa-
lais-dc- Justice, que vous avez visité .nvec intérêt en compagnie de
M. Thiac, archilecle chargé de son édification, ont été interrompus
depuis quelque temps par suite de mésaccord entre M. le ministre de
l'intérieur ei le conseil général du département, qui demandait que
l'État prit, dans l'exécution de cet important monument, une part plus
considérable que celle dont il s'était chargé d'abord. M. Achille Le-
clère, archilecle, inspccieur général des bâtiments civils, est venu à
Bordeaux pour régler celle affaire, et l'on a tout lieu d'espérer que les
travaux reprendront avec daulanl plus d'activité la campagne pro-
chaine, que cette année ils ont marché avec assez de lenteur.
Le Casino, bâtiment «lesliné à donner des conceris, et que vient de
l'aire élever un négociant de notre ville sur les plans de M. Burgiiel, doit,
dit-on, être bientôt livré au public, et la société philharmonique se
propose d'y donner ime de ses fêles dans quelque temps.
Des travaux de consolidation et d'appropriatiun à i'Ilôtel de la Bourse
ont été exécutés cette année sous ma direction comme architecte de
cet établissement, et seront continués la campagne prochaine.
Bordeaux doit également à la présence de M. Achille Leclère dans
ses murs, le commencement des travaux de réparation de notre ra-
ihédrale, que certaines parties réclamaient avec urgence. M Miailhe,
architecte chargé de la direction de ces travaux, vient dé faire établir
les échafaudages nécessaires à la restauralion de la grande rose an-
dessus du portail principal. Les constructions particulières ont été assez
nombreuses cette année, surtout dans l'hémicycle des quinconces, que
tout le monde voudrait voit- achevé.
Quant aux travaux projetés, on parle depuis longtemps d'une re-
construction de VHôlel des Postes. Vous connaissez la situation de
cet hôtel dans nue rue lrés-fié<pienlée, mais peu large et d'un abord
assez dillicile pour des voitures conmie les malles. Il est à désirer que
les, améliorations devenues indispens:ibles s'exécutent proniplemenl,
mais il est vivement à regretter que, dans une ville offrant un aussi
grand nombre de voies larges et d'un accès des plus faciles, l'iniérét
privé soit parvenu à faire maintenir l'hôtel des Postes dans la rue
Porle-Uijeaux. Il devait sembler au contraire qu'on se serait empressé
de profiter de la nécessité où se trouvait l'administration des postes de
faire de grandes réparaliims à son hôtel, pour établir cet hôtel ailleurs,
dans un quartier tout .iiissi central, et où la .>>é<'urite des piétons n'aurait
pas été constamment compromise par le passage des malles-postes.
Le public s'occupe toujours beaucoup du chemin de fer de Paris à
Bordeaux, voté par les chambres, et de celui, presque autant désiré,
lie Biirdeaux à Bayonne; mais les travaux de Bordeaux à Angouicme
ne sont pas encore commencés. On nous fait espérer cependant qu'au
printemps on se inetira ,i l'œuvre.
Ayant épuisé, je crois, tout ce que j'avais à vous dire sur liordeaui,
je prends la liberté de vous envoyer ci-joint un article de ma fofon,
sur un nouvel établissement thermal construit depuis quelques an-
nées à Cautercts (llantes-I'yrénées), et que l'on a livré au public cet
éin, bien que les charpentes, qui ont servi à construire les voûtes,
n'aient pas encore été enlevées. J'y joins un petit croquis donnant
le plan, l'élévation principale cl la coupe longiludinale de ce bàiiment,
pour l'intelligence de ma description (\).
Je suis allé à Cauterets nu mois d'août, par raison de santé, et c'est
alors que j'ai étudié l'édifice dont je vous parle et rédigé les notes
que je veus envoie.
Dans ce petit \oyage, j'ai vu peu d objeis inicrcssant notre art;
cependant, je vous avouerai que j'ai eu le regret de voir, à Tarbes,
abîmer l'inléressanle église cathédrale, par des peintures de toute forme
et de toute couleur qui faisaient le plus fâcheux contraste avec son
architecture du Xll* et du XIII' siècle.
A Pau, les travaux du château de Henri IV avancent lenienient.
On posait au moin d'août la galerie de la grande terrasse sur le Gave,
cl l'on s'occupait de réparer l'aile du nord. Il est à regretter que
celte restauration, faite avec intelligence, ne puisse cire poussée avec
plus d'aciivilé. Néanmoins, les habitants de Pau doivent tous les jours
se féliciter de voir l.i liste civile réparer et dégager ce château à
la fois si pittoresque et si riche en soiivcitirs. Si la position de Pau est
une des plus agréables de la France, si son séjour offre Uint de charmes
aux étrangers, le château et son parc peuvent revendiquer une bonne
part de ces avantages, et l'on doit être reconnaissant envers le roi
Louis-Philippe de n'avoir pas oublié qu'il exislail à Tune des exlré-
(1) Nous réservons celle comniunication de notre correspondant pour un
autre nionieut. (A', du O.)
j21
REVUK DE L'ARCHITFXTURK ET DES TRAVAUX PLBIJCS.
522
mités (lu royaume une hnltiiailuii royale digne de tout son intétél,
(le loiile sa prédilection pour nos châteaux historiques.
Mais, si le château de Henri IV iiKirite à tant de litres de fixer l'at-
tention des voyageurs, on peut dire que mallieurenseincnt II est le seul
(idifice que Pan rpiifcime. l'as une éï;lise, pîis une chapelle ;i visiter,
à moins que la curi()sit(' ne vous engage à diriger vos pas du côl(i
de la chapelle anglaise, construction r(jcente, soi-disant gothique, du
plus d(;plorable elTel.
Dans la délicieuse valli-e d'Argelès, les baigneurs de Caulercts, de
Barr(iges et de Saint-Sauveur, \ont faire un pèlerinage à l'antique
abhiiye do Sainl-Savin, reniarqiialde par sa belle position, la riche
végétation qui l'euvironui', et sa grande église d'architecture romane.
Si je n'avais crainte d'abuser de vos moments, je pourrais vous de-,
crire celte intéicssaulc église, dont j'ai relevé le plan, les coupes, et
pris qiicliiues vues. Mais cette digression arcliéolugi(iue pourrait m'en-
traîner trop loin...
Agréez, etc.. II. D.
NoTR SIR vs Procédé d'Assainissement des Égouts.
Dans la séance du 30 juillet, M. Sirota présenté un mémoire à l'Aca-
démie des Sciences, sur l'application à l'assainissemenl des égouts de
son procédé de désinfection des fosses d'aisance , procédé qui fut l'ob-
jet, l'an dernier, d'un rapport favorable de l'Académie (1). Pour cette
nouvelle cl utile application, M. Sirel fait subir à sa mélliode (pielqiies
modifications, exigées par les conditions différentes du problème qu'il
avait cette l'ois à résoudre.
« Commeiil en effet, dii-il, pourrait-on attendre quelque effieacilé
d'une poudre légère qui resterait nécessairement à la surface de l'eau
dont le fond des égouts est |irosque constamment couvert, et qui serait
emportée rapidement chaiiiic fois que la pluie déterminerait dans les
conduits un courant rapide?
«Après plusieurs essais, je crois êire parvenu à surmonter cette
difliculté. Voici comment j'opère :
« Pour 500 mètres d'égouts, je prends 7S kilogrammes d'une masse
composéeainsi qu'il suit :
Sulfate de fer. . . . 200 kilogrammes.
Sulfate de zinc. . . 25
Charbon végétal. . . 10
Sulfate de chaux. . 205
Total. ... 500
« Je mélange avec une certaine quautilé d'eau ces substances, après
en avoir opéré une union parfaite pour en former une masse solide.
« En ayant extrait 73 kilogrammes de cette masse compacte, et que
son poids relient au fond de l'eau , à l'entrée de l'égout , les eaux en
fonl une dissolution graduelle m passant par-dessus , et se trouvent
ainsi dé.Mufectées. Ou peut, avec les proportions indiquées, compter,
de la part de la masse, sur une action désinfectante d'une durée de
((uinze jours; tels sonl du moins les résultats que j'ai obtenus à
iMeaux , dans l'égout du Brassct, (|ui reçoit les eaux des mégisseries.
(( L'emploi du sulfate tU\ chaux, (pii rend conipactes les poudres
désinfeciantcs, ne les décompose nullement; il en siinnile plutôt les
ellels désinfectants que de les (liiniiiiier. »
Nouveau mour dk Fabrication des Briques et des Tuiles.
Ce procédé est dil à M. Prosser, de Birmingham , et a été communi-
qué h l'Institut des ingénieurs civils de Londres; en voici la description :
On fait sécher l'argile dans un four continu, semblable à peu près à
(1) Voy. vol. iT, col. itli
celui dont on se sert pour faire cuire les poteries, puis on la rcdoiiefl
poudre line. et on la soiinict à une forte pression dans des moules mé-
talli(|ueg. Cette opération lui fait perdre environ les deux tiers de ton
épaisseur, et malgré l'état de sécheresse auquel on l'a amenée dans le
four, l'argile contient encore assez d'humidité pour lui donner de la co-
hésion cl pour que les tuiles et les briques soient moulées en conser-
vant leurs arêtes; alors on peut les exposer a la chaleur du four, sans
les dessécher de nouveau, el la cuisson s'opère sans qu'il se forme au-
cune crevasse. On a mis sous les yeux de la société un échanlillon de
brique faite avec la terre à brique ordinaire de Straffurdsbire, quiavait
clé d'abord réduite en poudre fine; s:i couleur est d'un beau rouge, sa
texture homogène, ses arêtes bien déterminées. On ne remarque au-
cune trace de vitrification; son poids spécifique est de 2,5. Sa grande
densité est due à la pression qu'on lui a fait supporter, el que l'on peut
évaluer à i'jO louneaux.
La société a soumis à diverses épreuves les produits qu'elle avait à
examiner ; une tuile de 82 millimètres de diamètre et de 9 d'épaisseur a
souleiiii une pression de 30 tonneaux san^ que les l>ordi s'égrenassent;
une autre, de même diamètre el de 37 millimètres d'épaisseur, a réi>i>té
à une pression de 35 lonne.iux. et un bloc de 180 niillimètres est reste
intact sous une pression de ïH) tonneaux. Jusqu'il présent la fabrication
de M. Prosser a été assez restreinte quant au volume des pièces mou-
lées, mais il fait établir une nouvelle presse hydraulique qui lui per-
mettra de f.ibriqucr des tuiles de toute dimension et de tout modèlp,
pour les besoins de rarchileclure.
Sur l'Architecture du .MoYE>-.\Ge i>° Italie
, Extrait de L' ATMKMAra .
Il est intéressant de suivre l'inlluence du goût et du sentiment clas-
sique au milieu de lotîtes les variétés de l'archiiecture du Moyen-Age
en Italie, de la voir donnant aux styles byzantin, lombard el Inéne
ogival un aspect de compacité symétrique, et aux masses les plus
solides un air de légèreté élégante. En effet, le style ogival ne s'est
jamais naturalisé eu Italie; il y a ilaiis le golhii|ue italien une élcgaiice
polie et toute brillante ; ses angles ont été arrondis, ses arêtes adou-
cies, cl la .sévérité primitive, l'acuiié de ce stylo, ont été Iransfuféea
eu (|uel(|ije chose de joli el d'oiné. Le Duomo de Milan préseaie
l'aspect de pinacles d'ivoire suigneuscinent ci>elés ; son exti'riear
est petit de caractère, quoique ses dimensions soient considérables.
Les plus grands édifices gothiques de l'Italie ont fort poo de cet air
d'imposante grandeur qui Trappe dans les cathédrales d'Angleterre, ir
France et d'Allemagne; ils ne saisissent pas forleoienl TiiMgiMtioa
el n'ins[iireni pas celle religieuse vénération <|ne fait naître daas Ptoe
la solennité de la véritable arrhileciure gothique ; ils sont soMveni
plutôt gais que graves, et leurs ornements ont un caracicre luxurieux
et fantastique très-différent de la mystérieuse complication et de la
sombre sévérité du vrai gothique du Nord.
il y a quehpie chose qui semble incompatible avec la vivacité et la
gaieté méridionales dans le stylede l'archiiecture ogivale.avrc ses angles
si prononcés, avec son air de rudesse. Aussi ce genre ne put-il prendre
racine eu Italie, comme il est facile de s'en convaincre par l'exemple
(les églises les plus anciennes comparées à celles d'une époqne posié-
rieure. La première église gothique d'Italie est celle de Sainl-.\ndré à
Vercelli, dans le Piémont, ipii fut commencée par le cardinal Goala
en 1*219, à son retour d'Angleterre, où il avait été envoyé par le pape.
en qualité de It'-gal, pour soutenir le Iràne chancelant du roi Jean. Sa b-
çadc est romane; mais son iniérieiirappanient au style ogival, puisque
son chœur est éclairé par trois fenêtres en lancettes. Elle fut consirvile
par un ecclésiastique français.
L'église gothique qui vient immédiatement après celle dont il vieai
d'être question, est celle de Saint-François, a Assise, si riche en ouvrages
de l'art primitif de l'Italie. Elle fut construite entièrement dans le style
523
REVUE DE L ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
ogival, par un aicliilecle allemnnil nommé Jacobiis. Mais si, laissant
(le côté ces deux premiers éilKices, on dirige son allenlion sur l'égiiso
de Sainl-François de Rimini, on y reconnaît ane structure ogivale
en dedans et classique en dehors , marquant la première décadence du
gothique cl la renaissance du style chissi(|ue en Italie. Ici il devient
évident que les caractères essentiels de l'architecture ogivale n'ont pas
été |iarfailement sentis, puisqu'ils ne sont pas entrés dans le génie des
llaliens, si même ces principes ont été compris par eux, ce qui peut
éire regardé comme fort douteux. C'est avec ce point de départ désa-
vantageux que le plan de cet édifice a été conçu, et que son exécution
a commencé; aussi riiifluence italienne coiiimeiice-t-elle n s'y dessi-
ner, pour se prononcer plus nettement encore dans les églises et les
monuments d'une construction postérieure.
Ces observations sont indispensables pour comprendre le caractère
de l'architecture italienne au Moyen-Age, et pour s'expliquer celte nio-
dificaiion de style qui, tout en conservant aux églises d'Italie des traces
(le leui' origine arcliitcctonique, leur a donné néanmoins une physiono-
mie particulière dans laquelle on reconnaît sans peine rinfliience des
idées méridionales sur les conceplions des peuples septentrionaux.
Procédé pour la. conservation du Feb dans la .Mkh.
Le Technoloyisle a rapporté dans le temps un procédé assez compli-
qué que .M. It. .Mallet avait fait connaître, et qui avait pour but de pré-
server de la corrosion les bâtiments en Ter qui naviguent sur la mer,
et d'empêcher les animaux et les végétaux marins de Torraer une croùic
sous leur carène.
Ce procédé se composait de trois opérations, que M. R. Mallet ré-
duit aujourd'hui à deux, et qu'il modifie ainsi que nous croyons utile
de le rapporter d'après le Technnlogisle. Il peut avoir des applications
en dedors de la marine, et servir généralemenl à la conservation de
tous les fers destinés h séjourner sous l'eau.
La firemière des deux opérations dont se compose le procédé con-
siste dans l'emploi d'un t'crnis protccfcwr composé d'après ce principe,
savoir : que ses éléments, qui ne peuvent pas former des hydrates ni
se combiner avec l'eau, adhèrent avec force au fer, en conservant tou-
jours une cerUiine élasticité.
La carène d'un navire en fer étant parfaitement sèche et débarrassée
par le grattage de tout oxyde adhérant, on l'enduit du vernis protecteur,
qui se compose de :
40 parties du meilleur goudron de houille réduit, à l'aide de la cha-
leur, jusqu'à la consistance de la poix;
\ partie de caoutchouc dissous et amené à l'étal pâteux, état sous le-
quel on le trouve aujourd'hui dans le commerce;
5 pariies de minium pulvérisé.
Le goudron étant fondu, on ajoute le caoulchouc et enfin le minium,
et le tout est brassé avec soin, tandis qu'on fait fondie sur le feu.
Les bàlimenis neufs dont les bordages sont nets n'exigent qu'une
seule couche; les vieux eu demandent deux ou trois.
Aussii(it (|ue le vernis est sec, il faut le recouvrir uniformément
avec la peinture zoophage, ou vernis empoisonné, qu'on applique à
chaud avec des brosses douces.
La peinture zoophage prévient l'incrustation de la carène, en ce que
les sels méialliques qu'elle renferme sont peu solubles, ou tellement
délétères pour les animaux ou végétaux marins qui touchent à cette
carène, que ceux-ci n'adhèrent et ne se développent plus à sa surface;
il faut donc que cette peinture, en même temps qu'elle résiste au frot-
tement provenant du mouvement du navire, possède un degré de solu-
hililé ou pluKJt de miscihiliié avec l'eau assez élevé pour permettre
que les poisons soient absorbés par les capillaires des êtres qui vien-
nent s'appliquer dessus ; car, sans cette dernière propriété, aucun poi-
son, quelle que soit la proportion dans laquelle on l'emploie,. ne peui
èire utile d'une manière permanente. Voici, du reste, la composition a
laquelle .M. Mallet s'esl arrêté :
On fait fondre ensemble, à une douce chaleur, dans 2 parties d'can :
1 partie de savon jaune ;
i pariies de résine. ,
On mélange ces substances chaudes à du vernis d'huile ordinaire,
puis on fait fondre avec elles 4 parties du meilleur suif. Quand le mé-
lange est uniformément (qiére. on ajoute les subsUinces suivantes ré-
duites eu la poudre la plus Une :
1 partie di; réalgar;
1 partie de minium.
Puis on agite parfaitement le mélange.
Lorsque celle préparation est froide, elle a la consisianci; du m iirre
à 10 degrés centigrades. Pour les climats tropicaux, on augnienle la
dose de résine, et celle du savon pour les régions arctiques.
Lue couche de peinlure zoophage dure de un à trois ans, suivant les
circonstances; elle est d'un beau rouge écarlale qui ne dépare pas la
carène des bâtiments.
Les procédés de M. Mallet, appliqués à plusieurs steamers chargés de
divers services, ont fourni, dit-on, de bons résulials, el l'on a eiendu
leur usage avec succès aux bouées, corps moris, corps flotlanU, jetées,
el il de petits biiiroentscn fer ou autres.
CHRonriQns.
SoaiiAïai : tIM. Didron cl Lenoir, nommes ctivxiiers de la Légion d'honneur. —
Ln ulile avii de 11. le pri-M de police. — Cliiire à priclier de li calhedrale
de Troye». — RetUursiion du chÂlcau de Bloi». — Rcsuuralion du Ibellre de
Nantes. — Eglise nolhiquc en con>lniclion à Nanlrt. — l'n seul mécanisme pour
loules les horloges d'une ville. — Statues éICTées é Uoethc et i Stephenson. —
tjrand Ihéllrc en consiriiclion à Li«ourne. — Chemin de fer hollandais. — fv-
RLICaTlOBI KOOriLLU.
— Sur la proposition de M. de Salvandy, MM. Didron, s«cret.iire du
comité bisloriiiuc des arts et monuments, et AIIkti lenoir, arcbitecie,
membre du même cumile, el nos redacleurs tous deux, xiennciii d'èire
nommes chevaliers de la Légion d'honneur.
^ous applaudissons de grand cœur h cet acte de jiisiice. .\o» lecteurs
savent combien de services déjà MM. Albert Lenoir et Didron ont rendus
à l'art et à son histoire. Secrétaire depuis la fondation du comité liislo-
rique, M. Didron, outre les nombreux articles de critique publiés dans
divers journaux, a fait plusieurs travaux d'une baulc importance sur
l'archéologie nationale : son Hitloire de Dieu, le manuel i\' Iconographie
ehrélienne, la publication des Annalet arckrologiquet , sont des titres
plus que suffisants à la laveur dont il vient d'élre l'objet.
C'est à M. Albert Lenoir que Ion doit la rédaction d'une partie con-
sidérable des Instrvclioni du Comité hitlorique, la lielle publication de
\.\ Staliilique monumentale de l'arit, et une foule d'autres écrits sur
l'art chrétien de toutes les époques; enfin, c'est à lui qu'on doit la
iransformation du palais des Thermes cl de l'hôtel de Cluny en niusco
d'archéologie nationale; tant et de si utiles travaux méritaient bien à
M. Albert Lenoir celte tardive récompense. •
— M. le préfet de police vient de faire afficher un avis par lequel il
invite les habitants de Paris à se défaire, sous peine de prison, de cer-
taines habitudes compromet tantes pour la pudeur el la propreté publi-
ques, les engageant à faire usage des colonnes et autres appareils de
même espèce dont les bons soins de .M. le préfet de la Seine ont dé-
coré nos quais cl nos boulevards. Nous applaudissons vivement à celle
sage mesure, qui aura pour résultat, nous l'espérons, de contribuer
puissamment à l'assainissement de Paris, el de faire disparailreces mares
infectes qui salissent les trottoirs cl les abords de plusieurs monuments
publics. Mais ne serait-ce point l'occasion, puisque l'arrêlé défend de
souiller les murailles, de fa(iliter l'obéissance aux ordres de la police
i\E\m: DE lahchitecturh; et des travaux publics.
bMi
cil taisaiil élever des vespasiennes eu noiiilirc :iii iiKiiiissuflisaiilpour sa-
lisl'airc aux besoins, ei inèiiie de l'aire éludier un modèle qui allie à la fois
la décence cl la commodité à des formes d'un goût lolérable ? Ce ne
serait pas trop faire que d'ouvrir un concours pour liàier la sululion
d'une aussi grave question. Une des conditions du programme devrait
être l'emploi d'un procédé désinfectant comme celui du bitume de
houille, emploi dont nous avons parlé précédemment dans un article
spécial. (Vmj. col. 512). La chose est urgente, car il est des quartiers
que le nouvel arrêté jette dans une véritable perplexité en leur inter-
disant l'usage des petits coins, seuls endroits qu'ils aient eus jusqu'à ce
jour à leiirdisposiiion pour obéira une loi de la nature trop impérieuse
pour qu'on néglige d'en tenir compte.
Chaire à prêcher de style gothique. — La cathédrale de Troyes vient
de s'enrichir d'une chaire à prêcher dans le style de l'édifice. Le Moycn-
.'^ge ne nous a guère laissé de modèles pour ce meuble important
d'église, et l'architecte se trouve fort embarrassé's'il veut se montrer à
la fois archéologue et artiste. M. Goiinod, l'architecte chargé de ce
travail, a créé un petit édifice dans lequel on retrouve des formes du
XI II" ei du X1V° siècle. La cuve, ornée de bas-reliefs sculptés par
M. Triqiieti,est portée par cinq piliers, dont un central, qui est plus fort
que li's quatre autres. L'abat-voix est soutenu par deux colonneltes la-
térales et par le panneau formant le dossier, au milieu duquel s'ouvre
la porte ; il affecte la forme d'une petite flèche découpée à jour. L'es-
calier , porté aussi sur des colonnettes, est placé derrière la chaire et
aboutit en ligne droite à la porte pratiquée dans le dossier. Cette chaire
est placée dans un entre-colonnement et se trouve par conséquent
tout à fait isolée. Il serait bien à désirer que nos belles cathédrales du
.Moyen-Age vissent enfin remplacer les chaires dont lèsent dotées les
deux siècles derniers, par des compositions plus en rapport avec le style
du temps. L'exemple que nous citons est bon à snivre. Nous ne deman-
dons pas qu'on détruise les œuvres des artistes du temps de Louis XIV
et de Louis XV, mais il nous semble qu'il serait facile de les utiliser en
les plarant dans des églises de la même époque; il en est tant qui n'ont
pour chaires que des espèces de coffres sans couvercle!
Reslauralion du château de Blois. — Décidément, on va s'occuper de
la restauration de ce noble et malheureux château de Blois, aujourd'hui
iransforméen caserne. Le conseil municipal de la ville a pris noblement
l'initiative dans cette circonstance ; il a examiné avec soin et approuvé
avec éloges les plans présentés par M. Duban, pour transformer en
musée une partie de ce royal château; puis il a voté à l'unanimité une
somme de 43 000 francs destinée ii mettre ce projet à exécution. De
leur côté, les Chambres ont voté un crédit dc438000 francs; mais nous
;\vons vu avec regret dans le projet de loi que la salle des états de dois
n'était pas comprise dans la restauration ; elle reste encore entre les
mains de l'administration de la Guerre. Puisse-t-elle en sortir un jour I
Restauration du théâtre de Nantes. — La ville de Nantes vient de
faire restaurer la salle de son grand théâtre. C'est un travail assez, im-
portant pour que nous en disions un mol. L'artiste, M. Driollct, archi-
lecte-voyer de la ville, a choisi entre tous les styles celui du règne
qui vit naître chez nous l'opéra et fleurir la comédie française ; c'est
nue heureuse idée : le style du XVII" siècle a d'ailleurs cet avantage,
que sa richesse cl sa splonileiir s'allient facilement an confortable et
au bien-être si hautement réclamés aujourd'hui pour une salle de fêtes
et de plaisirs surtout. H y a toutefois un écueil h éviter dans l'emploi
de cette décoration brillante du temps de Louis XIV : c'est d'écraser
sous l'éclat de la dorure la simplicité de notre costume moderne. Au
siècle de Louis XIV, si les murs resplendissaient d'or, les femmes étin-
celaient de diamants, les hommes étalaient leurs justaucorps de ve-
lours brodés, leurs dentelles et leurs plumes. Le frac noir et la robe
de cachemire ne peuvent plus lutter avec celle pompe d'autrcrois.
.VI . Driolleta tourné l'écueil : sa décoration n'est pas pompeuse, mais riche
seulement. Chacune des galeries est divisée en larges compariituenU
formés par des encadrements en blanc mat cl en cuivre esUimp»;; l'in-
térieur des cadres imite un damas vert broche d'argent, et ils sont al-
ternés par des médaillons représentant les traiis de nos céiébrilcs imi-
sicales et dramatii|iies de tous les temps.
Le plafond, d'un st>lc un peu plus léger, imiie ane série d'.->rceaus
dont les colonnettes rayonnent vers le centre et laissent voir un fond
de eiel animé par des figures allégoriques appuyées contre une la-
lustrade, et (|uidelâ semblent écouter la voix ducliaiiieuroiiriiaruiome
de l'orchestre. Le soubassement des arceaux, à la naissance «lu pla-
fond, est orné de grands médaillons où sont peints dirers sujets co-
miques, tragi(|ues et chorégraphiques.
L'ensemble de la décoration est harmonieux , la transition du relief
à la peinture habilement ménagée. Les cui>res estampés, d'un emploi si
difficile dans la décoration monumentale, n'ont pas ici la niiigrenr
qu'on leur reproche d'ordinaire; en un mol, ce travail fait honneur au
talent d'ailleurs connu de M. Driollet. Les peintures sont de messieurs
Philaslre et Cambon ; c'est faire leur éloge.
Après des études aussi sérieuses que les siennes . M. Driollet doit a
Nantes être apprécié comme il le mérite. Nous n'avons pas oublié com-
bien son talent était estimé et recherche à Paris par les artistes les plu»
distingués.
— Dans la même ville, les travaux de la nouvelle église fOtkiqaede
Saint-Nicolas sont commencés depuis quelque temps. Le i
du chevet est déjà posé. Nous avons vu ces travaux et nous nous pla
à dire qu'ils sont faits avec un soin remarquable. C'est M. Lassos
est chargé de cette construction , pour laquelle on avait dans le i
demandé un projet à Piel , ce jeune architecte si plein d'amour |
l'art gothique, et dont nous avons raconté la vie et la mort préoia-
lurée dans les premières colonnes de ce volume II). Sur plusieurs point»
de la France, des églises de styles golhii|ue et roman s'elévenl oa se
projettent, mais il semble que Paris ait complètement oublié celle •|tt'on
doit bâtir sur la place Uclle-Chasse. On sait que ce travail iniportani
est confié au talent bien connu de M. Gau.
— On va placer au beffroi de Rennes une nouvelle horloge qui sera,
à ce qu'on assure, le plus beau monument de l'horlogerie moderne.
iS'ous donnerons quelques détails sur son exécution.
Nous devons, d'à f Auxiliaire Breton, qui annonce le fait, au momeni
où notre beffroi va s'enrichir de celle belle pièce, exprimer un vœu
qui peut-être fixera l'atteniion de la commission chargée de la récep^
lion. Nu serait-il pas possible de tenter l'application si ingénieuse que
Wheatson a faite à un pareil mécanisme, des nouvelles découvertes gal-
vaniques? A l'aide de Ois conducteurs appli<|ués à la détente d'une boi^
loge publique, le savant professeur anglais a établi les sonneries de
toutes les horloges publiques d'une même ville, de façon que loales
sonnent inslanlanémeni et par cela seul que l'horloge de laquelle part
le fil conducteur sonne elle-même.
On conçoit tout ce que celle application peu dispendieuse a de sé-
duisant. Pour une seule ville, un seul mouvement parfait suffit à rem-
placer tous les autres ; et l'heure est pointée par toutes les cloches à Ij
fois. Chaque église, en adaptant un marteau à l'un de ses timbres, au-
rait ainsi une horloge parfaite, et qui ne demanderait aucun entrelien.
On a calculé qu'avec moins du tiers de ce que coûte le mécanisme
nouveau, l'on pourrait établir ainsi la communiraiion galvanique entre
l'horloge publique et cinq des principaux édifices. La chose vaut la
peine qu'on y pense ; elle n'a rien d'ailleurs d'incroyable ; car ce oc
serait qu'une des applications des télégraphes électriques, si bien ap-
préciés maintenant de loul le monde savant.
— On vient d'inaugurer à Francfort la slaluc de Goeibe par Sdivan-
ihaler. On dil que le grand statuaire a fait un chef-»i"cpuvre.
(1) Voy. vol. », col. J7S
6X7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PURLICS.
52S
— Tandis que l'Allemagne et la Fiance clèvonl dos slatiics à leurs
gloires lilléraires, niiliiaiies el sclenlilii|nes, l'Angletcrie songe à en
élever une h l'ingénieur qui a le plus contribué à la propagation ilu
système de locomotion rapide, par ses iravaiiï et ses inventions. IMii-
sieurs compagnies de chemins de fer se sont cotisées pour dresser une
statue à George Sieplienson, cet habile constructeur «le machines.
• elni qu'on peut considérer, avec quelque justice, comme l'invenienr
de la locomotive. Le sculpteur Gihson est chargé de celte statue, qui
tievra figurer sur l'une des places de Liverpool.
— On construit dans ce moment à Livourne un théâtre qui sera,
dii-on, le plus grand el le plus inagniliquede toute la Toscane, et dont
l'ouverture aura lieu l'année prochaine. Ce ihcàlre oiïre celle particu-
larité, qu'il est surmonté d'une coupole en verre, circonstance qui per-
mettra de le consacrer aux représentations du jour comme à celles de
la nuit. Or, l'on sait qu'en Italie, les représeiilations du jour ne sont pas
moins fié(|uentes en été ijuc celles du soii-, et que, suivant l'usage an-
tique, la clarté du soleil est souvent préférée à celle du luslre. Du
reste, c'est le premier exemple d'une construction de ce genre dans la
péninsule.
Chemin de fer hollandais. — Il résulte d'un rapport fait récem-
ment par M. Vander Kun, ingénieur en chef du Walcrslaat, chargé
des fonctions d'ingénieur' directeur de la construciion du chemin de
fer rhénan, que les terrassements du chemin de 1er hollandais jus-
qu'à Arnhem, et dans le trajet d'entre Driehergen et .\riihein, ont donné
lieu à un déplacement de 2 546 000 mètres cubes de terre, (|ui ont été
transportés ù 2 ou 5000 mètres, au moyen de wagons et de rails pro-
visoires.
Le mètre de celte route ferrée qui, d'Anisierdam à Arnhem, aura
93 000 mètres, coûtera lOOflorinsOG (214 fr. 13 c.), ou 2UI28 fr. par
kilomètre.
Le inèire des cheuiins de fer belges a coûté 117 D. (250 fr. 4Uc.],
non compris 21 11. pour les expropriations de terrains, et 14 fl. pour les
matériaux.
Le chemin de fer de Paris à Lille el à Dunkcrque coûtera, suivant
les évaluations de M. Stephenson, 172 11. 50 (369 fr. 15 c.) par mètre.
Le chemin de fer de Cologne à Minden a coûté par mètre 100 11. 36,
(214 fr. 77 c).
Le mètre du chemin de fer de Dusseldorf à Elberfeld, qui n'a qu'une
seule voie, a coûté 112 fl. 50 (240 fr. 75 c).
Le mètre de celui de Cologne à Aix-la-Chapelle el à la frontière
belge, également à simple voie, mais dont le terrain offrait de grandes
difflculiés, a coulé la somme de li»9 fl. (425 fr. 86 c).
Enfin, le mètre du trajet d'Ans à Liège el à la frontière prussienne, à
simple voie, a coûté environ 320 fl. (684 fr. 80 c).
Les convois du chemin de fer rhénan ont parcouru , en 1844,
104673 1/2 milles néerlandais; la ligne a été fréquentée par 291727
voyageurs, non compris les transports militaires, de 210.
Les recettes brûles du raiiway hollandais se sont élevées, en 1844,
à 299 386 11. 951/^; le produit par mille néerlandais a été, en moyenne,
de 7392 n.
Les frais d'exploitation ont été, en 1844, de 156 959 Q. 10 1/2, soit,
en moyenne, 3875 fl. par mille néerlandais. (Juum. des Chem. de fer.)
PtBLiCATiONS Nouvelles. — L'auteur d'un ouvrage irès-eslimé et
très-estimable, Description historique des Maisons de Rouen les plus
remarquables par leurs décorations et par leur ancienneté, M. E. de
la Quérière, vient, à ce livre qui jette une belle lumière sur une partie
importante de l'histoire de l'architecture civile au Moyen-Age, de faire
«ne espèce d'appendice ayant pour litre Essai sttr les épis, crêtes ou
dentelles el autres décorations des anciens cotnbles el pignon», pour faire
suite à l'Histoire des Habitations au Moyen-Âge. Ce travail a l'inappré-
ciable avantage d'éclairer une question jusqu'à présent restée dans l'ou-
bli, cl de présenter, outre l'intérêt archéologique, un intérêt d'actualité.
.\njourd'hui, on effft, que, par un mouvement réactionnaire, l'atlenliuu
d'un grand nombre d'artistesdistingués se trouve dirigée vers l'arl de la
lin du .Moyen-Age cl ilc la Uenaissance, parce ipi'il offre des inspirations de
iialure à recevoir d'iieureuscs applications à l'archilecliire de nos jours,
ce livre sera d'une utilité réelle pour rarchitccle. Et puis il esi lemps
de sauver, en la consignant dans des livres, l'hisloire <les habitations de
ces temps-là, car chaque jour eu voil disparaître quelqu'une de iiotri*
sol. M. de la Quérière prend riiistnire de ces orneinenls des combles et
des pignons à partir du XV« siècle, cl il suit leurs transformations di-
verses à travers les XV1« cl XVII* siècles, jusqu'à leur disparition sous
Louis XV. Ce livre est enrichi de huit planches gravées.
— Manuel d' Iconographie chrétienne, grecque el latine, tel est le lilre
donné par M. bidron à nu ancien manuscrit sur l'art de peindre des
Byzaniins, découvert par lui chez les moines du mont Ai1ki!i. Ce nia-
iiiiscril, traduit du grec par le docteur l'anl linrand, el publié par or-
dre du ministre de l'inslructiun publique, est accompagné d'une intro-
duction el de notes fort curieuses du savant auteur de l'Histoire de
Dieu el du Diable. M. Didron a fait de ce livre l'un des plus précieux
recueils que puissent consulter ceux qui s'occupent de la peinture du
Moyen-Age. Nous rendrons compte de cet ouvrage.
— M. le comte de Labordc, auteur déjà d'un grand nombre de tra-
vaux intéresfaiiis sur l'édiliié parisienne, it dimi les grands ouvrages
sur r.\rabie, la S] rie el l'Asie Mineure sont connus de tous les artistes,
vient de publier i|uatre Jetlres sur V Organisai {(/n des Uibliothèquesdant
Paris. Ces lettres sont illustrées de nombreuses gravures sur bois; les
unes représenUint les divers plans et emplaremenis proposés pour la
Bibliothèque Royale, les aul^s reprodiiisani des miniatures du Moyen-
Age ou d'autres objets qui, sans avoir un rapport bien direct avec la
question traitée dans le livre, n'en ont pas moins un intérêt bibliu-jm-
phique qui les rattache au sujet. Aussitôt que la 5* lettre de cet ou-
vrage aura paru, nous nous empresserons d'en rendre compte. La <pia-
triènie, que nous venons de recevoir, conlieni, «lutre les plans d<- la
Bibliothèque Richelieu el des divers projets présentés, des plans et
des vues des principales bibliothèques de l'Europe.
GRAND HOPITAI. DE MII.AM.
Nous avons publié en 1843 ( col. 358, vol. IV) une note sur le
grand hôpital de Milan ; cette note était accompagnée d'une plan-
che représentant une des fenêtres du rez-de-chaussée, sur la rue,
de ce curieux édifice, et nous avions promis alors d'en donner
d'autres morceaux ; nous remplissons aujourd'hui notre promesse.
Nous donnons (P/. 28) une travée de l'étage supérieur; nos lecteurs
jugeront jusqu'à quel point de délicatesse et de richesse on peut
atteindre avec la simple terre cuite, et ils regretteront, comme nous,
de n'en pas voir l'usage plus répandu.
Dans cette planche nous eussions désiré indiquer les joints des
pièces de terre cuite qui forment la corniche; mais M. Thumeloup,
l'habile artiste à qui nous devons ces dessins, qui ont obtenu la mé-
daille d'or à l'Exposition de 1842, M. Thumeloup a craint que ce
tracé des joints ne nuisit à l'ensemble de l'effet. Sans partager ces
craintes, nous avons dii nous rendre au désir de notre confrère.
Cesab DALY,
Oiteeleur ridaclevr en chef.
membre île t'Acailriiiie riiyalr di-s Beauv-Arls Av Siortiliolin, t-l membre
honoraire cl correspomlanl de t'instilul royal des Archilecies brilannîquei.
Paiiis. — Ttp. Lacrampe f.t Coup., iii'e damictte, 2.
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GRAND HOPITAL DE MILAN.
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(Remun- Etagv s)ir la Rue)
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REVUR DE LAHCHITECTURK KT DES TRAVAUX PUBLICS.
530
LALHAMBRA.
Sommaire. — Coup d'œil général sur les édifices encore deboul dans lenceinle de la
Korteresse de l'Alliambra. — Les murs cl les tours de l'cnceiiile. — Palais des an-
ciens rois m.iurcs; la Cour de l'Élang ; caractère de l'art arabe; curieuse disposi-
tion des tympans, des arcs, des galeries; la Salle de la Barque; la Salle des
Ambassaileurs; la Cour des Lions, et absence de symétrie dans l'arrangement des
colonnes des galeries de ceiti: cour; problème d'art proposé à ce sujet; Salle des
Deux-Sœurs. — Description du mode de construction des voiiies de caractère
stalactite.
Au moment de terminer notre dernier article, nous étions sur le
point de pénétrer dans l'enceinte de l'Alliambra, en prenant pour
guide notre bon et savant ami Owen Jones ; nous avions même
franchi la Porte de la Justice. (Voy. PI. 5, et. PL 29, n" 1.) Avant
d'avancer plus loin, rappelons au lecteur que le Château Rouge, ou
l'Alhambra, occupe le sommet d'un plateau élevé à l'une des
extrémités de la ville de Grenade, et que les limites de ce plateau,
qui domine complètement la ville, sont dessinées par des mu-
railles garnies de tours. Au Nord, ces murailles semblent comme
leprolongementdes flancs decette acropole musulmane, qui s'élève
si pittoresquement du milieu des jardins magnifiques dont sa base
est entourée. (Voy. PI. 3.)
Dans le plan de la forteresse que nous donnons {PI. 29), l'en-
semble du plateau et des murailles n'est pas figuré, parce qu'il
aurait fallu réduire encore l'échelle du dessin, qui est déjà fort
petite ; mais, par la pensée, on peut aisément compléter ce tracé
en raccordant les murailles du Nord avec celles du Sud par deux
courbes.
Nous avons gravi la hauteur du plateau, et nons sommes devant
l'entrée de la forteresse; la Porte de la Jtistice [PI. 29, n» I) est
devant nous, mais avant d'y pénétrer, lisons l'inscription {PL 30]
qui se trouve incrustée dans un mur attenant à cette porte. Vous
ne comprenez pas l'espagnol? M. Owen Jones vous servira d'in-
terprète. Voici sa traduction :
« Les très-hauts, très-catholiques et très-puissants seigneui-s
'( don Fernando et dona Isabelle, notre roi et notre reine, ont con-
« quis par la force des armes ce royaume et cette ville de Grenade.
« Après que Leurs Altesses l'eurent assiégée pendant un temps con-
« sidérable, elle leur fut livrée par le roi maure Mouley-Hasen,
« ainsi que l'Alhambra et d'autres forteresses, le second jour
« de janvier, l'an quatorze cent quatre-vingt-douze. Ce même
i' jour. Leurs Altesses nommèrent pour gouverneur et capitaine
« général de cette place, don Inigo Lopez de Meudoza, comle ûc
« Tendilla, leur vassal, qui fut, au moment de leur départ, laUié
« dans le susdit Alhambra avec ioo cavaliers et 1000 fantassins.
" Les Maures reçurent l'ordre de rester dans leurs maisons et daits
" leurs villages comme auparavant. Le susdit comte a tait creuser
« cette citerne par ordre de [.eurs Altesses, n
Cette inscription, qui rappelle au voyageur, des set premiers pas,
\ks malheurs qui frappèrent les auteurs du monument merveilleux
dont les ruines sont devant lui, n'est plus au-dessus de la citerne
dont elle fait mention ; mais avançons, car de plus grandes choses
nous attendent, et nous ferions bien de commencer tout de suite
par faire une inspection générale de notre terrain, sauf à revenir
ensuite sur nos pas pour étudier a loisir les détails qui mériteront
plus particulièrement notre attention. Nous avons passé la Portr
de la Juttice, et une rue étroite nous conduit a la Puerla dtt
a Vino, » (|ui nous donne entrée a la a l'Iaza de loi Àlgibes, >
« ou place des Citernes.
Nous sommes venus pour contempler les ruines de l'ancien
palais des rois de Grenade, pour interroger les débris de cet art
magique des Arabes, qui parait avoir étendu sur des murailles de
pierre un voile magique tissu des rayons colores de rarc-en-tiel,
et ce grand monument à droite, qui attire tout d'abord notre at-
tention, c'est l'œuvre massive et lourde d'un roi chrétien (voyez-
en l'élévation PL3\]; nous rencontrons la cuirasse de fer là où nous
cherchions l'écharpe tissue d'or et de soie. C'est au delà du palais
de Charles V que se trouve tout ce qui reste aujourd'hui de l'an-
cfen palais des rois maures. Rien dans l'extérieur de ces débris
n'annonce les splendeurs qu'ils recèlent.
Dans le plan PL 29, les constructions arabes sont indiquées par
une teinte foncée, et les travaux exécutes postérieurement par
les chrétiens sont marqués par des teintes plus claires.
A la gauche de la place des Citernes, se voient les restes de « «/
Alcazaba » ou de la citadelle. (Voy. PL ;> et PL 31.) Aujourd'hui
la citadelle est devenue un bagne. Laissant sur notre gauche le
palais de Charles V, et passant par la ncalle Real n rue Royale ,
nous passons devant l'église de la paroisse, et nous nous trouvons
dans la m calle de san Francisco » (rue Saint-François', qai nous
conduit à l'Alhambra alla. Quelques maisons, de beaux jardias et
un couvent, occupent toute cette partie de la forteresse, où H y
avait autrefois la grande mosquée et la maison du cadi, qui exis-
taient encore à l'époque de la première invasion française, mais
dont on chercherait en vain aujourd'hui les traces.
Ainsi, le palais de l'Alhambra au Nord, des jardins et descoo-
stroctions modernes à l'Est et au Midi. l'Aleazaba a gauche, et
le palais de Charles V avec l'église paroissiale au centre, voilA la
disposition générale des constructions qui occupent l'étendue li-
mitée par les murs de l'ancienne forteresse.
Les Murs et les Toubs de l'E^ceitjte de la Fobte>es$b.
Les murs de l'enceinte sont garnis de tours, comme nous l'avons
dit ; au Sud, du cdté de la plaine, elles servaient surtout à la
défense ; mais du côté Nord, où l'escarpement de la BMMlagae
offrait une défense naturelle, on y avait établi des habitattoat
charmantes pour le sultan et son harem. La plus importante de en
tours était celle de Comarès (PL 59, n* 13, et PL 31 ^ dans laquelle
se trouve la célèbre Salle des Ambassadeurs. « Le caractère pitto-
« restiue mais sévère de ces tours, dit M . 0« en Jones, ne donne
T. V. 34
»»1
Rt;VUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
532
« aucun indice du luxe et de l'art qu'on trouve à leur intérieur :
n elles sont faites à l'extérieur comme les palais des anciens Égyp-
M tiens, pour en imposer au peuple et faire respecter le roi qui y
« demeurait ; tandis qu'à l'intérieur, les fleurs, les fontaines, les
« mosaïques de porcelaine et le stuc doré, servaient toujours à
« rappeler au maître de cent façons différentes que son bonheur
.( venait de Dieu. L'architecture des Arabes est essentiellement
« religieuse , — fruit du Koran , comme l'architecture gothique
« l'est de la Bible.
a La défense de représenter aucun être animé contribuait aussi
« à leur faire chercher une décoration à part, composée des inscrip-
« lions du Koran entremèléesd'ornements géométriques etde fleurs,
(( non copiées directement d'après nature, mais traduites par l'es-
<( tille ; — car il semblerait que les Arabes, en changeant leur vie
« errante pour une vie sédentnire, n'avaient abattu leurs tentes pri-
« mitives que pour les redresser dans de plus grandes proportions
(( et dans des conditions de plus grande durée, et avaient apporté
(( dans leurs habitations fixes, et sons une nouvelle forme, les dra-
« perles et les châles de cachemire qui ornaient leurs premières dc-
( meures, changeant le màt de la tente en colonne de marbre, et le
ic tissu de soie en plâtre doré.
Il y avait autrefois quatre entrées à la forteresse de l'Alhambra :
1° \a. Puerla de Juslicia oa Porte de la Justice (Voy. la légende
delà PI. 29, dans laquelle l'absence d'un numéro d'ordre fait re-
connaitre les tours qui n'ont pu être figurées dans le dessin. Comme
les constructions auxquelles renvoie la légende sont désignées par la
suite naturelle des nombres, à partir delà porte de la Justice, n" r,
on devine approximativement la position de celles qui ne figurent
pas au dessin) ; 2" la Torre de los Sieie Sueloi (la Tour des Sept
Étages ) ; 3° la Torre de las Itcijes eatolicos [\n Tour des Rois ca-
tholiques) ; et 4° In Torre de las Armas (la Tour des Armes) dans
l'Alcazaba (cette tour ne se voit pas dans notre plan, elle est plus
à gauche que la tour 16). La Porte de la Justice était autrefois, et
est encore aujourd'hui, l'entrée principale de la forteresse. Comme
toutes les autres tours de l'Alhambra, elle est bâtie en béton; les
jambages de la porte sont en marbre blanc, et l'arc de la porte, qui
est en brique ainsi que les tympans, forme l'ogive dit a en fer à
cheval. »
Au-dessus de la porte, à l'intérieur, se trouve une inscription
en deux lignes, dont voici la traduction d'après M. Pasqual de
Gayangos :
Cette porte , appelée Babu-sh-Shari'ah (Porte de la Loi), —
puisse Dieu faire prospérer par elle la loi d'/slam, comme il en a
fait un monument éternel de gloire, — fut bàlie par les ordre* de
notre Seigneur, le Commandeur des Croyants, le juste et belliqueux
Sultan Abou l-lladjadj Yusuf, fils de noire Seigneur le pieur et
belliqueux Sultan A bu-l-Walid Jbn Nasr : puisse Dieu recompenser
ses bonnes actions dans l'observance de la religion et agréer ses hauts
faits en défense de la foi! El elle fut fermée (pour la première fuis)
dans le glorieux mois de la naissance [de notre prophète) l'an sept
cent quarante-neuf. Puisse le Tout-Puissant faire de cette [porte)
un boulevard protecteur, et enregistrer [son érection) parmi let im-
périssables actions des justes!
Sur les chapiteaux des colounes on lit les inscriptions sui-
vantes ; sur la colonne de dj-oite : Louange à Dieu! il n'y a de pou-
voir ou de force qu'en Dieu; sur la colonne de gauche : Il n'y a
d'autre Dieu que Dieu, et Mahomet est son prophète.
Selon M. Pasqual de Gayangos, la Porte de Justice était ainsi
appelée parce que, conformément à un ancien usage généralement
répandu en Orient, les rois de Grenade venaient quelquefois s'y as-
seoir pour administrer la justice à toutes les classes de leurs sujets.
L'avant-bras avec sa main, qu'on voit sculptés en relief sur la face
extérieure de la clef de l'arc de cette porte, a donné lieu à une
série de conjectures plus ou moins plausibles ; la plus probable ce-
pendant, d'après l'avis de M. Pasqual de Gayangos, est celle assi-
gnécpar Echevarria (Paseas por Granada, voL I, p. 73) : qoe par
la main on a voulu désigner les cin(| principaux commandements
(le la foi mahometane, à savoir : l'observation du jeune du Ra-
niadhan, le pèlerinage de la Mecque, le don des aumônes habi-
tuelles, l'acte de l'ablution , et en dernier, la gnerre contre les in-
fidèles. Cette conjecture est encore fortifiée par ce fait, (jue les
femmes et les filles maures avaient l'habitude de portera leur cou
de petites mains d'or, d'argent ou de cuivre, comme le prouve l'in-
jonction ou pragmatique de Charles V, datée de lâ2.'>, qui leur en
défendit l'usage.
M. Pasqual de Gayangos donne aussi l'explication symbolique
de la clef en relief qui décore les portes principales de plusieurs
châteaux bâtis en Espagne par les Maures, et qui est flguree sur le
linteau de la deuxième porte qu'on rencontre en traversant la
Puerto de Jusiicia. C'était un signe symbolique usité parmi les
Sufis, dit-il, et qui dénotait l'intHligence ou la sagesse, qui est la
clef au moyen de laquelle Dieu ouvre les ccruis des croyants et
les prépare a la réception de la v raie foi. Ce signe pourrait aussi
vouloir dire que la porte ainsi marquée était la clef de la forteresse.
Quoi qu'il en soit, la clef se retrouve sur la principale porte de
plusieurs des châteaux bâtis par les Maures d'Espagne, particu-
lièrement après l'arrivée des Almohades : témoin l'Alcazaba de
Malaga et les châteaux d'Acala del Rio et de Tarifa.
pal41s des bois uatbes dans lakcienne fotekesse de
l'alhambsa.
M. 0\scn Jones considère les débris de cette partie de la forte-
resse, et' qu'on appelle aujourd'hui Casa Real Maison Royale),
comme une très-petite portion de l'ancien palais. H paraîtrait
même qu'il serait très-diflicile d'en déterminer les limites dans l'état
actuel de conservation dn monument ; toutefois, d'après ce qui reste
de la galerie à deux étages à l'extrémité Sud de la cour de l'Étang
[Patio de la Alberea) (Voy. PL 29), on peut juger, dit-il, de l'im-
portance qu'adù avoir In partiedrtruite pour faire place au palaisdc
Charli s-Quint. En comparant cet édifice avec d'autres résidences
des souverains d'Orient, telles que le sérail de Constant! nople ou
celui d'Andrinople, il est convaincu qu'il a l)eaucoup perdu de son
étendue et de sa magnificence, etqu'il manque beaucoup de choses
pour le rendre, Jnns son ensemble, aussi parfait que la portion
qui en reste l'est dans ses détails. On ne retrouve aucune trace des
nombreux appartements destinés aux gardes et aux personnes de
la suite, et cette partie du palais, plus importante encore, le ha-
rem, a entièrement disparu. Il est probable qu'il s'étendait dans
la direction de la Cour des Lions [Patio de los Leoncs] (Voy. PI. 2i» >
jusqu'à la Casa de Sanchez, n" 1 1 , et la Torre de las Infanlas, ;i
droite de la tour n" 10, mais hors de la PI. 29; car on retrouve
encore dans ces deux tours ruinées des restes d'appartements, pe-
tits, mais fort beaux, qui paraissent avoir été destinés à la récep-
tion des sultanes maures.
Cour de l'Étang. — On pénètre aujourd'hui dans la Casa Real
par une petite porte au coin Sud-Ouest de la cour de l'Etang [Pa-^
tio de la Alberea), près du palais de Charles-Quint et de la Place
533
REVUE DE L'ARCHITECTUBK ET DES TRAVAUX Pl'BMCS.
&31
(les Citernes [Plaza de los Algibes), et l'on se trouve dans lu Cour
de l'Etang (Voy. PL 29 et PL 31).
La galerie Nord de cette cour communique avec la Sala de la
Barca (Salle de la Barque), qui sert comme de vestibule à la Sala
de los Ambasadores (Salle des Ambassadeurs établie dans la Tour
de Comarès, n° i3). Une des figures de la PL 32 donne une idée gé-
nérale de l'état actuel des bâtiments qui entourent la Cour de l'E-
tang; on y voit la galeriedu Nord, et au fond, la tour de Comarès.
Les fenêtres au-dessus de la porte qui donne entrée dans la Salle
de la Barque, par la galerie Nord de la Cour de l'Etang, sont gar-
nies d:un réseau dont les jours étaient probablement fermés autre-
fois pardes verres de couleur, et dont les meneaux étaient exécutés
en plAtrc. A la vérité, on ne retrouve aujourd'hui aucune trace de
verre peint dans les fenêtres; mais ce qui confirmerait l'exactitude
de cette conjecture, c'est que sur le mur de face sont de fausses
fenêtres de la forme des précédentes, et dont les parties corres-
pondant aux jours sont peintes de diverses couleurs. On trouve
aussi des fenêtres de ce genre donnant sur la Cour de l'Etang et
d'autres donnant sur la Cour de la Mosquée (PL 29, n° 23).
Les inscriptions qui concourent à embellir la clôture de la Cour
de l'Etang et qu'on trouve se repliant autour des croisées, de la
porte d'entrée, etc., ont toujours le même caractère de fanatisme
religieux et de respect hiérarchique que nous connaissons:
« Annonce aux vrais croyants que le secours divin et une
prompte victoire sont réservés pour eux.
. « Dieu seul est Dieu, et Mahomet est son prophète.
« Dieu seul est vainqueur.
« La bénédiction vient de Dieu.
« En vérité, Ibn Nasr est le soleil de cet orbe brillant de beauté et
de splendeur.
«Etc., etc. etc. »
' De prime abord, tout semble fantaisie et caprice dans l'architec-
ture arabe de l'Alhambra; mais une étude attentive ne tarde pas à
démontrer que si, en effet, les artistes ariibes ont fait preuve d'une
admirable richesse d'imagination, d'une fantaisie pleine de séduc-
tion et de charme, ils ont aussi respecté les exigenen de la con-
struction et établi une relation tellement intime entre la décoration,
la construction et les dispositions réclamées par les besoins de la > ie
intérieure, qu'on est parfois embarrassé pour détenniner laquelle
de CCS causes a pu prédominer dans la composition ; on se deroaade
si on a décoré la construction, ou bien si on n'a fait que construire
une décoration. — On ht-site à aflirmer si telles découpures ont eu
pour objet d'alléger la charge d'un tympan, de créer un charmant
système d'ornementation, ou bien de ménager les courants d'air et
la fraîcheur si désirable sous un ciel ardent. C'est qu'en effet toute»
ces causes se sont concertées, et c'est de leur action synergique
que sont nés les mille détails admirables que nous admirons.
La Cour de l'Etang nous présente un exemple qui pourrait ton -
lever toutes les questions qui précédent et qui justifie le jof»-
ment que nous portons sur les artistes arabes. On admire les
élégantes colonnes qui soutiennent les arceaux des paieries au
Nord et au Midi, on s'étonne de leur extrême légèreté; loin
d'obstruer la vue, elles laissent errer les regards au delà d'elles.
elles aident à abriter et à protéger, mais elles n'emprisonnent
pas. Dans les climats chauds on a tant besoin d'air, d'espace,
que l'aspect seul de murailles pleines et de clôtures massixes
oppresse la poitrine et étouffe la respiration : aussi les colonnes des
galeries sont-elles si grêles qu'il semblerait que le marbre blanc-
dont elles sont faites est doué d'une force mystérieuse, pour que.
faibles comme paraissent ces fûts, ils puissent supporter si brave-
ment la charge qui Jes surmonte. Les tympans et les are» sont
d'une grAce et d'une légèreté dignes des colonnes qui les sup-
portent; nous voudrions vous les faire voir, mais, a défaut du cha-
peau magique qui transportait son propriétaire là où le voulait sa
fantaisie, nous ne pouvons que recommander à nos lecteurs de
consulter les beaux dessins de MM. Owen Jones et J. Goury.
La construction des arcs et des tympans mérite d'être étudiée :
elle est d'une remarquable simplicité : au-dessus des colonnes sont
biitis des piliers en brique qui portent des poitrails en bois destines
à transmettre la charge supérieure sur les piliei-sV. la F/g. ci-dessous'.
Les tympans sont fermés par un réseau composé de grandes
briques plates, ou carreaux, posées diagonalement, de manière à
former une série de losanges auxquelles sont attachés des orne-
ments à jour, en plâtre, qui, tout en donnant aux arceaak
535
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
536
un aspect particulier de légèreté et d'élégance, agitent et rafraî-
chissent l'air qui les traverse, distribuant partout une délicieuse
fraîcheur.
Ici on a donc orné une construction d'une parfaite simplicité ;
on a aussi construit une décoration d'une admirable richesse,
et cette décoration, cette construction, réalise un appareil des
mieux entendus pour satisfaire aux exigences d'un raffinement
sensuel qui ajoute à la santé du corps et à l'énergie de l'àme.
Cette disposition pourrait donner d'heureuses inspirations aux
artistes modernes.
Salle de la Barque et Salle des A inbassadeurs. Traversons main-
tenant la Salle de la Barque [Voy. PI. 29), et bien que les orne-
ments qui en décorent les parois soient d'une merveilleuse beauté,
et dans un état de conservation plus parfait que les ornements
des autres salles, cependant, comme nous ne pouvons en donner
ici les dessins et qu'une description ne saurait les remplacer, nous
entrerons tout droit dans la Salle des Ambatfadeurt,ou. comme
on l'appelle encore, le Salon Doré (n" 3).
Cette salle forme un carré d'environ ) i mètres de côté, sur 18
à 19 mètres de hauteur. C'est la plus grande et la plus imposante
des salles de lAlhambra, quoique dans l'arrangement, dans la
symétrie des détails, elle soit moins parfaite que la Salle dtt Deux-
Sœurs (n" %i, PL 29).
Le plafond actuel de la Salle des Ambassadeurs est un dôme en
bois, orné de moulures qui s'entrelacent les unes dans les autres
d'une manière variée ; des ornements en or sont peints dans les
compartiments sur des fonds rouges et bleus.
On trouve de pareils plafonds sou» les arcades de la Cour de
l'Étang et dans la Salle de la Barciue; mais M. Ovven Jones pense
que le plafond original de la Salle des Ambassadeurs était en'plAtre
et de forme stalactite, comme celui de la Salle des Deux-Sœurs,
que nous verrons plus loin. Le plafond actuel, quoique beau dans ses
détails et remarquable par son ingénieuse construction, parait cepen-
dant à peine digne de couronner une salle aussi magnilique. Nous
reprendrons, du reste, cette question des voûtes de l'Alhambra.
Cour des Lions. Quittant la Salle des Ambassadeurs et traversant
la Salle de la Barque et la galerie Nord de la Cour de l'Étang, nous
trouvons sur la gauche, près la galerie Sud, une porte qui permet
d'arriver à la fameuse Cour des Lions [Patio de los Leones] (Voy.
PL 31 et PI. 29). Ce fut dans cette cour, devant les lions de
pierre de la fontaine, que furent mis traîtreusement <i mort les chefs
de toutes les principales familles des Abencerrages, que le roi
Boabdil (Mohammed XI) avait attirés au palais, sous le prétexte d'o-
pérer une réconciliation entre eux et leurs ennemis les Zegris, as-
sassinat qui priva Grenade d'un grand nombre de ses plus vail-
lants guerriers, de ses plus fermes défenseurs.
La Cour des Lions est un parallélogramme d'environ 30 mètres
sur 15. Elle est entourée de portiques, et un pavillon occupe le
milieu de chacun de ses petits côtés. Les arceaux dis galeries et des
pavillons, d'une délicatesse et d'un fini parfaits, sont portés par 128
colonnes de marbre blanc. Les ornements sont encore parfaitement
conservés, mais la couleur a disparu ; car les badigeonneurs, ici
comme en France, ont profané un chef-d'œuvre avec leur brosse
impie; dans les différentes restaurations que le palais a subies de
temps à autre, les murs de cette cour ont été empâtés de plusieurs
couches de badigeon, mais, en en faisant sauter les écailles, on
peut encore découvrir des traces des couleurs primitives.
Les colonnes sont tantôt isolées et tantôt accouplées, sans qu'on
ait paru chercher aucune disposition symétrique. M. Owen Jones
prétend que cette irrégularité, loin de nuire à l'harmonie géné-
rale, est d'un effet charmant. Une telle singularité mérite d'être
remarquée et confirme la théorie exposée par nous au commence-
ment de notre premier article sur l'Alhambra, relative à la diver-
sité des principes qui président à la composition des œuvres d'art dues
à des races différentes, et même parfois seulement a des epo<jues
différentes. Vitruve aurait probablement crié anathème sur l'archi-
tecte de la tour de porcelaine de Nankin, et celui-ci aurait témoi-
gné, à coup sur, peu de considération pour l'auteur de la basilique
de Fane; et si l'avis du créateur de la Cour des Lions pouvait être
connu, il serait indubitablement peu favorableà l'un et à l'autre des
grands artistes que nous venons de nommer, et qui ont si bien con-
couru cependant au développement de l'art, chacun dans son pays.
C'est que l'art a ses préjugés : car l'art a sa nationalité et sou pa-
triotisme, nationalité moins étroite peut-être, moins exclusive sans
doute que celle qui nait au foyer de la famille, mais qui se dessine
de la manière la plus tranchée dès que les génies contrastés des
races différentes se trouvent en présence. Aussi affirmons-nous
sans crainte qu'une véritable doctrine scientifique de l'art, au lieu
de poser comme règle absolue et universelle du beau l'expression
des sentiments d'une seule race, doit chercher l'expression cor-
respondant aux sentiments de chacune des races humaines, sauf
ensuite ci les coordonner dans une loi suprême, comme toutes les
couleurs de l'arc-en-ciel se rt^ument dans la lumière solaire.
Nous avons souvent admiré dans nos basiliques du Moyen-Age
In variété des chapiteaux et des détails d'ornementation, qui, à
notre avis, communique un très-grand charme aux édifices de
cette époque; nous ne voulons donc pas mettre en doute l'excel-
lence du jugement porté par M. Owen Jones sur l'effet du grou-
pement des colonnes de la Cour des Lions; nous aimons mieux
y croire, puisque nous avons sous les yeux des effets analogues.
Mieux vaut recueillir ces faits, les méditer, et soumettre à l'exa-
men de l'esprit scientifique la solution de la question que voici : —
Pourquoi, dans les monuments anticjues, sommes-nous si exigeants
sous le rapport de la symétrie, de la régularité géométrique et même
de la répétition fréquente d'une même forme (car la répétition nous
convient dans les monuments de style antique), et pourquoi, par
contre, sommes-nous si insatiables de formes variées et imprévues
dans les édifices indiens, arabes, gothiques, etc. ?
Mieux vaut expliquer le phénomène que de le nier, comme font
chez nous à la fois les amateurs exclusifs soit du Moyen-Age, soit
de l'Antiquité; et cette explication, nous la tenterions ici, n'était la
longueur d'une telle digression. Profitons toutefois de cette occasion
de protester contre l'élroitesse, la roideur et l'insuffisance de toutes
les doctrines exclusives qui procèdent par voie de négation. Il ne
suffît pas de nier la légitimité d'un art, d'un style : cet art, ce
style, a enfanté des œuvres; il convenait donc dans un certain
lieu, à une certaine époque, à tel. ou tel peuple : — là est un Fait.
Quelle est la loi de relation entre ce Fait, c'est-à-dire ce
caractère d'art, ce style, le peuple qui l'adopta, les lieux, et les
temps qui l'ont fait naître, etc.? —Voilà une Qcestion.
Une négation n'est pas une solution ; en pareille circoustance,
elle est tout simplement une déclaration d'impuissance.
Reprenons notre description. Les chapiteaux des colonnes de la
Cour des Lions, bien que semblables dans leurs contours, offrent
une grande variété dans leurs feuillages; et quoique le même des-
53?7
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
338
sin soit répété plus d'une fois, il ne parait pas qu'on ait cherché à
établir un arrangement symétrique dans leur agencement.
Les toits sont modernes et en tuiles rouges ; M. Owen Jones pense
qu'ils ont dû être primitivement en tuiles vernies et de diverses,
couleurs. Cette supposition doit être exacte, car, d'un côté, lusage
constant, dans les édifices arabes, d^s terres cuites vernies, joint
au grand amour de la couleur qui dominait les artistes arabes, et,
de l'autre côté, les exigences de l'harmonie, font aisément adopter
cette opinion.
Les arceaux et les tympans de la Cour des Lions ressemblent,
dans leur construction, à ceux de la Cour de l'Étang.
La célèbre Fontaine des Lions est au eenti'e de la cour ; mais
nous ne nous en occuperons pas aujourd'hui. Ayant l'intention
d'en mettre le dessin sous les yeux de nos lecteurs, nous réserve-
rons nos observations pour le moment où la gravure sera prête.
Salle des Deux-Sœurs [PI. 29, n" 24). Passons dans la Salle
des Deux-Sœurs [Salade las Dos Hertnanas]; elle se trouve au
Nord de la Cour des Lions. Cette salle paraît avoir fait partie des
appartements privés des rois maures. Les alcôves ou chambres à
coucher de chaque côté de la Salle, avec la charmante suite d'ap-
partements de l'étage supérieur, lui donnent beaucoup plus le ca-
ractère d'une résidence que n'a la salle des Ambassadeurs, qui
était sans doute la salle de réception, comme l'indique le nom que
la tradition lui donne. Cette salle, avec les alcôves et corridors
qui en dépendent, est la plus remarquable de toutes les parties du
palais, par la beauté et la symétrie des ornements ; et les plafonds,
en forme de stalactite, sont les modèles les plus parfaits de ce mode
curieux de décoration (Voy. PI. 33). Les couleurs des ornements
sont en général bien conservées ; partout on pourrait les détermi-
ner avec une certitude parfaite.
DE LA CONSTBUCTIOM DES VOUTES STALACTITES.
C'est ici peut-être le lieu de dire quelque chose de la nature de
ces voûtes en stalactite, voûtes composées d'un petit nombre d'é-
léments, mais qui, par la variété des positions qu'on peut leur
donner, les uns par rapport aux autres, offrent à l'œil les combi-
naisons les plus diverses. La découverte du système des voûtes
arabes est due à M. Owen Jones, et comme ces voûtes diffèrent en-
tièrement de toutes les autres que nous connaissons, nous repro-
duirons ici le texte même de la description que M. Owen Jones en
a donnée.
« Ces voûtes sont composées de nombreux prismes de plâtre,
« unis par leurs Surfaces latérales contigués. Toutes ces figures
« se réduisent à sept, qui, en plan, se réduisent encore à trois
« formes primaires : le triangle rectangle À (Voy. PI. 34), le pa-
« rallélogramme rectangulaire fi, et le triangle isocèle C. Dans ces
« figures, les côtés aa, ah, àc, sont égaux; ba est égal à 66, et
« l'angle au sommet du triangle isocèle C est égal à 45". »
Le triangle rectangle A correspond à trois éléments dont nous
désignerons les élévations ainsi : A\, A2, Ai.
Le triangle isocèle C correspond aussi à trois éléments que
nous désignerons par C I, C 2, 6' 3.
C 3 est un parallélogramme dont le plan se compose de deux
triangles isocèles.
Le rectangle B ne correspond qu'à un seul élément que nous
désignerons par la lettre B, comme son plan.
Les courbes xxx... sont partout les mêmes, d'où on peut voir.
dit M. Owen Jones, que chacune des sept flgures se combine égale-
ment bien, par chacun de ses côtés, avec les six autres figorM, ce
qui les rend susceptibles de combiuaisons géométriques auMi va-
riées que les combinaisons mélodiques résultant de l'emploi des
sept notes de la gamme diatonique musicale.
Les plafonds coniques de la SaUe du Tribunal (Voy. PL 39), de
la SaUe des Deux-Steurt (n° 24), et de la Salie de* Abenetrragtt
(n° 2^), témoignent puissamment de l'effet grandiose obtenu par
l'emploi de ces simples éléments. Nous donnons, PI. 33, le plan
et la coupe de la voûte de la Salle des Deux-Sœurs. Dans ce des-
sin, la voûte repose sur des colonnes dont les arcs sont construits
d'après les mêmes principes que la voûte. Près de cinq mille pièces
prismatiques, nous n'osons pas les appeler des claceaux, entrent
dans la composition de la voûte de la Satie des Deux-Sœura, et
quoiqu'elle ne soit qu'en plâtre, consolidée par-ci par-là au moyen
de roseaux , cependant il n'y a point aujourd'hui, dans tout le pa-
lais, de partie qui soit mieux conservée.
La voûte de la Salle de la Barque est un dôme en bois, décoré de
dessins formant des entrelacs d'une très-grande beauté. Elle s'ap-
puie sur des pendentifs qui se terminent contre les grands arcs
transversaux construits a chaque extrémité de la salle (pour mieux
comprendre cette disposition, consulte?, laforme de la salle, PI. 29)
Ces pendentifs sont construits au moyen des sept éléments que
nous avons fait connaître, et la PI. 33, qui donne le plan et l'é-
lévation d'un de ces pendentifs, fait voir In position occupée, dans
ce cas spécial, par chacun des éléments constitutifs des voûtes
arabes, et complète les notions que nous voulions donner sur ees
curieuses constructions.
Dans le sixième volume de la Revue, nous nous remettrons en
route pour visiter les autres parties de la Forteresse de r.\lham-
bra, car il noys reste encore à voir des choses très-intéressantes.
Ces* a DALY.
TROIS JOORS A ROUI
(*• AaTICLLl
(•)•
SoaaAiiiK. — S«int4)ueD : *ui «elufl de cH Millee; — Je» toon;— rcMaaraiwa jt»-
j,.l^,.; _ les poruilt, — tour dilc la r»«ii»*r« ««mt Cttrrt «l aulm »ie«i MMt; —
tour centrale de Sainl-Ouen ; — le» abal-foos; — le» gargoaiTle» ; — èalerinw fc
(t) J'»i reçu «le notre honorable confrère M. Courtier , on» kOl* ntMi**
i la première partie de cet article. Après avoir donné une »ffl%b»a»m MMe
bienveillante 1 quelques passages de cette notice, H. Go»rU«r ■'appmd.
au sujet de» constructions parasites qui obstruent l«*i
le conseil municipal de cette ville avait pri.s en 181», la I
539
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
510
Sjinl-Ouen; -tombe dAleiandrc de Bcriieval;-étal .le rornemeiilalion «culpléc
cl peinte des voûte, et de. piliers ; - grille du chœur; - matériaui qu. oui servi
àlaco»slrucliondcSaint-Onon;-la pierre; -le plomb et le fer;- mauvais
scellement ; - charpente de Sainl-Ouen ; - sa description ; - impfll «ur le. vi«t-
icurs. — Un hôtel du XV!» «ii^clc ; — mutilation de cet ediOce. — Sainl-llaelou, —
déscncombrement de ses portail.; - harmonie de toutes les parties de ctle
église;-les porte.;- les vitraux. - Palais-dc-Justice. - llol.l de Uuurgtlu-
roulde.- Musée des Antiques. - Statue de Boïeldicu. - Église de Bon-Secours;
— «a position; — description de lédince; -- le» vitraux; — luic des inalériaui
employés; — les Toutes. — Chemin de fer de Rouen au Havre ; - mauvaise exé-
cution des travaux d'arl; — mauvaise qualité des briques employées.
Saint-Ouen. — Cet édifice si svelte et si gracieux nous montre
toujours les ruines anticipées de sa façade principale, et, quoique
les Rouennais annoncent son achèvement comme chose presque
prochaine, je crains bien qu'ils ne se fassent trop illusion.
Si, après avoir admiré la belle tour qui couronne la croisée de
l'église, ou abaisse ses regards sur les arrachements des deux tours
du portail, on regrette bien plus vivement encore que ce portail
soit resté inachevé. A voir la beauté de l'une on se fait une idée
de ce qu'eussent été les autres.
Si le témoignage de l'histoire ne nous apprenait que ces tours
n'ont été que commencées , j'aurais eu la tentation de soutenir
qu'elles ont été démolies , car on ne peut y voir un bloc de pierre
susceptible de recevoir de la sculpture et qui n'ait été achevé, soit
à l'intérieur, soit à l'extérieur, si voisin qu'il soit des arrache-
ments. Ici ce sont des clochetons, des niches, des dais ou des
moulures ornées; là des culots richement sculptés, quoiqu'ils
n'aient jamais porté la première assise de la naissance des ogives
qu'ils devaient soutenir, et cependant tout cela a reçu la dernière
main. Doit-on eu conclure que les constructeurs gothiques faisaient
toutes leurs sculptures avant la pose des pierres, ou bien que les
sculpteurs travaillaient côte à côte avec les maçons? Je serais
(Icmamlcr la démolition de toutes les constructions de cette espèce. Le con-
seil des bâtiments civils, dont M. Gonrlier est un des principaux membres,
a fortement appuyé la proposition du conseil municipal.
Je joins bien volontiers mes félicitations i celles que M. Gourlier adresse
au conseil niuiûcipal de Rouen, pour une intenllon si méritoire; mais Je
regrette bien vivement que depuis plus de vingt ans elle ait été à peine sui-
vie d'effet.
M. Gourlier m'annonce aussi que le flanc septentrional tout entier des
cathédrales de Troyes et de Sens vient d'être débarrassé des coDslructions
qui l'encombraicnl.
Je regrette de ne pouvoir donner textuellement la lettre de M. Gour-
lier. Les paroles d'un liomnic aussi liaut placé dans la hiérarchie adminis-
trative des bâUments publics eussent pu produire une juste émulation parmi
les conseils municipaux dts autres villes de France et provoquer le déblaie-
n-M>nt général des édifices publics, obstrués d'une manière si flcheuse depuis
des siècles.
Félicitons le conseil des bAtiinenls civils de la louable insistance qu'il met
à demander l'enlèvement des coniructions parasites qui enlacent la plupart
de nos églises du Moyen-Age, et faisons des vœux pour que le conseil mu-
nicipal de Paris ajoute aux sages mesures qui émanent si souvent de ses dé-
libérations, celle de débarra.sser les édifices publics de celle ville des bâ-
tisses qui les encombrent. Un si bel exemple donne par la capitale ne pourrait
manquer d'être suivi par les autres villes de France.
Kl, afin que la manie de rétablir ces constructions déshonorantes puisse
difficilement renaître à l'avenir , je voudrais que l'on gravât une inscription
ineffaçable sur les murs des édifices, â remplacement même où étaient les bara-
ques. Tout en flétrissant en termes énergiques le déplorable usage d'encombrer
de cette manière les flancs des édifices publics, cette inscription rappellerait
la délibération du conseil municipal qui aurait voté leur enlèvement, et les
noms des citoyens qui auraient provoqué cette mesure, ainsi que les prin-
cipales circonstances qui auraient pu accompagner ce fait important.
tenté de croire que l'un et l'autre de ces moyens étaient en usage ;
je ne me rappelle pas avoir jamais remarqué de sculptures simple-
ment épannelées dans les édiflces de style ogival. Que de pré-
cautions ce système devait exiger, et combien les maçons d'alors
étaient soigneux, comparés aux maçons d'aujourd'liui! Ou bien
esl-il plus croyable que la cessation des travaux des tours du por-
tail ayant été ordonnée, l'on termina néanmoins les sculptures?
cela est peu probable.
On remarque sur plusieurs faces de ces tours des refouillements
faits avec soin et légèrement taillés en queue d'aronde. Dans la
place qu'ils occupent, ils étaient nécessairement destinés à recevoir
des culots, des dais, des encorbellements, etc., munis de tenons
qui devaient s'ajuster dans ces refouillements. Ceci prouve jus-
qu'à l'évidence qu'une grande partie des corps saillants étaient
sculptés à Intelier et ensuite incrustés dans les murs (l). On de-
vait avoir une série de panneaux pour les tracés des incrustations,
afin que les parties saillantes et rentrantes s'ajustassent sans tik-
tonncments. Les refouillements sont faits avec une grande pré-
cision.
Quelques personnes blAment la disposition diagonale de ces
tours et ne parlent de rien moins que de raser ce qui existe pour
les reconstruire sur un nouveau plan. Mais n'ei'it-on pas d'auti-es
raisons pour conserver ce qui existe que parce que cela existe et
que telle était lidée de l'auteur du monument, il ne faudrait rien
changer. Cette disposition, pour être insolite, n'en est pas moins
susceptible de faire im très-bon effet, non quoique, mais parce que
diagonale, pour parodier ici les paroles d'un de nos modernes bom*
mes d'État. Tous les piliers-butants de la nef côté du Sud présentent
une arèle à l'extérieur au lieu dune face plane. Cette disiMJsilion
diagonale est certainement plus gracieuse que celle des piliers du
Nord et de l'abside, qui sont placés carrément. A Saint-Nicaise,tous
les piliers-butants du chevet de l'église se présentent en diagonale .
et sont d'une grande légèreté (2). Celte disposition donne plus d'é-
li'gance aux objets de forme carrée; faisons donc des vœux pour
qu'on achève ces tours comme elles ont été commencées; il faut
cet accompagnement à la merveilleuse rose de l'Ouest, dont les
meneaux réunissent la gracieuse symétrie du système rayonnant
aux épanouissements capricieux de la verrière flamboyante.
Mais d'autres personnes ne veulent d'aucune espèce de restau-
ration, de pcurde gftter le styleoriuinal de l'édifice. M. le curé, ses
vicaires et tous les paroissiens ont beau crier en chœur que leur
église tombe en ruine, ou bien qu'elle ne peut se jiasser de clocher
ou de tout autre accessoire non moins utile, on leur répond que ,
s'ils n'ont dans leurs archives les pians originaux des objets dé-
truits ou restés sans exécution, ils doivent se passer de ce qu'ils
demandent, en attendant que l'art ogival soit suffisamment étudié
(1) Nos propres observations nous permettent de considérer ce procédé
comme très-général en France, à partir du XIV* siècle. Les crosses surtout qui
ornent les pignons ont été fréquemment assemblées à tenons et à mortaises.
Nous avons reconnu que le même système avait été adopté dans quelques mo-
numents anglais. {IVole de SI. Céiar Daly.)
(2) A propos des piliers-butants de Saint-Mcaise, il est une remarque im-
portante à faire : c'est que six de ces piliers (trois de chaque cOté) se sont écrou-
lés, je ne sais à quelle époque, ainsi que les arcs-boutants d'une extrême légè-
reté qui contre -butaient les voûtes du chœur. Il ne paraît pas â l'extérieur que
les voûtes aient souffert de la perte de ces contre-forts, qui, de huit, sont réduits
â deux correspondants. Cette partie de l'édifice, plus élevée que la nef, est du
XV siècle.
5^1
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
5(9
et compris. Comme rien n'est éternel en ce monde, si ce n'est l'in-
constance iiumaine, il pourrait l)ien se faire que quand l'étude de
l'art ogival sera parvenue à son apogée, personne n'en voulut plus.
Ce serait dommage, sans doute ; mais cela s'est dt^à vu. Ahl s'il
ne s'agissait que de faire des choses superflues comme ces pein-
tures telles quelles, composées de ronds, de carrés, de triangles
rouges, jaunes, verts et bleus, j'appuierais volontiers le veto des
anti-restaurateurs ; mais il faut bien faire l'indispensable en atten-
dant que la science du Moyen-Age puisse marcher sans lisières fl).
Des naissances de voûtes incrustées dans le pignon de l'Ouest
de Saint-Ouen , au-dessous de la grande rose et sur les faces
obliques des deux tours, annoncent qu'on avait l'intention de jeter
un porche sur le vaste ébrasement qui sépare les deux avant-
corps. La largeur de l'espace étant d'environ 20 mètres, ce porche
devait nécessairement être divisé en trois arcades par des piliers
dont on retrouverait probablement la fondation en fouillant le sol.
Le couronnement de ce porche devait être nécessairement peu
élevé, en forme de galerie à jour, comme celui des portes d'entrée
de la cour des Libraires à la cathédrale; autrement, il eut caché la
belle rosace qui est au-dessus.
On a restauré le délicieux portail du transsept du Sud dit des
Marmousets, si remarquable par les deux hardis pendentifs de sa
voûte et les contre-arcalures si légères de son arcftde principale. La
restauration m'a paru assez heureuse, et, grâce au ton de vieille
pierre qu'on a su donner aux parties neuves, elles sont fort peu
apparentes. En voyant ce charmant portail, on regrette fort que
le pignon du transsept opposé soit obstrué par les lourdes construc-
tions de l'Hôtel-de-Viile, auquel il communique par une porte car-
rée encore plus lourde. II ne parait pas avoir eu d'autre entrée;
ainsi l'on n'a rien masqué en construisant le bâtiment qui sert au-
jourd'hui d'hotel-de-ville.
Près du portail des Marmousets , le presbytère, édifice du
XVIII" siècle greffé sur un soubassement gothique, est bâti trop
près de l'église, dont il masque deux verrières.
Derrière le transsept du Nord, et à l'angle qu'il forraeavec l'Hô-
tel-de-Ville,du côté du jardin, on voit encore une très-ancienne
construction en forme de tour demi-ronde à deux étages, dans le
style roman du W siècle, et percée à chaque étage d'une fenêtre eu
plein-cintre, dont l'archivolte, à tore rompu, repose sur des colon-
nettes.
(1) Nous lie connaissons pas assez bien les détails des travaux projetés à
Saint-Ouen pour nous prononcer définitivement sur leur convenance. Toute-
fois, nous devons déclarer que nous ne saurions accepter les solutions abso-
lues que nous entendons formuler autour de nous : certains veulent, iiou-scu-
lenient consolider nos vieux uionunienls: ils veulent encore tout restaurer, tout
compléter. On comprend le sentiment d'ordre qui les domine, et au nom du-
quel ils parlent; mais la irodid'on aussi a son importance dans la vie, et il
laut tenir couiptedes nécessités qui en dérivent. D'autres encore ne veulent ricii
restaurer, tout au plus accepteiU-lls des travaux de consolidation ; le sentiment
de respect qui les anime pour les œuvres de nos pères et la splendeur de l'art
passé est sans contredit à la fois rationnel et poétique ; mais si le passé demande
rbommage de nos souvenirs et de nos respects, le présent a des exigences
impérieuses qu'on ne saurait méconnaître impunément. Puis l'art lui-même, en
dehors de toutes les considérations de lieux et de temps, veut aussi être con-
sulté, et il 110 nous semble pas l'eutondre toujours répéter d'un ton absolu et
monotone le même monosyllabe : Oui, oui, ou non, non. Son avis varie »ec
les circonstances. Nous reviendrons sur ce sujet, et nous ferons comiailre avec
détail ce que nous pensons de la question des restaurations. Les journaux an-
noncent que Mi\I. Victor Hugo et de Monlalembert entendent protester contre
l'aclièvcmcnt projeté de Saint-Oncn. ( 'Vo(e de M. César Daly.)
Ce vieux débris, dont ne font pas mention les anciens autenrs,
est vraisemblablement un reste de l'une des absides latérales 'celle
du Nord] de l'église Saint-Ouen de la deuxième époque, construite
en lolG par Guillaume Abbé, fils de Richard III, duc de Norman-
die, et terminée en il 26. Cette supposition ne saurait perdre son
évidence parce que cette tour est divisée en deux étages voAtes.
On voit souvent des sanctuaires élevés au-dessus du sol de la nef.
afin d'y ménager des cryptes. Cette tour renferme aujourd'hui le
mécanisme de l'horloge de Saint-Ouen. Elle est connue sous le
nom de Chambre aux Clercs.
Le pilier-butant du côté oriental du pignon de ce transsept est à
cheval sur le mur extérieur de cette vieille construction, et comme il
ne coïncidait pasexactementavecun dosseret appartenant à In vieille
tour, on a racheté le porte-à-faux latéral par une déviation oblique
du contre-fort de la vieille tonr, à l'instar de certains tuyaux de
cheminée en avant-corps. Cette disposition est d'un mauvais effet:
mais de ce côté de l'église on parait ne pas y avoir regardé de si
près. C'était le côté contigu au couvent.
A la suite de la v ieille abside et en suivant le flanc de l'église
jusqu'à la tour du Nord-Ouest, on voit une suite d'arcades fort
basses, adossées au collatéral du Nord et dont aucun des auteurs
que nous avons lus ne fait mention. Ces arcades, où la forme ogi-
vale est presque imperceptible, sont garnies de débris de meneaux
du X\" siècle, rapportés par incrustation. Elles ont été enterrées
par suite de l'exhaussement du sol de la place. Le réduit voâté
qu'éclairent ces arcades, servant aujourd'hui de bûcher et de
violon au corps de garde des gendarmes, faisait vraisemblable-
ment partie du cloitre de labbaye. Il est placé exactement dans la
même position par rapport à l'église que le clottre de la cour de
l'Albane à la cathédrale. On parle de restaurer ce vieux débris; tant
mieux ; mais il y a des travaux plus urgents ù faire à Saint-Ouen.
Parler de la tour centrale, c'est réveiller l'admiration de to«*
ceux qui ont vu cet ouvrage colossal en filigrane de pierre. Sa
partie supérieure, qui se termine si gracieusement en forme de
couronne ducale dentelée de fleurs de lis alternant avec des clo-
chetons, est à ciel ouvert sur une vingtaine de mètres de hantear.
à partir de la terrasse en plomb qui recouvre l'extrados de la cou-
pole du clocher. Je ne pense pas, toutefois, que cette terrasse dàt
être la couverture définitive de la voûte, La lunette percée au
centre de la coupole du clocher, et qui reçoit à son |>ourtour le
sommet des nervures de la voûte, n'a certainement pas ete faite pour
recevoir tout simplement le plancher qui l'obstrue et quisupporte le
plomb. Peut-être devait-elle être surmontée d'une lanterne inté-
rieure qui n'a pu être exécutée.
Les quatre tourelles qui s'élèvent anx quatre angles de la tourcen-
tiale et s'en détachent a partir du point où elle devient octogoMle,
appuient leur tête amortie en forme de tiare sur la tour principale,
au moyen d'arcs rampants déoou|)és avec «ne delicatOK extrtee.
Ces tourelles sont complètement creuses à 8 ou 10 mètres «o-de»-
sus de la dernière marche de l'escalier qu'elles renferment.
Huit fenêtres, disposées sur les quatre faces de la partie moyenne
de la tour qui forme le clocher, laissent largement sortir le son des
cloches qui y sont renfermées. Ces baies, au lieu d'être de simples
arcades géminées comme dans la plupart des campaniles, sont dé-
corées de meneaux flamboyants comme les plus belles verrières;
aussi rien n'égale In richesse de cette magnifique tour.
Dans le but de rabattre le- son des cloches, et pour empêcher
l'intioduclion de la pluie dans les clochers, les coostrucUurs du
5'i3
REVUE DE LARCHITECTIJUE ET DES TIIAVAUX PUBLICS.
Moyen-Age ont garni les fenêtres de presque tous les clochers d'es-
pèces de Persiennes à larges lames qui dégénèrent quelquefois en
une série de petits auvents couverts en ardoises, tuiles, tavil-
lons, et disposés en échelons les uns au-dessus des autres.
Ces constructions parasites, connues sous le nom d'abat-sonn,
obstruent d'une manière déplorable les ébraseraents, les meneaux,
les colonnettes, etc., des arcades souvent si belles des clochers de
style ogival.
l>'architecte de Saint-Ouen a esquivé de la manière la plus heu-
reuse ce grave Inconvénient. Les parois du clocher sont doubles et
isolées. Chaque double face de la tour est percée de deux fenêtres
parallèles et correspondantes, et décorée de riches meneaux décou-
pés de la même manière. Les abat-sons ont été placés dans les
baies de la paroi intérieure, dont ils enchevêtrent les meneaux,
mais les doubles fenêtres extérieures sont entièrement libres. F.es
abat-sons se trouvent cachés dans l'ombre par les meneaux des
fenêtres qui brillent sur le premier pian. C'est à cette ingénieuse
disposition que la tour doit la pureté de son ensemble.
Comme préservatifs de la pluie, j'approuve ces espèces de per-
siennes; mais qu'on les place de manière à ce qu'elles laissent libre
à l'extérieur au moins la moitié de l'épaisseur des meneaux, et
qu'on les peigne d'une couleur sombre en harmonie avec la teinte
des vides qui les séparent. On ferait encore mieux de les cacher
par des panneaux ou claires-voies en fonte, ainsi qu'on l'a fait aux
clochers de Notre-Dame-de-Lorette et de Saint-Vincent-de-Paul à
Paris. Ces grillages, mis en harmonie avec le style de l'édifice, se-
raient susceptibles de faire une très-belle décoration (t).
La corniche de la nef de Saint-Ouen est beaucoup mieux con-
servée que celle de la cathédrale, quoi(iue le ehéneau qui la sur-
monte ne soit pas garni de plomb. Ce ehéneau est fort bien disposé
pourrécouleraentdeseaux.Desgargouillesjumelles, placées de cha-
que côté des clochetons (|ui surmontent les contre-forts, déversent
les eaux sur le comble desbas-cùtês, qui sont couverts en plomb.
Au milieu de chaque travée, le fond du ehéneau se divise en deux
pentes opposées convergeant chacune à l'une des gargouilles qui
flanquent les clochetons. Chaque gargouille n'est donc chargée
que des eaux d'une demi-travée.
Au pourtour de l'abside, les gargouilles sont remplacées pardes
chéneaux disposés sur le dos des arcs-boutants, qui forment alors
gargouilles rampantes. Ce changement de disposition a eu lieu à
cause des combles, qui sont différents.
Nos règlements municipaux ne permettant plus de déverser les
eaux des gouttières sur la voie publique sans l'intermédiaire des
tuyaux de descente, il devient indispensable de supprimer la fonc-
tion des gargouilles dans nos édifices gothiques, de celles du moins
qui déversent les eaux directement dans les rues. Quoique ces dé-
versoirs fantastiques donnent du pittoresque à nos vieux mo-
numents, comme, d'un autre côté, ils sont une source de dégrada-
tions pour les édifices eux-mêmes à cause du rejaillissement des
eaux qui en proviennent sur la base des murs, et que, se détachant
quelquefois, ils peuvent occasionner de graves accidents, on fera
(1) On rendrait un graiiil service aux Ion ride Notre-Dame el de Saint-Jacques
de Paris en les délivrant de ces détestables olijels qui modifient d'une nianiiTe
si fâcheuse l'aspect de ces«ion»menls. On semble avoir compris cette vérité en
établissant les pcrsiennes de la tour du Nord de Notre-Dame, qui sont infini-
ment moins saillantes qu'à la tour du SudT et l)eaucoup moins surtout qu'à la
tour de Saint-Jacques, où elles ont des proportions exagérées.
très-bien de les supprimer totalement, même ceux qui rejettent les
eaux du comble de la nef sur les toits des collatéraux, ce qui néces-
site de les couvrir en plomb et peut causer des avaries aux murs
de la nef (i).
L'intérieur de Saint-Oueu est d'une grande simplicité. Sa nef
élancée est d'une très-belle coupe. Malgré leurs proportions assez
sveltes, les quatre piliers de la croisée n'ont pas éprouvé la cour-
bure qu'on remarque en général aux piliers des églises des XIIP,
XIV et XV« siècles, et qui est le résultat de la poussée des voû-
tes des collatéraux. A Saint-Ouen, ces voûtes sont cependant fort
élevées. Le poids énorme de la tour, portée par les piliers, a né-
cessairement augmenté leur résistance et les a préserves de la
poussée. Aucun des piliers de la nef n'a subi de poussée sensi-
ble (2).
La tombe d'Alexandre de Berneval, architecte de Saint-Ouen,
et celle d'un autre artiste (3), qui faisaient partie du dallage
d'une chapelle, ont été relevées et scellées sur la face du mur du
fond de cette chapelle. C'est une idée fort louable, sans doute, que
celle de préserver de la destruction les curieux linéaments gravés
sur la face de ces pierres tumulaires, qui eussent été à la longue
effacés par le frottement des pieds des fidèles ; mais il eût été plus
convenable de les laisser a la place quelles occupaient et de les
entourer d'une grille, quitte a gêner un peu le service de la cha-
pelle, qui ne se serait pas moins fait pour cela.
Lorsqu'une tombe recouvre les cendres d'un homme célèbre,
c'est quelque chose de plus qu'une simple pierre, à part le mérite
que la sculpture aurait pu lui donner. Je répéterai à ce sujet les
éloquentes paroles de M. l'abbé Bourassé , dans son Archéologie
(1) Nous différons d'avis, quant à celte suppression, avec notre ami M. Jan-
nlarU. La conservation des édifices demanderait sans doute que partout où
l'écoulement des eaux pluviales se fait au moyen de gargouilles, on établit des
tuyaux de descente convenablement disposés; mais il nous parait tout à fait'
indispensable de conserver les gargouilles elies-niènies, à la fois pour ne pas
se priver de leur effet si éminemment pittoresque, et aussi par respect pour la
pureté du style gothique. D'ailleurs, les arUsles du Moyen-Age, au moins ceux
du XV', et peut-être même ceux du XIV< siècle, se sont frégueniment servis
eux-mêmes de ces gargouilles, uniquement en vue de leur effet piiti>res(|ue. Ils
en ont fait qui n'ont jamais pu servir i l'écoulement des eaux, des gargouilles
purement décoratives.
L'obstacle sérieux que rencontre la rérorme dont nous parlons consiste sur-
tout dans la difficulté qu'on éprouve à établir les tuyaux de descente sans altérer
le caractère des édifices gothiques, ni compromettre leur solidité en incrustant
dans les murailles des tuyaux pouvant donner lieu à des fuites dangereuses
Ceux de nos lecteurs qui pourraient nous fournir quelque renseignement utile
sur les moyens de vaincre cette difHculté, rendraient un véritable serrice i l'art
en nous mettant en mesure d'Instruire nos confrères sur ce point. En établis-
sant des tuyaux de descente pour faire le service des eaux pluviales, nous
sommes d'avis qu'on devrait, dans certains cas, établir leurs orifices supérieurs
d'écoulement i un niveau inférieur à ceux des gargouilles, de façon i ce que
l'écoulement des eaux se fit par les tuyaux de descente dans les circonstances
ordinaires, et que les gargouilles elles-mêmes pussent offrir un moyen complé-
mentaire d'écoulement dans les cas exceptionnels d'orage considérable.
Ce qui précède ayant élé communiqué à M. Janniard, il nous a appris qu'il
s'était lui-même occupé de celte étude, et qu'il comptait nous adresser pro-
chainement une description de son procédé. (JVo/« de M. Cétar Daly.)
(2) Je pense que, sauf quelques rares exceptions, les quatre piliers de la
croisée des églises ogivales ont éprouvé un bombement plut considérable par-
tout où ils ne sont pas chargés de tours ou clochers d'un grand poids. Mais il y
a une très-grande variété de proportions dans l'épaisseur et la hauteur des piliers.
et de grandes différences dans la hauteur des collatéraux ; je n'ai pas jusqu'ici
fait assez d'observations pour établir une règle générale sur ce point.
(3) Voy. les dessins de ces tombeaux, /-'o'. I de la Revue, col. 196.
5'»5
REVUE DE L'ARCHITKCTUHK ET DES TRAVALX PUBLICS.
M«
chrétienne. Après avoir décrit l'effet pittorescjiie des tombes de ce
genre, qu'il compare à un tiipis de pierre, il ajoute : « On a vu
« disparaître peu à peu de nos églises ce pavé à la fois histori(|ue,
« moral et religieux. Ah I du moins, conservons avec respect ce
« qui existe encore ! Ne brisons pas le petit nombre de pierres tu-
« mulaires échappées au marteau destructeur, ne les déplaçons
« même pas ! Un tombeau n'est plus qu'un objet de vaine décora-
it tion ou de simple curiosité, s'il ne couvre les restes de celui dont
« il conserve le nom. Il n'est pas décent de jouer avec les tom-
« beaux , et c'est manquer à ce qu'on doit aux morts que de les
« priver de la pierre qui les recommandait aux prières des fi-
« dèles. »
En effet, n'est-ce pas faire de la conservation aux dépens des
convenances? Puisqu'on a tant fait que de l'enlever de sa place
véritable, la tombe de Berneval serait beaucoup plus convena-
blement dans les galeries du Musée des Antiques de Rouen, que
plaquée contre la muraille d'une chapelle. Là, ce serait un objet
d'art de plus ; ici , c'est un contre-sens.
Quand on examine l'intérieur de la nef deSaint-Ouen, on re-
grette de ne pas voir figurer dans les niches à dais qui décorent
le fut des piliers , les nombreuses statues qui sans doute les occu-
paient. Ces statues devaient donner de la richesse à l'intérieur
assez simple de cet édifice. Les hautes et basses voûtes portent
des vestiges de peintures ([ui ont presque disparu. Les chapiteaux
des impostes, les frises sculptées au-dessus et la galerie intérieure,
conservent une teinte jaune qui ressemble à un reste de' dorure.
Les clefs de voûtes et l'extrémité de toutes les nervures qui \ abou-
tissent sont peintes de diverses couleurs sur une longueur qui parait
varier de I"" à 1"" 30. Ce n'est qu'en voyant les choses de près
qu'on pourrait juger si ces amorces sont des commencements ou
des restes de peintures disparues sous le badigeon ou par le grat-
tage. Userait toutefois assez bizarre qu'on n'eût peint que les clefs
et des tronçons de nervures.
Il existe des vestiges de peinture d'un genre analogue aux dé-
cors de théâtre sur les tympans des arcades du chœur. Ces pein-
tures, dans lesquelles ou a figuré des meneaux gothiques et des
anges, forment des panneaux triangulaires, dont lé coté tourné
vers l'archivolte, au lieu de suivre les contours de celle-ci, est
en ligne droite, disposition peu gracieuse, .le crois que ces pein-
tures, déjà presque effacées, sont une tentative malheureuse faite
à une époque de décadence.
Les grilles du pourtour du chœur sont du style Louis XV, et,
quoique d'une grande richesse, elles font là un bien mauvais effet.
S'il était aussi facile de trouver des fonds pour changer une chose
choquante que de faire des vœux pour sa suppression, je deman-
derais bien vite le remplacement de cette grille par une autre qui
serait en harmonie avec le beau style de l'édifice. Quand un objet
de détail fait un contraste trop choquant avec le caractère général
d'un édifice , on ne doit pas se préoccuper trop de la théorie des
faits accomplis, il faut élaguer impitoyablement. Kii faisant les
nouvelles grilles en fer fondu, le produit de la vente des anciennes
couvrirait une grande partie de la dépense.
Saint-Ouen est construit en grands blocs dune pierre blanche
de nature crayeuse , mais assez dure , et lardée de rognons de silex
noir, semblables à des truffes par la forme et par la couleur. Il pa-
rait que les tailleurs de pierre et les sculpteurs ne savaient pas at-
taquer ces rognons ou que leurs outils n'étaient pas d'une trempe
convenable pour les enlever ; car, partout où ces corps étrangers
se sont trouvés à la surface , au lieu de les affleurer avec le reste,
ou bien de les arracher et de remplir le trou avec une pièce, ils
les ont laisses en saillie. Dans les évidements des moulures on en
voit souvent de la grosseur du poing sortir de la masse. Seulement,
dans les larges surfaces, on les a cassés presque à fleur, et ils ne
forment plus qu'une légère bosse. Comme nos tailleors de pierre
sont plus hardis aujourd'hui, on fera bien, lors du grattage du
badigeon intérieur, de faire aussi disparaître les disgracieuses ex-
crois.sances que je viens de signaler.
I Cette pierre, qui se comporte tri-s-bien en élévation, parait
souffrir beaucoup de l'humidité. Dans les parties voisines du soF
elle a pris une teinte verddtre, elle est remplie de nombreuses cre-
vasses qui annoncent la décomposition de la pierre autant que
l'écrasement. Leur aspect dégradé m'a fait pressentir avec regret
que cet édifice ne verrait plus s'écouler autant de siècles qu'il
en a déjà vu. On ferait bien d'examiner de près, de sonder cette
pierre, pour .s'assurer de son état réel , et , pendant qu'il en est
temps encore, de s'occuper d'une reprise en sous-œuvre dans le»
parties malades , s'il y a lieu (l).
On a employé à la construction de .Saint-Ouen une prodigieuse
quantité de plomb. Tous les joints quelconques des meneaux, tant
des galeries intérieures que des verrières du corps de l'église et de
la tour, les balustrades, les pointes des clochetons , enfin, tous les
plus légers membres d'architecture isolés de ce vaste édifice, sont
scellés en plomb avec goujons en fer. Le métal remplit tout l'in-
térieur du joint. Il était coulé par un ou deux trous de trépan per-
cés obliquement sur les flancs du meneau, à 8 ou 10 centimètres
au-dessus du joint, et se dirigeant vers le centre occupé par le
goujon. Les meneaux qui supportent les arcades ogivales des ga-
leries intérieures de la nef sont scellés de cette manière , quoiqu'il.^
soient d'une extrême légèreté. Ils sont d'un seul morceau de 3 mè-
tres de hauteur, et leur section horizontale n'est que de 0" Î2 de
long , sur 0" 07 de large aux plus épais. Cette hauteur est donc
égale à treize fois la plus grande dimension de la base, et à qua-
rante-trois fois la plus petite. La compressihilité du plomb placé
dans les joints est là fort à propos pour compenser les tassements
inégaux. Une banc de fer plat de 30 mill. sur 12 mill.. posée de
champ, et vraisemblablement traversée par un goujon a chaque
montant, enfile tous les meneaux dune travée à la naissance des
arcades. Dans quelques parties extérieures , l'oxydation du fer a
fait éclater l'enfourchcment des montants des meneaux.
On aperçoit, a travers quelques trous de boulin, dans l'épais-
seur de la tour de l'escalier, des chaînes en fer qui paraissent des-
tinées à réunir celle-ci à la tour principale, et qui sont scellées en
plomb dans l'épaisseur même du mur.
Si le fer peut être quelquefois un auxiliaire dangereux pour la
stabilité des édifices dans les parties trop exposées à l'humidité.
témoin les pointes de quchpies clochetons éclatées par l'oxy-
dation du goujon, auquel tient encore son jet de plomb, II ne
faut pas se dissimuler que ce métal joue un plus grand r6le qu'on
ne pense dans nos édifices de style ogival, dans celui-ci du moins (3,.'
(i; Cette dégradation est peul.<lre fcffcl de la chaleur du in«tal en ««»••••
des gai cnnaniniés qui sécliappent des moule» lu moment de U fonte; c«r M
sait que Saiiit-Oucn fut converU en fonderie 1 IVpoque de U RérolaOon.
(2) On peut consulter avec fruit un arUcle de la Rttue, ioUtuM Ut TK»-
vtoi du ftT comme mov«" d« consolidqfion daft Us mor.uwcnl, ro(k*fw«
(1-0!,. lof. II. col. Î3-. (>•" - »> <^'*^ »^J
T. V. »
647
REVUE DE i;architecture it dks tkavaux publics.
.■>»K
Sa présence explique plus d'un tour de force en construction;
mais il faut convenir qu'on ne l'y a pas prodigué d'une manière
ridicule comme dans quelques-uns de nos édifices du XVIH* et
même du XIX" siècle, quoique l'audacieuse légèreté de ceux-là
semble l'exiger bien plus que la lourdeur de ceux-ci.
Si l'oxydation du fer, par l'effet de l'humidité, a causé quelque-
fois de si grandes avaries aux parties délicates de l'architecture ,
on doit s'en prendre à l'insouciante négligence ou à l'ignorance
des constructeurs. Les scellements se font, la plupart du temps,
avec le plâtre, qui est un agent destructeur très-actif, ou avec le
plomb, qui, ne s'attachant jamais au fer, permet à l'eau de passer
dans Je joint et d'oxyder ce dernier métal ; peut-être même s'y
forme-t-il un courant galvanique par l'intermédiaire de l'eau.
Mais nous avons aujourd'hui les ciments romains, qui ont la
propriété de conserver le fer dans les lieux humides. On pourrait
sceller, même au plâtre, si les scellements avaient été préalable-
ment revêtus d'une couche de mastic de minium et de céruse a
l'huile de 2 ou 3 millimètres d'épaisseur, qui, en fort peu de temps,
formerait un croûte dure et imperméable. Pourcmployer le plomb,
il faudrait que les scellements fussent étamés et le métal coulé au
rouge; il se souderait ainsi au fer.
Pour tous les scellements de pièces non exposées à l'action d'une
force vive, on pourrait encore employer le mastic de vitrier, dans
lequel on lancerait des tuileaux ou des éclats de pierre dure. Les
goujons pourraient être faits en schiste ou en bois séché au four et
bouilli dans du goudron minéral.
La charpente de Saint-Ouen est fort belle. Les formes ont une
disposition différente de celles de cette époipie, le poinçon descend
jusque sur l'entrait principal, qui repose sur un triple cours de
plates-formes, posées sur l'arase des murs de la nef. De chaque
côté du poinçon, la portée de l'entrait principal est soulagée par
deux moises pendantes descendant verticalement de la jonction du
troisième entrait avec les arbalétriers. Ces moises sont joinfives;
maisdans l'intervalle, entre le premier et le deuxième entrait,
elles sont séparées par un évidement d'une largeur égale à leur
diamètre. Elles font un fort bon effet. L'entrait principal est élégi
de bossages et de chanfreins. Tous les chevrons porlenl ftrme et
ont 20 centimètres d'équarrissage. Les moises sont assemblées avec
des clefs en bois au lieu de boulons. (Voy. les Fig. 3 à 12 de la
PL 22.)
Comme on s'occupe beaucoup aujourd'hui de la restauration des
édifices du Moyen-Age, et que ce système de comble m'a paru fort
intéressant, et que d'ailleurs je le crois inédit, j'ai pensé être agréa-
ble aux lecteurs de la Revue en le leur donnant.
Les moises pendantes sont parfaitement disposées pour soulager
■ la longue portée de l'entrait principal, dont la section de 0" 34 sur
27 est très-faible, eu égard à sa longueur, qui approche de 1 0» 00.
Elles reportent sur les arbalétriers les charges permanentes ou mo-
mentanées que peut recevoir l'entrait, telles que planchers, sus-
.pension de lustres et de lampes, dépôt ou passage de matériaux
très-lourds, etc.
Dans les cas ordinaires, le milieu de l'entrait est suspendu au
poinçon par des étriers en fer qui rendent ces deux parties auxi-
liaires} maisdans les combles gothiques, ce poinçon n'est soutenu
lui-même que par lesentraits secondaires, quisont faits en général de
deux morceaux assemblés à tenons et mortaises dans le poinçon ,
ce qui les rend peu propres à supporter une charge verticale.
Ces deux cours de moises relient parfaitement les trois entraits
aux arbalétriers et augmentent considérablement la solidité de l'en-
send)le de la ferme, qui ne peut se déformer. On pourrait même,
sans inconvénient, supprimer la partie du poinçon comprise entre
le grand et le moyen entrait, en faisant toutefois celui-ci d'un
seul morceau. On obtiendrait ainsi au milieu un large passage qui
pourrait être utile en cert<nnes circonstances.
On a ménagé un passage de ce genre, mais par une autre com-
binaison , dans le nouveau comble du transsept Nord de la ca-
thédrale; c'est par là (|u'on transporte les pièces de fonte de la
flèche centrale.
Explication des figure» de la Planche 22.
Fig. 3 et 4 , profil et plan d'une ferme.
Fig. .î , cou{)e verticale d'une ferme faite suivant la ligne brisée,
sur a, 6, c, d.
Fig. 0, 7 et 8, coupe horizontale , face et profil de la partie infé-
rieure d'une paire de moises pendantes (l).
Fig. 9, coupe horizontale d'une moiseà (leur de l'entrait.
Fig. 10 et II, plan et profil du poinçon et des contre-poinçons.
Fig. 12, coupe de.s contre-poinçons faite à fleur du dessus de
l'entrait.
Je ne quitterai pas Saint Ouen sans parler de l'usage détestable
de fermer la porte des églises dans l'après-midi. Cet usage, qui est
général à Rouen, a failli me priver du plaisir de visiter encore une
fois ce bel édifice , et m'a empêché d'en visiter plusieurs autres.
J'avais trouvé les portes fermées et m'en allais en pestant
contre (|ui de droit, car j'ignorais (ju'il fut avec les bedeaux des
aceommodfmeiils, quand, me retournant pour jeter encore un
coup (l'œil sur le portail, je vis d'autres visiteurs, mieux instruits
que nu)i sur la consigne, prêts à entrer accompagnés d'un gardien :
je ne fus pas longtemps à les suivre.
.\ la cathédrale, on fait encore mieux : quand l'église n'est pas
fermée, l'enceinte du pourtour du chœur est close, et un bedeau de
planton introduit les visiteurs, moyennant finance.
Laissons^nos voisins d'outre-mer l'usage peu courtois de fermer
à tout venant les portes des établissements publies; nous ne dou-
tons pas qu'ils ne l'abolissent un jour.
Sur In place Saint-Ouen, dans le prolongement de la rue de
l'Hôpital , on voit encore un manoir du XVI^ siècle , dont les mu-
railles, naguère percées de rares ouvertures, n'ont pour toute
décoration que des bandeaux et une série de pilastres ; mais ces
pilastres sont très-jolis et d'une conservation parfaite, ainsi que
tout le reste de la maison. Leurs fûts sont élégis d'encadrements, et
leurs chapiteaux sont d'une es{)èce d'ordre corinthien , dont le
tailloir est porté par des dauphins et autres animaux fantastiques ,
en guise de volutes, selon le goût de l'époque. Ces sculptures sont
d'une exécution parfaite.
La porte cochère, encadrée de deux pilastres et d'une archivolte
ornés d'arabesques de très-bon goût et sculptés d'une manière
(1) C'est par erreur que dans les Fiif. 3, A, S, 6, 7, 8 et 9, on a fait régner
dans toute la longueur des moises le clianfrein extérieur. Ce clianfrcin ne
règne que dans les parties correspondant à celui de l'cvidenieut inléricur
des moises.
y*9
REVUE DE LARCHITKCÏUUE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
550
très-délicnte, est surmontée du n entablement, dans lequel on lit
cette inscription : DA'S MICHl ADIVTOR.
Le propriétaire actuel a fait percer, depuis deux ans, dans cha-
que travée, une large arcade avec devanture de boutique. On a
sauvé les pilastres en les faisant servir à la décoration de la de-
vanture ; mais comme la barbouillomanie est à la mode , aussi bien
à Rouen qu'à Paris, on les a empâtés de peinture à l'huile. La
jolie archivolte et les gracieux pilastres de la porte cochère n'ont
pas été épargnés.
]1 restait encore, du côté de la cour, quelques colonnes engagées,
cylindriques par le bas et profilées en balustres par le haut. Les
exigences de la disposition des boutiques ont obligé à les enlever;
il n'en reste plus qu'une. .le recommande, surtout aux amateurs,
une colonne qui soutient le poitrail de l'entrée d'un escalier si-
tué à gauche dans la cour. Cette colonne , étagée par retraites,
se compose de cylindres superposés et ornés de cannelures et de
divers ajustements. Chaque retraite est déguisée par des cordons
d'un joli profil. Elle est couronnée d'un délicieux chapiteau de
même style que ceux des pilastres , et l'étage supérieur de son fût
est flanqué de deux statuettes allégoriques en ronde bosse, sculp-
tées dans la masse.
Une partie saillante, mutilée, placée entre les deux statuettes ,
indique sans doute la place qu'occupaient les armoiries du fon-
dateur de la maison. L'extrême simplicité de la façade extérieure,
les rares ouvertures dont elle était percée, annoncent que la face
la plus importante était du côté de la cour ; mais il n'y a pas lieu de
douter que les bâtiments actuels de l'intérieur, dont le principal
parait dater du XVIII'^ siècle, n'occupent la place de quelque bâti-
ment du XVI' siècle qu'on aura fait disparaître. La jolie colonne
dont je viens de parler n'était peut-être pas seule, et sans doute
elle accompagnait tout autre chose que le misérable escalier du
XVni" siècle, qui est derrière.
Je pense que si le propriétaire éprouve aujourd'hui quelque
regret d'avoir ainsi travesti sa maison, c'est plutôt de n'avoir
pas encore pu louer ses boutiques que d'avoir déshonoré ses jolis
pilastres.
Saint-Maclou. — On restaure la charmante petite église de
Saint-Maclou. Je ne saurais dire ce qu'on y fait, car la consigne
ne permet pas de visiter les travaux qui s'exécutent au sommet de
l'édifice. Je n'aime guère à forcer la consigne, et je n'avais pas le
temps de faire une visite au confrère chargé de la restauration.
Cette église est , de toutes celles de Rouen , la plus obstruée par
des bâtiments. La licence des envahisseurs avait été jusqu'à fermer
complètement le portail de droite tout entier; heureusement, on
vient de le dégager.
Ce portail , dont les trois arcades communiquent entre elles ,
est fermé par une chétive grille en bois qui lui donne l'aspect d'une
loge de bêtes fauves. Quel contraste entre cette misérable clôture
et la richesse incomparable de ce délicieux portail ! Celvii du trans-
sept du Sud est obstrué par une chapelle moderne construite en
hors-d'œnvre pour y faire le catéchisme. Celui du transsept du
Nord est libre; mais , en revanche, il est flanqué, à droite et à
gauche, d'ignobles baraques de moins de deux mètres de hauteur,
à pignons sur rue et occupées par des savetiers, tripiers et char-
bouniers, fournisseurs du quartier Martainvillc. Il est impossible
de voir rien de plus hideux et de plus sale que ces échoppes, où l'on
peut à peine se tenir debout.
Pour donner plus de largeur aux pignons des transsepts et ob-
tenir l'empiacrment de deux tourelles d'escalier, on a été oWigé
d'obstruer la moitié de la verrière de chacune des deux chapellei
contiguès. Celte faute, contre les règles de l'art, produit un bien
mauvais effet. C'est un péché originel : aussi ne le mettrai-je pas
sur le compte des modernes.
Ce joli édifice du XV' siècle a de élevé d'un seul Jet. La con-
struction tout entière porte le cachet de la même époque, chose
fort rare. Les portes en bois , l'orgue, une partie des vitraux et
autres détails sont du XVI'. On doit peut-être l'homogénéité de
l'architecture de cette église à la petitesse de ses proportions, qui
a permis de la construire en fort peu de temps, du milieu du XV*
au commencement du XVI* siècle.
Les portes d'entrée, notamment celles du transsept Nord, du
stylede la Renaissance, sont d'une grande richesse et d'un goût ex-
({uis. On les doit, dit-on, auciseau de Jean Goujon ; elles sont vrai-
ment dignes de lui. La chaire et l'orgue sont de la même époque.
La cage de l'escalier de l'orgue, délicieuse claire-voie en pierre,
du XV" siècle , a beaucoup de ressemblance avec celle de la cha-
pelle de l'hôtel de Cluny.
Les vitraux peints sont des XV» et XVI* siècles. Ceux du pour-
tour du chœur ont tous leur fond décoré d une riche architec-
ture ogivale en grisaille. Malheureusement, ces peintures se dété-
riorent par l'îiction de l'air, et il est à craindre qu elles ne finis-
sent par se détruire tout à fait. Cela tient évidemment à la nature
de la grisaille, puisque les autres couleurs ne se dégradent pas.
Dans une récente restauration de ces verrières, on a été obligé de
poser provisoirement des pièces de verre blanc, qu'on a barmo-
niées en les peignant à l'huile.
Parmi les vitraux du XVI* siècle, il y a, surtout au transept du
Sud , des figures dont les draperies sont d'une si admirable couleur et
qui imitent si bien d'éclatantes étoffes de soie avec leurs reflets et
leur velouté, qu'elles valent à elles seules toute une verrière.
La rose principale est encadrée dans un chambranle saillant en
ogive; ses vitraux sont d'une belle couleur, et seraient d'un bel
effet si les meneaux en pierre n'étaient trop massifs. C'est, du
reste , le défaut de tous les meneaux de cette église. Leur épais-
seur exagérée contraste avec la légèreté extrême de toute l'or-
nementation. En somme, le plan de Saint-Maclou n'est qu'im-
parfaitement étudié.
La ville de Rouen était extrêmement riche en édifices du XV»
siècle, et elle en possède encore bon nombre. Il semble qu a cette épo-
que il y ait eu une recrudescence de foi et une exubérance de
richesse extraordinaire. Les archevêques accordaient des in-
dulgences, et les paroissiens s'empressaient de les acheter ca »e
dépouillant d'une partie de leurs biens. Mais que toutes lesëgUm
de cette ville ont l'air pauvre ! Les Bouennais aujourd'hui sont
bien changés. Si la piété, si la munificence .(veuglc de leur» an-
cêtres les ont dotés d'un nombre exorbitant deglises. ils devraient
au moins, eux qui sont si riches, entretenir conv enablement celles
qui leur restent.
Palais-de-Justice. — Je n'ai vu le Palais -de-Justice que le
temps nécessaire pour remarquer qu'on avait rasé toutes les par-
ties de cet édifice qui étaient postérieures au XVI* siècle ; on était
en train de les reconstruire. Ces travaux vont entraîner une bien
grande dépense ; mais quand il s'agit de l'édifice où l'on plaide.
doit-on y regarder de si près dans ia capitale du pays uoruMui î
551
REVUE DE L'ARCHITECTIHE ET DES TUAVALX l'LBLICS.
553
HÔTEL DU BouBGTHEROULDE. — Si je n'ai pas eu le temps de
visiter encore une fois 1 h6tel du Bouigtlicroulde, en compensa-
tion j'ai vu son fac-similé. Croirait-on qu'un homme ait eu la
constance d'estamper, en totalité, dans tous leurs détails, les cinq
arcades qui composent la magnifique galerie du Camp-du-Drap-
d'Or? Et cet homme est un ancien sculpteur, M. Rossy, qui a
dépensé à cette œuvre le reste de son ardeur d'artiste et le fruit de
ses économies.
C'est peut-être le plus vaste travail d'estampage qui ait jamais
été fait. L'auteur en a monté trois arcades dans la cour de sa mai-
son, rue Neuve-Saint- Amand. Il n'y avait pas de place pour les
deux autres.
Cette œuvre colossale de patience et de talent est faite depuis
trois ou quatre ans, et cependant il n'en a pas encore été placé un
seul exemplaire complet. Comment toutes les écoles des beaux-
arts ou les musées des capitales de l'Europe ne se sont-ils pas en-
core procuré une épreuve de cette reproduction d'un des plus
intéressants morceaux d'architecture du XVI* siècle? Le défaut
de publicité en est sans doute la cause ; car M. Rossy, homme
d'une profonde modestie , m'a paru être beaucoup plus artiste in-
fatigable qu'ardent solliciteur.
Il serait digne de l'école de Paris d'en acquérir uu exemplaire.
Cette galerie ferait un admirable dégagement entre deux des grandes
salles d'exposition du palais des Beaux-Arts. Sa longueur est de
quinze mètres et sa hauteur de sept mètres.
D'un jour à l'autre, le marteau de la spéculation peut renverser
la délicieuse galerie de l'hôtel du Bourgtheroulde; d'un jour à
l'autre encore, M. Rossy, vieillard plus que sexagénaire, peut
mourir, et la collection de ses moules sera convertie en ignobles
plâtras. Le monde artisllciue peut perdre , d'un seul coup , l'origi-
nal et la copie d'une des plus charmantes productions architectu-
rales de la Renaissance. Pour 3 ou 4000 francs on en aurait un
moulage complet.
Musée des Antiques. — Le Musée des Antiquités de Rouen est
assez riche en objets d'art gallo-romains et du Moyen-Age. Cette
curieuse collection se trouve réunie sous les voûtes et dans la cour
du cloître d'un ancien couvent. Ce local bas et humide ne pourra
conserver bien longtemps en bon état les objets qu'on y a recueillis.
La cour renferme plusieurs énormes sarcophages en pierre brute,
dont l'un vient d'être découvert dans les fouilles du chemin de fer
du Havre. Sa forme est celle d'une auge rectangulaire fermée par
un couvercle. Dans l'intérieur est un cercueil de plomb de même
forme, dont les faces latérales et le couvercle sont ornés de croi-
sillons gravés en creux.
On voit aussi dans cette cour plusieurs fragments d'architec-
ture et de sculpture monumentale trouvés à Rouen en 1839, place
des Carmes, sous les débris d'un énorme pan de muraille de con-
struction antique. J'étais à Rouen lors de la découverte. On y
a réuni quelques beaux fragments d'architecture gallo-romaine
trouvés dans les ruines de Lillebonne, entre autres, la retombée
de l'archivolte d'une arcade ornée de petites figures en relief dans
les creux des bandeaux d'archivolte, et de figures plus grandes
dans les tympans. D'après les mesures que j'ai prises, cette arcade
devait avoir près de 4 mètres de diamètre. Elle pouvait faire pa: tie
d'un are de triomphe auquel appartenaient vraisemblablement
des chapiteaux de pilastres qui se voient dans la même cour et qui
paraissent être de la même éiwque. Tous les fragments de la col-
lection sont couchés péle-mèle dans la cour et sur le mur d'appui
du cloitre.
L'objet capital antique de la galerie principale «st une statue de
femme drapée, dont la tête est malheureusement perdue. Cette
belle sculpture , en marbre blanc , qu'on pense représenter Faus-
tine , a été trouvée dans les ruines d'un établissement thermal à
Lillebonne. Des grifrons-appli(|ues en bronze , trouvés au même
lieu, r.ccompagnent l'inscription placée sur le piédestal. Plusieurs
ornements gallo-romains en bronze et en terre cuite, pro\euant
des fouilles de Lillebonne, ont été très-heureusement ajustés sur
d'autres piédestaux.
Un grand nombre de meules antiques en granit , des chapi-
teaux, des urnes en verre et en terre cuite, des tuiles, des tuyaux
de conduite provenant en majeure partie de la province, font
partie de cette collection.
Parmi les objets du Moyen-Age se trouve une grande fontaine-
lavabo en plomb du \VI' siècle, très-richement décorée de me-
neaux et dais gothiques alternant avec des têtes de lion , dans la
gueule des(|uels étaient des robinets. Ce bassin provient du prieure
de Saint-Lô.
Je ne décrirai pas les vitraux peints ni les meubles du Moyen-
Age, et ne parlerai de la belle collection des médailles antiques et
modernes, parmi lesiiuelles s'en trouve un certain nombre en or,
que pour manifester la crainte qu'elles n'aient le même sort que
celles de Paris. Je souhaite bien vivement que le concierge ait pré-
venu le conservateur, comme je l'y ai engagé, du danger qu'il y
a de laisser les choses dans l'état actuel. Il faut que le médaillier
soit changé de place ou garanti convenablement de toute atteinte
extérieure.
Les Rouennais ont érigé à leur compatriote Boieldieu une
statue assise, en bronze, sur piédestal en marbre et entouré d'une
grille. Ce monument, placé dans une allée, sur le port, est assez
joli du reste, mais il est bien mignon pour figurer ainsi, en plein
air, au pied dune Mune de maisons à cinq étages qui l'écrasent. Il
serait plus convenablement dans la cour d'honneur d'un édifice
public de hauteur moyenne, ou dans le jardin de Saint-Ouen.
I>'eniplacement a été mal choisi sous un autre rapport ; pour Cîi
avoir une idée, qu'on se figure le monument de lu place du Palais-
Bourbon, réduit à des proportions plus petites, et planté avec
sa giille en fer au beau milieu de la contre-allée du boulevard
des Italiens, au coin de la rue Laffitte; qu'on se le représente
entouré d'une foule encore plus compacte que celle qui fré-
quente le boulevard parisien; car la population aisée de la ville
de Rouen tout entière s'y réunit chaque soir. Le double courant de
cette masse de promeneurs se heurte contre le malheureux monu-
ment comme les Ilots d'une rivière viennent se briser en tournov ant
contre lespiles d'un pont. Il fautque le pauvre Boieldieu, perpéluelle-
inciit coudoyé par les passants, soit rwllement de bronze pour con-
server son attitude méditative au milieu du brouhaha qui l'obsède.
Sortons maintenant de l'enceinte de la ville et allons respirer
l'air \if et pur des environs.
Église de Bon-Secoubs. — A la bifurcation de la vallée de la
Seine et de celle de l'Aubette, les montagnes qui côtoient le fleuve
forment un promontoire du haut duquel on descend a Rouen lors-
qu'on vient de Paris par la roule d'en haut. Cette croupe mon-
tueuse se bifurque légèrement elle-même, et prend à droite, du côté
553
REVUE DE L'ARCHITKCTLRE ET DES TRAVAUX PlBr.lCS.
55V
de l'Aubette, le nom de Côte Sainte-Catherine, et à gauehe celui
de Côte de Bon-Secours. Sur cette dernière, dont la base est bai-
gnée par la Seine, s'élevait jadis une vieille église de village, dé-
diée à la Vierge, et célèbre dans toute la Normandie par de nom-
breux miracles qui trouvent encore dans le paj s quelques croyants.
Les légendes et la tradition sont superflues pour apprendre ces
miracles aux visiteurs. Ils sont suffisamment attestés par des bé-
quilles en sautoir, des jambes d'argent et autres ex-voto du même
genre, suspendus au-dessus d'un des autels de l'église, et par le
grand commerce de médailles, chapelets et autres objets de dé-
votion, qui se fait aux abords^de l'édifice (l).
La chapelle de Bon-Secours, devenue insuffisante et tombant en
ruine, a été démolie il y a quekjues années, et se trouve transfor-
mée en une grande et belle église dans le style du Xin= siècle, et
aujourd'hui presque achevée.
Rien n'est imposant comme la vue dont on jouit de l'admirable
site où s'élève la nouvelle église, comme jadis le temple de Mi-
nerve sur le cap Sunium. L'imagination des fidèles, exaltée par ce
magnifique spectacle, devait être favorablement disposée à croire
aux merveilles.
Le moindre des miracles qui se sont opérés à Bon-Secours n'est
très-certainement pas la construction de !a nouvelle église, plus
digne en vérité d'une ville aisée que d'un pauvre village. Ce mi-
racle est dû à l'activité, au zèle et à l'habileté de M. le curé de
cette église, digne émule de l'ancien curé de Saint-Sulpice, et qui,
sans autres ressources pécuniaires que des subventions minislé-
rielles ou des dons volontaires, a pu conduire au point où elle en
est, cette entreprise relativement colossale. (;e minisire des autels a
su très-habilement stimuler la piété, peut-être aussi un peu la va-
nité des habitants de la province pour la construction deson église,
qui ne coûtera pas moins, dit-on, de ô ou 600 mille francs. Il a
trouvé le secret de transformer, assure-t-on, des protestants eux-
mêmes en donateurs de quelqu'une de ses verrières.
C'est une véritable bonne fortune pour les visiteurs de l'église
de Bon-Secours que d'y rencontrer M. le cure libre de disposer de
son temps ; il leur fait explorer son église dans tous ses détails,
avec une complaisance et une courtoisie parfaites.
Cette église est bâtie, comme nous l'avons dit, dans le style du
XIII<" siècle, sous la direction et sur les dessins de iM. Barthélémy,
l'un des architectes les plus distingués de la ville de Rouen, et
qui, en cette occasion, a travaillé, dit-on, uniquement pour le ciel et
pour la gloire; son but ne sera pas manqué, je puis le lui prédire,
quant au dernier point. M. le curése chargera de lui assurerl'autre.
Le plan est rectangulaire, avec une seule abside polygonale en
saillie, comme dans les basiliques romaines ; la nef, de même lar-
geur que l'abside, est séparée des bas-cùtés par deux rangées de
piliers ronds, sur chacun des quatre points cardinaux desquels est
engagée une colonnette. La longueur totale est de 50 mètres.
Les voûtes de la nef sont contre-butées par des arcs-rampants
couronnés de clochetons à leur base et à leur sommet ^2). Ces clo-
(1) Des ex-volo, d'une espèce moins orthodoxe pcul-Étie, ont élé disposés it'--
cemiuenl dans cette dglise. Ils consistent en cinq ou six bannières qui furent
arborées par divers industriels é la c<!rénionle d'inauguration du chemin de fer de
nouen à Paris. Ce diSpilt prouve sans doute une grande dévotion à Notre-Dame
de Bon-Secours; mais (|uelques-uiu"S des bannières portant le nom et l'adresse
du donateur pourraient fort bien, par mie interprétation malicieuse, passer pour
des prospectus d'un nouveau genre, ce qui serait peu édifiant.
(2) La plupart des arcs-rampants du Sud sont déjà lézardés aux voussoirs du
chetons, quoique tris-simples, font un bon effet. La corniche de la
nef est couronnée dune balustrade en arcades découpées en treflrs.
Cette balustrade est un peu maigre, par suite du trop grand éear-
tement des eolonnettes.
Le clocher unique est placé au-dessus du portail principal. Sa
hauteurseradc 50 mètres. Il estcarrcàju base, el son amortis.seinenl
est en forme de pyramide octogonale, flanquée de quatre cloche-
tons aux angles, le tout en pierre et couvert d'imbrications. Il iw
semblcra assez au grand clocher de Saint-Denis. Quand je l'ai vi-
sité, eu juin, on posait la dernière clef des arcades de l'étage supé-
rieur de la tour.
A l'intérieur, le chœur et la moitié de la nef sont entièrement U-r-
minés, moins le pavé. De chaque cdté de la nef, au-dessus des ar-
cades des collatéraux, règne une suite de galeries feintes porter»
par des eolonnettes a chapiteaux sculpti^.
Les cinq verrières du chœur et quatre autres dechaque rAté de la
nef sontdéjàgarniesde leurs vitraux peints dans le style du Mil' siè-
cle. Ces vitraux sont d'un bon effet. Leur composition est l'œuxre
de M. Gérente, jeune artiste d'un grand talent. Il a parfaitement
compris la destination des verrières dans un édifice. Ce ne sont
pas de ces vitraux de boudoir, qui le disputent, pour la finesse Avs
traits, à la miniature elle-même, comme nous en voyons quelque-
fois aux expositions du Louvre, et qui seraient d'un effet complète-
ment nul si on les plaçait à 6 mètres de hauteur; mais c'est de In
belle et bonne peinture, aux nuances vives et harmonieuses, an\
contours vigoureusement accusés, qui nous rappellent ces belles\er-
rières du XI1I« siècle, ces mosaïques transparentes dans lesquelU s
le dessin n'est que l'accessoire, et qui laissent pénétrer, dans l'in-
térieur de l'édifice, des faisceaux de lumière nuancés de milk-
couleurs. On a représenté sur la verrière du milieu de l'abside un
arbre de Jessé. Pour donner plus d'importance au personna;:r
principal d'où part l'arbre généalogi(|ue , on la peint conclu- en
travers au bas de la verrière, ce qui fait qu'il se tiou\e coupe «n
deux parties égales par le meneau unique qui divise la bnie dont
il occupe toute la largeur; cette disposition n'est pas heureuse. Si
ces verrières n'ont pas toute la vigueur de ton et le \eloute decello
du XlIIc siècle, elles sont, en revanche, d'un dessin plus correct.
Ces vitraux sont dus à la munificence de diverses personnes, doiil
les portraits, ainsi que ceux de toute leur famille, sont peints daii>
un encadrement spécial, avec inscription poitant les noms et qii;i-
lités des donateurs. C'est un excellent moyen de stimuler la gnn-
rosité des paroissiens.
La construction de cette église présente un grand luxe de mattv
riaux. Le socle est tout entier en pierre de Cherence d'un mètre dr
hauteur. Il n'y entre pas un bloc de moins d'un mètre cube. Le
socle dechaque contre- fort se compose d'une assise de deux mètres
cubes engagée dans toute l'épaisseur du mur de face. Plusieurs
blocs cubent trois mètres.
A partir de la retraite jusqu'à l'appui des verrières des collati-
ranx, les murssont en pierres de 11 le-.Adam ; Icresteesten VergeUt
Les verrières, dont la largeur est de 3 m., se composent de deux
arcades géminées, séparées par un meneau et surmontées d'une
rosace à six lobes. Le meneau est appareille en six morceaux.
milieu. On attribue cet elTet aux venu, ce qui ne paraît pe« problMe. â i
que ce vent ne vint du Nord et que sa pression sur les boçs du Nord de b «ef
n'ait surcliargé les arr.virautaiils du Sud. Celle dégra<Ulioa est plntOt l'cfcl du
tassement du sol de la fondation.
555
IIKVUK DK LARCmiKCTURE O DKS TKAVAl X PLIUJCS.
550
L'appareil des voûtes d'ariHescst frès-régulicr, et leur construc-
tion se fait par des moyens très-simples. On n'emploie des cintres
que pour la construction des arcs doubleaux et des arêtiers. Les
cintres des arêtiers se composent de quatre parties principales dis-
posées diagoiialement suivant la projection des nervures. On pose
(l'abord quatre entraits rampants, formés par autant de couples
de madriers en sapin dont le pied coupé en biais repose sur l'im-
poste des arcades, et la tète, coupée aussi en biais, s'ajuste sur
une clef placée à la réunion des quatre entraits. On dispose sur
ceux-ci quatre courbes en planclies, dont le profil extérieur reçoit
les voussoirs des arcs en pierre; aussitôt que la clef de ceux-ci est
posée, on dégage les cintres ; chaque ouvrier en prend un sur son
épaule et le porte à la travée suivante.
Le remplissage des voûtes se fait en petits moellons de Vergelet
débités à la scie à dents, par tranches de 0" 08 sur O" 10, et coupés
en tronçons de 2.5 à 30 cenllniètres de longueur. L'appareil en est
parfaitement régulier, et la pose se fait sans le secours d'aucun cintre.
Une rainure directrice est refouillée sur les faces latérales des
arcs-doubleaux, suivant la surface de révolution dans Ia((uellcd(>it
être comprise chaque retombée de voûte. Il suffit, pour diriger la pose
de chaque rang de moellons, d'appliquer une règle ou un cordeau
suivant les directrices correspondant à chaciue rang de moellons.
Les personnes qui, dans leur ignorance de l'art de bâtir, pré-
tendent que nous ne pourrions aujourd'hui construire des mo-
numents dans le style ogival, n'ont qu'à aller visiter le coup
d'essai fait à Bon-Serours ; elles verront qu'on pourra surpasser en
ce point les constructions gothiques; le raisonnement peut con-
duire à la solution du problème; mais il n'en est point encore ainsi
de l'exécution des sculptures de style ogival; nos ornemanistes
n'ont point encore saisi cette vigueur et cette naïveté de ciseau
qui distinguent à un si haut degré leurs confrères du Moyen-Age.
On ne saurait se faire une idée du coup d'œil dont on jouit du
haut du clocher de Bon-Secours. La villede Rouen toutcntière, avec
ses clochers, son port et ses vaisseaux, n'est pas la moins intéres-
sante partie de ce panorama. Le sol du plateau sur lequel s'élève
léglise, semble arriver juste au niveau du sommet actuel de la
flèche en fer de la cathédrale, dont la hauteur est de 1 30 mètres.
Chemin de Feb de Rouen au Havbe. — Les travaux marchent
avec activité. Cette voie de fer ne forme pas le prolongement de
la ligne de Paris à Rouen , mais elle s'embranche sur cette der-
nière dans la plaine de Solteville, à environ 2 kilomètres avant
d'arriver à la gare de Rouen.
Ce chemin de fer aura peu de charmes pour les personnes qui
redoutent les tunnels; ceux-ci formeront, dit-on, le tiers du par-
cours total ou environ 30 kilomètres. Dans les parties dont j'ai
observé la trace, de Rouen à Pavilly, les tunnels m'ont paru en
majorité. Il traversera le vallon de Pavilly sur un viaduc de 33 mè-
tres de hauteur et de 3 ou 400 mètres de longueur. Cet immense
travail d'art était en train d'exécution au mois de juin dernier.
A peine le chemin de fer du Havre a-t-il quitté celui de Rouen et
traversé la Seine, qu'il s'enfonce sous la côte Sainte-Catherine ; puis,
après avoir traversé la vallée de Darnétal à découvert sur une éten-
due de 4 à 300 mètres , il rentre sous terre près de l'église Saint-
Hilaire, parcourt les boulevards Saint-Hilaire et Beauvoisine, et ne
reparaît au soleil que sur une étendue de 100 à 150 mètres, au pied
du Mont-auœ-Malades, où sera la gare ; il disparaît de nouveau
sous la base de cette montagne. Les travaux d'art sont mal exé-
cutés et avec de mauvais matériaux. Ils sont empreints du même
cachet que ceux du chemin de fer de Paris à Rouen. Quelle diffé-
rence entre ceux-là et les travaux du chemin de fer du Nord!
Tous les travaux d'art, viaducs, tunnels, etc., se font en briques,
sur soubassement en pierre brute. On emploie deux esiM-ces de
briques, faites en général sur le lieu même, avec la terre qui s'y
trouve. Tous Us grands ateliers de construction sont accompagnés
d'une briqueterie, à partir de Rouen jusqu'à Pavilly, sur une
étendue de l.î à 20 kilomètres et au delà sans doute, d'où l'un
pourrait conclure que toute la terre de cette contrée est propre
à faire de la brique. Je suis loin de blâmer ce système, qui doit
être économique, puisqu'on évite ainsi les frais de transport ; mais
il faudrait que les produits fussent bons.
De ces deux espèces de briques, les unes sont jaunes , les au-
tres rouges. La première semble n'avoir été cuite qu'aux rayons
du soleil, à l'instar di-s Egyptiens, tant à cause de sa couleur que
de sa friabilité. Ce n'est pas que la couleur jaune soit toujours
l'indice d'une mauvaise qualité dans la brique; j'ai vu de la brique
et même de la tuile de cette couleur dont la qualité égale au moins
celle des meilleures briques rouges; mais elle est dure, com-
pacte et sonore. Celle du chemin de fer du Havre, au contraire, est
friable, légère, cassante, et rend un son fêlé, analogue à la mau-
vaise brique de Sarcelles, dont se servent les fumistes de Paris
pour la garniture des poêles. La brique rouge, quoique d'une cou-
leur plus séduisante, ne parait pas ici meilleure que l'autre.
Ces bri(|ues, il est vrai, réunissent toutes les apparences des
plus mauvaises qualités; mais peut-être possèdent-elles quelques
vertus occultes et merveilleuses qui les dispensent du reste. Et c'est
avec de tels matériaux qu'on fait des constructions qui exigent
la plus grande solidité ! C'est avec ces briques qu'on fait la voûte
du tunnel de la côte Sainte-Catherine , dont la constitution
géologique est, comme dans presque toute la Normandie, une
matière craveuse lardée de rognons de silex noir! La masse est di-
visée par d'innombrables crevasses verticales, semblables à celles qui
se forment dans une pierre tendre soumise à une trop forte charge.
Ces crevasses paraissent être plutôt l'effet de l'écrasement que du
retrait de la pierre. Quelques-unes ont jus(|u'à 30 cent, de largeur.
Au viaduc qui traveree la petite rivière de liobec, l'un des pieds-
droits de l'arcade qui recouvre le chemin longeant la rivière a été
poussé au vide du côté de l'eau immédiatement après que la
voùle eut été achevée, et bien aviiiit son décintrenient. Ce pied-
droit fut étayé sur-le-champ.
Mais Tmissons celte dissertation , déjà beaucoup trop longue ,
dans laquelle il s'est glissé plus de critique que nous n'aurions
voulu, et disons adieu à la ville de Rouen.
H. JANMARD, arcl.iiod. .
iVOlVEU PIIOCÉDÉ poiu e\fo\(:eii
Z.XS FIXOTS DES CONSTRUCTIONS HYDRAULIQUES
Par le docteur l'.-U. Pott.
Le caractère pariicnlier de ce nouveau mode consiste d.ins une ap-
plication des principes de la physique pneumatique pour ficher dans le
terrain les pilots qui doivcul servir de base aii\ conslruciioiis hydrauli-
ques. Dans ce système, au lieu de se servir de pilots pleins et solides, on
fait usage de pilois creux qu'on enfonce à l'aide de la pression alnio-
557
REVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PI BMCS.
5SS
spliérique, c'csi-a-dire en aspirant par l'inlérieiir de cha(|ue piloi le
sable ou autres malières terreuses meubles sur lesiiuellcs repose la base
de ce pilot, cl par couséquent en produisant un vide, que le pilol, en
descendant, vient aussitôt occuper. Voici à peu près coinnie on pro-
cède, et quels sont les appareils nécessaires à l'opération.
Soit un pilot (|u'il s'agit de ficlicr à une certaine prolondeur dans un
banc de sable recouvert d'eau. Ce pilol, coinmi' nous l'avons dit, est
creux dans toute sa longueur, cl non pas plein conititc ceux qu'on en-
fonce avec la sonnelle. Dans cet étal, on \i'. place veriicalenuMit d^ms
l'eau, et on en fait descendre l'extrémité inférieure ouverte dans le
point où il doit être établi jusque sur le sable, en le pressant un peu
pour l'y faire pénétrer légèrement. On voit que, de celle manière, l'air
ne peul plus s'introduire par le bas à son intérieur, ce qui est inie
condition indispensable pour le succès du travail.
Quand le pilol est ainsi debout, on coiffe sa partie supérieure d'un
chapeau imperméable à l'air, et, à l'aide d'un tuyau flexible cl égale-
ment imperméable, on le met en communication avec un récipient de
décharge qui communique hii-môme, par mi autre tuyau flexible, à
une pompe à air à trois corps ou trois pistons.
Lorsque tout est ainsi disposé, on fait jouer. les pompes, et aussitôt
il se fait une raréfaction d'air dans les tuyaux flexibles, le récipient et
le vide intérieur du pilot, raréfaction qu'on porte, au bout de quelques
instants, assez loin pour faire monter par la pression almospliéri(|ne un
mélange semi-fluide d'eau, de sable et de terre, qui se décharge dans
le récipient. Toutes les fois que le récipient e.«t rempli, on le vide à
l'aide d'une porte à tampon qui se trouve placée près du fond.
.\ mesure que le sable est enlevé ainsi par aspiration, le pilot descend
par son propre poids et par la pression almospbéri(|ne, pour occuper
la place des matériaux solides qui ont éié enlevés.
On établit une pompe à trois corps, a(in qu'il y ail un flux continu
de matière semi-fluide ; car on a remarqué que la rapidité avec laquelle
s'opérait renfonceinenl du pilol était proportionnelle à la force appli-
quée el à la permanence de son action.
Dans bien des circonstances, les sables mouvants, les alluvions ter-
reuses, lès vases, ainsi que quelques matières solides, seront assez
meubles, et l'accès de l'eau de fdtralion assez libre, assez constant et
abondant pour que le pompage se continue sans interruption jusqu'à ce
que le pilol soit enfoncé à la profondeur voulue; mais, dans plusieurs
autres, il sera nécessaire de remuer, détacher ou désagréger les ma-
tières sous le pilol avec des instruments adaptés et agissant à cctefl'et,
elde verser même de l'eau dans son intérieur pour les su.spendre et
en faciliter l'évacuation. Dans ce but, le chapeau qui coiffe le pilol porte
une boite à étoupe, à travers la(|uelle on peut faire agir les instruments,
ou bien on peul enlever le chapeau, introduire les instrume:iis, les
faire fonctionner, verser l'eau, et le remettre eu place. Du reste, le cha-
peau est facile à rendre imperméable à l'air, à l'aide de la pression
atmosphérique qui le comprime sur une rondelle de cuir gras, sur la-
quelle on le pose au sommet du pilot.
Pour accélérer la descente du pilot, on peut placer trniporairemenl
sur lui on sur le chapeau qui le surmonte un poids plus ou moins lourd.
Si on reticontre une couche de terrain d'une nature trop dure ou trop
compacte pour être pénétrée par les moyens indiiiués ci-dessus, alors on
peul avoir recours, pour la rompre, auxouiilsde sondage dont on se sert
pour forer les puits artésiens, et, pour faciliter l'opération, on relire le
chapeau sans inconvénient pendanl toute la durée du travail. Si une lon-
gueur de pilol ne suflil pas, on peul en ajouter une seconde, nue troi-
sième, qu'on visse ou assemble bout à bout d'une manière quelconque.
Le procédé qui vient d'être indiqué est très-propre .à ficher des pilots
d'un diamètre moyen ou d'une section médiocre, el toutes les fois que
l'afflux de terre, de sable, ou des autres malières de lintéricur à l'exté-
rieur du pilol, peuls'opéreV très-librement; mais, lorsque ces malières
ont une consistance telle que la communication entre l'intérieur el
l'extérieur n'est plus parfaitement libre, ou lorsque l'eau ne pénètre
pas d'une manière continue dans le pilot creux, ou enfin quand, par
des causes particulières, il devient nécessaire de faire nsage de pilols
d'une grandeur lello qu'on éprouverait des diffiruliés s«;rieuies pour \
faire le vide, on peut néanmoins procéder d'afirès les in<Hne<t principe",
mais en opérant ainsi qu'il suit :
Au lieu de coiffer le pilot d'un chapeau el d > Une le w.!.; .. -on in-
térieur, on y introduit un gros tube qu'on ap|telle une trompe, dont un
fait descendre l'exlréniiié inférieure jusqu'au fond el dans le table, < t
qu'on met en communication avec le récipient de décharge el les pom-
pes à air. C'est à l'aide de celte trompe qu'un a>pire cl qu'un tide les
matières qui se trouvent soug le pilol, aliii de le faire descendre, (jiianii
on veut faire inurchtr les travaux avec «dériié, on peut se s<Ttirdc
deux ou trois trompes mises en action par aulaiil d'appareils d'eibau»-
tion, cl si le pilot est d'un fort diamètre, on peul faire descendre dans
son intérieur des ouvriers qui giiideiil l'exlrémilé il<-» trompes, et leur
font enlever légulièreincnt tomes les matières i la pei ipbérie poar le
faire foncer bien uniformément et verlicaleinenl. Dans ce cas, il sera
nécessaire de descendre préalablement au fond du pilot un inqurt ou
une caisse d'un dianiètie moindre, t;int pour dimiier un point d'appui
solideauxouvriers que pour les maintenir à flot, et lesprésener ileiuni<-
irruption subite ou projection de bas en haut des sables el des lcrie>.
Aussitôt que les pilols sont enfoncés à la profondeur voulue, on le«
remplit avec un béton ou bien des cimenis romains, hydrauliques, n<i
avec toute autre substance; niais avant d'agir ainsi, il cunvieni, dans
le cas où le terrain ne présenterait pas une cunsi^lance suflisanie, de
le consolider dessous et autour du pilol. A cet effet, on verse ou l'on
fait pénétrer de force dans ce pilot creux des solutions chimique'^.
mastics, ciments nu autres, appropriés :i la nature du lerrain, qu'on
aura reconnue à l'avance. Ainsi, dit l'inTenteur en analysant des c< han-
tillons des terrains recueillis à différentes profondeurs, on peul s'assu-
rer quelles soin les matières qui le coinpo'Vciil, el selon qu'il sera cal-
caire, siliceux ou autre, on décidera la matière simple ou coni|(os«-e
qu'il faudrait combiner pour en augmenter la soli lilé. On peul, du reste.
par ipielques essais en pclil, mélanger plusieurs substances ^ - '
associées, et voir quelles seront celles qui produiront la si'i
la plus coinplèlc, et qui reffectueront le plus promplcinenl.
Plusieurs ingénieurs anglais distingués par leur mérite, el entre au-
tres -M. Walker, président de l'Inslitut des ingénieurs de Londres, «-i
M.Gordon, quia déjà élevé plusieurs phares remarquables parleur
belle exécution, ont conçu une idée favorable du nouveau nio<le d'éta-
blissement qu'<in doit à M. le docteur Poil, et sont, dil-on. dans l'iii-
tenlion d'en faire l'essai à la première occasion.
.»iCgC'^aai —
CONCOURS PODR UN PROJXT DE HAI.I.E AUX GRAIMS
POUR I.A VIIXX DE BI.OIS.
Nous donnons ici les principaux articles du programme de
ce concours, et nous les accompagnons de quelques observations
qui, nous l'espérons, ne seront pas sans profil pour la rédaetton
des programmes futurs :
« La llalle à construire sera placée sur Je eàU Je ta flacr d* U Priftr-
lure opposé au Palai$-de-Juitiee, et paralMrmml à celmi-ei. Elle a«rj
la forme d'un parallélogramme rectangle de 60 rocires de h^ade el de
30 mètres de côte, présentant une superficie rouverlc de 1800 mètre».
« La llalle sera construite sur l'alignemml arrélè par le Comteit mu-
nicipal, suivant ses délibérations des U novembre el 5 décembre IWi.
et sur l'axe du Palais-de -Justice. »
Cet alignement, quel est-il? le programme ne l'indique pas. Now
ignorons si , pour faire connaître cet alignement, un plan a été
annexé au programme public. Quant à nous, nous n'en avons point
Ô.'VJ
HEVUE DE L'ARCHITECTURE ET DES TRAVAUX PUBLICS.
560
reçu avec les exemplaires du programme qui nous ont été adressés
il notre demande. Faisons observer donc, qu'a défaut de ce docu-
ment, le concours de Blois ne serait pas très-sérieux , car les ar-
chitectes qui sont sur les lieux, et à même de prendre à la mairie
les informations indispensables, sciaient les seuls qui pussent con-
courir. Nous allons nous mettre en mesure d'éclaircir ce fait.
« On devra, dans la disposilion du projet, ménager iiti large accès
pour la circiilalioii desaclieleiirsct des vendeurs. Les issues praliquccs
autour de l'édifice itcvrinl pnKienter toutes les conditions dcsiniLlis /loiir
assurer la prompdtutle, la facilité et la sûreté du dvchargcmtnl tirs
(jrains cl de leur transport dans l'inlériiur de la Halle. »
Cet article suppose une connaissance préalable des abords de
l'emplacement adopté, ainsi que de l'importance du mouvement
commercial du marché aux grains de la ville de Blois, car il serait
impossible, sans ces données, de déterminer toutes les conditions ilt-
xirablcK i^our asinrer lu promptitude, la facilité et ta sûreté du dé-
chargement. Cet article avait besoin d'être développé pour les ar-
chitectes étrangers à la ville.
<i Le inuxiiniim de la dépense sera de 180 000 fr. L'écoiioniie sur celle
prévision sera jirise en tonsidéralioii pour le inciile des plans produits.»
Parmi les pièces que les concurrents devront produire, le pro-
gramme demande :
« Ln plan d'ensemble de la place cl de ses abords, sur lequel figure-
ront, en plan de masse, la Préfecture cl ses Jépindanccs, le Palais-de-
Juslice cl la Halle projetée, à l'échelle de 1 niillinièlre par inclre. »
Encore ici, le programme, à moins que ce plan n'y soit annexé,
semble supposer que l'artiste ira à Blois lever lui-même le plan des
abords du terrain destiné à la Halle; or, cela ne peut avoir lieu.
C'est donc se priver volontairement du concours d'une foule d'archi-
tectes qui ne pourront ou ne voudront pas faire les frais du voyage.
Enfin, un des derniers articles du programme impose les con-
ditions suivantes :
« Nul ne fera admis à concourir s'il ne justifie d'un certificat de récep-
tion d'élève de l'Ecole royale des Bcaux-.Arts, ou tout au moins d'un certi-
ficat délivre par un fonctionnaire public, et établissant tfu'il a exercé ta
profession d'architecte pendant deux années au moins avant le ["jan-
vier 1845.
(]et article est précédé par l'article habituel qui impose aux
concurrents de celer leurs noms dans une enveloppe cachetée ,
liortant une épigraphe répétée sur les dessins. Lorsque l'on por-
tera le jugement, le nom du vainqueur ne sera donc pas connu,
et, par conséquent, on ne saura pas s'il a ou s'il n'a pas satisfait aux
conditions de l'article en question, et il pourrait arriver que celui
qui aurait mérité le prix promis de 1 500 fr. ne fût pas en mesure à
cet égard. L'administration exigerait-elle, dans ce cas, la mise hors
deconcoursde l'auteur du meilleur projet? se priverait-elle deslu-
mières et de l'expérience précieuse de celui qui se serait montré le
plus compétent, et cela parce qu'il n'aurait pas fait attester son
talentpar certificat? En agissant de la sorte, ferait-elle acte de bonne
administration, et les administrés auraient-ils à s'en louer? Et si on
lu-i décernait le prix, les autres concurrents ne seraient-ils pas stric-
tement dans leur droit en demandant l'accomplissement des con-
ditions du programme? A quoi bon donc charger les concours de
conditions restrictives, antilibérales, qui, loin d'offrir des garan-
ties nouvelles ou désirables, ne peuvent enfanter que des disputes
et des luttes? Elles sont d'ailleurs en flagrante opposition avec les
intérêts des localités où se font les concours, parce que le nombre
de ceux qui apportent leur savoir et leur expérience en tribut a la
localité est diminué par ces restrictions sans qu'elles offrent aucune
compensation. .
a Celui (les concurrents dont le projet aura élé reconnu le meilleur,
recevra, à litre de prime, une soninie de 1500 francs.
« A ce moyen, la Ville sera propriélaire des plans en projets. Elle se
réserve de les faire exécuter par tel areliileclc (|ui lui conviendra. Les
antres projets seront remis à leurs auteurs.
« Les plans cl projets devront être remis au secrétariat de la mairie
de Blois, au plus lard, le ii août 18i5. »
Ceux de nos confrères qui voudraient concourir pourront con-
sulter dans nos bureaux le programme entier et les autres pièces
qui nous parviendraient ultérieurement.
(Une lettre de M. le maire de Blois, que nous recevons au moment
de mettre sous presse nous apprend qu'en effel il n'a point été fait
de plan de l'alignement de la place pour l'usage des concurrents.
Nos observations et nos craintes sont ainsi pleinement justifiées. )
PXTITr CORRESPONDANCE.
Il cxisic (topuis longtemps df'jà en Angleierre, dans les journaux spéciaux .
l'usage lie faire corresponilre les abonnes entre eux sur le terrain commun <lu
journal. Le.s lecteurs adressent aux journaux les questions qui leur présentent
quelque dimcullé : les Journaux publient ces lettres cl y répuiideiil, ou bien
d'antres lecteurs y répondent, et les auteurs des queslious et des réponses, s'ils
reculent detant la pul)licilé de leurs noms, sont désignés, soit par leurs ini-
tiales, suit par des lettres choisies A l'avance, soit enfin par îles pseudonyme».
Cet usage, qui coninicnce 1 se répandre eu France, nous croyons utile de l'adop-
ter, et nous engagi-ons nos lecteurs i nous adresser toutes les deinaiifles aux-
quelles ils auraient intérêt i nous tuir répondre. Les faits de pralii|iie peu
connus, les inxentions récentes, les procédés nouveaux de coiislnirtion et de
décoration, les questions de règlement de prix, de jurispriidenco, d'archéologie,
etc., etc., enfui, tout ce qui touche à l'art de bâtir peut élre l'objet d'une de-
mande. \ous ne répondrons pas toujours à ces demaiulcs uuui-mimes ; nous
voulons, an contraire, exciter nos confrères et les hommes qui se consacrent aux
dilTérentes parties de notre spécialité, industrie, art, histoire, etc., i venir sur
le terrain que nous leur préparons dans la Kevue, et i répondre aux demandes
et aux difficuliés qui nous seront soumises cl que nous sounieUrons à notre
tour â tous nos lecteurs. Ce sera une manière utile , pensons-nous, d'associer
i notre œmre rinlelligcnce et l'expérience de tous ceux qui nous lisent. Sou-
vent ù une demande telle, par exemple, que celle-ci : Quel est le meilleur sys-
icnic de cou>erture en zinc ? nous recevrons des réponses rédigées par les In-
dustriels nic:nes qui exploitent celle industrie, et ces dilTérentes réponses se ser-
viront de contrôle mutuel.
.Nous rommençons aujourd'hui nos réponses i quelques lettres qui nous ont
été adressées dernièrement.
— À 31. Jules /'... Vous n'êtes pas le seul qui nous ayez fait celte question.
Au reste, nous nous sommes adressé à M. HittorlT, beau-fils de M. Ia: Père.
pour obtenir la cummuuication du procédé irouié par ce dernier pour polir le
granit aussi facilement que le marbre ordinaire. H. Ilitlorff nous a répondu
que les affaires de la succession de M. Le Père n'étaient pas encore réglées ;
mais qu'aussitôt qu'elles le seraient, il nous communiqnerail volontiers cette
utile invomiun, si cela lui était possible.
— A V. M. S. /'. .Nous ferons plus tard un travail spécial sur les carions-
pâtes et sur leur emploi daiis'la décoration. Pour le mouient, nous avons beau-
coup de travaux en iraiu qui doiMut passer atant celui-là, cl entre autres un
lra\ail sur les maisons anglaises, et un autre sur le Club de la Réforme, un des
monuments les plus curieux et les plus considérables de Londres.
— .4 .}1. C. It. .ay. Nous accueillerons volontiers vosconimunicaUons.
CÉSAR DALV,
Directeur ridacieur m cktf,
membre de l'.4cad( mie royale des Braux-Arjs <ii^ Sioclholin, et mcir.bre
honoraire et corrrspondanl de l'insliuit royal des Archilecles brilinniquri.
TVP. LACBA.MPE ET CoMF . BUK DA.MiETTE, 'J.
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ncvue générale i]c lAtcliitrcluic cl des TravHii\ miilic». No o. Rue •> Funtriiiberg. — P«ri«.
roi. %. PI. M.
Tour de Citiarts,
[t'MÙ lâltnïii, i..:..'
ri. Il rr I, \-jzc
i I, 1 1, r ri, 1,1 rTM-Ji^-J
Pclj;s C; C'ciles V, vu de la P'aji d» !« V '^-^
i> Âibiiîiii. VU di ii PiiU di ItS Àljitin
Owen Joncs, Jcl.
FORTERESSE DE mum\
(grknaue)
Rcme générale Je l'Architcclurp cl des Trotniii Pulilirs. No «, niio île f umlemliorii. — l'urii.
r»L s. M. n.
b p.-'-T ;,
iT i.ï ' if\rc
la Cîiir 3e ïi'r.].
Owon Jones, ili-l.
C4Mrttri«.4>r.
FORTERESSE DE LALB.^MBRA
( r.RR.NADK)
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Iie>ae générale de rArchitrcturc et des Traïaiii rublica. — N» 6, Kur de l-uraleniherii Pari».
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r«f . I. H. M.
owen Jones, del.
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Les lio^s fonii s que donnai en PiiH !n «pt flittnU 3e la ïoLl« î'jUîiU
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A ^
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Élévation d» sect éléments cinstiUtilt de \i m\t ttaiactiU.
ilsvation d'in pendentif de la Salle d; la Baqi:;.
Pian d'un pend;itif de li SaBe de k Bu^e.
FORTERESSE DE L'ALHAMRRA.
iLii
càmtUiàf.mr.
Svstème de construction des voûtes staUiclites.
TABLE ALPHABÉTIQUE ET ANALYTIQUE
DES MATIÈRES.
A.
Abside des éaliscs gothiques et romanes : Son plan, 244. — Sa forme
cxiérieure, 481 ,
AciiOPOLE d'Atliùiies : Note sur les travaux qui s'y exécutent, 286.
— Hestiiiiralioii de plusieurs temples, «6. — Sculptures découver-
tes, 287.
.\ix-LA-('.iiAPELLE : Tonibeau de Ch;irlemngnc, voy. Tombeau.
.\lgeh : Emploi du cèdre dans les construclions mauresques de celle
ville, 285.
Ar.HAMRKA : .Môrile du livre publié par M. Owen Jones sur ce palais.
49. — Ignorance où l'oir est à l'égard de ce monument, 97. —Causes
de cette ignorance, ib. — Impossibilité de jusiilier l'Alliambra au
moyen des poétiques connues, il/. — Variété des poétiques suivant
la variété de tcm|)s, de lieux, de races, de religion, etc., 98. — Iti'-
clierclies sur la poétique dos Arabes, ib. — l.e climat de l'Arabie el
son influence sur l'idéal des Arabes, 99. — Influence do la religion do
.Mahomet sur Tiiléal arabe. 102. — A quelle occasion MM. Owen Joncs
et Jules Goury entreprirent leur travail sur l'Alhambra, 103. —
Description du site où est assis l'Allianlbra, 104. — Kpoque de sa
construction , «6. — Coup d'œil général sur les édifices encore
debout dans l'enceinte de la forteresse de l'Alhambra, 529. — Los
murs et les tours de l'enceiiile, 550. — Palais des anciens rois mau-
res, 552. — La Cour de l'Étang, ib. — Caractère de l'art arabe,
curieuse disposilion des tympans des arcs des galeries de l'.-Mliam-
bra, S54. — Salles de la Barque et des .\nd)assadeurs, Sô'i. — Cour
des Lions, ib. — Absence de symétrie dans l'arrangement des co-
lonnes des galeries de cette cour. 550. — Problème d'art proposé à
ce sujet, ib. — Salle des Deux Sœurs, 557. — Delà construction des
voûtes stalactites, ib.
Allées couvertes des Gaulois, 109.
.\iiiBONS, ou chaires des églises latines, 208.
Amortissement dans l'arcliitecture romane et gothique, 301.
.^MPiiiTHÉATiiES roniaius de la Gaule, 162.
.4n>ales archéologiques : Sommaire du premier numéro, H4.
ASTÉFIXbS, 146.
Antiqi:ités: .Musée d'antiquités nationales à l'hôtel de Cluny, 89. —
Résumé de l'histoire du palais des Thermes et de l'hùlel, 90. —
Première idée de l'établissement d'un musée d'antiquités dans ces
constructions, ib. — Travaux y exécutés par M. Albert Lenoir, ib.
— Découvertes faites durant ces travaux, 91. — Anciemie dislrihii-
tion de l'hôtel, ib. — La chapelle, 92. — Utilité des travaux effec-
tués, ib. — Voy. aussi I.>sTnLCTioxs.
Appel aux lecteurs, 189.
Aqieblcs romains, ISO.
Arcades romanes et gothiques, 290, 302.
Archéologie : Sujets archéologiques exposés au Salon de 18't4, voy.
Salon : voy. aussi à la table des sonmiaires tous les articles de la
partie Histoire.
Architecture arabe, voy. Alhambra. — Chrétienne, voy. Instructions
du comité. — Uoinaine en Gaule, voy. Instructions — Architecture
rurale : Services rendus par M. le marquis de .Maurémout dans la
llaule-Garonne, 515. — Son Trailc des Ordres, pour servir d'intro-
duction à l'arcliitecture rurale, lô. — Coup d'œil sur la marche de
l'art depuis les temps reculés jusqu'à nos jours, 516. — Systèn^e
proposé par M. de Maurémout pour les constructions rurales. 517.
— Arcbileclure du .Moyen-Age en Italie. — L'art ogival n'est ja-
mais entré dans le génie italien, S23.
Archivolte romane et gothique, 509.
Arcs de triomphe romains en Gaule, l.'iS. —Arc d'Orange exposé
au Salon, 184. — Arc de triomphe romain de Djonisah; projet de
son transport à Paris, 258.
Abcs-boutants dans les égli»s gothiques, 341.
Armes gauloises, 193.
Art moderne: Des causes de sa décadence, 518.
Arthur Martin. Un des rédacteurs de la Revue. 80. — Auteur des ar-
ticles : Tond)eau de CKarlema^ne à Aix-la-Chapelle, 2; de la res-
tauration projetée des vitraux <le Chartres, 86.
Arts et monuments (comité historique des), roy. Comité.
Asile (salles d ) : Leur cliaufTigc el leur ventilation, til».
Assaimsskment des villes Découverte importante. 512. — Assaini*-
.sement des éguuts, ,'j21.
AtelieiiscIu du min de fer de Birmingham, leurs potle» â coalis«e!>.
voy. Portes.
Autels romains de la Gaule, 149. — Autels des églises laliues. 200.
n.
Badenier, architecte, exposant au Salon de 18il. 21 i.
Bains et bains de pieds pour les élablisscmi-nls publics. \-2a — it,,i„
d'hôpilal: leurs meilleures liisposiimns, 36i. — Bains .l'Ori'-.in.
école flollanle de natation à Bordeaux. 490.— iKsrripluin d ■
coiislruclion, 491.— Sa mise à l'eau. 492.- Bains de Cauierol». :■■
Baltard (Victor;, architecte, un des exposants au S.-1I011 de 18*4. ItJi.
Balustrades de style gothique, 339.
Baptistères de r.ircliileclure latine, 203.
Barrai, ingénieur, un des rédacteurs de la Rrcue, aolcur de l'arlicl'- :
Kni-ins de construction : moufles à eiierenases de M Nepveu. 451.
Bahjiière du Trône : Statues de saint Louis et de Philippe- \ugu«tr.
354. — Pavillon de la barrière de la Gare, ib.
Barrows et loinbelles, 110.
Barrozxio (Jacques), dit Vianole . 30.
Basiliques romaines de la Gaule. — 164. — Basiliques latines, leurs
plans. 204.
Bas-reliefs découverts à l'acropole d'.Vlliènes, 287.
Bavav : Bésultats des dernières fouilles. 190.
Bayard, inventeur d'un procédé de désinfection des urines. 412.
Benvenuto Cellini, sculpteur du seizième siècle, 4.37.
Berthelin (Max), architecte, expo.-aiit au Salon de 18i4. 215.
BiBLiouRAPiiiE » Yignole centésimal, roy. Vigndlk. Panorania il'F.-
gyple et de Nubie, 40. — .\nnales archéoloiiiques. 144. — Ironozra-
|)liie chrélienne, par .M. Didrou. 141. — Paris sous le point de vue
pilloresquc et inonunienlal, par .M. II. .Meynadicr, I8i; roy. .iu>-i
Kdilité. — Moyen-Ace monumenlalet arcliéolocique. 2U». — N ■■
biourapliiquc sur Piel. archilecle, par .M. A. Teyssier, 27:1
Piel — Statistique monumentale de Paris, par M. Albrrl I ci-
vraisons l 'i et 15, 288. — Encyclopédie descheininsdc fi-i
Toiirneux. 1536. — Histoire de l'art monumental, M. L. ILi:
— Traité des ordres ap|)liqués .i rarcliilecture rurale. 51.-. — i- --.ii
sur les épis, crêtes ou denlelles el autres ilérorallons oes anciens
combles et pignons, par M. E. de la guerrière. .'i27. — M.umcl •! Ir<>-
nosra|)hie rlirétienne. grecque el laline, par .M.M. Dulion et l'.iul
Durand, 528 — Lettres sur l'organisaliun des bibLolliéques dans
Paris, par .M. le comte de Latiorde, 16.
BiBLioTiiiiQiKS : Sainte Geneviève, 383. — Lettres sur rorsaiii>a(ioii
des bibliothèques dans Paris, par M. le comte de l.alHinle. SM.
Bijoux romains, 195.
BiOGHtPiiiK lie L.-A. Piel. architecte. 273. — Du lient. .-roi. (^lerc. i76.
B111ME : Son emploi dans les contre-allées des Cli tl>séc>. l». — îSoii
utilité pour le dallage des ruelles, 1 U). — Son emploi pour cou-
verture, voy. Toit.
Blanciiiss»ue , voy. Blanchisserie. Prix proi -• - «len-
couraaement p(uir les meilleurs appareils . s.
Blanchisserie. 172. — Dpéraiions di»crsos qui «■.oi.«iiiuc;]i ic bi.uicliis-
sase. ib. — .Vppareil de lessivage par circulation. 175, 171. — .Avan-
tages. 175. — Plan d'une blancliisserie, 17l>. — Buanderie ci **-
choirs, 177.
Btutncr, fabricant de parquets à Strasbourc, 517.
BoeswiUvald. archilecle. un des exposants ^lu Salon de 1811. 184.
BoROKAix : Son école flottante de natation, roy. B»l^».
Bornes milliaires des Uomains. 152.
Bouchet (Jules) : Ses dessins de la Villa-Pia, lô.
Bourse île Bordeaux, S20.
Briques : Prix proposé par la Société d'encouragement poar lesr Is-
brication, 578. — Nouveau mode de fabricalion, 5il
Bronzks romains, 195.
T V.
3C
563
TABLE ALPHABÉTIQUK ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES.
56i
C.
Cabinets inoilores (fiine noiivollc fonno, 140.
Calonne (Al|ilionsc de), auteur des arlides : De la Villa Pia du Valican,
tô. — Ouverture du iiiiuve;iu Musée d'antiquités iialloiiales à
lluMel de Cluiiy, 89. — Nolice biograpliique sur L.-A. l'iel, 273.
Caloriff-RES; toi/- (ài*i ff.^gk.
(;a.mi> roiiiiiin. 153.
Canal de l'Yvotte : Son ahandoii fâcheux, 24.
CtNDÉnDRHS du l'oni-Uoval : Causes de leurs fréquentes ruptures, 3ôô.
Casi.> de la Villa Pia. 18."
Catuédbai-E d'.Aix-la-Cliapelle. 3 — IJeslannlion projetée des vilrau\
de la cathédrale deCliarlres. 8(!. — Calliédr.ile pr<«j,'iée par M. Gar-
iiaiid. et exposée au Salon, 2H>. — l^alliédrale de l.aon: Incciidif de-
sa flèche. 2*0. — Achèvenicol de l.i calheilnde de llennes, 2*0. —
Cathédrale de llarcelone : Dessin d'un aiiiien projei de portail re-
trouvé il rarche\ô(hé lie celte ville, 286. —Cathédrale d(! Paris,
vn<j. Notiib-Damk. — Calhédrale de ISouen , 421. et rny. Iloi EJt.
Caylus : Son opinion sur le nionumenl rom.iin de.Monlniarlre. 373.
CÈDRES en .\l>!érie : Leur emploi dans les maisons ni.iiirescui's, 283.
Chaires on ainhons des églises latines, 208. — Cliaire moderne de siyU;
eiithique, 52ff.
CiiAMPs-F.ivsÉES : Bilninage de ses conlre-allées, 48. — Palais pour
l'exposition de l'indiislrie, 141.
CiuPELi.Bilile llonuroise à iNotreDame d'Aix-la-Chapelle. 9. — Cha-
pelle de CIniiv, 91. — Chapelle d'Iidpilal : ses dispositiniis et ses
dimensions. 565.
CiiAPiTEAix romains de la Gaule, 148. — Chapiteaux ruinans et g<H
ihii|ucs, 29i et suiv.
CuAssE de Charlemaene à Aix-la-Chapelle, 4.
Château : de Pau : Travaux i|ui s'y cxécuieni, 240. — Sa restauration,
SiO. — Kestauration du château de Klois. 525.
CiiAiFFACE cl ventilation : Importance de ce sujet pour l'archiicctc,
118. — Calorilères ventilateurs à air chaud, qui se placent dans les
pièces à chaulTer: leur hut, ih. — Leur description. 119. — Leurs
applications diverses, l:iO. — Salles ilc hains et de liains de pieds, ii.
— CliaulTage à l'air chaud, 16!). — Descriplion d un calorifère vcnii-
lalcur en fonte, t6. — Mode île comhustion. ib. — Circulaliim de la
fumée, 170. — KchaulTemeiit de l'air, ib. — .\vanl.iaesdecesysiènic,
171. — CliautTauc et venlilalion des prisons cellulaires. 192. —
Fourneaux de cuisine pour les cnlléues et les hôpitaux. 20R. — Sa
descri(ition, ib. — Ses avantages. 210. — Calorifères ventilateurs
pour les écoles et les hôpitaux. 21 1 — Desiriplion des calorifères
d'écoles, |6. — Description des calorifères d'hâpitaux, 212. — Ven-
tilation ohtenue au moyen de ce calorifère. 213. — ChaulTagc cl ven-
lilalion des écoles et des salles d'asile, 440. — Dislribulion des ap-
pareils dans une salle d'école, 411. — Direction de ces appareils;
chauiïage sans venlilalion, 442. — Chaullaiïc avec ventilation, ib.
— Ventilation sans chauir.iae. 443. — Itésultats de» expériences
faites sur ce mode de chaidl'aue et de venlilalion , ib. — ltappi>rt
du docteur Itehier , ib. — Expérience de M. l'élix Cchlaiic, 445. —
Chauiraue et ventilation d'lià((ital, i93. — Exposé du système, lY;.
— Ventilation, 494. — Légende de la planche, ib.
C.HEMiKS de fer : Question des emlianadèrcs dans Paris, 281. — En-
(^yclopi'die des chemins de fer, par Kclix Tourneux, 534. — Statis-
tique du chemin de fer hollandais, S27.
('iiE>EAi!x des églises gothiques, 55S. — De quelle façon les chencaux
doivent être joints aux murs pour intercepter l'hutnidité, 429.
taiEVET des églises gothiques et romanes, 24t. M\.
Ctievreul, meinhre de l'Institut : son cours sur la loi du contraste si-
multané des couleurs, 43.
Chocur des églises romanes et gothiques, 246, 481.
Ciboires des éalises latines, 207.
Ciments, voy. Poczzolake.
Cirques romains de la Gaule, 163.
Citadelles romaines de la Gaule ; leur position. 147.
Clerget, architecte, exposant au Salon de 1814, 181.
Clochers des églises romanes et golliiqnes, 255, 385.
Cloches: Note statistique sur leur nombre et leur poids dans quel-
ques diocèses de France. 285.
CLocHETo.vsdeségli.sesgolhiques, 343.— Delacaihédralede Uouen 422.
Collatéraux des églises romanes et gothiques, 246, 485. — De la
cathédrale de Rouen, 424, 450.
CoLo^^ES historiques îles Romains en Gaule, 1.59. — Colonnes romaines,
291. — tiothiques, 293. — Colonnes de la barrière du Tri'me, ?5I.
Comité historique des arts et inonumenls : Progrès des études histo-
riques. 50. — liilluence de ce progrès sur la société, ib. — Histo-
rique de l'organisation du Comité, 51. — Paroles de M. Guizot sur
l'importance des études archéologiques, i6. — Fondation du Comité
et ses divisions, ib. — Liste des membres des résidents cl non ré-
sidents du Comité, 52 cl suiv. — Circulaire du ministre relative-
ment aux fonctions du Comité. 55. — Importance de l'étude des
monuments dans les études historiques, ib. — Lrgence de ces études,
56. — Rut de la publication des instructions du Comité, )6. — Ré-
daction de ces inslruclions, «6. — Instructions publiées, 57. — Voy.
aussi I.NSTnicTiONS.
CoNcoi'B» pour un craiid théâlrc à Toulouse, 383; — Pour une halle
aux grains à tilois, 5S8. — Oitique du programme, 5.^9.
Considérant 'Victor], membre du Conseil général de la Sciue, 8J cir-
culaire relativeanx iniéiètsde la ville de Pans, 22.
(^o>soLEs romanes ei gothiques, 'i92.
Co.vsTKrcTioS : Lngins pour ces travaux, 451.
(Contraste simultané des couleurs, cours de .M. Chevreul, 45.
t^u.NTHE-FOHTS des égliscs gothiques et romanes, 311,
CaiRBEAix dans les styles uothique et loinaii, 312.
Cohre'Ipo.nuance: Leitre relative aux pierres du temple de Diane Len-
cophr\née.282. — iNou>e,iux parquets fabriqués à Sirasbour;:, 517.
— Trav.iux receinmeiil achevés, en train d'exécution et projetés dan*
le déparlenient du llaut-Rliin, 518. — Réflexions sur l'art moderne,
ib. — Travaux en cours d'exécution a iiordeaux, 519. — Projet d'hô-
tel des posies pour cette ville, 5i0. — Travaux qui s'exécutent
dans les environs, ib. — Château de Pau, ib. — Ltilité de urniise
en eonmiunicalion îles lecteurs de la Revue entre eux, 560. — Ré-
ponse à M. Jules T ... .M. S. P... et II. J...
Couder (Aiiiédée), décorateur, exposant au .^.ilon de 1811. 215.
CoiLEiHS : Cours de M. Chevreul sut la loi de leur contraste simul-
tané, 45. — Causes qui tiennent les artistes éloignés de ce cours,
té. — Rut de ce cours. 46.
CoLVEMT des .Viinonciades bleues à Saint-Denis; sa démolition, 335.
CiiE.NEAUX et macliicoulis des églises, 339.
Cromlech, 108.
t'nvpiEs de.s premiers chrétiens, 203.
(à isi.NES de collèges et d'hôpitaux ; fourneau pour leur nsagc, coy.
Chai'ffacb. — Cuisines d'hôpital ; leurs dispositions, 364.
D.
l>«Iy (Céwr) : Sa nomination de membre honoraire et correspondant
de I Institut royal des architectes brilaniiiques; lettre adressée à
celle occasion a M.f^ésar Daly par .VL'I . L. Donaldson. vice-|irésident
de riiistilut, %. — Ses articles sont : Comité historique des arts et
fnonuinenls, 19. — L'Alhanibra. 97 et ,'>20 — Grandes portes d'atelier.
117. — Sillon (le 1814. 178 et 214 — Ecuries au premier étage, 345.
DÉroRATlo.^ : Fludes sur la décoration en Italie à dinéreiites époque»,
par M. Deiiuclle, 182. — Projet de décor. ition d un plafond, par
.M. J. .Saulnier. 221. — Décoration d'opéra, loy. Upéra, — Dccora-
llon du théâtre de Nantes, 525.
Drikrouck, architecte, exposant au Salon de 184-1, 182.
Denuf Ile , exposant au Salon de 1844. IK2.
Destrictiox du couveni des Annonciades bleues à Sainl-Dcnis, S3S
Develle, arcliiiecle du théâtre de Dunkcrque, 190.
Didron, ari héolouuc, directeur de la Uevui archéologique , chevalier
de la Lé::ioii-d'lloiiiieur, 521.
Discoi Bs du préfet de la Seine sur les cmbcllisscinenls effectués et pro-
jetés dans Paris, 29.
Dock de c.irénase projeté à Marseille, 285.
DoiMEM. Ill9. — Deini-dolinen. 110.
Sonaldson |^T. L.) , > Ice-présideiil de l'Institut royal des archilecles
britanniques ; sa lettre relativement à la nomination de .M. César
Daly, parmi les membres de l'Insliiut, 9<i.
Driollet. archit.. auteur de la restauration du Ihéàlre de .Nantes, 525
Druides, ruy. première i>STBUCTio.ii du comité historique des arts et
monuincnls.
Du nège (le chevalier Alexandre ) , président de l'académie de Tou-
louse, i:n des rédacleurs de la Itrrur, auteur de l'article : Du traité
des ordres appliqués ,i l'archilecture rurale, 115.
Du Fuy, architecte, exposant au Salon de 1814. 218. — Son projet
d'Iiôpilal. 349.
Duvoir .René), ingénieur, un des rédacteurs de la Rrvut. auteur des
articles Chauffage, Ventilation et Bains, 1 18, 169, 208, 410, 495.
EcHAFAUDkGES, VOy. ENGINS.
FcLAiRAGEaii gaz du pont des Arts, 48.
! Ecoi.E.s. leur chaufTajje et leur ventilation, toy. ces mots. — Ecole
j flotlaiile de natatinn, voy. Rains. — Frôle centrale des aris et iiia-
iiufaclurcs : Distribution des diplômes et des certificats. 58L
I Ecuries au premier étage, 315. — Dispositions générales, ib. — Les re-
mises, 3'»7. — 1 eur chauffage, ib. — Les écuries, 348. — Service
général de propreté, ib. — Syslènie de la construction, 319.
! Eci:sso> de la ville de Paris. 140.
Edilité parisienne : Circulaire de M Victor Considérant sur les intérêts
généraux de lu ville de Paris, 22 — Décadence du lO* arrondi.s-
.seinenl, ib. — Prodigirux accroissement des quartiers du nord-ouesl,
i6. — Partialité choquante dans la distribution des améliorations,
23. —Question du déplacement de la populaiion active de Paris, it.
— Sacrifice des besoins du 10^' arronilissemi'iit à des condilions pu-
roiiient décoratives, 24. — .Abandon fâcheux du canal de l'Yvette,
'b. — Question de la navigation de la Seine, 25. — Ftal du Gros-
l'.aillou,de la rive du 10<- arrondissement et des ports intérieurs, 26.
565
TABLE ALPIIABKTIQUK ET ANALYTfOrE DES MATIERK.
— Principe du dAvcIoppemenI commerchil, th.— Elat de l;i ques-
tion, li. — l.e> cornpiianies et le rninislre des Iravaui pul)lics. 27.
— Lllihté de l^i puldicilé des faits, '28. — Coup .l'œil sommaire sur le
budget munu-ipal, «/^. — Grande rue de la Croix-ltou^e au quai
Coiiti, -29. — Situaliori des revenus, dépenses, cmhellisscmeuls,
travaux commencés, el projets de la ville de l'aris, au 'iô décem-
bre 18'»3, ib. — As.sainissemcnt de ta ville, .10. — Intentions sans
effets, ib. — Première chose à faire pour assainir Paris. ,31 . — Pro-
duits de l'octroi, 32. — Travaux de lllôtel-ile-Ville, j6. — lUili-
nienls de la Cour-des Comptes, préfecture de police, ib. — Kiiiises
nouvelles cl travaux d'utilité publique, ib. —.Service des eaux, :i:l.
— Planlations, ib. — Voirie, t6. — . Améliorations de la voie publi-
que, rues nouvelles, 3'l. — Projet de conslruclion d'un nouvel hô-
pital, 35.— Bâtiment pour les écoles primaires, ib. — l'orts et ba.s-
sins de la Seine, ib. — Voies de conimunicalion, rues, pavage, ib.
— Piésnmé, 36.— Késumé stalislique de la complahilité de la ville
de Pans, depuis 1797 jusqu'à 1840 iHclusivemenI, 39. — De la
grande circulation ilans l'aris el du livre de .M. H. .Meynadier:
l'aris sous le point de vue pittoresque et moimmentid. 184. — Causes
qui rendent la circulation difficile dans l'aris, ib. — Moyen d'y re-
médier, 185. — Conditions auxquelles devrait satisfaire un lion svs-
tème de conslruclion dans Paiis. ib. — Nécessité d'un plan général
de grande circulaiion, 186. — Projet de M. Meynadier. 187. — Uive
droite, 188. — Uive gauche, 2.32. — Disfrdjution des établissements
publics sur les divers points de la capitale. 231. — Le t:iianip-de-
Mars, 2.>4. — Les grandes halles, ib. — Question des embarca-
dères el de la voierie de Montfaucon, 284. — Assainissement et hy-
giène de la ville, rot/, ces mots.
Eglise: Nouvelles églises de Paris, 32. — Eglise des Templiers de
Monisaunès, exposée au .Salon, 184. — Eglise nouvelle à Moulins,
240. — Eglises .Saint- Vincent-de-Paul cl de la Villetle; leur inaugu-
ration, 451. — Lglise nouvelle <le (Juebvviller, 518.— O'AlIkiich,
|6. De Dannemarie; rccorslruclion du vai-seau, ib. — De Bavillers,
en style roman, î6. — Eglise moderne de slyle goihique en con-
slruclion à iNantcs, 5i6. — Eglises latines, toy. Ikstbuction du co
mité; voy. aussi Cathédrale.
Egouts : Procédés pour les assainir, 521. — Nouvelle manière d'en
construire les voûles, 37o.
Egypte : .Son architecture, 40.
Emalx du .Moyen-Age, 'l'fO.
Email onilirant : Son cmphiidansla décoration d'une .salled'opéra, 51)9.
Embarcadèues dans Paris: Discu.ssion sur leur emplacement, 281-.
Embellisse.mënts de Paris, vuy. Koilitiî.
Engins de construction : Moulle à engrenages de M. Nepveu, 451 . — Ses
diversesapplicalionsà lamarine.à l'exploilalion des carrières, tô. —
Son application à la chèvre et à la grue, 452. — Avantages qu'elle
présente, ib.
Entablemb.nt gothique et roman, 312.
EçL'iLiBRK d'un cor|is solide ; équations déduites du principe des vi-
tesses virtuelles, 9. — Deux modes ircnscignemeiit de la mécanique,
10. — Enoncé du principe des vitesses virtuelles, ib. — Transfnr-
malion des coordonnées reclangnlaires dans la géométrie à trois di-
mensions, 11. — Cosinus de l'angle de doux droites. \'l. — Tradurlion
analytique du principe des vitesses virtuelles, rt. — Equation de l'équi-
libre d'un corps solide. 14etl5. — Equilibre des voûtes, l'oj/. Voûtes.
Escaliers d'opéra. »;oy. Upéra.
Étoffes trouvées dans le tombeau de Charlemagne à Aix-la-Cha-
pelle. 5 et suiv.
Ethetat; villa gallo-romaine découverte dans les environs de cette
ville. 191.
Etudes sur les théâtres, voy. Théâtre.
Exposition d'aichiiecture. voy. Salon.
ExposiTio.N quinquennale de 1 industrie française : Situation des liàli-
ments destinés à cette exposilimi . \±\. — Leur aspect, 122. —
Circulaire du ministre de l'agricullurc el du commerce adre>si''e
aux préfets des déparlcmenls, ib. — But de l'exposilion, ib. —
Points sur lesquels l'atlenlion des jurys d'ailmission devra se p"r-
ter: nature des produiis. 123. — Leur qualité, 124. — Leur valeur
industrielle el commerciale, ib. — Autres recommandaliiuis faites
aux préfets et aux jurys, ib. — Deuxième circulaire du mi-
nistre réglant l'ailmission îles produits el les cas d'exclusion, 125
et suiv. — Historique des e\|)ositions antérieures, 225. — Discours
de François (de iNeuchàleau) à l'occasion de la première exposilimi
de l'industrie, 227. — Les expositions suivantes, 229. — .Nombre
des exposants à ces diverses ex|)0!-ilions, 231. — linporlancc (jiie
l'on devrait donner aux expositions, 232.
Fenêtres et œils-de-bœuf du Moyen-Age, 385. — Fenêlrcs romanes,
386. — Les roses, 387. — Fenêtre en ogive. i6. — Fenêtre ra>on-
nante, 388. — Fenèlres et meneaux du \IV' siècle. 389. — Fenèire
flamboyante, 390. — Antres variétés, 5!tl. — Fenêtres rcclanau-
laires, ib. — Fenêtre ogivale formée par des arcades romanes, 392.
— Fenêtre Iriangulaiie curviligne, 393.
Fer : De sa conservation dans la mer , 523. — Lu procédé adopté à cet
elT.d. ib.
FLiiiiK:de la call»édraledel.aon : «on incendie. 2lO.— Flèche en fonte
de la cath. de Itoucii, 121. — Flèche- des églises du Moyen- Age, 4>J6.
Fi.oTTKiRS des bain- fliitlanls de Bordeaux, 491.
Fo>TAi>E Molière : Son inauguration, 46. — Caractère de ce moDumeal,
47 — Les statues de M. Pradier. i/i. — Statue de .Molière. 4K. Kon^
laine uolliique projetée par M. Max iierllieliii, 21S. — FofitaiiM de
la place .Saint- .Suipice, .'1K2.
Fonte: Flèche en fonte île la cathédrale de Rouen , 4^etsaiv.
Fonts baptismaux des égliseti latines, 206.
Fortifications des Itomains, l.'iS.
FoLiLLKs: Précautions à prendre dans leur exécnlioo, 168.— FoaillM
à Bavay, 190.
Foi BNKALX de ruisinc pour collèges et liôpilaax. toy. CaicrrACC.
Foyers de Ihèàtres, voy Opéra.
Frises du temple de Iliaiie Leucoplirynèe exposées à l'air, 282.
I' RONTONsel pignons des l<iilsdans les é2li^es romanes etgoltiiquet,338
Furstenberg (coinlc de); il assiste aux fouilles pratiquée* dans l'éflise
d'Aix-la-Chapelle, 7.
Callo-romain (style). 145.
Gargoiilles des édinces du Moyea-.\ge, 338. — Raisons qai doivent
faire >uppriiiier leur emploi.
Garnaud, arcliitecle. exposant au Salon de 1844, 216.
Genty (les frére>) sculpteurs du XVIe siècle, 437.
Gérard Chorus, architccie de Nolre-Danic d'.\ix-l2-Cliapelle. 7.
Tiot DBON : Son emploi pour empêcher la putréfaction des urine*. 513.
Goujon (Jean), .'■culpteur du \VP siècle, 437.
GouDod. arcliitecle. auteur il'une ch.iire de -lyle gothique, 525.
Gour; (Jules), architecte, collaborateur de 11. Owen Jones dans l 'ou-
vrage sur l'Alhambra. ll>3.
Grand bdpilal de Milan, 528.
Grandes porles d'atelier, roy. Portes.
Granit : Procédé inventé par M. Le F'ère pour le polir, 371 el 560.
GBAViRbsde M. Ilugueuet exposées au Salon, 225.
II.
Halle aux crains pour la ville de Blois: Sa mise au coocours, SOS. —
Oiliqiic du prouramnic, 559.
IliproiiROME construit à Paris, 431.
Histoire : Une des divisions des matières de la RtvMt; twy. à la table
des sommaires tous les articles parus sous ce titre. — ilisloira de
l'art monumental, par M. L. Batissier. 432.
llopiTAix. leur chaufTage et leur ventilation, roy. ce mol. — IIAi>ilal
projeté par M. Du Puy, et exposé au Salon, 217. — Aulre liApilal
projeté par M. Magne. 223. — lldpiUI pour XOO malades pro-
jeté par M. du Puy, 359. — Besoin duu ll(^pltal modèle, i». —
Proiiiamnie d'un hôpital de cette nature et questions à résoudre.
ib. — Quel nombre de malades doit contenir un liApiLil. 300. —
Quelle serait lameilleuredi-posiliongénèraleidonner aux --allMiffr.
— Quel nombre de malailes devrait contenir chaque salle. 361. —
Quelles sont les dépendances indispensables à chaque salle, et de
quelle f.içon seront-elles disposées. 363. — La pharmacie et sesdé-
pembinccs: la communauli- des relisieuses. \i>. — Quelle» mmM le*
meilleures dispositions à donner aux bains el à la cuisine. 361. —
Les séchoirs et la lingerie. i6 — Quelle sera l'importance de TadMÎ-
iii>lratlon. Personnel qui doit la composer, ib. — IHspociliMM et
dimension^ de la chapelle. 365. — Quelles sont le» dépeiMiaMce»
d'un hôpital; quelles sont celles qui doivent se rattacher à l'édMee
principal et celles qui doivent en être séparées, té. — Quelles M«t
les dispositions à prendre pour l'assainissement de loni le m-de-
chaussée et pour le service sénéral . 366. — Evalualiea des dé-
penses. 367. — Légende «le la planche. 16. — Hdp.lal de Milan, tra-
vée du premier étace. 528.
Horloge de Bennes, 526. — Moyen de ne plus .ivoir qu'une seale hor-
loge pour toute une ville, ib.
Hôtel de Clunv. son Musée, 89.— Toy. aussi Mcsék d'ardtévlogie. —
Hôtel de 1.1 Bourse à Bordeaux. 520 —Hôtel de» pcWi pnjiUdii*
la même ville, 16.
IlÔTEi-oE-ViLLBde Pari», travaux pendant 1843. 52. — Ce qe'ilaara
coûté, 238.
Huguenet, «raveur. exposant au Salon de 1844. 225.
Ih MiDiTK dans les constructions : l>es moyens de la prévenir et d"y
remédier. 266. — Mémoire de M. Léon Vâudoyer sar celle qoeftien.
267. — Des dilTérentes causes de l'humidilé. »*. — Marche Mivie
par l'humidité dans sa propagation. 270. — InconvènienU de riie-
midité. 271. — Constructions romaines sans mortier. 272. —
Moyens de prévenir l'huinidilé el d'y remédier. 315. — Imperfec-
tions des moyens employés pour conibalire le» elfcl* de l'hamidile.
,i. _ Ocs causes de la détériorai ion de* pierre», 1». — De» en "
riCT
TABLK AI.PHABKTIOUE KT ANALYTIQUE DES MATIÈRES.
569
316. — Moyens de prévenir les Inconvénienis de riiumiilKé lors de
l'ex/'cutioii des constructions. 517. — .Moyens de di-lruirc riiuini-
dité d.ins des consirucliotis .nnciennes, ib. — l.e plonil) et le l)i-
Ininc, 318. — Inconvénients du plomi) pour enipi^chcr l'Iiuinidité
de niotiler dans les murs, ib. — Kevêlement du pied des murs, 31!.'.
— Critique dç ce pracé<lé, 3iO. — Banquette creuse. 3:21 — (Iri-
tiquo de ce procédé, ib. — Moyens .Tp|)lioal)lcs aux ccmstriiclions
en nioellons. 32."). — lU-vôteinenls en briques, ib. — 'Icrrc cuite
éniaillée, ib. — Précautions à prendre dans les pans de bois. 524.
— .\vanla£;es des caves pour préserver les conitriiclions de l'Iiuini-
dite, 325. — l'récaulions à prendre dans l'élahli-sement des plan-
cliers des rez-de-cliaussée sans caves, ib. — (Causes rie l'Iiutnidilé
des rcz-de-cliaussée, .326. — .Moyens de les faire disparaître, ."i» el
suiv. — Moyens de rendre un étage sonlerrain liahilnhle. 5i7. —
t'.rilique du procédé indiqué, ib — Insuriis.mcc des enduits ou ci-
nicnls pour cmpèciier l'humidité de Iraveiser les murs. ib. ri suie,
— Emploi d'un contic-mur i-olé, ,528. — Critique de ce procédé,
ib. — Des moyens à employer pour les construclnm- .i inicrtte. 529.
— Jardins de l'Isola-IJella, ib. — Emploi moins coiileux du bitume,
(/;. — .Moyens à prendre contre l'Iiumldlté dans les constructions
rurales et Industrielles, ib. — liàlimenls d'exploitation, mai.sons de
paysans. 5.')(). — .Soins à apporter dans rétablissement des dallaues,
ih. — De I humidité dans les bàllments couverts en terrasse, 351.
— Emploi du zinc e( du bitume, leurs avanlaues el leurs inconvé-
nients, ib. — Gouttières et tuyaux de desceiilc. 552. — Passane ré-
servé pour eux d.ins les murs, ib. — Critique de ce procé<lé comme
trop coiiteux et peu Ionique, 553. — llésumé de ce qui précède,
ib. — .Moyens do faire cesser les inconvénienis de l'humi-
ddéou de s'en préserver dans les conslructions cxislanle<, 5r>0. —
Hevôlements intérieurs el extérieurs, ib. — Critique do ce pro-
cédé, ib. — Isolement des murs, 551. — .\pplication des cmluiis
hydrofuses aux refends, ili. — Kevètements en carreaux émaillés
et en plonib, 552. — Késuniédes moyens propres à combattre l'Iiu-
nildilé dans les constructions existantes. iV;. — Insalubrité des rez-
de-chaussée, 355. — (Causes de leur humidité, ili. — De quelle
manière on s'en préserve dans les maisons anglaises, ib. — liicon-
véniouts de l'iiumldité dans les œuvres d'art.ojl. — Choix dans les
matériaux de conslruclinn, ib. — Peintures antiques, ib. — Pein-
ture il fresque, 555. — Eiidulls dont on peut se ser\ir pour exécuter
des pointures, ib. — Peinture à la cire. 55C. — De quelle maniéie
le marbre doit être entretenu, ib. — Ex[)liralioii des linurcs. 3.)7.
— Addition de M. II. J. . 357. — Complément des annotations de
M. II. Janniaril, 4iG. — .Manière d'appliquer ulileinenl la feuille de
plomb et la couche de bitume, ib. — Dcscriplloii de la manière d'o-
pérer, 4i9. — DifTérenls cas où ce procédé peut être employé, 4!>l).
— Expériences faites sur rasccnsion de riiumiillté dans les murs et
<lans le plâtre, i'û. — .Marche de l'humidilé dans le plâtre, ib. —
Conséquences tirées de ces expériences, 4VJ. — Prix proposés par
la Société d'encouraiiemenl pour les moyens de piévenir ou de faire
cesser l'humidité dans les constructions, 378.
llvuiJi.NE publique : Découverte importante pour cmpAcher la corrup-
tion des urines. 512. — En quoi consiste ce procédé et .>.on ap|)lic.i-
llon. 515. — Utilité de l'urine pour l'agriculture el l'industrie, ib.
— Itevcnns que la ville en pourrait tirer, ."il-i. — Sai:e avis du Pré-
fet de police, ib. — A.esninisscment dts éguuls, 521. — Avis du
Préfet de police, 32i.
ilvpocAUSTE, ses dispositions, 106.
I.
IciiNOGRAPiiiE des églises romanes el gothiques, 243
lr.oxor,R.4PiiiE chrétienne, par M. Diilron. 1 H. — Iconographie chré-
tienne, grecque et latine, traduite par M. Paul Durand et annotée
par M. Didion, r)28.
l.NACci'inTiox de la fontaine Molière. 46 -^ Inauguration des églises
Saint- Vincenl-de-Paul el de la Villetle, 431,
l.NCEXDiES de théâtres, voy. Tiié.atri£s. — Delà llèciie de la cathédrale
de Laon, 240.
l.xcRLSTATioxs daiis les murs du Moyen-Age, 440,
I>olstuie: Exposition, foi/. ce mol.
l.xscRiPTio.xs et marbres romains, 19i, — Iiiscriplions qui décorent les
murs extérieurs des éiilisps lomancs et gothiques, 43V.
l.xsTRicTiox (première) du Comité historique des nris et monuments
Monumenls fixes ; première époque : Indépendance Kauloise. monu-
iiienls religieux des Gaulois, 105. — Obscurité des premiers temps
druidiques, ib. —Cette ob.scuritc se dissipe un peu sous la civilisa-
tion gre«que el romaine. 106. — Venue du Christianisme dans les
Gaules, ib. — Division de la religion des Gaulois en trois époques,
107. — Pierres dites druidiques, ib. — Mcn-llir ou Penlvan ib. —
Oomlcch, 108, — Pierre tournante, ib. — Dclmeii. 10i>. — Demi-
Dolmen. 1 10. — Allée couverte, ib. — lîarrows et tombelles, ib. —
Eeurs dlflérenles formes et leurs po.sitions, 111, — Monuments mi-
litaires, moites, ib. — Oppida, 112. — Monuments civils, ib. —
Deuxième époque: Colonisation grecque, monumenls religieux,
112, — Construchoncyclopéeiine, 113,— Temples de Marseille ib
. — leniplede Vernègues, 114. — Stèles, i6. — Leurs ornements
115, — ,Monuments militaires, ib. — Monuments civils, 116. —
Troisième époque : Conquête romaine, monuments relisjicux, 145.
— Terres cuiies romaines, 146. — .Silos, 147. — Posillon des cita-
delles et des villes romaines, ib. — |ii>triliUlion des villes, ib.
Les temples, ib. — Erauments de chapiteaux, 1 48. — Inscriptions cl
autels, 149. — .Monuments militaires, enceintes, ift. — Dillérciilcs
manières de construire des Uomains. l,5o. — Portes de ville. 151.
— Voies antiques, ib. — Bornes milliaires, 1.52. — Canifis el en-
ceintes, 1,53. — Leurs systèmes de fnrtincatlons, 15i, — Bcm-
parls, ib. — Eortilications |iermanentcs, 1.55, — .Monuments civiU,
l.'>6. — Ports, ib. — Aqueducs, ib. — I bennes, ib. — Prétoires.
157, — Arcs de triomphe. 158. — Colonnes historiques, 1.59.
-Jeux |>uldics. 160, — Ihéaire, «/>,— Sa distribution, 161.—
.\nipliitliéàtre , 162 — Sa distribution el .ses accessoires, té, —
Cirque, 163. — Basiliques. 16'». — Conslructions particulières.
165. — Leur distribution. 166.— L'Iiypoc.iuste. iV*. — .Moulins.
167. — Puits, ib. — Précautions a prendre dans les fouilles,
168. — .Monuments meubles; preiiiièro époque : Indépendance
gauloise, 193. — Colonisation grecque. 194. — «Conquête romaine.
ib. — Iiiscriplions el marbres, ib. — Vases et bijoux en or et en
argent, 195. — Bronzes, ib. — Terres cuites, poteries el verreries.
196. — Aumismatique, 197. — Médailles urecques. \b. — Médailles
et monnaies gauloises, 198. — Différents siunes monétaires em-
ployés par les Gaulois, 1!KJ. — Médailles el médaillons urecs, gau-
lois el romains, 200. — Livres à cunsulter pour la numismatique,
201. — .Moyens à employer pour nettoyer les médailles, ib.— Civi-
lisation chrétienne, mominicnls fixes cl relicieux . 202. — Epoque
méro\ indienne, ib.— Les cryptes. 2n3. — Premier svsième d'ar-
cbilecture chrétienne, basilique> latines, plans, 2oi. — Baptis-
tères, 205. — Koiits baptismaux, 2(»6. — Autels el ciboires, ib. —
Ciborium, 207. — Ambon ou chaire, 208.
— instruction (deuxième j du Comité historique : .Monumenls fixes,
civilisation chrétienne, styles roman el gothique, 241. — En-
semble de 1 éuliso. 242. — Orientation, ib. — Plan par terre
ou ichnographie, 243. — Dimensions générales, ib. — Système
général el matériaux de ronslruclioii, ib. — l>i>tribulion géné-
rale, 244. — L'abside, clicvel ou sancluaire. ib. — Le chœur.
à46. — La nef principale, ib. — Les collatéraux, té. — Plans de
Saint-Gcrmain-de>-Prcs el de .Notre-Dame de Paris, 2i7. — Les
transcepls, 24«. — Les portails, 23<i. — Le porche. 2.'il. — Ses dif-
férentes variétés, ib el suiv. — Les clochers, 255. — La sacris-
tie, ib. — Extérieur de l'église. 2S9. — Décoration îles muraille-..
«6. — Arcades, 290. — ('..donnes romanes, 291. — (;onsoles 292.
— Bases <les colonnes, i6. — Eût îles colonnes, 2!I3. — Leurs cha-
piteaux. 294.— Différentes espèces de chapiteaux, SO.*) el suiv.—
L'ainorlissciiieiit, 301. — L'arcaile romane, 3ti2. — L'arcade ogi-
vale. 304. — Les dillércnles variétés d'ouives. 305. — L'arcade sur-
baissée. 307. — Ornementation des arcades. 308. — Ces archivoltes.
309. — Leur ornementation, ib. — Les crosses, 311. — L'entable-
ment, 312. — Les corbeaux, ib. et suiv. — Les loils el la cou-
verture ; leurs dilTércnles espècig, 337. — Ornement du faîtage, ib.
— Erontons el pignons, 338. — Chéncaux et gargouilles, ib. —
Balustrades. .'139. — Ociieaux. ib. — .Mâchicoulis, ifc.^Coiilie-forls,-
ib. — Arcs-boutaiils, 341. — Leur oniemenlallon. 3i2, — Cloche-
Ions, 313. — Consoles ou appuis de la Uenaissanre, 34 4. — Piliers-
butaiils crénelés, ib. — Ecnètrcs et leils-de-bu-uf, 3S5. — (•cnèlres
romanes, 386. — Les roses, 3K7, — Eeiiètres en o^lve, ib. — Ee-
nôtrcs rayonnantes, 388. — Eenèlres eliiieneaux du XIV-Mècle. 389.
— Eenètre llamboyanle, 390, — Aulrc> variétés, ,".91, — Eenèlres
rectangulaires, ib. — Eenètre ogivale dans r.ircade romane, 592. —
— Eenètre triangul.iire . 393. — Portes. 433. — Murailles, pierres
lumulaires, iiiscriplions qui les décorent. 434. — Ornementation
extérieure, statuaire des XI* cl XIP siècles. 435. — Influence by-
sanlinc. ib. — Progrès de l'art et son apogée au XUI' siècle.
436. — La décadence de la statuaire commence au XIV» siècle, ih.
— Habileté des arlisles au XV' siècle. (37. — Différentes phases de
la statuaire au XVDsiècle, ib. — .Sculpture d'orncmenl pendanl les
mômes siècles, ses <llfférentes phases, xb. — Ornementation de la
Bcnaissance. 4:}8. — Dècailcnce complète, ib. — Application de la
couleur à rornemenlallon. ib. — Ses diffeientes phases. 439. —
Incrustations, émaux, mosaïques. iiO. — Extérieur de l'abside ou
chevet, 4SI. — Extérieur du cbii-ur, 4il2. — Extérieur de la nef
principale, i6, — Collatéraux et chapelles, 483. — Les transsepis.
ih. — Les porches, tb. — l.e portail, ih. — Ses divisions et son or-
nementation, 484, — Les clochers. 48.*>, — Les tours, 48ti, — Les
flèches, ib. — Leur.- diflérentes formes, 487. — Leur ornenieiila-
tion, 488, — Tours du XVjp siècle, 489, — Les sacristies, i6.
— observations de .M. 11. Janniard sur les mar:;elles ou mardelles.
280. — Orii;ine probable de ces cavités du sol, 281. — Les pyrami-
des el tours pleines. 373. — De l'opinion de Caylus sur le monument
romain de .Montmartre, ib.
l.NSTiTLT royal des architectes britanniques : Nomination de M. Daly
parmi les membres de celte société, el lettre de .M.Uonaldson à ci-
su et, 96.
Introdiction : Enuméralion des travaux en préparation, 1.
IsoDOMiM : Construction romaine. 150.
Isola-Bella : Ses jardins sur voûte*, '^i'■^.
rir.9
TABLK AI.I'HABKÏIQLK El ANALVTIQI K DKS MAIIKUKS.
570
JannUrd (II), arcliitecle, undesrédjicleursdel.i lievue. aiilciir dosarti-
cics : l'uils de Grenelle, manière de le ilCdiarrasser des sables, il . —
ou"!''*' --"'**'''^'"'""'* "'''''''^''*'''''' première irislruclion duCoinilé.
280 et o73.— Lellrc sur les frises du leniple de Hiaiie l.ciicopliryiiée,
!28"2.— Noies et. ippeiKliie ajoutés au Mémoire de M. Léon Vaudover
sur riinmidité, 31,5 , -,50 et /(4(J.— Trois jours à Uouen, iW) et .585
.lAHi>iN des Tuileries : lioplàlraee des murs de soulétiemeiit , î>:W. —
Jardius sur vofties de l'Isola-lîella, 520. — .lanlin du Luxembourg,
ses emliellissetncMls, 5SI.
Jean Goujon, 457.
Ji:i X pulilirs romains en Gaule, 160.
Joret, nrcliileelc, un des exposaids au .Salon de I8'('(, t8i.
Jluk de la calbédrale de Itnuen. 450.
KiiiNAC : Sa grande salle liyposlyle, i\.
IiacroJx (Eusène), arcliitecle, exposant au Salon de 1814, 219.
Iiafargue, architecte des bains flotlanls de fiordeaux, 490.
Iiajsus, architecte, charijé de la resiauralion de Notre-Dame de Paris,
ù27, et de la consiruction de l'éïlise Saint-Nicolas, à Nantes, tâô.
iebas, architecte : Son voyage en Grèce, 334.
lefrançois. arcliitecle : laveuleur d'un système de (cils plais bitumi-
neux, 83.
lenoir (.Mbert), architecte, l'un des rédacteurs des liulrucHons du Co-
mité historique et de la Revue, 56; architecte du Musée d'antiqui-
tés, 90. — Il est nommé chevalier de la Légiou-d'Honneur, ,554.
Zienormant ((:llarle^), membre de l'Académie des Inscriptions, l'un
des rédacteurs des Instructions du Comité historique, 56.
le Père, architecte : Sa mort, 33'l. — Notice biographique sur cet
artiste, 567. — .Son origine, ses premiers voyages, 568. — Son
voyage à Gonstantinople, ib. — Il fait partie de l'expédilioii d'E-
g>ple, 569. — Part qu'il prit aux travaux <lu grand ouvrage sur
l'Kgypte, rt. — llesl_iiommé archilecte de la Malmaison et de la
colonne Vendôme, 570. — Ses études sur les moyens de polir le
granit, 571. — Didercnts travaux qui lui furent couliés, ib. — Il
est chargé de la construction (h^ l'église de Saint-Vinceiit-de-Paul,
ib. — IJoiiiies quiililés de M. Le Père, 372. — Différents hommages
rendu.s à son mérite, ib.
Lettbks sur l'organisation des bibliolhèques dans Paris, t'i.
LiNfiERiE d'hôpital, 361l'.
Loge de la Villa Pia, 18. — Loges du Vatican : Leurs encadrements
exposés au Salon, 181. — Loges de théâtres, tjoy. Opéba.
Louvre: Projet de sa réunion aux Tuileries, voy. Salo.\.
M.
Maceuu : ronslruclion romaine, l.'iO.
MAço^^^ERlE : Mise au concours d'un travail sur les pTix de règlenicnl
des mémoires, 233.
Magne, architecte, exposant au Salon de 1854, 221.
Mairie projetée |iar M. Kug. Lacroix, 219.
Maiso.ns romaines de la (iaule, 16.j. — Maisons biîlies par M. Ed. Re-
naud , 225. — .Maisons du Moyen-.\ge ; essais sur les crêtes et épis
qui couronnent leurs combles, 527.
Marbrk : .Son entretien, 3;j(>.
Marché aux fleurs de la place Saint-Sulpice, 582.
Mardelles ou Margelles des Gaulois, 112 — Observations de M. II.
Janniard sur leur origine probable, 28(1.
Mauresque (arcliileclure) : Emploi du cèdre dans ces constructions en
Algérie, 283.
Méoaili.es grecques et romaines en Gaule, 2fK). — Moyens et précau-
lionsà prendre pour les nettoyer, 201. — .Médailles pour les expo-
sants des produits de l'iiidustrio, 285.
MÉLANGES : Une des divisions des matières; voir à la table des soiii
maires les articles contenus sous ce litre.
Mekeaix des fenôties gothiques : (a)nsidéralions sur la gros.scur
qu'ils doivent avoir, '(20 — Voy. aussi I'e.nètre.
Men-iiih ou Peulvan, 107.
Ménmée (Prospcr), mcnibre^e l'Académie française, l'un des rédac-
teurs des Inslruclions du Comité /ii'sfrir/i/i/c, 56.
.MÉROÉ : Nouvel evcmplairc de l'inscription de Ito.-ctle, découvert dan<
cette ville, l'i2.
Meynadier, auteur du livre iulilulé : Paris sous le point de rue pitto-
resque et monumental , etc., 184, et auteur des articles: Opéra,
études tliéoriquo- ( t pralique» d'un lliéâlrc pour rAcadt-iuic lovate
lie niu>iquc, 4.55 et 49.'>.
.Moni r E : Sa Iraduclion en binaaue décimal. 37.
MoMNAiKs uauloises, 193. — Moiinaie» ruin.iliivit en Gaule, 198.
MoMMKNTsrcliïieuv ile^Gauloi». IO"i. \\1;— inilitaiics. III. 11.",; _
civils, 112, 116.— MiHiuments reliuicux de la Gaule >mu* la domi.
nation romaine, 145. — Monumenis niiliLiires de l.i ménic éiMxiui-
IW — Monuments civils, |.5h. — MonumenU religieux de l'i ponue
chrétienne. 2()-2 — Monum«-nl àéicver a l.arrey, IS». — M.u.iimenl^
conimémoratifs à Giijas , 2.59. — A Gcrsoii. tl, — Au K<'-néral IJer-
traiid, ib. - A Mallhien de Donibaslc. ib.— A GliarlcA .Nodier li.
— Moiiumeiit romain de Moiitmarlre : De l'o|iiiiion de Caylu» à son
sujet, .575.
Mosaïques d'Italie. 183. — .Mosaïques du Moyen- Age, 440.
.MusQiÉEdu .Moristaii, ;i'u Kaiie, 44J.
Moi i.i.Ns rom.iins. 167.
Ml Rs <le la terrasse des Tuileries; leur replâtrage, 258.
MisÉK d';intiquilés nationales à l'iidicl de Cluny, 89. — Acquitiliont
nouvelles f.iiics par le Musée. 189.
Nécbologie : Notice sur la vie et les travaux du iieutenaul-colonel
Clerc, 276. — Perfeclionnement qu'il fil subir ;i la boussole, ib. —
Autres services rendus par lui. — Ses prciuières années. 277. —.Set
travaux. — Ses livres et leur mérile, 278.
Nef principale des églises romanes cl gotliiqucs, 2W. — Nef* coll.i-
térales, ib — Extérieur de ces nefs, 482.
Notre-Dame d'Aix-la-Cli.ipelle , 3. — Noire-Dame de Paris : Forie
.Sainte-Anne exiio'iéc au Salon. 184. — Ke.-lauralion de NoIre-Daine.
conliée à MM. I.assus et Viullel-Leduc, 237.
NiDifi : .Son architecture. iO.
NiMisjiATiQiE grecque el romaine en Gaule, 107.
Nv.iiPiiÉE de l.i Villa Pia, 18.
Observations présentées par la société des arcliltecles <.iirl.'i lui .le. i. ■
Icnics, roi/. Patentks. — Observations de II. Janiii
poinls<lcs/Ms/r»r/ii)«ji/M Comité hnlorii,utile*arltct ■
OEii UE-D()i;i E du Moyen-Age, roy. Kenêtre.
Ogive : Ses difTérentes espèces, ôOi.
Opéra : Projets de MM. Iloreau el Meynadier, 9«î. — Elude»
Ibéoriipies et pratiques d'un théàlic pour l'Académie royale de
musique, -lo'». — Exonle ; ib. — Situation du nouvel fi>l '
\''>(i. — Effet qui doit résulter du choix de rrinplaremru:.
— Faibles s:icririccs à faire pour l'acqui>itioii des lcrraiii>, -k>7.
— Unes nouvelles à |iercer. Vô8. — L'extérieur de l'édifice, i* —
I e porche, 459. — La terrasse rouverte, 46(1. — Sonulîliléel»uii iT
ib. — Pavillons latéraux, 462. — Leur décoration, ib. — Ai
cl terrassiî supérieure. 4(>;{. — Toiture, i6. — Le [xiurlour exlcrn or.
464. — Descriplioii des élévations latérales el postérieure, ib. —
Uldité d'une cour pour l'administration, .t<'»5 — Galerie ' -".— •,■
ib. — Bureaux el contrôle. 466. — Vestibule, i6. — i
conditions aéiiérales auxquelles il doit satisfaire. 44i7. — i . .
cations et dégagements divers du rez-decbauss«''e, 468. — . .:'-
terre, ib. — Les e>cali.'rs. (69 — ln>ufri>aiire des >y>lt nu- ■ -
ployés. tft. — Danger des escaliers à lampe dioile. 470. — >n -
proposé, ib. — Deuxième vestibule, ib. — Sa di-^lribiition i.-:
nient aux escaliers. i7l. — Salon <ratleiite. ib. — Sa ■:
ib. — Ce que doit être le foyer cl roiidilions auxquelles \\ ■ ■
faire, 473. — Saloiisdii foyer, 471. — Leur desliuiilion, 475. — Cimi-
miiiiicalions du foyer cl dessalons avec les autres parties de li vii|<>
i6. — Les corridors, 476. — Dimensions et foinies qu : -
avoir, ib. — liaisons qui doivent faire exclure les parq
lapis, ib. — Détails sur rornementalion des couloirs, 477. — Le-
étages supérieurs, ib. — Plaie-forme ou terrasse découverte, ib. —
Salles de secours, etc., 478. — l^ibinels pour le dépAt des vétr-
mcnts, 479. — Les loges, iù. — Précautions pour empÂdier le brou
des porlrs. ib. — Dimensions des loges, 480. — Leurs siéces. etc..
ib. — La salle, sa disiribulion. clc. -19*». — 1 \anien des diilereulr>
formes adoptées pour l'intérieur des salles. 197. — yuelleesl la cli.'-
convenable, ib. — Description de celle de la rue I epelletieravrr .. -
modilicaliotis, ib. — L'aniphilliéàlrc et les b'ccs. 498. — La^.ui:-
scène, 499. — Suppres.-ion des loges du iiianleau d';irleqnin. 'Mti. —
Proporliiins île la nou>elle salle projetée, '.M. — T.tblcau comparai f
des dimensiiiii-i <les principaux lliéalres de rEuro|>e, ib. — La cran-
deui d'une salle necunslilue pas loujourMinedinirultépour Irrluiu-
leur, ;i05. — .\couslique. îiOt. — Les arrliilecles italiens. i6. —
— Condilioiis acoustiques auxquelles une salle doit satisfaire. .'Ml
— Danger^di-s corps vibraiiLsel des saillies: .">ti7. — La coupole de U
salle cl le pourtour dos loges. 308. — De» matériaux à employer. »fr
— L'émail ombrant, 509. — Le prosctnium el le souffleur, 510. —
Vues sur la décoration de la>alle. III. — Lcucils .i éuler dait» celle
décoration, ili.
571
TABLE ALPHABÉTIOIIE ET ANALYTIQUE DES MATIÈRES.
sut
Oppioa des Gaulois, ll'i.
Oi'is iiiccrliini, leviiicliim, relirulalum, des Homains, 150.
Okik>tatio> (les églises romanes el t'olliiques, 'ii2.
OiixKMENTATioNexlérleurc des églises romanes el golliiques, 435. Vny.
aussi DÉCORATION.
Oweo Jones, auteur d'iin livre sur l'Alliambra, voy. Aliiambra.
Palus Lancelloiti , à Rome, allribué à Pirro-Liporio. 21, — P.ilais
de l'iiiduslrie projelé par M, Maune, 221. — Palais <lc justice de
Bordeaux, ril9. — lleslauralioii de celui de Houen, ih.
Panohama d'F.BypIe et de Nubie, par .M. 11. Iloreau . arrliiierlc . étal
de sa publication, 40. — Mosquée du Moristaii, au Caire, ib. —
Crande salle liyposlyle de Karnac , 41.
Pantiiéo.n : Projet d'aebèvemeiit île ses abords, 141.
l'ARQrETS fabriqués A Sirasboura, 517.
Partiiénon : Son état actuel, 28G.
Patentes des arcbitecles : Observations présentées par la société de»
arcbilcctes sur le projet de loi des patentes, 151. — Délimtion du
mot architecte, il). — [télinilion du mot patente, 1.V2, — Examen
des motifs qui doivent faire exempler l'architecte de la patente, ih.
— Assimilation de l'architecte au médecin et à l'avocat, 135. —
Conclusion, 156.
Pavage des rues de Paris pciidaiil 18V3, S,*}.
Peintire : Sa solidité chez les anciens, 35V. — Peinture à fre.sque,
3').'i. — Peinture à la cire, 'X\f\.
Perreymond, un des rédacteurs de la Revur, auteur des articles : De la
f;rande circidatioii dans Pari> et du livre de M, II. Meynadicr. 184.
— Exposition de l'industrie de 184t, 1"2I et 22.5. — Lue découverte
importante pour l'assainissement des villes, 412.
Pei'lvan ou Meu-bir, 107.
PinRE «le Sulherland : Son transport, 33S.
Pharmacie d'bôpital el ses dépendances, 363.
Piel (Louis-Alexandre), arcbiterte, religieux de l'onlrc de Saint-Do-
miiuque, sa biographie par M. .\. Teyssier, 273, — Itaisons qui
l'avaient porté à embrasser l'étal reliaicux, 274. — Ses premières
aimées, ses travaux, ib. — Nature de son talent et de ses idées, 27.'5.
PiRRUB de Uosetle, ilécouverle d'un nouvel exemplaire de l'inscription
qu'elle contient, 1 42. — Pierre iouriiaiitc des (iaulois. 108.
Pii.iERs-BiTANTS des églises romanes et gothiques, roy. Instscctio.'*
du comilé historique.
Pil.oTS : Nouveau procédé pour les enfoncer, 557.
Pirro-Io'gorio, architecte de la Villa Pia du Vatic.in, 15.
Place du Carrousel : Guichet du pont infecté par les urines, HO.
Plan par terre des églises romanes et gutbiqucs, 243,
Plantations dans Paris, 33.
Pi.ATRK : Sa nature hygrométrique, 316. — Ascension de riiumidité
dans celle nialicre, 4'i7.
Plomb : .'•'on emploi pour empêcher l'humidilé de monter dans les
murs, 518.
Police du roulage : Malentendu dans le projet de loi sur cette ques-
tion, 127. — Pourquoi les causes de destruction sur les inauvnises
roules s'évanouissent sur les Itelles roules, tfc. — Inutilité des rcs-
triclions relatives aux charaenieiits et à la laigeur <les janics des
voilures sur les belles routes, 128. — S'il existe une méthode peu
coûteuse d'cntrelenir les routes en bon état, ib. — Influence de la
beauté des roules sur l'ainélioralion des races chevalinos. 12!t. —
Insuflisance de la loi pour atteindre ce but, 130. — Itésumé, ib.
Pont des Arts : Son éclairauc au gaz, 48.
Porches des églises romanes et gothiques, 2S1, 483.
Portails des églises romanes et golliiqties. 250. — Dessin du portail
de lacaihédrale de llarccloime. retrouvé À l'archevèclié de cette
ville, 286. — Portail principal de la cathédrale de Kouen, 422 —
Portail sur la Gourdes Libraires. 424,
Portes d'atelier, à Kirmiiigbam , leur description, 117, — Portes
des villes romaines dans les Gaules, 151 — Porte d'.^roux de>-i-
née par .M. Dcibrouck, 182, — Porte Sainte-Anne de la cathédr.de
de l'aris, 181. — Porte du portail principal de la cathédrab- de
Uouen, -122, — Portes des églises romanes el gothiques, 433.
Ports des Koiuains, 156,
Poteries : Analyse de polerie étrusque. 43. — .Analyse de potirie
gallo-romaine, 44. — Analyse de polerie de l'Oliio , ib. — Poleiie
moderne du Havre, 45. — Poteries gauloises, I!I3.
F'oizzoLANE ;<rlincicllc qui résiste fi l'eau de mer, 284.
Pratiqi E : Une des divisions des matières : voir à la table des soiiiniai-
ros les articles compris sous ce litre.
Préioires des Itomaiiis en Gaule. 157,196.
Prix proposés par la Société d'encouraaement pour la fabrication des
briques, 5'<6; — pour les moyens de faire cesser ou de préM-iiir
l'humidité dans les constructions, 578; — pour le perfectionnein'enl
des appareils deslinés au blanchissage du linge, ib.
Propylées d'Athènes : Leur élat actuel, 286,
Prosjer, inventeur d'uii iioux eau mode de fabrication de luiles et de
briques. 521,
Pi BLicATioNs nouvelles, roi/. Ribi.iographif,
PciTS de Grenelle: Manière de se débarrasser des sables qui troublent
ses eaux, 41. — Moyen mis en œuvre par .M. Lefort. 42. — Ses in-
convénients. 43. — Auire moyen pniposé, ifc. — Son réservoir de
la place de l'Estrapade, lUI. — Puits roinaiii», 1G7.
PvRtMiuES el tours pleines : Leur origine, 575.
It.
Raoul •Hoehette : Son livre sur la Villa Pia du Vatican, 15.
UÉ'iLKMENT des mémoires : Mise au concours d'un travail sur le prix d«
rè'jleiiicni pour la niaroiinerie, 255.
Hemises : roy. Ecirik.
Remparts romains, l.^i.
Renaissance : .Sl.iluaire de celle époque. 457. — Ornementation, 458.
Rrnard-Perrin, architecte, auteur du Vigiiole centésimal, 3t>.
Renaud (Edouard) architecte : Maisons construites par lui. 22.5.
Restaihation : de .Noire-Dame, confiée à M.M. La»sus el Viollel-
Lc-duc, 257. — Du château de Iflois, ,'i2,'>. — Du théatrede .Nantes, i6.
Rosette (inscription de) iNouv^-l exemplaire découvert à Méroé, 142.
Iloi'KN ". Trois jours dans cette ville : liitroiluction, U9. — Réflexions
sur les vicissitudes de l'art, 420. — tjraiid nombre d'édilices du
Moyen-.\ge que l'on trouve à Rouen, ib. — .\rchilecture moderne
de Rouen, 421. — La cathédrale de Itouen, i6. — Travaux qui s'y
exécutent, ib. — (^loclietons renversés par l'ourauan, 422. — Porte
el portail principal, t6. — Gourdes Liliroires, 423. — Mutilations
qu'on a f.iit subir allés framneiiN gothiques, ib — Décaueinent des
édifices du .Moycn-ABe, 42V. — Portail de la Cour des Libraires, i6.
— La fléclie cii fonte, ib. — Son système de construction, 423. —
Son aspect, ib. Cnnsidéralions sur la crosse ur que doivent avoir
les suppnrlseii architecture, 426. — Les inencaux, i'(. — .Meneaux en
foule, 427, — A quel point en sont le» travaux de la Hèche, ih. — Leur
description, 428. — Italustradedu comble de la neL 429. — De quelle
façon doit être fait le joint d'un cheiieau au mur, ib. — liilérieur
de la caihéilrale: le jubé, 430. — l.es collatéraux, i<i, — Cliapelle
de la sjicrislie, ib. — .Statue de Riciiard Citur-de-Lion, 431. — Le
Iranssept. tb. — Lettre de M. Gombier, fM. — Saint-Ouen; étal ac-
tuel de cet édifice, 5.39. — De la rostaur-ilion projetée, 5V0. — Le*
portails, .'iVt. — 1.» tour centrale. f>i2. — Les alial-juins. ti\^. — Les
garuouilles, t6, — Inlcrieurde .Saint-tluen, .ML — Toinlie d'.\lexandre
de Rerneval. i6. — Etat de roriiemcnlatiuii sculptée el peinte des
voûtes et des piliers, ,%V5. — Grille du chipur. ih. — Matériaux qui
ont servi à la consiruclion de Saint-Ouen, ib. — La pierre, le plomb
el le fer, .'>i6. — Mauvais scellement, .%V7. — Charpente de .Siinl-
Ouen, ib. — S.i desciipiion. M«. — impAt sur les fÎMtcnrs, ih. — Un
liôlel du XVL- siè. le, ib. — Muiilation de cet édiliir, ,M!I. — Sainl-
Maclou, ib. — Désencombrenicnt de ses portails, 5.50.— Harmonie de
(outil, les parties de cet édilire, ib. — Les portes et les vitraux, ib.
— Palais de justice. i6. — Hûlel de Rourgtberoulde. S.'Jl. — Musée
des antiques, tb. — Statue de Roïeldieu, ,5,52, — Ewlise <lc Ronse-
cours, sa position, ib. — Description de l'édifice, 55,". — Ses vitraux.
534. — Luxe des matériaux em(iloyés, ib. — .Ses voàies. .W.S. —
Chemin Ue fer de Rouen au Havre, ib. — Mauvaise exérutiou de>
travaux d'art. 556, — Mauvaise qualiié des briijues employées, tfr.
RotLAUE (police du), roy, ce mot.
Ri ELLES de Paris : .Nécessité de les bitumer, 48 et 140.
Ri ES nouvelles de Paris, 3V. — Pavage des rues. 35. — Percement d'une
rue nouvelle. 141. — Rue des Matliurins-Siiint-Jacques; son élargis-
sement vote par le conseil municipal, 189.
Rnpricb Rcbert, uii des exposants au Salou de I8VV, 18V.
S.
SiMisTiB des églises romanes et gothiques, 255, 489.
.Salles d'asile : Leur cbaulTage et leur venlilalion, 410. — Salles de
spectacle, viiy. Théâtres cl Opéra,
Salon de t»<U, Pourquoi la presse parle si peu de l'exposilioii des
projets d archilecture, 178. — Son ignorance de l'art, 179. — Com-
ment on pourrait donner une grande impiTlance aux ex[)Osilioris
d'architecture el les rendre très-profitables. 180. — Sujets archéo-
losiques : Restauration du lemple de Diane Leucopbrvnée . p^r
M. Clerget, 181. — Porte d'Arroux. par M, Dellimuck, 182— Etudes
sur tari de la ilécoratioii en Italie à dilTèrentes époques, par M. De-
iiuelle, ih. — Dcciiralioiis antiques. 185. — Le> Mo.'aisles. tb. — I a
Renaissance, i6. — Encadrements des loaes ilu Vatican, par M. V,
Raltard, 181, — L'arc d Orange, par M. Joret. ib. — Porte Sninte-
Annc de la cathédrale de Paris, par M. IJieswilwald. ib. — Ealis s
des templiers de Mont<aunès. par M. Ru[)ricli Robert, ib. — Projet de
réunion du Louvre aux Tuileries, par M. R.Klenier, 214. — Projet d.-
fontaine gothique, par M. Max lieidielin. 215, — Des embellisseinenls
partiels de la calliéilrale de Paris, (iroposés par .M. Am. Couder, i'..
— De l'unité dans les décorations intérieures, 216. — Du projet de
cathédrale de M. Garnaud, ib. — Les artistes ont besoin les uns des
autres, ib. — Ils devraient s'associer plus fréquemment pour étudier
des projets, 217. — Les monuments d'architecture, par leur nature
373
TABLE ALPHABKTiyiiK ET ANALYflQI'K DES MATIÈRES.
S74
même, ne sont pas lous au même degré des œuvres d'art, 217. — De
l'Iiôpilal projeté par M. Du l'uy . 218 — Esl-il Imn daccuiiiulcr les liA-
pilaux dans tes villes ?j6. — Du projet de mairiiMlc M. Kiis;. Lacroix.
iil9. — Parties et tiépeiidaiices q^iicou'^iilucrit utic mairie, ih. — Tra-
vaux à elTetliier aux ahords de la place S.iiiil-Suliiice.-J-i().— Du projet
de Palais de l'Industrie de M. Maanc, 'i2l .— I'"aiil-il hàlir un palais
dérmitir pour les expositions de l'indnslric? ili. — (;on-idéralj(nis de
M. M;iatie en faveur de son projet, 222. — Dispositions aénérali's,
223. — Hôpital projeté |)ar .M. iMaane, «/(.— Description de ce projet,
22i. — Projet de décoration d'un plaTond. par M Jult's Saulnier, ib.
— Maison de .M. Kd. Itenaud, 225. — Gravures de M. Iluguenct, ib.
Sambin, sculpteur du XVI" siècle, 437.
S4N-Cahio, théâtre de INaples; ses dimensions, 501.
Sasctuaihe des égli.-es ^otldqucs et romanes. 2'li.
Saulnier (Joies), décorateur, ex()osaMt au Silon de 1814. 224.
ScALA (la), théâtre de Milan: ses dimensions, ib.
ScuLPTiHKs découvertes à l'Aciopole d'Athènes, 287. — Sculptures
grecques moulées par M. Lehas. pour TLcoledes heaux-arts,'J34. —
Sculptures du temple de Diaue Leucoplirynée exposées à l'air, 282.
Silos romains, 147.
Siret, inventeur d'un procédé pour l'assainissemeul des égouls, 521.
Société centrale des architectes : Compte-rendu de la séance du
14 janvier I8i4, 'J5. — Lettre de .M. Ilaltanl. ib. — Compte-rendu
sur les mesures d'installation et autres opérations du bureau et du
conseil pendant le premier semestre de l'exercice ISlS-ISii, ib. et
suiv. — Situation de la caisse, 137. — Rapports des censeurs sur
les comptes-rendus qui précèdent, ib. — Délibération sur les propo-
sitions résultant des compte— rendus, 138. — Election de menihres
nouveaux. 139. — Observations présentées pur la Société de> arclii
tectes à propos du projet de loi sur les patentes, voy. Patb.ntes.
— Société dencouragerueni : Prix proposés par elle, ô76.
Statistiqie des recettes et dépenses de la ville de Paris de 1797 A
1840, 39. — Statistique monurnenlale de Paris, livraisons 14 et
13. 281. — Matislique des prix du chemin de fer Hollandais, 527.
Statlaikei es XI", XII», Xlll'=, XIV", XVi^eiXVI» siècles, 433 et suiv.
Statl'es peintes, ilécouvertes à l'hùlel île Cluny, 92. — Statues com-
raémorative^ de Larrey, 189; — de l'réron. 190; —de Casimir De-
lavigne, ib. — de Duqiiesne, ib. — de La Pérouse, ib. — de Jean liart,
ib. — Statues découvertes à r.\cro|)ole d'.Xthènes. 287. — Sl.ilues de
saint Louis et de Pliili(ipe-Aus;usle, à la barrière du 'Irônc, 334. —
Statue de Itichard Cœur-de-Lion à la cathédrale de Itouen, 431.
— Statue de Gœthe, 556. — Statue à SIephenson, 527.
■Stèles greci|ues du midi de la France, lit.
T.
Temples romains de la Gaule, 147. — Temple de Diane Leucophrynée.
dessmé par M. Clergel, 181; — Ses frises expo.sées à l'injure de
l'air, 282 — Temple de la Victoire Aptère à Athènes; aclièveracnt
de sa restauration, 286; — de Minerve Poliade, 287.
Tekiies cuites romaines, 196.
Teyssier (Amédée), auteur d'une notice biographique sur Piel, 273.
Théaires romains de la Gaule. 160. — Théâtre de hunkerque, son
achèvement, 190. — l'réqueuls incendies des théàties, 239. — (Con-
cours pour un grand théâtre à Toulouse, 383. — Ktudes sur un
Ihéàlre d'opéra; piéainliule, 453. — L'Oi'Éka , voy. ce mol. —
Dimensions des principaux théâtres de rEurii[)e. 'iOI. — Théâtre de
Nantes; sa restauration, 525; — de Livourne, 527.
Théorie: Due des divisions des matières; voira la table des som-
maires les articles contenus sous ce titre.
TiiEa.>iEs (Palais des) : Son musée, 89. — Dispo.-ilion des llie.-mes ro-
mains, 1S6.
Thumeloup, arch, auteur des dessins du grand hôpital de Milan, .528.
TrNETTES, VIty. HVGIÈME.
Toit : Nouveau luit plat bitumineux, 82. — Avantages des toits plats.
83. — Système de M. Lefiançois, ib. — Préparation des substances
qui entrent dans la confection du nouveau toit bitumineux, 83. —
Préparation du toit à recouvrir de ces substances, 84. -— .Manière
de les appliquer, 85.
Toiture des églises romanes e( gothiques, 337.
Tombeau : celui de Charlemagne à Aix-la-Chappelle : Uichesses de
l'Alleniagne en orfèvrerie du Moyeu-Atc, 3. —Cathédrale d'Aix-
la-Chapelle, rt.— Kecherches faites danscel édifice, 4.— la chà--c
de Charlemagne, ib. — Lpoque à laquelle cette chiisse fut faite, ib.
— Ouverture de celte chàs.se, 5.— Otijcls (pii y fuient liou\és, th.—
Klolfes des XI" et XI t» siècles trouvées dans l'éali-e. id. — l-ouilles
pratiquées dans l'église, 7. — Description de réi;li>e, ib. — loin-
beau de Gérard Chorus, son architecte, )6.— liesullats des fouilles,
,4. —Ueslauralion projetée de la chapelle Hongroise. 9. — Pierre-
luniulaires qui décorent ^es murs extérieurs des églises romane>
et eothiqiies, 43 i.
To.miieli.es (les Gaulois, 1 10.
ToiiDiNo, Ihéàlre de Itonie, 506.
FouBS des éulises du Moyen-Aae, 486.
I'ranssepts des églises romanes et gothiques, 218.
TRA^sp0RT du phare de Sullierland, 335.
Tiii.EBiES, projet de «a réunion au Louvre, toy. .Salon.
Tuiles roiiiaiiic-(, 146. — Prix proposé pour la faliricalion de» luilm
par la Société d'encouragement, 370, — Nouveau mode de fabrica-
lioii des tuiles, 521.
V.
Vases romainn. en or cl en argent, 195
Vatican : la Villa l'ia, voy. \\\.\.\.
'Vaudoyer (Léon), arcliileeie , auteur d'un mémoire »ur ITiumidilé
dans les ciuislruclions. 2ii6.
Ve.ntilation et cliaufTaue. voy. CiiicrrAGB.
Vkrhehiks romaines, IS/i.
Viaduc sur la Loire, 432.
Vi(;,NOLE centésimal de .M. Ilenard , 36. — L'n mol sar le livre de Vi-
giiole et sur le» circonstances au milieu desquelle* Il fui fait, ib
(Jrand nombre de mauvais livres publiés sous le tilre de Yi'gnoln
37. — Tradutlion du module en langage décimal . t6. — \ianlas<-
du système duodécimal »ur le système décimal, i6.— Méllio,le nou-
velle de M. ISeiiaril-l'errin pour tracer la volute, 38. — Liililé du
livre de .M. Ueiiard-Perrin. ib.
Villa uallo-romaine découverte près d Elrelal. 191 — €on»idéralious
sur les invasions des Karbares, 192.
Villa Pia du Vatican : Ce que c'est que ce monument. 15. — P»r qui
il fut coii>lruit, ih. — Influence de 1 époque où il fut hiii, tn «oo ca-
ractère, 16. — Caractère du talent de l'arctiilecle, Pirro Liaorio. i«
— liichcsse de la Villa l'ia. 1". — Lxagéraliou de l'emploi de- al-
léiiories de l'antiquité, i6. — itaisons qui devaient les faire exclure
en partie de lliabilation d'un pape, i6.— Les cathédrales eolliique-
défendues contre .M. Itaoul-Uocbellc, ib. — Description de la ViIIj
Pia, 18. — La Loge, it. — Sa décoration intérieure, 19. |,e Vji-
sin, sa décoration extérieure, ib. — Son plan, 20 — Le réz-de-
cliau.sséeet sa décoration, ib. — Lt premier élase el sa d/^cnralioo .
21. — Matéiiaux employés dans la construction de cet édifice, i».—
Uésumé. ib. — Autres travaux de Pirro Ligorio, i6.
Villes romaines de la (ïaule. leur position, 147.
Visconti, architecte : La funlaine Molière, 46. — Fontaine de la place
Sainl-Snlpice, 382. ^
Vitraux de (Jiarircs, restauration projetée, 86. Lettre de il. Ar-
thur Martin sur ce sujet, ih. — Elal actuel de ces vitraux, 87.
Itai.sons <pii iloivcnl comballre ce projet de re>lauialion, i6.' Inu-
tilité des ilépeiises projetées, ih. — Peu de frais que iiécès*ilent leur
simple entretien et leur conservation, 88. — Emploi meilleur que
l'on pourrait faire des fonds alloués pour ces reslauralinn>. li
Voies antiques, 151.— Leurs différentes espèces, 152. — Uornes mil-
liaires. ih.
Voirie de .Muntfaucon : Sa suppression. 285.
Volute : Nouvelle manière de la tracer, (lar M. Henard-l'errin. 3.S
Voûtes en berceaux cylindriques (équilibre des) dans lesquriles lr«
plans de tète sont perpendiculaires à Taxe, ,57. — ( o»rt< df$ ttm-
trcs de (jmvité. 58. — Poids dos voussoirs élémcnlaires. prrs<iuii«
exercées sur leurs faces, ih. — On fait abstraction da ffolleinent
et de l'adhésion des mortiers. 59 —La ré>islaiice de> près» ons ilan*.
les joints normaux doit passer très-prés du mi.ieu ue l'épaisseur
pour que la \oùte possède une gran.le stabilité, ib. — Pi>«it«on du
centre de graMié d'un voii>soir élémentaire, expre>sioii du poittfde
celui-ci, 1)2. — (iomlilions de l'équilibre d'un vouloir élénieulaire,
63. —Questions relatives A l'équilibre îles voûtes, tb. — Première
série de questions: Liant donnée la pression par unité de «urfare
dans le> joinis normaux et les forces extérieure». cou>truire r-t ■■ ■'
ciller la courbe des centres de gravité, elc . 61. — Premu'
biènie : Voùle- non chargée-, soumises à la condition que U , ii-
siou par unité de surface, dans les juinis normaux, soil coaslaale.
ib. — Solution aiialylii|ue du problèinc. 66. — Branclies inuginairr»
dont la forme est néiuimoiiis déterminée, 69. — Traré de lacoarbe
et des normales, intrados et extrados, tb. — Traré de la mtmte
courbe au moyen de la règle à calcul, 71. — Deuxième proMèMC:
Voiiles non chargées devant recouvrir un espace d'une large«r iom-
née, 72. — Solution analytique, 73. —Solution graphique. 7t. —
Troisième problème: EtahlissemenI d'un système de deux arcs de
voûte assujélis .i .s'appuyer sur des piédroits donnes de liauleor écair
ou inégale, et devant en outre servir de base, en leur croiteiweiil-
à un troisième arc de voiite donné, 75. — Fqualion du problème.
ib. et suiv. — llésolulion de ces équations par des appruximalion»
successives, 78. — Coiislrurlionsreniplaranl lo> calcals précWcnl».
81 . — Pressions horizontales aux naissances, 82.
— Voûtes ou arches dans lesquelles le« pressions extérieure* de» char-
ges sont iiidéteriiiiiiées.256. — Uiscu^sionde l'indélerminatioMyt*-
duite par la disposition horizontale des assi^es du luaMtf ^ai
charge la voûte, 256-2.'>8. — Les équations données da*s le pte-
niier article sont restreintes aux cas où les forces exlérieorc* >«M
normales, lorsque les résultantes de celles-ci ne |>as.>eiit pas par le*
centres de gravité des vou-soirs élémentaires. 2.''>8. — Tran<>li8naa-
lion des équations d'équilibre dans le ras de forres nowilei. <4.
Equations traiisfurmérs, 259. — Cas où l'on néglige le poids éc*
voussoirs relaiivcroeul aux charge-, vflus>oirs ronslmils en (onir.
TABLE ALPHABKTIQUK ET ANALYTIQIE DES MATIERES.
'»-«
en bois, etc. . ib. — Equililirc d'une voùle ^^oumisc, soi! inléricure-
inenl, soit cxl^rieuremciil, à la pression d'un liquide, et dans la(|iiellp
on fait alistr.'iction du poids des voussoirs, 200. — Inlégralioii do
léqualion difiërentiellc du deuxième ordre : — = .'^ a6l. — lii-
légrale première sous forme finie, 2l)2. — Première relation entre
les données du problème et les coiislanles de l'iMlt'->2ra(uin, 2(j3. —
Intégrale seconde sous forme <le séries, ib. et "iGi. — l)eu\icnie re-
lation entre les données des problèmes et les constantes de la
deuxième intégrale, ib. — l.a série précédente est principalement
applicable nu cas des fortes cliargcs. .Nouvelles séries relatives au
cas <lcs faibles charges. Emploi des sinus hyperboliques, 'JG5 et.'266.
— Construction de la courbe dont l'équation est : p y = ., , 39.3. — Uti-
lité de ce tracé, ib. — I-a forme des arches doit se rapprocher d'au-
tant plus du plein-cintre, que la ciiarne est plus con«idéralile, 39.'i.
— Equilibre dcsarclies cbarijiéesd'un massiflernuné supérieurement
par un plan horizontal, 590. — Cette question est celle relative a
rétablissement des arches du plus grand nombre de pont-; ou de via-
ducs, ib. — Disposition de la charge extérieure d'une arche, donnant
lieu à des pressions normales déterminées, ib. — l'res>ions dans les
joints, ou à l'extrados, représentées par des hauteurs, comme ilans
ta inécani(|ue des fluides, :J9!l. — Epaisseurs et fonctions des ordon-
nées verticales, Wi). — Discussion relative;! la su|)pression desirè>-
petits termes dont la présence compliquerait trop l'usaue des formu-
les, Mil, 'Î02et 403. — Equations simplitiées, 403. — Calcul des coor-
données de la courbe des centres de gravité, 404. — .Méthode de
Legeiidre, pour tenir compte des termes du deuxième ordre, dans
les expressions des différences linies.enpartant des expressionsdif-
féreiitielles du premier ordre. ib.elMih. — Trace géométrique de
la courbe des centres fie ijravilé, de l'intrailos et de l'extrados, en par-
lant de l'expression du rayon de courbure et de l'épaisseur en
fonctions des ordonnées verticales, i(l6. — Détermination de l'épais-
seur à la clef, poussée contre les culées, 408.— Poids d'une partie
de la voùle et du massif, comprise depuis le plan vertical passant
par le sommet jusqu'à un plan de joint quelconque, 409. — Inclinai-
son des tangentes à la courbe des centres de aravilé, et à l'extra-
dos, menées par des points situés sur une même normale, i6. —
Poussée linrixonlale résultanie. cl position de son point d'appllra-
lion. 411. — Inléarale (iremière déduite de la considération ilc l'é-
quilibre du sysième, ib. — Données d un projet d'arche. 412. — La
limite de la pression dan- les jninis, d'après Navier. serait reiiré-
senlée, d'après nos conventions, par une hauteur de tOO"', 4l2. —
Cas où celte limite a été évideninieiildé|iassée. Pilier- prismatiques
de l'aqueduc de .Spolelte. ib. — Distinclinn des arches d'après l'aii-
L'Ie du dernier plan de |oini avec la verlicale, 4(3. — Itclation entre
les données d'un projet d'arche. répais.seiir au sommet, la pres>i<iii
dans les joints et l'an^ile du dernier plan de joint avec la verticale,
déiluits de l'intégrale première, 414. — Solution ilu problème par
des approximations successives, remplaçant la deuxième intégrale,
'b. — Calcul des premières valeurs approchées, dans les arches di-
tes en arc de cercle, 4L). — L'équation qui donne l'épaisseur :t la
clef ne présente pas d'indéterminalion. 41»). — Vériliralion des ré-
sultats dans chaque approximation. 4t7. — Cas des arche- en anses
Ile [laiiier, ib. — La pression ilansles joints normaux n'e-t plus ar-
bitraire comme [irécédemment. Première valeur approchée de l'é-
paisseur à la clef, ib. — Kéflexions sur la marche suivie dans I ex-
position des principes relatifs à rétablissement des voûtes rbargées,
418. — .\pplicalion de ces principes aux données qui ont dû >ervir
de base à la construction de l'arche du milieu du pont de OavanI
L'épaisseur à la clef, déduite de notre théorie, est précisément la
même que celle adoptée dans la con-tructiun. Considéraiion sur l'é-
cuuomie du projet, 419.
W.
■Wcyer (J. A.), archilecle : .Sa leltre à M Daly sur un nouveau mode
de fabrication de parquets. 517.
Yvon-Vdiarceau , uii des rédacteurs de la Rerue. auteur de- articles :
Equations de l'équilibre d'un corps solide, dédiiiles ilu principe <le-
vitesses virtuelles. 0; — Equilibre des voûtes en berceaux cvliu-
drlques, .^7, 25i). 390.
FIN DE LA TABLE ALPIIAUÉTIQUE ET AXALYTIQl'E DES MATIÈRES.
TABLK DKS SOMMAIIIKS.
578
TÂ.BLE DES SOMMVIKES
DONNABJT L'OUDRE DAMS LEQUEZ. I.XS PI.ANCBXS ONT PARU.
*• DE JANVIER.— INTRODUCTION, coH. — IIISTOIIIE : Tomlii-au de Charlc-
inaene, à Aii-la-Chapelli-, parM. Abthur Maiitin,3. — TMËOKIË : Enrialions
de l'équilibre des corps soliiles, ilcduili'S du principe des vilesses virluefles, par
M. YvoN Vii.micKHJ, 9. — MK1.ANGES : De la Villa Pia du Vaiicin, par M. Ai,-
p|lo^sK iiB OAt.oNNK, )5. — Edilité pai<isik>kk : Conseil municipal de Paris, 22
— Siluatioii des revenus, dépenses, embellissemenls, iravaux commencés el pro-
jetés de la viliede Pans, 29.— IIibi.iokrapiiik. Vignole centé>imal de M. F. A. Kh-
NAUD, architeelç, par M. A., 36. — Hanorama d'Egyple el de Nubie, de M. Ho-
BKAU, aichilecle, 59. — Tableau slalislique des dépenses failes par la ville de
Paris depuis 1797 jusqu'à I8W, par M. Martin Sainl-Léon, 39. — Cuvelle d'épura-
lion pour le puils de.GrencUe, par M. H. Janmahii, architecte, *t. — Analyse di'
poteries diverses, 43. — Du cours de M. Chevreul sur la loi du contraste simultané
des couleurs, 45. —Chronique : Inauguration de la Fontaine-Molière. — Uiiumage
des Champs-Elysées. — Pont-des-Arts. — Quatre planches, savoir : i<t un Fron-
tispice en deux cnuleurs et un Taui-titre imprimé en rouge ; 2o Un plan général de
ta Villa Pia, dessiné par M. J. Bouciikt, architecte; 3° une rue perspective du
grand vestibule delà Villa Pia, dessinée pur M. J. lloucimT et grurée sur acier par
M. iliBON ; 4» une rwe générale de la forteresse de l'Alhambra.rf Grenade, prise du
côté du palais de Charles-Quint et de la tour de Comarès, dessinée par M. OWKN
JONBS, architecte.
N" DE FÉvaiEit. — HISTOIRE : L'AMiambra, 49. — Du Comité historique des Art»
el Monuments, par M.Cksar Dai.ï, .10. — TIIEOKIE: Equilibre des voûtes en
berceaux cylindriques, par M. VvoN Viliarchai', 57. — PKATIQL'E : Nouveau
Toit plat bitumineux expérimenté, par M. A. I KFBA^çolS, architecte, 82. — ME-
LANGES : De la restauration proj(^iée des vitraux de Charircs, par M. Ariiilii
Maiitin, 86. — Nouveau Musée d'antiquités nationales à l'hAtel de Cluny, par
M. ALeHO^SK DE Cai.one, S9. —Société centrale des Architectes français, 93 —
Chroniqvk, 96. — Trois planches représentant : l'une, sur métal, diverses voûtes
en berceau; une autre , PI. .I, gravée sur bois, une vue de la Porte du Jugement,
à l'Alhambra; la troisième, planche double, également gravée sur bois, l'élévation
et le plan de la voûte arabe de la Salle des deux Swurs, à'J'Àlhambra.
X" DE MARS. -HISTOIKE: L'Alhambra, par M. (ésar Dai.y, 97. — Première in-
struction du comité historique des Arts et Monuments : Monuments hies, 1" et
2e époque, 105.- PRATiyiJE : Grandes Portes d'Atelier, par M. César Dai.y, H7.
— Du Chauffage et de la Ventilation, par M. Rkné Dlvoir, 118. — MELANGES :
Exposition quinquennale de l'Industrie française, 121.- De la Police du Roulage,
par un Ingénieur en chef dus Ponts-et-Chaussées, 427. — Observations pré-
sentées par la Société des architectes sur la loi des Patentes, 431. — Itulletin de la
Société cenlralcdes architectes (lutle et fin), 435. — CnROKlQiiE, 437. — Le réser-
voir du Puils de Grenelle et l'éonsson de la ville de Paris. — Nouveaux cabmels
inodores. — Guichet du Carrousel : Un remède pire que le mal. — Une réclame
en faveur de la propreté el de la santé publiques. — Simple dialogue a propos
d'un palais pour l'Industrie française. — Achèvement des abords du Panthéon. —
Percement d'une rue nouvelle.— Un architecte millionnaire. — Trés-inipor tante
découverte.— Pcri.ications nouvri.i.ks : Annales archéologiques. — Trois plan-
ches sur métal, représentant : l'une, pi. 6, deux grandes Portes d'. Atelier ;une autre,
pi. 7, un Calorifère ventilateur ; la ^e,pl 8, des salles de bains el de bains de pieds
construites au Collège royalde Rouen.— En outre, \S gravures sur bois dans le texte.
[«•D'AVRIL.- HISTOIRE: Première insiruclion du comité des Arls elMonumenls:
Monuments fixes, 3<- époque, 445. - PRATIQUE : - Du chaulT.ige et d.- la venli-
lation par M. René Diivoir, 469. — Du bbinchissage, par M. RB^E Diivoni, 42,.
— MELANGES : Salon de 4844 (4" article^ par M. i.bsar Dai.y, 478. - De la crande
circulation dans Paris el du livre de M. H. Meynadier, intitulé : Pans sous le point
de vue pittoresque el monumental, etc., par M. Pkrbeymond, 48i. - ChromoI'E :
Appel à nos Lecleurs; — Musée des Thermes; — Monument de l.arrey; - Statues
commémoratives dans les départements : — Théâtre de Dunkerque; — fouillis a
Bavay • — Restes d'une villa gallo-romaine dérouverte piès d'Elrelal. — Chauf-
fage eî ventilaiion des prisons cellulaires. — Trois planches sur métal, représen-
tant : la PI 9, un calorifère ventilateur, à air chaud , l,a PI. 40, un nouvel appa-
reil de lessivage par ctvralaticn intermittente ; et la PI. 41, les plans et couprs
d'une blanchisserie d'après le système de M. RÉKÉ DuvoiB. - En outre, M gra-
vures sur bois dans le texte.
\« DE MAI. — HISTOIRE : Première instruction du comiiè des Arts el Monnmenis
(suite et fin) ; «loniimenls meubles el Civilisation chrétienne, 493. - PRATiyU E :
Du chaiilTage et de la ventilaiion (3e article), par M. Rbnr DtivoiB,208. - Mh-
Du chaiilfage v., ..^ ... .- v- - . ,.: • ., ... ,. ,. „, .
LANGES: Salon de 4844 I2e«( dernier article), par M. Ck«ab Dah. 21».
Ex-
position de'linduslrie de 48i4(2e or(ic/c). par M. I'errrymono, 225. - Uibiiogua-
PHIE • De la grande circulation dans Paris et du livre de M. Meynadier [Suile el
fin), par M. Perrhymond, 252. - Du règlement des mémoires, 235 - ChroNIQI'E :
La restauration de Noire-Dame de Paris confiie à M.M. Lassos e Violel-Leduc. -
Les splendeurs de l'Hôlel-de-Ville el la fange des Halles. - Rep âtrage du mur de
la terrasse des Tuileries. - Arc de triomphe romain de Djonisah. ■- Iheâlres n -
cendiés. - Monuments commémoratirs dans les départements. - Incendie (le la
nèche de la cathédrale de Laon. - Cathédrale de Rennes. - Travaux du château
de Pau. - Publications nouveli.ks. - Veux planches sur métal rrprcsentant :
l'une un modèle de fourneaux de cuisine; l'autre, divers systèmes de ealnrtfcres
pour les écoles et les hOpitaux. En outre, 41 gravures sur bois dans le lexie.
X" DE JUIW. - HISTOIRE : Deuxième instruction du Comilc '"J'orique des Arts
t Monuments : - Siyles romain el gothique (chapitre premier), 244_- 1 HtUKlE .
" ■■ ViLiARCKAi) i3e article), 2.16. — PKAll-
De l'équilibre des voûtes, par M. YvoN V iliarckai) i3e article), 2.16. - IRA II-
OUE : De l'humidité dans les conslruclions, par M. Léon Vauuoykb, architecte.
la cathédrale de Barcelone. — Traraui eiétaiH i rAeropoli» ir.kiht-nn. - Crm-
•truction romaine découverte a Pari». — l'i i ,
planches sur métal représentant tes plans, '
ries el Itemiies de lord Stafford. a hindrei ; /
En outre, i9 grarurei sur bots dans le texte, '
K' DE JL'ii.i.cT. - HISTOIRE. — Deuiii'MK' in»trurii'<n du Comiii h.ti»ri<|g«4ri
Arts el Monuments : slyle roman el si> .. ft$
- PRATIQUE. - De l'humidile dans , , V»b^
DOJEB, architecte, annote par M. H. J > r
— Mon de M. LeI't-re; M. Lebaten i.
saint Louis ; le donjon et la ehapeilp <l> ^
de la place Vaihubert ; infurluiic» de» i.i.. ^.ji... - .;ij i
Rivoli; démolition de la chapelle des Annu'n<iid<t Birj,
d'un phare en Angleterre. — Publication» nouvelle» — /,
représentant : tune, divers appareils pour eomballre ou pttr,n,r i i,,.m.j.,,
l'autre, un projet dhô/atal, par .M. Du PlT . architecte ; £■ outre, \t» aratmrtt
sur bois dans le texte.
N« D'AOLT. — HISTOIRE : Deuxième initruciion du Comité bi<lorique de» An»
el .Monument»: styl. s niman el gothique (luite), S37. — PI4.»Tint'K : Ccuim <u
preniiir éiage, par .M. tÉSA» D»LY, 343. — De l'Iiu ' ntirurUon»,
des moyens de la prévenir el d'y remédier. Ilem" -i bot»», an-
noié par M. H. Janmabd [Suite el fin ."O. - y, ■ijOnulîl-.
par M. Di! PtY, architecte, Si9. — .Ml i -
Lk Péhe, architecte, 567. ■ — .Note» e[
lapreiniére insiruclion du Comité de» \ , -. .". .-
velle manière de conslruire les voûte» dr> ej(uui> Oc P<fu,i;j.- Wii pcopow» par
la société d'Encouragement pour l'industrie naiioaaie, â'6. — Cuboiiocb : Tra-
vaux de la ville de Pari», jardin du Luiembourit. — Un tnarrhr aui fleur» a ta
place Saint-Sulpice. — Bibliothèque Sainte-Geiieviéve. — (.«ncouri pour uu grand
ihéJIre à Toulouse. — Ecole centrale de» an» et manufaclorr». — Umz plaisrktt
sur métal représentant : l'une, double, diverses figures el tracés rrlaiifsaU l*»o-
rie des voûlts; raulre, les plans et coupes d'une ecule chauffée el rmiiUr par In
procédés de M. RÉKÉ DuvoiB ;enoulr(, irente-dtuxgracurrt sur t<,iêJaiu le le Tir
KO DE NEPTFnBRE. — HISTOIRE : Deuxième insiruclion du Comilê bèaloriqur
des Arls el Monuments : civilisation chrétienne; style rnman el iiyle gubi^ae:
détails extérieurs de l'église (suite;, r-M — THEORIE : Euinlibrr d. • vodira eti
berceaux cylindrique» (Se article), par M. Vvo> Viihbce4| . .^a-. — MU A>CES:
Trois joursà Rouen (4" article , par .M. h. Ja>m«»ii. a,, 'r i ■. .t. - ( h><>-
MQt'E : Un hippoilroine a Pari». — inaujturaiion dt-> '
Paul el de La Villette. — Grand viaduc sur (a l.oire. -
Histoire de l'Art monumental. — Deux planches sur tn , .
divers déiails de la charpente de t église Saint-Ouen à Hourm, el drmx fifres re-
latives à l'article sur Chumidilé; l'autre, les enupesd'un* salle a'ktfttai rhaujfrr
et ventilée d'après le système de M. Roi Octuib. — £a «aiira, tsmft-st^ fra-
vures sur bois dans le texte.
K» D'OCTOBRE. — HISTOIRE : Deuxième Insiruclion du Comité lili|iiil^»i ée«
Arts et Miinuinents : civilisation chrétienne, »lTle roman ri ni\r (oikiaaa ((■•>),
433 — PRATIQUE: Du 4;haufrage el de la Ventiiaii-n I- sririr . Cbâoîbfr et
Ventilation des écoles et de» «aile» d'asile, par M. I
inidiie dans les construciion». des moyen» de l.i
pléiiient des annotations ajoutée» au Mémoire de .\l i >
NiABI), 416. — Engins de construciion; moufle a uiprijust» *it U. N
architecte, par .M. b^RB«l.. ancien élève de l'Ecole Polyieclinique. 454. - I
sur b'S théâtres : l'Opéra, par M. H .MfV.tiDUB, 4S3. — A ROI LacTBca». -
Planches sur acier, representafl : l'une tes dttrrses apmtieatfmt du rr
engrenages, rie M. Nkpvki', architecte: l'autre, plamekt JouUe, tt plan ■■
de M. H. M»V!(AI>IEB.
K° DE :«OVEViBRE. — HISTOIRE : i' Instruction du Comité hû'oriqiie de* arts et
monnmenis : civilisation chrétienne; style» roman el icolliique. Km Col **l —
PRATIQUE: llams nouants sur la Garonne, ronslruit» par M. J. LtraacrK, ar-
chitecte, 490. — Chauffage el venlilalion d'une talle d'hApilal, par M. Hroe Oc-
VOIR, 493. — Etudes sur les Ibéilre» : l'Opéra, par M. H. liiT:<tDim «aiie , 4SS.
— MELANGES : Une découverte importanie pour I assaintsemenl de» tille», par
M. PERBEVMONn, 512. — BiBLioGBAPHii : Traité de» ordre» d'archiUciBie appli-
ques à l'arcliiiecture rurale, par le raarqui» de Uauremoai; coapto-natf* par
M. Du .MÉGE, 415. — r.urres|H)ndancc : 547 : Nouveaui parqueta ta iir<4J«4* i Siraa-
bo'.irg; Iravaux récemment achevé», en train d'riermion el projeta dJM le tfe-
parlement du Haut-Rhin; iravaux en cours i Bordeaux. — Kotoaarcn
■ ' 'de de labrwatioa 4** bri-
V ^- en Italie, itt.— fnairi
I Ii:jron et I finir auBiii tfct
M. le prefei de boUm ; «ftalre •
.1.1 ci..ï:rjii de Blot« - n al 111
^lepkm-
•Un. —
procède d'assainissement des egouls, 511.—
ques el des Unie», ib. — Sur l'architei Inr.- >
vallon du fer dan» la mi r, 525. — Chu
valiers de la Lésion d'honneur ; un
prêcher de la cathédrale de Troye» ;
lion du théâtre de Nantes; église gothique .u i
caiiisme pour toiiles les horloge» il une ville ;staii.
son. Grand Iheàtre en construciion à Livooru
Publications nouvelle». — Grand 'iràpiial de Milan, IM. — ïmtsftumrtttt sur anrr
repreienlint : l'un*, PI. ii, le plan cTunt ttole /huante dt ««Miioa rvmttruiU
sur la liaroniie, devant Bordeaux, par El. J. Lafmrfu*. ureiilttu; — ■•« aairr
/'/. 26, 1rs Cnupes el élévations de ce aièUU elmhlittrwunt; — la Itmitltmt, JH- ».
iint travée du premier étage sur la rue. du (iranel Uôftal dt MUmu, d'ufrn les
dessins di .M. Thumeloup. — t'a outre. 42 jrararea sur Ma da»u la Itxit.
K> UK uECEmiRE. - HIS10IRE : L'Alhambia lie anide), par B. Césaa Dali.
52» —MELANGES: Troi» jour» a Rouen .i» article, par M. H- JaaaiâM, «r-
r»i(ei-ie,i58. —Concours pour un projet déballe aux frain» pour la viliede Mat*.
b59 _ Petite rorrrsponilance, 558. — i a»i.s ou HATliars. — l'a« ^aad* aair
nriar, rrprrJCBianl le plan de la forimsst de f Àlkmmira PL Ht,; et f «nm
grandes planches sur iois. représentant ; la PI. M\ une laaeriptwa dt l'JUhmus-
bra ; la PI 51 , diverses tues du mime 'difir* , ta PI. 5i, le» r««j aet mrra ém Htm
el de t'elang ; la PI. 54, p<«i«Mra Afara wunirami I* iftttmê 4* faaXrafn'— eu
routes stalactites.
FIN DE L.V TATLE DES SO.»M.\IRES.
T. V.
57
TAHI,E D::S 293 GRAVLHKS SUH KOIS l>SK«Ki:S DANS LK TKXTK.
.j8()
TAinJi DliS 21)3 CHAVIRES Sl]H HOIS l\SÉHÉi:S DAIVS LE TEXTE-
AusiDKs dcs Eglises îles XI" el XI 1' siècles, "iiô. — Al)>iilcs de l-'oii-
Icviaull et de Cdiiie, 48i-
AitiAMuilA : Ariniles. 533.
Ai.i.KK couvcrle, lO'J.
A.Miio.N ou ciiaiie priiiii.ixe. 'JOS.
A>iPiiiiiiiliTiii: l'uiiiaiii. Ifiii.
A.MourissiîMKNT de» églises de (.'.ùme el de Sle-M.ii'ie()e'i'oscniicll<i,3Ul.
A.MÉKIXES, li().
Auc.AOKs : romane, 291. — De .Sainte-Marie de Tosraiiclla. 'Vti. —
i'Ieiii ciiiire, 30:2. — Ituinaiie de Saiiit-tJuriiiaiii-des-l'rés, 303. —
Surhaussée cl Irilobée, iO. — Ogivale de diiïéreiites formes. 304.
— Surbaissée, 30G. — lîoniaiic décorée, .307. — De r.\lliaiii-
bra , 533.
Akc-doita.nt, Mi.
Ahciiivolths rorii.iiics el golliique.<, 3()'J et suiv.
-XBCS de trioiiiplie romains, 1.58. — De Ucims el d'Orange, i6.
.Vl'tkl priiiiitil, 207.
IUll'sthadë de Sainl-'îervais, 339.
ltA^uEAl:x ou fri.«es de reuillages de Ménil-Aubry. 514.
itAi>iisriiKbs des basiliques liilines, 205.
lÎARUOWS, 2il0.
Hase des colonnes de St-Denis. 292, — de Sl-Gerniain-des-Prés, 295.
liASiLigLE ualto-romaine, 165.
Oa.mi> romain, Mil.
Cariaiide de Katisbonne, i29i.
CiiAi'iTEAtx (leuille de) grecs, 114. —Feuilles de chapiteaux gallo-
romaius, l'iS. — Chapiteaux romans et uolhiques de différenles
lornics el de dillérentes époques, 295. et suiv.
i;ii.\TEAL de l'ierrefonds : Arcade ornée, 315 — Gargouille. 338.
t^iBoiiiLM primilif, 207.
CiiiQUE gallo-romain, Kii.
Claveaux des arcades romanes et gothiques : Leurs décorations, 307.
Clocuer de Kolre-Dame de Dijon, 2.55. — Clocher d'Ainay. à Lvo!i,
308, 485. — Clochers en Normandie el de Saint-Denis, ^éfi, — Clo-
chers de campagne, -487.
Ci.ocheto.ns de Notre-Dame de Paris, — de lîeinis, etc., 3i3.
Coi-oNNE historique gallo-romaine, I.M)— Colonne romane el gothique,
291. — l'Ianj. de colonnes, 292. — Bases, ib. — Fùls, 293 el suiv.
— Leurs accouplements, 301.
Co.NsoLEs pour les mats des ampliilhé.ilre^, l()2. — Consoles de la ca-
thédrale de Ucims et de l'église de Coulommiers, 292.
CoNSTBi'CTio.N cyclopéenuc, 113.
Combe-forts des églises romanes el gothiques, 340; — à Trêves, ib.\
— à Cologne, 341 ; — à Saint-Denis, ib.\ —à Saint-Gervais, i6.; —
à Chartres, 342 ; — en Normandie, eic. , ib. cl suiv.
COHBEALX : Bords du Uhin , Ratisbonne el Normandie, 313 el 314.
Coupe de rempart romain, 154.
CouBONNEME.M des fallcs romans et goiliiques. Ô57 el suiv.
CbÉiNeaux d'une église (bords de la Loire), 339.
Cromlech, 108.
Cbosses eu pierre, de St-Denis. de Sl-Gervais et de Clermout. 311.
DÉcoRATiox des murailles des églises romanes et golhiques, 289 et
suiv.
DoLHEM , 109. — Demi-dolmen, 110.
Kglise : — Du XI»; siècle, sou plan, 245. — De Rosheim, 248.
Emplecto.n, 151.
l'EisÈTBES des églises romanes el gothiques, 585. — Leurs différentes
formes, 586; — Du cloître de Cologne, 587. — Fenêtres ogivales,
ib. et suiv. — Fenêtres rayonnantes, 588.— De Saint-Jean de Latran,
589. — De Saint-Gervais cl d'Angleterre, 590. — D'Ecouen, 591. —
Fenêtres rectangulaires, ib. — leuêlres ogivales dans des arcades
romaues, 592. — Fenêtre triangulaire curviligne, 595.
Feuille erecque : 1 14. — D'olivier el d'acaalhe, 1 18. — F'risée, ib.
Flèche de la Sainle-Chapellc, 489.
Fonts baptismauv (irimilifs, 206.
Fhontoms romans et uothiqucs, 295 el suiv.
liAHGOlu.LK ilo l'Icrrefoods, 5.58.
IIVPOCAUSTE, 166.
K-ABNAc : .Sa grande salle hypostyle. 41 .
Macebia. loi.
.Mâchicoulis d'.Msues-.Mortes et du rliAlenu de Mehun, 339.
Maiso.n romaine : Sun plan, ItMJ.
.Menhir, 108.
.Mosquée du .Moristan au Caire,'39.
Moulins romains, 167.
Muns d'enceinte romains. 167.
Notre-Dame : — De Taris : son plan. 2-i7; — Ses tours, 486; — Do
Dijon. 25.'); — De Tuiliers : son porluil, 250.
OKiL-DE-BoFi F des églises romanes, 590.
Ogives de différentes formes, 504 el suiv.
Opus incertum, l;iO. — Opus reliculalum, ib.
pALMETTts urccques. 113.
TiERRE tournaille, 109.
Pierres liées, 154.
\ TiLK romaine, 160.
Pla.n : — d'une maison romaine, 166. — D'une église du Xl< siècle. 24i(.
— De l'église Saint-Gcrniain-dcs-Piés el de .Notre-Dame de Pari»,
247. — De Saiiit-Jeaii-de-Beauvais. 248. — Plan de diverses es-
pèces de Iranssepts, 219. — Tlan clés porches du Temple, à Paris,
de Sainlc-Uaileuiinde a Poitiers, d'une église de Monréal, en Sicile,
251. — De 1,1 caihédialede Reims, de Sainl-Vinccnl. à Rome. 252.
De la cathédrale de Trêves, (6.
PLATE-BA.NDEà angles arrondis. 507.
Porches des églises du Temple, it Paris, de Sainte Radegonde. à Poi-
tiers, de Monréal, en Sicile. 251. — I>e la cathédrale de Reims, de
Sainl-Vincenl, à Rome, de Saiiil'/.énon, à Vérone, 252. — l'orches
militaires, 255. — Porche de décoration, ib. — Porche de la Ferlé -
.Sainl-.Vubin, en Sologne, d'une église à Reims, 2M.
PoBTAiL de Noire-Dame de l'oitiers, 2.'>0.
PoBTE de ville rnmaine, 151 . — Porte de Saint-Jean-de-Beauvais. 434.
Pi'iTS romain, 167.
Rempart romain : Sa coupe, 154.
Rinceaux grecs, 511.
Rose de SainI Etienne de Beauvais, 387. — .\utre rose, 391.
Saint Denis, 292, 511. 341. — Sainl-Etieiine de Beauvais : Décora-
lion des murs, 289— SainlGeniiaiii-des-Prés, 293, 305. — Saiul-
Gervais de Paris. 511, 558, 3.59, 5i0, 590. — Saiiil-Jean-<le-Beau-
vais, 454.— Saint-Jean-de-Lalran, 389.— Saint- Vinceol, à Rome,
252. — Saint-Zénon. h Vérone, ib.
Sainte-Chapelle, 48!».- Sainle-.Marie de Toscanella, 502, 303, 509.
Sainte- Radegonde, à Poitiers, 251.
Silos romaius, 147.
Stèles, 114.
Structure grecque de la République, 150.
Tailloir de chapiteau du XIV<: siècle, 501.
Terres cuites coloriées, 116.
Théâtre romain, 161.
Tombeau de Brézé à Rouen, 514.
Tombelle gauloise, 110.
Tours de .S'oire-Dame de Paris. 486.
Tbanscept de Rosheim, 248. — Différentes espèces de transccpU, 549.
Tuiles romaines, 146.
TuvAux romains en terre et en plomb, 156.
Voies romaines, 1.52.
FIN DE LA TABLE DES 293 GRAVURES INSÉRÉES DANS LE TE.XTE.
•i8l
TAIU.K DKS (iHAM)i;S PLAVCHKS.
.,>■:
TABLE DES Gl\OI)ES 1>L\N(:IIES.
:\VtS Al ItlIlKlIl.
9
to
11
ir,
11
13
16
17
18,
19
p, TITKIÎS UKS Pl.ANCHKS. '"'S'-
Frontispice I
l'iaii sellerai de la Villa Pia -, ^ij
Vue intérieure (lu veflihulc de la Villa Pia (
Vue générale de l'Alliariilira i u^.
'Iliéorie de l'équilibre des voûtes en berceau i
Alliambra, vues de la porte do la Justice et dcl'Alcazaba. ■
Grandes portes d'aielier / . . ,
Petits calorifères à couiaiil d'air chaud i'
Salle de bains el de bains de pieds du collège royal de Uouen '
Calorifère ventilateur en fonte \
. Appareil de lessivage par circulation ' 192
Blanchisserie {Coupe et plans) )
Fourneau de cuisine pour collège j ,,,,.
Calorifères ventilateurs pour les hôpitaux et les écoles . . i ''
Ueniises el écuries de lord SlalTord [Plans)
il). lElévalionil eoiipes). . l
ib. [l'ians cl détails) .... ' -oj
«■(/. [Grandes coupes il élévation]. ,
Ue l'Humidité dans les constructions \
Projet d'hôpital par M. Du Puy /
. '^•« TITRK.S DES PLANClIi:s.
u«it ri.
20. Tliéoiic lie l'équilibre des voûtes
21. Cliaiiff.iue et vcnlihilioii d'école
•ii. Char()eiiledcSt<)uoii: lieriluniidilédans|p?ron<lnirtii.
25. .Mouflcsii eimren.iiies de M. .Nep\eii.
■2i. Plan d'Opéra par M. II. Meynadier. .
i25. Ecole floltanle de iialaiion [Plan;
-id. il,. [Coupes et i
27. Chauffage cl vcutilalimi d'une salle d'h'i
28. Grand hôpital de Milan l'remiiT étage sur lu rm
29. Pl.in eéiiéraldo la fiiricrr.sse de l'Alliamlira .
.")(). Alhanibra [lii'rriplidu dr lu porte de la Juitirt
7)1. ifc. iVuet dirertfi\
"2. »''■ [Cours du l.inni el de l'Elang .
ôô. il). (Plan el eovpes de la r*tiite de
la talle des Deux Svurt. . . .
5i.. ib. <Syftemedeeonstrii'-i"n-i'^ >■■--
les flalaetilct) .
V.i
r/n
KIM DK L.V lABLi: DKS CKA.MIKS PL.ANCHKS.
Pini». — T>r. Licimn »t iU>»f.. «' • ni» i
Tv^'"