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Full text of "Revue générale de l'architecture et des travaux publics"

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TRAVAIX    PI  ULICS 


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m^  DES  ARCHITECTES  DES  INGÉNIEURS  ^  ^ 

/|||  h  DES  ARCHÉOLOGUES  DES  INDUSTRIELS  ET  DES  PROPRIÉTAIRES    ^(^> 

$^ih  sous  LA  DIRECTION  DE  M  CÉSAR  DAiy  ARCHITECTE    M^û 


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^     GÉOLO&IE  stéréotomie:  MACHINES     "^ 
J^/p\  TERRASSEMENT 

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TONTS  ROUTES  CANAUX  EDIFICES  PUBLICS 
CONSTRUCTIONS  PARTICULIÈRES 


.BATIMENTS  RURAUX  JARDINS  &C      (>r)Y'G> 


PEINTURE  SCULPTURE 
DÉCORATION    AMEUBLEMENT 


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LEGISLATION  JURISPRUDENCE        '\x^< 


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RUE  DE  EURSTEMBERG  N°6  A  PARIS 


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5^  AKNÉE. 


INTRODUCTION. 


(1844.) 


La  Revue  de  ï Architecture  et  des  Travaux,  Publics  entre  aujourd'hui  dans  sa  cinquième  année;  elle  n'est  donc- 
plus  à  l'état  d'essai,  sa  durée  n'est  plus  une  chose  problématique. 

Nous  ne  rappellerons  pas  les  marques  d'approbation  et  de  haute  estime  données  souvent  aux  principes  qu'elle 
professe  par  les  corps  artistiques  et  savants;  mais  à  ceujf  qui  voudraient  s'éclairer  sur  sa  véritable  valeur,  nous 
dirons  :  Jetez  les  yeux  sur  notre  passé. 

Ajouterons-nous  maintenant  un  mot  sur  l'avenir?  Ferons-nous  de  nouvelles  promesses  en  terminant  la  première 
page  de  notre  cinquième  année?  En  thèse  générale,  non.  Nos  principes  sont  connus,  et  la  manière  dont  nous  les  ap- 
pliquons l'est  aussi.  Nous  nous  bornerons  donc  à  énumérer  quelques-uns  des  travaux  que  nous  avons  mis  sur  le 
chantier,  et  dont  certains  sont  déjà  presque  terminés. 

Et  d'abord  nous  publierons  un  travail  historique  et  pratique  sur  VAlhambra;  huit  ou  dix  planches  l'accom- 
pagneront, et  un  grand  nombre  de  gravures  sur  bois,  insérées  dans  le  texte,  en  feront  comprendre  les  détails,  ^e 
Club  de  la  Réforme,  ce  monument  d'architecture  privée  dont  M.  Ch.  Barry  vient  de  doter  Londres,  sera  donné  avec 
ses  détails  de  construction,  de  service,  de  chauffage,  de  ventilation,  etc.  Un  travail  complet  sur  le  chauffage  et  la 
ventilation  des  édifices  publics  et  des  maisons  particulières,  des  théâtres,  des  hôpitaux,  des  collèges,  des  écoles, 
des  tribunaux,  des  sécheries,  des  buanderies,  des  serres,  etc.,  sera  fait  par  un  homme  de  l'art  à  qui  la  science  et 
l'expérience  sont  également  familières.  Des  modèles  nouveaux  de  maisons  particulières,  ainsi  que  d'écuries,  de 
cuisines,  etc.,  seront  également  donnés  à  nos  lecteurs.  Mais  ces  travaux  pratiques  ne  nous  empêcheront  pas  de 
traiter,  comme  par  le  passé,  les  théories  d'art  et  de  science,  et  l'histoire  non  plus,  cette  génératrice  du  présent, 
ne  sera  pas  plus  oubliée  que  pendant  les  années  précédentes;  et  si  l'Alhambra  et  Fart  indigène  nous  en  laissent 
la  place,  nous  évoquerons  aussi  les  débris  de  l'art  antique  de  la  Grèce. 

T.   V.  1 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


TOMBEAU   DE   CHARLEMAGNE 
A  AIX-LA-CHAPELLE, 


Paris,  17  dcccnibic  1843. 


Monsieur  le  Directeur, 


Pendant  que  vous  prolongiez  vos  intéressantes  reclierclicssnr  l'é- 
tat de  l'art  et  de  l'industrie  dans  un  des  principaux  centres  d'activité 
duglobe,  je  me  trouvais  à  Aix-la-Chapelle,  en  présence  d'un  art  qui 
ne  vit  plus,  mais  dont  on  ne  saurait  trop,  à  mon  avis,  réveiller  le 
souvenir  et  révéler  les  grandeurs.  Je  parle  de  la  magnifique  orfè- 
vrerie du  Moyen-Age,  dont  nous  sommes  si  pauvres  en  France,  et 
dont  l'Allemagne  est  encore  si  riche.  L'impression  vive  de  sur- 
prise et  d'admiration  qu'éprouvent  unanimement  à  son  aspect  les 
nombreux  étrangers  qui  visitent  chaque  jour  le  trésor  d'Aix-la- 
Chapelle  durant  la  saison  des  bains,  me  persuade  que  la  reproduc- 
tion du  système  architectural  de  ces  brillants  édifices  de  métal  se- 
rait appelée  aujourd'hui  à  un  succès  assuré  auprès  des  hommes  de 
goût  aussi  bien  qu'auprès  du  peuple,  si  l'artiste  moderne  savait,  à 
force  d'observation  et  d'amour,  s'inspirer  du  génie  des  anciens, 
tout  en  profitant  des  procédés  plus  avancés  acquis  à  notre  époque. 
Vous  verrez,  je  l'espère,  un  essai  de  ce  genre  à  la  prochaine  Expo- 
sition de  l'industrie  nationale  :  puisse-t-il  mériter  vos  suffrages  à 
quelques  égards,  et  préparer  la  solution  du  problème! 

Je  ne  pouvais  pas  séjourner  à  Aix-la-Chapelle  sans  donner  plu- 
sieurs jours  d'étude  au  vénérable  et  imposant  édifice,  le  seul,  si  je 
ne  me  trompe,  qui  soit  authentiquement  l'œuvre  de  Charlemagne. 
N'est-il  pas  étrangeque  la  docte  Allemagne  se  soit  bornée,  jusqu'à 
ce  moment,  à  en  publier  des  dessins,  sinon  inexacts,  du  moins  fort 
incomplets,  alors  qu'il  s'agissait  d'une  page  aussi  capitale  de  l'his- 
toire de  l'art?  Je  dois  à  l'obligeance  de  M.  l'inspecteur  des  travaux 
publics  de  la  province  d'Aix,  le  conseiller  d'architecture  Craemer, 
des  plans  et  des  coupes  relevés  par  lui  pour  servir  à  la  restauration 
dont  il  est  chargé,  et  j'ai  fait  moi-même  coter  et  profiler  toutes  les 
moulures  et  les  corniches  à  toutes  les  hauteurs.  Je  m'occupais  de  ce 
travail  lorsque  j'eus  le  plaisir  de  faire  la  précieuse  connaissance 
d'un  homme  de  talent  que  vous  connaissez  par  ses  ouvrages. 
M.  le  baron  deGuast,  l'auteur  du  travail  intitulé  Ravenna,  venait 
d'être  nommé  inspecteur-général  des  monuments  historiques  de 
Prusse,  et  il  commençait  par  Notre-Dame  d'Aix-la-Chapelle  son 
examen  des  richesses  archéologiques  de  l'Allemagne  septentrio- 


nale. En  poursuivant  ensemble  quelques  recherches,  nous  avons 
trouvé  plusieurs  bases  en  pierre  appartenant  aux  colonnes  de  mar- 
bre delà  galerie,  un  couronnement  d'architrave  destiné,  sans  au- 
cun doute,  à  porter  les  petits  cintres  insérés  dans  le  vide  des  gran- 
des arcades  supérieures  de  l'octogone,  ainsi  qu'une  autre  pierre 
de  couronnement  qui  nous  a  semblé  avoir  du  appartenir  au  mur 
où  étaient  découpés  les  trois  petits  cintres,  et  sur  lequel  s'ap- 
puyait le  second  ordre  de  colonnes.  Peut-être  serait-il  à  désirer 
que,  dans  les  restaurations  commencées,  on  reproduisit  modeste- 
ment ces  diverses  moulures,  au  lieu  de  puiser  dans  l'éternel  Vi- 
gnole  des  profils  qui  n'auront  jamais,  quel  que  puisse  être  leur 
mérite  propre,  celui  d'être  en  harmonie  avec  le  style  carlovingien. 
Cette  considération  sera,  je  le  crois,  vivement  sentie  un  jour,  lors- 
que le  mouvement  imprimé  depuis  quelques  années  aux  études 
d'archéologie  du  Moyen-Age  se  sera  répandu  partout  en  Europe. 

Je  pourrais,  si  vous  le  désiriez,  revenir  ailleurs  sur  ces  questions. 
Pour  aujourd'hui,  permettez-moi  de  me  borner  a  vous  donner 
quelques  renseignements  exacts  sur  deux  faits  que  les  récits  des 
journaux  ont  étrangement  dénaturés  :  l'ouverture  de  la  châsse  de 
Charlemagne,  faite  en  ma  faveur,  et  les  fouilles  pratiquées  quel- 
que temps  après  dans  la  cathédrale  par  M.  d'Olfers,  directeur-gé- 
néral des  Musées  de  Berlin,  qui  a  bien  voulu  m'inviter  à  y  prendre 
part.  Pardonnez-moi  quelques  détails  :  tout  ce  qui  touche  la  dé- 
pouille mortelle  d'un  homme  qui  est  resté  une  des  plus  grandes 
gloires  de  la  France  et  du  monde  ne  peut  être  sans  intérêt  pour 
vos  graves  lecteurs. 

Nul  n'a  jamais  révoqué  en  doute,  ainsi  que  quelques-uns  ont 
paru  le  supposer,  l'existence  du  corps  de  Charlemagne  dans  la 
grande  châsse  romane  placée  autrefois  au  fond  du  chœur,  derrière 
le  grand-autel,  et  conservée  aujourd'hui  dans  le  trésor.  Quoi  qu'il 
en  soit  des  poétiques  descriptions  qui  se  lisent  en  plusieurs  chro- 
niques estimées,  relativement  à  la  manière  triomphale  dont  le 
corps  du  grand  monarque  aurait  été  disposé  dans  son  sépulcre,  ou 
Othon  III  l'aurait,  dit-on,  découvert  en  1001,  assis  sur  un  trône 
d'or,  la  couronne  en  tête,  couvert  du  manteau  impérial,  la  main 
gauche  appuyée  sur  un  riche  évangéliaire  et  tenant  de  l'autre  un 
sceptre  d'or;  ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  Frédéric  Barbe- 
rousse,  ayant  obtenu  de  l'antipape  Pascal  la  canonisation  de 
Charles,  releva  ses  ossements,  au  milieu  d'un  grand  concours  d'é- 
vêques,  afin  de  les  offrira  la  vénération  des  peuples.  Or,  on  sait 
que  l'usage  universel  était  de  renfermer  les  reliques,  à  cette  occa- 
sion, dans  des  châsses  d'autant  plus  splendides  que  le  donateur 
était  plus  miignifique  et  le  saint  plus  vénéré.  Celle  qui  porte  le 
nom  de  Charlemagne,  à  Aix-la-Chapelle,  a  dti  être  exécutée  dans 
ce  but,  et  achevée,  sinon  sous  Frédéric,  du  moins  peu  d'années 
après  lui,  à  ne  s'en  tenir  qu'aux  simples  inductions  archéologicjues, 
puisque  le  style  de  la  grande  couronne  de  lumière  qui  porte  les 
noms  de  cet  empereur  et  de  sa  seconde  femme  Béatrix,  est  le 
même  roman  fleuri  qui  s'épanouit  sur  la  chîisse,  et  que  les  bas- 
reliefs  de  l'une  présentent  les  mêmes  profils  que  les  sujets  gravés 
de  l'autre.  D'ailleurs,  tous  les  historiens  de  l'Église  étaient  d'ac- 
cord sur  ce  point,  depuis  les  Noppius,  les  de  Beck  et  les  Meyer, 
jusqu'au  dernier  qui  vit  encore,  le  docte  abbé  Quix,  qui  a  bien 
voulu  nous  faire  part  du  fruit  de  ses  longues  études  locales.  Je 
n'avais  donc  pour  ma  part  aucun  doute  sur  ce  fait;  mais  cette  cer- 
titude ne  diminuait  aucunement  ma  curiosité,  elle  l'excitait  au 
contraire.  J'étais  vivement  désireux  de  m'assurer  que  les  reliques 
de  saint  Léopard,  déposées  par  Frédéric  dans  le  même  cercueil, 


RKVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


ainsi  que  l'affirmait  de  Beck,  n'étaient  pas  confondues  avec  celles 
de  Charlemagne.  Je  voulais  confronter  ces  derniers  ossements 
avec  ceux  que  l'on  conserve  séparément  dans  trois  reliquiiires  du 
XlVe,  du  XVe  et  du  XVI»  siècle,  afin  de  constater  l'identité  du 
corps.  Enfin,  je  n'étais  pas  sans  espoir  de  rencontrer  dans  l'inté- 
rieur de  la  châsse  quelque  acte  antique  jetant  un  nouveau  jour 
sur  les  faits,  ou  de  trouver  du  moins  les  précieuses  étoffes  que  le 
magnifique  Frédéric  devait  avoir  employées  pour  ensevelir  celui 
qui  était  de  sa  part  l'objet  de  tant  d'admiration  et  d'amour. 

J'osai  donc  solliciter  du  chapitre  d'Aix  une  faveur  inouïe,  à 
laquelle  je  ne  pouvais  avoir  d'autres  droits  que  le  désir  et  l'espé- 
rance de  contribuer  par  quelques  travaux  d'histoire  et  d'art  à  faire 
mieux  connaître  l'incomparable  trésor  de  la  basilique  carlovin- 
gienne(l).  Mon  indiscrète  demande  rencontra  une  bienveillance 
que  je  ne  saurais  assez  reconnaître.  M.  le  prévôt  Claëssen  consentit 
à  ce  que  la  chûsse  fût  descendue  de  la  place  élevée  où  elle  se  con- 
serve, et  voulut  présider  lui-même  à  son  ouverture.  Nous  eûmes 
beaucoup  de  peine  à  découvrir  le  secret  de  la  construction.  En 
vain,  les  premières  plaques  d'émail  enlevées,  cherchions-nous  à 
pénétrer  dans  les  jointures  des  épaisses  planches  de  chêne;  nous 
les  trouvions  partout  fortement  assemblées.  Ce  fut  seulement  après 
deux  heures  de  recherches  que  le  mot  de  l'énigme  se  rencontra. 
Les  ouvertures  avaient  été  pratiquées  au  milieu  de  chaque  versant 
du  toit,  et  les  portes  qui  les  fermaient  se  trouvaient  fixées  par  des 
liens  de  fer  sous  les  plaques  de  cuivre.  Quand  ces  liens  eurent  été 
détachés,  ce  ne  fut  pas  sans  un  religieux  saisissement  que  nos  re- 
gards avides  pénétrèrent  dans  l'intérieur.  Nous  y  aperçûmes  d'a- 
bord une  feuille  de  parchemin,  puis  des  étoffes  et  des  ossements 
disséminés,  la  plupart  d'une  bonne  conservation.  Le  parchemin 
était  un  acte  du  chapitre,  qui  remontait  à  l'époque  de  Louis  XI, 
et  constatait  que  l'os  de  1  "avant-bras  avait  été  extrait  de  la  châsse 
à  la  demande  de  ce  prince,  pour  être  placé  dans  un  reliquaire  dû 
à  sa  libéralité.  L'avouerai-je?  Je  brûlais  d'envie  de  tenir  entre  les 
mains  les  étoffes  dont  j'entrevoyais  le  dessin  et  les  couleurs,  et  qui 
me  semblaient  accuser  par  la  grandeur  du  style  l'époque  du  rival 
de  Philippe-Auguste  ;  mais  une  main  du  XIX^  siècle  pouvait-elle 
bien,  sans  frisson,  remuer  les  cendres  d'un  Charlemagne,  dç  celui 
dont  le  nom  s'accole  à  ceux  d'Alexandre,  de  César,  de  Napoléon, 
et  reste,  à  mon  avis,  le  plus  grand  de  tous?  Nous  eûmes  cette  au- 
dace. Il  fallait  bien  d'ailleurs  examiner  en  détail  l'état  de  ces  au- 
gustes restes  pour  en  dresser  procès-verbal  et  procéder  à  la  con- 
frontation désirée. 

On  eut  bientôt  la  garantie  que  la  châsse  renfermait  seulement 
un  corps,  auquel  il  ne  manquait,  à  peu  de  chose  près,  que  les 
grands  ossements  conservés  à  part.  On  vit  aussi  que  les  traditions 
appuyées  sur  Eginhart  relativement  à  la  haute  stature  du  grand 
homme  n'avaient  rien  d'exagéré  :  son  fémur  fut  trouvé  de  52  cen- 
timètres. 

Il  nous  restait  à  étudier  de  près  ces  étoffes  contemporaines 
de  nos  plus  grands  monuments,  et  dont  l'ornementation  devait 
d'autant  plus  exciter  notre  Intérêt  que  chaque  branche  particulière 
de  l'art  a  eu  ses  traditions  et  gardé  son  faire  propre,  ainsi  que  nous 
le  voyons  dans  la  sculpture  en  pierre  et  dans  les  ivoires,  dans  la 
peinture  sur  verre,  la  peinture  en  émail  et  celle  des  manuscrits. 

(I)  Un  de  nos  hommes  d'État  les  plus  distingués,  qui  partage  entre  l'iiis- 
icirc  et  l'art  les  loisirs  que  lui  permet  la  politique,  m'exprimait  dernièrement, 
à  Aix,  la  conviction  que  ce  trésor  est  le  plus  précieux  de  l'Europe. 


Pour  développer  ces  étoffes  à  loisir,  nous  enlevâmes  avec  le  plus 
grand  respect  la  poussière  sacrée  dont  elles  étaient  couvertes  ;  je  pus 
alors  en  prendre  des  calques  précis.  L'une  (il  ne  s'en  trouvait  que 
deux)  était  ornée  de  fleurs  rouges,  bleues,  blanches,  vertes  et  jau- 
nes, sur  un  fond  violet,  et  tissue  en  soie,  mais  d'un  caractère  artis- 
tique moins  prononcé  :  c'est  elle  qui  renferme  en  ce  moment  la  dé- 
pouille de  Charlemagne  soigneusement  enveloppée. 

L'autre ,  tissue  en  sole  et  en  fil ,  nous  apparut  magnifique  de 
forme  et  d'harmonie  de  couleurs.  Sur  un  fond  rouge  amarante 
étaient  semés  de  larges  ovales,  au  centre  desquels  s'avançaient  des 
éléphants  richement  caparaçonnés.  Les  broderies  des  encadrements 
et  la  rose  jetée  au  centre  des  vides  laissés  entre  les  ovales,  rappe- 
laient ces  crêtes  fleuronnées  qui  se  découpent  sur  les  châsses  du 
xiie  siècle;  au-dessus  et  au-dessous  des  éléphants,  se  dessinaient, 
sur  les  fonds,  des  végétaux  que  l'on  eût  dit  avoir  servi  de  type  aux 
arbres  de  Jcssé  que  nous  admirons  à  Saint-Denis  et  à  Chartres. 
L'effet  général  avait  quelque  chose  de  celui  des  vases  étrusques. 
D'où  provenait  ce  splendide  travail  ?  Était-ce  un  produit  de  l'Al- 
lemagne? Frédéric  l'avalt-il  fait  venir  de  l'Italie  ou  de  la  Sicile? 
Etait-ce  un  ouvrage  latin,  grec  ou  arabe?  Notre  faible  science  hési- 
tait, quand  tout  à  coup  une  inscription  se  découvre,  une  inscrip- 
tion tissue  dans  l'étoffe  :  elle  était  écrite  en  grec  ;  mais  en  grec  du 
Moyen-Age.  Faut-il  le  dire?  elle  nous  refusa  d'abord  son  secret.  Je 
me  plais  ici  à  rendre  hommage  à  la  bienveillance  d'un  membre  de 
l'Institut,  qui  passe  à  bon  droit  pour  un  des  plus  habiles  hellénistes 
d'Europe.  M.  Hase,  à  qui  je  fis  aussitôt  parvenir  un  calque  de  l'in- 
scription, n'eut  besoin  que  d'une  seconde  pour  lire  : 

-j-  Par  Michel,  intendant  du  trésor  privé  et  du  palais, 
}-  [Et  par]  Pierre,  gouverneur  de  Négrepont.  Deuxième  indiction. 

Les  fonctions  du  premier  personnage,  à  la  cour  des  empereurs  de 
Constantinople,  correspondaient  exactement  à  celles  de  notre  in- 
tendant de  la  liste  civile  et  de  la  maison  du  roi. 

Rester  l'unique  possesseur  d'un  dessin  d'aussi  grand  prix  m'eût 
semblé  de  l'égoisme  ;  j'en  fis  prendre  une  copie,  à  la  demande  de 
M.  d'Olfers,  pour  qu'il  pût  en  faire  hommage  à  Sa  Majesté  le  roi  de 
Prusse;  et  j'autorisai  M.  de  Hafneràle  reproduire  dans  le  bel  ou- 
vrage qu'il  publie  à  Manheim,  sur  les  costumes  du  Moyen-Age,  sans 
renoncer  toutefois  à  l'imprimer  moi-même. 

Cette  belle  étoffe  n'est  pas  la  seule  que  nous  ayons  décou- 
verte. Malgré  tous  les  chocs  que  la  jolie  ville  d'Aix,  placée  sur  la 
principale  route  de  l'Europe,  a  pu  recevoir  dans  les  grands  conflits 
du  dernier  demi-siècle,  le  vigilant  amour  de  ses  habitants  pour  leur 
trésor  avait  toujours  su  le  soustraire  au  vandalisme  des  vainqueurs. 
Je  le  savais,  et  j'en  étais  encore  plus  porté  à  soupçonner  que  plu- 
sieurs objets  précieux  attendaient  au  fond  des  vieilles  armoires  le 
regard  de  l'antiquaire.  En  effet,  grâce  à  la  complaisance  de 
51.  l'abbé  W  idenhaupt,  custode  du  trésor,  je  rencontrai  quelque 
part,  parmi  les  vieux  meubles  de  l'église,  une  caisse  en  bois  de 
chêne  remplie  de  saintes  reliques,  de  celles  probablement  que  Ion 
aura  retirées  des  nombreux  autels  aujourd'hui  détruits  :  quelques- 
unes  étaient  enveloppées  dans  des  soieries  des  XI^  et  XII>^  sïècles, 
de  la  plus  grande  beauté.  Pourquoi  faut-il  qu'il  soit  si  diffîcile  de 
faire  jouir  le  public  de  ces  trésors  sans  s'exposer  à  de  pénibles  sa- 
crifices? 11  serait  digne  de»  gouvernements  d'apprécier  les  grands 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


8 


travaux  qui  remplissent  véritablement  de  grands  vides,  et  de  favo- 
riser d'une  manière  spéciale  ceux  qui  ajoutent  des  valeurs  incon- 
nues et  importantes  à  la  somme  de  matériaux  que  chaque  siè- 
cle met  en  œuvre,  pour  créer  l'art  qui  le  caractérisera  dans  l'a- 
venir. 

La  châsse  de  Charlemagne  était  refermée  ,  quand  arriva 
M.  d'Olfers,  dont  le  voyage  avait  pour  but  des  fouilles  à  prati- 
quer sous  le  sol  de  l'église.  Voici  à  quelle  occasion.  Durant  l'hiver 
dernier,  M.  le  prévôt  Claëssen,  ayant  fait  creuser  sous  celle  des 
arcades  du  portique  qui  est  contiguë  à  la  sacristie,  avait  découvert 
un  caveau  renfermant  un  cercueil  en  plomb  ;  mais  les  recherches 
s'étaient  arrêtées  là  ;  car  le  roi  avait  exprimé  le  désir  d'être  averti 
des  premières  découvertes  avant  qu'on  passât  outre.  Le  conseiller 
intime,  directeur-général  des  musées  de  Berlin,  venait  de  sa  part 
pour  faire  ouvrir  le  cercueil,  avec  l'autorisation  de  l'Ordinaire,  et 
continuer  les  fouilles. 

Nous  y  avons  consacré  une  partie  des  nuits  d'octobre.  Un  sa- 
vant distingué,  qui  a  publié  une  notice  pleine  d'une  rare  érudition 
sur  le  palais  de  Charlemagne  à  Aix,  et  qui  prépare,  depuis  dix  an- 
nées de  recherches,  un  travail  sur  la  basilique  carlovingienne, 
M.  le  professeur  Bock,  s'était  joint  à  nous,  ainsi  qu'un  jeune  prince 
dont  le  nom  doit  être  doublement  cher  aux  amis  de  la  religion  et 
de  l'art,  M.  le  comte  de  Furstemberg,  qui  décore  en  ce  moment, 
avec  une  splendeur  digue  d'un  souverain,  son  église  d'Apollinaris- 
berg.  Nous  espérions  posséder  aussi  Mgr.  le  coadjuteur  de  Cologne, 
dont  on  sait  les  travaux  archéologiques;  malheureusement,  il 
avait  alors  à  remplir  un  douloureux  devoir  auprès  de  sa  mère 
mourante. 

Pour  se  rendre  compte  de  nos  fouilles ,  qu'on  veuille  bien  se 
rappeler  le  plan  de  l'église.  Il  forme  au  centre  un  octogone  entouré 
de  deux  portiques  intérieurs  superposés,  lesquels  sont  renfermés 
dans  un  mur  polygonal  à  seize  angles.  Vis-à-vis  de  la  principale 
entrée,  trois  faces  de  ce  mur  ont  été  enlevées  pour  ouvrir  les  porti- 
ques sur  le  chœur,  plein  de  magnificence,  bâti  à  la  fin  du  XIV"  siè- 
cle. L'entrée  est  formée  d'un  porche  surmonté  d'un  étage,  ainsi 
que  les  portiques  intérieurs.  Son  rez-de-chaussée  était  jadis  ouvert 
sur  la  voie  publique,  et  c'était  dans  un  des  angles  que  se  voyait 
avant  la  révolution  le  tombeau  du  grand  artiste  à  qui  l'on  doit  la 
construction  du  chœur.  Gérard  Chorus  fut  au  même  degré  homme 
de  bien  et  homme  de  génie  ;  ses  compatriotes  eurent  pour  lui  au- 
tant d'amour  que  d'admiration,  et,  vraiment,  c'est  beaucoup  dire  à 
leur  louange  et  a  la  sienne.  La  reconnaissance  publique  fut  portée 
jusqu'à  fonder  à  perpétuité  une  lampe  qui  devait  rester  nuit  et  jour 
allumée  devant  sa  tombe.  Nous  avons  trouvé  et  religieusement  re- 
cueilli ses  cendres  éparses,  pour  les  renfermer  dans  une  caisse  de 
plomb,  et  les  replacer  au  même  endroit.  Espérons  que  bientôt  on  y 
pourra  relire  la  vieille  et  naïve  inscription  : 

Il  Gcrartius  Chorus  miles  virtute  sonorus 

«  Magnanimiis  inultuin,  scelus  hic  non  liguit  in  uUum. 

«  In  populo  magnus,  in  clerc  milis  ut  agnus.  » 

A  peu  de  distance  de  l'entrée,  et  au  Sud  de  l'église ,  se  trouve 
la  chapelle  Hongroise.  D'anciennes  fouilles,  décrites  par  les  vieux 
historiens  d'Aix,  avaient  fait  découvrir,  vers  le  centre,  un  grand 
bassin  en  pierre,  regardé  par  les  uns  comme  un  des  bains  ro- 
mains restaurés  par  Charlemagne,  et  estimé  par  d'autres  un  bap- 
tistère chrétien.  L'exploration  de  cette  partie  et  de  quelques  autres 
a  été  remise  à  l'époqûè  des  grandes  restaurations  qui  se  préparent; 
mais  nous  avons  trouvé  sous  la  voûte  du  portique  la  plus  rappro- 


chée de  la  chapelle  dont  je  parle,  outre  un  fragment  de  voûte  assez 
mystérieux,  de  larges  briques  romaines  qui  ne  nous  ont  pas  permis 
d'hésiter  entre  les  deux  opinions.  La  première  s'est  trouvée  en  ou- 
tre pleinement  confirmée  par  une  fouille  faite  au  centre  même  du 
dôme.  On  voit  aujourd'hui  en  cet  endroit,  et  au  niveau  du  sol,  une 
vaste  table  de  marbre  noir  sur  laquelle  se  lit  une  inscription  pleine 
de  grandeur  en  sa  brièveté  :  carlo  mao.no.  Que  couvrait  ce  mar- 
bre? N'était-ce  pas  dans  ce  centre  de  l'édifice  qu'a>ait  été  creusé  le 
mystérieux  caveau,  à  la  voûte  dorée,  où,  selon  les  chroniqueurs, 
Charles,  grand  dans  la  mort  comme  il  l'avait  été  dans  la  >  ie,  avait, 
durant  trois  cent  cinquante  et  un  ans,  depuis  la  fin  de  814  jus- 
qu'en 1166,  continué  de  tenir  le  sceptre  de  sa  main  glacée,  et 
porté,  sans  céder  sous  le  poids,  la  couronne  impériale?  Les  tradi- 
tions locales,  les  récits  même  venaient  confirmer  cette  présomption 
vraisemblable.  Un  vieillard  nonagénaire  nous  cita  sur  les  lieux  la 
conviction  des  vieillards  qu'il  avait  entendus  dans  sa  jeunesse. 
Mieux  que  cela,  nous  trouvons  l'architecte  qui  avait  à  s'accuser 
d'avoir  enlevé  dans  le  chœur,  au  tombeau  d'Othon  III,  la  large  table 
de  marbre;  il  tenait  de  la  bouche  de  l'évêque  d'Aix  sous  Napoléon , 
Mgr.  Berdolet,  qu'une  fouille  pratiquée  sous  ses  yeux  en  cet  en- 
droit avait  réellement  fait  découvrir  le  sépulcre  de  Charles. 

Ces  renseignements  pris ,  on  se  met  à  l'œuvre  ;  mais ,  chose 
étrange,  point  de  caveau,  et  point  d'indice  qu'il  en  eût  jamais 
existé  1  Seulement,  à  une  profondeur  de  deux  mètres,  et  dans  la 
direction  de  la  chapelle  Hongroise,  c'est-à-dire  du  Nord  au  Sud, 
nous  trouvâmes  un  canal  de  bains  romains  en  briques  larges  et 
épaisses;  et  au  delà  un  mur  allant  de  l'Est-Sud-Est  à  l'Ouest-Nord- 
Ouest,  sans  nul  rapport  possible  avec  l'église.  La  question  du  ca- 
veau n'est  pourtant  pas  entièrement  résolue,  puistjue  la  partie 
orientale  de  l'église  n'a  pas  encore  été  explorée. 

Notre  curiosité  fut  au  contraire  consolée  quand  nous  fûmes  aux 
deux  extrémités  des  portiques  intérieurs,  sous  les  deux  voùtesd' arête 
qui  touchent  les  trois  arcades  ouvertes  sur  le  chœur.  Le  cercueil  en 
plomb,  entrevu  durant  l'hiver  précédent,  à  droite  en  entrant,  était 
précisément  celui  de  ce  saint  Léopard  dont  nous  avions  vainement 
cherché  les  cendres  dans  la  châsse  de  Oiariemagne.  L'inscription 
suivante  était  gravée  sur  un  des  versants  du  couvercle  : 

K  Clauditur  bic  magnus  Leopardus  nomine  clams 
«  Cujus  sub  obscquio  regnabat  tertius  Otto.  » 

Le  tombeau  correspondant  était  celui  de  sainte  Couronne  : 
nous  lûmes,  à  la  même  place,  sur  lâchasse  de  plomb  : 

»  Clauditur  hoc  tumulo  martyr  Corona  bcnigna 
«  Tertius  hic  Ccsar  quam  duccns  conderat  Otto.  » 

Mais,  désappointement  cruel!  Malgré  des  murs  de  quatre- 
vingts  centimètres  d'épaisseur,  revêtus  à  l'intérieur  d'un  ciment 
aussi  dur  que  le  grès,  l'humidité  avait  pénétré  dans  les  caveaux  mal 
protégés  par  les  grandes  assises  qui  les  couvraient.  Les  saints  corps 
qui  avaient  déjà  reposé  quelques  siècles  dans  les  catacombes  de 
Rome,  avant  de  prolonger  à  Aix  un  sommeil  de  huit  cents  ans, 
étaient  tombés  en  poussière,  et  il  en  était  de  même  des  précieuses 
étoffes  qui  les  avaient  sans  doute  jadis  entourés. 

Monsieur  le  Prévôt  a  conçu  l'excellente  pensée  de  faire  graver 
chacune  de  ces  deux  inscriptions  sur  un  marbre  que  l'on  introduira 
au  milieu  du  pavé  à  l'endroit  précis  où  reposent  les  corps  saints; 
il  nous  a  également  fait  part  de  quelques  autres  projets  qui  lui 
vaudront  la  reconnaissance  des  antiquaires  aussi  bien  que  celle 
des  fidèles.  Le  trésor  est  aujourd'hui  placé  dans  des  armoires  qui 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


10 


déparent  entièrement  une  charmante  petite  cliapelle  du  XV«  siècle. 
Il  espère  faire  agréer  du  roi  sa  translation  dans  la  spacieuse  cha- 
pelle Hongroise,  rotonde  décorée  par  l'impératrice  Marie-Thérèse; 
là  seraient  élevées,  seulement  à  hauteur  d'appui,  et  dégagées  de 
toutes  parts  ,  les  longues  et  merveilleuses  châsses  de  Notre- 
Dame  et  de  Charlcmagnc  ,  tandis  que  les  autres  morceaux  d'orfè- 
vrerie, les  bronzes,  les  ivoires,  les  manuscrits,  les  étoffes,  les 
émaux,  les  peintures  sur  bois  à  fond  d'or,  étaleraient  Icui'S  riches- 
ses le  long  des  murs  circulaires.  Dans  ce  projet,  l'élégante  cha- 
pelle du  XV^"  siècle,  délivrée  des  meubles  qui  l'encombrent,  s'ou- 
vrirait de  nouveau  sur  les  bas-côtés  de  l'octogone;  les  dentelles  de 
pierre  suspendues  à  ses  murs  reparaîtraient  dans  leur  ensemble;  il 
ne  manquerait  plus  pour  rendre  à  ce  monument  son  antique  ma- 
gie, que  les  apparitions  de  la  peinture  sur  verre. 
Agréez,  etc. 

Abthuk  MARTIN. 


ÉQUATIONS 

DE    L'ÉQUILIBRE    D'UN    CORPS    SOLIDE, 

déduites 
nu    l'KlNCIPE    DES    VITESSES   VIRTUELLES    (1). 

La  déduction  que  je  vais  donner  de  ces  équations  me  paraît 
plus  naturelle,  sinon  plus  rationnelle,  que  celles  qui  sont  données 
dans  plusieurs  ouvrages  de  mécanique. 

Je  dirai  de  plus,  que  si  on  veut  tenter  de  déduire  rationnellement 
les  équations  d'équilibre  du  principe  des  virtuelles,  on  ne  pourra 
employer  de  méthode  qui  ne  revienne  au  fond  à  celle  qui  va  servir 
de  base  à  ma  démonstration. 

Pour  justifier  la  nécessité  d'introduire  dans  l'enseignement  de  la 
mécanique  une  démonstration  des  équations  de  l'équilibre  d'un 
corps  solide,  fondée  sur  une  méthode  analogue,  je  dirai  quelques 
mots  sur  les  déductions  données  par  MM.  Poisson  et  Bellanger, 


(1)  Nous  appelons  l'attculion  de  nos  lecteurs  sur  le  travail  de  M.  Yvon 
Villarceau,que  nous  donnons  ici. Ce  nidnioirc  ne  doit  pas  «trc  considéré  comme 
un  travail  absolument  isolé  ;  il  est  l'introduction  indispensable,  et  la  base 
même  d'un  autre  mémoire  du  même  auteur,  consacré  à  l'étude  des  voûtes, 
et  que  nous  publierons  procliaincment. 


dans  des  ouvrages  consacrés  à  l'enseignement  de  la  mécanique. 
Toutefois,  afin  qu'on  ne  donne  point  à  ma  critique  une  portée 
qu'elle  ne  doit  point  avoir,  je  rappellerai  qu'il  existe  aujourd'hui 
deux  modes  distincts  d'enseignement  de  la  mécanique.  Dans  le 
premier  et  le  plus  ancien,  on  commence  par  la  statique,  et  les 
équations  de  l'équilibre  sont  données  généralement  sans  le  secours 
du  princijie  de.i  vitesses  virtuelles. 

Le  second  mod£,  dont  l'introduction  est  due  à  M.  de  Prony,  et 
le  perfectionnement  à  M.  Coriolis,  a  été  appliqué  avec  succès 
dans  l'enseignement  fait  par  M.  Bellanger  à  l'École  centrale  et  a 
l'Ecole  des  ponts-et-chaussées.  On  y  commença  l'étude  de  la  mé- 
canique par  celle  des  lois  du  mouvement  d'un  point  matériel; 
de  là,  au  moyen  de  la  considération  des  actions  mutuelles,  on 
passe  au  mouvement  d'un  système  de  points  matériels,  ou  des 
corps  tels  que  la  nature  nous  les  présente.  On  arrive  ainsi,  bien  fa- 
cilement, au  principe  des  vitesses  virtuelles,  et  on  fait  de  celui-ci 
la  base  de  toute  la  statique. 

Le  premier  de  ces  deux  modes  d'enseignement  a  reçu  de  nom- 
breuses modifications,  et  les  plus  illustres  géomètres  y  ont  apporté 
des  perfectionnements.  Malgré  cela,  la  nécessité  du  second  a  été 
vivement  sentie  par  ceux  qui  enseignent  les  applications  de  la  mé- 
canique à  l'industrie  ;  et  à  cause  décela,  il  me  parait  convenable 
que  ceux  qui  ont  en  vue  les  progrès  des  sciences  appliquées, 
viennent,  sans  fausse  modestie,  déposer  le  fruit  de  leurs  re- 
cherches au  pied  de  l'édifice  élevé  en  commun  par  messieurs 
les  professeurs  et  ingénieurs. 

Cette  distinction  étant  établie  entre  les  deux  modes  d'enseigne- 
ment, et  je  dirai  presque  entre  les  deux  théories  mécaniques,  je 
rappellerai  l'énoncé  du  principe  dus  vitesses  virtuelles,  tel  qu'il  est 
donné  par  M.  Bellanger;  cet  énoncé  est  le  suivant  : 

Pour  qu'un  corps  solide  soit  en  équilibre  sous  l'influence  de 
forces  extérieures  déterminées,  il  faut  et  il  suffit  que  la  somme  al- 
gébrique du  travail  virtuel  de  ces  forces  soit  nulle  pour  tous  les 
mouvements  du  corps  compatibles  avec  la  condition  de  solidité. 

Passons  maintenant  à  la  déduction  de  ce  principe,  que  donne 
M.  Poisson,  pour  établir  les  équations  de  l'équilibre  d'un  corps 
solide. 

M.  Poisson  conçoit  que,  le  corps  prenant  successivement  trois 
mouvements  de  translation,  parallèlement  aux  trois  axes  coordon- 
nés, et  trois  mouvements  de'rotation  autour  de  ces  axes,  le  prin- 
cipe des  vitesses  virtuelles  soit  applicable  à  chacun  de  ces  mou- 
vements ,  et  il  en  tire  les  six  équations  connues  de  l'équilibre  d'un 
corps  solide  ;  il  ne  cherche  point  a  démontrer  que  si  l'équation  des 
vitesses  virtuelles  est  satisfaite  pour  ses  six  mouvements,  elle  le 
sera  pour  tout  autre,  ce  qu'il  eût  été  indispensable  de  faire,  s'il 
n'eût  pris  le  soin  de  démontrer  déjà,  dans  la  première  partie  de  son 
Traité  de  mécanique,  les  conditions  de  l'équilibre,  au  moyen  des 
méthodes  employées  dans  le  premier  mode  d'enseignement  dont 
nous  avons  parlé.  Du  reste,  M.  Poisson  indique  suffisamment, 
dans  son  savant  mémoire  sur  le  mouvement  d'un  corps  solide , 
qu'un  déplacement  quelconque  d'un  corps  solide  peut  être  obtenu 
au  moyen  de  six  mouvements  successifs,  qui  sont  des  mouvements 
de  translation  parallèles  à  trois  axes,  et  des  mouvements  de  rota- 
tion autour  de  chacun  d'eux. 

En  un  mot,  M.  Poisson  n'avait  pas  besoin  d'insister  sur  cette 
déduction,  puisqu'il  avait  démontré  les  conditions  de  l'équilibre 
par  une  autre  méthode. 

Disons  maintenant  en  quelques  mots  l'usage  que  fait  M.  Bellan- 


11 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


12 


ger  an  principe  des  vitesses  virtuelles,  pour  arriver  aux  conditions 
d'équilibre  d'un  corps  solide. 

Après  avoir  établi  ce  principe  et  quelques  théorèmes  sur  l'é- 
quivalence des  forces,  il  l'applique  aux  six  mouvements  de  transla- 
tion et  de  rotation  que  considère  M.  Poisson,  et  en  déduit  six  con- 
ditions; puis  il  fait  voir,  au  moyen  de  ses  théorèmes  sur  l'équi- 
valence des  forces,  que,  si  ces  six  conditions  sont  satisfaites,  la 
résultante  de  toutes  les  forces  extérieures  est  nulle. 

La  rigueur  de  ses  démonstrations  est  incontestable  ;  mais  la  mé- 
thode me  parait  avoir  pour  inconvénient,  qu'elle  suppose  chez  ce- 
lui qui  l'établit  la  connaissance  anticipée  du  résultat  (  I  ).  Il  est  vrai 
que  M.  Bellangcr  examine  les  six  mouvements  dont  nous  venons 
de  parler,  comme  les  plus  simples,  autrement,  ou  ne  verrait  pas 
comment  il  serait  porté  à  les  examiner  de  préférence  à  d'autres. 

Lors  même  qu'on  ne  voudrait  pas  admettre  que  la  connaissance 
du  résultat  a  pu  guider  dans  le  choix  des  six  mouvements  en  ques- 
tion, il  faudrait  convenir,  du  moins,  que  cette  méthode  n'est  nulle- 
ment indiquée  par  le  principe  des  vitesses  virtuelles,  qui  suppose 
un  mouvenjent  quelconque,  et  non  pas  la  connaissance  des  six 
mouvements  en  lesquels  un  mouvement  quelconque  peut  être  dé- 
composé. 

Je  vais  maintenant  passer  à  la  démonstration  des  équations  de 
l'équilibre  d'un  corps  solide,  que  je  me  propose  principalement 
d'établir  dans  ce  mémoire. 

DÉMONSTBATION. 

Comme  je  dois  faire  usage  de  la  transformation  des  coordonnées 
rectangulaires,  et  de  formules  qui  s'y  rapportent,  je  vais  exposer 
succinctement  ces  dernières. 

Considérons  un  système  d'axes  coordonnés  rectangulaires  X, 
Y,  Z,  et  soient  x,  y,  z,  les  coordonnées  d'un  point  M,  rapportées 
à  ces  axes  dont  0  est  l'origine. 

Considérons  ensuite  un  autre  système  d'axes  rectangulaires 
J,,  F,,  Z,,  et  soient  x,,  j/,,  «,,  les  coordonnées  du  même  point 
M,  relativement  à  ces  derniers. 

Désignons  par»,  p,   les  trois -j  coordonnées  de  l'origine  0,  du 
second  système,  relativement  au  premier,  et  parallèlement  à  a-,  y,  z. 
Posons  pour  abréger  : 
co»  (a?,,  a;)=  a,     cos[œ,,y]^b,     cos  {œ^,  z]  ^=  c,    \ 
cos{y,,x)  =  a\     cos(y„y)  =  b',     cos(y^,z)=c,    i       (l) 
cos(z„x)=a",     cos{z„y)  =  b",    cos[z,,  z)=c",    ) 
Maintenant,  si  l'on  remarque  que  x  est  la  projection  de  0  M 
sur  X,  laquelle  est  égale  à  la  projection  du  contour  formé  par  les 
droites  a,  ^,  T,  x,,y,,z,,  et  terminé  aux  points  0  3/;  on  aura,  en 
observant  que  p  est  perpendiculaire  à  X,  et  ayant  égard  aux  éq.  (l): 

j;  =  a4-a:,o  +  »/,o'-f:,a",    \ 
de  même  y  =  ^J^a:,b^y,b' -\-z,b",    l  (2] 

2  =  T+aj,  c-\-y,  c'-f-r,  c",    ) 

J'ajoute  ici  la  démonstration  de  la  valeur  du  cosinus  de  l'angle 
de  deux  droites. 


(1)  Les  méthodes  de  démonstration  fondées  sur  la  connaissance  de  résul- 
tats énoncés,  ont  l'avantage  de  confirmer  des  vérités  soupçonnées,  entrevues  ; 
mais,  d'un  autre  côté,  elles  ont  le  grand  désavantage  de  ne  guider  en  aucune 
manière  dans  la  recherche  de  la  vérité.  Or,  il  reste  tant  à  faire  aujourd'hui 
dans  la  mécanique  appliquée,  qu'on  ne  saurait  trop  recommander  l'usage  et 
le  choix  éclairé  des  méthodes  d'investigation. 


Menons,  par  l'origine  des  coordonnées,  deux  droites  D  et  JJ  pa- 
rallèles aux  droites  données.  Prenons  sur  D  une  longueur  r,  et 
soient  a",  y,  z,  les  coordonnées  de  son  extrémité;  projetons  r  sur 
D',  et  soitp  cette  projection,  en  aura  : 

cotiD,  I»'i  =  ^. 
r 

Désignons  par  >.,  «.,  v,  les  angles  de  D  avec  A',  1',  Z,  et  par  '.',  u.', 
v',  ceux  que  D'  fait  avec  les  mêmes  axes. 

La  projection  p  sera  égale  à  celle  du  contour  formé  par  x,  y,  z, 
donc: 

X  cns  >.'  -j-  y  co$  u.'  -\-  z  co»  •,' 

r 


cos  [D,  U] 


X  y  r 

mais  cos  ).  =  — ,  (0«  "■  =     ,  en»  <  =  — , 

r  r  r 

donc  : 

cos  [D,  D']  =  cos  x  cos  >.'  —-  cos  u.  cos  u!  -j-  cos  -,  cos  •,'.  (3) 

Si  les  deux  droites  [D,  D']  coïncident,  on  a  :  x  =:  >.',  u  =  u! ,  etc., 
cos  [D,  D)  =  l,  et  il  vient,  pour  la  somme  des  carrés  des  cos  des 
angles  qu'une  droite  fait  avec  trois  axes  rectangulaires  : 

cos'  >.  -f-  cos'  u.  -\-  cos'  *  =  1 .  (4) 

Nous  ferons  maintenant  remarquer  que  les  neuf  cosinus  qui  en- 
trent dans  les  éq.  (2)  sont  liés  entre  eux  par  les  équations  sui- 
vantes, tirées  de  la  formule  (4)  : 

o"  4-6'  -f  c'  =1,   \ 
a"-ffc"  +c"=i,  (5) 

a"'-f  i"'-f  c"'  =  l;    ) 
De  plus  les  axes  X,,   Y„  Z,,  étant  rectangulaires,  on  a  : 
Cos[X,,  F,)=  0,  cas  [Y,,  Z,)  =  o,cos{Z,,  X,)  =  o,  et  en  appli- 
quant la  formule  (3),  il  vient  : 

a  a'  -]-  b  b'  ~  c  c'  =  o,   \ 
a'a"-^b' b" -^c' c"  =  0,    S  (6) 

a"  a  -\-b"  b  -f-  c"  c  =0,    ) 
Les  neuf  co«inu«  [a,  b,  c,  etc.)  sont  donc  liés  entre  eux  par  six 
équations,  d'où  il  resuite  qu'on  ne  peut  s'en  donner  que  trois  arbi- 
trairement. 

Ces  formules  préliminaires  étant  démontrées,  nous  allons  main- 
tenant aborder  la  question  de  mécanique  qui  nous  occupe. 

D'abord,  donnons  la  traduction  analytique  du  principe  des  vi- 
tesses virtuelles  énoncé  ci-dessus. 

Soit  P,  l'une  des  forces  extérieures  appliquées  au  corps  solide 
considéré  ;  ds,  l'élément  de  courbe  décrit  par  le  point  d'application 
de  P  dans  le  mouvement  virtuel  ;  x,  y,  z,  les  coordonnées  de  ce 
point  d'application  relativement  à  des  axes  rectangulaires. 

En  désignant  par  P',  ds',  x',  y',  z',  P",  ds",  x",  y",  z",  etc., 
des  quantités  analogues  relatives  à  d'autres  points, 

Le  principe  des  vitesses  virtuelles  se  traduira  dans  la  formule  : 

P  ds  cos  [P,  ds)  -\-  P  dscos  {P,  ds')  -f  P"  ds"  cos  (P",  d*"]  -f  etc. 
;=  0,  et  si  l'on  désigne  par  2  une  somme  de  termes  composés  de  la 
même  manière,  au  moyen  de  quantités  analogues,  ou  pourra  écrire 
plus  simplement  : 

z  P  ds  cos  [P,  ds)  =  0.  (7) 

Nous  donnerons  une  autre  forme  à  cette  équation  en  introdui- 
sant à  la  place  de  ds,  les  accroissements  dx,  dy,  dz,  des  coordonnées 
du  point  auquel  elles  se  rapportent. 

Pour  cela,  soient  x,  a,  v.  les  angles  de  la  direction  d'une  force  P, 
avec  les  parties  positives  ou  négatives  des  axes  x,  y,  z  (on  devra  seule- 
ment avoir  le  soin  de  prendre  les  çnêmes  parties  de  ces  axes  pour 


13 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


lï 


toutes  les  forces)  ;  si  nous  remarquons  que  les  cosinus  des  angles  de 

dûC  dy  dz  ,    „         ,    ,  >  - 
</s  avec  les  trois  axes  sont:  —,  ~-,  -p,  la  formule  3   donnera: 
as  ds    ds 

Coi  [P,  ds)  =  COSX—-J-  cos  u.  -  -  -j-  cas  i  -^,  et  l'équation  (7)  de- 
dS  u*i  Uo 

viendra  : 

2  P  [cas  xdx  -\-  cas  ['■  dy  -f-  cos  idz]^  o;  (8) 

Or,  les  quantités  P  cosX,  P  cos  r^.,  P  cos  •>,  ne  sont  autre  chose 
([ue  les  composantes  de  /'suivant  les  tro^s  axes,  et  si,  pour  plus  de 
simplicité,  nous  désignons  ces  composantes  par  X,  Y,  Z,  ou  si  nous 
posons  : 

P  cos  X  =  A',  N 

P  cos  }>.=  ¥,  I  (9) 

P  cos  -1  =  Z ,  J 

nous  pourrons  encore   donner  celle  aulic  forme  plus  simple  à 
l'équation  du  travail  virtuel  : 

^[Xdx^Y  dy  +  Z  dz]  =  0.  (  1 0) 

C'est  sous  cette  forme  que  nous  allons  l'appliquer  à  la  recherche 
des  conditions  d'équilibre  d'un  corps  solide. 

Concevons  que  le  système  des  axes  X,,  Y,,  Z,,  soit  lié  invaria- 
blement au  corps  solide,  et  que  a;,,  y,,  s,,  soient  les  coordonnées 
relativement  à  ces  axes,  du  point  d'application  M  de  la  force  P.  Dé- 
plaçons le  corps  solide  dans  l'espace,  d'une  manière  quelconque;  les 
coordonnées  x,,y,,  z^,  de  Jf  ne  varieront  pas;  mais  si  x,  y,  z  dé- 
signent les  coordonnées  du  même  point,  relativement  à  des  axes 
fixes  X,  Y,  Z ,  ces  coordonnées  varieront  dans  le  premier  instant, 
de  dx,  dy,  dz;  les  coordonnées  «,  p,  -j',  de  l'origine  du  système  mo- 
bile varieront  de  d%,  d?,d-i,  tandis  que  les  cos  des  angles  que  font 
les  axes  de  ce  système  avec  les  axes  fixes,  varieront  de  da,  da'.., 
db,  db'.,  etc. 

Et  réciproquement,  si  on  déplace  d'une  manière  quelconque  le 
système  des  axes  mobiles,  ce  qui  ne  se  peut  faire  qu'en  déplaçant 
l'origine  et  faisant  varier  les  angles  de  ces  axes  avec  les  axes  fixes, 
de  manière  à  conserver  toutefois  la  perpendicularité  de  ces  axes 
mobiles,  les  coordonnées  x,  y,  s,  de  M  varieront,  sans  que  ses  coor- 
données x,,y,,  2,  varient. 

Je  vais  exprimer  les  variations  de  x,  y,  z,  en  fonction  de  celles 
de  a,  P,  7,  a,  a'..,  b,  b'..,  etc.  Supposant  donc  ces  variations  infini- 
ment petites,  ij  me  suffit  de  différentier  les  équations  (2),  en  y  re- 
gardant a?,,  y,,  z,,  comme  des  constantes.  J'obtiens  ainsi  les  équa- 
tions différentielles  : 

dx  =  rfx  -[-  X,  rfa  -(-  y ,  da'  -\-  z,  da",  \ 
dy  =  d3  -j-  ar,  rfô  -f-  y ,  db'  -\-  z,  db", 
dz  =^  d-i  -f-  X,  de  +  2/,  dC  -\-  s,  de", 
En  mettant  ces  valeurs  dans  l'équation   (lo) 
que  a,  p,  f,  a,  b,  c,  etc.,  et  leurs  différentielles,  restent  les  mêmes 
pour  tous  les  points  du  corps,  ce  qui  permet  de  mettre  ces  diffé- 
rentielles en  facteurs  communs  des  termes  des  sommes  2,  il 
vient  (12)  : 

d7.^X-\-da^Xx,-\- du  ^Xy,-j-  da" ï  X s,        \ 
-i'd?xY-\-db-^Yx,~^db':iYy,-{-db"^Yz,        (     (12) 
-{-df^Z  +  dc^Zx,  +  dc'y.Zy,  4-  dc"iZz,^o.} 

Les  cos  a,  a'..,  etc.,  étant  liés  entre  eux  par  les  sixéq.  (5)  et  (O), 
nous  allons  exprimer  leurs  variations,  au  moyen  de  trois  seule- 
ment d'entre  elles. 

Pour  cela,  je  différcntie  les  équations  (5)  et  (6),  ce  qui  donne  : 


II 


et  observant 


a  da  -\-b  db  -\-c  de  =  0, 

a'  da'  -\~b'  db'  -{-c  de  =0,    J  (13) 

o"  da"  -\-  b"  db"  -j-  c"  de"  =  o, 

a  da  -j-  o'  da  -\- b  db'  -\- b'  db -}- c  de  -\-  c'  de  =  0,  \ 
a'da'-\-a"da-\-b'db"-\-b'db'-\-cdc"-\-c"dc'=o,   |       (l4) 
a"  da-\-a  da"  +  b"  db  -f  bdb"-]-  c"  dc-\-c  de"  =0,  ) 

Il  resterait  maintenant  à  éliminer  six  des  variations  da,  da', 
da",  etc.,  entre  ces  dernières  et  l'équation  (12);  mais  nous  pou- 
vons profiter  de  ce  que  la  position  initiale  des  axes  mobiles  est 
entièrement  arbitraire,  pour  simplifier  considérablement  nos  équa- 
tions. 

Comme  rien  ne  fixe  la  position  de  ces  axes  mobiles,  nous  pou- 
vons les  faire  coïncider  à  l'origine  du  mouvement  avec  les  axes 
fixes. 

De  cette  manière,  lésa;,,  y,,  z,,  de  féquation  (12)  se  transfor- 
meront en  x,y,  z,  et  les  équations  (l)  donneront  : 

a   =  1,       J  =  0,       c  =rz  0,  \ 

a'  =0,       b'  =  i,       f'  =  0,  (  (là) 

a"=  0,        b'  =  0,        c"  =  1,  7 

Ces  valeurs  réduisent  d'abord  les  équations  (13)  à  : 

da  =0,  \ 

db'  =  0,   >  (16) 

de"  =  0,  j 

Au  moyen  de  celles-ci  et  des  précédentes,  les  équations  (14)  de- 
viennent : 

da'  -\-db  =  0,  \ 

db"  -Jr  de  =  0,  }  (17) 

da"  -\~  de  ^  0,  1 

d'où  :  da   =  —  db    \ 

db"  =  —  rfc'  (18) 

de    ==  —  da"  -' 

en  mettant  ces  dernières  valeurs  et  celles  données  par  les  équa- 
tions (IG)  dans  l'équation  (12);  puis,  réunissant  en  un  seul  les  ter- 
mes affectés  des  mêmes  facteurs  différentiels,  il  vient  : 

dxiX-{'dc'  ^{Z  y—  Yz) 
-f  dp  ^  r  +  rfa"  2  (\y  z  —  Z  x)  (19) 

-\-d-i%Z  -}-db  ^(Yx  —  Xy)    =0 

Or,  cette  équation,  qui  n'est  qu'une  transformation  de  l'équa- 
tion (10),  devant,  suivant  le  principe  des  vitesses  virtuelles,  avoir 
lieu,  quel  que  soit  le  mouvement  du  corps,  compatible  avec  les  con- 
ditions de  solidité,  et  ces  conditions  ayant  été  satisfaites,  puisqu'on 
a  exprimé  que  les  trois  coordonnées  x,,  y,,  z,,  de  chaque  point  3/, 
relatives  aux  axes  liés  au  corps  solide,  sont  invariables ,  ne  peut 
avoir  lieu  qu'autant  que  les  coefficients  des  six  variations  dx,  d?,  rff . 
de'  da"  db,  qui  restent  entièrement  arbitraires,  sont  égaux  séparé- 
ment à  zéro.  En  égalant  donc  à  zéro  ces  coefficients,  on  aura  les  six 
équations  nécessaires  et  suffisantes  pour  l'équilibre  d'un  corps 
solide  : 

2T=0,       ^{Zy-Yz]  =  0,\ 

ïY=o,       2{Xz  —  Zx)  =  0.}  (JO) 

27=0,       2(Fx  — Jy)  =  0,' 

Les  trois  premières  expriment  que  la  somme  des  projections  des 
forces  extérieures  sur  chaque  axe  est  nulle  ;  les  trois  autres  expri- 
ment que  la  somme  des  moments  des  forces  extérieures  par  rap- 
port à  chaque  axe  est  aussi  nulle. 


15 


REVUE  DE  L  ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


IG 


On  peut,  au  moyen  des  équations  (9),  donner  à  ces  six  équations 

la  forme  suivante  : 

^Pcosx=0,  \ 

V  />  fosp=  0,  I 

2  jP  fo«  V  =  0,  ( 


21) 


[y  cos  1  —  s  cos  u. 
[z  cos''-  —  X  cos  V 


I  —  0 
=  0 


iP 

S.  P  [xcos  [j.  —  y'  cos X)  =  0 
Telles  sont  les  équations  qu'il  s'agissait  de  déduire  du  principe 
des  vitesses  virtuelles. 

Y  VON  VILLARCEAU. 


DE    X>A    TIIiIiA     PIA    DU    VATICAN 

BATIE    PAR    PIKRO    LICOBIO , 

ît  di  l'Mnîj!  publiî  m  ti  MMmt  pat  MU.  Jilis  B0UCH8T,  irthilttl!,  il  MOUl-ROCanTÎ,  imkt  it  l'iistiliil, 

La  Villa  Pia  n'est  pas,  à  proprement  parler,  un  monument  public; 
elle  n'est  pas,  non  plus,  précisément  une  habitation.  C'est  un  lieu  de 
repos  et  de  retraite,  une  sorte  de  boudoir  pontifical,  où,  descendu 
du  trône  de  saint  Pierre ,  le  successeur  de  l'Apôtre  put  venir 
causer  familièrement  avec  ses  intimes  ;  une  délicieuse  oasis  jetée 
sur  le  chemin  aride  et  brûlant  des  grandeurs  de  l'Eglise,  où,  le 
front  libre  de  la  tiare,  il  put  se  reposer  quelquefois  à  l'om- 
bre, loin  des  pompes  du  Vatican,  à  l'abri  d'une  splendeur  parfois 
importune,   dans    une  atmosphère  embaumée  par   les  fleurs  et 
rafraîchie  par  les  eaux  desfontaines.  C'est  une  fabriquedans  un  jardin 
que  le  Napolitain  Paul  IV  avait  demandée  au  Napolitain  Pirro 
Ligorio;  Paul  IV  mourut,  et  ce  fut  à  son  successeur.  Pie  IV, 
aussi  Napolitain,  que  l'artiste  livra  son  œuvre;  mais  ce  jardin  est 
celui  du  Vatican,  et  cette  fabrique  fut  bâtie  pour  un  pape,  usui- 
que  suo  et  succedentium  sibi  pontificum,  à  son  propre  usage  et  à 
l'usage  de  ses  successeurs,  ainsi  que  le  frère  du  fameux  marquis 
de  Marignan  l'a  fait  graver  sur  la  façade  du  bâtiment  principal. 
Commandée  par  un  pape  qui  disait  le  jour  de  sa  consécration  : 
«  Je  veux  être  servi  magnifiquement,  ainsi  qu'il  convient  à  un 
souverain  pontife,  »  et  dont  la  magnificence  sut  effacer  en  effet 
celle  des  Jutes  II  et  des  Léon  X  ;  achevée  par  un  Médicis  que  ses 
contemporains  n'ont  pas  trouvé  indigne  du  surnom  de  prolec- 
teur des  muses;  élevée  sur  les  dessins  d'un   artiste  admirateur 
passionné  de  l'arttique,  la  Villa  Pia,  pour  n'être  que  l'enfant  d'un 


caprice,  n'en  a  pas  moins  revêtu  un  caractère  de  richesse  et  de 
somptuosité  que  le  burin  est  presque  inhabile  à  reproduire  et  la 
plume  complètement  impuissante  à  faire  comprendre.  Dans  cette 
œuvre  de  fantaisie,  mais  d'une  fantaisie  qui  n'épargne  rien,  ni  les 
ressources  de  l'art,  ni  la  richesse  des  matériaux,  on  fouleaux  pieds 
les  faïences  émaillées,  les  mosaïques  de  toutes  les  couleurs;  à  l'ex- 
térieur, le  stuc  poli,  et  découpé  en  de  gracieux  ornements,  recouvre 
les  briques  des  murailles  ;  tandis  qu'à  l'intérieur  les  marbres  les  plus 
précieux,  le  jaspe  et  le  porphyre  s'étalent  sur  les  parois  de  l'édifice, 
s'élèvent  en  colonnes,  s'arrondissent  en  statues  allégoriques,  ou  bien 
se  creusent  en  vasques  et  en  bassins  sans  cesse  rafraîchis  par  des 
eaux  vives  ;  les  coupoles  détachent  leurs  reliefs  dorés  sur  des  fonds 
de  coule.urs  harmonieusement  assemblées,  et  la  fresque,  ce  com- 
plément indispensable  de  tout  édifice  italien,  déploie  ses  splen- 
deurs au  milieu  des  plafonds  et  dans  les  cartouches  assez  vastes 
pour  ne  pas  gêner  ses  franches  allures. 

Alors  que  Pirro  Ligorio  élevait  la  Villa  Pia  dans  le  jardin  du 
Belvédère,  en  face  de  la  loge  de  Bramante  et  à  côté  de  la  coupole 
de  Michel-Ange,  l'Italie  était  en  proie  à  cette  passion  contagieuse 
de  l'antique  qu'on  a  désignée  sous  le  nom  de  Renaissance,  et  qui 
déjà  avait  franchi  les  Alpes  pour  venir  chez  nous  imprimer  son 
cachet  au  front  des  châleaux  de  Fontainebleau  et  de  Chambord; 
chaque  jour,  le  sol  fouillé  livrait  à  l'admiration  des  artistes  de 
nouveaux  débris  du  vieux  monde  romain  ,  les  temples  des 
dieux  païens  et  les  anciens  palais  des  premiers  Césars.  Rome 
surtout,  Rome,  fière  à  bon  droit  de  son  passé  et  riche  déjà  de  son 
présent,  labourait  son  sol  en  tous  sens  pour  en  arracher  ces  pré- 
cieux témoins  de  sa  primitive  grandeur.  Des  chapiteaux,  des  sta- 
tues, des  colonnes,  des  monuments  entiers  sortaient  de  terre 
comme  par  enchantement  aux  acclamations  d'une  foule  d'artistes 
dont  l'imagination  et  l'ardeur  s'échauffaient  à  l'aspect  de  ce  bel  art 
d'une  grande  époque. 

Mais  dans  cette  foule,  l'homme  le  plus  enthousiaste,  le  plus  ' 
vivement  impressionné  peut-être,  fut  Pirro  Ligorio.  Issu,  dit- 
on,  d'une  famille  noble,  né  sans  le  savoir  à  côté  de  deux  villes 
antiques  à  peu  près  entières  sous  la  cendre  du  Vésuve,  bien  jeune 
encore,  il  avait  senti,  à  la  vue  des  rares  morceaux  antiques  alors 
exhumés  dans  sa  patrie, se  développer  son  goût  pour  le  grand  art 
qui  l'appelait  à  lui.  Élevé  dans  la  carrière  des  lettres,  il  devint 
artiste.  Laissez-le  grandir,  et  vous  le  retrouverez  bientôt  sur  le 
cadavre  de  la  vieille  Rome,  infatigable  à  dessiner  chaque  volute, 
chaque  rinceau,  chaque  profil  que  l'autopsie  met  à  découvert, 
complétant  d'après  ses  propres  inspirations  les  fragments  mutilés, 
restituant  à  sa  façon  les  morceaux  que  le  temps  a  rongés.  Plus 
tard,  vous  le  verrez  luttant  par  l'intrigue  contre  le  vieux  Michel- 
Ange,  qu'il  accuse,  sans  trop  de  scrupule,  de  radoter.  Appelé  deux 
fois  à  mettre  la  dernière  main  à  l'œuvre  du  grand  maître  à  qui 
la  mort  avait  ravi  le  bonheur  de  voir  briller  enfin  le  signe  de  la 
rédemption  sur  le  dôme  de  Saint-Pierre,  deux  fois  les  écarts  de  son 
imagination  turbulente,  qui  veut  modifier  les  dessins  du  Buona- 
rotti,  lui  font  retirer  cette  mission  délicate,  à  laquelle  fesprit  froid 
et  calme  de  Vignole  convenait  mieux. 

Descendu  des  combles  de  Saint-Pierre  dans  les  jardins  qui  voi- 
lent de  leur  verdure  le  pied  du  Mont- Vatican,  l'artiste  peut  res- 
pirer à  son  aise  ;  il  ne  trouve  plus  là  ni  rival  à  combattre,  ni 
plans  primitifs  qui  tiennent  son  génie  en  bride.  Le  voilà  seul  avec 
sonimagination,  s'exerçant  sur  ses  études  du  passé ,  et  leseoffres  dans 
lesquels  il  puise  sont  de  toute  la  chrétienneté  les  mieux  remplis. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TKAVAUX  PUBLICS. 


18 


il  saura  laisser  onnière  à  l'une,  et  n'oubliera  pas  qu'il  peut  dis- 
poser (les  nu  1res. 

Faut-il  maintenant  s'étonner  qu'un  simple  abri  dans  un  jardin 
soit  si  splendide  ?  Faut-il  s'étonner  encore  que,  sous  un  toit  bâti 
pour  un  pape,  pour  le  chef  de  l'Eglise  du  Christ,  l'antiquité 
païenne  soit  évoquée  tout  entière,  et  non  pas  seulement  dans  la 
forme  de  ses  colonnes  et  de  ses  chapiteaux,  dans  les  profils  de  ses 
hases  et  de  ses  corniche-i,  dans  ses  détails  de  sculpture  et  d'or- 
nement, mais  dans  sa  religion  même,  dans  ses  idoles  et  dans  ses 
(lieux  allégoriques  '?  C'est  la  conséciuence  nécessaire  du  génie  de 
l'artiste  qui  présida  à  cette  œuvre,  et  surtout  des  circonstances 
au  milieu  desquelles  ce  g(mie  s'est  développé  et  qui  ont  favorisé 
son  expansion. 

A  cette  époque,  où  tous  les  arts  interrogeaient  l'antiquité  pour 
apprendre  d'elle  ce  ({ue  c'étaient  que  le  beau  et  la  poésie,  les  dieux 
du  paganisme,  chantés  par  les  poètes,  durent  avoir  accès  dans  la 
demeure  des  papos,  ces  protecteurs  nés  des  grandes  et  belles 
choses,  et  à  plus  forte  raison  dans  un  lieu  de  repos  et  d'a- 
gréable délassement.  On  peut  donc  voir  sans  étonnement  la  poé- 
sie d  Homère  à  côté  des  sublimes  récits  de  Moïse,  les  divinités 
d'Hésiode  auprès  des  versets  de  l'Évangile.  M.  Raoul-Rochette, 
dans  le  texte  historique  qu'il  a  ajouté  aux  beaux  dessins  de  J.  Rou- 
chet,  voulant  prévenir  ce  que  celte  discordance  pourrait  "soulever 
de  répulsion  parmi  nous,  se  hâte  de  stigmatiser  l'ignorance  el  le 
faux  zèle  qni  se  scandaliserait  à  la  vue  des  figures  et  des  groupes 
profanes  dont  s'encadrent  les  sujets  bibliques  aux  portes  de  Saint- 
Pierre  de  Rome.  Mais,  M.  Kaoul-Rochette  l'avouera,  chez  les  prê- 
tres d'une  religion  qui  commande  la  chasteté,  la  poésie,  pour  être 
empruntée  aux  anciens,  n'en  doit  pas  moins  être  chaste,  et  de 
l'aveu  môme  du  savant  antiquaire,  le  poète  qui  a  fait  la  Villa  Pia 
n'a  pas  été  toujours  chaste  dans  toutes  les  stances  de  son  poème.  Pas 
plus  que  l'honorable  secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  des  Reaux- 
Arts,  nous  ne  trouvons  étrange  (jue  cet  accouplement  du  profane 
et  du  sacré  ait  eu  lieu  ;  pas  plus  que  lui  nous  ne  condamnons  l'em- 
ploi de  la  poésie  antique  par  les  artistes  du  XV!»  siècle,  quand 
cette  poésie  se  maintient  dans  de  certaines  limites;  mais  en  les  ex- 
pliquant, nous  ne  prétendons  pas  toujours  les  légitimer;  et  dus- 
sions-nous tomber  en  désaccord  positif  avec  M.  Raoul-Rochette,  nous 
n'en  soutiendrons  pas  moins  que  l'abus  des  dieux  païens  dans  les 
édifices  religieux  du  christianisme  ne  constitue  pas  le  moindre 
défaut  de  la  Renaissance,  et  que  si  Michel-Ange  n'a  pas  toujours 
été  à  l'abri  de  cette  fâcheuse  influence,  c'est  que  le  grand  Michel- 
Ange  lui-même  a  fait  taire  parfois  sa  raison  pour  prêter  l'oreille 
i\ux  sophismes  éphémères  de  la  mode.  La  Lusiade  est  un  poème 
admiré  de  tout  le  monde;  mais  quel  est  l'homme  sensé  qui  ferait 
un  mérite  au  Camoëns  d'avoir  mis  Vénus  aux  prises  avec  la  vierge 
Marie  ?  On  l'eu  excuse,  mais  on  ne  l'en  loue  point. 

Lue  fois  en  verve  d'admiration  pour  la  générosité  des  artistes 
et  des  papes  qui  donnaient  si  gracieusement  l'hospitalité  à  Jupiter 
et  à  Léda  auprès  de  Jésus^Christ  et  de  ses  apôtres,  l'auteur  ne 
devait  pas  s'arrêter  en  chemin,  et  il  lance  une  condamnation  som- 
maire contre  le  ijoùt  aride  cl  la  triste  nudité  des  églises  gothiques. 
Vous  appelez  aride  le  goût  qui  a  brodé  les  ogives  et  les  clochetons  de 
Saint-Oucn,  (jui  a  découpé  avec  tant  de  variété  et  tantde  richesse  tou- 
tes les  galeries,  tous  les  angles ,  toutes  les  nervures  de  la  cathédrale 
d'Amiens  !  Vous  appelez  tristes  et  nues  ces  églises  dont  les  portails 
s'élancent  dans  les  airs,  tout  couverts  de  leurs  légions  de  saints  éche- 
lonnés ainsi   sur  la  route  des  cieux  !  Vous  accusez  d'aridité  et 


de  triste  nudité  ces  immenses  et  somptueux  vaisseaux  où  chaque 
pierre  est  sculptée,  où  chaque  sculpture  a  sa  signification,  où  cha- 
que morceau  de  leurs  resplendissantes  verrières  est  une  histoire  ou 
une  allégorie  1  Si  leurs  voûtes  sont  aujourd'hui  froides  et  blanches, 
que  ne  vous  en  prenez-vous  aux  badigeonneurs  modernes  qui  ont 
passé  la  brosse  par  dessus  les  rinceaux  de  feuillages  et  les  ciels 
d'azur  parsemés  d'étoiles  d'or,  qui  ont  soigneusement  gratté  à 
vif  les  tuniques  des  saints  et  les  feuilles  des  chapiteaux,  de 
peur  que  la  postérité  ne  sache  qu'il  y  eut  là  jadis  toutes  les  cou- 
leurs de  l'arc-en-ciel  I  Mais  cessez  de  vous  tenir  les  yeux  résolu- 
ment fermés  pour  vous  écrier  ensuite  qu'il  fait  nuit  en  plein  jour; 
cela  n'est  ni  juste  ni  digne  du  savoir  et  du  goût  de  M.  Raoul-F.o- 
chette.  Autant  que  vous  nous  sommes  admirateurs  sincères  de  l'an- 
tiquité et  aussi  de  la  Renaissance  italienne;  mais  nous  ne  saurions 
applaudir  à  l'intolérance,  nous  ne  pouvons  pas  raisonnablement 
renier  un  art  qui  a  fait  les  Noti'e-Dame  de  Paris  et  de  Chartres, 
celles  de  Reims  et  d'Amiens.  Nous  concevons  parfaitement  tout  le 
plaisir  qu'on  peut  éprouver  à  la  vue  de  la  naissance  de  Vénus  et  au 
milieu  des  faunes  et  des  nymphes  du  Vatican;  cependant  nous 
aimons  autant  les  savoir  là  que  dans  nos  cathédrales.  Mais  reve- 
nons à  la  Villa  Pia. 

Faire  la  description  d'un  édifice  sans  le  secours  du  dessin  est 
chose  toujours  difficile  pour  l'écrivain  et  incomplète  pour  le  lec- 
teur :  aussi  n'est-ce  pas  une  description  détaillée  que  nous  allons 
faire,  mais  un  simple  coup  d'oeil  que  nous  allons  jeter  sur  l'intime 
retraite  d'un  pape;  deux  beaux  dessins  de  M.  J.  Rouchet,  les 
/•'/.  1  et  2,  serviront  à  la  fois  de  spécimen  pour  faire  apprécier  la 
parfaite  exécution  de  sa  belle  collection  de  la  Villa  Pia,  et  à  nous 
faciliter  notre  tâche. 

La  Villa  Pia  s'élève,  nous  l'avons  dit,  au  pied  du  Mont-Va- 
tican, mais  en  partie  sur  sa  rampe,  de  façon  que,  pour  maintenir 
le  niveau  du  sol,  on  a  dû  faire  un  remblai  vers  la  partie  anté- 
rieure de  la  Veilla.  Celle-ci  se  compose  (  Voy.  PI.  i  )  de  quatre  corps 
de  bâtiment  complètement  isolés,  savoir:  d'un  Catin  ou  logis 
principal  ;  d'une  Loge  ou  portique  ouvert  qui  lui  fait  face,  et  de 
deux  petits  arcs  posés  symétriquement  aux  extrémités  d'une  cour 
ovale  située  entre  les  quatre  bâtiments. 

En  arrivant  en  face  de  la  Villa,  c'est  l'élévation  extérieure  de 
la  Loge  qui  se  présente  d'abord  aux  regards.  Sa  base  se  baigne  dans 
les  eaux  d'un  nymphée  et  s'enrichit  des  dieux  de  la  Fable,  de  Cérès, 
de  néréides,  et  de  quatre  vigoureux  satyres  ou  atlantes  qui  font 
mine  de  porter  un  balcon  supérieur,  mais  qui  en  réalité  ne  portent 
que  des  corbeilles  de  fleurs. 

Le  balcon  dont  nous  venons  de  parler  est  au  niveau  du  sol  de 
la  cour,  et  forme,  avec  une  galerie,  tout  l'intérieur  de  la  loge  que 
couronne  de  chaque  côté  un  fronton  triangulaire,  tandis  que  les 
deux  faces  latérales  de  cet  édicule  sont  couronnées  par  des  fron- 
tons circulaires.  A  droite  et  à  gauche  du  soubassement  extérieur 
de  la  Loge,  deux  escaliers  en  pierre  montent  et  viennent  aboutir 
à  l'entrée  des  petits  arcs  qui  donnent  accès  dans  la  cour,  au  milieu 
de  laquelle  un  bassin  de  marbre  violet  reçoit  l'eau  que  vomissent 
deux  dauphins  portant  deux  enfants.  Autour  de  cette  cour  régnent 
un  petit  mur  de  clôture  et  un  banc  en  stuc  et  en  pierre. 

Si  l'on  est  entré  par  la  gauche,  on  trouve  à  droite  la  Loge,  dont 
la  galerie  est  entièrement  ouverte  sur  la  cour  et  sur  le  balcon,  et 
dont  quatre  colonnes  soutiennent  de  chaque  côté  les  retombées  de 
la  coupole.  Cette  galerie  est  pavée  en  mosaïque,  et  ses  deux  extré- 
mités, terminées  en  hérpicycles,  sopt  ornées  de  quatre  statues  de 
T.  V.  -î 


19 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


20 


muses  dans  des  niches,  et  de  deux  fontaines  en  marbre  blanc.  Le 
système  de  décoration  de  la  coupole  mérite  de  nous  arrêter  un 
instant;  aussi  bien,  en  le  décrivant  et  en  le  critiquant  nous  aurons 
à  peu  près  décrit  et  critiqué  tout  le  système  décoratif  de  la  Villa 
Pia  ;  la  forme  et  les  détails  varient,  mais  le  principe  est  partout 

le  même. . 
Au-dessus  d'unesériedeconsolesqui  s' appuientsur  l'entablement, 

c'est-à-dii-e  au  point  de  naissance  de  la  voûte,  s'élève,  en  manière 
de  second  étage,  une  riche  colonnade  d'ordres  et  de  détails  variés, 
que  surmontentdes  frontons  de  formes  également  diverses.  Vue  sur 
le  dessin  géométral  de  M.  Bouchet,  cette  colonnade  est  d'un  bel 
effet,  parce  que  les  axes  des  colonnes  sont  alors  en  ligne  droite  ; 
mais  quand  on  songe  qu'en  épousant  la  courbure  de  la  coupole,  ces 
colonnes  et  leurs  bases  décrivent  une  ligne  courbe,  on  ne  peut 
s'empéchér  de  déplorer  l'erreur  dans  laquelle  l'artiste  est  tombé 
et  l'étrange  oubli  qu'il  a  fait  de  la  véritable  fonction  de  la  colonne. 

Une  vérité  que  l'architecte  ne  devrait  jamais  perdre  de  vue,  c'est 
que  la  colonne  est  un  membre  principal  et  non  pas  un  accessoire, 
un  point  d'appui  et  non  pas  un  simple  motif  de  décoration. 

En  principe,  il  n'est  jamais  permis  de  simuler,  même  en  stuc,  une 
construction  irrationnelle  ou  impossible,  sous  peine  de  révolter  le 
bon  sens  et  de  choquer  le  bon  goût. 

Ce  n'est  certainement  pas  aux  sources  antiques  que  l'architecte 
de  la  Villa  Pia  a  été  puiser  de  pareilles  inspirations. 

Si  nous  n'avions  à  envisager  l'œuvre  de  Pirro  Ligorio  que  sous 
le  point  de  vue  des  détails,  nous  n'aurions  qu'a  admirer  et  à  ap- 
plaudir. Ces  arabesques  et  ces  tritons  qui  courent  le  long  des  frises, 
ces  rinceaux  et  ces  feuillages  qui  encadrent  ici  la  fable  d'Adonis, 
là  l'histoire  de  Moise,  peintes  de  la  main  de  Frederigo  Zuccberi, 
ont  une  grrtce  et  un  charme  presque  inimitables;  et  si  jamais  ar- 
tiste sut  faire  excuser  le  contact  du  sacré  avec  le  profane  et  har- 
monier  ensemble  des  éléments  si  opposés,  certes  ce  fut  bien  celui 
qui  bâtit  la  Villa  Pia. 

En  face  de  la  Loge  s'élève  le  Casin,  ouvert  aussi  sur  la  cour,  et 
répétant  la  disposition  et  la  galerie  de  la  Loge.  Quatre  colonnes 
isolées  livrent  entrée  par  trois  entrecolonnements,  et,  conjointe- 
ment.avec  deux  soubassements  à  pilastres  qui  forment  comme  à  la 
Loge  les  deux  extrémités  de  la  façade,  soutiennent  un  attique  si- 
mulant presque  un  premier  étage;  seulement,  ici  l'attique  est  plus 
élevé,  et  au  lieu  d'être  surmonté  d'un  fronton,  il  porte  un  second 
étage.  Le  centre  de  l'édifice  est  bien  accusé  par  des  trumeaux  cou- 
verts d'arabesques  qui  montent  à  l'aplomb  des  pilastres  du  soubas- 
sement, et  encadrent  à  la  fois  et  le  centre  et  les  deux  côtés  en  se  re- 
liant entre  eux  par  les  frises  au-dessus  de  l'attique  et  de  l'étage. 
A  l'étage  nous  voyons  trois  fenêtres  à  plates-bandes  surmontées  de 
cartouches  dans  la  partie  centrale,  et  dans  chacune  des  parties 
latérales,  une  niche  à  plein  cintre  avec  sa  statue;  au-dessous, 
dans  l'attique,  au  lieu  des  trois  fenêtres  et  des  deux  niches,  nous 
trouvons  cinq  baies  figurées  et  deux  cartouches  ronds,  ou  plutôt 
cinq  cadres  contenant  des  sujets  sculptés,  des  faunes,  des  nymphes 
couchées  ou  sortant  du  bain,  etc,  etc.  Au-dessus  des  trois  cadres 
du  centre  de  l'attique,  au  milieu  duquel  brille  l'écusson  du  pape, 
porté  par  des  génies,  on  lit  l'inscription  commémorative  de  l'a- 
chèvement de  la  Villa  Pia  par  Pie  IV.  Il  serait  superllu  d'ajou- 
ter que  tous  ces  cartouches ,  toutes  ces  baies  vraies  ou  figurées, 
ont  entre  eux  les  mêmes  axes  verticaux.  Cette  façade  harmonieu- 
.sement  distribuée  et  richement  décorée,  pèche  peut-être  par  une 
profusion  de  détails  et  par  un  oubli  trop  fréquent  de  la  vérité. 


Ainsi,  à  ne  consulter  que  l'élévation  du  Catin,  on  pourrait  croire 
que  ces  trois  divisions  bien  tranchées  correspondent  à  trois  pièces 
différentes  à  l'intérieur,  l'une,  grande,  au  centre,  et  les  deux  autres, 
plus  petites,  aux  extrémités;  mais  si  nous  interrogeons  le  plan,  nous 
voyons  qu'au  rez-de-cliaussée  comme  à  l'étage  c'est  une  seule  et 
même  galerie  qui  occupe  toute  la  façade.  Ce  défaut ,  car  c'en  est 
toujours  un,  excusable  quelquefois  dans  nos  maisons  modernes,  ou 
tant  d'exigences  et  de  besoins  divers  vieunentcoutrarier  et  modi- 
fier la  pensée  de  l'artiste,  ne  l'est  point  à  la  Villa  Pia ,  où  l'ar- 
chitecte n'avait  pour  exigences  à  ménager  que  les  lois  du  vrai  et 
du  beau,  pour  besoins  à  satisfaire  que  la  plus  élastique  fantaisie. 
Adossé  à  la  montagne  qui  l'abrite  de  ses  ombrages,  le  Ccuin 
présente  dans  son  plan  un  parallélogramme  allongé  dont  le  grand 
axe  traverserait  le  coteau  (  Foy.  /'/.  l).  Ce  parallélogramme  est 
flanqué  à  sa  partie  postérieure  de  deux  petites  ailes  de  surface  et 
de  hauteur  inégales,  dont  l'une,  à  droite,  £,  contient  l'escalier,  et 
dont  l'autre,  D,  plus  élevée  d'un  étage  en  manière  de  belvédère, 
forme  au  rez-de-chaussée  un  cabinet  de  travail.  Ce  cabinet  C  et 
cet  escalier  sont  séparés  entre  eux  par  un  petit  salon  B  que  pré- 
cède une  longue  galerie  ou  grand  salon  A,   précédé  lui-même  de 
la  première  galerie  transversale,  ou  vestibule  F  G,  que  nous  avons 
dit  s'ouvrir  sur  la  cour  et  faire  le  pendant  symétrique  de  la  Loge. 
Mais  ce'vestibule,  plus  long  que  la  grande  galerie  n'est  large, 
s'avance  un  peu  en  saillie  sur  les  deux  élévations  latérales,  ainsi 
qu'on  peut  le  voir  en  jetant  un  coup  d'œil  sur  le  plan. 

En  entrant  dans  le  vestibule,  nous  nous  trouvons  en  face  d'une 
Diane  d'Ephèse  avec  ses  nombreuses  mamelles;  à  droite  et  a 
gauche  sont  deux  portes,  l'une  figurée,  l'autre  donnant  accès  daus 
la  grande  galerie.  Comme  ceux  de  la  Loge,  les  hémicycles  sont  dé- 
corés de  statues  et  de  fontaines;  la  coupole  présente  des  compar- 
timents surmontés  de  frontons  coupés,  genre  de  décoration  qui 
rentre  dans  l'espèce  que  nous  avons  déjà  critiquée,  et  qui  a  le. 
défaut  de  former  des  jeux  de  ligne  discordants.  L'histoire  d'Adam 
et  Eve  est  peinte  à  la  voûte  par  Santi  di  Tito,  au  milieu  de  têtes 
de  Jupiter  et  de  Junon.  Cette  galerie,  toutefois,  porte  un  cachet  de 
grandeur  et  de  variété  dont  notre  Planche  2  peut  donner  une  idée. 
Les  détails  surtout  sont  pleins  de  richesse  et  de  gnlce,  et  la 
frise,  où  l'on  voit  courir  des  enfants  ailés  sur  des  chars,  peut  passer 
pour  un  modèle  du  genre. 

Les  murs  sont  revêtus  de  mosaïques  ;  le  pavé  est  fait  de  faïences 
coloriées,  et  la  coupole  est  partout  peinte  et  dorée. 

Un  goût  plus  pur,  mais  moins  large  peut-être,  préside  à  la  dé- 
coration de  la  grande  salle  ;  nous  ne  trouvons  plus  là  de  ces  sem- 
blants de  constructions  imaginaires,  et  {'histoire  delà  Vierge  al 
des  Apôtres,  peinte  par  Zuccheri,  n'a  pas  trop  droit  de  se  scandaliser 
de  sou  entourage.  La  couleur  joue  là  un  rôle  plus  important  que 
la  sculpture,  et  daus  plusieurs  de  ses  parties  la  coupole  rappelle  les 
peintures  des  maisons  de  Pompeïa. 

Dans  le  petit  salon  B,  même  genre  d'ornementation  et  de  pein- 
ture; seulement  le  profane  envahit  quelques  compartiments  de 
la  coupole,  où  les  fonds  blancs  et  la  couleur  dominent  comme  dans 
la  grande  galerie. 

L'iinjtatiou  de  construction  reparait  dans  la  voûte  du  cabinet 
de  travail.  Elle  représente  une  série  d'arcades  soutenues  par  des 
termes  et  figurant  un  portique.  Ces  arcades ,  remplies  de  peintures 
sacrées  et  profanes,  présentent  un  aspect  à  la  fois  simple  et  gran- 
diose. 

Nous  n'en  finirions  pas  si  nous  voulions  décrire  les  ornements 


2i 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


•22 


de  l'escalier,  de  l'étage  supérieur,  et  des  deux  édicules  qui  servent 
d'entrées  à  la  cour. 

L'étage  supérieur  reproduit  exactement  le  plan  du  rez-de-chaus- 
sée; la  petite  galerie  nous  a  paru  d'un  style  plus  pur  que  celui 
de  la  plupart  des  galeries  inférieures;  il  est  presque  exclusive- 
ment copié  sur  l'antique. 

Au-dessus  du  cabinet  de  travail  se  trouve  une  chambre  à  cou- 
cher fort  peu  décorée  et  qui  ne  parait  pas  avoir  été  jamais  habitée. 
Dans  un  de  ses  angles  est  un  petit  escalier  qui  donne  accès  à  un 
3e  étage  de  ce  corps  de  logis,  qui  forme  belvédère  à  la  hauteur  des 
combles,  et  d'où  la  vue  s'étend  sur  les  jardins  du  Vatican  et  sur  le 
splendide  palais  des  papes. 

Les  murailles  de  la  Villa  Pia  sont,  pour  la  plus  grande  partie, 
bâties  en  briques  et  revêtues  de  stuc  à  l'extérieur  aussi  bien  qu'à 
l'intérieur,  procédé  de  construction  qui  n'offrirait  que  peu  de  chan- 
ces de  durée  sous  un  ciel  moins  serein  que  celui  de  l'Italie. 

Si  nous  résumions  en  quelques  mots  les  traits  saillants  qui  ca- 
ractérisent l'architecture  de  la  Villa  Pia,  nous  pourrions  dire  que 
cette  architecture  est  une  imitation  de  l'antique  dans  ses  formes  et 
dans  ses  détails,  mais  de  l'antique  encore  imparfaitement  connu,  et 
suppléé  souvent  par  l'invention  gracieuse  et  brillante  d'un  artiste 
chez  qui  la  pensée  de  détail  dominait  presque  toujours  celle  de 
l'ensemble,  et  chez  qui  l'imagination  féconde  ne  laissait  pas  tou- 
jours place  à  la  raison.  Aussi  la  Villa  Pia  n'est-elle  pas  un  chef- 
d'œuvre  à  nos  yeux,  bien  qu'elle  étale  sur  ses  murs  des  trésors 
inépuisables  de  décoration;  mais  à  ce  seul  titre  déjà  elle  était  digne 
d'être  mesurée  et  dessinée  par  M.  J.  Boucbet,  dont  le  crayon  est 
à  la  fois  plein  de  sentiment  et  de  correction,  deux  qualités  qu'il 
est  aussi  rare  que  précieux  de  trouver  accouplées,  et  sans  lesquelles 
pourtant  un  artiste  ne  saurait  être  complet. 

Les  vingt-trois  grandes  planches  qui,  avec  la  description  de 
l'édifice  et  la  biographie  de  l'architecte  savamment  esquissées  par 
ja  plume  brillante  de  M.  Raoul-Rochette,  complètent  le  volume  de 
la  Villa  Pia,  sont  dues  au  burin  de  M.  Hibon.  L'exécution  en  est 
fort  soignée,  et  le  trait  généralement  pur. 

Pirro  Ligorio  n'a  guère  bàli  que  la  Villa  Pia  (l)  ;  mais,  devenu 
vers  la  fin  de  sa  vie  l'architecte  du  duc  d'Esté,  Alphonse  IF,  pour 
^qui  il  n'exécuta  jamais  de  bien  grands  travaux,  il  eut  le  loisir,  dans 
cette  espèce  de  sinécure,  de  réunir  et  de  classer  les  innombrables 
dessins  dont  il  composa  les  trente-cinq  volumes  qui  nous  sont  res- 
tés de  lui  sur  les  antiquités  romaines.  Dans  ces  dessins,  l'artiste  a 
souvent  mis  du  sien,  et  leur  incorrection  a  soulevé  plus  d'un  débat. 
Une  restauration  de  la  Rome  des  Césars  qu'il  fit  aussi,  et  qui,  à 
l'époque  où  il  vivait,  pouvait  avoir  quelque  appai'ence  de  vérité, 
n'est  guère  considérée  aujourd'hui  que  comme  une  œuvre  d'imagi- 
nation. Comme  la  plupart  des  artistes  de  son  temps,  Pirro  Ligorio 
l"ut  peintre  aussi  bien  qu'architecte,  et  l'on  cite  de  lui  quelques  fres- 
ques, mais  surtout  un  grand  nombre  de  frises  et  d'arabesques,  dont 
on  décorait  alors  les  façades  des  maisons;  Pirro  Ligorio  mourut  à 
Ferrare  en  i.'iSO. 

Alphonse  de  GALONNE. 


(1)  On  lui  attribue  aussi  le  palais  Lancellotti  à  Rome,  dont  la  façade  grave 
et  sévère  est  toute  en  refends.  Après  une  inondation  du  Pô  qui  avait  endom- 
magé plusieurs  édifices  i  Ferrare,  ce  fut  lui  qui  fut  appelé  A  les  réparer. 
M.  Raoul-liochcHe  pense  i\\\e  la  jolie  iu!(a  dEste,  à  Tivoli,  pourrait  bien  être 
aussi  l'œuvre  dp  cet  arcliitecte. 


£I>II.IT£  FAKISIXNNB. 


Conseil  Municipal  dk  Paris. 

On  a  remarqué  avec  surprise,  lors  des  récentes  élections  des 
conseillfirs  municipaux  de  la  ville  de  Paris,  que  les  candidats  qui 
briguaient  l'honneur  de  concourir  à  l'administration  de  la  ville 
se  préoccupaient  peu  de  faire  connaître  quelles  étaient  leure  idées 
relativement  aux  grandes  mesures  d'édilité'qui  intéressent  l'en- 
semble de  la  capitale.  A  en  juger  par  les  discours  prononcés,  il 
semblerait  qu'un  seul  candidat  eût  parfaitement  compris  la  vé- 
ritable solution  qu'il  importe  de  voir  adopter  pour  concilier  les 
intéix'ts  jusqu'ici  divergents  des  deux  grandes  fractions  de  la 
ville  qui  occupent  les  deux  rives  de  la  Seine.  M.  Victor  Consi- 
dérant, dans  une  note  adressée  aux  électeurs  du  10*  arrondis- 
sement, a  formulé  à  la  fois  la  critique  des  administrations  pas- 
sées et  le  principe  de  conduite  qu'il  conviendrait  d'adopter  pour 
l'avonir.  Les  électeurs  du  40«  arrondisseuient  paraissent  avoir  été 
vivement  frappés  des  vues  exposés  par  M.  Considérant ,  puisqu'ils 
lui  ont  délégué  le  soin  de  les  représenter  au  conseil  municipal,  m 
Nous  reproduisons  la  note  de  M.  Considérant.  Nos  lecteurs 
s'apercevront  ([u'elle  s'accorde  en  tout  point  avec  tout  ce  que 
la  Revue  a  publié  sur  l'édilité  parisienne.  Espérons  que  les  mem- 
bres nommés  par  les  autres  arrondissements  seront  plus  explicites 
au  sein  du  conseil  qu'ils  ne  l'ont  été  devant  les  électeurs. 

Noie  sar  le»  laterCis  généraux  de  la  ville  de  Pari»,  et  spécialement 
du  dixième  arrondissement. 

A   MM.    LES   ÉLECTEURS   DU   DIXIÈME   ABRONDISSEMEKT. 

Décadence  du  10'  arrondissement.  —  l.e  10«  arrondisscinent  est  le 
troisième  pour  l'étendue  du  territoire.  En  1831,  il  él.Tit  encore  le  pre- 
mier pour  le  chiffre  de  la  population  à  domicile. 

Dix  uns  plus  tard,  pciiilant  que  tous  les  autresarrondissemenis  avaient 
vu  s'accroitre  celle  population  dans  leur  sein,  le  lO"  était  le  seid  oii 
elle  eût  fléchi.  La  décadence  estsi  rapide,  que,  depuis  1831,  le  10*  arron- 
dissement a  perdu  environ  3,000  domiciliés,  et  s'est  vu  altcliu-et  dé- 
passé successivement  par  cinq  ariondissements  :  le  1",  qui,  pendant 
que  nous  perdions  3000,  gagnait  le  chilfn;  énorme  de  23,000;  le  3', 
qui  augmeiiiall  de  16000;  le  2'  et  le  6%  de  15000  ;  et  le  8«  de  13000. 

La  valeur  localive  sur  laipiellc  est  assise  la  contrlbiulon  dos  palenles, 
mesure,  comparativement  du  nlolns,  l'acllviié  du  grand  commerce  dans 
les   divers  arrondissenienis.  Cette  valeur,  messieurs,  a  diinituié 
100  mille  fr.  dans  noire  arrondissement,  pendant  qu'elle  augmentait  de 
plus  de  4  millions  dans  le  1",  le  2'  et  le  3%  réunis. 

Enlin,  dans  le  conrani  de  l'aïuiée  1842  seulcnieni,  nous  perdions  83 
électeurs,  pendant  (|ue  le  2«  arrondissement  eu  g.ignait  249. 

Ces  chiffres,  messieurs,  ne  sonl  que  trop  ëloquenis.  Ils  prouvent  la- 
coniquement que  le  mouvement  funeste  qui  déplace  si  rapidement  la 
richesse,  la  populaiion  active  elle  commerce  de  Paris,  sévit  peut-être 
plus  fort  sur  le  10'  arrondlssemenl  que  sur  tout  autre.  Examinons  de 
plus  près  ce  mouvement. 

Prodigieux  accroissement  des  quartiers  du  nord-ouest,  He. — Lel^ei 
le  2'arrondisssemenl  (nord-oueslde Paris)  voient  s' accroître  prodigieu- 
sement chez  eux  la  population  riche,  le  commerce  de  luxe,  et  les  quar- 
tiers voisins,  en  allant  à  l'est,  leur  population  commerçante.  Sous  Tin- 
fluence  du  môme  mouvement,  les  Batignolles,  d'une  part,  par  la  proxi- 
mité des  quartiers  de  la  haute  banque,  des  boulevards  et  des  ibeiires; 


REVUE  DE  L  ARCHITËCTUUE  Eï  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Si 


«l'aiilre  pari ,  La  Chapelle,  la  Villeiie  cl  Beicy,  par  la  pos-esiosn  des 
bouches  d'arrivage  des  canaux ,  el  par  le  quasi-monopole  de  rimniense 
approvisionncmeiil  de  Paris ,  se  sont  développés,  el  oril  grandi  comme 
de  vigoureux  parasites.  An  cotilraire,  les  villages  élevés  autour  de  Paris 
sur  la  rive  gauihe  (Ausierlitz,  la  Glacière,  etc.),  végclenl  misérable- 
ment; Grenelle  se  meurt  sous  le  vent  meurtrier  du  désert  des  Invalides; 
le  Gros-Caillou  reste  dans  un  déplorable  état  de  stagnation,  et  les  ber- 
ges abandonnées  de  la  Seine  attendent  eu  vain  l'acliviié  et  la  vie  tout 
le  long  et  au  delà  du  développement  littoral  de  notre  arondissemcnl. 

Toute  la  partie  centrale  du  vieux  Paris  et  les  trois  arrondissements 
de  la  rive  gauche,  ou  bien  ressemblent  à  des  cloaques,  comme  la  Cité, 
les  marchés,  les  quartiers  des  Lombards,  des  Arcis,  du  Louvre,  de 
rHôlel-de-Ville ,  de  la  Monnaie,  de  l'École  de  Médecine,  de  la  Sor- 
bnnne  et  de  Saint-Jacques,  ou  bien,  comme  le  Gros-Caillou,  le  quartier 
Saint-Marcel  et  Pile  Saint-Louis  s'étiolent  dans  un  Isolement  de  plus 
en  plus  fâcheux. 

Parlialitc  clinquante  dans  la  itislrilmlinn  des  améliorations.  — Mais 
qu'y  a-l-il  d'étonnant  dans  cette  inégalité  révoltante  de  la  fortune  des 
divers  quartiers  de  la  ville,  quand  on  voit  que,  dans  l'espace  de  huit 
années,  de  1831  à  1838,  11  millions  ont  été  dépensés  en  travaux  d'em- 
bellissement, d'assainissement  et  de  luxe,  sur  la  rive  droite,  tandis  que 
800  mille  l'r.  à  peine  (1)  ont  été  consacrés  à  la  rive  gauche!  quand  on 
voit,  de  1851  à  18il,  l'agrandissement  de  la  voie  publique  porter,  pour 
la  rive  droite,  sur  38  rues,  et  coûter  13  millions,  tandis  que,  dans  le 
même  laps  de  temps,  il  n'a  été  touché  qu'à  13  rues  el  qu'il  n'a  pas  été 
dépensé  2  millions  sur  la  rive  gauche  (2)  !  Et  cependant,  ce  qui  achève 
le  tableau,  la  charge  de  l'impôt,  particulièrement  de  celui  des  portes  et 
fenêtres,  pèse  beaucoup  plus  lourdement  sur  la  rive  gauche  que  sur  la 
rive  droite. 

Ce  n'est  pas  ici  le  lieu  d'accumuler  cl  d'examiner  tous  les  griefs.  Ce 
que  je  me  borne  à  signaler  suffit  pour  démontrer  combien  seraient  hors 
de  compte  ceux  qui  croiraient  qu'une  grande  pensée  de  justice  disiri- 
butive  et  d'égalité  proportionnelle  domine  déjà  dans  les  conseils  des  ad- 
niiiiistrations  supéiieurcs. 

Question  du  déplacement  de  la  population  active  de  Paris. — Depuis 
longtemps  pourtant,  des  mandataires  zélés  de  la  population  parisienne, 
des  membres  éclairés  de  notre  conseil  municipal,  ont  signalé  la  gian- 
deur  du  mal  el  appelé  l'attention  du  gouvernement  sur  les  moyens  d'ar- 
rêter ce  déplorable  déplacement  de  la  population,  qui  en  esl  la  cause 
fondamentale,  et  qui  laisse  et  laissera  de  plus  en  plus  derrière  lui  des 
ruines  el  des  pertes  incalculables  (3). 

L'éUide  détaillée  de  ce  problème  ne  serait  point  à  sa  place  dans  une 
note  consacrée  à  l'examen  rapide  des  intérêts  spéciaux  du  10'  arron- 
dissement; mais  je  ne  laisserai  pas  que  de  poser  ici  le  vrai  principe  de 
la  solution.  Ce  principe,  le  voici: 

Principe  fondamental  de  la  solution  de  la  question.— Les  déplace- 
ments successifs  des  foyers  d'activité  de  la  population  parisienne  ne 
seront  définitivement  arrêtés  que  du  jour  où  l'administration  aura 
compris  la  nécessité  de  créer,  sur  les  bords  de  la  Seine,  au  centre  de 
figure  de  la  ville,  dans  le  berceau  même  de  Paris,  un  foyer  supérieur  de 
vie,  de  plaisirs  et  d'affaires,  doué  d'une  force  louie-puissante  d'attrac- 
tion, et  dominant  en  beauté  ,  en  richesse,  en  vitalité  et  en  grandeur,  tous 
les  autres  points  de  la  capitale. 

C'est  donc  sur  le  centre  et  sur  la  Cité,  sur  les  quartiers  environ- 
nants et  principalement  sur  les  rives  de  la  Seine,  que  doivent  se  porter 


(1)  Les  chiffres  exacts  sont  :  11  357  634  fr.  et  833  612  fr. 

(J)  Les  cliiffrcs  exacts  sont  :  15  131  192  fr.  et  1  897,435.  Voir  les  comptes- 
rendus  annuels  du  budget  de  la  ville. 

(3)  Voir  les  travaux  publiés  par  MM.  Rabusson,  Lanquelin,  de  Cbabrol- 
Chaméane,  Pérignon,  Schniit  [Moniteur  Parisien),  Barrière  {Débats),  Dau- 
banton,  par  la  Gazette  municipale,  et  enfin  le  travail  de  M.  Perreymond, 

dontlcs  cinq  premiers  chapitres  sont  publiés  dans  la  «etuct/erJrfAftectureef 
des  Travaux  Publics. 


désormais,  dans  l'intérêt  bien  entendu  de  toute  lu  ville,  les  ciïorls  de 
radiuinistralion  cl  de  la  haute  cdilité  parisienne,  et  les  libéralités  trop 
hâtivement  prodiguées  aux  boulevards  et  aux  quartiers  excentriques  et 
aristocratiques  du  nurd-ouesl. 

La  régénération  de  la  Cité  el  des  quartiers  qui  l'environnent,  le  per- 
cement de  voies  de  communication  allant  du  centre  à  la  circonférence, 
la  parfaite  navigabilité  de  la  Seine,  et  rembellisseinenl  bien  entendu  et 
productif  de  ses  rives  :  voilà,  suivant  moi,  le  point  capital,  le  principe 
fixe  el  supérieur  seul  capable  de  donner  de  l'unité  el  de  la  force  au 
système  jusqu'ici  éparpillé  el  incohérent  de  l'édililé  parisienne,  el  de 
répandre  de  proche  en  proche,  du  centre  aux  extrémités,  le  bien-être, 
l'aciiNité  el  la  vie  dans  tous  les  membres  du  grand  corps. 

Mon  opinion  sur  le  système  général  de  l'administration  de  la  ville 
étant  sommairement  établie,  je  passe  à  l'examen  des  intérêts  spéciaux 
du  10'  arrondissement;  je  me  bornerai,  pour  être  bref,  à  trois  obser- 
\ allons  principales. 

Le  10*  arrondissement  a  eu  le  malheur  d'élre  placé  en  face  des 
demeures  royales  el  des  jardins  royaux,  el  d'en  être  séparé  par  un 
(leuve. 

1'"  Observation.  —  Sacrifiée  det  besoin*  du  iOt  arrondissement  u 
des  conditions  purement  décoratoires.  — Cette  position  a  fait  sacrifier 
les  besoins  les  plus  essentiels,  les  plus  vitaux  de  nos  quartiers  riverains, 
à  des  conditions  exclusives  de  décoration  ibéàirale.  L'absurde  dove- 
loppemenl  de  cette  façade  sans  profondeur,  plaquée  comme  iitie  loile 
de  fond  devant  le  collège  des  Quaire-N'alions  [actuellement  l'Instilul), 
qui  étrangle  le  quartier  de  la  Monnaie  et  intercepte  le  débouché  des 
rues  de  Seine  el  Mazarinc  sur  le  quai  Mala(|uais,  n'a  été  dressé  en  face 
du  Louvre  que  pour  donner  aux  fenêtres  de  ce  palais  une  perspective 
d'opéra.  L'activité,  la  vie  de  tout  un  quartier,  n'ont  été  si  fâcheusement 
sacrifiées  par  l'archilecle  Levcau,  que  pour  élever  à  l^uis  XIV  une 
déplorable  Dallerie  en  pierre  de  taille  (1). 

L'Hôtel  des  Invalides,  l'École  Mililaire,  n'ont-ils  pas  élé  disposés 
également  sous  l'empire  d'une  préocciipalion  fxc/u»ff«  de  perspective 
décoratoire  pour  les  Champs-Elysées  et  le  royal  chemin  de  Versailles 
cl  de  Saini-Cloud,  sans  aucune  considération  des  intércis  vitaux  des 
quartiers  dont  ces  espaces  immenses  devaient  faire,  en  quelque  sorte,  ' 
des  îles  inabordables,  et  que  pourtant  leur  voisinage  de  la  Seine  et  leur 
position  à  l'aval  de  Paris  destinaient  naturellement  et  essentiellement 
à  une  vie  commerciale,  abondante  el  active  ?  iN'est-il  pas  honteux  qu'on 
ail  laissé  jusqu'ici  dans  le  déplorable  ciat  d'abandon  el  même  d'insalu- 
brité où  nous  le  voyons,  un  développement  de  terrain  aussi  important 
que  celui  qui  est  compris  entre  le  haut  de  la  rue  de  Sèvres  ella  Seine,* 
notamment  les  points  situés  le  long  de  l'avenue  marécageuse  de  Lo- 
vvendal,  cl  de  l'avenue  de  Breieuil,  ainsi  que  les  environs  de  la  place 
Dupleix? 

Je  ne  multiplierai  pas  davantage  les  exemples  ;  ceux-là  suffisent  pour 
faire  comprendre  aux  intéressés  qu'ils  doivent  à  l'avenir  peser  sur 
l'édililé  supérieure,  pour  la  forcer  à  savoir  combiner  les  grands  aspects 
et  les  lignes  monumentales  qui  conviennent  aux  rives  d'urt  fleuve  qui 
traverse  une  capitale  comme  Paris,  avec  les  besoins  essentiels  des  popu- 
lations qui  habitent  ces  rives. 

2-'  Observation.  —  Abandon  fâcheux  du  canal  de  l'Yvette  —  En 
1772,  M.  de  Parcieux  présenta  à  l'Académie  des  Beaux-.\ris  un  projet 
de  la  plus  haute  importance,  qui  consistait  à  amènera  Paris  la  rivière 

(1)  Oonsultersur  ce  sujet  le  bon  projet  de  M.  Léon  de  Labiirde,  pour  l'amé- 
lioration  et  l'embellisseinent  du  10'  arrondissement.  «  Le» eau,  dit  M.  de 
«  Laborde,  en  élevant  .sou  édirice  sur  le  passage  de  tout  un  quartier,  en  trans- 
o  formant  en  impasses  des  rues  actives,  des  débouchés  nécessaires,  ne  se  préoc- 
«  cupait  que  d'une  cliose,  ne  travaillait  que  dans  un  but  :  donner  à  Louis  XIV, 
«  assis  dans  son  Louvre,  le  plus  beau  spectacle;  à  la  Seine,  la  plus  belle  <lé- 
«  coration  ;  en  un  mot,  il  regarda  devant  lui,  sans  réfléchir  qu'il  y  avait  quel- 
«  que  chose  derrière.  Or,  c'est  nous  qui  sommes  derrière,  et  qui,  depuis  bientôt 
ic  deux  siècles,  souffrons  de  cette  flatterie  d'un  courtisan.  » 


REVUE  DE  L'ARCHIl  ECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


20 


(le  l'Yvetle  (1)  ;  à  fournir  aiix  besoins  donicsliqncs  cl  à  rassainisseinent 
de  lu  rive  gauche  tout  eulière  dos  eaux  abondantes  ;  à  procurer  enfin  à 
celle  rive  des  avantages  analogues  à  ceux  que  le  canal  de  l'Ourcq  a 
faits  à  la  partie  seplentrionale  de  la  capitale.  L'exécution  de  ce  projet 
baulcuicnt  appuyé  par  tout  ce  que  l'Académie  renfermait  alors  de 
savanis  illustres,  repris  et  commencé  sous  Louis  XVI  (!"80),  par 
M.  Defer  de  La  Nouerret,  a  éié  déiilorablement  sacrifiée  en  17^7  à 
l'inilnence  égoïste  de  quelques  intérêts  particuliers.  En  1821,  M.  l'in- 
génieur C.-J.  Minard  esl  revenu  de  nouveau  à  celte  idée  :  il  a  obtenu 
l'approbation  dn  Conseil  des  Ponls-et-Chaussées  (séance  du  10  sep- 
tembre 18-22)  pour  le  projet  d'un  canal  qui,  partant  de  la  vallée  de 
l'Yvette,  et  aboutissant,  barrière  Saint- Jacques,  à  un  bassin  semblable 
•à  celui  de  La  Villetle,  amènerait  à  bas  prix  à  la  ville  des  eaux  d'une 
exeellenie  qualité,  ainsi  que  les  matériaux  de  pavage  et  de  construc- 
tion tirés  des  riches  carrières  au  long  desquelles  le  canal  devait  être 
.creusé. 

Le  niveau  de  ce  bassin  Saint-Jacques,  qui  donnerait  8  mille  mètres 
cubes  d'eau  par  jour,  serait  à  im  40  au-dessus  du  point  le  plus  élevé  de 
Paris  (l'Estrapade  près  le  Panthéon),  c'esl-à-dire  à  15  mètres  plus  haut 
que  le  niveau  du  bassin  de  La  Villetle. 

Le  puiis  de  Grenelle  étant  insuffisant  pour  subvenir  aux  besoins 
domestiques  et  à  l'assainissement  des  trois  arrondissements  de  la  rive 
gauche,  ceux-ci  sont  intéressés  à  la  reprise  d'un  projet  dont  l'exécu- 
lioii,  due  à  cette  rive,  épargnerait  chaque  année  d'ailleurs,  à  l'État,  à  la 
\  ille  et  aux  particuliers,  des  dépenses  considérables. 

On  peut  évaluer,  en  effet,  à  plus  de  40  raillions  les  économies  qui 
eussent  été  réalisées  depuis  20  ans  dans  Paris,  si  ce  canal,  dont  le  devis 
ne  s'élevait  qu'à  2  millions  et  demi,  eût  été  exécuté  (2). 

3'  Observation.  —  Question  de  la  navigalion  de  ta  Seine.  —  La 
construction  (les  canaux  Saint-Denis  et  Saint-Martin  a  eu  pour  objet 
d'abréger  le  trajet  de  la  Brielie-Saint-Denis  à  l'amont  de  Paris.  Or,  ces 
canaux  allongent  en  réalité  de  beaucoup  le  temps  qu'exigerait  le  trajet 
par  la  Seine,  si  la  navigation  de  la  rivière  était  libre  dans  la  ville.  En 
elfei,  dans  l'état  actuel  des  choses,  l'enconibrement  est  tel  qu'il  ne  faut 
quelquefois  pas  moins  de  quinze  jours  pour  traverser  le  canal.  La  tra- 
versée lie  ce  canal  coule,  en  moyenne,  au  commerce, 600  fr.  parbaleau 
de  500  tonneaux.  Par  la  Seine,  le  trajet  durerait  deux  jours  cl  coulerait 
à  peine  lîiO  fr. 

La  libre  navigation  de  la  Seine  dans  l'intérieur  de  Paris  esl  un  point 
sur  le(|uel  nous  ne  saurions  trop  nous  efforcer,  dans  rintéiét  colleclif  de 

(1)  L'Yvette  prend  sa  source  à  8  kilomèlres  de  Clievicusc,  et  n'a  (jnc  30 
à  32  kilomèlres  de  cours. 

(2)  Voir  le  Projet  de  canal  et  i\c  chemin  de  fer  pour  le  transport  des  paies  à 
Paris,  etc.,  par  M.  C.  J.  Minard.  Tout  réceiiimeiit,  Al.  Itadiguel  vient  de  pré- 
senter au  Conseil  général  lui  projet  de  dénvaliou  de  la  Marne,  qui  remplirait  en 
partie,  pcut-élre,  l'ohjel  du  canal  de  l'Yvelle.  C'est  une  question  à  étudier. 

Mottvement  général  de  l'approvisionnement  par  eau  de  la  capitale — 
l'aris  reçoit,  par  le  petit  cabotage  et  par  le  nouage,  2  000  000  tonneaux  de 
marciiandisesdc  toute  espèce,  quanlilé  presque  double  de  celle  que  reçoivent 
nos  principaux  ports  dj  mer  réunis. 

Celte  masse  énorme  de  marchandises  est  apportée  dans  les  ports  de  Paris  et 
de  la  banlieue  (La  Villetle,  Bercy,  la  Gare,  Grenelle)  par  un  nombre  de  20  Â 
22  000  bateaux,  et  do  3000  à  3800  trains  de  bois,  suivant  que  les  eaux  de  la 
Seine  sont  plus  ou  moins  favorables  a  la  navigation. 

10  AOO  de  ces  bateaux  et  2  200  trains  de  bois  se  déchargent  en  amont  de 
Paris  (Sud-Est),  c'est-à-dire  de  l'cxtréniilé  Est  de  la  Cilé  en  remontant  vers 
Bercy  et  la  Gare. 

9500  bateaux  déchargent  &  La  Villetle  et  le  long  du  canal  Saint-Martin  (Xord- 
Est  de  Paris). 

nco  bateaux  et  1200  trains  de  bois  déchargent  en  aval  (Sud-Est  de  Paris) 
c'est-à-dire  depuis  le  pont  des  .Sainls-Pères  jusque  vers  Grenelle  et  Passy. 

En  d'autres  termes,  tandis  que  20  000  bateaux  et  2200  irains  de  bois  dé- 
chargent en  amont  ou  au  Nord-Est,  1800  bateaux  et  1200  trains  de  bois  seu- 
lenienl  arrivent  en  aval  '. 


la  capitale  cl  dans  rinlérélparliculicr  du  10"  arrondissement,  de  vaincre 
l'inertie  et  la  mauvaise  volonté  (je  justifierai  celle  expression)  de 
.M.  Teste,  minisire  des  Travaux  Publics.  Examinons  d'abord  la  i|uestion 
dans  ses  rapports  avec  le  10°  arrondissement. 

lilat  du  Gros-Caillou  ,  de  la  rive  du  U)"  arrondiitemenl  el  drt  ports 
intérieurs.  —  Certes,  les  habitants  du  quarlier  des  Invalides  avaient 
conçu  les  plus  belles  espérances  lorsqu'ils  virent,  au  prix  de  plusieurs 
millions,  le  bras  de  la  Seine  du  coté  de  Grenelle  creusé  el  disposé  pour 
former  une  gare  belle  el  .spacieuse,  l'ile  des  Cygnes  iransforniée  en 
promenade,  une  estacade  surmontée  d'une  passerelle,  réunir  le  quai 
d'Orsay  à  celle  île,  un  chemin  de  fer,  enfin,  se  déployer  de  la  gare  à 
l'entrepôt  du  Gros-Caillou.  Vain  espoir!  l'ile  des  Cygnes  a  perdu  soti 
estacade;  la  gare  ne  reçoit  que  quelques  bateaux  de  charbon,  el  le  Gros- 
Caillou  n'a  pas  vu  s'accroître,  le  moins  du  inonde,  sa  prospérité  cl  son 
activité. 

C'est  qu'avant  de  construire  le  port  qui  doit  recevoir  les  navires,  les 
marchandises,  et  appeler  le  mouvement  commercial,  il  faut  que  le  port 
soit  abordable. 

Or,  la  voie  qui  doil  rendre  à  la  vie  tous  les  ports  de  l'intérieur  de 
Paris,  qui  doit  lutter  énergiquemcnl  contre  les  funestes  cffels  du  dépla- 
cement de  la  population,  appeler  à  une  nouvelle  existence  le  vieux 
Paris  central  el  larive  gauche,  c'est  la  Seine,  la  Seine  rendue  libre  cl 
navigable  dans  la  traversée  de  Paris  et  de  la  banlieue. 

Celle  grande  vérité,  messieurs,  a  déjà  élé  fortement  sentie  par  le 
Conseil  municipal,  qui  n'a  pas  craint  de  voler  plusieurs  millions  pour 
convertir  l'île  Louviers  en  poris  de  déchargement  el  en  magasins  de 
marchandises.  L'ancien  développement,  l'ancienne  prospérité  de  la 
hanse  parisienne  (le  commerce  par  la  ïeine),  se  sonlceriainenienl,  lors 
de  celle  résolution,  présentés  à  la  pensée  des  modernes  cchevins  de  la 
ville  de  Paris. 

Si  l'indusirie  et  la  ville  ont  dépensé  des  million»  pour  la  construc- 
tion de  l'entrepôt  du  Gros-Caillou,  des  ports  el  des  bas-ports  de  l'an- 
cienne île  Louviers,  des  ports  Saint-Paul,  des  Sainls-Pères,  d'Orsay  el 
de  la  gare  de  Grenelle;  si  tous  les  travaux  en  aval  el  une  jiariie  des 
travaux  en  amont  du  vieux  Paris  sont  restés  el  restent  stériles  el  im- 
productifs, il  esl  du  plus  haul  intérêt  d'en  signaler  les  causes. 

Principe  du  développement  commercial.  Explications  de  l'inégalité 
de  dislribnlionducommerce  d'approvisionnement  par  eau. — Kn  principe. 
messieurs,  l'activité  commerciale  ne  saurait  se  développer  sur  des  points 
dont  les  communications  sont  en  grande  partie  coupéis.  Si  ce  prin- 
cipe esl  vrai,  rien  n'est  plus  simple  que  de  savoir  pourquoi  les  ports  des 
Saints-Pères  et  d'Orsay,  pourquoi  les  berges  de  la  rivière  devant  les 
Invalides  el  le  Champ-de-.Mars,  pourquoi  la  gare  de  Grenelle,  sont 
frappés  de  marasme  el  de  mort,  tandis  que  La  Villetle,  Bercv,  la  Gare, 
monopolisent  au  détriment  de  tout  le  reste  de  la  ville,  el  surtout  du 
centre  et  de  la  rive  gauche,  l'immense  approvisionnement  par  eau  de  la 
capitale?  — C'esl  parce  que  leiiorj  el  l'amont  de  Paris  communiquent 
avec  la  haute  Seine,  la  basse  Seine  et  leurs  affluents,  rivières  et  ca- 
naux; tandis  que  le  centre  el  l'aval  de  Paris  ne  communiquent  qu'avec 
la  basse  Seine  seulemeni.  Le  commerce  ne  peut  se  conlenler  d'une 
liberté  de  communication  incomplète  à  ce  point.  Voilà  pourquoi  l'a- 
val de  Paris  est  abandonné,  tandis  que  l'amont  cl  le  canal  de  la  Seine  à 
la  Seine  aiiirent  tout  à  eux,  el  avec  une  telle  puissance,  qu'ils  s'en- 
combrent, s'engorgent  chaque  jour  davantage  de  bateaux,  de  marchan- 
dises, de  magasins  et  d'cntrepôis. 

La  libre  navigalion  de  la  Seine  dans  Paris,  vivement  réclamée  par  le 
Conseil  général,  appuyée  par  M.  le  préfet  lui-même,  et  entravée  par  le 
ministre  des  Travaux  Publics,  est  donc  la  condition  sine  qua  non  de  la 
revivificalion  commerciale  des  quartiers  riverains  de  l'aval  cl  du  centre. 
Sans  celle  liberté  de  navigation,  il  faut  renoncer  à  jamais  voir  s'élever 
le  long  de  la  rive,  et  surtout  à  l'aval  du  10*  arrondissemenl,  les  cntre- 
pôls,  les  élablissemenls  el  les  centres  de  commerce,  qui  y  seraient  si 
bien  placés,  cl  qu'il  esl  si  urgent  d'y  ailircr  pour  conlre-Uilanccr  les  fà- 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


38 


dieux  effets  de  l'isoleinenl  produit  par  le  développement  exagéré  qu'oc- 
cupent sur  ce  point  les  propriétés  de  l'État,  et  pour  éviter  le  fâcheux 
encombrement  de  ramoiii. 

Examinons,  pour  nous  édifier  sur  le  sujet,  les  chiffres  généraux  de 
l'approvisionnement  par  eau  de  la  capitale. 

Celle  disproportion  effrayante  atteste,  dans  la  répartition  des  avan- 
tages généraux,  un  déni  de  justice  et  un  renversement  de  toutes  les  no- 
tions du  droit  et  de  l'économie  distributive,  d'autant  plus  flagrants  que 
la  basse  Seine  et  ses  affluents  (l'Oise,  l'Aisne,  l'Eure,  l'Escaut,  les 
Canaux  du  Nord)  fournissent  à  l'approvisionnement  de  Paris  plus  de 
720  000  tonneaux  de  marchandises  qui  vont,  en  presque  totalité,  dé- 
boucher au  haut  de  la  ville! 

Voyons  niaiiitenani  comment  la  question  se  présenle. 

Èlal  de  la  question.  Les  compagnies  el  le  minisire  des  Travaux  Pu- 
blics. —  En  fait,  l'aval  et  l'intérieur  de  Paris  ont  été,  par  la  eonslnic- 
lion  des  canaux  du  Nord-Est,  et  par  l'obstruction  de  la  Seine  inlra 
muros,  sacriiiés  au  développement  exagéré  du  Nord  et  de  l'Est. 

Le  mouvement  des  approvisionnements  par  eau  de  la  capitale  ayant 
doublé  depuis  vingt  ans,  et  s'accroissant  prodigieusement  encore  tous 
les  jours,  il  arrive  maintenant  que  l'amont  et  les  canaux,  qui  accaparent 
presque  tolalenieiit  ce  mouvement  énorme,  sont  encombrés  et  se 
plaignent  de  pléthore.  10  000  bateaux  et  2200  trains  se  déchargent  à 
ramont  de  Paris,  8,400  bateaux  se  déchargent  le  long  des  canaux  Saint 
Denis  et  Saint-Martin  ;  les  Compagnies  des  canaux  ploient  sous  le  faix 
de  leur  monopole.  Eh  bien!  savez-voiis  ce  que  veut  l'ime  de  ces  Com- 
pagnies? Elle  veut  que  l'on  ajourne  indéfiniment  les  travaux  de  naviga- 
tion delà  Seine,  et  qu'on  autorise,  à  La  Chapelle,  la  con.structinii  d'un 
nouveau  bassin  pour  y  faire  refluer  le  trop-plein  de  ses  bateaux  (1). 


(1)  En  1337,  MM.  Zliendreconçurentridée  d'ouvrir  un  second  bassin  entre  I.a 
Villette  et  La  Cliapelle-Saint-Dcnis,  bassin  qui  devait  être  alimenté  par  les  eaux 
de  La  Villette.  L'ingénieur  de  la  Compagnie  concessionnaire  des  canaux  de 
l'Ourcqet  Saint-Denis,  M.  Vulgncr,  dressa  le  projet.  Le  Conseil  municipal  re- 
jeta cette  proposition  dans  le  mois  d'avril  1838. 

MM.  Zliendre  s'adressèrent  qnelque  temps  après  à  M.  le  directeur  de» 
Ponts-ct-Cli;ussées.  M.  le  directeur  invita  (mai  1839)  M.  le  préfet  de  la  Seine  à 
soumettre  ce  projet  aux  enquêtes  prescrites  par  la  loi  du  9  juillet  1833.  M.  le 
préfet  arrêta  qu'il  serait  ouvert  une  enquête  administrative  à  l'HOtel-de-Ville 
de  Paris  et  à  la  sous-préfecture  de  Saint-Denis.  Une  commission  fut  nommée 
pour  centraliser  et  étudier  les  résultats  de  cette  double  cnciuête.  Cette  com- 
mission se  prononça  contre  le  projet  dans  le  mois  de  juillet  1839. 

La  chambre  de  commerce,  consultée  sur  le  même  sujet,  jugea  que  le  nou- 
veau bassin  serait  utile,  s'il  était  mis  en  communication  directe  avec  le  canal 
Saint-Martin,  s'il  était  revêtu  en  pierre,  etc.  ;  en  un  mot,  la  chambre  de  com- 
merce imposait  de  grands  frais  à  MM.  Zhenore. 

L'affaire  en  ét;iit  restée  là,  lorsque  M.  le  ministre  des  Travaux  Publics,  quel- 
ques mois  plus  tard,  invita  M.  le  préfet  à  lui  renvoyer  toutes  les  pièces  de 
cette  affaire,  en  les  accompagnant  de  son  avis.  M.  le  préfet,  au  lieu  de  ré- 
pondre immédiatement  au  désir  du  nnnistre,  eut  la  bonne  et  louable  idée  de 
consulter  de  nouveau  le  Conseil  municipal,  qui  maintint  avec  fermeté  son  opi- 
nion défavorable. 

Or,  pendant  que  M.  le  ministre  des  Travaux  Publics  manifestait  ainsi  une 
vive  sollicitude  pour  un  projet  énergiquement  repoussé  par  le  préfet  de  la 
Seine,  par  le  Conseil  municipal  de  Paris,  et  préjudiciable  aux  intérêts  généraux 
de  la  ville,  il  opposait  toute  sa  force  d'inertie  et  toutes  les  lenteurs  d'un 
ajournement  systématique  au  projet  de  navigation  intérieure  de  la  Seine,  qui 
a  toute  la  sympathie  de  l'Hôtel-de-Ville,  du  commerce,  de  la  marine,  et  en  fa- 
veur duquel  le  Conseil  municipal  n'a  pas  seulement  persisté  à  réitérer  ses 
vœux  auprès  de  l'administration  supérieure,  mais  encore  n'a  pas  craint  d'en- 
gager déjà  plusieurs  millions  dans  les  travaux  de  l'Ile  Louviers.  L'Ile  Louviers, 
anciennement  appelée  Bonde  des  Barres,  et,  plus  tard,  des  Javeaux,  appartient  a 
la  ville  de  Paris  depuis  le  6  juillet  1705.  Cette  ile  a  été  achetée  à  M.  de  Balzac 
d'Antragues  :  la  ville  l'a  payée  61  500  livres.  L'île  Louviers  rapportait  depuis 
trente  ans  à  la  ville  une  rente  annuelle  de  ao  000  fr. 

Si  les  Compagnies  des  canaux  de  l'Est,  dont  les  bénétices  présumables  avaient 
été  calculés  sur  un  mouvement  annuel  de  600  bateaux,  craignent  de  voir  faiblir 


Heureusement  pour  Paris,  le  Conseil  municipal  a  repoussé  cette  pré- 
tention exorbitante,  qui  n'allait  à  rien  de  moins  qu'à  accroître  encore 
et  consommer  pour  l'avenir  le  sacrifice  des  quartiers  centraux  et  de  la 
rive  gauche  à  une  localité  extérieure. 

.Malheureusement,  par  contre,  celte  Compagnie  a  un  avocat  très- 
puissant  au  ministère  des  Travaux  Publics. —  M.  le  ministre  des  Tra- 
vaux Publics  était  lui-même,  en  effet,  l'avocat  en  titre  de  la  Compa- 
gnie des  Canaux  de  l'Ourcq  et  Saint-Denis,  avant  de  prendre  posses- 
sion de  son  porlefcuille;  et  nous  ne  sachions  pas  qu'il  ail  renoncé  a 
tout  jamais  à  cette  position  et  aux  avantages  qui  y  sont  joints. 

Le  projet  de  navigation  de  la  Seine  dans  Paris,  étudié  depuis  six  ans  par 
M.  l'ingénieurPoirée,  élaboré  et  modifié  par  diverses  commissions,  Tive- 
ment  approuvé  par  le  Con.seil  général  et  par  le  préfet  de  la  Seine,  est  indc'- 
fininientajourné  par  .M.  le  ministre  des  Travaux  Publics. — Voila  les  faits. 

Utilité  de  ta  publicité  des  faits. — Ces  faits,  il  est  bon  qu'ils  soient 
connus,  il  est  bon  que  les  quartiers  riverains,  les  quartiers  centraux 
el  la  ville  entière,  sachent  comment  le  beau  fleuve  qui  traverse  Paris 
pourrait  devenir  enfin,  pour  Paris  entier,  tout  ce  qu'il  peut  être,  c'est- 
à-dire  une  source  féconde  de  vie  et  de  prospérité,  et  comment  ce  grand 
bienfait  est  ajourné  indéfiniment  et  ne  s'accomplit  pas.  Il  est  bon  sur- 
tout que  ces  choses  se  sachent  au  monieiil  où  les  citoyens  ont  à  nommer 
leurs  mandataires  au  Conseil  général. 

Sur  la  question  qui  vient  de  nous  occuper,  comme  sur  d'autres,  la 
fermeté  de  ces  mandatsiircs  et  la  publicité  pourront  seules  venir  à 
bout  de  certaines  résistances. 

N'oublions  pas,  quant  à  la  question  vitale  de  la  navigation  de  la  Seine, 
que  la  concession  de  la  C*uM|iagiiie  des  rénaux  du  nord-est  de  Paris 
ne  finit  que  dans  soixante-dix-huit  ans;  n'oublions  pas  que  de  puissants 
intciêts,  toujours  actifs,  toujours  sur  le  qui-vive,  luttent  de  toutes  leurs 
forces  contre  les  améliorations  indispensables  à  la  régénération  du  vieux 
Paris  et  de  la  rive  gauche. 

Si  les  citoyens  ne  s'éclairent  pas  sur  les  grands  intérêts  de  la  ville, 
s'ils  ne  prennent  pas  des  mesures  énergiques  pour  forcer  l'inertie  ou  le 
mauvais  vouloir  de  l'administration  supérieure,  si  la  publiciione  s'en 
mêle  pas,  si  les  électeurs  ne  nomment  pas  pour  les  représenter  des. 
hommes  profondement  pénétres  de  la  gravité  des  questions  qu'il  s'agit 
de  résoudre,  capables  d'en  élucider,  d'eu  poursuivre  et  d'en  obtenir  les 
solutions,  rien  n'arrêtera  le  flot  de  celte  puissante  marée,  qui  eniniiiie 
et  concenire  au  delà  de  la  capitale,  au  nord-esi,  le  niouvemeiil  tout 
entier  du  grand  commerce  d'appiovisionnement,  et,  dans  les  régions 
excentriques  du  nord-ouest,  le  foyer  des  affaires  de  la  B:inque,  du  luxe, 
des  plaisirs  et  de  raciiviié  urbaine.  .Malheur  alors  au  vieux  Paris  el 
aux  trois  arrondissements  de  la  rive  gauche,  que  le  commerce  cl  la  vie 
délaissent  de  plus  en  plus,  dont  toutes  les  propriétés  sont  menacées 
d'une  dépréciation  qu'accélérera  bieniôt  l'influence  combinée  des  têies 
de  chemins  de  fer  du  Havre,  de  Lille,  de  Strasbourg  et  de  Lyon,  si  l'on 
ne  s'oppose  pas  vigoureusement  à  renvabissement  du  monopole  du 
nord  et  du  noid-ouest  de  la  rive  droite! 

Coup  d'œil  sommaire  sur  le  budget  municipal.  —  L'adminisiratton 
de  la  ville  roule  sur  un  budget  annuel  de  42  millions. 

Si  nous  jetons  un  coup  d'œil  rétrospectif  sur  l'ensemble  des  dépenses 
de  la  ville  pendant  quarante-trois  ans,  de  1707  à  18iO,  dépenses  por- 
tant sur  une  recette  totale  de  1  534  3(>2  449  fr.,  nous  trouverons  entre 
autres  faits,  et  en  chiffres  ronds,  que  l'on  a  dépensé  : 

Pour  fumées  de  feux  d'artifices  et  fêtes  publiques 16  000  000 

Et  pour  quais,  pavages  neufs,  trottoirs  et  carrières  sous  Paris 
(catacombes)j  seulement 11  000  000 

les  revenus  de  l'énorme  mouvement  actuel  de  8400  bateaux,  sur  lequel  elles 
opèrent,  est-il  juste  que  la  ville  et  l'industrie  perdent  les  intérêts  engagés  dans 
la  construction  des  ports  et  des  entrepôts,  et  que  les  besoins  de  la  ville  en- 
tière et  des  quartiers  riverains  soient  sacrifiés  au  développement  exagéré  de  la 
richesse  de  ces  Compagnies  ? 


•29 


REVUK  DK  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


30 


Pour  grands  travaux  d'arclil lecture,  dont  partie  ont  été  dé- 
truits, n'oul  jamais  servi,  ou  ont  changé  de  destination.     .     .     .  88  000  000 

L'État,  de  son  côté,  pendant  le  même  laps  de  temps,  dépen- 
sait à  Paris,  pour  des  travaux  du  même  genre,  environ.     .     .     .  200  000  000 
Et  pour  agrandissement  de  la  voie  publique,  seidement.     .     .  33  000  000 

Pour  la  garde  nationale 20  000  000 

Pour  la  garde  mimiclpale 67  OOO  000 

Pour  la  préfecture  de  police 148  000  000 

Et  pour  égouts,  distribution  des  eaux,  disposition  d'assainis- 
sement, etc.,  seulement   14  000  000 

Certes,  on  petit  être  ami  des  fêtes  publiques,  des  beaux-arts  et  de 
l'ordre,  sans  croire  nécessaire  de  sacrilier  l'assainissemenl  et  la  circula- 
tion, ces  deux  premiers  besoins  d'une  immense  population  agglomérée 
sur  un  petilespace,  à  des  dépenses  évidemment  exagérées.  Il  est  urgent 
(pie  l'on  songe  enfin  à  eiiirerdans  une  voie  nouvelle,  et  que  la  régéné- 
ration du  vieux  Paris  et  des  rives  de  la  Seine  devienne  l'objet  des  études 
de  l'administration,  et  remplace,  dans  son  budget,  les  dépenses  déco- 
raioires  prodiguées  à  des  quartiers  jusqu'ici,  et  proportiounellenient, 
beaucoup  trop  avantagés. 

Grande  rue  delà  Croix-Rouge  au  quai  Conli.  —  Après  la  question 
d'adoption  d'un  plan  d'ensemble,  destiné  à  arrêter  le  déplacement  de 
la  populaiion  par  le  remaniement  du  vieux  Paris  central,  et  par  la  libre 
navigation  de  la  Seine;  après  la  question  de  la  distribution  d'eaux 
abondantes  dans  tons  les  qtiarliers  tie  la  rive  gauclie,  et  des  autres 
ipbjels  ci-dessus  indiqués,  se  présentent,  pour  le  dixième  arrondisse- 
ment, les  amélioraiions  à  l'aire  dans  les  quartiers  Sainl-Thomas-d'Aqiiin 
et  de  la  Monnaie.  Nous  dirons  brièvcmeni,  à  cet  égard,  (ine  ces  amélio- 
rations doivent  avoir  pour  base  le  percement  d'imc  artère  qui,  partant 
de  la  Croix-Ronge,  ot'i  aboutissent  les  grandes  voies  de  loutes  les  bar- 
rières du  sud-ouest,  prenant  le  quartier  de  la  Moimaie  en  écharpe  et 
déblayant  les  abords  de  l'abbaye,  déboucherait  entre  le  pont  des  .\rts 
et  le  Pont-Neuf.  Un  nouveau  pont  à  voitures  prolongerait  cette  rue 
jusque  devant  la  colonnade  du  Louvre  (1). 

Le  faubourg  Saint-Germain  se  trouvant  alors  environné  de  quartiers 
llorissants  et  commerçants,  se  verrait  rappelé  à  la  vie  et  au  genre  de 
prospérité  (|ui  convient  à  ses  établissements  publics,  à  ses  vastes  hôtels 
et  à  sa  magnifique  position. 

Je  termine  par  une  remarque  qui  semblera  bien  vulgaire  a  quelques- 
uns  peut-être,  mais  qui  ne  manque  pourtant  pas  de  sens  à  mon  avis  : 
c'est  que  les  quais  qui  bordent  le  dixième  arrondissement,  les  plus 
beaux  quais  de  Paris,  ne  fournissent  même  pas,  dans  l'état  actuel  des 
cho.ses,  des  éléments  de  vie  et  d'exploitation  suffisants  pour  attirer  l'é- 
tablissement d'une  voiture  omnibus  qui  les  desserve  !  En  bonne  édilité, 
cependant,  les  deux  rives  de  la  Seine  devraient  être  les  deux  plus 
puissantes  artères  de  la  circulation  de  la  ville. 

Je  ne  parlerai  pas  ici  de  la  suppression  indispensable  des  péages  des 
ponts,  de  la  péréquation  des  impôts  qui  pèsent  trop  lourdement  sur  la 
rive  gauche,  ni  de  ipielques  autres  questions  qui  doivent  être  résolues 
au  mieux  des  iniétèts  des  classes  pauvres  et  des  quartiers  les  plus  en 
souffrance.  Les  solutions  de  ces  questions  dérivent  évidemment  des 
principes  supérieurs  de  justice,  d'égalité  et  d'économie  distributive  que 
je  m'eflforce  de  faire  prévaloir. 


Situation  des  Hevenus,  Dépenses,   Embellissements, 
Travaux  commences  et  projelés  de  la  Ville  de  Paris,  au  2a  décembre  1843. 

Depuis  plusieurs  années,  M.  le  préfet  de  la  Seine  prononce,  en 
présence  des  membres  de  la  Chambre  du  tribunal  de  Commerce  et 
des  quarante  notables  commerçants  désignés  par  eux,  un  discours 
sur  la  situation  administrative  de  la  Ville  de  Paris,  lors  de  l'ou- 


(1)  Voir  le  projet  de  M.  L.  de  Laborde,  cité  plus  iiaut. 


verture  de  la  séance  qui  a  lieu  au  Palais  de  la  Bourse,  pour  le  re- 
nouvellement annuel  des  cinq  membres  sortant  de  la  Chambre  de 
Commerce. 

Nous  aimons  à  voir  ainsi  le  premier  .magistrat  municipal  venir 
présenter  le  tableau  des  intérêts  parisiens  devant  des  hommes  ex- 
primentés  dans  la  pratique  et  la  triture  des  affaires. 

La  spécialité  de  notre  journal  ne  nous  permettant  pas  de  donner 
intégralement  le  discours  de  M.  le  comte  de  Rambuteau,  ce  n'est 
pas  à  nous  non  plus  de  porter  un  jugement  sur  l'ensemble  des 
différentes  parties  administratives  et  statistiques  que  M.  le  préfet 
a  traitées  dans  son  allocution.  Nous  nous  renfermerons  dans  la 
question  de  l'assainissement  de  Paris,  qui,  au  point  de  vue  de  l'uti- 
lité, occupe  évidemment  le  premier  rang;  telle  est  aussi  la  pensée 
de  M.  le  préfet,  pensée  qu'il  a  formulée  très-explicitement  et  avec 
une  précision  mathématique  dans  les  paroles  suivantes  : 

«  Ce  qui  excite  le  plus.  Messieurs,  ma  sollicitude,  c'est  l'assai- 
«  nissemement  de  la  cité.  Et  ainsi  que  j'en  prenais  l'engagement 
«  il  y  a  dix  ans,  je  n'ai  pas  cessé  un  instant  de  chercher  à  donner 
«  aux  Parisiens  de  l'air,  de  l'eau  et  de  l'ombre.  » 

Oui,  assainir  une  ville,  c'est  lui  donner  de  l'air,  de  l'eau  et  de 
l'ombre;  mais  combien  cette  tâche  est  difficile  lorsque  l'on  doit 
lutter  contre  des  constructions  entassées  les  unes  sur  les  autres, 
lorsque  d'infatigables  spéculateurs  envahissent  la  plupart  des  en- 
droits encore  libres  ou  plantés  d'arbres,  lorsqu'en  un  mot  l'on 
doit  lutter  contre  le  fait  et  les  conséquences  d'un  héritage  du  passé, 
accepté  forcément  sans  bénéfice  d'inventaire,  et  contre  les  vues 
égoïstes  de  l'intérêt  personnel  livré  à  lui-même! 

Aussi  nous  permettrons-nous  de  faire  observer  à  M.  le  Préfet 
et  aux  membres  du  Conseil  municipal,  que  leurs  Iwnnes  et  pater- 
nelles intentions  à  l'égard  de  l'assainissement  de  la  capitale  res- 
teront à  l'état  de  désir  dans  notre  siècle,  si  pour  parvenir  à  cet 
heureux  résultat  on  n'a  pas  recours  A  de  grands  moyens. 

Est-ce  à  dire  que  nous  méconnaissions  ce  qui  a  été  fait,  même 
d'après  les  idées  reeues  dans  les  bureaux  de  l'administration?  Non; 
mais  nous  trouvons  les  moyens  suivis  jusqu'à  ce  jour  trop  au- 
dessous  des  besoins  de  la  ville,  de  la  dignité  de  la  municipalité  de 
Paris. 

On  le  voit,  il  s'agit  ici  de  haute  édilité,  si  l'on  veut  réellement 
donner  de  l'air  et  de  l'ombre  aux  populations  qui  se  pressent 
et  s'étouffent  dans  des  quartiers,  comme  ceux  des  Halles,  des  Ar- 
cis,  où  l'habitant  n'a  à  sa  disposition  que  7  mètres  d'espace  : 
comme  ceux  des  Lombards,  Montorgueuil,  de  la  Banque,  de  la 
Porte  Saint-Denis,  Sainte-Avoye,  de  l'Hôtel-de-Ville,  Saint-Ho- 
noré,  Bonne-Nouvelle,  Saint-Maitin-des-Champs ,  Saint-Kusta- 
che,  du  Mail,  de  la  Cité,  Saint-Jacques,  du  Palais-Royal,  du  Mar- 
ché Saint-Jean,  etc.,  où  l'habitant  ne  trouve  encore  en  moyenne 
que  de  10  à  1 1  mètres  carrés  d'espace. 

Aussi  lorsque,  vis-à-vis  d'aussi  grands  et  d'aussi  pressants 
besoins  ,  nous  voyons  la  ville  hésiter  devant  un  emprunt 
spécial  pour  cet  objet,  nous  nous  demandons  avec  étonnement  si 
les  administrateurs  de  notre  puissante  cité  ont  médité  profondé- 
ment sur  ses  immenses  ressources  et  sur  des  combinaisons  finan- 
cières propres  à  arriver  à  un  résultat  bien  déterminé.  Nous  regret- 
tons dç  voir  M.  le  préfet  s'exprimer  en  ces  termes  sur  ce  sujet  : 
«  Deux  motifs  se  réunissent  pour  nous  empêcher  de  précipiter  ce.* 
«  travaux  (ceux  d'assainissement).  Le  premier  est  la  nécessité  de 
«  pourvoir  à  tous  les  services  par  les  ressources  ordinaires,  sans 
«  engager  l'avenir,  sans  se  lancer  dans  la  voie  des  emprunts. 


31 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


32 


<(  moyen  extrême,  qui,  pour  une  ville  comme  Paris,  ne  doit  être 
<i  employé  qu'avecla  plus  grande  circonspection  et  dans  de  graves 

«  circonstances.  » 

Et  pourtant  lavilledeParisauraacquittéunedettede  197  millions 
en  moins  de  30  ans,  et  elle  sera  entièrement  libérée  en  1854;  et 
quelles  plus  graves  circonstances  peut-il  exister  en  dehors  de  la 
nécessité  de  donner  de  l'air  pur  et  de  l'espace,  ces  deux  conditions 
essentielles  à  la  vie? 

L'administration  ne  représente-t-elle  pas  les  intérêts  collectifs 
des  habitants?  C'est  donc  à  elle  de  remettre  l'équilibre  là  où  un  es- 
prit étroit  d'égoisrae  sordide  sacrifie  la  santé  et  le  bien-être  des 
populations. 

Aiissi  serions-nous  les  premiers  à  demander  au  public  le  plau- 
dite  cives  des  comédies  des  anciens  Romains,  et  nous  serions  cer- 
tainement entendus  de  la  population  parisienne,  qui  ne  manquerait 
pas  d'applaudir  si,  à  son  prochain  discours,  M.  le  préfet  proposait 
un  emprunt  de  100  millions  pour  exécuter  les  travaux  les  plus  ur- 
gents d'assainissement. 

Le  principe  financier  une  fois  adopté  d'ouvrir  pour  ce  premier 
des  services  publics  un  emprunt  spécial  assez  considérable  pour 
que  l'on  ne  fut  pas  obligé  de  vivre  au  jour  le  jour  et  de  conti- 
nuer forcément  le  vicieux  système  actuel ,  qui  n'a  pu  encore 
consacrer  que  2  millions  par  an  à  ses  travaux  sur  la  voie  pu- 
blique, quoique  le  développement  des  rues  de  Paris  soit  de  720  ki- 
lomètres (  180  lieues  ),  on  serait  forcément  entraîné  à  suivre 
un  système  d'amélioration  diamétralement  opposé,  c'est-à-dire 
celui  qui  substituerait  des  places  plantées  d'arbres  à  nos  car- 
refours sales  et  étroits,  quelques  larges  rues  à  une  foule  de  ruelles 
inutiles  et  infectes,  et  faciliterait  ainsi  à  l'industrie  particulière  la 
reconstruction  des  maisons  par  îlots,  et  non  une  à  une,  seul  moyeu 
(jui  puisse  conduire  à  doter  de  cours  l'intérieur  des  deux  tiers  des 
habitations  de  Paris. 

Ces  travaux  entrepris  sur  une  grande  échelle,  c'est-à-dire  pro- 
portionnellement aux  immenses  besoins  existants,  font  craindre  à 
M.  le  préfet  «  des  perturbations  dans  les  propriétés  qui  se  trouve- 
«  raient  atteintes  ou  menacées,  et  dans  les  prix  des  matériaux 
«  et  de  main-d'œuvre.  » 

Ces  craintes  sont  mal  fondées;  car,  d'une  part,  les  propriétés  ga- 
gneraient à  cette  transformation,  et,  d'autre  part,  des  ouvriers  sans 
ouvrage  tendent  toujours  les  bras  à  la  sollicitude  de  la  société. 

Que  M.  le  préfet  de  la  Seine  et  les  membres  du  conseil  munici- 
pal se  posent  carrément  le  problème  de  l'assainissement  de  Paris, 
et  nous  sommes  convaincus  que  leur  intelligence  sera  frappée  de 
la  facilité  des  moyens  d'exécution.  En  toute  chose,  c'est  le  fil  d'A- 
riane qu'il  faut  trouver,  c'est  l'épée  d'Alexandre  qu'il  faut  savoir 
prendre  soit  pour  sortir  du  labyrinthe  des  petites  idées,  soit  pour 
couper  le  nœud  gordien  qui  enlace  toutes  les  questions  envisagées 
au  point  de  vue  des  car,  des  mais  et  des  si. 

Nous  félicitons  donc  grandement  M.  le  préfet  de  la  Seine  de  ne 
pas  avoir  oublié  l'engagement  qu'il  a  pris  de  donner  aux  Parisiens 
de  l'air,  de  l'eau  et  de  l'ombre;  nous  lui  rappellerons  seulement 
que  nos  poitrines  haletantes  et  oppressées  demandent  l'application 
la  plus  prompte  de  cette  grande  et  noble  pensée.  Voici,  du  reste,  les 
propres  paroles  de  M.  le  comte  de  Rambuteau  : 

«C'est  avec  une  saiisfaclion  toujours  nouvelle  que  je  vois  revenir 
l'époque  qui  ramène  l'occasion  de  me  trouver  au  milieu  de  vous,  et 
de  présider  ces  solennités  auxciuelles  concourt  rélile  du  commerce  de 
Paris. 


«  Je  ne  saurais,  en  effet,  rester  indiiïéi'enl  à  ce  mouvement  qui  ap- 
pelle ici  (les  notabilités  nouvelles,  et  à  ces  réunions  dans  lesquelles  je 
puis  vous  parler  de  noire  grande  cité.  Car  vos  études,  messieurs,  sont 
liées  à  la  situation  financière  de  Paris,  à  fctat  de  son  commerce,  à 
l'aisance  de  sa  population,  aux  cITorls  de  l'adminisiralion  municipale, 
comme  aux  amélioralions  qu'elle  a  le  lionlieiir  de  réaliser. 

Proiluilt  de  l'oclrvi. 

«  Le  mouvement  d'accroissement  que  je  vous  annonçais  au  mois  de 
juillet  dernier  dans  ces  produits  de  l'ociroi  s'est  iiiniiileiiu,  et  le  chiffre 
de  ces  produits,  qui,  en  I8i2,  avait  éprouvé  quelque  diminution  et  ne 
s'était  élevé  jusqu'au  22  décembre  ipi'à  2!)  724  941  fr.,  est  aujourd'hui 
de  31  442  83C  fr.,  d'où  résulte  une  augmentation  de  1  7l7i)lofr.  qui 
■l'atteint  pas  encore  cepeiidaiii  le  chiffre  de  1838.  Les  buissons  et  les 
combustibles  ont  particulièrement  augmenté. 

Travaux  de  l'tlùtcl-de-Ville. 

«Nos  travaux,  messieurs,  soil  pour  enibellir,  soit  pour  assainir  la 
ciié,  ne  se  sont  pas  ralentis.  L'Hôtel -de-Ville,  lerniiiié  complètement 
à  l'extérieur,  touche  à  sa  lin.  Il  a  fallu  se  rendre  compte  des  repar.i- 
tions  et  de  la  liaison  de  l'aiicicn  hôtel  avec  les  nouveaux  bàlimcnis. 
ainsi  que  des  excédants  des  dépenses  inévitables  dans  une  entreprise  si 
grande,  et  exécutée  si  vivement.  Le  conseil  municipal,  après  un  exa- 
men approfondi,  n'a  pas  hésité  à  continuer  son  œuvre  et  à  voter  tous 
les  crédits  nécessaires. 

«Les  anciens  bâtiments  ne  contenaient  que  17()  employés;  l'Hôtel 
actuel  en  renfermera  418,  de  manière  ii  concentrer  cl  ii  réunir  tous  ses 
ser\ices,  qui  autrefois  se  trouvaient  disséminés  au  loin,  soit  dans  l'hô- 
tel de  la  rue  Grange-Batelière,  soit  dans  des  maisons  dont  la  valeur  ou 
la  location  représentait,  pour  la  ville,  un  capital  de  plus  de  5 millions, 
sans  parler  des  sommes  qui,  lors  des  fêles  publiques,  étaient  dépensées 
en  constructions  provisoires,  et  qui,  de  18IU  à  1850,  se  sont  élevées  du 
5à  6  millions. 

«  Les  bureaux  de  l'Hôtel-de-VilIc  occupent  maintenant  171  pièces  ou 
16  000  mètres  superficiels,  au  lieu  de  40OO  mètres;  lorsque  les  deux  ga- 
leries intérieures,  que  l'on  reconstruit  dansée  moment,  seront  livrées  à  • 
quelques  fractions  de  divisions  que  l'on  a  été  obligé  de  restreindre  mo- 
mentanément, les  services  auront  deux  fois  plus  de  place  que  par  le 
passé. 

«  Les  salles  consacrées  au  conseil  municipal,  au  conseil  des  hospices, 
au  conseil  du  monl-de-piété,  aux  archives,  à  la  bibliothèque,  aux  so- 
ciétés savantes,  ne  sont  pas  moins  spacieuses;  l'utilité  et  la  convenance 
se  trouvent  donc  ainsi  réunies  à  la  grandeur  et  à  la  beauté  impos.inte 
du  monument  municipal,  dont  il  n'est  pas  un  habitant  de  Paris  qui  ne 
puisse  aujourd'hui  se  montrer  fier  à  juste  titre. 

Bâtiments  de  la  Cour  des  Comptes  ;  Préfecture  de  police. 

«  Les  localités  de  l'ancienne  cour  des  comptes  viennent  d'être  dis- 
posées pour  la  préfecture  de  police,  et  les  travaux  ont  été  conduits  de 
manière  ii  concilier  les  besoins  de  l'administration  et  ceux  de  l'habita- 
tion particulière  du  préfet. 

Eglises  nouvelles  et  travaux  d'utilité  publique. 

«  La  rampe  monumentale  de  la  place  Lafayette,  qui  est  destinée  ii 
donner  accès  à  l'église  de  Saint-Vincent-de-Paul  et  aux  rues  latérales, 
vient  d'être  terminée;  c'est  une  notable  amélioration  qui  était  vive- 
ment réclamée  par  les  habitants  du  quartier  Poissonnière.  Ce  quartier 
va  être  légalement  vivifié  par  la  gare  du  chemin  de  fer  du  nord. 

«  L'église  pourra  être  livrée  au  culte  dans  le  courant  de  l'année  pro- 
chaine. 

«  La  ville  de  Paris  sera  bientôt  en  mesure  de  commencer  la  construc- 
tion de  la  nouvelle  église  Belle-Chasse,  dont  les  terrains  seront  livrés 
incessamment  par  le  domaine. 

«  Le  temple  des  Billeltes  ne  suffisait  plus  aux  besoins  de  la  popula- 
tion protestante  de  la  confession  d'Augsbourg  :  un  nouveau  temple  a 


33 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


34 


été  disposé,  rue  Cliaucliat,  et  l'administration  poursuit  en  outre,  avec 
une  vive  sollicitude,  ralTeclalion  au  culle  reformé  des  anciens  bâti- 
ments du  Pantlieniont,  rue  de  Grenelle-Sainl-Germain,  affectés  par 
l'Empereur  à  cette  destination. 

«  La  construction  de  la  nouvelle  maison  d'arrêt,  rue  Traversière 
Saint-Antoine,  est  en  pleine  activité.  Il  en  est  de  même  du  nouveau 
marché  Beauveau,  que  la  ville  fait  établir  dans  le  quartier  Saint-An- 
toine. 

«  Les  travaux  nécessaires  pour  .ippropricr  les  greniers  de  réserve 
au  service  d'approvisionnement  de  la  capitale  sont  en  cours  d'exé- 
cution. 

«  L'ancien  corps  de  garde  de  la  Bastille  vient  d'être  remplacé  par 
une  construction  plus  en  harmonie  avec  la  décoration  de  cette  place. 

a  La  fontaine  monumentale  de  Saint-Sulpice  a  été  commencée  au 
mois  de  juillet  dernier. 

«  La  fontaine  Molière,  aux  dépenses  de  laquelle  la  ville  de  Paris  a  si 
noblement  contribué,  va  être  inaugurée.  Enfin,  la  restauration  des  co- 
lonnes de  la  barrière  du  Trône  est  presque  terminée,  et  des  crédits 
sont  votés  pour  la  reconstruction  et  l'amélioration  d'une  autre  barrière 
importante,  celle  de  la  Râpée. 

«  Mais  ce  qui  excite  le  plus,  messieurs,  ma  sollicitude,  c'est  l'assai- 
nissement de  la  cité.  Et,  ainsi  que  j'en  prenais  l'engagement  avec  le 
Roi,  lorsqu'il  y  a  dix  ans  j'étais  appelé,  comme  préfet  de  Paris,  à  l'hon- 
neur de  lui  adresser  pour  la  première  fois  la  parole,  je  n'ai  pas  cessé 
un  instant  de  chercher  à  donner  aux  Parisiens  de  l'air,  de  l'eau  et  de 
l'ombre. 

Service  des  eaux. 

«  Les  travaux  exécutés  tout  récemment  au  canal  de  l'Ourcq  nous  ont 
permis  d'accroître  le  volume  de  ses  eaux  de  1340  pouces,  tandis  que  le 
puits  artésien  de  Grenelle,  qui  fournit  2  000  000  de  litres  d'eau  par  vingt- 
quatre  heures,  nous  donne  les  moyens  d'alimenter  tout  le  quartier  du 
Panthéon,  où  de  vastes  réservoirs  viennent  d'être  disposés  à  cet  effet. 

«  La  longueur  totale  des  conduites  d'eau  est  de  191  kilomètres,  ei 
indépendamment  des  services  généraux,  la  ville  distribue  aujourd'hui 
de  l'eau  à  plus  de  100  fontaines  publiques,  à  ISOO  bornes-fontaines  et 
à  2S00  propriétaires  qui  ont  pris  des  abonnements  pour  autant  de  mai- 
sons; en  1852,  le  nombre  de  ces  abonnements  n'était  que  de  700. 

«  Quand  le  projet  de  barrage  de  la  Seine  et  de  turbines  au  Pont-Neuf 
aura  reçu  son  exécution,  tous  les  besoins  de  la  capitale  seront  large- 
ment satisfaits. 

Plantations. 

«  L'ombre,  messieurs,  n'est  pas  moins  nécessaire  que  l'eau  à  la  salu- 
brité des  grandes  villes.  On  sait  quelle  influence  les  masses  de  verdure 
exercent  sur  la  pureté  de  l'air,  qu'une  agglomération  considérable  de 
population  tend  sans  cesse  h  vicier.  Aussi,  depuis  que  les  constructions 
multipliées  ont  fait  disparaître  des  jardins  privés,  j'ai  cru  du  devoir  de 
l'administration  d'y  suppléer,  autant  que  possible,  en  conservant  les 
plantations  publiques  déjà  existantes,  et  en  en  créant  de  nouvelles.  De 
li»  ma  persévérance  à  planter  les  quais,  les  places  et  quelques  grandes 
rues,  comme  les  boulevards.  Et  chaque  année,  les  votes  du  conseil  mu- 
nicipal m'ont  fourni  les  moyens  de  réaliser  ces  dispositions. 

«  Les  plantations  des  quais  ont  dû  être  suspendues  surquelques  points 
du  côté  des  Tuileries,  à  cause  du  service  des  bateaux  ;  mais  elles  seront 
reprises  avec  activité  aussitôt  que  le  chemin  dehalagequi  va  être  établi 
sur  la  rive  inférieure  de  la  Seine,  du  Ponl-Royal  au  pont  de  Grenelle, 
aura  été  exécuté. 

Voirie  de  Paris. 

«  Chaque  année  voit  aussi  les  travaux  de  voirie  donner  plus  d'air  à  la 
ville,  en  même  temps  qu'ils  satisfont  aux  besoins  impérieux  d'une  cir- 
culation toujours  croissante,  et  de  plus  en  plus  active. 

«  Mais  deux  motifs  se  réunissent  pour  nous  empêcher  de  précipiter 


ces  travaux.  Le  premier  est  la  nécessité  de  pourvoir  à  tous  lès  services 
avec  les  ressources  ordinaires  sans  engager  l'avenir,  sans  se  lancer 
dans  la  voie  des  emprunts,  moyen  extrême,  qui,  pour  une  ville  comme 
Paris,  ne  doit  être  employé  qu'avec  la  plus  grande  circonspection  el 
dans  de  graves  circonstances. 

«  Le  second  motif  est  tiré  des  immenses  difficultés  d'exécution,  et 
des  perturbations  qu'apporteraient  infailliblement,  el  dans  les  pro- 
priétés qui  se  trouveraient  atteintes  ou  menacées  el  dans  le  prix  des 
matériaux  el  de  la  main-d'œuvre,  50  ou  60  missions  de  travaux  instan- 
tanément votés. 

Amélioration  de  la  voie  publique  ;  rue$  nouvelles, 

«  La  ville,  depuis  dix  ans,  a  consacré  21  000  000  fr.  à  l'amélioration 
de  la  voie  publique  (1)  ;  c'est  une  moyenne  d'environ  2  millions  par  an, 
qui  pourra  être  portée  bientôt  à  5  millions,  sans  compter  les  sommes 
qui  doivent  être  employées  pour  l'acquisition  des  maisons  el  des  ter- 
rains nécessaires  à  Pagrandissement  de  la  halle  centrale  el  de  ses 
abords,  dont  les  projets  sont  à  l'étude. 

«  Celte  année,  nous  avons  continué  les  travaux  de  la  me  Rambu- 
teau,  et  les  maisons  comprises  entre  la  rue  Saint-Denis  et  la  rue  des 
Piliers-Potiers-d'Etain  sont  aujourd'hui  en  démolition. 

«  Dans  la  Cité,  la  rue  Conslaniine  sera  entièrement  terminée  dans  le 
courant  de  la  campagne  prochaine. 

«Nous  nous  sommes  occupés  des  abords  de  l'Hôtel-de-Ville;  les 
maisons  retranchées  par  suite  de  la  continuation  de  la  rue  Lobau  vien- 
nent d'être  démolies,  et  la  maison,  place  de  l'Hôtel-de- Ville,  8,  au  coin 
de  la  rue  du  Mouton,  doit  disparaître  au  1"  avril  prochain. 

«  Entre  la  rue  Blanche  el  la  rue  de  Clichy,  la  rue  Moncey  a  été 
récemment  ouverte. 

«  Les  expropriations  exigées  par  l'achèvement  de  la  place  de  la  Ma- 
deleine sont  terminées.  Le  conseil  municipal  vient  de  voter  les  dépen- 
ses nécessaires  pour  l'ouverture  d'une  rue  de  60  mètres,  aussi  large 
que  la  rue  de  la  Paix,  en  face  des  débarcadères  des  chemins  de  fer  de 
Saint-Germain,  de  Versailles  el  de  Rouen. 

«  La  rue  Samson,  autrefois  interceptée  entre  la  rue  Neuve-Saint- 
Nicolas  el  la  rue  des  Marais-Sainl-Martin,  a  été  élargie  à  douze  mètres. 
La  rue  Neuve-Saint-Jean,  dans  le  même  quartier,  reçoit  aussi  d'impor- 
tantes améliorations. 

«  Plusieurs  maisons  ont  été  acquises  pour  l'agrandissement  de  la 
place  Saint-Sulpice  et  de  la  rue  Vaugirard,  près  du  Luxembourg;  enfln 
dans  le  courant  de  l'année,  il  a  été  accordé  561  permissions  de  voirie 
pour  des  constructions  à  l'alignement  sur  une  longueurde  1 1  189  mètres. 
L'élargissement  des  rues  Rar-du-Bcc  et  du  Pelil-Hurleur  a  été  déclaré 
d'utilité  publique,  et  on  s'occupe  dans  ce  moment  des  formalités  néces- 
saires pour  l'expropriation  des  maisons.  Enfin  l'on  continue  à  étudier 
le  projet  d'une  rue  nouvelle  entre  les  places  Saint-Sulpice  et  Sainl- 
Germain-des-Prés. 

«  L'administration  ne  perd  pas  de  vue  les  quartiers  excentriques,  et 
c'est  dans  le  but  de  les  vivifier  el  d'y  accroître  la  population  qu'elle 
s'occupe  de  plusieurs  projets,  dont  les  plus  notables  dans  ce  moment 
sont  :  l'achèvement  du  boulevard  de  la  Contrescarpe,  destiné  à  établir 
une  communication  plus  facile  et  plus  directe  de  la  gare  du  chemin  de 
fer  d'Orléans  à  la  place  Mazas  el  à  la  place  de  la  Bastille;  et  la  suppres- 
sion des  contre-allées  des  boulevards  Beaumarchais  el  des  Filles-du-Cal- 
vaire,  sur  lesquelles  seraient  élevées  des  consiruclions  nouvelles.  Celle 
dernière  mesure  aura  l'avantage  de  faire  disparaître  des  terrains  vagues, 
en  donnant  en  même  temps  à  ce  quartier  une  grande  valeur,  une  cir- 
culation constante,  et  toute  la  sécurité  désirable. 

«  Ainsi ,  messieurs,  toutes  les  fois  que  l'exécution  de  projets  utiles 
et  sagement  médités  aura  été  arrêtée  définitivement,  l'administration 

(1)  De  1834  au  1er  janvier  1843,  la  ville  aura  en  cuire  employé  5î  747  08»  fr. 
au  paiement  des  emprunts  coulractés  de  1808  &  1832,  principal  et  intértts. 
T.  V.  3 


35 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


86 


s'empressera  de  les  faire  connaître,  comme  elle  saura  toujours  aussi  se 
défendre  de  ces  publications  prématurées  que  l'on  réclame  quelquefois 
pour  ce  qu'on  appelle  des  plans  d'ensemble,  et  qui  n'auraient  pour  ré- 
sultat que  de  compromettre  les  intérêts  de  la  ville  aussi  bien  que  ceux 
des  particuliers. 

ProjeC  de  conslruclion  d'un  nouvel  hôpital. 

«  Un  projet  qui,  dans  un  autre  ordre  d'idées,  n'intéresse  pas  moins 
vivement  la  population,  est  celui  d'un  nouvel  hôpital  dans  le  quartier 
Poissonnière.  Je  m'en  occupe  toujours  avec  persévérance,  car  toute 
celte  partie  de  la  ville  ne  possède  pas  un  seul  établissement  de  charité, 
et,  d'un  autre  côté,  le  nombre  des  lits  et  des  hôpitaux  n'est  plus  en  rap- 
port avec  les  besoins  toujours  croissants  des  habitants  de  Paris. 

«Celle  grande  mesure  sera  le  complément  des  améliorations  qui  sont 
exécutées  habituellement  chaque  année  par  l'administration  des  hos- 
pices. 

Bâtiments  pour  les  écoles  primaires. 

«Les  écoles  excitent  aussi  tout  l'inlérêl  de  l'administration  munici- 
pale. Un  nouvel  et  spacieux  établissement  d'instruction  primaire,  dont 
la  dépense  est  évaluée  à  200  000  fr.,  s'élève  dans  ce  moment  rue  de  la 
Roquette,  et  plus  de  300  000  francs  ont  été  en  outre  consacrés  aux  écoles 
et  salles  d'asile  de  la  rue  du  Faubourg-Saint- Honoré,  de  la  rue  du  Re- 
nard-Saint-Méry,  et  de  la  rue  des  Blancs-Manteaux.  L'administration  a 
pris  à  la  charge  de  la  ville  de  Paris  l'école  primaire  supérieure,  fondée 
par  M.  Goubaux,  rue  Blanche,  et  elle  s'occupe  de  notables  réparations 
et  améliorations  dans  les  collèges  Louis-le-Grand,  Henri  IV,  Bourbon  et 
Rollin. 

Ports  et  bassin  de  la  Seine. 

«  Enfin,  messieurs,  parmi  les  travaux  qui  intéressent  plus  particuliè- 
rement le  commerce  de  Paris,  nous  devons  vous  rappeler  oeux  qui  ont 
pour  but  d'améliorer  ou  d'achever  nos  ports. 

«  Toute  la  partie  qui  s'étend  entre  le  pont  d'Arcole  et  le  pont  Marie 
vient  d'être  terminée,  et  peut  être  livrée  immédiatement  au  commerce, 
à  l'exception  d'une  vingtaine  de  mètres  superficiels,  où  l'on  a  conservé 
quelques  arbres  qui  doivent  disparaître  par  la  suite,  si  l'expérience  dé- 
montre qu'ils  sont  nuisibles  au  service. 

«On  continue  aussi  à  travailler  au  port  de  l'île  Louvier.  On  s'occupe 
aussi  de  la  construction  d'un  bas-port  dans  le  bassin  de  l'Arsenal.  Enfin, 
la  ville  sollicite  avec  instance  le  concours  du  gouvernement  pour  l'achè- 
vement des  bas-ports  de  l'hôpital  et  du  quai  .Malaquais,  dont  elle  a  voté 
l'exécution  en  ce  qui  la  concerne.  D'un  autre  côté,  l'étude  des  projets 
pour  l'amélioration  de  la  navigation  de  la  Seine  dans  Paris  est  très- 
avancée;  ces  projets  viennent  d'être  approuvés  par  le  conseil  général 
des  Ponls-et-Chaussées;  ils  seront  soumis  incessamment  à  l'autorité 
supérieure,  qui  pourra  faire  dans  sa  prochaine  session  ses  dis|)Ositions 
pour  obtenir  les  crédits  nécessaires  à  l'exécution  des  travaux. 

Voies  de  communicalion ,  rues,  pavage. 

«  Les  voies  de  communication  du  département  de  la  Seine  reçoivent 
tous  les  développements  que  peuvent  exiger  les  besoins  de  la  circula- 
lion  générale  cl  de  diverses  localités.  C'est  dans  ce  but,  et  pénétré  de  la 
nécessité  de  compléter  ces  grands  travaux,  que  le  conseil  général  de  la 
Seine  vient  de  voter  sa  prolongation  d'une  imposition  spéciale  qui  de- 
vait expirer  en  1834,  et  qui  sera  continuée  encore  pendant  six  années. 

«  Dans  l'enceinte  de  Paris,  la  nouvelle  disposition  des  rues  bombées, 
si  intéressante  pour  l'assainissement  de  la  voie  publique  cl  la  circula- 
tion des  voitures,  et  qui  se  lie  au  système  général  d'égouts  et  de  trot- 
toirs, s'élend  de  plus  en  plus.  Nous  comptons  230  kilomètres  de  rues 
ainsi  convertis  en  chaussées  bombées,  ld5  kilomètres  d'égouts  et  loO 
kilomètres  de  trottoirs.  Au  nombre  des  travaux  de  ce  genre  qui  sont  en 
cours  d'exécution,  on  doit  citer  ceux  de  k  rue  du  Faubourg-Sainl-.Mar- 
tm,  qui  consistent  dans  le  remaniement  général  du  pavé  avec  adoucisse- 


ment de  sa  pente,  larges  trottoirs  et  plantations,  et  qui  sont  évalués 
à  440  000  fr.,  sur  lesquels  les  propriétaires  riverains  ont  concouru  pour 
une  somme  de  100  000  fr.;  grand  et  utile  exemple  qui  vient  d'être  imité 
pour  les  trottoirs  des  Champs-Elysées,  auxquels  les  propriétaires  de  l'a- 
venue, depuis  le  rond-point  jusqu'à  la  barrière,  ont  contribué  aussi  pour 
une  somme  importante. 

«  Quant  aux  essais  de  perfectionnement  dans  le  système  du  pavage 
des  rues,  ceux  qui  ont  été  tentés  dans  les  rues  Montmartre  et  Saint- 
Honoré,  et  qui  se  composent  de  pavés  longs,  tajilés  avec  soin,  n'ont 
soulevé  d'objections  que  sous  le  rapport  de  la  dépense  de  premier  éta- 
blissement, qui  est  plus  considérable.  Mais  il  est  certain  que  l'entretien 
en  sera  moins  coûteux,  et  que  la  circulation  en  sera  beaucoup  plus  fa- 
cile. 

Résumé. 

«Tels ont  été,  messieurs,  les  travaux  les  plus  importants  de  l'admi- 
nistration municipale  pendant  l'anné  qui  vient  de  s'écouler.  Sa  con- 
duite, comme  vous  le  voyez,  est  réglée  sur  ses  devoirs,  ei  son  respect 
pour  les  droits  comme  pour  les  intérêts  de  tous. 

«C'est  l'administration  du  père  de  famille  qui  cherche  à  améliorer 
sans  cesse,  contente  si  chaque  jour  elle  fait  un  peu  de  bien,  et  qui  n'ou- 
blie jamais  que  les  mêmes  principes  qui  président  à  la  conduite  des 
grandes  fortunes  parlicidières  doivent,  sous  plusieurs  rapports,  se  re- 
trouver dans  la  direction  des  finances  de  la  ville  qui  a  l)esoiri  de  crédit, 
de  loyauté,  d'exactitude  et  de  prévoyance  poar  tous  les  événemenU. 
Heureuse  mille  fois  la  ville  de  Paris  de  pouvoir  développer  les  immenses 
ressources  de  son  commerce  et  de  sa  puissance  industrielle,  elle  se  doit 
à  l'empire  des  lois  et  de  sa  liberté,  à  la  marche  des  institutions  fondées 
en  juillet,  et  surtout  au  monarque  qui  dirige  avec  tant  de  sagesse  les 
destinées  de  la  France.  » 


— ".*nT»0-i 


BIBLIOGRAPHIE . 


ViGNOLE   Centésimal, 

Pat  H.  r.-i.  kaARD.  iitJuttcU. 

Peu  d'hommes  ont  été  plus  prônés  et  plus  décriés  que  Jacques  Ba- 
rozzio,  dit  de  Vignole,  du  lieu  de  sa  naissance.  Après  avoir  été  encensé 
durant  deux  siècles  sous  le  vocable  de  législateur  de  l'archileelure,  on 
a  vu  tout  à  coup,  de  nos  jours,  jîcs  autels  abandonnés,  ses  lois  tom- 
bées en  désuétude,  et  son  nom  même  livré  au  ridicule  parmi  les  ar- 
tistes, lui,  l'un  dfs  ariisies  les  plus  féconds  de  la  renaissance  italienne. 
Gloire  et  mépris,  c'est  surtout  son  livre  sur  les  Ordres  qui  lui  a  valu 
l'une  cl  l'autre  ;  mais  celte  gloire  était  légitime,  ei  pourtant  ce  mépris 
s'explique.  Mettons  pour  aujourd'hui  l'artiste  hors  de  cause,  pour  ne 
parler  que  du  législateur. 

A  l'époque  où  vivait  Vignole,  tous  les  regards  étaient  tournés  vers 
l'antique  ;  l'art  antique  seul  avait  ses  droits  bien  établis  dans  la  cilé  des 
papes,  dans  les  somptueux  palais  des  prélats  cl  des  princes  de  l'Italie. 
Les  architectes  dirigeaient  exclusivement  leurs  éiudes  vers  l'antiquité 
romaine,  la  seule,  il  faut  le  dire,  qu'il  lût  à  leur  portée  d'étudier.  La 
Rome  d'Auguste  sortait  du  sol  fouillé  de  la  Rome  moderne,  mais  mutilée, 
par  fragments;  et  ceux  d'ailleurs  qui  voulaient  apprendre  ce  bel  art 
de  bâtir  n'étaient  pas  tous  à  Rome,  n'avaient  pas  tous  sous  la  main  des 
débris  de  monuments  antiques  dont  ils  pussent  mesurer  les  proportions. 

Faire  à  cette  époque  un  livre  qui  donnât  pour  chacun  des  cinq  or- 
dres usités  des  mesures  relevées  d'après  ces  fragments,  et  modifiées  ou 


37 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


38 


justifiées  d'après  d'aulrcs  fragments,  en  un  mot,  une  moyenne  propor- 
tionnelle entre  tous  les  détails  de  même  nature  appartenant  à  un 
même  ordre ,  exprimer  cette  moyenne  par  une  unité  qui  pût  être  com- 
prise dans  tous  les  pays,  c'était  rendre  à  l'art  un  service  immense,  in- 
contestable; c'est  ce  service-là  que  Vignole  a  rendu. 

Spécialement  chargé,  par  l'Académie  d'Architecture  qui  venait  de  se 
fonder  à  Rome  ,  de  relever  pour  elle  les  monuments  antiques  épars  sur 
le  sol  romain  ;  nourri  de  bonne  heure  dans  les  discussions  d'art  ;  obser- 
vateur calme  et  judicieux  d'ailleurs,  à  qui  une  longue  pratique  avait 
rendu  familières  toutes  les  proportions  des  divers  ordres,  nul  peut- 
être,  plus  que  Vignole,  n'était  capable  de  faire  le  livre  qu'il  a  fait. 

Mais,  nous  l'avons  dit,  Barozzio  n'avait  eu  entre  les  branches  de  son 
compas  que  les  débris  de  l'art  romain  ;  et  quels  débris,  si  on  les  compare 
à  tous  ceux  que  nous  pouvons  mesurer  aujourd'hui!  Depuis  lors,  sans 
parler  des  monuments  étrusques  et  de  tant  d'autres  qui  sont  "sortis 
peu  à  peu  de  leurs  tombes,  nous  avons  trouvé  deux  villes  entières  dont  les 
splendeurs  couvaient  depuis  dix-sept  siècles  sous  la  cendre  du  Vésuve. 
Depuis  lors  aussi,  un  jour  est  venu  où  nous  avons  découvert  la  Grèce,  ce 
jardin  des  Hespérides  qu'on  savait  bien,  au  temps  de  Vignole,  renfermer 
des  trésors,  mais  dont  le  Turc  s'était  constitué  le  dragon  et  en  défendait 
impitoyablement  l'accès.  Faut-il  donc  s'étonner  que  Vignole  n'ait  pas 
tenu  compte  de  ce  qu'il  ne  connaissait  pas,  de  ce  qu'il  ne  pouvait  pas 
connaître,  et  qu'il  ait  fait  des  lois  différentes  de  celles  qui  ont  dû  pré- 
sider à  la  construction  des  plus  beaux  monuments  de  l'antiquité? 

Si,  à  ces  causes  de  désuétude,  nous  ajoutons  l'abus  que  la  spécula- 
tion et  l'ignorance  ont  fait  d'un  nom  illustre,  en  publiant  sous  le  titre 
classique  de  Vignotes  une  multitude  de  recueils  indigestes  où  la  faus- 
seté des  proportions  rivalisait  avec  la  grossièreté  des  profils  et  le  mau- 
vais goût  des  ornements,  nous  comprendrons  facilement  le  mépris  où 
ce  nom  est  tombé  chez  ceux-là  précisément  dont  la  nature  artistique 
et  le  goût  développé  par  la  vue  des  formes  simples  et  pures  de  l'anti- 
quité eussent  été  le  plus  sympathiques  au  mérite  de  Vignole,  au  temps  où 
celui-ci  vécut.  Si  spolier  un  homme  de  ses  œuvres  pour  s'en  attribuer 
le  mérite  est  une  action  criminelle,  combien  n'est-il  pas  plus  criminel 
encore  de  prostituer  un  beau  nom  pour  l'afficher  au  front  d'une  œuvre 
mauvaise,  ainsi  qu'à  un  pilori  de  honte  et  de  Uétrissure? 

Mais  hâtons-nous  de  prévenir  une  erreur  imminente,  et  d'informer 
nos  lecteurs  que  le  livre  de  M.  Renard-Perrin  n'est  pas  de  ceux  qui 
feront  tort  à  l'illustre  Vignole.  M.  Renard-Perrin  a  reproduit,  sans 
prendre  sur  lui  de  les  modifier,  les  proportions  et  les  formes  de  l'archi- 
tecte du  palais  Caprarnle,  et  il  a  traduit  en  français  le  texte  italien 
qui  est  consacré  à  l'explication  des  planches.  Mais  là  ne  s'est  pas 
bornée  sa  traduction  :  il  a  traduit  aussi  la  mesure  universelle  de  Vi- 
gnole, le  module,  en  langage  décimal,  si  toutefois  il  nous  est  permis  de 
parler  ainsi;  et  c'est  là  ce  (|ui  distingue  particulièrement  le  livre  de 
.M.  Renard-Perrin  de  tous  les  livres  de  même  espèce  publiés  jusqu'à  ce 
jour. 

Vignole,  on  le  sait,  avait  divisé  son  module,  c'est-à-dire  le  demi- 
diamètre  de  l'extrémité  inférieure  du  fût  de  la  colonne,  en  douze  parties 
pour  les  ordres  toscan  et  dorique,  et  en  dix-huit  pour  les  ordres  ioni- 
que, corinthien  et  composite.  Ces  parties,  souvent  trop  grandes  pour 
mesurer  les  membres  les  plus  délicats,  étaient  elles-mêmes  divisées  en 
fractions  duodécimales,  système  alors  généralement  admis  pour  tou- 
tes les  divisions  de  mesures.  Le  système  de  division  duodécimale  avait 
certainement  des  avantages  réels,  comme  par  exemple  de  permettre 
un  grand  nombre  de  subdivisions  sans  tomber  dans  des  fractions  de 
fraction.  Mais  sans  discuter  ici  les  raisons  qui  pourraient  justifier 
noire  prédilection  pour  le  système  duodécimal  plutôt  que  pour  le 
système  décimal,  il  nous  suffira  de  remarquer  qu'une  fois  ce  dernier 
admis  et  surtout  commandé  comme  mesure  générale,  il  n'y  avait  plus 
à  balancer;  il  devait  être  appliqué  aux  proportions  des  ordres  aussi 
bien  qu'aux  autres  parties  de  l'architecture  ;  mais  remarquons  en 
même  temps  que,  dans  cette  circonstance,  il  n'y  a  pas  un  seul  avantage 


résultant  de  son  emploi  qui  n'eût  pu  aus-i  bien  résulter  de  l'emploi 
du  système  duodécimal,  dans  l'hypothèse,  bien  entendu,  que  dans  ce 
dernier  cas  on  ferait  usage  de  douze  chiffres  et  du  zéro,  au  liea  de  neuf 
chiffres  et  du  zéro.  C'est  ce  qui  nous  empêche  d'attribuer  exclusi- 
vement au  nouveau  système,  ainsi  que  l'a  fait  M.  Renard-Perrin, 
tous  les  avantages  qui  résultent  de  sa  méthode.  En  effet,  voici  ces 
avantages  :  1"  unité  de  mesure  pour  tous  les  ordres;  2*  suppression 
des  anciennes  fractions  de  parties,  et  par  conséquent  des  longues  opé- 
rations qu'elles  traînaient  à  leur  suite;  3"  faculté  que  possèdent  les 
quantités  décimales,  et,  par  suite,  centésimales,  d'exprimer  instanta- 
nément par  leur  nom  le  rapport  de  la  partie  fractionnaire  avec  l'unité  ; 
4"  l'emploi  possible  des  divisions  de  la  mesure  légale  (du  mètre)  pour 
meitre  un  ordre  en  proportion.  Nous  le  demandons,  lequel  de  ces 
quatre  avantages  n'eût  été  aussi  facilement  obtenu  à  l'aide  d'un  système 
duodécimal  bien  et  complètement  organisé?  Mais  le  nouveau  système 
présente  une  unité  d'ensemble  que  n'offraient  certainement  pas  les  à'm- 
sions  duodécimales  combinées  avec  l'emploi  d'un  système  de  numération 
décimale  ;  d'ailleurs,  le  système  décimal,  nous  le  répétons,  est  aujourd'hui 
obligatoire  de  par  la  loi.  Cette  dernière  raison,  bien  que  l'obligation  ne 
s'étende  pas  explicitement  jusqu'au  module,  est  pour  nous  tout  à  fait 
concluante,  en  raison  des  avantages  qui  découlent  toujours  de  l'unité 
de  système,  et  des  remerciements  sont  dus  à  coup  sûr  à  M.  Renard- 
Peirin  pour  les  efforts  qu'il  a  faits  en  vue  d'atteindre  cette  unité. 

M.  Renard-Perrin  divise  donc  le  module  en  cent  parties  égales  qui 
se  trouveront  par  cela  même  proportionnellement  égales  aux  divisions  du 
mèlre,  et,  partant  de  ce  principe,  il  cote  toutes  les  planches  de  Vignole 
avec  un  module  centésimal.  A  cela  il  ajoute,  dans  des  tableaux  fort 
bien  faits  et  fort  commodes,  toutes  les  mesures  des  ensembles  et  des 
détails  donnés  par  Vignole  pour  chaque  ordre,  avec  leurs  traductions 
en  divisions  centésimales  en  regard  ;  de  sorte  qu'à  la  rigueur,  et  pour  les 
ornements  exceptés,  on  pourrait,  à  l'aide  de  ces  tableaux,  s'épargner 
l'usage  des  planches.  A  cet  effet,  et  pour  faciliter  l'emploi  de  ces  ta- 
bleaux, il  donne  un  nouveau  procédé  qui  permet  de  mettre  en  peu  de 
temps  un  ordre  en  proportion.  Ce  procédé,  dont  nous  ne  pourrions 
guère  donner  ici  que  la  théorie,  repose  sur  les  propriétés  que  possè- 
dent les  triangles  d'avoir  leurs  deux  côtés  coupés  en  parties  propor- 
tionnellement égales  par  toutes  les  lignes  menées  parallèlement  à  leur 
base. 

Cette  méthode,  à  la  fois  prompte  et  d'une  précision  mathématique. 
suffirait  à  elle  seule  pour  établir  la  supériorité  de  ce  nouveau  Vignole 
sur  tous  les  autres.  M.  Renard-Perrin  complète  aussi  le  tracé  géomé- 
trique de  la  volute  ionique,  dont  Vignole  n'avait  indiqué  que  la  première 
révolution,  et  il  termine  son  livre  en  donnant  une  échelle  des  dixmes 
appliquée  au  module. 

Le  Vignole  centésimal  est  un  livre  fort  utile  qui  lèvera  pour  l'élève 
un  nombre  infini  de  difficultés  que  le  mélange  des  systèmes  ancien  et 
nouveau  n'eût  pas  manqué  de  jeter  sur  sa  route.  L'étude  de  l'architec- 
ture est  déjà  assez  complexe,  assez  universelle,  pourrions-nous  dire, 
pour  (juc  les  hommes  de  mérite  s'efforcent  d'en  aplanir  les  voies.  La 
stricte  obéissance  aux  lois  de  Vignole  n'est  point  chose  à  craindre  pour 
les  jeunes  élèves,  et  ces  lois  peuvent  fort  bien  servir  de  guide  aux  in- 
dustriels, qui  commettraient,  sans  ce  premier  secours,  des  fautes  dont 
l'énorniilé  ne  manquerait  pas  de  corrompre  promptement  le  goût  des 
classes  ouvrières,  et  on  verrait  bientôt  partout  le  caprice  se  substituer 
à  la  règle.  Aussi,  tout  en  désirant  voir  promulguer  un  jour  un  code 
plus  complet  et  plus  juste  que  celui  du  législateur  italien,  nous  croyons 
qu'il  peut  encore,  même  aujourd'hui,  servir,  sinon  de  type,  au  moins  de 
règle  générale. 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


to 


Résumé  Statistique 

de  la  GompMbllllé  de  la  ville  de  Paris,  depalR  17»7  Jasqa'i  J8»0 
Inclosivemeui , 

Par  M.  MARTIN  SMUIMÉOII. 

Les  personnes  qui  sentent  comme  nous  la  haute  direction  que  doivent 
imprimer,  par  son  exemple,  le  département  de  la  Seine  et  la  commune 
de  Paris  aux  autres  départements  et  aux  autres  communes  de  France, 
comprendront  tout  l'intérêt  qui  s'attache  à  la  publication  de  l'ouvrage 
de  M.  F. -P. -Martin  Saint-Léon  :  Résumé  slalislique  des  recettes  et  des 
dépenses  de  la  ville  de  Paris  pendant  une  période  de  quarante-quatre 
ans,  de  1797  à  1840  inclusivement  (1). 

M.  Martin  Saint-Léon  avait  déjà  publié  en  1833  un  résumé  des  re- 
cettes et  dépenses  de  la  ville  de  Paris  pendant  trente-trois  années 
(de  1797  à  1850).  travail  qui  avait  obtenu  une  mention  honorable  de 
l'Académie  des  Sciences.  (Séance  du  8  décembre  1834.) 

La  nouvelle  publication  de  M.  Saint-Léon  est  encore  plus  importante 
que  sa  première ,  car  non-seulement  elle  donne  les  résultats  des  dix 
années  écoulées,  de  1831  à  1840,  mais  encore  l'auteur  a  fait  suivre 
chaque  chapitre  de  notes  explicatives  d'un  très-grand  intérêt ,  qui  don- 
nent une  idée  aussi  exacte  que  possible  des  rouages  administratifs  de 
la  ville  de  Paris. 

Les  personnes  qui  connaissent  la  nouvelle  méthode  de  comptabilité 
adoptée  par  la  ville,  conformément  aux  différentes  instructions  minis- 
térielles, et  l'ordonnance  royale  du  1"  mars  18.35,  relative  aux  comptes 
des  communes,  sauront  gré  à  M.  Saint-Léon  d'avoir  adopté  un  système 
uniforme,  moins  propre  peut-être  à  faciliter  ce  travail  de  contrôle,  qui 
consiste  à  s'assurer  si  chaque  allocation  a  bien  reçu  l'emploi  pour  lequel 
elle  avait  été  votée ,  mais  beaucoup  plus  commode  à  coup  sûr  pour 


(1)  Chez  P.  Dupont,  rue  de  Grenelle-Sl-Honoré,  55. 


faire  des  études  sur  les  dépenses  elTectnées  aux  dilTérents  chapitres 
du  budget  communal  ;  études  si  nécessaires  pour  s'éclairer  sur  l'impor- 
tance relative  de  ces  chapitres,  et  de  nature  à  assurer  dans  l'avenir  l'em- 
ploi le  plus  rationnel  des  revenus  de  la  ville. 

L'auteur  a  eu  aussi  l'attention  de  joindre  aux  tableaux  des  dépenses 
des  tableaux  dans  lesquels  est  marquée  la  proportion  de  toutes  les  dé- 
penses principales  par  rapport  à  la  dépense  totale,  travail  qui  rend  ex- 
trêmement facile  la  comparaison  des  ilépenses  faites  pour  un  même 
objet  à  différentes  périodes. 

Veut-on  savoir,  parexemple,dansquelle  proportion  de  la  dépense  totale 

se  trouve  celle  relative  aux  travaux  d'architecture  pour  les  édifices  des 

cultes pendan  t  les  deux  périodes  de  1821  il  1830et  de  1831  à  1840?Ontrou- 

2-243 
vcraque, dansia  première  période,  cestravauxentrentpourr--——  de  la 

lUI)t/00 

dépense  totale,  tandis  que,  pendant  la  deuxième  période,  ilsnesontquede 
817 


100000' 


Veut-on  savoir  les  dépenses  de  la  préfecture  de  police?  On 


trouvera  qu'elles  ont  été  pendant  la   première  époque  de 


15956 
1000(10 


et  pendant  la  deuxième  de 


6921 


etc.,  etc. 


100000 

Nous  aurons  peut-être  occasion  de  revenir  sur  l'important  travail 
de  M.  Martin  Saint-Léon. 


Panorama  D''ÉGypTE  et  de  Nubie  , 

Pv  IL  H.  fillAO,  otliilitii. 

Nous  avons  eu  déjà  l'occasion,  il  y  a  trois  ans  (  voy.  vol.  II.  cul.  337  ), 
d'appeler  l'attention  de  nos  lecteurs  sur  le  bel  ouvrape  que  M.  Il  Ho- 
reau  publie  sur  l'Egypte  cl  la  Nubie. 


Vue  intérieure  de  la  mosquée  du  Morislan  au  Kaire. 


41 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


42 


Depuis  lors,  nous  avons  vu,  dans  une  séricdc  trois  planches  que  l'on 
peut  juxtaposer,  le  Kaire  se  dérouler  à  nos  yeux,  le  Kaire  tout  entier, 
avec  ses  minarets,  ses  mosquées,  ses  tombeaux,  sa  grande  citadelle; 
puis  sont  venus  les  détails,  la  vue  de  la  grande  rue,  avec  ses  maisons 
bizarres  aux  couleurs  variées,  la  mosquée  du  sultan  el  Moyed,  celle  du 
A/orisian,  dont  nous  donnons  ci-conlre  une  vue  intérieure,  etc. 

Plus  loin,  nous  quittons  la  ville  des  vivants  pour  visiter  celle  des 
morts,  nous  remontons  jusqu'à  sa  source  le  fleuve  du  passé  :  nous 
sommes  au  pied  du  monument  le  plus  élevé,  sinon  le  plus  ancien  du 
inonde, de  la  fameuse  pyramide  de  Gyseli,  dont  la  construction  est  at- 
iribuée  par  Hérodote  à  Chéops,  premier  roi  de  la  quatrième  dynastie. 
Puis  viennent  les  autres  pyramides,  ces  fastueux  tombeaux  qui  ont 


traversé  plus  de  quarante  siècles.  Là-bas,  c'est  la  place  où  fut  Mem- 
phis;  il  ne  reste  de  celle  grande  el  fameuse  cité  qu'une  seule  pierre  ; 
mais  celte  pierre,  qui  ait  mètres  50  centimètres  de  longueur,  repré- 
sente un  de  ses  plus  fameux  rois,  Rhamsès  II.  Pour  aller  aux  ruines  de 
Tbèbes,  la  ville  aux  cent  portes,  H.  H.  Horeau  passe  par  Beni-Hassan, 
près  dui|uel  il  dessine  les  tombeaux  creusés  dans  le  roc  de  l'ancienne 
Bubasle,  el  plus  loin  le  célèbre  temple  de  Denderah,  construit  en  grès 
et  commencé  par  Cléopàlrc.  Ici  nous  sommes  à  Thèbes  :  voilà  Karnac, 
voilà  Luxor,  avec  leurs  portes  triomphales,  leurs  avenues  plantées  de 
sphinx,  leurs  pylônes,  leurs  obélisques,  leurs  statues  gigantesques,  la 
grande  salle  hyposlyle,  dont  on  voit  ci-dessous  la  vue  générale;  puis 
la  ville  qui  sort  en  partie  de  ses  ruines  et  qui  vient  ranger  ses  temples 


/IkTITEUJ!  i»  m 


Grande  salle  hyposljle  de  Karnac. 


elses  palais  devant  les  yeux  du  lecteur.  M.  H.  Horeau  en  est  là  de  sa 
publication,  et  ce  qui  en  a  paru  nous  fait  vivement  désirer  d'en  voir 
bientôt  mettre  au  jour  la  suite. 


PUITS  DE  GB.ENEX.I.E. 

Manière  de  se  débarrasser  des  Sables  qvi  en  trouçlent 
LES  Eaux. 

M.  Leforl,  ingénieur  des  eaux  de  Paris,  a  communiqué  à  l'Académie 
des  Sciences,  le  8  janvier  dernier,  une  note  par  laquelle  il  donne  avis 
que  les  eaux  du  puits  artésien  de  Grenelle  sont  déjà  distribuées  dans 
plusieurs  fontaines  du  faubourg  Saint-Jacques.  Une  distribution  géné- 
rale dans  tous  les  quartiers  de  la  rive  gauche  aura  lieu  lorsque  les  réser- 
voirs seront  terminés,  el  ils  n'attendent  plus  que  leur  enduit. 

.M.  Leforl  annonce  cnsuile  que  les  eaux  de  cette  source  ont  été 
ironblées  dans  le  conranl  de  décembre  dernier.  Sans  attribuer  po- 
sitivement ce  phénomène  aux  secousses  du  tremblement  de  terre  qui 
s'est  fait  soniiren  Normandie  vers  le  milieu  de  ce  mois,  il  fait  néan- 


moins ressortir  la  coïncidence  de  ces  deux  événements,  qui  se  sont 
suivis  de  près.  M.  Arago  pense  que  la  perturbation  survenue  dans  la 
limpidité  des  eaux  du  puits  de  Grenelle  quelques  jours  après  le  trem- 
blement de  terre  observé  en  Normandie ,  peut  très-bien  être  la  consé- 
quence de  ce  grand  phénomène  de  la  nature,  dont  les  secousses  auront 
détaché  une  certaine  quantité  de  terre  et  de  sable  des  parois  des  ca- 
naux souterrains  qui  alimentent  le  puits  de  Grenelle.  On  a  remarqué 
que  les  eaux  des  sources  se  troublaient  presque  toujours  à  la  suite  des 
iremblements  de  terre  dans  les'conlrées  où  ils  s'étaient  fait  sentir,  no- 
tamment lors  du  grand  tremblement  de  terre  qui  dévasta  Lisbonne. 

S'il  survenait  souvent  de  semblables  troubles  dans  leSeaux  du  puits 
de  Grenelle,  ou  bien  s'ils  duraient  longtemps,  il  serait  à  craindre  que 
les  tuyaux  de  conduite  fussent  bientôt  engorgés  par  le  dépôt  des  terres 
et  des  sables  en  suspension  dans  l'eau.  Pour  prévenir  cet  inconvénient. 
M.  Leforl  a  fait  établir,  près  du  tube  ascensionnel,  une  cuvette  dis- 
posée pour  recevoir  l'eau  à  sa  sortie  du  tube.  L'eau  s'échappe  de 
celte  cuvette  par  un  écoulement  de  superficie.  La  cuvette  est  équilibrée 
par  des  conlre-poids,  de  manière  à  lai  faire  conserver  sa  position  nor- 
male tiint  que  les  eaux  gardent  leur  limpidité;  mais  aussitôt  qu'elles  se 
troublent,  leur  pesanteur  spécifique  augmente  à  cause  des  sables  et  des 
terres  qu'elles  charrient;  l'équilibre  se  trouvant  alors  rompu,  la  cuvette 
exécute  un  mouveihenl  de  bascule  el  fait  ouvrir  un  orifice  de  décharge 
qui  donne  à  l'instant  issue  à  l'eau  du  puits  dans  l'égout  de  l'abaiioir. 


k3 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURMCS. 


L'eau  cesse  alors  de  couler  dans  les  tuyaux  de  conduite  jusqu'à  ce  que, 
les  eaux  ayant  recouvré  leur  limpidité,  la  cuvelte  reprend  sa  position 
normale,  et  le  service  des  eaux  est  remis  en  activité.  Avant  l'établisse- 
ment de  la  cuvette,  c'était  un  homme  qui  en  remplissait  les  fonctions, 
mais  avec  moins  de  régularité;  car  si  l'eau  se  troublait  pendant  la  nuit, 
le  gardien  ne  pouvait  en  dire  averti  sur-le-champ. 

Ce  moyen  est  très-iiigénicux  sans  doute,  mais  il  a  le  très-grave  incon- 
vénient de  priver  d'eau  plusieurs  quartiers  de  la  ville  pendant  un  temps 
illimité;  car  les  troubles  peuvent  fort  bien  durer  plusieurs  semaines. 
Ne  vaudrait-il  pas  mieux  construire  h  proximité  du  puits  artésien  une 
citerne  d'épuration  analogue  à  celles  dont  les  Romains  munissaient  la 
plupart  de  leurs  aqueducs?  On  ferait  passer  dans  cette  citerne  toute  la 
m;isse  d'eau  fournie  par  le  puits  ;  elle  serait  combinée  de  manière  que 
la  vitesse  de  l'eau  serait  réduite  à  un  état  voisin  de  la  stagnation,  et  don- 
nerait aux  matières  tenues  en  suspension  le  temps  de  se  déposer.  Sa 
capacité  serait  proportionnée  à  la  quantité  maximum  de  dépôt  fournie 
dans  un  temps  donné  et  démontrée  par  l'expérience.  Si  cette  quantité 
était  telle  qu'on  fut  obligé  de  donner  à  la  citerne  des  dimensions  exor- 
bitantes, il  vaudrait  mieux  faire  alors  deux  citernes  jumelles  dont  l'une 
fonctionnerait  pendant  qu'on  curerait  l'autre,  et  vice  versa.  Ou  bien  en- 
core on  pourrait  disposer  le  fond  de  chaque  division  de  la  citerne  en 
pente,  en  forme  d'entonnoir  à  un  ou  plusieurs  compartiments,  munis 
chacun  d'une  douille  recourbée,  dont  l'ouverture  serait  fermée  par  un 
obturateur  à  vis  de  pression,  qu'on  ouvrirait  de  temps  en  temps  pour 
faire  évacuer  le  sable. 

Si  la  ténuité  des  matières  en  suspension  dans  l'eau  était  telle  qu'elles 
ne  se  déposassent  pas  toutes  dans  la  citerne,  il  y  aurait  peu  de  probabilité 
que  le  surplus  se  déposât  dans  les  tuyaux.  Si  cependant  on  s'apercevait 
qu'il  s'y  fit  quelque  léger  dépôt,  il  serait  facile  de  l'expulser  en  lâchant 
dans  les  conduites  un  contre-courant  partant  des  réservoirs  et  descen- 
dant vers  la  source,  en  ouvrant  la  décharge  de  l'abattoir.  Cette  opéra- 
tion se  ferait  pendant  la  nuit,  et  le  service  des  eaux  n'en  souffrirait  pas. 

Nous  savons  que  la  grande  pression  qu'on  aurait  à  supporter  rendrait 
assez  difficile  l'établissement  d'une  citerne  d'épuraiion  en  maçonnerie, 
mais  on  pourrait  la  faire  en  fonte,  capable  de  supporter  trois  ou  quatre 
atmosphères  dç  pression  (I). 

H.  JANNIARD,  architecte. 


ANAIiTSE  DE  POTERIES  DIVERSES , 

Paru.  BIKTHIEK.iDjéiiiior  dis  oiiw. 
(  Elirait  des  Annales  des  Mines.  ) 

Le  principal  objet  de  cet  examen  a  été  de  rechercher  quelle  était  la 
nature  de  la  matière  colorante.  Les  échantillons  de  poteries  dont  j'ai 
pu  disposer  m'ont  été  remis  par  M.  Brongniari,  et  provenaient  de  la 
collection  dejjf  manufacture  royale  de  Sèvres. 

Poterie  Étrusque. 

Fragment  de  vase  épais  de  quelques  millimètres,  orné  de  reliefs  peu 
saillants.  Sa  pâte  est  d'un  gris  noir,  mais  on  y  dislingue  une  multitude 
de  petits  grains  blancs  ;  à  la  surface,  la  couleur  est  uniforme  et  sans 
taches  blanches.  Le  fragment  ne  s'est  pas  délayé  dans  l'eau,  mais  sa 


poussière  a  fait  pâte  au  bout  d'un  certain  temps.  Lorsqu'on  soumet 
cette  poussière  à  la  lévigation,  on  en  retire  une  quantité  considérable 
de  sable  quartzeux. 

Par  calcination  et  grillage,  cette  poterie,  réduite  en  poudre  fine,  perd 
0.11  de  son  poids,  et  devient  d'un  rouge  de  brique  peu  foncé  en  s'ag- 
glutinant  sensiblement.  Quand  on  la  traite  par  l'acide  murialique,  il  se 
manifeste  une  légère  effervescence,  et  il  se  dissout  de  l'oxyde  de  fer, 
un  peu  d'alumine  et  un  peu  de  carbonate  de  chaux.  Le  résidu  est  d'un 
gris  noir;  il  perd  0.03  de  son  poids  par  le  grillage  et  devient  parfaite- 
iiienl  blanc,  ce  qui  prouve  que  sa  matière  colorante  est  due  au  char- 
bon. La  proportion  de  celui-ci  peut  être  évaluée  approximativement  à 
0.01.  L'analyse  donne  : 

Oxyde  de  fer  et  alumine 0.14 

Carbonate  de  chaux o.Ol 

Charbon  (environ) o.Ol 

Sable  et  argile 0.7* 

Eau  combinée  à  l'argile  et  au  fer 0.10 


d.OO 


(1)  On  sait  que  l'élévation  de  la  colonne  d'eau  du  puits  de  Grenelle  au-des- 
sus du  sol  est  d'environ  30  mètres,  ce  qui  équivaut  à  la  pression  de  trois  at- 
mosphères. 


Cette  poterie  a  dû  être  fortement  desséchée,  mais  non  enite. 

POTERIB  G.U.LO-ROXAINE. 

Cette  poterie  a  été  trouvée  à  NoyelIcs-sur-Mer  (département  de  la 
Somme).  C'est  un  fragment  du  bord  arrondi  d'un  vase,  et  épais  d'en- 
viron deux  centimètres.  La  pâte  paraît  être  homogène  à  l'œil  nu,  ou  du 
moins  on  n'y  aperçoit  que  de  très-petius  points  blancs;  elle  est  grenue 
et  d'un  noir  mat. 

Calcinée  dans  un  creuset  couvert,  elle  perd  0.8  de  son  poids  et  reste 
noire;  ensuite,  par  le  grillage,  elle  ne  diminue  presque  pas  de  poids  et 
prend  seulement  une  teinte  qui  lire  sur  le  brun.  Traitée  par  l'acide 
muriatique  bouillant,  avant  d'avoir  été  calcinée,  il  se  dissout  0.15d'alu- 
raine  colorée  parde  l'oxyde  de  fer,  et  environ  0.1 1  de  carbonate  de  chaux . 
Le  résidu  desséché  pèse  0.80;  il  est  noir,  mais  par  le  grillage  il  se  déco- 
lore complètement,  quoique  lentement,  et  le  résidu  est  parfaitement  hiani. 
La  matière  colorante  est  donc  charbonneuse,  mais  de  diflicile  combus- 
tion. La  perte  est  de  0.07,  mais  cette  perte  comprend  l'eau  combinée 
à  l'argile;  on  n'en  a  pas  déterminé  la  proportion.  L'analyse  a  donné  : 

Alumine  et  oxyde  de  fer  solubles 0.15 

Matières  terreuses  insolubles (».73 

Carbonate  de  chaux 0.01 

Eau  et  charbon 0.05 


1.00 


Poterie  de  l'Ouio  (Amérique). 

Fragment  de  vase  arrondi  de  quelques  millimètres  d'épaisseur.  Sa 
pâte  est  d'un  gris  noir  foncé,  grenue  et  molle,  et  elle  est  mouchetée 
cà  et  là  de  points  blancs  plus  ou  moins  gros;  sa  poussière  est  de  cou- 
leur cendrée. 

Par  calcination  elle  perd  0.10  de  son  poids,  et  elle  devient  d'un 
rouge  brique  peu  foncé.  Lorsqu'on  la  traite  avant  calcination  par  l'a- 
cide muriatique,  il  y  a  une  effervescence  assez  vive,  et  il  se  dissout  0.1 1 
de  carbonate  de  chaux  et  0.14  d'oxyde  de  manganèse,  mêlé  d'oxyde  de 
fer  et  d'un  peu  d'alumine.  Le  résidu  desséché  est  dun  gris  noir;  quand 
on  le  grille  après  l'avoir  fortement  desséché,  il  perd  une  portion  de 
son  poids  qui  revient  à  0.05  du  poids  total  de  la  poterie.  L'analyse 
donne  : 

Carbonate  de  chaux 0.11 

Oxydes  de  manganèse  et  de  fer  et  alumine 0.14 

Argile  et  sable 0.70 

Eau  et  charbon ,  ." 0.05 


1.00 


kb 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


46 


POTEBIE  MODERNE  DU   HaVRE. 

Fragment  de  pipe  de  la  manufacture  de  M.  Ledemandé.  Sa  pâle  est 
parfaitement  homogène,  à  cassure  grenue  presque  unie  et  noire. 

Par  calcinaiion  et  grillage,  cette  poterie  devient  blanclie  et  perd 
0.033  de  son  poids.  Traitée  par  l'acide  muriatique  avant  calcinaiion,  il 
se  dissout  0.17  d'alumine,  légèrement  colorée  par  de  l'oxyde  de  fer,  et, 
en  outre,  une  trace  de  carbonate  de  chaux.  Le  résidu  est  d'un  noir 
grisâtre;  après  qu'il  a  été  desséché  à  la  chaleur  sombre,  il  pèse  0.78  ; 
ensuite,  par  le  grillage,  il  se  décolore  complètement,  et  il  se  réduit  à 
0.77.  La  perle  0.01  représente  la  proportion  du  charbon  ;  mais  cette 
proportion  doit  être  un  minimum,  parce  que,  comme  ce  charbon  est 
très-combustible,  il  est  possible  qu'il  s'en  brûle  une  petite  quantité 
pendant  la  calcinaiion.  L'analyse  a  donné  : 

Alumine  soluble 0.170 

Argile  insoluble 0.780 

Charbon  (environ) 0.010 

Eau 0.025 

0.985 
Celte  poterie  est  très-bien  fabriquée;  elle  a  dû  être  soumise  à  une 
véritable  cuisson,  à  l'abri  du  contact  de  l'air. 


DU  COURS  BISANirUEI.  DE  M.  CHETHEUXi 

SUR  LA   LOI   DC   CONTRASTE  SIMULTANÉ   DES   COULEURS. 

Dans  le  premier  volume  de  cette  Revxie,  nous  avons  rendu  compte 
du  livre  de  M.  Chevreul  sur  la  loi  du  contraste  simultané  des  couleurs. 
Nous  revenons  aujourd'hui  sur  les  travaux  de  ce  savant  professeur,  à 
l'occasion  des  leçons  publiques  qu'il  fait,  tous  les  deux  ans,  dans  une 
des  salles  de  l'établissement  des  Gobelins. 

Nous  avons  suivi  assidûment  les  séances  du  cours  que  M.  Chevreul 
vient  de  terminer,  et  nous  nous  faisons  un  devoir  de  communiquer  à 
nos  lecteurs  une  remarque  pénible  que  nous  y  avons  faite.  En  vain  nos 
regards  ont-ils  cherché  les  peintres  et  les  architectes  parmi  les  qua- 
rante ou  cinquante  auditeurs  qui  venaient  écouler  les  leçons  de  l'habile 
observateur.  A  quoi  attribuer  cette  absence  des  artistes? 

M.  Chevreul,  membre  de  l'Académie  des  Sciences,  administrateur 
du  Jardin  du  Roi,  professeur  de  chimie  appliquée  à  la  teinture,  est 
connu  dans  le  monde  savant,  mais  ses  travaux  sur  la  loi  du  contraste 
des  couleurs  n'ont  pas  encore  brisé  la  cloison  qui  sépare  le  monde 
savant  du  monde  artistique,  et  l'artiste  est  resté  jusqu'aujourd'hui  à 
peu  près  insensible  aux  avances  que  la  science  lui  lait. 

Puis  lesjournauxqui  se  donnent  pour  mission  de  tenir  les  artistes  au 
courant  des  choses  qui  les  intéressent,  gardent  à  l'égard  de  M.  Chevreul 
un  silence  dont  nous  avons  peine  à  nous  rendre  compte.  Quoi  qu'il  en 
soit,  il  résulte  de  celte  apparente  indillérence  des  organes  de  la  presse, 
que  les  cours  de  M.  Chevreul  se  font  en  quelque  sorte  à  huis  clos,  et 
que  ceux  là  à  qui  il  pourrait  venir  le  désir  d'y  assister  ne  saventsouvenl 
ni  où  ni  quand  ce  cours  a  lieu. 

L'absence  de  renseignements,  ou,  ce  qui  est  pire,  des  renseignements 
inexacts  ont  fait  croire  aux  artistes  que  les  leçons  de  M.  Chevreul  ne 
s'adressaient  (|u'aux  indu.slriels,  aux  fabricants  de  papiers  peints,  aux 
tapissiers,  aux  brodeurs,  aux  teinturiers,  etc.  Nous  avons  à  cœur  de 
réparer  une  erreur  qui  ressemble  de  si  près  à  une  injustice. 

Les  travaux  de  M.  Chevreul  sur  les  couleurs  s'adressent  avant  tout 
aux  artistes,  et,  ceux  de  nos  lecteurs  qui  ont  pris  connaissance  du  tra- 
vail publié  par  nous  en  18'i0  sur  ce  sujet  en  conviendront,  les  lois  que 
M.  Chevreul  enseigne  aux  Gobelins  sont  indispensables  aux  peintres. 


indispensables  aussi  à  rarcbiteclc,  qui,  faute  de  cette  science,  prodigue 
bien  souvent  beaucoup  d'argent  pour  ne  produire  qu'un  médiocre  ou  un 
mauvais  effet. 

M.  Chevreul,  dans  son  cours,  enseigne  à  l'artiste,  par  des  expériences 
nombreuses,  toutes  les  modifications  qup  les  couleurs  exercent  les  unes 
sur  les  autres,  soit  qu'on  les  mélange,  soit  qu'on  les  juxtapose.  Au 
moyen  d'une  table  d'une  construction  aussi  facile  qu'ingénieuse,  il  rap- 
pelle au  peintre  tous  les  phénomènes  de  la  coloration;  et  la  théorie  est 
si  simple  en  elle-même  qu'il  suffit  au  professeur  de  trois  leçons  pour  en 
compléter  la  démonstration.  Puis  il  passe  à  l'examen  de  toutes  les  ap- 
plications que  l'on  peut  faire  des  lois  du  contraste,  dans  l'architecture, 
pour  la  décoration  extérieure  et  intérieure  des  édifices;  il  s'étend  sur 
le  choix,  la  répartition  des  objets  colorés  qui  servent  à  cette  décora- 
tion, tels  que  les  vitraux,  les  peintures,  les  tapisseries,  les  objelsd'ameu- 
blement,  etc.,  etc.  M.  Chevreul  applique  ensuite  sa  théorie  à  la  jarrfi- 
nique,  ou  art  de  créer  et  de  disposer  les  mas!-es  de  verdure  dans  les 
jardins,  de  distribuer  les  fleurs,  etc., d'après  leurs  diverses  couleurs. 

Arrivant  à  la  peinture,  M.  Chevreul  passe  en  revue  les  différentes  ap- 
plications qu'on  peut  faire  de  ces  lois,  depuis  la  peinture  monumentale, 
la  grande  peinture,  jusqu'aux  papiers  peints;  rien  n'échappe  à  la  sagacité 
du  professeur,  ni  le  costume  d'uniforme  pour  les  troupes,  ni  celui  de 
fantaisie  pour  les  femmes,  ni  les  procédés  tirés  de  la  loi  du  contraste, 
pour  modifier  à  volonté  les  carnations.  En  un  mot,  la  théorie  du  con- 
traste est  développée  dans  presque  toutes  ses  applications. 

Si  ce  cours  est  favorable  aux  industriels,  à  qui  M.  Chevreul  indique 
des  procédés  tendantà  concilier  la  plus  grande  économie  d'exécution  et 
de  dépense  avec  une  notable  amélioration  de  produits  et  de  prix,  il  n'est 
pas  moins  précieux  aux  artistes,  à  qui  il  enseigne  les  loisfixes  auxquelles 
ils  ont  occasion  de  recourir  à  chaque  instant;  il  leur  apprend  à  se  défier 
des  illusions  d'optique;  il  leur  enseigne  ii  contrôler  les  yeux  du  corps  par 
ceux  de  l'intelligence,  et  les  fait  arriver  d'un  bond  à  des  résultats  qu'ils 
n'eussent  peut-être  jamais  obtenus  même  par  un  long  tâtonnement. 

Unde  nos  plus  importants  foyers  d'industrie,  Lyon,  a  donné  récem- 
ment un  honorableexemple  aux  autres  villesde  France  en  invitant  M.  Che- 
vreul à  y  faire  un  cours,  en  vue  de  perfectionner  l'industrie  des  étoffes. 

Nous  espérons  bien  que  l'enseignement  officieux  et  tout  spontané  que 
M.  Chevreul  professe  tous  les  deux  ans  au  fond  d'un  des  faubourgs  de 
Paris,  deviendra  bientôt  un  enseignement  officiel,  annuel  et  central.  Il 
n'est  personne  connaissant  les  utiles  travaux  de  M.  Chevreul,  qui  ne 
désire  leur  voir  prendre  incessamment  la  place  h  laquelle  ils  ont  droit 
dans  l'enseignement  public  des  Beaux-.\rts. 


CHRONIQUE.. 

SOMM.\IRE  :  Inaiiguralion  de  la  Fontaisk-Moliki\k.  —  Travaux  de  bilumagc  jui 
Champs-Elysées.  —  Ponl-des-Arls. 


Alors  que  tomes  les  villes  en  France  et  à  l'étranger  élèvent  à  l'envi 
des  monuments  aux  grands  hommes  qui  ont  l'ait  luire  sur  elles  quelques 
rayons  de  leur  gloire,  il  semblait  que  Paris  seul  voulût  se  soustraire  à 
ce  noble  enthousiasme,  à  ce  mouvement  spontané,  et  laisser  dans  un 
oubli  coupable  les  illustrations  de  son  passé.  Paris  n'avait  pas,  il  faut 
l'avouer,  pour  dire  au  peuple  et  à  l'étranger  qu'il  était  né  quelquefois 
des  hommes  de  génie  dans  son  sein,  un  seul  véritable  monument,  à 
moins  que  l'on  ne  veuille  considérer  comme  remplissant  ce  but  les  fi- 
gures qui  nichent  dans  la  façade  de  l'Hôtel-de-Ville  ou  bien  les  sia- 
ines  de  monarques  que  Ion  voit  galoper  ou  se  croiser  les  bras  sur 
quelques  places  publiques.  Sommes  -  nous  plus  riches  aujourd'hui 
qu'on  a  inauguré  la  Fonlaine-iloliére'!  Pouvons -nous  considérer 
comme   un  monument   et  surtout  comme   un   monument   digne  de 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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Molière,  le  frontispice  de  livre  illustré  quon  a  inauguré  le  13  de  ce 
mois  dans  la  rue  de  Richelieu. 

L'inauguration  de  ce  frontispice,  —  ce  n'est  pas  nous,  au  moins,  qui 
invenlonsce  mol  ;  il  est  emprunté  tout  entier  à  la  louange  que  le  journal 
officiel  le  Moniteur  a  faite  de  la  Fon<aîne-J»fo/!«re,  —  l'inauguration  de  ce 
frontispice,  disons-nous,  a  été  faite  avec  une  certaine  pompe.  On  avait 
tendu  de  velours  rouge  la  maison  où  Molière  mourut  le  17  février  1673, 
et  qui  s'élève  presque  en  face  de  la  fontaine;  de  nombreux  gendarmes 
interdisaient  à  la  foule  l'accès  des  alentours.  A  onze  heures  et  demie, 
un  cortège  composé  du  conseil  municipal,  des  députés  j|e  la  Seine,  des 
cinq  Académies,  de  la  commission  de  souscriplion,  de  gens  de  lettres, 
d'auteurs  dramatiques  et  d'arlisies  de  différents  théâtres,  est  venu  voir 
tomber  la  toile  grise  qui  cachait  depuis  plus  de  deux  ans  ce  que,  dans 
noire  naïveté,  nous  appelions  encore  il  y  a  (|uinze  jours  le  monument  de 
Molière  ;  puis,  quatre  discours  ont  été  prononcés  ;  dans  l'un  il  fui  ques- 
tion de  l'élargissement  de  la  voie  publique:  c'était  celui  de  M.  de  Ram- 
buteau  ;  le  second  faisait  l'éloge  de  l'Académie  Française  :  il  était  de 
M.  Etienne,  l'académicien.  M.  Samson,  du  Théâtre-Français,  est 
venu  ensuite  parler  du  comédien.  Quant  au  quatrième  discours,  il  nous 
a  appris  que,  «  grâce  à  Molière,  la  science  était  restée,  et  que  le  charlata- 
nisme avait  disparu.  «L'orateur  était  M.  Arago. 

Une  boîte  en  plomb,  contenant  les  œuvres  complètes  de  Molière  et 
quelques  feuillets  sur  sa  vie,  a  ensuite  été  déposée....  devinez  où;  je 
vous  le  donne  en  mille.  —  Dans  le  piédestal,  sans  doute,  dans  le  son- 
bassement...  — Vous  n'y  êtes  pas  :  sous  le  trottoir  '.'.'.  —  Nous  n'avons 
pas  besoin  défaire  observer  combien  la  place  est  heureusemcni  choisie. 

Les  journaux  artistiques  et  même  politiques  ont  presque  tous  dit  leur 
mot  sur  la  Fontaine-Molière;  mais  les  uns' ont  dit  blanc,  les  autres  noir. 
Il  serait  assez  curieux  de  rapprocher  ici  ces  avis  divers  si  messieurs  les 
critiques  d'art  ne  s'étaient  abstenus,  suivant  leur  louable  habitude,  de 
justifier  leurs  affirmations  ou  leurs  négations  par  des  arguments;  il  est 
si  commode  en  effet  de  dire  :  «Ceci  est  beau,  cela  est  laid,  »  sans  expo- 
ser le  pourquoi  ! 

Nous  voyons  venir  d'abord  le  Moniteur,  qui  proclame  dans  ses  co- 
lonnes oflicielles  et  parfois  oflicieuses,  que  l'œuvre  de  M.  Visconii  est 
un  frontispice;  —  nous  sommes  complètement  de  son  avis.  L'Artiste, 
lui,  l'appelle  un  beau  bahut  flamand  !  A  la  bonne  heure  ;  M.  Visconti 
doit  se  trouver  fier  d'avoir  mis  le  grand  moraliste  dans  un  beau 
bahut  flamand,  et  les  souscripteurs  doivent  être  bien  heureux  d'avoir 
fait  élever  un  meuble  à  la  mémoire  de  Molière.  Nous  voulons  bien  ac- 
corder »  l'Artiste  qu'il  y  ait  dans  le  monumenf  de  M.  Visconti  quelque 
chose  d'un  bahut,  pourvu  qu'il  nous  fasse  grâce  des  deux  épilhèles;  car 
nous  ne  voyons  pas  en  quoi  pourrait  être  beau  ce  mélange  de  lignes 
sans  unité,  de  colonnes  qui  ne  portent  rien,  de  piédestaux  qui  mon- 
tent l'un  sur  l'autre.  Quant  à  être  flamand,  c'est  peut-être  à  cause 
des  chapiteaux  italiens  que  l'Artiste  lui  a  donné  ce  nom  ;  on  avait  pour- 
tant pris  le  soin  d'annoncer  au  public  que  M.  Visconti  s'était  efforcé,  — 
qui  l'eût  crn"!  d'imprimer  à  l'ensemble  de  la  construction  le  caractère  de 
l'architecture  du  siècle  de  Louis  XIV. 

M.  Pradier  a  orné  chaque  côté  de  la  fontaine  d'une  figure  de  muse,  que 
l'on  appelle,  l'une  muse  grave,  l'autre  muse  enjouée.  Nous  voudrions 
bien  savoir  laquelle  des  deux  est  grave,  laquelle  des  deux  est  enjouée. 
Sur  les  pancartes  que  tiennent  ces  jeunes  divinités  nous  lisons  accou- 
plés, d'un  côté  le  Misanthrope  et  M  de  Pourceaugnac,  de  l'autre,  le 
Médecin  malgré  lui  et  VÉcole  des  Femmes.  Est-ce  Saganarelle  qui  est 
grave  ?  est-ce  le  Misanhrope  qui  est  léger  ?  Auquel  croire  ?  Pour  nous, 
ces  deux  muses,  puisque  muse»  il  y  a,  nous  ont  paru  toutes  deux  fort 
enjouées,  fort  gaillardes  même.  Il  faut  avouer  que  M.  Pradier  pos- 
sède à  un  haut  degré  le  talent  de  prêter  à  ses  femmes  une  forme 
voluptueuse,  et  de  faire,  avec  un  ciseau  d'une  admirable  facilité,  de  fort 
jolies  statuettes  plus  grandes  que  nature.  Il  est  difficile  de  trouver 
dans  la  réalité  une  étoffe  plus  moelleuse  que  les  draperies  de  marbre  de 
M-  Pradier. 


Quant  à  Molière  lui-même,  il  semble  profondément  affligé  de  la 
niche  qu'on  lui  a  faite.  Mais  nous  ne  voulons  pas  empiéter  ici  sur  le  do- 
maine des  études  esthétiques,  réservé  pour  les  colonnes  plus  graves  de 
la  Revue;  nous  ne  saurions  nous  empêcher  d'ajouter,  toutefois,  que,  si 
M.  Visconti  a  voulu,  dans  la  Fontaine-Molière,  nous  présenter  un  fron- 
tispice de  son  talent,  nous  avons  tout  lieu  d'être  inquiet  surla  beauté  fu- 
ture des  pages  à  vignettes  qu'il  va  étaler  sur  les  parois  de  la  cave  fu- 
nèbre qu'il  creuse  aux  Invalides  en  l'honneur  de  Napoléon.  La  Fon- 
taine-.Molière  n'a  pas  coulé  moins  de  178,000  francs. 

—  On  vient  d'étendre  dans  les  conlre-altées  de  Vavenue  des  Champi- 
Élisées  une  couche  de  bitume  large  d'environ  3  mètres;  c'est  fort 
bien.  Mais  il  existe  dans  Paris  une  multitude  de  rues  cl  de  ruelles 
fangeuses  trop  étroites,  bien  souvent,  pour  livrer  passage  à  une 
voiture,  et  où  le  piéton  ne  se  hasarde  qu'en  tremblant,  tant  le  pavage 
en  est  abrupte  cl  glissant,  tant  les  immondices  (|ui  le  convient  rendent 
ces  voies  impraticables,  tant  elles  ressemblent,  en  un  mot,  à  des  tuyaux 
d'égout  plutôt  qu'à  des  passages  destinés  à  l'homme  !  Il  serait  facile 
pourtant  de  rendre  cescloaques  habitables.  On  pourrait  daller  ces  ruelles 
en  bitume  dans  toute  leur  largeur  et  les  transformer  ainsi  en  espèces  de 
passages  découverts,  semblables  aux  lanes  de  Londres,  dont  l'accès 
serait  défendu  aux  voitures.  En  faisant  exécuter  un  pareil  travail,  l'ad- 
ministration rendrait, en  attendant  mieux,  un  grand  et  véritable  service 
aux  quartiers  du  centre  de  Paris,  où  ces  petites  rues  se  croisent  en  tous 
sens  et  à  l'infini;  c'est  même  là  une  chose  de  première  nécessité 
qui  avait  droit  de  passer  avant  le  dallage  des  contre-allées  des  Champs- 
Elysées. 

Au  rond-point,  on  a  fait  suivre  complaisamment  au  sentier  bi- 
tumé la  courbure  des  plantations,  tandis  que,  pour  couper  court,  le 
piéton  est  obligé  de  traverser  la  boue  épaisse  et  glissante  de  deux 
chaussées  dont  les  bas-côtés  ne  sont  point  pavés  ;  on  eût  bien  pu 
continuer  le  bitume  en  ligne  droite  en  employant  le  système  de 
M.  de  Coulaine  (I),  dont  on  vient  de  faire  l'essai  à  l'entrée  de  la  rue 
LafUtte,  c'est-à-dire  sur  l'un  des  points  les  plus  fréquentés  de  la  ca- 
pitale. Depuis  six  semaines  environ  qu'il  est  établi,  cet  essai  ne  pa- 
rait pas  avoir  souffert  aucune  altération.  Il  est,  dit-on,  question  d'ap- 
pliquer ce  système  dans  toutes  les  parliesdes  Champs-Elysées  qui  étaient 
auparavant  macadamisées;  et  déjà  dans  l'avenue  dite  de  Marigny,  pa- 
rallèle à  la  rue  du  Faubourg-Saintllonoré,  on  a  préparé  le  cailloutis  qui 
doit  recevoir  le  bitume. 

—  On  réinstalle  en  ce  moment  sur  le  pont  des  Arts  les  candélabres 
qu'on  en  avait  enlevés  pendant  quelques  jours  pour  les  approprier  à 
l'éclairage  au  gaz.  Enfin  ce  malheureux  pont  va  donc  sortir  de  sa  trop 
longue  obscurité.  On  devrait  bien  aussi  achever  de  renouveler  les  plan- 
ches du  tablier.  L'an  dernier,  on  avait  donné  pour  cause  à  l'interruption 
de  ce  travail  indispensable,  le  manque  de  sapin  convenable  dans  Paris 
et  l'impossibilité  de  le  faire  venir  pendant  l'hiver.  Il  y  a  plus  d'un  an  de 
cela;  depuis  lors,  nous  avons  vieilli  d'un  printemps,  d'un  été,  d'un 
automne  et  presque  de  deux  hivers,  et  le  sapin  n'est  pas  encore  arrivé. 


GÉSAB  DALY, 
Direcicur  rédacteur  en  cher. 


(1)  Ce  système  a  été  décrit  en  détail  dans  le  quatrième  volume  de  cette 
Revue,  col.  300. 

Paria.  —  Typographie  Licrampe  et  Coiiip.,  rue  Damielte,  i. 


.'Ù-I.s^  ('"J.- 


■r  ,v     .'-.TraviUt^PuHu^     /'uru/ùj^  c/c  fu/ ^tf/vAr/û N''~ 


'  BtiuJiti  iel 


h'.fc:  . 


PLAN  GENERAL  DE  LA  VILLA  PIA. 


Revu^  û'^dc  tArduùrciurc-a  Ja  rr^vaJix,Fuil,t^.    Pan,,  fiu^  rUFurstem^trç.  N'i 


m  ^.  FI  l 


,  J  -8û  UCÂ.A^     diii: 


VUE  INTÉRIEURE  DU  VESTIBULE  DE  LA  VILLA  FIA. 


(Rome). 


49 


REVUE  DE  L'ARCHITECTUHE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


so 


-=^vï,^;g£^fcS^ 


L'ALHAMBRA. 

Nous  aurions  voulu  donner  aujourd'hui  le  commencement  de  la 
description  de  l'Alhambra,  dont  la  vue  générale  est  représentée 
dans  notre  PL  3  ;  mais  la  distribution  des  matières  de  ce  numéro 
de  la  Revue  nous  engage  à  remettre  ce  travail  à  une  prochaine 
livraison.  La  vue  générale  de  l'Alhambra,  que  nous  donnons  PL  3, 
et  tous  les  autres  dessins  que  nous  donnerons  plus  tard  de  ce 
merveilleux  monument,  et  qui  en  reproduiront  toutes  les  vues 
principales,  ainsi  que  des  détails  de  sculpture  très-curieux  et 
d'autres  détails  relatifs  aux  voûtes  de  cet  étonnant  monument, 
sont  dus  au  crayon  de  M.  Owen  Jones,  architecte  anglais,  et  in- 
contestablement l'artiste  qui  a  le  plus  sérieusement  étudié  le  chef- 
d'œuvre  arabe. 

M.  Owen  Jones  a  eu  l'incroyable  patience  de  prendre  des  em- 
preintes, soit  au  moyen  du  moulage  en  plAtre,  soit  par  le  procédé 
de  l'estampage  avec  du  papier  non  collé,  de  toutes  les  décorations 
qui  couvrent  les  parois  de  l'Alhambra.  Le  grand  ouvrage  in-folio 
qu'il  a  publié  sur  l'Alhambra  témoigne  suffisamment,  du  reste,  de 
sentaient,  de  son  courage  et  de  son  amour  de  l'art.  Cet  ouvrage  doit 
se  composer  de  deux  volumes  grand  in-folio  ;  il  ne  reste  plus  à  pa- 
raître que  la  seconde  partie  du  deuxième  volume.  La  première 
partie  du  deuxième  volume,  qui  nous  est  parvenue  tout  récem- 
ment, est  exclusivement  consacrée  à  reproduire  les  détails  les  plus 
intéressants  de  l'ornementation  riche  et  variée  que  les  artistes 
arabes  ont  répandus  avec  profusion  sur  tous  les  murs  de  ce  palais 
de  fées.  Les  détails  reproduits  en  couleur  et  en  or  sont  tantôt  au 
quart,  tantôt  à  la  moitié,  et  parfois  de  la  grandeur  même  de  l'exé- 
cution. 

Mais  ce  n'est  pas  dans  cette  partie  de  la  Revue  que  nous  devons 
nous  livrer  à  des  descriptions  bibliographiques;  toutefois,  comme, 
nous  devons  à  l'obligeance  de  M.  Owen  Jones  de  pouvoir  donner 
à  nos  lecteurs  des  dessins  précis  de  l'Alhambra,  il  était  juste  de  li- 
vrer à  l'appréciation  de  nos  lecteurs  les  motifs  de  notre  entière 
confiance  en  ces  documents. 


DU  COMITÉ  HISTORIQUE  DES  ARTS  ET  MONUMENTS. 

Les  temps  ne  sont  pas  encore  très-loin  de  nous  où  des  savants  et 
des  artistes  illustres  discutaient  sur  la  question  de  savoir  si  les  pro- 


grès de  la  civilisation  moderne  étaient  en  effet  réels.  Les  uns  opi- 
naient en  faveur  de  l'état  sauvage,  d'autres  soutenaient  la  supério- 
rité des  civilisations  mi-barbares  de  l'antiquité,  et  un  petit  nombre 
seulement  s'attachaient  à  faire  comprendre  l'importance  des  con- 
quêtes matérielles,  morales  et  intellectuelles  faites  dans  les  derniers 
siècles.  Chacun  se  bornant  à  examiner  une  partie  seulement  de  la 
question,  trouvait  aisément  à  critiquer  les  théories  de  ses  adversai- 
res et  à  établir  l'excellence  de  la  sienne. 

Les  études  historiques  se  font  de  nos  jours  d'une  manière  plus 
philosophique;  on  comprend  que  chaque  société  a  eu  sa  fonction 
spéciale  dans  l'œuvre  de  progrès  général  opéré  depuis  l'existence 
de  l'homme  par  les  efforts  synergiques  de  l'humanité  entière, 
et  on  se  garde  de  conclure  de  telle  supériorité  spéciale  d'une  so- 
ciété sur  une  autre,  à  la  supériorité  absolue  de  celle-là  sur  celle-ci. 
De  ce  que  les  Grecs,  aux  beaux  temps  de  leur  histoire,  ont  porté 
dans  certaines  parties  des  arts  libéraux  un  sentiment  spécial  dont 
la  puissance  ne  se  fait  plus  reconnaître  dans  les  œuvres  de  nos  ar- 
tistes modernes,  chacun  ne  se  hâte  plus  de  conclure  à  la  supério- 
rité absolue  des  Grecs,  même  en  matière  d'art  ;  car  il  est  des  ex- 
pressions admirables  dans  le  langage  des  arts,  que  les  artistes 
européens  du  Moyen-Age,  les  Arabes,  les  Indiens, etc., ont  su  in- 
ven!er,  et  dont  les  anciens  n'ont  même  jamais  soupçonné  l'exis- 
tence. Tl  est  vrai  que  pendant  longtemps  les  critiques,  les  artistes 
modernes  et  les  archéologues,  n'ont  pas  su  apprécier  ces  merveil- 
les qui  étalaient  cependant  leurs  mille  beautés  aux  regards  de  tous; 
c'est  que  l'habitude  de  conclure  du  particulier  au  général  venait 
encore  ici  troubler  les  regards  :  —  les  œuvres  de  l'antiquité  étaient 
belles,  admirables  ;  donc  les  principes  de  l'art  antique  devaient 
régir  l'art  lui-même,  et  cela  sans  égard  aux  circonstances  si  variées 
de  lieux,  de  temps  et  de  mœurs;  —  de  là  les  églises  chrétiennes  en 
forme  de  temple,  les  barrières-temples,  prisons-temples,  hôpitaux- 
temples,  bourses-temples,  etc.,  etc. 

L'introduction  de  l'élément  philosophique  dans  les  travaux  his- 
toriques modernes  a  fait  apporter  un  esprit  moins  étroit,  moins 
exclusif  dans  l'étude  de  l'histoire  de  l'art,  et  par  suite  dans  la  pra- 
tique  de  l'art  lui-même.  Mais  toute  chose  a  sa  contre-partie  ;  et 
cette  tendance  à  chercher  dans  les  leçons  de  l'histoire  un  guide  pour 
déterminer  la  marche  qu'il  faut  imprimer  aux  choses  pratiques  et 
actuelles  de  la  vie,  rend  plus  important  et  plus  indispensable  que 
jamais  de  bien  connaître  tous  les  faits  historiques.  La  constatation 
des  faits  est  absolument  nécessaire  pour  faire  contre-poids  aux 
erreurs  monstrueuses  qu'on  fait  découler  si  fréquemment,  s^it  de 
faits  incorrects  auxquels  on  applique  des  principes  philosophiques 
irréprochables  en  eux-mêmes,  soit  encore,  et  beaucoup  plus  sou- 
vent, de  faits  mal  étudiés  et  incrustés  tant  bien  que  mal  dans  un 
système  philosophique  absurde, —  erreurs  qu'en  France  on  formule 
aussitôt  en  principes  politiques  ou  sociaux,  au  grand  danger  du 
repos  et  de  l'intérêt  publics.  —  Suivant  nous  donc,  les  études  his- 
toriques exercent  une  action  très-prononcée  surdes  idées  qui  influent 
puissamment  sur  la  marche  du  gouvernement  et  de  la  société. 

L'esprit  philosophique  se  trouve  aujourd'hui  dans  des  condi- 
tions de  développement  telles  qu'il  n'est  pas  besoin  de  s'inquiéter 
sur  son  avenir;  mais  il  importe  plus  que  jamais  d'étudier  les  fait», 
afin,  précisément,  de  créer  les  conditions  dans  lesquelles  cet  esprit 
philosophique  puisse  le  mieux  s'exercer  au  profit  de  la  science  et 
de  tous. 

Il  est  évident  que  l'étude  des  archives  historiques  d'un  grand 
peuple  ne  saurait  être  l'œuvre  d'une  seule  personne,  ni  même  de 
T.  V.  4 


51 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


mille  personnes  qui  ne  seraient  pas  organisées  de  manière  à  concou- 
rir à  l'accomplissement  d'un  même  plan  de  travail.  Aussi  M.  Gui- 
zot,  alors  ministre  de  l'Instruction  publique,  proposa-t-il  au  roi  la 
création  d'une  commission  qui  serait  chargée  de  diriger  «  le  grand 
travail  d'une  publication  générale  de  tous  les  matériaux  impor- 
tants et  encore  inédits  sur  l'histoire  de  notre  patrie.  »  Cette  propo- 
sition, faite  le  31  décembre  1833,  fut  agréée  le  18  juillet  1834.  Les 
membres  de  cette  commission  devaient  surtout  faire  exécuter  des 
recherches  dans  les  différentes  collections  et  bibliothèques,  et  di- 
riger le  dépouillement  des  nombreux  manuscrits  qu'elles  contien- 
nent et  qui  recèlent  le  secret  de  tant  d'événements  encore  impar- 
faitement connus  ou  même  complètement  ignorés. 

Mais  l'histoire  d'un  pays  ne  se  trouve  pas  tout  entière  dans  les 
manuscrits  et  les  chroniques;  la  littérature,  les  arts,  les  édifices, 
les  médailles,  etc.,  fournissent  aussi  des  renseignements  précieux 
sur  le  passé,  des  renseignements  auxquels  nul  autre  genre  de  do- 
cument ne  saurait  suppléer.  M.  Guizot  comprit,  dès  l'origine,  l'im- 
portance des  études  de  cet  ordre;  car,  déjà  en  novembre  1834  (l), 
il  déclarait  au  roi  que  l'histoire  des  arts  devait  occuper  une  place 
dans  «  le  vaste  ensemble  des  recherches  qui  embrassaient  toutes 
«  les  parties  de  l'existence  et  des  destinées  nationales.  Aucune 
a  étude  peut-être,  ajoutait  M.  le  ministre  de  l'Instruction  publi- 
«  que ,  ne  nous  révèle  plus  vivement  l'état  social  et  le  véritable 
«  esprit  des  générations  passées,  que  celle  de  leurs  monuments  re- 
«  ligieux,  civils,  publics,  domestiques;  que  celle  des  idées  et  des 
«  règles  diverses  qui  ont  présidé  à  leur  construction  ;  l'étude,  en 
«  un  mot,  de  toutes  les  œuvres  et  de  toutes  les  variations  de  l'ar- 
«  chitecture,  qui  est  à  la  fois  le  commencement  et  le  résumé  de 
«  tous  les  arts. 

«  Je  me  propose,  ajoutait  M.  Guizot,  de  faire  incessamment 
«  commencer  un  travail  considérable  sur  cette  matière  :  je  m'ap- 
«  pliquerai  à  faire  dresser  un  inventaire  complet,  un  catalogue 
«  descriptif  et  raisonné  des  monuments  de  tous  les  genres,  de 
«  toutes  les  époques,  qui  ont  existé  ou  existent  encore  sur  le  sol  de 
«  la  France.  Un  tel  travail,  en  raison  de  sa  nature  spéciale,  de 
«  son  importance  et  de  sa  nouveauté,  doit  demeurer  distinct  des 
«  autres  travaux  historiques  dont  je  viens  d'entretenir  Votre  Ma- 
«  jesté;  aussi  mon  intention  est-elle  d'en  confier  la  direction  à  un 
(i  comité  spécial,  et  d'en  faire  l'objet  de  mesures  particulières  que 
((  j'aurai  l'honneur  de  proposer  à  Votre  Majesté.  » 

A  la  commission  chargée  de  l'étude  des  documents  écrits,  il  fal- 
lut doue  bien  ajouter  un  comité  spécialement  chargé  de  diriger  les 
recherches  archéologiques.  Le  10  janvier  1835,  M.  Guizot  créa 
donc  le  comité  «  chargé  de  concourir,  sous  la  présidence  du  minis- 
tre, à  la  publication  des  monuments  inédits  des  sciences  et  des 
arts  considérés  dans  leurs  rapports  avec  l'histoire  générale  de  la 
France  (2).  » 

Ce  comité  se  subdivisa  en  deux  sections  ;  l'une  s'occupa  de  la 
littérature,  de  la  philosophie  et  des  sciences,  et  l'autre  se  con- 
sacra exclusivement  aux  arts. 

Il  paraîtrait  que  cette  organisation  rencontra  quelques  obstacles 
dans  la  pratique,  et  que  la  section  du  Sous-Comité  des  Arts  se  trouva 
trop  à  l'étroit,  et  incapable,  par  conséquent,  de  se  développer 
dans  la  proportion  de  son  importance;  aussi,  le  18  décembre  1837, 
M.  de  Salvandy,  devenu  à  son  tour  ministre  de  l'Instruction  pu- 


(1)  Rapports  au  Koi  et  pièces,  p.  23. 

(2)  Bulletin  du  Comité  historique  des  Ans  et  Monuments,  \"  numéro,  p.  3. 


blique,  érigea-t-il  le  Sout-Comilé  de»  Arts  en  Comité  de»  A  ri»  et  Mo- 
numents, comité  qui  fut  chargé  «  de  publier  tous  les  documents 
n  inédits  relatifs  ci  l'histoire  des  arts  chez  les  Français;  de  faire 
«  connaître  tous  les  monuments  d'art  en  France  dans  tous  les 
«  genres  :  monuments  religieux,  militaires  et  civils  ;  de  faire  des- 
«  siner  et  graver,  pour  les  conserver  à  l'avenir,  les  œuvres  remar- 
«  quables  d'architecture,  de  peinture,  de  sculpture  en  pierre,  en 
«  marbre  et  en  bois;  de  donner  des  instructions  sur  la  conscrva- 
«  tion  matérielle  des  ruines,  statues,  tours,  chapelles,  cathédrales, 
«  qui  intéressent  la  religion,  l'art  ou  l'histoire;  de  faire  des  re- 
n  cherches  sur  l'histoire  de  la  musique  à  toutes  les  époques  du 
«  Moyen-Age;  enfin,  de  préparer  les  matériaux  pour  une  histoire 
«  complète  de  l'art  en  France.  » 

M.  de  Salvandy,  désireux  de  faire  représenter  dans  le  nouveau 
comité  les  intérêts  de  tous  les  arts,  fit  adjoindre  de  nouveaux  mem- 
bres à  ceux  qui  avaient  composé  l'ancien  Sous-Comiti  de»  An»,  et 
aux  membres  résidents  (à  Paris)  (l)  on  ajouta  encore  des  membres 
non  résidents,  choisis  parmi  les  antiquaires  les  plus  distingues  des 
départements  (2).  Ainsi  constitué,  le  comité  commença  par  choisir 
des  correspondant»  officiels  dans  les  départements  (3)  et  même  à 


(1)  ilembrts  résidents  (nous  avons  fait  préciser  d'un  *  les  noms  îles  mem- 
bres de  l'ancien  Sous-Comiti  des  Arts)  : 
MM.  Gasparin  (comte  de),  pair  de  France,  président  du  comité;  —  *  Ampère 
(J.-J.),  professeur  au  Collc'ge  de  France,  membre  de  l'Institut;  —  Barre, 
graveur  général  des  monnaies;  —  BasUrd  (comte  Auguste  de);  —  Bottée 

de  Toulnion,  liibiiotliécaire  au  Conservatoire  de  musique;  — Delécluie; 

Grange  (marquis  de  la),  député;  —  Grillon,  membre  du  Conseil  municipal 
et  des  bâtiments  citils  ;  —  Héricart  de  ïliury  (vicomte',  membre  de  l'Insti- 
tut; —  *  Hugo  (Victor),  de  l'Académie  française;  —  Labordc  (comte  Léon 
de),  membre  de  l'Institut;  — 'Lenoir  (Albert),  architecte;—  *  Lenormani 
(Charles),  membre  de  l'Institut,  conservateur  de  la  bibliothèque  Royale; 

—  *Lc  Prévost  (Auguste),  député,  membre  de  l'Institut;  —  'Mérimée,  de 
l'Acadi'mie  française,  inspecteur  général  des  monuments  historiques;  — 
Montalembcrt  (comte  de),  pair  de  France;  —  Passy  (Antoine),  député;  — 
Robclin  (Charle.i),  architecte;  —  Sainte-Beuve,  de  l'Académie  française, 
conservateur  de  la  bibliothèque  Mazarine;  —  Salvandy  (comte  de),  de 
l'Académie  française,  député;  —  Saulcy  (de),  directeur  du  Musie  de 
l'Artillerie,  mrnibre  de  l'Institut;  —  Saussaye  (de  la),  correspondant  de 
l'Institut;  —  Sclicffcr  (Ary);  —  Schmit,  maître  des  requêtes  au  conseil 
d'État;  —  Taylor  (baron),  inspecteur  général  des  établissemenU  des  beaux- 
arts;  —  Texier  (Charles),  commissaire  royal  près  les  établissements  des 
beaux-arts  ;  — Varcollicr,  chef  du  secrétariat-général  à  la  préfecture  rie 
la  Seine;  — 'Vitet,  conseiller  d'État,  député,  membre  de  l'Institut;  — 
*DidrOD,  de  la  bibliothèque  Royale,  secrétaire  du  Comité. 

W  Membres  non  résidents  : 

MM.  Castcllanc  (marquis  de),  à  Toulouse  ;  —  Caumont  (de),  i  C«en;  —  Chau- 
drue  de  Craxannes  (baron),  sous-préfet,  i  Castel  Sarrazin;  —  Denis 
(Alphonse),  député  du  Var,  à  Hyères;  —  Devic  (monseigneur),  é(éque  de 
•  Belley;  —  Deville  (Achille),  i  Rouen;  —  Donnct  (monseigneur),  arche- 
vêque de  Bordeaux  ;  —  Gasparin  (Auguste  de),  ancien  député  de  la  DrOme, 
à  Orange;  — Gerville  (de),  à  Valogncs;  —  Jaubert  de  Passa,  i  Perpignan; 

—  Jouannct,  bibliothécaire  à  Bordeaux;  —  Lagoy  (marquis  de),  i  Salnt- 
Remi  ;  —  Saint-Méniin  (de),  conservateur  du  Musée,  à  Dijon  ;  —  Thévenot, 
i  Clerniont-Ferrand. 

(')  Correspondants  nationaux  : 

Ain. 

Aisne.  Uoii,M.  Van  Cleemputle,  architecte  ;  —Nogentel,  H  Souliac-Boileau  • 

—  Soissoss,  M.  Poquet,  prêtre.  ' 
Allier.  Moulins,  M.  Batissier  ;  —  SoBtiGM,  M.  ChambOD,  curé. 

A^>et  (Basses-). 

Alpes  (Hautes-). 

Ardêche.  Rosières,  M.  Guérin.  prêtre. 

Ardeones.  Chahleville,  M.   Hubert,  professeur  de  philosophie. 

Allège. 

Aube.  Troyes,  m.  Arnault,  peintre;  M.  Bourcelot,  curé  de  Saint-Urbain. 
Aude.  CARCissosNE,  M.  Cros,  directeur  du  Musée; —  NiHBOsm,  M.  Tournai, 

secrétaire  de  la  Commission  arciiéologique. 
Areyron. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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l'étranger  (1),  car  il  voulut  porter  son  attention  jusque  sur  l'in- 
fluence que  la  France  avait  pu  exercer  sur  le  développement  des 
arts  dans  les  autres  pays. 

Bouches-du-Rhône.  Aix,  M.  Porte  (Jcan-Baplisto),  M.  noiiaid,  bibliothécaire. 
—  Arles,  Jl.  Clair,  avocat,  M.  Huard,  directeur  du  Musée. 

Calvados.  Uayeux,  M.  Lambert,  bil)liotliécaire ,  M.  Tboniine  Desraazuros, 
vicaire  général  ;  —  Caen  ,  Décbaudé  d'Anisy;  —  Louvagny,  Beaurepaire 
(comte  de). 

Cantal. 

Charente.  Angoclême,  M.  Michon,  prêtre. 

Charente-Inférieure.  Rociiefort,  M.  Lessoii,  correspondant  de  l'Institut. 

Cher.  Bolbces,  M.  Girardot  (baron  de),  conseiller  de  préf. ,  M.  Ilazé,  peintre. 

Corrèze. 

Corse. 

Côte-d'Or.  Beaune,  M.  Foissel  (Théodore),  juge  au  tribunal;  — Dijon  ,  M.  Sa- 
got  (Emile),  architecte;  —  Magny,  M.  Gavean,  maire. 

Côtes-du-Nord. 

Creuse. 

Dordogne.  NoNTKOs ,  M    Verneilh  (Félix  de). 

Doubs.  PoNTARLiER,  M.  Deniesmav,  député. 

Drôme. 

Eure.  Bernât,  M.  Nicl,  ancien  sous-préfet. 

Sure-et-Iioir.  Chartres,  M.  Durand  (Paul),  M.  Pie,  chanoine  honoraire;  — 
Dreux,  M.  Tillenl. 

Finistère. 

Gard.  Nîmes,  M.  Pelet  (Auguste). 

Garonne  (Haute-).  TocLOCSE,  M.  Duniège;  M.  Gnillermy  (Ferdinand  de). 

Gers.  Al'ch,  M.  Canéto,  supérieur  du  petit  séminaire. 

Gironde.  Bordeaux,  M.  Diuihot ,  architecte,  M.Durand  (G.-J.),  architecte 
de  la  ville,  M.  Lamothe  (Léonce  de). 

Hérault.  Béziers,  M.  Portalon  (de);  —  Montpellier.  M.  Jubinal  (Achille),  pro- 
fesseur h  la  faculté  des  lettres,  M.  Renouvier  (Jules). 

Ille-et-Vilaine.  Rennes,  M.  Langlois,  architecte. 

Indre.  Chateauroux,  M.  Leroy  (Ferdinand),  préfet;  —  Lerlanc,  M.  Trcmblaye 
(de  la),  sous-préfet. 

Indre-et-Iioire .  Tours,  M.  Aubineau  (Léon),  archiviste,  M.  Bourassé,  profes- 
seur d'archéologie  an  petit  séminaire,  M.   Manceau,  chanoine  honoraire: 

—  Amboise,  m.  Cartier. 

Isère.  Grenoble.  M.  Pierangéli,  juge  au  tribunal;  —  N.-D. -de-l'Osier, 
M.  Dassy,  prêtre;  — Vienne,  M.  Delorme,  bibliothécaire  et  conservateur 
du  Musée  ,  M    Mermet. 

Jura.  Lons-le-Saulnier,  M.  Monnier  (Désiré);  —  Saint-Claude,  M.  Comoy, 
architecte  de  l'arrondissement  et  de  la  ville. 

Xiandes. 

Iioir-et-Cher.  Vendôme,  M.  Launay,  professeur  de  dessin  au  collège. 

Zioire.  MoNTBRisoN,  M.  Soultrait  (Georges  de). 

lioire  (Haute-).  Le  Puy,  M.  Aymard  (Auguste),  M.  Becdelièvre  (vicomte  de). 

lioire-Inférieure.  Nantes,  M.  Fournier,  curé  de  Saint-Nicolas. 

Iioiret.  Orléans,  M.  Pensée  (Charles);  —  Noyon-sur-Vernon,  M.  Crespy-Le- 
prince  (baron  de)  ;  —  Gien,  M.  Marchand,  ingénieur. 

Ziot. 

Iiot-et-Garonne.  NÉRAC,  Samazeuilh,  avocat. 

Iiozère. 

Maine-et-loire.  Angers,  M.  Godard-Faultrier,  directeur  du  Musée,  M.  Grille 
(Fr.),  bibliothécaire  de  la  ville;  — Saumur.  Joly-Leterne,  architecte. 

Manche.  Avranches,  M.  Mangon-Delalandej  —  Coutances,  M.  Dclamarre, 
vicaire  général. 

Marne.  Chaloss,  M  Champenois,  curé  de  Notre-Dame;  —  Chaltrait,  M.  Mel- 
let  (comte  de),  membre  de  la  Commission  arcliéologique  de  la  Marne  ;  — 
Reims,  monseigneur  Gousset ,  archevêque,  M.  Durand  (Hippolyte),  archi- 
tecte, M.  Paris  (Louis),  bibliothécaire  archiviste. 

Marne  (Haute-).  Langres  ,  M.  Fériel,  procureur  du  roi;  M.  Péchinet, 
architecte  ;  —  Montierender,  M.  Astier  (vicomte  d'). 

Mayenne. 

Meurthe.  Nancy,  M.  Guerrier  de  Dumast,  président  de  l'Académie  Stanislas; 

—  TouL,  M.  Delalle,  curé  de  l'ancienne  cathédrale. 
Meuse. 

Morbihan. 

Moselle. 

Nièvre.   La  Charité,  M.  Grasset  (Auguste)  ;— Neters,  M.  Duvivier  (Antonl). 

Nord.  Douai,  M.  Coussemaker  (de);  —  Lille,  M.  Contencin  (de),  secrétaire 

général  de  la  préfecture. 
Oise.   Beativais,   M.  Barraud,   directeur  du  grand  séminaire;  —  Clermont, 

M.  Woillez  (Eugène)  ;  —  Senlis,  M.  Poulet,  prêtre  principal  du  collège. 
Orne. 
Pas-de-Calais.  Calais,  M.  Pigault  de  Beaupré  ;  —  Clermont-Ferband,  M.  Mal- 

lay,  architecte,  professeur  d'archéologie  au  grand  séminaire 


Nous  avons  fait  connaître  l'organisation  au  moyen  de  laquelle 
se  rattachent  les  uns  aux  autres  les  travaux  des  divers  comités 
spéciaux  chargés  de  poursuivre  les  études  de  notre  histoire  natio- 


Puy-de-Dôme.  IssoiRE,  M.  BraTard,  architecte;  —  Nescbers,  M.  Croizet,  curé. 
Pyrénées  (Basses-). 
Pyrénées  (Hautes-). 

Pyrénées-Orientales.  Pekpighan,  M.  Henry,  bibliothécaire. 
Rhin  (Bas-).  Strasbourg,  M.  Klotz,  architecte  de  la  cathédrale  ;  —  M.  Pcrriii, 
architecte  ;  —  M.  Schneegaus  (Louis),  archiviste. 

Rhin  (Haut-J. 

Rhône.  Lyon,  Monseigneur  le  cardiiLTl  de  Bonald,  archevêque;  —  M.  Bonne- 
fond,  directeur  du  Musée;  —  M.  Coinarmond,  conserialeur  des  musées 
archéologiques;  —  M.  Dupasquier  (Loui.s),  architecte,  professeur  à  la  Mar- 
tiniére. 

Saône  (Haute-). 

Saône-et-Iioire.  .\uTUN,  M.  Dcvaucoux,  secrétaire  de  l'évéché;  —  Maçon, 
M.  Ragut,  archiviste-bibliothécaire. 

Sarthe.  Mans,  M.  Richelet,  bibliothécaire;  —  M.  Tournesac,  prêtre ,  profes- 
seur d'arcliéologie  ; — Solesmes,  M.  Guéranger  (Dom),  abbé  des  bénédictins. 

Seine.  Paris,  M.  Denierson,  curé  de  Saint-Germain-l'Auxerrois;  —  Pascal, 
prêtre. 

Seine-Inférieure.  Dieppe,  M.  Féret,  bibliothécaire.  —  Roien,  M.  Barthélémy, 
archileclc;  —  M.  Cochet,  aumônier  du  collège  royal. 

Seine-et-Marne.  Bourron,  M.  Oudin,  curé  ;  —  Donnemarie,  M.  Teste-d'Ouet 
(Alexandre)  ; — Meaux,  Mgr  Allou,éïêque;  —  Melik,  M.  Rosny  (Lucien  de). 

Seine-et'Oise.  Étami-es,  M.  Mont-Rond  (.Maxime  de);  —  Montfort-l'Amauey, 
M.  Robert; — Poissy,  M.  Saint-Clair  (de),  colonel;  — Rambouillet,  M.  Mou- 
tié,  membre  de  la  commission  archéologique;  —  Saint-Cyb,  M.  Boisselier, 
peintre,  professeur  de  dessin  à  l'école  militaire; — M.  Dussicux,  répéti- 
teur d'histoire  Â  l'école  militaire  ;  —  Versailles,  M.  Emaux. 

Sèvres  (Deux-).   Niort,  M.  Segrélain,  architecte. 

Somme.  Amiens,  Mgr  Mioland,  évêque;  —  M.  Duthoit  (A.),  Sculpteur;  — 
M.  Duval,  chanoine  honoraire  de  la  cathédrale;  —  M.  Goze;  —  M.  Jour- 
dain, chanoine  honoraire  de  la  cathédrale; — M.  Woillez  (Emmanuel); 
—  LiANcouRT,  M.  Escalopier  (comte  de  1'). 

Tarn.  Rabastens,  M.  Clausadc  (Gustave  de). 

Tarn-et-Garonne. 

Var. 

Vaucluse.  Avignon,  M.  Chanibeau  ,  conseAateur  du  musée  Calvet;  —  M.  Re- 
quien. 

Vendée. 

Vienne.  Poitiers,  M.  Cliergé  (Charles  de),  membre  de  la  Société  des  anti- 
quaires de  l'Ouest  ;  —  M.  Rédet  .  archiviste. 

Vienne  (Haute-).  Limoges,  M.  Boullé,  architecte;  —  Saint-Bonkct,  U.  Texier, 
curé. 

Vosges.  Saint-Dié,  Mgr  Gros,  évêque. 

Yonne.  Auxerbe,  M.  Quanlin,  archiviste; — Sens,  M.  Petit  (Victor);  —  .M.  Tarbé. 

Algérie.  Alger,  Berbrngger,  bibliothécaire  ; — Oran,  M.  André,  procureur  du  roi. 
(1)  Correspondants  étrangers  : 

En  Allemagne:  MM.  Boisserée  (Melchior),  à  Munich;  — Boisserée  (Sulpice), 
correspondant  de  l'Institut  de  France;  —  Gaertner,  architecte,  à  Mu- 
nich ;  —  Geissel  (Mgr),  coadjuteur  de  l'archevêque,  à  Cologne  ;  —  Kiesenet- 
ter,  conseiller  à  la  cour  de  Vienne;  —  KIcnze  (de),  architecte  du  roi  à 
Munich;  —  Knapp,  architecte  aulique  du  roi  de  Wurtemberg,  à  Slullgard; 

Lassaulx  (de),    architecte   du   gouvernement,  à   Coblentz;  —    Heide- 

loff,  secrétaire  de  l'académie  Albert-Diirer ,  à  Nuremberg;  —  Moller, 
architecte,  à  Darmstadt;  —  Raczinski  (Athanase,  comte),  à  Berlin  ;  — 
M.  Roisin  (Baron  Ferdinand  de),  à  Bonn; — Waageii  (docteur),  directeur 
delà  galerie  royale,  à  Berlin. 

En  Angleterre:  MM.  Britton, antiquaire,  à  Londres;  —  Donaldson,  vice-prés, 
de  l'Institut  royal  des  architectes  britanniques,  à  Londres;  —  Gally-Knight, 
membre  du  parlement;  —  Halliwell  (James-Orchard),  secrétaire  de  la  société 
des  antiquaires  de  Cambridge,  à  Londres;  —  Heywood-Hawkins  (J.), 
membre  du  parlement;  —  Longueville  (Jones),  maître  ès-arts  à  l'uni- 
versité de  Cambridge;  —  Michael  (Jones),  membre  de  la  Société  des 
anti()uaircs  de  Londres;   —  Way  (Albert),  directeur  de  la  Société  de 

Londres; Welby  Pugin,  professeur  d'archéologie  an   collège  d'Oscott, 

près  Birmingham;  —  Wliewel ,  professeur  de  géologie,  Â  Cambridge; 
Wright  (Thomas),  à  Londres,   correspondant  de  l'Institut  de  France. 

En  Belgique  :  MM.  Beanffort  (comte  Amédée  de),  président  de  la  commission 
royale  des  monuments  à  Bruxelles;  —  Delepierre  ,  membre  de  la  Société 
des  beaux-arts  de  Gand,  â  Bruges;  —  Febry-Rossius, docteur  ès-leltres  et 
en  philosophie,  à  Liège  ;  —  Jénicot,  directeur  de  la  restauration  de  Saint- 
Jacques ,  à  Liège  ;  —  Le  Maistre  d'Anstaing,  i  Tournai;  —M.  Reiffen- 
berg  (baron  de),  conservateur  de  la  bibliothèque,  i  Bruxelles ;  — Schayes, 
attaché  aux  archives  de  Belgique,  à  Bruxelles. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


nale  ;  mais  désormais  nous  nous  attacherons  exclusivement,  ainsi 
que  le  veut  la  spécialité  de  la  Revue,  aux  travaux  du  Comité  Histo- 
rique des  Arts  et  Monuments. 

Les  cadres  de  la  nouvelle  armée  d'archéologues  une  fois  bien  ar- 
rêtés et  en  partie  remplis,  M.  le  ministre  de  l'Instruction  publi- 
que adressa  aux  correspondants  du  comité  une  circulaire  destinée 
à  faire  bien  comprendre  à  chacun  d'eux  quelle  était  sa  fonction,  et 
de  quelle  manière  il  convenait  de  la  remplir;  voici  cette  circulaire  : 
Monsieur, 
Je  vous  ai  demandé  il  y  a  quelque  temps  de  diriger  vos  recher- 
ches sur  les  documents  inédits  relatifs  à  l'histoire  de  la  philoso- 
phie, des  sciences  et  des  lettres  :  il  me  reste  maintenant  à  appeler 
votre  attention  sur  un  autre  ordre  de  documents  non  moins  im- 
portants, mais  qui  demandent  des  investigations  d'un  genre  tout 
particulier. 

Depuis  les  Gaulois  jusqu'à  nos  jours,  des  monuments  de  toute  es- 
pèce ont  couvert  le  sol  de  la  France.  Quelques-uns  ont  complète- 
ment disparu  ;  d'autres,  encore  en  grand  nombre,  restent  debout 
ou  nous  sont  signalés  par  leurs  ruines.  Ces  monuments,  qui  révè- 
lent à  l'artiste  les  variations  successives  de  l'art  et  du  goût,  peu- 
vent aussi  fournir  à  l'historien  d'utiles  indications  sur  l'état  poli- 
tique, intellectuel,  moral  et  industriel  de  chaque  siècle.  Tantôt 
c'est  une  inscription  qui  se  déroule  sur  le  bois,  sur  la  pierre,  sur 
le  verre  ou  sur  le  métal  :  le  monument  alors  fait  l'office  d'un  ma- 
nuscrit; tantôt  c'est  la  grandeur  des  constructions,  le  caractère  du 
travail,  la  nature  et  le  choix  des  emblèmes,  qui  deviennent  autant 
de  révélations  pour  l'historien,  et  qui  mettent  en  relief  des  faits 
que  la  lettre  morte  des  documents  écrits  ne  pourrait  pas  même 
laisser  apercevoir. 

Il  n'y  a  pas  encore  longtemps  qu'on  a  reconnu  combien  les 
études  historiques  doivent  emprunter  de  secours  à  l'étude  des  mo- 
numents. Les  hommes  laborieux  des  deux  derniers  siècles,  qui  ont 
sauvé  d'une  destruction  inévitable  un  si  grand  nombre  de  chartes 
et  de  pièces  manuscrites  en  les  faisant  revivre  par  leurs  patientes 
transcriptions,  ont  laissé  se  dégrader  et  s'écrouler  sous  leurs  yeux 
cette  innombrable  variété  de  monuments  que  les  siècles  passés 
avaient  entassés  sur  tous  les  points  du  royaume.  Si  des  dessins  et 
des  descriptions  fidèles  nous  en  avaient  reproduit  les  formes  et  les 
dimensions,  si  seulement  un  relevé  exact  nous  en  donnait  le  dé- 
nombrement, que  de  problèmes  pourraient  être  résolus!  que  de 
lumières  sur  des  questions  à  jamais  douteuses! 

Il  est  trop  tard  pour  réparer  ce  déplorable  oubli;  mais  plus  nos 
regrets  sont  vifs,  plus  rigoureux  est  le  devoir  de  ne  pas  mériter  à 
notre  tour  les  reproches  des  siècles  à  venir.  Nos  richesses  monu- 
mentales, quoique  décimées  depuis  cinquante  ans,  égalent  encore 


en  beauté  et  surpassent  en  variété  celles  de  tous  les  autres  pays 
de  l'Europe.  Notre  premier  soin,  assurément,  doit  être  de  travail- 
ler à  leur  conservation,  de  les  entonrer  de  respect  et  de  prolonger 
leur  durée.  Mais,  quoique  nous  fassions,  ces  pierressontpérissables, 
etlejourviendraoiila  postérité  en  cherchera  vainement  la  poussière. 
Qu'il  en  reste  au  moins  une  image,  un  souvenir.  Que  partout  où  un 
monument  existe  aujourd'hui  on  sache  à  jamais  qu'il  a  existé;  que 
ses  proportions,  sa  figure,  son  importance,  sa  destination,  soient 
religieusement  conservées,  et  que  les  historiens  futurs  puissent  en 
retrouver  dans  tous  les  temps  une  trace  impérissable. 

C'est  pour  accomplir  cette  œuvre  difficile,  ce  travail  tout  nou- 
veau, qu'on  fait  appel  à  la  patience  et  aux  efforts  de  MM.  les  cor- 
respondants. Il  s'agit  de  dresser  la  carte  monumentale  de  la  France. 
Les  37  200  communes  devront  être  visitées,  explorées  en  tous 
sens.  Il  ne  faut  pas  qu'il  existe  un  seul  monument,  un  seul  frag- 
ment de  ruine,  à  quelque  siècle,  à  quelque  civilisation  qu'il  appar- 
tienne, sans  qu'il  en  soit  fait  mention,  ne  fût-ce  que  pour  constater 
qu'il  ne  mérite  pas  qu'on  l'étudié. 

Sans  l'assistance  active  et  laborieuse  de  MM.  les  correspondants, 
un  tel  plan  serait  chimérique.  N'oublions  pas  que  chaque  jour  voit 
disparaître  quelques-uns  de  ces  monuments  dont  nous  voulons 
perpétuer  le  souvenir.  Ceux  que  les  années  épargnent  encore,  l'i- 
gnorance les  mutile  ou  les  profane.  Il  faut  donc  que  cette  vaste 
stîitistique ,  sous  peine  d'être  impuissante  ,  soit  promptement 
terminée.  C'est  assez  dire  que,  pour  en  recueillir  les  éléments.  Il 
est  nécessaire  que  de  toutes  parts  et  en  même  temps  on  se  mette  à 
l'ouvrage. 

Mais  ici  une  difficulté  se  présente.  Une  œuvre  confiée  a  tant  de 
mains  à  la  fois  ne  manquera-t-elle  pas  d'ensemble  et  d'unité?  La 
science  archéologique  ne  possède  pas  encore  sa  nomenclature.  Que 
de  disparates,  que  de  contradictions  et  d'obscurités,  si  chacun  dé- 
crit les  monuments  avec  une  phraséologie  particulière,  s'il  juge  de 
leur  antiquité  d'après  des  systèmes  différenU  î  Cette  bigarrure 
nous  jetterait  dans  un  vague  et  dans  une  indécision  qu'un  travail 
scientifique  doit  éviter  à  tout  prix.  Aussi  ai-je  pensé  qu'il  était  in- 
dispensable que  le  comité  institué  pour  présider  à  ce  genre  de  tra- 
vaux indiquât  à  MM.  les  correspondants,  dans  des  instructions 
précises  et  techniques,  le  plan  d'après  lequel  les  recherches  de- 
vront être  entreprises,  les  expressions  qui  devront  être  consacrées 
à  la  description  de  telle  ou  telle  partie  des  monuments,  et,  enfin, 
les  signes  caractéristiques  qui  serviront  à  les  classer  et  à  détermi- 
ner l'époque  qui  les  a  vu  construire.  Ce  n'est  qu'en  se  conformant 
à  ces  instructions  et  en  les  suivant  littéralement  qu'on  évitera 
toute  ambiguïté,  et  que  nous  pourrons  donner  à  l'ensemble  du 
travail  cette  unité  qui  seule  peut  en  assurer  le  succès. 

J'ai  l'honneur  de  vous  transmettre  dès  aujourd'hui  la  première 
partie  des  instructions  adoptées  par  le  comité,  savoir  :  celles  qui 
se  rapiwrtent  aux  monuments  élevés  en  France  avant  l'établisse- 
ment définitif  du  christianisme,  soit  par  les  Gaulois,  soit  par  les 
Grecs  et  les  Romains,  et  celles  qui  concernent  les  monuments 
chrétiens.  M.  Albert  Lenoir  a  rédigé  la  partie  de  ces  instructions 


En  Espagne  :  MM.  Alvarez,  architecte,  â  Madrid  ;- Aniat  (monseigneur),  évêqiie 

de Zamora  ;-Bretoii  de  los  Herreros  don  Manoel),  bibliothécaire  de  la  reine  • 

-Carderera  (Valentin),  antiquaire,  à  Madrid  ;  -  Castellanos  (don  Basilio)' 

conseryateur  du  Cabinet  de  la  reine;  -Cépéro, chanoine  de  la  cathédrale  à 

Sévillei—Rocca  de  Togores,  de  l'Académie  espagnole   à  Madrid 
En  Grèce  :  MM.  Maurocordatos  (Georges),  professeur  à  l'Uni'versité,  à  Athènes  • 

—  Pittakys,  inspecteur  des  antiquités,  à  Athènet.  '  •      »        i     • 

En  Italie  :  MM.  Baini  (abbé,,  directeur  de  la  musique  de  la  chapelle  pon.ifi-      ''"'  ^       '"  '*"  ^"^    '""""'"«'"f*  religieux    et  Civils  des  Gaulois. 

"  '    "     "  '^'^sGrecs,  des  Romains  et  des  chrétiens,  jusqu'au  XI' Siècle;  M. 

P.  Mérimée  s'est  chargé  des  voies  et  des  camps;  à  M.  Ch.  Lenor- 
mant  appartiennent  les  instructions  sur  les  monuments  meubles: 
armes,  poteries,  ustensiles  et  monnaies.  Ultérieurement  seront 
publiées  les  instructions  relatives  aux  monuments  chrétiens  du  XI» 
au  XVI'  siècle. 


,     1  Tï  „  •  -~  — .—ile  pontkii- 

cale,  à  Rome;  _  Cordero  de  San-Qui„tino  (comte),  à  Turin;  _  Lacroix 
(abbé),  clerc  national,  à  Rome; -Marmora  (délia),  général,  aTuri„--Mi 
nard,  (chevalier),  vice-président  de  l'Académie  des  Beaux-Arts,  â  Rome'- 
Santm,  (abbé),  à  Rome;-Secchi  (abbé),  censeur  de  l'Académie  pontificale 
i  Rome;  _  Serra  di  Falco  (duc  de)  à  Palerme  ;  -  Visconti  fchevalier 
Pierre-Hercule,,  c«nm,issaire  des  antiquités  pontificales,  à  R„,"z 
<letti,  conservateur  du  Musée,  à  Milan. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


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Je  n'ai  pas  "besoin  de  vous  dire  qu'indépendamment  de  cette 
division  chronologique  en  deux  grandes  époques,  païenne  et  chré- 
tienne, nos  monuments  se  subdivisent  naturellement  d'après  leur 
destination.  On  peut  les  classer  en  religieux,  militaires  et  civils. 
Cet  ordre  sera  celui  des  instructions  suivantes,  et  en  outre  elles 
distingueront  encore,  dans  chacune  de  ces  trois  classes,  deux 
sortes  de  monuments,  les  monuments  fixes  ou  constructions  adhé- 
rentes au  sol,  et  les  monuments  meubles,  afin  de  rendre  moins 
confuse  et  plus  accessible  aux  recherches  cette  multitude  presque 
nfinie  d'objets. 

Recevez,  monsieur,  l'assurance  de  ma  considération  distinguée. 
Le  Ministre   de  l'Instruction  publique. 

Des  instructions  annoncées  dans  cette  circulaire,  trois  ont  été 
déjà  publiées  et  ont  rendu  de  grands  services,  mais  elles  n'ont  ja- 
mais été  dans  le  commerce;  de  sorte  que  les  architectes,  les  ar- 
chéologues et  les  amateurs,  totalement  étrangers  au  comité,  n'ont 
pu  se  les  procurer;  en  outre,  l'édition  des  deux  premières  instruc- 
tions relatives  à  l'archéologie  monumentale  est  aujourd'hui  com- 
plètement épuisée;  nous  avons  donc  demandé  et  obtenu  l'autori- 
sation de  reproduire  ces  deux  premières  instructions  dans  nos 
colonnes,  comme  déjà  nous  y  avons  reproduit  la  troisième,  relative 
à  l'Histoire  de  l'architecture  militaire  {Voy.  vol.  iv,  col.  33).  Nous 
donnerons  la  première  partie  des  Instructions  dans  notre  prochain 
numéro.  César  DALY. 


EQUILIBRE 
DES    VOUTES    EN   RERCEAUX    CYLINDRIQUES, 

dans  lesquelles 
LES    PLANS    DE    TÊTE    SONT    PERPENDICULAIRES    A    l'aXE. 

(Voyez  col.  9.) 

_  NOTA.  Nous  engageons  ceux  de  nos  lecteurs  qui  seraient  peu  familiers  avec 
I  analyse  mathématique,  à  ne  pas  négliger  cependant  d'examiner  ce  travail  qui 
donne  le  moyen  de  résoudre  graphiquement  un  certain  nombre  de  problèmes. 

S  I.  —  La  théorie  que  nous  allons  exposer  permet  de  résoudre 
les  diverses  questions  qu'on  peut  se  proposer  sur  la  stabilité  des 
voûtes.  Les  équations  généralesauxquelleselle  nous  conduira  seront 
surtout  utiles  pour  diriger  les  ingénieurs  dans  l'établissement  d'une 


voûte  projetée  ;  tandis  que  si  on  les  applique  à  l'examen  de  la  sta- 
bilité d'une  voûte  donnée,  elles  indiqueront  une  stabilité  aussi 
parfaite  que  possible,  lorsqu'elles  seront  satisfaites;  et  dans  le  cas 
contraire  elles  serviront  à  déterminer  les  forces  ou  charges  qu'il 
faudrait  ajouter  à  la  construction  pour  que  cette  stabilité  absolue 
eût  lieu.  De  cette  manière,  il  ne  faudra  pas  conclure  en  général 
que  telle  construction  qui  ne  satisfera  pas  complètement  à  nos 
équations  sera  dépourvue  de  stabilité,  mais  seulement  que  cette 
stabilité  ne  sera  pas  aussi  grande  qu'elle  eût  pu  être;  et  l'on 
pourra  juger,  jusqu'à  un  certain  point,  du  degré  de  stabilité,  par 
la  connaissance  que  fourniront  nos  équations,  des  forces  ou 
charges  qui  devraient  être  ajoutées   pour  la  stabilité  absolue. 

S'il  s'agissait  de  fixer  les  limites  de  la  stabilité  d'une  construc- 
tion donnée,  on  ne  saurait  mieux  faire  à  cet  égard  que  d'employer 
les  méthodes  graphiques  ou  de  calcul  indiquées  par  M.  Rellanger, 
dans  les  feuilles  lithographiées  de  son  cours  de  mécanique  appli- 
quée, fait  à  l'école  Centrale  et  à  l'école  des  Ponts-et-Chaussées. 

§  II.  —  Considérons  une  portion  de  voûte  comprise  entre  deux 
plans  parallèles  atix  plans  de  tète  et  distants  de  la  quantité  >.  qu'on 
supposera  égale  à  l'unité  linéaire ,  ou  infiniment  petite  si  l'on 
veut. 

Supposons  la  voûte  divisée  en  voussoirs  infiniments  petits,  par 
des  plans  de  joint  normaux  aux  courbes  d'intrados  et  d'extrados, 
comme  l'indique  la  figure  1.  Nous  ferons  passer  par  les  centres 
de  gravité  des  voussoirs  ou  des  trapèzes  qui  leur  servent  de  ba- 
ses, une  courbe  C  C  que  nous  nommerons  courbe  des  centres  fie 
gravité.  Dans  le  cas  général  d'intrados  et  d'extrados  non  paral- 
lèles, nous  concevons  les  plans  de  joint  menés  normalement  à  la 
courbe  de»  centres  de  gravité  des  voussoirs  que  ces  plans  serviront  à 
déterminer. 

Désignons  par  : 

X,  y,  les  coordonnées  d'un  point  C  de  cette  courbe,  rapportées 
à  des  axes  rectangulaires,  l'un  horizontal,  l'autre  vertical  ; 

a,  l'angle  de  la  tangente  en  ce  point,  avec  l'axe  des  x  ; 

ds,  l'élément  d'arc  ; 

dP,  le  poids  du  voussoir  infiniment  petit,  dont  a;  et  y  sont  les 
coordonnées  du  centre  de  gravité; 

2',  la  pression  totale  exercée  sur  la  face  A  B,  normalement  à 
cette  face,  par  la  partie  supérieure  de  la  construction  ; 

î",  la  pression  totale  exercée  normalement  sur  la  face  A'  fi' con- 
sidérée comme  appartenant  à  la  partie  D' de  la  construction ,  par 
la  partie  de  la  construction  supérieure  à  A' B' ;  à  cause  de  l'action 
égale  à  la  réaction,  la  partie  D' exercera  sur  A  B',  considéré  comme 
appartenant  à  la  partie  C  C,  une  réaction  précisément  égale  à  T'  et 
en  sens  contraire  de  celle-ci. 

Désignons  de  plus  par  dF  une  force  extérieure  différente  des 
précédentes,  agissant  parallèlement  aux  plans  de  tète,  sur  une 
étendue  infiniment  petite  xrf»  du  système  considéré  et  passant  par 
le  point  (a;,  y). 

Nous  examinerons,  en  leurs  lieu  et  place,  les  circonstances  que 
pourra  présenter  la  position  du  point  d'application  de  cette  force. 

Nous  la  supposerons  du  reste  uniformément  repartie  sur  l'arête 
qui  répond  au  point  [x,  y],  (Cette  hypothèse  est  satisfaite  si  l'on 
suppose  >.  infiniment  petit). 

Nous  désignerons  par  dF, ,  dFy ,  les  composantes  de  cette  force 
suivant  les  axes  Xet  Y. 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


60 


§  III.  —  Pour  établir  maintenant  les  équations  d'équilibre,  nous 
allons  faire  encore  deux  hypothèses  : 

D'abord,  imaginons  que  sans  altérer  en  rien  le  poids  des  vous- 
soirs  et  la  position  de  leur  centre  de  gravité,  on  leur  donne  la  forme 
indiquée  dans  la  flg.  (2),  c'est-à-dire  qu'on  les  taille  de  telle  ma- 
nière qu'ils  ne  soient  en  contact  que  suivant  les  arêtes  ou  gé- 
nérati'ices  qui  ont  leurs  pieds  sur  la  courbe  des  centres  de  gra- 
vité, C  C. 

Ensuite  nous  ferons  abstraction  des  frottements  et  de  la  résis- 
tance qu'oppose  l'adhésion  des  mortiers  au  glissement  des  voussoirs 
les  uns  sur  les  autres. 

Il  est  évident  que  si  l'équilibre  peut  exister  dans  un  système 
établi  suivant  ces  hypothèses,  il  existera  à  fortiori  lorsque  l'on 
remplacera  le  contact  de  deux  arêtes  par  celui  de  deux  plans  de 
joints,  et  que  l'adhésion  des  mortiers  ainsi  que  le  frottement  se- 
ront rétablis ,  le  rôle  de  ces  dernières  forces  étant  de  s'opposer  au 
mouvement  qui  tend  à  se  produire. 

Seulement,  il  faudra  remarquer  que  la  pression  totale  T,  qui  se 
répartirait  également  sur  tous  les  points  du  plan  de  joint,  dans  le 
cas  où  elle  passerait  par  le  centre  de  gravité  de  ce  plan,  ne  se  par- 
tagera pas  également  entre  tous  ses  points,  à  cause  que  les  centres 
de  gravité  des  faces  des  voussoirs  ne  se  trouvent  pas  sur  la  courbe 
C,  mais  se  projettent  sur  le  point  milieu  de  l'épaisseur  de  la  voûte. 
Les  centres  de  gravité  des  volumes  des  voussoirs  se  projetant  plus 
près  de  V extrados  que  ceux  des  faces  de  joint,  on  voit  que  lorsqu'on 
remplacera  les  arêtes  de  contact  par  des  faces  de  joint,  la  pression 
par  unité  de  surface  sera  plus  grande  vers  l'extrados  que  vers  l'in- 
trados.  Mais  les  distances  des  points  de  la  courbe  C  aux  points  mi- 
lieu de  l'épaisseur  qui  leur  correspondent  étant  très-petites,  ainsi 
que  nous  le  verrons  plus  bas,  nous  ne  tiendrons  généralement  pas 
compte  de  cette  inégale  répartition  des  pressions;  la  pression 
maximum  ne  différera  donc  que  très-peu  de  la  pression  moyenne. 

Il  y  aura  un  grand  avantage  à  ce  que  la  résultante  des  pressions 
passe  très-près  du  milieu  de  l'épaisseur  ;  car  si  la  voûte  est  sou- 
mise accidentellement  à  des  charges  auxquelles  on  n'aura  point  eu 
égard  en  fixant  les  conditions  de  son  établissement,  l'action  de 
celles-ci  sera,  tant  que  l'équilibre  pourra  subsister,  de  déplacer  le 
point  d'application  de  la  résultante  des  pressions,  en  faisant  varier 
son  intensité.  Or,  pour  que  cette  résultante  puisse  se  déplacer  dans 
un  sens  ou  dans  l'autre,  sans  trop  se  rapprocher  de  l'extrados  ou 
de  l'intrados,  il  est  évident  qu'elle  doit  passer  par  le  milieu  de 
l'épaisseur,  lorsque  les  surcharges  dont  il  s'agit  n'ont  pas  lieu  , 
c'est-à-dire  lorsque  la  voûte  est  seulement  soumise  à  l'action  des 
forces  qu'on  a  fait  entrer  dans  le  calcul  de  son  établissement. 

§  IV.  — Ceci  posé,  considérons  l'équilibre  d'une  portion  quel- 
conque C  C  de  voussoirs  du  système  de  la  fig.  (2);  soient  x,  y,  et 
.r',  i/',  les  coordonnées  de  C  et  C. 

Les  forces  extérieures  à  ce  système  sont  : 

1°  La  pression  T  agissant  en  C. 

2°  La  pression  î"  agissant  en  C. 

3»  Les  poids  dP  des  voussoirs. 

4°  Les  autres  forces  extérieures  dF  qui  agissent  sur  les  divers 
points  du  système. 

Ces  diverses  forces  étant  dans  un  même  plan,  trois  des  six  con- 
ditions d'équilibre  d'un  système  solide  sont  satisfaites  (l),  et  il  ne 
reste  qu'à  appliquer  les  trois  autres. 


(1)  On  verra,  dans  le  paragraphe  suivant,  comment  nous  concevons  qu'on 


Deux  de  ces  équations  expriment  que  la  somme  des  projections 
des  forces  extérieures  sur  chacun  des  axes  X  et   Y,  est  nulle. 

La  troisième  exprime  que  la  somme  des  moments  de  ces  forces 
ou  de  leurs  composantes,  par  rapport  à  un  troisième  axe  perpendi- 
culaire aux  deux  premiers,  est  également  nulle. 

En  égalant  à  zéro  la  somme  des  projections  des  forces  extérieu- 
res sur  l'axe  des  .r,  et  observant  que  la  projection  des  poids  dP 
est  nulle,  il  vient 

Tcota. —  Fcoja'-f-     /     dF^  =  0.  ;i) 

En  projetant  ces  forces  sur  Taxe  des  y,  et  égalant  la  somme  des 

projections  à  zéro,  on  obtient 

T  sin  0.—  T  sin  a'  -f     f'^  dF^  -f    f^  dP  =  o.  [2] 

En  faisant  la  somme  des  moments  par  rapport  a  un  axe  perpen- 
diculaire au  plan  des  x,  y,  et  passant  par  le  point  0,  puis  l'égalant 
à  zéro,  on  obtient  cette  dernière  condition 

a- iTim »  —  a:'r »i« «'  —  (y  Tfo» a  —  y'  T f o« «') -f    f       xdF^ 

-Sx  y'^'-'^Sxy'''^'  "^ 

Or,  remarquons  que  ces  équations  devant  avoir  lieu  pour  un  in- 
tervalle quelconque  C  C,  compté  sur  la  courbe  des  centres  de  gra- 
vité, auront  encore  lieu  lorsque  cet  intervalle  sera  ionnimeut  petit 
et  égal  à  rf*. 

Dans  ce  cas  x  deviendra  x  -\-  dx,  et  les  quantités  a'  et  F.qui 
sont  des  fonctions  de  x,  deviendront  a  -f  rfa,  et  T-j-  dT,  de  telle 
sorte  que  l'on  aura 

Tcos  a' —  Tcosaz=(  T~\-  d  T)  cos  {a  -   di  —Tcosx=d{  Tcot  «)  ; 
on  aura  de  même 

T  sino.'  —  Tsin  a.  =  d{  T  sin  »; . 
tandis  que  les  intégrales  contenues  dans  ces  mêmes  ciduiMiii*  se 
réduiront  a  un  de  leurs  éléments. 

En  supposant  donc  l'intervalle  C  C  inOniment  i)etit,  et  ayant 
égard  aux  remarques  précédentes,  nos  équations  (l),  (J),  (i),  de- 
viendront 

—  d(rfo«a)-f  dF,  =0,  .(4) 

—  d  {Tsin  a)  -f  rfF,  -j-dP  =  o.  (s) 

—  d(x  Tsin  a)-)-d(y  Tfo»  a) -\-xdF^  —  ydF.  +  ydP  =  o.[6)' 

Sous  cette  forme,  il  est  facile  de  voir  que  la  3'  éciuation  est  une 
conséquence  des  deux  premières.  Pour  rendre  ceci  évident,  nous 
allons  transformer  les  deux  premiers  termes  de  l'équation  (6)  ainsi 
qu'il  suit  : 

—  X  d  [T  sina.)  —  T  sin  a.  dx -\- y  d  {T  eos  a.)  -\-  T  cos  a.  dy; 
or,  en  observant  que  l'on  a 


(in  o  = 


les  termes 


deviennent 


dy  dx 

—  Tsinadx-^  Tcosady 


et  se  détruisent.  De  cette  manière,  l'équation  (6)  devient 
—  xd  {Tsin  a)  -f-  y  rf  (  7'  co»  a)  -f  x  rfF,  —  y  dF,  -f-  y  d/»  =  o. 
On  voit  maintenant  qu'elle  se  compose  du  1"  membre  de  l'équa- 


pnisse  appliquer  à  un  système  de  corps  solides  les  équations  d'équilibre  d'un 
système  solide. 


61 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


tion(5),  multiplié  par  x,  et  du  fr  membre  de  l'équation  (4),  pris 
en  signe  contraire  et  multipiié  par  y,  le  tout  égalé  à  zéro. 

L'équation  (6)  n'est  donc  qu'une  déduction  des  deux  précédenr- 
tes;  elle  y  est  comprise  implicitement,  et,  de  cette  manière,  il  suf- 
fira d'avoir  égard  à  ces  deux  premières  équations ,  que  nous  écri- 
rons ainsi  : 

d.  Tcosa.  :=^dF^  , 

d.  T  sin  a  =  dF, 


71 


§  V.  —  Les  équations  précédentes  sont  celles  qu'il  s'agissait 
d'obtenir.  Elles  sont  suffisantes  pour  assurer  l'équilibre  du  sys- 
tème. En  effet,  bien  que  les  six  équations  de  V équilibre  d'un  corps 
solide ,  appliquées  à  l'ensemble  d'un  système  de  corps  solides , 
comme  nous  l'avons  fait  §  IV,  soient  insuffisantes  pour  en  assurer 
l'équilibre,  elles  suffisent  cependant,  étant  appliquées  à  l'une  quel- 
conque de  ses  parties,  pour  nous  en  fixer  les  conditions.  Or,  nous 
avons  précisément  appliqué  ces  équations  à  l'équilibre  de  l'un  des 
voussoirs,  en  supposant  l'intervalle  CC  infiniment  petit  ;  de  telle 
sorte  que  nous  aurions  pu  nous  contenter  d'établir  immédiatement 
les  équations  (4),  (5)  et  (6). 

Avant  de  nous  servir  des  équations  (7)  pour  résoudre  les  di- 
verses questions  dont  elles  peuvent  fournir  les  solutions ,  nous  al- 
lons les  transformer. 

Pour  cela,  soit  t=  AB  l'épaisseur  de  la  voûte  au  point  dont  x 
et  y  sont  les  coordonnées,  t  la  pression  moyenne  sur  la  face  A  B, 
lorsque  les  surfaces  de  contact  sont  rétablies;  d'après  la  remarque 
du  §  m,  la  pression  maximum  par  unité  superficielle  différera  peu 
de  t  dans  le  joint  .4  Jî ,  et  nous  aurons 

r=xa,  '\ 

d'où  J 

1.  ''^  r  ,  V 

2  C05  a  =;  X  E  t  — ;-  '  V  (8) 


T  sin  a  =  X  6 1 


ds 
dy 
ds 


Nous  allons  inaintenant  calculer  la  valeur  de  dP.  Nous  désigne- 
rons parra  le  poids  de  l'unité  de  volume  des  matériaux  dont  es^con- 
struite  la  voûte. 

Le  volume  d'un  voussoir  sera 

Jst, 

en  appelant  t  la  largeur  il/ M' Fig  (3)  du  voussoir,  prise  au  milieu 
de  l'épaisseur,  et  l'on  aura 

rfP  =  oXsi;  (9) 

il  reste  à  exprimer  i  en  fonction  de  ds,  qui  est  mesuré  sur  la 
courbe  des  centres  de  gravité,  et  non  pas  sur  une  courbe  qui  passe- 
rait par  les  milieux  des  épaisseurs. 

Considérons  le  voussoir  projeté  en  DE  D'E',  et  déterminé  par 
les  plans  normaux  S  E,S  E' ,  faisant  l'angle  dm.. 

Soient  :  S  le  centre  de  courbure  de  la  courbe  CC; 

G  le  centre  de  gravité  du  trapèze  infinitésimal  DE  D'E'; 

f=^SG,  rayon  de  courbure  ; 

r  =  uS,  distance  de  la  surface  élémentaire  uu'  au  centre  de 
courbure. 

S=  KG,  distance  du  centre  de  gravité  au  milieu  de  l'épaisseur. 
La  surface  élémentaire  uu  vl  pour  expression 
r  rfct  dr; 
son  moment,  par  rapport  à  un  plan  perpendiculaire  à  f  et  passant 
par  S,  est 

r«  d»-  d  a. 


La  surface  totale  base  du  voussoir  est 

e  t  =  t  (p  —  ^)da; 
et  son  moment 

f  8  (P  S)   rf  «.   , 

En  égalant  la  somme  des  moments  au  moment  total ,  et  obser- 
vant que  le  facteur  commun  da  disparait  de  l'équation  ,  on  aura 

\  r'dr  =  pe(p  — J), 

Jp-*-i' 
ou 

(?-»+i0'-(p-»-ï0'      ,    ., 

=p'(p— î). 

En  effectuant  le  développement  et  réduisant,  il  vient 

(P-'V-P(P-J)  =  -;V'«. 
On  en  tire,  en  divisant  par  p'  et  résolvant 


(10) 


(On  ne  conserve  ici  que  le  signe  convenable  devant  le  radical.) 
On  peut  aussi  prendre  la  valeur  du  rapport  i  dont  nous  aurons 
besoin  plus  loin  ;  cette  valeur  est  '' 


l=\/l2|(l-i).  iiobis) 


Quant  à  la  valeur  de  _,  elle  se  déduit  de  l'équation  ci-dessus 

P 


i^'-i^-^'-^y 


(n) 


En  multipliant  le  numérateur  et  le  dénominateur  de  cette  va- 
leur par 


.(.  +  \/.--^), 


on  a  cette  autre  expression 


"p* 


(116m) 


de  laquelle  on  tire,  pour  valeur  approchée  alix  quantités  près  du 
4e  ordre 


P       "p*" 


(«) 


Cette  ex  pression  confirme  ce  que  nous  avons  avancé  §  III,  sur  la 
petitesse  de  la  distance  G  K. 

Pour  former  la  valeur  de  dP,  nous  rappellerons  que  nous  avons 
trouvé 

e  t  =  e  (  p  —  J  )  rf»  ; 

or,  on  a 

di 


d  a=^  — , 

P 


donc 


..■=.rf,  ^1--). 


Au  moyen  de  cette  valeur,  l'expression  (9)  devient 


dP  =  uXtds  (  •— ~  )• 


(IS) 


En  mettant  les  valeurs  (8)  et  cette  dernière  dans  les  équa- 
tions (7),  et  divisant  tout  parla  constante  x,  nos  équations  d'équi- 
libre deviendront  : 


67 


et  d'après  l'équation  (20), 


REVUE  DE  L'AKCHITECTURE  ÇT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


88 


P  = 


(22) 


cos  ■ 


En  divisant  les  équations  (21)  et  (22)  membre  à  membre,  il 
vient 

-=-,,  (23) 

ou  il  cause  de  la  valeur  de  a, 


L'intégrale  de  cette  expression ,  prise  entre  les  limites  »  et  x, 
divisée  par  x,  est 


—  =  /c  tapg   — r  ,  i'J5) 


En  mettant  pour-  ,  sa  valeur  générale  donnée  par  l'équation 
?  S 

(10  bis),  il  vient  après  réductions  faites,  pour  la  valeur  de  -  , 


c* 


I 


Cette  équation  fait  voir  que — ,  qu'on  a  regardé  comme  constant 

P 
dans  l'intégration,  l'est  effectivement.  De  cette  manière,  les  équa- 
tions (19),  au  lieu  d'être  des  intégrales  approchées,  sont  des  inté- 
grales exactes  de  l'équation  proposée.  En  substituant  dans  la  va- 

leur  de-  ,  celle  de  — ,  que  nous  venons  de  trouver,  et  réduisant, 

P  ? 

il  viendra 

e       c         1 

-^  '  '  (<.» 
La  comparaison  de  cette  équation  avec  l'équation  (23)  donnera 
ensuite,  pour  la  valeur  de  u.' 


,"•  ^  ."•    1 


(2J 


L'équation  (22)  fait  voir  que  cette  quantité  u.'  est  encore  égale 
au  rayon  de  courbure  relatif  au  sommet  de  la  voûte. 

L'équation  (24)  permet  de  donner  à  -une  autre  expression  ;  en 

effet,  en  multipliant  cette  équation  et  celle  qui  donne  la  valeur  de 


-  ,  membre  à  membre,  il  vient 


d'où 


et  en  mettant  pour  p,  sa  valeur  (22), 


■î=  ^ 


cos  —r 
1^ 


27 


Il  peut  être  utile  encore  de  connaître  le  poids  d'une  partie  de  la 
voûte  comprise  entre  le  sommet  et  un  plan  normal  correspondant 
à  l'abscisse  x. 

Ici  l'expression  générale  du  poids  élémentaire  donnée  par  l'équa- 
tion (i3),  donne,  en  mettant  pour  e  et  ds,  leurs  expressions  (20)  et 
(21) ,  puis  ayant  égard  aux  relations  établies  plus  haut  : 


CI 

1- 

? 

dP 

, 

xtc 

dx 

(^ 

co«* 

X 

cette  dernière  expression  est  celle  du  poids  par  unité  de  longueur. 

On  peut  avoir  besoin  de  la  longueur  d'un  nrc  de  notre  courbe, 

comptée  du  sommet;  sa  différentielle  est,  d'après  l'expression  (ao) , 

dw 


di 


X 

eot—r 


On  en  tire  en  intégrant 


s  =  u'  log  lang-  (y  +  f  ^  )• 


M) 


Remarques  sur  la  courbe  représentée  par  l'équalioii 

—7  =  —  log  cos  — . 
•"•  f* 

§  X.  Cette  équation  ne  contenant  que  le  seul  paramètre  u.  ,  il 

en  résulte  que  toutes  les  courbes  construites  avec  cette  é(|uation  et 
des  valeurs  diverses  de  ce  paramètre,  sont,  comme  les  diverses  pa- 
raboles du  2« degré,  des  courbes  semblables. 

Nous  avons  vu  que  ce  paramètre  n'est  autre  chose  que  le  rayon 
de  courbure  du  sommet,  et  qu'il  ne  dépend  que  de  la  nature  des 
matéiiaux  et  de  l'épaisseur  de  la  voûte  au  sommet. 

Sa  valeur  est 

Cette  première  remarque  est  Imjwrtante,  parce  que  l'on  pourra 
construire  une  fois  pour  toutes  la  courbe  dont  il  s'agit,  sur  une 
échelle  quelconque  ;  et  par  ce  nloyen  on  pourra,  à  l'aide  de  cette 
épure,  résoudre  graphiquement  un  certain  nombre  de  problèmes , 
ainsi  que  nous  le  verrons  plus  bas. 

§  XL  La  courbe  est  symétrique  par  rapport  à  l'axe  des  y,  puis- 
que deux  valeurs  égales  et  de  signe  contraire  de  x  donnent  la 
même  valeur  de  y. 

L'ordonnée  croit  d'une  manière  continue  de  — ,  =  o,  à  —  =  —  ; 

[«■  ."^2 

elle  devient  infinie  pour  cette  dernière  valeur  :  donc  la  courbe  a 

une  asymptote  parallèleàl'axedesy.situéàladistance  — i^'iducôté 

des  X  positifs.  Il  en  est  de  même  du  côté  des  x  négatifs.  Donc  une 

première  branche  de  la  courbe  est  renfermée  dans  un  intervalle 

compté  sur  l'axe  des  x,  égal  à  ^j.'. 

X         t:               3  ~ 
Pour— ,  >       et  < le  cosinus  est  négatif,  et  son  logarithme 

devient  imaginaire;  la  courbe  n'a  donc  pas  de  points  situés  dans 

"     .       3  it     ,  , 
l'intervalle  compris  entre  x  =  —  u.  et— — -.x .  La  grandeur  de  cet 

intervalle  est  encore  ^a'.  A  la  limite -^ — u'.lecosinus  redevient 

2    • 

positif,  et  la  valeur  de  y  réelle,  en  commençant  par  être  in- 
finie. 

Elle  va  en  diminuant  depuis  — "  u.' jusqu'à  2  s/,  delà  même  ma- 
nière que  de  X  ^  —  _"  u-',  à  a;  =  o.  Au  delà  elle  rtprend  les  méme« 


69 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUHLICS. 


70 


valeurs  qu'elle  a  reçues  déjà  pour  les  valeurs  de  a;  >  o.  Cela  tfent 
à  ce  qu'on  a  cos  [■2m-  +  o)  =  cos  0. 

On  voit  donc  que  la  courbe  se  compose  d'une  infinité  de  bran- 
ches égales  entre  elles,  séparées  par  des  intervalles  égaux  à  :: ,«.', 
comme  l'indique  la  figure  4. 

dy 
Cette   courbe   présente  la  singularité,  que  la    valeur  de  -7-, 

dx 

donnée  par  l'équation  (19),  est  réelle  pour  toute  valeur  de  x;  et  l'on 

sait  que  la  valeur  de-^,  donnée  en  fonction  de  x,  suffit  pour  dé- 
dx 

terminer  la  forme  de  la  courbe.  De  cette  manière,  la  forme  de  la 

courbe  se  trouve  déterminée  dans  les  intervalles  /,  /',  etc.,  qui 

n'en  renferment  aucun  point. 

Nous  savons  du  reste  que  les  constantes  (jui  proviennent  de 

dy 
l'intégration  de  —-  =  f  x,  ne  servent  qu'à  fixer  la  position  de  la 

courbe  dans  son  plan,  et  qu'elles  n'ont  aucune  influence  sur  sa 
forme. 

On  est  donc  conduit  à  admettre  qu'il  doit  exister  des  branches 
de  la  courbe  dans  les  intervalles  /  et  7',  dont  la  forme  est  identique 
avec  celle  des  autres  branches,  ayant  les  mêmes  asymptotes  et 
même  direction  d'axes,  mais  dont  on  ne  peut  assigner  la  position 
du  sommet,  attendu  que  dans  ce  cas  le  log  cos,  et  par  suite  la  va- 
leur de  y,  se  composeiît  d'une  constante  imaginaire,  et  d'une  partie 
variable  réelle.  Tout  ce  qu'on  peut  dire,  c'est  que  le  sommet  de 
ces  branches  est  situé  à  une  distance  imaginaire  de  l'axe  des  x. 
Nous  verrons ,  à  propos  des  voûtes  en  dôme ,  que  pour  réaliser 
toutes  les  solutions  d'une  certaine  question  fournie  par  une  même 
équation,  il  faut  avoir  égard  à  l'existence  de  ces  branches  imagi- 
naires /„  /',  etc. 

Tracé  de  la  courbe  et  des  normales.  Intrados  et  extrados. 

§  XII.  S'il  s'agit  de  calculer  les  ordonnées  de  la  courbe,  éq.  (l9), 
pour  une  valeur  donnée  de  u.' ,  on  observe  d'abord  que  le  log.  qui 
entre  dans  cette  équation  est  un  log.  hyperbolique  ou  népérien. 
Or,  on  sait  qu'un  log.  de  cette  espèce  s'obtient  en  divisant  le  log. 
vulgaire  ou  à  base  décimale  par  le  module 

.,  =  0,43429  448...  (30) 

Si  donc  nous  désignons  par  ].cos  le  log.  décimal  d'un  cosinus, 
donné  par  les  tables  ordinaires,  et  si  nous  remarquons  que  ce  log. 
est  toujours  trop  fort  de  10  unités,  nous  aurons,  pour  l'équation 
transformée 


Pour  éviter  cette  transformation  ,  voici  comme  on  s'y  pren- 
dra : 

On  calculera  d'abord  la  distance  du  sommet  0  à  l'asymptote  la 
plus  voisine  ;  cette  distance,  que  je  désignerai  par  a,  sera,  selon  ce 
qui  a  été  dit  §  (  r  1),  donnée  par  l'équation 

a  t 


d'où 


a  =  (* 


(32) 


Cette  distance  a  représente  un  intervalle  de  OO";  on  la  di- 
visera donc  en  un  nombre  entier  de  parties,  comme,  par 
exemple,  9  ou  18,  etc.;  ces  parties  correspondront  alors  à  des  in- 
tervalles de  10"  ou  5".  On  retranchera  ensuite  de  10,  les  I.  cos  des 
angles  correspondants  à  chaque  point  de  la  division. 

M'' 
On  calculera  ensuite  la  valeur  de  —,  et  en  multipliant  chacune 

des  quantités  obtenues  précédemment  par  cette  dernière,  on  aura 
la  valeur  des  ordonnées  qui  répondent  aux  abscisses  marquées  par 
les  points  de  division.  La  position  S  du  centre,  de  courbure  au 
sommet  s'obtiendra  en  portant  la  distance  ."-'  de  0  vers  Y. 

§  XIII.  —  S'il  s'agit  simplement  de  tracer  l'épure  indiquée  §  X , 
et  pour  laquelle  la  grandeur  de  «.'  est  indifférente,  on  posera  —  =  i , 
ce  qui  réduira  la  valeur  de  y  à 


y=  10  —  1. 


(33) 


I.  cos  —, 


10 


ou  bien 


Dans  ce  cas,  la  valeur  de. a  sera,  d'après  (32),  ^ale  à  -^  •/;  en 

effectuant  le  calcul,  on  trouve  pour  cette  valeur  de  a,  le  nombre 
0,65178  76... 

Après  avoir  porté  la  longueur  représentée  par  ce  nombre,  à,par- 
tir  de  l'origine,  sur  l'axe  des  .r,  et  l'avoir  divisée  en  parties  égales, 
comme  ci-dessus,  on  écrira  les  nombres  de  degrés  correspondants. 
La  valeur  de  l'ordonnée  s'exprimera  par  1 0,  moins  le  1.  cos  de  ce 
nombre  de  degrés;  on  pourra  éviter  de  faire  la  soustraction,  en 
traçant  une  droite  MM'  parallèle  à  l'axe  des  a-,  à  la  distance 
OjW=1,  et  portant,  à  partir  de  cette  droite  vers  l'origine,  la  partie 
décimale  du  l.  cos,  lorsque  la  caractéristique  sera  9.  Si  elle  était  8, 
on  ferait  la  même  opération ,  en  comptant  les  distances  à  partir 
d'une  droite  située  à  la  distance  2,  et  ainsi  de  suite. 

On  fixera  la  position  du  centre  de  courbure  du  sommet  en  por- 
tant, dans  ce  cas-ci,  la  valeur 

V  =0,  43429448... 
de  0  vers  1'. 

Je  rapporte  ici  les  valeurs  des  1.  cos  de  10°  en  10°,  telles  que  les 
donnent  les  tables. 


•=  10 


l.  cos  ■ 


31 


X 


Ici  l'angle  -,  estexprimé  en  rapport  d'arc  au  rayon  ;  pour  trou- 

X 

ver  le  I.  cos  dans  les  tables,  il  restera  donc  à  exprimer  -;  en  de- 

u. 

grés,  ce  qui  se  fera  en  écrivant 

Ix  I80o\ 
1.  cos  \  — 


NOMBRE 

NOMBRE 

de 

L.  COSINUS. 

de 

L.  r.OSINDS. 

DEGRÉS. 

DEGRÉS. 

0 

10, 

50 

9,80807 

10 

9,99335 

60 

9,69897 

20 

9.97299 

70 

9,53405 

30 

9,93753 

80 

9.23967 

AO 

9,88425            i 

i 

90 

—  Infini. 

7J 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


n 


La  courbe,  Fig.  5,  eàt  tracée  par  la  simple  application  de  ces 

valeurs  (l). 

§  XIV.  Pour  tracer  actuellement  les  courbes  intrados  et  ex- 
trados, il  fautconstruire  les  normalesaux  divers  points  de  la  courbe. 

Pour  cela,  traçons  de  part  et  d'autre  de  l'axe  des  y,  un  quart  de 
cercle,  du  point  S  comme  centre  et  avec  [/.'  pour  rayon;  la  longueur 

du  quart  de  circonférence  OR  est  égale  à  ya' ,   ou   à  la  droite 

OA=a,  équation  (32). 

Divisons  en  outre  ce  quart  de  circonférence  de  la  même  manière 
que  nous  avons  divisé  OA,  et  joignons  les  points  de  division  avec 
le  centre.  La  droite  divisée  OA  pourra  être  considérée  comme  le 
développement  de  l'arc  divisé  0  R. 

Cela  posé,  proposons-nous  de  mener  une  normale  en  un  point  N 
de  la  courbe;  nous  mesurerons  sur  l'arc  OiV,  une  longueur  OF 
égale  à  l'abscisse  OP  du  point  N.  Cette  mesure  sera  très-facile  à 
prendre  au  moyen  des  divisions  marquées  préalablement.  Je  dis 
maintenant  que  si  l'on  joint  PS  et  qu'on  mène  par  le  point  N  une 
parallèle  à  P'S,  cette  parallèle  sera  la  normale  qu'il  s'agissait  de 
tracer.  Pour  le  prouver,  nous  ferons  observer  que. l'angle  de  la  nor- 
male avec  l'axe  des  y,  est  précisément  égal  à  l'angle  *  de  la  tan- 
gente avec  l'axe  des  œ,  ce  qu'il  est  facile  de  voir  :  or,  d'après  la 
première  équation  (l9),  on  a 


tang  «•  =  tang 


d'où 


^■] 


X 


(35 


d'un  autre  côté,  on  a 


Soit  [Fig.  6)  ime  normale  l  E  menée  par  un  point  G  de  la 
courbe,  et  construite  par  la  méthode  précédente  ;  soient,  *■  le  point 
milieu  de  l'épaisseur  de  la  voûte,  E  un  point  de  Vextrado*,  /un 
point  de  {'intrados.  Nous  avons 

kT^YÏ  =  'it,i  =  ~KG, 

GlË=\t-n,  «7=;i-|-j, 

et  en  prenant  les  valeurs  (21)  et  (27)  de  «  et  de  *, 


CE 


X 

cot  — 


cot 


cette  expression  et  celle  de  67 ,  à  cause  de  a  =  — r ,  deviennent 


GE 


COS a  '  COâ  » 


cas  et 
Si  nous  faisons  pour  abréger 


''=tc(<  -:-f  ).   '.=îf(>  +î-^).  («•) 


il  viendra 


GE= 


Gl 


c 

COI  % 


!3T) 


^o«,       OP'       OP        X 
anale  OSP  =  — ,-  =  --—="7  > 

|A  ,7.  Ji. 

donc,  en  vertu  de  l'équation  précédente, 
OSP  =<^; 
donc  la  droite  PS  fait  avec  Y  le  même  angle  que  la  normale,  ou, 
en  d'autres  termes,  la  normale  au  point  N  est  parallèle  à  P'  S.  Il 
suit  de  là  que,  pour  mener  des  normales  par  les  points  I,  2,  3,  4, 
ô,  6,  7,  8  de  la  courbe,  il  suffira  de  mener  par  ces  points  des  paral- 
lèles aux  rayons  de  l'arc  OR,  qui  aboutissent  aux  divisions  10°, 
20°,  30°,  etc. 

§  XV.  Construisons  maintenant  les  courbes  extrados  et  intra- 
dos. 


(1)  L'épure  ci-dessus  peut  encore  être  plus  facilement  tracée  au  moyen  de  la 
règle  à  calcul. 

L'une  des  échelles  divisées  qui  se  trouvent  au  dos  de  la  réglette, l'échelle  dite 
des  sinus,  donne,  pour  la  distance  du  trait  correspondant  à  90",  à  celui  marqué 
par  un  autre  nombre  de  degrés,  une  longueur  égale  au  I.  cosecant»  de  ce  der- 
nier, multiplié  par  l'unité  linéaire  de  la  reff/e.  Or,  les  1.  cose'c.  sont. égaux  aux 
I.  sec.  des  <;onipléments,  ou  à  —  1.  cos.  Si  l'on  prend  donc  pour  rayon  les 
0,43429  de  l'unité  linéaire  de  la  régie  à  calcul,  et  qu'on  trace  le  quart  de  cercle 
ci-dessus  et  son  développement,  en  changeant  seulement  le  sens  de  la  graduation, 
c'est-à-dire  en  écrivant  90»,  80°,  70°...  10», 0°,  au  lieu  de  0°,  10°...  70», 80°,  90°, 
on  n'aura  qu'à  prendre  pour  ordonnées  correspondantes  à  ces  points  de  divi- 
sion, les  longueurs  comprises  sur  la  réglette  entre  90»  et  les  nombres  de  degrés 
de  cette  nouvelle  graduation. 

Ainsi,  les  régies  à  calctil  de  26  centimètres,  fabriquées  par  M.  Gravet,  suc- 
ces.scur  de  Lenoir,  et  qui  portent  le  nom  de  ce  dernier,  sont  construites  avec 
une  unité  linéaire  égale  à  12':'n^5;  d'où  résulte  que,  pour  construire  l'épure  avec 
ces  règles,  il  faut  prendre  un  rayon  égal  à  0,43429.12':°',  5,  ou  environ  5^,429. 


cas  a  co$  <*■ 

Pour  construire  ces  quantités,  menons  l'ordonnée  du  point  G,  et 

prenons  CL  =-  r.,  G  L  —  r^,  puis  menons  par  L  et  L  des  paral- 
lèles à  l'axe  des  .r;  je  dis  que  les  parallèles  rencontreront  la  normale 
aux  points  E  et  /,  et  détermineront  ainsi  un  point  de  i'exiradotet 
de  Vintrados. 

En  effet,  la  normale  faisant  l'angle  »  avec  l'axe  des  y,  l'angle 
L  G  £  de  la  normale ,  avec  une  parallèle  à  Y',  et  son  opposé,  sont 
égaux  a  »,  et  les  deux  triangles  rectangles  dont  ils  font  partie 
donnent 

Gl    ^r^       GL' 


GE  = 


Gl 


eos* 


COS'' 

ce  qui  vérifie  les  équations  (37). 

Donc,  pour  tracer  Ve.rlrados  et  ïiniradot,  après  (ju  ou  aura 
construit  les  normalesaux  divers  points,  par  la  méthode  du  §  XIV, 
il  faudra  calculer  les  valeurs  de  m  et  n,  par  les  équations  (37),  et 
porter  ces  quantités  sur  l'ordonnée  de  chacun  des  points  de  la 
courbe,  en  dessus  et  en  dessous,  à  partir  de  ces  points,  puis  mener 
des  parallèles  à  l'axe  des  .r,  par  les  points  ainsi  déterminés.  Ces  pa- 
rallèles couperont  les  normales  en  des  points  appartenant  à  l'extra- 
dos et  à  Vintrados. 

Second  Phobléme. 

Etablissement  d'une  voûte  non  chargée,  devant  recouvrir  un  espace 
d'une  largeur  donnée. 

§  XVI.  —  S'il  fallait  en  toute  rigueur  résoudre  cette  question, 
voici  comment  on  procéderait  : 
Soient  g  [Fig.  l)  la  demi-ouverture  donnée  de  la  voûte; 

f,  la  flèche  inconnue  R  D  ; 

c,  l'épaisseur  donnée  de  la  voûte  au  sommet. 

On  calculera  d'abord  la  distance  0/)  =  ti,,  équation  (37),  au 
moyen  de  la  2<"  équation  (30)  ;  puis  on  exprimera  que  la  courbe 
passe  par  le  pointai',  en  mettant  ses  coordonnées  dans  la  2*  équa- 
tion (19). 


73 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


n 


Calculons  donc  ces  coordonnées  : 

Je  mène  par  le  point  ilf  une  parallèle  à  l'axe  des  x  ;  puis  obser- 
vant, d'après  le  §  XV,  que  les  projections  verticales  GL'{Fig.(>), 
des  distances  de  la  courbe  des  centres  de  gravité  à  Vintrados,  sont 
constantes  et  égales  à  i, ,  j'en  conclus  j4  /*=»),,  ou  B  F  =  «,  = 
OD  ;  de  là  résulte,  pour  la  valeur  de  l'ordonnée  de  M, 

ij=l)F=JD^f; 
d'un  autre  côté,  on  a 

a:'=FW=:,g+FM, 
et  à  cause  de  i*  ^  ilf  =  a, 

x  =  g-{-AP  tang  «  =  3  -j-r^,  tang  »; 

or,  l'angle  a,  d'après  (35l,  a  aussi  pour  valeur  — ^  ,  donc,  d'après 

l'équation  (21  his),  e  étant  la  base  des  log.  népériens,  on  a 


22/ 


(39 


—  1. 


Mettant  dans  l'équation  (l9)  cette  valeur  de  x,  il  vient  pour  la  va- 
leur de  y  ou  f 


— ;  =  log  COS    \  ; / 


40 


Telle  est  l'équation  qu'il  faudrait  résoudre  par  rapport  à  f.  On 
voit  qu'il  est  impossible  de  le  faire  autrement  que  par  tâtonnement, 
à  cause  de  la  présence  de  f  comme  exposant  sous  le  radical  ;  mais 
le  terme  en  n,  peut  être  négligé  dans  une  première  approximation  ; 
et  si  l'on  substitue  la  valeur  trouvée  de  f  dans  l'exponentielle,  la 
•2°  valeur  approchée  sera  toujours  assez  exacte. 

On  peut  remarquer  que  la  valeur  dé  g  peut  rendre  le  cos  négatif , 
d'où  résulterait  une  valeur  imaginaire  de  f.  Il  serait  impossible, 
en  effet  (Voy.  Fig.  •>),  de  recouvrir  un  espace  dont  la  demi-largeur 

excéderait  —  i^',  en  employant  notre  courbe,  et  n'ayant  pas  égard 

aux  épaisseurs. 

Si  on  donnait  à  Ja  fois  la  demi-ouverture  g  ef  la  flèche  f,  il  fau- 
drait tirer  de  l'équation  (40)  la  valeuv  de  i^-';  et  à  cause  que  «,  est 
une  fonction  de  [j.,  équation  (36),  et  par  suite  de  f^',  par  l'équation 
(24),  de  laquelle  on  tire 


,^,{;+W<-4) 


il  y  aurait  à  mettre  pour  yi,  sa  valeur  en  fonction  de  (a'  ;  or,  on  pourra 
se  contenter  de  mettre  jji'pour  ja  dans  1^,,  ce  qui  donnera  ici  une 
exactitude  suffisante.  De  cette  manière,  l'équation  (40)  devien- 
drait 


f 


-}-  log  cos 


.         _        \ ^ /=  0.141] 

[A  ^  p.  ^ 

Ayant  résolu  cette  équation  par  tâtonnement,  l'expression  (28) 
donnerait  la  valeur  de  t  en  fonction  de  jx';  on  connaîtrait  ainsi  la 
valeur  de  la  pression  par  unité  de  surface,  qui  aurait  lieu  dans 
toute  l'étendue  de  la  voûte  ;  et  si  elle  se  trouvait  inférieure  à  la  ré- 
sistance de  la  matière  employée,  on  pourrait  établir  la  construc- 
tion au  moyen  de  la  valeur  trouvée  de  fi',  en  procédant  cemme  il 
est  indiqué  §  XII,  XIV  et  XV. 


Résolutian  graphique  des  questions  précédentes,  au  moyen  de  l'épure 
de  la  Fig.  (5). 

§  XVII.  —  On  supposera,  pour  plus  de  simplicité,  que  la  gran- 
deur de  la  demi-ouverture  et  celle  de  la  flèche  (si  celle-ci  est  don- 
née) ne  sont  pas  fixées  d'une  manière  si  absolue,  qu'on  ne  puisse 
diminuer  l'une  et  l'autre  d'une  fraction  de  la  demi-épaisseur  de  la 
voûte. 

Si  la  demi-ouverture  est  donnée,  et  si  l'on  se  donne  également 
le  poids  et  la  résistance  de  la  pierre ,  (a'  sera  connu  par  l'équa- 
tion (28),  tandis  que  l'épaisseur  c,  au  sommet,  restera  arbitraire. 

Construisons  une  échelle  telle  que  la  valeur  trouvée  de  y-'  soit 

représentée  par  OS  de  notre  épure  ;  mesurons  à  cette  échelle  une 
longueur  égale  à  la  demi-ouverture  g  donnée,  augmentée  de  la 
demi-épaisseur  de  la  voûte  ou  environ,  et  menons  une  parallèle  à 
l'axe  des  y,  à  cette  distance  ;  elle  rencontrera  la  courbe  en  un 
certain  point,  et  l'ordonnée  de  ce  point  sera  la  flèche  de  la  voûte, 
augmentée  d'environ  sa  demi-épaisseur. 

On  aura  ainsi  la  portion  de  courbe  qu'on  devra  employer. 

Au  moyen  de  l'épaisseur  donnée,  on  pourrait  construire  l'intrados 
sur  l'épure,  et  la  parallèle  à  l'axe  des  y  déterminerait,  par  son  in- 
tersection avec  l'intrados,  la  portion  de  courbe  qu'on  aurait  à  ap- 
pliquer. 

Cette  solution  exacte  nécessite  la  construction  de  l'intrados, 
tandis  que  la  précédente,  qui  n'est  qu'approchée,  ne  nécessite  que 
la  construction  d'une  ligne  droite. 

Dans  l'un  et  l'autre  cas,  les  dimensions  trouvées  doivent  être 
mesurées  à  l'échelle  qui  donne  OS  =  "•'. 

§  XVIII.  Étant  donnés  fetg,  trouver  approximativement  (Ji'par 
un  tracé. 

Je  reproduis  dans  la  Fig.  (8)  l'épure  de  la  Fig.  (5).  On  prendra 

parallèlement  à  OF  et  OX,  deux  longueurs  OF,  FH,  proportion- 
nelles à  fetg,  puis  on  joindra  OH. 

Par  le  point  de  rencontre  M  avec  la  courbe,  ou  mènera  parallè- 
lement à  X,  la  droite  MP,  qui  représentera  la  demi-ouverture  g, 

tandis  que  OP  représentera  la  flèche  f.  En  effet,  on  a  la  propor- 
tion 


MP 
OP 

FH 
OF 

9 

r 

or 

dans  tous  les 

cas,  OS 

représente 

fji';  on  aura 

donc 

o~s 

f 
OP 

_    9    , 
MP 

d'où 

, OS os 

OP       ^  MP 

Si  on  veut  mesurer  ja'  à  l'échelle  qui  donne  OF  =  f,  FH  =  g, 

on  prendra  sur  OH,  0L=  OF,  et  on  joindra  P  eti-;  puis,  me- 
nant par  S  une  parallèle  S  M',  à  PL,  on  aura 


OS 
OP 


OJ/' 
ÔL 


OM' 
OF 


OM 

f   ' 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


76 


Donc,  à  cause  des  équations  précédentes,  f^'  =  OM';  ;/  est  ainsi  me- 
suré à  la  même  éclielle  que/",  lorsqu'on  fait  0F=  f. 

On  n'a  donc,  pour  cette  solution,  qu'un  très-petit  nombre  de 
lignes  à  tracer.  On  discutera,  comme  au  §  XVI,  la  possibilité  d'ap- 
pliquer cette  valeur  de  "•'  ;  et  si  on  en  veut  avoir  une  valeur  plus  ap- 
prochée, il  faudra  avoir  égard  à  l'épaisseur  de  la  voûte  ou  tracer 
la  courbé  d'intrados  au  moyen  de  l'épaisseur  à  la  clef  supposée 

donnée,  en  opérant  à  l'échelle  qui  donne  OP  =  f  et  PM  ==  g. 

On  recommencera  alors  le  tracé,  et  on  déterminera  le  point  M,  en 
mesurant  f  à  partir  de  Vinlrmlos,  et  prenant  ce  point  31  sur  V in- 
trados; on  tirera  de  là  la  valeur  de  «•',  qui  convient  à  la  construc 
tion. 


ï'^  siu  6  —  ri  sin  ')'  =  », 


ou 


Tboisième  Application. 

§  XIX.  —  La  courbe  dont  nous  nous  occupons  peut  encore  être 
utilement  employée  pour  la  construction  d'une  voûte  qui  devrait 
recevoir  l'action  d'une  charge  distribuée  uniformément  sur  sa  lon- 
gueur, et  agissant  sur  une  étendue  déterminée. 

Par  exemple,  la  voûte  devrait  servir  de  base  a  un  mur  ou  à  une 
•    autre  voûte,  comme  l'indiquent  les  Fig.  (9)  et  (lO). 

Le  casde  la  Fig.  (lo)  renferme  évidemment  celui  de  la  Fig.  (9)  ; 
nous  allons  indiquer  comment  notre  courbe  s'applique  à  ce  dernier. 

Nous  supposons  données,  Fig.  (11),  les  positions  des  points  Q, 
Q'  et  F,  puis  la  direction  et  l'intensité  de  la  résultante  R,  dont  les 
composantes  sont  :  la  poussée  exercée  normalement  sur  le  vous- 
soir  VC  par  la  charge  supérieure,  et  le  poids  inconnu  de  ce  vous- 
soir.  Toutefois,  ce  dernier  poids  pourra  toujours  être  supposé 
connu  avec  une  exactitude  suffisante,  à  cause  que  la  résultante  R 
sera  peu  influencée  par  l'erreur  qu'on  pourrait  commettre  en  fai- 
sant une  hypothèse  sur  ce  poids.  Le  point  F  est  pris  sur  la  direc- 
tion de  la  résultante  R. 

Soient  :  P  l'angle  de  R  avec  un  axe  horizontal  ;  a  et  a'  les  angles 
des  pressions  Jet  T  qui  ont  lieu  sur  les  faces  ^  et  ^4'  du  voussoir 
VC,  avec  le  même  axe  (tous  ces  angles  étant  comptés  dans  le  même 
sens,  comme  l'indique  la  figure). 

Nous  allons  étabhr  les  équations  d'équilibre  de  ce  voussoir,  sou- 
mis aux  trois  forces  R,  Jet  F,  situées  dans  le  même  plan. 

En  projetant  ces  forces  sur  les  axes  horizontal  et  vertical, 
Fig.  (12),  et  égalant  à  zéro  les  sommes  des  projections,  il  vient 

R  cos  f,—  TcOtr,.  —  T  COS  a  =  o. 

R  sin  p  —  T  sin".  —  2"  sin  a'  = 

Il  reste  à  égaler  à  zéro  la  somme  des  moments  autour  d'un  axe 
perpendiculaire  au  plan  XY. 

Pour  plus  desimplicitédansles  calculs,  et  pour  réaliser  de  bonnes 
conditions  de  construction,  nous  prendrons  les  points  d'applica- 
tion des  forces  Tet  T,  sur  une  perpendiculaire  à  la  direction  de  R, 
et  à  égale  distance  de  part  et  d'autre  de  cette  direction. 

Désignons  par  z  la  distance  inconnue  CFde  cette  perpendiculaire 
au  point  F,  et  soit  l  la  distance  de  A  et  A'  au  point  C,  qu'on  pourra 
prendre  égale  à  la  demi-épaisseur  ou  à  peu  près,  de  la  voûte  ou  du 
mur  qui  charge  le  voussoir  F.  Nous  prendrons  pour  axe  des  mo- 
ments, afin  de  ne  pas  introduire  la  force  R,  la  perpendiculaire  au 
plan  des  œ,  y,  menée  par  le  point  C.  Abaissons  les  perpendiculaires 
t  P  et  CF  sur  Tet  T;  soient  désignés  par  e  et  e',  les  angles  des 
droites  l  avec  J  et  J',  il  viendra,  en  égalant  à  zéro  la  somme  des 
moments  de  ses  forces 


::) 


{41  bit] 


T  sin  <!--=  r  sin  6'. 
Or,  les  triangles  opposés  TVV,  AVC  donnent,  en  éualant  la 
somme  des  angles  non  opposés 

90"  -)-»  =  180°  —  ^  4-  a. 
Les  triangles  opposés  TU  V,  A' U C ,  donoeut  de  même 

'JO'-f-  6'=  180° —  a'-f  f». 

On  tire  de  ces  équations ,  après  avoir  retranché  90'  des  deux 
membres  de  chacune  d'elles 

lin  6=  «»  (  ^  —  «), 
tin  »'=  co»  (  p  —  «'). 
En  substituant  ces  valeurs  dans  l'équation  des  moments,  il 
vient 

Teotifi  —  «)=  rco«(p  — a"i. 
Cette  dernière  équation,  combinée  avec  les  équations  [a\],  four- 
nit un  résultat  éminemment  simple  :  en  effet,  passons  les  termes 
en  Jet  T  dans  les  seconds  membres,  et  divisons  ces  deux  équa- 
tions membre  à  membre,  R  disparaîtra ,  et  il  viendra 

sin  p  Ttin  a.-\-  T  tin  «" 

rot^         T  ron  «  -f  T  cot  a'' 
d'où,  en  chassant  les  dénominateurs 

T  tin  p  co«  «  -|-  r  tin  p  cot  «'  =  Ttin  «  co#  p  -i-  T  tin  «  cot  <* , 
en  passant  les  termes  en  Tdans  le  premier  membre  et  ceux  en  T 
dans  le  second,  puis  ayant  égard  à  la  formule  du  sinus  de  la  diffé- 
rence de  deux  angles,  on  aura 

T tin\^  —  n)  —  —  T  lin  (&  — «V 
En  divisant  membre  a  membre  cette  équation  et  l'équation  des 
moments,  T  et  T' disparaîtront,  et  l'on  aura 

long  (  p  —  a  )  =  —  tang  (  p  —  «'  ; 
d'où  l'on  tire 

P  — »=—  (p  — «')   +!»« 

OU  bien 

Nous  remplacerons  l'équation  des  moments  par  cette  dernière, 
qui  est  beaucoup  plus  simple.  Les  conditions  d'équilibre  du  vous- 
soir F  se  trouvent  donc  maintenant  exprimées  par  le  système  des 
équations  (41)  et  (42). 

Les  pressions  7' et  7"  peuvent  être  éliminées  dese(juatious(4l), 
en  observant  qu'elles  devront  être  produites  par  l'action  de  vous- 
soirs  appartenant  a  des  arcs  de  voûte  terminés  en  A  et  A',  lesquels 
voussoirs  ont  des  épaisseurs  i  et  i,  déterminées  par  les  relations 

si  l'on  fait  pour  abréger 


R'  = 


R 


les  éq.  (41  )  donneront 

/î'  f  o»  p  =  t  co»  »  -j-  t'  cot  %, 
R'  sin  p  =  I  «m  a  -(-  t'fina'. 
Or,  on  aura,  pour  les  arcs  dontil  s'agit,  d  après  les  équations  (37), 
et  en  observant  qu'ici  co»  »'  est  négatif  (  1  ) 

t  COI  a.  =  c  ,         t    cot  a'  ^=  —  c. 

En  substituant  ces  valeurs  et  reprenant  l'équation  (42),  on  don- 


(1)  Les  épaisseurs  de  la  voûte  s'oblenaiit  en  fonclioii  de  l'épaisseur  au  som- 
met, e  et  c'  désignent  cesépaisseurs,  c'est-à-dire  celles  qui  auraient  lieu  au  som- 
met de  voûtes  non  chargées,  ayant  aux  points  A  et  4'  les  épaisseurs  qui  con- 
viennent à  ces  points  dans  le  cas  qui  nous  occupe. 


77 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


78 


liera  la  forme  suivante  aux  trois  équations  d'équilibre  du  vous- 
soir  V: 


R'  cos  p  =  c  —  c  \ 

R'  sin  p  :^  c  lang  »  —  c  tamj  »•'      ; 


(43) 


§  XX.  —  Il  s'agit  maintenant  de  faire  passer  par  les  points 
A,  A,,  A',A\,  des  arcs  de  notre  couri)e,  équation  (19),  en  satis- 
l'aisaut  à  la  condition  que  les  pressions  extrêmes  en  A  et  A'  aient 
les  intensités  et  les  directions  déterminées  parles  équations  (41)  Us 
et  (42). 

L'équation  (19)  étant  celle  de  la  courbe  rapportée  à  son  sommet, 
pris  pour  origine  des  coordonnées,  devra  être  transformée  :  en  dé- 
signant généralement  par  j)  eXq  les  abscisse  et  ordonnée  du  som- 
met, on  aura,  pour  l'équation  rapportée  aux  mêmes  axes  que 
p  et  g 

~ — ~=  —  iog  cos  { -'- 

ou  bien 

y— 9 


cos 


(V 


(44) 


et 


dy_ 

dx 


=  ta 


"9  ( 


■q) 


(45) 


Nous  désignerons  par  a,  6,  a',  b',  les  abscisses  et  les  ordonnées 
des  sommets  0  et  0'  des  courbes  passant  par  A  A , ,  A'A' ,,  rappor- 
tées aux  axes  JT  et  F  qui  se  coupent  en  F. 

Soient  x,,  ?/„,  x\,  y\,  les  coordonnées  des  points  A  et  A' :  nous 
allons  d'abord  calculer  ces  quantités  ;  or,  ces  coordonnées  sont  les 
projections  des  contours  VCA,  VCA',  sur  les  axes  correspondants; 
il  vient  donc,  à  cause  de  F  C  =  z,  et  de  ^  C  =  .4'  C  =  5  : 
x^  =  z  co*  p  -|-  Ç  sin  p , 

y„   =  2  sin  p  —  5  cos  p , 

x\  =  z  cos  p  —  5  sin  p , 

>j\  =  zsin  p  4-  ?  C0-'  P- 
Soient  :  x,,  y,,  les  coordonnées  du  point  vl,;  et  a  ,,  l'angle  de 
la  tangente  à  la  courbe  en  ce  point.  Pour  calculer  ces  coordon- 
nées, nous  rappellerons  seulement,  d'après  les  équations  (36)  et 

(37),  que  la  projection  verticale  P  Q,  de  A,Q,h  pour  valeur 

'^'T'i'  +  Tj) 

La  projection  horizontale  PA,  aura  pour  valeur  PQtang  PQA , , 
ou  PQ  tang  a, ,  ce  qui  donne 


PA. 


1   _c_ 

6         fA 


tang  a, 


(46) 


on  aura  ainsi,  en  employant  les  lettres  indiquées  sur  la  Fig.   (Il 

Soient  x',,  y\ ,  les  coordonnées  de  A',  ;  puis  a', ,  l'angle  de  la  tan- 
gente en  ce  point,  avec  l'axe  X,  angle  qu'on  supposera  obtus. 


comme  l'indique  la  Figure  ;  on  aura,  en  remarquant  que  tang  a,  est 
négative,  et  employant  les  lettres  de  la  Fig.  (il) 

147) 


Au  moyen  de  ces  valeurs,  il  sera  facile  d'exprimer  qu'un  arc  de 
notre  courbe  passe  par  les  points  A,  A,,  et  qu'un  autre  passe  par 
les  points  A',A^.  Pour  cela,  nous  prendrons  l'équation  de  la 
courbe,  sous  la  forme  donnée  par  la  2«  équation  (44). 

En  mettant  successivement  dans  cette  équation  les  valeurs  cor- 
respondantes de  a;  et  y  pour  les  points  A,  A,,  puis,  pour  p  et  q,  les 
coordonnées  a  et  6  du  sommet  0,  d'une  part  ;  en  mettant,  d'autre 
part,  les  valeurs  correspondantes  de  a;  et  y  pour  les  points  A',  A', , 
et  à  la  place  de  j)  et  g  les  coordonnées  a',  b',  du  sommet  0',  on  aura 
les  quatre  équations  suivantes 


cos 


cos 


b  —  yo 


b~y. 


(a — x\  \ 


-yo 


(48) 


Avant  de  transformer  ces  formules,  nous  ajouterons  les  valeurs 
de  tang  a,  tang  a,,  tang  a',  tang  «',,  qui  entrent  dans  les  équa- 
tions (43)  et  (46).  En  les  tirant  de  la  3»  équation  (44),  et  prenant 
les  signes  qui  se  rapportent  au  cas  de  la  Fig.  (l  l),  ces  valeurs  sont  (  i  ) 

2  [y-b]    \ 


tang  %  =^ 


tang  o.'=-  — 


l,tango.,= 


2  iy'-b') 


k49) 


— tftanga.' 

Actuellement  on  remarquera  que  les  équations  (43),  (45),  (46), 
(47),  (48)  et  (49)  sont  au  nombre  de  19,  et  contiennent  un  nombre 
d'inconnues  précisément  égal  ;  ce  sont  :  loles  quatre  coordonnées 
des  deux  sommets  ;  2°  les  deux  épaisseurs  en  ces  sommets  ;  3°  les 
huit  coordonnées  des  quatre  extrémités  des  deux  arcs  de  voûte  ; 
4°  les  quatre  tangentes  relatives  à  ces  extrémités  ;  5°  enfin  la  dis- 
tance z  =  VC. 

Le  problème  est  donc  mis  en  équation,  et  il  n'y  a  plus  qu'à  ré- 
soudre le  système  des  19  équations  précédentes,  par  approxima- 
tion, soit  au  moyen  du  calcul  directement,  soit  en  s'aidantde  con- 
structions graphiques. 

Résolution  du  système  des  équations  précédentes  par  des  approxi- 
mations successives. 

§  XXL  —  Pour  rendre  la  première  approximation  plus  exacte, 
on  pourra  faire  une  hypothèse  sur  les  valeurs  dePA,,  PQ,  P'A\, 
P'  Q\  hypothèse  qui  sera  suggérée  par  l'habitude  qu'onaura  des  con- 
structions, autrement  on  pourrait  la  négliger.  De  plus,  on  observera 
que  si  le  voussoir  F  se  réduisait  à  un  point,  les  trois  forces  T,  T.  R 
passant  par  ce  point,  il  n'y  aurait  plus  que  deux  conditions  d'équi- 
libre à  remplir  :  ce  sont  celles  indiquées  par  les  deux  premières 
équations  (43);  dans  ce  cas,  on  ferait  donc  abstraction  dela3«.  On 
se  placera  dans  des  conditions  peu  différentes,  en  faisant  une  hv- 


(1)  Il  sera  mieux,  pour  les  signes,  d'employer  la  valeur  (5î)  ci-après. 


79 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLiCS. 


80 


pothèse  convenable  sur  la  valeur  de  z,  après  avoir  pris  pour  l  la 
demi-épaisseur  de  la  voûte  qui  ciiarge  le  voussoir  V.  Or,  comme  il 
ne  s'agit  ici  que  d'une  approximation,  11  sera  inutile  de  se  trop 
préoccuper  de  cette  valeur  hypothétique  de  z. 

Ceci  posé,  nous  allons  diviser  la  !■■=  équation  (48)  par  la  3",  et 
nous  aurons 

y.  — y» 


eos\ 


et  en  développant 


COS  —y-  COS  — f-  -f-  sin 
(1  [i. 


=:  e 


-  stn 


y,— y. 


a  œ,     ,       .     a      .      X, 

cas  —r  cas  —, — \-  sin  -y  stn  — - 

(A  (A  JA  [A 


ou  bien 


W  X  Or 

COS — °—  -f-  S"»  -^  '""S  — r 
y- K^ V_ 

^1     ,     .      ^1  <* 

COS  —7-  4-  stn  —7—  tang  — 7- 

M-  a  "• 


y, —y. 


d'où  l'on  tire  , 


y—Vo 


e 
a 

u,* 

X,                   x^ 
COS  ; COS  — p- 

U.                                (A 

tang  y  ~ 

sin 

X^ 

y— yo 

".'              .        X, 

—  e                Stn  — - 

u. 

f50l 


ou  cette  autre  valeur  plus  symétrique 

y.  Vo 


[A  X, 

e       COS  — . 


-  e  COS  — r 


tang  — p  =-- 


(5o)  bis. 


y,^  y, 

V-'      .      X,  u!    .      xo 

e        stn  — ; e        sin  — p- 

|A  jA 

Nous  joindrons  à  cette  équation  la  seconde  équation  (48)  résolue 
par  rapport  à  6,  et  il  viendra 


* — y.       .  /  a — ^.  \ 

,~^  =  lOg  COS   I ,-!-  l. 


(51) 


En  traitant  de  la  même  manière  les  deux  autres  équations  (48), 
on  aura  les  deux  équations  suivantes 


valeur  du  2'  membre).  La  valeur  de  a  étant  ainsi  déterminée,  on 
calculera  i  au  moyen  de  l'équation  (51),  en  prenant  les  précau- 
tions indiquées  relativement  aux  angles  et  aux  logarithmes  népé- 
riens. 

Tout  ce  qui  vient  d'être  dit  sur  le  calcul  de  a  et  b,  au  moyen  des 
formules  (50)  et  (51),  s'appliquera  au  calcul  de  a'  et  b'  par  les  for- 
mules (52). 

On  pourrait  calculera,  a,  etc.,  par  les  formules  (49),  que  j'ai  pré- 
sentées sous  cette  forme,  seulement  à  cause  de  l'élimination  qu'on 
eût  pu  se  proposer  de  faire  ;  mais,  outre  que  ces  formules  laissent 
les  signes  des  tangentes  indéterminées,  il  sera  plus  simple  et  plus 
sûr,  pour  les  signes,  d'écrire  d'après  la  3«  équation  (44) 
«•„  —  a     ,  ,         x\  —  a' 

~        f 

*  ,  =  ; h  m  r .    ' 


-\-  m-a. 


'53; 


X. 


+    IW  7t, 


54) 


COS 


—  e 


COS 


tang 


y  o 


sin  — j- e 


sm 


(52) 


V —  v' . 


log  COS 


a' — x , 


Disons  maintenant  l'usage  qu'on  devra  faire  de  ces  formules  : 
Ou  calculera  a;„,i/o,x,,  y,,  en  faisant,  sur  les  valeurs  de  leurs  par- 
ties inconnues,  les  hypothèses  indiquées  ci-dessus.  Cela  fait,  l'une 

des  deux  équations  (5o)  donnera  la  valeur  de  -,  ,  par  la  tangente  de 
cette  quantité  (il  va  sans  dire  que  les  tables  donneront  un  nombre 
de  degrés,  qu'il  faudra  multiplier  par  — ^  ,  pour  avoir  la  valeur  du 

a 
rapport  —  ,  qu'on  prendra  positif  ou  négatif,  selon  le  signe  de  la 


Si  quelques-uns  de  ces  angles  sont  négatifs  par  ces  formules,  on 
pourra  leur  ajouter  180»;  l'angle  a  lui-même  pourrait  dépasser 
180°;  il  pourrait  donc  se  faire,  suivant  le  cas,  que  l'on  dût  ajouter 
180°  même  à  un  de  ces  angles,  donne  positif  par  les  formules  pré- 
cédentes. 

Au  moyen  des  valeurs  de  a  et  a,  on  calculerae  et  c'  par  les  deux 

premières  équations  (43) 

R       tin  ft  —  eotfi  tang  a' 

c  = ,--       i 

t  X  tang  a  —  tang  a  f 

R         tin  fi  —  COS  f)  tang  »  i 

t  ).  tang  »  —  tang  a' 

Les  angles»,  a',  etc.,  viennent  d'être  déterminés  s.'iii>ii\<)irigard 
à  la  3'  équation  (43).  qui  lie  ces  angles  a  l'angle  ;'..  Il  est  donc 
probable  que  cette  dernière  équation  ne  sera  pas  satisfaite  par  les 
valeurs  résultant  de  la  première  approximation. 

§  XXIL  Nous  allons  résumer  les  calculs  qui  se  rapportent  a  la 
première  approximation. 

On  formera  les  valeurs  des  huit  coordonnées  au  moyen  des 
équations  (45),  (46)  et  (47),  et  des  hypothèses  indiquées  au  com- 
mencement du  §  précédent  ;  on  calculera  ensuite  a,  b,  a,  b',  par 
les  formules  (5o),  (5l)  et  (52);  puis  les  valeurs  de  a  et  a',  etc.,  par 
les  formules  (53)  ;  enfin  les  valeurs  c  et  c'  seront  fournies  par  les 
équations  (54). 

Ces  calculs  n'offrent  aucune  difficulté. 

On  aura  trouvé  la  solution  du  problème  si  les  valeurs  calculées 
de  a  et  a'  satisfont  à  la  adéquation  (43), 

a  -(-  a'  ==  2  P  ±  mr,  (iS) 

dans  laquelle  m  pourra  être  égal  à  o,  j  ou  —  1.  Maison  ne  rencon- 
trera jamais  juste  par  le  premier  essai.  Il  faudra  donc  recommen- 
cer. Ici  se  présentent  deux  cas  :  ou  bien  les  valeurs  de  r  et  c' qu'on 
aura  calculées  se  rapprocheront  sensiblement  de  celles  qui  résul- 
tent des  hypothèses  faites  primitivement,  ou  bien  elles  s'en  écar- 
teront notablement.  Supposons  que  ce  soit  ce  dernier  cas  qui  ait 
lieu  :  alors  on  se  servira  des  valeurs  calculées  pour  fixer  celles 
des  huit  coordonnées  en  conservant  la  même  valeur  de  z;  on  pour- 
suivra les  calculs,  et  on  devra  trouver  alors  des  valeurs  de  c  et  c 
peu  différentes  de  celles  résultant  du  premier  calcul  ;  mais  l'équa- 
tion (55)  pourra  n'être  pas  satisfaite,  et  on  retombera  daps  le  pre- 
mier cas;  alors  on  procédera  ainsi  qu'il  suit. 

Dans  le  premier  cas,    après    avoir   calculé   la    valeur    de 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


82 


a  4.»  —  2p4;WJiv,  on  fera  varier  z,  et  on  calculera  les  huit 
coordonnées  au  moyen  des  valeurs  de  c,  c,  »,  »',  etc.,  qui  ontservi. 
de  base  aux  calculs  précédents  ;  on  continuera  les  calculs,  et  on 
prendra  la  nouvelle  différence  «  -|"  «  —  "f^^  »»«  ;  si  elle  est  de 
même  sens  que  la  précédente,  il  faudra  recommencer  les  calculs 
en  faisant  varier  z  en  sens  contraire,  et  on  pourra  trouver  une  dif- 
férence de  §ens  contraire  à  la  précédente.  Une  simple  proportion 
suffira  ordinairement  pour  fixer  la  valeur  de  z,  qui  rendra  nulle  la 
différence  dont  il  s'agit,  lorsqu'on  aura  fait  varier  z  de  manière  à 
obtenir  deux  différences  de  signes  contraires;  et  sans  recommencer 
les  calculs  pour  cette  valeur  de  z,  on  pourra  se  contenter  de  sim- 
ples proportions  pour  fixer  les  corrections  à  faire  aux  autres  in- 
connues, en  comparant  leurs  variations  à  celles  de  z. 

§  XXIir.  Indiquons  maintenant  comment  ces  calculs  pourront 
être  remplacés  par  des  constructions. 

La  quantité  u.'  étant  fixée  par  la  nature  des  matériaux  qui  en- 
trent dans  la  construction  des  deux  arcs  de  voûte,,  on  aura  recours 

à  l'épure  du  §  XIII.  On  prendra  la  longueur  OS,  pour  représenter 
la  valeur  de  «•'  qu'on  aura  adoptée,  et  l'on  construira  les  données  de 

la  Fig.  (il)  à  l'échelle  qui  donne  la  longueur  OS,  pour  la  valeur 
de  (a'.  Sur  cette  construction,  on  fixera  à  peu  près  les  positions  des 
points  A,  A^,  A ,A\,  de  la  Fig.  (il),  en  ayant  le  soin  de  prendre 
les  points  A,  A,  sur  une  perpendiculaire  à^la  direction  de  R,  et  à 
une  distance  égale  à  la  demi-épaisseur  de  la  voûte  supérieure 
(Foy.  §  XXI).  (Ce  que  nous  venons  d'indiquer  est  effectué  dans  la 
Fiq.  (14),  que  notis  supposons  rapportée  à  la  même  échelle  que  la 
Fiq.  (13).  Cette  dernière  représente  l'épure  du  §  XIII).  Cela  fait, 
on  joindra  [Fig.  14)  les  points  AçXA^,  puis  les  points  A,  A ^ ,  par 
des  lignes  droites.  Ensuite,  considérant  la  droite  AA  ,,  on  mè- 
nera [l'ig.  13)  une  suite  de  droites  faisant  avec  OS  le  même  angle 
que  celle-ci  fait  avec  FF,  et  du  même  côté;  on  tâchera,  par  des 
tâtonnements  très-courts,  d'en  tracer  une  telle,  que  la  corde  de  l'arc 

qu'elle  interceptera  sur  la  courbe  [Fig.  13)  soit  égale  k  AA^\  on 

déterminera  de  même  une  autre  corde  égale  à  A  A',,  (ces  tracés  sont 
indiqués  dans  la  Fig.  (13)  par  les  mêmes  lettres).  Les  arcs  inter- 
ceptés ainsi  seront  ceux  de  la  courbe,  qui  devront  être  transportés 
parallèlement  en  A, A,,  et^',^',  [Fig.  14).  On  mènera  des  nor- 
males et  ensuite  des  tangentes,  par  le  procédé  du  §  XIV,  aux 
points  A  et  A  [Fig.  13);  les  tangentes  ^T,  A' I"  seront  transpor- 
tées parallèlement  dans  la  Fig.  (14),  et  l'on'mesurera  leurs  angles 
a.  et  a'  avec  l'axe  des  x.  Les  équations  (54)  devront  être  ensuiteap- 
pliquées  au'  calcul  des  épaisseurs  au  sommet  cete',  des  arcs  de 
voûte  passant  par  A,A^,  A,A',;  puis,  au  moyen  de  la  2-^  équation 
(36),  et  par  le  procédé  du  §  XIV,  on  construira  les  points  de  l'in- 
trados qui  correspondent  aux  points  A,  et  A\  de  la  Fig.  (13),  en 
employant  les  épaisseurs  c  pour  le  premier,  et  c'  pour  le  second. 
On  transportera  ces  points  dans  la  Fig.  (14),  de  manière  que,  dans 
cette  Figure  et  la  Fig.  (13),  ils  occupent  les  mêmes  positions  par 
rapport  aux  cordes  ^.4,,  A  A\.  Si  on  avait  bien  choisi  les  posi- 
tions de  A,  et  A,,  les  points  ainsi  transportés  coïncideraient  avec 
ces  derniers;  mais  il  n'en  sera  jamais  exactement  ainsi. 

Dans  un  2<-  tracé,  il  faudra  changer  la  positiondes  points  A,,  A, , 
ainsi  qu'il  va  être  indiqué  ;  ou  mènera  par  Q  et  Q'  des  parallèles 
aux  normales  de  la  F/g.  (13),  menées  par  ^4,  et^',  ;  on  prendra  sur 
ces  normales  des  distances  égales  à  celles  qui  séparent  les  points 
«n/rarfos  ci-dessus,  des  points  correspondants  de  la  courbe.  On  dé- 


terminera ainsi  de  nouvelles  positions  de  A,  etyl',;  puis,  sans 
changer  les  positions  des  points^  et  A,  on  recommencera  tous  les 
tracés  précédents,  et  on  calculera  de  nouvelles  valeurs  de  c  et  e', 
qui  ne  différeront  pas  sensiblement  des  premières.  Il  reste  actuel- 
lement à  déterminer  la  position  du  point  C.  Pour  cela,  on  notera 
la  différence  a  -)-  a'  —  fi  +  mr ,  qui  résulte  du  tracé  précédent,  et 
on  fera  varier  la  position  du  point  C,  dans  un  sens  qu'indiquera 
clairement  le  tracé,  attendu  que  l'équation  des  moments  est  équi- 
valente à  la  condition,  que  les  directions  des  trois  forces  situées 
dans  un  même  plan  se  coupent  en  un  même  point.  On  verra  donc 
bien  facilement  s'il  faut  relever  ou  abaisser  le  point  C,  en  considé- 
rant les  trois  intersections  de  T,  T'  et  R,  qui  devraient  avoir  lieu 
en  un  même  point.  Après  avoir  déplacé  le  point  C,  on  recommen- 
cera les  tracés  et  le  calcul  de  c  et  de  c',  dont  les  valeurs  ne  devront 
pas  sensiblement  différer  des  précédentes.  Il  ne  faudra  généralement 
qu'un  petit  nombre  d'essais  pour  arriver  à  faire  coïncider  les  inter- 
sections de  7',  7^  et  iî,  ou  rendre  nulle  la  différence  a-|-  a.' — p+m^r. 

On  voit  du  reste  que,  s'il  fallait  flxer  dans  la  Fig.  (14)  les 
sommets  des  deux  arcs  de  courbe,  il  suffirait  de  transporter  la 
courbe  de  la  Fig.  (13),  de  manière  à  faire  coïncider,  dans  les  deux 
figures,  les  points  qui  sont  indiqués  par  les  mêmes  lettres. 

Le  problème  se  trouve  donc  actuellement  résolu  d'une  manière 
complète. 

§  XXIV.  Nous  terminerons  ce  que  nous  avions  à  dire  sur  les  dif- 
férentes applications  de  la  courbe  que  nous  venons  d'employer,  en 
ajoutant  que  les  pressions  sur  les  pieds-droits,  aux  naissances  des 
arcs  de  voûte,  ont  pour  valeur  x  e  t,  en  général  ;  or,  t  et  à  sont 
constants,  £  est  l'épaisseur  aux  naissances  ;  il  résulte  de  sa  va- 
leur (21),  que  la  poussée  horizontale  T  cos  a,  a  pour  expression 
simple,  dans  toute  l'étendue  d'un  même  arc  de  voûte,  itc. 

Dans  un  prochain  article,  nous  traiterons  la  question  de  l'établis- 
sement des  voûtes  des  ponts,  qui  se  rapporte  en  partie  à  notre 
première  série, 

YVON-VILLARCEAU. 


NOUVEAU  TOIT  PL.\T  BITUMINEUX  EXPÉRIMENTÉ, 

d'une  exécution  simple, 

A  LA  PORTÉE  DE  TOUT  LE  MONDE 

Nous  avons  donné  l'an  dernier  (vol.  IV,  coL  161  et  205)  la  tra- 
duction des  procédés  inventés  par  M.  Dorn  pour  la  confection  des 
T.  V.  6 


83 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


8^ 


toits  d'argile  bitumés  ;  mais  nous  apprenons  qu'il  n'y  a  guère  que 
les  travaux  exécutés  sous  les  yeux  du  maître  qui  aient  offert  un 
résultat  satisfaisant. 

Cependant  ces  essais  ne  seront  point  stériles  ;  ils  ouvrent  une 
voie  nouvelle  que  d'autres  parcourent  avec  fruit.  Déjà,  dit-on, 
les  toits  en  terrasse  remplacent  les  toits  inclinés  à  Berlin,  et  l'on 
en  voit  aussi  beaucoup  dans  les  autres  parties  de  la  Prusse.  Les 
toits  plats  ne  conviennent  pas  seulement  aux  climats  méridionaux  ; 
ils  ont,  même  dans  nos  contrées,  des  avantages  incontestables  sur 
les  toits  inclinés;  l'hiver,  la  neige  en  est  plus  facilement  balayée 
que  sur  les  combles  inclinés,  à  moins  toutefois  que  l'angle  de  ceux- 
ci  ne  soit  assez  aigu  pour  que  la  neige  glisse  sur  ses  parois  sans  s'y 
attacber;  et  l'été,  rien  n'est  plus  agréable  que  ces  terrasses  élevées 
où  les  familles  peuvent  passer  leurs  soirées  loin  du  bruit  de  la 
rue,  au-dessus  des  couches  malsaines  de  l'air,  au  milieu  de  petits 
jardins  improvisés. 

Nous  reproduisons  ici ,  sur  cet  important  sujet,  une  notice  com- 
muniquée au  Bulletin  du  Mtisée  de  V Industrie  par  M.  A.  Lefran- 
çois,  architecte  français  établi  depuis  longtemps  en  Allemagne,  et 
dans  laquelle  il  décrit  un  toit  plat  de  son  invention,  pouvant  servir 
au  besoin  de  réservoir  d'eau  en  cas  d'incendie. 


Les  nombreux  avantages  que  présentent  les  toits  plats  à  couver- 
tures bitumineuses  :  l'aspect  gracieux  qu'ils  donnent  aux  con- 
structions, l'espace  qu'ils  font  gagner,  le  bas  prix  de  leur  exécu- 
tion, leurs  dispositions  faciles  à  comprendre  et  à  la  portée  de  toutes 
les  intelligences,  avantages  auxquels  se  joint  encore  celui  de  parer 
à  la  communication  des  incendies,  me  font  espérer  que  ces  couver- 
tures reprendront  auprès  du  public  la  faveur  qu'elles  ont  momen- 
tanément perdue. 

Depuis  bientôt  deux  ans  j'ai  fait  une  couverture  de  ce  genre, 
fruit  d'une  combinaison  nouvelle,  sous  les  auspices  de  la  Société 
Agronomique  d'Altmark.  Cette  couverture  est  surtout  appro- 
priée aux  constructions  agricoles,  et  destinée  à  abriter,  pendant 
l'hiver,  les  dernières  récoltes  qui  ne  peuvent  être  engrangées. 

Je  crois  pouvoir  en  donner  des  détails  assez  précis  pour  que  cha- 
cun puisse  l'exécuter  lui-même. 

Préparation  des  substances  qui  entrent  dans  la  confection  du  nouveau 
toit  bitumineux. 

Il  faut  faire  choix  d'une  argile  douce,  plus  maigre  que  grasse, 
sans  aucun  mélange  de  corps  étrangers;  vous  l'humecterez  d'une 
quantité  d'eau  suffisante  pour  lui  donner  une  ténacité  moyenne. 
A  cet  effet  vous  la  déposez  dans  un  bac  à  chaux,  ou  tout  simple- 
ment sur  une  mauvaise  porte  ;  vous  l'y  étendez  et  la  piétinez  bien. 
Après  l'avoir  corroyée  et  parfaitement  piétinée,  vous  préparez  une 
certaine  quantité  de  bourre  bien  battue  à  labaguette  pourqu'elle  ne 
soit  point  par  paquets,  mais  au  contraire  bien  divisée;  vous  reten- 
dez également  sur  l'argile,  et  vous  recommencez,  pour  bien  opérer 
le  mélange,  à  piétiner  celle-ci  pour  l'incorporer  avec  la  bourre. 
Vous  relevez  l'argile  à  la  pelle  à  plusieurs  reprises,  et  piétinez  en- 
core, en  mettant,  à  mesure  que  le  mélange  s'effectue,  un  nouveau 
lit  de  bourre  ;  vous  corroyez  de  nouveau  le  mélange  jusqu'à  ce 
qu'enfm  il  en  résulte  un  amalgame  et  une  union  parfaite  des  deux 
substances,  à  peu  près  deux  tiers  d'argile  pour  un  tiers  de  bourre. 
Mais  comme  l'argile  plus  ou  moins  grasse  exige  des  proportions 


différentes,  vous  n'avez  qu'à  faire  subir  une  petite  épreuve  a  ce 
mortier  en  en  étendant  une  épaisseur  d'environ  3  centimètres 
sur  une  planche  que  vous  exposez  au  soleil.  Si  à  la  dessiccation  le 
mortier  résiste,  demeure  sans  fentes  ni  crevasses,  c'est  que  le  mé- 
lange est  bon  ;  dans  le  cas  contraire,  c'est-à-dire  s'il  est  fendillé  et 
lézardé,  c'est  qu'il  n'y  a  point  assez  de  bourre. 

Lorsque  le  mélange  argileux  est  obtenu  de  la  manière  qui  vient 
d'être  décrite,  il  ne  s'agit  plus  que  de  l'étendre  à  la  main  ou  avec 
une  truelle  sur  le  lattis  de  la  construction,  le  plus  régulièrement 
possible,  et  à  une  épaisseur  d'environ  3  centimètres. 

Le  lattis  sera  composé  de  lattes  de  8  centimètres  de  largeur  à 
peu  prèsj  sur  35  mill.  d'épaisseur,  et  placées  à  15  miil.  de  distance 
l'une  de  l'autre  ;  ou  bien  le  lattis  sera  formé  de  planches  refendues 
bien  assujetties,  espacées  comme  les  lattes;  ou  bien  encore,  et  par- 
ticulièrement pour  des  constructions  rurales,  de  perches  fendues 
dont  les  bouts  seront  alternés,  et  qui,  bien  entendu,  seront  fixées 
sur  leur  plat,  le  tout  posé  sur  un  chevronnage  solidement  établi 
auquel  on  donnera  une  pente  de  2  à  8  centimètres  par  mètre,  plus 
ou  moins,  à  volonté.  On  aura  soin  que  le  lattis  soit  de  bois  et  que 
les  éléments  soient  solidaires  entre  eux,  de  manière  qu'en  mar- 
chant dessus,  aucune  de  ses  parties  ne  fléchisse  sous  les  pieds. 

L'argile  étendue  sur  ce  lattis,  par  une  belle  journée  d'été,  et 
bien  séchée,  sans  fentes  ni  crevasses  (s'il  s'en  trouvait  de  peu  mar- 
quées, vous  les  rempliriez  avec  un  peu  d'argile  tres-délayée  et 
assez  claire  pour  qu'elle  put  s'inliltrer  dans  les  interstices:,  vous 
disposez  une  marmite  ou  une  chaudière  de  la  contenance  de  8  à 
10  ou  12  litres,  selon  l'étendue  de  toit  que  vou4.avez  à  enduire; 
vous  l'emplissez  aux  trois  quarts  de  goudron  de  charbon  de  terre, 
et,  par  un  feu  doux  et  clair,  vous  l'amenez  a  l'ebullition,  en  ayant 
soin  de  tenir  la  marmite  close  avec  une  feuille  de  tôle,  dans  la 
eraiiite  que  le  feu  ne  se  communique  au  goudron.  Vous  prenez 
de  ce  goudron  bouillant  dans  un  vase  portatif  en  terre  cuite  auquel 
vous  adaptez  une  anse  en  corde  pour  vous  donner  la  facilite  de 
le  saisir,  et  vous  étendez  largement  et  promptement  sur  votre  toit 
le  goudron  toujours  très-chaud  et  liquide,  pour  qu'il  pénètre  pro- 
fondément l'argile  (l). 

Le  lendemain,  le  temps  continuant  à  être  favorable,  vous  dispo- 
sez une  quantité  de  toile  en  rapport  avec  l'étendue  de  votre  toit  : 
cette  toile  doit  être  très-grossière  et  forte;  celle  que  Ion  emploie 
à  la  confection  des  sacs  pour  mettre  le  grain  est  la  plus  propre  a 
cet  usage.  Vous  commencez  à  poser  le  premier  lé  sur  la  planche 
saillante  de  l'égout  du  toit;  vous  le  fixez  avec  du  goudron  mêlé 
d'un  sixième  de  poix  sur  ses  bords  et  par  des  clous  fichés  à  de  pe- 
tites distances ,  seulement  sur  les  bords  inférieurs  des  planches  de 
l'égout.  Les  autres  lés  se  posent  de  même  et  de  manière  a  ce  que 
leurs  bords  se  recouvrent  de  5  à  6  centimètres,  et  toujours  impré- 
gnés de  goudron-poix  et  lixés  par  de  petits  clous  alors  plus  espacés 
entre  eux  ;  et  ainsi  de  suite,  jusqu'au  faite  du  toit.  Si  celui-ei  était 
circulaire,  il  est  bien  entendu  qu'il  faudrait  couper,  coudre  et  fixer 
la  toile  par  lé  en  pointes,  dans  la  forme  de  ceux  de  parapluies. 

Tout  le  toit  ainsi  recouvert  de  sa  toile  bien  tendue,  sans  aucun 
pli,  vous  délayerez  de  l'argile  bien  claire,  et,  avec  une  brosse  ordi- 
naire et  commune  que  vous  tremperez  dans  cette  argile,  vous  en 
enduirez  fortement  toute  la  toile.  Après  quelques  heures  d'un  grand 


(1)  Voy.,  pour  les  instruments  dont  on  se  sert  dans  l'exécution  de  ce»  tra- 
vaux, l'anicle  7'oi(i  p/at»,  inséré  dans  le  vol.  iv,  col. 151  et  205,  de  la  A«vue 
de  V  Architecture  et  des  Travaux  Publics. 


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REVUE  DE  L  AKCHITEGTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


86 


soleil,  tout  l'appareil  ainsi  disposé  étant  bien  sec,  vous  apprêtez 
votre  marmite  pour  donner  une  nouvelle  couche  générale  de  gou- 
dron, celui-ci  préparé  comme  précédemment,  avec  cette  différence 
que  vous  mettez  dans  la  marmite,  aux  trois  quarts  pleine  de  gou- 
dron, un  Kilogramme  de  poix  et  un  kilogramme  de  résine.  Après 
un  quart  d'heure  d'ébullition  de  ces  substances,  vous  en  emplissez 
votre  pot  de  terre,  et  vous  retendez  à  profusion  en  le  versant  même 
par  parties  et  l'étendant  rapidement  au  pinceau,  par  un  soleil 
ardent,  et  le  goudron  le  plus  chaud  possible.  Une  seconde  personne 
a  côté  de  vous,  munie  d'un  tamis  rempli  d'un  bon  ciment  de  tuile 
pulvérisée,  tamise  et  recouvre  de  ciment,  à  une  épaisseur  d'envi- 
ron 7  mill.,  le  goudron,  que  vous  étendez  de  manière  à  ce  que  l'on 
puisse  marcher  sur  le  toit  sans  que  le  goudron  s'attache  aux  chaus- 
sures. 

,  Lorsque  vous  avez  terminé  cette  opération,  vous  prenez  une 
batte  quadrilatère  en  planche  de  ô  centimètres  d'épaisseur,  de 
•iO  centimètres  de  longueur  sur  33  centimètres  de  largeur,  emman- 
t'hée  dans  son  milieu  d'un  bâton  de  l"»  20  de  longueur. 

Vous  battez  modérément  et  à  plusieurs  reprises  toute  l'étendue 
du  toit,  pour  incorporer  ainsi  profondément  et  solidement  le  ciment 
dans  le  goudron. 

Vous  laissez  la  dessiccation  de  ces  matières  s'opérer  pendant  deux 
ou  trois  jours,  et  un  matin,  avant  que  le  soleil  ne  soit  très-élevé, 
vous  prenez  un  balai  et  balayez  tout  le  ciment  qui  n'a  pu  adhérer 
au  goudron.  Vous  donnez,  dans  des  circonstances  absolument  sem- 
blables, une  seconde  couche  de  cette  préparation,  telle  quelle  vient 
d'être  présentée  et  décrite,  et  la  couverture  est  entièrement  ter- 
minée, lien  résultera  une  plate-forme  régulière,  unie,  d'une  teinte 
rougeàtre  ou  brunâtre,  légèrement  mélangée  de  l'une  et  de  l'autre, 
dont  la  composition  offrira  en  peu  de  temps  la  dureté  de  la  pierre, 
et  par  conséquent  sa  solidité  (l). 

Ce  toit,  tel  qu'il  vient  d'être  décrit,  a  répondu  complètement 
depuis  deux  ans  à  ce  qu'on  en  attendait ,  c'est-à-dire  qu'il  n'a  pas 
éprouvé  la  moindre  aHération  :  ce  qui  me  laisserait  croire  que  je 
ne  suis  pas  éloigné  d'avoir  atteint  le  maximum  de  solidité  cherché. 
Cependant,  s'il  arrivait  qu'il  dût  subir  quelques  additions  ou  per- 
fectionnements subséquents  pour  satisfaire  pleiuement  aux  vœux 
de  la  Société  centrale  d'Agriculture  de  Marienwerder  et  de  mes  ho- 
norables collègues  d'Altmark,  je  les  prie  de  croire  qu'ils  pourront 
toujours  compter  sur  mes  efforts  pour  répondre  à  leurs  désirs. 

A.  LEFRANÇOIS, 

Architecte  de  Jardins,  membre  collecteur  de 
la  Société  agronomique  d'Altmark. 


(1)  En  donnant  à  la  couverture  une  couleur  blanchâtre,  au  moyen  d'une  der- 
nière couche  de  sable  blanc  <  on  trouverait  l'avantage  de  maintenir  la  chaleur 
de  la  terrasse  à  une  température  moins  élevée,  condition  surtout  importante 
lorsqu'on  doit  habiter  la  pièce  immédiatement  au-dessous  de  la  terrasse.  A  dé- 
faut de  sable  blanc,  on  pourrait  se  servir  de  chaux. 

[Note  du  Directeur  delà  Bévue.) 


DE  X.A  KESTAUHATION  PROJETEE  DES  VITRAUX 
DE  CHARTRES 

Nous  donnons  ci-dessous  une  lettre  de  M.  Arthur  Martin  re- 
lative au  projet  de  la  remise  en  plomb  des  vitraux  de  la  cathédrale 
de  Chartres.  Les  longues  et  persévérantes  études  que  M.  Arthur 
Martin  a  faites  de  nos  anciennes  verrières,  et  l'admirable  ouvrage 
qu'il  a  publié  de  concert  avec  M.  Charles  Cahier  sur  les  vitraux  de 
Bourges,  donnent  un  grand  poids  à  sa  parole.  Quant  à  notre  propre 
sentiment ,  ceux  de  nos  lecteurs  qui  se  rappellent  notre  article  sur 
la  restauration  projetée  de  Notre-Dame  de  Paris  {  Voy.  vol.  iv, 
col.  137)  le  connaissent  déjà.  Nous  pensons  que  dans  l'état  actuel 
de  nos  connaissances  des  arts  du  Moyen-Age,  on  ne  saurait  ap- 
porter trop  de  réserve  et  de  prudence  dans  tous  les  travaux  de 
restauration.  Avant  d'oser  substituer  aux  feuillets  perdus  d'un 
vieux  livre  des  pages  nouvelles,  sous  prétexte  d'achever  l'œuvre, 
il  faut  au  moins  comprendre  la  langue  dans  laquelle  ce  livre  est 
écrit.  Or,  que  connaissons-nous,  par  exemple,  des  principes  de  la 
symbolique  qui  dirigeait  les  travaux  du  sculpteur,  du  peintre  ver- 
rier et  de  l'architecte  du  Moyen-Age?  Où  sont  les  études  sérieuses 
qu'on  a  faites  sur  les  rapports  numériques  des  membres  principaux 
des  églises  gothiques?  Quels  étaient  les  principes  géométriques 
adoptés  par  les  tailleurs  de  pierres  dans  la  construction  des  voûtes? 
Lesquels  de  ces  principes  étaient  adoptés  indifféremment  par  toutes 
les  écoles  de  tailleurs  de  pierres,  et  lesquels  caractérisaient  plus 
spécialement  telle  ou  telle  école?  A  quels  signes  extérieurs  recon- 
naît-on les  travaux  exécutés  par  les  différentes  écoles  de  tailleurs 
de  pierres?  etc.,  etc.,  etc.,  etc.  Soyons  donc  francs,  et  avouons 
que  les  plus  avancés  de  nous  en  sont  encore  à  l'alphabet,  et  que, 
dès  lors,  la  prudence  au  moins  est  une  nécessité,  chaque  fois  qu'il 
s'agira  de  remanier  les  trésors  artistiques  de  nos  édifices  gothiques. 
Voici  la  lettre  de  M.  Arthur  Martin  : 

Monsieur  le  directeur, 
La  nouvelle  de  la  mesure  si  grave  que  le  ministère  des  Cultes 
est,  dit-on,  sur  le  point  d'adopterau  sujet  des  vitraux  de  Chartres, 
inspire  un  juste  effroi  aux  amis  de  plus  en  plus  nombreux  des 
vieux  monuments  de  notre  pays.  Ni  les  bienveillantes  intentions 
du  ministre,  ni  la  probité  connue  du  manufacturier,  ne  sauraient 
changer  la  nature  des  choses  et  rassurer  les  esprits.  Il  est  indubi- 
table pour  quiconque  sait  les  difficultés  pratiques  d'une  remise  en 
plomb  de  nos  antiques  verrières,  qu'elle  ne  peut  s'opérer  sans  de 
nombreux  accidents  et  des  pertes  a  jamais  regrettables.  Un  très- 


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grand  nombre  de  verres  importants  brisés  aujourd'hui  en  plusieurs 
morceaux,  mais  solidement  retenus  par  les  réseaux  de  plomb,  se- 
ront définitivement  perdus  ;  un  nombre  très-probablement  plus 
grand  encore  se  briseront  pour  la  première  fois  dans  le  transport, 
ou  entre  les  mains  du  metteur  en  œuvre.  Je  parle  de  choses  que 
j'ai  déjà  vues.  Enfin  le  besoin  d'établir  quelque  harmonie  de  ton 
entre  les  parties  d'une  même  verrière  rendra  de  nouveaux  sacrifi- 
ces indispensables;  et  pour  ce  qui  est  de  l'arrangement  des  verres 
conservés  et  du  renouvellement  des  verres  détruits,  que  n'a-t-on 
pas  à  craindre?  Comment  l'artiste  verrier  reproduira-t-il  avec  vé- 
rité une  foule  de  scènes  ou  de  détails  de  scènes  dont  le  sens  lui 
restera  caché?  Comment  sans  de  longues  études,  dont  le  loisir  est 
impossible  au  milieu  des  opérations  commerciales,  découvrira-t-il 
le  secret  de  tant  de  pages  mystérieuses  dont  la  science  a  jusqu'ici 
négligé  l'explication?  Ne  faut-il  pas  à  ceux  qui  font  de  ce  genre 
d'études  leur  occupation  habituelle,  de  longues  heures,  souvent 
de  longs  jours  d'une  patiente  observation  et  de  laborieuses  re- 
cherches, pour  parvenir  à  se  rendre  compte  soit  des  formes  altérées, 
soit  de  l'énigme  qu'elles  recèlent  ?  Je  demande  si  des  vitraux  re- 
nouvelés comme  on  l'entend  auront  plus  de  mérite  désormais, 
aux  yeux  de  la  science,  que  des  miniatures  repeintes  et  des  sculp- 
tures repiquées.  De  grandes  valeurs  monumentales  dont  la  France 
a  droit  d'être  fière,  puisque  aucune  contrée  de  l'Europe  ne  possède 
sur  ce  point  le  vingtième  de  ses  richesses,  auront  donc  pour  jamais 
disparu  de  notre  sol.  En  vérité,  il  est  permis  de  s'en  émouvoir,  et 
il  est  trop  juste  de  faire  un  appel  à  l'opinion  pour  conjurer  le 
nouvel  orage  qui  menace,  plus  sérieusement  que  ceux  de  l'atmo- 
sphère, les  trésors  de  théologie,  d'histoire,  de  poésie  légendaire  et 
symbolique  que  nous  admirons  à  Chartres. 

J'ai  trop  longtemps  contemplé,  examiné,  étudié  les  verrières  de 
la  plupart  de  nos  cathédrales,  pour  n'avoir  pas  le  droit  d'avoir 
une  opinion  ;  et  mon  amour  pour  ces  peintures ,  où  se  réflé- 
chissent nos  vieux  âges,  me  fait  éprouver  le  besoin  de  l'exprimer. 
Non,  je  ne  pense  pas  qu'il  soit  si  urgent  d'appliquer  à  nos  monu- 
ments chéris  d'aussi  violents  remèdes;  je  ne  pense  pas  qu'il  y  ait 
lieu  d'acheter  si  cher,  près  de  300,000  francs,  des  restaurations 
qui  ressembleront  tant  à  des  ruines  aux  yeux  de  tous  les  connais- 
seurs. 

J'ai  la  conviction  qu'avec  de  modestes  dépenses  confiées  aux  an- 
tiquaires de  la  localité,  à  ceux  qui  auront  nécessairement  pour 
leur  cathédrale  quelque  chose  de  l'affection  qu'inspire  l'héritage 
paternel,  et  qui  seraient  heureux  d'offrir  une  collaboration  à  la 
fois  habile  et  désintéressée  ;  j'ai  la  conviction  que  l'on  pourrait 
pourvoir  à  tous  les  besoins  urgents,  et  conserver  nos  verrières  au 
moins  pour  un  demi-siècle.  J'ai  encore  devant  les  yeux  un  esti- 
mable verrier  attaché  à  celle  de  nos  cathédrales  qui  est  la  plus 
riche  après  celle  de  Chartres.  Il  jugeait  d'après  l'expérience,  et 
soutenait  avec  connaissance  de  cause  que  quinze  années  d'un 
traitement  de  800  francs  lui  eussent  suffi  pour  renouveler  tous  les 
plombs  de  toutes  les  verrières.  Qu'on  n'en  doute  pas,  les  chiffres 
effrayants  que  l'on  a  prononcés  décroîtraient  prodigieusement  si 
l'on  ne  dédaignait  pas  les  mesures  plus  simples  conseillées  d'ail- 
leurs par  certaines  convenances  envers  les  contrées,  aussi  bien  que 
par  la  prudence  et  par  l'économie. 

Au  fait,  que  faudrait-il  avant  tout?  Des  fers  renouvelés, de  sim- 
ples consolidations,  de  pauvres  verres  de  couleur  teints  dans  la 
pâte  à  la  place  des  verres  blancs.  Je  dis  uniquement  des  verres 
teints,  parce  que  ma  pensée  bien  réfléchie  est  qu'il  faut  en  effet 


préférer,  pour  masquer  les  vides  peu  considérables,  des  verres  qui 
s'harmonisent  par  leurs  couleurs  avec  le  reste  du  tableau,  sans 
tromper  par  une  restauration  trop  habile  l'œil  de  l'observateur  et 
dévoyer  la  science.  Il  est  clair  que  ce  système  ne  saurait  être  snivi 
quand  il  s'agit  de  produire  des  médaillons  nouveaux  ;  jnais  si  ces 
nouveaux  médaillons  devaient  se  confondre  par  leur  effet  avec  le» 
vieilles  peintures,  que  des  inscriptions  mettent  en  garde  contre 
l'erreur  en  même  temps  qu'elles  serviront  à  donner  bon  exemple 
à  la  postérité.  Que  faudrait-il  encore  pour  nos  verrières?  Des  gril- 
lages extérieurs  tels  que  la  cathédrale  de  Bourges  a  le  bonheur 
d'en  posséder.  Et  cette  précaution,  ce  n'est  pas  seulement  contre 
les  vents  et  la  grêle  qu'elle  est  devenue  indispensable,  mais  bien 
aussi  contre  les  insultes  de  l'enfance,  moins  habituée  qu'en  d'autres 
temps  à  respecter  les  choses  belles  et  les  choses  saintes. 

Si  le  ministère  des  Cultes  a  des  fonds  à  consacrer  en  faveur  de 
nos  cathédrales,  ces  grandes  splendeurs  monumentales  de  la 
France,  que  les  amis  de  l'art  religieux  qui  ont  quelque  accès  dans 
ses  bureaux  se  fassent  donc  un  devoir  de  l'éclairer  sur  les  dépenses 
vraiment  utiles  et  pressantes.  Non,  ce  que  les  besoins  actuels  ré- 
clament, ce  ne  sont  pas  ces  restaurations  qui  se  poursuivent  de- 
puis quelque  temps  aux  portails  sculptés  de  nos  basiliques;  res- 
taurations trop  souvent  de  pur  caprice,  dont  l'inévitable  résultat 
est  d'enlever  aux  monuments  une  partie  de  leur  signification  an- 
tique, et  par  conséquent  de  leur  prix  ;  ce  ne  sont  pas  les  désas- 
treux projets  d'une  remise  en  plomb  générale,  telle  que  celle  qui 
va  peut-être  ruiner  Chartres,  qui  menace  Bourges,  que  Lyon  a 
subie,  et  qui  a  déjà  enlevé  toute  valeur  archrélogique  à  une  des 
verrières  de  Strasbourg;  mais  la  simple  conservation  des  édifices; 
et,  certes,  il  en  est  beaucoup  dont  l'existence  est  gravement  com- 
promise. 

Que  l'on  détruise,  si  l'on  veut,  les  constructions  ou  les  accessoi- 
res en  désaccord  avec  les  monuments,  mais  seulement  lorsque  ce» 
accessoires  n'ont  par  eux-mêmes  aucune  valeur  d'époque  ;  encore 
faut-il  redouter  ici  les  erreurs  des  architectes  ou  des  antiquaires, 
d'autant  plus  tranchants,  on  le  sait,  qu'ils  sont  moins  instruits,  l'ar 
exemple,  que  l'on  fasse  disparaître  à  Notre-Dame  de  Paris  les 
malencontreux  marbres  qui  masquent  les  colonnes  de  l'abside; 
que  l'on  remplace  l'insignifiant  autel  ;  que  l'on  dégage  l'arcade 
centrale  et  la  partie  supérieure  de  celles  du  chœur,  obstruées  par 
des  tableaux  dont  la  place  serait  mieux  ailleurs,  qui  n'applaudirait 
à  une  telle  mesure?  Mais  enlever  le  monument  de  Louis  XIII,  la 
boiserie  de  Louis  XIV,  ce  serait  frapper  de  grands  souvenirs  his- 
toriques et  détruire  des  valeurs  d'art. 

Veut-on  favoriser  l'art  moderne ,  rendre  nos  cathédrales  plus 
dignes  du  vrai  Dieu  et  d'un  grand  peuple?  En  vérité,  l'on  sera 
moins  en  peine  de  trouver  des  thèmes  que  de  rencontrer  le  génie 
qui  devrait  les  remplir.  Qui  empêcherait  de  faire  un  appel  à  la 
peinture  sur  verre  pour  embellir  les  fenêtres  veuves  de  leurs  vieux 
vitraux?  Que  ne  propose- t-on  de  solennels  concours  pour  les  chai- 
res à  prêcher,  les  autels,  et  toutes  ces  décorations  indépendantes 
de  l'édifice,  mais  indispensables,  et  honteusement  livrées  jusqu'ici 
aux  exploitations  du  commerce?  On  pourrait  presque  dire  que 
l'orfèvrerie  religieuse  n'existe  pas  à  l'état  d'art.  Et  pourtant  qu'il 
serait  aisé,  pour  peu  qu'on  le  voulût,  de  réaliser,  avec  la  moitié 
des  fonds  qui  se  consument  de  la  manière  que  nous  avons  dit, 
toutes  ces  merveilles  de  magnificence  de  l'orfèvrerie  du  Moyen- 
Age,  qu'il  nous  faut  aller  aujourd'hui  chercher  péniblement  à  tra- 
vers l'Europe  1  C'est  après  avoir  mesuré,  dessiné  et  peint  les  plus 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


90. 


magnifiques  ouvrages  de  ce  genre,  qui  soient,  si  je  ne  me  trompe, 
conservés  aujourd'iiui,  que  j'exprime  ma  conviction  profonde.  Oui, 
nous  pourrions,  dans  des  conditions  de  dépenses  tout  à  fait  acces- 
sibles, reproduire  ces  ensemlîles  où  le  repoussé,  la  ciselure,  les 
nielles,  les  filigranes,  les  pierres,  les  cristaux  et  les  émaux  sédui- 
sent tout  à  la  fois  par  l'élégance  des  formes,  l'harmonie  des  cou- 
leurs, la  variété  des  contrastes,  et  les  graves  ou  naïves  pensées 
des  représentations.  Quelle  mine  féconde  de  motifs  d'art  fournirait 
à  l'architecte,  au  ciseleur,  à  l'émailleur,  à  l'orfèvre,  tout  cet  anti- 
que ameublementdenos  temples,  dont  les  noms  eux-mêmes  ont  en 
partie  disparu?  Pourquoi  ne  songerait-on  pas  à  faire  reparaître  au 
milieu  de  nous  les  vastes  couronnes  de  lumière  telles  qu'on  les 
conserve  encore  à  Aix-la-Chapelle  et  à  Hildesheim  ;  et  les  ambons 
revêtus  de  marbre  et  de  fines  mosaïques  comme  en  Italie,  ou  de 
plaques  de  métal  doré  enrichi  de  pierres,  comme  en  Allemagne; 
et  les  ciborium  s'élançant  avec  majesté  vers  les  hautes  voîites  et 
couronnant  l'autel  de  leurs  arcades  dorées;  et  les  devants  d'autel 
de  métal  savamment  ouvragés  ;  et  les  couvertures  d'évangéliaires, 
où  l'or  et  les  pierres  relèvent  la  pâleur  des  mystérieux  ivoires;  et 
ces  croix  processionnales  couvertes  de  filigranes  et  d'emblèmes; 
enfin  ces  châsses  émaillées  qui  s'élevaient  autrefois  en  pyramide 
derrière  les  grands  autels,  et  dont  les  pierreries  étincelaient  aux 
rayons  convergents  des  vitraux  peints  de  l'abside?  Espérons  que 
toutes  ces  belles  choses  des  temps  antiques  seront  de  nouveau 
connues,  c'est  dire  qu'elles  seront  goûtées  ;  espérons  que,  grâce 
au  zèle  des  antiquaires  qui  exhument  en  ce  moment  tous  ces  sou- 
venirs si  longtemps  oubliés,  les  artistes,  guidés  par  des  représenta- 
tions et  des  descriptions  fidèles,  sauront  créer  pour  l'art  et  pour  la 
piété  des  beautés  et  des  jouissances  nouvelles.  Le  comité  des  mo- 
numents attaché  au  ministère  de  l'Instruction  publique  peut  rendre 
à  cet  égard  de  vrais  services  au  pays  à  mesure  que  s'accroîtra  son 
influence.  Nous  formons  le  vœu  q;tie  le  ministère  des  Cultes,  chargé 
seul  de  nos  cathédrales,  juge  également  à  propos  de  s'entourer 
des  lumières  qu'apportent  les  hommes  spéciaux,  d'autant  plus 
qu'il  s'agit  d'études  toutes  nouvelles,  et  en  faveur  desquelles  le 
gouvernement  n'a  pas  encore  créé  d'enseignement  public. 

J'oserai  émettre  un  autre  vœu  :  c'est  qu'on  rende  au  clergé  ca- 
tholique la  justice  de  l'entendre  dans  sa  propre  cause,  parce  qu'il 
est  une  foule  de  questions  appartenant  au  dogme  et  à  la  liturgie 
où  le  prêtre  est  évidemment  le  seul  homme  qui  ait  compétence. 

Recevez,  etc. 

Aethub  MARTIN. 


ï!r»o 


OITTERTUIIE   DU  UTOWEAU   MUSÉE    D'ANTIQUITÉS 
NATIONAI.es  a  Ii'HOTEI.  de  CIiUNT. 

Aplusieurs  reprises  déjà  nous  avons  eu  l'occasion  d'entretenir  nos 
lecteurs  du  Musée  d'archéologie  nationale,  projeté  au  palais  des 
Thermes  et  à  l'Hôtel  de  Cluny.  Ce  Musée  a  reçu  aujourd'hui  un 
commencement  de  réalisation.  Une  partie  des  salles  basses  de  l'hô- 
tel, les  chapelles  basse  et  haute,  quelques  pièces  du  premier  étage, 
et  entre  autres  la  chambre  dite  de  François  I^r,  vont  être  incessam- 
ment ouvertes  au  public,  qui  pourra  alors  étudier  à  son  aise  la  pré- 
cieuse collection  de  M.  Dusommerard.  Cette  collection,  on  se  le  rap- 
pelle, fut  acquise  l'an  dernier  par  l'État,  ainsi  que  l'hôtel,  à  la  suite 


du  rapport  de  M.  Arago,  dont  nous  reproduisîmes  les  passages  les 
plus  intéressants.  [Voyez  vol.  IV,  col.  216.) 

Nous  ne  reprendrons  point  ici  l'histoire  du  palais  des  Thermes 
et  de  l'hôtel  de  Cluny.  On  la  retrouvera  complète,  à  peu  de  chose 
près,  dans  le  rapport  du  savant  député.  Nous  rappellerons  seule- 
ment que  le  palais  des  Thermes,  bâti  par  Constance  Chlore,  à  ce 
que  l'on  croit,  fut  successivement  habité  par  les  Césars  et  par  plu- 
sieurs rois  de  la  première  et  de  la  seconde  race;  .sans  doute  il 
avait  été  déjà  singulièrement  modifié  par  ces  derniers,  et  il  le  fut 
probablement  plus  encore  par  ceux  aux  mains  destjuels  il  passa, 
après  qu'il  eut  été  donné  par  Philippe-Augusteà  Henri,  son  cham- 
bellan, en  1218.  Il  devint  la  propriété  des  abbés  de  Cluny  seule- 
ment en  1 340,  époque  à  laquelle  Pierre  de  Chasius,  abbé  de  Cluny. 
en  fit  l'acquisition,  acquisivit  domum  quœ  dicilur  palatium  de  Ter- 
minis,  seu  de  Thcrmis  Pariéiis,  ainsi  que  le  dit  la  chronique  de 
Cluny.  Située  à  quelques  pas  de  leur  collège  de  la  place  Sorbonne, 
cette  propriété  convenait  à  merveille  aux  abbés  pour  en  faire  leur 
pied-à-terre  pendant  leur  séjour  à  Paris.  L'un  d'eux,  Jean  de 
Bourbon,  commença  la  construction  de  l'hôtel  actuel  ;  mais  sa 
mort,  arrivée  en  1485,  interrompit  les  travaux  pendant  cinq  ans. 
Ils  furent  repris  en  1490  par  Jacques  d'Amboise,  abbé  de  Cluny, 
évêque  de  CIcrmont ,  frère  du  fameux  cardinal  ministre  de 
Louis  XII.  Tout  porte  à  croire  que  les  travaux  n'étaient  pas  au- 
core  bien  avancés  quand  Jacques  d'Amboise  les  fit  reprendre.  Par- 
tout dans  l'hôtel  on  retrouve  l'écusson  des  d'Amboise  surmonté 
de  la  crosse  pastorale,  et  dans  plusieurs  parties  extérieures,  entre 
autres  sur  les  murs  de  la  grande  tourelle  de  l'escalier  principal, 
dans  la  cour,  on  voit  l'écaillé  du  pèlerin,  attribut  de  saint  Jac- 
ques, patron  du  frère  du  cardinal. 

L'idée  de  faire  avec  les  ruines  du  palais  romain  et  l'hôtel  de 
Cluny  un  musée  national  qui  put  combler  le  vide  laissé  par  la  des- 
truction du  musée  des  Petits-Augustins,  appartient  à  M.  Albert 
Lenoir,  qui  exposa  au  Louvre,  en  1833,  un  projet  de  réunion  de 
ces  deux  édifices.  Cette  réunion  s'opérait  au  moyen  d'une  galerie 
de  style  roman ,  seule  construction  à  élever,  et  dont  la  place  était 
tout  naturellement  marquée  dans  la  petite  cour  qui  sépare  la 
grande  salle  des  Thermes  de  l'hôtel  de  Cluny  lui-même,  et  qui  est 
aujourd'hui  encombrée  d'ignobles  constructions  en  plâtre  servant 
d'ateliers  de  lithographie,  etc. 

Chargé  dc^à  des  travaux  de  consolidation  du  vieux  palais  des 
Césars,  M.  Albert  Lenoir  devint  tout  naturellement  l'architecte  de 
l'hôtel  de  Cluny  après  son  acquisition  par  l'État,  et  fut  ainsi  ap- 
pelé à  réaliser  au  moins  une  partie  du  plan  qu'il  a  exposé  il  y 
a  onze  années.  Espérons  qu'on  ne  tardera  pas  à  compléter  l'œuvre, 
et  qu'on  profitera  des  heureuses  dispositions  qu'offre  l'hôtel  de 
Cluny,  non-seulement  pour  exposer  le  plus  avantageusement  pos- 
sible la  belle  collection  Dusommerard,  mais  aussi  pour  montrer 
aux  artistes  et  au  public  l'image  de  ce  qu'était  l'intérieur  de  l'ha- 
bitation d'un  grand  seigneur  au  commencement  de  la  Renaissance. 
M.  Albert Lenoirn'a  eu  à  sa  disposition,  pour  commencer,  qu'un 
crédit  assez  limité  (20  000  francs).  Il  fallait  d'abord  songer  à  con- 
solider les  parties  de  l'édilice  qui,  sans  donner  précisément  de  l'in- 
quiétude, pouvaient  néanmoins  empêcher  l'aménagement  du  musée 
Dusommerard.  Tels  étaient  les  plafonds  du  rez-de-chaussée,  dont 
les  poutres  s'étaient  brisées.  Ces  poutres  avaient  été  soutenues 
dans  toute  leur  longueur  par  des  murs  de  refend  qu'on  avait  bâtis 
pour  approprier  les  grandes  pièces  de  l'hôtel  aux  besoins  des  diffé- 
rentes professions  qui  en  occupèrent  successivement  les  diverses 


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REVUK  DE  L'ARCHITECTUBE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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parties.  L'architecte  a  dû  enlever  ces  murs,  et  les  poutres  se  se- 
raient certainement  affaissées  sous  la  charge  des  planchers,  s'il  n'a- 
vait pris  soin  de  les  soutenir  par  des  piliers  qui  sont  en  bois  et 
auxquels  il  a  donné  une  forme  octogonale  et  appropriée  au  style  de 

l'édifice. 

Tous  les  métiers  qui  ont  quelque  rapport  avec  l'imprimerie  sem- 
blaient pour  un  temps  s'être  donné  rendez-vous  à  l'hôtel  de  Cluny, 
et  réunir  leurs  efforts  pour  le  détruire;  mais,  grâce  aux  soins  et  au 
luxe  qui  avaientprésidé  à  sa  construction,  il  a  pu  arriver  jusqu'à 
nous,  et  les  mutilations  dont  il  a  été  victime  sont  généralement  plus 
uravcs  à  l'intérieur  qu'à  l'extérieur.  Néanmoins,  il  n'a  pu  être 
soumis  à  tant  de  vicissitudes,  dont  la  plus  cruelle  fut  sans  doute  la 
crise  de  93,  sans  avoir  bien  souffert  dans  ses  détails. 

A  peine  aujourd'hui  ébauchée,  la  restauration  entreprise  par 
M.  Albert  Lenoir  a  déjà  livré  bien  des  secrets  de  l'état  primitif. 
L'hôtel  de  Cluny,  comme  beaucoup  de  nos  lecteurs  le  savent, 
iorme  trois  des  côtés  d'un  quadrilatère  dont  le  quatrième,  du  côté 
de  la  rue  des  Mathurius,  est  fermé  par  un  mur  d'environ  6  mè- 
tres de  hauteur.  On  a  retrouvé  dans  le  haut  de  ce  mur  des  restes  de 
créneaux,  et  un  peu  au-dessous,  des  traces  et  des  morceaux  de  sup- 
ports en  fer  qui  ont  dû  porter  une  sorte  de  chemin  de  ronde  en 
bois,  d'où  il  eût  été  facile  de  faire  vigoureuse  résistance  en  cas 
d'attaque  par  la  rue  des  Mathurins.  Une  petite  porte  percée  au  pre- 
mier étage  de  l'aile  droite  de  l'hôtel,  à  la  hauteur  même  du  che- 
min de  ronde,  et  dont  l'ouverture  biaise  serait,  dans  le  cas  con- 
traire, difficile  à  expliquer,  semble  avoir  été  faite  pour  conduire  à 
cette  espèce  de  balcon  intérieur. 

Ces  traces  de  dispositions  militaires,  —  on  en  retrouve  aussi 
et  de  mieux  accusées  encore  à  l'hôtel  de  Sens,  à  la  maison  de  Jac- 
ques Cœur,  à  Bourges,  etc.,  —  sont  parfaitement  justifiées  par  les 
besoins  de  l'époque  à  laquelle  elles  remontent.  Il  fallait  alors  faire 
soi-même  la  police  et  défendre  souvent  sa  demeure  contre  les  atta- 
ques nocturnes,  ou  même,  pour  peu  que  l'on  fût  puissant  et  qu'on 
eût  des  ennemis  également  puissants,  contre  des  entreprises  quasi- 
régulières  que  la  royauté  elle-même  n'avait  pas  toujoui-s  la  force 
ni  peut-être  le  vouloir  de  réprimer. 

D'un  dessin  varié  et  d'une  extrême  délicatesse,  la  galerie  qui 
règne  le  long  du  toit,  du  côté  de  la  cour  d'honneur  dont  nous  ve- 
nons de  parler,  se  trouvait  rompue  en  plusieurs  endroits,  et  partout 
les  jours  en  avaient  été  bouchés  avec  du  plâtre  ;  elle  court  mainte- 
nant sans  interruption  au-dessus  de  la  corniche,  et  l'on  peut  en  ad- 
mirer les  gracieuses  découpures. 

Au  rez-de-chaussée,  en  jetant  à  terre  les  cloisons  modernes,  on 
a  trouvé  qu'originairement  il  existait  près  de  la  grande  tourelle, 
dans  le  corps  de  logis  principal,  une  grande  salle  communiquant 
avec  les  salles  voisines,  plus  petites,  par  des  portes  à  cintre  sur- 
baissé ,  ornées  de  moulures  gothiques.  Le  dessus  des  portes  est 
décoré  des  armoiries  des  d'Amboise,  aussi  bien  que  les  corbeaux 
qui  soutiennent  l'extrémité  des  poutres. 

Le  premier  étage  n'est  point  encore  restauré,  et  ne  sera  livré  que 
plus  tard  au  public.  Il  reproduit  la  distribution  du  rez-de-chaussée  : 
une  grande  pièce  centrale  communiquant  à  d'autres  salles  plus 
petites  par  des  portes  ornées.  On  a  retrouvé  dans  ce  premier  étage 
les  restes  de  la  décoration  d'une  grande  cheminée  ainsi  que  des 
fragments  de  ses  sculptures. 

La  pièce  la  plus  importante  de  l'édifice,  la  chapelle  haute,  est 
dans  un  état  de  conservation  des  plus  heureux  ;  mais  il  n'en  était 
pas  de  même  de  la  chapelle  basse.  Le  sol  de  cette  chapelle  avait 


été  considérablement  exhaussé,  des  sculptures  avaient  été  brisées, 
des  consoles  et  une  colonnette  entière  enlevées  ;  un  petit  escalier  a 
vis,  conduisant  à  la  chapelle  haute,  avait  été  coupé,  et  les  débris 
de  sa  rampe,  taillée  à  jour,  avaient  servi,  ainsi  que  plusieurs  sta- 
tues, à  bâtir  un  mur  dans  l'épaisseur  duquel  il  se  perdait.  Nous 
aurons  tout  dit  sur  ces  dévastations  si  nous  ajoutons  que  cette 
pièce  avait  servi  dans  le  temps  de  salle  de  billard.  Aujourd'hui,  le 
sol  primitif  a  été  remis  à  découvert,  on  en  a  retrouvé  le  dallage 
en  partie  conservé;  l'escalier  et  sa  jolie  rampe  ont  été  restaures, 
mais  il  reste  encore  à  reparer  les  sculptures.  Quant  aux  statues 
retrouvées  dans  la  muraille  moderne,  ce  sont  sans  doute  celles 
des  membres  de  la  famille  d'Amboise,  qui  figuraient  dans  la  cha- 
pelle haute,  et  dont  parle  Piganiol  de  la  Force  dans  sa  Description 
de  Paris  (1)  :  «  Contre  les  murs,  dit-il,  sont  placées  par  groupes, 
en  forme  de  mausolées,  les  figures  de  toute  la  famille  de  Jacques 
d'Amboise  (2)  et  celle  du  cardinal  ;  la  plupart  sont  à  genoux  avec 
des  habillements  de  leur  siècle,  très-singuliers  et  bien  sculptés.  » 
Ces  statues  portent  des  traces  parfaitement  conservées  de  peintu- 
res et  de  dorures,  et,  chose  digne  de  remarque,  on  y  reconnaît  aisé- 
ment que,  pour  obtenir  un  certain  effet  de  rouge  brillant,  on  a  rom- 
mencé  par  dorer  les  parties  à  peindre  ;  puis  on  a  passé  par  la-des- 
sus une  espèce  de  vernis  rouge  assez  transparent  pour  que  le 
brillant  de  l'or  se  fit  jour  au  travers.  On  ne  reconnaît  pas  immé- 
diatement la  présence  de  l'or  a  l'aspect  seul  de  la  peinture,  mais 
une  fois  que  les  parties  écaillées  ont  révélé  le  secret  de  l'effet,  l'œil, 
instruit  pour  ainsi  dire  du  procédé,  retrouve  aisément  l'éclat  de 
l'or  combiné  avec  la  couleur  propre  du  vernis. 

Dans  la  salle  dite  de  François  1",  voisine  de  la  chapelle  haute, 
et  dont  la  croisée  s'ouvre,  comme  celles  de  la  chapelle,  sur  le 
jardin  derrière  l'hôtel,  M.  Albert  Lenoir  a  retrouvé  quelques  fai- 
bles traces  d'une  décoration  peinte  qu'il  a  reproduite  et  complétée 
dans  le  même  style.  Ces  peintures  offrent  une  analogie  frappante 
avec  les  peintures  antiques  que  l'on  voit  dans  les  restes  des  habi- 
tations romaines  en  Italie,  et  elles  pourraient  bien  être  l'œuvre  de 
ces  artistes  italiens  que  Charles  VIII  et  Louis  .\II  firent  venir  en 
France  à  la  suite  de  leurs  guerres  d'Italie.  Du  reste,  on  retrouve  le 
chiffre  de  Charles  VIII  sur  le  chapiteau  du  pilier  central  de  la  cha- 
pelle basse. 

En  attendant  que  la  galerie  romane,  entre  le  palais  des  Ther- 
mes et  l'hôtel  de  Cluny.  reçoive  son  exécution,  M.  Albert  lenoir 
a  établi  un  escalier  provisoire  qui  conduit  dans  la  grande  salle 
basse  des  Thermes  et  qui  permet  de  visiter  a  la  fois  les  deux  édifices. 

Les  travaux  que  l'on  exécute  à  l'hôtel  de  Cluny  ont  à  nos  yeux 
un  double  intérêt:  ils  doivent  doter  la  ville  de  Paris  d'un  musée 
dont  l'importance  et  l'utilité  sont  aujourd'hui  bien  reconnues,  et 
rendre  à  son  état  primitif  une  habitation  particulière  qui  date  d'une 
des  époques  les  plus  intéressantes  de  l'architecture  privée.  >e 
fût-ce  qu'à  ce  seul  titre,  Ihôtel  de  Cluny  mériterait  déjà  toute  I» 
sollicitude  du  gouvernement. 

Alphonse  de  CALONiVE. 


(1)  Toiii.  VI,  pag.  306. 

(2)  La  chapelle,  qui  n'est  pas  bien  grande,  dcvaU  en  être  encombrée;  car  ils 
étaient  dix-sept  enfants.  Ces  statues  étaient  posées  ti  une  certaine  hauteur  sur 
un  corps  de  moulures  très-saillant  et  orné. 


93 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


9k. 


SOCIÉTÉ  CENTRALE  DES  ARCHITECTES  FRANÇAIS. 

SÉANCE  GÉNÉaALE  DU  DIMANCHE  ta  JANVIER  1844. 

Présidence  de  M.  Bloiiet. 

La  séance  est  ouverte  Â  midi,  en  présence  de  plus  de  soixante  membres; 
dans  le  cours  de  la  séance,  leur  nombre  s'élève  à  cent  deux. 
Il  est  d'abord  donné  lecture  de  la  lettre  suivante  : 

A  mestieurs  les  Membres  de  la  Société  centrale  des  Architectes. 

«  Paris,  13  janvier  tSH. 
II  Messieurs, 

«  Obligé  de  retourner  à  Lyon  pour  y  diriger  cl  surveiller  les  travaux  du  l'a- 
lais-de-Justice, j'éprouve  le  regret  de  ne  pouvoir  partici|)crà  vos  travaux  et  à  vos 
délibérations  ;  je  sens  même  une  sorte  de  confusion  de  n'êlre  pas  un  agent  plus 
directement  utile  de  l'œuvre  d'organisation  que  nous  avons  entreprise.  Je  dois 
être  d'autant  plus  sensible  aux  témoignages  d'intérêt  et  d'affection  que  vous 
m'avez  donnés  en  me  nommant  de  nouveau  votre  président. 

«Veuillez,  messieurs,  en  recevoir  mes  sincères  remercinients,  et  rester  bien 
persuadés  que,  du  jour  où  vous  jugerez  utile  de  désigner  pour  cette  fonction 
un  autre  de  nos  lionorables  confrères,  vous  me  trouverez  toujours  heureux  de 
porter  simplement  le  titre  de  membre  de  la  Société  centrale. 

K  Je  suis,  messieurs  et  honorables  confrères,  avec  la  plus  haute  considéra- 
tion, votre  bien  dévoué  et  affectionné  confrère. 

Cl  BALTAno  père.  » 

Le  secrétaire  principal  fait  remarquer  que  M.  lîaltard  ne  reste  pas  aussi 
étranger  aux  travaux  de  la  Société  qu'il  a  la  modestie  de  le  penser.  Le  dernier 
conseil  a  eu  la  satisfaction  d'être  présidé  par  lui  ;  et,  à  Lyon,  il  fait  partie  de 
la  Société  académique  d'Architecture,  formée  à  l'instar  de  la  Société  centrale, 
et  ayant  le  même  but. 

Il  est  également  donné  lecture  d'une  lettre  de  M.  Herbault,  membre  non 
résidant,  demeurant  à  Amiens,  qui  expose  plusieurs  idées  relatives  aux  publi- 
cations que  la  Société  pourrait  entreprendre,  etc.  Le  secrétaire  principal  rap- 
pelle que  déjà  plusieurs  collègues  ont  adressé  des  lettres  contenant  des  idées 
utiles;  il  propose  d'engager  le  conseil  à  en  faire  l'examen.  Cette  proposition 
est  adoptée. 

Le  président  communique  les  lettres  d'adhésion  de  MM.  A.  Leclerc  et  Huvé, 
membres  de  l'Inslilut  ;  Godeboeuf,  2"  grand  prix  et  prix  départemental  ;  Dela- 
croix, Doisnard  et  Grillot,  architectes  des  départements  du  Donbs,  de  la  Man- 
che et  des  Vosges,  tous  admissibles  de  droit,  les  trois  premiers  à  titre  de  mem- 
bres résidants  (et  déjà  classés  à  ce  titre  dans  les  sections),  et  les  trois  autres  à 
titre  de  membres  non  résidants.  Il  proclame  leur  admission  définitive,  ce  qui 
porte,  dès  à  présent,  le  nombre  total  des  membres  de  la  Société  à  deux  cent 
vingt-sept. 

Compte-rendu  par  le  secrétaire  principal  sur  les  mesures  d'installation  et 
autres  opérations  du  bureau  et  du  conseil  pendant  le  premier  semestre 
de  l'exercice  1843-1844- 

Il  Messieurs, 

Il  Les  statuts  portent  (art.  33)  qu'il  vous  sera  rendu  un  compte  détaillé  des 
travaux  du  bureau  et  du  conseil  à  la  fin  de  chaque  année  ;  mais,  nos  exer- 
cices devant  courir  du  \"  juillet  au  30  juin,  c'est  nécessairement  après  cette 
<lernière  époque  que  ce  compte  général  devra  vous  être  présenté.  Toutefois, 
nous  avons  pensé  que  cette  forme  pourrait  également  être  employée  à  la  fin  de 
chaque  semestre  pour  vous  faire  connaître  les  opérations  du  bureau  et  du  con- 
.«eil  pendant  ce  laps  de  temps,  et  qu'elle  devrait  surtout  l'être  cette  première 
fois,  où  il  importe  de  nous  informer  des  mesures  d'installation  dont  nous  avons 
eu  à  nous  occuper. 

u  Aussitôt  après  sa  constitution,  votre  bureau  s'est  empressé  de  pourvoir  à 
l'expédition,  tant  des  lettres  qu'il  était  nécessaire  d'écrire  à  chacun  des  fonc- 
tionnaires élus  par  vous  pour  leur  annoncer  officiellement  leur  nomination, 
que  de  celles  que  vous  aviez  jugé  vous-mêmes  devoir  être  envoyées  aux  mem- 
bres des  précédentes  réunions  préparatoires  qui  ont  amené  la  formation  de  la 
Société. 

«Quant  i  celles  que  vous  aviez  également  votées  à  MM.  les  ministre  de  l'In- 
térieur, des  Travaux  Publics  et  du  Commerce  et  à  M.  le  préfet  de  Police, 
pour  les  remercier  de  leur  coopération  à  l'approbation  de  la  Société,  et  leur 


donner  connaissance  de  sa  constitution  définitive  et  de  sa  composition,  elles 
ont  dû  être  écrites  au  nom  du  conseil,  comme  mandataire  de  ta  Société  et 
ton  organe  auprès  de  l'autorité  (aux  termes  de  l'art.  45  des  statuts)  ;  et,  sur 
les  propositions  du  bureau,  il  en  a  été  adressé  également  pour  faire  connaître 
la  constitution  et  la  composition  de  la  Société,  1°  aux  divers  autres  ministres; 
2°  à  M.  le  préfet  du  déparlement;  3°  i  M.  le  président  du  conseil  général  des 
bâtiments  civils;  4"  â  M.  l'intendant-général  de  la  liste  civile;  5"  à  MM.  les 
présidents  et  vice-présidents  des  deux  Chambres,  du  Conseil  d'État ,  de  la 
Cour  des  Comptes,  de  la  Cour  de  Cassation,  de  la  Cour  royale,  du  Tribunal  de 
première  instance  et  du  Tribunal  de  commerce;  6"  aux  présidents  de  chacune 
des  académies  qui  composent  l'Institut;  7°  enfin  aux  présidents  de  la  Société 
d'Encouragement  (dans  le  local  de  laquelle  vous  avez  tenu  vos  premières  séan- 
ces), de  la  Société  libre  des  Beaux-Arts  et  de  la  Société  royale  des  Antiquaires 
de  France. 

Il  H  a  été  répondu  à  votre  président  par  M.  le  secrétaire  perpétuel  par  inté- 
rim de  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Letlrej,  pour  lui  témoigner,  au 
nom  de  l'Académie,  l'intérêt  qu'elle  prend  à  la  formation  de  la  Société,  et  l'es- 
poir que  nous  ne  négligerons  pas  les  recherches  qui  se  rattachent  a  l'histoire 
de  l'art,  et  que  nous  communiquerons  à  l'Académie  nos  travaux  de  ce  genre.     . 

Il  Vos  statuts  et  règlements  ont  en  outre  été  publiés  par  M.  Daly,  dans  la 
Revue  de  l'Architecture, et  par  M.  Sageret,dansr.4rmuatrcdej  bâtiments. Ce 
dernier  y  a  également  reproduit  la  liste  complète  des  membres  de  la  Société. 

II  L'un  des  premiers  soins  de  votre  bureau  avait  été  également  de  préparer 
pour  cet  exercice  un  budget  qu'il  a  communiqué  au  conseil  dès  sa  première 
séance,  et  dont  nous  constatons  souvent  ici  les  résultats  totaux  : 

Il  Vos  recettes  s'élèveront  à 6531  fr.    »  c. 

(1  Vos  dépenses  à 2600         » 


Il  Différence 3631  fr.    n 

Il  Dont  une  partie  pourra  être  placée  en  fonds  de  réserve  et  une  partie  ap- 
pliquée aux  dépenses  extraordinaires  que  vous  pourrez  approuver  sur  des  pro- 
positions spéciales.  Parmi  les  dépenses  ordinaires  portées  dans  ce  budget,  est 
comprise  la  location  de  ce  local  que  votre  conseil  a  cru  devoir  être  nuiotenu, 
au  mdins  provisoirement,  et  pour  lequel  un  engagement  a  en  conséquence  été 
consenti  pour  le  courant  de  cet  exercice. 

II  Le  compte  qui  vous  sera  rendu  dans  cette  séance  par  M.  le  secrétaire-tré- 
sorier, vous  fera  voir  que  les  prévisions  de  votre  budget  sont  déjà  en  partie  réa- 
lisées. 

II  Votre  conseil  a  fixé  ses  réunions  au  deuxième  jeudi  de  chaque  mois  ;  et  sa 
première  préoccupation  a  dû  être  de  satisfaire  à  l'art.  44  des  statuts,  qui  veut 
qu'aucune  délibération  7>e  puisse  être  prise  qu'en  présence  de  deux  tiers  au 
moins  du  nombre  total  de  ses  membres.  Diverses  mesures  avaient  été  propo- 
sées à  cet  effet;  mais  le  conseil  a  pensé,  et  l'événement  a  justifié  cette  opinion, 
qu'il  suffirait,  quanta  présent,  et  des  convocations  motivées  du  président,  et 
de  la  tenue  exacte  de  feuilles  et  de  tableaux  de  présence,  exigés  d'ailleurs 
pour  toutes  vos  réunions  par  l'art.  8  des  statuts.  Ces  tableaux  sont  placés  sous 
vos  yeux. 

Il  Le  conseil  a  particulièrement  été  occupé,  pendant  cette  première  session, 
dos  demandes  en  e/ection,  qui  ont  été  présentées  au  nombre  de  vingt-quatre  (I); 
vous  avez  été  appelés  vous-mêmes  à  les  examiner  préparatoirement  en  sections, 
pt  vous  allez  avoir  à  vous  prononcer  par  un  scrutin  définitif. 

Il  Plusieurs  autres  objets  ont  également  occupé  le  conseil. 

II  L'un  de  nos  collègues,  M.  Brunet-Debaines,  a  adressé  deux  propositions. 

Il  La  première  exprimait  le  désir  que,  chaque  année,  un  tableau  indicatif 
des  membres  de  la  Société  fut  déposé  dans  les  différentes  cours  et  tribunaux 
ainsi  que  chez  tous  les  officiers  ministériels  et  dans  les  administrations 
auxquelles  la  connaissance  peut  en  importer.  Le  conseil  a  pensé  que  ce  vœu 
était  rempli,  du  moins  autant  que  le  permet  la  situation  actuelle  de  la  Société, 
par  l'envoi,  précédemment  indiqué,  des  statuts  et  de  la  composition  de  la  So- 
ciété, aux  présidents  et  vice-présidents  des  différents  tribunaux;  envoi  qui 
pourra  être  suivi  de  celui  de  la  liste  générale,  que  vous  devez  publier  chaque 
année  aux  termes  de  l'art.  2  des  statuts. 

II  Par  sa  seconde  proposition,  notre  collègue  émettait  le  vœu  que  la  Soclécé 
arrivât  à  des  travaux  effectifs,  et  que,  pour  en  raeiliter  les  moyens,  il  fill  créé 


({)  Nota.  Une  vingt-cinquième  demande,  celle  de  M.  Pétiaux,  architecte  de  Va- 
lenciennes,  est  parvenue  trop  tard  pour  pouvoir  être  eiaminée  dans  la  dernière 
réunion  des  sections  ;  elle  leur  sera  soumise  dans  leurs  prochaines  réunions. 


95 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


90 


des  commissions  spéciales  d'art  pratique,  de  voirie,  de  conlenlieiix,  ainsi  que 
pour  ce  qui  concerne  les  honoraires  des  arcliilcctes. 

i(  Le  conseil  a  trouvé,  dans  les  développements  de  celte  proposition,  des  ob- 
servations utiles  et  qu'il  importera  de  ne  pas  perdre  de  vue;  mais  il  a  pensé 
que  la  création  de  commissions  spéciales  permanentes  introduirait  une  nou- 
velle organisation  dans  celle  qui  résulte  des  statuts  et  règlements,  lesquels 
laissent  d'ailleurs  au  conseil  et  à  la  Société  la  faculté  de  former  au  besoin  les 
commissions  qui  pourraient  être  nécessaires  pour  l'examen  de  telles  ou  telles 
questions. 

K  C'est  ce  qui  a  en  effet  eu  lieu  pour  une  question  de  mitoyenneté,  dont 
l'examen  a  été  proposé  par  votre  secrétaire  principal.  Comme  il  importait  de 
réunir,  pour  l'examen  d'une  question  de  cette  nature,  tous  les  documents  que 
pourraient  donner  les  différeuts  membres  de  la  Société,  le  conseil  a  engagé  les 
sections  à  en  faire  un  examen  préparatoire  et  à  désigner  chacune  un  membre 
pour  faire  partie  d'une  commission  spéciale  (1)  qui,  après  un  examen  appro- 
fondi, communiquera  son  rapport  au  conseil. 

Cl  Notre  collègue  M.  Pcllieux,  sur  la  présentation  qui  lui  a  été  faite,  ainsi 
qu'à  vous  tous,  du  diplôme  voulu  par  l'art.  3  des  statuts,  a  émis  le  regret  qu'il 
ne  portât  que  la  signature  d'un  de  vos  vice-présidents,  en  l'absence  de  notre 
vénérable  président  et  de  votre  secrétaire  principal,  et  le  désir  que,  ainsi  que 
cela  avait  effectivement  eu  lieu  pour  les  lettres  de  nominations  primitives,  ce  di- 
plôme portât  les  noms  de  tous  les  membres  du  bureau. 

«  Telles  avaient  en  effet  été  aussi  les  premières  vues  de  votre  bureau  ;  mais  le 
conseil  avait  remarqué  que,  ce  diplôme  n'ayant  qu'un  caractère  provisoire, 
ces  deux  signatures  suffiraient  quant  à  présent.  Il  n'a  pu  qu'apprécier,  du 
reste,  les  considérations  exprimées  dans  la  lettre  de  M.  Pellieux,  el  il  se 
propose  d'y  porter  la  plus  grande  attention  lors  de  l'examen  qu'il  compte 
faire,  dans  l'une  de  ses  plus  prochaines  séances,  des  mesures  relatives  i  une 
sorte  de  concours  auquel  pourraient  être  appelés  les  différents  membres  de 
la  Société  pour  l'étude  d'un  diplôme  définitif  Ainsi  que  d'une  medaiHe  de  la 
Société. 

«Un  membre  du  conseil,  M.  Moreau,  lui  a  soumis,  dans  sa  dernière  séance, 
une  proposition  de  la  plus  haute  importance,  puisqu'elle  concerne  l'ensei- 
gnement. Forcé  de  s'occuper  de  préférence  des  objets  qui  devaient  vous  être 
soumis  aujourd'hui,  le  conseil  a  du  ajourner  à  sa  prochaine  séance  l'cvamen 
de  cette  proposition. 

«  Le  temps  lui  a  également  manqué  pour  entendre  la  lecture  de  questions 
adressées  par  un  autre  membre  du  conseil,  M.  Danjoy,  relativement  i  la  dé- 
linilion  qu'on  doit  attacher  aux  mots  architecte,  architecture,  etc.,  et  aux 
inductions  qu'on  doit  en  tirer.  Ce  sera  également  l'objet  des  prochains  tra- 
vaux du  conseil. 

«  Sur  la  proposition  de  notre  collègue  M.  Girard,  deux  propriétaires  ont, 
par  un  compromis,  chargé  votre  président  de  désigner  l'un  de  vous,  au  ju- 
gement duquel  ils  entendent  s'en  rapporter  comme  arbitre,  pour  la  solution 
de  plusieurs  questions  relatives  à  un  compte  de  mitoyenneté.  Votre  président 
se  propose  de  désigner  à  cet  effet  M.  Paul  Lclong. 

«MM.  Carilian-Gœury  et  Victor  Dalmont  vous  avaient  adressé,  lors  de  votre 
dernière  réunion  générale,  une  demande  tendant  à  obtenir  l'autorisation  de 
prendre  le  titre  de  libraires  de  la  Société  centrale  des  Architectes.  Cette 
maison  de  librairie  est  en  même  temps  fort  ancienne,  fort  importante  et  tout 
à  fait  spéciale  pour  l'architecture;  votre  conseil  a  donc  pensé  qu'il  ne  pou- 
vait y  avoir  qu'avantage  à  accéder  à  leur  demande,  et  nous  vous  en  soumet- 
tons en  conséquence  la  proposition. 

«MM.  Guichard  et  Vasnier,  greffiers  de  bâtiments, ont  offert  à  votre  prési- 
dent leur  concours  entièrement  gratuit  à  titre  de  sous-secrétaires,  archivis- 
tes  et  bibliothécaires.  Le  conseil  n'a  pu  que  leur  savoir  infiniment' de  gré  de 
cette  offre  obligeante;  mais  il  a  considéré  :  1»  qu'il  ne  conviendrait  pas  que 
la  Société  acceptât  des  services  gratuits  d'autres  personnes  que  ses  membres; 
20  qu'aux  termes  des  statuts,  ses  seuls  membres  aussi  peuvent  remplir  les 
fonctions  dont  il  s'agit.  Il  a  donc  pensé  que  la  proposition  de  MM.  Guichard 
et  Vasnier  ne  pouvait  être  acceptée,  mais  qu'il  y  avait  lieu  de  leur  en  témoi- 
gner  vos  remercîmonts. 

«  Enfin,  un  propriétaire  s'est  également  adressé  a  votre  président  pour  le 
prier  de  lui  hive  savoir  s'il  devait  continuer  des  poursuites  judiciaires  inten- 
tées contre  son  voisin  pour  raison  d'affaiblissement  apporté  au  mur  mitoven 


(1)  La  commission  est  composée  de  MM.  Danjean,  Petit  de  Villeneuve   Girard 
Mmon),  Garuaud,  Brunet-Del,aisnes,  Renié,  Chabrol,  Gourlier  el  Vigoureui. 


qui  les  sépare,  par  suite  de  U  reconstruction  i  l'alignement  de  U  façade  de 
ce  dernier;  mais  votre  conseil  a  ûù  remarquer  qu'une  insiance  Judiciaire 
étant  déjà  commencée,  vous  ne  devez  aucunement  intertenir  en  pareille  cir- 
constance, surtout  lorsqu'une  seule  des  parties  intéressées  s'adresse  i  vous. 
Il  Tel  est,  messieurs,  l'ensemble  des  opérations  de  votre  bureau  el  de 
votre  conseil  pendant  le  premier  semestre  qui  s'est  écoulé  <lepuis  votre  con- 
stitution définitive.  Le  conseil  a  pensé  devoir  faire  imprimer  le  bulletin  de 
vos  deux  dernières  réunions  générales,  et  l'adresser  1  chacun  des  membres 
résidants  ou  non  résidants,  afin  que  tous  soient  parfaitement  informés  de* 
actes  de  la  Société.  Vous  penserez  probablement  qu'il  doit  en  éire  ainsi  du 
présent  compte-rendu,  et,  en  général,  du  procès-verbal  de  cette  séance. 

(/.a  iuite  au  prochain  numéro.) 


CHRONIQUE. 

—  M.  César  Dalv,  archilecle,  directeur  de  la  Revue  de  V Àrchtlreture 
el  des  Travaux  Publics,  vient  d'éire  élu  membre  honoraire  el  rorres- 
pondiinl  lie  Vlnstilul  royal  des  Architeclrs  Urilanniques.  On  se  nip|>elle 
que  .M.  César  Daly  a  dijà  été  l'objei,  l'an  dernier,  d'une  faveur  analogue 
de  la  pan  de  l'Académie  royale  des  Beaux-.\rls  de  Sio<  Lholm. 

L'fnsft(u(  britannique  a  déclaré  vouloir  ainsi  témoigner  de  son  estime 
pour  les  travaux  publiés  par  notre  compatriote  sur  les  diverses  bran- 
ches de  l'architecture.  Nous  reproduisons  ici  la  lettre  de  M.  le  vice-pré- 
sident de  l'Institut. 

26  Janvier  MU. 
Monsieur  et  cher  ami. 

J'ai  le  plaisir  de  vous  informer  que  les  membres  de  Vlnstilul  des 
Architeclrs  Britanniques,  dans  leur  séance  du  lundi  22  de  ce  mois,  se 
sont  fait  l'honneur  de  vous  élire  membre  honoraire  el  correspondant  de 
leur  corps.  Les  membres  de  l'Iiistilut.  justes  appréciateurs  des  ou- 
vrages par  lesquels  vous  avez  contribué  à  rehausser  notre  b<'l  art,  sont 
heureux  de  vous  offrir  ce  témoignage  de  leur  respect  et  de  leur  estime. 
Celte  sociéié  étant  établie  pour  l'avancement  et  la  culture  de  l'art,  par 
des  investigations  dans  les  diverses  branches  de  science  qui  s'y  ratta- 
chent, les  membres  osent  espérer  que  vous  voudrez  bien  leur  tran«- 
nieilre  de  temps  à  autre  les  communications  que  vous  jugerez  devoir 
icndre  à  cet  objet,  soit  en  théorie,  soit  en  pratique. 

Quand  notre  pays  aura  la  satisfaction  de  vous  posséder,  soyez  assuré. 
que  les  membres  de  V  Institut  des  Archilecles  Britanniques,  tant  collec- 
tivement qu'individuellement,  s'empresseront  de  vous  faciliter  les  objets 
de  votre  voyage,  et  de  vous  convaincre  par  tous  les  moyens  en  leur  pou- 
voir de  leur  respect  pour  un  confrère  si  distingué. 

Je  saisis  cette  occasion  de  vous  exprimer  la  considération  avec  la- 
(|UL'llc  je  suis. 

Monsieur  et  cher  confrère. 

Votre  serviteur  et  ami  très-Qdéle, 
T.  L.  DoNALDSon. 

—  L'espace  nous  manque  aujourd'hui  pour  reproduire  les  observations  pré- 
sentées par  la  Société  des  Architectes  à  la  Chambre  des  députés  relativement 
à  la  loi  des  patentes,  et  dont  l'effet,  comme  on  le  sait,  a  été  de  soustraire  les 
arcliitcctes  à  la  patente  et  de  les  faire  assimiler,  sous  ce  rapport,  aux  autres  ar- 
tistes. —  Nous  sommes  aussi  contrainis  de  remettre  i  notre  prochain  numéro 
plusieurs  articles  qui  n'ont  pu  trouver  place  dans  celui-ci.  Nous  aurons  égale- 
ment à  parler  de  deux  Revues  d'archéologie  dont  nous  venons  de  rece«oir  les 
prospectus,  et  de  plusieurs  nouveaux  projets  d'Opéra  récemniei-t  èclo»,  entre 
autres  celui  de  M.  H.  Horcau,  architecte,  el  celui  de  M.  Meynadier,  auteur  de 
travaux  curieux  sur  la  ville  de  Paris  ;  tous  deux  ont  choisi  i  peu  près  le  même 
emplacement,  au  point  de  rencontre  des  boulevards  Montmartre  el  des  Italiens, 
et  leurs  plans  ont  entre  eux  certaine  analogie,  bien  que  sans  doute  chacun  ait 
été  conçu  et  élaboré  dans  l'ignorance  la  plus  complète  d'un  travail  rital. 

Nous  comptons  publier  le  travail  de  M.  H.  Meynadier. 


César  DALY, 

Directeur  rédacteur  rn  chef. 

PAaiS     -   TTP.   LtCRllfPli  ET  CDU»,,  «CE  OAMIETTE  ,  S. 


=^     -S 
&a      _ 


as      -a 


Rtrrutf'  (^rraJfiU  l'ArchÀtci:ture  fl  i/t-s  TraDiUdicPiU>lu»\       Pa^U,  /t^^--  de  Fm'sttmhrr^,  N"6 


Vol  i.  PI.  4. 


Fig.z. 


Fu/4- 


X/t m *  A  - 


//'("!  i'ij^rrr.tii   .^r/ 


llJiOKlfc  Dt  L  KyUlLlbKt  UtD  VUU  il.^  m  jiLlULAi 


T.niie  !(i5il('iillf  lie  r  vi'chilcrluii'  .1  .l'v    i  mh,,   )MiMii-.s  fins,  nie  dp  Kur>ti-mlirt's  ,  l; 


Vol.  S  l>l. 


l'orlc  (lu  .lu.^cinciil   ou  de  la  .lii-licc. 


Vup  inli'iiciiic  dp  r.\lc;izid);i. 


«OxM'ii  .loues  •Ici. 


PALAIS   DE   L'ALHAMBRA 


(  G  R  K  N  A  U  E  ) 


97 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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L'ALHAMBRA. 


Beaucoup  de  personnes,  qui  ignorent  h  la  fois  la  langue  d'Ho- 
mère et  celle  de  Virgile,  savent  cependant  que  l'Iliade  et  l'E- 
néide existent  ;  elles  ne  connaissent  pas  davantage  les  idiomes  de 
la  Grande-Bretagne  et  de  l'Italie,  et  cependant  elles  vous  parle- 
ront du  Paradis  perdu,  de  Milton,et  de  V Enfer,  du  Dante.  Quelque 
chose  de  pareil  se  passe  parmi  les  architectes  :  peu  d'entre  eux  ont 
visité  l'Espagne,  et  cependant  tous  connaissent  l'existence  de  VAl- 
hambra;  quelques-uns  ont  lu  des  récits  pittoresques  qu'en  ont  faits 
des  voyageurs,  mais  combien  peu  ont  étudié  le  chef-d'œuvre 
arabe  1 

Pour  la  grande  majorité  des  architectes  français,  l'Alhambra  est 
encore  quelque  chose  de  fantastique  qui  appartient  au  royaume 
des  fées.  Le  Château  rouge  de  Grenade  (l)  se  marie  dans  leur  esprit 
aux  contes  des  Mille  et  une  Nuits,  dont  les  héros  vivent  familière- 
ment avec  des  magiciens ,  des  génies  et  des  goules.  Et  de  même 
qu'ils  ont  peine  à  comprendre  comment  les  récits  des  Mille  et  une 
Nuits  peuvent  rappeler,  ne  fut-ce  que  de  loin,  la  vie  réelle  d'une 
race  nombreuse  d'hommes  en  chair  et  en  os,  de  même  aussi  ils  ont 
quelques  difficultésà  se  figurer,  d'après  la  description  desvoyageurs, 
quel  peut  être  le  caractère  précis  du  célèbre  palais  arabe,  qui  sem- 
blerait couvert  d'or  et  de  pierreries. 

Et  en  vérité,  pourrait-il  en  être  autrement?  Combien  de  pré- 
jugés les  nations  de  l'Occident,  qui  sont  le  plus  immédiatement  en 
contact,  n'entretiennent-elles  pas  déjà  les  unes  contre  les  autres, 
uniquement  à  cause  de  quelques  différences  dans  les  habitudes  de 
la  vie,  différences,  d'ordinaire,  cependant  très-fondées  en  raison? 
Et  quels  jugements  erronés  ne  porteront-eHes  donc  pas  sur  des 
choses  et  des  hommes  qui  offrent,  pour  ainsi  dire,  une  négation 
perpétuelle  des  principes  reconnus  par  tout  l'Occident  ? 

Comment  en  effet  justifier  d'après  les  règles  de  l'art  antique  les 
formes  variées  et  surprenantes  de  l'art  arabe?  Où  peut-on  décou- 
vrir, dans  les  célèbres  poétiques  d'Aristote,  d'Horace  et  de  Vitruve, 
les  principes  de  l'étonnant  poëme  bâti  par  les  rois  de  Grenade  ? 

Nulle  part,  assurément;  et  cependant  l'Alhambra  est  un  chef- 
d'œuvre. 

(1)  Alhambra,  en  arabe,  signifie  le  rouge. 


Que  conclure? 

Y  aurait-il  par  hasard  deux  poétiques,  cent  poétiques?  et  celle  qui 
a  régi  le  monde  antique,  et  que  nos  académies  ont  ressuscitée  depuis 
quelques  siècles,  correspondrait-elle  seulement  à  une  forme  parti- 
culière du  beau?  ne  serait-elle  qu'une  des  touches  d'un  merveilleux 
clavier  dont  le  jeu  complet  réclamerait  le  concours  de  toutes  les 
races  humaines  qui  habitent  les  diverses  zones  du  globe  ;  clavier 
dont  les  accords  seraient  destinés  à  se  perfectionner  et  à  s'accroître 
en  éclat,  en  richesse  et  en  variété,  dans  la  proportion  même  des 
progrès  des  races  humaines  vers  l'unité  universelle  ;  clavier  dont 
jusqu'aujourd'hui  les  hommes  n'ont  jamais  pu  entendre  ni  même 
pressentir  le  jeu  complet? 

Nous  l'avouons,  telle  est  en  effet  notre  pensée.  La  nature  elle- 
même  ne  varie-t-elle  pas  les  formes,  les  couleurs  et  les  essences  de 
ses  productions  suivant  les  diverses  régions  de  la  terre?  La  végéta- 
tion du  Nord  est-elle  la  même  que  celle  du  Midi?  Le  chien-cheval 
du  Kamtchatka  ressemble-t-il  au  chameau  de  l'Arabie,  à  l'éléphant 
de  l'Inde,  au  llama  du  Pérou? 

Les  races  humaines  ne  sont-elles  pas  aussi  différenciées  de 
couleurs,  de  formes,  de  caractère,  de  langage  et  de  goût?  n'ha- 
bitent-elles pas  des  climats  différents  nécessitant  des  costumes  et 
des  régimes  différents?  Comment  se  pourrait-il  donc  que  ces  races' 
si  dissemblables  au  physique  et  au  moral,  ne  le  fussent  pas  dans 
leur  manière  de  sentir  et  de  concevoir  le  beau?  Evidemment  cha- 
cune d'elle  a  son  sentiment  spécial  d'art,  son  beau  particulier, 
&a  poétique,  enfin,  et  il  ne  serait  pas  plus  raisonnable  déjuger  des 
manifestations  de  l'art  chez  les  divers  peuples  de  la  terre,  d'après 
le  sentiment  d'un  seul  peuple  ou  d'une  seule  race,  qu'il  ne  serait 
raisonnable  d'imposer  aux  habitants  de  pays  différents  le  même 
costume  et  le  même  régime  alimentaire. 

Pour  un  disciple  rétif  de  Vitruve  et  d'Aristote,  l'Alhambra, 
comme  les  grottes  d'Elora  et  les  tours  de  porcelaine  de  la  Chine, 
doit  nécessairement  appartenir  tout  entier  au  monde  de  la  rêverie 
et  du  caprice.  Il  serait  donc  à  propos  peut-être,  avant  de  pénétrer 
dans  la  forteresse  musulmane,  et  pour  ne  pas  nous  livrer  à  de 
fausses  interprétations  en  expliquant  le  génie  arabe  à  l'aide  du  gé- 
nie greco-latin  francisé,  de  tâcher  de  glaner  auprès  des  Arabes 
mêmes  quelques  notions  sur  leur  goût,  sur  leur  idéal  du  bon  et  du 
beau,  idéal  nécessairement  en  rapport  avec  l'état  climatérique,  les 
productions  et  l'aspect  de  leur  pays,  en  rapport  aussi  avec  leurs 
mœurs  et  leurs  croyances  religieuses. 

L'Arabie,  c'est  l'empire  du  feu.  Presque  jamais  de  nuages  dans 
le  ciel,  de  pluies  ni  de  brouillards  sur  la  terre  ;  des  vents  brûlanis; 
des  tourbillons  de  sables  que  soulève  le  vent  du  désert;  nulle  ri- 
vière navigable,  à  peine  quelques  légers  filets  d'eau  ;  çà  et  là  des 
sources  abreuvant  des  pâturages  isolés  et  séparés  par  des  déserts 
inhabitables.  Des  tribus  d'hommes,  sur  ce  sol  ainsi  morcelé,  voya- 
geant surtout  la  nuit,  et  réglant  leur  route  à  l'aide  des  étoiles,  cam- 
pent sous  des  tentes,  montent  des  chameaux,  des  coursiers,  les 
meilleurs  de  l'univers,  et,  par  des  guerres  intestines,  se  disputent 
les  rares  pâturages  de  ce  sol  brûlant;  aticune  forél,  enfin  une  na- 
ture triste,  presque  dépouillée,  ardée  par  les  rayons  d'un  soleil 
vertical. 

En  résumé,  l'Arabie  est  une  terre  généralement  aride,  où  pres- 
que jamais  l'œil  du  voyageur  ne  repose  sur  une  vqiétation  riche  et 
puissante,  où  jamais  son  oreille  n'est  frappée  du  mugissement  des 
fleuves,  mais  où  cependant  l'on  rencontre  encore  de  loin  en  loin  des 
oasis  fraîches  et  ombreuses  offrant  les  plus  heureux  contrastes  avec 
T.  V.  ' 


99 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


100 


l'aspect  stérile  et  infécond  du  reste  de  la  contrée.  L'idéal  du  bon  et 
du  beau  doit  donc  nécessairement  s'allier,  dans  la  pensée  de  l'A- 
rabe, avec  l'idée  d'une  grande  fécondité,  de  délicieux  ombrages  et 
d'eaux  abondantes  ;  aussi,  avec  ces  données,  et  en  se  rappelant  l'in- 
fluence excitante  des  climats  secs  et  chauds  sur  les  sens,  on 
se  trouvera  en  mesure  de  créer  de  toutes  pièces  le  paradis  de 
Mahomet. 

En  présence  de  l'aspect  monotone  de  son  pays,  d'un  spectacle 
d'une  si  désespérante  uniformité,  l'Arabe,  obéissant  à  ce  besoin  de 
variété  qui  le  domine,  se  réfugie,  par  une  réaction  très-naturelle, 
dans  un  monde  idéal  que  son  imagination  ardente  peuple  de  créa- 
tions poétiques,  conformes  au  génie  caractéristique  de  sa  race. 
Admirateur  fervent  des  merveilles  de  la  magie,  dont  la  puissance 
s'exerce  par  l'intermédiaire  des  anges  et  des  génies,  il  croit  aussi  à 
l'influence  directe  des  corps  célestes  sur  les  destinées  individuelles 
des  hommes.  Toutes  ces  notions  de  magie  et  d'astrologie  se  lient 
intimement  avec  les  croyances  religieuses  de  l'Arabe,  qui  linit 
si  bien  par  se  créer,  comme  au  dedans  de  lui,  un  monde  idéal  en- 
tièrement indépendant  de  la  vie  qui  l'entoure,  que  ce  monde  et 
ces  existences  prennent  pour  lui  un  relief  presque  égal  à  celui  de 
la  nature  même.  Couché  à  l'ombre,  loin  de  tout  bruit,  aspirant 
lentement  la  fumée  du  tabac,  il  oublie  volontiers  la  vie  extérieure 
pour  se  concentrer  plus  entièrement  dans  l'idéal  qu'il  s'est  créé. 
Tels  sont  les  besoins  de  la  nature  arabe,  besoins  que  le  Koran  et  les 
traditions  religieuses  de  l'islamisme  satisfont  pleinement;  de  laces 
extases  qui  les  saisissent  souvent,  ce  fanatisme  religieux  qui  leur 
a  doimé  le  pouvoir  d'agir  si  puissamment  sur  le  monde. 

Et  lorsqu'on  se  rappelle  que  la  religion,  toujours  le  plus  puis- 
sant agent  d'union  d'un  peuple,  est  presque  l'unique  lien  des 
tribus  sans  propriété  foncière ,  on  comprend  aisément  que  la  loi 
religieuse  devienne  identique  avec  la  loi  politique,  que  son  in- 
fluence se  reconnaisse  en  tout  et  partout,  et  que  ce  soit  même  la 
religion  qui  attache  les  sujets  à  leur  chef.  Pour  compléter  donc  no- 
tre notion  sur  le  beau  idéal  des  Arabes,  ouvrons  le  Koran.  Nous  y 
verrons  comment  les  circonstances  physiques  de  climat,  etc., 
ont  d'abord  agi  fortement  sur  la  conception  religieuse,  et  nous 
reconnaîtrons  ensuite  combien  la  conception  religieuse  a  dû  réa- 
gir puissamment  à  son  tour  sur  le  caractère  de  l'art  arabe,  puis- 
qu'elle a  pu  lui  donner,  dans  des  pays  différents,  une  unité  de 
caractère  qu'il  n'eût  pu  conserver  au  même  degré  sans  cette  puis- 
sante influence.  Pourrions-nous  mieux  faire,  d'ailleurs,  pour  con- 
naître l'idéal  du  bien-être  arabe,  que  de  choisir  le  li\  re  du  Pro- 
phète, le  livre  que  tout  disciple  de  Mahomet  révère  comme  la 
parole  de  Dieu  même,  comme  le  code  parfait,  la  source  de  toute 
science,  de  tout  art;  le  livre  enfin  «  sur  lequel  il  n'y  a  point  de 
doute  (Koran,  ch.  ii,  v.  1),  qui  est  une  révélation  du  souve- 
rain du  monde,  —  que  l'esprit  fidèle  (l)  apporta  d'en  haut,  —  et 
déposa  sur  le  cœur  de  Mahomet,  afin  qu'il  fût  apôtre.  »  (Koran, 
ch.  XXVI,  V.  192...  194.) 

Voici,  après  une  lecture  attentive  du  Koran,  quelques-uns  des 
passages  que  nous  avons  cru  devoir  extraire  de  ce  livre  : 

«  Annonce  à  ceux  qui  croient  el  qui  pratiquent  les  bonnes  œuvres, 
qu'ils  auront  pour  demeure  des  jardins  arrosés  de  courants  d'eau.  » 
(Ch.  Il,  V.  23.  ) 

«  Tous  ceux-là  éprouveront  l'indulgence  du  Seigneur  et  habiteront 


(1)  L'ange  Gabriel. 


éternellement  des  jardins  arrosés  par  des  courants  d'eau.   Quelle  est 
belle  la  récompense  des  vertueux!  »  (Ch.  m,  v.150.) 

L'exclamation  qui  termine  le  verset  précédent,  ce  ci;i  d'admira- 
tion exprime  énergiquemeut  le  prix  que  les  Arabes  attachent  à  une 
belle  végétation ,  à  la  fraîcheur  des  eaux ,  à  cette  image  d'une 
oasis  céleste.  Voici  encore  la  même  pensée,  la  même  admiration  : 

«  Ceux  qui  écouleront  Dieu  et  l'apolre  seront  iiitroduils  dans  les  j'ar- 
dins  arrosés  par  des  courants  d'eau;  ils  y  (lemcurcronl  éternellement . 
C'est  un  bonheur  ineffable  '.  »  (Ch.  iv,  v.  17.) 

Au  fur  et  à  mesure  que  nous  avancerons  dans  le  Koran,  nous 
verrons  se  compléter  de  plus  en  plus  le  tableau  du  paradis.  Dans 
les  trois  premiers  chapitres,  il  n'est  parlé  simplement  que  de 
jardins  arrosés  de  courants  d'eau  :  dans  le  quatrième  chapitre , 
le  Prophète  ajoute  un  nouveau  détail  : 

«  Ceux  qui  croiront  rt  qui  pratiqueront  les  bonnes  œuvres  seront  in- 
troduits dans  les  jardins  arrosés  de  courants  d'eau;  ils  y  demeureront 
éternellement  ;  ils  y  trouveront  des  femmes  exemptes  de  toutes  souillures 
el  des  ombrages  délicieux.  »  (Cb.  iv,  v.  60.) 

Nous  allons  donner  encore  quelques-uns  de  ces  extraits  pour 
que  notre  lecteur  soit  parfaitement  édifié  sur  le  caractère  du  bon- 
heur idéal  des  Arabes;  il  nous  sera  ensuite  facile  de  remontera 
l'origine  de  certaines  dispositions  caractéristiques  du  lieu  de  féli- 
cité rêvé  par  les  disciples  de  Mahomet. 

«  Dieu  a  promis  aux  croyants,  hommes  et  femmes,  tes  jardins  baignés 
par  des  rivières;  ils  y  demeureront  éternellement  ;  ils  auront  des  habi- 
tations charmantes  dans  les  jardins  d'Édtn  el  une  grjce  infinie  de 
Dieu.  C'est  un  bonheur  immense!  «  (Cb.  ix,  v.  73.) 

«  Ceux  à  qui  nous  avions  précédeminenl  promis  de  belles  récompenses, 
seront  éloignés  de  ce  séjour  terrible  (  l'enfer).  Ils  n'entendront  pas  le 
moindre  bruit,  etc..  .  »  (Ch.  xxf,v.  101  et  102.) 

«  Ceux  qui  auront  cru  el  pratiqué  les  bonnes  œuvres  se  divcrlironi 
dans  un  parterre  de  fleurs.  »  (Ch.  xxx,  v.  14.) 

«  Quant  à  ceux  qui  craignent  leur  Seigneur,  ils  auront  au  paradis 
des  appartements  au-dessus  desquels  soni  construits  d'autres  apparte- 
ments (I)  ;  à  leurs  pieds  coulent  des  ruisseaux.  »  (Ch.  xxxix,  v.  2t.) 

«  Voici  le  tableau  du  paradis  qui  a  été  promis  aux  hommes  pieux  : 
des  fleuves  dont  l'eau  ne  se  gâte  jamais,  des  fleuves  de  lait  dont  le  goùl 
ne  s'altérera  jamais,  des  fleuves  de  fin  doux  a  boire,  des  fleuves  de  miel 
pur,  toutes  sortes  de  fruits  et  le  pardon  des  péchés.  En  sera-l-il  ainsi 
avec  celui  qui,  condamné  au  séjour  du  feu,  sera  abreuvé  d'eau  bouillante 
qui  lui  déchirera  les  entrailles?  »  (Ch.  xLvii,  v.  16  el  17.) 

«  Ceux  qui  craignent  la  majesté  de  Dieu  auront  deux  jardins. 

«  Lequel  des  bienfaits  (.'e  Dieu  nierez-vous? 

«  Tous  deux  ornés  de  bosquets. 

a  Lequel,  etc. 

0  Dans  tous  deux,  deux  sources  vives. 

«  Lequel,  etc. 

«  Dans  tous  deux,  deux  espèces  de  chaque  fruit. 

«  Lequel,  etc. 

«  Ils  se  reposeront  accoudés  sur  des  lapis  en  étoffe  de  iot<  brochée 
d'or.  Les  fruits  de  deux  jardins  seront  à  la  portée  de  quiconque  voudra 
les  cueillir. 

a  Lequel,  etc. 

«  Là  seront  déjeunes  vierges  au  regard  modeste,  que  n'a  jamais  tou- 
chées ni  homme  ni  génie. 


(1)  Sans  doute  des  maisons  i  plus  d'un  étage,  des  habitations  élevées  et  d'un 
caractère  monumental. 


101 


REVUK  DE  LAUCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


102 


«  Lequel,  eto. 

«  Elles  ressemblent  à  l'hyacinthe  et  au  coniil. 

«  Lequel,  etc. 

«  Quelle  est  la  récompense  du  bien,  si  ce  n'est  le  bien  ? 

«  Lequel,  eic. 

«  Outre  ces  deux  jardins,  deux  autres  s'y  trouveront  encore. 

«  Lequel,  eic. 

«  Deux  jardins  couverts  de  verdure. 

«  Lequel,  etc. 

«  Où  jailliront  doux  sources. 

«  Lequel,  eic. 

«  Là  il  y  aura  des  fruits,  des  palmiers  et  des  grenades. 

«  Lequel,  e(c. 

«  Là  il  y  aura  des  vierges  jeunes  et  belles. 

«  Lequel,  etc. 

«  Des  vierges  aux  grands  yeux  noirs,  renfermées  d^ns  des  pavillons. 
•    «  Lequel,  etc. 

«  Jamais  homme  ni  génie  n'attenta  à  leur  pudeur. 

«  Lequel,  etc. 

«  Leurs  époux  se  reposeront  sur  des  coussins  verls  el  des  lapis  ma- 
gnifiques. 

«Lequel  des  bienfaits  de  Dieu  nierez-vous? 

Béni  soit  le  nom  du  Seigneur,  plein  de  majesté  et  de  gloire!» 
(Ch.  XLvi,  V.  46....  78.) 

Lorsque  l'événement  (le  jugement  dernier)  arrivera. 

Alors  vous,  hommes,  serez  partagés  en  trois  troupes. 

Les  hommes  de  la  droite  (oh  !  les  hommes  de  la  droite  !) 

Et  les  hommes  de  la  gauche  (oh  !  les  hommes  de  la  gauche!). 

Et  les  premiers  seront  les  derniers; 

Ceux-ci  seront  les  plus  rapprochés  de  Dieu  ; 

Ils  habiteront  le  jardin  des  délices. 

(II  y  aura  un  grand  nombre  de  ceux-ci  parmi  les  peuples  anciens, 

Et  un  petit  nombre  seulement  parmi  les  modernes), 

Se  reposeront  sur  des  sièges  ornés  d'or  et  de  pierreries. 

Accoudes  et  placés  en  face  les  uns  des  autres  ; 

Autour  d'eux  circuleront  des  enfants  éternellement  jeunes. 

Avec  des  gobelets,  des  aiguières  et  des  coupes  remplis  d'un  vin  ex- 
quis. 

Dont  ils  n'éprouveront  ni  maux  de  tête  ni  étourdissements; 

Avec  des  fruits  dont  ils  sont  friands, 

Et  de  la  chair  de  ces  oiseaux  qu'ils  aiment  tant. 

Autour  d'eux,  des  vierges  aux  yeux  noirs,  pareilles  aux  perles  dans 
leur  conque  : 

Telle  sera  la  récompense  de  leurs  œuvres. 

Ils  n'y  entendront  ni  discours  frivoles  ni  paroles  criminelles; 

On  n'y  entendra  que  les  paroles  :  Paix,  paix! 

Les  hommes  de  la  droite  (qu'ils  seront  heureux  les  hommes  de  la 
droite  !) 

Séjourneront  parmi  les  arbres  de  lotus  sans  épines. 

Et  les  bananiers  chargés  de  fruits,  du  sommet  jusqu'en  bas. 

Sous  des  ombrages  qui  s'étendront  au  loin, 

Près  d'une  eau  courante. 

Au  milieu  de  fruits  en  abondance 

Que  personne  ne  coupera,  dont  personne  n'interdira  l'approche  ; 

Et  ils  se  reposeront  sur  des  liis  élevés. 

Nous  créâmes  les  vierges  du  paradis  par  une  création  à  part; 

Nous  avons  conservé  leur  virginité  (1). 

Chéries  de  leurs  époux  el  d'un  âge  égal  au  leur, 

Elles  seront  destinées  aux  hommes  de  la  droite  ; 


(1)  Les  Moslims  croient  que  les  viergcsdu  paradis  ne  perdront  pas  leur  virgi- 
nité par  la  colîabltation  avec  leurs  époux  du  paradis. 


(      Il  y  en  aura  un  grand  nombre  parmi  les  anciens. 

Et  un  grand  nombre  parmi  les  modernes. 

Et  les  hommes  de  la  gauche  (oh  !  les  hommes  de  la  gauche  !) 

Seront  au  milieu  d'un  vent  pestilentiel  el  de  l'eau  bouillante. 

Dans  V ombre  d'une  fumée  noire. 

Dans  l'ombre  qui  n'est  ni  fraîche,  ni  agréable. 

Autrefois  ils  menaient  une  vie  pleine  d'aisance; 

Ils  persévéraient  dans  une  haine  implacable. 

Et  disaient  : 

Quand  nous  serons  morts,  quand  nous  serons  devenus  poussière  et 
os,  serons-nous  ranimés  de  nouveau, 

Ainsi  que  nos  pères  les  anciens? 

Dis  :  Les  anciens  comme  les  modernes 

Seront  infailliblement  rassemblés  au  rendez-vous  du  jour  fixé  d'a- 
vance ; 

Puis  vous,  hommes  plongés  dans  l'erreur,  vous  qui  ne  croyez  point. 

Vous  mangerez  le  fruit  d'un  arbre,  le  fruit  du  zakoum; 

Vous  vous  en  remplirez  le  ventre; 

Ensuite  vous  boirez  de  l'eau  bouillante. 

Comme  boil  un  chameau  altéré  de  soif. 

Tel  sera  leur  festin  au  jour  de  la  rétribution. 

(^Koran,  ch.  lvi,  v.  7,  ....  5(j.) 

Que  rencontrons-nous  dans  ces  tableaux  du  paradis?  des  plaisirs 
sensuels,  des  oasix  d'une  perfection  idéale,  des  eaux  abondantes,  des 
orôrc^magnifiques,  de  la  verdure,  des  fleurs,  des  fruits,  l'absence  de 
tout  bruit  de  nature  à  troubler  la  quiétude  voluptueuse  du  bienheu- 
reux qui  se  repose  sur  des  coussins  verts  brodés  d'or  et  habite  des 
tentes  de  perles  et  de  pierres  précieuses.  Et  si  maintenant  nous 
voulions  compléter  notre  analyse  en  recherchant  quelles  sont  les 
peines  que  le  Koran  annonce  aux  infidèles,  aux  hommes  de  la 
gauche,  nous  trouverions  qu'elles  forment,  avec  les  délices  du  pa- 
radis, la  même  antithèse  que  la  douleur  fait  avec  le  bonheur.  Aux 
citations  précédentes  sur  la  géhenne,  nous  ajouterons  encore  cel- 
les-ci : 

«  Ceux  qui  traitent  d'imposture  le  livre  (le  Koran)  connaîtront  la  vé- 
rité un  jour;  alors,  les  colliers  aux  cous  el  enchaînés,  ils  seront  livrés 
au  feu.  ))(Ch.  XL,  v.  72,73.) 

a  L'arbre  de  zakoum  sera  la  nourriture  des  coupables,  il  bouillon- 
nera dans  leurs  entrailles  comme  un  métal  fondu, 

«  Comme  bouillonne  l'eau  bouillante. 

«  On  criera  :  Saisissez  les  méchants,  et  versez  sur  leur  tête  le  tour- 
ment de  l'eau  bouillante.  (Ch.  xlv,  v.  43,  48.) 

«  Dieu  dira  aux  gardiens  de  l'enfer  :  Saisissez-le  et  liez-le; 

«  Puis  chauffez-le  au  feu  de  l'enfer. 

«  Chargez-le  ensuite  déchaînes  de  scixante-dix  coudées. 

«  Car  il  n'a  pas  cru  en  Dieu  le  Très-Haut. 

«  Aussi  aujourd'hui,  il  n'a  plus  de  protecteur, 

«  Ni  d'anlre  nourriture  que  le  pus.  »  (Ch.  lxix,  v.  30,  36.) 

«  La  géhenne  sera  toute  formée  d'embûches  ; 

«  Ils  n'y  goûteront  ni  la  fraîcheur,  ni  aucune  boissoA, 

«  Si  ce  n'est  l'eau  bouillante  et  le  pus.  »  (Ch.  lxxix,  v.  21,  25.) 

Nous  connaissons  maintenant  le  paradis  et  la  géhenne  de  l'Arabe  ; 
nous  savons  ce  qu'il  aime  et  admire,  ce  qu'il  espère  obtenir  et  oc 
qu'il  désire  éviter;  aussi,  en  attendant  qu'il  lui  soit  donné  de  pé- 
nétrer dans  les  jardins  arrosés  de  fleuves  d'une  eau  qui  ne  se  gâte 
jamais,  de  fleuves  de  lait  et  de  miel  ;  qu'il  lui  soit  permis  de  con- 
templer la  beauté  des  houris  aux  yeux  noirs,  de  se  promener  sur 
des  tapis  de  fleurs,  et  de  se  reposer  à  l'ombre  des  arbres  à  plusieurs 
fruits,  on  comprend  que  l'Arabe  ait  appliqué  son  génie  à  modeler 
son  habitation  terrestre  d'après  son  idéal  du  séjour  céleste ,  idéal 


03 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


10'» 


né  d'ailleurs  sous  la  double  influence  du  climat  de  son  pays  et  de 
la  nature  de  sa  race,  et  par  conséquent  parfaitement  en  rapport 
avec  les  besoins  physiques  que  l'architecte  doit  toujours  respecter. 

Une  retraite  inaccessible  à  tout  étranger,  éloignée  de  tout  bruit 
extérieur,  de  tout  ce  qui  pourrait  le  troubler  dans  ses  rêveries  et 
dans  ses  jouissances,  telle  est  la  première  condition  d'une  bonne 
habitation  de  musulman;  là,  couché  sur  des  divans,  dans  des  salles 
fraîches  ou  sous  de  belles  galeries  à  jour  dont  les  parois  sont  cou- 
vertes de  dorures  et  de  peintures  aux  couleurs  éclatantes,  ou  bien  à 
l'ombre  d'une  riche  végétation,  les  yeux  charmés  par  des  pcirterres 
de  fleurs,  l'ouïe  doucement  caressée  par  le  murmure  des  eaux  qui 
retombent  des  vasques  des  fontaines  et  rafraîchissent  l'air,  l'Arabe 
se  croit  au  comble  du  bonheur  réservé  aux  humains  ici-bas. 

Quelques-uns  de  nos  lecteurs  s'étonneront  peut-être  que  nous 
soyons  allé  en  Arabie  et  que  nous  ayons  voulu  même  visiter  le  para- 
dis et  la  géhenne,  pour  y  rechercher  l'explication  de  quelques-uns 
des  caractères  de  l'architecture  arabe  en  Espagne.  Nous  prierons 
ceux-là  de  vouloir  bien  se  rappeler  que  les  musulmans  sont  peut- 
être  les  plus  fanatiques  de  tous  les  sectaires  religieux ,  que  pour 
eux  le  Koran  est  à  la  fois  le  code  législatif  parfait,  l'arbre  de  la  vé- 
ritable science,  le  livre  inspiré,  la  parole  de  Dieu;  et  ils  compren- 
dront qu'une  foi  si  entière  dans  la  vertu  absolue  du  Koran  a  dû 
nécessairement  exercer  une  immense  influence  sur  l'esprit  des  po- 
pulations musulmanes,  et  établir  dans  la  législation  et  les  mœurs 
de  ces  sectaires  une  uniformité  que  les  exigences  matérielles  des 
climats  différents  sous  lesquels  ils  vivent  n'aurait  pas  seule  fait 
naître,  et  qui  a  dû  nécessairement  se  retrouver  dans  l'art,  qui  n'est 
que  la  forme  sous  laquelle  se  manifeste  extérieurement  la  vie  inté- 
rieure. 

Pour  juger  donc  du  mérite  de  l'architecture  des  Arabes  en  Es- 
pagne ,  il  n'eût  point  suffi  de  consulter  les  besoins  matériels,  qui 
sont  les  conséquences  du  climat  d'Espagne  ;  il  fallait  encore  étudier 
le  beau  idéal  arabe ,  devenu  le  beau  idéal  de  tous  les  musulmans, 
turcs,  égyptiens,  etc.,  qui  est  exprimé  dans  le  Koran,  livre  qui  fut 
formulé  en  Arabie ,  sous  l'influence  de  la  nature  arabe  pure ,  et 
par  conséquent  quelque  peu  différent  de  ce  qu'eût  été  un  tel  livre 
écrit  sous  l'influence  du  climat  d'Espagne,  devant  le  spectacle  d'une 
nature  riche  et  verdoyante.  Il  nous  fallait  donc  bien  consulter  le 
Koran,  et,  pour  mieux  pénétrer  son  esprit,  il  était  utile  de  rappeler 
les  conditions  physiques  du  pays  qui  l'avait  vu  naître  et  avait  pu 
exercer  de  l'action  sur  son  caractère. 

Nous  terminerons  ici  nos  considérations  préliminaires,  et  nous 
aborderons  l'étude  de  l'Alhambra  en  prenant  pour  guides  les 
dessins  que  M.  Ow  en  Jones  a  publiés  sur  ce  beau  monument ,  et 
qui  forment  un  livre  qui  est  lui-même  un  monument  digne  en 
tout  point  de  l'œuvre  arabe. 

MM.  Owen  Jones,  architecte  anglais,  et  Jules  Goury,  architecte 
français,  venaient  de  parcourir  ensemble  l'Egypte  pour  étudier 
les  restes  précieux  de  l'architecture  arabe  que  cette  contrée  possède, 
et  étaient  encore  hâlés  du  soleil  qui  rougit  depuis  trois  mille  ans 
les  monuments  de  Sésostris,  lorsque,  l'enthousiasme  dans  l'âme, 
la  santé  et  la  vigueur  au  corps,  ils  se  retournèrent  vers  l'Ouest  et 
arrivèrent,  au  milieu  de  l'été  de  1834,  à  l'extrémité  de  l'immense 
plaine  qui  s'étend  au  pied  des  montagnes  neigeuses  de  la  Sierra- 
Nevada,  devant  les  quatre  collines  qui  portent  la  ville  de  Grenade. 

Les  Arabes  s'étaient  emparés  de  l'Espagne  en  deux  ans  ;  il  avait 
fallu  huit  siècles  de  combats  pour  les  en  chasser,  et  ce  fut  sous  les 
murs  de  Grenade  que  fut  enfin  renversé,  pour  ne  plus  se  relever  en 


Espagne,  le  fier  drapeau  des  enfantsd'Islam.  Ce  fui  aussi  àGrenade. 
dans  les  murs  de  l'Alhambra,  que  succomba  le  pauvre  Goury  ;  il  y 
mourut  du  choléra,  six  mois  après  son  arrivée.  Le  vivant  cependant 
était  encore  plus  à  plaindre  que  le  mort. 

Digne  Owen  !  tu  n'as  pas  voulu  que  le  non»  de  ton  ami  fut  sans 
auréole;  tu  as  inscrit  son  nom,  avant  le  tien,  sur  le  frontispice  du 
livre  monumental  dont  tu  as  fait  seul  plus  des  trois  quarts,  et  tu  as 
dédié  l'œuvre  entière  à  la  mémoire  de  Goury.  De  telles  actions  ho- 
norent les  arts,  de  telles  amitiés  font  gémir  sur  les  préjugés  natio- 
naux. 

Voici  comment  est  décrit,  dans  le  livre  de  M.  Owen  Jones,  la 
plaine  qui  se  voit  de  la  hauteur  où  est  assise  la  forteresse  de  l'Al- 
hambra :  «  Au  Nord-Ouest  s'étend  à  perte  de  vue  la  délicieuse 
Véga  (l),  parée  d'une  verdure  éternelle,  et  arrosré  par  de  nom- 
breux ruisseaux  qui  descendent  des  hauteurs  environnantes;  là, 
l'oranger,  le  citronnier,  la  vigne  et  le  mûrier  déploient  une  luxu- 
riante végétation.  «  Ce  lieu,  dit  l'historien  arabe  de  Grenade,  sur- 
«  passe  bien  en  aménité  et  en  fertilité  la  célèbre  Gantah  ou  prairie 
«  de  Damas,  et  on  ne  peut  le  comparer  qu'à  un  paradis  terrestre.  • 
Rien  ne  peut,  en  effet,  égaler  le  charme  magique  de  cette  plaine, 
qui,  sans  être  cultivée  autant  qu'elle  pourrait  l'être,  ni  avec  la 
même  habileté  que  les  Maures  y  apportaient,  est  néanmoins  un  des 
lieux  les  plus  ravissants  que  l'œil  du  voyageur  puisse  contempler. 
L'effet  en  est  encore  rehaussé  par  des  groupes  de  fermes  d'une 
blancheur  éblouissante  qui  brillent  à  travers  le  feuillage  verdoyant, 
et  par  d'innombrables  carmènes  (2}  ou  villas  qu'un  poète  arabe  a 
comparées  assez  heureusement  à  autant  de  perles  orientales  enchâs- 
sées dans  une  coupe  d'émeraude.  .\  ces  avantages  du  sol  vient 
encore  se  joindre  la  salubrité  du  climat  (3),  qui  était  proverbiale 
comme  elle  l'est  encore  parmi  les  Maures  du  rivage  opposé,  qui 
vinrent  plus  d'une  fois  à  Grenade  pour  y  chercher  la  santé.  Les 
fraîches  brises  de  la  Sierra-Nevada  rafaichissent  l'atmosphère  dans 
les  jours  les  plus  chauds  de  l'été,  et  le  printemps  y  tient  constam- 
ment la  place  de  l'hiver.  Doit-on  s'étonner  alors  que  les  Maures 
aient  quitté  à  contre-cœur  un  pareil  séjour,  et  que  Grenade  soit 
encore  aujourd'hui  le  sujet  favori  des  chants  populaires  d'un  peu- 
ple qui  ne  cesse  de  soupirer  et  de  prier  pour  le  rétablissement  de 
son  empire?  » 

La  construction  de  l'Alhambra  ne  date  pas  de  l'époque  la  plus 
florissante  de  la  puissance  arabe  en  Espagne.  Les  chefs  mu- 
sulmans, en  guerre  les  uns  avec  les  autres,  n'étaient  déjà  plus  en 
mesure  de  repousser  avec  avantage  les  attaques  constantes  des 
chétiens,  qui  les  refoulaient  de  plus  en  plus  au  midi.  En  1238, 
Jacques  I",  roi  d'Aragon,  s'empara  de  Valence,  tandis  que  Ferdi- 
nand III  de  Castille  prenait  possession  de  Cordoue,  l'ancien  siège 
des  Califats  d'Occident.  Les  populations  musulmanes  reculaient 
de  toutes  parts  devant  les  progrès  de  la  Croix.  Cinquante  mille 


(l)  Baga,  de  l'arabe  bekah,  qui  signiHe  «  lieu  entre  deux  monlagnes,  valWe 
ou  plaine  cullivée. 

(3)  Le  mot  cannen  vient  de  l'arabe  karm,  Tigne,  à  la  calture  de  laquelle  les 
jardins  avaient  d'al>ord  été  destinés. 

(3)  «  Plus  salubrc  que  l'air  de  Grenade  »  est  un  proverbe  encore  usité  en 
Afrique.  Ibn  AI-KhatUs,  dans  M)n  traité  sur  la  peste  (Bib.  Esc.  n»  1780),  dit 
que  les  deux  Tontaines  appelées  Jj/n  ad  dama  (fontaine  des  larmes),  et  Al- 
Fakar,  étaient  considérées  comme  ayant  des  propriétés  médicinales,  et  que 
des  malades  du  Maroc  et  d'autres  parties  de  l'Afrique  occidentale  venaient  i 
Grenade  pour  éprouver  l'effet  de  leurs  eaux.  Ayn  ad  dama  a  été  corrompu  par 
les  Espagnols  en  Dinadawer. 


^05 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


106 


Maures  quittèrent  le  royaume  de  Valence  à  la  suite  des  succès  de 
Jacques  d'Aragon,  et  trois  cent  mille  familles  maures  quittèrent 
les  villes  de  Séville,  de  Xérès  et  de  Cadix,  lors  de  leur  occupation 
par  les  Castillans.  Ces  mcrtheureux  allèrent  pour  la  plupart,  dit- 
on,  s'établir  dans  le  royaume  de  Grenade,  dont  la  capitale  devint 
le  séjour  des  savants,  des  artistes,  des  poètes  et  des  familles  illus- 
tres qui  fuyaient  devant  les  armes  chrétiennes,  et  déjà  l'on  pouvait 
pressentir  que  Grenade  serait  un  jour  l'héritière  de  toutes  les  gloi- 
aes  et  de  toutes  les  splendeurs  musulmanes,  autrefois  répandues 
entre  tant  de  villes  fameuses. 

On  suppose  que'  ce  fut  vers  ce  temps,  le  milieu  du  treizième 
siècle,  que  furent  jetées  les  fondations  de  l'Alharabra.  Quelques- 
uns  en  attribuent  la  construction  à  Mohammed  II;  d'autres  en  font 
remonter  l'origine  à  son  père  Ibn-al-Ahmar.  Mais  il  est  temps 
de  pénétrer  dans  la  forteresse  elle-même,  qui  occupe,  comme 
on  peut  le  voir  [PI.  3),  le  sommet  d'une  colline  qui  commande 
la  ville  de  Grenade,  et  d'où  la  vue  s'étend  au  loin.  Les  limites  du 
plateau  de  l'Alhambra  sont  entourées  de  murailles  garnies  de 
tours,  et  c'est  après  avoir  traversé  les  beaux  jardins  qui  s'éten- 
dent au  pied  de  l'acropole  musulmane  et  en  avoir  gravi  la  hau- 
teur, qu'on  pénètre,  par  la  porte  de  Justice  (Voyez  PI.  5),  dans 
l'enceinte  intérieure. 

CÉSAR  DALY. 

[La  suite  prochainement.) 


— aOB»  &CCaB>- 


PREMIERE  INSTRUCTION  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 


DES    ARTS    ET    MONUMENTS. 


MONUMENTS  FIXES. 


PREMIÈRE  ÉPOQIE.  —  l!NDÉPE\DA\CE  GALLOISE.' 


PREMIERE  PARTIE. 


MONUMENTS  RELIGIEUX. 


§  I.  —  Religion  des  Gaulois. 

A  très-peu  d'exceptions  près,  les  monuments  gaulois  portent  tous 
le  caractère  religieux.  Nous  aurons  à  peine  quelques  mots  à  dire 
sur  les  vestiges  de  constructions  militaires  et  d'habitations  civiles 
que  certaines  provinces  peuvent  posséder  encore,  tandis  que  les 
monuments  consacrés,  soitàlaDivinité,soit  à  la  mémoire  des  morts, 
sont  tellement  nombreux,  qu'ils  méritent  une  étude  sérieuse  et 
toute  particulière.  Malheureusement ,  pour  obtenir  des  notions 
exactes  sur  ces  monuments,  il  nous  manque  une  donnée  première. 
Nous  ignorons  presque  entièrement  quelles  étaient  les  croyances 
religieuses  des  premiers  Gaulois  :  les  monuments  écrits  ne  nous 
l'apprennent  pas,  et  les  monuments  figurés  ne  nous  fournissent  au- 
cun renseignement,  ne  nous  conduisent  à  aucune  induction  qui 
résolve  le  problème.  Les  pierres  dites  Druidiques  ne  révèlent  point 
un  culte  qu'on  puisse  définir:  elles  n'indiquent  aucun  attribut 
spécial  de  la  Divinité.  Il  est  presque  impossible  de  ne  pas  leur 


reconnaître  un  caractère  religieux,  mais  ce  ne  sont  que  de  gros- 
siers symboles  de  l'idée  qui  s'empare  de  tous  les  peuples  à  leur 
naissance,  l'idée  de  la  puissance  créatrice  de  ce  monde.  Avant  de 
comprendre  Dieu,  l'humanité  l'adore  ;  pour  l'adorer,  il  lui  faut 
une  image,  et  cette  image  est  nécessairement  aussi  informe  que 
l'idée  qu'elle  représente  est  obscure.  Il  est  donc  probable  que  lors 
même  que  nous  pourrions  ressusciter  les  cérémonies  dont  ces  pier- 
res druidiques  furent  sans  doute  témoins,  nous  ne  leur  trouverions 
aucun  sens  précis,  aucune  signification  déterminée  :  en  un  mot, 
nous  n'avons  rien  de  net,  rien  de  clair  à  apprendre  sur  ta  reli- 
gion des  Gaulois,  tant  qu'ils  demeurent  indépendants,  et  que 
du  fond  de  leurs  forêts  ils  échappent  à  toute  influence  étrangère. 

Mais  un  jour  moins  douteux  nous  éclaire  dès  que  la  civilisation 
grecque  et  romaine  commence  à  prendre  racine  sur  leur  sol  :  alors 
l'image  de  la  Divinité  n'est  plus  quelque  chose  d'inerte,  d'enve- 
loppé, d'inintelligible  :  elle  se  personnifie  et  revêt  une  foule  de 
figures  à  la  fois. variées  et  caractéristiques.  Dans  cette  multiplicité 
de  dieux  qui  apparaissent  tout  à  coup,  et  qui  disputent  aux  blocs 
druidiques  leurs  adorateurs,  tout  n'appartient  pas  cependant  à  li- 
mitation  et  aux  influences  extérieures;  une  forte  empreinte  natio- 
nale et  indigène  s'y  fait  toujours  sentir.  A  l'exception  de  ce  que 
nous  appellerons  la  religion  politique,  religion  imposée  à  la  Gaule 
par  ses  vainqueurs,  la  nouvelle  manière  d'adorer  la  Divinité , 
quoique  d'origine  étrangère,  n'en  est  pas  moins  toute  gauloise. 
Partout,  il  est  vrai,  vous  retrouvez  le  culte  d'Auguste  et  delà  Vic- 
toire. C'est  là  le  mot  d'ordre  du  conquérant,  c'est  une  consigne 
officielle  et  partout  semblable.  Mais,  quant  aux  formes  et  aux  dé- 
nominations purement  religieuses  appartenant  au  culte  romain, 
vous  ne  les  voyez  se  répandre  qu'en  subissant  une  foule  de  muti- 
lations et  de  travestissements.  Les  cultes  de  Minerve,  de  Cérès,  de 
Neptune,  sont  très-rares  :  il  n'y  a  guère  que  cinq  divinités  qu'on 
rencontre  assez  généralement  honorées  dans  toutes  les  parties  de 
la  Gaule  :  Hercule  et  Mercure,  chacun  avec  des  attributs  particu- 
liers et  complètement  gaulois;  Jupiter,  tantôt  purement  celte, 
quand  il  porte  le  sagum  et  le  vase  à  boire  de  nos  ancêtres,  tantôt 
participant  du  Sérapis  égyptien,  alors  que  le  modius  est  placé  sur 
sa  tête  ;  Bacchus,  qui  paraît  avoir  été  importé  principalement  par 
les  Grecs,  à  en  juger  par  les  noms  de  Dionysius,  Eleutherius,  qui 
lui  sont  presque  toujours  donnés  ;  et  enfin  la  Déesse  Mère  intro  • 
duite  par  les  Phocéens,  comme  Diane  éphésienne,  renouvelée  sous 
la  forme  phrygienne  après  l'établissement  des  Galates  en  Asie  et 
par  suite  des  rapports  que  ces  peuplades  émigrées  conservèrent  avec 
la  mère  patrie.  Cette  Déesse  Mère  est  tantôt  l'Isis  égyptienne,  tantôt 
la  Vénus  grecque  :  elle  semble  composée  des  lambeaux  de  toutes 
sortes  de  croyances  que  les  Gaulois,  dans  leurs  courses  aventu- 
reuses, avaient  empruntées  à  des  civilisations  plus  avancées  que  la 
leur. 

Mais  ces  cultes  d'emprunt,  ces  bigarrures  exotiques,  ne  pénétrè- 
rent jamais  bien  avant  dans  les  mœurs.  Les  vieilles  superstitions 
domestiques  avaient  des  racines  plus  profondes,  et  devaient  être 
bien  autrement  vivaces.  Pendant  que  de  fragiles  idoles  se  succé- 
daient au  gré  de  l'imagination  capricieuse  d'un  peuple  avide  de 
nouveautés,  on  voyait  se  perpétuer  ces  adorations  vagues,  mysté- 
rieuses, indéterminées;  ces  pratiques  de  théurgie  naturelle,  pre- 
miers instincts  d'une  société  demi-sauvage ,  et  qui ,  pendant  si 
longtemps,  avaient  été  son  unique  religion.  Aussi  lorsque  le  chris- 
tianisme s'en  vint  planter  la  croix  sur  le  sol  des  Gaules,  il  eut  bon 
marché  de  tous  ces  autels  élevés  par  ordre  des  empereurs  :  il  mit 


107 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


108 


bientôt  eu  poussière  toutes  ces  images  importées  de  l'Asie  ou  de 
Rome;  mais  il  lui  fallut  transiger  avec  les  croyances  indigènes, 
r.es  puissances  invisibles,  ces  femmes  mystérieuses  qui,  sous  le 
nom  de  fées,  exerçaient  un  si  merveilleux  empire,  continuèrent 
dbabiter  leurs  grottes  et  leurs  forêts;  la  vénération  attachée  aux 
montagnes,  aux  sources,  aux  rochers,  se  perpétua  de  siècle  en 
sieclc^et  de  nos  jours  on  peut  encore  en  retrouver  des  traces  dont 
l'étude  est  pleine  d'attraits,  et  qu'il  importera  de  constater  (l  ). 

Ainsi  trois  époques  bien  distinctes  dans  la  religion  des  Gaulois  : 
d'abord  une  adoration  des  puissances  mystérieuses  de  la  nature, 
adoration  qui  s'adresse  à  des  symboles  dont  il  nous  reste  encore 
des  vestiges,  mais  dont  la  véritable  signification  nous  échappe;  en- 
suite, sous  la  domination  étrangère,  invasion  du  polythéisme  grec 
et  romain;  mais,  pour  se  faire  accepter,  il  faut  que  ce  polythéisme 
se  déguise,  et  qu'il  laisse  subsister  à  ses  côtés  les  vieilles  croyances 
nationales;  enfin,  lorsque  le  christianisme  a  terrassé  le  polythéisme 
grec  et  romain,  un  reste  de  vie  anime  si  fortement  encore  les  su- 
perstitions primitives,  que  de  nos  jours,  après  tant  de  siècles,  nous 
en  apercevons  les  dernières  lueurs. 

Nous  n'insisterons  pas  plus  longtemps  sur  ces  observations 
préliminaires,  et  nous  passerons  immédiatement  à  l'étude  des  mo- 
numents. 

§  H.  —  Pierres  dites  Dbuidiques. 

On  trouve  en  Fiance,  comme  dans  tout  le  Nord  de  l'Europe,  un 
vaste  système  de  monuments  qui,  sans  offrir  aucune  des  conditions 
de  l'art,  présentent  cependant  entre  eux  assez  de  similitude  pour 
.  faire  reconnaître  qu'une  même  pensée  présidait  à  leur  exécution. 

Ces  monuments  se  composent  en  général  de  fragments  de  ro- 
chers, de  pierres  dont  la  forme  est  plus  ou  moins  irrégulière,  dont 
les  dimensions  sont  plus  ou  moins  grandes,  tantôt  isolées,  tantôt 
disposées  en  groupes  d'après  des  lois  qui  paraissent  constantes. 

Dans  les  contrées  qui  offrent  des  restes  de  ces  monuments,  les 
premières  études  doivent  faire  distinguer  les  masses  élevées  à  main 
d'homme  de  celles  que  la  nature  s'est  plu  à  isoler. 

Lorsqu'on  aura  constaté  par  l'aspect  du  terrain  que  le  transport 
et  la  pose  de  ces  pierres  ne  peuvent  être  que  le  résultat  des  efforts 
de  l'homme,  la  qualité  de  la  roche,  la  distance  du  gisement  qui  en 
fournit  la  matière,  la  direction  qui  put  être  suivie  après  l'exploi- 
tation jusqu'au  lieu  où  le  monument  fut  consacré,  présenteront  des 
observations  importantes  à  consigner. 

On  notera  les  dimensions  des  monolithes,  en  hauteur,  largeur, 
épaisseur  ;  leurs  distances  respectives ,  s'ils  forment  un  groupe. 
J)ans  ce  travail  géométrique  on  devra  employer  le  mètre  comme 
unité  de  mesure 

On  désigne  par  le  nom  de  Men-hir  ou  Peulvan  les  longues  pier- 
res debout  et  isolées  qui  se  présentent  fréquemment  dans  l'Ouest  de 
la  France.  Les  traces  de  rainures  ou  d'inscriptions,  les  intentions 
de  sculpture  et  d'ornements  qui  pourraient  s'y  rencontrer  doivent 
être  levées  avec  soin. 


Men-Hir. 


(1)  On  examinera  les  traditions  qui  prêtent  des  vertus  miraculeuses  aux 
sources  et  fontaines;  ou  indiquera  aussi  les  clairières  et  carrefours  des  forêts, 
liabilés  par  les  dames  ou  fées,  les  excavations,  les  grottes,  les  pointes  de  ro- 
chers, les  falaises,  elc  ,  <,ue  la  superstition  révère,  et  qui  sont  en  général  dés.- 
Buésparles  noms  de  châteaux  du  Diable,  maisons  de  Gargantua,  roches  aux 
Fées,  baumes  des  Dames,  etc. 


Fig.X. 

Les  pierres  druidiques  sont  rarement  seules  dans  une  même  con- 
trée; les  rapports  qui  existent  entre  ces  pierres  seront  le  sujet 
d'un  plan  mesuré  si  elles  sont  voisines,  d'une  triangulation  si  les 
distances  qui  les  séparent  ne  permettent  pas  de  juger  d'abord  de 
leurs  positions  relatives.  Des  men-hirs,  désignés  sous  le  nom  de 
hautes  bornes,  paraissent  situés  sur  les  frontières  des  nombreuses 
provinces  qui  formaient  la  Gaule  :  ces  monuments  peuvent  guider 
dans  l'étude  des  divisions  positives  de  la  topographie  antérieure  i\ 
la  conquête  romaine. 

Dse  pierres  debout,  alignées  comme  des  arbres,  occupent  une 
superficie  considérable;  tel  est  l'aspect  que  présente  le  monument 
de  Carnac  :  cette  disposition  est  désignée  par  les  noms  d'aligne- 
ment, d'allées  non  couvertes.  Des  groupes  de  pierres  alignées  ou  en 
cercles  présentent  à  leur  sommet  des  mortaises  qui  furent  desti- 
nées à  recevoir  des  architraves;  les  portes  rustiques  qui  résultent 
de  cette  disposition  se  nomment  Lichavens  ;  l'étendue  des  mor- 
taises, leur  disposition,  la  distance  qui  les  sépare  deux  à  deux,  se- 
ront des  sujets  d'études  mesurées  et  dessinées. 

Cromlech. 


Fig.  2. 

Les  cercles  de  pierres,  les  combinaisons  elliptiques  ou  en  spirale 
formées  par  des  roches  peu  élevées  semblent  tenir  à  des  idées  as- 
tronomiques; ces  courbes,  de  quelque  nature  qu'elles  soient,  doi- 
vent être  levées  géométriquement;  il  importe  de  reconnaître  le 
nombre  des  roches  qui  les  composent.  Leur  ensemble  est  désigné 
par  le  nom  de  Cromlech. 

Des  masses  placées  en  équilibre  sur  des  bases  solides  peuvent 
recevoir  un  mouvement  d'oscillation  plus  ou  moins  développé; 
d'autres  roches  tournent  sur  un  pivot;  nommées  pierres  branlan- 
tes, pierres  croulantes  et  tournantes,  elles  seront  examinées  et  re- 
produites, les  unes  de  manière  à  faire  connaître  le  degré  d'incli- 
naison qu'elles   peuvent  prendre  relativement  à  l'horizon  ,  les 


109 


REVUE  DE  L  ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


110 


l'ierre  tournante. 


autres  dans  leur  mouvement  de  rotation  comparé  à  celui  de  la 
boussole.  On  cherchera  leur  centre  de  gravité  et  les  moyens  qui 
purent  être  employés  dans  la  pose. 

On  nomme  Dolmen  une  table  de  pierre  formée  d'une  masse 
plate  portée  horizontalement  par  plusieurs  roches  verticales.  On 
considère  ces  monuments  comme  des  autels  gaulois. 

Dolmen. 


Fig.  4. 


Le  demi-dolmen  est  une  pierre  inclinée  qui  est  soutenue  par  une 
de  ses  extrémités  seulement,  l'autre  posant  sur  le  sol.  On  exami- 
nera si  le  demi-dolmen  ne  serait  pas  le  résultat  d'accidents  arrivés 
à  un  dolmen  complet. 

Demi-Dolmen. 


Fig.  5. 

La  table  des  dolmens  est  quelquefois  percée  d'un  ou  de  plusieurs 
trous;  il  est  important  d'étudier  si  toute  la  superficie  de  la  pierre 
offre  une  pente  ou  des  rainures  dirigées  vers  les  points  perforés  ou 
vers  les  extrémités.  L'orientation  du  monument  peut  servir  à  fixer 
son  origine  et  ne  doit  pas  être  négligée. 

Le  nom  d'allées  couvertes  est  donné  à  de  longues  suites  parallè- 
les de  pierres  dressées  et  portant  des  masses  placées  horizontale- 
ment pour  former  un  toit.  On  examinera  avec  soin  ceux  de  ces 
monuments  qui,  par  leur  symétrie,  par  l'étude  apportée  dans  la 
pose  et  l'ajustage  des  pierres,  pourraient  indiquer  un  progrès 
dans  l'exécution,  et  faire  entrevoir  l'usage  dinstruments  tran- 
chants. 


Allée  couverte. 


Fig.  6. 


Des  pierres  enchaînées  deux  à  deux,  des  roches  de  formes  sin- 
gulières ou  présentant  un  passage  au  milieu  de  leur  masse,  des 
blocs  de  matières  précieuses  (l)  et  de  produits  naturels  fort  rares 
dans  une  contrée,  sont  devenus  des  sujets  de  pèlerinages  en  raison 
des  vertus  que  leur  attribue  la  superstition.  Abandonnées  à  elles- 
mêmes,  loin  des  routes  et  de  toute  habitation,  d'autres  pierres 
conservent  des  traces  d'usages  inconnus;  elles  seront  toutes  des- 
sinées et  accompagnées  des  traditions  alors  que  la  moindre  indi- 
cation démontrera  qu'elles  ont  été  travaillées  ou  seulement  trans- 
portées par  les  hommes. 

On  décrira  scrupuleusement  les  terrains  voisins  des  monuments 
druidiques,  et,  dans  le  cas  où  des  fouilles  y  auraient  été  pratiquées, 
un  procès-verbal  évitera  pour  l'avenir  de  nouvelles  et  infructueu- 
ses recherches. 

Les  pierres  consacrées  par  la  tradition  gauloise  sont  de  nature  à 
être  exploitées  de  nos  jours  par  l'industrie  ;  on  s'efforcera  de  sau- 
ver de  la  destruction  ces  monuments  historiques. 

(1)  Aérolithes  et  masses  de  métaux  natifs. 


§    III.    R ARROWS   ET    TOMBELLES. 


L'usage  de  décorer  et  de  protéger  les  sépultures  par  des  monti- 
cules ou  tombeaux  en  terre  fut  presque  universel  dans  l'antiquité. 
On  trouve  en  France  de  nombreux  exemples  de  ces  tombeaux,  qui 
paraissent  avoir  été  élevés,  soit  par  les  Celtes,  les  Kimris  et  les 
Gaulois,  soit,  après  eux,  par  les  Romains,  et  enfin  par  les  peuples 
du  Nord. 


Fig.  7. 
Les  dimensions  de  ces  collines  factices  varient  en  raison  du 


lit 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


lis 


nombre  d'individus  qui  y  furent  inhumés  :  leur  forme  est  allongée 
à  la  base  lorsqu'on  a  voulu  en  faire  des  sépultures  communes, 
nommées  depuis  ossuaires;  elle  est  arrondie  quand  l'inhumation 
est  simple.  Le  squelette  est  placé  sur  le  sol  ;  sous  la  tète  se  trouve 
assez  généralement  une  arme;  une  grosse  pierre  couvre  la  partie 
supérieure  du  corps;  des  ossements  d'animaux  l'cutourent  quel- 
quefois. Ces  sépultures  doivent  être  fouillées  en  les  coupant  en  croix 

par  le  milieu. 

Une  coupe  indiquant  le  gisement  des  corps  et  leur  position  orien- 
tée, des  mesures  de  diamètre  et  de  hauteur,  un  plan  de  ces  fouilles 
et  un  procès- verbal,  tels  sont  les  travaux  qu'exige  chacun  de  ces 
barrows. 

Lorsque  la  tombelle,  par  sa  grande  étendue,  peut  être  considé- 
rée comme  un  ossuaire,  elle  présente  des  dispositions  intérieures 
de  plusieurs  natures  :  des  chambres  sépulcrales  formées  de  pierres 
brutes,  réunies  comme  des  dolmens,  renferment  uh  ou  plusieurs 
individus  couchés  ou  assis  ;  des  couloirs  conduisent  à  ces  cryptes, 
et  souvent  une  galerie  commune  est  destinée  au  service  de  tous  les 
caveaux. 

Dans  d'autres  exemples,  une  chambre  allongée,  formée  comme 
les  galeries  couvertes,  réunit  les  corps  qui  reçurent  une  sépulture 
commune;  enfin,  dans  ces  ossuaires,  les  constructions  sont  quel- 
quefois en  pierres  cimentées  :  c'est  alors  qu'en  étudiant  les  divers 
ustensiles  trouvés  dans  la  sépulture  on  peut  décider  si  elle  est 
gauloise  ou  romaine.  Les  fouilles  de  ces  ossufiires  demandent  plus 
de  soin  que  celles  des  tombeaux  simples,  afin  de  ne  pas  les  détruire 
en  les  ouvrant.  Si  la  colline  factice  est  allongée,  elle  peut  être  en- 
tamée par  une  des  extrémités,  ordinairement  soumises  à  l'orienta- 
tion. 

Dans  les  plans  et  coupes,  tracés  avec  beaucoup  de  soin,  le  nom- 
bre et  la  forme  des  pierres  brutes  qui  composent  les  cryptes  sont 
des  détails  importants  à  indiquer. 

Une  couche  d'argile  était  ordinairement  placée  dans  les  parties 
basses  pour  les  préserver  de  l'humidité  :  les  procès-verbaux  doi- 
vent faire  mention  de  cette  circonstance. 

Les  tombelles  sont  quelquefois  réunies  en  grand  nombre  ;  elles 
forment  alors  des  cimetières  près  des  oppida,  dans  leur  enceinte,  ou 
sur  un  champ  de  bataille.  Placées  sur  une  même  ligne,  il  est  néces- 
saire d'en  indiquer  la  direction  orientée,  ainsi  que  les  hauteurs 
respectives. 

Les  tombelles  funèbres  arrêtées  à  leur  base  par  un  cercle  en 
pierres  brutes  ou  appareillées  peuvent  offrir  d'utiles  observations 
relatives  à  la  construction.  Les  galgals  sont  formés  de  pierres 
amoncelées. 

DEUXIÈME  PARTIE.  —  MONUMENTS  MILITAIRES. 

Les  collines  factices  ne  furent  pas  toutes  destinées  aux  sépultu- 
res :  ou  en  voit  qui  sont  tronquées  par  le  haut,  entourées  d'un 
fossé,  et  qui  peuvent  être  considérées  comme  des  forts  destinés  à 
défendre  un  point  important;  le  nom  de  Mottes  leur  est  assez  gé- 
néralement donné.  Une  coupe  de  terrain  doit  indiquer  si  des  tran- 
chées voisines  ou  des  ravins  naturels  ne  lient  point  ces  forts  à  un 
système  de  défense  plus  étendu. 

Dans  les  plaines  sujettes  à  Inondation  il  peut  arriver  que  des 
cônes  en  terre  aient  été  élevés  comme  lieux  de  refuge. 

Ces  mottes  sont  à  peu  près  les  seuls  vestiges  de  monuments  à 
proprement  parler  militaires  qu'on  puisse  faire  remonter  à  l'époque 


de  l'indépendance  gauloise.  Toutefois  on  trouve  aussi  dans  quel- 
ques provinces  de  vastes  enceintes,  construites  évidemment  de 
main  d'homme,  et  qui,  trop  irrégulières  pour  être  des  camps  ro- 
mains, sont,  d'après  toutes  les  probabilités,  l'enveloppe  extérieure 
de  ces  oppida  dans  lesquels  se  réfugiaient  les  populations  gauloises 
à  l'approche  de  l'ennemi.  Les  archéologues  ne  s'accordent  pas  sur 
la  question  de  savoir  si,  indépendamment  de  ces  lieux  de  refuge, 
les  Gaulois  avaient  des  villes  permanentes  fortifiées,  dans  l'accep- 
tion que  nous  donnons  à  ce  mot.  Quoi  qu'il  en  soit,  on  recher- 
chera dans  les  masses  mêmes  des  talus  qui  forment  la  clôture  des 
oppida,  si  quelques  traces  de  constructions  militaires  ne  s'y  seraient 
point  conservées;  on  y  pourra  trouver  des  renseignements  utiles 
pour  résoudre  la  question  relative  au  mode  d'appareil  adopté  par 
les  Gaulois. 

TaoiSIÉ.UE  PARTIE.  —  MONUMENTS  CIV1I.S. 

Les  oppida  ou  enceintes  fortifiées  des  Gaulois  ne  présentèrent 
probablement  point  à  l'intérieur  les  dispositions  d'alignements  et 
de  rues  comme  nos  villes;  on  n'y  trouvait  que  les  conditions  d'un 
lieu  de  refuge  ou  ca$tnim.  Les  habitations  qu'elles  renfermaient 
ne  furent  donc  que  des  demeures  incommodes  dont  on  peut  trou- 
ver le  souvenir  en  examinant  le  sol  de  ces  enceintes,  en  y  faisant 
des  fouilles  dirigées  avec  soin.  M.  Féret  a  reconnu,  dans  la  cité  de 
Limes,  auprès  de  Dieppe,  des  habitations  composws  de  fosses  cir- 
culaires qui  probablement  étaient  recouvertes  de  branches  d'ar- 
bres. 

On  trouve  dans  plusieurs  parties  du  Berri,  mais  principalement 
dans  l'arrondissement  d'Issoudun,  de  vastes  excavations  en  forme 
de  cônes  tronqués  renverses,  dont  la  courbe  est  trop  régulière  pour 
ne  pas  avoir  été  faite  à  main  d'homme.  On  les  appelle  dans  le  pays 
raardelles,  margelles  ou  simplement  marges,  et  la  tradition  leur 
assigne  une  haute  antiquité.  Elles  sont  placées  d'une  manière  Irré- 
gulière dans  les  champs,  quelquefois  réunies  en  grand  nombre  dans 
un  petit  espace;  mais  toutes,  sans  exception,  offrent  ce  caractère 
particulier,  de  ne  laisser  apercevoir  dans  les  environs  aucune  trace 
du  déblai  auquel  leur  construction  a  dû  donner  lieu  ;  et  cependant 
le  volume  de  ce  déblai  se  monte,  pour  quelques-unes  d'elles,  à 
1 1  000  mètres  cubes.  Leurs  dimensions  sont  tn's- variables;  il  y  en 
a  de  150  mètres  de  large  et  de  6  à  8  mètres  de  profondeur;  géné- 
ralement elles  sont  moins  grandes. 

Jusqu'à  présent  on  ignore  l'usage  auquel  les  mardelles  ont  pu 
servir.  On  les  rencontre  dans  toute  sorte  de  terrains,  de  façon 
qu'on  ne  peut  les  considérer  comme  produites  par  l'extraction  de 
matériaux  employés  dans  les  constructions.  Les  paysans  préten- 
dent qu'elles  servaient  «i  mettre  des  troupes  en  embuscade;  cette 
opinion  n'est  pas  plus  vraisemblable  que  celle  qui  tendrait  à  voir 
dans  les  mardelles  de  vastes  silos.  Il  est  du  reste  à  remarquer  que 
plusieurs  d'entre  elles  sont  l'objet  de  croyances  superstitieuses. 

Les  mardelles  ne  sont  pas  seulement  particulières  au  Berri  ;  elles 
paraissent  exister  aussi  en  Ecosse,  et  on  les  rencontre  en  assez 
grand  nombre  dans  plusieurs  cantons  de  la  Normandie. 

IDEIXIÈME  ÉPOQIE.  —  COLO\ISAT!0\  GRECQUE. 

PREMIÈRE  PARTIE.   —   MONUMENTS  RELIGIEUX. 
La  colonisation  grecque,  répandue  sur  tout  le  littoral  de  la  Mé- 


113 


REVUE  DE  LARCHITECTUKE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


114 


diterranée,  occupa. les  côtes  méridionales  de  la  France  :  peut-être 
même  doit-on  reconnaître  la  présence  antérieure  des  Phéniciens  ou 
des  Ligures  dans  quelques  constructions  et  excavations  situées 
vers  les  bouches  du  Rhône,  et  analogues  à  celles  qu'on  désigne 
abusivement  sous  le  nom  de  constructions  cyclopéennes. 

Construclion  cydopéenne. 


Fig.  8. 

Dans  les  recherches  relatives  à  ces  faits  importants,  on  considé- 
rera comme  de  nature  à  éclaircir  la  question  toutes  constructions 
qui  portent  le  caractère  de  l'antiquité,  quels  que  soient  d'ailleurs 
les  formes  et  l'appareil  des  pierres  qui  les  composent.  Des  dessins 
exactement  mesurés  et  donnant  les  contours  des  pierres  sont  indis- 
pensables à  cette  étude. 

Marseille,  Antibes,  Agde  et  les  autres  colonies  helléniques  dont 
la  désignation  manque  au  texte  de  Scylax  doivent  présenter  encore 
des  souvenirs  de  leur  origine. 

Marseille,  centre  de  la  colonisation,  a  été  trop  négligée  jusqu'à 
ce  jour  sous  le  point  de  vue  de  ses  relations  avec  le  monde  connu 
des  anciens,  et  sous  celui  de  son  étendue,  de  ses  monuments  reli- 
gieux et  civils.  Son  acropole  décrite  par  Strabon  et  César,  l'en- 
ceinte de  la  ville,  les  envahissements  de  la  mer,  l'emplacement  et 
l'étendue  de  l'ancien  port,  sont  des  sources  d'investigation  dont  on 
comprendra  toute  l'importance. 

Dans  la  première  période  de  la  puissance  hellénique,  les  temples, 
composés  d'une  étroite  cella  entourée  de  colonnes,  présentent 
toujours  les  formes  simples  et  sévères  de  l'ordre  dorique;  les  tri- 
glyphes  et  le  chapiteau  en  l'orme  de  coupe  surmontée  d'un  épais 
tailloir  sont  des  caractères  trop  connus  pour  qu'il  soit  nécessaire  de 
les  développer  ici. 

L'église  cathédrale  de  Marseille,  située  dans  l'ancienne  ville , 
peut  fournir,  ainsi  que  Saint-Sauveur  et  d'autres  édifices  religieux, 
quelques  notions  relatives  aux  temples  célèbres  de  l'acropolis  et 
de  la  ville  antique.  C'est  parmi  les  matériaux  qui  servirent  à  la 
construction  de  ces  églises  qu'on  peut  rencontrer  quelques  frag- 
ments grecs;  les  fouilles  exécutées  dans  les  environs  pour  les  par- 
ticuliers seront  suivies  avec  soin.  Les  anciens  édifices  extérieurs 
des  autres  villes  de  la  côte  déjà  mentionnées  plus  haut,  et  qui 
purent  appartenir  à  la  colonisation  grecque ,  seront  de  même 
l'objet  d'investigations  minutieuses  de  la  part  de  MM.  les  corres- 
pondants. 

Pendant  la  seconde  période  de  l'art  grec,  les  ordres  ionique  et 
corinthien  se  développèrent,  et  les  temples  prirent  un  autre  as- 
pect :  les  chapiteaux  se  décorèrent  de  palmettes  et  de  feuilles  d'o- 
livier ou  d'acanthe  finement  découpées,  creusées  en  biseaux  et  à 
vives  arêtes.  La  légèreté  du  dessin,  la  représentation  fidèle  et  dé- 
licate des  productions  de  la  nature,  tels  sont  les  caractères  distinc- 
tifs  de  l'ornementation  grecque  de  cette  seconde  époque.  Dans  les 
détails  d'architecture,  les  profils  des  corniches  et  des  architraves, 
des  bases  et  de  leurs  supports,  sont  profondément  refouillés  et  des- 
sinés avec  énergie. 

Au  bas  de  Vernègues,  près  de  Pont-Royal,  sur  la  route  d'Orgon 


à  Lambesc,  se  voient  les  restes  d'un  temple  qui,  par  ses  proportions 
et  ses  détails,  par  le  style  de  ses  ornements,  peut  être  considéré 
comme  appartenant  à  l'art  hellénique. 

Feuille  grecque. 


Fig.  9. 

Les  autels  des  Grecs  présentent  les  formes  les  plus  variées;  des 
ornements  d'architecture  en  décorent  la  base  et  le  sommet.  La 
sculpture  y  reproduit  souvent  les  attributs  des  sacrifices  ou  des 
divinités  auxquelles  ils  furent  consacrés;  quelquefois  la  représen- 
tation de  ces  divinités  elles-mêmes.  Élevés  dans  les  temples  ou 
isolément  dans  les  campagnes,  ils  offrent  un  égal  intérêt  ;  MM.  les 
correspondants  signaleront  toute  découverte  de  cette  nature;  des 
dessins  seront  joints  aux  descriptions,  et  feront  connaître,  s'il 
y  a  lieu,  les  constructions  accessoires,  telles  que  fondations  et  mas- 
sifs de  pierre  qui  auraient  servi  à  consolider  l'établissement  de  ces 

autels. 

Les  tombeaux  peuvent  être  classés  au  nombre  des  monuments 
religieux.  Dans  tous  les  lieux  où  les  Grecs  ont  établi  des  colonies, 
ils  ont  laissé  des  témoins  de  leur  respect  pour  les  morts.  Des  stèles 
en  marbre  ou  en  pierre,  des  colonnes  plus  ou  moins  élevées,  sont  les 
monuments  funèbres  les  plus  communs  en  Grèce  et  sur  le  litto  rai 
de  la  Méditerranée. 


Slèks. 


Fig.  10. 


Fig.  H. 


Un  ouvrage  publié  à  Marseille  en  1773  a  fait  connaître  un 
grand  nombre  d'inscriptions  grecques  gravées  sur  des  tombeaux. 
Elles  n'ont  pu  disparaître  entièrement  du  territoire  marseillais  ; 
si  de  nouvelles  recherches  mettent  sur  les  traces  de  ces  stèles  ou 
des  monuments  de  même  nature  qui  pourront  sortir  des  fouilles 
postérieures,  il  est  nécessaire  de  les  faire  réunir  dans  un  musée  : 
ces  dispositions  s'appliquent  à  toutes  les  villes  de  la  colonisation 
grecque. 

Il  est  à  souhaiter  que  ces  richesses  ne  passent  point  à  l'étraDger, 
ce  qui  est  arrivé  pour  une  statue  de  style  grec  ancien,  peut-être 

T.  V.  8 


115 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


116 


celle  de  la  Diane  éphésienne  adorée  à  Marseille,  et  que  possède  au- 
jourd'hui la  galerie  Albani  à  Rome.  ^ 

A  défaut  d'inscriptions  grecques  sur  les  stèles  ou  marbres  d'une 
autre  forme,  on  en  reconnaîtra  l'origine  par  la  finesse  des  orne- 
ments, par  des  palmettes  légères  ou  des  rosaces  gravées  au 
sommet. 

Palmellei  grecques. 


Fig.  12. 

Le  territoire  marseillais  conservait  encore  dans  le  siècle  dernier 
quelques  monuments  funèbres  qu'on  attribuait  aux  Grecs;  au  ha- 
meau de  la  Pêne  était  une  pyramide  dont  ou  pourra  retrouver  quel- 
ques traces. 

Enfin  sur  le  sol  de  la  Provence  l'influence  de  l'art  hellénique 
s'exerça  sur  les  monuments  funèbres  de  l'époque  romaine.  Le 
grand  tombeîiu  de  saint  Remy  en  serait  une  preuve  suffisante  ; 
MM.  les  correspondants  peuvent  trouver  dans  cette  transition  une 
suite  d'observations  curieuses  à  consigner. 

DEUXIÈME  PARTIE.  —  MONUMENTS  MILITAIRES. 

Les  Grecs  ont  connu  l'art  de  protéger  par  de  fortes  murailles 
leurs  villes  et  les  citadelles  qui  les  dominaient.  Durant  la  première 
période  hellénique  les  constructions  militaires  furent  composées 
de  pierres  irrégulières ,  et  communément  désignées  sous  le  nom  de 
murs  cyclopéens;  alors  quelques  tours  pesantes  s'élevèrent  en 
saillie  sur  les  courtines  :  l'irrégularité  de  l'ouvrage  indique  clai- 
rement l'état  encore  primitif  de  la  civilisation.  Nous  avons  déjà 
signalé  plus  haut  ce  mode  de  bâtir  et  la  nécessité  d'en  dessiner  avec 
soin  une  à  une  toutes  les  pierres,  afin  de  déterminer  d'une  manière 
précise  le  caractère  de  la  construction. 

La  Grèce,  en  se  plaçant  dans  une  voie  de  progrès,  améliora  son 
système  de  défense  :  les  pierres  furent  taillées  à  l'équerre  et  pri- 
rent des  formes  régulières  ;  mais,  par  une  combinaison  sagement 
entendue,  on  évita  de  réduire  leurs  dimensions  en  abattant  les 
angles  qu'elles  présentaient  en  sortant  de  la  carrière  ;  il  n'est  donc 
pas  rare  de  rencontrer  des  assises  équarries  sur  leurs  lits ,  mais 
dont  les  extrémités  se  joignent  par  des  lignes  inclinées,  courbes 
ou  anguleuses,  comme  on  le  pratique  de  nos  jours  dans  les  gros 
libages  de  fondation.  Enfin  un  troisième  système  de  construction 
militaire  se  présente  chez  les  Grecs;  les  pierres  y  sont  parfaitement 
régulières  et  bien  dressées  sur  toutes  les  faces.  C'est  ainsi  que  fu- 
rent construites  les  longues  murailles  d'Athènes  et  l'enceinte  de 
Messène.  Des  tours  rondes  ou  carrées  s'élèvent  à  des  distances  cal- 
culées sur  la  portée  du  trait. 

Quant  à  la  forme  des  clôtures  de  villes,  elle  fut  subordonnée  à 
la  nature  du  sol.  On  suivit  le  contour  des  collines,  on  s'éleva  jusqu'à 
leur  crête,  s'appuyant  sur  des  roches  escarpées,  ou  se  protégeant 
par  un  agger  et  des  fossés  profonds. 

L'Étrurie ,  dont  les  relations  avec  la  Grèce  furent  pour  ainsi 
dire  continues,  put  avoir,  en  raison  du  voisinage,  quelque  in- 


fluence sur  les  colonies  méridionales  des  Gaules.  Les  villes  de 
cette  partie  de  l'Italie  présentent  un  fait  curieux,  relatif  a  la  i»- 
liorcétique  antérieure  à  celle  des  Romains.  On  y  reconnaît  que 
les  Étrusques  n'ignoraient  i>as  l'art  de  prendre  des  angles  pour 
défendre  un  point  important  de  l'enceinte  d'une  ville.  Tous  ces 
faits  sont  signalés  à  MM.  les  corresiwndants  pour  attirer  leur 
attention  sur  les  murs  militaires  qui  pourraient  être  attribues  à 
la  colonisation  grecque  dans  les  contrées  méridionales  de  la 
France. 


TROISIÈME  PARTIE.  —  MONUMENTS  CIVILS. 

Les  constructions  civiles  des  Grecs  présentent  une  grande  va- 
riété de  formes,  dont  les  éléments  simples  se  trouvent  dans  leur» 
temples. 

L'agora  ou  place  publique ,  le  ttoa  ou  portique ,  la  basilique , 
les  propylées,  étaient  des  édifices  composés  de  galeries  à  colonnes 
dont  l'espacement  était  subordonné  à  l'emploi  du  bois  ou  de  la 
pierre,  à  l'étendue  des  architraves  qui  reliaient  ces  colonnes  entre 
elles.  Sans  doute  la  France  ne  possède  aucun  de  ces  monuments 
grecs  au-dessus  du^sol  ;  mais  les  fouilles  peuvent  mettre  au  jour 
quelques  soubassements  d'édifices  composés  de  pierres  rapportées, 
ou,  selon  l'usage  des  Hellènes,  taillées  dans  la  roche  vive.  Il  est 
donc  nécessaire  d'eu  signaler  les  dispositions  principales.  Établies 
ordinairement  avec  de  larges  pierres,  ces  substruclions  [wrlaient 
l'aire  du  monument,  et  de  nombreuses  marches  profilées  a  l'entour 
donnaient  de  toute  part  un  accès  facile.  Les  déUiils  d'architecture 
ainsi  que  ceux  des  temples  pourront  présenter  le  style  dorique 
décoré  de  triglyphes;  des  traces  de  coloration  y  seront  minutieu- 
sement recherchées,  non-seulement  sur  les  parties  planes,  mais 
encore  sur  les  moulures  courbes  et  dans  les  refouillements;  des 
terres  cuites  peintes  y  étaient  souvent  appliquées. 

Terres  cuUe$  coloriiet. 


Fig.  13. 

Pour  ce  qui  concerne  la  sculpture  d'ornement  dont  furent  déco- 
rées les  faces  intérieures  ou  extérieures  des  édifices  grecs ,  nous 
avons  donné  à  l'article  qui  concerne  l'architecture  sacrée  les  ren- 
seignements dont  MM.  les  correspondants  pourront  faire  usage. 

Les  côtes  méridionales  de  la  France,  par  la  nature  des  rochers 
qui  les  composent,  offrirent  aux  Grecs  les  moyens  de  creuser  faci- 
lement des  ports,  d'établir  des  môles  selon  l'usage  consacré  dans 
leur  patrie;  ces  colons  actifs  et  intelligents  aidèrent  par  l'industrie 
aux  dispositions  que  fournissaient  les  localités.  On  examinera  sur 
les  côtes  tout  ce  qui  pourrait  indiquer  leur  présence. 

Les  maisons  grecques  servirent  de  modèle  à  celles  des  Romains: 
nous  traiterons  avec  détails,  dans  un  article  intitulé  Constructions 
particulières,  cette  partie  importante  de  l'art  antique  en  France. 

(La  suite  au  prochain  numéro.  ) 


117 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


118 


GRANDES  PORTES  D'ATELIER. 

Notre  PL  6  représente  deux  espèces  de  grandes  portes  d'atelier; 
l'une  (Fig.  1 ,  2  et  3),  tournant  sur  des  gonds  ordinaires,  et  l'autre 
(Fig.  4,  5,  G  et  7),  glissant  sur  un  chemin  de  fer  suspendu.  Ces 
deux  portes  ont  été  exécutées  à  Birmingham,  à  V  Engine  House 
de  la  station  du  London  et  Birmingham  railway,  et  sons  la  di- 
rection de  M.  Dockray,  l'ingénieur  en  chef  de  la  ligne.  A  la  vérité, 
notre  planche  représente  les  murs  de  Y  Engine  House  dans  un  état 
qui  serait  de  nature  à  satisfaire  plutôt  les  amateurs  du  pittoresque 
que  les  actionnaires  du  chemin  ;  aussi  notre  conscience  nous  oblige- 
t-elle  à  convenir  que  les  lierres  et  les  mousses  que  notre  graveur  a 
traités  avec  une  si  rare  habileté  de  burin  sont  purement  fictifs;  et 
si  dans  le  dessin  original  notre  crayon  s'est  permis  quelques  lazzi 
pittoresques,  nous  nous  devons  de  déclarer  qu'il  y  avait  loin  de  là 
à  ce  vernis  d'abandon  et  de  désolation  que  le  graveur  a  étendu  sur 
son  œuvre,  et  qui  ferait  croire  vraiment  que  non-seulement  les 
locomotives  sont  depuis  longtemps  abandonnées,  mais  que  les  che- 
mins de  fer  mêmes  ont  cédé  le  pas  à  la  navigation  aérienne. 

A  l'exception  donc  des  herbes  parasites  que  nous  n'avons  pas 
voulu  faire  effacer,  tellement  elles  sont  bien  exécutées,  mais  que 
le  lecteur  voudra  bien  supprimer  par  un  effort  de  sa  pensée,  la 
Fig.  l  nous  représente  la  face  extérieure  de  l'entrée  principale  de 
l'Engi ne  House  de  Birmingham.  Cette  entrée,  dont  le  dessus  est 
occupé  par  un  réservoir  d'eau,  en  fonte,  est  accompagnée  à  gauciie 
d'une  fenêtre  pareille  à  celle  qui  est  figurée  à  droite  dans  notre 
planche,  et  dont  le  châssis  est  en  fer.  La  Fig.  2  représente  cette 
porte  vue  de  l'intérieur  du  bâtiment.  La  tige  qui  porte  le  pivot  du 
gond  est  scellée  par  une  de  ses  extrémités  entre  deux  pierres 
(  voy.  Fig.  2).  La  Fig.  3  montre  comment  la  partie  scellée  se 
bifurque,  et  la  Fig.  2  comment  chaque  patte  se  courbe  en  dessous 
pour  se  cramponner  dans  la  pierre. 

L'extérieur  de  la  porte  Fig.  4  est  le  même,  sauf  les  proportions, 
que  celui  de  la  Fig.  i.  La  coupe  Fig.  5,  dont  la  partie  principale 
est  représentée  à  une  échelle  double  par  les  Fig.  6  et  7,  montre 
les  détails  du  moyen  adopté  pour  la  suspension  et  le  glissement 
des  vantaux  de  la  porte.  Ce  système  de  porte  à  coulisse  ou  à  che- 
min de  fer  est  plus  coûteux  que  le  système  ordinaire  à  gonds,  mais 
il  est  extrêmement  commode  lorsque  l'atelier  est  petit,  ou  que  l'es- 
pace est  trop  précieux  pour  que  l'on  consente  à  perdre  l'emplacement 
nécessaire  à  la  manœuvre  de  portes  à  gonds. 

Les  portes  à  coulisse  pourraient  recevoir  de  nombreuses  et 
utiles  applications  dans  nos  édifices  publics  et  dans  nos  maisons 
particulières.  Césab  DALY. 


DU  CHAUFFAGE  ET  DE  LA  VENTILATION. 

Ce  n'est  que  depuis  quelques  années  qu'on  s'occupe  avec  succès 
du  chauffage  et  de  la  ventilation  des  établissements  publics  et 
particuliers.  Cette  partie  importante  de  l'architecture  n'est  pas 
encore  enseignée  à  l'Ecole  des  Reaux-Arts,  et  les  architectes,  géné- 
ralement, l'ignorent.  On  sait  fort  bien  donner  à  un  édifice  les  dis- 
positions que  le  confortable  réclame,  ainsi  que  les  proportions 
voulues  par  notre  amour  des  belles  formes  ;  on  détermine 
assez  bien  les  dimensions  des  divers  éléments  d'un  bâtiment  :  murs, 
pièces  de  charpente,  de  fer,  etc.,  en  vue  de  leur  résistance  néces- 
saire; mais  l'édifice  sorti  des  mains  de  l'architecte  est  le  plus  sou- 
vent un  être  encore  sans  vie  ;  c'est  un  superbe  cadavre  sans  appa- 
reil respiratoire;  il  y  manque  la  circulation  de  l'air  pur  nécessaire 
à  l'alimentation  des  personnes  qui  l'habitent,  et  les  moyens  de  faire 
évacuer  l'air  vicié,  dont  il  est  important  d'organiser  l'écoulement 
au  fur  et  à  mesure  de  sa  formation. 

Quand  il  est  question  de  faire  progresser  lart,  nos  artistes  savent 
fort  bien  déclarer  qu'il  faut  étudier  et  imiter  la  nature  ;  que  n'en 
font-ils  autant  à  propos  du  chauffage  et  de  la  ventilation  des  édifices? 
Us  verraient,  par  exemple,  que  les  êtres  animés  sont  tellement  orga- 
nisés que  le  seul  fait  de  la  respiration  suffit  pour  opérer  au  dedans 
d'eux  un  phénomène  de  combustion  qui  entretient  la  chaleur  dans 
tout  leur  corps,  et  pour  décharger  les  poumons  des  gaz  délétères 
dont  il  importe  de  les  débarrasser. 

Que  les  architectes ,  dans  les  demeures  qu'ils  construisent ,  ne 
cherchent-ils  aussi  à  satisfaire  simultanément  aux  besoins  de  la 
ventilation  et  à  ceux  du  chauffage? 

Dans  notre  Introduction  au  volume  de  cette  année,  nous  avons 
pris  l'engagement  d'entretenir  nos  lecteurs  à  ce  sujet.  Nous  nous 
sommes  adressé  en  effet  à  M.  RénéDuvoir,  dont  la  grande  expé- 
rience en  cette  matière  est  connue,  et  nous  l'avons  prié  de  com- 
muniquer à  nos  lecteurs  quelques-unes  des  dispositions  adoptées 
par  lui  dans  sa  pratique  journalière.  Nous  lui  avons  proposé  de 
monter  à  la  tribune  que  nous  avions  élevée  en  fondant  cette  Revue, 
et  d'expliquer  lui-même  à  notre  public  les  dispositions  de  quelques- 
uns  des  principaux  appareils  construits  par  lui  dans  divers  établis- 
sements, tantôt  pour  les  chauffer  et  les  ventiler  par  les  différents 
systèmes  de  l'air  chaud,  de  l'eau  chaude  et  de  la  vapeur,  et  tantôt 
pour  le  service  des  bains,  du  blanchissage,  de  la  cuisine ,  etc. 

M.  René  Duvoir  a  accepté  notre  proposition,  et  nous  donnons 
aujourd'hui  ses  premières  communications  à  nos  lecteurs. 

CD. 


Calorifèkes  Ventilateubs  a  aib  chaud  qui  se  placbst 
DANS  LES  Pièces  a  Chauffée. 

Nos  constructions,  tant  publiques  que  privées,  ont  été  rarement 
bâties  en  vue  d'un  système  général  de  chauffage  ;  aussi  s'y  trouve- 
t-il  bon  nombre  de  pièces  tellement  disposées  qu'il  faut  les  chauf- 
fer directement,  attendu  l'impossibilité  où  l'on  se  trouve  fréquem- 
ment de  les  mettre  tous  en  rapport  avec  un  même  calorifère  ; 
tels  sont,  par  exemple,  la  plupart  des  appartements  à  loyer  de 
Paris ,  car  les  propriétaires  n'y  ont  pas  encore  pris  le  parti  de 
chauffer  leurs  maisons  au  moyen  d'un  système  de  chauffage  géné- 
ral, qui  cependant  donnerait  évidemment  de  notables  économies. 


119 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


lao 


Nous  avons  cherché  à  remédier  d'une  manière  simple  à  ces  in- 
convénients. Nous  chauffons  l'air  extérieur  destiné  à  la  ventila- 
tion de  la  pièce  en  le  faisant  passer  par  un  appareil  que  nous 
établissons  dans  la  pièce  même  qu'il  s'agit  de  chauffer. 

La  prise  d'air  doit  avoir  les  dimensions  suffisantes  pour  fournir 
le  volume  d'air  nécessaire  au  plus  grand  nombre  de  personnes  que 
la  salle  doit  contenir.  Un  registre  placé  dans  le  conduit  permet  d'en 
faire  varier  la  section  suivant  le  nombre  de  personnes  qu'y  s'y 
trouvent  momentanément. 

Description  des  petits  Calorifères  à  air  chaud,  PI.  ^ . 

Les  Fig.  1  et  2  représentent:  la  première,  une  coupe  verticale; 
la  deuxième,  une  coupe  horizontale  suivant  x  x  [Fig.  i)  d'un  ca- 
lorifère du  plus  petit  modèle. 

F,  foyer  en  fonte  avec  grille  pour  la  combustion  de  la  houille,  et 
cendrier  au-dessous.  Les  produits  de  la  combustion  s'élèvent  dans 
le  cylindre  en  fonte  F  pour  redescendre  dans  le  cylindre  en  tôle 
C,  qui  enveloppe  complètement  le  cylindre  en  fonte.  De  là,  ils  vont 
gagner  la  cheminée  par  un  tuyau  Z),  muni  d'une  clef  /{ ;  c  est  un 
couvercle  en  tôle  qu'on  peut  facilement  enlever  pour  le  nettoyage 
de  l'appareil. 

La  porte  P  du  foyer  glisse  dans  des  coulisses,  et  son  mouvement 
est  réglé  par  un  contre-poids  p,  au  moyen  d'une  chaîne  qui  passe 
sur  une  poulie  m.  Cette  porte  peut  ainsi  fermer  plus  ou  moins  l'ou- 
verture du  cendrier,  et  produire  une  combustion  plus  ou  moins 
active. 

L'enveloppe  extérieure  du  calorifère  se  compose  :  l"  d'un  so- 
cle en  tôle  A  A ,  portant  une  moulure  en  cuivre;  2°  d'un  cylindre 
en  tôle  B  B,  monté  sur  le  socle  ;  3"  d'un  marbre  K,  qui  recouvre 
l'appareil. 

L'air  extérieur,  appelé  par  un  canal  H,  arrive  sous  le  cendrier, 
monte  en  s'échauffant  à  la  fois  contre  les  parois  du  foyer,  le  tam- 
bour de  circulation  de  la  fumée  et  l'enveloppe  extérieure  B  B, 
qui  est  chauffée  par  rayonnement;  il  sort  ensuite  de  l'appareil  par 
la  bouche  de  chaleur  I,  qui  règne  sur  toute  la  circonférence  du 
calorifère. 

Les  Fig.  3  et  4  représentent  :  l'une,  la  vue  extérieure  ;  l'autre, 
une  coupe  d'un  calorifère  de  plus  grande  dimension. 

La  Fig.  5  est  une  coupe  suivant  x  x  de  la  Fig.  4  ;  et  la  Fig.  6 
est  une  autre  coupe  faite  suivant  y  y  de  la  même  Fig.  4. 

F,  foyer  en  fonte  disposé  pour  brûler  de  la  houille  sur  une  grille 
g,  au-dessous  de  laquelle  se  trouve  le  cendrier  L. 

G,  cylindre  en  fonte  surmontant  le  foyer,  bouehé  à  sa  partie  su- 
périeure par  une  plaque  en  fonte  et  par  un  couvercle  en  tôle  ,  et 
muni  latéralement  d'une  buse.  C'est  par  cette  ouverture  que  les 
produits  de  la  combustion  se  rendent  dans  le  tambour  annulaire 
C  C  [Fig.  4),  dans  lequel  ils  descendent  pour  s'échapper  ensuite 
par  le  tuyau  à  fumée  D.  fi  est  le  registre  de  ce  tuyau. 

ce  est  un  couvercle  qui  rend  le  nettoyage  facile  à  exécuter. 

Une  porte  à  coulisse  P  [Fig.  3)  est  équilibrée  par  un  contre-poids 
p  [Fig.  4),  dont  la  chaîne  passe  sur  la  poulie  m. 

La  cloche  du  foyer  repose  sur  une  plaque  M  M  M  [Fig.  6),  qui 
esta  jour  afin  que  l'air  appelé  puisse  s'introduire  dans  l'appareil. 
Cette  plaque  est  supportée  par  un  socle  en  fonte  A. 

B,  enveloppe  extérieure  portant  un  marbre  K,  et  muni  de 
larges  bouches  de  chaleur  /. 

ff,  canal  d'arrivée   de  l'air  extérieur.    L'air,  qui  s'échauffe 


surtout  par  son  contact  avec  les  parois  du  tambour  à  fumée, 
dont  la  disposition  présente  dans  un  petit  espace  une  tres- 
graude  surface,  prend  encore  de  la  chaleur  au  foyer  en  fonte 
et  à  l'enveloppe  extérieure,  qui  est  chauffée  par  rayonnement. 
Les  portes  à  coulisses  peuvent  être  remplacées  par  des  portes  de 
foyers  et  de  cendriers  en  fer  ou  en  cuivre  se  fermant  au  moyen  de 
loquets  ou  de  boutons  tournants.  Pour  les  calorifères  de  collèges  et 
de  pensions,  l'ouverture  et  la  fermeture  des  portes  s'effectuent  au 
moyen  de  clefs,  afin  que  les  élèves  ne  puissent  toucher  au  foyer. 

Pour  les  maisons  particulières  où  l'on  brûle  du  coke,  afin  de 
rendre  le  ramonage  moins  frwiuent,  on  peut  modifier  l'appareil  de 
manière  à  rendre  facile  le  chargement  par  le  haut.  Une  ouverture 
circulaire,  que  l'on  Iwuche  par  un  couvercle  en  cuivre,  est  alors 
pratiquée  au  centre  du  marbre,  et  au-dessus  du  foyer  est  adapté  un 
autre  couvercle  en  forte  tôle  qu'on  enlève  au  moyen  d'une  clef 
lorsqu'on  veut  y  jeter  la  charge  de  combustible  nécessaire  à  l'ali- 
mentation du  feu. 

Ces  appareils  se  construisent  également  avec  des  foyers  appro- 
priés à  la  combustion  du  bois. 

Quand  ces  calorifères  sont  destinés  à  chauffer  alternativement 
ou  à  la  fois  plusieurs  pièces  contignes  a  celle  ou  doit  se  trouver 
l'appareil,  on  remplace  l'enveloppe  extérieure  en  tôle  par  une  con- 
struction en  biscuit  ou  en  faïence,  et  Ion  établit  à  la  partie  supé- 
rieure de  l'appareil  un  réservoir  à  air  chaud  dans  lequel  viennent 
puiser  les  bouches  de  chaleur.  Dans  cette  disposition  comme  dans 
les  précédentes,  on  se  réserve  les  moyens  d«  charger  les  foyers  par 
la  partie  supérieure  (i). 

Dans  plusieurs  collèges,  on  s'est  servi  avec  succès  de  ces  appa- 
reils, qui  conviennent  parfaitement  au  chauffage  des  classes,  des 
salles  d'études  et  des  dortoirs,  par  cette  double  raison  qu'ils  pro- 
curent à  la  fois  une  chaleur  convenable  et  une  ventilation  abon- 
dante, condition  hygiénique  de  la  plus  haute  importance  pour  les 
pièces  où  plusieurs  personnes  se  trouvent  réunies. 

Nous  en  avons  placé  au  collège  royal  de  Saint-Louis,  à  l'École 
Normale,  aux  collèges  de  Moulins,  de  Tournon.  d'Amiens,  de  Ro- 
dez et  d'Avignon,  dans  les  écoles  de  MAcon  et  dans  un  grand  nom- 
bre de  maisons  particulières,  où  ils  ont  donné  de  bons  résultat.-; 
comme  chauffage  économique  et  salubre. 

Ils  conviennent  également  au  chauffage  des  appartements.  On 
peut  les  monter  et  les  démonter  aussi  facilement  que  tous  les  poêles 
ordinaires. 

Ce  système,  dont  M.  Péclet  a  approuvé  l'usage  dans  les  colk^'cs, 
se  combine  avec  le  système  de  ventilation  indiqué  dans  son  instruc- 
tion sur  l'assainissement  des  écoles,  instruction  sur  laquelle  nous 
aurons  occasion  de  revenir  à  propos  du  chauffage  des  écoles  et  des 
appareils  à  air  chaud. 

Salles  de  Bains  et  de  Bains  de  Pieds. 

La  santé  et  la  propreté  exicent  l'usage  frwjuent  de  bains  entiers 
et  surtout  de  bains  de  pieds;  mais  ce  service  rencontre  toujours 


(1)  Nous  donnons  ici  les  prix  de  quelques-uns  de  ces  appareils   Nos  lecteurs 

se  trouveront  ainsi  plus  en  mesure  de  comparer  entre  eux  les  avantages  des  ca- 
lorifères de  M.  Rdiié  Diivoir  et  ceux  de  tout  autre  système.     (Ao(e  du  direct.) 

N°  1.  Diamètre  0   30 vaut     60  fr. 

N"  2.  Diamètre  0   40 vaut     80 

N°  3.  Diamètre  0  50,  socle  en  fonte vautl20fr 

N°  4.  Diamètre  0  50,  socle  en  cuivre vaut  140 


131 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


1^ 


des  obstacles  dès  qu'il  faut  l'organiser  sur  une  grande  échelle, 
comme  dans  les  collèges,  les  pensions,  les  hospices,  etc.;  nous 
avons  cherché  à  le  faciliter  en  rendant  plus  commodes  les  vases 
destinés  aux  bains  de  pieds. 

La  PL  8  représente  a  la  fois  la  salle  où  se  prennent  les  bains 
^  entiers  et  celle  où  se  prennent  des  bains  de  pieds  seulement,  telles 
qu'elles  ont  été  construites  au  collège  royal  de  Rouen.  Ce  plan  est 
celui  que  nous  avons  eu  le  plus  souvent  occasion  de  mettre  à  exé- 
cution ;  l'expérience  a  prouvé  qu'il  est  tout  à  fait  approprié  à 
l'usage  des  collèges  et  des  pensions. 

La  Fk/.  1  représente  le  plan  des  deux  salles,  et  la  Fig.  2  l'éléva- 
tion de  la  salle  des  bains  de  pieds. 

Chaque  bain  de  pieds  est  fixé  devant  un  banc  où  sont  indiquées 
les  places  des  élèves.  Pour  faire  le  service  on  dispose  l'eau  à  la 
température  convenable  dans  une  des  baignoires  ou  dans  un  ré- 
servoir. On  ouvre  une  soupape;  l'eau  s'échappe  par  nn  tuyau  mis 
communication,  au  moyen  d'un  embranchement,  avec  chacun  des 
bains  de  pieds,  et  s'élève  dans  tous  au  même  niveau. 

On  les  vide  tous  ensemble  en  ouvrant  un  robinet  placé  à  l'ex- 
trémité opposée  de  la  conduite;  et  pour  laver  celle-ci  on  y  laisse 
couler  de  l'eau  propre  pendant  quelques  instants.  De  nouveaux 
bains  de  pieds  peuvent  être  disposés  immédiatement  après.  Une 
fois  l'eau  chauffée,  le  service  complet  des  bains  de  pieds  s'effectue 
en  moins  d'une  demi  heure. 

Des  salles  de  bains  et  des  services  de  bains  de  pieds  ont  été 
aussi  établis,  d'après  notre  système,  dans  les  collèges  de  Saint- 
Louis  à  Paris,  de  Toulouse,  de  Pau,  de  Bourges,  de  Poitiers,  de 
Bordeaux,  de  Tournon,  de  Moulins,  de  Nantes,  de  Versailles,  d'A- 
vignon et  de  Montpellier;  d'autres  sont  eu  voie  de  construction  (l). 

RENÉ  DUVOIR. 


EXPOSITION  9UINQnEBTNAZ,E    DE  ^'INDUSTRIE 
FRANÇAISE. 

Les  pavillons  qui  doivent  recevoir  cette  année  les  produits 
de  l'Industrie  nationale,  sont  situés  dans  le  grand  carré  des 
Champs-  Elysées. 

On  sait  que  cette  exposition  est,  depuis  près  d'un  demi-siècle, 
errante  et  nomade  sur  le  sol  de  Paris.  Les  différents  gouverne- 


(1}  Le  prix  des  bains  de  pieds  avec  leurs  tuyaux  conducteurs  et  raccords  en 
cuivre  est  ; 

Pour  les  bains  de  pieds,  en  zinc 15  fr. 

Pour  les  bains  de  pieds,  en  cuivre 25 


ments  qui  se  sont  succédé  ont  bien  compris  l'importance  de  ces 
exhibitions,  mais  ils  n'ont  pas  encore  cru  devoir  dresseï-  un  temple 
au  génie  industriel  de  notre  pays,  un  temple  digne  des  merveilles 
qu'il  doit  contenir. 

Ainsi,  sous  le  Directoire,  en  1798,  l'exposition  eut  lieu  au 
Champ-de-Mars;  en  1801  et  1802,  dans  la  cour  du  Louvre;  en 
1806,  sur  l'esplanade  des  Invalides;  en  1819,  1823  et  182",  dans 
la  cour  et  dans  cette  partie  des  bâtiments  du  Louvre  qui  avoisi- 
nent  la  colonnade;  en  1834,  sur  la  place  de  la  Concorde;  enfin  en 
1839  aux  Champs-Elysées,  où  elle  n'occupait  que  16  500  métrés 
carrés  de  terrain. 

Les  travaux  du  va^te  bâtiment  en  planches  qui  sert  cette  année 
à  recevoir  les  produits  industriels  sont  assez  avancés  pour  qu'on 
puisse  juger  de  l'effet  définitif.  L'architecture  de  ce  monument,  sans 
rien  offrir  de  remarquable,  répond  cependant  à  ce  qu'on  pouvait 
en  attendre.  La  distribution  parait  avoir  été  bien  comprise,  et  le 
jour  surtout  se  distribue  fort  également.  L'ensemble  du  bâtiment 
forme  un  long  parallélogramme  dont  la  superficie  est  de  plus  de 
deux  hectares  (22  000  mètres  carrés). 

INous  ne  dirons  pas  aujourd'hui  à  quelle  occasion  cette  noble  et 
grande  pensée  d'une  exposition  des  produits  de  l'Industrie  nationale 
vint  à  François  de  Neufchàteau,  ministre  de  l'Intérieur  (17!)8),  et 
comment  le  public  accueillit  avec  acclamation,  avec  enthousiasme, 
cette  bonne  nouvelle,  qui  était  une  conséquence  naturelle  du  droit 
de  propriété  qu'on  venait  d'accorder  aux  inventeurs  sur  les  fruits 
de  leur  génie. 

En  attendant,  nous  croyons  utile  de  donner  la  circulaire  que 
M.  Cunin-Gridaine,  ministre  de  l'Agriculture  et  du  Commerce,  a 
fait  adresser  aux  préfets.  Le  lecteur  verra  que  ces  pièces  sont  écri- 
tes dans  un  esprit  de  progrès  assez  large,  et  peuvent  faire  pressen- 
tir que  l'Industrie  nationale,  les  produits  du  travail,  les  droits  des 
travailleurs,  sont  à  la  veille  d'occuper  le  rang  qui  leur  est  dû. 

Circulaire  de  M.  U  ministre  de  V Agriculture  et  du  Commerce,  adressée 
aux  préfets  des  départements. 

.Monsieur  le  Préfet,  mes  lettres  des  6  el  8  octobre  dernier  vous  ont 
fait  coniiailre  l'iiitenlion  du  Gouvernement  de  ne  rien  négliger  pour 
donner  à  la  prochaine  exposition  des  produits  de  l'industrie  lout  l'éclat 
que  comporte  cette  grande  solennité. 

Depuis  cette  époque,  je  me  suis  occupé  de  la  disposition  des  bâti- 
ments nécessaires  pour  l'exposition  ;  les  travaux  de  maçonnerie,  que 
les  gelées  pouvaient  empêcher  ou  interrompre,  sont  achevés  depuis  un 
mois;  les  autres  travaux,  adjugés  en  totalité,  sont  en  cours  d'exécu- 
tion ;  une  superlicie  de  près  de  20,000  mètres,  entièrement  couverte, 
recevra  les  produits  du  travail  national,  et  déjà  le  degré  d'avancement 
des  travaux  et  l'activité  avec  laquelle  ils  se  poursuivent  me  donnent  la 
certitude  qu'aucun  obstacle  n'en  prolongera  l'exécution  au  delà  de  l'é- 
poque fixée  pour  leur  achèvement. 

Je  viens  aujouid'hui,  monsieur  le  Préfet,  vous  entretenir  de  la  direc- 
tion à  imprimer  aux  opérations  des  jurys  chargés  de  l'admission  des 
produits. 

Le  droit  de  travailler  est  un  droit  garanti  à  tons  par  nos  lois  moder- 
nes, et  le  travail  l'origine  la  plus  noble  de  la  propriété;  chacun  peut 
donc  se  glnrilicr  à  juste  litre  de  ses  œuvres  et  prétendre  à  l'honneur  de 
les  exposer.  Mais  les  jurys  ne  doivent  pas  perdre  de  vue  que  les  expo- 
sitions de  riiulustrie,  comme  l'indique  leur  litre,  ont  une  spécialité 
marquée  dans  les  limiles  de  laquelle  les  adiiiissions  doivent  être  rigou- 
reusement renrermées.  Au  début  de  l'institution,  tous  les  produits  pu- 
rent être  admis  indistinctement.  La  France  n'avait  pas  encore  conquis 


1«3 


REVUE  DE  LARCHITECTUKE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


la» 


parmi  les  peuples  manufacluiicrs  le  rang  que  sa  richesse,  son  inlelli- 
genceeisoii  aciivilé  lui  assignent,  et  les  expositions  n'étaient  encore 
alors,  pour  ainsi  dire,  qu'un  appel  au  génie  des  arts  industriels. 

Depuis,  l'industrie  a  grandi  sous  la  protection  des  institutions  du 
pays  et  sous  l'influence  de  la  paix  et  de  l'ordre  intérieur;  la  science  a 
éclairé  sa  marche;  la  méc;inique  a  centuplé  ses  forces,  et  le  travail  na- 
tional exploite  aujourd'hui  en  grand  toutes  les  branches  de  la  produc- 


lion. 


Ce  résultat,  que  je  suis  heureux  de  eonslaler,  commande  au  Gouver- 
nement de  réserver  les  honneurs  de  l'exposition  aux  produits  qui  oc- 
cupent dans  la  consonimalion  une  place  assez  notable  pour  mériter 
véritablement  l'iulérèt  et  l'attention  publique.  Cette  mesure  contribuera 
à  donner  à  cette  belle  et  nationale  institution  le  caractère  sérieux  et  di- 
gne qui  convient  à  la  grandeur  de  la  France  et  à  l'imporlance  de  son 
commerce.  Les  jurys  comprendront,  en  outre,  la  nécessité  de  n'admet- 
ire  que  des  objets  recomniandables  par  leur  bonne  fabrication. 

Si  le  but  de  nos  expositions  n'est  pas  d'offrir  à  la  curiosité  publique 
le  vain  étalage  de  stériles  chefs-d'œuvre,  il  n'est  pas  non  plus  de  rece- 
voir sans  choix  les  produits  de  toute  nature  qui  peuvent  être  présentés  : 
l'un  et  l'antre  inconvénients  doivent  être  évités  avec  le  même  soin. 

Tous  les  arts  industriels  qui  fournissent  aux  besoins  de  l'homme  con- 
tribuent au  bien-être  delà  société  et  concourent  au  développement  de 
la  richesse  publique  ;  leur  utilité  seule  donne  la  mesure  de  leur  valeur 
relative,  et  cette  base  est  la  règle  la  plus  sûre  que  le  jury  puisse  adop- 
ter pour  l'appréciation  des  produits  qui  lui  seront  soumis. 

En  effet,  un  produit  isolé,  fût-il  un  chef-d'œuvre  de  patience  ou  d'a- 
dresse, un  modèle  de  richesse  ou  d'élégance,  s'il  n'a  été  obtenu  qu'à 
prix  de  travail  ou  d'argent,  n'a  pas,  lui-même,  une  valeur  industrielle 
qu'on  doive  particulièrement  encourager  ;  souvent  même  de  pareils 
travaux  sont  pour  leur  auteur  une  cause  de  mécompte  et  de  ruine.  Mais 
il  n'en  est  pas  de  même  d'un  produit  en  réalité  plus  modeste,  s'il  satis- 
fait à  un  besoin  commun,  si  sa  bonne  fabrication  en  assure  le  bon  usage, 
si  son  bas  prix  en  généralise  l'emploi.  Ce  produit  a  une  véritable  va- 
leur industrielle,  et  sa  place  est  marquée  à  l'exposition. 

Les  jurys  auront  donc  ii  considérer  : 

La  nature  des  produits; 

Leur  qualité  ; 

Leur  valeur  industrielle  et  commerciale. 

1.  Les  objets  qui  appartiennent  à  la  science  et  aux  beaux-arts  doivent 
être  écartés  avec  soin.  Je  rangerai  particulièrement  dans  cette  catégorie 
les  objets  d'art  proprement  dits,  les  systèmes  planétaires  et  autres,  les 
méthodes  d'enseignemeni,  les  appareils  médicaux,  les  pièces  anatomi- 

ques,  etc D'antres  expositions  leur  sont  ouvertes,  et  ils  ont  leurs 

juges  dans  les  sociétés  savantes  et  dans  les  académies  des  arts  et  des 
sciences. 

Il  en  est  de  même  de  ces  spécimens  d'invention  ou  de  perfeclionne- 
mentdoni  les  résultats,  purement  théoriques,  sont  encore  sans  appli- 
cations matérielles,  et  qui  n'ont  reçu  aucune  sanction  de  la  pratique. 
Il  convient  d'attendre,  à  leur  égard,  que  le  temps  les  ait  fait  passer  du 
domaine  de  la  science  dans  celui  de  l'industrie. 

D'im  autre  côté,  le  jury  central  de  1839,  en  signalant  la  convenance 
d'interdire  aux  exposants  la  distribution  de  toutes  cartes,  adresses  et 
prospectus,  a  demandé  qu'on  cessât  d'admettre  certains  objets  qui,  aux 
dcn\ières  expositions,  occupaient  ime  place  considérable,  et  qui  appar- 
licniieut  plutôt  à  la  confection  qu'à  la  fabrique:  je  veux  parler  des  vê- 
tements, corsets,  perruques,  souliers,  socques,  etc.;  et,  en  second  lieu, 
lies  préparations  alimentaires,  boissons,  cosmétiques,  médicaments,  etc. 
Toutefois,  je  dois  expliquer  que  cette  exclusion  ne  saurait  s'appliquer, 
à  l'égard  des  substances  alimentaires  et  des  cosmétiques,  qu'aux  pro- 
duits qui  n'ont  été,  en  dernier  lien,  que  l'objet  d'une  mauipidalion  ac- 
cessoire ou  d'une  simple  mise  en  forme. 

Enfin,  monsieur  le  Préfet,  je  n'ai  pas  besoin  de  vous  rappeler  que 
les  jurys  départementaux  ne  doivent  ni  admettre,  ni  laisser  expédier  au- 


cuns produits  chimiques  ou  autres,  qui  seraient  susceptibles  de  s'en- 
flammer spontanément,  .soit  dans  le  transport,  soil  sous  la  tenipéniiure 
élevée  des  salles  de  l'exposition.  On  ne  saurait,  à  cet  égard,  déployer 
trop  de  sévérité  pour  prévenir  les  accidents. 

II.  La  bonne  qualité  des  produits  est  une  des  conditions  essentielles 

pour  leur  admission  ;  mais,  par  là,  je  n'entends  pas  i-xclu!>ivemenl  ces  A 
qualités  recherchées  par  les  classes  riches  de  la  société,  et  que  seules 
elles  peuvent  payer  convenablement  ;  ce  n'est  là  qu'une  exception,  l-i 
qualité  qu'on  doit  exiger  est  celle  qui  résulte  de  l'emploi  intelligent  des 
matières,  de  la  régularité  de  la  fabrication,  de  la  pureté  des  formes  ou 
des  dessins,  de  la  solidité  des  couleurs  ou  des  apprêts. 

Quelques  fabricanl>,  au  lieu  d'envoyer  à  l'exposition  les  types  ordi- 
naires de  leur  fabrication,  se  croient  obligés  de  faire  exécuter  à  grands 
frais,  pour  cette  époque,  des  produits  exceptionnels,  des  pièces  d'expo- 
sition. En  cela  ils  méconnais.seMt  le  but  de  l'institution,  qui  n'est  pomt 
d'établir  un  concours  entre  les  f.ibricants  sur  la  seule  comparaison  des 
objets  exposés,  mais  de  faire  connaître  l'étal  vrai  des  dilTerenles  bran- 
ches de  la  fabrique.  D'un  autre  côté,  en  se  présentant  avec  des  produits 
exécutés  en  dehors  des  conditions  normales,  on  se  met  en  contradiction 
avec  la  notoriété  publi(|ue  et  on  court  la  chance  d'être  mal  classé  :  ce 
qu'on  fait  le  mieux,  en  effet,  c'est  ce  qu'on  fait  joiirncllemenl,  et,  en 
visant  à  l'extraordinaire,  on  perd  li'  bénéfice  de  sa  spécialité. 

III.  Le  jury  de  l'exposition  de  1859  s'est  préoccupé  particulièrement, 
dans  l'appréciation  des  objets  exposés,  de  la  valeur  industrielle  et  com- 
merciale lies  produits.  Il  a  considéré,  avec  toute  raison,  que  le  prix  est 
un  des  [irincipaux  éléments  de  la  perfection,  comme  l'utilité  est  la  me- 
sure la  plus  vraie  de  la  valeur  réelle  des  choses. 

Les  jurys  départemenlaux  sont  composés  d'hommes  trop  positifs 
pour  ne  pas  tenir  le  plus  grand  compte  de  cette  considcralion.  La  ré- 
duction dans  les  prix,  lorsqu'elle  n'est  achetée  par  aucune  altération  de 
la  qualité,  constitue  un  progrès  véritable;  et  ce  progrès,  en  niellant  la 
marchamlise  à  la  portée  d'un  plus  grand  nombre  de  coiisomm^icurs, 
estfa\oiable  an  développement  du  travail,  par  l'augmenlalioii  de  pro- 
duction qui  en  est  la  conséquence. 

Lurs  des  dernières  expositions,  mes  prédéccs.seurs  avaient  demandé 
que  le  prix  de  chaque  article  fût  soigneusement  indiqué.  Le  jury  ceD> 
irai  avait  vivemenl  appuyé  cette  mesure.  Je  vous  invile,  monsieur  le 
Préfet,  a  insister  particulièrement  sur  ce  point.  Sans  la  tonnaissance 
exacte  des  prix,  le  niériie  relatif  des  produits  et  leur  véritable  valeur 
commerciale  ne  peuvent  être  sainement  appréciés,  et  le  jury  central  se 
trouvant,  à  leur  égard,  .sans  moyens  de  remplir  la  mission  qui  lui  est 
confiée,  pourrait  être  obligé  de  les  mettre  hors  de  concours. 

Telles  sont,  monsieur  le  Préfet,  les  recommandations  générales  que 
je  vous  prie  de  soumettre  au  Jury  constitué  dans  votre  département  ; 
placé  sur  les  lieux,  coimaissant  do  longue  date  l'importance  des  éta- 
blissements, la  nature  et  la  qualité  de  leurs  produits,  il  peut  avec  sû- 
reté en  faire  l'application,  et  son  témoignage,  donné  sans  esprit  de  lo- 
calité comme  sans  faveur,  ne  peut  manquer  d'être,  pour  le  jury  central, 
un  élément  précieux  d'appréciation.  Veuillez,  en  outre,  avertir  le  jury 
de  votre  département,  que,  comprenant  toute  la  difficulté  de  sa  inis.siun 
et  voulant  donner  force  à  ses  décisions  et  le  défendre  lui-même  contre 
les  influences  qui  pourraient  entraver  l'accomplissement  de  sa  tâche, 
j'ai  décidé  que  le  jury  central  poui  rail  refuser  l'exposition  des  produits 
qui  n'auraient  pas  été  soumis  à  son  examen  préalable,  ou  qui,  par  une 
cause  quelconque,  ne  se  trouveraient  pas  dans  les  conditions  que  je 
viens  d'énumérer. 

A  la  réception  de  celle  lettre,  vous  aurez,  monsieur  le  Préfet,  à  faire 
ouvrir,  à  votre  préfecture  et  dans  chaque  sous-préfecture  de  votre  dé- 
partement, le  registre  d'insciiption  des  déclarations  des  fabricants  et 
industriels  qui  se  proposent  d'exposer  ;  ces  déclarations  devront  indi- 
quer : 

Le  nom  du  fabricant,  la  nature  de  son  industrie,  son  domicile,  le  siège 
et  la  date  de  fondation  de  son  établissement,  le  nombre  d'ouvriers  qu'il 


123 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


12Ô 


emploie  dans  ses  ateliers  et  le  nombre  de  ceux  qu'il  fait  travailler  en 
dehors;  lu  nature  et  la  force  de  son  moieur,  le  nombre  de  ses  niélicrs, 
feux,  fours,  forges,  etc.;  la  i|uantité  de  matières  premières  qu'il  met 
en  œuvre;  l'iniporlance  annuelle  en  qnaniilé  et  en  valeur  des  produits 
qu'il  livre,  soit  au  commerce  intérieur,  soit  à  l'exportaiion;  les  avanta- 
ges que  présente  l'établissement  pour  la  localité,  les  médailles  ou  ré- 
compenses bonorifiques  qu'il  a  pu  obtenir. 

De  son  côté,  le  jury,  à  mesure  que  ces  déclaiationslui  seront  remises, 
constatera,  autant  que  possible,  l'exaciilude  des  renseignements  consi- 
gnés dans  ces  déclarations,  et  recueillera  toutes  les  informations  néces- 
saires pour  l'examen  <lcs  produits  de  chaque  éiablisssenient  et  pour  la 
rédaction  de  la  note  qui  devra  en  accompagiier  l'envoi. 

Vous  savez,  en  outre,  monsieur  le  Préfet,  (ju'aux  termes  de  l'article  S 
de  l'ordonnance  royale  du  5  septembre  1845,  les  jurys  départementaux 
n'ont  pas  seulement  la  missidu  de  prononcer  sur  l'admission  des  pro- 
duits présentes  pour  l'exposition;  ils  ont  encore  à  signaler  au  Gouver- 
nement les  industriels  qui,  par  la  fondation  d'établissements  ou  par  des 
inventions  ou  des  procédés  nouveaux,  non  susceptibles  d'être  exposés, 
auraient  contribué  aux  progrès  des  arts  et  manufactures  depuis  la  der- 
nière exposition.  Les  jurys,  je  n'en  doute  pas,  apprécieront  toute  l'im- 
porlance  de  l'intérêt  de  cette  partie  de  leur  tâche,  et  en  ne  négligeant 
rien  pour  déterminer  les  grands  établissements  à  prendre  au  prochain 
concours  la  part  que  leur  rang  leur  assigne,  ils  seront  heureux  de  pou- 
voir signaler  les  noms  des  industriels,  chefs  d'atelier  ou  simples  ouvriers 
qui,  par  des  perfectionnements  pratiques  ou  des  procédés  ingénieux, 
auraient  rendu  des  services  à  l'industrie  :  ce  sont  là  des  titres  honora- 
bles à  la  reconnaissance  du  pays,  et  le  Gouvernement,  sur  le  rapport  du 
jury  central,  saisira  avec  empressement  l'occasion  de  mettre  ces  titres 
sous  les  yeux  du  Roi. 

Veuillez,  monsieur  le  Préfet,  m'accuser  réception  de  cette  circulaire, 
cl  recevoir  l'assurance  de  ma  considération  la  plus  distinguée. 

Le  Ministre  Secrétaire  d'Etat  de  l'agriculture  et  du  commerce, 
Signé  :  L  Cunin-Gridaine. 

La  circulaire  suivante  apprendra  à  nos  lecteurs  les  mesures 
prises  par  M.  le  ministre  du  Commercer  pour  régler  l'admission 
des  produits  proposés  pour  l'exposition,  les  cas  d'exclusion  et  les 
mesures  d'ordre  adoptées  dans  l'intérêt  de  tous  : 

Monsieur  le  préfet,  au  moment  où  les  opérations  du  jury  de  votre 
département,  chargé  de  l'examen  des  produits  destinés  à  la  prochaine 
Exposition,  touchent  à  leur  terme,  vous  avez  à  vous  occuper  de  leur 
expédition  et  de  la  rédaction  des  pièces  qui  doivent  les  accompagner. 

Comme  aux  précédentes  Expositions,  les  objets  expédiés  doivent 
être  détaillés  dans  un  bordereau  indiquant  le  nom  et  le  domicile  de 
chaque  fabricani,  le  nombre  et  la  nature  de  ses  articles,  les  médailles 
et  récompenses  honorifiques  qu'il  a  pu  déjî»  obtenir. 

Vous  trouverez  ci-joint,  monsieur  le  Préfet,  un  modèle  de  ce  bor- 
dereau; il  ne  devra  être  rempli  qu'au  fureta  mesure  des  expéditions, 
et  il  ne  devra  comprendre  que  les  produits  effectivement  expédiés.  Ce 
bordereau  me  sera  adressé  directement,  par  la  pnst«,  en  triple  exem- 
plaire, et  de  manière  à  ce  qu'il  me  parvienne  toujours  avant  l'arrivée 
des  colis. 

Un  de  ces  exemplaires  est  destiné  au  jury  central  de  l'Exposition  ;  à 
cet  exemplaire  sera  joint,  pour  chaque  exposant,  un  bulletin  indivi- 
duel contenant  les  divers  renseignements  réclamés  par  ma  circulaire 
du  IS  décembre  dernier;  on  y  inscrira,  en  outre,  les  observations  et 
annotations  particulières  du  jury  départemental,  propres  à  faire  con- 
naître l'importance  réelle  des  établissements  et  les  titres  des  fabricants 
aux  récompenses  nationales.  Ce  témoignage,  émanant  d'hommes  si 
compétents,  sera  pour  le  jury  central  un  utile  élément  d'appréciation. 
On  devra  joindre  au  bulletin  les  notes  et  documents  qui  auront  pu  être 
fournis  par  chaque  exposant.  J'ajoute  que  si  un  fabricant  présentait 


en  même  temps  des  objets  d'une  nature  complètement  différente,  il 
serait  nécessaire  de  lui  affecter  un  bulletin  distinct  pour  chaque  vaiure 
de  produits. 

Le  second  exemplaire  du  bordereau  est  destin:;  h  l'administration  cen- 
trale. Il  m'est  nécessaire  pour  la  correspondance  avec  les  préfectures, 
avec  le  jury  central  et  avec  l'inspecteur  de  l'Exposition.  Dans  la  colonne 
d'observations  de  ce  bordereau  seront  reproduites  les  notes  du  jury  dé- 
partemental inscrites  sur  le  bulletin  indivlifuel. 

Enfin,  le  troisième  exemplaire  du  bordereau  est  indispensable  pour 
le  service  de  l'inspecteur;  ce  bordereau  ne  reproduira  pas  les  annota- 
tions du  jury,  mais  il  devra  être  accompagné,  pour  chaque  exposant, 
d'une  carte  dont  le  modèle  est  ci-joint,  et  qui  servira  pour  la  réparti- 
tion et  le  classement  des  produits  dans  les  différentes  divisions  de 
l'Exposition.  Il  est  bien  entendu  que,  comme  pour  les  bulletins  indivi- 
duels, il  devra  être  fait  autant  de  cartes  qu'il  y  aura  de  produits  d'une 
nature  diffcrenlt. 

Les  produits  pourront  être  reçus  à  l'Exposition  à  partir  du  23  mars 
courant;  ils  devront  tous  être  arrivés  avant  le  13  avril  prochain.  Ils  se- 
ront adressés  à  l'inspecteur  de  l'Exposition,  aux  Champs-Elysées,  et 
chaque  envoi  devra  être  accompagné  d'une  lettre  de  voilure  timbrée, 
indiquant  le  nombre,  les  numéros  et  le  poids  des  colis,  la  nature  des 
objets,  ainsi  que  le  prix  du  transport  et  la  durée  de  la  route.  Il  ne  de- 
vra être  ajouté  au  prix  du  transport  aucuns  frais  à  rembourser.  Un  du- 
plicata, sur  papier  non  timbré,  de  la  lettre  de  voiture,  sera  joint  à 
l'exemplaire  du  bordereau  destiné  à  l'inspecteur  de  l'Exposition.  Les 
voituriers  arriveront  exclusivement  par  le  quai  de  la  Conférence;  la  let- 
tre de  voiture  devra  en  faire  mentioti.  Enfin  ,1a  voie  du  roulage  ordi- 
naire ou  celle  de  la  navigation  devront  être  exclusivement  adoptées. 

Je  vous  rappelle  d'ailleurs,  monsieur  le  préfet,  que  certains  produits 
bruts,  tels  que  les  minerais,  granits,  marbres  et  autres  objets  analogues, 
ne  doivent  être  envoyés  que  par  échantillons.  Je  dois  vous  avertir  en 
outre  que  le  Gouvernement  ne  répond  pas  des  pertes  ou  dommages  ré- 
sultant, soit  pendant  la  route,  soit  dans  le  cours  de  l'Exposition,  des  vi- 
ces d'emballage,  de  la  détérioration  naturelle  des  produits,  ni  des  acci 
dents  ou  événements  de  force  majeure,  même  de  celui  d'incendie.  Les 
exposants  doivent  en  être  expressément  informés,  afin  qu'ils  puissent 
faire  assurer  leurs  produits,  s'ils  le  jugent  convenable,  ou  rester  leurs 
propres  assureurs.  Toutes  les  précautions  ont  d'ailleurs  été  rigoureuse- 
ment prises  contre  les  risques  du  feu  ;  et,  à  cet  égard,  je  vous  rappelle, 
monsieur  le  Préfet,  la  recommandation  que  je  vous  ai  faite  de  ne  lais- 
ser admettre  aucune  substance  susceptible  de  s'enflammer  spontané- 
ment ou  par  le  simple  choc. 

Ma  circulaire  du  13  décembre  dernier  a  recommandé  aux  jurys  de 
signaler  particulièrement  à  raiiention  du  Gouvernomenl  les  industriels 
qui,  par  des  inventions  ou  des  procédés  nouveaux,  ont  contribué,  de- 
puis la  dernière  Exposition,  aux  progrès  des  arts  et  manufactures.  Leurs 
noms  devront  être  inscrits,  avec  le  rapport  du  jury,  à  la  suite  de  ceux 
des  exposants,  sur  les  deux  exemplaires  du  bordereau  destinés  au  jury 
central  et  à  mon  département. 

Enfin,  monsieur  le  Préfet,  je  vous  prie  de  faire  remettre  sous  vos 
yeux  les  instructions  adressées  à  votre  préfecture  les  9  octobre  1858 
et  18  janvier  1839,  lors  de  la  dernière  Exposition,  et  je  vous  invite  à 
vous  y  conformer  avec  soin  pour  tout  ce  qui  concerne  les  mesures  d'or- 
dre propres  à  provenir  dans  l'admission  et  l'expédition  des  produits 
l'encombrement  et  la  confusion. 

Veuillez,  monsieur  le  Préfet,  m'accuser  exartemeni  réception  de  la 
présente  circulaire,  et  recevoir  l'assurance  de  ma  considératimi  la  plus 
distinguée. 

Le  Ministre  Secrétaire  d'Etat  de  l'.'^gricullure  ei  du  Commerce, 
Signé  :  L.  CUNI.N-GRIDAINE. 


i27 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS 


iK 


DE  IiA  POZ.ICI:  DU  ROUI.AGE. 

Le  projet  de  loi  sur  la  police  du  roulage,  amendé  l'an  dernier 
par  la  chambre  des  députés,  vient  d'être  amendé  de  nouveau  par 
la  chambre  des  pairs.  Depuis  plus  de  dix  ans  que  ce  projet  de  loi 
est  l)allotté  d'une  Chambre  à  l'autre,  plus  la  discussion  se  prolonge, 
moins  la  question  semble  s'éclaircir.  En  dernier  lieu  surtout.  les 
systèmes  les  plus  divergents  ont  été  produits;  on  s'est  étayé  des 
faits  et  des  expériences  les  plus  contradictoires.  Cependant,  tous 
ces  faits  sont  probablement  exacts  ;  les  expériences  ont  été  faites  par 
des  hommes  très-habiles  ;  ceux  qui  raisonnent  d'après  ces  faits  et 
ces  expériences  ne  sont  pas  des  esprits  faux  :  il  doit  donc  y  avoir  au 
milieu  de  tout  cela  quelque  malentendu.  Ce  malentendu  le  voici  : 
dans  tout  le  cours  de  ces  interminables  discussions  on  parle  tou- 
jours des  routes  en  général,  sans  établir  aucune  distinction  entre 
celles  qui  sont  bonnes  et  celles  qui  sont  mauvaises.  Cependant, 
l'action  du  roulage  est  totalement  différente  dans  les  deux  cas  :  il 
n'est  donc  pas  étonnant  que  l'on  arrive  à  des  conclusions  tout  à 
fait  opposées.  Pour  peu  qu'on  eût  voulu  faire  une  distinction  indis- 
pensable et  examiner  séparément  ce  qui  se  passe,  1"  sur  de  mau- 
>  aises  routes  ;  2"  sur  de  belles  routes,  on  eût  éclairci  bien  vite  une 
question  fort  compliquée  en  apparence,  mais,  en  réalité,  extrême- 
ment simple. 

Lorsqu'une  route  est  rouagée,  raboteuse,  lorsqu'elle  offre  une 
résistance  inégale,  et  des  trous  ou  des  flaques  plus  ou  moins  pro- 
noncés, alors  les  voitures  agissent  sur  elle  par  choc,  par  force  vive, 
et  lui  font  d'autant  plus  de  mal  qu'elle  est  plus  mauvaise.  Dans  ce 
cas  il  y  a  écrasement,  désagrégation,  défoncement.  Dans  ce  cas, 
pour  un  tonnage  donné,  les  forts  chargements  sont ,  sans  aucun 
doute,  plus  à  redouter  que  les  faibles  chargements.  C'est  un  fait 
analogue  à  celui  du  coup  de  mouton  qui  agit  sur  un  pieu  avec  une 
toute  autre  efficacité  que  mille  petits  coups  de  marteau.  Dans  ce 
cas  encore,  les  jantes  étioites  peuvent  offrir  moins  de  garanties  que 
les  jantes  larges.  Enfin,  la  vitesse  ajoute  considérablement  aux  dé- 
gradations, attendu  que  l'intensité  des  chocs  est  proportionnelle  à 
cette  vitesse. 

Sur  de  belles  routes,  au  contraire,  à  surface  unie,  ferme  et  éga- 
fement  résistante,  les  chocs  disparaissent,  et  les  voitures  n'agissent 
plus  que  par  simple  frottement.  Dans  ce  cas,  il  n'y  a  plus  de  dé- 
gradation proprement  dite;  il  n'y  a  que  de  l'usure,  et  une  usure 
uniforme  et  insensible  qui  ne  nuit  en  rien  à  la  viabilité.  Dans  ce 
cas,  pour  un  tonnage  donné,  les  lourds  chargements  ne  sont  pas 
plus  à  craindre  que  les  faibles  chargements,  les  jantes  étroites  ne 
sont  pas  plus  à  craindre  que  les  jantes  larges,  le  frottement  étant, 
comme  on  sait,  proportionnel  au  poids,  quelle  que  soit  l'étendue 
des  surfaces  de  contact.  Dans  ce  cas  encore,  la  vitesse  a  plutôt 
des  avantages  que  des  inconvénients,  car  elle  tend  à  diminuer  le 
frottement,  en  soulevant,  pour  ainsi  dire,  les  voitures,  par  un  effet 
analogue  à  celui  qui  se  produit  dans  la  marche  des  bateaux  rapides 
sur  les  canaux. 

On  objectera  peut-être  que  la  surface  des  routes,  même  les  plus 
belles,  n'est  ni  assez  unie,  ni  assez  ferme  pour  que  la  loi  du  frot- 
tement lui  soit  rigoureusement  applicable,  et  l'on  pourra  craindre 
qu'avec  une  entière  lii)erté  le  roulage  n'adopte  des  jantes  tellement 
minces,  tellement  tranchantes,  que  la  résistance  des  chaussées,  qui 
est  loin,  après  tout,  d'être  indéfinie,  ne  se  trouve  forcément  en  dé- 
faut. Mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  la  solidité  des  roues  exige 


une  certaine  largeur  dans  les  jantes,  et  que  cette  largeur  est  en- 
core bien  supérieure  à  celle  qui  pourrait  donner  quelque  Inquié- 
tude pour  la  conservation  des  routes.  Il  serait  tout  à  fait  impossi- 
ble, par  exemple,  de  faire  porter  une  lourde  charrette  sur  des  jan- 
tes de  deux  centimètres.  Eh  bien!  il  a  été  constaté  qu'une  chaussée 
en  bon  état  résisterait  parfaitement  a  des  jantes  aussi  minces.  On 
peut  faire  observer  encore  que  dans  les  localités  où  il  n'existe  pas  de 
ponts  à  bascule  et  où  le  roulage  jouit,  par  le  fait,  d'une  liberté  en- 
tière, on  ne  lui  voit  pas  employer  des  jantes  beaucoup  plus  étroites 
que  celles  généralement  en  usage;  c'est,  nous  le  répétous,  qu'il  y 
a  une  limite  naturelle  imposée  par  le  besoin  de  solidité  des  roues, 
et  Ion  pourrait  descendre  beaucoup  au-dessous  de  cette  limite, 
sans  avoir  rien  à  craindre  pour  la  résistance  des  chaussées. 

Ainsi  donc,  les  restrictions  relatives  aux  chargements  et  à  la 
largeur  des  jantes,  restrictions  qui  peuvent  être  nsotivées  sur  de 
mauvaises  routes,  deviennent  complètement  inutiles  sur  de  belles 
routes.  Il  suit  de  la  que  toute  la  question  se  réduit  à  maintenir  la 
surface  des  chaussées  constamment  unie  et  ferme,  de  telle  sorte 
que  le  roulage  n'agisse  sur  elle  que  par  voie  de  frottement.  Ce 
n'est  donc  plus  eu  réalité  qu'une  simple  question  d'entretien. 

Ceci  ét^ibli,  il  y  a  lieu  de  se  demander  maintenant  :  1"  s'il  existe 
en  effet  des  méthodes  d'entretien  pouvant  réaliser  le  parfait  état 
des  routes  dont  nous  avons  parlé;  2"  si  leur  application  n'entraî- 
nerait pas  dans  une  trop  grande  dépense. 

En  premier  lieu,  oui,  il  existedes  méthodes  d'entretien  procurant 
en  toutes  saisons  des  routes  unies  et  fermes,  à  peu  près  exemptes  de 
poussière  et  de  l)oue,  et  sans  aucime  apparence  non -seulement 
d'ornières,  mais  des  moindres  frayés.  Ces  méthodes  sont  parfai- 
tement connues  aujourd'hui  ;  elles  sont  appliquées  dans  un  certain 
nombre  de  départements,  et  tout  le  monde,  à  peu  près,  les  ingé- 
nieurs comme  le  publie ,  parait  d'accord  sur  leur  efficacité.  Il 
ne  s'agit  donc  pas  de  procédés  à  découvrir,  ou  bien  de  procédés 
dont  le  succès  est  plus  ou  moins  problématique  ;  il  s'agit  de  procé- 
dés aujourd'hui  consacrés  par  l'expérience,  et  qui  ne  se  sont  trou- 
vés nulle  part  en  défaut,  même  sur  des  routes  d'une  fréquenta- 
tion tout  à  fait  exceptionnelle,  telle  que  la  grande  avenue  de  Neuilly 
aux  Champs-Elysées,  et  beaucoup  d'autres  que  nous  pourrions  citer. 

Quant  a  la  dépense  que  ces  procédés  exigent,  comment  pourrait- 
elle  être  plus  grande  que  dans  tout  autre  système?  Les  dégradations 
et  l'usure  sont  en  raison  inveree  de  la  bet.uté  des  routes,  et  sur  des 
routes  parfaitement  belles  il  n'y  a  plus  de  dégradations  propre- 
ment dites,  et  l'usure  se  trouve  réduite  a  son  minimum.  Or,  le  tra- 
vail de  l'entretien  consiste  à  réparer  les  dégradations  ou  à  restituer 
l'usure.  Comment  ce  travail  pourrait-il  augmenter  à  mesure  que 
les  dégradations  diminuent'?  comment  arriverait-il  à  ^on  maxi- 
mum lorsque  les  dégradations  disparaissent?  Une  telle  opinion 
n'est  pas  soutenable,  elle  est  contraire  à  la  nature  des  choses,  qui 
veut  qu'ici,  comme  dans  une  foule  d'autres  circonstances,  l'écono- 
mie soit  un  des  plus  précieux  attributs  de  la  beauté. 

L'emploi  du  système  d'entretien  le  plus  parfait,  c'est-à-dire  du 
système  qui  maintient  au  plus  haut  degré  l'uni  et  la  dureté  des 
routes  ,  telle  est  donc  la  solution  bien  simple  de  cette  question  de 
la  police  du  roulage,  si  longuement  et  si  vainement  controA  ersée 
depuis  plus  de  dix  ans.  Eh  bien  !  cette  solution  si  simple  résout  en 
même  temps  une  foule  de  questions  secondaires,  dont  divei"s  ora- 
teurs se  sont  plus  ou  moins  préoccupés  dans  les  deux  Chambres. 

Ainsi,  on  a  parlé  de  l'amélioration  de  la  race  chevaline,  dans 
l'intérêt  des  remontes  de  la  cavalerie  ;  mais  on  n'a  pas  pris  garde 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


130 


que  ce  sont  les  routes  qui  font  les  chevaux.  Sur  de  mauvaises  rou- 
tes, les  chevaux  lourds  sont  une  nécessité;  les  chevaux  fins,  ailx 
allures  rapides,  seraient  bientôt  perdus.  D'ailleurs,  la  vitesse  de- 
vient impossihle  sur  de  semblahles  routes,  parce  qu'elle  augmente 
considérablement  le  tirage.  C'est  le  contraire  qui  arrive  sur  de 
belles  routes  ;  le  tirage  y  diminue  bien  plutôt  avec  la  vitesse  ;  en- 
suite, les  chevaux  fins  n'y  sont  plus  soumis  à  ces  efforts  saccadés 
et  inégaux  qui  les  ruineraient  promptement,  et  ils  peuvent  déve- 
lopper leurs  enjambées  en  toute  assurance,  le  sabot  étant  toujours 
certain  de  retomber  sur  une  surface  unie  et  ferme.  La  vitesse  ayant 
une  grande  valeur,  l'emploi  de  ces  chevaux  devient  donc  éminem- 
ment avantageux,  et  dès  lors  il  ne  tarde  pas  à  se  généraliser,  comme 
on  le  voit  aujourd'hui  eu  Angleterre.  En  résumé,  la  nature  des  che- 
vaux qui  circulent  sur  les  routes  est  en  rapport  forcé  avec  l'état 
de  ces  routes  ;  si  elles  restent  mauvaises,  on  aura  le  cheval  de  char- 
rette actuel  ;  si  elles  deviennent  belles,  on  aura  les  chevaux  fins  et 
rapides,  si  précieux  pour  les  remontes  de  la  cavalerie. 

On  signale  et  ou  déplore  les  mauvais  traitements  que  les  char- 
retiers font  éprouver  à  leurs  chevaux;  c'est  en  effet  quelque  chose 
de  révoltant.  Mais  la  dureté,  pour  ne  pas  dire  la  cruauté  qu'on  re- 
proche avec  raison  aux  charretiers,  ne  cessera  qu'avec  le  mau\  ais 
état  des  routes.  C'est  la  nécessité  de  surmonter  un  obstacle,  de  s'ar- 
racher d'un  mauvais  pas,  qui  les  habitue  à  forcer  et  à  maltraiter 
leur  attelage.  Si  les  routes  étaient  parfaitement  belles  et  le  tirage 
égal,  la  force  des  chevaux  serait  en  rapport  avec  le  travail  qu'on 
aurait  à  exiger  d'eux,  et  il  n'existerait  plus  aucun  motif  pour  les 
accabler  de  coups,  comme  on  le  fait  aujourd'hui.  Une  grande  amé- 
lioration s'opérerait  en  même  temps  et  par  cela  même  dans  le  mo- 
ral des  charretiers,  qui  n'ont  pas  moins  à  gagner  que  leurs  che- 
vaux au  parfait  état  de  la  viabilité.  Ainsi  la  beauté  des  routes, 
qu'on  poursuit  en  vue  d'un  intérêt  purement  matériel,  sert  aussi 
des  intérêts  d'un  ordre  plus  élevé,  qui  sembleraient  n'avoir  rien  à 
lui  demander.  C'est  une  suite  de  cette  gi'ande  loi  de  solidaiité  qui 
établit  une  intime  et  si  heureuse  liaison,  quoique  souvent  inaper- 
çue, entre  les  améliorations  de  toute  sorte,  aussi  bien  de  l'ordre 
moral  que  de  l'ordre  matériel. 

La  fticilité  du  croisement  ou  du  déplacement  des  voitures  est  en- 
core une  conséquence  Haturelle  du  bon  état  des  routes.  Une  lourde 
charrette,  engagée  dans  des  ornières  profondes,  n'est  pas  libre  de 
ses  mouvements,  et  la  plupart  du  temps  il  lui  serait  impossible 
d'en  sortir  pour  céder  une  partie  de  la  voie.  Au  contraire,  sur  des 
routes  unies  et  fermes,  rien  ne  s'oppose  à  ce  qu'elle  se  range 
promptement  et  livre  sans  difficulté  le  passage  nécessaire.  La  beauté 
des  routes  a  donc  l'avantage  de  diminuer  de  beaucoup  les  dangers 
de  la  circulation  ;  toutefois,  elle  ne  suffit  pas  pour  les  faire  entiè- 
ment  disparaître,  et  un  ensemble  de  mesures  préventives  et  pénales 
est  en  outre  nécessaire  pour  réaliser  autant  que  possible  cet  im- 
portant résultat. 

Nous  croyons  que  l'administration  ne  se  préoccupe  pas  assez  de 
la  police  du  roulage,  au  point  de  vue  de  la  sécurité  publique.  L'u- 
tilité de  cette  espèce  de  police  est  cependant  moins  contestable  et 
d'une  tout  autre  importance  que  celle  relative  à  la  conservation 
des  routes.  Qu'est  l'écrasement  en  pure  perte  de  quelques  mètres 
cubes  de  pierre,  auprès  d'un  bras  ou  d'une  jambe  cassée  ?  Veiller 
à  la  sûreté  de  la  circulation  sur  la  voie  publique  constitue  pour 
l'administration,  non-seulement  un  droit  incontestable,  mais  un 
devoir  impérieux  dont  l'accomplissement,  il  faut  le  dire,  laisse 
beaucoup  trop  à  désirer.  | 


Ce  n'est  pas  que  la  loi  actuelle  du  roulage,  comme  celle  projetée, 
ne  comporte  des  mesures  de  police  proprement  dite;  mais  il  arrive 
malheureusement  que  ces  mesures  sont  fort  mal  exécutées,  par 
deux  motifs  :  1"  parce  que  la  plupart  des  délits  sont  portés  devant 
l'autorité  locale,  qui  ne  condamne  presque  jamais;  2°  parce  que  les 
amendes  sont,  dans  tous  les  cas,  beaucoup  trop  faibles  pour  décou- 
rager les  délinquants  et  pour  stimuler  le  zèle  des  agents  qui  ont  à 
dresser  des  procès-verbaux. 

Chose  incroyable,  les  délits  qui  peuvent  compromettre  la  vie  des 
voyageurs  sont  punis  d'une  amende  de  l  fr  à  5  fr.  seulement, 
quand  ceux  auxquels  on  attribue ,  peut-être  à  tort,  quelque  dé- 
gradation des  routes,  comme  le  défaut  de  largeur  des  jantes,  l'ad- 
dition d'un  cheval  de  renfort,  etc.,  sont  punis  par  des  amendes  de 
50  fr.  et  au-dessus!  ]l  va  sans  dire  que  les  gendarmes  ne  se  font 
pas  faute  de  dresser  des  procès-verbaux  pour  cette  dernière  espèce 
de  délits,  pendant  qu'ils  négligent  complètement  les  autres.  On 
sait,  en  effet,  qu'ils  ont  droit  au  tiers  des  amendes,  et  l'on  conçoit 
que  le  tiers  de  50  fr.  puisse  offrir  un  utile  stimulant  à  leur  zèle  ; 
mais,  en  bonne  conscience,  que  peut-on  espérer  d'une  prime  de 
66  centimes?  H  y  a  plus,  l'autorité  locale,  devant  laquelle  sont 
portés  les  délits,  ne  donne  habituellement  aucune  suite  aux  pro- 
cès-verbaux ;  elle  est  trop  près  des  délinquants  pour  agir  avec  une 
entière  indépendance  et  une  juste  sévérité;  dès  lors,  à  quoi  bon 
verbaliser  et  se  faire  des  ennemis  en  pure  perte?  Les  délits  dont  il 
s'agit  ne  seront  réprimés  d'une  manière  efficace  que  lorsqu'ils  seront 
passibles  de  plus  fortes  amendes,  et  qu'ils  ressortiront  des  conseils 
de  préfecture,  sans  préjudice  du  renvoi  des  délinquants  par  devant 
les  tribunaux  ordinaires,  pour  ce  qui  regarde  les  peines  corpo- 
relles. 

La  limitation  du  poids  absolu  des  chargements  et  celle  du  nom- 
bre de  chevaux  attelés  de  file  nous  sembleraient  devoir  s'ajouter 
aux  mesures  qui  ont  pour  objet  la  police  proprement  dite,  c'est-à- 
dire  la  sécurité  de  la  circulation.  Un  chargement  qui  dépasse  cer- 
taines limites  présente  toujours  quelques  dangers,  surtout  dans  les 
traverses  des  villes  et  villages  et  dans  les  fortes  pentes.  Quant  aux 
attelages  de  sept  à  huit  chevaux  de  file,  comment  est-il  possible  de 
les  diriger  avec  la  précision  et  la  promptitude  nécessaires,  sans 
crainte  d'accidents?  On  ne  devrait  pas,  selon  nous,  tolérer  plus  de 
quatre,  et  peut-être  plus  de  trois  chevaux  de  file.  Si  le  roulage 
trouvait  du  bénéfice  à  employer  des  attelages  plus  nombreux,  il 
n'aurait  qu'à  mettre  les  chevaux  sur  deux  rangs,  et  il  serait  ainsi 
naturellement  conduit  à  remplacer  la  charrette  à  deux  roues  par  le 
chariot  à  quatre  roues.  Ce  changement,  si  désirable  dans  l'intérêt 
de  la  circulation,  n'imposerait  d'ailleurs  rien  d'onéreux  à  l'indus- 
trie des  transports,  dans  l'hypothèse  de  routes  en  parfait  état;  car 
alors  le  tirage  n'est  nullement  augmenté  par  le  plus  grand  nombre 
de  roues,  pendant  que  l'on  utilise  beaucoup  mieux  la  force  de  l'at- 
telage. 

En  résumé,  nous  pensons  : 

1<>  Que  la  police  du  roulage,  en  ce  qui  regarde  la  conservation 
des  routes,  a  d'autant  moins  d'importance,  que  les  routes  sont  plu* 
belles  ;  que  sur  des  routes  en  parfait  état  elle  devient  complètement 
inutile,  et  que,  dès  lors,  tout  se  réduit  à  une  simple  question  d'entre- 
tien, laquelle  parait  aujourd'hui  théoriquement  et  pratiquement  ré- 
solue ; 

2°  Que  c'est  la  police  proprement  dite,  celle  relative  à  la  sécurité 
publique,  qui  doit  appeler  surtout  la  sollicitude  de  l'administration  ; 
que  cette  police  devrait  donner  lieu  à  une  répression  plus  étendue, 

T.   V.  9 


tsi 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


132 


plus  efficace,  et  qu'à  cet  effet  il  conviendrait  d'élever  le  chiffre  des 
amendes,  d'attribuer  la  connaissance  des  délits  aux  conseils  de  pré- 
fecture, et  aussi  d'assigner  une  limite  au  nombre  de  chevaux  attelés 
de  file,  et  même  au  poids  absolu  des  chargements. 

Un  ingénieur  en  chef  des  Ponts-et-Chausséks. 


OBSERVATIONS 

PRÉSENTÉES  PAR  LA  SOCIÉTÉ  DES  ARCHITECTES 

SUR   LA  LOI   DES  PATENTES   (1). 

La  Société  centrale  des  Architectes  ne  date  que  d'hier,  et  ce- 
pendant son  existence  a  déjà  été  signalée  par  un  bienfait  dont 
tous  les  architectes  se  ressentent;  car  c'est  grâce  à  l'activité 
intelligente  et  aux  considérations  fondées  qu'ont  fait  valoir 
les  membres  de  la  commission  nommés  par  la  Société  pour 
étudier  cette  question  des  patentes,  que  les  architectes  jouissent 
aujourd'hui  d'être  exempts  de  payer  une  patente  qui  les  assimi- 
lait à  des  Industriels.  Nous  aurions  voulu  faire  précéder  le  rap- 
port rédigé  par  la  commission  de  la  société,  d'un  aperçu  histori- 
que des  débats  que  cette  question  des  patentes  a  déjà  soulevés  dans 
d'autres  temps  à  propos  des  architectes  :  M.  Gourlier  avait  bien 
voulu  même  nous  communiquer  une  liste  très-intéressante  des  di- 
vers mémoires  et  bien  à  consulter  à  cette  occasion;  mais  l'éten- 
due du  rapport  que  nous  donnons  ci-dessous,  le  peu  de  place  qui 
nous  reste  dans  ce  numéro,  et  l'impossibilité  de  retarder  encore 
d'un  mois  la  reproduction  du  document  que  nous  donnons  au- 
jourd'hui, nous  privent  de  cette  satisfaction. 

Le  projet  de  loi  sur  les  patentes  ei  le  rapport  imprimé  de  M.  Viiet, 
au  nom  de  la  commission  de  la  Chambre  des  Députés,  intéressent  à  un  si 
haut  degré  les  architectes  dans  leur  position  sociale,  qu'ils  ont  cru  de- 
voir appeler  spécialement  sur  ce  sujet  l'aticnlion  des  Chambres  et  du 
Gouvernement. 

1°  Qu'est-ce  (]u'un  arcliitecie? 

2°  Qu'est-ce  que  la  patente? 

3°  Quel  motif  y  a-t-il  pour  qu'un  architecte  y  soit  soumis  ou  en' soit 
exempt? 

La  solution  de  ces  questions  conduira  à  examiner  la  profession 
d'architecte  d'après  les  définitions  qui  en  sont  adniises  généralement 
et  d'après  la  position  qu'ils  occupent,  et  cellç  surtout  qu'ils  devraient 
occuper. 

L'examen  de  la  patente  nous  donnera  lieu  d'apprécier  la  nature  de 
cet  impôt  en  nous  appuyant  sur  des  discussions  législatives,  sur  le  texte 
(le  plusieurs  lois,  et  enfin  sur  le  rapport  même  de  la  commission  char- 
gée de  donner  un  avis  à  la  Chambre  des  Députés  sur  le  projet  du  gou- 
vernement. 

On  lit  dans  le  Dictionnaire  de  l'Académie,  au  mot  Architecte  : 

«  Celui  qui  exerce  l'art  de  l'archilecture,  l'ar<  do  bâtir;  artiste  qui 
compose  les  édifices,  on  déierinine  les  proportions,  les  disiribulions. 


(1)  La  Société,  présidée  par  M.  Blouet,  le  25  février  1844,  a  approuvé  les 
observations  qui  suivent,  et  qui  lui  avaient  été  soumiser,  par  une  commission 
composée  de  MM.  Gourlier,  Dcjoly,  Morean,  Léon  Vaudoycr  et  de  M.  Charles 
Uoiiault,  rapporteur. 


les  décorations,  les  fait  exécuter  sous  ses  ordres  cl  en  règle  le»  dé 
penses.  » 

On  remarquera  d'abord  que  c'est  avec  inteniion  sans  doute  que  l'on 
a  répété  trois  fois  le  mol  art  dans  cet  article  si  court.  On  voit  bien  qu'il 
est  dans  l'esprit  de  tous  que  l'architecte  est  un  artiste,  c'esi-à-dire  un 
homme  qui  exerce  une  profession  éiiiiueniroeiil  libérale  et  non  pas  in- 
dustrielle. 

Voyons  maintenant  ce  que  c'est  que  la  patente  dans  l'étal  actuel  de 
la  législation  (i): 

«  La  patente  est  un  impôt  de  qualité  auquel  sont  soumis  ceux  qui 
exercent  le  commerce,  certaines  professions  ou  certains  emplois. 

«  Les  personnes  suivantes  ne  sont  pas  sonmi.ses  à  la  patente,  sa- 
voir :  Les  fonctionnaires  publics  et  employés  salariés  par  l'Étal,  en  ce 
qui  concerne  seulrment  l'exercice  de  leurs  fonctions... 

«  ...  Les  peintres,  graveurs,  sculpteurs,  coiisidcrég  comme  artistes, 
et  Revendant  que  le  produit  de  leur  art;  les  médecins,  chirurgiens, 
pharmaciens  attachés  aux  armées,  aux  hôpitaux  civils  ou  militaires,  ou 
au  service  des  pauvres,  par  nomination  du  Couverncrocnl  ou  des  auto- 
rités constituées,  soit  qu'ils  exercent  ou  non  leur  an  chez  des  parlicu- 
liers.  » 

Le  17  février  1791,  l'Assemblée  nationale  décréta  qu'il  y  aurait  un 
dioit  de  paiento. 

Dans  l'esprit  de  cette  loi,  on  assujettit  tontes  les  professions  à  la  p:i- 
tente,  et  l'on  spécifia  seulement  les  exceptions. 

Le  4  thermidor  an  III  (2i  juillet  ITitS),  la  t;onveniion,  plus  libérale 
sous  ce  rapport,  exempta  géiiéraleincnl  les  arts,  niéiiers  ou  professions, 
et  n'entendit  y  comprendre  que  le  commerce. 

C'est  donc  par  une  extension  en  faveur  du  Use  que  certaines  profes- 
sions ont  été  soumises  à  la  patente. 

On  voit  le  progrès  qu'a  fait  cet  inipôl,  qui  a  été  généralise  pour  toutes 
les  professions,  dont  quelques-unes  n'ont  été  exemptées  que  par 
exception. 

.\près  avoir  rappelé  la  définition  du  mol  architecte  donnée  par  l'A- 
cndémie,  et  la  législation  actuelle  des  patentes,  nous  avons  cru  conve- 
nable d'entrer  dans  l'examen  du  nippon  de  la  comiiiis»ion  delà  Cham- 
bre des  Députés,  qui  nous  a  pani  être  le  document  le  plus  propre  à 
jeter  de  la  lumière  sur  la  question  qui  nous  occupe. 

Nous  lisons,  à  la  page  14  du  Rapport  de  la  commission,  un  paragra- 
phe qui  semble  n'avoir  pas  de  rapport  direct  avec  les  architectes,  car 
une  fois  l'impôt  établi,  il  ne  nous  appartient  |ias  de  discuter  son  mode 
d'application. 

Voici  ce  paragraphe  : 

«  Il  y  aurait  bien  un  moyeu  de  les  reiidi  c  t  lUt.ii  es  et  »erieux  Jcs  pro- 
jets d'assiette  de  l'impôt)  :  ce  serait  de  donner  aux  répartiteurs  le  droit 
de  l'aire  "des  investigations  sur  les  livres  et  sur  les  registres  de  chaque 
patentable,  afin  de  constaler  l'état  réel  de  leurs  affaires.  » 

L'esprit  de  la  loi  des  patentes  se  retrouve  ici  tout  entier.  Il  s'agit 
d'im  impôt  appliijué  il  l'industrie,  au  commerce  où  les  livret  sont  néces- 
saires. 

Mais  les  architectes  ne  sont  pas  ncgociani!<,  et  ne  sont  pas  même 
obligés  d'avoir  de  livres  ni  de  registres  île  commerce;  cela  seul  montre- 
rait que  la  patente  s'applique  ii  tout  autre  profes>ion  qu'à  celle  d'ar- 
chitecte. 

On  n'a  jamais  songé,  dans  l'usage,  à  rendre  les  aichilettes  jusiicia- 
hies  du  Tribunal  de  coumicrce;  et  il  est  sans  exemple  qu'un  architecte 
ait  siégé  comme  juge  consulaire.  Sous  ce  point  de  vue  ils  ne  sont  donc 
pas  susceptibles  d'être  patentés. 

On  lit  également,  page  74  du  Rapport  : 

«  I  a  patente  est,  'a  vrai  dire,  l'impôt  des  professions  non  ela$*ét$, 
non  organisées,  dont  l'accès  est  libre  à  tout  le  monde.  Elle  est  le  passe- 
port au  moyen  duquel  on  entre  dans  ces  professions.  » 

(1)  dictionnaire  de  Législation  usuelle,  de  H.  de  Chabrol. 


133 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE 

* 


ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


13i 


Si  la  palenie  ('lail  vérilablement  applicable  à  lonles  les  professions 
non  classées,  non  organisées,  dont  l'accès  est  libre  à  loul  le  monde,  elle 
(levrail  s'appliquer  aux  arlisi<ïs  ,  aux  savauls,  aux  hommes  de  let- 
tres, etc.  ;  car  ce  sont  là  des  professions  non  classées,  non  organisées, 
dont  r accès esl  libre  à  loul  le  monde;  ol  ccpeudatit  ni  le  gouverneiuciit 
ni  la  cuinmission  n'ont  eu  l'idée  de  les  imposer. 

Nous  puiserons  dans  le  rapport  mémo  largumenl  le  plus  fort  en  fa- 
veur de  l'exempliou  réciaiui'c  pour  les  architectes.  Cet  argument  a  été 
présenté  en  faveur  des  médecins.  Ces  deux  professions  ont  une  telle 
analogie,  que  tout  ce  qui  s'applique  à  l'une  peut  s'appliquer  à  l'autre 
sous  le  rapport  de  la  patente. 

Nous  allons  transcrire  les  paragraphes  du  rapport  relatifs  à  l'exemp- 
tion réclamée  en  faveur  des  médecins.  On  verra  qu'en  subsiiliianl  seu- 
lement par  la  pensée  le  mot  architecte  au  mot  médecin,  tous  les  raison- 
nements restent  parlaiicincnt  logi(|ues. 

Voici  ce  qu'ont  lit  aux  pages  77,  78,79,  80  et  81  du  Rapport  de 
M.  Vitei: 

«  S'il  est  jiisic  d'exempter  de  la  patente  les  olliciers  ministériels, 
parce  qu'ils  sont  soumis  à  des  charges  particulières  qu'on  peut  appeler 
l'impôt  spécial  des  oITices,  un  motif  du  même  genre  ordonne  d'affran- 
chir les  professions  dites  libérales.  On  peut,  jusqu'à  nu  certain  point, 
considérer  comme  leur  impôt  spécial  le  sacrilice  de  temps  et  d'argent 
nécessaire  pour  acquérir  soit  un  diplôme,  soit  les  cimnaissances  sans 
lesquelles  nul  ne  peut  avec  succès  embrasser  ces  sortes  de  profes- 
sions. 

«  Aussi,  jamais  lacontribulion  des  patentes  n'a-t-elleétéimposéeni  aux 
avocats,  ni  aux  professeurs  ou  instituteurs,  ni  aux  artistes,  ni  aux  ac- 
teurs, tii  à  aucune  personne  possédant  un  de  ces  arts  (|ul  s'acquièrent 
par  de  longues  études,  et  qui  s'exercent  par  une  simple  dépense  d'in- 
telligence et  d'activité. 

«  Toutefois,  il  est  une  exception  qu'on  a  peine  à  s'expliquer,  une  pro- 
fession qui  remplit  au  plus  haut  degré  les  conditions  auxquellesl'exemp- 
lion  de  la  patente  semble  toujours  attachée;  la  profession  de  médecin 
n'a  jamais  joui  ju,squ'à  présent  de  cette  exemption,  sauf  dans  des  cas 
où  elle  lui  était  accordée  en  échange  de  services  publics  et  gratuits. 

«  Cette  anomalie  ne  peut  se  comprendre  que  quand  on  remonte  à 
l'époque  où  fut  organisé  le  système  des  |iateutes,  et  quand  on  examine 
ce  qu'était  alors,  ce  qu'est  encore  dans  certaines  conditions  la  profes- 
sion de  médecin.  Depuis  1792  jusqu'à  présent  il  fut  permis  à  tout 
homme,  fùt-il  sans  études,  sans  lumières,  sans  instruction,  d'exercer  la 
médecine,  à  la  seule  condition  de  se  faire  délivrer  une  patente  qu'on 
accordait  indifféremment  à  tous  ceux  qui  se  présentaient  pour  l'ob- 
tenir. 

«  Ici,  nous  ne  pouvons  que  répéter  ce  que  nous  disions  tout  à  l'iieure 
à  propos  des  oinccs.  Quand  une  profession  est  ouverte  à  tout  venant, 
la  patente  n'est  pas  seulement  légitime,  elle  est  nécessaire;  mais  quand 
la  profession  est  soumise  à  des  règles,  à  des  conditions;  quand  il  n'est 
plus  loisible  d'y  pénétrer  comme  on  veut,  soit  parce  que  l'exercice 
n'en  est  confié  qu'à  un  nombre  limité  de  personnes,  soit  parce  qu'il  y  a 
des  épreuves  de  capacité  à  subir,  alors  la  patente  ne  peut  être  deman- 
dée que  par  une  sorte  de  méprise,  par  un  malentendu,  et  un  oubli  des 
principes  sur  lesquels  repose  cette  nature  d'impôt. 

«  Il  suit  de  là  (pie  les  médecins  devraient  être  exemptés  de  la  contri- 
bution des  patentes  à  dater  du  jour  où  la  loi  de  ventôsean  XI  vint  réta- 
blir la  médecine  dans  son  état  normal,  etc. 

«Néanmoins,  depuis  celle  é[)oque,  ils  ont  toujours  été  et  sont  encoie 
patentés,  mais  ils  n'ont  pas  cessé  de  faire  les  plus  vives  protestations. 
Ils  demandent  avec  raison  pourquoi  les  avocats  jouissent  d'une  immu- 
nité qui  leur  est  refusée.  Quelle  est  en  effet  la  différence  entre  le  di- 
plôme d'un  avocat  cl  celui  d'un  médecin?  Si  l'on  compare  la  durée  des 
éludes,  le  nombre  des  épreuves,  la  longueur  du  noviciat,  c'est  plutôt 
an  médecin  que  l'exemplimi  paraîtrait  due. 

«  Pour  justifier  la  préférence  que  le  projet  de  loi  accorde  aux  avo- 


cats, l'exposé  des  motifs  se  f(mde  sur  ce  qu'ils  n'ont  pas  d'action, 
comme  les  médecins,  pour  le  paiement  de  leurs  honoraires.  Mais  cette 
interdiction  ne  résulte  d'aucune  loi.  C'est  une  mesure  de  discipline  in- 
térieure à  laquelle  on  ne  sait  que  trop  qu'il  est  aisé  de  se  soustraire  On 
ne  peut  donc  s'appuyer  sur  un  tel  motif  pour  exempter  les  uns  el  im- 
poser les  antres. 

«  Il  n'y  a  pas  de  milieu,  selon  nous:  il  faut  soumettre  à  la  patente 
les  avocats  comme  les  médecins,  ou  il  faut  accorder  aux  médecins 
l'exemption  qui  esl  acqui.se  aux  avocats. 

«  Knire  ces  deux  partis,  nous  ne  pensons  pas  que  vous  puissiez  hé- 
siter. Si  vous  demandiez  une  patente  à  l'avocat,  vous  déviiez  nécessai- 
rement en  demander  une  à  l'artiste,  et  à  quiconque  exerce  une  profes- 
sion libérale.  Toute  distinction  serait  arbitraire  et  injustifiable.  Il  vous 
faudrait  imposer  en  masse  les  uns  comme  les  autres.  Or,  indépeinlam- 
ment  des  difficultés  d'une  telle  entreprise,  il  esl  encore  un  motif  pour 
ne  pas  assirjetlir  b  la  patente  ces  sortes  de  professions  :  c'esi  qu'il  esl 
presque  impossible  de  distinguer  ceux  qui  les  ont  embras.sées  sérieuse- 
ment de  ceux  qui  ne  les  exercent  que  nominalement  :  personne  ne  fait 
du  commerce  ou  de  l'industrie  en  amateur,  tandis  qu'on  peut  très-bien 
être  avocat,  artiste,  médecin  même,  sans  plaider  une  cause,  sans  ven- 
dre un  tableau,  ou  sans  voir  un  inabide. 

«  Comment  sortir  de  ce  dédale?  Comment  trouver  des  conditions 
équitables  pour  appliquer  l'impôt?  N'esl-il  pas  plus  simple,  plus  natu- 
rel et  plus  juste  de  réparer  la  longue  erreur  commise  envers  les  méde- 
cins? Déjà,  en  ^826,  le  gouvernement,  |iar  l'organe  de  M.  Cuvier,  re- 
connaissait devant  la  Chambre  des  Pairs  que  cette  erreur  devait  avoir 
un  terme,  et  peu  s'en  fulliit  ipie  les  Chambres  ne  consacrassent  alors 
l'exemption  que  nous  vous  demandons  de  prononcer  aujourd'hui. 

«  La  seule  considération  qui  ponrrait-contre-balancer  tant  de  raisons 
d'équité,  ce  serait  l'intérêt  du  trésor.  Sans  doute,  en  exemptant  les 
médecins,  vous  renoncez  à  un  produit,  sans  <|u'il  soit  possible  d'en 
préciser  le  chiffre.  Mais  s'il  fallait  absolument  compenser  cette  perle, 
s'il  fallait  demander  non-seulement  aux  médecins,  mais  aux  avocats, 
et  à  quelques  autres  professions  libérales,  une  addition  à  leurs  charges 
actuelles,  ce  ne  serait  qu'à  la  condition  de  trouver  telle  autre  taxe 
mieux  appropriée  à  la  nature  de  ces  professions,  et  plus  facile  à  asseoir 
é(|uitablement  que  le  droit  de  patente. 

«  Votre  commission  se  borne  à  émettre  celte  idée.  Il  ne  Ini  appar- 
tient pas  de  l'approfondir,  el  elle  vous  demande  seulement  de  décider, 
quant  à  présent,  (|ue  l'exemption  dont  jouissent  les  avocats  sera  com- 
mune aux  médecins.  » 

Ces  arguments  n'ont  pas,  ce  nous  semble,  besoin  de  commentaires, 
et  nous  ne  pourrions  donner  de  meilleures  raisons  que  celles  (|ue  l'on 
vient  de  citer. 

Nous  allons  transcrire  textuellement  tout  le  paragniphe  du  Rapport 
qui  est  relatif  aux  architectes,  et  nous  chercherons  à  combattre  les  mo- 
tifs qui  ont  été  allégués  contre  nous,  el  qui  paraissent  avoir  été  réfutés 
d'avance  dans  le  rapport  même. 

Voici  ce  que  dit  le  Rapport  à  la  page  8â  : 

«  Toutefois,  comme  on  s'étonnera  peut-être  que  les  architectes  ne 
se  trouvent  pas  coinpi  is  dans  la  même  catégorie  que  les  peintres  et  les 
scul|iteurs,  il  esl  bon  d'en  dire  un  mol.  A  coup  sûr,  s'il  s'agissait  d'une 
question  d'art,  l'arehitecture  devrait  marcher  de  pair  avec  ses  deux 
sœurs  ;  mais  il  ne  s'agit  que  de  professions,  el  celle  de  l'architecte  dif- 
fère, sur  beaucoups  de  points,  des  deux  autres.  L'arcbiiecle  n'invente 
pas  seulement  des  plans  d'édifices,  il  les  fait  exécuter;  il  emploie  à  lu 
fois  des  dessinateurs  pour  copier  ses  projets  et  des  commis  pour  dres- 
ser ses  devis.  Son  atelier  est  aussi  un  bureau;  il  esl  expert  en  même 
temps  qu'artiste;  il  s'occu|ie  de  la  valeur  des  choses  tout  aussi  bien 
que  de  leur  beauté;  on  ne  doit  donc  pas  s'étonner  que  dans  cette  situa- 
tion mixte,  ayant,  pour  ainsi  dire,  deux  caractères,  il  se  trouve  par 
l'un  d'eux  assujetti  à  la  paienle.  Nous  n'avons  pas  pensé  qu'il  y  eût  de 
suffisants  motifs  pour  l'en  affranciiir.  » 


fS5 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


136 


La  commission  semble  elle-même  s'être  préoccupée  de  Pétonnement 
que  Ion  éprouverait  de  voir  r,ircliiieclure  séparée  de  ses  sœurs  la 
peinture  el  la  sculpture. 

Jules  Romain,  Léonard  de  Vinci,  Raphaël,  Jean  Goujon,  Puget  et 
tant  d-aulres  architectes  étaient  en  même  temps  sculpteurs  et  peintres. 
Michel-Auge,  en  dirigeant  les  constructions  de  Saint-Pierre  de  Rome, 
se  croyait  tout  aussi  grand  artiste  que  lorsqu'il  peignait  la  chapelle 

Sixtine. 

Il  nous  a  suffi  de  rappeler  quelques  passages  du  Rapport  de  la  com- 
mission des  patentes  pour  faire  voir  comment,  sans  forcer  aucun  rai- 
sonnement, tous  les  arguments  présentés  en  faveur  des  médecins  peu- 
vent s'appliquer  aux  architectes.  Il  ne  nous  reste  plus  qu'à  combattre 
les  motifs  que  l'on  allègue  pour  distinguer  l'architecture  de  la  sculpture 
el  de  la  peinture. 

Ce  que  la  commission  dit  de  l'architecte  peut  également  se  dire  du 
sculpteur  et  même  du  peintre.  Le  sculpteur  ne  compose  pas  seulement 
une  statue,  il  la  fait  exécuter,  et  pour  cela  il  emploie  des  mouleurs,  des 
metteurs  au  point,  des  praticiens;  souvent  même  il  fournit  la  luatière, 
plâtre,  bois,  marbre  ou  bronze,  à  laquelle  il  a  donne  la  forme  que 
son  génie  lui  a  inspirée  ;  et,  sans  cesser  d'être  artiste,  il  est  obligé 
de  faire  acte  de  fournisseur,  de  passer  des  marchés  pour  son  compte. 

Il  en  est  de  même  du  peintre,  qui  a  aussi  ses  employés,  ses  aides, 
SOS  dessinateurs  de  perspective,  etc. 

Enfin,  l'un  et  l'autre  sont  souvent  aussi  nommés  experts,  comme 
rarcliitecte,  et  peuvent  avoir  à  s'occuper  de  révalualion  des  choses  de 
leur  art,  de  leur  profession. 

Et  cependant  on  ne  leur  a  jamais  demandé  de  prendre  patente. 

Sous  ce  point  de  vue,  l'architecture  pourrait  donc  être  considérée 
comme  une  profession  participant  moins  à  l'industrie  que  ses  sœurs; 
car  elle  ne  fait  aucun  acte  de  commerce  pour  son  compte,  comme  nous 
venons  de  le  voir  pour  le  sculpteur. 

Veut-on  trouver  une  autre  comparaison  prise  dans  la  profession  d'a- 
vocat? L'avocat  a,  comme  l'architecte,  un  bureau,  des  employés  qui 
compulsent  ses  dossiers  et  préparent  son  travail,  de  manière  qu'il  n'ait 
plus  qu'à  mettre  en  œuvre  leurs  résumés.  Seulement,  au  lieu  de  s'ap- 
peler secrétaires,  les  employés  de  l'architecte  s'appellent  dessinateurs, 
vérificateurs,  etc. 

Dans  les  constructions  dirigées  par  des  architectes,  tout  ce  qui  ne 
ressort  pas  de  l'art  proprement  dit  paie  patente.  Tous  les  entrepre- 
neurs et  fournisseurs  sont  soumis  à  cet  impôt.  Ce  n'est  que  la  partie 
intellectuelle,  l'âme,  en  un  moi,  de  toutes  les  professions  qui  s'y  ratta- 
chent, que  nous  voulons  placer  en  dehors  d'une  charge  applicable  seu- 
lement à  des  objets  matériels. 

Qu'y  a-t-il  enliii  de  plus  libéral  que  les  professions  représentées  à 
l'Institut?  Eh  bien  !  l'architecture  a  une  classe  à  l'Académie  des  Beaux- 
Arts;  et  il  arrive,  par  une  bien  étwnge  anomalie,  qu'un  membre  de 
l'Académie  qui  produit  ainsi  la  preuve  la  plus  éclatante  de  la  libéralité 
de  sa  profession,  sera  soumis  à  une  patente  (pie  l'esprit  du  législateur  a 
toujours  spécialement  appli(|uéc  aux  professions  industrielles. 

Parmi  tous  les  membres  de  l'Institut,  les  huit  architectes  qui  y  siè- 
gent seraient  seuls  patentés,  à  cause  de  la  profession  qui  lésa  conduits 
à  l'Académie. 

On  a  pu  remarquer  que  pour  exempter  les  médecins,  on  leur  de- 
mande seulement  de  faire  preuve  de  la  profession  libérale  qu'ils  exer- 
cent. Ou  leur  demande  l'exhibition  d'un  diplôme.  Il  est  juste  que  l'Etat, 
eu  voulant  dégrever  de  l'impôt  une  profession  libérale,  ne  dégrève  pas 
une  profession  industrielle;  nous  demandons  seulement  que  l'architecte 
véritable,  c'est-à-dire  celui  que  les  longues  études  théoriques  dans  les 
arts  et  dans  les  sciences  rendent  digne  de  «e  titre  fasse  preuve  de  sa 
(|Halilé,  et  qu'alors  il  soit  exempt  de  riinpôl  qui  se  rattache  à  l'in- 
dustrie. 

Cette  question,  touchant  de  la  manière  la  plus  vive  à  l'existence  so- 
ciale de  l'arcliitecte,  ne  peut  être  traitée  d'une  manière  incidente. 


La  Société  des  archiiecles  y  reviendra  cerlainemenl  plus  lard.  Nous 
demandons  seulement  qu'il  soit  admis  en  principe  que  les  architectes 
proprement  dits  ne  soient  pas  soumis  à  la  patente.  Nous  aurons  ensuite 
à  examiner  quelles  sont  les  personnes  qui  se  trouvent  dans  celle  claase, 
et  quelles  preuves  claires,  faciles  à  apprécier,  elles  peuvent  donner 
pour  se  faire  exempter 

Ces  preuves  auront  acliiellement  un  caractère  transitoire  ;  mai»  lors- 
que, par  suite  des  travaux  ultérieurs  de  la  société,  la  position  d'archi- 
tecte sera  définie,  comme  celle  des  médecins,  nous  espérons  que  tous 
ceux  qui  rempliront  les  conditions  que  la  profession  libérale  d'archi- 
tecte exige,  seront  exemptés  de  la  patente. 

,  CONCLISION. 

En  résumé,  considérant  combien  il  serait  Tàcheux  de  laisser  passer  la 
loi  qui  louche  à  leur  position  d'artistes,  sans  faire  une  réclamation  juste 
et  (|ui  ouvre  enfin  les  yeux  des  législateurs  sur  celte  importante  ques- 
tion, les  architectes  demandent  de  n'être  pas  soumis  h  la  patente.  Ce- 
pendant, pour  que  les  agents  de  fadminislration  chargés  d'appliquer  la 
loi  sachen  t  quelles  personnes  elle  atti-inl,  (piellcs  personnes  elle  exemple, 
il  est  nécessaire  de  définir  d'une  manière  précise  ce  que  l'on  doit  en- 
tendre par  architecte. 

Jusqu'à  présent,  c'est  la  patente  clb'-ménie  qui  a  donné  cette  qua- 
lité à  un  grand  nombre  de  personnes  qui  n'y  ont  pas  d'autre  litre.  Si 
l'on  pouvait  trouver  une  autre  dénomination  que  celle  d'archiiecle  pour 
qualifier  ces  personnes,  nous  proposerions  d«f  dire  que,  pénéraicmeni, 
les  archiiecies  .seraient  exempts  de  la  patente  ;  mais,  dans  celle  impos- 
sibilité, il  nous  a  paru  convenable  de  demander  l'exemption  pour  les 
architectes  qui,  par  leurs  éludes,  par  les  épreuves  d'admission  dans 
les  écoles  et  par  leur  position  actuelle,  offrent  des  garanlies  de  capa- 
cité el  d'instruction  qu'on  trouverait  loulnalurellemcnl  dans  la  présen- 
tation d'un  diplôme. 

Nous  demanderons  de  faire  considérer  par  mesure  provisoire  comme 
ayant  donné  une  preuve  sufTisanie  de  leur  qualité  d'architecte,  et  par 
conséquent  de  leur  droit  à  l'cxcnipiion,  h  s  catégories  suivantes,  qui 
ont  d'^i illeurs  servi  à  la  constitution  de  la  Société  des  architectes  : 

t"  Les  architectes,  membres  de  rinslilut; 

2"  Les  architectes,  professeurs  à  l'École  royale: 

3°  Les  architectes,  membres  du  conseil  des  bâtiments  civils; 

4°  Les  archiiecles  en  chef,  adjoints  ou  inspecteurs  de  la  couronne, 
des  ministères,  et,  en  général,  des  administrations  publiques; 

S"  Les  architectes  en  chef  des  départements  et  des  chefs-lieux  de  dé- 
partement; 

6°  Les  architectes  qui  ont  remporté  le  I"  ou  le  2*  grand  prix,  ou  le 
prix  départemental,  ou  un  accessit  au  grand  prix,  ou  au  prix  départe- 
mental; 

7°  Les  architectes  médailllstcs  de  l'Ecole  royale  et  des  écoles  pu- 
bliques des  départements,  et  ceux  qui  justifieraient  de  leurs  études  el 
de  leur  capacité  par  des  certificats  régulièrement  émanés  de  ces 
écoles; 

8*  Les  architectes,  enfin,  qui  exercent  l'art  sous  le  rapport  seulement 
théorique  et  sous  les  points  de  vue  liisioriqties,  archéologiques,  etc. 

Les  exemptions  ci-dessus  cesseraient  d'a\oir  lieu  si  les  architectes 
pour  qui  on  les  réclame  faisaient  l'entreprise  et  se  livraient  ainsi  à  des 
opérations  industrielles,  au  sujet  desquelles  la  patente  devrait  leur  être 
imposée  comme  entrepreneurs. 


lïOSC 


137 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


138 


SOCIÉTÉ  CENTRALE  SES  ARCHITECTES  FRANÇAIS. 

SÉANCE  GÉNÉRALE  DU  DIMANCHE  14  JANVIER  1844. 

(Suile  cl  Hn.  Yoy.  col.  93.) 

Compte-rendu  de  la  situation  de  la  caisse,  par  M.  le  secrétaire-trésorier. 

n  II  restait  en  caisse  à  l'époque  de  la  séance  générale  du 

27  juin  1843 OOl  fr.  15  c. 

11  II  a  été  reçu  depuis  et  jusqu'à  ce  jour 2050         » 


Total 2051        15 

11  Les  dépenses  faites  depuis  ladite  séance  jusqu'à  ce  jour  se 
sont  élevées   à • 1076        60 


(1  Reste  en  caisse 1574        55    » 

Rapport  de  messieurs  les  censeurs  sur  les  comptes-revdus  qui  précèdent. 

Il  Messieurs, 

«  D'après  le  règlement  constitutif  de  notre  Société,  vous  nous  avez  fait 
l'honneur  de  nous  donner  la  qualité  de  censeurs.  A  ce  titre,  notre  devoir  est 
de  surveiller  tous  les  actes  de  la  Société,  de  tenir  la  main  à  ce  que  ses  statuts 
et  règlenienLs  soient  strictement  observés,  et  de  vous  faire  à  ce  sujet,  lorsque 
nous  le  croyons  convenable,  toutes  les  observations  nécessaires. 

Il  Tous  les  ans,  à  la  fin  de  notre  mission,  nous  devons  vous  faire  un  rapport 
détaillé  sur  l'état  de  la  caisse,  vous  faire  connaître  ce  (|ui  s'est  passé  de  plus 
important  pendant  l'année,  et  quelles  sont  les  améliorations  possibles,  en  rai- 
son de  l'état  de  la  Société  et  de  ses  moyens. 

11  Nous  ne  devons  pas  aujourd'hui  remplir  cette  tâche  honorable  et  difficile; 
l'année  n'étant  point  achevée,  nous  ne  pourrions  vous  rendre  compte  de  ce  qui 
doit  encore  se  faire;  mais  nous  avons  cru  devoir  profiler  de  celte  réunion  se- 
mestrielle pour  vous  faire^connaître  d'une  manière  générale  et  sommaire  l'étal 
actuel  de  la  Société,  si  des  difflcidtés  résultent  de  l'application  do  son  règle- 
ment, si  tous  les  articles  en  sont  scrupuleusement  observés,  et  enfin  la  vérifi- 
cation que  nous  avons  faite  de  la  caisse,  à  l'époque  où  la  Société  a  été  définiti- 
vement constituée. 

Il  Lors  de  l'organisation  définitive  de  la  Société,  le  27  juin  1843,  le  nombre 
des  membres  qui  la  composaient  était  de  deux  cent  dix;  il  est  aujourd'hui  de 
deux  cent  vingt-sept.  L'adhésion  de  plusieurs  arcliitectes  honorablement  placés 
confirme  l'importance  que  prend  la  Société,  les  .services  qu'elle  peut  rendre 
aux  progrès  de  l'art,  et  la  juste  considération  (|u'elle  doit  acquérir  en  s'occu- 
pant  de  travaux  utiles  qu'elle  a  mainlenant  à  peine  ébauchés. 

11  Beaucoup  de  demandes  en  élection  ont  été  faites;  il  y  a  eu  aussi  beaucoup 
de  propositions  d'admission  par  les  différentes  sections,  sanctionnées  par  le 
conseil;  quelques-unes  ont  été  ajournées  ou  rejetées  faute  de  renseignements 
suffisants,  mais  avec  cette  réserve  de  ne  jamais  blesser  les  convenances,  et 
néanmoins  d'étendre  profondément  les  investigations  sur  la  capacité,  la  moralité 
et  le  droit  des  demandeurs,  investigations  d'autant  plus  honorables  pour  ceux 
qui  en  sont  l'objet,  quelque  profondes  qu'elles  soient,  qu'elles  ont  pour  but  de 
ne  rien  allier  d'impur  à  la  Société  centrale,  dont  tous  les  membres  doivent  être 
solidaires  de  leurs  actions,  et  sévères  scrutateurs  des  fautes  qu'un  seul  pourrait 
faire,  si,  en  ayant  connaissance,  les  autres  les  toléraient  et  ne  les  blâmaient  pas. 

«  Sous  ce  rapport,  nous  n'avons  qu'à  approuver  tout  ce  qui  a  été  fait  à  cet 
égard,  en  désirant  toutefois  que  l'on  puisse  apporler  quelques  perfections  pour 
faciliter  la  connaissance  plus  parfaite  de  la  moralité  et  de  la  capacité  de  reux 
qui  se  présentent,  sans  que  les  recherches,  en  cas  de  refus,  puissent  être  pour 
eux  un  sujet  d'offense. 

(I  Aux  termes  de  votre  règlement,  le  conseil  s'est  réuni  chaque  mois.  La  dif- 
ficulté d'être  en  majorité  est  très-grande.  Il  avait  été  proposé,  pour  y  obvier, 
d'infliger  une  amende  aux  membres  absents  sans  justification.  Mais,  jusqu'ici, 
des  convocations  motivées  ont  suffi  pour  atteindre  le  but.  » 

[MM.  les  censeurs  entrent  ensuite,  sur  les  diverses  dépenses  et  recettes, 
dans  un  examen  développé,  après  lequel  ils   s'e.rpriment  ainsi  qu'il 
suit  )  ; 
■1  Tous  ces  détails  nous  ont  paru  exacts,  et  nous  nous  plaisons  à  l'annoncer 

à  la  Société.  Dans  les  recettes,  quelques  inscriptions  de  noms  avaient  été  ou- 


bliées; cette  confusion,  inliérenle  à  une  administration  qui  n'était  pas  com- 
plètement organisée,  a  été  rectifiée,  et  ne  se  renouvellera  plus;  et  il  y  aura  un 
compte  ouvert  pour  chaque  sociétaire. 

u  Toutes  les  dépenses,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  sont  exactes.  Elles  ont  été 
ordonnées  par  M.  le  prési<leiit  et  faites  par  le  concours  du  trésorier  et  des 
agents,  (|ui  doivent  être  sous  leurs  ordres. 

11  Tous  les  reçus  sont  réguliers;  rien  n'a  été  fait  inutilement. 

u  II  résulte  de  ces  détails  que  la  recette  totale,  à  l'époque  de  la  constitution 
définitive  de  la  Société,  était  de 2430  fr.  c. 

a  Que  les  dépenses,  à  la  même  époque,  s'élevaient  à.  .        1828  85 

11  Qu'il  restait  en  caisse 601  15 

11  Qu'il  y  avait  à  recouvrer .  .  710 

Il  Et  qu'il  restait  à  payer  en  impressions,  location  de 
salles,  frais  d'organisation  et  antres,  environ 300 

11  Nous  venons  de  vous  faire  connaître  quels  étaient  les  résultats  des  paie- 
ments successifs  faits  depuis  l'origine  jusqu'à  l'époque  de  la  constitution  défi- 
nitive de  la  Société.  Dans  nos  remarques  nous  ajouterons  que  MM.  les  prési- 
dents se  sont  fait  un  devoir  de  payer  les  premiers  leur  cotisation;  que  le  bu- 
reau a  également  fait  son  versement;  qu'il  y  a  peu  de  retardataires;  que  Ton 
s'est  présenté  chez  tous  les  sociétaires  pour  obtenir  les  premiers  recouvre- 
ments; que  l'on  ne  peut  signaler  aucune  perte  accidentelle;  que  les  reçus  ont 
été ,  sans  en  excepter  un  seul,  faits  régulièrement  ;  que  les  recettes  sont  in- 
scrites immédiatement  et  au  fur  et  à  mesure  qu'elles  sont  opérées,  à  la  demande 
du  président  et  du  trésorier;  que  ces  recouvrements  se  font  par  le  sieur  de 
Lalaisse,  qui  est  obligé  d'en  rendre  compte  aussitôt  an  trésorier  et  au  président 
pour  en  obtenir  décliarge  ;  que  les  ordres  de  dépenses  d'administration  sont 
émanés  du  président,  qui  vérifie  les  factures  et  en  ordonnance  le  paiemeuL 

11  II  nous  resterait  à  faire  le  projet  des  dépenses  pour  l'année  courante.  Ce 
projet  vous  a  déjà  été  soumis  par  la  commission  et  nous  a  paru  bien  conçu  ; 
nous  croyons  devoir  y  renvoyer,  ne  voulant  pas  fixer  plus  longtemps  votre  at- 
tention sur  cet  objet.  » 

On  passe  ensuite  à  la  délibération  des  propositions  qui  résultent  du  compte- 
rendu  sur  les  opérations  du  bureau  et  du  conseil,  et  notamment  de  celle  qui  est 
faite  d'accorder  à  MM.  Carilian-Gœury  et  Victor  Dalmont,  l'autorisation  de 
prendre  le  titre  de  Libraires  de  la  Société. 

Un  membre  du  bureau  exprime  l'opinion  qu'il  pourrait  y  avoir  inconvénient 
à  accorder  celte  autorisation;  qu'il  n'y  aurait  là  aucun  avantage  pour  la  So- 
ciété, mais  seulement  pour  les  postulants;  qu'il  en  résulterait  une  espèce  de 
monopole,  et  que  la  Société  pourrait  se  trouver  embarrassée  si  elle  avait  par  la 
suite  quelque  raison  pour  vouloir  retirer  celle  autorisation  soit  au  titulaire 
même,  soit  à  un  successeur  auquel  il  l'aurait  transmise. 

Ces  observations  sont  appuyées  par  plusieurs  membres,  et  d'autres  pensent 
que  si  l'autorisation  est  accordée,  il  faudrait  qu'elle  ne  fût  que  personnelle  ,  et 
que  la  Société  se  réservât  le  droit  de  la  retirer. 

Un  autre  membre  du  bureau  rappelle  d'abord  que  ce  qui  a  décidé  le  con- 
seil à  proposer  unanimement  d'accorder  l'autorisation,  c'est  qu'il  s'agit  d'une 
très-ancienne  et  très-bonne  maison  de  librairie,  qui  ne  paraît  laisser  à  craindre 
aucun  inconvénient.  Il  ne  pense  pas  d'ailleurs  que  la  Société  ne  doive  faire  que 
ce  à  quoi  elle  pourrait  avoir  un  intérêt  positif,  et  il  regarde  du  reste  comme 
très-sages  les  reslriclions  qui  ont  été  proposées. 

Ces  observations  sont  également  appuyées  par  plusieurs  membres,  et  l'un 
d'eux  les  motive  sur  ce  que  presque  toutes  les  institutions  analogues  accordent 
des  autorisations  semblables. 

Un  troisième  membre  du  bureau,  en  appuyant  également  ces  dernières  pro- 
positions, remarque  que  peut-être  il  y  aurait  à^examiner  si  la  Société  ne  pour- 
rait pas  y  trouver  elle-même  quelques  avantages  ;  ei,  sons  ce  rapport,  il  pro- 
pose l'ajournement,  dont  la  demande  est  également  appuyée. 

La  question  étant  mise  aux  voix,  une  forte  majorité  se  prononce  contre  U 
proposition. 

L'assemblée  approuve  unanimement  les  autres  propositions,  ainsi  que  l'en- 
semble des  opérations  du  bureau  et  du  conseil  pendant  le  semestre  écoulé. 

On  s'occupe  ensuite  des  élections. 

Le  bureau  fait  remarquer  d'abord  que,  bleB  qu'aux  termes  des  statuts,  il  »e 
doive  y  avoir  aucune  discussion  sur  les  candidats,  il  lui  est  impossible  de  ne 
pas  donner  lecture  d'une  lettre  qui  lui  parvient  à  l'instant,  et  par  laquelle  l'un 
d'eux  se  défend  de  l'impulalion  qui  lui  aurait  été  faite  de  s'«tre  IWré  i  diffé- 
rentes entreprises. 

Après  cette  lecture,  un  membre,  sans  se  prononcer  ni  pour  ni  contre,  re- 


139 


REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


UO 


marque  que  cette  lettre  forme  im  nouveau  document  qui  n'aurait  peut-être  pas 
clii  êlre  lu,  et  qui  se  trouve  n'avoir  été  aucuiieuieiu  discuté.  Dans  cette  position, 
il  pense  qu'il  faut  ne  pas  se  prononcer  aujourd'hui  sur  le  caiididat  dont  il 
s'agit,  et  le  renvoyer  à  un  nouvel  examen,  ce  qui  permettra  de  s'en  occuper 
dans  six  mois,  an  lieu  de  le  renvoyer  à  un  an.  Cette  opinion  est  appuyée  par 
plusieurs  membres,  et  notammciit  par  plusieurs  des  présentateurs  du  candidaL 

lille  est,  au  contraire,  contestée  par  plusieurs  membres,  qui  pensent  qu'il  y 
aurait  le  plus  grand  inconvénient  à  revenir  ainsi  sur  des  opérations  terminées, 
01  qui  réclament  l'application  pure  et  simple  des  statuts. 

Il  est  donné  lecture  des  articles  des  statuts  et  des  règlements  relatifs  aux 
■éleclions,  mais  dans  lesquels  ce  cas  n'est  pas  prévu  ;  d'après  quoi  plusieurs 
membres  pensent  qu'il  faut  adopter  la  voie  la  plus  large  et  la  plus  favorable 
aux  candidats,  c'est-à-dire  l'ajournement,  qui  ne  préjuge  rien. 

L'n  de  messieurs  les  censeurs  pense  que,  s'il  y  avait  eu  désistement  on 
une  demande  de  sursis  du  candidat,  on  si  ses  présentateurs  déclaraient  avoir 
mission  de  la  réclamer  en  son  nom,  il  faudrait  y  acquiescer  ;  mais  que,  dans  le 
cas  contraire,  on  doit  se  prononcer  sur  l'élection  ;  seulement,  il  pense  que 
l'incident  mérite  d'être  examiné  en  principe  par  le  conseil.  Ces  observations, 
sont  appuyées  par  plusieurs  membres. 

D'autres  membres  sont  d'avis  que,  dès  que  les  opérations  sont  terminées, 
le  désistement  ne  pourrait  aucunement  être  admis.  Ce  principe  est  contesté 
l>ar  d'autres  membres,  mais  M.  le  président  fait  observer  que  cette  question 
n'est  pas  posée. 

L'ordre  du  jour  est  réclamé,  appuyé  et  adopté  par  une  grande  majorité. 

Le  bureau  fait  en  outre  connaître  qu'un  candidat,  qui  s'était  d'abord  dé- 
sisté, a  depuis  retiré  son  désistement. 

D'après  le  désir  de  l'assemblée,  il  est  ensuite  donné  lecture  des  résultats  des 
scrutins  préparatoires  qui  ont  eu  lieu  dans  les  sections,  tels  qu'ils  sont  con- 
signés dans  des  tableaux  mis  en  plusieurs  exemplaires  sous  les  yeux  de  la 
Société.  Il  est  d'al)ord  procédé  à  un  scrutin  secret  entre  quatre-vingt-treize 
membres  présents;  mais  le  nombre  des  bulletins  ne  paraissant  pas  en  rapport 
avec  celui  des  volants,  ce  scrutin  est  annulé,  et  11  est  procédé  à  un  nouveau 
scrutin  entre  soixante-douze  membres  présents,  d'après  lequel  les  candidats 
ci-après,  ayant  réuni  plus  des  deux  tiers  des  voix  des  membres  présents 
(nombre  exigé  par  les  articles  2A  des  statuts  et  38  du  règlement),  sont  dé- 
clarés élus,  et  ceux  qui  ont  droit  i  être  membres  résidants  répartis  par  le 
sort  dans  les  sections  ainsi  qu'il  est  indiqué  ci-après  : 


SIeiiibres  résidants 


',      l'remi, 


MM.    QllCHERAT. 
DUPAEC. 

Poulain. 

BtOT. 
PiLlARD. 

Oalhost. 

Magne. 

Chalakgf.. 

Periaix. 

Brcyèbe. 

Peise. 

Janniasd. 

Oebressekne. 

Deschamps  (P). 

Tessier. 


Membres  non  résidants. 
MM.  Brbset-Debaines,  au  Havre,  et  Dbphot,  à  Bordeaux. 

Le  nombre  total  des  membres  de  la  Société  est  ainsi  porté  à  deux  cent 
quarante-quatre. 

Plusieurs  membres  remettent  une  noie  qui  exprime  le  regret  que  la  Société 
ne  soit  pas  représentée  à  l'inauguration  du   monument  de  Molière. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


ère  section. 
Deuxième  section 
Troisième  section. 
'     Quatrième  section. 

!     Cinquième  secl  ion 

Sixième  section. 
Septième  section. 
Huitième  section. 

Neuvième  section. 


CHKOmQVZ. 

SoMMAiRK.  —  Le  réservoir  du  Puiti  de  Greoelle  et  l'écuiWD  de  la  Tille  de  Pirii.  — 
Nouveaux  cabinets  inodore».  —  Guichet  du  Carrouiel  :  un  remrde  pire  que  le 
mal.  —  Une  réclame  en  Tiveur  de  la  proprelé  et  de  la  nnté  publiques.  —  Simple 
dialogue  à  propos  d'un  paliis  pour  l'Industrie  Irançaife.  —  Projet  de  loi  sur 
l'achévcraenl  du  Panthéon.  —  Percement  d'une  noarelle  rue.  —  t'a  irchiiecle 
millionnaire.  —  Trés-iraporlanle  découverte.  —  Pdilicatiom  RocriLLU  :  An- 
nales archéologiques. 


Un  iiiiniensc  réservoir  vient  d'être  construit  place  de  l'Estrapade, 
près  du  Panlliéon,  pour  recevoir  les  eaux  du  puils  de  Grenelle ,  qui 
de  là  se  ré|i.iiiJroiil  duiis  lus  alentours  pour  alimenter  plusieurs  fon- 
taines CM  construction  ou  projetées.  Sur  le  mur  du  réservoir,  en  face  de 
la  |>lace  de  l'Estrapade ,  on  a  sculpté  un  grand  écusson  de  la  ville  de 
Paris;  cet  éciisson  se  trouve  encadré  dans  un  miitirdu  style  de  la  Re- 
naissance, dont  les  sculptures  ne  manquent  ni  de  grâce  ni  d'élégance. 
Par  malheur,  la  délicaicsse  même  de  ces  sculpiures  .<<'h:irnionise  fort 
mal  avec  la  construction  simple  et  rustique  de  l'immense  muraille 
qu'elles  décorent. 

—  Parmi  les  améliorations  dont  la  ville  de  Paris  est  le  tbéilre  jour- 
nalier, nous  ne  devons  pas  oublier  de  signaler  ces  petites  maisons  en 
bois  d'un  usage  indispensable,  que  l'on  vient  de  placer  sur  plusieurs 
points  de  la  capitale,  et  qui  sont  desiinccs  à  remplacer  ces  inlecis  ca- 
binels  inodores  que  l'on  relépuaitauparavanl,  avec  i-i  peu  de  prévoyance 
et  si  peu  de  soucis  pour  rugréinent  public ,  dans  des  passages  étroits 
et  obscurs  déjà  assez  malsains  par  eux-mêmes.  Le  modèle  adopté  réu- 
ni! à  i'avanlage  immense  d'cire  isolé  de  toutes  part  celui  de  l'élégance 
et  de  la  propreté  qu'exige  impérieusement  le  grand  jour.  Ces  pelite> 
maisons  sont  en  bois  et  décorées  de  pilastres  dans  le  style  de  la  Reoais- 
sance;  elles  sont  peintes  en  chamois  clair  de  deu.v  tons.  Elles  sont  cou- 
vertes en  lames  de  zinc,  et  font  pendant,  pour  la  plupart,  aux  petites 
maisons  des  gardes  préposés  aux  statitms  de  fiacres, et  concourent  arec 
elles  à  l'embellissement  des  places  sur  lesquelles  elles  sont  situées. 

—  On  a  obtenu  un  résultat  moins  heureux  en  voulant  régulariser  un 
mal  qui  rongeait  à  sa  base  le  vieux  guichet  du  Louvre  en  face  du 
poni  du  Carrousel.  L'obscurité  du  lieu,  les  caviiés  inlériearrs  du  gui- 
chet et  son  éloignemeiit  des  maisons,  en  avaient  fait  comme  la  sentine 
du  quartier.  Les  urines  séjournaient  entre  les  pavés,  contre  les  murailles, 
et  s'infiltraient  ensuite  entre  les  pierres  de  la  fondation.  On  a  voulu 
mettre  bon  ordre  à  cet  étal  de  choses,  ei  pour  cela,  on  a  construit, 
de  chaque  côté  des  deux  entrées,  deux  sialles  en  pierres.  Par  malheur, 
au  lieu  de  creuser  un  conduit  qui  put  mener  les  urines  justpi'à  la  ri- 
vière, on  s'est  coiilcnlé  de  leur  ouvrir  une  issue  à  hauteur  du  sul,  vers  le 
centre  de  la  chaussée  du  guichet  ;  de  cette  façon,  l'urine  séjourne  uu 
peu  moins  ,  il  est  vrai ,  au  pied  des  murs ,  mais  elle  forme  des  mare* 
sur  le  pavé, et  les  voitures  en  passant  la  font  jaillirdetouscAtés;  comme, 
déplus,  ces  appareils,  précisénieni  en  raison  de  leur  destination ,  ap- 
pellent à  eux  un  beaucoup  plus  grand,  nombre  de  personnes  que  les 
coins  du  guichet  tels  qu'ils  étaient  auparavant ,  il  se  trouve  que  le  mal 
est  encore  aggrave  :  le  guichet  est  devenu  presque  impraticable. 

A  ce. propos,  qu'il  nous  soit  permis  de  demander  pourquoi  on  n'ou- 
vrirait pas  à  côté  du  guichet,  un  autre  guichet  exclusivement  consacré 
à  l'usage  des  piétons,  ainsi  qu'il  en  existe  déjà  dans  d'auires  parties  du 
même  monument. 

—  On  ne  doit  pas  craindre  de  répéter  les  lionnes  choses.  Une  pre- 
mière, une  seconde,  une  dixième  fois,  on  peut  avoir  parlé  à  îles  gens 
distraits,  préoccupés  d'autres  idées.  Répélons  donc  qu'il  serait  facile  de 
convertir  les  ruelles  de  nos  villes,  actuellement  si  infectes  et  si  dégoû- 
tantes, en  patiaget  découverts,  propres  et  habitables,  semblables  aux 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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lanes  de  Londres,  qui,  elles  aussi,  ctaienl  affreuses  à  voir  il  y  a  quelque 
quinze  ans,  mais  qui  sont  niainlenanl  irès-ahordables. 

Loin  de  nous  la  pensée  de  hlàmer  l'administration  au  sujet  des 
travaux  d'améliorations  et  d'einbellissomcnis  (jn'elle  tffeclne  sur  les 
points  les  plus  brillants  de  la  capitale;  nous  ne  venions  pas  nous  arrêter 
à  la  blâmer  de  la  sollicitude  qu'elle  témoigne  en  faveur  des  quartiers  pri- 
vilégiés :  boulevards,  quartiers  de  la  Madeleine,  Sainl-Honoré,  etc.  ; 
toutefois,  nous  l'engageons  à  se  rappeler  qu'il  y  a  des  milliers  d'indi- 
vidus qui  grouillent  dans  la  fange  de  ruelles  infectes,  faute  de  quel- 
ques mètres  du  bitume  que  l'on  coule  pour  l'agrément  des  promeneurs 
sous  les  arbres  des  Champs-Elysées. 

—  Avant  de  quitter  les  avenues  de  l'immense  promenade  plantée  par 
Colberl,  arrêtons-nous  un  instant  au  grand  carré  des  [êtes.  C'est  là 
que,  pour  cette  année  encore,  s'élève  le  temple  éphémère  de  Vindus- 
Irie  française. 

Une  question  tonte  naturelle  vient  se  poser  sur  les  lèvres,  lorsqu'on 
jette  les  yeux  sur  cette  immense  construction,  eu  pensant  qu'après 
avoir  servi  pendant  quelques  mois  de  cet  été,  elle  sera  déiruiie  comme 
ses  aînées,  et  que  toute  celte  main-d'œuvre  et  bonne  partie  des  maté- 
riaux seront  perdus  sans  retour.  —  Pourquoi,  se  demande-l-on,  ne 
point  bâtir  un  édifice  durable,  digne  de  son  objet  et  de  la  France,  qui 
puisse,  hors  des  temps  d'exposition,  être  utilement  employé  à  d'autres 
usages?  —  A  cela  on  peut  faire  une  réponse  tout  aussi  simple  que  la 
question  :  — Pour  élever  un  palais  de  l'indiislrie,  durable,  digne  de  son 
objet  et  de  la  France,  il  ne  faudrait  pas  moins  de  iO  millions,  tandis 
que  nos  baraques  en  planches  iienous  coûtent  guère  que  bOO  000  francs 
tous  les  cinq  ans,  ce  (lui  représente  un  capital  de  2  millions  seulement. 
Nous  ne  disconvenons  pas  qu'il  serait  infiniment  plus  agréable  d'avoir 
un  monument  permanent,  mais  nos  moyens  ne  nous  permellent  pas  de 
nous  donner  ce  luxe.  Ce  n'est  pas  la  bonne  volonté  qui  nous  manque, 
c'est  l'argent.  —  A  pareil  argument  il  n'y  a  guère  de  réponse,  à  moins 
que  vous  ne  teniez  en  réserve  une  heureuse  combinaison  grosse  des  mil- 
lions demandés,  et  nous  engageons  les  deux  interlocniems  à  méditer 
longuement  le  travail  que  celle  Revue  a  publié  dans  le  courant  de  l'an 
dernier  sous  le  titre  :  Éludes  sur  la  ville  de  Paris;  peut-être  y  trouve- 
ront-ils le  moyende  s'entendre. 

—  On  va  enfin  régulariser  les  abords  du  Panthéon,  don,  la  base  est 
restée  si  longtemps  masquée  par  des  palissades  en  planches,  si  peu 
en  harmonie  avec  la  splendeur  de  l'édifice.  Un  projet  de  loi,  len- 
danl  à  approuver  les  conventions  faites  à  ce  sujet  entre  la  ville  de  Paris 
et  l'État,  va  être  présenté  aux  Chambres.  Le  même  projet  de  loi  em- 
brasse aussi  la  régularisation  des  abords  de  la  Chambre  des  pairs.  On 
sait  que  l'arcbilecte  du  Panlhéon  est  M.  Destouches,  ancien"  pension- 
naire de  l'Académie  de  France  à  Rome  et  chevalier  de  la  Légion- 
d'Honneur. 

Nous  ne  saurions  trop  louer  celle  tendance  de  l'administration  à 
mettre  la  dernière  main  à  tous  ces  édifices  commencés  et  restés  ina- 
chevés depuis  si  longtemps.  Rien  n'est  plus  Irislc  à  voir  que  ces  murs 
qui  noircissent  avant  même  que  d'avoir  élé  converis,  et  dont  les  pierres, 
déjà  désagrégées,  sont  suspendues  au-dessus  des  échafauds  dressés 
pour  leur  construction.  Ces  jeunes  ruines  portent  en  elles  un  cachet  de 
faiblesse  et  d'impuissance  qu'il  imporie  d'effacer,  et  bien  qu'on  ail  déjà 
l)eaucoup  fail  pour  cela,  il  y  a  cependant  beaucoup  à  faire  encore  pour 
achever  tous  les  monuments  commencés  dans  Paris. 

—  La  rue  projetée  depuis  longtemps  pour  mettre  en  commnniciUion 
avec  la  rue  Tronchel  la  station  des  cheniinsde  Versailles, (le  Sairil-Gerina  In 
et  de  Rouen  quiestsituécrue  Saini-Lazare,vaêire  incessaumieni exécu- 
tée. On  s'occupe  en  ce  moment  de  l'expropriation  des  terrains.  Cette 
nouvelle  voie  va  encore  embellir  le  quartier  de  la  Madeleine,  déjà  si 
privilégié.  Ceci  appelle  tout,  nalurellemeni  une  comparaison  entre  les 


faveurs  donlon  inonde  cette  paitie  de  la  rive  droite  de  la  Seine,  et  celles 
que  l'on  semble  refusera  la  rive  gauche.  Sur  celle  dernière,  les  em- 
barcadères sont  relégués  aux  barrières,  alors  qu'il  serait  si  facile  et  si 
urgent  de  les  amener  plus  |irès  du  centre.  Il  est  question,  toutefois,  de 
faire  entrer  dans  Paris  le  chemin  de  fer  de  Versailles  (rive  gauche)  et 
d'établir  son  embarcadère  vers  le  point  de  rencontre  des  rues  de  Sèvres 
et  du  Cherche-.Midi.  Mais  ce  n'csl  encore  là  qu'un  projet. 

—  M.  Canonica,  académicien,  architecte  des  palais  royaux  de  Milan 
et  de  Moiiza,  chevalier  de  plusieurs  ordres,  est  mon  dernièrement  à 
Milan.  Il  était  né  à  Tesserte.  près  de  Liigano.  ■  Son  nom,  dit  la  Ga- 
zelle de  Bd/e,  figure  avec  honneur  dans  l'histoire  de  rarchiteclure  mo- 
deine  de  l'Italie.  Un  grand  nombre  d'édifices  ont  été  construits  sous  sa 
direction  dans  plusieurs  villes  du  nord  de  l'Italie.  Il  laisse  une  fortune 
considérable  dont  il  a  consacré, une  partie  à  fonder  des  étalilissenients 
de  bienfaisance.  Il  a  légué  à  la  commune  de  Tesserte,  dans  le  canton  du 
Tésin,  où  il  est  né,  40  000  livres  pour  fonder  nn  hospice  destiné  aux  or- 
phelins; il  a  établi  un  prix  annuel  d'aichileclure  de  40  000  livres,  w 
La  Gazelle  de  Bàlc  se  trompe  sans  doute;  elle  a  probablement  vouju 
dire  que  le  riche  architecte  avait  légué  une  somme  de  40000  livres  pour 
la  fondation  d'un  prix  annuel,  ce  qui  est  déjà  fort  raisoimable.  Du  reste, 
(lédueiion  faite  de  ces  divers  legs,  il  reste  encore  à  ses  hériiiers  une  for- 
tune de  plus  d'un  million  ;  ceci  doit  engager  nos  jeunes  adeptes  dans 
l'art  d'Iciiuus  à  ne  pas  désespérer  encore  de  l'avenir  et  à  ne  point  briser 
leur  compas. 

—  Parmi  les  conquêtes  archéologiques  de  cette  fameuse  expédition 
d'Egypte  qui  a  su  déposer  dans  ce  pays  des  Pharaons,  tombé  alors  dans 
la  barbarie,  le  germe  fécond  de  notre  civilisation  industrielle,  l'une  des 
plus  importantes  est  celle  de  la  Pierre  de  Roselle ,  de  celte  célèbre  in- 
scri|Hion  qui  devait  donner  la  clef  des  mysiérieux  chraclércs  du  lan- 
gage hiéraliqne  des  Égyptiens,  rendre  la  voix  aux  monuments  de  l'an- 
tique Egypte,  muets  depuis  lani  de  siècles.  Par  malheur,  celte  pierre 
éiait  brisée;  à  celle  inscription  précieuse,  il  man(|iiait  un  fiagmenl. 
Un  journal  anglais  (Lillerary  Gazelle)  annonçait,  il  y  a  peu  de  temps, 
qu'un  second  exemplaire,  mais  complet  celte  fois,  de  la  même  in- 
scription, venait  d'être  trouvé.  Notre  savant  antiquaire  M.  Letronne 
publia  à  ce  sujet,  dans  les  Débals,  un  article  trop  intéressant  pour  que 
nous  ne  le  reproduisions  pas  en  entier  : 

Très-importante  découverte.  —  tel  esi  le  titre  (Mo$l  importani 
Discovery)  que  porle  un  article  inséré  dans  le  dernier  numéro  de  la 
Gazelle  tilléraire  de  Londres,  du  10  février;  cl  si  la  découverte  qu'il 
annonce  esl  bien  réelle,  comme  il  n'est  guère  possible  d'en  douter, 
l'épithèle  de  Irés-imporlante  csl  parfaitement  mérilée. 

Il  ne  s'agit,  en  effet,  de  rien  moins  que  d'un  nouvel  exemplaire  com- 
plet de  la  fameuse  inscription  de  Roselle,  qui  aurait  élé  trouvé  dans 
l'île  de  Méroé  par  M.  le  docteur  l.epsius,  chef  de  l'expédilion  scientifi- 
que envoyée  par  Sa  Majesté  le  roi  de  Prusse  pour  explorer  la  vallée  du 
Nil. 

On  appréciera  toute  l'importance  de  celle  découverte,  si  l'on  se  sou- 
vient que  le  bloc  de  granit  appelé  pierre  de  Rosette,  du  nom  de  la  ville 
où  il  a  été  découvert  par  les  Français  en  1799,  porte  sur  une  de  ses 
faces  trois  inscriptions  superposées,  les  deux  premières  en  égvpiien. 
écrites,  l'une  eu  earacièrcs  hiéroglyphiques  ou  sacrés,  l'auire  eu  carac- 
tères démotiques  ou  populaires,  et  la  iroisiènu-  en  grée,  el  que  chacune 
d'elles  n'est  qu'une  expressicui  différente  du  même  décret  rendu  à 
Memphis  par  les  prêtres  égyptiens,  en  rhoiineiir  de  Plolémée  V,  dit 
Epiphane. 

La  découveriede  ce  documeiildii  premier  ordre  produisit,  au  com- 
mencement de  ce  siècle,  une  sensation  exiraordinaire;  car  elle  ranimait 
loul  à  coup  l'espoir,  alors  presque  eniièremeut  perdu,  de  retrouver  l'i- 
diome et  les  systèmes  graphiques  de  l'ancienne  Egypte,  au  moyen  de  la 
comparaison  de  trois  textes,  dont  l'un  était  parfaitement  connu.  Elle 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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fut  donc  le  signal  du  reclierfclies  poursuivies  par  les  premiers  savants 
de  l'Europe,  les  Silvcslre  de  Sacy,  les  Akerlihid,  les  Tliouias  Young  el 
lesChampollion,  pour  ne  ciler  que  les  plus  illustres. 

Chanipoliioii  est  celui  qui  a  le  plus  avancé  le  déchiffrement  des  deux 
traductions  égyptiennes,  puisqu'il  est  parvenu  à  une  transcription  prcs- 
(|ue  complète  du  texte  intermédiaire,  ei,  par  le  rapproclienienl  d'une 
foule  d'indices,  à  une  intelligence  très-avancée  du  texte  sacré,  comme 
l'alteslent  et  sa  Grammaire  égyptienne  et  son  Dictionnaire  hiérogly- 
phique. 

Mais  les  efforts  de  ce  génie  pénétrant,  comme  ceux  de  ses  devan- 
ciers, ont  été,  en  partie  du  moins,  arrêtés  par  cette  fâcheuse  circon- 
stance, que  le  texte  hiérogly|)hi(|uc  est  réduit  au  tiers  environ  de  l'é- 
tendue qu'il  avait  primitivement,  la  partie  supérieure  ayant  été  emportée 
avec  im  éclat  de  la  pierre. 

A  en  juger  par  les  pas  immenses  que  l'interprétation  des  hiéroglyphes 
a  faits,  malgré  ce  grand  obsiacle,  on  peut  croire  qu'elle  serait  à  présent 
bien  avancée,  si  l'on  avait  pu,  dès  l'origine,  s'appuyer  sur  une  compa- 
raison complète  des  trois  textes.  Or,  sur  le  nouvel  exemplaire  trouvé 
par  M.  Lepsius,  le  texio  liiéroglypliiqneesJ  exlrtiordinairemerrl  bien  con- 
servé {ihe  hieroglyphic  portion  is  unusually  perfect),  selon  l'expression 
de  la  Gazette  littéraire,  et  l'on  peut  croire  à  l'exaclilude  du  fait,  puis- 
qu'il est  consigné  duns  une  lettre  adressée  par  le  docteur  Lepsius  à 
M.  Bunsen,  ministre  de  Prusse  à  Londres,  qui  est  lui-même  un  savant 
très-distingué,  occupé  depuis  longtemps  de  grands  travaux  sur  l'histoire 
et  la  chronologie  égyptiennes. 

C'est  assurément  là  une  des  nouvelles  les  pins  intéressantes  que  pût 
recevoir  le  monde  savant.  Dans  l'état  où  se  trouvent  maintenant  les 
études  égyptiennes,  ce  lexle  hiéroglyphique  complet  doit  les  éclairer 
d'une  vive  lumière.  Ici  va  donc  se  présenter  une  épreuve  décisive  pour 
le  système  de  Champollion,  qui,  dans  ce  qu'il  a  d'essentiel  et  de  fonda- 
mental, a  obtenu,  dès  l'origine,  et  conservé  depuis,  l'assentiment  des 
plus  habiles  philologues  de  l'Europe.  Niebidir  l'avait  proclamé  la  plui 
Mie  découverte  historique  des  temps  modernes  ;  Silvestre  de  Sacy  a  plu- 
sieurs fois  exprimé  l'opinion  qu'un  Sfcond  monument,  tel  que  l'Inscrip- 
tion de  Roseite,  ne  ferait  qu'en  confirmer  les  bases,  et  cette  confiance 
est  encore  partagée  par  tous  ceux  qui  ont  pris  la  peine  d'étudier  avec 
.soin  les  écrits  de  Champollion;  ainsi  ils  n'auront  probablement  nulle 
inquiétude  pour  celte  gloire  de  notre  siècle  et  de  notre  pays;  mais  la 
vérificaiion  n'en  sera  pas  moins  attendue  avec  grand  intérêt  par  tons 
les  amis  de  la  science  hisloriqué. 

Du  reste,  la  décoiiveite  d'une  nouvelle  copie  du  décret  de  Memphis 
n'a  en  elle-même  rien  qui  puisse  surpiendre. 

Dans  un  récent  ouvrage  (1),  j'ai  indiqiu',  pour  stimuler  et  soutenir  le 
zèle  des  voyageiirs,  tous  les  motifs  qui  donnent  lieu  de  croire  que  des 
fouilles  bien  dirigées  devront  amener  tôt  nu  tard  la  connaissance  soit 
d'un  nouvel  exemplaire  de  l'inscription  de  Rosette,  soit  de  toute  antre 
inscription  bilingue  analogue,  donl  l'étude  comparée,  ai-je  dit,  fournira 
le  moyen  de  déchirer  tout  à  fait  te  voile  que  notre  illustre  Champollion 
a  si  heureusement  soulevé. 

Mais  ce  qu'il  y  a  de  vraiment  extraordinaire  dans  la  découverte  an- 
noncée, c'est  qu'elle  ail  été  faile,  non  en  Egypte,  mais  à  Méroé.  Cette 
circonstance,  sur  laquelle  l'auteur  de  l'ariicle  dans  la  Gazette  littéraire 
de  Londres  n'a  fait  aucune  remarque,  comme  si  elle  n'avait  rien  que  de 
naturel,  est  cependant  tellement  inattendue,  qu'il  n'est  pas  un  homme 
•nstruit  qui  ne  soit  lenié  de  la  croire  historiquement  f>Tes(\ue  impossible 
En  effet,  le  décret  des  prêtres  Egyptiens,  transcrit  sur  la  pierre  de  Ro- 
sette, ne  concerne  que  l'Egypte  dans  toutes  ses  dispositions  ■  il  y  est  dit 
qu'un  exemplaire  doit  en  être  envoyé  et  déposé  dans  les  divers  temples 
du  pays.  C'est  donc  en  Egypte  seulement  qu'on  devrait  en  trouver  des 
cop.es,  depuis  la  mer  jusqu'à  Pbiles,  ou  tout  au  plus  dans  la  portion  de 


la  Basse-Nubie  qu'on  appelait  le  dodecauhmnon  (espace  de  douze 
schœnes),  qui  se  terminait  à  Hitra-Sycaminot,  limite  niéridiouale  de  la 
domination  des  Piolémées  et  des  Romains. 

Quant  à  Méroé,  contrée  reculée  si  loin  vers  le  midi,  elle  fit  partie 
d'un  Etat  indépendaul  appelé  \e  royaume  d'Ethiopie,  t\w  arrivait  au  nord 
jusque  vers  la  secumie cataracte.  11  coidinait  donc  au  royaume  d'Egypte. 
De  là  des  guerres  continuelles,  dans  lesquelles  les  Ethiopiens  ont  pu 
être  souvent  battais;  mais  rien  n'annonce  que  les  Ptoléniécs  aient  ja- 
mais porté  leurs  armes  jusqu'à  Méroé,  encore  moins  que  cette  preM|u'ile 
ait  jamais  fait  partie  intégrante  de  l'Egypte.  Or,  c'est,  à  ce  qu'il  semble, 
ce  qu'il  faudrait  conclure  de  la  présence  à  Méroi  d'une  copie  du  décret 
rendu  pai'  les  prêtres  de  .Memphis.  Je  passe  sous  silence  bien  d'autres 
considérations,  qui  toutes  feraient  ressortir  rintTai(ftn6/anre  du  fait. 

De  cette  invraisemblance,  je  ne  conclus  pas  que  le  fait  n'est  pas  vrai; 
je  veux  dire  seulement  qu'il  parait  contraire  à  toutes  les  inductions 
raisonnables  i|u'on  peut  tirer  des  faits  connus.  Si  donc  il  se  cunliroie 
que  la  pierre  a  été  trouvée  à  iltroé,  ce  sera  une  nouvelle  preuve  des 
immenses  lacunes  qui  restent  encore  dans  riiisloin-  de  l'Egypte,  sous 
la  domination  grecque.  C'est  surtout  à  propos  de  celle  branche  si  im- 
|iorianle  de  l'histoire  de  l'anticinité,  qu'après  même  les  plus  grands  ei- 
furts  pour  lâcher  de  savoir  quelque  chose,  il  ne  doit  rien  coulera  un 
esprit  sincère  de  dire  :  ^antum  til  quod  neseimut!  » 

LETRONNE. 

PiBLicATiONS  NOUVELLES.  —  Sous  cc  titre  :  Annales  archéologiques, 
l'un  de  nos  collaborateurs,  M.  Didron  (de  la  Bibliothèque  Royale,  secré- 
taire de  la  commission  des  arts  et  monuments  au  ministère  de  l'Iii- 
struction  publique],  vient  de  commencer  la  publication  d'une  Revue 
meiisuelle,  spécialement  consacrée  à  l'élude  de  l'archéologie  et  si  la  dé- 
fense de  ses  intérêts.  Dans  son  introduction,  M.  Didron  annonce  qu'il 
s'occu|iera  tout  parliculièiemenl  de  l'étude  de  nus  antiquités  nationales 
du  Moyen-Age,  sans  toutefois  négliger  absolunienl  les  études  de  l'anli- 
quité  païenne. 

Vqici  le  sommaire  du  premier  numéro  des  Annalri  archéologiques  : 

Sommaire  du  l"  numéro. 

Introduction. 

Iconographie  chrélienne  (Le  Nimbe),  par  M.  Didion. 

Peinture  sur  verre,  par  .M.  Lassl's. 

.Musée  des  Thermes  et  de  l'hôtel  de  Cluny,  par  M.  Kcrdinand  DE  GuiL- 

UERav. 
.Mdanges.  —  Chape  de  Charles  Vil.  —  Cadres  en  bois,  sculptés  au 

XVI'  siècle.  —  Adhésion  et  encouragements. 

Dessins. 
Vingt  gravures  sur  bois  lepresenlant  diverses  ligures  nimbé>'S. 
Vitrail  de  Saint-Germain-rAuxerrois,  gravé  sur  cuivre. 

—  Iconographie  chrétienne  :  Histoire  de  Dieu,  par  M.  Didron,  de  la 
Bibliothèque  Royale,  secrétaire  du  comité  histori<|ue  des  artsel  monu- 
ments. Un  volume  grand  in-4°,  imprimerie  royale.  Ce  volume,  dont 
nous  ne  pouvons  pas  donner  l'analyse  aujourd'hui,  se  compose  de  plu- 
sieurs chapitres  dans  lesquels  l'auteur  traite  sucessivement  du  Nimbe. 
de  \' Auréole,  de  la  Gloire,  de  Dieu  te  Père,  de  Dieu  te  Fils,  du  Sainl- 
Espril  et  de  la  Trinité. 


(1)  Recueil  des  Inscriptions  grecques  et  latines  de  l'Egypte,  1. 1, 


p.  832. 


Cbsab  DALY, 

Direeltur  fidacteur  en  cluf, 
membre  de  l'Acatléinie  royale  drs  Bcaui-.\rts  de  Siocktioiiii,  el  membre 
honoraire  cl  correspondanl  de  l'Inslilul  royal  des  Arctiileclcs  brilanoiqurt. 


PAMS.    —   TVP.   LlOKvlIPE   BT  COUP.,  RUE  DAMIITTE,   ï. 


R^vuc  (^ffléra/^  de^  l Archùfcturt^ e/  des  Trapau^x  Pijhlirs         Pnris,  Rue  de  Furstemhrrtf ,  N" 6 . 


Vol',   PL 


Fia.J. 


Fi^.6. 


fu/  3 


Fi^2. 


Fùf^4-. 


Fi^.S. 


ScHéUe  en  Pieds  «wv    t-t-*-H î 1 f 1 — 


~\c  F  Jet  n^  .X  é^  M   7- 


;  rtioA  Dalv  del. 


GRA-NDES  PORTES  D'ATELIER. 


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Revue-  Générale  de  LAirJutectuie.  eX  des  Travaux  jPuiàcs      6 ,  Rue   de  Rirstemhero  .   Pa/à 


roi.  5.  PL  S 


Fio-.  1 . 


Fier.  2. 


/<»     MW>-W. 


Ayié-  Dtaoir  dW. 


S  IRm^M-  irJftHÊtm^   jtmfy 


SALLE  DE  BAINS  ET  DE  BAINS  DE  PIEDS, DU  COLLEGE  R':  DR  ROUEN. 

(Construite   d'après  le    svslèmc  dr  M'  Kèné  DuvoirJ. 


11^3 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


146 


^  'Zi'ÀM 


INSTRUCTIONS  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 


DES    ARTS    ET    MONUMENTS. 


MONUMENTS  FIXES. 


(SUITE,  voy.  col.  97.) 
TROISIÈME  ÉPOQUE.  —  COPJQIÊTE  ROMAIIVE. 

PREMIÈRE    PARTIE.  —  MONUMENTS    RELIGIEUX. 

L'histoire  de  l'art  présente  une  troisième  et  brillante  période, 
déterminée  par  l'arrivée  de  César  sur  le  sol  des  Gaules.  Les  Ro- 
mains y  apportèrent  une  civilisation  qui  changea  la  face  de  toutes 
les  productions  antérieures. 

De  toutes  parts  des  camps  s'établirent  pour  étendre  et  conserver 
la  conquête  ;  des  silos,  des  magasins  militaires  furent  placés  sous 
leur  protection,  et  les  premiers  autels  des  divinités  romaines  s'éle- 
vèrent devant  les  tentes  consulaires.  Les  alliances  avec  plus  d'une 
république  gauloise  commencèrent  les  mélanges  de  religion  et  de 
mœurs  signalés  au  début  de  ces  instructions,  et  l'art  italique,  prê- 
tant son  secours  aux  druides ,  interpréta  leurs  idées  religieuses  et 
les  traduisit  sur  des  monuments  durables.  Les  soldats  romains, 
exercés  dans  l'art  de  bâtir  et  dirigés  par  d'habiles  artistes,  en  im- 
posant aux  Gaulois  la  théogonie,  les  lois,  les  usages  de  l'Italie,  les 
dotèrent  de  nombreux  édifices  analogues  à  ceux  de  la  métropole, 
et  toutes  les  constructions  de  la  Gaule  furent  soumises  au  niveau 
d'une  même  équerre,  à  la  liaison  d'un  même  ciment. 

C'est  particulièrement  au  début  de  ces  importations  étrangères 
que  l'art  peut  être  qualifié  de  gallo-romain,  par  la  liaison  in- 
time qui  s'établit  alors  dans  les  productions  des  deux  peuples  ; 
c'est  donc  à  cette  époque  que  MM.  les  correspondants  pourront 
attribuer  en  général  les  monuments  de  sculpture  offrant  des  divi- 
nités étrangères  à  Rome,  des  costumes,  des  usages  du  peuple  sou- 
mis. On  y  pourra  rencontrer  des  représentations  de  druides,  des 
noms  gaulois  écrits  en  caractères  romains ,  mais  faciles  à  recon- 
naître aux  racines  et  aux  terminaisons  barbares  ;  des  emblèmes, 
des  nombres  mystérieux,  des  branches  de  gui  ou  de  chêne,  des  in- 


struments sacrés  ou  d'un  usage  inconnu.  On  aura  scinde  recueillir 
tous  ces  renseignements  précieux  ainsi  que  tout  ce  qui  pourrait 
mettre  sur  les  traces  de  la  religion  des  druides,  des  divinités  lo- 
cales, enfin  de  tout  ce  que  le  ciseau  italique  a  pu  conserver  de  sou- 
venirs gaulois. 

Une  importation  qui  doit  dater  de  cette  première  époque  de  la 
domination  romaine,  et  dans  laquelle  on  trouvera  de  nombreux 
éléments  d'étude,  c'est  la  fabrication  des  terres  cuites.  On  exami- 
nera les  puits  d'exploitation,  les  fours  à  cuire ,  les  dimensions  et 
les  formes  données  aux  briques  et  aux  tuiles  qui,  selon  Vitruve, 
furent  établies  sur  des  mesures  gauloises. 

Tuiles  romainet. 


Fig.  14. 

Des  marques  de  fabriques  ou  de  localités  pourront  s'y  rencon- 
trer. On  fera  les  mêmes  applications  aux  poteries  et  aux  vases  de 
toute  nature,  ainsi  qu'aux  antefixes  placées  devant  les  toits. 


Fig.  15. 


Fig.  16 


Il  sera  utile  de  suivre  4'exploitation  des  pierres,  des  marbres, 
des  granits,  tant  pour  les  édifices  à  construire  sur  le  sol  que  pour 
l'exportation  en  Italie.  Les  Gaulois  furent  employés  à  ces  travaux, 
et  les  carrières  pourraient  fournir  des  notions  relatives  aux  moyens 
mis  en  œuvre  pour  détacher  les  masses,  ainsi  qu'aux  instruments 
en  usage  dans  ce  genre  d'exploitation. 

Quant  à  l'architecture  de  cette  époque  de  transition,  elle  doit 
être  complètement  dans  le  style  romain  ,  puisque  tout  porte  à 
croire  que  les  Gaulois  n'avaient  point  d'art  établi  sur  des  règles  ; 
quelques  usages  indigènes  conservés  dans  les  édifices  élevés  par 
les  nouveaux  constructeurs  pourraient  donc  seuls  faire  reconnaître 
les  monuments  contemporains  de  la  conquête.  On  peut  attribuer  à 
l'époque  de  la  première  occupation  militaire  des  Gaules  les  maga- 
sins souterrains  et  les  silos  dans  lesquels  les  Romains  renfermèrent 
des  provisions  de  guerre.  On  doit  indiquer  les  coupes  de  ces  silos, 
les  moyens  d'y  puiser,  de  les  clore,  et  même  de  les  défendre  des 
surprises  de  f  ennemi. 

T.   V.  10 


14.7 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Itô 


Silos. 


Fig.  17. 

Maîtres  eufin  de  nos  riches  provinces,  les  vainqueurs  pensèrent 
à  s'y  établir  d'une  manière  durable.  Les  villes  qu'ils  fondèrent  dans 
les  Gaules  se  distinguent  des  établissements  antérieurs  à  la  con- 
quête par  l'heureux  choix  des  localités  et  par  la  réunion  de  tout  ce 
qui  pouvait  contribuer  à  la  prospérité  d'une  colonie. 

Un  lieu  élevé,  dominant  toute  la  surface  que  devait  occuper  la 
ville ,  était  consacré  à  la  citadelle  et  renfermait  les  temples  des 
grandes  divinités.  Cette  première  disposition  reconnue,  on  exami- 
nera si  les  citadelles  ou  acropoles  romaines  ont  conservé  des  restes 
de  murailles  militaires  et  de  contre-forts  destinés  à  soutenir  les  ter- 
rains et  les  rochers;  on  étudiera  les  cheniins  ou  escaliers  favora- 
bles à  l'arrivée  des  troupes,  au  transport  des  machines  de  guerre, 
enfin  aux  pompes  religieuses  que  les  solennités  conduisaient  aux 
temples.  On  cherchera  sur  ces  points  culminants  les  traces  qui 
pourraient  indiquer  la  formeet  l'étendue  des  remparts,  ainsi  que 
les  dimensions  des  temples  des  divinités  protectrices  de  la  cité. 
Lorsque  les  citadelles  furent  établies  postérieurement,  elles  étaient 
situées  en  dehors  de  l'enceinte.  Un  plan  topographique  des  locali- 
tés, dessiné  sur  une  grande  échelle,  doit  servir  de  base  aux  opéra- 
tions qu'on  se  propose  de  faire  sur  une  ville  antique.  Les  décou- 
vertes successives,  tracées  exactement  aux  lieux  où  elles  seront 
faites,  établiront  de  la  clarté  dans  le  travail. 

L'intérieur  d'une  ville  romaine,  divisée  en  quartiers  ou  régions, 
contenait  un  forum  ou  place  publique,  un  marché,  des  carrefours  ; 
c'est  sur  ces  points  importants  qu'étaient  placés  les  temples  des 
divinités,  souvent  remplacés  par  des  églises.  On  cherchera  les  sou- 
venirs de  ces  édifices  dans  les  légendes  sacrées  et  dans  les  tradi- 
tions. Près  des  marches  étaient  les  autels  de  Mercure,  d'Isis,  de 
Sérapis;  ceux  d'Apollon  et  de  Bacchus  avolsinaient  le  théâtre; 
Hercule  avait  ses  temples  auprès  de  l'amphithéâtre  et  du  cirque. 

La  position  d'un  temple  une  foisreconnueparles  traditions  ou  les 
monuments  littéraires,  on  devra  en  chercher  les  traces  positives 
dans  les  substructions  de  l'église  ou  des  édifices  d'une  autre  espèce 
élevés  au  même  lien.  Toutes  les  attaches  ou  ruines  qui,  dans  les 
environs,  pourraient  se  lier  au  monument  principal  ou  à  l'enceinte 
sacrée  qui  l'entourait,  seront  relevées  avec  soin  dans  leurs  direc- 
tions relatives  et  placées  sur  un  plan  mesuré  et  orienté.  Ce  qui 
regarde  les  temples  s'applique  de  même  à  tout  autre  édifice  an- 
tique, de  quelque  nature  qu'il  soit. 

Lorsque  les  restes  du  temple  paraîtront  au-dessus  du  sol ,  un 
dessin  géoraétral  donnera  l'état  présent  des  ruines  en  les  déga- 
geant des  constructions  modernes  qui  pourraient  y  être  enclavées. 
Les  moulures  ou  membres  d'architecture  seront  levés  avec  préci- 
sion et  dans  le  galbe  exact  de  l'original ,  la  partie  la  plus  intacte 
étant  choisie  pour  cette  opération  ;  une  lame  de  plomb  appliquée 


sur  la  pierre  peut  en  donner  les  courbes  exactes,  pour  les  reporter 
sur  le  papier.  On  obtient  le  même  résultat,  et  directement,  en  tra- 
çant le  profil  sur  un  papier  passé  dans  le  joint  de  deux  pierres,  si 
les  moulures  y  sont  bien  conservées. 

Les  membres  d'architecture  trop  grands  pour  subir  celte  opéra- 
tion seront  cotés  avec  soin  et  relevés  à  l'équerre  et  au  (il  à  plomb. 

Les  détails  ornés,  tels  que  chapiteaux ,  frises ,  décorations  de 
toute  espèce,  seront  dessinés  de  manière  à  reproduire  exactement 
le  caractère  de  la  sculpture.  C'est  de  la  sévérité  de  ces  dessins  et  de 
l'exactitude  à  rendre  les  formes  que  dépend  l'assignation  de  l'ége 
du  monument  dont  on  donnera  la  réduction. 


Feuille  d'olivier. 


Feuille  d'acanthe. 


Fig.  18. 


Fig.  19. 


L'architecture  gallo-romaine  offrira,  dans  les  ornements  et  dans 
les  profils  de  moulures,  une  richesse  d'invention,  une  variété  de 
formes,  qui  pourra  faire  distinguer  les  compositions  dans  lesquelles 
se  manifestait  le  génie  inventif  des  Gaulois.  L'exécution  de  ces  dé- 
tails d'architecture  est  assez  grossière  dans  les  régions  septentrio- 
nales ;  on  y  reconnaît  l'usage  du  trépan  pour  obtenir  les  effets 
d'ombre  et  de  lumière. 

Ces  fragments  précieux  ne  peuvent  être  étudiés  avec  fruit  s'ils 
ne  sont  mesurés  avec  tous  leurs  détails,  dessinés  géométralcment 
et  dans  leur  état  brut.  Les  profils  et  un  plan  indiquant  la  décora- 
tion des  plafonds,  des  sculptures  placées  sous  les  modillons  et  lar- 
miers, sont  encore  des  travaux  indispensables  pour  expliquer 
complètement  l'ensemble  de  ces  monuments.  On  peut  recommander 
l'emploi  de  la  chatnbre  claire  pour  en  dessiner  les  ornements  avec 
vérité,  et,  s'ils  sont  peu  saillants,  un  estampage  en  papier  offre 
une  reproduction  encore  plus  fidèle. 

Cette  opération  consiste  a  appliquer  sur  la  sculpture  de  peu  de 
relief  un  papier  sans  colle  et  légèrement  mouillé,  comme  on  l'ena- 


149 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


150 


ploie  dans  l'imprimerie,  et  à  y  faire  paraître  les  formes  les  plus 
délicates,  et  même  le  grain  de  la  pierre,  en  appuyant  d'abord  avec 
un  linge,  puis  avec  une  brosse. 

Les  procès-verbaux  de  recherches  mentionneront  les  divers 
marbres,  schistes  et  autres  matériaux  employés  dans  les  édifices  ; 
leurs  qualités ,  le  pays  où  ils  furent  exploités  ;  s'ils  sont  exotiques 
ou  produits  par  le  sol. 

Le  plan  général  de  la  ville  antique  recevra  l'indication  des 
fouilles  successives  dont  on  a  conservé  le  souvenir  ;  les  fragments 
placés  dans  les  musées  ou  dans  quelque  autre  dépôt  municipal  se- 
ront, autant  que  possible,  rattachés  à  la  fouille  dont  chacun 
d'eux  est  sorti.  Une  classification  par  numéros  peut  suffire  à  cette 
opération. 

Indépendamment  du  plan  des  édifices  dont  les  murs  sont  encore 
debout,  on  dessinera  géométralement  les  mosaïques  et  pavés  indi- 
quant l'étendue  des  monuments  qui  ne  s'élèvent  plus  au-dessus 
du  sol. 

Dans  la  fouille  de  ces  édifices ,  le  plus  petit  fragment  d'architec- 
ture, une  feuille  de  chapiteau,  une  moulure  ornée,  un  détail,  quel- 
que peu  important  qu'il  paraisse,  doit  devenir  une  source  d'obser- 
vations utiles  ;  on  ne  peut  oublier  qu'en  sauvant  ces  fragments  on 
contribue  à  former  une  suite  de  faits  qui,  tôt  ou  tard ,  trouvent 
leur  place  dans  la  vaste  collection  des  connaissances  archéolo- 
giques. 

Ce  qu'on  a  dit  précédemment  des  autels  des  Grecs  peut  s'ap- 
pliquer à  ceux  des  Romains  :  diversité  dans  les  formes,  décoration 
d'architecture  et  de  sculpture,  emblèmes  de  sacrifices  et  de  vic- 
times, jusque-là  complète  analogie  ;  mais  une  exécution  peu  soi- 
gnée, des  profils  de  moulures  plus  composés  et  d'un  galbe  moins 
pur,  la  sculpture  d'un  dessin  moins  noble,  caractérisent  les  autels 
élevés  sous  la  domination  romaine  et  les  font  différer  de  ceux  des 
Grecs. 

Les  inscriptions  suffiront  pour  faire  distinguer  les  autels  votifs, 
lorsqu'ils  seront  privés  d'ornementation  et  qu'ils  n'offriront  rien 
de  plus  que  des  cubes  de  pierre  ou  de  marbre,  comme  on  en  voit 
souvent  de  consacrés  aux  nymphes  ou  à  quelques  divinités  locales 
du  second  ordre. 

Certaines  cérémonies  romaines  ont  donné  naissance  à  des  mo- 
numents sacrés  inconnus  aux  Grecs;  dans  les  tauroboles  on  éleva 
des  autels  d'une  forme  particulière  :  une  table  percée  d'un  grand 
nombre  d'ouvertures  recevait  la  victime  ;  sous  cet  autel  s'admi- 
nistrait le  baptême  de  sang.  La  France  possède  un  de  ces  monu- 
ments de  superstition;  les  nouvelles  découvertes  dans  ce  genre  se- 
ront étudiées  et  dessinées  par  MM.  les  correspondants. 

Enfin  nous  signalerons  une  dernière  classe  de  monuments  reli- 
gieux, les  bornes  Termes  ou  Hermès,  qui  servaient  de  limites 
entre  les  provinces  ou  les  propriétés  particulières,  et  qui,  répan- 
dues dans  les  campagnes,  recevaient  à  certaines  époques  de  l'an- 
née les  vœux  des  cultivateurs. 

DEUXIÈME  PARTIE.  —  MONUMENTS  MILITAIRES. 
§  I.  Enceintes. 

L'enceinte  primitive  de  Rome  avait  enveloppé  le  Palatin  dans 
une  forme  carrée  :  un  grand  nombre  de  cités  romaines  présentent 
cette  disposition,  particulièrement  sur  les  pays  de  plaines.  Les 
murailles,  protégées  à  leur  base  par  un  fossé  et  un  agger,  étaient 


construites  de  plusieurs  manières.  On  désignera  la  façon  de  ces 
murailles;  des  dessins  géométraux  indiqueront  si  elles  sont  fa- 
briquées en  grandes  assises  réglées,  en  moellons  smillés,  ou  par 
encaissement. 

Les  grandes  assises  peuvent  être  établies  en  liaison  comme  on 
pose  les  briques,  c'est  Vinsertum  des  Romains.  L'opus  incerlum 
est  formé  de  pierres  irrégulières. 

Opus  incertum. 


Fig.  21. 

Dans  la  structure  des  Grecs  et  les  constructions  delà  république 
romaine,  une  pierre  en  boutisse,  dont  l'extrémité  seule  était  ap- 
parente, se  plaçait  entre  deux  pierres  offrant  toute  leur  longueur. 

Structure  greequt  et  de  la  Jiépublique. 


Fig.  22. 

On  nomme  revinctum  ou  construction  cramponnée  celle  dont 
les  pierres  formant  les  deux  parois  du  mur  sont  liées  avec  des 
crampons.  Le  nom  de  maceria  se  donne  à  la  construction  com- 
posée de  blocs  de  pierre  placés  à  sec.  sans  liaison  de  mortier.  La 
base  des  murailles  est  souvent  établie  de  la  sorte. 

Les  moellons  smillés  (similes)  peuvent  être  taillés  en  losanges 
et  figurer  une  maille  ou  réseau  :  cette  structure  est  appelée  opu» 
reticulatum. 

Opus  reticulatum. 


I    '    i    '     (    '     I^-^ 


Fig.  23. 

Le  nom  d'isodomum  était  donné  aux  constructions  de  moel- 
lons placés  à  plat,  mais  égaux  en  hauteur;  \e pseudisodomum  était 
composé  d'assises  de  moellons  inégaux. 

L'emplecton  forme  un  encaissement  de  moellons  reliés  par  des 
assises  de  briques.  En  France  la  décoration  de  terres  cuites  mêlées 
aux  constructions  est  très-variée.  Des  losanges  et  autres  figures 
géométriques  se  reproduisent  à  plusieurs  hauteurs  dans  les  nui- 
railles  :  c'est  vers  le  Ras-Empire  qu'elles  se  multiplient  et  pren- 
nent toutes  les  formes. 


151 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


152 


Emp  leeton  et  maceria. 


Fig.  24. 

Dans  les  contrées  maritimes  et  auprès  des  fleuves  qui  roulent 
des  galets,  les  Romains  ont  fait  usage  de  ces  cailloux,  et,  les  in- 
clinant les  uns  sur  les  autres  en  forme  d'épi  ou  d'arête  de  poisson, 
en  ont  formé  un  ouvrage  qu'on  nomme  opus  ipicatum. 

§  II.  Portes. 

Les  portes  situées  au  milieu  des  grandes  faces  des  murailles  de 
ville  étaient  en  général  protégées  par  des  tours  crénelées  ;  le  che- 
min de  ronde  arrivait  aux  portes  de  la  ville  dans  une  petite  en- 
ceinte formant  double  défense  sur  ce  point.  La  porte  de  ville  of- 
frait ordinairement  deux  voies  consacrées ,  l'une  à  l'entrée , 
l'autre  à  la  sortie  des  chars  :  les  murs  de  Nîmes  etd'Autun  ont  en 
outre  des  ouvertures  pour  les  piétons.  Ces  dispositions  curieuses, 
ainsi  que  les  moyens  de  clôture,  le  mouvement  des  herses,  le  biais 
des  murs  pour  le  jet  du  trait,  seront  indiqués  aux  plans,  coupes  et 
façades  des  portes.  Tous  les  vestiges  de  scellement,  de  ferrure,  de 
trous  voisins  des  entrées,  qui  pourraient  expliquer  l'arrangement 
des  barricades,  ou  palissades  établies  en  cas  de  siège,  seront  me- 
surés avec  soin  et  placés  dans  les  dessins  géométraux. 

Porte  de  ville. 


Fig.  25. 

Le  chemin  de  garde  passant  sur  la  muraille  était  orné  au-dessus 
des  portes  par  des  arcades  à  jour  ou  toute  autre  décoration.  On 
examinera  dans  ces  arcades  si  des  appuis  permettaient  de  com- 
battre comme  dans  les  parties  de  la  muraille  où  étaient  établis  des 
créneaux. 

§  III.  Voies  antiqdbs. 

Les  caractères  principaux  des  voies  romaines  connues  en  France 
sont  : 
Leur  peu  de  largeur  :  elles  dépassent  rarement  6  ou  7  mètres; 
Leur  forme  bombée  ; 
Leur  direction  presque  toujours  en  ligne  droite  ; 


Leur  situation  sur  les  plateaux  ou  à  mi-côte  des  hauteurs; 

La  profondeur  de  l'empierrement  divisé  en  plusieurs  couches 
distinctes  de  matériaux  :  on  en  compte  quelquefois  jusqu'à  quatre, 
chacune  de  plusieurs  pieds  d'épaisseur. 

On  peut  ajouter,  mais  seulement  comme  un  indice  accessoire 
auquel  il  ne  faut  pas  attacher  trop  d'importance ,  l'emploi  de  terre 
glaise,  ou  de  masses  de  terre  cuite ,  ou  enfin  de  briques  ou  de 
tuiles  dans  les  couches  inférieures. 

La  couche  supérieure,  mmma  eruêla,  se  compose  de  cailloux  ou 
de  pierres  de  toutes  dimensions,  quelquefois  taillés  et  présentant 
alors  l'apparence  du  petit  .appareil  des  constructions  romaines. 
Quelques  voies  antiques,  surtout  dans  le  Midi,  sont  au  contraire 
pavées  de  pierres  énormes  taillées  irrégulièrement,  mais  assem- 
blées avec  beaucoup  de  précision. 

Voie  romaine. 


Fig.  S6 

Ailleurs,  lorsque  les  localités  l'exigeaient,  on  a  taillé  les  ro- 
chers au  pic,  de  manière  à  former  souvent  des  excavations  très- 
considérables'(i  ). 

Dans  les  pays  plats  beaucoup  de  voies  antiques  se  distinguent 
par  leur  exhaussement  au-dessus  des  plaines  environnantes.  Plu- 
sieurs offrent  l'aspect  d'une  muraille  épaisse  élevée  de  plusieurs 
pieds  au-dessus  du  sol. 

Voie  romaine. 


Fig.  27. 

Les  caractères  que  nous  venons  d'énumérer  ne  sont  point  tel- 
lement constants  et  absolus  que  lorsqu'ils  se  présentent  on  en 
doive  toujours  conclure  l'existence  d'une  voie  antique;  et  par 
contre,  les  exceptions  ou  des  caractères  très-différents  ne  prouvent 
point  toujours  une  origine  moderne.  Dans  tous  les  cas  on  devra 
tenir  compte  des  circonstances  locales,  qui  peuvent  avoir  beaucoup 
d'importance  pour  décider  la  question  ;  par  exemple,  le  voisinage 
d'une  voie  antique  bien  constatée  ;  celui  d'un  camp  ou  d'un  grand 
établissement  romain.  On  jwurra  s'aider  encore,  mais  avec  réserve. 
des  témoignages  historiques  que  nous  ont  conservés  les  géographes 
anciens. 

En  examinant  une  voie  antique  on  devra  noter  : 

Sa  direction  ; 

Son  étendue,  ses  lacunes,  ses  embranchements  ; 

La  nature  des  matériaux  et  leur  épaisseur. 

On  fera  connaître  si  elle  est  encore  en  usage  ou  si  elle  l'a  été 
anciennement,  enfin  si  l'on  y  a  fait  des  réparations  plus  ou  moins 
modernes. 

On  recherchera  si  des  bornes  ont  existé  ou  existent  encore  le 
long  de  ces  chemins  ou  aux  environs;  si  l'on  en  a  déplacé  quel- 
ques-unes. 

Il  est  important  de  copier  les  inscriptions  de  ces  bornes,  ou, 
mieux,  de  les  estamper. 


(1)  Voyez  le  vol.  II,  col.  4  de  celle  Revue,  et  la  Planche  I  du  même  toI. 


153 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


ibk 


On  examinera  si  les  distances  indiquées  par  ces  inscriptions  sont 
exprimées  en  milles  romains  ou  en  lieues  gauloises.  (Les  premiers 
de  1000  pas  ou  tiers  de  lieue,  les  secondes  de  1500  pas  ou  demi- 
lieue.) 

Quelquefois  on  trouve  sur  le  bord  des  voies  romaines  des  pyra- 
mides ou  des  tours  pleines  (sans  escaliers  ni  chambre  intérieure), 
dont  la  destination  est  fort  problématique.  On  décrira  minutieuse- 
ment ces  constructions,  et,  s'il  est  possible,  on  en  donnera  des 
plans  et  des  dessins.  On  recherchera  également  si,  dans  le  voisi- 
nage de  ces  routes,  il  n'existe  pas  des  tombeaux,  des  substructions 
de  maisons,  soit  en  j?roupes,  soit  isolées. 

Autant  que  possible  on  devra  tenir  note  des  noms  modernes  des 
hameaux,  et  même  des  fermes  que  traverse  une  voie  antique  ;  ces 
noms  pourront  quelquefois  mettre  sur  la  trace  de  nouvelles  dé- 
couvertes. 

Les  voies  traversent  les  torrents  et  les  fleuves  sur  des  ponts  anti- 
ques qu'on  étudiera  dans  tous  leurs  détails  de  construction  et  d'ar- 
chitecture. 

§  IV.  Camps  et  Enceintes  antiques. 

Il  existe  en  France  un  grand  nombre  d'enceintes  formées  par 
un  fossé  et  un  amas  de  terre,  ou  bien  par  une  muraille  de  pierres 
sèches.  Leur  origine,  leur  date,  souvent  même  leur  destination, 
sont  très-difficiles  à  déterminer.  Non-seulement  les  camps  des  peu- 
plades barbares,  gauloises  ou  étrangères,  qui  ont  fait  la  guerre  sur 
notre  territoire  depuis  une  époque  fort  antérieure  à  la  conquête  de 
César,  jusqu'au  VIII«  ou  IX'  siècle,  peuvent  se  confondre  avec  des 
camps  romains,  mais  encore  des  enceintes  ayant  une  destination  re- 
ligieuse ou  civile  peuvent  quelquefois  être  prises  pour  des  ouvrages 
militaires.  C'est  ainsi  que  plusieurs  monuments  celtiques  sont  en- 
vironnés d'un  large  fossé  et  d'un  parapet  en  terre.  D'autres  fois 
des  enceintes  semblables  entourent  des  tumulm.  Dans  une  foule  de 
cas,  ce  n'est  que  par  l'observation  de  bien  des  circonstances  acces- 
soires que  l'on  arrive  à  connaître  l'origine  de  ces  monuments.  On 
ne  peut  donc  trop  recommander  de  décrire  minutieusement  tous 
les  objets  antiques  trouvés  sur  les  lieux  :  médailles,  armes,  pote- 
ries, meules  à  grain,  ustensiles  de  tout  genre,  même  les  ossements 
d'animaux,  si  l'on  en  découvrait  en  grand  nombre;  leur  espèce  et 
leur  gisement  pourraient  fournir  des  renseignements  utiles. 

Les  enceintes  dont  la  destination  militaire  paraît  le  mieux  con- 
statée, et  dont  on  peut  rapporter  l'érection  à  une  époque  anté- 
rieure à  la  conquête,  se  trouvent  en  général  sur  des  plateaux  éle- 
vés ou  escarpés,  dont  elles  suivent  les  contours  les  plus  irrégu- 
liers. D'ordinaire  elles  se  composent  d'un  mur  en  pierres  sèches, 
qui  sert  en  quelque  sorte  de  parement  à  un  agger  de  terre  plus  ou 
moins  épais.  Les  pierres  sont  brutes  le  plus  souvent,  quelquefois 
grossièrement  équarries,  plus  rarement  elles  sont  liées  les  unes 

Mut  d'enceinte. 


Fig.  28. 
aux  autres  par  des  tenons  de  bois  à  queue  d'aronde. 


Pierres  liées. 


Fig.  29. 

Les  formes  des  enceintes  en  terre,  que  l'on  peut  regarder  comme 
des  camps,  sont  trop  nombreuses  et  trop  variables  pour  qu'on  es- 
saie de  les  décrire  ici.  Un  grand  nombre  présentent  ce  rapport, 
qu'elles  ont  une  petite  enceinte  intérieure  presque  toujours  conti- 
guë  à  l'enceinte  principale. 

■  Camp. 


Fig.  30. 


Quant  à  leur  origine,  il  est  difficile  de  la  constater  autrement 
que  par  la  découverte  des  objets  antiques  qu'elles  peuvent  renfer- 
mer. On  conçoit  en  effet  qu'avant  l'invention  des  armes  à  feu, 
tous  les  retranchements  temporaires  ont  eu  entre  eux  la  plus 
grande  ressemblance,  quel  que  fût  le  peuple  qui  les  eût  construits. 

Cependant,  lorsque  quelques-uns  de  ces  camps  offrent  un  tracé 
conforme  aux  règles  de  la  castramétation  chez  les  Romains,  on 
peut  présumer  qu'ils  ont  été  élevés  par  ce  peuple,  et  à  une  époque 
où  ses  légions  avaient  encore  conservé  leur  antique  discipline. 

Nous  rappellerons  donc  sommairement  l'ordonnance  des  camps 
romains,  telle  que  nous  l'ont  transmise  les  auteurs  militaires. 

Anciennement,  c'est-à-dire  sous  la  République  et  dans  les  pre- 
mières années  de  l'Empire,  les  camps  étaient  carrés,  entourés  d'un 
rempart  en  terre  avec  un  fossé  en  avant,  d'une  largeur  et  dune 
profondeur  correspondant  à  l'épaisseur  et  à  la  hauteur  du  rem- 
part, ce  dernier  n'étant  composé  que  des  terres  retirées  du  fossé; 
dans  la  suite  on  leur  donna  la  forme  d'un  parallélogramme  rec- 
tangle, quelquefois  avec  des  angles  arrondis,  les  grands  côtés  étant 
aux  petits  dans  le  rapport  de  trois  à  un. 

D'ordinaire  les  camps  avaient  quatre  portes,  une  sur  chaque 
face;  quelquefois  un  ouvrage  avancé,  un  rempart  avec  un  fossé 
s'élevait  en  avant  des  portes.  Le  rempart  du  côté  opposé  à  l'en- 
nemi avait  souvent  une  hauteur  sensiblement  plus  considérable 
que  celle  des  autres  faces  du  camp. 

Coupe  de  rtmpart. 


Fig.  31 


jgg  REVUE  DE  L'ARCHITECTURE 

Les  lieux  que  les  généraux  romains  préferaient  pour  établir 
leurs  camps  étaient  principalement  les  larges  plateaux  à  proximité 
des  cours  d'eau,  ou  bien  les  plaines.  Pour  eux  une  hauteur  escar- 
pée était  une  mauvaise  position,  et  leur  pratique  constante  était 
de  faire  niveler  le  terrain  occupé  par  leurs  troupes. 

On  ne  peut  qu'inviter  les  correspondants  à  joindre  a  leurs  mé- 
nioires  sur  les  camps  antiques  un  plan  détaillé  non-seulement  des 
retranchements,  mais  de  leurs  environs,  avec  des  coupes  du  fosse, 
du  rempart,  et,  s'il  se  peut,  de  tout  le  terrain  qu'embrasse  1  en- 
ceinte fortifiée.  Il  est  essentiel  de  marquer  à  quelle  distance  du 
camp  se  trouve  un  ruisseau  ou  un  étang.  Enfin  l'on  recherchera 
si  dans  le  voisinage  il  existe  d'autres  retranchements,  et  si  des  de- 
couvertes  d'objets  antiques  ont  été  faites  aux  environs. 

§    V.    FOETlFICATIOiNS    PEKMAiVEXTES. 


ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 

TROISIÈME  PARTIE.  -  MONUMENTS  OVILS. 


156 


Nous  avons  donné,  colonne  1 1 2,  quelques  renseignements  sur  les 
fortifications  permanentes  des  Gaulois. 

II  y  a  lieu  de  croire  qu'après  la  conquête,  les  Romains,  voyant 
leur  domination  affermie,  ne  fortifièrent  point  les  villes  qu'ils  bâ- 
tirent ou  qu'ils  occupèrent.  Campées  sur  les  frontières  orientales, 
leurs  légions  arrêtaient  les  incursions  des  barbares,  et  un  très-petit 
nombre^de  troupes  suffisait  à  maintenir  l'ordre  dans  les  provinces 
ajoutées  à  l'empire.  Les  troupes  étaient  ou  réparties  dans  les  sta- 
tions militaires,  stativa  castra,  ou  bien  elles  occupaient  certaines 
forteresses  ou  citadelles  à  proximité  des  grandes  villes. 

Dans  la  décadence  de  l'empire,  les  invasions  des  barbares  firent 
sentir  le  besoin  de  fortifier  les  villes,  pour  les  mettre  à  l'abri  du 
pillage.  Les  travaux  entrepris  à  cette  époque  portent  l'indice  d'une 
grande  précipitation,  et  d'ordinaire  on  remarque  que  les  murailles 
sont  bâties  avec  les  débris  de  grands  édifices,  comme  si  on  les  avait 
sacrifiés  pour  en  tirer  des  matériaux  à  l'approche  du  danger.  Les 
progrès  de  la  religion  chrétienne  expliquent  encore  comment  un 
urand  nombre  de  temples  furent  démolis  alors,  et  leurs  matériaux 
employés  à  ces  fortifications. 

Presque  toutes  les  murailles  construites  à  cette  époque  se  font 
reconnaître  facilement  par  les  blocs  énormes  qui  en  forment  les 
assises  inférieures,  et  dont  un  grand  nombre  présentent  des  mou- 
lures, desbas-relifs  ou  des  inscriptions.  En  général,  le  haut  des 
murs  est  à  petit  appareil  interrompu  par  des  lits  de  briques  ou  de 
tuiles.  Quelquefois  certaines  parties  du  parement  extérieur  pré- 
sentent une  espèce  de  mosaïque  grossière,  par  la  combinaison  de 
pierres  noires  et  blanches  et  de  briques  rouges.  Il  faut  noter  l'é- 
paisseur du  ciment  qui  sépare  les  pierres,  en  général  beaucoup  plus 
considérable  que  dans  les  premiers  siècles  de  l'architecture  ro- 
niaine. 

Les  tours  sont  rondes  plus  souvent  que  carrées,  ayant  le  même 
diamètre  à  leur  base  qu'à  leur  sommet,  et  fort  rapprochées  les  unes 
des  autres.  En  œuvre,  leur  diamètre  est  rarement  de  plus  de  5,à 
6  mètres. 

Les  observations  qu'on  devra  faire  sur  ces  fortifications  sont 
les  mêmes  que  celles  qui  s'appliquent  à  tous  les  édifices  du  même 
temps. 

On  trouve  quelquefois,  sur  des  bas-reliefs  ou  des  mosaïques,  des 
renseignements  curieux  sur  l'art  de  la  guerre  chez  les  anciens,  des 
représentations  de  machines  de  guerre,  de  tours,  de  remparts,  de 
tentes,  etc.  En  décrivant  ces  monuments,  on  doit  toujours  y  join- 
dre des  dessins  ou  des  calques,  s'i  y  a  lieu. 


Les  édifices  publics  desRomains  prirent  un  grand  développement 
sur  le  sol  des  Gaules.  Ces  constructions  sont  aussi  imi)orUintesque 
toutes  celles  qui  jusqu'ici  ont  été  signalées  à  MM.  les  correspon- 
dants ;  leur  étude  peut  offrir  un  grand  nombre  de  faits  nouveaux. 

§    I.    POBTS. 

Si  la  ville  romaine  qu'on  étudiera  est  maritime,  on  tracera  sur 
le  plan  général  l'étendue  et  l'emplacement  des  ports  marchand  et 
militaire,. l'arsenal,  les  magasins,  le  phare,  les  jetées,  et  tous  les 
détails  de  marine  que  pourraient  produire  les  fouilles,  si  le  port  est 

à  sec. 

Au  profil  des  quais  on  joindra  un  détail  de  la  construction  desti- 
née au  soutènement  des  terres,  des  notes  sur  les  mortiers  hydrau- 
liques, l'exploitation  de  la  chaux,  etc. 


§  II.  Aqueducs. 

On  suivra  le  cours  des  aqueducs,  non-seulement  dans  les  vallées 
et  dans  les  plaines  qu'ils  traversent  sur  des  constructions  apparen- 
tes, mais  encore  dans  les  montagnes  percées,  sous  le  pavé  des 
villes,  et  partout  où  passèrent  les  canaux.  Dans  l'étude  générale  de 
ces  aqueducs,  depuis  la  source  jusqu'aux  citernes  ou  réservoirs  cy|i 
reçurent  les  eaux,  on  fera  un  travail  de  nivellement  pour  connaî- 
tre les  siphons  et  autres  moyens  en  usage  chez  les  Romains  ;  on 
pourra  compléter  ainsi  nos  connaissances  sur  la  science  hydrauli- 
que des  anciens. 

Le  cours  des  tuyaux  de  plomb  ou  de  terre  cuite  distribuant  les 
eaux  dans  la  ville  sera  relevé  lorsque  des  fouilles  les  mettront  à 
découvert.  Les  lieux  où  purent  être  situés  les  châteaux  d'eau,  fon- 
taines ou  lavoirs,  seront  donnés  par  le  nivellement  des  terrains  et 
le  cours  de  ces  tuvaux. 


Tuyaux  en  terre. 


Fig.  32. 


z: 


Fig.  33. 


J'uj/au  en  plomb. 


'WlÊmS) 


Fig.  31. 


Les  mastics  et  revêtements  intérieurs  des  conduits  et  des  piscines 
seront  l'objet  d'une  étude  spéciale,  ainsi  que  les  dépôts  tartreux 
des  eaux,  et  tout  ce  qui  peut  indiquer  la  durée  de  leur  passage  ou 
de  leur  séjour. 

Les  Orientaux  ont  conservé  l'usage  de  retenir  dans  les  vallées 
les  eaux  pluviales  ou  celles  qui  coulent  lentement  des  montagnes, 
par  des  digues  solides,  derrière  lesquelles  ils  établissent  des  fon- 
taines commodes  et  des  lavoirs  publics.  Ces  constructions  étaient 
connues  des  anciens;  la  France  en  possède  des  traces  auprès  d'Aix; 
il  est  important  de  les  signaler  et  de  les  étudier,  non-seulement 
comme  des  monuments  de  la  domination  romaine,  mais  encore 
dans  le  but  d'en  faire]  connaître  l'usage,  et  de  le  renouveler  dans 
des  contrées  dépourvues  d'eau  courante. 

§  III.  Thermes. 

L'examen  des  aqueducs  se  lie  à  celui  des  bains  publics  et  parti- 
culiers, désignés  chez  les  Romains  par  les  noms  de  thtrmœ  et  6a/- 


157 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


158 


nea.  Les  thermes,  si  multipliés  dans  l'antiquité,  et  dont  les  Gaules 
ont  conservé  de  nombreuses  ruines,  s'élevèrent  auprès  des  sources 
thermales,  dans  l'enceinte  des  grandes  villes  et  quelquefois  extra 
muros.  Lorsque  la  ligne  des  canaux  d'aqueduc  aura  dirigé  les  étu- 
des vers  les  ruines  que  la  tradition  ou  les  dispositions  elles-mêmes 
pourront  faire  considérer  comme  appartenant  à  un  édifice  consacré 
aux  bains,  un  plan  général  sera  levé  ;  on  y  indiquera  les  arrivées 
des  eaux  avant  leur  emploi,  et  les  aqueducs  de  dégagement  lors- 
que, par  l'usage  des  bains,  elles  étaient  mises  hors  de  service. 

Un  réservoir  étant  nécessaire  pour  réunir  ces  eaux  avant  leur 
arrivée  aux  piscines  ou  grands  bassins ,  de  même  qu'aux  bains 
particuliers,  on  en  cherchera  les  traces  en  amont  du  cours  d'eau. 
Toutes  les  directions  que  devaient  suivre  les  tuyaux  de  distribu- 
tion,  soit  vers  l'hypoeauste  ou  fourneau  destiné  à  chauffer  les 
bains,  soit  aux  baignoires  avant  et  après  l'usage,  seront  étudiées 
de  manière  à  bien  expliquer  les  fonctions  de  chaque  conduit. 

Si  des  souterrains  destinés  à  servir  de  magasins  aux  com- 
bustibles, de  salles  de  service,  d'hypocauste  pour  chauffer  les 
bains,  etc.,  se  rencontrent  dans  les  ruines  de  l'édifice,  ils  seront 
l'objet  de  plans  particuliers  ;  les  divers  niveaux  des  salles,  leurs 
usages  respectifs,  tels  que  bains  froids,  bains  tièdes,  étuves,  etc., 
seront  expliqués  au  plan;  leur  forme,  et  la  place  qu'elles  occupent 
dans  l'établissement,  guideront  pour  ces  désignations. 

Si  quelques  traces  de  mosaïques  ou  de  décorations  intérieures, 
telles  que  peintures,  stucs,  marbres  incrustés,  se  rencontrent  dans 
les  ruines,  elles  seront  recueillies  et  dessinées  avec  précision,  en 
couleurs  et  dans  le  caractère  de  l'antiquité. 

L'orientation  du  plan  est  nécessaire  comme  vérification  de  plu- 
sieurs préceptes  de  Vitruve  relatifs  aux  bains.  Des  coupes  sur 
chaque  salle  indiqueront  sa  forme  et  sa  construction. 

§  IV.  Pbétoikes. 

Les  capitales  de  province  doivent  seules  renfermer  les  restes  de 
palais  impériaux  ou  de  prétoires  ;  ces  grands  édifices,  qui  ne  reçu- 
rent les  souverains  que  pendant  leurs  voyages  dans  les  Gaules , 
furent  plus  spécialement  réservés  aux  chefs  qui  commandaient 
l'occupation. 

'  Cette  considération  doit  les  faire  envisager  sous  le  point  de  vue 
militaire  autant  que  sous  l'aspect  civil  :  l'emplacement  qu'ils  oc- 
cupèrent fut  donc  ordinairement  choisi  de  manière  à  dominer  le 
pays,  à  tenir  les  routes  stratégiques  sous  la  dépendance  du  préfet, 
à  relier  avec  les  camps  d'occupation  toute  la  ligne  militaire. 

Lorsque  ces  conditions  de  localités  seront  reconnues  dans  les 
ruines  d'un  grand  édifice  que  les  traditions  pourront  indiquer 
comme  un  prétoire,  le  relevé  du  plan  y  fera  distinguer  les  grandes 
salles  d'audience,  un  tribunal  et  de  vastes  habitations.  Près  de 
cet  édifice  les  nivellements  de  terrain  pourront  indiquer  la  surface 
d'une  place  publique  ou  forum,  convenable  à  la  réunion  d'une 
partie  de  l'armée  et  de  la  population.  On  devra,  par  un  examen 
scrupuleux  de  l'enceinte,  s'assurer  des  relations  qui  pouvaient 
être  établies  entre  le  palais  prétorien  et  les  murailles  de  la  ville  ; 
la  même  étude  s'appliquera  aux  portes  placées  sur  la  voie  mi- 
litaire. 

Les  plans,  coupes  et  façades  indiqueront  exactement  l'état  ac- 
tuel de  l'édifice;  les  détails  de  construction  qui  pourraient  offrir 
de  l'intérêt  seront  signalés  aux  dessins  et  dans  les  descriptions. 


S  V.  Abcs  de  tbiomphe. 

Les  trophées  militaires,  arcs  de  triomphe,  colonnes  historiques, 
multipliés  en  France  par  l'art  italique ,  sont  des  monuments  iso- 
lés dans  lesquels  la  richesse  de  l'architecture  fut  plus  ou  moins  pro- 
diguée selon  l'importance  des  faits  mémorables  dont  ils  conservè- 
rent le  souvenir. 

Les  arcs  de  triomphe,  placés,  selon  l'effet  qu'ils  devaient  pro- 
duire, avant  l'entrée  des  villes,  à  l'alignement  des  remparts,  dans 
l'intérieur  de  l'enceinte  ou  à  la  tète  des  ponts,  présentent  des  as- 
pects variés. 

Les  plus  simples,  ouverts  d'une  seule  arcade,  offrent  une  masse 
décorée  de  colonnes  saillantes,  au  milieu  desquelles  la  sculpture 
monumentale  a  figuré  les  statues  des  peuples  vaincus.  Les  orne- 
ments de  l'archivolte,  des  arcs  doubleaux  et  de  la  voûte  sont  imités 
des  productions  du  sol,  heureuse  idée  que  l'art  du  Moyen-Age  de- 
vait développer  plus  tard. 


Fig.  35. 

D'autres  arcs  sans  colonnes  engagées,  sont  décorés  de  pilastres, 
de  bas-reliefs  figurant  les  faits  remarquables  de  la  guerre.  Les  plus 
riches  monuments  de  ce  genre  sont  percés  de  trois  grandes  ar- 
cades égales  en  hauteur. 


Fig.  36. 

comme  on  en  voit  un  exemple  à  Reims,  ou  d'arcs  de  dimensions 
différentes  :  tel  est  celui  d'Orange. 


Fig.  37. 

Les  dessins  géométraux  de  ces  édifices,  tous  construits   en 
pierres  de  grandes  dimensions,  feront  connaître  la  disposition  de 


REVUE  DE  L'AIICHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


160 


159 

lappareil,  les  moyens  de  construction  employés  pour  obtenir  des 
voûtes  durables  bien  que  refouiilées  de  caissons  sculptés.  On  aura 
soin  d'exprimer  toutes  les  assises  de  pierres  par  leurs  joints  hori- 
zontaux et  verticaux  ;  on  ne  négligera  point  les  trous  régulière- 
ment placés  qui  pourraient  indiquer  des  inscriptions  ou  des  orne- 
ments en  métal. 

Tous  les  attributs  sculptés  seront  dessinés  dans  leur  caractère  : 
ils  sont  de  nature  à  expliquer  des  usages  inconnus  ;  on  y  voit  des 
enseignes  militaires,  des  vêtements  curieux,  des  armes,  des  ma- 
chines, etc.,  etc.  Les  têtes  d'esclaves  ou  de  vaincus  placées  dans 
les  impostes  et  les  frises  seront  aussi  l'objet  d'une  étude  spéciale  ; 
leurs  caractères  anthropologiques  peuvent  donner  les  moyens  d'as- 
signer l'âge  du  monument. 

Les  fruits,  les  feuillages  et  leurs  fleurs  employés  dans  l'orne- 
mentation seront  dessinés  avec  assez  d'exactitude  pour  qu'on 
puisse  y  trouver  des  notions  positives  sur  les  productions  anciennes 
du  pays. 

S  VL  Colonnes  histobiques. 

Les  colonnes  historiques,  indépendantes  des  fêtes  triomphales 
et  ayant  pour  but  de  perpétuer  le  souvenir  d'un  fait  isolé,  se  trou- 
vent dans  les  campagnes  aussi  souvent  que  dans  les  villes  ;  elles 
s'élèvent  au  lieu  même  où's'était  livrée  une  bataille,  où  avait  eu 
lieu  un  événement  digne  de  mémoire. 


Fig.  38. 


Les  bas-reliefs  placés  sur  les  piédestaux,  les  ornements  d'architec- 
ture qui  couronnent  les  embasements,  ou  qui  décorent  la  colonne 
elle-même,  pouvant  être  en  rapport  avec  le  motif  qui  fit  consacrer 
le  monument,  seront  dessinés  avec  assez  d'exactitude  pour  qu'au- 
cun détail  n'échappe  à  l'investigation. 

Si  la  colonne  est  tronquée  dans  sa  hauteur,  ce  qui  n'arrive  que 
trop  souvent  à  ces  constructions  offrant  peu  de  résistance,  on  cher- 
chera dans  tous  les  environs  les  fragments  qui  pourraient  s'y  rat- 
tacher et  la  compléter.  Le  style  de  la  sculpture  est  le  meilleur 
moyen  de  rapprochement  dont  on  puisse  faire  usage  en  pareil  cas. 
Les  mesures  peuvent  aider  encore  à  relier  à  la  masse  principale  les 
détails  dispersés. 

Les  piles  isolées  et  élevées  sur  une  base  étroite,  les  tours  mas- 
sives et  dans  lesquelles  on  ne  peut  reconnaître  un  but  d'utilité, 
pourront  être  classées  dans  ce  genre  de  monuments. 


Fig.  39. 

S  VII.  Jecx  publics. 

Les  jeux  publics  établis  dans  les  villes  romaines  nécessitèrent 
la  constniction  d'édifices  capables  de  réunir  la  foule  des  specta- 
teurs ;  à  l'emploi  du  bois  ou  substitua  bientôt  celui  de  matières 
plus  durables,  et,  dans  les  colonies  fondées  par  les  empereurs  avec 
tout  le  luxe  des  grandes  cités,  on  éleva  des  monuments  spéciaux 
aux  jeux  scéniques,  aux  combats  d'animaux,  aux  courses  de  tout 
genre;  les  grandes  villes  de  la  Gaule  offriront  donc  collectivement 
aux  études  de  MM.  les  correspondants  le  théâtre,  l'amphithéâtre  et 
le  cirque.  Lorsqu'une  ville  sera  considérée  comme  une  colonie  du 
second  ordre,  elle  pourra  se  voir  privée  d'un  de  ces  immenses 
édifices  ;  le  cirque,  fort  rare  dans  les  Gaules,  fut  supprimé  le  plus 
souvent,  et  les  courses  s'établirent  sans  frais  dans  la  plaine. 

L'amphithéâtre,  qui  offrait  dans  son  enceinte  plus  d'un  genre 
de  combats,  manque  rarement  aux  colonies  de  quelque  impor- 
tance, et  ses  jeux,  conservés  jusqu'aux  premiers  siècles  de  la  mo- 
narchie, nécessitèrent  alors  quelques  constructions  dont  on  re- 
trouve les  traces.  Le  théâtre,  enfin,  réunit  tous  les  divertissements 
donnés  aux  populations  lorsqu'il  fut  le  seul  édifice  consacré  aux 
fêtes;  MM.  les  correspondants  rechercheront  les  souvenirs  histori-  • 
ques  de  ces  jeux  publics,  et  devront,  selon  l'étendue  des  villes,  ren- 
dre compte  de  leur  importance;  les  camps  ou  grandes  stations  mi- 
litaires pourront  aussi  conserver  les  traces  de  théâtres. 

Chacun  de  ces  monuments  présente  des  formes  distinctes ,  des 
dispositions  spéciales,  qui  doivent  être  étudiées  dans  tous  leurs 
détails. 

§  VIII.  Théâtre. 

Le  théâtre  des  Romains  était  le  plus  répandu  dans  les  Gaules  ;  il 
différait  de  celui  des  Grecs  par  la  scène,  beaucoup  plus  étroite,  et 
par  l'absence  du  thymelée  ou  orchestre  avancé,  destiné  aux  récita- 
tifs et  aux  choeurs.  Il  se  composait  de  deux  parties  bien  distinctes. 
La  première,  tracée  sur  un  plan  demi-circulaire,  contenait  les 
bancs  des  spectateurs.  L'économie,  la  facilité  d'exécution  avalent 
fait  établir  dès  l'origine  cette  portion  de  cercle  dans  le  liane  d'une 
colline,  dont  la  pente  favorisait  la  pose  des  gradins. 

Une  galerie  à  colonnes  régnait  au  sommet,  et  formait  la  tribune 
des  femmes,  et  plus  souvent  celle  des  esclaves;  cette  galerie  était 
quelquefois  en  bois.  Dans  cette  division  importante  du  théâtre,  on 
étudiera  les  dégagements  favorables  à  l'arrivée  et  à  la  sortie  de  la 
foule,  les  vomitoires  ou  débouchés  pratiqués  dans  les  corridors 
pour  faciliter  le  classement  des  spectateurs  sur  les  bancs  et  dans 
les  précinctions,  grandes  divisions  des  places  par  castes  et  profes- 


ir.i 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


tes 


sions;  enfin,  sous  les  gradins,  on  suivra  les  traces  des  voûtes  ou 


Théâtre. 


fiij.  iO. 

cases  qui  recevaient  des  vases  eu  l)rouze  destinés  à  porter  la  voix 
des  acteurs  jusqu'aux  places  les  plus  éloignées. 

Lorsque  des  fouilles  s'opéreront  sur  le  sol  inférieur  de  cette  por- 
tion demi-circulaire  des  tiiéàtres,  MM.  les  correspondants  y  cher- 
cheront les  traces  de  pavés  mosaï(|ues,  indication  de  l'importance 
que  prenait  cette  place  réservée  aux  premiers  magistrats.  Des  au- 
tels, et  même  de  petits  édicules  consacrés  aux  dieux  qui  présidaient 
à  la  scène,  pourront  s'y  rencontrer  aussi  bien  que  dans  quelque  autre 
lieu  de  la  salle.  Sur  le  sol  inférieur,  appelé  de  nos  jours  le  parterre, 
s'amoncelèrent  les  débris  de  sculpture  et  de  décoration ,  qui ,  tom- 
bant de  toutes  parts,  s'y  réunirent  par  la  nature  même  et  la  forme  de 
l'édifice.  C'est  là  que  les  fouilles  mettront  au  jour  les  fragments 
les  plus  précieux. 

La  seconde  partie  du  théâtre  contenait  la  façade,  \e  iproscemum 
ou  avant-scène,  les  salles  des  mimes  et  toutes  les  dépendances  né- 
cessaires aux  spectacles;  elle  était  sur  un  plan  rectangulaire  et 
formait  le  diamètre  ou  la  corde  de  l'arc  destiné  à  la  foule. 

Le  proscenium,  décoré  de  marbres,  de  bas-reliefs,  de  colonnes, 
ornait  le  fond  de  la  scène  réservée  aux  représentations  ;  ïhyposcc- 
nium,  mur  peu  élevé,  qui  du  sol  inférieur  gagnait  le  niveau  de  la 
scène,  était  aussi  enrichi  de  sculptures.  Des  portes  situées  au  fond 
sur  le  proscenium,  et  dans  les  faces  latérales,  communiquaient  aux 
salles  des  acteurs,  et  donnaient  entrée  aux  chœurs,  aux  processions 
et  à  toute  la  pompe  des  spectacles.  Ces  détails  de  décoration  et 
d'usages  seront  consignés  dans  des  coupes  levées  géométralement 
sur  toutes  les  parties  importantes  ;  elles  compléteront  les  dessins 
généraux  de  l'édifice. 

On  recueillera  tous  les  détails  de  scellements  qui  pourraient  in- 
diquer les  attaches  de  bas-reliefs  et  de  marbres  incrustés  ;  les  trous 
placés  de  manière  à  expliquer  les  moyens  de  couverture  en  char- 
pente sur  l'avant-scène  seront  mesurés  et  placés  scrupuleusement 
sur  h  s  dessins. 

Les  escaliers  situés  près  des  façades  seront  figurés  aux  plans, 
avec  le  nombre  et  la  disposition  des  marches  nécessaires  pour  arri- 
ver au  sol  des  divers  planchers.  Sur  les  élévations  on  détaillera  les 
moulures  de  décoration,  les  appareils  des  cintres,  les  proportions 
des  étages  et  de  leurs  ouvertures.  Au  sommet  des  édifices  on  re- 
cueillera tout  ce  qui  pourait  expliquer  les  moyens  employés  pour 
tendre  le  velarium  sur  la  totalité  du  monument  :  des  consoles  sail- 
lantes en  marbre  ou  en  pierre  recevaient  un  système  de  charpente 
à  cet  eftiet.  On  cherchera  près  des  théâtres  les  traces  des  portiques 


couverts,  destinés  à  recevoir  la  foule,  dans  le  cas  où  la  pluie  sur- 
venait au  milieu  des  jeux.  Ces  portiques,  composés  de  plusieurs 
rangées  de  colonnes,  offrirent  des  dispositions  carrées,  ou  de 
formes  irrégulières,  selon  que  les  localités  permirent  de  les  étendre. 
Des  temples  furent  quelquefois  élevés  dans  leur  enceinte;  des  plan- 
tations en  faisaient  une  promenade  publique  semblable  à  nos  espla- 
nades. 

§  IX.  Ahphithéatbe. 

Double  théâtre  par  sa  forme  et  sa  superficie,  l'amphithéâtre, 
commun  en  France,  présentait  une  constructiou  immense  sur  un 
plan  elliptique.  Placés  près  de  l'enceinte  des  villes,  pour  faciliter 
l'introduction  des  animaux  qui  devaient  combattre,  ainsi  que  pour 
le  transport  des  victimes  au  delà  des  murailles,  ces  monuments 
offraient  à  l'extérieur  plusieurs  étages  d'arcades  continues,  sur 
une  longue  courbe  décorée  de  piliers  ou  de  colonnes. 

Am/ihilhéàtre. 


Fig.  41. 

L'architecture  des  amphithéâtres,  exécutée  dans  des  caractères 
pesants,  vigoureux  et  convenables  au  sujet,  doit  être  étudiée  spé- 
cialement par  MM.  les  correspondants,  et  mesurée  avec  assez  de 
soin  pour  conserver  à  tous  les  détails  leur  physionomie  particu- 
lière. 

Dans  i'attique,  au  sommet  de  la  façade,  une  suite  non  interrom- 
pue de  consoles  en  pierres  percées  verticalement  d'un  large  trou 
recevaient,  comme  autour  des  théâtres,  des  pièces  de  bois  dres- 
sées, et  de  l'extrémité  desquelles  partait  un  système  de  câbles  ten- 
dus vers  le  centre  de  l'édifice,  pour  supporter  un  velarium  destiné 
à  mettre  la  foule  des  spectateurs  à  l'abri. 

Consoles. 


Fig.  M. 

Les  moyens  employés  pour  placer  les  poutres  du  vtlarium,  pour 
soutenir  le  tirage  des  toiles  par  la  combinaison  des  bois;  le  nu- 
mérotage des  consoles  pour  l'ordre  établi  dans  le  service  ;  les  scel- 
lements de  fer  qui,  sur  les  bancs  ou  dans  quelque  autre  point  de 
l'édifice,  indiqueraient  des  auxiliaires  au  système  des  câbles,  com- 

T.    V.  Il 


REVUE  DE  LARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURI.ICS. 


IM 


pléteiont  les  études  relatives  à  cet  abri  léger.  Les  écoulements  des 
eaux  pluviales,  les  détails  de  construction,  les  attributs  sculptés, 
les  décorations  plaquées,  etc.,  etc.,  sont  des  sujets  dobservation 
qui  doivent  être  recueillis,  décrits  et  dessinés. 

Immédiatement  derrière  la  façade  se  tro^ivait  à  chaque  étage 
une  grande  galerie  de  circulation  qui  faisait  le  tour  de  l'édifice. 
Destinée  à  recevoir  la  foule  non-soulement  à  l'époque  des  jeux, 
mais  à  tout  moment  de  la  journée,  cette  galerie  contenait  des  bou- 
tiques, et  faisait  de  l'édifice  un  bazar,  qui  réunissnit  les  habitants 
et  les  étrangers.  De  plain-pied  avec  ces  galeries  ou  par  des  esca- 
liers multipliés,  on  se  rendait  aux  loges  des  spectateurs  par  les 
vomitoires  disposés  pour  donner  entrée  aux  diverses  préciiictions 
de  gradins.  La  foule  réunie  dans  ces  édifices  immenses  trouvait 
place  sans  désordre  par  la  belle  disposition  des  issues;  toutes  les 
combinaisons  de  dégagements  fournies  par  le  plan,  la  facilité  de 
classement  dans  les  précinctions,  la  division  des  loges,  les  inscrip- 
tions de  corporations  gravées  sur  les  bancs,  la  place  assignée  à  cha- 
cun, depuis  la  tribune  de  l'empereur  et  des  premiers  magistrats 
de  la  colonie  jusqu'à  la  place  étroite  du  dernier  des  spectateurs, 
présenteront  des  détails  curieux  à  examiner. 

Les  inscriptions  indiquant  les  restaurations  faites  dans  l'édifice, 
et  à  défaut  d'inscription  les  différences  notables  que  présenteront 
les  matériaux  dans  leur  nature  même,  ou  dans  la  manière  dont  ils 
furent  employés,  serviront  de  guide  pour. étudier  les  révolutions 
qui  s'opérèrent  à  diverses  époques  ;  on  y  reconnaîtra  la  continua- 
tion des  usages  qui  maintinrent  les  jeux  de  l'amphithéfUre  jus- 
qu'aux premiers  temps  de  la  monarchie. 

Arrivé  enfin  au  sol  de  l'arène,  on  étudiera  sa  forme  par  un  re- 
levé des  courbes  ;  dans  le  podium  ou  clôture  formée  de  pienes 
dressées,  qui  séparait  les  spectateurs  du  péril  des  jeux,  on  trou- 
vera les  quatre  portes  donnant  entrée  aux  animaux  et  aux  combat- 
tants. On  examinera  scrupuleusement  les  moyens  employés  pour 
clore  ces  portes,  ainsi  que  toute  autre  partie  de  l'édifice  ;  les  scelle- 
ments fixés  au  podium  et  indiquant  des  barrières  de  métal,  qui 
protégeaient  plus  complètement  les  spectateurs  contre  les  dangers 
de  l'arène;  enfin  on  pourra  trouver  les  traces  d'un  euripeou  canal 
placé  dans  quelques  amphithéâtres  à  la  base  du  podium,  pour  éloi- 
gner encore  les  animaux. 

Si  des  fouilles  pratiquées  dans  l'étendue  de  l'arène  mettent  au 
jour  des  substructions  étroites,  on  y  reconnaîtra  des  canaux  con- 
venables à  l'écoulement  des  eaux  ;  plus  étendus,  ces  conduits  pour- 
raient former  un  système  d'aqueducs  liés  aux  citernes  et  châteaux 
d'eau  de  la  ville  :  on  y  verrait  alors  un  moyen  d'amener  l'eau  dans 
l'arène  pour  des  jeux  nautiques.  Un  troisième  motif  enfin  peut  être 
attribué  aux  constructions  trouvées  sous  le  sol  central  de  l'amphi- 
théâtre, c'est,  à  savoir,  une  suite  de  corridors  destinés  aux  machi- 
nistes, qui  faisaient  paraître  des  décorations. 

En  France ,  des  amphithéâtres  creusés  dans  le  roc  sont  tracés 
sur  des  plans  en  polygones  plus  ou  moins  réguliers. 

§    X.    ClIiQUK. 

Beaucoup  plus  allongé  que  l'amphithéâtre,  le  cirque  fut  destiné 
■  aux  courses  de  toute  espèce  et  particulièrement  à  celles  des  chars  : 
deux  lignes  parallèles  de  gradins  ou  de  talus  en  terre,  peu  élevés, 
se  développaient  sur  une  grande  étendue;  reliés  d'un  côté  par  une 
portion  de  cercle,  les  bancs  y  prenaient  la  forme  d'un  théâtre  ;  au 
fond  était  une  tribune,  plus  souvent  une  entrée  dans  la  carrière. 


A  l'extrémité  opposée,  les  lignes  parallèles  étaient  réunies  par  une 
construction  oblique,  dans  laquelle  des  remises  de  chars  ou  earcere* 
fermées  de  grilles  servaient  de  |)ointde  deparl  aux  courses. 

Cirqu*. 


! 


i  I 


r- 

Fin.  ^<' 


Au  centre  de  la  carrière  cl  dans  le  sens  de  sa  longueur,  un  mur 
peu  élevé ,  formant  l'arête  ou  épine  de  l'éilifice  ,  elait  construit, 
non  parallèlement  aux  bancs  des  spectateurs,  mais  dans  une  incli- 
naison telle  qu'au  moment  du  départ  tous  les  chars  avaient  le  même 
avantage  de  distance. 

A  chaque  extrémité  de  l'épine,  trois  iMimes  en  marbre,  isolées 
entre  elles  et  enrichies  de  sculptures,  gtiidaient  les  courses  et  de- 
vaient être  doublées  un  certain  nombre  de  fois;  des  obélisques, 
des  statues,  des  machines  ingénieuses,  \w\\v  donner  le  signal  du 
départ,  et  jusqu'à  des  bassins  ou  Ion  abreuvait  les  chevaux,  ou 
Ion  puisait  pour  rafraîchir  les  roues  des  coureurs,  étalent  ranues 
sur  cette  épine. 

La  France  a  conservé  des  ruines  de  ces  édifices  de  luxe  et  de 
plaisir,  et  plus  d'un  hippodrome  dont  les  constructions  auraient 
disparu  pourra  se  reconnaître  aux  formes  des  terrains,  aux  pentes 
alignées  des  collines  voisines  des  villes,  à  des  terrasses  couron- 
nant des  arènes  naturelles.  C'est  alors  qu'on  cherchera  les  rap- 
ports que  présentera  la  longueur  avec  le  stade  ou  les  mesures  ro- 
maines, qu'on  déterminera  sur  les  plans  l'inclinaison  des  taretres 
et  de  l'épine,  qu'on  calculera  le  nombre  de  spectateurs  que  conte- 
naient les  gradins.  Dans  les  villes,  ces  études,  plus  difficiles  en 
raison  des  percements  de  rues  et  des  maisons  placées  sur  le  sol  des 
cirques,  nécessiteront  dans  les  caves  et  les  substructions  des  édi- 
fices particuliers  des  recherches  minutieuses  de  tout  ce  (|ui  peut  en 
faire  partie.  La  grande  étendue  de  ces  monuments  ne  permit  sou- 
vent d'établir  que  des  bancs  en  bois  :  dans  ce  cas,  on  retrouvera 
l'enceinte  générale,  qui  fut  aussi  solidement  construite  que  si  elle 
avait  été  destinée  à  supporter  des  gradins  en  pierre. 

§  XL  BASiLigrcs. 

La  présence  d'une  basilique  était  une  condition  indispensable 
aux  villes  qui  devaient  être  élevées  au  rang  de  municipe  ;  cet 
édifice,  placé  sur  le  forum  et  consacre  aux  transactions  de  négoce 
ainsi  qu'au  tribunal,  était  la  bourse  de  nos  villes  modernes. 

La  distribution  intérieure,  uniquement  formée  j>ar  des  colon- 
nes isolées,  l'absence  des  voûtes  en  pierres  remplacées  par  des  pla- 
fonds en  bois,  le  peu  d'épaisseur  qu'une  construction  aussi  légère 
avait  fait  donner  ordinairement  aux  murs  extérieurs,  telles  furent 
les  causes  de  la  destruction  presque  générale  de  ces  monuments 

Un  autre  motif  de  destruction  non  moins  puissant  fut  l'emploi 


166 


REVUK  DE  L'ARCMlTKGTLRK  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


16G 


((lie  les  pi'emieis  chrétiens  firent  des  riches  colonnes  de  ces  basili- 
ques d'usage  civil,  pour  en  décorer  leurs  basiliques  religieuses  éta- 
blies sur  des  dispositions  analogues.  La  grande  similitude  qui  régna 
entre  ces  deux  genres  d'édifices  doit  faire  éviter  à  MM.  les  cor- 
respondants de  confondre  les  ruines  d'une  basilique  romaine  avec 
celles  d'une  église  primitive;  l'étude  des  détails  de  construction, 
des  ciments,  des  fragments  d'architecture,  pourra  déterminer  l'u- 
sage primitif  du  monument.  L'orientation  du  plan  peut  encore 
servir  de  guide  dans  les  recherches. 

basilique. 


'accnnn.n; 

jJDDGDaj 
IC'CCDDDD; 

□DDOGCC 

ccaconcX 
aD:::iDcan: 

acidnnnri^ 


Fig    44. 


I 


Le  plan  allongé  des  basiliques  offrira  une  vaste  circulation  sé- 
parée de  la  nef  centrale  par  deux  ou  quatre  rangs  de  colonnes. 
Au  fond,  une  disposition  demi-circulaire  indiquera  le  lieu  qu'oc- 
cupait le  tribunal  ;  les  angles  du  plan  pourront  donner  'es  indica- 
tions d'escaliers  desservant  l'étage  supérieur,  composé  d'une  ga- 
lerie ouverte*  sur  la  nef.  Lorsqu'une  fouille  sera  suffisamment 
étendue  pour  permettre  d'attribuer  à  un  édifice  de  ce  genre  les 
constructions  mises  au  jour,  après  le  relevé  du  plan  et  les  autres 
travaux  déjà  indiqués,  on  cherchera  dans  les  fragments  des  détails 
suffisants  pour  compléter  les  deux  ordres  d'architecture  inté- 
rieure. 

Les  gradins  du  tribunal,  l'exhaussement  de  son  sol  au-dessus  de 
celui  du  monument,  les  traces  de  clôture  et  d'appui  qui  pourraient 
indiquer  une  distribution  d'ordre  et  de  police  intérieure,  offriront 
des  observations  neuves;  l'orientation  du  plan  et  la  facilité  de  ses 
abords  vers  la  place  publique  et  les  rues  adjacentes  compléteront 
les  dessins  géométraux. 

^  XII.  Co.NSTiu  t■rl0^s  pauïicijlièhes. 

La  distribution  intérieure  des  villes  antiques  à  l'égard  des  rues, 
des  carrefours,  des  places  publiques,  était  établie  sur  un  plan 
régulier  lorsque  le  terrain  le  permettait.  Généralement  les  percées 
principales  n'ont  point  changé  dans  les  cités  modernes,  malgré 
les  accumulations  de  murailles  de  tous  les  âges  et  les  pavements 
successifs.  On  doit  donc  s'attendre  à  rencontrer,  dans  les  fouilles 
qui  couperont  les  rues  principales,  des  traces  de  voies  romaines 
plus  ou  moins  rapprochées  du  sol  actuel  ;  on  étudiera  la  fabrication 
de  ces  voies  et  leur  pavement.  Les  substructions  des  maisons  ré- 
cemment établies  sur  les  rues  antiques  sont  souvent  maçonnées 
avec  des  pierres  enlevées  à  ces  chaussées,  qui,  pavées  eu  roche 
dure,  en  lave  ou  en  granit,  offraient  un  opus  incerlutn  formé  de 
masses  épaisses  et  faciles  à  reconnaître. 

Les  insulœ  ou  iles  de  maisons,  comprises  entre  les  rues,  étaient 
comme  de  nos  jours  divisées  en  lots-plus  profonds  que  larges.  L'ha- 
bitation romaine,  plus  commode  à  tous  égards  que  celle  des  Gau- 


lois, s'y  établissait  avec  ses  distributions  intérieures,  et  soumise 
aux  lois  de  mitoyenneté. 

La  façade,  ouverte  d'une  ou  plusieurs  boutiques,  avait  de  plus 
un  passage  conduisant  à  un  espace  plus  large  nommé  atrium,  et 
dont  le  centre  était  occupé  par  un  bassin  destiné  à  recevoir  les 
eaux  pluviales;  les  pièces  disposées  autour  de  l'atrium  étaient 
celles  qu'habitaient  le  maitre  et  sa  famille. 

Maiiont. 


rn I 


I- 


l- 


Fig.  45. 

Si  le  propriétaire  était  un  riche  citoyen,  une  seconde  cour  ou 
péristyle  entouré  de  chambres  plus  vastes,  d'un  triclinium  ou  salle 
a  manger,  de  pièces  de  luxe,  etc.,  formait  son  habitation  réservée. 
Les  villes  antiques  ont  trop  souffert  en  France  pour  qu'on  puisse 
trouver  des  habitations  entières;  mais  plus  d'une  mosaïque  de  Iri- 
clinium,  plus  d'un  pavement  de  boutique  ou  de  quelque  pièce  de 
luxe  ont  arrêté  la  pioché  des  terrassiers.  Dans  le  cas  où  MM.  les 
correspondants  auraient  connaissance  d'une  découverte  de  ce 
genre,  non-seulement  ils  dessineront  la  mosaïque,  et  s'opposeront 
fi  ce  que  sous  prétexte  de  spéculation  elle  soit  détruite,  mais 
encore  ils  devront  la  faire  couvrir  de  manière  à  la  préserver  de  la 
ruine. 

Établies  dans  un  climat  tout  autre  que  celui  de  l'Italie,  les  mai- 
sons de  la  Gaule  offriront  une  circonstance  que  MM.  les  corres- 
pondants ne  doivent  point  négliger.  Des  hypocaustes  ou  calorifères 
souterrains  répandaient  la  chaleur  par  des  tuyaux  de  terre  cuite 
placés  sur  les  parois  des  appartements;  ils  offriront  une  étude  cu- 
rieuse non-seulement  sous  le  point  de  vue  archéologique,  mais 
encore  sous  celui  des  améliorations  à  faire  à  nos  maisons  moder- 
nes (l).  On  y  pourra  faire  des  observations  intéressantes  sur  la  na- 
ture des  combustibles. 

Ilypocauste. 


=5^! 'r,i»'»r*=*.'-<»«. 


Fig.  46. 

Dans  le  lieu  le  plus  retiré  de  l'habitation,  les  divinités  laraires 
étaient  déposées  dans  une  petite  chapelle  plus  ou  moins  décorée  : 


(1)  Ces  calorifères  sont  de  petites  dimensions;  on  ne  doil  pa*  les  confondre 
arec  ceux  des  bains. 


167 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


168 


c'est  à  ces  monuments  qu'on  pourra  trouver  des  peintures  curieu- 
ses; elles  seront  copiées  avec  les  couleurs  antiques,  ainsi  que  toutes 
celles  qui  auraient  fait  partie  du  décor  intérieur  de  la  maison.  Les 
enduits  qui  portent  des  peintures  doivent  être  étudiés  dans  leur 
composition. 

Le  balneum  ou  bain  privé  se  présente  rarement  dans  les  maisons 
romaines;  la  Gaule  en  a  donné  quelques  exemples  :  il  serait  im- 
portant de  recueillir  ceux  qui  se  présenteront  à  l'avenir. 

Des  caves  ou  celliers  se  rencontrent  dans  les  fouilles  qui  s'opè- 
rent sur  les  villes  antiques  pour  établir  des  constructions  moder- 
nes, et  quelquefois  dans  des  lieux  isolés.  Les  amphores  destinées 
à  contenir  les  liquides  étaient  plantés  dans  le  sol  de  ces  caves,  et 
rangées  sur  une  ou  plusieurs  lignes. 

Les  fours  à  cuire  le  pain,  les  fourneaux  à  cuisine. 

Meule  à  bras. 


F.g.  M. 

les  meules  à  bras,  les  moulins,  seront  recueillis  comme  des  dé- 
tails de  nature  à  faire  connaître  une  partie  de  l'industrie  gallo-ro- 
maiue. 

MouHn. 


Fiij.  48, 

Des  puits,  des  bassins  à  laver  ou  destinés  à  recevoir  les  eaux 
pluviales  dans  Vatrium  et  dans  les  péristyles,  des  piscines  d'une 
plus  grande  étendue  et  situées  dans  les  jardins,  tels  sont  les  dé- 
tails qui  pourront  se  présenter  dans  les  maisons  particulières  des 
villes. 


Puits. 


Fig.  49. 

On  poun-a  reconnaître  au  sol  qui  couvre  aujourd'hui  les  con- 
structions, si  elles  étaient  entièrement  établies  en  pierre;  les  mai- 
sons de  bois  étaient  communes  dans  le  Nord.  La  campagne  peut 
offrir  aussi  des  notions  sur  les  habitations  de  riches  citoyens  qui 


pendant  l'été  s'éloignaient  des  affaires.  Le  Laurentin  ou  villa  de 
Pline,  les  nombreuses  maisons  de  Cicéron,  sont  assez,  connus  par 
les  descriptions  pour  qu'on  y  retrouve  tout  le  luxe  des  habitations 
de  la  ville.  Les  moyens  d'étude  indiqués  précédemment  sont  donc 
applicables  aux  constructions  particulières  qui  se  trouveront  rx/ra 
muro». 

Les  travaux  agricoles  groupèrent  des  fermes  ou  habitations  ru- 
rales pour  l'exploitation  des  terres;  la  distribution  de  ces  bâti- 
ments, les  destinations  diverses  des  corps  de  logis,  tels  que  gran- 
ges, étables,  etc.,  devront  être  indiquées  par  les  plans;  et  de  la 
nature  de  ces  corps  de  fermes  pourront  quelquefois  se  tirer  des  in- 
ductions sur  le  genre  de  culture  autrefois  en  usage  dans  telle  ou 
telle  province. 

M.  Féret  a  fait  dans  la  Normandie  des  observations  de  ce  genre 
qui  ont  produit  d'heureux  résultats. 

Aux  instructions  qui  précèdent,  et  qui  s'appliquent  aux  monu- 
ments au-dessous  du  sol  comme  à  ceux  que  des  fouilles  anciennes 
ou  récentes  mirent  au  jour,  on  doit  joindre  quelques  observations 
relatives  aux  découvertes  à  faire,  et  à  la  direction  à  donner  aux  tra- 
vaux de  terrasse. 

L'inspection  souvent  répétée  d'un  terrain  qui  présentera  des 
chances  de  succès  aux  explorations,  y  fera  reconnaître  certaines 
ondulations  prolongées,  d'une  couleur  différente  de  celle  de  Vku- 
mus  des  environs,  et  empruntée  des  ciments,  des  débris  de  terre 
culte  et  de  pierre  calcaire. 

Si  le  sol  est  livré  à  la  culture,  la  germination  plus  lente  sur  les 
murs  cachés  près  de  sa  surface  fera  voir  à  l'observateur  des  nuan- 
ces dilTérentes  dans  la  verdui-e;  par  le  plus  ou  nioins  de  force 
dans  la  végétation,  on  pourra  suivre  les  constructions  antiques 
dont  souvent  le  plan  entier  est  dessiné  par  des  lignes  de  plantes 
étiolées. 

Api-ès  les  pluies  abondantes,  non-seulement  le  sol  emprunte  ses 
nuances  des  débris  qu'il  renferme,  mais  encore  des  éboulements' 
s'opèrent,  et  peuvent  mettre  au  jour  des  constructions,  des  pote- 
ries, des  pierres  gravées  et  des  médailles. 

Dans  les  contrées  maritimes  ou  sur  les  bords  des  fleuves,  les 
orages  entraînent  des  portions  de  terrain  considérables  ;  les  obser- 
vations de  MM.  les  correspondants  doivent  se  diriger  vers  les  rives 
ainsi  entamées. 

Il  n'est  pas  moins  ordinaire  dans  les  montagnes  de  voir  les  tor- 
rents causés  par  les  fontes  de  neiges  déchausser  les  constructions 
antiques,  entraîner  dans  les  ravins  des  fragments  prwieux,  des 
médailles  et  autres  objets. 

Jamais,  en  aucune  circonstance,  un  terrain  ne  doit  être  rétabli 
à  l'état  qui  précédait  l'exploration,  sans  que  des  dessins  et  des 
procès-verbaux  ne  constatent  les  découvertes,  et  ne  les  fassent  con- 
naître dans  tous  leurs  détails  de  nivellement,  de  dispositions  gé- 
nérales et  particulières,  et  dans  tout  ce  qui  est  relatif  à  la  construc- 
tion et  à  l'emploi  des  matériaux. 

On  doit  veiller  à  ce  que  les  ouvriers,  entamant  la  terre  avec  pru- 
dence, et  ordinairement  à  la  l)éche,  ne  brisent  point  les  mosaïques 
ou  les  sculptures ,  ne  détruisent  pas  les  lignes  de  distribution, 
qui,  dans  les  maisons,  présentent  souvent  l'épaisseur  d'une  seule 
brique. 

(  La  suite  au  prochain  numéro.  ) 


169 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


170 


DU  CHAUFFAGE  Eï  DE  LA  VENTILATION. 


CHAUFFAGE    A    LAIK    CHAUD. 

Le  chauffage  à  l'aie  chaud  est,  dans  hien  des  eircoustaiices,  d'un 
emploi  plus  économique  et  plus  commode  que  celui  de  tout  autre 
système  ;  tels  sont  les  cas  où  il  s'agit  d'échauffer  promptement  des 
pièces,  des  édifices,  dont  il  n'est  fait  usage  que  pendant  un  temps 
limité,  comme  les  tribunaux,  les  salles  de  spectacles,  les  salles  des 
cours,  etc.,  etc. 

Toutefois,  de  graves  défauts,  qui  semblaient  inhérents  au  chauf- 
fage par  l'air  chaud,  en  avaient  restreint  l'usage.  L'air  chaud  ob- 
tenu par  des  surfaces  métalliques  chauffées  jusqu'au  rouge,  était 
sec,  malsain  et  d'une  odeur  désagréable  ;  sou  passage  à  travers 
l'appareil  le  viciait  au  point  de  lui  enlever  les  qualités  propres 
à  la  vie  de  l'homme  et  de  lui  communiquer  des  propriétés  nuisi- 
bles. Il  s'agissait  donc  de  construire  un  calorifère  dont  les  sur- 
faces destinées  à  chauffer  l'air  ne  pussent  point  rougir,  et  qui  pût 
donner  à  l'air  une  quantité  de  vapeur  en  rapport  avec  sa  tem- 
pérature. 

Voici  la  description  de  l'appareil  au  moyen  duquel  nous  avons 
satisfait  à  cette  double  exigeance. 

DESCRIPTIOiN    d'un    CALOBIFÎîRE    VENTILATEUR    EN    FONTE. 

La  Fig.  l  de  la  Planche  0  est  la  vue  extérieure  de  l'appareil  du 
côté  du  foyer. 

La  Fig.  2  est  une  coupe  verticale  suivant  la  ligne  a  b,  de  la 
Fig.  3. 

La  Fig.  3  est  une  coupe  horizontale  faite  suivant  la  ligne  brisée 
e  fg  h  i  II  de  la  Fig.  2. 

La  Fig.  4  est  une  coupe  verticale  faite  suivant  la  ligne  c  d  de 
la  Fig.  3. 

Mode  de  combustion.  —  Le  foyer  se  compose  d'une  cloche  en 
fonte  A,  fondue  en  deux  ou  trois  pièces  selon  les  dimensions  de 
l'appareil.  La  hauteur  de  cette  cloche  est  assez  grande  pour  que  la 
flamme,  en  s'élevant  d'abord  verticalement,  donne  à  l'air  brûlé 
qui  descend  par  les  tuyau x\B,  C,  l),  H,  F,  et  li',  C,  D\  E',  F,  un 
tirage  sulfisant  pour  produire  l'appel  d'air  nécessaire  <t  une  bonne 
combustion. 


G  est  la  grille  en  fer  sur  laquelle  se  place  le  combustible  et  qui 
sépare  le  cendrier  du  foyer. 

//  est  la  porte  du  cendrier,  ordinairement  ouverte  quand  la  com- 
bustion doit  être  active;  elle  est  munie  d'une  porte  à  coulisse,  la 
seule  qu'on  ouvre  quand  on  veut  diminuer  la  consommation  du 
combustible. 

/  est  une  première  porte  de  foyer  ;  elle  est  destinée  au  nettoyage 
de  la  grille  et  sert  à  l'introduction  des  copeaux  et  du  papier  qu'on 
enflammé  pour  allumer  le  calorifère. 

La  deuxième  porte  K  est  destinée  au  chargement  du  foyer  ;  c'est 
par  cette  ouverture  qu'on  introduit  la  masse  du  combustible,  qui, 
en  se  consumant  lentement,  doit  dégager  la  chaleur  nécessaire  à  un 
chauffage  d'air  pendant  10  à  12  heures. 

Dans  les  calorifères  de  différentes  grandeurs,  la  distance  entre 
cette  porte  et  la  grille,  ainsi  que  le  diamètre  du  foyer,  sont- cal- 
culés pour  produire  des  consommations  déterminées  de  com- 
bustible. 

La  partie  inférieure  de  la  cloche  est  garnie,  jusqu'à  une  hauteur 
qui  dépasse  un  peu  la  porte  de  chargement,  en  briques  très-ré- 
fractaires,  formant  le  foyer  proprement  dit,  qui  s'opposent  à  ce  que 
le  contact  et  le  rayonnement  du  combustible  en  ignition  fassent 
rougir  les  surfaces  métalliques. 

Circulation  de  la  fumée.  —  Arrivés  à  la  partie  supérieure  de  la 
cloche  .\ ,  les  produits  de  la  combustion  se  divisent  et  parcourent 
en  descendant  les  deux  séries  de  tuyaux  It,  C,  D,  E,  F,  et  B',  C, 
D',  E',  F,  placés  de  chaque  côté  du  foyer,  et  dans  lesquels  la 
répartition  de  l'air  brûlé  et  sa  vitesse  sont  parfaitement  égales  (i  . 

L'air  brûlé  se  réunit  à  la  partie  inférieure  du  tambour  L, 
[Fig.  3  et  4),  dans  lequel  il  s'élève  pour  gagner  le  tuyau  à  fumée 
qui  le  surmonte. 

N  [Fig.  3  et  4)  est  la  porte  du  foyer  d'appel  i>our  produire  de 
suite  un  bon  tirage  quand  on  allume  le  calorifère  pour  la  première 
fois,  ou  lorsqu'il  s'est  entièrement  refroidi. 

C'est  aussi  par  cette  porte  qu'on  opère  le  ramonage  de  la  che- 
minée, sans  être  obligé  de  démonter  le  tuyau  à  fumée. 

Le  nettoyage  des  tuyaux  de  circulation  s'effectue  avec  la  même 
facilité  :  il  suffit  d'ôter  les  tampons  t  t  t...  qui  ferment  les  extré- 
mités des  tuyaux  pour  que  l'on  puisse  enlever  la  suie. 

Echauffement  de  l'air.  —  L'air  arrive  de  l'extérieur  par  deux 
conduits  M,  M'  (Fig.  2),  qui  le  distribuent  sous  toute  la  longueur 
des  tuyaux  F,  F';  cet  air,  en  s'élevant,  rencontre  des  surfaces  qui 
se  trouvent  à  des  températures  de  plus  en  plus  élevées,  et  s'échauffe 
progressivement. 

Les  conduits  M  M'  communiquent  également  avec  les  espaces 
circulaires  compris  entre  la  cloche  du  foyer  A ,  le  tambour  à  fumée 
et  les  enveloppes  concentriques  eu  maçonnerie,  qui  augmentent 
les  surfaces  de  chauffe. 

Tout  l'air  chaud  se  réunit  à  la  partie  supérieure  du  calorifère 
dans  un  réservoir  de  chaleur  0,d'où  il  s'écoule  par  les  tuyaux  P  P', 
P"  [Fig.  2  et  4),  pour  se  rendre  dans  les  lieux  où  il  doit  être  utilisé. 

Dans  quelques  appareils,  pour  diminuer  les  dimensions  du  calo- 
rifère, on  supprime  la  construction  en  briques  qui  entoure  les  cy- 
lindres A  L.  Cette  disposition  est  représentée  Fig.  4. 

En  conservant  au  cylindre  du  foyer  cette  chemise  en  briques,  on 


(1)  Ce  fiiit,  constalc  dopuis  longtemps,  a  il6  vérifié  par  M.  Péclet,  qui  a 
donné  de  ce  plicnoniènc  une  explication  aussi  simple  que  claire  dans  sonTrailt 
de  hi  cha'eur.  (Vol.  II.  §  ISS») 


171 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


172 


se  réserve  la  possibilité  d'avoir  à  la  partie  supérieure  une  chambre 
à  air  chaud,  qui  se  trouve  à  une  température  plus  élevée,  et  qu'on 
peut  employer  au  chauffage  des  pièces  les  plus  éloignées. 

Pour  conserver  à  l'air  chauffé  l'état  hygrométrique  de  l'air  ex- 
térieur, nous  avons  adapté  au  calorifère  l'appareil  suivant  : 

Entre  les  cloches  A  L  est  placé  horizontalement  un  tuyau  en  cui- 
vre Q,  représenté  Fig.  5.  Dans  toute  sa  longueur,  la  partie  supé- 
rieure de  ce  tuyau  est  percée  de  petits  tmus.  Une  de  ses  extrémi- 
tés sort  du  calorifère  et  reçoit  dans  une  sorte  de  godet  f  une 
bouteille  renversée  g  remplie  d'eau.  L'eau  se  met  de  niveau  dans 
toute  la  longueur  du  tuyau,  et  produit  une  quantité  de  vapeur 
toujours  en  rapport  avec  la  température  de  l'air  qui  traverse  le  ca- 
lorifère. Cette  vapeur  se  mêle  à  l'air  chaud  et  arrive  avec  lui  aux 
bouches  de  chaleur.  Il  suffit  de  remplir  le  matin  la  bouteille  d'eau 
pour  toute  la  journée. 

Les  conduits  M  M',  qui  amènent  l'air  froid  au  calorifère,  com- 
muniquent avec  un  canal  en  briques ,  dont  l'ouverture ,  située 
au  dehors,  est  protégée  par  une  grille  en  fonte.  Cette  prise  d'air 
extérieure  a  l'avantage  de  ne  fournir  à  l'appareil  que  de  l'air  pur 
et  jamais  d'air  mêlé  de  fumée  ou  de  cendres,  ce  qui  pourrait  ré- 
sulter d'une  négligence  ou  d'une  maladresse  du  chauffeur,  si  la 
prise  d'air  était  ouverte  dans  la  cave  où  se  trouve  le  calorifère. 

A  l'avantage  de  ne  point  rougir  et  de  fournir  toujours  de  l'air  pur 
convenablement  chargé  de  vapeurs,  cet  appareil  joint  encore,  sous 
le  rapport  de  sa  construction,  celui  de  la  facilité  du  service  et  du 
ramonage.  Le  foyer,  placé  à  peu  de  distance  de  la  façade  du  calo- 
rifère, est  à  portée  du  chauffeur  L'appareil  est  construit  entière- 
ment en  fonte  et  présente  une  grande  solidité  ;  les  joints,  montés  a 
brides  et  à  boulons,  obvient  à  tous  les  inconvénients  produits  par 
1.1  dilatation  incessante  des  coffres  et  des  appareils  en  tôle,  dont  le 
clouage  laisse  toujours  échapper  la  fumée  dans  les  réservoirs  à  air 
chaud.  La  disposition  des  surfaces  de  chauffe  de  chaque  côté  du 
foyer  permet  de  donner  à  ces  calorifères  peu  de  hauteur  et  de  les 
placer  dans  des  caves  peu  élevées. 

La  marche  de  l'air  chaud  s'y  effectue  en  sens  inverse  de  celle  de 
la  fumée  :  cette  disposition  est  la  plus  avantageuse  pour  réchauf- 
fement de  l'air;  elle  permet  de  diminuer  les  surfaces  de  chauffe  et 
d'utiliser  le  combustible  aussi  complètement  que  possible. 

Le  foyer  est  disposé  de  manière  à  brûler  du  coke  et  toutes  les 
houilles  sèches,  mais  l'anthracite  offre  une  supériorité  incontes- 
table sur  les  autres  houilles  ;  avec  ce  combustible  on  peut  ne  char- 
ger le  foyer  qu'une  seule  fois  le  matin  pour  toute  la  journée.  Il  en 
résulte  qu'un  seul  homme  peut  faire  le  service  d'un  grand  nombre 
de  calorifères  ;  il  suffit  de  disposer  les  foyers  le  soir,  pour  n'avoir 
le  matin  qu'à  allumer  les  feux. 

Le  Conseil  royal  de  l'instruction  publique  a  autorisé  l'établisse- 
ment de  ces  calorifères  ventilateurs  pour  le  chauffage  de  l'École 
de  Droit  de  Paris,  des  collèges  d'Amiens  et  de  Dijon,  et  de  l'Aca- 
démie de  Dijon.  Le  Conseil  général  du  département  de  Saône-et- 
Loire  les  a  adoptés  à  la  suite  d'un  concours  ouvert  à  cet  effet,  pour 
le  chauffage  de  la  prison  cellulaire  de  Châlons.  Enfin  plusieurs  pa- 
lais de  justice  en  font  usage,  et  beaucoup  d'hôtels  de  Paris  sont 
également  chauffés  par  ces  appareils  (l). 


(1)  Le  prix  de  ces  calorifères  varie  suivant  l'espace  à  chauffer  : 
Le  N"  1  vaut    800  francs. 
Le  K"  2     —     liiOO 
Le  N"  3    —    2200 


Ces  calorifères  con>ienneut  tout  particulièrement  aux  hôpitaux, 
bureaux,  tribunaux,  collèges,  théâtres,  à  tous  les  lieux  enfin  qui 
exigent  une  température  régulière  et  de  l'air  pur. 

Lorsqu'il  est  nécessaire  de  porter  uue  partie  de  la  chaleur  à  une 
grande  distance,  nous  remplaçons  les  briques  garnis.sant  linté- 
rieur  du  foyer,  par  une  chaudière  destinée  a  établir  un  chauffage 
par  la  circulation  de  l'eau  chaude  pour  les  parties  éloignées.  >ous 
reviendrons  plus  tard  sur  cette  question  en  traitant  du  chauffage 
■par  l'eau  chaude. 

RÉ>k  DLVOJR. 


DU  BLAN(;HlS.SA(iK 

Al>P/HElL    DE    LESSIVAGE    PAR    CIBCULATIO.N.  —    pLAK    DVKÈ 
BLANCHISSERIE. 

Outre  les  établissements  consacrés  spécialement  u  l'industrie  du 
blanchissage  du  linge  ou  des  étoffes,  il  existe  un  grand  nombre 
d'hôtels,  de  châteaux,  de  collèges,  d'hôpitaux,  de  prisons,  etc., 
dans  lesquels  larehitecte  est  souvent  appelé  a  établir  une  blanchis- 
serie pour  le  service  même  de  la  maison.  Toutefois,  maigre  ces 
nombreuses  applications,  les  procédés  de  blanchissage  et  les  sys- 
tèmes de  distribution  générale  d'une  blanchisserie  sont  restes  long- 
temps dans  l'enfance,  et  nous  croyons  utile  de  portera  la  connais- 
sance du  public  les  résultats  de  nos  travaux  et  de  notre  expérience 
sur  cette  mat'ère. 

Le  blanchissage,  comme  on  sait,  consiste  en  neuf  opérations 
principales  : 

1"  Le  triage,  opération  qui  a  |)our  but  de  distribuer  le  liime  à 
blanchir  en  plusieurs  tas  suivant  son  degré  de  (inessc  et  de  saleté; 

2"  Le  trempage,  ou  première  imbihition  d'eau  froide  que  Ion  fait 
ordinairement  subir  au  linge  dans  des  baquets; 

3"  L'egfangeage,  ou  lavage  du  linge,  aussi  dans  l'eau  froid»-,  |>iiiii 
enlever  le  plus  gros  de  la  malpropreté.  Cette  opération,  faite  pres- 
que toujours  d'une  manière  brutale  au  moyen  de  baltes  en  bois, 
est  souvent  nuisible  au  linge; 

4"  Le  coulage,  qui  consiste  à  faire  passer  a  travers  le  linge  une 
dissolution  alcaline  de  soude  ou  de  potasse  (les  cendres  de  bois 
servent  aussi  à  cet  usage).  Cette  dis.solution  doit  être  presque  a 
l'état  d'ébullition  pour  que  son  effet  soit  complet.  C'est  la  ro|)era- 
tion  capitale  dii  blanchissage: 

.5°  Le  mvonnage,  dont  le  but  est  d'enlever  complètement  les  ta- 
ches qui  auraient  résisté  aux  opérations  précédentes. 

6»  Le  rinçage,  complément  du  savonnage  pour  enlever  l'eau  de 
savon. 

"o  L'égouttage,  dont  le  nom  indique  assez  l'objet;    ■ 

8"  Le  séchage,  qui  doit  compléter  l'évaporation  de  l'eau  contenue 
dans  le  linge. 

0"  Enfin  le  pliage  et  le  repassage,  auquel  se  rattache  le  racoœ- 
modage  des  accrocs  faits  au  linge; 

On  conçoit,  de  prime  alwrd,  que  ces  travaux  successifs  doivent 


Le  N"  4    —    JOOO 

Le  N»  5     —     aoOO 
Ces  calorirères  sont  garantis  pour  10  ans. 

Le  prix  des  conduits  et  des  bouches  de  chaleur  u'est  pas  compris  dans  le  urif 
ci-dessus. 


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REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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être  distribués  dans  une  l)Ianchisserie  de  telle  façon  que  les  pièces 
affectées  à  leur  usage  se  trouvent  placées  dans  un  ordre  de  succes- 
sion analogue  à  celui  qui  existe  entre  les  diverses  opérations,  ainsi 
que  nous  venons  de  l'indiquer,  de  manière  que  le  service  de  l'une 
n'entrave  pas  le  service  de  l'autre.  Ce  n'est  pourtant  pas  ce  que  l'on 
rencontre  dans  toutes  les  blanchisseries.  Trop  souvent,  même  dans 
les  constructions  élevées  spécialement  pour  cet  usage,  on  voit  les 
différents  services  confondus  ensemble  ou  trop  écartés  les  uns  des 
autres;  ainsi  tous  les  services  relatifs  au  lessivage  se  trouvent  dans 
un  bâtiment,  tandis  que  tous  ceux  relatifs  au  séchage  sont  placés 
dans  un  autre;  de  là  perte  de  temps  pour  les  transports,  et  compli- 
cation dans  le  travail.  Nous  nous  sommes  donc  posé  pour  problème 
à  résoudre,  de  construire  une  blanchisserie  disposée  de  telle  façon 
que  tous  les  travaux  pussent  se  faire  simultanément,  sans  interrup- 
tion, et  de  manière  à  employer  le  moins  de  bras  et  de  temps  pos- 
sible. 

Mais  la  solution  du  problème  général  d'une  bonne  blanchisserie 
renferme  celle  d'uu  problème  particulier,  celui  du  coulage  des  les- 
sives. 

Nous  examinerons  d'abord  ce  détail  isolément,  et  nous  repren- 
drons ensuite  l'étude  de  l'ensemble  de  la  blanchisserie. 

Xoitvel  appareil  de  lessivage  par  circulation. 

Le  coulage  des  lessives,  tel  qu'il  est  fait  ordinairement,  présente 
de  graves  inconvénients  :  dans  ce  système,  on  fait  chauffer  la  les- 
sive dans  une  chaudière  en  fonte,  en  tôle  ou  en  cuivre,  placée  dans 
un  massif  de  maçonnerie  au-dessus  d'un  foyer  à  bois  ou  à  charbon  ;. 
un  robinet  adapté  à  la  partie  inférieure  de  la  chaudière  sert  à  faire 
couler  la  lessive,  arrivée  à  l'état  d'ébullition,  dans  des  seaux  que 
l'on  vide  ensuite  dans  le  cuvier  où  se  trouve  le  linge  déjà  trempé. 
Ce  cuvier,  tout  à  fait  indépendant  de  la  chaudière,  placé  à  un  ni- 
veau supérieur,  est  recouvert  d'une  toile  grossière  ou  charrier  sur 
laquelle  on  place  de  la  cendre  de  bois. 

L'eau  chaude,  versée  sur  la  cendre,  s'empare  peu  à  peu  des  sels 
solubles  que  celle-ci  renferme,  et  forme  une  dissolution  alcaline 
qu'on  nomme  lessive,  et  qui  n'agit,  comme  moyen  de  blanchiment, 
que  par  le  carbonate  de  potasse  qu'elle  contient.  On  forme  souvent 
et  avec  avantage  la  lessive,  en  mettant  avec  l'eau  dans  la  chaudière 
une  quantité  déterminée  de  sel  de  soude  ou  de  potasse  pour  donner 
à  l'eau  le  même  degré  alcalimétrique.  La  lessive  iiltre  à  travers 
la  toile  et  tombe  sur  le  linge ,  qu'elle  traverse  avant  d'arriver 
au  fond  du  cuvier.  Un  robinet  placé  au  bas  du  cuvier  lui  donne 
issue  sur  un  conduit  en  bois  ou  en  tôle  qui  la  verse  dans  la  chau- 
dière, où  elle  entre  de  nouveau  en  ébuUition  pour  être  reversée  en- 
suite dans  le  cuvier.  Quelquefois  la  chaudière  n'est  pas  même 
munie  d'un  robinet,  et  il  faut  puiser  la  lessive  à  la  main. 

Ce  système  grossier  présente  les  inconvénients  suivants  : 

La  vapeur  qui  se  dégage  de  la  lessive  pendant  le  transvasement 
emplit  la  pièce  destinée  à  ce  service,  obscurcit  l'air,  se  condense 
sur  les  plafonds  et  sur  les  murs,  qu'elle  détériore,  et  occasionne 
une  perte  de  chaleur,  et  par  suite  de  combustible,  qui  devient  con- 
sidérable quand  on  agit  sur  une  grande  échelle. 

Le  transport  et  le  transvasement  rendent  le  service  pénible,  oc- 
cupent des  bras,  sont  l'occasion  d'un  écoulement  d'eau  qui  salit  le 
sol  ;  nouvelle  perte  de  chaleur. 

Ensuite,  quelque  soin  qu'apportent  à  leur  besogne  les  hommes 
chargés  du  transvasement,  la  lessive  arrive  au  cuvier  à  des  tempé- 


ratures inégales,  et  trop  souvent  ils  sont  victimes  d'accidents  con- 
tre lesquels  la  prudence  ne  les  défend  pas  toujours. 

Enfin  un  coulage  fait  par  ce  procédé  n'exige  guère  moins  de 
dix  à  douze  heures  de  travail. 

Dans  l'appareil  que  nous  allons  décrire,  ces  inconvénients  dis- 
paraissent, comme  nous  le  verrons  plus  loin. 

La  PL  10  représente  deux  de  ces  appareils  placés  l'un  près  de 
l'autre ,  ainsi  qu'ils  doivent  l'être  dans  la  buanderie. 

La  Fig.  1  donne  l'élévation  de  l'un  et  une  coupe  verticale 
de  l'autre,  faite  suivant  la  ligne  brisée  j  k  l  m  de  la  Fig.  2  .  de 
manière  à  montrer  le  mode  de  circulation  de  la  lessive.  La  Fig.  2 
représente  le  plan  de  ces  mêmes  appareils,  à  des  hauteurs  diffé- 
rentes. 

A  est  une  chaudière  cylindrique  en  cuivre  dont  le  cou- 
vercle est  maintenu  exactement  fermé  au  moyen  d'une  vis  de 
pression  ;  sur  ce  couvercle  est  disposée  une  soupape  à  flotteur, 
qui  ne  s'ouvre  que  quand  le  niveau  du  liquide  est  descendu  à 
une  certaine  limite. 

B  B'  [Fig.  l) ,  cuviers  dont  les  douves  en  bois  de  chêne  épais 
sont  maintenues  par  des  cercles  de  fer.  A  une  petite  distance  du 
fond  de  chaque  cuvier  se  trouve  une  grille  en  bois  e  e  {Fig.  1  et  2), 
supportée  par  des  morceaux  de  bois  découpés  en  arcade,  afin 
de  ménager  à  la  lessive  un  espace  libre  où  elle  puisse  se  réunir. 
C'est  sur  cette  grille  qu'on  entasse  le  linge  sale  après  le  trempage. 
Un  couvercle  en  cuivre  C  C  est  attaché  à  une  corde  qui  passe 
sur  des  poulies  fixées  au  plafond ,  et  vient  s'enrouler  sur  l'arbre 
d'un  treuil  DD' ,  qui  sert  à  élever  ou  à  descendre  le  cou- 
\ercle. 

a  a  et  6  6  (  Fig.  i  )  sont  les  tuyaux  de  circulation  de  la  les- 
sive ;  le  premier  traverse  le  fond  du  cuvier,  s'élève  au  centre 
jusqu'à  la  partie  supérieure,  et  se  termine  par  un  champignon  c, 
qui  projette  le  liquide  chaud  dans  toutes  les  directions.  Le.  second 
tuyau  ramène  la  lessive  dans  la  chaudière.  Dans  ce  tuyau  on 
a  placé  une  petite  soupape  d  (  Fig.  l  ),  qui  ne  s'ouvre  que  quand 
une  assez  grande  quantité  de  liquide  s'est  réunie  au  fond  du 
cuvier.  EE'  [Fig.  1)  est  un  espace  vide  ménagé  dans  la  maçon- 
nerie pour  la  pose  des  tuyaux  et  leurs  réparations. 

F  est  le  fourneau  en  briques.  La  construction  de  son  foyer 
et  des  carneaux  est  appropriée  à  la  nature  du  combustible  qu'on 
doit  brûler  sur  la  grille.  Les  produits  de  la  combustion  circu- 
lent deux  fois  autour  de  la  chaudière ,' et  se  rendent  dans  la 
cheminée  T. 

Voici  quelle  est  la  marche  d'opération  dans  l'un  des  appareils. 
On  met  le  sel  de  soude  ou  de  potasse  au  fond  du  cuvier,  et  on  y 
verse  de  l'eau  jusqu'à  ce  que  la  chaudière  soit  remplie,  et  que 
le  niveau  du  liquide  soit  arrivé  à  la  hauteur  de  la  grille  sup- 
portant le  linge.  On  place  le  linge  d'une  manière  régulière  sur 
la  grille  en  bois  ee,  sans  trop  le  tasser,  et  on  abaisse  le  cou- 
vercle du  cuvier.  On  fait  du  feu  dans  le  foyer  et  on  porte  le 
liquide  à  l'ébullilion.  La  pression  de  la  vapeur  fait  monter  la 
lessive  dans  le  tuyau  aa  et  la  projette  contre  le  champignon  r . 
qui  la  répartit  uniformément  sur  toute  la  surface  du  linge.  La 
lessive  traverse  toute  la  masse  et  se  réunit  à  la  partie  infé- 
rieure du  cuvier  ;  le  niveau  du  liquide  s'abaisse  dans  la  chau- 
dière À  et  ouvre  la  soupape  *  ,  en  même  temps  que  la  pression 
du  liquide  sur  le  fond  ouvre  la  soupape  d  ;  alors  la  lessive 
revient  à  la  chaudière  pour  se  chauffer  de  nouveau  et  retourner 
dans  le  cuvier.  Cette  circulation  de  la  lessive  bouillante  &'ef- 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


no 


fectue  d'elle-même ,  et  produit  un  lessivage  prompt  et  parfi.it 
de  toute  la  masse  du  linge  (l). 

Dans  ce  système ,  on  le  voit,  les  inconvénients  que  nous  avons 
signalés  n'existent  plus.  Une  fois  le  linge  placé  dans  le  cuvier, 
on  ferme  le  couvercle.  Il  n'y  a  plus  qu'à  faire  du  feu;  la  lessive 
se  verse  d'elle-même  sur  le  linge  aussitôt  quelle  a  acquis  la 
température  nécessaire,  et  retourne  ensuite  à  la  chaudière.  Cette 
circulation,  ainsi  rendue  intermittente,  empêche  l'écoulement  de 
s'établir  par  une  seule  voie  ,  ainsi  qu'il  arrive  presque  toujours 
avec  les  appareils  à  jet  continu.  La  personne  qui  était  occupée 
au  coulage  devient  inutile  ,  puisqu'il  suffit  d'alimenter  le  foyer 
de  temps  en  temps.  Ce  coulage,  fait  à  vases  clos  qui  conservent 
toute  la  chaleur  du  liquide  ,  n'exige  que  de  quatre  à  six  heures 
pour  un  cuvier  de  2  mètres  de  diamètre. 

Il  résulte  de  l'emploi  de  ce  système  de  l'économie  sur  la  main- 
d'œuvre,  sur  le  combustible  ,  et ,  comme  le  linge ,  mieux  chauffé, 
s'y  nettoie  beaucoup  plus  facilement,  il  en  résulte  encore  de 
l'économie  sur  le  savon  employé  et  sur  le  temps  des  laveu- 
ses (2). 

Après  des  expériences  comparatives  avec  d'autres  systèmes , 
il  a  été  adopté  par  les  hôpitaux  civils  et  militaires  de  Paris; 
l'emploi  journalier  auquel  il  a  été  soumis  a  constaté  qu'il  remplit 
toutes  les  conditions  désirables. 

Voici  sur  cet  appareil  l'opinion  de  M.  Payen,  rapporteur  du 
jury  central  de  l'exposition  de  1839  : 

«  L'ingénieux  appareil  de  lessivage  de  M.  René  Duvoir,  ré- 
cemment amélioré ,  facilite  le  chargement  et  le  déchargement  al- 
ternatifs de  deux  cuviers  servis  par  une  seule  chaudière. 

«  Une  disposition  convenable  opère ,  avec  réchauffement  gra- 
duel des  lessives ,  des  aspersions  et  des  circulations  intermit- 
tentes qui  excluent  les  inconvénients  des  fausses  voies  de  filtrage. 

«  Le.  système  de  lessivage  de  M.  Duvoir  est  employé  avec 
succès  dans  plusieurs  établissements  publics  et  blanchisseries 
particulières.  » 

Le  jury  de  l'exposition  nous  a  décerné  la  médaille  d'argent. 

La  Société  d'encouragement ,  sur  le  rapport  favorable  fait  par 
M.  Herpin  au  nom  du  comité  des  arts  économiques ,  nous  a 
aussi  décerné  ,  en  1837  ,  la  première  médaille  accordée  aux  ap- 
pareils de  blanchissage. 

Ces  appareils  fonctionnent  dans  les  hôpitaux  Saint-Louis  et 


(1)  Le  prix  de  i;es  appareils  est  fixé  suivant  la  capacité  du  cuvier.  Dans  le 
prix  sont  comprises  toutes  les  fournitures  et  constructions,  l'appareil  étant 
livré  prêt  à  Tonctionner,  sauf  le  terrassement  et  la  maçonnerie  pour  les  grandes 
dimensions. 

Cuvier  de  1°"    «  de  diamètre.  660  fr. 

1     20  —  700 

1     30  —  000 

1     45  —  1100 

1     60  —  1200 

1  80        —        1500 

2  )i        —        2000 
2  30       —        2500 

2  50       —        3000 

3  »       —        4000. 

(2)  A  l'hospice  delà  Salpêtrière,  le  coulage  de  1500  draps  coûte  : 

Sel  de  soude,  AO  kilog. ,  à  50  c 20  fr. 

2  hectolitres  de  charbon,  à  3  fr.  30  c.  .      0  60 


Total 26  60 


de  la  Salpétrière,  à  Paris;  dans  les  hôpitaux  militaires  do 
Charonne,  du  Gros-Caillou,  de  Rayonne  ,  de  la  Ro<*lielle,  etc.  ; 
dans  ceux  de  Vernon  ,  de  Gisors  ,  de  Rcauvais ,  etc.;  dans  les 
collèges  royaux  de  Versailles,  de  Moulins,  de  Toulouse;  dans 
les  maisons  centrales  de  Poissy ,  Gaillon  ,  Clermont  ,  Fonte- 
vrault.  Embrun,  Mont-Saint-Michel ,  Nîmes,  Montpellier,  etc.; 
chez  plusieurs  grands  blanchisseurs  :  M.  Dulud  a  Keuilly,  madame 
Lefèvre  à  Versailles  ,  etc.  ;  pour  le  blanchiment  du  lin  ,  chez 
MM.  Feray  et  comp.  ,  à  Essonne  ,  et  à  la  filature  de  M.  Des- 
portes-Vincent ,  à  Amiens.  Il  en  a  été  également  construit  pour 
la  blanchisserie  générale  de  Neufchâtel  (  Suisse],  à  Mexico  ,  etc. , 
ainsi  que  dans  beaucoup  de  chAteaux  ,  entre  autres  chez  M.  le 
vicomte  d' A cy  ,  à  Villers-aux-Érables  (cet  appareil  est  le  premier 
que  nous  ayons  construit,  en  1835),  cher.  M.  le  vicomte  de 
Chezelle,  M.  le  manjuis  de  Nieul ,  M.  le  baron  Bœderer,  M.  le 
baron  de   Pontalba,  etc. 

Revenons  maintenant  aux  dispositions  générales  d'une  blanchis- 
serie entière. 

Jilanchifftrie. 

La  PI.  1 1  représente  la  coupe  longitudinale  et  le  plan  de  ce  que 
nous  appellerons  notre  type. 

A  est  la  salle  dans  laquelle  s'effectue  le  triage  du  linge  sale. 

B ,  la  buanderie,  dans  laquelle  on  opère  le  blanchissage  du  linge 
proprement  dit,  et  tégouttage. 

C  est  la  pièce  doit  le  linge  est  enlevé  pour  être  distribué  dans 
les  séchoirs  aux  étages  supérieurs. 

D,  séchoir  à  air  chaud  pour  les  temps  humides. 

K,  séchoir  à  air  libre  pour  les  temps  socs. 

F,  salle  où  s'opèrent  le  repassage  et  le  raccommodage. 

Dans  la  buanderie  B  se  trouvent  réunies  les  différentes  opéra- 
tions du  lessivage.  Le  premier  travail,  le  trempage,  s'opère  dans  le 
bassin  on  pierre  d;  et  comme  le  trempage.  Vettangtuge  et  le  rinç-age 
ne  s'effectuent  jamais  simultanément,  il  y  a  économie  a  se  servir 
du  même  bassin  pour  ces  trois  opérations. 

bb,  cuviers  à  lessive  dans  lesquels  ou  dispose  le  linge  pour  le 
lessivage,  comme  nous  l'avons  vu  dans  la  planche  pn-cédonto. 

It,  treuils  servant  à  manœuvrer  les  couvercles  des  cuviers. 

Dans  le  dessin,  l'un  des  cuviers  est  supposé  fermé,  et  l'autre 
est  découvert,  afin  de  montrer  la  répartition  de  la  lessive  sur  le 
linge. 

flfl.  bouilleurs  dans  lesquels  on  chauffe  la  lessive.  On  voit  dans 
l'élévation  la  coupe  d'un  des  fourneaux  qui  enveloppent  le  bouil- 
leur, avec  un  foyer  et  des  carneaux  à  fumée. 

Les  produits  de  la  combustion  passent  sous  le  sol  dans  un  con- 
duit en  briques,  qui  est  indiqué  en  lignes  ponctuées  sur  le  dessin,  et 
se  rendent  dans  la  cheminée  h,  qui  monte  dans  l'épaisseur  du 
mur. 

Des  cuviers  le  linge  passe  dans  les  bassins  à  eau  chaude  e  c, 
dans  lesquels  it  subit  l'opération  du  savonnage,  puis  de  là  dans 
le  bassin  d,  où  il  est  rincé,  pour  être  déposés  ensuite  sur  les  che- 
valets e  e  e  e,  où  il  s'égoutte. 

L'eau  chaude  servant  au  savonnage  provient  des  chaudières,  qui 
sont  munies  à  cet  effet  d'un  robinet  r.  [PI.  lO.) 

Le  linge  blanchi  et  égoutté  arrive  dans  la  pièce  C.  Pour  les  blan- 
chisseries importantes,  il  est  bon  de  placer  dans  cette  pièce  un  sé- 
choir à  force  centrifuge,  pour  priver  le  linge  d'une  partie  de  l'eau 
qu'il  contient  avant  de  le  porter  aux  séchoirs  à  air. 


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Dans  les  petites  blanchisseries,  on  porte  le  linge  aux  séelioirs 
après  l'égonttage. 

Le  linge  est  placé  dans  une  caisse  en  bois  p  qu'on  peut  élever  au 
moyen  d'un  treuil  q,  sur  lequel  s'enroule  une  corde  qui  est  attachée 
à  la  caisse,  et  qui  passe  sur  des  poulies  de  renvoi  fixées  à  la  partie 
supérieure  du  bâtiment. 

Le  linge  est  élevé,  soit  au  deuxième  étage,  pour  y  être  étendu 
dîins  le  séchoir  à  air  libre  E  quand  le  temps  est  sec  et  chaud,  soit 
au  premier  étage,  pour  y  être  séché  par  l'air  chaud,  dans  le  séchoir 
D,  par  les  temps  froids  et  humides. 

L'établissement  de  deux  séchoirs  présente  des  avantages  sous  le 
rapport  de  l'économie  de  combustible,  puisque  le  séchage  à  l'air 
libre,  quand  il  peut  s'effectuer,  ne  coûte  rien  ;  mais  il  ne  peut  avoir 
lieu  constamment  ni  surtout  régulièrement.  Dans  tous  les  cas, 
dans  un  séchoir  à  air  libre,  les  murs  doivent  être  percés  de  très- 
larges  croisées,  fermées  en  partie  par  des  jalousies  mobiles.  Les 
traverses  en  bois  qui  servent  à  l'étendage  doivent  être  assez  écar- 
tées les  unes  des  autres,  et  placées  dans  le  sens  des  courants  d'air 
qui  s'établissent  par  les  croisées  opposées,  afin  de  présenter  plus  de 
surface  à  l'air. 

Dans  un  séchoir  à  air  chaud,  le  séchage  peut  toujours  s'effectuer 
en  peu  de  temps  et  avec  régularité.  Aussi  dans  toutes  les  grandes 
blanchisseries  de  toiles,  calicots,  etc. ,  et  dans  les  fabriques  de  draps, 
opère-t-on  le  séchage  dans  des  séchoirs  à  airchaud,  et  renonce-t-on 
complètement  au  séchage  à  l'air  libre.  Le  séchoir  D  est  plus  petit 
que  le  séchoir  E,  et  les  traverses  en  bois  qui  supportent  le  linge  doi- 
vent être  plus  rapprochées,  afin  qu'il  y  ait  moins  d'intervalle  entre 
les  pièces  étendues.  Il  faut  toutefois  que  cet  intervalle  soit  assez 
grand  pour  que  les  pièces  de  linge  ne  puissent  adhérer  l'une  avec 
l'autre. 

L'air  chaud  s'obtient  au  moyen  d'un  calorifère  /"  situé  au  rez-de- 
chaussée,  h  est  le  tuyau  à  fumée,  qui  s'élève  dans  la  cheminée  jus- 
qu'au-dessus du  toit  et  se  termine  par  une  lanterne  x,  destinée  à 
assurer  à  l'appareil  un  bon  tirage  indépendant  de  la  pluie  et  des 
coups  de  vent.  L'air  chaud  se  rend  dans  le  séchoir  par  un  tuyau  g 
qui  le  conduit  dans  un  récipient  en  briques  i  i,  construit  au  milieu 
du  séchoir  et  percé  latéralement  de  bouches  de  chaleur  fcfe,  fermées 
par  des  registres  à  coulisses  qui  permettent  d'obtenir  par  chacune 
d'elles  une  égale  vitesse  de  l'air  chaud. 

/ 1  sont  des  cheminées  d'évàporation  percées  <à  leur  partie  infé- 
rieure d'ouvertures  m  m  par  lesquelles  entre  l'air  humide  du  séchoir 
pour  s'élever  jusqu'au-dessus  du  toit.  Ces  cheminées  sont  toutes 
recouvertes  de  chapeaux  en  tôle  o  o  qui  les  préservent  de  la 
pluie. 

Du  séchoir  le  linge  passe  dans  la  pièce  F,  destinée  au  raccommo- 
dage, an  pliage  et  au  repassage. 

Dans  la  blanchisserie  que  nous  venons  de  décrire  nous  avons 
cherché  à  placer  chaque  appareil  dans  les  conditions  qui  nous  ont 
paru  les  plus  favorables;  nous  allons  indiquer  les  avantages  des 
dispositions  que  nous  avons  adoptées,  afin  que  dans  l'étude  d'un 
établissement  de  même  nature,  on  puisse  tendre  à  les  obtenir  autant 
que  l'espace  et  la  forme  de  l'emplacement  le  permettront. 

La  buanderie  proprement  dite,  c'est-à-dire  la  pièce  dans  la- 
quelle s'effectue  le  blanchissage,  est  au  rez-de-chaussée.  Le  sol 
est  dallé  et  incliné  de  manière  à  favoriser  l'écoulement  des  eaux 
qui  se  répandent  à  terre.  Les  foyers  des  appareils  de  lessivage  et 
le  foyer  des  calorifères  sont  groupés  à  côté  l'un  de  l'autre,  ce  qui 
rend  le  service  facile  pour  un  même  chauffeur,  et  permet  de  n'a- 


voir qu'une  seule  cheminée  pour  les  deux  appareils  de  chauffage. 

Dans  cette  pièce,  les  bassins  sont  placés  de  manière  à  ce  que  les 
laveuses  soient  bien  éclairées.  C'est  pour  cela  que  les  murs  sont 
percés  de  très-grandes  ouvertures  fermées  par  des  châssis  vitrés. 

On  conçoit  qu'il  serait  facile  et  économique  de  distribuer  l'eau 
dans  la  buanderie  de  façon  à  épargner  son  transport  à  bras 
d'homme. 

Le  séchoir  à  air  libre  est  placé  à  l'étage  le  plus  élevé,  afin  qu'il 
soit  mieux  aéré. 

Le  séchoir  à  air  chaud  est  au  premier  et  se  trouve  dans  une  po- 
sition favorable  pour  ne  transmettre  que  peu  de  chaleur  par  le 
plancher  et  par  le  plafond.  Les  murs  latéraux  doivent  être  le  plus 
épais  possible  ou  à  doubles  parois,  et  être  percés  de  très-petites  ou- 
vertures fermées  par  des  croisées  doubles,  afin  de  diminuer  la  perte 
de  chai  eur. 

Quand  le  séchoir  à  air  chaud  est  à  l'étage  supérieur,  dans  un 
grenier  par  exemple,  il  faut  le  couvrir  d'un  double  plafond.  Les 
autres  conditions  sont  de  lui  donner  peu  de  hauteur  et  seulement 
les  dimensions  suffisantes  pour  contenir  le  linge  à  sécher. 

Il  vaut  mieux,  quand  cela  est  possible,  que  le  séchage  s'effec- 
tue dans  le  séchoir  en  deux  opérations  consécutives,  qu'en  une 
seule  dans  un  séchoir  de  plus  grandes  dimensions. 

L'établissement  de  séchoirs  et  d'étuvesse  présente  très-fréquem- 
ment dans  la  construction  des  usines  et  des  manufactures,  et  les 
moyens  de  séchage  varient  avec  la  nature  dès  produits  à  sécher. 
Aussi  reviendrons-nous  sur  ce  sujet  pour  donner  quelques  détails 
sur  les  dispositions  de  séchoirs  et  d'appareils  que  nous  avons  em- 
ployés pour  différents  modes  de  séchage  et  dont  l'application  nous 
a  donné  de  bons  résultats, 

RENÉ  DUVOIR. 


SAXiOMT  DE  1844. 

Pourquoi  ta  presse  parle  si  peu  de  l'exposition  des  projets 
d'architecture. 

C'est  un  des  grands  regrets  de  nos  confrères  de  province  que  de 
ne  pas  assister  à  l'exposition  annuelle  des  dessins  d'architecture 
au  Louvre.  La  presse  quotidienne,  qui  consacre  régulièrement  un 
certain  nombre  de  feuilletons  à  décrire  les  principales  oeuvres  de 
chaque  Salon,  se  renferme  exclusivement  dans  la  peinture  et  la 
sculpture;  c'est  comme  si  l'architecture  n'existait  pas  pour  nos  cri- 
T.  V.  12 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


180 


tiques  d'art,  et  leurs  écrits  n'apprennent  aux  architectes  des  dé- 
partements absolument  rien  sur  le  sujet  qui  les  intéresse. 

A  la  vérité,  le  silence  de  la  presse  quotidienne  s'explique  assez 
facilement  par  son  ignorance  d'un  art  qui  s'appuie  à  la  fois  sur 
les  sciences  exactes  et  sur  tous  les  arts  du  dessin.  Il  est  très-facile 
à  un  critique  quelque  peu  familier  avec  les  formes  littéraires,  de 
promener  ses  lecteurs  au  milieu  des  tableaux  et  des  statues  du  Sa- 
lon, en  s'exclamant  sur  la  couleur  de  celui-ci,  les  formes  de  celui- 
là,  exclamations  entremêlées  d'anecdotes  plus  ou  m;)ins  amusantes, 
d'observations  quelquefois  spirituelles,  mais  qui  n'ont  souvent  que 
peu  ou  point  de  rapport  avec  les  travaux  exposés.  Les  critiques  qui 
se  contentent  ainsi  de  nous  faire  connaître  leurs  impressions  per- 
sonnelles comme  si  elles  devaient  être  nécessairement  celles  de  tout 
le  monde,  ne  ressemblent  pas  mal  à  ce  roi  de  Pologne  qui,  lorscju'il 
avait  bu,  voulait  que  son  peuple  fût  ivre.  Ces  Messieurs,  pour 
être  parfois  amusants,  n'en  sont  pas  moins  cruels  pour  les  expo- 
sants, et  ne  satisfont  qu'à  moitié  la  portion  sérieuse  du  public  ; 
mais  ce  n'est  pas  non  plus  à  celle-là  qu'ils  s'adressent  ;  le  plus  sou- 
vent ils  ne  veulent  qu'amuser  leurs  lecteurs,  donner  aux  abonnés 
du  journal  un  moment  d'agréable  distraction,  et  assez  fràiuemment 
ils  y  réussissent. 

L'analyse  des  projets  d'architecture  n'offre  pas  les  mêmes  faci- 
lités que  celle  de  la  peinture  ;  devant  ces  ligues  rigoureuses  tracées 
à  la  règle  et  au  compas,  développées  conformément  à  de  certaines 
règlesde  proportion,  le  spirituel  critique  se  trouve  embarrassé;  son 
allure,  naguère  si  libre  et  si  plaisante  devant  les  tableaux  et  les  sta- 
tues, devient  subitement  embarrassée;  il  ne  comprend  pas,  ou,  s'il 
comprend  quelque  chose,  c'est  la  nécessité  de  faire  des  études  spé- 
ciales et  sérieuses  pour  avoir  le  droit  de  juger  des  œuvres  qui 
relèvent  de  notre  bel  art.  Or,  les  hommes  qui  ont  consacré  de  lon- 
gues années  à  l'étude  des  sciences  et  des  monuments,  ont  acquis 
souvent  un  sérieux  et  une  gravité  d'esprit  qui  se  concilient  dif- 
ficilement avec  le  laisser-aller  d'idées  qui  caractérise  d'ordinaire 
la  littérature  des  feuilletons.  Le  savant  ne  veut  parler  que  pour 
instruire,  et  se  tait  de  préférence  à  risquer  une  pensée  incomplète. 
Le  feuilletoniste  ne  craint  qu'une  chose,  c'est  d'ennuyer  ;  aussi 
jamais  il  ne  creuse  une  idée  :  il  craindrait  trop  de  fatiguer  son  pu- 
blic, qui  cesserait  de  s'abonner  au  journal.  11  respecte  peu  l'intelli- 
gence de  l'abonné,  il  la  suppose  toujours  au  plus  bas,  et  dès  lors  il 
s'efforce  de  captiver  son  monde  par  des  récits  piquants,  des  anec- 
dotes bizarres;  il  image  et  brillante  son  langage,  et  joue  des  feux 
d'artifice  devant  l'imagination  du  lecteur,  qui  n'a  pas  besoin  d'a- 
voir pris  ses  degrés  à  l'Université  pour  s'en  amuser.  On  le  voit, 
ces  conditions  ne  sont  pas  très-favorables  à  la  prise  en  considéra- 
tion des  travaux  d'architecture;  car  ici  il  ne  suffit  plus  d'une  ai- 
mable gaieté  servie  par  une  plume  facile  et  animée. 

Nous  avons  eu  la  curiosité  de  parcourir  à  peu  près  tous  les  prin- 
cipaux comptes-rendus  de  Salons  qu'on  a  faits  depuis  qu'il  existe 
des  expositions  publiques  de  beaux-arts  à  Paris;  et  à  partir  de  Di- 
derot jusqu'aux  critiques  de  nos  jours,  nous  n'en  avons  pas  ren- 
contré deux  qui  aient  parlé  des  projets  d'architecture  avec  quelque 
étendue.  Les  Salons  de  Diderot,  qui  ont  servi  de  modèle  à  tant  de 
critiques  de  ce  siècle-ci,  ne  font  mention  qu'une  seule  fois  de  l'ex- 
position de  l'architecture,  et  alors  même,  au  lieu  de  nous  dire  quels 
étaient  les  projets  exposés,  leurs  défauts  et  leurs  qualités,  l'auteur 
se  lance  dans  une  dissertation  sur  l'Église  de  saint  Pierre  de  Rome  ; 
il  paraît  disposé  à  nous  entretenir  de  tous  les  monuments  qu'on 
voudra,  pourvu  que  ce  ne  soit  pas  de  ceux  de  l'exposition.  Les 


imitateurs  de  Diderot  ont  généralement  exagéré  encore  la  réserve 
de  leur  modèle,  au  point  de  ne  plus  parler  du  tout  d'architecture; 
peut-être  ont-ils  eu  raison. 

Mais  comme  les  architectes  de  province  et  les  étrangers  savent 
cependant  qu'il  y  a  au  Salon  de  cha(iue  année  une  exposition  d'ar- 
chitecture, ils  sont  assez  naturellement  portes  à  la  supposer  en  rap- 
port avec  la  réputation  et  le  talent  reconnu  des  architectes  de  Paris, 
dont  les  artistes  étrangers  viennent  si  souvent  admirer  les  tra- 
vaux. Il  n'en  est  rien  cependant;  notre  exposition  d'architecture 
est  vraiment  misérable;  sur  2423  sujets  exposes  au  Salon  de  cette 
année,  il  n'y  a  que  21  sujets  d'architecture!  Et  pourtant  combien 
d'architectes  de  talent  et  déjeunes  gens  pleins  d'imagination  et  de 
sève,  qui  ne  demandent  qu'à  donner  des  preuves  de  leur  habileté 
et  de  leur  savoir  ! 

Comment  on  pourrait  donner  vne  grande  importance  aux  txpoti- 
tions  annuelles  d  architecture  et  les  rendre  tiiê-pmfitcMe*. 

Il  est  vraiment  bien  fâcheux  qu'il  ne  se  trouve  pei-sonne  auprès 
de  Sa  Majesté,  qui  aime  avec  tant  de  passion  le  noble  art  de  l'ar- 
chitecture, pour  lui  rappeler  combien  il  serait  utile  d'encourager 
les  architectes,  par  des  médailles  et  des  récompenses  honorifiques, 
à  exposer  leurs  idées  sur  les  travaux  d'embellissement  dont  nos 
\illes  sont  susceptibles,  sur  les  améliorations  a  introduire  dans  les 
dispositions  des  principaux  monuments  publics,  théâtres,  palais  de 
justice,  prisons,  collèges,  etc.,  qui  sont  répétés  dans  toutes  les  prin- 
cipales villes  de  France,  et  qui  coûtent  au  pays  des  sommes  si 
énormes.  Si  notre  voix  pouvait  parvenir  jusqu'aux  oreilles  du  roi. 
nous  lui  dirions  : 

«  Sire,  jamais  sous  aucun  de  ses  rois,  même  pendant  le  règne  de 
Louis  XIV,  la  France  n'a  exécuté  d'aussi  grands  et  d'aussi  impor- 
tants travaux  de  construction  que  pendant  le  règne  de  Votre  Ma- 
jesté. Depuis  1830,  Paris  s'est  presque  complètement  Iranforme; 
il  y  a  quatorze  années,  elle  était  la  ville  des  monuments  provisoi- 
res et  des  monuments  en  construction  ;  des  édifices  importants  _\ 
attendaient  depuis  des  siècles  qu'un  roi,  ami  des  arts  et  de  l'ordre, 
voulût  leur  achèvement.  Le  Panthéon,  la  Madeleine,  l'église  Saint- 
Vincent  de  Paul,  l'église  de  Saint-Denis,  l'église  Saiut-Eustache, 
la  Sainte-Chapelle,  la  place  de  la  Bastille,  la  Colonne  Vendùme, 
l'Arc-de-Triomphe  de  l'Étoile,  l'Hùtel-de-Ville,  la  Chambre  des 
Députés,  le  Palais  du  quai  d'Orsay,  le  Palais  des  Beaux-Arts,  le 
Palais-de-Justice,  la  Place  du  Carrousel,  les  Champs-Elysées,  le 
Muséum  d'Histoire  Naturelle ,  l'Institution  royale  des  Sourds- 
Muets,  etc.,  etc.,  etc.,  etc.,  ont  été  achevés  ou  entièrement  con- 
struits dans  ces  dernières  années.  Les  municipalités  des  différentes 
villes  du  royaume  semblent  rivaliser  de  zèle;  les  rues  s'élargissenl 
et  se  rectifient,  des  eaux  limpides,  chaque  année  de  plus  en  plus 
abondantes,  lavent  nos  ruisseaux  et  entraînent  dans  les  ^outs 
publics  les  boues  et  les  détritus  que  n'enlèvent  pas  les  balayeurs... 

H  Et  cependant  ces  merveilleuses  constructions,  ces  progrès  évi- 
dents, ne  sont  encore  que  peu  de  chose  auprès  de  ce  qu'on  pourrait 
réaliser  dans  un  prochain  avenir.  Que  Votre  Majesté  daigne  faire 
pour  les  architectes  ce  qu'elle  fait  chaque  année  pour  les  peintres 
et  les  sculpteurs;  qu'elle  fasse  annoncer  que  désormais  il  y  aura 
au  Louvre  une  exposition  annuelle  et  spéciale  d'architecture,  dont 
les  sujets  seront  distribués  en  trois  catégories  correspondant  aux 
trois  faces  sous  lesquelles  on  peut  envisager  l'architecture,  c'est- 
à-dire,  1"  dan»  tes  rapports  atec  l'art  ;  2°  dans  ses  rapports  avec  la 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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ncience;  et  3°  dans  ses  rapports  avec  les  besoins  de  la  vie;  que  ces 
trois  catégories  seront  donc  ainsi  composées  : 

a  1"  Des  sujets  conçus  en  vue  des  progrès  de  l'art  proprement 
dit,  tels  que  les  dessins  des  vieux  monuments,  les  études  compa- 
ratives des  ordres  ou  des  divers  styles  d'architecture,  etc.  ; 

«  2°  Des  études  de  construction  pure,  de  machines  employées 
dans  l'exécution  des  travaux,  etc.  ; 

«  3°  Des  projets  d'établissements  publics,  de  maisons  particu- 
lières, de  distribution  d'eau,  d'égouts,  en  un  mot  de  tout  ce  qui 
intéresse  la  beauté,  la  salubrité  et  la  prospérité  des  villes.  Que  les 
ingénieurs  aussi  soient  invités  à  envoyer  leurs  projets  à  cette  expo- 
sition, et  qu'auprès  des  études  relatives  aux  villes  ou  centres  où  se 
groupent  les  populations ,  on  puisse  examiner  les  études  des  voies 
de  communication,  routes,  canaux,  chemins  de  fer,  ponts,  etc., 
destinées  à  faciliter  et  à  activer  les  rapports  des  villes  entre  elles. 

«  Que  Votre  Majesté  fasse  connaître  que  chacune  de  ces  catégories 
deviendra  l'objet  de  récompenses  spéciales  en  rapport  avec  l'im- 
portance des  travaux  exposés,  que  l'architecte  et  l'ingénieur  pour- 
ront espérer  de  se  voir  récompensés  en  exposant  des  travaux  vrai- 
ment importants  et  de  nature  à  éclairer  les  administrations  sur  des 
points  d'intérêt  public,  d'art  ou  de  science,  et  il  n'est  pas  douteux 
que  l'annonce  d'une  telle  exposition  ne  devienne  à  l'instant  un  sti- 
mulant des  plus  actifs,  d'où  résulterait  l'éclosion  d'une  série  d'i- 
dées précieuses  pour  l'Etat  et  pour  les  particuliers.  » 

Une  telle  exposition  formerait  une  transition  et  un  lien  entre 
l'exposition  de  peinture  et  de  sculpture,  et  l'exposition  des  pro- 
duits de  l'industrie  ;  l'exposition  de  l'architecture  serait  comme 
le  centre  et  le  foyer  des  deux  autres  :  car,  enfin,  que  sont  la  pein- 
ture et  la  sculpture,  sinon  les  deux  instruments  au  moyen  des- 
(|uels  l'architecture  complète  les  décorations  qu'elle  imagine?  Et 
combien  d'industries  y  a-t-il  qui  soient  absolument  étrangères  à 
l'art  de  bâtir  et  de  décorer  les  édifices  et  les  maisons  qui  composent 
nos  villes,  à  la  construction  des  ponts,  des  routes  et  des  canaux,  à 
l'ameublement  et  au  chauffage  de  nos  habitations,  à  l'éclairage  de 
nos  rues,  etc.,  etc.? 

C'est  par  Vnrchiteclure  que  Vart  entre  en  relation  avec  la  science, 
c'est  par  elle  que  le  sentiment  du  beau  pénètre  dans  les  travaux  in- 
dustriels, enfin  c'est  surtout  l'architecture  qui  développe  le  luxe, 
au  sein  duquel  Vtifilc  et  le  beau  communient  ensemble. 

Nous  engageons  ceux  de  nos  lecteurs  qui  en  auraient  le  loisii', 
a  bien  méditer  la  corrélation  de  ces  trois  termes  :  Peinture-sculp- 
ture, Architecture,  Industrie;  nous  pensons  que  là  pourrait  fort 
bien  se  rencontrer  la  véritable  solution  du  problème  tant  débattu 
de  la  construction  d'un  palais  définitif  pour  les  expositions  pu- 
bliques. 

Sujets  archéologiques  :  MM.  Clerget,  Delbrouck  et  Denuelle. 

Sur  les  21  sujets  d'architecture  exposés,  il  y  a  10  études  archéo- 
logiques et  1 1  études  de  projets  divers. 

Parmi  les  dessins  archéologiques,  nous  avons  remarqué  la  res- 
tauration du  Temple  de  Diane  Leucophri/née ,  à  Magnésie  (Asie- 
Mineure),  par  M.  Clkroet,  ancien  grand  prix  de  Rome.  Nos  lec- 
teurs se  rappellent  peut-être  que  les  frises  sculptées  de  ce  beau 
monument  ionique  furent  apportées  récemment  à  Paris  par  les 
soins  d'une  commission  nommée  par  le  gouvernement  et  dirigée 
par  M.  Ch.  Texicr,  l'auteur  de  plusieurs  articles  importants  de 
cette  Revue.  On  assure  même  que  M.  Fontaine  prépare  au  Louvre 


une  salle  pour  leur  exposition  permanente;  en  attendant,  ces  vé- 
nérables vestiges  d'un  autre  âge  sont  abrités  sous  un  auvent  en 
planches  qui  les  dérobe  un  peu  à  l'influence  des  intempéries  at- 
mosphériques, et  tout  à  fait  à  l'ardeur  studieuse  des  artistes. 

Les  dessins  de  M.  Clerget  sont  au  nombre  de  sept  ;  ils  sont  remar- 
quablement bien  exécutés  et  doivent  être  très-exacts,  car  M.  Clerget 
était  lui-même  attaché  en  qualité  de  dessinateur  à  la  commission 
chargée  de  retirer  d'un  terrain  marécageux  et  de  rapporteren  France 
les  curieux  fragments  que  nous  possédons.  Nous  ignorons  si  ces  des- 
sins sont  déjà  la  propriété  du  gouvernement,  ou  s'ils  appartiennent 
à  M.  Clerget  ;  mais,  dans  ce  dernier  cas,  nous  pensons  que  le  gouver- 
nement ferait  bien  de  les  acquérir  et  de  les  suspendre  dans  la  salle 
même  où  seront  exposés  les  fragments  de  la  frise.  Ce  serait  ajouter 
un  nouvel  intérêt  à  ces  débris  que  d'en  faire  bien  comprendre  l'état 
primitif  au  moyen  de  la  restauration  de  M.  Clerget;  ce  serait  aussi 
venir  en  aide  à  un  habile  artiste,  victime  des  injustices  de  la  for- 
tune. Nous  ne  connaissons  de  M.  Clerget  que  ses  œuvres,  mais 
cette  connaissance  est  plus  que  suffisante  pour  motiver  le  vœu  que 
nous  formons.  Ajoutons,  du  reste,  que  cette  manière  de  faire  con- 
naître l'origine  et  le  but  primitif  des  fragments  importants  de  nos 
musées  au  moyen  de  dessins  et  de  légendes  explicatives,  mériterait 
d'être  généralement  adoptée.  Ces  vestiges  qui  paraissent  aujour- 
d'hui sans  but,  dont  le  lien  avec  le  passé  n'est  pas  évident,  pren- 
draient alors  de  la  vie  et  révéleraient  du  vieux  monde  mille  ex- 
pressions qui  nous  échappent  aujourd'hui  ;  l'imagination  reporte- 
rait chacun  de  ces  débris  à  sa  place  primitive,  si  bien  qu'une 
promenade  dans  les  musées  donnerait  une  idée  plus  réelle  des 
sociétés  passées  que  six  mois  de  lecture  ;  le  public  s'instruirait  en 
s'amusant,  et  le  goût  des  arts,  qui  exprime  le  raffinement  du  sens 
public,  rencontrerait  plus  d'occasions  pour  se  développer. 

L'art  antique  n'est  pas  à  la  mode  aujourd'hui  ;  après  avoir  régné 
pendant  trois  siècles  en  maitre  absolu  et  exclusif,  il  perd  à  cette 
heure  son  crédit  et  tombe  dans  une  disgrâce  imméritée.  Le  tra\ail 
de  M.  Clerget  est  le  seul  qui  soit  venu  témoigner  puissamment  du 
merveilleux  goût  du  monde  païen. 

M.  Delbrouck  a  exposé  un  dessin  géométral  de  la  Porte  d'Ar- 
roux,  qui  donnait  entrée  à  la  ville  d'Augustodunum  (Autun  ;  mais 
cette  étude  est  incomplète,  les  détails  manquent,  et  le  rendu  même 
pourrait  être  plus  heureux.  Toutefois  si  M.  Delbrouck  est  un  jeune 
homme  qui  s'occupe,  comme  nous  le  pensons,  à  compléter  ses  étu- 
des d'art,  nous  le  félicitons  de  savoir  résister  à  l'entraînement  de 
la  mode  :  les  études  de  l'art  antique  seront  toujours  indispensa- 
bles à  l'architecte,  et  bien  que  nous  soyons  d'avis  que  pendant 
longtemps  on  l'a  trop  exclusivement  cultivé,  cependant  une  reac- 
tion exagérée  aurait  des  conséquences  déplorables;  et  on  ne  tarde- 
i-ait  pas  à  voir  tout  sacrifier  à  la  déesse  de  la  fantaisie.  Il  y  a  dans 
l'art  antique  bien  entendu  un  bon  sens  si  imperturbable,  un  goi'it 
tellement  sûr,  une  prudence  et  une  expérience  si  consommées , 
qu'il  est  impossible  à  l'artiste  qui  s'en  est  occupé  sérieusement  de 
ne  pas  apporter  ensuite  dans  ses  compositions  quelques-unes  des 
qualités  que  nous  signalons,  et  qu'il  importe  surtout  de  cultiver 
chez  les  architectes,  car  les  essais  de  nos  confrères  intéressent  lar- 
gement la  fortune  publique  et  privée. 

M.  Dkniielle  a  exposé  une  suite  d'études  de  l'art  de  la  dicora- 
tion  en  Italie  à  différentes  époques.  Ceci  est  un  travail  sérieux  qui 
a  demandé  des  efforts  longs  et  persévérants.  C'est  surtout  de  la  pein- 
ture et  de  la  mosaïque  que  M.  Denuelle  parait  s'être  occupe,  du 
moins  ce  sont  là  les  sujets  des  études  qu'il  a  exposées.  Pour  bien 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


i6k 


pomprendie  les  principes  de  l'art  de  décorer  les  édifices,  M.  De- 
niielie  a  pensé  avec  raison  qu'il  était  indispensable  de  considérer 
celui-ci  comme  le  complément  de  l'architecture,  d'y  voir  le  subor- 
donné et  l'instrument  d'un  autre  art.  Partant  de  là,  il  se  mit  sous 
la  direction  de  l'habile  architecte  du  palais  des  Beaux-Arts,  et  après 
quelques  années  d'étude  dans  l'atelier  de  M.  Duban,  il  partit  pour 
l'Italie;  son  professeur  l'avait  engagé  à  y  aller  étudier  l'art  de  la 
décoration  à  ses  différentes  époques. 

M.  Denuelle  nous  montre  au  commencement  de  sa  série  d'e- 
tudes  des  décorations  intérieures  d'Herculanum  et  de  Pompeï: 
à  la  bonne  heure!  voilà  un  bon  point  de  départ;  les  artistes  de  la 
Renaissance  se  sont  inspirés  de  l'antique,  souvent  ils  l'ont  inter- 
prété, quelquefois  ils  l'ont  même  copié.  Pompei  et  Herculanum 
fournissent  d'ailleurs  des  modèles  de  décoration  dans  lesquels  l'or- 
donnance des  parties  et  l'entente  des  couleurs  méritent  toute  notre 
admiration.  Après  les  peintures  antiques  est  venu  le  tour  des  mo- 
saïques; la  Sicile,  Florence,  Venise,  ont  offert  des  champs  féconds 
aux  travaux  de  notre  moissonneur,  qui  nous  montre  la  mosaïque 
qui  décore  le  cul  de  four  de  l'abside  de  San-Miniato,  à  Florence 
(XII^  siècle),  et  le  plafond  de  la  sacristie  de  l'église  de  Saint-Mare, 
à  Venise  (fin  du  XV'  siècle). 

Le  grand  art  des  mosaïstes  revivra-t-il  encore  un  jour?  Quelques 
personnes  en  doutent,  et  cependant,  pour  la  décoration  de  nos 
grands  édifices  publics,  on  ne  saurait  trouver  de  peinture  aussi  mo- 
numentale ni  formant  au  même  degré  partie  intégrante  de  l'édifice  ; 
la  mosaïque  est  essentiellement  de  \ei  peinture  construite,  elle  forme 
une  transition  entre  la  peinture  et  l'architecture.  Les  peintures  sur 
toile,  encadrées  et  suspendues  aux  murs  de  nos  édifices,  nuisent 
n  l'unité  de  l'architecture  ;  la  peinture  à  fresque  est  déjà  un  im- 
mense progrès  pour  la  décoration  intérieure,  mais  celle-ci  même 
n'a  pas  la  solidité  et  le  caractère  pour  ainsi  dire  architectonique 
de  la  mosaïque,  qui  est  une  peinture  en  pierre  et  qui  résiste  à  tontes 
les  intempéries.  Espérons  que  nos  enfants,  moins  pauvres  que 
nous,  feront  revivre  glorieusement  un  art  si  bien  fait  pour  s'allier 
à  l'architecture. 

Après  avoir  rendu  hommage  à  l'École  des  Mosaïstes  de  Palerme, 
de  Montréale,  de  Saint-Marc,  après  avoir  étudié  les  Écoles  con- 
temporaines fondées  par  les  Cimabue  et  les  Giotto,  régénérateurs 
de  la  peinture  en  Italie,  et  salué  les  œuvres  de  leurs  élèves,  les 
Gaddi,  les  Simone  Memmi,  etc.,  notre  jeune  voyageur  arrive  à  la 
Renaissance.  La  Renaissance,  c'est  la  fleur  épanouie  dans  toute 
sa  fraîcheur,  et  qui  répand  partout  ses  arômes  enivrants  ;  c'est  Bru- 
neleschi,  c'est  le  Bramante;  c'est  la  vigueur  de  Michel-Ange,  la 
pureté  de  Raphaël,  la  fougue  et  la  grâce  de  Benvenuto.  A  ceux-ci 
succèdent  Jules  Romain  ,  Vasari ,  Zuccari,  etc.,  et  déjà  nous  nous 
trouvons  sur  la  pente  de  la  décadence.  Chaque  époque  a  eu  ses 
grands  peintres  décorateurs,  et  M.  Denuelle  a  voulu  suivre  pas  à 
pas  les  diverses  expressions  de  son  art  depuis  les  temps  antiques 
jusqu'au  XVI«  siècle.  On  le  voit,  c'est  un  résumé  de  cette  étude 
qu'il  a  exposé,  en  choisiss;int  des  sujets  dans  chacune  des  grandes 
époques  de  l'art  de  la  décoration  :  les  peintures  de  Pompeï  et 
d'Herculanum  y  reproduisent  le  style  de  la  peinture  antique  ;  —  la 
coupe  d'une  des  travées  de  l'église  de  Saint-François-d'Assise  et  le 
détail  d'une  des  voûtes  de  la  chapelle  supérieure  donnent  des 
exemples  de  peinture  de  la  fin  du  XIII'=  et  du  commencement  du 
XIV«  siècle;  le  cul  de  four  de  San-Miniato  montre  quel  était  le 
caractère  des  mosaïques  du  XIII'  siècle,  et  la  sacristie  de  l'église  de 
Saint-Marc  offre  un  exemple  intéressant  de  mosaïque  du  W' siècle 


La  Renaissance  est  représentée  par  trois  décorations  de  xoùtes, 
dont  deux  ont  été  peintes  par  Raphaël  au  Vatican,  vers  isio,  et 
dont  la  troisième,  qui  fait  pjirtie  des  salles  Bortrhia,  fut  exécutée  à 
la  même  époque  par  Pinturicchio  d'après  les  dessins  de  Raphaël. 
Finalement,  le  déclin  de  l'art  décoratif  est  montré  dans  une  vue 
perspective  de  la  bibliothèciue  du  Vatican,  peinte  par  Frédéric 
Zuccari  en  Iô90. 

Tous  ces  dessins,  exécutés  avec  un  talent  très-réel,  témoignent 
puissamment  en  faveur  de  leur  auteur,  et  nous  autorisent  à  féliciter 
à  la  fois  le  maître  qui  a  si  bien  guidé  son  disciple,  et  l'élève  qui  a 
su  mettre  si  bien  à  profit  les  conseils  du  maître. 

Les  autres  sujets  archéologiques  du  Salon  se  composent  des 
Etudes  d'après  les  encadrements  des  Loges  de  Raphaël  au  Vatican, 
de  M.  Victor  Baltard  (études  très-bien  exécutées,  et  qui  (mt  en 
outre,  pour  le  public  artiste  qui  visite  l'exposition,  l'avantage  ac- 
cidentel de  rendre  plus  complète  encore  la  suite  des  études  déco- 
ratives si  bien  commencées  par  M.  Denuelle;  ;  des  Détails  de  l'arc 
d'Orange,  dessin  bien  rendu,  bonne  étude,  de  M.  Joret;  une  petite 
mine  de  plomb  de  M.  B<ks\vil\vali),  représentant  la  porte  Sainte- 
Anne  de  l'église  cathédrale  de  Paris,  et  exécutée  avec  la  fidélité 
qu'on  lui  connaît;  et  enfin  un  intéressant  travail  de  M.  Ri  pbich 
(Robert),  représentant  l'état  actuel  de  Véglise  des  Templiers  de 
Montsaunès,  arrondissement  de  Saint-Gaudens  {Haute-Garonne:, 
monument  curieux  de  la  seconde  moitié  du  XII*  siècle. 


César  DALY. 


[La  suite  au  prochain  numéro.) 


bibuogb.aphiz. 

De  la  grande  circulation   dans  Paris,    et  du   Livrk 

DE    M.     HiPPOLYTE    MeYNADIER    : 

Paris  SAas  le  poiDl  de  vue  pilltresque  el  ■oianeiilal,  on  ElrmeiiLs  d'un  plan  fiténl 
d'ensemble  de  ses  Iravani  d'art  el  d'ulililé  pnbliqne. 

La  libre  circulation  dans  les  rues  de  Paris  devient  de  jour  en 
jour  plus  difficile,  et  quatre  causes  principales  tendent  constam- 
ment à  accroître  et  à  perpétuer  ce  grave  inconvénient  : 

1°  L'augmentation  de  la  population; 

2°  Le  gros  roulage  et  le  mouvement  qu'entraîne  la  distribution 
des  denrées  et  des  olyets  de  toute  espèce  pour  l'approvisionnement 
d'ur>€  population  toujours  croissante; 

3°  Le  changement  qui  s'opère  dans  nos  mœurs  et  dans  nos  usa- 
ges, et  qui  nous  pousse  à  vivre  beaucoup  plus  hors  de  chez  nous 
qu'au  coin  du  foyer  de  famille,  à  rechercher  les  rendez- vous  publics, 
et  par  conséquent  à  multiplier  le  nombre  des  équipages,  des  voi- 
tures, des  omnibus,  etc.,  pour  y  parvenir  plus  vite  et  plus  com- 
modément ; 

r  La  disproportion  qui  existe  entre  les  travaux  d'élargisse- 
ment des  rues  et  l'accroissement  de  la  population. 

Tous  ces  mouvements  divers  obstruent  et  rendent  impratica- 
bles des  rues  faites  sous  l'influence  d'autres  besoins  et  d'autres 
idées,  et  les  accidents  qui  en  résultent  augmentent  d'une  manière 
effrayante.  Il  y  a  dix  ans  que,  sur  une  population  totale  de 
800  000  habitants  on  comptait  dans  l'année  iô4  blessés  et  4  tués 


i8S 


RKVUb;  DE  L' ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


186 


par  suite  des  difUcultés  et  des  désordres  de  la  circulation  ;  aujour- 
d'hui, dans  le  même  intervalle  de  temps,  sur  plus  de  900  000  lia- 
bitants  on  compte  700  cas  de  blessures  et  30  cas  de  mort. 

Dire  que  le  moyen  de  soustraire  les  habitants  de  Paris  à  ces 
malheurs  consiste  à  ouvrir  de  plus  larges  rues,  et  à  les  tracer  de 
manière  à  établir  un  système  de  grande  circulation  capable  de 
desservir  tous  les  quartiers,  c'est  dire  sans  doute  une  vérité,  mais 
une  vérité  de  La  Palisse.  Cependant  il  faut  bien  la  répéter,  et  la 
répéter  même  à  satiété,  puisque  les  bureaux  de  l'Hotel-de-Ville, 
et  ceux  des  ministères  des  travaux  publics  et  de  l'intérieur,  se  re- 
fusent à  l'admettre,  toute  simple  qu'elle  est. 

Nous  devons  donc  applaudir,  nous  qui  avons  prisa  tâche  d'étu- 
dier les  questions  de  haute  édilité  parisienne  et  de  présenter  au 
public  et  aux  administrations  spéciales  les  résultats  de  nos  recher- 
ches à  ce  sujet,  nous  devons  applaudir  et  voir  avec  bonheur  les 
efforts  des  hommes  qui  s'occupent  sérieusement  des  moyens  de 
rendre  les  rues  de  Paris  plus  praticables  et  de  les  mettre  plus  en 
harmonie  avec  les  nouveaux  besoins  que  nous  nous  sommes  créés  ; 
aussi  nous  croyons  nécessaire  de  donner  à  nos  lecteurs  une  idée 
d'un  travail  intéressant,  publié  il  y  a  quelques  mois  sur  cette  ma- 
tière par  M.  H.  Meynadier. 

Pour  mieux  faire  sentir  toute  l'importance  des  travaux  de  ce 
genre,  rappelons  sommairement  les  conditions  que  devrait  remplir 
un  bon  système  de  circulation  dans  Paris. 

En  parcourant  les  grands  ilôts  de  maisons  qui  forment  la  capi- 
tale, l'observateur  est  frappé  de  trois  graves  inconvénients  : 

1°  L'entassement  de  la  population  des  vingt-huit  quartiers  pla- 
cés au  centre  de  la  ville,  c'est-à-dire  sur  un  territoire  qui  ne  me- 
sure pas  la  cinquième  partie  de  lasuperlicieoccupée  par  la  capitale. 
Plus  de  la  moitié  de  la  population  parisienne,  en  effet,  est  îigglo- 
mérée  sur  cet  espace  si  restreint  ; 

2°  L'absence  de  larges  voies  parallèles  à  la  Seine,  pour  mettre 
les  différents  quartiers  du  centre  et  ceux  d'une  même  rive  en  com- 
munication entre  eux  ; 

3°  Le  singulier  contraste  qu'offrent  certaines  rues  perpendicu- 
laires à  la  Seine,  qui,  vastes  et  spacieuses  à  l'entrée  de  la  ville,  se 
resseï  lent  de  plus  en  plus  à  mesure  qu'elles  s'approchent  du  cen- 
tre, où  la  population  est  plus  condensée. 

Ainsi,  sur  les  trente-trois  barrières  de  la  rive  droite,  il  n'y  a,  du 
côté  de  l'Est,  que  les  barrières  de  Rercy  et  du  Trône  ;  du  côté  de 
l'Ouest,  que  celles  du  Roule,  deNeuilly  etdePassy,qui  trouvent  un 
prolongement  facile  dans  le  centre  de  la  ville,  par  les  quais  et  par 
lis  boulevards  intérieurs.  Les  quatre  autres  barrières  principales, 
celles  de  LaVillette,  du  Combat,  de  La  Chapelle,  de  Monceaux,  ne 
peuvent  arriver  au  centre  que  par  des  rues  impraticables  qui  vont 
sans  cesse  se  rétrécissant. 

L'absence  de  voies  de  grande  circulation  parallèles  et  perpendi- 
culaires à  la  Seine,  dans  les  quartiers  du  centre,  explique  com- 
ment, dans  l'immense  massif  de  maisons  compris  entre  la  rue  de 
Richelieu  et  la  place  Royale,  il  existe  un  quartier,  le  Marais,  qui  ne 
participe  en  rien  au  mouvement  et  à  l'activité  des  autres  quartiers; 
et  comment  ceux  des  Halles,  des  Lombards,  des  Arcis,  de  Sainte- 
Avoye,  du  Marché-Saint-Jean,  etc.,  se  corrompent  de  plus  en  plus 
dans  une  affreuse  saleté,  privés  d'air,  de  lumière  et  d'eaux  suffi- 
samment abondantes. 

Et  pourtant,  dans  cette  partie  centrale  du  Paris  de  la  rive  droite, 
comme  sur  toute  cette  rive,  depuis  la  Seine  jusqu'aux  pieds  des 
plateaux  de  Ménilmontnnt,  de  Belleville,  de  La  Villette,  de  Mont- 


martre et  de  Chaillot,  il  n'existe  pas,  à  proprement  parler,  de  diffi- 
cultés de  terrain  :  le  sol  de  la  rive  droite  est  presque  partout  uni- 
forme; que  sont,  en  effet,  les  buttes  de  Saint-Roch,  de  Bonne-Nou- 
velle, du  Temple,  de  Saint-Gervais? 

Sur  la  rive  gauche,  les  communications  sont  restées  dans  un 
état  plus  déplorable  encore.  Comment  s'opère  I&  circulation  dans 
ce  vaste  chaos  de  maisons  compris  entre  le  Jardin-des-Plantes  et  la 
rue  des  Saints-Pères?  Des  ruelles  tellement  sinueuses  et  des  pentes 
si  mal  conduites  qu'elles  repoussent  le  mouvement  plutôt  qu'elles 
ne  l'attirent  et  le  facilitent. 

Si,  sur  la  rive  droite,  nous  avons  rappelé  l'état  d'isolement  du 
Marais,  l'état  de  pourriture  des  quartiers  des  Halles,  des  Arcis,  etc., 
que  dire  du  quartier  Saint-Marcel  et  du  Gros-Caillou  (Invali- 
des) ,  localités  entièrement  en  dehors  de  tout  mouvement  et  plus 
étrangères  au  progrès  parisien  que  n'importe  quelle  petite  ville  de 
France? — que  dire  de  l'état  de  dégradation  du  quartier  Saint-Vic- 
tor, de  Saint-Jean-de-Latran,  de  la  rue  Mouffetard,  en  un  mot  de 
tout  le  versant  de  la  montagne  Sainte-Geneviève  jusqu'à  la  Seine? 

Le  déplorable  état  de  ces  quartiers  s'explique  également  par 
l'absence  de  voies  de  grande  circulation  allant  du  centre  à  la  cir- 
conférence, et  surtout  parce  que,  dans  cette  partie  de  Paris,  il 
n'existe  pas  une  seule  grande  artère  parallèle  à  la  Seine  qui  ratta- 
che entre  eux  les  différents  tronçons  des  larges  rues  qui  partent 
des  barrières  et  se  continuent  dans  de  belles  proportions  jusqu'aux 
approches  des  quartiers  centraux,  où  elles  s'étranglent  tout  à  coup 
quand  elles  devraient  précisément  s'élargir  davantage. 

Ainsi,  les  grandes  routes  qui  aboutissent  aux  barrières  de  Sèvres 
et  de  Vaugirard  trouvent  bien  un  prolongement  jusqu'à  la  Croix- 
Rouge; —  celles  des  barrières  d'Enfer  et  d'Arcueil  jusqu'à  la  place 
Saint-Michel  ; — celle  d'Italie  jusque  vers  le  Panthéon  ;  mais  com- 
ment ces  rues  sont-elles  mises  en  communication  entre  elles  et 
avec  les  quais? 

Tout  le  mouvement  qui  afflue  par  les  rues  de  Sèvres,  du  Cher- 
che-Midi et  de  l'Ouest,  converge  sur  le  Pont-Neuf  par  les  ruesol)- 
struées  et  étroites  du  Four,  de  Bussy  et  Dauphine. 

Tout  le  mouvement  concentré  à  la  place  S<iint-Michel  n'a  d'issue 
un  peu  praticable  que  par  les  rues  Monsieur- le-Prince  et  de  l'O- 
déon,  d'où  il  se  précipite  encore  au  Pont-Neuf  par  la  rue  Dau- 
phine. 

C'est  ainsi  que  la  rive  gauche  a  le  double  désavantage  de  voir 
s'accumuler  presque  tout  le  gros  roulage  sur  un  seul  de  ses  points, 
sans  que  pour  cela  ce  point  soit  habité  ou  vivifié  par  le  grand  com- 
merce :  loin  de  là,  la  rue  Dauphine  et  le  Pont-Neuf  ne  servent 
que  de  transit  aux  marchandises,  qui  toutes  vont  accroître  l'acti- 
vité de  la  rive  droite,  précisément  parce  que/e  commtree  ne  sait  où 
s'arrêter,  où  se  placer  dans  l'étnt  actuel  de  cette  rive.  Il  ne  reste 
donc  aux  habitants  de  ces  rues  que  le  désavantage  d'un  encom- 
brement insupportable  et  tyrannique. 

Est-ce  à  dire  que  nous  méconnaissions  les  difficultés  de  tenain 
que  présente  la  montagne  Sainte-Geneviève,  et  les  diflicultés  plus 
grandes  encore  offertes  par  le  passfige  de  l'étroit  bassin  de  !a 
Bièvre? 

Non  ;  mais  nous  savons  aussi  que  cette  difficulté  de  terrain  pour- 
rait facilement  être  tournée  et  surmontée  à  peu  de  frais  par  l'adop- 
tion d'un  plan  général  de  grande  circulation,  qui  réunirait  les  dif- 
férents quartiers  d'une  même  rive  à  ceux  du  centre  et  aux  deux 
grandes  divisions  de  la  capitale. 

Mais  si  les  besoins  que  nous  venons  de  signaler  sont  nombreux  et 


187 


RKVUK  DE  I/ARCHIThXrURR  BT  DKS  TRAVAUX   PUBIJCS. 


188 


piessanis;  si,  comme  nous  le  prouverons,  ils  peuvent  être  satis- 
faits dans  l'espace  de  dix  ans,  il  faut  se  préoccuper  de  travaux  plus 
pressants  encore,  puisqu'ils  sont  indispensables  pour  fixer  la 
grande  base  de  la  circulation  générale  de  la  ville. 

Ces  travaux  sont  ceux  qui  doivent  rendre  la  Seine  navigable 
dans  l'intérieur  de  Paris  et  faire  disparaître  les  obstacles  qui  l'ob- 
struent depuis  des  siècles,  obstacles  qui  ont  forcé  le  commerce  par 
eau  de  l'approvisionnement  de  Paris  à  s'entasser  à  l'amont  et  sur 
les  canaux  Saint-Martin  et  Saint-Denis,  et  à  laisser  désert  l'aval  et 

le  centre. 

Les  quais,  alors,  ces  uniques  et  larges  voies  qui  traversent  Paris 
dans  son  plus  long  diamètre,  acquerront  toute  l'importance  que 
leur  donne  leur  position  centrale,  puisqu'ils  longent  une  grande 
partie  des  vingt-huit  quartiers  du  centre  que  nous  avons  vus  con- 
tenir plus  de  la  moitié  de  la  population  ;  les  quais  deviendront,  soit 
par  terre,  soit  par  eau,  les  deux  bases  de  la  grande  circulation  dans 
l'intérieur  de  Paris. 

On  le  voit,  pour  répondre  à  ce  programme,  il  ne  s'agit  pas  de 
demi-mesures,  il  ne  s'agit  pas  d'élargir  de  quelques  décimètres  les 
principales  rues  de  Paris. 

Non,  il  faut  prendre  la  ville  dans  son  ensemble,  et,  tout  en  tenant 
compte  d'une  manière  absolue  des  monuments  historiques,  et  d'une 
manière  relative  des  intérêts  individuels  ,  c'est-à-dire,  tout  en 
cherchant  à  harmoniser  ces  derniers  avec  l'intérêt  général  de  notre 
grande  cité,  il  faut  aller  au  fond  des  choses,  établir  un  système  de 
grande  communication  bien  lié,  bien  un,  capable  de  donner  en 
même  temps  une  libre  circulation,  et  d'assainir  les  quartiers  les 
plus  infects  par  de  larges  coupures  pratiquées  dans  les  massifs  des 
vieilles  maisons  qui  les  composent. 

Ce  n'est  donc  pas  nous  qui  traiterons  d'utopies  et  de  visions 
chimériques  les  vues  et  les  projets  de  M.  H.  Meynadier;  nous  nous 
hâtons  au  contraire  de  le  féliciter  d'avoir  donné  à  son  livre  le  sous- 
titre  d'Eléments  d'un  plan  général,  carce  mot  eVfnien/» indique  que 
M.  Meynadier  n'a  pas  dit  toute  sa  pensée  sur  cet  important  sujet  ; 
et  en  effet,  selon  nous,  si  M.  Meynadier  se  fût  arrêté  là  où  s'arrête 
son  livre,  il  n'aurait  pas  atteint  le  but  qu'il  s'est  proposé  :  celui  de 
remanier  Paris  dans  son  ensemble  afin  d'établir  une  complète  har- 
monie entre  les  grands  travaux  déjà  accomplis  et  ceux  qui  restent 
à  faire. 

Le  projet  de  M.  Meynadier  se  divise  en  trois  parties  bien  dis- 
tinctes :  la  première  comprend  les  travaux  qu'il  propose  pour  doter 
Paris  de  grandes  rues,  et  pour  assainir  de  nombreux  quartiers, 
tantôt  par  de  larges  carrefours  et  tantùt  par  la  création  de  squares 
ou  places  plantées  d'arbres.  La  seconde  traite  de  la  distribution, 
dans  Paris,  des  établissements  que  l'État  et  la  Ville  doivent  con- 
struire. Dans  la  troisième,  l'auteur  propose  la  vente  de  certaines 
propriétés  de  nulle  valeur  artistique  ou  historique,  appartenant  à 
des  administrations  publiques,  et  dont  le  produit  serait  affecté  à  la 
construction  des  établissements  publics  dont  il  parle  dans  sa 
deuxième  partie. 

M.  H.  Meynadier  prend  pour  base  de  son  projet  de  grande  viabi- 
lité les  trois  quartiers  qui  se  suivent  et  qui  se  trouvent  juxtaposés 
entre  les  deux  rues  Saint-Martin  et  Saint-Denis  et  leur  prolonge- 
ment, c'est-à-dire  le  quartier  des  Lombards  (de  la  place  du  Chàte- 
let  à  la  rue  aux  Ours);  —  le  quartier  de  la  porte  Saint-Denis  (de 
la  rue  aux  Ours  au  boulevard  Saint-Denis);  —  le  quartier  du  fau- 
iiourg  Saint-Denis  (  du  boulevard  Saint-Denis  aux  trois  bar- 
rières Saint-Denis,  des  Vertus  et  de  La  Villette).  C'est  à  la  cour 


Batave  (au-dessus  de  la  rue  Aubry-le-IJoucher),  que  M.  Mey- 
nadier place  son  centre  d'opération;  il  y  construit  un  large  car- 
refour circulaire  ou  rond-point,  dans  lequel  il  fait  passer  trois 
grandes  rues  qui  partagent,  suivant  plusieurs  directions,  le  grand 
massif  du  vieux  Paris  de  la  rive  droite,  compris  entre  les  quais  de 
cette  rive,  le  Louvre,  la  Bourse,  le  marché  du  Temple  et  la  bi- 
bliothèque de  l'Arsenal. 

Mais  entrons  dans  quelques  détails  sur  les  vues  de  M.  Meynadier. 

RIVE  DBOiTE.  —  Grande  rve  du  Centre.  Cette  rue,  projetée  par 
M.  Meynadier,  part  de  la  place  du  Chàtelet,  vis-à-vis  le  pont  au 
Change,  s'ouvre  un  large  passage  à  travers  les  rues  ignobles  et  in- 
fectes qui,  du  nord  de  la  place  du  Chàtelet,  forment  entre  les  rues 
Saint-Martin  et  Saint-Denis  un  Inextricable  labyrinthe  justfu'au 
boulevard  Saint-Denis  ;  puis  de  ce  boulevard,  cette  grande  rue  du 
Centre,  se  maintenant  toujours  parallèlement  et  à  peu  près  a  la 
même  distance,  entre  le  prolongement  des  rues  Saint-Martin  et 
Saint-Denis  dans  les  faubourgs  de  ces  noms,  arrive  à  gauche  de 
la  barrière  des  Vertus  (côté  ouest),  et  se  relie,  par  deux  embran- 
chements, aux  barrières  de  la  rue  du  Faubourg-  Saint-.Martin 
(barrière  de  La  Villette)  et  à  la  barrière  Saint-Denis. 

La  Grande  rue  du  Centre  aurait  trois  ronds-points  :  l'un,  comme 
nous  l'avons  dit,  à  la  cour  Batave,  l'autre  près  du  marché  au  four- 
rage Saint-Denis  et  de  la  rue  boulevard  de  La  Fayette;  le  troi- 
sième au  mur  de  l'octroi  (barrière  des  VertusV 

Rue  du  Nord-Est.  Cette  nouvelle  rue  partirait  de  l'angle  .\ord- 
VM  de  la  place^de  l'Oratoire  et  de  la  place  du  Louvre  (rue  des  Pou- 
lies-Saint-Honoré),  arriverait  au  rond-point  de  la  Grande  rue  du 
Centre  (Cour  Batave],  passerait,  en  faisant  un  angle  aigu  avec 
cette  rue,  entre  le  Temple  et  le  marché  des  Knfants-Rouges  (.Nord 
de  la  rue  de  Beauce,  Marais),  traverserait  le  boulevard  du  Temple 
et  arriverait  au  Sud  de  la  barrière  Ménilmontant.  Cette  rut  du 
Nord-Est  aurait  également  trois  ronds-points  :  le  premier,  com- 
mun avec  celui  de  la  Grande  rue  du  Centre,  le  deuxième  par  de  la 
le  canal  Saint-Martin,  près  la  rue  Saint-Maur  (Est  de  la  rue  Neuve- . 
Popincourt);  le  troisième  au  mur  de  l'octroi. 

La  rue  de  C Arsenal,  proposée  par  M.  H.  Meynadier,  partant  du 
quai  des  Célestins  (Ouest  de  la  Bibliothè(|ue  de  l'Arsenal),  se  di- 
rige au  Nord-Ouest  de  Paris,  faisant  avec  la  Grande  rue  du  Centre 
un  angle  égal  à  celui  que  formerait  avec  cille-ci  la  rue  du  Nord- 
Est.  De  là  elle  arrive  à  la  place  de  la  Boui-se,  à  langle  formé  par  les 
rues  Notre-Dame-des-Victoires  et  des  Filles-Saint-Thomas.  Cette 
rue  de  l' Arsenal  anvait  deux  ronds-points:  celui  commun  aux  deux 
rues  du  Centre  et  du  Nord- Est  (Cour  Batavcj,  et  un  second  qui  se 
trouverait  à  l'Est  du  marché  Saint-Jean,  et  au  Nord-Est  de  l'é- 
glise de  Saint-Gervais. 

Rue  de  l'Hôlel-de- Ville.  Cette  rue,  proposée  et  adoptt-c  sous 
Louis  XIV,  acceptée  par  tous  les  gouvernants  qui  ont  admi- 
nistré la  France  depuis  ce  temps ,  et  toujours  sur  le  point 
d'être  construite,  est  encore  cependant  à  l'état  de  simple  projet. 
M.  Meynadier  la  fait  partir  du  chevet  de  Saint-Germain-l'Auxer- 
rois,  d'où  elle  se  dirige  sur  la  place  de  la  Bastille  (côté  Ouest',  en 
passant  entre  la  place  du  Chàtelet  et  le  commencement  de  la 
Grande  rue  du  Centre,  au  Nord  de  THôtel-de-Ville,  et  en  traversant 
le  rond-point  de  la  rue  de  l'Arsenal,  à  l'Est  du  marché  Saint- Jean. 

Au  point  de  départ  de  cette  rue  de  VBôtel-de-Ville,  M.  Meyna- 
dier aurait  une  grande  place  autour  de  Saint-Germain  l'Auxer- 
rois,  etc.etc.  PERREYMOND. 

(La  suite  au  prochain  numéro.) 


189 


RKVUE  DE  L'ARCHITKCTIJRK  KT  DES  TRAVAUX  PURI.ICS. 


190 


CHRONIQUE. 

SoMMiiBK.— Appel  a  kos  Lkktkurs  ;  —  Musée  ili-s  Tlicriiics  ;  —  Munumenl  de 
Larroy  ;  —  Slalues  comniémoialives  daus  lis  dciiarlemoiils;  —  Théâiredc  Dunkor- 
qiie  ;  -  Fouilles  à  Bavay  ;  — lloles  d'une  villa  gallo-romaine  déjouverlc  près  d'E- 

Irclat.  —  ClIAUFFAGK   RT  VRNTIHTION  DKS  PRISONS  CELLUI.ilnBS. 

Appel  a  nos  Lectuurs.  —  Nous  voudrions  pouvoir  enregistrer 
chiique  mois  tous  les  monuments  qui  s'achèvent,  tous  ceux  (|ui  se 
commencent  et  tous  ceux  qui  se  projettent.  Malheureusement,  ces  faits 
n'arrivent  pas  tous  à  notre  connaissance,  ou  bien,  s'ils  y  arrivent, 
c'est  trop  souvent  par  la  voie  des  journaux  de  localités  ,  et  trop  sou- 
vent aussi  les  faits  annoncés  par  des  hommes  éirangers:»  la  spécia- 
lité sont  inexacts,  incomplets  ou  exagérés.  Ils  sont  encore  liien  au- 
ircmoni  défigurés  quand  ils  ont  passé  par  l'intermédiaire  de  la  pressi; 
quotidienne  de  Paris.  Nous  i;royons  donc  devoir  ici  renouveler  l'appel 
que  nous  avons  fait  souvent  à  nos  abonnés,  à  nos  correspondants  na- 
turels, et  les  prier,  au  nom  de  l'intéiét  commun,  de  nous  tenir  au 
courant  de  tout  ce  qui  intéresse  l'art  de  bâtir  dans  leur  pays.  Certes, 
si  chacun  d'eux  nous  envoyait  seulement  dix  lignes  tous  les  trois  mois, 
nous  arriverions  il  pouvoir  leur  offrir  une  chronique  des  plus  utiles 
et  des  plus  attrayantes.  Et  pourtant  dix  lignes  sont  bientôt  jetées  à 
la  poste.  Nous  avons  l'espoir  que  ce  nouvel  appel  sera  entendu  de 
nos  lecteurs;  nous  prendrons  le  soin,  d'ailleurs,  de  le  leur  renouveler 
■souvent,  alin  qu'ils  ne  l'oublient  jamais. 


—  Le  conseil  municipal  de  la  ville  de  Paris  vient  d'adopter  le  projet 
irélargisscrnent  de  la  rue  des  Mathuriiis-Saint-Jacques,  en  face  du 
musée  d'archéologie  nationale  (hôtel  de  Cluny).  On  s'occupera  plus  lard, 
dit-on,  d'isoler  ce  monument  et  les  restes  du  palais  des  Thermes  des 
\ieillos  masures  en  plâtre  au  milieu  desquelles  ils  se  trouvent  encais- 
sés. Ainsi  nous  verrons  chaque  jour  se  former  et  grandir  ce  musée  qui 
\ient  de  naître,  et  qui  sera  si  précieux  pour  les  ariisles  qui  voudroni 
faire  des  études  sérieuses  et  réfléchies.  Déjà  plusieurs  dons  sont  venus 
enrichir  la  collection  Diisommcrard.  M.  Sanson-Davilliers,  membre  du 
conseil  général  de  la  Seine,  vient  de  donner  :  1°  une  bague  à  pierre  el 
cassoletie;  2°  deux  vases  en  terre,  couleurs  rouge  et  grise  ;  3"  un  collier 
ou  bracelet  en  ambre  ou  verroterie  ;  i"  une  boucle  ;  5"  un  style  ;  6°  une 
bague  à  chaton;  7°  des  anneaux,  chaineites  et  ornements  en  bronze  ; 
8"  un  glaive;  9°  une  hache  en  silex  ;  10"  el  quatre  escbinisles,  alismans 
renommés  chez  les  Gaulois  et  appelés  œufs  de  ser|)enl.  Tous  ces  ob 
jets,  trouvés  dans  la  propriété  de  M.  Sanson-Davilliers,  à  Hérouval 
(Oise),  sont  de  l'époque  gallo-romaine.  Depuis,  il  a  envoyé  un  cercueil 
en  pierre  et  d'autres  objets  de  la  même  époque. 

il  avait  été  déjà  donné  dernièrement,  par  M.  le  baron  Taylor,  un  cha- 
piteau et  une  console  en  marbre  provenant  d'une  église  chrétienne 
ir.\ihènes. 

Précédemment  un  estampage  en  plâtre,  de  la  belle  console  de  Saint- 
Michel  de  Dijon,  avait  été  envoyé  par  M.  de  Saint-Mesmin,  conservateur 
du  musée  de  Dijon. 

M.  A.  I.enoir  a  aussi  donné  une  remarquable  tapisserie  du  temps  de 
Louis  XII,  et  un  chapiteau  ionique  provenant  du  châieau  de  Madrid, 
construit  au  bois  <le  Boulogne  par  François  1",  el  détruit  à  l'époque  de 
la  Révolution. 

Nous  souhaitons  vivement  que  ces  exemples  trouvent  de  nombreux 
imitateurs. 

M.  A.  Lenoira  retrouvé  chez  un  marbrier  deux  pierres  tombales  d'ab- 
bés de  Cluny.  Ces  abbés  sont  représentés  sur  ces  tombes  dans  leur 
grand  costume,  et  les  inscriptions  font  connaître  leurs  noms  et  la  date 
de  leur  mort.  Il  est  bien  désirable  que  ces  morceaux  préci<'ux  soient  ac- 
quis par  le  ministère  pour  le  musée. 

—  Nous  avons  annoncé  l'an  dernier  qu'un  monument  allait  éire  élevé 
à  la  mémoire  de  Lnrrcy,  l'illuslrc  chirurgien  en  chef  des  armées  de 


l'Empire.  La  commission  de  la  souscription  ouverte  à  cet  effei  a  émis 
le  vœu  que  ce  monument  fût  placé  dans  la  cour  de  l'hôpital  militaire 
du  Val-de- Grâce,  et  le  ministre  de  la  Guerre  a  donné  son  assentiment 
à  ce  projet.  L'exécution  sera  confiée  à  .M.  David  (d'Angers),  auteur 
déjà  ,  comme  l'on  sait ,  de  la  statue  du  célèbre  physiologiste  Bicliat. 

—  Dans  les  départements,  on  voit  chaque  jour  les  populations  décorer 
leurs  places  et  leurs  promenades  publiques  des  statues  de  leurs  illus- 
trations ;  ce  noble  élan  d'orgueil  a  toutes  nos  sympathies ,  non  pas  seu- 
lement parce  que  son  but  est  élevé,  mais  aussi  parce  qu'il  est  bien 
propre  à  inspirer  aux  ariisies  de  généreuses  pensées,  à  réveiller  dans 
leurs  cœurs  ces  grands  sentiments  d'art  qui  s'engourdissent  et  meu- 
rent au  contact  permanent  des  travaux  de  pure  spéculation.  La  ville 
de  Caen  va  élever  un  monument  au  célèbre  mathématicien  Laplace  : 
Quimper  prépare  un  piédestal  à  Fréron  ,  l'adversaire  savant  et  acharné 
de  Voltaire,  le  frein,  l'on  pourrait  dire,  s'il  était  permis  de  com- 
parer les  intelligences  à  des  machines,  le  frein  de  cette  puissante  lo- 
comotive qui  emportait  le  XVIII"  siècle  à  travers  les  hasards  d'un  dé- 
raillement. Le  Havre,  de  son  côté,  s'occupe  d'un  monument  à  Gi- 
simir  Delavigne.  Nous  avons  vu  dernièrement  dans  la  cour  du  Louvre 
la  statue  en  bronze  de  Diiquesne ,  œuvre  remarquable  et  originale  de 
.M.  Dantan  atné.  Elle  est  aujourd'hui  en  roule  pour  Dieppe,  pairie  de 
l'illustre  amiral.  Duquesne  succédait  à  Lnpérouse,  qui,  lui  aussi,  est 
allé  décorer  une  place  publique  d'Alhy ,  sa  ville  natale.  Le  Lapéroiise 
était  aussi  en  bronze  et  de  .M.  ilaggi.  On  nous  promet  pour  l'été  la 
figuie  d'un  troisième  marin ,  de  Jean-Barl ,  ce  fameux  loup  de  mer  à 
qui  Dunkerque  dut  en  grande  partie^  sa  prospérité  el  son  importance 
militaire  sous  Louis  XIV.  Tout  dans  celle  ville  reconnaissante  ,  mais, 
hélas,  bien  déchue,  tout  rappelle  son  héros  favori  ;  on  n'y  jure  que  par 
lui,  elle  Dunkerquois  a  sur  Jean-Bart  quelque  anecdote  toujours  prête. 
La  statue  du  héros  flamand  doit  décorer  une  place  qui  déjà  porte 
son  nom. 

—  Près  de  là,  dans  la  même  ville,  s'achève  un  théâtre  bâti  sur  des 
proportions  assez  vastes.  La  forme  extérieure  de  ce  monument  a  cela 
de  parliculier,  qu'elle  esl  en  partie  circulaire.  L'entrée  principale 
s'annonce  par  un  parallélogramme  en  saillie,  servant  de  péristyle 
au  rez-de-chaussée  et  de  foyer  au  premier.  Le  péristyle  est  d'ordre 
ionique.  Ce  théâtre,  commencé  depuis  longues  années,  a  été  termine 
par  .M.  Develle,  architecte  de  la  ville,  jeune  artiste  distingué.  Par 
malheur,  dans  ce  travail,  .M.  Develle  avait  à  suivre  Jes  plans  de  son 
prédécesseur,  el  (piand  l'atlièvemeiudu  inonumenl.  fulconlié  à  ses  soins, 
il  était  trop  tard  pour  en  niodilier  sensiblement  les  dispoi-itions. 

— On  sait  combien  d'objets  intéressants  et  précieux  pour  l'archéologie 
les  fouilles  faites  à  Bavay  (ancienne  Baviacum)  ont  déjà  mis  à  jour. 
Dans  la  parlic  où  elles  s'exécutent  aujourd'hui  ,  on  a  découvert  un 
{^raiid  nombre  de  voies  qui  se  croi.sent  en  lous  sens,  ce  qui  porierail 
.1  penser  (pie  ces  voies  ne  sont  autre  chose  qiie  les  rues  de  l'ancienne 
ville  romaine.  Il  parailiail  que  leur  sol,  pour  la  plupart,  serait  fi.riiK- 
d'une  première  couche  épaisse  d'environ  15  centimètres  ,  cl  composée 
de  cendres  bien  tassées,  mélangées  de  charbon.  Sur  celte  couche  se 
liouve  un  lit  de  grosses  pierres  posées  à  plat  :  ce  lit  a  de  5U  à  60  cen- 
limètres  d'épaisseur.  Les  vides  qui  existent  entre  ces  pierres  sont  éga' 
Icment  remplis  de  cendres  cl  de  charbon.  Un  second  lit  d'une  é|wis- 
seiir  de  40  à  50  centimètres,  aussi  formé  de  pierres,  mais  moins 
grosses  que  les  précédentes,  et  liées  ensemble  par  du  gravier,  est 
siirmonlé  d'un  troisième  lit  composé  de  pierrailles ,  de  tuileaux 
concassés  et  de  gravier,  de  70  à  80  ceniimèlres  d'épaisseur.  En  quel- 
ques endroits ,  on  remarque  une  couche  de  ciment ,  épaisse  de  15  à  IH 
cciilimèties;  mais  il  reste  peu  de  vestiges  de  celte  première  couche, 
que  le  soc  de  la  charrue  a  détruite.  Ces  chaussées  avaient  donc  de 
\m  90  à  2""  23  d'épaisseur  totale. 

Dans  la  incnie  ville,  derrière  l'église,  on  a  irouvé  sous  une  ca\e 
les  restes  d'un  hypocausir. 


191 


RKVUK  DK  LAUr.HITKCTURK  ET  DKS  TBAVAUX  PUBLICS. 


192 


r>liisiciirs  aiilres  décoiivcrles  ont  élé  faites  rrceinmenl  à  Buvay  , 
mais  elles  consisleni  presque  toiiies  en  poteries,  ustensiles  en  bronze, 
monnaies,  fie. 

—  Sur  ini  aiilre  point  de  la  France,  sur  les  côtes  de  la  Manche,  au 
village  de  Bordeaux,  près  de  l'ancienne  station  romaine  d'Élrelal , 
des  fouilles  dirigées  par  M.  l'abbé  Cochet,  aumônier  du  collogc  royal 
(le  Uouen,  ont  amené  aussi  des  découvertes.  On  a  trouvé  sous  le  sol 
des  restes  de  constructions  romaines  qui  durent  faire  partie  d'une 
villa.  Dix-sept  bases  de  colonnes  ont  fait  reconnaître  une  galerie  qui 
devait  être  formée  de  dix-neuf  colonnes.  Un  tronçon  de  fftl  a  donné  le 
diamètre  de  4G  ceutirnèlres.  Les  bases  sont  es|(acées  entre  elles  de  2°" 
20,  et  la  galerie  devait  avoir  une  longueur  de  54™  SO.  Elle  est  suivie 
d'un  cryplo-porlique  qui  lui  donne  nu  développement  de  113  mètres; 
loutefois  sa  largeur  n'est  que  du  2""  50.  On  a  trouvé  dans  le  sol  plusieurs 
objets  de  tuilclie  en  bronze,  des  armes,  des  poteries,  des  débris  de 
ciment  colorié  eu  rouge,  (|ui  sans  doute  recouvrait  les  murs,  des  mé- 
dailles, des  hameçons,  des  ossements  d'animaux,  et  une  grande  quan- 
tité d'écaillés  d'buiires. 

Un  fait  remarquable  s'est  présenté  dans  ces  découvertes  :  les  seules 
médailles  trouvées  sont  du  llaul-Empire.  Dans  la  noiice  publiée  sur 
ce  sujet  par  VÉcho  du  Monde  savant,  M.  l'abbé  Cochet  entre  sur 
ce  fait  dans  des  considéiations  que  nous  allons  reproduire. 

«  Il  est  remarquable,  dii-il,  que  dans  la  plus  grande  partie  des  mo- 
numents romains  visités  dans  nos  contrées,  on  n'a  trouvé  que  des  mé- 
ilailles  des  premiers  siècles.  Il  en  a  élé  ainsi  dans  les  maisons  gallo-ro- 
maines de  .Maulévrier,  de  Bracquemonl,  d'Éticlat  et  de  Château-Gaillard. 
Il  est  digne  de  remarque  que  le  même  fait  existe  en  Basse-Normandie, 
ei  qu'il  a  élé  observé  par  les  antiquaires.  «  Quant  aux  médailles  trou- 
vées dans  noire  pays,  dit  M.  Yaiigcois,  de  l.aigle,  il  est  un  fait  sur  le- 
([iiel  nous  devons  appeler  l'atlenlion  de  nos  lecteurs  :  c'est  qu'elles  sont 
lotîtes  du  Haut-Empire,  c'est-à-dire  du  temps  des  premiers  empereurs 
romains.  Nous  n'en  connaissons  pas  de  postérieures  à  Gralien,  mort  à 
Lyon  en  583.  On  doit  conclure  de  là  que  l'occupation  de  notre  pays  par 
les  successeuis  de  César  a  cessé  peu  après  la  fin  du  IV» siècle.» 

«Mainicnaiiton  demandera  peut-être  comment  le  grand  édilice  a  péri. 
Voici  ce  que  j'ai  jiu  lire  au  sein  iiiêtne  des  ruines  explorées.  Toute  la 
surface  du  moiiumcul  était  recouverte  d'une  couche  épaisse  de  char- 
bons et  de  cendres.  Jamais  elle  n'avait  moins  de  20  centimètres,  et  par- 
fois elle  s'élevait  h  la  profondeur  de  1  mètre  60  centimètres.  L'incendie 
qui  dévora  cet  édifice  avait  élé  si  violent,  qu'il  avait  fondu  les  méiaux, 
brûlé  les  ossefnents  et  calciné  les  plus  durs  silex. 

«  Eh  bien,  cetle  destinée  de  notre  monument  a  été  celle  de  toutes  les 
villas  de  la  Gaide  et  de  tous  les  établissements  romains  dans  nos  con- 
trées. Fouillez  le  sol  de  la  France  septentrionale,  et  vous  trouverez 
partout  une  couche  épaisse  de  cendre  qui  recouvre  les  ruines  comme 
un  vaste  drap  mortuaire.  La  trace  des  incendies  est  pai  tout  vivante  sur 
le  sol,  et,  semblables  à  la  lave  des  volcans  éteints,  de  noiis  brandons 
semblent  dire  qu'un  océan  de  feu  a  autrefois  ravagé  celte  terre.  L'his- 
toire se  tait  sur  notre  pays  à  l'époque  gallo-romaine.  Le  silence  du 
tombeau  enveloppe  la  plupart  des  élabliss.-meuis  romains  que  nos  bê- 
ches découvrent,  et  de  lotîtes  les  pages  de  leur  histoire,  nous  n'en  pou- 
vons lire  qu'une  seule,  la  dernière.  Oh!  celle-là,  c'est  qu'elle  est  écrite 
en  lettres  de  feu. 

«  Interrogez  donc  les  hommes  qui  ont  fouillé  le  sol  de  la  France  et  de 
l'Angleierre.  Demandez  à  ces  patients  antiquaires  qui  ont  cherché  avec 
lanl  d'ardeur  à  lire  dans  le  grand  livre  que  la  terre  recouvre,  et  tous 
vous  répondiont  unanimement  que  dans  ce  pays  le  monde  romain  a  élé 
la  proie  de  violents  incendies. 

«  M.  Fallue,  qui  a  ex|doré  les  boids  de  la  Seine,  qui  a  fouillé  les  villas 
de  Maulévrier,  du  Lendin  et  de  Sainte-Croix-sur-Aizier,  les  a  trouvées 
couvertes  de  cendres  séculaires,  et  lorsque  plu>  tar.l  il  a  demandé  aux 
collines  d'HarlIeur  les  restes  de  Caracolinutn,  il  les  a  trouves  couveils 
de  cette  noire  pon.ssière  qu'il  appelle  l'accompagnement  obligé  de  tout 


établissement  gallo-romain.  M.  Gaillard,  dans  le  kilnéaire  de  Lille- 
bonne,  a  vu  des  poutres  et  des  lattes  carbonisées.  M.  Duméril,  en  fouil- 
lant à  Vieux,  près  Caen,  a  trouvé  le  sol  qui  couvrait  celte  ville  antique 
plein  de  charltons,  de  cendres  et  de  tuiles  noircies  par  le  fea.  «  A  la  pro- 
fondeur de  66  centimètres,  dit-il,  le  terrain  loui  entier  était  recouvert 
d'une  couche  uniforme  et  horizontale  de  matières  brûlées  qui  n'avait 
pas  moins  d'un  décimètre  d'épaisseur.  » 

«  C'est  ainsi  que  se  trouvent  confirmés,  après  quatorze  siècles,  les  ré- 
cits des  historiens  qui  nous  ont  raconté  d'une  manière  si  lamentable  les 
invasions  des  Barbares.  Dès  l'an  259,  les  Allemands  commencèrent  à 
ravager  la  Gaule,  se  frayant  ainsi  un  passîigc  vers  l'Italie.  Du  temps  de 
l'robus  (277)  l'invasion  devint  générale.  Les  Francs,  les  Saxons  surtout, 
se  montrèrent  par  milliers  sur  les  côlcg  de  la  Manche;  tous  les  poris 
en  furent  encombrés.  Probus  défendit  vaillamment  le  rivage,  et  après 
mille  combats,  il  parvint  à  rétablir  momentinenient  la  paix.  En  282,  les 
ennemis  revinrent  à  la  charge.  Carrausius,  liomine  courageux  sorti 
du  peuple,  les  tint  en  échec  pendant  sa  vie  ;  mais  après  sa  mort  ils  re- 
commencèrent leurs  irruptions  avec  tant  de  violence,  que  la  Gaule-Bel- 
gique devint  un  vaste  désert,  inculte,  inhabité,  et  silencieux  comme  la 
mort.  Ce  fut  à  cetle  époque,  sans  donle,  que  notre  liitoral  prit  le  nom 
de  Saxoniquc  :  liUut  Saxonicum.  A  la  lin  du  III*  siècle,  ConsUnlin 
rendit  la  paix  ..  ces  peuples  par  la  prise  de  Gessoriacum.  (Boulogne.) 
«  Pourtant  ce  n'était  qu'au  V'  siècle  que  la  Gaule  devait  arriver  à 
l'apogée  de  ses  malheurs.  Vers  l'an  400,  nous  voyons  apparaître  des 
masses  de  Barbares  ;  ce  sont  les  Sucvcs,  les  Alains,  les  Vandales,  les 
Gèles,  les  Goths  et  les  Bnrgondes.  C'est  une  tempête  effroyable,  un 
déluge  de  ravageurs  :  debacchantibus  bvrbarit.  Ils  sortent  tomme  des 

nuées  de  s  les  points  de  I  horizon.  Pendant  dix  ans,  ils  déchargeiil 

sur  notre  pays  toute  leur  rage,  loiite  leur  fureur  barbare.  Tout  nage 
dans  le  sang,  tout  devient  leur  proie.  Incubai  barbariei  seva  lempertat. 
S'ils  se  rencontrent,  c'est  pour  se  dévorer  les  uns  les  autres,  et  ils  ne 
s'accordent  que  pour  détruite  et  pour  brûler. 

«  La  plus  redoutable  invasion  fut  celle  dont  saint  Jérôme  nous  a  con- 
servé le  souvenir.  Elle  eut  lieu  pendant  les  années  409,  410  et  411.  Ce 
fut  dans  ce  vaste  bassin  des  Gaules,  depuis  le  Bhin  jusqu'aux  Pyré- 
nées, une  effroyable  marée  de  B.irbares.  L'on  vit  des  llou  de  peuples 
aller  et  revenir  comme  les  Ilots  du  déluge,  euntet  el  redeunltt,  et  pro- 
duire parmi  nous  un  déluge  universel.  On  a  compté  jusqu'à  dix  peuples 
à  la  fois  ;  les  Quades,  les  Vandales,  les  Sarmates,  les  Bnrgondes,  les 
Allemands,  les  Allains,  les  Gépides,  les  Hernies,  les  Saxons  et  les  Pan- 
noniens.  Les  grandes  métropoles,  telles  qu'Amiens,  Arras,  Tournay, 
Mayence,  Reims,  Thérouenne,  Spire,  Strasbourg,  Lyon  et  Narbonne, 
disparurent  dans  les  (lam-nes.  C'en  était  fait  du  monde,  si  l'arche  du 
christianisme  n'egt  surnagé  sur  les  eaux  de  ce  nouveau  déluge.  » 

CaicrriGE  et  vEKTiLiTion  DES  PBisoKs  ccLLCLAiiies.  —  Dans  un  moment  où 
tout  le  monde  s'occupe  des  prisons  cellulaires.  Il  importe  que  les  arcl.llecles 
soient  bien  renseignés  sur  loui  ce  qui  concerne  la  ventilation  et  le  chautTage  de 
ces  édifices.  L'homme  renfermé  pendant  plusieurs  mois  consécutifs,  ei  même 
parfois  pendant  plusieurs  années  dans  une  étroite  cellule,  devient  plus  que  tout 
autre  sensible  aux  changements  de  la  température,  et  réclame  plus  que  tout 
aulrc  aussi  un  air  pur  el  sain.  Dans  un  de  nos  numéros  prochains,  M.  René  Du- 
voir  donnera  un  travail  dans  lequel  il  mettra  sous  les  yeux  de  nos  lecteurs  les 
différentes  dispositions  d'appareils  de  chauffage  et  de  ventilation  adoptées  par 
l'administration  pour  les  besoins  des  prisons.  Nous  espérons  que  cetle  publica- 
tion, faite  à  propos,  sera  de  nature  à  épargner  beaucoup  de  recherches  el  d'em- 
barras à  ceux  de  nos  confrères  qui  voudraient  s'occuper  de  la  question  des 
prisons. 


CÉsAB  DALY, 

Direclnr  rédacteur  en  ektf, 
membre  de  f  .Académie  royale  drs  Beau  \ -Ans  de  Sioi-kholm,  el  membre 
honoraire  cl  correspondant  de  l'Institut  rojal  dos  Archilecles  brilanniquct. 


I-ABIS.    —    TVP.    LtCRAUPK    KT   COUP.,   llrE   DtUIETTK,   2. 


Revue,    &fnéraU^  de   i'Ârchit&cM/re'   et    dej'  J'ravaux   Publia  6 .  Rua  de.  Furstcmierq .  Paru-. 


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CALORIFERE    VENTOATEUR    EN    FONTE, 

Invente      paj'      M'. 
EÉNÉ    DU  VOIR- 


B-n^nf    r-,-Jn^rn/f^    cL^  l'Architcciure    et   de^  f'rauazis  J\Uiius  .  6.  Rue   iJjr  lAx/'sùuîiha-a .Fn/ij-. 


Vr.1  S  F!  ic. 


F,g.2. 


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f^..ri    n;,.^u-  y. 


Jmft.     i/>    .'.iK'intt>iti/i- 


APPAREIL  DE  LESSIVAGE  PAR  CIRCULATION 

Inventé    pat-    M!" 
RS[ÏB'\   D0VOIR. 


R£viL&   Générale'   de-    l'ArciuldcUirey  &t  cLes   'IhcœoLux^  PuhUos.  6 .  Rua   d&-  Fursterrvberq .  Paru. 


Vol  B.K.tl 


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Ràit^  J)ia>eir    dci  . 


aW^rm^  jolf. 


BLANCHISSERIE. 


Système    ie    M'^    Reae    Duvoir . 


193 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  J)ES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Ifé 


^HK 


MIKHK  INSTRUCTION  DU  COMITK  HISTORIQUE 

nKS    ARTS    ET    MONUMENTS. 

{Siiilc  l't  lin.  Vmj   col.  97  cl  U.ïJ. 

MONUMENTS    MEUBLES. 


l'HEMIERE  EPOQIE.  —  I^DÉPE^D\!VCE  CAILOLSE. 

Les  monuments  meubles  de  cette  époque  qu'on  découvre  habi- 
tuellement sur  le  sol  de  la  France  sont  : 

I"  Des  armes, 

■2"  Des  ustensiles  d'un  usa|,'e  civil  ou  religieux, 

3"  Des  poteries, 

4"  Des  monnaies. 

Les  armes  gauloises,  defer  onde  bronze,  antérieures  à  l'influence 
grecque  ou  à  la  conquête  romaine,  sont  ou  inconnues  ou  très-dif- 
ficiles à  distinguer.  Les  haches  en  silex,  d'un  emploi  beaucoup 
plus  religieux  que  guerrier,  paraissent  appartenir  à  la  civilisation 
aborigène;  mais  on  ne  peut  douter  que  la  population  gauloise  n'ait 
continuée  faire,  dans  les  temps  romains,  un  usage  commémoratif 
de  ces  objets. 

On  a  constaté,  en  fait  d'armes  et  d'ustensiles  purement  gaulois, 
l'emploi  du  silex,  de  la  pierre  ollaire  et  de  l'os.  Certains  bijoux 
d'or,  par  le  caractère  du  travail,  peuvent  être  attribués  à  l'époque 
primitive  ;  quelques  anneaux ,  bracelets  et  colliers  de  bronze 
offrent,  sous  le  rapport  de  l'attribution,  le  même  degré  de  proba- 
bilité. Les  poteries  gauloises  ne  se  distinguent  des  gallo-romaines 
que  par  l'imperfection  du  procédé  céramique  ;  on  n'y  rencontre, 
en  général,  ni  symboles  ni  représentations  ;  leur  étude  intéresse 
spécialement  l'histoire  des  arts  industriels. 

Les  monnaies  purement  gauloises  sont,  en  revanche,  très-nom- 
breuses :  on  en  connaît  en  or,  en  électrnm,  en  argent,  en  bronze 
et  en  potain.  .Nous  en  parlerons  bientôt  dans  un  chapitre  consacré 
spécialement  à  la  numismatique. 

En  gén(''ral,  on  doit  recommander  une  surveillance  exacte,  un 
•soin  persévérant  et  minutieux  dans  tout  ce  qui  concerne  les  inves- 
tigations gauloises.  0\>  a  vu  tout  ce  que  l'étude  des  tombelles  ,  des 


ossuaires,  des  oppida,  des  temples  et  enceintes  druidiques  pouvait 
produire  de  précieux  résultats.  Le  terrain  compuis  dans  ces  en- 
ceintes et  celui  du  voisinage  ne  sauraient  être  négligés.  Les 
moindres  vestiges  du  séjour  de  l'homme  ou  des  animaux  domes- 
tiques dans  ces  localités  peuvent  conduire  à  des  inductions  cu- 
rieuses (i). 

DEl'XIÈME  ÉPOQlE.  —  COLOMSATIO\  fiRECQlE. 

On  trouve  dans  le  Midi  de  la  France  un  grand  nombre  de  mon- 
naies grecques,  quelques  rares  inscriptions,  des  marbres  plus  rares 
encore,  des  figurines  et  des  ustensiles  de  bronze,  des  débris  seide- 
ment  de  vases  et  de  bijoux. 

l^ne  mine,  jusqu'à  présent  beaucoup  plus  riche  que  celle  des 
marbres  ou  inscriptions  appartenant  aux  villes  grecques  de  la 
Gaule,  est  celle  des  figurines  de  bronze,  de  travail  indubitable- 
ment grec,  que  le  goût  des  riches  amateurs  a  dû ,  dès  les  temps 
antiques,  faire  affluer  sur  notre  sol.  Il  est,  du  reste,  à  peu  près 
inutile  de  donner  aucune  instruction  précise  à  ce  sujet,  les  monu- 
ments de  cette  espèce  se  recommandant  d'eux-mêmes  par  le  mé- 
rite de  l'art,  et  la  matière  dont  ils  sont  formés  ne  présentant  aucun 
appAt  à  la  cupidité. 

On  doit  recommander  aux  correspondants  de  recueillir  avec  le 
plus  grand  soin  ,  sur  le  sol  des  villes  grecques,  les  moindres  frag- 
ments qui  pourraient  nous  faire  reconnaître  avec  certitude  de  quel 
genre  de  poterie  les  Grecs  de  la  Gaule  faisaient  usage. 

TROISIÈME  ÉPOQlE.  —  COXQIÊTE  ROMAINE. 

Le  plus  grand  nombre  des  monuments  antiques  qu'on  découvre 
sur  le  sol  de  la  Gaule  appartiennent  à  l'époque  de  la  domination 
romaine.  On  peut  diviser  les  monuments  en  cinq  classes  princi- 
pales : 

1°  Les  inscriptions  et  marbres; 

2°  Les  vases  et  bijoux  en  or  et  en  argenl  ; 

3°  Les  bronzes  ; 

4"  La  poterie  et  les  verres  ; 

:>"  Les  monnaies  et  médaillons. 

§  I".  Tnscbiptio^s  et  Marbbes. 

Les  inscriptions,  n'offrant  aucune  valeur  commerciale,  sont  pai 
cela  même  les  plus  faciles  à  conserver  de  tous  les  monuments.  Un 
travail  utile  à  entreprendre  dans  tous  les  lieux  qui  fourmillent 
d'inscriptions  romaines ,  c'est  de  former  un  recueil  exact  de  toutes 
celles  qui  se  trouvent  dispersées  dans  les  maisons  et  incrustées 
dans  les  murs,  en  indi((uant  la  position  et  la  proportion  de  cha- 
cune d'elles.  Les  correspondants  feront  bien  de  ne  pas  réserver 
pour  leur  propre  usage  de  semblables  recueils,  s'ils  en  possèdent 
d'anciens,  ou  s'ils  en  forment  eux-mêmes  de  nouveaux.  On  doit 
les  engager  à  déposer  au  moins  une  copie  de  ces  recueils  dans  la 
bibliothèque  publique  la  plus  voisine  de  leurs  résidences.  Beaucoup 
de  personnes  croient  faciliter  la  lecture  des  inscriptions  en  rem- 
plissant d'une  teinte  rouge  le  creux  des  lettres  :  on  doit  s'abstenir 


(1)  Nous  reconiiiiandons,  comme  un  modèle  dans  ce  genre  de  reclierches,  !•• 
travail  que  M .  Féret,  de  Dieppe,  a  publié  sur  la  cit*  do  I.imes.  —  Mimoiret  de 
la  Scciété  drs  Aniiquairet  de  Xormandie,  lonie  III. 

T.    V  W 


198 


REVLK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


196 


de  cett«  opération,  pour  peu  que  les  linéaments  tracés  sur  la  pierre 
ou  le  marbre  présentent  la  moindre  incertitude. 

Les  correspondants  doivent  suivre  avec  soin  les  démolitions 
d'anciens  édifices  et  les  constructions  nouvelles.  Il  leur  sera  tou- 
jours facile  d'obtenir  les  pierres  ornées  d'inscriptions,  an  moins 
pour  l'échange  de  pierres  nues  de  mêmes  dimension  et  qualité. 
S'ils  rencontrent  à  cet  égard  de  la  résistance  chez  les  construc- 
teurs et  démolisseurs,  ils  chercheront  à  obtenir  au  moins  que  les 
inscriptions  ne  soient  pas  retournées  ou  couvertes  de  ciment  ou 
d'enduit  dans  la  construction,  etqu'on  les  place  à  portée  de  l'œil  des 
passants.  On  recommande  aux  correspondants  qui  se  seraient  pro- 
curé par  ces  soins  assidus  des  inscriptions  antiques,  de  n'en  décorer 
leurs  habitations  qu'au  cas  où  eux-mêmes  occuperaient  le  sol  d'une 
ville  antique,  et  où  leur  résidence  serait  trop  éloignée  d'un  musée 
de  ville  ou  de  département.  Le  mieux,  toujours,  est  de  faire  trans- 
porter les  inscriptions  au  musée,  à  la  bibliothèque  s'il  n'y  a  pas  de 
musée,  à  la  mairie  s'il  n'y  a  pas  de  bibliothèque. 

On  doit  veiller  avec  la  même  attention  à  ce  que  des  bas-reliefs 
ou  des  figures  de  ronde-bosse  ne  soient  pas  employés  comme  ma- 
tériaux ordinaires  dans  les  constructions  nouvelles.  A  moins  d'un 
mérite  d'art  tout  à  fait  extraordinaire,  il  ne  faut  pas  exposer  les 
marbres  aux  risques  des  transports.  Les  correspondants  averti- 
ront, autant  que  possible,  de  leur  erreur,  les  propriétaires  de 
marbres  qui  se  soumettraient  à  des  dépenses  considérables  d'em- 
ballage et  d'expédition,  dans  l'espérance,  presque  toujours  trom- 
pée, de  tirer  commercialement  parti  de  la  vente  des  marbres  an- 
tiques. Les  marbres,  comme  les  inscriptions,  doivent  autant  que 
possible  rester  dans  la  localité  qui  les  a  fournis.  Les  marbres  inté- 
ressants par  l'art  ou  le  sujet  sont  rares;  comme  renseignement 
local ,  il  n'en  est  aucun  qui  ne  soit  digne  d'attention. 

§  II.  Vases  et  Bijoux  km  or  et  en  abgent. 

Toutes  les  fois  qu'un  correspondant  aura  connaissiince  de  la 
découverte  de  vases  ou  de  figures  d'argent,  de  bijoux  d'or  et  autres 
objets  en  matière  précieuse  et  menacés  d'être  anéantis  par  le  creu- 
set, il  devra,  autant  que  possible,  se  transporter  de  sa  personne 
sur  le  lieu  delà  découverte,  donner  avis  au  propriétaire  de  la  valeur 
d'affection  qui  s'attache  aux  objets  antiques  de  cette  nature,  em- 
pêcher par  toutes  les  voies  de  persuasion  que  les  objets  ne  soient 
transportés  chez  les  orfèvres,  les  suivre  chez  ces  derniers  s'il  y  a 
lieu,  et  réveiller  chez  eux  le  sentiment  intéressé  qui  peut  assurer 
la  conservation  des  monuments. 

Quand  ce  premier  danger  est  passé,  les  objets  en  matière  pré- 
cieuse s'écoulent  naturellement  par  les  voies  du  commerce  des  an- 
tiquités. Pour  peu  que  la  masse  de  chaque  découverte  soit  consi- 
dérable, il  est  bien  difficile  que  les  propriétaires  trouvent  dans  les 
ressources  locales  un  moyen  d'assurer  la  possession  de  tels  monu- 
ments au  pays  qui  les  a  produits.  Les  correspondants  doivent  au 
moins  s'employer  pour  qu'il  reste  dans  le  plus  prochain  musée  au 
moins  un  échantillon  des  monuments  découverts,  ou  suppléera 
leur  absence  par  des  empreintes  et  des  dessins. 

§  III.  Bbokzes. 

On  comprend  sous  ce  titre  :  I"  les  fragments  de  statues  colos- 
sales ou  de  grandeur  naturelle,  les  figures,  et  généralement  toutes 
les  représentations  en  grand  et  en  petit  d'hommes  et  d'animaux; 


2°  les  armes,  vases,  instruments  et  ustensiles  d'un  usage  militaire, 
religieux  et  civil  ;  3°  les  décrets  et  actes  civils  sur  tables  et  lames 
de  bronze. 

La  plupart  des  bronzes,  comme  les  marbres,  n'intéressent  que 
les  localités  dans  lesquelles  on  les  trouve.  Pour  peu  qu'on  habite  le 
sol  d'une  ville  antique,  il  est  aisé  de  formera  peu  de  frais  des  col- 
lections dans  lesquelles  figurent  : 

Des  représentations  plus  ou  moins  grossières  de  divinités  ro- 
maines ou  gallo-romaines  ; 

Des  fers  de  lance,  des  haches  et  des  épées  en  bronze,  des  débris 
de  casque  et  de  cuirasse  ; 

Des  débris  de  vases  religieux  ,  domestiques  ou  funéraires  ; 

Des  clefs,  des  fragments  de  revêtement,  des  clous,  des  fibules. 
des  boutons,  des  cuillers  et  autres  objets  qui  se  rapportent  aux  ha- 
bitations, aux  vêtements  et  à  la  nourriture  des  Romains. 

On  joint  aisément  à  de  telles  collections  des  épingles  en  os.  des 
ustensiles  en  plomb,  etc.  Les  instruments  de  fer  se  trouvent  en  gé- 
néral trop  oxydés  pour  que  la  forme  n'en  soit  pas  complètement 
altérée;  toutefois  on  peut  tirer  de  ces  instruments  de  bonnes  indi- 
cations. Les  cachets  de  médecins  oculistes,  les  tessères  des  gladia- 
teurs, sont  au  nombre  des  objets  les  plus  précieux  pour  l'étude  des 
mœurs  antiques  ;  les  fibules  et  autres  objets  en  bronze  qui  pré- 
sentent des  vestiges  d'émail,  doivent  être  recueillis  avec  grand 
soin,  comme  propres  à  éelaircir  une  partie  peu  connue  de  l'indus- 
trie des  anciens. 

En  général,  dans  la  formation  de  semblables  collections,  com- 
posées d'objets  dont  la  valeur  commerciale  est  limitée,  les  corres- 
pondants ne  devront  s'attacher  qu'aux  monuments  qu'ils  auront 
vus,  pour  ainsi  dire,  sortir  de  terre  sous  leurs  veux.  Dans  la  plu  . 
part  des  départements ,  les  objets  de  comparaison  sont  trop  peu 
nombreux  pour  que  chacun  puisse  espérer  d'habituer  ses  yeux  a 
distinguer  avec  certitude  les  monuments  réellement  antiques  des 
monuments  falsifiés  dont  le  commerce  abonde  :  mieux  vaut  un 
choix  très-borné,  mais  sur,  qu'un  ramas  d'objets  sons  authenticité, 
au  milieu  des(|uels  se  perdent  ceux  qui  méritent  une  véritable 
confiance. 

Les  objets  réellement  précieux  en  bron7e  ne  courent  pas  le 
nsfjue  d  être  anéantis.  11  n'y  a  pas  d'année  qui  n'amène  à  la  sur- 
face du  sol  de  la  France  un  certain  nombre  de  figurines  de  bronze 
tout  à  fait  dignes  d'admiration.  Le  devoir  des  correspondants  devra 
se  borner,  en  ce  qui  concerne  les  bronzes,  à  stimuler  l'amour- 
propre encore  plus  que  l'intérêt  des  possesseurs,  à  les  engager  a 
déposer  dans  les  collections  locales  les  figurines  ,  armes  ,  vases  et 
ustensiles  qui  leur  appartiennent ,  plutôt  qu'a  les  faire  passer  dans 
le  commerce  ;  à  s'efforcer  enfin  de  leur  faire  comprendre  (ju'a 
l'égard  des  prix  d'affection,  les  bénéfices  sont  presque  toujours 
nuls  pour  les  premiers  détenteurs. 

§  IV.  Tefires  cuites,  Potehifs  et  Verreries. 

Le  territoire  de  la  Gaule  fournit  abondamment  des  vases  de 
terre  rouge  avec  des  ornements  ou  des  figures  en  relief.  Ceux  de 
ces  vases  qu'on  trouve  entiers  et  intacts  sont,  comparativement, 
rares  et  assez  précieux  ;  la  plupart  portent  au-dessous  du  culot  une 
inscription  latine  qui  est  le  nom  ou  la  marque  du  fabricant. 

On  découvre  moins  fréquemment  d'autres  vases  d'un  usage  évi- 
demment funéraire,  dont  la  couverte,  d'un  noir  ardoisé,  et  l'ex- 
trême légèreté,  rappellent  la  fabrique  de  la  Campanie.  Ces  vase." 


19- 


REVUK  DE  LARCHITEGTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


198 


offrent  pour  ornements  de  simples  rosaces,  et  presque  toujours 
l'inscripUon  AVE,  en  peinture  bianclie  superposée  et  incorporée 
par  la  cuisson  à  la  couverte  noire.  La  cassure  de  ces  vases  montre 
une  pâte  d'un  rouge  assez  vif. 

Les  amphores  de  simple  terre  cuite,  et  les  autres  débris  appar- 
tenant à  la  poterie  domestique,  offrent  un  beaucoup  moindre  in- 
térêt. 

On  ne  remarque  pas  une  très-grande  variété  de  sujets  parmi  les 
llgurines  de  terre  cuite  qu'on  découvre  ordinairement  sur  le  sol  de 
la  France.  Nous  devons  principalement  signaler  des  figures  de  Ve- 
nus Genitrix,  des  animaux  de  différentes  espèces,  et  surtout  les 
bustes  embrassés  d'Isis  et  de  Sérapis,  et  autres  vestiges  de  l'infil- 
tration des  religions  égyptiennes  en  Gaule;  le  travail  de  ces  figures 
est  rarement  fini  et  délicat. 

La  verrerie  antique  consiste  surtout,  dans  notre  pays,  en  urnes 
de  verres  destinées  à  renfermer  des  cendres.  On  en  découvre  un 
grand  nombre,  et  souAcnt  de  remarquables  pour  la  forme  et  la  di- 
mension. A  côté  de  ces  urnes  se  recontrent  presque  toujours  de  pe- 
tits lecijthus,  ou  vases  à  parfums,  improprement  nommés  lacryma- 
toires. 

Il  n'est  aucune  partie  de  la  France  qui  ne  puisse  fournir  des 
monuments  analogues  à  ceux  que  nous  venons  de  décrire,  en  assez 
grande  abondance  pour  que  les  musées,  et,  à  défaut  des  musées, 
les  bibliothèques  des  villes  n'en  soient  pas  pourvues. 

§  V.  Numismatique. 

Les  monuments  numismatiques  qu'on  découvre  sur  le  sol  de  la 
Gaule  appartiennent  à  diverses  origines,  et  peuvent  être  distingués 
eu  plusieurs  classes  ;  on  y  trouve  des  médailles  grecques,  des  mé- 
dailles gauloises  et  des  médailles  romaines. 

Marseille  doit  être  considéré  comme  la  source  et  le  point  de  dé- 
part de  l'émission  des  monnaies  grecques  dans  la  Gaule.  Les  autres 
\illes  grecques  de  la  côte  ou  de  l'intérieur,  telles  qu'Antibes  (An- 
tipolis), Agde  (Agatha),  Rhodanusia,  Béziers  (Beterra),  Avignon 
i  Avenio),  n'étaient  que  des  colonies  ou  des  dépendances  de  la  mé  • 
tropole  phocéenne.  Les  monnaies  à  légende  grecque  de  ces  villes 
reproduisent  en  général  les  types  et  la  coupe  des  médailles  mar- 
seillaises. Les  villes  de  la  côte  indiquent  le  développement  de  la 
prospérité  commerciale  de  Marseille  :  celles  de  l'intérieur,  l'accrois- 
sement du  territoire  que  Marseille  dut  à  la  faveur  des  généraux 
romains  Marias  et  Pompée,  et  dont  la  plus  grande  extension  pré- 
céda d'un  petit  nombre  d'années  la  l'uine  politique  de  Marseille, 
("est  là  une  opinion  que  M.  le  marquis  de  LaGoy  a  développée  avec 
beaucoup  de  talent  et  de  vraisemblance  dans  une  récente  publica- 
tion (l),  et  qui  nous  parait  devoir  être  consacrée  par  la  science. 

Autrefois  on  ne  connaissait  de  .Marseille  que  des  médailles  assez 
uniformes  de  types,  et  dont  presque  aucune  n'excitait  l'intérêt  par 
la  singularité  des  représentations  et  la  rareté  des  exemplaires.  Nous 
devons  depuis  peu  d'anriées  a  M.  le  marquis  de  La  Goy  (2)  la 
connaissance  des  plus  anciennes  monnaies  de  Marseille,  dont  les 
t>  pes  et  la  fabrication  rappellent  l'origine  asiatique  des  Marseillais. 
Le  même  savant  a  publié  les  médailles  grecques  de  Glanum,  au- 
jourd'hui Saint- Remy  ;  de  Ca;nicense,  peuple  dont  le  territoire  est 


(1)  .YoMVc  sur  rattribvdon  de  quelques  vv'dinlles  des  Gai.Ies.  Aix.  1837, 
iii-ft",  pages  3  cl  suiianics. 

(2)  IHi<-rii>(iim  de  quelques  médailles  inédles.  .Six,  183'i,  in-i". 


inconnu;  de  Nîmes,  de  Sénas,  et  même  des  Tricoriî,  peuple  du 
Dauphiné.  La  fabrication  de  ces  dernières  pièces  est  postérieure  au 
don  que  César  fit  aux  Marseillais  d'une  partie  considérable  du  ter- 
ritoire de  la  Gaule,  et  antérieure  à  la  prise  de  Marseille  par  le  même 
général. 

Toutes  ces  monnaies,  ainsi  que  celles  de  Marseille,  sont  d'argent 
ou  de  bronze  ;  on  n'en  a  pas  découvert  en  or  jusqu'à  ce  jour. 

Il  est  difficile  de  saisir  la  liaison  qui  a  pu  exister  entre  la  numis- 
matique grecque  de  Marseille  et  celle  des  Gaulois  proprement  dit.*: 
et  même  il  est  permis  de  douter  que  l'exemple  des  Marseillais  ai' 
été  fructueux  en  dehors  de  l'influence  directe  de  Marseille  et  de» 
villes  qui  lui  étaient  soumises  (i).  Plusieurs  siècles  après  l'établis- 
sement des  Phocéens  sur  nos  côtes,  la  conquête  de  la  Macédoine 
par  les  Gaulois  parait  avoir  propagé  l'usage  de  la  monnaie  dans 
l'intérieur  de  la  Gaule.  Les  conquérants  ayant  rapporté  dans  lu 
mère  patrie  un  nombre  prodigieux  de  doubles  statères  en  or  de  Phi- 
lippe, fils  d'Amyntas,  le  cours  de  cette  monnaie  s'établit  dans  la 
contrée  et  donna  lieu  à  l'établissement  d'ateliers  monétaires,  dans 
lesquels  on  imita  d'abord  grossièrement  le  type  macédonien  du 
bige  au  revers  du  buste  d'Apollon,  mais  où  le  caprice  des  artistes 
gaulois  introduisit  bientôt  une  fouie  de  variantes  plus  ou  nioin;» 
bizarres,  et  quelquefois  tellement  accumulées  qu'on  a  peine  à  re- 
connaître la  trace  du  modèle.  Grâce  à  ces  altérations,  la  diversité 
des  types  s'établit  enfin  dans  la  Gaule;  la  monnaie  d'argent,  imi- 
tée des  deniers  consulaires  romains,  et  celle  de  bronze,  furent  frap- 
pées avec  infiniment  plus  de  liberté  dans  le  choix  des  types  que  ia 
monnaie  d'or  :  les  animaux  sacrés  de  la  Gaule,  les  emblèmes  ca- 
ractéristiques des  divers  peuples  y  trouvèrent  leur  place.  Au  moyen 
d'un  alphabet  en  usage  chez  les  Gaulois,  où  l'on  remai'que  le  mé- 
lange des  lettres  grecques  et  des  lettres  latines,  le  nom,  tantôt  des 
chefs,  tantôt  des  peuples,  souvent  de  tous  les  deux  ensemble,  fut 
reproduit  sur  les  médailles.  On  déterminerait  difficilement  l'époque 
à  laquelle  cet  usage  s'établit  chez  les  Gaulois;  mais  c'est  jm-u  .'c 
hasarder  que  d'en  placer  l'introduction  après  la  réduction  de  la 
Gaule  narbonnaise  en  province  romaine,  l'an  I2I  avant  Jésu^- 
(Ihrist.  La  plupart  même  de  ces  pièces  paraissent  avoir  ete  frappeo 
au  milieu  des  circonstances  critiques  qu'amena  l'entreprise  de  JuU  n 
(lésar,  et  pour  subvenir  aux  besoins  de  la  guerre.  On  a  lu  a\ec 
certitude,  sur  les  médailles,  les  noms  d'un  assez  grand  nombre  de 
chefs  dont  César  fait  mention  dans  ses  Commentaires,  ceux  d'.4Mi- 
biorix,  Litavicus,  Adcantuanus,  Duratius,  Tastjeius.  On  s'est  même 
llatté  récemment,  mais  avec  moins  de  probabilité,  d'avoir  re- 
trouvé sur  une  médaille  d'or  le  nom  de  Vercingetorix.  Ces  re- 
cherches, poursuivies  autrefois  avec  plus  de  zèle  que  de  lumièro. 
prises  récemment  d'après  des  principes  plus  fixes  (2  ,  ont  encoii' 
besoin  de  se  régulariser  pour  produire  tous  leurs  fruits.  La  fixation 
définitive  de  l'alphabet  gaulois,  les  limites  de  l'emploi  exclusif  de> 
caractères  grecs,  les  règles  qui  ont  du  présider  aux  désinences  de 
mots,  et  qui  doivent  conduire  a  distinguer  positivement  les  noms 


(1)  Les  monnaies  d'argent  qu'on  découvre  principatemeni  à  Vieille-Toulou>c 
el  au  revers  desquelles  on  remarque  une  espèce  de  croix  a\ec  divers  atihlmis. 
paraissent  plutôt  appartenir  &  la  civilisation  ibérique  qu'à  la  ciiilisaliou  gau- 
loise. Feu  Tôclion  regardait  ces  pièces  comme  imitées  des  monnaies  d'argcDl  d.- 
Hlioda  de  la  Tarragonaisc.  M.  Cliaudruc  de  Crazanne  préparc  un  travail  impo:  - 
tant  sur  cette  question. 

(2)  La  Hevue  de  la  I\'umismalique  française,  qui  a  conimeucé  de  paraUrc  j 
Blois  en  1830  sous  la  dircclion  de  MM.  Cartier  et  de  la  Saussaye,  a  noial>leqieul 
contribué  aux  progrès  de  celle  élude. 


199 


RKVUK  DK  [.'ARCHIThXTURK  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


SM) 


(les  peuples  de  ceux  des  chefs,  quaud  les  légendes  ne  sont  pas  mu- 
lilces,  toutes  ces  questions  réclamcnl  iapplication  d'esprits  pa- 
tienls,  méthodiques,  et  plus  curieux  d'accroître  le  domaine  de  la 
certitude  que  celui  des  aperçus  sans  consistance. 

Cette  étude  philologique  devra  précéder  et  amener  le  classement 
régulier  des  types,  et  l'appréciation  des  médailles  sans  légende,  qui 
constituent  la  grande  majorité  des  monuments  numismatiques  de  la 
Gaule.  On  fera  d'abord  une  large  part  à  ce  que  les  antiquaires  ont 
i)[>pe\é  plagia  barbarorttm,  c'est-à-direà  ces  pièces  qui  ne  sontqu'une 
contrefaçon  plus  ou  moins  habile,  plus  ou  moins  grossière,  des  mon- 
naies rapportées  de  la  Grèce.  Le  gisement  de  ces  contrefaçons  est 
extrêmement  étendu  ;  il  compi-end  non-seulement  le  territoire  de  la 
(iaule,  mais  encore  tout  le  pays  qui  s'étend  depuis  le  Rhin  jusqu'à  la 
Macédoine,  en  traversant  la  Norique,  la  Pannonie,  la  Thrace  occi- 
dentale et  l'Illy  rie.  Les  pièces  d'or  au  type  de  Philippe  sont  plus  com- 
munes en  Gaule;  les  tétradrachmes  d'argent,  imitées  des  pièces  du 
même  prince,  extrêmement  abondantes  dans  la  Hongrie  et  les  con- 
trées plus  au  Sud  encore,  sont,  ou  très-rares,  ou  extrêmement  gros- 
sières de  fabrication  sur  notre  sol.  Sansattribuer  à  des  populations 
(l'origine  gauloise  toutes  ces  contrefaçons,  on  ne  peut  s'empêcher 
de  constater  l'analogie  decaractères  qu'elles  présentent  toutes  entre 
elles,  et  de  se  rappeler  en  même  temps  le  long  séjour  des  tribus 
gauloises  à  l'Ouest  et  au  Nord  de  la  Macédoine,  séjour  qui  remonte 
a  plus  d'un  siècle  avant  la  conquête  de  ce  royaume  sur  Ptolémée 
Céraunus  (l'an  278  avant  Jésus-Christ). 

Outre  ces  pièces  d'or  et  d'argent,  les  Gaulois  employaient  pour 
les  transactions  les  plus  ordinaires,  des  signes  monétaires  d'une 
nature  spéciale,  et  particulièrement  des  rouelles  évidées  de  bronze 
ou  de  potain,  dont  on  retrouve  fréquemment  la  ligure  parmi  les 
accessoires  des  Phtlippes  d'or  contrefaits  dans  la  Gaule,  et  même 
de  quelques  monnaies  de  Marseille.  Ces  rouelles  paraissent  avoir 
constitué  une  de  ces  monnaies  courantes  (l)  les  plus  anciennement 
usitées  dans  la  Gaule;  les  pièces  de  bron/e  ou  de  potain  appartien- 
nent sans  doute  à  un  Age  plus  voisin  de  la  conquête  romaine  ;  les 
pièces  de  potain  en  particulier  sont  reproduites  par  le  même  pro- 
cédé que  les  rouelles,  c'est-à-dire  coulées  ou  plutêit  soufflées  dans 
un  moule.  Les  pièces  de  potain  ne  portent  jamais  de  légende,  mais 
des  attributs  limités  à  chacun  des  peuples  qui  en  faisaient  usage. 
Le  classement  des  pièces  dé  potain  et  de  bronze  sans  légendes  ap- 
partient aux  antiquaires  dispersés  sur  le  sol  de  la  France;  eux 
seuls  peuvent  constater  rigoureusement  les  limites  dans  lesquelles 
(m  trouve  principalement  et  en  grande  abondance  des  types  iden- 
tiques, et  en  inférer  l'attribution  à  tel  ou  tel  peuple  dont  le  terri- 
toire était  contenu  dans  les  mêmes  limites.  Le  même  genre  de  re- 
cherches, suivi  avfc  persévérance  et  bonne  foi,  peut  mettre  sur  la 
voie  du  classement  des  imitations  des  Philippes,  toutes  les  fois  que 
ces  imitations  se  distinguent  par  l'addition  ou  là  substitution  d'at- 
tributs bien  déterminés.  Les  personnes  éloignées  du  centre  des  étu- 
des ont,  quant  au  point  que  nous  venons  d'indiquer,  un  avantace 
signalé  sur  les  antiquaires  de  la  capitale.  Les  correspondants  re- 
connaîtront à  cet  égard  ce  que  leur  position  a  de  favorable,  et  ne 
négligeront  pas  d'en  tirer  parti. 


(1)  M.F.deSaulcy  a  donné  "ne  exccllenle  notice  sur  les  «o«f//cs  mor,c7airei 
des  Gaulois,  dans  la  It.iue  Numi,maliquefrar,enise,  lom.  I-,  p,g.  ,c9.,j. 


MÉOAILLES   ET    MÉDAILLONS  GrECS,    GaIILOIS    ET    RoUAIMS. 

Bien  que  la  monnaie  romaine  en  Gaule  ait  été  soumise  aux  rè- 
glements généraux  de  l'empire,  et  que  par  conséquent  il  soit 
l)resque  toujours  impossible  de  distinguer  les  pièces  frappées  dans 
cette  province  de  celles  que  les  ateliers  de  l'Italie  ont  produites,  il 
est  certains  types,  tels  que  celui  de  l'autel  de  Lyon ,  sur  les  mé- 
dailles d'Auguste  et  de  Tibère,  qui  présentent  un  intérêt  local. 
Outre  cela  on  connaît,  de  l'époque  primitive,  des  monnaies  colo- 
niales de  Cavailhon,  Mmes,  Vienne,  Lyon,  et  de  la  ville  de  Rus- 
cino,  qui  a  donné  son  nom  ù  la  province  de  Roussillon,  et  sur  les 
débris  de  laquelle  Perpignan  s'est  éle^é. 

Les  monnaies  de  certains  empereurs  qui  n'cnit  régne  que  sur  la 
Gaule,  tels  qu'Albin,  Tétricus,  Victorin,  Marins,  Postume,  etc., 
sont  évidemment  l'œuvre  des  artistes  gaulois.  On  remarque  avec 
surprise,  à  l'époque  de  Tétricus  et  de  Postume,  la  grande  supé- 
riorité des  monnaies  fabriquées  en  Gaule  sur  celles  de  Valérien, 
de  Gallien  et  des  autres  princes  qui  possédaient  alors  l'Italie. 

On  distingue  les  pièces  d  or  en  médaillons  et  mnlailles.  Les 
médaillons  sont  des  pièces  excédant  le  minlule  ordinaire,  d'un 
poids  supérieur  à  la  monnaie  courante ,  et  qui ,  fabriquées  en 
petit  nombre,  pour  des  occasions  solennelles,  n'ont  probablement 
jamais  été  mises  dans  la  circulation. 

Les  médailles  d'or  du  module  de  Vaureu»,  et  qui  plus  tard  ont 
servi  de  modèle  au  solidas,  ou  sou  d'or  des  empereurs  earlovin- 
giens,  ont  été  si  multipliées  dans  notre  pays,  <|u'au  commence- 
ment de  la  troisième  race  elles  figuraient  encore  au  nombre  des 
monnaies  courantes.  Les  grands  bronzes  de  fabrique  romaine  con- 
tinuent, dans  le  Midi  de  la  France,  d'être  reçus  pour  In  valeur 
d'un  décime. 

Le  sol  de  la  Gaule  a  fourni  à  diverses  reprises  des  médaillons 
très-rema«iuables.  Ceux  qu'on  avait  découverts  a  Cherbourg  et  a 
Boulogne-sur-mer  avaient  surtout  fixe  l'attention.  Il  ne  reste  plus 
de  ces  précieux  monuments  ([u'un  des  médaillons  trouves  a  Cher- 
bourg. 

La  tête  de  I^a>lianus,  l'un  des  trente  tyrans  dont  la  vie  a  été 
écrite  par  Trébellius  Polliou,  peut  être  considérée  comme  la  plus 
rare  de  celles  qui  appartiennent  en  propre  a  la  Gaule  ;  on  dis- 
tingue ensuite,  par  ordre  de  rareté,  celles  de  Marins,  de  Victorin. 
de  Tétricus  le  fils,  d'Albin,  et  les  beaux  revers  de  Postume  re- 
présentant les  travaux  d'Hercule. 

On  ne  doit  nullement  se  régler,  pour  l'argent  et  le  bmn/.e.  sur 
les  raretés  de  l'or.  Telle  tête  précieuse  en  or,  par  exemple  celle  dt 
Tétricus  le  jière,  se  rencontre  par  milliers  en  argent,  ou  plutôt  en 
bronze  muci.  En  général,  on  ne  doit  s'attacher,  tant  dans  largent 
(|ue  dans  le  bronze,  qu'aux  médailles  dune  Iwnne  conservation,  a 
Celles  dont  les  légendes  et  les  types  sont  lisibles  :  les  autres 
n'offrent  ni  intérêt,  ni  valeur. 

Pour  l'acquisition  et  le  classement  des  médailles,  les  collecteurs 
(les  départements  se  règlent  avec  raison  sur  le  livre  de  M.  Mion- 
net,  intitulé  Du  prix  c(  de  lu  rareté  de*  médaillex  romaines.  Mais 
beauccnip,  faute  d'avoir  lu  avec  l'attention  convenable  lesobserva- 
li(nis  dont  ce  livre  est  précédé,  ignorent  comment  on  doit  faire  usage 
des  descriptions  et  des  évaluations  de  M.  Mionnet.  Il  fant  toujours 
se  rappeler,  en  prenant  ce  livre  : 

1"  Que  tout  revers  non  décrit  par  M.  Mionnet  est  commun,  et 
par  conséquent  n'augmente  pas  la  valeur  attribuée  a  la  tête: 

2"  Que  pour  toutes  les  pièces  dont  l'évaluation  ne  s'eleve  pas 


301 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


^»i 


jiu-dessus  du  taux  moyen,  cette  valeur  même  ne  peut  être  attri- 
buée qu'fiux  échantillons  dont  la  conservation  est  parfaite. 

La  chance  des  fouilles  peut,  il  est  vrai,  donner  un  revers  ou 
une  tète  entièrement  nouveaux.  Mais  d'abord  ces  occasions  sont 
infiniment  rares;  puis,  pour  quiconque  a  quelque  peu  manié  les 
médailles  romaines,  les  types  inconnus  présentent  quelque  chose 
d'insolite  qu'on  ne  saurait  confondre  avec  les  types  vulgaires.  En 
cas  de  doute  on  fera  bien  de  ne  pas  s'en  tenir  à  l'ouvrage  de 
M.  Mionnet,  et  si  l'on  n'a  pas  à  sa  disposition  la  doctrine  d'Eckhel, 
on  devra  consulter  les  anciennes  collections  de  Tristan,  de  Vail- 
lant, de  Morell,  de  Banduri,  de  Beauvais,  etc.,  moins  rares  dans 
notre  pays. 

Il  est  utile  de  noter  avec  soin,  dans  toutes  les  découvertes  de 
médailles,  même  les  plus  communes,  jusqu'à  quelle  époque  re- 
montent les  pièces  les  plus  anciennes,  et  jusqu'où  descendent  les 
plus  modernes.  Dans  toutes  les  fouilles  de  monuments  antiques, 
les  médailles  sont  l'indice  le  plus  sûr  des  limites  chronologiques 
dans  lesquelles  se  sont  prolongés  l'usage  et  la  fréquentation  des 
édifices. 

Les  médailles,  comme  les  autres  monuments  de  métal ,  sont 
exposées  non-seulement  à  être  détruites  par  la  fonte,  mais  encore 
à  être  altérées  par  des  nettoyages  ou  des  restaurations  miilhabiles. 
On  peut  tracer  à  cet  égard  quelques  règles  dont  l'application  ne 
présente  aucun  inconvénient. 

Les  pièces  d'or  peuvent  être  soumises  à  l'action  de  l'eau-forte; 
c'est  un  moyen  sur  d'en  enlever  le  tartre ,  et  de  leur  rendre  leur 
fraîcheur  primitive ,  sans  leur  faire  subir  la  moindre  détério- 
ration. 

L'argent,  très-souvent  altéré  dans  le  sein  de  la  terre  par  une 
oxydation  profonde,  ne  supporte  alors  d'autre  mordant  que  le  jus 
de  citron  ou  une  dissolution  très-étendue  d'ammoniaque.  Ces 
substances  opèrent  lentement,  mais  à  coup  sûr. 

Tous  les  acides  ou  alcalis,  même  les  plus  faibles,  altèrent  le 
bronze.  Pour  nettoyer  les  pièces  de  ce  métal,  on  n'a  d'autre  res- 
source que  les  agents  mécaniques.  L'emploi  de  ces  agents  récla- 
mant une  habileté  et  une  expérience  particulières,  on  recommande 
a  ceux  qui  découvrent  des  monuments  antiques  de  s'abstenir  com- 
plètement de  tout  nettoyage  des  bronzes. 

Les  jmtines  ordinaires,  et  surtout  les  patines  vertes,  les  plus 
communes  dans  notre  pays,  n'ont  rien  à  craindre  de  l'emploi  de 
l'huile.  On  peut  faire  usage  de  ce  préservatif  quand  la  surface  du 
monument  est  ferme  et  d'un  beau  poli;  on  doit  s'en  abstenir  com- 
plètement si  la  patine  est  friable  ou  sujette  à  l'exfoliation,  si  un 
séjour  dans  un  terrain  volcanique  lui  a  donné  cet  aspect  bleuâtre 
et  grenu  qui  est  le  propre  des  monuments  découverts  aux  environs 
du  Vésuve. 

L'huile  siccative,  au  contraire,  doit  être  immédiatement  appli- 
((uée  aux  plombs,  qu'elle  empêche  de  se  réduire  en  pous- 
sière. 

Les  vases  (jui  portent  une  couverte  métallique  se  nettoient 
convenablement  à  l'eau  seconde. 

La  surface  des  terres  cuites,  offrant  souvent  des  Jraces  d'en- 
duit et  (!e  peinture,  doit  être  lespeetée  avec  le  plus  ^rand  scru- 
pule. 

Nous  ne  pouvons  terminer  ce  qui  concerne  les  monuments 
romains  sans  appeler  l'attention  sur  les  découvertes  propres  à 
eclaircir  l'histoire  des  procédés  que  les  anciens  ont  appliqués  aux 
ouvrages  d'art.  Cavlus  a  décrit  les  vestiges  d'une  fonderie  an- 


tique (i),  trouvés  en  1737  au  revers  de  la  colline  de  Montmartre; 
Grivaud  de  La  Vincelle  a  fait  connaître  l'existence  de  fours  à 
potier  découverts  dans  les  jardins  du  palais  du  Luxembourg,  et 
consacrés  à  la  fabrication  de  vases  gallo-romains  (2).  Les  débris 
d'ateliers  monétaires,  et  les  coins  qu'on  y  rencontre  parfois,  les 
moules  en  terre  cuite  qui  ont  servi  dans  les  camps  à  couler  des 
deniers  romains  sous  les  règnes  de  Septime  Sévère  et  de  ses  fils,  ne 
doivent  pas  moins  fixer  l'attention  ;  rien  ne  saurait  être  minu- 
tieux dans  l'étude  et  la  description  des  usines  antiques. 


CIVIL1S.\TI01N  CHRETIEiNiXE. 


MONUMENTS  FIXES 


l'itEMli:ilH  PARTIE.  —  MOMME.\TS  HHKilIlX. 


STVI.I-:  I.ATIX. 

Première  périmlc.  —  lh'|iiiis  les  premiers  siècles  du  Chrisliaiiisiiie  juiiqu'au  M'  siècle  (iti. 

ÉPOQIJE    MÉROVINOIEiNNE. 

Lorsque  sur  le  sol  des  Gaules  les  Romains  construisaient  la  plu- 
part des  monuments  religieux,  civils  et  militaires,  décrits  dans  les 
instructions  précédentes,  une  religion  nouvelle  s'élevait  à  côté  du 
paganisme,  qu'elle  devait  renverser  un  jour.  Poursuivis  de  toutes 
parts  au  nom  des  empereurs  et  de  leurs  préfets,  les  premiers  apôtres 
chrétiens  ne  purent  songer  à  construire;  aussi  les  persécutions  qui 
ensevelirent  les  premières  cérémonies  religieuses  dans  les  catacom- 
bes de  Rome  et  de  l'Italie  en  général,  produisirent-elles  des  effets 
analogues  dans  les  Gaules  ;  plus  d'un  évèque  assembla  les  fidèles 
dans  des  réduits  souterrains  formés  par  la  nature  ou  produits  par 
une  industrie  antérieure. 

Ces  lieux  obscurs  et  isolés  ne  purent  offrir  aux  pompes  reli- 
gieuses une  étendue  qui  leur  permit  de  se  développer  ;  à  peine  trou- 
vait-on dans  ces  cryptes  la  place  d'un  autel  et  celle  que  devaient 
occuper  quelques  fidèles.  Aucun  style  d'architecture  ne  décorait 
encore  ces  étroits  sanctuaires  ;  de  faibles  essais  de  peinture  y  re- 
traçaient d'une  manière  barbare  le  Christ  et  sa  mère,  les  iniaues 
des  apôtres  et  des  premiers  martyrs. 

11  est  peu  de  villes  anciennes  qui  n'aient  garde  le  souvenir  des 
persécutions,  et  qui  ne  renferment  quelque  saint  lieu  consacre  par 
le  sang  des  chrétiens.  Lorsque  ces  s<juterrains  présenteront  seule- 
ment des  excavations  pratiquées  dans  la  roche  et  n'auront  aucune 
trace  de  maçonnerie,  MM.  les  correspondants  en  relèveront  le  plan 
avec  soin  à  la  boussole,  en  indiquant  les  divers  niveaux  du  ter- 
rain, en  examinant  si  dans  les  niches  ou  refoui llements  des  pa- 
rois, des  bancs  étendus  ou  des  sièges  isolés  n'ont  pas  été  pn»ti(|ues 
dans  le  massif.  Si  quelques  traces  de  sculpture  ou  de  peinture, 
d'inscription  et  d'ornement,  sont  conservées  sur  les  parties  travail- 
lées de  la  montagne,  on  tes  étudiera  avec  soin;  on  recherchera  les 


(1)  liecueil  d'antiquités,  loin.  H,  p.  390,  il  loin.  III,  |>.  392-9j. 

(2)  A  ntiquilés  gauloises  et  romaines,  recueillies  dans  les  jardins  du  palais 
du  sénat.  Paris,  1807.  In-i»  cl  allas  iii-fol. 

(3)  Voir  Ifi  Cours  a'aiiliqiiilfe  clirélicimes  de  M.  <l«  Cauiiioiil. 


203 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Mi 


issues  bouchées  par  des  blocs  de  pierre,  qui  pourraient  conduire  à 
quelque  catacombe,  ossuaire  ou  charnier,  pratiqué  dans  un  caveau 
contigu.  On  devra  chercher  sur  le  sol  l'emplacement  que  pouvait 
occuper  l'autel,  soit  qu'il  ait  été  conservé  dans  la  roche,  soit  qu'on 
l'ait  placé  après  le  travail  d'excavation. 

Si  la  crvpte  se  développe  au  point  de  former  plusieurs  nefs,  on 
indiquera  sur  le  plan  la  direction  de  ces  nefs,  leur  orientation,  les 
chapelles  qui  s'y  rattachent,  les  moyens  employés  pour  leur  don- 
ner de  la  lumière.  On  pourra  trouver  des  traces  du  bassin  destiné 
nu  baptême  par  immersion,  et  les  rigoles  pour  y  conduire  les  eaux 
et  les  détourner  après  la  cérémonie.  Les  traditions  populaires  atta- 
chées à  ces  premiers  monuments  du  christianisme  doivent  accom- 
pagner les  dessins  et  les  notes  explicatives  de  l'état  des  lieux. 

Si  des  travaux  de  maçonnerie  se  présentent  dans  ces  voûtes 
souterraines,  on  y  reconnaîtra  la  fabrication  antique  à  la  présence 
des  briques  alternées  dans  du  moellon  piqué  avec  soin  et  bien  ap- 
pareillé. 

Lorsque  la  persécution  présenta  moins  de  rigueur,  on  osa  con- 
struire quelques  enceintes  sacrées  devant  ces  grottes  converties  en 
sanctuaires.  Ces  constructions,  le  plus  souvent  exécutées  à  la  hâte 
et  sans  les  ressources  de  l'art  de  bâtir,  présenteront  plus  d'une  ob- 
servation utile  à  consigner;  on  y  pourra  reconnaître  plusieurs  épo- 
(|«es  dans  la  maçonnerie,  souvent  refaite  en  partie,  ou  modifiée 
dans  ses  formes  générales. 

Les  apôtres  et  les  martyrs,  soumis  à  la  loi  qui  fit  placer  les  cime- 
tières hors  des  villes  romaines,  furent  ensevelis  d'abord  loin  de 
l'enceinte,  dans  le  lieu  des  sépultures  communes  ;  un  tombeau  leur 
l'ut  consacré  ;  il  devint  un  point  de  réunion  pour  les  fidèles.  Sur  ces 
monuments  ou  mémoires  s'élevaient  des  chapelles  de  peu  d'éten- 
due; la  sépulture  conservée  sous  l'autel  y  prit  le  nom  de  tnarlyrium 
ou  confession.  C'est  donc  à  quelque  distance  des  anciennes  en- 
ceintes de  villes  que  MM.  les  correspondants  doivent  diriger  leurs 
recherches  pour  trouver  les  fondations  pieuses  de  l'Église  primi- 
tive. L'aftluenee  du  peuple  fit  bientôt  augmenter  la  superficie  des 
premiers  édifices  ;  auprès  d'eux  s'élevèrent  des  chapelles  secondaires 
qui  formèrent  un  ensemble  où  l'on  doit  reconnaître  l'origine  des 
basiliques,  des  abbayes  et  de  leurs  dépendances. 

Du  jour  où  Constantin  permit  au  christianisme  de  sortir  des  ca- 
tacombes, les  temples  s'élevèrent  sur  toute  f  étendue  de  l'empire, 
une  ère  nouvelle  s'ouvrit  pour  les  arts,  et  l'architecture  religieuse 
piituaissance.  Mais  l'antiquité  exerça  d'abord  une  grande  influence 
sur  les  travaux  des  premiers  chrétiens. 

Cet  art  se  divisa  bientôt  en  deux  rameaux  bien  distincts  :  le  pre- 
mier, qu'on  peut  appeler  style  latin,  fut  adopté  par  l'Eglise  latine, 
se  développa  grandement  dans  Rome,  et  se  répandit  dans  le  Kord 
de  l'Italie,  dans  les  provinces  illyriennes,  l'Allemagne,  les  Gaules 
et  l'Espagne,  enfin  dans  tout  l'empire  d'Occident.  Basé  sur  les 
principes  sages  de  la  construction  antique,  il  fut  adopté  par  les 
Goths,  les  Vandales,  les  Lombards,  dans  toutes  les  provinces  sou- 
mises par  ces  peuples  barbares  L'imitation  presque  servile  des  dé- 
tails de  l'architecture  romaine  caractérise  cette  première  période. 
L'autre  style  primitif,  formé  de  même  d'éléments  romains,  et  trans- 
planté à  Constantinople,  y  prit  sous  le  ciel  de  l'Orient  une  phy- 
sionomie particulière  qui  lui  valut  le  nom  d'architecture  byzantine; 
introduit  en  France  par  des  relations  fréquentes  avec  Byzance,  ce 
st\  le,  riche  en  inventions  nouvelles,  ne  fut  chez  nous  qu'une  im- 
portation. 

Après  les  dévastations  dont  la  France  fut  le  thcî\tre  pendant 


les  VIII'  et  IX"  siècles,  on  dut  songer  à  réparer  les  pertes  causées 
par  la  guerre.  Les  basiliques  latines  étaient  incendiées,  mais  on 
n'avait  pas  oublié  leurs  dispositions  premières,  consacrées  par  les 
usages  et  favorables  aux  cérémonies  ;  on  reproduisit  donc  le  plan 
latin.  Quant  aux  chapilcîjux,  aux  entablements  transmis  par  l'anti- 
quité à  l'architecture  latine,  ils  avaient  disparu  pour  la  plupart; 
dans  les  provinces  méridionales,  de  nombreux  monuments  païens 
servirent  encore  de  modèles,  mais  partout  ailleurs  il  fallut  créer 
ou  s'inspirer  de  formes  étrangères. 

C'est  alors  que  les  chapiteaux  cubiques  créés  en  Orient,  les  mou- 
lures profondément  dessinées  à  l'instar  de  celles  des  Grecs,  les 
coupoles  et  les  pendentifs  inventés  à  Byzance,  vinrent  se  lier  aux 
dispositions  latines  pour  former  un  style  mixte  nommé  architec- 
ture romane. 

Affranchis  des  règles  de  l'antiquité,  les  artistes  chrétiens  se  li- 
vrèrent alors  à  toutes  les  combinaisons  de  l'art  de  bâtir;  ils  éle- 
vèrent les  voûtes  des  temples  à  une  hauteur  prodigieuse,  inventè- 
rent des  nervures  pour  les  rendre  durables,  des  contre-forts  et  des 
arcs-boutants  pour  les  soutenir;  et  lorsque  l'ogive,  plus  élancéi; 
que  le  plein-cintre,  plus  vigoureuse  par  la  combinaison  de  ses  cla- 
veaux, vint  s'associer  aux  inventions  antérieures,  on  vit  naître  un 
quatrième  système  nommé  style  ogival  ou  gothique,  développe- 
ment de  tout  ce  qui  l'avait  précédé,  dernière  période  de  l'art  chré- 
tien. 

Ces  différentes  phases  de  l'architecture  seront  développées  dans 
les  instructions  suivantes  jusqu'à  l'époque  de  la  Renaissance,  que 
caractérise  le  retour  aux  formes  consacrées  par  l'antiquité. 

Premier  ijrstime  d'architecture  chrétienne. 

BASILIQUES  LATINES  [i). 

PLA^s. 

La  forme  des  basiliques  primitives  fut  longtemps  variable.  «  t 
ne  devint  fixe  qu'après  la  stabilité  de  l'Église.  L'isolement,  les  in- 
(luences  locales,  l'absence  d'unité,  contribuèrent  plus  d'une  fois  a 
faire  adopter  des  dispositions  incommodes,  étroites  et  {teu  conve- 
nables au  but  qu'on  se  proposait.  L'église  latine  n'offrait  point 
l'ensemble  et  la  puissance  qui  la  caractérisa  plus  tard,  et  les  con- 
structions religieuses  étaient  loin  de  présenter  encore  ces  vastes 
conceptions  au.vquelles  s'intéi-essait  toute  la  chrétienté,  et  qu'éle- 
vaient des  populations  entières.  Constantin  lui-même  avait  donne 
l'exemple  de  cette  irrégularité  qui  régna  d'abord  dans  la  disposi- 
tion des  églises;  à  Rome,  à  Constantinople,  dans  la  Palestine,  il 
avait  consacré  des  temples  dont  le  plan  était  indifféremment  un 
cercle,  un  polygone  ou  un  parallélogramme. 

Quelquefois  même  ces  formes  se  combinèrent  entre  elles,  et  plus 
(l'une  basilique  primitive  présenta  une  nef  carrée  précédant  un 
sanctuaire  complètement  circulaire.  Le  temple  élevé  par  Perpétuus 
sur  le  tombeau  de  saint  Martin,  auprès  de  Tours,  fut,  sur  le  sol  des 
Gaules,  le  plus  bel  exemple  de  celte  disposition  curieuse,  inspine 
peut-être  par  un  souvenir  du  Saint-Sépulcre. 


(1)  Pour  l'élude  des  basiliques  lalinos,  nous  renvoyons  nos  lecleurs  au  pre- 
mier volume  de  celle  Revue,  où  il  irouicra  la  question  irail^e  avec  des  (K'volop- 
menls,  des  détails,  et  des  illustrations  que  le  cadre  et  l'objet  même  des  Instrw  ■ 
lions  ministérielles  ne  pouvaient  pas  comporlcr.  (Xole  de  M.  Ccsar  Uiily  ' 


206 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


20« 


Enfin  des  absides  demi-circulaires  appuyées  contre  les  murs  des 
basiliques  allongées,  ou  sur  les  pans  coupés  des  temples  en  poly- 
gone, complétèrent  les  éléments  des  premiers  plans  chrétiens. 

Mais,  lorsque  les  cérémonies  furent  établies  sur  des  règles  cer- 
taines, on  sut  bientôt  reconnaître  parmi  ces  formes  variées  celle 
qui  convenait  le  mieux  au  nouveau  culte,  et,  dans  tout  l'empire 
d'Occident,  la  plupart  des  églises  s'élevèrent  sur  un  parallélo- 
gramme (l) 

Baptistères. 

Devant  les  basiliques  primitives,  extérieurement  à  Yatrium,  et 
quelquefois  aussi  dans  son  enceinte,  s'élevait  un  petit  édifice  in- 
différemment carré,  circulaire,  hexagone,  octogone,  ou  en  forme 
de  croix  grecque  :  il  était  destiné  aux  cérémonies  du  baptême. 


Fiy.  50 


Fig.  51. 


Fig.  52 


Fig.  53. 


Au  centre,  un  bassin  profond  prenait,  le  plus  souvent,  la  forme 
de  l'édifice,  sous  l'invocation  de  saint  Jean-Baptiste.  On  y  rece- 
vait, de  la  main  de  l'évêque,  le  baptême  par  immersion.  Les  caté- 
chumènes étaient  plongés  dans  la  cuve,  qui  se  remplissait  par  une 
rigole  souterraine,  et  se  vidait  par  le  même  moyen.  Le  bassin  était 
souvent  environné  d'une  galerie  de  colonnes  destinées  à  porter  le 
plafond  ;  une  ouverture  éclairait  l'édifice  par  le  haut  ;  les  bancs  des 
catéchumènes  se  plaçaient  autour  à  l'intérieur.  Vis-à-vis  la  porte 
d'entrée,  placée  en  regard  de  celle  de  la  basilique,  l'image  de  saint 
Jean  présidait  à  la  cérémonie.  Les  baptistères,  peu  commodes  en 
raison  de  leur  distance  du  temple  et  de  la  position  qu'ils  occupaient 
relativement  à  l'axe  de  Yatrium,  furent  quelquefois  rattachés  à 
l'ensemble  de  l'édifice  par  des  portiques.  On  les  établit  encore  sur 
la  face  latérale  des  basiliques,  pour  éviter  les  inconvénients  qu'ils 
présentaient  devant  l'entrée  principale. 

Plus  tard,  la  fontaine  du  baptême  fut  introduite  sous  le  porche, 
qui  prit  le  nom  de  catéchumène ,  puis  dans  l'enceinte  même  de  la 
basilique,  où  elle  occupa  une  chapelle  particulière  dans  les  nefs  la- 
térales. Ces  diverses  positions  des  fonts  de  baptême  doivent  être  un 
sujet  d'étude  pour  MM.  les  correspondants. 

Les  formes  variées  auxquelles  fut  soumis  le  bassin  destiné  à  la 
cérémonie  n'offriront  pas  moins  d'intérêt  que  les  diverses  places 
qu'il  occupa  au  dehors  ou  au  dedans  de  l'enceinte  des  édifices  sa- 
crés. A  l'origine  du  christianisme,  on  fit  usage  de  cuves  en  granit 
ou  en  marbre,  qui,  dans  l'antiquité,  décorèrent  les  bains  publics; 
mais,  loin  des  grandes  villes,  on  dut  y  suppléer  par  une  construc- 
tion facile.  Des  tablettes  de  pierre,  bien  jointes,  furent  disposées  en 
polygone  ou  en  carré;  dressées  autour  d'une  aire  en  béton  qui  de- 


(1)  Reproduire  ici  ce  que  contiennent  les  Instructions  sur  les  plans,  les  élé- 
vations et  les  (lélails  des  basiliques  latines,  serait  répéter  ce  qui  a  été  décrit 
d'une  manière  heancoup  plus  étendue  et  plus  complète  dans  le  premier  volume 
de  cette  Revue.  Nous  y  renvoyons  encore  une  fois  nos  lecteurs,  qui  y  trou- 
veront une  série  de  dessins  et  de  plans  que  ne  donnent  pas  les  Instructions. 

(.Yole  de  M.  César  Daly  ] 


vint  le  fond  de  la  cuve,  elles  formèrent  un  bassin  asse^  grand  pour 
contenir  plusieurs  personnes  à  la  fois.  Les  marches  disposées  au- 
tour permirent  d'entrer  plus  facilement  dans  l'eau. 

Fonlt  baptismaux. 


Fig.  56. 

La  sculpture  d'ornement  et  les  incrustements  en  marbre  cou- 
vrirent les  faces  extérieures  du  bassin.  Souvent  sur  ces  pierres  de- 
bout, de  petites  colonnes  furent  placées  aux  angles  pour  fixer  une 
clôture. 


Fig.  57. 

Lorsqu'on  abandonna  l'usage  de  plonger  les  catéchumènes  dans 
le  bassin,  il  se  ferma  par  un  couvercle  mobile  qui  permettait,  au 
moyen  d'une  ouverture  étroite,  de  puiser  avec  un  vase  l'eau  du 
sacrement  ;  cette  mutation  dans  le  rite  conduisit  à  resserrer  la  cuve, 
et  à  la  réduire  au  point  où  nous  la  voyons  de  nos  jours. 

L'architecture  des  baptistères,  en  harmonie  avec  la  décoration 
des  basiliques,  fut  soumise  aux  mêmes  conditions.  Dans  les  grandes 
villes  où  les  édifices  païens  présentaient  de  riches  matériaux,  ces 
monuments  furent  décorés  avec  leurs  dépouilles  :  les  colonnes  en 
marbre,  les  portes  de  bronze,  les  pavés  en  porphyre,  s'allièrent  aux 
mosaïques  et  à  la  peinture.  Dans  les  villes  «econdaires,  les  mu- 
railles nues  furent  élevées  jusqu'à  une  hauteur  suffisante,  sans 
autre  décoration  que  les  fenêtres  qui  éclairaient  l'édifice;  une  sim- 
ple charpente  couvrit  ces  baptistères  isoles.  Dans  le  Mown-Age  on 
leur  appliqua  les  perfectionnements  apportés  dans  l'art.:  ils  furent 
soumis  à  tous  les  styles  d'architecture  qui  se  succédèreut«n  Eu- 
rope. 

AtTF.LS  ET  Ciboires. 

Lautel  des  basiliques  latines  est  ordinairement  un  tombeau  en 
marbre,  en  granit  ou  en  porphyre;  la  forme  est  celle  dune  cuve 
ou  d'un  sarcophage  carré.  Enlevés  aux  édifices  païens,  ces  monu- 
ments, qui  renferment  les  reliques  des  saints  martyrs,  sont  sou- 


-207 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


MS 


\ent  décores  de  sculptures  chrétiennes,  exécutées  dans  le  style  an- 
tique, et  ajoutées  après  coup.  Sur  la  table  sont  gravés  les  attributs 
(lu  christianisme  :  l'alpha  et  l'oméga,  le  labarum,  la  palme,  etc. 


Fig.  58. 

\u-dessousde  l'autel  est  pratiquée  une  petite  case  voûtée,  ou- 
verte, dans  le  sens  de  la  nef;  c'est  le  marlyrium  ou  confession, 
destiné  il  contenir  les  reliques  des  martyrs.  Ce  lieu  est  décoré  avec 
l)paucoup  de  luxe,  et  prend  quelquefois  un  développement  tel, 
(ju'on  y  descend  par  un  grand  nombre  de  marches,  disposées  en 
avant  ou  sur  les  côtés  de  l'autel  ;  il  devient  alors  une  crypte  des- 
tinée à  rappeler  les  souterrains  des  catacombes.  Le  Moyen-Age 
donna  au  marlyrium  assez  d'étendue  pour  en  faire  une  église  sou- 
terraine, presque  aussi  vaste  que  celle  qui  s'élevait  au-dessus  du 
sol. 

Les  cryptes  primitives  se  présentent  sous  des  dimensions  res- 
treintes; elles  peuvent  être  voûtées  ou  simplement  formées  de 
grandes  tables  de  pierre  ou  de  marbre,  dressées  et  superposées  de 
manière  à  rappeler  les  plafonds  des  carrières  qui  servirent  de  sé- 
pulture aux  premiers  martyrs. 

Cfborium. 


Fig.  .59 

Aux  quatre  angles  de  l'autel  principal,  ou  maitre-autel,  s'élèvent 
des  colonnes  précieuses,  surmontées  de  chapiteaux  et  d'un  enta- 
blement en  marbre  formant  un  dais  au-dessus  de  la  sainte  table  ; 
cette  décoration  est  le  ciborium.  On  y  prodigua,  dans  les  premiers 
siècles  du  christianisme,  tout  le  luxe  des  métaux  et  des  pierreries  ; 
les  plus  anciens,  décrits  par  les  auteurs,  étaient  surmontés  d'un 
fronton  ;  on  sait  qu'il  en  existait  aussi  de  couronnés  par  quatre  pe- 
tits arcs,  un  sur  chaque  face  de  l'autel. 

Les  basiliques  latines  présentent,  en  avant  du  sanctuaire,  un  es- 
pace carré,  entouré  d'une  clôture  en  marbre,  richement  ornée  de 
mosaïque  et  de  sculpture;  cette  enceinte  forme  le  choeur.  Des 
bancs  en  marbre  y  sont  consacrés  aux  clercs  ;  un  riche  pavé  dé  - 
core  le  sol.  Les  ambons  destinés  à  la  lecture  de  l'épitre  et  de  l'é- 
vangile s'élèvent  sur  les  faces  latérales  de  la  clôture.  Construits  en 
marbre  ou  en  pierre,  ces  ambons  présentent  d'un  côté  un  pupitre 
élevé  que  supportent  de  petites  colonnes,  et  auquel  on  arrive  par 
plusieurs  degrés;  de  l'autre  côté  est  une  chaire  à  laquelle  on  monte 


par  deux  escaliers.  Auprès  de  cette  chaire,  sur  un  des  pilastres  qui 
la  décorent,  s'élève  une  colonnette  enrichie  de  mosaïques  :  elle  est 
destinée  à  porter  le  cierge  pascal  (l), 

Ambon. 


DU  (H.41IFFAGE  ET  DE  LA  VK.NTILATION. 

FOURNEM     DE  (.1  ISINE   l'OI  H  LES  COLLÈGES,   LES   Hôl'n  \r\  ,    ETC. 

La  cdlIcclioM  d'appareils  et  de  fourneaux  (|ue  nous  a\oiis  com- 
binés pour  le  service  de  la  cuisine  se  compose  de  plus  de  cinquante 
modèles  différents.  Celte  collection  ne  peut  trouver  place  dans  cette 
Revue  ;  nous  donnerons  seulement  deux  planches,  l'une  d'un  four- 
neau destiné  à  l'usage  des  collèges,  hôpitaux,  communautés,  pen- 
sions, a  tous  les  grands  établissements  enfin;  c'est  celle  dont  nous 
allons  donner  la  description.  L'autre  se  composera  de  fourneaux 
de  cuisine  de  maisons  particulières,  et  sera  l'objet  d'un  prochain 
article. 

C'est  après  avoir  fait  de  nombreux  changements  et  d'importants 
perfectionnements  aux  appareils  que  nous  avons  successivement 
établis,  que  nous  sommes  arrivé  à  la  combinaison  de  ce  fourneau, 
au  moyen  duquel  se  fait  l'emploi  le  plus  utile  du  combustible,  et 
qui  présente  toutes  les  facilités  désirables  pour  le  service. 

Description  du  fourneau  de  cuisine. 
La  Fig.  I,  PI.  12,  représente  le  fourneau  vu  de  fece  ;  la  Fig.  i', 


(1)  Celte  première  Instruction  se  termine  par  un  cliapitre  sur  le  styto 
byzanUn ,  que  nous  ne  reproduirons  pas  ici  par  la  même  raison  qui  nous  a 
fait  retranclicr  la  plus  grande  partie  du  cliapitre  consacré  à  IVludc  Un  style 
latin.  Ceux  de  nos  lecteurs  qui  voudront  consulter  le  premier  volume  de  cette 
/ieiue,  y  trouveront  une  élude  sur  le  style  byzantin  beaucoup  plus  complète 
que  ne  l'est  celle  des  Inslrucliont. 

Nous  avons  reçu  d'un  de  nos  confrères  une  lettre  relative  à  quel  ,ues  passage»^ 
de  V Instruction  que  nous  achevons  aujourd'hui.  Nous  comptons  donner  cette 
j  lettre  dans  notre  prochain  numéro.  {Note  de  M.  César  Daly.) 


âO» 


REVUE  DE  LARGHITECTUllE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


210 


le  [liai)  (lu  fournenu  fait  au  niveau  de  la  plaque  supérieure.  La 
Fig.  3  est  la  vue  latérale  du  cùté  de  la  ligne  xx',  et  la  Fig.  4 
donne  la  vue  du  eèté  opposé  y  y'  [  Fig.  2  ). 

Ce  fourneau  est  divisé,  à  proprement  parler,  en  deux  parties, 
l'une  antérieure,  A.  B,  (',  D,  (jui  est  le  fourneau  proprement  dit; 
l'autre  postérieure,  /{,  //,  E,  où  se  trouvent  l'étuve  et  la  chau- 
dière. 

Toutes  les  faces  verticales  du  fourneau  sont  en  fonte;  l'intérieur 
est  en  briques;  la  partie  postérieure  est  également  revêtue  de 
fonte  dans  les  fourneaux  que  nous  construisons  maintenant.  Une 
plaque  A  A...  [Fig.  2),  également  en  foute,  recouvre  le  fourneau. 

La  construction  intérieure  en  briques ,  dans  laquelle  sont  mé- 
nagés lescarneaux  à  fumée  nécessaires  au  ciiauffage  des  bassines, 
du  four,  du  grilloir  et  de  toutes  les  autres  parties  du  fourneau  , 
concentre  la  chaleur  sur  les  joints  où  elle  est  nécessaire,  et  empêche 
les  plaques  des  côtés  de  trop  se  chaufl'i'r  et  de  rendre  ainsi  le  ser- 
vice pénible  pour  le  cuisinier. 

La  plaque  A  yl  est  percée  de  trois  ouvertures.  (Vvy.  Fig.  2.)  Deux 
ouvertures  rondes  sont  destinées  à  recevoir,  l'une  la  marmite  à  pot- 
au-feu  li,  l'autre  la  bassine  à  légumes  C;  la  troisième  ouverture, 
qui  est  carrée ,  et  qui  se  trouve  au-dessus  du  foyer  principal,  est 
bouchée  par  de  petites  plaques  en  fonte  D.  Ces  plaques  peuvent 
être  remplacées  facilement  quand  elles  ont  été  brûlées  par  l'action 
de  la  chaleur.  C'est  sur  cette  partie  D  du  fourneau  que  se  fait  la 
préparation  des  mets  qui  exigent  une  température  très-élevée.  Les 
petites  plaques  D  peuvent  être  enlevées  et  remplacées  par  une 
troisième  marmite  quand  les  besoins  du  service  l'exigent. 

T,  robinet  à  colonne  et  à  col  de  cvgue  pour  verser  l'eau  dans 
toutes  les  bassines  et  marmites  qui  sont  sur  le  fourneau,  r ,  ro- 
binet d'arrêt  qui  empêche  qu'on  ne  verse  de  l'eau  sur  le  fourneau 
en  fermant  le  col  de  cygne. 

/  (  Fig.  1  )  est  la  porte  du  foyer  principal  ;  K,  la  porte  du 
cendrier. 

M  I  Fig.  3  ]  est  la  [mite  d'un  foyer  additionnel  destiné  à  chauffer 
la  mai'mite  à  pot-au-feu  avant  la  préparation  des  autres  aliments. 
N  est  la  porte  du  cendrier.  G  est  un  grilloir  à  cùtelettes  ,  dis- 
posé de  manière  à  faire  sortir  par  la  cheminée  les  vapeurs  qui 
se  dégagent  pendant  la  cuisson. 

/'  i  Fig.  4  )  est  un  four  pour  les  rôtis  et  la  pâtisserie  ;  au-dessous 
est  établi  un  petit  foyer  0,  dans  lequel  on  peut  brûler  quelques 
morceaux  de  charbon  pour  donner  plus  de  couleur  aux  grosses 
pièces  cuites  dans  le  four. 

Deux  petites  portes  à  coulisses  se  trouvent ,  l'une  sur  la  porte 
du  four,  l'autre  dans  la  plaque  du  fond  (|ui  le  sépare  du  conduit 
a  fumée.  On  peut  donc  établir  dans  le  four  un  courant  d'air  qui 
entraine  la  vapeur  qui  se  dégage  pendant  la  cuisson  ,  et  qui  donne 
aux  viandes  cuites  de  cette  manière  l'apparence  et  les  qualités  (|ui 
caractérisent  les  rôtis  cuits  à  la  broche. 

La  cuisson  des  autres  aliments  s'effectue  dans  des  casseroles 
placées  sur  la  plaque  A  ,  qui  les  chauffe  plus  ou  moins,  suivant 
la  position  qu'elles  y  occupent. 

Dans  la  construction  en  briques,  qui  forme  la  partie  postérieure 
du  fourne  lu  ,  se  trouvent  : 

1"  Une  étuve  E,  chauffée  par  les  produits  de  la  combustion, 
qui  circulent  autour  d'elle  avant  de  se  rendre  dans  la  cheminée. 
C'est  dans  cette  étuve  qu'on  maintient  chauds  les  plats  préparés 
avant  l'heure  des  repas; 

2°  Un  ré^ervoir  à  eau  chaude  //,  fournissant  par  le  robinet  R 


l'eau  nécessaire  aux  besoins  de  la  cuisine,  et  dont  la  capacité  est 
telle,  qu'il  peut  servir  en  même  temps  à  la  préparation  des  bains 
entiers  et  des  bains  de  pieds.  Un  tuyau  (lui  n'est  pas  figuré  sur  le 
dessin  conduit  l'eau  chaude  à  la  salle  de  bains.         ' 

Un  petit  foyer  L  (  Fig.  3  )  permet  de  chauffer  ce  réservoir  quand 
on  a  besoin  d'eau  chaude  le  matin  a>ant  d'allumer  le  fourneau , 
ou  le  soir,  quand  il  est  complètement  refroidi. 

Le  foyer  principal,  quand  il  est  en  pleine  activité,  dégage  assez 
de  chaleur  pour  chauffer  foules  les  parties  du  fourneau.  Des  re- 
gistres en  fonte,  placés  sur  les  côtés,  permettent  d'obtenir  une 
égale  répartition  de  la  chaleur  dans  le  fourneau,  ou  de  faire  va- 
rier la  température  d'un  côté  ou  de  l'autre,  suivant  lu  nature  des 
mets  que  l'on  préi»are. 

Pour  enlever  les  vapeurs  qui  se  dégagent  des  bassines  ou  des 
casseroles,  il  est  bon  d'étid)lir  au-dessus  du  fourneau  une  hotte 
qui  communique  avec  une  grande  cheminée,  dans  laquelle  il  s'é- 
tablira toujours  une  ventilation  naturelle.  Il  vaut  mieux  encore 
faire  monter  dans  cette  cheminée  le  tuyau  a  fumée  du  fourneau  , 
dont  la  chaleur  activent  encore  le  tirage,  qui  n'est  jamais  trop 
considérable. 

Nous  avons  établi  sur  ce  modèle  les  fourneaux  de  cuisine  des 
collèges  d'Amiens,  d'Avignon,  de  Bastia,  de  Clermont,  de  Douai . 
de  Limoges,  de  Lyon,  de  Metz,  de  Moulins,  de  Nîmes,  d'Orléans  , 
de  Rhodez,  et  avant  ceux-ci  les  fourneaux  de  Bordeaux,  de  Bourges, 
de  Montpellier,  de  Nantes,  de  Pau,  de  Poitiers,  de  Toulouse  et  de 
Versailles,  qui  sont  moins  perfectionnés  que  celui  que  nous  venons 
de  décrire. 

Les  dimensions  de  ces  fourneaux  varient  avec  le  nombre  des 
personnes  auxquelles  ils  sont  destinés.  Nous  avons  quatre  modèles 
de  différentes  grandeurs  (l),  mais  on  comprend  qu'il  est  facile  de 
modiliei-  chacun  de  ces  modèles  de  manière  a  le  rendre  applicable 
à  la  préparation  de  mets  plus  abondants  ou  plus  varies  que  ceux 
qu'on  prépare  dans  les  collèges.  Il  suffit  d'allonger  la  partie  anté- 
rieure du  fourneau  de  manière  à  pouvoir  placer,  derrière  les  deux 
marmites  représentées  sur  le  dessin,  deux  autres  bassines  ou  une 
bassine  et  un  hain-marie. 

Celte  dernière  disposition  convient  surtout  aux  hôpitaux,  pour 
lesquels  il  est  quelquefois  encore  préférable  de  n'ajouter  qu'un  sh-uI 
bain-marie  de  grande  dimension,  qui  prend  alors  une  forme  al- 
longée, et  s'élève  devant  la  partie  postérieure  du  foiu'ueau  sans 
gêner  le  service  des  autre  parties. 

Nous  avons  construit  sur  différents  modèles  des  fourneaux 
d'hôpitaux  qui  sont  d'un  service  également  facile,  et  qui  fouctiuu- 
nent  avec  économie  dans  les  hôpitaux  des  Enfants  trouvés  d'An- 
goulème,  de  Chàteaudun,  de  Gisors,  de  Vernon,  etc.,  etc. 


Eq  font)-.      En  ToDU  «*rc  baguette  rticaivr» 

(1)            N°  1  pour  150  personnes,  1800  fr.               2000  Ir. 

2  _   200     —  2000         2200 

3  —  250     —  2Î00         2400 
J  _  $00     —  2i00         WOO 

Les  pièces  en  cuivre  se  paient  à  pan. 

Il  faut  tl'ordinaire  une  niaruiilc  pour  le  pot-au-feu,  lieux  bassines  pour  le^ 
ragoûts,  et  un  réservoir  i  eau  cliaude  contenaut  SOO  litres.  Le  prix  du  cuivre 
est  approximativeuicnt  : 

Pour  le  N"  1         500  fr. 

2  550 

3  600 
A        700 

T    V.  »^ 


215 


RKVUE  DE  LARCHITKCTURK  ET  DES  IRAVAUX  PUBLICS. 


216 


denier,  pour  dissimuler  lirréguUtrité  de  la  place  du  Carrousel ,  la 
divise  en  trois  cours  dinégales  o;,}indeurs;  il  établit,  devant 
chacun  des  palais,  une  cour  reclnn-uiaire  qui  débouciie  sur  une 
grande  cour  centrale  de  forme  elliptique  et  largement  ouverte  aux 
extrémités  du  grand  axe:  de  cette  manière,  les  promeneurs  de  la 
cour  centrale  jouiraient  de  la  vue  presque  entière  des  façades  du 
Louvre  et  des  Tuileries;  les  regards  ne  seraient  plus  choqués  du 
défaut  de  pnrallélisme  entre  les  ailes  qui  réunissent  les  deux  palais; 
et  la  façade  intérieure  de  chacune  de  ces  ailes,  dont  l'architecture 
est  si  disgracieuse,  se  trouverait  a  peu  près  cachée  par  les  deux 
grandes  galeries  formant  les  côtés  de  la  cour  elliptique  du  centre. 
L'emploi  de  la  forme  courl.e,  pour  dissimuler  le  non  parallélisme 
des  bâtiments,  est,  suivant  nous,  une  idée  susceptible  d'être  heu- 
reusement dé\  eloppée. 

Ajoutons  que,  dans  la  solution  de  cette  question  si  controversée, 
il  importe  de  ménager  à  traveis  la  place  du  Carrousel  des  passages 
extrêmement  larges  et  faciles  pour  la  circulation  publique.  C'est 
la  un  besoin  d'autant  plus  impérieux,  que  le  nombre  des  voitures 
s'accroît  tous  les  jours,  et  que  celte  masse  immense  des  deux  palais 
avec  leurs  vastes  cours  et  le  jardin  des  Tuileiies,  interposée  entre 
les  deux  grandes  fractions  de  la  ville  (la  rive  droite  et  la  rive 
gauche),  obligea  de  longs  détours,  rend  ainsi  les  communications 
difficiles,  et  entraîne  une  perte  de  temps  et  de  travail  fort  regret- 
table. 

Du  projet  de  Fontaine  gothique  de  M.  lierthelin  [Max). 

M.  Berthelin  (Max)  a  exposé  un  projet  de  fontaine  gothique 
qu'il  propose  de  faire  construire  sur  la  place  lîellechasse,  en  face 
de  l'église  future  de  Sainte-Clotilde  ;  c'est  une  jolie  composition 
qui  montre  que  l'auteur  connaît  sa  Notre-Dame  de  Paris.  L'en- 
semble de  la  fontaine  est  d'un  effet  très-agréable  ;  mais  si  M.  Ber- 
thelin  tenait  particulièrement  à  l'emplacement  qu'il  lui  destine, 
l'exécution  du  monument  serait  menacée  d'un  ajournement  in- 
défini ;  car  le  projet  de  cette  malheureuse  église  de  Sainte-Clotilde 
n'est  pas  encore  arrêté,  bien  que  M.  Gau,  comme  chacun  sait,  ait 
achevé  ses  plans  depuis  longtemps  ;  bien  plus,  voilà  qu'on  nous 
assure  que  les  plans  de  ^L  Gau  n'ont  pas  l'assentiment  de  quel- 
ques personnes  influentes;  il  faudrait  pourtant  bien  se  décider. 
Finalement,  si  ces  plans  rencontrent  une  très-grande  résistance, 
n'y  aurait-il  pas  moyen  d'indemniser  l'artiste  de  ses  travaux  et 
d'ouvrir  un  concours  public  où  M.  Gau  serait  admis  à  disputer  le 
prix?  Quand  les  plans  de  la  future  église  gothique  seront  définiti- 
vement arrêtés,  on  sera  plus  en  mesure  déjuger  de  l'à-propos  de 
la  fontaine,  que,  du  reste,  M.  Berihelin  consentirait  sans  doute 
à  construire  aussi  bien  ailleurs  que  sur  la  place  Bellechasse. 

Des  emljcllissemcnts  partiels  de  la  cathédrale  de  Paris,  proposés 
par  M.  Couder  {Atnédée).  —  De  l' unité  dans  les  décorations  inté- 
^y'Xienres. 

Les  cmliflliiscmenls  partiels  de  la  cathédrale  de  Paris,  proposés 
par  M.  Couder»  dénotent  une  imagination  chaleureuse  et  colorée, 
mais  qu'(m  voudrait  réglée  par  un  goût  plus  sévère  et  plus  difficile. 
M.  Couder  nous  montre  comment  il  entendrait  disposer  et  décorer 
le  maitre-autel,  la  chaire,  te  banc  d'œuvre ;  comment  il  voudrait 
costumer  les  suisses  lors  des  solennités  nalionaUs;  quelle  pourrait 
être  leur  tenue  aux  fêtes  de  l'Église.  Il  a  exposé  encore  un  dessin 


de  bannière  de  la  Vierge  et  un  dais.  L'architecture  de  M.  Couder, 
nous  l'avons  dit,  n'a  pas  été  assez  rigoureusement  étudiée.  En  exa- 
minant ses  dessins,  on  reconnaît  aisément  le  pinceau  d'un  habile 
décorateur,  mais  on  y  devine  aussi  l'artiste  peu  familier  avec  le 
cise.'iu  et  la  pierre  de  taille.  M.  Couder  manie  plus  habilement  les 
étoffes  que  la  truelle;  ses  suisses  ont  une  allure  superbe;  les  bro- 
deries en  or  et  les  draperies  du  dais  et  de  la  bannière  sont  d'un 
effet  de  luxe  extrême. 

Quelques  personnes  ont  beaucoup  ri  de  cette  espèce  d'accouple- 
ment d'architecture  religieuse  et  de  costume  de  suisse;  pour  nous, 
cette  étude  simultanée  du  la  déc  ration  du  temple  et  du  costume 
des  serviteurs  de  l'Église  nous  parait  non-seulement  très-conve- 
nable, mais  même  foit  heureuse  ;  nous  nous  plaisons  à  y  reconnaître 
un  besoin  A'unité  qui  fait  honneur  à  M.  Couder.  Le  temple,  sans  ses 
cérémonies,  est  comme  endormi  ou  mort  :  c'est  lorsque  les  prêtres 
officient  revêtus  de  leurs  costumes  traditionnels,  (|ue  des  nuages 
d'encens  se  déroulent  en  montant  \ers  les  voûtes,  que  les  chants 
sacrés  se  marient  aux  sons  de  l'ui^u',  et  qu'un  peuple  entier  s'uuit 
dans  un  même  élan  d'adoration  et  de  joie  religieuse,  c'est  alors, 
et  alors  seulement,  que  le  temple  vit  et  ((ue  l'artiste  reconnaît  la 
pleine  réalisation  de  sa  conception.  Décorer  l'intérieur  d'une  église 
sans  tenir  compte  des  costumes  des  serviteurs  du  temple  et  même 
du  caractère  général  des  costumes  des  fidèles,  ce  serait  travailler 
en  dehors  des  conditions  de  l'unité;  ce  serait  apporter  à  la  décora- 
tion de  la  maison  de  Dieu  moius  de  souci  qu'on  n'en  apporte  à 
embellir  l'intérieur  d'un  théâtre,  d'une  salle  de  bal  ou  de  concert. 

/>«  projet  de  cathédrale  de  3t.  tiarnaud.  —  Le*  artiste»  oui  brsoin 
le»  uns  des  autres.  —  II»  devraient  n'associer  plus  fréquemment 
pour  étudier  des  projets. 

Peut-être  ferait-on  un  médioci-e  plaisir  à  MM.  Couder  et  Gar- 
NAUDcn  trouvant  de  l'iiiialosicentre leurs  talents;  et  peut-èlre  même 
seraient-ils  encore  moius  llattés,  si,  après  leur  avoir  accordé  une 
imagination  très-riche,  très-brillante,  on  ne  leur  reconnaissait  pas 
au  même  degré  la  puissance  de  la  raison,  la  sévérité,  la  délicatesse 
du  goût;  tel  est  cependant  notre  sentiment, et,  en  l'exprimant  ici, 
nous  croyons  rendre  un  hommage  sérieux  aux  deux  artistes.  Ne 
sommes-nous  pas  tous,  en  effet,  complémentaires  les  uns  des  au- 
tres? Tel  dont  la  fantaisie  vi\e  et  riante  vient  de  créer  une  char- 
inaute  composition,  n'est-il  pas  souvent  heureux  de  consulter  tel 
autre,  son  ami,  dont  l'esprit,  moins  agile  mais  plus  tenace,  s'est 
rendu  maître  dans  le  domaine  de  la  science?  Y  a-t-il  quelqu'un 
parmi  nous  qui  pui>se  se  passer  du  secours  de  tous  les  autres?  Et 
dès  lors  est-il  raisonnable  d'ambitionner  simultanément  toutes  les 
qualités?  Autant  vaudrait  se  faire  bon  Dieu  tout  de  suite. 

Disons-mieux  :  y  eut-il  jamais  dans  le  monde,  surtout  parmi 
ce  peuple  des  artistes,  tous  plus  ou  moins  hommes  de  sentiment, 
de  verve  et  d'inspiration,  y  eut-il  jamais  des  misanthropes  ré- 
solus à  se  tenir  absolument  à  l'écart  de  leurs  semblables?  Nous 
l'avouons,  nous  n'avons  nulle  croyance  dans  les  contes  bleus  qu'on 
débite  sur  Michel-Ange.  Tout  artiste  a  besoin  d'applaudisse- 
ment, de  gloire,  de  triomphe;  il  s'inspire  à  la  chaleur  de  son 
cœur,  à  son  ardeur  sympathique  pour  les  beautés  de  la  nature,  à 
l'amour,  à  l'amitié,  aux  grandeurs  de  l'ambition,  aux  charmes 
de  la  famille  ;  et  lorsque  son  imagination  exaltée  lui  révèle  un 
spectacle  qui  lui  parait  sublime,  il  crie  à  pleine  poitrine  et  ap- 
pelle le  monde  entier  à  admirer  avec  lui  la  création  de  son  génie; 


217 


RKVUE  DK  LARCUrrKCTimE  KT  DKS  TRAVAUX   PURl.ICS. 


■IlH 


il  vous  dira  qu'elle  est  admirable  et  vous  demandera  avec  un  naïf 
orgueil  de  lui  rendre  hommage.  La  nature  de  l'artiste  est  pleine  de 
religieuse  sympatiiie  et  de  vanité. 

Lorsque  dans  mes  promenades  solitaires,  dit  .lean-.Iaeques,  je  ren- 
contre un  bel  arbre,  je  me  retourne  instinctivement  pour  chercher 
un  ami,  j'éprouve  le  besoin  de  dire  à  quelqu'un  :  «  Voyez  le  bel 
arbre,  m  Oui,  nous  avons  besoin  les  uns  des  autres  ;  nos  instincts, 
nos  goùls,  sont  \ariés  comme  les  fondions  (|ue  l'iiomme  est  des- 
tiné à  remplir,  .lamais  le  monde  ne  connut  un  artiste  également 
éminent  dans  tous  les  arts,  non  plus  que  dans  toutes  les  branches 
d'un  même  art;  l'architecture  de  Raphaël  n'est  pas  d'une  supério- 
rité bien  remarquable,  et  il  trouva  à  Venise  des  maîtres  pour  le 
coloris.  Que  les  artistes  ne  s'offensent  donc  pas  lorsqu'il  arrive  à 
un  critique  de  ne  pas  leur  accorder  au  même  degré  toutes  les  qua- 
lités. Si  chacun  pouvait  se  passer  des  autres,  la  sociélé  serait  sans 
but,  et  l'affection  même  serait  sans  raison. 

Il  arrive  assez  souvent  de  voir  deux  artistes  associer  leurs  efforts 
pour  un  même  projet;  c'est  tantôtdeux  architectes  dont  l'un  est  bon 
constructeur  et  l'autre  bon  dessinateur;  c'est  tantôt  un  architecte 
et  un  sculpteur.  Nous  aimons  à  rencontrer  ces  associations,  et  nous 
pensons  qu'un  jour  elles  te  développeront  plus  l'égulièrement. 
Il  est  des  gens  qui  disent  ne  pas  comprendre  comment  un  même 
travail  d'art  peut  être  fait  pardeux  ou  plusieurs  personnes  associées; 
c'est  ([u'elles  envisagent  mal  la  question.  Le  germe,  l'idée  mère 
d'une  conception  d'ait,  appartient  nécessairement  à  un  seul  ;  mais 
entre  ce  germe  et  l'éclosion  complète  de  l'idée,  il  y  a  un  in- 
tervalle énorme  qui  suppose  une  élaboration  considéiable  et  qui 
peut  avoir  exigé  les  connaissances  les  plus  variées,  le  concours  de 
plusieurs  sciences,  de  plusieurs  industries.  Or,  ces  arts,  ces  sciences, 
ces  industries,  constituent  autant  de  spécialités  et  peuvent  être  cul- 
tivés par  autant  de  personnes  différentes.  Dans  le  fait,  aujourd'hui 
même,  c'est  par  le  concours  de  toutes  ces  spécialités  que  les  projets 
s'élaborent  le  plus  souvent  et  se  complètent  ;  seulement  cela  se  fait 
irrégulièrement,  et  le  projet  ou  le  monument  est  attribué  à  une  seule 
personne  au  lieu  de  l'être  à  un  groupe  dont  elle  était  le  chef  ou 
le  directeur  général.  A  la  Renaissance,  lorsqu'il  y  avait  vrai- 
ment des  écoles  d'art,  c'est-à-dire  des  groupes  d'artistes  se  rat- 
tachant à  une  même  doctrine  d'art,  il  était  très-commun  de  voir 
plusieurs  disciples  travailler  à  une  même  œuvre  sous  la  direc- 
tion du  chef  de  l'école,  et  s'en  distribuer  les  diverses  parties  con- 
formément aux  aptitudes  et  à  l'habileté  de  chacun. Un  de  nos  amis, 
M.  William  Haussoulier,  jeune  peintre  plein  de  goût,  d'intelli- 
gence et  d'amour  pour  son  art,  s'était  proposé  de  publier  un  écrit 
sur  les  œuvres  de  Raphaël,  étudiées  de  ce  point  de  vue.  M.  Wil- 
liam Haussoulier  est  depuis  (|uelque  temps  en  Italie;  espérons 
qu'une  main  amie  lui  fera  passer  ces  lignes  sous  les  yeux,  et 
qu'elles  lui  rappelleront  un  ancien  projet  dont  la  réalisation  serait 
digne  de  lui  it  utile  aux  arts. 

La  cathédrale  de  M.  Garnaud  témoigne  des  belles  qualités  et  des 
défauts  que  nous  avons  signalés  dans  les  compositions  déjà  exposées 
par  cet  artiste  aux  Salons  précédents. 

Us  monuments  d'architecture,  par  leur  nature  même,  ne  sont  pas 
tous  an  même  deyré  des  œuvres  d'art.  —  De  l'Hôpital  projeté  par 
M.  Dttpuy  (Dominique-Jean).  —  Est-Il  bon  d'accumuler  les  fw- 
pitauar  dans  les  villes? 

Il  y  a  des  travaux  d'architecture  qui  ont  surtout  un  caractère 


d'utilité,  et  avec  lesquels  les  .sentiments  du  cœur  n'ont  pas  un 
rapport  direct  :  tels  sont  les  marchés  publics,  les  égouls  d'une 
ville,  les  halles  aux  vins  ,  au  blé,  etc.  D'autres,  au  contraire, 
s'adressent  directement  aux  sentiments  du  cœur  :  tels  sont  les 
tombeaux,  les  monuments  élevés  aux  grands  hommes,  les  ares 
de  triomphe,  etc.  D'autres,  enfin,  ont  un  caractère  univers»!  : 
telles  sont  les  églises,  les...  Mais  nous  ne  voulons  pas  faire  aujour- 
d'hui une  classification  systématique  des  différents  genres  de  con- 
structions; nous  voulons  seulement  constater  que  les  unes  ont  sur- 
tout pour  objet  de  satisfaire  à  des  besoins  de  première  nécessite, 
tandis  que  d'autres,  quoicjue  d'un  caractère  plus  élevé,  ne  sont  pas 
au  même  degré  l'expression  d'un  besoin  immédiat  et  absolu; —  que 
l'expression  artistique  ne  saurait  être  également  élevée  dans  tous 
les  travaux  d'architecture  ;  —  que  les  uns  sont  essentiellement  des 
œuvres  d'art  et  s'adressent  au  sentiment  et  à  l'idéal;  que  les 
autres  sont  essentiellement  des  œuvres  industrielles  destinées  a 
satisfaiie  aux  besoins  de  la  vie  matérielle.  Mais  ajoutons  cpie 
tout  monument  de  la  dernière  espèce,  c'est-a-dire  simplement 
ù'utilité,  peut  être  élevé  au  degré  supérieur,  et  devenir,  dans  une 
certaine  mesure,  une  œuvre  de  charme,  et  même  de  poésie.  On 
comprend  aisément,  en  effet,  que  les  marchés  publics  pourraient 
revêtir  les  aspects  les  plus  variés  et  les  plus  agréables;  que  les  h<'i- 
pitaux,  au  moyen  de  jardins,  de  parterres  de  fleurs,  de  fontaines  ou 
de  cours  d'eau,  etc.,  pourraient  inspirer  un  sentiment  de  bien-être 
aux  malades  ,  et  donner  l'espoir  d'une  santé  prochaine  à  tout  ve- 
nant :  des  bas-reliefs  à  l'extérieur,  des  peintures  à  l'intérieur,  en 
glorifiant  les  souvenirs  de  haute  charité  qui  s'attachent  à  quel- 
([ues  beaux  noms,  éveilleraient  de  bons  sentiments  dans  le  cœur 
de  l'homme  souffrant,  et  fortifieraient  sa  conliai»ce  dans  la  cha- 
rité de  ses  frères.  Mais  l'état  de  nos  finances  ne  permet  que  ra- 
rement de  faire  qu'un  monument  d'utilité  publique  soit  aussi  un 
monument  d'agrément  public,  et  trop  souvent  ce  sont  les  monu- 
ments publics  qui  enlaidissent  les  rues  de  nos  villes  :  témoin  la 
façade  postérieure  du  palais  de  l'Institut,  l'hôpital  de  la  Charité. 
sur  la  rue  des  Saints-Pères ,  presque  tous  les  collèges  ,  les  caser- 
nes, etc.,  etc.  ;  mais  évitons  d'inutiles  critiques  de  détail,  et  re- 
tournons à  l'exposition. 

C'est  un  projet  d'hôpital  que  M.  Dupuv  (  Dominique- Jean  a 
exposé  ;  on  comprend  dès  lors  le  but  de  la  digression  qui  précède. 

Kn  France  et  dans  tous  les  pays  du  monde  civilisé,  c'est  un  usage 
généralement  adopté  d'accumuler  les  hôpitaux  dans  les  villes. 
Nous  déclarons  ne  pas  apercevoir  l'excellence  de  ce  système.  Peut- 
être  est  il  fondé  sur  queiciue  bonne  raison  qui  nous  échappe  en  et- 
moment  ;  mais  il  nous  semble  qu'il  suffirait  d'établir  dans  le^ 
villes  un  petit  nombre  d'hôpitaux  pour  les  malades  dont  le  trans- 
port offrirait  du  danger  ,  pour  donner  des  secours  immédiats  aux 
blessés ,  etc. ,  et  qu'il  serait  bon  de  transporter  la  grande  masse 
des  malades  et  des  convalescents  dans  des  hôpitaux  ruraux  situes 
au  milieu  des  champs  et  des  bois  ,  où  l'air  est  pur,  et  où  le  tym- 
pan n'est  pas  meurtri  tout  le  jour  durant  par  les  bruits  discor- 
dants et  mortels  de  nos  villes.  Il  est  vrai  que  les  élèves  en  mé- 
decine n'auraient  pas  des  occasions  aussi  fràjuentes  d'étudier  les 
différentes  maladies  qui  aftligent  l'espèce  humaine:  mais  esl-il 
nécessaire  d'entretenir  la  maladie  chez  les  uns  pour  rechercher  Us 
moyens  de  la  guérir  plus  facilement  chez  les  autres?  C'est  une 
question  qui  mérite  examen.  Toutefois,  nous  ne  livrons  pas  ce> 
idées  comme  le  résultat  d'une  longue  et  sérieuse  réflexion  ;  nous 
nous  sommes  promis,  au  contraire,  de  commencer  prochai itemenl 


219 


REVUK  DE  LAIICHITKCTURK  KT  DKS  TRAVAUX  PUBLICS 


SÎO 


une  étude  approfondie  de  la  question  des  hôpitaux  ,  et,  en  atten- 
dant,  pour  rendre  pleine  justice  à  M.  Dupuy,  nous  l'avons  prié 
de  nous  communiquer  par  écrit  l'ensemble  des  raisons  qui  l'ont 
influencé  dans  la  composition  de  son  projet,  qui  témoigne,  comme 
on  le  verra,  d'études  très-sérieuses  et  très-persévérantes.  Nous  fai- 
sons graver  le  projet  de  M.  Dupuy  ;  nous  remettrons  donc  à  un 
prochain  numéro  le  mémoire  qu'il  a  bien  voulu  nous  adresser,  et 
dont  la  lecture  fera  certainement  grand  plaisir  à  nos  confrères. 

Du  Projet  de  Mairie  de  M.  Lacroix  (Eugène). 

La  Ville  parait  désireuse  de  terminer  la  placeSaint-Sulpice,  dont 
un  des  côtés  est  déjà  occupé  par  l'église  et  un  autre  côté  par  le 
séminaire.  On  sait  que  M.  Visconti  construit  au  centre  de  la 
place  une  fontaine  qui  devra  être  alimentée  par  les  eaux  du 
puits  de  Grenelle  ;  il  ne  reste  donc  qu'à  régulariser  deux  des  côtés 
de  la  place  pour  que  l'ensemble  soit  complet.  La  Ville  s'en  occupe, 
car  elle  a  acheté  l'hôtel  Choiselat,  sis  à  l'angle  de  la  place,  sur 
le  côté  opposé  à  l'église,  pour  y  établir  la  mairie  du  11*  arrondis- 
sement, actuellement  située  rue  Servandoni. 

Ce  système  d'approprier  à  de  nouveaux  usages  des  bâtiments 
primitivement  construits  en  vue  de  services  très-différents,  est 
rarement  heureux.  On  est  tout  d'abord  frappé  d'une  économie 
immédiate,  mais  on  calcule  rarement  à  quel  prix  déftnitif  on  l'a- 
chète ;  les  pertes  de  temps  et  d'argent,  les  désordres  de  toute  nature 
qui  résultent  d'une  disposition  architectonique  peu  en  rapport 
avec  les  besoins  du  service  journalier,  sont  rarement  évaluées  à 
leur  véritable  chiffre.  Dans  une  mairie  on  rencontre  plusieurs  ser- 
vices différents,  chacun  avec  son  cortège  de  bureaux,  de  salles,  etc., 
et  il  importe  au  public,  dont  le  temps  doit  être  ménagé,  que 
les  bureaux  et  accessoires  de  ces  services  ne  soient  pas  enchevê- 
trés les  uns  dans  les  autres,  mais  que  chacun  soit  au  contraire 
aisément  et  directement  accessible  à  tous  ceux  qu'y  appellent 
leurs  affaires. 

Un  hôtel  de  mairie  est  affecté  au  service  :  1"  de  la  mairie  pro- 
prement dite  ;  2»  de  la  justice  de  paix;  3"  de  la  garde  nationale. 
Dans  la  mairie  on  doit  trouver  : 

1"  le  bureau  du  maire; 

2"       id.       du  secrétaire; 

3"       —      des  certificats  de  vie; 

4"       —      du  recrutement; 

."i"       —      des  élections  ; 

6"       —      de  la  garde  nationale  ; 

7"       —      des  mariages,  des  naissances  et  des  décès  ; 

8"  la  salle  des  mariages. 
La  justice  de  paix  comprend  : 

r  une  salle  d'audience  ; 

2"  le  cabinet  du  juge  de  paix  ; 

3"  une  antichambre; 

4"  le  bureau  du  greffier; 

5"  le  greffe. 
L'élat-majur  de  la  légion  réclame  : 

1"  une  salle  de  discipline  avec  cabinet  pour  les  délibérations; 

2"  une  salle  pour  le  conseil  supérieur; 

3"  un  cabinet  pour  le  major; 

4°  un  cabinet  pour  le  secrétaire  du  major; 

.5°  une  salle  des  adjudants-majors  ; 

6"  un  dépôt  d'armes. 


Il  faut  ajouter  aux  détails  des  service  spéciaux  que  nous  venous 
d'énumérer,  trois  autres  éléments  qui,  sans  former  partie  inté- 
grante d'aucune  des  trois  grandes  divisions  ci-dessus  analysées, 
doivent  cependant  exister  dans  toute  mairie,  ce  sont  :  une  salle 
pour  les  élections,  un  poste  de  garde  nationale  et  un  logement  de 
concierge. 

Toutes  ces  divisions  doivent  communiquer  facilement  les  unes 
avec  lesaulres,  et  cependant  elles  doivent  rester  distinctes,  autant 
que  possible,  pour  éviter  la  confusion. 

M.  Lacroix  prétend,  et  nous  sommes  disposé  à  l'admettre,  que 
l'hôtel  Choiselat  ne  peut  satisfaire  à  ces  données;  qu'on  serait 
obligé  de  fractionner  les  services;  d'établir  une  partie  de  la  justice 
de  paix  au  rez-de-chaussée  et  une  autre  partie  au  premier  étage; 
que  les  bureaux  de  la  garde  nationale  subiraient  un  fractionnement 
analogue  ;  qu'il  en  résultera  de  la  confusion  ;  que  tel  qui  a  affaire 
au  greffe,  et  qui  veut  aussi  parler  au  juge  de  paix,  sera  contraint 
de  monter  au  premier,  de  traverser  des  corridors,  où  il  pourra  se 
tromper  de  bureaux  deux  ou  trois  fois,  et  peut-être  manquer 
l'heure  de  l'audience;  que  d'ailleurs  l'hôtel  Choiselat  n'est  pas  dans 
l'alignement  de  la  rue  du  Pot-de-fer  ;  qu'on  sera  donc  obligé  de 
retrancher  une  partie  des  bâtiments  en  aile.  Par  toutes  ces  raisons, 
assez  valables  ce  nous  semble,  M.  Lacroix  a  pensé  qu'il  serait  utile 
i\  l'arrondissement  et  digne  de  l'administration  de  bAtir  une  mairie 
de  toutes  pièces  et  distribuée  de  manière  à  satisfaire  à  tous  les  be- 
soins du  programme. 

Une  autre  question  qu'il  faudrait  considérer,  et  qui  sera  résolue 
dans  quelques  mois ,  c'est  le  prolongement  projeté  de  la  rue  des 
Petits-Augustins,  qui  traverserait  la  rue  Sainte-Marguerite,  la 
rue  du  Four-Saint-Germain ,  et  aboutirait  à  la  rue  du  Vieux- 
Colombier. 

Pour  mettre  cette  rue  en  communication  directe  avec  la  rue  du 
Pot-de-Fer,  il  faudrait  égiwirrir  la  place  Saint-Sulpice,  et,  par  con- 
séquent ,  retrancher  une  partie  des  maisons  contiguès  à  l'hôtel 
Choiselat.  Pour  faire  ce  retranchement,  il  parait  que  la  Ville  doit 
acheter  tout  l'Ilot  de  maisons  compris  entre  la  place  Saint-Sulpice, 
la  rue  du  Vieux-Colombier,  la  rue  du  Gindre  et  la  rue  Mézières. 

La  Ville  doit  aussi  continuer  la  rue  Madame  jusque  dans  la  rue 
du  Vieux-Colombier,  et  la  rue  du  Gindre,  qui  en  est  le  prolonge- 
ment, serait  alors  élargie.  Tous  ces  alignements  donneraient  une 
nouvelle  vie  au  faubourg  Saint-Germain  ,  et  feraient  de  la  place 
Saint-Sulpice  une  des  plus  belles  places  de  Paris. 

Dans  son  projet,  M.  Lacroix  a  profité  de  tous  ces  alignements, 
et  il  a  placé  sa  mairie  dans  l'axe  de  l'église  Saint-Sulpice,  avec 
entrée  sur  la  place  et  sortie  sur  la  rue  Madame. 

M.  Lacroix  a  cru  devoir  réunir  à  cette  mairie  les  écoles  com- 
munales, une  succursale  de  la  caisse  d'épargne  et  un  bureau  de 
bienfaisance,  toutes  choses  communes  à  l'arrondissement  et  sous 
la  surveillance  immédiate  du  maire. 

Dans  son  projet,  ou  trouve,  en  entrant  par  la  place  Saint-Sul- 
pice, au  rez-de-chaussée,  à  droite,  l'état-major  de  la  garde  na- 
tionale ;  à  gauche,  la  justice  de  paix  ;  au  fond  de  la  cour,  la  salle 
d'élection  ;  au  premier  étage,  la  mairie  proprement  dite  ;  en  entrant 
par  la  nouvelle  rue  Madame,  les  écoles  des  filles  et  des  garçons  avec 
préaux  couverts  et  découverts  ;  les  bureaux  de  vaccine,  de  bien- 
faisance et  la  succursale  de  la  caisse  d'épargne. 

La  caserne  étant  à  deux  pas,  rue  du  Vieux-Colombier,  il  n'a  pas 
cru  devoir  ajouter  un  poste  de  pompiere. 

Tout  ce  travail,  bien  étudié,  bien  rendu,  mérite  l'attention  de 


331 


REVUK  DK  LARCHITKCTLRK  KT  DKS  THAVAl  X   PUBIJCS. 


232 


la  Ville,  et  nous  engageons  M.  Lacroix  à  faire  connaitre  son  projet 
à  toutes  les  notabilités  de  l'arrondissement  qui  seraient  en  mesure 
de  contribuer  à  le  faire  adopter  par  l'administration. 


Du  pnijel  de  Palais  de  l'Industrie  et  du,  projet  d'Hôpital,  par 
M.  Matjne.  —  Faut-il  bâtir  un  palait  définitif  punr  h  s  exposi- 
tions de  r Industrie  '.' 

M.  Magne  est  un  ancien  lauréat,  et,  comme  tous  ceux  qui  ont  eu 
l'honneur  de  remporter  le  grand  prix,  il  trouve  dans  son  crayon  et 
son  pinceau  deux  instruments  dociles,  qui  se  prêtent  avec  une 
miraculeuse  souplesse  et  infiniment  de  charme  à  exprimer  toutes 
les  conceptions  de  leur  maître.  M.  Magne  a  abordé  deux  sujets 
très-intéressants,  et  qui  ont  tous  les  deux  la  valeur  de  l'à-propos  ; 
l'un  est  un  projet  de  palais  p<mr  l'exposition  des  produits  de  l'in- 
dustrie et  pour  r  exposition  annuelle  des  arts;  dans  l'intervalle  de 
ces  expositions  il  servirait  de  bazar;  —  l'autre  est  un  projet  d'hô- 
pital pour  les  convalescents. 

Le  premier  projet  de  M.  Magne  se  rattache  à  une  question  éco- 
nomique importante.  Les  constructions  provisoires  qui  servent  dans 
l'état  actuel  à  l'exposition  quinquennale  de  l'industrie  française  se 
modifient  chaque  fois  dans  leurs  formes  et  dans  leurs  dimensions  : 
c'est  qu'il  faut  avoir  déjà  fait,  pour  être  assuré  de  bien  faire  ;  c'est 
surtout  pour  l'architecte  que  l'expérience  du  passé  est  le  flambeau 
de  l'avenir.  Connaissons-nous  bien,  à  l'heure  qu'il  est,  toutes  les 
conditions  que  devrait  remplir  un  palais  pour  l'exposition  de 
l'Industrie?  Est-il  bien  suffisant,  en  effet,  de  distribuer  plus  ou 
moins  régulièrement,  sur  un  grand  espace,  les  mille  [jroduits  et 
inventions  du  génie  français?  Ces  machines  éparses,- inertes,  sans 
vie  et  sans  mouvement,  sont-elles  suffisamment  compréhensibles? 
Ne  conviendrait-il  pas,  par  hasai'd,  de  les  faire  fonctionner,  pour 
mieux  faire  juger  de  l'aisance  et  du  moelleux  de  leur  mouvement, 
du  rôle  bien  déterminé  de  chacun  de  leurs  éléments  ?  Une  exposition 
de  l'industrie  doit-elle  être  faite  uniquement  en  vue  de  la  production 
et  de  la  consommation  actuelle,  et  ne  devrait-elle  pas  servir  paral- 
lèlement, et  dans  une  certaine  mesure,  à  l'éducation  du  peuple,  à 
l'éclosion  des  vocations?  Il  est  important  de  rappeler  ici  un  fait  qui 
mérite  l'attention  de  nos  gouvernants  :  c'est  que,  dans  le  rapport  de 
la  commission  de  la  chambre  des  communes  d'Angleterre,  nommée 
en  vue  d'étudier  les  causes  de  l'infériorité  des  arts  du  dessin  indus- 
triel dans  la  Grande-Bretagne  comparativement  à  l'état  de  ces  arts 
en  France  et  sur  le  continent,  il  y  a  eu  une  espèce  d'unanimité 
parmi  les  artistes  anglais  et  étrangers  consultés  à  cette  occasion,  pour 
déclarer  qu'il  fallait  attribuer  le  laffinement  généial  du  goût  fran- 
çais au  grand  nombre  de  musées  répandus  dans  toutes  nos  villes 
et  constamment  ouverts  au  public.  N'y  aurait-il  pas  une  influence 
analogue  à  espérer  de  nos  expositions  industrielles,  bien  conçues  et 
bien  exécutées  ?  On  le  voit ,  les  premiers  éléments  du  problème 
sont  à  étudier;  oui,  les  premiers  ;  car,  suivant  quelle  loi  ferait-on 
même  la  distribution  des  produits?  quelles  limites  conviendrait-il 
de  donner  à  l'édifice?  etc.,  etc.  Avant  de  faire  une  botte,  on  prend 
les  mesures  du  pied,  on  en  étudie  les  fonctions  et  les  mouvements 
nécessaires.  Avant  de  faire  un  monument,  on  en  étudie  les  besoins, 
et  on  les  écrit  sous  forme  de  programme.  Or,  ici,  le  programme  ne 
nous  parait  pas  avoir  été  suffisamment  étudié.  Que  M.  Magne  ne 
s'offense  pas  de  notre  critique,  elle  laisse  intact  son  talent  d'ar- 
tiste ;  mais  la  rédaction  seule  du  programme  d'un  palais  définitif 


de  l'industrie  suppose  la  solution  d'une  série  de  questions  écono- 
miques, administratives,  scientifiques  et  artistiques,  des  plus  diffi- 
ciles et  des  plus  ardues.  Ce  n'est  plus  ici  comme  pour  un  collège, 
une  église,  un  théâtre,  une  mairie,  une  caserne  ;  un  palais  pour  les 
expositions  est  un  monument  sans  tradition  dans  le  passé.  De\ant 
ce  travail,  l'artiste  est  réduit  presque  à  ses  seules  forces;  il  lui  est 
impossible  de  consulter  l'expérience,  difficile  de  prévoir  les  besoins 
et  le  rôle  exact  de  l'industrie  dans  l'avenir.  Les  bâtiments  pro^i- 
soires  construits  tous  les  cinq  ans  ne  coûtent  pas  400,000  fr.  :  c'est 
80,000  fr.  par  an.  80,000  fr.,  à  raison  de  5  pour  100,  corres- 
pondent à  un  capital  de  1,600,000  fr.  Or,  nous  le  demandons,  que 
coûterait  un  palais  définitif  qui  couvrirait  20  hectares  de  terrain, 
comme  les  bâtiments  actuels,  ou  même  davantage,  car  la  quantité 
des  produits  envoyés  à  chaque  exposition  croit  suivant  une  pro- 
gression des  plus  rapides?  Ne  craignons  pas  de  le  dire,  c'est  le 
programme  qu'il  faut  étudier  et  creuser  longtemps  avant  d'alwr- 
der  la  solution  architecturale  d'un  palais  définitif  des  expositions, 
et  ce  programme,  nous  voudrions  le  voir  étudié  par  un  groupe 
d'hommes  réunissant  plusieurs  spécialités. 

Toutefois,  à  la  suite  de  ce  qui  précède,  il  est  juste  d'ajouter  les 
considérations  que  M.  Magne  fait  valoir  en  faveur  de  son  projet. 
Son  idée  de  bazar,  d'ailleurs,  peut  conduire  peut-être  à  la  solution 
de  la  question  économique;  car  un  bazar  est  une  exposition  per- 
manente des  produits  de  l'industrie,  et  un  bazar  peut  rapporter 
de  bons  revenus;  cependant  on  ne  saurait  se  dissimuler  que  cette 
transformation  offre  des  difficultés. 

«  Ce  nionuniCMl,  d'une  coiistruclion  dur.tbie,  élevé  .nu  centre  des 
quartiers  commerçaiils  de  Paris,  serait  destiné  .i  recevoir  les  productions 
del'iiidusirie,  dont  l'exposition  revient  tous  les  cinq  ans,  et  leslable.iu\ 
exposés  annuellement  an  innsée  du  Louvre;  ce  qui  éviterait  l'inconvé- 
nienl  de  masquer,  comme  on  est  obligé  de  le  faire,  faute  d'espace,  les 
collections  dos  maîtres  de  l'Ecole  ancienne.  Enfin,  après  la  durée  «le 
ces  diverses  expositions,  celte  construction  serait  convertie  en  forum 
ou  bazar,  réunissant,  pendant  toute  l'année,  des  productions  itc  toute 
sorte,  classées  dans  les  différentes  divisions  disposées  à  cet  elTet. 

«  Une  grande  cour  centrale,  ornée  dt  plantations,  «le  fontaines, 
d'exèdres.  et  recevant  au  centre  la  statue  équestre  du  ron«lateur  du 
monument,  serviraii  de  lien  «le  promenades  publiques,  et  ferait  de  ce 
bazar  un  lien  de  commerce  et  d'agrément. 

«  Jnscpi'à  présent  Ton  avait  reculé  devant  l'établissement  d'un  nio- 
nuuicnt  de  ce  genre;  en  effet,  il  n'était  point  possilile  d'affecter  nn«- 
somme  «le  plusieurs  millions  à  l'érection  d'un  palais  qui  aurait  en  pour 
toute  destination  l'exposition  quinquennale  des  produits  de  l'indusirie. 
Avec  notre  programme,  toutes  les  dimcultés  s'aplanissent,  car  la  con- 
versi«in  des  salles  d'expositions  en  bazar  pendant  dix  mois  de  rann«M- 
produirait  au  gouvernement  un  revenu  assez  élevé  pour  qu'on  pAiabor- 
«ler  sans  obstacles  la  question  de  dépense. 

«  Des  divers  emplacemcnis  que  nous  pmposons,  l'un  des  plus  conve- 
nables est  celui  qu'occupe  l'ilol  circnn.scril  par  le  quai  Pelletier,  les 
rues  Plancite-Mibray  et  des  Arcis,  la  me  de  la  Verrerie  et  la  pl.-ice  «le 
ril«Jtel-de-Ville;  en  effet,  les  constructions  renfermées  dans  le  cercle 
((lie  nous  venons  de  tracer  sont  généralemenl  de  peu  de  valeur.  Nous 
ne  préien«lons  pas  cependant  nous  en  tenir  à  cet  emplacement  :  Il  en 
existe  lui  autre,  moins  convenablement  situé,  il  est  vrai,  mais  qui  réuni- 
rail  toutes  les  conditions  possibles  d'économie  quant  à  l'expmprlaliun. 
Il  est  situé  entre  la  rue  Saint-André-des-Arts,  le  coté  giuiche  de  la  cour 
du  Commerce,  la  rue  de  l'Ecole-de-Médetine  et  les  rues  du  Paon  et  «le 
l'Eperon. 

«  Nous  avons  adopté  provisoirenuMil  remplacement  le  plus  rappnx-hc 
du  Palais  du  Louvre. 


±2^ 


REVUE  DE  l.ARCHITECTLIΠ ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


00 


•Il 


Dispositiom  générales. 

«  En  regard  du  quai,  se  développe  une  façade  d'une  longueur  de  près 
delroiscenls  mèlres,  décorée  d'un  inagnilique  porliqne  d'ordre  corin- 
ihien;  au  cenlre,  l'entrée  publique,  et  aux  deux  exlréniilés  de  la  cour, 
deux  vastes  entrées  pour  les  voilures  et  le  passage  des  dilférenls  pro- 
duits qui  devront  être  exposés. 

«Au  premier  plan,  un  double  portique,  l'un  de  dix  nièlns  sur  la  enur, 
l'autre  de  vingtsur  le  quai,  pour  la  libre  eireulalion  des  visilciirs,  don- 
nant accès  à  droite  et  à  gaiicbe  aux  différentes  galeries  et  aux  vastes  es- 
caliers conduisant  au  premier  élage,  oii  sont  exposés  les  bronzes,  l'orfè- 
vrerie, les  vitraux  et  lesobjelsde  commerce  les  plus  usuels. 

«  La  façade  princifiale,  formée  dn  porli(pie  dont  nous  avons  parlé, 
reçoit,  au  dessus  de  l'eulablernent  de  l'ordie,  un  grand  atlique  décoré 
des  statues  en  marbre  ou  en  bronze  des  bonimes  célèbres  donl  les  pré- 
«ieuscs  découvertes  bâtèrent  le  progrès  d<-  l'art  industriel;  Galilée,  Gu- 
leuberg,  Lapeyroiise ,  Benvcnuio  Cellini,  l'apin ,  Peyronnet,  Jac- 
qnart,elc.  ViennenI  ensuite,  sous  le  soflile  de  l'ordre  Inférieur,  les  génies 
de  second  ordre,  avec  la  représenlalion  des  productions  remarquables 
qu'ils  ont  exposées. 

«  D(!rrière  celle  galerie,  s'élève,  au  second  plan  et  au  premier  élage, 
un  portique  qui  règne  au  pourtour  de  la  cour,  servant  de  cominunica- 
lion  entre  les  <liveiscs  galeries  d'exposition. 

«  La  cour  ceuirale,  de  forme  carrée,  offrant  un  développement  de  plus 
de  cent  mètres  sur  cbaque  face,  esleniourée  de  portiques  simples  sur 
les  faces  lalérales,  et  doubles  sur  les  faces  principale  et  posiérienre. 
Ces  promenoirs  desscrveni  les  différentes  galeries,  facilitent  la  circula- 
lion,  et  décor'eni  syniélriqucmciil  les  qualre  côiés  de  la  cour  servant  de 
lieu  de  promenade  publique,  {l'alcnlihus  inlrà  publicis  horlibus.) 

«  En  proloiigenienl  du  porliipie  ouvert  .sur  le  qiiai.s'élendenl,  à  dioite 
et  il  gauche,  des  galeries  d'exposilion  de  vingt  mènes  de  largeur  aux- 
quelles sont  adossés  les  escaliers  donl  mms  avons  parle  plus  haut,  con- 
iliilsant  à  l'clage  supérieur  et  disposes  dans  l'axe  des  porli(pies  de  com- 
munication sur  la  cour;  ces  premières  galeries  communiquent  avec 
d'auires  de  même  largeur,  s'eiendant  parallèlement  aux  faces  lalérales, 
iliinl  elles  occupcnl  tout  le  développement  ;  celles-ci  donnent  encore 
accès  à  une  triple  galerie,  de  niénie  laigenr  que  les  précéilenles  et  dis- 
posée parallèlement  à  la  face  principale  et  aux  galeries  dont  nous  avons 
(larlé  en  premier  lieu;  elles  sont  séparées  de  celles-ci  par  des 
cours  secondaires  seivaul  il  éclairer  et  veniilei  les  galeries  qui  leur  sont 
adossées. 

«  Les  diverses  galeries  donl  nous  venons  de  djcrire  la  dispusilion 
offieni  à  rez-de-chaussée  des  catégories  distinctes  poui'  l'exposiiion  des 
différents  (iroduits;  les  machines,  les  foules,  les  lustres,  les  tapisse- 
ries, elc  ,  un  corps  de  gaide  et  un  logement  de  gardien  (ilacés  à  proxi- 
mité des  entrées,  complètent  les  dispositions  du  rez-de-chaiissée. 

u  Les  grandes  divisio'nsque  nous  avons  enumerées  se  retrouvent  au 
premier  élage  avec  les  subdivisions  nécessaires  dont  nous  avons  déjii 
parlé.  Cet  étage  admet  encore,  sur  la  face  posiérienre  et  d.ms  la  lon- 
gueur lin  dévelop|ieinent  de  la  cour,  les  liigenieiits  d'uiiadminislialenr, 
les  bureaux  et  quelques  pièces  de  dépendance. 

L'ensemble  des  conslructions  couvertes  offre  une  siipeilieie  de 
ri3,000  mèlres  par  élage. 

Les  hôpitaux  de  Paris  s'encombrent  chaque  jour,  et  chaque 
jour  les  chefs  de  service  sont  obligés  de  renvoyer  un  certiiin  nom- 
l)re  de  malades  pour  faire  place  à  de  nouveaux  sujets  affectés  de 
maladies  aiguës  U  en  résulte  que  ces  malades,  à  peine  entrés  dans 
leur  convalescence,  se  trouvent,  en  quittant  les  salles,  sans  moyen 
d'exislence  ;  ils  sont  la  plupart  sans  argent,  et  leur  état  de  santé 
ne  leur  permet  pas  de  travailler  pour  en  gagner.  Et  cependant 
leurs  besoins  deviennent  alors  plus  impérieux  ;  la  guérisou  peut- 
elle  en  effet  s'opérer  sans  le  setcurs  de  oiédicaments  et  d'une  ali- 


mentation substantielle?  On  comprend  la  funeste  inniienee  de  In 
misère  et  des  privations  de  toute  espèce  sur  des  organisations  déjà 
usées  par  lenial  :  les  rechutes  sont  nombreuses,  inévitables,  et  sou- 
vent plus  graves  que  l'affection  primitive. 

Tels  sont  les  motifs  du  projet  que  M.  Magne  compte  soumettre 
au  Ministre  de  l'Intérieur,  et  dont  il  donne  la  description  en  ces 
termes  : 

«  Le  convaleseenl  admis  dans  l'asile  travaillerait  dans  un  des  nom- 
breux ateliers  qui  y  esisieronl;  la  durée  de  son  travail  de  chaque  jour 
serait  proporlionnéc  il  ses  forces;  l:i  il  recevrait  des  aliments  subslan- 
tiels,  de  bon  vin,  enfin  tous  les  soins  que  ri'clanierait  son  élal. 

«  A  la  sortie  de  l'asile,  le  eonvaleeceni  recevrait  une  somme  qu'on  dé- 
terminera ultérieurement,  on  bien,  il  serait  placé  dans  les  ateliers  de 
Paris  par  les  soins  d'une  commission  atta(  bée  ii  l'éiablissemenl. 

«  On  aurait  ainsi  rempli  le  double  but  de  raelire  I  ouvrier  dans  un  élai 
de.sanlé  qui  puisse  lui  permettre  île  gagner  sa  vie  cl  lui  assurer  de 
l'occupai  ion  à  sa  sortie  de  l'asile. 

«  L'établis.senienl  que  nous  proposons,  situé  hors  Paris,  en  bon  air. 
cuniiendrait  2000  convalescenis  des  deux  sexes,  répartis  dans  deux 
grandes  divisions  sans  communication  entre  elles. 

«  \  l'entrée,  le  logement  d'un  concierge  ,  un  vaste  parloir  et  le 
local  des  médecins  ei  de  leurs  aides,  une  salle  d'opération  el  un 
dépôt,  dans  le  cas  où  l'étal  du  malade  ne  permettrait  pas  de  le  transpor- 
ter dans  un  des  hôpitaux  où  l'on  devrait  traiter  son  affection. 

«  Ces  conslructions  seraient  séparées,  par  une  première  cour  de  ser- 
vice, du  local  administratif  et  religieux,  placé  en  avant  de  la  grande 
cour  centrale  qui  distribue  à  droite  et  ii  gauche  les  ateliers  de  luule 
sorte  pour  les  deux  sexes,  ainsi  que  les  galeries  de  communication  aux 
promenoirs  couverts. 

«  Li  partie  postérieure  de  la  cour  reçoit  de  grands  réfectoires,  les 
cuisines  avec  dépôt  de  subsistances,  des  bains,  des  piscines,  enfin  une 
cunslruction  complètement  isolée  des  aleliers  el  des  promenoirs,  el  af- 
fectée au  logement  des  sœurs  hospitalières,  avec  lingerie,  ouvroir, 
buanderie,  lavoir,  séchoirs,  et  un  réservoir  distribuant  l'eau  dans  toutes 
les  salles. 

Il  Pour  assurer  la  libre  circulation  de  l'air,  les  bâtiments  spi-cialenieni' 
destinés  aux  convalescents  sont  séparés  par  des  cours  d'une  étendue 
convenable,  plantées  d'arbustes  elde  Heurs,  et  où  des  lileis  d'eau  entre- 
tiennent la  fraîcheur. 

Il  Eu  outre  des  dispositions  que  nous  veimns  de  mentionner,  le  rez-de- 
chaussée  comporte  encore  de  vastes  promenades  plantées  d'arbres,  dé- 
corées de  fontaines  el  servant  d'enceinte  aux  constructions  ;  des  écuries 
el  remises,  des  hangars,  des  latrines,  enfin  une  ferme  avec  toutes  ses 
dépendances. 

«  .\n-dessus  des  c<uistructioiis  du  rez-de-<baiissée,  s'élèvent  deux 
étages  de  doiloirs  admettant  1000  lits  dans  chaque  division. 

«  Une  chapelle  placée  an  premier  étape  est  disposée  de  façon  à  ne 
laisser  aucune  communication  entre  les  deux  sexes  :  elle  coinporle  aussi 
des  tribunes  ;  celle  des  administrateurs  et  celle  des  .sœurs  placées  au- 
de-siis  de  la  Sacristie. 

Projet  lie  décoration  d'un  Plafimd,  yar  M.  Suulnirr  [Jn'ef;. 

Nous  ne  nous  rendons  pas  bien  compte  de  la  fantaisie  de  .M.  Saul- 
nier  (Julesl,  qui  a  expose  un  projet  de  dirorution  d'un  plafond  pour 
un  établissement  public.  Cette  idée  d'isoler  un  plafond  de  la  salle  qu'il 
recouvre,  de  le  décorer  sans  égard  pour  l'influence  de  celte  déco- 
ration sur  celle  des  murs  de  la  même  salle;  tout  cela  nous  semble 
tellement  en  dehors  des  habitudes  d'tinité  et  de  mesure  que  l'étude 
de  l'arcliiteclure  communique  d'ordinaire  à  l'esprit,  et  que  le  talent 
évident  de  M.  Saulnier  permet  de  lui  supposer,  que  nous  nous 


225 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


226 


sentons  lancé  dans  une  multitude  d'hypothèses,  pour  expliquer  la 
présence  au  Snlon  de  ce  fragment  isolé;  mais  comme  ces  hypo- 
thèses, en  fin  de  compte,  seraient  sans  aucun  effet  utile,  nous  nous 
contenterons  de  passer  outre,  en  reconnaissant  toutefois  le  mérite 
aussi  bien  que  l'originalité  de  M.  Saulnier. 

Derio'  dessins  de  maisons,  par  M.  Ed.  Renaud. 

Nous  terminerons  ce  compte  rendu  par  la  mention  des  travaux 
de  M.  Ed.  Renaud,  qui  a  exposé  les  dessins  de  deux  maisons  con- 
struites sous  ses  ordres  et  d'après  ses  plans  :  l'une,  sur  la  place 
Saint-Georges,  a  été  déjà  publiée  par  nous  dans  notre  volume  de 
l'an  dernier;  l'autre  est  située  rue  Fontaine-Saint-Georges,  n"  20. 
Nous  engageons  ceux  de  nos  lecteurs  qui  passeraient  de  ces  côtés 
à  visiter  ces  maisons;  la  décoration  et  les  sculptures  en  sont  tout  à 
fait  remarquables. 

Nous  espérons  qu'un  jour  on  se  décidera  à  offrir  des  récom- 
penses honorifiques  aux  architectes  qui  auront  beaucoup  fait  pour 
augmenter  le  comfortable  de  nos  intérieurs,  et  faire  pénétrer  dans 
la  masse  de  la  population,  par  le  bon  goût  de  leurs  décorations,  un 
sentiment  convenable  des  belles  formes.  Il  serait  bon  que  les  façades 
des  maisons  et  des  édifices  publics  fussent  considérées  davantage 
comme  moyen  d'épurer  le  goût  du  peuple. 

Les  gravures  de  M.  Huguenet. 

Nous  ne  saurions  clore  notre  compte  rendu  du  Salon  de  1844 
sans  dire  un  mot  des  gravures  d'architecture  exposées  par  M.  Hu- 
guenet. Il  est  impossible,  croyons-nous,  de  rien  faire  en  ce  genre 
de  plus  pur,  de  plus  précis.  Le  Portail  de  Notre-Dame  de  Brou  et 
la  Façade  de  la  maison,  place  Saint-Georges,  n°  26  (la  première  est 
une  œuvre  de  grande  dimension)  sont  des  travaux  où  la  constance 
de  l'artiste  marche  de  pair  avec  son  talent.  Prenez  une  loupe,  et 
regardez  les  frises,  les  chapiteaux  de  cette  maison,  vous  les  verrez 
se  couvrir  de  feuillages,  de  fleurs,  et  se  peupler  d'animaux.  Grâce 
à  la  puissance  de  la  lentille,  cette  façade  devient  un  monde.  Nous 
conseillons  à  nos  lecteurs  cette  expérience;  elle  leur  est  facile,  puis- 
qu'ils ont  la  planche  entre  les  mains  (l). 

CÉSAR  DALY. 


EXPOSITION  DE  Z.'IIiri>TTSTRIE  DE  1844. 


(deuxième  article,   Voy.  col.  121.) 


HlSTOaiQUE   DES   EXPOSITIONS    ANTÉEIEUUES. 

La  Convention  était  sortie  victorieuse  des  luttes  civiles  et  de  la 
guerre  étrangère.  Il  fallait  asseoir  sur  des  bases  inébranlables  la 
prépondérance  des  nouvelles  idées  en  France  et  en  Europe.  Cette 


(1)  Voir  cette  planche  dans  le  â«  volume  de  cette  Revue  (année  184$). 


grande  mission  échut  en  partage  au  Directoire,  qui  avait  recueilli 
le  pouvoir  des  mains  de  la  Convention,  Le  cabinet  de  Vienne  était 
loin  de  vouloir  la  réunion  définitive  de  la  Belgique  à  la  France; 
pourtant  la  Convention  avait  voté  cette  réunion  avant  de  se  séparer. 
Le  Directoire  forma  donc  de  vastes  plans  de  campagne.  Les  trois 
grandes  armées  de  la  République,  celles  de  Rhin-et-Moselle,  de 
Sambre-et-Meuse  et  celle  d'Italie,  étaient  là  pour  répondre  à  l'ap- 
pel de  la  patrie.  Bonaparte  conçut  la  grande  pensée  de  frapper 
l'Autriche  dans  ses  possessions  de  la  Lombardie,  et  de  trancher 
avec  l'épée  la  ligue  de  l'Autriche  et  de  la  plupart  des  petits  Etats 
d'Italie.  Cette  merveilleuse  campagne,  qui  commença  par  la  vic- 
toire de  Montenolte  (12  avril  1796)  et  finit  par  celle  de  Neumark 
((«■•avril  1797)  et  le  glorieux  traité  de  Campo-Formio  (i7  oc- 
tobre 1797),  incorporait  la  Belgique  à  la  France,  et  étendait  les 
limites  de  la  République  jusqu'aux  Alpes  et  au  Rhin.  Le  Direc- 
toire prépara  une  fête  triomphale  pour  recevoir  le  jeune  général  de 
l'armée  d'Italie,  qui  venait  lui  présenter  le  traité  de  Campo-Formio. 
Cette  solennité  nationale  eut  lieu  dans  la  grande  cour  du  Luxem- 
bourg le  10  décembre  1797. 

Après  des  discours  de  Talleyrand,  de  Barras  et  de  Bonaparte 
JoubertetAndréossy  s'avancèrent  en  portant  le  drapeau  de  l'année 
d'Italie.  La  vue  de  ce  drapeau,  qui  était  destiné  à  décorer  la  salle 
des  séances  publiques  du  Directoire,  souleva  des  acclamations  in- 
finies. Les  inscriptions"  étaient  en  lettres  d'or.  —  D'un  côté,  en 
grands  caractères,  se  lisait  : 

«  A  l'armée  d'Italie,  la  pairie  reconnaissante  ;  » 

et  de  l'autre  : 

«L'armée  d'Italie  a  fait  cent  cinquante  mille  prisonniers;  elle  a  pris  cent 
soixante-dix  drapeaux,  cinq  cent  cinquante  pièces  d'artillerie  de  siège,  six 
cents  pièces  de  campagne,  cinq  équipages  de  pont,  neuf  \aisseaux  de  04 
canons,  douze  frégates,  douze  corvettes  et  dix-huit  galères.  — Armistices  avec 
les  rois  de  Sardaigne,  de  Naples,  le  Pape ,  les  ducs  de  Parme,  de  Modènc. 
. —  Préliminaires  de  Léoben.  —  Traités  de  paix  de  Tolentino,  de  Campo-For- 
mio. —  Donné  la  liberté  aux  peuples  de  Bologne,  Feriare,  Modène,  de  la  Ilo- 
magne,  de  la  Lombardie,  de  Brescia,  de  Bergame,  de  Mantoue,  d'une  partie 
du  Véronais  et  de  la  Valtelinc  ;  aux  peuples  de  Gènes,  aux  fiefs  impériaux ,  aux 
peuples  des  départements  de  Corcyre,  de  la  mer  Egée  et  Illirique.  —  Envoyé 
à  Paris  les  chefs-d'œuvre  de  Michel-Ange,  de  Titien,  de  Paul  Véronéte,du 
Corrége,  de  l'Albane,  des  Carrache,  de  Raphaël,  de  Léonard  de  Vinci,  elc 
—  Triomphé  en  dix-huit  batailles  rangées,  Monlenotte,  Millc^imo,  Mondovi, 
Lodi,  Borghetto,  Lonato,  Castiglione,  Rovercdo,  Bassano,  Saint-Georges,  Fon- 
lana-Niva,  Caldiero,  Arcole,  Rivoli,  la  Favorite,  le  Tagliamenlo,  Tarvis,  Neu- 
niarck.  —  Livré  soixante-sept  combats. 

A  l'ombre  des  lauriers  de  la  campagne  d'Italie,  la  confiance, 
l'espoir,  reparaissaient  dans  la  République.  Le  Directoire  avait  déjà 
commencé  à  remettre  quelque  ordre  dans  les  finances  et  dans 
l'administration  ;  Vindusirie  allait  renaître.  Le  Directoire  décréta 
que  l'anniversaire  de  la  fondation  de  la  République  serait  célèbre 
par  une  fête  grandiose.  Surpasser  les  dimensions  matérielles  de 
cette  fête  immense  de  la  Fédération  du  Champ-de-Mar»  (14  juil- 
let 17 90)  eût  été  impossible;  la  pensée  qui  avait  animé  cette  gi-ande 
cérémonie  populaire  n'existait  plus  :  il  fallait  en  trouver  une  autre, 
digne  d'être  mise  en  parallèle  avec  la  fête  militaire  qui  venait  d'avoir 
lieu  dans  la  grande  courdu  Louvre.  Le  ministre  de  l'Intérieur,  Fran- 
çois (de  Neufchàteau),  intelligent  appréciateur  des  arts  utiles,  eut 
cette  noble  pensée  :  il  proposa  une  Exposition  des  produits  de  l'In- 
dustrie nationale.  Cette  idée  fut  accueillie  avec  enthousiasme.  La 
gloire  des  armes  n'absorbait  pas  toute  lactiviténiitionale.  La  France 
avait  déjà  la  conscience  de  sa  haute  destinée  industrielle. 
T.  V.  15 


227 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


2i» 


L'exposition  fut  ouverte  le  troisième  jour  complémentaire  de 
l'an  VI  (10  septembre  1798).  Voici  comment  le  Moniteur  rapporte 
cette  solennité  : 

\  dix  heures  pr(!ciscs  du  malin,  le  ministre  de  l'Iutéiicur  s'est  rendu  à  la 
maison  du  Charnp-de-Mars,  et  de  là  au  lieu  de  l'exposilion,  par  le  milieu  du 
<ii(|uc.  Celle  marche  a  été  réglée  ainsi  qu'il  suit  : 

1°  L'école  des  trompettes  ; 

2"  Cn  détachement  de  cavalerie; 

3°  Les  deux  premiers  pelotons  d'appariteurs; 

4"  Des  tambouis ; 

5"  Musiipie  militaire  à  pied; 

6"  Un  peloton  d'infanterie; 

7"  Les  hérauts; 

8"  Le  régulateur  de  la  fête; 

0"  Les  artistes  inscrits  pour  l'exposition; 

10"  Le  jury,  composé  des  citoyens  Darcet,  membre  de  l'Institut  national; 
Molard,  menihre  du  Conservatoire  des  Arls  et  Métiers;  Chaptal,  membre  de 
l'Inslitut  national;  Vion,  peintre,  uiend)re  de  l'Institut  national;  Gillet-Lati- 
Hionl,  membre  du  ronscil  des  mines;  Duqucsnoy,  de  la  Société  d'Agriculture 
du  département  de  la  Seine;  Moilte,  sculpteur,  membre  de  l'Institut  national; 
Ferdinand  Berthoud,  horloger,  membre  de  l'instilut  national;  Gallois,  homme 
de  lellres,  à  Auteuil,  associé  à  l'InsliUit  national; 

110  Le  bureau  central; 

12°  Le  minisire  de  l'Intérieur; 

13°  Un  peloton  d'infanterie. 

Le  ministre  et  le  cortège  ont  fait  le  tour  de  l'enceinte  consacrée  à  l'exposi- 
tion ;  et,  comme  le  temple  à  l'industrie  n'était  point  terminé,  le  ministre  s'est 
placé  sur  le  tertre  du  Champ-de-Mars  ;  il  y  a  prononcé  le  discours  suivant,  à  la 
suite  duquel  la  musique  a  exécuté  un  air  patriotique  : 

Citoyens, 

Us  ne  sont  plus  ces  temps  malheureux  où  l'industrie  enchaînée  osait  Â 
peine  produire  le  fruit  de  ses  méditations  et  de  ses  recherches;  où  des  règle- 
ments désastreux,  des  corporations  privilégiées,  des  entraves  fiscales,  étouf- 
faient les  germes  précieux  du  génie;  où  les  arts,  devenus  cn  même  temps  les 
instrumenls  et  les  victimes  du  despotisme,  lui  aidaient  à  appesantir  son  joug 
sur  tous  les  citoyens,  et  ne  parvenaient  au  succès  que  par  la  flatterie,  la  cor- 
ruption et  les  humiliations  d'une  honteuse  servitude. 

Le  flambeau  de  la  liberté  a  lui,  la  République  s'est  assise  sur  des  bases  iné- 
branlables; anssilôt  l'industrie  s'est  élevée  d'un  vol  rapide,  et  la  France  a  été 
couverte  des  résultats  de  ses  efforts.  Les  agitations  politiques,  inséparables  des 
rirconstances,  des  guerres  inléricures  et  extérieures,  telles  que  les  annales  du 
monde  n'en  offrent  point  d'exemples,  des  fléaux  et  des  obstacles  de  tous  les 
genres,  se  sont  en  vain  opposés  à  ses  progrès  :  elle  a  triomphé  des  factions,  des 
circonstances,  de  la  guerre;  elle  a  vaincu  tous  les  obslacles,  et  le  feu  sacré  de 
l'émulation  a  constamment  agrandi  la  sphère  de  son  activité. 

0  vous  qui  douteriez  encore  des  avantages  inestimables  d'un  gouvernement 
libre,  fondé  sur  la  vertu  et  l'industrie,  parcourez  tous  les  départements  qui 
s'honorent  d'appartenir  à  la  grande  nation;  comparez  les  produits  de  leur 
agriculture  avec  ceux  qu'ils  donnaient  sous  l'influence  du  despotisme;  com- 
parez les  ateliers  nombreux  qui  se  sont  élevés  du  sein  des  orages,  et  même  sans 
espoir  apparent  de  succès,  et  dites-nous  ensuite  si  la  richesse  du  Peuple  n'est 
pas  encore  une  conséquence  nécessaire  de  la  liberté  ;  dites-nous,  si  vous  le  pou- 
vez, quelles  seront  les  bornes  de  l'industrie  française  lorsqu'elle  pourra  se  li- 
vrer à  toute  son  énergie,  lorsque  les  canaux  du  commerce  seront  rouverts,  lors- 
qu'elle se  verra  ombragée  par  l'olivier  de  la  paix. 

La  paix!  ce  mot  chéri  retentit  dans  tous  les  cœurs;  mais  si  le  gouvernement 
ne  néglige  rien, en  conciliantla  gloire  de  la  Nation  et  les  intérêts  de  l'humanité  ; 
s'il  est  convaincu  que  la  prospérité  de  la  République  doit  avoir  pour  bases  l'a- 
griculture, les  manufactures  et  le  commerce,  il  vous  appartient  peut-être  plus 
(|u'&  lui,  artistes  républicains,  de  hâter  le  moment  où  vous  pourrez  jouir  de  ses 
bienfaits. 

Parmi  les  nations  policées,  les  arts  seuls  peuvent  consolider  la  victoire  et  assu- 
rer la  paix.  Les  ennemis  les  plus  acharnés  de  la  République,  vaincus  et  humiliés 
par  la  valeur  de  nos  frères  d'armes,  se  consolent  quelquefois  en  se  repaissant 
de  la  folle  espérance  de  faire  triompher  leur  industrie;  c'est  à  vous  de  détruire 
ce  prestige  par  l'efficacité  de  vos  efforts  ;  c'est  à  vous  de  leur  montrer  que  rien 
n'est  impossible  à  des  hommes  libres  et  éclairés;  c'est  i  vous  d'égaler  et  de 
surpasser  vos  rivaux,  et  vous  en  avez  les  moyens.  La  nature,  aussi  libérale  pour 


le  pays  que  vous  habitez  qu'elle  parait  avare  pour  la  plupart  de  ceux  qui  vous 
envient,  est  secondée  encore  par  la  forme  de  votre  constitution  et  par  les  lumiè- 
res multipliées  qui  vous  environnent. 

Il  manquait  peut-être  un  point  central  i  votre  émulation  ;  l'industrie,  cn  dis- 
persant ses  produits  sur  la  surface  de  la  République,  ne  mettait  pas  les  artistes 
A  portée  d'étalilir  des  comparaisons,  qui  sont  toujours,  dans  les  arts,  une  source 
de  perfectionnements;  d'ailleurs,  le  gouvernement  lui-même  pouvait  craindre 
(le  laisser  dans  une  obscurité  décourageante  les  talents  distingués  qui  honorent 
les  déparlements  les  plus  éloignés  du  lieu  de  sa  résidence. 

C'est  pour  procurer  aux  artistes  le  spectacle  nouveau  de  toutes  les  industries 
réunies,  c'est  pour  établir  entre  eux  une  émulation  bienfaisante,  c'est  pour 
remplir  l'un  de  ses  devoirs  les  plus  s;icrës,  pour  apprendre  à  tous  les  citoyens 
que  la  prospérité  nationale  est  inséparable  de  celle  des  arts  et  manufactures, 
que  le  gouvernement  a  approuvé  la  réunion  touchante  à  l'inauguration  de 
laquelle  il  m'a  chargé  de  présider  aujourd'hui,  et  qu'il  en  a  fixé  l'époque  Â  celle 
de  la  fondation  de  la  République. 

Ce  spectacle,  en  effet,  est  bien  vraiment  républicain  ;  il  ne  ressemble  point  i 
ces  pompes  frivoles  dont  il  ne  reste  rien  d'utile. 

Les  artistes  auront  enfin  une  occasion  éclatante  dese  faire  connaître,  et  l'homme 
de  mérite  ne  courra  plus  les  risques  de  mourir  ignoré,  après  quarante  ans  de 
travaux. 

Tous  les  citoyens  vont  s'instruire  et  jouir  a  la  fois,  en  venant  contempler  ici 
l'exposition  annuelle  des  fruits  de  l'industrie  française. 

Les  savants,  les  hommes  de  leitres  viendront  étudier  eux-mêmes  les  progrès 
de  nos  arls;  ils  auront  enfin  une  base  pour  asseoir  la  technologie  ou  la  théorie 
instructive  des  arls  et  des  métiers. 

Celle  science  était  presque  entièrement  Ignorée,  quand  l'Encyclopédie  en  traça 
la  première  ébauche.  Ce  sont  des  écrivains  français  qui  ont  jclé  les  fondements 
de  celte  étude  intéressante.  Il  est  réservé  à  la  France  d'en  réunir  tout  le  système 
et  d'en  faire  un  objet  d'enseignement  public  :  peu  de  connaissances  humaines 
sont  plus  dignes  de  cet  honneur. 

En  effet,  la  technologie  ouvre  à  l'esprit  un  champ  bien  vaste.  L'écoinmiie  ru- 
rale, la  minéralogie  pratique,  tirent  du  sein  de  la  nature  des  matières  premières 
que  les  arts  et  métiers  savent  approprier  i  l'usage  des  hommes  cl  aux  divers 
besoins  de  la  société.  Ces  besoins  sont  la  nourriture,  le  vêtement,  le  logement; 
mais  les  arts  ne  s'en  tiennent  pas  i  ce  qui  pourrait  être  strictement  nécessaire 
pour  y  pourvoir  &  la  rigueur.  S'ils  s'étaient  bornés  li,  la  vie  humaine  aurait  été 
bien  triste  et  bien  sauvage.  Pour  mieux  répondre  i  nos  désirs,  et  pour  nous 
rendre  heureux  par  nos  propres  besoins,  les  arts  étendent  leur  carrière  ;  ils  ere- 
bellissent  leurs  produits  ;  ils  mettent  tour  à  tour  à  contribution  les  trois  règnes 
de  la  nature  et  les  quaurc  parties  du  monde.  Ils  Joignent  l'élégance  1  la  commo- 
dité; et  nos  jouissances  varient,  et  nos  goOls  sont  flattés,  en  même  temps  que  nos 
besoins  se  trouvent  satisfaits. 

Ces  arts,  que  l'idiome  de  l'ancien  régime  avait  cru  avilir  en  les  nommant 
arts  mécaniques ,  ces  arls  abandonnés  longtemps  à  l'instinct  et  à  la  routine, 
sont  pourtant  susceptibles  d'une  élude  profonde  et  d'un  progrès  illimité.  Bacon 
regardait  leur  histoire  comme  une  branche  principale  de  la  philosophie.  Dide- 
rot souhaitait  qu'ils  eussent  leur  Académie  ;  mais  que  le  despotisme  était  loin 
d'exaucer  son  vœu  !  Il  n'envisageait  dans  les  arts  que  des  esclaves  d'un  vain  luxe, 
et  non  des  instruments  du  bonheur  social.  Aussi  la  plupart  de  ces  arts  sont 
restés  dans  l'enfance,  parce  qu'on  les  a  méprisés.  Cependant  l'Industrie  est  fille 
de  l'Invention,  et  sœur  du  Génie  el  du  Goût.  Si  la  main  exécute,  l'imagination 
invente  et  la  raison  perfectionne.  Les  arts  les  plus  communs,  les  plus  simples  en 
apparence,  s'éclairent  au  foyer  de  la  lumière  des  sciences;  et  les  mathématiques, 
la  physique,  la  chimie,  le  dessin,  appliqués  aux  arls  et  métiers,  doivent  guider 
leurs  procédés,  améliorer  leurs  machines,  simplifier  leurs  formes,  et  doubler 
leurs  succès  en  diminuant  leur  main-jl'œuvre. 

Ali  !  rendons  enfin  aux  artistes  la  justice  qui  leur  est  due!  que  les  arts  nom- 
més libéraux,  bien  loin  d'affecter  sur  les  autres  une  injuste  prééminence,  s'atta- 
chent dé.sormais  à  les  faire  valoir  !  Que  l'éducation  publique  fasse  connaître  k 
nos  enfants  la  pratique  et  la  théorie  des  arts  les  pins  utiles,  puisque  c'est  de 
leur  exercice  que  notre  commission  fait  sagement  dépendre  l'admission  des 
jeunes  gens  au  rang  de  citoyens  (1)  !  Que,  tous  les  ans,  ce  temple  ouvert  a  l'in- 
dustrie par  les  mains  de  la  liberté,  reçoive  de  nouveaux  chefs-d'œuuc  '.  Qu'une 
émulation  active,  animant  i  la  fois  tous  les  points  de  la  République,  engage  las 

('  Les  jeunes  gens  ne  peuvent  être  infcrils  sur  le  registre  civique  s'ils  ne  prouvent 
qu'ils  savent  lire  el  écrire  et  exercer  une  profession  mécanique  {Conililuliiin,  lit  II . 
art.  t-2,>. 


229 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS, 


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arlisles,  les  fabricants  en  tous  les  genres,  à  venir  disputer  l'honneur  de  voir 
distinguer  leurs  ouvrages  et  d'entendre  leurs  noms  retentir  dans  la  fête  auguste 
qui  ouvre  solciinellenient l'année  républicaine!  Que  pour  mériter  ces  lionneurs, 
ils  tâchent  à  l'envi  de  perfectionner  les  produits  de  leur  industrie;  qu'ils  s'ef- 
forcent de  leur  donner  le  caractère  simple,  la  beauté  des  formes  antiques  et  un 
fini  plus  précieux,  un  lustre  plus  parfait  encore  que  celui  dont  se  vanlent,  avec 
tant  d'alTeclalions,  les  manufactures  anglaises!  Français  régénérés,  vous  avez  à 
la  fois  des  modèles  ù  surpasser  et  des  rivaux  à  vaincre!  Si  les  nations  les  i)lus 
libres  sont  nécessairement  les  plus  industrieuses,  à  quel  degré  de  gloire  et  de 
prospérité  ne  s'élèveront  pas  les  arts  vraiment  utiles  chez  un  peuple  qui  a 
voulu  qu'on  ne  put  être  citoyen  sans  exercer  un  de  ces  arts,  et  avec  un  gouver- 
nement qui  s'honore  lui-même  de  l'éclat  qu'il  se  plaît  à  répandre  sur  eux  I 

Le  Directoire  exécutif  a  vu  avec  peine  que  le  temps  n'ait  pas  permis,  cette 
aimée,  de  donner  a  cette  cérémonie  intéressante  l'appareil  et  la  solennité  dont 
elle  est  susceptible  ;  mes  yeux  cherchent  «n  vain,  dans  cette  enceinte,  les  pro- 
duits de  l'industrie  d'un  grand  nombre  de  départements  qui  i,  peine  ont  pu 
recevoir  l'annonce  de  ce  concours  nouveau  dans  les  fastes  politiques  de  l'Eu- 
rope. Mais  si  celle  idée  vraiment  patriotique  a  pu  exciter  quelques  regrets 
parmi  ceux  qui  sont  dans  l'impossibilité  de  concourir  à  son  exécution  ;  si  ceux 
même  qui  sont  assez  heureux  pour  y  concourir  regrettent  de  n'avoir  pas  été 
préNcnus  plus  tôt,  et  de  ne  pas  offrir  à  l'estime  publique  des  produits  plus  par- 
laits,  le  but  du  gouvernement  est  rempli.  L'an  VII  de  la  République  montrera 
dans  son  cours  tout  ce  que  peut  l'émulation  sur  un  peuple  libre  et  ami  des 
arts. 

Vous  qui  les  cultivez  avec  tant  de  succès,  secondez  les  efforts  constants  d'un 
Kouvernenient  paternel  ;  vos  intérêts  sont  les  siens  :  les  arts  ne  peuvent  régner 
qu'avec  la  liberté.  Vous  êles  les  ennemis  les  plus  dangereux  pour  les  ennemis 
(le  la  République  ;  les  victoires  de  l'industrie  sont  des  victoires  immortelles. 

Réunissez  donc  tous  vos  moyens,  toute  votre  activité  pont  présentera  l'Europe 
étonnée,  à  la  fin  de  l'année  qui  va  s'ouvrir,  le  spectacle  le  plus  imposant  et  le 
plus  auguste  que  puisse  donner  un  peuple  civilisé.  Que  dès  le  mois  de  messidor, 
il  parvienne  de  tous  les  départements  des  échantillons  de  loutes  les  espèces  d'in- 
ilustrie,  que  le  gouvernement  soumettra  à  l'examen  d'un  jury,  et  qui  ne  seront 
admis  à  cette  exposition  qu'après  cet  examen.  Que  cette  admission  soit  déjà  un 
honneur  dont  les  manufacturiers  français  soient  jaloux  ,  et  que  les  couronnes 
décernées  ensuite  le  1"  vendémiaire  par  le  Directoire  exécutif,  soient  la  récom- 
pense la  plus  flatteuse  à  laquelle  un  républicain  puisse  aspirer  ! 

Pour  moi,  citoyens,  celle  qui  touche  le  plus  mon  cœur,  celle  qui  excite  toute 
ma  sensibilité,  je  la  trouve  dans  la  mission  honorable  qui  m'est  aujourd'hui 
lonflée  par  le  Directoire;  et  si  j'ai  pu  réussir  à  vous  pénétrer  de  ses  véritables 
sentiments  et  de  sa  bienveillance  pour  les  arts,  si  j'ai  pu  vous  inspirer  ceux 
qui  m'animent,  si  j'ai  pu  augmenter  encore  et  éclairer  votre  amour  pour  la 
République,  ce  jour  sera  le  plus  beau  de  ma  vie. 
Le  ministre  de  l'Intérieur, 

François  (de  Neufchâteau). 

Tfois  jours  après  l'ouverture  de  V Exposition,  ou  le  cinquième 
jour  complémentaire  de  l'an  VI,  le  jury,  sur  la  demande  du  gou- 
vernement, désigna  les  douze  exposants  des  produits  qui  lui  sem- 
blaient les  plus  remarquables: 

C'étaient  MM.  BBEaiiET  [horlogerie].  —  Lenoir  [instruments  de 
mathématiques].  —  Didot  et  Hebhan  [typographie,  édition  de  Vir- 
liile).  —  Ci.ovET  [fabrication  d'acier].  —  Dihl  et  Guebhabd  [ta- 
hleau.r  en  porcelaine). —  Des.\bnoj)  [cheminées  et  poêles].  —  Comé 

crayons).  —  Deharme  [tôle  vernie]  tous  de  Paris.  —  MM.  Julien, 
(le  Scine-et-Oise  [coton  filé  à  la  mécanique).  —  Pavn  fils,  de  Troyes 

bonneterie).  —  Gremokt  et  Babré,  de  Bercy  (toiles  peintes). — 
PoTTEB,  de  Chantilly  [faïence  blanche). 

Quelque  temps  après,  François  (de  Neufchâteau)  adressa  aux 
autorités  départementales  des  circulaires  annonçant  que  les  expo- 
sitions seraient  annuelles. 

Les  deux  expositions  suivantes,  19  septembre  1801  (an  IX),  I8 
septembre  1802  (an  X),  eurent  lieu  dans  la  cour  du  Louvre,  à  l'é- 
poque du  consulat,  sous  le  ministère  Chaptal.  Ces  expositions  furent 
de  véritables  triomphes  pour  les  arts  chimiques  et  mécaniques.  Le 
métier  Jacquart,  qui  devait  porter  une  si  grande  réforme  dans  la 


fabrication  des  étoffes  façonnées,  affranchir  des  millions  de  jeunes 
ouvrières  de  maladies  et  de  difformités  cruelles,  apparat  en  1801. 

Rappelons  aussi  que  c'est  à  cette  époque  (t)  brumaire  an  X;  que 
fut  fondée  la  Société  d' Encouragement  qui  a  fait  tant  d'efforts  pour 
hâter  le  développement  de  l'industrie  nationale. 

La  quatrième  exposition  fut  ouverte  le  25  septembre  1806.  Les 
laines  et  les  draperies,  la  fabrication  du  coton  et  la  production  de 
la  soie,  formèrent  les  parties  les  plus  importantes  de  cette  exposi- 
tion. 

Avant  d'arriver  aux  expositions  qui  eurent  lieu  sous  la  Restau- 
ration, nous  devons  citer  le  nom  des  hommes  qui  guidèrent  l'indus- 
trie de  leurs  enseignements  et  de  leurs  exemples,  à  travers  les  in- 
certitudes de  ces  époques  guerrières,  les  Chaptal,  les  Douglas,  les 
Conté,  les  Berthollet,  les  Oberkampf,  les  Edouard  Adam,  les  Jac- 
quart, les  Ternaux,  les  Monge,  les  Prieur,  les  Vauquelin,  etc.,  etc. 

Le  système  continental  et  les  guerres  qui  eurent  lieu  depuis 
1806  avaient  ralenti  l'essor  de  l'industrie  française;  mais  quelques 
années  de  paix  suflirent  pour  rallumer  le  génie  industriel  de  la 
France.  La  Restauration  compte  trois  expositions  :  celle  de  1819, 
sous  le  ministère  Decazes;  les  deux  autres  en  1823  et  1827,  sous 
le  ministère  Villèle.  Toutes  trois  eurent  lieu  dans  la  cour  du 
Louvre. 

Le  rapporteur  de  l'exposition  de  1819  était  M.  Louis  Costaz;  les 
deux  autres  expositions  furent  décrites  par  M.  Héricart  de  Thury. 

Ces  expositions  furent  remarquables  par  les  draperies  et  lainages, 
le  filage  de  la  laine  peignée,  la  production  et  le  travail  de  la  soie. 
L'industrie  métallurgique,  la  production  de  l'acier,  les  préparations 
chimitiues,  etc.,  etc.,  firent  aussi  de  grands  progrès  sous  la  Restau- 
ration. C'est  de  cette  époque  que  date  aussi  l'immense  développe- 
ment de  l'industrie  parisienne ,  développement  que,  d'un  certain 
point  de  vue,  on  pourrait  considérer  comme  monstrueux  lorsque 
l'on  considère  les  conséquences  funestes  qui  résultent  de  sa  con- 
centration sur  un  seul  point  du  territoire. 

La  chute  de  la  Restauration  et  les  mouvements  populaires 
des  premières  années  du  nouveau  gouvernement  reculèrent  jus- 
qu'en 1834  l'exposition  qui  devait  suivre. 

Une  ordonnance  rendue  le  4  octobre  1833  disposait  que  l'ou- 
verture de  cette  nouvelle  exposition  aurait  lieu  sur  la  place  de  la 
Concorde  le  1"  mai  1834.  Quatre  bâtiments  d'égales  dimensions 
(76  mètres  de  long  sur  47  de  large)  furent  élevés  sur  le  terre-plein 
de  cette  place  ;  ils  étaient  ainsi  disposés  : 

Sud-Est.  —  Côté  des  Tuileries  et  de  la  Seine. 

Sud-Ouest.  —  Côté  des  Champs-Elysées  et  de  la  Seine. 

Nord-Est.  —  Coté  des  Tuileries  et  du  Garde-Meubles. 

Nord-Ouest.  —  Coté  des  Champs-Elysées  et  du  Garde-Meubles. 

Les  sept  années  d'intervalles  qui  s'étaient  écoulées  entre  les 
deux  expositions  de  1827  et  1834  n'avaient  pas  été  perdues  pour 
l'industrie;  à  côté  des  nouveaux  perfectionnements  apportés  par 
des  noms  déjà  célèbres  dans  nos  manufactures,  de  nouveaux  noms 
se  firent  connaître,  toutes  les  branches  d'industrie  étaient  repré- 
sentées, et  soixante-quinze  départements  avaient  coopéré  à  cette 
grande  œuvre  nationale.  Nos  départements  montueux  ou  presque 
déserts  avaient  seuls  manqué  à  cette  solennité  :  c'étaient  les  dc"- 
partements  des  Pyrénées-Orientales,  des  Alpes  (Hautes  et  Basses^ 
de  l'Aveyron,  du  Cantal,  de  la  Corrèze,  de  la  Corse,  du  Lot,  du  Vnr, 
des  Landes,  de  l'Allier.  Le  nombre  des  exposants  était  d'un  tiers 
plus  considérable  qu'en  1827. 

L'exposition  suivante  eut  lieu  le  I"  mai  1839,  sous  le  grand 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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carré  des  Tuileries,  dans  une  galerie  en  huit  longues  salles  occu- 
pant ensemble  une  superficie  de  IC  500  mètres  carrés. 

On  admirait  surtout,  dans  cette  dernière  exposition,  les  grands 
progrès  faits  par  la  filature  à  la  mécanique  de  la  laine  et  du  lin,  les 
machines  à  feu,  celles  à  papier  continu;  on  admirait  aussi  la  limpi- 
dité, la  taille  et  les  formes  élégantes  de  nos  cristaux,  le  flint-glass 
Kt  le  crown-glass,  les  maroquins,  les  soieries,  les  châles,  les  mouL- 
selines  unies  et  brodées,  les  marbres  des  Pyrénées,  les  pierres  litho- 
graphiques, la  bougie  stéarique,  la  soudure  du  plomb  par  lui- 
même,  le  bronze  laminé  pour  doubler  les  vaisseaux,  etc.,  etc. 

Voici,  dans  l'espace  de  40  ans,  la  progression  du  nombre  des 
exposants  : 

1"  exposition,  1798  :  110  exposants;  —  2«,  1801  :  220;  — 
3",  1802  :  540;  —  4»,  1806  :  1422;  —  5«,  1819  :  1622;  — 
fie,  1823  :  1648; —  !<■,  1827  :  1795;  — 8%  1834  :  2447;  — 
y,  1839  :  3381. 

Le  mouvement  industriel  commercial  et  agricole  de  la  France 
date  de  Henri  IV  et  de  Sully,  de  l'administration  de  ces  deux  grands 
hommes  qui  se  complétaient  l'un  l'autre.  Avant  leur  règne  on  ne 
trouve  que  quelques  édits  qui  renferment  des  dispositions  utiles  à 
l'industrie,  notamment  ceux  de  Louis  XL  Après  eux,  Richelieu  et 
Louis  XIII  dressèrent  un  autre  théâtre  à  l'activité  fébrile  de  la 
France.  L'industrie  fut  encore  oubliée  au  milieu  des  agitations  de 
la  noblesse  et  des  partis  qui  vinrent  se  briser  devant  l'épée  et 
la  hache  du  tout-puissant  cardinal.  —  Vint  ensuite  Colbert.  Ce 
grand  maître  comprenait  la  puissance  et  la  gloire  du  travail  ;  aussi 
ne  négiigea-t-il  aucun  moyen  pour  diriger  toutes  les  forces  de  la 
nation  vers  ces  nobles  manifestations  de  l'esprit  humain.  Il  appela 
en  France  les  grands  industriels  et  les  premiers  savants  de  l'é- 
poque; il  créa  de  magnifiques  ateliers  pour  les  premiers,  des 
chaires  pour  les  seconds.  Bientôt  la  France  égala  les  plus  belles 
productions  des  pays  voisins,  quand,  malheureusement,  la  révo- 
cation de  redit  de  Nantes  arrêta  de  nouveau  la  grande  impul- 
sion donnée  au  travail  national.  Alors  la  France  rendit  à  l'étrangei» 
les  trésors  industriels  qu'elle  en  avait  reçus,  trésors  qu'elle  avait 
fécondés  de  son  génie;  le  Nord  de  l'Allemagne,  l'Angleterre,  profi- 
tèrent de  celte  fatale  mesure. 

Vers  la  fin  du  XVIIP  siècle,  en  1776,  Turgot  attaqua  de  front 
les  maîtrises  (i)  et  jurandes,  qui  pesaient  sur  l'industrie  et  sur 
le  génie  des  inventeurs.  Il  succomba  dans  la  lutte,  car  pour  briser 
cette  pesante  chaîne  séculaire,  il  fallait  le  bras  de  tout  un  peuple; 
il  fallait  qu'un  homme  comme  Necker  (1784)  vint  sonner  le  tocsin 
avec  son  fameux  com-pte  rendu,  qui  constatait,  aux  yeux  du  peuple 
affamé,  l'inégalité  devant  la  loi,  l'inégalité  en  matière  d'impôt. 

La  France  entrait  dans  une  nouvelle  phase  économique.  Le 
mouvement  intellectuel  du  XVIII»  siècle,  poussé  par  le  torrent  po- 
pulaire, fit  irruption  partout.  Dès  lors  tout  s'opérait  au  nom  de  la 
liberté  et  de  l'égalité,  jusqu'à  ce  que  la  dévorante  activité  de  la 
France,  en  passant  par  les  mille  champs  de  batailles  de  la  Répu- 
blique et  de  l'Empire,  vint  s'abattre,  haletante  et  oppressée,  de- 
vant l'Europe  coalisée  et  le  trône  de  ses  anciens  rois. 

Au  milieu  de  ces  grandes  crises,  au  milieu  de  ces  profonds  sou- 
lèvements, les  idées  extrêmes  se  heurtèrent  ;  leur  choc  fit  briller 


(1)  On  eiuendait  par  mailrise  le  liiie  de  maître  en  tel  art  ou  tel  métier.  Ce 

litre  s'acquérait  à  certaines  conditions  déterminées,  et  conférait,  entre  autres,  le 
pri>ilége  d'appartenir  à  la  corporation  d'art  ou  de  métier  dont  on  avait  acquis 
la  maîtrise. 


aux  yeux  des  plus  clairvoyants  cette  vérité  :  que  la  puissance  du 
travail  ne  pourra  atteindre  son  apogée  de  gloire  et  de  stabilité  que 
par  les  idées  et  l'esprit  d'association,  qui  fait  converger  à  leur 
centre  unique  les  efforts  et  les  intérêts  de  tous. 

Pour  arriver  à  ce  grand  résultat,  l'émulation  est  certes  un  puis- 
sant moyen;  les  obstacles  disparaissent  là  où  l'aiguillon  de  l'amour- 
propre  et  les  encouragements  de  toute  espèce  mettent  eu  jeu  les 
ressorts  de  l'activité  humaine  ;  aussi  avons-nous  rappelé  avec  une 
sainte  reconnaissance  la  pensée  de  François  de  Neufchàteau,  qui 
inaugura  les  expositions  industrielles;  aussi  avons-nous  voulu 
citer  les  paroles  remarquables  qui  se  trouvent  consignées  dans  son 
discours  de  1 798,  et  rappeler  la  pompe  avec  laquelle  cette  solen- 
nité a  été  inaugurée. 

Maintenant  que  le  génie  de  la  France  a  fécondé  cette  belle  pen- 
sée, que  des  merveilles  de  plus  en  plus  étonnantes  viennent  con- 
stater la  grande  part  que  notre  pays  peut  revendiquer  dans  le  tra- 
vail des  autres  peuples,  il  ne  nous  reste  plus  qu'à  ouvrir  les  portes 
de  l'Exposition  aux  génies  inventifs  de  nos  voisins,  à  entourer  l'Ex- 
position de  tous  les  prestiges  d'une  fête  nationale,  et  à  appeler  l'at- 
tention des  hommes  qui  président  aux  destinées  de  la  France  sur  la 
réalisation  immédiate  de  cette  grande  pensée  que  Turgot  formulait 
il  y  a  soixante-huit  ans,  que  Louis  XVI  prononça,  et  que  la  pos- 
térité fera  graver  en  lettres  d'or  sur  les  tables  de  la  loi  : 

«  Dieu,  en  donnant  à  l'homme  des  besoins,  en  lui  rendant  ne- 
«  cessaire  la  ressource  du  travail,  a  fait,  du  droit  de  travailler,  la 
«  propriété  de  tout  homme ,  et  cette  propriété  est  la  première,  la 
«  plus  sacrée  et  la  plus  imprescriptible  de  toutes.  » 

PERBEYMOND. 


De  la  Grande  Circulation  dans  Paris  ,   et   nu   Livre 

DE    M.    HiPPOLYTE    MeYNADIER. 

Paris  siHK  le  point  de  rue  pilloresqae  cl  monumeoUi ,  ou  Elémenls  d'uu  plau  «ûirral 
it'ensemble  de  ses  Irava»  d'arl  el  d'ulililé  publi<|ne 

(Suite  et  Bn.  Voy.  col.  «84. ) 

BivK  GAUCHE.  —  Prolongement  de  la  Grande  rue  du  Centre  par 
le  Pont-au-Change,  la  nie  de  la  Barillerie  (façade  du  Palais-de- 
Justice),  le  pont  Saint-Michel,  jusqu'au  carrefour  des  rues  Racine, 
de  l'École-de-Médecine,  des  Mathurins5aint-Jacques,  etc.  —  Re- 
dressement ou  élargissement  de  la  rue  de  La  Harpe  depuis  ce 
point,  e^  de  la  rue  d'Enfer,  qui  en  forme  le  prolongement.  Jus- 
qu'à la  btirrière  de  ce  nom. 

Ouverture  d'une  rue  A,  qui  partirait  d'une  place  à  ouvrir  au- 
tour de  Saint-Séverin,  se  dirigerait  an  Sud  du  marché  Saint-Ger- 
main, et  arriverait  au  boulevard  des  Invalides  vis-à-vis  l'avenue  de 
Tourville. 

Percement  d'une  rue  B,  qui  de  la  Halle  aux  Vins  (à  peu  près  au 
milieu  de  la  rue  des  Fossés-Saint-Bernard)  aboutirait  à  la  rue  de 
Seine,  vis-à-vis  la  rue  Jacob  (autrefois  du  Vieux-Colombier),  en  pa.s- 
sant  au  Nord  de  Saint-Séverin  ; 

D'une  rue  C,  qui  de  la  mairie  du  10'  arrondissement  arrive- 
rait derrière  l'Institut,  où  M.  Meynadier  propose  une  place  semi- 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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circulaire  pour  faciliter  la  viabilité  sur  ce  point,  sans  démolir  les 
deux  avant-corps  de  l'Institut  ; 

D'une  rue  D,  partant  de  la  rue  de  Fieurus  (Ouest  du  Luxem- 
bourg), au  boulevard  des  Invalides  (avenue  de  Tourville),  etc. 

A  ces  différentes  rues  de  !«'  et  de  2"  ordre,  aux  ronds-points  ou 
carrefours  circulaires  que  nous  avons  indiqués,  et  au  centre  des- 
quels s'élèveraient  des  monuments,  M.  Mejnadier  ajoute  encore 
des  squares,  ou  places  plantées  d'arbres,  et  des  parcs.  Ainsi,  il  trans- 
forme les  terrains  de  l'ancienne  île  Louviers  en  une  promenade 
plantée  d'arbres.  Il  découvre  largement  les  abords  de  Notre- 
Dame,  en  abattant  l'Hôtel-Dieu  et  les  bureaux  de  l'administration 
des  hospices  (parvis  Notre-Dame)  ;  il  déblaie  les  alentours  jusqu'à 
la  rue  de  la  Cité,  depuis  la  Seine  et  jusqu'à  la  rue  Saint-Chris- 
tophe ;  il  couvre  de  plantations  l'espace  libre  qui  en  résulte  (du 
Petit-Pont  au  pont  de  l'Archevêché) . 

L'ignoble  enclos  de  l'ancienne  commanderie  de  Saint-Jean-de- 
Latran  (Sud  du  Collège  de  France),  compris  entre  les  rues  des 
Noyers,  Saint-Jacques,  des  Carmes  et  la  place  Cambrai,  se  trans- 
forme également  en  un  jardin. 

La  place  Saint-André-des-Arcs  est  agrandie  et  forme  un  square. 

Sur  la  rive  droite,  les  abords  du  Conservatoire  des  Arts  et  Mé- 
tiers sont  élargis  et  plantés  d'arbres.  Une  partie  des  jardins  du  pa- 
lais de  l'Elysée-Bourbon  est  livrée  au  public,  etc.,  etc. 

M.  Meynadier  demande  pour  la  capitale  un  parc  à  l'instar  du 
Regent's  Park  de  Londres.  Il  propose  de  l'établir  dans  la  plaine  de 
Monceaux,  entre  le  mur  de  l'octroi  et  celui  de  l'enceinte  continue. 
Ce  parc  aurait  d'immenses  proportions,  et  il  enclaverait  dans  son 
étendue  le  parc  actuel  de  Monceaux.  On  arriverait  à  ce  parc  delà 
place  de  la  Concorde  et  du  rond-point  des  Champs-Elysées ,  par 
deux  nouvelles  rues  en  ligne  droite  qui  partiraient,  la  première  à 
gauche  de  l'aile  Ouest  du  Garde-Meubles,  passant  au  Nord  de  l'É- 
lysée-Bourbon  (rue  du  Faubourg-Saint-Honoré),  et  la  seconde  au 
Nord  du  rond-point  (ruede  Montaigne).  Les  deux  rues  aboutiraient 
devant  le  parc  de  Monceaux,  rue  de  Valois,  près  de  la  rue  de  Mes- 
sine. 

M.  Meynadier  passe  ensuite  à  la  distribution  des  établissements 
publics  sur  les  différents  points  de  la  capitale.  Il  ménage  le  grand 
effet  monumental  et  pittoresque  de  Paris  (et  nous  l'en  félicitons)  là 
où  la  nature  et  la  raison  l'ont  plus  particulièrement  indiqué,  c'est- 
à-dire  sur  l'immense  ligne  des  quais,  convenablementélargis  et  dé- 
gagés sur  certains  points. 

Les  monuments  et  les  établissements  publics  dont  M.  Meynadier 
réclame  l'exécution  ne  sauraient  être  considérés  comme  lesconsé- 
([uences d'une  folle  rêverie;  il  propose  l'achèvement  du  Louvre,  la 
reconstruction  de  la  Bibliothèque  Royale  et  de  l'Archevêché ,  la 
construction  d'un  Opéra  définitif,  d'un  hôtel  ou  palais  plus  central 
pour  les  autorités  militaires  de  la  ville  de  Paris,  qu'il  place  sur  le 
quai  des  Grands -Augustins,  à  la  Vallée,  etc. 

Il  demande,  pour  les  soldats  de  la  garnison,  des  casernesplus  sa- 
lubres  que  celles  qu'ils  occupent  maintenant;  il  croit  pouvoir  les 
établir  dans  les  édifices  qui  servent  actuellement  d'abattoirs  ;  et 
on  construirait  de  nouveaux  abattoirs  hors  du  mur  de  l'octroi. 

M.  Meynadier  s'occupe  également  du  Champ-de-Mars. 

On  sait  que  l'architecte  Gabriel  (l),  qui  construisit  en  1751  l'É- 
cole Militaire  et  ses  dépendances,  avait  donné,  dans  l'origine,  des 


(1)  (Jacques  Ange),  né  i  Paris  en  1710,  niorl   vers  1780.  C'est  son  grand 
l>ère,  Jacques  Giibriel,  nioil  on  1686,  qui  a  construit  le  (  liateau  royal  de  Glioisy. 


proportions  convenables  à  l'esplanade  du  Champ-de-Mars;  mais 
elles  furent  restreintes  au  ["juillet  (  790,  époque  a  laquelle  les  Pa- 
risiens établirent,  à  l'occasion  de  la  fête  nationale  de  la  Fédération, 
du  14  juillet  1790,  les  talus  que  l'on  voit  encore  aujourd'hui.  Plus 
tard,  les  contre-allées,  derrière  le  talus,  furent  plantées  de  quatre 
rangées  d'arbres.  Ces  différents  travaux  réduisirent  la  largeur  du 
Champ-de-Mars  de  plus  d'un  tiers  ;  les  évolutions  militaires  en 
souffrent  :  le  front  d'un  régiment  de  trois  bataillons  ne  peut  se  dé- 
velopper sans  que  plusieurs  compagnies  n'aillent  rompre  en  mon- 
tant sur  les  talus. 

M.  Meynadier  supprime  les  talus  et  les  contre-allées;  il  con- 
struit plus  loin,  au-dessus  des  fossés,  d'autres  talus  en  maçonne- 
rie formant  gradins,  qui  présenteraient  ainsi,  sur  un  développe- 
ment de  seize  cents  mètres,  deux  vastes  amphithéâtres,  d'où  des 
milliers  de  spectateurs  pourraient  embrasser  du  regard  cette  grande 
place  qui  est  à  la  fois  un  champ  de  manœuvres  et  un  hippodrome. 

Le  dessous  de  ces  gradins,  soutenu  par  des  voûtes,  deviendrait 
d'immenses  magasins  dans  lesquels  M.  Meynadier  propose  de  réu- 
nir le  matériel  d'équipement  militaire,  de  literie,  etc.,  qui  se  trouve 
maintenant  éparpillé  à  Panthcmon  (rue  de  Grenelle),  à  Saint-Jean- 
de-Beauvais  (près  la  place  Maubert),  aux  Champs-Elysées  (près  la 
rue  de  Chaillot),  à  l'.^rsenal  (rue  de  Sully),  et  dans  la  rue  de  Si'- 
vres.  Les  autres  administrations,  la  Liste  civile  et  la  Ville,  pour- 
raient également  y  avoir  des  emplacements. 

Dans  la  crainte  que,  pour  l'érection  de  grands  et  utiles  édi- 
fices, l'Etat  ne  soit  pas  disposé  à  ouvrir  des  crédits  spéciaux 
et  suffisants,  M.  Meynadier  a  cherché  le  moyen  de  les  créer  sans 
qu'il  en  coûtât  rien  aux  contribuables.  Voici  ce  qu'il  propose, 
après  avoir  recherché  et  dressé  la  liste  d'une  série  de  propriétés  et 
d'établissements  sans  valeur  historique  ou  monumentale,  appar- 
tenant à  l'État,  à  la  Ville  et  à  la  Liste  civile,  qui  n'en  a  que  l'u- 
sufruit; après  avoir  reconnu  que  ces  propriétés  représentent  une 
somme  d'au  moins  70  millions,  M.  Meynadier  en  propose  l'aliéna- 
tion, à  laquelle  se  prêteraient,  par  un  intelligent  accord,  l'État,  la 
Liste  civile  et  la  Ville;  il  applique  le  prix  de  ces  ventes  à  la  con- 
struction des  monuments  en  question. 

M.  Meynadier  s'occupe  aussi  du  déplacement  des  grandes  hfilles;  il 
les  place  au  point  de  rencontre  des  deux  grandes  rues  de  vnâiel-tle- 
Ville  et  du  Centre  (place  du  Châtelet),  en  démolissant,  sur  une  su- 
perficie d'environ  40  000  mètres  carrés,  les  vieilles  et  infectes  ma- 
sures comprises  entre  cette  place  et  la  rue  Aubry-le-Boucher.  Cet 
emplacement  est  évidemment  préférable  à  celui  qu'occupent  mainte- 
nant les  halles;  la  ventilation  y  serait  bien  plus  facile,  et  les  causes 
d'insalubrité  que  ces  marchés  entraînent  avec  eux  seraient  •:ran- 
dement  affaiblies. 

Enfin,  et  pour  compléter  autant  que  possible  la  série  des  tra- 
vaux proposés  par  M.  Meynadier,  nous  dirons  qu'il  indique,  sous 
le  nom  de  Stades  de  la  banlieue,  un  système  de  boisement  (virtiel 
sur  plusieurs  points  du  territoire  aux  alentours  de  Paris;  ces  plan- 
tations, tout  en  contribuant  à  la  beauté  et  à  l'assainissement  des 
communes  rurales  du  département  de  la  Seiue,  contribueraient 
grandement  aussi  à  l'embellissement  de  la  capitale.  Et  eu  vérité. 
cette  pauvre  banlieue,  déboisée,  nue,  pelée,  défoncée,  boulexerset- 
de  mille  façons,  par  l'exploitation  trop  souvent  inintelligente  des 
carrières  et  par  l'établissement,  inutile  bien  souvent,  d'un  inextri- 
cable labyrinthe  de  routes  et  de  chemins,  a  grandement  besoin  d'un 
peu  de  hautes  futaies  et  de  verdure.  Ce  serait  lui  rendre  une  partie 
de  son  éclat  d'il  y  a  soixante  ans,  lorsque  des  parcs,  des  châteaux 


235 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


23C 


et  de  vertes  remises  flattaient  encore  les  yeux  des  voyageurs ,  et 
donnaient  aux  abords  de  la  capitale  un  aspect  riant  et  plantureux. 
Nous  avons  cherché  à  donner  l'idée  la  plus  exacte  possible  du  livre 
de  M.  Meynadier  ;  nous  avons  fait  précéder  de  quelques  réflexions 
sur  la  grande  circulation  dans  Paris,  la  description  des  travaux  de 
viabilité,  d'assainissement  et  d'embellissement  pittoresque  et  mo- 
numental qu'il  propose.  Nous  devrions  maintenant  apprécier  la  va- 
leur absolue  et  relative  de  l'intéressante  publication  de  M.  Meyna- 
dier; mais,  comme  nous  aurons  maintes  fois  l'occasion  de  reve- 
nir sur  la  grave  question  de  la  viabilité  et  de  l'assainissement  de  la 
capitale,  nous  flnirons  cet  aperçu  en  engageant  vivement  les  per- 
sonnes qui  s'occupent  de  haute  édilité ,  à  méditer  le  livre  de 
M.  Meynadier,  qui  mérite  à  plusieurs  égards  d'être  pris  en  sérieuse 

considération. 

PERREYMOND. 


DU  HÈGIiEBIENT  SES  MÉMOmES. 

Hise  au  concours  d'un  iravaii  sur  les  prii  de  règlement  pour  la  maçonnerie. 

Nos  lecicurs  se  souviennent  sans  doute  que  l'an  dernier  {Col.  363 
et  412),  après  avoir  établi  par  une  crilifiiie  raisonnée  que  les  livres  qui 
servaient  à  fixer  le  prix  des  travaux  divers  de  bâtiments  étaient  singu- 
lièrement entachés  d'erreur  et  d'arbitraire,  nous  fîmes  un  appel  à  tous 
ceux  que  ces  questions  iiiiéressent,  aux  entrepreneurs,  aux  vérificateurs, 
aux  architectes,  etc.;  nous  engagions  surtout  le  conseil  général  des 
bâtiments  civils,  et  la  Société  centrale  des  Architectes  français,  à  s'oc- 
cuper de  la  solution  du  problème. 

Voilà  que  déjà  les  chambres  des  entrepreneurs,  frappées  de  la  justesse 
(le  nos  observations,  s'empressent  de  fournir  les  documents  qui  peuvent 
aider  à  celle  solution.  La  chambre  des  entrepreneurs  de  menuiserie  a 
publié  réccmnient  un  livre  sur  sa  spécialité,  intiiulé  Tarif  et  détails 
de  la  menuiserie,  pour  servir  de  base  aux  règlements  de  façons  ri  four- 
nitures. 

De  son  côté,  la  chambre  des  entrepreneurs  de  maçonnerie  vient 
d'ouvrir  un  concours  pour  lui  iravaii  de  même  nature  en  ce  (|ui  con- 
cerne sa  spécialité. 

Nous  ne  pouvons  qu'applaudir  à  ces  efforts,  ci  nous  engageons  vive- 
ment MM.  les  entrepreneurs  de  serrurerie,  de  peinture  et  de  vitrerie,  d  ■ 
charpenlerie,  etc.,  à  suivre  l'exemple  de  leurs  confrères  et  à  fournir 
aussi  leur  contingent  d'expérience  pour  qu'ensuite  le  conseil  des  bâli- 
iiients  civils  ou  la  Société  des  Architectes,  après  avoir  contrôlé  ces 
éléments  divers,  en  puisse  faire  comme  un  code  auquel  leur  approbation 
donnerait  force  de  loi. 

Voici  les  termes  mêmes  dans  lesquels  est  conçue  la  résolution  prise 
à. cet  égard  par  la  Chambre  des  entrepreneurs  de  maçonnerie  : 

La  Clianibre  syndicale  des  entrepreneurs  de  maçonnerie  de  la  ville  de  Paris 
et  du  département  de  la  Seine,  vivement  préoccupée  du  désordre  qui  règne 
dans  l'appréciation  et  la  fixation  des  prix  des  ouvrages  de  maçonnerie,  a  dit 
chercher  à  en  connaître  les  causes  j  il  lui  en  a  été  signalé  plusieurs  à  la  tète  des- 
quelles se  placent  : 

1°  Les  rabais  excessifs  consentis  dans  les  adjudications  et  les  marchés  onéreux 
souscrits  par  quelques  entrepreneurs  ; 

2°  La  publication  d'ouvrages  nouveaux  sur  les  prix  des  bâtiments,  qui  ne  sont 
réellement  que  des  compilations  non  raisonnées  d'anciens  prix  abaissés  outre 
mesure,  sans  motifs  apparents; 

3°  La  facilité  avec  laquelle  certains  vérificateurs,  s'appuyant  sur  ces  ou- 
vrages, fruits  de  documents  inexacts,  appliquent  leurs  prix  aux  mémoires  qu'ils 
sont  chargés  de  vérifier  et  régler,  et  en  font  ainsi  supporter  les  fâcheuses  con- 
séquences à  la  généralité  des  entrepreneurs. 


Dans  ces  circonstances  graves,  la  Chambre,  considérant  et  reconnalssaru , 

—  Sur  la  première  question  : 

Encore  bien  que  les  rabais  excessifs  consentis  dans  les  adjudications  soient 
faits  par  des  personnes  qui  n'ont  ni  les  mêmes  capacités  financières,  ni  le* 
mêmes  moyens  d'éludé  et  d'exécution,  ni  la  même  expérience  ; 

Et  que  les  marchés  souscrits  â  des  conditions  onéreuses  soient  malheureuse- 
ment la  conséquence  ou  d'une  position  embarrassée  ou  d'une  ignorance  sur 
lesquelles  ont  élé  fondées  des  spéculations  que  la  justice  a  déjà  flétries  ; 

Toujours  est-il  que  le  bon  marché  et  les  rabais  énormes  que  sollicitent  le» 
propriétaires  et  les  administrations  n'ont  souvent  lieu  qu'aux  dépens  de  la  bonne 
construction  et  parfois  de  la  probité; 

Que  trop  d'exemples  seraient  à  citer,  même  dans  les  travaux  que  l'Étal  cl  la 
ville  de  Paris  font  exécuter  à  grands  frais  ; 

—  Sur  la  deuxième  question  : 

Que  jusqu'à  ce  jour,  malgré  de  bonnes  intentions,  la  publication  de  traités 
sur  les  prix  de  maçonntrie  n'a  élé  qu'une  compilation  et  une  spéculation,  et 
non  un  travail  utile; 

—  Enfin,  sur  la  troisième  quesiion  : 

Que  si  les  résultats  erronés  d'appréciations  faites  légèrement  ont  été  cause 
de  contestations  entre  les  propriétaires  et  les  entrepreneurs,  il  faut  reconnaître 
que  les  rabais  sans  frein,  les  marchés  onéreux  ont  pu  cl  dû  induire  en  erreur 
les  personnes  qui  se  sont  occupées  sérieusement  de  prix  de  bâtiments; 
Qu'on  ne  saurait  trop  tôt  y  pouvoir; 
A  iRKÊTÉ  ET  DÉCIDÉ,  dans  sa  séance  du  11  atril  del8AA: 
Qu'une  série  de  prix  de  maçonnerie  raisonnée,  et  qu'on  devrait  intoquer 
avec  confiance,  en  cas  de  discussion,  servirait  i  atténuer  le  mal,  sinon  i  y  re- 
médier entièrement  ; 

Qu'à  cet  elTet,  il  serait  fait  appel  aux  lumières  de  toutes  les  personnes  qui 
s'occupent  de  comptabilité  en  matière  de  construcUon  ; 

Que  ces  personnes  seraient  invitées  à  puiser  aux  véritables  sources  les  élé- 
ments nécessaires  à  la  composition  d'un  ouvrage  sur  les  prix  de  maçonnerie,  ri 
sur  le  mode  le  plus  juste  de  mesurage; 

Que  ce  Iravaii  serait  l'objet  d'un  concours  ; 

Qu'il  no  s'agit  point  dans  l'espèce  d'un  ouvrage  dont  les  prix  soient  élevés, 
mais  bien  d'établir  un  travail  sérieux,  raisonné  et  rrai  autant  que  pos:>ible  dans 
toutes  les  parties; 

Qu'il  devra  comprendre  : 

1"  La  valeur  des  diverses  natures  de  matériaux  employés  pour  les  irataux  de 
maçonnci'ic  dans  la  ville  de  Paris  et  le  département  de  la  Seine  avec  et  sans  les 
droits  d'octroi  ; 

2°  Les  dépenses  de  toute  nature  pour  leur  mise  en  œuvre,  telles  (|ue  laillcv . 
bardage  ordinaire  et  extraordinaire,  pose,  etc 

3°  Les  déchets  sur  les  matériaux  pour  arriver  à  leur  mise  en  œuvre  ; 

4°  Les  faux  frais  de  toute  nature  pour  voitures,  chevaux,  magasins.  chantier>, 
commis,  outils,  équipages,  etc.  ; 

Généralement  tous  les  éléments  qui  entrent  dans  la  composition  i'\.iriF  iies 
prix; 

5°  Les  bénéfices  légitimes  qui  doivent  être  accordés  sur  les  travaux  ; 

6°  Et  enfin  le  mode  de  mesurage  applicable  à  chaque  nature  d'uuvrage< 
après  la  mise  en  œuvre. 

Il  sera  indispensable  de  faire  sentir  la  dilTérence  entre  les  grands  travaux  , 
ceux  dits  ordinaires  et  ceux  d'entretien. 

Tous  ces  prix  seront  considérés  comme  étant  payés  suivant  les  usages  de  l'ad- 
ministration. 

La  Chambre  syndicale  pense  qu'il  devra  résulter  de  la  réunion  de  tous  ces 
éléments  des  prix  assez  justes  pour  concilier  les  intérêts  opposés  des  proprié- 
taires et  des  entrepreneurs. 

C'est  à  ces  fins  qu'elle  oITre,  à  titre  de  rétuunéralion,  aux  persoinies  qui  au- 
ront traité  d'une  manière  claire  et  raisonnée  de  toutes  les  matières  énoncées  (i- 
dessus,  savoir  : 

A  celui  qui  aura  mérité  le  n"  l"  une  somme  de  1500  fr. 

A  celui  qui  aura  mérité  le  n"  2  une  somme  de 600  fr.,  et  aux  quatre  cuvrag's 
Jugés  les  meilleurs  après  les  deux  premiers,  des  médailles  d'honneur  dont  la 
valeur  sera  pour  chacun  de  100  francs. 

Les  ouvrages  des  divers  concurrents  devront  être  déposés  au  secrétariat  dt 
la  Chambre,  rue  Grenier-Sainl-Lazare,  16,  au  plus  tard  le  1"  février  1843. 

Chaque  ouvrage,  au  lieu  de  signature,  portera  une  devise  répétée  sorl'enve- 
loppe  de  la  lettre  qui  contiendra  le  nom  de  l'auteur. 


237 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURH:  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


238 


Ces  ouvrages  seront  examinés  et  jugés  par  une  commission  spéciale  que  dé- 
signera ultérieurement  la  Chambre  des  entrepreneurs. 

Le  résultat  du  travail  de  cette  commission  sera  proclamé  en  séance  pu- 
blique; les  lettres  qui  porteront  les  mêmes  devises  que  les  mémoires  couronnés 
seront  ouvertes,  et  le  président,  en  faisant  connaître  le  nom  des  auteurs,  distri- 
buera les  prix. 

Il  est  expressément  entendu  que  tous  les  ouvrages  récompensés  soit  par  des 
sommes  d'argent,  soit  par  des  médailles  d'honneur,  deviendront  la  propriété 
delà  Chambre  syndicale,  qui  en  fera  tel  usage  qu'elle  jugera  convenable. 

Fait  et  arrêté  en  séance  de  syndicat,  le  11  avril  1844. 

Signé  :  Letellier  Delafosse,  Président  ; 
Marquet,  Vice-Président  ; 
G.  Caliou,  Vice-Président  ; 
Maïet,  Trésorier  ; 
Declodx,  Secrétaire  ; 
DoucuiN,  Vice-Secrétaire  ; 
Panier  et  Victor  Lehaire,  Délégués  près  du  syndicat. 


CHRONIQUE. 

Sommaire  :  La  restauration  de  Noire-Dame  de  Paris  confiée  à  MM.  Lassus  et  Vio- 
let-l.cduc  —  Les  splendeurs  de  l'Hôlel-de-VilIc  cl  la  fango  des  halles.  —  Ue- 
plàlrago  du  mur  de  la  tcrnsse  des  Tuileries.  —  Arc  de  triomphe  romain  de  Djo- 
iiisah.  —  Théâtres  incendiés.  —  Monuments  commcmoralifs  dans  lesdéparlemcnts. 
—  Incendie  de  la  flèche  de  la  calhédrale  de  Laon.  —  Cathédrale  de  Rennes.  — 
Travaux  du  château  de  Pau.  —  PDBLICATIO^s  nouvelles. 

—  «  Par  une  décision  du  30  avril  dernier,  .M.  le  garde  des  sceaux, 
ministre  de  la  Justice  et  des  Culies,  adoptant  l'avis  émis  par  le  conseil 
des  liàlinienls  civils  sur  le  concours  ouvert  pour  la  resiaiiration  de 
Noire-Dame  de  Paris,  a  confié  à  MM.  Lassus  el  Viollet-Leduc  la  direction 
de  celle  imporianle  restauration.  Ces  architecles  devront  se  mettre  en 
mesure  de  commencer  le  plus  loi  possible  les  travaux  de  consolidation 
que  réclame  ce  monumenl.  »  Telle  est  la  nouvelle  qu'on  a  pu  lire  der- 
nièrement dans  tous  les  journaux.  Puisque  le  sort  en  est  jeté  el  qu'on 
va  enfin  porter  le  marleau  sur  les  nmrs  vénérables  de  Noire-Dame, 
nous  nous  félicitons  de  voir  des  artistes  tels  que  MM.  Lassus  et  Violiel- 
Leduc  chargés  de  ce  difficile  travail  ;  loutefois,  engageons-nous  ces 
messieurs  à  modérer  le  désir  qu'ils  ont  de  «  rendre  à  notre  belle  ca- 
thédrale <ou<e  sa  sp/cndcwr,  de  lui  restituer  toutes  les  richesses  dont 
elle  a  été  dépouillée.»  Qu'ils  prennent  garde  que  celle  lâche  qu'ils  se 
sont  imposce,  disent-ils  dans  leur  Rapport  adressé  à  M.  le  Ministre  des 
Cultes  sur  leur  projet  de  restauration,  ne  soit  au-dessus,  nous  ne  di- 
rons pas  de  leurs  forces,  mais  au-dessus  de  l'état  acluel  des  sciences 
archéologiques,  où  lanl  de  doutes  tiennent  encore  indécis  les  hommes 
même  les  plus  savants.  Nous  engageons  ces  messieurs  à  lire  l'ar- 
ticle publié  l'an  dernier  dans  cette  i{««ue,  sur  la  restauration  projetée 
de  Notre-Dame  (vol.  IV,  col.  137)  :  «Notre  avis,  dision.s-iious  à  la  fin  de 
ce  travail,  notre  avis  est  qu'on  doit  se  borner  à  peu  près  à  de  simples 
travaux  de  consolidation,  el  qu'on  soit  très-ménager  du  marteau.  Dans 
vingt  ou  trente  ansnos  éludes  seront  beaucoup  plus  avancées,  cl  alors  on 
pourra  peut-cire  montrer  plus  de  hardiesse;  et  quant  à  l'effet  de 
splendeur  qu'on  voudrait  obtenir  pour  mieux  honorer  le  culte, 
nous  pensons  que  le  moyen  le  plus  elficace  et  le  moins  dangereux 
consisierail  à  remplacer  partout  les  vitraux  blancs  modernes  par 
ime  série  de  belles  verrières.  Nous  eussions  désiré  voir  borner  les 
projcis  lotit  siiii|ilemeiii  : 

«  i°  Aux  grands  travaux  de  consolidation  absolument  nécessaires  pour 
conserver  l'édifice  ; 

«  2°  S  l'enlèvement  de  certaines  des  superfetations  ajoutées  au 
XVIII'  siècle,  partout  où  l'on  serait  sûr  de  retrouver  la  conslruction 
ancienne  sous  le  rcvôlemcnt  moderne; 

«5"  A  un  déliadigcoiinago  général,  opcinlion  qui  ccinduirail  peut- 


être  à  quelques  travaux  de  peinture  qu'il  faudrait  limiter  le  plus  pos- 
sible ; 

ni"  A  la  composition  d'une  suite  de  verrières,  étudiées  en  vue  d'un 
effet  général  (voir  nos  observations  relatives  à  la  peinture  sur  verre, 
col.  126),  et  dont  l'ensemble  formerait  un  enseigncuienl  régulier  <i 
attrayant  des  vérités  de  l'Église.  » 

—  On  assure  que  les  frais  de  construction  du  nouvel  Hotel-de -Ville, 
en  y  comprenant  les  démolitions  qu'il  a  fallu  opérer  dans  ses  abords,  ne 
s'élèveront  pas  à  moins  de  18  millions.  Le  vai.sseaii  que  la  ville  de  Paris 
porte  dans  ses  armes  doit  être  un  galion,  dit  la  Revue  de  Paris,  et  le 
mur  d'enceinte  qui  protège  les  recettes  de  l'octroi  prend  tous  les  carac- 
tères des  mines  du  Pérou.  Dix-huit  millions  pour  le  logement  d'un  pré- 
fet! Bien  des  rois  en  seront  jaloux.  Lorsque  nous  voyon-.  faire  de  pareilles 
dépenses  pour  ce  qu'on  pourrait  appeler  avec  raison  un  objet  de  luxe, 
nous  nous  demandons  s'il  n'est  pas  odietix  de  laisser  croupir  dans  la 
fange  des  halles  et  des  quartiers  voisins,  une  population  de  plusieur> 
centaines  de  mille  âmes,  alors  qu'on  pourrait,  presque  sans  bourse  dt;- 
lier,  lui  donner  de  l'air  et  lui  bâtir  des  rues  propres  et  larges. 

—  Le  mur  qui  soutient  du  côté  du  quai  la  terrasse  des  Tuileries  diit 
du  bord  de  l'eau,  était  depuis  longtemps  dans  un  triste  état  de  dégrada- 
tiim;  pour  y  leniédier,  on  vient  défaire  à  ce  mur  un  large  joinloicment 
en  plâtre  «[ui  ne  vivra  probablement  pas  plus  de  deux  hiveis.  La  couleur 
pâle  du  plâtre  se  raccordant  fort  mal  avec  le  ton  noirâtre  de  la  vieille 
pierre,  on  a  rétabli  l'harmonie  des  nuances  en  recouvrant  la  surface  en- 
tière d'un  badigeon  gris-verdâire.  Le  plâtre,  peu  satisfait  sans  doute  dt 
se  voir  ainsi  affublé  dans  son  neuf,  repousse  tant  qu'il  peut  le  malen- 
contreux badigeon.  Celui-ci,  quoique  posé  d'hier,  s'écaille  et  se  délaclx 
en  maints eudroiis. 

Pour  compléter  la  restauration  du  mur,  les  maçons  chargés  du  join- 
tolemenl,  non  contents  d'avoir  bouché  toutes  les  cavités  peiiies  et  gran- 
des qui  î7/us(ra!en<  la  dégradation  générale  de  la  surface,  ont  pris  sous 
leur  bonnet,  sans  doute,  l'idée  de  murer  jusqu'aux  restes  des  vieilles 
gargouilles  qui  déversaient  les  eaux  pluviales  de  la  terrasse  sur  la  voie 
|)ublique.  Il  s'ensuit  qu'aujourd'hui  20  mai.  les  eaux  tombées  sur  la  ter- 
rasse, ne  trouvant  plus  leurs  issues  accoutumées,  se  faisaient  jour  au 
travers  des  joints  du  mur  el  jaillissaient  sur  le  trottoir  à  la  grande  slupé-^ 
faction  des  passants.  Il  semblait  que  celle  muraille  vénérable  vint  d'être 
frappée  çà  et  là  de  la  verge  de  Moïse. 

Des  gargouilles  d'atienle  dispo.sées  sous  le  trottoir  do  quai  annonceni 
qu'on  a  l'intention  de  poser  des  tuyaux  de  descente  pour  l'écoulement 
des  eaux  de  la  terrasse.  Le  retard  qu'on  a  mis  à  poser  ces  tuvaux  faii 
présumer  qu'ils  ont  été  commandés  ad  hoc  el  que  nous  trouverons  dans 
leur  forme  un  nouveau  modèle  à  imiter;  car  si  l'on  n'eût  eu  qu'à  le> 
prendre  chez  le  marchand,  nous  aimons  à  croire  qu'ils  seraient  en  placi 
depuis  longtemps. 

Si  c'est  par  économie  qn'on  a  fait  le  jointoiemeni  en  plâtre,  il  es; 
permis  de  dire  qu'elle  n'est  pas  heureuse;  car  le  plâtre  dure  fort  peu 
lorsqu'il  est  exposé  à  l'humidité  qui  Iranssude  constamment  au  traver> 
des  murs  de  lerrassc.  Il  eût  beaucoup  mieux  valu  faire  ces  joints  en 
ciment  romain,  dont  la  résistance  aux  iniempéries  de  l'air  est  inlinlnieni 
supérieure  à  celle  du  plâtre,  surlout  sur  les  parties  humides.  La  cou- 
leur de  plusieurs  de  ces  ciments,  s'harmonisant  avec  le  ion  foncé  de  la 
vieille  pierre,  eût  évité  l'emploi  d'un  badigeon  menteur.  Les  ciments,  il 
est  vrai,  coûtent  beaucoup  plus  cher  que  le  plâlro;  mais  si  l'on  met 
dans  la  balance  le  prix  du  badigeon  nécessiié  par  remploi  de  cedernier. 
on  trouvera  la  différence  beaucoup  moindre  dans  la  dépense.  Quant  à 
la  durée,  il  est  inconstable  que  le  mode  proposé  remporte  de  beaiironii 
sur  celui  qui  a  été  employé. 

—  Le  gouvernement  vient,  dit-on,  d'envoyer  plusieurs  ariisies  en 
Afrique  avec  la  mission  de  faire  transporter  à  Paris  l'arc  de  triompht 


239 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


210 


romain  de  Djonisali.  La  hauteur  de  cet  arc  est  de  H  mètres  ainsi  que 
sa  largeur.  Il  n'est  percci  que  d'une  seule  arcade,  liaute  de  6  mètres 
sous  clef,  et  large  de  4  mètres.  Une  inscripilon  est  placée  sur  l'attique. 
Ce  monument  a  plus  de  quinze  siècles.  On  dit  qu'il  sera  placé  au  mi- 
lieu du  Carrousel. 

—  Ce  serait  un  triste  et  long  relevé  à  faire  que  celui  de  tous  les 
iliéàtres  qui  ont  été  détruits  par  le  feu;  il  n'est  guère  de  salles  de 
spectacle  à  Paris  qui  n'ait  été  reconstruite  une,  deux  et  même  trois 
lois  à  la  suite  d'incendies. 

L'an  dernier,  les  théâtres  de  Berlin  et  du  Havre  étaient  la  proie  des 
flammes  ;  au  mois  de  mars  de  cette  année,  le  théâtre  Adelphi  à  Glascow 
prenait  feu  pendant  une  représentation  à  bénéfice,  et  la  foule,  en  se 
précipitant  dans  les  corridors  et  dans  les  escaliers,  renversait  tout  sur 
son  passage;  plusieurs  personnes  furent  blessées.  Dernièrement  (le 
7  mai),  le  théâtre  de  Manchester  était,  lui  aussi,  complètement  consumé. 
Le  même  jour,  celui  de  Birmingham  a  failli  brûler.  Knfin,  il  y  a  peu  de 
temps,  l'incendie  couvait  au  milieu  des  décors  du  Théâtre- Française 
Paris,  et  un  de  ces  soirs  la  salle  de  l'Opéra  brûlera  comme  déjà  elle  a 
failli  brûler  l'an  dernier,  lors  de  l'incendie  du  Gymnase-Enfantin.  A  la 
vue  de  ces  fréquents  sinistres,  on  se  demande  s'il  ne  serait  pas  d'ur- 
fc'ence  publique  d'obliger  les  villes  et  les  sociétés  particulières  de  cons- 
truire des  salles  de  spectacle  incombustibles.  Plusieurs  salles,  nous  le 
savons,  sont  déjà  dans  ce  cas  ;  mais  nous  insistons  pour  qu'on  rende 
cette  mesure  générale  pour  tous  les  nouveaux  théâtres  à  construire  en 
France. 

—  Enregistrons  encore  aujourd'hui  quelques-uns  de  ces  témoignages 
(l'affection  et  de  reconnaissance  donnés  par  les  cités  des  départemenls 
aux  hommes  qui  les  ont  illustrées. 

Une  commission  vient  de  se  constituer  à  Bourges,  à  l'effet  d'élever 
un  monument  à  Cujas  dans  la  ville  qui  fut,  comme  l'on  sait,  le  prin- 
cipal théâtre  de  sa  gloire.  Toulouse,  sa  patrie,  lui  doit  aussi  un  monu- 
ment, ne  fiil-ce  i\ue  pour  réparer  l'injustice  que  celte  ville  lui  fit  de 
méconnaître  longtemps  son  mérite. 

Des  habitants  de  Lyon  ont  conçu  le  projet  d'élever  une  statue  sur  la 
place  du  Petit-Change,  dans  le  quartier  Saint-Paul,  à  Gerson,  qui  est 
mort  dans  celte  ville  en  1429.  M.  Fulchiron,  depule  du  Rhône,  ligure, 
(lit-on,  pour  3000  francs  sur  la  liste  de  souscription.  C'est  à  Gerson, 
chancelier  de  f  Université  de  Paris,  savant  théologien  et  auteur  présumé 
de  Vlmilalion  de  Jésus-Chrisl,  que  furent  dues  en  partie  les  libertés  de 
l'Église  galicaiie. 

La  ville  de  Châleauroux  va  aussi  avoir  son  monument  commémo- 
ralif.  Une  souscription  a  été  ouverte  pour  y  élever  une  statue  au  noble 
et  digne  compagnon  d'exil  de  Napoléon,  au  général  Bertrand,  à  qui  elle 
a  donné  le  jour.  Cette  glorification  des  sentiments  généreux  est  bien 
faite  pour  inspirer  une  conception  grande  et  élevée;  il  y  a  dans  un  tel 
monument  quelque  chose  de  plus  à  exprimer  que  la  gloire  d'un  général 
d'armée. 

De  son  côlé,  le  conseil  municipal  de  ^anci  a  volé  une  somme  de 
3000  francs  pour  le  monument  à  élèvera  la  mémoire  de  M.  Mathieu  de 
Dombasie,  et  a  décidé  que  la  place  du  collège  s'appellerait  désormais 
place  Dombasie. 

La  société  d'émulation  du  Jura  a  volé  par  acclamations  l'érection 
d'une  colonne  sur  le  monticule  de  la  Croix,  qui  domine  le  village  du 
Quiniy,  où  Charles  Nodier  s'est  marié,  et  où  est  née  sa  fille.  Cette  co- 
lonne portera  pour  inscription  :  Au  bon  Charles  Nodier. 

—  La  foudre  est  un  des  plus  fréquents  agents  de  destruction  des 
tlèches  aiguës  de  nos  cathédrales,  et  il  serait  bien  à  souhaiter  que  l'on 
employât  tous  les  moyens  que  la  science  nous  donne  pour  les  mettre  à 
l'abri  de  cet  ennemi  terrible.  Combien  de  chefs-d'œuvre  n'avons-nous 
pas  vus  périr  dans  les  Uammes!  combien  de  trésors  u'ont  point  été  per- 
dus à  jamais  pour  l'art,  faute  d'une  dépense  minime,  si  on  la  compare 


aux  pertes  qu'elle  eût  prévenues I  L'incendie  récent  de  la  flèclie  de  Laon 
vient  d'en  fournir  un  nouvel  exemple. 

«  La  tour  du  cloître,  dit  \e  Journal  de  fAitne  en  racontant  ce  sinistre, 
cette  construction  si  svelte,  si  légère,  si  aérienne,  qui  compte  de  la  base 
à  la  plate-forme  supérieure  environ  85  mètres  d'élévation,  est  encore 
exhaussée  d'un  clocher  en  flèche  d'une  dizaine  de  mètres.  Ce  clocher, 
de  forme  hexagonale,  et  qui  est  terminé  par  un  globe  sur  lequel  est 
fixé  un  ange  aux  ailes  éployées  et  portant  une  croix,  présente  dans  sa 
partie  inférieure  un  campaiiille  dans  le(|uel  sont  placés  la  cloche  et  les 
timbres  de  l'borloge.  L'ange,  haut  d'un  mètre  à  un  mètre  et  demi,  est 
en  plomb,  et  du  poids  d'environ  50  kilogrammes  ;  le  globe  qui  le  pori« 
est  en  cuivre  ;  les  six  pans  formant  la  flèche  sont  recouverts  de  lames  de 
plomb.  » 

C'est  à  quelques  mètres  au-dessous  du  globe  que  la  flèche  a  été  frappée 
de  la  foudre.  Le  feu  prit  à  la  partie  inférieure  du  clocher  :  il  était  bien 
diflicile  de  combattre  un  incendie  à  une  pareille  hauteur.  Toutefois  l'eau 
fut  montée  sur  la  plate-forme  de  la  tour,  et  à  l'aide  de  pompes  à  main 
on  essaya  de  combattre  le  feu.  Bientôt  tout  le  clocher  s'écroula,  en- 
traînant dans  sa  chute  le  globe  et  lange  qui  le  surinoniait. 

Heureusement  celte  chute  n'a  occasionné  aucun  des  graves  accidents 
que  l'on  pouvait  redouter.  L'incendie  s'est  arrêté  là;  mais  la  flèclie  de 
l'horloge,  restaurée  il  y  a  vingt-trois  ans,  devra  être  reconstruite  en 
entier. 

—  La  première  pierre  d'une  église  vient  d"étre  posée  à  Moulins,  et  une 
cathédrale  vient  d'être  terminée  à  Rennes.  Cette  cathédrale  avait  été 
commencée  en  1787,  par  M.  Bureau  de  Girac,  évéque  de  Rennes  à 
celle  époque.  Interrompue  pendant  la  Révolution,  cette  construction 
fut  reprise  en  1811  :  les  travaux  ont  donc  duré  vingt-cinq  ans. 

—  Au  chàleau  d'Henri  IV,  à  Pau ,  les  travaux  se  poursuivent  celle 
année  avec  une  activité  remarquable.  Plus  de  cent  ouvriers,  en  y 
comprenant  les  hommes  employés  aux  carrières,  sont  en  ce  moment 
occupes  à  tes  travaux  de  restauration.  La  façade  du  Sud  est  ter- 
minée jusqu'à  la  corniche.  Le  balcon  nallend  plus  que  la  balustrade, 
et .  au  dire  du  Mémorial  de  Pau,  il  promet  d'être  d'un  effet  inagiii  - 
fique.  La  première  voûte  de  la  façade  de  l'entrée  principale  est  achevée. . 
A  l'inlérieur,  les  travaux  sont  poussés  avec  la  même  vigueur.  Un  pas- 
sage couvert  et  souterrain  pour  communiquer  aux  cuisines  est  com- 
mencé; il  traverse  la  grande  cour  intérieure  du  château.  Les  cuisines 
sont  à  la  veille  d'être  terminées.  On  a  utilisé  les  caves  pour  ce  service. 

Plblic.\tioss  NOIVKLLES.  —  Moyen-Age  monumental  et  arthéoto- 
gique.  —  La  42'  livraison  se  compose  des  planches  suivantes  :  Portail 
de  l'église  Saint-Martin,  à  Ponl-à-Mousson  (Meurthe)  ;  —  Chapelle  du 
château  de  Vincennes;-  Portail  latéral  Sud  de  Saint-Ouen  à  Rouen  ; 
—  Entrée  du  palais  épiscopal  et  porche  latéral  du  Nord  de  la  calhédrale 
de  Chartres;  —  Fontaine  des  Lions,  à  l'Alhanihra  de  Grenade;  —  Frag- 
ments de  la  porte  du  Nord,  calhédrale  de  Bâie. 

La  45«  livraison  contient  les  planches  qui  suivent  :  Façade  de  Saint- 
Maclou,  à  Rouen,  avec  l'ancienne  flèche  détruite  en  1794;  —  Intérieur 
de  l'église  Saint-Etienne,  à  Caen;  —  Maison  de  Jacques  Cœur,  à 
Bourges;  —  Sainte-.Marie-du-Moni,  près  Carenlan  ;  —  Planche  de  dé- 
tails :  A ,  détails  de  l'intérieur  de  la  calhédrale  de  Mayence;  B,  ancienne 
porte  dans  la  salle  capitulaire  ;  —  Détails  du  cloilie  Saint-.\ubin  ,  à 
Angers. 


CÉSAB  DALY, 

Directeur  ridarteur  en  chef, 
membre  de  l'Académie  royjle  des  Beaux-Ans  de  Sloclibolm,  et  membre 
honoraire  et  correspondant  de  l'Inslilut  royal  des  Archilecles  brilannique «. 


Faris.  —  Typographie  LiCRàhpb  et  Comp.,  rue  Damielle,  *. 


Ratme,  GenrraM  i^-  L'ArrJutectiir&   at  de^  Trcit/uitij::  fahUc^  .  ^) .  Jiur     de.  I^'ursteTnbcra .  Paru 


Vol. 6. Pi 


Fiffl. 


S^ss^^ 


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iiii;i(iiii:i!i)iiiiiiiiii(iiiiubuiiiiuiijfiiiiiiiii!!!i):i;::Q^iiii'a!!ij!:L:;::^;!!iïïii!!ii!!li!Li:..l 


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FOURNfcAU    DK    CUISIM,  POUR    COLLF.GES 

Appareils    de  W. 
WMi  DU  VOIR.       ( 


fWm^,^  XJJI^^mi^ 


Revue     C-méralc-     de-    L'ArcÂitecàire^     et  des   Ihaocuac    Puiliej- .  6  Rue    dfc    Furstemtera     Paris  . 


Vol    S.Il.li 


Flo-,  4 


h— H i 1 1 1 1 1 1 H 


KcIicIIp. 


Séné    /hwoir    dot 


IiHp'^  Jt  iM-atm^e 


X  tUfmttr  jaj^ 


CALORIFERES  VENTILATEURS,  POUR  LES  HOPITAUX  ET    LES  ÉCOLES. 


Construits     par       .^ 
M»    RENE     DUVOIR. 


241 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


242 


DEUXIÈME  INSTRUCTION  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 

DES    ARTS    ET    MONUMENTS   (1). 


MONUMENTS   FIXES. 


CIVILISATION    CHRETIKINNE. 

ST¥I.E  ROMA^'   EX  STII.E  CiOTIIIQUE. 

du  Xle  au  XVle  siècle. 

C'est  à  partir  de  la  résurrection  de  l'art,  dans  les  premières 
années  du  X^  siècle,  qu'ont  été  construits  presque  tous  les  édifices 
religieux  que  les  correspondants  de  la  commission  rencontreront 
dans  leurs  recherches.  A  partir  de  cette  époque  aussi,  les  églises 
n'ont  guère  cessé  d'offrir  une  distribution  constante,  ramenée 
dune  manière  assez  fidèle  (sauf  les  proportions  et  quelques  ad- 
jonctions indispensables)  au  type  de  la  basilique  romaine.  Cette 
distribution  n'a  même  reçu  jusqu'à  nos  jours  qu'une  modification 
importante  par  le  prolongement  des  collatéraux  autour  du  chœur, 
qui  date  des  premières  années  du  XII"  siècle. 

Plus  les  églises  construites  sur  un  autre  plan  sont  rares,  plus 
elles  devront  être  étudiées  avec  soin,  chaque  fois  qu'on  en  ren- 
contrera. 

A  partir  de  ces  premières  années  du  Xl«  siècle ,  nos  temples 
ayant  pris  des  proportions  de  plus  en  plus  étendues,  et  en  rapport 
avec  les  masses  de  population  qui  s'y  pressaient  aux  fêtes  solen- 
nelles, la  réunion  des  travaux  de  plusieurs  générations,  le  plus 
souvent  même  de  plusieurs  siècles,  devint  indispensable  à  leur 
achèvement  ou  a  leur  appropriation.  Chacun  de  ces  siècles,  cha- 
cune de  ces  générations,  dédaignant  de  s'astreindre,  surtout  dans 
les  détails,  à  un  plan  primitif,  qui,  d'ailleurs,  la  plupart  du  temps. 


n'avait  pas  été  rigoureusement  arrêté,  a  imprimé  un  caractère 
particulier  à  son  œuvre. 

C'est  donc  en  détail  et  pour  ainsi  dire  pied  à  pied  qu'il  faut 
aller  chercher,  tant  à  l'extérieur  qu'à  l'intérieur,  sur  chacune  des 
portions  d'un  ensemble  si  compliqué  et  presque  toujours  si  hété- 
rogène, la  date  particulière  que  les  arts  du  Moyen-Age  y  ont  in- 
scrite. Pour  ne  pas  s'égarer  dans  une  pareille  analyse,  il  est  né- 
cessaire de  la  conduire  avec  beaucoup  d'ordre.  Nous  pensons  qu'il 
pourra  y  être  procédé  d'après  la  marche  tracée  dans  les  divisions 
suivantes  : 

Chapitre  l.  Ensemble  de  l'église. 

Chapitre  IL  Examen  détaillé  de  l'extérieur. 

Chapitre  III.  ï^xamen  détaillé  de  l'intérieur. 

Chapitre  IV.  Dépendances,  constructions  accessoires  ou  ana- 
logues. 


CHVPITRK  I. 


KNSEMBLE  M  L'ÉGLISE. 


(1)  Nos  lecteurs  IrouveroiU  dans  le  cours  de  celle  Instruction  une  sërie  de 
Ijiavures  qui  ne  sont  point  dans  la  publication  ministérielle  et  qui  donnent  un 
intérêt  de  plus  à  ce  travail,  ilc^jà  si  intéressant  d'ailleurs. 


Ce  chapitre  se  composera  de  cinq  paragraphes,  savoir  : 
§  I.  Orientation  de  l'édifice. 
§  II.  Plan  par  terre. 
g  m.  Dimensions  générales. 
§  IV.  Système  général  et  matériaux  de  construction. 
§  V.  Distribution  générale. 

§  I.  Orientation. 

Tout  le  monde  sait  que,  longtemps  avant  le  XI"  siècle,  les  églises 
ont  commencé  à  être  dirigées,  autant  que  possible,  vers  l'orient, 
soit  pour  que  le  soleil  en  éclairât  l'intérieur  de  ses  premiers  rayons, 
soit  afin  que  les  fidèles  qui  viendraient  y  prier  eussent  la  face 
tournée  vers  la  contrée  qui  fut  le  berceau  du  christianisme.  Lors- 
qu'une d'elles  a  été  construite  depuis  cette  époque  dans  une  autre 
direction,  ce  qui  est  ordinairement  dû  à  des  circonstances  particu- 
lières de  localité ,  il  est  indispensable  d'en  faire  l'observation.  Nous 
pensons  même  que  l'on  doit  tenir  compte  de  l'inclinaison,  souvent 
très-marquée,  que  présente  l'axe  de  la  plupart  des  églises  par  rap- 
port à  l'orient  vrai,  inexactitude  qui  peut  tenir,  soit  au  peu  de 
soin  apporté  par  les  constructeurs  à  établir  une  orientation  exacte, 
soit,  comme  l'ont  supposé  quelques  antiquaires,  à  ce  qu'on  se  sera 
dirigé  sur  le  point  du  ciel  où  se  levait  le  soleil  à  l'époque  de  l'ou- 
verture des  travaux. 

Si  les  églises  étaient  toujours,  sauf  ces  légèies  inexactitudes, 
dirigées  de  l'occident  vers  l'orient,  ainsi  que  cela  arrive  le  plus 
ordinairement,  il  suffirait  d'employer  la  mention  des  points  cardi- 
naux du  ciel  pour  éviter  toute  confusion  dans  la  désignation  de 
l'emplacement  respectif  de  leurs  parties,  et  surtout  de  celles  qui 
sont  répétées  des  deux  côtés  de  leur  axe  ;  mais  comme  il  n'en  est 
pas  toujours  ainsi,  on  a  eu  recours  à  divers  moyens  d'éviter  toute 
confusion.  Ainsi  l'on  dit  qu'un  objet  est  à  la  droite  de  l'axe  de 
l'église,  ou  du  côté  de  l'épitre,  lorsqu'il  se  trouve  à  la  droite  d'un 
observateur  qui  aurait  la  face  tournée  vers  le  chevet  et  le  dos  vers 
le  bas  de  l'édifice.  Dans  le  cas  contraire  on  peut  dire  que  cet  objet 
est  à  gauche  ou  du  cùté  de  l'évangile.  Lorsqae  l'orientation  est 
normale ,  on  peut  sans  inconvénient  se  servir  des  expressions  de 
méridional  et  de  septentrional,  qui  ont  alors  l'avantage  de  donner 
à  la  fois  l'orientation  relative  et  l'orientation  absolue  des  (wints 
dont  il  s'agit. 

T.   V.  16 


2i7 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


2Ï8 


eristie.  Le  XII"  siècle,  en  les  prolongeant  au  delà  du  sanctuaire,  où 
ils  prennent  le  nom  de  pourtour  du  chœur,  y  a  ajouté  une  série  de 
chapelles  correspondant  à  chacune  de  ses  travées. 

Saint-Germain-des-Prés. 


Fig.  6. 

Plus  tard  cette  ceinture  de  chapelles  se  prolongea  au  delà  des 
transsepts,  jusqu'à  l'autre  extrémité  de  la  nef. 

Les  collatéraux,  quelquefois  doubles  dans  les  grands  édifices, 
c'est-à-dire  partagés  en  deux,  dans  le  sens  de  leur  longueur,  par  un 

Kotre-Vamt  de  Paris. 


t'y   7. 


rang  de  piliers  ou  de  colonnes  intermédiaires,  y  sont  souvent  aussi 
pourvus  de  galeries  supérieures  qui  en  doublent  l'étendue. 

Ils  manquent  dans  les  chapelles  et  dans  la  plupart  des  églises  de 
petite  dimension. 

Saint-Jean  de  Beauvait. 


Fig.  8. 


E.    LES  TRANSSEPTS. 


Les  transsepts,  construction  transversale  à  la  nef  et  aux  collaté- 
raux, comme  l'indique  son  nom,  et  placée  aux  deux  côtés  de  leur 
extrémité  voisine  du  chœur,  existent  d'une  manière  plus  ou  moins 
marquée  dans  quelques  basiliques  primitives.  Ils  furent  de  très- 
bonne  heure  adoptés  et  développés  pas  les  architectes  chrétiens, 
auxquels  ils  fournissaient  l'occasion  d'imprimer  à  leurs  édifices  un 
caractère  particulier  de  consécration  religieuse  en  leur  donnant  la 
forme  d'une  croix.  C'est  ce  qui  les  a  fait  appeler  en  France  la  croi- 
$ée  ou  Ui  croiiillom  de  l'église. 

Église  de  Rosheim. 


Ihj.  S). 

Après  les  collatéraux,  ce  sont  eux  qui  ont  reçu  les  premiers  au- 
tels secondaires  introduits  dans  nos  temples,  dont  la  disposition  et 
le  rite  primitifs  n'en  comportaient  qu'un.  Souvent  même  leurs  ab- 
sides sont  mieux  caractérisées  et  de  plus  grande  dimension  que 
celles  des  collatéraux,  destinées,  dans  l'origine,  à  un  autre  service, 
comme  nous  l'avons  dit. 

Les  transsepts  manquent  dans  les  chapelles  et  souvent  dans  les 
petites  églises.  Ils  sont  répétés  deux  fois  dans  quelques  grands  édi- 
fices, de  manière  à  ce  que  le  plan  figure  une  sorte  de  croix  de  Lor- 
raine ou  archiépiscopale. 


249 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


230 


Fig.  10. 


On  dit  qu'une  église  est  en  forme  de  croix  grecque,  lorsque  la 
nef,  les  transsepts  et  le  chœur  sont  de  même  dimension  ;  et  qu'elle 


A^'-\ 


6-V      \ 


I 


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Fig.  11. 


représente  une  troix  latine,  lorsque  la  nef  est  plus  longue,  confor- 
mément à  l'usage  le  plus  habituel. 


1^ 


\ 


v^^ 


Fuj.  1-2. 


Quelquefois  cette  croix  est  renversée  ,  le  croisillon  le  plus  long 
étant  celui  qui  se  trouve  occupé  par  le  chœur. 


Fig.  13. 

F.    LHS  PORTAILS.  , 

Il  n'y  avait,  dans  les  églises  primitives,  qu'une  seule  entrée  don- 
nant sur  Vatrium.  Cette  entrée  est  aujourd'hui  représentée  par  le 
grand  portail ,  ordinairement  dirigé  vers  le  couchant ,  mais  quel- 
quefois ,  ainsi  que  le  porche,  reporté  au  bas  de  l'un  des  collaté- 
raux, surtout  dans  la  plupart  des  églises  à  contre  absides,  dont  nous 
allons  parler. 

Notre-Viime  de  Poitiers. 


Fig.  U 

Outre  ce  portail  principal,  portion  de  l'édifice  où  les  arts  du 
Moyen-Age  ont  souvent  déployé  le  plus  de  magnificence,  il  est  rare 
qu'on  n'en  rencontre  pas  d  autres,  et  particulièrement  sur  la  face 
extérieure  des  transsepts.  Ces  entrées  de  l'église,  étant  d'une  grande 
importance  sous  le  rapport  de  l'ornementation,  seront  décrites  avec 
beaucoup  de  soin  et  de  détails,  et  l'on  devra,  entre  autres  circon- 
stances, examiner  si  elles  font  partie  du  plan  de  la  masse  de  l'église, 
ou  si  elles  lui  sont,  soit  postérieures,  soit  même  antérieures,  comme 
cela  arrive  quelquefois. 


251 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


252 


G.    LE   POBtHE. 

Le  porche  est  cette  portion  de  l'édifice  ordinairement  exté- 
rieure, qui  était  destinée,  suivant  les  rites  de  la  primitive  Église, 
à  mettre  à  l'abri  des  injures  de  l'air,  mais  en  dehors  de  l'assemblée 
des  fidèles,  les  catéchumènes  et  les  pénitents.  Ces  rites  ayant  été 
abandonnés  depuis  un  grand  nombre  de  siècles,  leur  suppression  a 
entraîné,  à  une  plus  ou  moins  longue  distance,  suivant  les  localités, 
celle  de  la  distribution  qui  y  correspondait.  La  présence  du  porche 
est  donc  un  signe  notable  d'ancienneté  et  de  fidélité  à  la  liturgie 
primitive,  qui  doit  le  faire  signaler  et  décrire  avec  une  attention 
particulière  toutes  les  fois  qu'il  a  été  construit  dans  cette  intention. 
Mais  il  faut  soigneusement  distinguer  ce  porche  normal  des  di- 
verses constructions,  tant  intérieures  qu'extérieures ,  qui  ont  été 
confondues  avec  lui  sous  la  même  dénomination ,  savoir  : 

A  l'intérieur  : 

Le  porche  en  forme  de  coupole,  imitation  de  l'église  du  Saint- 
Sépulcre,  placé  à  l'entrée  de  quelques-unes  de  nos  églises  ro- 
manes; 

Le  Temple,  à  Paris. 


Fig.  15. 

Le  porche  accidentel,  formé  par  la  base  d'un  clocher  placé  sur  le 
milieu  du  portail , 

Sainte-Radegonde ,  à  Poitiers. 


Fig.  16. 

OU  résultant  de  l'étranglement  que  produisent,  dans  le  plan  de  ce 
même  portail,  les  bases  de  deux  clochers  latéraux, 

Monréal  [Sicile). 


Fig.  17. 

OU  enfin  produit  par  le  retrait  des  portes  en  arrière  de  la  masse  du 
portail. 


Cathédrale  de  Reims. 


Fig.  18. 

A  l'extérieur  : 

Le  porche-péristyle,  imitation,  aussi  complète  que  l'a  comporté 
la  capacité  des  constructeurs  du  péristyle  antique,  non-seulement 
dans  sa  masse,  mais  encore  dans  ses  moindres  détails  de  disposition 
et  d'ornementation. 

Saint- Vincent ,  à  Rom  t. 


t--3 


Fig.  19. 

Un  y  trouve  quelquefois  les  traces  de  l'emploi  de  rideaux , 
destinés  à  préserver  les  assistants  du  soleil  et  de  la  pluie. 

Le  porche-tribunal ,  ordinairement  supporté  sur  deux  colon- 
nes ,  dans  la  décoration  desquelles  il  entre  presque  toujours  des 
figures  de  lions. 

Sainl-Zénon  ,  à   Vérone , 


Fig.  M. 

On  sait  qu'au  Moyen-Age  c'était  à  la  porte  des  églises  que 
se  rendait  souvent  la  justice ,  et  que  s'accomplissaient  certJiins 
actes  authentiques,  ainsi  que  le  rappellent  les  formules  initr 
leones  et  à  la  porte  du  moutier.  Quelquefois  ce  porche-tribu- 
nal ,  au  lieu  d'être  appuyé  sur  le  portail ,  l'est  sur  le  porche 
religieux ,   et  constitue  alors  un  véritable  avant-porche. 

Le  porche  militaire ,  construit  en  avant  du  portail  pour  en 
défendre  au  besoin  l'entrée ,  est  ordinairement  couronné  de  mâ- 
chicoulis ou  de  créneaux  (l). 


(1)  Pour  de  plus  amples  détails  sur  ces  constructions  militaires,  voir,  dans  le 
vol.  IV  de  cette  /l«t)ue,  les  articles  intitulés  :  .<lrcA«7ec(i«remiIt(atre  du  Moyen- 
Age,  col.  337,  385  et  433. 


253 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 

La- Ferlé-Saint-Aubin,  en  .Sologne. 


3» 


t'iy.  21. 


Fig.  22. 


Il  se  réduit  quelquefois,  à  l'exemple  des  moucharahis  orien- 
taux ,  à  une  simple  saillie  des  étages  supérieurs ,  supportée  par 
des  mâchicoulis  (l). 


Fi(j.  23. 


Fig.  24. 


Le  porche  de  décoration ,  souvent  fort  orné  et  fort  saillant , 
ajouté ,  en  avant  du  portail  principal ,  ou  même  de  quelqu'une 
des  portes  latérales ,  dans  un  simple  but  d'ornementation ,  or- 
dinairement après  coup  et  à  une  époque  peu  ancienne ,  lors- 
que la  tradition  du  porche  primitif  était  depuis  longtemps  perdue. 


Fil/.  25. 

Enfin  le  porche-auvent,  construction  légère  placée  en  avant 
de  l'une  des  entrées  de  l'église  pour  la  défendre  des  injures 
de  l'air. 


(1)  Foj,.  col.  387,  vol.  IV,  de  ceUc  Revue. 


Fig.  26. 


À  Beimt  (détruite). 


Fig.  27. 

On  trouve  souvent,  sur  les  bords  du  Rhin,  et  plus  rarement 
en  France,  des  églises  dans  lesquelles  le  porche  est  remplace 
par  une  ou  trois  contre-absides.  Dans  ce  dernier  cas ,  les  deux 
latérales  servent  ordinairement  de  passage.  La  principale  est 
occupée,  tantôt  par  un  autel  où  l'on  officie  quelquefois,  tantôt 
par  un  chœur  de  chantres,  mais  plus  souvent  par  les  fonts 
baptismaux. 

Cathédrale  de  Trêves. 


Fig   28. 

On  sait  que  le  baptistère ,  primitivement  placé  au  milieu  de 
['atrium  ou  parvis,  a  été  reporté,  à  l'époque  de  la  suppression 
de  cet  atrium,  dans  l'intérieur  de  l'église,  où  il  a  occupe  divers 
emplacemeuts  (le  plus  souvent  à  gauche),  et  pris  plusieurs  for  - 
mes,  quelquefois  même  celle  d'un  petit  édifice  complet  insère 
dans  le  grand. 


255 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


25« 


H.    LES   CLOCHERS. 

Les  clochers,  dont  le  nom  indique  suffisamment  la  destina- 
tion, sont  encore  une  adjonction  faite  par  le  cliristianisme  au 
plan  de  la  basilique  romaine,  pour  y  placer  les  instruments  au 
moyen  desquels  s'introduisit,  à  une  époque  très-reculée,  l'usage 
d'appeler  les  fidèles  à  la  prièi'c.  Les  plus  anciens  que  l'on  con- 
naisse sont  des  tours  rondes,  isolées  de  l'église,  comme  on  a 
souvent  continué  de  les  placer  en  Italie ,  et  beaucoup  plus  ra- 
rement en  France.  Par  la  suite  les  clochers  remplirent  en  même 
temps  une  autre  destination  ,  celle  d'annoncer,  du  plus  loin  pos- 
sible, au  voyageur,  l'emplacement  de  l'église.  C'est  pour  satis- 
faire plus  complètement  à  ce  dernier  service ,  aussi  bien  que  par 
des  motifs  de  décoration  et  de  magnificence ,  qu'ils  ont  été  éle- 
vés quelquefois  jusqu'à  des  hauteurs  prodigieuses.  En  France , 
dans  les  plus  anciennes  églises,  le  clocher  principal  couronne 
ordinairement  le  centre  de  l'édifice  au  point  de  jonction  de  la 
nef,  des  transsepts  et  du  chœur. 

Notre-Dame  de  Dijon. 


Fig.  92. 

Dans  les  grandes  églises  épiscopales  ou  abbatiales,  on  en 
compte  quelquefois  jusqu'à  sept  ou  huit,  mais  ordinairement 
trois,  savoir  :  un  principal  au  centre  de  la  croisée,  et  deux 
secondaires  aux  côtés  du  grand  portail.  Ceux-ci  rappellent,  par 
leur  position  ,  et  souvent  par  l'infériorité  de  leurs  proportions  , 
les  clochetons  dont  était  flanquée  primitivement  la  façade  ex- 
térieure de  V atrium. 

I.    LA   SACRISTIE. 

La  sacristie,  dont  tout  le  monde  connaît  la  destination  et 
l'emplacement  habituel  dans  le  voisinage  du  chœur,  est  moins 
une  portion  intégrante  qu'une  dépendance  de  l'édifice ,  presque 
toujours  ajoutée  après  coup  dans  nos  églises  romanes  et  go- 
thiques ,  et  moins  importante  par  sa  décoration  propre  que  par 
les  objets  précieux  qu'on  y  dépose.  Nous  la  mentionnons  ici 
cependant,  par  la  raison  que  c'est  au  moins  un  accessoire  in- 
dispensable et  que  son  existence  date  de  la  primitive  Église , 
comme  nous  l'avons  dit  ci-dessus. 

(La  suite  au  prochain  numéro.] 


ÉQUILIBRE 
DES    VOUTES    EN    BERCEAUX    CVLINDRIQL tS 

(DEOXIÈME    ARTICLE.     Voir  COl.    51.) 


§  X\V^  —  Nous  avons  réussi  à  traiter  les  questions  de  l'article 
précédent,  sans  nous  écarter  en  rien  de  l'exactitude  mathématique, 
et  aussi  sans  apporter  dans  les  calculs  une  complication  sensible- 
ment plus  grande  que  si  nous  ne  nous  étions  point  astreint  a  toute 
cette  rigueur.  Aujourd'hui  nous  serons  obligé  de  nous  en  dépar- 
tir, tant  à  cause  des  difficultés  que  nous  présenteront  les  intégra- 
tions, qu'à  cause  de  l'indétermination  des  problèmes  (|ue  présente 
la  question  des  voûtes  de  pont  on  arches,  question  que  nous  allons 
aborder  dans  cet  article.  Toutefois  nous  serons  en  droit  de  consi- 
dérer comme  suffisamment  exacts,  les  résultats  analytiques  aux- 
quels nous  parviendrons  en  négligeant  de  certains  termes  très- 

petits,  tels  que  —  dans  les  équations  (t4),  lorsque  nous  aurons 

P 

vérifié  que  la  plus  grande  valeur  de  ces  termes,  déduite  de  nos  ré- 
sultats, conserve  effectivement  le  degré  de  petitesse  (|ue  nous  leur 
avons  supposé.  Quant  à  l'indétermination  du  problème  en  lui- 
même,  nous  en  ferons  l'objet  d'une  courte  discussion  dans  le  para- 
graphe suivant. 

Voùles  ou  archet  dan*  letqutlU*  le»  pressions  extérieures  ou  charges 
sont  indéterminées. 

§  XXVl.  —  Nous  supposons  données,  dans  noire  première  série 
de  questions,  la  pression  t  par  unité  de  surface,  et  les  forces  exté- 
rieures F  différentes  des  poids  des  voussoirs,  en  fonction  de  r.  En 
laissant  de  côté,  pour  le  moment,  les  arches  dans  lesquelles  les  faces 
normales  de  joint  s'étendent  jusqu'au  tablier  (i),  nous  allons  faire 
voir  que,  dans  tous  les  autres  cas,  In  répartition  de  la  charge  sur 


(1)  Nous  ferons  remarquer  que  dans  ces  voûtes,  l'épaisseur  esl  une  certaine 
fonction  de  l'abscis.se,  donnée  par  la  condition  de  l'Iiorizontalilé  de  Vexlrados; 
rétablissement  de  ces  voiiles  se  rapporte  à  la  deuxième  .série  de  questions, 
dans  laquelle  on  se  donne  e  et  F.  [F  est  alors  égal  à  zéro.)  Ce  n'est  donc  point 
ici  le  lien  de  traiter  cette  question  ;  mais  nous  avertissons,  dé»  à  présent,  qu'elle 
n'est  point  indéterminée,  et  ne  présente  que  des  difficultés  d'intégration,  dont 
on  parvient  à  se  tirer  en  négligeant  des  termes  peu  influents. 


337 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


258 


les  différents  voussoirs,  dépend  de  la  pose  des  assises  horizontales 
dont  les  extrémités  s'appuient  sur  les  reins  de  la  voûte,  et  du  tas- 
sement qui  se  produit  après  la  construction.  Les  circonstances  de 
Ja  pose  et  du  tassement,  dépendant  entièrement  du  soin  qu'appor- 
tent les  ouvriers  dans  la  construction,  et  de  la  nature  des  mîité- 
riaux  employés,  et  le  tassement  dépendant  lui-même  de  la  pose  , 
on  voit  qu'il  devient  impossible  de  tenir  compte  exactement,  dans 
le  calcul,  de  ces  circonstances  si  variables.  C'est  à  cette  variation 
que  tient  l'indétermination  des  forces  F  exercées  par  les  assises 
horizontales  sur  les  voussoirs.  Pour  en  bien  comprendre  les  effets,  il 
nous  suffira  d'examiner  les  cas  extrêmes  que  peut  présenter  la  pose 
des  assises  horizontales.  Ces  cas  extrêmes  n'ont  lieu  que  très-ra- 
rement; quelques-uns  d'entre  eux  peuvent  même  ne  jamais  se  ren- 
contrer; mais  on  concevra  que  nous  les  considérions  de  préférence, 
et»  remarquant  que  les  résultats  que  peuvent  fournir  les  cas  pra- 
tiques ordinaires,  seront  nécessairement  renfermés  entre  ceux  que 
fourniront  les  cas  extrêmes  que  nous  allons  passer  en  revue. 

§  XXVII. —  Le  plus  souvent,  dans  les  constructions  de  voûtes 
chargées,  les  voussoirs  ne  se  terminent  point  vers  Yeœtrados  par 
une  surface  cylindrique  ayant  cette  courbe  pour  directrice,  mais 
bien  par  deux  surfaces  planes,  l'une  horizontale  passant  par  l'arête 
supérieure  du  voussoir,  l'autre  verticale  et  passant  par  l'arête  in- 
férieure située  sur  Veœtrados.  Au  moyen  de  cette  disposition  en 
escalier,  on  met  de  niveau  les  faces  horizontales  des  voussoirs  avec 
celles  des  assises  de  maçonnerie  qui  forment  la  charge  de  la  voûte. 

Nous  considérerons  d'abord  diverses  circonstances  de  la  pose 
des  assises,  diins  cette  disposition  par  rapport  aux  voussoirs.  Il 
est  clair  que  les  facis  verticales  des  assises  peuvent  être  plus 
ou  moins  serrées,  et  même  que  la  face  verticale  de  contact  d'une 
assise  avec  le  voussoir  peut  ne  supporter  aucune  pression,  soit 
pendant  la  pose,  soit  après  que  le  tassement  a  été  produit;  cela 
dépendra  principalement  de  la  pose  de  l'assise  considérée,  et  de 
celle  des  assises  voisines.  Il  pourra  donc  y  avoir  un  plus  ou  moins 
grand  nombre  de  voussoirs  dont  les  tètes  ne  recevront  des  assises 
aucune  pression  horizontale,  de  même  aussi  que,  pour  d'autres 
\oussoirs,  ces  pressions  seront  plus  ou  moins  considérables.  Main- 
tenant, la  pression  verticale  qu'une  pierre  appartenant  à  une  as- 
sise exercera  sur  la  face  horizontale  de  la  tête  du  voussoir  corres- 
pondant à  l'assise  inférieure,  dépendra  de  plusieurs  circonstances, 
telles  que  l'exécution  plus  ou  moins  parfaite  des  surfaces  de  joint, 
et  la  longueur  de  la  partie  de  la  pierre  considérée,  engagée  entre  les 
assises  supérieure  et  inférieure,  du  côté  opposé  à  la  tête  du  vous- 
soir ;  on  conçoit  encore  une  exécution  ou  une  pose  assez  impar- 
faite pour  que  quelques-unes  de  ces  faces  horizontales  de  joint, 
comnmnes  à  l'assise  et  au  voussoir  inférieur,  ne  supportent  au- 
cune pression  ;  de  même  aussi  que  ces  pressions  pourront  être 
considérables,  comme  dans  le  cas  où  la  pierre  dont  il  s'agit  aurait 
une  plus  grande  épaisseur  vers  la  tète  du  voussoir  que  vers  le  côte 
opposé.  Les  pressions  verticales  exercées  sur  les  têtes  des  voussoirs 
par  les  assises  pourront  donc,  comme  les  pressions  horizontales, 
varier  dans  des  limites  très-étendues.  11  est  permis  même  de  se 
représenter  un  cas  dans  lequel  les  pressions  horizontales  et  verti- 
cales seraient  nulles  :  ce  serait  celui  où  le  système  des  assises  hori- 
zontales pourrait  de  lui-même  se  tenir  en  écpiilibre,  comme  dans 
les  constructions  égyptiennes;  alors  la  \oùte  serait  touchée  sim- 
plement, sans  être  pressée  par  ces  assises,  et  ne  serait  d'aucune 
utilité  dans  la  construction,  de  telle  sorte  qu'on  pourrait  la  sup- 


primer, tandis  qu'elle  devrait  se  tenir  en  équilibre  d'elle-même  si 
on  voulait  la  conserver. 

De  ce  qui  précède  il  faut  conclure  qu'il  est  impossible  d'assi- 
gner aucune  valeur  déterminée  aux  composantes  verticale  et  hori- 
zontale de  la  force  extérieure  F,  dans  la  disposition  que  nous  con- 
sidérons ;  il  est  donc  également  impossible  de  les  soumettre  à  aucun 
calcul  précis.  Lorsque,  néanmoins,  ces  composantes  pourraient 
être  déterminées,  nos  formules  (H),  qui  expriment  les  conditions 
de  la  plus  grande  stabilité,  ne  s'appliqueraient  que  dans  le  cas 
particulier  que  nous  allons  examiner.  Ce  cas  est  celui  où  la  résul- 
tante des  pressions  horizontales  et  verticales  est  normale  à  la  courbe 
des  centres  de  gravité.  En  effet,  la  force  dF,  appliquée  à  chaque 
voussoir  infiniment  petit,  est  supposée  passer  par  le  point  de  la 
courbe  correspondant  à  ce  voussoir;  or,  si  le  point  d'application 
de  cette  force  est  un  point  de  Vextrados  du  voussoir  considéré, 
cette  force  ne  peut  passer  par  le  centre  de  gravité  sans  être  nor- 
male à  la  courbe;  tandis  que  si  elle  était  appliquée  au  centre  de 
gravité,  elle  pourrait  avoir  une  direction  quelconque.  On  se  ren- 
dra compte  de  la  nécessité  qu'il  en  soit  ainsi ,  sans  recourir  à  nos 
équations,  en  considérant  l'équilibre  d'un  voussoir  éléraentaire. 
Appliquons  l'équation  des  moments,  en  prenant  un  axe  parallèle  à 
celui  de  la  voûte  et  passant  par  le  centre  de  gravité  du  voussoir. 
Le  moment  du  poids  du  voussoir  sera  nul,  à  cause  de  la  position 
de  l'axe.  Les  moments  des  pressions  exercées  par  les  deux  vous- 
soirs contigus,  et  que  nous  supposons  agir  tangenliellement  à  la 
courbe  des  centrée  de  gravité,  auront  pour  valeur  le  produit  de 
forces  finies  par  des  droites  infiniment  petites  du  second  ordre  : 
mais  ces  moments  sont  de  signe  contraire,  et  la  différence  des  for- 
ces qui  entrent  dans  leur  composition  est  infiniment  petite;  la  dif- 
férence de  ces  moments  est  donc  une  quantité  infiniment  petite  du 
troisième  ordre.  Si  nous  supposons  maintenant  que  la  force  dF  ne 
passe  point  par  le  centre  de  gravité,  elle  produira  un  moment  infi- 
niment petit  du  premier  ordre,  qui  ne  saurait  être  équilibré  par  le 
précédent,  qui  est  du  troisième.  Au  contraire,  le  moment  de  la 
force  rff  serait  équilibré,  si  la  résultante  des  pressions  des  voussoirs 
voisins  passait  à  une  distance  convenable  du  centre  de  gravité  ; 
mais  nous  avons  vu,  à  la  fin  du  paragraphe  (III),  combien  il  im- 
porte, pour  obtenir  la  plus  grande  stabilité  possible,  que  cette 
résultante  s'éloigne  peu  du  milieu  de  l'épaisseur;  nous  devrons 
donc,  en  nous  tenant  au  point  de  vue  de  cette  grande  stabilité, 
examiner  principalement  le  cas  où  la  résultante  des  forces  exté- 
rieures, différentes  du  poids  du  voussoir,  est  normale  à  la  courbe 
des  centres  de  gravité.  Dans  le  cas  particulier  des  forces  dF  nor- 
males, nos  équations  (t  t)  peuvent  prendre  une  forme  qu'il  est  inté- 
ressant de  faire  connaître. 

Transformation  des  équations  d'équilibre,  dans  le  cas  des  force» 

normales. 

§  XXVIII.  —  Nous  allons  donner  à  la  force  dF,  dont  les  com- 
posantes entrent  dans  les  équations  ( 7 ),  une  expression  appropri»^ 
exclusivement  au  cas  où  cette  force  est  normale  à  la  courbe  des 
centres  de  gravité.  Nous  supposerons  que  cette  force  soit  dirigée 
vers  le  centre  de  courbure;  s'il  en  était  autrement,  il  suffirait  de 
changer  son  signe.  Soit  .V  la  force  normale  par  unité  de  surface, 
qui  aeit  sur  l'élément  superficiel  dont  ds  est  la  base  et  x  la  lon- 
gueur, nous  aurons 

dF  =  N  >.  ds. 


T.   V. 


17 


239 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


200 


L'angle  de  cette  force,  avec  l'axe  des  x,  est  90  +  *  ;  celui  que  fait 
sa  direction  avec  l'axe  des  y,  est  «.  Les  composantes  de  dF  suivant 
ces  axes,  sont  donc 

db\  —  —  N X sin%  ds,  dFy=  Nxcoso.d».  (56) 

Substituant  ces  valeurs  dans  les  équations  (7),  elles  deviennent 

d.  Tcosx=  —  Nt. sin *  ds,  d.  T sin  a.  —  Nxcosa.  d.i  -)-  dP. 

En  multipliant,  d'une  part,  la  première  de  ces  équations  par 

co-ia,  la  deuxième  par  «m  a  et  ajoutant;  puis,  d'une  autre  part, 

multipliant  la  première  par  sin  a ,  la  seconde  par  cot  a ,  et  retran- 

ciiant,  on  aura  les  deux  équations 

cos^-d.  l'cosx-}-sin  nd.Tsin  %  =  sin  xdP , 
cas  a  d.  T  sin  a.  —  sin  a  d.  Tcos  a  =  co«  a  dP  -f-  Nxdt , 
en  observant  que  le  facteur  sin*  a-f-  cos*  «  de  N\ds,se  réduit  à 
l'unité.  Maintenant,  la  différentiation  donne 

d.  T  cos  ^^  cos  a.  dT  —  T  sin  a  do. , 
d.  T  sin  OL  =  sin  X  dT  -\-  Tcos  %da.; 
et  l'on  voit  que  pour  former,  avec  ces  expressions,  la  valeur  des 
premiers  membres  des  équations  ci-dessus,  il  suffit  de  multiplier 
la  première  par  cos  a ,  la  deuxième  par  sin  » ,  et  d'ajouter,  puis 
ensuite  de  multiplier  la  première  par  sin  ol  ,  la  deuxième  par 
cos  1 ,  et  de  retrancher;  on  en  tire  immédiatement 

dT ^=  sin  xdP,  1  .     . 

Td  x  =  cos  ,.dP-^  Nids.  ]  ^     ' 

On  peut  actuellement  mettre  à  la  place  de  TetdP,  leurs  valetirs 
(8)  et  (13);  il  vient  de  cette  manière 


d.  zi  =  mil  l j  sin  a  ds,  ï 

it  dt  =  oa  [  I  —  -  j    cos  <i.dt-\-N  ds.  \ 


(58) 


rablement  la  construction  de  la  courbe.  En  nous  reportant  a  la 
valeur  de  T,  §  (V),  nous  pourrons  écrire 

tt  =  Q;  (60) 

d'où  il  résulte  que  si  l'on  fait  la  pression  (  par  unité  de  surface, 
constante  ,  l'épaisseur  i  sera  également  constante.  Nous  allons 
appliquer  les  équations  précédentes  à  un  exemple. 

Equilibre  d'une  voûte  soumise,  soit  intérieurement,  toit  extérieure- 
ment, à  la  presiion  d'un  liquide,  tt  dans  laquelle  on  néglige  le 
poids  des  voussoirs  par  rapport  à  cette  pression. 

§  XXX.  —  SI  la  masse  liquide  presse  extérieurement  la  voûte, 
nous  prendrons  pour  axe  des  x,  une  droite  horizontale  parallèle 
aux  plans  de  tête,  située  dans  le  plan  du  niveau  supérieur.  De 
cette  manière,  la  pression  normale  .Y  aura  pour  expression,  sui- 
vant les  lois  connues  de  l'hydrostatique, 

iV=D,y,  \(i\) 

en  désignant  paro,  le  poids  de  l'unité  de  volume  du  liquide;  la 
force  N  aura  du  reste  le  sens  supposé  dans  la  mise  en  équation 
S  (XXVIII).  En  mettant  maintenant  dans  la  deuxième  équa- 
tion (59)  les  valeurs  de  Q  et  de  N  (60)  et  (61),  il  viendra 


< 

I  —  : 


(62) 


Telles  sont  les  équations  transformées  que  nous  nous  proposions 
d'obtenir.  Nous  ferons  remarquer  toutefois  qu'on  pouvait  obtenir 
immédiatement  ces  équations,  en  égalant  à  zéro  les  sommes  des 
projections  des  forces  qui  sollicitent  un  voussoir  sur  des  axes,  l'un 
tangent  à  la  courbe  des  centres  de  gravité,  l'autre  normal  à  cette 
courbe.  Il  faut  seulement  alors  faire  attention  à  ce  que,  si  l'on 
prend  pour  l'un  des  axes  la  normale  menée  par  l'une  des  extrémités 
de  l'élément  ds,  la  projection  de  T  sur  la  partie  de  cet  axe  dirigée 
vers  le  centre  de  courbure  est  nulle ,  et  la  projection  de  la 
force  T-\-dT  sur  la  même  partie,  s'obtient  en  multipliant  par  — 
co«( 90  —  dx],  ou — sindy.  ;  la  composante  a  dès  lors  pour  expres- 
sion —  Tdci. ,  en  négligeant  les  infiniment  petits  des  ordres  supé- 
rieurs. Les  autres  composantes  s'obtiennent  sans  difficulté 

§  XXIX.  —  Lorsqu'on  est  fondé  à  regarder  comme  négligeables 
lès  poids  dP  des  voussoirs  par  rapport  aux  autres  forces  ([ui  les 
sollicitent ,  ce  qui  serait  sensiblement  vrai ,  par  exemple ,  dans  un 
sjstèmelormé  d'arcs  de  fer,  de  fonte  ou  de  bois  soumis  à  des  char- 
ges considérables,  les  équations  (57)  se  réduisent  à 
dT=o,  rdx=xNds. 

La  première  de  ces  équations  s'intègre  immédiatement;  nous 
désignerons  la  constante  par  Q  ï. ,  et  si  nous  observons  que  l'ex- 
pression du  rayon  de  courbure  est  =  =  —,  nous  aurons 

T=Q',        (?  =  -Vf.  (59). 

On  voit  que,  dans  cette  hypothèse,  la  pression  tangentielle  to- 
tale Test  constante,  et  le  rayon  de  courbure  en  raison  inverse  de 
la  pression  normale  N;  cette  dernière  remarque  facilitera  considé- 


et  il  restera  à  déduire  de  cette  équation  celle  de  lu  courbe ,  par  voie 
d'intégration. 

Si  la  masse  liquide,  au  lieu  de  presser  Vexirados,  était  au  con- 
traire en  contact  avec  Vintrados,  comme  dans  les  conduites  d'eau 
souterraines,  nos  équations  s'appliqueraient  encore  eu  changeant 
le  signe  de  N,  ou  simplement  celui  de  o,  ;  mais  à  cause  des  circon- 
stances particulières  que  présente  le  mouvement  des  eaux,  relati- 
vement aux  pressions  exercées  sur  les  parois  des  conduites,  il  fau- 
drait placer  l'origine  des  coordonnées  à  la  hauteur  du  niveau 
supérieur  d'un  manomètre  à  air  libre,  qu'on  mettrait  en  communi- 
cation directe  avec  le  liquide  en  mouvement.  Lors<|ue  ce  niveau 
s'élèvera  au-dessus  de  la  voûte,  .V  étant  négatif,  la  valeur  de  Q 
sera  négative,  parce  que,  dans  la  deuxième  équation  (59).  le  rayon 
de  courbure  est  supposé  positif;  il  en  résultera  (|ue  les  valeurs  de  T 
et  t  deviendront  .lussi  négatives.  Cela  signifie  que  les  voussoii's 
devront  agir  les  tms  sur  les  autres  par  tractions,  et  non  eu  se 
repoussant.  Ces  tractions  pourront  être,  en  partie,  produites  par 
l'adhésion  des  mortiers,  et,  au  besoin,  par  des  liens  de  fer  établis 
entre  les  voussoirs  consécutifs.  Dans  certains  cîis  du  mouvement 
des  eaux,  il  pourra  se  faire  que  le  niveau  du  manomètre  descende 
au-dessous  des  parties  les  plus  basses  de  la  voûte,  et  alors  tous 

les  y  seront  négatifs ,  ce  qui  rendra  négative  la  valeur  de  —  , 

équation  (62),  et  par  suite,  positive  celle  de  t,  à  cause  du  signe 
de  o,  :  il  est  évident  que,  dans  ce  cas,  la  voûte  recevra,  de  dehors 
en  dedans,  des  actions  égales  à  l'excès  de  la  pression  atmosphérique 
sur  la  pression  totale  de  l'eau  dans  la  conduite  en  chaque  point. 
Ce  résultat  est  conforme  à  celui  que  fournit  l'équation  (61),  car  a, 
et  y  étant  négatifs,  iV  devient  positif. 

En  laissant  de  côté  le  cas  ou  une  partie  des  ordonnées  serait  posi- 
tive et  l'autre  négative,  afin  de  ne  pas  trop  compliquer  la  question, 
nous  résumerons  la  discussion  précédente,  et  nous  confirmerons 
les  conséquences  auxquelles  nous  sommes  arrivés,  en  interprétant 
l'équation  (02). 

Cette  dernière  nous  montre  que  toutes  les  fois  que  y  sera  po- 


2G1 


REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURMCS. 


•262 


sitlf,  c'est-à-dire  lorsque  la  voûte  sera  chargée  extérieurement 
d'une  masse  liquide,  ou  pressée  intérieurement  par  un  liquide  en 
repos  ou  en  mouvement,  mais  de  telle  sorte  que  le  niveau  supé- 
rieur du  manomètre  s'élève  au-dessus  de  la  voûte ,  le  rap- 
port —  sera  positif;  et  l'équation  restant  la  même,  la  forme  de  la 

courbe  sera  identique  dans  ces  divers  cas,  toutes  circonstances  res- 
tant égales  d'ailleurs.  Elle  montre  encore  que,  dans  le  cas  de  la  pres- 
sion intérieure  et  des  ordonnées  négatives,  le  rapport  ci-dessus 
devient  négatif,  de  manière  que,  si  l'on  change  y  en  —  y,  la  forme 
(le  la  courbe  reste  encore  la  même;  seulement  elle  est  disposée 
en  sens  contraire  du  précédent  et  symétriquement  par  rapport 
à  l'axe  des  y.  Nous  n'aurons  donc  qu'à  intégrer  généralement 

t 

l'eqnation  (62) ,  en  regardant  —  et  y  comme  des  quantités  po- 

sitives. 
Avant  de  passer  à  l'intégration  de  l'équation  (G2),  nous  ferons 

remarquer  que — exprime  la  hauteur  d'une  colonne  du  fluide  con- 

sidéré,  qui  produirait,  par  son  poids,  la  pression  (  par  unité  de  sur- 
face. Pour  plus  de  simplicité  dans  l'écriture,  et  rendre  notre  équa- 
tion homogène,  nous  poserons 

i  c^ 


63 


et  elle  se  réduira  à 


2y 


m 


IiUéyralion  de  l'équation  — 


2y_ 

§  XXXI.  —  La  question  que  nous  avons  présentée  dans  le  para- 
graphe précédent,  quoique  en  apparence  purement  théorique, 
n'est  cependant  point  à  négliger  sous  le  point  de  vue  des  applica- 
tions prati(|ues.  Indépendamment  de  l'intérêt  qu'elle  peut  mériter 
comme  conception  théorique,  sa  solution  doit  surtout  d'abord  être 
considérée  comme  une  solution  approchée  de  plusieurs  problèmes 
importants ,  que  nous  essaierons  de  perfectionner  ultérieurement. 
Nous  espérons  qu'en  vue  de  ce  résultat,  on  voudra  bien  nous  par- 
donner l'étendue  des  développements  analytiques  dans  lesquels 
nous  allons  entrer. 

On  peut,  dans  l'équation  ci-dessus,  mettre  pour  p  son  expression 
ordinaire  donnée  §  (L\),  et  l'on  obtiendra  très-facilement  une  pre- 
mière intégrale  en  multipliant  les  deux  membres  de  l'équation 
par  dij  ;  mais  la  forme  à  laquelle  on  arrive  ne  met  pas  aussi  facile- 
ment en  évidence  les  circonstances  générales  de  la  forme  de  la 
courbe,  que  celle  qu'on  obtient  en  mettant  pour  p  une  expression 
équivalente,  dans  laquelle  m\  prend  y  pour  variable  indépendante 
au  lieu  de  œ.  En  employant  cette  dernière,  nous  aurons 


+ 


/  doc-  \  V 

V  +  if) 


le  signe  -)-  devant  être  employé  dans  le  cas  où  la  courbe  tourne  sa 
concavité  du  côté  des  x  positifs,  et  le  signe  —  dans  le  cas  con- 
traire, afin  que  le  rayon  de  courbure  reste  positif;  mais  nous  allons 
voir  qu'il   n'y  a  point  à  se  préoccuper  de  cette  circonstance  , 

attendu  que  le  double  siune  va  disparaître.  En  posant  s  =  -— ,  l'ex- 

pression  précédente  prend  la  forme 


+  dz 


lydy 


(t-fz'). 

L'intégrale  du  premier  membre  s'obtient  immédiatement  au 
moyen  des  formules  de  réduction  des  exposants  dans  les  expres- 
sions différentielles  binômes  ;  si  on  ne  veut  pas  recourir 
à  ces  formules ,  on  écrira  le  numérateur  de  cette  manière 
dz  [\  -\-  z'  \  —  «'  dz,  et  le  premier  membre,  abstraction  faite  du 
double  signe,  se  réduira  aux  deux  termes 
dz  zdz 


^i~. 


z'  (  l  -h  ^'  )  • 

on  appliquera  au  second  de  ces  termes  le  procédé  de  l'intégration 
par  parties,  et  l'on  obtiendra  une  intégrale  égale  et  de  signe  con- 
traire à  celle  du  premier  terme  ;  l'intégrale  du  premier  membre  se 
réduira  à 

± î 


Mettant  maintenant  dans  cette  intégrale,  à  la  place  de  z,  sa  va- 
leur, effectuant  l'intégration  du  deuxième  membre  de  l'équatiou 
proposée,  puis  désignant  une  constante  par  fe*,  il  \iendra 


dx 
—    dy 


—  Jt' 


|/- 


dx* 
dy* 


(65) 


dx 
on  voit  que  k  est  l'ordonnée  du  point  pour  lequel  on  a  —  ==  o, 

c'est-à-dire  du  point  de  la  courbe  auquel  la  tangente  est  parallèle  a 

l'axe  des  y  ou  verticale.  Pour  résoudre  cette  équation  par  rapport 

dx 
à  — ,  il  faut  d'abord  élever  ses  deux  membres  au  carré,  ce  qui  in- 
dy 

troduit  c*  à  la  place  de  c',  de  sorte  que  les  hypothèses  de  c*  po- 
sitif et  de  c'  négatif  conduisent  au  même  résultat,  ainsi  que  nous 
l'avons  déjà  observé  plus  haut.  Achevant  le  calcul,  il  vient 

y«-A' 


dx 


1^ 


y 


— I 


(6C) 


OU  cette  autre  équation,  dans  laquelle  le  signe  du  deuxième  mem- 
bre est  changé, 

r  —  k} 


+ 


dx 


1/'-^  |/ 


.+-'■;'■■• 


(671 


dx 
§  XXX  IL  —  La  valeur  de  -^  pouvant  être  arbitrairement  prise 

avec  l'un  ou  l'autre  signe,  tandis  que  sa  grandeur  absolue  reste  la 
même  pour  des  valeurs  égales  et  de  signe  contraire  de  y,  il  est  facile 
d'en  conclure  que  la  courbe  est  formée  de  deux  branches  symétri- 
ques par  rapport  à  l'axe  des  x.  Tout  ce  que  nous  pourrons  dire 
sur  la  branche  située  du  côté  des  y  positifs,  s'appliquera  donc  à 
l'autre  branche.  Nous  nous  occuperons  seulement  de  la  pre- 
mière. 

L'équation  (67)  donne  la  valeur  de  +  x,  égale  à  l'Int^rale  du 
produit  de  son  second  membre  par  dy;  d'où  il  résulte  qu'à  une 
valeur  de  y  répondent  deux  valeurs  égales  et  de  signe  contraire 


263 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


2G4 


pour  X.  La  courbe  est  donc  encore  symétrique  par  rapport  à  l'axe 
des  y. 

Nous  avons  déjà  reconnu  que  k  est  l'ordonnée  du  point  auquel 
la  tangente  à  la  courbe  est  verticale;  nous  aurons  pareillement  les 
ordonnées  des  points  correspondant  aux  tangentes  horizontales, 
en  égalant  à  zéro  chacun  des  deux  facteurs  formant  le  dénomina- 

doc 
teur  de  l'expression  de  —  :  désignons  donc  par  h  et  A'  ces  ordon- 
nées, il  viendra 

A''=  /f^  +  c'  .  )      ^ 

La  plus  petite  de  ces  ordonnées,  h,  répond  à  la  tangente  hori- 
zontale supérieure;  la  plus  grande,  K,  répond  à  celle  inférieure. 
On  reconnaît  aisément,  en  considérant  le  dénominateur  de  l'équa- 

doc 
tien  (66),  que  la  condition  pour  que  la  valeur  de  —reste  réelle,  est 

exprimée  par  + -, <l  , 

inégalité  qui  se  résout  en  les  deux  conditions  suivantes 

y^  >  fc*  -  c*    ,     y'  <  ft*  +  e'  : 
il  résulte  de  ces  inégalités  et  des  équations  (68),  que  la  branche 
inférieure  est  comprise  entre  deux  parallèles  à  l'axe  des  x,  menées 
aux  distances  h  et  K  de  l'origine. 

En  ne  considérant  que  le  signe  supérieur  dans  (67),  on  voit 
qu'en  supposant  dy  positif  et  partant  de  y^A,  dx  reste  positif, 
jusqu'à  ce  que  l'on  ait  y  =  k;  l'abscisse  va  donc  en  croissant  dans 
cet  intervalle  :  au-delà,  le  2'  membre  devient  négatif,  et  par  suite 
dx  ;  l'abscisse  décroit  jusqu'à  ce  qu'on  ait  y  =  h'. 

§  XXXIII. — Le  reste  du  cours  de  la  courbe,  que  n'indique  pas 
l'équation  différentielle,  est  mis  en  évidence  par  l'intégrale  de  l'é- 
quation (67),  que  nous  allons  calculer.  Cette  intégrale  peut  être 
réduite  aux  fonctions  elliptiques  :  nous  ne  nous  arrêterons  pas  à 
cette  forme  de  l'intégrale,  mais  nous  allons  la  développer  eu 
série.  Pour  cela,  nous  poserons 


au  moyen  de  ces  valeurs,  on  donne  à  celle  de  x,  la  forme 


y' 


ç  =  ' 


au  moyen  de  ces  valeurs,  l'équation  (67)  se  transforme  en 
dx  19  rfe 


m 


±'k 


\/l_Ç»      V/l  —6» 
En  élevant  la  quantité  sous  le  premier  radical  à  la  puissance  —  j, 
au  moyen  de  la  formule  du  binôme  ;  puis  multipliant  les  termes 
du  développement  par  Ça  et  indiquant  l'intégration,  il  vient 

l'intégrale  du  2*  membre  se  résout  en  une  somme  d'intégrales, 
dont  chacune  s'obtient  sans  difflcultés  par  les  formules  relatives 
aux  différentielles  binômes.  Nous  allons  présenter  le  résultat  du 
calcul,  et  pour  simplifier,  nous  poserons  : 

A  =  (^f  ç.  _L(i:-Y2^i  I  (1:^')*  L'  re  I   (lil:!:!^  '"•"; 

\îl    '>        \^\i.'.l       6    "^   ~\j.4.6/      8.10    •=       l^\s.4.6.8/     lO.U.u' 

L    t.    . 

-f-  etc. 

T^     I.t    \l.3    T^      3  ^    ^        I       Î.4.6.»     \  1.S.5       I      J! 

4-  4-  6*)  5»  +  hli^  l±l±    I    ±i  6«  4-  -i-  6»  +  _L  0«\;«  >  (70) 

'si  I      Î.;..1S    \l.3.5.7      1^5.5.7  1^  5.7  1^     7  j^    /    \       ' 

-)-  etc. 

'  '^    ».*•«    >!.»      1^      4  /   ^     I      Î.t..l0   \î.4.6    T^    4   ,   " 

-f  -f  6*)  ',«  +  Ll^  (±1:1    I   J_'   9.  +i.  6V  +  i_66U»  +  elc 
8      /       '   s.*..i4  \ï.4.«.8   i^».6.«     ~e.»        I     «      /^  -t-eic, 


+  2  -r-  =  contt  -\-  A  angle  [eot  =  •]  -f  (iBÇ-f  C»)  l/l  —  »»  , 

n 

On  peut  déterminer  la  constante  de  manière  que  l'on  ait  x  =  o 
pour  y  =  h,  les  équations  (68)  et  (69)  donnent  alors  »=  i,  et  la 
précédente  donne 

0  =  contt  -)-  A  amw  ; 
mais  l'angle  donné  par  son  cosinus  contient  imphcltement  2mv,  de 
sorte  qu'on  peut  omettre  la  constante  ;  il  vient  alors  pour  l'équa- 
tion de  la  courbe 


±  X  =  —  Aangle[eo$  =  »]-{-  —  (Bî+C())l/i  — »»  .   (71) 

Nous  indiquerons  immédiatement  qu'il  résulte  d'un  examen 
attentif,  qu'on  doit  exclure  de  la  suite  des  angles  donnés  par  6, 
l'angle  négatif  égal  en  valeur  absolue  au  plus  petit  des  angles 
positifs  que  peuvent  fournir  les  tables,  et  ceux  qu'on  pourrait 
former  en  donnant  à  cet  angle  négatif  l'accroissement  général 
2mir;  tandis  qu'on  peut  former  avec  le  plus  petit  angle  positif  et 
cet  accroissement,  une  série  de  valeurs  de  x  qui  ap|>artienneut 
également  à  la  courbe  et  sont  séparées  par  des  intervalles  égaux  à 
k-A. 

Il  résulte  de  là  que  la  courbe  est  composée  de  portions  super- 
posables,  transportées  parallèlement  à  l'axe  des  x,  de  manière  à 
laisser,  entre  deux  de  ces  portions  consécutives,  l'intervalle A«j4, 

En  faisant  y  =  k  et  désignant  par  g  l'abscisse  correspondante, 
puis  observant  que  6  se  réduit  alors  à  zéro,  il  vient 

k  h 

±  g  =  —  A(4m-^  î]^-\-  ~  'm  ; 

le  point  placé  sur  B  indique  qu'on  doit  faire  e  ^  o  dans  sa  valeur. 

(Ici  on  s'est  gardé  d'écrire  (4  m  +  i)  —,  à  cause  de  la  remarque 

qui  vient  d'être  faite  sur  le  choix  des  angles). 

Eu  désignant  par  g'  l'abscisse  correspondante  à  y  =A',ou  celle 
du  point  le  plus  bas  de  la  courbe,  on  aura,  en  observant  que  e  de- 
vient égal  à  —  1 ,  pour  cette  valeur  de  y, 

I<es  plus  petites  valeurs  positives  de  g  et  g  sont  ^  ^tAk  -f-  i  B^, 
et  ;  T^Ak,  tandis  que  l'intervalle  commun  qui  sépare  les  autres  va- 
leurs est  T'A  k. 

§  XXXIV.  —  Il  resterait  maintenant  à  dire  comment  on  passera, 
des  données,  à  la  Naleur  des  paramètres  qui  entrent  dans  l'équa- 
tion (71).  Nous  considérei'ons  seulement  le  cas  particulier  où  l'on  se 
donnera  la  position  du  plan  des  naissances  et  celle  du  sommet  de 
la  voûte,  et  nous  supposerons  que  l'on  exige  que  la  tangente  à  la 
courbe  soit  verticale  à  ses  extrémités  :  ceci  revient  à  dire  que  l'on 
se  donne  k  et  h. 

La  valeur  de  c',  déduite  de  l'équation  (68),  est 
c'-  =  k'-  —  A'  ; 
puis  ou  a,  pour  l'ouverture  totale  de  la  voûte  entre  les  deux  nais- 
sances, le  double  de  la  plus  petite  valeur  de  g,  ou 

~Ak-{-Blk, 
2  ' 

la  valeur  de  l  étant,  d'après  (68)  et  (69), 


265 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


266 


Enfin,  s'étant  donné  la  pression  (  constante  ou  variable  arbitrai- 
rement, l'équation  (63)  donnera,  pour  l'épaisseur  de  la  voiite, 
_  k'  —  W- 

'~  '        ■  (72) 

2  ^      ' 

a, 

§  XXXV.  —  La  valeur  de^quenous  rapportons  ici,  indique 

h 
que  le  rapport  —  doit  être  voisin  de  l'unité ,  afin  que  nos  séries 

soient  assez  convergentes  pour  les  calculs  numériques;  l'équa- 
tion (71)  ne  peut  donc  être  appliquée  facUement  au  calcul  relatif  à 
des  voûtes  peu  chargées  au  sommet.  Nous  allons  donner  une  autre 
série  qui  a  l'avantage  de  faciliter  les  calculs  numériques,  pour  des 
valeurs  petites  de  h,  lorsque  celles  de  y  ne  s'approchent  pas  trop 
de  A';  mais  cette  nouvelle  série  ne  manifeste  pas  les  retours  de  la 
courbe  aux  mêmes  formes,  lesquels  résultent  de  (7i). 
Si  l'on  met  dans  (67),  à  la  place  de  k^,  sa  valeur/*'-)-  c',  il  vient 


-\-  dx  = 


|/^ 


y*  — à' 


dy. 


2c' 


puis  en  posant  : 


<p  =  . 


y'  -  h' 


2c' 


on  donne  au  facteur  de  dy  la  forme  - 


1  — <? 


.        .  Développant 

1/2  <?     l/l— io 

ensuite  la  puissance  —  \ ,  donnée  par  le  second  radical ,  et  mul- 
tipliant le  résultat  par  l  —  ç,  on  a  d'abord 


VT 


;-? 


).S.5      5      /    9  \* 

--ïX7r(TJ-*"^-' 

de  sorte  qu'il  reste  à  intégrer  une  suite  de  termes  de  la  forme 


l/r 


—  1 


d. 


Au  moyen  des  formules  déjà  citées,  on  fait  dépendre  toutes  ces 
intégrales  d'un  logarithme  ou  d'un  Snglt  hyperbolique.  (Nous  dési- 
gnons ici  par  des  lettres  gothiques,  les  Sinus,  Cosinus  et  .J^nglts  hyper- 
boliques.) On  arrive  ainsi,  en  supposant  x  =  o,  pour  y  :=  h,  à 
la  formule  suivante  : 


+  1^2 


X 


■■  3njlf 


Cos 


J.S.5     i.s    1 


1.3.5.7      1.3. S      9 


+1.3.»      i.s     7        -  1,3 

1.4.6      i.t      6  :.4 

_±_y  (y'     ,V  i  '       3  15, 


r,''-\~etc. 


+ 


».e     J.4    6 


s. 5. 7      1.3.5 
4.6.»  ~J 


4     h    [h^  '  )     (    i    i' 


'        6 


>      i.4.6      > 


6  A  U' 


-fe/c. 


»     I.J     T 


■etc. 


7     1.3.5     » 
T  J.4.S    T" 


73 


8    A  \  A'  / 


i     1.3.= 


I     >.4.« 


etc. 


—  etc. 


dans  laquelle  on  peut  écrire  ■  'og    -?-  4"  \/    "li '      .  «  'a 

place  de  3njlf    Ci>s  =  -|-  . 

Enfin  nous  indiquerons  une  autre  série  semblable  à  la  précédente 
poin-  la  forme  et  la  valeur  des  coefficients;  elle  s'obtient  en  pro- 
cédant comme  il  vient  d'être  indiqué  pour  celle-ci,  mais  en 
remplaçant  /t'  par  A'  —  c',  de  sorte  qu'il  suffit  de  changer,  dans 
cette  série,  A  en  A',  puis  c'  en  —  c*,  et  c  en  c  \/ — i;  ce  facteur 
imaginaire  rend  réels  les  radicaux  du  second  membre,  tandis  que  le 

produit  l/ — 1  angif    Co3  =  —     se  change  en —  anj/e    fo«=    ,  I. 

Tous  les  termes  de  la  valeur  de  +  ar  deviennent  ainsi  réels  et  al- 
ternativement positifs  et  négatifs.  Dans  cette  série,  qui  remet  en 
évidence  la  périodicité  d'y,  les  x  sont  comptés  depuis  le  point  de 
tangence  inférieur,  c'est-à-dire  qu'on  a  x  =  o,  pour  y  =  A'. 

Les  séries  que  nous  venons  de  donner  peuvent  être  utiles  dans 
d'autres  occasions;  mais  je  dois  dire  que  le  tracé  de  la  courbe  au 
moyen  du  rayon  de  courbure  calculé  par  l'équation  (G2)  en  fonc- 
tion de  l'ordonnée,  est  susceptible  d'une  très-grande  précision,  sur- 
tout lorsqu'on  se  sert,  pour  le  calcul  de  ?,  de  l'ordonnée  du  milieu 
de  l'arc  auquel  on  applique  le  rayon  c.  On  a  du  reste  une  vérifi- 
cation de  l'exactitude  du  tracé,  en  le  continuant  jusqu'à  l'horizon- 
tale inférieure,  attendu  que  le  point  inférieur  obtenu  par  le  tracé 
doit  se  trouver  sur  cette  horizontale ,  à  laquelle  répond  l'ordon- 
née A'.  Nous  donnerons,  dans  un  des  numéros  suivants,  une  épure 
représentant  ce  tracé,  et  les  particularités  que  présente  la  forme  de 
la  courbe  que  nous  venons  de  discuter  brièvement. 

YVON  VILL.\RCEAU. 


DE  L'HUMIDITE  DANS  LES  CONSTRUCTIONS 

ET    DES    MOYENS    DE    LA     PRÉVENIR    ET    dV    REMÉDIER. 

Nous  avons  eu  déjà  plusieurs  fois  l'occasion  de  faire  part  à  nos 
lecteurs  de  communications  intéressantes  qui  nous  ont  été  faites 


2G7 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


268 


sur  cet  important  sujet  par  MAL  Janniard,  Polonceau,  etc.(l). 
La  question  est  trop  grave  pour  que  nous  ne  nous  empressions 
pas  de  donner  place  dans  nos  colonnes  à  un  remarquable  travail 
qui  a  valu  dernièrement  à  son  auteur,  M.  Léon  Vaudoyer,  un  prix 
de  2000  fi'ancs  proposé  par  la  Société  d'Encouragement  pour  la 
meilleure  instruction  tliéorique  et  pratique  sur  les  moyens  de  pré- 
venir ou  de  faire  cesser  les  effets  de  l'humidité  dans  les  construc- 
tions. C'est  d'après  le  Bulletin  même  de  la  Société  que  nous  re- 
produisons le  mémoire  de  M.  Léon  Vaudoyer  : 

INSTRUCTION  THÉORIQUE  ET  PRATIQUE 

1  "  Sur  les  diverses  causes  de  l'humidité  cl  de  set  inconvénienU  quant  aux 
couslruclionsen  général  et  aux  lialiitulions; 

2''  Sur  les  différents  moyens  soit  de  prévenir  ces  inronvénienls  tort  rie 
l'exécution  des  constructions,  soil  de  tes  faire  cesser  el  de  s'en  préserver 
dans  les  constructions  existantes,  |i:ir  M.  Léon  Vaudoykr,  iircliileclc. 

DES   DIFFÉRENTES  CAUSES   DE   LHIMIDITÉ. 

L'iiuinidiié  qui  se  produit  dans  les  constructions  est  duc  à  diverses 
causes;  elle  se  manifeste  de  plusieurs  iiianicresdaiis  la  partie  inférieure 
des  bàiinicnis.  Dans  les  rez-de-chaussée,  l'humidité  pénètre  soit  par 
les  murs  mêmes,  soit  par  le  sol. 

Les  murs  dont  se  composent  les  constructions  sont  de  deux  espèces  : 
les  murs  de  face,  c'est-à-dire  ceux  qui  déterminent  le  périmètre  ex- 
li'iieur  d'un  bàlinient,  et  les  murs  de  refend,  qui,  compris  enire  les 
premiers,  servent  .^  former  les  divisions  principales  dont  se  compose 
rerisend)le  des  distributions  intérieures. 

On  voit  d'après  cela  que  les  murs  de  face  ont  nécessairement  une  de 
leurs  parois  exposée  à  l'extérieur,  puisqu'ils  ont,  comme  toutes  les  con- 
slriiclions,  leur  base  sur  le  sol  naturel  et  qu'ils  sont  en  contact  direct 
avec  ce  même  sol  dans  la  bantenr  de  leur  fundalion  et  dans  la  hauteur 
lies  caves  ou  d'un  éiane  souterrain,  s'il  y  en  a  ;  seulement,  dans  ces 
derniers  cas,  le  contact  n'a  lien  que  d'un  seul  côté. 

Les  conditions  dans  lesquelles  se  trouvent  les  murs  de  refend  sont 
toutes  difrircnles,  car,  s'il  y  a  des  caves,  ils  ne  se  trouvent  en  contact 
direct  avec  le  sol  que  par  leurs  fondations,  et,  à  partir  du  niveau  du 
sol  intérieur,  leurs  parois  seront  à  l'abri  de  toute  influence  exiérieuic 
de  l'athuisplicre.  Examinons  selon  quelles  lois  l'humidité  s'introduit 
dans  ces  deux  espèces  de  murs. 

D'après  les  lois  physiques,  l'humidité  du  sol  tendant  constanunenl  à 
pénétrer,  n'importe  dans  (|iielle  direciiou,  les  corps  hygiomètriqnes 
qu'elle  rencontre,  il  en  résulte  que  les  murs  des  bâtiments  emprunte- 
ront au  sol  imc  certaine  dose  d'humidité  par  tous  les  points  où  ils  se 
irouveroni  en  coniact  direct  avec  lui  ;  c'est-à-dire,  s'il  y  a  des  caves, 
les  murs  de  face  par  leur  base  et  par  une  de  leurs  parois,  et  les  murs  de 
refend  parleur  base  senleiueut.  S'il  n'y  avait  pas  de  caves,  les  murs  de 
refend  et  les  murs  de  face  se  trouveraient  exactement  dans  la  même  situa- 
tion à  l'égard  de  leur  partie  située  au-dessous  du  niveau  extérieur  du  sol. 

Mais  sont-ce  là  les  seules  causes  de  l'humidité  qu'on  signale  ordi- 
nairement dans  les  parties  inférieures  des  Itàiiments?  Certainement 
non;  et  il  est  facile  de  démontrer  que  pour  les  nmrs  de  face  il  en  est 
d'auires  qui,  pour  être  moins  constantes,  n'en  sont  pas  moins  très- 
directes;  nous  voulons  parler  de  l'eau  de  la  pluie  (pie  le  vent  chasse  sur 
les  parois  des  murailles,  dont  le  pied  se  trouve  ainsi  mouillé  ,  tant  par 
l'eau  qui  frappe  direclemenl  sur  la  surface  du  mur  que  par  celle  qui  re- 
jaillit sur  le  snl ,  ou  par  celle  encore  qui  descend  le  long  de  la  façade. 
Pour  peu  qu'on  suppose  un  bâtiment  ayant  un  comble  dépourvu  de 
chenean,  l'on  imaginera  facilement  le  surcroit  d'himiiditéipie  procure- 
ront dans  le  bas  des  murs  de  lace  les  égonttures  de  ce  comble. 

1)  Toi/,  col.   1C2,  vol.  I;  col.  481,  58i  et  siiiv.,  vol.  II;  col.  S.'î  el  siiiv., 
vol.  III. 


Ainsi  donc,  nou'<  pouvons  considérer  dé.sormais  comme  suATisnin- 
ment  établi  que,  dans  les  constructions  tilles  qu'un  les  fait  générale- 
ment, riininidité  pénètre  dans  la  partie  inférieure  des  bâtiments,  l°par 
le  pied  des  innrs;  2°  par  les  parois  de  ces  murs  en  coniact  direct  avec 
le  sol;  5"  par  les  surfaces  extérieures  de  ces  murs  exposées  à  la  pluie 
et  à  l'humidité  de  l'atmosphère.  Il  est  bien  entendu  que  l'Influence  de 
ces  causes  diverses  s'exerce  en  raison  de  la  nature  du  sol .  du  climat 
dans  lequel  les  bâtiments  se  trouvent  situés  de  leur  orientation,  de  la 
nature  des  matériaux  employés  dans  la  construction,  des  différents 
modes  de  construire,  et  enfin  de  toutes  les  conditions  particulières  dans 
lesiiuelles  les  bâtiments  en  question  peuvent  .se  trouver  placés. 

Outre  l'hunùdité  qui  pénètre  dans  les  murs  par  les  voies  que  nous 
venons  d'indiquer,  nous  devons  signaler  celle  qui  se  manifeste  à  la  sur- 
face même  du  sol  intérieur  des  rez-<le  chaussée,  et  expliipier  de  quelle 
manière  elle  peut  y  parvenir. 

Si  le  sol  intérieur  d'un  bâtiment  est  établi,  soil  à  l'aide  d'un  dallage 
quelconque  ou  même  d'un  carrelage,  on  d'un  plancher  direcieiucnt  sur 
le  sol  naturel,  il  est  certain  que  le  terre-plein  au-dessous  du  sol  con- 
tenant d'une  part  son  humidité  propre,  et  de  l'autre  celle  qui  y  péné- 
trera tant  à  travers  les  murs  que  par-des.<oiis  les  fondations  de  ces 
mêmes  murs,  il  existera  ainsi  une  humidité  constante  dans  toute  l'é- 
tendue du  rez-de-chaussée,  susceptible  d'exercer  son  influence  sur  les 
corps  qui  se  irouveroni  en  coniact  direct  avec  la  surface  du  sol.  On  a 
souvent  pensé  que,  pour  diminuer  cette  influence,  il  sullisait  d'élever 
le  sol  intérieur  des  rez-de-chaussée  à  une  certaine  hauteur  au-dessus 
du  sol  extérieur;  mais  ce  moyen  ne  saurait  avoir  l'etrieacité  qu'on 
s'en  promet  qu'autant  qu'on  pratiquera  ou  des  caves  nu  un  isolement 
au-des.sous  du  sol,  car  on  pourra  ainsi  trouver  le  moyen  d'aérer  b«-au- 
coup  plus  facilemenl;  et  la  partie  inférieure  des  murs  de  face,  le  plus 
exposés  à  l'action  de  la  pluie,  se  trouvant  ainsi  en  contre-bas  du  sol 
intérieur,  ils  ne  |  ourront  plus  transmettre  an-dedans  du  bAliment  l'Iiu- 
mi<liié  qui  pénétrera  les  parois  extérieures.  Nous  verrons  plus  loin  que 
ces  dispositions  sont  d'ailleurs  insuffisantes;  nous  nous  conlenterons 
pour  le  moment  d'établir,  1°que,  sauf  des  précautions  partiuidières,  le 
sol  du  rez-de-chaussée  d'un  bâtiment  quelconque,  établi  au  niveau 
même  du  sol  extérieur  et  directement  sur  ce  sol,  lui  enq)runtera  (nie 
bumiilité  constante;  2°  que  si  le  niveau  du  sol  intérieur  est  plus  élevé 
que  celui  du  sol  extérieur,  mais  qu'il  soit  de  même  éudtli  direcieiiieiit 
sur  le  terre-plein  compris  entre  les  murs  du  bâtiment,  il  conservera  à 
irès-pcn  de  chose  près  les  mêmes  chances  d'humidité  que  dans  le  pre- 
mier ras,  élaiil  supposé  d'ailleurs  dans  les  conditions  analogues;  3°(|ue 
ces  chances  seront  tiès-noUiblemenl  diminuées  si  le  sid  intérieur  est 
établi  au-dessus  des  caves;  4°  enliii  qu'elles  seront  encore  moindres 
sans  être  toutefois  annulées,  si  ce  sol  eslà  la  fuis  sur  cave  et  élevé  à 
une  certaine  hauteur  au-dessus  du  sol  extérieur. 

Quant  aux  causes  auxipiclles  devront  être  attribués  ces  différents 
résultats,  elles  nous  paraissent  trop  faciles  à  déduire  pour  qu'il  soit  né- 
cessaire d'entrer  à  ce  sujet  dans  d'autres  détails.  Nousajouteronssenlc- 
menl  que  ces  causes  dépendent  des  conditions  particulières  dans  les- 
quelles les  bàiiments  peuvent  se  trouver,  et  qu'il  sérail  trop  difficile  et 
trop  long  de  spécifier. 

Parmi  les  diverses  causes  qui  influent  sur  la  proportion  dans  laquelle 
l'humidité  progresse  dans  les  rez-de-chaus.sée,  il  faut  mettre  en  pre- 
mière ligne  celles  qui  résultent  de  la  nature  même  du  sol  sur  lequel 
les  cunstnictions  sont  établies. 

Ou  conçoit  de  plus  que  la  nappe  d'eau  peut  se  rencontrer  à  une  plus 
ou  moins  grande  profondeur  de  la  surface  du  sol,  qu'un  bâtiment  se 
trouvera  pins  on  moins  rapproché  d'un  fleuve  et  exposé  à  la  crue  des 
eaux,  que  les  sols  sont  de  différentes  natures,  comme  les  rochers,  les 
craies,  les  glaises ,  les  terrains  sablonneux,  etc.,  et  que,  par  consé- 
(picnt,  ils  peuvent  être  plus  ou  moins  peruiéakk'S  et  plus  ou  moins  ac- 
cessibles à  l'humidile. 

Quant  à  l'inilueucc  du  climat,  elle  est  trop  bien  reconnue  pourqn'd 


•2fi9 


rkvuh;  dk  i;architkcïlre  et  des  travaux  publics. 


-"70 


soil  nécessaire  ilc  nous  y  anèier;  il  en  esl  de  même  des  inllnences  di- 
verses qui  résulienl  incoiileslabiement  de  l'oiienlalioii  des  bàiinienls. 
tn  examinant  quatre  (açades  situées  dans  des  expositions  différentes, 
on  pourra  reconnaître  que  celles  exposées  à  TOuesi  et  au  Nord  ont  à 
subir  une  influence  funeste  de  la  température,  tandis  que,  sur  les  autres, 
cette  influence  s'exerce  bien  moins  sensiblenienletse  trouve  d'ailleurs 
combattue  par  l'action  salutaire  du  soleil  (1).  l'armi  les  conditions  par- 
ticulières qui  peuvent  influer  sur  la  plus  ou  moins  grande  l'aciliié  avec 
la(|uelle  l'huinidité  pénétrera  dans  le  sol  avoisinant  les  bâtiments,  il 
laut  en  mentiotmer  une  qui  est  sans  conliedil  la  moins  équivoque: 
c'est  celle  dans  laquelle  se  trouvera  un  lei  raiii  pave  conq)aré  à  un  ter- 
rain qui  ne  le  sera  pas.  Ainsi,  en  songeant  à  la  quantité  d'eau  que  la 
pluie  répand  sur  \;\  surface  du  sol  d'une  ville,  et  pour  l'écoulement  de 
laquelle  on  est  obligé  de  construire  des  égoutsd'un  immense  dévelop- 
pement, on  se  convaincra  que  cette  quantité  d'eau  est  en  moins  dans 
l'intérieur  du  sol;  rien  n'est  plus  frappant,  par  exemple,  ([ue  la  dMlé- 
rence  qui  existe  entre  riiumidilé  du  terrain  d'un  jardin  et  celle  du  ter- 
rain d'une  cour  pavée  ou  dallée,  et  dont  les  pentes  seront  réglées  pour 
faciliter  l'écoulement  des  eaux.  On  peut  facilement  en  conclure  (pie  les 
constructions  en  contact  avec  l'un  ou  l'autre  de  c»s  terr.iins  seront 
placées  dans  des  conditions  bien  ditréreiilcs  quant  à  rbiiinidilé  qu'elles 
peuvent  leur  emprunicr.  Pour  ajouter  encore  une  des  situations  parti- 
culières dans  lesquelles  les  bàiinients  peuvent  se  trouver  placés,  nous 
citerons  celle  par  suiie  de  laquelle  un  bâtiment  élevé  sur  une  déclivité 
se  trouve  adossé  d'un  côté  à  un  terre-plein,  et  par  conséquent  domine 
par  un  sol  en  penie  dont  les  eaux  tendent  à  descendre  vers  la  con- 
struction et  à  y  cnlrcleiiir  riiumidile,  si  l'on  n'a  pas  soin  de  prendre 
des  précautions  pour  l'eu  garantir. 

Il  peut  encore  se  présenter  pour  les  constinctioiis  une  iiifiiiiié  de 
conditions  particulières  dont  il  nous  semble  que  cbaciin  peut  se  ren- 
dre compte  et  que  nous  nous  dispenserons  d'énumérer,  tant  à  cause  de 
la  difliculté  qu'il  y  aurait  à  les  prévoir  toutes,  que  pour  ne  pas  nous 
étendre  trop  longueiiieiit  sur  ce  point. 

Maintenant  que  nous  pensons  avoir  suflisaminent  démontré  quelles 


(1)  L'action  salulaire  du  soleil  doit  êlre  prise  selon  nous  en  grande  consi- 
dération ;  l'expérience  le  prouve  :  ainsi,  par  exemple,  dans  notre  climat,  quoi- 
que le  vent  du  Sud  cliasse  la  pluie  sur  les  façades  qui  se  tiouveiu  à  cette  ex- 
position, ce  sont  cependant  celles  qui  restent  le  moins  humides  et  qui  se  dé- 
tériorent le  moins  rapidement,  tandis  que  celles  exposées  au  Xord  et  qui  n'ont 
à  redouter  que  les  pluies  chassées  par  le  vent  du  Nord-Ouest,  ont  bien  plus  à 
souffrir  des  variations  de  l'atmosphère;  c'est  donc  principalement  à  l'action  du 
soleil  que  ces  effets  doivent  être  attribués  ,  car  l'influence  que  peut  exercer  sur 
ces  façades  le  vent  du  Nord  ou  du  Nord-Est  nous  senil)le  très-secondaire,  l'.n 
Italie,  il  tombe  annuellement  une  plus  grande  quantité  d'eau  qu'en  France,  et 
cependant  les  constructions  ont  bien  moins  à  redouter  l'humidité,  grice  Â  la 
elialeur  du  soleil,  qui,  alternant  avec  les  causes  qui  pourraient  la  produire,  les 
rend  presque  nulles.  C'est  surtout  la  constance  de  l'humidité  qui  est  nuisible. 
A  Paris,  il  suffit  d'examiner  les  façades  dos  bâliincnts  situés  an  Nord  et  de  les 
comparer  avec  celles  des  édifices  situés  au  Midi,  pour  se  convaincre  de  la  diffé- 
rence notalile  qui  existe  entre  eux. 

En  France,  les  façades  placées  dans  les  conditions  les  plus  défavorables  sont 
celles  exposées  à  l'Ouest,  car  elles  reçoivent  la  pluie  directement  et  le  soleil 
ne  leur  parvient  que  lorsque,  rapproché  de  l'horizon,  il  a  perdu  sa  force.  Los 
façades  au  contraire  exposées  à  l'Est  se  trouvent  dans  les  conditions  les  plus 
avantasenses ,  car  elles  sont  entièrement  i  l'abri  de  la  pluie,  et  sont  frappées 
pondant  une  grande  partie  de  la  journée  par  les  rayons  du  soleil. 

En  admettant  que  les  façades  exposées  au  Midi  sont  dans  une  condition  plus 
favorable,  il  est  bien  entendu  qu'il  faut  faire  la  jiart  de  l'altération  que  peuvent 
éprouver  ces  façades  par  suite  du  mauvais  emploi  ou  de  la  mauvaise  qualité 
des  matériaux.  Nous  citerons  comme  exemple  plusieurs  parties  de  la  galerie  du 
Louvre,  sur  le  quai,  où  certaines  pierres  se  trouvent  enticreincnt  dééoiuposées, 
tandis  que  les  parties  qui  les  avoisinent  sont  dans  un  état  de  conservation 
très-satisfaisant.  Ce  bâtiment  est  d'ailleurs  resté  dans  les  condilious  les  plus 
pernicieuses,  puisque  la  partie  qui  avoisine  te  pied  du  mur  n'est  pas  même  pavée. 


sont  les  difl'éreiiles  causes  de  l'iiumidiié,  quelles  sont  les  voies  qu'élit? 
siiitpiMir  aileiudre  et  envahir  les  cuiistriictioiis,  les  conditions  diverses 
et  particulières  qui  peuvent  influer  sur  la  proportion  dans  laquelle  son 
action  se  produit  et  s'exerce  sur  ces  mêmes  constructions,  tant  il  l'iu- 
lérieur  qu'à  l'exiéiieur,  nous  allons  nous  occuper  d'en  signaler  les  in- 
convénients, et  rechercher  quelt  uraienl  le»  moyens,  $oil  Je  let  prévenir 
lors  de  l'exécution  des  conslructiont,  soil  de  les  faire  cesser  ou  de  s'en 
préserver  dans  les  conslructiont  existantes. 

Pour  bien  faire  ressortir  les  incoi:vénienls  résuliant  de  l'huniidiié  ipii 
pénètre  dans  les  coiisiructions,  il  importe  d'éiablir  d'.ilioid  que  les 
obstacles  qu'elle  pourrait  rencontrer  dans  la  nature  des  matériaux  sont 
loin  d'être  tels  qu'on  semble  les  supposer  ;  car,  liâlons-nous  de  le  dire, 
les  matériauv  employés  habituellement  dans  les  constructions,  buis, 
britpies,  moellons,  pierre  tendre,  pierre  calcaire,  sans  en  excepter 
même  il.'  marbre  et  le  granil,  sont  tons  plus  ou  moins  hygrométriques  : 
c'est-à-dire  que,  plongés  dans  l'eau  ou  maintenus  dans  une  atmo- 
sphère humide,  après  les  avoir  préalablemi.-nt  pesés  dans  un  élat  de 
sécheresse  complète  ,  il  n'en  est  aucun  qui,  pesé  de  nouveau,  ne 
donne  nu  poids  supérieur,  résultant  de  la  dose  d'humidiié  qu'il  aura 
absorbée. 

Ce  n'est  donc  pas  iitiiqiiement  par  l'emploi  de  telle  on  telle  pierre 
qu'on  pourra  combattre  eulièremcnt  l'humidité,  qui  tend  coiisianniienl  à 
pénétrer  les  corps  hygrométriques  qu'elle  rencontre;  Gir  l'huniidiié  que 
renferme  le  sol  à  une  certaine  profondeur  tend  incessamment  à  envahir 
les  parties  desséchées  momentanément  par  l'air  atmosphérique  ou  le 
soleil;  c'est-à-dire  que,  quand  Ihuinidilé  disparait  de  la  partie  supé- 
rieure du  sol,  f.iiite  de  pluie,  elle  tend  constaiiiinent  à  y  revenir  des 
couches  inférieures,  par  l'effet  de  la  capillarité,  comme  l'humidité 
qui  alimente  les  racines  des  arbres  et  qui  leur  parvient  souvent  d'une 
grande  profondeur.  Mais  pour  rendre  cet  ellèt  encore  plus  sensible. 
supposons  une  colonne  monoliilie  de  pierre,  de  granit  même  si  l'on 
veut,  dont  le  pied  sera  baigné  dans  un  bassin  plein  d'eau  ;  supposons 
de  plus  que  la  totalité  de  la  colonne  soit  à  l'abri  du  contact  de 
l'air  aiinosplieri(pie,  qu'elle   puisse  être,  |)ar  exemple,  placée  sous 


Pour  les  bâtiments  dont  les  faces  sont  exposées  au  .Nord,  outre  les  inconvé- 
nients que  nous  venons  de  signaler,  il  en  est  un  autre  bien  reconnu  mainte- 
nant, et  ancpiel  on  n'est  pas  encore  parvenu  à  remédier  :  c'est  une  es|>èce 
d'araignée  qui  se  loge  dans  les  trous  des  pierres  cl  fait  autour  de  ces  nous 
une  toile  rayonnante  et  plate  qui  n'a  pas  moins  de  13  à  20  centimètres  de  cir- 
conférence :  ces  toiles,  qui,  dans  certaines  natures  de  pierre,  deviennent  très- 
nombreuses,  conservent  la  poussière  qui  s'y  attache  et  font  autant  de  lacbei 
noires  qui  produisent  l'effet  le  plus  désagréable  sur  les  surfaces  des  monuments, 
comme  on  en  peut  juger  par  les  façades  de  la  .Monnaie,  de  l'Instiiul,  etc.;  do 
plus,  celte  poussière,  qui  dcviontainsi  inhérente  aux  parois  des  murs,  forme 
éponge,  conserve  l'Iiumidilé  qu'elle  reçoit  de  l'atmosphère  et  devient  irès-nui- 
silile  à  leur  conservation. 

Nous  pensons  donc  que  les  monuments  ont  besoin  d'être  entretenus,  et  qu'ils 
doivent  être  époussetés  et  brossés  à  certaines  époques,  tous  les  cinq  ou  dix  ans, 
par  exemple,  et  de  plus  il  serait  à  désirer  qu'à  l'aide  d'une  préparation  chi- 
mique appliquée  sur  les  pierres,  ils  pussent  être  préservés  des  insectes  dont 
nous  venons  de  parler. 

Lors  de  la  restauration  de  vieux  édifices,  quand  on  déj^ire  rendre  i  la  pierre 
sa  couleur  primitive,  on  sait  que  ce  résultat  peut  être  facilenirnt  obtenu  à 
l'aide  d'un  procédé  très-connu  qui  a  été  employé  avec  succès  aux  balustrades 
de  la  place  de  la  Concorde,  au  Collège  de  France,  etc.  En  recoiiiniandanl  l'em- 
ploi de  ce  moyen,  nous  voulons  surtout  nous  élever  contre  le  système  de  grat- 
tage, qui  doit  être  proscrit  :  1°  en  ce  qu'il  altère  la  forme  de  l'architecture,  et 
2"  en  ce  qu'il  enlève  à  la  pierre  la  croûte,  la  patine,  qui  s'est  formée  par  le  (cm|is 
sur  sa  surface  et  qui  contribue  à  sa  conservation. 

Les  observations  que  nous  avons  faites  i  l'égard  dos  bâtiments  exposés  au 
Midi  ne  sauraient  être  appllrablos  aux  constructions  en  pans  de  bois,  auxquelles 
au  contraire  cette  exposition  est  très-nuisible;  car  le  bois  privé  d'air  qui  subi) 
alternativement  l'inOuencc  de  l'humidité  et  de  la  grande  chaleur  est  sujet  à 
pourrir  facilement. 


2TI 


REVUE  DK  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


272 


une  (loclie  d:itis  laqiiellcî  on  aiiniil  fait  le  vide;  il  esl  consiaiit 
(luaii  boul  d'iin  certain  temps  riiumidiié  s'introduira  dans  le  frti 
de  celle  colonne,  qu'elle  la  pénétrera  ,  s'élèvera  sans  cesse  et 
finira  par  gagner  le  sommet,  en  admetlanl  toujours  qu'aucune  cause 
de  dessèchement  extérieur  ne  sera  survenue  (1). 

Servons-nous  encore  de  l'exemple  de  celte  colonne  pour  démontrer 
que  riiumidiié  n'abandonne  jamais  les  corps  qu'elle  a  envahis,  el  ne 
pciilêlre  absorbée  que  par  l'action  de  l'air  ou  de  la  chaleur,  .^insi,  sup- 
posons que  celte  colonne  saturée  d'humidité  soii,  par  un  moyen  quel- 
conque, sécliée  dans  sa  partie  supérieure  ;  l'humidité  disparaîtra  dans 
les  panics  où  l'air  ou  la  clialoiir  qu'on  aura  fait  agir  l'auront  attcinle  de 
manière  à  l'absorber;  mais  l'humidilé  de  la  pariie  inférieure  viendra 
bientôt  envahir  de  nouveau  la  partie  séchée,  aussitôt  que  les  causes  de 
sécheresse  auront  cessé. 

>"ons  concluons  de  là  que  l'humidilé  qui  renconire  un  corps  hygro- 
mélri(nie  le  pénètre  en  tous  sens  d'une  manière  toujours  croissante,  si 
elle  n'est  comballue  par  une  aciion  séchante  ou  absorbante. 

Ainsi  donc  un  mur  construit  en  pierre  de  n'imporie  quelle  nature 
pourra  être  pénétré  par  l'humidilé  qui  existe  dans  le  sol  et  qui  s'intro- 
duira dans  loules  les  direclions,  par  tous  les  points  où  ce  mur  sera 
on  rontacl  direct  avec  le  sol.  Ajonions  que  la  dislance  à  laquelle  at- 
teindra celle  humidité  ne  saurait  cire  Hélerminée,  qu'elle  peut  s'élever 
irès-haut  au-dessus  du  niveau  du  sol,  et  que  si,  arrivée  à  un  ceriain 
poin",  sa  progression  devient  plus  lente,  c'est  reffet  du  rapport  qui 
cxi.îl  :  eiiire  les  causes  par  lesquelles  cette  hiimidilc  est  produite,  et 
l'influence  ncutralisanie  delà  tempéralure  de  l'almospbère,  rapport  en 
raison  duquel  l'équilibre  (  herche  à  s'élablir.  On  comprend  très-bien 
que  la  partie  inférieuie  d'un  mur  pénéirée  d'ime  certaine  dose  d'humi- 
dité an  conmiencemenl  do  l'été,  le  sera  dans  une  proportion  sensibb'- 
mcnl  moindre  à  la  fin  de  celle  saison,  surtout  s'il  leçojt  l'aciion  direct- 
du  soleil,  et  que  l'hiver  suivant  l'humidilé  atteindra  de  nouveau  les 
parties  dont  elle  aura  été  momenlanémenl  repoussée  (2). 

Des  Incosvénie.nts  dp.  l'hlmiditè 

Quoique  les  inconvénients  de  l'humidité  soient  bien  connus,  nous 
crovoiis  devoir,  avaiit  d'indiquer  les  moyens  que  nous  proposons  pour 
lisconibaitre.  rappeler  ici  les  principaux  :  il  faut  mettre  en  première 
li-jne  l'iiisalubiiié  résultant  de  la  permanence  de  l'Iimnidilé  dans  les 
lieux  habiles,  puis  la  desiruclion  qu'elle  exerce  sur  tous  les  ohjeisqui 
sont  de  naïuie  à  en  souffrir;  ainsi  les  enduits  se  détruisent  et  tomheni, 
les  lambris,  les  planchers  et  les  parquets  pourrissent,  la  peinture  farine 
cl  se  détache,  les  papiers  s'imbibent  et  se  décomposent,  les  étoffes  s'al- 
lèrcni,  les  meubles,  les  tableaux,  les  livres,  et  enGn  tout  ce  qu'on  esl 
dans  l'usage  de  conserver  dans  les  appartements  est  exposé  à  une  dété- 
rioration certaine.  De  plus,  le  corjis  même  des  murs  en  élévation  con- 
struits soit  en  pierre,  en  maçonnerie,  en  briiiuc  ou  en  pans  de  bois, 
subit  une  délérioraiion  progressive  qui  peut  devenir  nuisible  à  leur  so- 
lidité. Sui- les  parements  extérieurs,  la  dégradation  commence  par  les 
joints,  pour  lesquels  ou  n'a  [las  toujours  soin  d'employer  les  mortiers 

(1)  On  (lit  lics-souvent  :  L'Immidilé  monte  toujours,  et  on  semble  donner  à 
penser  que,  pour  envahir  un  corps  hygrométrique,  l'iuniiidllé  doit  venir  de  bas 
m  liant,  tandis  qu'il  faut  hien  qu'on  saclie  que  l'IiuniidiKS  envahit  les  corps 
liygiom(5lri(|»es  dès  (|u'cllc  les  concentre  soit  horizontalement,  soit  verticale- 
ment, n'importe  enfui  dans  quelle  direction  ils  se  présentent;  ainsi,  en  suppo- 
sant la  colonne  que  nous  avons  prise  pour  exemple,  couchée  horizontalement, 
et  sa  base  seule  baignée  dans  l'eau,  l'Iiumidité  l'envaidrait  absolument  connue 
dans  le  premier  cas. 

[*:  (2)  C'est  à  tort  qu'on  fait  exécuter  les  travaux  de  peintures  intérieures  et  ex- 
térieures à  l'époque  du  printemps;  c'est  à  l'automne  que  ces  travaux  pourront 
être  faits  avec  bien  plus  de  succès,  d'après  ce  que  nous  venons  de  dire  de  l'in- 
Duencequela  belle  saison  exerce  sur  les  parties  des  constructions  exposées  i 
l'hnnfulité. 


qu'il  conviendrait  (1).  lien  résulte  (el  cela  sera  toujours  difficile  k  cviier) 
que  la  subskince  qui  est  interposée  entre  les  assises  de  pierre,  élanl  or- 
dinairement plus  perméable  que  la  pierre  elle-même,  se  décompose  la 
première,  i|ue  le  joint  se  creuse,  et  que  l'humidilé,  trouvant  un  point 
il'arrèl,  séjourne  enire  les  deux  arêtes.  Ces  parties  humides  subissant 
ensuite  les  alternalives  de  la  gelée,  du  dégel  et  de  la  chaleur,  finisMiit 
par  se  décomposer  el  tombeni  en  pous.sière. 

Le  joint  se  trouvani  ainsi  élargi,  nlïrc  encore  plus  de  prise  à  la  des- 
iruclion, et  si  l'fin  n'y  porte  prunqitemeiit  un  remède  efficace,  l'humi- 
dité y  développera  des  végcUtions  qui  accélèrenl  la  ruine  de  la  ron- 
struction,  à  laquelle  de  nombreux  insectes  viennent  encureconiribuer(â). 
Uiitre  ces  inconvénienUi  luaiériels  iiihéreiiis  à  nuire  manière  «le  con- 
struire, il  résulte  de  ce  système  d'inierpositiun  de  mortier  entre  lei 
pierres  un  effet  très-désagréable  à  l'œil,  et  qui  détruit  l'unité  des  formes 
archiieciurales,  comme  on  peut  en  juger  par  les  colonnes  de  la  Made- 
leine, du  Panihi'on,  de  la  Rourse,  ou  par  la  construction  de  l'arc  de 
iriomphe  du  Carrousel,  qui  a  cependant  été  faite  avec  le  plus  grand 
soin  (5). 

(La  suite  prochainement.) 


(1)  A  l'occasion  des  inconvénients  qui  résultent  de  l'humidité,  ce  serait  le  cas 
d'entrer  dans  les  diverses  cunsidératinns  que  comportent  la  composition  et 
l'emploi  des  mortiers  ;  nous  serions  très-disposé  à  le  faire,  mais  nous  crain- 
drions de  trop  nous  écarter  du  sujet  qui  nous  occupe,  et  nous  préférons  d'ail- 
leurs renvoyer  aux  tra\aux  remarquables  de  Vicat,  qui  a  traité  la  question  des 
mortiers  avec  une  grande  supériorité. 

(2)  Il  importe  d'établir  que  l'humidité  qui  pénètre  dans  les  constructions  en 
pierres  ne  peut  être  nuisible  à  ces  constructions  lorsqu'elle  est  constante  et  que 
les  pierres  n'ont  pas  à  subir  les  alternatives  de  l'humiililé,  de  la  sécheresse,  de 
la  gelée,  etc.  C'est  ain.si  que  les  pierres  des  ponts  qui  sont  rnn.siammeni  sous 
l'eau  ne  se  détériorent  pas,  taudis  que  la  zone  de  celles  qui,  par  l'alternatite  de 
la  crue  el  de  la  diminution  des  eaux,  sont  exposées  i  être  lanlOt  baiKné<>s,  tantôt 
découvertes,  subit  une  épriuvc  i  laquelle  elle  ne  peut  résister  qu'un  certain 
temps.  C'est  précisément  cette  zone  qu'on  a  ut1  réparer  entièrement  aux  piles 
du  Pout-iVruf.  Pour  preuve  de  la  uon-déconqiusilion  des  |>ierres  maintenues 
dans  une  liumidilé constante,  nous  citerons  encore  celles  qui  se  trouvent  dans 
les  carrières,  et  les  pierres  qui  séjournent  au  fond  des  rivières.  Ainsi  dunr, 
dans  un  bâtiment,  les  parties  de  nuirs  au-dessous  du  sol  n'ont  rien  à  redouter 
pour  leur  conservation  des  rlTets  de  l'Iiumidité. 

(3)  Certes,  avec  notre  manière  de  construire,  l'emploi  d'un  hou  mortier  est 
une  chose  très-essentielle;  mais  il  est  un  autre  système  de  cousirucliou  qui 
serait  l)ien  préférable  s'il  pouvait  être  adopté  :  c'est  relui  dans  lequel  ou  peut 
se  passer  de  toute  espèce  de  mortier  ou  ciment,  quand  on  construit  eu  pierres  de 
taille  ;  c'est  le  système  suivi  par  1rs  anciens  depuis  la  plus  haute  antiquité  jus- 
qu'aux temps  de  barbarie  qui  suivirent  la  chute  de  l'empire  romain,  et  qui  con- 
siste à  poser  les  assises  à  pierre  sèche,  sans  l'introduction  d'aucune  cnmposi- 
lion  factice.  Ces  constructions  sont  préférables  i  celles  que  nous  exécutons  jour- 
nellement, sous  le  double  rapport  de  la  stabilité  et  de  la  durée  ;  car,  d'une  pan, 
cette  manière  de  construire  exige  que  les  surfaces  des  lits  des  pierres  soient  par 
laileunnt  planes  et  que  la  superposition  des  a.ssises  ait  lieu  très-exacteuicul;  et. 
d'une  autre  part,  la  finesse  extrême  des  joints  qui  n'existent  pour  ainsi  dire  pas, 
ne  laisse  aucune  prise  à  la  destruction  ;  aussi  l'expérience  de  plusieurs  siècles  a- 
t-elle  fait  reconnaître  qu'une  telle  construction,  lorsque  les  matériaux  sont  de 
bonne  qualité,  est  pour  ainsi  dire  impérissable.  Jamais  les  Grecs  et  les  Ro- 
mains n'ont  construit  autrement,  soit  en  marbre,  soit  en  pierre,  et  des  exem- 
ples tels  que  le  Colysée,  le  pont  du  Gard,  les  Arènes  de  Muies,  etc.,  ne  peuvent 
laisser  aucun  doute  sur  l'excellence  de  ce  système. 

Non  contents  d'une  telle  perfection,  les  anciens  ont  pris  un  surcroît  de  pré- 
rantiOMS  à  l'égard  des  monuments  de  pierre,  en  les  révélant  très-souvent  d'un 
stuc,  afin  de  dissimuler  encore  plus  complètement  les  joiuLs  et  de  préserver  en 
même  temps  la  pierre,  toujours  plus  ou  moins  poreuse,  descITelsde  l'intem- 
périe de  l'atmosphère.  Ce  stuc,  dont  l'épaisseur  n'était  pas  d'un  millimètre,  res- 
semblait beaucoup  plus  à  une  couche  de  peinture  qu'à  un  enduit  ;  de  sorte  qu'il 
pouvait  être  applique  non-seulement  sur  les  parties  lisses,  mais  également  sur 
les  sculptures.  Quanta  sa  durée,  elle  ne  pentêtre  conslestée,  puisque  aujoiir- 
il'hui  Uiêmo.  dans  les  monuments  où  ces  stucs  datent  de  près  de  deux  milleans, 


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REVUE  DK  LARCHITECTUKE  ET  DVJi  ÏHAVALX  PUBLICS. 


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bibi.10grafhi1:. 

Notice  Biographique 

sur  loiiis:\le\andre  l'IlL,  airliileclc,  rcligipuï  de  l'ordre  de  Sa'iil-Ddriiiiiiquc, 

PAR  M.   AM.   TKVSSIEn. 

Le  20  iiviil  1840,  le  lendemain  du  jour  de  Pâques,  un  jeune 
homme,  un  artiste,  franehissait  les  barrières  de  Paris  et  s'achemi- 
nait vei's  la  Ville  Eternelledes  Césars  et  des  papes.  Qu'allait-il  faire 
à  Rome'?  allait-il,  comme  tant  d'autres,  étudier  l'art  anticjue  sur 
les  monuments  mêmes  de  l'antiquité?  allait-il,  las  enfin  de  n'en 
voir  que  des  copies  et  de  ramper  sans  cesse  à  la  suite  des  traditions 
d'école,  interroger  lui-même  les  débris  du  passé,  pour  reb<\tir  en- 
suite, dans  son  imagination,  la  Rome  des  païens?  —  Non  ;  car  nul 
peut-être,  plus  que  ce  jeune  architecte,  ne  fut  antipathique  à  l'art 
païen  :  et  s'il  fût  allé  l'étudier  dans  ses  domaines,  c'eût  été  pour  le 
combattre,  et  non  pour  le  reconstruire.  Qu'allait  il  donc  faire  dans 
la  ville  sainte?  Esprit  profondément  religieux,  ferxeut,  il  allait, 

on  ne  saurait  les  déiaclier  de  la  pierre  par  aucun  moyen.  On  conçoit  tout  ce 
(|u'un  tel  système  aurait  d'avanlageux  dans  la  construction  pour  la  conservation 
de  nos  monuments,  savoir  :  la  |)ose  des  pierres  à  pierre  sèche,  et  l'application 
il'un  stuc  susceptible  de  les  préserver  des  ravages  de  notre  climat.  Au  premier 
abord,  la  constructiiin  à  pierre  sèclie  semble  présenter  de  graniles  difficullés 
par  le  soin  extrême  qu'elle  exige  dans  la  taille  des  pierres;  mais  il  nous  send)le 
cependant  qu'à  l'aide  de  moyens  mécaniques  peu  compliqués,  on  pourrait  sup- 
pléer .1  ce  (|ue  le  travail  de  Ibomnie  aurait  de  trop  dispendieux.  Quant  aux 
stucs  à  appliquer  .sur  la  pierre,  s'il  ne  s'agis.sait  que  de  reproduire  ceux  des 
anciens,  rien  ne  serait  plus  facile;  mais  II  faut  faire  la  part  de  la  diflércnce  des 
climats,  et  il  est  probable  que  le  sluc  antique  ne  se  comporterait  pas  en  France 
comme  en  Grèce  et  en  Ilalie;  c'est  donc  une  composition  analogue  qu'il  s'agit 
de  préparer,  et  en  cela  l'état  des  connaissances  que  nous  possédons  en  chimie 
nous  permet  d'espérer  que  ce  résultat  pourra  être  procliainemcnt  obtenu.  Ce 
n'est  pas  un  simple  vœu  que  nous  émettons,  c'est  presque  une  prédiction  que 
nous  prétendons  faire  ;  car  on  ne  peut  que  déplorer  cette  fureur  de  grattage  et 
(le  blanchissage  qui  s'est  emparée  de  nous  depuis  quelques  années;  et,  d'un 
autre  côté,  rien  n'est  plus  déplorable  que  l'état  dans  lequel  se  trouvent  nos  mo- 
numents de  pierre  construits  avec  le  plus  de  luxe. 

C'est  donc  en  présence  du  portiiiue  de  la  Madeleine  que  nous  disons  sans  hé- 
siter :  Dans  dix  ans  ce  porUque  recevra  ou  une  peinture,  ou  un  stuc,  ou  une 
composition  quelconque  qui  dissimulera  les  joints,  les  préservera  des  atteintes 
de  l'humidité,  et  conservera  «1  la  pierre  une  teinte  égale  qui  permettra  de  jouir  de 
l'ensemble  des  proportions  de  l'architecture. 

Si  nous  sommes  entré  dans  quelques  développements  au  sujet  du  mode  sui>l 
par  les  anciens  dans  leurs  constructions  de  pierre,  c'est  dans  le  but  d'appeler 
l'alteiiUon  de  la  Société  d'Encouragement  sur  une  question  qu'il  nous  paraît  es- 
sentiel de  livrer  à  l'étude  des  personnes  capables  de  la  résoudre,  dans  l'intérêt 
de  la  conservation  et  de  la  durée  de  nos  monuments  nationauv. 


par  un  sacrifice  solennel,  se  vouer  entièrement  au  service  de  Dieu  ; 
il  allait  prendrede s  mains  du  père  Lacordaire  le cilice  dominicain, 
illustré  déjà  piir  tant  d'artiNles  fameux. 

Riche  des  qualités  qui  font  espérer  les  grands  artistes,  plein 
de  foi  en  la  puissance  de  son  art,  doué  d'un  sentiment  remar- 
quable, (|uoique  très-exclusif,  de  l'architectine  qu'on  peut  appeler 
chrétienne,  et  noinri,  par  l'étude  et  la  discussion,  des  auteurs  re- 
ligieux du  Moyen-Age,  sans  lesquels  on  ne  saurait  comprendre 
l'art  de  cette  époque,  ce  fut  après  de  longs  travaux  et  des  fatigues 
sans  nombre,  au  moment  même  où  il  voyait  enfin  la  fortune  ou 
plutût  l'équité  lui  sourire,  ce  fut  alors  que  Louis-.4lexandre  Plel 
prit  la  détermination,  longtemps  préméditée,  d'entrer  dans  l'ordre 
des  frères  prêcheurs,  que  l'abhé  Lacordaire  venait  de  rétablir  en 
France.  Dire  comment,  après  s'être  abandonné  aux  joies  mondai- 
nes autant  qu'tiii  autre,  après  avoir  été  disciple  de  Huche/,  et  avoir 
navigué  longtemps  dans  les  eaux  d'un  rationalisme  quelquefois 
sceptitpie,  il  en  vint  à  celte  foi  ardente  et  complète  qui  lui  fit  tout 
sacrifier,  parents,  amis,  fortune,  c'est  faire  l'histoire  de  toute  sa 
vie;  c'est  ce  qu'a  fait  M.  Am.  Teyssier,  dans  le  livre  qu'il  a  mo- 
destement appelé  une  Notice  biographique. 

M.  Teyssier  passe  rapidement  sur  les  premières  années  de  son 
ami.  ^é  à  Lisieux  en  IS08,  PicI,  à  l'âge  de  vingt-quatre  ans,  avait 
déjà  traversé  les  classes  d'un  collège,  la  boutique  d'un  droguiste  et 
l'étude  d'un  notaire.  Profondément  dégoûté  des  deux  professions 
dont  il  avait  fait  l'essai,  professions  si  opposées  aux  besoins  de  sa 
nature,  il  revint  irouver  son  père  :  «  Je  serai  architecte,  ou  je  ne 
serai  rien,  »  lui  dit-il.  Il  est  rare  de  rencontrer  une  vocation  si  net- 
tement accusée. 

A  l'âge  de  vingt-quatre  ans,  Fiel  vint  donc  se  faire  archi- 
tecte à  l'école  de  M.  Debret;  mais  bientôt  il  quitta  l'atelier  pour 
se  livrer  entièrement  à  ses  propres  inspirations.  Enthousiaste  pour 
l'art  du  Moyen-Age,  et  particulièrement  pom-  l'art  de  cette  époque 
glorieuse  du  Moyen-Age  qui  a  produit  presque  toutes  nos  grandes 
cathédrales,  il  fut  désireux  de  suivre  au  delà  du  Rhin  le  mouve- 
ment parallèle  de  l'art  allemand  ;  il  voulait  apprendre  aussi  par 
lui-même  la  vérité  sur  ce  mouvement  artistique  de  l'Allemagne 
moderne,  dont  quelques  écrivains  faisaient  un  si  grand  éloge.  Pour 
étudier  le  passé,  il  visita  Strasbourg,  Fribourg,  Chaffliausen,  Ans- 
bourg,  W  eissemhourg,  etc.,  mais  surtout  Nuremberg;  il  se  pro- 
mena dans  Munich  pour  interroger  le  présent.  A  son  retour,  il  pu- 
blia son  Voyage  en  Allemagne  dans  F  Européen.  Quelques  travaux 
d'architecture  pratique  lui  furent  aussi  proposés  vers  celte  époque, 
et  il  fut  prié  de  faire  le  plan  d'une  église  gothique  pour  la  ville  de 
Nantes.  Son  projet  fut  d'abord  accepté  ;  mais  plus  tard,  quand  l'ar- 
tiste eut  fermé  sur  lui  la  porte  du  doitre,  ce  même  projet  fut  re- 
poussé. Piel  fit  aussi  les  dessins  d'une  église  de  même  style  pour 
un  village  de  Franche-GoiTité.  Ces  travaux  d'application  se  ma- 
riaient chez  lui  à  des  travaux  théoriques,  dont  le  Voyage  en  Allt- 
magne  n'iivait  été  que  le  prélude.  Il  fit  dans  l'Européen  le  compte- 
rendu  du  Salon  t'e  1837,  et  publia  ensuite  un  travail  eiifi([uv  sur 
le  Temple  de  la  Madeleine,  comme  il  l'appelle,  et  enfin  une 
Déclamation  contre  l'art  païen.  Dans  ce  deniier  morceau,  qui 
est  très-court,  il  semble  avoir  résumé  toutes  les  pensées  dévelop- 
pées dans  ses  précédents  écrits,  afin  de  formuler  un  anathème  plus 
puissant. 

En  contact  fréquent  avec  des  hommes  d'une  foi  robuste,  uni 
par  les  liens  de  la  plus  fraternelle  amitié  avec  celui  qui  ve- 
nait le  premier  de  répondre  à  l'appel  du  père  Lacordaire  et  de 
T    V.  18 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


276 


prendre  à  Rome,  dans  le  monastère  de  Sainte-Sabine,  l'habit  de 
moine  dominicain,  profondément  croyant  lui-même,  Piel  marcha 
vite  dans  la  voie  de  l'apostolat.  Le  frère  Pierre,  après  lui  avoir  ou- 
vert le  chemin,  n'éprouva  pas  de  grandes  difficultés  à  l'attirer  au- 
près de  lui.  A  peine  Piel  était-il  arrivé  à  Rome,  que  le  frère  Pierre 
mourut  dans  ses  bras;  mais  ces  deux  frères  ne  devaient  pas  être 
séparés  longtemps  :  quinze  mois  ne  s'étaient  pas  écoulés,  que  leurs 
âmes  étaient  déjà  réunies.  Piel  mourut  au  monastère  de  Bosco, 
en  Piémont,  à  peine  Agé  de  trente-trois  ans. 

M.  Teyssier  n'a  pas  voulu  s'étendre  sur  les  mérites  que  pou- 
vait avoir  Piel  comme  artiste.  «  J'ai  laissé,  dit-il,  à  dessein,  le 
front  de  mou  ami  découvert,  afin  qu'une  main  plus  digne  pût 
y  déposer  une  couronne.  «  Toutefois  l'artiste,  dans  Piel,  se  lie 
si  étroitement  à  l'homme,  qu'en  nous  traçant  les  traits  de  l'homme, 
M.  Teyssier  a  dessiné  aussi  le  portrait  de  l'artiste  tel  qu'il  s'est 
peint  lui  -  même  dans  ses  écrits  ;  la  physionomie  de  Piel  est 
d'ailleurs  tellement  tranchée ,  qu'on  la  saisit  au  premier  coup 
d'œil,  et  qu'elle  reste  profondément  gravée  dans  la  mémoire. 
Pour  Piel,  il  n'y  eut  qu'un  seul  art  véritable  :  l'art  chrétien;  et  il 
appelle  l'art  gothique  du  XlIP  siècle  la  synthèse  chrétienne.  Dans 
les  écrits  de  Piel,  partout  on  reconnaît  que  c'est  bien  là  l'idée  qui 
domine  et  qui  génère  pour  ainsi  dire  toutes  les  antres.  Pour  Piel, 
la  cathédrale  du  XIIl"  siècle  était  l'expression  la  plus  complète 
possible  du  christianisme  catholique,  et  il  en  conclut  que  la  cathé- 
drale chrétienne,  par  sa  forme  et  sa  beauté,  est  autant  supérieure 
au  temple  païen  que  le  christianisme  l'est  lui-même  à  la  religion 
païenne,  et  il  ressort  évidemment  des  écrits  de  Piel  que,  de  spé- 
ciale qu'elle  a  pu  être  d'abord,  cette  proposition  avait  fini  par 
prendre  dans  son  esprit  la  plus  grande  généralité,  et  par  s'appliquer 
à  l'architecture  entière  des  deux  époques.  A  la  vérité,  Piel  n'est  pas 
le  seul  qui  ait  formulé  cette  doctrine,  car  nous  avons  vu  soutenir, 
par  des  hommes  de  véritable  mérite  d'ailleurs,  la  proposition  géné- 
rale de  l'absolue  supériorité  de  l'art  du  Moyen-Age  sur  l'art  an- 
tique. Ce  sont  les  prémisses  de  ce  raisonnement  qu'il  faudrait 
commencer  par  établir.  De  ce  que  l'architecture,  qui  est  comme 
Vepitome  de  l'industrie  et  des  arts  d'une  époque,  est  nécessaire- 
ment une  expression  (Idèle  des  sociétés  contemporaines,  et  de  ce 
que  les  idées  religieuses  d'une  société  sont  supérieures  à  celles 
d'une  autre  société,  il  ne  faut  pas  se  hâter  de  conclure  qu'il  y  aura 
nécessairement  aussi  une  inégalité  correspondante  entre  les  archi- 
tectures de  ces  deux  sociétés.  La  religion  est  la  base  des  sociétés; 
—  d'accord,  mais  elle  n'en  est  pas  l'unique  élément;  — puis,  si 
d'un  côté  il  faut  convenir  que  le  christianisme  n'a  pas  eu  constam- 
ment en  vue  le  développement  de  l'art  lear  le  principe  de  la  mor- 
tification des  sens  n'a  pas  toujours  été,  à  coup  sur,  favorable  aux 
progrès  des  beaux-arts,  qui  réclament  au  contraire  des  sens  très- 
rallinés),  et  que  de  l'autre  il  faille  admettre  que  le  sensualisme 
païen  avait  initié  les  artistes  antiques  à  une  connaissance  bien  in- 
time des  proportions  et  des  formes  du  corps  humain,  qui  offre  dans 
son  mlmirable  harmonie  le  style  de  toutes  les  beautés  physiques, 
ces  deux  faits  viennent  ébranler  singulièrement,  ce  nous  semble, 
la  proposition  de  Piel  ;  d'ailleurs,  qu'on  place  côte  à  côte  les  sculp- 
tures du  Parihénon  et  celles,  par  exemple,  de  la  porte  royale  de 
lacathédrale  de  Chartres,  et  qu'on  dise  ensuite  laquelle,  de  l'œux  re 
païenne  ou  de  l'œuvre  chétienne,  est  la  plus  belle  sous  le  rapport 
plastique. 

Mais  nous  ne  voulons  pas  pousser  cette  discussion  pkis  avant  au- 
jourd'hui. Nos  lecteurs  savent  quelle  est  notre  admiration  pour  les 


merveilleuses  créations  du  Moyen-Age,  que  nous  avons  tant  de 
fois  défendues  contre  les  attaques  des  amateurs  exclusifs  de  l'an- 
tique; mais  nous  ne  saurions  offrir  les  chefs-d'œuvre  de  l'antique 
en  holocauste  au  génie  du  Moyen-Age.  Chaque  époque  a  eu  sa  fonc- 
tion à  remplir,  et  l'humanité  présente  jouit  des  travaux  de  toutes 
les  époques  passées.  L'antiquité  s'est  préoccupée  surtout  du  côté 
physique  et  sensuel  de  l'art,  même  dans  son  symbolisme  si  poé- 
tique et  si  admirable;  le  Moyen- Age  a  cultivé  surtout  l'élément 
spirituel.  Quant  à  nous,  tâchons  d'associer  ces  deux  éléments;  et 
pour  cela,  au  lieu  de  mépriser  les  conquêtes  du  passé,  sachons  en 
profiter,  et  ne  sacrifions  ni  l'imagination  à  la  raison,  ni  la  raison  à 
l'imagination  ;  mais  persuadons-nous  bien  que  les  œuvres  seules 
qui  satisferont  à  ces  deux  exigences  seront  dignes  de  nous. 

Si  nous  nous  sommes  laissé  entraîner  a  dire  ce  qui  précède  et  a 
parler  des  écrits  de  Piel,  c'est  moins  pour  en  faire  ici  la  critique  que 
pour  établir  en  passant  l'inanité  des  doctrines  intolérables  en  matière 
d'art.  Les  théories  de  Piel  réclameraient,  pour  être  discutées  à  fond, 
plus  de  place  que  n'en  peut  offrir  un  simple  article  bibliographi- 
que. En  parlant  d'esthétique,  nous  aurons  plus  d'une  fois  l'occa- 
sion de  les  appeler  sur  le  terrain  de  la  discussion  ;  nous  en  com- 
battrons certaines  parties ,  mais  d'autres  parties  nous  serviront 
d'auxiliaires  pour  repousser  les  injustes  attaques  des  détracteurs  de 
l'art  chrétien  ;  car,  nous  le  répétons,  nul  ne  fut,  plus  que  Piel , 
antipathique  au  paganisme;  nul  non  plus  ne  s'est  plus  vigoureu- 
sement constitué  le  champion  de  l'architecture  que  nous  appelons 
gothique. 

Alpho.\se  HE  CALO^^E. 


XKCilULOGIE. 

NOTICE    SVB,   X.A    VIK    ET    X.E8    TRAVAUX 

du  iicDleiiaul-coloarl  Pierrr-Auloisf  (ll\l(.. 

Depuis  le  commeiicemcnt  de  ce  siècle,  deux  hommes  ont  renouvelé 
les  mélliodes  de  la  lopogmphie  ex.iclf.  L'un,  le  lieiilenanl-coloiiel  du 

génie  Clerc,  s'est  consacré  aux  plans  à  grande  échelle ,  du  — —  au  -— — . 

(|iii  servent  aux  ofliciers  du  génie  militaire,  aux  ingénieurs  tics  Ponis-ei- 
Chaussées,  et  qu'on  appelle  levers-nivelés  par  courbes  burizonlalcs  ; 
l'autre,  le  chef 'l'escadron  d'état-major  Maissiat,  aux  plans  à  petite 

échelle,  du  au  j^^.  qui  représentent  par  des  hachures  le  re- 

lief du  terrain,  etserveiiidc  niiiiuie  à  la  nouvelle  carie  de  France.  Le 
premier  a  fondé,  pour  le  génie  miliiaiie,  la  brigade  topographlque  ;  on 
peut  dire  que  l'autre  est  encore,  vingt  ans  après  sa  mon,  le  maître  de 
tous  ces  jeunes  et  habiles  oineiers  d'élal-major  qui  lèvent  aujourd'hui 
h'S  détails  de  la  nouvelle  carte  de  Prance,  ce  grand  niunumcnl  scienti- 
lique  dont  l'avancement  fait  chaque  jour  mieux  apprécier  le  mérite.  Ce 
sont  ses  méthodes  qu'ils  suivent,  ses  Instruments  qu'ils  emploient,  ses 
Idées  qu'ils  a|i|)llipicnl  après  lui. 

Bien  qu'ils  aient  eu  en  vue  des  objets  un  peu  difTérents,  M.M.  .Maissiat 
cl  Clerc  sont  arrivés  tous  deux  à  ce  résultat,  que,  pour  le  détail  des 
levers  à  grande  ou  à  petite  échelle,  il  fallait  se  servir  uniquement  de  la 
boussole;  que,  malgré  sou  peu  d'cxactiiude  apparente,  c'était  encoie 
l'iiistrumeiil  par  excellence,  parce  que  l'Indépendance  des  observations 
rachetait  leur  faible  degré  d'exactitude.  Mais  celle  boussole  éUiit  devenue 
dans  leurs  mains  un  inslrumenl  nouveau  doim.int  les  angles  avec  le  mé- 
ridien vrai,  porlanl  un  niveau  à  bulle  d'air  cl  une  alidade  à  limcitc  mo- 


2T7 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


278 


bile,  sur  un  cadran  vertical,  salisfuisanl  enfin  à  tous  les  besoins  du 
topographe. 

On  peu!  (lire  que  c'est  au  perfeciionnement  de  cet  instrument  que 
ces  deux  bouiuies  ont  consacré  leur  vie,  car  les  améliorations  qu'ds  ont 
a|)port(!es  aux  mcibodes  des  levers  topograpliiques  sont  la  conséquence 
des  améliorations  faites  ù  la  boussole  ;  et  dans  l'application  le  com- 
mandant Maissiat  paraît  avoir  été  plus  loin  que  le  colonel  Clerc,  puis- 
qu'il a  su  faire  un  plus  grand  usage  du  cadran  vertical  de  sa  boussole. 
C'est  dans  CCI  le  voie  qu'on  doit  clierclier  les  derniers  pcileclionneinenis 
à  apporter  aux  méthodes  du  colonel  Clerc. 

(>es  deux  hduinies,  nés  tous  deux  au  milieu  des  mouiagnes,  et,  cimse 
remarquable,  dans  la  même  ville  et  la  même  année,  partirent  en  même 
lemps  dans  le  bataillon  de  volontan'es  de  l'Ain.  Leurs  premiers  pas 
dans  la  carrière  furent  rapides;  mais  la  nalure  de  leurs  travaux  nuisit 
prohablement  à  leur  avancement  ;  ils  ne  voulaient  que  l'aire  de  la  topo- 
graphie. Toute  leur  vie  ils  reslèreni  amis,  se  communiquant  récipro- 
quement les  amélioralions  ipi'ils  apportaient  à  la  science  chérie  qu'ils 
n'ont  cessé  de  cultiver  jus(|u'à  leur  dernier  soupir.  Qu'il  nous  soit 
permis  aujourd'hui  de  payer  un  tribut  d'éloges  à  la  mémoire  du  lieu- 
tenant-colonel Clerc.  Ce  sera  expliquer  les  services  (|u'il  a  rendus  au 
génie  niiliiaire  dans  l'art  des  levers  nivelés.  Nous  tâcherons,  dans  un 
autre  arllcle,  de  passer  en  revue  la  vie  et  les  travaux  du  commandant 
Maissiat;  ce  sera  l'aire  l'Iiisloricpio  et  reypo^itiou  des  mélliodes  suivies 
pour  le  lever  et  la  rédaclion  des  déiails  topographiques  de  la  nouvelle 
carte  de  France.  Quant  aux  déiails  biograpbi(|nc$  qui  suivent,  nous  les 
devons  tons  à  une  commnnicaiion  de  M.  Baidin,  ancien  élève  de  l'école 
Polytechnique,  qui  a  fait  déjà  plusieurs  biographies  du  lieutenant-colonel 
Clerc. 

Cleiic  (Pierre-Antoine),  lieutenant-colonel  du  génie  en  retraite, 
commandant  de  la  brigade  topograpbique  et  de  l'École  des  gardes  du 
génie,  professeur  de  topographie  à  l'École  Polytechnique,  puis  à  l'École 
d'application  de  l'artillerie  et  du  génie,  chevalierde  la  Légion-d'Honneur 
et  de  saint- Louis,  membre  du  conseil  municipal  de  Meiz  ;  né  à  Nantua, 
dépariemcnt  de  l'Ain,  le  8  novembre  1770;  mort  à  Metz  le  18  juillet 
1843. 

Le  jeune  Clerc  étudiait  l'architecture  à  Nantua,  et  cidtivait  ses  heu- 
reuses dispositions  pour  les  arts ,  lorsqu'il  s'élança  avec  enthousiasme 
dans  les  bataillons  des  volontaires  de  l'Ain.  Il  fit  comme  sousoflîcier, 
eu  1792,  I7il5,  et  dans  les  ans  II ,  III  et  IV  de  la  République,  les  cam- 
pagnes des  armées  du  Rhin.  Sergent-major  au  5=  bataillon  de  l'Ain, 
renfermé  dans  le  fort  Vauban,  il  s'y  montra  comptable  généreux  et  im- 
prévoyant, comme  il  le  fut  toute  sa  vie  ;  il  était  déjà  du  petit  nombre 
de  ces  hommes  qui,  dit-on  vulgairement,  n'ont  rien  à  eux. 

Il  fut  incorporé  dans  les  bataillons  de  sapeurs  du  génie  lors  de  leur 
organisation  à  Weissembourg,  et,  eu  1797,  il  était  capitaine  en  second 
aux  années  du  Danube  et  du  Rhin.  Il  éiail  au  siège  de  la  léte  du  pont 
de  Manheiin,  au  blocus  de  .Mayence  de  l'an  VI,  au  passage  du  Rhin 
par  Moreau,  au  siège  de  la  télé  du  pont  d'IIuningue,  prenant  part  à 
toutes  les  reconnaissances.  Le  26  germinal  au  VIII,  le  ministre  de  la 
Ciierre  écrivait  de  sa  propre  main  au  citoyen  Clerc,  capitaine  au3«  ba- 
taillon de  sapeurs  :  —  «  D'après  le  compte  favorable,  ciloyen,  qui  m'a 
éiè  rendu  de  vos  talents  et  de  voire  conduite,  je  me  suis  déterminé  à 
vous  enqiloyer  auprès  de  moi  ;  je  vous  invite,  en  conséquence,  à  vous 
rendre  au  ministère  de  la  Guerre.  Le  secrétaire-général  vous  indiquera 
les  fonctions  qui  vous  seront  conliées. 

«  Salut  et  fraternité,  Caiinot.  « 

Le  capii.iine  Clerc  se  trouva  ainsi  détaché  du  corps  du  génie,  pour 
être  employé,  dans  le  cabinet  particulier  du  miusitre,  à  la  rédaclion  des 
caries  destinées  aux  opérations  et  aux  journaux  milit:iires  de  celte 
époque.  Il  remplit  ces  fonctions  jusqu'à  la  chute  du  ministère  dirigeant. 
—  Belle  position  pour  un  jeune  capitaine  !  On  voidnten  faire  un  aide- 
dc-cainp;  mais  le  régénérateur  de   la  topographie,  qui  n'avait  (|u'uiie 


I  seule  ambition,  celte  de  décrire  les  formes  du  terrain,  aima  mieux 
rester  capitaine  de  sapeurs. 

Le  nouvean  ministre,  en  l'appelant  près  de  lui,  eut  soin  de  lui  laisser 
'  continuer  ses  études.  Dès  ce  moment  il  ne  fit  plus  que  de  la  topogra- 
phie. Il  s'occupa,  outre  son  service  ordinaire  ,  d'expéiiences  relatives 
à  l'art  des  levers,  et  c'est  alors  qu'il  parvint  ii  rendre  applicable  aux 
levers  topographiques  la  méthode  ingénieuse  de  Philippe  liuache ,  à 
représenter  le  terrain  par  la  projection  horizontale  des  sections  faite.* 
par  des  plans  horizontaux  èquidisUints,  méthode  que  le  corps  du  génie 
s'ell'orçait  d'introduire,  qui  permet  de  résoudre  sur  nue  seule  projection 
tous  les  |»r(djlèmes  que  la  géoméirie  descriptive  ordinaire  résout  avec 
deux,  mais  à  la(|uelle  manquaient  des  méthodes  faciles  et  sûres  de 
faire  le  lever  du  terrain.  Vers  1807,  sa  réputation  le  lit  appeler  à  l'É- 
cole Polytechnique,  pour  y  fonder  renseignement  de  la  lopogripliie 
pratique,  à  laquelle  il  venait  d'ouvrir  une  ère  nouvelle.  Il  fonda  alors, 
à  ses  frais,  une  École  d'élèves  topographes  à  qui  il  enseignait  ses  mé- 
thodes. 

Eu  1809,  le  capitaine  en  premier  Clerc  passait  du  <lépdl  de  la  guerre 
au  dépôt  des  rortifications,  et  on  le  chargeait  de  diriger  l'exécution  de 
la  carie-relief  ilu  golfe  de  la  Spezzia,  dans  la  ri\ière  deGéucs.  Ce  grand 
iravail,  qui  ne  fut  terminé  qu'à  la  lin  de  1811,  l'ut  si  bien  accueilli 
que  l'habile  artiste  fut  nommé  chef  de  bataillon  et  chevalier  de 
la  Légion-d'IIonneur.  A  celte  occasion,  l'Enifiereur  dit  au  ministre 
(le  la  Guerre:  ((Puisqu'il  ne  veut  pas  demander  la  croix,  il  faut  la  lui 
donner.  » 

Le  relief,  grand  morceau  de  5  mètres  de  long  et  de  4  mètres  de  large, 
fut  mis  sous  les  yeux  de  l'Kmpereur,  qui  alla  pins  loin,  qui  voulut  mou- 
ler dessus  tout  boité,  pour  mieux  voir  ces  formes  dont  riniiiaiion  lui 
paraissait  merveilleuse.  L'auteur  tremblait  pour  son  œuvre  ;  .sa  crainte 
éiait  extrême.  Il  se  fâcha,  et  très-fort  même,  mais  en  vain  :  il  avait  af- 
faire à  trop  forte  partie.  C'est  alors  que  Napoléon,  satisfait,  lui  dit  : 
((  Que  demandez-vous  '?  —  Donnez-moi  de  la  topographie  à  faire,  sire. 
—  Ou  vous  en  donnera.  El  l'entretien  (init  là. 

Tandis  que  SCS  topographes  construisaient  le  relief  de  l'ensenible,  Ir 
capitaine  Clerc  exécutait  lui-même  la  partie  qui  renfermait  le  pointa 
fortifier,  et  qui  devait  lui  servir  à  démontrer  les  avantages  de  sa  mc- 
thodi'  pour  la  description  des  formes  du  terrain.  C'est  sur  ce  morce.iu. 
resté  entre  les  mains  de  sa  famille,  que  le  grand  bnnnne  marqua  d'nii 
Irait  grossier  au  crayon,  religieusement  respecté  depuis,  Ja  pn!>iiioii 
d'un  fort  à  construire:  précieuse  relique,  supérieure  à  beaucoup  d'autres 
auxquelles  un  engouement  peu  éclairé  a  donné  parfois  tant  de  valeur. 

Eu  1813  et  1814,  le  commandant  Clerc  exécutait  avec  ses  élève.* 
topographes,  réunis  en  nue  brigade  provisoire,  les  levers  nivelés  «If 
Cherbourg,  du  plateau  du  moiil  Cenis,  des  iles  d'IIyèrcs,  de  Colcyne  et 
(le  C'iblentz. 

Alors  eul  lieu  l'organisafKUi  de  la  Brigade  lopographique,  (|ui.  peu 
après,  fut  siqq)rimée  et  remplacée  par  l'Ecole  des  gardes  du  génie,  que 
le  chef  de  bataillon  Clerc  organisa  et  commanda.  Celle-<-i,  su|iprimée 
à  son  tour,  devint  nue  nouvelle  brigade  lopographique,  qui,  reprenant 
les  travaux  coinu;ericés,  exécuta  les  plans  niveb-s  des  villes  de  .Metz, 
Toiil,  .\larsal,  Ritche,  Avcsnes,  Maubeuge,  Landrecies,  etc. 

En  18-Jt),  celte  importante  direction  fut  confiée  au  capiiaine  Duniay, 
et  le  commandant  Clerc  passa  à  l'École  d'application  de  l'aiiillerieel  du" 
génie  pour  y  enseigner  les  levers  militaires.  t"est  dans  cette  position 
qu'arriva  l'époque  de  la  retraite ,  souvent  si  regrettable  |iour  les 
bounnes  d'clile,  pour  lesquels  on  vaudrait  une  modification  à  la  loi: 
.M.  le  colonel  Bergère,  commandant  alors  l'école  de  .Metz,  lui  expri- 
mait ainsi  les  regrets  et  l'estime  du  conseil  de  l'École  de  Metz  : 

((  Si  le  moment  du  repos  est  arrivé  pour  vous,  mon  cher  colonel,  vos 
((  nombreux  travaux  resteront  pour  fournir  d'utiles  secours  à  ceux 
((  qui  voudront  apprendre  comme  à  ceux  qui  voudront  enseigner  un 
((  art  qui  vous  doit  ses  plus  notables  progrès.  L'Ecole  Polytecbuique 
((  Cl  l'École  d'application  en  conserveront  la  précieuse  tradition...  » 


•2T9 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


280 


Le  lieutenant-colonel  en  retraite  ne  cessa  pas  d'être  professeur;  il  fit 
plus  ;  il  devint  anlenr,  et  il  écrivit  non  plus  seulement  pour  les  élèves 
de  l'école  de  Meiz,  pour  ces  jeunes  ofliciers  quil  aimait  tant  et  qui  le 
lui  rendaieni  si  bien ,  mais  pour  toutes  les  personnes  qui  ont  besoin  de  la 
i.opograpbie.  et  qui,  si  peu  préparées  qu'elles  soient  en  dessin  et  er\géo- 
niéirie,  veulent  l'crnienient  s'insiruire. 

Qui  n'aime  à  lire  ces  anciens  traités  sur  la  peinture,  le  dessin,  la 
perspective,  la  géoniéirie  pratique,  tels  qu'où  les  faisait  anirefoisdu  iemp< 
de  Clairaiit  et  de  Bezoul,  ces  deux  auteurs  admirables  de  simplicité,  de 
clarié  et  d'élégance,  si  neufs  encore  aujourd'hui,  et  cependant  si  ou- 
bliés? Ces  traités,  écrits  avec  naïveté,  avec  peu  ou  point  de  prétention  :i 
la  science,  et  qui  semblaient  ne  donner  que  îles  résultats  d'expérience, 
prenaient  l'élève  par  la  main  et  le  conduisaient,  —  un  peu  lentement, 
il  est  vrai,  mais  d'un  pas  assuré,  —  juste  au  but  qu'il  avait  besoin 
d'atteindre  pour  pratiquer  tel  ou  tel  art.  Il  en  est,  dans  le  nombre,  qui 
sont  de  petits  cbefs-d'œuvre. 

C'est  vraiment  une  nouveauté  assez  piquante  qu'un  ouvrage  fait  de 
celle  façon  aujourd'hui.  Cette  idée  ne  pouvait  venir  qu'à  un  praticien 
consommé,  cxetnpl  de  toute  prétention  scientilique,  enthousiaste  de 
son  art,  et  désireux,  avant  tout,  d'en  populariser  les  préceptes,  les 
exemples  et  les  procédés  d'exécution.  Tel  auteur,  tel  livre  :  un  homme 
profondément  versé  dans  la  pratique,  et  qui  a  produit  de  grands  Ira- 
vaux  lopograpliiques,  devait,  avant  tout,  penser  à  faire  un  guide,  tni 
manuel  pour  l'enseignement  de  la  topographie  et  du  dessin  tout  h  la 
fois,  à  rédiger  un  traité  de  topographie  pure,  c'est-à-dire  dégagée  de 
considérations  enipvnnlées  à  la  géodésie. 

Il  est  des  hommes  qu'on  dit  loul  d'une  pièce,  qui  se  vouent  à  la 
solution  d'une  question,  empruntée  par  les  uns  à  la  théorie,  et  par 
d'autres  à  la  pratique.  Ce  parti  pris,  cette  pensée  unique  devient  pour 
eux  un  niailre,  nu  tyran  ;  ils  sont  heureux  ou  malheureux  par  elle.  Ils 
accuseiil  de  froideur,  quelquefois  d'injustice,  les  personnes  qui  ne  sen- 
tent pas  comme  eux,  qui  n'ont  pas  leur  passion..  Oublieux  d'eux- 
mêmes,  ils  ne  savent  rien  demander  pour  eux;  mais,  en  revanche,  ils 
son!  toujours  prêts  à  demander,  comme  prêts  à  donner,  pour  raccoin- 
plissement  de  leurs  travaux  de  piédilection.  Liants,  faciles,  bienveil- 
lants dans  le  commerce  ordinaire  de  la  vie,  ils  sont  rarement  les  mêmes 
dans  les  relations  qui  se  rattachent  à  ces  travaux.  A  quclipics-uns  de 
ces  traits,  quel  est  celui  de  ses  anciens  élèves  (|ui  n'a  pas  reconnu 
rexccllent.commandaiit  Clerc?  Quel  zèle,  quel  dévouement  pour  son 
art!  Avec  quelle  délicieuse  bonhomie  il  s'épanchait  avec  nous!  Quel- 
quefois le  sourire  naissait  sur  nos  lèvres,  mais  le  respect  l'arrêtait 
aussitôt,  tant  il  est  vrai  que  tout  sentiment  vrai  et  profond  plait  et  im- 
pose il  la  fois!  Ces  caractères  rares,  rares  de  nos  jours  surtout,  ac- 
complissent de  bonnes  et  grandes  choses,  mais  trop  souvent  à  leurs 
dépens. 

C'est  pur  un  travail  assidu,  incessant,  opiniâtre,  dont  cet  homme  au 
caractère  de  fer  était  seul  capable,  qu'il  est  parvenu  à  rédiger  les  trois 
volumes  de  son  Essai;  c'est  par  le  sacrifice  de  .ses  faibles  ressources, 
c'est  en  se  génani,  en  gênant  sa  famille,  ipi'il  a  pu  les  faire  imprimer. 
Fortune,  santé,  famille,  tout  appartenait  à  la  topographie,  à  l'art  qui 
lut  tonte  sa  vie  l'objet  de  son  culte.  En  véritable  prédestiné,  il  fut 
frappé  par  la  Uiort  au  moment  où  son  œuvre  d'ici-bas  fut  accomplie. 
Il  était  déjà  Irès-mala.le  lorsque  le  5*  volume  sortait  des  mains  de 
l'imprimeur;  il  en  sortait,  et  les  frais  en  étaient  dus:  pensée  qui  fut 
pénible,  accabbinle,  mortelle  peut  être,  pour  cet  homme  désintéressé 
jusqu'à  la  lierié.  —  Les  anciens  élèves  du  commandant  Clerc  —  et  ils 
sont  nombreux  —  et  les  admirateurs  de  sou  beau  Udent  achèteront 
l'ouvrage  de  leur  célèbre  maître.  Ils  paieront  ainsi  une  dette  honorable. 
N'est-il  pas  juste  que  l'œuvre  éteigne  la  dette  de  l'ouvrier? 

«Placé  à  la  tête  de  la  brigade  topographique,  il  en  organisa  les  Ira- 
vaux  d'une  manière  tellement  parfaite,  que  depuis  viugi  ans  ses  mé- 
thodes s'y  sont  conservées  complètement  intactes.  » 

Résumons-nous  sur  VEssai  de  M.  le  lieutenant-colonel  Clerc,  sur  son 


œuvre  capitale,  car  il  enseigne  la  doctrine  dont  ses  beaux  plans  nivclé« 
ne  sont  que  des  applications.  Ce  livre,  qui  ne  suppose  que  les  notions  les 
plus  ordinaires  de  la  géométrie  élémentaire,  et  peu  ou  point  de  dessin 
linéaire,  sera  reçu  avec  empressement  et  recoimaissance.  Sa  méthode 
est  lellemenl  simple  et  graduée,  que  chacun  y  apprend,  chemin  faisant, 
ce  qu'il  a  besoin  de  savoir  pour  aller  plus  loin,  et  pour  arriver,  en  défi- 
nitive, à  faire  le  dessin  topographiipn;  le  plus  compliqué.  Ce  livre,  ré- 
digé suivant  l'esprit  des  anciens  livres  d'art,  est  paiTaitenient  approprié 
au  but  que  l'auteur  s'est  proposé.  Ce  n'est  qu'en  se  plaçant  à  un  autre 
point  de  vn(!  ipie  le  sien,  que  l'on  pourrait  être  tenté  de  lui  reprocher 
des  longueurs.  On  ne  doit  pas  oublier,  en  lisant  ce  livre,  que  l'auteur  a 
pris  systématiquement  le  parti  de  conduire  l'élève  pas  à  pas,  et  de  par- 
eiMirir  avec  lui  toutes  les  ligues,  de  s'arrêter  à  tous  les  points,  de  mesu- 
rer toutes  les  distances,  de  les  inscrire,  de  les  dessiner  avec  lui.. .  Certes, 
l'homme  déjà  instruit,  déjà  familiarisé  avec  les  spéculations  des  sciences, 
ne  s'astreindra  pas  à  cette  marche  didactique;  il  tournera  souvent  le 
fneillet  et  ira  plus  vite  au  but.  Quant  à  l'étudiant,  peu  versé  dans  les 
sciences  et  abandonné  a  ses  propres  forces,  mais  qui,  en  revanche,  est 
doué  de  curiosité  et  persévérance,  il  ne  trouvera  rien  de  trop  dans  son 
guide.  D'un  autre  côté,  intéressé  qu'il  sera  par  .ses  progrès  successifs, 
il  marchera  dans  cette  étude  avec  confiance  et  sans  fatigue.  On  com- 
prend donc  que  le  livre  de  M.  Clerc  convient  auv  habiles  comme  aux 
novices,  car  l'art  y  est  en  entier  pour  tous.  Indocli  diseant  el  ameni 
meministe  péril i. 


— «^c- 


NOTES  ET  OBSERVATIONS 

DE    M.     H.    JANISIARD, 

relatives  à  la  preniièn;  Insiruriioii  du  Comilé  histori(|tie  des  .Iris  el  floiinmeBbs 

Un  de  nos  rédactetirs,  M.  H.  Janniard,  nous  a  adressé,  ninsi  que 
nous  l'avons  dit  dnns  notre  dernier  numéro,  (|uel(|ues  observations 
(|uc  lui  a  suguérées  la  lecture  de  la  première  Instruction  du  Comité 
liitlorique  des  Art»  et  Monuments,  dont  nous  venons  d'ncliever  la 
piihlieation.  >ous  nous  faisons  un  plaisir  de  communiquer  les  notes 
de  M.  H.  Janniard  à  nos  lecteurs,  persuadt-s qu'on  ne  saurait  trop 
porter  de  lumières  dans  les  recherches  que  l'on  fait  sur  le  domaine 
d'un  passé  trop  souvent  nébuleux. 

MARDELLES  OU   MARGELLES   (Voy.  COl.   113,  VOl.  V). 

Les  antiquaires  pensent  que  la  forme  régulière  de  ces  excavations 
doit  faire  attribuer  leur  origine  à  la  main  des  hommes.  Nous  croyons 
qu'il  faut  les  ranger  dans  la  catégorie  des  phénomènes  naturels,  et  que 
ce  sont  tout  simplement  des  fontii  qui  se  sont  formés  par  l'élioulement 
de  la  voùie  de  cavernes  naturelles  et  inconnues.  Voici  sur  quoi  nous 
basons  notre  opinion. 

Nous  avons  observé  dans  les  bois  de  Quemigny,  près  Dijon ,  plu- 
sieurs groupes  d'excavations  tout  à  fait  analogues  aux  margelles,  par 
la  régularité  de  leur  forme,  et  par  l'absence  de  tout  déblai  dans  le  voi- 
sinage. L'une  d'elles  surtout,  de  5  mètres  de  diamètre,  nous  frappa  par 
l'analogie  de  sa  forme  avec  celle  du  puits  militaire  dit  trou  de  Loup  ;  sa 
profondeur  est  égale  à  son  diamètre  supérieur.  Ses  berges  sont  si  ra- 
pides, qu'on  ne  peut  y  descendre  qu'en  s'aidant  des  loufles  de  bois  qui 
y  sont  implantées.  Non  loin  de  là  sont  deux  autres  excavations  ilu 
même  genre  et  d'une  même  profondeur,  mais  d'un  diamètre  dix  fois 
plus  grand. 

Ces  excavations  sont  toutes  dans  ime  argile  j:iunâtre  ayant  beaucoup 
d'analogie  avec  la  terre  à  Uiur.  Elles  sont  situées  à  l.i  naissance  d'un 
petit  vallon  sur  un  plateau  peu  élevé,  à  l'Est  du  village. 


28  ( 


UliVUK  DK  LARCHITKCTURK  ET  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


282 


A  environ  3  kilomètres  à  l'Otiesl,  duns  un  iiutre  bois  et  tians  une  posi- 

lioti  ;in:il()giie,  se  trouve  un  autre  groupe  île  deux  lions  du  iiicnie  sjeiire, 
mais  beauconp  plus  petits,  creusés  dans  une  teire  île  même  nature.  Ces 
excavations  existiiil  depuis  un  temps  inimémotial.  Le  fond  et  les  parois 
se  sont  couvirts  de  végeialion  ;  les  renards  et  les  blaireaux  y  creusent 
volontiers  leurs  retraites. 

Ces  deux  groupes  de  Margelles  sont  séparés  par  un  large  vallon  cul- 
tivé, allant  du  Sud  au  Nord.  Au  milieu  de  ce  vallon,  à  peu  près  sur  le 
passage  d'une  ligue  droite  qui  réiiiiirail  lis  deux  groupes  précédeuls, 
mais  sur  un  plan  beaucoup  plus  bas,  se  formait,  il  y  a  une  virigiaini' 
d'aunécs,  une  excavation  cylindrique  d'environ  2  mètres  de  diauiède. 
Chaque  année  le  fond  baissai!  d'environ  50cenlimèlres,  et  tous  les  deux 
ans  au  moins  le  propriéUiire  du  lerralu  élait  obligé  de  rétablir  le  ni- 
veau, en  apportant  quelipies  tombereaux  diî  terre.  Enfin,  fatigué  de  ne 
pouvoir  assouvir  la  faim  de  ce  gouffre  naissant,  il  fil  creuser  le  trou  jiis- 
(|u'à  environ  2  mètres  de  profondeur,  et  le  remplit  de  menues  pierrailles 
sur  le.squelles  on  rejeta  une  partie  des  terres.  Depuis  ce  temps,  la  dé- 
pression n'a  plus  paru,  à  la  surface  du  moins;  mais  il  est  probable  que 
l'affaissement  des  terres  se  continue  soulerrainement  ;  les  pierrailles 
formant  voûte,  soutiennent  momenianément  la  coiicbe  supérieure  ,  ei  il 
n'est  pas  impossible  qu'il  se  fasse  subilcment  un  fontis  [irol'oud.  Il  est 
fort  probable  que  si  l'on  eût  laissé  agir  la  nature,  l'excavation  se  se- 
rait couiiuuée,  et  par  l'éboiilement  progressif  des  parois,  de  cylindrique 
qu'elle  él.iil,  elle  aurait  pris  la  forme  d'un  cône  renversé. 

.Mais  un  fait  plus  récent  est  venu  nous  coulirmer  dans  nom;  opinion 
sur  l'origine  des  margelles.  Vers  le  milieu  de  1845,  sur  un  plateau  cul- 
tivé, et  à  quelques  centaines  de  mètres  du  deuxième  groupe  d'excava- 
tions, il  s'est  formé  un  fontis  presque  cylindrique  de  2"  50  de  diamètre, 
dans  un  sol  de  terres  jaunes  argileuses  de  même  nature  que  lesauires. 
Il  y  a  tout  lieu  de  penser  que  ces  diverses  excavations  ont  une  origine 
commune  :  l'ébonlemeut  de  la  voûte  de  cavernes  inconnues,  par  suile 
de  l'action  des  eaux  souterraines,  ou  par  toute  autre  cause.  La  na- 
ture a,  pour  ainsi  dire,  été  prise  sur  le  fait  dans  les  deux  derniers 
exenipb^s  que  nous  avons  cités.  Dans  le  premier,  il  y  a  eu  commence- 
ment d'exécution  ;  dans  le  second,  l'acte  a  été  accompli. 

On  ne  coniiait  pas  de  cavernes  dans  le  pays,  mais  il  en  existe  cepen- 
dant; le  fontis  qui  s'est  fait  en  1843  le  prouve  assez,  et  l'exislence  de 
plusieurs  sources  torrentielles  dans  le  pays  nous  l'a  fait  d'ailleurs  for- 
tement présumer. 

Il  u'v  a  jamais  en  de  carrières  souterraines;  tous  les  matériaux  s'ex- 
ploitent à  ciel  ouvert. 

Une  personne  éclairée  m'a  dit  avoir  vu  sur  le  plateau  de  Belleville 
des  excavations  analogues  aux  margelles,  et  qui  ne  sont  autre  cliose  que 
des  fimtis  formés  par  l'ébonlemeut  des  carrières  à  plâtre,  et  auxquels  le 
tem|>s  a  donné  une  forme  évasée  par  le  haut. 

On  sait  que  les  fnnlis  ont  en  général  la  l'orme  d'un  cône  tronqué,  ou 
dune  pyramide  à  base  polygonale  plus  ou  moins  irrégulière.  Petit  à 
petit  les  terres  des  parois  retombent  dans  l'excavation  en  prenant  un 
talus  plus  ou  moins  prononcé,  selon  leur  nature.  Le  iron  se  régularise, 
s'arrondit,  et  prend  enlin  la  forme  d'un  cône  renversé  à  base  circulaire 
ou  elliptique. 

Au  surplus,  il  est  un  fait  que  tout  le  monde  a  été  à  même  d'observer  : 
c'est  que  la  nature  tend  toujours  à  arroiulir  les  corps.  La  coupe  des 
monlagnes  alfecle  toujours  la  forme  arrondie,  sauf  (luelques  cas  excep- 
tionnels, <|uand  ce  sont  des  montagnes  eu  roches  très-dures  qui  ont 
été  violemment  séparées  par  de  grands  calaclysines,  et  dont  alors  les 
angles  saillants  correspondent  à  des  angles  rentiants  de  la  monlagne, 
qui  n'en  est  .séparée  (pie  par  un  précipice.  Quelle  que  soit  la  forme 
de  la  base  d'un  fontis,  si  la  partie  supérieure  du  sol  dans  lequel  il  se 
forme  se  compose  d'une  assez  forte  couche  di'  terre  ou  de  sable,  la  ca- 
vité s'arrondit  d'une  manière  d'amant  plus  régulière  (pie  les  terres 
sont  plus  meubles  et  plus  homogènes.  Ce  phcnon  eue  peut  s'expliquer 
par  la  théorie  des  voûtes. 


Quelle  que  foit  la  forme  de  l'orifice  par  lequel  du  gable  s'écoule,  le 
monticule  qu'il  produit  dans  sa  chute  prend  toujours  la  forme  d'un 
cône  à  base  circulaire,  si  l'ouverture  n'a  pas  une  grande  différence  de 
longueur  dans  les  deux  axes;  ou  elliptique,  si  l'ouverture  est  Irès- 
allongée. 

Nous  pensons  donc  que  les  margelles  du  Berri  et  autres  doivent  élre 
restituées  au  domaine  de  la  géologie. 

{La  tuile  prochainemenl.) 


CORIIXSFOIin>ANCK. 

Les  Pierres  du  lemple  ijc  Diane  Leucopliriuée  eiposres  au\  injuri;<i  de  l'air. 

À  monsieur  César  Dalv,  rédacteur  in  ch'fde  la  Itevuf. 

Monsieur, 

Dans  un  article  sur  le  Salon  de  ISii,  publié  dans  l'un  des  derniers 
niiniéros  de  la  Revuede  l'ArchilecCure  (vol.  V,  col.  178),  et  comme  pré- 
liminaire de  l'hommage  que  vous  rendez  à  la  belle  restaiiraiiou  du 
temple  de  Diane  Leucophrinée ,  par  M.  Clerget,  vous  dites  que  les 
fri.ses  sculptées  de  ce  magnifique  monument  de  l'art  grec  sont  ahrilées 
sons  un  auvent  en  planches  ipii  les  dérobe  aux  injures  de  l'atmosphèrr 
et  à  l'ardeur  studieuse  des  artistes. 

Les  renseignements  qu'on  vous  a  donnés  sur  ce  fait  ne  sont  point 
exacts;  on  vous  a  dit  ce  qui  devrait  cire  et  non  ce  qui  est.  Si  (pielque 
chose  dérobe  ces  sculptures  aux  investigations  des  artistes,  ce  ne  peut 
être  que  la  consigne  (|ui  ferme  la  porte  à  tout  venant,  plutôt  qu'une 
couverture  (pielconqiie.  Rien,  hélas!  ne  les  garantit  des  intempéries  de 
l'air,  et  elles  sont  ainsi  depuis  leur  arrivée  dans  le  jardin  du  Louvre. 
Lorsque  la  Revue  les  annon(.a,  il  y  a  plus  d'un  an,  je  lis  vainement  plu- 
sieurs fois  le  tour  du  Louvre  pour  apercevoir  la  baraque  qui  devait 
les  recouvrir;  ce  n'est  que  six  mois  après  que  je  les  aperçus  eu  pas- 
sant. 

Ces  marbres  gisent,  alignés,  sur  trois  rangs,  non  loin  de  l'ancien  em- 
placement des  lombes  de  juillet,  sous  l'herbe  du  jardin  de  la  colonnade, 
comme  les  lignes  des  guerriers  prussiens  sous  les  neiges  du  champ  de 
bataille  d'Eylau.  Leur  développement  paraît  élre  de  80  mètres  environ. 
Près  des  bas-reliefs,  on  remarque  un  magnifique  sarcophage  grec  qui,  si 
l'on  eu  juge  bien  à  distance,  m'a  semblé  n'avoir  pas  d'égal  dans  la  col- 
leciioii  du  Musée. 

Il  serait  bien  déplorable  qu'une  longue  exposition  à  l'air  et  à  la  pluie 
fit  perdre  à  ce  beau  monument  funèbre  le  beau  ton  jaunâtre  i|u'il  doit 
sans  doute  à  son  long  séjour  dans  la  terre,  et  qui  lui  donne  nue  fraî- 
cheur admirable. 

J'aime  à  espérer  comme  vous,  monsieur,  qu'on  prépare  à  ces  iulé- 
ressants  débris  un  logement  dans  les  galeries  du  Louvre.  Ils  ont  déjà 
passé  un  hiver  sous  l'herbe.  C'est  la  position  la  plus  meurtrière  qu'on 
puisse  infliger  à  des  objets  d'art  ((uelcmiques,  dans  notre  climat  froid  et 
humide.  Ou  ne  pourrait  traiter  avec  plus  d'indifférence  de  simples 
moellons  Combien  ces  précieux  restes  passeront-ils  encore  d'hivers 
en  cet  état?  Ces  hivers  ne  seront  peai-éire  pas  aussi  doux  que  le  pre- 
mier. 

Ou  ne  conçoit  pas  comment  un  tel  acte  d'insouciance  peut  avoir  liou 
sous  les  murs  mêmes  du  superbe  monument  un  l'on  réunit  à  si  grands 
frais,  depuis  des  siècles,  les  objets  d'art  de  tons  les  temps  et  de  tous  les 
pays.  C'éiail  vraiment  bien  la  peine  de  les  retirer  à  grands  frais  des 
marais  du  Méandre;  la  vase,  du  moins,  plus  soigneuse  que  nous,  les  dé> 
rubaitaux  injures  de  l'air. 

J'ai  observé  bien  des  fois  que  les  pierres  placées  sous  l'herbe  se  dé- 
iruisaienl  plus  vite  qu'en  toute  autre  circonstance.  L'herbe  rnirelient 
l'humidité,  tout  en  laissant  un  libre  passage  i  l'air  :  ainsi,  pendant  les 


283 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUJ5LICS. 


•28  V 


gelées,  ces  deux  ngenls  dcsiructeiirs,  presque  Incries  quand  ils  sonl  sé- 
parés, se  trouvent  ici  combinés  de  la  manière  la  |ilus  funeste.  Quelle 
que  soit  la  gélidité  d'une  pierre,  si  elle  est  complètement  purgée  d'Im- 
midilé,  la  plus  forte  gelée  n'a  aucune  action  sur  elle. 

J'admets  que  les  marbres  sont  en  général  assez  réfractaires  à  l'action 
de  l'air  atmosphérique  pour  que  nos  plus  fortes  gelées  ne  puissent  les 
faire  éclater  même  quand  ils  sont  humides;  mais  le  rontacl  de  l'air 
corrode  toujours  leur  surface  et  enlève  aux  ouvrages  d'art  l'épiderme 
que  leur  (il  le  ciseau  de  l'artisle.  Les  lichens,  les  mousses,  s'altaehent 
promptemeni,  cl  il  est  fort  difficile  de  détruire  les  taches  qu'ils  y  ont 
laissées. 

J'ai  vu  des  marbres  slaluaires,  desgraniis  même,  se  décomposer  as- 
sez rapidemenlà  l'air;  entre  aulres,  une  sialue  en  marbre  du  gladiateur 
mourant,  placée  dans  le  jardin  du  château  de  la  Muette.  Elle  se  dégrade 
sensiblement,  et  sa  surface  tombe  en  poussière  comme  certains  grès 
dont  la  gangue  est  imparfaite.  Il  ne  serait  pas  impossible  que  les  mar- 
bres du  temple  de  Magnésie  fussent  d'une  nature  analogue,  ou  que  leur 
long  séjour  dans  le  limon  du  marais,  auquel  ils  doivent  sans  doute  leur 
couleur  brillante,  les  eût  prédisposés  à  céder  plus  facilement  aux  atta- 
ques de  notre  climat  rigoureux. 

Je  fais  avec  vous  des  vœux,  monsieur,  pour  que  le  logement  qu'on 
leur  prépare  au  Louvre  soit  prêt  avant  l'hiver  prochain  ;  car  je  crains 
qu'on  ne  leur  fasse  pas  de  toiture  provisoire, 
.agréez,  etc. 

H.  JANNIARD, 
archilecte. 


ACADEMIE  DES  SCIENCES. 

Existence  de  Toréls  de  cèdrps  dans  l'Algérie,  el  emploi  de  ce  bois  dans  les  conslruc- 
tions  mauresques.  —  ^otc  de  M.  Vicat  sur  les  pouzzolanes  arliflcielies. 

Dam»  la  séance  du  10  juin,  .M.  Bory  de  Saint-Vincent  a  donné 
comniuuicaliou  à  l'Académie  de  quelques  notes  prises  par  M.  le  ca- 
pitaine Uurieu  de  Maison-Neuve,  membre  de  la  commission  scientifi- 
(|ue  de  l'Algérie,  sur  les  cèdres  de  l'Atlas  et  sur  l'emploi  de  leur  bois 
dans  les  constructions  mauresquesd'.\lger.  M.Durieuen  a  rencontré  de 
vastes  forêts  sur  les  versants  méridionaux;  maison  retrouve  dans  ces  fo- 
rêis  des  traces  d'incendies  allumés  par  les  pâtres,  el  plusieurs  arbres  de 
ilimensions  énormes  gisenl  déracinés  par  les  ouragans.  L'orage  et  le  feu 
ne  sont  pas  les  seuls  agenis  destructeurs  de  ces  arbres  superbes  ;  les 
montagnards,  auxquels  les  colons  demandent  le  bois  de  construction 
nécessaire  aux  mai-sons  qui  s'élèvent  comme  par  eucbanlement.  cou- 
pent sans  choix  tout  aibre  qui  se  trouve  à  proximité,  el  détruisent 
souvent,  pour  obtenir  la  plus  médiocre  pièce  de  charpente,  des  colos- 
ses de  végétation  respectés  par  mille  tempêtes.  L'adminisiraiion  prend 
aujourd'hui  des  mesures  pour  arrêter  ces  dégâts  et  régulariser  les 
coupes. 

Au  temps  même  de  la  domination  turque  en  Barbarie,  le  bols  de 
cèdre,  que  les  savants  de  l'Europe  ne  soupçonnaient  seulement  pas  y 
abonder,  était  fort  employé  dans  Alger  même,  concurremment  avec  les 
troncs  de  certains  genévriers,  qui  viennent  assez  gros  dans  les  dunes 
de  quelques  points  des  côtes.  On  employait  surtout  les  branches  cylin- 
driques qui  ironique  cinq  à  six  pouces  de  diamètre  ou  un  peu  plus, 
el  par  lionçons  de  quelques  pieds  de  longueur,  pour  soutenir  oblique- 
ment les  saillies  produites  en  dehors  des  maisons  mauresques  par  la 
place  qu'occupe  le  divan  ,  meuble  indispensable  dans  la  longueur 
des  bâtiments  étroits  où  se  plaisent  les  familles  musulmanes.  Ce  sont 
tics  pièces  pareilles  des  mêmes  bois,  qui  servent  aussi  comme  d'arcs- 
boulants  entre  les  côtés  des  rues  si  étroites  d'une  ville  où  touies  les 
maisons  s'appuient  les  unes  contre  les  autres,  et  deviennent,  pour  ainsi 
dire,  solidaires  par  le  secours  de  ces  sortes  de  bûches,  que  les  passants 


voient  à  haulcuis  diverses  au-dessus  de  leur  tête,  fixées  en  lra\ers  d'un 
mur  à  l'autre,  d'une  manière  si  disgracieuse,  mais  pourtant  fort  mo- 
tivée par  la  fréquence  des  treinblemenis  de  terre  et  parla  nature  des 
matériaux  qui  entrent  dans  les  constructions. 

Ainsi  donc,  quand  les  cèdres  antiques  du  Liban  auront  complètement 
disparu,  ce  qui,  au  dire  des  voyageurs,  ne  doit  point  larder  à  arriver, 
nous  retrouverons  cette  essence  précieuse  dans  les  montagnes  de 
l'Atlas  et  sous  notre  main. 

—  Dans  la  séance  du  17  juin  ,  le  savant  ingénieur  JW.  Vieat  a  fait 
part  à  l'Académie  de  la  note  suivante,  sur  les  condiliom  auxquelles  utic 
pouzzolane  artificielle  doit  tatisfaire  pour  convenir  à  l'eau  de  mer  : 

«  Toutes  les  argiles  qui  contiennenl  assez  de  carbonate  du  chaux 
pour  qu'après  cuisson  il  se  soit  formé  un  silicate  d'alumine  el  de 
chaux  en  proportions  quelconques  ,  mais  lellcs  cepend:  nt  que  la 
chaux  fasse  au  moins  la  dixième  partie  de  l'argile  allaqiiéc,  toutes  ces 
argiles,  disait-on,  sonl  propres  à  fournir  des  pouzzolanes  arlihcielles 
propres  à  l'eau  de  mer.  Seulement,  il  ne  faut  leur  appliquer  que  le 
degré  de  cuisson  nécessaire  à  la  décomposition  en  carbonate  de  chaux 
(8  à  10  degrés  du  pyromètre),  et  ne  pas  le  prolonger  au  delà 
du  temps  nécessaire  à  cette  dccomposilion.  La  potasse  caustique,  ajoii- 
lée  en  proportions  de  5  p.  100  à  une  argile  pure ,  remplace  efficace- 
ment le  carbonate  de  chaux. 

«  Il  suit  de  là  que  la  condition  â  remplir  pour  qu'une  pouzzolane 
convienne  à  l'eau  de  nier,  c'est  que  l'argile  y  ait  été  attaquée  par  un 
fondani,  mais  à  tel  point  (|ue  les  principes  ne  soicni  pas  trop  foriemeni 
lié>  par  cette  combinaison.  Dans  ces  cas,  l'argile  forme  immèdiatemeni 
par  voie  humide,  avec  la  chaux  éteinte  qui  intervient  pour  la  confecliun 
du  béton,  une  combinaison  nouvelle  qui  n'est  point  décomposée  far  le 
sulfate  de  magnésie  de  l'eau  de  mer. 

a  J'ai  trouvé  un  moyen  très-siinple  pour  être  maître  de  la  duiéo 
Cl  de  l'intensité  du  feu  appliqué  aux  argiles  sous  forme  pulvéruleiile 
el  en  grand.  » 


>:©:c 


CHRONIQUE. 

SoMMiiRS  :  Séance  du  Conseil  municipal  de  Paris,  questions  des  embarcadères  elde 
la  voirie  de  Monltaucon.  —  Médailles  pour  les  ciposinls  de  produits  dp  l'indas- 
Irie.  —  Note  statistique  sur  les  cloches  en  France.  —  Dock  de  carénage  flollanli 
Marseille.  —  Ancien  projet  de  portail  pour  la  cathédrale  de  Barcelone.  —  Travaux 
exécutés  a  l'Acropolisd'Athénes.  —  Constructions  romaines  ilécouvcrtes  à  Paris.  — 
Pl'BLICATIOX  MOUriLLES. 

—  Dans  sa  séance  du  51  mai  dernier,  le  Conseil  mimicipal  de  Paris, 
consulté  sur  le  tracé  du  chemin  de  fer  de  Paris  à  Strasbourg  el  sur 
son  entrée  dans  la  capiUile,  a  pris  une  délibération  qui,  on  va  le  voir, 
est  lout-â-fait  conforme  aux  idées  que  nous  avons  souvent  émises 
relaiivemenl  à  l'influence  future  îles  stations  sur  le  déplacement  de 
la  population  parisienne.  Voici  les  conclusions  de  la  commission, 
composée  de  .MM.  Perret,  Perricr,  Lanquetin,  Frédéric  Moreau,  Ilé- 
rard,  Thayer,  cl  Victor  Considérant,  rapporteur: 

<t  Jeter  encore  (dit -elle)  au  nord  ou  nord-ouesl  de  Paris,  la  téie 
du  chemin  de  fer  de  Strasbourg,  ajouter  à  ces  poitits,  beaucoup  trop 
puissants  déjà  pour  l'avenir  de  la  ville,  une  virtualité  nouvelle,  ce 
serait  aller  contre  toutes  les  doctrines  de  haine  édiliic,  de  sagesse  et 
d'avenir. 

«  Pénétrée  de  ces  priix  ipes.  qui  sont  les  vôtres,  votre  commission  a 
formulé  celle  première  cuiieliisioii  lu'gaiivc  : 

«  Il  importe  au  plus  haut  degré  aux  iiiléiéts  actuels  el  à  venir  de 
la  cité  parisienne,  que  la  léle  du  chemin  de  fer  de  l'.XIIemagne  ne 
soit  pas  placée  dans  les  régions  du  nord  et  du  nord-ouest  de  la 
ville. 

«  Le  débarcadèic  du  cheniiii  de  fer  de    Strasbourg  doit  être  placé, 


28J 


RKVUli  DK  L'ARCHITECÏL'RK  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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aulaiil  que  possible,  en  sens  inverse  du  moiivemeiU  de  déplacenienl 
lie  la  population,  afin  de  contre-baiaiicer  de, toute  la  force  qui  lui  est 
propre  les  causes  de  la  déviation  qui  cniraînent  aiijourd'lnii  le  centre 
de  lacliviié  et  des  affaires  exlérieureineiit  à  l'assietie  naturelle  de 
Paris. 

0  L'emplacement  le  plus  capable  de  satisfaire  à  cette  liante  consi- 
dération est,  aux  yeux  de  votre  commission,  renfermé  cuire  la  bar- 
rière du  Trône,  la  rue  du  Faubourg-Saint-Anloine,  le  boulevard  Con- 
trescarpe et  la  Seine. 

«  Nous  avons  donc  l'Iionnenr  de  vous  inviter  à  peser  de  lonte  votre 
autoiilé  pour  que  la  tcle  du  chemin  de  fer  ne  soit,  en  aucun  cas, 
portée  au  nord  au  delà  de  la  ligne  du  faubourg  Saint-Antoine  ;  mais 
que,  au  contraire,  elle  soit  le  plus  possible  rapprochée  de  la  rivière, 
sans  vous  arrêter  aux  considérations  de  dépense  d'un  nouvel  embar- 
eadèro. 

tt  Vous  prouverez  ainsi  à  l'administration  supérieure  toute  l'im- 
poitance  que  le  Conseil  municipal  de  la  Ville  attache  à  combaiire  le 
déplacement  de  la  population. 

«  En  résume,  votre  commission  est  unanime  pour  demander,  et 
demauiler  avec  énergie,  que  l'enlrée  à  Paris  soit  située  dans  les  limites 
que  nous  venons  de  rappeler,  à  l'exclusion  formelle  de  tout  autre 
cmplaoeineni. 

Ces  conclusions  ont  été  adoptées  à  l'unanimité. 

—  Dans  une  antre  séance,  le  Conseil  municipal  s'est  aussi  occupé 
de  la  suppression  de  la  voirie  de  Montfaucon,  question  toujours 
ajournée  jusqu'.i  présent.  Le  projet  éiaii  toujours  de  laiic  Iranspor- 
ter  les  vidanges  dans  la  forêt  de  Bondy,  au  moyen  de  bateaux  her- 
métiques. M.  Arago  a  émis  sur  ce  point  un  avis  nouveau.  Suivant  lui, 
il  serait  facile  do  faire  passer  les  vidanges  jusqu'à  l'emplacement  qui 
leur  est  destiné,  au  moyen  d'une  conduite  armée  d'un  refouloir. 
M.  Gay-Lussac,  consulté  à  cet  égard,  a  fortifié  l'opinion  de  son  col- 
lègue de  l'Institut ,  et  le  Conseil  a  adopié  les  vues  présentées  par 
M.  .\rago.  Mais  une  commune  voisine  s'est  opposée  à  l'exécution  de 
la  mesure,  et  l'aU'aire  a  été  portée  au  Conseil  d'Étal.  On  espère  qu'il 
statuera  promptemcnt  et  que  la  ville  pourra  bientôt  exécuter  un  pro- 
jet si  important  pour  la  salubrité  publique. 

—  On  a  frappé  celte  année,  à  la  .Monnaie,  soixante-quinze  mé- 
dailles en  or,  trois  cents  en  argent,  et  une  beaucoup  filus  grande  quan- 
tité en  bror.ze.  Toutes  ces  médailles  sont  destinées  aux  exposants  des 
produits  de  l'industrie  que  le  jury  central  doit  désigner  au  minisire  du 
Commerce. 

En  1859,  il  a  été  décerné  quatre-vingt-dix-sept  médailles  en  or, 
irois  cenis  médailles  en  argent,  et  (piatre  cent  dix-huit  en  bronze.  Les 
médailles  en  bronze  pour  celle  année  sont  au  nombre  de  près  de  cinq 

CPIllS. 

—  M.  rarcbevéque  de  Bordeaux  vient  de  publier  un  long  et  intéres- 
sant mandement  sur  les  cloches.  On  y  remarque  la  noie  suivante  : 

Il  est  un  diocèse  en  France,  celui  de  Belley,  où,  depuis  vingt  ans, 
on  a  relevé  ou  construit  à  neuf  et  pourvu  de  cloches  de  toutes  les  di- 
mensions, plus  de  deux  cents  clochers.  Il  n'y  a  pas  de  village  en  Lor- 
raine qui  n'ait  recouvré  ses  anciennes  sonneries,  et  l'on  retrouve  encore 
dans  les  tours  des  églises  cathédrales  de  Paris,  de  Lyon,  de  Ueims,  de 
Poitiers,  de  Strasbourg,  de  Nanci,  de  Uoiien,  d'Amiens,  de  Sens  et  de 
Vendôme,  les  célèbres  bourdons  qui  en  faisaient  la  gloire.  On  vient  de 
doier  les  clochers  des  cathédrales  de  Nantes,  de  Chartres  et  de  Rodez  , 
de  sonneries  supéiieuies  à  celles  dont  elles  avaient  été  dépouillées. 
L'une  des  nouvelles  cloches  de  Rodez  pèse  17  000;  celle  qui  va  être 
refondue  pour  Nolre-Dame-de-la-Garde,  de  Marseille,  pèsera  22  000. 

—  La  chambre  de  commerce  de  .Marseille  vient  de  décider  la  coii- 
siruction  prochaine  d'un  dock  de  carénage  lloliant,  destiné  au  radoub 


des  navires  de  haut-bord,  et  notamment  des  bâtiments  à  vapeur,  qui  jus- 
qu'à présent  avaient  été  forcés  d'aller  se  ravitailler  à  la  Seyce  ou  à  Tou- 
lon. Ce  sysième  de  docks  n'est  pas  nouveau  ;  les  État.s-ljnis  l'ont  adopté 
avec  succès;  il  en  existe  un  à  Rotterdam,  et  on  en  construit  un  au 
Havre. 

—  Nous  venons  de  recevoir  d'un  de  nos  correspondanis  d'Espagne 
la  copie  d'un  ancien  projet  de  portail  pour  la  cathédrale  de  Barcelone. 
Ce  projet,  qui  date  de  la  fin  du  style  ogival,  présente  touies  les  qualités 
et  tous  les  défauts  de  celle  époque  de  décadence.  Ses  détails  soni  sin- 
gulièrement légers  et  élégants,  mais  l'ensemble  manque  peut-être  de 
celte  grandeur  et  de  cette  fermeté  qui  caractérisent  le  style  gothique 
de  la  belle  époque;  toutefois  on  ne  peut  se  lasser  d'admirer  l'imagina- 
lion  féconde  de  l'artiste  qui  a  lissé,  pour  ainsi  dire,  celle  riche  dentelle. 
Le  dessin  original  de  ce  projet,  que  l'on  croyait  perdu,  a  élé  retrouve 
pendant  les  deiniers  troubles  dans  les  ari:hives  de  l'Archevêché.  Quels 
que  soient  l'imporlance  et  le  mérite  de  cette  composition,  si  les  troubles 
qui  ont  récemmeul  bouleversé  Barcelone  n'avaient  dû  produire  que  ce 
résultat,  ce  serait  un  dessin  trop  chèrement  acheté. 

—  Une  lettre  écrite  d'Athènes  en  date  du  21  avril  1844,  insérée  dans 
le  journal  anglais  The  Alhenœum,  contient  des  détails  intéressants  sui-  les 
importants  travaux  exécutés  à  l'Acropolis  par  les  soins  de  la  Société 
archéologique,  ainsi  que  surles  monuments  précieux  que  l'on  y  admire 
encore  aujourd'liui.  Nous  empruntons  à  l'Écho  du  Monde  savant  l'ex- 
trait suivant,  qu'il  a  fait  de  cette  lettre  :  On  a  conservé  les  mesures  an- 
glaises. 

Aidée  par  les  souscriptions  du  comité  anglais,  la  Société  archéolo- 
gique a  leiininé  la  restauration  du  temple  de  la  Victoire  aptère  (  sans 
ailes).  Celte  restauration  éiait  de  la  plus  urgente  nécessité;  car  les 
premiers  travaux  qui  avaient  été  faits  n'avaient  pas  été  terminés,  et  déjii 
une  des  colonnes  que  l'on  avait  remises  en  place  était  tombée  de  nou- 
veau. L'on  a  rétabli  un  cbapiieau  et  un  tambour  pour  une  colonne, 
ainsi  que  plusieurs  pièces  transversales  de  marbre;  les  architraves  ont 
été  replacées  sur  les  colonnes,  ainsi  nue  toute  la  frise  du  côte  oriental. 
Le  tout  a  été  solidement  rattaché  ensemble,  et  l'on  a  placé  en  sùreie. 
dans  le  temple  même,  les  trois  reliefs  de  Victoires  ailées  qui  faisaient 
panie  d'une  balustrade  qui  entourait  l'édifice.  Quoique  les  restes  de 
celte  balustrade  existent  encore  au  côté  septentrional  du  temple,  on  a 
cru  plus  convenable  de  les  conserver  séparément.  Il  manque  encore 
deux  pièces  de  la  frise,  probablement  perdues  dans  la  maçonnerie  du 
bastion  turc  silué  au-dessous,  de  même  que  quatre  autres  pièces  qui  se 
trouvent  dans  le  Musée  britannique;  néanmoins  l'effet  que  produil  le 
temple  est  parlait  quant  à  sa  façade  principale.  Les  bases  de  toutes  les 
colonnes  dil  Proiiylee  ont  été  depuis  longtemps  dégagées  de  la  terre 
qui  arrivait  au  milieu  de  leur  hauteur,  et  maintenant  la  Pinacolheca 
l'orme  un  Musée  disposé  avec  ordre  pour  la  conservation  des  inscrip- 
tions cl  (les  petits  rragmenis  de  sculpture.  Du  Propylée  au  Parliienon, 
et  du  Parihéiion  à  l'Ereclithcium,  tous  les  décombres  ont  été  enlevés. 
de  telle  sorte  que  le  grand  temple  a  repris  son  magnifique  effet;  il  est 
cependant  à  regretter  que  les  frais  considérables  de  ce  travail  (  sur 
(|uelques  points  la  terre  et  les  pierres  s'élevaient  à  10  pieds)  aient  em- 
pêché de  terminer  le  déblaiement  et  d'enlever  les  gros  blocs  de  mar- 
bre qui  encombrent  encore  la  place.  Pour  éviter  de  fortes  dépenses  ei 
pour  conserver  néanmoins  un  grand  nombre  de  fragment»  de  sculpture 
de  diverses  époques,  le  conservateur  des  antiquités  les  a  implantés  dans 
de  petits  murs  de  plâtre  qui  nuisent  à  l'effet  général.  Lorsqu'on  aura 
pu  déblayer  le  grand  espace  silué  derrière  le  Parihenon  à  l'extrémité 
orientale  de  l'Acropolis ,  ces  restes  pourront  être  disposés  convena- 
blement et  prendront  place  dans  un  musée  acropolitain. 

L'intérieur  du  Parihéuon  a  élé  débarrassé  de  lu  mosquée  turque  qui 
eu  occupait  le  centre,  et  si  maintenant  l'on  pouvait  aussi  le  dégager 
des  vidumineux  fragments  de  l'église  chrétienne  située  à  son  extrémité 


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REVUEDE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUI5MCS. 


28S 


..rieniale,  lo.ilc  son  éien.lue  se  déploierait  de  nouveau  avec  son  antique 
beauté;  nù:mi.i()ins  il  y  manquerait  toujours  l'intérieur  des  tolonnes,  qui 


a  disparu  totaictiiont,  grâce 


aux  arci)ilef:tes  turcs  et  chrétiens.  On  a 


parfaitement  reconnu  la  position  de  la  statue  d'or  et  d'ivoire  de  Phi- 
dias, ainsi  que  celle  de  la  statue  colossale  de  Minerve. 

Ce  qui  fait  le  plus  .rhouneur  aux  travaux  du  conservateur  des  anti- 
quités et  il  la  Société  archéologique,  en  la  reconslruciion  «lu  mur  méri- 
dional de  Minerve  Poliade,  et  la  réparation  du  portique  des  Cariatides, 
de  même  que  le  dégagement  complet  de  l'Erechtheiuin  et  du  Cecro- 
pium.  à  l'exception  de  son  portique  septentrional,  l/allrniion  .le  la  So- 
(  iété  archéologique  s'eçl  portée  sur  ce  portique,  qui  sert  mainleiiant  de 
m.iaasin  à  poudre,  et  le  comité  anglais  a  mis  en  réserve  le  peu  de  fonds 
qui  lui  restent  jusqu'à  ce  que  l'on  puisse  commencer  ii  s'occuper  de  ce 

bel  objet. 

Lors(|ue  l'on  voit  l'Acropolis  dans  son  état  actuel,  l'on  reconnaît  que 
le  premier  grand  ouvrage  que  doive  maintenant  entreprendre  la  Société 
archéologique  consiste  à  dégager  le  portique  de  l'Éreclitlieiumet  a  ouvrir 
la  belle  porte  qui  s'ouvre  vers  le  temple  ;  il  est  à  regretter  que  l'on  n'ait 
pas  même  la  somme  peu  considérable  qu'exigeraient  ces  travaux.  Une 
commission  française,  sous  la  direction  de  M.  Le  Ras,  vient  de  passer 
huit  mois  à  mouler  et  à  dessiner  les  nmnumenis  de  l'Acropolis.  Les  ar- 
tistes français  viennent  de  dresser  un  échafaudage  au  moyen  duquel  ils 
pourront  mouler  l'angle  .Nord-Ouest  du  Parihénon;  ce  magnilique  mo- 
dèle comprendra  la  p.iiiie  supérieure  des  colonnes,  la  frise,  l'entable- 
ment, et  il  donnera  une  idée  exacte  des  proportions  colossales  de  l'é- 
difice entier. 

Parmi  les  nombreuses  inscriptions  de  l'Aciopolis  qui  ont  été  publiées 
dans  les  éphémérides  de  la  Société  archéologicpie,  il  en  est  trois  ou 
quatre  qui  présentent  un  intérêt  particulier  :  ce  sont  l'inscription  de 
la  base  de  la  statue  votive  de  Minerve  Hygie,  mentionnée  par  Plui-irque 
dans  la  vie  de  Péricics  et  par  Pline;  le  catalogue  des  contributions 
payées  au  trésor  du  Parthénon  par  diverses  villes,  et  la  description, 
le  prix  et  la  distribution  de  l'ouvrage  relatif  à  la  construction  de  la 
lotigue  muraille. 

Il  reste  encore  noiidnc  de  statues  et  de  reliefs  qui  mériteraient  d'ê- 
tre moulés.  Si  les  musées  d'Europe  contribuaient  aux  Irais  de  l'opéra- 
tion, ce  seraient  les  suivants  :  dix  pièces  de  la  frise  du  Parthénon,  une 
métope,  la  Victoire  ailée  quittant  ses  sandales,  et  une  autre  appelée  le 
Taureau  de  Marathon,  reliefs  appartenant  à  l'exterieurdu  temple  de  la 
Victoire  aptère,  avec  une  portion  d'un  iroisièine  (|ui  cojisi.-te  en  une 
lielle  petite  statue  de  f.iuiie,  de  2  pieds  de  haut;  Cérès  ou  Diane  sur 
un  char,  dans  uti  style  qui  rappelle  celui  des  marbres  de  Xante;  huit 
des  petits  reliefs  sépulcraux  et  autres  conservés  dans  la  Pinacoihèi|iie; 
plusieurs  beaux  fragments  de  petites  statues,  dont  trois  conservés  dans 
le  portique  d'Adrien  ;  un  torse  de  Cupidon  ,  un  hardi  reliOf  sépulcral 
de  5  pied^  de  hauteur,  représentant  un  vieillard  et  un  jeune  homme; 
àne  statue  drapée  d'une  manière  remarquable,  du  meilleur  temps, 
haute  de  6  pieds,  trouvée  à  Andros;  —sa  tête  manquait  et  avait  été  rem- 
placée par  nu  buste  romain,  comme  le  montre  la  fracture  du  cou  :  —  un 
petit  relief,  avec  l'inscription  Athena,  etc.  ;  la  statue  colossale  <rErieli- 
thonius,  encore  en  place  deriière  le  temple  de  Thésée,  haute  de  8  pieds, 
sans  tête;  la  statue  colossale  de  Minerve  Vietrix,  remari|uable  pour  son 
exquise  draperie,  sans  tête,  près  du  Theseium.  Dans  le  Theseiiim.  le 
curieux  relief,  haut  de  6  pieds,  d'un  guerrier  avec  son  épieu,  avec  des 
restes  considérables  de  couleurs  ;  un  ouvrage  d'Aristeion,  de  rancieiuic 
école  de  Sycione;  une  belle  figure  du  meilleur  temps,  bien  conservée, 
à  l'exception  des  jambes  aii-de.-sous  du  genou  et  des  bras,  haute  de  5 
pieds,  appelée  Apollon  à  cause  dti  serpent  qui  se  trouve  à  sa  base;  luie 
statue  que  l'on  regarde  comme  un  Apollon  lyeien,  haute  de  H  pieds; 
un  beau  petit  Silène  avec  Bacchus  enfant  sur  ses  épaules,  haut  de  5 
pieds;  un  Pan,  de  5  pieds;  un  beau  petit  Terme  de  i  pied  et  demi,  avec 
trois  tètes  de  la  Diane  triforme  et  une  d'Hermès;  un  relief  sépul- 
cral, de  5  pieds  sur  i,  représentant  un  jeune  homme,  un  chien  et  un 


jeune  garçon;  un  autre  de  même  grandeur,  avec  femme,  nourrice,  en- 
fant et  ami  ;  —ces  deux  pièces,  d'un  très-beau  relief,  .sont  d'admirables 
spécimens  du  style  sépidcral  ordinaire  qui  vient  après  la  meilleure  pé- 
riode de  la  sculpture  athénienne;  —  plusieurs  autres  reliefs  de  faibles 
proportinns  et  de  moindre  importance. 
.On  n'a  pas  fait  de  fouilles  en  dehors  de  l'Acropolis,  et  il  n'est  pas 
probable  que  l'on  en  fasse;  car  le  gouvcrnemriit  grec  manque  de 
fonds  pour  cet  objet,  et  la  loi  défend  à  tout  individu  d'emporier  de 
Grèce  des  objets  antiques.  Une  circonstance  à  déplorer,  est  que  la  ville 
est  bàlie  sur  des  restes  anciens,  et  l'on  ne  peut  gm-re  espérer  de  décou- 
vertes à  Athènes  ailleurs  que  dans  l'Acropolis.  Néanmoins  divers  motif», 
portent  à  croire  que  d'autres  endroits  seraient  plus  productifs,  s'ils 
étaient  l'objet  de  recherches  archéologiques. 

En  exécutant  des  fouilles  pour  fonder  les  caves  d'une  maison 

dans  la  rue  Constanline,  entre  les  mes  de  Perpi',;nan  et  de  la  Licoriu' 
(île  de  la  Cité,  a  Paris),  on  a  découvert  des  restes  de  constructions  ro- 
maines, et  entre  autres  un  hypocauïte.  un  aqueduc  qui  s'étend  plus  loin 
que  les  débris  trouves,  plusii'nrs  murs  indiquant  des  distributions  d'ap- 
partements, et  un  mur  Irés-long  s'étendant  parallèlement  ii  la  rue  Con- 
siantine.  Le  peu  d'épaisseur  des  murailles  semblerait  donner  à  penser 
que  cette  ( onsti  iiction  appartenait  à  une  riehc  habiialion  plutôt  qu'à 
un  monument  public. 

Publications  noivf.lles.  —  Les  I4«  et  15'  liviaisons  de  la  Slatitti- 
que  mmiummlalc  de  Purit,  publiée  par  M.  Atberl  Lmoir  pour  le  minis- 
tère de  rinslriiction  publique,  viennent  de  paraître,  et  la  l»eaulé  de  l'éxe- 
cution surpasse  telle  de  toutes  les  livraisons  précédentes,  et  les 
planches  (jnelles  contiennent  sont  du  plus  haut  intéiêt.  La  14*  livraison 
forme,  avec  la  13'.  précédemment  parue,  une  monographie  complète  de 
l'ancienne  église  de  l'abbaye  Sainte-Geneviève,  détruite  pendant  la  Ré- 
volution, et  dont  il  ne  reste  plus  aujourd'hui  que  la  tour  qui  fait  partie 
des  dépendances  du  collège  Henri  IV.  Ou  s;iitquà  celte  aniiipie  abbaye 
viennent  se  rattacher  les  premiers  souvenirs  historiques  de  la  monarchie 
française.  Au  centre  de  l'église  on  voyait  la  statue  couchée  de  Clovis,  ac- 
tuellement dans  les  caveaux  de  Saint-Denis,  et  une  chapelle,  située 
derrière  l'abside,  était  placée  sons  l'invocation  de  saiiiicClotilde.  L'église 
dont  .M.  Albert  l.enoir  reproduit  anjourd'lnii  le.s  plans,  coupes,  éléva- 
tions cl  détails,  est  du  XP.sièclc;  la  façade,  toutefdis.  et  la  partie  siipé- 
lieure  delà  nef,  sont  du  Xli' siècle,  et  la  tour  date  du  XIV«  Les  chapi- 
teaux du  chœur,  publiés  en  grands  deuils,  sont  de  curieux  ccbantilloiis 
<le  l'architecture  du  XI'  siècle.  Pour  compléter  ee  travail,  lanleur  y  a 
joint  le  dessin  de  deux  chùsses  de  la  patronne  de  Paris,  lune  du  XIIP. 
l'autre  du  XVIl»  siècle. 

La  IS'  livraison  contient  :  1°  deuv  planches  repréientanl  l'clévalion 
principale  et  différents  détails  de  l'hôtel  Torpaiiiie,  eonslriiit  à  Paris 
vers  la  fin  du  XVI'  siècle.  Ce  qui  en  reste  est  à  l'école  îles  Beaux-Arts. 
Deux  antres  planches  reproduisent  divers  chapiteaux  et  inscriptions 
lie  l'église  Saint-Gerui:'.in-des-Piés.  Une  antre  représeiiie  les  quatre 
faces  d'un  tombeau  gillo-romain  trouvé  en  180fi  rue  Vivienne,  aiiv- 
quelles  .M.  Albert  Lciioir  a  ajouté  une  restauration.  Vient  ensuite  l'an- 
cien hôtel  des  Ursins,  situé  dans  l.i  Cité,  sur  le  bord  de  la  Seine,  vis-à- 
vis  la  place  de  l'Hôtel  de- Ville.  Cette  livraison  se  termine  par  un  plan 
de  Moniniarire  avec  indication  de  tontes  ses  antiquités. 


CES  Alt  D.\LY. 

Directeur,  rrdncleur  en  chef. 
membre  de  l'Académie  royale  des  Iliaui-Arls  de  Slocliliolro,  et  minibre 
lionoraire  el  correspondant  de  l'Insiilul  nival  des  Arcliil'  clés  lirilanniqiii-» 

l'AIIIS.    —   TVP.    I.«CI!AIII>r    KT   COUP.,    liKt,   DiHIETTK,    2. 


28'J 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


290 


'HIiSTOIj 
DEUXIEME  INSTRUCTION  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 

DES    ARTS    ET    MONUMENTS. 
CIVILISATION  CHRÉTIENNE. 

STYLE  ROMAN  ET  STYLE  GOTHIQUE. 

(SUITE ,  voy.  col.  241.) 

Cllli'ITIU;  II,  —  EXA11E\  DÉTAILLÉ  DE  L'EXTÉRIElIt  DE  L'ÉGLISE 

Avaut  d'indiquer  les  formes  et  les  caractères  par  lesquels  peut 
se  distinguer  à  l'extérieur  chacun  des  membres  de  l'église  que  nous 
venons  d'énumérer,  il  est  indispensable  de  jeter  un  coup  d'œil  ra- 
pide sur  les  objets  qui  doivent  figurer  dans  ces  descriptions,  soit 
qu'ils  appartiennent  exclusivement  à  l'extérieur,  ou  que  nous 
puissions  les  rencontrer  également  en  dedans  de  l'édifice. 

A  .  Le  pi'emier  examen  portera  sur  le  système  et  les  matériaux 
de  construction,  qui  devront  être  signalés  toutes  les  fois  qu'ils 
présenteront  quelque  caractère  particulier,  différent  de  celui  de 
la  masse.  (  Voyez  ce  que  nous  avons  dit,  §  IV  du  chapitre  précé- 
dent, col.  243.) 

H.  Les  murailles  peuvent  être  complètement  lisses  sur  leur  sur- 
face extérieure,  ou  décorées,  soit  de  quelque  ornement  courant,  tel 
que  des  stries  verticales,  horizontales  ou  obliques,  des  nattes 
[Fiij.  30l,  des  compartiments  (F((/.  31),  des  imbrications  [Fi(j.  32), 
des  damiers  [Fig.  33),  des  bossages;  soit  de  quelque  renflement 
ou  moulure  horizontale,  tel  que  cymaise,  larmier  ou  imposte;  le 
plus  souvent  elles  sont  pourvues,  surtout  en  dehors,  d'un  soubas- 
sement très-caractérisé. 

Saint-Èlienne  {Beauvais). 


l]l||i|f|Mi|!IM!Mi|ii|Hi|niii|,|,,. 

■■■' ,  = 


Pifj.  30. 


Fig.  32. 


Fig.  33. 


C.  Elles  peuvent  être  nues  ou  pourvues  de  colonnes,  pieds-droits 
ou  pilastres,  libres  ou  engagés,  en  supportant,  soit  un  amortisse- 
ment, soit  un  couronnement,  soit  une  architrave. 

L'amortissement  est  la  partie  supérieure  dune  baie,  lors(|u'elle 
va  en  diminuant  vers  le  sommet. 

L'amortissement  est  ordinairement  curviligne  et  prend  alors  le 
nom  d'arcade. 

L'arcade  peut  être  à  jour  ou  figurée,  nue  ou  décorée  d'une  ar- 
chivolte soutenue  par  deux  des  supports  que  nous  venons  de  men- 
tionner, ou  par  deux  consoles. 

Dans  le  cas  où  c'est  une  série  d'arcades  (arcature)  qui  repose 
ainsi  sur  de  simples  consoles,  elle  devient  un  couronnement. 
[Voyez  ci-après  D.) 

Ailleurs,  des  arcades  ainsi  soutenues  par  de  simples  consoles  al- 
ternent avec  d'autres,  qui  reposent  sur  l'un  des  supports  que  nous 
venons  de  citer,  ou  sur  un  simple  ressaut  de  la  muraille. 

On  rencontre  fréquemment  aussi,  mais  plus  à  l'intérieur  qu  a 
Textérieur,  si  ce  n'est  pourtant  dans  les  baies  des  clochers,  deux 
arcades  secondaires  inscrites  dans  une  arcade  principale  de  courln- 
semblable  ou  différente,  et  soutenues  par  une  colonne  centrale  ; 
au-dessus  de  cette  colonne  se  trouve  ordinairement  un  œil-de- 
bœuf,  destiné  à  alléger  le  plein  de  l'arcade,  et  le  plus  souvent  de 
forme  circulaire  et  rayonnante. 


Fhj.  3i. 


Fiy.  35. 


Le  contour  de  cet  œil-de-boeuf  est  tantôt  uni,  tantôt  découpé 
en  lobes,  d'abord  au  nombre  de  trois  ou  quatre,  puis  se  multi- 
pliant de  plus  en  plus.  C'est  là  l'origine  de  ces  quatre-feuilles  et  de 
ces  trèfles  que  nous  verrons  figurer  si  souvent  en  creux  et  comme 
taillés  à  l'emporte-pièce  au  bord  des  parties  pleines,  dans  les 
églises  gothiques. 

L'œil-de-bœuf  et  ses  variétés  se  trouvent  encore  employés,  soit 
des  deux  côtés  d'une  arcade  ornée,  soit  isolés  comme  celui  dont 
nous  venons  de  parler,  au-dessus  de  chaque  colonne  d'une  arca- 
ture. 

Outre  les  séries  de  colonnes  et  d'arcades,  ou  en  rencontre  en  en- 
trelacements. II  faut  alors,  non-seulement  les  signaler,  mais  en- 
core rendre  compte  avec  un  soin  particulier,  et  autant  que  possible 
fournir  un  dessein  exact,  sur  une  échelle  étendue,  des  courbes 
principales  et  de  celles  qui  résultent  de  leurs  intersections. 

T.    V  19 


291 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


292 


Fig.  36. 


Fig.  37. 


Fig.  38. 

La  colonne  et  l'amortissement  méritent  chacun  un  examen  par- 
ticulier et  approfondi. 

A.  La  colonne  se  distingue  du  pilier  par  la  présence  d'un  cha- 
piteau et  ordinairement  d'une  base. 

Cependant  il  existe  un  genre  de  support  Intermédiaire,  la  co- 
lonne-pilier, toujours  remarquable  par  sa  pesanteur,  et  qui  n'est 
munie  à  son  sommet  que  d'un  cordon  et  d'un  tailloir,  ou  de  l'un 
des  deux  seulement. 


La  colonne  est  complète  lorsqu'elle  se  compose  d'une  base,  d'un 
fût  et  d'un  chapiteau;  incomplète  lorsqu'elle  manque,  soit  de  base 
(quelquefois  avec  une  portion  du  fût),  soit  de  chapiteau. 

Dans  le  cas  où  ce  sont  la  base  et  une  portion  du  fût  qui  man- 
quent, ce  qui  existe  peut  être  désigné  sous  le  nom  de  demi-colonne, 
et  repose  soit  sur  une  console,  soit  sur  une  simple  retraite  des 
tambours  inférieurs;  quelquefois  aussi  ces  derniers  manquent 
complètement.  Quand  on  rencontrera  des  faits  de  ce  genre,  on  de- 
vra examiner  s'ils  tiennent  à  la  construction  primitive  ou  s'ils 
sont  le  produit  d'un  remaniement  postérieur  ayant  pour  but  de 


donner  du  jour  ou  de  l'espace,  comme  cela  arrive  le  plus  commu- 
nément. 


Cathédrale  de  Jteims. 


Coulommieri. 


Fig   40. 


Fig.  41. 


Fig.  42. 

La  colonne  peut  être  simple  ou  composée. 

Elle  peut  être  ronde  a;  munie  d'une  arête  mousse  b  ou  aiguë  c; 
elliptique  d  ;  carrée  e  (et  alors  elle  prend  le  nom  de  pied-droit)  ; 
rectangulaire  et  engagée  dans  la  muraille  (et  alors  elle  s'appelle 
pilastre  f)  ;  ou  prismatique  g. 


D 


A 


G  G  P  K 

Fig.  43. 

Sa  base  peut  reposer  immédiatement  sur  le  sol  ou  être  portée 
sur  un  socle  et  entourée  d'une  plinthe. 

Cette  base  peut  être  formée  ou  décorée  soit  de  figures  humai- 
nes, soit  de  représentations  d'animaux  et  en  particulier  de  lions 
(surtout  dans  les  portails  ou  les  porches),  soit  d'ornements  cou- 
rants. 

Saint-Denit. 


illllil'lllll liiiiiil 


Fig.  44. 


FiSr.  45. 


293 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


99k 


Elle  peut  encore  être  munie  ou  non  d'appendices  en  forme  de 
pattes  ou  de  feuilles  aux  quatre  angles  du  socle. 

SainlGermain-des-Prés  (Paris). 


Fig.  iC. 


Considéré  sous  le  rapport  de  sa  forme,  le  fût  peut  être  fuselé  a, 
renflé  b,  en  balustre  c,  cylindrique  d  ou  conique  e. 


n  ^1 


Fig.  47. 

Sous  le  rapport  de  sa  disposition,  il  peut  être  simple  a,  croisé  b, 
entrelacé  c,  brisé  D,  noué  E,  ou  annelé  à  divers  points  de  sa  hauteur  F. 


c 
Fig. 


48. 


Sous  le  rapport  de  sa  surface,  il  peut  être  lisse,  cannelé  avec  ou 
sans  rudentures  A, verticalement,  horizontalement,  ou  en  spirale  b, 
losange  c,  strié,  gaufré  d,  chevronné  e,  contre-chevronné  f,  tordu, 
rubanné,  imbriqué  G,  et  contre-imbriqué,  natté,  godronné  II,  frctté, 


chargé  d'enroulements,  d'entrelacs,  d'animaux  ou  de  personnages 
rampants  autour  de  lui,  ou  d'une  figure  humaine  engagée;  il  peut 
même  être  remplacé  par  cette  figure  : 


fiatisbonne. 


Ftff.  51. 


Quoique  les  colonnes  romane  et  gothique  ne  soient  pas  assujet- 
ties à  des  proportions  rigoureuses,  on  devra  toujours  indiquer  le 
rapport  du  diamètre  du  fût  ou  de  ses  diverses  parties,  s'il  n'est  pas 
cylindrique,  avec  sa  longueur. 

Dans  certaines  contrées  du  royaume  où  l'architecture  antique 
n'a  jamais  été  complètement  perdue  de  vue,  on  trouve  la  colonne 
corinthienne  plus  ou  moins  exactement  reproduite  par  les  artistes 
du  Moyen-Age.  Souvent,  au  lieu  du  type  classique,  ils  en  ont 
adopté  constamment  la  variété  qu'ils  avaient  plus  particulièrement 
sous  les  yeux  dans  les  monuments  du  pays,  de  manière  à  former 
ainsi  de  petites  écoles  locales,  reconnaissables  h  ce  caractère.  C'est 
par  une  circonstance  de  ce  genre  que  le  pied-droit  et  le  pilastre  can- 
nelés avec  rudentures  dominent  exclusivement  dans  les  églises  de 
Vienne  et  de  tout  le  territoire  dAutuu. 

Partout  ailleurs  même,  excepté  quelques  exemples  très-rares  de 
formes  ioniques  ou  doriques,  le  chapiteau  du  Moyen-Age  se  com- 
pose ordinairement  d'une  corbeille  et  d'un  tailloir,  de  manière  à 
rappeler  plus  ou  moins  fidèlement  les  formes  corinthiennes  où 
I  composites  de  l'architecture  antique. 


295  REVUF.  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 

-   La  corbeille  peut   être   cjlindrique   {Fig.  ôS  et   53),  cubique  Normandie. 

Saint-Gcrmain-des-I'rés.     Le  Pin 

[Normandie). 


590 


Fig.  .V2.  Fin-  53. 

Cathédrale  de  Verdun.  Cornelo. 


Fig.  55. 


Fig.  50. 


Fig.  57. 


{Fig.  54,  55  et  56),  conique(F4j.  57)  (en  crtne  tronqué  et  renversé), 
cordée  [Fig.  58)  (en  cœur),  pyramidale  [Fig.  59  et  60)  (en  pyra- 
?iiide  tronquée  et  renversée),  ureéolée  [Fig.  6l)  (resserrée  un  peu 


Cologne. 


Venise. 


Fig   5H. 


Fig.  59.  Fig.  60. 

Venise. 


Palais,  dit  de  Constantin 
Conslantinople'. 


Fig.  61. 


Fig.  62. 


nu-dessous  de  son  sommet),  campanulée  [Fig.  62)  (en  forme  de 
cloche),  infundibuliforme  (Fig.  63  et  64)  (présentant  la  forme  d'un 
entonnoir  ou  d'une  corbeille  proprement  dite,  à  bords  plus  ou 
moins  évasés)  ;  godronnée  [Fig.  65),  scapboïde  [Fig.  66). 


Fig.  6ô. 


Fig.  66. 


La  décoration  du  chapiteau  peut  appartenir  à  la  peinture  ou  a 
la  sculpture,  ou,  comme  cela  arrive  souvent,  à  l'une  et  a  l'autre  a 
la  fois.  Quand  il  est  resté  lisse,  cette  circonstance  indique  quelque- 
fois que  l'on  a  eu  l'intention  d'y  employer  la  peinture  exclusive- 
ment. Il  faut  distinguer  ce  chapiteau  de  celui  qui  a  été  gratté 
après  coup,  aussi  bien  que  de  celui  cpii  n'est  qu'épannelé,  c'est-a- 
dire  où  les  masses  d'ornement  ont  été  réservées  dans  l'attente  d'un 
travail  de  ciseau  qui  n'aura  pas  eu  lieu. 

On  rencontre  encore  des  chapiteau.x  où  l'ornementation  de 
sculpture,  quelquefois  la  plus  délicate,  a  été  recouverte  de  plâtre 
pour  faire  place  à  des  peintures.  C'est  ordinairement  au  XIII'  siècle 
qu'a  eu  lieu  cette  substitution  de  la  couleur  à  la  forme. 

En  général,  toutes  les  fois  qu'on  trouvera  du  plâtre  ou  du  badi- 
geon sur  un  point  susceptible  de  décoration,  on  devra  s'assurer  de 
ce  qui  peut  exister  dessous. 

Quand  l'ornement  de  la  corbeille  appartiendra  à  la  sculpture, 
outre  les  caractères  provenant  de  son  exécution  plus  ou  moins  dé- 
licate, plus  ou  moins  fouillée,  il  sera  nécessaire  d'examiner  si  cet 
ornement  se  détache  en  plein  relief  de  sa  surface,  s'il  y  est  engagé 
ou  s'il  est  pris  à  même  sa  masse,  de  manière  que  son  contour  y  soit 
évidé  en  creux. 

Cet  ornement  peut  se  composer  d'objets  empruntés  à  la  figure 
humaine,  au  règne  animal,  au  règne  végétal,  à  l'économie  domes- 
tique, la  parure,  la  broderie,  la  passementerie,  la  sparterie,  etc. 

La  figure  humaine  parait  s'être  introduite  dans  cette  partie  de  la 
colonne  par  la  substitution  d'un  personnage  complet  au  mascjue 
antique  qui  forme  quelquefois  le  fleuron  du  chapiteau  corinthien. 


Vienne  (Dauphiné). 


Sainl-Gtrmain-dts-Près. 


fig.  63. 


Fig.  6i. 


Fig.  67. 


Fig   68. 


Elle  y  présente  quelquefois  des  scènes  historiques  ou  religieuses, 
avec  ou  sans  inscriptions  explicatives,  et  alors  on  dit  que  le  chapi- 
teau est  historié. 


29-; 


UKVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Normandie. 


Sainl-Denis  (caveau  royal). 


Fiij.  69. 


Fiij.  70. 


1!  est  symbolique  quand  les  figures,  avec  ou  sans  mélange  d'a- 
nimaux, annoncent  une  intention  symbolique,  soit  qu'on  ait  réussi 
ou  non  à  en  saisir  le  sens. 

Saint-Gaudens  {'-nmlé  de  Comminges). 


Enfin  la  composition  peut  être  purement  de  caprice,  quand  ces 
figures  sont  groupées  dans  une  simple  combinaison  de  fantaisie  ou 
d'ornementation. 

Toutes  les  fois  que  des  démons  se  rencontreront  parmi  ces  per- 
sonnages, on  devra  indiquer  s'ils  sont  figurés  avec  des  masques 
sur  le  visage  ou  d'autres  parties  du  corps;  sous  la  forme  de  Pans, 
avec  un  visage  humain  barbu,  des  cornes  et  des  pieds  de  bouc  ;  ou 
enfin  sous  une  forme  purement  animale  ou  monstrueuse. 

Dans  les  églises  romanes,  les  personnages  ou  les  groupes  sont 
souvent  destinés,  surtout  à  l'extérieur,  à  montrer  les  vices  et  les 
crimes  dans  toute  la  difformité  de  leur  physionomie  et  de  leurs 
actes,  ou  bien  déjà  soumis  aux  châtiments  que  leur  infligeait  la 
theodicée  bizarre  et  raffinée  du  Moyen-Age.  Lors  même  que  ces 
figures  offensent  la  pudeur,  on  y  reconnaît,  sinon  toujours  une  ni- 
tention  sérieuse  et  morale,  au  moins  ordinairement  l'absence  de 
cet  esprit  hostile  contre  les  ministres  du  culte,  dont  l'affaiblisse- 
ment du  sentiment  religieux  amena  si  souvent  la  manifestation, 
quelques  siècles  plus  tard,  dans  la  décoration  des  églises. 

Quand  l'ornement  des  chapiteaux  appartient  au  règne  animal, 
il  faut  distingiier  soigneusement  si  les  animaux  représentés  sont 
indigènes,  exotiques,  monstrueux  ou  fantastiques.  Dans  les  deux 
premiers  cas,  on  devra  citer  les  espèces  toutes  les  fois  qu'elles 
pourront  être  reconnues  avec  quelque  certitude.  Dans  le  troisième, 
on  devra  également  signaler  celles  qui  seront  entrées  dans  la  com- 
position des  monstres,  lorsqu'elles  seront  suffisamment  caractéri- 
sées. Les  animaux  exotiques  sont  ordinairement  empruntés  à  l'O- 
rient, et  il  est  rare  que  les  animaux  fantastiques  ne  proviennent 
pas  aussi  de  quelque  tradition  mythologique,  superstitieuse  ou 
fabuleuse  de  l'Orient. 


Quelquefois  la  corbeille  ou  même  le  chapiteau  entier  sont  i-em- 
placés  par  une  figure  d'homme  ou  d'animal,  supportant  le  tailloir, 
l'archivolte  ou  l'imposte. 


Fig.  72. 

Les  objets  appartenant  au  règne  végétal  qui  figurent  le  plus 
souvent  sur  les  chapiteaux,  sont  les  feuilles,  les  fleurs  et  les  fruits. 
Les  premières  feuilles  qu'on  y  rencontre  sont  la  feuille  d'eau  imi- 
tée de  l'antique  ; 


^ 


Fi;/.  73. 


Fùj.  -*. 


puis  les  palmettes,  Iîj  feuille  bordée  de  perles,  et  d'autres  types  ap- 
partenant soit  à  la  flore,  soit  à  la  décoration  orientale. 


Saint-Denis. 


Fig.  75. 

C'est  au  XIII»"  siècle  que  commence  à  s'y  introduire  l'imitation 
des  feuilles  indigènes.  Les  premières  en  date  sont  souvent  digitees, 
palmées  ou  ternées  ;  on  reconnaît  celles  de  lierre  (Fij.  76),  de  vigne 


Fig.  76. 


299 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS 

Notre-Dame-de-Parit. 


300 


Fig.  77. 


vierge  [Fig.  7  7),  de  vigne  [Fig.  78),  de  quintefeuille  [Fig.  79),  de  né- 
iiupliar,  de  bouton  d'or  [ranunculus  acris],  de  chêne  {Fig.  80),  de 


Fig.  78. 


Sainte-Chapelle. 


Sainte-ChaprlU. 


Fig.  79. 


Fig.  80. 


fraisier,  de  roseaux  ;  puis  les  formes  incisées,  iaciniées,  lyrées,  run- 
cinées,  lobées,  sinuées,  frisées,  pinnatifidcs;  la  mauve  frisée,  le  chou 


Cluny. 


F,g    81. 

[Fig.  81),  le  chardon,  le  houx,  la  chicorée.  Ici  encore  on  devra  si- 
gnaler toutes  les  espèces  que  l'on  pourra  distinguer  avec  quelque 
eerlitude,  et  toutes  les  formes  que  la  nomenclature  de  la  botanique 
permettra  d'indiquer  avec  précision.  Les  observateurs  étrangers  à 
l'étude  de  l'histoire  naturelle  pourront  consulter  à  ce  sujet  quel- 
([w  médecin  ou  quelque  pharmacien  du  lieu. 

Un  chapiteau  très-gracieux,  qui  se  rencontre  souvent  dans  le 
^idi  de  la  France,  consiste  en  une  longue  feuille  repliée  à  plu- 
sieurs reprises  en  boule  sur  elle-même. 

Parmi  les  fleurs,  nous  citerons  la  rose,  employée  avec  prédilec- 
tion dans  les  églises  placées  sous  l'invocation  de  la  Vierge  ; 


fig.  82. 


Notre-Dame-âe-PaTi$. 


F'U- 


parmi  les  fruits,  les  raisins  et  la  pomme  de  pin  ;  parmi  les  objet.s 
empruntés  à  la  toilette,  les  perles  et  les  godrons. 

Le  chapiteau  de  petite  dimension  conserve  ordinairement  ses 
quatre  cornes  très-visibles  jusqu'à  la  fin  du  XIII*  siècle;  il  devient 


Fig.  8t. 

au  XIV*  infuiidibuliforme  (en  entonnoir),  orné  de  deux  rangs  de 
feuilles,  dont  l'inférieur  se  détache  quelquefois  au  point  de  le  faire 
paraître  double  ;  nu  XV^',  il  raccourcit  de  plus  en  plus  jus(iu'a  ce 
qu'il  s'efface  complètement,  et  puis  soit  remplacé  au  XVI<-  par  le 
retour  aux  types  classiques. 

La  colonne  et  le  chapiteau  de  grande  dimension  ne  suivent  pas 
exactement  les  mêmes  phases.  Après  s'être  montrés  au  XI*  siècle 
avec  une  corbeille  chargée  de  quelques  fleurons  simples  et  d'une 
exécution  pesante,  ils  présentent  au  XII*,  sinon  une  grande  pureté 
de  formes  et  de  proportions,  au  moins  fort  souvent  un  goût  exquis 
dans  le  choix  et  l'exécution  de  l'ornementation  de  la  corbeille. 
Dès  cette  époque  on  les  trouve  souvent  employés  dans  une  portion 
de  l'église  pour  faire  contraste  avec  celle  qui  porte  sur  des  piliers 
composés.  Au  Xlll*  siècle  il  y  a  déjà  un  déclin  sensible  dans  la  dé- 
coration de  In  corbeille,  le  plus  souvent  cylindrique,  et  hérissée  de  ces 
développements  végétaux  en  crosse  auxquels  on  a  abusivement 
donné  jusqu'ici  le  nom  de  crochet. 

Saint-Denis 


Fig   85. 


301 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


302 


Au  XIV"",  elle  raccourcit  et  présente  deux  étages  de  feuilles  fri- 
sées sous  un  tailloir  qui  a  passé  de  la  forme  carrée  à  l'octogone. 
Au  XV«,  ce  tailloir  s'arrondit  sur  une  corbeille  de  plus  en  plus  ché- 
tive  et  méconnaissable,  jusqu'à  ce  que  l'une  et  l'autre  finissent  par 
disparaître  entièrement. 

Le  tailloir  ne  doit  pas  être  examiné  avec  moins  de  soin  que  la 
corbeille.  A  ce  que  nous  venons  de  dire  des  diverses  formes  succes- 
sivement imprimées  à  son  contour,  nous  devons  ajouter  qu'avant 
l'époque  où  il  affecte  la  forme  carrée,  ce  contour  se  compose  de 
(juatre  faces  concaves,  soit  que  la  concavité  résulte  d'une  courbe 
DU  de  lignes  di'oites  brisées. 


Fig.  86. 

Il- sera  indispensable  de  tenir  compte  de  sa  proportion,  du  profil 
vertical  ou  en  retraite  de  sa  tranche,  des  diverses  pièces  dont  il  est 
quelquefois  formé,  des  inscriptions  qu'il  peut  porter,  et  enfin  de 
son  ornementation,  souvent  assez  compliquée. 

Dans  les  combinaisons  que  les  colonnes  présentent  deux  à  deux, 
elles  peuvent  être  doublées  (l'une  derrière  l'autre),  accouplées 
(placées  de  front)  ou  en  retraite  (diagonalement  l'une  par  rapport  à 
l'autre). 


J 


'^'    -     fev 


Figr.  87. 

Quelquefois  ces  groupes  de  colonnes  supportent  en  commun  un 
véritable  entablement. 

L  Amortissement.  L'amortissement  peut  être  rectiligne  ou  cur- 
viligne. 

L'amortissement  rectiligne  peut  être  en  mitre  [Fig.  88  et  89)  ou 
en  encorbellement  (/^«j.  90,  91). 


Fig.  88. 


Fig.  89. 
Sainte-Marie  de  Toscanella. 


Fig.  90. 


Fig.  91. 


L'amortissement  curviligne  est,  comme  nous  l'avons  dit,  l'ar- 
cade. 

IL  Arcade.  L'arcade  peut  être  simple  ou  composée.  Dans  ce 
dernier  cas,  elle  est  ordinairement  trilobée  (formée  de  trois 
lobes  ou  divisions  distinctes);  elle  peut  encore  être  complète  ou 
incomplète,  c'est-à-dire  dépourvue  de  tout  ou  partie  de  l'un  de  ses 
côtés.  L'arcade  incomplète  se  rencontre  surtout  dans  les  collaté- 
raux et  les  arcs-boutants  ;  elle  prend  le  nom  d'arc  rampant. 


^ 


Fig.  92. 

L'arcade  romane  est  celle  qui  est  engendrée  par  un  seul  arc  de 
cercle;  l'arcade  gothique  résulte  de  deux  arcs  au  moins,  formant 
un  angle  à  leur  sommet. 

On  doit  distinguer  quatre  espèces  d'arcades  simples  appartenant 
à  l'architecture  romane,  savoir  :  1°  l'arcade  romane  surbaissée, 
formée  d'un  arc  moindre  que  le  demi-cercle  ; 


Sainte-Marie  de  Toscanella. 


Fig.  93. 


2°  l'arcade  semi-circulaire  ou  à  plein  cintre,  dont  le  nom  in- 
dique suffisamment  la  forme,  et  qui  est  le  type  habituel  dans  lar- 
chitecture  qu'elle  caractérise  ; 


.     Fig.  9«. 

3°  l'arcade  romane  en  fer  à  cheval,  formée  d'un  arc  dont  la  cour- 
bure se  prolonge  au  delà  du  demi-cercle  ; 


•* 


303 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS 
Saint-Germain-des-Prés. 


304 


Fi  g.  95. 


Fi  g.  9G. 


4°  l'arcade  romane  surhaussée ,  formée  d'un  arc  semi-circulaire , 
dont  les  c6tés  se  prolongent  parallèlement  au-dessous  de  son 
centre  ; 


Fiy.  97. 


Fig.  98 


Fig.  99. 

et  enfin,  une  seule  espèce  d'arcade  composée,  savoir  l'arcade  trilo- 
bée romane. 


Fig.  100. 

Quelquefois  les  deux  premières  de  ces  arcades ,  et  la  troisième  , 
qui  est  d'origine  byzantine,  sont  employées  concurremment  dès 
le  XI"  siècle  ;  la  quatrième  appartient  plus  particulièrement  au  XII^, 
et  se  rencontre  surtout  dans  les  chevets  et  autres  portions  de  l'é- 
glise où  les  supports  sont  accidentellement  rapprochés  ;  la  cin- 
quième est  aussi  ancienne  que  les  trois  premières. 

L'arcade  gothique  simple  peut  présenter  jusqu'à  sept  formes 
différentes,  dont  les  cinq  premières  existent  dès  le  XII'  siècle,  et 
les  deux  dernières  au  XV'  seulement. 


La  première  de  toutes  en  date  offre  ce  qu'on  peut  appeler  un 
plein-cintre  brisé  :  c'est  l'arcade  gothi<|ue  évasée,  dont  les  arcs  ont 
leurs  centres  placés  en  dedans  de  son  contour,  et  quelquefois  si 
près  l'un  de  l'autre,  qu'il  faut  l'examiner  avec  beaucoup  d'atten- 
tion pour  apercevoir  la  brisure  presque  insensible  qui  la  distingue 
du  plein-crntre  roman. 


/ 


--..^C. 


F'g.  101 


F-g    tO-2. 

Immédiatement  après  on  trouve  l'arcade  gothique  aiguë,  dont 
les  arcs  ont  leurs  centres  en  dehors  de  son  contour; 


Fig.  103 


Fig.  10t. 


puis  l'arcade  à  tiers-point,  dont  les  centres,  placés  à  ses  deux  ex- 
trémités inférieures,  forment  un  triangle  équilatéral  avec  le  point 
d'intersection  ; 


Fig.  105. 


Fig.   KG 


l'arcade  lancéolée,  foimée  de  deux  arcs,  dont  la  courbure  se  pro- 
longe jusqu'au-dessous  de  la  ligne  des  centres  ; 


305 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


906 


Fig.  107. 


Fig.  108. 


et,  enfin,  l'arcade  gothique  surhaussée,  dont  les  arcs  dépassent , 
comme  ceux  de  la  précédente,  la  ligne  des  centres,  mais  en  pre- 
nant une  direction  parallèle. 


Fig.  109. 


Les  deux  formes  particulières  au  XV«  siècle  sont  :  l'arcade  go- 
thique prolongée,  dont  les  arcs  s'étendent  aussi  au  delà  de  la  ligne 
des  centres,  mais  en  prenant  une  courbe  différente  et  beaucoup 
plus  longue;  et  l'arcade  gothique  surbaissée,  dont  les  arcs  ne  des- 
cendent pas  jusqu'à  la  ligne  des  centres. 


Fig.  110. 


L'arcade  trilobée  quitte  en  même  temps  que  l'arcade  simple , 
c'est-à-dire  au  Xlh  siècle,  la  courbe  semi-circulaire,  pour  prendre 
la  courbe  gothique.  On  la  trouve  souvent  inscrite  dans  une  ar- 
cade romane;  puis,  plus  tard,  dans  une  arcade  gothique;  puis, 
enfin,  contournée  et  dénaturée  dans  les  lignes  flamboyantes  du 
XVe  siècle. 

C'est  à  une  époque  postérieure  au  XII"  siècle  que  s'introduit  l'ar- 
cade à  contre-courbure,  formée  de  deux  arcs  convexes  placés  au- 
dessous  de  la  ligne  des  centres; 


Fig.  m. 


puis  l'arcade  en  talon,  formée  de  quatre  arcs,  dont  les  deux  supé- 
rieurs sont  à  contre-courbure  comme  les  précédents,  et  les  infé- 
rieurs à  courbure  ordinaire  ; 


^- 


Fig.  112. 


et  l'arcade  en  doucine,  formée  pareillement  de  quatre  arcs,  mais 
dont  les  supérieurs  sont  au  contraire  concaves,  à  sommet  brisé  ou 
arrondi,  et  les  inférieurs  convexes.  Ces  deux  dernières  formes  n'ont 
été  employées  en  grand  qu'au  XV'  siècle. 


Ftg.  114. 

Il  en  est  de  même  de  l'arcade  en  anse  de  panier,  formée  d'un  arc 
très-surbaissé,  flanqué  d'arcs  d'un  rayon  beaucoup  plus  court  à 
ses  deux  extrémités,  et  qui,  dans  les  constructions  supérieures  au 
sol,  ne  parut  gtière  avant  cette  époque. 


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* 

Fig.  115. 

T.  V. 


30 


307 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 

Place  des  Trois-Couronne$  {Paris).  ,  Clocher  d'Arnay  {Lyon). 


30^ 


Fig.  116. 


Il  ne  faut  pas  la  confondre  avec  la  baie  rectangulaire  ou  carrée  à 
angles  arrondis  en  arc,  qui  n'en  diffère  qu'en  ce  point,  que  ses  arcs 
latéraux  sont  réunis  par  un  linteau  ou  plate-bande  rectiligne,  au 
lieu  de  l'être  par  un  arc  surbaissé. 


Fig.  117. 


Fig.  118. 


L'arcade  en  anse  de  panier  normale  offre  pour  courbe  généra- 
trice l'ellipse  prise  dans  le  sens  de  son  grand  diamètre. 

A  partir  de  la  Renaissance,  l'arcade  est  toujours  ou  surbaissée, 
ou  semi-circulaire,  ou  semi-elliptique. 

Les  claveaux  de  l'arcade  peuvent  présenter,  soit  une  alternance 
de  couleurs,  soit  une  alternance  de  saillie  ; 


Fig.  120. 


Fig.  121. 


leur  coupe,  leur  combinaison,  l'épaisseur  et  le  profil  de  leurs  joints 
sont  encore  dignes  d'examen.  Dans  certaines  contrées  on  les  trouve 
souvent  disposés  sur  deux  rangs  engrenés;  leur  intrados  peut  être 
découpé  plus  ou  moins  profondément,  soit  en  dents  de  scie  aiguës 
ou  mousses , 

Angltlerr». 


Fig    122. 


soit  en  lobes  arrondis,  ou  en  contre-lobes. 


Sainte-Marie  de  Toseanella. 


Fig.  123. 


Fig.  121. 


Au  XVe  siècle,  cet  intrados  se  prolonge  en  légères  coutre-arcj»- 
tures  découpées  a  jour. 

Château  de  Pierrefonds. 


Fig.  119. 


Fig.  1-25. 


309 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


3t» 


D'abord  simple  et  plat  dans  l'arcade  gothique  comme  dans  l'ar- 
cade romane,  il  se  décore,  soit  d'un  l'essaut,  soit  d'un  tore  ou  bou- 
din ;  celui-ci  se  subdivise  ensuite  en  plusieurs  cordons  ou  nervures 
ordinairement  placés  en  retraite,  d'abord  toujours  saillants,  puis 
l)ientôt  poussés  en  creux  en  même  temps  qu'en  relief,  à  mesure  que 
le  support  se  complique  lui-même. 


FiiJ.  126. 


Fig.  127. 


Fig.  128. 


Ces  nervures  prennent  une  première  arête,  tantôt  mousse  et  tan- 
tôt aiguë,  puis  plusieurs;  enfin  ,  à  l'époque  de  la  suppression  du 
cliapiteau,  elles  descendent  jusqu'à  terre  ou  viennent  mourir  sur 
les  tambours  du  support. 

3.  Archivolte.  L'archivolte  est  la  décoration  dont  l'arcade  est 
bordée;  elle  peut  être  simple  ou  multiple,  et,  dans  ce  dernier  cas, 
les  archivoltes  secondaires  dont  elle  se  compose  sont  placées  en 
retraite  sur  un  pareil  nombre  de  cintres.  Il  faudra  remarquer  si 
cette  retraite  a  lieu  par  ressauts  réguliers  et  égaux,  pris  à  même  le 
plein  de  la  muraille. 

Sainic-Murie  de  Toscanella. 


H<j.  lii». 

L'archivolte  repose  toujours  sur  le  tailloir  du  chapiteau,  sur  une 
imposte,  sur  un  entablement  ou  sur  une  console. 

L'ornementation  de  l'archivolte  commence,  dans  le  Nord,  parle 
tore  simple  a  ,  tordu  b,  ondule  c,  guivré  d,  chevronné  e. 


Fig.  132. 


contre-chevronné  f  ou  rompu  o,  les  méandres  h,  les  fleurons  de- 


f  <f.  13». 


Fig.  133. 


tachés  I,  les  pointes  de  diamant  i,  les  têtes  de  clou  k,  les  ro- 


Fig.  137. 


Fig.  138. 


settes ,  les  becs  d'oiseaux ,  les  masques  et  autres  objets  toujours 


311 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


312 


Fig.  1*1.  fig.  1*2. 

en  relief,  dont  il  est  plus  facile  de  donner  l'idée,  au  moyen  d'un 
croquis,  que  de  les  assujettir  à  une  classification  complète  et 
méthodique.  Au  XIP  siècle,  arrivent  les  enroulements  a,  les  en- 
trelacs B, 

Aix  (Provence).  Aix  (Provenre). 


les  rinceaux,  les  dessins  courants,  les  feuillages,  que  le  XIII" 
porte  à  toute  leur  perfection  ;  c'est  lui  qui  commence  à  chercher 
les  modèles  de  ces  derniers  dans  la  flore  indigène,  aussi  bien  qu'à 
border  l'archivolte  de  trèfles  et  quatre-feuilles  en  creux,  et  a  orner 
son  contour  extérieur  de  crosses  et  autres  expansions  végétales. 
Au  XIV°,  l'archivolte  participe  de  la  sécheresse  et  de  l'uniformité 
de  l'ornementation  générale  aussi  bien  que  de  sa  nature  purement 
indigène.  Au  XV' siècle,  toutes  les  formes  végétales  riches  et  com- 
pliquées que  nous  avons  indiquées  ci-dessus,  à  l'article  du  chapi- 
teau, comme  caractérisant  cette  époque,  appartiennent  encore  da- 
vantage à  l'arcade,  et  viennent  se  développer  par  groupes  ou  isolé- 
ment dans  sa  masse,  dans  les  épanouissements  latéraux  dont  elle 
est  bordée , 


Saint-Denis. 


Saint-Gel  vais 
{Paris). 


Clermoiit 
[dessin  non  exécuté). 


Fig.  145. 


Fig.  146. 


Fig.  147. 


dans  le  fleuron  qui  la  couronne,  et,  enfin,  dans  les  pignons  plus 
ou  moins  aigus  et  flamboyants  qui  la  circonscrivent,  jusqu'à  ce 
que  la  Renaissance  vienne  proscrire  tout  ce  luxe  de  végétation 
pour  y  substituer  les  moulures  empruntées  à  l'architecture  an- 
tique. 

D.  On  n'observe  de  véritable  entablement,  au  Moyen-Age,  que 
dans  ces  monuments  du  Midi  de  la  France  dont  les  constructeurs 
n'ont  jamais  entièrement  perdu  le  souvenir  des  types  classiques  ; 
encore  la  mauvaise  proportion  des  profils  et  l'oubli  de  quelque 
partie  importante  trahissent-ils  toujours  le  peu  de  savoir  et  d'habi- 
leté de  l'imitateur. 

Cathédralt  d'Avignon. 


Fig.  148. 

Nous  ne  pensons  pas  que  les  saillies  correspondantes  du  sommet 
de  la  muraille,  dans  les  édifices  romans  et  gothiques,  puissent 
être  sans  inconvénient  réunies  sous  le  même  nom,  et  nous  préfé- 
rons les  désigner  sous  celui  de  couronnement.  Le  plus  ancien  de 
ces  couronnements  consiste  ordinairement  en  une  corniche  plate 
ou  arrondie,  souvent  même  richement  décorée,  supportée  par  des 
modillons  d'une  forme  particulière,  représentant  l'extrémité  sail- 
lante des  solives  du  plafond  de  la  basilique  primitive. 

Sainte-Marie  de  Toeeanella. 


iAiXtJLUJLtJUUkJL  J  t 


Fig.  119. 

On  a  donné  le  nom  de  corheaujc  à  ces  supports  souvent  carrés 
ou  rectangulaires,  et  se  terminant  par  une  partie  ornée  qui  offre 
tantôt  des  têtes  ou  des  figures  complètes  d'hommes  ou  d'animaux, 
tantôt  la  représentation  des  objets  les  plus  divers  et  les  plus  bi- 
zarres, quelquefois  même  les  plus  inconvenants.  Ordinairement 
ces  corbeaux,  en  s'éloignant  de  leur  type  parallélipipède  primitif, 
s' évident  à  leur  partie  inférieure  par  une  échancrure  plus  ou  moins 
caractérisée,  plus  ou  moins  heureusement  motivée,  de  manière  a 
se  rapprocher  plus  complètement  de  la  forme  du  modillon  ou  de 
celle  de  la  console. 


Fig.  150. 


313 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


31'» 


Quelquefois,  et  surtout  dans  les  églises  de  la  Bourgogne  et  de  la 
Champagne,  on  remarque  qu'ils  sont  amincis  en  dépouille  vers 
leur  extrémité. 

L'ornementation  des  corbeaux,  souvent  très-variée,  devra  être 
décrite  avec  soin  aussi  bien  que  celle  de  la  corniclie;  cette  der- 
nière perd  souvent  sa  direction  purement  horizontale  pour  se  dé- 
couper en  arcatures  d'abord  rectangulaires  ou  semi-circulaires  , 
puis  bientôt  pointues  ou  trilobées,  d'abord  sans  complication,  puis 
bientôt  avec  contre-arcatures  et  contre-corbeaux  ;  tantôt  tout  ce 
système  de  couronnement  repose  sur  de  légers  pieds-droits,  pi- 
lastres ou  ressauts;  tantôt  ces  supports  alternent  avec  des  cor- 
beaux. 


liords  du  Rliin. 


Ratitbonne. 


Ftg.  151. 


Fig.  152 


Quand  les  corbeaux  supporteront  le  couronnement  d'un  pignon 
ou  d'un  fronton,  il  faudra  examiner  s'ils  suivent  l'inclinaison  du 
rampant  ou  s'ils  sont  perpendiculaires  à  l'horizon. 

Le  plus  souvent  chaque  arcade  est  munie  d'un  corbeau;  quel- 
quefois, enfin,  les  arcades  pourvues  de  corbeaux  alternent  avec 
d'autres  qui  en  sont  dépourvues.  De  même  qu'on  trouve  ainsi  des 
arcades  sans  corbeaux,  on  peut  également  rencontrer,  soit  plu- 
sieurs rangs  superposés  de  corbeaux  et  demodillons,  soit  des  cor- 
beaux sans  arcades  et  même  sans  couronnement,  qu'il  faut  dis- 
tinguer de  ces  harpes  ou  pierres  d'attente  destinées  à  former 
liaison  avec  une  continuation  postérieure  de  la  muraille,  aussi 
bien  que  d'autres  pierres  saillantes  engagées  dans  la  maçonnerie  , 
et  de  la  destination  desquelles  il  est  quelquefois  fort  difficile  de 
rendre  compte. 

Au-dessous  du  couronnement  règne,  dans  certains  édifices,  un 
ornement  horizontal  tenant  lieu  d'architrave;  ailleurs  des  briqnes, 
des  incrustations,  des  inscriptions,  et,  au  XIIP  siècle,  des  trèfles  ou 
quatre-feuilles  en  creux 

yormandie. 


53  S3 


Fig.  153 


annonçant  une  intention  de  frise.  Enfin ,  à  ces  divers  couronne- 
ments succèdent,  au  XIV"  siècle,  un  bandeau  semé  de  feuilles  in- 
digènes ; 


I^  Ménil-Aubry 


tiy.  lui. 


au  XV*,  la  guirlande  de  l'époque  ; 


Le  Ulénit-A  ubnj . 


liy.  155. 

au  XVI',  les  imitations  plus  ou  moins  pures,  plus  ou  moins  heu- 
reuses de  l'entablement  antique. 

Tombeau  de  Brezé  (Rouen). 


T^ 


Fig.  lâfi. 

Il  existe  peu  de  corbeaux  dans  les  couronnements  de  l'Est  et  du 
Midi  de  la  France;  le  plus  souvent  ils  y  sont  remplacés  par  de 
petits  modillons  supportant  de  légères  arcatures  de  très-peu  de 
relief;  ce  couronnement  suit  la  ligne  du  toit,  même  le  loug  des 
pignons;  il  doit  son  origine  à  l'imitation  d'arcatures  de  briques 
sans  saillies ,  surmontées  d'un  massif  d'autres  briques  disposées 
en  opus  spicatum  ou  arête  de  hareng,  qui  forment  le  sommet 
de  la  muraille  dans  quelques  constructions  romaines  des  bords  du 
Rhin. 


Bords  du  Rhin. 


Bords  du  Rhin 


Fig.  157. 


(La  tuiu  au  prochain  numéro. 


315 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS, 


3te 


DE  L'HUMIDITÉ  DANS  LES  CONSTRUCTIONS 

ET    DES    MOYENS    DE    LA    PRÉVEMK    ET    d'y    REMÉDIER    {{) 
SUITE.  (  Voyez  col.  200  de  co  vr.lunie.) 


Imperfection  des  moyem  employée  pour  combattre  les  effet»  de 
l'humiditc. 

Oii  s'est  beaucoup  plus  appliqué  jusqu'à  présent  à  eoinballre  les  ef- 
feis  (le  l'Iiiiiiiidllc  ul  ses  iticofivciiicnts  il:ins  les  liàiimenis  déjà  cou- 
su iiiis,  qu'on  ne  s'est  occupé  (le  les  prévenir  dans  les  nouvelles  con- 
slruclions. 


(1)  Notre  collaborateur,  M.  H.  Jamilard,  qui  s'est  occupé  longtemps  et  tout 
pai  ticuliéiement  des  moyens  à  employer  pour  combattre  ou  prévenir  rhumiUit(ï 
dans  les  constructions,  nous  a  adressé  plusieurs  notes  et  observations  sur  le  ira- 
\a\\  de  M.  Léon  Vaudoyer.  Nos  lecteurs  nous  sauront  gré  de  les  publier  ici  cl 
lie  donner  ainsi  un  prix  nouveau  au  mémoire  déjà  remarquable  d'ailleurs  ((ue 
la  Société  d'Encouragement  a  jugé  digne  d'être  couronné.  Quelques  unes  de  ces 
notes  nous  sont  arrivées  trop  tard  pour  qu'elles  pussent  accompagner  la  pre- 
mière partie  parue  dans  notre  dernier  numéro  ;  nous  les  donnons  ci-dessous  avec 
renvois  aux  paragraphes  auxquels  elles  se  rapportent. 

—  Cvl.  209,  paragraphe  1".  u  Les  façades  exposées  à  l'ouest  et  au  nord,  dit 
l'auteur,  ont  à  subir  une  influence  funeste  de  la  température,  tandis  que  sur  les 
autres  celte  influence  s'exerce  bien  moins  sensiblement,  et  se  trouve  d'ailleurs 
combattue  par  l'action  salutaire  du  soleil.  » 

Il  est  cependant  des  pierres  qui  se  détériorent  plus  vite  au  Midi  qu'au  Nord, 
témoin  la  galerie  du  Louvre  du  côté  du  Sud,  citée  par  l'auteur  de  ce  mémoire 
dans  la  note  suivante,  et  les  collatéraux  du  Sud  de  Notre-Dame  de  Paris,  qui 
ont  été  réparés  de  ce  côté  et  qui  étaient  en  bon  étal  au  Nord.  Il  esl  présuniable 
pourtant  que  l'on  a  employé  la  même  pierre  sur  les  deux  facesà  des  niveaux  cor- 
rispondanis;  car  il  est  d'usage  de  constniire  en.semblc  les  deux  côtés  opposés 
d'une  même  travée  de  bâiiment.  Le  moellon  de  plâtre  aussi  se  détériore  vite 
an  Sud  cl  dure  longienips  au  Nord. 

—  Col.  270,  paragraphe  1"  de  la  note.  L'auteur  parle  d'une  sorle  d'arai- 
gnée qui  se  loge  dans  les  trous  des  pierres  et  contribue  à  leur  destruction. 

Une  autre  es|iéce  d'insectes  plus  funeste  encore,  de  la  famille  des  abeilles  ou 
(les  guêpes,  se  creuse  un  logement  dans  les  veines  tendres  de  certaines  pierres 
dans  les  murs  exposés  au  Sud. 

Ils  agrandissent  constamment  ces  cavités,  en  arrachant  avec  leurs  pinces  et 
leurs  pattes  l'espèce  de  sable  provenant  du  détritus  de  la  pierre,  et  finissent  par 
donner  à  la  surface  l'aspect  d'un  mur  vermiculé. 

Nous  ne  serions  pas  surpris  que  la  façade  du  Sud  de  la  galerie  du  Louvre 
dût  en  grande  partie  ses  dégradations  à  ces  insectes,  et  que  ceux-ci  ne  soient 
point  étrangers  à  la  décomposition  de  la  face  Sud  de  Notre-Dame. 


l'our  cornliiilire  les  ofTcls  de  l'iiumidité,  on  a  eu  généralement  re- 
cours à  des  enduils  ou  à  des  ciments  diis  hydrofuget,  qu'on  a  appli- 
qués sur  les  parois  intérieures  des  murs,  de  manière  à  substituer,  à 
l'aide  d'nn  nouvel  enduit  sup|>(>sé  imperméuble.  une  siirrace  sèclie  à 
une  surface  plus  ou  moins  liiiniide. 

Sans  entreprendre  d'analyser  la  coniposiiion  et  la  qualili;  des  diffé- 
rents ciments  employés  pour  cet  usage,  ni  prétendre  apftrécier  le  degré 
d'ellicacilé  qu'on  a  pu  leur  reconnaître,  nous  n'Iiésitons  pas  cependant 
à  dire  que  loutt-s  les  compositions  pinson  moins  savamment  combinées 
ne  sont  qu'un  remède  lr(''.s-iin|iarf:iit  el  presi|iie  nul.  en  ce  qu'il  ne  dé- 
truit pas  la  ('anse  preini(-rc  et  réelU;  dn  mal  qu'on  cberclio  :i  combattre. 
Or,  riinmidilé  esl  un  Iléaii  ayant  une  action  conliinic  qu'on  ne  peut  ar- 
rêter, et  qui  ne  peut  èlre  amoindri  ou  anéanti  que  par  l'action  de  l'air. 
Nous  ne  craignons  donc  pas  d'avancer  (|iie  tous  ces  prétendus  endinls 
liydroHiges  ne  sont  que  des  palliatifs  susceptibles  de  dissimider  plus  ou 
moins  longtemps  le  mal  sans  jamais  l'anéantir:  qu'ils  ont  même  souvent 
le  grave  inconvénient  de  l'augmenter,  en  diininnanl  les  cbances  d'ab- 
sorption, et  qu'au  lien  d'aider  au  dessccbemcnt  dés  constructions,  ils 
contribuent  à  y  maintenir  l'hiimidilé,  dont  les  causes  premières  sub- 
sisient  toujours  et  dont  les  effets  désastreux  continuent  à  exercer  une 
funeste  influence.  Il  faut  toutefois  faire  queUptes  rcscrves  en  ce  qui 
concerne  l'emploi  de  ces  divers  ciments,  selon  leur  espèce  et  leurs 
propriétés,  dans  certains  cas  particuliers.  Ces  réserves  sont  surtout  ap- 
plicables à  l'enduit  de  M.M.  Thrnard  cl  il'Arcet.  qui,  dans  les  données 
auxquelles  il  doit  satisfaire,  a  obtenu  un  succès  incontestable  et  déjà 
sanctionné  par  une  expérience  de  plusieurs  années 

t;'csl  donc  le  principe  même  dn  mal  qti'd  faut  considérer,  afin  de  le 
neutraliser  s'il  est  possible  :  car  c'est  en  l'arrêtant  dès  son  origine  que 
l'on  |tarvicndra  à  en  annuler  les  effets.  Les  causes  de  rhnmidité  ci  de 
sa  progression  étant  mainienani  connues,  il  sera  pins  facile  de  trouver 
les  moyens  de  la  prévenir  et  d(;  la  combattre  :  ces  moyens  doivent  tou- 
jours avoir  pour  but  d'empêcher  l'Iinmidité  de  pénétrer  dans  l'inlérieur 


—  Même  note  deux  paragraphes  plus  loin  : 

Le  procédé  dont  parle  l'auteur  sert  à  nettoyer  la  surface  de  la  pierre,  en  lui 
laissant  toutes  ses  taches  un  peu  moins  foncées  seulement  II  consiste  dans  rem- 
ploi d'une  eau  vraisemblablement  alcaline  ou  acidulée.  Cette  eau  ne  laisserait-elle 
pas  dans  la  surface  de  la  pierre  un  principe  délétère  qui  pourrait  se  développer 
plus  tard?  Il  serait  bon  de  laisser  passer  un  certain  nombre  d'années  sur  les 
objets  mis  en  ex|)éricnce,  avant  d'employer  ce  système  de  nettoyage  aux  monu- 
ments plus  précieux.  (Note  dé  M.  //.  J .) 

—  Col.  271,  paragraphe  S*.  ■•  La  distance!  laquelle  atteindra  cette  humidité 
ne  saurait  être  déterminée.  » 

Cela  dépend  de  la  nature  plus  ou  moins  hygrométrique  des  matériaux  em- 
ployés. Le  plltre,  par  exemple,  al)sorl>e  l'eau  avec  une  telle  rapidité,  que 
nous  avons  \\i  l'iiumidité  s'élever  de  1»  JO  en  quelques  Jours  dans  une  cloison 
légère  baignée  par  une  nappe  d'eau  de  O""  05  de  profondeur  seulement.  Aussi 
nous  ne  saurions  trop  recommander  de  proscrire  impitoyablement  le  pliire, 
même  comme  enduit,  dans  toutes  les  parties  d'un  édifice  quelconque,  à  partir  de 
la  plus  basse  fondation  jusqu'à  l"  00  au  moins  au-dessus  du  sol  intérieur.  Il 
fautfaire  l'enduit  intérieur  en  mortier  ou  ciment,  à  partir  du  sol  jusqu'à  la  hau- 
teur du  stylobate  ou  de  la  plinthe  en  bois,  si  c'est  dans  un  lieu  habité,  et  ne  Ja- 
mais faire  d'enduit  extérieur,  ni  même  de  jointoiement  en  plâtre,  au-dessous  de 
1.1  hauteur  d'appui,  excepté  les  cas  où  l'on  aurait  appliqué  une  feuille  de  plomb 
ou  une  couche  de  bitume  sur  l'arasement  des  murs  au  niveau  du  sol.  Mais  alors 
il  est  indispensable  que  le  plomb  ou  le  bitume  traverse  l'épaisseur  de  l'enduit 
lui-même  en  l'établissant  sur  une  légère  retraite  ménagée  exprès  dans  la  base 
(lu  mur,  et  excédant  l'épaisseur  de  l'enduit;  autrement  celui-ci  scr» irait  de  con- 
ducteur à  l'humidité  du  sol. 

Nous  avons  remarqué  que  les  cloisons  légères  en  plâtre  établies  sur  coulisses 
en  bois  posées  sur  le  carrelage  des  rez-de-chaussée  étaient  moins  sujettes  à  l'hu- 
midité que  celles  qui  sont  à  nu  sur  le  carreau  ou  sur  fondation.  Ce  préservatif 
sera  encore  plus  efficace  si  l'on  enduit  de  goudron  la  face  inférieure  de  la 
coulisse. 

[Notes  dtil.  II.  J.) 


317 


REVUE  DE  LAUCHlTECTURIv  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


318 


des  murs;  car,  (lès que  les  murs  en  seront  pénétrés,  il  est  ù  peu  près 
irnpossiiile  de  lu  détruire  [i). 

Moyens  de  prévenir  la  inconvcnienls  île  l'humidité  lors  de  l'exéculion 
des  conslructions. 

C'est  surtout  au  moment  où  l'on  entreprend  les  consiriiclions  «lu'il 
iniporle  de  prévenir  les  inconvénienls  de  l'Iuiniidilé,  car  les  moyens  :'i 
employer  ne  seraient  plus  applicables  après  les  travaux  terminés. 

(^(■s  moyens  variant  selon  les  matériaux  avec  lesipiels  on  construit, 
nous  indiquerons  successivement  ceux  qui  sont  applicables  aux  con- 
structions en  pierre,  en  moellon,  en  bri(iue,  en  pans  de  bois,  et  nous 
examinerons  les  dispositions  particulières  à  adopter,  quand  on  voudra 
on  non  l'aire  des  caves,  ou  utiliser  un  étage  soulerrain. 

L'alteulion  devra  se  porter  d'abord  sur  la  manière  d'élalilir  les  fon- 
dations, et,  à  cet  égard,  nous  recommanderons  un  béton  compose  de 


(1)  Il  n'pst  pas  impossible  de  détruire  les  inconvénienls  de  l'Iiuinidilé  des 
nun's,  niC'nie  dans  nn  ancien  baiinionl.  Le  moyen  (|ne  nous  allons  proposer  n'est 
pas  tellement  coûteux  (pi'on  ne  puisse  l'employer  dans  des  maisons  de  (juidcpic 
importance.  Nous  devons  exposer  préalablement  que  nous  avons  la  con\iction 
que  l'humidité  qui  su  nianifesie  dans  les  nuirs  des  rez-de-cliansséc  n'a  pas 
d'autre  origine  que  celle  du  sol  d'où  elle  remonte,  sauf  cpiekpies  cas  excep- 
tionnels où  les  nnns  sont  exposés  au  contact  d'un  courant  d'ean  on  de 
vapeur. 

Ce  moyen  consiste  &  ouvrir  avec  une  scie  à  dents  un  joint  entre  deux  assises, 
le  plus  près  possible  du  niveau  du  sol  du  rez-de-clianssée ,  mais  toujours  eu  con- 
irc-bas.  Après  avoir  prolongé  le  trait  de  scie  sur  une  longueur  de  1°>  00,  plus  un 
moins,  selon  que  l'état  du  mur  et  la  prudence  pennetti  ont  de  le  faire,  on  glissera 
dans  le  Joint  une  feuille  de  plond)  goudronnée  qui  remplira  le  joint  le  uneux 
|)ossible;  on  contimiera  l'opération  sons  l'étendue  de  tous  les  murs,  en  ména- 
geant toujours,  à  l'extrémité  par  laquelle  doit  se  coiuinuer  l'opération,  un  pas- 
sage suffisant  pour  la  scie,  afin  de  n'être  pas  obligé,  à  cha(|uc  station,  de  refaire 
un  trou  de  trépan  pour  l'introduction  de  la  scie.  Comme  il  restera  toujours  entre 
les  rives  des  deux  feuillos  de  plomb  ^oisines  un  joint  par  où  l'innnidité  pourrait 
encore  .s'introduire  lui  peu,  il  serait  bon  d'y  injecter  dn  goudron  minéral  chaud 
avec  une  ]>oinp3  foulante  à  main. 

t;e  procédé  n'est  pas  purement  conjectinal,  nous  eu  avojis  lait  l'application  à 
mie  cloison  légère  construite  sur  fondation  en  moellon  dans  un  sol  très-humide. 
L'humidité,  (pu  s'élevait  du  sol  à  une  hauteur  d'environ  75  cenlimèlres,  était 
telle  que  les  rideaux  d'un  lit  qui  y  était  adossé  s'y  pourrissaient.  Kous  conseil- 
lâmes au  propriétaire  dq  faire  scier  la  cloison  horizontalement  au  niveau  du  sol, 
et  d'y  passer  une  feuille  de  plomb;  il  le  fit,  et  l'humidité  n'a  ))lus  reparu 
depuis. 

Si  l'oiiératiou  que  nous  proposons  devait  se  faire  dans  un  édifice  important, 
nous  conseillerions  découler  dans  le  trait  de  sric  dti  plomb  fondu  jusqu'au  rouge, 
afin  que  chaque  coulée  se  soudât  à  la  rive  de  la  précédente.  Une  trijigle  de  fer 
plat  introduite  sur  la  rive  opposée  avant  la  coulée  du  plomb  et  qu'on  retirerait 
ensuite,  ménagerait  un  passage  à  l'introduction  de  lascie  poin'  la  section  suivante. 
On  n-.alerait  le  plomb  de  chaque  côté  quaiul  il  serait  refroidi.  Le  plomb  étant 
trop  mou.  luius  voudrions  qu'il  fût  allié  d'un  peu  d'élain.  On  poin-rait  aussi 
injecter  dans  le  joint  du  bitume  ciiand  an  moyen  d'une  pompe  foulante.  Nous 
voudrions  que  dans  ces  deux  derniers  cas  le  joint  fût  préalablement  éclianUé,  soit 
par  un  courant  d'air  chaud  qu'on  y  ferait  passer  au  moyeu  d'un  tirage  ou  d'une 
pression  artificiels,  soit  par  un  jet  de  gaz  à  l'instar  dj  celui  des  appareils  pour 
la  soudure  autogène. 

Nous  savons  que,  pour  chasser  complètement  l'humidité  d'un  mur  salpêtre, 
il  faudrait  en  expulser  d'abord  le  salpêtre  lui-même.  La  science  ne  nous  a  pas 
encore  doupé  ce  moyen;  mais  nous  ne  désespérons  pas  de  le  voir  surgir  nu  jour 
au  milieu  des  nombreuses  découvertes  de  la  chimie,  qui  en  produit  rarement  de 
plus  utiles. 

Une  fois  qu'on  aurait  intercepté  la  communication  de  la  partie  salpêtrée  avec 
le  réservoir  commun,  le  sol,  au  moyen  de  l'iiUerposition  d'une  lame  imperméable, 
on  pourrait  alors  attaquer  sérieusement  le  salpêtre  introduit  dans  le  nuu-.  Comme 
ce  sel  tend  toujours  à  sortir  au  dehors  du  mur  eu  forme  d'effiorescences  ou  de 
cristaux  ,  c'est  là  que  la  science  pourrait  le  saisir  après  qu'on  lui  aurait  coupé 
toute  communication  avec  sa  source.  (/Vote  de  il.  H.  J.) 


bon  mortier  de  meulière  concassée,  de  ponzzolaiie  et  de  silex  (I)  Ln 
lianleiir  de  c<;  lit  de  béton  sera  iiécess.ii rement  proportionnée  an  poids 
qu'il  devra  supporter;  celte  baiiteiir  une  fois  déterminée,  on  aura  soin 
d'araser  ce  massir  avec  nn  enduit  de  mortier  bydranjiqne;  cet  enduit 
étant  bien  pris,  on  cominencera  à  poser  les  pierres,  pour  les  joints  des- 
quelles on  emploiera  également  du  mortier  liydraulique  Quand  on  sera 
ainsi  p.'irverni  un  peu  au-dessous  du  niveau  (hi  s(d  intérieur  du  rez-dc- 
cliaiissée,  on  appliquera,  sur  le  lit  supérieur  A,  Pig.  1  (PI.  2),  de  la 
dernière  assise  et  dans  toute  releiidiie  du  mur,  urie  feuille  de  plomb 
irès-mince  (2);  on  bien,  après  avoir  préalablemenl  faitsécher cette  assis*-, 
on  étendra  sur  sa  surface  horizontale  un  enduit  bitumineux  aussi  mince 
(|ue  possible,  pourvu  (|u'il  pénètre  dans  In  pierie  cl  qu'il  en  bouche  tous 
les  pores  (3).  Cette  oper:jtion  teruMnée,on  conlinnera  la  pose  des  assises, 
mais  eu  ayant  soin  de  choisir  des  pierres  calcaires  de  Iwnne  i|iialilc; 
car,  quoique  toutes  les  pierres  soient  plus  ou  moins  hygrométiiqucs,  il 
faudia  toujours  employer  cellei  qui  le  seront  le  moins,  ou  plutôt  eii- 


(1)  Consulter,  pour  la  composition  des  bétons,  les  ouvrages  de  M.  ViciT,  et 
choisir  les  bétons  dont  les  qualités  particulières  ont  été  reconnues  par  l'expé- 
'■'«"<=«•  (A'ote  de  fauteur.) 

(2)  Voir  les  coL  162,  vol.  1",  481,  vol.  II,  et  23,  vol.  III  de  cette  Revue,  i 
propos  de  l'emploi  du  bitume,  comme  moyco  d'empêcbcr  l'humidité  de  mouler 
dans  les  murs.  Nous  pensons  que  le  bitume,  dont  l'emploi  peut  varier  de  beau- 
coup de  façons,  est  généralement  préférable  an  plomb,  qui  se  déchire  au  moin- 
dre tassement  et  livic  passage  à  l'humidité.  [.\ule  du  directeur.) 

(3)  Il  est  à  craindre  qu'une  feuille  de  plomb  très-mince  ne  soit  bientôt  détruite 
par  l'action  du  principe  caustique  de  la  chaux  (et  c'est  ce  qui  est  arrivé  à  un 
de  nos  confrères),  ou  qu'elle  ne  se  trouve  percée  à  jour  sou»  la  pression  du  mur 
par  les  moindres  aspérités  des  lits  de  la  pierre.  11  faut  que  celle  feuille  ail  au 
moin.-i  deux  unllimètres  d'épai-sseur,  cl,  connue  nous  l'aions  dit  dans  notre  pre- 
mière note,  nous  voudrions  qu'on  doiuiât  au  plomb  de  la  fermeté  par  un  alliage 
d'étain,  et  que  les  surlaces  fussent  goudronnées. 

On  reproche  au  plomb  interposé  entre  deux  assises  l'iiiconvéuienl  de  se  lami- 
ner sous  une  forte  charge,  et  l'on  a  attribué  directement  ce  phénomène  à  la 
mollesse  du  métal.  Nous  pensons  qu'on  doil  l'imputer  principalement  à  une 
autre  cause. 

La  résistance  du  ploud)  à  l'écrasement  est,  d'après  Navicr  {Bésisla-ice  des 
matériaux),  de  ICO  kilos  par  centimètre  carré,  ou  1  000  000  de  kilos  par  mètre 
carré.  Nous  avons  calculé  qu'un  mur  plein  eu  roche,  de  0»  30  d'épaisseur  cl  de 
20'"  00  de  hauteur,  chargé  de  six  planchers  plafonnés  et  carrelés,  cl  d'un  comble, 
exerçait  sur  sa  base,  et  par  cljatpie  mètre  linéaire  de  façade  (é<|uivalcnl  à  O-SO 
carré)  une  pression  de  30  040  kilos,  ce  qui  équivaut  Â  6  kilos  par  centimètre  carré; 
or,  6  :  100  ::  1  :  16.  666;  le  plomb  aura  donc  une  résistance  près  de  «lix-sept 
fois  supérieure  à  la  pression  d'un  pareil  mur,  cl  en  supposant  ce  mur  porté  par 
des  supports  isolés,  tels  que  des  piles  ou  des  jambes  étrièrcs  dont  la  section  liori- 
zontale  ne  serait  que  de  1/5  de  la  totalité,  le  plomb  aurait  encore  une  résistance 
plus  que  triple,  quoique  la  charge  fût  quintuple.  Enfin ,  une  feuille  de  plomb 
pourrait  porter,  sans  se  laminer,  un  mur  en  pierre  de  Uillc  dure  de  400  mètres 
de  haut.  Nous  avons  peu  de  clochers  qui  dépassent  le  quart  de  cette  hauteur. 
On  ne  peut  donc,  tout  en  reconnaissant  l'ciret  de  la  continuité  de  la  pression 
pendant  un  long  espace  de  temps.admeltre  que  le  laminage  observé  soit  le  ré- 
sultai de  celte  pres.sion. 

On  doil,  selon  nous,  attribuer  cet  inconvénient  à  la  dilaUtion.  Le  plomb  est 
le  plus  dilatable  des  métaux  solides,  et  il  est  si  mou,  qu'une  fois  dilaté  par  la 
chaleur,  il  éprouve  peu  de  retraite  quand  la  température  baisse.  Pour  peu  qu'il 
soit  gêné  dans  son  mouvement  de  contraction,  il  reste  pre.sque  au  point  ou  l'a 
porté  la  dilatation.  C'est  à  celte  propriété  qu'on  doit  les  plis  ((ni  se  font  si  fré- 
quemment aux  chéiieaux  en  plomb  exposés  au  soleil.  Or,  la  lame  de  plomb  pri- 
sonnière entre  deux  assises  de  pierre  ne  peut  se  dilater  verticalement  à  cause  de 
la  charge  qui  la  prcs.se  et  de  la  mollesse  du  métal  (car  il  faut  distinguer  ici  la 
force  d'inertie  par  laquelle  le  plomb  résiste  à  la  pression,  d'avec  la  force  vite 
qu'il  lui  faudrait  pour  soulever,  par  le  simple  effet  de  la  dilaution,  le  poids  qui 
l'accable).  Sou  expansion  ne  peut  donc  se  faire  que  dans  le  sens  horizouul;  les 
riviis  de  la  feuille  de  plomb  désafllcurcnt  les  parements  du  mur,  et  une  partie 
de  la  masse  se  refoule  sur  elle-même,  ce  qui  nous  est  démontré  par  le 
mat  âge. 

Ce  désaflleurement  se  fait  nécessairement  aux  dépens  de  l'épaisseur  de  la  lame. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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(Oie,  pour  celle  pariie  inférieure  des  hàiinienis  exposée  aux  iiilluences 
aliiiosplioriqiies,  celles  qui  sont  le  moins  snscepiibles  de  se  décompo- 
ser, snrionl  si  elles  ne  soni  garanties  par  anciin  moyen  particulier.  Il 
csl  à  remarquer  que  la  manière  doni  se  coniporieiil  les  pierres  dépend, 
pour  corlaincs  d'enlre  elles,  des  conditions  dans  lesquelles  elles  se 
tioiivenl  employées:  ainsi,  par  exemple,  telle  pierre  qui  se  conservera 
parfaiicnicnl,  placée  .i  une  certaine  lianleur  au-dessus  du  sol,  sera  au 
contraire  liès-pnMDplenieiil  délriiiie  si  elle  en  esl  rapprochée  (I).  La 
pierre  de  rile-Adani,  diie  de  l'Abbaye-du-Val,  celle  de  Sainl-Leu,  elc, 
sont  dans  te  cas.  I.a  pierre  de  Cliérence,  qui  csl  Irès-dnre  cl  peul  être 
soumise  à  une  forte  pression,  ne  se  décompose  jamais;  mais  elle  est 
cxlrêmemenl  poreuse,  cl  laisse  tamiser  l'eau  comine  un  filtre.  Les  mê- 
mes observations  s'appliquent  aux  mortiers,  dont  les  uns  sont  excel- 
lents quand  ils  sont  maintenus  dans  l'iinmidilé,  lainlis  qu'ils  seraient 
très-mauvais  exposés  à  l'air  ou  à  la  chaleur. 

L'interposition  d'une  lame  de  plomb  on  dune  substance  bitumineuse 
qui  a  déji)  été  employée  avec  succès  a  pour  but  d'arrêter  riiumidilé  que 
la  partie  inférieure  du  mur  pourra  recevoir  du  sol  ;  h  la  vérité,  le  lit  de 
béton,  que  nous  avons  recommandé  comme  base  du  mur,  laissera  dif- 
licilemcnl  pénéircr  riiumidilé  qui  pourrait  s'y  introduire  par  celle  voie; 
mais  il  importe  d'arréler  celle  à  laquelle  le  mur  esl  exposé  par  ses  deux 
parois.  Les  mêmes  précautions  devront  être  prises  pour  les  murs  on 
pans  de  bois  de  refend,  surlonl  s'il  n'y  a  pas  de  caves.  Quant  aux  murs 
délace,  ils  en  réclament  encore  d'aniros  pour  bsj:araniir  des  atteintes 
de  rimnddilé  atmosphérique  dont  ils  auiont  loujoiirs  plus  ou  moins  à 
sowllVir,  siflon  leur  exposition.  La  feuille  de  plomb,  qui  esl  efficace  pour 
condialue  cl  anèlir  l'Immidilé  provenant  du  s(d,  ne  peut  neutraliser 
les  effels  de  l'humidité  de  ratmos|)bère  :  en  elTct,  si  l'on  place  celle 
lenille  au  niveau  du  sol  extérieur,  toute  la  partie  inférieure  du  mur, 
au-dessus  de  ce  niveau,  restera  exposée  à  riiumidilé,  et  cette  humiilité 
gagnera  l'inlérieur.  Si  au  contraire  on  met  la  feuille  de  plomb  au-des- 
sus du  sol  extérieur,  et  qu'on  élève  d'auiaiil  le  niveau  du  sol  intérieur, 
la  partie  iiiféiiture  du  mur  restera  exposée  au  double  incoiivénieiit  de 
l'humidité  provenant  du  sol  et  de  celle  de  l'aimosplière,  par  conséquent 
à  toutes  les  chances  de  deslruclion  que  nous  avons  signalées.  Il  reste 
donc  un  point  essentiel  à  déterminer,  savoir,  de  préserver  le  pied  des 
murs  de  face  des  effcUsde  l'humidité  de  l'atmosphère,  à  quelque  niveau 
que  soit  établi  l'obstacle  destiné  à  arrêter  rhiimidiié  du  sol. 

On  peul  indiipier,  comine  un  excelleni  préservatif  contre  l'hiimiilité 
atmosphérique,  un  revêtemenl  de  dalles  de  pierre  appliqué  dans  le  lus 
des  murs  de  face;  ces  dalles,  en  pierre  calcaire  de  bonne  qualité,  au- 
ront au  moins  un  mètre  de  hauteur,  et  plus  s'il  esl  possible;  elles  de- 
vront être  posées  pierre  à  pierre  :  et  il  esl  indispensable  de  ménager  un 
petit  intervalle  pour  la  circulation  de  l'air  enire  les  dalles  de  revèie- 
ment  et  le  paremonl  du  mur  dans  lequel  elles  seront  agrafées.  Comine 
surcroît  de  précaution,  la  face  intérieure  des  dalles  serait  imprégnée 


Quand  la  température  baisse,  la  relraiie  ne  peul  se  faire  que  dans  le  sens  verlical, 
d'après  les  raisons  données  plus  haut,  et  toujours  aux  dépens  de  l'épaisseur;  et 
comme  celle  alternative  de  dilatation  et  de  retraite  a  lieu  continuellement  et 
autant  de  fois  qu'il  se  fait  de  grandes  variations  dans  la  température  atmosphé- 
rique, il  s'ensuit  que  l'épaisseur  de  la  lame  de  plomb,  diniinuanl  toujours  on 
se  répandant  latéralement,  finit  par  être  réduite  i>  zéro,  ou  à  peu  près.  Voilà 
pourquoi  nous  conseillons  de  donner  de  la  fermelé  au  plomb  par  un  alliage  d'é- 
tain,  de  zinc  ou  de  régule,  combiné  toutefois  de  ni.nniérc  à  lai.sscr  au  métal  une 
certaine  élasticité,  sans  le  rendre  plus  oxydable.  Nous  préférerions  l'étain  pur, 
mais  il  csl  un  peu  clier.  Le  mètre  carré  de  0"  002  d'épaisseur  pèse  15  Jjilos  et 
loùterail  30  fr.,  tandis  que  le  plomb  de  O^OOa  pèse  23  kilos  et  coûte  16  fr.  10 
centimes.  (.Vo(e  de  M.  IT.  J.) 

(1)  La  position  plus  ou  moins  élevée  d'une  pierre  au-dessus  du  sol  n'entre 
dlreclement  pour  rien  dans  ce  fait.  Il  suffit  que  la  pierre  gelive  soit  imprégnée 
d'humidité  pour  se  détruire  à  la  gelée  si  elle  y  est  sensible;  mais,  quelle  que 
soit  la  gélivité  d'une  pierre,  jamais  elle  ne  sera  attaquée  par  la  gelée  la  plus  in- 
tense si  elle  est  sèche.  (lYo/c  de  M.  II.  J .) 


d'un  enduit  bitumineux,  et  leur  partie  supérieure  couverte  d'une  assise 
de  pierre  dont  la  taille  ou  le  profil  serait  tel  que  l'eau  ne  pût  y  sé- 
journer. Il  esl  évident  qu'avec  ces  précautions,  ni  la  pluie  baltaiii  con- 
tre Je  mur,  ni  celle  qui  rejaillit  sur  le  sol.  ni  l'eau  qui  descend  de  I» 
partie  supérieure,  ne  pourront  pénétrer  le  mur  proprement  dit,  et  que, 
si  les  dalles  de  revêtement  se  trouvent  momentanémeiil  humides,  elles 
sécheront  irès-promplemenl  et  ne  communiqueront  point  leur  humidité 
passagère  au  corps  du  mur  dont  elles  sont  isolées  (1).  On  obtiendra, 
en  outre,  par  ce  système,  l'avantage  d'éviter,  dans  la  partie  Inférieure 
des  bâtiments,  les  joints  horizontaux,  ceux  dans  lesquels  un  emploie  du 
mortier,  eiqiiisonl les  plus  sujelsàsedélériorer(2).  (Voyez  F/j.l,  PL  18.) 
Lorsqu'aux  précautions  que  nous  venons  de  recommander  on  aura 
ajouté  soit  un  revers  de  pavé  bien  fait,  sur  ciment,  soit,  ce  qui  esl  pré- 
férable, un  enduit  d'asphalte  de  A'^fÀi  de  large,  avec  une  pente  suf- 
fisante, tout  le  long  du  pied  du  bâtiment,  on  aura  complété  les  moyens 
les  plus  simples  et  les  plus  indispensables  pour  prévenir  les  inconvé- 
nients de  riiumidilé  qui  peul  s'introduire  par  les  murs  dans  l'inlérieur 
des  bàiimenls.  Mais  le  système  de  revêtement,  qui  esl  d'une  exécution 
facile  lorsque  les  murs  de  face  sont  en  ligne  droite  et  sans  saillies  no- 
tables, rencontrerait  de  grandes  difliciillés  pour  des  façades  d'édifices 
dont  le  style  d'architecture  motiverait  un  grand  nombre  d'à varil-corps, 
d'arrière-corps,  de  parties  s;iillanles,  etc.,  comme  on  le  remarque  dans 
rintérieiir  de  la  cour  du  Louvre.  Dans  ce  cas,  ce  système  devra  être 
modifié,  et  même  quelquefois  abandonné;  il  faudra  alors  élever  sensi- 
blement le  niveau  du  sol  intérieur  au-dessus  du  sol  extérieur:  et,  pour 
suppléer  aux  bons  effets  du  revêtement,  ou  choisira  d'excellents  maté- 
riaux; il  sera  nécessaire  d'apporter  le  plus  grand  soin  dans  la  construc- 
tion, el  de  donner  aux  niurs  une  plus  forte  épaisseur  (5).  Un  moyen  à 


(1)  Ce  système  de  dallage  est  très-souvent  pratiqué  uniquement  dans  ce  der- 
nier but;  nous  désirons  qu'il  puisse  £lre  exécuté  de  manière!  obtenir  le  double 
résultat  que  nous  venons  d'indiquer.  Pour  cela,  il  suffirait  d'éviter,  ainsi  qu'on 
a  cuutRnie  de  le  faire,  de  couler  en  plâtre,  ou  même  en  mortier,  le  vide  qui 
reste  entre  les  dalles  et  le  mur;  car  la  circulation  de  l'air  entre  les  parties  ex- 
posées à  l'humidité  et  colles  qu'on  veut  préserver  sera  toujours  le  meilleur 
moyen  d'arriver  au  résultat  que  nous  proposons.  La  pierre  de  Cblteau-Landon, 
el,  à  sou  défaut,  le  liais,  doit  être  préféré  pour  cet  usage.  Le  soubassement  dés 
faces  latérales  de  l'église  de  Notrc-Dame-de-Lorettc  a  été  revêtu  de  dalles  de 
Châieau-Landon,  qui,  depuis  vingt  ans,  se  sont  maintenues  dans  un  état  de  con- 
servation parfaite.  (fiolt  dé  l'auteur.) 

(2)  Si  les  dalles  de  revêtement  sont  enduites  de  bitume  à  l'inlérieur,  il  est 
inutile  de  les  isoler  du  corps  du  mur,  car  cette  disposition  est  très-\icieuse, 
attendu  que  des  dalles  aussi  minces  ne  résisteraient  pas  à  un  faible  choc.  Les 
dalles  de  Notre-Daine-de-Lorette,  citées  dans  la  note  précédente,  ont  15  à  20 
cenliinèlres  d'épaisseur  et  ne  sont  point  isolées,  si  nous  a^ons  bonne  mémoire. 
Ellesont  vraiscinblalilemenlété  posées  pluscn  vue  derapparcll  que  comme  moyen 
hydrofugo  Au  surplus,  si  ces  dalles  ont  la  propriété  de  repousser  l'humidité, 
nous  ne  les  accepterons  pas  comme  un  exemple  de  bonne  coiistruciion.  Une 
partie  de  l'épaisseur  du  mur  est  portée  par  elles,  cl  pour  peu  que  les  deux 
ou  trois  assises  de  pierre  ordinaire  qui  forment  le  surplus  aient  des  joints  un  peu 
lâches  qui  se  contractent  sous  la  charge,  le  revêtement  peut  courir  quelques 
risques;  mieux  eût  valu  faire  l'épaisseur  entière  en  Château-Landon. 

Nous  ne  partageons  pas  l'opinion  de  notre  confrère  sur  les  revêlements  en 
dalles  minces  qui  se  posent  habituellement  au  bas  des  murs  en  moellons,  autant 
dans  le  but  d'empêcher  la  destruction  de  l'enduit  par  l'action  de  l'huniidité  ou 
du  choc  des  corps  étrangers,  que  pour  empêcher  l'humidilé  extérieure  de  péné- 
trer dans  l'inlérieur.  Ce  moyeu,  d'après  la  manière  vicieuse  de  poser  ces  dalles, 
produit  souvent  l'ofTet  contraire;  car  comme  elles  sont  trop  minces  en  général, 
et  que  c'est  à  peine  si  l'enduit  recouvre  une  petite  partie  de  leur  épaisseur,  il 
s'ensuit  que  les  eaux  pluviales  qui  coulent  du  haut  du  mur  s'introduisent  der- 
rière la  dalle.  Nous  avons  vu  plus  d'un  exemple  de  ce  fait. 

(Mole  de  M.  II.  J.) 

(3]  C'est  surtout  dans  de  semblables  conditions  qu'il  serait  i  désirer  qu'on 
pût  construire  à  pierre  sèche,  du  moins  dans  une  certaine  hauteur. 

Pour  se  convaincre  de  l'inlluence  qu'exercent,  sur  la  durée  des  édifices,  le 


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REVUE  DE  LARCHn  KCTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


l'aide  duquel  on  peut  obtenir  un  très-bon  résulial,  consiste  à  bien  chaus- 
ser la  constriiciion,  c'est-à-dire  à  élever  les  iriurs  de  face  sur  une  sorte 
de  soubassement  qui,  par  sa  hauteur  et  son  cnipaioniciit,  puisse  con- 
tribuer à  éloigner  du  pied  du  mur  les  chances  d'humidité.  Pour  rendre 
notre  idée  plus  sensible,  nous  citerons  comme  exemples  la  façade  de  la 
Monnaie,  sur  le  quai,  les  faces  latérales  de  l'édllice  du  quai  d'Orsay  et 
la  façade  du  grand  corps  de  bâtiment  de  l'école  des  Beaux-Arts;  la 
plupart  des  palais  d'Italie  sont  élevés  sur  des  soubassements  de  ce 
genre.  Il  serait  à  désirer  que  celte  espèce  de  banquette  fût  creuse  Inté- 
rieurement, afin  de  pouvoir  y  établir  une  circulation  d'air  :  dans  tous 
les  cas,  les  pierres  (|ui  la  recouvriront  devront  éire  bien  choisies  et 
avoir  une  penle  suffisante  pour  faciliter  l'écoulement  des  eaux  (1). 
(Voyez  \aFig.  2.) 


choix  (les  inalériaux  et  le  soin  apporta  dans  la  manière  de  conslruire,  nous  cile- 
roiis  l'aiicleu  Louvre,  qui  date  de  trois  cents  ans,  et  dont  les  soubassements, 
bien  qu'on  n'ait  pris  aucune  précanlion  parliculière,  sont  encore  dans  un  élat 
•  de  conservation  très-salisfaisant.  Il  paraît  qu'autrefois  on  se  préoccupait  da- 
vantage de  la  bonne  qualité  des  matériaux  :  nous  rappellerons  à  cette  occasion 
que  lorsque,  sous  Louis  XIV,  il  fut  question  d'achever  la  construction  du 
Louvre,  Colbcrt  chargea  une  commission  d'architectes  de  visiter  les  monuments 
de  Paris  et  des  environs,  afin  de  reconnaître  la  qualité  des  pierres  dont  ils 
étaient  bâtis,  le  plus  ou  le  moins  d'altération  (ju'elles  avaient  éprouvé,  et  les 
carrières  dont  elles  avaient  été  tiréos.  Le  rapport  de  cette  commission  existe  en 
manuscrit  à  la  Bibliothèque  Royale  (*).  Un  travail  analogue  a  été  ordonné  et 
exécuté  dernièrement  en  Angleterre,  pour  les  pierresqni  doivent  être  employées 
dans  la  construction  du  nouvel  édifice  destiné  au  Parlement;  ce  travail  a  été 
imprimé.  {\ote  de  l'auteur.) 

(1)  Selon  nous,  cette  banquette  pleine,  telle  qu'elle  est  disposée  dans  la  Fig.  2, 
doit  produire  l'effet  opposé  à  celui  qu'on  lui  attribue;  nous  le  démontrerons 
plus  bas. 

Notre  confrère  attribue  l'origine  de  l'humidité  des  rez-de-chaussée  ù  trois 
causes  :  1'  à  l'ascension  de  l'eau  des  terres  dans  le  corps  des  murs  et  dans  le 
sol  même  des  logements  par  la  capillarité  des  matériaux;  2"  au  rejaillissement 
des  eaux  pluviales  tombées  sur  le  sol  au  pied  des  murs,  et  a»  à  l'humidité  de  l'air 
ambiant. 

Nous  pensons  qu'il  faut  d'abord  écarter  la  troisième  cause,  car  si  l'air  am- 
biant peut  communiquer  l'humidité  dont  il  est  quelquefois  saturé  aux  murs  des 
rez-de-chaussée.,  il  la  coinmuniqiiornit  tout  aussi  bien  aux  murs  des  étages  su- 
périeurs, Â  nu  degré  décroissant  peut-être  à  mesure  qu'on  s'éloigne  du  .sol  des 
émanations  duquel  il  tire  son  liuniidité  ;  encore  faudrnil-il  supposer  aux  maté- 
riaux des  propriétés  absorbantes,  telles  que  celle  des  murs  salpêtres.  L'air 
ambiant  n'est  jamais  assez  constamment  himiide  pour  qu'une  phase  sèche  ne 
vienne  enlever  aux  murs  le  peu  d'humidité  que  leur  aurait  donnée  une  phase 
aqueuse.  Ce  n'est  guère  que  dans  les  cours  étroites  et  profondes  où  l'air  est 
stagnant,  dans  les  caves  et  les  souterrains,  que  l'air  salure  d'eau  peut  avoir  des 
effets  sensibles,  parceque  là  les  phases  humides  sont  plus  nombreuses  que  les 
phases  sèches,  ou,  plutôt,  sont  constantes. 

L'air  humide  (sauf  les  cas  de  présence  du  salpêtre)  contribue  plus  à  l'Iiumi- 
dité  des  murs  par  son  inaction,  c'est-à-dire  en  n'évaporant  pas  l'humidité  du 
•sol  à  mesure  qu'elle  s'élève  dans  les  murs,  que  par  son  action  directe  ,  en  l'y 
introduisant  lui-même.  Il  y  contribue  encore,  eu  ce  qu'étant  spécifiquement 
plus  léger  que  l'air  sec,  il  oppose  à  l'humidité  ascendante  une  pression  plus 
faible.  C'est  pour  ces  deux  cau.ses  que  nous  voyons,  principalement  pendant 
l'hiver,  l'humidité  s'élever  à  sou  maximum  de  liautenr  dans  la  base  des  murs, 
et  baisser  progressivement  à  mesure  que  l'air  de  l'été  devient  plus  chaud  et  plus 
sec;  l'auteur  le  dit  lui-même,  col.  271.  L'air  humide  est  donc,  d'après  ce  que 
nous  venons  de  dire,  un  agent  négatif  j)lutOt  que  positif. 

Quant 'à  la  banquette  à  laquelle  on  suppose  la  vertu  de  détourner  l'humidité 
provenant  des  éciaboussurcs  des  eaux  pluviales,  elle  nous  semble,  d'après 
la  figure,  produire  l'effet  contraire.  Elle  fa»orise  l'ascension  de  l'humidité  du 
sol  en  présentant  une  iilus  large  section  horizontale  aux  molécules  d'eau  ascen- 
dantes, et  elle  élève  plus  près  du  niveau  du  sol  intérieur  la  zone  frappée  par 
les  éclaboussures,  et  celles-ci  mouilleront  indubitablement  le  mur  au-dessus  do 

(•)  M.  Héricartde  Thury  en  donne  un  extrait  dans  sa  description  des  catacombes 
lie  Paris,  p,  t58.  (Noie  de  M.  H.  J.) 


Ces  précautions,  qui  entrainent  à  d'assez  fortes  dépenses,  ne  sont  ap- 
plicables qu'à  des  consiruciions  monumentales,  pour  la  conservation  et 
la  durée  desquelles  on  ne  doit  rien  négliger.  Aussi,  dans  les  cas  que 
nous  venons  de  supposer,  il  faudra  non-seulement  conserver  la  leuilli- 
de  plomb,  mais  peut-être  même  en  placer  à  deux  hauteurs  différentes, 
A  et  U;  de  plus,  il  conviendra  d'adopter,  pour  riiiiérieur  des  murs  du 
rez-de-chaussée,  un  système  de  revêtement  avec  isolement,  soit  en  mar- 
bre, soit  en  pierre,  soit  en  menuiserie,  selon  la  destination  de  celle 
partie  de  rédifice,  mais  toujours  dans  le  bnl  d'éviter  l'humidité  qui  pour- 
rait traverser  la  partie  inférieure  du  mur,  laquelle  ne  se  trouve  pas  ga- 
rantie à  l'extérieur  dune  manière  complète  (I).  Derrière  ces  revèle- 
mt-nts,  il  conviendra  aussi  de  hitumitier  les  parois  du  mur  (2).  (Voyez 
la  Fig.  2.) 


la  feuille  de  plomb.  Car,  en  définitive,  l'air  qui  circule  dans  le  vide  de  la  ban- 
quette n'est  autre  que  l'air  ambiant,  qui,  s'il  est  humide  sous  la  galerie  comme 
au  dehors,  ne  peut  être  d'aucune  utilité.  Mais  il  est  plus  humide  encore  .sous  la 
banquette,  puisqu'il  se  cliargc  en  outre  de  l'humidité  qui  s'cxbnlc  des  parois  de 
cette  banquette. 

Dans  la  figure  2  surtout,  il  vaudrait  mieux  supprimer  complètement  la 
banquette  creuse  ou  pleine,  ainsi  que  nous  l'indiquons  dans  la  Fig.  11.  Dans 
la  Fig.  2,  la  pluie  tombant  sur  la  banquette  rejaillit  àAO  ou  50  rcniimétres  sur  le 
pied  du  mur,  c'est-à-dire  évidemment  au-dessus  de  la  feuille  de  plumb/? placée 
dans  le  joint;  la  moulure  elle-même  en  reçoit  beaucoup  par  sa  position  saillante, 
et  la  feuille  de  plomb  est  impuissante  pour  la  repousser,  taudis  qu'en  suppri- 
mant la  banquette  et  laissant  la  feuille  de  plomb  à  la  hauteur  actuelle,  jamais 
les  éclaboussures  ne  l'atteindront.  Si  ces  banquettes  existent  à  plusieurs  pa- 
lais d'Italie,  pays  peu  accessible  à  l'humidité,  n'osKe  pas  plulOt  pour  éloigner 
les  dépôts  d'iumiondices  du  pied  des  murs,  ou  dans  un  but  décoratif,  ou  bleu 
pour  offrir  un  siège  aux  passants,  comme  à  l'arc  de  triomphe  de  l'Étoile,  que 
pour  garantir  ces  murs  des  eaux  pluviales?  Ne  perdons  pas  de  vue  que  ce  sont 
les  éclaboussures  de  la  pluie  ou  de  l'égout  des  toits,  rejaillissant  sur  le  sol,  qui 
mouillent  surtout  le  pied  des  murs,  plutôt  que  la  pluie  qui  fouette  sur  leur 
surface,  et  qui  peut  humecter  tout  aussi  bien  le  premier  étage.  Ne  perdons 
point  de  vue  que  trois  princijjcs  d'humidité  agissent  simultanément  à  la  base 
des  murs  en  temps  de  pluie  :  lo  l'humidité  du  !^ol  ;  2°  la  pluie  qui  tombe  obli- 
quement sur  le  socle;  3"  les  éclaboussures  tant  de  la  pluie  qui  tombe  directe- 
ment sur  le  sol  que  de  celle  qui  toml)e  de  l'égout  du  toiu 

Nijus  ne  saurions  donc  trop  recommander,  à  ce  propos,  l'usage  des  cbéoeaux, 
et  même  de  simples  gouttières,  poin-  préserver  le  pied  des  murs  des  éciabous- 
.surcs  des  eaux  de  l'égout,  qui  agissent  infailliblement,  quelle  que  soil  la  direc- 
tion de  la  pluie,  et  longtemps  après  qu'elle  a  cessé ,  et  tombent  avec  plus 
d'abondance,  tandis  que  la  pluie  ne  tombe  directement  sur  la  face  des  murs  que 
quand  elle  est  poussée  par  le  vent. 

Il  importe  que  le  bord  du  chéneau  soit  le  plus  près  possible  du  bord  do 
l'égout;  car  toute  l'eau  qui  tonii)e  dans  la  zone  comprise  entre  ces  deux  ligues 
retombe  au  pied  du  mur,  à  moins  qu'elle  ne  soit  en  contre-pente ,  ce  qui  est 
fort  rare.  Nous  citerons  comme  d'excellents  exemples  les  chéneaux  établis,  par 
notre  savant  confrère  M.  Hittorff,  au  Cirque-Olympique  et  aux  pavillons  des 
Champs-Elysées  ,  ainsi  qu'à  l'église  de  Sainl-Vincenl-de-Paul.  Nous  y  ajouterons 
les  chéneaux  que  nous  avons  proposés,  d'après  notre  propre  expérience,  dans 
le  quatrième  volume  de  la  Iteviie-,  VI.  3.  (iVote  de  il.  U.  J.) 

(1)  On  conçoit  que  la  dépense  que  nécessiteront  des  travaux  de  ce  genre  est 
trop  variable  pour  pouvoir  être  établie  dans  cette  instruction,  qui  est  faite  dans 
le  but  de  servir  pour  tous  les  cas  analogues  et  imprévus  qui  peuvent  se  pré- 
senter. (Xote  de  fauleur  ) 

(2)  Nous  ne  pouvons  être  de  l'avis  de  l'auteur  sur  l'isolement  du  revêtement 
en  marbre;  car  cet  isolement  lui  Ôterait  toute  solidité,  à  moins  de  donner  une 
grande  épaisseur  aux  dalles,  ce  qui  augmenterait  considérablement  la  dépense. 
Si  l'on  bitumine  la  paroi  du  mur,  il  n'y  a  nul  inconvénient  à  sceller  les  dalles  au 
mur  au  moyen  d'un  bon  ciment  (*).  (Xott  de  M.  B.  J.) 

(')  N'est-ce  pas  ici  le  cas  de  rappeler,  en  la  proscrivinl,  la  déplorable  habitude  de 
nos  marbriers  modernes,  qui  ne  connaissent  que  le  pUtre  pour  scellemeni,  même  de- 
puis que  r.irl  des  constructions  a  été  doté  de  si  bons  ciments? 

Los  Romains,  qui  furent,  sans  contredit ,  les  plus  fameux  faiseurs  de  placages  en 
marbre  qui  aient  jamais  existé,  ont  revêtu  de  marbre  la  surface  entière  d'édifice; 
considérables,  tels  que  le  Panthéon  et  le  temple  de  Vénus  1  Home,  etc.  ;  ils  se  sont 
T.    V.  2i 


323 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


324 


Tels  soiil,  en  résumé,  les  moyens  qu'on  pourra  employer  avec  quel- 
que succès  pour  prévenir  l'huniidlléqui  pénèlrc  par  les  murs  de  face  et 
les  murs  de  refend,  dans  les  conslruciions  en  pierre  de  taille. 

En  exaniinanl  les  moyens  applicables  aux  conslruciions  en  moellon, 
nous  serons  amenés  à  reciuinaîirc  qu'ils  devront  être  les  mêmes  que 
ceux  indiqués  pour  les  cas  généraux  des  bàlimenls  en  pierre.  Nous 
ferons  observer,  toutefois,  que  le  manque  de  liaison  qui  résulterait  de 
rinlcrposilion  de  la  feuille  de  plomb,  eu  égard  à  une  moindre  épaisseur 
donnée  aux  murs,  exigerait  quelques  combinaisons  que  nous  laissons 
au  j{igement  des  consiructeurs,  si  mieux  ils  n'aiment  recourir  à  l'em- 
ploi du  bitume,  qu'on  peut  appliquer  de  plusieurs  manières,  soit  en  in- 
terposant, dans  la  construction,  à  la  hauteur  où  l'on  voudra  arrêter 
l'Iiuinidité,  une  ou  deux  rangées  de  briques  biluminées  à  l'avance,  soit 
en  coulant  le  bitume  sur  place,  soil  en  faisant  usage  de  moellons  fac- 
tices, composés  de  morceaux  de  meulière  liés  entre  eux  avec  du  bi- 
tume, et  susceptibles  d'adbérer  suflisaniment  avec  le  mortier. 

Si  les  murs  de  face,  ou  au  moins  leur  partie  inférieure,  sont  construits 
en  pierre  meulière,  on  pourra  se  dispenser  du  revêtement  de  dalles  ;  car 
le  paiement  d'un  mur  en  meulière  et  bon  mortier  hydraulique,  bien 
rocaille  extérieurement,  n'aura,  pour  ainsi  dire,  rien  à  redouter  de 
riiumidité.  Lorsqu'on  ne  pourra  disposer  que  de  matériaux  de  mauvaise 
qualité  pour  la  pai  lie  inférieure  des  murs,  et  qu'on  n'en  trouvera  aucun 
pour  faire  le  revêtement  que  nous  avons  indiqué,  il  faudra  couvrir  cette 
partie  d'un  enduit  de  bon  mortier  bien  lissé;  il  est  inutile  d'ajouter 
qu'on  doit  proscrire  totalement  l'usage  du  plâtre  dans  les  constructions 
qui  avoisinenl  le  sol. 

Dans  les  localités  où  l'on  emploie  généralement  la  brique  pour  les 
constructions,  il  faudra  la  choisi)'  de  bonne  qualité  pour  les  murs  de 
face,  et  surtout  pour  les  parties  voisines  du  sol.  Dans  ce  cas,  le  meil- 
leur moyeu  de  garantir  les  parements  extérieurs  de  l'humidité  et  de 
l'empêcher  de  pénétrer  dans  les  murs,  consisterait  à  employer  des  bri- 
ques dont  la  face  extérieure  serait  bituminée,  ou,  mieux  encore,  revê- 
tue d'cuiail  (1).  Il  est  bien  entendu  que  les  joints  seront  toujours  faits 


(l  )  L'application  de  l'émail  sur  la  terre  cuite  date  de  la  plus  haute  antiquité  :  les 
murs  de  BabyloneeldePersépolis  étaient  revêtus  de  briques  émaillécs  de  diverses 
couleurs,  et,  depuis,  on  en  retrouve  des  exemples  dans  des  monuments  de  dif- 
férentes époques.  Nous  ne  savons  pourquoi  l'usage  des  terres  éinallléesa  été 
abandonné;  mais  II  nous  semble  qu'on  a  trop  négligé  les  avantages  qu'on  peut 
en  retirer.  Depuis  des  siècles,  les  Orientaux  sont  dans  l'usage  de  revêtir  les 
murs  intérieurs  de  leurs  habitations  de  carreaux  en  faïence,  qui  ont  l'avantage 
de  leur  procurer  de  la  fraîcheur,  tout  en  les  préservant  de  l'humidité.  L'Espa- 
gne leur  a  emprunté  cet  usage;  en  Hollande,  on  fait  généralement  usage  des 
carreaux  du  même  genre,  pour  les  revêtements  Intérieurs  des  rez-de-chaussée, 
sans  doute  comme  préservatif  contre  l'humidité,  qui  est  très  à  redouter  dans  ce 
pays.  Dès  le  XV=  et  surtout  au  XVI«  siècle,  on  introdui-sit  en  France  l'emploi 
des  carreaux  de  faïence  pour  le  carrelage  des  appartements  les  plus  simples 
comme  les  plus  recherchés  ;  on  en  voyait  encore.  Il  y  a  peu  de  temps,  aux  châ- 
teaux d'Anet  et  d'Écouen  ;  il  est  évident  qu'au  rez-de-chaussée  ce  genre  de 
carrelage  devait  avoir  la  propriété  d'empêcher  l'humidité  de  se  produire  a  la 
surface  du  sol.  On  a  fait  aussi  usage  de  tuiles  émaillées  pour  les  couvertures,  et 
on  a  même  appliqué  ce  genre  de  décoration  aux  façades  des  mai.sons,  comme 

bien  gardés  sans  doute  d'employer  à  cet  usage  le  plâtre  ou  toute  autre  matière  aussi 
périssable.  Nous  avons  trouvé  dans  l'édiflce  gallo-romain  du  Nord  de  Montmartre, 
celte  terre  classique  du  plaire,  nombre  de  fragments  d'un  revêtement  en  marbre 
dont  l'épaisseur  n'était  que  de  o™  015  ndllira  ,  et  des  bandeaux  dont  l'épaisseur 
n'excédait  pas  Om  018  milliin.,  et  qui,  cependant,  étaient  scellés  avec  du  mortier 
de  chaux  cl  ciment.  Ce  ciment  est  encore  si  foriement  allaché  au  marbre  qu'on  ue 
l'en  arrache  pas  facilement;  quoique  appliqué  sur  un  sciage,  le  mortier  semble 
adhérer  plus  foriement  au  marbre  qu'à  lui-même.  L'emploi  du  plâtre  esl  si  com- 
mode et  la  routine  si  fort  enracinée,  que  si  les  architectes  ne  forcent  à  la  longue 
ks  marbriers  à  employer  d'autres  moyens,  il  est  présumable  qu'ils  ne  changeront 
pas  de  méthode.  C'est  pourtant  à  l'emploi  du  plâtre  qu'on  doit  les  dégradations  qui 
auront  complètement  ruiné,  u'ici  à  peu  d'années,  les  revêtements  en  marbre  des 
piédestaux  des  statues  du  Uusce  des  Antiques,  notamment  de  ceux  dans  lesquels  on 
a  incrusté  des  bas-reliefs,  qui  sont  dans  un  état  déplorable.       (f(ule  de  U.  H.  J.) 


en  bon  mortier.  Nous  pensons  aussi  que,  dans  ce  genre  de  construction, 
une  rangée  de  briques  bituminées  peut  avantageusement  remplacer  la 
feuille  de  plomb,  selon  la  différence  qui  en  pourrait  résultrr  pour  la 
dépense,  eu  égard  aux  pays  dans  lesquels  on  construirait,  il  est  certain 
qu'on  obtiendrait  de  bons  effets  du  bitume  employé  dans  la  consiruclion 
en  brique,  en  remplacement  du  mortier,  ainsi  que  cela  se  pratiquait 
dans  lanliquité.  On  sait,  en  effet,  que  les  constructions  de  Babylone 
étaient  composées  de  briques  unies  entre  elles  par  du  bitume  mêlé  de 
roseau  haché,  et  nous  ne  savons  pas  pourquoi  on  ne  chercherait  pas  à 
faire  de  nouveau  l'application  de  cet  ancien  mode  de  consiruclion.  Seu- 
lement, dans  ce  cas,  il  faudrait  que  la  quantité  de  bitume  étendue  entre 
chaque  rangée  de  briques,  eût  la  nmindre  épaisseur  possible,  et  con- 
servât une  certaine  élasiicilé;  car,  si  le  bitume  est  cassant  et  sec,  il  ne 
résistera  pas  à  la  pression,  et  il  pourra  survenir  des  tassements  dans  la 
contlruction.  L'introduction  de  roseau  ou  de  paille  hachée  nous  parait 
devoir  remédier  à  cet  inconvcnienl. 

A  l'aris,  où  l'on  ronslruit  souvent  en  pans  de  bois,  sans  prendre  au- 
cune précaution  contre  l'humidité,  on  se  contente  de  poser  les  pans  de 
bois  au-dessus  d'une  ou  de  deux  assises  de  pierre,  ou  même  sur  un 
soubassement  en  moellon  ou  en  brique  ;  la  partie  inférieure  du  pan  de 
bois  est  composée  de  pièces  horizontales  appel<ies  lablièret  basses,  qui, 
dans  toute  leur  étendue,  se  trouvent  ainsi  en  contact  avec  ce  soubas- 
sement en  maçonnerie  ou  en  pierre,  lequel  n'est  souvent  qu'à  O"  50  au- 
dessus  du  sol;  ces  sablières,  destinées  à  recevoir  le  pied  de  toutes  les 
autres  pièces  du  pan  de  bois,  sont  par  là  exposées  à  une  humidité 
constante  et  pourrissent  très-promptemenl. 

Il  importe  donc,  lorsqu'on  construira  en  pans  de  bois,  de  redoubler 
de  précautions;  dans  ce  cas,  la  feuille  de  plomb  sera  indispensable,  et  il 
conviendra  de  l'interposer  entre  l'assise  sur  laquelle  doit  reposer  le 
pan  de  bois  et  la  sablière  basse  de  ce  pan  de  bois. 

Selon  la  nature  des  matériaux  employés  pour  lu  construction  infé- 
rieure, on  pourrait  substituer  à  la  feuille  de  plomb  une  préparation  hy- 
drofuge  appliquée  avec  soin  sur  la  inaronnerie  servant  de  base  au  pan 
de  bois.  Il  conviendra  de  faire  ce  soubassement  le  plus  haut  possible, 
et,  pour  les  pans  de  bois  de  face,  nous  renverronsaux  observations  que 
nous  avons  faites  à  l'égard  des  murs  (1). 

L'humidité  contre  laquelle  nous  venons  d'indiquer  différents  moyens 


on  le  volt  encore  i  Beauvais.  Le  château  de  Madrid  était  célèbre  par  la  beauté 
des  ornements  de  faïence  dont  il  était  revêtu  extérieurement,  et  qui  étaient  dus 
au  célèbre  Césa  délia  Kobbia.  Nous  pourrions,  au  sujet  des  terres  émaillées , 
entrer  dans  de  plus  grands  développements,  mais  ils  seraient  étrangers  à  la  ma- 
tière que  nous  traitons  :  nous  nous  bornerons  i  appeler  l'attention  de  la  So- 
ciété d'encouragement  sur  une  fabrication  dont  s'est  honorée  autrefois  notre 
industrie  nationale,  et  qui  semble  être  aujourd'hui  tombée  dans  un  oubli  com- 
plet. (Mote  de  Couleur.) 

(1)  Malgré  les  résultats  que  promettent  les  précautions  que  nous  venons  d'in- 
diquer, nous  conseillerons,  pour  plus  de  sûreté,  de  ne  jamais  construire  en 
pans  de  bois  dans  la  hauteur  des  rez-dc-chaus.'^ée,  ni  dans  les.  façades  exposées 
au  Sud  ou  à  l'Ouest  ;  car  le  bois,  enveloppé  de  maçonnerie  et  privé  d'air,  est 
exposé  à  pourrir  promplement.  C'est  dans  le  but  d'assurer  la  conservation  du 
bois  qu'on  le  couvre  d'une  couche  de  peinture^  et  souvent  on  produit  l'elTet 
contraire.  Pour  que  la  peintiu-e  conserve  le  bois,  il  faut  qu'elle  ne  soil  appliquée 
que  lorsque  le  bois  est  complètement  sec;  sans  cela,  elle  confine  à  l'Intérieur 
l'humidité  préexisianle,  et  cette  humidité,  ainsi  emprisonnée,  est  un  germe 
de  destruction.  Le  bois  a  besoin  d'air,  et,  quand  il  est  parfaitement  sec,  il  peut 
être  presque  impunément  exposé  aux  variations  de  l'atmosphère.  Ainsi,  par 
exemple,  dans  nos  vieilles  villes  de  France,  on  voit  des  façades  de  maisons  en 
pans  de  bois,  qui  datent  de  trois  cents  ans,  oit  les  bois,  dépouillés  depuis  long- 
temps de  leur  ancienne  peinture,  sont,  il  est  vrai,  rongés  à  leur  surface  par  l'in- 
fluence  de  la  pluie  et  du  soleil,  mais  le  cœur  eu  est  sain  et  conserve  sa  force. 
C'est  par  une  raison  analogue  que  la  charpente  des  combles  ne  pourrit  jamais. 
Au  marché  des  Blancs-Manteaux,  la  charpente,  qui  avait  été  peinte,  a  été  pour- 
rie au  bout  de  vingt-cinq  ans,  el  vient  d'être  remplacée  par  une  charpente  de 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


préservatifs  esl  sculemenl  celle  qui  peut  pénétrer  dans  la  partie  infé- 
rieure des  bâtiments,  par  la  voie  des  murs,  soit  intérieurs,  soit  exté- 
rieurs; il  nous  reste  à  nous  occuper  de  celle  (|ui  s'introduira  directe- 
ment par  le  sol,  selon  qu'il  y  a  des  caves  ou  qu'il  n'y  en  a  pas. 

Il  y  aura  toujours  avantage,  pour  l'assainissement  des  bâtiments  ha- 
bités, à  les  élever  au-dessus  de  caves,  et  l'on  conçoit  que  ce  système 
de  construction  devra  diminuer  sensiblement  les  chances  d'humidité  et 
rendra  plus  faciles  les  moyens  de  la  combattre.  Dans  un  bâtiment  élevé 
sur  caves,  les  murs  de  face  ne  seront  pins  en  contact  avec  le  sol  que 
par  leur  base  et  par  une  de  leurs  parois,  et  les  murs  de  refend  par  leur 
base  seulement  ;  de  plus,  le  sol  du  rez-de-clinussée  sera  ainsi  sur  vonte, 
au  lieu  d'être  directement  établi  sur  la  terre.  Cependant  les  avantages 
d'un  rez-de-cbaussée  élevé  sur  caves  ne  sont  pas  tels  qu'on  pourrait  le 
croire,  et,  quelque  bien  aérées  que  soient  les  caves,  leur  voûte  contient 
encore  une  certaine  buniidité  qui  se  produit  sur  les  dallages,  les  carre- 
lages et  les  planchers,  et  dont  il  importe  de  se  garantir. 

Dans  le  sol  d'un  rez-de-cbaussée  sans  caves,  l'humidité  se  manifeste 
constamment  à  la  surface,  si  l'on  n'y  apporte  un  remède  efficace. 
Quand  ce  sol  est  plancbéié  ou  parqueté,  l'action  de  l'humidité  n'est 
point  directe,  les  planchers  ou  les  feuilles  de  parquet  étant  posés  sur 
des  lambourdes,  qui  les  isolent  cl  forment  un  espace  vide  entre 
le  plancher  ot  le  sol  ;  mais  les  lambourdes  étant  en  contact  avec 
le  sol,  subissent  l'action  permanente  de  l'humidité,  se  trouvent 
bientôt  pénétrées,  et  ne  tardent  pas  à  pourrir.  Il  est  donc  nécessaire, 
dans  ce  cas,  de  substituer  au  sol  naturel  un  sol  factice  et  imperméable, 
qui  permette  d'établir  le  plancher  à  l'iibri  de  celte  humidité  inlérieiire 
et  ascendante.  Le  moyen  qu'il  conviendrait  d'adopter  serait  de  couvrir 
le  sol  d'un  lit  de  béton  hydraulique  deO^lo  d'épaisseur  au  moins,  sur 
lequel  on  étendrait  une  couche  d'asphalte  de  O"  005;  sur  ce  nouveau 
sol,  ainsi  composé,  on  pourra,  en  toute  sûreté,  établir  les  lambourdes 
et  les  parquets  (1). 

Ce  que  nous  venons  de  dire  des  planchers  à  établir  dans  les  rez-de- 
chaussée  sans  caves  s'applique  aux  dallages  de  marbre,  de  pierre  et  de 
terre  cuite,  et  les  moyetis  à  employer  pour  les  préserver  de  l'humidité 
seront  les  mêmes  que  ceux  qui  viennent  d'être  indiqués  ;  seulement,  au 
lieu  d'appliquer  l'enduit  hydrofiige  sur  le  béton.  Il  faudrait  peut-être 
eu  recouvrir  les  dalles  mêmes,  ainsi  que  MM.  Thénard  et  d'Arccl  l'ont 
conseillé.  Quant  au  béton,  qui,  par  économie,  pourrait  être  supprimé 
au-dessous  des  parquets,  il  est  indispensable  au-dessous  des  dallages 


fer  (*).  Nous  ne  prétendons  pas  cependant  que  la  peinture  ne  puisse  contribuer 
à  préserver  les  bols  exposés  aux  inlluences  atniospliéri(|ues,  mais  seulement  il 
importe  de  l'appliquer  à  propos  et  de  manière  à  ne  renfermer  aucune  humidité 
Intérieurement;  ainsi,  par  exemple,  les  faces  des  fenêtres  et  des  portes,  expo- 
sées à  l'extérieur,  ont  besoin  d'être  peintes  aussitôt  qu'on  les  met  en  place  , 
mais  il  est  iiiulile  de  peindre  leur  face  intérieure,  qui  est  abritée,  et,  en  laissant 
ainsi  une  face  sans  peinture,  lu  sécheresse  pourra  s'opérer  bien  plus  facilement. 
Nous  pensons  dune  que  nos  ancêtres  avaient  raison  de  laisser  les  pièces  des 
pans  de  bois  et  les  solives  de  leurs  planchers  accessibles  à  l'air.  L'art  d'ailleurs 
s'était  emparé  de  ces  dispositions  et  en  avait  su  tirer  un  excellent  parti.  On 
sait  quel  charme  présentent  à  l'œil  les  boiseries  en  bois  naturel,  ainsi  qu'on 
était  dans  l'usage  de  les  faire  anciennement.  {Note  de  l'auleur.) 

(IJ  Un  enduit  général  en  bitume  est  un  excellent  moyen,  nous  dirons  même  le 
meilleur  moyen  d'assainir  les  rez-de-chaussée  ;  mais  11  esl  nécessaire  qu'il  soit 
recouvert  d'une  couche  de  béton  ou  du  moins  d'une  aire  en  mortier  sur  la- 
quelle on  scellerait  les  lambourdes  :  autrement  on  courrait  risque  de  voir  celles- 
ci  s'enfoncer  dans  le  bitume  pendant  lis  grandes  chaleurs,  à  cause  de  la  faible 
surface  de  ces  supports.  Cet  enduit  géjiéral  en  bitume  recouvrira  rigoureuse- 
ment la  rive  de  la  feuille  de  plomb  passée  entre  deux  assises  des  murs,  comme 
on  le  voit  dans  la  Fiy.  11.  {i\ote  de  M.  If.  J  ) 

(•)  (.'est  au  gouilronn.igc  dont  ils  furent  rei'ouvcrls  qu'on  doit,  «ans  nul  doute,  la 
rapide  destruction  des  Imtiaux  en  bois  des  sorilles  de  l'église  de  Saint-Uerniain- 
en-Lajre,  qui  se  sont  complétimenl  pourris.  (ffpU  d»  M.  H.  J.) 


de  pierre  ou  de  marbre,  a«n  d'éviier  les  tassements  el  d'obtenir  un  ni- 
veau parfait  (1). 

L'expérience  a  fait  reconnaître  que  le  sol  des  rez-de-chaussée  même 
élevés  sur  caves  n'est  pas  entièrement  exempt  d'humidilé,  et  voici  les 
observations  que  nous  avons  faites  à  ce  sujet  :  pour  niveler  le  sol  du 
rez-de-cbaussée ,  on  est  dans  l'usage  de  remblayer  le  vide  qui  reste 
au  dessus  de  l'extrados  des  voûtes  de  caves  avec  des  gravois,  des  éclats 
de  pierre,  etc.,  sans  mortier,  et  l'on  pose  les  dallages  immédialemerii 
sur  ces  remblais  ;  on  a  remarqué  que,  dans  les  vestibules,  les  escaliers, 
et,  en  général,  dans  les  lieux  qui  ne  sont  pas  bien  clos  et  où  peut  (lé- 
nélrer  l'humidité  de  l'air  extérieur,  les  dallages,  ainsi  posés,  ne  restent 
jamais  dans  un  état  de  sécheresse  parfaite,  et  conservent  des  taches  lin- 
inides.  Cela  peut  s'expliquer  de  la  manièi-e  suivante  '  l'humidité  qui  se 
développe  et  séjourne  sur  des  dalles  de  pierre,  surtout  quand  une  tem- 
pérature douce  succède  à  un  très-grand  froid,  pénètre  dans  l'inlérienr 
de  ces  dalles,  les  traverse,  et  s'introduit  uu-dessous  sans  qoe  jamais 
l'action  de  l'air  puisse  parvenir  il  l'atteindre.  Celte  humidité,  ainsi  con- 
centrée entre  les  dallages  et  les  voùies  de  caves  qui  elles-mêmes 
sont  humides,  ne  peut  que  s'accroître  ;  de  sorte  qne.  lors  même  que  la 
surface  extérieure  des  dallages  est  séchée  par  l'atmosphère,  l'humidité 
leur  parvient  de  nouveau  de  la  partie  inférieure  avec  laquelle  ils  sont 
en  contact.  Si  ces  inconvénients  sont  moindres  dans  les  parties  bien 
closes,  et  à  cause  de  la  chaleur  qu'on  y  enlrelienl  en  hiver,  ils  s'y  ma- 
nifestent cependant  quelquefois,  surtout  dans  les  lieux  qui  restent  in- 
habités; et,  comme  ces  inconvénients  sont  dus  à  l'humidilé  qui  existe 
dans  les  voûtes  et  dans  les  murs  des  caves,  nous  conseillons  de  poser 
sur  béton  les  dallages  des  rez-de-chaussée,  même  lors(iu'il  y  aura  des 
caves.  Dans  les  lieux  les  plus  exposés  à  l'humidité  de  l'atmosphère,  on 
pourra  employer  un  enduit  hydrofuge  indépendamment  du  béton.  L'hu- 
midité qui  s'introduit  par  les  voûtes  des  caves  esl  tellement  reconnue  , 
que  nous  recommandons  de  ne  pas  même  élever  tme  simple  cloison 
dans  un  rez-de-chaussée  sans  prendre  les  mêmes  précautions  que  pour 
les  murs  qui  ont  leur  fondation  dans  le  sol,  c'est-à-dire  d'iniei  poser, 
sons  le  pied  de  ces  cloisons,  soit  une  feuille  de  plomb,  soit  une  prépara- 
tion hydrofuge  (2). 


(1)  Tous  les  dallages  en  pierre  des  reE-dc-cltaussce  de  l'école  des  Beaux-Arts, 
celui  de  la  salle  du  Jugement  dernier,  sont  posés  sur  béton  et  se  sont  maintenus 
dans  uuétat  de  sécheresse  parfaite,  quoiqu'il  n'y  ait  pas  de  caves. 

Pour  le  dallage  de  la  nouvelle  galerie  d'agriculture  au  Conservatoire  des  arts 
et  métiers,  les  précautions  ont  été  encore  plus  grandes;  je  l'ai  fait  établir  sur 
une  aire  d'asphalte  et  de  béton  superposés.  Voici  comment  on  a  procédé  :  le 
sol  a  été  d'abord  bien  nivelé  et  bien  battu,  puis  on  a  étendu,  sur  toute  la  sur- 
face, de  la  terre  a  poêle  à  3  ou  4  centimètres  de  hauteur.  C'est  sur  le  sol  ainsi 
préparé  qu'a  été  étal)lie  l'aire  d'asphalte  de  10  a  15  millimètres  d'épaisseur,  et 
sur  celte  aire  le  béton  de  10  à  12  centimètres,  destiné  à  recevoir  le  dallage  qui  a 
été  posé  sur  un  lit  de  mortier  fin.  Le  béton,  disposé  ainsi  au-dessus  de  l'aire 
d'asphalte,  se  prête  mieux  à  la  pose  des  dalles;  car,  si  l'aire  d'asphalte  était 
établie  au-dessus  du  béton,  elle  ne  se  marierait  pas  aussi  bien  avec  le  mortier 
indispensable  pour  obtenir,  lors  de  la  pose,  une  certaine  élasticité  (*). 

[Xote  de  l'nuteur.) 

(2)  Ce  qui  donne  une  si  grande  humidité  au  sol  des  rez-de-cliausséé  établis 
sur  vofites  de  cave,  c'est  qu'on  a  conservé  à  Paris  et  aux  environs  la  funeste 
habitude  de  hourdcr  ces  voûtes  en  plâtre.  On  a  reconnu  la  nécessité  de  faire  les 
murs  en  mortier  jusqu'au  premier  étage,  el  l'on  fait  les  voûtes  en  pMtrc:  an- 
ciennement même  on  les  enduisait  en  plâtre.  Ou  sait  pourtant  que  cette  mj- 
lière  a  beaucoup  d'affinité  pour  l'eau  :  elle  absorbe  l'humidité  constante  de 
l'atmosphère  des  caves;  elle  s'en  sature  et  la  monte,  par  l'action  delà  capillarité, 
ju-qu'au  sol  du  rez-de-chaussée.  Le  plâtre  se  salpêtre  à  la  longue,  et  ses  rfTcLs 
n'en  sont  que  plus  désastreux.  On  n'a  donc  rien  de  ndcux  1  faire  que  de  le 
proscrire  des  voûtes  connue  on  l'a  proscrit  des  murs.  Cela  sera  un  peu  noins 
connnode  à  exécuter,  mais  beaucoup  plus  salubrr.  (.Yo»e  de  il.  II.  J.) 

(*)  Il  vaut  niit'ux  que  l'aire  d'asphallo  soit  posée  enlic  diui  bèloiis;  ce  movra 
serait  lurtout  inappréciable  pour  les  magaslDS  i  poudre.  (.Vo/«  de  M.  tt,  J.i 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Un  autre  moyen  dVliiblir  les  dallages  ou  les  parquets  des  rez-de- 
cbaussée  consiste  à  élever,  sur  le  sol  ou  sur  les  voûtes  des  caves,  de 
petits  murs  parallèles  et  régulièrement  espacés,  en  moellon,  en  meu- 
lière ou  en  briques.  On  posera  sur  ces  murs  le  plancher  ou  les  lam- 
bourdes, destinés  à  porier  le  parquet,  ou  même  un  dallage,  si  la  di- 
stance des  murs  a  é.é  calculée  en  conséquence.  On  pourra,  pour  plus 
d'économie,  se  contenter  de  points  d'appui  isolés.  Dans  tous  les  cas,  le 
dessus  de  la  maçonnerie  de  ces  murs  ou  de  ces  petites  piles  sera  cou- 
vert d'une  prépanilion  liydroliigo.  Au  moyen  de  ce  système  de  con- 
struction, le  niveau  du  sol  intérieur  devant  être  établi  en  couire-haut 
de  celui  du  sol  extérieur,  on  fera  circuler  l'air  au-dessous  du  plancher; 
à  l'aide  d'ouvertures  ménagées  dans  le  bas  des  murs,  cet  air  servira  à 
activer  le  tirage  des  foyers  placés  à  l'intérieur  des  habitations,  et  i!  pro- 
curera une  fraîcheur  agréable  en  été  (t  et  2).  (Voy.  Fig,  3.) 

Lorsque  le  rez-de-chaussée  est  assez  élevé  au-dessus  du  sol  exté- 
rieur, on  peut  utiliser  l'étage  souterrain,  qui,  par  sa  disposition,  cesse 
véritablement  d'être  une  cave  ;  alors  les  précautions  à  prendre  pour 
éviter  les  effets  de  l'huniidiié  seront  différentes  de  celles  que  nous  avons 
indiquées.  Ainsi,  en  faisant  sentir  la  nécessité  d'arrêter  l'humidiié  pro- 
venant du  sol,  nous  avons  établi  rob>tacle  là  où  cette  humidité  deve- 
nait réellement  nuisible,  et  nous  avons  dit  qu'on  pourrait  la  laisser  en- 
vahir les  parties  des  murs  en  contre-bas  du  niveau  extérieur  du  sol,  où 
elle  ne  présente  pas  le  même  inconvénient;  mais,  si  l'on  veut  rendre 
un  étage  snutermin  habitable,  il  conviendra,  après  avoir  établi  les  fon- 
dations en  béton,  d'opposer  à  l'humidiié  qui  pénétrera  les  murs  par  leur 
base,  soit  du  plomb,  soit  un  enduit  hydrofuge,  qu'on  interposera  au 
niveau  du  sol  de  cet  étage.  (Voy.  Fig.  4.)  Après  avoir  pris  pour  l'é- 
tablissement de  ce  sol  l'une  ou  l'autre  des  précautions  indiquées,  et  de 
préférence  celle  qui  consiste  à  ménager  un  isolement,  il  faudra  songer 
à  se  garantir  de  l'humidité  qui  pénétrera  à  travers  les  murs  dont  l'une 
des  parois  est  en  contact  avec  le  sol.  A  cet  effet,  nous  conseillons, 
pour  les  constructions  monumentales  et  en  pierre,  d'élever  de  ce  côté 
un  conire-mur  en  meulière,  susceptible  de  recevoir  un  enduit  hydrau- 
lique imperméable,  comme  ceux  des  fosses  (3).  Un  moyen  plusécono- 


(1)  Les  anciens,  jaloux  d'assurer  la  plus  grande  durée  à  leurs  niomimcnls  , 
avaient  adopté  un  système  analogue  pour  leurs  dallages  :  ils  construisaient,  sur 
le  soi,  de  petits  massifs  carrés  en  brique,  assez  rapprocliés  pour  supporter  de 
grands  carreaux  en  terre  cuile,  formant  un  premier  dallage;  ils  les  couvraient 
d'une  couche  de  mortier  assez  grossier,  mais  d'excellente  qualité,  de  2  ou  3  cen- 
timètres d'épaisseur,  puis  d'un  enduit  de  mortier  plus  fin,  sur  lequel  ils  po- 
saient les  dalles  de  marbre  ou  les  mosaïques  qui  composaient  le  sol  intérieur  de 
l'édifice.  Ce  mode  de  dallage  était  généralement  employé  pour  les  bains,  où 
l'on  en  profitait  pour  faire  circuler  de  l'air  cliaud  ;  on  le  trouve  également  ap- 
pliqué aux  dallages  des  temples,  où  il  n'avait  sans  doute  d'autre  but  que  d'é- 
viter l'humidité.  Dans  les  iiabitalions  antiques,  le  sol  des  pièces  à  rez-de-chaus- 
sée était  composé  de  mosaïques  qui,  par  leur  nature,  étaient  peu  accessibles  à 
l'humidité,  et,  de  plus,  ces  mosaïques  étaient  posées  sur  un  lit  de  mortier. 

{Note  de  l'auteur.) 
(2)  Mais  en  liivcr  il  pourrait  apporter  un  froid  insupportable  en  passant 
par  les  joints  des  dalles  qui  lui  laisseraient  quelques  issues  ,  et  lors  même  qu'il 
ne  pourrait  pénétrer  par  là,  si  l'on  employait  le  moyen  usité  par  les  Romains 
et  cité  par  l'auteur  dans  la  note  ci-dessus,  il  refroidirait  tellement  le  dallage 
que  sa  température  deviendrait  incommode. 

L'auteur  du  Mémoire  ne  nous  dit  pas  (du  moins  nous  ne  l'avons  pas  compris) 
s'il  rejette  directement  cet  air  extérieur  dans  l'appartement  ou  bien  dans  la 
ventouse  du  foyer.  Dans  ce  dernier  cas,  si  on  le  faisait  passer  dans  un  appareil 
calorifère  adapté  au  foyer,  l'air  arriverait  chaud  dans  l'appartement  ;  mais  le 
refroidissement  du  dallage  et  la  possibilité  des  vents  coulis  doivent  ne  faire 
adopter  ce  moyen  qu'avec  quelque  réserve.  (iVote  de  M.  H.  J.) 

(3)  Les  enduits  des  fosses,  qui  sont  généralement  en  mortier  de  chaux  hy- 
draulique ou  en  ciment  romain,  sont  loin  d'être  assez  imperméables  pour 
empêcher  l'humidité  de  passer  (*).  Il  faut  bien  distinguer  l'eau  i  l'état  de  liquide 

l")  Nous  avons  eu  occasion  de  ciiir  dans  un  autre  article  l'application  d'un  enduit 


inique  et  sans  doute  aussi  sûr  consisterait  à  enduire  la  paroi  extérieure 
du  mur  d'un  enduit  hydrofuge  ou  d'une  couche  de  bilumc.  Si  le  mur  est 
en  moellon,  en  brique  ou  en  meulière,  le  contre-mur  deviendra  inutile, 
l'enduit  pouvant  s'appliquer  directement  sur  ces  matériaux.  On  pour- 
rait aussi,  en  établissant  un  conire-niur  très-mince  (1)  en  brique,  isoler 
ce  contre-mur  de  la  surface  du  mur  (ju'on  voudrait  préserver  (21.  Si 
enfin  l'étage  en  question  exige  un  état  de  sécheresse  parfaite,  on  aura 


de  l'eau  divisée  à  l'état  moléculaire  qui  constitue  l'humidité.  Dans  le  premier 
cas,  elle  n'agit  que  par  l'action  de  la  gravitation,  c'est-à-dire  de  haut  en  bas,  et 
encore  horizontalement  i  cause  de  sa  mobilité.  Dans  le  deuxième  cas,  clic  agit 
dans  tous  les  sens,  même  de  bas  en  haut,  par  l'action  de  la  capillarité  uu  par 
l'affinité  de  ses  molécules  pour  celles  qui  constituent  la  matière  à  traverser; 
elles  s'y  élèvent  d'autant  plus  que  celte  affinité  est  plus  giande.  L.cs  seules 
limites  peut-être  de  son  ascension  dans  un  corps  perméable,  sont  celles  où  la 
puissance  évaporatoire  de  l'air  ambiant  fait  équilibre  i  l'action  capillaire. 

Un  simple  enduit  en  ciment  ou  mortier,  quoique  doué  d'affinité  pour  l'eau, 
un  simple  tissu  même,  peuvent  s'opposer  au  passage  de  ce  liquide  i  l'état  cou- 
lant ou  considéré  comme  corps;  mais  nous  n'en  connaissons  aucun  qui  puisse 
s'opposer  au  passage  de  l'eau  à  l'état  moléculaire,  c'est-à-dire  à  l'humidité. 
Les  métaux  et  les  matières  vitrifiées  compactes  peuvent  seuls  intercepter  l'hu- 
midité par  l'extrême  ténuité  de  leurs  porcs,  bien  <|u'ils  aient  de  l'affinité  pour 
l'eau  ;  et  les  corps  gras,  tels  que  les  bitumes,  résines,  graisses,  etc.,  quoique  po- 
reux, sont  imperméables  à  l'eau  dans  ses  deux  états,  à  cause  de  leur  manque 
d'affinité,  ou  plutôt  de  leur  répulsion  pour  ce  liquide.  ré|inl*inii  (|ui  s'oppose  à 
l'action  de  la  capillarité. 

Nous  avons  vu  du  béton  qui,  quoique  fort  dur,  laisse  passer  l'eau  comme  une 
éponge.  Nous  ne  prétendons  pas  toutefois  que  ce  fait  soit  général,  et  nous  de- 
vons ajouter  qu'il  entrait  un  peu  de  ciment  dans  sa  composition,  outre  la  chaux 
hydraulique. 

Tant  que  le  béton  est  en  travail,  c'est-àKlirc  tant  qu'il  est  Jeune,  il  absorbe 
l'eau,  qui  tend  à  le  traverser  et  se  ^as^imile;  c'est  pour  cela  qu'il  sèche  sous 
l'eau  ;  mais  il  n'y  a  pas  de  raison  pour  que  cela  soit  éternel,  et  au  bout  d'un 
certain  nombre  d'annéi'S  il  doit  être  salure,  et  nous  douions  qu'il  en  absorbr 
encore;  il  laissera  donc  passer  l'humidité  par  ses  pores  quand  il  sera  vieux  et 
ne  pourra  plus  se  l'assimiler.  {Kote  de  M.  H.  J.) 

(1)  Le  contre-mur  ndnce  sera  bientât  collé  contre  le  mur  par  la  poussée  des 
terres,  à  laquelle  il  ne  pourra  résister;  mais,  ne  le  fùt-il  pas,  si  linlervalle  csi 
très-petit  et  non  aéré,  il  .servirait  fort  peu.  Il  faut  (|ue  le  vide  ail  une  certaine 
largeur  cl  qu'il  y  ait  courant  d'air;  autrement  l'air,  excessivement  chargé  de 
l'humidité  constante  qui  y  arriverait,  pénétrerait  les  murs.  L'enduit  bitumineux 
proposé  par  l'auteur  est  bien  préférable,  en  ayant  soin  toutefois  de  le  souder 
avec  la  feuille  de  plomb  interposée  entre  deux  a.ssises  au  niveau  du  soi.  Il  faut 
encore, comme  condition  indispensable,  que  l'enduiten  bitume  soit  étendu  entre 
deux  béions,  surtout  i  l'étage  souterrain,  pour  empêcher  son  soulèvement  par 
quelque  subite  in\asion  d'eau.  Il  faudrait  aussi  que  la  couche  de  bitume  appli- 
quée sur  le  parement  du  mur  fi"il  recouverte  d'un  enduit  en  mortier,  [Kiur  em- 
pêcher qu'à  la  longue  les  corps  durs  et  anguleux  ronicnus  dans  les  terres  ne 
vinssent  à  crever  le  bilumc.  I.e  procédé  de  goudronnage  récemment  appliqué 
au  pavé  des  rues  est  appelé  à  nous  donner  un  jour  des  moellons  et  des  pierres 
imperméal)les  pour  la  construction  de  la  base  des  murs. 

(/Vote  de  .M.  P.J) 

(2)  En  Angleterre,  où  l'on  construit  en  brique,  on  a  souvent  recours  à  un 
contre-mur  semblable,  avec  isolement.  Dans  certains  cas,  on  a  appliqué  avec 
succès,  sur  la  surface  des  murs  qu'on  voulait  préserver,  un  lit  de  tuiles  très- 
dures,  bien  enduites  de  bon  ciment.  Nous  ajouterons  que,  pour  arrêter  l'hu- 
midité provenant  du  sol,  les  Anglais  ont  remplacé  le  plomb  par  un  lit  d'ardoise 
noyé  dans  une  couche  de  mortier  ;  mais  il  est  permis  de  douter  de  l'efficicité 
de  ce  moyen . 

Du  reste,  les  fondations  et  les  massifs  en  béton  sont  généralement  adoptés  en 
Angleterre,  ainsi  que  l'application  d'une  feuille  de  plomb  dans  l'épaisseur  des 
murs.  {Pfote  de  l'auteur.) 

de  ciment  romain  de  Sa  *cenlimèlres  d'épaisseur,  pour  recevoir  la  partie  de<  solives 
d'un  plancher  élevé  d'environ  60  centimèln-s  .lu-dessiis  du  «n|  extérieur.  Ce  pré.«er- 
vatif  n'a  pas  empêché  l'humidité  de  s'élever  la  première  année  i  0  60  au-dessui  du 
sol  du  rez-de-chaussée,  ou  à  peu  près  90  centimètres  au-dessus  de  l'enduil  en  quci- 
tion.  Ce  fut  bien  pis  les  annnes  suivantes. 


329 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLFCS. 


330 


soin  d'y  établir  un  bon  syslème  de  ventilation,  et  d'appliquer,  sur  les  pa- 
rois intérieures  des  pièces  de  cet  étage,  soit  des  préparations  liydro- 
fugcs,  soit  des  lambris  en  bois. 

EnOn  il  est  une  dernière  disposition  qnc  nous  avons  mentionnée  et 
à  l'égard  de  laquelle  il  est  nécessaire  de  prendre  des  procanlions  par- 
ticulières contre  l'Iiumidité:  c'est  celle  d'un  bâiiinenl  élevé  à  mi-côte  et 
adossé  en  partie  au  terre-plein  de  celle  côte,  (le  manière  que,  d'un 
côté  à  l'autre,  il  y  ait  la  dilTérence  d'un  étage.  Dans  ce  cas,  il  (audra 
construire  préalablement  un  mur  de  souléiiemenl  en  bons  matériaux  , 
destiné  à  maintenir  les  terres  et  les  eaux  de  la  pariie  supérieure.  Entre 
ce  mui',  qui  devra  avoir  une  épaisseur  et  un  talus  convenables,  et  sera 
percé  de  barbacanes  de  distance  en  dislance,  et  le  mur  de  l'Iiabilation  , 
on  ménagera  un  espace  voûté  de  1  ou  2  mètres,  formant  un  corridor 
dont  le  sol,  au  pied  du  mur  de  terrasse,  aurait  une  pente  régli'c  pour 
l'écoulement  des  eaux.  L'air  pouvant  ainsi  circuler  librement  entre  la 
face  de  l'habitation  et  le  terre-plein,  on  n'aura  à  redouter,  pour  le  mur 
de  riiabitalion,  que  riiuinidilé  à  laquelle  est  exposé  un  bâtiment  placé 
dans  les  conditions  ordinaires.  C'est  par  une  disposition  analogue  (pi'on 
cherche  à  préserver  les  orangeries  et  les  serres  chaudes  des  effets  de 
l'humidité  et  du  froid.  (Voy.  la  Fig.  5.) 

Les  murs  de  terrasse  servant  à  soutenir  des  terres  destinées  à  être 
plantées  en  jardin  se  trouvent  aussi  dans  le  même  cas,  ei,  si  l'on  ne 
prend  pas  des  précautions  particulières,  leurs  faces  seront  prompie- 
ment  déiériorées  par  l'humidité  constante  que  la  terre  leur  communi- 
ipiera  :  le  mieux  serait  donc  de  les  construire  en  meulière  et  bon  mor- 
lier,  ou  bien,  s'il  ne  pouvaiten  être  ainsi,  il  conviendrait  alors  d'élever 
nu  conlre-nuir  en  meulière  avec  enduit  qui,  non-seulement  préserverait 
le  mur  extérieur  des  eff.  ts  de  l'humidilé,  mais  permettrait  en  même 
temps  de  combiner  un  syslème  d'écoulement  pour  les  eaux  qui  s'inlil- 
trent  dans  les  terres  (1  et  2). 

Quoicpie  les  principes  ipie  nous  venons  de  poser  au  sujet  des  moyens 
a  employer  contre  les  effets  de  l'hinnidilé  soient  applicables  à  tous  les 
genres  de  constructions  en  général,  nous  croyons  devoir,  pour  satis- 
faire au  programme  proposé,  dire  quelques  mots  concernant  les  con- 
structions rurales  et  indusiiielles. 

Les  constructions  rurales  se  compo.<ent  de  bàlimenis  d'habitation  et 
d'exploitation.  On  comprend  que  les  premiers  se  trouvent  dans  les 
mêmes  coudiiions  que  tous  les  autres,  cl  qui;  les  travaux  à  cnlre- 
prendre  contre  l'humidité  seront  analogues  ;i  ceux  dont  nous  avons 
déjà  parlé. 

Quant  aux  bàlimenis  d'exploiialion,  tels  que  buanderies,  laiie- 
ries,  etc.,  qui  par  suite  <le  l'emploi  aliondant  de  l'eau,  ne  peuvent  pas 
être  considérés  comme  exposés  à  souffrir  de  l'humidité,  il  sera  facile,  à 
l'aide  do  dallages  ou  d'enduiis  bien  faits,  et  en  ménageant  avec  soin 


(1)  Les  célobres  jariliiis  de  l'Isola-Bella  sur  le  lac  Majeur  sonl  en  parlic  éta- 
blis sur  un  sut  factice  qui  a  éli  siuclevé  au-dessus  du  niveau  des  eaux  à  l'aide 
d(!  constructions  ;  mais,  dans  ces  constructions  destinées  à  supporter  des  terres 
dans  lesquelles  crois.senl  des  arbres  de  haute  liitaic,  on  a  en  soin  de  inéjiager 
des  écoulenieiUs  pour  l'eau  de  la  pluie,  qui,  sans  cette  précaution,  d'ailleurs 
pnrrailcnicnt  entendue,  aurait  prunipteinent  miné  ces  substructions,  dans  les- 
quelles, en  outre,  on  peut  circuler  librement.  {/Voie  de  l'uuteur.) 

(2)  Un  endint  en  bitume  appliqué  sur  la  face  du  mur  du  côté  des  terres,  plus 
un  conlre-nmr  en  pierres  sèches,  ilont  les  cavités  faciliteraient  la  libre  circula- 
tion des  eaux,  qui  s'écouleraient  ensuite  par  des  barbacanes  ménagées  au  tra- 
vers de  la  base  du  nuu-  de  revêtement,  serait  bien  moins  coûteux.  Il  faudrait 
(pie  le  contrc-ninr  fût  porté,  dans  toute  son  épaisseur,  sur  inic  retraite  de  la 
basse  fondation,  disposée  en  forme  de  caniveau,  par  un  enduit  hydraulique  con- 
duisant l'eau  dans  les  barbacanes.  I^a  basse  fondation  serait  ainsi  préservée  de 
l'action  des  eaux,  cl  la  poussée  des  terres  diminuée;  car  on  sait  que  les  terres, 
surtout  les  argiles  et  les  marnes,  poussent  davantage  quand  elles  sont  saturées 
d'eau  ;  mais  il  faudrait  un  enduit  en  mortier  entre  le  bitume  et  le  conlre-nuir. 
Ce  moyen  serait  plus  écouomiipie  que  les  cavernes  voûtées  d'Isola-Bella  ou  deBa- 
liylone.  {Note  de  .17.  //.  J.) 


récoulement  des  eaux,  d'éviter  les  infiltrations,  soii  dans  le  sol,  s«iit 
dans  le  pied  elles  parois  des  mnrs  (1).  Les  autres  bâtiments  d'exploi- 
tation, comme  écuries,  vacheries  et  bergeries,  sont  exposés  auv  incon- 
vénients résultant  de  la  vapeur  qui  se  dégage  du  corps  des  animaux  ei 
vient  se  condenser  sur  les  parois  des  murailles  et  du  plafond;  cette  va- 
|)eur  est  irés-miisibie  a  la  conservaiion  des  buis,  qui  finissent  par  pour- 
rir; les  moyens  à  employer  pour  combattre  son  influence  consislcnt 
dans  un  bon  système  de  ventilation,  établi  de  manière  à  ne  pas  nuire 
au  régime  hygiénique  des  animaux.  De  plus,  il  conviendra  de  laisser  les 
solives  des  plafonds  apparentes,  plutôt  que  de  les  envelopper  de  plà- 
tie;  si  l'on  n'est  pas  arrêté  par  la  dépense,  on  remplacera  les  planchers 
de  bois  par  des  planchers  en  fer  et  poterie. 

Les  habitations  des  paysans  méiitenl  une  attention  particulière;  car. 
si  l'économie  la  pins  stricte  doit  présider  à  leur  construction,  la  salu - 
briié  est  pour  elles  une  condition  non  moins  e.ssenlielle;  or,  pour  les 
garantir  de  l'humidité,  nous  recommanderons  les  moyens  déjà  men- 
tionnés, savoir  :  obstacle  interpo.sé  dans  l'épaisseur  des  mnrs  contre 
l'humidilé  du  sol,  enduit  hydrofiige  on  enveloppe  avec  isolement  sur 
les  parois  exposées  ii  la  pluie,  sauf  le  choix  et  la  valeur  des  substances  à 
employer,  selon  les  pays  dans  lesquels  on  aura  ii  consimire;  mais  ces 
moyens  étant  dispendieux  et  d'une  exécution  diflicile,  nous  pensons 
que  c'est  autant  par  \,i  dis|)osition  desconslrnciioiis  que  par  la  forme  à 
leur  donner  qu'on  parviendra  à  obtenir  le  ré.-nliat  désiré.  Ainsi  nous 
conseillerons  aux  paysans  de  ne  pas  habiter  les  étages  bas,  d'abriter  les 
façades  de  leurs  deaieures  par  des  toits  très-saillants,  d'en  paver  le 
pourtour  et  de  ménager  des  pentes  pour  les  eaux,  de  choisir  cnlin  une 
exposition  convenable,  d'occuper  de  préférence  les  pièces  exposées  à 
l'Est,  etc.  Nous  ue  saurions  mieux  rendre  noire  idée  qnVn  prenant 
pour  exemple  les  chalets  de  la  Suisse,  dans  lesquels  les  conditions  que 
nous  venons  d'énnmérer  se  trouvent  très-bien  remplies,  et  qui,  par 
leur  construction  ingénieii.se  et  pitloresqiie,  méritent  d'être  pris  pour 
modèles  d'habilalious  rurales. 

Parmi  les  constructions  industrielles,  celles  qui  n'ont  à  craindre  que 
l'humidité  du  sol  ou  de  l'atmosphère  se  trouvent  dans  les  conditions  or- 
dinaires, et  les  préservaiils  que  nous  avons  indiqués  leur  sonl  applica- 
bles. Quant  aux  établisscmcnls  qui,  par  l'usage  auquel  ils  sonl  consa- 
crés, sont  exposés  à  une  humidité  provenant  d'autres  causes,  nous  pen- 
sons qu'il  sera  bien  plus  lacili!  de  les  en  préserver.  Ainsi  les  papete- 
ries, les  lavoirs  de  laine,  les  leintnrencs,  raflineries,  etc.,  dans  lesquels 
l'eau  doit  circuler  et  séjourner,  senmt  aisément  garantis  de  l'humidité 
accidentelle  que  le  besoin  d'eau  pourrait  occasionner;  les  moyens  .i  em- 
ployer seront  réglés  sur  la  manière  dont  les  constructions  seront  dis- 
posées pour  l'écoidementprontpt et  facile  de  l'eau,  et  d'après  le'svstèaie 
de  dallage  ii  adopter  pour  éviter  les  fuites  et  les  infilli allons.  L'eau 
qu'on  introduit  volontairement  dans  les  bâtiments  n'est  jamais  à  crain- 
dre, parce  qu'on  s'en  rendra  facilement  maître;  tandis  que  l'huraidilé 


(1)  Dans  tous  les  lieux  oti  l'eau  doit  s'écouler  sur  le  sol  el  où  elle  peut  filtrer 
par  les  fissures  qu'elle  rencontrerait,  il  sera  nécessaire  d'apporter  !e  plus  grand 
soin  dans  l'établissement  des  dallages.  On  obtiendra  un  bon  résultat  en  em- 
ployant les  enduits  d'asphalte,  qui  permettent  d'éviter  les  Joints.  Le  problème 
d'un  dallage  sans  joints  est  un  des  plus  utiles  que  l'industrie  ait  été  appelée  i 
résoudre;  si  l'on  considère  l'influence  pernicieuse  de  notre  climat  sur  les  dal- 
lages extérieurs,  composés  de  plusieurs  pièces,  et  qu'on  fixe  sou  attention  sur 
ces  grandes  surfaces  d'asphalte,  à  l'aide  desquelles  le  sol  de  la  place  Louis  XV 
est  en  partie  couvert,  on  ne  peut  s'empérher  d«  rccuiinaltre  les  avantages 
qu'on  doit  se  promettre  de  l'applicatiou  du  bitume  pour  remplacer  les  dal- 
lages ronipo.sés  de  morceaux  plus  ou  moins  grands.  L'asphalte  naturel  cl  les 
produits  bitumineux  ne  sauraient  cependant  £lrc  appliqués  dans  les  localités 
qui  réclament  un  certain  luxe;  et  c'est  pour  y  suppléer  qu'on  a  essayé  de  plu- 
sieurs substances  colorées  et  susceptil)lcs  de  se  prêter  aux  exigences  de  l'art. 
Tels  sont  les  pavés  à  la  vénitienne,  les  bitumes  végétaux,  el  autres  compositions 
qui  ont  pu  être  employées  avec  succès  dans  les  intérieurs,  mais  qui,  en  général, 
ont  mal  réussi  au  dehors.  (A'ote  dt  Cauttur.) 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


332 


iiihérenie  au  sol  ainsi  que  celle  de  l'alinosplière  onl  une  :iciion  con- 
siaiiit!  qu'il  ne  laul  |ias  négliger  et  contre  laquelle  il  faut  réunir  tous 
ses  efforts. 

Dans  les  établissements  où  l'emploi  de  la  vapeur  exposerait  les  con- 
siriiclioiis  à  (les  inconvénients  d'un  autre  genre,  on  parviendra  à  les 
éviter  par  une  vcnlilaiion  Itit-n  entendue  (I). 

Nous  terminerons  nos  ohservations  sur  les  différentes  chances  d'hu- 
midité auxcinelles  les  constrnclions  peuvent  être  exposées,  en  parlant 
de  l'humidlié  qui  se  manifeste  par  la  partie  supérieure  des  bâtiments 
couverts  en  terrasse.  Dans  notre  climat,  la  construction  des  terrasses 
exige  le  plus  grand  soin,  et,  comme  ou  les  établit  généralement  sur  des 
planchers  en  bois,  il  iiuportc  que  leur  revêtement  ne  soit  pas  expose  à 
se  fendre  parle  retrait  ou  la  flexion  des  solives  qui  les  supportent.  Le 
plomb  est  inconleslablemenlce  qu'il  y  a  de  mieux  pour  parer  à  cet  in- 
convénient; mais,  comme  il  doit  avoir  nue  certaine  épaisseur,  il  entraîne 
à  une  assez  forte  dépense.  Le  zinc  n'est  applicable  qu'aux  teriassessur 
l('si|nclles  on  ne  marche  pas  (2).  On  a  cherché  à  suppléer  au  plomb 
par  des  enduits  imperméables;  l'asphalte  a  été  employé  avec  succès; 
seulement  il  Tant  (|ue  ces  enduits  n'éprouvent  pas,  par  le  froid,  un  re- 
trait trop  sensible  et  capable  de  produire  des  tissures,  et  qu'en  même 
temps  ils  ne  soient  pas  exposés  à  se  ramollir  par  la  chaleur  au  point  de 
ne  pofivoir  y  marcher  sans  y  laisser  rcminciiile  des  pieds.  {'>}.  Avant 


(1)  Dans  les  ateliers  où  il  se  dégage  beaucoup  d'eau  à  l'état  de  vapeur,  tels 
(|ue  les  papeteries  mécaniques,  teintureries,  buanderies,  etc. ,  celle  vapeur  se 
cundcnse  sur  les  murs,  et  surtout  sur  les  plafonds,  d'où  elle  retombe  en  guutles 
d'eau  sur  les  ouvriers,  les  machines  et  les  produits,  auxquels  elle  cause  un  no- 
table duniniage.  Ensuite  les  plafonds,  s'il  y  en  a,  l'absorbent,  et  les  solives  du 
plancher  sont  bientôt  pourries.  II  faudrait  que  la  partie  supérieure  de  l'alelier 
fût  toujours  en  forme  de  vuùtc  le  plus  surhaussée  possible,  ou  de  plans  inclinés 
recouverts  d'un  enduit  bien  lisse  et  imperméable  autant  que  possible,  ou  de 
feuilles  de  métal.  Les  voûtes  ou  rampants  seraient  reçus  sur  une  imposte  ou 
cordon  creusé  en  gouttière  et  garni  eu  métal,  ou  enduit  inqierméable  avec 
tuyaux  de  décharge  pour  les  eaux  de  condensation.  Celles-ci ,  au  lieu  de  re- 
tomber, comme  nous  l'avons  dit,  couleraient  à  droite  et  à  gauche  en  sultant 
les  retombées,  et  seraient  reçues  dans  les  gouttières,  qui  les  porteraient  au  de- 
hors. {ISote  de  M.  II.  J.) 

(2)  Le  zinc  d'une  certaine  épaisseur,  le  n"  20,  par  exemple,  est  excellent 
|)Our  terrasse;  mais  il  faut  qu'il  soit  et  dilatation  parfaitement  libre.  Nous  avons 
fait  des  terrasses  de  4  à  5  mètres  de  largeur,  soudées  d'une  seule  pièce,  qui  se 
sont  bien  comportées.  Lorsque  nous  avons  fait  démolir  l'ancienne  usine  des 
l)ains  d'Engliien,  nous  y  avons  trouvé  des  doublages  de  planchers  en  zinc  n°  20 
posés  depuis  vingt  ans,  cl  encore  en  bon  état.  Ils  portaient  cependant  des  réser- 
voirs pleins  d'eau.et  même  des  fourneaux  en  briques  qu'on  cltaulTait  nuit  et  Jour 
dans  la  saison.  Ces  charges  rendaient  la  dilatation  captive.  On  jetait  sur  le  dou- 
blage tout  le  charbon  de  terre  qu'on  brûlait,  on  y  posait  et  on  y  laissait  tomber 
a  chaque  instant  les  pelles  ringards  et  une  foule  d'autres  ustensiles;  enfin, on 
ne  le  ménageait  pas  plus  qu'un  dallage.  La  température  y  était  toujours  très- 
élevée,  et  le  zinc  était  presque  constamment  couvert  d'eau,  tantôt  froide,  tantôt 
chaude,  qui  découlait  des  réservoirs.  Ces  eaux  ont  la  propriété  d'attaquer  le  zinc 
plus  que  le  plomb.  Eh  bien  !  malgré  tout  cela,  nous  avons  eu  rarement  des  ré- 
l)arations  à  y  faire.  Nous  avons  utilisé  la  plus  grande  partie  de  ce  vieux  zinc  à 
faire  des  revêtements  de  murs.  Le  plomb  eût  moins  bien  résisté.  Les  planchers 
de  la  nouvelle  usine  sont  doublés  de  la  même  manière;  ils  sont  encore  bien  plus 
chargés  que  les  autres,  et  la  température  s'y  élève  à  40  degrés  centigrades. 

Nous  pensons  que  le  zinc  est  susceptible  de  faire  de  magnifiques  terrasses, 
quand  l'industrie  nous  aura  donné  des  feuilles  de  ce  métal  aussi  grandes  que 
celles  qu'on  obtient  du  plomb  ;  car  ce  qui  nuit  le  plus  au  zinc  en  grande  surface, 
c'est  la  multiplicité  des  soudures,  qui  rendent  la  dilatation  irrégulière.  Son  grand 
défaut  est  .sa  sonorité  sous  les  pieds  des  passaut.s. 

(3)  Les  enduits  bitumineux  ne  valent  rien  sur  des  surfaces  Hexibles  comme  les 
planchers;  car  aussitôt  que,  par  l'action  du  soleil  et  de  l'air,  la  partie  huileuse 
et  volatile  du  bitume  s'est  évaporée,  le  bitume  perd  toute  son  élasticité  et  devient 
tellement  cassant,  (pie  le  moindre  jeu  des  bois,  la  moindre  retraite  par  le  froid, 
le  brise.  Nous  avons  eu  plus  d'une  fois  l'occasion  de  reconnaître  par  expérience 
cette  vérité;  après  avoir  dépensé  beaucoup  en  réparation  sur  des  terrasses  vieilles 


d'appliquer  l'enduit  bitumineux,  on  établira  une  aire  en  carreaux  de 
terre  cuite,  ainsi  que  cela  a  été  fait  avix  succès  aux  trottoirs  du  pont 
des  Saints-Pères,  et  l'on  combinera,  s'il  est  possible,  un  système  d'iso- 
lement (|ni  permette  à  l'air  de  ciicider  au-dessous  du  sol  de  la  terrasse. 
On  a  reconnu  aussi  qu'en  uppli(|uaut  sur  les  enduits  de  bitume  de  la 
couleur  blanche  ou  diminuait  les  effets  de  la  chaleur. 

il  est  encore  une  autre  voie  par  laquelle  riiiiniiiiité  ou  au  moins  les 
infiltrations  de  l'eau  peuvent  se  produire  dans  les  bâtiments  et  devenir 
très-nuisibles: c'est  celle  de  tuyaux  de  di^seente  mal  disposés;  il  ne  suffit 
pas,  en  effet,  de  recueillir  les  eaux  des  combles,  il  faut  encore  les  con- 
duire jusqu'au  sol.  Les  tuyaux  de  descente  employés  à  cet  effet  ne 
pouvant  souvent  pas  être  fixés  contre  les  façades,  on  est  réduit  à  les 
éiablir  à  l'Iniérieur  des  bâtiments  :  dans  ce  cas,  ou  ne  doit  point  les  en- 
c:isirer  dans  les  murs;  car  il  serait  impossible  de  découvrir  les  inllltra- 
tions  qui  se  produisent,  et  qui,  pouvant  devenir  considérables  dans  les 
temps  de  gelée,  causent  de  grands  dommages  anx(|uels  il  sera  presque 
impossible  de  remédier.  Nous  pensons,  en  principe,  que  les  tuyaux  de 
descente  doivent  être  apparents  et  accessibles,  et  que,  lorsqu'on  est  con- 
traint de  les  placer  en  dedans  des  bâtiments,  la  meilleure  manière  d'at- 
teindre ce  double  but  sera  de  les  établir  d.ins  des  cspèi;es  de  grands  vides 
en  inaçuiiiierie,  ménagés  dans  la  construction,  comme  des  tuyaux  de  che- 
minée, et  assez  larges  pour  contenir  un  ou  deux  tuyaux  de  fonte  ou  de 
plomb  et  livrer  passage  à  un  homme  dans  toute  leur  hauteur,  a  l'aide 
d'échelons  scellés  duis  les  murs  (I). 

Tel  est  le  résultat  de  nos  observations  sur  les  inconvénients  que  peut 
occasionner  l'humidité,  et  le  pr<iduii  des  études  que  nous  avons  faites 
pour  p.irvenir  à  lescombailre.  On  nous  reprochera  peut-être  de  n'avoir 


en  bitume,  nous  avons  toujours  été  obligé  de  les  refaire,  et,  mieux,  de  le*  rem- 
placer par  des  combles. 

Au  surplus,  quelle  que  soit  la  nature  du  couvert  d'une  terrasse  sur  charpente, 
il  est  indispensable,  comme  le  fait  remarquer  l'auteur  de  ce  mémoire,  d'aérer  l<>s 
vides  entre  les  solives.  Cela  se  fait  quel(|uefois,  mais  en  général  d'une  manière 
vicieuse.  Si  l'on  pose  l'aire  ou  le  plancher  qui  doit  porter  la  terrasse  immédia- 
tement sur  les  solives,  l'aérage  détient  très-compliqué,  puisque,  si  le  dessous  des 
solives  est  plafonné,  il  faut  un  ventilateur  aux  deux  extrémités  de  chaque  entre- 
vous.  (On  ne  fait  le  plus  souvent  qu'une  ouverture  ù  une  seule  extrémité.) 

Mais  quelque  Im>u  que  soit  l'aérage  et  quelque  imperméable  que  soit  le  rccou» 
vrenient  de  la  terrasse,  il  est  rare  que  la  face  supérieure  des  solives  en  contact 
avec  l'aire  ne  soit  pas  plus  ou  moins  pourrie,  surtout  si  l'aire  est  en  plltre.  Cet 
inconvénient,  qu'on  attribue  en  général ,  mais  souvent  i  tort,  i  l'eau  qui  peut 
traverser  les  pores  du  plomb  ou  du  bitume,  vient  de  l'humidité  de  l'air  qui  se 
trouve  reuferuiée  dans  l'épaisseur  du  plancher,  et  qui  se  condense  sous  l'aire 
parle  refroidissement  subit  de  l'atmosphère.  Ensuite  les  solives,  dont  les  fibres 
sont  dilTéremnient  disposées.  Jouent  d'une  manière  dilTérente  par  l'effet  des 
variations  atmosphériques,  en  se  haus.sant  nu  se  baissant  alternativement,  ce  qui 
brise  les  enduits  bitumineux  quand  ils  ont  perdu  leur  élasticité. 

On  obvie  i  ce  double  inconvénient,  et  l'on  rend  la  ventilation  très-facile,  en 
posant  en  travers  des  solives  une  série  de  lambourdes  arrêtées  avec  des  clous 
sur  chaque  solive.  On  obtient  ainsi  un  grillage  qui  relie  les  solives  entre  elles,  et 
neutralise  leurs  mouvements  dans  tous  les  sens.  Le  mouvement  de  bas  en  haut  des 
lambourdes  est  fort  peu  redoi'tal)le,  vu  la  faiblesse  de  leur  action  verticale;  d'ail- 
leurs, retenues  par  des  cUms  sur  les  solives,  et  chargées  du  poids  de  l'aire,  elles  ne 
peuvent  faire  de  mouvements  sensibles.  Ces  lambourdes  reçoivent  i  elles  seules 
l'impression  de  l'humidité  de  l'aire,  et  comme  elles  ne  sont  que  des  pièces  se- 
condaires, leur  détérioration  par  l'humidité  compromet  peu  la  solidité  du  plan- 
cher. Il  sera  bon,  au  surplus,  de  recouvrir  leur  face  supérieure  d'uue  couche  de 
goudron  avant  la  pose  de  l'aire. 

Quant  à  la  ventilation,  on  conçoit  qu'elle  sera  aussi  bonne  que  facile  à  établir, 
au  moyen  d'uue  .seule  ouverture,  ou,  mieux,  de  plusieurs  ouvertures  à  chaque 
extrémité  du  bâtiment,  <laiis  le  sens  de  la  longueur  des  lambourdes.  Les  vides 
entre  les  solives  seront  en  communication  par  les  vides  entre  les  lambourdes, 
et  le  courant  d'air  longitudinal  parcourra  principalement  la  région  des  lam- 
bourdes où  il  est  le  plus  utile.  (.Vote  de  J/.  //.  J.) 

(1)  On  voit  un  exemple  de  ce  système  à  la  chapelle  du  nouvel  hospice  de 
Charenton.  C'est  aussi  dans  los  constructions  de  cet  hospice  (|u'on  a  peut-être. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


33^ 


pas  assez  précisé  la  iialuie  des  obstacles  à  opposer  à  l'Iiuinidilé,  en  né- 
gligeant d'indiquer  les  substances  qui  doivent  entrer  dans  la  composi- 
tion des  enduits  bydrofuges.  Nous  répondrons  que  cette  question,  toute 
spéciale,  n'est  pas  de  noire  ressort,  et  que  la  Société  d'encouragement 
semble  l'avoir  compris  ainsi,  en  proposant  pour  cet  objet  un  prix  dis- 
tinct. Quant  aux  laits  pratiques  reconnus  par  l'expérience,  qui  auraient 
peut-être  dû  accompagner  celte  insiruction,  il  faudrait  qu'ils  pussent 
être  basés  sur  une  expérience  de  plusieurs  années  pour  être  de  quelque 
valeur. 

Ce  sont  donc  surtout  des  principes  généraux  que  nous  avons  voulu 
établir;  quant  à  la  manière  dont  l'humidité  agit  dans  les  constHiclions 
et  aux  moyens  de  la  combattre,  ces  principes  peuvent  se  résumer 
ainsi  : 

1°  L'humidiié  étant  un  des  plus  grands  fléaux  que  nos  constructions 
aienlà  redouter,  il  faut  la  prévenir  et  l'arrêter  avant  qu'elle  atteigne  les 
parties  où  elle  deviendrait  nuisible. 

2°  Les  seuls  obstacles  à  lui  O|)poser  sont  le  plomb,  les  enduits  com- 
posés de  cor|)sgias,  bitumineux  ou  résineux,  et  quelques  morliers  pré- 
parés pour  cet  usage. 

ô"  L'isolement  et  la  circulation  de  l'air  sont  les  meilleurs  moyens 
d'empêcher  l'humidiié  de  communiquer  avec  un  corps  quelconque. 

4"  Lorsqu'on  ne  pourra  pas  garantir  les  constructions  par  les  moyens 
ordinaires,  il  faudra  employer  les  matériaux  les  moins  hygrométriques 
et  les  éloigner  le  plus  possible  du  sol. 

5°  Il  y  aura  toujours  avantage  à  prévenir  les  effets  de  l'humidiié 
pend.int  la  consiniclion,  car  il  sera  difficile  de  la  combattre  quand  elle 
se  produira  dans  des  bâthnents  existants,  et  il  sera  impossible  de  l'en 
chasstr. 

6°  Avani  de  commencer  une  construction  ,  il  faudra  étudier  par 
quelles  voies  l'humidiié  pourrait  s'y  introduire,  arrêter  à  l'avance  les 
obstacles  qu'on  a  l'inieniion  de  lui  opposer,  puis  déteiminer  les  points 
où  ces  obstacles  devront  être  placés  cl  leur  nauire,  eu  égard  aux  diver- 
ses condiiions  parliculières  à  ces  constructions. 

(La  fin  prochainemcnl.) 


pour  la  première  fois,  eu  le  soiii  d'introduire  une  feuille  de  plomb  sous  tous  les 
murs  (■).  On  y  a  fait  également  un  heureux  emploi  de  l'asphalte. 

{yole  de  l'auteur.) 

—  Malheureusement,  ce  moyen,  très-coûteux  et  occupant  une  grande  place, 
ne  peut  être  employé  que  dans  les  grands  édifices,  lels  que  la  Madeleine,  où 
nous  l'avons  remarqué;  il  ne  faut  guère  songer  à  l'appliquer  aux  construclious 
ordinaires.  Mais,  dans  celles-ci,  si  l'on  veut  éviter  l'effet  jusqu'ici  peu  gracieux 
des  tuyaux  de  descente  apparents,  et  qu'on  veuille  les  loger  dans  l'épaisseur 
des  murs,  voici  comment  on  pourrait  opérer  pour  avoir  toute  sécurité  contre 
les  infiltrations. 

Si  le  mur  était  en  pierre,  on  pratiquerait  à  chaque  assise,  avant  la  pose,  un  trou 
dont  le  diamètre  excéderait  de  à  ou  5  cenlimètres  environ  la  grosseur  du  tuyau  ; 
on  placerait  le  tuyau  au  centre  du  trou  de  la  pierre,  et  on  coulerait  dans  le  vide 
annulaire  du  bitume  bien  chaud  et  assez  gras,  à  mesure  qu'on  poserait  les 
assises,  en  ayant  bien  soin  de  ne  pas  laisser  tomber  de  plâtre,  mortier  ou  pous- 
sière, dans  le  vide  à  chaque  rcpri.se.  On  aura  ainsi  un  double  tuyau  imperméa- 
ble. Le  bitume  interceptera  les  fuiles  qui  pourraient  survenir  à  la  foule,  et 
pourvu  que  le  tuyau  soit  droit  dans  toute  sa  hauieur  et  muni  par  le  bas  d'un 
coude  bien  arrondi,  les  engorgements  seront  faciles  i  dégager. 

Si  le  tuyau  devait  être  posé  dans  un  mur  en  moellons,  brique  ou  autres 
menus  matériaux,  le  tuyau  serait  d'avance  revêtu  de  bitume  et  blo(|ué  dans  la 
maçonnerie,  en  ayant  soin  de  faire  un  nœud  a  chaque  jonction. 

(Note  de  M.  ll.J.) 

—  Nous  pensons,  nous,  qu'il  serait  mieux  encore  de  laisser  les  tuyaux  appa- 
rents et  d'en  faire  des  motifs  d'ornementation,  plutôt  que  de  les  cacher  dans  les 
murs.  Nous  disons  même  que  logiquement  il  en  doit  être  ainsi. 

(Ao(e  de  M   À.  de  C.) 

(•)  Nous  avons  lu  quelque  part,  il  j  a  dix  ans,  que  ce  moyen  clail  connu  des  Ro- 
mains. {Note  de  M.  H.  J.) 


CHRONIQUE. 

SoiiMAiBE.  -Monde  M.  Le  Hère; -M.  LebasenGrèce;- Ussuiue»  de  Philippe 
Auguste  et  de  saint  Louis,  le  donjon  et  la  chapelle  de  Vincennes;  —  t)eui  pierrr» 
colossales;  Travaux  de  la  place  Vaihuhert;  -  Infortunes  des  candélabre»  du 
Honl-Uoyaletdela  rue  de  Rivoli;-  Drmolilion  de  la  chapille  de»  Aniionciade» 
bleues,  à  Saint-Denis;  —  Transport  d'un  phare  en  Angleterre.  —  Po»uc»Ti3ii» 

MOGTELLES. 

—  M.  Le  Père,  archiiecle  du  gouvernement,  membre  de  l'Institut 
d'Égypie,  vient  de  mourir  à  Paris  dans  sa  (|uatre-vingi-troisième  année. 
Nous  publierons  prochainemcnl  une  notice  biographique  sur  ceiMriisie 
distingue. 

—  M.  Lebas  est  en  ce  moment  en  Grèce.  Il  revient  de  C.trie,  où  l'on 
dit  qu'il  a  fait  des  découvertes  archéologiques  de  la  pins  grande  impor- 
tance. 11  doit  faire  exécuter  incessamment  des  foitilles  dans  les  ruines 
de  Delphes.  A  Athènes,  M.  Lebas  a  fait  mouler,  pour  l'Ecole  des  Beaux- 
Arts  de  Paris,  les  plus  beaux  restes  de  sculpture  qu'on  y  admire  en- 
core aujourd'hui  ;  avant  la  lin  de  son  voyage,  il  espère,  dit-on,  faire 
exécuter  des  modèles  complets  des  quatre  plus  beaux  temples  qu'ait 
élevés  l'antiquité. 

—  Depuis  quelque  temps,  des  échafaud.ages  sont  dressés  pourélever, 
sur  les  colonnes  de  la  barrièie  dti  Trône,  les  slatues  de  saint  Louis  ei 
(le  Philippe  Auguste.  Les  faces  des  statues  seront  tournées  vers  Vin- 
cennes ,  dont  ces  deux  rois  ont  bâti  le  célèbre  château.  On  parle  de 
détruire  le  donjon  et  la  chapelle;  nous  n'osons  croire  vraiment  à  l'exé- 
cuiion  d'un  pareil  acte  de  vandalisme  et  de  barbarie,  et  nous  repoussons 
ce  bruit  comme  une  calomnie. 

—  On  vient  de  bàlir  à  la  barrière  de  la  Gare  deux  pavillons  en  pierr« 
de  taille,  destinés  aux  bureaux  de  l'octroi  et  au  corps  de  garde.  Chacun 
de  ces  pavillons  sera  siirmonlé  d'un  fionloi»  triangulaire  formé  d'une 
seule  pierre  colossale.  Ces  deux  pierres  n'ont  pas  moins  de  5  mètres 
de  longueur,  et  elles  ont  environ  H  mettes  cubes  chacune.  Près 
de  là  on  consiruit  les  ma.ssifs  de  maçonnerie  destinés  à  soutenir 
le  quai  d'Austerlitz.  En  face  le  Jardin  du  Ifoi,  la  place  Valhubcrt  se 
découpe  en  tioltoirs  triangulaires  et  en  chaussées.  Celle  place,  qui 
n'était  point  pavée,  avait  assurément  besoin  d'être  améliorée,  mais  il 
nous  semble  qu'on  eill  pu  le  faire  sans  nuire  à  la  ciiculalion.  Les 
chaussées  ménagées  entre  les  irottoiis  sont  trop  étroites,  snrloui  du 
côté  du  Jardin  dit  Itoi.  Lors  des  jouis  de  reunions  ou  de  pronien:ides 
aux  galeries  du  Muséum  et  au  jardin,  les  voitures  slalionnaient  devant 
la  grilb;;  aiijiiurd'bni,  elles  doivent  aller  stationner  loin  de  l.i.  dans  la 
rue  de  BiiU'on  ;  il  serait  donc  à  propos  d'ouvrir  une  nouvelle  grille  sur 
cette  (lerniùie  rue.  Une  autre  observation  :  les  pierres  qui  forment  les 
angles  des  plates-bandes  destinées  à  encadrer  lesirnltnirs,  sont  cniiitées 
suivant  une  ligne  courbe,  mais  de  façon  à  ce  que  cette  courbe,  d'un  trop 

grand  rayo ait  pas  les  lignes  d'angle  pour  Ungentes.  Celle  coupe 

produit  le  plus  mauvais  effet,  el  nous  ne  comprenons  pas  que  l'adoii- 
nistraiion  ail  accepté  de  pareilles  pierres.  Les  vides  laissés  enire  les 
plaies- bandes,  d;iiis  les  espaces  triangulaires,  sont  remplis  jusqu'à 


335 


REVUK  DE  I;ARCH1TECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


336 


piéseiil  avec  de  la  terre.  Y  pl;inler:i-l-on  des  arbres,  y  élèvera-t-on 
des  fontaines,  ou  bien  y  coulera-t-oii  de  l'asplialie?  Nous  l'ignorons 
encore. 

—  iN'oiis  avons  signalé  dans  le  temps  (vol.  il,  col.  49)  la  rupinre 
d'un  des  candélabres  du  Poni-Koyal  par  le  choc  d'une  voiture.  Nous 
prédisions  alors  que,  malgré  les  chas.se-roucs  en  fonle  posés  depuis 
l'accident  à  chacun  d'eux,  les  candélabres  des  angles  seraient  atteints 
par  la  circonférence  des  roues.  Cette  prédiction  vient  de  se  réaliser  pour 
la  deuxième  fois  au  premier  angle  toiirnani,  côté  du  (|uai  d'Orsay. 

L'un  dos  candélabies  de  la  rue  de  Rivoli,  ipii,  par  la  grosseur  et  la 
forme  conique  de  lenr  base,  semblaient  défier  le  choc  des  plus  fortes 
voitmes,  vient  aussi  de  succomber.  Il  s'est  brisé  en  trois  morceaux 
dans  sa  chute. 

C.e  candélabre  a  été  rompu  dans  son  scellement  par  le  vice  de  con- 
forniaiion  du  scellement  lui-même,  qui,  an  lieu  de  former  une  surface 
conique  ou  cylindrique  coniinue,  est  divisé  en  quatre  branches  par 
quatre  cchancrures  en  arcade.  Ces  écliancrures  enlèvent  au  moins 
les  trois  quarts  de  la  force  du  scellement.  Comme  il  faut  un  passage 
aux  tuyaux  à  gaz,  ou  pourrait  les  remplacer  par  des  trous,  ou  bien  com- 
penser par  un  l)ourrelet  au  pourtour  la  diminuiion  de  la  section  du  scel- 
lement. Les  candélabres  de  la  rue  de  Rivoli  soni  d'assez  forte  proportion 
pour  ne  redouter  aucun  choc  de  voiture,  s'ils  n'avaient  pas  de  vice  de 
conformation  on  de  matière. 

Il  y  a  quelques  jours,  nous  avons  vu  dans  la  même  rue  des  ouvriers 
occupés  à  en  remplacer  un  autre  qui  avait  .subi  le  même  sort. 

Voilà  donc  cinq  accidents  du  même  genre  arrivés  en  deux  ans  à 
notre  connaissance,  les  trois  derniers  à  peu  près  dans  la  même  se- 
maine. Quand  on  pense  aux  terribles  résultats  qui  pouvaient  advenir 
de  la  chute  de  masses  de  fonte  de  4  à  5  mètres  de  hauteur  sur  deux 
des  trottoirs  les  plus  fréquentés  de  Paris,  ou  ne  peut  s'empêcher  de 
frémir.  Espérons  que,  bien  que  par  un  hasard  loni  providentiel  on 
n'ait  eu  à  déplorer  la  mort  ou  les  blessures  de  personne,  ce  n'eu  sera 
pas  moins  un  avis  salutaire  pOur  radmiiiistration,  qui  fera  désormais 
mieux  combiner  les  proportions  de  ses  candélabres,  et  ne  recevra  que 
des  fontes  de  bonne  qualité  pour  leur  confeciion.  La  Revue  donnait 
à  ce  sujet  dans  son  111°  volume,  colonne  459,  des  renseignements  qui 
pourront  être  utiles. 

—  On  vient  de  démolir  le  couvent  des  Annonciades  bleues  à  Saint- 
Denis.  La  charpente  du  dôme  de  la  ch.ipelle  de  cet  établissement  reli- 
gieux ,  qu'on  aperçoit  à  gauche  en  entrant  dans  la  ville,  est  démolie 
depuis  plusieurs  mois.  La  maçonnerie  elle-même  doit  bientôt  être  at- 
taquée. 

11  existe  encore  dans  l'intérieur  du  dôme,  bàli  par  Davillers,  archi- 
tecte de  Louis  XV,  une  série  de  bas-reliefj  d'un  irès-bou  travail,  qui 
ne  tarderont  pas  à  être  convertis  en  moellons. 

Il  y  a  deux  bas-reliefs  demi-circulaires  de  4  mètres  de  diamètre  ; 
quatre  bas -reliefs  carrés  de  2"°  00;  quatre  autres  oblongs,  aussi  de 
•2  mètres;  plus  huit  tympans  ornés  d'anges,  et  quatre  clefs  très-riche- 
ment ornées;  plusieurs  portraits  dans  des  médaillons. 

Transport  du  phare  de  Sulhertand,  en  Angleterre.  —  Le  phare  con- 
struit à  Sutherland  en  1802  a  76  pieds  anglais  de  hauteur  sur  un  dia- 
mèlre  de  15  pieds  i»  sa  base;  son  extrémité  supérieure  est  un  peu  co- 
nique vers  la  lanterne.  Il  est  construit  eu  pierres  polies,  et  renferme 
dans  son  intérieur  un  escalier  en  spirale.  Son  poids  total  est  de  338 
tonnes;  concentré  sur  une  surface  de  162  pieds  carrés  seulement,  il 
offrait  de  grandes  difficultés  pour  le  transport  de  sa  masse.  Néanmoins 
M.  Murray  proposa  de  tenter  l'opération  pour  éviter  les  frais  considé- 
rables qu'auraient  occasionnés  l'établissement  d'un  phare  temporaire  et 
la  construction  d'une  tour  nouvelle  sur  le  nouveau  point  où  l'on  se  pro- 
posait de  l'établir.  Il  basait  d'ailleurs  sa  proposition  sur  l'exemple  des 
États-Unis,  où  l'on  a  réussi  à  transporter  des  maisons  entières.  Une 
circonstance  accidentelle  vint  hâter  l'adoption  du  projet  de  M.  Murray; 
en  effet,  la  mer  fit  une  brèche  considérable  à  la  jetée  sur  laquelle 


la    tour  était   posée;  aussi  se  mil-on  à  l'ouvrage   le  13  juin   18il. 

Des  maçons  commencèrent  par  percer  des  trous  dans  lesquels  on 

introduisit  des  poutres  qui  furent  reliées  en  une  base  .solide;  sous  celle- 

{  ci,  et  direcleinent  sous  l'édifice,  furent  ensuite  placés  140  rouleaux  de 

i  fer  de  fonte  qui  glissaient  sur  8  lignes  de  rails  de  fer;  des  contre-foris 

I  extérieurs  soutenaient  la  masse  de  la  tour,  et  reposaient  sur  des  pièces 

de  bois  glissant  elles-mêmes  sur  d'aiitris  pièces;  le  frottement  était 

I  adouci  à  l'aide  de  savon  et  de  plombagine.  Les  moteurs  de  cette  énorme 

I  masse  élaienl  des  crics  qui  la  poussaient  et  des  vis  qui  la  liraient,  ainsi 

,  que  trois  puissants  cabestans  mis  en  jeu  par  18  hommes. 

Le  2  du  mois  d'août ,  la  masse  entière  fut  éloignée  de  sa  première 
position  de  28  pieds  6  pouces  vers  le  nord  ,  et  par  cette  première  opé- 
ration elle  se  trouva  sur  la  ligne  de  la  nouvelle  jetée.  Ou  changea  alors 
la  position  des  rouleaux  cl  des  poutres  de  glissement  de  manière  à  leur 
faire  suivre  d'abord  une  courbe  de  647  pieds  de  rayon  et  ensuite  une 
ligne  droite  dirigée  vers  l'est.  Dès  lors-  la  mas»;  entière  fut  mue  en 
avant  avec  une  vitesse  de  33 1/2  pieds  par  heure,  de  telle  sorte  qu'en 
quatorze  heures  de  marche  elle  parcourut  une  dislance  de  447  pieds. 
Il  fallut  perdre  beaucoup  de  temps  pour  changer  les  rails  et  les  poutres 
et  pour  les  poser  solidement,  à  mesure  que  la  niasse  avançait;  aussi  ce 
ne  futque  le  4  octobre  que  le  phare  arriva  à  l'extrémité  de  la  jetée,  où 
de  nouvelles  fondations  avaient  été  préparées  pour  le  recevoir.  Lorsqu'il 
y  fut  arrivé,  l'on  retira  l'une  après  l'autre  les  poutres  qui  lui  avaient 
servi  de  base  pendant  son  voyage,  et  l'espace  qu'elles  occupaient  fui 
rempli  de  maçonnerie  solide.  En  résultat  définitif,  la  tour  s'est  trouvée 
établie  dans  sa  nouvelle  place  avec  une  solidité  telle  que  l'on  n'a  pas 
remarqué  la  moindre  crevasse  dans  ses  murs.  Pendant  tout  le  temps  du 
transport,  l'on  a  constamment  entretenu  pendant  la  nuit  de  la  limiiëre 
dans  la  lanterne,  comme  de  coutume. 

La  dépense  totale  de  ce  travail  important  a  été  de  827  livres  ster- 
ling ;  or,  l'on  a  reconnu  que  l'on  a  fait  une  économie  de  893  livres  ster- 
ling en  adoptant  le  parti  de  transporter  la  tour  déjà  existante,  au  Heu 
d'en  consiruirc  une  nouvelle. 

PUBLICATION  NOUVELLE. 
Encyclopédie  de$  chemins  de  fer  et  des  machines  à  vapeur.  —  Sous 
ce  litre,  M.  Félix  Tourneux,  ingénieur,  ancien  élève  de  l'École  Poly- 
technique, a  publié  un  volume  grand  in-18,  qui  rendra,  croyons-nous, 
de  grands  services  aux  gens  du  monde  qui  s'intéressent  aux  grandes' 
questions  de  progrès  industriels,  en  mettant  à  la  portée  de  chacun  la 
technologie  des  chemins  de  fer  el  des  machines  à  vapenr,  restée  trop 
longtemps  l'apanage  exclusif  des  gens  spéciaux.  On  ne  craint  guère  que 
ce  que  l'on  ne  connaît  pas,  et  si  nous  voyons  encore  quelquefois  les  en- 
gins de  la  locomotion  rapide  inspirer  la  terreur  et  l'effroi,  la  cause  en 
est  dans  la  profonde  ignorance  où  se  trouve  la  généralité  du  public  sur 
les  combinaisons  souvent  si  simples  des  appareils,  dont  on  se  fait  des 
fanlômes.  Aujourd'hui,  d'ailleurs,  que  les  chemins  de  fer  tendent  à 
devenir  les  voies  ordinaires  de  communication ,  et  que  les  machines  i\ 
vapeur  sont  nos  coursiers  habituels,  il  n'est  plus  convenable  d'ignorer 
eniièreinenlles  noms  des  principaux  éléments  qui  les  composent.  Nous 
ne  considérons  pas,  toutefois,  le  livre  de  M.  Félix  Tourneux  comme 
exclusivement  utile  aux  gens  du  monde;  il  peut  l'être  encore  à  tous 
ceux  que  leur  art  met  en  rapport  direct  ou  indirect  avec  les  fabriques, 
les  chemins  de  fer,  la  navigation  à  vapeur,  etc.,  et  qui  pourtant  n'ont 
pas  besoin  de  faire  sur  ces  sujets  de  profondes  éludes. 

Erratum. 

Col.  287,  2*  ligne  :  Au  lieu  de  :  néantnoint,  il  y  manquerait  toujours 
l'intérieur  des  colonnes,  lisez  :  néanmoins,  il  y  manquerait  toujours  les 
colonnes  intérieures. 


L'un  des  rédacteur»  : 
ALPHONSE  DE  GALONNE. 


PARIS.   —  TTP.   LlCRlVPK   KT  COMP.,      KCB   D4aiRTT(  ,  3. 


337 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 

Saint-Gervais. 


338 


DEUXIÈME  INSTRUCTION  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 

DES   AUTS    ET    MONUMENTS. 
(SDITE,  voy.  col.  241  et  289). 


CIVILlSATrON  CHRÉTIENNE. 


STILE     noMAM     ET     STTI.E     CilOT  II  IQ  UE. 


OHAHIIHI!  II.  —  DÉTAILS  EXTÉIUEIRS  DE  L'ÉGLISE. 

(SCITS.) 

E.  Le  couronnement  porte  une  couverture  en  terrasse,  en  dôme 
ou  à  comble  ;  ces  divers  modes  de  couvertures,  et  surtout  le  der- 
nier, qui  est  le  plus  fiéquent,  doivent  donner  lieu  à  l'examen  de 
tout  ou  partie  des  points  suivants  : 

1»  Les  diverses  inclinaisons  successives  du  toit  dont  on  pourra 
trouver  la  trace  ; 

2"  La  nature  de  la  couverture  actuelle  et  des  couvertures  anté- 
rieures ; 

30  La  décoration,  les  dessins,  jeux  de  couleurs,  figures  en  re- 
lief et  en  entailles,  inscriptions,  que  peut  présenter  cette  couver- 
ture ; 

4°  L'ornement  de  faîtage  en  pierre  ou  en  plomb  qui  en  dé- 
core quelquefois  le  sommet,  le  fleuron  ou  l'acrotère  qui  le  ter- 
mine; 

Auvergne. 


Fig.   l.VJ. 


Normandie. 


Fig.  161. 


Fy,.  162 


5°  Les  couvre-joints  et  leurs  anteflxes; 

6"  Les  frontons  et  pignons  plus  ou  moins  aigus  à  leur  som- 
met ,  souvent  flanqués  d'autres  antefixes  de  grande  propor- 
tion ; 

Saint -Trophime  {Àrlet). 


Fig   163. 


Fig.  16». 


t'ig   165. 

7°  Les  chéneaux  et  gargouilles,  toutes  les  fois  qu'ils  mériteront 
quelque  attention  par  leur  forme,  par  leur  exécution,  ou  par  In 
présence  d'une  inscription; 

Saint-Sulpiee,  à  Pierrefimdt. 


Fig.  160. 


Fig.  166. 


T.   V. 


sa 


339 


REVUE  DE  LARCHITKCTURE  ET  DF.S  TRAVAUX  PURI.ICS. 


3W> 


8°  Les  objets  dont  la  ligne  extérieure  du  chéneau  est  bordée, 
et  qui  sont  ou  un  épanouissement  de  ce  même  cliéneau  (balus- 
trade), 

Sainl-Gervais  {Paris). 


Ifig.  167. 

OU  une  dépendance  du  toit  en  terrasse  (créneaux), 
burit  de  la  Loin. 


Fig.  108. 
on  un  couronnement  militaire  (mâchicoulis). 

Enceinte  d'Aigues-Mories.  Château  de  Mehun. 


Fig.  169. 


Fig.  170. 


L'ornement  de  faitage  et  la  balustrade  suivent  les  révolutions 
successives  de  l'ornementation.  11  faudra  donner  la  figure  ou  tout 
au  moins  l'indication  précise  du  motif  adopté  dans  leur  décoration; 
aux  XV'  et  XVP  siècles,  cette  décoration  se  compose  souvent,  pour 
la  balustrade,  d'une  inscription  en  caractères  gothiques  gigantes- 
(|ucs,  dont  le  texte  (ordinairement  une  antienne  ou  prière)  devra 
être  relevé  en  entier. 

/•'.  Les  murailles  des  églises  ont  trop  de  portée,  soit  à  raison  de 
leur  hauteur  et  de  leur  écartement,  soit  à  cause  de  la  poussée  des 
voûtes  substituées  aux  plafonds  de  la  basilique  primitive,  pour 
qu'on  n'ait  pas  senti  de  bonne  heure  le  besoin  de  les  renforcer  de 
distance  en  distance;  l'architecture  romane  y  avait  pourvu  au 
moyen  de  contre-forts  que  l'architecture  gothique  a  développés 
plus  tard  dans  ses  ares  et  piliers  butants. 

Les  premiers  contre-forts  sont  remarquables  par  leur  peu  de  sail- 
lie ;  ce  sont  ou  des  colonnes  plus  ou  moins  complètement  enga- 
gées, Fig.  171,  ou  des  pilastres  assez  grêles,  Fig.  172,  souvent 
même  de  simples  ressauts,  Fig.  173,  interrompant  de  distance  en 


Fij.  171. 


Fig  172. 


distance  le  plein  de  la  muraille  comme  les  chaînes  de  pierre,  et 
quelquefois  remaniés  ou  renforcés  plus  tard  pour  en  augmenter  la 
résistance.  Ils  s'élèvent  d'ordinaire  jusqu'au  couronnement;  néan- 
moins on  en  rencontre  (jui  se  terminent  par  une  retraite  en  lar- 
mier, Fig.  174,  en  c6ne,  Fig.  i7J,ou  en  pignon,  Fig.  170,  avant 


Fig.  171. 


Fig.  175. 


Fig.  176. 


d'y  atteindre;  il  en  est  enfin  qui  constituent  de  véritables  demi- 
tours  pouvant  servir  à  la  défense  de  l'édifice  ;  leurs  dimensions  vont 
toujours  en  augmentant,  et  leurs  larmiers  en  se  multipliant,  à  me- 
sure que  l'édilice  s'élève  et  que  la  voûte  s'y  introduit. 


Trive$. 


Fig.  177. 


341 


REVUE  DK  L'ARCHITECTUKE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


3fc2 


On  doit  quelquefois  distinguer  les  contre-forts  en  inférieurs  et 
en  supérieurs  :  les  premiers  sont  alors  ceux  qui,  appartenant  à  une 
portion  secondaire  de  l'édifice,  descendent  jusqu'à  terre;  les  se- 
conds, qui,  même  après  l'introduction  des  arcs-butants,  ne  consis- 
tent souvent  qu'en  une  simple  colonne  engagée,  ne  sont  que  le  pro 
longement  extérieur  des  piliers  ou  colonnes  qui  soutiennent  et  sé- 
parent les  travées  de  la  nef  principale  et  du  chœur. 

Cologne. 


L'architecture  gothique,  chez  laquelle  le  besoin  de  soutènements 
extérieurs  existait  bien  plus  fortement  encore,  réclama  des  appuis 
plus  efficaces  pour  comprimer  les  voûtes  élancées  de  ses  nefs  prin- 
cipales et  de  ses  chœurs;  c'est  alors  qu'arrivent  les  premiers  arcs- 
bubmts  partant  du  contre-fort  inférieur,  et  allant  de  là  s'appuyer 
sur  le  contre-fort  supérieur.  Quelquefois  ces  arcs-butants  primitifs 
sont  pleins,  ou  percés  seulement  soit  d'un  œil-de-bœuf  pour  en  al- 
léger la  masse,  soit  d'une  baie  de  communication.  Mais  bientôt  la 
saillie  toujours  croissante  des  portions  principales  de  l'édifice,  et  la 
forme  en  ogive  de  leurs  voûtes,  obligent  d'en  étendre  les  soutène- 
ments, quelquefois  doubles,  bien  au  delà  de  tout  ce  qui  les  entoure  ; 
c'est  alors  que  le  contre-fort  inférieur  s'allonge  en  pilier  butant,  et 


S:iint-Denis. 


Snint-Gervais  {Paris). 


ron,  appli(|ué  sur  une  de  ses  faces  ;  puis  il  reçoit  dans  sa  partie  su- 
périeure des  arcs  plus  ou  moins  complets  qui  vont  s'appuyer  con- 
tre les  murs  extérieurs  de  In  nef  ou  toute  autre  partie  élevée,  pour 
maintenir  la  poussée  des  voûtes,  et  forme  ainsi  une  ceinture  quel- 
quefois double  de  piliers  et  d'ares-butants. 

Dans  certains  cas,  cette  ceinture  de  piliers  butants  est  placée 
en  dehors  des  murailles  secondaires  de  l'église,  ou  n'y  a  été  rat- 
tachée qu'après  coup  par  l'adjonction  d'une  série  de  chapelles  à 
son  plan  primitif;  plus  rarement  ces  piliers,  isolés  de  la  masse  de 
l'édifice,  ont  été  liés  les  uns  aux  autres  par  une  série  d'arcs  la- 
téraux. 

Quelquefois,  comme  dans  la  Sainte-Chapelle  de  Paris,  les  arcs 
et  piliers  butants  ont  été  remplacés  par  de  longs  et  étroits  contre- 
forts projetés  jusqu'à  une  distance  notable  de  l'édifice. 

Charirei. 


Fig.  181. 

L'ornementation  des  contre-forts  et  des  piliers  butants  se  com- 
pose d'abord,  pour  les  premiers  (quand  ils  ne  consistent  pas  en  d  e 
simples  colonnes,  pilastres  ou  ressauts],  tantôt  de  colonnes  latéra- 
les, tantôt  d'imbrications  ou  contre-imbrications  figurées  sur  leurs 
diveVs  larmiers  ; 

Normandie. 


Fig.  179.  Fig.  180. 

s'arme  lui-même  souvent  d'un  petit  contre-fort  secondaire  ou  épe- 


Fig    182. 

pour  les  seconds,  d'un  pilier  carré,  pesant  et  court,  soutenaut 
un  arc  plus  ou  moins  complet,  qui  n'offre  guère  dans  l'origine 
d'autre  vide  qu'une  espèce  de  passage  pratiqué  à  travers  une  mu- 
raille pleine;  cette  muraille,  que  remplacent  quelquefois  des  co- 
lonnes et  arcades  rayonnant  d'un  centre  commun,  porte  une  gout- 
tière qui  se  bifurque  souvent  autour  du  pilier  butant,  pour  rejeter 


U3 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


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au  loin,  au  moyen  de  gargouilles,  les  eaux  des  toits  supérieur  et 
inférieur.  Au  XIII"  siècle  arrivent  les  légers  clochetons  carrés, 
souvent  à  jour,  les  édicules  avec  ou  sans  statues,  les  arcs-butants 
élancés  et  quelquefois  doublés,  les  pignons  figurés,  les  crosses  et 
autres  expansions  végétales  indigènes. 


Notre-Dame 
de  Parii. 


Notre-Dame 
de  Reims. 


Fig.  183. 


Fig.  184. 


Fig.  185. 


Au  X1V«,  les  ornements  s'amaigrissent;  le  clocheton  se  ferme, 
et  ses  angles,  au  lieu  de  suivre  ceux  du  pilier,  se  portent  souvent 
au  milieu  des  faces  de  ce  dernier;  au  XV^,  le  pilier  butant,  après 
s'être  pour  ainsi  dire  complètement  \égétalisé  dans  sa  partie  su- 
périeure, hérissée  de  crosses,  de  bourgeons,  de  fleurons,  et  de  tout 
ce  luxe  d'une  foliation  indigène,  riche  et  compliquée,  que  nous 
avons  déjà  eu  occasion  de  signaler,  y  joint  les  statues,  les  niches, 
les  dais  travaillés  à  jour. 


Fig.  186. 


Fig.  187. 


A  la  Renaissance  enfin ,  toute  cette  brillante  ornementation  cède 
la  place,  d'abord  à  des  arabesques  et  à  tous  les  caprices  de  l'époque 


Fig.  188. 

de  transition,  puis  aux  consoles  renversées  et  autres  lourds  appuis 
de  l'architecture  italienne  [Fig.  189). 

Èylite  de  la  Sorbonne  {Paris). 


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Fig.  189. 

On  rencontre  rarement  en  France,  mais  plus  souvent  en  Angle- 
terre, des'piliers  butants,  octogones  ou  hexagones,  ceints,  h  leur 
sommet  et  à  divers  points  de  leur  hauteur,  d'une  couronne  de  cré- 
neaux libres  ou  engagés. 

Nieuport. 


Fig.  190. 


34.5 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


3^6 


Les  murailles  de  toute  église  sont  nécessairement  percées  de 
deux  espèces  de  baies  :  les  fenêtres  et  les  portes.  Nous  nous  occu- 
perons d'abord  des  premières. 

[La  suite  au  prochain  numéro.) 


DES  ECURIES  AU  PREMIER  ÉTAGE. 

Dans  toutes  les  grandes  villes  il  y  a  des  quartiers  privilégiésqui, 
par  leur  position  ou  le  caractère  de  leur  entourage,  appellent  puis- 
samment les  populations  :  c'est  tantôt  l'aristocratie  qui  se  laisse 
attirer,  comme  au  West  End,  à  Londres,  et  tantôt  ce  sont  les  amis 
de  la  vie  facile  et  élégante,  ou  bien  de  riches  commerçants,  comme 
du  côté  de  la  Madeleine  et  de  la  rue  Neuve-Vivienne,  à  Paris.  Mais 
cette  affluence,  toujours  croissante,  finit  par  faire  angmenter  le 
prix  des  terrains  au  point  que  la  valeur  du  sol  atteint  et  parfois 
même  dépasse  celle  des  constructions  qu'on  y  élève  ;  alors  l'éco- 
nomie de  surface,  question  toujours  importante  dans  les  construc- 
tions urbaines,  devient  la  base  même  des  combinaisons  de  l'ar- 
chitecte. 

Les  remises  et  les  écuries  dont  nous  avons  donné  les  dessins 
dans  les  PL  14,  1.5,  16  et  17,  ont  été  construites  dans  le  quartier 
le  plus  aristocratique  de  Londres,  près  du  palais  de  lord  Stafford, 
dont  elles  sont  une  dépendance.  Elles  ont  été  élevées  vers  la  fin  de 
l'an  dernier  (1843),  sur  les  dessins  de  M.  Ch.  Barry,  esq.,  architecte 
dont  le  nom  est  devenu  européen,  et  dont  les  œuvres  renferment 
toujours  d'utiles  enseignements. 

Il  fallait  remiser  environ  seize  voitures,  et  trouver  des  écu- 
ries pour  vingt-quatre  chevaux;  de  plus,  il  fallait  loger  les  co- 
chers, les  palefreniers,  les  postillons,  et  disposer  des  emplacements 
pour  chacun  des  services  particuliers,  magasin,  sellerie,  galerie  de 
pansement,  etc.,  qui  se  rattachent  nécessairement  à  un  tel  établis- 
sement. 

Dispositions  générales. 

M.  Barry,  ayant  calculé  que  les  remises  avec  leurs  dépendances 
occupaientà  peu  près  la  même  surface  que  les  écuries  avec  leurs  dé- 
pendances, résolut  de  superposer  l'un  à  l'autre,  et  d'économiser 
ainsi  la  moitié  des  terrains,  de  la  cou\erture,  de  la  charpente,  et 
des  fondations  que  les  dispositions  ordinaires  auraient  demandées. 
Il  disposa  les  remises  au  rez-de-chaussée,  et  les  écuries  au  pre- 
mier étage;  bien  entendu,  il  fallut  donner  aux  murs  du  rez-de- 


chaussée  un  peu 'plus  de  force  que  dans  l'hypothèse  d'une  con- 
struction sans  étage. 

En  consultant  la  PI.  1 4,  on  verra  le  plan  du  rez-de-chaussée  et 
celui  du  premier  étage.  On  remar(|uera  que  la  façade  postérieure 
{II B)  est  trés-irrégulière  :  c'est  que  l'établissement  touche  de  ce 
côté  à  une  propriété  voisine  sur  laquelle  on  bâtira  sans  doute 
avant  peu  ;  c'est  ce  qui  explique  aussi  l'échancrure  triangulaire 
et  la  retraite  qui  se  voient  au  plan,  et  qui  donnent  des  moyens 
d'éclairage  et  de  jventilation  qui  subsisteront  dans  le  cas  même  où 
le  voisin  bâtirait  immédiatement  contre  l'établissement. 

E  A  (voyez  PI.  14,  plan  du  rez-de-chaussée)  désigne  la  façade 
principale. 

En  franchissant  le  passage  qui  donne  accès  à  l'intérieur  on  se 
trouve  dans  une  cour  entourée  de  quatre  corps  de  bâtiments,  cha- 
cun à  un  étage.  Nous  examinerons  d'abord  le  plan  général  du  rez- 
de-chaussée  ;  nous  monterons  ensuite  au  premier. 

En  consultant  le  plan  on  verra  que  le  devant  est  occupé,  à  gauche 
en  entrant,  par  les  logements  du  cocher  en  chef  et  de  ses  subordon- 
nés, et  à  droite  par  les  logements  du  palefrenier  en  chef  et  de  ses 
garçons  d'écurie;  on  verra  que  les  remises  sont  établies  sur  les  deux 
côtés  de  la  cour,  et  que  dans  le  fond  on  a  disposé  la  salle  à  mander 
des  domestiques,  le  calorifère  (dont  plus  loin  nous  parlerons  plus  au 
long),  le  trou  à  fumier,  la  première  rampe  du  plan  incliné  qui  con- 
duit au  premier  étage,  des  loose  box,  le  magasin,  et  une  petite  cour 
dans  laquelle  cstune  chaudière.  L'inspection  delà  PL  15,  qui  donne 
une  vue  de  la  façade  principale,  deux  coupes  longitudinales  et  une 
coupe  transversale,  servira  beaucoup  à  faire  comprendre  les  dispo- 
sitions des  lieux. 

Passons  maintenant  au  plan  du  premier  étage.  L'axe  de  la  pre- 
mière rampe  du  plan  incliné  se  trouve  sur  le  prolongement  de  l'axe 
de  l'entrée  principale  de  l'établissement;  à  partir  du  premier  palier, 
deux  rampes  se  présentent  conduisant,  l'une  à  gauche  et  l'autre  à 
droite,  aux  deux  galeries  de  pansement,  qui  s'étendent  parallèle- 
ment aux  écuries  et  sur  la  même  longueur.  Sur  le  devant,  à  gauche, 
au-dessus  des  logements  des  cochers,  sont  :  une  sellerie  avec  sa 
chambre  de  nettoyage  et  deux  logements  d'aides-palefreniers;  a 
droite  se  trouve  aussi  une  sellerie  avec  sa  chambre  de  nettoyage  et 
une  chambre  à  coucher.  La  sellerie  de  droite  est  beaucoup  plus  con- 
sidérable que  la  sellerie  de  gauche;  c'est  peut-être  parce  que  la  pre- 
mière est  destinée  à  recevoir  les  plus  fortes  pièces  :  les  harnais  pour 
les  attelages,  par  exemple.  Faisons  remarquer,  en  passant,  combien 
cette  séparation  de  la  sellerie  et  de  la  salle  de  nettovage  importe  à 
l'entretien  de  la  propreté  et  à  la  conservation  des  harnais,  etc.  ;  trop 
souvent,  ces  divisions  sont  négligées;  on  évite  aussi  par  économie 
de  faire  des  cheminées,  qui  permettent  cependant  de  combattre  les 
effets  de  l'humidité,  et  qui  facilitent  beaucoup  le  travail  du  net- 
toyage ;  à  la  vérité,  ces  économies  sont  quelquefois  obligws,  mais 
trop  souvent  aussi  elles  résultent  d'un  faux  calcul. 

Un  petit  approvisionnement  de  fourrage  peut  se  mettre  dans  les 
combles  qui  surmontent  le  corps  de  bâtiment  de  l'avant  et  celui  du 
fond.Lavoituredefoin  s'arrête  sous  laported'entrée,  et  son  déchar- 
gement se  fait  par  une  trappe  dont  on  voit  la  di$(>osition  PL  15, 
dans  la  coupe  longitudinale  faite  suivant  la  ligne  A  B  du  plan.  On 
charge  le  comble  du  bâtiment  du  fond  par  la  lucarne  (  voy.,  PL  tS, 
la  coupe  long,  suivant  .4  B).  Lorsque  nous  avons  pris  ces  dessins, 
à  la  fin  de  l'an  dernier,  le  bâtiment  n'était  pas  encore  entièrement 
fini  ;  aussi  nous  apercevons-nous  maintenant  d'un  oubli  que  nous 
avons  fait  relativement  au  mode  de  distribution  du  fourrage  dans 


3i7 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


3W 


les  écuries  ;  toutefois,  il  nous  semble  que  ce  service  pourrait  se  faire 
ainsi  :  les  galeries  de  pansement  avancent  chacune  de  quelques 
pieds  (1)  dans  le  corps  de  bâtiment  de  l'avant  (voy.  PL  14).  On 
pourrait  faire  une  trappe  au-dessus  de  chacune  de  ces  parties,  par 
laquelle  on  passerait  le  foin  ;  de  cette  manière  le  service  serait  direct, 
le  foin  ne  serait  Jamais  sali,  circonstance  désirable  pour  ne  pas  dé- 
goûter les  chevaux,  et  il  n'y  aurait  que  peu  de  perte;  de  plus, 
comme  chaque  galerie  de  pansement  est  séparée  de  son  écurie  par 
une  cloison,  les  miasmes  ne  monteraient  pas  dans  le  grenier  à  four- 
rage, autre  circonstance  qu'il  importe  de  prévoir  et  dont  généra- 
lement on  s'occupe  fort  peu.  Il  est  vrai  qu'en  consultant,  PL  i5, 
la  coupe  faite  suivant  E  F  G  H  An  plan  du  rez-de-chaussée, 
on  s'aperçoit  que  le  mur  de  séparation  du  grenier  et  de  l'é- 
curie ne  monte  pas  assez  haut  pour  que  cette  séparation  ait  lieu 
complètement;  mais  peut-être  le  mur  transversal  qui  sépare  la 
chambre  de  nettoyage  de  la  chambre  à  coucher  d'un  aide-pale- 
frenier monte-t-il  jusqu'à  la  couverture,  et  ferme-t-il  le  grenier 
de  ce  côté;  une  disposition  analogue  permettrait  la  même  supposi- 
tion pour  l'extrémité. 

Les  Remises. 

Chaque  remise  est  divisée  en  quatre  compartiments  destinés  à 
contenir  chacun  deux  voitures  à  la  file  ;  les  entrées  se  ferment  au 
moyeu  de  portes  pleines,  et  une  douce  température  y  est  mainte- 
nue pour  empêcher  l'action  de  l'humidité  et  des  grandes  variations 
atmosphériques,  qui  feraient  jouer  les  bois,  détruiraient  les  ten- 
tures et  pourriraient  les  cuirs  des  voitures. 

Toutes  ces  dispositions  sont  parfaitement  sages,  et  témoignent 
f»  la  fois  du  bon  goût  et  du  sentiment  d'ordre  et  d'économie  bien 
entendue  de  l'architecte  et  de  Sa  Seigneurie  ;  mais  au  milieu  de  la 
satisfaction  que  nous  fait  éprouver  ce  tableau  d'ordre  luxueux, 
devant  ces  équipages  aux  riches  tentures,  devant  toute  cette  ma- 
tière inerte  qui  ne  subira  jamais  les  extrêmes  du  chaud  et  du  froid, 
il  nous  semble  entendre  encore  les  frissons  glacés  des  pauvres  en 
haillons  qu'on  rencontre  dans  toutes  les  villes  de  la  Grande-Bre- 
tagne ;  nous  voyons  encore  ces  faces  maigres  et  bleues,  ces  pieds 
nus  sur  lesdalles  boueuses,  ces  grosses  mains  rouges  et  crevassées, 
cette  horrible  saleté,  livrée  de  la  misère  et  de  la  dégradation  mo- 
rale, et  ce  spectacle  affreux  nous  émeut  profondément.  Nous  ne 
demandons  pas  à  nos  confrères  de  nous  excuser  d'une  digression 
aussi  étrangère  au  but  de  cet  écrit  :  pour  être  artiste,  on  n'en  sent 
que  plus  profondément,  on  n'en  est  que  plus  ardent  à  réclamer  la 
suppression  de  toutes  les  laideurs  et  par  conséquent  de  toutes  les 
misères.  Ajoutons  toutefois  qu'on  aurait  le  plus  grand  tort  de  voir 
dans  ce  rapprochement  même  un  reproche  indirect  à  l'adresse  de 
lord  Stafford.  Sa  Seigneurie,  au  contraire,  est  un  des  plus  fer- 
vents et  des  plus  éclairés  protecteurs  des  beaux-arts;  on  le  dit  d'une 
grande  magnificence  et  d'une  grande  charité. 

LaPL  1 G  donne  les  dispositions  du  système  adopté  pour  le  chauf- 
fage des  remises  ;  il  consiste  dans  une  circulation  d'eau  chaude. 


(1;  Nous  avons  donin;  toutes  les  dimensions  en  pieds  et  pouces  anglais,  at- 
tendu que,  de  celte  manière,  on  évite  une  série  de  petites  fractions  que  la  con- 
version en  mesures  françaises  ferait  naître,  et  qui  cmpêclieraient  de  saisir  faci- 
lement les  rapports  des  dimensions  entre  elles.  Les  pieds  s'indiquent  par  un 
accent  aigu  '  et  les  pouces  par  un  double  accent  "  ;  ainsi,  6'.0"  signifie  0  pieds 
6  pouces. 


système  aujourd'hui  très-connu  et  dont  nous  ne  ferons  que  rappeler 
le  principe.  Au-dessus  du  foyer  (nous  en  avons  désigné  la  place  en 
traitant  des  dispositions  générales  du  plan  du  rez-de-ehaussée)  est 
une  chaudière  du  sommet  de  laquelle  part  un  tuyau  qui,  après  avoir 
circulé  dans  toutes  les  pièces  à  échauffer,  revient  déboucher  dans  le 
bas  de  la  chaudière;  au  fur  et  à  mesure  que  le  feu  chauffe  les  couches 
inférieures  de  l'eau  de  lachaudière,  leur  densité  diminue,  elles  mon- 
tent, et  sont  remplacées  par  d'autres  couches  plus  denses,  c'est-à- 
dire  plus  froides,  qui  se  chauffent  et  montent  à  leur  tour,  et  ainsi 
de  suite.  Il  s'établit  de  cette  manière  un  mouvement  de  circulation; 
l'eau  chauffée  s'engage  dans  la  branche  supérieure  du  tuyau,  ré- 
pand peu  à  peu  sa  chaleur  dans  l'air  ambiant,  et,  ainsi  graduelle- 
ment refroidie,  revient,  par  la  branche  inférieure  du  tuyau  de  circu- 
lation, se  rendre  dans  le  b;is  de  la  chaudière  ;  là,  elle  s'échauffe  de 
nouveau,  remonte  et  recommence  sa  course.  Au  sommet  de  la  chau- 
dière est  une  disposition  (jui  a  pour  objet  d'empêcher  que  des  acci- 
dents n'arrivent  par  suite  de  l'expansion  de  l'eau,  en  conséquence 
de  son  élévation  de  température  et  de  la  formation  même  d'une 
certaine  quantité  de  vapeur.  Cet  appareil  a  été  établi  par  M.  Price, 
de  Londres. 

Le  tuyau  à  eau  chaude  circule  dans  un  canal  creusé  dans  le  sol 
de  chacune  des  pièces  qu'on  veut  chauffer  ;  ce  canal  est  couvert 
d'une  plaque  de  métal  percée  de  nombreuses  ouvertures  pour  que 
l'airde  la  pièce  puisse  aisément  venir  en  contact  avec  le  tuyau. 

Comme  il  fallait  échauffer  à  la  fois  les  remises  de  droite  et  les 
remises  de  gauche,  on  a  adapté  deux  tuyaux  de  circulation  à  la 
chaudière,  et  en  examinant  la  PL  Ifi,  on  pourra  en  suivre  aisément 
les  différentes  circonvolutions.  Les  deux  branches  du  départ  se 
distinguent  parfaitement  ;  mais  les  branches  de  retour,  en  entrant 
dans  la  chambre  où  est  établi  le  foyer,  se  trouvent  dans  un  même 
plan  vertical,  et  on  n'en  peut  donc  voir  qu'une  seule.  Nous  avons 
donné  trois  sections  du  canal  de  conduite  qui  compléteront  l'intel- 
ligence de  ce  qui  précède. 

Les  Ecurie*. 

Pour  l'ensemble  des  écuries,  consultez  les  W.  14et  15;  pour  les 
détails,  voyez  la  PL  17.  Les  écuries  contiennent  24  stalles 
divisées  en  deux  groupes  de  7  et  deux  groupes  de  ô.  Chaque  écurie 
a  sa  galerie  de  pansement,  dont  elle  est  séparée  par  une  cloison  en 
bois  garnie  de  fenêtres  vitrées  pour  l'éclairage  des  écuries.  Afin  que 
cet  éclairage  fût  plus  complet,  on  a  établi  des  châssis  vitrés  dans  la 
toiture  au-dessus  de  la  galerie.  Voyez  cette  disposition  dans  la 
PL  17  (coupe  suivant  L  M).  On  remarquera  que  par  cet  arran- 
gement les  chevaux  reçoivent  toute  la  lumière  par  derrière,  dispo- 
sition excellente.  L'écurie  est  garnie  d'une  boiserie  jusqu'à  la  hau- 
teur de  6'  6"  environ;  les  séparations  des  stalles  sont  fixes,  avec  des 
embases  et  des  mains-courantes  en  fonte;  les  mangeoires  aussi  sont 
en  fonte  et  munies  en  avant  d'un  rouleau  cylindrique.  Les  râteliers 
en  fonte  forment  des  quarts  de  sphère;  on  en  voit  un  qui  est  indi- 
qué en  ponctué  dans  la  PL  17  (voy.  coupe  suivant  L  3/).  ■ 

Service  général  de  propreté. 

Au  premier  palier  du  plan  incliné  qui  sert  à  monter  aux  écuries 
se  voit  une  ouverture  K  qui  communique  avec  le  trou  à  fumier 
(voy.  PL  14).  C'est  par  cette  ouverture  qu'on  jette  les  balayures 
des  écuries  et  des  galeries  de  pansement.  Cette  position,  parfaite- 
ment centrale,  économise  le  travail. 


3W 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


3Ô0 


Les  moyens  adoptés  pour  l'écoulement  des  urines,  des  produits 
des  cabinets  d'aisance  et  des  eaux  pluviales,  ont  été  aussi  parfaite- 
ment étudiés  ;  chaque  stalle  pouvant  être  occupée  tantôt  par  une 
jument,  tantôt  par  un  cheval,  on  y  a  disposé  en  conséquence  deux 
systèmes  de  rigoles  extérieures  et  de  communication  avec  les  tuyaux 
d'écoulement  cachés  dans  le  sol  :  a  désigne  à  la  fois  le  point  le 
plus  bas  de  chaque  stalle  et  l'ouverture  grillée  par  laquelle  leseaux 
s'échappent;  a  désigne  aussi  une  grille  d'écoulement.  Dans  la  ga- 
lerie il  a  fallu  pourvoir  ù  l'écoulement  des  eaux  provenant  soit  des 
chevaux  en  pansement,  soit  même  de  la  pluie,  car  cette  galerie  n'est 
fermée  du  côté  de  la  cour  que  par  une  balustrade  (voy.  PL  17).  Une 
rigole  règne  d'un  bouta  l'autre  de  la  galerie,  et  les  lettres  e,e,  indi- 
quent les  ouvertores  grillées  par  lesquelles  les  eaux  s'écoulent. 
Toutes  ces  ouvertures  ,  a,  a, a...  a',  a  a...  e,  e,  communiquent 
avec  des  canaux  d'écoulement  dont  les  directions  et  les  dépendan- 
ces mutuelles  sont  indiquées,  PL  14  (plan  du  premier  étage),  par  des 
traits  ponctués.  En  y  regardant,  on  verra  que  les  tuyaux  d'écou- 
lement de  chaque  écurie,  avec  ceux  de  sa  galerie  de  pansement, 
convergent  vers  huit  points  c,  c,  c,...  qui  désignent  le  sommet  de 
huit  tuyaux  verticaux  dont  on  trouve  les  extrémités  inférieures 
marquées  en  c',  c',  e'.  .  dans  le  plan  du  re/.-de-chaussée.  Là,  au 
moyen  d'embranchements,  ces  huit  conduits  verticaux  se  dégorgent 
dans  trois  conduits  horizontaux,  d,  d,  d,  qui  eux-mêmes  déversent 
leurs  eaux  dans  un  même  conduit  rf',  d',  d' ,  qui  se  rend  directement 
dans  le  trou  à  fumier. 

Les  eaux  pluviales  qui  tombent  sur  le  toit  ou  dans  la  cour  sont 
également  entraînées  dans  le  trou  à  fumier  ;  celles  qui  tombent  sur 
la  couverture  sont  reçues  dans  des  chéneaux  desservis  sur  la  cour 
par  quatre  conduits  verticaux  qui  arrivent  en  t\  t\  t',  t',  et  se 
déchargent  presque  directement  dans  les  conduits  principaux  d',d'. 
Les  chéneaux  extérieurs  communiquent  avec  les  conduits  ce,  ce'.. 
Les  eaux  de  la  «our  s'échappent  par  les  ouvertures  /",  /",  f,  f.  qui 
sont  les  {X)ints  les  plus  bas  delà  cour  et  qui  communiquent  par  des 
embranchements  avec  les  tuyaux  d',  d'. 

Les  produits  des  cabinets  w,  w,  sont  également  entraînés  dans  le 
trou  à  fumier,  comme  on  le  voit  sur  le  plan. 

Conslrucliong. 

Les  murs  sont  en  briques  recouvertes  d'un  ciment  imitant  la 
pierre;  ils  reposent  sur  des  massifs  en  béton,  genre  de  fondation 
très-généralement  adopté  en  Angleterre.  Les  répartitions  des  re- 
mises sont  formées  de  piliers  en  pierre  et  de  colonnes  en  fonte  ;  les 
pieds  de  celles-ci  sont  engages  dans  des  embases  en  pierre.  Les  con- 
structeurs anglais  se  servent  souvent  aussi  d'embases  en  fonte  sous 
lesquelles  ils  placent  une  lame  de  plomb.  Kous  avons  dessiné  cette 
disposition  parmi  les  détails  delà  PL  16.  Tous  les  linteaux  qui  sup- 
portent le  sol  du  premier  étage  sont  en  fonte;  on  en  voit  les  plans, 
formes  et  dimensions  dans  la  PL  10.  Des  voûtes  en  briques  repo- 
sent sur  ces  linteaux,  et  leurs  retombées  sont  recouvertes  par  de 
petits  voùtains  qui  aident  à  arvaser  le  sol  de  l'étage.  Les  voûtes  au- 
dessous  des  écuries  sont  toutes  recouvertes  d'une  couche  de  bitume 
(voy.  PL  1"),  et  les  voùtains  servent  de  canaux  pour  porter  les 
eaux  jusqu'aux  conduits  verticaux  c'  c'...  Le  sol  au-dessus  des  voù- 
tains étant  rendu  de  niveau  par  de  la  maçonnerie,  et  une  petite 
fondation  étant  réservée  pour  porter  les  panneaux  de  séparation  des 
stalles,  on  a  établi  une  aire  générale  de  béton  dans  toute  l'étendue 
des  écuries,  et  là-dessus  on  a  coulé  une  aire  générale  d'asphalte. 


Une  a.ssise  de  pierres  minces  ou  de  dalles  relie  la  corniche  exté- 
rieure de  l'édifice  avec  le  mur,  et  neutralise  l'effet  du  surplomb. 
{Voy.  PL  17). 

Cesab  DALY. 


DE  L'HUMIDITÉ  D.\NS  LES  CONSTRUCTIONS 

ET    DES    MOYENS    DE    LA    PRÉVENIR     ET    d'v     REMÉDIER. 


MEMOIRE  DE  M.   LÉON  VAUDOVKR. 


(Suite  cl  du   Voy  col.  2«e  et  SIS;. 


Moyens  de  faire  eetser  let  inconvétiienli  de  l'humidilé  ou  de  t'en  pré- 
server dans  les  cons(ruelion»  txitlantet. 

Après  avoir  indi(pié  les  moyens  de  prévenir  les  iiicoiivéïiiciiu  de  l'Iiu- 
inidilé  lors  de  la  corislriiciion  des  bàtiinerits,  il  nous  reste  à  nous  oc- 
cuper des  moyens  à  employer  pour  les  faire  cesser  et  pour  s'en  garantir 
dans  les  consliiiclioiis  existantes. 

Nous  avons  déjà  l'ail  ressortir  rinsulTisance  des  enduits  ou  peinliires 
hydrofiiges  pour  aiteiiulre  le  but  qu'on  se  propose  ;  nous  examinerons 
s'il  n'y  aurait  pas  de  moyens  plus  effioaces  pour  y  parvenir. 

Supposons  que  les  murs  du  rez-de-chaussée  d'un  bâtiment  soieni 
envahis  par  riiuiniditc  cl  que  des  elTlorescences  extérieures  indiquent 
que  l'intérieur  de  ces  murs  est  salpèlré;  loin  de  clicrclier  à  renfenner 
rhiimidité  dans  le  mur,  il  faudra  iion-sculcnient  lui  laisser  la  possibililc 
d'être  absorbée  par  l'air  ambiant ,  mais  encore  l'aire  tous  ses  efforU 
pour  en  alténuer  les  causes.  A  cet  effet,  on  établira  des  cour.mts  d'air 
le  long  des  murs  ,  eti  contrebas  du  sol,  on  fera  des  caves  s'il  n'y  en  a 
pas,  on  posera  des  revèlements  extérieurs  cl  intérieurs  (1),  on  prendra 
eiilin  des  précautions  analogues  à  celles  que  nous  avons  déjà  prescri- 
tes lors  de  la  construction  des  bâtiments,  en  tant  qu'il  sera  possible 
de  les  mettre  à  exéculion;  mais,  dans  le  cas  où  ces  précautions  ne 
pourraient  cire  prises  après  coup,  comme  cela  arrivera  souvent,  ou. 
si  malgré  cela,  les  elTels  de  riiuuiidilé  conliuuenl  à  se  manifester,  il 
fauilra  avoir  recours  à  de  nouveaux  moyens  que  nous  allons  décrire. 
Pour  éviter  que  l'Iiumidité  exislanl  dans  un  des  murs  d'un  bàiinieni , 
eu  se  produisant  à  la  surface  intérieure  de  ce  mur,  pénclre  dans  les 
lieux  habités,  le  meilleur  parti  à  prendre  est  d'élever  en  avant  de  ce 
mur  une  cloison  en  briques  dures  posées  de  champ,  reliée  de  dis- 


(1)  Los  revêtements  inipcrniéables  appliqués  aux  deux  faces  d'uo  mur  sont 
plus  pernicieux  qu'on  ne  croit.  Ils  peuvent  conduire  l'buuiidilé  du  rci-Ue- 
chaussiiti  au  premier  étage  en  lui  dlant  tout  moj'cn  de  s'tivaporer  par  l'acUixi 
de  l'air;  iraus  en  avons  fait  plus  d'une  fuis  l'observation.  Des  revêtements  en 
zinc,  perlés  d'abord  a  une  liauleurplus  grande  que  celle  où  s'cicvail  riiumiUité 
apiiarciitc,  ont  été  dépassés.  Ou  y  mit  successivement  des  hausses  qui  rurcal 
dépassées  A  chaque  liivcr.  Nous  rimes  exécuter,  il  y  a  cinq  ou  six  ans,  daiu  un 
vieux  mur  de  refend,  une  reprise  en  sous-œuvre  qui  ne  s'élevait  qu'a  1  miu-e 
au-dessus  du  sol.  Cette  reprise  Tut  faite  en  meulière  et  mortier  liydraulique. 
On  TutoiiliRé  de  reposer  les  lambris  de  liautcur  recouvrant  les  deux  laces  Un 
mur  avant  que  la  reprise  fl'it  complètement  sèche  ;  eh  bien ,  au  bout  de  quelques 
mois,  l'huuiidiié,  ainsi  encaissée,  gagna  le  plafond,  élevé  à  plus  de  2  luètres  au- 
dessus  de  la  reprise.  Depuis  ce  temps  il  a  été  impossible  de  faire  disparaître  les 
taches  d'humidité  i  la  corniche.  Le  vieux  mur  étal^  salpêtre ,  et  tout  nous  fait 
craindre  que  les  portées  des  solives  du  premier  plancher  ne  se  pourrissenL 

'{Sou  dt  St.  H.  J.) 


351 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURK  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


352 


tance  en  dislance  avec  le  mur  même ,  mais  de  manière  à  laisser  un 
intervalle  de  2  ou  3  centimètres  qui  permette  à  l'air  de  circuler  entre 
le  mur  et  cette  cloison ,  dont  l'épaisseur  sera  celle  d'une  brique  de 
0"°  05.  Pour  surcroît  de  précaution,  les  briques  recevraient,  sur  leur 
paroi  inlérieure,  une  couche  de  bitume,  surtout  celles  qui  seraient  en 
contact  avec  le  mur,  et  la  surface  apparente  de  celle  cloison  serait  re- 
couverte d'un  enduit  de  plâtre  qui,  étant  bien  sec,  pourrait  recevoir 
les  lémures  ou  le  papier  qui,  pour  plus  de  précaution,  pourraient  être 
posés  sur  porte-tapisseries.  Ce  système  offrirait  toutes  les  garanties 
désirables  ,  et  on  n'aurait  plus  rien  à  redouter  de  rbuniidité,  dont  le 
corps  du  nmr continuerait,  il  est  vrai,  à  être  pénétré,  mais  qui  serait 
sensiblement  diminuée  parle  courant  d'air  établi  entre  la  cloison  et  la 
surface  du  mur  (1).  Pour  plus  d'économie,  on  pourrait  appliquer  sur  le 
mur  humide  des  montants  et  des  traverses  de  bois,  sur  lesquels  on 
clouerait  des  lattes  qui  recevraient  ensuite  un  enduit,  et  formeraient 
ainsi  une  cloison  très-mince  et  isolée  du  n)ur;  mais  ces  montants  se 
trouvant  exposés  à  rimnjidité  du  mur  avec  lequel  ils  seraient  en  con- 
tact, on  ne  pourrait  s'en  promettre  une  longue  durée;  il  faudrait,  dans 
ce  cas,  goudronner  les  bois,  ne  les  appuyer  tonire  le  mur  que  de  dis- 
tance en  distance,  ou  intei poser  du  plomb  du  coté  où  ces  montants  se- 
raient exposés  à  rinfluencc  de  l'humidité;  de  plus,  une  circulaiiun 
d'air  sera  toujours  nécessaire  (2). 

Le  principe  du  revêtement  isolé  est  de  tous  les  moyens  celui  qu'on 
doit  préférer,  par  les  raisons  déjà  déduites;  mais  comme,  dans  certains 
cas,  il  faut  éviter  de  diminuer  la  grandeur  des  pièces  par  celle  doublure, 
qui  aura  au  moins  7  à  8  centimètres  y  compris  l'isolement,  nous  exami- 
nerons s'il  n'y  aurait  pas  quelque  autre  système  à  adopter. 

Si  le  mur  dont  il  s'agit  sépare  deux  pièces,  et  qu'il  soit  nécessaire  de 
se  préserver  de  l'humidité  de  chaque  côté  de  ce  mur,  on  devra  adopter 
le  système  de  la  cloison  isolée  :  car,  si  l'on  appliquait  directement  sur 
le  nmr,  soit  un  enduit,  soit  une  composition,  ou  un  revêlement  imper- 
méable quelconque,  l'humidité,  ainsi  emprisonnée,  augmenterait  et 
exercerait  des  ravages  qui ,  pour  n'être  pas  apparents ,  n'en  seraient 
pas  moins  très-funestes.  Si,  au  contraire,  l'humidité  ne  se  manifeste 
que  dans  une  des  deux  pièces,  et  qu'on  parvienne  à  la  neutraliser  d'un 
seul  côté ,  elle  augmentera  évidemment  du  côté  opposé,  mais  sans  être 
aussi  nuisible  que  dans  le  premier  cas,  puisque  du  côté  qu'on  n'aura 
pas  préservé  elle  pourra  recevoir  l'influence  de  l'air  et  être  alternative- 
ment absorbée  dans  une  certaine  proportion.  Nous  pensons,  dansée 
cas,  qu'on  pourrait,  à  la  rigueur,  éviter  l'isolement  et  appliquer  directe- 
ment sur  une  des  parois  de  ce  mur  les  enduits  ou  revêlements  qu'on 
considérera  comme  les  meilleurs  préservatifs  ;  nous  devons  dire,  néan- 


(IJ  C'est  par  une  disposition  analogue  que  les  anciens  assainissaient  les  piè- 
ces destinées  aux  bains  ;  non-seulement  ce  genre  de  revêtement  isolé  les  pré- 
servait de  l'Iiumidité  et  du  froid,  mais  il  leur  permettait,  en  outre,  de  faire 
circuler  la  chaleur  derrière  les  parois  des  salles,  comme  nous  avons  déjà  vu 
qu'ils  la  faisaient  circuler  sous  les  dallages.  Dans  l'aiiliquité,  on  fabriquait  des 
tuiles  de  terre  cuite  qui,  par  leurs  dimensions  et  leur  peu  d'épaisseur,  se  prê- 
taient on  ne  peut  mieux  à  ce  genre  de  revêtement.  On  conçoit,  en  effet,  que 
ces  cloisons  auront  toujours  l'inconvénient  de  diminuer  l'étendue  des  pièces 
dans  lesquelles  elles  seront  pratiquées  ;  il  y  aurait  donc  avantage  à  ce  qu'elles 
fussent  aussi  minces  que  possible,  et  l'on  y  parviendrait  en  fabriquant  des  es- 
pèces de  dalles  spécialement  destinées  à  cet  usage;  mais,  en  tout  cas,  la  terre 
cuite  est  la  matière  qui  nous  paraît  la  plus  propre  à  remplir  le  but  qu'on  se 
propose.  (^'ote  de  l'auteur.) 

(2)  Les  lambris  en  menuiserie  ne  sont  autre  chose  que  des  cloisons  isolées 
analogues  à  celles  que  nous  proposons,  et  il  est  bien  constant  qu'en  lambris- 
sant, en  partie  ou  en  totalilé,  si  c'est  nécessaire,  une  pièce  dont  les  murs  sont 
humides,  on  aura  beaucoup  fait  pour  se  garantir  de  l'humidité;  mais  néan- 
moins on  pourra  encore  en  redouter  les  effets  si  l'on  n'a  pas  soin  d'établir 
derrière  ces  lambris  une  circulation  d'air  capable  d'en  atténuer  la  cause  prc- 
niièrc  et  d'assurer  la  conservalion  du  bois,  qui  devra  de  plus  être  gou- 
dronné. (7Vo(e  de  l'auteur.) 


moins,  qu'il  y  en  a  peu  qui  conserveraient  longtemps  nue  adhérence 
complète  avec  un  mur  dans  lequel  l'huniidiié  continuerait  à  exister,  sur- 
tout sur  les  murs  de  pierre,  qui  se  prctenl  diflicileiueni  à  l'applicaiioii 
des  enduits;  c'est  pounpioi  nous  préférons  à  un  enduit  appliqué  une 
composition  susceptible  de  pénétrer  dans  l'inlérienr  du  mur,  quelle  que 
soit  sa  consiruclion,  telle  que  celle  proposée  par  .MM.  Tkénardttd'Arcet, 
qui  nous  semblent  avoir  résolu  ce  problème  avec  succès.  Cei  enduit 
pourra  égalenu'nl  élre  apliqué  à  l'inlérienr  d'un  mur  de  face,  pourtu 
qu'il  soit  dans  une  exposition  favorable,  car,  l'une  des  parois  recevant 
l'influence  de  l'air,  l'humidité  ne  sera  pas  concentrée  dans  l'intérieur  du 
mur. 

Malgré  les  avantages  incontestables  qu'on  peut,  dans  certains  cas,  se 
promettre  de  l'enduil  d'Arcet,  on  pourrait  employer  avec  succès  un  sys- 
tème sans  isolement,  composé  de  carreaux  de  faïence  vernissés,  posés 
avec  un  bon  mortier;  mais  ce  genre  de  revêtement  n'étant  pas  appli- 
cable à  toutes  les  pièces  d'une  habitation  ,  nous  pensons  qu'il  suffira  de 
retourner  les  carreaux  en  plaçant  l'émail  du  côté  du  mur.  La  face  brute 
serait  susccpiible  de  recevoir  un  enduit  quelconque,  et  par  conséquent 
tel  genre  de  décoration  qu'on  voudrait.  Ce  revêtement  pourrait  être 
aussi  composé  de  carreaux  ou  de  tuiles  de  Bourgogne,  biluminées.  En 
rappel.int  ici  ce  (jue  nous  avons  dit  sur  l'emploi  de  terres  émaillées, 
nous  pensons  que  ,  dans  plusieurs  circonsl.Tiices  ,  on  peut  les  employer 
avec  avantage.  Déjà  des  bouchers  et  des  charcutiers  de  Paris  ont  adopté 
ce  genre  de  revêlement,  qui  recevrait  une  utile  application  dans  cer- 
taines usines,  dans  les  laboratoires,  dans  les  cuisines,  etc.  On  pourra, 
à  l'aide  de  revêtements  de  ce  genre,  qui  sont  en  usage  dans  plusieurs 
pays,  se  garantir  de  l'humidité  cl  obtenir  facilement  une  gtande  pro- 
preté. 

Un  autre  revêtement  à  appliquer  sur  les  murs,  et  dont  l'ellicacité 
est  reconnue,  consiste  dans  des  feuilles  de  plomb  extrêmement  minces, 
étendues  sur  toute  la  surface;  nous  n'hésitons  pas  à  en  recommander 
l'usage,  pourvu  que  l'on  ait  soin  de  ne  les  appliquer  que  sur  une  seule 
face  ;  car,  autrement,  l'humidité  préexistante  dans  le  mur  s'y  trouverait 
hermétiquement  renfermée.  La  seule  difOculié  que  présente  l'emploi 
des  feuilles  métalliques  consiste  dans  le  choix  de  la  composition  à  em- 
ployer pour  les  coller,  afin  qu'elle  puisse  sécher  facilement  et  se  fixer 
sur  les  cmluiis  de  difl'érenles  natures  sur  lesquels  on  peut  avoir  à  les 
appli(|ucr.  Il  est  inutile  de  dire  que,  quand  on  voudra  appliquensur  le 
mur,  soit  l'enduit  d'Aretl,  soit  un  ciment  ou  une  composition  hydrofuge, 
ou  même  un  revêtement  posé  sur  mortier,  il  faudra  dépouiller  le  mur  hu- 
mide de  son  enduit,  le  laisser  sécher  pendant  quelque  temps,  et  refaire 
ensuite  un  nouvel  enduit  (1). 

Résun)ant  les  moyens  à  l'aide  desquels  on  pourra  comballre  avanta- 
geusement l'huniidiié  dans  les  consiructions  existantes,  nous  recomman- 
derons particulièrement  : 

1°  Le  système  de  revêlement  avec  isolement  et  circulation  d'air; 

2°  Pour  les  cas  où  les  préservatifs  pourraient  s;ins  inconvénient 
élre  appliqués  directement  sur  le  mur,  l'enduit  d'Arctt  et  les  enduils 
de  bitume,  les  feuilles  métalliques,  les  carreaux  émaillés  ou  biiu- 
minés. 

Quant  à  l'humidité  qui  pénétrerait  dans  les  lùtimenis  existants,  par 
le  sol  même,  il  sera  facile  de  .s'en  garantir  par  des  moyens  qui  devront 
être  les  mêmes  que  ceux  que  nous  avons  déjà  indiqués  en  Iraitant  des 
précautions  à  prendre  lors  de  la  construction.  Une  aire  générale  d'as- 
phalte étendue  sur  le  sol  sera  toujours  le  moyen  le  pins  simple  et  le 
plus  sur  pour  éviter  l'humidité  quand  il  s'agira  d'un  rez-de-chaussée 
sans  cave  au  dessous. 


(1)  C'est  ici  le  cas  de  remarquer  que  les  enduits  de  mortier  de  sable  et 
chaux  hydraulique,  lissés  à  la  truelle,  qui  sont  excellents  pour  résister  à  l'hu- 
midité, sont  tout  à  fait  impropres  à  recevoir  la  peinture  à  l'huile,  qui  ne  peut 
y  adhérer  et  se  décompose.  (i\o/e  de  l'auteur  ) 


353 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


354 


Il  n'y  a,  suivant  nous,  aucun  moyen  d'éviler  les  dangers  que  pré- 
sente l'habitation  de  constructions  trop  récemment  exécutées;  pour 
hâter,  dans  ces  cunstruclions ,  i'évapumtion  de  l'humidité,  il  faut  avoir 
recours  à  la  circulation  d'un  air  vif  ou  chaud. 

Insalubrilé  des  rei- de-chaussée . 

On  a  dernièrement  Inséré,,  dans  quelques  journaux  ,  un  article  ainsi 
conçu  : 

«  Des  recherches  statistiques  opérées  dans  les  hôpitaux  de  Paris  ont 
«constaté  une  mortalité  effrayante  dans  la  chisse  des  portiers,  qui,  avec 
(I  les  habitants  des  rp/.-dechaussée,  forment  presque  exclusivement  la 
u  totalité  des  malades  atteinis  de  philiisie  et  de  rhumaiisme  aigus.  Ces 
«calculs,  présentés  à  l'Académie  de  médecine,  semblent  devoir  pro- 
«  voquer,  près  du  conseil  de  salubrité,  quelques  mesures  hygiéniques 
«  relatives  h  l'hahitaiion  du  rez-de-chaussée.  » 

Les  termes  de  cet  article  sont  trop  généraux  pour  pouvoir  être  dis- 
cutés, et  nous  n'adopions  les  faits  qu'il  avance  qu'avec  une  extrême 
réserve;  car  il  nous  semble  difficile  d'arriver,  par  une  semblable  sta- 
tistique, à  établir  une  moyenne  à  peu  près  exacte,  quand  on  pense  à 
toutes  les  circonstances  qui,  en  pareil  cas,  doivent  être  prises  en  con- 
sidération, telles  que  l'exposition  des  lieux  habités,  les  conditions  de 
construction,  d'aérage,  de  situation,  dans  lesquelles  ils  se  trouvent; 
l'âge  des  personnes  qui  les  habitent,  leur  état  de  santé  normal  anté- 
rieurement à  la  situation  accidentelle  dans  laquelle  elles  se  trou- 
vent, etc. ,  etc.  Néanmoins  la  question  mérite  d'être  étudiée  sérieuse- 
ment, et  nous  essaierons,  sinon  de  l'entreprendre,  au  moins  d'émettre 
quelques  idées  à  ce  sujet. 

En  général,  à  Paris,  les  rez-de-chaussée  habités  sont  dans  des  con- 
ditions très-défavorables  quanta  la  salubrité;  la  plupart  donnent  sur 
des  cours  (les  rez-de-chaussée  sur  les  rues  étant  ordinairement  occunés 
par  les  boutiques),  où  ils  prennent  le  jour  et  l'air;  ces  cours,  le  plus 
souvent  étroites  et  profondes,  sont  entourées  de  bâtiments  élevés  qui 
empêchent  le  soleil  d'y  pénéirer.  Si  l'on  ajoute  à  cet  inconvénient  la 
nature  des  constructions  dans  lesquelles  aucune  précaution  n'est  prise 
contre  l'humidité,  on  comprendra  combien  il  peut  être  dangereux  d'ha- 
biter des  lieux  semblables. 

Mais  un  rez-de-chaussée  situé  sur  le  derrière  d'un  hôtel,  ou  même 
d'une  maison  de  moyenne  importance,  et  élevé  convenablement  au- 
dessus  du  sol,  à  l'aide  de  vastes  caves  ou  d'un  étage  souterrain,  dont 
les  pièces  auront  une  hauteur  convenable  et  seront  ouvertes  sur  un 
jardin  ou  sur  une  vaste  cour,  au  midi  ou  au  levant,  pourra  toujours 
être  habité  sans  danger.  Ce  serait  donc  à  tort  ()u'on  soutiendrait  que 
tous  les  rez-de-chaussée  sont  insalubres.  Les  rez-de-chaussée  ne  sont 
dangereux  à  habiter  que  lorsqu'ils  sont  humides,  privés  d'air,  de  lu- 
mière et  de  soleil,  el,  à  cet  égard,  les  demeures  des  portiers  sont  dans 
les  conditions  les  plus  déplorables.  Outre  ces  inconvénients,  les  portiers 
sont  encore  exposés  à  des  courants  d'air  continuels,  parla  situation  de 
leurs  loges,  généralement  placées  au  pied  des  escaliers  et  sous  les 
portes  cochères.  Par  là  on  peut  juger  (|ne  d'autres  causes  que  celle  de 
l'humidité  contribuent  à  l'insalubrité  de  certains  rez-de-chaussée  et 
particulièrement  à  celle  des  loges  de  portiers,  et  qu'en  remédiant,  dans 
une  consirueiion,  aux  inconvénients  de  l'humidité,  on  n'aura  pas  tout 
fait  pour  la  rendre  saine  el  habitable  (1). 


(1)  A  Londres,  on  est  parvenu  à  rendre  sains  et  habilables,  non-seulement 
les  rez-de-chaussée,  mais  aussi  des  étages  situés  en  contre-bas  du  sol  des  rues. 
Ces  étages  sont  préservés  de  l'humidité  du  sol  par  un  isolement  assez  large  qui 
favorise  la  circulation  de  l'air  ;  de  plus,  la  grande  largeur  des  rues  et  le  peu 
de  hauteur  des  maisons  permettent  au  soleil  de  pénétrer,  même  dans  celte 
partie  inférieure  des  habitations,  où,  d'ailleurs,  on  ne  couche  pas;  et,  comme 
l'exposition  de  leur  façade  varie,  on  a  soin  de  réserver  par  derrière  un  espace 
assez  vaste,  planté  ordinairement  en  jardin,  sur  lequel  s'ouvrent  les  fenêtres 
de  la  face  opposée  à  celle  de  la  rue.  Cet  étage  n'a  donc  aucun  des  incouvé- 


A  Paris,  avec  nos  rues  étroites,  nos  maisons  d'une  hauteur  déme- 
surée, nos  cours  humides  et  sombres,  il  est  impossible  que  certaine 
rez-de-chaussée  puissent  être  habités  sans  inconvénient;  el  il  serait 
préférable  de  les  utiliser  de  toute  autre  manière.  Quant  aux  demeures 
réservées  aux  portiers,  il  y  a  de  la  cruauté  à  forcer  des  hommes  à 
vivre  dans  des  lieux  essentiellement  inhabitables.  Celle  question  nous 
semble  donc  mériier  de  fixer  l'attention,  et  nous  émettons  le  vœu 
qu'elle  puisse  être  prise  en  grande  considération  par  le  conseil  de 
Salubrité. 

Inconvénients  de  l'humidité  sur  les  œuvret  d'art. 

indépendamment  des  désastreux  effets  de  Thumidilé  sur  les  consinic- 
tions  en  général  et  dans  les  lieux  habités ,  nous  devons  signaler  ceux 
d'un  autre  genre  qu'elle  peut  exercer  sur  les  œuvres  d'art  placés  à  l'in- 
térieur et  à  l'extérieur  des  édifices. 

La  peinture  appliquée  sur  les  monuments  mêmes  doit  l'être  dans  les 
conditions  de  durée  les  jilus  rassurantes,  pour  remplir  convenablement 
son  but. 

Les  anciens  nous  ont  laissé,  à  cet  égard,  des  exemples  que  nous  ne 
nous  attachons  pas  assez  à  suivre.  En  examinant  les  peùitures  antiques 
encore  existantes  dans  les  ruines  de  Pompéîa,  qui,  après  être  restées 
enfouies  pendant  quinze  siècles ,  nous  apparaissent  encore  aussi 
fraiches,  aussi  éclatantes  que  si  elles  venaient  d'être  terminées,  il  est 
impossible  de  ne  pas  proclamer  rexcellence  des  moyens  employés  pour 
leur  donner  une  aussi  longue  durée.  Les  Allemands  ont  fait ,  à  ce  sujet, 
des  recherches  irès-minuiieuses,  et  ils  paraissent  être  parvenus  à  des 
solutions  presque  certaines,  autant  qu'il  est  permis  d'en  juger  par 
quelques  résultats  satisfaisants  obtenus  à  Munich. 

11  est  certain  que,  soit  par  la  nature  des  matériaux  employés  à  la 
construction,  soit  par  la  composition  des  mortiers  et  des  enduits  appli- 
qués sur  les  murailles,  soit  enfin  par  la  manière  dont  les  couleurs 
étaient  préparées  et  étendues  sur  les  surfaces  à  décorer,  il  n'était  sorte 
de  précautions  qu'on  ne  prît  pour  lutter  contre  les  chances  de  desiruc- 
tion  qui  auraient  pu  résulter  des  variations  de  l'atmosphère,  dans  un 
climat  cependant  plus  favorable  que  beaucoup  d'autres  (1). 

Le  caractère  de  durée  fut  toujours  celui  que  les  hommes  cherchèrent 
à  imprimer  h  leurs  œuvres.  Aussi,  plus  tard,  voyons-nous  les  chrétiens 
remplacer,  par  des  mosaïques  composées  de  matières  indestructibles, 
les  procédés  de  la  peinture  des  anciens.  Enfin,  quand  la  renaissance 
des  arts  eut  rendu  plus  exigeant  sur  les  moyens  d'exécution,  les  Ita- 
liens employèrent  la  peinture  à  fresque,  à  laquelle  nous  devons  les 
principaux  chefs-d'œuvre  de  l'école  florentine  et  de  l'école  romaine. 
L'usage  qu'on  a  voulu  en  introduire  en  France,  et  qu'on  s'est  trop 
hàié  de  proscrire,  par  des  motifs  qui  ont  peut-être  été  avancés  avec 
trop  de  précipitation  ,  nous  engage  à  donner  quelques  explications  sur 
la  matiière  dont  les  fresques  se  font  en  Italie  et  sur  les  causes  qui  en 
ont  assuré  le  succès. 

Eh  Italie,  on  bâtit  moitié  en.  pierre  et  moitié  en  briques;  les  murs 
intérieurs  et  les  voûtes  sont  ordinairement  en  briques;  de  sorte  que, 
lorsqu'ils  sont  destinés  à  être  décorés  de  peintures,  ils  sont  plus  propres 
à  recevoir  des  enduits  et  se  prêtent,  par  conséquent,  bien  mieux  aux 


nients  d'un  étage  souterrain,  et  il  présente,  d'ailleurs,  l'avantage  de  permet- 
tre aux  eaux  ménagères  de  s'écouler  directement  dans  les  égnuts,  sans  parcou- 
rir, comme  à  Paris,  le  sol  de  la  voie  publique  :  quant  à  l'imniidité,  toutes  les 
précautions  sont  prises  (lour  s'en  garantir,  et  ces  précautions,  sur  lesquelles 
nous  avons  pris  des  renseignements  sur  les  lieux,  sont  tout  1  fait  analogues  1 
celles  que  nous  avons  réunies  dans  cette  Instruction.  (Voyez  t'ig.  9.) 

[Kote  de  l'auteur.) 
(1)  On  ne  peut  douter  que  le  mode  employé  dans  les  peintures  de  Pompéia, 
qui  n'étaient  que  de  simples  décorations,  n'ait  été  le  même  pour  les  peintures 
historiques  et  monumentales  dont  parlent  les  anciens  auteurs. 

(A'o/«  dt  l'auttuT.) 

T  V.  23 


355 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


55C 


procédés  de  la  fresque.  En  France,  et  à  Paris  paniculièremeiit,  où  la 
pierre  abonde,  on  construit  les  monuments  tout  en  pierre,  et  c'est  sur 
des  murs  pareils  qu'on  a  voulu  essayer  de  faire  des  peintures  à  fresque. 
Les  principaux  inconvénients  d'une  telle  construction,  pour  ce  genre 
de  peinture  ,  sont  d'abord  la  difficulté  d'appliquer  un  enduit  sur  un 
mur  de  pierre;  puis  la  pierre  est  une  niaiicre  spongieuse  très-impres- 
sionnable aux  iniluences  atmosphéri(|ucs  et  aux  effets  de  Ibumidité  en 
général,  si  nuisible  dans  notre  climat.  Si  l'on  ajoute  à  ces  inconvé- 
nienls,  contre  lesquels  on  n'a  peut-être  pas  assez  essayé  de  lutter,  la 
difficullé  que  présentent  les  procédés  d'exécution,  on  s'expliquera 
pourquoi  on  a  renoncé  à  la  peintuie  à  fresque;  mais  comme  on  ne  pou- 
vait renoncer  à  exécuter  des  peintures  monumentales,  quelques  peintres 
ont  adopté  la  peinture  à  la  cire,  comme jie  présentant  pas  d'embns  et 
permettant,  tout  en  conservant  le  mat  de  la  peinture  à  fresque,  d'ar- 
river à  une  richesse  de  tons  supérieure.  D'autres,  lidèles  à  la  peinture 
à  l'huile,  ou  ne  voulant  pas  accroître  les  diflicultés  matérielles  de 
l'exécuiion,  se  sont  contentés  de  peindre  sur  les  murs  préparés  à  l'aide 
de  l'enduit  d'Arccl,  comme  ils  auraient  peint  sur  une  toile.  Ces  divers 
systèmes  ont  été  mis  en  prali(iue  sur  les  murs  de  pierre,  ce  qui,  selon 
nous,  ne  doit  être  nullement  rassurant  pour  la  durée  de  ces  peintures, 
surtout  lorsque  ces  murs  sont  exposés  aux  influences  les  plus  nuisibles 
de  l'atmosphère  :  car  alors,  quelles  que  soient  les  précautions  prises  à 
rinlérieur,  l'humidité  qui  pénètre  dans  le  mur,  par  le  sol  d'abord,  et 
par  les  parois  exléileures  ensuite,  finira  par  atteindre  l'intérieur  à  tra- 
vers les  pierres,  qui  sont  le  plus  souvent  tendres,  et,  par  conséquent, 
spongieuses.  Nous  ajouterons  que,  d'après  la  manière  de  construire  à 
Paris,  les  joints  des  murs  en  pierre  ont  environ  1  cenliniètre  d'épais- 
seur et  sont  en  mortier  ou  en  plâtre ,  de  sorte  qu'il  est  irès-diflicile 
qu'une  préparation  quelconque,  appliquée  sur  le  mur,  agisse  de  la 
même  manière  sur  les  joints  que  sur  la  pierre  ;  cette  préparation  péné- 
trera différemment  dans  la  pierre  et  dans  le  ciment  ou  le  plâtre.  L'air 
exercera,  par  la  même  raison,  une  influence  toute  différente  sur  les 
pierres  et  sur  la  matière  dont  les  joints  seront  faits,  cl  ces  joints  de- 
viendront bientôt  apparents  (1).  On  peut  en  conclure  qu'on  ne  saurait 
hésiter  sur  la  manière  de  construire  les  murs  destinés  à  recevoir  des 
peintures,  soit  à  fresque,  soit  à  la  cire,  soit  à  l'huile.  Ces  murs  doivent 
être  construits  ou  en  pierre  de  meulière,  ou  en  bri(pies,  afin  d'être  sus- 
ceptibles de  bien  recevoir  les  enduits  et  de  pouvoir  ainsi  éviter  l'incon- 
vénient des  joints.  Lorsque  la  stabilité  de  la  construction  ou  rordon- 
nance  extérieure  exigera  que  tel  mur  soit  en  pierre,  il  sera  facile  de  le 
revêtir  intérieurement  d'une  doublure  de  briques;  ce  qui  aurait  le 
double  avantage  d'éviter  les  inconvénients  auxquels  sont  sujets  les 
murs  de  pierre,  et  de  préserver  la  peinture  de  toute  humidité,  si  l'on 
a  soin  surtout  de  laisser  un  isolement  suffisant  entre  la  construction  de 
briques  et  celle  de  pierre  (2). 


(1)  Déjà  on  peut  remarquer  cet  effet  ilaus  les  peintures  exécutées  dans  cer- 
taines parties  de  l'église  Notre-Dame-de-Lorette.  Ce  que  nous  venons  dédire 
à  l'égard  des  murs  est  également  applicable  aux  peintures  sur  voûtes  en  pierre, 
quant  à  la  difficulté  d'appliquer  un  enduit  et  i  l'apparition  des  joints. 

[Note  de  l'auleur.) 

(2)  Le  Jugement  dernier,  qui  vient  d'èlre  exécuté  à  Munich  par  iM.  Corné- 
lius, a  été  peint  à  fresque  sur  un  double  mur  de  briques  isolé  du  mur  exté- 
rieur, auquel  il  n'est  relié  que  de  distance  en  distance,  pour  en  assurer  la  soli- 
dité. La  copie  du  Jugement  dernier  de  Miclicl-Ange,  exécutée  par  Sigalon,  a 
été  placée  à  l'école  des  Beaux-Arts  avec  les  plus  grandes  précautions;  celte 
copie,  qui  est  sur  toile,  est  entièrement  isolée  derrière,  et  deux  étages  de 
planchers  la  rendent  accessible  dans  toute  sa  hauteur.  Nous  croyons  donc  qu'on 
s'est  trop  hâté  de  proscrire  la  peinture  à  fresque,  et  l'argument  si  souvent  mis 
en  avant,  qu'elle  ne  peut  résister  dans  notre  climat,  nous  semble  tout  à  fait 
sans  fondement;  rien  ne  serait  plus  facile  que  de  parvenir  à  exécuter  des  fres- 
ques tout  aussi  duraliles  que  celles  d'Italie,  pourvu  qu'on  se  donnât  la  peine 
de  prendre  les  précautions  nécessaires.  [Note  de  l'auteur.) 


Les  réflexions  qui  précèdent  nous  ont  été  suggérées  par  la  belle 
peinture  de  M.  Delaroche  à  l'école  des  Beaux  Arts,  pour  la  durée  de 
laquelle  nous  ne  sommes  pas  sans  inquiétude.  Nous  regrettons  que, 
dans  cette  circonstance,  on  n'ait  pas  ein[)loyé  le  moyen  que  nous  avons 
indiqué  plus  haut  de  la  doublure  de  briiiues,  et  qu'on  ait  ainsi  livré  à 
la  pierre  une  œuvre  aussi  capitale;  aussi  nous  craignons  qu'elle  n'ait 
beaucoup  à  redouter  de  l'influence  pernicieuse  de  notre  climat.  Le  mur 
sur  lequel  celte  peinlure  a  été  exécjilée  est  en  pierre;  il  n'y  a  pas  de 
cave  sous  le  sol,  cl  sa  surface  extérieure  est  exposée  au  couchant; 
dans  de  telles  conditions,  ce  mur  est  snjet  à  s'inipn-gner  d'humidité, 
tant  par  sa  base  que  par  ses  parois  extérieures  exposées  à  la  jdnie.  Cette 
humidité,  en  pénétrant  forcément  dans  le  mur,  se  propagera,  et  Unira, 
dans  un  délai  plus  ou  moins  long,  par  atteindre  la  surface  intérieure. 
l'ci\i\u\l  d'Arcct,  appli(pié  à  l'intérieur,  parviendra-l-il  complètement 
à  l'arrêter?  telle  est  la  question  ;  car  la  coupole  du  Panthéon,  exécutée 
d'après  les  mêmes  procédés,  est  dans  des  conditions  toutes  différentes, 
et  ne  saurait  être  (irise  pour  exemple. 

Si  l'humidité  exerce  son  action  sur  les  peintures  faites  dans  l'inté- 
rieur de  nos  monuments,  celle  action  sera  bien  plus  directe  et  plus 
nuisible  sur  les  oriiemenls  de  sculpture  placés  à  l'extérieur,  surtout 
quand  ils  sont  eu  pierre;  dans  cette  circonstance,  l'enduii  Thénard  el 
d'Arcel  sera  d'un  grand  secours.  Sa  composition  et  la  manière  de 
l'emplover  sont  trop  connues  pour  qu'il  soit  nécessaire  d'entrer  dans 
de  plus  amples  détails  à  cet  égard.  M.  Kiif<,  entrepreneur  de  pein- 
ture, en  a  fait  d'heureuses  applications  :  s'occupant  plus  particulière- 
ment de  la  peinture  à  la  cire,  il  était,  plus  qu'aucun  autre,  à  portée  de 
se  livrer  au  perfectionnement  d'un  procédé  de  ce  genre;  les  travaux 
déjà  exécutés  par  lui  pour  préserver  des  ouvrages  de  sculpture  en 
pierre  des  eff'eis  de  rhumidilc  ont  pleinement  réussi  ;  nous  citerons 
entre  autres  les  quatre  groupes  de  l'arc  de  triomphe  de  l'Étoile ,  les 
huit  statues  assises  de  la  place  de  la  Concorde,  et  les  deux  bustes  qui 
décorent  l'entrée  de  l'école  des  Beaux-Arts. 

M.  Ftwe',  après  avoir  appliqué  à  chaud  l'enduit  hydrofuge,  le  couvre 
de  deux  ou  trois  couches  de  peinture  à  la  cire,  de  telle  couleur  qu'on 
désire,  et  à  laquelle  il  donne  l'apparence  du  grain  de  la  pierre.  La  pré- 
paration hydrofuge  peut  également  être  appliquée  avec  avantage  sur 
les  monuments  funèbres  exécutés  en  matériaux  susceptibles  de  se  dé-' 
lériorer  facilement,  sur  des  parois  de  muraille,  même  extérieures, 
pourvu  qu'elle  prévienne  l'envahissement  de  l'humidité  ,  el  qu'elle  ne 
la  concentre  pas. 

Dans  noire  climat,  le  marbre  même  n'est  pas  exempt  des  atteintes 
de  l'humidité;  lorsqu'elle  séjourne  longtemps,  el  que  la  poussière  s'y 
attache,  elle  engendre  des  lichens  qui  finissent  par  noircir  el  former 
une  croiite  qui  enlève  au  marbre  sa  trans()arence  et  à  la  sculpture  son 
effet.  On  a  cru  pouvoir  préserver  le  marbre  de  ces  effets,  en  l'impré- 
gnant d'une  composition  à  l'aide  de  laquelle  il  devait  rester  pur  el 
conserver  sa  couleur  naturelle.  Le  premier  essai  de  ce  genre  a  été  fait 
sur  les  sculptures  de  la  fontaine  de  Grenelle;  l'autre,  à  notre  connais- 
sance,  sur  le  piédestal  de  la  slalue  de  Louis  XIV,  de  la  place  des  Vic- 
toires. Non-seulement  ces  essais  n'ont  point  réussi,  mais  ils  ont  en- 
crassé les  marbres  el  en  ont  altéré  la  couleur  au  point  de  les  ramener 
à  un  état  pire  que  celui  où  ils  se  trouvaient  après  avoir  été  abandonnés 
.à  l'intempérie  des  saisons.  Nous  en  concluotis  que,  pour  conserver  le 
marbre,  il  est  inutile  d'employer  des  compositions  arliGcielles;  que 
cette  matière  n'a  rien  à  redouter  de  l'humidité,  si  ce  n'est  quelques 
lichens  et  des  taches  plus  ou  moins  désagréables  â  la  vue,  et  qu'il  suffit 
d'épousseter,  brosser  et  laver  les  monuments  de  marbre  exposés  a  l'air 
tous  les  cinq  ou  six  ans,  si  on  veut  leur  rendre  leur  état  primitif. 

En  terminant  cette  instruction,  nous  sommes  loin  de  prétendre  avoir 
résolu  toutes  les  questions  qui  se  rattachent  à  celle  de  l'humidité  et  de 
sa  funeste  influence.  Toutefois,  en  passant  en  revue  les  faits  principaux 
qui  peuvent  se  produire,  nous  espérons  avoir  établi  quelques  principes 
généraux,  susceptibles  de  servir  de  base  à  des  études  plus  complètes 


3&7 


RKVUK  DK  L'ARCHITECTURE  ET  JJKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


358 


et  plus  approfondies,  ei  que  rexpérience  seule  pourra  rendre  con- 
cluantes. * 

Explication  des  fiyuns  de  la  planche  18. 

La  Fig.  1  indique  la  manière  la  plus  sinfiple  dont  on  pourrait  établir 
le  revêlement  extérieur  en  d:ilips  de  |)ierrc. 

A,  mur  ;  U,  leuille  de  plomb  appliquée  sur  le  lit  supérieur  de  la  der- 
nière assise  ;  C,  planclior  posé  sur  lambourdes  et  béion;  D.  lambris  de 
menuiserie  formant  rc\êleuienl  intérieur;  £,  revers  en  asplialle  sur 
béton,  nécessaire  pour  proléger  le  pied  du  mur;  F,  dalles  en  pierre, 
avec  isolement;  G,  vcnlonse  destinée  à  introduire  l'air  dans  le  vide 
laissé  derrière  les  dallis. 

Fig.  2.  Disposition  d'une  banquette  saillanie  destinée  il  proléger  le 
pied  d'un  monument,  avec  revêtement  analogue  à  celui  de  la  figure 
prccéilcnie. 

A,  mur;  B,  leuille  de  plomb;  C,  dallage  posé  sur  bélon  ;  D,  revête- 
ment en  marbre  ;  E..  dalles  extérieures  séparées  du  mur;  F,  banquette 
saillante  au  pied  du  mur;  G,  ventouse  pour  l'inlroduclion  de  l'air  dans 
l'intérieur  de  la  bancpiclte;  U,  conduit  servant  à  introduire  cet  air  dans 
les  pièces  du  rez-de-chaussée,  où  il  pourrait  servir  à  alimenter  les 
foyers. 

Fig.  5.  Dallage  établi  sur  de  petits  murs  en  maçonnerie  avec  iso- 
lement. 
Fig.  4.  Dallage  établi  sur  constructions  en  briques  avec  isolement. 
Fig.  5.  Coupe  d'un  étage  souterrain  dans  lequel  on  voudrait  éviter 
les  inconvénients  à  l'aide  d'un  contre-mur  en  meulière  avec  enduit  hy- 
draulique. 

A,  mur  souterrain;  fi,  conlre-niur  en  meulière  avec  enduit  hydrau- 
lique; C.  mur  supérieur;  D,  extrados  de  la  voûte;  E,  plancher. 

Fig.  C.  Revêtement  de  briques  établi  dans  le  même  but.  Dans  l'un 
et  l'autre  cas,  on  placera  des  feuilles  de  plomb  ou  de  tout  autre  obstacle 
imperméable  à  deux  hauteurs  différentes  F  et  G;  H,  revêtement  en 
briques  isolé  du  mur  souterrain,  avec  enduit  hydraulique. 

Fig.'l.  Coupe  d'une  habitation  située  sur  la  déclivité  d'une  colline. 
Pour  éviter  les  inconvénients  de  l'humidité,  on  propose  de  laisser  un 
isolement  notable  A  entre  les  bâtiments  et  le  terre-plein,  d'établir  avec 
le  plus  grand  soin  un  mode  convenable  pour  l'écoulement  des  eaux  par 
une  rigole  B.  enfin  de  tout  disposer  pour  faciliter  le  plus  possible  la 
circulation  de  l'air.  A  l'orangerie  de  Versailles ,  qui  est  adossée  à  un 
terre-plein,  l'écoulement  de  l'eau  provenant  du  sol  supérieur  a  été  éta- 
bli avec  le  plus  grand  soin,  afin  de  préserver  le  mur  de  soutènement 
des  inconvénients  de  l'humidité. 

Fig.  8.  Cloison  de  briques  sur  champ,  formant  revêtement  avec  iso- 
lement sur  une  face  de  mur  humide. 

La  Fig.  9  indique  la  disposition  générale  des  plus  simples  maisons 
de  Londres  :  on  voit  que  le  sol  des  rues  est  toujours  exhaussé  au- 
dessus  du  niveau  du  sol  naturel,  afin  que  l'étage  inférieur  consacré  aux 
dépendances,  cuisines,  etc.,  ne  soit  pas  précisément  un  étage  souter- 
rain et  que  les  eaux  ménagères  puissent  s'écouler  directement  dans  les 
égouts.  L'isolement  qui  existe  entre  les  murs  de  faoe  et  la  voie  publi- 
que forme  une  espèce  de  fossé  ou  petite  cour  basse,  Irès-commodc  pour 
le  service.  Lorsque  ce  fossé  est  assez  large,  on  y  dispose  un  escalier 
extérieur  qui  permet  de  communiquer  du  dehors  dans  l'étage  bas  sans 
passer  dans  l'intérieur  de  la  maison.  La  cave  placée  sous  le  trottoir 
serti  contenir  le  charbon  de  terre,  qui  peut  y  être  introduit  par  un  trou 
percé  dans  la  voûte. 

A,  égout  de  la  ville  établi  au-dessous  de  la  chaussée  fi  (1);  C.  cave 
creusée  sous  le  trottoir  Cet  dont  la  voûte  est  percée  d'un  trou  E,  pour 


l'introduction  du  charbon;  F,  fos-sé  on  petite  cour  basse;  G,  étage  bas 
consacré  au  service;  H,  sol  d'un   petit  jardin  ;  J,  palier  à  mi-oUge; 
A',  niveau  du  sol  naturel. 
Fig.  10.  Plan  du  rez-de-chaussée  de  cette  maison. 

Addiliont  de  M.  H.  J. 

Nous  avons  apporté  aux  dispositions  de  la  Fig.  2  quelques  mod  (1- 
cations  indiquées  dans  la  Fig.  \  1 ,  d'après  les  motifs  donnés  dans  noire 
note,  col.  321.  A,  corps  du  mur  en  pierre;  B,  feuille  de  plomb  posée 
au-dessus  de  la  moulure  du  socle,  au  lieu  d'être  en  dessous;  C,  dal- 
lage; D,  revêtement  en  marbie  scellé  au  mur;  E,  couche  de  bitume 
posée  entre  deux  bétons  et  soudée  exactement  à  la  rive  de  la  feuille  de 
plomb;  F,  socle  en  pierre  dure  et  compacte ,  dune  seule  assise,  por- 
tant 0°"  70  d'épaisseur  au  moins,  pour  ([iie  le  rejaillissement  des  eaux 
pluviales  ne  puisse  le  dépasser;  G,  enduit  eu  asphalte,  engage  dans  une 
feuillure  pratiquée  sous  la  banquette  //,  et  posé  sur  bélon. 

Dans  la  Fig.  S,  il  est  indispensable  de  prolongera  feuille  de  plomb 
ou  l'enduit  en  bitume  F  jusqu'au  parement  du  contre-mur  fi,  et  de.re- 
couvrir  ce  parement  d'un  enduit  en  bitume  soudé  à  la  couche  horizon- 
tale fi,  et  se  prolongeant  jusqu'à  l'assise  saillante  ;  autrement  l'Iiumidilé 
entrerait  entre  la  rive  de  la  couche  de  bitume  F  et  le  parement  du  con- 
tre-mur B,  plus  dans  toute  la  hauteur  de  la  face  verticale  de  ce  con-» 
tre-mur;  car  si  le  contre-mur  B  est  imperméable,  il  faut  faire  le  mur 
entier  de  la  même  manière  et  supprimer  la  feuille  de  |)lonib  F,  qui  se- 
rait superflue;  si,  au  contraire,  il  n'est  pas  imperméable,  et  nous  en 
sommes  convaincu,  il  faut  absolument  jirolonger  le  préservatif  par- 
tout où  l'humidité  peut  passer. 

Fig.  6.  On  mettrait  une  couche  de  bitume  entre  le  mur  cl  le  pare- 
ment en  brique  //,  dans  toute  la  hauteur,  en  ayant  soin  de  souder  cet 
enduit  à  la  couche  F.  Il  serait  bon  qu'on  endui.-ii  également  le  dessous 
de  l'assise  saillante,  afin  que  lliumidite  ne  pût  remonter  par  là.  Dans  les 
Fig.  5etC,  il  faudrait  que  le  dessous  des  bunbourdes  arrivât  au  niveau 
de  la  feuille  de  plomb  G,  comme  dans  la  Fig.  V». 

Fig.  7.  La  voûte  souterraine  A  sera  recouverie  d'une  chape  en  bi- 
tume se  mariant  avec  la  couche  de  bitume  ou  la  feuille  de  plomb  que 
nous  proposerons  de  passer  sous  le  mur  de  face  coniigu.  Il  serait  en- 
core mieux  que  le  biiiime  du  mur  se  prolongeât  jusqu'à  linirados  de  la 
voûte  yl,  en  suivant  un  joint  entre  deux  rangs  de  voussoirs.  Celte  couche 
de  bitume  dans  le  joint  intercepterait  l'humidilé,  qui  s'iufillrerail  dans 
l'épaisseur  de  la  voûte  par  les  terres  adossées  au  mur.  Et  si  l'on  voulait 
rendre  le  passage  voûté  A  parlaiicmenl  sain,  il  faudrait  que  lu  chape 
de  la  voûte  se  prolongeât  sur  toute  la  hauteur  de  la  face  extérieure  du 
mur  adossé  au  terre-plein,  et  traversât  même  l'épaisseur  du  mur  à  sa 
base. 

La  Fig.  H  est,  comme  nous  l'avons  dit  plus  haut,  une  modiCcaiion 
à  la  Fig.  2. 


(1)  Il  se  trouve  dans  le  dessin  original  une  erreur  que  nous  nous  sommes 
fait  un  scrupule  de  reproduire  exactement,  en  indiquant  toutefois  par  un  tracé 
ponctué  la  construction  véritable,  telle  qu'on  la  voit  à  Londres,  et  telle  qu'elle  j 


doit  tire.  En  effet,  si  les  eaux  ménagères  étaient  amenées  par  un  conduit  ayant 
son  issue  à  la  partie  inférieure  de  l'égout,  comme  on  le  voit  dans  le  dessin,  il 
arriverait  souvent  que  ces  eaux,  au  lieu  de  s'écouler,  reflueraient  dans  la  cuisine; 
il  y  a  plus,  par  les  temps  de  pluie,  l'eau  des  égoult,  qui  monte  fréquemment 
jusqu'à  la  voûte,  inonderait  infailliblement  l'étage  inférieur  de  la  maison,  dont 
le  sol  est  ici  presque  au  même  niveau  que  celui  de  l'égout.  I,e  conduit  des  eaux 
de  cuisine  doit  venir  se  décharger  dans  l'cgoul  par  le  haut,  comme  les  lignes 
ponctuées  de  la  ligure  9  l'indiquent. 


—90t>— 


359 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBIJCS. 


MO 


PROJET  D'HOPITAL  POUR  800  MALADES. 

Depuis  longtemps  les  hôpitaux  àe  Paris  ne  suffisent  plus  aux 
besoins  de  la  population. 

La  plupart  ont  été  établis  dans  des  édifices  bâtis  originairement 
à  l'usage  des  communautés  religieuses,  et  auxquels  on  a  ajouté  des 
constructions  accessoires  pour  les  mieux  approprier  à  leur  desti- 
nation nouvelle. 

Malgré  ces  modifications,  ces  accroissements  successifs  ,  malgré 
les  elTorts  tentés  pour  améliorer  le  service  et  augmenter  le  nombre 
des  lits,  on  peut  dire  que  Paris  ne  possède  pas  encore  un  hôpital 
qui  présente  un  ensemble  satisfaisant. 

Aucun  ne  présente  une  disposition  largement  comprise  ,  offrant 
à  la  fois  toute  la  salubrité  possible ,  la  meilleure  répartition  dans 
le  service  de  santé,  une  surveillance  active,  une  grande  facilité 
dans  le  service  général,  et  la  plus  grande  économie  :  toutes  con- 
ditions cependant  indispensables  à  remplir. 

Ces  motifs,  et  l'insuffisance  toujours  croissante  des  lits  pour 
les  besoins  de  la  population,  ont  fait  sentir  le  besoin  d'uu  hôpital 
nouveau,  construit  sur  des  données  positives. 

C'est  donc  agir  dans  l'intérêt  public  que  de  rechercher  les 
moyens  d'obtenir  tous  les  avantages  que  nous  venons  de  signaler. 
La  tâche  est  difficile,  rien  de  ce  qui  existe  n'étant  directement 
applicable  à  la  solution  du  problème. 

Pour  atteindre  le  but  que  nous  nous  sommes  proposé,  nous 
avons  dû  nous  tracer  un  programme  renfermant  toutes  les  con- 
ditions à  réaliser  dans  la  disposition  de  ce  plan. 

Ces  conditions  sont  essentielles;  la  plupart  sont  indépendantes 
de  l'art ,  et  toutes  ne  peuvent  être  bien  comprises  qu'après  des 
études  sérieuses  faites  dans  les  hôpitaux  mêmes,  à  la  suite  d'entre- 
tiens avec  les  chefs  de  service,  seuls  aptes  à  sentir  les  inconvé- 
nients ou  les  avantages  de  telle  ou  telle  distribution. 

Voici  la  série  des  questions  auxquelles  il  fallait  trouver  une 
réponse  satisfaisante  avant  de  pouvoir  rédiger  même  le  pro- 
gramme d'un  hôpital  : 

r  Quelle  quantité  de  malades  devrait  contenir  un  hôpital? 

2°  Quelle  serait  la  meilleure  disposition  générale  à  donner  aux 
salles  ? 

3°  Quel  nombre  de  malades  devrait  contenir  chaque  salle  î 

4"  Quelles  sont  les  dépendances  indispensables  de  chaque  salle, 
et  de  quelle  façon  devraient-elles  être  disposées? 

5»  Quels  sont  les  besoins  et  les  convenances  de  la  pharmacie  et 
le  ses  dépendances  ?  '■ 

6"  Quels  sont  ceux  de  la  communauté  des  religieuses  ? 

7°  Quelle  est  la  meilleure  disposition  à  donner  aux  bains  et  à 
la  cuisine? 

8°  Aux  séchoirs  et  à  la  lingerie? 

9°  Quelle  devrait  être  l'importance  de  l'administration;  la 
composition  de  son  personnel  ? 

10°  Quelles  devraient  être  la  disposition  et  les  dimensions  de 
la  chapelle? 

tl°  Quelles  sont  les  dépendances  d'un  hôpital,  et  comment  doi- 
vent-elles être  distribuées  par  rapport  à  l'édifice  principal  ? 

12°  Quelles  dispositions  convient-il  de  prendre  pour  l'assainis- 
sement de  tout  le  rez-de-chaussée  et  pour  le  service  général  ? 

Sans  entrer  dans  les  détails ,  tels  sont  les  principaux  articles 


dont  la  solution  est  nécessaire  pour  la  rédaction  d'un  bon  pro- 
gramme â'bôpital. 

Je  vais  maintenant  rechercher  la  valeur  et  la  raison  de  chacun 
de  ces  différents  articles,  les  rapports  qu'ils  ont  entre  eux,  et 
le  genre  de  construction  le  plus  convenable  à  adopter  sous  le 
triple  rapport  de  l'art,  des  convenances  et  de  l'économie. 

Aidé  du  mémoire  de  l'Académie  des  Sciences,  de  renseigne- 
ments que  m'ont  fournis  des  personnes  spéciales  d'une  grande 
autorité,  et  des  observations  que  j'ai  faites  directement  sur  les 
hôpitaux  de  France  et  des  pays  étrangers,  j'essaierai  de  motiver 
chaque  partie  du  projet  que  je  propose  en  allant  au  fond  des  con- 
sidérations qui  m'ont  déterminé.  J'ai  l'espoir  qu'il  ressortira  de 
cette  discussion  quelques  avantages  qui  ajouteront  à  l'utilité  du 
projet. 

1°  Quel  nombre  de  malades  doit- contenir  tin  hôpital? 

On  s'accorde  généralement  à  reconnaître  que  le  nombre  de  six  a 
huit  cents  est  celui  qui  satisfait  le  mieux  aux  raisons  d'économie 
administrative,  et([ui  permet  les  soins  les  jjIus  assidus  et  la  surveil- 
lance la  plus  parfaite.  Pour  le  bien-être  des  malades,  il  faut  s'at- 
tacher a  éviter  la  confusion  dans  le  service,  et  il  est  de  l'intérêt 
de  l'administration  que  l'ordre  le  plus  parfait  règne  dans  toutes 
les  parties  de  l'établissement. 

Ces  conditions  importantes  ne  pourraient  pas  être  bien  remplies 
dans  un  hôpital  qui  contiendrait  deux  ou  trois  mille  malades;  un 
hôpital  aussi  vaste  présenterait  en  outre  de  graves  inconvénients  : 
on  ne  pourrait  construire  d'ailleurs  un  établissement  aussi  vaste 
qu'à  une  grande  distance  de  la  ville,  à  cause  de  l'immense  em- 
placement qu'il  exigerait  pour  satisfaire  aux  conditions  de  salu- 
brité ;  il  serait  moins  à  la  portée  des  malades  et  recevrait  moins 
proraptement  les  secours  des  médecins.  Les  proportions  limitées 
auxquelles  on  s'accorde  à  donner  la  préférence  me  paraissent  très 
convenables.  Suivant  les  besoins  de  la  population,  qui  peut  s'aug- 
menter encore,  on  pourrait,  dans  la  suite,  établir  de  nouveaux 
hôpitaux  aux  extrémités  de  la  ville  où  la  nécessité  se  ferait  le  plus  ' 
sentir;  de  cette  façon  ,  les  secours  ne  cesseraient  pas  d'être  immé- 
diats, et  seraient  également  répartis  entre  tous  les  habitans  (l). 

2°  Quelle  ferait  la  meilleure  dinposition  générale  à  donner  aiuc 
salles  ? 

La  disposition  générale  d'un  hôpital,  la  surface  de  terrain  qu'il 
con\  ient  de  lui  donner,  doivent  être  l'objet  d'une  appréx;iation  bien 
réfléchie.  Pour  laisser  le  moins  de  doute  possible  sur  la  validité 
des  motifs  qui  m'ont  dirigé  dans  la  disposition  des  salles  que  je 
propose,  je  procéderai  par  l'exposé  des  différentes  dispositions  qui 
ont  été  prises  à  différentes  époques  et  qui  sont  à  présent  condam- 
nées. 

Une  commission  de  l'Académie  des  Sciences,  dans  un  travail 
sur  les  hôpitaux  qui  date  de  1 785  (  voy.  les  Mémoires  de  l'Académie 
des  Sciences  ) ,  déplore  qu'à  V Hôtel-Dieu  les  salles  soient  si  ramas- 
sées, pour  la  plupart  doublées  dans  leur  épaisseur,  et  qu'il  y  ait 
autant  d'étages  superposés.  Ces  défiiuts  réunis  dans  un  même  édi- 
fice constituent  un  vice  tellement  capital ,  qu'il  suffit  de  le  signaler 
pour  qu'il  soit  apprécié  à  l'époque  où  nous  sommes. 


(1)  Évidemment  M.  Du  Puy  raisojine  ici  d'après  ce  fait,  qu'aiijourd'liui  les 
médecins  cliargés  de  visiter  les  hôpitaux  ne  s'y  consacrent  pas  exclusivement 
et  n'habitent  pas  i'hdpital  même;  mais  c'est  là  une  circonstance  qu'on  pourrait 
changer  dès  demain.  Si  on  admettait  l'utilité  de  transférer  les  hôpitaux  i  U 
campagne,  on  y  enverrait  des  médecins  résidants. 


361 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


863 


La  même  commission  eut  à  examiner  un  projet  d'iiôpital  qu'on 
proposait  d'établir  sur  l'emplacement  de  l'Ile  des  Cygnes  ;  les  diffé- 
rentes salles  de  malades  rayonnaient  à  partir  d'un  centre  commun 
où  on  avait  étal)li  la  cliapelle.  La  commission  blâme  avec  raison 
cette  disposition,  dans  laquelle  les  bâtiments  forment  entre  eux  des 
angles  aigus  vers  leur  point  de  convergence  ;  l'air  des  salles  ne 
peut  pas  être  changé  dans  les  parties  qui  s'approchent  de  la  cha- 
pelle, il  ne  peut  y  avoir  qu'un  échange  de  mauvais  air  d'une  salle 
à  l'autre,  les  croisées  des  bâtiments  voisins  étant  très-rapprochées 
entre  elles. 

Les  différents  hôpitaux  d'Italie,  presque  tous  disposés  et  bâtis  en 
vue  d'un  effet  d'art,  ont  généralement  les  salles  disposées  en  croix, 
ce  qui  reproduit  en  partie  aux  angles  des  salles  l'inconvénient  d'y 
conserver  un  air  corrompu. 

Les  salles  disposées  dans  des  pavillons  isolés  doivent  donc  l'em- 
porter surtout  autre  système;  c'était  aussi  la  pensée  delà  commis- 
sion, et  di'jà  nous  avons  vu  plusieurs  applications  de  cette  disposi- 
tion, par  exemple  au  nouvel  hôpital  de  Bordeaux,  et  à  Paris  à 
l'hôpital  Beaujon.  Mais  on  se  plaint  de  ce  que  les  pavillons  de 
malades  sont  beaucoup  trop  rapprochés  à  l'hôpital  de  Bordeaux, 
et,  en  outre,  de  ce  qu'ils  sont  reliés  à  leuts  deux  extrémités  par 
des  bâtiments  formant  ceinture.  Cette  disposition  nuit  en  effet  à  la 
circulation  de  l'air,  et  ne  remplit  pas  absolument  cette  condition 
essentielle  de  salubrité  suivant  laquelle  chaque  pavillon  devrait- 
former  en  quelque  sorte  un  petit  hôpital  isolé. 

Les  pavillons  annexés  à  l'hôpital  Beaujon,  quoique  très-mal  con- 
struits et  d'une  distribution  intérieure  très-vicieuse,  offrent  cepen- 
dant une  proportion  assez  convenable  entre  leur  développement  et 
l'espace  qui  les  sépare;  la  nécessité  qui  les  a  fait  ajouter  successive- 
ment à  l'établissement  primitif  nous  fournit  par  hasard  un  exem- 
ple de  la  simplicité  et  du  complet  isolement  que  nous  recherchons. 

J'ai  cru  devoir  disposer  de  la  même  manière  les  pavillons  prin- 
cipaux de  mon  projet;  ils  ne  sont  réunis  que  par  la  galerie  qui 
entoure  la  grande  cour  centrale  et  qui  les  dessert  tous,  en  les  re- 
liajit  en  même  temps  aux  autres  corps  de  bâtiments,  à  l'adminis- 
tration, à  la  chapelle,  aux  bains,  à  la  pharmacie,  à  la  communauté 
des  religieuses,  à  la  cuisine,  etc.  J'ai  voulu  qu'il  en  fût  de  même 
pour  les  pavillons  des  nourrices  et  des  enfants  ;  ils  communiquent 
également  par  leur  entrée  à  la  grande  cour,  qui  leur  donne  accès  à 
tous  les  bâtiments,  tandis  que  l'air  circule  librement  à  leur  extré- 
mitéqui  donne  sur  les  dépendances  :  de  cette  façon,  les  six  pavillons 
principaux  et  les  deux  pavillons  particuliers  sont  tous  dans  les 
mêmes  conditions.  Ils  ont  leur  entrée  sur  la  galerie  à  des  distances 
à  peu  près  égales,  et  chacune  des  croisées  des  salles  débouche  sur 
un  espace  libre.  Je  crois  devoir  dire  quelque  chose  de  la  néces- 
sité de  joindre  aux  pavillons  principaux  les  deux  pavillons  dont  je 
viens  de  parler  :  l'un  serait  affecté  aux  femmes  enceintes  et  aux 
nourrices  (  les  premières  au  rez-de-chaussée  et  les  secondes  au 
premier  étage),  et  l'autre  servirait  aux  enfants  des  deux  sexes,  sé- 
parés pareillement.  On  devra  reconnaître  qu'il  est  convenable, 
dans  un  hôpital  aussi  important  que  celui  que  je  propose,  d'ajou- 
ter ces  deux  pavillons,  et  de  leur  donner  une  position  particulière 
et  spéciale  à  leurs  attributions,  qui  ne  demandent  pas  un  aussi 
grand  développement  que  les  pavillons  principaux.  On  en  appré- 
ciera la  nécessité  en  songeant  à  l'insuffisauce  des  lits  destinés  aux 
enfants  malades,  au  petit  nombre  de  lits  affectés  aux  nourrices, 
et  enfin  au  besoin,  malheureusement  trop  fréquent,  de  diminuer 
le  nombre  des  femmes  qui  se  présentent  à  la  clinique  et  à  la  ma- 


ternité, établissements  trop  souvent  désolés  par  des  épidémies 
meurtrières. 

J'ai  pensé  que  les  pavillons  principaux  pouvaient  être  à  deux 
étages  ;  chacun  contiendrait  trois  salles  de  malades,  y  compris  celles 
au  rez-de-chaussée.  Il  a  paru  pourtant  préférable  à  la  commission 
des  savants  (Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences)  de  n'avoir  que 
deux  étages  de  malades  ;  mais  nous  devons  considérer  qu'ils  étaient 
sous  l'impression  des  observations  qu'ils  venaient  de  faire  dans  dif- 
férents hôpitaux  où  les  salles  étaient  ramassées  et  comprises  dans 
des  bâtiments  trop  rap[)rochés  ;  il  n'était  pas  étonnant  alors  que  l'air 
corrompu,  qui  ne  pouvait  pas  se  renouveler,  parvint  dans  les  étages 
supérieurs  et  y  rendit  la  mortalité  plus  grande.  Je  crois  devoir 
faire  observer  que  dans  les  conditions  nouvelles  où  se  trouvent  les 
salles  ainsi  disposées  dans  des  pavillons  tout  à  fait  isolés,  quand 
l'air  purpeut  librement  circuler,  quand  il  peut  si  facilement  chasser 
les  miasmes  impurs  qui  se  forment  dans  les  salles,  par  l'action  di- 
recte que  lui  offrent  des  croisées  convenablement  placées,  toute 
inquiétude  doit  cesser;  d'ailleurs  l'économie  de  terrain,  la  promp- 
titude dans  le  service,  fout  aussi  un  devoir  impérieux  de  ne  pas 
trop  disséminer  les  salles. 

«  Quel  nombre  de  malades  devrait  contenir  chaque  salle  ? 

On  admet  généralement  que  chaque  salle  doit  contenir  de  30  à 
40  lits;  ce  nombre  satisfait  aux  prescriptions  de  l'Académie,  aux 
exigences  du  service  de  santé,  aux  conditions  d'une  surveillance 
facile,  et  à  l'économie  administrative.  Les  salles  de  malades,  dans  le 
projet  que  je  propose,  contiendraient  trente-deux  lits,  et  il  y  aurait 
à  l'extrémité  deux  chambres  séparées,  qui  contiendraient  chacune 
trois  lits,  dont  deux  seraient  affectés  à  des  cas  très-graves,  et  celui 
du  milieu  à  un  malade  convalescent  qui  pourrait  avertir  les  sur- 
veillants, si  l'état  de  ses  voisins  réclamait  des  secours  immé- 
diats. 

Les  grandes  salles  auraient  34  mètres  de  long,  9  mètres  de  large, 
et  5  mètres  de  haut,  ce  qui  fournirait  pour  chacuu  des  malades 
48  mètres  cubes  d'air  respirable,  quantité  requise  par  l'Académie. 

La  largeur  des  salles,  portée  à  9  mètres,  permet  d'éloigner  les  lits 
des  murs  à  une  distance  de  50  à  60  centimètres,  eu  sorte  qu'il  est 
possible  de  passer  derrière  la  tête  du  malade,  et  de  lui  apporter  tous 
les  soins  que  son  état  peut  réclamer.  Cet  isolement  facilite  aussi 
l'entretien  de  la  propreté  et  la  libre  circulation  de  l'air. 

Je  n'ai  pas  cru  devoir  placer  les  convalescents  dans  un  pavillon 
séparé  ;  quelques  personnes  pourtant  admettent  cette  distinction  : 
elle  ne  fait  rien  à  la  disposition  du  projet,  car  il  serait  facile  d'af- 
fecter un  pavillon  aux  convalescents,  ou  de  disposer  pour  eux  d'un 
étage  dans  chacun  des  pavillons.  Mais  les  malades  qui  entrent  en 
convalescence  ne  sauraient  être  mieux  que  sous  la  direction  de  la 
personne  q\ii  les  a  traités.  D'ailleurs,  mettrait-on  les  convalescents 
fiévreux  avec  les  blessés"?  Dans  quelles  proportions  les  uns  seraient- 
ils  aux  autres?  Qui  serait  chargé  de  ce  service?  On  sent  bien  qu'il 
existe  une  grande  lacune  pour  ce  qui  concerne  les  convalescents 
proprement  dits  à  leur  sortie  de  l'hôpital;  du  repos,  un  air  sain  et 
une  bonne  nourriture  seraient  bien  désirables  pour  eux  ;  mais  il  y 
a  loin  de  ceux-ci  aux  malades  entrant  en  convalescence,  à  ceux  qui 
viennent  d'échapper  aux  accidents  aigus  et  qui  doiventjusqu'à  leur 
sortie  rester  sous  la  surveillance  du  médecin  ou  du  chirurgien,  sous 
peine  de  tomber  dans  de  graves  rechutes. 

Cette  séparation,  d'ailleurs,  ne  me  parait  pas  présenter  un  grand 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


364 


avantage  dans  un  hôpital  bien  disposé,  où  toutes  les  précautions 
sont  prises  pour  le  bien-être  de  chacun. 

Quelles  sont  les  dépendances  indispensables  de  chaque  salle,  et  de 
quelle  façon  seront-elles  disposées. 

En  face  des  escaliers  qui  arrivent  dans  les  vestibules  communi- 
quant de  chaque  salle  principale  à  la  galerie,  je  propose  d'établir 
une  pièce  servant  à  la  sœur  surveillante,  qui  pourrait  aussi  servir  de 
salle  d'opérations.  La  commission,  dans  le  mémoire  de  l'Académie, 
réclame  seulement  une  salle  d'opérations  pour  les  opérés  de  chaque 
sexe,  et  plusieurs  personnes  sont  de  cet  avis;  mais  il  faut  considé- 
rer qu'à  l'époque  où  cette  nécessité  fiit  sentie  on  opérait  les  malades 
dans  leur  lit,  que  leurs  voisins  entendaient  leurs  cris,  étaient  té.- 
moins  de  leurs  angoisses  ;  cette  situation  leur  causait  une  appré- 
hension horrible  lorsqu'ils  devaient  être  eux-mêmes  opérés,  ou 
bien  leur  rappelait  des  souvenirs  qui  pouvaient  leur  être  préjudicia- 
bles s'ils  l'avaient  été  déjà.  En  consacrant  aux  opérations  une  pièce 
en  dehors  de  la  salle,  on  obvie  à  ces  inconvénients,  sans  être  obligé, 
comme  dans  l'adoption  d'une  salle  commune,  de  transporter  loin  de 
son  lit  un  blessé  dont  l'état  peut  être  par  cela  seul  très-aggravé.  Il 
peut  arriver  aussi  que  plusieurs  chefs  de  service  aient  à  opérera  la 
même  heure;  en  adoptant  le  parti  d'une  salle  unique,  il  y  af  rait 
impossibilité  de  le  faire.  Si  pourtant  une  opération  présentait  un 
haut  intérêt  et  qu'elle  vînt  réunir  un  grand  nombre  d'étudiants, 
alors  elle  pourrait  être  faite  dans  les  salles  de  clinique. 

A  l'extrémité  de  chaque  salle,  au  bout  du  corridor  qui  sépare  les 
deux  pièces  attenantes,  et  au-dessous  de  la  croisée  qui  fait  face,  je 
propose  d'établir  un  fourneau  dit  laboratoire,  pour  les  tiàanes,  et 
où  l'on  puisse  au  besoin  faire  chauffer  un  bain.  A  droite  seraient 
les  latrines,  et  à  gauche  une  petite  pièce  contenant  une  baignoire. 
Il  y  a  des  malades  affectés  de  péritonites ,  de  hernies,  de  rhuma- 
tismes, auxquels  on  prescrit  un  bain  auprès  de  leur  lit,  de  peur 
d'occasionner  de  graves  accidents  par  le  transport.  Le  milieu  des 
salles  dans  leur  longueur  serait  occupé  par  des  meubles  servant  à 
la  fois  de  tables  et  d'armoires  pour  le  linge,  coupés  par  des  pas- 
sages et  des  poêles,  si  ce  système  de  chauffage  était  adopté. 

Deux  moyens  se  présentent  pour  supporter  les  planchers  des  salles, 
les  voûtes  et  maçonneries  n'étant  pas  applicables,  parce  qu'elles 
prendraient  trop  de  hauteur,  ou  parce  qu'elles  exerceraient  trop  de 
poussée  sur  les  parois  des  pavillons  ;  j'ai  cru  devoir  indiquer  des 
poteaux  en  bois  supportant  les  pièces  principales  des  planchers, 
comme  procédé  le  plus  économique;  mais  je  proposerais  avec  plus 
de  confiance  des  fermes  en  fer  formant  une  voûte  plate  légère- 
ment arrondie  aux  naissances,  et  garnies  en  poterie;  le  nettoyage 
sn-ait  plus  facile,  la  construction  entière  des  pavillons  à  l'abri  du 
feu,  et  la  dépense  pourrait  être  compensée  en  évitant  ainsi  l'em- 
barras des  poteaux  ;  on  pourrait  alors  diminuer  d'un  mètre  la  lar- 
geur des  pavillons,  sans  que  la  largeur  des  salles  diminuât  elle- 
même;  je  pense  que  ce  système  plus  nouveau,  également  appli- 
cable, ne  manquera  pas  d'obtenir  la  préférence. 

La  pharmacie  et  ses  dépendances.  —  La  communauté  des 
religieuses. 

Ces  deux  corps  de  bâtiments,  par  leur  importance  et  leur  desti- 
nation, paraissent  bien  devoir  faire  pendant  aux  bâtiments  d'admi- 
nistration que  j'ai  placés  en  avant  de  l'édifice  ;  je  n'ai  pas  hésité  à 
leur  assigner  cette  place  dans  la  disposition  générale,  elle  me  pa- 


raît satisfaire  à  l'art  comme  aux  convenances;  ces  quatre  corps  de 
bâtiments  limitent  semblablement  la  partie  principale  de  l'édifice 
et  laissent  dominer  les  pavillons  de  malades,  qui,  placés  au  centre, 
jouissent  de  l'avantage  d'être  entourés  de  tout  ce  qui  concourt  au 
service  de  santé. 

La  communauté  des  religieuses,  à  droite,  contient  au  rez-de- 
chaussée  un  réfectoire  avec  oratoire  et  plusieurs  pièces  servant  de 
dépendances.  Au  premier  étage  seraient  placés  le  dortoir,  une  infir- 
merie-et  quelques  chambres  particulières  au  logement  des  sœurs, 
dont  le  nombre  peut  s'élever  à  cinquante. 

Le  corps  de  bâtiment  à  gauche  contient  entièrement  au  rez-de- 
chaussée  tout  ce  qui  concerne  la  pharmacie,  une  salle  principale 
pour  la  distribution  des  médicaments,  plusieurs  officines  et  cham- 
bres de  dépôt. 

Quelles  sont  les  meilleures  dispositions  à  donner  amc  Bains  et  à  la 

Cuisine. 

Les  bains  et  la  cuisine  nous  semblent  devoir  être  placés  au 
centre  de  l'édifice,  et  avoir  en  même  temps  des  issues  sur  les  dé- 
pendances. Les  bains  se  trouveront  ainsi  à  la  portée  des  malades  , 
et  il  serait  facile  d'en  accorder  aux  personnes  du  dehors,  qui  pour- 
raient y  parvenir  sans  entrer  dans  l'hôpital.  Quant  à  la  cuisine,  sa 
position  centrale  facilitera  la  distribution  des  aliments  sur  tous  les 
points  de  l'édifice  ,  en  même  temps  que  son  issue  sur  les  dépen- 
dances permettra  de  s'approvisionner,  de  laver  les  légumes,  et  de 
se  débarrasser  des  ordures,  sans  être  obligé  de  passer  par  l'inté- 
rieur. A  cet  effet,  j'ai  placé  les  bains  à  droite  et  à  gauche  dans  le 
bâtiment  du  fond,  entre  la  grande  cour  et  les  dépendances  ;  chaque 
partie,  pour  chacun  des  deux  sexes,  contient  douze  cabinets.  La 
cuisine  se  trouve  pliicée  entre  les  deux  parties,  de  façon  à  ce  qu'un 
système  commun  de  chauffage  puisse  servir  à  la  cuisine  et  à  la  pré- 
paration des  bains.  Une  petite  pièce  au  centre  contient  le  réser- 
voir d'eau  chaude;  elle  est  entourée  de  cabinets  où  l'on  pourrait 
tenir  du  linge  chaud  et  déposer  le  combustible. 

Ce  système,  adopté  au  grand  hôpital  de  Florence,  permet  de 
donner  un  très-grand  nombre  de  bains  dans  lajournée,  sans  occa- 
sionner une  plus  grande  dépense  de  combustible. 

Auprès  de  la  cuisine,  à  droite  et  à  gauche,  se  trouve  une  pièce  as- 
sez vaste  pour  y  déposer  les  provisions  qui  doivent  servira  la  con- 
sommation de  la  journée. 

Les  Séchoirs  et  la  Lingerie. 

Les  séchoirs  seraient  placés  au-dessus  des  bains,  et  le  chauffage, 
déjà  commun  à  la  cuisine  et  aux  bains,  pourrait  aussi  le  devenir 
aux  séchoirs.  La  situation  de  ces  derniers  entre  la  grande  cour  et 
les  dépendances  serait  d'ailleurs  la  plus  favorable  pour  le  séchage 
à  l'air  libre  par  les  temps  secs. 

La  lingerie  serait  placée  au  premier  étage  au-dessus  de  la  phar- 
macie et  dans  le  prolongement  des  séchoirs.  Dans  cette  position, 
le  linge  y  serait  facilement  recueilli  au  sortir  des  séchoirs,  raccom- 
modé, rangé  et  réparti  de  nouveau  dans  les  salles. 

Quelle  sera  l'importance  de  l'administration.  Personnel  qui  doit  la 

composer. 

Les  bâtiments  d'administration  doivent  être  situés  en  avant  de 
l'édifice.  J'ai  cru  devoir  les  partager  en  deux  corps  de  logis,  car 
l'administration  forme  deux  parties  bien  distinctes  :  l'administra- 


365 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


366 


lion  proprement  dite,  ou  direction  de  l'établissement,  et  les  salles 
de  consultations  et  les  logements  du  personnel  des  internes.  Néan- 
moins il  faut  que  ces  deux  parties  soient  reliées  de  façon  à  ce  qu'elles 
puissent  communiquer  chacune  avec  le  reste  de  l'édifice,  au  rez- 
de-chaussée  et  aux  étages  supérieurs.  C'est  pourquoi  j'ai  cru  devoir 
faire  passer  en  façade  la  galerie  qui  dessert  tous  les  bâtiments  ;  je 
pense  que  cette  disposition  est  aussi  convenable  au  point  de  vue 
de  l'art  qu'à  celui  des  besoins  de  l'établissement ,  car  elle  annonce 
au  premier  coup  d'œil  le  principe  de  distribution  large  et  favorable 
à  la  circulation  de  l'air  qui  règne  dans  tout  l'intérieur  de  l'édifice; 
de  plus,  les  bâtiments  de  l'administration  occupent  une  surface  de 
terrain  assez  considérable  pour  qu'il  me  soit  possible  de  ne  les  sur- 
monter que  d'un  étage,  en  sorte  que  les  pavillons  de  malades  puis- 
sent dominer  dans  la  pensée  architecturale  comme  la  cause  pre- 
mière de  l'édifice. 

Chacun  des  corps  de  bâtiments  d'administration  a  une  entrée 
particulière  ouvrant  sur  la  galerie  de  service  intérieur. 

Celui  de  droite  contient,  au  rez-de-chaussée,  un  concierge  gardant 
la  porte  s'ouvrant  pour  la  consultation,  une  salle  de  consultation 
pour  quarante  personnes,  un  bureau  des  malades  admis  à  la  con- 
sultation, deux  cabinets  de  consultation  des  médecins  et  chirur- 
giens, une  salle  de  gardes  pour  deux  internes,  une  salle  de  garde 
des  pharmaciens. 

Le  premier  étage  serait  divisé  en  nombre  suffisant  de  chambres 
pour  y  loger  les  élèves  internes  en  médecine,  chirurgie  et  phar- 
macie, au  nombre  de  trente. 

Le  corps  de  bâtiment  de  gauche  contient  au  rez-de-chaussée  un 
logement  de  concierge,  les  bureaux  de  l'économe,  ceux  du  direc- 
teur et  les  bureaux  communs  aux  employés,  une  grande  salle  pour 
le  conseil  des  médecins  et  des  administrateurs. 

Au  premier  étage  seraient  disposés  les  logements  du  directeur , 
celui  de  l'économe,  celui  de  l'aumônier  et  ceux  des  employés. 

J'ai  pensé  qu'il  était  convenable  de  disposer  deux  salles  de  clini- 
que, de  chirurgie  et  médecine;  je  les  ai  placées  au  rez-de-chaussée, 
adroite  et  à  gauche,  àl'extrémité  des  bâtiments  d'administration.  On 
peut  y  parvenir  sans  entrer  dans  l'hôpital  et  sans  gêner  le  service 
particulier  de  l'administration.  Il  me  semble  nécessaire  que  les 
médecins  et  chirurgiens  puissent  professer  dans  le  lieu  même 
où  les  appellent  leurs  occupations  principales. 

Disposition  et  dimensions  de  la  Chapelle. 

Les  dimensions  de  la  chapelle  doivent  être  proportionnées  à  l'im- 
portance de  l'édifice:  il  n'y  a  ordinairement  qu'une  petite  quantité 
de  malades  en  état  de  s'y  rendre.  Pourtant  j'ai  pensé  qu'il  était 
bien  de  lui  donner  quelque  étendue ,  surtout  en  la  plaçant  de 
manière  à  ajouter  au  caractère  de  l'édifice  ;  les  malades  pourraient 
y  arriver  à  couvert  par  la  galerie,  qui  peut  aussi  servir  de  prome- 
noir au  rez-de-chaussée  et  au  premier  étage;  derrière  le  chœur  de 
la  chapelle  se  trouvent,  au  rez-de-chaussée,  deux  pièces  servant 
de  sacristie  et  dépendances  ;  au  premier  étage  une  tribune  affectée 
aux  religieuses,  où  elles  peuvent  arriver  séparément;  au-dessus 
est  placé  le  clocher,  qui  domine  tout  l'édifice. 

Quelles  sont  les  dépendances  d'un  hôpital;  quelles  sont  celles  qui 
doivent  se  rattacher  à  l'édifice  principal  et  celles  qui  doivent  en  être 
séparées. 

Les  dépendances  de  cet  édiûce  sont  considérables;  j'ai  remarqué 


qu'elles  avaient  toujours  été  traitées  trop  négligemment  et  avec 
insuffisance;  elles  contribuent  pourtant  beaucoup  à  l'ensemble  des 
bâtiments  indispensables,  et  peuvent  nuire  considérablement  à  la 
salubrité,  si  elles  participent  trop  de  la  partie  principale. 

Peut-être  l'économie  du  terrain,  réunie  à  la  pensée  architectu- 
rale de  laisser  dominer  le  corps  de  l'hôpital ,  est-elle  la  cause 
qui  les  a  fait  toujours  sacrifier:  il  est  facile  pourtant  d'apprécier 
les  inconvénients  graves  qui  peuvent  résulter  de  la  trop  grande 
proximité  de  la  buanderie,  de  la  salle  des  morts,  etc. 

Pour  opposer  à  ce  défaut  commun  à  tous  les  hôpitaux  que  j'ai 
visités,  une  disposition  nouvelle  qui  soit  prise  en  considération,  j'ai 
cru  devoir  étendre  assez  les  dépendances  pour  qu'il  soit  facile  d'en 
apprécier  les  avantages,  mais  de  façon  à  ce  qu'il  soit  possible  de  les 
réduire,  si  la  disposition  du  terrain  l'exigeait  ou  si  l'on  croyait 
devoir  supprimer  quelques-uns  des  bâtiments  qu'elles  contiennent. 

A  droite  de  la  porte  de  sortie  sur  la  voie  publique,  dans  la  partie 
la  plus  éloignée  des  constructions  principales,  se  trouve  la  buan- 
derie dans  un  corps  de  bâtiment  complètement  isolé,  et  n'ayant 
qu'un  rez-de-chaussée  composé  de  la  salle  pour  (««an^er  le  linge,  et 
de  salles  de  dépôt. 

A  gauche  et  dans  un  corps  de  bâtiments  semblable  et  symétrique 
au  précédent,  se  trouvent  la  salle  des  morts,  la  salle  d'autopsie  et  la 
petite  chapelle  des  morts. 

Aux  extrémités  de  ces  deux  corps  de  bâtiments  sont  disposées 
les  parties  principales  des  dépendances  ;  elles  sont  bâties  en  ailes 
composées  chacune  d'un  rez-de-chaussée  et  d'un  premier  étage. 

Le  rez-de-chaussée  est  occupé  par  des  magasins,  des  remises  pour 
quelques  voitures,  et  par  des  salles  de  dépôt  formant  vestiaire 
pour  recevoir  les  vêtements  des  malades,  et  les  y  conserver  pendant 
le  temps  de  leur  séjour  dans  l'hôpital. 

Le  premier  étage  de  ces  deux  corps  de  bâtiments  est  occupé  par 
les  infirmiers  et  les  personnes  de  service  des  deux  sexes. 

Quelles  sont  les  dispositions  à  prendre  pour  l'assainissement  de  tout 
le  rez-de-chaussée,  et  pour  le  service  général. 

Pour  combattre  les  effets  incessants  et  fâcheux  de  l'humidité, 
j'ai  pensé  que,  bien  que  l'air  circulât  librement  entre  les  pavillons, 
disposés  autour  de  la  grande  cour  et  séparés  par  des  jardins,  il  était 
convenable  qu'ils  fussent  construits  sur  caves;  un  tiers  de  la  hau- 
teur desdites  caves  se  trouve  au-dessus  du  sol  ;  elles  sont  tellement 
aérées  qu'elles  peuvent  servir  de  magasins  de  toutes  sortes,  pour  le 
combustible,  les  vins,  l'huile,  etc.  Elles  s'ouvrent  à  l'extrémité 
des  pavillons  surun  chemin  de  ronde  qui  rend  leur  accès  très-facile; 
elles  peuvent  servir  à  l'établissement  de  calorifères,  et  elles  contien- 
draient les  fosses  d'aisance,  dont  la  vidange  se  ferait  aisément  par 
le  chemin  de  ronde,  qui,  par  ses  communications  avec  les  dépen- 
dances, peut  satisfaire  à  toutes  les  exigences  de  service  d'emmaga- 
sinage et  de  débarras,  sans  que  l'intérieur  de  l'hôpital  ait  jamais  k 
en  souffrir.  Je  crois  que  l'on  ne  saurait  trop  insister  sur  les  avan- 
tages à  retirer  de  cette  disposition,  qui  exige,  il  est  vrai ,  un  peu 
plus  de  terrain,  mais  qui  laisse  sans  entraves  le  service  intérienr, 
évite  l'aspect  dégoûtant  de  quelques  transports  indispensables,  et 
empêche  des  dégradations. 

Je  dois  faire  observer  que  le  chemin  de  ronde  se  trouve  un  peu 
en  contre-bas  du  sol  de  la  cour,  de  sorte  que  l'eau  pluviale  dans  les 
jardins  et  celle  des  toits  s'écoulent  rapidement  par  le  chemin  ;  au 
moyen  de  cette  disposition,  il  suffit  de  quelques  marches  pour 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


368 


entrer  par  la  grande  cour  dans  les  salles  ;  et  à  leur  extrémité,  celles- 
ci  sont  assez  élevées  au-dessus  du  chemin  de  ronde  pour  qu'il  soit 
facile  d'entrer  de  ce  côté  dans  les  caves.  [Voyez  la  coupe  PL  19.) 

Evaluation  des  Dépenses. 

Cethôpital,  qui  contiendrait  sept  cent  quatre-vingts  malades,  oc- 
cuperait trente-six  mille  cent  soixante  mètres  superficiels  de  terrain, 
dont  environ  huit  mille  mètres  superficiels  de  bâtiment ,  construc- 
tions principales  et  dépendances;  en  y  appliquant  le  prix  ordinaire 
de  revient  constaté  dans  des  travaux  de  ce  genre,  et  qui  s'élève 
en  moyenne  à  la  somme  de  cinq  cents  francs  le  mètre  superficiel, 
on  arrive  à  un  résultat  de  quatre  millions.  Cette  dépense  ne  doit 
pas  dépasser  les  prévisions  de  l'administration  ;  le  terrain  pourrait 
seul  paraître  un  peu  considérable,  mais,  ainsi  que  je  l'ai  fait  obser- 
ver quand  j'ai  parlé  des  dépendances,  celles-ci  pourraient  être  ré- 
duites; néanmoins  il  serait  désirable  de  ne  rien  retrancher  et  de 
laisser  aux  malades  tous  les  bénéfices  de  la  disposition  que  je 
propose. 

.  DU  puy, 

archilecle. 
LÉGENDE   DE   LA    PLANCHE    19. 

A,  bâtiments  d'administration, 
o,  salle  de  cours. 

B,  B...,  pavillons  de  malades. 

C,  Pharmacie,  et  au-dessus  lingerie. 

c,  salle  de  distribution  des  médicaments. 

D,  Communauté  des  religieuses. 

d,  réfectoire  des  religieuses. 

E,  bains,  au-dessus  séchoirs. 

F,  cuisine. 

G,  chapelle, 
fl^,  fl^...,  dépendances. 

h,  chapelle  des  morts  ;  derrière,  salle  d'autopsie. 
h',  buanderie,  et  derrière  dépôt  de  linge. 
O,  O...,  chemin  de  ronde. 
J,  J...,  jardins. 


NOTICE  BIOGRAPHIQUE 

sua  M.  J.-B.  LEPÈRE,  architecte. 

LePère  (  Jean-Baptiste  ) ,  architecte ,  membre  de  l'Institut  d'E- 
gypte, chevalier  de  la  Légion-d'Honneur,  naquit  à  Paris  le  1"  dé- 
cembre 1761. 


Fils  unique  de  parents  peu  fortunés,  ce  fut  dans  l'école  gratuite 
que  le  jeune  LePère  commença  par  apprendre  à  dessiner  et  à  s'ap- 
proprier les  premières  notions  de  la  géométrie;  attiré  par  un 
penchant  naturel  vers  le  perfectionnement  de  ses  premiers  essais, 
il  continua  de  les  cultiver  et  suivit  avec  zèle  les  cours  publics.  Joi- 
gnant à  ses  études  favorites  celles  des  hautes  mathématiques,  de 
la  physique  et  de  la  chimie,  il  fit  en  même  temps  l'apprentissage 
de  plusieurs  métiers  nécessaires  à  l'exploitation  des  arts  mécani- 
ques et  à  la  pratique  de  l'architecture.  Muni  de  ces  richesses,  désor- 
mais sou  seul  patrimoine,  impatient  d'exercer  son  savoir  et  animé 
de  l'amour  des  voyages,  qui  fut  toujours  sa  passion  prédominante, 
il  s'embarqua  en  1787  pour  l'ile  Saint-Domingue.  Chargé  d'élever 
plusieurs  habitations  considérables,  il  exécuta  ces  constructions 
avec  des  nègres  auxquels  il  enseigna  lui-même  à  manier  les  outils 
du  charpentier  et  ceux  du  maçon.  Des  offres  avantageuses  lui  fu- 
rent faites  dans  cette  contrée,  mais  la  certitude  de  pouvoir  acqué- 
rir une  grande  fortune  ne  pouvant  balancer  en  lui  celle  de  se  voir 
circonscrit  dans  un  cercle  d'occupations  trop  restreint  pour  sa 
jeune  imagination,  et  son  désir  d'acquérir  de  nouvelles  connais- 
sances, il  quitta  l'Amérique,  et  revint  à  Paris  vers  l'année  1789. 

M.  LePère,  alors  âgé  de  29  ans,  y  reprit  ses  études,  en  y 
employant  tout  le  temps  que  pouvaient  lui  laisser  les  différentes 
occupations  auxquelles  il  dut'se  livrer  pour  pourvoir  aux  besoins 
de  son  existence.  Tantôt  employé  pour  la  composition  et  l'exécu- 
tion de  plusieurs  bâtiments  (tarticuliei's,  tantôt  relevant  les  plans, 
ou  travaillant  dans  les  bureaux  avec  d'autres  artistes,  il  eut  éga- 
lement à  se  livrer  à  l'application  de  ses  bonnes  études  dans  l'art, 
de  la  perspective,  en  composant  et  en  traçant  sous  la  direction  de 
M.  Antoine,  peintre,  une  grande  partie  des  décorations  d'archi- 
tecture du  nouveau  théâtre  de  la  Comédie-Française. 

Cependant,  ne  trouvant  dans  ces  occupations  trop  peu  lucratives 
aucun  moyen  de  satisfaire  à  son  continuel  désir  de  voyager,  afln 
d'acquérir  de  nouvelles  connaissances  par  la  vue  et  l'étude  des 
monuments  antiques,  M.  LePère  se  présenta  en  1796  à  l'appel  du 
gouvernement  d'alors  pour  se  réunir  à  une  expédition  destinée  a 
être  envoyée  à  Constantinople,  afln  d'y  établir  des  fonderies  de 
canons.  Admis  au  nombre  des  artistes  et  des  artisans  dont  cette 
expédition  devait  se  composer,  il  s'embarqua  avec  ses  compagnons 
de  voyage  à  Toulon,  pour  se  rendre  de  là  directement  par  msr  au 
lieu  de  leur  destination.  Mais,  harcelés  par  la  flotte  anglaise,  nos 
voyageurs  durent  se  jeter  dans  le  port  de  Gènes,  où,  à  peine  échap- 
pés aux  poursuites  des  Anglais,  ils  se  virent  exposés  à  devenir  les 
victimes  d'une  émeute  populaire. 

M.  Pampelone,  chef  de  l'expédition,  proposa  alors  de  continuer 
le  voyage  par  terre,  et  40  personnes  seulement ,  de  70  qu'elles 
étaient,  adoptèrent  la  proposition.  M.  EePère,  sTu  nombre  des  pre- 
mières, vit  avec  une  grande  satisfaction  ce  changement  de  route, 
qui  lui  procura  la  facilité  devoir  une  partie  de  l'Italie,  de  la  Dal- 
matie,  de  la  Bosnie,  de  la  Turquie  européenne,  d'étudier  les  mo- 
numents^  si  variés  de  caractère  et  de  style  des  villes  de  "tortone  , 
Parme,  Plaisanèe,  Bologne,  Rimini,  Zara,  Sebenico,  Traunick , 
Sarajevo,  Pristina,  Philipopoli  et  Andrinople. 

Arrivé  dans  l'ancienne  Byzance,  et  choisi  parmi  ceux  des  mem- 
bres de  l'expédition  qui  furent  acceptés  par  le  gouvernement  turc, 
M.  LePère  sut  bientôt  se  faire  remarquer  par  sa  capacité,  la  variété 
de  ses  connaissances,  et  par  la  douceur  et  la  bonté  de  son  carac- 
tère. Chargé  de  diriger  les  travaux  de  la  construction  des  bâtiments 
et  des  machines  pour  l'établissemeat  et  l'exploitation  des  fonde- 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


370 


ries,  il  fut  distingué  par  le  capitau-pacha,  le  visir  et  les  a>itres 
officiers  turcs,  qui  lui  firent  des  offres  brillantes  pour  se  l'atta- 
cher et  pour  lui  faire  adopter  la  religion  musulmane.  M.  Le- 
Père  refusa,  et  ce  refus,  tout  en  lui  conciliant  l'estime  générale, 
nécessita  son  départ.  11  quitta  Constantinople  après  deux  an- 
nées de  séjour  et  revint  à  Paris.  Une  destinée  plus  brillante  lui 
était  réservée  :  l'expédition  d'Egypte  se  préparait;  reçu  parmi  les 
hommes  distingués  qui  concoururent  à  immortaliser  par  leurs 
travaux  cette  héroïque  entreprise,  son  nom  leur  fut  associé  de  la 
manière  la  plus  honorable. 

En  1798,  M.  LePère  quitta  pour  la  troisième  fois  sa  patrie. 
Embarqué  sur  la  flotte,  il  arriva  bientôt  à  Alexandrie,  où  commen- 
cèrent les  premiers  travaux  des  artistes  et  des  savants  auxquels 
nous  devons  le  grand  ouvrage  sur  l'Egypte. 

Presque  toujours  à  la  tête  de  ces  belles  et  souvent  périlleuses 
entreprises,  M.  LePère  mesura  et  dessina  la  colonne  de  Pompée, 
les  obélisques,  les  Pyramides,  les  tombeaux,  les  temples,  et  tant 
d'autres  monuments  remarquables  de  l'antique  splendeur  des 
Égyptiens.  Chargé  en  outre  de  la  direction  de  l'établissement  du 
([uartier  général  et  des  hôpitaux,  il  composa,  sur  la  demande 
du  général  Kléber,  un  projet  pour  un  vaste  hôpital  que  l'on  devait 
exécuter  à  Alexandrie,  et  sur  celle  du  général  en  chef,  un  projet 
d'embellissement  pour  la  place  d'Esbékir.  Ce  projet,  composé  d'un 
portique  circulaire,  offrait  quatre  entrées  principales,  et  au  centre 
une  colonne  triomphale  ornée  d'eaux  jaillissantes;  la  place  ainsi 
entourée  était  destinée,  selon  les  différentes  saisons,  tantôt  à  être 
une  promenade  publique  où  les  piétons  pouvaient  s'abriter  de  l'ar- 
deur du  soleil  sous  de  vastes  colonnades,  et  tantôt  à  servir  de 
bassin  pour  recevoir  les  bienfaisantes  inondations  des  eaux  du  Nil, 
sur  lesquelles  les  habitants  du  Caire  aiment  à  se  balancer  dans  de 
petites  barques.  Cette  belle  composition,  que  le  général  en  chef 
avait  approuvée,  aurait  été  réalisée  si  elle  n'eût  eu  le  sort  de  tant 
d'autres  conceptions  du  génie  de  Bonaparte  que  sa  destinée  l'em- 
])êcha  d'exécuter. 

Après  la  conquête  de  la  Haute-Egypte  et  la  formation  des  diffé- 
lentes  commissions  composées  de  savants  et  d'artistes,  M.  LePère 
se  livra  de  nouveau  avec  ardeur  à  l'investigation  des  monuments 
antiques.  Il  en  étudia  toutes  les  parties  avec  un  rare  soin  et  une 
exactitude  scrupuleuse.  Relever  minutieusement  les  plans,  dessi- 
ner a\ec  la  plus  grande  fidélité  toutes  les  formes  architectoniques 
et  toutes  les  sculptures,  rechercher  les  moyens  dont  les  Égyptiens 
avaient  pu  faire  usage  pour  travailler  et  mettre  en  œuvre  les 
énormes  blocs  de  granit  employés  dans  leurs  colossales  construc- 
tions, telles  furent  les  continuelles  occupations  de  M.  LePère, 
qui,  comme  il  le  disait  souvent,  furent  les  plus  beaux  moments 
de  sa  vie.  Aussi  sou  portefeuille  devint  un  des  plus  riches  et  des 
plus  intéressants  pour  la  partie  d'architecture.  Ses  compagnons  de 
voyage  y  eurent  souvent  recours,  soit  pour  compléter  leurs  travaux, 
soit  pour  y  chercher  une  garantie  de  l'exactitude  de  leurs  propres 
relevés.  Heureux  de  laisser  à  chacun  une  part  de  gloire  dans  la 
magnifique  publication  du  grand  ouvrage  de  l'Egypte,  il  cédait 
avec  plaisir  une  part  de  ses  richesses  à  ceux  qui  avaient  été  moins 
heureux  dans  leur  récolte,  appliquant  ici,  comme  dans  toutes  les 
autres  circonstances  de  sa  longue  vie,  cette  maxime,  «  que  la  véri- 
table fortune  du  riche  est  sa  générosité.  »  Les  gravures  qui  por- 
tent son  nom,  généralement,  les  plus  intéressantes  de  louvrage, 
dépassent  le  nombre  de  cinquante. 

Revenu  en  France,  M.  LePère  fut  nommé  en  1802,  par  le 


premier  Consul,  architecte  de  la  Malmaison.  H  occupa  cette  place 
pendant  quelques  années  sans  y  trouver  une  occasion  favorable 
pour  développer  ses  nombreuses  connaissances  et  sa  capacité 
comme  architecte  distingué.  Ce  ne  fut  que  vers  l'année  1805  que 
cette  circonstance  se  présenta.  A  cette  époque,  l'Empereur  ayant 
ordonné  l'exécution  du  projet  d'ériger  à  la  gloire  de  la  Grande 
Armée  une  coloinie  triomphale  revêtue  de  bas-reliefs  en  bronze, 
dont  la  matière  devait  être  tirée  des  canons  pris  sur  l'ennemi,  M. 
le  baron  Denon  fut  chargé  de  la  direction  de  ce  monument,  et 
M.  Gondoin,  qui  en  avait  été  nommé  l'architecte,  présenta  plusieurs 
moyens  d'exécution  auxquels  on  ne  crut  pas  devoir  se  confier. 
L'Institut,  consulté  par  M.  Denon,  reconnut  lesinnombrables diffi- 
cultés de  cette  construction,  et  adopta  l'idée  présentée  par  l'archi- 
tecte, de  faire  élever  une  colonne  provisoire  de  la  grandeur  de  In 
colonne  définitive,  afin  de  pouvoir  se  servir  de  ce  modèle  pour  y 
prendre  avec  certitude  les  dimensions,  la  forme  et  le  galbe  des  bas- 
reliefs  en  spirale,  ainsi  que  les  détails  et  les  épures  nécessaires  â 
l'exécution  de  ce  vaste  ensemble.  Ce  moyen,  qui  présentait  un  sur- 
croit de  dépenses  considérables  et  surtout  une  grande  pertede  temps, 
sans  offrir  la  certitude  d'un  résultat  satisfaisant,  et  dont  l'adop- 
tion aurait  peut-être  amené  l'abandon  de  ce  beau  monument, 
suggéra  à  M.  Denon  1  idée  de  consulter  M.  LePère.  Celui-ci,  ad- 
mis à  examiner  les  moyens  d'exécution  présentés,  et  après  en 
avoir  signalé  le  côté  faible,  développa  de  suite,  avec  une  clarté  et 
une  précision  telles,  la  manière  dont  un  pareil  travail  devait  èUv 
dirigé,  que  M.  Denon  l'adjoignit  immédiatement  à  M.  Gondoiu. 
S'occupant  aussitôt  à  fixer  ses  premières  idées  sur  le  papier,  M.  Le- 
Père présenta  ses  dessins ,  où  tous  les  problèmes  étaient  réso- 
lus; le  nombre,  les  dimensions,  la  forme  de  chaque  pièce  de 
bronze,  avaient  été  déterminés  par  des  calculs.  La  manière  dont 
M.  LePère  fixait  ses  pièces  sans  aucun  scellement  dans  la  pierre 
et  sans  qu'elles  pussent  souffrir  de  la  dilatation  et  de  la  condensa- 
tion du  métal,  parut  à  la  fois  si  simple  et  si  ingénieuse,  que  son 
projet  fut  adopté  sur-le-champ  et  approuvé  pour  être  mis  à  exécu- 
tion. M.  Gondoin,  en  artiste  capable  déjuger  et  de  rendre  justice 
au  talent,  s'honora  lui-même  dans  cette  circonstance;  car,  après 
avoirexaminé  les  dessins  de  son  nouveau  collègue,  il  dit  à  M.  Le- 
Père :  «  Je  ne  vois  rien  à  ajouter  à  votre  travail  ;  vous  serez  chargé 
de  tout,  je  ne  puis  que  m'en  rapporter  ii  vous.  » 

M.  LePère  dirigea  en  effet,  à  lui  seul,  cette  vaste  entreprise. 
Ses  connaissances  en  mathématiques,  ses  fortes  études  en  mécani- 
que, son  habileté  à  imaginer  des  instruments  particuliers,  a  guider 
de  ses  conseils,  appuyés  sur  sa  propre  expérience  dans  la  pratique 
de  presque  tous  les  métaux,  tantôt  le  ciseleur,  tantôt  le  sculp- 
teur ou  le  fondeur,  tout  lui  fut  d'un  grand  secours  et  concourut  à 
la  parfaite  exécution  de  ce  monument  national. Toutefois,  pendant 
les  quatre  années  employées  à  son  achèvement,  il  n'y  eut  peut- 
être  que  lui  qui  fut  bien  convaincu  de  la  réussite  de  son  travail  ; 
car,  comme  tant  d'autres  artistes  dont  le  génie  sut  concevoir  des 
productions  au-dessus  des  intelligences  ordinaires,  il  eut  à  com- 
battre bien  des  doutes,  bien  des  incertitudes,  bien  des  entraves 
que  l'ignorance  accumulait  à  l'envi  autour  de  lui;  il  vainquit 
néanmoins  toutes  ces  difficultés,  et  la  colonne  de  la  Grande  Armée 
fut  achevée  et  découverte  le  25  août  1810.  Depuis  cette  époque, 
ce  monument  eut  à  résister  aux  vains  efforts  d'une  stupide  popu- 
lace, qui  ne  put  l'ébranler  ni  par  la  force  du  nombre,  ni  par  celle 
des  chevaux  qu'elle  amena  à  son  secours  pour  en  arracher  la 
statue  de  l'Empereur;  mais  ces  impuissants  efforts,  ni  l'action 
T.  V.  2i 


371 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


art 


du  temps,  n'ont  pu,  depuis  trente-quatre  ans,  que  témoigner  du 
rare  mérite  de  l'artiste  qui  a  élevé  ce  glorieux  trophée. 

En  applaudissant  au  succès  du  travail  de  M.  LePère,  l'Empereur 
le  nomma,  en  1811,  son  architecte  à  la  division  de  Saint-Cloud.  Il 
y  construisit  le  nouveau  bâtiment  du  grand  Commun,  et  exécuta 
les  préparatifs  de  la  grande  fête  célébrée  le  23  juin  181 1,  à  l'occa- 
sion de  la  naissance  du  roi  de  Rome. 

M.  LePère  fut  également  chargé,  eu  1811,  de  la  construction 
d'un  obélisque  destiné  à  perpétuer  le  souvenir  de  la  conquête  de 
l'Egypte,  et  qui  devait  être  placé  sur  le  terre-plein  du  Pont-Neuf 
Il  fit  pour  cette  construction  des  études  du  plus  haut  intérêt,  au- 
jourd'hui une  des  richesses  de  son  portefeuille.  Conçu  sur  une 
échelle  plus  colossale  qu'aucun  des  obélisques  de  l'antiquité,  dont 
le  plus  élevé,  cité  par  Diodore  de  Sicile,  ne  compte  que  47  mètres 
ou  1 48  pieds,  cet  obélisque  devait  avoir  57  mètres  ou  1 80  pieds.  De- 
vant être  construit  en  granit  de  France  par  assises  de  moyenne  hau- 
teur, la  combinaison  des  moyens  d'exécution  que  M.  Le  Père  avait 
trouvés  rendait  l'apparence  de  ces  assises  imperceptible  et  la 
solidité  aussi  durable  que  celle  d'un  obélisque  monolithe  :  des  bas- 
reliefs  disposés  horizontalement  en  couvraient  les  quatre  faces,  et 
pour  en  faciliter  l'exécution  dans  une  matière  aussi  dure  que  le 
granit,  M.  LePère  trouva  le  moyen  de  sculpter  et  de  polir  cette 
matière  aussi  facilement  que  le  marbre.  Dans  ses  études  sur  les 
monuments  de  l'Égj'pte,  cette  recherche  l'avait  déjà  fort  oc- 
cupé. 

Ce  travail  fut  interrompu  en  1814,  et  M.  LePère  construisit 
depuis  sur  le  même  emplacement  le  piédestal  sur  lequel  est  élevée 
la  statue  de  Henri  IV. 

En  1822,  M.  LePère  fut  nommé  architecte  du  château  de  Fon- 
tainebleau, place  qu'il  perdit  après  la  révolution  de  1830. 

M.  LePère  fit  encore  les  dessins  de  la  plupart  des  médailles 
exécutées  sous  la  direction  de  M.  Denon,  en  mémoire  des  hauts 
faits  de  l'Empire.  Il  composa  également  l'appareil  si  simple  au 
moyen  duquel  fut  montée  sur  le  sommet  de  la  colonne  la  statue 
de  l'Empereur,  et  il  imagina  ce  remarquable  et  merveilleux  mé- 
canisme pour  accorder  le  piano  à  l'aide  de  la  vue  seule  et  sans  le 
secours  de  l'ouïe  :  invention  capitale,  que,  d'après  un  rapport  de 
l'Institut  (Académie  des  sciences  et  des  arts),  on  peut  considérer 
comme  le  plus  grand  perfectionnement  du  piano. 

Chargé  de  la  construction  de  la  nouvelle  église  de  Saint-Vincent- 
de  Paul,  travail  commencé  en  1824,  et  auquel  il  associa,  dès 
l'origine,  son  gendre  M.  Hittorff,  M.  LePère  mourut  peu  de  temps 
avant  l'ouverture  de  ce  temple  au  culte.  Les  décrets  de  la  Provi- 
dence l'ont  privé  du  bonheur  qu'il  désirait  tant  pouvoir  goûter 
encore  :  celui  de  voir  ce  grand  et  magnifique  édifice  achevé,  d'ad- 
mirer, brillant  de  toutes  ses  richesses,  de  toute  sa  splendide  pa- 
rure, l'enfant  qu'il  voulait  avant  tout  beau  et  fort  :  deux  qualités 
dont  son  âge,  disait-il,  lui  avait  fait  craindre  de  ne  pouvoir  le  doter 
sans  le  concours  d'un  jeune  collaborateur. 

En  pensant  à  tout  ce  qu'il  a  fallu  de  dons  naturels  pour  arriver, 
sans  autre  secours  que  celui  de  sa  propre  volonté,  à  des  positions 
aussi  belles,  aussi  érainentes  que  celles  occupées  par  M.  LePère, 
on  doit  s'étonner  que  tant  de  moyens,  joints  au  caractère  le  plus 
honorable,  ne  lui  aient  pas  ouvert  les  portes  de  l'Institut,  alors 
que  bien  peu  de  ses  membres  avaient  pu  s'y  présenter  avec  des 
travaux  aussi  importants  que  l'exécution  de  la  colonne  de  la  place 
Vendôme  et  les  magnifiques  dessins  et  restaurations  des  monu- 
ments de  l'Egypte.  Mais  peu  ambitieux,  incapable  de  faire  agir 


d'autres  influences  que  celles  que  le  titre  d'artiste  et  ses  qualités 
d'homme  de  talent  lui  donnaient,  il  renonça  facilement  à  la  re- 
cherche d'une  distinction  pour  l'obtention  de  laquelle,  se  plaisait-il 
à  dire,  «  il  fallait  avant  tout  se  faire  frère  quêteur,  »  fonction  qui 
ne  pouvait  pas  aller  à  l'homme  qui  avait  toujours  aimé  à  donner 
l'aumône,  mais  non  pas  à  la  recevoir. 

A  ses  qualités  distinguées  dans  les  arts  et  dans  les  sciences,  M.  Le- 
Père réunissait  les  qualités  morales  qui  en  faisaient  l'homme  le 
plus  vénérable,  le  plus  aimable  et  le  meilleur  que  l'on  put  voir  : 
à  sa  grande  force  d'âme,  à  sa  fine  intelligence,  il  joignait  une 
bonté  de  cœur  ineffable.  Jamais,  on  peut  le  dire,  il  n'a  su  ce  que 
c'était  que  de  ne  pas  aimer,  de  ne  pouvoir  pas  être  aimé.  Jamais 
sa  modestie  ne  lui  fit  envier  personne  et  croire  qu'il  pouvait  être 
envié.  Ceux  qui  l'ont  connu  dans  l'intimité  savent  ce  qu'il  y  avait 
de  noble  et  de  vertueux  dans  cette  belle  et  excellente  nature. 
M.  LePère  était  un  de  ces  hommes  rares  dont  on  ne  se  figure  pas 
la  fin  possible.  Son  cœur  était  si  bon,  sa  douceur  si  grande,  l'éga- 
lité de  son  caractère  si  exceptionnelle,  son  encourageante  affection 
pour  la  jeunesse  si  bienveillante,  que  la  pensée  de  voir  finir  une 
vie  si  pure  paraissait  impossible.  Cependant  la  mort  est  venue  le 
frapper  presque  inopinément,  au  moment  où  lespoir  de  le  voir 
longtemps  encore  au  milieu  de  sa  famille  semblait  le  mieux  fondé. 
Les  regrets  de  tous  ses  amis,  de  toutes  les  personnes  qui  l'ont 
connu,  ont  été  aussi  sincères  qu'unamines. 

Il  ne  pouvait  en  être  autrement  d'un  homme  après  la  mort 
duquel  M.  Jomard  écrivait  : 

a  Je  n'ai  connu  dans  le  voyage  d'Égyple  aucune  personne  plus  digne 
«  d'estime  et  d'altachemenl,  pour  le  caractère  et  la  délicatesse  des  sen- 
«  tinienls,  comme  pour  le  talent  et  le  roérile  joints  à  la  modestie  ;  » 

et  à  qui,  de  son  vivant,  le  général  en  chef  de  l'armée  d'Egypte, 
Menou,  avait  écrit  du  quartier  général  d'Alexandrie,  le  5  floréal 
an  9  de  la  république  : 

«  Votre  conduite,  citoyen,  annonce  un  homme  entièrement  dévoué 
«  à  son  pays  et  à  la  république,  et  qui  ne  se  dirige  que  par  les  principes  • 
«  de  l'honneur.  Je  vous  avais  déjà  voué  mon  estime  depuis  longtemps; 
«  votre  courage,  en  rest;int  au  Caire,  m'inspire  pour  vous  tous  les  au- 
«  1res  senlimenls.  Vous  acquérez  des  droits  imprescriptibles  à  la  recon- 
«  naissance  nationale.  Soyez  assuré  que  je  les  ferai  valoir  auprès  du 
«  premier  Consul  avec  toute  l'énergie  dont  je  suis  capable.  » 

M.  LePère  termina  le  16  juillet  1844  sa  longue  carrière,  à 
l'âge  de  plus  de  quatre-vingt-deux  ans.  La  vie  d'un  tel  homme  , 
qui,  ami  des  Berthollet,  des  Monge,  des  Fourrier,  vit  ses  travaux 
réunis  à  ceux  de  ces  grands  citoyens;  qui,  architecte  de  Napoléon, 
vit  attacher  son  nom  aux  plus  grandes  entreprises  contempo- 
raines, envisagée  depuis  son  obscur  point  de  départ  jusqu'à  son 
glorieux  point  d'arrivée,  doit  servir  d'exemple  pour  stimuler  le 
génie  à  marcher  dans  la  voie  du  travail  et  de  la  vertu  :  car  elle 
apprend  à  ne  pas  désespérer  de  la  Providence,  qui  n'oublie  pas  tou- 
jours le  talent  le  plus  modeste  et  la  plus  sévère  probité. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


37fc 


SrOTES    ET  OBSERVATIONS 

DE    H.    H.    JANMABD, 

rclalives  à  la  Première  iiislruclion  du  Comilé  historique  des  Arls  et  Hoiiuments. 

(SCITK   ET  Fin.) 

Pyramides  et  tours  pleines  {voy.  col.  153). 

Ces  coiislruclions  qui  se  trouvent  quelquefois  sur  le  bord  des  voies 
romaines  n'étaienlelles  pas  des  points  de  repère,  ou  des  signaux,  ou 
des  peints  de  ralliement  militaires,  ou  enfin  des  monuments  coinmé- 
moratifs  (lo  combats?  L'observation  de  leur  position  topographique  et 
surtout  (le  leur  position  relative,  s'il  s'en  trouve  plusieurs  dans  le  même 
canton ,  peut  jeter  un  grand  jour  sur  la  destination  de  ces  petits 
monuments.  N'était-ce  (loinl  aussi  ce  (|ue  dans  le  Moyen-Age  on  ap- 
pelait des  mon<s-joj>,  et  dans  quelques  provinces  du  Midi  des  pires- 
longues?  Selon  M.  Langlois,  dans  sa  notice  sur  l'incendie  de  la  cathé- 
drale de  Rouen  :  «  On  appellait  mtmls-joie,  mons  gaudii,  des  monticules 
artificiels  élevés  en  forme  de  pyramide,  des  piliers  en  maçonnerie,  des 
poteaux  et  quelquefois  même  de  grands  arbres,  objets  ordinairement 
décorés  d'un  crucifix  ou  d'une  ligure  de  la  Vierge;  ils  servaient  d'in- 
dices itinéraires  aux  voyageurs  et  aux  pèlerins,  que  réjouissait  cette 
vue  ;  ils  leur  montraient  le  chemin  et  semblaient  les  approcher  du 
terme  de  leurs  fatigues.  » 

«  Les  monts-joie  se  composaient  quelquefois  de  simples  arbrisseaux, 
ou  de  genêts  dont  on  nouait  les  sommets  d'une  manière  particulière, 
et  au  pied  desquels  on  accumulait  un  monceau  de  pierres  blanches. 
Ces  remarques  étaient  pour  les  passants  ce  que  sont  les  brisées  pour  les 
chasseurs.  » 

On  conçoit  toute  l'utilité  de  ces  points  de  reconnaissance  dans  ('es 
temps  où  la  France,  beaucoup  moins  peuplée  qu'aujourd'hui,  était  cou- 
verte de  vastes  terrains  incultes  et  déserts,  entrecoupée  de  forêts,  et 
où  les  voies  de  communication  étaient  rares  et  mal  tracées. 

De  l'opinion  de  Caylus  sur  le  monument  romain  de  Montmartre 
(rot/,  col.  2l'8,.5'  vol.) 

Nous  ne  pensons  pas  qu'on  doive  prendre  au  sérieux  l'opinion  de 
Caylus,  qui  veut  absolument  que  le  nionumeni  de  Montmartre  ait  été 
une  fonderie  parce  qu'il  y  a  vu  les  débris  d'une  espèce  de  fourneau, 
dont  il  ne  donne  pas  même  la  description. 

L'abbé  Lebeuf,  contemporain  de  Caylus,  et  savant  non  moins  recom- 
mandable,  a,  lui  aussi,  visité  les  ruines  de  cet  édifice,  et  a  suivi  les  tra- 
vaux des  fouilles  oiïicielles  faites  en  1737.  Il  a  rédigé,  sur  ce  sujet,  une 
notice  insérée  au  Mercure  de  France,  janvier  1758,  page  47,  cl  il  en 
fait  mention  au  troisième  volume  de  VUisloire  du  diocèse  de  Paris, 
pages  'J6  et  119.  «  Cet  édifice  était,  dit-il,  partagé  en  plusieurs  cham- 
bres :  dans  l'une  était  une  ouverture  semblable  à  un  fourneau.  Il  y  a 
trouvé  quelques  pierres  plates,  ciselées  et  ouvragées,  des  tuyaux  en 
terre  cuite,  qui  devaient  y  amener  les  eaux  de  la  fontaine  voisine.  »  Il 
présume  que  cet  édifice  renfermait  des  bains. 

Feu  .M.  Jollois,  l'un  des  membres  les  plus  distingues  de  l'Institul 
d'Egypte,  a  fait  mettre  à  découvert  la  surface  entière  de  la  fondation 
de  cet  édifice  en  1840.  Il  nous  a  dit  à  nous-niéme  qu'il  croyait  que 
celle  construction  était  une  maison  de  campagne  dans  laquelle  se  trou- 
vait un  bain. 

Voilà  donc  deux  antiquaires,  tout  aussi  rccoiumandables  que  Caylus, 
qui  pensent  que  c'était  un  bain  et  non  une  fonderie.  Le  fourneau,  prin- 
cipale base  de  l'opinion  de  Caylus,  a  été  aussi  observé  par  l'abbé 


Lebeuf;  el,  a  défaut  de  description,  on  peut  loul  aussi  bien  supposer 
qu'il  a  pu  servir  à  chauffer  un  bain  qu'à  chauffer  un  creuset. 

Ainsi  que  nous  le  disions  dans  une  notice  insérée  dans  le  deuxième 
volume,  colonne  2H  de  la  Revue,  nous  y  avons  trouvé  des  fragments 
de  plaques  de  marbre  blanc,  recouverts  d'une  couche  d'incrustation 
lamellaire,  évldeiiiment  produite  par  le  stgoiir  des  eaux.  Ces  fragments 
app:irlenuienl  prob;iblement  à  un  réservoir  d'eau  revêtu  en  marbre,  et 
nous  en  avons  conclu  qu'il  pouvait  avoir  servi  à  un  bain  (1).  Nous  y  avons 
Irouvé  des  débris  de  moulures  en  marbre  blanc,  et  des  morceaux  d'en- 
duit recouverls  de  peintures  à  la  manière  étrusque.  Tous  ces  fragments 
aiinoncenl  un  édifice  décoré  avec  luxe.  Où  a-l-on  vu  des  fonderies  in- 
crusléesen  marbre?  Il  y  a  toiii  lieu  de  croire  que  les  Romains,  si  luxueux 
d'ailleurs  dans  leurs  édifices,  non-seulement  ne  prodiguaient  pas  les 
matériaux  précieux  dans  la  construction  de  leurs  usines,  mais  qu'ils  n'y 
apportaient  pas  même  la  solidité,  qui  él;iit  le  caractère  dislinclif  de  leur 
manière  de  bâtir.  S'il  en  eût  été  autrement,  on  retrouverait  souvent  des 
vestiges  de  leurs  élablissemenls  industriels.  Mais  de  telles  découvertes 
sont  excessivement  rares,  el  se  reconnaissent  plutôt  aux  débris  nom- 
breux des  objets  fabriqués  qu'à  l'imporUince  des  constructions;  ce  qui 
fait  croire  qu'ils  les  conslruisaienl,  comme  les  modernes,  très-légère- 
ment. Au  surplus,  on  ne  trouve  sur  l'emplacement  du  monumeiii  de 
.Montmartre  aucun  fragment  de  scories.  Ces  matières  soni  de  nature  à 
se  conserver  éternellement,  et  le  sol  de  la  prétendue  fonderie  devrait  en 
éiie  jonché. 

Caylus,  il  est  vrai,  y  a  trouvé  aussi  des  fragments  de  creusets  dont  il 
ne  donne  pas  la  description.  S'il  était  permis  de  faire  des  conjectures 
sur  les  creusets  observés  par  Caylus,  voici  ce  que  nous  dirions  :  Fro- 
doarl,  écrivain  du  dixième  siècle,  dit  (tome  VI  II  du  Recueil  des  Historient 
de  France,  page  198),  que  «  lors  du  renversement  de  cet  édifice  par 
une  tempête,  en  94i,  on  vil  des  démons,  sous  la  forme  de  chevaliers,  se 
servir,  poursaper  ses  murailles,  des  pouires  qu'ils  avaient  extraites  des 
ruines  d'une  chapelle  voisine  qu'ils  venaient  de  détruire.  » 

Si  Frodoart,  homme  instruit,  a  pu  croire  à  l'histoire  des  démolisseurs 
infernaux,  à  [ilus  forte  raison  le  peuple  ignorant  et  superstitieux  a-i-il 
été  la  dupe  de  la  vision  merveilleuse.  Cette  tradition  a  dû  laisser  dans 
les  esprits  une  horreur  profonde  pour  ces  ruines,  que  personne  n'osa 
visiter  de  longtemps.  Or,  serait-il  impossible  que  des  faux  monnayeurs, 
gens  assez  sceptiques,  comme  tous  les  fripons  du  même  genre,  eussent 
profité  de  la  terreur  générale  qu'inspiraient  ces  ruines  et  qui  en  éloi- 
gnait vraisemblablement  les  visiteurs,  pour  établir  leur  lalioraioirc 
dans  quel(|ne  réduit  encore  intact?  Cet  édifice  ne  fut  pas  enlièiement 


(1}  Ces  revélemciits  n'ont  que  15  iiiilliDiètrcs,  et  le  bandeau  18  niilliniètrei 
d'épaisseur.  Ils  étaient  scellés  avec  du  mortier  de  cliaux  et  ciment  de  brique. 
Ce  mortier  paraît  avoir  adliéré  au  marbre,  quoique  sur  sciage,  plus  rortement 
qu'à  lui-même,  puisque  tous  les  TragmeDU  que  nous  avons  observés  portent 
encore  des  arracbements  de  mortier  sur  presque  toute  leur  surface.  Il  semble, 
d'après  l'inspection  d'un  de  ces  fragements,  qu'on  recouvrit  la  surface  du  sciage 
d'un  frottis  ou  d'un  gobelis  de  mortier  a\ant  la  pose;  peut-être  était-ce  no 
moyeu  de  faire  prendre  iniru\  le  mortier  à  la  surface  du  sciage. 

Nous  recommandons  cette  observation  aux  architectes  qui  ont  occasion  de 
faire  exécuter  des  placages  en  marbre,  car,  comme  il  faudrait  changer  de  sys- 
tème, il  est  douteux  que  les  marbriers  cux-uiémes  s'y  décident  iamais;  il  y  a 
peut-être  bien  un  peu  plus  de  travail,  puis  il  faudrait  surtout  sortir  de  la  routine, 
ce  qui  n'est  pas  cliose  facile.  Nos  marbriers  ne  connaissent  que  le  plitre,  ma- 
tière détestable  quand  elle  est  employée  dans  des  lieux  humides. 

Les  Romains  connaissaient  le  plitre,  quoiqu'ils  fussent  les  plus  fameux  fai- 
seurs de  placage  qui  aient  jamais  existé,  puisqu'ils  révélaient  en  dalles  de  mar- 
bre de  grands  édifices  tout  entiers,  tels  que  le  Panthéon,  le  temple  de  Vé- 
nus, etc.  Il  est  présumable  qu'ils  connurent  le  plltre  de  Montmartre,  puis- 
qu'ils construisirent  dans  cette  localité  plusieurs  monuments,  dont  celui  qui 
nous  occupe  était  assis  à  un  mètre  près  .sur  la  haute  niasse  de  plltre  ;  ils  n'oM 
pourtant  pas  employé  au  scelloment  de  leurs  dalles,  non  plus  qu'aux  enduits, 
cette  matière  qu'ils  avaient  cependant  sous  la  main. 


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REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


376 


(iiiiriiil  par  la  Icmpêie  et  les  dénions  de  9 14,  pnisiine  Sauvai  (^n^tiji.  de 
Paris,  1011)6  I,  page  3V9)  dit  qu'en  1618  (près  de  sept  siècles  plus 
lard)  il  restait  encore  un  grand  pan  de  mur  et  une  statue  dans  une 
niclie,  qui  furent  renversés  par  un  ouragan  le  20  octobre. 

Ainsi,  d'une  part,  la  présence  des  accessoires  d'une  maison  somp- 
tueuse, tels  que  revêments  en  marbre,  sculpture  d'ornement  e(  statues, 
peintures,  etc.,  et  enûn  très-solides  constructions  ;  d'autre  part,  l'ab- 
sence d'objets  qui  accoMipagnent  toujours  les  usines  niétallurgifiues, 
tels  que  les  scories  provenant  de  la  fusion  des  métaux.  Le  nom  même 
de  temple  de  Mercure  que  lui  donnent  les  anciens  auteurs,  s'il  ne  prouve 
pas  que  ce  fut  réellement  un  temple,  fait  du  moins  présumer  que  cet 
édifice  avait  un  aspect  monumental  que  n'ont  pas  les  usines.  Tout,  enfin, 
concourt  à  démontrer  que  ce  n'était  pas  une  fonderie,  mais  bien  un 
établissement  de  bains,  ou  plutôt  une  maison  de  campagne  avec  bains. 


IVOUVEILE  MANIERE 

SE  CONSTRUIRE  IiES  VOUTES  DES  ÉGOUTS  DE  PARIS. 

Depuis  quelques  années,  l'on  construit  à  Paris  des  voûtes  d'égouts 
(Pune  épaisseur  de  0""  13  seulement,  en  moellons  faclices,  sur  murs 
pieds-droits  de  0"  55,  en  blocage  de  meulière  et  mortier  de  cbaiix  liy- 
drauliqiic. 

On  a  sans  doute  éprouvé  soigneusement  la  résistance  de  ces  voûtes, 
dont  l'épaisseur  nous  semble  bien  légère  pour  porter  une  couche  de 
terre  de  2  à  3  mètres  de  hauteur,  et  conlinuellement  ébranlée  et  tassée 
par  le  roulis  d'innombrables  voilures. 

Ces  voûtes  sont  extrailossées  conccntriquement,  et  la  grande  dilTé- 
rence  d'épaisseur  (|Qi  existe  entre  elles  et  leurs  pieds-droits  est  rachetée 
par  le  premier  rang  de  voussoirs  portant  à  l'extérieur  un  congé  qui  se 
prolonge  sur  la  largeur  entière  de  l'arrase  du  mur. 

Les  joints  longitudinaux  sont  tous  perpendiculaires  à  la  courbe,  qui 
est  un  plein  cintre. 

Ces  moellons  sont  fabriqués  sur  place  avec  de  petites  meulières 
jetées  à  bain  de  mortier  dans  un  moule  en  bois.  Le  mortier  se  compose 
de  parties  égales  de  ciment  romain  et  de  sable  dc'  rivière.  On  le  gichc 
avec  de  larges  truelles  en  fer  dans  de  grandes  auges  ouvertes  par  devant. 
Le  mélange  du  sable  et  du  ciment  se  fait  d'abord  à  sec,  et,  après 
qu'on  y  a  mis  la  quantité  d'eau  nécessaire,  on  le  brasse  vigoureusement 
avec  la  truelle,  en  le  poussant  allernativement  d'un  bout  à  l'autre  de 
l'auge. 

Le  moulage  se  fait  en  enfonçant  dans  un  bain  de  mortier,  dont  on 
remplit  le  moule,  des  quartiers  de  meulière  qu'on  a  soin  de  laisser  ap- 
parents sur  les  quatre  faces  qui  doivent  former  joints.  Ces  joints  con- 
servent ainsi  des  aspérités  pour  donner  prise  au  mortier  dans  la  pose. 
Les  faces  d'intrados  et  d'extrados  ne  laissent  voir  que  le  mortier,  dont 
la  surface  s'est  parfaitement  lissée  sur  les  parois  du  moule. 

Il  y  a  deux  sortes  de  moules,  l'un  pour  les  voussoirs  portant  congé, 
l'autre  pour  les  voussoirs  ordinaires  y  compris  la  clef.  Cette  dernière 
espèce  de  moule  a  la  forme  d'une  caisse  carrée  sans  fond,  composée 
de  fortes  planches  de  chêne  réunies  par  des  charnières  en  fer  et  soli- 
dement barrées.  Deux  des  côtés  de  la  caisse  correspondant  à  l'intrados 
et  à  l'extrados  sont  cintrés.  Les  deux  autres,  correspondant  aux  deux 
joints  de  Ic'te,  sont  droits  et  sont  munis,  du  côté  de  l'intrados,  d'un 
prolongement  servant  de  manche  pour  saisir  le  moule.  Les  deux  côtés 
ouverts  corresponilent  aux  joints  de  douelle.  Celui  du  dessous  se  trouve 
fermé  pendant  le  moulage  par  la  surface  inclinée  de  la  table  sur  laquelle 
on  le  pose.  Les  deux  côtés  munis  d'un  manche  sont  réunis  au  côté 
formant  extrados  par  deux  paires  de  charnières  en  fer  ;  mais  par  l'extré- 
mité dont  le  prolongement  sert  de  manche,  l'un  est  invariablement  fixé 


au  côté  faisant  intrados,  et  l'autre  est  réuni  à  celui-ci  par  une  mortaise 
carrée  recevant  un  tenon.  C'est  par  ce  joint  que  s'ouvre  le  moule  ; 
l'assemblage  est  maintenu  par  un  ressort  et  un  mentonnet. 

Pour  ouvrir  le  moule,  on  décroche  le  mentonnet,  on  saisit  ensuite 
les  deux  manches  avec  les  mains  ;  on  é<:arle  le  moule,  les  charnières  se 
développent,  et  le  voussoir  se  dépouille  aisément.  Les  moules  pour  les 
voussoirs  du  premier  rang  ont  un  côté  de  plus  correspondant  au  congé. 
Ils  se  développent  de  la  même  manière  que  les  autres,  dont  ils  ne  dif- 
fèrent en  outre  que  par  leur  profil. 

Chaque  atelier  est  muni  d'une  vingtaine  de  moules  alignés  en  di-ux 
séries,  et  comprenant  chacune  une  espèce  de  voussoirs.  Le  travail  se 
fait  en  suivant  méthodiquement  les  deux  séries  de  moules  qu'on  remplit 
par  un  bout  de  la  ligne  tandis  qu'on  les  vide  de  l'autre.  Le  nombre  des 
moules  employés  doit  être  calculé  sur  la  vitesse  de  prise  du  ciment,  et 
ils  sont  sans  doute  assortis  de  manière  qu'en  les  remplissant  tous  al- 
ternativement et  avec  ordre,  il  n'y  ait  pas  de  double  emploi  dans  la  fa- 
brication. 


7««« 


PRIX  PROPOSES  PAR  LA  SOCIETE  D'ENCOURAGEMENT 
POUR  Ii'INDUSTRIE  NATIONA1.E. 


EXTRAIT   DES    PBOGBAUSIES. 


Prix  pour  la  fabrication  des  briquet,  tuitet,  carreaux  et  aulree  produite 
en  terre  cuite. 

La  Société  d'encouragement. 
Considérant  quelle  est  d'Importance  de  la  fabrication  des  briques,  tuiles,  car- 
reaux et  autres  produits  en  terre  culte,  pour  les  constructions  et  pour  l'Indus- 
trie en  général,  et  combien  II  importe  d'améliorer  cette  fabrication,  de  la  rendre 
moins  coûteuse  et  de  la  multiplier  autant  que  possible,  et  surtout  d'en  Intro- 
duire l'usage  dans  les  localités  où  II  n'est  pas  encore  établi,  i  cause  de  l'igno- 
rance des  procédés  ou  de  leur  Imperfection,  ou  enfin  de  leur  trop  grande  . 
cherté; 

Considérant,  en  outre,  que  les  procédés  de  cette  fabrication  sont  extrême- 
ment variables,  en  raison,  soit  de  la  nature  et  de  la  consistance  particulières 
des  terres  dans  chaque  localité,  soit  de  la  nature  même  des  produits  à  fabri- 
quer, soit  enfin  des  habitudes  locales,  etc.: 

Qu'en  conséquence,  si,  dans  certaines  localités,  l'ensemble  des  procédés  de 
ce  genre  de  fabrication  réclame  des  améliorations  plus  ou  moins  importantes, 
il  est  possible  que,  dans  beaucoup  d'autres,  une  partie  seulement  de  ces  pro- 
cédés soit  susceptible  d'être  améliorée  ; 

Et  que,  d'ailleurs,  dans  un  art  aussi  important  et  aussi  répandu,  il  importe 
de  laisser  aux  Inventeurs  et  aux  Industriels  la  faculté  d'exercer  leurs  recher- 
ches sur  l'objet  qui  leur  paraîtra  ou  plus  urgent  ou  plus  facile  à  traiter, 

A  cru  devoir  diviser  ainsi  qu'il  suit  le  prix  unique  qu'elle  avait  précédem- 
ment proposé  pour  ce  genre  de  fabrication. 

i"  Procédé  propre  à  opérer,  plus  économiquement  ou  plus  parfaitement 
qu'on  ne  le  fait  ordinairement,  la  division  des  terres  dont  la  préparation 

exige  cette  division. 

La  Société  d'encouragement  propose  un  prix  de  la  valeur  de  cinq  cents 
francs  pour  celui  qui,  soit  dans  une  manufacture  déjà  existante,  soit  dans  une 
manufacture  nouvelle,  aura  Inventé  et  mis  en  usage  un  procédé  quelconque 
pour  opérer,  d'une  manière  plus  économique  ou  plus  parfaite  qu'on  ne  pour- 
rait le  faire  par  les  procédés  ordinairement  employés,  la  division  des  terres 
qui,  en  raison  de  leur  ténacité  naturelle,  réclament  cette  opération  préparatoire. 

La  Société  a  principalement  en  vue  les  terres  de  la  nature  des  glaises  de 
Vaugirard,  Vanvcs,  Gentilly,  etc.,  dont  la  consistance  saponiforme  et  la  forte 
ténacité  rendent  celte  division  assez  longue  et  assez  difficile. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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On  sait  qu'elle  s'opère  ordinairement,  soit  lorsque  cette  glaise  est  fraîche- 
ment tirée,  en  la  coupant  en  tranches  plus  ou  moins  épaisses  au  moyen  d'un 
couteau  à  deux  mains,  soit,  lorsqu'elle  est  sèche,  en  la  concassant  et  en  la 
laissant  ensuite  tremper  le  temps  nécessaire. 

La  Société  ne  prescrit  aucune  condition  quant  au  moyen  de  division  et  à  la 
nature  du  procédé  à  employer;  elle  demande  seulement  que  ce  procédé  soit, 
i  perfection  égale,  plus  économique  que  le  procédé  ordinaire  ou  plus  parfait, 
i  dépense  égale. 

La  comparaison  à  établir  entre  l'ancien  et  le  nouveau  procédé  devra  être  ap- 
puyée, l''de  certificats  autlicnliques  constatant,  d'une  part,  quels  étaient  la  na- 
ture, les  avantages  ou  les  inconvénients,  et  enfin  le  prix  de  main-d'œuvre  de 
l'ancien  procédé,  et,  d'autre  part,  quels  sont  ceux  du  nouveau  procédé;  2"  de 
la  production  d'échantillons  authentiques  de  briques,  tuiles,  carreaux  ou  au- 
tres produits,  tant  crus  que  cuits,  fabriqués,  les  uns  suivant  l'ancien  procédé, 
les  autres  suivant  le  procédé  nouveau. 

On  devra  aussi  faire  connaître  d'une  manière  exacte  la  nature  et  la  con- 
sistance ordinaires  des  terres,  et  en  fournir  des  échantillons  également  authen- 
tiques. 

Si  le  nouveau  procédé  est  mécanique,  on  devra  produire  des  dessins  détaillés 
de  machines,  accompagnés  d'une  description  exacte. 

2°  Mélange  et  corroyage  des  terres. 

La  Société  propose  un  prix  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  pour  celui 
qui,  dans  les  mêmes  circonstances  que  ci-dessus  et  sous  les  mêmes  conditions, 
aura  inventé  et  mis  en  usage  un  procédé  quelconque  pour  opérer,  d'une  ma- 
nière plus  économique  ou  plus  parfaite  qu'on  ne  pourrait  le  faire  par  les  pro- 
cédés ordinairement  employés,  le  mélange  et  le  corroyage  des  terres. 

Les  concurrents  devront  fournir  les  mêmes  documents  que  pour  le  prix  pré- 
cédent. 

3"  Procédé  de  rebattage  et  de  réparage. 

La  Société  propose  un  prix  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  pour  celui  qui, 
dans  les  mêmes  circonstances  que  ci-dessus  et  en  remplissant  les  mêmes  condi- 
tions, aura  inventé  et  mis  en  usage  un  procédé  quelconque  pour  opérer,  d'une 
manière  plus  économique  ou  plus  parfaite  que  par  les  procédés  ordinairement 
employés,  le  rebattage  et  le  réparage  des  briques,  tuiles,  carreaux,  etc.,  etc. 

On  devra  s'attacher  à  ce  que  ce  procédé  assure,  aussi  complètement  que  pos- 
sible, la  régularité  et  la  parfaite  conformité  de  formes  et  de  dimensions  des 
briques,  tuiles,  etc. 

La  Société  admettra,  pour  concourir  successivement  à  ce  prix  et  sous  les 
mêmes  conditions  que  ci-dessus,  l'auteur  d'un  procédé  qui  aurait  l'avantage  de 
dispenser  des  opérations  de  rebattage  et  de  réparage,  sans  aucun  inconvé- 
nient pour  la  bonté  et  la  perfection  des  produits  fabriqués. 

Les  concurrents  devront  fournir  les  mêmes  documents  que  pour  les  prix  pré- 
cédents. 

4°  Cuisson. 

La  Société  propose  un  prix  de  la  valeur  de  mille  francs  pour  celui  qui,  dans 
les  mêmes  circonstances  que  ci-dessus  et  en  remplissant  les  mêmes  conditions, 
sera  parvenu  à  rendre  la  cuisson  plus  parfaite,  plus  siîre,  plus  égale  ou  plus 
économique,  soit  au  moyen  d'une  meilleure  construction  et  disposition  des 
fours,  soit  au  moyen  de  meilleurs  procédés  d'enfournement,  de  conduite  du 
feu,  d'emploi  des  combustibles,  etc.,  etc. 

On  devra,  indépendamment  des  documenls  précédemment  indiqués,  produire 
les  plans,  coupes  et  profils  de  construction  et  de  disposition  des  fours,  l'indi- 
cation du  mode  d'enfournement,  de  la  (|uantité  des  produits  enfournés,  de  la 
nature  et  de  la  quantité  des  combustibles,  et  enfin  des  procédés  de  cuisson  et 
de  conduite  du  feu,  le  tout  authentiquement  cartifié. 

Dans  le  cas  où  les  avantages  qu'il  est  nécessaire  d'obtenir,  sous  le  rapport  de 
la  cuisson,  ne  seraient  atteints  qu'en  partie  par  les  concurrents,  par  exemple, 
s'il  y  avait  seulement  amélioration  de  la  construction  ou  disposition  des  fours, 
sans  amélioration  des  procédés  de  cuisson,  ou  vie»  versa,  la  Société  se  réserve 
la  faculté  de  réduire  le  prix  à  moitié  de  sa  valeur. 

5»  Vernissage. 

La  Société  propose  un  prix  de  la  valeur  de  mille  francs  pour  celui  qui, 
dans  les  mêmes  circonstances  et  en  remplissant  les  mêmes  conditions  que  ci- 
dessus,  aura  inventé  et  mis  en  usage  un  procédé  de  vernissage  des  tuiles, 
carreaux  et  autres  produits,  plus  parfait  ou  plus  économique  que  les  procédés 
ordinairement  employés. 


Il  est  désirable  que  ce  procédé  puisse  être  mis  en  usage  d'une  manière  satis- 
faisante, sans  exiger  une  seconde  cuisson.  On  devra  faire  connaître,  d'une  ma- 
nière exacte  et  suffisamment  détaillée,  les  matières  employées  au  vernissage, 
ainsi  que  la  manière  de  s'en  servir. 

Au  besoin,  on  fera  connaître  également  la  disposition  du  four  ou  le  mode 
particulier  de  cuisson  que  le  procédé  pourra  exiger. 

Dans  la  cas  où  ce  procédé  ne  remplirait  qu'une  partie  des  avantages  désirés, 
par  exemple,  s'il  exigeait  une  cuisson  particulière,  et  qu'en  conséquence  il  n'y 
eût  qu'une  faible  économie,  comparativement  aux  procédés  actuellement  usitéf, 
la  Société  se  réserve  la  faculté  de  réduire  le  prix  i  moitié  de  sa  valeur. 

6°  Extraction  de  la  glaise. 

La  Société,  considérant  que  l'extraction  de  la  glaise  de»  environs  de  Paris  et 
de  diverses  autres  localités  se  fait  ordinairement  par  puits  et  galeries  souter- 
raines, et  que  les  procédés  employés  pour  cette  extraction  sont  fort  imparfaits 
et  assez  coûteux,  quoique  peu  lucratifs  et  fort  dangereux  pour  les  ouvriers,  en 
raison  des  nappes  d'eau  dont  les  bancs  de  glaise  sont  toujours  accompagnés; 

Que  cette  extraction  importe  non-seulement  à  la  fabrication  des  briques, 
tuiles,  carreaux,  etc.,  mais  encore  à  celle  des  poteries,  faïences  et  autres; 

Et  enfin  que  l'amélioration  du  mode  de  cette  extraction  intéresse  en  même 
temps  ces  différentes  fabrications,  ainsi  que  le  bien  et  la  sûreté  des  ouvriers 
glaisiers. 

Propose  un  prix  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  pour  celui  qui  aura  in- 
venté et  mis  en  usage,  soit  dans  les  carrières  de  glaise  des  environs  de  Paris, 
soit  dans  celles  d'autres  localités  où  l'on  extrait  de  la  glaise  à  peu  près  de 
même  nature,  un  procédé  d'extraction  plus  sûr,  plus  facile  ou  plus  économi- 
que que  celui  qui  est  actuellement  en  usage. 

On  devra  faire  connaître,  par  un  mémoire  sufOsamment  détaillé  et  accompa- 
gné de  dessins  nécessaires, 

1"  Le  gisement  de  l'espèce  de  glaise  dont  il  s'agit,  la  profondeur  à  laquelle 
elle  se  trouve,  la  hauteur  des  bancs  et  la  nature  de  ceux  qui  lui  sont  super- 
posés ; 

2°  Le  mode  d'extraction  présentement  en  usage,  la  nature,  les  formes  et  di- 
mensions des  outils  et  ustensiles  qu'on  y  emploie  ;  les  inconvénients  qu'il  pré- 
sente, particulièrement  quant  à  la  sûreté  des  extracteurs  ;  le  prix  de  main- 
d'œuvre  qu'exige  le  procédé  ; 

3»  Et  enfin  les  détails  du  nouveau  mode  d'extraction,  la  nature  et  les  formes 
des  outils  et  ustensiles  qu'il  exige,  les  avantages  qui  en  résultent  et  le  prix  de 
main-d'œuvre  auquel  il  donne  lieu. 

Tous  ces  documents  devront  être  accompagnés  de  certificats  authentiques  cl 
dûment  légalisés. 

Enfin  on  y  joindra  des  échantillons  de  la  glaise  dont  il  s'agit  el  des  produits 
à  la  fabrication  desquels  elle  est  employée. 

Le  concours  restera  ouvert  jusqu'au  1»'  janvier  1845.  Les  prix  seront  décer- 
nés dans  la  séance  générale  du  deuxième  semestre  de  la  même  année. 

Prix  pour  des  moyens  de  prévenir  ou  de  faire  cesser  les  effets  de  l'humlditi 
dans  les  constructions. 

La  Société  d'encouragement  décernera  des  médailles  d'or,  de  platine,  d'ar- 
gent et  de  bronze  :  1°  à  ceux  qui,  sans  embrasser  l'ensemble  de  la  matière  i 
traiter  dans  une  instruction  théorique  et  pratique  sur  les  diverses  causes  de 
l'humidité  et  de  ses  inconvénients,  et  sur  les  moyens,  soit  de  les  prévenir  lors 
de  l'exécution  des  constructions,  soit  d'y  remédier  dans  les  constructions  exis- 
tantes, en  auraient  du  moins  traité  complètement  une  partie  distincte;  J«  a 
ceux  qui  présenteront  des  procédés  dont  l'application  sera  reconnue  sûre  et 
facile,  mais  qui  seraient  de  nature  à  n'être  employés  que  dans  ceruins  cas 
particuliers. 

Les  médailles  seront  distribuées  dans  la  séance  générale  du  deuxième  se- 
mestre de  1845. 

Le  concours  restera  ouvert  jusqu'au  1"  janvier  de  la  même  année. 

Prix  pour  le  perfectionnement  des  appareils  et  protidi*  detlinit  au  bltm- 
ehissage  du  linge. 

1°  Pour  l'introduction,  dont  les  buanderies,  d'appareils  perfectionnés  d* 

lessivage. 

Des  travaux  remarquables  sur  le  blanchissage  économique  du  linge  ont  été 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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entrepris  par  des  savants  très-distingués,  et  l'on  doit  à  leurs  recherches  un 
grand  nombre  de  perfectionnements  fort  importants. 

Mais  les  découvertes  de  la  science  ne  se  sont  point  encore  popularisées  parmi 
les  nombreux  blanchisseurs  de  la  capitale  et  des  environs;  les  perfectionne- 
ments n'ont  pas  encore  pénétré  dans  leurs  ateliers. 

Néanmoins  il  est  certain  que  des  appareils  établis  d'après  les  méthodes  per- 
fectionnées, soit  par  la  circulation  de  l'eau  cliaude,  soit  par  affusion,  soit  par 
la  vapeur,  offriraient  de  grands  avantages  en  produisant  tout  i  la  fois  un  blan- 
chissage plus  parfait  et  une  économie  notable  dans  la  dépense. 

C'est  dans  le  but  de  répandre  les  bons  procédés  de  lessivage  que  la  Société 
d'encouragement  accordera  des  médailles  aux  blanchisseurs  qui  auront  établi 
chez  eux  des  appareils  perfectionnés  de  lessivage,  et  qui  justifieront  s'en  ser- 
vir avec  succès  depuis  plus  d'un  an. 

Ces  médailles  seront  décernées  dans  la  séance  générale  du  deuxième  semes- 
tre de  1843. 

2*  Pour  le  perfectionnement  des  appareils  dt  lessivage  par  la  vapeur. 

L'emploi  de  la  vapeur  a,  sur  les  autres  procédés,  l'avantage  de  ne  mettra 
jamais  le  linge  en  contact  qu'avec  de  l'eau  pure  et  distillée,  au  lieu  de  lessive 
sale  et  colorée;  de  nettoyer  et  d'enlever  complètement  les  substances  grasses 
dont  le  linge  est  imprégné. 

Mais  une  opinion  généralement  répandue  contre  le  lessivage  àla  vapeur,  c'est 
que  le  linge  traité  de  cette  manière  est  exposé  à  être  altéré  ou  même  brûlé. 
Néanmoins  on  se  sert  d'appareils  à  vapeur  depuis  trente  ans  à  l'hôpital  Saint- 
Louis,  dans  l'administration  des  lils  militaires;  depuis  plusieurs  années,  par- 
ticulièrement, dans  les  hospices  de  la  ville  de  Poitiers;  Hjamnis  l'on  n'y  a  vu 
les  accidents  dont  il  s'agit,  et  qui  ne  sauraient  provenir  que  d'une  manipulation 
excessivement  défectueuse  et  de  la  négligence  la  plus  entière. 

L'addition  d'un  tube  latéral  qui  permet  de  reconnaître  s'il  y  a  trop  ou  pas 
assez  de  liquide  dans  l'intérieur  de  la  chaudière  est  un  heureux  perfectionne- 
ment ajouté  à  l'ancien  appareil  de  Curaudau,  et  il  a  pour  effet  de  prémunir 
contre  tout  danger  d'altération  du  linge. 

Mais  la  Société  d'encouragement  accueillerait  avec  empressement  de  nouvel- 
les améliorations  dans  les  appareils  de  lessivage  à  la  vapeur,  et  qui  auraient 
pour  résultat  d'assurer  le  succès  de  l'opération  en  diminuant  la  surveillance  et 
le  travail  des  personnes  chargées  de  la  diriger. 

C'est  dans  ce  but  qu'elle  accordera  un  prix  de  la  valeur  de  mille  francs  à 
ceux  qui  auront  apporté  des  perfectionnements  importants  aux  appareils  ac- 
tuels de  lessivage  par  la  vapeur. 

Bien  que,  dans  l'état  actuel  de  la  science,  le  lessivage  à  la  vapeur  mérite  la 
préférence  sur  tes  autres  procédés,  la  Société  n'entend  pas  accorder  à  ce  sys- 
tème une  préférence  exclusive  ou  absolue;  elle  décernera  également  des  ré- 
compenses à  ceux  qui  auront  amélioré  notablement  les  bons  procédés  ou  appa- 
reils de  lessivage  par  affusion,  circulation,  etc. 

Ces  prix  et  récompenses  seront  décernés,  s'il  y  a  lieu,  dans  la  séance  géné- 
rale du  deuxième  semestre  de  1845. 

IS'ota.  —  Les  concurrents  devront  aussi  porter  leur  attention  sur  les  moyens 
d'éviter  ou  de  diminuer  les  inconvénients  que  présentent  les  manipulations  du 
linge  imprégné  de  liqueur  alcaline.  Cette  opération  répugne  beaucoup  aux  ou- 
vrières à  cause  de  l'action  très-vive  et  douloureuse  que  l'alcali  produit  sur  leurs 
mains. 

Si  la  chaudière  et  le  cuvier  à  vapeur  étaient  parfaitement  joints,  on  pourrait 
éviter  la  manipulation  dont  il  s'agit,  en  imprégnant  le  linge  de  lessive  alcaline 
dans  le  cuvier  à  vapeur  même,  l'y  laissant  macérer  pendant  le  temps  néces- 
saire, ayant  soin  seulement  de  vi<ler  en  grande  partie  la  chaudière  avant  d'al- 
lumer le  feu. 

3°  Pour  la  détermination  des  causes  d'altération  des  tissus  par  la  vapeur 
et  les  lessives  alcalines. 

Si  des  tissus  ont  été  aliérés  ou  brûlés  dans  l'opération  du  lessivage  par  la 
Tapeur,  il  faut  attribuer  cet  accident,  soit  à  un  excès  d'alcali,  soit  à  une  pres- 
sion extraordinaire  de  la  vapeur  et  à  une  élévation  considérable  de  tempéra- 
ture dans  l'intérieur  de  l'appareil,  par  suite  de  l'obturation  accidentelle  des 
conduits  de  vapeur. 

Il  devient  donc  fort  important,  non-seulement  pour  la  question  qui  nous  oc- 
cupe, mais  encore  pour  celle  du  blanchiment  en  général,  de  connaître  le  degré 
de  température,  de  pression  et  d'alcalinité  auquel  les  tissus  commencent  i  être 
altérés. 


Tel  est  l'objet  de  la  question  suivante,  que  la  Société  d'encouragement  met 
au  concours  : 

Déterminer  par  l'expérience  l'action  que  l'eau,  la  vapeur,  les  UssiMS 
alcalines  plus  ou  moins  denses,  plus  ou  moins  caustiques,  exercent  à  des 
températures  et  iout  des  pressions  plut  ou  moins  élevées,  et  pendant  un 
laps  de  temps  plut  ou  moins  long,  sur  les  tissus  de  lin,  de  chanvre  et  de 
coton,  de  diverses  finesses  et  qualités. 

La  valeur  du  prix  sera  de  deux  mille  francs. 

Il  sera  décerné,  s'il  y  a  lieu,  dans  la  séance  générale  du  deuxième  semes- 
tre de  1845. 

Les  concurrents  devront  mettre  les  commissaires  de  la  Société  â  même  de  ré- 
péter les  expériences  et  de  vérifier  l'exactitude  des  faits  qui  seront  énoncés 
dans  les  mémoires,  qui  devront  être  présentés  au  concours  avant  le  1"  jan- 
vier 1845. 

L'air  atmosphérique  contenu  dans  l'appareil,  étant  fortement  échauffé,  peut 
aussi  occasionner, l'altération  des  tissus;  il  importe  d'étudier  cette  action  et  de 
tenir  compte  des  résultats  auxquels  elle  peut  donner  lieu. 

4°  Pour  le  perfectionnement  des  rouet  ou  autres  machinet  propres  à  laver 

le  ling». 

Les  roues  à  laver  (voir  le  Bulletin  de  la  Société  d'encouragement,  vingtième 
année  (1821),  p.  51,  et  mars  1839)  sont  employées  avec  succès  pour  le  blanchi- 
ment des  étoffes;  on  en  a  fait  d'utiles  applications  au  blanchissage  du  linge; 
mais  le  degré  de  vitesse  à  imprimer  i  la  roue,  afin  que  le  linge  soit  suffisamment 
secoué,  retourné  et  imprégné  de  lessive  ;  la  disposition  la  plus  avantageuse  de 
l'intérieur  des  compartiments  ;  la  forme,  les  dimensions  les  plus  convenables  i 
donner  à  la  roue,  etc.  ;  tous  ces  objets  n'ont  pas  encore  été  précisés  ni  étudiés 
d'une  manière  satisfaisante. 

C'est  afin  d'arriver  à  la  solution  de  ces  Intéressantes  questions  que  la  Société 
d'encouragement  propose  un  prix  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  à  l'auteur 
du  meilleur  travail  qui  lui  sera  présenté  sur  ce  sujet  : 

Déterminer,  d'après  t'expériene»  et  la  théorie,  les  conditions  de  forme  et 
de  vitesse,  ainsi  que  les  dimensions  les  plus  convenables  à  donner  aux  roues 
à  laver  le  linge. 

D'autres  machines  à  laver  agissant  par  pression,  torsion  ou  percussion  (washs- 
tock),  [Bulletin,  vingtième  année),  sont  employées  aussi  dans  les  manufactures, 
et  il  serait  possible  d'en  faire  d'utiles  applications  au  lavage  du  linge. 

La  Société  accordera  un  prix  de  la  valeur  de  cinq  cents  francs  à  celui  qui  lui 
présentera  la  meilleure  machine  de  ce  genre  propre  au  lavage  du  linge. 

Ce  prix  sera  décerné,  s'il  y  a  lieu,  dans  la  séance  générale  du  deuxième  se- 
mestre de  1845. 

5°  Pour  le  perfectionnement  des  appareils,  machines  et  procédés  pour  ca- 
landrer,  moirer,  plisser,  repasser  et  sécher  le  linge. 

La  Société  accordera  des  médailles  et  des  récompenses  aux  personnes  qui  lui 
présenteront  les  meilleurs  objets  en  réponse  1  cette  partie  du  programme  ;  elles 
seront  distribuées,  s'il  y  a  lieu,  dans  la  séance  générale  du  deuxième  semes- 
tre de  1845. 

OOMDITIOXS  CÉXÉIIALES   1   REMPLIR   PAR   LES  COXCCRKEXTS. 

1*  Les  modèles,  mémoires,  descriptions,  renseignements,  échantillons  et  piè- 
ces destinés  à  constater  les  droits  des  concurrents,  seront  adressés  francs  de 
port  au  secrétaire  de  la  Société  d'encouragement  pour  l'industrie  natio- 
nale, rue  du  Bac,  42,  hôtel  de  Boulogne  ;  ils  devront  être  remis  avant  le 
1"  janvier  de  l'année  de  la  distribution  des  prix  :  ce  terme  est  de  ri- 
gueur. 

2"  Les  procédés  ou  machines  seront  examinés  par  des  commissaires  que  la 
Société  désignera. 

3°  Les  membres  du  Conseil  d'administration  et  les  deux  censeurs  sont  exclus 
du  concours. 

4"  Les  autres  membres  de  la  Société  sont  admis  à  concourir;  les  étrangers 
le  sont  également. 

5°  Les  concurrents  sont  avertis  que  la  communication  qu'ils  font  à  la  So- 
ciété de  leurs  procédés  ne  peut  leur  tenir  lieu  d'un  brevet  d'invention,  et  que, 
s'ils  veulent  prendre  le  brevet,  il  faut  qu'ils  le  fassent  avant  de  se  présenter 
au  concours. 

6°  Les  brevets  d'invention  n'étant  délivrés  que  sur  la  description  détaillée 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DKS  TRAVAUX  PURLICS. 


383 


des  procédés,  et  chacun,  d'après  la  loi  du  5  juillet  1844,  pouvant  en  prendre 
connaissance  (1),  la  Société  se  réserve  expressément  la  faculté  de  publier,  en  to- 
talité ou  en  partie,  les  découvertes  qui  auront  obtenu  les  prix  et  médailles; 
mais  les  concurrents  ne  pourront  user  de  cette  faculté,  sous  quelque  prétexte 
que  ce  soit. 

7°  Les  auteurs  jugés  dignes  d'une  récompense,  qui  ne  se  seraient  pas  pour- 
vus d'un  brevet  d'invention  et  qui  désireraient  garder  le  secret  de  leurs  procé- 
dés, seront  tenus  d'en  déposer  sous  cachet  la  description,  dont  l'exactitude 
devra  être  attestée  par  un  membre  du  comité  compétent.  La  durée  du  dépAt 
ne  pourra  excéder  quinze  ans,  à  l'expiration  desquels  la  description  sera 
publiée. 

8»  La  Société  conservera  les  mémoires  descriptifs  et  les  dessins  qui  n'auront 
point  été  couronnés;  mais  elle  permettra  aux  auteurs  d'en  prendre  copie,  et 
elle  leur  rendra  les  modèles. 

9»  Les  concurrents  ne  mettront  pas  leurs  noms  à  leurs  mémoires  ;  ils  y  met- 
tront seulement  une  devise,  et  ils  joindront  aux  modèles,  mémoires  ou  échan- 
tillons, un  billet  cacheté  renfermant  la  même  devise,  leur  nom,  et  l'indication 
de  leur  domicile. 

10°  Les  concurrents  qui  auraient  traité  plusieurs  des  questions  mises  au  con- 
cours sont  invités  i  envoyer  des  mémoires  séparés  sur  chacune  d'elles. 

11°  Les  médailles  ou  la  somme  seront  remises  â  celui  qui  aura  obtenu  le  prix, 
ou  i  son  fondé  de  pouvoirs. 

Approuvé  en  séance  générale,  le  29  mat  18ii. 

Le  baron  THfiNARD,  président; 
FRANCœUR,  DUMAS,  vice-présidents  ; 
CL.  ANTHELME  COSTAZ,  JOMARD,  secrétaires-adjoints. 


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CBROUflQUE. 

Sommaire  :  Travaux  de  la  ville  de  Paris,  jardin  du  Luxembourg.  -  Un  marché  aux 
fleurs  à  la  place  Saint-Sulpice.  -  Bibliothèque  Sainte-Geneviève.  -  Concours 
pour  un  grand  ihéâtre  à  Toulouse.  -  École  centrale  des  ans  et  manuraclurcs, 
distribution  des  diplômes  et  des  certificats. 

Différents  travaux  importants  el  utiles  s'exécutent  en  ce  moment  sur 
différents  poinis  de  la  capilale.  Nous  sommes  loin,  on  le  sait,  d'être 
d'accord  avec  Tadministration  sur  la  manière  dont  le  remaniement  de 
Paris  doit  s'opérer,  el  sur  les  plans  d'enscnii)ie  à  suivre  dans  l'édifica- 
tion du  Paris  moderne;  mais  nous  nous  sommes  toujours  empressés  de 
lui  donner  nos  éloges  quand  des  travaux  de  détail  nous  ont  semblé 
faits,  sinon  d'un  point  de  vue  d'ensen^ble  bien  compris,  du  moins 
en  vue  d'une  amélioration  réelle  et  immédiate.  Nous  nous  refusons  à 
croire  aux  plans  d'ensemble  de  la  ville,  dont  cependant  les  discours  du 
préfet  viennent  deux  fois  par  an  éblouir  les  myopes,  quand  nous  voyons 
une  rue  arlère  telle  que  la  rue  Rambuleau  former  des  coudes  en  maints 
endroits  comme  une  rue  du  Moyen-Age,  alors  que  chacun  bâtissait  sa 
maison  à  sa  guise,  tantôt  suivant  une  ligne,  Uintôl  suivant  une  autre, 
et  que  les  rues  se  formaient  comme  par  hasard  de  la  juxtaposition  for- 
tuite d'habilaiions,  en  l'absence  de  tout  conirôle  directeur  ;  nous  nions 
absolument  l'existence  de  ce  plan  d'ensemble  quand  nous  voyons  re- 
bâtir des  maisons  neuves  sur  les  terrains  de  l'ancien  Vaudeville,  c'est-à- 
dire  dans  le  prolongc-mcnt  de  la  galerie  inachevée  du  Louvre  et  de  la 
rue  de  Rivoli;  quand  nous  nous  rappelons  surtout  avoir  vu,  il  n'y  a 
guère  plusd'un  an,  des  ouvriers  occupés  à  niveler  les  terrains,  à  bitumer 
les  trottoirs,  à  planter  les  arbres  du  boulevard  Malesherbes,  près  de  la 
Madeleine,  ce  fameux  boulevard  si  pompeusement  promis,  si  longtemps 


(»)  Loi  du  5  juillet  18«.  «  An.  25.  Les  descriptions,  dessins,  échanlillons  et  mo- 
dèles des  brevet»  délivrés  resteront  jusqu'à  l'expiration  lics  brevets,  déposés  au  mi- 
nistère de  l'.igriculturc  et  du  commerce,  où  ils  seront  communiqués,  sans  frais,  à 
toute  réquisition.  Toute  personne  pourra  obtenir,  à  ses  frai.«,  copie  dcsdilcs  descrip- 
tions et  dessins,  suivant  les  formes  qui  seront  déterminées  par  l'an.  50.  » 


annoncé,  ce  boulevard  impossible,  depuis  plus  de  cinq  ans  qu'une  rue 
nouvelle,  la  rue  Lavoisier.est  bâtie  8ur  son  axe;  plus  impossible  encore 
aujourd'hui,  que  de  vastes  maisons  en  pierre  de  taille  et  à  cinq  étages 
viennent  de  s'élever  comme  par  ench;inlernent,  justement  à  son  entrée, 
sur  les  terrains  qu'il  devait  traverser.  Voilà  pourtant  ce  que  deviennent 
les  beaux  projets  de  la  Ville  :  aussi  les  promesses  de  M.  le  préfet  nous 
trouvent-elles  sceptiques;  pour  y  croire  .  nous  attendrons  désormais 
qu'elles  se  soient  réalisées;  quant  au  plan  d'ensemble,  il  y  a  long- 
temps que  nous  n'y  avons yamai<  cru. 

Parmi  les  améliorations  partielles  dont  nous  parlions  plus  haut,  il  en 
est  une  (|ue  nous  nous  reprocherions  de  passer  sous  silence;  nous  vou- 
lons parler  du  dégagement  que  l'on  crée  à  la  partie  du  jardin  du  Luxem- 
bourg qui  longe  la  rue  de  Vaugirard,  el  de  la  démolition  de  ces  ignobles 
masures  qui  la  privaient  de  la  vue  et  de  l'air  du  jardin.  Ce  n'est  point  pré- 
cisément à  la  Ville  que  sont  dus  ces  travaux  ;  ils  sont  l'œuvre  du  gouver- 
nement :  mais  ils  se  railachenl  trop  élroiiement  aux  intérêts  de  la  ville 
pour  les  en  séparer.  Quand  toutes  ces  vieilles  maisons  seront  démolies, 
on  élèvera  une  grille  sur  toute  la  longueur  du  jardin. 

A  l'intérieur  du  parc ,  on  a  fait  depuis  quelques  années  plusieurs 
améliorations.  On  a  élargi,  d'un  côté  du  moins,  la  grande  avenue  dite 
de  l'Observatoire,  el  pour  cela,  il  a  fallu  f^ire  un  remblai  considérable 
du  côté  des  pépinières  du  sud-ouest.  On  a  commencé  dans  certains  en- 
droits le  remblai  de  la  partie  opposée.  Il  nous  semble  qu'on  pourrait 
facilement,  el  sans  travaux  considérables,  faire  entrer  définitivement 
les  pépinières  et  le  jardin  de  la  Faculté  de  médecine  dans  l'ensemble 
du  parc;  les  différences  de  niveaux  pourraient  être  sauvées  par  des 
pentes  dont  l'elTel  pittoresque  animerait  celte  partie  si  monotone  du 
jardin.  On  travaille  aussi  à  renouveler  les  informes  statues  qui  le  dé- 
parent depuis  trop  longtemps  de  leurs  membres  mutilés.  On  a  déjà 
placé  un  Hercule  d'une  beauté  de  formes  assez  suspecte,  et  près  de  là 
la  Velléda  de  M.  Maindron.  Cette  œuvre  remarquable  exhale  un  par- 
fum de  mélancolie  qui  arrête  le  promeneur  el  le  force  à  rêver.  Bien- 
tôt, dit-on,  la  sombre  druidesse  verra  disparaître  son  entourage  païen; 
les  Vénus,  lesJVulcain,  les  Bacchus,  feront  place  à  sainte  Clutilde,  l'é- 
pouse du  vainqueur  de  Tolbiac;  à  Blanche  de  Casiille,  la  mère  du  roi 
saint  et  guerrier  qui  bâtit  la  chapelle  de  Vincennes,  la  Sainte-Chapelle 
et  une  partie  de  Saint-Denis;  à  sainte  Geneviève,  la  pauvre  bergère, 
palroiie  de  Paris;  à  Valentine  de  Milan,  la  malheureuse  épouse  du  duc 
d'Orléans  assassiné  en  1507  par  les  hommes  de  Jean  Sans-Peur;  à  Ma- 
rie Stuarl,  celte  autre  princesse  malheureuse  qui  paya  si  cher  sa  beauté 
et  ses  amours;  à  Jeanne  d'Albret,  la  mère  de  Henri  IV;  à  Marguerite 
de  Provence,  l'épouse  de  saint  Louis;  et  enfin  à  Jeanne  Hachette, 
l'héroïne  de  Beauvais.  H  est  une  autre  Jeanne  qui,  nous  l'espérons,  ne 
sera  pas  oubliée  dans  relie  glorilication  des  gloires  féminines  de  la 
France;  il  est  aussi  une  autre  Marguerite  pour  laquelle  nous  demandons 
un  piédestal:  l'aimable  sœur  de  François  I"  ne  mérite- t-elle  pas  une 
place  sous  ces  poétiques  ombrages,  entre  Marot  et  Ronsard? 

—  On  démolit  sur  la  place  Saint-Sulpice  toutes  les  vieilles  masures 
qui  l'emcombraient  encore,  el  quelques  ouvriers  se  hàUnl  lentement 
autour  de  la  fontaine  de  M.  Viscunti.  Après  maint  et  maint  essai  en 
plâtre,  l'architecte  a  enfin  trouvé  le  galbe  qu'il  lui  convenait  de  donner 
à  sa  grande  vasque  en  marbre;  s'il  ne  fait  pas  un  chef-d'œuvre,  ce  ne 
sera  pas  faute  d'avoir  cherché.  Quand  le  sol  de  la  place  sera  complète- 
ment aplani,  el  que  les  eaux  du  piiiis  de  Grenelle  couleront  du  sommet 
de  la  motitagne  qu'élève  M.  Visconti,  alors  on  ap|)ellera  les  marchands 
fleuristes  de  la  capilale  au  pied  des  jeunes  ormeaux;  ce  sera  le  cin- 
quième marché  aux  fleurs  de  Paris,  et  le  seul  sur  la  rive  gauche.  Le 
plus  animé  d'entre  eux  est  celui  du  quai  aux  Fleurs,  dans  l'ile  de  la  Cité, 
et  par  conséquent  au  centre  de  la  ville.  Les  autres  sont  situés,  l'un  au 
pied  de  la  .Madeleine,  un  auire  autour  du  Chàteau-d'Elau,  et  le  troisième 
à  la  place  Royale,  c'est-à-dire  tous  trois  sur  la  rive  droite,  tous  trois 
presque  sur  la  ligne  favorisée  des  boulevards  du  nord;  cl  pendant  que 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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les  jolies  habitantes  de  celte  heureuse  rive  s'enivraient  à  leur  aise  des 
parfums  de  la  rose  et  du  jasmin,  la  pauvre  griselte  du  fauljourg  Saint- 
Germain  était  obligée  d'aller  chercher  jusque  sur  les  bords  de  la  Seine 
l'œillet  qui  devait  décorer  le  jardin  de  sa  fenêtre.  Il  y  avait  là  injustice, 
et  nous  félicitons  M.  le  préfet  du  gracieux  projet  qu'il  a  conçu  en  faveur 
de  cette  aimable  population  du  sud. 

—  On  a  enfin  posé,  sur  l'emplacement  de  l'ancien  collège  Montaigu, 
la  première  pierre  de  la  nouvelle  bibliothèque  Sainte-Geneviève.  La 
construction  de  cet  édifice  est,  .comme  on  le  sait,  confiée  à  l'intelli- 
gence de  M.  Henri  Labrouste. 

Concours  pour  un  grand  théâtre  à  Toulouse. — La  place  principale  de 
Toulouse  est  située  à  peu  près  au  centre  de  la  cité,  et  s'étend  devant 
l'Hôtel-de-Ville,  ou,  comme  l'appellent  les  Toulousains,  le  Capitale. 
Les  côtés  nord  et  sud  de  celte  place  sont  occupés  par  des  maisons  par- 
ticulières de  construction  nouvelle,  qui  sont  d'un  dessin  uniforme  et 
d'un  assez  bon  effet.  Le  Capitole ,  flanqué  d'une  rue  à  chacune  de  ses 
extrémités,  occupe  tout  le  côté  Onest  de  la  place,  tandis  que  du  côlé 
Est  on  voit  encore  une  masse  de  maisons  informes,  sales  et  hideuses, 
dont  on  fait  bien  de  vouloir  se  débarrasser  au  plus  tôt.  C'est  sur  l'em- 
placement de  ces  masures,  et  vis-à-vis  de  l'Hôtel-de-Ville,  qu'on  veut 
élever  un  théâtre  monumental. 

La  situation  nous  paraît  assez  bien  eniendue:  elle  est  centrale  ;  la 
place  du  Capitole  rendra  les  abords  du  théâtre  faciles,  et  en  établissant 
des  rues  sur  les  trois  autres  côtés  du  monument,  celui-ci  se  trouvera 
complètement  isolé,  circonstance  très-importante  pour  un  théâtre. 

On  voit  actuellement  exposés  dans  la  grande  salle  de  peinlure  du 
musée  de  Toulouse,  près  d'une  vingtaine  de  projets  de  théâtre;  c'est 
que  l'administration  a  ouvert  un  concours  public  pour  son  théâtre  de 
la  place  du  Capitole.  Nous  disons  un  concours pu6/îc,  et  c'est  presque  un 
ton,  car  peu  d'architectes  en  dehors  de  l'enceinte  de  la  ville  sont  in- 
struits de  ce  concours,  et  nous-mêmes,  qui  publiâmes  tout  au  long  le 
prospectus  que  l'administration  nous  avait  adressé,  relatif  au  concours 
(non  suivi  d'effet)  de  son  Hôiel-de-Ville,  il  nous  a  fallu  venir  à  Tou- 
louse pour  apprendre  l'existence  de  ce  nouveau  concours. 

On  comprend  que  nous  ne  pouvons  pas  analyser  ici  successivement 
chacun  des  projets  exposés,  mais  nous  devons  déclarer  que  ce  concours 
nous  a  révélé  des  éludes  certainement  plus  avancées  que  nous  ne 
comptions  en  voir.  Bon  nombre  de  concurrents  ont  ménagé  des  entrées 
couvertes  pour  les  voitures,  et  des  galeries  au  pourtour  du  monument, 
qui  dispeuseraieni  de  ces  affreuses  marquises  et  autres  appendices  dont 
on  affuble  tant  d'édifices  publics.  Quelques-uns  ont  donné  une  forme 
circulaire  à  l'extrémité  du  théâtre  occupée  par  la  salle,  mais  ces  tenta- 
tives sont  généralement  assez  malheureuses;  nos  théâtres  modernes  sont 
accompagnés  de  tant  d'accessoires  étrangers  aux  théâtres  antiques,  que 
la  satle  est  loin  d'occuper,  comme  autrefois,  la  majeure  partie  de  la 
surface  horizontale  du  monument.  Il  n'est  donc  plus  nécessaire  au 
même  degré  d'accuser  la  forme  spéciale  de  la  salle. 

D'autres  concurrents  avaient  composé  leur  façade  principale  (celle 
qui  donnerait  sur  la  place)  dans  le  style  du  Capitole,  monument  bâti  il 
y  a  cent  ans  environ,  et  qui  ne  manque  certainement  pas  de  quelque 
grandeur,  mais  qui  ne  saurait  être  présenté  aujourd'hui,  cependant, 
comme  un  modèle  à  imiter.  On  comprend  que  l'intention  de  ces  mes- 
sieurs était  de  donner  un  caractère  d'un«7eà  la  place.  Le  côté  Nord  de 
cette  place  reproduit  en  effet  exactement  le  côlé  Sud;  ils  auront  voulu 
qu'il  y  eût  de  l'analogie  entre  le  côté  Ouest  et  le  côté  Esi;  ce  désir  se 
comprend,  mais  il  ne  conviendrait  pas  d'y  sacrifier  un  monument  aussi 
important  que  le  sera  le  nouveau  théâtre;  car,  nous  le  répétons,  le  Ca- 
pitole, qu'on  accepte  volontiers  pour  son  propre  compte  tel  qu'il  est,  qui 
est  d'ailleurs  un  legs  de  nos  ancêtres,  ne  saurait  cependant  imposer  ses 
formes  molles  et  un  peu  lourdes  au  nouvel  édifice  qu'on  veut  con- 
struire. 


On  nous  a  donné,  comme  les  auteurs  des  projets  qui  nous  avaient  le 
plus  frappés,  MM.  Chambert,  l'architecte  du  déparlement;  de  Bonald, 
architecte  de  la  ville,  Delort,  Deprato,  Villeneuve  et  Gonin  ;  mais  nous 
sommes  d'autant  moins  certains  de  rexactitude  de  ces  renseigiien)ents, 
qu'il  nous  est  arrivé  d'entendre  altribuer  le  mêtne  projet  à  deux  auteurs 
différents,  et  réciproquement.  De  toute  façon,  les  concurrents  qui  l'em- 
porteront (il  paraît  qu'il  y  aura  trois  prix)  pourront  s'en  applaudir,  car 
leur  victoire  ne  sera  pas  sans  quelque  gloire. 


ECOLE  CENTRALE  DES  ARTS  ET  M.VNUFACTURES. 

L'École  centrale  des  Arts  et  Manufactures  vient  de  terminer,  selon 
l'usage ,  son  année  scolaire,  par  la  distribution  des  diplômes  d'ingé- 
nieur civil  qu'elle  décerne  à  ses  élèves  les  plus  distingués.  La  sévérité 
des  épreuves  par  lesquelles  il  faut  passer  pour  l'obtenir,  fait  de  ce 
diplôme  une  des  plus  honorables  récompenses  qu'un  jeune  homme 
puisse  ambitionner  à  la  fin  de  ses  études,  cl  une  des  plus  solides  ga- 
ranties de  succès  à  son  entrée  dans  la  carrière  de  la  haute  industrie. 
A  la  dernière  exposition  des  produits  de  l'industrie  nationale,  trois  mé- 
dailles d'or  ont  été  accordées  à  d'anciens  élèves  de  celte  école. 

Trente-trois  diplômes-ont  été  délivrés  cette  année.  Dans  la  liste  qui 
suit  on  remarquera  des  jeunes  gens  de  diverses  nations. 

DIPLÔMES  D'INGËNIEIB. 

Mécanicient. —  MM.  Schmerber,  de  Mulhouse;  Goeti,  de  Genève; 
Lagrafel,  de  Marseille;  Bcnoit-Duporlail,  de  Paris;  Coulera,  de  Mul- 
house; Lemaire,  de  Maubeuge:  Saulnier,  de  Paris. 

Comlructeurs.  —  M.M.  Zanolini,  de  Bologne  (Italie);  Davasse,  de 
Toulouse  ;  Poucet,  de  Montmerle  (Ain)  ;  Pollack,  de  Peslh  (Hongrie)  ; 
Muller,  d'Altkirck;  Coghlan,  de  Killarney  (Irlande);  Zawadski,  de 
Dombrowski  (Pologne);  Malher,  de  la  Louisiane;  Guelle,  d'Andeville 
(Eure)  ;  Séguin,  d'Annonay  ;  Salleron,  de  Paris;  Nillis.  de  Paris;  Hu- 
bert, de  Mous. 

miailurgitlet.  —  MM.  Desforgcs,  de  Paris;  de  Gispert,  de  Barce- 
lone; Jelowicki,  de  Werda  (Pologne);  Guillaume,  de  Paris;  Dumler,- 
de  Namur;  Leniuhot,  d'Arbois  (Jura). 

Chimistes.  —  MM.  Le  Royer,  de  Genève;  Knab,  de  Tarare;  Curlel, 
de  Quers  ;  Duclos,  de  Grenoble  ;  Terrisse,  de  Bolle  (Suisse)  ;  Clausz,  de 
Landau  ;  Guérard-Deslauriers,  de  Caen. 

CERTIFICATS  DE  CAPACITÉ. 

Mécaniciens.—  MM.  Boulté,  de  Paris;  Alberge,  de  Dinan  ;  Carbon- 
nicr,  de  Rouen  ;  Marais,  de  Louviers. 

Constructeurs.  —  M.M.  Corneck,  de  Vcrneuil;  Dupuy,  de  Martel; 
Rollit,  de  Sainl-Jean-en-Boyan  ;  Sonnlag,  de  Louisbourg  ;  Richard,  de 
Paris  ;  Riche,  de  Gray. 

MétaUurgisles.  —  M.  Demoly,  de  Lons-le-Saulnier  (rappel  du  certi- 
ficat obtenu  au  dernier  concours). 

Chimistes.  —  MM.  Brissout  de  Barneville,  de  Paris;  Dony,  de  Fri- 
bourg;  Sudre,  de  Bordeaux. 


L'un  des  Rédacteurs , 

Alphonse  de  GALONNE. 


Pahis.  —  TïP.  Lacrampg  et  Comp.,  bue  damiette,  2. 


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M  5  M.  19. 


Bt-fiffiil. 


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PROJET    D'HOPITAL 


par  M  DU  PUY  arrhitecte 


385 


REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


38K 


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DEUXIÈME  INSTRUCTION  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 

DES    ARTS    ET    MONUMENTS. 

(SUITE,  voy.  col.  2il,  289  et  337.) 

CrVUCISATION  CHRÉTIENN-X. 

STYLE  ROMAN  ET  STYLE  GOTHIQUE. 
CHAPITRE  II.  —  DÉTAILS  FATÉWEURS  DE  L'ÉGLISE. 

(SUITB.) 

G.  Les  fenêtres  peuvent  être  en  arcade ,  en  œil-de-bœuf,  ou 
rectangulaires;  percées  dans  la  muraille  à  angles  droits,  ou  éva- 
sées, soit  à  l'intérieur,  soit  à  l'extérieur,  en  meurtrières. 


E^S 


Fi'j.  191. 

Dans  la  basilique  primitive,  l'abside  en  était  dépourvue.  En- 
suite elle  en  admit  une  ou  trois  à  sa  partie  supérieure  ;  plus  rare- 
ment et  postérieurement  elles  y  furent  pratiquées  en  nombre  pair. 
C'était  surtout  par  ces  fenêtres  de  l'abside  et  par  celles  des  fa- 
çades que  l'édilice  était  éclairé,  plus  que  par  les  baies,  tantôt  en 
arcade,  tantôt  en  œil-de-bœuf,  des  murailles  latérales.  On  sait 
d'ailleurs  que  les  grandes  fenêtres  ne  furent  d'abord  qu'un  groupe 
de  petits  jours  réunis  et  inscrits  dans  une  baie  figurée.  Sur  les  fa- 
çades romanes,  on  rencontre,  soit  les  trois  fenêtres  de  front  de  la 
basilique ,  surmontées  ou  non  de  lœil-de-bœuf  du  fronton,  soit  ces 


mêmes  fenêtres  dans  une  autre  disposition  (2  et  l],  soit  deux  fe- 
nêtres latérales,  soit  enfin  une  grand  baie  circulaire  à  meneaux 
massifs  et  rayonnants,  motivée  ou  par  la  forme  carrée  de  l'étage 
de  la  façade  dans  laquelle  elle  est  inscrite,  ou  par  le  souvenir  de 
cet  ancien  œil-de-bœqf  du  fronton  primitif,  dont  nous  venons  de 
parler. 

Dans  l'examen  des  fenêtres  romanes ,  il  sera  toujours  nécessaire 
de  remarquer  si  ce  sont  de  simples  baies  percées  à  travers  le  plein 
de  la  construction ,  ou  si  le  contour  en  est  dessiné  par  un  enca- 
drement de  pierres  d'une  coupe  particulière ,  destinées  à  former 
cintre ,  comme  c'est  le  cas  le  plus  ordinaire. 


Fig.  192. 


Fiff.  193. 


Fig.  I9i. 


Fig.  19.Ï. 


Fig.  196. 


Quelle  que  soit  la  nature  de  l'arcade,  on  devra  toujours  indiquer 
le  rapport  de  la  hauteur  de  la  fenêtre  avec  sa  largeur.  Jusqu'à  une 
époque  avancée,  les  pieds-droits  sont  ordinairement  munis  de  co- 
lonnes, ou  tout  au  moins  d'une  imposte  à  leur  sommet. 

La  fenêtre  romane  en  arcade  peut  présenter  les  formes  semi- 
circulaire,  surbaissée  ou  trilobée.  En  fer  à  cheval,  elle  ne  se  ren- 
contre guère  que  dans  des  baies  secondaires. 

Ces  fenêtres  peuvent  être  réunies  en  groupes,  deux  à  deux  ou 
trois  à  trois,  de  dimensions  pareilles  ou  inégales,  inscrites  ou 
non  dans  une  baie  principale  figurée,  ou  dans  un  système  d'ar- 
cature  extérieure,  soit  d'une  manière  continue,  soit  par  alter- 
nation  avec  des  arcades  figurées.  Il  en  est  de  même  pour  l'œil- 
de-bœuf. 


Fig.  197. 


T.  V. 


35 


AKi 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


388 


Cloiire  à  Coloiim' 


Fig.  198 

Il  est  rare,  en  France,  de  trouver  eelui-ci  employé  isolément 
dons  le  système  général  de  fénestration  d'une  église;  mais  il  y 
a  été  souvent  combiné  avec  la  fenêtre  en  arcade,  soit  qu'il  en 
surmonte  le  sommet,  soit  qu'il  alterne  avec  elle. 

Sans  elle,  on  ne  le  voit  guère  que  dans  les  façades  principales, 
ou  il  s'étend  et  s'agrandit  de  manière  à  envahir  une  grande  par- 
tie de  leur  surface ,  et  prend  alors  le  nom  de  Rose.  C'est  dans  les 
roses  romanes  que  se  présentent  les  premières  nervures  en  pierres 
(meneaux) ,  qui  forment  les  compartiments  de  la  fenêtre  ;  ces  me- 
neaux y  sont  toujours  disposés  en  roue,  soit  qu'ils  représentent 
des  colonnettes  supportant  des  arcades,  ou  bien  des  balustres. 

Siiint-F.tfenne  île  Beauvais. 


t'iij.  199. 

La  fenêti'e  simple  à  arcade  pointue  arrive  avec  l'arcade  go- 
lliique;  elle  est  d'abord  aiguë,  surhaussée  ou  trilobée,  rarement 
à  tiers-point,  quelquefois  à  contre-courbure,  jamais  lancéolée. 

.Cette  première  fenêtre  gothique  se  combine ,  soit  avec  elle-même, 
soit  avec  l'œil-dc-bœuf. 


Fi'j.  200. 


F.(j.  H)l. 


Fiij.  203. 


Les  groupes  qui  en  résultent  sont  souvent  inscrits  dans  une 
baie  figurée  a  arcade ,  d'abord  romane,  puis  gothique.  Le  plus 
simple  de  ces  groupes  se  compose  de  deux  fenêtres  étroites  en 
arcade ,  ordinairement  surmontée  d'un  œil-de-bœuf  intermédiaire, 
le  tout  rassemblé  dans  une  arcade  principale  figurée.  Il  en  en- 
vahit de  plus  en  plus  les  parties  pleines,  jusqu'à  ce  qu'il  les  ait 
réduites  aux  dimensions  de  meneaux.  Le  premier  de  ces  meneaux 
est  toujours  perpendiculaire  jusqu'à  la  hauteur  de  la  naissance  de 
l'arcade,  où  il  se  bifurque.  Peu  à  peu  les  meneaux  perpendi- 
culaires et  les  œils-de-bœuf  se  multiplient  dans  une  arcade  prin- 
cipale ou  fenêtre  élargie,  et  ayant  passé  de  la  courbe  aiguë  à  la 
courbe  à  tiers-point  ou  évasée. 

Enfin  les  meneaux  circulaires  du  sommet  ne  sufllsent  plus  ni 
aux  besoins  de  l'ornementation,  ni  à  la  solidité  des  châssis  vitrés. 
Ils  se  ramifient  dans  leur  intérieur,  d'abord  en  découpures  lobées 
ou  segments,  le  plus  souvent  au  nombre  de  six  ou  de  trois,  puis 
en  combinaisons  trop  variées  pour  qu'il  soit  possible  de  les  dé- 
crire ici ,  mais  toujours  engendrées  par  des  courbes  circulaires 
et  rayonnantes.  Telles  sont  les  transformations  que  subit  la  fenêtre 
gothique,  depuis  une  époque  avancée  du  XIT  siècle  jusqu'à  la 
fin  du  XIII*,  et  après  les(iueiles  elle  preud  le  nom  de  feiiélre 
rayonnante. 


Fi';.  2:t. 


Fis-  201. 


389 


RKVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


390 


Il  llll'illllllliuiiiiiiillltiiliill  II 

pig.  iOô. 

Suiiil-Jedn-tU-I.iilrun  [l'aris). 


Cette  fenêtre  s'élargit  encore  au  XlVe  siècle,  de  manière  à  enva- 
hir souvent  tout  l'espace  compris  entre  les  contre-forts,  et  passe 
(le  l'arcade  évasée  à  l'arcade  surbaissée,  sans  jamais  s'arrêtera 
l'intermédiaire  (le  plein  cintre).  En  même  temps  les  meneaux 
se  compliquent  et  s'évident  de  plus  en  plus  en  véritable  den- 
telle ou  filigrane  de  pierre,  mais  sans  cesser  de  conserver  le 
cercle  pour  courbe  génératrice  de  toutes  leurs  ramifications  su- 
périeures, avec  cette  différence,  que  ce  n'est  plus  seulement  le 
cercle  en  repos,  mais  souvent  aussi  les  projections  du  cercle  en 
mouvement. 

La  fenêtre  en  rose  suit  les  mêmes  phases,  et  s'agrandit  de  plus 
en  plus,  sans  cesser  d'appartenir  au   système  rayonnant. 

Vers  le  commencement  du  XV"  siècle  s'accomplit  une  im- 
portante révolution  dans  la  forme  et  la  combinaison  des  meneaux. 

Après  que  toutes  les  combinaisons  possibles  de  l'œll-de-bœuf, 
de  ses  divisions  et  de  ses  projections  ont  été  épuisées  dans  une 
fenêtre  de  plus  en  plus  surbaissée,  elles  s'en  trouvent  à  cette 
époque  définitivement  exclues  pour  être  remplacées  par  un  autre 
système  où  figurent  bien  encore  quelquefois  les  projections  du  cercle, 
mais  qui  se  distingue  du  précédent  par  la  direction  toujours  ascen- 
dante de  ses  parties,  au  milieu  d'une  variété  infinie  déformes,  ren- 
fermée dans  une  arcade  le  plus  souvent  surbaissée  ou  en  anse  de 
panier.  Malgré  tout  le  caprice  de  ces  formes,  il  est  rare  qu'elles 
ne  consistent  pas,  surtout  pendant  la  première  moitié  du  siècle. 


en  un  groupe  de  triangles  ou  de  quadrilatères  curvilignes,  ou 
autres  courbes  composées  finissant  en  pointe  et  présentant  quelque 
analogie  avec  une  flamme  droite  ou  renversée  ; 

Saint-Gervaii  [Parit). 


Fin.  i07. 

c'est  ce  qui  a  fait  donner  à  la  fenêtre  du  XV»  siècle  le  nom  de 
flamboyante ,  \oys  même  que  ses  meneaux  représentent  toute  autre 
chose  :  par  exemple,  des  fleurs  de  lis  ou  des  étoiles,  ainsi  que 
cela  arrive  assez  souvent  en  France,  surtout  dans  les  fenêtres  de 
la  grande  proportion  (l). 

Une  autre  baie  du  XV»  siècle,  beaucoup  plus  fréquente  en  An- 
gleterre qu'en  France,  est  la  fenêtre  perpendiculaire  à  meneaux 
purement  verticaux  jusqu'à  leur  sommet,  ou  s'y  croisant  par  de 
simples  bifurcations  parallèles  au  contour  de  l'arcade,  qui  dans  ce 
cas  prend  une  coupe  moins  surbaissée. 


Anijtelerr». 


Samt-Gervait  {Paris). 


t.y.  "iOS. 


fi. 


(1)  N'ous  pensons  qu'on  peut  donner  le  nom  de  lyntpan  i  cette  portion  su- 
|i(^ricurc  de  la  fenêtre  comprise  cuire  les  deux  cOtés  de  l'arcade,  toutes  les  fois 
([lie  son  tracé  olTiira  l'cniprciiilc  des  deux  systènips  dont  nous  venons  de  parler, 
cl  par  coiist'qnfnt  une  st'paratiun  bien  iranchoe  a>ec  les  meneaux  perpenditv- 
laircs  de  la  masse  de  la  haie,  l.cs  lntcrv.illcs  circonscrits  entre  ces  derniers  s'ap- 
pelleront desjouri,  et  le  Titrage  qui  les  occupe  ie)t  panneaux.  Xous  propose- 
rons enfin  de  désigner  par  le  nom  de  réseau  dt  la  fenitrt  ce  que  les  .\nglais 
appellent  tracery,  c'est-à-dire  l'espèce  de  broderie  en  lientelle  produite  par 
l'ensemble  des  meneaux. 


39t 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBf.ICS. 

Église  d'Écouen. 


392 


Fig.  210. 

A  partir  de  la  deuxième  moitié  de  ce  siècle,  les  meneaux  ad- 
optent des  directions  de  plus  en  plus  arbitraires  dans  une  large 
baie  ordinairement  évasée  par  le  haut  en  anse  de  panier,  afin  d'of- 
frir un  plus  vaste  champ  à  l'art  du  peintre  verrier;  ils  s'y  appe- 
santissent aussi  de  plus  en  plus,  jusqu'à  ce  que  le  retour  aux  types 
de  l'architecture  classique  les  en  bannisse  complètement. 

Après  l'introduction  de  la  fenêtre  flamboyante  on  ne  trouve  plus 
de  traces  de  l'emploi  de  l'œil-de-bœuf  que  dans  ces  grandes  roses 
terminales  qui  continuent  d'occuper  le  sommet  des  façades  et  des 
pignons.  Les  meneaux  compliqués  de  ces  roses  subissent  la  même 
révolution  que  ceux  de  la  fenêtre  à  arcades ,  et  présentent  un 
champ  pins  favorable  encore  aux  gracieux  et  légers  épanouisse- 
ments du  système  flamboyant.  Là  c'est  du  centre  qu'ils  partent, 
comme  dans  la  rose  rayonnante  ;  mais  la  différence  du  réseau  qu'ils 
produisent  ne  permet  pas  de  se  méprendre  un  instant  sur  leur  na- 
ture et  leur  date. 


tig.  211. 

La  fenêtre  rectangulaire  ne  se  rencontre  guère  qu'au-dessous 
des  autres  baies  ;  elle  remplace  quelquefois,  du  XIII'  au  XV'  siècle, 
les  galeries  ou  les  arcatui-es  figurées  qui  y  régnent  ordinairement; 
moins  apparente  et  moins  décorée  que  les  précédentes,  elle  n'offre 
ordinairement  que  des  meneaux  perpendiculaires. 


fîcnnrn'S. 


Arles. 


Fig    21  i. 


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{} 1 


Fiij.  21  j. 


Enfin,  dans  quelques  églises,  les  roses  des  transsepts  et  même 
celles  du  portail  sont  remplacées  par  de  grandes  fenêtres  à  arca- 
des tout  à  fait  hors  de  proportion  avec  les  autres,  et  beaucoup 
moins  favorables  à  la  décoration  extérieure  que  les  baies  circulaires. 
Cette  substitution  se  rencontre,  au  reste,  beaucoup  moins  fréquem- 
ment en  France  qu'en  Angleterre.  Nous  leur  donnerons  le  nom  de 
fenêtres  composées  lorsqu'elles  seront  formées  d'une  grande  quan- 
tité de  petites  fenêtres  distinctes  et  pourvues  de  leurs  meneaux  , 
groupées  en  étages  décroissants  au  moyen  de  précinctions  horizon- 
tales. 

A  l'extérieur,  l'ornementation  de  la  fenêtre  cintrée  ressemble 
beaucoup  à  celle  de  l'arcade  proprement  dite,  dont  elle  n'est  guère 
qu'une  variété;  tantôt  soutenue  ou  divisée  par  une  ou  plusieurs 
colonnes,  tantôt  n'offrant  qu'une  imposte  ou  une  console  pour 
support  à  son  archivolte,  elle  est  souvent  liée  à  la  fenêtre  suivante 
par  un  cordon  gracieux,  résultant  de  la  liaison  de  l'ornement  exté- 
rieur de  cette  même  archivolte  avec  l'imposte.  Un  autre  système 
très-élégant  du  XII'  siècle  consiste  à  percer  la  fenêtre  aiguë  de 
cette  époque  dans  un  groupe  d'arcades  romanes  entrelacées  dont 
elle  occupe  les  intersections. 


/ ../   -ii-J 


Fij.  2IU. 

Aux  XI'  et  XU'  siècles,  les  séries  d'ornements  courants  ou  déta- 
chés sur  l'archivolte;  aux  XIIl'  et  XIV*,  plusieurs  archivoltes  en 
retraite  soutenues  par  un  pareil  nombre  de  colonnettes  ou  pieds- 
droits,  ou  bien  venant  mourir  sur  les  faces  des  contre-forts  voisins  ; 
au  XV',  la  guirlande  de  l'époque  avec  ses  crosses  et  ses  expansions 
symétriques,  le  tout  souvent  inscrit  dans  un  pignon  figuré  de 
même  nature  ;  au  XVI',  les  moulures  renouvelées  de  l'architecture 
antique  :  telles  sont  les  principales  formes  que  revêt  cette  ornemen- 
tation, parallèle  à  celle  de  l'arcade  ordinaire,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit. 

Quant  à  la  fenêtre  en  rose,  son  ornementation  extérieure  se 
compose  fréquemment  d'une  moulure  circulaire  ou  triangulaire 
curviligne,  renfermant,  soit  des  figures  qui  sont  parfois  des  zodia- 
ques, ou  bien  d'autres  moulures  appartenant  également  au  cercle 
et  à  ses  fractions. 


393 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURUCS, 


a»i 


Fig.  217. 

Souvent  la  moulure  principale,  au  lieu  d'être  fermée  iuférieu- 
rement,  repose  sur  deux  consoles  ou  deux  groupes  qui  en  tiennent 
lieu. 

Il  y  a  peu  de  portions  de  l'église  qui  aient  été  soumises  à  plus 
de  déplacements  et  de  remaniements  que  les  fenêtres;  c'est  pour- 
quoi, après  avoir  examiné  et  décrit  celles  qui  existent  aujourd'liui, 
on  devra  rechercher  avec  le  même  soin  les  traces  (quelquefois 
difficiles  à  retrouver  sous  le  badigeonnage)  de  toute  fénestratioii 
auti'riciire. 

[La  fuite  au  prochain  numéro.) 


ÉQUILIBRE 
DES   VOUTES    EN   BERCEAUX    CYLINDRIQUES 

{TROISIÈME  IRTieLE.    VoiV  COl.    57.) 


Construction  de  la  courbe  dont  l'équation  est  ^y  =  • — , 

§  XXXVL  —  Le  tracé  géométrique  de  cette  courbe  ayant  une 
grande  analogie  avec  celui  des  courbes  en  anses  de  panier,  que 
nous  donnerons  plus  bas  en  traitant  de  l'équilibre  des  arches  de 
pont,  et  présentant  du  reste  un  peu  plus  de  simplicité,  nous  allons 
le  décrire  brièvement. 

La  quantité  c  qui  entre  dans  l'équation  ci-dessus  n'est  point  une 
des  données  immédiates;  nous  allons  la  déduire  graphiquement 
deccllesque  nous  avons  choisies  [paragraphe  34),  lesquelles  sont  k 
et  h.  Nous  rappellerons  que  ces  quantités  sont  liées  entre  elles  et  à 


h'  par  les  équations  (68),  et  nous  renverrons  pour  leur  significa- 
tion géométrique  et  mécanique  aux  paragraphes  32  et  30. 

Ayant  porté  d'abord  [Fig.  !,/*{.  30)  a  partir  de  l'origine  Odes  cooF' 
données,  et  dans  le  sens  des  y  positifs,  les  distances  ^J('=  A,  OS=h, 
on  construira  le  triangle  OBC  rectangle  en  B,  avec  *  |)our  hypo- 
thénuse  et  h  pour  l'un  des  côtés  de  l'angle  d.'oit;  le  troisième  coté 
BC  sera  la  valeur  de  c,  d'après  la  l"  équation  (68).  Décrivant  en- 
suite sur  BC  une  demi-circonférence,  puis  la  divisante»  deux  par- 

tieségalesau point  WetjoignantZ)C,onauraZ*6'  =  ~>--  d'après  la 

relation  connue  entre  la  diagonale  et  le  côté  du  carré.  On  prendra 
sur  une  parallèle  à  Taxe  des  a-,  menée  par  le  point  C,  une  longueur 
AC  =  BC  ==  c,  puis,  joignant  0.4,  on  aura  OA  =  h',  d'après  la 
2e  équation  (G8).  On  portera  ensuite  cette  longueur  de  0  en  E,  et, 
d'après  ce  qui  a  été  démontré  dans  les  parauraphes  précédents,  les 
parallèles  menées  par  Eet  S  renfermeront  la  branche  inférieure  de 
la  courbe  en  lui  étant  tangentes,  tandis  que  la  parallèle  menée  par 
le  point  C  contiendra  tous  les  points  de  la  courbe  en  lesquels  la 
tangente  est  parallèle  à  l'axe  des  y. 

Pour  tracer  la  courbe  maintenant,  il  reste  à  déduire  de  soit 
équation  même  le  rayon  de  courbure  p  correspondant  à  chaque  or- 
donnée y;  on  pourra  le  faire  très-rapidement  au  mo>en  de  la  règle 
à  calcul,  car  en  retournant  la  réglette  et  mettant  son  origine  sous  le 

trait  qui  repond  à  — .les  quotients  de  cette  quantité  par  chaque  va- 
leur de  y  se  trouveront  sur  la  réglette  au  droit  du  trait  corres- 
pondant à  chaque  diviseur,  sans  qu'il  soit  nécessaire  de  la  dépla- 
cer. Si  on  veut  remplacer  le  calcul  par  une  construction,  on  re- 
marquera que  p  est  une  troisième  proportionnelle  aux  quantités  y 

c 
et  -y — -,  ou,  si  on  l'aime  mieux,  cette  dernière  est  une  moyenne 

proportionnelle  cnlre  ?  et  y.  On  pourra  employer  la  construction 

que  fournit  le  théorème  de  la  tangente  moyenne  proportionnelle 

entre  la  sécante  entière  et  ta  partie  extérieure  dans  le  cercle.  Pour 

cela,  ayant  construit  deux  droites  rectangulaires,  TL,  TV  [Fig.  i], 

—  c 

on  prendra  Tt/ =  -——ou  DC  de  la  Fig.  1;  puis,  d'un  point 
y  2> 

quelconque  pris  sur  TV,  comme  centre,  on  décrira  un  arc  de  cercle 
PTP'  tangent  en  Tix  la  droite  TU.  Si  dès  loi-s»du  point  L' comme 
centre,  avec  une  longueur  donnée  y  pour  rayon,  on  trace  un  arc 
qui  coupe  le  premier  en  un  point  P,  et  que  Ion  prolonge  la  drsite 
r/*  jusqu'à  ce  qu'elle  rencontre  de  nouveau  le  premier  arc  en  un 
point  P',  la  distance  UP'  sera  la  valeur  cherchée  de  ?,  en  vertu  du 
théorème  de  géométrie  sus-énoncé.  On  pourra  construire  plusieurs 
valeurs  de  ?  correspondant  à  différentes  valeurs  de  y,  avec  un 
même  are  tangent;  mais  il  conviendra  de  le  changer  lorsque  le  lieu 
des  intersections  sera  mal  déterminé  :  il  sera  facile  d'en  tracer 
d'autres  qui  présentent  de  meilleures  déterminations. 

Il  reste  encore  à  faire  une  construction  préparatoire  qui  consiste 
a  mener  par  un  point  tel  que  le  point  C,  une  série  de  droites  Cg, 
Cg'yCg",  etc.,  faisant  entre  elles  des  angles  égaux  assez  petits, 
comme  5"  ou  10",  ce  qui  sera  facile  au  moyen  d'un  rapporteur;  il 
faudra  seulement  que  la  pix-mière  de  ces  droites,  a  (wrtir  de  l'axe 
des  y,  fasse  avec  celui-ci  un  angle  qui  ne  soit  que  la  moitié  des 
angles  des  auti-es  droites.  Pour  enectuer  un  tracé  rigoureux,  il 
faudrait  changer  de  rayon  de  courbure  à  cluiquc  arc  infinimeat 


395 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


390 


petit  de  la  courbe  que  l'on  tracerait  avec  ce  rayon  ;  comme  cela  est 
impraticable,  il  faut  se  contenter  de  l'approximation  que  l'on  ob- 
tient en  traçant,  avec  le  même  rayon,  un  arc  de  courbe  correspon- 
dant à  un  angle  seulement  très-petit  des  normales  extrêmes,  et  c'est 
cet  angle  que  nous  faisons  de  lO";  or,  comme  la  courbe  est  ici  sy- 
métrique autour  de  l'axe  des  y,  si  l'on  veut  appliquer  le  même 
rayon  de  courbure  à  une  étendue  qui  ne  soit  que  de  10",  il  faut 
changer  de  rayon  apiès  la  construction  d'un  arc  de  5"  de  part  et 
d'autre  de  l'axe  des  y. 

Maintenant,  ayant  construit  le  rayon  de  courbure  qui  répond  à 
y  =^li,  au  moyen  du  tracé  précédent,  on  en  portera  la  longueur 
de  5  en  R,  et  du  point  R,  avec  ce  rayon,  on  traceraun  arc  de  cer- 
cle indéfini  SS,  ;  puis,  par  le  point  R,  on  mènera  une  droite  RG 
parallèle  à  Cg  ;  l'arc  SG  sera  un  arc  de  la  courbe.  Pour  construire 
l'arc  suivant,  on  supposera  que  le  milieu  de  cet  arc  est  en  S,  sur 
le  prolongement  de  l'arc  SG  ;  alors,  au  moyen  de  l'ordonnée  du 
point  i',,  on  construira  la  valeur  du  rayon  de  courbure  correspon- 
dant, que  l'on  portera  de  G  en  R,  ;  avec  ce  rayon,  et  de  R,  comme 
centre,  on  tracera  l'arc  indéfini  GS,;  puis,  par  le  point  R  ,,oi\ 
mènera  R^G'  parallèle  à  C(j',  et  si  l'on  a  bien  choisi  la  position  de 
S,,  ce  point  se  trouvera  au  milieu  de  l'are  GG' ;  s'il  s'en  trouvait 
trop  éloigné,  il  faudrait  recommencer,  en  prenant  pour  le  point  S, 
le  milieu  de  l'arc  obtenu  par  cette  première  détermination,  et  l'on 
obtiendrait  alors  une  exactitude  suffisante. 

On  voit  que  les  autres  arcs  partiels  de  la  courbe  se  construiront 
de  la  même  manière,  et  qu'il  suffira  de  continuer  le  tracé  jusqu'en 
S'.  Le  reste  de  la  courbe  se  déduira  de  sa  symétrie  autour  des  axes 
OS,  0'  S'  et  OX.  Cette  construction  étant  continuée  par  la  pensée 
indéfiniment  dans  les  deux  sens,  on  reconnaîtra  très-clairement  le 
cours  de  la  courbe,  tandis  que  nous  n'avons  pu  le  faire  que  péni- 
blement au  moj'ende  son  équation  en  coordonnées  rectangulaires. 

On  s'assurera  à  la  fois  de  l'exactitude  de  la  méthode  graphique 
que  nous  donnons  ici,  et  de  celle  de  l'exécution  des  tracés,  en  ob- 
servant que  la  parallèle  à  OX,  menée  par  le  point  C,  doit  passer 
par  le  point  auquel  la  tangente  est  verticale,  c'est-à-dire  qu'ici 
cette  parallèle  devra  couper  en  deux  parties  égales  l'arc  de  lO" 
correspondant.  D'un  autre  c6té,  le  point  le  plus  bas  doit  se  trouver 
sur  la  parallèle  ES'.  On  peut  pousser  plus  loin  les  vérifications,  en 
calculant,  au  moyen  de  (73),  la  valeur  de  ar  qui  répondàj/  =  fc; 
or,  un  tracé  fait  sur  une  échelle  assez  grande  donne  une  longueur 
CI  sensiblement  égale  à  celle  résultant  de  l'équation  (73). 

Nous  donnons  [Fig.  3),  sur  une  petite  échelle,  la  forme  générale 
de  la  courbe,  dont  la  Fig.  2  ne  présente  qu'une  partie.  Enfin, 
pour  rendre  évidente  par  un  exemple  l'influence  de  la  variation 
du  rapport  des  quantités  h  et  k,  nous  donnons  [Fig.  4)  une  con- 
struction dans  laquelle  ce  rapport  diffère  beaucoup  moins  de  l'unité 
quedans  laprécédente(l);  on  remarque  que  l'ouverture  se  rétrécit  et 
que  la  courbe  se  rapproche  du  cercle,  avec  lequel  elle  se  confon- 
drait si  l'on  avait  h  =  /.■.  Dans  ce  ciis,  la  courbe  n'aurait  de  di- 
mensions sensibles  que  si  h  et  k  devenaient  ensemble  infinis.  On  peut 
donc  regarder  le  cercle  comme  étant  l'une  des  limites  de  la  courbe 
qui  nous  occupe. 

Des  considérations  analogues  nous  montreront  que  la  forme  des 
arches  de  pont  doit  se  rapprocher  d'autant  plus  du  plein-cintre  que 
la  charge  au  sommet  est  plus  considérable. 


(1)  La  Fig.  10  «st  la  reproduction,  sur  une  plus  petite  échelle,  de  la  partie 
(le  la  courbe  fig.  li,  située  au-dessous  de  l'axe  des  x. 


Equilibre  bes  abches  chaugées  d'us  massif  tebminé  supé- 
bieiikement  par  un  plaîf  hobizontal. 

S  XX\  VII.  —  Nous  pensons  avoir  suffisamment  indiqué  les  cau- 
ses de  l'indétermination  des  pressions  extérieures  aux  voûtes  char- 
gées, dans  le  mode  de  construction  en  usage  aujourd'hui  (l),  pour 
qu'on  ne  s'imagine  pointque  nous  venions  présenter  la  théorie  de  l'é- 
quilibre d'un  système  établi  dans  les  mêmes  conditions;  nous  avons 
fait  comprendre  (§  XXVII)  l'impossibilité  de  cette  théorie.  Nous 
avons  de  plus  ajouté  que  nos  équations  générales  ne  s'appliqueraient 
ici  que  dans  le  cas  où  la  résultante  des  forces  extérieures  serait  nor- 
male, et  nous  avons  reconnu  que  cette  condition  est  une  de  celles 
qui  servent  à  fixer  la  plus  grande  stabilité  du  système.  Il  convient 
donc  actuellement  de  rechercher  une  disposition  des  matériaux  qui 
assure  la  direction  normale  de  la  charge  de  la  voiite,  en  permettant 
dévaluer  son  intensité  en  chaque  point.  Ayant  obtenu  les  diverses 
équations  relatives  à  ce  nouveau  système ,  puis  en  ayant  déduit 
les  formes  et  dimensions  principales  qui  en  résultent,  il  y  aura  à 
examiner  si  on  ne  pourrait  pas  attribuer  les  mêmes  formes  et  di- 
mensions aux  arches  à  construire  suivant  le  mode  actuel ,  c'est-à- 
dire  aux  arches  surchargées  d'un  massif  formé  d'assises  horizon- 
tales. Il  pourrait  se  faire,  en  effet,  que,  dans  cette  circonstance, 
la  résultante  des  pressions  extérieures  indéterminée  à  priori  se 
trouvât  en  définitive,  après  la  construction,  peu  différente,  pour 
l'intensité  et  la  direction,  de  celle  qui  aurait  lieu  dans  le  mode  de 
disposition  de  la  charge  dont  nous  allons  nous  occuper.  Or,  on 
conçoit  que  l'expérience  doit  principalement  être  consultée  à  cet 
égard,  et  si  elle  venait  à  confirmer  les  prévisions  de  la  théorie  rela- 
tivement à  la  possibilité  de  construire  des  arches  de  ponts  ou  de 
viaducs  suffisamment  solides  et  souvent  beaucoup  plus  légères  que 
le  plus  grand  nombre  des  constructions  de  ce  genre,  tant  anciennes 
que  modernes,  il  y  aurait  grand  a\  antage  à  appliquer  cette  théorie, 
aujourd'hui  qu'on  est  sur  le  point  d'entreprendre  de  nombreuses 
lignes  de  chemins  de  fer,  dont  la  plupart  nécessiteront  des  travaux 
d'art  d'une  grande  importance.  On  conçoit,  d'un  autre  côté,  que 
nous  ne  pourrons  guère  chercher  la  confirmation  de  notre  nouvelle 
théorie  dans  la  comparaison  des  dimensions  principales  des  ponts 
actuellement  existants,  avec  celles  qui  pourraient  en  résulter; 
ces  ponts  n'ayant  point  été  construits  pour  jouir  de  la  très- 
grande  stabilité  que  nous  voulons  atteindre  en  faisant  en  sorte  que 
la  résultante  des  pressions  sur  les  joints  normaux  passe  très-près 
du  milieu  de  l'épaisseur.  (Les  ingénieurs,  aujourd'hui,  font  seule- 
ment en  sorte  qu'elle  ne  passe  pas  trop  près  de  Vinirados  ou  de 
l'extrados  dans  l'état  normal  de  la  voûte,  ou  lorsqu'elle  n'est  point 
soumise  à  des  surcharges  accidentelles.) 

Ceci  posé,  nous  allons  décrire  et  étudier  la  disposition  de  la 
charge,  qui  lève  l'indétermination. 

Disposition  de  la  charge  extérieure  d'une  arche,  donnant  liruà  des 
pressions  normales  déterminées. 

%  XXXVIII.  —  Cette  disposition  est  représentée  dans  la  Fig.  5. 
On  y  a  exagéré  quelques  dimensions,  pour  rendre  sensibles  cer- 

(1)  Nous  avons  reproduit,  Fig.  8  et  9,  les  diverses  circonstances  c.iaminécs 
dans  le  paragraphe  27.  La  prcinière  de  ces  ligures  présente  une  voùtc  séparée 
du  massif  qu'elle  devait  supporter;  la  seconde  se  rapporte  i  la  discussion  de» 
autres  cas. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


398 


taines  particularités  qui  eussent  échappé  dans  un  dessin  dont 
toutes  les  parties  seraient  faites  à  la  même  échelle.  Nous  suppo- 
sons toujours  la  voûte  divisée  par  une  série  de  plans  normaux  à  la 
courbe  des  centre»  de  gravité,  et  infiniment  rapprochés.  Chaque 
voussoir  infiniment  petit  se  trouve  compris  d'une  part  entre  deux 
de  ces  plans  consécutifs ,  puis  d'autre  part  entre  la  surface  intrados 
et  une  surface  parallèle  à  la  courbe  des  centres  de  gravité.  Comme 
l'épaisseur  est  supposée  varier  d'un  voussoir  à  l'autre,  ainsi  que  le 
rayon  de  courbure ,  on  voit  qu'il  doit  résulter  de  cette  construction 
une  surface  extrados  dentelée  au  lieu  d'être  unie.  La  raison  de 
cette  forme  des  voussoirs  à  l'extrados  est  dans  la  nécessité  où  nous 
nous  trouvons  de  rendre  les  pressions  extérieures  noi'males  à  la 
courbe  des  centres  de  gravité  ;  ce  qui  aura  lieu  en  faisant  abstraction 
du  frottement,  dont  nous  ne  tenons  point  compte,  ainsi  que  nous 
l'avons  annoncé,  <§  III.  Du  reste,  nous  ferons  remarquer  que  nous 
n'établissons  cette  discontinuité  de  la  surface  extrados  que  pour 
nous  conformer,  dans  notre  théorie,  à  une  rigueur  mathématique 
aussi  grande  que  possible ,  tandis  qu'en  ayant  égard  au  peu  de  dé- 
faut de  parallélisme  de  Vexlrados  et  de  la  courbe  des  centres  de  gra- 
vité, on  devra,  dans  la  pratique,  substituer  à  la  surface  dentelée  de 
Vextrados  une  surface  continue;  il  n'en  résultera  qu'une  très-lé- 
gère inclinaison  de  la  pression  extérieure  sur  la  normale,  dont  il 
nous  eût  été  impossible  de  tenir  compte  dans  la  théorie.  Nous  sup- 
posons maintenant  qu'on  applique  contre  la  face  extrados  du  vous- 
soir une  pierre  prismatique  de  forme  déterminée  ainsi  qu'il  suit  : 
par  l'arête  supérieure  du  voussoir  considéré,  on  mènera  un  plan 
horizontal  ;  puis,  par  l'arête  supérieure  du  voussoir  situé  immédia- 
tement au-dessous  du  premier,  on  mènera  un  plan  vertical  ;  l'espace 
compris  entre  ces  plans,  d'une  part,  puis,  d'autre  part,  entre  la  sur- 
face extrados  du  voussoir  considéré  et  le  plan  très-étroit  faisant  partie 
du  plan  de  joint  des  deux  voussoirs ,  cet  espace,  dis-jc,  limité  par 
les  plans  de  tète,  formera  le  volume  du  solide  prismatique  dont  il 
s'agit;  sa  base  est  circonscrite  par  le  contour  quadrangulaire 
A  B  D  E ,  Fig.  5.  La  base  de  ce  prisme  se  réduirait  dans  la  prati- 
que au  triangle  A  B/);  à  cause  de  cela,  nous  appellerons  ce  prisme, 
pour  abréger,  prisme  triangulaire.  Pour  l'exactitude  de  la  théorie, 
nous  supposerons  que  la  face  correspondante  iiE  D  ne  touche  pas  le 
plan  de  joint  commun ,  afin  de  n'avoir  point  à  tenir  compte  de  la 
pression  à  laquelle  elle  pourrait  donner  naissance.  Enfin  nous  sup- 
poserons qu'un  autre  prisme  à  base  rectangulaire  A  B  G  H  charge 
la  face  horizontale  AB  du  premier  prisme.  Il  suflira  de  concevoir 
chaque  voussoir  accompagné  de  la  sorte  de  deux  prismes ,  l'un 
triangulaire  et  l'autre  quadrangulaire,  pour  se  faire  l'idée  de  la 
disposition  que  nous  allons  étudier. 

Il  va  sans  dire  que  tous  les  prismes  quadrangulaires  sont  limités 
supérieurement  par  un  même  plan  horizontal  dont  le  niveau  ne 
doit  pas  être  inférieur  à  celui  du  point  le  plus  élevé  de  Vexlrados. 
Pour  compléter  notre  description  ,  nous  ajouterons  que  la  voûte 
s'appuie  inférieurement  contre  une  pile  ou  culée  prolongée  jus- 
qu'au niveau  supérieur  des  prismes  quadrangulaires,  de  manière  à 
encaisser  ces  derniers  et  à  recevoir  la  poussée  horizontale  qu'ils 
exerceront.  On  observera  en  passant  que  la  construction  des  sur- 
faces extrados  continues  a  été  souvent  pratiquée ,  et  que  les  pierres 
correspondant  à  nos  priâmes  irianijUlaires  sont  alors  le  prolonge- 
ment des  assises  horizontales;  en  conservant  ce  mode  de  construc- 
tion par  assises  horizontales,  il  serait  bon  néanmoins  de  séparer  les 
prismes  triangulaires  de  ces  mêmes  assises  ;  on  les  ferait  alors  avec 
une  pierre  plus  dure,  afin  de  ne  pas  briser  leurs  angles  :  ou  évite- 


rait ainsi  la  rupture  des  voussoirs,  qui  a  lieu  souvent  dans  la  dis- 
position en  escalier  que  nous  avonsdiscutée  §  XWII,  et  de  plus  on 
arriverait  à  produire  des  pressions  normales  dont  l'intensité  reste- 
rait seule  indéterminée,  en  négligeant  le  frottement. 

§  XXXÏX.  — La  question  (jue  nous  avons  à  résoudre,  relative- 
ment au  système  que  nous  venons  de  décrire,  consiste  à  déterminer 
la  forme  de  la  courbe  de*  centres  de  gravité,  et  l'épaisseur  qui  cor- 
respond à  chacun  de  ses  points;  car,  suivant  les  données  de  In 
("série  de  questions,  nous  pouvons  prendre  /  arbitrairement, 
et  la  valeur  de  F  résulte  de  la  disposition  du  système  ;  nous  avons 
donc  à  déterminer  les  valeurs  de  y  et  i  en  fonction  d'x. 

Dans  le  système  que  nous  examinons,  la  seule  force  extérieure  F, 
que  reçoit  un  voussoir  A  E  M  N,  est  la  pression  normale  exercée 
par  la  face  A  E  du  prisme  triangulaire  correspondant,  en  faisant 
abstraction  du  frottement.  Quant  au  frottement,  nous  pourrions 
ajouter  qu'il  serait  nul,  si  l'on  admettait  que  les  faces  A  E,  B  D,  du 
voussoir  fussent  en  contact  parfait  au  moment  de  la  pose;  ou,  du 
moins,  il  n'aurait  lieu  qu'en  vertu  de  la  compressibilité  de  la  ma- 
tière du  prisme,  qui  lui  permettrait  de  descendre  en  suivant  ta 
surface  extrados  du  voussoir.  Nous  <levons  donc  appliquer  Id  les 
équations  (58),  appropriées  exclusivement  au  cas  des  forces  nor- 
males. Nous  les  transformerons  seulement  en  écrivant  dans  la 
première,  rfy,  à  la  place  de  siny.  ds,  et  jrf»  dans  la  deuxième,  à  la 
place  de  ds,  ce  qui  la  rendra  divisible  par  do.  ;  elles  deviendront 


d.it  =  uii   1 \  dij 


}COg%- 


f74l 


Il  faut  maintenant  exprimer  la  valeur  de  N;  nous  la  déduirons 
de  la  considération  de  l'équilibre  du  prisme  triangulaire;  mais  au- 
paravant, pour  simplifier  les  notations,  plaçons  l'axe  des  x  dans 
le  plan  qui  limite  les  prismes  quadrangulaires  à  leur  partie  supé- 
rieure; puis,  .r  et  y  étant  les  coordonnées  du  point  C,  situé  sur 
la  courbe  des  centres  de  gravité,  désignons  par  x'  et  y'  les  coordon- 
nées du  point  A  de  Vextrados,  situé  sur  la  normale  passant  par  le 
point  C,  et  par  x"  et  y",  celles  du  point  J/  de  V intrados,  situé 
également  sur  cette  normale;  S  étant  toujours  la  distance  du  mi- 
lieu de  l'épaisseur  au  point  C,  et  observant  que  l'angle  de  la  nor- 
male avec  l'axe  de^y  est  a,  les  valeurs  de  y' et  y"  seront 


'I  \  ^ 

./=y-f  |-  t-}-jjco««.    J 


(75) 


Les  forces  que  reçoit  le  prisme  triangulaire  sont  au  nombre  de" 
quatre  ;  ce  sont  les  trois  pressions  exercées  perpendiculairement 
sur  ses  faces  AB ,  AE,  BD,  puis  le  poids  de  ce  prisme. 

La  force  exercée  perpendiculairement  sur  la  face  .4  B  est  égale 
au  poids  du  prisme  quadrangulaire  dont  la  base  est  A  BGH;  en 
négligeant  le  frottement  que  ce  prisme  pourrait  éprouver  sur  ses 
faces  verticales  de  la  part  des  prismes  adjacents,  nous  désignerons 
cette  force  par  dQ,  et  le  poids  de  l'unité  de  volume  de  la  matière 
des  prismes  quadrangidaires  par  u,  ;  de  cette  manière,  en  obser- 
\  ant  que  .1  B  est  égal  à  d.r' ,  on  aura 

dQ  =  a,iy'dx'.  ;7G) 

La  force  que  le  prisme  triangulaire  reçoit  du  voussoir  normale- 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


400 


ment  à  la  face  A  E,  est  égale  à  celle  qu'il  exerce  sur  ce  voussoir, 
et  que  nous  avons  désignée  (§  XXVIII)  par  iVxJ». 

Enfin ,  nous  désignerons  par  (IH,  la  pression  horizontale  que 
le  prisme  quadrangulaire  adjacent  exerce  sur  la  face  verticale  BD. 

Quant  au  poids  lui-même  du  prisme  triangulaire,  11  constitue 
une  force  infiniment  petite  du  deuxième  ordre,  à  cause  des  deux 
dimensions  infiniment  petites  de  ce  prisme,  et  il  ne  doit  point  en- 
trer dans  des  équations  entre  des  quantités  infiniment  petites  du 
premier  ordre. 

En  égalant  maintenant  à  zéro  les  sommes  des  projections  des 
autres  forces,  sur  deux  axes,  l'un  vertical,  l'autre  horizontal, 
on  aura 

(IQ  —  A'/,  tis  C0S3.  =  0,     dll  —  iV/.  ds  sin  »  ^  o. 

Eu  passant  les  seconds  termes  dans  les  deuxièmes  membres , 

puis  divisant  la  seconde  de  ces  équations  parla  première,  il  vient 

dfï 
^Q=tanga, 

d'où  l'on  tire ,  en  mettant  pour  dQ  sa  valeur  (76), 

d  //  ^  CI ,  ly  dx'  tangy..  (77) 

Nous  reviendrons  sur  cette  équation ,  dont  nous  donnerons  la 
signification  lorsque  nous  aurons  à  en  faire  usage  ;  nous  la  lais- 
serons de  côté  actuellement,  pour  nous  occuper  de  la  première  des 
deux  précédentes.  En  y  mettant  pour  dQ  la  même  valeur  que  ci- 
dessus,  puis,  f(/»  à  la  place  de  ds,  on  en  tirera 

COSa.  d% 

Pour  calculer  le  coefficient  différentiel--  ,  observons  que  dx  oxy 

di 

AB  est  la  différence  des  projections  des  droites  AS  et  DS  sur  un 
axe  horizontal;  la  projection  de  la  première  est  une  fonction  de 
a;  ou  de».,  ayant  pour  expression  (s+ï*  —  ^)«m«;  la  seconde 
projection  est  une  fonction  semblable  relative  à  a.-\-dt.,  dans  la- 
quelle seulement  p  conserve  la  même  valeur,  car  le  centre  du  cercle 
osculateur  au  point  C'est  en  S'  et  non  en  S;  on  aura  donc  la  va- 
leur de  ,-  ,  en  prenant  la  dérivée  de  l'expression  précédente  par 
dy. 

rapporta  œ ,  et  regardant  p  comme  constant  dans  la  différentiation; 
il  viendra  ainsi 


dx       ,     ,   ,         »,  ,     .       di.i 

— — =  (  p  -f-  i  s  —  #)  CO»  a  -j-  sm  a  -^-— 
UT.  d 


—  H) 


et  l'on  aura  par  suite 


Ni=  u,y      p4~î  ^  —  S -\- tango. 


d[jj-ri) 


do.     y 

Maintenant  nous  ferons  t  constant,  par  les  raisons  énoncées 


[§  VII),  et  nous  poserons 


=  ». 


(78) 


de  sorte  que  [a  désigne,  comme  s'il  s'agissait  de  liquides,  la  hau- 
teur due  à  la  pression  t ,  et  i  le  rapport  de  la  densité  des  matières 
du  massif  à  celle  de  la  voûte  ;  quand  elles  seront  de  même  densité 
que  celles-ci ,  on  aura  i  =  1 . 

Substituons  la  valeur  précédente  de  Ni  dans  la  deuxième  équa- 
tion (74),  et  divisons-la  par  ci,  il  viendra,  en  vertu  des  conven- 
tions que  nous  venons  d'établir, 

£a  =  £(p_-S)co»a-l-iy  I   p+îi  — ^-f-fanga     ^'"j" 


70) 


Quant  à  la  première  de  ces  mêmes  équations,  en  ayant  égard 
a  ce  que  (  est  constant,  elle  donnera,  étant  divisée  par  «, 
di       /  ^  \du 

or,  nous   avons  vu  (  §  V  ),  que  la  quantité  -  est  du  deuxième 

P 

ordre  de  petitesse ,  lorsqu'on  considère  -  comme  étant  du  premier  ; 

en  négligeant  cette  quantité  devant  l'unité ,  nous  pourrons  donc 
intégrer  l'équation  précédente,  et  si  nous  désignons  par  t„  l'épais- 
seur qui  répond  au  point  dont  y»  est  l'ordonnée,  nous  aurons, 
pour  l'intégrale , 


loK- 


y  — y» 


d'où,  e  désignant  la  base  des  logarithmes  hyperboliques, 

y-y. 


(8.) 


Nous  remarquerons  seulement  que  le  terme  négligé  introduisant 
des  erreurs  du  deuxième  ordre  dans  l'exponentielle ,  l'erreur  sur  t 
est  réduite  au  troisième  ordre  à  cause  du  facteur  to,  qui  est  du 
premier. 

Il  resterait  maintenant  à  porter  cette  valeur  de  i  dans  (79) ,  et  à 
effectuer  l'intégration  de  l'équation  du  deuxième  ordre  qui  en  ré- 
sulterait, après  avoir  substitué  aussi  la  valeur  de  y'  et  celle  ?  en 
fonction  des  coefficients  différentiels  du  premier  et  du  deuxième 
ordre;  l'équation  s'élèverait  même  au  troisième  ordre,  si  l'on  con- 
servait le  terme  affecté  de  langea,  à  cause  de  d^  qui  s'exprimerait 
en  fonction  de  rfp  ;  mais  nous  ne  tenterons  point  l'intégration ,  nous 
appliquerons  seulement  à  sa  construction,  des  méthodes  graphiques 
analogues  à  celles  décrites  §  XXXVI ,  et  nous  indiquerons  la  ma- 
nière de  calculer  l'abscisse  et  l'ordonnée  de  la  courbe ,  représentées 
par  l'équation  (79)  transformée,  par  le  procédé  connu  des  quadra- 
tures. 

Avant  de  continuer  les  calculs ,  nous  allons  montrer  que  si  on 
suppose  négligeable  le  poids  de  la  voûte  devant  la  charge,  et  la 
matière  de  cette  voûte  assez  résistante  pour  que  l'épaisseur  t  et  S  res- 
tent toujours  très-petits,  on  retombera  sur  l'équation  (02);  d'où 
il  résulte  que  la  construction  sera  dans  le  cas  d'une  voûte  chargée 
d'un  liquide  dont  le  poids  serait  ci,.  En  effet,  dans  cette  hypothèse, 
il  faut  faire  ci  =  o ,  ce  qui  rend  u.  infini,  et  l'équation  (80)  donne  t 
constant.   Divisant  ensuite  l'équation  (79)  par  »,   et  observant 

que  '4  =:  —  ,  le  premier  membre  devient  —  ;  à  cause  que  i  devient 
i      a,  o, 

infini,  le  premier  terme  du  deuxième  membre  devient  nul;  et 
comme  nous  négligeons  les  termes  qui  dépendent  des  épaisseurs 
par  rapport  à  p  dans  la  parenthèse,  y  se  réduit  en  même  temps  à 
y,  ce  qui  donne  py  pour  la  valeur  du  deuxième  membre.  On  re- 
tombe donc  ainsi  sur  l'équation  (62).  De  cette  manière,  la  discus- 
sion de  la  courbe  que  représente  cette  équation  s'appliquera  sen- 
siblement aux  voûtes  d'épaisseurs  très-petites ,  par  rapport  aux 
charges.  On  doit  voir  maintenant  pourquoi  nous  avons  discuté  si 
longuement  dans  les  paragraphes  (3l)  et  suivants,  l'équation  (62) 
qui  n'est  qu'un  cas  particulier  de  l'équation  plus  générale  (79) ,  à 
laquelle  il  eût  été  difficile  d'appliquer  une  discussion  aussi  étendue. 
Le  tracé  que  nous  donnerons  ci-dessous  de  la  courbe  représentée 
par  cette  dernière ,  nous  confirmera  dans  l'identité  de  ses  caractères 
principaux  avec  celle  donnée  par  l'équation  (62). 


401 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


U» 


^  XL.  Pour  rendre  possible  la  construction  de  l'équation  (79), 
nous  avons  encore  à  faire  disparaître  la  dérivée  qui  entre  dans  la 
parenthèse  du  deuxième  membre.  Nous  dirons  dès  à  présent  que 
par  la  suite  nous  ferons  complètement  abstraction  de  ce  ferme  in- 
troduit par  le  défaut  de  parallélisme  de  Vexirados  et  de  la  courbe 
des  centres  de  gravité  ;  mais  afin  de  prévenir  les  difficultés  que 
pourrait  faire  naître  la  présence  du  facteur  tang  a  qui  pe\it  devenir 
fort  grand ,  et  même  infini ,  nous  devons  entrer  dans  quelques  dé- 
veloppements il  cet  égard. 

Nous  calculerons  d'abord  dS  ;  pour  cela  élevons  au  carré  les  deux 
membres  de  l'équation  (10  bis)  §  V,  nous  en  tirerons 

12 
en  différentiant ,  il  viendra  ensuite 


rfJ  = 


i      dz d? 

_P ?__ 

S 
1  — 2  - 


Avec  cette  valeur,  on  formera  facilement  la  suivante 

rf(ie_J)  •  V  '         »   p         ^   f  /(/«"^    fd~x 


dx 


82) 


1  — 2  — 

P 


Or,  en  mettant  dans  l'équation  (80),  à  la  place  de  dy,  sa  valeur 

p  siriT.  dx ,  on  aura  immédiatement 

dt        I  S\   £       . 

— •  =      1 ?  sin  X  ; 

dx        \  9  j  y- 

il  ne  reste  donc  plus  qu'à  former  la  valeur  de  rf?.  Pour  cela ,  ob- 
servons que  cette  dernière  expression  étant  du  premier  ordre  de 

E 

petitesse  à  cause  du  facteur  —  ,   la  dérivée  précédente  est  une 

quantité  du  même  ordre.  Si  nous  voulons  obtenir  sa  valeur  ap- 
prochée aux  termes  près  du  troisième  ordre ,  il  suffira  de  calculer 

dp  , 

—  avec  une  exactitude  approchée  seulement  aux  termes  près  du 

dx 

premier  ordre,  à  cause  du  facteur  du  deuxième  ordre  qui  l'accom- 
pagne. Or,  transportons  la  valeur  («2) ,  dans  laquelle  nous  négli- 
gerons les  termes  de  deuxième  ordre,  dans  l'équation  (79),  nous 
aurons  d'abord 

diit  —  S) 


p  «n  a, 


(82  bis] 


et  l'équation  (79)  deviendra,  aux  termes  près  du  deuxième  ordre, 

,u.  =  e(p_J)cosco.-f  ,y  f  p-f-'e  —  S 


sin X  tang X  t 

zr^ ? 


Si  l'on  différentie  maintenant  cette  équation  ,  et  qu'on  rejette  en- 
suite tous  les  termes  du  premier  ordre  qu'elle  pourra  contenir,  ce 
qui  réduira  dy  à  dy,  on  aura,  aux  termes  près  du  premier  ordre, 

rfo  p  dy 

dx  y   dx 

Nous  avons  dû  conserver  les  termes  du  premier  ordre  avant  la  dif- 
férentiation ,  parce  qu'il  pouvait  se  faire ,  comme  cela  arrive  sou- 
vent, que  l'ordre  de  petitesse  de  quelques  termes  s'abaissât  d'une 
unité  (nous  remarquerons  que  la  diffère ntiation  de  l'équation  (62) 
fournit  directement  ce  dernier  résultat);  observant  que  l'on  a 
dy  =  p  sm«  dx  ,  la  valeur  précédente  pourra  s'écrire 

d?  p" 


dx 


: sin  X. 


82  Irr] 


Substituant  cette  valeur  et  celle  de -,-  dans  (82;,  on  aura,   aux 

dx 

quantités  près  du  troisième  ordre, 

Cette  valeur  étant  mise  dans  l'équation  (79),  on  aura,  au  même 
degré  d'approximation ,  d'après  la  remarque  faite  ci-dessus  sur 
celui  de  la  valeur  de  «  , 


eu.  =  tf  00 1  X 

+  'V  ,  pH-ï«  — 5-|-ï?«na'anj«j   /l— i-^  ^^""vj   )' 

Il  faut  encore  faire  disparaître  i  de  cette  équation ,  au  moyen  de  sa 
valeur  approchée  (l2)  §  V;  on  aura  ainsi 

tu.  =  tp  cot  a 

-i-jyj  p +  .._.■. ^ _f.i.„„ a, anjafi:::!!-!!)  j. 
(  f  \     ."•  y     ) 

Cette  équation  est  du  deuxième  degré  en  p  à  cause  de  la  présence 
de  (  en  diviseur  ;  mais  en  regardant  le  très-petit  terme  qui  le  con- 
tient comme  une  quantité  connue,  nous  pourrons  en  tirer  une  va- 
leur de  p ,  en  résolvant  cette  équation  comme  une  équation  du  pre- 
mier degré ,  et  nous  aurons 

.  ,  l  £         sin  X  tang  «  /   «  '  \   ) 

f  =  e p-^; .  i83) 

tcosx-\-  iy  !   1  -I-  tin  X  tang  x  — 

Cette  équation  et  l'équation  (8  i)  sont  la  base  des  calculs  et  con- 
structions qui  vont  suivre. 

Examinons  d'abord  l'étendue  dans  laquelle  il  peut  être  conve- 
nable d'en  faire  usage  :  on  voit  que  pour  des  angles  x  très-voisins 
de  90°,  les  termes  affectés  de  tang%,  et  qui  étaient  restés  très-pe- 
tits pour  des  valeurs  moindres  de  a,  vont  devenir  très-grands  et  dé- 
passer l'unité  qui  les  précède  dans  l'une  et  l'autre  parenthèse;  dès 
lors  le  rayon  vecteur  paraîtra  varier  suivant  une  loi  différente  de 
celle  qu'il  aura  suivie  jusque-là;  lorsqu'on  fera  »=  90°,  la  valeur 
de  p  se  trouvera  réduite  à 


J 

'  l     '■  ^y  I 


expression  très-petite  en  général  et  fort  différente  de  celle  qu'où 
obtiendrait  en  négligeant  les  termes  en  tang  a,  dont  l'influeDce  était 
à  peine  sensible  auparavant.  Cette  circonstance  parait  devoir  faire 
considérer  l'équation  (83)  comme  inexacte  pour  des  valeurs  de  »  voi- 
sines de  90°.  Il  ne  convient  plus,  en  effet,  d'employer  alors  les  ter- 
mes affectés  de  tang  »,  parce  que  dans  l'établissement  de  cette  équa- 
tion nous  avons  considéré  ces  termes  comme  très-petits,  et  que  celle- 
ci  n'est  sensiblement  exacte  qu'à  la  condition  qu'ils  restent  tou- 
jours tels;  il  semblerait  même  qu'alors  cette  équation  ne  devrait  plus 
être  d'aucun  usage  :  néanmoins,  nous  reconnaîtrons  par  la  suite, 
au  moyen  de  la  concordance  entre  les  résultats  qu'elle  fournira  et 
ceux  obtenus  par  une  voie  différente,  qu'on  peut  appliquer  cette 
équation  en  toute  sûreté  entre  —  90°  et  -f-  90*,  en  supprimant  les 
termes  qui  suivent  l'unité  dans  lesparentlièses  du  numérateur  et 
du  dénominateur  de  son  deuxième  meml)n\  On  remarquera  da- 
bord  que,  tant  que  »  ne  sera  pas  très-voisin  de  90",  l'erreur  qui  eu 
résultera  sur  p  sera  du  deuxième  ordre.  En  effet,  supposons  la  fra<>- 
tion  qui  suit  <  dans  la  valeur  de  p  réduite  en  série  suivant  les  puis- 
sances de  «,  tous  les  termes  dont  il  s'agit,  étant  du  premier  ordre, 
T.  V.  '    26 


i03 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


Mk 


donneront  lieu  à  des  termes  de  cet  ordre  et  des  ordres  supérieurs; 
et  leur  produit  par  t  qui  multiplie  cette  fraction  donnera  lieu  à  des 
termes  du  deuxième  ordre.  D'ailleurs,  si  l'on  remarque  que  la  sup- 
pression de  ces  termes  a  pour  effet  de  diminuer  en  même  temps  le 
numérateur  et  le  dénominateur  de  la  valeur  p,  on  doit  voir  qu'il 
tend  à  s'établir  une  espèce  de  compensation,  par  suite  de  l'influence 
contraire  qu'ils  exercent  sur  cette  expression.  S'il  restait  quelque 
scrupule  relativement  à  ces  termes,  on  pourrait  en  tenir  compte 
jusque  vers  85»  ;  mais  il  faudrait  s'arrêter  là,  car  ces  termes  deve- 
nant très-considérables,  on  serait  en  droit  de  croire  que  les  termes 
négligés  des  ordres  supérieurs  acquerraient  alors  des  valeurs  dont 
il  faudrait  tenir  compte  également  ;  ou ,  si  l'on  veut,  la  valeur 
de  p,  formée  ci-dessus  par  les  seuls  premiers  termes  d'une  sé- 
rie, cesserait  d'être  convergente.  Dans  ce  cas,  il  y  aurait  à  calcu- 
ler à  part  l'équilibre  du  voussoir  ou  des  voussoirs  compris  entre 
8.50  et  90°,  ce  qui  n'offrirait  aucune  difficulté  lorsqu'on  aurait 
donné  arbitrairement  une  forme  à  Vintrados  et  à  Vextrados  dans 
cette  étendue;  mais,  nous  le  répétons,  après  nous  être  convaincu 
de  la  concordance  des  résultats,  on  peut  appliquer  en  toute  sûreté 
l'équation  (83),  en  réduisant  les  parenthèses  de  son  second  mem- 
bre à  l'unité.  Elle  devient  alors 

P  =  s-^C.  (84) 

Comme  dans  cette  équation  et  dans  (si),  nous  négligeons  les  ter- 
mes du  troisième  ordre,  et  même  des  termes  du  deuxième  ordre, 
dans  la  valeur  de  p  ;  il  n'y  aura  point  à  tenir  compte  de  J  dans  les 
valeurs  de  y  et  y"  dont  nous  ferons  usage,  soit  dans  le  calcul,  soit 
dans  le  tracé  de  la  courbe  des  centres  de  gravite;  il  ne  sera  néces- 
saire d'y  avoir  égard  que  lorsqu'il  s'agira  de  calculer  ou  tracer 
Vextrados  et  Vintradns. 

Lorsque  le  massif  de  maçonnerie  qui  charge  la  voûte  et  la  voûte 
elle-même  sont  construits  de  matériaux  ayant  la  même  densité,  » 
devient  égal  à  l'unité.  Cette  circonstance  simplifie  l'équation  pré- 
cédente et  le  tracé  de  la  courbe  qu'elle  représente.  En  effet,  les  or- 
données des  points  de  Vintrados  et  de  Vextrados  qui  répondent  à 
la  même  normale,  diffèrent  entre  elles  d'une  quantité  égale  à  la  pro- 
jection verticale  de  l'épaisseur;  il  en  résulte 

y"  =  1/  4-  t  cas  «, 
équation  qu'on  obtiendrait  par  la  soustraction  membre  à  mem- 
bre des  équations  (75).  Au  moyen  de  cette  relation  et  de  «=  l , 
l'équation  (84)  se  réduit  à 

P=A;{(--iy').  (85) 

Calcul  des  coordonnées  de  la  courbe  des  centres  de  gravité. 

§  XLL  Pour  procéder  au  calcul  des  coordonnées  ou  au  tracé 
géométrique  de  cette  courbe ,  que  nous  donnerons  plus  bas ,  il  est 
nécessaire  de  connaître  à  priori  les  quantités  u. ,  e,  et  y,,  les  deux 
dernières  de  ces  quantités  étant ,  comme  nous  l'avons  dit ,  l'épais- 
seur et  l'ordonnée  au  sommet  ;  or,  les  données  immédiates  de  la 
question  sont  ordinairement  la  demi-ouverture  de  la  voûte  et  la 
llèche  ou  hauteur  sous  clef,  puis  la  charge  qui  doit  s'élever  au- 
dessus  de  la  clef.  Ces  données ,  ainsi  que  nous  le  verrons  plus  bas, 
suffisent  pour  déterminer  "-,  e,  et  y, ,  de  telle  sorte  qu'alors  "■  ne 
sera  point ,  dans  tous  les  cas ,  une  quantité  arbitraire ,  comme  on 
aurait  pu  le  croire ,  du  moins  lorsqu'il  s'agira  de  voûtes  en  anse 
de  panier  terminées  verticalement,  ou  de  portions  de  voûtes  dans 


lesquelles  on  fixera  la  direction  du  dernier  plan  de  joint.  11  parai- 
trait  donc  convenable  de  commencer  par  indiquer  la  manière  de 
déduire  ces  dernières,  des  données  ordinaires  de  la  question ,  et 
nous  l'eussions  fait,  s'il  nous  eût  été  possible  de  présenter  des 
intégrales  peu  compliquées  de  l'équation  (84);  mais,  comme  la 
détermination  que  nous  donnerons  repose  sur  le  calcul  des  coor- 
données ou  le  tracé  géométrique  de  la  courbe ,  nous  commence- 
rons par  exposer  l'un  et  l'autre  de  ces  procédés. 

Supposons  donc  que  par  un  moyen  quelconque,  l'on  ait  déter- 
miné les  valeurs  exactes  ou  approchées  des  troisquantitésfx,  e,,  y,, 
de  manière  à  satisfaire  exactement  ou  à  peu  près  aux  données 
immédiates,  on  aura  recours  aux  relations  suivantes  obtenues  ci- 
dessus,  que  nous  réunissons  ici 
y  —  Vo 


y'  =  y  —  ^icofct, 
dy^fsinoidt. 


'         «  co«  a  -f-  l'y' 

y"  =  y+T'co«», 

da;  :=  p  cos't.  d%. 


(86) 


dp  = «'«  a.  du. 

y 

Nous  allons  employer  ces  relations ,  non  au  calcul  des  coordon- 
nées d'un  point  isolé ,  mais  bien  pour  calculer  les  différences  finies 
\y,  \jc ,  des  coordonnées  successives  de  points  correspondant 
à  des  normales  faisant  entre  elles  l'angle  constant  A»  :  de  cette 
manière  a.  sera  ici  la  variable  indépendante,  et  y,  2-,  ainsi  que 
leurs  accroissements ,  seront  des  fonctions  de  %  et  a».  On  voit 
qu'il  suffira,  connaissant  des  valeurs  de  y,  x,  correspondant  à  a,  et 
ayant  calculé  celles  de  Ay  et  sx,  d'ajouter  celles-ci  aux  pre- 
mières ,  pour  obtenir  les  coordonnées  y  -f-  Ay,  a;  -|-  a  ar ,  qui  cor- 
respondent à  l'angle  a-f-A«.  Quand  on  aura  continué  ces  cal- 
culs de  proche  en  proche  jusqu'à  la  plus  grande  ordonnée,  toutes 
les  coordonnées  intermédiaires  se  trouveront  en  même  temps  cal- 
culées, et  leurs  valeurs  seront  aussi  vérifiées,  si  celles  des  coor- 
données extrêmes  le  sont. 

Il  faut  donc,  avant  tout,  avoir  les  valeurs  initiales  des  varia- 
bles; or,  nous  supposons  connus  y,  et  c,  ;  d'ailleurs,  si  l'on  fait 
passer  l'axe  des  y  par  le  sommet,  on  aura  en  même  temps  a:  =  u 
et  a  =  0 ,  en  ce  point. 

Pour  passer  de  là  aux  valeurs  suivantes,  il  reste  à  calculer  les 
différences  "finies  Ay ,  \x.  Fixons  d'abord  le  degré  d'approxima- 
tion avec  lequel  il  convient  de  le  faire.  Si  l'on  veut  que  les  plus 
grandes  valeurs  de  y  et  de  ar  ne  soient  point  en  erreur  de  quantités 
de  l'ordre  des  épaisseurs,  ou  du  premier  ordre  ,  il  sera  bon,  pour 
éviter  l'accumulation  des  erreurs  provenant  des  différences  succes- 
sives, de  pousser  l'exaclitude  de  celles-ci  jusqu'au  deuxième  ordre 
inclusivement.  Or,  en  supposant  que  l'on  fasse  Aa  de  5°  à  10* , 
cette  quantité  exprimée  en  rapport  d'arc  au  rayon  ,   pourra  être 

E 

considérée  comme  étant  du  même  ordre  que  —  ou  du  premier , 

? 
et  les  mêmes  puissances  de  ces  quantités,  ainsi  que  leurs  produits 
de  même  degré ,  seront  aussi  de  même  ordre.  Cela  posé ,  pour  ob- 
tenir des  valeurs  de  Ay  et  ax  exactes  aux  termes  près  du  troi- 
tième  ordre,  on  pourra  profiter  d'une  proposition  due,  je  crois, 
à  Legendre,  et  qui  aurait  l'avantage,  si  elle  était  plus  connue,  de 
simplifier  beaucoup  certains  calculs  d'approximation  en  fixant  le 
degré  de  celle-ci.  On  la  démontre  du  reste  facilement  au  moyen  du 
théorème  de  Taylor.  Cette  proposition  peut  recevoir  l'énoncé  sui- 


406 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


«M 


::l 


(87) 


vant  :  Si  dans  un  système  d'équations  différentielles  du  premier  ordre,  I 
on  change  les  différentielles  en  différences  finies ,  on  peut  donner 
aurésultat  un  degré  d'exactitude  qui  s' étend  aux  termes  du  deuxième  \ 
ordre  inclusivement,  en  augmentant  en  même  temps  chaque  variable 
dépendante  ou  indépendante  de  la  moitié  de  sa  différence  finie. 
Appliquons  cette  proposition  aux  équations  (86)  en  dy  et  dx,  nous 
aurons 

Ay  =  (  p  -|"  7  'i?  )  «"»(<»  -r  i  Aa  )  Aa 

\x  =  (  p  +  i  '^?  )  co«  (  «  -]-  { ^7.  )  A». 

équations  dans  lesquelles  il  faut  mettre  pour  Ap,  sa  valeur  appro- 
chée seulement  aux  termes  près  du  deuxième  ordre ,  puisque  Ap  se 
trouve  multiplié  par  a»;  or,  l'équation  (82  ter),  reproduite  ci-des- 
sus, est  inexacte  dans  les  termes  du  premier  ordre  ;  mais  en  chan- 
geant les  d  en  A ,  les  facteurs  du  premier  ordre  que  nous  intro- 
duisons réduisent  l'inexactitude  au  deuxième  ordre  ;  il  faudra  donc 
employer  la  valeur  suivante 

P 


As  = 


y 


-Sin  a  Aa. 


(88) 


Ajoutons  encore  qu'à  cause  du  même  facteur  a«  dans  Ay  et 
^x ,  la  valeur  de  p  dans  l'expression  de  ces  quantités  n'aura  pas 
besoin  d'être  exacte  dans  les  termes  du  deuxième  ordre,  et  que 
celle  donnée  (86) ,  dans  laquelle  on  a  négligé  des  termes  de  cet 
ordre,  convient  encore  très-bien  ici.  Les  formules  (86),  (87)  et  (88), 
employées  simultanément,  sont  donc  assez,  exactes  pour  le  degré 
d'approximation  que  nous  voulons  obtenir.  Pour  les  appliquer 
commodément,  il  faudra  dresser  un  tableau  dans  lequel  on  ouvrira 
des  colonnes  pour  les  valeurs  correspondantes  de 

=-.,     E,     p,     Ap,     y,     ^y,     x,     \x,     y',     y". 

Au  moyen  des  valeurs  initiales  données,  il  deviendra  facile  de 
calculer  les  valeurs  initiales  qui  restent  inconnues;  puis,  en  ajou- 
tant Ay  à  y,  et  Aa;  à  x,  on  aura  les  valeurs  de  y  et  a;  corres- 
pondant à  la  deuxième  valeur  de  a,  ce  qui  permettra  de  calculer 
de  nouveau  toutes  les  quantités  qui  suivent  a  dans  la  colonne  ho- 
rizontale du  tableau  que  nous  Indiquons  ;  en  comparant  la  première 
et  la  deuxième  valeur  de  p ,  on  se  convaincra  que  la  valeur  appro- 
chée donnée  par  l'équation  (88),  qui,  si  elle  étaitexacte,  devrait  être 
égale  à  la  différence  de  ces  deux  valeurs,  n'eu  sera  pas  assez  éloi- 
gnée pour  ne  pas  justifier  son  usage  dans  les  équations  (87).  En  con- 
tinuant ainsi  de  proche  en  proche  ,  on  formera  les  valeurs  corres- 
pondantes de  e ,  y  et  a;,  et  le  cours  de  la  courbe,  ainsi  que  les  épais- 
seurs, se  trouveront  déterminés.  Enfin ,  pour  appliquer  ces  violeurs 
a  la  construction  de  Vintrados  et  de  l'extrados,  il  faudra  encore 

e' 

calculer  pour  chaque  point  celle  de  5=-rî  — ,  quantité  qui  sera 

P 
généralement  très-petite  et  qu'on  pourra  négliger  le  plus  souvent. 
Cette  distance  étant  portée  sur  la  normale  à  partir  de  la  courbe  des 
centres  de  gravité  et  vers  le  centre  de  courbure,  on  aura  ainsi  la 
position  du  point  milieu  de  l'épaisseur,  et  par  suite  les  points  cor- 
respondants de  Vintrados  et  de  Vextrados,  en  portant  la  demi- 
épaisseur  de  part  et  d'autre.  Si  on  voulait  calculer  les  coordonnées 
des  courbes  intrados  et  extrados,  il  faudrait  augmenter  les  valeurs 
de  y'  et  y"  inscrites  à  notre  tableau,  de  la  quantité  S  cosct,  et  on 
calculerait  x'  et  x"  par  les  équations  suivantes 

x'  =  X  -\-  (  j  £  —  S)  sin  a,  x"  =x  —  [\  i  -\-^)sin  a. 
Quant  aux  circonstances  dans  lesquelles  il  conviendra  d'effec- 
tuer les  calculs  que  nous  venons  de  développer,  nous  dirons  que, 
s'il  ne  s'agit  que  d'étudier  un  projet,  on  pourra  se  contenter  de  la 


méthode  graphique  que  nous  allons  donner  ci-dessous,  laquelle 
dispense  d'exécuter  les  calculs  précédents.  Si ,  de  l'élude  du  projet, 
on  doit  passer  à  l'exécution ,  comme  il  sera  le  plus  souvent  impos- 
sible de  construire  l'épure  à  la  grandeur  d'exécution ,  il  deviendra 
alors  nécessaire  d'exécuter  les  calculs  de  notre  tableau  pour  déter- 
miner assez  exactement  les  coordonnées;  d'ailleurs,  pour  un  ou- 
vrage important ,  on  ne  doit  pas  reculer  devant  les  quelques  heu- 
res de  travail  qu'ils  pourraient  exiger.  On  s'est  donné  souvent  la 
peine  de  faire  des  calculs  aussi  compliqués  que  les  nôtres ,  alors 
qu'il  s'agissait  d'anses  de  panier  à  plusieurs  centres,  se  rappro- 
chant plus  ou  moins  des  ellipses ,  lorsque  rien  ,  théoriquement  du 
moins,  n'indiquait  la  nécessité  de  se  rapprocher  de  formes  rigou- 
reusement déterminées  ;  ne  conçoit-on  p<is  dès  lors  qu'on  pourrait 
consacrer  tout  autant  de  temps  à  des  calculs  reposant  sur  une 
théorie  mieux  fondée,  j'ose  le  croire,  que  celles  parvenues  à  ma 
connaissance,  qui  ont  été  émises  sur  le  même  sujet? 

Tracé  géométrique  de  la  Courbe  des  centres  de  graeité,  de  l' Intrados 
et  de  l'Extrados. 

§  XLII.  Nous  renverrons,  pour  ce  qui  concerne  les  données  du 

problème,  aux  observations  présentées  au  commencement  du  para- 
graphe précédent,  et  nous  supposerons  de  même,  déterminées,  les 
quantités u.,e.  ety,.  Aprèscequenousavonsditdansleg  XXXVI sur 
la  manière  de  tracer  une  courhe  au  moyen  de  son  rayon  de  cour- 
bure, nous  croyons  superflu  de  revenir  sur  ce  genre  de  construc- 
tion; nous  avons  donc  seulement  à  indiquer  comment  on  obtiendra, 
par  un  tracé,  le  riiyon  de  courbure  lui-même,  dont  la  valeur  diffère 
ici  de  celle  qui  a  été  employée  §  X  XXVI.  Pour  abréger  les  descrip- 
tions, et  nous  renfermer  dans  les  cas  pratiques  les  plus  ordinaires, 
nous  supposerons  les  matières  du  massif  de  même  densité  que  celle 
de  la  voûte  (quand  on  aura  compris  le  tracé  que  nous  allons  don- 
ner, on  imaginera  facilement  ce  qu'il  y  aurait  à  faire  s'il  s'agissait 
de  densités  différentes).  Dans  le  cas  particulier  que  nous  considé- 
rons, la  valeur  de  ?  est  fournie  par  l'équation  (  85  )  ;  mais  pour 
n'avoir  point  à  tracer  de  lignes  qui  excèdent  considérablement  celles 
qu'il  s'agit  d'obtenir,  il  convient  de  multiplier  et  diviser  le 
deuxième  membre  par  un  nombre  surpassant  notablement  l'unité; 
nous  emploierons  à  cet  usage  le  nombre  5,  comme  fort  convenable 
à  notre  objet,  et  nous  aurons 

y    ^  ' 

Voici  maintenant  comme  il  faudra  procéder  :  on  calculera,  au 
moyen  de  l'équation  (81),  une  valeur  de  »  correspondant  à  In  plus 
grande  ordonnée  que  l'on  ait  à  considérer,  puis  une  ou  deux  autres 
valeurs,  correspondant  à  des  valeurs  de  y  intermédiaires  entre  y. 
et  la  plus  grande  ordonnée;  cela  sera  suffisant,  attendu  que  la 
courbe  logarithmique,  représentée  par  l'équation  ;8l)  (en  prenant 
y  et  «  pour  coordonnées),  se  confond  presque  avec  une  ligne  droite, 
dans  l'étendue  que  l'on  a  besoin  d'en  considérer;  ceci  tient  à  la 
grandeur  de  "•  par  rapport  à  y — y,.  On  prendra,  d'une  part,  la  moi- 
tié de  chacune  des  valeurs  de  t,  y  compris  «,,  et  de  l'autre,  on  les 
multipliera  par  5,  ce  qui  reviendra  à  avancer  la  virgule  d'un  rang 
vers  la  droite  dans  les  précédentes;  puis  on  les  portera  perpendicu- 
lairement à  l'axe  des  y,  à  partir  de  lextrcmité  des  ordonnées  auv 
quelles  elles  correspondent.  On  aura  ainsi  déterminé  la  position  de 
points  appartenant  à  deux  courbes  distinctes  EE  et  E'E',  Fig,  6, 
PL  20,  qu'on  joindra  par  des  traits  continus.  Cela  fait,  on  prepdra, 


'1.07 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLFCS. 


408 


sur  une  perpendiculaire  à  l'axe  des  y,  CD=  j^  C  O,  puis  0  J/ 
=  V  1^-  Si  l'on  veut  faire  le  tracé  en  changeant  le  rayon  de  c  ur- 
bure  de  lO"  en  lo»,  il  faudra  tracer  autour  du  point  C,  et  en  par- 
tant de  l'axe  des  y,  une  suite  de  droites  divergentes  Cg,  Cg  etc., 
faisant  entre  elles  l'angle  constant  de  5",  ce  qui  sera  vite  fait  au 
moyen  d'un  rapporteur.  Ces  constructions  préparatoires  serviront 
pour  toutes  les  valeurs  de  p. 

Actuellement,  supposons  qu'on  ait  déjà  tracé  une  portion  de 
la  courbe  des  centres  de  gravité,  en  partant  du  sommet,  et  qu'on 
soit  parvenu  en  un  point  Gm ,  on  prolongera  le  dernier  arc  au  delà 
de  ce  point,  puis  on  fera  une  hypothèse  sur  la  position  du  point  V, 
qui  doit  se  trouver,  si  l'hypothèse  est  exacte,  sur  le  milieu  de  l'arc 
suivant  qu'il  s'agit  de  tracer.  Par  ce  point  on  mènera  une  droite 
faisant  avec  la  normale  passant  par  Gm  un  angle  de  5",  c'est-à-dire 
parallèle  à  celle  des  droites  divergentes  Cg,  qui  suit  celle  parallèle  à 
cette  normale.  Menant  ensuite  VP  parallèle  a  l'axe  des  x,  on  aura 

Q  Q,  =  -p  £,  et  P  Ç  =  56.  Ou  portera  la  demi-épaisseur  Ç  0,  de  part 
et  d'autre  du  point  U  sur  la  normale ,  et  l'on  aura  la  position  des 
points  U,  U",  ayant  pour  ordonnéesi/'  et  y"  d'après  (8f>).  On  mènera 

par  ces  points,  des  parallèles  à  l'axe  des  a;,  d'où  il  résultera  0Q'  = 

y',0Q"=y",PQ=:5i;  et  à  cause  de  CD  =  -^OC,ox\  aura  Q'L^ 

■^OQ'  =  -^y'.  En  menant,  par  le  point  C,  PtP'parallèleà  l'axe  des 

y,  onauraf 'y '^i*0  =  S6.  Tirons  maintenant  la  droite  OP 'pro- 
longée indéfiniment,  puis  portons,  de  M  en  N,  vers  0,  la  longueur 

MN=Q'L,  cequi  donnera  0  N=  -ri^ — tt!/';  je  disquelalongueur 
N K,  déterminée  par  l'intersection  de  la  droite  OP"  avec  une  pa- 
rallèle à  l'axe  des  x  menée  par  le  point  N,  sera  la  valeur  cherchée 
dep;  en  effet,  les  deux  triangles  rectangles  semblables  OKN, 
0 P" Q",  donnent  la  proportion 

TF       ÔÎV" 

F^  ~  W  ' 

ou,  d'après  les  déterminations  que  nous  venons  d'effectuer, 

ô  =  y"      ' 

Or,  cette  proportion,  comparée  à  l'équation  (89),  donne  évidem- 
ment KN^?,  ce  qu'il  s'agissait  de  démontrer. 

Ce  rayon  étant  porté  de  Gm  en  Rm ,  on  tracera  de  ce  point,  avec 
le  même  rayon,  un  arc  indéfini,  puis,  par  Rm,  on  mènera  une  droite 
faisant  l'angle  de  10°  avec  la  normale  Gm  Rm,  ce  qui  déterminera 
l'étendue  de  l'arc  Gm  Gn  ;  on  pourra  alors  vérifier  si  l'on  a  bien 
choisi  la  position  du  point  U  qui  devrait  se  trouver  sur  le  milieu 
de  cet  arc.  Si  l'erreur  parait  trop  grande,  on  recommencera  en  par- 
tantdu  milieu  del'arc  ainsi  déterminé,  comme  il  aété  dit§XXXVI, 
relativement  au  tracé  d'une  autre  courbe  du  même  genre.  Nous 
avons  supposé  le  tracé  de  la  courbe  parvenu  à  un  point  Gm  ,  pour 
mieux  caractériser  nos  constructions;  mais  il  est  visible  que  ce  point 
peut  être  pris  sur  l'axedes  y,  et  alors  on  commence  la  construction 
par  le  procédé  que  nous  venons  d'indiquer  pour  la  continuer. 

Enfin ,  la  quantité  ^,  dont  nous  n'avions  pas  besoin  de  tenir 
compte  pour  effectuer  les  calculs  et  tracés  des  épaisseurs  et  de 
la  courbe  des  centres  de  gravité ,  ainsi  que  nous  l'avons  démontré 
plus  haut,  doit  cependant  être  prise  en  considération  pour  le  tracé 
de  Vextrados  et  àeY intrados;  sa  valeur,  que  l'on  peut  mettre  sous  la 

forme  S  ^=  0,083 — ,  pourrait  être  construite  par  le  procédé  des  troi- 


sièmes proportionnelles;  mais  il  sera  plus  court,  pour  ceux  qui 
font  usage  de  la  régie  à  calcul,  d'effectuer  le  calcul,  a»i  moyen  de  l'é- 
quation précédente;  on  n'aura  de  cette  manière,  suivant  l'expres- 
sion habituelle,  qu'un  seul  coup  de  règle  à  donner.  D'après  la  si- 
gnification de  la  quantité  S,  on  voit  que,  pour  obtenir  la  véritable 
situation  des  points  de  Vintrado»  et  de  l'extrados,  il  suffira  de  por- 
ter cette  quantité  vers  le  centre  de  courbure,  à  partir  des  points 
U,  V"  en  u',«  ".Ces  points  u  et  u"  appartiendront  donc  aux  courbes 
extrados  et  intrados.  La  plus  grande  valeur  de  *  aura  lieu  au  point 
le  plus  bas  de  la  courbe,  et  l'on  jugera  en  calculant  cette  valeur  si 
elle  est  assez  petite  pour  qu'on  puisse  en  faire  abstraction. 

Nous  indiquerons  ci-après  le  moyen  qui  se  présente  de  vérifier 
l'exactitude  des  tracés. 

Détermination  de  l'épaisseur  à  la  clef,  et  de  la  pression  dans  les 
joints,  au  moyende  la  demi-ouverture,  delà  flèche  ou  hauteur  sous 
clef,  et  de  la  charge  au-dessus  de  la  clef.  Poussée  contre  les  culées. 

§  XLin.  La  détermination  dont  il  s'agit  s'obtiendrait  au  moyen 
de  l'équation'  de  la  courbe  des  centres  dti  gravité ,  ou  des  intégrales 
de  l'équation  différentielle  du  deuxième  ordre  résultant  de  l'élimi- 
nation de  £  entre  les  équations  (81)  et  (84).  A  défaut  de  ces  inté- 
grales, nous  aurons  recours  à  la  considération,  soit  de  l'équilibre 
de  la  voûte,  soit  de  l'équilibre  du  massif  qui  la  charge.  Nous  ob- 
tiendrons ainsi,  sans  avoir  recours  aux  procédés  de  résolution  des 
équations  différentielles,  une  intégrale  du  premier  ordre  de  l'équa- 
tion dont  il  s'agit. 

Revenons  à  l'équation  (77),  et  fixons  le  rôle  de  la  force  élémen- 
taire dH  dont  elle  donne  la  valeur.  En  vertu  des  équations  dont 
cette  dernière  est  tirée,  dH  est  d'abord  la  composante  horizontale 
de  la  pression  normale  exercée  sur  un  voussoir.  Nous  ajouterons 
que  cette  force,  à  cause  de  l'égalité  de  Vaction  à  la  réaction,  est  en 
même  temps  la  force  horizontale  que  le  massif  reçoit  du  voussoir 
dans  le  sens  positif  de  l'axe  des  x,  par  l'intermédiaire  du  prisme 
triangulaire.  Cela  posé,  partageons  la  voûte  et  le  massif  par  un 
plan  vertical  passant  par  le  sommet  de  la  voûte,  et  considérons  l'é- 
quilibre d'une  des  parties  de  la  voûte,  terminée  d'un  côté  par  ce 
plan,  et  de  l'autre  par  un  plan  normal  quelconque.  En  n'ayant  d'a- 
bord égard  qu'aux  forces  horizontales  principalement  utiles  à  no- 
tre objet,  ces  forces  sont  :  la  poussée  totale  >-«,<,  exercée  au  som- 
met par  l'autre  portion  de  la  \oûte,  les  forces  dfl,  et  la  compo- 
sante horizontale  de  la  réaction  exercée  contre  le  dernier  plan  de 
joint,  dont  la  valeur  est  ).<6  cosx.  En  iiyant  égard  au  sens  de  ces 
forces,  on  obtient  la  relation 


l    '^ 


dll -\-xti  cosx. 


(90) 


Considérant  maintenant  l'équilibre  du  massif,  les  forces  hori- 
zontales qu'il  reçoit  sont  d'une  part  les  mêmes  forces  dH,  et  de 
l'autre,  la  réaction  horizontale  totale  contre  le  plan  vertical  qui  li- 
mite la  partie  considérée  du  massif,  laquelle  est  égale  et  contraire 
à  la  poussée  horizontale  qu'il  exerce  contre  l'autre  partie  du  mas- 
sif adjacent  à  la  pile  ou  à  la  culée.  Il  est  ici  naturel  de  représenter 
cette  force  totale  par  H,  car,  à  cause  du  sens  de  ces  forces,  il  vient 


dH. 


(91) 


409 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


MO 


Dans  le  cas  oii  l'on  considérera  rtiction  du  massif  tout  entier, 
si  l'on  affecte  de  l'indice  (  toutes  les  quantités  qui  se  rapportent  à 
l'extrémité  inférieure  de  la  voûte,  on  ol)tiendra  le  point  d'appli- 
cation de  cette  résultante,  en  égalant  son  moment  à  la  somme  des 
moments  des  composantes  dH;  or,  remarquons  d'abord  que  le 
point  d'application  de  la  force  dH  est  un  point  de  Vextrados  ayant 
pour  ordonnée  y',  de  sorte  que  nous  pouvons  changer  les  limites  de 
l'intégrale  précédente  en  y\  et  y\,  à  la  condition  d'exprimer  rf// 
en  y'  et  dy'.  Désignons  par  u  l'ordonnée  du  point  d'application  de 
la  résultante,  nous  aurons 


H. 


!/, 


Vo 


y'dff: 


d'où  nous  tirerons 


1 


ydH. 


(92) 


y- 


Enfin,  on  pourra  désirer  connaître  le  poids  d'une  des  portions  de 
la  voûte  et  du  massif  correspondant.  En  considérant  l'équation  de 
l'équilibre  du  système  ainsi  formé,  qui  se  rapporte  aux  forces  ver- 
ticales, on  voit  que  les  seules  forces  verticales  qui  le  sollicitent  sont 
le  poids  P  lui-même  de  ce  système,  et  la  composante  verticale  de 
la  réaction  de  la  culée  contre  le  dernier  plan  de  joint,  dont  la  va- 
leur est  X(  s,  «ma,  ;  on  aura  donc  P  par  l'équation 

P  =  },U,  un  a,  =  oXas,  sin  a, ,  (93) 

de  laquelle  il  serait  facile  de  déduire  le  volume  des  matériaux,  si  la 
densité  du  massif  était  la  même  que  celle  de  la  voûte. 

Il  reste  maintenant  à  substituer  la  valeur  de  dH  dans  les  équa- 
tions précédentes,  et  à  effectuer  les  intégrations.  Pour  rendre 
possible  ces  dernières,  nous  avons  à  exprimer  lang  «■  qui  entre 
dans  (77),  en  fonction  de  tangi.',  «■'  désignant  l'angle  de  la  tan- 
gente à  ['extrados  avec  l'axe  de  x,  et  les  angles  *  et  a'  se  rappor- 
tant à  des  tangentes  menées  par  des  points  situés  sur  une  même 
normale  à  la  courbe  des  centres  de  gravité.  Soitf  la  différence  très- 
petite  de  ces  deux  angles,  nous  aurons 

a  =  a'-|-^, 

et  de  plus  (voyez  Fig.  5) 


tangi -■ 


'JE       (?  +  i^-^)''»' 


en  négligeant  dans  cette  équation  les  termes  du  deuxième  ordre 
et  des  ordres  supérieurs,  on  aura,  par  l'équation  (82  bis), 

£ 

7  r=  Y  —suit-. 
U 

Maintenant ,  développant  tang  a  suivant  les  puissances  de  7,  au 

moyen  du  théorème  de  Taylor,  et  s'arrêtant  au  terme  du  premier 

ordre,  on  aura 

e     sini 
tanna  =  1anq'^  4-} r—ri 

■'  ^         '     '    Jjl     cos    « 

<m  pourra  de  plus,  sans  altérer  l'approximation,  substituer  dans  le 
deuxième  terme,  sin  a  à  la  place  de  sin  a,  ce  qui  donnera 


tang 0.=  tang ^  I  1 


2u-  cos  X 
puis  observant  que  l'on  a 

dx'  lang  %'  =  dy' , 
on  pourra  mettre  la  valeur  de  dH  (7  7)  sous  la  forme  suivante  ; 


dH 


—  <a,/.y'dy'(i-\--~         ,  ). 
'    •*     •'  \      '     iiLcasv.  I 


Nous  devons  placer  ici  une  remarque  que  nous  eussions  peut- 
être  dû  faire  plus  tcH;  c'est  que  la  valeur  de  _«.  peut  être  considérée 
comme  une  quantité  du  premier  ordre  de  grandeur,  ce  qui  rendrait 

le  rapport  —  du  deuxième  ordre  de  petitesse  ;  en  effet  l'équation  (84) 

donne  pour  la  valeur  de  --,  —  —  î,  en  négligeant  les  termes  du 
.    xy 

premier  ordre;  mais  par  suite  de  la  convention  établie  sur  l'ordre 

de  grandeur  de  — ,  son  inverse  -  est  du  premier  ordre  de  gran- 

P  t 

deur  ;  il  faut  donc  que  sa  valeur  soit  de  cet  ordre,  et  à  plus  forte 

a 

raison  '—,,  qui  est  une  quantité  plus  grande  (l).  Nous  sommes  donc 

autorisés  à  considérer  le  terme  qui  suit  l'unité  dans  la  parenthèse, 
comme  étant  du  deuxième  ordre,  tant  que  cos%  ne  sera  pas  trojf 
petit,  ou  que  >  ne  dépassera  pas  85°  environ.  Dans  ces  limites,  on 
aura  donc  une  expression  exacte  aux  termes  près  du  deuxième  or- 
dre, en  écrivant 

dH=a,xy'dy'.  (94) 

Il  y  a  plus  :  si  nous  supposons,  comme  cela  aura  lieu  dans  la  réa- 
lité, la  surface  extrados  continue  au  lieu  d'être  dentelée  ainsi  que 
nous  l'avons  supposée  pour  l'exactitude  de  la  théorie,  il  faudra 
écrire  a'  au  lieu  de  a  dans  les  équations  sur  lesquelles  est  établie 
l'équation  (77),  ce  qui  la  fera  coïncider  avec  celle  que  nous  venons 
d'obtenir.  Nous  aurions  pu  supprimer  tout  d'abord  les  termes  qui 
proviennent  du  défaut  de  parallélisme  de  l'extrados  avec  la  courbe 
des  centres  de  gravité;  mais  il  était  bon  de  voir  que  ce  défaut  de 
parallélisme  n'introduit  dans  les  équations  définitives  que  des  er- 
reurs du  deuxième  ordre  et  des  ordres  supérieurs. 

§  XLIV.  —  L'équation  (94)  montre  que  la  pression  trans- 
mise aux  culées  est  la  même  que  celle  qui  serait  produite  par 
un  liquide  dont  le  poids  serait  ci,  ;  la  même  hypothèse  rend  nulle 


la   dérivée 


do. 

,  —  S 


et  la  valeur  de  iV  qui  en  résulte   est 


-,  y'  I  1  -\-— I  ;  elle  n'est  donc  que  très-peu  différente  de  la 

pression  que  produirait  le  même  liquide  sur  la  voûte;  mais  la  pres- 
sion iV  est  appliquée  à  la  surface  élémentaire xd»,  et  l'on  doitavoir 
^ ds  =  N"  ds,  en  appelant  A"  la  pression  par  unité  de  surface  sur 
l'élément  xds  de  Vextrados;  il  résulte  de  cette  équation  et  de  la 
valeur  précédente  N"  =  a,  y'.  Notre  hypothèse  sur  la  disiKnition 
des  matériaux  qui  chargent  la  voûte  revient  donc  à  supposer  qu'ils 


(1)  On  conçoit  que  nous  avons  dû,  à  défaut  d'autre  mélliodes  plus  prfebes, 
employer  la  considération  des  graudciirs  de  divers  ordres,  pour  classer  les 
termes  et  exclure  ceux  dont  l'importanco  était  négligeable;  niais  on  doit  anssi 
comprendre  que  celle  classification  ne  peul  avoir  rien  d'absolu,  que  des  termes 
supposés  d'un  certain  ordre  peuvent .  par  suite  de  valeurs  parliculiires  des  va- 
riables dont  elles  dépendent,  acquérir  des  valeurs  qui  les  rangent  dans  uu  ordre 
durèrent  ;  il  faut  donc  vérifier  dans  les  applicaiious,  si  les  termes  considérés,  par 
suite  des  valeurs  numériques  admises,  n'acquierrent  point  une  importance  qui 
les  ferait  sortir  des  Hmiies  assignées  à  leur  degré  de  pelilesse.  La  remarque  que 
nous  venons  de  faire  rend  effectivement  le  produit  (_u  de  l'ordre  de  j',  et  non  dn 
premier  ordre  de  petitesse;  mais  elle  n'infirme  point  des  résultats  des  paragra- 
phes précédents,  ce  dont  on  peut  s'assurer  en  effectuant  les  transformations  que 
nous  nous  sommes  borné  i  indiquer;  et  l'on  verra  que  nous  avoni conservé  eflec- 
tivement  tous  les  Icrmcs  qui  devaient  rester  dans  les  équations. 


m 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


M2 


[y  —Vo- 


agissent  sur  elle  et  sur  les  piles  ou  culées,  comme  un  liquide  de 
même  densité. 

En  intégrant  l'équation  (94)  entre'  les  limites  y/  et  y,  il  vient 
d'après  (9l)  et  les  observations  relatives  aux  limites, 

2 
OU  \  (95) 

H^.Mv-y:)^ 

La  poussée  est  ainsi  exprimée  par  le  poids  d'un  prisme  droit 
ayant  pour  densité  celle  du  massif,  et  dont  la  base  serait  un  tra- 
pèze ayant  pour  ses  deux  bases  parallèles,  les  coordonnées  des 
points  extrêmes  de  Vextrados  et  leur  distance  verticale,  ou  la  flè- 
che de  l'arc  considéré.  En  mettant  cette  valeur  dans  l'équation  (92), 
puis  effectuant  l'intégration  indiquée,  au  moyen  de  (94),  il  vient, 
pour  l'ordonnée  u  du  point  d'application  de  la  résultante  des  pres- 
•sions  horizontales  exercées  par  le  massif  sur  la  culée, 

„    ,y'"—y»" 


ou 


yr-y. 
,  yo"-\-yo'y.'+y," 


(95  big) 


yo+y: 

eu  faisant  disparaître  le  facteur  commun  y,'  —  y,'. 

Contentons-nous  d'ajouter  en  passant  que,  lorsqu'il  s'agira  de 
calculer  l'équilibre  de  la  culée,  pour  tenir  compte  des  actions  exer- 
cées par  la  voûte  et  le  massif,  il  suffira  de  considérer  en  même 
temps  que  la  force  H,  dont  nous  venons  de  fixer  la  grandeur  et  la 
direction,  la  pression  i^t  e,  exercée  par  la  voûte  sur  la  culée,  suivant 
In  tangente  au  dernier  élément  de  la  courbe  des  centres  de  gra- 
vité. 

La  valeur  précédente  de  H  étant  substituée  à  l'intégrale  qui  la 
représente  dans  (90),  en  ayant  égard  à  ce  que  l'on  a,  d'après  les 
équations  (78), 


on  aura 


■y-liy'  +  yo 


(95  ter] 


Nous  allons  faire  voir  que  cette  expression  est  précisément  une 
intégrale  première  de  l'équation  (84).  En  effet,  différentions-la  en 
remplaçant  préalablement  le  produit  des  deux  facteurs  en  y'  par  la 
différence  de  deux  carrés,  puis  remplaçons  d  e  par  sa  valeur  tirée 
de  (80),  en  y  négligeant  le  terme  du  deuxième  ordre,  et  transpo- 
sons ensuite,  il  viendra 

/  •  '  1         ^  '^y' 

[i£  «m  «=:  (ty  4- 6  co«  a)  -p-; 
a» 

mais  on  a,  en  négligeant  S  devant  j  t,  et  faisant  sxn  a!  =  sin  a,  ce 

qui  est  exact  aux  termes  près  du  deuxième  ordre, 

dy'  dy"    ds'  ■       ,      ■   ,    , 

~r  =^^  T- =*'"*? -t--0'' 

a»         ds     da.  \     \   >   I 

substituant  cette  valeur  dans  l'équation  précédente,  enlevant  le 
facteur  commun  sin  «■,  et  négligeant  le  terme  du  deuxième  \  e'  cos  a, 
on  aura,  en  tirant  la  valeur  de  p, 

."■—7  «y 

£  COS  a.-\-  %y 
Cette  équation  n'étant  autre  que  l'équation  différentielle  du 
deuxième  ordre  (84),  il  est  donc  démontré  que  l'équation  (95  ter] 
en  est  l'intégrale  première. 


C'est  l'équation  (95  ter)  qui  va  principalement  nous  servir  pour 
établir  une  des  relations  cherchées  entre  les  données  d'un  projet 
d'arche,  et  les  constantes  nécessaires  pour  effectuer  le  calcul  des 
coordonnées  ou  le  tracé  géométrique. 

Elle  pourrait  être  utilisée  dans  le  calcul  des  coordonnées,  mais 
nous  avons  préféré,  pour  l'analogie  du  calcul  et  du  tracé,  partir 
de  la  valeur  du  rayon  de  courbure  et  de  l'épaisseur;  nous  indi- 
quons ainsi  les  procédés  qu'il  y  aura  à  suivre  lorsqu'on  pourra  ob- 
tenir le  rayon  de  courbure  en  fonction  des  coordonnées  et  de  leurs 
différentielles  du  premier  ordre.  Du  reste,  elle  sera  employée  avan- 
tageusement pour  vérifier  l'exactitude  des  calculs,  attendu  que  les 
valeurs  de  e  et  y,  relatives  à  la  valeur  extrême  de  a,  devront  satis- 
faire à  cette  équation  ;  tous  les  calculs  intermédiaires  se  trouveront 
donc  en  même  temps  vérifiés  ainsi  que  nous  l'avons  dit  §  XLI. 

§  XLV.  —  Les  données  ordinaires  d'un  projet  d'arche  sont  : 
la  demi-ouverture  g,  la  hauteur  sous  clef  à  partir  de  naissances  ou 
la  flèche  /",  enfin  la  hauteur  h  de  la  charge  au-dessus  de  la  clef.  On 
a  coutume  de  ne  point  avoir  égard  à  cette  dernière  dans  le  calcul 
d'une  arche,  et  cependant  elle  mérite  plus  d'attention.  Disons  d'a- 
bord que  celte  hauteur  provient  ordinairement,  dans  les  ponts, 
d'un  lit  de  maçonnerie  reposant  sur  le  plan  horizontal  tangent  a 
\' extrados,  d'une  couche  de  cailloux,  d'une  autre  de  sable,  et  enfin 
du  pavé  lui-même,  quant  à  la  chaussée  ;  dans  les  ponts-canaux, 
plusieurs  de  ces  couches  sont  remplacées  par  une  couche  d'eau. 
Nous  remplacerons  pour  le  calcul,  la  hauteur  de  chacune  d'elles, 
par  la  hauteur  d'une  couche  de  la  matière  du  massif  qui  aurait 
le  même  poids,  ce  qui  se  fera  en  la  multipliant  par  le  rapport  de  la 
densité  propre  de  cette  coucheà  celle  du  massif,  et  ce  sera  la  somme 
de  ces  hauteurs  réduites  que  nous  désignerons  par  h.  Enfin,  nous 
ajouterons  à  ces  données  l'une  des  deux  quantités  u.  et  «,. 

La  première  de  ces  quantités  a  est  liée  à  la  pression  dans  les 
joints  par  l'équation  (78).  Elle  exprime,  ainsi  que  nous  l'avons 
dit  ailleurs,  la  hauteur  d'une  colonne  de  la  matière  considérée  dont 
le  poids  produirait  sur  une  base  horizontale  la  pression  qui  a  lieu 
dans  les  joints  normaux.  Son  usage  ici  est  le  même  que  celui  des 
hauteurs  manométriques  dans  la  mécanique  des  fluides  ;  il  a,  comme 
ces  dernières,  l'avantage  de  rendre  plus  saisissable  à  l'esprit  l'in- 
tensité des  pressions,  que  tel  ou  tel  nombre  de  kil.  par  mètre  carré. 
U  sert  d'un  autre  c6té  à  rendre  les  équations  homogènes,  de  telle 
sorte  qu'il  n'y  entre  plus  que  des  lignes  et  des  rapports.  Cette  quan- 
tité ;a  n'est  pas  toujours  donnée  a  priori,  elle  peut  résulter  de  con- 
ditions particulières;  mais  elle  ne  doit  jamais  dépasser  une  limite 
fixée  par  la  résistance  des  matériaux.  Navier,  dans  stm  Résumé  des 
Leçons  sur  l'application  de  la  mécanique  n°  176,  fixe  la  limite  des 
pressions  qu'on  peut  employer  avec  sécurité  dans  les  arches,  à 
610  kil.  pour  une  surface  de  25cent.  carrés,  d'où  l'on  déduit  «•  = 
100  mètres ,  en  prenant  pour  poids  du  mètre  cube,  nr  =  2440  kil., 
c'est  le  poids  du  liais  de  Bagneux;  les  autres  pierres  employées 
aux  environs  de  Paris  donneraient  une  valeur  de  u.  un  peu  plus 
forte  à  cause  de  leur  moindre  densité.  Suivant  Navier,  on  ne  s'ex- 
poserait donc  point  à  trop  charger  les  voûtes  toutes  les  fois  que  ix  ne 
dépasserait  pas  100  mètres  (l). 


(1)  Xous  pouvons  donner  un  exemple  Trappant  dans  lequel  on  reconnaîtra 
facilementque  celte  valeur  a  été  dépassée  :  les  piliers  prismatiques  de  l'aqueduc 
de  Spolette  ont  plus  de  100  mètres  de  hauteur,  et  sont  de  plus  cliargés  d'une 


413 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


kik 


Nous  dirons  toutefois  que  les  épaiseurs  déduites  de  la  valeurde.u- 
que  l'on  aura  fixée  au-dessous  de  too  mètres,  pourront  bien  assurer 
la  stabilité  de  l'arche  en  ayant  égard  seulement  à  son  poids  ;  mais  si 
les  épaisseurs  se  trouvent  petites,  il  conviendra,  à  cause  des  sur- 
charges, de  diminuer  |a,  ce  qui  aura  pour  effet  d'augmenter  les 
épaisseurs.  La  valeur  de  u.  n'est  donc  point  absolument  arbitraire. 

La  considération  de  l'angle  a,  du  dernier  plan  de  joint  avec  la 
verticale,  va  nous  servir  à  distinguer  deux  classes  d'arches  dans  le 
système  de  construction  qui  nous  occupe  :  1"  les  arches  dans  les- 
quelles l'angle  «,  a  une  valeur  moindre  que  90",  et  qui  correspon- 
dront pour  nous  aux  arches  dites  en  arc  de  cercle;  2"  les  arches  en 
anses  de  panier,  qui  ont  lieu  toutes  les  fois  qu'on  se  donne  «,  =90". 

Les  joints,  dans  l'un  et  l'autre  de  ces  cas,  sont  supposés  ne  pas 
s'étendre  jusqu'à  un  même  plan  horizontal,  comme  cela  a  lieu  dans 
quelques  arches  en  arc  du  cercle.  Dans  le  premier  cas,  l'angle  «, 
n'ayant  pas  de  valeur  nécessairement  déterminée,  ix  peut  être  pris 
arbitrairement  ainsi  que  nous  allons  le  voir;  dans  le  second  au  con- 
traire, a,  recevant  la  valeur  particulière  de  90",  u.  cesse  d'être  arbi- 
traire, et  prend  une  valeur  résultant  de  la  condition  a,  =90".  En 
effet,  en  laissant  de  côté  la  constante  y,  dont  la  valeur  est,  à  *  près, 
A-|--j-E,,  les  constantes  distinctes  que  nous  avons  à  considérer 
sont/",  g,  h,  «.,  £,,«,,  c'est-à-dire  au  nombre  de  (î.  Or  l'équation  (95 1er] 
va  nous  fournir,  comme  intégrale  première  de  (84),  une  relation 
entre  ces  constantes,  au  moyen  des  valeurs  que  prennent  les  varia- 
bles correspondant  au  dernier  plan  de  joint;  la  deuxième  intégrale 
ou  l'équation  de  la  courbe  des  centres  de  gravité  fournirait  une  se- 
conde relation  à  laquelle  nous  suppléerons  par  les  quadratures  ou  les 
tracés  décrits  ci-dessus.  Ces  six  constantes  ne  sont  donc  liées  entre 
elles  que  par  deux  équations,  d'où  il  suit  qu'on  peut  prendre  arbi- 
trairementquatre  d'entre  elfes,  et  que  les  deuxautres  s'en  déduiront  ; 
or,  les  trois  premières  étant  données  nécessairement  a  priori,  on 
ne  peut  donc  prendre  arbitrairement  que  l'une  des  trois  quantités 
u-,  £  o  et  a,  formant  un  groupe  qui  doit  être  réduit  à  deux,  parce 
qu'on  n'a  ei)  général  aucune  raison  a  priori  de  fixer  la  valeur 
de  So  • 

Transformons  donc  maintenant  l'équation  (95  ter),  de  manière  à 
y  introduire  les  données.  Nous  égalerons  pour  cela  deux  valeurs  de 
l'ordonnée  du  point  inférieur  de  l'mirado^;  l'une  se  compose  de  l'or- 
donnée du  point  inl'érieur  de  Vextrados  et  de  la  projection  verticale 
de  l'épaisseur,  l'autre  de  la  somme  des  longueurs  h,  e»,  et  f;  on  a 
donc 

»/',-}-£,  co««,=A  +  s,-|-/'; 
mais  h  n'est  autre  chose  que  y',,  d'où  résulte 

«/'■— 2/'.  =  ^  — s,*-»-'*, +/". 
et  2/',  + '/.  =  ^— ^  eo«a,+/"4-2/i, 

en  ajoutant  à  chaque  membre  de  la  première,  la  quantité  2  y\  ou 
son  égale  2  A.  Or,  en  appliquant  l'équation  (95  ter]  aux  valeurs  rela- 
tives au  dernier  plan  de  joint,  c'est-à-dire  en  affectant  de  l'indice  1 
toutes  les  variables,  et  substituant  les  valeurs  précédentes,  puis, 
posant  pour  abréger 

:=E.  — -,  co«»,, 
il  vient 


2u. 


+  /"+2A), 


96 


énoniie  coiisliuclioii  à  leur  partie  supérieure;  d'où  il  est  facile  de  conclure,  mal- 
gré le  défaut  d'indication  sur  la  dureté  et  la  densité  de  la  pierre,  <;ue  la  valeur 
de  jx,  à  la  partie  inférieure  des  piliers,  doit  dépasser  100  mètres. 


é(iuation  du  deuxième  degré  en  z,  dont  on  tirera  plus  facilement  la 
valeur  de  z  en  la  résolvant  à  la  manière  des  «luationsdu  premier 
degré,  en  négligeant  d'abord  z  au  deuxième  membre,  à  cause  de 
sa  petitesse  relativement  à  Fi;  on  aura  ainsi 

(97) 


z  =  ■ 


(t-^-') 


mais  d'un  autre  côté  t,  estliéà  t.  par  l'équation  (81),  dans  laquelle 
il  faut  mettre  pour  y — y,  sa  valeur  facile  à  constater,  /" -j- 

7  (', — «,  cas  a,)  ou  f-\--TZ;  on  en  tire 


/•4-T^ 


(98) 


1  — cotf-,  e 


Cette  dernière  équation,  jointe  à  celle  (97)  qui  exprime  la  valeur 
de  l'auxiliaire  z,  constitue  la  seule  relation  exacte  qu'il  nous  soit 
possible  d'établir  directement  entre  les  constantes  et  les  données  du 
problème,  relation  qui,  on  doit  le  remarquer,  necontient  point  la 
quantité  j.  Nous  allons  voir  maintenant  commenton  peut  suppléer 
à  celle  qui  nous  manque. 

§  XL VI.  L'équation  provenant  de  l'élimination  de  z  entre  les 
deux  précédentes,  contient  e,,  «,  et  pi;  nous  avons  vu  qu'on  ne  peut 
se  donner  qu'une  seule  des  deux  dernières  quantités,  de  telle  sorte 
que  si  on  connaissait  l'une  des  deux  autres,  l'équation  dont  il  s'agit 
servirait  à  faire  connaître  la  troisième.  A  défaut  de  la  connaissance 
de  deux  de  ces  quantités,  nous  attribuerons  une  valeur  approchée 
à  l'une  d'entre  elles,  et  nous  indiquerons  ci-dessous  la  manière  de 
la  calculer.  Au  moyen  de  cette  valeur  approchée,  de  celle  don- 
née, et  de  la  troisième  qui  s'en  déduira  par  les  équations  (97) 
et  (98),  puis  de  la  relation  y,^A-}--i-t^ ,  on  connaitra  les  trois 
quantités  u.,  e,,  y,  nécessaires  au  calcul  des  coordonnées  ou  au  tracé 
de  la  courbe  des  centres  de  gravité  indiqué  §§  XLI  et  LXII.  Il  sera 
suffisant  ici  de  s'en  tenir  au  simple  tracé,  en  calculant  la  valeur  de 
8  seulement  pour  le  point  le  plus  bas  de  la  voûte.  Si  le  tracé  est 
exact,  la  normale  passant  par  le  point  le  plus  bas  de  l'intrados,  ou 
correspondant  à  la  flèche  f,  devra  faire  avec  l'axe  des  y,  l'angle  a, 
donné  ou  supposé  ;  mais  l'abscisse  de  ce  point  ne  se  trouvera  exac- 
tement égale  à  g,  qu'autant  qu'on  sera  tombé  sur  la  véritable  va- 
leur de  celle  des  trois  quantités  î*,  €„,  »,  qu'on  aura  déterminée  ap- 
proximativement. On  fera  dès  lors  varier  cette  quantité,  que  nous 
désignerons  par  o,  pour  n'avoir  point  à  nous  répéter,  de  telle  sorte 
que  o  représente  (a,  «„  ou  », ,  suivant  les  cas  ;  or,  par  le  théorème  de 
Taylor,  on  a,  en  considérant  g  comme  fonction  de  », 


dg 


,d'g 


"^=-^7  4«  +7-rT^»'-f  etc.; 
o«  du 


(99) 


en  ne  tenant  compte  que  du  premier  terme  du  deuxième  membre, 
et  désignant  par  j,,  l'accroissement  de  g  produit  par  l'accroisse- 
ment »,  de  o,  on  aura,  par  cette  formule , 

d'où  l'on  tire  la  valeur  de  la  dérivée  ;  et  en  la  substituant  dans  le 
développement  ci-dessus,  il  vient 

», 

9, 
pour  la  valeur  approchée  de  l'accroissement  a»  qui  pourra  produire 
l'accroissement  aj  constituant  la  différence  entre  la  valeur  donnée 
de  g  et  celle  fournie  par  le  tracé.  Ce  qui  précède  revient  a  effectuer 


415 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


416 


une  simple  proportion.  On  fera  un  troisième  tracé  avec  la  valeur  de 
o  corrigée.  Si  la  valeur  de  g  qui  en  résulte  n'est  pas  assez  appro- 
chée de  celle  donnée,  pour  qu'on  juge  nécessaire  de  faire  un  nou- 
veau tracé ,  l'emploi  de  la  formule  (99) ,  avec  deux  termes  au 
deuxième  membre,  fournira  une  grande  précision,  à  moins  qu'il  n'y 
ait  aucune  solution,  caractère  que  l'on  reconnaîtra  à  la  grandeur 
que  prendra  le  deuxième  terme  relativement  au  premier,  et  que 
ferait  apercevoir  le  tracé  de  la  courbe  des  erreurs,  lequel  montrerait 
cette  courbe  s'approchant,  puis  s'éloignant  ensuite  de  l'axe,  sans 
l'avoir  rencontré.  Pour  déduire  de  trois  tracés  la  valeur  exacte  de 
n,  on  choisira  celui  des  tracés  qui  donne  le  résultat  le  plus  appro- 
ché ;  soient  alors  g,,  j,,  les  différences  des  valeurs  de  g  dans  les 
deux  autres  avec  celles  du  premier  et  correspondant  à  des  diffé- 
rences ',,  o,  de  o,  obtenues  de  même;  en  substituant  ces  valeurs 
dans  l'équation  (99)  et  faisant  pour  abréger 

dg  ,    d'g 

o  —  -7-7  0  =  1  -J-T' 
du  ua 


(100) 


on  aura 

ff,  =  «',  +  K'; 

On  tirera  ensuite  de  ces  deux  équations  les  valeurs  de  a  et  defc  : 
l'équation  (99)  deviendra  ainsi 

AJ=-OAo+  fcAa', 

d'où  l'on  tire  pour  valeur  approchée  aux  termes  près  du  troisième 
ordre 


1  b 

Atr=—    ^g A^- 

a  a 


(10.) 


Au  moyen  de  cette  équation,  ou  aura  la  correction  Aa  qu'il  reste 
à  ajouter  à  i  pour  obtenir,  par  un  tracé  définitif,  l'annéantisse- 
ment  de  l'erreur  Aj  qui  reste  encore  dans  le  tracé  le  plus  approché. 

On  aurait  pu  développer  Aa  en  fonction  de  Aj,  et  éviter  le  retour 
que  nous  venons  de  faire  ;  mais  nous  avons  préféré  le  développe- 
ment (99^,  pour  nous  conformer  aux  procédés  de  résolution  des 
équations  numériques,  dans  lesquels  on  calcule  immédiatement  les 
dérivées. 

Calcul  des  valeurs  approchées  do-,,  e„  et  |j..  Cas  des  archet  dites 
en  arc  de  cercle. 

§  XLVII.  Nous  avons  vu  que  dans  ces  arches,  l'angle  « ,  n'est 
point  fixé  a  priori,  et  que  u.  reste  arbitraire.  Pour  obtenir  une  va- 
leur approchée  de  *■ ,  nous  observerons  que  la  courbe  intrados  dif- 
férera peu  en  réalité  d'un  arc  de  cercle.  Or,  si  elle  était  en  effet  un 
arc  de  cercle,  on  déduirait  très-simplement  l'angle  «,  de  la  flèche  f 
et  de  la  demi-ouverture  g,  de  la  manière  suivante  :  menons,  dans 
cette  hypothèse,  la  corde  qui  joint  l'une  des  naissances  au  sommet 
de  Vinlrados;  l'angle  de  cette  corde  et  de  la  corde  de  l'arc  2»,  com- 
pris entre  les  deux  naissances,  sera  inscrit  au  cercle  et  aura  pour 
mesure  la  moitié  de  l'arc  compris  entre  ses  côtés  ou  |  »,  ;  la  tan- 
gente de  cet  angle  a  évidemment  pour  expression  —  .  On   recon- 

a 

naîtra  dans  les  constructions,  que  l'angle  ainsi  déterminé  sera  un 
peu  trop  fort  ;  nous  écrirons  donc 


tang^y.,<C~.  ■ 


102) 


On  pourra  dans  la  première  approximation  prendre  —  pour  la 
valeur  de  cette  tangente  ;  il  y  aura  seulement  à  prendre  »,  plus  pe- 


tit dans  le  deuxième  tracé.  Toutefois,  dans  les  tracés  successifs,  il 
faudra  déduire  la  valeur  correspondante  de  e»,  de  l'équation  (98), 
après  avoir  calculé  l'auxiliaire  z  par  (97). 

On  pourra  observer  que  f,  et  par  suite  z,  étant  assez  petits  par 
rapport  à  (a  dans  le  cas  actuel,  il  pourrait  devenir  nécessaire  de  cal- 
culer l'exponentielle  qui  entre  dans  (98)  avec  une  assez  grande 
approximation,  afin  d'avoir  une  valeur  suffisamment  exacte  de  e„; 
pourévitercet  inconvénient,  on  développera  l'exponentielle  en  série, 
en  se  contentant  de  deux  premiers  termes  qui  suivent  l'unité,  ce 
qui  sera  toujours  assez  exact  ;  puis  en  mettant  2  sin  '  î»,  à  la  place 
de  1  —  cos  a, ,  on  aura 


2«ft'T« 


-,^.jj+ii^^im 


etc. 


I 


(103) 


(        !*  \       ."•      /  ) 

Malgré  cela,  on  pourrait  croire  que  la  valeur  de  «,  serait  indé- 
terminée pour  des  valeurs  très-petites  de  fet  par  suite  de  a,  ;  pour 
faire  voir  qu'il  n'en  est  point  ainsi,  nous  allons  considérer  le  cas 
extrême  où  l'on  supposerait  f  et  »,  infiniment  petits.  Cette  hypo- 


thèse réduit  la  valeur  de  «  à 


ifh 


-, ,  et  la  valeur  de  ««  donnée  par 
tn 


l'équation  précédente,  en  ne  conservant  que  les  inflniments  petits 
de  l'ordre  le  moins  élevé,  devient,  après  avoir  divisé  le  deuxième 
membre  haut  et  bas  par  f. 


2/- 


[y.  —  ih) (u  — ii/j) 


Or,  il  est  facile  de  voir  que  se  donner  f  et  g  infiniment  petits, 
revient  adonner  le  rayon  de  courbure  intrados  ="„  au  sommet,  et 
que  la  valeur  de  »,  en  résulte  ;  en  effet,  on  a  évidemment 

-4  =  »,.     2/'?„"  =  9,, 

la  première  de  ces  é(iuations  ayant  lieu  suivant  l'expression  de 
l'angle  de  contingence,  et  la  seconde  résultant  d'un  théorème  connu 
de  géométrie  élémentaire;  on  déduit  de  ces  équations,  par  l'élimi- 
nation de  g , 

2/-  Pc"  ' 
or,  en  recourant  aux  équations  du  §  XL,  on  reconnaîtra  que 
tous  les  termes  qui  entrent  dans  les  valeurs  des  différentielles 
de  i  «  et  de  >,  ont  pour  facteur  sin  »,  et  par  suite  sont  nuls  au  som- 
met, d'où  résulte  en  ce  point  le  parallélisme  des  trois  courbes,  in- 
trados, courbe  des  centres  de  gravité  et  extrados.  Le  rayon  de  cour- 
bure p»"  est  donc  celui  (i„  de  la  deuxième  courbe  diminué  de  ^k,  au 
terme  près  S,  qui  est  du  deuxième  ordre.  Substituant  cette  valeur 
dans  l'équation  précédente  et  portant  le  résultat  dans  la  valeur 
de  e„  on  en  tire,  en  négligeant  les  termes  du  deuxième  ordre  et 

considérant  -  comme  facteur  de  cet  ordre ,  d'après  la  note  du 

M-    * 

§  XLIII. 


■iih 


fo=  to 


ih 


relation  identique  avec  l'équation  (84)  appliquée  au  sommet  de  la 
voûte,  et  qui  montre  que  t«  est  déterminé,  en  même  temps  qu'elle 
établit  la  concordance  de  nos  résultats. 

La  valeur  de  e„  étant  déterminée  par  (103),  et  y»  ayant  pour  va- 
leur A-|-  ^e„,  les  quantités  nécessaires  aux  calculs  ou  constructions 
se  trouvent  fixées,  et  pour  leur  correction,  il  suffira  d'appliquer 
les  procédés  du  §  XLVI  en  faisant  a  —  », . 


4.17 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


M8 


Enfin,  nous  préviendrons  l'objection  qui  pourrait  être  faite  en 
disant  qu'on  peut  faire  immédiatement  une  iiypothèse  sur  la  va- 
leur de  e»  au  lieu  de  considérer  »,  ;  nous  dirons  à  cela,  qu'il  eût 
toujours  fallu  trouver  une  valeur  approchée  de  So,  pour  ne  pas  se 
jeter  dans  des  tâtonnements  illimités,  ce  que  nous  avons  fait  en 
partant  de  «,  ;  d'un  autre  e6té,  on  se  priverait  d'une  vérification 
importante,  qui  consiste  en  ce  que  l'angle  «,  résultant  des  tracés  ou 
calculs  et  qui  correspond  a  la  flèche  f,  doit  se  trouver  identique 
avec  celui  d'où  l'on  est  parti,  quelque  fausse  que  soit  l'hypothèse 
sur  sa  vraie  valeur. 

C'a*  des  arches  en  anse  de  panier. 

§  XLVIIl.  —  Ici  l'angle  limite  a,  est  égal  à  90»,  et  la  va- 
leur de  ,"■  s'en  déduit  nécessairement,  §  XLV.  Cette  valeur  par- 
ticulière va  simplifier  les  équations  (97)  et  (98);  elle  réduit  en  ef- 
fet 2  à  £û  et,  par  suite,  la  dernière  de  ces  équations  à  une  identité, 
tandis  qu'on  tire  de  l'équation  (96) 

Cette  équation  fera  connaître  la  valeur  de  pi  relative  à  toute  va- 
leur hypothétique  de  e»;  nous  allons  maintenant  calculer  une  va- 
leur approchée  de  cette  dernière  quantité  par  les  considérations 
suivantes.  Il  résulte  de  l'examen  de  nombreux  tracés  que  la  forme 
de  Vintrados  est  à  peu  près  celle  d'une  ellipse  dont  les  deux  demi- 
axes  seraient  f  et  g,  avec  cette  différence  que  l'intrados  présente 
plus  de  convexité  entre  le  sommet  et  les  naissances,  que  la  demi- 
ellipse.  Cette  circonstance  indique  que  le  rayon  de  courbure  de 
l'ellipse  au  sommet  est  plus  petit  que  celui  de  Vintrados;  or,  nous 
avons  expliqué,  dans  le  paragraphe  précédent,  le  parallélisme  des 
trois  courbes  au  sommet  ;  notre  remarque  revient  donc  à  dire  que 
le  rayon  de  courbure  de  l'ellipse  ayant  fetg  pour  demi-axes,  aug- 
menté de  la  demi-épaisseur  au  sommet,  est  moindre  que  le  rayon 
de  courbure  de  la  courbe  des  centres  de  gravité  en  ce  point.  Écrivons 
cette  inégalité  en  mettant  pour  le  rayon  de  courbure  de  l'ellipse, 

g' 

sa  valeur  connue  — ,  et  pour  celle  de  p»  le  deuxième  membre  de  (8-1) 
divisé  haut  et  bas  par  i,  il  viendra 


1    ^o  <   'o 


^+A 


Or,  faisons  remarquer  que  les  matériaux  du  massif  n'étant  ja- 
mais plus  denses  que  ceux  de  la  voûte,  i  est  un  nombre  <  1  ;  si  donc 
nous  remplaçons  t  par  l'unité,  dans  le  dénominateur  du  deuxième 
membre,  ce  dénominateur  se  trouvera  diminué,  et  par  suite  le 
deuxième  membre  augmenté;  nous  aurons  donc  a  fortiori,  en  mul- 
tipliant les  deux  membres  par  ce  dénominateur , 


■j(  eo  +  A  )  +  i  e„'  +  feo  A  < 


—  I-  -Jl 


toi'- 


Mettant  à  la  place  de -^,  sa  valeur  tirée  de  (104),  il  viendra 
t 


après  réductions 


+  ''< 


t/' 


(105 


r 


—  I 


Telle  est  l'inégalité  qui  servira  au  calcul  de  la  valeur  approchée 
de  £„.  J'ai  trouvé  par  de  nombreux  tracés,  que  la  valeur  moyenne 


de  io-\-h  s'écarte  peu  des  (piatre  cinquièmes  de  la  valeur  du 
deuxième  membre  de  cette  inégalité.  On  pourra  mettre  à  profit 
cette  remarque,  d'abord  pour  les  tracés  successifs  indiqués  plus 
haut,  puis  aussi  pour  se  faire  une  idée  apprwhée  des  dimensions 
auxquelles  on  arrivera  au  moyen  des  valeurs  donnés  de  /,  g  et  h, 
sans  recourir  au  calcul  de  la  courbe  ou  aux  tracés  ;  en  effet,  on 
tirera  «■  de  l'équation  (104),  et  l'on  déduira  le  poids  de  In  demi- 
voûte,  de  l'équation  (93),  qui  se  réduira  h  ->■  i^»,  (la  valeur  de  «,  s'ob- 
tient par  l'équation  (81)  en  y  faisant  y  —  yo  =  /'-|-ît«). 

Connaissant  maintenant  u,v-^\-y<,^=h-\-\u,  on  aura  tout  ce 
qu'il  faut  pour  effectuer  les  calculs  ou  constructions,  et  la  correc- 
tion de  la  valeur  de  •,  s'opérera  par  les  procédés  du  ^  \LVI  en 
faisant  "  =  t„. 

Nous  ferons  remarquer  que  l'inégalité  (  105)  donne  l'épaisseur 
totale  to-f-A,  formée  de  celle  de  la  voûte  à  la  clef  et  de  la  hauteur 
de  la  charge,  en  fonction  de  la  flèche  et  du  surbaissement,  au  moyen 
duquel  le  dénominateur  du  deuxième  membre  peut  être  calculé; 
cette  épaisseur  totale  n'est  donc  point  liée  directement  à  l'ouver- 
ture 2g,  mais  bien  à  la  flèche.  Faut-il  attribuer  a  cette  circonstance 
l'inutilité  des  efforts  tentés  jusqu'ici  pour  lier  directement  l'épais- 
seur à  la  clef  à  l'ouverture  des  arches  en  arc  de  cercle  ? 

Présentons  encore  quelques  observati(>ns,  afin  qu'on  ne  soit  pas 
tenté  de  tirer  défausses  conséquences  de  l'inégalité  (l05).  Si  on 
donne  les  valeurs  de  fetg  égales,  ou  s'il  s'agit  de  plein-cintre,  on 
trouvera  '.  -(-  A  infinis;  cette  conséquence  n'est  point  absurde  : 
nous  avons  reconnu,  en  effet,  que  plus  les  charges  sont  considéra- 
bles, et  plus  lu  forme  de  la  voûte  doit  se  rapprocher  du  plein-cintre, 
avec  lequel  elle  ne  se  confond  que  dans  le  cas  d'une  charge  totale 
infinie;  mais  est-ce  à  dire  qu'une  arche  en  plein-cintre  cessera  d'ê- 
tre stable  pour  des  charges  finies?  Non,  et  l'expérience  prouve  ef- 
fectivement le  contraire;  mais  ce  qu'il  est  permis  de  conclure,  c'est 
que  la  résultante  des  pressions  dans  ces  voûtes  ne  passe  pas  par 
le  milieu  de  l'épaisseur,  et  que  dès  lors,  à  épaisseur  égale,  elles  jouis- 
sent d'une  moindre  stabilité  que  si  leur  forme  était  déterminée  par 
nos  équations.  On  voit  pareillement  que  ces  conditions  de  grande 
stabilité  ne  seront  point  remplies  dans  les  arches  chargées  ayant 
une  flèche  plus  grande  que  leor  demi-ouverture,  car  nos  équations 
donneraient  dans  ce  cas  une  épaisseur  totale  négative,  ce  qui  est 
absurde.  Enfin,  l'équation  (i  05)  pourra  conduire  à  une  épaisseur 
totale  évidemment  trop  considérable,  donnant  lieu  à  des  pressions 
très-petites  dans  les  joints,  ce  qui  serait  contraire  aux  principes  de 
l'économie  dans  les  constructions:  ce  sera  l'indication  quela  voùie 
pourrait  être  avantageusement  surbaissée  ;  il  u'y  aura  aucune  dif- 
ficulté à  le  faire,  puisqu'il  suffira,  pour  avoir  la  même  hauteur 
totale  sous  clef,  d'exhausser  les  naissances.  Si  l'éjwisseur  était  évi- 
demment trop  petite,  et  donnait  lieu  par  conséquent  a  de  Ires- 
grandes  valeurs  de  !^,  ce  serait  l'indication  d'un  trop  grand  surbais- 
sement, auquel  il  serait  moins  facile  de  remédier. 

S  XLIX.  —  En  jetant  un  coup  d'oeil  rétrospectif  sur  la  théo- 
rie que  nous  venons  de  développer,  on  reconnaîtra  sans  peine  que 
nous  avons  suivi,  dans  l'exposition,  une  route  inverse  de  celle 
qu'il  convient  de  suivre  dans  les  applications:  mais  on  devra,  ce 
me  semble,  rester  convaincu  qu'il  eût  été,  sinon  impossible,  du 
moins  diflkile  de  nous  faire  comprendre  en  procédant  autrement. 
Nous  espérons  faire  disparaître  les  difficultés  qui  pourraient  être 
restées  dans  l'esprit  du  lecteur,  quanta  I  application  de  notre  théo- 
rie, en  en  présentant  quelques  exemples  dans  notre  prochain  ar- 
T.  V.  «ï 


419 


REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


430 


ticle.  En  attendant,  nous  présentons  {Fig.  r)  un  tracé  d'arche  en 
anse  depanier,  danslequel  nous  avons  choisi  pour  données  la  flèche 
et  la  demi-ouverture  de  l'arche  du  milieu  du  pont  de  Cravant,  en 
supposant  i^  1  et/*  =  o.  (Perronuet  donne  l'élévation  de  cette 
arche,  daus  son  ouvrage  sur  les  ponts,  sans  indiquer  la  partie  de 
la  construction  supérieure  au  plan  horizontal  tangent  à  Vextrados). 
En  faisant  les  tracés  successifs  que  nous  venons  d'indiquer,  on 
trouve  précisément  l'épaisseur  à  la  clef  qui  a  été  adoptée  par  l'in- 
génieur chargé  de  construire  ce  pont.  Cette  épaisseur,  qui  est  de 
l""  43,  répond  à  une  valeur  de  u.  égale  à  20""  1  environ,  quantité 
fort  au-dessous  de  la  limite  100  mètres.  On  doit  regarder  ces  ré- 
sultats comme  indiquant  une  très-grande  stabilité,  si  la  forme  de 
l'arche,  dans  ses  autres  parties,  diffère  peu  de  celle  déterminée  par 
notre  tracé;  mais  on  doit  aussi  considérer  la  conception  de  ce  tra- 
vail comme  peu  économique,  à  cause  de  la  faible  charge  qu'y  sup- 
portent les  voussoirs  dans  les  joints  normaux.  Si  on  eût  augmenté 
le  surbaissemeat  en  élevant  en  même  temps  les  naissances,  on  eût 
pu  adopter  une  moindre  épaisseur  à  la  clef,  correspondant  à  une 
charge  dans  les  joints  représentée  par  le  poids  d'une  colonne  de  50 
à  60  mètres  de  hauteur. 

YVON  VILLARCEAU. 


TaolS  JOURS  A  ROUEN. 


iNTfiODUCnOX. 


Que  dire  sur  Rouen  qui  n'ait  déjà  été  écrit  cent  fois,  et  par  des 
plumes  assurément  plus  éloquentes  que  la  mienne  ?  En  me  priant 
de  lui  donner  un  travail  sur  cette  ville,  le  directeur  de  la  Revue  a 
Imposé  une  rude  tâche  à  un  simple  voyageur,  qui  n'a  pu  là  passer 
que"  trois  jours  à  prendre  quelques  notes  presque  illisibles,  encou- 
rant le  nez  en  l'air  par  les  rues  de  cette  curieuse  capitale  du  pays 
normand,  de  cette  ville  de  paix  et  de  travail,  où  l'on  semble  avoir 
voulu  enterrer  la  guerre  en  plantant  de  vieux  canons  de  fonte  en 
guise  de  chasse-roues  aux  angles  des  maisons,  et  retourner  ainsi 
le  sens  de  ce  vers  de  Virgile  : 

Et  curvae  rigidum  falces  conllantur  in  enscm. 

L'instrument  destiné  à  renverser  les  murailles  devient  ici,  par  une 
heureuse  métamorphose,  le  protecteur  de  ces  mêmes  murailles. 

Il  faut  s'attendre  à  trouver  dans  ces  lignes  une  œuvre  incohé- 
rente et  saccadée  plutôt  qu'un  travail  suivi,  peu  ou  point  de  pit- 
toresque, et  pour  cause;  mais  quelques  observations  et  réflexions 


qui  pourront  être  utiles  à  ceux  qui  s'occupent  de  la  restauration 
des  édifices  du  Moyen-Age.  J'ai  semé  çà  et  là  quelques  mots  de 
critique,  parce  que  la  critique,  quand  elle  est  consciencieuse  et 
mesurée,  est  toujours  utile  au  progrès. 

A  Rouen,  l'on  ne  saurait  parcourirqu'un  bien  petit  nombre  de  rues 
sans  voir  poindre  au  milieu  des  tristes  mais  pittoresques  maisons 
en  bois  des  derniers  siècles,  quelque  curieux  fragment  d'architec- 
ture de  la  grande  période  qui  commence  au  Xl«  siècle  et  finit  à  la 
Renaissance. 

Pauvre  art  chrétien  !  vaincu  et  détrôné  par  l'art  païen,  traité 
de  barbare  pendant  trois  siècles,  le  voilà  qui  relève  aujourd'hui  la 
tète  et  menace  à  son  tour  de  terrasser  son  rival  I 

Pourquoi  les  beaux-arts  en  général,  pourquoi  en  particulier 
l'art  sublime  des  Ictinus,  des  Vitruve,  des  Pierre  de  Montereau, 
des  Philibert  Delorme,  etc.,  est-il  soumis  aux  caprices  de  la  mode, 
à  ce  mouvement  de  bascule  qui  semble  être  depuis  un  temps 
immémorial  l'état  normal  de  l'esprit  humain  ,  dans  les  arts  aussi 
bien  que  dans  les  choses  futiles? 

N'avons-nous  pas  vu  l'art  chrétien  lui-même  plus  inconstant 
encore  que  l'art  païen,  son  prédécesseur  et  son  maître,  s'engager 
aussi  dans  cette  voie  de  versatilité?  N'avons-nous  pas  vu  la  svelte 
basilique  latine,  fille  aînée  de  la  basilique  païenne,  céder  la  place 
à  la  lourde  architecture  romane,  et  celle-ci  chassée  par  le  style 
ogival  ?  N'avons-nous  pas  vu  ce  dernier,  majestueux  et  sévère  au 
XIII'  siècle,  riche  et  élégant  au  X1V«,  élégant  et  féerique  au 
XV«,  dégénérer  et  passer  à  l'état  hybride  sous  l'influence  de  la  ré- 
surrection de  l'art  païen,  et  enfin  complètement  anéanti  par  celui-ci 
au  XVI»  siècle?  et  ce  dernier  lui-  même,  après  nous  avoir  laissé  de 
délicieux  témoins  de  son  séjour  parmi  nous,  passer  par  un  état  de 
décadence  progressive,  pour  arriver  enfin,  au  bout  de  deux  siècles 
et  demi,  à  l'époque  moderne,  véritable  Babel  architecturale,  cette 
époque  de  transition  unique  peut-être,  où  tous  les  systèmes,  jadis 
alternativement  vainqueurs  et  vaincus,  se  disputent  la  place?  Le- 
quel d'entre  eux  restera  maître  du  terrain?  Ni  les  uns  ni  les  autres 
probablement.  Un  art  nouveau  surgira  sans  doute  de  ce  chaos 
moderne.  Il  ne  sera  pas  l'œuvre  d'un  seul,  mais  celle  de  tous. 
Chacun  apportera  sa  pierre  à  l'édifice  commun. 

Voilà  trois  siècles  que  l'architecture  roule  sur  des  réminiscences 
ou  plutôt  sur  des  imitations.  Il  faut  sortir  de  cet  état  de  servage.  Les 
innombrables  ouvrages  qui  se  publient  depuis  un  siècle  sur  lar- 
chitecture  de  tous  les  temps  et  de  tous  les  pays,  sont  d'un  mer- 
veilleux secours  pour  nous  rendre  savants  dans  cet  art  sublime, 
pour  nous  donner  d'excellentes  inspirations,  et  pour  préparer  cet 
enfantement  d'un  art  nouveau.  Celui-ci,  quoi  qu'il  fasse,  et  par 
suite  même  de  l'abondance  des  matériaux ,  s'affranchira  difficile- 
ment de  toute  réminiscence. 

Mais  nous  voici  loin  de  Rouen. 

Je  disais  donc  que  cette  ville  possédait  encore  bon  nombre  d'édi- 
fices publics  et  de  maisons  particulières  du  Moyen-.\ge  et  de  la 
Renaissance.  Plus  d'une  fois  au  détour  d'une  rue,  l'image  élancée 
d'un  clocher  gothique  encore  chargé  de  ses  riches  festons  de 
pierre,  vient  frapper  les  regardsde  l'observateur.  Si  l'on  cherche  l'en- 
trée de  l'édifice,  on  la  trouve  souvent  affublée  d'une  enseigne  de 
commerce  ou  de  quelques  oripeaux  de  rouenneries.  A  l'intérieur, 
le  bruit  du  marteau  ou  de  la  hache  ,  le  bourdonnement  des  engre- 
nages et  des  métiers,  ont  remplacé  les  sons  harmonieux  de  l'orgue 
et  la  voix  grave  et  cadencée  des  chantres.  Si  la  rapide  destruction 
de  ces  édifices  ne  s'ensuivait  pas,  s'ils  étaient  propres  et  bien  en- 


REVUK  DE  LARCHITKCTLRE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


im 


tretenus,  on  pourrait  en  prendre  son  parti;  mais  il  n'en  est  rien. 

C'est  assez  le  propre  des  villes  construites  en  bois  de  conserver 
longtemps  leurs  bâtiments  particuliers.  C'est  dans  celles-là  qu'on 
retrouve  le  plus  fréquemment  des  maisons  du  Moyen-Age.  Doit-on 
en  conclure  que  les  constructions  en  charpente  durent  plus  long- 
temps que  celles  en  pierre?  Cela  pourrait  bien  être,  car  elles  sont  spé- 
cifiquement plus  légères;  les  tassements  y  sont  plus  rares  et  surtout 
moins  graves  ;  l'assemblage  des  bois  en  rend  toutes  les  parties  so- 
lidaires ;  elles  peuvent  éprouver  des  surplombs  considérables  sans  le 
moindre  danger  :  aussi  a-t-on  souvent  échelonné  les  divers  étages 
en  saillie  sur  la  rue,  au  détriment  de  la  salubrité.  Les  maisons  en 
maçonnerie  se  détruisent  plus  vite  par  la  disjonction  des  matériaux 
produite  par  les  tassements  et  les  secousses ,  par  désagrégation 
plutôt  que  par  décomposition  des  matériaux  eux-mêmes.  Les  mai- 
sons en  bois  périssent  par  la  décomposition  sollicitée  par  l'humidité 
ou  l'action  des  insectes. 

Gardons-nous  bien  toutefois  d'en  conclure  qu'il  vaudrait  mieux 
construire  eu  bois  qu'en  pierre;  car  si  les  constructions  en  char- 
pente placées  dans  des  conditions  favorables  ont  des  chances  de 
longue  durée,  n'oublions  pas  qu'il  suffit  parfois  de  quelques  jours, 
de  quelques  heures  même,  pour  réduire  en  cendres  une  ville  tout 
entière. 

Les  Rouennais  échangent  aujourd'hui  volontiers  leurs  vieilles 
cages  en  bois  pour  des  maisons  neuves  en  maçonnerie  à  quatre  ou 
cinq  étages,  dans  la  construction  desquelles  ils  suivent  pas  à  pas  le 
système  parisien.  Dieu  veuille  toutefois  que  les  intéressants  dé- 
bris de  l'architecture  du  Moyen-Age  ne  soient  pas  trop  tôt  lem- 
placés  par  les  bâtiments  modernes  ! 

La  CATHÉDiiALE.  —  Les  travaux  de  la  cathédrale  sont  à  peu 
près  suspendus  depuis  longtemps,  et  le  noble  édifice  ne  parait  pas 
devoir  recouvrer  de  sitôt  ses  membres  mutilés  par  les  éléments  et 
par  les  hommes.  Les  clochetons-contre-forts  que  M.  Alavoine  fit 
élever  il  y  a  douze  ans  de  chaque  côté  de  la  façade,  sont  restés  en 
masse  comme  il  les  a  laissés,  et  il  se  passei'a  sans  doute  encore  bien 
des  années  avant  qu'on  y  appelle  les  sculpteurs.  Ces  contre-forts 
sont  une  répétition  des  deux  riches  avant-corps  qui  flanquent  le 
portail  principal.  Si  les  deux  nouveaux  arrivés  n'eussent  été  néces- 
saires pour  la  consolidation  de  la  façade,  on  eût  fort  bien  fait  de 
ne  point  les  élever  (l)  :  ils  gâtent  la  symétrie  de  l'ensemble. 

Quelques  échafaudages  placés  en  haut  de  la  façade  semblent 
annoncer  qu'on  a  l'intention  de  rétablir  les  trois  grands  clochetons 
ou  édicules  qui,  avec  celui  qu'on  voit  encore,  couronnaient  jadis 


(1)  J'étais  à  Rouen  il  y  a  une  douzaine  d'années,  lorsqu'on  plantait  les  pilotis 
qui  portent  la  fondation  du  contre-fort  près  la  tour  Saint-Romain.  Les  pieux 
sont  en  fonte,  de  forme  cylindrique ,  d'environ  Om  08  de  diamètre  sur  environ 
1m  50  de  long;  on  les  enfonçait  àla  niasse  très-près  les  uns  des  autres.  M.  Ala- 
voine, en  employant  ce  système,  en  attendait  sans  doute  un  double  résultat: 
1"  celui  de  consolider  le  sol  en  le  resserrant  entre  les  pieux  en  fonte;  2°  celui 
de  le  solidifier  A  la  longue  parla  combinaison  des  oxydes  du  fer  avec  les  terres 
environnantes,  combinaison  qui  forme,  comme  on  sait,  un  produit  très-dur, 
compacte,  et  susceptible  d'étendre  indéfiniment  ses  dimensions  en  tout  sens  à 
mesure  que  l'oxyde  du  fer  pénètre  les  terres  liumidcs.  Ce  qui  me  fait  penser  que 
telle  était  l'intention  de  l'architecte,  c'est  qu'il  n'a  point  fait  peindre  les  pieux. 
Le  sol  dans  lequel  ils  furent  plantés  n'étant  pas  rempli  d'eau,  mais  seulement 
humide,  des  pieux  en  bois  s'y  fussent  promptement  pourris,  et  U  s'en  fftt  suivi 
de  graves  inconvénients.  L'usage  des  pieux  en  sable  était  encore  fort  peu  connu 
i  cette  époque. 


le  grand  portail.  Ils  furent  renversés  par  un  ouragan  en  1683  (l). 

On  aura  une  idée  de  la  force  de  l'ouragan  qui  renversa  ces  clo- 
chetons, quand  on  saura  que  celui  qui  reste,  et  que  j'ai  mesuré,  a 
■1  mètres  en  carré  a  sfi  base.  La  pyramide  octogone  <|ui  le  termine, 
et  dont  la  base  est  d'environ  3  mètres  et  la  hauteur  de  8  mètres, 
est  portée  par  huit  piliers  séparés  entre  eux  par  autant  d'arcades 
à  jour  de  4  mètres  de  haut.  Les  quatre  piliers  diagonaux  ont  i"  6o 
de  culée  sur  0"  10  d'épaisseur.  Les  quatre  piliers  intermédiaires 
ont  0""  90  de  culée  sur  O"  40  d'épaisseur.  Si  le  corps  de  la  pyramide 
est  plein  (et  rien  n'annonce  le  contraire),  son  cube  serait  d'environ 
1!)  mètres  et  son  poids  de  4ô  600  kilog.;  mais  en  le  supposant 
creux,  et  en  portant  son  enveloppée  0"  20 d'épaisseur.  Il  pèserait 
encore  environ  22  600  kilog. 

Ce  clocheton  fut  vraisemblablement  garanti  du  sort  de  ses  frères 
jumeaux  par  la  tour  Saint-Romain,  près  de  laquelle  il  se  trouve, 
bien  que  cette  tour  fût  sous  le  vent.  D'après  les  indications  de 
Farin  (Hist.  de  Rouen)  sur  la  marche  de  ce  météore,  je  conclus 
qu'il  devait  venir  du  sud-ouest  et  passer  diagonalement  entre  les 
deux  tours.  La  pression  des  colonnes  d'air  qui  frappaient  le  clo- 
cheton se  trouvait  neutralisée  par  la  réaction  des  colonnes  d'air 
réfléchies  par  la  tour  Saint-Romain,  tandis  que  la  projection  ver- 
ticale des  trois  autres  clochetons,  faite  parallèlement  à  la  direction 
du  vent,  tombait  dans  le  vide  qui  sépare  les  deux  tours,  et  au- 
cune réaction  ne  pouvant  contre-balancer  l'impétuosité  du  vent 
direct,  ces  clochetons  furent  renversés.  Il  suffisait,  du  reste,  que  la 
tour  Saint-Romain  ralentît  la  vitesse  de  la  colonne  d'air  au  milieu 
de  laquelle  se  trouvait  le  clocheton,  pour  qu'il  fût  préservé  (2). 

La  chute  de  ces  clochetons  fit  à  la  voûte  de  la  nef  une  brèche  de 
1 1  mètres  de  long  et  C  de  large,  et  brisa  le  positif  de  l'orgue. 
Le  positif  actuel  porte  le  cachet  du  XVII'  siècle,  et  il  repose  sur  des 
piliers  et  des  arcades  en  bois  du  XV*^  siècle,  restes  vraisemblable- 
ment du  positif  détruit.  Cet  ouragan  causa,  selon  Farin,  pour  plus 
de  200  000  écus  de  dégât  dans  la  cathédrale.  Il  renversa  aussi  les 
clochers  de  Saint-Michel  et  de  Saint-André,  endommagea  celui  de 
Saint-Laurent,  et  abattit  plusieurs  clochetons  de  la  tour  Saint- 
Ouen,  quoiqu'ils  fussent  scellés  en  plomb. 

La  porte  d'entrée  du  portail  principal,  en  bois  dechèno,  est  ornée, 
autouides  panneaux,  d'une  simple  bande  d'arabesques  du  XV1«- siè- 
cle d'un  très-bon  style.  On  vient  malheureusement  de  l'erapàter 
de  peinture  à  l'huile.  Pourquoi  ne  se  borne-t-on  pas  à  nettoyer 
et  à  reboucher  les  crevasses  en  mastic  à  l'huile  couleur  de  bois,  et 
à  passer  une  couche  d'huile  grasse  sur  le  tout?  Ce  portail  est  d'une 
richesse  de  détails  incomparable.  Sur  le  tympan  de  la  porte  se  dé- 
ploie un  arbre  de  Jessé  disposé  avec  beaucoup  de  goût  et  de  légè- 
reté. L'ébrasement  est  décoré  avec  élégance  :  on  y  compte  plus  de 

(1)  Dans  le  commencement  de  ce  siècle,  plusieurs  communes  du  déparienient 
de  la  CAte-d'Or,  sur  une  étendue  de  quinze  lieues,  furent  ravagées  par  un  mé- 
téore dont  les  effets  furent  encore  plus  terribles. 

Si  des  masses  aussi  compactes  et  aussi  lourdes  que  les  clocbetoos  de  la  ca- 
thédrale de  Rouen  ont  pu  être  renversées  par  un  ouragan,  que  ne  doit-oo  pas 
craindre  pour  l'avenir  du  monument  de  Juillet,  qui  n'est  qu'un  tube  de  métal 
de  10  à  15  niillimètrei  d'épaisseur  sur  Jm  60  de  diamilre,  et  d'une  hauteur  toute 
de  43m  37  pour  la  partie  en  bronze  seulement.  La  surface  normale  est  d'en- 
viron 109  mètres  carrés,  déduction  faite  du  tiers  pour  les  parUes  cylindriques. 
La  seule  résistance  que  ce  monument  oppose  i  l'action  du  vent  est  son  poids, 
qui  est  de  183,781  kil.,  et  repose  sur  une  base  de  Cm  30  de  cOlé,  sans  autre 
scellement  que  celui  de  la  rampe  de  l'escalier. 

(2)  Depuis  que  ces  lignes  sont  écrites  (juin),  on  a  rétabli  l'un  de  ces  docbe- 
tons,  le  plus  voisin  de  la  lour  de  Beurre. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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mille  figurines  de  20  à  30  centimètres  de  haut,  sculptées  à  travers 
une  profusion  d'ornements  qui  se  dégradent  tous  les  jours  de  plus 
en  plus.  On  y  laisse  nicher  les  hirondelles,  et,  outre  la  saleté  que 
ces  oiseaux  laissent  autour  de  leur  demeure ,  les  gamins  sont  oc- 
cupés du  matin  au  soir  à  les  dénicher  à  coups  de  pierres.  Le  choc 
de  ces  projectiles  a  tellement  piqueté  la  surface  du  portail ,  qu'à 
une  certaine  distance  on  ne  distingue  rien  qu'une  surface  grisâtre 
et  monotone  d'un  effet  désagréable.  Serait-il  donc  si  difficile  de  se 
défaire  des  hirondelles  et  des  gamins?  Quelques  coups  de  balai 
pour  les  unes  et  quelques  incarcérations  pour  les  autres  en  au- 
raient bientôt  fait  justice.  Un  lavage  à  la  brosse  rude  rendrait  à  ce 
portail  une  grande  partie  de  sa  splendeur,  en  faisant  disparaître 
le  piquetage  produit  par  le  choc  des  pierres. 

On  a  enfin  débarrassé  la  cour  des  libraires,  qui  sert  d'atrium  au 
transsept  du  nord,  des  chétives  baraques  qui  l'obstruaient  à  droite 
et  à  gauche.  Cette  démolition  a  mis  à  découvert,  de  chaque  côté,  une 
suite  d'arcades  romanes  dont  les  unes,  percées  dans  le  mur  du  bâ- 
timent de  la  bibliothèque  du  chapitre,  sont  ornées  d'archivoltes; 
les  autres,  sous  l'ancien  réfectoire,  ont  seulement  les  arêtes  abat- 
tues. Les  deux  arcades  jumelles  qui  donnent  entrée  à  cette  cour  et 
qui  sont  si  agréablement  couronnées  d'une  galerie  à  jour,  ont  en- 
core leurs  portes  en  bois  du  XV=  siècle  assez  bien  conservées,  quoi- 
qu'elles n'aient  d'autre  abri  que  l'ébrasement  voûté  sous  lequel 
elles  se  développent,  et  qu'elles  ne  paraissent  pas  avoir  jamais  été 
peintes. 

Dans  les  parties  de  cet  atrium  qui  touchent  à  droite  et  à  gauche 
le  portail  et  font  suite  aux  arcades  romanes ,  la  démolition  des 
échoppes  a  mis  à  découvert  une  série  d'arcades  ogivales  d'un  beau 
travail  qui  décoraient  le  mur  d'appui  d'une  grande  verrière  du 
côté  de  la  bibliothèque  et  d'une  fausse  verrière  de  répétition  du 
côté  du  réfectoire.  Malheureusement,  les  boutiquiers,  pour  agrandir 
leur  réduit,  ont  enlevé  les  colonnettes  qui  recevaient  la  retombée 
des  arcades,  et  qui,  si  l'on  en  juge  par  ce  qui  en  reste,  étaient 
couronnées  de  chapiteaux  très-délicatement  sculptés.  Des  animaux 
fantastiques  en  haut  relief  décoraient  les  retombées  des  archivoltes 
immédiatement  au-dessus  des  chapiteaux.  Ils  ont  été  abattus 
comme  ces  derniers.  On  a  poussé  l'audace  jusqu'à  trancher  un 
pilier  de  0°"  80  d'épaisseur  séparant  deux  arcades  romanes.  Si  l'on 
en  juge  par  l'admirable  conservation  des  parties  englobées  dans  le 
comble  des  baraques,  et  épargnées  par  les  Vandales  parce  qu'elles 
ne  pouvaient  les  gêner,  l'établissement  de  ces  constructions  para- 
sites dut  suivre  de  très-près  l'achèvement  de  cette  partie  du 
portail. 

Par  une  fatalité  bien  déplorable,  les  monuments  du  Moyen-Age, 
à  peine  sortis  du  ciseau  des  artistes  qui  y  déployèrent  tant  de 
génie  et  tant  d'amour,  ont  été  confiés  à  des  mains  insouciantes  qui, 
au  lieu  de  se  faire  un  devoir,  un  bonheur  de  les  conserver,  les  ont 
misa  la  merci  d'une  foule  de  trafiquants  de  bas  étage.  Jésus-Christ 
chassa  jadis  à  coups  de  fouet  les  vendeurs  du  temple  de  Jérusalem  ; 
mais  ses  représentants  ici-bas,  loin  de  suivre  un  si  noble  exemple, 
ont  livi'é  les  parvis  de  presque  tous  les  temples  chrétiens  aux  ven- 
deurs du  dernier  ordre  ou  aux  bedeaux,  véritables  termites  achar- 
nés à  la  destruction  de  ces  édifices  religieux. 

Heureusement  qu'aujourd'hui  l'on  revient  à  des  idées  plus  con- 
formes à  la  dignité  des  églises, en  les  débarrassant  de  l'ignoble  en- 
tourage sous  lequel  elles  furent  ensevelies  au  Moyen-Age  et  dans  les 
siècles  suivants.  La  ville  de  Rouen,  où  l'audace  des  envahisseurs  a 
été  portée  à  son  comble,  semble  se  décider  à  regret  à  cette  œuvre 


de  purification  ;  car  jusqu'ici  Ton  n'a  vu  disparaître  que  les  échoppes 
de  la  cour  des  libraires  ;  je  me  trompe,  on  a  fait  aussi  quelque 
chose  à  Saint-Maclou.  Mais  nous  autres  Parisiens,  ne  nous  appe- 
santissons pas  trop  sur  les  échoppes  qui  obstruent  les  flancs  des 
églises  de  province  et  ne  dépassent  pas  la  plupart  du  temps  l'appui 
des  verrières  du  rez-de-chaussée  :  à  Paris  on  a  fait  les  choses  plus 
en  grand  ;  ce  sont  des  maisons  à  cinq  étages  qui  enlacent  et  étouf- 
fent toutes  les  églises  du  Moyen-Age,  à.  l'exception  de  la  cathé- 
drale. Pourquoi  la  capitale  ne  donne-t-elle  pas  aux  départements 
l'exemple  du  déblaiement  général  ? 

Si  le  beau  portail  qui,  de  la  cour  des  libraires,  donne  entrée  à 
l'église,  a  perdu  les  onze  statues  qui  peuplaient  ses  niches,  il  con- 
serve encore  en  assez  bon  état  un  grand  bas- relief  dans  son  tym- 
pan ,  et  les  nombreux  anges  qui  décorent  les  refouillements  en  dais 
de  son  archivolte  ;  mais  ce  portail  possède  encore,  sur  les  faces  des 
dosserets  échelonnés  dans  l'ébrasement,  cent  cinquante-six  médail- 
lous-quatre-feuilles  inscrits  dans  des  carrés  rangés  en  colonnes.  Ces 
médaillons  renferment  chacun  un  sujet  biblique,  évangélique,  allé- 
gorique ou  apocalyptique,  d'une  grande  variété  de  composition.  Les 
triangles  mixtilignes  qui  occupent  l'intervalle  entre  les  médaillons 
et  les  carrés  circonscrits  sont  remplis  par  des  reptiles  et  des  pois- 
sons fantastiques,  de  0"  08  à  0"  10  de  long,  à  tête  d'hommes,  de 
démons  ou  d'animaux  d'une  grande  originalité,  au  nombre  de  plus 
de  neuf  cents.  Je  laisse  aux  Champollion  de  l'art  chrétien  le  soin 
de  déchiffrer  cet  immense  tableau  hérioglyphique.  Le  portail  de  la 
Calandre  possède  un  nombre  plus  considérable  encore  de  médail- 
lons disposés  de  la  même  manière ,  mais  de  sujets  différents  et 
moins  bien  conservés,  et  il  ne  manque  que  les  têtes  à  ses  onze  sta- 
tues. 

Les  piliers  extérieurs  des  collatéraux  du  nord, du  côté  de  la  cour 
dite  de  l'Albane,  s'élèvent  sur  d'anciens  piliei-s  portant  encore  les 
naissances  des  nervures  et  les  impostes  d'une  suite  de  voûtes 
d'arêtes  qui  devaient  recouvrir  jadis  le  cloître  construit  pour 
l'usage  des  chanoines  de  la  cathédrale,  lorsqu'ils  vivaient  en  com- 
munauté avant  le  XIV*  siècle.  Ce  cloître  existait  dans  tout  l'es- 
pace compris  entre  la  tour  Saint-Romain  et  la  bibliothèque. 

Il  est  rare  que  dans  la  reconstruction  des  grandes  églises  aux 
XIII*,  XIV'  et  XV"  siècles,  on  n'ait  pas  utilisé  une  partie  des  sub- 
structions  de  l'édifice  primitif.  Tel  est  l'avantage  des  constructions 
bien  établies.  Mais  comme  le  plan  était  presque  toujours  changé, 
il  arrivait  souvent  que  des  parties  sur  fondations  neuves  cor- 
respondaient à  des  parties  élevées  sur  fondations  vieilles.  S'il  ne 
s'en  est  pas  suivi  des  tassements  dangereux,  on  le  doit  sans  doute 
à  la  bonne  construction  des  fondements  neufs,  et  surtout  à  la  len- 
teur de  l'exécution  de  l'édifice. 

De  quelque  côté  qu'on  se  dirige  sur  la  métropole  en  suivant  le 
prolongement  de  ses  axes,  on  arrive  presque  au  pied  des  murs 
sans  cesser  de  voir  la  tète  tronquée  do  la  ileche  en  fonte  s'élever 
au-dessus  des  pignons,  tant  cette  flèche  domine  par  sa  hauteur 
les  autres  parties  de  l'édifice. 

La  pyramide  en  fonte  qui  remplace  l'ancienne  aiguille  en  char- 
pente, est  octogone  en  plan,  et  à  jour,  dans  toute  sa  hauteur.  Elle 
s'élève  sur  la  tour  carrée  en  maçonnerie  qui  surmonte  la  croisée  de 
l'église. 

Au  lieu  de  s'appuyer  sur  le  couronnement  du  mur  de  la  tour, 
la  flèche  est  portée  par  des  racinaux  en  fonte  qui  descendent 
presque  jusqu'à  l'extrados  de  la  voûte  intérieure  de  la  tour,  à 
environ  12  mètres  au-dessous  du  couronneir.ent.  Au  moven  d'une 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


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tranchée  faite  dans  l'épaisseur  du  mur  de  l'étage  supérieur,  chaque 
montant  des  racinaux  repose  en  entier  sur  le  corps  du  mur  de  l'é- 
tage inférieur  de  la  tour,  et  non  sur  la  voûte  elle-même.  Pour  re- 
cevoir les  patins  des  racinaux,  on  a  incrusté  dans  le  mur  trois  as- 
sises de  pierre  dure  en  encorbellement,  formant  ensemble  une 
saillie  de  20  centimètres,  indépendamment  d'une  retraite  de  50  cen- 
timètres à  partir  du  fond  des  tranchées.  Cette  retraite  offre  donc 
une  très-grande  solidité;  mais,  pour  que  le  poids  de  la  flèche  en 
fonte  fût  réparti  également  sur  toute  l'étendue  de  la  retraite  en 
pierre  dure,  il  eût  fallu  raccorder  les  patins  avec  les  montants  au 
moyen  de  très-forts  congés  capables  de  résister  à  la  flexion.  Des  con- 
tre-fiches, placées  dans  les  plansdesquatre  murs,  relient  les  montants 
entre  eux  et  reportent  la  charge  vers  les  quatre  angles.  Huit  autres 
contre-fiches,  disposées  comme  les  arêtes  d'une  pyramide  octogone, 
s'appuient  par  le  bas  sur  le  pied  des  montants  et  se  réunissent  au 
centre,  à  la  hauteur  de  l'arasement  de  la  tour,  pour  soutenir  le 
noyau  de  l'escalier,  formant  l'axe  de  la  flèche  et  de  toutes  les  en- 
rayures  qui  s'y  réunissent.  Ainsi,  par  cette  ingénieuse  combinai- 
son, le  poids  entier  de  la  flèche  en  fonte,  qui  sera  de  600000  kilog., 
est  reporté  sur  les  quatre  murs  de  l'étage  inférieur  de  la  tour.  La 
voûte  n'aura  pas  même  à  porter  le  poids  de  l'enrayure  inférieure 
placée  à  la  base  des  racinaux  ;  car  cette  enrayure,  ainsi  que  toutes 
celles  qui  sont  au-dessous  de  la  plate-forme  en  fonte  qui  est  à  la 
base  de  la  flèche,  est  suspendue  par  d'énormes  boulons  en  fer 
forgé  au  centre  de  la  pyramide  creuse  formée  par  les  huit  contre- 
fiches  centrales.  Ainsi  ces  huit  contre-fiches  portent  tous  les  objets 
qui  exercent  une  gravitation  quelconque  sur  l'axe  de  la  flèche, 
soit  en  dessus,  soit  en  dessous  de  leur  sommet,  tandis  que  les  ra- 
cinaux rangés  sur  le  périmètre  intérieur  de  la  tour  en  pierre  sont 
chargés  du  poids  de  toutes  les  parties  extérieures  de  la  flèche. 

Celle-ci  est  tout  à  jour,  et  l'aspect  en  est  maigre.  Cette  maigreur 
est  encore  augmentée  par  quatre  grandes  arcades  entièrement 
vides,  de  3  mètres  de  large  sur  9  à  10  mètres  de  haut,  percées  dans 
les  faces  principales.  Chacune  de  ces  arcades  sera  plus  tard  enca- 
drée par  les  rampants  d'un  pignon  aigu  hérissés  de  crosses,  et  la 
flèche  sera  flanquée  de  quatre  grands  clochetons  en  fonte  à  jour, 
élevés  sur  les  quatre  angles  de  la  tour  en  pierre.  Cet  accompagne- 
ment diminuera  sans  nul  doute  la  maigreur  de  l'ensemble,  qui  ne 
serait  pas  supportable  si  l'escalier  central  et  sa  cage  ne  lui  don- 
naient un  peu  de  corps,  en  empêchant  les  rayons  visuels  de  tra- 
verser aussi  facilement  la  tour.  La  maigreur  qu'on  reproche  aux 
meneaux  de  la  flèche  ne  vient  certainement  pas  du  manque  de  lar- 
geur;—  ils  ont  I  .s  centimètres  et  les  plus  grands  vides  n'ont  que 
0™  50  de  large; — mais  elle  est  due  à  leur  manque  d'épaisseur,  car, 
comme  ces  membres  en  général  empruntent  une  partie  de  leur 
effet  de  la  perspective  et  que  leur  profil  est  ordinairement  double, 
ceux-ci  étant  simples,  l'effet  est  manqué  (l). 

Il  eût  fallu  doubler  le  profil  de  ces  meneaux  sur  la  profondeur, 
c'est-à-dire  rapporter  à  l'intérieur,  comme  doublage,  des  meneaux 
pareilsàceux  actuels,  qui  n'ont  que  15  centimètres  de  profondeur 
et  sont  creusés  en  forme  de  gouttière  à  l'intérieur.  En  les  doublant, 
ils  eussent  eu  par  conséquent  30  centimètres  de  profondeur  ou 
épaisseur  sur  lâ  centimètres  de  largeur. 

C'est  une  erreur  que  de  considérer  une  colonne,  un  meneau,  etc., 
comme  de  simples  supports  dont  on  ne  doit  exiger  que  la  résis- 


(1)  C'est  11  une  des  eoiiséquciiccs  nécessaires  de  l'emploi  de  la  fonte  3u\  lieu 
cl  place  de  la  pierre  et  avec  des  formes  créées  pour  elle.  {Nute  de  M.  A.deC.) 


tance  suffisante  aux  fonctions  qu'ils  doivent  remplir.  Outre  les 
conditions  de  stabilité,  l'art  exige  encore  impérieusement  celles 
des  formes  extérieures,  la  combinaison,  les  proportions  relatives 
de  certaines  parties  entre  elles. 

Si  les  belles  colonnes  que  les  Grecs  ont  léguées  a  notre  admira- 
tion n'eussent  été  destinées  qu'à  servir  de  supports,  leurs  propor- 
tions, leur  espacement,  qui  furent  fixésaprés  de  longues  études  pra- 
tiques et  qui  ne  peuvent  être  changés  notablement  sans  altérer  plus 
ou  moins  leur  bon  effet,  eussent  varié  comme  la  résistance  de  la 
matière  employée  à  leur  construction. 

D'ailleurs,  les  colonnes  sont  dix  fois  plus  solides  qu'il  ne  faut 
pour  porter  la  charge  qu'on  leur  a  confiée  dans  la  plupart  des  ap- 
plications; mais  comme  elles  étaient  généralement  placées  à  l'exté- 
rieur, il  fallait  qu'elles  pussent  résister  par  leur  masse  à  la  pous- 
sée au  vide. 

Des  considérations  climatériques  entrèrent  aussi  pour  quelque 
chose  dans  la  comiK)sition  des  ordres  grecs.  N'est-ce  pas  ce  sol  sou  vent 
bouleversé  par  des  tremblements  de  terre  qui  nécessita  la  fermeté 
de  lignes  et  le  peu  d'élévation  des  monuments  de  la  Grèce  an- 
cienne et  moderne?  Que  deviendrait  dans  ce  pays  notre  architec- 
ture ogivale? 

Quoique  l'apparence  semble  indiquer  le  contraire,  il  en  est  pour- 
tant de  même  des  colonnettes  du  style  ogival,  dont  les  proportions 
sont  extrêmement  variables  et  ne  sont  assujetties  à  aucune  règle; 
mais  on  les  a  toujours  groupées  soit  avec  des  piliers  dont  elles  ne 
forment  pour  ainsi  dire  que  les  cannelures,  soit  avec  d'autres  co- 
lonnettes pour  en  former  un  faisceau  qui  puisse  non-seulement  of- 
frir une  solidité  réelle,  mais  encore  une  masse  exempte  de  mai- 
greur. Quand  les  colonnettes  groupées  avec  un  pilier  ou  une  gi-osse 
colonne  sont  isolées  et  d'une  longueur  notable,  on  a  été  forcé  de 
les  relier  en  une  ou  deux  places  sur  la  hauteur  avec  le  pilier  par 
dos  crampons  en  fer. 

Si  dans  quelques  cas  assez  rares  les  constructeurs  gothiques  ont 
placé  des  colonnes  grêles  isolément  pour  porter  la  retombée  des 
voûtes,  comme,  par  exemple,  au  curieux  réfectoire  de  l'abbaye  de 
Saint-Martin-des-Champs  a  l'aris,  la  maigreur  de  ces  colonnes 
fut  motivée  par  la  nécessité  de  ne  point  obstruer  l'espace.  De  gros 
piliers  eussent  empêché  la  plupart  des  convives  de  voir  le  frère 
charge  de  faire  la  lecture  ou  le  sermon  pendant  les  repas,  et  eussent 
gêné  le  service.  L'intention  de  ne  pas  gêner  est  rendue  évidente 
par  les  colonnes  engagées  dans  les  murs,  qui,  au  lieu  de  descendre 
jusqu'à  terre ,  sont  portées  par  des  culots.  Les  colonnes  isolées 
étant  dans  l'axe  de  la  salle,  n'éprouvent  aucune  poussée  latérale  et 
n'ont  à  résister  qu'à  la  pression  verticale  des  voûtes. 

Pour  éviter  l'effet  désagréable  de  la  longueur  démesurée  deees 
colonnes,  dont  l'élévation  est  de  plus  de  vingt  diamètres,  on  les  a 
divisées  en  deux  étages  par  un  anneau  saillant,  au  niveau  duquel 
règne  le  culot  qui  porte  les  colonnes  engagées. 

Dans  la  construction  des  meneaux  des  verrières  du  Moyen-.\ge, 
les  roses  surtout,  qui  se  ramifient  en  courbes  si  légères,  si  gra- 
cieuses, si  variées, se  contre-butant  les  unes  les  autres,  et  dont  le 
motif  parait  emprunté  au  règne  végétal,  il  semble  qu'on  se  soit 
plus  préoccupé  d'amoindrir  autant  que  possible  le  réseau  de  pierre 
au  profit  des  jours  qui  les  dix  isent.  H  n'en  est  rien  cependant  ;  les 
règles  de  l'esthétique  ont  encore  là  régné  en  souveraines. 

On  voulait  obtenir  une  grande  masse  de  lumière,  r-u  plu- 
tôt augmenter  le  plus  possible  la  surface  de  ces  mosaïques  dia- 
phanes, de  ces  tapisseries  lumineuses  qui  alternent  si  heureuse- 


42- 


REVLE  DE  LARCHITKCTLRE  Eï  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


438 


meut,  si  indispensablemeut,  avec  l'opacité,  avec  la  froideur  des 
murailles.  Il  fallait  une  charpente  pour  soutenir  les  frêles  panneaux 
de  verre  qui  devaient  la  transmettre  diaprée  de  mille  couleurs, 
tout  en  nous  préservant  des  intempéries  de  l'atmosphère;  il  fallait 
que  cette  charpente  fût  le  plus  mince  possible  ;  mais  les  règles  du 
goût,  plus  encore  que  celles  de  la  solidité,  établirent  entre  les  pleins 
et  les  vides  des  proportions  en  dehors  desquelles  on  tombe  plus  ou 
moins  dans  la  lourdeur  ou  la  maigreur.  Que  la  pierre  fût  dure  ou 
tendre,  on  s'en  écarta  le  moins  possible.  J'ignore  si  les  architectes 
du  Moyen-Age  ont  jamais  pensé  au  fer  pour  former  les  meneaux  ; 
en  tout  cas,  ils  ne  l'ont  pas  employé. 

Les  commotions  les  plus  redoutables  pour  les  meneaux  étant 
celles  dont  la  direction  est  perpendiculaire  au  plan  de  la  verrière, 
on  donne  aux  meneaux  une  plus  grande  épaisseur  dans  ce  sens. 
Mais  pour  éviter  la  lourdeur  que  la  perspective  n'eût  pas  manqué 
de  leur  donner  par  suite  de  cette  disposition,  on  amincit  leur  face 
intérieure  et  extérieure  en  forme  d'aiêle  saillante,  élégie  de 
moulures.  Leur  section  transversale  put  ainsi  être  à  peu  près  in- 
scrite dans  une  losange  dont  le  grand  axe  est  perpendiculaire  au 
plan  du  vitrail,  au  lieu  de  l'être  dans  un  rectangle  orienté  de  la 
même  manière;  on  obtint  alors  la  plus  grande  somme  de  résistance 
sous  la  moindre  section. 

Je  pense  qu'on  pourra  faire  de  magnifiques  meneaux  en  fonte; 
mais  on  rencontrera  de  graves  mécomptes  toutes  les  fois  qu'on  vou- 
dra profiter  de  la  plus  grande  résistance  relative  des  métaux  pour 
amincir  outre  mesure  les  colonnes,  les  meneaux ,  ou  tous  autres 
supports  dont  tes  proportions  sont  le  fruit  des  longues  études  des 
hommes  de  l'art,  sanctionnées  par  les  siècles.  On  ne  pourrait 
impunément  s'écarter  de  ce  principe  même  dans  la  sculpture;  je 
dirai  plus,  on  ne  peut  pas  toujours  copier  servilement  la  nature 
dans  l'ornementation  architecturale,  ni  même  dans  les  accessoires 
de  la  statuaire.  Une  feuille,  une  draperie  détachée,  ne  peuvent, 
sans  paraître  maigres,  être  réduites  à  une  épaisseur,  je  ne  dirai  pas 
égale,  mais  voisine  de  la  nature.  Les  feuilles  des  chapiteaux  en 
bronze  de  l'arc  de  triomphe  des  Tuileries,  par  exemple,  sont  ex- 
cessivement maigres,  parce  qu'on  a  profité  de  la  ténacité  du  métal 
pour  se  rapprocher  des  proportions  de  la  nature.  On  ne  fait  pas 
les  draperies  d'une  statue  en  bronze  aussi  minces  qu'une  étoffe, 
quoiqu'on  ne  les  fasse  pas  cependant  aussi  épaisses  que  celles  en 
marbre. 

Depuis  quelques  années  la  manie  du  bon  marché  a  enfanté  les 
cuivres  estampés  en  remplacement  des  cuivres  moulés,  pour  la  mou- 
ture des  porcelaines.  Quoique  les  proportions  des  premiers  les  rap- 
prochent plus  de  la  nature,  dont  les  unes  et  les  autres  sont  une  imi- 
tation, et  quoique  leur  exécution  soit  quelquefois  plus  fine  et  plus 
pure,  ils  n'en  font  pas  moins  un  effet  tellement  mauvais  que  les 
personnes  de  goût  n'eu  voudront  jamais.  Cela  tient-il  à  l'habitude 
précédemment  contractée  de  voir  les  choses?  Je  ne  le  pense  pas. 
Cette  habitude  peut  bien  avoir  quelque  influence  momentanée  sur 
les  hommes  accoutumés  à  raisonner  les  choses;  mais  si  elle  avait 
un  pouvoir  absolu,  il  n'y  aurait  plus  alors  de  règles  dans  les  arts, 
il  u'y  aurait  pas  de  ligne  de  démarcation  entre  le  beau  et  le  laid. 
Mais  je  m'aperçois  un  peu  tard  que  j'ai  profité  de  ma  position 
aérienne  sur  la  flèche  de  la  cathédrale  pour  me  lancer  dans  les  es- 
paces imaginaires. 

La  construction  de  la  flèche  est  aujourd'hui  arrêtée  à  2  mètres  au- 
dessous  de  l'encorbellement  qui  doit  porter  la  lanterne  supérieure 
a  environ  20  mètres  du  sommet.  Cette  lanterne,  dont  le  diamètre 


sera  de  4  mètres,  formera  un  délicieux  belvédère,  le  plus  élevé 
peut-être  de  tous  ceux  qui  existent.  Il  s'e1è\eraà  environ  I2.S  mètres 
au-dessus  du  sol.  Huit  grandes  volutes  formant  l'eucorbellement 
recevront  les  huit  piliers-butants  de  la  lanterne,  taudis  que  huit 
colonnettes  intérieures  soutiendront  le  pyramidion  aigu  qui  cou- 
vrira la  lanterne  et  terminera  la  flèche.  Celles-ci  iwrteront  la  re- 
tombée des  arcades.  De  la  base  des  piliers-butants  s'élanceront  huit 
gargouilles,  et  de  leur  sommet  des  arcs-boutants  s'appuieront  sur 
la  prolongation  de  la  flèche.  Une  galerie  annulaire  de  3"  50  dedia- 
ir.ètre  régnera  au  pourtour  de  la  lanterne. 

Au  centre  de  la  flèche  s'élève  une  double  tour  ronde  concentri- 
que en  fonte  à  claire-voie.  Dans  l'espace  annulaire  qui  sépare  les 
deux  tours,  se  développe  un  bel  escalier  en  hélice  aussi  en  fonte, 
La  tour  extérieure  forme  la  cage  et  la  tour  intérieure  le  noyau  de 
l'escalier.  Les  enrayures  de  la  tour  centrale  sont  en  forme  de  rose 
à  jour  à  huit  lobes.  Les  enrayures  qui  contre-butent  les  huit  arê- 
tiers de  la  flèche  viennent  s'appuyer  sur  le  périmètre  de  la  cage. 

L'escalier  se  divise  en  trois  révolutions  ou  étages  principaux, 
dont  l'emmarchement  diminue  par  retraite.  La  dernière  révolution 
qui  partira  de  la  base  de  la  lanterne  tournera  autour  d'un  noyau 
réduit  à  un  diamètre  de  15  centimètres.  Cette  dernière  révolution 
sera  pour  les  plus  hardis  visiteurs  qui  voudront  monter  jusqu'aux 
limites  extrêmes  de  la  flèche. 

L'enveloppe  extérieure  de  la  flèche  se  compose  de  huit  surfaces 
découpées  à  jour  et  encadrées  entre  huit  arêtiers.  Chacun  de  ceux- 
ci  est  formé  par  un  cours  de  fortes  pièces  en  fonte  ornées  de  crosses 
en  forme  de  volutes,  d'un  style  équivoque.  Ces  pièces  sont  reunies 
entre  elles,  sur  la  hauteur,  par  des  collets  boulonnés,  et  doublées  à 
l'intérieur  par  une  série  de  plaques  de  50  centimètres  de  large,  for- 
mant feuillure  de  chaque  côté  de  l'arêtier  pour  recevoir  les  me- 
neaux à  jour  des  faces  de  la  pyramide. 

Toutes  les  pièces  de  fonte  ont  été  imprimées  au  minium.  Cette 
peinture  se  détache  déjà  des  parties  anciennes.  On  lui  a  substitué  la 
peinture  galvanique,  dont  on  semble  plus  satisfait  ;  mais  elle  n'a 
pas  encore  subi  une  assez  longue  épreuve  (l). 


(1)  Il  serait  bien  i  désirer  qne  la  chimie,  qui  nous  donne  tous  les  Jours  tant 
de  produits  d'une  utilité  problématique,  trouvSt  un  enduit  inattaquable  aux  in- 
tempéries de  l'air,  et  qui  put  garantir  le  fer  de  l'oxydation  pendant  des  siècles. 
Dùt-on  employer  le  feu  pour  fixer  cet  enduit  à  la  surface  du  fer,  ce  ne  serait 
certes  pas  un  empêchement  à  son  application.  On  a  bien  trouvé  un  procédé 
pour  fixer  un  émail  blanc  sur  des  ustensiles  de  cuisine  en  fonte,  pourquoi  n'en 
trouverait-on  pas  un  pour  la  couleur  de  pierre,  de  bronze,  ou  toute  autre 
nuance?  La  galvanoplastie  nous  tirera  un  jour  de  ce  mauvais  pas. 

M.  Alavoine  a  fait  un  pas  de  géant  dans  l'art  d'appliquer  le  fer  fondu  i  l'ar- 
chitecture monumentale.  Il  a  senti  quel  immense  parti  nous  pourrions  tirer 
du  moulage  de  la  fonte  pour  l'ornementation  de  nos  édifices  publics;  mais  si  la 
science  ne  nous  dote  d'un  enduit  indestructible,  il  faudra  presque  y  renoncer. 
Ce  n'est  pas  que  le  fer  exposé  au  grand  air,  même  sans  aucune  peinture,  ne 
puisse  se  couvrir,  avec  le  temps,  d'une  espèce  de  patine  brune;  mais  quelle 
aCTrcusc  couleur!  Quel  parti  pourrait-on  en  tirer  pour  l'elTet  monumental?  Il 
est  probable  qu'on  regrettera  un  jour,  si  ce  n'est  déjà,  d'avoir  fait  en  fonte 
les  belles  fontaines  de  la  place  de  la  Concorde  et  des  Champs-Elysées  à  Paris, 
au  lieu  de  les  faire  en  bronze?  La  perte  des  dorures  primitives  et  la  couche 
annuelle  de  peinture  qu'on  est  obligé  de  leur  donner  auront  bientôt  compense 
l'économie  qu'on  a  pu  faire  sur  la  maUère.  En  bronze,  on  eût  pu  les  faire  de 
moitié  moins  épaisses,  et,  partant,  à  peu  près  de  moitié  moins  pesantes.  Les 
frais  de  modèle  et  de  n)ain-d'œu\re  étant  égaux  dans  les  deux  cas,  on  n'eflt 
donc  eu  que  la  différence  du  prix  de  la  matière. 

A  la  colonne  de  la  grande  armée,  la  main-d'œuvre  est  revenue  à  trts-pcu  de 
chose  près  au   même  prix  que  le  bronze,  c'est-à-dire  à  3  francs  le  kilog.  (Je 


i'»29 


RKVUK  DK  L'ARCHITKCTLRK  KT  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


km 


Du  point  où  se  termine  aujourd'hui  la  flèche,  à  en\  iron  1 30  mè- 
tres du  sol,  et  où  l'on  ne  peut  arriver  pour  le  moment  qu'avec  une 
échelle,  on  jouit  d'un  magnifique  panorama.  Sous  ses  pieds  les 
combles  de  l'église,  et  en  avant  les  tours  du  portail,  sur  le  sommet 
desquelles,  malgré  la  distance,  la  vue  plonge  à  tel  point  que  vous 
avez  peine  à  vous  persuader  que  ce  sont  bien  ces  mêmes  tours  du 
haut  desquelles  vous  contempliez  l'instant  d'auparavant  un  peuple 
de  mirmidons  circulant  dans  les  rues  de  la  ville  ;  ce  sont  les  tours 
elles-mêmes  qui  sont  devenues  lilliputiennes.  Le  regard  pénètre 
dans  la  tète  découverte  de  la  tour  de  Beurre  comme  dans  un  puits, 
et  l'on  prendrait  volontiers  pour  des  insectes  les  corneilles  qui 
volent  incessamment  de  l'une  à  l'autre. 

Sur  le  premier  plan,  la  ville,  et  son  port  couvert  de  nombreux 
vaisseaux,  dont  les  mâtures  s'élèvent  à  la  hauteur  des  muiscms. 

Sur  le  deuxième  plan,  au  nord,  une  enceinte  de  montagnes  dis- 
posées en  hémic3cle  dans  lesquelles  s'enfoncent  de  jolis  vallons; 
sur  la  pente  des  coteaux  brillent,  à  travers  de  verdoyants  bosquets, 
de  jolies  villas. 

Au  delà  du  fleuve,  qui  semble  la  corde  de  l'arc  formé  par  les 
montagnes,  on  voit  Saint-Sever,  les  vertes  prairies  et  les  villages 
qui  l'entourent.  Cette  vaste  plaine  est  fermée  à  l'horizon  par  des 
montagnes  basses,  couvertes  de  forets  qui  semblent  s'appuyer  à 
droite  et  à  gauche  sur  le  fleuve,  qui  les  sépare  des  côtes  élevées  do- 
minant sa  rive  droite. 

La  balustrade  en  pierre  qui  entoure  le  comble  de  la  nef  a  été 
refaite  en  partie  depuis  l'incendie  de  1822.  L'entablement  qui  la 
porte  est  fort  endommagé  par  l'intempérie  de  l'air.  Cet  état  de  dé- 
gradation est  dû  sans  nul  doute  à  l'infiltration  des  eaux  pluviales 
qui  a  lieu  dans  le  joint  mal  fermé  qui  sépare  le  relief  du  chéneau 
en  plomb,  de  la  base  de  la  balustrade  (l).  L'eau  qui  s'infiltre  sous  le 
plomb,  ne  pouvant  s'évaporer  par  l'action  de  l'air,  pénètre  dans  le 
corps  de  la  pierre,  ce  qui  donne  prise  à  la  gelée.  Aussi  vaudrait-il 
mieux  ne  pas  garnir  le  chéneau  et  laisser  couler  l'eau  à  nu  sur  la 


suppose  qu'on  ait  aclieté  le  métal.)  La  niaiii-d'œuvie  pour  le  fer  doit  Être  la 
même,  ou  à  peu  près.  La  valeur  du  fer  fondu,  deuxième  fusion,  est  à  celle  du 
bronze  ;:  1 :8;  nous  prendrons  ces  deux  cliifTies  comme  expression  de  la  va- 
leur respective  des  deux  métaux,  et  nous  dirons  pour  le  bronze  :  main-d'œuvre 
=  8  ;  métal  =  8,  ou  8  -f  8  =  16  ;  et  pour  le  fer  8  -f  1  =  0.  Mais  nous  avons 
dit  (luc  le  puiils  du  i)roiize  pouvait  être  réduit  à  moitié  de  celui  du  fer,  à  cause 
de  sa  plus  grande  ténacité;  nous  aurons  ainsi  8  -f  4  =  12.  Ainsi  le  fer  étant 
=  9  et  le  bronze  =  12,  nous  aurons  enfin  9  :  12  ::  3  :  1.  Le  prix  du  fer  sera 
donc  égal  aux  3/4  de  celui  du  bronze,  pour  travaux  tirés  à  un  seul  exemplaire, 
bien  entendu. 

Je  donne  ces  calculs  approximatifs  pour  démontrer  que  tant  que  nous 
ne  trouverons  pas  une  couverte  indélébile  pour  le  fer,  il  y  aura  économie  mal 
entendue  à  faire  certains  monuments  en  fonte  de  fer  plutôt  qu'en  bronze.  11 
faut  convenir  que  des  fontaines  sont  plus  sujettes  à  la  détérioration  que 
des  objets  moins  exposés  à  l'humidité;  car  les  colonnes  lampadaires  de  la 
place  de  la  Concorde  ont  moins  souffert  que  les  fontaines. 

(1)  Les  constructeurs  anciens,  non  plus  que  la  majeure  partie  des  modernes, 
ne  savaient  pas  fermer  convenablement  le  joint  entre  le  bord  d'un  chéneau  et 
le  mur.  On  se  contentait  de  faire  une  rainure  dans  laquelle  on  incrustait  tant 
bien  que  mal  le  bord  du  chéneau  lui-même,  qui  souvent  était  en  plomb  fort 
épais.  Au  premier  effet  de  dilatation  un  peu  |>rononcé,  le  métal,  en  s'allon- 
geant,  avait  bientôt  brisé  le  chétif  solin  en  plâtre  qui  calfeutrait  le  joint. 

Il  vaudrait  inOniment  mieux  recouvrir  le  relief  du  chéneau  d'une  bandelette 
de  plomb  mince,  incrustée  par  petites  parties  dans  une  rainure  étroite  et  pro- 
fonde, et  scellée  avec  du  mastic,  si  c'est  dans  la  pierre,  ou  bien  scellée  en  plâtre, 
li  c'est  dans  un  enduit  en  plâtre,  en  ayant  soin,  si  l'on  y  met  des  clous,  de  ne 
pas  enfoncer  leur  tête  jus(|u'au  métal,  afin  de  laisser  un  espace  pour  la  prise 
du  plâtre. 


pierre  comme  à  Saint-Ouen,  dont  l'entablement  est  bien  consené. 
L'entablement  de  la  cathédrale  de  Paris  est  en  assez  bon  état,  quoi- 
que son  chéneau  ne  soit  pas  garni.  Il  serait  intéressant  de  recher- 
cher l'état  des  entablements  d'un  grand  nombre  d'édifices  du 
Moyen-Age  à  ehéneaux  garnis  ou  non  garnis,  pour  s'assurer  du 
moyen  le  plus  avantageux. 

Lorsqu'on  est  entré  dans  la  nef  de  la  cathédrale,  le  premier  ob- 
jet qui  vous  saute  aux  yeux  est  le  lourd  jubé  d'ordre  ionique  en 
marbre  blanc,  qui  sépare  le  chœur  de  la  nef.  Ce  n'est  pas  que  ce 
jubé  soit  de  mauvais  goût  par  lui-même;  mais  il  est  eu  désaccord 
complet  avec  le  reste  de  l'édifice.  C'est  cependant  à  la  déplorable 
manie  de  suivre  la  mode  en  architecture  comme  en  autres  choses, 
que  nous  devons  les  disparates  choquantes  qui  déprécient  tant 
l'architecture  de  la  plupart  de  nos  édifices  religieux. 

Je  fais  des  vœux  bien  sincères  pour  qu'on  débarrasse  la  cathé- 
drale de  Rouen  de  ce  malencontreux  hors-d'œuvre.  Je  me  garderai 
bien  toutefois  de  dire  qu'il  faille  l'envoyer  dans  les  magasins  du 
marbrier.  On  pourrait  très-bien  l'utiliser  à  la  décoration  de  quelque 
salle  des  fastes  à  l'Hôtel-de-Villc  ou  tout  autre  édifice  public.  Quoi- 
qu'il ne  soit  pas  d'un  style  irréprochable,  il  est  d'une  grande  ri- 
chesse, et,  placé  à  propos,  il  pourrait  produire  un  très-bon  effet. 

Comme  à  Notre-Dame  de  Paris,  les  collatéraux  sont  percés  du 
côté  de  la  nef  de  deux  étages  de  grandes  arcades  en  ogive.  \  Paris, 
les  arcades  supérieures  s'ouvrent  sur  une  galerie  régnant  sur  toute 
l'étendue  du  premier  rang  de  collatéraux,  et  sont  garnies  d'une 
balustrade.  Mais  ici  les  arcades  du  deuxième  étage,  aussi  larges  que 
celles  du  bas,  ne  sont  que  de  simples  baies  s'ouvrant  sous  le  vide 
des  voûtes  assez  élevées  des  collatéraux,  et  comme  elles  sont  sans 
balustrade,  elles  ne  font  pas  bien.  On  ne  se  rend  pas  compte  de 
prime  abord  de  celte  disposition  peu  gracieuse,  et  qui  parait  sans 
motif.  Mais  si  l'on  examine  la  face  des  piliers  de  la  nef  du  côté 
des  collatéraux,  on  aperçoit  à  chaque  pilier  une  espèce  de  balcon 
semi-annulaire  formé  par  l'élargissement  de  la  saillie  du  ban- 
deau d'appui  des  arcades  de  l'étage  supérieur.  Chacun  de  ces  bal- 
cons repose  sur  cinq  colonnettes  portées  par  un  encorbellement 
placé  au  niveau  de  l'imposte  des  arcades  inférieures.  Ces  saillies 
ont  été  disposées,  sans  nul  doute,  pour  communiquer  d'une  arcade 
à  l'autre  en  passant  derrière  les  piliers,  et  font  présumer  que  les 
arcades  supérieures  devaient  former  tribune  au  moyen  d'une  ba- 
lustrade, qui  n'a  sans  doute  jamais  été  posée.  De  petits  culots  en 
bossage  sur  le  pourtour  des  saillies  qui  contournent  les  piliers,  de- 
vaient recevoir  les  montants  principaux  de  la  balustrade,  et  une 
porte  percée  dans  le  mur  à  côté  de  l'orgue  devait  donner  entrée 
aux  tribunes.  Je  n'ai  pas  eu  le  temps  de  chercher  à  ni'assurer  si 
la  balustrade  avait  existé,  ce  que  je  ne  crois  pas.  Celte  disposition 
n'existe  pas  autour  du  traussept  ni  autour  du  chœur;  les  deux 
étages  d'arcades  n'en  font  qu'un  seul.  H  semble  qu'ici  le  clergé, 
plus  ombrageux  que  celui  de  Notre-Dame  de  Paris,  ait  voulu,  eu 
supprimant  le  balcon  au  pourtour  du  chœur,  empêcher  les  regards 
indiscrets  du  public  de  pénétrer  dans  le  sanctuaire. 

Si  l'on  n'a  pas  mis  de  balustrade  aux  tribunes  de  la  nef,  en  re- 
vanche on  en  a  mis  une  fort  riche  à  une  tribune  placée  derrière 
l'orgue,  au  bas  de  la  grande  rose,  dont  elle  masque  une  partie. 

La  chapelle  qui  sert  de  vestibule  à  la  sacristie  est  fermée  du 
côté  de  l'église  par  une  délicieuse  clôture  en  pierre  à  claire-voie  eu 
style  du  XV«  siècle,  couronnée  de  clochetons  et  de  dentelures  du 
meilleur  goût.  Des  colonnettes  détachées,  d'une  merveilleuse  légè- 
reté, ornent  le  pourtour  des  murs  de  ce  gracieux  vestibule.  Il  est 


4.31 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


i*9i 


fermé  par  une  porteen  fer  du  XV' siècle,  garnie  d'une  très-riche  ser- 
rure de  la  même  époque.  Pourquoi  faut-il  qu'on  ait  obstrué  cette 
belle  clôture  d'une  énorme  armoire  en  bois  qui  la  couvre  tout  en- 
tière? Nous  souhaitons  vivement  que  MM.  les  ecclésiastiques,  pro- 
tecteurs naturels  des  édifices  religieux,  apportent  plus  de  soin  aies 
préserver  des  ])rofanations  de  leurs  sacristains. 

La  statue  de  Richard  Cœur-de-Lion,  découverte  en  1838  sous  le 
pavé  de  la  métropole,  est  toujours  piteusement  couchée  au  pied 
du  superbe  monument  du  cardinal  Georges  d'Amboise.  Elle  semble 
implorer  de  ce  prélat  magnifique  une  position  plus  honorable 
dans  son  église. 

Le  transsept  est  à  triple  nef,  chose  assez  rare,  et  décoré  dans  la 
partie  du  sud  de  superbes  vitraux,  dont  l'un  est  malheureusement 
enfoui  à  moitié  dans  une  des  baraques  qui  obstruent  cette  belle 
métropole  ;  double  motif  pour  appeler  le  marteau  sur  ces  construc- 
tions parasites,  qu'on  ne  saurait  raser  trop  promptemcnt.  Mais  il 
est  à  craindre  qu'une  partie  de  cette  belle  verrière  ne  se  trouve 
détruite  quand  on  aura  détaché  le  plâtre  qui  recouvre  les  verres 
et  les  plombs.  L'enlèvement  de  ces  baraques  rendra  le  jour  aux 
nombreuses  sculptures  de  retour  des  contre-forts  du  portail. 

Mais  quittons  ce  beau  monument,  dont  nous  n'avons  raconté  que 
quelques  maigres  épisodes,  et  rendons  visite  à  l'église  de  Saint- 
Ouen,  son  heureuse  rivale. 

H.  JANNIARD,  architecte. 
[fji  suite  prochainement.) 


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CBROMIQUX. 

SoMMAiiiE  :  Lu  liippodrome  à  Paris.  —  Iiiauguralion  des  églises  Sainl-Vincenl-de- 
Paul  el  de  La  Villelle.  —  Grand  viaduc  sur  la  Loire.  —  Pt'Bt.icATloN  ^0CTR|.LB  : 
llistriirc  de  l'Art  monumental,  par  M.  L.  Balissiér. 

—  Les  jotn-naux  quotidiens  ont  .innoncé  dernièredient  qu'un  cirque 
:dlaii  êirc  consirtilt  près  de  I'îiic  de  l'Étoile,  sur  des  proporiions  im- 
menses, si  loulefois  on  les  compare  avec  celles  de  nos  cirques  et  de  nos 
théâtres  modernes.  Ce  cirque,  auquel  on  donne  le  nom  d'Hippodrome, 
doit  s'élever  sur  les  plans  el  sur  les  dimensions  des  amphithéâtres 
;nili(|ues;  il  contiendra,  dit-on,  sept  mille  personnes,  et  servira  à  des 
courses  de  chevaux  et  de  chars,  à  des  luîtes,  à  des  simulacres  de  com- 
bats, à  des  marches  triomphales;  il  n'y  manquerait  que  les  bêtes  cl  les 
gladiateurs  pour  en  faire  un  cinpie  romain.  Cci  édifice  colossal  devra 
être  bâti  en  deux  mois!  Sans  refuser  créance  au  récit  des  journaux, 
qu'il  nous  soit  permis  de  relever  une  erreur  que  plusieurs  d'enire 
eux  ont  commise.  Ils  se  sont  figura,  que  puisque  ce  nouveau  cir- 
quedevaii  être  copié  sur  l'antique,  il  serait  nécessairement  découvert  ; 
et  lii-dessus,  donnant  l'essor  à  leur  verve  caustique,  ils  taisaient  nom- 
bre de  plaisanteries  fort  spirituelles  sur  l'agrcmeui  des  filuies  d'orage  et 
des  coups  de  soleil.  Ces  messieurs  n'onl  sans  douie  jamais  In  ce  vers 
de  Juvénal  : 

Et  pueros  indé  ad  veubia  raptos. 

ils  sauraient  sans  cela  que  le  Yelarium  mettait  la  population  romaine 
A  l'abri  des  coups  de  soleil  et  des  orages. 

—  On  vient  d'inaugurer  à  Paris  un  des  monuments  les  plus  impor- 
tants qui  aient  clé  bâtis  dans  ce  siècle  ;  nous  voulons  parler  de  l'église 
Saint-Vincenl-de-Panl.  Ce  n'est  pas  que,  sur  plusieurs  points  de  la 
France,  on  n'ait  déjà  élevé  des  momnnents  ijcancoup  plus  considé- 
rables par  leurs  dimensions,  mais  il  en  est  pou,  suivant  nous,  qui  mé- 


ritent plus  que  celui-ci  de  captiver  l'attention  du  public.  Celle  nouvelle 
église  semble  marquer  une  ère  nouvelle  pour  noire  peinture  monumen- 
tale, et  son  aspect  intérieur  réfuie  victorieusenieni  tout  ce  qui  a  pu 
être  dit  contre  l'emploi  de  la  couleur  dans  la  décoration  des  édifices 
religieux.  Mais  là  ne  se  borne  pas  M.  Hitiorffdans  son  œuvre;  bientôt, 
plusieurs  parties  de  l'extérieur  seront  elles-mêmes  revêtues  de  pein- 
tures, et  ceci  est  une  tentative  plus  hardie  encore  el  qui  éveillera 
sans  doute  bien  des  critiques.  Les  anciens  peignaient-ils  extérieu- 
rement leurs  édifices?  Il  n'est  plus  guère  possible  aujourd'hui  d'en 
douter;  mais  là  n'esi  point  la  question.  S'ils  l'ont  fait,  eux  qui  avaient 
un  goût  si  pur  Cl  si  délicat ,  il  nous  est  sans  doute  permis  de  croire 
qu'ils  avaient  de  bonnes  raisons  pour  cela  ;  mais  quand  même  ils  ne 
l'eussent  point  fait,  serait-ce  une  raison  pour  que  nous  ne  le  fassions 
pas?  Qui  pourrait  être  assez  insensé  pour  venir  fermer  à  l'an  les  che- 
mins de  l'avenir,  et  dire  :  «  Les  anciens  se  sont  arrêtés  là,  vous  n'irez 
pas  plus  loinl  »  Alors  que  tout  marche  el  progresse  dans  le  monde  phy- 
sique et  iniellectuel,  seraii-il  raisonnable  de  vouloir  mettre  obstacle  au 
développement  de  l'une  des  plus  belles  fractions  de  son  intelligence? 
Ce  sont  là  pourtant  des  idées  reçues  et  prônées  quelquefois:  l'exclusi- 
visme, en  matière  d'art,  n'est  pas  même  chose  si  rare  qu'on  ne  puisse 
lui  compter  de  chauds  partisans  et  de  puiss.inls  champions;  nous 
voyons  parfois,  avec  peine,  des  hommes  de  mérite  s'égarer  dans  ces 
fausses  voies.  Le  domaine  de  l'art  est  vasie;  chaque  forme,  chaque 
époque  peni  y  vivre  à  l'aise  sans  coudoyer  les  autres.  Appliquons-nous 
à  la  recherche  du  beau,  plutôt  que  d'émousser  nos  armes  pour  con- 
quérir à  tel  système  d'art  sur  tel  autre  une  prédominance  imaginaire. 
Nous  reviendronsen  détail  sur  l'œuvre  de  M.  Uitiorff,  dans  un  tra- 
vail spécial  sur  ce  sujet  Nous  espérons  accompagner  ce  travail  de 
plusieurs  gravures. 

—  On  a  aussi  inauguré  une  nouvelle  église  à  La  Villeltc.  C'est  une 
œuvre  charmante  due  au  talent  de  M.  Lequeux,  el  dont  nos  lecteurs 
nous  sauront  gré  de  leur  donner  prochainement  l'élévation  cl  les 
détails. 

—  Un  de  nos  correspondants  nous  écrit  que  toute  la  rive  gauche  de 
la  Loire,  aux  environs  d'Orléans,  esl  alarmée  par  suite  du  rétrécisse- 
ment qu'ont  fait  subir  au  lit  de  la  rivière  les  ingénieurs  chargés  de  la 
construction  du  grand  viaduc  du  chemin  de  fer  de  Vierzon.  En  présence 
des  calamités  récentes  dont  frémissent  encore  les  rives  de  la  Saône  et 
du  Rhône,  nous  croyons  que  l'administration  devrait  s'émouvoir  aux 
plaintes  des  riverains  de  la  Loire.  Nous  souhaitons  vivement  que  le 
fait  par  nous  signalé  provoque  de  la  part  de  messieurs  les  ingénieurs 
une  justification  qui  dissipe  les  craintes  des  riverains  alarmés. 

Publication  nouvelle.  —  il  vient  de  paraître  la  première  livraison 
d'un  livre  intitulé  Hittoire  de  l'Art  monumental,  par  M.  L.  ftitissier. 
Il  formera  un  volume  grand  in-S"  composé  de  64  livraisons;  le  texte 
renferme  un  grand  nombre  de  gravures  sur  bois  fort  belles.  L'étude 
de  l'archéologie  est  aujourd'hui  le  complément  indispensable  de  toute 
éducation  artistique  et  littéraire,  et  ce  livre  rendra  un  grand  service  à 
cette  science  en  mettantàla  portée  de  tous,  les  connaissances  générales 
éparses  jusqu'à  ce  jour  dans  une  foule  de  livres  fort  coûteux  et  souvent 
indigestes.  Remercions  donc  .M.  Batissier,  auteur  déjà  des£/*'men<id'Xr- 
rhéologie,  de  ce  qu'il  a  fait  pour  propager  et  faciliter  chez  nous  létudc 
de  cette  science.  Nous  reviendrons  sur  ce  livre  dans  un  article  spé- 
cial, et  nous  donnerons  alors  à  nos  lecteurs  quelques  spécimens  des 
belles  gravures  qu'il  contient. 


L'un  det  Rédacteurs , 

Alphonse  de  GALONNE. 


Pahis.  —  Tvp.  Lacrahpe  et  Coup.,  rce  dahiette,  2. 


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REVLI-:  J>Ii  LAUCHITECTUHK  ET  I)KS  TU  WMA   l'I  nucS. 

Sainl-Jtan  dt  Btauvoii  (Purli, 


k» 


-^jr-rt> '"     i. 


DEUXIÈME  INSTRUCTION  DU  COMITE  IIISTOIUQUE 


DES    AIITS    ET    MONUMENTS. 


(SUITE,  vo'j.  roi.  2il,  289,  337  et  385  ) 


^68»- 


CIVFLISATION  CIIKETIENNE. 


STii. E    ■tun.t:\    i:t    htyi.e    uotiiiqije. 


(lIAITiriK  il.  —  OÉTAII.S  KXTÉItlElRS  DK  l/KCLISE. 

(nriTi.) 

//.  Les  murailles  d'une  église  sont  encore  percées  de  portes.  Ces 
baies,  d'une  autre  nature  que  les  précédentes,  peuvent  être  pincées 
soit  au  milieu  de  façades  plus  ou  moins  richement  décorées,  soit 
ça  et  là  sur  un  point  quelconque  du  pourtour.  Nous  décrirons 
bientôt  les  premières  en  traitant  des  portails  :  les  secondes,  beau- 
coup moins  importantes  par  leur  masse  et  leur  ornementation, 
n'en  devront  pas  moins  être  examinées  avec  d'autant  plus  de  soin 
(|ue,  mémo  dans  les  églises  très-rustiques,  il  est  rare  qu'elles  ne 
présentent  pas  quelques  parties  décorées  et  caractéristiques. 

C'est  ainsi  qu'il  sera  toujours  nécessaire  de  constater  : 

I»  Si  elles  appartiennent  à  la  construction  primitive,  si  elles 
ont  été  pratiquées  après  coup,  ou  si  au  contraire  elles  ne  se 
trouvent  pas  aujourd'hui  supprimées  et  bouchées; 

2"  Si  la  baie  est  pourvue  d'un  amortissement  rectiligne  ou  cur- 
viligne, et  dans  ce  dernier  cas  quelle  est  la  forme  de  l'arcade;  si 
c'est  au  contraire  un  rectangle  à  linteau  ou  à  plate-bande;  si  les 
angles  n'en  sont  pas  arrondis  en  arcs,  soit  complets,  soit  seule- 
ment figurés,  ou  occupés  par  une  console  plus  ou  moins  ornée; 


Fiç.  218. 

3°  S'il  y  a  quelque  chose  n  remarquer  sur  les  faces  interienre  on 
extérieure  des  pieds-droits;  s'ils  présentent  des  colonnes,  pilastre* 
ou  figures  placés  de  front  ou  en  retraite,  et  des  archivoltM  cor- 
respondantes ;  et  quelle  est  la  décoration  du  tympan  : 

4°  Ce  qu'il  peut  y  avoir  à  dire  du  linteau,  du  pmrr  miiral 
quand  i!  existe,  et  enfin  des  battants  mêmes,  considérés  sous  le 
triple  rapport  de  la  sculpture  en  bois,  de  la  ferrure  et  de  la  serru- 
rerie. 

Nous  recommanderons  particulièrement  l'examen  de  la  eottp<- 
des  claveaux  qui  composent  le  cintre  de  ces  portes  secondaires. 
quelquefois  fort  compliquée  dans  l'architectore  romane  et  l'arcbi- 
teclure  orientale. 

/.  Ces  murailles  peuvent  encore  présenter  des  pierres  cfaargéfs 
d'inscriptions  tuniulaires  ou  de  toute  autre  nature,  soit  engagée* 
dans  leur  masse,  soit  encastrées  dans  leur  revêtement  ;  quelque- 
fois même  de  véritables  tombeaux  placés  sous  leur  abri.  Comme, 
cependant,  ces  derniers  y  sont  beaucoup  plus  rares  qu'à  l'intérieur 
des  églises,  c'est  dans  le  chapitre  suivant  que  nous  nous  réser\r- 
rons  d'en  traiter.  Quant  aux  inscriptions,  d'autres  instruction», 
que  le  comité  se  propose  de  publier,  mettront  à  portée  de  recon- 
naître, à  l'inspection  des  caractères,  I.t  date  de  ces  monument* 
écrits.  Nous  nous  contenterons  d'avertir  ici  qu'on  devra  tonjour» 
en  prendre  une  copie  complète  (à  moins  que  ce  ne  soient  d'iosipii  - 
fiantes  fondations  du  XVI*  et  du  XVII*  siècle,  dont  il  ne  fiiadra 
donner  qu'une  analyse  succincte),  et,  de  plus,  en  relever  fidèle- 
ment l'empreinte  par  des  procédés  mécaniques  toutes  les  fols 
qu'ils  présenteront  ou  quelque  singularité  dans  la  forme  des  ca- 
ractères, ou  quelque  difficulté  dans  leur  interprétation,  ou  quel- 
que intérêt  particulier  dans  leur  texte.  Il  faudra  encore  examiner 
si  les  pierres  qui  les  portent  ont  été 

t"  Posées  avec  intention  de  les  y  graver  sur  place; 

3»  Engagées  fortuitement  dans  la  construction  ainsi  que  cela 
est  arrivé  le  plus  souvent  pour  celles  qui  sont  chargées  d'inscrip- 
tions antiques)  ; 

3*  Encastrées  dans  le  revêtement  pour  asMrcr  kor  conser- 
vation ; 

4°  Rap|>ortées  après  coup  ; 

i"  r>rave«-s  accideutellcment  et  sans  préméditation,  postenev; 
rement  à  la  construction. 

Il  serait  très-long  d'enumerer  toutes  les  portions  de  11  snrihee 
extérieure  et  intérieure  d'une  église  oà  l'on  peut  feneontrw  des 

T.    V.  M 


453 


REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


^36 


inscriptions.  Les  recherches  à  faire  sous  ce  rapport  ne  sauraient 
être  trop  minutieuses;  mais  il  est  surtout  indispensahle  de  noter 
les  cas  où  elles  auraient  été  placées  dans  une  intention  marquée 
d'ornementation,  ainsi  que  cela  arrive  souvent  dans  les  balus- 
trades des  W'  et  XVl"  siècles,  et  plus  anciennement  au-dessous 
du  couronnement,  en  place  de  frise. 

Relativement  au  sens  de  ces  inscriptions,  elles  doivent  être 
classées  en  explicatives  ou  accidentelles.  Celles-ci,  qui  peuvent  se 
rapporter  à  toutes  sortes  de  faits,  sont  ordinairement  beaucoup 
moins  intéressantes  que  les  premières,  dans  lesquelles  on  rencontre 
(les  renseignements  du  plus  grand  prix  pour  l'histoire  de  l'édifice 
et  celle  de  l'art.  On  les  distingue  encore  en  chronologiques  ou  no- 
minatives, suivant  qu'elles  fournisseat,  soit  la  date  de  construc- 
tion ou  de  consécration  detoutou  partie  d'un  monument  religieux, 
soit  les  noms  du  fondateur  ou  restaurateur,  du  pontife  qui  l'a 
béni,  de  l'architecte  ou  de  l'artiste  qui  a  concouru  à  l'élever,  le 
réparer  ou  le  décorer;  enfin,  elles  peuvent  être  peintes,  gravées, 
soit  en  creux,  soit  en  relief,  ou  incrustées. 

Les  mêmes  soins  doivent  être  apportés  à  la  recherche  et  à  la 
copie  exacte  des  portraits,  écussons,  emblèmes,  devises,  cimiers, 
marques,  chiffres,  outils  caractéristiques  de  certains  corps  de  mé- 
tiers, qui  se  rencontreront  à  l'extérieur  ou  à  l'intérieur  des  églises, 
et  qui  y  auront  été  placés  pareillement  dans  l'intention  d'indiquer 
quelque  date,  quelque  nom  propre  de  famille,  de  corporation, 
d'artiste  ou  d'individu  quelconque,  soit  qu'on  ait  déjà  réussi  ou 
non  à  en  saisir  la  signification. 

K.  Ce  que  nous  venons  de  dire  de  la  possibilité  de  rencontrer 
des  inscriptions  sur  toutes  les  portions  de  la  surface  d'une  église  est 
encore  plus  applicable  à  l'ornementation  :  il  n'est,  eu  effet,  pas  un 
point  de  cette  surface  où  la  fécondité  des  arts  du  Moyen-Age  n'ait 
trouvé  l'occasion  de  suspendre  quelque  areature,  quelque  orne- 
ment détaché  ou  courant,  quelque  bas-relief,  quehiuc  statue.  On 
ne  devra  omettre  aucun  de  ces  objets,  ni  négliger  d'y  chercher  les 
renseignements  qu'ils  peuvent  fournir,  soit  à  la  fixation  de  la  date 
du  monument,  soit  à  l'histoire  de  l'art. 

Au  XI«  siècle,  la  statuaire  présente  deux  types  très-distincts  : 
l'un,  court  et  rond,  aussi  dépourvu  de  noblesse  que  de  beauté,  est 
évidemment  le  travail  d'ouvriers  ignorants,  abandonnés  à  leur 
libre  arbitre,  travaillant  sous  l'impulsion  de  l'art  romain  dégénéré 
ou  de  leur  grossier  instinct  personnel;  l'autre,  apporléde  Constan- 
tinople,  où  la  statuaire  s'était  retrempée  au  L\«  siècle,  sous  la  do- 
mination de  la  dynastie  macédonienne.  Cette  influence  byzantine 
continua  jusqu'au  XII 1'  siècle,  par  l'envoi  non  interrompu  de  re- 
liquaires, de  manuscrits,  de  galons,  d'étoffes,  de  broderies,  de 
peintures,  de  sculptures  et  même  d'artistes,  d'agir  sur  l'art  occi- 
dental en  concurrence  avec  ses  inspirations  indigènes;  c'est  sur- 
tout dans  les  contrées  les  plus  voisines  de  la  Méditerranée  qu'elle 
prévalut.  On  la  reconnaît  aux  proportions  géométriques  des  figures, 
aux  plis  comptés  et  parallèles  des  draperies,  aux  vêtements,  qui 
sont  ordinairement  la  tunique  et  le  manteau  bordé  de  perles,  de 
galons,  et  renfermant  des  pierres  précieuses  enchâssées;  à  l'ab- 
sence de  perspective  dans  les  pieds  et  genoux,  qu'on  figure  très- 
ouverts  pour  éviter  la  difficulté  des  raccourcis;  aux  chaus- 
sures, quelquefois  très-riches,  toujours  pointues,  et  suivant  sou- 
vent le  ressaut  du  support  ;  aux  yeux  saillants,  fendus,  et  retrous- 
sés à  leur  extrémité  extérieure;  aux  sourcils  arqués,  et  enfin  au 
détail  minutieux  des  cheveux. 

Dès  ce  même  siècle,  mais  surtout  au  XII*,  survint  un  nouveau 


type,  caractérisé  par  l'allongement  hors  de  toute  proportion  des 
personnages,  qui  semble  avoir  eu  pour  but  de  leur  imprimer  un 
caractère  au-dessus  de  l'humanité,  mais  qui  peut  avoir  été  mo- 
tivé par  la  forme  étroite  des  emplacements  destinés  h  les  recevoir. 
L'expression  grave  et  religieuse  de  ces  figures,  la  beauté  souvent 
exquise  et  la  tranquillité  des  types,  le  parallélisme  exact  des  plis 
pressés  dans  lesquels  elles  sont  comme  emmaillottées,  la  fidélité  et 
le  fini  consciencieux  des  moindres  détails,  attestent  qu'une  main 
consacrée  a  passé  par  là  ;  qu'elle  a  suivi  des  proportions  conve- 
nues, une  sorte  de  canon  dont  il  semble  qu'il  ne  soit  pas  permis 
de  s'écarter.  C'est  à  la  même  époque  qu'on  s*appli(|ua  à  reproduire 
la  ressemblance  individuelle,  ou  portrait,  sur  les  tombeaux,  et 
qu'on  l'obtint  par  le  procédé  sûr  et  expéditifdu  moulage. 

Mais  c'est  le  XI1I«  siècle  qui  est  l'époque  de  plus  grande  splen- 
deur de  la  statuaire  du  Moyen-Age  comme  de  tous  ses  autres  arts , 
d'une  soumission  complète  au  joug  de  l'autorité  ;  celui-ci  y  arrive 
à  une  liberté  sage  et  grave,  alliée  à  une  verve  admirable  d'exécu- 
tion, qui  se  manifeste  dans  le  jet  heureux,  dans  les  poses  natu- 
relles, dans  les  plis  simples  et  gracieux  des  figures,  dans  leur  mo- 
delé déjà  très-bien  senti,  mais  surtout  dans  l'expressioa  de  foi 
vive,  de  ferveur  religieuse  qu'il  sut  alors  leur  imprimer  et  qu'il 
ne  retrouva  plus  depuis.  L'habitude  du  moulage,  récemment  in- 
troduite, comme  nous  l'avons  vu,  contribua  probablement  d'une 
manière  puissante  à  faire  abandonner  les  types  de  convention  des 
âges  précédents  pour  y  substituer  le  type  indigène  qui  règne  ex- 
clusivement dans  lej>  productions  de  cette  épo(jue. 

Dès  le  XIV'  siècle,  les  plis  des  draperies  commencent  à  se  tour- 
menter; fe  grotesque,  la  satire  antimonacale  et  anticléricale,  a 
faire  invasion  daus  le  domaine  de  la  statuaire,  qui  a  passé  des 
inspirations  purement  religieuses  et  personnellement  désintéres- 
sées du  cloître  à  l'impulsion  des  intérêts  et  des  passions  terrestres 
de  l'ouvrier  laïque,  non  encore  digne  du  nom  d'artiste.  Il  règne 
une  grande  inégalité  dans  les  ouvrages  de  ce  siècle  de  transition  : 
les  uns  présentent  toute  la  verve  et  tout  le  charme  de  l'âge  précé- 
dent ;  dans  quelques  autres  on  voit  poindre  déjà  les  défauts  et  les 
qualités  de  celui  qui  suivra,  et  en  certaines  contrées  l'influence 
du  goût  germanique  aux  plis  collés,  aux  poses  maniérées,  aux 
étoffes  amples  sur  des  figures  maigres;  mais  là  où  il  se  montre  avec 
son  caractère  propre,  ce  caractère  n'est  plus  inspiré  et  n'est  pas 
encore  exact  ni  spirituel  :  les  figures  présentent  dans  leurs  sur- 
faces plates  peu  de  sentiment  du  modelé,  mais  au  contraire  les 
traces  d'un  travail  expéditif,  plutùt  que  le  fouillé  délicat  du  ci- 
seau. Les  sujets  changent  en  même  temps  :  ce  ne  sont  plus  ces 
compositions  symboliques  et  symétriques,  remarquables  par  l'har- 
monie des  pleins  et  des  vides,  qui  occupaient  les  tympans  et  les 
parties  lisses  des  portails,  ni  ces  saints  personnages  inscrits  dans 
des  arcatures,  à  l'imitation  de  celles  qui  existent  sur  certains 
tombeaux  antiques,  ni  ces  nimbes  de  diverses  formes  caractéris- 
tiques des  siècles  précédents,  offrant  l'image  du  Christ  ou  de  Dieu 
le  père,  entouré  d'anges  adorateurs,  des  quatre  évangélistes,  ou  des 
vieillards  de  l'Apocalypse.  Au  lieu  de  toutes  ces  physionomies  con- 
stamment ferventes  et  sérieuses,  l'art,  redescendu  sur  la  terre,  y 
groupe  de  nombreux  personnages  appartenant  à  la  nature  vul- 
gaire et  n'exprimant  désormais  que  ses  passions.  Un  autre  carac- 
tère de  ces  compositions  est  qu'elles  ne  représentent  plus  que  des 
événements  positifs,  soit  qu'elles  en  prennent  le  sujet  dans  les  ré- 
cits de  la  Bible,  dans  le  rapprochement  de  l'ancienne  et  de  la  nou- 
velle loi,  dans  les  traditions  de  la  Légende  dorée,  dans  la  vie  du 


437 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


438 


patron  de  l'église  ou  dans  les  croyances  consacrées  relativement  à 
la  résurrection  des  morts  et  au  jugement  dernier.  Sans  doute  tous 
ces  sujets  s'y  étaient  déjà  montrés,  mais  ils  n'y  dominaient  pas 
exclusivement,  et  ils  y  étaient  considérés  d'un  point  de  vue  plus 
-  élevé. 

C'est  encore  à  cette  époque  que  les  figures  grotesques  ou  mon- 
strueuses ,  offrant  quelque  rapport  avec  celles  que  les  ouvriers 
du  XI*-'  siècle  avaient  souvent  placées  autour  des  églises  comme 
type  d'une  nature  abâtardie  par  le  vice  et  le  péché ,  et  qu'un  goût 
plus  épuré  en  avait  ensuite  bannies,  reviennent  s'y  montrer,  non 
plus  cette  fois  dans  un  but  moral  ou  purement  plaisant,  mais  dans 
une  intention  railleuse  et  satirique  dirigée  contre  le  culte  lui- 
même  et  surtout  contre  ses  ministres. 

Au  XV'  siècle,  le  sculpteur  s'élève  au  rang  d'artiste,  et  l'on 
sent  à  la  fois  l'empreinte  des  prétentions  de  l'atelier  dans  les 
poses  et  les  physionomies  exagérées  des  figures ,  aussi  bien  que 
dans  le  jeu  de  plus  en  plus  tourmenté  des  draperies  ,  et  le  fruit 
des  études  de  ce  même  atelier  dans  l'habileté  à  rendre  les  moin- 
dres détails  du  modelé  de  la  chair  vivante  et  morte,  et  l'expres- 
sion des  passions  humaines.  C'est  surtout  dans  la  représentation 
en  marbre  ou  en  albâtre  des  têtes  et  des  mains  sur  les  tombeaux , 
ainsi  que  dans  la  composition  des  petites  figures  exécutées  de 
même  avec  des  matériaux  précieux  que  se  déploya  cette  habileté 
du  XV°  siècle  à  faire  vivre  et  surtout  à  faire  pleurer  ses  personna- 
ges. Quant  aux  nombreuses  statues  dont  il  peupla  les  portails  et 
les  piliers  butants  de  ses  églises,  exécutées  à  la  hâte  par  des  artis- 
tes secondaires,  elles  présentaient  au  contraire  peu  de  relief  et  de 
vie.  Il  faut  distinguer  dans  cette  période  l'école  de  Charles  VIII  et 
de  Louis  XII,  aux  figures  de  peu  de  relief,  pourvues  de  détails 
anatomiques  plus  marqués  dans  la  sculpture  d'ornementation  ; 
cette  école  fleurit  particulièrement  sur  les  bords  de  la  Loire. 

I^'art  continua  de  marcher  dans  les  mêmes  voies  pendant  les 
premières  années  du  siècle  suivant  jusqu'à  l'introduction  de  l'école 
milanaise,  au  travail  vulgaire,  expéditif  et  maniéré,  particulière- 
ment dans  la  pose,  les  cheveux  et  les  draperies  de  ses  personna- 
ges; c'est  ensuite  qu'arriva  l'école  de  Michel-Ange,  et  que  fleu- 
rirent à  la  fois  Sambin  en  Bourgogne,  les  frères  Genty  à  Troyes, 
BenvenutoCellini  et  Paul-Ponce  Trcbati  à  Paris,  au  dessin  savant, 
au  relief  plus  marqué,  aux  poses  académiques,  aux  muscles  et 
aux  traits  fortement  accentués.  On  sait  avec  quelle  rapidité  elle 
étouffa  la  statuaire  fine  et  svelte  de  Jean  Goujon ,  et  à  quels  dé- 
plorables excès  d'exagération  ,  de  maniéré  dans  les  cheveux  et  les 
draperies,  elle  se  porta,  avant  d'être  à  son  tour  remplacée  par  le 
goût  flamand  sous  le  règne  de  Henri  IV. 

La  sculpture  d'ornementation  a  suivi,  au  Moyen-Age,  à  peu  près 
les  mêmes  phases  que  l'imitation  de  la  nature  humaine;  tantôt 
byzantine  et  tantôt  rustique ,  au  X^  siècle,  mais  habile  à  produire 
de  grands  effets  par  des  procédés  peu  compliqués  et  par  l'opposi- 
tion des  parties  lisses  avec  les  parties  décorées;  elle  commença  au 
XII°  à  s'approprier,  non-seulement  les  rinceaux  ,  les  entrelacs  et 
quelques  autres  des  motifs  courants  les  plus  gracieux  de  l'art  an- 
tique, mais  encore  l'imitation  des  produits  d'une  nature  végétale 
et  animale  fantastique  on  étrangère,  et  jusqu'à  des  zodiaques  ou 
des  calendriers;  sous  des  architectes  ecclésiasti(|ues,  qui ,  satisfaits 
de  diriger  la  masse,  abandonnaient  les  détails  à  l'inspiration  de 
leurs  subordonnés,  elle  imprima  une  admirable  variété  aux  chapi- 
teaux, dont  elle  porta  la  décoration  à  son  plushaut  point  de  perfec- 
tion ,  aux  archivoltes,  aux  tympans  et  à  toutes  les  autres  portions 


ornées  de  l'architecture  romane.  Le  XIII'  siècle  fut  pour  elle  (ii 
ce  n'est  dans  dans  le  chapiteau  j ,  comme  pour  la  statuaire,  l'épo- 
que ta  plus  brillante  de  tout  le  Moyen-Age;  celle  où,  employant 
indifféremment  dans  ses  compositions  l'ogive  et  le  plein-cintre, 
l'ornement  symbolique,  l'ornement  exotique  et  l'ornement  indi- 
gène, elle  imprima  un  relief  plus  vif,  un  modelé  plus  parfait  que 
par  le  passé  à  ses  enroulements  et  à  ses  guirlandes.  Mais  bientôt 
la  révolution  qui  avait  fait  passer  du  clerc  à  l'architecte  de  pro- 
fession la  direction  des  travaux  ecclésiastiques,  introduisit  de  la 
sécheresse  et  de  la  négligence  dans  les  détails,  en  même  temps 
qu'elle  fit  faire  à  l'art  du  XIV' siècle  un  grand  pas  \ers  l'unité 
d'ornementation.  C'est  alors  qu'arrivent  les  feuilles  détarkées,  iso- 
lées et  de  plein  relief,  souvent  aiguisées  en  longues  et  fioes  den- 
telures, et  que  les  dais  en  saillie  commencent -à  se  multiplier. 
L'ornementation  s'appesantit  au  XV'  siècle  sous  les  lignes  tour- 
mentées et  contournées  du  gotlii(iuc  flamboyant,  sous  je  goiit  des 
tours  de  force  et  l'affectation  de  science,  sous  cette  profusioD  de 
végétation  indigène  et  vulgaire  qu'elle  fit  germer  de  toutes  les 
saillies ,  de  toutes  les  arêtes,  de  toutes  les  cavités,  et  à  l'ombre  de 
laquelle  vinrent  s'abriter  des  légions  de  statues,  avec  leurs  niches 
et  leurs  dais.  Après  avoir  épuisé  l'imitation  de  la  nature  végétale, 
la  dentelle  et  la  broderie  eurent  leur  temps,  puis  les  arabesques. 
puis  cette  ornementation  de  la  Renaissance,  d'abord  \i\e ,  fine  et 
légère,  tant  qu'elle  resta  fidèle  a  la  division  des  parties,  puis 
devenue  massive,  exagérée  et  sans  esprit,  quand  elle  brisa  ses  li- 
gnes ou  força  ses  proportions;  en  général,  l'alliance  avec  le  gothi- 
que abâtardi  du  XV*  siècle,  commencée  sous  Louis  XII,  se  pro- 
longe pendant  les  premières  années  du  règne  de  son  successeur; 
c'est  ensuite  qu'arrive  la  jolie  colonne  de  petite  proportion,  remar- 
quable par  la  saillie  du  stylobate,  par  la  co»iuetterie  de  son  cha- 
piteau et  de  son  eutablement ,  par  la  variété  et  la  finesse  de  sou 
ornementation ,  que  rend  plus  piquante  le  contraste  des  surfiMes 
lisses.  Malheureusement,  ce  brillant  rameau  de  l'art  de  la  Renais- 
sance fut  bientôt  étouffé  chez  nous  sous  la  réunion  des  parties  et 
les  proportions  exagérées  des  objets  décorés  qui  en  furent  la  suite, 
aussi  bien  que  sous  les  lourdes  et  bizarres  importations  des  goûts 
florentin  et  vénitien,  dont  le  développement  presque  parallèle  jeta 
de  bien  plus  profondes  racines  dans  notre  sol.  En  beaucoup  d'en- 
droits même  ce  fut  sans  intermédiaire  que  l'art  passa  du  flam- 
boyant gothique  à  ce  que  nous  pourrions  appeler  le  flaratwyant 
de  la  Renaissance,  tant  ou  y  retrouve  la  même  pesanteur  des  mas- 
ses ,  le  même  abus  des  lignes  brisées  et  contournées,  la  même  pro- 
fusion d'ornements  et  la  même  absence  de  critique  dans  leur  choix, 
le  même  goût  pour  ces  porle-à-faux ,  ces  culs-df -lampe  et  ces  clefs- 
pendantes  ,  au  moyen  desquels  les  voûtes  de  nos  églises  semblè- 
rent souvent  rivaliser  avec  celles  des  cavernes  a  stalactites.  On 
peut  ajouter  que  cette  seconde  dégéneration  fut  encore  plus  fâ- 
cheuse que  la  première ,  puisqu'elle  faussait  à  la  fois  le  type  chré- 
tien et  le  type  grec,  et  que  trop  souvent  elle  ne  rachetait  pas 
même  par  le  mérite  et  la  grâce  de  l'exécution,  les  inconvenances 
et  les  disparates  d'une  composition  païenne  et  thcAlrale  jusque 
dans  l'intérieur  des  églises ,  assemblage  bâtard  d'inspirations  grec- 
ques, romaines,  florentines  et  vénitiennes. 

Ce  n'est  point  ici  que  nous  traiterons  de  la  peinture  appliquée  à 
la  représentation  de  la  figure  humaine  ;  ses  compositions  apparte-  • 
nant  d'une  manière  à  peu  près  exclusive  à  l'intérieur  des  églises , 
nous  la  réserverons  pour  le  chapitre  suivant.  >ous  ne  croyons  de- 
voir parler  maintenant  de  cet  art  quecomme  appliqué  à  l'omemen- 


i.39 


ftEVUE  DK  LARCHIÏECTIJUK  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


UO 


tation.  La  peinture  et  la  mosaïque  étaient  arrivées  dans  notre  cuite 
avec  la  basilique  même,  et  la  première  surtout  ne  cessa  jamais  de 
concourir  à  la  décoration  des  églises  ;  aussi  trouvons  nous  dès  le 
\l'  siècle  les  teintes  plates  employées  pour  faire  valoir  ou  rem- 
placer les  reliefs,  les  refends  substitués  aux  bossages,  et  jusqu'à 
des  rinceaux  et  autres  ornements  courants  présentant  plus  ou 
moins  le  caractère  roide  et  anguleux  de  l'époque  ;  mais  c'est  au 
XII'  et  au  XIIP  que  la  puissance  et  le  charme,  nous  pourrions 
presque  dire  le  besoin  pour  les  yeux,  d'une  coloration  brillante  et 
variée,  furent  plus  généralement  sentis,  et  qu'elle  arriva  dans  nos 
temples  comme  auxiliaire,  souvent  môme  en  remplacement  de  la 
sculpture  d'ornementation,  probablement  par  suite  du  contact  que 
les  croisades  avaient  établi  entre  nos  devanciers  et  des  populations 
plus  méridionales  chez  lesquelles  florissait  déjà  cet  élément  de  dé- 
coration. Bientôt  naturalisé  chez  nous,  il  s'y  combina  merveilleu- 
sement avec  la  lumière  colorée  de  ces  vitraux  éclatants  dont  le 
XIII'  siècle  dotait  en  même  temps  nos  églises.  Aussi  n'y  eut-il  pas 
seulement  introduction  d'une  couleur  brillante  dans  l'ornementa- 
tion, mais  encore  quelquefois  réaction  de  cette  même  couleur  con- 
tre la  forme,  réaction  attestée  par  le  plâtre  appliqué  sur  des  chapi- 
teaux, sur  des  moulures,  sur  des  archivoltes  de  l'exécution  la 
plus  délicate ,  pour  y  substituer,  au  simple  clair-obscur  de  la  dé- 
coration sculptée,  les  splendeurs  d'une  riche  décoration  peinte. 
Au  reste,  cette  préférence  donnée  à  la  couleur  ne  survécut  pas  au 
contact  qui  l'avait  importée  chez  nous,  et  l'auréole  dont  elle  avait 
ceint  l'art  des  XII'  et  XIII"  siècles  ne  brilla  pas  même  sur  celui 
qui  les  suivit  immédiatement.  L'ornementation  peinte  ne  disparut 
pas  de  nos  églises  après  l'abandon  de  ce  luxe  de  couleurs,  mais 
elle  y  fut  employée  sSbrement,  et  cessa  d'empiéter  sur  le  domaine 
de  la  sculpture.  On  devra,  toutes  les  fois  qu'on  en  rencontrera  les 
traces,  en  étudier  avec  un  soin  particulier  les  procédés,  les  cou- 
ches successives,  les  motifs,  les  détails  souvent  très-fins  et  ti-ès-com- 
pliqués,  et  enfin  les  effets  plus  ou  moins  éclatants,  quand  on  par- 
viendra à  les  découvrir,  soit  sous  les  repeints,  soit  sous  le  badi- 
geonnage  que  les  générations  intermédiaires,  et  surtout  la  nôtre , 
ont  prodigués  si  déplorablement  pour  anéantir  tout  vestige  de  cette 
branche  importante  de  l'art  du  Moyen-Age.  Quelque  modernes  que 
soient  les  repeints,  il  faudra  examiner  scrupuleusement  s'ils  ne 
doivent  pas  être  regardés  comme  une  reproduction  plus  ou  moins 
fidèle  de  la  décoration  primitive  :  c'est  ce  qu'on  reconnaîtra  aux 
motifs  d'ornement  qui  y  figurent  ;  toutes  les  fois ,  par  exemple , 
que  ce  sera  quelqu'une  des  variétés  du  chevron  ,  du  méandre ,  ou 
d'autres  moulures  n'ayant  pas  survécu  à  l'époque  de  transition, 
on  pourra  affirmer  que  c'est  jusque-là  qu'il  faut  remonter  au  moins 
pour  trouver  la  date  du  premier  travail,  dont  les  générations  in- 
termédiaires aurontrespecté  la  pensée  dans  leurs  restaurations  sou- 
vent maladroites ,  mais  toujours  moins  funestes  que  le  badigeon- 
nage. 

C'est  surtout  à  l'extérieur  que  la  recherche  de  l'ornementation 
peinte  devra  être  faite  avec  le  plus  de  soin ,  à  raison  des  causes  plus 
puissantes  de  destruction  qu'elle  y  aura  rencontrées.  Ainsi  il  ne 
suffira  pas  d'explorer  les  couloirs  et  autres  parties  intérieures  des 
porches  et  des  portails ,  les  chapiteaux ,  les  statues ,  les  colonnes , 
les  dais ,  les  couronnements ,  il  faudra  encore  s'assurer  si  les  par- 
ties lisses  des  murs ,  l'extérieur  de  l'abside  et  du  chœur ,  ou  toute 
autre  surface  où  sa  présence  n'a  pas  été  soupçonnéejusqu'ici,  n'en 
renferment  pas  quelques  vestiges,  qui  acquerraient  alors  une  haute 
importance  pour  l'histoire  de  l'art. 


Les  mêmes  recherches  devront  s'appliquer  aux  incrustations, 
émaux,  verres,  mosaïques,  alternation  de  matériaux  discolores, 
tels  que  marbres  ou  briques ,  et  en  général  à  tout  ce  qui  a  eu  pour 
but  d'imprimer  à  l'ornement  un  caractère  polychrome.  Les  incrus- 
tations surtout  méritent  une  grande  attention  par  les  procédés  va- 
riés et  souvent  compliqués  qui  ont  été  employés  dans  leur  prépa- 
ration ,  tels  que  Its  pâles,  les  mastics,  enduits  brillants  formant 
une  sorte  de  stuccature  ordinairement  rouge ,  chargés  d'ornements 
dorés  ou  discolores  présentant  quelque  relief.  Pour  recevoir  ces 
enduits ,  les  surfaces  lisses  ont  parfois  été  sillonnées  de  stries  dont 
il  sera  nécessaire  de  tenir  note,  lors  même  qu'elles  seront  restées 
libres.  Toute  cette  ornementation  polychrome  remonte  aux  mêmes 
époques  que  la  brillante  ornementation  peinte  dont  nous  venons  de 
parler.  Il  est  certaines  contrées  de  la  France ,  telles  que  l'Auver- 
gne ,  par  exemple ,  où  elle  a  pris  un  plus  grand  développement  et 
forme  une  portion  notable  de  l'art.  C'est  surtout  dans  les  portails, 
les  couronnements,  les  absides,  les  faces  terminales  des  transsepts, 
qu'on  en  doit  chercher  des  traces.  Toutes  les  fois  qu'on  rencon- 
trera un  ornement  en  creux,  tel  que  trèfle,  quatre-feuille,  œil-de- 
bœuf  ou  autre,  il  faudra  s'a.ssurer  s'il  n'a  pas  été  rempli  dans  l'o- 
rigine par  quelque  incrustation. 

Nous  allons  maintenant  reprendre  chacune  des  grandes  divi- 
sions de  l'église  à  l'exlérieur ,  pour  indiquer  sur  quels  points  de 
chacune  d'elles  devront  plus  particulièrement  porteries  recherches. 

(La  fin  prochainement.) 


DU  CHAUFFAGE  ET  DE  LA  VENTILATION. 


(*e  article  ) 


Chauffage  et  Ventilation  des  écoles  et  des  salles  d'asile. 

Au  nombre  des  salles  de  réunion  qui  ont  le  plus  besoin  de  ven- 
tilation, se  trouvent  eu  première  ligne  les  écoles  et  les  salles  d'asile. 
Aux  causes  ordinaires  de  l'altération  de  l'air,  la  respiration  et  la 
1  transpiration,  vient  encore  se  joindre  dans  ces  endroits  la  mal- 
:  propreté  des  enfants.  Aussi  la  sensation  que  ceux-ci  éprouvent  en 
,  entrant,  l'hiver,  dans  les  écoles  chauffées  au  moyen  des  anciens 
i  poêles  est-elle  des  plus  désagréables  ;  souvent  même  l'absorption 


kki 


RKVUE  I)K  [/ARCHITKCTLUE  KT  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


Mi 


de  cet  air  insalubre  compromet  la  santé  des  élèves  et  celle  des  maî- 
tres. C'est  donc  une  question  grave  que  celle  de  l'assainissement 
de  ces  localités  :  aussi  nous  allons  en  entretenir  aujourd'hui  nos 
lecteurs. 

M.  E.  Péclet,  inspecteur  général,  qui  s'est  beaucoup  occupé  de 
cette  question, a  fait  paraître  en  1.S'12  un  mémoire  détaillé  (t)  dans 
lequel  se  trouve  indiqué  le  système  de  chauffage  et  de  ventilation 
([ue  nous  avons  appliqué  depuis  au  chauffage  des  (îcolcs,  avec  les 
améliorations  que  notre  pratique  nous  a  suggérées.  Nous  allons 
donner  la  description  du  système,  tel  que  nous  l'établissons  au- 
jourd'hui. 

Les  appareils  de  chauffage  sont  des  calorifères  à  air  chaud  placés 
dans  les  salles  elles-mêmes,  afin  de  ne  pas  perdre  leur  chaleur 
rayonnante. 

Ils  sont  au  nombre  de  deux,  et  posés  à  une  extrémité  de  la  salle, 
du  cote  de  l'estrade,  pourque  le  maitre  puisse  facilement  en  diriger 
le  service. 

Les  tuyaux  à  fumée  s'élèvent  d'abord  verticalement  au-dessus 
des  appareils,  et  traversent  horizontalement  la  salle  dans  toute  sa 
longueur,  pour  monter  ensuite  dans  une  cheminée  en  maçonnerie 
construite  à  l'extrémité  de  la  salle  opposée  aux  calorifères. 

Cette  cheminée  descend  jusqu'au  niveau  du  sol  de  la  classe,  où 
elle  aboutit  à  un  coffre  horizontal  percé  d'ouvertures  qui  servent 
à  l'évacuation  de  l'air  de  la  salle. 

Les  calorifères  sont  ceux  dont  nous  avons  donné  la  description 
dans  un  article  précédent  [col.  21 1).  Us  se  composent  d'une  cloche 
en  fonte,  garnie  intérieurement,  dans  la  partie  qui  forme  le  foyer 
proprement  dit,  d'une  garniture  en  briques  réfractaires  qui  em- 
pêche le  métal  de  rougir,  et  d'une  enveloppe  en  tôle,  percée  à  la 
partie  supérieure  de  larges  bouches  de  chaleur.  C'est  par  ces  ou- 
vertures que  sort  l'air  chaud  appelé  du  dehors  au  moyen  des  con- 
duits en  briques  établis  sous  le  sol  et  débouchant  sous  les  appareils. 

Cet  air  chaud,  lancé  à  une  extrémité  de  la  salle  en  grande  abon- 
dance, est  appelé  à  l'autre  extrémité  par  la  cheminée  de  ventilation. 
Le  tirage  y  est  déterminé  par  réchauffement  de  l'air,  au  moyen  de 
la  chaleur  perdue  des  tuyaux  à  fumée  qui  la  traversent. 

La  planche  21  représente  une  école  chauffée  et  ventillée  suivant 
le  système  dont  nous  venons  de  donner  une  idée. 

La  fig.  1  est  une  coupe  longitudinale  de  la  salle,  la  fig.  2  une 
coupe  tranversale ,  et  la  fig.  3  le  plan  représenté  à  une  échelle 
moindre  de  moitié. 

A.  A.  Calorifères  à  air  chaud. 

a. a.  Portes  de  chargement. 

6.6.  Portes  par  lesquelles  on  met  sur  la  grille  le  petit  bois  néces- 
saire àallumer  le  charbon,  et  qui  servent  en  même  temps  à  faciliter 
le  nettoyage  de  la  grille. 

ce.  Portes  de  cendrier. 

B.B.  Tuyaux  à  fumée  traversant  la  salle  dans  toute  sa  longueur 
avant  de  se  rendre  à  la  cheminée  de  ventilation,  où  ils  se  réunissent 
pour  monter  au  milieu  et  s'élever  au-dessus  du  toit. 

L'extrémité  du  tuyau  est  recouverte  d'un  chapeau  en  tôle  qui  le 
préserve  de  la  pluie. 


(1)  Ce  Mémoire  a  élé  adopté  en  séance  du  Conseil  royal  de  l'Instruction  pu- 
blique, qui  en  a  volé  l'impression  à  1000  exemplaires,  et  la  distribution  à 
MM.  les  recteurs  des  académies,  à  MM.  les  Inspecteurs  cl  sous-inspecteurs 
primaires,  et  à  MM.  les  préfets  der,  départements.  On  le  trouve  i  la  librairie 
de  Paul  Dupont,  rue  de  Grcneilc-Saint-Honoré,  55. 


d.d.  Registres  placés  dans  les  tuyaux  à  fumée  pour  régler  le  ti- 
rage, et  par  suite  l'activité  des  foyers. 

E.E.  Conduits  pratiqués  sous  le  sol  pour  l'arrivée  de  l'air  exté- 
rieur dans  les  calorilëres. 

g.g.  Ouvertures  des  prises  d'air  recouvertes  de  grilles  en  fonte, 
qui  les  préservent  de  l'introduction  de  corps  étrangers,  et  qui  i>ont 
cependant  faciles  à  enlever  pour  le  nettoyage  des  conduits. 

f.f.  Registres  en  tôle  servant  à  régler  l'admission  de  l'air  dans 
les  appareils. 

C.  Cheminée  de  ventilation. 

l.  Chapeau  en  tôle  préservant  l'ouverture  de  la  cheminée  de  la 
pluie  et  des  coups  de  vent. 

D.D.  Coffre  en  maçonnerie  ou  en  bois  communiquant  avec  la 
cheminée  et  servant  à  répartir  l'appel  dans  toute  la  largeur  de  la 
salle. 

t.t.t...  Ouvertures  percées  sur  la  façade  de  ce  coffre  pour  l'intro- 
duction de  l'air  dans  la  cheminée.  Ces  ouvertures  augmentent  de 
dimensions  à  mesure  qu'elles  s'éloignent  de  la  cheminée,  de  ma- 
nière à  donner  chacune  passage  à  un  égal  volume  d'air.  Des  re- 
gistres en  tôle  à  coulisse,  placés  devant  chacune  d'elles,  permettent 
d'obtenir  aussi  exactement  que  possible  cette  régularité  dans  la 
ventilation,  et  de  produire  le  chauffage  sans  renouvellement  d'air 
t.vant  l'arrivée  des  élèves  dans  la  classe. 

h.  Trappe  en  bois  qui  se  meut  dans  des  coulisses  et  ferme 
une  grande  ouverture  percée  à  la  partie  supérieure  de  la  cheminée. 
Cette  ouverture  sert,  l'été,  â  produire  une  ventilation  naturelle,  et 
l'hiver,  à  laisser  échapper  momentanément  un  grand  volume  dair 
chaud  quand  on  a  fait  trop  de  feu  dans  les  calorifères,  et  que  la 
température  de  la  salle  est  trop  élevée. 

Pour  obtenir  dans  la  cheminée  de  ventilation  une  plus  grande 
surface  de  chauffage  et  donner  par  conséquent  une  plus  grande 
vitesse  à  l'air  qui  la  traverse  pour  s'échapper  au  dehors,  il  vaut 
mieux  ne  pas  réunir  les  tuyaux  a  fumée  eu  un  seul,  mais  les  faire 
monter  tous  les  deux  séparément  dans  la  cheminée,  en  les  espaçant 
de  manière  à  ce  qu'ils  divisent  la  cheminée  dans  la  longueur  en  trois 
parties  égales.  Cette  disposition  présente  encore  un  autre  avan- 
tage: c'est  que  les  deux  appareils  sont  complètement  indépendants 
l'un  de  l'autre ,  et  qu'on  peut  n'en  allumer  qu'un  seul  quand  le 
temps  n'est  pas  très-froid,  ou  que  l'un  des  calorifères  est  en  répa- 
ration. 

niRECTIOn   DBS   AFPABEILS. 

Chauffage  sans  ventilation.  —  Avant  l'arrivée  des  élèves  il  faut 
échauffer  les  classes  le  plus  promptement  possible  ;  on  tient  alors 
fermés  les  registres  d'introduction  de  l'air  dans  les  calorifères  et 
les  registres  de  ventilation.  Ou  ouvre  les  trappes  percées  a  la  partie 
inférieure  des  calorifères  pour  produire  une  circulation  de  l'air  de 
la  salle  dans  les  appareils.  On  produit  alors  le  chauffage  sans  ven- 
tilation et  on  chauffe  plus  promptement  les  salles. 

Chauffage  avec  ventilation.  — Quelque  temps  après  rarrivéedes 
enfants ,  il  est  nécessaire  de  produire  un  renouvellement  d'air  et 
de  continuer  le  chauffage  pour  maintenir  l'équilibre  de  tempéra- 
ture. On  ferme  alors  les  trappes  qu'on  avait  maintenues  ouvertes 
avant  la  classe,  et  on  ouvre  les  registres  des  prises  d'air  et  les  re- 
gistres de  ventilation,  de  manière  à  produire  le  chauffage  avec  Ten- 
ti  lotion. 


U3. 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


U4 


Ces  registres  permettent  de  régler  la  ventilation  proportionnelle- 
ment au  nombre  d'élèves  qui  sont  dans  la  classe. 

Ventilation  sans  chauffage. —  On  peut,  l'été,  produire  la  venti- 
lation par  l'air  froid  au  moyen  des  mêmes  appareils.  Il  suffit  de 
placer  à  la  partie  inférieure  de  la  cheminée  un  petit  foyer  d'appel 
(|uipourra  être  un  réchaud,  pourbrûler  delà  tannée,  ouunebrai- 
sière  à  poussier  de  chaibon  de  bois. 

Une  porte  en  tôle  fermera  l'ouverture  par  laquelle  on  introduira 
le  petit  foyer  dans  la  cheminée. 

L'appel  produit  dans  la  cheminée  par  réchauffement  de  l'air, 
aux  dépens  de  la  chaleur  dégngée  par  le  foyer  d'appel ,  détermi- 
nera un  appel  d'air  froid  par  les  prises  d'air.  Cet  air  traversera 
l'appareil  pour  sortir  parles  bouches  de  chaleur,  et  renouvellera 
l'air  de  là  salle  en  se  rendant  à  la  cheminée  de  ventilation,  par  la- 
quelle il  s'échappera  dans  l'atmosphère. 

RÉSULTATS  DES  EXPBBIENCES  FAITES  SUR  CE  MODE  DE  CHAUFFAGE 

ET  DE  Ventilation. 

Pour  donner  une  idée  des  résultats  obtenus  par  l'emploi  de  ces 
appareils  dans  les  écoles,  nous  citerons  un  ^trait  d'un  rapport  du 
docteur  Béhier  au  Comité  central  de  l'Instruction  primaire. 

«  La  commission  dite  de  chauffage,  nommée  par  le  comité  cen- 
tral ,  a  bien  voulu  me  charger  de  constater  les  résultats  de  l'em- 
ploi de  l'appareil  de  M.  René  Duvoir,  d'après  les  systèmes  indiqués 
par  M.  Péclet,  pour  le  chauffage  de  l'école  de  la  rue  Neuve-Cocjue- 
nard  (école  de  garçons,  M.  Brunier,  instituteur)  d'abord,  et  ensuite 
pour  le  chauffage  des  deux  écoles  de  la  Halle-aux-Draps. 

«  Ce  sont  ces  résultats  que  je  vous  demanderai  la  permission  de 
vous  exposer. 

«  Cet  examen,  selon  le  vœu  de  la  commission,  doit  embrasser  les 
trois  conditions  du  degré  de  chauffage  obtenu,  de  la  ventilation  que 
doit  produire  l'appareil,  enfin  de  la  quantité  de  combustible  dé- 
pensé. 

<(  Pour  ce  qui  est  de  l'élévation  de  la  température  obtenue,  elle  a 
toujours  été  satisfaisante,  souvent  même  trop  considérable  momen- 
tanément, surtout  pour  les  écoles  de  la  Halle-aux-Draps,  où  la  di- 
rection de  l'appareil  est  encore  peu  habituelle,  et  surtout  à  cause 
de  l'élévation  de  la  température  extérieure  pendant  les  mois  qui 
viennent  de  s'écouler.  A  l'école  de  la  rue  Neuve-Coquenard ,  la 
teujpérature  a  toujours  été  de  12»  2  R.  Elle  s'était  élevée  entre  13 
et  14"  R.,  comme  moyenne,  aux  écoles  de  la  Halle-aux-Draps. 

a  L'école  de  la  rue  Neuve-Coquenard  est  dans  des  conditions  de 
chauffage  qui  rentrent  dans  la  catégorie  la  plus  ordinaire.  Pour  les 
écoles  de  la  Halle-aux-Draps,  au  contraire,  on  doit  reman[uer,  à 
part  la  grandeur  de  ces  salles,  qui  doit  modifier  la  grandeur  de 
l'appareil  ;  on  doit  reconnaître,  dis-je,  que  le  mode  de  clôture  de  cet 
établissement  offrait  des  conditions  très-défavorables  :  le  plafond, 
qui  a  la  forme  d'une  voûte  plein-cintre,  est  composé  seulement  de 
planches  recouvertes  de  toiles,  au-dessus  desquelles  se  trouve  le 
toit  du  bâtiment.  La  température  a  été  constamment  assez  élevée 
dans  ces  écoles,  et  même,  à  certains  jours,  trop  élevée,  comme  je 
l'ai  dit. 

«  11  me  parait  hors  de  doute  que  l'appareil,  dans  les  deux  loca- 
lités où  il  a  été  employé,  a  été  un  moyen  de  chauffage  toujours 
suffisant.  Le  témoignage  des  instituteurs  est  formel  à  cet  égard. 

«  Cette  température  est  toujours  uniformément  répandue  dans 


les  différents  points  de  la  salle.  Contrairement  aux  autres  poêles, 
qui  chauffent  surtout  les  ix)ints  les  plus  voisins,  l'appareil  n'est  pas 
sujet  à  ce  rayonnement  circonscrit.  En  effet,  comme  vous  le  savez. 
Messieurs,  les  parois  du  calorifère  lui-même  sont  entourées  d'un 
second  manchon  de  tôle,  laissant  entre  le  foyer  et  lui  une  dislance 
de  plusieurs  centimètres,  cavité  qui  communique  directement  avec 
la  prise  d'air  extérieur;  ce  n'est  donc  pas  en  échauffant  les  cou- 
ches d'air  les  plus  rapprochées  que  1  appareil  agit,  mais,  au  con- 
traire, l'appel  exécuté  par  la  cheminée  de  ventilation  attire  l'air 
extérieur  de  la  prise  d'air,  et  c'est  après  s'être  chauffé  à  son  passage 
dans  la  cavité  qui  entoure  le  foyer  et  que  circonscrit  le  manchon, 
que  cet  air  traverse  la  pièce  et  va  se  rendre  dans  la  cheminée,  par 
laquelle  il  s'échiippe  pour  être  remplacé  par  un  nouvel  air  aussi 
préalablement  chauffé  par  l'appareil  au  moment  de  son  entrée. 
C'est  ce  passage  perpétuel  de  l'air  chauffé  qui  répand  ainsi  une 
chaleur  uniforme  dans  tous  les  points  de  la  pièce.  Aussi,  dans  les 
trois  établissements,  des  thermomètres  ont  été  placés  à  trois  points 
différents,  un  à  l'estrade  de  l'instituteur,  un  au  milieu  de  l'un  des 
côtés  de  la  classe,  le  troisième  au  niveau  de  la  cheminée  d'appel  ; 
toujours  les  deux  derniers  ont  marqué  la  même  température  ;  celui 
de  l'estrade  est  toujours  un  peu  au-dessous,  d'un  demi-degré  à  peu 
près,  ce  qui  s'expliquerait  soit  par  la  présence  d'un  châssis  voisin 
dans  les  trois  cas,  soit  plutôt  parce  que  l'estrade,  située,  dans  les 
trois  cas,  un  peu  en  arrière  des  appareils  et  entre  eux,  est  moins 
directement  placée  dans  le  sensdu  courant  d'air  chaud  qui  s'établit. 
Du  reste,  cette  différence,  sensible  au  thermomètre  ,  n'est  nulle- 
ment appréciable  comme  variété  de  sensation. 

«Dans  ces  deux  localités,  l'élévation  de  la  température  n'a 
jamais  été  accompagnée  d'altération  appréciable  dans  l'air.  Loin 
d'y  rencontrer  cette  odeur  souvent  pénible  que  présentent  certaines 
écoles  pendant  l'hiver,  l'air  m'a  toujours  paru  pur  et  sans  odeur. 
C'est  là  l'effet  de  la  ventilation  opérée  par  l'appareil.  Cette  ventila- 
tion est  considérable.  Dans  l'école  de  la  rue  ISeuve-Cociuenard,  elle 
s'était  élevée  terme  moyen  à  978,36  mètres  cubes  par  heure,  ce  qui, 
pour  cent  quatre-vingts  enfants  de  sept  à  dix  ans,  donne  5,43  mè- 
tres cubes  par  chaque  enfant  pour  chaque  heure. 

«  Aux  écoles  de  la  Halle-aux-Draps,  la  ventilation  ne  peut  pas 
être  très-rigoureusement  et  scientificjuement  constatée.  On  a  bien 
trouvé  diins  la  cheminée  d'appel  de  chacjue  école  une  ventilation 
de  1 1  à  1300  mètres  cubes  par  heure  ;  mais  la  hauteur  des  croisées 
et  leur  mauvaise  fermeture  font  qu'il  s'échappe  de  la  salle  une 
quantité  d'air  chaud  assez  considérable ,  qui  diminue  la  vitesse 
qu'on  trouve  dans  la  cheminée.  Mais  si  l'on  peut  difficilement 
faire  l'appréciation  mathématique,  on  peut  constater  pratiquement 
que  l'air  ne  porte  à  l'école  des  garçons,  comme  à  celle  des  tilles, 
aucune  mauvaise  odeur;  la  respiration  est  facile;  les  conditions  de 
salubrité  me  paraissent  aussi  complètes  que  possible.  On  conçoit 
très-bien  qu'un  air  aussi  largement  renouvelé  soit  pur  et  sans  alté- 
ration. 

«  La  dépense  de  combustible,  d'après  les  expériences  faites,  varie 
de  20  à  2â  kilogrammes  de  houille  par  jour  pour  l'école  de  la  rue 
Neuve-Coquenard,  et  de  40  à  50  kilogrammes  pour  chacune  des 
écoles  de  la  Halle-aux-Draps.  » 

Les  expériences  faites  par  le  docteur  Béhier  prouvent  bien  que 
sous  tous  les  rapports,  élévation  de  température,  renouvellement 
de  l'air  et  économie  de  combustible,  nous  avons  satisfait  à  toutes 
les  conditions  imposées 

Nous  pouvons  encore  préciser  par  des  nombres  les  bons  effets  de 


!M 


REVUE  DK  L'AUCHirr.CTURK  KT  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


ii9 


ce  moyen  (l'assainissement  des  écoles,  en  donnant  les  résultats  '■ 
d'expériences  faites  comparativement  snr  la  composition  de  l'air 
pris  dans  les  salles  chaiil'rées  à  la  manière  ordinaire,  et  dans  les 
salles  que  nous  avons  ciiauffées  et  ventilées. 

Ces  expériences,  faites  sous  les  yeux  de  M.  Dumas  dans  son  labo- 
ratoire par  M .  Félix  Leblanc,  sont  décrites  dans  un  mémoire  ayant 
pour  titre  Recherchex  sur  la  composition  de  tair  confiné,  et  inséré 
dans  les  Annales  de  physique  et  de  chimie,  3°"  série,  tom.  X.  Voici 
ce  qu'on  lit  page  N  du  numéro  de  juin  1812  : 

V.  Salle  d'asile  pour  l'enfance,  deuxième  arrondissement ,  rue 
Neuve-Coquenard. — «  L'aira  étérecueilli  dans  une  petite  pièce  basse 
«  et  étouffée,  dite  le  préau,  où  les  enfants  séjournent  pendant  les 
«  beures  de  récréation,  surtout  lorsque  le  temps  ne  permet  pas  la 
«  sortie  à  l'air  libre.  Cent  seize  enfants  de  trois  à  six  ans,  tant  filles 
«  que  garçons,  séjournaient  alors  depuis  trois  heures  dans  cette 
«  pièce  de  230  mètres  cubes  de  capacité  ;  l'odeur  qui  y  régnait  était 
«  forte  et  désagréable,  bien  que  la  porte  fût  entr'ouverte  et  un  va- 
«  sistas  béant  au  plafond.  L'analyse  a  indiqué  :i  millièmes  d'acide 
'(  carbonique,  et  une  diminution  d'oxygène  sensiblement  propor- 
«  tionnelle.  » 

«  Salle  d'école  primaire,  deuxième  arrondissement.  —  «  Cent 
«  quatre-vingts  garçons  de  sept  à  dix  ans;  séjour  continu  de  une 
«  heure  à  cinq  heures.  Cette  salle  est  la  seule  (1812)  encore  qui  soit 
«  ventilée  par  les  appareils  construits  par  M.  René  Du  voir,  d'après 
«  le  système  de  M.  l'éclet.  Pendant  l'hiver,  le  chauffage  a  lieu  à 
«  l'aide  de  l'air  chaud  amené  par  la  ventilation.  .l'ai  successive- 
0  ment  examiné  l'état  de  l'air  vers  la  fin  du  séjour  obligé  des  en- 
«  fants  :  1"  La  ventilation  étant  à  son  maximum;  2°  notabrement 

affaiblie,  un  seul  poêle  fonctionnant;  3°  tout  moyen  de  ventilation 
«  étant  interdit  et  la  salle  complètement  close  ;  on  s'est  efforcé  de 
«  se  placer  d'ailleurs  dans  des  conditions  semblables.  » 

«  Ventilation  complète. —  «  Dans  le  premier  cas,  la  ventilation 
«  étant  de  1,080  mètres  cubes  par  heure,  c'est-à-dire  G  mètres 
«  cubes  environ  par  enfant  et  par  heure,  la  quantité  d'oxygène  dis- 
«  parue  dans  cette  atmosphère  a  été  de  IG  dix-millièmes;  la  quan- 
«  tité  d'acide  carbonique  pouvait  donc  s'élever  au  plus  à  deux  mil- 
«  lièmes.  Aucune  odeur  ne  régnait  dans  la  salle  ;  la  respiration 
«  n'y  était  nullement  gênée.  Température  17°.  » 

«  Ventilation  imparfaite.  —  «  Le  volume  d'air  écoulé  par  la 
«  cheminée  d'appel  était  de  837  mètres  cubes  par  heure  ;  la  pro- 
«  portion  d'acide  carbonique  a  été  trouvée  de  47  dix-millièmes; 
«  l'air  était  loin,  on  le  voit,  d'être  ramené  à  son  état  normal.  » 

«  Salle  fermée.  — «  Tout  étant  parfaitement  clos,  on  recueille 
«  l'air  au  bout  du  même  nombre  d'heures  de  séjour,  et  l'on  trouve 
«  87  dix-millièmes  d'acide  carbonique.  L'atmosphère  était  lourde, 
«  l'instituteur  se  plaignait  de  la  chaleur,  et  attendait  avec  inipa- 
«  tience  le  moment  de  pouvoir  ouvrir  les  fenêtres.  La  température 
«  intérieure  n'était  que  de  1 8".  Le  thermomètre  extérieur  marquait 
«  16°  ;  l'air  un  peu  agité.  » 

Cette  comparaison  nous  parait  décisive  en  faveur  de  l'applica- 
tion de  ce  système,  qui,  partout  où  il  a  été  employé,  a  donné  les 
meilleurs  résultats  qu'on  puisse  désirer  sous  le  rapport  du  chauf- 
fage et  de  la  ventilation. 

On  peut  s'en  convaincre  en  visitant  les  écoles  dans  lesquelles  il 
a  été  établi,  savoir,  à  Paris  :  l'école  delà  rue  >enve-Coquenard  ; 


L'école  de  filles  et  l'école  de  garçons  de  la  Halle-aux-Draps  ; 

Les  écoles  et  salles  d'asile  de  la  rue  du  Renard-Saint-Méry  ; 

Celles  de  la  rue  des  Ulancs-Manteaux  ; 

L'école  supérieure  de  la  rue  Neuve-Saint-Laurent; 

L'école  de  la  rue  des  Brodeurs  ; 

Kt  les  autres  écoles  de  Vaugirard,  de  Bercy,  de  Noirmoutiers,  etc. 

Re-^é  DUVOIR. 


DE  L'HUMIDITÉ  D.\NS  LES  CONSTRICTIONS  , 

DES    MOYENS    DE    L\    PRÉVENIR    ET    u'V    REMÉDIER. 


COMPLtlIEM  DES  AWOTATIONS  UOITÉES  il  MÉMOIRE  DE  I.  IÉ0\  UlDOïEI. 

Nous  ne  saurions  trop  insister,  comme  le  fait  l'auteur  du  re- 
marquable mémoire  que  nous  avons  annoté,  sur  la  nécessité  de 
prendre  toutes  les  mesures  possibles  pour  préserver  les  l>Atiments 
en  construction  de  l'invasion  de  l'humidité.  Nous  le  demandons, 
non-seulement  pour  la  santé  des  hommes  et  pour  la  conservation 
des  objets  à  leur  usage,  mais  encore  pour  la  conservation  de  quel- 
ques-unes des  parties  constitutives  des  édifices  eux-mêmes.  Nous 
citerons  pour  exemple  les  dallages  en  marbre  des  salles  du  Musée 
des  Antiques,  au  Louvre,  qui  sont  dégradés  par  l'humidité,  et 
pourtant  la  plupart  de  ces  dallages  ne  datent  guère  que  de  la  fin  de 
l'Empire.  Là  belle  mosaïque  dont  la  Melpomène  colossale  est  entou- 
rée se  boursoufle  de  toutes  parts,  et  est  menacée  d'une  destruc- 
tion très-prochaine.  Il  n'y  a  cependant  guère  plus  de  trente  ans 
qu'elle  existe.  Qu'on  la  compare  à  celles  que  les  Romains  nous  ont 
laissées  depuis  tant  de  siècles,  et  qu'on  retrouve  encore  en  si  bon 
état  sous  le  sol  de  nos  campagnes  !  Il  n'y  a  pas  lieu  de  douter  que 
la  mosaïque  du  Musée  n'ait  été  détériorée  par  l'humidité  du  sol, 
concentrée  par  l'huile  avec  laquelle  on  lustre  la  surface  de  la  mo- 
saïque et  qui  s'est  opposée  à  l'évaporation  ;  peut-être  même  est- 
elle  posée  sur  plâtre.  Nous  connaissons  le  goût  des  modernes  pour 
ce  détestable  moyen  de  scellement. 

En  résumé,  nous  dirons  qu'il  faut  couper  le  mal  à  sa  racine. 
Tous  les  revêtements  posés  après  coup  ne  font  que  le  déplacer,  et 
ne  sont  que  des  palliatifs  et  non  des  remèdes. 

Si,  par  économie,  on  ne  voulait  mettre  du  plomb  ou  du  bitume 
que  dans  les  murs,  voici  de  quelle  manière  nous  proposerions  de 
l'établir  d'après  notre  propre  expérience. 

Dans  les  rez-de-chaussée  qui  doivent  être  carrelés  ou  dallés  sur 
terre-plein  ou  voûte  de  cave,  la  couche  de  bitume  doit  être  posée 
dans  les  murs,  à  2  ou  3  centimètres  en  contre-bas  du  dessus  du 
carreau.  Si  on  la  plaçait  beaucoup  plus  bas,  Ihumidite  pourrait 
pénétrer  horizontalement  du  terre-plein  dans  l'épaisseur  de  la 
tranche  du  mur  comprise  entre  la  couche  de  bitume  et  le  plan  du 
carreau ,  et  remonter  ensuite  verticalement  dans  le  mur,  à  moins 
qu'on  ne  recouvrit  d'un  enduit  imperméable  la  face  de  cette  franche. 

Si,  au  contraire ,  la  couche  de  bitume  ou  la  feuille  de  plomb  était 
posée  dans  un  plan  plus  élevé  que  le  carreau ,  l'humidité  du  sol,  ar- 
rêtée dans  sa  marche  ascensionnelle  par  la  couche  de  bitume,  se 
répandrait  latéralement,  et  se  ferait  jour  dans  les  appartement  surs 


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RKVLE  DE  L'ARCHIThXÏURK  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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toute  In  liauteur  de  la  tranche  comprise  entre  le  plan  du  carreau 
et  la  couche  du  bitume  (1). 


(1)  Nous  avons  observé  un  phénomène  qui  vicnl  à  l'appui  de  nos  conjec- 
luies. 

Dans  une  maison  de  campagne  où  nous  avons  fait  rapplicatlon  du  bitume  au 
Jiiveau  du  sol  du  rez-de-chaussée,  dans  l'épaisseur  des  murs  seulement,  se 
trouve  un  caveau  dont  le  dallage  est  de  0"'  50  en  contre-bas  du  sol  du  rez-de- 
chaussée,  et  par  conséquent  de  la  couche  de  bitume.  La  partie  inférieure  des 
murs,  construite  en  meulière  et  mortier  de  chaux  hydraulique ,  avait  reçu  un 
enduit  en  mortier  de  chaux  et  ciment  de  brique  ,  à  partir  du  pavé  jusqu'à  0"'  30 
au-dessus  de  la  couche  de  bitume.  L'enduit  était  fait  depuis  quatre  ou  cinq 
uiois,  quand  une  forte  gelée,  ayant  pénétré  dans  le  caveau,  détruisit  l'enduit 
dans  toute  la  partie  comprise  entre  le  dessous  de  la  couche  de  bitume  et  le 
pavé.  La  décomposition  du  ciment  était  d'autant  plus  complète  qu'on  se  rap- 
prochait plus  de  la  couche  de  bitume;  mais  toute  la  partie  de  l'enduit  qui  se 
trouvait  au-dessiis  de  cette  dernière  est  restée  parfaitement  intacte,  et  la  ligne 
de  démarcation  était  bien  tranchée  suivant  la  couche  de  bitume. 

Ce  phénomène  peut  être  attribué  à  l'action  de  l'humidité  provenant  du  sol, 
qui,  ayant  empêché  la  dessiccation  du  ciment  dans  la  partie  de  mur  au-dessous 
de  la  couche  de  bitume,  a  laissé  plus  de  prise  à  la  gelée  ,  tandis  que  l'enduit 
qui  dépassait  la  liauteur  de  la  couche  de  bitume,  se  trouvant  préservé  de  l'hu- 
midité du  sol,  était  suffisamment  sec  pour  braver  la  gelée. 

L'état  de  décomposition  plus  complet  du  ciment  dans  le  voisinage  de  la  cou- 
che de  bitume,  qui,  plus  bas,  pourrait  être  attribué  i  deux  causes  :  soit  i  ce 
que  cette  partie  plus  endommagée  se  trouvant  plus  éloignée  du  sol  considéré 
comme  réservoir  de  chaleur  relatif,  pendant  les  grands  froids,  a  pu  être  saisie 
plus  vigoureusement  par  la  gelée  à  cause  de  cet  éloigncment  même  ;  soit  enfin , 
ce  qui  nous  parait  assez  possible,  que  les  colonnes  humides  arrivant  verticale- 
ment du  sol  et  horizontalement  du  terre-plein ,  c'est-à-dire  dans  deux  direc- 
tions perpendiculaires  (sur  l'autre  face  du  mur  le  terre-plein  arrivait  au  ni- 
veau du  bitume  ,)  se  soient  décomposées  mutuellement  en  une  direction  dia- 
gonale, comme  les  courants  de  deux  rivières  affluentcs,  et  soient  venues  sortir 
avec  abondance  à  l'angle  formé  pai'  la  face  verticale  du  mur  du  cïveau  et  la 
couche  horizonlale  de  bitume. 

Pour  nous  assurer  de  la  réalité  de  ces  conjectures,  nous  avons  fait  l'expérience 
suivante,  qui  nous  a  paru  assez  intéressante  pour  la  décrire  ici. 

ABCD  (Fig.  2,  /'/.  22)  est  un  paralléliiiipèdc  en  plâtre  à  modeler  de  0"»  12 
sur  0""  10  de  section  ,  et  Om  âo  de  hauteur,  vu  par  une  de  ses  faces  latérales. 

Il  est  divisé  dans  sa  hauteur  en  quatre  parties  ou  étages  par  quatre  latnes  de 
plomb  horizontales ,  dont  la  première  EF,  placée  à  0"  12  au-dessus  de  la  base 
CD,  occupe  toute  la  section  du  solide,  moins  \m  espace  en  £,  de  Cm  02  de 
large  sur  toute  la  profondeur.  La  deuxième  lame ,  Gf7,  est  placée  à  Cm  10  au- 
dessus  de  la  première,  et  disposée  de  la  même  manière,  excepté  que  la  solu- 
tion de  continuité  // est  placée  en  sens  inverse.  La  troisième,  /J,et  la  qua- 
trième, KLy  sont  placées  dan»  le  même  plan  et  séparées  par  un  intervalle  de 
Om  02  de  large. 

Le  solide  en  plitre' ainsi  préparé  fut  placé  debout  dans  une  caisse  en  xinc 
MSOPQR,  divisée  dans  sa  longueur  en  deux  sections;  la  première  B.I/iV  n'a- 
vait que  Om  02  de  profondeur,  tandis  que  l'autre,  OI'QJl,  s'élevait  jusqu'au  ni- 
veau de  la  première  lame  de  plomb  ,  à  O"  12  au-dessus  du  fond. 

Par  celte  disposition,  l'une  des  faces  du  solide  en  |>lâtre  formait  l'une  des 
quatre  parois  verticales  du  compartiment  OPQR,  et  pour  intercepter  toute 
communication  entre  les  deux  parties  de  la  caisse,  le  Joint  entre  le  solide  et  les 
l'.arois  avait  été  luté  avec  de  la  glaise. 

Chaque  compartiment  fut  rempli  d'eau  jusqu'au  bord.  Par  cette  disposition, 
le  solide  en  plâtre  était  censé  représenter  une  tranche  de  mur  assise  sur  un  sol 
humide  et  appuyée  par  une  de  ses  faces  à  des  terres  humides. 

Nous  allons  indiquer  maintenant  la  marche  suivie  par  l'infiltration  des  deux 
nappes  d'eau  dans  le  solide. 

L'humidité  pénétra  dans  le  plâtre  dans  deux  directions  perpendiculaires  entre 
elles.  La  nappe  inférieure  s'élevait  verticalement,  et  la  nappe  latérale  marchait 
horizontalement  en  suivant  la  face  inférieure  de  la  feuille  de  plomb,  comme 
l'indiquent  les  flèches  dans  la  figure.  Le  profil  des  deux  colonnes  humides  for- 
mait d'abord  une  éqiierrc  i  angle  rentrant  assez  vif.  Peu  â  peu  l'angle  s'arron- 
dit et  finit  par  former  un  quart  de  cercle  assez  régulier.  Cet  arrondissement 
indique  l'action  d'un  courant  diagonal,  résultant  de  la  réunion  des  deux  cou- 
rants perpendiculaires.  Ce  courant  se  trouvait  doué  d'une  plus  grande  vitesse 


Il  est  essentiel  pour  la  pose  des  seuils  de  nitinager  d'avance  une 
entaille  d'une  profondeur  sufïlsante  à  chaque  baie  de  porte,  et 


(contrairement  aux  l(>is  de  la  mécanique),  parce  qu'il  se  composai!  de  la  réunion 
des  deux  courants  perpendiculaires  qui  lui  fournissaient  une  somme  d'humidité 
plus  considérable  envahissant  avec  plus  de  rapidité  les  porcs  du  solide. 

La  vitesse  du  courant  horizontal  partant  du  réservoir  latéral  était  sensible- 
ment plus  grande  que  celle  du  courant  ascendant.  (La  dilTérence  moyenne 
était  ::  32  :  27.  )  Cette  différence  résulte  de  ce  que  le  mouvement  de  chaque 
colonne  humide  était  soumis  à  l'action  de  deux  puissances  différentes.  La  vi- 
tesse des  filets  de  la  colonne  borizontalc  résultait  de  la  pression  latérale  du  li- 
quide contenu  dans  le  réservoir  supérieur,  ajoutée  â  l'attraction  capillaire,  tan- 
dis que  la  vitesse  des  filets  de  !a  colonne  ascendante  se  composait  de  l'attrar- 
lion  capillaire  alTaiblie  par  la  gravitation,  qui  tendait  â  faire  redescendre  les 
molécules  par  leur  propre  poids. 

D'un  autre  cdté,  la  marche  respective  des  deux  colonnes,  très-rapide  pendant 
les  premiers  instants, se  ralentit  sensiblement  au  bout  d'un  quart  d'heure,  puis 
elle  suivit  une  progression  croissante  à  mesure  que  le  front  de  chacune  dimi- 
nuait, ou,  autrement,  â  mesure  que  les  côtés  de  l'angle  formé  par  le  profil  des 
deux  colonnes  décroissait.  On  peut  attribuer  ce  phénomène  directement  à 
cette  décroissance  ;  car,  à  mesure  que  la  surface  du  front  de  chaque  colonnr 
diminuait,  le  cube  de  chaque  tranche  d'une  épaisseur  donnée  diminuait  égale- 
ment, et  la  masse  d'eau  fournie  par  les  réservoirs  pouvant  être  toujours  la 
même,  fa  vitesse  des  filets  d'eau  envahissants  devait  augmenter  en  raison  in- 
verse. Il  y  avait  convergence  des  deux  colonnes  envahissantes. 

Aussitôt  que  la  colonne  horizontale  fut  arrivée  i  l'extrémité  E  de  la  lame  de 
plomb,  l'humidité  jusqu'ici  contenue  par  la  face  inférieure  de  celte  lame  s'é- 
lança dans  l'espace  que  lui  laissait  l'interruption  de  l'obstacle  qui  la  contenait, 
et  le  profilde  la  section  humide  qui  tout  à  l'heure  était  un  arc  de  cercle  concave, 
prit  une  double  courbure  en  forme  d'5qui  fut  bicntCt  eOacée  et  convertie  eu 
une  courbe  unique  convexe. 

De  ce  moment  l'humidité  suivit  une  marche  rayonnante  dont  le  profil  était 
une  sorte  de  quart  de  cercle ,  dont  le  centre  se  trouvait  entre  le  milieu  de  la 
solution  de  continuité  de  la  lame  de  plumb  EF,  et  la  rive  de  cette  dernière. 
Ce  quart  de  cercle  s'appuyait  par  le  bas  sur  le  dos  de  la  feuille  de  plomb,  rt 
par  le  haut  â  l'arête  du  pilier  en  plâtre.  \ 

La  progression  était  décroissante  par  la  raison  inverse  des  causes  qui  la  ren- 
daient croissante  dans  la  section  inférieure.  A  mesure  que  le  développement  des 
zones  envahies  augmentait  ,  leur  largeur  diminuait  dans  un  temps  doimè. 
Mais  cette  largeur  augmenta  légèrement  aussitôt  que  la  courbe  atteignit  par 
le  haut  le  dessous  de  la  feuille  de  plomb  GH ,  et  par  le  bas  l'arête  vcrticali- 
du  prisme  en  plâtre.  De  convexe  qu'elle  était,  la  courbe  prit  une  triple  cour- 
bure par  l'inOcxion  de  ses  extrémités ,  puis  elle  ne  forma  plus  qu'une  seule 
ligne  concave.  Lnfin  ,  l'humidité  franrliit  le  passage  laissé  par  la  feuille  deplonih 
GH ,  â  peu  près  de  la  même  manière  qu'elle  l'avait  fait  â  celui  de  EF.  Elle 
suivit  ensuite  une  marche  analogue  à  celle  qu'elle  avait  prise  à  partir  de  £ ,  jus- 
qu'à ce  qu'ayant  atteint  l'intervalle  JK ,  une  partie  des  filets  humides  s'y  en- 
gagea, tandis  que  lo  reste  se  dirigea  vers  les  points  /  et  G. 

La  colonne  qui  franchit  le  passage  JK  décrivit  alors  une  courbe  rayonnante 
un  peu  plus  ouverte  que  le  demi-cercle,  et  dont  le  centre  se  trouvait  au  quart 
de  la  distance  JK  du  côté  de  K.  Nous  penstnis  que  celte  courbe  eûtété  en  demi- 
circonférence  de  cercle  parfaite,  si  l'intervalle  JK  edt  été  très-étroit,  car  la 
différence  entre  le  demi-diamètre  et  la  Oèclie  d'une  des  courbes  moyennes 
était  très-faible.  Ici,  l'attraction  capillaire  étant  le  seul  générateur  du  mouve- 
ment, la  régularité  de  celui-ci  ne  pouvait  être  troublée  que  par  le  défaut  d'ho- 
mogénéité du  solide. 

Nous  avons  indiqué  par  des  lignes  courbes  très-légères  les  contours  de  la 
section  transversale  des  colonnes  humides  mesurées  dans  des  intervalles  de 
temps  égaux ,  et  par  des  flèches  la  direction  de  leur  marche. 

La  vitesse  fut  tantOt  croissante ,  tantOt  décroissante  ,  suivant  que  le  dévelop- 
pement du  front  de  la  colonne  diminuait  ou  augnienlait.  Mais  la  vitesse  moyenne 
fut  constamment  décroissante  à  mesure  que  l'eau  s'élevaiL  Ce  n'est  qu'au  bout 
de  cinquante  heures  que  l'humidité  parvint  au  sommet  du  solide  en  plâtre.  La 
hauteur  de  celui-ci  étant  de  0™  AO,  la  vitesse  moyeiuie  verticale  a  donc  été  de 
om  008  par  heure;  mais  les  di.iphragines  en  plomb  ont  beaucoup  allongé  la 
distance  réelle  parcourue  que  nous  avonsjtrouvéc  de  O"  50  en  suivant  les  diago- 
nales; la  marche  réelle  a  donc  été  de  0*"  01  en  moyenne  par  heure. 

L'eau  absorbée  a  été  d'cnviroo  les  S/8  du  cube  du  solide  en  plâtre.  Notre  in- 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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d'enduire  cette  entaille  de  l)itume  sur  le  fond  et  sur  les  côtés. 
Nous  avions  oublié  cette  précaution  à  la  première  application  ((iie 
nous  fimes  du  bitume  à  la  base  des  murs.  Les  maçons  cassèrent  le 
bitume  pour  la  pose  des  seuils,  et  l'bumidité  s'est  élevée  dans  les 
tableaux  de  toutes  les  portes.  Elle  ne  s'est  élevée  que  là. 

Nous  donnons  dans  la  planche  22  deux  figures,  dont  la  première 
indique  la  manière  d'appliquer  le  bitume  dans  différents  cas.  La 
partie  à  gauche  représente  la  coupe  d'un  édifice  dont  les  caves  se- 
raient exposées  aux  inondations  et  qu'on  voudrait  rendre  parfaite- 
ment saines. 

La  fondation  serait  établie  sur  un  massif  général  de  béton  A , 
d'un  mètre  d'épaisseur  au  moins  sous  les  murs,  et  réduit  à  une 
épaisseur  moindre  sous  le  sol  des  caves.  Cette  diminution  progres- 
sive d'épaisseur  aura  la  forme  d'une  voûte  renversée  arasée  de  ni- 


lention  était  de  mesurer  la  dépense  d'eau  respective  de  cliaque  réservoir,  mais 
le  lut  en  glaise  laissant  passer  de  temps  en  temps  des  fuites  d'eau  du  réservoir 
supérieur  dans  l'autre,  nous  dûmes  y  renoncer.  L'humidité  suivait  une  marclie 
analogue  sur  la  face  opposée  à  celle  c|ue  nous  avons  représentée  dans  la  figure; 
mais  la  vitesse  était  moins  grande  ((ue  dans  cette  dernière,  ce  qui  fait  que  le 
solide  de  révolution  décrit  par  les  zones  humides,  au  lieu  d'être  une  portion 
de  cylindre,  était  une  portion  de  cône. 

Nous  attribuons  ce  défaut  de  parallélisme  dans  la  marclie  de  l'humidité  plutôt 
à  ce  que  l'iui  des  côtés  était  moins  sec,  qu'à  la  différence  de  densité  dans  la 
masse  du  plâtre.  Apres  l'expérience,  le  prisme  eu  plâtre  se  trouva  criblé  de  pe- 
tits trous  assez  profonds  sur  la  face  en  contact  avec  l'eau  du  réservoir  latéral, 
tandis  que  la  base  qui  plongeait  dans  le  réservoir  inférieur  se  trouvait  intacte. 
Nous  sommes  porté  â  conclure  de  là  qu'aussitôt  que  l'humidité  eut  passé  de 
l'étage  inférieur  du  prisme  ù  celui  au-dessus,  le  réservoir  latéral  ou  supérieur 
fournissait  seul,  on  à  peu  près,  toute  l'eau  absorbée  par  le  reste  de  la  mafse. 
Les  nombreux  trous  qui  la  pénètrent  ont  été  évidemment  faits  par  le  passage 
des  filets  d'eau  qui  pénétraient  dans  le  plâtre  et  en  ont  dissous  les  molécules.  La 
mauvaise  qualité  du  lut  ne  nous  permit  pas  de  vérifier  cette  conjecture,  en  me- 
suiant  la  dépense  d'eau  respective  des  deux  réservoirs. 

De  cette  expérience,  nous  concluons  :  1°  que  l'humidité,  comme  la  chaleur, 
pénètre  les  corps  de  proche  en  proche  dans  toutes  les  directions,  et  que,  quelle 
que  soit  la  forme  primitive  du  générateur,  si  la  section  de  celui-ci  est  plus  pe- 
tite que  l'espace  à  envahir,  elle  décrit  toujours  à  la  lonsue  un  solide  à  surface 
de  révolution,  en  supposant,  bien  entendu,  une  parfaite  homogénéité  entre  les 
parties  du  corps  soumis  â  l'expérience; 

2»  Que  l'humidilé  d'un  terre-plein  pénètre  plus  vite  dans  le  corps  d'un  mur 
(pie  celle  du  sol  de  la  fondation  ,  à  intensité  égale,  bien  entendu.  Et  nous  ajou- 
tons, par  induction,  qu'elle  marche  encore  plus  vile  de  haut  eu  bas  que  dans 
le  sens  horizontal  ; 

3"  Que  pour  empêcher  rhumidilé  de  monter  dans  les  mur'S,  il  est  indispen- 
sable que  la  couche  de  bitume  ou  la  feuille  de  plomb  placée  cuire  deux  assises 
traverse  l'épaisseur  entière  de  la  masse  du  mur  et  l'enduit  lui-même  s'il  y  en  a, 
sous  peine  de  voir  l'humidité  monter  dans  l'épaisseur  de  cet  enduit  comme  elle 
a  passé  en  E  el  en  II;  et  que  toute  crevasse  ou  solution  de  conliiiuilé  comme 
JK  la  laissera  passer  dans  le  corps  du  mur; 

â»  Que  toutes  les  fois  qu'on  voudra  assainir  un  étage  adossé  à  un  terre-plein, 
il  faudra  que  la  face  du  mur  du  côté  des  terres  soit  revêtue  d'une  couverte  im- 
perméable ou  qu'elle  soil  parfaitement  isolée. 

Nous  ne  donnons  les  résultats  de  cette  expérience  en  miniature ,  faite  â  la 
bâte  ,  que  pour  ce  qu'ils  valent.  Nous  ne  l'avons  exécutée  que  pour  nous  assurer 
de  la  validité  de  nos  conjectures.  Il  faudrait  qu'elle  fût  répétée  en  grand  sur  la 
plupart  des  matières  qui  entrent  dans  la  construction  des  bâtiments,  telles  que 
mortiers  ,  ciments ,  bétons  ,  plâtre  ,  pierres  dures  el  tendres,  maçonnerie  en  blo- 
cage de  moellon,  brique  ou  meulière,  hourdés  en  morlier  ou  plâtre,  etc.,  dispo- 
.sés  dans  la  construction  d'un  bâtiment  fait  exprès,  dont  les  quatre  faces  seraient 
orientées ,  et  où  l'on  ferait  en  sorte  de  rassembler  le  plus  grand  nombre  de  cas 
possible.  Il  faudrait .  eu  beaucoup  de  circonstances,  se  servir  de  l'hygromètre, 
du  baromètre  et  du  thermomètre.  Il  faudrait  y  consacrer  au  moins  une  année 
entière  en  observation  as.iidu« ,  et  une  grande  dépense  ;  il  n'y  a  guère  qu'une 
administration  qui  puisse  les  prendre  pour  son  compte.  »> 


veau.  Sur  ce  massif  bien  dressé,  on  établira  une  couche  de  bitume 
B,  dont  on  aura  soinde  recouvrir  les  jonctions  d'un  doublage  en 
bitume  bien  chaud,  ou,  mieux  encore,  dune  deuxième  couche  gé- 
nérale recouvrant  exactement  les  joints  de  la  première. 

Quand  le  mur  C  sera  élevé  sur  la  couche  de  bitume ,  on  rerou- 
vrira sa  face  extérieure  d'un  enduit  de  bitume  parfaitement  son- 
dé à  la  couche  B,  et  protégé  par  un  contre-mur  eu  brique  />, 
hourdé  en  bitume.  L'enduit  en  bitume  se  prolongera  sous  la  face 
inférieure  de  la  pierre  saillante  E,  afin  que  l'humidité  ne  puisse 
pénétrer  par  la. 

La  couche  de  bitume  du  sol  des  caves  sera  recouverte  d'un  mas- 
sif de  béton  F,  arasé  de  niveau ,  dont  la  moindre  épaisseur  au  bas 
des  murs  pieds-droits  des  voûtes  sera  de  O"  20.  Ce  deuxième  mas- 
sif de  béton  est  destiné  à  garantir  la  couche  de  bitume  de  tout  cho<-. 
et  surtout  à  la  maintenir  contre  la  pression  ascendante  de  l'eau 
pendant  l'inondation.  Cettedestination  explique  pourquoi  on  donm- 
plns  d'épaisseur  au  béton  supérieur  au  milieu  de  la  cave  qu'a  celui 
des  cotés. 

Si  la  profondeur  des  caves  était  très- considérable  et  que  l'inou- 
dation  s'élevât  très-haut  (à  3  on  4  mètres  an-dessus  du  sol ,  par 
exemple) ,  il  faudrait  alors  porter  l'épaisseur  du  massif  de  béton  A 
à  1"  50 ,  et  même  audelà,  si  l'intervalle  entre  les  murs  était  consi- 
dérable. 

Quoique  l'assainissement  des  caves  par  le  mn  en  que  nous  pro- 
posons doive  détruire,  ou  du  moins  diminuer  considérablement  les 
chances  d'humidité  dans  le  rez-de-chaussée ,  nous  proposons  néan- 
moins de  placer  une  feuille  de  plomb  G  dans  l'épaisseur  du  mur,  et 
de  recouvrir  le  sol  entier  d'une  couche  de  bitume,  comme  nous 
l'avons  indiqué  dans  la  Fig.  li  ,  PI.  18. 

La  partie  à'droite  de  la  coupe ,  Fig.  1 ,  représente  l'étage  sou- 
terrain d'une  maison  de  ville  ordinaire  que  l'on  voudrait  rendre 
parfaitement  sain ,  soit  pour  y  faire  un  café  ou  restaurant ,  soit 
un  magasin.  La  couche  de  bitume  placée  sous  le  sol  entre  deux 
bétons  traverse  toute  l'épaisseur  du  mur  et  se  prolonge  sur  la  face 
extérieure  du  mur,  où  elle  est  protégée  par  un  conlre-mur  en  bri- 
ques de  champ  dont  l'arasement  s'emboite  dans  une  rainure  creu- 
sée dans  la  saillie  de  l'assise,  au  niveau  du  sol.  Cette  rainure  sera 
remplie  de  bitume  à  la  pose  de  la  pierre.  Le  sol  du  rez-de-chaussée 
est  disposé  comme  dans  la  partie  à  gauche,  et  reçoit  un  parquet  dont 
les  lambourdes  sont  posées  sur  une  couche  générale  de  mortier. 

La  Fig.  2  représente  le  prisme  en  plâtre  sur  lequel  a  été  faite 
l'expérience  de  la  marche  de  l'humidité. 

Les  flèches  indiquent  la  direction  des  courants  humides,  et  les 
lignes  droites  ou  courbes  tracées  sur  la  surface,  les  contours  des 
zones  humides  à  chaque  période  de  la  durée  de  l'expérience.  .\  l'é- 
tage inférieur,  les  zones  humides  de  forme  angulaire  ont  été  enva- 
hies par  période  d'un  quart  d'heure,  et  les  zones  courbes  des  trois 
autres  étages  l'ont  été  par  période  d'une  heure. 

H.  J.\NMARD. 

jrchitrctr. 


T.    V. 


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REVUK  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DliS  TRAVAUX  PUBLICS. 


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mois  dans  l'ouvrage  intitulé  Paris  sous  le  point  de  vue  pittoresque 
et  monumental,  nous  ne  pensions  pas  que  la  question  ferait 
d'assez  rapides  progrès  pour  obtenir  de  l'autorité  des  arrêts  ten- 
dant à  des  solutions  sérieuses,  malgré  leur  constitution  provi- 
soire. 

Pour  rendre  plus  sensibles  nos  fictions,  et  sans  manquer  ce- 
pendant au  respect  que  nous  devons  au  vieux  tbéàtre,  nous  rap- 
pellerons quelquefois  ses  défauts,  à  titre  de  renseignements;  puis, 
au  fur  et  à  mesure  que  nous  décrirons  notre  édifice,  nous  efface- 
rons graduellement  son  aine  du  sol  :  le  plan  que  nous  mettons 
sous  les  yeux  de  nos  lecteurs  indique  lui-même  ce  calcul  de  notre 
esprit. 

Si  j'avais  pour  lecteurs  et  pour  juges  tous  les  amateurs  de  l'O- 
péra, mes  lecteurs  et  mes  juges  seraient  très-nombreux  ;  les  uns, 
liarfaitement  éclairés,  connaissent  toute  la  science  des  mots  et 
tous  les  mots  de  la  science;  les  autres  préfèrent  les  dénomina- 
tions avec  toute  leur  simplicité  française.  Pour  ceux-ci,  que  je 
crois  en  majorité,  je  suiMai  autant  qu'il  me  sera  possible  le  con- 
seil du  trop  regrettable  Charles  Nodier  :  je  reculerai  devant  l'abus 
de  la  technologie;  et,  à  l'aide  de  mots  usuels  que  tous  comprennent, 
je  tâcherai  d'atteindre  mon  but. 

J'ai  parlé  de  fictions;  mais  c'est  une  erreur.  Personne  ne  se 
trouve  plus  que  moi  dans  les  réalités,  car  il  me  parait  presque  im- 
possible de  donner  un  plan  descriptif  d'un  édifice  sans  l'avoir 
jamais  vu.  Je  ne  connais  ce  talent  qu'à  l'auteur  de  la  fantastique 
ou  philosophique  abbaye  de  Thélème;  ou,  même  encore,  à  l'ingé- 
nieux auteur  de  la  restitution  de  cette  abbaye  du  bon  plaisir.  Mais 
le  jeune  professeur  qui  défend  du  haut  de  sa  chaire  les  droits  de  la 
nationalité  française  en  signalant  le  système  d'attaque  encore  voilé 
des  rêveurs  germains,  Charles  Lenormant,  avec  ses  connaissances 
variées  et  sa  facile  éloquence ,  peut  entreprendre  des  lAches  qui 
sont  autant  de  succès  pour  lui,  et  qui  n'offriraient  à  nous  que  des 
périls  et  des  chutes.  Aussi  déclarons-nous  avoir  vu,  bien  vu  l'édi- 
fice que  nous  allons  décrire  :  il  a  été  érigé  tout  entier  à  notre  plus 
grande  satisfaction.  Essayons  de  mettre  notre  lecteur  à  même  de 
le  juger. 

La  Pbomenade  pittobesque. 

Le  jour  où  j'aperçus  l'édifice  pour  la  première  fois,  je  venais  du 
bas  du  boulevard,  du  côté  du  temple  de  la  Madeleine,  que  je  pré- 
férerais pouvoir  appeler  tout  simplement  l'église;  j'avais  parcouru, 
peu  d'instants  auparavant,  les  abords  des  Champs-Elysées,  la  place 
Louis  XV,  et  j'étais  sous  ce  charme  où  me  laisse  la  vue  de  ce  Pa- 
ris, plus  royal  sur  ce  point  qu'aucun  des  points  du  royal  Versailles. 
L'air  était  pur,  le  ciel  n'avait  aucun  nuage,  le  .soleil  était  encore 
attaché  sur  les  flancs  du  sud  de  notre  Observatoire,  et  fun  des  cô- 
tés du  boulevard  allongeait  de  grandes  ombres  obliques  jusqu'aux 
pieds  des  façades  opposées  que  l'astre  éclairait  de  tous  ses  feux. 

Entre  ces  rayons  voilés  et  ces  rayons  lumineux,  pour  la  première 
fois,  peut-être,  j'oubliais,  en  passant  devant  la  rue  de  la  Paix,  de 
tourner  mes  regards  vers  la  spirale  de  bronze  allemand,  dont  la 
légende  a  le  rare  mérite  d'être  écrite,  d'un  bout  à  l'autre,  dans  les 


n  à  cet  é^ard ,  ne  trouva  pas  (l'autre  expédient  que  de  demander  à  S.  IM. 
u  Louis  XVIII  une  bagatelle  de  487  493  fr.  14  c. 

Il  II  n'y  avait  eu  qu'une  erreur  de  1  387  495  fr.  14  c.  sur  des  travaux  évalués 
«  900  000  fr.,  et  qui  se  sont  élevés  à  2  ÎS7  495  fr.  14  c.  » 

Il  y  a  de  quoi  dégoûter  à  jamais  du  provisoire. 


termes  les  plus  français,  sans  l'aide  de  l'Académie.  J'aimais  à  voir 
de  cette  ligne  étendue  les  profils  du  monument  nouveau  que  je 
découvrais  par  gradation,  cttiui  me  paraissait  admirablement  bien 
placé  pour  ajouter  a  la  décoration  splendide  de  Paris,  au  charme 
de  ses  effets  pittoresques,  et  non  pour  être  seulement  compté, 
comme  grand  nombre  de  nos  édifices,  sur  le  mort  tableau  des  pro- 
priétés de  l'État. 

Au  point  où  en  est  Paris  avec  sa  décoration  pittoresque  et  mo- 
numentale, tous  les  grands  édifices,  à  peu  d'exceptions  près,  que 
l'autorité  a  la  noble  mission  d'y  fonder,  ne  doivent  s'élever,  selon 
nous,  et  chacun  en  raison  de  l'utilité  de  sou  appropriation,  que  sur 
l;i  double  ligne  des  quais,  ou  sur  celle  de  nos  lioulevards.  Ainsi, 
malgré  tous  nos  respects  pour  les  actes  émanés  de  l'esprit  ({ui  do- 
mine l'une  de  nos  plus  libérales  institutions,  nous  n'avons  pu  croire 
à  l'immuabilité  d'une  décision  récente,  un  peu  menaçante  par  la 
forme,  très-désastreuse  au  fond,  qui  eut  privé  l'Opéra  de  ses  plus 
vivifiants  éléments.  L'acte  qui  devait  traîner  l'Académie  Royale 
de  Musique  sur  l'un  des  points  les  plus  encombrés  de  la  ville  et 
des  moins  propres  n  lui  offrir  les  dégagements  qu'imposent  les  be- 
soins de  la  circulation,  n'a  pas  résisté  à  la  censure  d'une  journée 
de  publicité;  il  se  trouve  déjà  rapporté  dans  les  consciences,  nous 
n'en  doutons  pas  :  il  était  bien  permis  aux  plus  sages  de  se  trom- 
per, et,  devant  une  erreur,  nous  n'avons  pas  arrêté  notre  édifi- 
cation. 

Avant  de  me  trouver  sur  l'arrière  du  théâtre  de  l'Opéra-Comique, 
auquel  il  faudra  toujours  reprocher  de  n'avoir  pas  eu  le  courage  de 
tourner  sou  visage  du  cùté  du  boulevard  comme  les  braves  du  mé- 
lodrame, j  avais  compris  les  principales  dispositions  extérieures 
du  nouvel  Opéra.  Vous  voyez,  lecteur,  que  déjà  notre  récit  devient 
de  l'architectonographie...  pour  cette  fois,  passez-nous  ce  mot, 
((ui  n'est  pas  de  notre  facture,  mais  (lui  rend  fidèlement  le  sens  de 
la  tâche  que  nous  nous  sommes  imposée. 

De  là  je  jouis  de  l'effet  général  du  monument.  Il  me  rendait 
bien  raison  de  tout  ce  (|u'un  peuple  avancé  doit  tirer  de  la  concep- 
tion des  édifices  destinés  à  la  décoration  de  ses  villes.  Il  répondait 
complètement  aux  seules  conditions  qui  justifient  les  sacrifices 
pécuniaires  que  la  raison  a  mission  d'offrir  aux  caprices  de  lart. 
Je  voyais  les  résultats  d'un  travail  de  l'imagination  approprié  aux 
besoins  réels  de  la  chose  publique.  Il  y  avait  là,  ou,  du  moins,  cela 
me  semblait  tel,  éclat,  utilité,  et  parfaite  harmonie  avec  les  goûts  de 
la  population  parisienne. 

Le  choix  d'un  emplacement  (lourun  édifice,  l'art  de  bien  déter- 
miner son  assiette,  sont  d'une  si  haute  importance  et  cela  se  né- 
glige tant),  que  j'attribuais  une  partie  de  mes  impressions  à  l'heu- 
reuse position  du  monument. 

'  Il  est  exactement  placé,  je  parle  de  sa  façade  et  j'indique  le 
point  central  de  cette  façade,  au  point  de  rencontre  du  boulevard 
Montmartre  et  du  boulevard  des  Italiens,  du  c(')té  de  la  rue  Graniie- 
Batelière,  de  telle  sorte  que  ladite  façade  de  soixante-quatre  mètres 
se  développe  symétriquement,  moitié  sur  l'un,  moitié  sur  l'autre 
de  ces  boulevards,  ainsi  qu'on  en  peut  juger  avec  le  plan  de 
l'édifice. 

Si  j'ai  pu  apercevoir  une  portion  de  sa  façade  dès  le  boulevard 
de  la  Madeleine,  et  la  découvrir  entièrement  vers  le  boulevard  des 
Italiens,  avant  la  post-face  du.théàtre  de  l'Opéra-Comique,  on  con- 
çoit que  le  promeneur  doit  se  trouver  dans  les  mêmes  conditions 
de  développement  de  vues  en  venant  du  boulevard  Poissonnière; 
et  ce  sont  ces  développements  immenses  qui  se  présentent  d'une 


khi 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


US 


façon  si  pittoresque,  sous  des  jours  si  différents,  qui  me  font  dire, 
après  toutes  les  autres  eonsidératious  que  j'ai  présentées  dans  mon 
ouvrage  sur  Paris,  que  le  choix  de  cet  emplacement,  la  position 
inathématique  de  l'édifiée,  sur  le  point  que  je  viens  de  décrire, 
justifient  les  sacrifices  pécuniaires,  je  le  répète  encore  une  fois , 
que  la  raison  a  mission  d'offrir  aux  caprices  de  l'art. 

Au  lecteur  qui  a  le  plan  sous  les  yeux,  il  est  inutile  de  faire  re- 
marquer que  ce  n'est  pas  exclusivement  sur  les  terrains  de  la  mai- 
rie du  deuxième  arrondissement  que  s'allongent  les  cent  vingt-trois 
mètres  environ  qui  forment  la  longueur  du  vaste  parallélogramme 
dans  lequel  sont  renfermées  toutes  les  choses  dont  j'ai  à  parler; 
mais  j'ai  à  faire  remarquer,  toutefois,  (jne  la  rue  Pinon,  au  moyen 
d'une  ccharpe  faite  aux  maisons  des  n°^  8  et  lo,  forme  le  prolon- 
gement direct  de  la  rue  Grange-Batelière,  qui  a  trouvé  passage  sur 
la  cour  de  la  mairie  (1)  ;  que  l'église  de  la  Rédemption,  nouvelle- 
ment créée  dans  le  forum  de  la  douane,  se  trouve  séparée  de 
l'Opéra,  ce  qui  est  convenable,  par  les  maisons  bAties  sur  les 
terrains  de  la  mairie  vers  le  sud.  Ces  maisons  forment  l'un  des 
cotés  de  la  place  de  l'Opéra,  vers  l'arrière-faeade  de  cet  édifice,  où 
nous  avons  placé  les  dépendances  de  son  service. 

Puisque  les  plâtres  et  les  sapins  de  la  rue  Lepelletier  n'ont  pas 
encore  entièrement  disparu  du  sol,  avons-nous  dit,  il  faut  remar- 
quer que  le  nouvel  édifice  ne  s'étend  pas  sur  le  terrain  de  la  salle 
et  du  théâtre.  Une  de  ses  façades  latérales  seulement,  eel'e  tournée 
vers  l'ouest,  passe  à  un  mètre  environ  de  l'angle  nord-est  de  l'an- 
cienne baraque  :  ce  qui  veut  dire  qu'au  besoin,  on  peut  toujours 
chanter,  danser,  festoyer,  rue  Lepelletier,  jusqu'au  jour  de  la  prise 
de  possession  du  nouveau  monument. 

Portions  des  terrains  de  la  rue  Piiion  et  de  la  rue  Grange-Bate- 
lière appartenant  à  la  Ville,  portion  de  l'hôtel  n"  1  de  cette  der- 
nière rue,  portions  des  maisons  n"**  2,  4,  6  et  8,  je  dis  portions, 
car  il  reste  à  chacune  de  ces  propriétés  des  délaissés  magnifiques 
dont  les  propriétaires  peuvent  tirer  le  plus  grand  parti,  ont  fait  les 
frais  de  l'emplacement  du  nouvel  Opéra  et  des  deux  rues,  d'environ 
quatorze  mètres,  qui  bordent  ses  deux  côtés. 

Le  sacrifice  de  la  ville  en  faveur  de  l'Opéra  se  borne  à  l'abandon 
de  la  loge  de  portier  de  son  ancienne  deuxième  mairie, — dévoue- 
ment aux  besoins  de  la  voie  publique  (2), — se  manifeste  par  l'aban- 
don d'une  partie  des  terrains  de  la  cour  et  de  ceux  de  l'emplace- 
ment des  bâtiments;  mais  l'aliénation  des  grands  lots  b,  e,  d. 


(1)  La  veille  du  terrain  pris  sur  la  rue  Piiion,  pour  y  bâtir  dans  les  condi- 
tions monumentales  indiquées,  compenserait,  à  peu  de  chose  près,  ce  n'est 
pas  douteux,  la  valeur  des  deux  Immeubles  à  démolir  marqués  e,  f.  A  in- 
dique l'hôtel  même  do  la  mairie;  6,  c,  des  lots  de  terrains  à  aliéner;  d  indique 
également  une  aliénation  imporlaulc  d'un  délaissé  sur  la  vieille  rue  Grange-Ba- 
telière,  résultant  du  changement  de  sa  direction  h  son  extréniilé  de  l'Ouest. 

(2)  Cette  situation  exige  de  moins  grands  sacrifices  qu'on  ne  se  l'imagine,  en 
raison  du  prix  des  terrains  dans  le  quartier. 

Les  hôtels  nos  2,  !i,  8,  conservent  des  délaissés  assez  considérables  pour  avoir 
encore  de  grandes  façades.  Ils  ne  perdent  qu'en  profondeur.  Le  n  "  2  conserve 
sur  le  boulevard  un  quart  de  son  étendue. 

L'hôtel  n"  0  n'a  que  son  avenue  un  peu  raccourcie  et  ne  perd  aucun  b.1ti- 
nient,  aucune  façade.  ^ 

Les  dispositions  nouvelles,  relatives  à  la  voirie,  donneraient  une  bien  plus 
grande  valeur  aux  boutiques,  qui  seraient  en  rapport  avec  les  côtés  latéraux  de 
l'Opéra. 

L'immeuble  n"  1  ne  serait  lui-même  enlamé  qu'en  partie,  et  des  façades  d'un 
grand  prix  seraient  données  à  ses  profondeurs. 

Nous  ne  demandons  que  lumières  et  impartialité  pour  l'exauicn  do  la  quos- 
lion. 


sa  propriété,  est  ce  que  nous  appelons  les  compensations  avec  le 
tour  du  bilton. 

Je  me  hôte  de  dire  que  les  galeries  dites  passages  de  l'Opéra 
restent  intactes  dans  cette  transformation,  et  qu'une  issue  monu- 
mentale, qui  les  met  en  communication  avec  la  nouvelle  rue,  rem- 
place le  couloir  infect  où  les  potentats  de  l'Opéra  refoulent  leurs 
peuples  pendant  livrcsse  du  banquet. 

Et  tout  ce  quartier  de  bas-fond,  si  mal  coupé,  si  disgracieux, 
malgré  l'éclat  de  sa  position,  ne  peut  qu'être  avivé  au  moyen  d'ou- 
vertures nouvelles,  qui  mettent  la  rue  de  Provence  en  commuDi- 
cation  directe  avec  le  boulevard.  Par  suite  de  l'insuffisance  de  la 
rue  du  Faubourg-Montmartre  pour  l'écoulement  des  flot»  de  po- 
pulation qui  s'y  jettent  du  matin  au  soir,  d'autres  ouvertures  de- 
venues indispensables,  il  importe  de  le  constater,  ont  été  combi- 
nées dans  le  but  de  les  diviser  utilement,  comme  rexi<:ent  les  rè- 
gles d'une  voirie  intelligente.  Ces  percements  ont  été  faits  dans  le 
(lanc  nord  de  la  rue  Grange-Batelière  et  dans  celui  des  jardins  de 
l'hôtel  d'Ogny,  g,  dit  Aguado,  qui,  selon  nous,  aumitdù  devenir  la 
mairie  du  deuxième  arrondissement  (l),'  de  telle  sorte  que,  par  la 
démolition  de  portions  de  quatre  maisons  seulement,  la  rue  Vi- 
vienne  se  prolonge  jusqu'à  la  barrière  Rochechnuart. 

L'enlèvement  d'un  cinquième  bâtiment,  rue  du  Faubourg-Mont- 
martre, crée  une  autre  rue  dans  l'axe  de  la  mairie  de  notre  projet, 
et  une  belle  architecture  de  plus  se  trouve  ainsi  mise  en  relief  au 
profit  de  tous.  ^ 

Ces  travaux,  combinés  avec  ensemble,  ont  pour  résultat  l'amé- 
lioration des  voies  de  communication,  le  complet  assainissement 
et  lembellissement  monumental  d'un  quartier,  à  cet  égard.  Ires- 
mal  partagé. 

Sur  notre  plan ,  ou  remarque  l'indication  d'une  nouvelle  me 
partant  de  l'angle  ouest  de  la  rue  Richelieu,  et  aboutissant  vers 
l'angle  des  rues  Vivienne  et  Saint-Marc,  pour  donner  encore  une 
issue  sur  la  place  de  la  Bourse. 

Cette  rue,  qui  ne  sert,  en  quelque  sorte,  qu'à  la  syroélrie  du 
plan,  sera  peut-être  jugée  impraticable.  S'il  y  a  difficulté  à  l'exé- 
cuter, qu'on  n'y  pense  plus  :  elle  n'est  pas  indispensable  pour 
compléter  les  magnificences  de  la  position  ;  mais  nous  croyons  que 
les  propriétaires  eux-mêmes  des  immeubles  qu'elle  traverserait 
auraient  intérêt  à  ouvrir  à  leurs  propres  frais  cette  nouvelle  voie. 

L'ExTÉBiEin. 

Un  théâtre  d'Opéra  particulièrement,  un  théâtre  cloué  au  sol  du 
quartier  actuel,  dit  de  l'Opéra,  doit  s'unir  par  ses  formes  à  mille 
pensées  de  plaisirs,  et  là,  pour  toucher  plus  de  sens,  l'hannonie 


(1)  On  ne  comprendra  jamais  que  l>  ville,  qui  avait  à  cboiMr  poorsa  mairie, 
entre  l'hôtel  d'Ogny  et  l'hOlcl  d'Eichtal,  ait  donné  ses  ftriténntta  à  ce  dernier. 
qui  est  mal  situé  et  qui  n'olTre  pas  l'éleiidue  nécessaire  anx  Iwsoiiu  de  celle 
mairie.  Là  encore  une  de  ces  fausses  mesures  dont  II  sérail  diflirile  de  jnstiirr 
les  motifs,  surtout  quand  on  volt  sur  le  plan  les  deux  graotb  lois  k  du  Jardia, 
qu'elle  aurait  pu  utilement  aliéner. 

Disons,  Â  cette  occasion,  i|ue  notre  plan  était  dressé,  rommiiniqué  coalden- 
Ucllement,  cl  connu  par  conséquent,  avant  la  dernière  «ente  pobiiqae  de  l'Mlci 
Aguado.  C'est  depuis  cette  époque  seulemeni  que  d'actifs spécalatcws  oatai- 
ircpris  de  faire  des  passages  dans  la  direction  niéaie  des  rues  que  no«s  aioaa 
tracées.  Ce  fait,  qui  enrichira  les  spéculateurs  démontre  la  jostcue  de  ito* 
observations,  et  puisqu'il  s'agit  de  voies  utiles  à  la  cIrtulaUoi),  rues  on  passades, 
l'opération  devait  être  entreprise  par  la  tille  :  nous  n'avons  pas  besoin  de  dé- 
velopper lîos  motifs;  ils  se  comprennent  suIBsamineat. 


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RKVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


4t)0 


doit  se  trouver  dans  l'image,  comme  elle  doit  se  trouver  dans  Its 
sons. 

Au  point  de  vue  architeetonique,  l'auteur  s'est  proposé  d'oc- 
cuper par  un  monument  splendide  la  place  tout  exceptionnelle 
qu'il  assigne  à  l'édifice.  Il  s'est  pioposé  de  trouver  des  combinai- 
sons d'effets  qui  répondissent  à  ces  deux  propositions  :  il  a  voulu 
que  les  rapports  entre  le  pittoresque  et  les  besoins  de  la  distribu- 
tion générale  fussent  toujours  réglés  ou  tempérés  par  la  raison. 

La  façade  principale,  étendue  d'environ  64  mètres,  n'est 
guère  plus  large  que  celle  du  blokaus  de  la  rue  Lepelletier. 
Elle  présente  un  composé  de  portiques  à  jour,  de  conditions  di- 
verses, accusant  trois  étages,  encastrés  dans  deux  pavillons,  utiles 
contre-forts,  qui  donnent  h  cette  architecture  légère,  l'aplomb,  le 
sérieux,  la  fermeté,  qui  doivent  caractériser  une  construction  mo- 
numentale. Reste  à  voir  si  le  but  est  atteint. 

Le  Porche. 

Celte  fois,  un  parti  qui  n'est  pas  sans  difficultés,  se  trouve  fran- 
chement abordé  ;  il  est  commandé  par  la  nécessité.  Les  specta- 
teurs d'élite,  disent  les  flatteurs,  qui  hantent  le  théâtre,  veulent 
descendre  à  couvert.  Un  auvent,  la  marquise,  misérable  excrois- 
sance qui  pend  sur  le  mur  d'un  édifice,  perd  en  quelques  semaines 
la  fraîcheur  de  ses  peintures,  et  même,  dans  toute  la  coquetterie  de 
sa  jeunesse,  dénature  l'œuvre  de  l'artiste.  Donc,  dans  toute  combi- 
naison monumentale,  la  marquise  devient  impossible,  et  nous  ne 
nous  souvenons  de  celle  de  la  rue  Lepelletier  et  de  celles  si  malheu- 
reusement appendues  aux  murs  de  la  Madeleine,  de  celle  encore 
accrochée  sur  la  porte  principale  du  musée,  que  pour  bannir  leur 
usage.  Un  second  moyen,  pour  la  descente  de  voiture  à  couvert, 
a  été  employé  dans  diverses  salles  :  quelquefois  on  a  pratiqué 
un  couloir  sous  l'aplomb  des  banquettes  du  parterre  ;  mais  ce  cou- 
loir, d'effet  peu  attrayant,  a  le  manifeste  inconvénient,  par  suite 
de  la  disposition  obligée  de  ses  deux  ouvertures,  de  se  trouver  à 
l'état  de  violente  ventilation  ;  et  c'est  à  l'heure  où  les  femmes  ont 
le  plus  à  craindre  cette  ventilation,  qu'elles  en  sont  le  plus  mena- 
cées. Pour  descendre  à  couvert  devant  la  face  principale  de  l'édi- 
fice, où  l'on  doit  trouver  son  entrée  principale,  il  fallait  un  porche: 
ou  a  mis  un  porche. 

Il  est  composé  de  neuf  grandes  arcades  qui  l'éclairent  sur  sa 
face,  1.  Deux  autres  arcades  sont  ouvertes  sur  ses  flancs  pour  le' 
passage  des  voitures,  qui  peuvent  s'y  trouver  simultanément  au 
nombre  de  quatre  ou  cinq  ;  mais  chaque  baie,  sur  la  face,  est  assez 
large  (S""  25  environ)  pour  permettre  aux  voitures  en  queue  de  se 
dégager  les  premières,  si  celles  en  tête  se  trouvent  les  dernières  à 
se  débarrasser  de  leur  fardeau. 

Ce  porche,  placé  en  avant-corps,  avec  saillie  de  sept  mètres, 
supporte,  à  l'aplomb  de  ses  pieds-pilastres,  un  autre  ordre  de  por- 
tiques à  jour  qui  répond  à  un  besoin  d'une  autre  nature,  2,  Hàtons- 
nous  de  dire  qu'en  avant  du  porche  une  gare  ou  trottoir  X  pour 
les  piétons  relie  le  boulevard  Montmartre  au  boulevard  des  Ita- 
liens, et  ne  laisse  pour  le  passage  des  voitures  que  deux  coupures. 
Elles  n'offrent  pas  plus  d'inconvénients  pour  la  sûreté  des  piétons  et 
leur  repos,  que  lescoupures  faites  sur  le  boulevard  même  des  Ita- 
liens par  les  rues  Laffltte  et  Lepelletier  ;  et  sur  le  point  où  se  trouve 
fixé  l'étlifice,  il  y  a,  et  il  y  aura,  moins  de  circulation  de  voitures 
(c'est  évident  pour  quiconque  connaît  le  quartier)  que  vers  les 
autres  coupures  indiquées. 


La  Tebbasse  couvbbte. 

Nous  n'avons  pas  sous  notre  ciel  accidenté  cette  température 
également  chaude  qui  commande  en  Italie,  et  plus  encore  sous  les 
tropiques,  des  dispositions  utiles  aux  besoins  du  corps,  et  qui  sont 
favorables  à  des  combinaisons  d'architecture  d'un  grand  effet; 
mais  n'avons-nous  pas  aussi  nos  jours  et  nos  nuits  d'air  plus  pe- 
sant? ne  sentons-nous  pas  le  besoin  alors  de  combattre  cette  in- 
commodité? et  si  nous  devons  la  trouver  dans  un  lieu  de  plaisirs, 
pourquoi  nos  calculs  se  refuseraient-ils  à  priver  nos  sens  des  dou- 
ceurs et  du  bien-être  qu'ils  réclament?  L'architecture  serait  in- 
firme si  elle  ne  satisfaisait  pas  à  tous  les  besoins  de  notre  nature 
infirme. 

En  Italie,  cette  construction  serait  une  loge;  en  attendant  que  le 
mot  soit  plus  généralement  compris  à  Paris,  nous  l'appelons  bour- 
geoisement terrasse  couverte. 

Mais  nous  n'excluons  pas  la  poésie  que  nous  trouvons  unie  à  cette 
combinaison  architecturale. 

La  voyez-vous  cette  loge,  le  jour,  avec  ses  arcs  et  ses  pilastres 
déliés,  ajustés  sur  les  arcs  et  les  pieds-pilastres  du  porche,  vivant 
l'un  et  l'autre  de  toutes  les  lumières,  de  toutes  les  ombres  que  notre 
ciel,  mille  fois  changeant,  donne  à  leur  combinaison  pittoresque? 
La  voyez-vous,  le  soir,  avec  son  architecture  découpée,  dont  les 
pleins  font  ombre  et  dont  les  vides  resplendissent  de  l'éclat  des  feux 
qui  les  éclairent?...  Voyez  circuler  dans  ces  vides  de  feu,  de  votre 
place  du  boulevard,  ces  hommes,  ces  femmes  aux  mœurs  élégantes, 
que  la  fortune  et  le  plaisir  ont  réunis,  et  vous  aurez,  vous,  prome- 
neur, observateur,  philosophe,  un  spectacle  ravissant.  Dut  cet  effet 
ne  se  produire  que  pendant  les  cent  vingt  jours  de  l'année  qui  nous 
font  craindre  ou  espérer  de  chaudes  soirées,  la  création  de  cette 
loge  serait  suffisamment  justifiée;  et  tout  directeur  de  l'Opéra  re- 
connaîtra qu'elle  donne  un  puissant  attrait  de  plus  à  son  attrayant 
spectacle. 

Bien  que  très-déliés  par  rapport  à  leur  écartement  et  à  l'éléva- 
tion de  l'arc,  les  pilastres  du  porche,  soit  du  premier,  soit  du  se- 
cond rang,  ont  une  fermeté  que  rend  plus  sensible  celle  des  lignes 
de  l'ornementation.  Cette  ornementation,  entièrement  étudiée  pour 
laisser  à  la  loge  supérieure  tout  l'éclat  que  son  rang  réclame,  offre 
une  combinaison  d'effets  qui  résulte  de  l'union  de  la  sculpture  et 
des  peintures  sur  la  lave  émaillée  et  de  l'émail  ombrant,  riches 
émeraudes  qui  doivent  un  jour  jeter  la  variété  de  leurs  feux  sur  les 
plus  riches  parois  de  nos  édifices  pour  y  briller  éternellement  , 
sans  altération,  et  nous  rendre  fiers  de  pouvoir  montrer,  au  moyen 
de  ce  mariage  mixte  de  notre  pierre  volcanique  et  de  deux  élé- 
ments artistiques  d'invention  nationale,  des  types  d'architecture 
splendide,  plus  somptueux,  plus  originaux,  plus  durables  encore 
que  les  marbres  orgueilleux  dressés  par  les  Palladio  et  les  Sca- 
mozzi. 

Sans  développer  aucune  explication  relative  aux  détails  de  l'or- 
nementation, disons  que  nous  voyons  dans  tout  le  parcours  de  la 
longue  ligne  de  l'entablement  une  frise  où  Lechesne,  cet  habile  tail- 
leur de  pierre,  ornemaniste  de  la  frise  de  la  maison  dorée  et  des 
ressauts  du  brillant  manoir  de  la  rue  Fontaine-Saint-Georges,  a 
laissé  l'empreinte  de  son  ciseau  facile. 

Comme  la  raison  et  le  goût  s'unissent  pour  faire  une  règle  à 
l'architecte  qui  superpose  plusieurs  étages  ou  plusieurs  ordres,  de 
couronner  son  œuvre  par  une  importante  corniche,  et  d'amortir. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


«•3 


sinon  de  supprimer,  celle  de  tous  les  ordres  interposés,  celle  du 
porche  est  étudiée  en  ce  sens. 

L'architecture  de  la  loge  est  comprise  en  vue  de  produire  un 
de  ces  effets  qui  tiennent  simultanément  de  la  distribution  des 
masses ,  de  la  combinaison  des  détails  et  de  leur  mise  en  rapport 
absolu  avec  l'emplacement  de  l'édifice,  c'est-à-dire  avec  son  orien- 
tation propre  à  déterminer  les  angles  de  lumière,  sous  les  influences 
desquels  le  monument  doit  vivre. 

Est-ce  un  calcul  toujours  établi,  toujours  imposé,  de  nos  jours 
surtout?. .  c'est  ce  que  je  ne  crois  pas,  et,  selon  moi,  c'est  un  grand 
mal. 

Et ,  de  plus ,  toute  la  masse  de  cette  architecture  ,  sur  les  faces 
antérieures,  postérieures  et  latérales,  car  il  doit  y  avoir  unité  de 
vues  dans  toutes  les  parties,  est  encore  comprise  pour  satisfaire  à 
une  somme  d'idées  que  l'on  suppose  plus  généralement  répandues 
chez  le  peuple  pour  lequel  on  a  fait  l'édifice,  et  qui ,  après  tout, 
pourrait  en  solder  le  compte. 

L'auteur  s'agenouille  devant  le  grand  œuvre  des  Grecs,  parce 
qu'il  est  sensible  à  l'inappréciable  pureté  qui  le  distingue;  mais  il 
n'a  pas  oublié  que  la  France  compte  des  génies  qui  l'ont  dotée 
d'une  architecture  où  le  sentiment  et  l'imagination,  toujours  gra- 
cieusement enlacés,  si  l'on  peut  dire,  donnent  à  mille  combinai- 
sons gracieuses  un  cachet  tout  national. 

En  s'inspirant  de  la  pensée  dont  s'animaient  les  maîtres  du 
XVI'  siècle,  il  a  voulu  donner  à  son  édifice  le  caractère  propre 
à  sa  destination,  mais  il  n'a  pas  voulu  imiter  ce  qui  pour  nous 
n'est  pas  imitable ,  même  le  théâtre  dû  aux  munificences  d'Au- 
guste; il  a  voulu  essayer  d'offrir,  avec  des  combinaisons  mixtes, 
différentes  de  celles  de  l'antique,  et  non  servilement  Renaissance, 
un  œuvre  capital  :  sa  hardiesse  sera  justifiée  s'il  a  obtenu  l'éclat, 
la  gaieté ,  le  festoyant,  la  noblesse  ,  qui  doivent  former  le  carac- 
tère de  cet  édifice.  On  voit  que  la  question  est  encore  à  l'état  de 
problème. 

Le  portique  de  la  loge  est  formé  d'arcades  à  plein-cintre ,  égales 
en  largeur  à  celles  du  porche  (environ  trois  mètres  vingt-cinq 
centimètres,  avons  nous  déjà  dit),  et  soutenues  sur  de  fermes  pi- 
lastres, ornés  sur  leurs  quatre  faces  de  cette  lave  émaillée  si  peu 
connue ,  si  peu  appréciée  par  conséquent  ,  et  que  nous  nous 
sommes  efforcé  de  préconiser  dans  unautre  travail ,  en  indiquant 
son  origine,  ses  qualités,  et  l'emploi  que  les  arts  doivent  en  faire  (  1  ). 

En  dessinant  et  en  ciselant  ses  frises,  le  sculpteur  a  pu  jouer 
avec  les  fictions  mythologiques ,  ce  qui  est  toujours  permis  et  de 
bon  goût  dans  ces  parties  de  l'ornementation  j  mais  cette  fois  les 
statuaires  n'ont  pas  usé  aussi  largement  de  cette  licence. 

Appliquée  à  la  grande  décoration  de  nos  édifices,  la  statuaire 
doit  avoir,  enfin,  une  tout  autre  signification  que  toutes  ces  imi- 
tations mortes  de  la  vieille  mythologie,  si  loin  de  notre  génie  na- 
tional ,  si  loin  des  mœurs ,  des  besoins ,  des  croyances  de  cette 
époque  :  il  y  a  des  croyances  encore.  La  statuaire  a  d'autres  élé- 
ments pour  nous  impressionner;  eu  disant  nous,  j'entends  parler 
des  masses  et  non  des  esprits  cultivés  qui  savent  admirer  dans  le 
sanctuaire  de  nos  musées  les  chefs-d'œuvre  des  âges  mytholo- 
giques. 

Depuis  longtemps  les  muses,  cette  très-admirable  création  du 
génie  antique,  sout  tombées  dans  un  état  de  vulgarité  désespérant 

(1)  Voir  Paris  sous  le  point  de  vue  pittoresque  et  monumental ,  cha- 
pitre XXXV. 


pour  la  dignité  des  doctes  sœurs,  si  compromises  par  les  arf  hitectés 
de  nos  théâtres,  qui,  faute  de  pouvoir  les  compter  toutes  dans  un 
ajustement  complet,  les  ont  désunies,  ce  que  ne  veut  pas  l'antique. 

Celte  fois,  disons-nous,  le  ciseau  de  David,  de  Duret,  de  Trl- 
quetti,  et  de  leurs  plus  célèbres  émules,  a  reçu  mission  de  nous 
offrir  l'image  des  compositeurs,  des  poètes  illustres  qui  ont  Jeté  le 
plus  de  charme,  le  plus  d'éclat,  le  plus  d'hamaonie  sur  la  scène 
lyrique. 

Tout  l'effet  de  l'édifice  n'est  pas  dans  ce  vaste  porche ,  dans  cette 
grande  loge  à  jour  qu'il  supporte  hardiment ,  ni  dans  la  longue 
terrasse  découverte  qui  règne  au-dessus  de  cette  loge  et  qu'on  voU 
comme  celle  du  dessous,  ornée  o'arbustes  et  de  fleurs,  faisant  ri- 
deau de  fond  aux  statues  de  marbre  qui  s'harmonient  si  bien  avec 
cette  verdure;  cet  effet  résulte  de  la  grande  combinaison  architec- 
toniquequi  forme  tout  l'ensemble  de  la  façade,  dont  l'unité  n'e«t 
pas  brisée  par  lavant-corps  décrit,  quoique  les  distances  diverses 
d'où  l'on  peut  apercevoir  le  monument  doivent  modifier  sensi- 
blement les  aspects  de  cette  architecture  pittoresque. 

Les  jours  du  porche  et  de  la  loge  tendent  à  rendre  moins  dur  le 
ressaut  de  cette  partie  de  la  construction ,  et  permettent  de  sentir 
la  liaison  du  corps  principal  de  l'élévation  avec  les  deux  parties  de 
droite  et  de  gauche ,  qui  forment  ainsi  deux  pavillons  en  retrait 
par  rapport  à  lavant-corps. 

Ces  pavillons,  d'au  moins  douze  mètres  de  face,  donnent  de  ta 
fermeté  à  cet  ensemble  festoyant. 

Ils  sont  là,  pour  ainsi  dire,  en  contre-forts.  Aucsi  ne  présentent- 
ils,  dans  presque  tout  leur  ensemble,  que  des  murs  pleins  avec  des 
moulures  et  des  tympans  sculptés.  Sur  lun  ,  on  voit  le  génie  de  la 
musique;  sur  l'autre,  celui  de  la  poésie  dramatique.  Dans  ces  con- 
ditions, nous  acceptons  l'allégorie. 

Au  rez-de-chaussée,  ces  pavillons  offrent  deux  principales  ou- 
vertures. L'une  accuse  une  galerie  latérale,  3,-ouverle  dans  toute 
la  longueur  de  l'édifice;  l'autre  accuse  un  péristyle,  4,  sous 
lequel  la  galerie  a  sou  issue. 

Au-dessus  de  la  corniche  du  premier  étage  de  ces  pavillons  se 
développe  un  soubassement  portant  unattique,  sans  jours,  avec 
un  large  tympan  couvert  de  lave  émaillée.  Sur  l'un,  ce  sont  les 
trouvères  et  les  conteurs ,  offrant  à  Charlemagne  leurs  tensomt  et 
leurs  sirvcntes,  éléments  de  l'intime  union,  en  France,  de  la  poésie 
dramatique  et  lyrique  ;  sur  l'autre ,  c'est  Louis  XIV  fondant,  par 
son  acte  de  concession  en  faveur  de  l'abbé  Perrin  et  du  marquis 
de  Sourdéac,  notre  Académie  royale  de  Musique. 

Les  angles  de  cette  partie  des  pavillons  sont  ornés,  sur  chaque 
face,  de  cariatides  demandées  au  talent  si  suave,  si  gracieux  ,  si 
fécond  de  Pradier;  en  cet  endroit ,  il  fallait  lutter  avec  Jean 
Goujon. 

Au-dessus  de  la  corniche  supportée  par  les  cariatides,  on  dis- 
tingue un  ajustement  de  figures  couchées  couronnant  celte  partie 
de  l'édifice. 

Ces  figures  sont  appuyées  d'une  part  contre  un  cadran  marquant 
les  heures;  de  l'autre,  contre  celui  qui  marque  les  variations  du 
temps.  De  l'une  et  de  l'autre  part,  ces  figures  représentent  le  Si- 
lence et  l'Attention.  Cette  ornementation  s'harmouie  avec  les  autres 
sculptures  que  je  viens  d'indiquer  et  sert  à  donner  plus  d'ampleur 
aux  pavillons. 

Le  socle  qui  porte  le  cadran  est  surmonté ,  «n  outre ,  d'une  ban- 
nière déployée  seulement  les  jours  de  représentation. 

Ces  deux  pavillons  sont  reliés,  dans  l'étendue  de  la  face,  par  une 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBIJCS. 


46'» 


galerie tomposant  le  ileinier  étage  de  l'édifiée.  Cet  étaj;e  est  t-ii 
retrait,  à  l'aplomb  de  l'arrière  du  porche  et  de  la  terrasse  qui  le 
couronne. 

Nous  allons  apprécier  les  effets  de  cette  combinaison  architecto- 
rale  au  point  de  vue  pittoresque  et  monunncntal  ;  nous  allons  ap- 
précier son  utilité  pour  les  spectateurs. 

Cet  attique  élève  à'  30  mètres  environ  une  façade  dont  la  lon- 
gueur est  de  C-1  mètres  ;  c'est  un  parti  franc  dans  la  composition 
de  l'édifice.  Il  fallait  des  hauteurs  à  l'intérieur;  il  ne  s'agissait  donc 
pas  de  les  dissimuler  à  l'extérieur.  Cela  n'empêche  pas  la  surélé- 
vation du  toit  du  théâtre  dans  les  proportions  qui  lui  conviennent. 
Cet  attique  est  en  rapport  avec  les  quatrièmes  loges  fixées  nu 
niveau  de  son  soubassement.  Et  les  spectateurs  de  cette  rangée  , 
ceux  de  l'amphithéâtre,  ceux  des  cinquièmes,  peuvent  se  promener 
l'été  sur  la  terrasse  découverte,  placée  en  avant-corps ,  et  qui  sert 
de  toiture  à  la  terrasse  couverte  du  premier  étage.  L'attique  lui- 
même,  intérieurement,  sert  de  foyer  aux  spectateurs  de  ces  trois 
catégories  de  places.  Plus  modestes  dans  leur  toilette,  plus  timides 
dans  leurs  allures,  ces  spectateurs  évitent  en  général  la  promenade 
du  grand  foyer  ;  mais  ils  apprécient  le  délassement  que  procure  un 
vaste  et  sain  promenoir  dans  nne  salle  de  spectacle. 

Au  point  de  vue  monumental  et  pittoresque,  en  attachant  à  ce 
dernier  mot  le  sens  que  je  lui  attribue,  je  reconnais  qu'à  partir  du 
pied  de  l'édifice,  tant  qu'on  n'a  pas  atteint  la  distance  de  1 4  mètres, 
l'ensemble  que  forment  les  portiques  à  jour  du  porche,  ceux  de 
la  loge,  et  les  statues  qui  chantournent  la  dernière  ligne  de  cette 
loge,  offre  un  corps  complet  ne  laissant  pasà  l'imagination  le  be- 
soin de  percevoir  d'autres  lignes  sur  des  plans  plus  reculés. 

Mais  lorsqu'on  s'éloigne  davantage,  les  statues  de  marbre,  qui 
ont  le  ciel  pour  toile  de  fond  ,  à  cette  distance ,  changent  d'aspect 
au  fur  et  à  mesure  que  l'architecture  s'élève  comme  un  rideau  der- 
rière leur  fine  silhouette,  qui  se  dessine  alors  sur  l'attique  ,  avec 
lequel  leurs  contours  s'harmonient  sans  confusion  ;  et  l'espace  de 
!)  mètres  qui  les  sépare  reste  toujours  sensible  à  l'oeil.  L'atti(|ue  se 
trouve  bientôt  complètement  développé  depuis  le  sommet  de  son 
soubassement  jusqu'à  la  flambante  antéfixe  qui  le  couronne. 

Un  toit  voûté,  bouclier  d'écaillés  métalliques  émaillées,  à  croupe 
arrondie  sur  la  face  antérieure,  s'élève  au-dessus  de  son  large  sou- 
bassement, dans  des  proportions  de  hauteur  assez  ménagées  pour 
ne  pas  en  faire  un  corps  en  disparate  avec  des  combinaisons  archi- 
tectoniques  systématiquement  marquées  par  des  vides  nombreux. 
En  s'éloignant  au  delà  de  46  mètres ,  le  soubassement  de  l'attique 
devient  également  visible ,  et  successivement  dans  des  proportions 
de  hauteur  convenables  à  la  distance  où  l'on  est.  A  100  mètres  en- 
viron ,  il  est  complètement  découvert. 

On  peutconcevoir  l'utilité  de  ces  gradations  d'effets  pittoresques, 
qui  ne  font  rien  perdre  à  l'architecture  de  son  caractère  monumen- 
tal et  de  son  unité. 

La  distance  qui  se  trouve  entre  la  façade  de  la  loge  et  la  façade 
de  l'attique  a  permis  de  donner  à  celle-ci  une  richesse  qui  ne  nuit 
aucunement  à  la  splendide  décoration  de  la  loge. 

Des  descriptions  plus  détaillées  à  cet  égard  entraîneraient  à  de  j 
trop  longs  développements.  Nous  avons  dû  nous  borner  à  l'indica-  ' 
tion  des  masses  et  des  principaux  détails  formant  l'ensemble  de 
la  distribution  toute  spéciale  d'une  façade  étudiée  dans  ses  rap-  , 
ports  avec  les  conditi^ps  de  sa  situation  pittoresque  et  les  besoins  | 
de  son  appropriation.  | 

Un  jeune  artiste  plein  d'avenir,  élève  d'un  de  nos  plus  grands 


maîtres,  et  qui  se  dévoue  peut-être  en  assujettissant  son  udent  re- 
marquable  à  nos  vues  personnelles,  M.  Eugène  Lambert,  rendra 
plus  sensibles  et  plus  appréciables,  avec  son  facile  crayon  et  les 
trésors  de  son  ornementation ,  ces  calculs  qui  restent  encore  im- 
palpables sous  notre  plume  impuissante. 

Les  autres  explications  qui  seront  données  touchant  la  distribu- 
tion générale  du  plan  justifieront  peut-être  les  dispositions  a  indi- 
(|uer  et  celles  déjà  indiquées;  nous  poursuivons. 

Le   PoiRTOUB. 

Sur  les  côtés  latéraux ,  au  rez-de-chaussée ,  à  travers  les  percées 
de  larges  et  hautes  arcades ,  la  lumière  se  répand  abondamment 
sur  deux  galeries  ouvertes,  3,  reliées  en  tète  par  un  vestibule  d'ar- 
gle,  4,  au  péristyle,  5,  de  la  face  antérieure,  et  en  queue  par  un 
porche  étiibli  sur  la  post-face.  Il  n'y  a  donc  pas  solution  de  conti- 
nuité dans  l'abri  ouvert  en  tout  temps  aux  promeneurs  qui  veu- 
lent circuler  autour  de  l'édifice. 

Au-<lessus  de  l'architrave,  dans  toute  la  longueur  des  faces  la- 
térales, des  consoles  supportent  un  balcon  à  balustres  de  pierre  et 
à  forte  saillie.  Comme  ornement,  il  anime  l'aspect  de  ces  façades; 
comme  utilité,  pendant  le  mauvais  temps  il  sert  d'auvent  aux 
humbles,  sortis  du  théâtre  par  les  issues  secondaires,  et  qui  n'ont 
pas  d'é(|uipages  plus  ou  moins  légalement  armoriés,  avec  licence 
pour  franchir  la  barre  du  grand  porche.  Là,  on  peut  se  jeter  dis- 
crètement dans  un  fiacre  salutaire  en  passant  sous  cet  abri,  et  bra- 
ver ainsi  les  attaques  de  l'averse. 

Le  premier  étage  offre  dans  toute  sa  longueur  de  longues  fe- 
nêtres étroites  et  cintrées  avec  ornementation.  Au-<lessus  de  l'en- 
tablement qui  les  surmonte  s'élève  encore  un  petit  étage  carré, 
percé  de  mezzanines,  qui  supporte  lui-même  un  autre  entablement 
couronné  par  une  galerie  de  balustres;  c'est  tout  ce  ([u'on  peut 
apercevoir  de  l'édifice  en  parcourant  les  rues  latérales  :  les  au- 
tres parties  de  l'élévation  se  trouvent  dans  un  profond  reculement. 
Cette  élévation,  cependant,  a  un  caractère  monumental,  caries 
monuments  d'une  grande  cité  ne  servent  pas  seulement  à  décorer 
la  rue  ou  la  place  qui  les  contient;  une  ville  ne  se  juge  pas  d'un 
jwint  de  vue  aussi  restreint.  Elle  a  sa  grande  physionomie,  qu'on 
apprécie  des  points  élevés  d  où  l'on  découvre  tout  l'ensemble  de 
ses  édifices.  Il  n'est  donc  pas  permis,  du  moins  pour  ceux  qui  ont 
quelque  intelligence  de  la  dignité  d'un  grand  peuple  et  du  soin 
(ju'il  doit  mettre  à  se  faire  honneur  de  tous  ses  travaux,  il  n'est 
pas  permis  de  couvrir  un  monument  de  sa  capitale  comme  on 
couvrirait  une  grange. 

L'ëtfige  en  reculement  est  un  attique  formant  en  quelque  sorte 
le  soubassement  du  toit  immense  qui  couvre  entièrement  la  salle 
et  le  théâtre.  Cet  attique,  orné  et  coupé  par  de  larges  mezzanines 
convenablement  coordonnées,  s'harraonie  avec  la  voVite  métal- 
lique du  toit,  disposée  dans  toute  la  longueur  du  faite  en  une 
vaste  plate-forme,  semblable,  pour  la  disposition  générale,  à  la 
plate-forme  de  la  belle  toiture  qui  couvre  le  Thé.'itre-Français  au 
Palais-Royal;  mais  cette  plate-forme  est  ornée  dune  riche  balu- 
strade' largement  décorée,  qui  complète  ce  magnifique  couronne- 
ment. 

La  façade  postérieure  est  développée  sur  une  place  ou  fraction 
de  rue  de  Tô  mètres  de  large.  Elle  fait  partie  des  bâtiments  plus 
particulièrement  affectés  au  service  de  l'administration.  Son  ar- 
chitecture conserve  au  rez-de-chaussée  les  mêmes  dispositions  que 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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celle  des  façades  latérales,  les  arcades  à  jour  ;  mais,  au-dessus  des 
arcades,  il  n'y  a  plus  qu'un  seul  étage,  peu  élevé  même,  afin  que 
plus  de  jour  vienne  éclairer  l'itilérieur  des  pièces  ouvertes  sur  la 
cour  de  l'administration. 

Pour  quiconque  connaît  les  lial)itiides  des  sept  cents  artistes  ou 
emploj'és  divers  inscrits  au  tableau  de  l'Académie  Royale  de  Mu- 
sique, pour  quiconque  connaît  bien  la  nature  du  service  de  cette 
vaste  administration,  l'utilité  de  la  cour  n'est  pas  douteuse  ;  elle 
est  un  élément  de  l'ordre  qu'il  convient  de  maintenir  parmi  cette 
active  peuplade.  Sans  pénétrer  plus  avant  à  cette  heure  dans  la 
distribution  de  la  partie  de  l'édifice  consacrée  à  l'administration, 
remarquons  autour  de  cette  cour,  au  rez-de-chaussée,  une  ga- 
lerie, 6,  libre  à  la  circulation,  sous,  laquelle  comparses  et  autres, 
esclaves  de  l'heure  militaire,  toujours  réunis  à  l'avance,  peuvent 
attendre,  défendus  contre  l'injure  du  temps,  que  le  concierge  leur 
ait  ouvert  leur  loge  commune.  Cette  galerie  est  d'ailleurs  utile 
pendant  tout  le  cours  de  la  journée  aux  divers  agents  du  service 
continuellement  eu  ciiculation  dans  l'établissement,  et  c'est  tou- 
jours en  vue  de  rendre  moins  fréquents  les  accidents  qui  peuvent 
résulter  des  caprices  de  notre  climat,  qu'un  porche  est  également 
établi  vers  la  post-face,  7.  Après  minuit,  par  la  pluie,  par  la  neige, 
il  ne  convient  pas  de  faire  stationner,  dans  une  cour  ou  dans  une 
rue,  les  artistes  énervés  par  les  travaux  de  la  scène,  et  qui  atten- 
dent pour  rentrer  au  foyer  domestique  l'arrivée  d'un  équipage 
payé  ou  à  payer. 

Sur  plusieurs  des  pieds-droits  que  supportent  des  archivoltes  , 
vers  les  faces  postérieures,  latérales,  et  particulièrement  sur  ceux 
qu'on  remarque  à  la  base  des  pavillons  d'angle,  vers  la  face  anté- 
rieure, on  a  disposé  des  tables  de  marbre,  encadrées  sous  un  gril- 
lage, qui  servent  à  l'apposition  des  affiches  de  toutes  les  dimen- 
sions, afin  que  ce  placage,  disposé  avec  quelque  symétrie,  ne  fasse 
pas  tâche  sur  l'édifice. 

Le  Pbemieh  Pas. 

Le  public  de  l'Opéra,  qui  forme  d'innombrables  catégories  dont 
l'appréciation  donnerait  matière  à  mille  fois  vingt  volumes  de 
mille  romanciers  plus  ou  moins  moralistes,  ne  se  trouve  séparé,  à 
certains  égards,  qu'en  deux  grandes  divisions  bien  distinctes,  à 
riieure  du  spectacle. 

La  division  des  lions  en  loge.  Il  n'est  pas  de  sa  dignité  de  s'ar- 
rêter à  la  porte  pour  payer:  elle  passe...,  on  la  salue.  —  La  division 
(les  amateurs  qui  traite  comptant  comptant  avec  le  buraliste. 
Elle  offre  des  philosophes  venus  de  tous  les  points  du  globe,  qui 
s'ébahissent,  après  trois  heures  de  queue,  au  premier  coup  de  com- 
mandement du  chef  d'orchestre,  sans  avoir  négligé  de  faire  petite 
monnaie  pour  l'impôt  forcé  des  cannes  et  parapluies,  gênante 
institution,  née  des  gourdins  de  Gernianicus.  Le  dépôt  est  établi 
sous  le  vestibule  d'angle,  4. 

Les  amateurs,  cette  fois,  n'aurontplus  àse  plaindre  :  si  on  ne  leur 
donne  pas  de  banc  pour  attendre,  assis,  l'heure  des  jouissances  pro- 
mises par  la  réclame,  on  leur  offre  du  moins  de  longues  galeries 
couvertes,  sous  lesquelles  la  pluie  et  la  boue  ne  les  atteindront  pas; 
sous  lesquelles,  en  été,  ils  respireront  librement  un  air  qui  ne 
sera  pas  vicié;  sous  lesquelles,  en  hiver,  leurs  pieds  humides  se- 
ront séchés  en  les  posant  sur  des  plaques  chauffées  par  de  bien- 
faisants calorifères;  ainsi,  le  philosophe  peut  attendre  une  heure 
de  plus.  Une  heure  de  plus,  dans  la  durée  de  la  queue,  c'est  une 


fascination  pour  le  passant;  à  cette  vue,  il  se  laisse  détourner  de 
projets  antérieurs.  Jl  est  clair  qu'il  y  a  économie  pour  le  directeur 
à  bien  chauffer  ses  plaques. 

Dans  toute  la  longueur  de  cette  galerie,  la  queue  se  forme  sur 
trois  rangs,  entre  le  muret  une  balustrade  de  fera  demeure,  qu'il 
n'est  pas  permis  aux  plus  lestes  d'enjamber,  8.  Et  pour  éviter  les 
cris  des  personnes  trop  pressées  par  la  fouie,  d'ordinaire  assez 
folle,  on  a  établi,  de  distance  en  distance,  des  barrières  mobiles 
dans  l'entre-deux  desquelles  trente  personnes  sont  renfermées  très 
à  l'aise.  Cette  barrière,  connée  au  poignet  et  a  l'oeil  d'un  municipal, 
ne  s'abaisse,  par  un  petit  mouvement  mécanique  que  le  brave 
tient  entre  les  doigts,  que  lorsque  la  série  qui  précède  a  fait  place, 
en  avançant,  à  la  série  qui  la  suit;  de  cette  manière,  plus  de  con- 
fusion, et  tout  y  gagne,  même  la  morale. 

Près  de  chaque  barrière,  il  y  a  une  porte  permettant  à  toute  per- 
sonne qui  serait  indisposée,  ou  qui  aurait  à  sortir  un  moment,  de 
s'échapper  et  de  revenir  prendre  sa  place,  ce  qui  n'engendre  au- 
cune difficulté,  ni  avec  le  sergent  de  ville,  ni  avec  les  divisions  du 
bout  de  la  colonne. 

On  arrive  ainsi,  sans  lutte  sérieuse,  auprès  du  bureau  des  bil- 
lets, 9,  ouvert  sous  le  vestibule  d'angle,  4,  de  la  face  antérieure  . 
où  le  public  qui  ne  s'est  pas  engagé  derrière  la  balustrade  de  fer 
peut  encore  circuler  librement,  comme  s'il  n'y  avait  pas  de  specta- 
cle, comme  s'il  n'y  avait,  pas  de  foule  dans  l'attente. 

Disons  en  passant  que  ce  bureau  touche  à  une  salle,  lO,  où  la 
prudence  administrative  maintient  pendant  le  spectacle  son  es- 
couade de  sûreté,  convenablement  placée  hors  de  tout  contact  Inu- 
tile avec  les  spectateurs  paisibles  :  elle  ne  doit  devenir  apparente 
qu'au  moment  du  danger. 

Avec  son  billet  pris,  l'amateur  entre  dans  une  voie  toute  tracée, 
où  nous  le  suivrons  pour  connaître  ses  impressions  et  recueillir 
des  notes  fort  exactes. 

Voilà  beaucoup  de  temps  passé  a  l'examen  de  l'extérieur,  a 
l'inspection  minutieuse  des  précautions  prises  pour  rendre  agréa- 
bles tous  les  abords  du  théâtre  ;  mais  nous  avons  à  dire  encors 
quelques  mots  des  précautions  prises  pour  combattre  avec  succès 
les  habitudes  d'un  public  qui  souille,  avec  impudeur  et  sans  façon, 
le  pied  des  édifices,  et  plus  particulièrement  celui  de  toutes  les 
salles  de  spectacle.  A  Paris,  le  théâtre  des  Variétés,  place  sur  le 
boulevard ,  est  le  seul  préservé  du  mal  :  cette  exception  prouve 
combien  il  est  facile  de  le  prévenir. 

Des  bornes,  convenablement  élevées,  dont  le  pied  est  baigné 
par  un  bassin  d'eau  toujours  vive,  sont  placées  le  long  du  trot- 
toir, contre  le  pied-droit  de  chaque  arcade  des  galeries  latérales; 
—  leur  forme  carrée,  avec  moulures  à  très-forte  saillie  sur  chacun 
de  leurs  angles,  les  rend  parfaitement  utiles  au  service  que  la  dé- 
cence leur  réclame.  Il  serait  difficile  de  demander  davantage,  d'ob- 
tenir davantage. 

Là  encore  la  lave  émaillée,  déjà  utilisée  a\ec  avantage  à  cet 
égard,  sert  tout  à  la  fois  à  la  propreté  et  à  la  décoration. 

Dès  que  le  prix  du  billet  d'entrée  est  soldé,  le  garde  municipal 
de  planton  contre  la  chatière  du  buraliste  invite  à  passer  vive- 
ment dans  le  grand  vestibule. 

Cette  espèce  de  salle  des  pas-perdus,  i,  d'environ  lO  mètres  de 
large  sur  40  de  long,  à  voûte  un  peu  surbaissée,  avec  arêtes  de 
cloitre,  s'appuie  sur  les  pieds-droits  qui  séparent  les  vingt-deux  ar- 
cades qui  forment  son  ensemble. 
En  raison  de  sa  position,  ce  vestibule,  à  l'heure  du  spectacle. 
1.  V.  30 


'1.67 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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est  toujours  éclairé,  été  comme  hiver,  par  la  lumière  artificielle, 
ce  premier  agent  des  illusions  du  théâtre,  et  qui,  là,  jaillit  de  vingt 
candélabres. 

L'esprit  d'ordre  qui  a  réglementé  le  mouvement  de  la  foule,  pour 
la  prise  des  billets,  est  encore  très- significatif  en  cet  endroit. 

On  n'y  voit  plus  ni  gardes  municipaux,  ni  sergents  de  ville,  qui 
fout  si  bien  nu  dehors,  mais  dont  l'aspect  est  trop  sévère  pour  l'In- 
térieur :  on  les  laisse  aux  abords  du  porche,  dont  ils  ont  la  police 
à  très-juste  titre.  Là,  on  voit  seulement  des  sergents  de  l'Académie 
Royale  de  Musique,  et  c'est  tout  autre  chose. 

Ils  sont  vêtus  d'un  beau  costume,  et  chargés  de  maintenir  le 
silence  dans  cette  station,  dont  l'utilité  est  bien  plus  vivement  sen- 
tie au  moment  de  la  sortie,  puisque  c'est  là  que  [actionnent  éveil- 
lés, à  moins  qu'ils  ne  sachent  dormir  debout,  les  gens  voués  aux 
dignes  de  la  terre.  Si  ces  gens  n'ont  pas  tous  la  jouissance  d'un 
siège,  on  leur  a  du  moins  assuré  à  tous  celle  des  calorifères,  quand 
il  y  a  lieu. 

Trois  issues,  au  centre  du  vestibule,  fermées  seulement  par  des 
portes  battantes,  rendent  facile  l'accès  de  la  salle  au  public  venu 
de  droite  et  de  gauche  par  les  galeries  latérales,  et  à  celui  venu  par 
les  porches  ;  ces  portes  sont  gardées  par  des  suisses,  avec  halle- 
barde, magnifiquement  habillés,  et  de  fort  bonne  mine. 

Quatre  braves  vétérans,  de  haute  stature,  à  moustaches  grison- 
nantes, payés  et  vêtus  à  l'heure,  font  leg  frais  de  cette  représen- 
tation. 

Des  jeunes  gens  à  la  livrée  de  l'Opéra, —  toutle  monde  a  livrée, — 
ont  mission  d'ouvrir  les  portières  des  voitures  enfilées  sous  le  por- 
che, fiacres  ou  modestes  équipages  privés  d'un  laquais,  afin  de  leur 
éviter  le  secours,  assez  suspect,  des  ouvreurs  officieux,  qui  n'ont 
pas  toujours  en  partage  la  politesse  et  la  propreté. 

L'Intéeiedb. 

Avant  de  passer  entre  les  suisses,  il  est  à  propos  de  rappeler,  ou 
d'apprendre  à  ceux  qui  l'ignorent,  que  toutes  les  parties  de  la  dis- 
tribution, du  côté  de  la  salle,  doivent  rester  dans  des  conditions 
secondaires  relativement  à  cette  salle,  malgré  la  magnificence  rela- 
tive qu'on  peut  leur  donner;  c'est-à-dire  que  la  salle,  étant  la 
partie  principale  de  l'édifice,  aucune  autre  partie,  soit  vestibule, 
soit  escalier,  soit  foyer,  ne  doit  pas,  par  suite  d'imprudentes  com- 
binaisons, amoindrir  feffet,  le  grand  effet,  que  doit  produire  la 
salle  proprement  dite. 

Il  y  a  des  théâtres  où  la  sévérité  des  vestibules,  des  escaliers  et 
du  foyer,  laissent,  malgré  de  grandes  qualités  architectoniques,  le 
publie  se  refroidir  avant  d'avoir  vu  la  scène. 

Il  y  a  de  beaux  théâtres  où  l'ennui  est  incrusté  sur  le  marbre  et 
la  pierre  qui  les  onient.  C'est  que  tout,  dans  cette  importante  com- 
binaison, doit  avoir  des  proportions  affectées,  pour  ainsi  dire,  aux 
sens  du  public.  Nous  ne  parlerons  pas  de  règles  ;  en  architecture, 
il  vaut  mieux  les  sentir  que  de  les  définir;  mais  nous  dirons  que 
ces  proportions  doivent  être  déterminées  par  une  parfaite  connais- 
sance des  besoins  réels  et  non  imaginaires,  par  une  connaissance 
de  la  disposition  d'esprit  la  plus  générale,  sous  l'empire  de  laquelle 
se  trouve  conduite  la  masse  du  public  qui  hante  le  spectacle  ;  nous 
dirons  qu'il  faut  bien  connaitre  la  propriété  de  chacune  des  parties 
de  l'édifice,  et  l'usage  que  l'administration,  que  le  public  en  font; 
mais  il  ne  s'agit  pas,  là,  d'aller  jamais  contre  les  impressions  de  la 
foule  :  il  faut,  au  contraire,  s'en  rendre  l'esclave. 


Il  faut,  dans  une  salle  de  spectacle,  que  le  public  se  trouve, 
avant  tout,  entendons-nous  bien,  gaiement  et  commodément  logé. 
L'abus  de  dispositions  affectant  de  trop  grandes  vues  monumen- 
tales, quand  il  ne  faut  les  développer  que  d'une  manière  toute  con- 
ditionnelle, pourrait  produire  sur  l'esprit  du  public  l'impression 
contraire  à  celle  signalée.  Voyons  si  ces  principes  ont  eu  quelque 
application  dans  l'édifice  que  nous  décrivons. 

J'ai  foulé  le  pavé  de  bois  du  porche  et  des  rues  qui  entourent 
l'Opéra;  j'ai  foulé  les  dalles  de  liais  du  premier  vestibule;  j'ai 
passé  entre  les  suisses  immobiles,  et  je  suis  sur  les  dalles  de  marbre 
du  deuxième  vestibule,  il. 

Là,  on  ne  peut  avoir  de  fâcheuse  méprise,  et  demander  l'échange 
de  sa  contremarque  à  un  abonné  courtier-marron.  Le  chef  du  con- 
trôle, homme  grave,  vêtu  comme  un  notaire,  est  assis  au  milieu  du 
sauctuaire,  sur  un  siège  élevé  d'où  son  œil  d'aigle  aperçoit  et  juge 
tout  d'un  seul  regard  ;  et  les  changeurs,  divises  autour  de  leur  chef, 
pour  recevoir  ses  inspirations,  sont  distingués  du  public  par  un 
surtout  de  couleur  voyante,  qui  n'est  pas  une  livrée,  et  qui  leur 
sied  à  merveille. 

Si  l'on  court  au  parterre,  on  aperçoit  facilement  une  des  deux 
voûtes,  qui  portent  une  inscription  significative,  1 2  :  ce  sont  les  deux 
premières  ouvertures  que  l'un  distingue  à  droite  et  à  gauche.  Après 
avoir  parcouru  seulement  cinq  mètres  de  plain-pied,  on  trouve,  au 
premier  retour  d'équerre,  un  escalier  à  rampe  droite,  de  quatre  mètres 
de  large,  aboutissant  à  l'entrée  de  ce  parterre,  13,  et  l'on  peut 
remarquer  d'utiles  précautions  prises  pour  assurer  la  prompte  et 
facile  évacuation. 

Eu  sortant  par  les  grandes  issues  du  parterre  adhérentes  au 
palier  en  forme  de  mitre,  13,  qu'on  reconnaît  sur  le  plan,  le  pu- 
blic descend  le  large  escalier  par  lequel  il  est  monté;  mais,  par- 
venu au  pied  de  cet  escalier  à  rampe  droite  et  de  peu  d'élévation, 
au  lieu  de  repasser  sous  la  voûte,  12,  qui  le  rejetterait  dans  le 
vestibule,  10,  par  où  doit  circuler  la  presque  totalité  de  la  foule 
descendue  des  étages  supérieure,  il  passe,  lui,  devant  une  grille 
qui  lui  intercepte  le  passiige  dans  ce  moiueut,  et,  sans  aucun 
détour,  il  arrive  directement  par  une  sortie  non  indiquée  sur  le 
plan,  mais  que  l'examen  fait  comprendre,  sous  le  grand  vestibule, 
vis-à-vis  la  deuxième  arcade,  en  rapport  direct,  de  chaque  côté, 
avec  la  deuxième  arcade  de  la  façade  du  porche. 

De  là,  ce  même  public  peut,  sans  cohue,  sans  gène  aucune,  se 
répandre  sous  les  vestibules  d'angles,  sous  les  galeries  du  pour- 
tour, et  gagner  les  rues,  les  passages  qui  lui  conviennent. 

Incidemment,  avant  de  quitter  le  parterre,  puisque  nous  parlons 
des  choses  quand  nous  les  rencontrons,  sans  nous  détourner  pour 
les  aller  chercher,  disons  que,  pour  rendre  plus  agréable  aux  ha- 
bitués de  cette  section  des  places  la  fréquentation  de  toutes  les 
parties  de  la  salle,  où  le  public  doit  être  admis  sans  exclusion, 
sans  exception,  une  autre  issue  a  été  ménagée  sur  le  même 
palier  13  déjà  indiqué.  Cette  issue  met  le  parterre  eu  communi- 
cation directe  avec  un  autre  palier  14,  d'où  il  peut  gagner,  soit 
le  grand  escalier  14  de  communication  de  tous  les  rangs  de 
places,  soit  le  grand  escalier  d'apparat,  qui  seront  l'un  et  l'autre 
décrits  ultérieurement,  mais  au  moyen  desquels  on  peut,  en  sor- 
tant du  parterre,  atteindre,  par  des  voies  convenables  et  agréa- 
bles, et  non  par  des  couloirs  et  des  escaliers  en  casse-cou,  les 
foyers,  la  grande  loge,  les  grands  corridors. 

Dégagés  du  parterre,  dont  la  constitution  exige,  pour  ainsi  dire, 
des  exceptions  dans  la  distribution  de  toute  salle  de  spectacle , 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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voire  même  dans  celle  de  l'Opéra,  nous  voilà  ramenés  sous  le  pé- 
ristyle pour  voir  la  foule  monter  le  grand  escalier  d'apparat,  et  pour 
la  suivre  bientôt,  d'étage  en  étage,  gravissant  les  marches  des 
grands  escaliers  de  communication,  redescendant,  remontant  et 
redescendant  encore. 

Les  Escaliers. 

Dans  la  distribution  générale  d'une  salle  de  spectacle,  et  d'une 
salle  d'Opéra  particulièrement,  les  escaliers  ont  une  importance 
de  premier  ordre. 

Les  diverses  constructions  de  salles  que  l'on  connaît  ii'offrent 
peut-être  pas,  à  cet  égard  ,  l'application  d'un  système  qui  réponde 
parfaitement  aux  conditions  de  cette  partie  du  service.  Nous  de- 
vons le  penser ,  puisque  nous  voyons  sans  cesse  des  projets  où 
chacun  apporte  des  idées  différentes  les  unes  des  autres,  en  ce  qui 
touche  les  moyens  défaire  disparaître  facilement  et  promptement 
la  foule  de  l'intérieur  d'une  salle  de  spectacle. 

Si  les  escaliers  sont  bien  disposés  pour  la  sortie,  ils  le  sont  bien 
pour  l'entrée.  Convenablement  disposés  pour  l'entrée,  ils  ne  le  sont 
pas  toujours  bien  pour  la  sortie.  Faute  d'avoir  distingué  ces  deux 
conditions  différentes,  on  a  souvent  commis  de  graves  erreurs  de 
distribution  dans  cette  partie  d'étude  architectonique.  Si  nous 
avons  pris  quelquefois  plaisir  à  observer  les  exigences  de  la  foule 
dans  ce  grand  vaisseau  qu'on  appelle  l'Opéra,  il  n'en  est  pas  qui 
aient  plus  constamment  fixé  notre  attention  que  celles  manifestées 
pendant  la  descente  et  la  sortie. 

L'intérêt  de  l'observation  a  produit  des  réflexions,  et  les  ré- 
flexions nous  ont  fait  pencher  pour  un  système. 

Il  en  est  un,  qui  n'est  pas  le  nôtre,  que  nous  voyons  et  que  nous 
avons  vu  préconiser;  les  séductions  qu'il  offre  dissimulent  trop 
ses  dangers.  Nous  essaierons  d'arracher  le  voile  doré  qui  les  cou- 
vre ;  nous  essaierons  de  lui  opposer  les  avantages  que  nous  croyons 
attachés  à  celui  (jue  nous  adoptons. 

Souvent  et  longtemps  nous  avons  cherché  la  meilleure  combi- 
naison applicable  pour  cette  partie  essentielle  de  la  distribution. 

Nous  avons  reconnu,  et  tout  le  monde  à  cet  égard  sera  de  notre 
avis,  qu'il  ne  devait  jamais  être  question  des  escaliers  tournants; 
mais  serons-nous  de  l'avis  de  tout  le  monde  en  affirmant  que  pour 
tous  les  escaliers  du  public,  les  escaliers  a  rampe  droite,  à  fré- 
(jueuls  re|)os  et  à  retour  d'équerre  ,  sont  à  tous  égards,  et  dans 
toutes  les  circonstances,  les  préférables,  préférables  à  ceux  compris 
entre  deux  murs  parallèles  ? 

Ce  n'est  pas  d'aujourd'hui  que  l'on  connaît  les  escaliers  droits 
de  cette  sorte ,  descendant  du  faite  à  la  base  d'un  édifice  et  offrant 
des  paliers  ou  repos  à  chaque  division  d'étages. 

L'escalier  d'honneur  du  Luxembourg  est  fait  ainsi,  et  nous  sa- 
vons tous  que  le  théâtre  antique  d'Herculanum  possédait  des  esca- 
liers combinés  dans  ce  système,  bien  que  les  deux  murs  affectas- 
sent la  ligne  circulaire  de  l'amphithéâtre,  ce  qui,  selon  nous, 
n'ajoute  rien  aux  qualités  ou  aux  défauts  du  système  ,  en  tant 
qu'on  voudrait  en  faire  l'application  à  nos  théâtres  ;  la  chose 
n'est  donc  pas  nouvelle. 

Avec  ce  système  appliqué  aune  salled'Opera,  le  spectateur,  prêt 
à  descendre  de  l'étage  des  cin(iuièmes,  peut  voir  le  spectateur  sorti 
du  rez-de-chaussée,  arrêté  au  bas  de  l'escalier,  quand  son  pied,  à 
lui,  reste  encore  sur  la  dernière  marche,  un  peu  plus  près  du  pa- 
radis. 


Les  promoteurs  de  ce  système,  que  j'ai  le  regret  de  combattre, 

car  il  y  en  a  qui  sont  gens  de  grand  talent,  lui  trouvent  un  im- 
mense avantage  pour  faciliter  l'écoulement  de  la  foule  dans  le  cas 
d'un  incendie  du  théâtre,  événement  pres(|ue  impossible,  pendant 
les  représentations,  dans  un  théâtre  construit  avec  des  précautions 
convenables. 

Mais  c'estavec  la  prévision  de  ce  danger  qu'il  faut  les  combattre. 

Quel  est  l'effet  de  cette  disposition  t  On  crie...  Au  feu  !  —  Les 
femmes,  jeunes  et  vieilles,  —  il  y  en  a  de  cette  série  à  cette  heure-là, 
— les  hommes,  jeunes  et  v  ieux ,  n'ont  qu'un  but,  c'est  la  sortie  !  Il  y 
aurait  des  exceptions  peut-être  nombreuses ,  mais  enfin  la  masse 
effrayée  serait  bientôt  sur  ses  paliers  respectifs,  et  couvrirait 
comme  un  essaim  cette  longue  échelle,  chargée  siibilcraent  de  mille 
spectateurs.  Ce  chiffre  n'a  pas  d'exagération. 

Si  les  plus  pressés  de  descendre  étaient  au  paradis,  transformé  tout 
d'un  coup  en  enfer  par  l'effet  de  ces  métamorphoses  si  familières 
à  l'Opéra  ,  que  feraient-ils?...  Comptant  sur  la  force  de  leurs  jar- 
rets, sur  celle  de  leurs  poignets,  ils  se  précipiteraient  comme  une 
avalanche.  Les  plus  faibles ,  les  plus  délicats  s'affaisseraient;  étouf- 
fées, les  femmes  ainsi  torturées  jetteraient  leur  dernier  soupir;  et  la 
dernière  porte,  celle  au  bas  de  l'échelle,  encombrée  de  morts  et 
de  mourants,  ne  serait  plus  dégagée  que  pour  pourvoir  à  de  lamen- 
tables funérailles. 

Avec  des  escaliers  fractionnés  par  étage ,  avec  de  nombreux  pa- 
liers et  de  fréquents  retours  d'équerre,  la  foule  des  étages  supérieur» 
n'est  pas  moins  empressée  que  dans  les  conditions  précédentes; 
mais  elle  trouve,  dans  celles-ci,  de  continuelles  barrières  qui  l'em- 
pêchent de  concevoir  la  pensée  de  se  lancer  comme  un  jet  du  haut 
en  bas.  Ces  obstacles,  ainsi  répétés,  permettent  à  ceux  dont  la  rai- 
son a  plus  de  puissance,  de  se  retirer  à  l'écart  au  moyen  des  issues 
que  l'on  retrouve  à  chacun  des  retours  d'équerre,  et  par  lesquelles  il 
faut  inévitablement  s'échapper.  La  foule,  après  un  premier  moment 
de  panique,  cède  aux  influences  de  la  sagesse;  elle  devient  d'autant 
moins  dangereuse  qu'elle  est  considérablement  divisée;  le  calme 
se  rétablit,  et  l'écoulement  complet  se  fait  alors  sans  accident. 

Mais  au  théâtre  d'Herculanum  comment  aurait-on  fait?  nous 
dira-t-on.  Les  anciens  n'avaient  pas  de  chandelle  pour  jouer  la  co- 
médie; le  ga/.  n'éclairait  pas  le  masque  de  leurs  tragédiens;  dans 
leur  spectacle  en  plein  soleil  il  n'y  avait  donc  pas  de  motif  pour 
crier...  Au  feu!...  hors  le  jour  où  Herculanum,  son  théâtre,  la 
\  ille  entière  étouffa  sous  les  cendres  brûlantes  du  Vésuve. 

La  question  des  escaliere  étant  ainsi  tranchée ,  revenons  au 
deuxième  vestibule,  1 1,  où  nous  verrons  l'application  du  système 
qui,  selon  nous,  doit  prévaloir  :  de  là,  nous  pénétrerons  avec  plus 
de  méthode  jusqu'au  ceeur  de  l'édifice. 

Voyons  si  tous  les  dégagements  qui  sont  ménagés  sont  en  parfait 
rapport  avec  les  habitudes  du  public  de  l'Opéra ,  et  n'oublions  pas 
que  les  habitudes  sont  impérativi>s  :  nous  ne  voulons  pas  dire 
qu'elles  doivent  être  contraires  au  progrès. 

La  distribution  de  ce  vestibule  est  faite  pour  que  le  public  com- 
prenne facilement  la  direction  qu'il  doit  prendre  et  qu'il  ait  le 
moins  d'hésitation  possible  à  s'engager  dans  les  diverses  ouver- 
tures par  où  l'on  peut  parvenir  aux  places  que  chacun  doit  occu- 
per ;  car,  il  faut  qu'on  le  sache  encore,  ce  public  si  intelligent  a 
toujours  eu  besoin,  prétendent  les  contrôleurs ,  qu'une  pantomime 
expressive,  aidée  quelquefois  par  de  significatives  paroles,  lui  tese 
bien  comprendre  son  chemin. 

Cette  distribution,  dans  ses  rapports  avec  les  escaliers ,  est  fiiitv 


Mi 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


472 


afin  (le  produire  sur  l'imagination  du  public  une  impression  assez 
favorable  pour  exciter  en  lui  cet  entrain  qui  lui  fait  attacher  plus 
(le  prix,  en  (luekjue  sorte,  au  spectacle  qu'il  va  voir.  Il  y  a  eu  étude 
à  cet  égard  ,  il  y  a  eu  étude  encore  pour  que  toutes  les  combinai- 
sons de  distribution  répondissent  autant  que  possible  à  tous  les 
caprices  de  droit  de  In  brillante  foule  qui  hante  l'Opéra. 

Ce  vestibule  a  douze  mètres  d'étendue  sur  chacun  de  ses  c<ités. 
Cette  dimension,  qui  ne  laisse  pas  le  regard  se  perdre  dans  un  trop 
grand  vide,  ce  qui  compromettrait  d'autres  effets  d'architecture 
qu'il  serait  maladroit  de  sacrifier,  s'agi'andit  à  l'œil  cependant  par 
la  combinaison  de  jours  ménagés  pour  faire  valoir  des  escaliers  dis- 
posés d'une  façon  pittoresque,  festoyante  et  monumentale. 

En  entrant  sous  ce  vestibule,  on  a  en  face  de  soi  un  large  esca- 
lier de  plus  de  huit  mètres  d'ouverture,  mais  seulement  élevé  de 
quelques  marches  ;  son  ouverture  est  encadrée  sous  une  arcade 
surbaissée  dont  l'archivolte  repose  sur  de  solides  colonnes  qui  lais- 
sent des  vides  à  droite  et  à  gauche. 

Du  centre  du  vestibule,  l'œil  aperçoit  facilement  aux  deux  ex- 
trémités du  premier  palier,  IG,  qu'on  atteint  au  bout  des  cinq  ou 
six  marches  indiquées,  la  base  et  le  faîte  de  deux  belles  ram- 
pes, 17,  de  quatre  mètres,  qui  tendent  au  premier  étage  ;  ces  ram- 
pes à  jour  sont  bordées  de  balustres  en  marbre. 

De  ce  même  point,  l'œil  suit  facilement  le  public  qui  monte  ces 
rampes;  il  le  voit  s'avancer  vers  le  haut,  passant  sur  le  premier 
retour  d'équerre,  18,  deuxième  palier  de  l'escalier  d'apparat, 
franchissant  les  marches  qui  y  adhèrent;  et  il  ne  le  perd  de  vue 
qu'au  moment  où  il  atteint  le  troisième  palier,  19,  quand,  enfin, 
il  va  toucher  le  plancher  du  premier  étage. 

Dans  cette  combinaison ,  nous  trouvons  des  effets  qui  ont  de  la 
magie;  ils  résultent  du  jeu  (jue  produisent  les  vides  ménagés  pour 
que  l'on  puisse  découvrir  le  mouvement  de  la  circulation,  même  de 
tous  les  points  des  escaliers. 

Plus  loin ,  nous  ferons  remarquer  le  rapport  de  ces  effets  avec 
ceux  de  même  nature  obtenus  avec  les  autres  grands  escaliers,  i  .5, 
établis  sur  les  Cijtés. 

En  ce  moment ,  essayons  de  faire  comprendre ,  à  l'aide  de  la 
simple  description,  l'effet  que  produit,  du  même  point  de  station  , 
le  vaste  salon  ellipsoïde  que  le  plan  n'indique  pas,  et  qui  se  trouve 
ouvert  sur  toute  la  largeur  du  premier  palier,  en  face  des  marches 
qui  le  relient  au  vestibule. 

Ce  salon ,  placé  sous  l'amphithéâtre  et  sous  le  parterre,  offre  des 
combinaisons  architectoniques  qui  s'harmonientavcc  le  système  de 
vides  calculés  pour  le  jeu  des  escaliers.  Des  colonnes  supportent  sa 
voûte,  et  trois  larges  ouvertures,  adhérentes  au  palier,  permettent 
son  accès. 

Son  utilité  ne  saurait  être  contestée.  Les  spectateurs  descendus 
des  loges,  et  qui  comptent  sur  un  équipage ,  au  lieu  de  se  jeter  dans 
le  vestibule  pour  y  attendre  les  gens  à  la  recherche  de  leur  voiture, 
se  retirent  du  côté  du  splendide  salon  et  attendent  là ,  à  l'abri  de 
tout  froissement  de  la  foule  empressée  de  disparaître, que  le  signal 
du  départ  leur  soit  donné  par  la  livrée,  qui ,  pour  être  utilement 
aperçue,  n'a  pas  besoin  de  s'avancer  au  delà  de  l'entrée  du  deuxième 
vestibule,  1 1 . 

Ce  salon  de  station  est  décoré  avec  luxe  ;  la  statuaire  en  fait 
presque  tous  les  frais,  et  sa  forme  y  prête.  Il  fallait  une  opposition 
à  la  décoration  de  la  salle  et  du  grand  foyer,  dont  nous  n'avons  pas 
dû  parler  encore. 

Ce  salon  ,  indépendamment  de  ses  larges  ouvertures  du  côté  du  ! 


vestibule,  a  plusieurs  issues  qui  le  mettent  en  communication  soif 
avec  d'autres  parties  de  l'intérieur,  soit  avec  l'extérieur,  par  les 
galeries  latérales. 

ISous  aurons  peut-être  occasion  de  revenir  plus  lard  dans  cette 
station  ;  mais  nous  repassons  actuellement  sur  le  palier ,  cardinal 
pourainsi  dire,  afin  de  continuer  nos  pérégrinations  et  de  reconnaître 
progressivement  l'effet  pittoresque  des  escaliers  (jui  n'ont  pas  en- 
core été  décrits,  ainsi  que  leur  rapport  avec  les  effets  de  l'escalier 
d'apparat. 

Lorsqu'on  a  atteint  le  deuxième  palier,  18,  de  l'escalier  d'appa- 
rat ,  on  a  en  face  de  soi ,  à  une  distance  de  4  mètres  euN  iron ,  sous 
une  voûte  servant  de  passage,  le  grand  escalier  15,  qui  dessert, 
de  haut  en  bas,  tous  les  divers  rangs  de  loges  sans  exception.  Il 
y  a  à  la  base  une  issue  directe  sur  une  galerie  intérieure  adhé- 
rente h  la  galerie  latérale  de  l'extérieur  de  cet  escalier,  de  manière 
qu'en  sortant  d'un  lieu  très-chaud,  pour  aller  dans  un  espace  sou- 
vent très-froid  ou  très-frais,  on  passe  par  une  utile  gradation  de 
température,  sans  ([u'on  soit  exposé,  par  la  position  des  lieux,  a 
une  mortelle  ventilation. 

Nous  avons  dit  (|ue  pendant  les  entr'actes,  le  parterre  jouissait 
d'une  issue  directe  pour  atteindre  les  foyers,  en  passant  sur  le  grand 
palier  14,  qui,  à  la  hauteur  de  l'entre-sol,  se  trouve  en  communica- 
tion avec  le  grand  escalier  des  c<ités,  15,  et  que  nous  voyons  encore 
en  communication  avec  le  grand  escalier  d'apparat,  à  la  hauteur  de 
son  deuxième  palier,  18.  C'est  parcelle  communication  que  les 
personnes  destinées  à  l'orchestre  public  et  aux  loges  du  rez-de- 
chaussée  arrivent  très-directement  à  leur  place,  en  passant  par 
l'ouverture  que  nous  voyons  sur  le  plan,  contre  celle  réservée  au 
parterre,  et  qui  reste  fermée  lors  de  l'arrivée.  Ces  personnes,  on 
le  voit,  passent  alors  devant  le  grand  escalier  15,  qui  conduit,  au 
besoin ,  à  tous  les  rangs  de  loges. 

Cet  escalier  suspendu  dans  sa  cage,  où  il  reste  à  jour,  a  4  mètres 
de  large,  et  seul  il  serait  suffisant  pour  assurer  le  prompt  dégage- 
ment de  la  salle,  car  l'escalier  d'apparat,  indispensable  sous  le  ra|v 
port  de  la  décoration  architectonique,  et  qui  ne  s'étend  que  jusqu'au 
premier  étage,  offre  un  luxe  de  facilités  pour  ce  dégagement. 

Si  l'on  stationne,  au  moment  de  la  sortie,  sur  le  deuxième  pa- 
lier, 18,  de  l'escalier  d'apparat,  on  découvre  de  cette  position,  non- 
seulement  les  personnes  qui  sont  encore  sous  le  vestibule,  celles 
qui  entrent  sous  la  rotonde  décrite,  celles  qui  montent  au  premier 
étage  par  les  escaliers  d'apparat  de  droite  et  de  gauche,  mais  encore 
celles  qui  circulent  sur  le  grand  escalier,  l.'>.  placé  en  reculement 
sous  la  voûte. 

Bien  que  séparées  de  fait  des  personnes  qui  circulent  sur  les  es- 
caliers d'apparat,  et  qu'elles  ne  peuvent  rencontrer  dans  leur 
course,  celles  circulant  sur  le  grand  escalier  se  trouvent,  pour  le 
coup  d'œil,  faire  masse  avec  elles. 

En  outre,  par  suite  de  cette  combinaison  d'escaliers  a  jour,  9,  mis 
ainsi  en  rapport  pour  la  vue,  les  pci-sonnes  qui  se  trouvent  en  même 
temps  sur  les  escaliers  en  reculement,  à  la  hauteur  du  palier  18 
de  l'escalier  d'apparat,  se  voient  réciproquement  des  deux  points 
extrêmes  de  la  grande  largeur  de  l'édifice.  Cependant,  elles  sont 
séparées  par  deux  sections  de  l'escalier  d'apparat,  qui  se  dévelop- 
pent, entre  les  points  où  elles  sont  posées,  sur  une  longueur  de  40 
mètres,  où  tout  est  fractionné  de  manière  à  produire  d'heureux 
effets  de  perspective.  Ce  n'est  pas  tout. 

Depuis  le  deuxième  palier,  18,  sur  lequel  nous  venons  de  faire 
une  pause,  l'escalier  d'apparat  reste  entièrement  à  découvert  jusqu'à 


VIS 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


VJ^ 


une  grande  élévation  ;  en  sorte  que  l'observateur  placé  au  premier 
étage  sur  le  large  palier,  20,  qui  unit  le  grand  foyer  du  public  à 
toute  la  partie  des  premières  loges,  peut,  en  s'avançant  vers  les  ba- 
lustrades, jouir  de  l'effet  général  de  ces  escaliers  et  voir  leur  phy- 
sionomie animée,  soit  au  moment  de  l'arrivée,  soit  au  moment  de  la 
sortie.  De  là,  son  œil  est  maître  de  toute  la  surface  qui  se  déroule  à 
ses  pieds. 

Il  faut  voir  du  haut  de  ces  balcons  si  variés,  et  à  la  lumière  com- 
plètement éblouissante  du  gaz,  ce  mouvement  des  femmes  qui  vont 
remonter  en  équipage.  Elles  sont  toutes  du  même  âge,  elles  sont 
toutes  charmantes  dans  ce  parterre  jonché  de  fleurs,  de  plumes,  d'é- 
toffes soyeuses,  si  elles  portent  les  dentelles,  les  pierreries  et  les 
parfums,  talismans  sans  prix,  qui  les  font  vivre  et  briller  cent 
ans. 


Le  Foyeb  ,  LA  Tebrasse  couveete  et  les  Salo 


NS. 


Nous  sommes  trop  près  du  foyer  pour  ne  pas  y  passer  d'abord. 

Il  importe  qu'on  se  rende  bien  compte  de  la  véritable  destination 
d'un  foyer  du  public  à  l'Opéra  ;  car  cette  destination  détermine 
d'une  manière  al)solue  sa  distribution,  sa  forme,  ses  dimensions:  à 
cet  égard,  il  ne  peut  y  avoir  de  doute. 

Le  foyer  n'est  pas  un  salon  dans  lequel  des  groupes  se  forment 
et  restent  longtemps  stationnaires  ;  où  l'on  marche  le  chapeau  à  la 
main,  avec  la  discrétion  des  gens  bien  appris,  appelés  à  une  récep- 
tion privée;  ce  n'est  pas  non  plus  une  bourse  où  le  vendeur  se  pose 
avec  ses  savantes  combinaisons  devant  l'innocent  acheteur,  et  réci- 
pro([uement;  ce  qui  ne  veut  pas  du  tout  dire  qu'on  n'y  fasse  pas 
d'affaires,  qu'on  ne  s'y  arrête  pas  pour  y  donner  la  main  la  plus 
pure  à  la  main  la  plus  perfide.  Avant  tout,  le  foyer  est  un  prome- 
noir où  des  amis,  et  on  en  a  toujours  beaucoup  dans  ce  pays-là,  se 
tiennent  par  le  bras  et  forment  invariablement  une  double  ligne  de 
circulation,  allant  d'un  bout  à  l'autre  de  la  longueur  ;  et  quand  un 
provincial,  s'il  y  a  encore  un  provincial,  rend  bon  compte  dé  ce 
qu'il  a  fait  à  l'Opéra,  il  dit  .l'ai  été  me  promener  au  foyer. 

Il  n'est  donc  pas  possible  de  concevoir  pour  cet  usage  autre  chose, 
si  on  ne  veut  errer,  qu'une  galerie,  la  plus  longue  possible,  c'est-à- 
dire  longue  de  toute  la  largeur  d'un  théâtre,  et  qui  n'ait  en  largeur 
que  ce  qu'il  faut  pour  de  bonnes  proportions,  et  pour  que  le  public 
comprenne  bien  comment  il  va  former  sa  double  ligne  de  prome- 
nade, avec  toute  l'aisance  nécessaire  cependant,  afin  que  les  ébahis, 
épars  sur  tous  les  points,  ne  soient  ni  heurtés  ni  bousculés  par  le 
flot  qui  monte  et  par  le  flot  qui  descend. 

Voilà  les  principales  conditions  du  foyer  ,  auxquelles  il  ne  faut 
pas  manquer  d'ajouter  celles-ci  :  11  y  a  des  gens  qui  trouvent  char- 
mant de  s'asseoir  sur  de  molles  banquettes  et  d'observer  le  mouve- 
ment de  la  circulation  ;  il  faut  bien  les  satisfaire.  Il  y  en  a  d'autres 
qui  aiment  à  trouver  dans  une  partie  plus  retirée,  mais  non  trop 
éloignée  de  cette  foule  qui  éieetrise  et  qui  ranime  la  verve,  un  coin 
où  les  amateurs  de  causeries  peuvent  plus  facilement  se  circonscrire  ; 
jusqu'à  ce  jour,  on  a  peu  satisfait  à  cette  exigence  de  l'esprit. 

Le  foyer,  c'est,  on  le  voit,  un  bien  important  accessoire  dans  la 
distribution  d'une  salle  de  spectacle.  C'est  là  que  le  public  va  cher- 
cher le  moyen  de  rendre  à  des  membres  engourdis  par  une 
trop  longue  immobilité ,  toute  leur  élasticité  première  ;  c'est  là 
qu'il  va  chercher  un  air  qui  sera  toujours  plus  pur  que  celui  respiré 
dans  une  salle  échauffée  par  deux  à  trois  mille  spectateurs  et  par  une 
myriade  de  lumières;  c'est  là,  enfin,  que  pendant  le  petit  nombre 


de  veillées  consacrées  accidentellement  aux  plaisirs  charivariqae» 
du  bal  masqué  ,  il  va  chercher...  pas  autre  chose  que  ce  qu'il  y  va 
chercher  un  jour  de  grande  représentation. 

Dansées  conditions,  voyons  si  le  foyer  de  l'Opéra  a  reçu  de  no- 
tables améliorations  ;  mais  n'allons  pas  examiner  si  on  pourrait  ac- 
cidentellement,  très-accidentellement,  en  faire  une  balle  de 
concerts. 

A  l'Opéra,  ta  seule  salle  de  concerts  permise,  spéciale?...  mais 
c'est  la  galle  de  spectacle  avec  son  rideau  baissé  plus  ou  moins  re- 
culé. 

C'est  une  utile  idée,  sans  doute,  d'avoir  mis  le  foyer  de  l'Opéra 
en  communication  dans  toute  son  étendue,  ou  à  peu  près,  avec  une 
terrasse  couverte,  à  l'abri  de  la  pluie  par  conséquent,  offrant,  l'été, 
tous  les  avantages  d'une  allée  de  jardin  illuminée,  et  l'hiver,  tons 
les  agréments  d'un  jardin  d'hiver. 

N'ai-je  pas  justifié  cette  disposition  nouvelle,  où  je  vois  les  fem- 
mes venant  s'asseoir  au  milieu  des  arbustes  distribués  sous  cette 
architecture  pittoresque,  et  stationnant,  à  la  grande  satisfaction  du 
glacier,  devant  ces  larges  balcons  étincelants  de  clarté,  d'où  elles 
peuvent  embrasser,  à  droite  et  à  gauche,  une  immense  étendue  de 
boulevards,  et  d'où  elles  peuvent,  ce  qui  a  du  prix  encore,  être 
vues  de  tout  ce  qu'elles  voient  ? 

Deux  tambours  en  fer,  servant  de  support  à  des  fleurs,  sont 
placés  vers  les  extrémités  de  cette  loge;  ils  ne  déparent  pas  l'ar- 
chitecture, et  le  glacier  fait  de  leur  intérieur  exigu,  mais  suflisant, 
un  dépôt  provisoire  de  son  officine. 

Au  besoin,  sans  aucun  doute,  les  portiques  extérieurs  de  la  loge 
peuvent  être  clos,  et,  dans  ce  cas,  elle  ne  forme  plus,  avec  le  fover, 
qu'une  double  galerie  fermée;  c'est  la  serre  près  du  salon. 

Pour  mon  compte,  j'aime  peu  les  clôtures ,  les  fermetures  provi- 
soires, car,  souvent  établies  pour  quelques  heures,  l'insouciance,  la 
paresse,  les  maintiennent  contre  la  raison  et  les  cris  du  public;  cet 
inconvénient  ne  pouvait  empêcher  de  concevoir  et  de  construire  la 
loge.  Les  moyens  mécaniques,  à  l'Opéra ,  ont  une  puissance  indé- 
finie. Des  stores,  faciles  à  rouler  et  à  dérouler,  sont  étiiblis  de  ma- 
nière à  rester  fermés  seulement  pendant  les  soirées  trop  froides, 
et  sont  disposés  très-utilement  pour  garantir  l'intérieur  des  attein- 
tes des  courants  d'air.  Leur  clôture  est  parfaite  ,  et  leur  transpa- 
rence, qu'augmente  le  grand  feu  des  lumières,  laisse  a  larcbitec- 
ture  extérieure  le  caractère  qui  lui  est  propre  pour  la  décoration 
même  du  boulevard  et  de  la  ville. 

Cette  loge  a  sept  mètres  de  largeur;  le  foyer  en  a  dix;  deux  de 
plus  que  celui  de  la  rue  Lepelletier;  cependant  la  longueur  est  la 
même,  ou  à  peu  près. 

Plus  large  de  deux  mètres  que  le  foyer  de  la  rue  Lepelletier, 
celui-ci  a  des  dispositions  particulières  qu'on  doit  apprécier. 
Laissons  de  côté  les  avantages  de  sa  communication  a>  ec  la  l<^  ; 
avantages  qui,  l'été,  aux  Joui's  les  moins  favorables  pour  le  pro- 
duit des  recettes  ,  se  traduisent  par  l'arrivée  d'un  plus  grand 
nombre  de  spectateurs  de  distinction,  voues  a  la  divine  fl&uerie  de 
la  terrasse. 

D'après  les  habitudes  du  public ,  puisque  la  circulation  au  foyer 
se  fait  sur  deux  lignesparalleles,s'etablissant  toujours  plus  près  des 
murs,  dans  le  sens  longitudinal,  il  était  plus  rationnel  dofTriraux 
promeneurs  une  double  ouverture  qui  leur  permit,  sans  briser  leur 
double  ligne  de  circulation,  de  pénétrer  facilement  dans  les  salles, 
22,  qui  ne  sont  qu'une  division  architectonique  du  foxer,  cl  qui, 
rue  Lepelletier,  furent  disposées,  originairement,  l'une  pour  rcce- 


W5 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


voir  le  comptoir  du  limonadier,  l'autre  pour  subir  le  triste  étalage 
du  bouquiniste  vendeur  de  pièces  de  théâtre. 

Actuellement,  un  comptoir  placé  comme  précédemment  est  en- 
core occupé  par  le  glacier,  l'autre  par  une  bouquetière  :  il  y  a  riva- 
lité pour  exciter  le  goût  et  l'odorat. 

Ce  n'est  pas  dans  ces  portions  du  foyer  que  vient  se  réfugier  la 
causerie  intime  :  elle  s'évanouirait  entre  les  biscuits  du  limona- 
dier, et  les  papillons  nourris  des  roses  de  la  bouquetière. 

Sur  le  côté  de  chacune  de  ces  deux  portions  du  foyer,  il  y  a  un 
salon,  23,  d'environ  dix  mètres  sur  huit,  dont  l'accès  reste  d'au- 
tant plus  facile  qu'il  a  des  ouvertures  directes  sur  le  foyer  et  sur 
un  palier  adhérent  au  corridor  des  loges. 

Ces  deux  salons  sont  publics,  très-publics  et  très-visibles,  bien 
qu'ils  soient  assez  retirés  pour  être  plus  à  l'abri  du  bruissement 
de  la  foule.  On  est  tenté  d'y  entrer,  parce  qu'on  y  voit  de  moelleux 
divans,  des  fauteuils  confortables ,  un  éclairage  harmonie  avec  les 
peintures  attachées  aux  murs  et  au  plafond,  etqu'enfln  les  pieds 
n'y  foulent  que  des  tapis  ;  mais  sur  la  porte  de  l'un  il  y  a  :  Salon  des 
.  compositeurs;  et  sur  l'autre  :  Salon  des  poètes.  Oh  !  alors  à  moins 
d'appartenir  à  l'esprit  de  l'Institut  par  le  présent,  le  passé  ou  le 
iutur,  on  s'incline  et  l'on  passe  outre.  Les  initiés  font  exception  , 
ne  s'effraient  pas ,.  entrent ,  causent ,  entendent  causer,  et  font 
bien. 

Au  nombre  des  particularités  de  la  distribution  du  grand  foyer, 
il  y  en  a  une  d'un  gri^nd  intérêt. 

Comme  au  grand  foyer  de  la  rue  Lepelletier,  le  grand  foyer  a  trois 
portes  au  milieu  de  sa  longueur,  pour  qu'on  y  pénètre  du  côté  de 
la  face  des  corridors  du  premier  étage.  Mais  à  l'ancien  foyer,  ces 
trois  ouvertures,  tout  à  fait  incomplètes,  laissaient  à  désirer,  quand 
les  spectateurs  sont  nombreux ,  et  particulièrement  au  moment 
de  la  reprise  du  spectacle  après  un  entr'acte. 

Dans  ce  moment,  la  foule  engagée  vers  les  extrémités  pagne 
difficilement  les  issues  du  milieu  pour  retourner  à  ses  places 
respectives  ;  et  à  cet  égard  on  a  pu  remarquer  des  inconvénients 
réels ,  résultant  de  l'empressement  de  tous  à  reprendre,  à  la  même 
minute,  mille  places  restées  vacantes.    * 

Dans  le  foyer  nouveau,  il  y  a  les  trois  portes  du  milieu  ;  il  y  a 
aux  deux  extrémités ,  sans  compter  les  issues  peu  secrètes  malgré 
ce  que  j'ai  dit ,  qui  permettent  de  trouver  un  passage  fort  large  par 
le  salon  des  poètes  et  par  celui  des  compositeurs ,  deux  autres  ou- 
vertures pour  communiquer  directement  avec  les  corrdors.  Ces 
ouvertures  sont  placées  aux  deux  bouts  du  grand  foyer,  avant  les 
sections  de  galerie  où  se  trouvent  le  comptoir  du  glacier  et  l'éta- 
gère de  la  bouquetière. 

Remarquons  leur  utilité  incontestable;  mais  examinons  aussi 
l'effet  pittoresque  qui  résulte  de  leur  combinaison  arebitectonique. 

Cette  ouverture  donne  inmédiatement  sur  un  couloir  ou  pas- 
sage, 24,  large  de  quatre  mètres,  dont  un  côté  est  bordé  par  les 
deux  portes  du  salon,  23,  des  poètes  ou  des  compositeurs  ,  l'autre 
par  une  balustrade  à  jour  d'où  le  regard  plonge  dans  le  vide  du 
grand  escalier  d'apparat.  Ce  couloir  est  ainsi  jeté  comme  un  pont  ; 
et,  de  dessus  son  tablier,  l'on  découvre  encore,  même  daus  l'extré- 
mité opposée,  la  plus  grande  partie  de  l'escalier  d'apparat,  et  les 
balcons  des  corridors  de  face  appartenant  aux  loges  des  deuxièmes 
et  des  troisièmes.  L'on  découvre  encore  tout  l'ensemble  des  paliers 
et  des  corridors  du  premier  étage  dont  nous  allons  nous  occuper, 
et  qui  sont  disposés  comme  on  n'a  pas  encore  eu  le  soin  de  le  faire 
jusqu'ici  dans  aucun  théâtre.  En  outre,  de  ce  même  point  on  dé- 


couvre l'escalier  secondaire  de  la  tète  de  la  salle ,  placé  au  bout  du 
corridor,  lequel  offre  encore  une  rampe  droite  se  développant  en 
face  du  passage  ;  eu  sorte  que  les  personnes  qui  viennent  des 
étages  supérieurs  par  cet  escalier,  reconnaissent  tout  d'abord 
le  moyen  d'arriver  facilement  au  foyer,  et  jouissent  de  loin  des 
effets  de  perspective  produits  par  cette  disposition. 

Il  en  est  de  même  pour  les  personnes  venues  des  étages  supé- 
rieurs par  les  dégagements  que  nous  avons  du  nommer  les  grands 
escaliers,  i  ô.  En  mettant  le  pied  sur  la  dernière  marche  qui  adhère 
au  corridor,  et  en  faisant  un  retour  d'équerre,  du  côté  du  foyer, 
elles  jouissent  instantanément  du  même  coup  d'œil. 

Mais  avant  d'entrer  dans  plus  de  détails  en  ce  qui  concerne  les 
corridors  ,  répétons ,  si  nous  l'avons  déjà  dit ,  que  ces  grands  esca- 
liers à  rampe  droite  avec  paliers  à  retour  d'équerre,  sont  disposes, 
depuis  le  plus  haut  étage  jusqu'au  rez-de-chaussée,  auquel  ils 
aboutissent,  dans  une  cage  où  leur -rampe  reste  vide  et  dégagée 
du  côté  où  se  replie  le  retour  d'équerre.  Cette  rampe  est  garnie 
d'une  balustrade  à  jour  ;  et  cette  disposition  permet  encore  de  voir, 
de  quelque  point  que  ce  soit  de  l'escalier,  le  mouvement  de  cir- 
culation qui  a  lieu  dans  tout  son  développement,  sans  avoir  à  re- 
douter, on  le  comprend,  les  accidents  gra\esqui  résulteraient  de 
la  disposition  que  je  me  suis  permis  de  condamner. 

Les  Cobbidobs. 

Les  corridors...  On  a  cru  vraiment,  jusqu'ici,  qu'il  s'agissait  de 
disposer  un  couloir  plus  ou  moins  étroit,  pour  que  les  gens  qui  ne 
craignent  pas  de  se  frayer  passage  à  coups  de  coudes  pussent  ga- 
gner, avec  l'aisance  qui  leur  est  propre,  le  numéro  de  leur  loge  : 
c'était  une  erieur  de  goût  et  de  convenances. 

Ne  faut-il  pas  que  les  femmes,  qui  ne  risquent  point  d'habitude 
leur  toilette  du  soir  dans  une  foule  en  circulation  aussi  cavalière- 
ment animée  que  celle  du  foyer  de  l'Opéra,  puissent  trouver,  lors- 
que la  mauvaise  saison  doit  les  priver  dune  courte  excursion  vers 
la  terrasse,  un  endroit  à  proximité  de  leur  loge,  où  il  leur  soit 
possible  de  faire  quelques  pas  sans  ressentir  l'embarras  qu'elles 
éprouvent  quand  elles  deviennent,  isolément  et  un  peu  trop  long- 
temps, un  objet  de  curiosité  pour  de  trop  nombreux  regards  '? 

Aussi  les  corridors  actuels  ont-ils,  dans  toutes  leurs  dimensions 
respectives,  une  largeur  double,  au  moins,  de  ceux  de  lOpera  de 
la  rue  Lepelletier.  Au  lieu  d'afi'ecter,  comme  ceux-là,  une  forme 
circulaire  commandée  par  la  courbe  de  la  salle,  ils  offrent  une 
disposition  plus  nouvelle,  d'où  résulte  quelques-uns  des  effets  pitto- 
resques que  j'ai  décrits  en  partie  en  parlant  du  rapport  des  es- 
caliers avec  ces  corridors. 

Le  périmètre  dans  lefjuel  se  trouvent  compris  ces  corridors,  et 
auquel  adhèrent  les  escaliers  d'apparat  sur  toute  une  ligne,  est 
un  parallélogramme,  en  sorte  que  le  corps  de  la  salle,  de  forme  cir- 
culaire, reste  isolé  au  milieu  de  ce  carré,  25,  \ers  trois  de  ses  côte». 

En  décrivant  les  corridors  du  premier  étage,  je  décris  ceux  des 
étages  supérieurs,  qui  ne  diffèrent  de  ceux-là  que  par  quelques 
motifs  de  décoration. 

Il  eût  été  oiseux  d'exagérer  les  dangers  du  feu  dans  les  dépen- 
dances d'un  théâtre  où  les  mesures  les  plus  efficaces  pour  le  pré- 
venir et  le  combattre  avec  succès  ont  éle  assurées,  ainsi  qu'il  sera 
démontré  plus  tard.  Ce  n'est  donc  pas  par  crainte  du  feu  que  tous 
les  corridors  ne  sont  pas  parquetés  :  ils  sont  couverts  de  dalles 
mosaïques,  parce  qtic  le  moinement  qui  s'y  fait,  en  général  nu  pas 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


«78 


de  course,  au  commencement  ou  à  la  reprise  du  spectacle,  rendrait 
dangereux,  pour  tous  ceux  qui  n'ont  pas  le  pied  léger,  un  plancher 
ciré,  où  des  glissades  deviendraient  fréquentes.  D'une  autre  part, 
le  piétinement  sur  le  hols,  je  le  crois  du  moins,  aurait  eu  pour  les 
personnes  déjà  réunies  dans  la  salle  un  retentissement  désagréable 
au  moment  où  toutes  se  disposent  à  l'attention  :  ces  efforts  pour 
éviter  le  bruit,  on  le  verra  bientôt,  ont  encore  été  poussés  plus 
loin  (I). 

Même  en  vue  de  tout  accomplir  pour  satisfaire  aux  besoins  du 
confort,  il  n'eût  pas  été  possible  de  couvrir  de  tapis  tout  l'espace 
des  corridors  d'une  salle  aussi  vaste,  fréquentée  par  un  public  aussi 
nombreux.  La  poussière,  les  déchirures,  les  difficultés  de  l'entre- 
tien, seraient  de  nature  à  jeter  bien  des  inconvénients  sous  les  pas 
des  promeneurs,  et  ce  serait  payer  un  peu  cher  les  quelques  secon- 
des de  course  sur  ces  lames  chaudes  et  moelleuses. 

Mais  une  exception  a  son  utilité.  Nous  avons  parlé  des  femmes 
qui  fuient  le  mouvement  trop  brusque  des  flots  du  foyer  :  elles  re- 
cherchent pendant  les  eutr'actes  les  sièges,  disposés  en  quelque 
sorte  comme  de  discrets  parloirs,  contre  la  paroi  du  corridor  oppo- 
.sée  à  celle  qui  forme  l'enveloppe  de  la  salle  ;  eh  bien,  assises  sur  ces 
sièges,  les  femmes  aux  pieds  délicats  eussent  trop  souffert  sur  une 
pierre  ou  sur  un  bpis  trop  dur.  Sur  ce  point,  dans  toute  l'étendue 
rectiligne  du  corridor,  en  avant  de  ces  sièges  qui  n'offrent  chacun 
que  trois  ou  quatre  places  aux  causeurs,  et  qui  sont  tous  séparés 
par  des  piédestaux  ornés,  on  a  jeté  une  longue  bande  de  tapis. 
Au-dessus  des  sièges  sont  des  glaces  décorées  architectonique- 
ment,  qui  répètent  les  bougies  artificielles  qui  les  éclairent,  la  ligne 
circulaire  de  l'enveloppe  de  la  salie,  les  pilastres  et  les  portes  dé- 
corées qui  en  font  l'ornement;  elles  répètent  encore,  par  l'effet 
oblique,  l'architecture  d'une  partie  des  escaliers  d'apparat  et  du 
grand  foyer;  elles  font  voir  mille  fois  le  mouvement  de  mille  pro- 
meneurs, et  reproduisent  autant  de  fois  tous  les  vases  aux  formes 
élégantes,  distribués  au  foyer,  sur  les  rampes  des  escaliers,  dans 
les  corridors  mêmes,  et  dans  lesquels  on  voit,  en  toutes  saisons, 
des  arbustes,  des  fleurs  véritables  ou  artificielles,  sans  avoir  l'air 
de  l'être,  et  qui  donnent  à  tout  cet  ensemble  une  distinction  qui 
contribuera  longtemps  au  succès  de  l'enl reprise  théâtrale,  sans 
qu'elle  puisse  craindre  de  voir  autre  part  une  semblable  concur- 
rence. 

Aux  étages  au-dessus  des  premières  et  au-dessus  des  deuxièmes 
loges,  les  panneaux  des  murs  rectilignes  des  corridors  sont  décorés 
seulement  d'arabesques,  parce  qu'à  ces  étages  le  jeu  des  glaces 
n'aurait  plus  le  même  intérêt,  n'ayant  pas  i\  répéter  des  parties 
aussi  essentielles  d'architecture. 

En  montant  à  ces  étages  supérieurs,  on  retrouve  encore  des 
balcons  ouverts  sur  l'escalier  d'appm-at;  ils  s'étendent  chacun 
sur  une  largeur  de  40  mètres,  et  sont  seulement  fermés  par  une 
rampe  à  riches  balustres  à  jour,  sur  laquelle  s'appuient  tous  les 
curieux  avides  de  tout  ce  mouvement,  de  tous  ces  effets  variés, 
(fue  produisent,  avec  toutes  leurs  combinaisons,  les  escaliers,  le 
grand  foyer ,  et  ses  portiques  à  jour,  qui  s'harmouient  avec  les 
portiques  de  la  grande  loge. 

Au  rang  des  quatrièmes  loges,  à  celui  des  cinquièmes,  caché 
mystérieusement  derrière  l'amphithéâtre,  dit  des  quatrièmes  à  l'O- 


(1)  Dans  plusieurs  coustiuclioiis  on  a  fait  une  utile  application  du  pavé  mo- 
saïque en  bois  de  boul.  Ce  pavé,  ainsi  que  les  dalles  mosaïques,  n'a  pas  de 
sonorité. 


péra,  paradis  au  mélodrame  et  puulaHler  aux  Funambules,  on  ne 
jouit  pas  de  tout  ce  prestige,  mais  il  s'en  trouve  ud  autre  la  que  t'oD 
sait  également  apprécier. 

Si,  par  suite  de  leur  position  dans  la  salle,  ces  places  élevées 
doivent  inévitablement,  malgré  les  effort»  de  l'art  et  de  la  science, 
ressentir  plus  de  chaleur  que  celles  des  étages  du  dessous,  il  faut 
convenir  alors,  qu'au  point  de  vue  sanitaire  comme  au  poini  de  vue 
spéculatif,  il  était  convenable  de  combiner,  dans  la  distribution  ar- 
chitectouique,  une  disposition  utile  pour  compenser  cet  inconvé- 
nient, qu'on  ne  détruirait  pas  complètement  sans  nuire  à  des  con- 
ditions d'acoustique  qu'il  faut,  bon  gré  mal  gré,  ménager,  ce  qur^ 
nous  verrons  plus  tard. 

Il  ne  faut  donc  pas  contester  l'utilité  du  foyer  placé  de  plaiu-pied 
avec  les  corridors  des  quatrièmes  loges,  et  que  le  public  doit  tra- 
verser pour  arriver  sur  la  plate-forme  qui  couvre  la  loge.  En  vue 
d'une  utile  spéculation,  cette  plate-forme  est  livrée  aux  intraitables 
fumeurs,  qui  sont  en  proie,  sans  intermittence,  à  un  appétit  de  ci- 
gares et  de  cigarettes. 

Ce  que  j'ai  dit  des  effets  pittoresques  de  la  loge  est  également 
juste  pour  cette  terrasse  élevée,  d'où  l'œil  découvre  encore  un  ma- 
gnifique spectacle  sur  les  deux  longs  rayons  illuminés  de  nos  bou- 
levards. 

En  redescendant  au  premier  rang  des  loges  par  où  je  veux  faire 
mon  entrée  dans  la  salle,  je  n'oublie  pas  de  remaniuer  les  acces- 
soires utiles,  dépendants  de  la  division  de  cette  salle,  et  qu'on  ne 
pouvait  omettre  dans  une  aussi  importante  distribution,  occes- 
soire^trop  complètement  négligés  jus(|u'ii  ce  jour. 

Ainsi,  au  premier  étage,  qu'on  \}eut  considérer  comme  le  point 
central  des  dépendances  de  la  salle,  on  a  placé,  à  proximité  des 
foyers,  deux  pièces,  20,  une  à  droite,  une  à  gauche,  où  se  trouve 
réuni,  en  un  complet  état  de  service,  tout  ce  qui  peut  être  néces- 
saire pour  offrir  de  prompts  secours  à  toute  personne  qui  se 
trouverait  gravement  indisposée.  Ces  deux  salles  ,  parfaitement 
aérées  et  loin  du  bruit,  répondent,  par  leur  distribution  et  leur 
ameublement,  à  toutes  les  conditions  utiles  pour  un  traitement 
réclamé  à  l'improviste;  l'une  est  destinée  aux  hommes,  l'autre  aux 
femmes.  A  l'étage  des  quatrièmes  loges,  deux  autres  pièces  sont 
également  affectées  au  même  service;  et  toutes  ces  pièces  sont  sous 
la  surveillance  des  médecins  et  des  inspecteurs  de  la  division  de  la 
salle. 

Dans  la  distribution  des  étages  intermédiaires,  on  trouve  un 
bureau  pour  ces  inspecteurs  ;  celui  des  médecins  se  trouve  natarel- 
leraent  dans  les  salles  de  secours. 

Le  commissaire  de  police  n'est  jamais  oublié;  son  bureau,  plus 
rapproché  des  éléments  du  tumulte,  est  placé  au  rez-de-cbaussee ; 
il  adhère  au  corps  de  garde  précédemment  indiqué. 

Du  c6té  opposé,  se  trouve  placé  le  bureau  ou  les  agents  de  comp- 
tabilité et  les  contrôleurs  vérifient  les  billets,  de  diverses  valeurs. 
qui  ont  servi  de  passe-port  au  public  admis  dans  la  salle.  Du  c»\té 
de  ce  bureau  de  vérification,  on  trouve  encore  la  loge  du  gardien- 
concierge,  détenteur  des  clefs  de  la  section  de  l'édifice  destiné  ao- 
public. 

Puisque  je  me  suis  promis  de  tout  voir  et  de  tout  décrire,  ma 
tAche  est  d'entrer  dans  des  détails  bien  minutieux.  Je  n'esquive 
rien,  car  il  n'y  a  rien  là  qui  soit  inutile. 

Sur  divers  paliers  des  grands  escaliers,  IS  (ne  confondons  pas 
ceux-ci  avec  l'escalier  d'apparat  \  on  remarque  des  issues  avec 
portes  battantes;  elles  offrent  le  libre  accès  de  cellules  que  je  ne 


kl9 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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puis  nommer  autrement,  qui  sont  parfaitement  entretenues  par 
des  gardiennes  pincées  pour  eu  avoir  la  surveillance  spéciale.  Et 
ce  lieu  discret,  disposé  pour  que  les  femmes  elles-mêmes  puissent 
y  pénétrer  ou  en  sortir  sans  éprouver  aucun  embarras,  tapissé 
d'émail,  assaini  par  l'eau,  n'incommode  jamais,  ni  la  salle,  ni  les 
•  corridors,  ni  les  escaliers  ;  à  cet  égard,  il  n'y  a  rieu  de  connnun 
avec  les  dispositions  de  la  salle  de  la  rue  Lepelletier. 

Avant  que  la  main  de  l'ouvreuse  de  loge  mette  sa  clef  dans  une 
serrure  où  elle  pénètre  sans  ferrailler,  ce  que  j'expliquerai,  j'ai  en- 
core à  dire  que  ces  femmes  fonctionnaires,  dont  la  civilité  ne  fait 
jamais  défaut  au  public  de  l'Opéra,  j'aime  à  leur  rendre  cette  jus- 
tice, ont  été,  elles-mêmes,  par  suite  de  l'esprit  d'ordre,  de  l'esprit 
réglementaire  que  j'ai  fait  remarquer,  assujetties  à  une  tenue  uni- 
forme. Cela  s'Est  fait  ainsi ,  et  avec  beaucoup  de  convenances  , 
pour  les  vivandières  de  nos  régiments  :  je  n'établis  pas  autrement 
l'analogie. 

N'oublions  pas  que  les  pelisses,  les  châles,  le»  manteaux,  etc., 
sont  un  embarras  pour  la  loge,  et  que  cet  embarras,  venu  du  dehors, 
passe,  en  général,  sur  les  bras  de  l'ouvreuse. 

Là,  ou  n'a  pas  voulu  que  des  vêtements  de  femme,  toujours  dé- 
licats, exigeant  des  soins,  fussent  jetés  pêle-mêle  dans  un  coffre 
d'armoire.  Au  bout  de  chaque  corridor  il  y  a  un  cabinet  spécial 
où  tous  ces  objets  sont  déposés  avec  ordre,  sur  des  supports-  nu- 
mérotés. 

Ce  casuel  des  ouvreuses  ne  pourrait  être  supprimé  sans  faire 
craindre  une  révolte  au  sérail,  car  le  banc,  cet  autre  impôt,  plus 
illégal,  a  été  mis  hors  d'œuvre  par  suite  de  la  bonne  distribution 
des  loges,  et  de  la  bonne  combinaison  des  sièges. 

Les  Loges. 

Les  clameurs,  tout  ce  qui  peut  se  traduire  par  un  son  ,  n'ont 
droit  de  franchise,  à  l'Opéra,  que  dans  les  régions  de  la  scène.  Dans 
toutes  les  autres  parties,  le  génie  du  silence  étend  ses  ailes  pour 
étouffer  le  moindre  bruit  qui  pourrait  s'élever.  Voilà  pourquoi  la 
vieille  serrure  des  loges,  véritable  quincaillière,  a  été  remplacée  par 
une  petite  mécanique  à  ressort  qu'un  cylindre  mobile,  dans  la  main 
de  l'ouvreuse,  ouvre  toujours  sans  aucun  bruit;  et  cette  fermeture 
nouvelle  offre  à  l'intérieur  une  petite  bascule  en  saillie  horizontale 
sur  laquelle  il  suffit  de  peser  légèrement  avec  le  doigt  pour  ouvrir 
la  porte,  sans  craindre  de  déchirer  ses  gants  ou  de  casser  ses 
ongles. 

Et  cette  porte ,  que  je  n'ai  pas  encore  ouverte  à  mon  lecteur,  est 
I  arfaitement  ajustée  dans  la  feuillure  de  la  baie,  ne  se  déjette  pas, 
n'a- pas  de  jours  qui  incommoderaient  le  spectateur  en  établissant 
de  fâcheux  courants  d'air,  et  tourne  facilement  sur  ses  gonds  si- 
lencieux. 

Pour  éviter  tout  bruit  insolite,  les  angles  intérieure  s'appuient 
sur  des  bourrelets  élastiques.  Les  portes  ont  un  vasistas  également 
exempt  de  tout  changement  de  forme  par  l'influence  atmosphéri- 
que ;  sa  glace  se  baisse  ou  s'élève  à  volonté  et  sans  efforts,  en  glis- 
sant entre  ses  bourrelets  au  moyen  d'un  bouton  convenable. 

Pour  faire  cette  porte ,  dont  le  panneau  et  le  châssis  sont  en  fer, 
inaperçus  toutefois,  il  a  fallu  unir  l'art  du  mécanicien  à  celui  du 
tapissier.  Puisque  ces  habiles  gens  se  sont  associés  pour  assurer  le 
bien-être  dans  l'intérieur  de  la  loge,  il  convient  également  de  ne 
pas  passer  devant  leur  travail  sans  l'avoir  fait  apprécier. 

Il  n'y  a  plus  de  banquettes  à  l'Opéra  ;  ce  théâtre,  pourpeu  qu'il 


eût  tardé  de  comprendre  son  public ,  eût  été  devance  dans  cette 
bienheureuse  réforme  par  les  successeurs  du  vieux  Séraphin  ,  Sé- 
raphin, qui  réformait  si  peu  et  dont  l'àme  a  dû  gagner  les  limbes, 
si  le  ciel  lui  a  tenu  compte  de  toutes  les  innocentes  joies  qu'il  a 
mises  au  cœur  des  enfants. 

Les  loges  sont  plus  spacieuses  que  celles  de  la  rue  Lepelletier; 
elles  ont  40  centimètres  de  plus  eu  profondeur,  parce  que,  dans  ce 
sens  seulement ,  on  sentait  la  gêne.  Dans  la  largeur,  il  n'y  a  que 
très-peu  de  différence,  celle  nécessaire  pour  établir,  sur  les  deux 
côtés  de  chaque  loge,  des  accotoirs  indépendants  des  loges  adhé- 
rentes, et  placés  au-dessous  de  la  division  chantournée  qui  marque 
la  séparation  de  chacune  de  ces  loges.  Avec  cette  disposition  ,  les 
attitudes  plus  nonchalantes  et  plus  gracieuses  aussi  remarquées  chez 
les  habituées  des  loges  de  face ,  se  sont  acclimatées  dans  les  loges 
des  côtés. 

Les  sièges  (ceci  est  absolu  pour  tous  les  rangs  de  loges)  assurent, 
par  leur  élasticité ,  un  facile  repos ,  d'autant  plus  complet  que  les 
jambes  ne  sont  plus  forcément  repliées  sous  un  angle  trop  droit. 
Une  utile  disposition  vient  encore  en  aide  à  la  gracieuse  indolence 
des  femmes  :  sans  être  en  tout  conformes  a  un  fauteuil,  ces  sièges 
ont  deux  bras  convenablement  allongés ,  évidés  en  dessous,  et  qui 
ne  causent  aucun  embarras  dans  la  loge ,  mais  qui  servent  alterna- 
tivement d'utile  appui  au  côté  droit ,  au  côté  gauche ,  sans  que  ce 
soit  un  système  de  bascule.  Ces  derai-fauteuils  sont  presque  entiè- 
rement recouverts  d'étoffe.  Ils  n'ont  de  bois  visible  qu'à  leurs  pieds, 
garnis  de  roulettes  pour  rendre  plus  faciles  tous  les  mouvements  des 
spectateurs  des  loges. 

Et  comme  les  considérations  de  propreté  ont  fait  sentir  que  des 
tapis  de  pied  seraient  un  luxe  mal  entendu  pour  les  loges  du  public, 
celles-ci ,  au  lieu  de  l'incommode  tabouret  qu'exploitaient  les  ou- 
vreuses, sont  meublées  de  tabourets  garnis  montés  sur  des  roulettes 
en  cuir,  et  qui  passent,  à  volonté,  de  dessous  les  pieds  sous  le  fau- 
teuil, auquel  ils  sont  étroitement  liés. 

Inutile  ici  de  faire  remarcjuer  le  soin  qu'on  a  pris  d'empêcher 
qu'aucune  loge  reçût ,  des  locataires  à  l'année ,  une  décoration  dis- 
semblable de  la  décoration  générale;  inutile  de  dire  que  des  patères 
convenables  et  parfaitement  bien  scellées  tiennent  aux  parois  de  la 
loge;  et  nous  entrons  enfin  dans  une  salle  que  son  auteur  a  voulu 
rendre  la  plus  vaste ,  In  plus  brillante  des  salles  de  l'Europe,  qu'a- 
niment encore  les  chants  de  l'illustre  Rossini. 

HippoLYTE  MEYNADIER. 

(La  suite  au  prochain  numéro,) 


A  NOS  LECTEURS. 

M.  C^ar  Daljr,  charge  tlrpnli)  \r  mol»  de  jnlllpl  dcrnlrr  d'unr  inl*«lon 
liiiponaiiir  du  Koavf nirnirnl ,  rM  de  rrlour  i  ParN,  apr^  uor  ali»rnce 
beaucoup  plus  longue  que  celle  qu'il  s'adendall  à  (aire.  C'est  ansrz  dire 
que  la  cause  de  nos  retards  a  cessé  et  que  nous  allons  répai^r  le  temps 
perdu. 

.\ous  somines  auiisl  en  relard  envers  plusieurs  de  nos  correspondant» 
qui  nous  ont  adressé  des  lettres  que  le  manque  de  place  nous  force  i  re- 
mettre au  prochain  numéro.  >ions  les  remercions  de  leurs  intéressante* 
communications,  et  nous  les  prions  bleu  de  croire  que  nous  ne  les  atlons 
pas  mises  en  oubli. 


L'un  des  rédacteurs  : 
ALPHONSE  DE  CALONNE. 


iir.  i^cbàDpk  et  coup.,  bue  damikttr  .  2. 


lUvue  Gèn-crala  lù?^  l'Jrc/ûéccture-  eC-eÙ!s  Travaux.  /^U^a:    /ùi^-  {/c  J''iirsfcfn6tTfû.  N' f 


Vol  S.  n  22 


1.  ^ra 


Fu/ 


ML'HUICIDÎTE 
DANS  LES  COHSraiCnCHE 


Fia.  LC 


i 


4  v'A^. 


MJitfuiiarJ  j'^ 


Reruf  ^eneraU  ,&  /'Jn-Âi/^ràur  e/ ,/Kr FroJ^aiu-- AMa'    r,ir,s.  M,r  J;i,jUmùr,y.jV' â. 


HMe^naJifT  e/e/ 


Val  5   PI  24 


HIPPOTYTÏÏ    MFYWADIFR 


481 


REVUE  OK  L'ARCHITFXTURK  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 

Funlevrault. 


MS 


(SUITE  ET  FIN,  voij.  col.  241,  '28U,  337,  385  cl  433.) 


-€i)»- 


CIVILISATION  CHRÉTIENNE. 


STII.E     BOMAN     ET     STVI.E     GOTHIQL'E- 


CHANIKK  II.  —  DÉTAILS  KXTÉIUEIRS  M  L'KGLISE. 


A .  Dans  les  églises  romanes,  l'abside  est  l'une  des  portions  de 
l'édifice  le  plus  soigneusement  bâties  et  le  plus  richement  décorées, 
même  à  l'extérieur,  où  aucune  construction  secondaire  ne  la 
masque  ordinairement.  Lors  même  que  lesautres  murailles  seront 
nues  et  rustiques,  il  faudra  examiner  si  elle  ne  s'en  distingue  pas 
par  quelque  recherche  dans  le  choix  et  la  disposition  des  maté- 
riaux, dans  les  contre-forts,  la  décoration  des  fenêtres  et  le  couron- 
nement; si  elle  n'est  pas  pourvue  de  colonnes  ou  de  sculptures, 
surmontée  soit  d'une  galerie  où  l'on  puisse  circuler,  soit  de  mâ- 
chicoulis ;  tenir  compte  du  nombre  et  de  la  situation  des  fenêtres, 
ainsi  que  de  l'intériorité  du  toit  par  rapport  h  celui  dii  chœur.  Quand 
il  n'existe  pas  d'abside,  ces  recherches  devront  se  porter  sur  le 
chevet. 

Dans  les  églises  où  ce  chevet  n'est  apparent  à  l'extérieur  qu'au- 
dessus  du  pourtour  du  chœur  et  de  ses  chapelles,  il  prêtera  matière 
à  moins  d'observations  ;  néanmoins  on  devra  encore  en  examiner, 
comparativement  avec  le  reste  de  l'édifice,  les  fenêtres,  les  revê- 
tements, le  couronnement,  les  contre-forts,  les  piliers  et  arcs- 
butants. 


DEUXIEME  INSTRUCTION  DU  COMITÉ  HISTORIQUE 

DES   AIITS    ET    MONLMENTS. 


I 


Fig.  220. 

B.  Le  chœur  est  encore  une  des  portions  les  plus  soignées  de 
l'église  romane,  et  il  appellera  les  mêmes  investigations  que  l'ab- 
side. On  examinera,  entre  autres  choses,  si  son  toit,  plus  élevé  que 
celui  de  l'abside,  n'est  pas  inférieur  à  celui  de  la  nef  principale. 

Dans  l'église  gothique,  le  chœur  se  confond  à  l'extérieur  avfc  !«• 
chevet  ou  partie  supérieure  du  sanctuaire,  et  devra  être  soumis 
aux  mêmes  recherches. 

6'.  La  nef  principale,  malgré  son  importance  dans  la  eonstror- 
tion,  dont  elle  forme  la  masse  centrale,  offre  peu  de  prise  à  l'obsrr- 
vation  du  côté  extérieur,  toutes  les  fois  qu'elle  est  accompagna  de 
collatéraux  et  de  chapelles,  puisqualorselle  ne  présente  de  visible 
que  les  revêtements  de  sa  muraille  supérieure,  les  fenêtres  dont 
elle  est  iiercéc,  ses  contre-forts  et  arcs-butants,  son  couronnement 
et  son  toit.  Cependant  elle  est  souvent  ornée,  dans  l'architectare 
romane,  d'areatures  plus  ou  moins  riches;  mais  à  mesure  que  la 
date  du  monument  s'éloigne  de  ce  stvle,  les  baies  des  fenêtres 
s'élargissent  de  plus  en  plus  aux  dépens  du  plein  de  la  muraille, 
de  manière  à  finir  par  envahir  tout  l'espac»'  compris  entre  les  con- 
tre-forts. 

Toutes  les  fois  qu'au-dessus  des  collatéraux  on  pourra  aperce- 
voir l'arcature  ou  fenestration  inférieure  de  la  nef  principale,  ordi- 
nairement cachée  par  la  toiture  actuelle  de  ces  mêmes  collaténint, 
on  devra  en  tenir  compte,  ainsi,  en  général,  que  de  toutes  traces 
d'anciennes  baies,  aujourd'hui  supprimées  et  remplacées  par 
d'autres,  ou  remaniées. 

D.  Les  collatéraux  prêtent  beaucoup  pins  anx  rrcherche»  dans 
T.  V.  Jl 


«83 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


hSk 


l'église  romane,  où  ils  sont  ordinairement  dépourvus  de  chapelles 
contemporaines  le  long  de  la  nef.  Il  faudra  examiner  leurs  baies 
de  portes  et  de  fenêtres,  anciennes,  nouvelles  et  remaniées,  leurs 
contre-forts  et  piliers  butants,  leurs  couronnements,  leur  couver- 
ture actuelle  et  les  vestiges  que  l'on  pourrait  trouver  de  cette  toi- 
ture primitive,  presque  horizontale,  qui  souvent  laissait  à  jour  lar- 
cature  ou  fenestration  inférieure  de  la  nef  principale  et  du  chœur, 
dont  nous  venons  déparier;  enfin  la  face  plate,  ou  pourvue  d'une 
abside  plus  ou  moins  prononcée,  pleine  ou  percée  d'tme  ou  plu- 
sieurs biiics,  par  laquelle  ils  se  terminent  à  l'orient.  S'ils  se  pro- 
longent autour  du  chœur,  on  devra  encore  signaler  la  disposition, 
la  forme  et  l'orientation  de  leurs  chapelles,  dont  l'autel  est  tantôt 
parallèle  à  celui  de  ce  même  chœur,  et  tantôt  rayonnant  de  son 
centre  vers  les  divers  point  de  I  horizon. 

La  chapelle  de  la  Vierge,  brillant  hors-d'œuvre  ordinairement 
ajouté  après  coup  à  l'extrémité  orientale  du  chœur,  et  n'y  tenant 
quelquefois  que  par  une  étroite  galerie,  réclamera  une  attention 
particulière,  surtout  quand  elle  formera  comme  une  petite  église 
distincte,  h  la  suite  de  la  grande.  Enfin  il  sera  nécessaire  de  sou- 
mettre au  même  examen  les  autres  chapelles  placées  le  long  des 
collatéraux  proprement  dits,  et  de  s'assurer  de  l'époque  à  laquelle 
elles  auront  pu  être  ajoutées  à  la  construction  primitive.  Parmi  les 
questions  auxquelles  donneront  lieu  ces  chapelles,  nous  ne  devrons 
pas  oublier  celle  de  leur  toiture  continue  et  distincte  et  propre  à 
chacune  d'elles,  et  alors  pyramidale,  conique  ou  en  coupole. 

E.  Les  transsepts'sont  encore  l'une  des  portions  de  l'église  les 
plus  accessibles  aux  regards  et  ordinairement  le  plus  richement 
décorées,  au  moins  sur  leur  face  terminale.  Dans  l'architecture 
romane,  ils  sont  le  plus  souvent  munis  d'absides  dont  il  faudra 
signaler  la  situation ,  l'orientation  ,  la  courbe  plus  ou  moins  com- 
plète, quelquefois  même  n'atteignant  pas  le  revêtement  extérieur, 
et  enfin  la  hauteur,  qui  s'arrête  dans  certains  cas  à  la  naissance 
d'un  étage  supérieur.  Ou  devra  non-seulement  les  examiner  sous 
tous  les  rapports  déjà  indiqués,  mais  encore  donner  une  descrip- 
tion détaillée  de  leur  ornementation,  surtout  lorsqu'ils  forment 
façade  et  portail.  Cette  ornementation  rivalisant  alors  avec  celle 
du  portail  principal,  on  entrera  à  son  sujet  dans  des  détails  qui 
vont  être  indiqués  ci-dessous  [G). 

F.  Nous  avons  énuméré  les  diverses  variétés  de  porches  que 
l'on  peut  rencontrer  à  l'entrée  des  édifices  religieux  ;  tout  ce  qui 
en  sera  apparent  à  l'extérieur  devra  être  relevé  et  décrit  à  part 
quand  il  présentera  quelque  caractère  distinct  de  celui  des  con- 
structions voisines.  Cette  description  piécédera  ou  suivra  celle  du 
portail,  selon  que  le  porche  sera  lui-même  en  avant  ou  en  arrière 
de  ce  portail.  Dans  le  cas  où  il  ne  consisterait  qu'en  quelques 
constructions  légères  et  sans  caractère,  destinées  seulement  à  pro- 
téger comme  auvent  le  bas  du  portail  et  l'entrée  de  l'élise  contre 
les  intempéries  de  l'air,  il  suflira  de  les  mentionner. 

G.  Nous  avons  déjà  parlé  de  la  plupart  des  objets  et  des  formes 
qui  peuvent  entrer  dans  la  construction  et  la  décoration  d'un  por- 
tail ;  néanmoins  l'accumulation  en  est  quelquefois  si  considérable, 
que  nous  croyons  devoir  les  rappeler  ici  d'une  manière  plus  métho- 
dique. Nous  pensons  donc  qu'il  sera  bon  de  les  passer  en  revue 
dans  l'ordre  suivant  : 

1°  Le  plan  par  terre  (ou  ichnographie  ),  quelquefois  accidenté  et 
brisé,  soit  par  la  présence  d'un  porche  extérieur,  soit  par  les  sail- 
lies des  supports,  soit  par  la  retraite  des  baies,  soit  surtout  par 
l'embasement  d'un  ou  plusieurs  clochers. 


2°  Le  système  général  de  construction  et  de  décoration,  les  pro- 
portions générales,  la  nature  et  la  forme  des  revêtements,  les  co- 
lonnes, pieds-droits,  pilastre»  et  contre- forts  appartenant  à  l'en- 
semble. 

3°  Le  couronnement  général  ;  la  forme  du  pignon  ou  du  fronton 
-dont  il  est  surmonté. 

A"  Le  rez-de-chaussée  ;  ses  parties  pleines,  ses  portes  avec  leurs 
pieds-droits,  arcades  en  retraite,  colonnes,  archivoltes,  statues, 
niches  et  dais;  leurs  linteaux,  tympans,  piliers  centraux,  battants, 
ferrures  et  serrures;  ses  fausses  baies  ou  baies  figurées;  son  orne- 
mentation et  son  couronnement  distincts,  s'il  y  en  a. 

5°  Chacun  des  étages  supérieurs,  à  partir  du  rez-de-chaussée  ; 
leurs  parties  plaines,  colonnes,  arcades,  roses,  fenêtres,  galeries 
libres  ou  figurées,  ornementation  et  couronnement  particuliers. 

0".  Les  pignons  ou  frontons,  et  les  ornements  ou  baies  qui  peu- 
vent s  y  trouver  inscrits  ;  les  galeries  libres  ou  figurées  qui  les  sur- 
montent quelquefois;  l'acrotère  qui  les  termine;  l'inclinaison  ac- 
tuelle du  toit,  et  toute  trace  d'une  inclinaison  antérieure  différente. 

7°  La  façade  des  collatéraux  quand  elle  est  distincte  de  celle  de 
la  nef  principale. 

8°  La  base  des  clochers  du  [)ortail  quand  elle  constitue  pareil- 
lement un  corps  distinct  de  la  façade  principale. 

Nous  n'essayerons  pas  d'établir  l'énumération  complète  de  tout 
ce  qui  peut  entrer  dans  la  décoration  d'un  portail.  Cette  décoration 
est  quelquefois  si  riche  et  si  variée,  qu'il  faudrait  sortir  du  cadre 
de  nos  instructions  pour  en  prévoir  tous  les  détails  et  toutes  les 
combinaisons.  Ce  serait  d'ailleurs  nous  assujettir  à  une  répétition 
inutile  de  ce  que  nous  avons  dt^à  dit.  Les  personnes  qui  auront 
bien,  voulu  méditer  avec  attention  les  indications  précédentes  ar- 
riveront au  portail  avec  une  masse  de  connaissances  déjà  suffisante 
pour  juger  avec  rectitude  du  système  de  la  construction  de  chacune 
de  ses  parties,  aussi  bien  que  pour  les  décrire  avec  précision.  Nous 
nous  contenterons  de  les  prévenir  que  c'est  là  principalement  que 
la  sculpture  du  Moyen-Age  a  étalé  ses  compositions  synd>oliques, 
historiques  et  astronomiques,  ses  rapprochements  de  l'ancienne  et 
de  la  nouvelle  loi,  des  vertus  et  des  vices. 

Les  zodiaques  et  les  calendriers  se  rencontrent  le  plus  souvent 
le  long  des  pieds-droits  des  portes.  Les  premiers  représentent  les 
signes  des  constellations  que  parcourt  le  soleil;  les  seconds,  les 
mois  de  l'année,  caractérisés  par  l'occupation  spéciale  à  chacun 
d'eux,  pour  diverses  classes  ou  professions  de  la  société.  On  devra 
examiner,  dans  les  deux  cas,  les  singularités  et  anomalies  que  peu- 
vent présenter  ces  figures,  soit  dans  leurs  formes,  soit  dans  leur 
nombre,  soit  dans  leur  disposition. 

Un  autre  genre  de  figures  que  l'on  rencontrera  souvent  dans  les 
portails  et  les  porches  extérieurs,  et(|ui  semblent  appartenir  d'une 
manière  particulièrea  cette  façade  extérieure  de  l'édifice,  sont  les 
lions,  comme  nous  l'avons  déjà  dit.  Les  formules  que  nous  avons 
citées  autorisent  à  penser  que  la  présence  de  ces  figures  était  obli- 
gatoire ,  au  moins  à  certaines  époques  et  dans  certains  pays,  pour 
leur  imprimer  un  caractère  solennel  et  régalien,  soit  comme  siège 
de  justice  ecclésiastique  ou  civile,  soit  comme  emplacement  affecté 
à  certains  actes  qui  devaient  être  entourés  d'une  grande  authenti- 
cité. Plus  de  semblables  idées  sont  éloignées  de  nos  mœurs,  et  plus 
on  devra  mettre  de  soin  dans  la  recherche  de  ces  lions,  qui  fig\irent, 
tantôt  sculptés  isolément  et  portés  sur  des  colonnes  en  avant  du 
monument,  tantôt  amoncelés  en  groupe  dans  des  sty lobâtes  ,  des 
chapiteaux  ou  des  impostes. 


&85 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


IM 


Nous  avons  déjà  signalé  le  goût  de  nos  devanciers  du  XIII' siècle 
pour  tous  les  jeux  de  la  lumière  décomposée  ou  réfléchie.  C'est  à 
eux  que  l'on  doit  les  verres  colorés  que  l'on  trouve  dans  les  revê- 
tements de  certains  portails  et  clochers,  et  qu'ils  y  appliquèrent 
quelquefois  sur  de  vastes  surfaces.  On  peut  concevoir  l'effet  mer- 
veilleux qui  en  résultait  quand  le  soleil  venait  à  les  frapper  de  ses 
rayons.  Il  subsiste  malheureusement  bien  peu  d'exemples  et  même 
de  vestiges  de  cette  splendide  décoration,  dont  les  moindres  par- 
celles devront  être  recherchées  et  signalées  (il. 

H.  Nous  avons  indiqué  les  circonstances  qui  introduisirent, 
postérieurement  à  son  origine ,  les  clochers  dans  le  plan  de  la  ba- 
silique chrétienne,  et  nous  avons  fait  remarquer  combien  il  était 
rare  de  les  rencontrer  en  France  isolés  de  l'église ,  comme  cela  a 
fréquemment  continué  d'avoir  lieu  dans  d'autre»  contrées,  et  par- 
ticulièrement en  Italie. 

Au  W"  siècle,  et  le  plus  souvent  à  partir  de  cette  époque,  le  clo- 
cher unique  ou  le  clocher  principal,  quand  il  y  en  eut  plusieurs, 
fut  placé  au  centre  de  la  croisée.  Cette  circonstance,  qui  l'a  fait 
reposer  sur  les  quatre  piliers  centraux  de  l'édifice,  lui  a  imprimé  le 
plus  souvent  aussi  la  forme  quadrangulaire  au  moins  à  sa  base.  Il 
en  est  de  même,  au  reste,  des  autres  constructions  de  ce  genre, 
toujours  appuyées  sur  des  masses  rectilignes,  quel  que  soit  leur 
emplacement.  Dans  les  clochers  élevés,  cette  forme  s'arrondit 
plus  ou  moins  vers  le  sommet,  par  les  soins  qu'ont  pris  les  con- 
structeurs d'abattre  une  ou  plusieurs  fois  icsangles,  dans  le  passage 
d'un  étage  a  un  autre,  de  manière  à  présenter  quelqu'un  des  poly- 
gones engendrés  par  le  carré,  quand  la  décroissance  ne  va  pas 
jusqu'au  cercle  proprement  dit.  Dès  une  époque  fort  reculée  on  a 
commencé  à  employer  à  l'établissement  de  clochetons  l'espace  laissé 
libre  par  les  quatre  premiers  angles  abattus. 


Lgliss  d'.linay  [Lyon], 


à  la  masse  de  l'église,  et  auquel  on  a  donné  le  nom  de  hniterne.  Ot 
étage ,  très-apparent  au  dehors ,  présente  souvent ,  dans  ses  revê- 
tements, son  ornementation,  les  baies  dont  il  est  percé,  les  contre- 
forts ou  clochetons  destinés  à  le  consolider,  des  faits  particuliers, 
dont  il  sera  nécessaire  de  tenir  compte. 

Les  clochers  ont  reçu  divers  noms,  suivant  leurs  forme*.  On  le» 
a  appelés  tours,  lorsqu'ils  finissent  brusquement  en  terrri«seou  par 
un  toit  peu  visible; 


l¥otre~Damé-dc-l'artt. 


Fig.  22t. 


Il  est  l'are  (jue  le  clocher  central  ne  porte  pas  sur  un  étage  ajouté 


(1)  On  uoiive  un  exemple  très-intÉicssani  de  ce  système  de  décoration  à  la 
catliédrale  de  Tours,  que  M.  Giiérin,  arcliitccte  du  département  d'Indre-el- 
Loirc,  a  commencé  de  restaurer. 

Derrière  le  verre,  on  trouve  tantôt  des  feuilles  de  métal  et  tantôt  de  la  pein- 
ture. 

A  la  catliédrale  de  Nantes  le  verre  est  remplacé  par  l'ardoise,  dont  la  couleur 
contraste  avec  celle  de  la  pierre  de  manière  i  faire  croire  par  moments  que  les 
réseaux  ornant  les  faces  de  la  maçonnerie  sont  garnis  de  verre. 

(iVo(«  de  .M  Césnr  Daly.) 


Fi<j    2:H. 


pyramides,  quand  la  construction  se  termine  en  pointeau  moyen 
de  retraits  successifs  rectilignes  ou  curvilignes;  flèches,  dans  le  cas 
où  le  sommet  en  est  surmonté  d'un  toit  aigu;  dômes,  si  ce  loit 
s'arrondit  en  segment  sphérique  ou  en  pyramide  curviligne;  ai- 
guille quand  il  présente  un  c<\ne  ou  une  pyramide  trés-allonj;<-e  1 1 
tout  d'une  venue. 


Normandie. 


Sclnt-Dtnit. 


t  î; 


487 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DKS  TRAVAUX  PUBLICS. 


488 


Fig.  225. 


Fig.  226. 


On  lencontre  encore,  surtout  dans  les  campagnes,  le  cloclier  à 
deux  ou  quatre  pignons,  dont  la  masse  quadraugulaire  est  termi- 
née par  un  toit  à  pignons  peu  aigus  ; 


Fig.  -227. 


Fig.  228. 


le  clocher  à  toit  de  charpente,  constituant  une  portion  notable  de 
sa  niasse;  le  clocher  de  charpente  revêtu  de  plomb  ;  le  clodier  de 
charpente  couvert  d'ardoise  ou  de  bardeau  ;  le  clocher  arcade,  com- 
posé d'une  simple  arcade  à  jour,  sous  laquelle  la  cloche  est  sus- 
pendue. 

.Midi  de  la  France. 


Fig.  229. 

Les  principaux  faits  à  examiner  dans  la  description  d'un  clocher 
sont  : 

1°  Son  emplacement; 

2°  Le  plan  de  sa  base  e.t  les  modifications  qu'éprouve  ce  plan  ; 


8"  Les  matériaux  et  le  système  de  construction  ; 

4°  La  hauteur  jus(|u'au  sommet,  et  la  hauteur  des  diverses  par- 
ties, quand  elles  établissent  des  divisions  apparentes  ; 

5"  La  forme,  les  revêtements,  l'ornementation  de  la  masse,  puis 
de  chacun  des  étages,  en  allant  de  la  base  vers  le  sommet,  y  com- 
pris ses  parties  constituantes,  telles  que  contre-forts,  colonnes,  ar- 
cades ou  amortissement,  baies  ouvertes  ou  figurées,  et  dans  le  pre- 
mier cas  pourvues  ou  non  de  divisions  horizontales  formées  par 
des  précinctions,  des  larmiers  ou  des  abat-sons  ;  fenêtres,  œils-de- 
bœuf,  clochetons,  édicules,  niches,  dais,  statues,  couronnements  ; 

6°  Le  couronnement  terminal ,  les  frontons ,  pignons ,  mâchi- 
coulis, créneaux,  corbeaux,  corniches,  balustrades,  antefixes,  ai- 
guilles, clochetons  ; 

70  Le  toit,  sa  forme,  sa  hauteur  ;  la  matière  dont  il  est  couvert  ; 
le  nombre  de  ses  faces,  les  œils-de-bœuf  et  autres  baies  dont  il  est 
percé;  l'ornementation  de  ses  arêtes  et  de  ses  faces,  en  relief,  en 
intaille  ou  en  couleur  ;  les  imbrications  ou  contre-imbrications  qui 
peuvent  y  être  figurées; 

8"  La  matière  et  la  forme  de  la  croix  par  laquelle  le  clocher  se 
termine  le  plus  souvent  en  France;  les  objets  qui  pourraient  l'ac- 
compagner ou  la  remplacer. 

Nous  avons  indiqué  ci-dessus  les  divers  points  d'une  église  où 
l'on  peut  rencontrer  des  clochers  ;  toutes  les  fois  qu  il  en  existera 
plusieurs,  chacun  d'eux  devra  être  décrit  avec  des  détails  propor- 
tionnés à  son  importance.  On  distinguera  par  le  nom  de  clocheton 
ceux  qui  sont  secondaires  ou  qui,  même  isolés,  n'ont  jamais  été 
destinés  à  recevoir  des  cloches,  mais  seulement  à  concourir  à  la 
décoration  de  l'édifice.  En  France,  dans  les  églises  épiscopales  et 
abbatiales,  le  nombre  des  clochers  est  le  plus  souvent  de  trois,  sa- 
voir :  un  principal  au  centre  de  la  croisée,  et  les  autres  aux  deux 
côtés  du  portail. 

L'ornementation  du  clocher  se  compose,  aux  XI*  et  XII""  siècles, 
d'arcades  superposées  par  étages  (ordinairement  au  nombre  dt- 
deux,  dont  les  inférieures  sont  figurées  et  les  supérieures  libres  . 
Pour  peu  que  ces  baies  offrent  quelque  étendue,  une  colonne  cen- 
trale les  subdivise  en  arcades  secondaires.  La  décoration  de  ces  di- 
vers amortissements,  de  leurs  archivoltes,  colonnes ,*  impostes  ; 
des  contreforts,  ressauts  et  revêtements,  est  souvent  fort  riche, 
et  présente  un  caractère  remarquable  d'unité  et  de  fermeté. 

Plus  tard,  les  arcades  du  clocher  s'allongent  en  lancette,  n'offrant 
plus  qu'un  seul  étage;  la  colonne  centrale  devient  prismatique  et 
annelée  à  un  ou  plusieurs  points  de  sa  hauteur;  elle  finit  par  dis- 
paraître de  l'arcade,  de  plus  en  plus  aigué,  bordée  de  colonncttes 
et  d'archivoltes  en  retraite.  C'est  alors  qu'arrivent  les  toits  élancés 
en  pierre,  chargés  d'imbrications  figurées.  Souvent,  à  cette  der- 
nière époque,  le  clocher  central  devient  secondaire,  de  principal 
qu'il  avait  été  jusque-là. 

Au  XIV*  siècle,  la  baie  perd  ses  colonnes  et  son  ornementation 
fine  et  délicate.  Plusieurs  ressauts,  larmiers  ou  abat-  sons  viennent 
la  diviser  de  nouveau  à  l'intérieur.  Les  contre-forts  des  quatre  an- 
gles se  renflent  et  se  prolongent  en  clochetons  arrondis.  Les  cré- 
neaux et  mâchicoulis,  plus  ou  moins  ornés,  signalent  l'introduction 
du  clocher  comme  poste  militaire  dans  la  tactique  de  l'époque. 

Avec  le  XV«  siècle  arrivent  les  baies  évasées  ou  surbaissées , 
pourvues  de  meneaux  au  moins  à  leur  partie  supérieure,  et  d'abat- 
sons  au-<lessous  ;  la  division  des  étages  marquées  par  des  larmiers 
extérieurs,  les  lignes  contournées  et  flamboyantes,  les  arcs  ram- 
pants et  autres  ornements  de  détail  de  l'époque,  décrits  ci-dessus  ; 


^89 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


MO 


leur  exécution  d'abord  fine  et  légère  s'appesantit  à  mesure  qu'elle 
approche  de  la  Renaissance. 

C'est  encore  au  XV^  siècle  qu'appartiennent  les  clochers  de  char- 
pente revêtus  en  plomb,  et  que  ce  système  de  construction  permit 
de  hérisser  de  crosses  et  autres  expansions  végétales. 

Sainte-ChafelU. 


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Fig.  230. 

Le  XVI'  substitua  à  tout  ce  luxe  de  pointes  et  d'aiguilles  plu- 
sieurs ordres  superposés,  d'abord  d'un  travail  fin  et  délicat ,  puis 
en  moindre  nombre,  de  proportions  forcées,  et  ce  que  nous  avons 
appelé /îam6o)/ant  de  la  Renaissance,  avec  ses  bossages ,  ses  sur- 
laces rustiquées  et  son  ornementation  incohérente  et  théâtrale.  En 
général ,  à  mesure  qu'on  revint  plus  complètement  à  l'imitation 
bien  ou  mal  entendue  de  l'antique  dans  l'architecture  religieuse,  le 
clocher  devint  plus  embarrassant  à  placer,  à  élever  à  une  hauteur 
considérable  et  à  décorer.  Aussi  son  importance  n'a-t-elle  fait  que 
décroître  de  jour  en  jour ,  jusqu'à  ce  qu'on  soit  prochainement  ra- 
mené à  l'isoler  de  nouveau  de  la  basilique,  comme  à  l'époque  de 
son  introduction. 

!.  Ainsi  que  nous  t'avons  déjà  dit,  il  est  rare  qu'à  partir  du 
Xl°  siècle  la  sacristie  soit  une  portion  constituante  de  l'église  ou 
se  distingue  par  les  soins  apportés  à  sa  décoration  extérieure. 
Comme  cependant  l'un  ou  l'autre  de  ces  faits  peut  se  rencontrer , 
il  sera  toujours  nécessaire  de  l'examiner  et  d'en  rendre  compte  sous 
ce  double  rapport. 

Fin  de  la  deuxième  Inslruclion  du  Comité  historique  des  Arts  et  Monu- 
ments, rédigée  par  MM.  P.  Mérimée  et  Albert  Lenoir. 


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ÉCOLE  FLOTTANTE  DE  NATATION 
(dite  bains  d'orléans), 

CONSTRUITE  SUR  I.A  GAROBTNE  DEVANT  BORDEAUX, 

A'ifrh  les  pians  et  soos  la  direclioo  de  S.  J.  LAFARGIE ,  ardiJIfrtf.  ' 

Cet  établissement  fut  soigneusement  examiné  par  moi  lors  de 
mon  passage  à  Bordeaux  il  y  a  quelques  mois,  et  la  description  qui 
suit,  ainsi  que  tous  les  dessins  qup  la  Revue  donne  aujourd'hui, 
ont  été  faits  d'après  les  documents  qu'à  ma  prière  l'habile  auteur 
des  bains  flottants  a  bien  voulu  m'adresser. 

J'eusse  été  heureux  de  communiquer  aux  lecteurs  de  la  Reçue 
les  dessins  et  les  descriptions  de  plusieurs  autres  constructions  et 
monuments  importants ,  récemment  exécutés  .dans  le»  villes  que 
j'ai  eu  l'occasion  de  visiter  ;  mais  tous  nos  confrères  des  départe- 
ments ne  m'ont  pas  tenu  parole  en  m'envoyant  les  documents 
qu'ils  m'avaient  promis.  J'ai  eu  plus  d'une  fois  lieu  de  m'aperce- 
voir  qu'il  fallait  renouveler  fréquemment  la  même  demande  auprès 
d'eux  pour  leur  persuader  qu'elle  était  réellement  sérieuse;  je  pro- 
fite donc  de  cette  occasion  pour  assurer  ceux  auxquels  j'ai  adressé 
des  propositions  de  cette  nature,  et  qui  ny  ont  pas  encore  re- 
pondu ,  que  c'est  avec  chagrin  que  je  reste  sans  reccToir  de  leurs 
nouvelles.  Je  remercie  ceux  qui  ont  compris,  comme  M.  Lafargne, 
que,  pour  opérer  un  pellicment  général  parmi  les  architectes,  il 
faut  reconnaître  l'inlluence  de  la  preste  et  en  profiter.  Par  la  prettt, 
on  communie  à  distance,  la  parole  franchit  l'espace,  et  Ion  se 
communique  réciproquement  sa  pensée,  plus  commodément  mtae 
que  de  vive  voix;  car  on  réfléchit  davantage  en  écrivant,  et  puis, 
verba  volant,  scripta  tnancnl,  on  peut  revenir  à  loisir  sur  ce  qui  est 
écrit,  de  telle  sorte  qu'une  publication  périt>dique  permet  à  chacun 
de  choisir  son  heure  pour  s'entretenir  avec  ses  confrères.  >ons  in- 
sistons donc  auprès  des  architectes  de  province,  pour  qu'ils  nous 
envoient  chaque  mois  le  bulletin  de  ce  qui  se  fait  dans  leur  «lepar- 
tement  de  nature  à  intéresser  l'histoire,  la  théorie  et  la  pratique  de 
l'architecture,  pour  qu  on  nous  tienne  régulièrement  au  courant 
des  projets  qu'on  médite,  des  édifices  qu'on  construit,  des  recher- 
ches archéologiques  qu'on  entreprend,  etc.  Quand  bien  mêtne  il  ne 
serait  rien  fait  dans  le  mois,  nous  toudrion*  qu'on  nom  Catmiimtél. 
car  une  correspondance  régulière  nous  arrivant  de  chaque  dépar- 


491 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS, 


kn 


tement,  en  en  faisant  le  dépouillement,  nous  serions  conduits  à  des 
réflexions  sur  l'activité  relative  des  départements  et  à  chercher 
pourquoi  cette  activité  se  montre  si  énergique  d'un  côté  et  si  dé- 
bile de  l'autre. 

CÉSAB  DALY. 

Cet  établissement  repose  principalement  sur  deux  flotteurs  en 
fer  (tôle) ,  en  forme  de  fuseau  et  tronqués  dans  le  haut;  ils  sont  con- 
struits ainsi  pour  présenter  moins  de  résistance  au  flux  et  au  reflux . 
Ils  ont  48  mètres  de  longueur,  et  leur  plus  grand  diamètre  est  de 
2""  20;  leur  poids  est  de  32000  kilogrammes.  Leur  tonnage,  calculé 
à  un  tirant  d'eau  de  l^lO  ou  du  rayon,  est  de  1.51  tonneaux,  sur 
lesquels  il  faut  déduire  le  poids  d'environ  1.5  tonneaux  que  produi- 
sent les  constructions  en  bois  au-dessus  de  la  ligne  de  flottaison. 
II  reste  donc,  déduction  faite,  136  tonneaux  correspondant  au 
poids  de  2ôoo  personnes ,  poids  que  l'établissement  peut  porter 
avec  toute  la  sécurité  désirable. 

Quoique  le  chiffre  de  2.500  soit  bien  plus  considérable  que  celui 
des  personnes  ordinairement  réunies  aux  bains,  la  sécurité  est 
d'autant  plus  grande  que  le  poids  des  2500  personnes  est  considéré 
comme  supporté  par  les  flotteurs  seulement,  tandis  que,  le  plus 
grand  nombre  des  baigneurs  étant  presque  constamment  dans 
Ueau ,  leur  poids  diminue  selon  le  principe  bien  connu  d'Archi- 
raède. 

Pour  régler  le  tirant  d'eau  d'une  manière  précise  et  pour  donner 
aux  bassins  plus  ou  moins  de  profondeur,  les  flotteurs  sont  munis 
de  robinets  et  de  pompes  pour  y  introduire  ou  en  expulser  la  quan- 
tité d'eau  suffisante;  de  plus,  deux  cloisons  en  tôle  avec  robinets 
de  communication  divisent  chaque  flotteur  en  trois  compartiments, 
de  manière  à  pouvoir  réparer  un  accident  sans  être  obligé  de  met- 
tre à  sec  un  flotteur  entier. 

L'établissement  est  ainsi  composé  : 

Un  grand  bassin.rectangulaire  de  30  mètres  de  longueur  sur  12 
mètres  de  largeur  et  ("-fO  de  profondeur  ordinaire.  Il  est  facile, 
comme  on  la  vu  plus  haut,  d'augmenter  ou  de  diminuer  cette  der- 
nière quantité.  Ce  bassin  est  commun  à  tous  les  baigneurs. 

Aux  extrémités  sont  deux  autres  bassins  de  forme  hexagonale, 
chacun  de  12  mètres  sur  10  mètres;  ils  sont  séparés  du  bassin 
principal  par  une  claire-voie  mobile  servant  à  préserver  du  tu- 
multe les  personnes  qui  désirent  se  baigner  tranquillement.  Au- 
dessus  de  celte  séparation  s'étendent,  à  chaque  extrémité,  deux 
galeries  transversales  supportant  les  pavillons. 

La  plate-forme,  ou  plancher  du  fond  des  bassins,  est  faite  avec 
de  fortes  longrines  longitudinales  en  sapin  du  Nord,  liées  A  des  tra- 
verses en  même  bois  par  des  boulons  en  fer  à  écrou  ;  de  fortes  plan- 
ches sont  clouées  sur  les  traverses  à  0°'02  de  distance  de  l'une  à 
l'autre,  afin  de  laisser  écouler  la  vase.  En  cas  d'accident,  des  plan- 
ches pareillement  disposées  sont  clouées  au-dessous  des  longrines. 
Ce  plancher  est  fixé  aux  flotteurs  par  des  colliers  et  des  supports 
en  fer  avec  des  pièces  de  bois  moisées  verticalement  à  chaque  tra- 
verse, et  venant  se  lier  au  plancher  des  galeries. 

Le  pourtour  des  bassins  est  fermé  par  une  claire-voie;  tous  les 
angles  sont  bien  arrondis  ;  tous  les  bois,  taillés  de  manière  à  donner 
toute  sécurité  aux  baigneurs  et  à  garantir  les  flotteurs  de  tout  choc 
nuisible.  Le  long  de  cette  claire- voie  est  fixé  un  banc  dans  l'eau, 
sous  les  galeries,  afin  de  pouvoir  prendre  des  bains  assis  lorsqu'on 
le  désire. 

L'enceinte  extérieure  et  les  bordages  sont  faits  en  fortes  plan- 


ches de  sapin  fixées  horizont<dement  sur  une  charpente  parfaite- 
ment assemblée,  et  composée  de  pièces  verticales  et  horizontales  en 
bois  de  sapin  liées  ensemble  par  des  croix  de  Saint-André.  Une 
grille  en  fer  est  établie  à  chaque  extrémité  des  bordages,  afin  de 
laisser  un  libre  courant  à  l'eau  et  d'empêcher  les  corps  étrangers 
de  s'introduire  dans  les  bassins. 

A  i"  20  au-dessus  de  la  ligne  ordinaire  de  flottaison  et  au  pour- 
tour des  trois  bassins,  sont  établies  des  galeries  couvertes  commu- 
niquant à  vingt  chambres  disposées  pour  les  baigneurs  du  grand 
bassin  ;  chaque  chambre  contient  douze  petites  armoires  pour  ser- 
rer les  habits  d'autant  debaigneurs.  En  outre  de  ces  240  places  au- 
tour des  galeries  longeant  les  bassins  particuliers,  se  trouvent  56 
cabinets  pour  les  baigneurs  (pii  désirent  être  seuls  pour  se  préparer 
aux  bains.  Les  cabinets  particuliers,  les  chambres  et  leurs  armoi- 
res sont  marqués  de  numéros  correspondant  a  ceux  placés  sur  les 
caleçons  de  chaque  baigneur,  de  telle  sorte  qu'il  ne  peut  y  avoir  de 
confusion  lorsrju'on  reprend  ses  vêtements. 

Au  niveau  des  galeries  et  au  centre  se  trouvent,  en  entrant,  un 
péristyle  et  les  bureaux  du  Contrôle;  vis-à-vis,  un  salon  servant  de 
café  ;  aux  extrémités  des  pavillons  sont  les  chambres  de  l'adminis- 
tration et  du  gardien  ,  quatre  lingeries  et  dépôt  des  ustensiles  né- 
cessaires, plus  quatre  sièges  d'aisance;  le  tout  ayant  issue  sur  les 
galeries. 

Une  tente,  combinée  de  In  manière  suivante,  couvre  les  bassins, 
pour  la  commodité  des  baigneurs.  Cette  tente  est  composée  de  pan- 
neaux mobiles  reposant  sur  de  légères  fermes  en  fer  et  en  bois.  Des 
bandes  de  toile  goudronnées  de  0'"02  de  largeur  sont  clouées  sur 
des  cadres  en  bois  à  0'"02  de  distance  de  lune  à  l'autre,  entrelacées 
de  manière  à  se  couper  à  angles  droits  et  à  former  un  damier  a 
jour.  Cette  combinaison  amortit  l'ardeur  des  rayons  du  soleil , 
laisse  librement  circuler  l'air  et  offre  un  coup  d'oeil  très-agréable. 

La  charpente  des  galeries,  des  chambres  et  des  pavillons  est  re- 
couverte de  fortes  toiles  passées  à  une  peinture  préparée  avec  plu- 
sieurs corps  gras  combinés  pour  une  longue  durée. 

Les  deux  pa\illons  éle^cs  au-dessus  des  galeries  transversales 
viennent  rompre  la  monotonie  d'une  longue  ligne  horizontale  et 
fournir  en  outre  des  dépôts  de  linge,  quatre  terrasses  servant  d'é- 
gouttoirs  pour  le  linge  mouillé  qui  a  servi  aux  baigneurs,  et  32  ca- 
binets ordinairement  réservés  pour  les  pensionnats. 

L'établissement  est  mouillé  dans  la  rade  par  le  moyen  de  quatre 
fortes  chaînes  ancrées,  deux  en  aval  et  deux  en  amont ,  avec  leurs 
bittes  disposées  de  mnnière  à  manœuvrer  facilement  au  flux  et  au 
reflux. 

Un  pont  mobile  en  bois  à  deux  travées,  reposant  sur  un  ponton, 
sert  de  communication  entre  le  quai  et  les  bains. 

Telles  sont  les  dispositions  générales  de  ces  bains  flottants,  ter- 
minés depuis  1840  (juin). 

Cette  construction  ayant  été  faite  à  terre,  sa  mise  à  l'eau  offrit 
d'assez  grandes  difficultés.  L'architecte  directeur  des  travaux,  éga- 
lement chargé  de  cette  opération,  fut  assez  heureux  pour  la  voir 
réussir;  au  bout  d'une  heure,  cette  vaste  construction,  qui  semblait 
fixée  au  sol,  assise  sur  un  plan  incliné  combiné  d'une  manière  par- 
ticulière pour  vaincre  les  diflicultés  que  présentait  le  déplacement, 
franchit  l'espace  qui  la  séparait  du  fleuve  et  s'avança  tranquille- 
ment sur  l'eau,  en  présence  des  autorités  de  la  ville,  et  aux  accla- 
mations de  plusieurs  milliers  de  personnes  réunies  sur  le  rivage. 

Cet  établissement,  que  monseigneur  le  duc  d'Orléans  daigna 
honorer  de  son  auguste  patronnage,  fut  entièrement  construit  dans 


493 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


iM 


l'espace  de  deux  mois;  on  y  reçoit  gratis  les  soldats  de  la  garnison 
et  les  élèves  des  écoles  gratuites.  Ouvert  au  public  après  un  exa- 
men et  un  rapport  favorables  de  MM.  les  ingénieurs  des  ponts  et 
chaussées  à  M.  le  préfet  de  la  Gironde,  rien  n'est  venu  troubler  la 
confiance  publique ,  la  solidité  de  ce  curieux  établissement ,  qui 
procure  un  ornement  à  la  rade  et  un  délassement  salutaire  aux 
habitants  de  Bordeaux. 


CHAUFFAGE  ET  VENTILATION  DHOPITAL. 

Dans  le  système  de  chauffage  et  de  ventilation  que  nous  allons 
décrire,  on  s'est  proposé  d'obtenir,  le  plus  simplement  et  le  plus 
économiquement  possible,  les  résultats  suivants  : 

Produire  une  ventilation  qui  suffise  pour  renouveler  l'air  d'une 
salle  d'hôpital  en  moins  d'une  heure,  et  qui  corresponde  au  moins 
à  20  mètres  cubes  par  heure  et  par  lit. 

Répartir  cet  air  dans  toutes  les  parties  de  la  salle,  de  manière  à 
fournir  à  chaque  malade  un  air  dont  la  pureté  indispensable  à  sa 
guérison  lui  procure  une  respiration  facile,  et  dont  la  chaleur  le 
maintienne  dans  un  équilibre  de  température  qui  souvent  ne  lui 
est  pas  moins  nécessaire. 

Obtenir  à  volonté  l'uniformité  de  température  et  de  ventilation, 
ou  produire  autour  de  certains  lits,  pour  des  raisons  quelconques, 
une  ventilation  et  une  élévation  de  température  plus  grandes  que 
celles  dont  les  autres  malades  ont  besoin. 

Exposé  du  système  de  chauffage  et  de  ventilation. 

Dans  chaque  salle  du  rez-de-chaussée  sont  deux  calorifères 
rectangulaires  en  fonte  et  en  tôle,  disposés  pour  brûler  des  houilles 
sèches.  Dans  ces  appareils,  l'air  extérieur,  appelé  dans  un  canal 
en  maçonnerie,  arrive  sous  le  foyer,  s'échauffe,  et  s'échappe  dans 
toutes  les  directions  par  de  larges  bouches  de  chaleur.  L'intérieur 
de  chaque  calorifère  est  en  fonte,  et  ne  peut  jamais  rougir;  la  par- 
tie qui  reçoit  le  rayonnement  du  foyer  forme  un  bain  de  sable 
destiné  à  tenir  chaudes  les  tisanes  des  malades.  Ce  bain  de  sable 
est  accessible  des  deux  côtés  sur  la  plus  grande  dimension  de  l'ap- 
pareil, auquel  on  donne  une  forme  allongée  pour  qu'il  reste  plus 
d'intervalle  entre  les  lits  et  chaque  calorifère,  (à's  appareils  sont 
ceux  que  nous  avons  décrits  dans  un  précédent  article  (Voy.  PI.  13 
et  col.  211). 

Au  premier  étage,  se  trouvent  deux  calorifères  semblables.  La 
fumée  des  calorifères  du  rez-de-chaussée  monte  dans  les  appareils 
du  second  pour  se  réunir  à  celle  de  ces  derniers.  En  sortant  de  ce 
second  appareil,  la  fumée  s'élève  verticalement,  traverse  le  plan- 
cher, et  monte  dans  la  cheminée  de  ventilation,  où  elle  produit 
un  échauflement  de  l'air,  suffisant  pour  l'appel  que  nécessite  le 
renouvellement  continuel  de  l'air  dans  les  salles. 

Sous  le  rapport  de  l'économie  de  combustible,  cette  disposition 
ne  laisse  rien  à  désirer.  Les  produits  de  la  combustion,  après  avoir 
élevé  la  températxire  de  l'air  appelé  de  l'extérieur  pour  le  chauffage 
des  salles,  chauffent  encore  l'air  vicié  dans  les  cheminées  pour  pro- 
duire la  ventilation.  Enfin,  on  profite  du  rayonnement  des  appa- 
reils et  de  celui  des  tuyaux  à  fumée. 

L'égalité  de  température  dans  toutes  les  parties  de  la  salle  se 


trouve  déterminée  par  l'aniformité  de  la  ventilation,  qui  distri- 
bue également  l'air  chaud  autour  de  chaque  lit.  Les  conduits  à 
fumée  sont  disposés  de  manière  à  rendre  les  nettoyages  faciles  et 
aussi  rares  que  possible. 

Vemtilatiob. 

Les  calorifères  sont  placés  de  manière  à  ce  que  l'air  appelé  de  l'ex- 
térieur, et  qui  s'échappe  par  le»  bouches  de  chaleur,  ait  auUntde 
chemin  à  faire  des  deux  côtés  pour  arriver  aux  parties  de  la  saile 
qui  en  sont  le  plus  éloignées,  c'est-à-dire  que  la  distance  qui  les 
sépare  est  à  peu  près  double  de  celle  qui  existe  entre  chacun 
d'eux  et  l'extrémité  de  la  salle  qui  en  est  le  plus  rapprochée. 

Pour  que  l'air  chaud  soit  réparti  uniformément  dans  toutes  les 
parties  de  la  salle  et  autour  des  lits,  des  cheminées  de  ventilation 
sont  placées  entre  chaque  paire  de  lits,  et  munies  cbacone  d'un  ori- 
fice fermé  par  une  trappe  dont  on  peut  régler  la  position  de  ma- 
nière à  obtenir  exactement  une  égale  vitesse  d'air  par  toutes  le» 
ouvertures. 

La  partie  inférieure  de  cette  cheminée  est  disposée  en  table  de 
nuit,  à  deux  portes,  pour  le  service  des  lits  entre  lesquels  elle  se 
trouve.  De  petits  trous  permettent  qu'il  s'établisse  un  faible  cou- 
rant d'air,  de  manière  qu'il  ne  puisse  jamais  se  dégager  dans  la 
salle  d'émanations  qui  affectent  désagréablement  l'odorat.  A  la 
hauteur  des  lits  et  à  portée  des  malades,  les  cheminées  de  venti- 
lation portent  au-dessus  des  tables  de  nuit  de  petites  tablettes  en 
bois  servant  à  poser  les  verres  et  les  tasses  dont  les  malades  peu- 
vent avoir  besoin. 

Les  dimensions  des  cheminées  s<mt  calculées  pour  une  ventila- 
tion de  800  à  1 000  mètres  cubes  par  heure  et  par  salle,  c'est-à-dire 
à  plus  de  20  mètres  cubes  par  heure  et  par  malade. 

Au  premier  étage,  des  chemine^  de  ventilation  semblables  se 
trouvent  entre  les  lits;  mais  elles  ont  des  dimensions  plus  grandes, 
parce  qu'elles  doivent  encore  servir  au  passage  de  l'air  appelé  du 
rez-de-chaussée. 

Sous  le  comble,  les  cheminées  partielles  se  réunissent  dans 
deux  cheminées  générales  construites  en  plâtre,  et  dans  lesquelles 
la  ventilation  s'opère  par  réchauffement  de  l'air  contre  les  tuyaux 
à  fumée.  A  la  partie  supérieure,  les  cheminées  sont  fermées,  et  l.i 
sortie  de  l'air  s'effectue  latéralement  par  quatre  ouvertures,  fer- 
mées en  partie  par  des  volets  reliés  deux  à  deux  par  des  tiges  arti- 
culées, et  disposées  de  manière  a  ce  que  le  vent  qui  agit  dans  une 
direction  et  ferme  l'une  des  ouvertures,  ouvre  forcément  celle 
qui  est  opposée  et  favorise  par  conséquent  l'évacuation  de  l'air 
appelé. 

Ce  projet  a  été  reconnu  comme  le  meilleur  de  ceux  qui  ont  été 
proposés  au  concours  pour  les  salles  de  sorofuleux  a  l'hôpital  des 
enfants  malades.  ISous  y  avons  établi  les  appareils  de  chaufTai^ 
semblables  à  ceux  que  nous  avons  représentés  dans  la  PI.  13  de 
cette  année.  Quant  à  la  ventilation,  l'administration  ne  l'a  pas 
jugée  indispensable  à  l'assainissement  des  salles  de  malades,  et 
notre  système,  bien  qu'approuve  par  la  commission,  n'a  pas  été 
exécuté  à  Paris  :  il  l'a  été  dans  l'infirmerie  du  collé||:;e  d'Orléans. 

Lbgekde  db  la  planche  17. 

Fig.  t.  Coupe  longitudinale  d'une  partie  d'un  corps  de  bâ- 
timent. 


495 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


496 


La  Fig.  2  est  une  coupe  transversale  faite  par  le  milieu  d'une 
des  petites  cheminées  de  ventilation  placées  entre  les  lits. 

a,  calorifère  à  air  chaud  en  fonte,  avec  bain  de  sable,  étuve,  et 
larges  bouches  de  chaleur  pour  le  rez-de-chaussée. 

a',  calorifère  semblable  pour  le  premier  étage. 

6,  tuyaux  à  fumée  du  rez-de-chaussée. 

c,  tuyaux  à  fumée  du  premier  étage. 

d,  conduit  qui  amène  l'air  extérieur. 

g,  g,  g...,  cheminées  de  ventilation  pour  le  rez-de-chaussée. 

e,  e,e,  tables  de  nuit  ventilées. 

»,  i,  t...,  orifices  de  ventilation  dont  l'ouverture  est  réglée  par  un 
registre  à  tourniquet. 

h  h...,  cheminées  de  ventilation  du  premier  étage  recevant  l'air 
vicié  qui  est  appelé  par  les  tables  de  nuit  de  cet  étage  et  par  celles 
du  rez-de-chaussée. 

Il,  conduits  horizontaux  recevant  l'air  appelé  par  les  petites 
cheminées,  et  le  conduisant  à  une  cheminée  principale  m. 

0  0,  système  de  volets  reliés  les  uns  aux  autres,  et  disposés  de 
manière  à  ce  qu'il  y  ait  toujours  au  moins  deux  ouvertures  de 
libres,  quelle  que  soit  la  direction  du  vent. 

René  DUVOIR. 


L'OPÉRA , 

Etudes  théoriques  et  pratiques  d'un   théâtre  pour  l'Académie  Royale 

de  Musique. 


6CITE.  (  Voye:  col.  Aï3  de  ce  volume.) 


L\  Salle.  —  Sa  DiSTBiBtxiON. 

Dans  toutes  ses  parties,  l'art  a  de  la  grandeur,  même  lorsqu'il 
s'agit  d'un  intérieur  de  salle  de  spectacle  pour  une  société  blasée 
par  l'excès  de  la  civilisation. 

On  peut  lutter  encore  dans  ce  cercle  étroit  pour  satisfaire  à  la 
fois  aux  conditions  de  l'utile  et  du  beau.  Mais  avec  les  données 
artistiques  qui  dérivent  des  habitudes  de  notre  société  moderne, 
on  ne  pourra  jamais  obtenir  dans  l'ensemble  d'une  salle  de  spec- 
tacle, et  particulièrement  d'une  salle  d'Opéra  pour  Paris,  qu'une 
perfection  très-relative. 

J'aurai  à  parler  de  l'acoustique ,  de  la  lumière  artificielle  qu'on 
nomme  éclairage,  sans  oublier  de  faire  sentir  la  différence  notable 
qu'il  doit  y  avoir  entre  les  conditions  de  l'éclairage  de  la  scène  et 
celles  de  l'éclairage  de  la  salle,  que  sépare,  en  fait,  une  imper- 
ceptible démarcation. 

J'aurai  à  parler  de  perspective  avant  mèmed'aborder  la  descrip- 
tion du  théâtre. 

J'aurai  à  parler,  avant  tout,  de  la  forme  de  la  salle,  si  rigoureu- 
sement commandée  par  les  besoins  qui  se  rattachent  aux  précé- 
dentes propositions. 

Dans  les  théâtres  modernes,  compris  l'Opéra,  qui  a  été  souvent 
accusé  de  n'être  qu'un  spectacle  pour  les  yeux,  on  doit  parfaite- 
ment entendre  de  tous  les  points  de  la  salle;  mais  la  scène,  à 
moins  de  sacrifier  des  combinaisons  faites  pour  assurer  à  la  plus 


grande  masse  possible  des  spectateurs  le  plus  de  jouissances  pos- 
sible, ne  peut  être  également  bien  vue  de  partout. 

Dans  tout  théâtre  lyrique  l'ouïe  doit  jouir  d'un  privilège;  mais 
voulant  concilier,  autant  qu'il  se  peut,  ses  exigences  avec  celles  de 
la  vue,  nous  avons  fait  des  efforts  pour  que  le  sacrifice  ne  fut  pas 
absolu.  En  effet,  si  des  spectateurs  se  trouvent  placés  sous  un 
angle  qui  ne  leur  permette  pas  de  voir  le  développement  de  tous  les 
accessoires  scéniques,  ils  peuvent  jouir  au  moins  de  la  vue  de  tout 
un  côté  du  tableau  ;  et  plus  rapprochés  de  la  partie  qu'on  appelle 
avant-scène,  la  seule  où  soit  réellement  portée  l'action  du  drame, 
il  s'ensuit,  pour  eux,  que  le  sens  le  moins  favorisé  sous  un  certain 
rapport,  se  trouve,  sous  un  autre,  plus  favorisé  par  ce  rapproche- 
ment. 

Ce  n'est  pas  tout,  qu'on  le  remarque  bien  ;  le  spectacle  est  con- 
sidéré ici  dans  ses  rapports  avec  les  mœurs,  les  goûts,  les  usages 
très-justifiables,  très  bien  calculés,  très-bien  entendus,  de  notre 
société  moderne;  je  le  répète.  Et  ces  spectateurs  eux-mêmes, 
qui  savent  très-bien,  avant  d'entrer  dans  la  salle,  qu'ils  pourront 
être  placés  de  la  manière  que  j'ai  dite,  et  qui  ne  s'en  plaignent  pas, 
recherchent  au  contraire  par  calcul,  tous  les  habitués  de  l'Opéra 
le  savent,  ces  places  spéciales  d'où  la  vue  atteint  bien  autre  chose 
qu'un  chAssis  couvert  de  toile  peinte,  et  d'où  soi-mén)e  on  est  vu 
de  la  plus  grande  masse  possible  des  spectateurs,  ce  qui  est  d'un 
prix  inestimable  pour  quelques-uns,  — je  dirais  pour  tous  si  je  ne 
respectais  les  exceptions. 

En  effet,  dans  les  classes  où  l'on  veut  avoir  l'air  de  vivre  avec 
distinction,  le  plaisir,  les  émotions  qui  naissent  du  spectacle  sont 
appréciés  certainement  ;  mais  ce  spectacle  perdrait  son  principal 
attrait  s'il  était  rendu  dans  une  salle  où  chaque  sjjectateur,  aux 
prises  seul  avec  le  drame,  se  trouverait  hors  des  conditions  où  le 
placent  nos  habitudes.  En  deux  mots,  il  faut  qu'une  salle  de 
spectacle,  et  celle  de  l'Opéra  spécialement,  malgré  ses  vastes  di- 
mensions, pré.senfe  les  spectateurs  dans  des  conditions  presque 
semblables  à  celles  qu'offrirait  une  réunion  dans  un  salon  ;  il  faut 
que  chacun  ait  son  rôle  de  représentation  ;  on  y  va  pour  voir,  on  y 
va  pour  être  vu.  Tous  sont  autant  là  pour  ce  spectacle  de  la  salle 
que  pour  le  spectacle  de  la  scène.  Pour  nous,  la  salle  doit  donc  tou- 
jours par  sa  forme,  par  sa  distribution,  par  sa  décoration ,  satis- 
faire à  cette  impérieuse  exigence  :  tel  a  été  le  principe  dominant 
de  la  nouvelle  étude. 

Le  plan  qui  répond  le  mieux  aux  conditions  qu'impose  le  sys- 
tème que  nous  défendons,  et  nous  avons,  ailleurs,  de  plausibles 
motifs  de  justification,  est,  sans  contredit,  le  plan  circulaire; 
c'est-à-dire  celui  où  le  plan  de  la  salle,  figurant  un  cercle,  laisse  a 
la  scène  une  ouverture  qui  varie  entre  le  quart  et  le  cinquième  de 
sa  circonférence. 

Dansce  dernier  parti,  plus  favorable  qu'un  autre  aux  disposition.s 
symétriques,  les  spectateurs  se  trouvent,  par  rapport  les  uns  aux  au- 
tres, dans  la  situation  la  plus  convenable  pour  jouir  du  coup  d'oeil 
général  qu'offre  la  réunion  du  public,  l'ensemble  de  toute  la  salle, 
qui  devient  ce  qu'elle  doit  être  chez  nous,  j'ose  le  dire,  un  vaste 
et  magnifique  meuble,  une  étagère  splendide,  brillante  de  variété 
et  de  mouvement,  sous  laquelle  se  cache  un  peu  la  trop  grande  pré- 
tention monumentale  que  les  anciens,  dans  leur  condition  diffé- 
rente, devaient  faire  valoir. 

Mais  si  vous  entrez  dans  le  parti  des  anciens,  ce  que  j'ai  cru  pos- 
sible comme  tant  d'antres,  sans  avoir  nourri  trop  longtemps  ce- 
pendant cette  erreur  de  jeunesse,  vous  faites  un  hémicycle,  vous 


497 


RKVUE  DK  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


«M 


voyez  alors  de  toutes  les  places  ou  à  peu  près  ;  mais  l'effet  scénique 
perd  de  sa  magie,  et  le  spectacle  si  animé  et  si  utile  de  l'intérieur  de 
la  salle  est  annulé;  le  théâtre,  sans  charme,  n'est  plus  ajusté  aux 
mœurs  de  la  société  française  du  XIX"  siècle. 

.le  n'examinerai  pas  successivement  les  plans  de  salles  circon- 
scrits entre  ces  deux  principes.  Je  me  horne  à  dire  que  les  plans 
qui  se  rapprochent  le  plus  du  premier,  se  rapprochent  le  plus  de 
notre  perfection  relative  ;  et  que  les  plans  qui  se  rapprochent  du 
principe  antique,  s'éloignent  le  plus  de  cette  perfection. 

La  forme  circulaire  n'est  pas  seulement  préférable  par  les  rai- 
sous  qui  viennent  d'être  exposées  :  elle  se  prête  encore  à  une  meil- 
leure distribution  de  la  lumière  dans  la  salle,  ce  qui  n'est  pas  sans 
importance;  il  y  a  là  un  attrait  qui  influe  sensiblement  sur  les  dis- 
positions du  spectateur.  En  outre,  je  crois  cette  forme  encore  par- 
ticulièrement favorable  à  l'émission  de  la  voix. 

Pour  de  tels  avantages,  on  peut,  sans  de  grands  inconvénients, 
priver  quelques  spectateurs  de  la  vue  d'une  fraction  des  arrière- 
plans  du  théâtre,  surtout  quand  leur  rayon  visuel  s'étend  entière- 
ment sur  une  vaste  avant-scène,  surtout  quand  dans  sa  traversée 
oblique  du  théâtre  l'œil  saisit  environ  les  quatre  cinquièmes  de  l'é- 
, tendue  de  la  toile  de  fond  :  dans  ces  conditions,  je  ne  sache  pas 
que  ce  soit  perdre  une  portion  appréciable  de  spectacle. 

La  salle  de  la  rue  Lepelletier  est  en  quelque  sorte  notre  spéci- 
men. Elle  brille  en  partie  par  toutes  les  conditions  que  nous  avons 
développées,  et  nous  devons  dire  que  toutes  les  combinaisons  utiles 
qu'offrent  sa  forme  et  le  principe  dominant  de  sa  décoration  ap- 
partiennent au  génie  de  Louis,  grand  architecte,  qui  a  bâti  le  Pa- 
lais-Boyal  et  la  salle  des  Français ,  monuments  où  les  défauts 
n'obscurcissent  pas  les  grandes  qualités;  qui  a  bâti,  pour  sa  gloire, 
le  magnifique  théâtre  de  Bordeaux,  où  l'on  retrouve,  dans  le  plan 
de  la  salle,  quelques-unes  des  dispositions  que  le  même  architecte 
introduisit  dans  la  salle  d'opéra  de  la  rue  Richelieu,  effacée  du  sol 
après  le  sanglant  attentat,  et  qui  servit  de  modèle  à  la  salle  de  la 
rue  Lepelletier. 

Les  modifications  apportées  au  plan  primitif  de  Louis  dans 
le  contour  de  la  salle  de  la  rue  Lepelletier,  ont  donné  peut- 
être  un  peu  plus  de  pureté  à  quelques  lignes  ;  mais  à  tous  autres 
égards  ,  en  tout  ce  qui  a  rapport  à  l'effet  général ,  elles  m'ont  paru 
insensibles.  Les  modifications  faites  à  la  coupe  du  plafond  ne  nous 
ont  pas  paru  aussi  heureuses  que  les  premières. 

J'ai  rempli  un  devoir  en  attribuant  au  célèbre  Louis  tout  ce  qui 
lui  revient  de  cet  important  travail ,  car  le  plan  de  la  salle  de 
la  rue  Lepelletier,  comme  celui  de  l'ancienne  salle  de  la  rue 
Richelieu,  — je  répète  plan  de  la  salle,  —  me  parait  offrir 
dans  son  ensemble,  à  peu  de  chose  près,  la  plus  heureuse  des  dis- 
positions. 

J'ajoute  que  la  distribution  générale  de  la  salle  de  l'Opéra  de 
Paris  présente,  sans  nul  doute,  les  plus  utiles  conditions  pour 
faire,  au  point  de  vue  de  notre  société  moderne ,  la  plus  ma- 
gnifique des  salles  de  l'Europe. 

Après  cette  profession  de  foi,  nous  sommes  plus  à  l'aise  pour  dé- 
fendre le  parti  que  nous  avons  pris. 

La  nouvelle  salle ,  comme  celle  de  la  rue  Richelieu ,  çopime 
celle  de  la  rue  Lepelletier,  affecte  la  forme  circulaire.  Pans  sa 
distribution,  nous  trouvons  pour  les  musiciens  un  vaste  orchestre, 
développpé  sur  toute  la  largeur  de  l'avant-scène. 

Puis  vient  l'orchestre  du  public,  pour  lequel  nous  n'avons  encore 
pu  trouver  d'autre  nom  que  son  nom  bâtard,  comme  tant  de 


noms  appropriés  aux  choses  du  théâtre ,  cela  soit  dit  sans  inten- 
tion d'allusions. 

Les  sièges  de  cet  orchestre  sont  autant  de  fauteuils  élastiques,  a 
do.ssiers  un  peu  renversés,  avec  des  accotoirs  pour  chaque  bras,  qui 
sont  séparés  de  ceux  du  fauteuil  voisin  par  une  division  en  sur- 
élévation. 

Le  rapprochement  de  ces  places  avec  la  scène  fait  leur  pius 
grand  mérite  :  c'est  leur  principale  distinction  ;  elle  se  paie  douUe, 
et  ce  n'est  pas  trop. 

Vient  ensuite  le  parterre,  qui,  toujours  placé  entre  l'orchestre 
et  l'amphithéâtre ,  diffère  des  anciens  parterres  par  des  disposi- 
tions spéciales  dont  l'utilité  n'est  pas  contestable. 

L'espace  entre  chaque  rang  de  ses  places  est  plus  considérable 
que  celui  que  l'on  trouve  au  parterre  de  la  salle  Lepelletier.  A  ce 
dernier,  il  y  a  32.  â  centimètres;  au  nôtre,  il  y  a  4â  centimè- 
tres. Il  n'atteint  pas  la  largeur  de  l'écartement  des  rangs  de 
l'orchestre  et  de  l'amphithéâtre  ,  mais  il  est  suffisant  pour  que  des 
hommes  de  taille  élevée  ne  soient  pas  condamnés,  pendant  six 
heures  de  plaisir,  à  souffrir  la  plus  incommode  immobilité. 

Le  siège  joue  un  rùle  important  au  parterre  :  il  sert  au  repos 
comme  partout  quand  il  est  bien  conçu  ;  mais  il  est  aussi  un  obsta- 
cle à  la  circulation,  et,  bien  ou  mal  conçu,  il  fera  toujours  obstacle. 
Donc,  le  plus  grand  écartement  dont  nous  venons  de  parler  rendant 
plus  facile  cette  circulation  ,  offre  encore  un  avantage  important 
sous  ce  rapport,  car  on  sait  par  combien  de  discourtoises  apostro- 
phes sont  accueillis  les  retardataires  qui  s'engagent  malencontreu- 
sement dans  les  défilés  trop  étroits  de  nos  parterres. 

Je  conteste  l'utilité  d'un  couloir  permanent  pratiqué  au  centre 
du  parterrre  ;  et,  d'ailleurs,  il  forme  une  ligne  vide  d'un  effet  dés- 
agréable. 

L'écartement  entre  les  rangs  et  la  disposition  des  si^es  obvie  à 
tous  ces  inconvénients. 

Chaque  place  dont  la  largeur  est  déterminée  offre  pour  siège  un 
fauteuil,  mais  qui  diffère  de  ceux  que  nous  avons  mentionnés. 

Ce  fauteuil  est  combiué  pour  que  les  membres  du  corps  qui 
réclament  un  appui  constant  rencontrent  toujours  cet  appui  con- 
venable ;  et  MM.  les  tapissiers  de  l'Opéra  ont  encore  prouvé  là 
que  pour  être  bien  assis,  même  sur  un  siège  élastique  ,  il  convient 
de  poser  la  base  du  corps  sur  un  point  moins  élevé  que  la  ligae  des 
jarrets,  et  qu'il  convient  toujours  d'avoir  le  corps  penché  en  arrière. 
Les  tapissiers  ont  encore  eu  soin  de  donner  assez  de  profondeur  à 
ces  sièges  pour  que  leur  rebord,  encore  suffisamment  élastique, 
pût  soutenir  les  cuisses  au  pli  du  jarret. 

Voici  seulement  la  particularité  qu'offrent  ces  fauteuils  :  ils  ont 
un  dossier  mobile  et  cependant  très-solide,  mais  qu'on  doit  tenir 
rabattu  sur  le  sié^e ,  soit  avant  le  lever  dq  rideau  après  l'entrée 
dans  la  salle,  soit  pendant  les  entr' actes;  on  se  conforme  facile- 
ment à  cet  ordre,  qui  a  son  utilité. 

Ces  dossiers,  aiijsi  rabattus ,  offrent  une  surface  unie  et  solide 
sur  laquelle,  au  moment  des  entrées  et  des  sorties,  la  circulation  se 
fait  sans  çont(;stalions,  avec  la  plus  grande  sùrele  ;  voiln  le  par- 
terre. 

Nous  trouvons  enfin  l'amphitliéàtre,  dont  l'existence  n'est  jas- 
tifiée  que  par  la  nécessité  de  ne  pas  mettre  le  parterre,  un  peu  moa- 
vant  de  sa  nature,  en  contact  trop  direct  avec  les  premières  loges. 

L'amphithéâti-e,  disons-nous,  favorise  par  son  rapprocbemenl 
des  premières  loge*,  ce  qui  fait  sa  distinction,  n'est  plus  qu'une  an- 
nexe de  l'orchestre,  et  n'a  de  remarquable  que  la  disposition  de 
T.  V.  ?* 


499 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


500 


ses  fauteuils,  imaginés  pour  nous  laisser  jouir,  avec  la  plus  grande 
aisance,  des  agaceries  lointaines  de  la  scène,  que  rapprochent  les 
puissants  télescopes  de  Lerebours  ou  de  Chevalier. 

L'admission  des  femmes  à  l'amphithéâtre  avait  l'inconvénient 
de  rompre  l'harmonie  qu'offre  au  coup  d'oeil  la  sévère  uniformité 
du  parterre,  et  nuisait  à  l'effet  des  toilettes  des  premières  loges  : 
l'aspect  de  la  salle  y  perdait.  La  plupart  des  places  qui  s'y  trou- 
vaient occupées  par  des  femmes,  très-empanachées  sans  aucun 
doute,  étaient  toujours  des  places  improductives  :  c'était  la  tapis- 
serie drapée  par  le  distributeur  du  billet  de  faveur.  Tous  ces  atours 
de  toilettes,  un  peu  excentriques  quelquefois,  des  rentières  en  re- 
traite de  l'Académie  royale  de  Musique,  mais  qui  ne  manquent  pas 
d'éclat,  ont  été  plus  heureusement  distribués  dans  les  loges  des 
divers  rangs  qui,  à  tous  égards,  sont  plus  convenables  pour  des 
femmes,  même  lorsqu'elles  sont  pensionnaires  de  l'Opéra. 

Quatre  étages  de  loges  se  développent  autour  de  la  salle. 
•  A  partir  de  l'avant-scène,  la  salle  est  divisée  en  trois  grandes  tra- 
vées principales,  séparées  par  de  plus  petites  travées  conr,prises  cha- 
cune entre  deux  colonnes.  Chaque  côté  de  l'avant  scène  est  com- 
posé de  deux  petites  travées  formées  par  trois  colonnes,  et  l'ou- 
verture de  la  scène  constitue  une  quatrième  grande  division.  La 
circonférence  de  la  salle  se  trouve  donc  coupée  en  quatre  grandes 
sections,  par  quatre  sections  plus  étroites  dont  les  deux  de  l'avant- 
scène  sont  doubles.  Sur  les  quatre  groupes  de  colonnes  s'appuient 
quatre  grands  arcs  surbaissés  couronnant  les  quatre  grandes  di- 
visions et  portant  la  coupole.  Cette  disposition  établit  une  notable 
confraternité  entre  cette  salle  et  ses  deux  aînées  de  la  rue  Riche- 
lieu et  de  la  rue  Lepelletier. 

A  la  droite  et  à  la  gauche  du  parterre  on  remarque  encore  les 
loges  dites  de  rez-de-chaussée. 

Puis,  dans  le  haut,  au  quatrième  étage,  vis-à-vis  l'ouverture 
de  la  scène,  au  fond  de  la  salle  par  conséquent,  il  y  a  une  rangée 
de  loges  découvertes  sur  leurs  quatre  faces,  ce  qui  est  une  inno- 
vation, et  qui  n'ont  que  deux  fauteuils  dans  leur  profondeur.  Der- 
rière ces  loges,  le  public  peut  deviner,  mais  ne  le  voit  pas,  un 
amphithéâtre  qui  a  conservé  le  nom  d'amphithéâtre  des  quatrièmes. 

Derrière  cet  amphithéâtre,  plus  vaste  que  celui  de  la  rue  Lepel- 
letier malgré  ses  premiers  rangs  changés  en  loges,  viennent  encore 
les  loges  traditionnelles  du  cintre,  que  l'administration,  selon  ses 
vues  et  ses  besoins,  peut  supprimer  ou  rétablir  à  volonté. 

Une  vaste  coupole  circulaire,  conçue  à  peu  près  comme  celle  de 
Louis,  complète  jusque-là  la  ressemblance  de  l'œuVre  du  présent 
avec  l'œuvre  du  passé.  Voyons  les  dissemblances  :  elles  sont  d'une 
très-haute  importance. 

Aux  deux  anciennes  salles,  le  plancher  de  la  scène  prend  nais- 
sauce  à  peu  de  distance  du  pied  de  la  colonne  qui  marque  la  sépa- 
ration de  la  salle  et  du  théâtre.  11  résulte  de  cette  disposition  que  la 
voix  de  l'acteur,  surtout  si  un  courant  d'air  est  accidentellement 
produit  de  la  salle  au  théâtre,  va  se  perdre  dans  les  ciels  et  les  ma- 
chines, au  lieu  de  suivre  la  direction  que  lui  donne  l'émission. 

A  cet  égard,  j'appuierai  mes  observations  sur  une  autorité,  et 
j'espère  qu'aucun  artiste  ne  viendra  me  démentir. 

Adolphe  Nourrit ,  non  moins  célèbre  par  son  talent  lyrique  que 
par  le  talent  qu'il  apportait  à  l'exécution  du  drame;  Adolphe  Nourrit, 
que  d'inhabiles  décisions  rejetèrent  trop  loin  ;  Adolphe  Nourrit, 
courageux  pour  devenir  grand  artiste  ,  et  sans  force  pour  se  jouer 
de  l'injuste  intrigue;  Adolphe  Nourrit,  qui  fut  le  meilleur  guide  de 
l'administration  dans  l'art  difficile  de  la  mise  en  scène,  nous  dit  un 


jour,  avec  cet  entraînement  qu'on  lui  a  connu  :  <<  Je  voudrais 
que  l'avant-scène  fût  jetée  plus  loin  dans  la  salle.  Plus  je  me 
rapproche  du  public,  plus  je  me  sens  animé;  mon  illusion,  à  moi, 
devient  complète  ;  ce  public  fait  partie  de  l'action  ;  si  je  pouvais 
agir  au  milieu  de  lui,  il  me  semblerait,  pour  ainsi  dire,  qu'en  cher- 
chant à  le  toucher  de  mon  gantelet  je  trouverais  pour  appui  le  bras 
de  mes  chevaliers!...  » 

Je  ne  puis  rendre  le  mouvement,  l'expression,  unis  à  ces  paroles 
saisissantes,  pour  moi  du  moins  ;  mais  je  compris  la  pensée  de 
l'artiste,  et  voilà  pourquoi  II  m'a  paru  indispensable,  dans  la  nou- 
velle salle,  de  satisfaire  à  cette  condition  en  donnant  naissance  a 
l'avant-scène  à  partir  de  la  base  de  la  deuxième  colonne,  et,  pour 
répondre  au  vœu  de  Nourrit ,  de  placer  ainsi  le  chanteur  sous  la 
coupole  même  de  la  salle  où  doit  rayonner  sa  voix. 

Il  résulte  de  cette  disposition  que,  des  places  d'avant-scene,  on 
voit  presque  constanmient  l'acteur  de  profil,  inconvénient  bien 
faible  à  nos  yeux,  car  ceux  appelés  à  connaître  la  valeur  de  l'ob- 
jection qui  pourrait  être  faite  à  cet  égard,  savent,  ou  peuvent  sa- 
voir, que,  vu  des  loges  dites  du  manteau  d'arlequin,  situées  sur  le 
théâtre,  le  spectacle,  loin  de  perdre  en  attraits,  y  gagne  peut-être 
encore.  J'ai  toujours  vu  ces  places-là  très-recherchées;  non  poui» 
tout  ce  qu'on  peut  supposer,  mais  parce  que  de  là,  l'effet  de  la  re- 
présentation est  exceptionnel,  original  et  plein  d'intérêt.  Ayant 
fait  admettre  des  personnes  du  monde  dans  une  de  ces  loges  du 
théâtre,  celle  du  maitre  des  ballets,  elles  s'étonnèrent  comme  nous 
de  reconnaître  à  la  danse  de  Marie  Taglioni,  plus  de  perfection , 
plus  de  rectitude,  plus  de  vigueur,  plus  de  suavité  même  qu'on 
n'en  supposait  à  l'inimitable  sylphide  en  la  voyant  de  la  salle  que 
ses  élans  électrisaient. 

Ainsi  placées,  ces  personnes,  qui  se  trouvaient  dans  un  reeule- 
ment  plus  prononcé  que  ne  doivent  l'être  les  spectateurs  des  loges 
situées  au-dessus  de  l'avant-scène,  regrettaient  peu,  sous  le  charme 
qui  les  captivait,  de  ne  pas  voir  les  toiles  de  fond  du  théâtre.  A  des 
degrés  différents,  il  y  aura  toujours  assez  de  tiilentsà  l'Opéra  pour 
exciter  pareil  intérêt  chez  un  nombre  suffisant  de  spectateurs  :  les 
loges  d'avant-scène  ne  seront  donc  jamais  désertées. 

La  distance  entre  l'acteur  placé  sur  l'avant-scène  et  les  premiers 
plans  des  décorations  n'est  pas,  malgré  le  développement  de  cette 
avant-scène  dans  la  salle,  plus  grande  là  que  dans  la  salle  de  la 
rue  Lepelletier. 

En  effet,  dans  l'ancienne  salle,  les  loges  du  manteau  d'arlequin 
dont  nous  venons  de  parler,  et  qui  ne  peuvent  être  considérées 
que  comme  une  création  abusive  dont  nous  sommes  parfaitement 
a  même  de  signaler  les  inconvénients,  font  porter  sur  un  second 
plan  le  premier  châssis  de  décoration.  En  outre,  ces  loges  para- 
sites ont  rendu  impossible,  ainsi  que  j'en  administrerai  la  preuve, 
l'application  rationnelle  du  plus  sensible  et  du  plus  efficace  per- 
fectionnement ([ue  soit  susceptible  de  recevoir  l'éclairage  scénique. 

Ces  loges,  créées  d'abord  pour  les  maîtres  du  chant,  les  maîtres 
des  ballets  et  le  machiniste  en  chef,  ne  sont  jamais  occupées  par 
ces  fonctionnaires  durant  leur  service  :  à  quoi  bon  les  avoir? 

Les  six  loges  de  cette  nature,  si  ce  n'est  huit,  établies  progressi- 
vement deux  par  deux,  au  théâtre  de  la  rue  Lepelletier,  puis  suc- 
cessivement améliorées,  c'est-à-dire  agrandies  au  détriment  de  la 
scène,  et  qui,  d'obscures  et  cachées,  ont  fini  par  se  découvrir  comme 
les  loges  davant-scène,  ont  été  effacées  du  plan  du  nouveau  théâtre  ; 
et  leurs  usufruitiers  privilégiés,  qui  les  défendaient  sans  trop  de 
conscience,  ont  trouvé  une  compensation  dans  le  partage  de  quel- 


501 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


ques  loges  de  la  salle,  parce  qu'un  abus  finit  par  être  un  droit,  et 
que  ces  droits  d'abus  en  France  sont,  malgré  nos  belles  paroles,  ce 
que  nous  nous  plaisons  à  respecter;  nous  sommes  si  bons  enfants! 
Mais,  du  moins,  les  trente  ou  quarante  spectateurs  qui  se  réfu- 
giaient dans  ces  retraites  illicites  sont  devenus,  en  prenant  place 
dans  la  salle,  un  élément  du  personnel  appelé  à  la  meubler,  comme 
on  dit  à  l'administration. 

Dès  lors,  le  premier  châssis  de  décoration  a  pu  être  plus  rappro- 
ché et  de  l'avant-scène  et  de  l'acteur  qui  y  agit,  et  l'éclairage  scé- 
niqueapu  recevoir  son  importante, son  indispensable  amélioration. 

Quant  aux  deux  loges  du  plancher  de  l'avant-scène,  situées 
dans  des  conditions  assez  difficiles  à  qualifier,  et  qui  sont  nuisiblcsà 
l'ensemble  de  la  représentation  ,  j'en  demande  mille  pardons  aux 
abonnés  qui  les  recherchent,  elles  ont  été  judicieusement  suppri- 
mées. 

Au  reste,  cette  saillie  de  l'avant-scène  existe  dans  certaines 
salles  lyriques  de  l'Italie,  dans  les  plus  vastes,  et,  si  je  ne  me 
trompe,  il  faut  attribuer  à  cette  utile  disposition  une  partie  des 


avantages   qu'offrent    ces    salles  pour  l'émiasion   de  la   voix. 

Il  s'agissait  de  faire  la  plus  belle  salle  connue  avec  beaucoup  des 
éléments  de  l'architecte  Louis,  parce  que  ceux  qu'il  a  laisfés  se 
trouvaient  réellement  les  plus  puissants;  et. les  améliorations  ap- 
portées à  sa  pensée,  s'il  y  a  amélioration,  ne  viennent  que  du  pro- 
grès général  qu'ont  pu  faire  les  idées  depuis  l'époque  ou  parurent 
ses  œuvres. 

Les  proportions  de  la  salle  nouvelle  sont  plus  vastes  que  celles 
de  la  salle  Lepelleticr;  il  le  fallait  pour  atteindre  le  but  proposé  ; 
mais  il  ne  fallait  pas  se  Iwrner  à  dire  :  Je  ferai  une  bien  grande 
salle,  et  la  faire;  il  fallait  encore  que  toutes  ses  proportious  fus- 
sent harmoniées  et  ré[>ondissent,  malgré  leurs  grandes  dimensk»», 
aux  conditions  rigoureuses  qui  constituent  les  avantages  d'une 
excellente  salle  de  spectacle. 

J'ai  mission  de  prouver  que  rien  n'est  exagéré  dans  les  propor- 
tions de  la  nouvelle  salle  ;  et  mes  preuves,  je  les  trouve  dans  le  ta- 
bleau ci-joint,  qui  reproduit  exactement  les  proportions  respectives 
des  principales  salles  de  l'Europe. 


Tableau  comparatif  des  dimensions  des  principaux  théâtres  de  l'Europe,  et  de  celles  du  théâtre  décrit  dans  ce  mimoirt , 

servant  à  la  justification  des  proportions  de  ce  dernier. 


DÉSIGNATIONS 

DES    DIMENSIONS    RELEVÉES. 


Dislance  enlre  l'appui  des  loges  des  pre- 
mières et  la  rampe 

Distance  de  la  rampe  au  rideau 

Dislance  depuis  le  rideau  jusqu'au  fond  du 
Ihéâlre 

Total  de  la  dislance  enlre  l'appui  des  pre- 
mières loges  cl  le  fond  du  Ihéâlre 

Diamètre  de  la  salle  mesuré  entre  les  appuis 
des  loges  de  eôlé 

Largeur  de  l'ouverlure  de  la  scène 

Différence  entre  l'ouverture  de  la  scène  et  le 
diamètre  de  la  salle  mesuré  entre  les  appuis 
des  loges  de  côté 

Maiiraum  du, retrait  des  loges  de  coté,  par 
rapport  i  l'ouverture  de  la  scène 

Hauteur  de  la  ligne  supérieure  do  la  corniche 
sur  la<|uelle  s'appuie  la  coupole,  prise  au- 
dessus  du  poini  le  plus  bus  du  parterre — 

Hauteur  depuis  la  corniche  jusqu'au  point  le 
plus  élevé  de  la  coupole 

H,iuleur  maximum  de  la  salle 


Largeur  du  théâtre  entre  les  murs  ou  pieds- 
ilroils  des  retraites  de?  décorations 


18.25 
8.00 

10.50 


36.75 


18.30 
11.  75 


6. 55 


15. 7.^ 
1.50 


«7.55 


i6.50 


19.00 
4.80 

25.10 


46.90 


15.10 
12.40 


3.00 


m.    c 

20.50 

2.75 

27.20 


50  45 


Sl-tftMSBOlG 


ir.    c 

18.40 

4.10 

•27.60 


50.10 


19.00  17.00 
IS.SO  45.50 


5. 70 


1.50    2.85 


15.15 
1.15 


14.30 


28.00 


18.40 
2.50 


20.90 


29.90 


1.50 


0.7.-. 


15.00 
1.05 


19.75 
3,40 

25.50 


48.65 


17.75 
(7.20 


O.Î7ï 


16.25 
1.60 


IG.05 


24.00 


17.85 


2S.0O 


20.80 
0.50 

4*. 10 


51.40 


19.50 
12.70 


6.80 


3.40 


«6. OU 
1.50 


17.50 


22.90 


m.    c. 
19.00 

4.80 

39.20 


53.00 


16. «0 
13.50 


2.70 


1.33 


14.50 

Î.OO 


16.50 


24.75 


m.     c. 

23.75 

5.50 

23.90 


53.13 


21.70 
15.00 


6.70 


18. SO 
1.50 


19.80 


26. 35 


m.    c. 
23.70 

5.eo 

22.60 


-1  PUIS. 


14.50 
3.30 

31.00 


30.60 

3 

25.00 


51.90 


33.65 
«5.90 


6.75 


3.35 


24.60 
0.65 


25.35 


30.40 


38.70 


«4.50 

H.UO 


3. M 


«.15 


«S.SO 
3.00 


I7.S0 


34.60 


48.40 


30.30 
«3.30 


7.00 


5.50 


«6.00 
4.00 


10.00 


35.80 


À 

23.00 
B. 

5.00 

r, 

50. UO 


57.00 


D. 
34.00 

E 
17.50 


F. 

6.50 


C 

5.35 


30.80 
4.30 


.1. 

M. «5 


J. 

58.30 


OBSERVATIONS. 


A.  Aui  théâtres  de  Milan  cl  i  Napkt.  le» 
ipeclaieurs  dr>  loge*  de  bec  Mal  pUcn  a 
e  plus  grande  dislance  de  la  sc^ae  que  dan* 


une  plu 
la  Mlle 


decrile  daa>  ce  meaioirc. 


B.  Dans  d'autres  Ibéltm  les  aTint-wéDct 
sont  plus  avancée»  dan»  la  Mlle  que  rellr 
du  théâtre  que  nous  décrivons. 

C.  le  Uiéllre  de  Turin  e«i  celui  ou  celle 
distance  est  le  plu»  considérable;  elle  5'e*t 
inférieure  que  de  80  ccoiiméuc»  à  celle  qu'on 
trouve  dan»  le  Ihéltrc  décnl  dan»  ce  némoirr. 

D.  Celle  grande  largeur,  donnée  i  la  talle 
décrite  dan»  ce  meinaire,  e*l  uule  pour  la 
beauté  des  proportions,  mai»  ne  pn>doil. 
pour  le»  ipeclateur»  placé»  »ur  le»  coté*,  »«- 
cun  reculcmenl  eiagére  (Voir  plot  bu,  le 
niaiimuni  du  retrait  de»  loge»  <e  cAlé). 

E.  Celle  ouverlure  au  ibéilre  Aleuadcv,  « 
Sainl-Féter»bourg  ,  n'e»l  inférietirt  que  de 
50  centimélre»  a  l'ouverture  de  \a  Mfw  dé- 
crite dan»  ce  mémoire. 

F.  A  cel  égard,  cette  fallc  i,  pour  le  point 
vifuel,  un  avantage  »ur  la  lallc  de  la  rac  t*- 

pelletier. 

a.  Lm  salles  qui  semblent  offrir  i  e#l  éfird 
une  amélioration  »o«l  oMoaae*,  •!  «Me 
forme  n'est  plu»  adroini^.  T>'»llleuft._  »■ 
rjison  de  sa  plu»  grande  ouverture  de  tcàmt, 
notre  salle  reprrnd  de  notable»  avantage» 
puisqu'on  découvre  une  plu*  grande  »urt«c^ 
du  Iheâlre. 

n  1  r«  hjiiietir»  «onl  «opérieore»  «il  «e- 
,„r,',    ,  '     :.s  de  l'Open  d«  U  rar 

1 ,  «  n'atirignrni  p»»  celle» 

la  luulcur  Jt  San-<Jrlor»lde$"JSdeptt»» 
que  celle  de  la  talle  U-pelletier. 

J.  La  largeur  totale  du  plancbet  du  Iktl 
ire  rsl  de  58"  »  en  ;  comprenanl  le«re- 
iraile».  Ce»  mraur»,  ou  »e  logeai  le»  d*e«»»- 
lion» de  ».rvi.e,  n'riisirnl  p»» da»»i«  p«u|art 
de»  Ibéilre».  A  rttperi  de  rni»,  le»  ■•cbé- 
niili'S  le»  noinmciil  »•»■ 


En  comparant  attentivement ,  on  reconnaîtra  peut-être  que 
les  proportions  de  la  nouvelle  salle  ont  été  étudiées  en  vue  de  pro- 
duire un  ensemble  plus  irréprocbable  qu'aucun  de  ceux  offerts  par 
les  salles  dont  je  mets  les  proportions  sous  les  yeux  de  mes  lec- 
teurs. 


Ce  tableau,  selon  moi,  tranche  nettement  d'importantes  ques- 
tions. 

Encore  une  fois,  ce  n'est  pas  à  tailler  plus  long  et  pl«»  to*»» 
qu'on  a  voulu  s'amuser  ;  on  a  voulu  harmonier  toutes  te» diwiilii»» 
pour  présenter  un  ensemble  pluttSt  grand  par  la  jusl«»e  da  ff^ 


503 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


50^ 


portions  que  par  une  grande  superficie ,  ou  par  un  grand  cube 
d'air. 

Puisque  nous  sommes  encore  à  l'examen  de  la  salle ,  laissons  le 
théâtre  de  côté  et  ne  le  faisons  entrer  dans  cette  discussion  qu'a- 
vec les  parties  avancées  qui  sont  communes  à  cette  salle. 

On  voit  sur  le  tableau  que  le  diamètre  de  la  salle  que  nous  décri- 
vons est  plus  grand  que  celui  d'aucune  autre  salle  ;  mais  on  doit 
voir  aussi  que  l'acteur,  par  suite  des  utiles  dispositions  de  l'avant- 
scène,  ne  reste  pas  aussi  éloigné  des  spectateurs  qu'à  la  Scnla  de  Mi- 
lan, qu'à  San-Carlo  de  Naples,  deux  salles  essentiellement  favo- 
rables à  l'action  lyrique,  malgré  leurs  vastes  dimensions. 

Qu'on  ne  s'étonne  donc  pas  des  résultats  obtenus  avec  les  pro- 
portions de  la  salle  décrite  :  éloignement  convenable  entre  le 
spectateur  et  l'acteur  ;  facilité  |K)ur  le  chanteur  d'émettre  sa  voix 
sans  efforts  et  d'en  faire  parvenir  les  intonations  dans  toutes  les 
parties  du  vaisseau  avec  toute  la  justesse  qu'on  peut  désirer  ,  s'il 
chante  juste,  bien  entendu. 

J'ai  ouï  dire  à  un  chanteur  d'un  talent  consommé,  auquel  l'art  a 
di\  le  plus  utile  concours  pour  la  réforme  musicale  qui,  dès  1820, 
s'est  opérée  dans  les  usages  du  chant  à  l'Opéra,  —  je  nomme 
M.  Levasseur, —  qu'à  son  début  à  la  Scala,  il  éprouva  beaucoup 
plus  de  facilité  pour  émettre  les  sons  de  sa  voix  qu'il  n'en  a  jamais 
éprouvé  au  théâtre  de  la  rue  Lepelletier.  Cet  exemple  ne  serait 
pas  le  seul  à  citer;  mais  comme  le  caractère  de  M.  Levasseur  per- 
met, aussi  bien  que  son  talent,  de  le  prendre  pour  autorité,  j'ai  cité 
ce  fait  afin  de  prouver  qu'une  grande  salle  ne  constitue  pas  tou- 
jours une  difficulté  pour  le  chanteur. 

J'ajoute  ce  que  j'ai  observé  moi-même.  A  l'occasion  du  sacre  de 
S.  M.  le  roi  Charles  \  ,  feu  M.  le  duc  de  Doudcauville,  alors  nii- 
Yiistre  de  la  maison  du  roi,  donna  à  l'hùtel  ministériel  une  fête  à 
laquelle  nous  eûmes  l'honneur  d'être  invité.  Le  programme  pro- 
mettait plaisirs  et  surprises;  deux  nains,  précurseurs  de  Tom 
Pouce,  furent  annoncés  comme  des  géants.  On  offrit  pour  inter- 
mède une  petite  pastorale  lyrique  passablement  rococo,  mais  qui  a 
pu  servir  à  nos  observatioHS. 

Le  jardin  était  richement  illuminé  et  orné  de  décorations  peintes, 
tout  comme  à  l'Opéra  ;  et  le  paysage  de  Ciceri  luttait  même  heu- 
reusement avec  la  natnre  :  le  tableau  ne  paraissait  avoir  d'artificiel 
que  la  lumière. 

Je  fais  mes  excuses  de  cette  révélation,  non  au  consciencieux  mi- 
nistre que  la  France  regi-etta  deux  fois  ,  non  même  à  .M.  le  duc  de 
Northumberland,  ce  brillant  chevalier  de  la  Jarretière,  cet  ambas- 
sadeur extraordinaire  de  la  nation  la  plus  commercialement  phi- 
lanthropique, ce  roi  de  la  fête,  qui  se  réjouissait  naïvement  de  la 
pastorale,  mais  à  l'ordonnateur,  directeur  de  l'Opéra  (M.  Dubois), 
qui  en  avait  eu  la  sublime  conception. 

L'horloge  marquait  minuit.  Madame  Dabadre,  en  souliers  de 
satin  blanc ,  la  houlette  à  la  main ,  debout,  le  dos  appuyé  contre 
un  moulin  à  vent  de  Ciceri,  ailé  comme  un  moulin  de  Montmartre, 
madame  Dabadie,  plutôt  l'Estelle  de  M.  de  Florinn,  les  pieds  posés 
SUT  un  gros  tabouret  de  velours  pour  les  préserve»-  de  la  fraîcheur 
de  l'herbette,  chantait  à  grandes  rouJades,  et,  si  j'ai  bon  souvenir, 
appelait  Némorin. 

Pour  la  moralité ,  vu  l'heure  avancée,  nous  vimes  apparaître  à 
cet  appel  le  mari  de  la  chanteuse,  le  formidable  Dabadie.  Placés 
à  plus  de  20  mètres  des  fenêtres  des  salons  du  rez-de-chaussée,  de- 
vant lesquelles  se  tenaient  les  auditeurs,  ces  chanteurs  émettaient 
ainsi  en  plein  air  des  sons  qui  parvenaient  très-facilement  jusqu'à 


l'entrée  des  salons ,  et  l'on  ne  s'aperçut  pas  que  les  deux  artistes 
fissent  plus  d'efforts  qu  ils  n'avaient  l'habitude  d'en  faire  à  l'Opéra 
pour  se  faire  entendre. 

J'en  conclus  que  les  sons  de  la  voix,  dans  des  circonstances  don- 
nées, parviennent  facilement,  sans  se  dénaturer,  à  une  plus  grande 
distance  qu'on  ne  l'a  souvent  admis;  et  si  notre  citation  ne  tenait 
pas  déjà  une  place  un  peu  large,  nous  rapporterions  d'autres  faits, 
à  cet  égard,  très-curieux. 

Acoustique. 

Puisque  nous  sommes  appelé  à  parler  de  l'acoustique,  nous 
aurons  à  examiner  si  les  règles  de  cette  science  ne  rencontrent  pas 
dans  l'application  de  ces  Imprévus  comme  il  y  en  a  souvent  ailleurs 
pour  dérouter  la  science  humaine. 

Nous  allons  voir  si  la  salle  en  question  nous  offre,  à  l'égard  de 
la  conservation  du  son,  le  résultat  d'études  plus  avancées  que  les 
études  qui  ont  pu  aider  à  la  construction  des  salles  de  spectacle 
élevées  jns(|u'à  ce  jour  dans  le  monde  connu. 

Un  homme  d'esprit,  dont  les  opinions  pénétrèrent  souvent  dans 
le  conseil  de  l'Académie  royale  de  Musique,  avant,  pendant  et 
après  les  phases  de  sa  direction,  car  il  fut  directeur  de  l'Opéra, 
avait  présenté  plusieurs  considérations  à  son  ministre,  pour  le  dé- 
cider à  mander  expressément  à  Paris  deux  architectes  Italiens, 
l'un  de  Milan,  l'autre  de  Naples,  et  tous  deux  d'origine  bien  au- 
thentiquement  constatée,  afin  de  leur  faire  construire  une  salle 
modèle  d'Opéra  :  car,  selon  lui,  les  architectes  italiens  seuls  réu- 
nissaient toutes  les  qualités  propres  à  cette  œuvre...  Louis  XIV 
avait  bien  appelé  le  Bernin  pour  lui  faire  un  Louvre,  qu'il  ne  fit  pas, 
heureusement  pour  Perrault,  pour  Louis  XIV  et  pour  la  France, 
à  notre  avis. 

N'importe,  malgré  le  jeu  des  ressorts  de  l'Opéra  près  du  mi- 
nistre-guerrier. Mars  ne  tomba  pas  dans  le  filet  qu'on  lui  tendait, 
du  reste  de  très-bonne  foi,  et  nous  ne  vîmes  pas  naiire  à  Paris 
un  illustre  bâtard  de  la  Scala  et  de  San-Carlo  (i). 

Nous  ne  contesterons  jamais  aux  artistes  étrangers  les  qualités 
individuelles  qui  peuvent  distinguer  chacun  d'eux  ;  et  jamais  pré- 
jugé national  ne  nous  rendra  injuste  envers  le  talent,  envers  le 
génie.  Mais  nous  ne  voudrions  pas  que,  par  légèreté,  des  adminis- 
trateurs dans  un  pays  comme  le  nôtre,  où  l'administration  a  une 
action  aussi  forte  et  aussi  directe,  vinssent  nous  offrir  comme  la 
conséquence  exclusive  du  savoir  et  du  calcul,  des  résultats  heureux 


(1)  On  ne  songe  pas,  que  nous  sachions,  à  imiter  aujourd'hui  des  architectes 
italiens  i  venir  nous  construire  une  Académie  royale  de  Musique,  et  nous  re- 
grettons que  notre  collalmrateur  se  soit  aventuré  dans  une  question  dont  nous 
ciierclions  en  vain  l'à-propos,  mais  qui  peut  aigrir,  suivant  nous,  des  siiscepti- 
l)ilités  légitimes  qu'il  convient  de  toujours  respecter.  Le  tliéâtre  de  la  Scala  est 
une  œuvre  trop  belle  pour  que  nous,  artiste,  nous  entendions  volontiers  traiter 
ses  enfants  de  «  bîiards!  »  Nous  avons  fait  ces  observations  à  M.  Meynxdier., es- 
pérant, n'hésitant  nténie  pas  à  croire  que  nous  serions  écoute,  et  (juc  ce  hors- 
d'œuvre  à  propos  de  nos  confrères  d'Italie,  hors-d'œuvre  qui  nous  paraît,  à 
nous,  couiplètenient  sans  utilité,  serait  supprimé;  mais  M.  Meynadier,  qui  est 
certainement  cependant  un  des  hommes  des  moeurs  les  plus  douces  que  nous 
connaissions,  a  tenu  absolument  a  maintenir  sa  rédaction;  il  n'a  voulu  qu'en 
adoucir  la  forme,  et  nous  avons  dû  l'accepter  ainsi  modifiée,  sous  peine  de  voir 
priver  nos  lecteurs  de  Pensemblc  du  travail  de  M.  Meynadier.  L'auteur  a-t-il 
des  raisons  secrètes  de  nature  i  lui  faire  attribuer  de  l'à-propos  à  celte  digres- 
sion? nous  l'ignorons  entièrement  {Note  de  M.  César  Daly  ) 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


S06 


qui  ne  sont  dus  peut-être  en  plus  grande  partie  qu'à  des  causes 
purement  locales  et  accidentelles. 

Honneur  aux  architectes  italiens,  en  tout  ce  qu'il  ont  produit 
de  grand,  de  beau,  et  d'utile;  mais  déclarons  que  nous  n'avons 
trouvé  nulle  part  aucune  raison  qui  pût  nous  faire  admettre,  ni 
sous  le  rapport  de  i'acoutisque,  ni  sous  celui  de  l'art  de  la  dis- 
tribution des  intérieurs,  ni  sous  celui  encore  de  l'art  de  la  distri- 
bution pittoresque  des  masses  extérieures ,  que  les  architectes 
italiens  de  notre  époque  fussent  plus  capables  que  les  architectes 
français  de  combiner  et  de  construire  la  meilleure  des  salles  de 
spectacle. 

Encore  une  fois,  sans  nier  le  mérite  relatif  de  quelques-uns 
des  édifices  napolitains,  lombards,  romains  modernes,  génois, 
consacrés  aux  représentations  scéniques,  déclarons,  ce  qui  pour 
nous  est  incontestable,  qu'en  ce  qui  concerne  l'acoustique,  les 
Italiens  n'ont  jamais  établi  un  principe  fixe,  invariable,  qui  pût 
servir  de  base  à  la  construction  d'un  théâtre. 

Ce  n'est  même  pas  d'eux  que  nous  avons  appris  à  connaître 
les  causes  les  plus  facilement  appréciables  des  avantages  acousti- 
ques de  quelques-unes  de  leurs  salles  de  spectacle  :  les  causes  les 
plus  directes  de  ces  avantages,  savoir:  l'intluencedé  leur  climat, 
un  air  moins  chargé  d'humidité,  rendu  par  conséquent  plus  élas- 
tique, donnent  aux  édifices  de  leur  pays  de  très-utiles  conditions 
de  sonorité. 

Ce  ne  sont  pas  lés  Italiens  qui  nous  ont  dit  :  Pour  que,  dans 
un  vaisseau  donné,  le  son  frappe  l'oreille  de  toute  son  inten- 
sité, il  faut  que  ce  vaisseau  soit  composé,  le  plus  possible,  des 
corps  les  moins  vibrants;  au  contraire,  au  sein  de  toutes  les 
commissions  administratives  qui  ont  pu  traiter  de  la  construc- 
tion d'une  salle  d'Opéra,  les  artistes  ultramontains,  compris 
musiciens  compositeurs  ou  exécutants,  auxquels,  par  parenthèse, 
on  a  accordé  aussi  à  cet  égard  un  peu  trop  de  confiance,  en 
sont  toujours  reveous  à  leur  funeste  conseil  de  considérer  l'or- 
cliestre,  la  cavité  dans  laquelle  on  est  forcé  de  l'enfouir,  avec  sa 
double  mission  de  s'harmonier  pour  les  besoins  simultanés  de  la 
salle  et  de  la  scène,  comme  un  instrument  d<ins  lequel  la  vi- 
bration doit  s'opérer,  ainsi  qu'elle  s'opère,  ou  à  peu  près,  dans 
un  tuyau  d'orgue  ou  dans  le  coffre  d'un  violon.  De  là  ces  in- 
ventions proposées  de  placages  en  bois  dans  tout  le  pourtour  de 
la  salle,  ces  planchers,  ces  doubles  planchers;  ces  inventions  de 
tambours  sous  orchestre,  soit  métalliques,  soit  de  peau  d'àne,  qu^ 
quelques-uns  proposèrent,  qu'on  essaya,  et  qui  sont  essentielle- 
ment contraires  aux  bons  effets  qu'on  doit  attendre  de  l'émission 
des  sons.  Ce  fut  aussi  l'erreur  de  J.-.T.  Rousseau. 

Ainsi  donc,  en  tout  ce  qui  touche  lu  question  difficile  de  l'a- 
coustique, la  lumière  ne  nous  est  pas  venue  de  l'Italie;  et  sous 
tous  les  autres  rapports,  sous  le  rapport  de  l'esthétique,  nous  ne 
croyons  pas  que  les  architectes  italiens  du  dix-neuvième  siècle 
soient  supérieurs  aux  architectes  français.  Nous  n'avons  voulu 
attaquer  le  mérite  de  personne;  nous  avons  voulu  attaquer  un 
préjugé,  et  rétablir  un  équilibre. 

Lorsque  le  gouvernement  conçut  le  projet  de  faire  une  nou- 
velle salle  des  séances  de  la  Chambre  des  députés,  ce  fut  vers 
1827  ou  28,  si  nous  ne  nous  trompons,  il  s'occupa  sérieusement 
de  la  question  de  l'acouStique.  Nous  ne  saurions  dire  tout  ce  qui 
-fut  mis  en  œuvre  à  cet  égards  mais  si  quelque  commission  spé- 
«taie  fut  nommée  pour  enrichir  cette  salle  de  toutes  les  qua- 
lités acoustiques  dont  elle  pouvait  avoir  besoin,  nous  devons 


nous  étonner  de  la  trouver  si  peu  favorable  à  rémission  du  «on. 

A  cette  occasion,  voici  entre  autres  choses  ce  que  fit  le  gouver- 
nement :  il  chargea  les  architectes  entretenus  à  cette  époque 
a  la  villa  Médici,  de  prendre  des  informations  pour  reconnaître 
l'état  de  la  science  acoustique  des  Italiens. 

L'un  d'eux,  qui  nous  a  rapporté  cette  circoDstance ,  M.  J.-B. 
Lesueur,  dont  le  nom  est  à  jamais  inscrit  sur  les  pierres  histo- 
riques de  notre  Hôtel-de- Ville,  nous  dit  que  la  mission  lui  parut 
délicate  ;  mais  il  ne  la  déclina  pas. 

Il  chemina  ;  il  arriva  au  théâtre  de  Tordino,  dont  les  construc- 
tions, scienlinquementcalculéesenccqui  concerne  l'acoustique,  au- 
raient dû,  sous  ce  rapport,  présenter  les  plus  signincatifs  résal- 
lats.  C'était  l'opinion  du  constructeur  et  celle  des  gens  de  la 
science;  mais,  contrairement  à  leurs  prévisions  et  par  un  de  ces 
ricochets  dont  ils  n'ont  pas  expliqué  le  phénomène,  Tordino 
manque  absolument  de  sonorité. 

Le  Tibre,  qui  le  baigne,  a  été  accusé  de  lui  avoir  vole  cette  so- 
norité; c'est  peut-être  vrai;  mais  M.  Lesueur, 'pas  plus  que  nous, 
pas  plus  que  d'autres,  n'oserait,  après  l'accusation,  condamner  le 
fleuve  pour  celte  spoliation. 

Tordino,  on  le  comprend,  n'est  pas  venu  en  aide  aux  faibles 
poumons  de  notre  législature. 

Le  cadre  de  ce  travail  ne  me  permet  pas  de  m'étendre  au- 
tant que  je  le  voudrais  en  citations  d'ordre  primordial,  si  je  puis 
dire,  pour  préparer  la  conclusion  et  la  défendre  en  quelque  sortr 
par  un  bastion  de  faits  antérieurs  vieux  comme  le  monde  ;  cepen- 
dant, sans  en  développer  les  causes  qui  se  sentent,  après  les 
observations  déjà  faites,  faisons  remarquer  que  la  sonorité  de 
nos  vastes  basiliques  est  d'autant  plus  sensible  que  les  noeuds 
de  vibration  y  sont  plus  rares;  et  que  dans  les  salles  de  spectacle 
l'impuissance  de  la  sonorité  est  d'autant  plus  manifeste  que  les 
nœuds  de  vibration  y  sont  plus  frétiueirts. 

Cela  dit,  ajoutons  encore,  à  titre  de  considération  préalable, 
qu'il  est  bon,  en  toutes  choses,  de  savoir  vivre,  et,  autant  que  faire 
se  peut,  bien  vivre,  avec  le  mal  qu'on  ne  peut  empêcher. 

Nous  nous  expli(iuons.  Il  n'y  a  pas  d'intérieur  pour  lequel  les 
règles  de  l'acoustique  soient  plus  absolument  exigibles,  —  en  tant 
qu'il  y  a  règles,  — que  pwir  une  salle  de  spectacle.  Eh  bien!  tons 
les  éléments  de  coustmction,  de  distribution,  de  décoration,  qui 
participent  à  sa  fonnation,  sont  en  général  les  éléments  les  plus 
contraires  aux  conditions  de  l'acoustique. 

Il  faut  donc  trouver  un  moyen  ternie,  à  laide  des  lumières  que 
produit  l'observation  des  faits,  pour  combiner  l'arrangement  le 
moins  défavorable  aux  effets  que  l'on  veut  obtenir.  Et  alors, 
sans  avoir  prétendu  une  perfection  impossible,  on  aura  des  ré- 
sultats qui  seront  du  moins  aussi  satisfaisants  qu'on  est  en  droit 
de  les  exiger  dans  la  situation  actuelle  des  choses,  dans  la  situa- 
tion où  nous  pouvons  nous  placer  en  observant  les  limites  que  l'in- 
telligence humaine  a  tracées  jusqu'à  ce  jour  a  la  science  de  l'a- 
coustique. 

Il  faut,  dans  une  salle  de  spectacle,  que  le  son  arrive  jusqu'à 
l'ouïe  des  spectateure,  autant  que  possible  directement ,  et  par  le 
moins  de  réflexions  possible. 

Il  faut,  en  quelque  sorte,  que  la  détonation  de  chaque  son  se  fasse 
sous  le  vaisseau  même,  sans  que  des  corps  propres  a  la  transmif- 
sion  des  sons  les  laissejit  séchapper  au  dehors. 

Il  faut  que  la  salle  seule  dévore  le  son;  il  faut  qu'il  y  naisse  et 
qu'il  y  meure. 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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Mais  quf  nous  serions  fou  si  nous  prétendions  que  ces  conditions 
•  pourraient  être  satisfaites  d'une  manière  absolue  dans  une  salle  de 
spectacle,  comme  elles  pourraient  l'être  dans  une  vaste  sphèrecreuse 
dont  toute  l'enveloppe,  parfaitement  homogène  ,  serait  formée  du 
coi'ps  le  moins  vibrant,  le  moins  propre  à  la  transmission  du  son  I 
Ne  voit-on  pas  déjà  que  le  bois,  que  les  plaques  métalliques  ne 
sont  pas  nos  principaux  matériaux?  Étant  forcé  cependant  de  les 
employer  quelquefois ,  nous  ne  l'avons  pas  fait  sans  combattre 
autant  que  possible  leur  pernicieuse  influence. 

Qu'on  veuille  bien  reconnaître  encore,  avant  d'aller  plus  loin,  que 
les  corps  absorbants  sont  moins  nuisibles  aux  effets  utiles  de  l'a- 
coustique que  les  corps  vibrants  ;  car  si  le  son  émis  a  une  puis- 
sance convenable,  proportionnée  à  la  capacité  du  vaisseau  sous  le- 
quel il  devra  se  dilater,  les  corps  absorbants,  placés  dans  certaines 
conditions  ne  produiront  aucun  mal,  ou  le  mal  sera  tres-limité  , 
puisque,  autant  qu'il  est  possible  de  le  conjecturer,  il  y  aura  moins 
de  réflexion,  moins  de  nœuds  à  redouter. 

Les  laines  qui  nous  couvrent,  les  soieries,  les  fins  tissus  de  mille 
sortes,  les  fauteuils,  tous  les  sièges,  les  accotoirs  garnis  de  crin  et 
de  velours,  les  tentures  indispensables  à  la  décoration  de  parties  no- 
tables, objets  qui  sont  tous  autant  de  corps  absorbants  ,  qu'on  ne 
saurait  proscrire  en  vertu  d'une  loi  d'acoustique  quelconque,  peu- 
vent donc  avoir,  sous  des  rapports  très-importants ,  une  très- 
grande  utilité  relative. 

La  puissance  de  la  voix  humaine  est  plus  grande  qu'on  ne  le 
croit  généralement  ,  avons-nous  déjà  dit,  en  citant  l'exemple  que 
nous  donna  le  couple  Dabadie. 

Mais  cette  puissance  dépend,  ceci  nous  parait  encore  un  fait 
indubilal)le,  de  l'art  avec  lequel  le  son  est  émis.  Telle  voix,  rela- 
tivement plus  puissante,  produira  des  sons  moins  intenses  que 
telle  autre  relativement  moins  puissante,  parcette  seule  raison  qu'il 
y  aura  une  différence  dans  la  manière  d'employer  l'instrument 
humain. 

Un  homme  dont  les  artistes  n'apprécient  pas  encore  la  savante 
méthode,  peut-être  parce  que  sa  méthode  est  plutôt  une  science 
qu'un  art,  Delsarte,  dont  le  nom  grandit  cependant ,  malgré  les 
préjuges  qu'engendre  la  rocailleuse  routine  ,  Delsarte,  savant  ar- 
tiste, observateur  profond,  parvient,  par  sa  manière  déposer  la 
voix  du  sujet  qu'il  étudie  et  qu'il  enseigne  ,  à  faire  émettre  sans 
efforts  pénibles,  par  des  natures  chétives,  des  sons  d'une  très- 
grande  intensité.  Ainsi,  par  ses  soins,  une  jeune  fille  d'une  com- 
plexion  délicate,  aux  membres  fragiles,  à  la  poitrine  resserrée,  au 
souffle  impuissant  quand  il  s'agit  pour  elle  de  parler  ,  chante  par 
les  moyens  de  Delsarte,  et  sa  voix  a  plus  de  puissance  que  des  in- 
struments puissants  qui  ne  peuvent  la  couvrir. 

Il  y  a  dans  la  nature  des  conditions  extrêmement  favorables  au 
transport  du  son,  compris  celui  qui  part  de  la  voix  humaine  ;  mais 
comme  il  n'y  a  rien  de  moins  visible,  rien  de  moins  saisissable  que 
le  son,  la  théorie  relative  à  cette  faculté  de  transmission  qui  se 
produit  avec  la  vivacité  d'un  phénomène  électrique,  est  très-riche 
de  conjectures  ;  et  jusqu'à  ce  qu'un  génie,  encoreà  venir,  ait  formule 
les  règles  de  l'acoustique,  prenons  cette  science  tellequelle  est  dans 
son  infirmité  présente,  et  contentons-nous  de  ce  que  nous  donnent 
les  faits  que  nous  pouvons  observer,  sans  avoir  la  prétention  d'en 
connaître  et  d'en  déterminer  toutes  les  causes. 

Dans  la  nouvelle  salle,  autant  que  possible,  on  a  essayé  de  di- 
minuer les  causes  qui  semblent  les  plus  propres  à  la  multiplication 
des  nœuds  de  vibration  ;  autant  que  possible,  on  a  disposé  les  corps 


pour  que  les  ondes  sonores,  dans  leur  course  rapide  de  340  mètres 
par  seconde,  vinssent  frapper  des  surfaces  privées  de  la  fa- 
culté de  les  multiplier,  comme  les  multiplieraient  des  surfaces  réflé- 
chissantes ;  car  nousavonsdit  qu'il  valait  mieux  que  le  son  parvint 
à  l'oreille  du  spectateur  directement,  que  d'y  venir  par  réflexion. 
Mais  le  résultat  sera  encore  assez  utile  sous  le  rapport  de  la  net- 
teté, si  le  son  venant  à  l'oreille  est  seulement  un  premier  effet  re- 
fléchi. 

Au  milieu  d'un  chaos  de  phénomènes  si  souvent  inexplicables, 
retenons  tous  ceux  que  la  raison  peut  comprendre.  Ainsi,  à  l'éganl 
d'une  partie  spéciale  et  capitale,  la  coupole,  nous  faisons  des  ef- 
forts pour  diminuer  le  nombre  des  effets  réfléchis,  et  combattre,  au- 
tant que  nous  le  pouvons,  l'effet  des  insaissables  nœuds  de  vibration  : 
le  profil  de  notre  coupole  n'est  pas  en  anse  de  panier  comme  celle  de  la 
salle  Lepelletier;  nous  sommes  revenu  un  peu  à  la  courbe  que  Louis 
donna  à  sa  coupole  de  la  rue  Richelieu  ;  mais,  pour  que  cette  cou- 
pole ne  serve  pas  en  quelque  sorte  de  timbale  vibrante,  répercu- 
tant des  sons  profitables  seulement  aux  pompiers  mis  en  observa- 
tion dans  les  vides  qu'on  trouve  entre  le  dessus  de  la  coupole  et  le 
dessous  des  combles, — qu'on  remarque  bleu  ceci,  —  la  voûte  n'est 
formée  ni  d'une  calotte  métallique,  ni  même  de  poteries  creuses, 
qui,  de  leur  nature,  sont  essentiellement  vibrantes  :  elle  est  formée 
d'une  maçonnerie  pleine,  compacte,  suffisamment  épaisse,  com- 
posée des  matériaux  les  moins  propres  h  la  transmission  des  sons. 
Nous  sommes  en  lutte  systématique  contre  quelques  portions  des 
surfaces  qui  produisent  d'inutiles  effets  réfléchis  en  cequi  concerne 
le  son,  et  nous  disons  quelques,  parce  que  d'abord  nous  devons 
reconnaître  notre  impuissance  pour  les  attaquer  toutes,  et  que 
toutes  peut-être,  ainsi  que  nous  l'expliquerons  plus  bas,  ne  sont 
pas  rationnellement  nuisibles. 

Dans  cette  lutte,  nous  attaquons,  lorsque  cela  nous  parait  néces 
saire,  des  saillies  qui  multiplieraient  ces  surfaces  selon  nous  nuisi- 
bles; ainsi,  nous  n'avons  donné,  ce  qui  n'est  peut-être  pas  classi- 
que,  qu'une  saillie  pour  ainsi  dire  insensible  à  la  corniche  sur 
laquelle  nous  faisons  porter  la  coupole. 

Dans  cette  autre  lutte  systématique  contre  tous  les  corps  vi- 
brants que  nous  avons  la  puissance  d  attaquer,  nous  n'avons  pas 
manqué,  au  risque  d'encourir  le  blâme  de  tous  ceux  qui  voudraient 
qu'une  salle  d'Opéra  ne  fut  qu'une  vaste  contre-basse,  de  former 
également  de  matériaux  pleins  les  dix  colonnes  qui  supportent 
exclusivement,  en  apparence  du  moins,  tout  le  fardeau  de  la 
coupole. 

Les  rangs  de  loges  en  étagères,  enveloppés  dans  tout  leur  pour- 
tour par  un  mur  massif  d'environ  80  centimètres  d'épaisseur,  sont 
donc  fixés  sur  un  corps  sans  vibration. 

L'appui  de  ces  étagères  se  trouve  monté  sur  une  construc- 
tion de  fer  qui  a  permis  de  donner  aux  loges  une  saillie  d'en- 
viron 2"  50. 

Cette  disposition  d'armatures  et  de  solives  en  fer  cramponnées 
sur  le  mur  offre  assez  de  solidité  pour  que  l'appui,  c'est-à-dire  le 
devant  des  loges,  soit  formé  d'une  construction  de  briques  pleine.», 
rendue  inébranlable  par  des  griffes  de  fer  convenablement  agencées. 
Cette  bâtisse  en  porte-à-faux ,  ce  qui  ne  lui  ote  pas  son  in- 
attaquable solidité ,  cache  sa  pesanteur  sous  ses  tentures 
veloutées  ;  car,  selon  nous,  en  passant  nous  le  répétons,  dans 
une  salle  de  spectacle,  les  corps  absorbants,  convenablement  équi- 
librés, sont  moins  contraires  aux  effets  utiles  de  l'acoustique  que 
les  corps  vibrants. 


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Le  plafond  des  loges,  nous  dirons  notre  raison  à  cet  égard,  est 
formé  de  plaques  émaiilées,  pleines  et  unies,  faisant  corps  avec  une 
aire  en  plâtre  convenablement  épaisse,  qui  sert  de  plancher  à  l'é- 
tage supérieur. 

Il  y  a  là,  suffisamment  ménagée,  une  surface  propre  à  réfléchir 
les  sons  ;  mais,  dans  ce  cas,  nous  sommes  loin  d'en  craindre  les 
effets,  car  nous  admettons  qu'ils  ne  sont,  d'une  manière  appré- 
ciable, que  le  résultat  d'un  premier  et  seul  jeu  de  réflexion ,  qu'il 
faut  rechercher  pour  établir  quelque  équilibre  entre  tous  ces  corps 
([ui  agissent  de  façon  si  opposée,  mais  si  directe,  dans  la  question  de 
l'acoustique.  Nous  pensons  que  dans  le  vaisseau  de  l'Opéra,  pour 
l'utile  répercussion  des  sons,  il  nous  a  fallu  une  suffisante  quantité 
de  surfaces  réfléchissantes,  car  nous  croyons  que  les  effets  qu'on 
doit  attendre  du  jeu  des  ondes  sonores  seraient  très-incomplets  si 
l'on  voulait  que  tout  un  intérieur  de  salle  de  spectacle,  pour  faire 
opposition  aux  corps  vibrants,  ne  fût  qu'un  corps  absorbant  ouaté, 
bourrelé,  étoffé  comme  la  chancelière  dans  laquelle  nous  chauf- 
fons nos  pieds.  Dans  l'acoustique,  l'imprévu  frappe,  déroute,  et  la 
science  n'est  plus  que  conjecturale. 

L'émail  que  nous  employons  est  le  produit  d'un  esprit  inven- 
teur qui  s'est  plus  d'une  fois  signalé  par  d'utiles  découvertes.  Le 
baron  de  Bourgoing,  ministre  de  France  a  Munich,  que  distinguent 
les  plus  aimables  qualités  de  l'homme  du  monde,  et  dont  le  carac- 
tère est  un  des  plus  honorables  et  des  plus  appréciés  du  corps  di- 
plomatique, s'est  livré,  avec  le  plus  grand  succès,  à  l'étude  des 
sciences  et  des  arts;  inventeur  de  ces  ingénieux  tableaux  litho- 
phaniques  aujourd'hui  connus  du  monde  entier,  il  a  complété  cette 
première  découverte  par  l'invention  de  sou  émail  ombrant,  que 
nous  avons  plus  haut  succinctement  signalé. 

Cet  émail  ombrant,  qui  n'est  autre  chose  que  du  verre  de  cou- 
leur en  fusion  coulé  sur  un  biscuit  de  terre  composée,  sur  lequel  on  a 
formé  des  ornements  au  moyen  d'un  moule  en  relief  semblable  au 
moule  du  tableau  llthophaniqiie,  est  appelé  ombrant  parce  que  la 
masse  d'<5mail  de  couleur  qui  tombe  dans  la  partie  la  plus  creuse 
forme  l'ombre  du  tableau,  et  que  celle  qui  adhère  aux  surfaces  les 
moins  profondes  forme  les  clairs. 

Il  y  a  dans  ce  procédé  une  gradation  de  ton  inappréciable  qu'il 
serait  peut-être  difficile  d'obtenir  par  un  procédé  de  peinture.  La 
suavité  que  cette  particularité  donne  aux  images  reproduites  par 
l'émail  ombrant  est  telle,  que  les  sujets  qui  ont  le  désavantage,  ce- 
pendant,  de  n'offrir  qu'une  seule  couleur,  toute  de  convention, 
tantôt  bleue,  tantôt  brune,  tantôt  rouge,  tantôt  verte,  etc.,  excitent 
un  intérètqui  peutseprolonger  parla  méditation;  c'est  du  moins  ce 
((ue  nous  avons  éprouvé.  Quand  le  sujet  de  l'image  est  bien  choisi, 
ainsi  reproduit,  il  ac(iuiert  un  charme  indéfinissable.  Mais  ce  n'est 
pas  sous  ce  rapport  que  nous  a\ons  à  apprécier  l'émail  ombrant; 
nous  avons  à  signaler  ses  qualités  en  ce  qui  est  relatif  à  son  em- 
ploi dans  la  décoration  monumentale,  soit  extérieure,  soit  inté- 
rieure. 

La  fixité  de  ses  couleurs,  qui  sont  inaltérables,  leur  variété, 
leur  éclat,  se  prêtent  à  mille  combinaisons  mosaïques  du  meilleur 
effet,  et  nous  préconisons  l'utile  mariage,  pour  la  décoration  de  nos 
édifices,  de  la  lave  émaillée  et  de  l'émail  ombrant,  ces  deux  belles 
inventions  françaises  qui  brillent  par  des  qualités  distinctes,  mais 
qui  se  ressemblent  par  de  précieuses  conditions  de  durée. 

En  l'absence  de  M.  de  Bourgoing,  retenu  trop  longtemps  hors 
de  France  par  ses  devoirs  diplomatiques,  son  ami,  le  baron  du 
Tramblay,  consacre  une  partie  de  son  temps  et  de  sa  fortune  à  faire 


faire  une  marche  rapide  à  la  fabrication  de  cet  utile  produit  cé- 
ramique. 

Nous  aurons  encore  l'occasion  de  signaler  un  autre  utile  emploi 
de  cette  découverte  pour  un  des  besoins  importants  du  théâtre  ; 
revenons  à  l'acoustique. 

Par  suite  de  notre  système,  le  parterre  repose  sur  des  voùte«  en 
maçonnerie  et  non  sur  un  bâti  en  bois,  comme  nous  le  trou\oos 
rue  Lepelletier;  mais  deux  conditions  d'hygiène  pour  les  specta- 
teurs commandent  de  placer  leurs  pieds  sur  du  bois  ou  sur  des 
tapis,  et  non  sur  le  carreau,  qui,  l'été,  leur  serait  plus  nuisible 
encore que  l'hiver. 

L'amphithéâtre,  l'orchestre  du  public,  sont  dans  les  mêmes  con- 
ditions; et  l'orchestre,  l'orchestre  proprement  dit,  celui  des  musi- 
ciens, se  trouve  placé,  sans  plancher  vibrant  cette  fois,  dans  une 
construction  de  maçonnerie.  J'indiquerai  plus  loin  quelques  par- 
lies  de  sa  distribution  intérieure. 

Les  arcs  surbaisses  qui  supportent  la  coupole  et  qui  repo»eiit 
eux-mêmes  sur  les  colonnes  servit  à  la  décoration  et  a  la  di- 
vision de  la  salle,  sont  en  maçonnerie,  et  présentent  une  surface 
de  matériaux  pleins  comme  ceux  de  la  coupole  elle-même. 

L'amphithéâtre  des  quatrièmes  offre  également  une  construc- 
tion massive,  combinée  pour  éviter  toute  vibration. 

Sans  passer  des  à  présent  sur  le  théâtre,  nu  delà  de  rayant- 
scène,  disons  que  cette  avant-scene,  en  raison  même  des  aftinites 
établies  par  le  corps  du  chanteur  entre  sa  voix  et  le  corps  vi- 
brant du  plancher,  auquel  se$  pieds  adhèrent ,  exigeait  quelqwii 
dispositions  utiles.  Un  plancher  vibrant,  placé  si  près  de  la  voix 
du  chanteur,  doit  absorber,  en  raison  même  de  ses  propriétés  vi- 
brantes, une  portion  appréciable  des  sons  émanant  de  cette  \oix. 
qui,  se  dilatant  dans  toutes  les  directions  au  moment  de  leur  déto- 
nation, viennent  frapper  ce  plancher,  qui  s'empare  ainsi  de  quel- 
({ues  ondes  sonores  au  profit  de  l'espace  vide  conservé  au-dessous 
(lu  plancher. 

A  ce  mal  il  n'y  avait  qu'un  remède  : 

Le  iproscenium,  où  se  passe  presque  toute  l'action  dramatique, 
et  qui  n'est  jamais  assujetti  â  l'action  du  machiniste,  est  ordinairr- 
ment  formé  d'un  plancher  monté  comme  les  autres  parties  do 
plancher  du  théâtre.  Ces  planches,  d'environ  quatre  centimètres 
d'épaisseur,  sont  fixées  à  demeure  et  ne  subissent  aucune  trans- 
formation pour  les  effets  de  la  scène. 

Dans  la  nouN  elle  salle,  toute  une  partie  avancée  du  pnMrrniwm 
repose  sur  une  voûte  épaisse,  à  dessus  plot,  sur  lequel  le  plancher 
est  fixé.  Mais  comme  les  exigences  de  la  danse  ne  sont  pas  de  la 
même  nature  que  celles  du  chant  (on  voit  que  les  difficultés  nail» 
sent  de  la  contradiction  même  des  besoins  ,  un  plancher  trop  &mt 
aurait  eu  des  inconvénients.  Toutefois  celui  de  la  partie  la  plus 
avanct'e  de  l'avant-scène  a  pu  recevoir  une  épaisseur  de  8  cen- 
timètres; et  toutes  les  fractions  en  sont  jointes  à  rainure  et  par- 
faitement assemblées.  Nous  avions  tort  d'appeler  cela  «n  remède: 
ce  n'est  qu'un  palliatif. 

Pour  en  finir  avec  les  dispositions  de  ra\,iiii-.>.reiu'  relnlntT»  au 
chant,  j'ajouterai  que  la  coquille  du  souffleur  que  Rossini  fit  ad- 
mettre à  l'Opéra,  sans  doute  parce  qu'il  la  jugeait  indispensable,  n 
reçu  une  transformation  utile,  devenue  possible  par  suite  de  la  dis- 
position donnée  aux  appareils  d'éclairage  de  la  rampe,  et  que  je 
ferai  connaître  plus  loin. 

Cette  coquille,  d'où  le  souffleur  poursuit  l'acteur  de  ses  insuffla- 
tions plus  ou  moins  heureuses,  est  placée  dans  |■orche^t^e,  hors  de 


511 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLrCS. 


51S 


la  ligne  de  la  scène,  et  dans  des  conditions  telles  que  le  soiiflleur 
\  oit,  qu'il  est  vu  et  entendu  de  la  scène,  sans  jamais  montrer  ses 
oreilles  aux  spectateurs,  qui  lui  refusent  obstinément  toute  espèce 
de  sympathie. 

Prêt  à  faire  la  description  de  la  décoration  de  la  salle  et  celle  de 
sou  éclairage,  deux  questions  que  je  crois  étroitement  liées,  je  dois 
dire  préalablement  que  les  dispositions  auxquelles  donneront  lieu 
cet  éclairage  et  cette  décoration  pourront  bien  se  trouver  quel- 
quefois en  opposition  avec  certains  principes  de  l'acoustique,  tels 
que  nous  les  avons  exposés;  mais  n'avons-nous  pas  dit  que  tout 
était  de  convention  au  théâtre  et  que  les  principes  absolus  ne  sau- 
raient s'y  maintenir  intégralement?  on  y  vit  beaucoup  avec  les 
moyens  termes,  et  ce  sera  probablement  toujours  ainsi. 

Toutefois,  avant  de  m'engager  dans  les  questions  indiquées,  j'a- 
jouterai que,  pour  rendre  plus  insensible  l'effet  des  corps  vibrants 
lorsqu'on  est  en  quelque  sorte  forcé  de  les  employer  dans  la  con- 
struction, on  les  combat  avec  les  armes  que  l'on  peut  trouver. 
Ainsi,  par  exemple,  les  portes  des  loges  sont  de  véritables  portes  de 
prison  dissimulées  sous  des  ornements  trompeurs,  et  que  les  doigts 
les  plus  délicats,  je  l'ai  déjà  dit,  ouvrent  et  ferment  à  volonté 
et  sans  effort.  Ces  portes,  en  bois  de  chêne,  avec  coulisseaux  en' 
fer  pour  le  jeu  des  vasistas,  n'ont  pas  moins  de  3  centimètres 
d'épaisseur;  mais  ce  corps,  rendu  moins  xibrant  par  une  plus 
forte  épaisseur,  est  recouvert  en  partie  par  un  corps  absorbant,  ce 
que  nous  verrons  plus  bas.  Donc,  sur  ce  point,  par  cette  combi- 
naison, nous  évitons  tout  à  la  fois  l'effet  des  surfaces  réfléchissantes 
et  la  transmission  du  son  à  l'extérieur. 

Moins  le  son  se  répercutera  à  l'extérieur,  moins  seront  affaiblies 
dans  la  salle  la  puissance  de  la  voix,  celle  des  instruments,  et  peut- 
être  sera-ce  un  bon  moyen  pour  rendre  aux  basses  toute  leur 
valeur  :  on  sait  qu'elles  ne  l'ont  pas  dans  les  salles  construites  sur 
les  principes  que  nous  avons  combattus. 

Nous  n'avons  pas  tout  dit  à  l'égard  des  questions  d'acoustique, 
que  nous  quittons  en  ce  moment;  mais,  sans  briser  l'enchainemeiit 
de  nos  observations,  en  traitant  plusieurs  des  sujets  qui  suivent, 
qui  sont  aussi  de  premier  ordre  et  qui,  par  la  force  même  des 
choses,  s'entremêlent  à  cette  importante  question,  nous  y  serons 
successivement  ramené. 

Vues  sub  la  Décoration  de  la  Salle. 

La  décoration  d'une  salle  de  spectacle  doit  tenir  essentiellement 
du  genre  de  spectacle  pour  lequel  elle  est  faite  ;  elle  doit  dépendre 
des  mœurs,  des  habitudes  des  spectateurs.  Cette  décoration  doit  en- 
core dépendre  de  l'état  des  modes,  du  costume  de  la  société  pour 
laquelle  elle  est  faite. 

On  conçoit  parfaitement  que  la  salle  de  l'Opéra  de  Londres  ,  ou 
toutes  les  femmes  sansexception  assistent  au  spectacle,  parées  comme 
jiour  le  bal  ou  pour  des  grandes  soirées,  et  parées  comme  se  parent 
les  Anglaises,  autant  par  l'éclat  de  leurs  cols  de  cygne  sans  voile  pu- 
dique, que  par  les  plumes,  lesfleursetles  plus  riches  bijoux  ,  puisse, 
aprèscette  brillantedécoration,  la  plus  séduisante  sanscontredit ,  se 
passer  de  moulures,  de  reliefs,  de  savantes  peintures,  et  que  le  public 
de  ce  monde-là,  après  le  rafraîchissement  annuel  des  parois  de  la  salle 
par  la  voie  d'une  détrempe  uniforme,  n'ait  plus  à  demander  à  l'en- 
treprise théâtrale  que  son  brillant  mais  très-incommode  éclairage. 

A  l'Opéra  de  Paris,  malgré  les  progrès  d'un  luxe  que  les  censeurs 
trouvent  immodéré,  et  malgré  les  ingénieux  artifices  de  la  toilette 


des  femmes  du  monde  élégant  ,  l'ensemble  de  la  salle  ne  peut  pas 
briller  complètement  par  les  mêmes  raoyensqui  font  briller  la  salle 
de  Londres. 

Ce  qu'il  importe  encore  d'observer  pour  la  décoration  d'une 
salle  d'Opéra  à  Paris,  comme  pour  celle  sans  doute  de  tous  les 
pays,  il  ne  peut  y  avoir  d'exception  à  cet  égard ,  c'est  un  parti  d'or- 
nementation qui  n'efface  pas  trop  les  femmes  qui  sont  jalouses  de 
l'effet  qu'elles  tendent  à  produire,  et  qui  n'efface  ni  les  décorations, 
ni  les  costumes  de  la  scène,  pour  lesquels  les  eutrepreneui-s  font 
tant  de  sacrifices. 

Et  cependant,  il  faut  que  tout  l'ensemble  de  cette  salle,  en  même 
temps  qu'il  offre  à  la  vue  un  sage  repos,  soit  noble  et  plein  d'éclat. 
A  chaque  pas,  avec  de  telles  conditions  qui  constituent  presque  des 
contradictions,  il  y  a  des  périls  imminents  pour  le  décorateur  de 
la  salle.  Il  ne  peut  les  détourner  que  par  une  habile  distribution  de 
tous  ses  moyens  de  décoration,  parmi  lesquels  il  doit  comprendre 
les  femmes  qui  vivifleront  ses  étagères. 

Il  faut,  ce  qu'on  n'a  pas  obtenu  jusqu'à  ce  jour,  moins  par  la  dif- 
ficulté de  le  faire  que  par  l'absence  d'un  bon  calcul,  il  faut  que  la 
salle  décorée,  quelle  que  soit  sa  décoration,  soit  longtemps  somp- 
tueuse et  ne  soit  pas  seulement  propre  pendant  un  an,  et  puis 
malpropre,  enfumée  jusqu'à  la  prochaine  restauration  qui  vient 
dévorer  un  capital  qu'on  eut  mieux  employé  eu  donnant  plus  de 
solidité  aux  éléments  de  la  première  décoration. 

Nous  avons  dit  que  l'éclairage  de  la  salle  se  rattachait  a  son 
système  de  décoration,  nous  ne  nous  éloignerons  donc  pas  trop  de 
notre  sujet,  vers  le(|uel  nous  re\iendrons  plus  tard,  en  passant  des 
n  présent  à  la  question  générale  de  l'éclairage. 

{La  tuile  prochainement.) 

Hippolyte  MEVNADIER. 


IXE  DKCOIVERTE  IHI'0RT\!VTE 

POUH    L'ASSAINISSEMENT    DES    VILLES. 

Il  existe  à  Paris,  comme  dans  presque  toutes  les  grandes  villes, 
un  nombre  considérable  de  foyers  d'infection  produits  par  la  fer- 
mentation putride  des  urines  répandues  sur  le  sol  ou  vei-sées  dans 
des  tinettes  mises  à  la  disposition  du  public. 

Les  rues  de  Paris  ayant  un  développement  de  7  20  kilomètres 
(180  lieues),  on  peut  calculer  qu'il  existe  dans  nos  rues  plus  de 


513 


RKVLE  DK  L'ARCHIÏKCTURK  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


5H 


30  000  de  ces  foyers  d'infection,  en  les  supposant  distribués  à  20 
mètres  de  distance  l'un  de  l'autre,  ce  qui  est  au-dessousde  la  vérité. 
Il  serait  donc  d'une  grande  importance  pour  la  salubrité  publi- 
que, de  prévenir,  par  un  procédé  économique,  la  décomposition 
des  substances  que  renferme  ce  liquide,  et  d'empècber  ainsi  les 
odeurs  nauséabondes  et  insalubres  qu'il  dégage  de  se  répandre 
dans  l'atmosphère. 

Ce  problème  vient  d'être  résolu  par  un  moyen  aussi  simple  qu'é- 
conomique. 11  suffiten  effet  de  mettre  le  liquide  en  contact  avec  du 
goudron  de  houille,  pour  le  préser\er  de  la  fermentation  ammo- 
niacale, et  lui  conserver  toute  son  acidité. 

Un  kilogramme  de  ce  goudron  suffit  pour  empêcher  la  fermenta- 
tion de  ce  liquide  dans  un  vase  d'une  capacité  de  100  litres.  Ce 
même  goudron,  conservant  son  efficacité  pendant  plusieurs  mois, 
et  ne  valant  que  8  francs  les  1000  kilogrammes,  il  s'ensuit  qu'on 
peut  désinfecter  1000  tinettes,  contenant  chacime  100  litres,  ou 
100  000  litres,  avec  une  dépense  de  moins  de  8  francs. 

Or,  sur  un  million  d'habitants  que  renferme  Paris,  on  peut 
compter  que  300  000  personnes  répandent  dans  les  rues,  pendant 
12  heures  sur  24,  300  000  litres  de  ce  liquide;  la  dépense  pour 
nous  préserver  de  ces  émanations  putrides  serait  donc  insigni- 
fiante, quanta  la  matière  désinfectante. 

Il  reste  à  calculer  si  les  appareils  ad  hoc  qu'il  faudrait  placer  çà 
et  là  dans  nos  rues,  pour  que  les  urines  fussent  mises  en  contact  di- 
rect avec  le  goudron,  constitueraient  une  dépense  exorbitante  qui, 
au  point  de  vue  économique,  pourrait  en  quelque  sorte  empêcher 
la  mise  en  pratique  de  cette  utile  découverte. 

Avant  de  répondre  à  cette  question,  il  est  bon  de  savoir  si  les 
matières  contenues  dans  ce  liquide  peuvent  être  utilisées. 
Il  sert  à  différents  usages  : 

1°  Employé  dans  les  arts,  on  profite  des  réactions  alcalines  qui 
s'y  développent  pour  le  dessuinlaye  des  laines,  la  teinture  en  cou- 
leurs rouges,  dans  la  draperie. 

2°  Employé  dans  l'agriculture,  il  constitue  l'un  des  plus  puis- 
sants engrais  que  l'on  connaisse.  Berzelius,  Payen,  ont  démontré 
qu'il  contient  une  proportion  plus  considérable  de  matière 
organique  azotée  que  le  guano,  que  l'on  va  chercher  si  loin. 
M.  Schattenmann  (Académie  des  sciences,  13  novembre  1843)  a 
prouvé  que  des  dissolutions  de  sels  ammoniacaux  (hydrochlorate, 
phosphate  ou  sulfate)  activent  beaucoup  la  végétation  et  donnent 
des  résultats  très-avantageux  sur  les  prairies,  les  orges,  les  avoi- 
nes, etc.  On  se  sert  aussi  en  agriculture  des  urates,  c'est-à-dire  d'un 
mélange  d'urine  et  de  plâtre. 

On  voit  de  quelle  utilité  peut  être  ce  liquide.  Aujourd'hui,  les 
fabricants  qui  en  font  usage  le  recueillent  dans  les  casernes  ou  au- 
tour de  quelques  monuments  publics  ;  ils  fournissent  des  tinettes 
et  des  futailles  pour  le  contenir.  Mais  l'accumulation  de  ces  liquides 
en  putréfaction  présente  deux  graves  inconvénients.  L'un  est  l'é- 
manation insalubre;  le  second,  la  perte  des  sels  ammoniacaux  vo- 
latilisés pendant  leur  dépôt  dans  les  tinettes. 

L'emploi  du  goudron  de  houille  obvie  à  ces  deux  inconvénients. 
Reste  à  chercher  un  moyen  pour  concentrer  sous  un  petit  volume, 
soit  par  l'élévation  artificielle  de  la  température,  soit  par  une  ven- 
tilation convenable,  toute  la  force  des  substances  salines  que  l'u- 
rine contient  (lOO  grammes  par  litre).  On  pourrait,  pour  attein- 
dre ce  but,  combiner  une  sorte  de  grand  réservoir  peu  profond,  et 
dans  lequel  une  ventilation  active  serait  organisée.  Nous  laissons  à 
messieurs  les  architectes  le  soin  de  résoudre  ce  problème. 


La  ville  de  Paris,  qui  se  fait  déjà  une  rente  considérable  par  la 
vente  des  matières  de  Montfaucon,  des  boues  et  de  tous  les  détritns 
quiserecueillentdans  les  rues, pourrait,  en  exploitant  cette  noavfife 
industrie, s'assurer  de  nouveaux  revenus.  On  sait  que  lesselsammo- 
iiiacaux  tirésde  l'urine  pure  sont  de  beaucoup  plus  riches  en  azote  que 
les  sels  ammoniacaux  ordinaires  que  livre  le  commerce,  et  qui  sont 
extraits  de  plusieurs  substances  ou  des  eaux  vannes  de  Montfau- 
con (l).  Ces  derniers  sels  se  vendent  auprix  defio  centimes  le  kilo- 
gramme. Employés  pour  fumer  des  terres,  2  kilogrammes  sont  né- 
cessaires pour  saturer  à  un  degré  cent  litres  d'eau  (aérometre  de 
Baume).  Cette  quantité  peut  fertiliser  âO  mètres  carrés  de  terrain. 
Or,  à  prix  égal  et  sans  compter  la  plus  grande  action  fertilisante 
des  sels  ammoniacaux  tirés  directement  des  urines,  on  trouve  que 
les  300  000  litres  de  ce  liquide  (pie  Ion  pourrait  réunir,  produiraient 
3000  kilogrammes  de  sel  ammoniacal  par  jour,  ou  une  valeur  de 
plus  de  coo  000  fr.  par  an.  Et  comme  nous  proposonsà  la  ville  Vfx- 
ploitation  de  ce  nouveau  produit,  il  est  hors  de  doute  que  les  frais 
d'établissement  de  cette  industrie,  fussent-ils  même  frcf^onsidé- 
rables,  seraient  couverts  au  bout  de  quelques  années. 

Mais,  sans  nous  arrêter  à  ces  considérations  économiques,  il  est 
évident  que  la  ville  devrait,  dans  l'intérêt  de  la  salubrité  publique, 
adopter  et  faire  adopter  ce  moyen  préservatif,  lors-même  que  ce 
liquide  ne  serait  pas  utilisé,  et  qu'après  avoir  stationné  sur  le  gou- 
dron de  houille  il  irait  se  déverser  dans  les  égouts. 

Ainsi  une  ordonnance  de  police  municipale  suffirait  pourqu'il  fut 
placé  dans  les  établissements  publics,  près  des  monuments,  dans 
les  vespasiennes,  dans  les  prisons,  dans  les  écoles,  les  salles 
d'asiles,  etc.,  etc.,  des  tinettes  renfermant  du  goudron  de  houille. 
Les  marchands  de  vin,  les  traiteurs,  etc.,  devraient  également  être 
tenus  d'en  avoir.  Enfin  la  ville  ferait  les  frais  d'établissements  des 
appareils  à  goudron,  et  par  cette  réforme  elle  serait  conduite  a 
mieux  distribuer  et  à  mieux  protéger  les  constructions  utiles  dont 
nous  parlons.  La  moralité,  aussi  bien  que  la  santé  publique,  n'au- 
rait qu'à  y  gagner. 

M.  le  préfet  de  police  vient  de  faire  afficher  un  avis  par  lequel  il 
invite  les  habitants  de  la  capitale  à  se  montrer  plus  soucieux  ,  à 
l'avenir,  de  la  propreté  de  leurs  rues  et  des  monuments  publics,  en 
utilisant  k's  vespasiennes  (\ue  l'administration  municipale  a  fait  con- 
struire sur  les  boulevards  et  sur  les  quais.  Les  personnes  qui  conlre- 
viendraient  à  cet  avis  seront  passibles  de  peines  (î). 

Pour  notre  part,  nous  félicitons  M.  le  préfet  d'avoir  pris  cette 
détermination,  et  nous  croyons  qu'elle  aura  l'assentiment  gênerai. 

Mais  combien  cette  mesure  n'acquerrait-elle  pas  de  force  et  de 
puissance  sur  l'opinion  publique,  cette  grande  souveraine  des 
mœurs  et  des  usages,  pour  contraindre  les  récalcitrants  a  se  confor- 
mer à  cette  utile  loi  municipale,  si  rétablissement  des  nouveaux 
appareils  dont  nous  parlons  préservait  tout  le  monde  des  funestes 
émanations  qui  se  dégagent  à  chaque  pas  dans  nos  rues  ! 

Le  public  se  ferait  alors  son  propre  gardien  ;  personne  n'oserait 
enfreindre  le  nouvel  arrêté  dès  qu'il  aurait  été  imposé  dans  un  double 
intérêt  de  convenance  et  de  salubrité  publiques. 

La  découverte  du  procédé  désinfectant  dont  nous  venons  de  faire 
lutrevoir  l'importance  sous  le  triple  rapport  de  la  salubhté  publique. 


(t)  Les  sels  aminoiiiacaux  artiBcieb  n'alMuiionncnt  que  l'aiole  qalls  nmftr- 
nirni,  tandis  que  l'urine  conlieni,  en  ouU«  des  Mb  MiaNBiiCMX,  m 
lion  consiil<'rable  ilurtSe  qui  est  elle  m<aw  trts-riclw  ea  atote. 

(S)   Voir  plus  IoId  notre  Camxiovi. 

T.    V.  M 


51 J 


REVUK  DE  L  ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX   PUBLICS. 


ÔK, 


des  arts  manufacturiers  et  de  l'agriculture,  est  due  ft  M.  le  docteur 
Heury  Bavard,  connu  par  ses  travaux  sur  l'Iiygiene  publique,  et 
surtoutpar  ses  publications  sur  la  topographie  wédicaleûe  plusieurs 
quartiers  de  Paris  (l). 

Nous  avons  vu  et  répété  les  expériences  de  M.  Bajard,  et  la 
simplicité  de  son  procédé  pour  arrêter  la  putréfaction  des  urines 
permet  à  tout  le  monde  d'en  ccnstater  comme  nous  les  heureux 
résultats. 

PERREYMOND. 


BIBI.IOGRAPHIE. 

CONSTBUCTIONS    RuBALES. 

Nous  avons  souvent  regretté  qu'on  se  fut  si  peu  occupé  de 
l'étude  de  l'architecture  rurale;  la  moindre  amélioration  dans 
cette  spécialité  s'adresse  immédiatement  à  des  millions  d'individus 
et  produit  une  somme  de  bien-être  immense.  Certes,  il  revient 
d'ordinaire  moins  de  gloire  à  qui  s'occupe  de  la  construction  éco- 
nomique et  saine  d'un  logement  de  métayer,  de  la  bonne  distribu- 
tion et  arrangement  des  bâtiments  d'une  ferme,  qu'à  l'auteur  d'un 
grand  monument  public;  mais  cependant  celui  qui  se  consacre  à 
l'étude  de  ces  modestes  constructions,  en  vue  de  les  perfectionner, 
fait  une  œuvre  digne  et  bien  louable.  On  ne  saurait  trop  recom- 
mander à  la  gratitude  publique  des  hommes  comme  Franklin, 
Parraeutier,  Cadet  de  Vaux,  Loudon,  etc.,  etc. 

On  nous  assure  que  les  campagnards  du  Midi  doivent  beaucoup 
aux  efforts  de  M.  le  marquisde  Saint-Félix  de  Mauremont,  ancien 
préfet  du  Lot  et  ancien  députe.  M.  de  .Mauremont  est  l'auteur 
d'un  traité  d'architecture  rurale,  et  il  est  déjà  parvenu,  dit-on,  à 
introduire  d'importantes  améliorations  dans  la  manière  de  bâtir 
en  usage  chez  les  paysans  et  les  fermiers  des  environs  de  Ville- 
franche  (département  de  la  Haute-Garonne). 

M.  le  marquis  de  Saint-Félix  de  Mauremont  n'est  pas  un  simple 
amateur;  il  parait  avoir  fait  ses  études  d'architecte  d'une  manière 
régulière,  et  quoique  entraîné  plus  tard  dans  la  sphère  politique  et 
"littéraire,  l'amour  de  notre  bel  art  ne  l'a  jamais  abandonné,  et  au- 
jourd'hui nous  recevons  d'un  savant  antiquaire,  M.  du  Mège,  que 
chacun  connait  et  apprécie,  quelques  lignes  sur  une  nouvelle  pu- 
blication de  M.  le  marquisde  Saint-Félix  de  Mauremont.  Nous  ne 
connaissons  pas  ce  nouvel  ouvrage,  mais  nous  nous  rapportons 
avec  confiance  à  l'appréciation  éclairée  de  M.  du  Mège. 

Traité  historique  et  descriptif,  critique  et  raisonne  dks  ordres  D'AR- 
CHITECTUKE,  avec  un  nouveau  système  simplifié,  accessible  à  toute 
nature  de  matériaux,  et  suivi  de  leurs  divers  accessoires;  ouvrage 
servant  d'introduction  développée  a  l'architectire  rirale.  accom- 
pagné d'lne  biographie  des  architectes  et  d'ln-  vocabulaire  lm- 
VERSEL,  avec.  32  planches.  Par  A.  J.  M.  de  Saint-Félix  ,  marquis 
DE  Mauremont  ,  comte  de  Cajarc  ,  membre  de  plusieurs  sociétés  sa- 
vantes, chevalier  de  l'ordre  souverain  de  Saint- Jean  de  Jérusalem, 
de  l'ordre  royal  de  la  Légion  d'honneur,  eic.  (2). 

L'architecliire  n'est  p.is  seulement  un  art,  comme  le  pensent  quel - 
•lues  l.ouimes  du  monde;  c'est  aussi  une  science  qui  est  basée  sur  plu- 


(1)  Voir  le  âc  volume  de  la  Revue,  col.  33. 

(2)  Ouvrage  iii-4";  se  vend  à  Toulouse,  chez  Doutadoure,  imprimeur-libraire, 


sieurs  niiircs,  qui  s'eiiricliil  de  leurs  dofoiiveries,  cl  ijiii  jijouio  purs,- 
.sainniciil  an  buiiliciir  des  peuples  ,  ainsi  qu'à  leur  |:li)iiu.  S()n> 
Louië  XIV,  un  pocie  pouvaii  bien  chercher  à  en  rabaisser  un  autre  en 
lui  donnant  répilhèle  de  maçon;  mais  Maiisard  cl  l'enault,  en  France, 
.'ijonlalcnlauv  illuslralioiis  du  granil  siècle,  laiulisque,  arcliilecle  aussi, 
Vauban  élevait  les  buiilovnnis  qui  devaient  arrêter  les  efforls  des  enne- 
mis de  la  patrie.  Si,  à  l'époque  où  nous  vivons,  l'arcliiieciure  ne  multi- 
plie pas  ses  chefs-d'œuvre,  si  les  genres  soni  confondus,  i\  l'on  donne 
à  lin  temple  grec  le  nom  d'église,  si  l'on  substitue  des  formes  lournun 
tées  on  des  lignes  peu  liannonicuscs  aux  adorables  caprices  de  la  Re- 
naissance, aux  exemples  donnés  par  Palladio,  il  est  des  esprits  supé- 
rieurs qui  veillent  r.uiiener  aux  vrais  principes,-  en  ponant  les  liiinièreii 
dans  le  chaos  des  idées,  en  fixant  pourclmquc  genre  de  consiructioii 
le  style  qu'il  faut  suivre,  les  maximes  qu'il  ne  faut  jamais  abandonner. 
Parmi  ces  hommes  recoinmandables,  il  faut  siirloni  distinguer  M.  de 
Saint-Félix  Maiireinoni,  auieiir  de  l'Arcuitecture  bubale  théorique  et 
pratique,  ouvrage  dont  les  éditions  se  sont  multipliées,  et  qui  méritait 
bien  le  succès  qu'il  a  obtenu.  Maintenant,  dans  l'ouvrage  que  nous  an- 
nonçons, M.  de  Sailli-Félix  donne  un  iraiié  complet  des  ordres  d'archi- 
tecture, «l  ce  traité  est  destiné  ï  servir  d'introduction  à  son  Archilec- 
lure  rurale.  Dans  sa  prt'face  ainsi  que  dans  le  chapitre  premier  de  son 
nouvel  ouvrage,  l'auteur  examine  rnpidemenl  les  nonvraux  genres  ad- 
optés, et  faii  ainsi  une  histoire  abrégée  de  l'art.  Invinciblement  attaché 
par  ses  études  à  rarchiteetnre  grecque,  il  ne  considère  celles  des  autres 
peuples,  et  siii  tout  des  modernes,  que  comme  une  dégénérescence , 
une  sorte  de  dégradation;  mais  en  cela  il  nous  permettra  de  ne  pas  être 
de  son  avis;  les  Grecs  oui  emprunté  aux  Égyptiens  une  partie,  si  ce  n'est 
tout  leur  système  de  construction.  Ils  ont  amoindri  les  masses,  donne 
plus  de  légèreté,  plus  d'élégan.ce  aux  formes.  Ils  ont  perfectionné  l'art; 
ils  l'ont  surtout  assoupli,  si  l'on  peut  s'exprimer  ainsi,  à  leurs  croyan- 
ces, à  leurs  besoins,  à  leurs  haliiiudcs. 

Les  Romains  ne  firent  qu'imiter  ou  copier  les  Grecs;  mais  de  nou- 
velles nécessités  naquirent  avec  une  religion  nouvelle  adoptée  par  des 
peuples  jusqu'alors  inconnus.  Les  temples  du  polythéisme  ne  purent 
suflire  au  culte  chrétien.  Tout  le  peuple  devant  participer  aux  mystères, 
mêler  sa  voix  à  la  voix  des  piètres  chantant  les  hymnes  sacrés,  et  en- 
tendre les  instructions  données  par  les  ministres  de  sa  religion,  il  fal- 
lut des  édifices  appropriés  à  ces  nécessités.  Dès  lors  l'architcclure 
romane  fut  créée.  Ellq  emprunta  bientôt  à  l'Orient,  à  Ityzance,  la  ri- 
chesse des  décorations  intérieures,  et  pendant  plusieurs  siècles  ce 
genre  fut  le  seul  en  honneur  dans  la  clirélicnté.  Mais  rarchileciure  fit 
au  XIV«  siècle  des  progrès  Immenses.  Alors  la  science  éleva  ces  voUies 
si  hardies  et  si  solides  à  la  fois  que  nous  admirons  encore.  La  sculp- 
ture d'omeincnlaiion,  qui  avaii  abandonné  les  gracieux  contours  des 
chapiteaux  corinililciis,  et  qui  ne  ciselait  plus  les  élégants  rinceaux  de 
l'acanie,  abandonna  aussi  les  chapiteaux  romans,  devenus,  par  les 
histoires  que  l'on  y  représentait,  des  pages  détachées  des  livres  saints. 
La  sculpture  seconda  les  efforts  de  rarchileciure  sa  soeur,  et  l'on  a 
douté  pendant  quelque  temps  que  le  ciseau  ait  pu  façonner  en  feuilles 
si  légèrement  découpées,  ces  dais,  ces  pyranildions  qui  coiironueni 
avec  tant  de  légèreté,  avec  tant  de  charme,  les  h.irdie$  constructions 
du  XV'  siècle.  Ce  n'était  point  assurément  une  dégénérescence:  c'était 
le  progrès  le  plus  marqué,  c'était  pent-élrc  ce  que  l'art  pouvait  créer 
de  plus  grand,  de  plus  majestueux,  de  plus  surprenant  à  la  fois. 

Après  cet  elTort,  l'art  chrétien  devait  ou  demeurer  stalionnaire,  ou 
rétrograder  vers  les  temps  antiques.  Il  y  eut  nue  époque  de  tran.<iition, 
ce  fut  celle  de  la  Renaissance.  .\près  elle  on  renonça  à  toute  création,  on 
redevint  Grec  ou  Romainjctc'est  ce  que  beaucoup  de  personnes  croient 
être  aujourd'hui  le  seul  moyen  d'atteindre  le  beau,  de  lutter  avec  les 


rue  Sainl-Iiomc,  41  ;  à  Paris,  chez  Pierre  Bertraivl,  rue  Saiiit-.\ii<lré-des-Arls, 
38,  ei  chez  Audrel,  rue  du  Paaii,  8. 


517 


UEVUE  DK  LARCHITKCTl  KE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


5f8 


plus  grnii  lis  génies  des  (emps  passés;  nous  croyons  <|uc  cetifi  pensée  est 
une  erreur.  Clia(|ue  édifice  doil,  par  son  style,  indiquer  sa  dcsiinaiion. 
Dans  rilcllénie,  dans  tout  le  inonde  romain,  cm  reconnaissail  un  lempic 
à  sa  l'orme,  loiijoms  à  peu  |)rès  la  nième.  On  ne  se  Ironipail  point  sur 
la  dcsiinaiion  d'un  tel  édifice.  .Mais  olcz  à  la  Madeleine  son  l'ronton  et 
ses  statues,  opère/,  de  inênic  à  Notre-Dame  de  Lorciie,  et  cotiinie  ces 
l'rontons,  ces  colonnes,  ces  l'ormes,  ont  été  donnés  par  nous  ii  des  bàii- 
nients  avant  une  loul  antre  destination,  itersonnc  ne  reconnaitra  dans 
ces  deu.x  constructions  ce  que  nous  nommons  des  églises.  Avouons  ce- 
pendant qu'il  est  sans  doute  des  édifices  où  les  formes  grecques  peuvent 
être  adoptées  avec  avantage.   Une  imilation  d'un  tein[de  de  l'œslinn 
pourra  fort  bien  devenir,  dans  nos  villes,  une  halle  ou  un  marché  cou- 
vert. Tous  les  édifices  ruraux,  à  l'exception  peut-être  de  l'hahifation 
il'ini  grand  propiiétaire,  perivenl  affecter  ces  formes  élégantes  et  éco- 
noniiciucs  (|ue  l'art  inventa  dans  la  Grèce,  et  c'est  ce  que  ,M.  de  Sainl- 
Félix  propose.  En  substituant,  en  cllet,  ce  style  aux  formes  grossières 
de  nos  édifices  ruraux,  on  fera  ini  immense  progrès.  Il  m;  faudrait  pas 
cependant  charger  de  scnlptmes  délicates  ces  bâtiments  destinés  seule- 
ment à  des  usages  utiles,  et  à  ce  sujet,  on  doit  lire  et  V ÀrchileHure 
rurale  de  M.  de  Saint  Kélix  et  le  traité  que  nous  venons  d'annoncer. 
Lii  se  trouve  un  nouveau  sytème,  simplifié,  accessible  ii  tonte  nature  de 
matériaux,  et  suivi  de  leurs  divers  accessoiresi  C'est  ce  système  que 
nous  devons  examiner  dans  un  prochain  article,  et  qui,  nous  le  disons 
d'avance,  parait  remplir  tontes  les  conditions  exigées  pour  opérer  une 
heureuse  révolution  dans  nos  constructions  rurales.  Là  il  y  aurait  aussi 
un  progrès  réel,  et  tous  les  bons  esprits  applaudiront  aux  savants  ef- 
forts de  l'auteur  de  cet  excellent  livre. 

Le  Ch"  Alexandre  du  MÈGE  , 

Diri.'clciir  du  Jlusée  de  Toulouse. 


A  M.  César   Dalï,  directeur  de   la   Rnnt  de  FArrUteclure  ti   det 
Travaux  public». 

Ainsi  que  vous  m'en  avez  manifesté  le  désir,  j'ai  l'honneur,  iiiunMeur. 
de  vous  adresser  quelques  notes  sur  les  travaux  exécutes  ou  en  iraiii 
d'cxcciitinn  dans  nos  localités.  Si  je  ne  l'ai  pas  fait  plus  l6t,  veuillez 
en  accuser  le  nombre  de  mes  occupations  et  non  ma  bonne  volonté. 
D'après  un  relevé  fait  it  la  {tf-éfecturc  du  déparienieul  du  llaut- 
Rliin,  et  contenu  dans  le  rapport  du  préfet  au  conseil  géoëral,  il  j 
été  affecté  par  les  communes  ii  la  cous  ruclion  de  maisons  d'éculc!» . 
églises,  presbytères,  corps  de  garde,  ponts,  etc.,  du  1*^  janvier  IStVi 
au  I"  janvier  1844,  la  i-onimc  de  5,221,123  fr.  Scenl.,  pour  464  projets. 
Les  trois  arrondissements  formant  le  département  ont  contribué  daos 
celle  dépense  de  la   manière  suivante  : 

Arrondissement  de  Colinar  .  '-'.i02,G40fr.  74  cent. 

de  Relfort 1.153,370      •■ 

dAltkirtb l,CC.'>,li4      31 


CORRESPONDANCE. 

SoiMAiBii/  Nouveaux  parquets  fabriqués  à  Strasbourg.  — Travaux  réceimnenl  acbe- 
vés,  ou  en  tiain  d'e\éculionei  projelês  dans  le  déparleriieiil  du  llaul-Ithin  ;  ré- 
llexions  sur  l'art  moderne.  —Travaux  en  cours  d'exéculion  ,i  Dordeaux  ;  projet 
d'hôlcl  des  postes  dans  celle  ville;  travaux  qui  s'exécutent  dans  les  environs; 
ctaieau  de  Pau,  etc. 

A  M.  César  Daly,  directeur  de  la  Revue  générale  de  lÀrchilecture  et  des 

Travaux  publics. 

Monsieur, 

Permettez-moi  de  vous  recommander  une  industrie  nouvelle  de  notre 
vieille  cité  de  Strasbourg.  M.  Charles  Bluincr  est  parvenu,  par  des  pro- 
cédés particuliers,  à  vaincre  certaines  diflicnltés  dans  le  travail  du  bois, 
et  à  taire  des  parquets  ordinaires  el  à  dessins  mosaïques  à  la  fois  d'une 
grande  précision,  d'une  solidité  parfaite  el  d'une  extrêine  modicité  de 
prix.  Je  puis  en  toute  confiance  vous  le  recommander,  et  je  vous  serais 
bien  obligé  s'il  vous  était  possible  de  transnielire  ma  recommandation 
à  nos  confrères,  par  l'organe  de  voire  excellente  Revue. 

M.  Blnmervous  fait  remettre  deux  feudles  de  parquet  qu'il  vous  prie 
de  vouloir  bien  conserver  chez  vous,  alin  de  les  montrer  à  messieurs  les 
architectes  qui  seraient  désireux  de  les  voir;  il  y  joint  aussi  un  cahier 
de  planches  représentant  les  principaux  dessins  qu'il  exécute,  avec  les 
prix' du  mètre  carré  de  chacun  d'eux  pour  Strasbourg  et  pour  Paris. 

Veuillez,  agréez,  etc. 

J.  A.  WEYER, 
A  rchitecle. 


Somme  totale.  .  5.221,125  fr.  (M  ceni. 
Grâce  à  ces  travaux,  le  département  du  Haut-Rhin,  récemment  en- 
core l'un  des  plus  aiTiérés  quant  ;i  l'inslruction  primaire,  se  trouve 
maintenant  l'un  des  mieux  dotés  sous  ce  rap|Mjri.  Remarquons  en 
passant  que  c'est  à  partir  de  la  promulgation  de  la  loi  du  30  juin  1833 
sur  l'instrucilon  primaire  que  date  celle  impulsion. 

La  réaction  en  faveur  de  l'architecture  gothique,  unie  à  la  réaction 
religieuse,  a  sauvé  bien  des  monuments  d'une  ruine  certaine;  elle  a 
provoqué  en  France  la  construction  d'une  foule  d'églises  dans  le  style 
du  .Moyen-Age,  et  l'achèvement  d'un  grand  nombre  d'autre»  com- 
mencées dans  les  siècles  derniers,  et  dont  les  travaux  étaient  re<tés 
suspendus  pendant  nos  tourmentes  révolutionnaires. 

Le  Haut-Rhin  voit  actuellement  s'achever  la  nouvelle  église  d»- 
Guebwiller;  en  1844,  on  a  exécuté  un  étage  d'une  des  deux  tours  de 
la  façade  ;  le  style  du  monument  est  celui  de  l'époque  de  Louis  XV. 
Les  travaux  de  celte  tour  sont  évalués  à  la  somme  de  SO  i  60  mille 
francs. 

Relfort  verra  de  son  côté  la  deuxième  lourde  son  église  construite 
en  1843.  L'adjudication  des  travaux,  évalués  à  27  ou  28,000  francs. 
est  <léjà  faite.  Celle  église  est  d'un  style  plus  sévère  que  celle  de 
Guebwiller,  et  elle  porte  le  cachet  du  règne  de  Louis  XVI. 

Dans  la  partie  haute  du  département,  on  commence  plusieurs  églises. 
Altkirch  a  adjugé  les  travaux  de  la  sienne,  évalués  à  160,000  francs. 
et  en  a  conlié  la  direction  à  M.  Bolz,  architecte  à  Paris.  Elle  est  conçue 
dans  le  style  byzantin. 

Dannemarie  fait  reconstruire  le  vaisseau  ^e  son  r^usc  p.iiuî9.-uic 
el  conserve  la  tour.  Ce  travail,  adjugé  pour  environ  60,000  francs, 
est  dirigé  par  M.  Lejeiine,  architecte  du  département. 

Bavilliers  a  commencé  cet  automne  les  travaux  de  son  église,  éra- 
lués  à  70,000  fr.  C'est  à  M.  Poisal  qu'est  conlié  ce  travail,  qui  sera 
exécuté  dans  le  style  dit  XII*  siècle. 

Tels  sont,  monsieur,  les  principaux  travaux  qui  s'exécutent  dans  le 
département.  Bien  d'autres  encore  sont  en  projet,  et  parmi  cenx-ci. 
une  salle  de  spectacle  pour  Colmar,  trois  églises  pour  Uulbooie  ;  maà% 
les  fonds  manquenl  pour  le  moment. 

Après  avoir  clos  cette  sèche  énumération,  penneltez-moi  qnehpMS 
réilexions  sur  l'étal  d'isolement  et  d'anarchie  dans  leqad  firent  le» 
architectes,  et  par  suite  duquel  l'art  marche  an  hasatd  et  mrs  di- 
rection. Lors  de  la  discussion  de  la  loi  des  patentes,  le  ministre  pru- 
inil  de  s'occuper  de  l'organisation  en  corps  des  architectes.  CeUc 
promesse  serail-elle  oubliée? 

4ujourd'hui  chaque  artiste,  avec  les  élemenu  qu'il  a  acquis  el  les 
recherches  qu'il  peut  avoir  faites,  tente  un  effort  pour  se  dctorrasser 
des  langes  de  la  routine.  Le  slylc  de  l'empire  n'est  plus  guéie  repré- 
senté maintenant;  on  a  vu  lui  succéder  a  la 'fois  à  peu  près  lOM  le» 
j  styles  connus,  le  gothique,  les  fornics  de  la  Renaissance,  la  capricieasc 


519 


RKVUK  Di:  r;AI\CHITKCTLRK  KT  DKS  TRAVAUX  PLBI-ICS. 


520 


fantaisie  du  lemps  do  Louis  XV,  le  liyïanliii  même,  loulos  imltaiions 
plus  ou  moins  adroites,  mais  pas  un  slyle  oiij,'inal  et  qu'on  puisse 
appeler  national.  Chacun  de  son  côic  a  cherché,  mais  personne  n'a 
trouvé.  Celte  recherciie,  qui  ne  peut  guère  être  l'œuvre  d'un  seul  homme, 
ce  hut  que  chacun  individuellement  ne  peut  atteindre,  ne  pourrait-elle 
pas  être  l'œuvre  de  l'association  des  artistes  entre  eux?  Ces  grandes 
sociétés  de  Franr»-.Vafons,  qui,  à  une  époque  barharc,  portèrent  si 
haut  l'idéal  du  beau  dans  l'art  chrétien,  ne  pourraient-elles  pas  re- 
naître aujourd'hui  et  produire  les  mêmes  résultats?  L'Allemagne 
semhie  pouvoir  répondre  alTirmativement.  L'académie  de  Munich,  puis, 
samment  secondée  par  les  efforts  d'un  monarque  intelligent,  a  créé 
et  met  en  pratique  ce  qu'elle  appelle  le  slyle  nouveau  de  T Allemagne. 
Composé  d'éléments  divers  rattachés  entre  eux  avec  étude,  sinon  avec 
beaucoup  de  goût,  ce  slyle  a  l'inappréciable  avantage  de  se  prêter 
an  climat  et  à  la  nature  des  matériaux  du  pays.  Je  l'ai  vu  employé 
dans  le  grand-duché  de  Bade,  aux  bâtiments  du  chemin  de  fer  de 
la  rive  droite  du  Itliin.  A  Carlsruhe,  l'école  polytechnique,  l'académie 
et  plusieurs  autres  élahlissemenis  piddics  sont  conçus  dans  ce  style. 
On  y  voit  encore  une  caserne  qui  peut  donner  une  idée  de  l'effet  qui 
peut  résulter  de  son  emploi,  même  dans  des  conditions  très-écono- 
miques. Tout  dans  ce  pays  rappelle  ce  siyle  adopté;  les  particuliers, 
les  ingénieurs  des  travaux  publics,  le  génie  militaire,  en  impriment 
le  cachet  à  leurs  travaux.  On  n'y  retrouve  plus  ces  loilrds  détails 
affectionnés  par  le  génie  militaire  français.  C'est  cho.se  en  rffit  digne 
de  emarque,  qu'en  France,  dans  ce  pays  qui  a  la  prétention,  jus- 
tifiée du  reste,  d'être  le  premier  dans  les  arts,  les  diverses  adminis- 
trations, qui  tomes  sont  des  branches  de  l'État,  st'inblenl  prendre  à 
tâche  de  d(!menlir  cette  renonimée.  Nous  accordons  suis  restriction 
nos  éloges  au  génie  civil  et  au  génie  militaire  français  pour  leurs 
lonnaissancos  dans  les  parties  théoriques  et  pratiques  des  conslruc- 
lions,  mais  nous  ne  saurions  leur  reconnaître  un  mérite  égal  dans 
les  parties  purement  artistiques. 

Telles  sont,  monsieur,  les  réflexions  que  j'ai  cru  devoir  vous  sou' 
mettre  à  vous,  le  directeur  d'une  Uevne  qui  est  et  tloit  cire  un  lien 
entre  les  divers  membres  de  notre  grande  et  noble  famille.  Qu'il  mon 
exemple,  chacun  de  nos  confrères  en  fasse  autant,  et  nous  verrons 
bientôt,  grâce  à  celte  œuvre  d'association,  l'art  sortir  de  l'anarchie  où 
il  est  tombé  aujourd'hui. 

Veuiller,  agréer,  etc.. 

X. 
Archilecle. 

.\  M.  César  Daly,  directeur  de  la  Revue  de  l'Architecture  et  des 
Travaux  publiet. 

Monsieur, 

.\  votre  passage  à  Bordeaux,  vous  avez  bien  voulu  me  demander 
de  vous  donner  de  temps  en  temps  quelques  nouvelles  sur  les  con- 
slruîtious  exécutées  ou  projetées  à  Bordeaux  et  dans  ses  environs; 
je  viendrais  aujourd'hui  vous  en  entretenir,  si  vous-même  n'aviez  pas 
visité  récemment  noire  ville,  et  si,  par  conséquent,  vous  n'étiez  pas 
au  courant  presque  aussi  bien  que  moi. 

Je  ine  contenterai  de  vous  apprendre  que  les  travaux  de  notre  Pa- 
lais-dc- Justice,  que  vous  avez  visité  .nvec  intérêt  en  compagnie  de 
M.  Thiac,  archilecle  chargé  de  son  édification,  ont  été  interrompus 
depuis  quelque  temps  par  suite  de  mésaccord  entre  M.  le  ministre  de 
l'intérieur  ei  le  conseil  général  du  département,  qui  demandait  que 
l'État  prit,  dans  l'exécution  de  cet  important  monument,  une  part  plus 
considérable  que  celle  dont  il  s'était  chargé  d'abord.  M.  Achille  Le- 
clère,  archilecle,  inspccieur  général  des  bâtiments  civils,  est  venu  à 
Bordeaux  pour  régler  celle  affaire,  et  l'on  a  tout  lieu  d'espérer  que  les 
travaux  reprendront  avec  daulanl  plus  d'activité  la  campagne  pro- 
chaine, que  cette  année  ils  ont  marché  avec  assez  de  lenteur. 


Le  Casino,  bâtiment  «lesliné  à  donner  des  conceris,  et  que  vient  de 
l'aire  élever  un  négociant  de  notre  ville  sur  les  plans  de  M.  Burgiiel,  doit, 
dit-on,  être  bientôt  livré  au  public,  et  la  société  philharmonique  se 
propose  d'y  donner  ime  de  ses  fêles  dans  quelque  temps. 

Des  travaux  de  consolidation  et  d'appropriatiun  à  i'Ilôtel  de  la  Bourse 
ont  été  exécutés  cette  année  sous  ma  direction  comme  architecte  de 
cet  établissement,  et  seront  continués   la  campagne  prochaine. 

Bordeaux  doit  également  à  la  présence  de  M.  Achille  Leclère  dans 
ses  murs,  le  commencement  des  travaux  de  réparation  de  notre  ra- 
ihédrale,  que  certaines  parties  réclamaient  avec  urgence.  M  Miailhe, 
architecte  chargé  de  la  direction  de  ces  travaux,  vient  dé  faire  établir 
les  échafaudages  nécessaires  à  la  restauralion  de  la  grande  rose  an- 
dessus  du  portail  principal.  Les  constructions  particulières  ont  été  assez 
nombreuses  cette  année,  surtout  dans  l'hémicycle  des  quinconces,  que 
tout  le  monde  voudrait  voit-  achevé. 

Quant  aux  travaux  projetés,  on  parle  depuis  longtemps  d'une  re- 
construction de  VHôlel  des  Postes.  Vous  connaissez  la  situation  de 
cet  hôtel  dans  nue  rue  lrés-fié<pienlée,  mais  peu  large  et  d'un  abord 
assez  dillicile  pour  des  voitures  conmie  les  malles.  Il  est  à  désirer  que 
les,  améliorations  devenues  indispens:ibles  s'exécutent  proniplemenl, 
mais  il  est  vivement  à  regretter  que,  dans  une  ville  offrant  un  aussi 
grand  nombre  de  voies  larges  et  d'un  accès  des  plus  faciles,  l'iniérét 
privé  soit  parvenu  à  faire  maintenir  l'hôtel  des  Postes  dans  la  rue 
Porle-Uijeaux.  Il  devait  sembler  au  contraire  qu'on  se  serait  empressé 
de  profiter  de  la  nécessité  où  se  trouvait  l'administration  des  postes  de 
faire  de  grandes  réparaliims  à  son  hôtel,  pour  établir  cet  hôtel  ailleurs, 
dans  un  quartier  tout  .iiissi  central,  et  où  la  .>>é<'urite  des  piétons  n'aurait 
pas  été  constamment  compromise  par  le  passage  des  malles-postes. 

Le  public  s'occupe  toujours  beaucoup  du  chemin  de  fer  de  Paris  à 
Bordeaux,  voté  par  les  chambres,  et  de  celui,  presque  autant  désiré, 
lie  Biirdeaux  à  Bayonne;  mais  les  travaux  de  Bordeaux  à  Angouicme 
ne  sont  pas  encore  commencés.  On  nous  fait  espérer  cependant  qu'au 
printemps  on  se  inetira  ,i  l'œuvre. 

Ayant  épuisé,  je  crois,  tout  ce  que  j'avais  à  vous  dire  sur  liordeaui, 
je  prends  la  liberté  de  vous  envoyer  ci-joint  un  article  de  ma  fofon, 
sur  un  nouvel  établissement  thermal  construit  depuis  quelques  an- 
nées à  Cautercts  (llantes-I'yrénées),  et  que  l'on  a  livré  au  public  cet 
éin,  bien  que  les  charpentes,  qui  ont  servi  à  construire  les  voûtes, 
n'aient  pas  encore  été  enlevées.  J'y  joins  un  petit  croquis  donnant 
le  plan,  l'élévation  principale  cl  la  coupe  longiludinale  de  ce  bàiiment, 
pour  l'intelligence  de  ma  description  (\). 

Je  suis  allé  à  Cauterets  nu  mois  d'août,  par  raison  de  santé,  et  c'est 
alors  que  j'ai  étudié  l'édifice  dont  je  vous  parle  et  rédigé  les  notes 
que  je  veus  envoie. 

Dans  ce  petit  \oyage,  j'ai  vu  peu  d  objeis  inicrcssant  notre  art; 
cependant,  je  vous  avouerai  que  j'ai  eu  le  regret  de  voir,  à  Tarbes, 
abîmer  l'inléressanle  église  cathédrale,  par  des  peintures  de  toute  forme 
et  de  toute  couleur  qui  faisaient  le  plus  fâcheux  contraste  avec  son 
architecture   du  Xll*  et  du  XIII'  siècle. 

A  Pau,  les  travaux  du  château  de  Henri  IV  avancent  lenienient. 
On  posait  au  moin  d'août  la  galerie  de  la  grande  terrasse  sur  le  Gave, 
cl  l'on  s'occupait  de  réparer  l'aile  du  nord.  Il  est  à  regretter  que 
celte  restauration,  faite  avec  intelligence,  ne  puisse  cire  poussée  avec 
plus  d'aciivilé.  Néanmoins,  les  habitants  de  Pau  doivent  tous  les  jours 
se  féliciter  de  voir  l.i  liste  civile  réparer  et  dégager  ce  château  à 
la  fois  si  pittoresque  et  si  riche  en  soiivcitirs.  Si  la  position  de  Pau  est 
une  des  plus  agréables  de  la  France,  si  son  séjour  offre  Uint  de  charmes 
aux  étrangers,  le  château  et  son  parc  peuvent  revendiquer  une  bonne 
part  de  ces  avantages,  et  l'on  doit  être  reconnaissant  envers  le  roi 
Louis-Philippe  de  n'avoir  pas  oublié  qu'il  exislail  à  Tune  des  exlré- 

(1)  Nous  réservons  celle  comniunication  de  notre  correspondant  pour  un 
autre  nionieut.  (A',  du  O.) 


j21 


REVUK  DE  L'ARCHITFXTURK  ET  DES  TRAVAUX  PLBIJCS. 


522 


mités  (lu  royaume  une  hnltiiailuii  royale  digne  de   tout  son  intétél, 
(le  loiile  sa  prédilection   pour  nos  châteaux  historiques. 

Mais,  si  le  château  de  Henri  IV  iiKirite  à  tant  de  litres  de  fixer  l'at- 
tention des  voyageurs,  on  peut  dire  que  mallieurenseincnt  II  est  le  seul 
(idifice  que  Pan  rpiifcime.  l'as  une  éï;lise,  pîis  une  chapelle  ;i  visiter, 
à  moins  que  la  curi()sit('  ne  vous  engage  à  diriger  vos  pas  du  côl(i 
de  la  chapelle  anglaise,  construction  r(jcente,  soi-disant  gothique,  du 
plus  d(;plorable   elTel. 

Dans  la  délicieuse  valli-e  d'Argelès,  les  baigneurs  de  Caulercts,  de 
Barr(iges  et  de  Saint-Sauveur,  \ont  faire  un  pèlerinage  à  l'antique 
abhiiye  do  Sainl-Savin,  reniarqiialde  par  sa  belle  position,  la  riche 
végétation  qui  l'euvironui',  et  sa  grande  église  d'architecture  romane. 
Si  je  n'avais  crainte  d'abuser  de  vos  moments,  je  pourrais  vous  de-, 
crire  celte  intéicssaulc  église,  dont  j'ai  relevé  le  plan,  les  coupes,  et 
pris  qiicliiues  vues.  Mais  cette  digression  arcliéolugi(iue  pourrait  m'en- 
traîner  trop  loin... 

Agréez,  etc..  II.  D. 


NoTR  SIR  vs  Procédé  d'Assainissement  des  Égouts. 

Dans  la  séance  du  30  juillet,  M.  Sirota  présenté  un  mémoire  à  l'Aca- 
démie des  Sciences,  sur  l'application  à  l'assainissemenl  des  égouts  de 
son  procédé  de  désinfection  des  fosses  d'aisance  ,  procédé  qui  fut  l'ob- 
jet, l'an  dernier,  d'un  rapport  favorable  de  l'Académie  (1).  Pour  cette 
nouvelle  cl  utile  application,  M.  Sirel  fait  subir  à  sa  mélliode  (pielqiies 
modifications,  exigées  par  les  conditions  différentes  du  problème  qu'il 
avait  cette  l'ois  à  résoudre. 

«  Commeiil  en  effet,  dii-il,  pourrait-on  attendre  quelque  effieacilé 
d'une  poudre  légère  qui  resterait  nécessairement  à  la  surface  de  l'eau 
dont  le  fond  des  égouts  est  |irosque  constamment  couvert,  et  qui  serait 
emportée  rapidement  chaiiiic  fois  que  la  pluie  déterminerait  dans  les 
conduits  un  courant  rapide? 

«Après  plusieurs  essais,  je  crois  êire  parvenu  à  surmonter  cette 
difliculté.  Voici  comment  j'opère  : 

«  Pour  500  mètres  d'égouts,  je  prends  7S  kilogrammes  d'une  masse 
composéeainsi  qu'il  suit  : 

Sulfate  de  fer.  .  .  .     200  kilogrammes. 

Sulfate  de  zinc.    .   .      25 

Charbon  végétal.  .  .       10 

Sulfate  de  chaux.  .     205 

Total.  ...    500 

«  Je  mélange  avec  une  certaine  quautilé  d'eau  ces  substances,  après 
en  avoir  opéré  une  union  parfaite  pour  en  former  une  masse  solide. 

«  En  ayant  extrait  73  kilogrammes  de  cette  masse  compacte,  et  que 
son  poids  relient  au  fond  de  l'eau ,  à  l'entrée  de  l'égout ,  les  eaux  en 
fonl  une  dissolution  graduelle  m  passant  par-dessus ,  et  se  trouvent 
ainsi  dé.Mufectées.  Ou  peut,  avec  les  proportions  indiquées,  compter, 
de  la  part  de  la  masse,  sur  une  action  désinfectante  d'une  durée  de 
((uinze  jours;  tels  sonl  du  moins  les  résultats  que  j'ai  obtenus  à 
iMeaux ,  dans  l'égout  du  Brassct,  (|ui  reçoit  les  eaux  des  mégisseries. 

((  L'emploi  du  sulfate  tU\  chaux,  (pii  rend  conipactes  les  poudres 
désinfeciantcs,  ne  les  décompose  nullement;  il  en  siinnile  plutôt  les 
ellels  désinfectants  que  de  les  (liiniiiiier.  » 


Nouveau  mour  dk  Fabrication  des  Briques  et  des  Tuiles. 

Ce  procédé  est  dil  à  M.  Prosser,  de  Birmingham  ,  et  a  été  communi- 
qué h  l'Institut  des  ingénieurs  civils  de  Londres;  en  voici  la  description  : 
On  fait  sécher  l'argile  dans  un  four  continu,  semblable  à  peu  près  à 


(1)   Voy.  vol.  iT,  col.  itli 


celui  dont  on  se  sert  pour  faire  cuire  les  poteries,  puis  on  la  rcdoiiefl 
poudre  line.  et  on  la  soiinict  à  une  forte  pression  dans  des  moules  mé- 
talli(|ueg.  Cette  opération  lui  fait  perdre  environ  les  deux  tiers  de  ton 
épaisseur,  et  malgré  l'état  de  sécheresse  auquel  on  l'a  amenée  dans  le 
four,  l'argile  contient  encore  assez  d'humidité  pour  lui  donner  de  la  co- 
hésion cl  pour  que  les  tuiles  et  les  briques  soient  moulées  en  conser- 
vant leurs  arêtes;  alors  on  peut  les  exposer  a  la  chaleur  du  four,  sans 
les  dessécher  de  nouveau,  el  la  cuisson  s'opère  sans  qu'il  se  forme  au- 
cune crevasse.  On  a  mis  sous  les  yeux  de  la  société  un  échanlillon  de 
brique  faite  avec  la  terre  à  brique  ordinaire  de  Straffurdsbire,  quiavait 
clé  d'abord  réduite  en  poudre  fine;  s:i  couleur  est  d'un  beau  rouge,  sa 
texture  homogène,  ses  arêtes  bien  déterminées.  On  ne  remarque  au- 
cune trace  de  vitrification;  son  poids  spécifique  est  de  2,5.  Sa  grande 
densité  est  due  à  la  pression  qu'on  lui  a  fait  supporter,  el  que  l'on  peut 
évaluer  à  i'jO  louneaux. 

La  société  a  soumis  à  diverses  épreuves  les  produits  qu'elle  avait  à 
examiner  ;  une  tuile  de  82  millimètres  de  diamètre  et  de  9  d'épaisseur  a 
souleiiii  une  pression  de  30  tonneaux  san^  que  les  l>ordi  s'égrenassent; 
une  autre,  de  même  diamètre  el  de  37  millimètres  d'épaisseur,  a  réi>i>té 
à  une  pression  de  35  lonne.iux.  et  un  bloc  de  180  niillimètres  est  reste 
intact  sous  une  pression  de  ïH)  tonneaux.  Jusqu'il  présent  la  fabrication 
de  M.  Prosser  a  été  assez  restreinte  quant  au  volume  des  pièces  mou- 
lées, mais  il  fait  établir  une  nouvelle  presse  hydraulique  qui  lui  per- 
mettra de  f.ibriqucr  des  tuiles  de  toute  dimension  et  de  tout  modèlp, 
pour  les  besoins  de  rarchileclure. 


Sur  l'Architecture  du  .MoYE>-.\Ge  i>°  Italie 

,  Extrait   de  L' ATMKMAra  . 

Il  est  intéressant  de  suivre  l'inlluence  du  goût  et  du  sentiment  clas- 
sique au  milieu  de  lotîtes  les  variétés  de  l'archiiecture  du  Moyen-Age 
en  Italie,  de  la  voir  donnant  aux  styles  byzantin,  lombard  el  Inéne 
ogival  un  aspect  de  compacité  symétrique,  et  aux  masses  les  plus 
solides  un  air  de  légèreté  élégante.  En  effet,  le  style  ogival  ne  s'est 
jamais  naturalisé  eu  Italie;  il  y  a  ilaiis  le  golhii|ue  italien  une  élcgaiice 
polie  et  toute  brillante  ;  ses  angles  ont  été  arrondis,  ses  arêtes  adou- 
cies, cl  la  .sévérité  primitive,  l'acuiié  de  ce  stylo,  ont  été  Iransfuféea 
eu  (|uel(|ije  chose  de  joli  el  d'oiné.  Le  Duomo  de  Milan  préseaie 
l'aspect  de  pinacles  d'ivoire  suigneuscinent  ci>elés  ;  son  exti'riear 
est  petit  de  caractère,  quoique  ses  dimensions  soient  considérables. 
Les  plus  grands  édifices  gothiques  de  l'Italie  ont  fort  poo  de  cet  air 
d'imposante  grandeur  qui  Trappe  dans  les  cathédrales  d'Angleterre,  ir 
France  et  d'Allemagne;  ils  ne  saisissent  pas  forleoienl  TiiMgiMtioa 
el  n'ins[iireni  pas  celle  religieuse  vénération  <|ne  fait  naître  daas  Ptoe 
la  solennité  de  la  véritable  arrhileciure  gothique  ;  ils  sont  soMveni 
plutôt  gais  que  graves,  et  leurs  ornements  ont  un  caracicre  luxurieux 
et  fantastique  très-différent  de  la  mystérieuse  complication  et  de  la 
sombre  sévérité  du  vrai  gothique  du  Nord. 

il  y  a  quehpie  chose  qui  semble  incompatible  avec  la  vivacité  et  la 
gaieté  méridionales  dans  le  stylede  l'archiiecture  ogivale.avrc  ses  angles 
si  prononcés,  avec  son  air  de  rudesse.  Aussi  ce  genre  ne  put-il  prendre 
racine  eu  Italie,  comme  il  est  facile  de  s'en  convaincre  par  l'exemple 
(les  églises  les  plus  anciennes  comparées  à  celles  d'une  époqne  posié- 
rieure.  La  première  église  gothique  d'Italie  est  celle  de  Sainl-.\ndré  à 
Vercelli,  dans  le  Piémont,  ipii  fut  commencée  par  le  cardinal  Goala 
en  1*219,  à  son  retour  d'Angleterre,  où  il  avait  été  envoyé  par  le  pape. 
en  qualité  de  It'-gal,  pour  soutenir  le  Iràne  chancelant  du  roi  Jean. Sa  b- 
çadc  est  romane;  mais  son  iniérieiirappanient  au  style  ogival,  puisque 
son  chœur  est  éclairé  par  trois  fenêtres  en  lancettes.  Elle  fut  consirvile 
par  un  ecclésiastique  français. 

L'église  gothique  qui  vient  immédiatement  après  celle  dont  il  vieai 
d'être  question,  est  celle  de  Saint-François,  a  Assise,  si  riche  en  ouvrages 
de  l'art  primitif  de  l'Italie.  Elle  fut  construite  entièrement  dans  le  style 


523 


REVUE  DE  L  ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


ogival,  par  un  aicliilecle  allemnnil  nommé  Jacobiis.  Mais  si,  laissant 
(le  côté  ces  deux  premiers  éilKices,  on  dirige  son  allenlion  sur  l'égiiso 
de  Sainl-François  de  Rimini,  on  y  reconnaît  ane  structure  ogivale 
en  dedans  et  classique  en  dehors ,  marquant  la  première  décadence  du 
gothique  cl  la  renaissance  du  style  chissi(|ue  en  Italie.  Ici  il  devient 
évident  que  les  caractères  essentiels  de  l'architecture  ogivale  n'ont  pas 
été  |iarfailement  sentis,  puisqu'ils  ne  sont  pas  entrés  dans  le  génie  des 
llaliens,  si  même  ces  principes  ont  été  compris  par  eux,  ce  qui  peut 
éire  regardé  comme  fort  douteux.  C'est  avec  ce  point  de  départ  désa- 
vantageux que  le  plan  de  cet  édifice  a  été  conçu,  et  que  son  exécution 
a  commencé;  aussi  riiifluence  italienne  coiiimeiice-t-elle  n  s'y  dessi- 
ner, pour  se  prononcer  plus  nettement  encore  dans  les  églises  et  les 
monuments  d'une  construction  postérieure. 

Ces  observations  sont  indispensables  pour  comprendre  le  caractère 
de  l'architecture  italienne  au  Moyen-Age,  et  pour  s'expliquer  celte  nio- 
dificaiion  de  style  qui,  tout  en  conservant  aux  églises  d'Italie  des  traces 
(le  leui'  origine  arcliitcctonique,  leur  a  donné  néanmoins  une  physiono- 
mie particulière  dans  laquelle  on  reconnaît  sans  peine  rinfliience  des 
idées  méridionales  sur  les  conceplions  des  peuples  septentrionaux. 


Procédé  pour  la.  conservation  du  Feb  dans  la  .Mkh. 

Le  Technoloyisle  a  rapporté  dans  le  temps  un  procédé  assez  compli- 
qué que  .M.  It.  .Mallet  avait  fait  connaître,  et  qui  avait  pour  but  de  pré- 
server de  la  corrosion  les  bâtiments  en  Ter  qui  naviguent  sur  la  mer, 
et  d'empêcher  les  animaux  et  les  végétaux  marins  de  Torraer  une  croùic 
sous  leur  carène. 

Ce  procédé  se  composait  de  trois  opérations,  que  M.  R.  Mallet  ré- 
duit aujourd'hui  à  deux,  et  qu'il  modifie  ainsi  que  nous  croyons  utile 
de  le  rapporter  d'après  le  Technnlogisle.  Il  peut  avoir  des  applications 
en  dedors  de  la  marine,  et  servir  généralemenl  à  la  conservation  de 
tous  les  fers  destinés  h  séjourner  sous  l'eau. 

La  firemière  des  deux  opérations  dont  se  compose  le  procédé  con- 
siste dans  l'emploi  d'un  t'crnis  protccfcwr  composé  d'après  ce  principe, 
savoir  :  que  ses  éléments,  qui  ne  peuvent  pas  former  des  hydrates  ni 
se  combiner  avec  l'eau,  adhèrent  avec  force  au  fer,  en  conservant  tou- 
jours une  cerUiine  élasticité. 

La  carène  d'un  navire  en  fer  étant  parfaitement  sèche  et  débarrassée 
par  le  grattage  de  tout  oxyde  adhérant,  on  l'enduit  du  vernis  protecteur, 
qui  se  compose  de  : 

40  parties  du  meilleur  goudron  de  houille  réduit,  à  l'aide  de  la  cha- 
leur, jusqu'à  la  consistance  de  la  poix; 

\  partie  de  caoutchouc  dissous  et  amené  à  l'étal  pâteux,  état  sous  le- 
quel on  le  trouve  aujourd'hui  dans  le  commerce; 

5  pariies  de  minium  pulvérisé. 

Le  goudron  étant  fondu,  on  ajoute  le  caoulchouc  et  enfin  le  minium, 
et  le  tout  est  brassé  avec  soin,  tandis  qu'on  fait  fondie  sur  le  feu. 

Les  bàlimenis  neufs  dont  les  bordages  sont  nets  n'exigent  qu'une 
seule  couche;  les  vieux  eu  demandent  deux  ou  trois. 

Aussii(it  (|ue  le  vernis  est  sec,  il  faut  le  recouvrir  uniformément 
avec  la  peinture  zoophage,  ou  vernis  empoisonné,  qu'on  applique  à 
chaud  avec  des  brosses  douces. 

La  peinture  zoophage  prévient  l'incrustation  de  la  carène,  en  ce  que 
les  sels  méialliques  qu'elle  renferme  sont  peu  solubles,  ou  tellement 
délétères  pour  les  animaux  ou  végétaux  marins  qui  touchent  à  cette 
carène,  que  ceux-ci  n'adhèrent  et  ne  se  développent  plus  à  sa  surface; 
il  faut  donc  que  cette  peinture,  en  même  temps  qu'elle  résiste  au  frot- 
tement provenant  du  mouvement  du  navire,  possède  un  degré  de  solu- 
hililé  ou  pluKJt  de  miscihiliié  avec  l'eau  assez  élevé  pour  permettre 
que  les  poisons  soient  absorbés  par  les  capillaires  des  êtres  qui  vien- 
nent s'appliquer  dessus  ;  car,  sans  cette  dernière  propriété,  aucun  poi- 
son, quelle  que  soit  la  proportion  dans  laquelle  on  l'emploie,. ne  peui 


èire  utile  d'une  manière  permanente.  Voici,  du  reste,  la  composition  a 
laquelle  .M.  Mallet  s'esl  arrêté  : 

On  fait  fondre  ensemble,  à  une  douce  chaleur,  dans  2  parties  d'can  : 
1  partie  de  savon  jaune  ; 
i  pariies  de  résine.  , 

On  mélange  ces  substances  chaudes  à  du  vernis  d'huile  ordinaire, 
puis  on  fait  fondre  avec  elles  4  parties  du  meilleur  suif.  Quand  le  mé- 
lange est  uniformément  (qiére.  on  ajoute  les  subsUinces  suivantes  ré- 
duites eu  la  poudre  la  plus  Une  : 

1  partie  di;  réalgar; 
1  partie  de  minium. 

Puis  on  agite  parfaitement  le  mélange. 

Lorsque  celle  préparation  est  froide,  elle  a  la  consisianci;  du  m  iirre 
à  10  degrés  centigrades.  Pour  les  climats  tropicaux,  on  augnienle  la 
dose  de  résine,  et  celle  du  savon  pour  les  régions  arctiques. 

Lue  couche  de  peinlure  zoophage  dure  de  un  à  trois  ans,  suivant  les 
circonstances;  elle  est  d'un  beau  rouge  écarlale  qui  ne  dépare  pas  la 
carène  des  bâtiments. 

Les  procédés  de  M.  Mallet,  appliqués  à  plusieurs  steamers  chargés  de 
divers  services,  ont  fourni,  dit-on,  de  bons  résulials,  el  l'on  a  eiendu 
leur  usage  avec  succès  aux  bouées,  corps  moris,  corps  flotlanU,  jetées, 
el  il  de  petits  biiiroentscn  fer  ou  autres. 


CHRonriQns. 

SoaiiAïai  :  tIM.  Didron  cl  Lenoir,  nommes  ctivxiiers  de  la  Légion  d'honneur.  — 
Ln  ulile  avii  de  11.  le  pri-M  de  police.  —  Cliiire  à  priclier  de  li  calhedrale 
de  Troye».  —  RetUursiion  du  chÂlcau  de  Bloi».  —  Rcsuuralion  du  Ibellre  de 
Nantes.  —  Eglise  nolhiquc  en  con>lniclion  à  Nanlrt.  —  l'n  seul  mécanisme  pour 
loules  les  horloges  d'une  ville.  —  Statues  éICTées  é  Uoethc  et  i  Stephenson.  — 
tjrand  Ihéllrc  en  consiriiclion  à  Li«ourne.  —  Chemin  de  fer  hollandais.  —  fv- 

RLICaTlOBI  KOOriLLU. 

—  Sur  la  proposition  de  M.  de  Salvandy,  MM.  Didron,  s«cret.iire  du 
comité  bisloriiiuc  des  arts  et  monuments,  et  AIIkti  lenoir,  arcbitecie, 
membre  du  même  cumile,  el  nos  redacleurs  tous  deux,  xiennciii  d'èire 
nommes  chevaliers  de  la  Légion  d'honneur. 

^ous  applaudissons  de  grand  cœur  h  cet  acte  de  jiisiice.  .\o»  lecteurs 
savent  combien  de  services  déjà  MM.  Albert  Lenoir  et  Didron  ont  rendus 
à  l'art  et  à  son  histoire.  Secrétaire  depuis  la  fondation  du  comité  liislo- 
rique,  M.  Didron,  outre  les  nombreux  articles  de  critique  publiés  dans 
divers  journaux,  a  fait  plusieurs  travaux  d'une  baulc  importance  sur 
l'archéologie  nationale  :  son  Hitloire  de  Dieu,  le  manuel  i\' Iconographie 
ehrélienne,  la  publication  des  Annalet  arckrologiquet ,  sont  des  titres 
plus  que  suffisants  à  la  laveur  dont  il  vient  d'élre  l'objet. 

C'est  à  M.  Albert  Lenoir  que  Ion  doit  la  rédaction  d'une  partie  con- 
sidérable des  Instrvclioni  du  Comité  hitlorique,  la  lielle  publication  de 
\.\  Staliilique  monumentale  de  l'arit,  et  une  foule  d'autres  écrits  sur 
l'art  chrétien  de  toutes  les  époques;  enfin,  c'est  à  lui  qu'on  doit  la 
iransformation  du  palais  des  Thermes  cl  de  l'hôtel  de  Cluny  en  niusco 
d'archéologie  nationale;  tant  et  de  si  utiles  travaux  méritaient  bien  à 
M.  Albert  Lenoir  celte  tardive  récompense.  • 

—  M.  le  préfet  de  police  vient  de  faire  afficher  un  avis  par  lequel  il 
invite  les  habitants  de  Paris  à  se  défaire,  sous  peine  de  prison,  de  cer- 
taines habitudes  compromet  tantes  pour  la  pudeur  el  la  propreté  publi- 
ques, les  engageant  à  faire  usage  des  colonnes  et  autres  appareils  de 
même  espèce  dont  les  bons  soins  de  .M.  le  préfet  de  la  Seine  ont  dé- 
coré nos  quais  cl  nos  boulevards.  Nous  applaudissons  vivement  à  celle 
sage  mesure,  qui  aura  pour  résultat,  nous  l'espérons,  de  contribuer 
puissamment  à  l'assainissement  de  Paris,  el  de  faire  disparailreces  mares 
infectes  qui  salissent  les  trottoirs  cl  les  abords  de  plusieurs  monuments 
publics.  Mais  ne  serait-ce  point  l'occasion,  puisque  l'arrêlé  défend  de 
souiller  les  murailles,  de  fa(iliter  l'obéissance  aux  ordres  de  la  police 


i\E\m:  DE  lahchitecturh;  et  des  travaux  publics. 


bMi 


cil  taisaiil  élever  des  vespasiennes  eu  noiiilirc  :iii  iiKiiiissuflisaiilpour  sa- 
lisl'airc  aux  besoins,  ei  inèiiie  de  l'aire  éludier  un  modèle  qui  allie  à  la  fois 
la  décence  cl  la  commodité  à  des  formes  d'un  goût  lolérable  ?  Ce  ne 
serait  pas  trop  faire  que  d'ouvrir  un  concours  pour  liàier  la  sululion 
d'une  aussi  grave  question.  Une  des  conditions  du  programme  devrait 
être  l'emploi  d'un  procédé  désinfectant  comme  celui  du  bitume  de 
houille,  emploi  dont  nous  avons  parlé  précédemment  dans  un  article 
spécial.  (Vmj.  col.  512).  La  chose  est  urgente,  car  il  est  des  quartiers 
que  le  nouvel  arrêté  jette  dans  une  véritable  perplexité  en  leur  inter- 
disant l'usage  des  petits  coins,  seuls  endroits  qu'ils  aient  eus  jusqu'à  ce 
jour  à  leiirdisposiiion  pour  obéira  une  loi  de  la  nature  trop  impérieuse 
pour  qu'on  néglige  d'en  tenir  compte. 

Chaire  à  prêcher  de  style  gothique.  —  La  cathédrale  de  Troyes  vient 
de  s'enrichir  d'une  chaire  à  prêcher  dans  le  style  de  l'édifice.  Le  Moycn- 
.'^ge  ne  nous  a  guère  laissé  de  modèles  pour  ce  meuble  important 
d'église,  et  l'architecte  se  trouve  fort  embarrassé's'il  veut  se  montrer  à 
la  fois  archéologue  et  artiste.  M.  Goiinod,  l'architecte  chargé  de  ce 
travail,  a  créé  un  petit  édifice  dans  lequel  on  retrouve  des  formes  du 
XI II"  ei  du  X1V°  siècle.  La  cuve,  ornée  de  bas-reliefs  sculptés  par 
M.  Triqiieti,est  portée  par  cinq  piliers,  dont  un  central,  qui  est  plus  fort 
que  li's  quatre  autres.  L'abat-voix  est  soutenu  par  deux  colonneltes  la- 
térales et  par  le  panneau  formant  le  dossier,  au  milieu  duquel  s'ouvre 
la  porte  ;  il  affecte  la  forme  d'une  petite  flèche  découpée  à  jour.  L'es- 
calier ,  porté  aussi  sur  des  colonnettes,  est  placé  derrière  la  chaire  et 
aboutit  en  ligne  droite  à  la  porte  pratiquée  dans  le  dossier.  Cette  chaire 
est  placée  dans  un  entre-colonnement  et  se  trouve  par  conséquent 
tout  à  fait  isolée.  Il  serait  bien  à  désirer  que  nos  belles  cathédrales  du 
.Moyen-Age  vissent  enfin  remplacer  les  chaires  dont  lèsent  dotées  les 
deux  siècles  derniers,  par  des  compositions  plus  en  rapport  avec  le  style 
du  temps.  L'exemple  que  nous  citons  est  bon  à  snivre.  Nous  ne  deman- 
dons pas  qu'on  détruise  les  œuvres  des  artistes  du  temps  de  Louis  XIV 
et  de  Louis  XV,  mais  il  nous  semble  qu'il  serait  facile  de  les  utiliser  en 
les  plarant  dans  des  églises  de  la  même  époque;  il  en  est  tant  qui  n'ont 
pour  chaires  que  des  espèces  de  coffres  sans  couvercle! 

Reslauralion  du  château  de  Blois.  —  Décidément,  on  va  s'occuper  de 
la  restauration  de  ce  noble  et  malheureux  château  de  Blois,  aujourd'hui 
iransforméen  caserne.  Le  conseil  municipal  de  la  ville  a  pris  noblement 
l'initiative  dans  cette  circonstance  ;  il  a  examiné  avec  soin  et  approuvé 
avec  éloges  les  plans  présentés  par  M.  Duban,  pour  transformer  en 
musée  une  partie  de  ce  royal  château;  puis  il  a  voté  à  l'unanimité  une 
somme  de  43  000  francs  destinée  ii  mettre  ce  projet  à  exécution.  De 
leur  côté,  les  Chambres  ont  voté  un  crédit  dc438000  francs;  mais  nous 
;\vons  vu  avec  regret  dans  le  projet  de  loi  que  la  salle  des  états  de  dois 
n'était  pas  comprise  dans  la  restauration  ;  elle  reste  encore  entre  les 
mains  de  l'administration  de  la  Guerre.  Puisse-t-elle  en  sortir  un  jour  I 

Restauration  du  théâtre  de  Nantes.  —  La  ville  de  Nantes  vient  de 
faire  restaurer  la  salle  de  son  grand  théâtre.  C'est  un  travail  assez,  im- 
portant pour  que  nous  en  disions  un  mol.  L'artiste,  M.  Driollct,  archi- 
lecte-voyer  de  la  ville,  a  choisi  entre  tous  les  styles  celui  du  règne 
qui  vit  naître  chez  nous  l'opéra  et  fleurir  la  comédie  française  ;  c'est 
nue  heureuse  idée  :  le  style  du  XVII"  siècle  a  d'ailleurs  cet  avantage, 
que  sa  richesse  cl  sa  splonileiir  s'allient  facilement  an  confortable  et 
au  bien-être  si  hautement  réclamés  aujourd'hui  pour  une  salle  de  fêtes 
et  de  plaisirs  surtout.  H  y  a  toutefois  un  écueil  h  éviter  dans  l'emploi 
de  cette  décoration  brillante  du  temps  de  Louis  XIV  :  c'est  d'écraser 
sous  l'éclat  de  la  dorure  la  simplicité  de  notre  costume  moderne.  Au 
siècle  de  Louis  XIV,  si  les  murs  resplendissaient  d'or,  les  femmes  étin- 
celaient  de  diamants,  les  hommes  étalaient  leurs  justaucorps  de  ve- 
lours brodés,  leurs  dentelles  et  leurs  plumes.  Le  frac  noir  et  la  robe 
de  cachemire  ne  peuvent  plus  lutter  avec  celle  pompe  d'autrcrois. 
.VI .  Driolleta  tourné  l'écueil  :  sa  décoration  n'est  pas  pompeuse,  mais  riche 


seulement.  Chacune  des  galeries  est  divisée  en  larges  compariituenU 
formés  par  des  encadrements  en  blanc  mat  cl  en  cuivre  esUimp»;;  l'in- 
térieur des  cadres  imite  un  damas  vert  broche  d'argent,  et  ils  sont  al- 
ternés par  des  médaillons  représentant  les  traiis  de  nos  céiébrilcs  imi- 
sicales  et  dramatii|iies  de  tous  les  temps. 

Le  plafond,  d'un  st>lc  un  peu  plus  léger,  imiie  ane  série  d'.->rceaus 
dont  les  colonnettes  rayonnent  vers  le  centre  et  laissent  voir  un  fond 
de  eiel  animé  par  des  figures  allégoriques  appuyées  contre  une  la- 
lustrade,  et  (|uidelâ  semblent  écouter  la  voix  ducliaiiieuroiiriiaruiome 
de  l'orchestre.  Le  soubassement  des  arceaux,  à  la  naissance  «lu  pla- 
fond, est  orné  de  grands  médaillons  où  sont  peints  dirers  sujets  co- 
miques,  tragi(|ues  et  chorégraphiques. 

L'ensemble  de  la  décoration  est  harmonieux  ,  la  transition  du  relief 
à  la  peinture  habilement  ménagée.  Les  cui>res  estampés,  d'un  emploi  si 
difficile  dans  la  décoration  monumentale,  n'ont  pas  ici  la  niiigrenr 
qu'on  leur  reproche  d'ordinaire;  en  un  mol,  ce  travail  fait  honneur  au 
talent  d'ailleurs  connu  de  M.  Driollet.  Les  peintures  sont  de  messieurs 
Philaslre  et  Cambon  ;  c'est  faire  leur  éloge. 

Après  des  études  aussi  sérieuses  que  les  siennes .  M.  Driollet  doit  a 
Nantes  être  apprécié  comme  il  le  mérite.  Nous  n'avons  pas  oublié  com- 
bien son  talent  était  estimé  et  recherche  à  Paris  par  les  artistes  les  plu» 
distingués. 

—  Dans  la  même  ville,  les  travaux  de  la  nouvelle  église  fOtkiqaede 
Saint-Nicolas  sont  commencés  depuis  quelque  temps.  Le  i 
du  chevet  est  déjà  posé.  Nous  avons  vu  ces  travaux  et  nous  nous  pla 
à  dire  qu'ils  sont  faits  avec  un  soin  remarquable.  C'est  M.  Lassos 
est  chargé  de  cette  construction  ,  pour  laquelle  on  avait  dans  le  i 
demandé  un  projet  à  Piel ,  ce  jeune  architecte  si  plein  d'amour  | 
l'art  gothique,  et  dont  nous  avons  raconté  la  vie  et  la  mort  préoia- 
lurée  dans  les  premières  colonnes  de  ce  volume  II).  Sur  plusieurs  point» 
de  la  France,  des  églises  de  styles  golhii|ue  et  roman  s'elévenl  oa  se 
projettent,  mais  il  semble  que  Paris  ait  complètement  oublié  celle  •|tt'on 
doit  bâtir  sur  la  place  Uclle-Chasse.  On  sait  que  ce  travail  iniportani 
est  confié  au  talent  bien  connu  de  M.  Gau. 

—  On  va  placer  au  beffroi  de  Rennes  une  nouvelle  horloge  qui  sera, 
à  ce  qu'on  assure,  le  plus  beau  monument  de  l'horlogerie  moderne. 
iS'ous  donnerons  quelques  détails  sur  son  exécution. 

Nous  devons,  d'à  f  Auxiliaire  Breton,  qui  annonce  le  fait,  au  momeni 
où  notre  beffroi  va  s'enrichir  de  celle  belle  pièce,  exprimer  un  vœu 
qui  peut-être  fixera  l'atteniion  de  la  commission  chargée  de  la  récep^ 
lion.  Nu  serait-il  pas  possible  de  tenter  l'application  si  ingénieuse  que 
Wheatson  a  faite  à  un  pareil  mécanisme,  des  nouvelles  découvertes  gal- 
vaniques? A  l'aide  de  Ois  conducteurs  appli<|ués  à  la  détente  d'une  boi^ 
loge  publique,  le  savant  professeur  anglais  a  établi  les  sonneries  de 
toutes  les  horloges  publiques  d'une  même  ville,  de  façon  que  loales 
sonnent  inslanlanémeni  et  par  cela  seul  que  l'horloge  de  laquelle  part 
le  fil  conducteur  sonne  elle-même. 

On  conçoit  tout  ce  que  celle  application  peu  dispendieuse  a  de  sé- 
duisant. Pour  une  seule  ville,  un  seul  mouvement  parfait  suffit  à  rem- 
placer tous  les  autres  ;  et  l'heure  est  pointée  par  toutes  les  cloches  à  Ij 
fois.  Chaque  église,  en  adaptant  un  marteau  à  l'un  de  ses  timbres,  au- 
rait ainsi  une  horloge  parfaite,  et  qui  ne  demanderait  aucun  entrelien. 
On  a  calculé  qu'avec  moins  du  tiers  de  ce  que  coûte  le  mécanisme 
nouveau,  l'on  pourrait  établir  ainsi  la  communiraiion  galvanique  entre 
l'horloge  publique  et  cinq  des  principaux  édifices.  La  chose  vaut  la 
peine  qu'on  y  pense  ;  elle  n'a  rien  d'ailleurs  d'incroyable  ;  car  ce  oc 
serait  qu'une  des  applications  des  télégraphes  électriques,  si  bien  ap- 
préciés maintenant  de  loul  le  monde  savant. 

—  On  vient  d'inaugurer  à  Francfort  la  slaluc  de  Goeibe  par  Sdivan- 
ihaler.  On  dil  que  le  grand  statuaire  a  fait  un  chef-»i"cpuvre. 


(1)  Voy.  vol.  »,  col.  J7S 


6X7 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PURLICS. 


52S 


—  Tandis  que  l'Allemagne  et  la  Fiance  clèvonl  dos  slatiics  à  leurs 
gloires  lilléraires,  niiliiaiies  el  sclenlilii|nes,  l'Angletcrie  songe  à  en 
élever  une  h  l'ingénieur  qui  a  le  plus  contribué  à  la  propagation  ilu 
système  de  locomotion  rapide,  par  ses  iravaiiï  et  ses  inventions.  IMii- 
sieurs  compagnies  de  chemins  de  fer  se  sont  cotisées  pour  dresser  une 
statue  à  George  Sieplienson,  cet  habile  constructeur  «le  machines. 
•  elni  qu'on  peut  considérer,  avec  quelque  justice,  comme  l'invenienr 
de  la  locomotive.  Le  sculpteur  Gihson  est  chargé  de  celte  statue,  qui 
tievra  figurer  sur  l'une  des  places  de  Liverpool. 

—  On  construit  dans  ce  moment  à  Livourne  un  théâtre  qui  sera, 
dii-on,  le  plus  grand  el  le  plus  inagniliquede  toute  la  Toscane,  et  dont 
l'ouverture  aura  lieu  l'année  prochaine.  Ce  ihcàlre  oiïre  celle  particu- 
larité, qu'il  est  surmonté  d'une  coupole  en  verre,  circonstance  qui  per- 
mettra de  le  consacrer  aux  représentations  du  jour  comme  à  celles  de 
la  nuit.  Or,  l'on  sait  qu'en  Italie,  les  représeiilations  du  jour  ne  sont  pas 
moins  fié(|uentes  en  été  ijuc  celles  du  soii-,  et  que,  suivant  l'usage  an- 
tique, la  clarté  du  soleil  est  souvent  préférée  à  celle  du  luslre.  Du 
reste,  c'est  le  premier  exemple  d'une  construction  de  ce  genre  dans  la 
péninsule. 

Chemin  de  fer  hollandais.  —  Il  résulte  d'un  rapport  fait  récem- 
ment par  M.  Vander  Kun,  ingénieur  en  chef  du  Walcrslaat,  chargé 
des  fonctions  d'ingénieur' directeur  de  la  construciion  du  chemin  de 
fer  rhénan,  que  les  terrassements  du  chemin  de  1er  hollandais  jus- 
qu'à Arnhem,  et  dans  le  trajet  d'entre  Driehergen  et  .\riihein,  ont  donné 
lieu  à  un  déplacement  de  2  546  000  mètres  cubes  de  terre,  (|ui  ont  été 
transportés  ù  2  ou  5000  mètres,  au  moyen  de  wagons  et  de  rails  pro- 
visoires. 

Le  mètre  de  celte  route  ferrée  qui,  d'Anisierdam  à  Arnhem,  aura 
93  000  mètres,  coûtera  lOOflorinsOG  (214  fr.  13  c.),  ou  2UI28  fr.  par 
kilomètre. 

Le  inèire  des  cheuiins  de  fer  belges  a  coûté  117  D.  (250  fr.  4Uc.], 
non  compris  21  11.  pour  les  expropriations  de  terrains,  et  14  fl.  pour  les 
matériaux. 

Le  chemin  de  fer  de  Paris  à  Lille  el  à  Dunkcrque  coûtera,  suivant 
les  évaluations  de  M.  Stephenson,  172  11.  50  (369  fr.  15  c.)  par  mètre. 
Le  chemin  de  fer  de  Cologne  à  Minden  a  coûté  par  mètre  100  11.  36, 
(214  fr.  77  c). 

Le  mètre  du  chemin  de  fer  de  Dusseldorf  à  Elberfeld,  qui  n'a  qu'une 
seule  voie,  a  coûté  112  fl.  50  (240  fr.  75  c). 

Le  mètre  de  celui  de  Cologne  à  Aix-la-Chapelle  el  à  la  frontière 
belge,  également  à  simple  voie,  mais  dont  le  terrain  offrait  de  grandes 
difflculiés,  a  coulé  la  somme  de  li»9  fl.  (425  fr.  86  c). 

Enfin,  le  mètre  du  trajet  d'Ans  à  Liège  el  à  la  frontière  prussienne,  à 
simple  voie,  a  coûté  environ  320  fl.  (684  fr.  80  c). 

Les  convois  du  chemin  de  fer  rhénan  ont  parcouru ,  en  1844, 
104673  1/2  milles  néerlandais;  la  ligne  a  été  fréquentée  par  291727 
voyageurs,  non  compris  les  transports  militaires,  de  210. 

Les  recettes  brûles  du  raiiway  hollandais  se  sont  élevées,  en  1844, 
à  299  386  11.  951/^;  le  produit  par  mille  néerlandais  a  été,  en  moyenne, 
de  7392  n. 

Les  frais  d'exploitation  ont  été,  en  1844,  de  156  959  Q.  10  1/2,  soit, 
en  moyenne,  3875  fl.  par  mille  néerlandais.  (Juum.  des  Chem.  de  fer.) 

PtBLiCATiONS  Nouvelles.  —  L'auteur  d'un  ouvrage  irès-eslimé  et 
très-estimable,  Description  historique  des  Maisons  de  Rouen  les  plus 
remarquables  par  leurs  décorations  et  par  leur  ancienneté,  M.  E.  de 
la  Quérière,  vient,  à  ce  livre  qui  jette  une  belle  lumière  sur  une  partie 
importante  de  l'histoire  de  l'architecture  civile  au  Moyen-Age,  de  faire 
«ne  espèce  d'appendice  ayant  pour  litre  Essai  sttr  les  épis,  crêtes  ou 
dentelles  el  autres  décorations  des  anciens  cotnbles  el  pignon»,  pour  faire 
suite  à  l'Histoire  des  Habitations  au  Moyen-Âge.  Ce  travail  a  l'inappré- 
ciable avantage  d'éclairer  une  question  jusqu'à  présent  restée  dans  l'ou- 


bli, cl  de  présenter,  outre  l'intérêt  archéologique,  un  intérêt  d'actualité. 
.\njourd'hui,  on  effft,  que,  par  un  mouvement  réactionnaire,  l'atlenliuu 
d'un  grand  nombre  d'artistesdistingués  se  trouve  dirigée  vers  l'arl  de  la 
lin  du  .Moyen-Age  cl  ilc  la  Uenaissance,  parce  ipi'il  offre  des  inspirations  de 
iialure  à  recevoir  d'iieureuscs  applications  à  l'archilecliire  de  nos  jours, 
ce  livre  sera  d'une  utilité  réelle  pour  rarchitccle.  Et  puis  il  esi  lemps 
de  sauver,  en  la  consignant  dans  des  livres,  l'hisloire  <les  habitations  de 
ces  temps-là,  car  chaque  jour  eu  voil  disparaître  quelqu'une  de  iiotri* 
sol.  M.  de  la  Quérière  prend  riiistnire  de  ces  orneinenls  des  combles  et 
des  pignons  à  partir  du  XV«  siècle,  cl  il  suit  leurs  transformations  di- 
verses à  travers  les  XV1«  cl  XVII*  siècles,  jusqu'à  leur  disparition  sous 
Louis  XV.  Ce  livre  est  enrichi  de  huit  planches  gravées. 

—  Manuel  d' Iconographie  chrétienne,  grecque  el  latine,  tel  est  le  lilre 
donné  par  M.  bidron  à  nu  ancien  manuscrit  sur  l'art  de  peindre  des 
Byzaniins,  découvert  par  lui  chez  les  moines  du  mont  Ai1ki!i.  Ce  nia- 
iiiiscril,  traduit  du  grec  par  le  docteur  l'anl  linrand,  el  publié  par  or- 
dre du  ministre  de  l'inslructiun  publique,  est  accompagné  d'une  intro- 
duction el  de  notes  fort  curieuses  du  savant  auteur  de  l'Histoire  de 
Dieu  el  du  Diable.  M.  Didron  a  fait  de  ce  livre  l'un  des  plus  précieux 
recueils  que  puissent  consulter  ceux  qui  s'occupent  de  la  peinture  du 
Moyen-Age.  Nous  rendrons  compte  de  cet  ouvrage. 

—  M.  le  comte  de  Labordc,  auteur  déjà  d'un  grand  nombre  de  tra- 
vaux intéresfaiiis  sur  l'édiliié  parisienne,  it  dimi  les  grands  ouvrages 
sur  r.\rabie,  la  S]  rie  el  l'Asie  Mineure  sont  connus  de  tous  les  artistes, 
vient  de  publier  i|uatre  Jetlres  sur  V  Organisai  {(/n  des  Uibliothèquesdant 
Paris.  Ces  lettres  sont  illustrées  de  nombreuses  gravures  sur  bois;  les 
unes  représenUint  les  divers  plans  et  emplaremenis  proposés  pour  la 
Bibliothèque  Royale,  les  aul^s  reprodiiisani  des  miniatures  du  Moyen- 
Age  ou  d'autres  objets  qui,  sans  avoir  un  rapport  bien  direct  avec  la 
question  traitée  dans  le  livre,  n'en  ont  pas  moins  un  intérêt  bibliu-jm- 
phique  qui  les  rattache  au  sujet.  Aussitôt  que  la  5*  lettre  de  cet  ou- 
vrage aura  paru,  nous  nous  empresserons  d'en  rendre  compte.  La  <pia- 
triènie,  que  nous  venons  de  recevoir,  conlieni,  «lutre  les  plans  d<-  la 
Bibliothèque  Richelieu  el  des  divers  projets  présentés,  des  plans  et 
des  vues  des  principales  bibliothèques  de  l'Europe. 


GRAND  HOPITAI.  DE  MII.AM. 

Nous  avons  publié  en  1843  (  col.  358,  vol.  IV)  une  note  sur  le 
grand  hôpital  de  Milan  ;  cette  note  était  accompagnée  d'une  plan- 
che représentant  une  des  fenêtres  du  rez-de-chaussée,  sur  la  rue, 
de  ce  curieux  édifice,  et  nous  avions  promis  alors  d'en  donner 
d'autres  morceaux  ;  nous  remplissons  aujourd'hui  notre  promesse. 
Nous  donnons (P/.  28)  une  travée  de  l'étage  supérieur;  nos  lecteurs 
jugeront  jusqu'à  quel  point  de  délicatesse  et  de  richesse  on  peut 
atteindre  avec  la  simple  terre  cuite,  et  ils  regretteront,  comme  nous, 
de  n'en  pas  voir  l'usage  plus  répandu. 

Dans  cette  planche  nous  eussions  désiré  indiquer  les  joints  des 
pièces  de  terre  cuite  qui  forment  la  corniche;  mais  M.  Thumeloup, 
l'habile  artiste  à  qui  nous  devons  ces  dessins,  qui  ont  obtenu  la  mé- 
daille d'or  à  l'Exposition  de  1842,  M.  Thumeloup  a  craint  que  ce 
tracé  des  joints  ne  nuisit  à  l'ensemble  de  l'effet.  Sans  partager  ces 
craintes,  nous  avons  dii  nous  rendre  au  désir  de  notre  confrère. 


Cesab  DALY, 

Oiteeleur  ridaclevr  en  chef. 

membre  île  t'Acailriiiie  riiyalr  di-s  Beauv-Arls  Av  Siortiliolin,  t-l  membre 
honoraire  cl  correspomlanl  de  t'instilul  royal   des  Archilecies  brilannîquei. 

Paiiis.  —  Ttp.  Lacrampe  f.t  Coup.,  iii'e  damictte,  2. 


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GRAND  HOPITAL  DE  MILAN. 


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(Remun-  Etagv  s)ir  la  Rue) 


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REVUR  DE  LAHCHITECTURK  KT  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


530 


LALHAMBRA. 


Sommaire.  —  Coup  d'œil  général  sur  les  édifices  encore  deboul  dans  lenceinle  de  la 
Korteresse  de  l'Alliambra.  —  Les  murs  cl  les  tours  de  l'cnceiiile.  —  Palais  des  an- 
ciens rois  m.iurcs;  la  Cour  de  l'Élang  ;  caractère  de  l'art  arabe;  curieuse  disposi- 
tion des  tympans,  des  arcs,  des  galeries;  la  Salle  de  la  Barque;  la  Salle  des 
Ambassaileurs;  la  Cour  des  Lions,  et  absence  de  symétrie  dans  l'arrangement  des 
colonnes  des  galeries  de  ceiti:  cour;  problème  d'art  proposé  à  ce  sujet;  Salle  des 
Deux-Sœurs.  —  Description  du  mode  de  construction  des  voiiies  de  caractère 
stalactite. 


Au  moment  de  terminer  notre  dernier  article,  nous  étions  sur  le 
point  de  pénétrer  dans  l'enceinte  de  l'Alliambra,  en  prenant  pour 
guide  notre  bon  et  savant  ami  Owen  Jones  ;  nous  avions  même 
franchi  la  Porte  de  la  Justice.  (Voy.  PI.  5,  et.  PL  29,  n"  1.)  Avant 
d'avancer  plus  loin,  rappelons  au  lecteur  que  le  Château  Rouge,  ou 
l'Alhambra,  occupe  le  sommet  d'un  plateau  élevé  à  l'une  des 
extrémités  de  la  ville  de  Grenade,  et  que  les  limites  de  ce  plateau, 
qui  domine  complètement  la  ville,  sont  dessinées  par  des  mu- 
railles garnies  de  tours.  Au  Nord,  ces  murailles  semblent  comme 
leprolongementdes flancs decette  acropole  musulmane,  qui  s'élève 
si  pittoresquement  du  milieu  des  jardins  magnifiques  dont  sa  base 
est  entourée.  (Voy.  PI.  3.) 

Dans  le  plan  de  la  forteresse  que  nous  donnons  {PI.  29),  l'en- 
semble du  plateau  et  des  murailles  n'est  pas  figuré,  parce  qu'il 
aurait  fallu  réduire  encore  l'échelle  du  dessin,  qui  est  déjà  fort 
petite  ;  mais,  par  la  pensée,  on  peut  aisément  compléter  ce  tracé 
en  raccordant  les  murailles  du  Nord  avec  celles  du  Sud  par  deux 
courbes. 

Nous  avons  gravi  la  hauteur  du  plateau,  et  nons  sommes  devant 
l'entrée  de  la  forteresse;  la  Porte  de  la  Jtistice  [PI.  29,  n»  I)  est 
devant  nous,  mais  avant  d'y  pénétrer,  lisons  l'inscription  {PL  30] 
qui  se  trouve  incrustée  dans  un  mur  attenant  à  cette  porte.  Vous 
ne  comprenez  pas  l'espagnol?  M.  Owen  Jones  vous  servira  d'in- 
terprète. Voici  sa  traduction  : 

«  Les  très-hauts,  très-catholiques  et  très-puissants  seigneui-s 
'(  don  Fernando  et  dona  Isabelle,  notre  roi  et  notre  reine,  ont  con- 
«  quis  par  la  force  des  armes  ce  royaume  et  cette  ville  de  Grenade. 
«  Après  que  Leurs  Altesses  l'eurent  assiégée  pendant  un  temps  con- 
«  sidérable,  elle  leur  fut  livrée  par  le  roi  maure  Mouley-Hasen, 
«  ainsi  que  l'Alhambra  et  d'autres  forteresses,  le  second  jour 
«  de  janvier,  l'an  quatorze  cent  quatre-vingt-douze.  Ce  même 
i'  jour.  Leurs  Altesses  nommèrent  pour  gouverneur  et  capitaine 


«  général  de  cette  place,  don  Inigo  Lopez  de  Meudoza,  comle  ûc 
«  Tendilla,  leur  vassal,  qui  fut,  au  moment  de  leur  départ,  laUié 
«  dans  le  susdit  Alhambra  avec  ioo  cavaliers  et  1000  fantassins. 
"  Les  Maures  reçurent  l'ordre  de  rester  dans  leurs  maisons  et  daits 
"  leurs  villages  comme  auparavant.  Le  susdit  comte  a  tait  creuser 
«  cette  citerne  par  ordre  de  [.eurs  Altesses,  n 

Cette  inscription,  qui  rappelle  au  voyageur,  des  set  premiers  pas, 
\ks  malheurs  qui  frappèrent  les  auteurs  du  monument  merveilleux 
dont  les  ruines  sont  devant  lui,  n'est  plus  au-dessus  de  la  citerne 
dont  elle  fait  mention  ;  mais  avançons,  car  de  plus  grandes  choses 
nous  attendent,  et  nous  ferions  bien  de  commencer  tout  de  suite 
par  faire  une  inspection  générale  de  notre  terrain,  sauf  à  revenir 
ensuite  sur  nos  pas  pour  étudier  a  loisir  les  détails  qui  mériteront 
plus  particulièrement  notre  attention.  Nous  avons  passé  la  Portr 
de  la  Juttice,  et  une  rue  étroite  nous  conduit  a  la  Puerla  dtt 
a  Vino,  »  (|ui  nous  donne  entrée  a  la  a  l'Iaza  de  loi  Àlgibes,  > 
«  ou  place  des  Citernes. 

Nous  sommes  venus  pour  contempler  les  ruines  de  l'ancien 
palais  des  rois  de  Grenade,  pour  interroger  les  débris  de  cet  art 
magique  des  Arabes,  qui  parait  avoir  étendu  sur  des  murailles  de 
pierre  un  voile  magique  tissu  des  rayons  colores  de  rarc-en-tiel, 
et  ce  grand  monument  à  droite,  qui  attire  tout  d'abord  notre  at- 
tention, c'est  l'œuvre  massive  et  lourde  d'un  roi  chrétien  (voyez- 
en  l'élévation  PL3\];  nous  rencontrons  la  cuirasse  de  fer  là  où  nous 
cherchions  l'écharpe  tissue  d'or  et  de  soie.  C'est  au  delà  du  palais 
de  Charles  V  que  se  trouve  tout  ce  qui  reste  aujourd'hui  de  l'an- 
cfen  palais  des  rois  maures.  Rien  dans  l'extérieur  de  ces  débris 
n'annonce  les  splendeurs  qu'ils  recèlent. 

Dans  le  plan  PL  29,  les  constructions  arabes  sont  indiquées  par 
une  teinte  foncée,  et  les  travaux  exécutes  postérieurement  par 
les  chrétiens  sont  marqués  par  des  teintes  plus  claires. 

A  la  gauche  de  la  place  des  Citernes,  se  voient  les  restes  de  «  «/ 
Alcazaba  »  ou  de  la  citadelle.  (Voy.  PL  ;>  et  PL  31.)  Aujourd'hui 
la  citadelle  est  devenue  un  bagne.  Laissant  sur  notre  gauche  le 
palais  de  Charles  V,  et  passant  par  la  ncalle  Real  n  rue  Royale  , 
nous  passons  devant  l'église  de  la  paroisse,  et  nous  nous  trouvons 
dans  la  m  calle  de  san  Francisco  »  (rue  Saint-François',  qai  nous 
conduit  à  l'Alhambra  alla.  Quelques  maisons,  de  beaux  jardias  et 
un  couvent,  occupent  toute  cette  partie  de  la  forteresse,  où  H  y 
avait  autrefois  la  grande  mosquée  et  la  maison  du  cadi,  qui  exis- 
taient encore  à  l'époque  de  la  première  invasion  française,  mais 
dont  on  chercherait  en  vain  aujourd'hui  les  traces. 

Ainsi,  le  palais  de  l'Alhambra  au  Nord,  des  jardins  et  descoo- 
stroctions  modernes  à  l'Est  et  au  Midi.  l'Aleazaba  a  gauche,  et 
le  palais  de  Charles  V  avec  l'église  paroissiale  au  centre,  voilA  la 
disposition  générale  des  constructions  qui  occupent  l'étendue  li- 
mitée par  les  murs  de  l'ancienne  forteresse. 

Les  Murs  et  les  Toubs  de  l'E^ceitjte  de  la  Fobte>es$b. 

Les  murs  de  l'enceinte  sont  garnis  de  tours,  comme  nous  l'avons 
dit  ;  au  Sud,  du  cdté  de  la  plaine,  elles  servaient  surtout  à  la 
défense  ;  mais  du  côté  Nord,  où  l'escarpement  de  la  BMMlagae 
offrait  une  défense  naturelle,  on  y  avait  établi  des  habitattoat 
charmantes  pour  le  sultan  et  son  harem.  La  plus  importante  de  en 
tours  était  celle  de  Comarès  (PL  59,  n*  13,  et  PL  31  ^  dans  laquelle 
se  trouve  la  célèbre  Salle  des  Ambassadeurs.  «  Le  caractère  pitto- 
«  restiue  mais  sévère  de  ces  tours,  dit  M .  0«  en  Jones,  ne  donne 
T.  V.  34 


»»1 


Rt;VUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


532 


«  aucun  indice  du  luxe  et  de  l'art  qu'on  trouve  à  leur  intérieur  : 
n  elles  sont  faites  à  l'extérieur  comme  les  palais  des  anciens  Égyp- 
M  tiens,  pour  en  imposer  au  peuple  et  faire  respecter  le  roi  qui  y 
«  demeurait  ;  tandis  qu'à  l'intérieur,  les  fleurs,  les  fontaines,  les 
«  mosaïques  de  porcelaine  et  le  stuc  doré,  servaient  toujours  à 
«  rappeler  au  maître  de  cent  façons  différentes  que  son  bonheur 
.(  venait  de  Dieu.  L'architecture  des  Arabes  est  essentiellement 
«  religieuse ,  —  fruit  du  Koran ,  comme  l'architecture  gothique 
«  l'est  de  la  Bible. 

a  La  défense  de  représenter  aucun  être  animé  contribuait  aussi 
«  à  leur  faire  chercher  une  décoration  à  part,  composée  des  inscrip- 
«  lions  du  Koran  entremèléesd'ornements  géométriques  etde  fleurs, 
((  non  copiées  directement  d'après  nature,  mais  traduites  par  l'es- 
<(  tille  ;  —  car  il  semblerait  que  les  Arabes,  en  changeant  leur  vie 
«  errante  pour  une  vie  sédentnire,  n'avaient  abattu  leurs  tentes  pri- 
«  mitives  que  pour  les  redresser  dans  de  plus  grandes  proportions 
((  et  dans  des  conditions  de  plus  grande  durée,  et  avaient  apporté 
((  dans  leurs  habitations  fixes,  et  sons  une  nouvelle  forme,  les  dra- 
«  perles  et  les  châles  de  cachemire  qui  ornaient  leurs  premières  dc- 
(  meures,  changeant  le  màt  de  la  tente  en  colonne  de  marbre,  et  le 
ic  tissu  de  soie  en  plâtre  doré. 

Il  y  avait  autrefois  quatre  entrées  à  la  forteresse  de  l'Alhambra  : 
1°  \a.  Puerla  de  Juslicia  oa  Porte  de  la  Justice  (Voy.  la  légende 
delà  PI.  29, dans  laquelle  l'absence  d'un  numéro  d'ordre  fait  re- 
connaitre  les  tours  qui  n'ont  pu  être  figurées  dans  le  dessin.  Comme 
les  constructions  auxquelles  renvoie  la  légende  sont  désignées  par  la 
suite  naturelle  des  nombres,  à  partir  delà  porte  de  la  Justice,  n"  r, 
on  devine  approximativement  la  position  de  celles  qui  ne  figurent 
pas  au  dessin)  ;  2"  la  Torre  de  los  Sieie  Sueloi  (la  Tour  des  Sept 
Étages  )  ;  3°  la  Torre  de  las  Itcijes  eatolicos  [\n  Tour  des  Rois  ca- 
tholiques) ;  et  4°  In  Torre  de  las  Armas  (la  Tour  des  Armes)  dans 
l'Alcazaba  (cette  tour  ne  se  voit  pas  dans  notre  plan,  elle  est  plus 
à  gauche  que  la  tour  16).  La  Porte  de  la  Justice  était  autrefois,  et 
est  encore  aujourd'hui,  l'entrée  principale  de  la  forteresse.  Comme 
toutes  les  autres  tours  de  l'Alhambra,  elle  est  bâtie  en  béton;  les 
jambages  de  la  porte  sont  en  marbre  blanc,  et  l'arc  de  la  porte,  qui 
est  en  brique  ainsi  que  les  tympans,  forme  l'ogive  dit  a  en  fer  à 
cheval.  » 

Au-dessus  de  la  porte,  à  l'intérieur,  se  trouve  une  inscription 
en  deux  lignes,  dont  voici  la  traduction  d'après  M.  Pasqual  de 
Gayangos  : 

Cette  porte ,  appelée  Babu-sh-Shari'ah  (Porte  de  la  Loi),  — 
puisse  Dieu  faire  prospérer  par  elle  la  loi  d'/slam,  comme  il  en  a 
fait  un  monument  éternel  de  gloire,  —  fut  bàlie  par  les  ordre*  de 
notre  Seigneur,  le  Commandeur  des  Croyants,  le  juste  et  belliqueux 
Sultan  Abou  l-lladjadj  Yusuf,  fils  de  noire  Seigneur  le  pieur  et 
belliqueux  Sultan  A  bu-l-Walid  Jbn  Nasr  :  puisse  Dieu  recompenser 
ses  bonnes  actions  dans  l'observance  de  la  religion  et  agréer  ses  hauts 
faits  en  défense  de  la  foi!  El  elle  fut  fermée  (pour  la  première  fuis) 
dans  le  glorieux  mois  de  la  naissance  [de  notre  prophète)  l'an  sept 
cent  quarante-neuf.  Puisse  le  Tout-Puissant  faire  de  cette  [porte) 
un  boulevard  protecteur,  et  enregistrer  [son  érection)  parmi  let  im- 
périssables actions  des  justes! 

Sur  les  chapiteaux  des  colounes  on  lit  les  inscriptions  sui- 
vantes ;  sur  la  colonne  de  dj-oite  :  Louange  à  Dieu!  il  n'y  a  de  pou- 
voir ou  de  force  qu'en  Dieu;  sur  la  colonne  de  gauche  :  Il  n'y  a 
d'autre  Dieu  que  Dieu,  et  Mahomet  est  son  prophète. 

Selon  M.  Pasqual  de  Gayangos,  la  Porte  de  Justice  était  ainsi 
appelée  parce  que,  conformément  à  un  ancien  usage  généralement 


répandu  en  Orient,  les  rois  de  Grenade  venaient  quelquefois  s'y  as- 
seoir pour  administrer  la  justice  à  toutes  les  classes  de  leurs  sujets. 
L'avant-bras  avec  sa  main,  qu'on  voit  sculptés  en  relief  sur  la  face 
extérieure  de  la  clef  de  l'arc  de  cette  porte,  a  donné  lieu  à  une 
série  de  conjectures  plus  ou  moins  plausibles  ;  la  plus  probable  ce- 
pendant, d'après  l'avis  de  M.  Pasqual  de  Gayangos,  est  celle  assi- 
gnécpar  Echevarria  (Paseas  por  Granada,  voL  I,  p.  73)  :  qoe  par 
la  main  on  a  voulu  désigner  les  cin(|  principaux  commandements 
(le  la  foi  mahometane,  à  savoir  :  l'observation  du  jeune  du  Ra- 
niadhan,  le  pèlerinage  de  la  Mecque,  le  don  des  aumônes  habi- 
tuelles, l'acte  de  l'ablution  ,  et  en  dernier,  la  gnerre  contre  les  in- 
fidèles. Cette  conjecture  est  encore  fortifiée  par  ce  fait,  (jue  les 
femmes  et  les  filles  maures  avaient  l'habitude  de  portera  leur  cou 
de  petites  mains  d'or,  d'argent  ou  de  cuivre,  comme  le  prouve  l'in- 
jonction ou  pragmatique  de  Charles  V,  datée  de  lâ2.'>,  qui  leur  en 
défendit  l'usage. 

M.  Pasqual  de  Gayangos  donne  aussi  l'explication  symbolique 
de  la  clef  en  relief  qui  décore  les  portes  principales  de  plusieurs 
châteaux  bâtis  en  Espagne  par  les  Maures,  et  qui  est  flguree  sur  le 
linteau  de  la  deuxième  porte  qu'on  rencontre  en  traversant  la 
Puerto  de  Jusiicia.  C'était  un  signe  symbolique  usité  parmi  les 
Sufis,  dit-il,  et  qui  dénotait  l'intHligence  ou  la  sagesse,  qui  est  la 
clef  au  moyen  de  laquelle  Dieu  ouvre  les  ccruis  des  croyants  et 
les  prépare  a  la  réception  de  la  v  raie  foi.  Ce  signe  pourrait  aussi 
vouloir  dire  que  la  porte  ainsi  marquée  était  la  clef  de  la  forteresse. 
Quoi  qu'il  en  soit,  la  clef  se  retrouve  sur  la  principale  porte  de 
plusieurs  des  châteaux  bâtis  par  les  Maures  d'Espagne,  particu- 
lièrement après  l'arrivée  des  Almohades  :  témoin  l'Alcazaba  de 
Malaga  et  les  châteaux  d'Acala  del  Rio  et  de  Tarifa. 

pal41s  des  bois  uatbes  dans  lakcienne  fotekesse  de 
l'alhambsa. 

M.  0\scn  Jones  considère  les  débris  de  cette  partie  de  la  forte- 
resse, et' qu'on  appelle  aujourd'hui  Casa  Real  Maison  Royale), 
comme  une  très-petite  portion  de  l'ancien  palais.  H  paraîtrait 
même  qu'il  serait  très-diflicile  d'en  déterminer  les  limites  dans  l'état 
actuel  de  conservation  dn  monument  ;  toutefois,  d'après  ce  qui  reste 
de  la  galerie  à  deux  étages  à  l'extrémité  Sud  de  la  cour  de  l'Étang 
[Patio  de  la  Alberea)  (Voy.  PL  29),  on  peut  juger,  dit-il,  de  l'im- 
portance qu'adù  avoir  In  partiedrtruite  pour  faire  place  au  palaisdc 
Charli  s-Quint.  En  comparant  cet  édifice  avec  d'autres  résidences 
des  souverains  d'Orient,  telles  que  le  sérail  de  Constant! nople  ou 
celui  d'Andrinople,  il  est  convaincu  qu'il  a  l)eaucoup  perdu  de  son 
étendue  et  de  sa  magnificence,  etqu'il  manque  beaucoup  de  choses 
pour  le  rendre,  Jnns  son  ensemble,  aussi  parfait  que  la  portion 
qui  en  reste  l'est  dans  ses  détails.  On  ne  retrouve  aucune  trace  des 
nombreux  appartements  destinés  aux  gardes  et  aux  personnes  de 
la  suite,  et  cette  partie  du  palais,  plus  importante  encore,  le  ha- 
rem, a  entièrement  disparu.  Il  est  probable  qu'il  s'étendait  dans 
la  direction  de  la  Cour  des  Lions  [Patio  de  los  Leoncs]  (Voy.  PI.  2i»  > 
jusqu'à  la  Casa  de  Sanchez,  n"  1 1 ,  et  la  Torre  de  las  Infanlas,  ;i 
droite  de  la  tour  n"  10,  mais  hors  de  la  PI.  29;  car  on  retrouve 
encore  dans  ces  deux  tours  ruinées  des  restes  d'appartements,  pe- 
tits, mais  fort  beaux,  qui  paraissent  avoir  été  destinés  à  la  récep- 
tion des  sultanes  maures. 

Cour  de  l'Étang. — On  pénètre  aujourd'hui  dans  la  Casa  Real 
par  une  petite  porte  au  coin  Sud-Ouest  de  la  cour  de  l'Etang  [Pa-^ 
tio  de  la  Alberea),  près  du  palais  de  Charles-Quint  et  de  la  Place 


533 


REVUE  DE  L'ARCHITECTUBK  ET  DES  TRAVAUX  Pl'BMCS. 


&31 


(les  Citernes  [Plaza  de  los  Algibes),  et  l'on  se  trouve  dans  lu  Cour 
de  l'Etang  (Voy.  PL  29  et  PL  31). 

La  galerie  Nord  de  cette  cour  communique  avec  la  Sala  de  la 
Barca  (Salle  de  la  Barque),  qui  sert  comme  de  vestibule  à  la  Sala 
de  los  Ambasadores  (Salle  des  Ambassadeurs  établie  dans  la  Tour 
de  Comarès,  n°  i3).  Une  des  figures  de  la  PL  32  donne  une  idée  gé- 
nérale de  l'état  actuel  des  bâtiments  qui  entourent  la  Cour  de  l'E- 
tang; on  y  voit  la  galeriedu  Nord,  et  au  fond,  la  tour  de  Comarès. 

Les  fenêtres  au-dessus  de  la  porte  qui  donne  entrée  dans  la  Salle 
de  la  Barque,  par  la  galerie  Nord  de  la  Cour  de  l'Etang,  sont  gar- 
nies d:un  réseau  dont  les  jours  étaient  probablement  fermés  autre- 
fois pardes  verres  de  couleur,  et  dont  les  meneaux  étaient  exécutés 
en  plAtrc.  A  la  vérité,  on  ne  retrouve  aujourd'hui  aucune  trace  de 
verre  peint  dans  les  fenêtres;  mais  ce  qui  confirmerait  l'exactitude 
de  cette  conjecture,  c'est  que  sur  le  mur  de  face  sont  de  fausses 
fenêtres  de  la  forme  des  précédentes,  et  dont  les  parties  corres- 
pondant aux  jours  sont  peintes  de  diverses  couleurs.  On  trouve 
aussi  des  fenêtres  de  ce  genre  donnant  sur  la  Cour  de  l'Etang  et 
d'autres  donnant  sur  la  Cour  de  la  Mosquée  (PL  29,  n°  23). 

Les  inscriptions  qui  concourent  à  embellir  la  clôture  de  la  Cour 
de  l'Etang  et  qu'on  trouve  se  repliant  autour  des  croisées,  de  la 
porte  d'entrée,  etc.,  ont  toujours  le  même  caractère  de  fanatisme 
religieux  et  de  respect  hiérarchique  que  nous  connaissons: 

«  Annonce  aux  vrais  croyants  que  le    secours  divin  et  une 
prompte  victoire  sont  réservés  pour  eux. 
.    «  Dieu  seul  est  Dieu,  et  Mahomet  est  son  prophète. 

«  Dieu  seul  est  vainqueur. 

«  La  bénédiction  vient  de  Dieu. 

«  En  vérité,  Ibn  Nasr  est  le  soleil  de  cet  orbe  brillant  de  beauté  et 
de  splendeur. 

«Etc.,  etc.  etc.  » 
'  De  prime  abord,  tout  semble  fantaisie  et  caprice  dans  l'architec- 
ture arabe  de  l'Alhambra;  mais  une  étude  attentive  ne  tarde  pas  à 
démontrer  que  si,  en  effet,  les  artistes  ariibes  ont  fait  preuve  d'une 
admirable  richesse  d'imagination,  d'une  fantaisie  pleine  de  séduc- 


tion et  de  charme,  ils  ont  aussi  respecté  les  exigenen  de  la  con- 
struction et  établi  une  relation  tellement  intime  entre  la  décoration, 
la  construction  et  les  dispositions  réclamées  par  les  besoins  de  la  >  ie 
intérieure,  qu'on  est  parfois  embarrassé  pour  détenniner  laquelle 
de  CCS  causes  a  pu  prédominer  dans  la  composition  ;  on  se  deroaade 
si  on  a  décoré  la  construction,  ou  bien  si  on  n'a  fait  que  construire 
une  décoration. — On  ht-site  à  aflirmer  si  telles  découpures  ont  eu 
pour  objet  d'alléger  la  charge  d'un  tympan,  de  créer  un  charmant 
système  d'ornementation,  ou  bien  de  ménager  les  courants  d'air  et 
la  fraîcheur  si  désirable  sous  un  ciel  ardent.  C'est  qu'en  effet  toute» 
ces  causes  se  sont  concertées,  et  c'est  de  leur  action  synergique 
que  sont  nés  les  mille  détails  admirables  que  nous  admirons. 
La  Cour  de  l'Etang  nous  présente  un  exemple  qui  pourrait  ton - 
lever  toutes  les  questions  qui  précédent  et  qui  justifie  le  jof»- 
ment  que  nous  portons  sur  les  artistes  arabes.  On  admire  les 
élégantes  colonnes  qui  soutiennent  les  arceaux  des  paieries  au 
Nord  et  au  Midi,  on  s'étonne  de  leur  extrême  légèreté;  loin 
d'obstruer  la  vue,  elles  laissent  errer  les  regards  au  delà  d'elles. 
elles  aident  à  abriter  et  à  protéger,  mais  elles  n'emprisonnent 
pas.  Dans  les  climats  chauds  on  a  tant  besoin  d'air,  d'espace, 
que  l'aspect  seul  de  murailles  pleines  et  de  clôtures  massixes 
oppresse  la  poitrine  et  étouffe  la  respiration  :  aussi  les  colonnes  des 
galeries  sont-elles  si  grêles  qu'il  semblerait  que  le  marbre  blanc- 
dont  elles  sont  faites  est  doué  d'une  force  mystérieuse,  pour  que. 
faibles  comme  paraissent  ces  fûts,  ils  puissent  supporter  si  brave- 
ment la  charge  qui  Jes  surmonte.  Les  tympans  et  les  are»  sont 
d'une  grAce  et  d'une  légèreté  dignes  des  colonnes  qui  les  sup- 
portent; nous  voudrions  vous  les  faire  voir,  mais,  a  défaut  du  cha- 
peau magique  qui  transportait  son  propriétaire  là  où  le  voulait  sa 
fantaisie,  nous  ne  pouvons  que  recommander  à  nos  lecteurs  de 
consulter  les  beaux  dessins  de  MM.  Owen  Jones  et  J.  Goury. 
La  construction  des  arcs  et  des  tympans  mérite  d'être  étudiée  : 
elle  est  d'une  remarquable  simplicité  :  au-dessus  des  colonnes  sont 
biitis  des  piliers  en  brique  qui  portent  des  poitrails  en  bois  destines 
à  transmettre  la  charge  supérieure  sur  les  piliei-sV. la  F/g. ci-dessous'. 


Les  tympans  sont  fermés  par  un   réseau  composé  de  grandes 
briques  plates,  ou  carreaux,  posées  diagonalement,  de  manière  à 


former  une  série  de  losanges  auxquelles  sont  attachés  des  orne- 
ments à  jour,  en  plâtre,   qui,  tout  en   donnant  aux  arceaak 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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un  aspect  particulier  de  légèreté  et  d'élégance,  agitent  et  rafraî- 
chissent l'air  qui  les  traverse,  distribuant  partout  une  délicieuse 
fraîcheur. 

Ici  on  a  donc  orné  une  construction  d'une  parfaite  simplicité  ; 
on  a  aussi  construit  une  décoration  d'une  admirable  richesse, 
et  cette  décoration,  cette  construction,  réalise  un  appareil  des 
mieux  entendus  pour  satisfaire  aux  exigences  d'un  raffinement 
sensuel  qui  ajoute  à  la  santé  du  corps  et  à  l'énergie  de  l'àme. 

Cette  disposition  pourrait  donner  d'heureuses  inspirations  aux 
artistes  modernes. 

Salle  de  la  Barque  et  Salle  des  A  inbassadeurs.  Traversons  main- 
tenant la  Salle  de  la  Barque  [Voy.  PI.  29),  et  bien  que  les  orne- 
ments qui  en  décorent  les  parois  soient  d'une  merveilleuse  beauté, 
et  dans  un  état  de  conservation  plus  parfait  que  les  ornements 
des  autres  salles,  cependant,  comme  nous  ne  pouvons  en  donner 
ici  les  dessins  et  qu'une  description  ne  saurait  les  remplacer,  nous 
entrerons  tout  droit  dans  la  Salle  des  Ambatfadeurt,ou.  comme 
on  l'appelle  encore,  le  Salon  Doré  (n"  3). 

Cette  salle  forme  un  carré  d'environ  )  i  mètres  de  côté,  sur  18 
à  19  mètres  de  hauteur.  C'est  la  plus  grande  et  la  plus  imposante 
des  salles  de  lAlhambra,  quoique  dans  l'arrangement,  dans  la 
symétrie  des  détails,  elle  soit  moins  parfaite  que  la  Salle  dtt  Deux- 
Sœurs  (n"  %i,  PL  29). 

Le  plafond  actuel  de  la  Salle  des  Ambassadeurs  est  un  dôme  en 
bois,  orné  de  moulures  qui  s'entrelacent  les  unes  dans  les  autres 
d'une  manière  variée  ;  des  ornements  en  or  sont  peints  dans  les 
compartiments  sur  des  fonds  rouges  et  bleus. 

On  trouve  de  pareils  plafonds  sou»  les  arcades  de  la  Cour  de 
l'Étang  et  dans  la  Salle  de  la  Barciue;  mais  M.  Ovven  Jones  pense 
que  le  plafond  original  de  la  Salle  des  Ambassadeurs  était  en'plAtre 
et  de  forme  stalactite,  comme  celui  de  la  Salle  des  Deux-Sœurs, 
que  nous  verrons  plus  loin.  Le  plafond  actuel,  quoique  beau  dans  ses 
détails  et  remarquable  par  son  ingénieuse  construction,  parait  cepen- 
dant à  peine  digne  de  couronner  une  salle  aussi  magnilique.  Nous 
reprendrons,  du  reste,  cette  question  des  voûtes  de  l'Alhambra. 

Cour  des  Lions.  Quittant  la  Salle  des  Ambassadeurs  et  traversant 
la  Salle  de  la  Barque  et  la  galerie  Nord  de  la  Cour  de  l'Étang,  nous 
trouvons  sur  la  gauche,  près  la  galerie  Sud,  une  porte  qui  permet 
d'arriver  à  la  fameuse  Cour  des  Lions  [Patio  de  los  Leones]  (Voy. 
PL  31  et  PI.  29).  Ce  fut  dans  cette  cour,  devant  les  lions  de 
pierre  de  la  fontaine,  que  furent  mis  traîtreusement  <i  mort  les  chefs 
de  toutes  les  principales  familles  des  Abencerrages,  que  le  roi 
Boabdil  (Mohammed  XI)  avait  attirés  au  palais,  sous  le  prétexte  d'o- 
pérer une  réconciliation  entre  eux  et  leurs  ennemis  les  Zegris,  as- 
sassinat qui  priva  Grenade  d'un  grand  nombre  de  ses  plus  vail- 
lants guerriers,  de  ses  plus  fermes  défenseurs. 

La  Cour  des  Lions  est  un  parallélogramme  d'environ  30  mètres 
sur  15.  Elle  est  entourée  de  portiques,  et  un  pavillon  occupe  le 
milieu  de  chacun  de  ses  petits  côtés.  Les  arceaux  dis  galeries  et  des 
pavillons,  d'une  délicatesse  et  d'un  fini  parfaits,  sont  portés  par  128 
colonnes  de  marbre  blanc.  Les  ornements  sont  encore  parfaitement 
conservés,  mais  la  couleur  a  disparu  ;  car  les  badigeonneurs,  ici 
comme  en  France,  ont  profané  un  chef-d'œuvre  avec  leur  brosse 
impie;  dans  les  différentes  restaurations  que  le  palais  a  subies  de 
temps  à  autre,  les  murs  de  cette  cour  ont  été  empâtés  de  plusieurs 
couches  de  badigeon,  mais,  en  en  faisant  sauter  les  écailles,  on 
peut  encore  découvrir  des  traces  des  couleurs  primitives. 


Les  colonnes  sont  tantôt  isolées  et  tantôt  accouplées,  sans  qu'on 
ait  paru  chercher  aucune  disposition  symétrique.  M.  Owen  Jones 
prétend  que  cette  irrégularité,  loin  de  nuire  à  l'harmonie  géné- 
rale, est  d'un  effet  charmant.  Une  telle  singularité  mérite  d'être 
remarquée  et  confirme  la  théorie  exposée  par  nous  au  commence- 
ment de  notre  premier  article  sur  l'Alhambra,  relative  à  la  diver- 
sité des  principes  qui  président  à  la  composition  des  œuvres  d'art  dues 
à  des  races  différentes,  et  même  parfois  seulement  a  des  epo<jues 
différentes.  Vitruve  aurait  probablement  crié  anathème  sur  l'archi- 
tecte de  la  tour  de  porcelaine  de  Nankin,  et  celui-ci  aurait  témoi- 
gné, à  coup  sur,  peu  de  considération  pour  l'auteur  de  la  basilique 
de  Fane;  et  si  l'avis  du  créateur  de  la  Cour  des  Lions  pouvait  être 
connu,  il  serait  indubitablement  peu  favorableà  l'un  et  à  l'autre  des 
grands  artistes  que  nous  venons  de  nommer,  et  qui  ont  si  bien  con- 
couru cependant  au  développement  de  l'art,  chacun  dans  son  pays. 
C'est  que  l'art  a  ses  préjugés  :  car  l'art  a  sa  nationalité  et  sou  pa- 
triotisme, nationalité  moins  étroite  peut-être,  moins  exclusive  sans 
doute  que  celle  qui  nait  au  foyer  de  la  famille,  mais  qui  se  dessine 
de  la  manière  la  plus  tranchée  dès  que  les  génies  contrastés  des 
races  différentes  se  trouvent  en  présence.  Aussi  affirmons-nous 
sans  crainte  qu'une  véritable  doctrine  scientifique  de  l'art,  au  lieu 
de  poser  comme  règle  absolue  et  universelle  du  beau  l'expression 
des  sentiments  d'une  seule  race,  doit  chercher  l'expression  cor- 
respondant aux  sentiments  de  chacune  des  races  humaines,  sauf 
ensuite  ci  les  coordonner  dans  une  loi  suprême,  comme  toutes  les 
couleurs  de  l'arc-en-ciel  se  rt^ument  dans  la  lumière  solaire. 

Nous  avons  souvent  admiré  dans  nos  basiliques  du  Moyen-Age 
In  variété  des  chapiteaux  et  des  détails  d'ornementation,  qui,  à 
notre  avis,  communique  un  très-grand  charme  aux  édifices  de 
cette  époque;  nous  ne  voulons  donc  pas  mettre  en  doute  l'excel- 
lence du  jugement  porté  par  M.  Owen  Jones  sur  l'effet  du  grou- 
pement des  colonnes  de  la  Cour  des  Lions;  nous  aimons  mieux 
y  croire,  puisque  nous  avons  sous  les  yeux  des  effets  analogues. 
Mieux  vaut  recueillir  ces  faits,  les  méditer,  et  soumettre  à  l'exa- 
men de  l'esprit  scientifique  la  solution  de  la  question  que  voici  :  — 
Pourquoi,  dans  les  monuments  anticjues,  sommes-nous  si  exigeants 
sous  le  rapport  de  la  symétrie,  de  la  régularité  géométrique  et  même 
de  la  répétition  fréquente  d'une  même  forme  (car  la  répétition  nous 
convient  dans  les  monuments  de  style  antique),  et  pourquoi,  par 
contre,  sommes-nous  si  insatiables  de  formes  variées  et  imprévues 
dans  les  édifices  indiens,  arabes,  gothiques,  etc.  ? 

Mieux  vaut  expliquer  le  phénomène  que  de  le  nier,  comme  font 
chez  nous  à  la  fois  les  amateurs  exclusifs  soit  du  Moyen-Age,  soit 
de  l'Antiquité;  et  cette  explication,  nous  la  tenterions  ici,  n'était  la 
longueur  d'une  telle  digression.  Profitons  toutefois  de  cette  occasion 
de  protester  contre  l'élroitesse,  la  roideur  et  l'insuffisance  de  toutes 
les  doctrines  exclusives  qui  procèdent  par  voie  de  négation.  Il  ne 
suffît  pas  de  nier  la  légitimité  d'un  art,  d'un  style  :  cet  art,  ce 
style,  a  enfanté  des  œuvres;  il  convenait  donc  dans  un  certain 
lieu,  à  une  certaine  époque,  à  tel.  ou  tel  peuple  : — là  est  un  Fait. 

Quelle  est  la  loi  de  relation  entre  ce  Fait,  c'est-à-dire  ce 
caractère  d'art,  ce  style,  le  peuple  qui  l'adopta,  les  lieux,  et  les 
temps  qui  l'ont  fait  naître,  etc.?  —Voilà  une  Qcestion. 

Une  négation  n'est  pas  une  solution  ;  en  pareille  circoustance, 
elle  est  tout  simplement  une  déclaration  d'impuissance. 

Reprenons  notre  description.  Les  chapiteaux  des  colonnes  de  la 
Cour  des  Lions,  bien  que  semblables  dans  leurs  contours,  offrent 
une  grande  variété  dans  leurs  feuillages;  et  quoique  le  même  des- 


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sin  soit  répété  plus  d'une  fois,  il  ne  parait  pas  qu'on  ait  cherché  à 
établir  un  arrangement  symétrique  dans  leur  agencement. 

Les  toits  sont  modernes  et  en  tuiles  rouges  ;  M.  Owen  Jones  pense 
qu'ils  ont  dû  être  primitivement  en  tuiles  vernies  et  de  diverses, 
couleurs.  Cette  supposition  doit  être  exacte,  car,  d'un  côté,  lusage 
constant,  dans  les  édifices  arabes,  d^s  terres  cuites  vernies,  joint 
au  grand  amour  de  la  couleur  qui  dominait  les  artistes  arabes,  et, 
de  l'autre  côté,  les  exigences  de  l'harmonie,  font  aisément  adopter 
cette  opinion. 

Les  arceaux  et  les  tympans  de  la  Cour  des  Lions  ressemblent, 
dans  leur  construction,  à  ceux  de  la  Cour  de  l'Étang. 

La  célèbre  Fontaine  des  Lions  est  au  eenti'e  de  la  cour  ;  mais 
nous  ne  nous  en  occuperons  pas  aujourd'hui.  Ayant  l'intention 
d'en  mettre  le  dessin  sous  les  yeux  de  nos  lecteurs,  nous  réserve- 
rons nos  observations  pour  le  moment  où  la  gravure  sera  prête. 

Salle  des  Deux-Sœurs  [PI.  29,  n"  24).  Passons  dans  la  Salle 
des  Deux-Sœurs  [Salade  las  Dos  Hertnanas];  elle  se  trouve  au 
Nord  de  la  Cour  des  Lions.  Cette  salle  paraît  avoir  fait  partie  des 
appartements  privés  des  rois  maures.  Les  alcôves  ou  chambres  à 
coucher  de  chaque  côté  de  la  Salle,  avec  la  charmante  suite  d'ap- 
partements de  l'étage  supérieur,  lui  donnent  beaucoup  plus  le  ca- 
ractère d'une  résidence  que  n'a  la  salle  des  Ambassadeurs,  qui 
était  sans  doute  la  salle  de  réception,  comme  l'indique  le  nom  que 
la  tradition  lui  donne.  Cette  salle,  avec  les  alcôves  et  corridors 
qui  en  dépendent,  est  la  plus  remarquable  de  toutes  les  parties  du 
palais,  par  la  beauté  et  la  symétrie  des  ornements  ;  et  les  plafonds, 
en  forme  de  stalactite,  sont  les  modèles  les  plus  parfaits  de  ce  mode 
curieux  de  décoration  (Voy.  PI.  33).  Les  couleurs  des  ornements 
sont  en  général  bien  conservées  ;  partout  on  pourrait  les  détermi- 
ner avec  une  certitude  parfaite. 

DE  LA    CONSTBUCTIOM  DES   VOUTES    STALACTITES. 

C'est  ici  peut-être  le  lieu  de  dire  quelque  chose  de  la  nature  de 
ces  voûtes  en  stalactite,  voûtes  composées  d'un  petit  nombre  d'é- 
léments, mais  qui,  par  la  variété  des  positions  qu'on  peut  leur 
donner,  les  uns  par  rapport  aux  autres,  offrent  à  l'œil  les  combi- 
naisons les  plus  diverses.  La  découverte  du  système  des  voûtes 
arabes  est  due  à  M.  Owen  Jones,  et  comme  ces  voûtes  diffèrent  en- 
tièrement de  toutes  les  autres  que  nous  connaissons,  nous  repro- 
duirons ici  le  texte  même  de  la  description  que  M.  Owen  Jones  en 
a  donnée. 

«  Ces  voûtes  sont  composées  de  nombreux  prismes  de  plâtre, 
«  unis  par  leurs  Surfaces  latérales  contigués.  Toutes  ces  figures 
«  se  réduisent  à  sept,  qui,  en  plan,  se  réduisent  encore  à  trois 
«  formes  primaires  :  le  triangle  rectangle  À  (Voy.  PI.  34),  le  pa- 
«  rallélogramme  rectangulaire  fi,  et  le  triangle  isocèle  C.  Dans  ces 
«  figures,  les  côtés  aa,  ah,  àc,  sont  égaux;  ba  est  égal  à  66,  et 
«  l'angle  au  sommet  du  triangle  isocèle  C  est  égal  à  45".  » 

Le  triangle  rectangle  A  correspond  à  trois  éléments  dont  nous 
désignerons  les  élévations  ainsi  :  A\,  A2,  Ai. 

Le  triangle  isocèle  C  correspond  aussi  à  trois  éléments  que 
nous  désignerons  par  C  I,  C  2,  6'  3. 

C  3  est  un  parallélogramme  dont  le  plan  se  compose  de  deux 
triangles  isocèles. 

Le  rectangle  B  ne  correspond  qu'à  un  seul  élément  que  nous 
désignerons  par  la  lettre  B,  comme  son  plan. 

Les  courbes  xxx...  sont  partout  les  mêmes,  d'où  on  peut  voir. 


dit  M.  Owen  Jones,  que  chacune  des  sept  flgures  se  combine  égale- 
ment bien,  par  chacun  de  ses  côtés,  avec  les  six  autres  figorM,  ce 
qui  les  rend  susceptibles  de  combiuaisons  géométriques  auMi  va- 
riées que  les  combinaisons  mélodiques  résultant  de  l'emploi  des 
sept  notes  de  la  gamme  diatonique  musicale. 

Les  plafonds  coniques  de  la  SaUe  du  Tribunal  (Voy.  PL  39),  de 
la  SaUe  des  Deux-Steurt  (n°  24),  et  de  la  Salie  de*  Abenetrragtt 
(n°  2^),  témoignent  puissamment  de  l'effet  grandiose  obtenu  par 
l'emploi  de  ces  simples  éléments.  Nous  donnons,  PI.  33,  le  plan 
et  la  coupe  de  la  voûte  de  la  Salle  des  Deux-Sœurs.  Dans  ce  des- 
sin, la  voûte  repose  sur  des  colonnes  dont  les  arcs  sont  construits 
d'après  les  mêmes  principes  que  la  voûte.  Près  de  cinq  mille  pièces 
prismatiques,  nous  n'osons  pas  les  appeler  des  claceaux,  entrent 
dans  la  composition  de  la  voûte  de  la  Satie  des  Deux-Sœura,  et 
quoiqu'elle  ne  soit  qu'en  plâtre,  consolidée  par-ci  par-là  au  moyen 
de  roseaux  ,  cependant  il  n'y  a  point  aujourd'hui,  dans  tout  le  pa- 
lais, de  partie  qui  soit  mieux  conservée. 

La  voûte  de  la  Salle  de  la  Barque  est  un  dôme  en  bois,  décoré  de 
dessins  formant  des  entrelacs  d'une  très-grande  beauté.  Elle  s'ap- 
puie sur  des  pendentifs  qui  se  terminent  contre  les  grands  arcs 
transversaux  construits  a  chaque  extrémité  de  la  salle  (pour  mieux 
comprendre  cette  disposition,  consulte?,  laforme  de  la  salle,  PI.  29) 
Ces  pendentifs  sont  construits  au  moyen  des  sept  éléments  que 
nous  avons  fait  connaître,  et  la  PI.  33,  qui  donne  le  plan  et  l'é- 
lévation d'un  de  ces  pendentifs,  fait  voir  In  position  occupée,  dans 
ce  cas  spécial,  par  chacun  des  éléments  constitutifs  des  voûtes 
arabes,  et  complète  les  notions  que  nous  voulions  donner  sur  ees 
curieuses  constructions. 

Dans  le  sixième  volume  de  la  Revue,  nous  nous  remettrons  en 
route  pour  visiter  les  autres  parties  de  la  Forteresse  de  r.\lham- 
bra,  car  il  noys  reste  encore  à  voir  des  choses  très-intéressantes. 

Ces* a  DALY. 


TROIS  JOORS  A  ROUI 


(*•  AaTICLLl 


(•)• 


SoaaAiiiK.  —  S«int4)ueD  :  *ui  «elufl  de  cH  Millee;  — Je»  toon;— rcMaaraiwa  jt»- 
j,.l^,.;  _  les  poruilt,  —  tour  dilc  la  r»«ii»*r«  ««mt  Cttrrt  «l  aulm  »ie«i  MMt;  — 
tour  centrale  de  Sainl-Ouen  ;  —  le»  abal-foos;  — le»  gargoaiTle» ;  —  èalerinw  fc 


(t)  J'»i  reçu  «le  notre  honorable  confrère  M.  Courtier ,  on»  kOl*  ntMi** 
i  la  première  partie  de  cet  article.  Après  avoir  donné  une  »ffl%b»a»m  MMe 
bienveillante  1  quelques  passages  de  cette  notice,  H.  Go»rU«r  ■'appmd. 
au  sujet  de»  constructions  parasites  qui  obstruent  l«*i 
le  conseil  municipal  de  cette  ville  avait  pri.s  en  181»,  la  I 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


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Sjinl-Ouen; -tombe  dAleiandrc  de  Bcriieval;-étal  .le  rornemeiilalion  «culpléc 
cl  peinte  des  voûte,  et  de.  piliers  ;  -  grille  du  chœur;  -  matériaui  qu.  oui  servi 
àlaco»slrucliondcSaint-Onon;-la  pierre; -le  plomb  et  le  fer;-  mauvais 
scellement  ;  -  charpente  de  Sainl-Ouen  ;  -  sa  description  ;  -  impfll  «ur  le.  vi«t- 
icurs.  —  Un  hôtel  du  XV!»  «ii^clc  ;  —  mutilation  de  cet  ediOce.  —  Sainl-llaelou,  — 
déscncombrement  de  ses  portail.;  -  harmonie  de  toutes  les  parties  de  ctle 
église;-les  porte.;-  les  vitraux.  -  Palais-dc-Justice.  -  llol.l  de  Uuurgtlu- 
roulde.-  Musée  des  Antiques.  -  Statue  de  Boïeldicu.  -  Église  de  Bon-Secours; 
—  «a  position;  — description  de  lédince; -- le»  vitraux;  —  luic  des  inalériaui 
employés;  —  les  Toutes.  —  Chemin  de  fer  de  Rouen  au  Havre  ;  -  mauvaise  exé- 
cution des  travaux  d'arl;  —  mauvaise  qualité  des  briques  employées. 

Saint-Ouen.  —  Cet  édifice  si  svelte  et  si  gracieux  nous  montre 
toujours  les  ruines  anticipées  de  sa  façade  principale,  et,  quoique 
les  Rouennais  annoncent  son  achèvement  comme  chose  presque 
prochaine,  je  crains  bien  qu'ils  ne  se  fassent  trop  illusion. 

Si,  après  avoir  admiré  la  belle  tour  qui  couronne  la  croisée  de 
l'église,  ou  abaisse  ses  regards  sur  les  arrachements  des  deux  tours 
du  portail,  on  regrette  bien  plus  vivement  encore  que  ce  portail 
soit  resté  inachevé.  A  voir  la  beauté  de  l'une  on  se  fait  une  idée 
de  ce  qu'eussent  été  les  autres. 

Si  le  témoignage  de  l'histoire  ne  nous  apprenait  que  ces  tours 
n'ont  été  que  commencées ,  j'aurais  eu  la  tentation  de  soutenir 
qu'elles  ont  été  démolies  ,  car  on  ne  peut  y  voir  un  bloc  de  pierre 
susceptible  de  recevoir  de  la  sculpture  et  qui  n'ait  été  achevé,  soit 
à  l'intérieur,  soit  à  l'extérieur,  si  voisin  qu'il  soit  des  arrache- 
ments. Ici  ce  sont  des  clochetons,  des  niches,  des  dais  ou  des 
moulures  ornées;  là  des  culots  richement  sculptés,  quoiqu'ils 
n'aient  jamais  porté  la  première  assise  de  la  naissance  des  ogives 
qu'ils  devaient  soutenir,  et  cependant  tout  cela  a  reçu  la  dernière 
main.  Doit-on  eu  conclure  que  les  constructeurs  gothiques  faisaient 
toutes  leurs  sculptures  avant  la  pose  des  pierres,  ou  bien  que  les 
sculpteurs  travaillaient  côte  à  côte  avec  les  maçons?  Je  serais 


(Icmamlcr  la  démolition  de  toutes  les  constructions  de  cette  espèce.  Le  con- 
seil des  bâtiments  civils,  dont  M.  Gonrlier  est  un  des  principaux  membres, 
a  fortement  appuyé  la   proposition  du  conseil  municipal. 

Je  joins  bien  volontiers  mes  félicitations  i  celles  que  M.  Gourlier  adresse 
au  conseil  niuiûcipal  de  Rouen,  pour  une  intenllon  si  méritoire;  mais  Je 
regrette  bien  vivement  que  depuis  plus  de  vingt  ans  elle  ait  été  à  peine  sui- 
vie d'effet. 

M.  Gourlier  m'annonce  aussi  que  le  flanc  septentrional  tout  entier  des 
cathédrales  de  Troyes  et  de  Sens  vient  d'être  débarrassé  des  coDslructions 
qui  l'encombraicnl. 

Je  regrette  de  ne  pouvoir  donner  textuellement  la  lettre  de  M.  Gour- 
lier. Les  paroles  d'un  liomnic  aussi  liaut  placé  dans  la  hiérarchie  adminis- 
trative des  bâUments  publics  eussent  pu  produire  une  juste  émulation  parmi 
les  conseils  municipaux  dts  autres  villes  de  France  et  provoquer  le  déblaie- 
n-M>nt  général  des  édifices  publics,  obstrués  d'une  manière  si  flcheuse  depuis 
des  siècles. 

Félicitons  le  conseil  des  bAtiinenls  civils  de  la  louable  insistance  qu'il  met 
à  demander  l'enlèvement  des  coniructions  parasites  qui  enlacent  la  plupart 
de  nos  églises  du  Moyen-Age,  et  faisons  des  vœux  pour  que  le  conseil  mu- 
nicipal de  Paris  ajoute  aux  sages  mesures  qui  émanent  si  souvent  de  ses  dé- 
libérations, celle  de  débarra.sser  les  édifices  publics  de  celle  ville  des  bâ- 
tisses qui  les  encombrent.  Un  si  bel  exemple  donne  par  la  capitale  ne  pourrait 
manquer  d'être  suivi  par  les  autres  villes  de  France. 

Kl,  afin  que  la  manie  de  rétablir  ces  constructions  déshonorantes  puisse 
difficilement  renaître  à  l'avenir ,  je  voudrais  que  l'on  gravât  une  inscription 
ineffaçable  sur  les  murs  des  édifices,  â  remplacement  même  où  étaient  les  bara- 
ques. Tout  en  flétrissant  en  termes  énergiques  le  déplorable  usage  d'encombrer 
de  cette  manière  les  flancs  des  édifices  publics,  cette  inscription  rappellerait 
la  délibération  du  conseil  municipal  qui  aurait  voté  leur  enlèvement,  et  les 
noms  des  citoyens  qui  auraient  provoqué  cette  mesure,  ainsi  que  les  prin- 
cipales circonstances  qui  auraient  pu  accompagner  ce  fait  important. 


tenté  de  croire  que  l'un  et  l'autre  de  ces  moyens  étaient  en  usage  ; 
je  ne  me  rappelle  pas  avoir  jamais  remarqué  de  sculptures  simple- 
ment épannelées  dans  les  édiflces  de  style  ogival.  Que  de  pré- 
cautions ce  système  devait  exiger,  et  combien  les  maçons  d'alors 
étaient  soigneux,  comparés  aux  maçons  d'aujourd'liui!  Ou  bien 
esl-il  plus  croyable  que  la  cessation  des  travaux  des  tours  du  por- 
tail ayant  été  ordonnée,  l'on  termina  néanmoins  les  sculptures? 
cela  est  peu  probable. 

On  remarque  sur  plusieurs  faces  de  ces  tours  des  refouillements 
faits  avec  soin  et  légèrement  taillés  en  queue  d'aronde.  Dans  la 
place  qu'ils  occupent,  ils  étaient  nécessairement  destinés  à  recevoir 
des  culots,  des  dais,  des  encorbellements,  etc.,  munis  de  tenons 
qui  devaient  s'ajuster  dans  ces  refouillements.  Ceci  prouve  jus- 
qu'à l'évidence  qu'une  grande  partie  des  corps  saillants  étaient 
sculptés  à  Intelier  et  ensuite  incrustés  dans  les  murs  (l).  On  de- 
vait avoir  une  série  de  panneaux  pour  les  tracés  des  incrustations, 
afin  que  les  parties  saillantes  et  rentrantes  s'ajustassent  sans  tik- 
tonncments.  Les  refouillements  sont  faits  avec  une  grande  pré- 
cision. 

Quelques  personnes  blAment  la  disposition  diagonale  de  ces 
tours  et  ne  parlent  de  rien  moins  que  de  raser  ce  qui  existe  pour 
les  reconstruire  sur  un  nouveau  plan.  Mais  n'ei'it-on  pas  d'auti-es 
raisons  pour  conserver  ce  qui  existe  que  parce  que  cela  existe  et 
que  telle  était  lidée  de  l'auteur  du  monument,  il  ne  faudrait  rien 
changer.  Cette  disposition,  pour  être  insolite,  n'en  est  pas  moins 
susceptible  de  faire  im  très-bon  effet,  non  quoique,  mais  parce  que 
diagonale,  pour  parodier  ici  les  paroles  d'un  de  nos  modernes  bom* 
mes  d'État.  Tous  les  piliers-butants  de  la  nef  côté  du  Sud  présentent 
une  arèle  à  l'extérieur  au  lieu  dune  face  plane.  Cette  disiMJsilion 
diagonale  est  certainement  plus  gracieuse  que  celle  des  piliers  du 
Nord  et  de  l'abside,  qui  sont  placés  carrément.  A  Saint-Nicaise,tous 
les  piliers-butants  du  chevet  de  l'église  se  présentent  en  diagonale  . 
et  sont  d'une  grande  légèreté  (2).  Celte  disposition  donne  plus  d'é- 
li'gance  aux  objets  de  forme  carrée;  faisons  donc  des  vœux  pour 
qu'on  achève  ces  tours  comme  elles  ont  été  commencées;  il  faut 
cet  accompagnement  à  la  merveilleuse  rose  de  l'Ouest,  dont  les 
meneaux  réunissent  la  gracieuse  symétrie  du  système  rayonnant 
aux  épanouissements  capricieux  de  la  verrière  flamboyante. 

Mais  d'autres  personnes  ne  veulent  d'aucune  espèce  de  restau- 
ration, de  pcurde  gftter  le  styleoriuinal  de  l'édifice.  M.  le  curé,  ses 
vicaires  et  tous  les  paroissiens  ont  beau  crier  en  chœur  que  leur 
église  tombe  en  ruine,  ou  bien  qu'elle  ne  peut  se  jiasser  de  clocher 
ou  de  tout  autre  accessoire  non  moins  utile,  on  leur  répond  que  , 
s'ils  n'ont  dans  leurs  archives  les  pians  originaux  des  objets  dé- 
truits ou  restés  sans  exécution,  ils  doivent  se  passer  de  ce  qu'ils 
demandent,  en  attendant  que  l'art  ogival  soit  suffisamment  étudié 


(1)  Nos  propres  observations  nous  permettent  de  considérer  ce  procédé 
comme  très-général  en  France,  à  partir  du  XIV*  siècle.  Les  crosses  surtout  qui 
ornent  les  pignons  ont  été  fréquemment  assemblées  à  tenons  et  à  mortaises. 
Nous  avons  reconnu  que  le  même  système  avait  été  adopté  dans  quelques  mo- 
numents anglais.  {IVole  de  SI.  Céiar  Daly.) 

(2)  A  propos  des  piliers-butants  de  Saint-Mcaise,  il  est  une  remarque  im- 
portante à  faire  :  c'est  que  six  de  ces  piliers  (trois  de  chaque  cOté)  se  sont  écrou- 
lés, je  ne  sais  à  quelle  époque,  ainsi  que  les  arcs-boutants  d'une  extrême  légè- 
reté qui  contre -butaient  les  voûtes  du  chœur.  Il  ne  paraît  pas  â  l'extérieur  que 
les  voûtes  aient  souffert  de  la  perte  de  ces  contre-forts,  qui,  de  huit,  sont  réduits 
â  deux  correspondants.  Cette  partie  de  l'édifice,  plus  élevée  que  la  nef,  est  du 
XV  siècle. 


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et  compris.  Comme  rien  n'est  éternel  en  ce  monde,  si  ce  n'est  l'in- 
constance iiumaine,  il  pourrait  l)ien  se  faire  que  quand  l'étude  de 
l'art  ogival  sera  parvenue  à  son  apogée,  personne  n'en  voulut  plus. 
Ce  serait  dommage,  sans  doute  ;  mais  cela  s'est  dt^à  vu.  Ahl  s'il 
ne  s'agissait  que  de  faire  des  choses  superflues  comme  ces  pein- 
tures telles  quelles,  composées  de  ronds,  de  carrés,  de  triangles 
rouges,  jaunes,  verts  et  bleus,  j'appuierais  volontiers  le  veto  des 
anti-restaurateurs  ;  mais  il  faut  bien  faire  l'indispensable  en  atten- 
dant que  la  science  du  Moyen-Age  puisse  marcher  sans  lisières  fl). 

Des  naissances  de  voûtes  incrustées  dans  le  pignon  de  l'Ouest 
de  Saint-Ouen ,  au-dessous  de  la  grande  rose  et  sur  les  faces 
obliques  des  deux  tours,  annoncent  qu'on  avait  l'intention  de  jeter 
un  porche  sur  le  vaste  ébrasement  qui  sépare  les  deux  avant- 
corps.  La  largeur  de  l'espace  étant  d'environ  20  mètres,  ce  porche 
devait  nécessairement  être  divisé  en  trois  arcades  par  des  piliers 
dont  on  retrouverait  probablement  la  fondation  en  fouillant  le  sol. 
Le  couronnement  de  ce  porche  devait  être  nécessairement  peu 
élevé,  en  forme  de  galerie  à  jour,  comme  celui  des  portes  d'entrée 
de  la  cour  des  Libraires  à  la  cathédrale;  autrement,  il  eut  caché  la 
belle  rosace  qui  est  au-dessus. 

On  a  restauré  le  délicieux  portail  du  transsept  du  Sud  dit  des 
Marmousets,  si  remarquable  par  les  deux  hardis  pendentifs  de  sa 
voûte  et  les  contre-arcalures  si  légères  de  son  arcftde  principale.  La 
restauration  m'a  paru  assez  heureuse,  et,  grâce  au  ton  de  vieille 
pierre  qu'on  a  su  donner  aux  parties  neuves,  elles  sont  fort  peu 
apparentes.  En  voyant  ce  charmant  portail,  on  regrette  fort  que 
le  pignon  du  transsept  opposé  soit  obstrué  par  les  lourdes  construc- 
tions de  l'Hôtel-de-Viile,  auquel  il  communique  par  une  porte  car- 
rée encore  plus  lourde.  II  ne  parait  pas  avoir  eu  d'autre  entrée; 
ainsi  l'on  n'a  rien  masqué  en  construisant  le  bâtiment  qui  sert  au- 
jourd'hui d'hotel-de-ville. 

Près  du  portail  des  Marmousets ,  le  presbytère,  édifice  du 
XVIII"  siècle  greffé  sur  un  soubassement  gothique,  est  bâti  trop 
près  de  l'église,  dont  il  masque  deux  verrières. 

Derrière  le  transsept  du  Nord,  et  à  l'angle  qu'il  forraeavec  l'Hô- 
tel-de-Ville,du  côté  du  jardin,  on  voit  encore  une  très-ancienne 
construction  en  forme  de  tour  demi-ronde  à  deux  étages,  dans  le 
style  roman  du  W  siècle,  et  percée  à  chaque  étage  d'une  fenêtre  eu 
plein-cintre,  dont  l'archivolte,  à  tore  rompu,  repose  sur  des  colon- 
nettes. 


(1)  Nous  lie  connaissons  pas  assez  bien  les  détails  des  travaux  projetés  à 
Saint-Ouen  pour  nous  prononcer  définitivement  sur  leur  convenance.  Toute- 
fois, nous  devons  déclarer  que  nous  ne  saurions  accepter  les  solutions  abso- 
lues que  nous  entendons  formuler  autour  de  nous  :  certains  veulent,  iiou-scu- 
lenient  consolider  nos  vieux  uionunienls:  ils  veulent  encore  tout  restaurer,  tout 
compléter.  On  comprend  le  sentiment  d'ordre  qui  les  domine,  et  au  nom  du- 
quel ils  parlent;  mais  la  irodid'on  aussi  a  son  importance  dans  la  vie,  et  il 
laut  tenir  couiptedes  nécessités  qui  en  dérivent.  D'autres  encore  ne  veulent  ricii 
restaurer,  tout  au  plus  accepteiU-lls  des  travaux  de  consolidation  ;  le  sentiment 
de  respect  qui  les  anime  pour  les  œuvres  de  nos  pères  et  la  splendeur  de  l'art 
passé  est  sans  contredit  à  la  fois  rationnel  et  poétique  ;  mais  si  le  passé  demande 
rbommage  de  nos  souvenirs  et  de  nos  respects,  le  présent  a  des  exigences 
impérieuses  qu'on  ne  saurait  méconnaître  impunément.  Puis  l'art  lui-même,  en 
dehors  de  toutes  les  considérations  de  lieux  et  de  temps,  veut  aussi  être  con- 
sulté, et  il  110  nous  semble  pas  l'eutondre  toujours  répéter  d'un  ton  absolu  et 
monotone  le  même  monosyllabe  :  Oui,  oui,  ou  non,  non.  Son  avis  varie  »ec 
les  circonstances.  Nous  reviendrons  sur  ce  sujet,  et  nous  ferons  comiailre  avec 
détail  ce  que  nous  pensons  de  la  question  des  restaurations.  Les  journaux  an- 
noncent que  Mi\I.  Victor  Hugo  et  de  Monlalembert  entendent  protester  contre 
l'aclièvcmcnt  projeté  de  Saint-Oncn.  (  'Vo(e  de  M.  César  Daly.) 


Ce  vieux  débris,  dont  ne  font  pas  mention  les  anciens  autenrs, 
est  vraisemblablement  un  reste  de  l'une  des  absides  latérales  'celle 
du  Nord]  de  l'église  Saint-Ouen  de  la  deuxième  époque,  construite 
en  lolG  par  Guillaume  Abbé,  fils  de  Richard  III,  duc  de  Norman- 
die, et  terminée  en  il 26.  Cette  supposition  ne  saurait  perdre  son 
évidence  parce  que  cette  tour  est  divisée  en  deux  étages  voAtes. 
On  voit  souvent  des  sanctuaires  élevés  au-dessus  du  sol  de  la  nef. 
afin  d'y  ménager  des  cryptes.  Cette  tour  renferme  aujourd'hui  le 
mécanisme  de  l'horloge  de  Saint-Ouen.  Elle  est  connue  sous  le 
nom  de  Chambre  aux  Clercs. 

Le  pilier-butant  du  côté  oriental  du  pignon  de  ce  transsept  est  à 
cheval  sur  le  mur  extérieur  de  cette  vieille  construction,  et  comme  il 
ne  coïncidait  pasexactementavecun  dosseret  appartenant  à  In  vieille 
tour,  on  a  racheté  le  porte-à-faux  latéral  par  une  déviation  oblique 
du  contre-fort  de  la  vieille  tonr,  à  l'instar  de  certains  tuyaux  de 
cheminée  en  avant-corps.  Cette  disposition  est  d'un  mauvais  effet: 
mais  de  ce  côté  de  l'église  on  parait  ne  pas  y  avoir  regardé  de  si 
près.  C'était  le  côté  contigu  au  couvent. 

A  la  suite  de  la  v  ieille  abside  et  en  suivant  le  flanc  de  l'église 
jusqu'à  la  tour  du  Nord-Ouest,  on  voit  une  suite  d'arcades  fort 
basses,  adossées  au  collatéral  du  Nord  et  dont  aucun  des  auteurs 
que  nous  avons  lus  ne  fait  mention.  Ces  arcades,  où  la  forme  ogi- 
vale est  presque  imperceptible,  sont  garnies  de  débris  de  meneaux 
du  X\"  siècle,  rapportés  par  incrustation.  Elles  ont  été  enterrées 
par  suite  de  l'exhaussement  du  sol  de  la  place.  Le  réduit  voâté 
qu'éclairent  ces  arcades,  servant  aujourd'hui  de  bûcher  et  de 
violon  au  corps  de  garde  des  gendarmes,  faisait  vraisemblable- 
ment partie  du  cloitre  de  labbaye.  Il  est  placé  exactement  dans  la 
même  position  par  rapport  à  l'église  que  le  clottre  de  la  cour  de 
l'Albane  à  la  cathédrale.  On  parle  de  restaurer  ce  vieux  débris;  tant 
mieux  ;  mais  il  y  a  des  travaux  plus  urgents ù  faire  à  Saint-Ouen. 

Parler  de  la  tour  centrale,  c'est  réveiller  l'admiration  de  to«* 
ceux  qui  ont  vu  cet  ouvrage  colossal  en  filigrane  de  pierre.  Sa 
partie  supérieure,  qui  se  termine  si  gracieusement  en  forme  de 
couronne  ducale  dentelée  de  fleurs  de  lis  alternant  avec  des  clo- 
chetons, est  à  ciel  ouvert  sur  une  vingtaine  de  mètres  de  hantear. 
à  partir  de  la  terrasse  en  plomb  qui  recouvre  l'extrados  de  la  cou- 
pole du  clocher.  Je  ne  pense  pas,  toutefois,  que  cette  terrasse  dàt 
être  la  couverture  définitive  de  la  voûte,  La  lunette  percée  au 
centre  de  la  coupole  du  clocher,  et  qui  reçoit  à  son  |>ourtour  le 
sommet  des  nervures  de  la  voûte,  n'a  certainement  pas  ete  faite  pour 
recevoir  tout  simplement  le  plancher  qui  l'obstrue  et  quisupporte  le 
plomb.  Peut-être  devait-elle  être  surmontée  d'une  lanterne  inté- 
rieure qui  n'a  pu  être  exécutée. 

Les  quatre  tourelles  qui  s'élèvent  anx  quatre  angles  de  la  tourcen- 
tiale  et  s'en  détachent  a  partir  du  point  où  elle  devient  octogoMle, 
appuient  leur  tête  amortie  en  forme  de  tiare  sur  la  tour  principale, 
au  moyen  d'arcs  rampants  déoou|)és  avec  «ne  delicatOK  extrtee. 
Ces  tourelles  sont  complètement  creuses  à  8  ou  10  mètres  «o-de»- 
sus  de  la  dernière  marche  de  l'escalier  qu'elles  renferment. 

Huit  fenêtres,  disposées  sur  les  quatre  faces  de  la  partie  moyenne 
de  la  tour  qui  forme  le  clocher,  laissent  largement  sortir  le  son  des 
cloches  qui  y  sont  renfermées.  Ces  baies,  au  lieu  d'être  de  simples 
arcades  géminées  comme  dans  la  plupart  des  campaniles,  sont  dé- 
corées de  meneaux  flamboyants  comme  les  plus  belles  verrières; 
aussi  rien  n'égale  In  richesse  de  cette  magnifique  tour. 

Dans  le  but  de  rabattre  le- son  des  cloches,  et  pour  empêcher 
l'intioduclion  de  la  pluie  dans  les  clochers,  les  coostrucUurs  du 


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Moyen-Age  ont  garni  les  fenêtres  de  presque  tous  les  clochers  d'es- 
pèces de  Persiennes  à  larges  lames  qui  dégénèrent  quelquefois  en 
une  série  de  petits  auvents  couverts  en  ardoises,  tuiles,  tavil- 
lons,  et  disposés  en  échelons  les  uns  au-dessus  des  autres. 

Ces  constructions  parasites,  connues  sous  le  nom  d'abat-sonn, 
obstruent  d'une  manière  déplorable  les  ébraseraents,  les  meneaux, 
les  colonnettes,  etc.,  des  arcades  souvent  si  belles  des  clochers  de 
style  ogival. 

l>'architecte  de  Saint-Ouen  a  esquivé  de  la  manière  la  plus  heu- 
reuse ce  grave  Inconvénient.  Les  parois  du  clocher  sont  doubles  et 
isolées.  Chaque  double  face  de  la  tour  est  percée  de  deux  fenêtres 
parallèles  et  correspondantes,  et  décorée  de  riches  meneaux  décou- 
pés de  la  même  manière.  Les  abat-sons  ont  été  placés  dans  les 
baies  de  la  paroi  intérieure,  dont  ils  enchevêtrent  les  meneaux, 
mais  les  doubles  fenêtres  extérieures  sont  entièrement  libres.  F.es 
abat-sons  se  trouvent  cachés  dans  l'ombre  par  les  meneaux  des 
fenêtres  qui  brillent  sur  le  premier  pian.  C'est  à  cette  ingénieuse 
disposition  que  la  tour  doit  la  pureté  de  son  ensemble. 

Comme  préservatifs  de  la  pluie,  j'approuve  ces  espèces  de  per- 
siennes;  mais  qu'on  les  place  de  manière  à  ce  qu'elles  laissent  libre 
à  l'extérieur  au  moins  la  moitié  de  l'épaisseur  des  meneaux,  et 
qu'on  les  peigne  d'une  couleur  sombre  en  harmonie  avec  la  teinte 
des  vides  qui  les  séparent.  On  ferait  encore  mieux  de  les  cacher 
par  des  panneaux  ou  claires-voies  en  fonte,  ainsi  qu'on  l'a  fait  aux 
clochers  de  Notre-Dame-de-Lorette  et  de  Saint-Vincent-de-Paul  à 
Paris.  Ces  grillages,  mis  en  harmonie  avec  le  style  de  l'édifice,  se- 
raient susceptibles  de  faire  une  très-belle  décoration  (t). 

La  corniche  de  la  nef  de  Saint-Ouen  est  beaucoup  mieux  con- 
servée que  celle  de  la  cathédrale,  quoi(iue  le  ehéneau  qui  la  sur- 
monte ne  soit  pas  garni  de  plomb.  Ce  ehéneau  est  fort  bien  disposé 
pourrécouleraentdeseaux.Desgargouillesjumelles,  placées  de  cha- 
que côté  des  clochetons  (|ui  surmontent  les  contre-forts,  déversent 
les  eaux  sur  le  comble  desbas-cùtês,  qui  sont  couverts  en  plomb. 

Au  milieu  de  chaque  travée,  le  fond  du  ehéneau  se  divise  en  deux 
pentes  opposées  convergeant  chacune  à  l'une  des  gargouilles  qui 
flanquent  les  clochetons.  Chaque  gargouille  n'est  donc  chargée 
que  des  eaux  d'une  demi-travée. 

Au  pourtour  de  l'abside,  les  gargouilles  sont  remplacées  pardes 
chéneaux  disposés  sur  le  dos  des  arcs-boutants,  qui  forment  alors 
gargouilles  rampantes.  Ce  changement  de  disposition  a  eu  lieu  à 
cause  des  combles,  qui  sont  différents. 

Nos  règlements  municipaux  ne  permettant  plus  de  déverser  les 
eaux  des  gouttières  sur  la  voie  publique  sans  l'intermédiaire  des 
tuyaux  de  descente,  il  devient  indispensable  de  supprimer  la  fonc- 
tion des  gargouilles  dans  nos  édifices  gothiques,  de  celles  du  moins 
qui  déversent  les  eaux  directement  dans  les  rues.  Quoique  ces  dé- 
versoirs fantastiques  donnent  du  pittoresque  à  nos  vieux  mo- 
numents, comme,  d'un  autre  côté,  ils  sont  une  source  de  dégrada- 
tions pour  les  édifices  eux-mêmes  à  cause  du  rejaillissement  des 
eaux  qui  en  proviennent  sur  la  base  des  murs,  et  que,  se  détachant 
quelquefois,  ils  peuvent  occasionner  de  graves  accidents,  on  fera 


(1)  On  rendrait  un  graiiil  service  aux  Ion  ride  Notre-Dame  el  de  Saint-Jacques 
de  Paris  en  les  délivrant  de  ces  détestables  olijels  qui  modifient  d'une  nianiiTe 
si  fâcheuse  l'aspect  de  ces«ion»menls.  On  semble  avoir  compris  cette  vérité  en 
établissant  les  pcrsiennes  de  la  tour  du  Nord  de  Notre-Dame, qui  sont  infini- 
ment moins  saillantes  qu'à  la  tour  du  SudT  et  l)eaucoup  moins  surtout  qu'à  la 
tour  de  Saint-Jacques,  où  elles  ont  des  proportions  exagérées. 


très-bien  de  les  supprimer  totalement,  même  ceux  qui  rejettent  les 
eaux  du  comble  de  la  nef  sur  les  toits  des  collatéraux,  ce  qui  néces- 
site de  les  couvrir  en  plomb  et  peut  causer  des  avaries  aux  murs 
de  la  nef  (i). 

L'intérieur  de  Saint-Oueu  est  d'une  grande  simplicité.  Sa  nef 
élancée  est  d'une  très-belle  coupe.  Malgré  leurs  proportions  assez 
sveltes,  les  quatre  piliers  de  la  croisée  n'ont  pas  éprouvé  la  cour- 
bure qu'on  remarque  en  général  aux  piliers  des  églises  des  XIIP, 
XIV  et  XV«  siècles,  et  qui  est  le  résultat  de  la  poussée  des  voû- 
tes des  collatéraux.  A  Saint-Ouen,  ces  voûtes  sont  cependant  fort 
élevées.  Le  poids  énorme  de  la  tour,  portée  par  les  piliers,  a  né- 
cessairement augmenté  leur  résistance  et  les  a  préserves  de  la 
poussée.  Aucun  des  piliers  de  la  nef  n'a  subi  de  poussée  sensi- 
ble (2). 

La  tombe  d'Alexandre  de  Berneval,  architecte  de  Saint-Ouen, 
et  celle  d'un  autre  artiste  (3),  qui  faisaient  partie  du  dallage 
d'une  chapelle,  ont  été  relevées  et  scellées  sur  la  face  du  mur  du 
fond  de  cette  chapelle.  C'est  une  idée  fort  louable,  sans  doute,  que 
celle  de  préserver  de  la  destruction  les  curieux  linéaments  gravés 
sur  la  face  de  ces  pierres  tumulaires,  qui  eussent  été  à  la  longue 
effacés  par  le  frottement  des  pieds  des  fidèles  ;  mais  il  eût  été  plus 
convenable  de  les  laisser  a  la  place  quelles  occupaient  et  de  les 
entourer  d'une  grille,  quitte  a  gêner  un  peu  le  service  de  la  cha- 
pelle, qui  ne  se  serait  pas  moins  fait  pour  cela. 

Lorsqu'une  tombe  recouvre  les  cendres  d'un  homme  célèbre, 
c'est  quelque  chose  de  plus  qu'une  simple  pierre,  à  part  le  mérite 
que  la  sculpture  aurait  pu  lui  donner.  Je  répéterai  à  ce  sujet  les 
éloquentes  paroles  de  M.  l'abbé  Bourassé ,  dans  son  Archéologie 

(1)  Nous  différons  d'avis,  quant  à  celte  suppression,  avec  notre  ami  M.  Jan- 
nlarU.  La  conservation  des  édifices  demanderait  sans  doute  que  partout  où 
l'écoulement  des  eaux  pluviales  se  fait  au  moyen  de  gargouilles,  on  établit  des 
tuyaux  de  descente  convenablement  disposés;  mais  il  nous  parait  tout  à  fait' 
indispensable  de  conserver  les  gargouilles  elies-niènies,  à  la  fois  pour  ne  pas 
se  priver  de  leur  effet  si  éminemment  pittoresque,  et  aussi  par  respect  pour  la 
pureté  du  style  gothique.  D'ailleurs,  les  arUsles  du  Moyen-Age,  au  moins  ceux 
du  XV',  et  peut-être  même  ceux  du  XIV<  siècle,  se  sont  frégueniment  servis 
eux-mêmes  de  ces  gargouilles,  uniquement  en  vue  de  leur  effet  piiti>res(|ue.  Ils 
en  ont  fait  qui  n'ont  jamais  pu  servir  i  l'écoulement  des  eaux,  des  gargouilles 
purement  décoratives. 

L'obstacle  sérieux  que  rencontre  la  rérorme  dont  nous  parlons  consiste  sur- 
tout dans  la  difficulté  qu'on  éprouve  à  établir  les  tuyaux  de  descente  sans  altérer 
le  caractère  des  édifices  gothiques,  ni  compromettre  leur  solidité  en  incrustant 
dans  les  murailles  des  tuyaux  pouvant  donner  lieu  à  des  fuites  dangereuses 
Ceux  de  nos  lecteurs  qui  pourraient  nous  fournir  quelque  renseignement  utile 
sur  les  moyens  de  vaincre  cette  difHculté,  rendraient  un  véritable  serrice  i  l'art 
en  nous  mettant  en  mesure  d'Instruire  nos  confrères  sur  ce  point.  En  établis- 
sant des  tuyaux  de  descente  pour  faire  le  service  des  eaux  pluviales,  nous 
sommes  d'avis  qu'on  devrait,  dans  certains  cas,  établir  leurs  orifices  supérieurs 
d'écoulement  i  un  niveau  inférieur  à  ceux  des  gargouilles,  de  façon  i  ce  que 
l'écoulement  des  eaux  se  fit  par  les  tuyaux  de  descente  dans  les  circonstances 
ordinaires,  et  que  les  gargouilles  elles-mêmes  pussent  offrir  un  moyen  complé- 
mentaire d'écoulement  dans  les  cas  exceptionnels  d'orage  considérable. 

Ce  qui  précède  ayant  élé  communiqué  à  M.  Janniard,  il  nous  a  appris  qu'il 
s'était  lui-même  occupé  de  celte  étude,  et  qu'il  comptait  nous  adresser  pro- 
chainement une  description  de  son  procédé.  (JVo/«  de  M.  Cétar  Daly.) 

(2)  Je  pense  que,  sauf  quelques  rares  exceptions,  les  quatre  piliers  de  la 
croisée  des  églises  ogivales  ont  éprouvé  un  bombement  plut  considérable  par- 
tout où  ils  ne  sont  pas  chargés  de  tours  ou  clochers  d'un  grand  poids.  Mais  il  y 
a  une  très-grande  variété  de  proportions  dans  l'épaisseur  et  la  hauteur  des  piliers. 
et  de  grandes  différences  dans  la  hauteur  des  collatéraux  ;  je  n'ai  pas  jusqu'ici 
fait  assez  d'observations  pour  établir  une  règle  générale  sur  ce  point. 

(3)  Voy.  les  dessins  de  ces  tombeaux,  /-'o'.  I  de  la  Revue,  col.  196. 


5'»5 


REVUE  DE  L'ARCHITKCTUHK  ET  DES  TRAVALX  PUBLICS. 


M« 


chrétienne.  Après  avoir  décrit  l'effet  pittorescjiie  des  tombes  de  ce 
genre,  qu'il  compare  à  un  tiipis  de  pierre,  il  ajoute  :  «  On  a  vu 
«  disparaître  peu  à  peu  de  nos  églises  ce  pavé  à  la  fois  histori(|ue, 
«  moral  et  religieux.  Ah  I  du  moins,  conservons  avec  respect  ce 
«  qui  existe  encore  !  Ne  brisons  pas  le  petit  nombre  de  pierres  tu- 
«  mulaires  échappées  au  marteau  destructeur,  ne  les  déplaçons 
«  même  pas  !  Un  tombeau  n'est  plus  qu'un  objet  de  vaine  décora- 
it tion  ou  de  simple  curiosité,  s'il  ne  couvre  les  restes  de  celui  dont 
«  il  conserve  le  nom.  Il  n'est  pas  décent  de  jouer  avec  les  tom- 
«  beaux ,  et  c'est  manquer  à  ce  qu'on  doit  aux  morts  que  de  les 
«  priver  de  la  pierre  qui  les  recommandait  aux  prières  des  fi- 
«  dèles.  » 

En  effet,  n'est-ce  pas  faire  de  la  conservation  aux  dépens  des 
convenances?  Puisqu'on  a  tant  fait  que  de  l'enlever  de  sa  place 
véritable,  la  tombe  de  Berneval  serait  beaucoup  plus  convena- 
blement dans  les  galeries  du  Musée  des  Antiques  de  Rouen,  que 
plaquée  contre  la  muraille  d'une  chapelle.  Là,  ce  serait  un  objet 
d'art  de  plus  ;  ici ,  c'est  un  contre-sens. 

Quand  on  examine  l'intérieur  de  la  nef  deSaint-Ouen,  on  re- 
grette de  ne  pas  voir  figurer  dans  les  niches  à  dais  qui  décorent 
le  fut  des  piliers  ,  les  nombreuses  statues  qui  sans  doute  les  occu- 
paient. Ces  statues  devaient  donner  de  la  richesse  à  l'intérieur 
assez  simple  de  cet  édifice.  Les  hautes  et  basses  voûtes  portent 
des  vestiges  de  peintures  ([ui  ont  presque  disparu.  Les  chapiteaux 
des  impostes,  les  frises  sculptées  au-dessus  et  la  galerie  intérieure, 
conservent  une  teinte  jaune  qui  ressemble  à  un  reste  de' dorure. 
Les  clefs  de  voûtes  et  l'extrémité  de  toutes  les  nervures  qui  \  abou- 
tissent sont  peintes  de  diverses  couleurs  sur  une  longueur  qui  parait 
varier  de  I""  à  1""  30.  Ce  n'est  qu'en  voyant  les  choses  de  près 
qu'on  pourrait  juger  si  ces  amorces  sont  des  commencements  ou 
des  restes  de  peintures  disparues  sous  le  badigeon  ou  par  le  grat- 
tage. Userait  toutefois  assez  bizarre  qu'on  n'eût  peint  que  les  clefs 
et  des  tronçons  de  nervures. 

Il  existe  des  vestiges  de  peinture  d'un  genre  analogue  aux  dé- 
cors de  théâtre  sur  les  tympans  des  arcades  du  chœur.  Ces  pein- 
tures, dans  lesquelles  ou  a  figuré  des  meneaux  gothiques  et  des 
anges,  forment  des  panneaux  triangulaires,  dont  lé  coté  tourné 
vers  l'archivolte,  au  lieu  de  suivre  les  contours  de  celle-ci,  est 
en  ligne  droite,  disposition  peu  gracieuse,  .le  crois  que  ces  pein- 
tures, déjà  presque  effacées,  sont  une  tentative  malheureuse  faite 
à  une  époque  de  décadence. 

Les  grilles  du  pourtour  du  chœur  sont  du  style  Louis  XV,  et, 
quoique  d'une  grande  richesse,  elles  font  là  un  bien  mauvais  effet. 
S'il  était  aussi  facile  de  trouver  des  fonds  pour  changer  une  chose 
choquante  que  de  faire  des  vœux  pour  sa  suppression,  je  deman- 
derais bien  vite  le  remplacement  de  cette  grille  par  une  autre  qui 
serait  en  harmonie  avec  le  beau  style  de  l'édifice.  Quand  un  objet 
de  détail  fait  un  contraste  trop  choquant  avec  le  caractère  général 
d'un  édifice ,  on  ne  doit  pas  se  préoccuper  trop  de  la  théorie  des 
faits  accomplis,  il  faut  élaguer  impitoyablement.  Kii  faisant  les 
nouvelles  grilles  en  fer  fondu,  le  produit  de  la  vente  des  anciennes 
couvrirait  une  grande  partie  de  la  dépense. 

Saint-Ouen  est  construit  en  grands  blocs  dune  pierre  blanche 
de  nature  crayeuse ,  mais  assez  dure ,  et  lardée  de  rognons  de  silex 
noir,  semblables  à  des  truffes  par  la  forme  et  par  la  couleur.  Il  pa- 
rait que  les  tailleurs  de  pierre  et  les  sculpteurs  ne  savaient  pas  at- 
taquer ces  rognons  ou  que  leurs  outils  n'étaient  pas  d'une  trempe 
convenable  pour  les  enlever  ;  car,  partout  où  ces  corps  étrangers 


se  sont  trouvés  à  la  surface ,  au  lieu  de  les  affleurer  avec  le  reste, 
ou  bien  de  les  arracher  et  de  remplir  le  trou  avec  une  pièce,  ils 
les  ont  laisses  en  saillie.  Dans  les  évidements  des  moulures  on  en 
voit  souvent  de  la  grosseur  du  poing  sortir  de  la  masse.  Seulement, 
dans  les  larges  surfaces,  on  les  a  cassés  presque  à  fleur,  et  ils  ne 
forment  plus  qu'une  légère  bosse.  Comme  nos  tailleors  de  pierre 
sont  plus  hardis  aujourd'hui,  on  fera  bien,  lors  du  grattage  du 
badigeon  intérieur,  de  faire  aussi  disparaître  les  disgracieuses  ex- 
crois.sances  que  je  viens  de  signaler. 
I  Cette  pierre,  qui  se  comporte  tri-s-bien  en  élévation,  parait 
souffrir  beaucoup  de  l'humidité.  Dans  les  parties  voisines  du  soF 
elle  a  pris  une  teinte  verddtre,  elle  est  remplie  de  nombreuses  cre- 
vasses qui  annoncent  la  décomposition  de  la  pierre  autant  que 
l'écrasement.  Leur  aspect  dégradé  m'a  fait  pressentir  avec  regret 
que  cet  édifice  ne  verrait  plus  s'écouler  autant  de  siècles  qu'il 
en  a  déjà  vu.  On  ferait  bien  d'examiner  de  près,  de  sonder  cette 
pierre,  pour  .s'assurer  de  son  état  réel ,  et ,  pendant  qu'il  en  est 
temps  encore,  de  s'occuper  d'une  reprise  en  sous-œuvre  dans  le» 
parties  malades ,  s'il  y  a  lieu  (l). 

On  a  employé  à  la  construction  de  .Saint-Ouen  une  prodigieuse 
quantité  de  plomb.  Tous  les  joints  quelconques  des  meneaux, tant 
des  galeries  intérieures  que  des  verrières  du  corps  de  l'église  et  de 
la  tour,  les  balustrades,  les  pointes  des  clochetons ,  enfin,  tous  les 
plus  légers  membres  d'architecture  isolés  de  ce  vaste  édifice,  sont 
scellés  en  plomb  avec  goujons  en  fer.  Le  métal  remplit  tout  l'in- 
térieur du  joint.  Il  était  coulé  par  un  ou  deux  trous  de  trépan  per- 
cés obliquement  sur  les  flancs  du  meneau,  à  8  ou  10  centimètres 
au-dessus  du  joint,  et  se  dirigeant  vers  le  centre  occupé  par  le 
goujon.  Les  meneaux  qui  supportent  les  arcades  ogivales  des  ga- 
leries intérieures  de  la  nef  sont  scellés  de  cette  manière ,  quoiqu'il.^ 
soient  d'une  extrême  légèreté.  Ils  sont  d'un  seul  morceau  de  3  mè- 
tres de  hauteur,  et  leur  section  horizontale  n'est  que  de  0"  Î2  de 
long ,  sur  0"  07  de  large  aux  plus  épais.  Cette  hauteur  est  donc 
égale  à  treize  fois  la  plus  grande  dimension  de  la  base,  et  à  qua- 
rante-trois fois  la  plus  petite.  La  compressihilité  du  plomb  placé 
dans  les  joints  est  là  fort  à  propos  pour  compenser  les  tassements 
inégaux.  Une  banc  de  fer  plat  de  30  mill.  sur  12  mill..  posée  de 
champ,  et  vraisemblablement  traversée  par  un  goujon  a  chaque 
montant,  enfile  tous  les  meneaux  dune  travée  à  la  naissance  des 
arcades.  Dans  quelques  parties  extérieures ,  l'oxydation  du  fer  a 
fait  éclater  l'enfourchcment  des  montants  des  meneaux. 

On  aperçoit,  a  travers  quelques  trous  de  boulin,  dans  l'épais- 
seur de  la  tour  de  l'escalier,  des  chaînes  en  fer  qui  paraissent  des- 
tinées à  réunir  celle-ci  à  la  tour  principale,  et  qui  sont  scellées  en 
plomb  dans  l'épaisseur  même  du  mur. 

Si  le  fer  peut  être  quelquefois  un  auxiliaire  dangereux  pour  la 
stabilité  des  édifices  dans  les  parties  trop  exposées  à  l'humidité. 
témoin  les  pointes  de  quchpies  clochetons  éclatées  par  l'oxy- 
dation du  goujon,  auquel  tient  encore  son  jet  de  plomb,  II  ne 
faut  pas  se  dissimuler  que  ce  métal  joue  un  plus  grand  r6le  qu'on 
ne  pense  dans  nos  édifices  de  style  ogival,  dans  celui-ci  du  moins  (3,.' 


(i;  Cette  dégradation  est  peul.<lre  fcffcl  de  la  chaleur  du  in«tal  en  ««»•••• 
des  gai  cnnaniniés qui  sécliappent  des  moule»  lu  moment  de  U  fonte;  c«r  M 
sait  que  Saiiit-Oucn  fut  converU  en  fonderie  1  IVpoque  de  U  RérolaOon. 

(2)  On  peut  consulter  avec  fruit  un  arUcle  de  la  Rttue,  ioUtuM  Ut  TK»- 
vtoi  du  ftT  comme  mov«"  d«  consolidqfion  daft  Us  mor.uwcnl,  ro(k*fw« 
(1-0!,.  lof.  II.  col.  Î3-.  (>•" -  »>  <^'*^  »^J 

T.    V.  » 


647 


REVUE  DE  i;architecture  it  dks  tkavaux  publics. 


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Sa  présence  explique  plus  d'un  tour  de  force  en  construction; 
mais  il  faut  convenir  qu'on  ne  l'y  a  pas  prodigué  d'une  manière 
ridicule  comme  dans  quelques-uns  de  nos  édifices  du  XVIH*  et 
même  du  XIX"  siècle,  quoique  l'audacieuse  légèreté  de  ceux-là 
semble  l'exiger  bien  plus  que  la  lourdeur  de  ceux-ci. 

Si  l'oxydation  du  fer,  par  l'effet  de  l'humidité,  a  causé  quelque- 
fois de  si  grandes  avaries  aux  parties  délicates  de  l'architecture  , 
on  doit  s'en  prendre  à  l'insouciante  négligence  ou  à  l'ignorance 
des  constructeurs.  Les  scellements  se  font,  la  plupart  du  temps, 
avec  le  plâtre,  qui  est  un  agent  destructeur  très-actif,  ou  avec  le 
plomb,  qui,  ne  s'attachant  jamais  au  fer,  permet  à  l'eau  de  passer 
dans  Je  joint  et  d'oxyder  ce  dernier  métal  ;  peut-être  même  s'y 
forme-t-il  un  courant  galvanique  par  l'intermédiaire  de  l'eau. 

Mais  nous  avons  aujourd'hui  les  ciments  romains,  qui  ont  la 
propriété  de  conserver  le  fer  dans  les  lieux  humides.  On  pourrait 
sceller,  même  au  plâtre,  si  les  scellements  avaient  été  préalable- 
ment revêtus  d'une  couche  de  mastic  de  minium  et  de  céruse  a 
l'huile  de  2  ou  3  millimètres  d'épaisseur,  qui,  en  fort  peu  de  temps, 
formerait  un  croûte  dure  et  imperméable.  Pourcmployer  le  plomb, 
il  faudrait  que  les  scellements  fussent  étamés  et  le  métal  coulé  au 
rouge;  il  se  souderait  ainsi  au  fer. 

Pour  tous  les  scellements  de  pièces  non  exposées  à  l'action  d'une 
force  vive,  on  pourrait  encore  employer  le  mastic  de  vitrier,  dans 
lequel  on  lancerait  des  tuileaux  ou  des  éclats  de  pierre  dure.  Les 
goujons  pourraient  être  faits  en  schiste  ou  en  bois  séché  au  four  et 
bouilli  dans  du  goudron  minéral. 

La  charpente  de  Saint-Ouen  est  fort  belle.  Les  formes  ont  une 
disposition  différente  de  celles  de  cette  époipie,  le  poinçon  descend 
jusque  sur  l'entrait  principal,  qui  repose  sur  un  triple  cours  de 
plates-formes,  posées  sur  l'arase  des  murs  de  la  nef.  De  chaque 
côté  du  poinçon,  la  portée  de  l'entrait  principal  est  soulagée  par 
deux  moises  pendantes  descendant  verticalement  de  la  jonction  du 
troisième  entrait  avec  les  arbalétriers.  Ces  moises  sont  joinfives; 
maisdans  l'intervalle,  entre  le  premier  et  le  deuxième  entrait, 
elles  sont  séparées  par  un  évidement  d'une  largeur  égale  à  leur 
diamètre.  Elles  font  un  fort  bon  effet.  L'entrait  principal  est  élégi 
de  bossages  et  de  chanfreins.  Tous  les  chevrons  porlenl  ftrme  et 
ont  20  centimètres  d'équarrissage.  Les  moises  sont  assemblées  avec 
des  clefs  en  bois  au  lieu  de  boulons.  (Voy.  les  Fig.  3  à  12  de  la 
PL  22.) 

Comme  on  s'occupe  beaucoup  aujourd'hui  de  la  restauration  des 
édifices  du  Moyen-Age,  et  que  ce  système  de  comble  m'a  paru  fort 
intéressant,  et  que  d'ailleurs  je  le  crois  inédit,  j'ai  pensé  être  agréa- 
ble aux  lecteurs  de  la  Revue  en  le  leur  donnant. 

Les  moises  pendantes  sont  parfaitement  disposées  pour  soulager 
■  la  longue  portée  de  l'entrait  principal,  dont  la  section  de  0"  34  sur 
27  est  très-faible,  eu  égard  à  sa  longueur,  qui  approche  de  1 0»  00. 
Elles  reportent  sur  les  arbalétriers  les  charges  permanentes  ou  mo- 
mentanées que  peut  recevoir  l'entrait,  telles  que  planchers,  sus- 
.pension  de  lustres  et  de  lampes,  dépôt  ou  passage  de  matériaux 
très-lourds,  etc. 

Dans  les  cas  ordinaires,  le  milieu  de  l'entrait  est  suspendu  au 
poinçon  par  des  étriers  en  fer  qui  rendent  ces  deux  parties  auxi- 
liaires} maisdans  les  combles  gothiques,  ce  poinçon  n'est  soutenu 
lui-même  que  par  lesentraits  secondaires,  quisont  faits  en  général  de 
deux  morceaux  assemblés  à  tenons  et  mortaises  dans  le  poinçon  , 
ce  qui  les  rend  peu  propres  à  supporter  une  charge  verticale. 

Ces  deux  cours  de  moises  relient  parfaitement  les  trois  entraits 


aux  arbalétriers  et  augmentent  considérablement  la  solidité  de  l'en- 
send)le  de  la  ferme,  qui  ne  peut  se  déformer.  On  pourrait  même, 
sans  inconvénient,  supprimer  la  partie  du  poinçon  comprise  entre 
le  grand  et  le  moyen  entrait,  en  faisant  toutefois  celui-ci  d'un 
seul  morceau.  On  obtiendrait  ainsi  au  milieu  un  large  passage  qui 
pourrait  être  utile  en  cert<nnes  circonstances. 

On  a  ménagé  un  passage  de  ce  genre,  mais  par  une  autre  com- 
binaison ,  dans  le  nouveau  comble  du  transsept  Nord  de  la  ca- 
thédrale; c'est  par  là  (|u'on  transporte  les  pièces  de  fonte  de  la 
flèche  centrale. 

Explication  des  figure»  de  la  Planche  22. 

Fig.  3  et  4  ,  profil  et  plan  d'une  ferme. 

Fig.  .î ,  cou{)e  verticale  d'une  ferme  faite  suivant  la  ligne  brisée, 
sur  a,  6,  c,  d. 

Fig.  0,  7  et  8,  coupe  horizontale ,  face  et  profil  de  la  partie  infé- 
rieure d'une  paire  de  moises  pendantes  (l). 

Fig.  9,  coupe  horizontale  d'une  moiseà  (leur  de  l'entrait. 

Fig.  10  et  II,  plan  et  profil  du  poinçon  et  des  contre-poinçons. 

Fig.  12,  coupe  de.s  contre-poinçons  faite  à  fleur  du  dessus  de 
l'entrait. 

Je  ne  quitterai  pas  Saint  Ouen  sans  parler  de  l'usage  détestable 
de  fermer  la  porte  des  églises  dans  l'après-midi.  Cet  usage,  qui  est 
général  à  Rouen,  a  failli  me  priver  du  plaisir  de  visiter  encore  une 
fois  ce  bel  édifice ,  et  m'a  empêché  d'en  visiter  plusieurs  autres. 

J'avais  trouvé  les  portes  fermées  et  m'en  allais  en  pestant 
contre  (|ui  de  droit,  car  j'ignorais  (ju'il  fut  avec  les  bedeaux  des 
aceommodfmeiils,  quand,  me  retournant  pour  jeter  encore  un 
coup  (l'œil  sur  le  portail,  je  vis  d'autres  visiteurs,  mieux  instruits 
que  nu)i  sur  la  consigne,  prêts  à  entrer  accompagnés  d'un  gardien  : 
je  ne  fus  pas  longtemps  à  les  suivre. 

.\  la  cathédrale,  on  fait  encore  mieux  :  quand  l'église  n'est  pas 
fermée,  l'enceinte  du  pourtour  du  chœur  est  close,  et  un  bedeau  de 
planton  introduit  les  visiteurs,  moyennant  finance. 

Laissons^nos  voisins  d'outre-mer  l'usage  peu  courtois  de  fermer 
à  tout  venant  les  portes  des  établissements  publies;  nous  ne  dou- 
tons pas  qu'ils  ne  l'abolissent  un  jour. 


Sur  In  place  Saint-Ouen,  dans  le  prolongement  de  la  rue  de 
l'Hôpital ,  on  voit  encore  un  manoir  du  XVI^  siècle  ,  dont  les  mu- 
railles, naguère  percées  de  rares  ouvertures,  n'ont  pour  toute 
décoration  que  des  bandeaux  et  une  série  de  pilastres  ;  mais  ces 
pilastres  sont  très-jolis  et  d'une  conservation  parfaite,  ainsi  que 
tout  le  reste  de  la  maison.  Leurs  fûts  sont  élégis  d'encadrements,  et 
leurs  chapiteaux  sont  d'une  es{)èce  d'ordre  corinthien  ,  dont  le 
tailloir  est  porté  par  des  dauphins  et  autres  animaux  fantastiques  , 
en  guise  de  volutes,  selon  le  goût  de  l'époque.  Ces  sculptures  sont 
d'une  exécution  parfaite. 

La  porte  cochère,  encadrée  de  deux  pilastres  et  d'une  archivolte 
ornés  d'arabesques  de  très-bon  goût  et  sculptés  d'une  manière 


(1)  C'est  par  erreur  que  dans  les  Fiif.  3,  A,  S,  6,  7,  8  et  9,  on  a  fait  régner 
dans  toute  la  longueur  des  moises  le  clianfrein  extérieur.  Ce  clianfrcin  ne 
règne  que  dans  les  parties  correspondant  à  celui  de  l'cvidenieut  inléricur 
des  moises. 


y*9 


REVUE  DE  LARCHITKCÏUUE  ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


550 


très-délicnte,  est  surmontée  du  n  entablement,   dans  lequel  on  lit 
cette  inscription  :  DA'S  MICHl  ADIVTOR. 

Le  propriétaire  actuel  a  fait  percer,  depuis  deux  ans,  dans  cha- 
que travée,  une  large  arcade  avec  devanture  de  boutique.  On  a 
sauvé  les  pilastres  en  les  faisant  servir  à  la  décoration  de  la  de- 
vanture ;  mais  comme  la  barbouillomanie  est  à  la  mode ,  aussi  bien 
à  Rouen  qu'à  Paris,  on  les  a  empâtés  de  peinture  à  l'huile.  La 
jolie  archivolte  et  les  gracieux  pilastres  de  la  porte  cochère  n'ont 
pas  été  épargnés. 

]1  restait  encore,  du  côté  de  la  cour,  quelques  colonnes  engagées, 
cylindriques  par  le  bas  et  profilées  en  balustres  par  le  haut.  Les 
exigences  de  la  disposition  des  boutiques  ont  obligé  à  les  enlever; 
il  n'en  reste  plus  qu'une.  .le  recommande,  surtout  aux  amateurs, 
une  colonne  qui  soutient  le  poitrail  de  l'entrée  d'un  escalier  si- 
tué à  gauche  dans  la  cour.  Cette  colonne ,  étagée  par  retraites, 
se  compose  de  cylindres  superposés  et  ornés  de  cannelures  et  de 
divers  ajustements.  Chaque  retraite  est  déguisée  par  des  cordons 
d'un  joli  profil.  Elle  est  couronnée  d'un  délicieux  chapiteau  de 
même  style  que  ceux  des  pilastres ,  et  l'étage  supérieur  de  son  fût 
est  flanqué  de  deux  statuettes  allégoriques  en  ronde  bosse,  sculp- 
tées dans  la  masse. 

Une  partie  saillante,  mutilée,  placée  entre  les  deux  statuettes , 
indique  sans  doute  la  place  qu'occupaient  les  armoiries  du  fon- 
dateur de  la  maison.  L'extrême  simplicité  de  la  façade  extérieure, 
les  rares  ouvertures  dont  elle  était  percée,  annoncent  que  la  face 
la  plus  importante  était  du  côté  de  la  cour  ;  mais  il  n'y  a  pas  lieu  de 
douter  que  les  bâtiments  actuels  de  l'intérieur,  dont  le  principal 
parait  dater  du  XVIII'^  siècle,  n'occupent  la  place  de  quelque  bâti- 
ment du  XVI'  siècle  qu'on  aura  fait  disparaître.  La  jolie  colonne 
dont  je  viens  de  parler  n'était  peut-être  pas  seule,  et  sans  doute 
elle  accompagnait  tout  autre  chose  que  le  misérable  escalier  du 
XVni"  siècle,  qui  est  derrière. 

Je  pense  que  si  le  propriétaire  éprouve  aujourd'hui  quelque 
regret  d'avoir  ainsi  travesti  sa  maison,  c'est  plutôt  de  n'avoir 
pas  encore  pu  louer  ses  boutiques  que  d'avoir  déshonoré  ses  jolis 
pilastres. 

Saint-Maclou.  — On  restaure  la  charmante  petite  église  de 
Saint-Maclou.  Je  ne  saurais  dire  ce  qu'on  y  fait,  car  la  consigne 
ne  permet  pas  de  visiter  les  travaux  qui  s'exécutent  au  sommet  de 
l'édifice.  Je  n'aime  guère  à  forcer  la  consigne,  et  je  n'avais  pas  le 
temps  de  faire  une  visite  au  confrère  chargé  de  la  restauration. 

Cette  église  est ,  de  toutes  celles  de  Rouen  ,  la  plus  obstruée  par 
des  bâtiments.  La  licence  des  envahisseurs  avait  été  jusqu'à  fermer 
complètement  le  portail  de  droite  tout  entier;  heureusement,  on 
vient  de  le  dégager. 

Ce  portail ,  dont  les  trois  arcades  communiquent  entre  elles , 
est  fermé  par  une  chétive  grille  en  bois  qui  lui  donne  l'aspect  d'une 
loge  de  bêtes  fauves.  Quel  contraste  entre  cette  misérable  clôture 
et  la  richesse  incomparable  de  ce  délicieux  portail  !  Celvii  du  trans- 
sept  du  Sud  est  obstrué  par  une  chapelle  moderne  construite  en 
hors-d'œnvre  pour  y  faire  le  catéchisme.  Celui  du  transsept  du 
Nord  est  libre;  mais  ,  en  revanche,  il  est  flanqué,  à  droite  et  à 
gauche,  d'ignobles  baraques  de  moins  de  deux  mètres  de  hauteur, 
à  pignons  sur  rue  et  occupées  par  des  savetiers,  tripiers  et  char- 
bouniers,  fournisseurs  du  quartier  Martainvillc.  Il  est  impossible 
de  voir  rien  de  plus  hideux  et  de  plus  sale  que  ces  échoppes,  où  l'on 
peut  à  peine  se  tenir  debout. 


Pour  donner  plus  de  largeur  aux  pignons  des  transsepts  et  ob- 
tenir l'empiacrment  de  deux  tourelles  d'escalier,  on  a  été  oWigé 
d'obstruer  la  moitié  de  la  verrière  de  chacune  des  deux  chapellei 
contiguès.  Celte  faute,  contre  les  règles  de  l'art,  produit  un  bien 
mauvais  effet.  C'est  un  péché  originel  :  aussi  ne  le  mettrai-je  pas 
sur  le  compte  des  modernes. 

Ce  joli  édifice  du  XV' siècle  a  de  élevé  d'un  seul  Jet.  La  con- 
struction tout  entière  porte  le  cachet  de  la  même  époque,  chose 
fort  rare.  Les  portes  en  bois  ,  l'orgue,  une  partie  des  vitraux  et 
autres  détails  sont  du  XVI'.  On  doit  peut-être  l'homogénéité  de 
l'architecture  de  cette  église  à  la  petitesse  de  ses  proportions,  qui 
a  permis  de  la  construire  en  fort  peu  de  temps,  du  milieu  du  XV* 
au  commencement  du  XVI*  siècle. 

Les  portes  d'entrée,  notamment  celles  du  transsept  Nord,  du 
stylede  la  Renaissance,  sont  d'une  grande  richesse  et  d'un  goût  ex- 
({uis.  On  les  doit,  dit-on,  auciseau  de  Jean  Goujon  ;  elles  sont  vrai- 
ment dignes  de  lui.  La  chaire  et  l'orgue  sont  de  la  même  époque. 

La  cage  de  l'escalier  de  l'orgue,  délicieuse  claire-voie  en  pierre, 
du  XV"  siècle ,  a  beaucoup  de  ressemblance  avec  celle  de  la  cha- 
pelle de  l'hôtel  de  Cluny. 

Les  vitraux  peints  sont  des  XV»  et  XVI*  siècles.  Ceux  du  pour- 
tour du  chœur  ont  tous  leur  fond  décoré  d  une  riche  architec- 
ture ogivale  en  grisaille.  Malheureusement,  ces  peintures  se  dété- 
riorent par  l'îiction  de  l'air,  et  il  est  à  craindre  qu  elles  ne  finis- 
sent par  se  détruire  tout  à  fait.  Cela  tient  évidemment  à  la  nature 
de  la  grisaille,  puisque  les  autres  couleurs  ne  se  dégradent  pas. 
Dans  une  récente  restauration  de  ces  verrières,  on  a  été  obligé  de 
poser  provisoirement  des  pièces  de  verre  blanc,  qu'on  a  barmo- 
niées  en  les  peignant  à  l'huile. 

Parmi  les  vitraux  du  XVI*  siècle,  il  y  a,  surtout  au  transept  du 
Sud ,  des  figures  dont  les  draperies  sont  d'une  si  admirable  couleur  et 
qui  imitent  si  bien  d'éclatantes  étoffes  de  soie  avec  leurs  reflets  et 
leur  velouté,  qu'elles  valent  à  elles  seules  toute  une  verrière. 

La  rose  principale  est  encadrée  dans  un  chambranle  saillant  en 
ogive;  ses  vitraux  sont  d'une  belle  couleur,  et  seraient  d'un  bel 
effet  si  les  meneaux  en  pierre  n'étaient  trop  massifs.  C'est,  du 
reste  ,  le  défaut  de  tous  les  meneaux  de  cette  église.  Leur  épais- 
seur exagérée  contraste  avec  la  légèreté  extrême  de  toute  l'or- 
nementation. En  somme,  le  plan  de  Saint-Maclou  n'est  qu'im- 
parfaitement étudié. 

La  ville  de  Rouen  était  extrêmement  riche  en  édifices  du  XV» 
siècle,  et  elle  en  possède  encore  bon  nombre.  Il  semble  qu  a  cette  épo- 
que il  y  ait  eu  une  recrudescence  de  foi  et  une  exubérance  de 
richesse  extraordinaire.  Les  archevêques  accordaient  des  in- 
dulgences, et  les  paroissiens  s'empressaient  de  les  acheter  ca  »e 
dépouillant  d'une  partie  de  leurs  biens.  Mais  que  toutes  lesëgUm 
de  cette  ville  ont  l'air  pauvre  !  Les  Bouennais  aujourd'hui  sont 
bien  changés.  Si  la  piété,  si  la  munificence  .(veuglc  de  leur»  an- 
cêtres les  ont  dotés  d'un  nombre  exorbitant  deglises.  ils  devraient 
au  moins,  eux  qui  sont  si  riches,  entretenir  conv enablement  celles 
qui  leur  restent. 

Palais-de-Justice.  —  Je  n'ai  vu  le  Palais -de-Justice  que  le 
temps  nécessaire  pour  remarquer  qu'on  avait  rasé  toutes  les  par- 
ties de  cet  édifice  qui  étaient  postérieures  au  XVI*  siècle  ;  on  était 
en  train  de  les  reconstruire.  Ces  travaux  vont  entraîner  une  bien 
grande  dépense  ;  mais  quand  il  s'agit  de  l'édifice  où  l'on  plaide. 
doit-on  y  regarder  de  si  près  dans  ia  capitale  du  pays  uoruMui  î 


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REVUE  DE  L'ARCHITECTIHE  ET  DES  TUAVALX   l'LBLICS. 


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HÔTEL  DU  BouBGTHEROULDE.  —  Si  je  n'ai  pas  eu  le  temps  de 
visiter  encore  une  fois  1  h6tel  du  Bouigtlicroulde,  en  compensa- 
tion j'ai  vu  son  fac-similé.  Croirait-on  qu'un  homme  ait  eu  la 
constance  d'estamper,  en  totalité,  dans  tous  leurs  détails,  les  cinq 
arcades  qui  composent  la  magnifique  galerie  du  Camp-du-Drap- 
d'Or?  Et  cet  homme  est  un  ancien  sculpteur,  M.  Rossy,  qui  a 
dépensé  à  cette  œuvre  le  reste  de  son  ardeur  d'artiste  et  le  fruit  de 
ses  économies. 

C'est  peut-être  le  plus  vaste  travail  d'estampage  qui  ait  jamais 
été  fait.  L'auteur  en  a  monté  trois  arcades  dans  la  cour  de  sa  mai- 
son, rue  Neuve-Saint- Amand.  Il  n'y  avait  pas  de  place  pour  les 
deux  autres. 

Cette  œuvre  colossale  de  patience  et  de  talent  est  faite  depuis 
trois  ou  quatre  ans,  et  cependant  il  n'en  a  pas  encore  été  placé  un 
seul  exemplaire  complet.  Comment  toutes  les  écoles  des  beaux- 
arts  ou  les  musées  des  capitales  de  l'Europe  ne  se  sont-ils  pas  en- 
core procuré  une  épreuve  de  cette  reproduction  d'un  des  plus 
intéressants  morceaux  d'architecture  du  XVI*  siècle?  Le  défaut 
de  publicité  en  est  sans  doute  la  cause  ;  car  M.  Rossy,  homme 
d'une  profonde  modestie ,  m'a  paru  être  beaucoup  plus  artiste  in- 
fatigable qu'ardent  solliciteur. 

Il  serait  digne  de  l'école  de  Paris  d'en  acquérir  uu  exemplaire. 
Cette  galerie  ferait  un  admirable  dégagement  entre  deux  des  grandes 
salles  d'exposition  du  palais  des  Beaux-Arts.  Sa  longueur  est  de 
quinze  mètres  et  sa  hauteur  de  sept  mètres. 

D'un  jour  à  l'autre,  le  marteau  de  la  spéculation  peut  renverser 
la  délicieuse  galerie  de  l'hôtel  du  Bourgtheroulde;  d'un  jour  à 
l'autre  encore,  M.  Rossy,  vieillard  plus  que  sexagénaire,  peut 
mourir,  et  la  collection  de  ses  moules  sera  convertie  en  ignobles 
plâtras.  Le  monde  artisllciue  peut  perdre ,  d'un  seul  coup  ,  l'origi- 
nal et  la  copie  d'une  des  plus  charmantes  productions  architectu- 
rales de  la  Renaissance.  Pour  3  ou  4000  francs  on  en  aurait  un 
moulage  complet. 

Musée  des  Antiques.  —  Le  Musée  des  Antiquités  de  Rouen  est 
assez  riche  en  objets  d'art  gallo-romains  et  du  Moyen-Age.  Cette 
curieuse  collection  se  trouve  réunie  sous  les  voûtes  et  dans  la  cour 
du  cloître  d'un  ancien  couvent.  Ce  local  bas  et  humide  ne  pourra 
conserver  bien  longtemps  en  bon  état  les  objets  qu'on  y  a  recueillis. 

La  cour  renferme  plusieurs  énormes  sarcophages  en  pierre  brute, 
dont  l'un  vient  d'être  découvert  dans  les  fouilles  du  chemin  de  fer 
du  Havre.  Sa  forme  est  celle  d'une  auge  rectangulaire  fermée  par 
un  couvercle.  Dans  l'intérieur  est  un  cercueil  de  plomb  de  même 
forme,  dont  les  faces  latérales  et  le  couvercle  sont  ornés  de  croi- 
sillons gravés  en  creux. 

On  voit  aussi  dans  cette  cour  plusieurs  fragments  d'architec- 
ture et  de  sculpture  monumentale  trouvés  à  Rouen  en  1839,  place 
des  Carmes,  sous  les  débris  d'un  énorme  pan  de  muraille  de  con- 
struction antique.  J'étais  à  Rouen  lors  de  la  découverte.  On  y 
a  réuni  quelques  beaux  fragments  d'architecture  gallo-romaine 
trouvés  dans  les  ruines  de  Lillebonne,  entre  autres,  la  retombée 
de  l'archivolte  d'une  arcade  ornée  de  petites  figures  en  relief  dans 
les  creux  des  bandeaux  d'archivolte,  et  de  figures  plus  grandes 
dans  les  tympans.  D'après  les  mesures  que  j'ai  prises,  cette  arcade 
devait  avoir  près  de  4  mètres  de  diamètre.  Elle  pouvait  faire  pa:  tie 
d'un  are  de  triomphe  auquel  appartenaient  vraisemblablement 
des  chapiteaux  de  pilastres  qui  se  voient  dans  la  même  cour  et  qui 
paraissent  être  de  la  même  éiwque.  Tous  les  fragments  de  la  col- 


lection sont  couchés  péle-mèle  dans  la  cour  et  sur  le  mur  d'appui 
du  cloitre. 

L'objet  capital  antique  de  la  galerie  principale  «st  une  statue  de 
femme  drapée,  dont  la  tête  est  malheureusement  perdue.  Cette 
belle  sculpture  ,  en  marbre  blanc  ,  qu'on  pense  représenter  Faus- 
tine  ,  a  été  trouvée  dans  les  ruines  d'un  établissement  thermal  à 
Lillebonne.  Des  grifrons-appli(|ues  en  bronze  ,  trouvés  au  même 
lieu,  r.ccompagnent  l'inscription  placée  sur  le  piédestal.  Plusieurs 
ornements  gallo-romains  en  bronze  et  en  terre  cuite,  pro\euant 
des  fouilles  de  Lillebonne,  ont  été  très-heureusement  ajustés  sur 
d'autres  piédestaux. 

Un  grand  nombre  de  meules  antiques  en  granit ,  des  chapi- 
teaux, des  urnes  en  verre  et  en  terre  cuite,  des  tuiles,  des  tuyaux 
de  conduite  provenant  en  majeure  partie  de  la  province,  font 
partie  de  cette  collection. 

Parmi  les  objets  du  Moyen-Age  se  trouve  une  grande  fontaine- 
lavabo  en  plomb  du  \VI'  siècle,  très-richement  décorée  de  me- 
neaux et  dais  gothiques  alternant  avec  des  têtes  de  lion  ,  dans  la 
gueule  des(|uels  étaient  des  robinets.  Ce  bassin  provient  du  prieure 
de  Saint-Lô. 

Je  ne  décrirai  pas  les  vitraux  peints  ni  les  meubles  du  Moyen- 
Age,  et  ne  parlerai  de  la  belle  collection  des  médailles  antiques  et 
modernes,  parmi  lesiiuelles  s'en  trouve  un  certain  nombre  en  or, 
que  pour  manifester  la  crainte  qu'elles  n'aient  le  même  sort  que 
celles  de  Paris.  Je  souhaite  bien  vivement  que  le  concierge  ait  pré- 
venu le  conservateur,  comme  je  l'y  ai  engagé,  du  danger  qu'il  y 
a  de  laisser  les  choses  dans  l'état  actuel.  Il  faut  que  le  médaillier 
soit  changé  de  place  ou  garanti  convenablement  de  toute  atteinte 
extérieure. 


Les  Rouennais  ont  érigé  à  leur  compatriote  Boieldieu  une 
statue  assise,  en  bronze,  sur  piédestal  en  marbre  et  entouré  d'une 
grille.  Ce  monument,  placé  dans  une  allée,  sur  le  port,  est  assez 
joli  du  reste,  mais  il  est  bien  mignon  pour  figurer  ainsi,  en  plein 
air,  au  pied  dune  Mune  de  maisons  à  cinq  étages  qui  l'écrasent.  Il 
serait  plus  convenablement  dans  la  cour  d'honneur  d'un  édifice 
public  de  hauteur  moyenne,  ou  dans  le  jardin  de  Saint-Ouen. 

I>'eniplacement  a  été  mal  choisi  sous  un  autre  rapport  ;  pour  Cîi 
avoir  une  idée,  qu'on  se  figure  le  monument  de  lu  place  du  Palais- 
Bourbon,  réduit  à  des  proportions  plus  petites,  et  planté  avec 
sa  giille  en  fer  au  beau  milieu  de  la  contre-allée  du  boulevard 
des  Italiens,  au  coin  de  la  rue  Laffitte;  qu'on  se  le  représente 
entouré  d'une  foule  encore  plus  compacte  que  celle  qui  fré- 
quente le  boulevard  parisien;  car  la  population  aisée  de  la  ville 
de  Rouen  tout  entière  s'y  réunit  chaque  soir.  Le  double  courant  de 
cette  masse  de  promeneurs  se  heurte  contre  le  malheureux  monu- 
ment comme  les  Ilots  d'une  rivière  viennent  se  briser  en  tournov  ant 
contre  lespiles  d'un  pont.  Il  fautque  le  pauvre  Boieldieu,  perpéluelle- 
inciit  coudoyé  par  les  passants,  soit  rwllement  de  bronze  pour  con- 
server son  attitude  méditative  au  milieu  du  brouhaha  qui  l'obsède. 

Sortons  maintenant  de  l'enceinte  de  la  ville  et  allons  respirer 
l'air  \if  et  pur  des  environs. 

Église  de  Bon-Secoubs.  —  A  la  bifurcation  de  la  vallée  de  la 
Seine  et  de  celle  de  l'Aubette,  les  montagnes  qui  côtoient  le  fleuve 
forment  un  promontoire  du  haut  duquel  on  descend  a  Rouen  lors- 
qu'on vient  de  Paris  par  la  roule  d'en  haut.  Cette  croupe  mon- 
tueuse  se  bifurque  légèrement  elle-même,  et  prend  à  droite,  du  côté 


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REVUE  DE  L'ARCHITKCTLRE  ET  DES  TRAVAUX  PlBr.lCS. 


55V 


de  l'Aubette,  le  nom  de  Côte  Sainte-Catherine,  et  à  gauehe  celui 
de  Côte  de  Bon-Secours.  Sur  cette  dernière,  dont  la  base  est  bai- 
gnée par  la  Seine,  s'élevait  jadis  une  vieille  église  de  village,  dé- 
diée à  la  Vierge,  et  célèbre  dans  toute  la  Normandie  par  de  nom- 
breux miracles  qui  trouvent  encore  dans  le  paj  s  quelques  croyants. 
Les  légendes  et  la  tradition  sont  superflues  pour  apprendre  ces 
miracles  aux  visiteurs.  Ils  sont  suffisamment  attestés  par  des  bé- 
quilles en  sautoir,  des  jambes  d'argent  et  autres  ex-voto  du  même 
genre,  suspendus  au-dessus  d'un  des  autels  de  l'église,  et  par  le 
grand  commerce  de  médailles,  chapelets  et  autres  objets  de  dé- 
votion, qui  se  fait  aux  abords^de  l'édifice  (l). 

La  chapelle  de  Bon-Secours,  devenue  insuffisante  et  tombant  en 
ruine,  a  été  démolie  il  y  a  quekjues  années,  et  se  trouve  transfor- 
mée en  une  grande  et  belle  église  dans  le  style  du  Xin=  siècle,  et 
aujourd'hui  presque  achevée. 

Rien  n'est  imposant  comme  la  vue  dont  on  jouit  de  l'admirable 
site  où  s'élève  la  nouvelle  église,  comme  jadis  le  temple  de  Mi- 
nerve sur  le  cap  Sunium.  L'imagination  des  fidèles,  exaltée  par  ce 
magnifique  spectacle,  devait  être  favorablement  disposée  à  croire 
aux  merveilles. 

Le  moindre  des  miracles  qui  se  sont  opérés  à  Bon-Secours  n'est 
très-certainement  pas  la  construction  de  !a  nouvelle  église,  plus 
digne  en  vérité  d'une  ville  aisée  que  d'un  pauvre  village.  Ce  mi- 
racle est  dû  à  l'activité,  au  zèle  et  à  l'habileté  de  M.  le  curé  de 
cette  église,  digne  émule  de  l'ancien  curé  de  Saint-Sulpice,  et  qui, 
sans  autres  ressources  pécuniaires  que  des  subventions  minislé- 
rielles  ou  des  dons  volontaires,  a  pu  conduire  au  point  où  elle  en 
est,  cette  entreprise  relativement  colossale.  (;e  minisire  des  autels  a 
su  très-habilement  stimuler  la  piété,  peut-être  aussi  un  peu  la  va- 
nité des  habitants  de  la  province  pour  la  construction  deson  église, 
qui  ne  coûtera  pas  moins,  dit-on,  de  ô  ou  600  mille  francs.  Il  a 
trouvé  le  secret  de  transformer,  assure-t-on,  des  protestants  eux- 
mêmes  en  donateurs  de  quelqu'une  de  ses  verrières. 

C'est  une  véritable  bonne  fortune  pour  les  visiteurs  de  l'église 
de  Bon-Secours  que  d'y  rencontrer  M.  le  cure  libre  de  disposer  de 
son  temps  ;  il  leur  fait  explorer  son  église  dans  tous  ses  détails, 
avec  une  complaisance  et  une  courtoisie  parfaites. 

Cette  église  est  bâtie,  comme  nous  l'avons  dit,  dans  le  style  du 
XIII<"  siècle,  sous  la  direction  et  sur  les  dessins  de  iM.  Barthélémy, 
l'un  des  architectes  les  plus  distingués  de  la  ville  de  Rouen,  et 
qui,  en  cette  occasion,  a  travaillé,  dit-on,  uniquement  pour  le  ciel  et 
pour  la  gloire;  son  but  ne  sera  pas  manqué,  je  puis  le  lui  prédire, 
quant  au  dernier  point.  M.  le  curése  chargera  de  lui  assurerl'autre. 

Le  plan  est  rectangulaire,  avec  une  seule  abside  polygonale  en 
saillie,  comme  dans  les  basiliques  romaines  ;  la  nef,  de  même  lar- 
geur que  l'abside,  est  séparée  des  bas-cùtés  par  deux  rangées  de 
piliers  ronds,  sur  chacun  des  quatre  points  cardinaux  desquels  est 
engagée  une  colonnette.  La  longueur  totale  est  de  50  mètres. 

Les  voûtes  de  la  nef  sont  contre-butées  par  des  arcs-rampants 
couronnés  de  clochetons  à  leur  base  et  à  leur  sommet  ^2).  Ces  clo- 


(1)  Des  ex-volo,  d'une  espèce  moins  orthodoxe  pcul-Étie,  ont  élé  disposés  it'-- 
cemiuenl  dans  cette  dglise.  Ils  consistent  en  cinq  ou  six  bannières  qui  furent 
arborées  par  divers  industriels  é  la  c<!rénionle  d'inauguration  du  chemin  de  fer  de 
nouen  à  Paris.  Ce  diSpilt  prouve  sans  doute  une  grande  dévotion  à  Notre-Dame 
de  Bon-Secours;  mais  (|uelques-uiu"S  des  bannières  portant  le  nom  et  l'adresse 
du  donateur  pourraient  fort  bien,  par  mie  interprétation  malicieuse,  passer  pour 
des  prospectus  d'un  nouveau  genre,  ce  qui  serait  peu  édifiant. 

(2)  La  plupart  des  arcs-rampants  du  Sud  sont  déjà  lézardés  aux  voussoirs  du 


chetons,  quoique  tris-simples,  font  un  bon  effet.  La  corniche  de  la 
nef  est  couronnée  dune  balustrade  en  arcades  découpées  en  treflrs. 
Cette  balustrade  est  un  peu  maigre,  par  suite  du  trop  grand  éear- 
tement  des  eolonnettes. 

Le  clocher  unique  est  placé  au-dessus  du  portail  principal.  Sa 
hauteurseradc  50  mètres.  Il  estcarrcàju  base,  el  son  amortis.seinenl 
est  en  forme  de  pyramide  octogonale,  flanquée  de  quatre  cloche- 
tons aux  angles,  le  tout  en  pierre  et  couvert  d'imbrications.  Il  iw 
semblcra  assez  au  grand  clocher  de  Saint-Denis.  Quand  je  l'ai  vi- 
sité, eu  juin,  on  posait  la  dernière  clef  des  arcades  de  l'étage  supé- 
rieur de  la  tour. 

A  l'intérieur,  le  chœur  et  la  moitié  de  la  nef  sont  entièrement  U-r- 
minés,  moins  le  pavé.  De  chaque  cdté  de  la  nef,  au-dessus  des  ar- 
cades des  collatéraux,  règne  une  suite  de  galeries  feintes  porter» 
par  des  eolonnettes  a  chapiteaux  sculpti^. 

Les  cinq  verrières  du  chœur  et  quatre  autres  dechaque  rAté  de  la 
nef  sontdéjàgarniesde  leurs  vitraux  peints  dans  le  style  du  Mil' siè- 
cle. Ces  vitraux  sont  d'un  bon  effet.  Leur  composition  est  l'œuxre 
de  M.  Gérente,  jeune  artiste  d'un  grand  talent.  Il  a  parfaitement 
compris  la  destination  des  verrières  dans  un  édifice.  Ce  ne  sont 
pas  de  ces  vitraux  de  boudoir,  qui  le  disputent,  pour  la  finesse  Avs 
traits,  à  la  miniature  elle-même,  comme  nous  en  voyons  quelque- 
fois aux  expositions  du  Louvre,  et  qui  seraient  d'un  effet  complète- 
ment nul  si  on  les  plaçait  à  6  mètres  de  hauteur;  mais  c'est  de  In 
belle  et  bonne  peinture,  aux  nuances  vives  et  harmonieuses,  an\ 
contours  vigoureusement  accusés,  qui  nous  rappellent  ces  belles\er- 
rières  du  XI1I«  siècle,  ces  mosaïques  transparentes  dans  lesquelU  s 
le  dessin  n'est  que  l'accessoire,  et  qui  laissent  pénétrer,  dans  l'in- 
térieur de  l'édifice,  des  faisceaux  de  lumière  nuancés  de  milk- 
couleurs.  On  a  représenté  sur  la  verrière  du  milieu  de  l'abside  un 
arbre  de  Jessé.  Pour  donner  plus  d'importance  au  personna;:r 
principal  d'où  part  l'arbre  généalogi(|ue  ,  on  la  peint  conclu-  en 
travers  au  bas  de  la  verrière,  ce  qui  fait  qu'il  se  tiou\e  coupe  «n 
deux  parties  égales  par  le  meneau  unique  qui  divise  la  bnie  dont 
il  occupe  toute  la  largeur;  cette  disposition  n'est  pas  heureuse.  Si 
ces  verrières  n'ont  pas  toute  la  vigueur  de  ton  et  le  \eloute  decello 
du  XlIIc  siècle,  elles  sont,  en  revanche,  d'un  dessin  plus  correct. 
Ces  vitraux  sont  dus  à  la  munificence  de  diverses  personnes,  doiil 
les  portraits,  ainsi  que  ceux  de  toute  leur  famille,  sont  peints  daii> 
un  encadrement  spécial,  avec  inscription  poitant  les  noms  et  qii;i- 
lités  des  donateurs.  C'est  un  excellent  moyen  de  stimuler  la  gnn- 
rosité  des  paroissiens. 

La  construction  de  cette  église  présente  un  grand  luxe  de  mattv 
riaux.  Le  socle  est  tout  entier  en  pierre  de  Cherence  d'un  mètre  dr 
hauteur.  Il  n'y  entre  pas  un  bloc  de  moins  d'un  mètre  cube.  Le 
socle  dechaque  contre- fort  se  compose  d'une  assise  de  deux  mètres 
cubes  engagée  dans  toute  l'épaisseur  du  mur  de  face.  Plusieurs 
blocs  cubent  trois  mètres. 

A  partir  de  la  retraite  jusqu'à  l'appui  des  verrières  des  collati- 
ranx,  les  murssont  en  pierres  de  11  le-.Adam  ;  Icresteesten  VergeUt 

Les  verrières,  dont  la  largeur  est  de  3  m.,  se  composent  de  deux 
arcades  géminées,  séparées  par  un  meneau  et  surmontées  d'une 
rosace  à  six  lobes.  Le  meneau  est  appareille  en  six  morceaux. 


milieu.  On  attribue  cet  elTet  aux  venu,  ce  qui  ne  paraît  pe«  problMe.  â  i 
que  ce  vent  ne  vint  du  Nord  et  que  sa  pression  sur  les  boçs  du  Nord  de  b  «ef 
n'ait  surcliargé  les  arr.virautaiils  du  Sud.  Celle  dégra<Ulioa  est  plntOt  l'cfcl  du 
tassement  du  sol  de  la  fondation. 


555 


IIKVUK  DK  LARCmiKCTURE  O  DKS  TKAVAl  X   PLIUJCS. 


550 


L'appareil  des  voûtes  d'ariHescst  frès-régulicr,  et  leur  construc- 
tion se  fait  par  des  moyens  très-simples.  On  n'emploie  des  cintres 
que  pour  la  construction  des  arcs  doubleaux  et  des  arêtiers.  Les 
cintres  des  arêtiers  se  composent  de  quatre  parties  principales  dis- 
posées diagoiialement  suivant  la  projection  des  nervures.  On  pose 
(l'abord  quatre  entraits  rampants,  formés  par  autant  de  couples 
de  madriers  en  sapin  dont  le  pied  coupé  en  biais  repose  sur  l'im- 
poste des  arcades,  et  la  tète,  coupée  aussi  en  biais,  s'ajuste  sur 
une  clef  placée  à  la  réunion  des  quatre  entraits.  On  dispose  sur 
ceux-ci  quatre  courbes  en  planclies,  dont  le  profil  extérieur  reçoit 
les  voussoirs  des  arcs  en  pierre;  aussitôt  que  la  clef  de  ceux-ci  est 
posée,  on  dégage  les  cintres  ;  chaque  ouvrier  en  prend  un  sur  son 
épaule  et  le  porte  à  la  travée  suivante. 

Le  remplissage  des  voûtes  se  fait  en  petits  moellons  de  Vergelet 
débités  à  la  scie  à  dents,  par  tranches  de  0"  08  sur  O"  10,  et  coupés 
en  tronçons  de  2.5  à  30  cenllniètres  de  longueur.  L'appareil  en  est 
parfaitement  régulier,  et  la  pose  se  fait  sans  le  secours  d'aucun  cintre. 

Une  rainure  directrice  est  refouillée  sur  les  faces  latérales  des 
arcs-doubleaux,  suivant  la  surface  de  révolution  dans  Ia((uellcd(>it 
être  comprise  chaque  retombée  de  voûte.  Il  suffit,  pour  diriger  la  pose 
de  chaque  rang  de  moellons,  d'appliquer  une  règle  ou  un  cordeau 
suivant  les  directrices  correspondant  à  chaciue  rang  de  moellons. 

Les  personnes  qui,  dans  leur  ignorance  de  l'art  de  bâtir,  pré- 
tendent que  nous  ne  pourrions  aujourd'hui  construire  des  mo- 
numents dans  le  style  ogival,  n'ont  qu'à  aller  visiter  le  coup 
d'essai  fait  à  Bon-Serours  ;  elles  verront  qu'on  pourra  surpasser  en 
ce  point  les  constructions  gothiques;  le  raisonnement  peut  con- 
duire à  la  solution  du  problème;  mais  il  n'en  est  point  encore  ainsi 
de  l'exécution  des  sculptures  de  style  ogival;  nos  ornemanistes 
n'ont  point  encore  saisi  cette  vigueur  et  cette  naïveté  de  ciseau 
qui  distinguent  à  un  si  haut  degré  leurs  confrères  du  Moyen-Age. 

On  ne  saurait  se  faire  une  idée  du  coup  d'œil  dont  on  jouit  du 
haut  du  clocher  de  Bon-Secours.  La  villede  Rouen  toutcntière,  avec 
ses  clochers,  son  port  et  ses  vaisseaux,  n'est  pas  la  moins  intéres- 
sante partie  de  ce  panorama.  Le  sol  du  plateau  sur  lequel  s'élève 
léglise,  semble  arriver  juste  au  niveau  du  sommet  actuel  de  la 
flèche  en  fer  de  la  cathédrale,  dont  la  hauteur  est  de  1 30  mètres. 

Chemin  de  Feb  de  Rouen  au  Havbe.  —  Les  travaux  marchent 
avec  activité.  Cette  voie  de  fer  ne  forme  pas  le  prolongement  de 
la  ligne  de  Paris  à  Rouen  ,  mais  elle  s'embranche  sur  cette  der- 
nière dans  la  plaine  de  Solteville,  à  environ  2  kilomètres  avant 
d'arriver  à  la  gare  de  Rouen. 

Ce  chemin  de  fer  aura  peu  de  charmes  pour  les  personnes  qui 
redoutent  les  tunnels;  ceux-ci  formeront,  dit-on,  le  tiers  du  par- 
cours total  ou  environ  30  kilomètres.  Dans  les  parties  dont  j'ai 
observé  la  trace,  de  Rouen  à  Pavilly,  les  tunnels  m'ont  paru  en 
majorité.  Il  traversera  le  vallon  de  Pavilly  sur  un  viaduc  de  33  mè- 
tres de  hauteur  et  de  3  ou  400  mètres  de  longueur.  Cet  immense 
travail  d'art  était  en   train   d'exécution  au  mois  de  juin  dernier. 

A  peine  le  chemin  de  fer  du  Havre  a-t-il  quitté  celui  de  Rouen  et 
traversé  la  Seine,  qu'il  s'enfonce  sous  la  côte  Sainte-Catherine  ;  puis, 
après  avoir  traversé  la  vallée  de  Darnétal  à  découvert  sur  une  éten- 
due de  4  à  300  mètres  ,  il  rentre  sous  terre  près  de  l'église  Saint- 
Hilaire,  parcourt  les  boulevards  Saint-Hilaire  et  Beauvoisine,  et  ne 
reparaît  au  soleil  que  sur  une  étendue  de  100  à  150  mètres,  au  pied 
du  Mont-auœ-Malades,  où  sera  la  gare  ;  il  disparaît  de  nouveau 
sous  la  base  de  cette  montagne.  Les  travaux  d'art  sont  mal  exé- 


cutés et  avec  de  mauvais  matériaux.  Ils  sont  empreints  du  même 
cachet  que  ceux  du  chemin  de  fer  de  Paris  à  Rouen.  Quelle  diffé- 
rence entre  ceux-là  et  les  travaux  du  chemin  de  fer  du  Nord! 

Tous  les  travaux  d'art,  viaducs,  tunnels,  etc.,  se  font  en  briques, 
sur  soubassement  en  pierre  brute.  On  emploie  deux  esiM-ces  de 
briques,  faites  en  général  sur  le  lieu  même,  avec  la  terre  qui  s'y 
trouve.  Tous  Us  grands  ateliers  de  construction  sont  accompagnés 
d'une  briqueterie,  à  partir  de  Rouen  jusqu'à  Pavilly,  sur  une 
étendue  de  l.î  à  20  kilomètres  et  au  delà  sans  doute,  d'où  l'un 
pourrait  conclure  que  toute  la  terre  de  cette  contrée  est  propre 
à  faire  de  la  brique.  Je  suis  loin  de  blâmer  ce  système,  qui  doit 
être  économique,  puisqu'on  évite  ainsi  les  frais  de  transport  ;  mais 
il  faudrait  que  les  produits  fussent  bons. 

De  ces  deux  espèces  de  briques,  les  unes  sont  jaunes ,  les  au- 
tres rouges.  La  première  semble  n'avoir  été  cuite  qu'aux  rayons 
du  soleil,  à  l'instar  di-s  Egyptiens,  tant  à  cause  de  sa  couleur  que 
de  sa  friabilité.  Ce  n'est  pas  que  la  couleur  jaune  soit  toujours 
l'indice  d'une  mauvaise  qualité  dans  la  brique;  j'ai  vu  de  la  brique 
et  même  de  la  tuile  de  cette  couleur  dont  la  qualité  égale  au  moins 
celle  des  meilleures  briques  rouges;  mais  elle  est  dure,  com- 
pacte et  sonore.  Celle  du  chemin  de  fer  du  Havre,  au  contraire,  est 
friable,  légère,  cassante,  et  rend  un  son  fêlé,  analogue  à  la  mau- 
vaise brique  de  Sarcelles,  dont  se  servent  les  fumistes  de  Paris 
pour  la  garniture  des  poêles.  La  brique  rouge,  quoique  d'une  cou- 
leur plus  séduisante,  ne  parait  pas  ici  meilleure  que  l'autre. 

Ces  bri(|ues,  il  est  vrai,  réunissent  toutes  les  apparences  des 
plus  mauvaises  qualités;  mais  peut-être  possèdent-elles  quelques 
vertus  occultes  et  merveilleuses  qui  les  dispensent  du  reste.  Et  c'est 
avec  de  tels  matériaux  qu'on  fait  des  constructions  qui  exigent 
la  plus  grande  solidité  !  C'est  avec  ces  briques  qu'on  fait  la  voûte 
du  tunnel  de  la  côte  Sainte-Catherine ,  dont  la  constitution 
géologique  est,  comme  dans  presque  toute  la  Normandie,  une 
matière  craveuse  lardée  de  rognons  de  silex  noir!  La  masse  est  di- 
visée par  d'innombrables  crevasses  verticales,  semblables  à  celles  qui 
se  forment  dans  une  pierre  tendre  soumise  à  une  trop  forte  charge. 
Ces  crevasses  paraissent  être  plutôt  l'effet  de  l'écrasement  que  du 
retrait  de  la  pierre.  Quelques-unes  ont  jus(|u'à  30  cent,  de  largeur. 

Au  viaduc  qui  traveree  la  petite  rivière  de  liobec,  l'un  des  pieds- 
droits  de  l'arcade  qui  recouvre  le  chemin  longeant  la  rivière  a  été 
poussé  au  vide  du  côté  de  l'eau  immédiatement  après  que  la 
voùle  eut  été  achevée,  et  bien  aviiiit  son  décintrenient.  Ce  pied- 
droit  fut  étayé  sur-le-champ. 

Mais  Tmissons  celte  dissertation  ,  déjà  beaucoup  trop  longue , 
dans  laquelle  il  s'est  glissé  plus  de  critique  que  nous  n'aurions 
voulu,  et  disons  adieu  à  la  ville  de  Rouen. 

H.  JANMARD,  arcl.iiod. . 

iVOlVEU  PIIOCÉDÉ  poiu  e\fo\(:eii 

Z.XS  FIXOTS  DES  CONSTRUCTIONS  HYDRAULIQUES 

Par  le  docteur  l'.-U.  Pott. 

Le  caractère  pariicnlier  de  ce  nouveau  mode  consiste  d.ins  une  ap- 
plication des  principes  de  la  physique  pneumatique  pour  ficher  dans  le 
terrain  les  pilots  qui  doivcul  servir  de  base  aii\  conslruciioiis  hydrauli- 
ques. Dans  ce  système,  au  lieu  de  se  servir  de  pilots  pleins  et  solides,  on 
fait  usage  de  pilois  creux  qu'on  enfonce  à  l'aide  de  la  pression  alnio- 


557 


REVUE  DE  L'ARCHITECTURE  ET  DES  TRAVAUX  PI  BMCS. 


5SS 


spliérique,  c'csi-a-dire  en  aspirant  par  l'inlérieiir  de  cha(|ue  piloi  le 
sable  ou  autres  malières  terreuses  meubles  sur  lesiiuellcs  repose  la  base 
de  ce  pilot,  cl  par  couséquent  en  produisant  un  vide,  que  le  pilol,  en 
descendant,  vient  aussitôt  occuper.  Voici  à  peu  près  coinnie  on  pro- 
cède, et  quels  sont  les  appareils  nécessaires  à  l'opération. 

Soit  un  pilot  (|u'il  s'agit  de  ficlicr  à  une  certaine  prolondeur  dans  un 
banc  de  sable  recouvert  d'eau.  Ce  pilol,  coinmi'  nous  l'avons  dit,  est 
creux  dans  toute  sa  longueur,  cl  non  pas  plein  conititc  ceux  qu'on  en- 
fonce avec  la  sonnelle.  Dans  cet  étal,  on  \i'.  place  veriicalenuMit  d^ms 
l'eau,  et  on  en  fait  descendre  l'extrémité  inférieure  ouverte  dans  le 
point  où  il  doit  être  établi  jusque  sur  le  sable,  en  le  pressant  un  peu 
pour  l'y  faire  pénétrer  légèrement.  On  voit  que,  de  celle  manière,  l'air 
ne  peul  plus  s'introduire  par  le  bas  à  son  intérieur,  ce  qui  est  inie 
condition  indispensable  pour  le  succès  du  travail. 

Quand  le  pilol  est  ainsi  debout,  on  coiffe  sa  partie  supérieure  d'un 
chapeau  imperméable  à  l'air,  et,  à  l'aide  d'un  tuyau  flexible  cl  égale- 
ment imperméable,  on  le  met  en  communication  avec  un  récipient  de 
décharge  qui  communique  hii-môme,  par  mi  autre  tuyau  flexible,  à 
une  pompe  à  air  à  trois  corps  ou  trois  pistons. 

Lorsque  tout  est  ainsi  disposé,  on  fait  jouer. les  pompes,  et  aussitôt 
il  se  fait  une  raréfaction  d'air  dans  les  tuyaux  flexibles,  le  récipient  et 
le  vide  intérieur  du  pilot,  raréfaction  qu'on  porte,  au  bout  de  quelques 
instants,  assez  loin  pour  faire  monter  par  la  pression  almospliéri(|ne  un 
mélange  semi-fluide  d'eau,  de  sable  et  de  terre,  qui  se  décharge  dans 
le  récipient.  Toutes  les  fois  que  le  récipient  e.«t  rempli,  on  le  vide  à 
l'aide  d'une  porte  à  tampon  qui  se  trouve  placée  près  du  fond. 

.\  mesure  que  le  sable  est  enlevé  ainsi  par  aspiration,  le  pilot  descend 
par  son  propre  poids  et  par  la  pression  almospbéri(|ne,  pour  occuper 
la  place  des  matériaux  solides  qui  ont  éié  enlevés. 

On  établit  une  pompe  à  trois  corps,  a(in  qu'il  y  ail  un  flux  continu 
de  matière  semi-fluide  ;  car  on  a  remarqué  que  la  rapidité  avec  laquelle 
s'opérait  renfonceinenl  du  pilol  était  proportionnelle  à  la  force  appli- 
quée el  à  la  permanence  de  son  action. 

Dans  bien  des  circonstances,  les  sables  mouvants,  les  alluvions  ter- 
reuses, lès  vases,  ainsi  que  quelques  matières  solides,  seront  assez 
meubles,  et  l'accès  de  l'eau  de  fdtralion  assez  libre,  assez  constant  et 
abondant  pour  que  le  pompage  se  continue  sans  interruption  jusqu'à  ce 
que  le  pilol  soit  enfoncé  à  la  profondeur  voulue;  mais,  dans  plusieurs 
autres,  il  sera  nécessaire  de  remuer,  détacher  ou  désagréger  les  ma- 
tières sous  le  pilol  avec  des  instruments  adaptés  et  agissant  à  cctefl'et, 
elde  verser  même  de  l'eau  dans  son  intérieur  pour  les  su.spendre  et 
en  faciliter  l'évacuation.  Dans  ce  but,  le  chapeau  qui  coiffe  le  pilol  porte 
une  boite  à  étoupe,  à  travers  la(|uelle  on  peut  faire  agir  les  instruments, 
ou  bien  on  peul  enlever  le  chapeau,  introduire  les  instrume:iis,  les 
faire  fonctionner,  verser  l'eau,  et  le  remettre  eu  place.  Du  reste,  le  cha- 
peau est  facile  à  rendre  imperméable  à  l'air,  à  l'aide  de  la  pression 
atmosphérique  qui  le  comprime  sur  une  rondelle  de  cuir  gras,  sur  la- 
quelle on  le  pose  au  sommet  du  pilot. 

Pour  accélérer  la  descente  du  pilot,  on  peut  placer  trniporairemenl 
sur  lui  on  sur  le  chapeau  qui  le  surmonte  un  poids  plus  ou  moins  lourd. 
Si  on  reticontre  une  couche  de  terrain  d'une  nature  trop  dure  ou  trop 
compacte  pour  être  pénétrée  par  les  moyens  indiiiués  ci-dessus,  alors  on 
peul  avoir  recours,  pour  la  rompre,  auxouiilsde  sondage  dont  on  se  sert 
pour  forer  les  puits  artésiens,  et,  pour  faciliter  l'opération,  on  relire  le 
chapeau  sans  inconvénient  pendanl  toute  la  durée  du  travail.  Si  une  lon- 
gueur de  pilol  ne  suflil  pas,  on  peul  en  ajouter  une  seconde,  nue  troi- 
sième, qu'on  visse  ou  assemble  bout  à  bout  d'une  manière  quelconque. 

Le  procédé  qui  vient  d'être  indiqué  est  très-propre  .à  ficher  des  pilots 
d'un  diamètre  moyen  ou  d'une  section  médiocre,  el  toutes  les  fois  que 
l'afflux  de  terre,  de  sable,  ou  des  autres  malières  de  lintéricur  à  l'exté- 
rieur du  pilol,  peuls'opéreV  très-librement;  mais,  lorsque  ces  malières 
ont  une  consistance  telle  que  la  communication  entre  l'intérieur  el 
l'extérieur  n'est  plus  parfaitement  libre,  ou  lorsque  l'eau  ne  pénètre 


pas  d'une  manière  continue  dans  le  pilot  creux,  ou  enfin  quand,  par 
des  causes  particulières,  il  devient  nécessaire  de  faire  nsage  de  pilols 
d'une  grandeur  lello  qu'on  éprouverait  des  diffiruliés  s«;rieuies  pour  \ 
faire  le  vide,  on  peut  néanmoins  procéder  d'afirès  les  in<Hne<t  principe", 
mais  en  opérant  ainsi  qu'il  suit  : 

Au  lieu  de  coiffer  le  pilot  d'un  chapeau  el  d  >  Une  le  w.!.;  ..  -on  in- 
térieur, on  y  introduit  un  gros  tube  qu'on  ap|telle  une  trompe,  dont  un 
fait  descendre  l'exlréniiié  inférieure  jusqu'au  fond  el  dans  le  table,  <  t 
qu'on  met  en  communication  avec  le  récipient  de  décharge  el  les  pom- 
pes à  air.  C'est  à  l'aide  de  celte  trompe  qu'un  a>pire  cl  qu'un  tide  les 
matières  qui  se  trouvent  soug  le  pilol,  aliii  de  le  faire  descendre,  (jiianii 
on  veut  faire  inurchtr  les  travaux  avec  «dériié,  on  peut  se  s<Ttirdc 
deux  ou  trois  trompes  mises  en  action  par  aulaiil  d'appareils d'eibau»- 
tion,  cl  si  le  pilot  est  d'un  fort  diamètre,  on  peul  faire  descendre  dans 
son  intérieur  des  ouvriers  qui  giiideiil  l'exlrémilé  il<-»  trompes,  et  leur 
font  enlever  légulièreincnt  tomes  les  matières  i  la  pei ipbérie  poar  le 
faire  foncer  bien  uniformément  et  verlicaleinenl.  Dans  ce  cas,  il  sera 
nécessaire  de  descendre  préalablement  au  fond  du  pilot  un  inqurt  ou 
une  caisse  d'un  dianiètie  moindre,  t;int  pour  dimiier  un  point  d'appui 
solideauxouvriers  que  pour  les  maintenir  à  flot,  et  lesprésener  ileiuni<- 
irruption  subite  ou  projection  de  bas  en  haut  des  sables  el  des  lcrie>. 

Aussitôt  que  les  pilols  sont  enfoncés  à  la  profondeur  voulue,  on  le« 
remplit  avec  un  béton  ou  bien  des  cimenis  romains,  hydrauliques,  n<i 
avec  toute  autre  substance;  niais  avant  d'agir  ainsi,  il  cunvieni,  dans 
le  cas  où  le  terrain  ne  présenterait  pas  une  cunsi^lance  suflisanie,  de 
le  consolider  dessous  et  autour  du  pilol.  A  cet  effet,  on  verse  ou  l'on 
fait  pénétrer  de  force  dans  ce  pilot  creux  des  solutions  chimique'^. 
mastics,  ciments  nu  autres,  appropriés  :i  la  nature  du  lerrain,  qu'on 
aura  reconnue  à  l'avance.  Ainsi,  dit  l'inTenteur  en  analysant  des  c<  han- 
tillons  des  terrains  recueillis  à  différentes  profondeurs,  on  peul  s'assu- 
rer quelles  soin  les  matières  qui  le  coinpo'Vciil,  el  selon  qu'il  sera  cal- 
caire, siliceux  ou  autre,  on  décidera  la  matière  simple  ou  coni|(os«-e 
qu'il  faudrait  combiner  pour  en  augmenter  la  soli  lilé.  On  peul,  du  reste. 
par  ipielques  essais  en  pclil,  mélanger  plusieurs  substances  ^  -     ' 

associées,  et  voir  quelles  seront  celles  qui  produiront  la  si'i 
la  plus  coinplèlc,  et  qui  reffectueront  le  plus  promplcinenl. 

Plusieurs  ingénieurs  anglais  distingués  par  leur  mérite,  el  entre  au- 
tres -M.  Walker,  président  de  l'Inslitut  des  ingénieurs  de  Londres,  «-i 
M.Gordon,  quia  déjà  élevé  plusieurs  phares  remarquables  parleur 
belle  exécution,  ont  conçu  une  idée  favorable  du  nouveau  nio<le  d'éta- 
blissement qu'<in  doit  à  M.  le  docteur  Poil,  et  sont,  dil-on.  dans  l'iii- 
tenlion  d'en  faire  l'essai  à  la  première  occasion. 

.»iCgC'^aai — 

CONCOURS  PODR  UN  PROJXT  DE  HAI.I.E  AUX  GRAIMS 
POUR  I.A  VIIXX  DE  BI.OIS. 

Nous  donnons  ici  les  principaux  articles  du  programme  de 
ce  concours,  et  nous  les  accompagnons  de  quelques  observations 
qui,  nous  l'espérons,  ne  seront  pas  sans  profil  pour  la  rédaetton 
des  programmes  futurs  : 

«  La  llalle  à  construire  sera  placée  sur  Je  eàU  Je  ta  flacr  d*  U  Priftr- 
lure  opposé  au  Palai$-de-Juitiee,  et  paralMrmml  à  celmi-ei.  Elle  a«rj 
la  forme  d'un  parallélogramme  rectangle  de  60  rocires  de  h^ade  el  de 
30  mètres  de  côte,  présentant  une  superficie  rouverlc  de  1800 mètre». 

«  La  llalle  sera  construite  sur  l'alignemml  arrélè  par  le  Comteit  mu- 
nicipal, suivant  ses  délibérations  des  U  novembre  el  5  décembre  IWi. 
et  sur  l'axe  du  Palais-de -Justice.  » 

Cet  alignement,  quel  est-il?  le  programme  ne  l'indique  pas.  Now 
ignorons  si ,  pour  faire  connaître  cet  alignement,  un  plan  a  été 
annexé  au  programme  public.  Quant  à  nous,  nous  n'en  avons  point 


Ô.'VJ 


HEVUE  DE  L'ARCHITECTURE    ET  DES  TRAVAUX  PUBLICS. 


560 


reçu  avec  les  exemplaires  du  programme  qui  nous  ont  été  adressés 
il  notre  demande.  Faisons  observer  donc,  qu'a  défaut  de  ce  docu- 
ment, le  concours  de  Blois  ne  serait  pas  très-sérieux ,  car  les  ar- 
chitectes qui  sont  sur  les  lieux,  et  à  même  de  prendre  à  la  mairie 
les  informations  indispensables,  sciaient  les  seuls  qui  pussent  con- 
courir. Nous  allons  nous  mettre  en  mesure  d'éclaircir  ce  fait. 

«  On  devra,  dans  la  disposilion  du  projet,  ménager  iiti  large  accès 
pour  la  circiilalioii  desaclieleiirsct  des  vendeurs.  Les  issues  praliquccs 
autour  de  l'édifice  itcvrinl  pnKienter  toutes  les  conditions  dcsiniLlis  /loiir 
assurer  la  prompdtutle,  la  facilité  et  la  sûreté  du  dvchargcmtnl  tirs 
(jrains  cl  de  leur  transport  dans  l'inlériiur  de  la  Halle.  » 

Cet  article  suppose  une  connaissance  préalable  des  abords  de 
l'emplacement  adopté,  ainsi  que  de  l'importance  du  mouvement 
commercial  du  marché  aux  grains  de  la  ville  de  Blois,  car  il  serait 
impossible,  sans  ces  données,  de  déterminer  toutes  les  conditions  ilt- 
xirablcK  i^our  asinrer  lu  promptitude,  la  facilité  et  ta  sûreté  du  dé- 
chargement. Cet  article  avait  besoin  d'être  développé  pour  les  ar- 
chitectes étrangers  à  la  ville. 

<i  Le  inuxiiniim  de  la  dépense  sera  de  180  000  fr.  L'écoiioniie  sur  celle 
prévision  sera  jirise  en  tonsidéralioii  pour  le  inciile  des  plans  produits.» 

Parmi  les  pièces  que  les  concurrents  devront  produire,  le  pro- 
gramme demande  : 

«  Ln  plan  d'ensemble  de  la  place  cl  de  ses  abords,  sur  lequel  figure- 
ront, en  plan  de  masse,  la  Préfecture  cl  ses  Jépindanccs,  le  Palais-de- 
Juslice  cl  la  Halle  projetée,  à  l'échelle  de  1  niillinièlre  par  inclre.  » 

Encore  ici,  le  programme,  à  moins  que  ce  plan  n'y  soit  annexé, 
semble  supposer  que  l'artiste  ira  à  Blois  lever  lui-même  le  plan  des 
abords  du  terrain  destiné  à  la  Halle;  or,  cela  ne  peut  avoir  lieu. 
C'est  donc  se  priver  volontairement  du  concours  d'une  foule  d'archi- 
tectes qui  ne  pourront  ou  ne  voudront  pas  faire  les  frais  du  voyage. 

Enfin,  un  des  derniers  articles  du  programme  impose  les  con- 
ditions suivantes  : 

«  Nul  ne  fera  admis  à  concourir  s'il  ne  justifie  d'un  certificat  de  récep- 
tion d'élève  de  l'Ecole  royale  des  Bcaux-.Arts,  ou  tout  au  moins  d'un  certi- 
ficat délivre  par  un  fonctionnaire  public,  et  établissant  tfu'il  a  exercé  ta 
profession  d'architecte  pendant  deux  années  au  moins  avant  le  ["jan- 
vier 1845. 

(]et  article  est  précédé  par  l'article  habituel  qui  impose  aux 
concurrents  de  celer  leurs  noms  dans  une  enveloppe  cachetée  , 
liortant  une  épigraphe  répétée  sur  les  dessins.  Lorsque  l'on  por- 
tera le  jugement,  le  nom  du  vainqueur  ne  sera  donc  pas  connu, 
et,  par  conséquent,  on  ne  saura  pas  s'il  a  ou  s'il  n'a  pas  satisfait  aux 
conditions  de  l'article  en  question,  et  il  pourrait  arriver  que  celui 
qui  aurait  mérité  le  prix  promis  de  1 500  fr.  ne  fût  pas  en  mesure  à 
cet  égard.  L'administration  exigerait-elle,  dans  ce  cas,  la  mise  hors 
deconcoursde  l'auteur  du  meilleur  projet?  se  priverait-elle  deslu- 
mières et  de  l'expérience  précieuse  de  celui  qui  se  serait  montré  le 
plus  compétent,  et  cela  parce  qu'il  n'aurait  pas  fait  attester  son 
talentpar  certificat?  En  agissant  de  la  sorte,  ferait-elle  acte  de  bonne 
administration,  et  les  administrés  auraient-ils  à  s'en  louer?  Et  si  on 
lu-i  décernait  le  prix,  les  autres  concurrents  ne  seraient-ils  pas  stric- 
tement dans  leur  droit  en  demandant  l'accomplissement  des  con- 
ditions du  programme?  A  quoi  bon  donc  charger  les  concours  de 
conditions  restrictives,  antilibérales,  qui,  loin  d'offrir  des  garan- 
ties nouvelles  ou  désirables,  ne  peuvent  enfanter  que  des  disputes 
et  des  luttes?  Elles  sont  d'ailleurs  en  flagrante  opposition  avec  les 
intérêts  des  localités  où  se  font  les  concours,  parce  que  le  nombre 


de  ceux  qui  apportent  leur  savoir  et  leur  expérience  en  tribut  a  la 
localité  est  diminué  par  ces  restrictions  sans  qu'elles  offrent  aucune 
compensation.  . 

a  Celui  (les  concurrents  dont  le  projet  aura  élé  reconnu  le  meilleur, 
recevra,  à  litre  de  prime,  une  soninie  de  1500  francs. 

«  A  ce  moyen,  la  Ville  sera  propriélaire  des  plans  en  projets.  Elle  se 
réserve  de  les  faire  exécuter  par  tel  areliileclc  (|ui  lui  conviendra.  Les 
antres  projets  seront  remis  à  leurs  auteurs. 

«  Les  plans  cl  projets  devront  être  remis  au  secrétariat  de  la  mairie 
de  Blois,  au  plus  lard,  le  ii  août  18i5.  » 

Ceux  de  nos  confrères  qui  voudraient  concourir  pourront  con- 
sulter dans  nos  bureaux  le  programme  entier  et  les  autres  pièces 
qui  nous  parviendraient  ultérieurement. 

(Une  lettre  de  M.  le  maire  de  Blois,  que  nous  recevons  au  moment 
de  mettre  sous  presse  nous  apprend  qu'en  effel  il  n'a  point  été  fait 
de  plan  de  l'alignement  de  la  place  pour  l'usage  des  concurrents. 
Nos  observations  et  nos  craintes  sont  ainsi  pleinement  justifiées.  ) 


PXTITr   CORRESPONDANCE. 

Il  cxisic  (topuis  longtemps  df'jà  en  Angleierre,  dans  les  journaux  spéciaux  . 
l'usage  lie  faire  corresponilre  les  abonnes  entre  eux  sur  le  terrain  commun  <lu 
journal.  Le.s  lecteurs  adressent  aux  journaux  les  questions  qui  leur  présentent 
quelque  dimcullé  :  les  Journaux  publient  ces  lettres  cl  y  répuiideiil,  ou  bien 
d'antres  lecteurs  y  répondent,  et  les  auteurs  des  queslious  et  des  réponses,  s'ils 
reculent  detant  la  pul)licilé  de  leurs  noms,  sont  désignés,  soit  par  leurs  ini- 
tiales, suit  par  des  lettres  choisies  A  l'avance,  soit  enfin  par  îles  pseudonyme». 
Cet  usage,  qui  coninicnce  1  se  répandre  eu  France,  nous  croyons  utile  de  l'adop- 
ter, et  nous  engagi-ons  nos  lecteurs  i  nous  adresser  toutes  les  deinaiifles  aux- 
quelles ils  auraient  intérêt  i  nous  tuir  répondre.  Les  faits  de  pralii|iie  peu 
connus,  les  inxentions  récentes,  les  procédés  nouveaux  de  coiislnirtion  et  de 
décoration,  les  questions  de  règlement  de  prix,  de  jurispriidenco,  d'archéologie, 
etc.,  etc.,  enfui,  tout  ce  qui  touche  à  l'art  de  bâtir  peut  élre  l'objet  d'une  de- 
mande. \ous  ne  répondrons  pas  toujours  à  ces  demaiulcs  uuui-mimes  ;  nous 
voulons,  an  contraire,  exciter  nos  confrères  et  les  hommes  qui  se  consacrent  aux 
dilTérentes  parties  de  notre  spécialité,  industrie,  art,  histoire,  etc.,  i  venir  sur 
le  terrain  que  nous  leur  préparons  dans  la  Kevue,  et  i  répondre  aux  demandes 
et  aux  difficuliés  qui  nous  seront  soumises  cl  que  nous  sounieUrons  à  notre 
tour  â  tous  nos  lecteurs.  Ce  sera  une  manière  utile  ,  pensons-nous,  d'associer 
i  notre  œmre  rinlelligcnce  et  l'expérience  de  tous  ceux  qui  nous  lisent.  Sou- 
vent ù  une  demande  telle,  par  exemple,  que  celle-ci  :  Quel  est  le  meilleur  sys- 
icnic  de  cou>erture  en  zinc  ?  nous  recevrons  des  réponses  rédigées  par  les  In- 
dustriels nic:nes  qui  exploitent  celle  industrie,  et  ces  dilTérentes  réponses  se  ser- 
viront de  contrôle  mutuel. 

.Nous  rommençons  aujourd'hui  nos  réponses  i  quelques  lettres  qui  nous  ont 
été  adressées  dernièrement. 

—  À  31.  Jules  /'...  Vous  n'êtes  pas  le  seul  qui  nous  ayez  fait  celte  question. 
Au  reste,  nous  nous  sommes  adressé  à  M.  HittorlT,  beau-fils  de  M.  Ia:  Père. 
pour  obtenir  la  cummuuication  du  procédé  irouié  par  ce  dernier  pour  polir  le 
granit  aussi  facilement  que  le  marbre  ordinaire.  H.  Ilitlorff  nous  a  répondu 
que  les  affaires  de  la  succession  de  M.  Le  Père  n'étaient  pas  encore  réglées  ; 
mais  qu'aussitôt  qu'elles  le  seraient,  il  nous  communiqnerail  volontiers  cette 
utile  invomiun,  si  cela  lui  était  possible. 

—  A  V.  M.  S.  /'.  .Nous  ferons  plus  tard  un  travail  spécial  sur  les  carions- 
pâtes  et  sur  leur  emploi  daiis'la  décoration.  Pour  le  mouient,  nous  avons  beau- 
coup de  travaux  en  iraiu  qui  doiMut  passer  atant  celui-là,  cl  entre  autres  un 
lra\ail  sur  les  maisons  anglaises,  et  un  autre  sur  le  Club  de  la  Réforme,  un  des 
monuments  les  plus  curieux  et  les  plus  considérables  de  Londres. 

—  .4  .}1.  C.  It.  .ay.  Nous  accueillerons  volontiers  vosconimunicaUons. 


CÉSAR   DALV, 

Directeur  ridacieur  m  cktf, 
membre  de  l'.4cad(  mie  royale  des  Braux-Arjs  <ii^  Sioclholin,  et  mcir.bre 
honoraire  et  corrrspondanl  de  l'insliuit  royal  des  Archilecles  brilinniquri. 


TVP.    LACBA.MPE    ET   CoMF  .    BUK   DA.MiETTE,    'J. 


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ncvue  générale  i]c  lAtcliitrcluic  cl  des  TravHii\  miilic».       No  o.  Rue  •>  Funtriiiberg.  —  P«ri«. 


roi.  %.  PI.  M. 


Tour  de  Citiarts, 


[t'MÙ  lâltnïii,  i..:..' 


ri.  Il  rr  I,  \-jzc 


i  I,  1 1,  r  ri,  1,1  rTM-Ji^-J 


Pclj;s  C;  C'ciles  V,  vu  de  la  P'aji  d»  !«  V  '^-^ 


i>  Âibiiîiii.  VU  di  ii  PiiU  di  ItS  Àljitin 


Owen  Joncs,  Jcl. 


FORTERESSE  DE  mum\ 

(grknaue) 


Rcme  générale  Je  l'Architcclurp  cl  des  Trotniii  Pulilirs.       No  «,  niio  île  f  umlemliorii.  —  l'urii. 


r»L  s.  M.  n. 


b  p.-'-T  ;, 


iT  i.ï  '  if\rc 


la  Cîiir  3e  ïi'r.]. 


Owon  Jones,  ili-l. 


C4Mrttri«.4>r. 


FORTERESSE  DE  LALB.^MBRA 


(  r.RR.NADK) 


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Iie>ae  générale  de  rArchitrcturc  et  des  Traïaiii  rublica.  —  N»  6,  Kur  de  l-uraleniherii        Pari». 

\'  ~~ 


r«f .  I.  H.  M. 


owen  Jones,  del. 


Z^ 


Les  lio^s  fonii  s  que  donnai  en  PiiH  !n  «pt  flittnU  3e  la  ïoLl«  î'jUîiU 


A  S 


A    ^ 


c  1 


Élévation  d»  sect  éléments  cinstiUtilt  de  \i  m\t  ttaiactiU. 


ilsvation  d'in  pendentif  de  la  Salle  d;  la  Baqi:;. 


Pian  d'un  pend;itif  de  li  SaBe  de  k  Bu^e. 


FORTERESSE  DE  L'ALHAMRRA. 


iLii 


càmtUiàf.mr. 


Svstème  de  construction  des  voûtes  staUiclites. 


TABLE  ALPHABÉTIQUE  ET  ANALYTIQUE 


DES    MATIÈRES. 


A. 

Abside  des  éaliscs  gothiques  et  romanes  :  Son  plan,  244.  —  Sa  forme 

cxiérieure,  481 , 
AciiOPOLE  d'Atliùiies  :  Note  sur  les  travaux  qui  s'y  exécutent,  286. 

—  Hestiiiiralioii  de  plusieurs  temples,  «6.  —  Sculptures  découver- 
tes, 287. 

.\ix-LA-('.iiAPELLE  :  Tonibeau  de  Ch;irlemngnc,  voy.  Tombeau. 

.\lgeh  :  Emploi  du  cèdre  dans  les  construclions  mauresques  de  celle 
ville,  285. 

Ar.HAMRKA  :  .Môrile  du  livre  publié  par  M.  Owen  Jones  sur  ce  palais. 
49.  —  Ignorance  où  l'oir  est  à  l'égard  de  ce  monument,  97. —Causes 
de  cette  ignorance,  ib.  —  Impossibilité  de  jusiilier  l'Alliambra  au 
moyen  des  poétiques  connues,  il/.  —  Variété  des  poétiques  suivant 
la  variété  de  tcm|)s,  de  lieux,  de  races, de  religion,  etc.,  98.  —  Iti'- 
clierclies  sur  la  poétique  dos  Arabes,  ib.  —  l.e  climat  de  l'Arabie  el 
son  influence  sur  l'idéal  des  Arabes,  99. — Influence  do  la  religion  do 
.Mahomet  sur  Tiiléal  arabe.  102. — A  quelle  occasion  MM.  Owen  Joncs 
et  Jules  Goury  entreprirent  leur  travail  sur  l'Alhambra,  103.  — 
Description  du  site  où  est  assis  l'Allianlbra,  104.  —  Kpoque  de  sa 
construction  ,  «6.  —  Coup  d'œil  général  sur  les  édifices  encore 
debout  dans  l'enceinte  de  la  forteresse  de  l'Alhambra,  529. — Los 
murs  et  les  tours  de  l'enceiiile,  550.  —  Palais  des  anciens  rois  mau- 
res, 552. — La  Cour  de  l'Étang,  ib. —  Caractère  de  l'art  arabe, 
curieuse  disposilion  des  tympans  des  arcs  des  galeries  de  l'.-Mliam- 
bra,  S54.  —  Salles  de  la  Barque  et  des  .\nd)assadeurs,  Sô'i.  —  Cour 
des  Lions,  ib.  — Absence  de  symétrie  dans  l'arrangement  des  co- 
lonnes des  galeries  de  cette  cour.  550.  —  Problème  d'art  proposé  à 
ce  sujet,  ib. — Salle  des  Deux  Sœurs,  557.  —  Delà  construction  des 
voûtes  stalactites,  ib. 

Allées  couvertes  des  Gaulois,  109. 

.\iiiBONS,  ou  chaires  des  églises  latines,  208. 

Amortissement  dans  l'arcliitecture  romane  et  gothique,  301. 

.^MPiiiTHÉATiiES  roniaius  de  la  Gaule,  162. 

.4n>ales  archéologiques  :  Sommaire  du  premier  numéro,  H4. 

ASTÉFIXbS,  146. 

Antiqi:ités:  .Musée  d'antiquités  nationales  à  l'hôtel  de  Cluny,  89.  — 
Résumé  de  l'histoire  du  palais  des  Thermes  et  de  l'hùlel,  90.  — 
Première  idée  de  l'établissement  d'un  musée  d'antiquités  dans  ces 
constructions,  ib. — Travaux  y  exécutés  par  M.  Albert  Lenoir,  ib. 

—  Découvertes  faites  durant  ces  travaux,  91. — Anciemie  dislrihii- 
tion  de  l'hôtel,  ib.  —  La  chapelle,  92.  —  Utilité  des  travaux  effec- 
tués, ib.  —  Voy.  aussi  I.>sTnLCTioxs. 

Appel  aux  lecteurs,  189. 

Aqieblcs  romains,  ISO. 

Arcades  romanes  et  gothiques,  290,  302. 

Archéologie  :  Sujets  archéologiques  exposés  au  Salon  de  18't4,  voy. 
Salon  :  voy.  aussi  à  la  table  des  sonmiaires  tous  les  articles  de  la 
partie  Histoire. 

Architecture  arabe,  voy.  Alhambra.  —  Chrétienne,  voy.  Instructions 
du  comité. —  Uoinaine  en  Gaule,  voy.  Instructions  —  Architecture 
rurale  :  Services  rendus  par  M.  le  marquis  de  .Maurémout  dans  la 
llaule-Garonne,  515. —  Son  Trailc  des  Ordres,  pour  servir  d'intro- 
duction à  l'arcliitecture  rurale,  lô.  —  Coup  d'œil  sur  la  marche  de 
l'art  depuis  les  temps  reculés  jusqu'à  nos  jours,  516.  —  Systèn^e 
proposé  par  M.  de  Maurémout  pour  les  constructions  rurales. 517. 

—  Arcbileclure  du  .Moyen-Age  en  Italie.  —  L'art  ogival  n'est  ja- 
mais entré  dans  le  génie  italien,  S23. 

Archivolte  romane  et  gothique,  509. 

Arcs  de  triomphe  romains  en  Gaule,  l.'iS.  —Arc  d'Orange  exposé 
au  Salon,  184.  — Arc  de  triomphe  romain  de  Djonisah;  projet  de 
son  transport  à  Paris,  258. 

Abcs-boutants  dans  les  égli»s  gothiques,  341. 

Armes  gauloises,  193. 

Art  moderne:  Des  causes  de  sa  décadence,  518. 

Arthur  Martin.  Un  des  rédacteurs  de  la  Revue.  80.  —  Auteur  des  ar- 
ticles :  Tond)eau  de  CKarlema^ne  à  Aix-la-Chapelle,  2;  de  la  res- 
tauration projetée  des  vitraux  <le  Chartres,  86. 


Arts  et  monuments  (comité  historique  des),  roy.  Comité. 
Asile  (salles  d  )  :  Leur  cliaufTigc  el  leur  ventilation,  til». 
Assaimsskment  des  villes      Découverte  importante.  512.  —  Assaini*- 

.sement  des  éguuts,  ,'j21. 
AtelieiiscIu  du  min  de  fer  de  Birmingham,  leurs  potle»  â  coalis«e!>. 

voy.  Portes. 
Autels  romains  de  la  Gaule,  149.  —  Autels  des  églises  laliues.  200. 

n. 

Badenier,  architecte,  exposant  au  Salon  de  18il.  21  i. 

Bains  et   bains  de  pieds  pour  les  élablisscmi-nls  publics.  \-2a  — it,,i„ 
d'hôpilal:   leurs  meilleures   liisposiimns,  36i.  —  Bains  .l'Ori'-.in. 
école  flollanle  de  natation  à  Bordeaux.  490.— iKsrripluin  d  ■ 
coiislruclion,  491.— Sa  mise  à  l'eau.  492.- Bains  de  Cauierol».     :■■ 

Baltard  (Victor;,  architecte,  un  des  exposants  au  S.-1I011  de  18*4.  ItJi. 

Balustrades  de  style  gothique,  339. 

Baptistères  de  r.ircliileclure  latine,  203. 

Barrai,  ingénieur,  un  des  rédacteurs  de  la  Rrcue,  aolcur  de  l'arlicl'-  : 
Kni-ins  de  construction  :  moufles  à  eiierenases  de  M    Nepveu.  451. 

Bahjiière  du  Trône  :  Statues  de  saint  Louis  et  de  Philippe- \ugu«tr. 
354.  —  Pavillon  de  la  barrière  de  la  Gare,  ib. 

Barrows  et  loinbelles,  110. 

Barrozxio  (Jacques),  dit  Vianole  .  30. 

Basiliques  romaines  de  la  Gaule.  — 164.  —  Basiliques  latines,  leurs 
plans.  204. 

Bas-reliefs  découverts  à  l'acropole  d'.Vlliènes,  287. 

Bavav  :  Bésultats  des  dernières  fouilles.  190. 

Bayard,  inventeur  d'un  procédé  de  désinfection  des  urines.  412. 

Benvenuto  Cellini,  sculpteur  du  seizième  siècle,  4.37. 

Berthelin  (Max),  architecte,  expo.-aiit  au  Salon  de  18i4.  215. 

BiBLiouRAPiiiE  »  Yignole  centésimal,  roy.  Vigndlk.  Panorania  il'F.- 
gyple  et  de  Nubie,  40.  —  .\nnales  archéoloiiiques.  144. — Ironozra- 
|)liie  chrélienne,  par  .M.  Didrou.  141.  —  Paris  sous  le  point  de  vue 
pilloresquc  et  inonunienlal,  par  .M.  II.  .Meynadicr,  I8i;  roy.  .iu>-i 

Kdilité.  —  Moyen-Ace  monumenlalet  arcliéolocique.  2U».  —  N ■■ 

biourapliiquc  sur   Piel.  archilecle,  par  .M.  A.  Teyssier,  27:1 
Piel  —  Statistique  monumentale  de  Paris,  par  M.  Albrrl  I  ci- 
vraisons  l 'i  et  15,  288.  —  Encyclopédie  descheininsdc  fi-i 
Toiirneux.  1536. —  Histoire  de  l'art  monumental,  M.  L.  ILi: 
—  Traité  des  ordres  ap|)liqués  .i  rarcliilecture  rurale.  51.-.  —  i-  --.ii 
sur  les  épis,  crêtes  ou  denlelles  el  autres  ilérorallons  oes  anciens 
combles  et  pignons,  par  M.  E.  de  la  guerrière.  .'i27.  — M.umcl  •!  Ir<>- 
nosra|)hie  rlirétienne.  grecque  el  laline,  par  .M.M.   Dulion  et   l'.iul 
Durand,  528  —  Lettres  sur   l'organisaliun  des  bibLolliéques  dans 
Paris,  par  .M.  le  comte  de  Latiorde,  16. 

BiBLioTiiiiQiKS  :  Sainte  Geneviève,  383.  —  Lettres  sur  rorsaiii>a(ioii 
des  bibliothèques  dans  Paris,  par  M.  le  comte  de  l.alHinle.  SM. 

Bijoux  romains,  195. 

BiOGHtPiiiK  lie  L.-A.  Piel.  architecte.  273.  —  Du  lient. .-roi.  (^lerc.  i76. 

B111ME  :  Son  emploi  dans  les  contre-allées  des  Cli  tl>séc>.  l». — îSoii 
utilité  pour  le  dallage  des  ruelles,  1  U).  — Son  emploi  pour  cou- 
verture, voy.  Toit. 

Blanciiiss»ue  ,  voy.  Blanchisserie.  Prix  proi    -•  -  «len- 

couraaement  p(uir  les  meilleurs  appareils  .  s. 

Blanchisserie.  172.  —  Dpéraiions  di»crsos  qui  «■.oi.«iiiuc;]i  ic  bi.uicliis- 
sase.  ib.  —  .Vppareil  de  lessivage  par  circulation.  175,  171.  —  .Avan- 
tages. 175.  —  Plan  d'une  blancliisserie,  17l>.  —  Buanderie  ci  **- 
choirs,  177. 

Btutncr,  fabricant  de  parquets  à  Strasbourc,  517. 

BoeswiUvald.  archilecle.  un  des  exposants  ^lu  Salon  de  1811.  184. 

BoROKAix  :  Son  école  flottante  de  natation,  roy.  B»l^». 

Bornes  milliaires  des  Uomains.  152. 

Bouchet  (Jules)  :  Ses  dessins  de  la  Villa-Pia,  lô. 

Bourse  île  Bordeaux,  S20. 

Briques  :  Prix  proposé  par  la  Société  d'encouragement  poar  lesr  Is- 
brication,  578.  —  Nouveau  mode  de  fabricalion,  5il 

Bronzks  romains,  195. 


T    V. 


3C 


563 


TABLE  ALPHABÉTIQUK  ET  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES. 


56i 


C. 

Cabinets  inoilores  (fiine  noiivollc  fonno,  140. 

Calonne  (Al|ilionsc  de),  auteur  des  arlides  :  De  la  Villa  Pia  du  Valican, 
tô.  —  Ouverture  du  iiiiuve;iu  Musée  d'antiquités  iialloiiales  à 
lluMel   de  Cluiiy,  89.  —  Nolice  biograpliique  sur  L.-A.  l'iel,  273. 

Caloriff-RES;  toi/-  (ài*i  ff.^gk. 

(;a.mi>  roiiiiiin.  153. 

Canal  de  l'Yvotte  :  Son  ahandoii  fâcheux,  24. 

CtNDÉnDRHS  du  l'oni-Uoval  :  Causes  de  leurs  fréquentes  ruptures,  3ôô. 

Casi.>  de  la  Villa  Pia.  18." 

Catuédbai-E  d'.Aix-la-Cliapelle.  3  —  IJeslannlion  projetée  des  vilrau\ 
de  la  cathédrale  deCliarlres.  8(!. — Calliédr.ile  pr<«j,'iée  par  M.  Gar- 
iiaiid.  et  exposée  au  Salon,  2H>.  —  l^alliédrale  de  l.aon:  Incciidif  de- 
sa  flèche.  2*0.  —  Achèvenicol  de  l.i  calheilnde  de  llennes,  2*0.  — 
Cathédrale  de  llarcelone  :  Dessin  d'un  aiiiien  projei  de  portail  re- 
trouvé il  rarche\ô(hé  lie  celte  ville,  286.  —Cathédrale  d(!  Paris, 
vn<j.  Notiib-Damk.  —  Calhédrale  de  ISouen  ,  421.  et  rny.  Iloi  EJt. 

Caylus  :  Son  opinion  sur  le  nionumenl  rom.iin  de.Monlniarlre.  373. 

CÈDRES  en  .\l>!érie  :  Leur  emploi  dans  les  maisons  ni.iiirescui's,  283. 

Chaires  on  ainhons  des  églises  latines,  208. — Cliaire  moderne  de  siyU; 
eiithique,  52ff. 

CiiAMPs-F.ivsÉES  :  Bilninage  de  ses  conlre-allées,  48.  —  Palais  pour 
l'exposition  de  l'indiislrie,  141. 

CiuPELi.Bilile  llonuroise  à  iNotreDame  d'Aix-la-Chapelle.  9.  — Cha- 
pelle de  CIniiv,  91.  —  Chapelle  d'Iidpilal  :  ses  dispositiniis  et  ses 
dimensions.  565. 

CiiAPiTEAix  romains  de  la  Gaule,  148.  —  Chapiteaux  ruinans  et  g<H 
ihii|ucs,  29i  et  suiv. 

CuAssE  de  Charlemaene  à  Aix-la-Chapelle,  4. 

Château  :  de  Pau  :  Travaux  i|ui  s'y  cxécuieni,  240. — Sa  restauration, 
SiO.  —  Kestauration  du  château  de  Klois.  525. 

CiiAiFFACE  cl  ventilation  :  Importance  de  ce  sujet  pour  l'archiicctc, 
118. —  Calorilères  ventilateurs  à  air  chaud,  qui  se  placent  dans  les 
pièces  à  chaulTer:  leur  hut,  ih.  —  Leur  description.  119.  —  Leurs 
applications  diverses,  l:iO. —  Salles  ilc  hains  et  de  liains  de  pieds,  ii. 
— CliaulTage  à  l'air  chaud,  16!). — Descriplion  d  un  calorifère  vcnii- 
lalcur  en  fonte,  t6.  —  Mode  île  comhustion.  ib.  —  Circulaliim  de  la 
fumée,  170.  —  KchaulTemeiit  de  l'air,  ib.  —  .\vanl.iaesdecesysiènic, 
171.  —  CliautTauc  et  venlilalion  des  prisons  cellulaires.  192.  — 
Fourneaux  de  cuisine  pour  les  cnlléues  et  les  hôpitaux.  20R.  —  Sa 
descri(ition,  ib.  —  Ses  avantages.  210.  —  Calorifères  ventilateurs 
pour  les  écoles  et  les  hôpitaux.  21 1  —  Desiriplion  des  calorifères 
d'écoles,  |6.  —  Description  des  calorifères  d'hâpitaux,  212.  —  Ven- 
tilation ohtenue  au  moyen  de  ce  calorifère.  213. — ChaulTagc  cl  ven- 
lilalion des  écoles  et  des  salles  d'asile,  440.  —  Dislribulion  des  ap- 
pareils dans  une  salle  d'école,  411.  —  Direction  de  ces  appareils; 
chauiïage  sans  venlilalion,  442.  —  Chaullaiïc  avec  ventilation,  ib. 

—  Ventilation  sans  chauir.iae.  443. —  Itésultats  de»  expériences 
faites  sur  ce  mode  de  chaidl'aue  et  de  venlilalion  ,  ib.  —  ltappi>rt 
du  docteur  Itehier  ,  ib.  —  Expérience  de  M.  l'élix  Cchlaiic,  445. — 
Chauiraue  et  ventilation  d'lià((ital,  i93. —  Exposé   du   système,  lY;. 

—  Ventilation,  494.  —  Légende  de  la  planche,  ib. 

C.HEMiKS  de  fer  :  Question  des  emlianadèrcs  dans  Paris,  281.  —  En- 
(^yclopi'die  des  chemins  de  fer,  par  Kclix  Tourneux,  534.  —  Statis- 
tique du  chemin  de  fer  hollandais,  S27. 

('iiE>EAi!x  des  églises  gothiques,  55S.  —  De  quelle  façon  les  chencaux 
doivent  être  joints  aux  murs  pour  intercepter  l'hutnidité,  429. 

taiEVET  des  églises  gothiques  et  romanes,  24t.  M\. 

Ctievreul,  meinhre  de  l'Institut  :  son  cours  sur  la  loi  du  contraste  si- 
multané des  couleurs,  43. 

Chocur  des  églises  romanes  et  gothiques,  246,  481. 

Ciboires  des  éalises  latines,  207. 

Ciments,  voy.  Poczzolake. 

Cirques  romains  de  la  Gaule,  163. 

Citadelles  romaines  de  la  Gaule  ;  leur  position.  147. 

Clerget,  architecte,  exposant  au  Salon  de  1814,  181. 

Clochers  des  églises  romanes  et  golliiqnes,  255,  385. 

Cloches:  Note  statistique  sur  leur  nombre  et  leur  poids  dans  quel- 
ques diocèses  de  France.  285. 

CLocHETo.vsdeségli.sesgolhiques, 343.— Delacaihédralede  Uouen  422. 

Collatéraux  des  églises  romanes  et  gothiques,  246,  485.  —  De  la 
cathédrale  de  Rouen,  424,  450. 

CoLo^^ES  historiques  îles  Romains  en  Gaule,  1.59.  — Colonnes  romaines, 
291.  —  tiothiques,  293.  —  Colonnes  de  la  barrière  du  Tri'me,  ?5I. 

Comité  historique  des  arts  et  inonumenls  :  Progrès  des  études  histo- 
riques. 50.  —  liilluence  de  ce  progrès  sur  la  société,  ib.  —  Histo- 
rique de  l'organisation  du  Comité,  51.  —  Paroles  de  M.  Guizot  sur 
l'importance  des  études  archéologiques,  i6.  —  Fondation  du  Comité 
et  ses  divisions,  ib.  —  Liste  des  membres  des  résidents  cl  non  ré- 
sidents du  Comité,  52  cl  suiv.  —  Circulaire  du  ministre  relative- 
ment aux  fonctions  du  Comité.  55.  —  Importance  de  l'étude  des 
monuments  dans  les  études  historiques,  ib.  — Lrgence  de  ces  études, 
56.  —  Rut  de  la  publication  des  instructions  du  Comité,  )6.  —  Ré- 
daction de  ces  inslruclions,  «6.  —  Instructions  publiées,  57.  —  Voy. 
aussi  I.NSTnicTiONS. 


CoNcoi'B»  pour  un  craiid  théâlrc  à  Toulouse,  383;  —  Pour  une  halle 
aux  grains  à  tilois,  5S8.  —  Oitique  du  programme,  5.^9. 

Considérant  'Victor],  membre  du  Conseil  général  de  la  Sciue,  8J  cir- 
culaire relativeanx  iniéiètsde  la  ville  de  Pans,  22. 

(^o>soLEs  romanes  ei  gothiques,  'i92. 

Co.vsTKrcTioS  :  Lngins  pour  ces  travaux,  451. 

(Contraste  simultané  des  couleurs,  cours  de  .M.  Chevreul,  45. 

t^u.NTHE-FOHTS  des  égliscs  gothiques  et  romanes,  311, 

CaiRBEAix  dans  les  styles  uothique  et  loinaii,  312. 

Cohre'Ipo.nuance:  Leitre  relative  aux  pierres  du  temple  de  Diane  Len- 
cophr\née.282.  —  iNou>e,iux  parquets  fabriqués  à  Sirasbour;:,  517. 
—  Trav.iux  receinmeiil  achevés,  en  train  d'exécution  et  projetés  dan* 
le  déparlenient  du  llaut-Rliin,  518.  —  Réflexions  sur  l'art  moderne, 
ib.  —  Travaux  en  cours  d'exécution  a  iiordeaux,  519.  —  Projet  d'hô- 
tel des  posies  pour  cette  ville,  5i0.  —  Travaux  qui  s'exécutent 
dans  les  environs,  ib.  —  Château  de  Pau,  ib.  —  Ltilité  de  urniise 
en  eonmiunicalion  îles  lecteurs  de  la  Revue  entre  eux,  560.  —  Ré- 
ponse à  M.  Jules  T  ...  .M.  S.  P...  et  II.  J... 

Couder  (Aiiiédée),  décorateur,  exposant  au  .^.ilon  de  1811.  215. 

CoiLEiHS  :  Cours  de  M.  Chevreul  sut  la  loi  de  leur  contraste  simul- 
tané, 45.  —  Causes  qui  tiennent  les  artistes  éloignés  de  ce  cours, 
té.  —  Rut  de  ce  cours.  46. 

CoLVEMT  des  .Viinonciades  bleues  à  Saint-Denis;  sa  démolition,  335. 

CiiE.NEAUX  et  macliicoulis  des  églises,  339. 

Cromlech,  108. 

t'nvpiEs  de.s  premiers  chrétiens,  203. 

(à  isi.NES  de  collèges  et  d'hôpitaux  ;  fourneau  pour  leur  nsagc,  coy. 
Chai'ffacb.  —  Cuisines  d'hôpital  ;  leurs  dispositions,  364. 


D. 


l>«Iy  (Céwr)  :  Sa  nomination  de  membre  honoraire  et  correspondant 
de  I  Institut  royal  des  architectes  brilaniiiques;  lettre  adressée  à 
celle  occasion  a  M.f^ésar  Daly  par  .VL'I .  L.  Donaldson.  vice-|irésident 
de  riiistilut,  %.  —  Ses  articles  sont  :  Comité  historique  des  arts  et 
fnonuinenls,  19. — L'Alhanibra.  97  et  ,'>20 — Grandes  portes  d'atelier. 
117.  — Sillon  (le  1814.  178  et  214  —  Ecuries  au  premier  étage,  345. 

DÉroRATlo.^  :  Fludes  sur  la  décoration  en  Italie  à  dinéreiites  époque», 
par  M.  Deiiuclle,  182.  —  Projet  de  décor. ition  d  un  plafond,  par 
.M.  J.  .Saulnier.  221.  —  Décoration  d'opéra,  loy.  Upéra,  — Dccora- 
llon  du  théâtre  de  Nantes,  525. 

Drikrouck,  architecte,  exposant  au  Salon  de  184-1,  182. 

Denuf  Ile  ,  exposant  au  Salon  de  1844.  IK2. 

Destrictiox  du  couveni  des  Annonciades  bleues  à  Sainl-Dcnis,  S3S 

Develle,  arcliiiecle  du  théâtre  de  Dunkcrque,  190. 

Didron,  ari  héolouuc,  directeur  de  la  Uevui  archéologique ,  chevalier 
de  la  Lé::ioii-d'lloiiiieur,  521. 

Discoi  Bs  du  préfet  de  la  Seine  sur  les  cmbcllisscinenls  effectués  et  pro- 
jetés dans  Paris,  29. 

Dock  de  c.irénase  projeté  à  Marseille,  285. 

DoiMEM.  Ill9.  —  Deini-dolinen.  110. 

Sonaldson  |^T.  L.) ,  > Ice-présideiil  de  l'Institut  royal  des  archilecles 
britanniques  ;  sa  lettre  relativement  à  la  nomination  de  .M.  César 
Daly,  parmi  les  membres  de  l'Insliiut,  9<i. 

Driollet.  archit..  auteur  de  la  restauration  du  Ihéàlre  de  .Nantes,  525 

Druides,  ruy.  première  i>STBUCTio.ii  du  comité  historique  des  arts  et 
monuincnls. 

Du  nège  (le  chevalier  Alexandre  ) ,  président  de  l'académie  de  Tou- 
louse, i:n  des  rédacleurs  de  la  Itrrur,  auteur  de  l'article  :  Du  traité 
des  ordres  appliqués  ,i  l'archilecture  rurale,  115. 

Du  Fuy,  architecte,  exposant  au  Salon  de  1814.  218.  —  Son  projet 
d'Iiôpilal.  349. 

Duvoir  .René),  ingénieur,  un  des  rédacteurs  de  la  Rrvut.  auteur  des 
articles  Chauffage,  Ventilation  et  Bains,  1 18,  169,  208,  410,  495. 


EcHAFAUDkGES,  VOy.  ENGINS. 

FcLAiRAGEaii  gaz  du  pont  des  Arts,  48. 

!  Ecoi.E.s.  leur  chaufTajje  et  leur  ventilation,  toy.  ces  mots.  — Ecole 

j  flotlaiile  de  natatinn,  voy.  Rains.  —  Frôle  centrale  des  aris  et  iiia- 
iiufaclurcs  :  Distribution  des  diplômes  et  des  certificats.  58L 

I  Ecuries  au  premier  étage,  315.  —  Dispositions  générales,  ib.  —  Les  re- 
mises, 3'»7.  —  1  eur  chauffage,  ib.  —  Les  écuries,  348.  —  Service 
général  de  propreté,  ib.  — Syslènie  de  la  construction,  319. 

!  Eci:sso>  de  la  ville  de  Paris.  140. 
Edilité  parisienne  :  Circulaire  de  M  Victor  Considérant  sur  les  intérêts 
généraux  de  lu  ville  de  Paris,  22  —  Décadence  du  lO*  arrondi.s- 
.seinenl,  ib. — Prodigirux  accroissement  des  quartiers  du  nord-ouesl, 
i6.  —  Partialité  choquante  dans  la  distribution  des  améliorations, 
23. —Question  du  déplacement  de  la  populaiion  active  de  Paris,  it. 
—  Sacrifice  des  besoins  du  10^'  arronilissemi'iit  à  des  condilions  pu- 
roiiient  décoratives,  24.  —  .Abandon  fâcheux  du  canal  de  l'Yvette, 
'b.  — Question  de  la  navigation  de  la  Seine,  25. —  Ftal  du  Gros- 
l'.aillou,de  la  rive  du  10<- arrondissement  et  des  ports  intérieurs,  26. 


565 


TABLE  ALPIIABKTIQUK  ET  ANALYTfOrE  DES  MATIERK. 


—  Principe  du  dAvcIoppemenI  commerchil,  th.—  Elat  de  l;i  ques- 
tion, li.  —  l.e>  cornpiianies  et  le  rninislre  des  Iravaui  pul)lics.  27. 

—  Lllihté  de  l^i  puldicilé  des  faits,  '28.  —  Coup  .l'œil  sommaire  sur  le 
budget  munu-ipal,  «/^.  —  Grande  rue  de  la  Croix-ltou^e  au  quai 
Coiiti,  -29.  —  Situaliori  des  revenus,  dépenses,  cmhellisscmeuls, 
travaux  commencés,  el  projets  de  la  ville  de  l'aris,  au  'iô  décem- 
bre 18'»3,  ib.  —  As.sainissemcnt  de  ta  ville,  .10.  —  Intentions  sans 
effets,  ib.  —  Première  chose  à  faire  pour  assainir  Paris.  ,31 .  —  Pro- 
duits de  l'octroi,  32.  —  Travaux  de  lllôtel-ile-Ville,  j6.  —  lUili- 
nienls  de  la  Cour-des Comptes,  préfecture  de  police,  ib.  —  Kiiiises 
nouvelles  cl  travaux  d'utilité  publique,  ib.  —.Service  des  eaux,  :i:l. 

—  Planlations,  ib.  —  Voirie,  t6. —  . Améliorations  de  la  voie  publi- 
que, rues  nouvelles,  3'l.  —  Projet  de  conslruclion  d'un  nouvel  hô- 
pital,  35.—  Bâtiment  pour  les  écoles  primaires,  ib.  —  l'orts  et  ba.s- 
sins  de  la  Seine,  ib.  —  Voies  de  conimunicalion,  rues,  pavage,  ib. 

—  Piésnmé,  36.—  Késumé  stalislique  de  la  complahilité  de  la  ville 
de  Pans,  depuis  1797  jusqu'à  1840  iHclusivemenI,  39.  —  De  la 
grande  circulation  ilans  l'aris  el  du  livre  de  .M.  H.  .Meynadier: 
l'aris  sous  le  point  de  vue  pittoresque  et  moimmentid.  184.  —  Causes 
qui  rendent  la  circulation  difficile  dans  l'aris,  ib.  —  Moyen  d'y  re- 
médier, 185.  —  Conditions  auxquelles  devrait  satisfaire  un  lion  svs- 
tème  de  conslruclion  dans  Paiis.  ib.  —  Nécessité  d'un  plan  général 
de  grande  circulaiion,  186.  —  Projet  de  M.  Meynadier.  187.  —  Uive 
droite,  188.  —  Uive  gauche,  2.32.  —  Disfrdjution  des  établissements 
publics  sur  les  divers  points  de  la  capitale.  231.  —  Le  t:iianip-de- 
Mars,  2.>4.  —  Les  grandes  halles,  ib.  —  Question  des  embarca- 
dères el  de  la  voierie  de  Montfaucon,  284.  —  Assainissement  et  hy- 
giène de  la  ville,  rot/,  ces  mots. 

Eglise:  Nouvelles  églises  de  Paris,  32.  —  Eglise  des  Templiers  de 
Monisaunès,  exposée  au  .Salon,  184.  —  Eglise  nouvelle  à  Moulins, 
240. —  Eglises  .Saint- Vincent-de-Paul  cl  de  la  Villetle;  leur  inaugu- 
ration, 451.  —  Lglise  nouvelle  <le  (Juebvviller,  518.—  O'AlIkiich, 
|6.  De  Dannemarie;  rccorslruclion  du  vai-seau,  ib. —  De  Bavillers, 
en  style  roman,  î6. —  Eglise  moderne  de  slyle  goihique  en  con- 
slruclion à  iNantcs,  5i6. —  Eglises  latines,  toy.  Ikstbuction  du  co 
mité;  voy.  aussi  Cathédrale. 

Egouts  :  Procédés  pour  les  assainir,  521.  —  Nouvelle  manière  d'en 
construire  les  voûles,  37o. 

Egypte  :  .Son  architecture,  40. 

Emalx  du  .Moyen-Age,  'l'fO. 

Email onilirant  :  Son  cmphiidansla  décoration  d'une .salled'opéra, 51)9. 

Embarcadèues  dans  Paris:  Discu.ssion  sur  leur  emplacement,  281-. 

Embellisse.mënts  de  Paris,  vuy.  Koilitiî. 

Engins  de  construction  :  Moulle  à  engrenages  de  M.  Nepveu,  451 . — Ses 
diversesapplicalionsà  lamarine.à  l'exploilalion  des  carrières, tô. — 
Son  application  à  la  chèvre  et  à  la  grue,  452.  —  Avantages  qu'elle 
présente,  ib. 

Entablemb.nt  gothique  et  roman,  312. 

EçL'iLiBRK  d'un  cor|is  solide  ;  équations  déduites  du  principe  des  vi- 
tesses virtuelles,  9.  —  Deux  modes ircnscignemeiit  de  la  mécanique, 
10.  —  Enoncé  du  principe  des  vitesses  virtuelles,  ib.  —  Transfnr- 
malion  des  coordonnées  reclangnlaires  dans  la  géométrie  à  trois  di- 
mensions, 11. — Cosinus  de  l'angle  de  doux  droites.  \'l. — Tradurlion 
analytique  du  principe  des  vitesses  virtuelles,  rt.  — Equation  de  l'équi- 
libre d'un  corps  solide. 14etl5. — Equilibre  des  voûtes,  l'oj/.  Voûtes. 

Escaliers  d'opéra.  »;oy.  Upéra. 

Étoffes  trouvées  dans  le  tombeau  de  Charlemagne  à  Aix-la-Cha- 
pelle. 5  et  suiv. 

Ethetat;  villa  gallo-romaine  découverte  dans  les  environs  de  cette 
ville.  191. 

Etudes  sur  les  théâtres,  voy.  Théâtre. 

Exposition  d'aichiiecture.  voy.  Salon. 

ExposiTio.N  quinquennale  de  1  industrie  française  :  Situation  des  liàli- 
ments  destinés  à  cette  exposilimi .  \±\.  —  Leur  aspect,  122.  — 
Circulaire  du  ministre  de  l'agricullurc  el  du  commerce  adre>si''e 
aux  préfets  des  déparlcmenls,  ib.  —  But  de  l'exposilion,  ib.  — 
Points  sur  lesquels  l'atlenlion  des  jurys  d'ailmission  devra  se  p"r- 
ter:  nature  des  produiis.  123.  —  Leur  qualité,  124.  —  Leur  valeur 
industrielle  el  commerciale,  ib.  —  Autres  recommandaliiuis  faites 
aux  préfets  et  aux  jurys,  ib.  —  Deuxième  circulaire  du  mi- 
nistre réglant  l'ailmission  îles  produits  el  les  cas  d'exclusion,  125 
et  suiv.  —  Historique  des  e\|)ositions  antérieures,  225.  —  Discours 
de  François  (de  iNeuchàleau)  à  l'occasion  de  la  première  exposilimi 
de  l'industrie,  227.  —  Les  expositions  suivantes,  229.  —  .Nombre 
des  exposants  à  ces  diverses  ex|)0!-ilions,  231.  —  linporlancc  (jiie 
l'on  devrait  donner  aux  expositions,  232. 


Fenêtres  et  œils-de-bœuf  du  Moyen-Age,  385.  —  Fenêlrcs  romanes, 
386.  —  Les  roses,  387.  —  Fenêtre  en  ogive.  i6.  —  Fenêtre  ra>on- 
nante,  388.  —  Fenèlres  et  meneaux  du  \IV'  siècle.  389.  —  Fenèire 
flamboyante,  390.  —  Antres  variétés,  5!tl.  —  Fenêtres  rcclanau- 
laires,  ib.  —  Fenêtre  ogivale  formée  par  des  arcades  romanes,  392. 
—  Fenêtre  Iriangulaiie  curviligne,  393. 


Fer  :  De  sa  conservation  dans  la  mer ,  523.  —  Lu  procédé  adopté  à  cet 

elT.d.  ib. 
FLiiiiK:de  la  call»édraledel.aon  :  «on  incendie.  2lO.— Flèche  en  fonte 

de  la  cath.  de  Itoucii,  121. — Flèche-  des  églises  du  Moyen- Age,  4>J6. 
Fi.oTTKiRS  des  bain- fliitlanls  de  Bordeaux,  491. 
Fo>TAi>E  Molière  :  Son  inauguration,  46. — Caractère  de  ce  moDumeal, 

47  — Les  statues  de  M.  Pradier.  i/i. — Statue  de  .Molière.  4K. Kon^ 

laine  uolliique  projetée  par  M.  Max  iierllieliii,  21S.  —  FofitaiiM  de 

la  place  .Saint- .Suipice,  .'1K2. 
Fonte:  Flèche  en  fonte  île  la  cathédrale  de  Rouen  ,  4^etsaiv. 
Fonts  baptismaux  des  égliseti  latines,  206. 
Fortifications  des  Itomains,  l.'iS. 
FoLiLLKs:  Précautions  à  prendre  dans  leur  exécnlioo,  168.— FoaillM 

à  Bavay,  190. 
Foi  BNKALX  de  ruisinc  pour  collèges  et  liôpilaax.  toy.  CaicrrACC. 
Foyers  de  Ihèàtres,  voy  Opéra. 

Frises  du  temple  de  Iliaiie  Leucoplirynèe  exposées  à  l'air,  282. 
I'  RONTONsel  pignons  des l<iilsdans  les  é2li^es romanes etgoltiiquet,338 
Furstenberg  (coinlc  de);  il  assiste  aux  fouilles  pratiquée*  dans  l'éflise 

d'Aix-la-Chapelle,  7. 


Callo-romain  (style).  145. 

Gargoiilles  des  édinces  du  Moyea-.\ge,  338.  —  Raisons  qai  doivent 
faire  >uppriiiier  leur  emploi. 

Garnaud,  arcliitecle.  exposant  au  Salon  de  1844,  216. 

Genty  (les  frére>)  sculpteurs  du  XVIe  siècle,  437. 

Gérard  Chorus,  architccie  de  Nolre-Danic  d'.\ix-l2-Cliapelle.  7. 

Tiot  DBON  :  Son  emploi  pour  empêcher  la  putréfaction  des  urine*.  513. 

Goujon  (Jean),  .'■culpteur  du  \VP  siècle,  437. 

GouDod.  arcliitecle.  auteur  il'une  ch.iire  de  -lyle  gothique,  525. 

Gour;  (Jules),  architecte,  collaborateur  de  11.  Owen  Jones  dans  l 'ou- 
vrage sur  l'Alhambra.  ll>3. 

Grand  bdpilal  de  Milan,  528. 

Grandes  porles  d'atelier,  roy.  Portes. 

Granit  :  Procédé  inventé  par  M.  Le  F'ère  pour  le  polir,  371  el  560. 

GBAViRbsde  M.  Ilugueuet  exposées  au  Salon,  225. 


II. 


Halle  aux  crains  pour  la  ville  de  Blois:  Sa  mise  au  coocours,  SOS.  — 
Oiliqiic  du  prouramnic,  559. 

IliproiiROME  construit  à  Paris,  431. 

Histoire  :  Une  des  divisions  des  matières  de  la  RtvMt;  twy.  à  la  table 
des  sommaires  tous  les  articles  parus  sous  ce  titre.  —  ilisloira  de 
l'art  monumental,  par  M.  L.  Batissier.  432. 

llopiTAix.  leur  chaufTage  et  leur  ventilation,  roy.  ce  mol.  —  IIAi>ilal 
projeté  par  M.  Du  Puy,  et  exposé  au  Salon,  217.  —  Aulre  liApilal 
projeté  par  M.  Magne.  223.  —  lldpiUI  pour  XOO  malades  pro- 
jeté par  M.  du  Puy,  359.  —  Besoin  duu  ll(^pltal  modèle,  i». — 
Proiiiamnie  d'un  hôpital  de  cette  nature  et  questions  à  résoudre. 
ib.  —  Quel  nombre  de  malades  doit  contenir  un  liApiLil.  300.  — 
Quelle  serait  lameilleuredi-posiliongénèraleidonner  aux  --allMiffr. 
—  Quel  nombre  de  malailes  devrait  contenir  chaque  salle.  361.  — 
Quelles  sont  les  dépendances  indispensables  à  chaque  salle,  et  de 
quelle  f.içon  seront-elles  disposées.  363.  —  La  pharmacie  et  sesdé- 
pembinccs:  la  communauli-  des  relisieuses.  \i>. — Quelle»  mmM  le* 
meilleures  dispositions  à  donner  aux  bains  el  à  la  cuisine.  361.  — 
Les  séchoirs  et  la  lingerie.  i6  — Quelle  sera  l'importance  de  TadMÎ- 
iii>lratlon.  Personnel  qui  doit  la  composer,  ib.  — IHspociliMM  et 
dimension^  de  la  chapelle.  365.  — Quelles  sont  le»  dépeiMiaMce» 
d'un  hôpital;  quelles  sont  celles  qui  doivent  se  rattacher  à  l'édMee 
principal  et  celles  qui  doivent  en  être  séparées,  té.  —  Quelles  M«t 
les  dispositions  à  prendre  pour  l'assainissement  de  loni  le  m-de- 
chaussée  et  pour  le  service  sénéral .  366.  —  Evalualiea  des  dé- 
penses. 367.  —  Légende  «le  la  planche.  16.  —  Hdp.lal  de  Milan,  tra- 
vée du  premier  étace.  528. 

Horloge  de  Bennes,  526.  —  Moyen  de  ne  plus  .ivoir  qu'une  seale  hor- 
loge pour  toute  une  ville,  ib. 

Hôtel  de  Clunv.  son  Musée,  89.—  Toy.  aussi  Mcsék d'ardtévlogie.  — 
Hôtel  de  1.1  Bourse  à  Bordeaux.  520  —Hôtel  de»  pcWi  pnjiUdii* 
la  même  ville,  16. 

IlÔTEi-oE-ViLLBde  Pari»,  travaux  pendant  1843.  52.  —  Ce  qe'ilaara 
coûté,  238. 

Huguenet,  «raveur.  exposant  au  Salon  de  1844.  225. 

Ih  MiDiTK  dans  les  constructions  :  l>es  moyens  de  la  prévenir  et  d"y 
remédier.  266.  —  Mémoire  de  M.  Léon  Vâudoyer  sar  celle  qoeftien. 
267.  —  Des  dilTérentes  causes  de  l'humidilé.  »*.  —  Marche  Mivie 
par  l'humidité  dans  sa  propagation.  270.  —  InconvènienU  de  riie- 
midité.  271.  —  Constructions  romaines  sans  mortier.  272.  — 
Moyens  de  prévenir  l'huinidilé  el  d'y  remédier.  315.  —  Imperfec- 
tions des  moyens  employés  pour  conibalire  le»  elfcl*  de  l'hamidile. 
,i.  _  Ocs  causes  de  la  détériorai  ion  de*  pierre»,  1».  —  De»  en  " 


riCT 


TABLK  AI.PHABKTIOUE  KT  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES. 


569 


316.  —  Moyens  de  prévenir  les  Inconvénienis  de  riiumiilKé  lors  de 
l'ex/'cutioii  des  constructions.  517.  —  .Moyens  de  di-lruirc  riiuini- 
dité  d.ins  des  consirucliotis  .nnciennes,  ib.  —  l.e  plonil)  et  le  l)i- 
Ininc,  318.  —  Inconvénients  du  plomi)  pour  enipi^chcr  l'Iiuinidité 
de  niotiler  dans  les  murs,  ib.  —  Kevêlement  du  pied  des  murs,  31!.'. 

—  Critique  dç  ce  pracé<lé,  3iO.  —  Banquette  creuse.  3:21  —  (Iri- 
tiquo  de  ce  procédé,  ib.  —  Moyens  .Tp|)lioal)lcs  aux  ccmstriiclions 
en  nioellons.  32.").  —  lU-vôteinenls  en  briques,  ib.  —  'Icrrc  cuite 
éniaillée,  ib.  —  Précautions  à  prendre  dans  les  pans  de  bois.  524. 

—  .\vanla£;es  des  caves  pour  préserver  les  conitriiclions  de  l'Iiuini- 
dite,  325.  —  l'récaulions  à  prendre  dans  l'élahli-sement  des  plan- 
cliers  des  rez-de-cliaussée  sans  caves,  ib.  —  (Causes  rie  l'Iiutnidilé 
des  rcz-de-cliaussée,  .326.  —  .Moyens  de  les  faire  disparaître,  ."i»  el 
suiv.  —  Moyens  de  rendre  un  étage  sonlerrain  liahilnhle.  5i7.  — 
t'.rilique  du  procédé  indiqué,  ib  —  Insuriis.mcc  des  enduits  ou  ci- 
nicnls  pour  cmpèciier  l'humidité  de  Iraveiser  les  murs.  ib.  ri  suie, 

—  Emploi  d'un  contic-mur  i-olé,  ,528.  —  Critique  de  ce  procédé, 
ib. —  Des  moyens  à  employer  pour  les  construclnm-  .i  inicrtte.  529. 

—  Jardins  de  l'Isola-IJella,  ib.  —  Emploi  moins  coiileux  du  bitume, 
(/;.  —  .Moyens  à  prendre  contre  l'Iiumldlté  dans  les  constructions 
rurales  et  Industrielles,  ib.  —  liàlimenls  d'exploitation,  mai.sons  de 
paysans.  5.')().  —  .Soins  à  apporter  dans  rétablissement  des  dallaues, 
ih.  —  De  I  humidité  dans  les  bàllments  couverts  en  terrasse,  351. 

—  Emploi  du  zinc  e(  du  bitume,  leurs  avanlaues  el  leurs  inconvé- 
nients, ib.  —  Gouttières  et  tuyaux  de  desceiilc.  552.  —  Passane  ré- 
servé pour  eux  d.ins  les  murs,  ib.  —  Critique  de  ce  procé<lé  comme 
trop  coiiteux  et  peu  Ionique,  553.  —  llésumé  de  ce  qui  précède, 
ib.  —  .Moyens  do  faire  cesser  les  inconvénienis  de  l'humi- 
ddéou  de  s'en  préserver  dans  les  conslructions  cxislanle<,  5r>0.  — 
Hevôlements  intérieurs  el  extérieurs,  ib.  —  Critique  do  ce  pro- 
cédé, ib.  —  Isolement  des  murs,  551.  —  .\pplication  des  cmluiis 
hydrofuses  aux  refends,  ili.  —  Kevètements  en  carreaux  émaillés 
et  en  plonib,  552.  —  Késuniédes  moyens  propres  à  combattre  l'Iiu- 
nildilé  dans  les  constructions  existantes.  iV;.  —  Insalubrité  des  rez- 
de-chaussée,  355.  —  (Causes  de  leur  humidité,  ili.  —  De  quelle 
manière  on  s'en  préserve  dans  les  maisons  anglaises,  ib.  —  liicon- 
véniouts  de  l'iiumldité  dans  les  œuvres  d'art.ojl.  —  Choix  dans  les 
matériaux  de  conslruclinn,  ib.  —  Peintures  antiques,  ib.  —  Pein- 
ture il  fresque,  555.  —  Eiidulls  dont  on  peut  se  ser\ir  pour  exécuter 
des  pointures,  ib.  —  Peinture  à  la  cire.  55C.  —  De  quelle  maniéie 
le  marbre  doit  être  entretenu,  ib.  —  Ex[)liralioii  des  linurcs.  3.)7. 

—  Addition  de  M.  II.  J. .  357.  —  Complément  des  annotations  de 
M.  II.  Janniaril,  4iG. —  .Manière  d'appliquer  ulileinenl  la  feuille  de 
plomb  et  la  couche  de  bitume,  ib.  —  Dcscriplloii  de  la  manière  d'o- 
pérer, 4i9.  —  DifTérenls  cas  où  ce  procédé  peut  être  employé,  4!>l). 

—  Expériences  faites  sur  rasccnsion  de  riiumiillté  dans  les  murs  et 
<lans  le  plâtre,  i'û.  —  .Marche  de  l'humidilé  dans  le  plâtre,  ib.  — 
Conséquences  tirées  de  ces  expériences,  4VJ.  —  Prix  proposés  par 
la  Société  d'encouraiiemenl  pour  les  moyens  de  piévenir  ou  de  faire 
cesser  l'humidité  dans  les  constructions,  378. 

llvuiJi.NE  publique  :  Découverte  importante  pour  cmpAcher  la  corrup- 
tion des  urines.  512.  —  En  quoi  consiste  ce  procédé  et  .>.on  ap|)lic.i- 
llon.  515.  —  Utilité  de  l'urine  pour  l'agriculture  el  l'industrie,  ib. 

—  Itevcnns  que  la  ville  en  pourrait  tirer,  ."il-i.  —  Sai:e  avis  du  Pré- 
fet de  police,  ib.  —  A.esninisscment  dts  éguuls,  521.  —  Avis  du 
Préfet  de  police,  32i. 

ilvpocAUSTE,  ses  dispositions,  106. 

I. 

IciiNOGRAPiiiE  des  églises  romanes  el  gothiques,  243 

lr.oxor,R.4PiiiE  chrétienne,  par  M.  Diilron.  1  H.  —  Iconographie  chré- 
tienne, grecque  et  latine,  traduite  par  M.  Paul  Durand  et  annotée 
par  M.  Didion,  r)28. 

l.NACci'inTiox  de  la  fontaine  Molière.  46  -^  Inauguration  des  églises 
Saint- Vincenl-de-Paul  el  de  la  Villetle,  431, 

l.NCEXDiES  de  théâtres,  voy.  Tiié.atri£s.  —  Delà  llèciie  de  la  cathédrale 
de  Laon,  240. 

l.xcRLSTATioxs  daiis  les  murs  du  Moyen-Age,  440, 

I>olstuie:  Exposition,  foi/.  ce  mol. 

l.xscRiPTio.xs  et  marbres  romains,  19i,  —  Iiiscriplions  qui  décorent  les 
murs  extérieurs  des  éiilisps  lomancs  et  gothiques,  43V. 

l.xsTRicTiox  (première)  du  Comité  historique  des  nris  et  monuments 
Monumenls  fixes  ;  première  époque  :  Indépendance  Kauloise.  monu- 
iiienls  religieux  des  Gaulois,  105.  —  Obscurité  des  premiers  temps 
druidiques,  ib.  —Cette  ob.scuritc  se  dissipe  un  peu  sous  la  civilisa- 
tion gre«que  el  romaine.  106.  —  Venue  du  Christianisme  dans  les 
Gaules,  ib.  —  Division  de  la  religion  des  Gaulois  en  trois  époques, 
107.  —  Pierres  dites  druidiques,  ib. —  Mcn-llir  ou  Penlvan  ib.  — 
Oomlcch,  108,  —  Pierre  tournante,  ib.  —  Dclmeii.  10i>.  —  Demi- 
Dolmen.  1 10.  —  Allée  couverte,  ib.  —  lîarrows  et  tombelles,  ib.  — 
Eeurs  dlflérenles  formes  et  leurs  po.sitions,  111,  —  Monuments  mi- 
litaires, moites,  ib.  —  Oppida,  112.  —  Monuments  civils,  ib.  — 
Deuxième  époque:  Colonisation  grecque,  monumenls  religieux, 
112,  — Construchoncyclopéeiine,  113,— Temples  de  Marseille   ib 

.  —  leniplede  Vernègues,  114.  —  Stèles,  i6.  —  Leurs  ornements 


115,  —  ,Monuments  militaires,  ib.  —  Monuments  civils,  116.  — 
Troisième  époque  :    Conquête  romaine,  monuments  relisjicux,  145. 

—  Terres  cuiies  romaines,  146.  —  .Silos,  147.  —  Posillon  des  cita- 
delles et  des  villes  romaines,  ib.  —  |ii>triliUlion  des  villes,  ib. 

Les  temples,  ib.  —  Erauments  de  chapiteaux,  1 48.  —  Inscriptions  cl 
autels,  149.  —  .Monuments  militaires,  enceintes,  ift.  —  Dillérciilcs 
manières  de  construire  des  Uomains.  l,5o.  —  Portes  de  ville.  151. 

—  Voies  antiques,  ib.  —  Bornes  milliaires,  1.52.  —  Canifis  el  en- 
ceintes, 1,53.  —  Leurs  systèmes  de  fnrtincatlons,  15i,  —  Bcm- 
parls,  ib.  —  Eortilications  |iermanentcs,  1.55,  —  .Monuments  civiU, 
l.'>6.  —  Ports,  ib.  —  Aqueducs,  ib.  —  I  bennes,  ib.  —  Prétoires. 
157,  —  Arcs  de  triomphe.  158.  —  Colonnes  historiques,  1.59. 
-Jeux  |>uldics.  160,  —  Ihéaire,  «/>,—  Sa  distribution,  161.— 
.\nipliitliéàtre  ,  162  —  Sa  distribution  el  .ses  accessoires,  té, — 
Cirque,  163.  —  Basiliques.  16'».  —  Conslructions  particulières. 
165.  —  Leur  distribution.    166.—   L'Iiypoc.iuste.   iV*.  —  .Moulins. 

167.  —  Puits,    ib.  —  Précautions   a    prendre  dans   les  fouilles, 

168.  —  .Monuments  meubles;  preiiiièro  époque  :  Indépendance 
gauloise,  193.  —  Colonisation  grecque.  194.  —  «Conquête  romaine. 
ib.  —  Iiiscriplions  el  marbres,  ib.  —  Vases  et  bijoux  en  or  et  en 
argent,  195.  —  Bronzes,  ib.  —  Terres  cuites,  poteries  el  verreries. 
196.  —  Aumismatique,  197.  —  Médailles  urecques.  \b.  —  Médailles 
et  monnaies  gauloises,  198.  —  Différents  siunes  monétaires  em- 
ployés par  les  Gaulois,  1!KJ.  —  Médailles  el  médaillons  urecs,  gau- 
lois el  romains,  200.  —  Livres  à  cunsulter  pour  la  numismatique, 
201.  —  .Moyens  à  employer  pour  nettoyer  les  médailles,  ib.—  Civi- 
lisation chrétienne,  mominicnls  fixes  cl  relicieux .  202.  —  Epoque 
méro\ indienne,  ib.—  Les  cryptes.  2n3.  —  Premier  svsième  d'ar- 
cbilecture  chrétienne,  basilique>  latines,  plans,  2oi.  —  Baptis- 
tères, 205.  —  Koiits  baptismaux,  2(»6.  —  Autels  el  ciboires,  ib.  — 
Ciborium,  207.  —  Ambon  ou  chaire,  208. 

—  instruction  (deuxième j  du  Comité  historique  :  .Monumenls  fixes, 
civilisation  chrétienne,  styles  roman  el  gothique,  241.  —  En- 
semble de  1  éuliso.  242.  —  Orientation,  ib.  —  Plan  par  terre 
ou  ichnographie,  243.  —  Dimensions  générales,  ib.  —  Système 
général  el  matériaux  de  ronslruclioii,  ib.  —  l>i>tribulion  géné- 
rale, 244.  —  L'abside,  clicvel  ou  sancluaire.  ib.  —  Le  chœur. 
à46.  —  La  nef  principale,  ib.  —  Les  collatéraux,  té.  —  Plans  de 
Saint-Gcrmain-de>-Prcs  el  de  .Notre-Dame  de  Paris,  2i7.  —  Les 
transcepls,  24«.  —  Les  portails,  23<i.  —  Le  porche.  2.'il.  —  Ses  dif- 
férentes variétés,  ib  el  suiv.  —  Les  clochers,  255.  —  La  sacris- 
tie, ib.  —  Extérieur  de  l'église.  2S9.  —  Décoration  îles  muraille-.. 
«6.  —  Arcades,  290.  —  ('..donnes  romanes,  291.  —  (;onsoles  292. 

—  Bases  <les  colonnes,  i6.  —  Eût  îles  colonnes,  2!I3.  —  Leurs  cha- 
piteaux. 294.— Différentes  espèces  de  chapiteaux,  SO.*)  el  suiv.— 
L'ainorlissciiieiit,  301.  —  L'arcaile  romane,  3ti2.  —  L'arcade  ogi- 
vale. 304.  —  Les  dillércnles  variétés  d'ouives.  305.  —  L'arcade  sur- 
baissée. 307.  —  Ornementation  des  arcades.  308.  —  Ces  archivoltes. 
309.  —  Leur  ornementation,  ib.  —  Les  crosses,  311.  —  L'entable- 
ment, 312.  —  Les  corbeaux,  ib.  et  suiv.  —  Les  loils  el  la  cou- 
verture ;  leurs  dilTércnles  espècig,  337.  —  Ornement  du  faîtage,  ib. 

—  Erontons  el  pignons,  338.  — Chéncaux  et  gargouilles,  ib.  — 
Balustrades.  .'139.  —  Ociieaux.  ib. —  .Mâchicoulis,  ifc.^Coiilie-forls,- 
ib.  —  Arcs-boutaiils,  341.  —  Leur  oniemenlallon.  3i2, —  Cloche- 
Ions,  313.  —  Consoles  ou  appuis  de  la  Uenaissanre,  34  4. —  Piliers- 
butaiils  crénelés,  ib.  —  Ecnètrcs  et  leils-de-bu-uf,  3S5.  —  (•cnèlres 
romanes,  386.  —  Les  roses,  3K7,  —  Eeiiètres  en  o^lve,  ib.  —  Ee- 
nôtrcs  rayonnantes,  388. —  Eenèlres  eliiieneaux  du  XIV-Mècle.  389. 

—  Eenètre  llamboyanle,  390,  —  Aulrc>  variétés,  ,".91,  —  Eenèlres 
rectangulaires,  ib.  —  Eenètre  ogivale  dans  r.ircade  romane,  592.  — 

—  Eenètre  triangul.iire .  393.  —  Portes.  433.  —  Murailles,  pierres 
lumulaires,  iiiscriplions  qui  les  décorent.  434.  —  Ornementation 
extérieure,  statuaire  des  XI*  cl  XIP  siècles.  435. —  Influence  by- 
sanlinc.  ib.  —  Progrès  de  l'art  et  son  apogée  au  XUI'  siècle. 
436. —  La  décadence  de  la  statuaire  commence  au  XIV»  siècle,  ih. 

—  Habileté  des  arlisles  au  XV'  siècle.  (37.  —  Différentes  phases  de 
la  statuaire  au  XVDsiècle,  ib. —  .Sculpture  d'orncmenl  pendanl  les 
mômes  siècles,  ses  <llfférentes  phases,  xb.  —  Ornementation  de  la 
Bcnaissance.  4:}8.  —  Dècailcnce  complète,  ib. —  Application  de  la 
couleur  à  rornemenlallon.  ib. —  Ses  diffeientes  phases.  439.  — 
Incrustations,  émaux,  mosaïques.  iiO.  —  Extérieur  de  l'abside  ou 
chevet,  4SI.  —  Extérieur  du  cbii-ur,  4il2.  —  Extérieur  de  la  nef 
principale,  i6,  —  Collatéraux  et  chapelles,  483.  —  Les  transsepis. 
ih.  —  Les  porches,  tb.  —  l.e  portail,  ih.  —  Ses  divisions  et  son  or- 
nementation, 484,  —  Les  clochers.  48.*>,  —  Les  tours,  48ti,  —  Les 
flèches,  ib.  —  Leur.-  diflérentes  formes,  487.  —  Leur  ornenieiila- 
tion,  488,  —  Tours  du  XVjp  siècle,  489, —  Les  sacristies,  i6. 

—  observations  de  .M.  11.  Janniard  sur  les  mar:;elles  ou  mardelles. 
280.  —  Orii;ine  probable  de  ces  cavités  du  sol,  281.  —  Les  pyrami- 
des el  tours  pleines.  373.  —  De  l'opinion  de  Caylus  sur  le  monument 
romain  de  .Montmartre,  ib. 

l.NSTiTLT  royal  des  architectes  britanniques  :  Nomination  de  M.  Daly 
parmi  les  membres  de  celte  société,  el  lettre  de  .M.Uonaldson  à  ci- 
su  et,  96. 
Introdiction  :  Enuméralion  des  travaux  en  préparation,  1. 
IsoDOMiM  :  Construction  romaine.  150. 
Isola-Bella  :  Ses  jardins  sur  voûte*,  '^i'■^. 


rir.9 


TABLK  AI.I'HABKÏIQLK  El    ANALVTIQI  K  DKS  MAIIKUKS. 


570 


JannUrd  (II),  arcliitecle,  undesrédjicleursdel.i  lievue.  aiilciir  dosarti- 
cics  :  l'uils  de  Grenelle,  manière  de  le  ilCdiarrasser  des  sables,  il .  — 

ou"!''*' --"'**'''^'"'""'*  "'''''''^''*''''''  première  irislruclion  duCoinilé. 
280  et  o73.— Lellrc  sur  les  frises  du  leniple  de  Hiaiie  l.ciicopliryiiée, 
!28"2.—  Noies  et. ippeiKliie  ajoutés  au  Mémoire  de  M.  Léon  Vaudover 
sur  riinmidité,  31,5  ,  -,50  et  /(4(J.— Trois  jours  à  Uouen,  iW)  et  .585 

.lAHi>iN  des  Tuileries  :  lioplàlraee  des  murs  de  soulétiemeiit ,  î>:W.  — 
Jardius  sur  vofties  de  l'Isola-lîella,  520.  —  .lanlin  du  Luxembourg, 
ses  emliellissetncMls,  5SI. 

Jean  Goujon,  457. 

Ji:i  X  pulilirs  romains  en  Gaule,  160. 

Joret,  nrcliileelc,  un  des  exposaids  au  .Salon  de  I8'('(,  t8i. 

Jluk  de  la  calbédrale  de  Itnuen.  450. 


KiiiNAC  :  Sa  grande  salle  liyposlyle,  i\. 


IiacroJx  (Eusène),  arcliitecle,  exposant  au  Salon  de  1814,  219. 

Iiafargue,  architecte  des  bains  flotlanls  de  fiordeaux,  490. 

Iiajsus,  architecte,  charijé  de  la  resiauralion  de  Notre-Dame  de  Paris, 
ù27,  et  de  la  consiruction  de  l'éïlise  Saint-Nicolas,  à  Nantes,  tâô. 

iebas,  architecte  :  Son  voyage  en  Grèce,  334. 

lefrançois.  arcliitecle  :  laveuleur  d'un  système  de  (cils  plais  bitumi- 
neux, 83. 

lenoir  (.Mbert),  architecte,  l'un  des  rédacteurs  des  liulrucHons  du  Co- 
mité historique  et  de  la  Revue,  56;  architecte  du  Musée  d'antiqui- 
tés, 90.  —  Il  est  nommé  chevalier  de  la  Légiou-d'Honneur,  ,554. 

Zienormant  ((:llarle^),  membre  de  l'Académie  des  Inscriptions,  l'un 
des  rédacteurs  des  Instructions  du  Comité  historique,  56. 

le  Père,  architecte  :  Sa  mort,  33'l.  —  Notice  biographique  sur  cet 
artiste,  567.  —  .Son  origine,  ses  premiers  voyages,  568.  —  Son 
voyage  à  Gonstantinople,  ib.  —  Il  fait  partie  de  l'expédilioii  d'E- 
g>ple,  569.  —  Part  qu'il  prit  aux  travaux  <lu  grand  ouvrage  sur 
l'Kgypte,  rt.  —  llesl_iiommé  archilecte  de  la  Malmaison  et  de  la 
colonne  Vendôme,  570.  —  Ses  études  sur  les  moyens  de  polir  le 
granit,  571. —  Didercnts  travaux  qui  lui  furent  couliés,  ib.  —  Il 
est  chargé  de  la  construction  (h^  l'église  de  Saint-Vinceiit-de-Paul, 
ib.  —  IJoiiiies  quiililés  de  M.  Le  Père,  372.  —  Différents  hommages 
rendu.s  à  son  mérite,  ib. 

Lettbks  sur  l'organisation  des  bibliolhèques  dans  Paris,  t'i. 

LiNfiERiE  d'hôpital,  361l'. 

Loge  de  la  Villa  Pia,  18.  —  Loges  du  Vatican  :  Leurs  encadrements 
exposés  au  Salon,  181.  —  Loges  de  théâtres,  tjoy.  Opéba. 

Louvre:  Projet  de  sa  réunion  aux  Tuileries,  voy.  Salo.\. 


M. 


Maceuu  :  ronslruclion  romaine,  l.'iO. 

MAço^^^ERlE  :  Mise  au  concours  d'un  travail  sur  les  pTix  de  règlenicnl 
des  mémoires,  233. 

Magne,  architecte,  exposant  au  Salon  de  1854,  221. 

Mairie  projetée  |iar  M.  Kug.  Lacroix,  219. 

Maiso.ns  romaines  de  la  (iaule,  16.j.  —  Maisons  biîlies  par  M.  Ed.  Re- 
naud ,  225.  —  .Maisons  du  Moyen-.\ge  ;  essais  sur  les  crêtes  et  épis 
qui  couronnent  leurs  combles,  527. 

Marbrk  :  .Son  entretien,  3;j(>. 

Marché  aux  fleurs  de  la  place  Saint-Sulpice,  582. 

Mardelles  ou  Margelles  des  Gaulois,  112  —  Observations  de  M.  II. 
Janniard  sur  leur  origine  probable,  28(1. 

Mauresque  (arcliileclure)  :  Emploi  du  cèdre  dans  ces  constructions  en 
Algérie,  283. 

Méoaili.es  grecques  et  romaines  en  Gaule,  2fK).  —  Moyens  et  précau- 
lionsà  prendre  pour  les  nettoyer,  201.  —  .Médailles  pour  les  expo- 
sants des  produits  de  l'iiidustrio,  285. 

MÉLANGES  :  Une  des  divisions  des  matières;  voir  à  la  table  des  soiii 
maires  les  articles  contenus  sous  ce  litre. 

Mekeaix  des  fenôties  gothiques  :  (a)nsidéralions  sur  la  gros.scur 
qu'ils  doivent  avoir,  '(20   —  Voy.  aussi  I'e.nètre. 

Men-iiih  ou  Peulvan,  107. 

Ménmée  (Prospcr),  mcnibre^e  l'Académie  française,  l'un  des  rédac- 
teurs des  Inslruclions  du  Comité  /ii'sfrir/i/i/c,  56. 

.MÉROÉ  :  Nouvel  evcmplairc  de  l'inscription  de  Ito.-ctle,  découvert  dan< 
cette  ville,  l'i2. 

Meynadier,  auteur  du  livre  iulilulé  :  Paris  sous  le  point  de  rue  pitto- 
resque et  monumental ,  etc.,  184,  et  auteur  des  articles:  Opéra, 


études  tliéoriquo-  (  t  pralique»  d'un  lliéâlrc  pour  rAcadt-iuic  lovate 
lie  niu>iquc,  4.55  et  49.'>. 

.Moni  r  E  :  Sa  Iraduclion  en  binaaue  décimal.  37. 

MoMNAiKs  uauloises,  193.  —  Moiinaie»  ruin.iliivit  en  Gaule,  198. 

MoMMKNTsrcliïieuv  ile^Gauloi».  IO"i.  \\1;—  inilitaiics.  III.  11.",;  _ 
civils,  112,  116.—  MiHiuments  reliuicux  de  la  Gaule  >mu*  la  domi. 
nation  romaine,  145.  —  Monumenis  niiliLiires  de  l.i  ménic  éiMxiui- 
IW  —  Monuments  civils,  |.5h.  —  MonumenU  religieux  de  l'i  ponue 
chrétienne.  2()-2  —  Monum«-nl  àéicver  a  l.arrey,  IS».  —  M.u.iimenl^ 
conimémoratifs  à  Giijas ,  2.59.  —  A  Gcrsoii.  tl,  —  Au  K<'-néral  IJer- 
traiid,  ib.  -  A  Mallhien  de  Donibaslc.  ib.—  A  GliarlcA  .Nodier    li. 

—  Moiiumeiit  romain  de  Moiitmarlre  :  De  l'o|iiiiion  de  Caylu»  à  son 
sujet,  .575. 

Mosaïques  d'Italie.  183.  —  .Mosaïques  du  Moyen- Age,  440. 

.MusQiÉEdu  .Moristaii,  ;i'u  Kaiie,  44J. 

Moi  i.i.Ns  rom.iins.  167. 

Ml  Rs  <le  la  terrasse  des  Tuileries;  leur  replâtrage,  258. 

MisÉK  d';intiquilés  nationales  à  l'iidicl  de  Cluny,  89.  —  Acquitiliont 
nouvelles  f.iiics  par  le  Musée.  189. 


Nécbologie  :  Notice  sur  la  vie  et  les  travaux  du  iieutenaul-colonel 
Clerc,  276.  —  Perfeclionnement  qu'il  fil  subir  ;i  la  boussole,  ib.  — 
Autres  services  rendus  par  lui.  —  Ses  prciuières  années.  277.  —.Set 
travaux.  —  Ses  livres  et  leur  mérile,  278. 

Nef  principale  des  églises  romanes  cl  gotliiqucs,  2W. —  Nef*  coll.i- 
térales,  ib —  Extérieur  de  ces  nefs,  482. 

Notre-Dame  d'Aix-la-Cli.ipelle ,  3.  —  Noire-Dame  de  Paris  :  Forie 
.Sainte-Anne  exiio'iéc  au  Salon.  184.  —  Ke.-lauralion  de  NoIre-Daine. 
conliée  à  MM.  I.assus  et  Viullel-Leduc,  237. 

NiDifi  :  .Son  architecture.  iO. 

NiMisjiATiQiE  grecque  el  romaine  en  Gaule,  107. 

Nv.iiPiiÉE  de  l.i  Villa  Pia,  18. 


Observations  présentées  par  la  société  des  arcliltecles  <.iirl.'i  lui  .le.  i.  ■ 
Icnics,  roi/.  Patentks. — Observations  de  II.  Janiii 
poinls<lcs/Ms/r»r/ii)«ji/M  Comité hnlorii,utile*arltct  ■ 

OEii  UE-D()i;i  E  du  Moyen-Age,  roy.  Kenêtre. 

Ogive  :  Ses  difTérentes  espèces,  ôOi. 

Opéra    :    Projets  de    MM.     Iloreau    el    Meynadier,    9«î.    —    Elude» 
Ibéoriipies  et  pratiques  d'un  théàlic   pour  l'Académie  royale   de 
musique,   -lo'».   — Exonle  ;    ib.  — Situation   du   nouvel   fi>l  ' 
\''>(i.  —  Effet  qui   doit   résulter   du    choix    de   rrinplaremru:. 

—  Faibles  s:icririccs  à  faire    pour  l'acqui>itioii  des   lcrraiii>,  -k>7. 

—  Unes  nouvelles  à  |iercer.  Vô8. —  L'extérieur  de  l'édifice,  i*  — 
I  e  porche,  459. —  La  terrasse  rouverte,  46(1. —  Sonulîliléel»uii  iT 
ib.  —  Pavillons  latéraux,  462.  —  Leur  décoration,  ib.  —  Ai 

cl  terrassiî  supérieure.  4(>;{.  — Toiture,  i6.  —  Le  [xiurlour  exlcrn  or. 
464.  —  Descriplioii  des  élévations  latérales  el  postérieure,  ib.  — 
Uldité  d'une  cour  pour  l'administration,  .t<'»5  — Galerie  '  -".—  •,■ 
ib.  — Bureaux  el  contrôle.  466.  — Vestibule,  i6.  —  i 
conditions  aéiiérales  auxquelles  il  doit  satisfaire.  44i7. —  i  .   . 

cations  et  dégagements  divers  du  rez-decbauss«''e,  468. —         .  .:'- 
terre,  ib.  —  Les  e>cali.'rs.  (69   —  ln>ufri>aiire  des  >y>lt  nu-  ■     - 
ployés.  tft.  —  Danger  des  escaliers  à  lampe  dioile.  470.  —  >n  - 
proposé,  ib.  —  Deuxième  vestibule,  ib. —  Sa  di-^lribiition  i.-: 
nient  aux  escaliers.  i7l.  —  Salon  <ratleiite.  ib.  —  Sa  ■: 
ib.  —  Ce  que  doit  être  le  foyer  cl  roiidilions auxquelles  \\         ■      ■ 
faire,  473.  —  Saloiisdii  foyer,  471. —  Leur desliuiilion, 475.  — Cimi- 
miiiiicalions  du  foyer  cl  dessalons  avec  les  autres  parties  de  li  vii|<> 
i6.  —  Les  corridors,  476.  —  Dimensions  et  foinies  qu  :  - 
avoir,  ib.  —  liaisons  qui  doivent  faire  exclure  les  parq 
lapis,  ib.  —  Détails  sur  rornementalion  des  couloirs,  477.  —  Le- 
étages  supérieurs,  ib.  —  Plaie-forme  ou  terrasse  découverte,  ib.  — 
Salles  de  secours,  etc.,  478.  —  l^ibinels  pour  le  dépAt  des  vétr- 
mcnts,  479.  —  Les  loges,  iù. —  Précautions  pour  empÂdier  le  brou 
des  porlrs.  ib.  —  Dimensions  des  loges,  480. —  Leurs  siéces.  etc.. 
ib. —  La  salle,  sa  disiribulion.  clc.  -19*».  —  1  \anien  des  diilereulr> 
formes  adoptées  pour  l'intérieur  des  salles.  197.  —  yuelleesl  la  cli.'- 
convenable,  ib.  —  Description  de  celle  de  la  rue  I  epelletieravrr  ..  - 
modilicaliotis,  ib.  —  L'aniphilliéàlrc  et  les  b'ccs.  498.  —  La^.ui:- 
scène, 499.  —  Suppres.-ion  des  loges  du  iiianleau  d';irleqnin.  'Mti. — 
Proporliiins  île  la  nou>elle  salle  projetée,  '.M.  —  T.tblcau  comparai  f 
des  dimensiiiii-i  <les  principaux  lliéalres  de  rEuro|>e,  ib. —  La  cran- 
deui  d'une  salle  necunslilue  pas  loujourMinedinirultépour  Irrluiu- 
leur,  ;i05.  —  .\couslique.  îiOt.  —  Les  arrliilecles  italiens.  i6.  — 

—  Condilioiis  acoustiques  auxquelles  une  salle  doit  satisfaire.  .'Ml 

—  Danger^di-s  corps  vibraiiLsel  des  saillies:  .">ti7. — La  coupole  de  U 
salle  cl  le  pourtour  dos  loges.  308.  —  De»  matériaux  à  employer.  »fr 

—  L'émail  ombrant,  509.  —  Le  prosctnium  el  le  souffleur,  510. — 
Vues  sur  la  décoration  de  la>alle.  III. —  Lcucils  .i  éuler  dait»  celle 
décoration,  ili. 


571 


TABLE  ALPHABÉTIOIIE  ET  ANALYTIQUE  DES  MATIÈRES. 


sut 


Oppioa  des  Gaulois,  ll'i. 

Oi'is  iiiccrliini,  leviiicliim,  relirulalum,  des  Homains,  150. 
Okik>tatio>  (les  églises  romanes  el  t'olliiques,  'ii2. 
OiixKMENTATioNexlérleurc  des  églises  romanes  el  golliiques,  435.  Vny. 

aussi   DÉCORATION. 

Oweo  Jones,  auteur  d'iin  livre  sur  l'Alliambra,  voy.  Aliiambra. 


Palus  Lancelloiti ,  à  Rome,  allribué  à  Pirro-Liporio.  21,  —  P.ilais 
de  l'iiiduslrie  projelé  par  M,  Maune,  221.  —  Palais  <lc  justice  de 
Bordeaux,  ril9.  —  lleslauralioii  de  celui  de  Houen,  ih. 

Panohama  d'F.BypIe  et  de  Nubie,  par  .M.  11.  Iloreau  .  arrliiierlc  .  étal 
de  sa  publication,  40.  —  Mosquée  du  Moristaii,  au  Caire,  ib. — 
Crande  salle  liyposlyle  de  Karnac  ,  41. 

Pantiiéo.n  :  Projet  d'aebèvemeiit  île  ses  abords,  141. 

l'ARQrETS  fabriqués  A  Sirasboura,  517. 

Partiiénon  :  Son  état  actuel,  28G. 

Patentes  des  arcbitecles  :  Observations  présentées  par  la  société  de» 
arcbilcctes  sur  le  projet  de  loi  des  patentes,  151.  —  Délimtion  du 
mot  architecte,  il).  —  [télinilion  du  mot  patente,  1.V2,  —  Examen 
des  motifs  qui  doivent  faire  exempler  l'architecte  de  la  patente,  ih. 

—  Assimilation  de  l'architecte  au  médecin  et  à  l'avocat,  135.  — 
Conclusion,  156. 

Pavage  des  rues  de  Paris  pciidaiil  18V3,  S,*}. 

Peintire  :  Sa  solidité  chez  les  anciens,  35V.  —  Peinture  à  fre.sque, 

3').'i.  —  Peinture  à  la  cire,  'X\f\. 
Perreymond,  un  des  rédacteurs  de  la  Revur,  auteur  des  articles  :  De  la 

f;rande  circidatioii  dans  Pari>  et  du  livre  de  M,  II.  Meynadicr.  184. 

—  Exposition  de  l'industrie  de  184t,  1"2I  et  22.5.  —  Lue  découverte 
importante  pour  l'assainissement  des  villes,  412. 

Pei'lvan  ou  Meu-bir,  107. 

PinRE  «le  Sulherland  :  Son  transport,  33S. 

Pharmacie  d'bôpital  el  ses  dépendances,  363. 

Piel  (Louis-Alexandre),  arcbiterte,  religieux  de  l'onlrc  de  Saint-Do- 
miiuque,  sa  biographie  par  M.  .\.  Teyssier,  273,  —  Itaisons  qui 
l'avaient  porté  à  embrasser  l'étal  reliaicux,  274.  —  Ses  premières 
aimées,  ses  travaux,  ib. — Nature  de  son  talent  et  de  ses  idées,  27.'5. 

PiRRUB  de  Uosetle,  ilécouverle  d'un  nouvel  exemplaire  de  l'inscription 
qu'elle  contient,  1 42.  —  Pierre  iouriiaiitc  des  (iaulois.  108. 

Pii.iERs-BiTANTS  des  églises  romanes  et  gothiques,  roy.  Instscctio.'* 
du  comilé  historique. 

Pil.oTS  :  Nouveau  procédé  pour  les  enfoncer,  557. 

Pirro-Io'gorio,  architecte  de  la  Villa  Pia  du  Vatic.in,  15. 

Place  du  Carrousel  :  Guichet  du  pont  infecté  par  les  urines,  HO. 

Plan  par  terre  des  églises  romanes  et  gutbiqucs,  243, 

Plantations  dans  Paris,  33. 

Pi.ATRK  :  Sa  nature  hygrométrique,  316.  —  Ascension  de  riiumidité 
dans  celle  nialicre,  4'i7. 

Plomb  :  .'•'on  emploi  pour  empêcher  l'humidilé  de  monter  dans  les 
murs,  518. 

Police  du  roulage  :  Malentendu  dans  le  projet  de  loi  sur  cette  ques- 
tion, 127.  —  Pourquoi  les  causes  de  destruction  sur  les  inauvnises 
roules  s'évanouissent  sur  les  Itelles  roules,  tfc. —  Inutilité  des  rcs- 
triclions  relatives  aux  charaenieiits  et  à  la  laigeur  <les  janics  des 
voilures  sur  les  belles  routes,  128.  —  S'il  existe  une  méthode  peu 
coûteuse  d'cntrelenir  les  routes  en  bon  état,  ib.  —  Influence  de  la 
beauté  des  roules  sur  l'ainélioralion  des  races  chevalinos.  12!t.  — 
Insuflisance  de  la  loi  pour  atteindre  ce  but,  130.  —  Itésumé,  ib. 

Pont  des  Arts  :  Son  éclairauc  au  gaz,  48. 

Porches  des  églises  romanes  et  gothiques,  2S1,  483. 

Portails  des  églises  romanes  et  golliiqties.  250. —  Dessin  du  portail 
de  lacaihédrale  de  llarccloime.  retrouvé  À  l'archevèclié  de  cette 
ville,  286.  —  Portail  principal  de  la  cathédrale  de  Kouen,  422  — 
Portail  sur  la  Gourdes  Libraires.  424, 

Portes  d'atelier,  à  Kirmiiigbam  ,  leur  description,  117,  —  Portes 
des  villes  romaines  dans  les  Gaules,  151  —  Porte  d'.^roux  de>-i- 
née  par  .M.  Dcibrouck,  182,  — Porte  Sainte-Anne  de  la  cathédr.de 
de  l'aris,  181.  —  Porte  du  portail  principal  de  la  cathédrab-  de 
Uouen,  -122,  —  Portes  des  églises  romanes  el  gothiques,  433. 

Ports  des  Koiuains,  156, 

Poteries  :  Analyse  de  polerie  étrusque.  43.  —  .Analyse  de  potirie 
gallo-romaine,  44.  —  Analyse  de  polerie  de  l'Oliio  ,  ib.  —  Poleiie 
moderne  du  Havre,  45.  —  Poteries  gauloises,  I!I3. 

F'oizzoLANE  ;<rlincicllc  qui  résiste  fi  l'eau  de  mer,  284. 

Pratiqi  E  :  Une  des  divisions  des  matières  :  voir  à  la  table  des  soiiiniai- 
ros  les  articles  compris  sous  ce  litre. 

Préioires  des  Itomaiiis  en  Gaule.  157,196. 

Prix  proposés  par  la  Société  d'encouraaement  pour  la  fabrication  des 
briques,  5'<6;  —  pour  les  moyens  de  faire  cesser  ou  de  préM-iiir 
l'humidité  dans  les  constructions,  578;  —  pour  le  perfectionnein'enl 
des  appareils  deslinés  au  blanchissage  du  linge,  ib. 
Propylées  d'Athènes  :  Leur  élat  actuel,  286, 

Prosjer,  inventeur  d'uii  iioux eau  mode  de  fabrication  de  luiles  et  de 

briques.  521, 
Pi  BLicATioNs  nouvelles,  roi/.  Ribi.iographif, 


PciTS  de  Grenelle:  Manière  de  se  débarrasser  des  sables  qui  troublent 
ses  eaux,  41.  —  Moyen  mis  en  œuvre  par  .M.  Lefort.  42.  —  Ses  in- 
convénients. 43.  —  Auire  moyen  pniposé,  ifc.  —  Son  réservoir  de 
la  place  de  l'Estrapade,  lUI.  —  Puits  roinaiii»,  1G7. 

PvRtMiuES  el  tours  pleines  :  Leur  origine,  575. 


It. 


Raoul •Hoehette  :  Son  livre  sur  la  Villa  Pia  du  Vatican,  15. 

UÉ'iLKMENT  des  mémoires  :  Mise  au  concours  d'un  travail  sur  le  prix  d« 
rè'jleiiicni  pour  la  niaroiinerie,  255. 

Hemises  :  roy.  Ecirik. 

Remparts  romains,  l.^i. 

Renaissance  :  .Sl.iluaire  de  celle  époque.  457.  —  Ornementation,  458. 

Rrnard-Perrin,  architecte,  auteur  du  Vigiiole  centésimal,  3t>. 

Renaud  (Edouard)  architecte  :  Maisons  construites  par  lui.  22.5. 

Restaihation  :  de  .Noire-Dame,  confiée  à  M.M.  La»sus  el  Viollel- 
Lc-duc,  257.  — Du  château  de  Iflois,  ,'i2,'>.  —  Du  théatrede  .Nantes,  i6. 

Rosette  (inscription  de)  iNouv^-l  exemplaire  découvert  à  Méroé,  142. 

Iloi'KN  ".  Trois  jours  dans  cette  ville  :  liitroiluction,  U9. —  Réflexions 
sur  les  vicissitudes  de  l'art,  420. — tjraiid  nombre  d'édilices  du 
Moyen-.\ge  que  l'on  trouve  à  Rouen,  ib.  —  .\rchilecture  moderne 
de  Rouen,  421.  —  La  cathédrale  de  Itouen,  i6.  —  Travaux  qui  s'y 
exécutent,  ib. — (^loclietons  renversés  par  l'ourauan,  422.  —  Porte 
el  portail  principal,  t6. — Gourdes  Liliroires,  423.  —  Mutilations 
qu'on  a  f.iit  subir  allés  framneiiN  gothiques,  ib  — Décaueinent  des 
édifices  du  .Moycn-ABe,  42V.  —  Portail  de  la  Cour  des  Libraires,  i6. 

—  La  fléclie  cii  fonte,  ib.  —  Son  système  de  construction,  423.  — 
Son  aspect,  ib.  Cnnsidéralions  sur  la  crosse ur  que  doivent  avoir 
les  suppnrlseii  architecture,  426.  —  Les  inencaux,  i'(.  —  .Meneaux  en 
foule,  427,  —  A  quel  point  en  sont  le»  travaux  de  la  Hèche,  ih. — Leur 
description,  428.  —  Italustradedu  comble  de  la  neL  429.  —  De  quelle 
façon  doit  être  fait  le  joint  d'un  cheiieau  au  mur,  ib.  — liilérieur 
de  la  caihéilrale:  le  jubé,  430.  —  l.es  collatéraux,  i<i,  — Cliapelle 
de  la  sjicrislie,  ib.  —  .Statue  de  Riciiard  Citur-de-Lion,  431.  —  Le 
Iranssept.  tb.  —  Lettre  de  M.  Gombier,  fM. — Saint-Ouen;  étal  ac- 
tuel de  cet  édifice,  5.39.  —  De  la  rostaur-ilion  projetée,  5V0.  —  Le* 
portails,  .'iVt.  —  1.»  tour  centrale.  f>i2.  —  Les  alial-juins.  ti\^. —  Les 
garuouilles,  t6, — Inlcrieurde  .Saint-tluen,  .ML — Toinlie  d'.\lexandre 
de  Rerneval.  i6.  —  Etat  de  roriiemcnlatiuii  sculptée  el  peinte  des 
voûtes  et  des  piliers,  ,%V5. — Grille  du  chipur.  ih.  —  Matériaux  qui 
ont  servi  à  la  consiruclion  de  Saint-Ouen,  ib.  —  La  pierre,  le  plomb 
el  le  fer,  .'>i6.  —  Mauvais  scellement,  .%V7. — Charpente  de  .Siinl- 
Ouen,  ib.  —  S.i  desciipiion.  M«. — impAt  sur  les  fÎMtcnrs,  ih.  —  Un 
liôlel  du  XVL-  siè.  le,  ib.  —  Muiilation  de  cet  édiliir,  ,M!I.  —  Sainl- 
Maclou,  ib.  —  Désencombrenicnt  de  ses  portails,  5.50.— Harmonie  de 
(outil,  les  parties  de  cet  édilire,  ib.  —  Les  portes  et  les  vitraux,  ib. 

—  Palais  de  justice.  i6.  —  Hûlel  de  Rourgtberoulde.  S.'Jl.  —  Musée 
des  antiques,  tb.  — Statue  de  Roïeldieu,  ,5,52,  —  Ewlise  <lc  Ronse- 
cours,  sa  position,  ib.  —  Description  de  l'édifice,  55,". —  Ses  vitraux. 
534.  —  Luxe  des  matériaux  em(iloyés,  ib.  —  .Ses  voàies.  .W.S.  — 
Chemin  Ue  fer  de  Rouen  au  Havre,  ib.  —  Mauvaise  exérutiou  de> 
travaux  d'art.  556,  —  Mauvaise  qualiié  des  briijues  employées,  tfr. 

RotLAUE  (police  du),  roy,  ce  mot. 

Ri  ELLES  de  Paris  :  .Nécessité  de  les  bitumer,  48  et  140. 

Ri  ES  nouvelles  de  Paris,  3V. — Pavage  des  rues.  35. — Percement  d'une 
rue  nouvelle.  141. —  Rue  des  Matliurins-Siiint-Jacques;  son  élargis- 
sement vote  par  le  conseil  municipal,  189. 

Rnpricb  Rcbert,  uii  des  exposants  au  Salou  de  I8VV,  18V. 


S. 


SiMisTiB  des  églises  romanes  et  gothiques,  255,  489. 

.Salles  d'asile  :  Leur  cbaulTage  et  leur  venlilalion,  410.  —  Salles  de 
spectacle,  viiy.  Théâtres  cl  Opéra, 

Salon  de  t»<U,  Pourquoi  la  presse  parle  si  peu  de  l'exposilioii  des 
projets  d  archilecture,  178.  —  Son  ignorance  de  l'art,  179.  —  Com- 
ment on  pourrait  donner  une  grande  impiTlance  aux  ex[)Osilioris 
d'architecture  el  les  rendre  très-profitables.  180.  —  Sujets  archéo- 
losiques  :  Restauration  du  lemple  de  Diane  Leucopbrvnée  .  p^r 
M.  Clerget,  181.  —  Porte  d'Arroux.  par  M,  Dellimuck,  182— Etudes 
sur  tari  de  la  ilécoratioii  en  Italie  à  dilTèrentes  époques,  par  M.  De- 
iiuelle,  ih.  —  Dcciiralioiis  antiques.  185.  —  Le>  Mo.'aisles.  tb.  —  I  a 
Renaissance,  i6.  —  Encadrements  des  loaes  ilu  Vatican,  par  M.  V, 
Raltard,  181,  —  L'arc  d  Orange,  par  M.  Joret.  ib.  —  Porte  Sninte- 
Annc  de  la  cathédrale  de  Paris,  par  M.  IJieswilwald.  ib.  —  Ealis  s 
des  templiers  de  Mont<aunès.  par  M.  Ru[)ricli  Robert,  ib. — Projet  de 
réunion  du  Louvre  aux  Tuileries,  par  M.  R.Klenier,  214.  —  Projet  d.- 
fontaine  gothique,  par  M.  Max  lieidielin.  215, — Des  embellisseinenls 
partiels  de  la  calliéilrale  de  Paris,  (iroposés  par  .M.  Am.  Couder,  i'.. 
—  De  l'unité  dans  les  décorations  intérieures,  216.  —  Du  projet  de 
cathédrale  de  M.  Garnaud,  ib.  —  Les  artistes  ont  besoin  les  uns  des 
autres,  ib.  —  Ils  devraient  s'associer  plus  fréquemment  pour  étudier 
des  projets,  217.  —  Les  monuments  d'architecture,  par  leur  nature 


373 


TABLE  ALPHABKTiyiiK  ET  ANALYflQI'K  DES  MATIÈRES. 


S74 


même,  ne  sont  pas  lous  au  même  degré  des  œuvres  d'art,  217.  —  De 
l'Iiôpilal  projeté  par  M.  Du  l'uy .  218  — Esl-il  Imn  daccuiiiulcr  les  liA- 
pilaux  dans  tes  villes  ?j6. — Du  projet  de  mairiiMlc  M.  Kiis;.  Lacroix. 
iil9.  —  Parties  et  tiépeiidaiices  q^iicou'^iilucrit  utic  mairie,  ih. — Tra- 
vaux à  elTetliier  aux  ahords  de  la  place  S.iiiil-Suliiice.-J-i().— Du  projet 
de  Palais  de  l'Industrie  de  M.  Maanc,  'i2l .— I'"aiil-il  hàlir  un  palais 
dérmitir  pour  les  expositions  de  l'indnslric?  ili. — (;on-idéralj(nis  de 
M.  M;iatie  en  faveur  de  son  projet,  222.  —  Dispositions  aénérali's, 
223.  —  Hôpital  projeté  |)ar  .M.  iMaane,  «/(.—  Description  de  ce  projet, 
22i. — Projet  de  décoration  d'un  plaTond.  par  M   Jult's  Saulnier,  ib. 
—  Maison  de  .M.  Kd.  Itenaud,  225.  —  Gravures  de  M.  Iluguenct,  ib. 
Sambin,  sculpteur  du  XVI"  siècle,  437. 
S4N-Cahio,  théâtre  de  INaples;  ses  dimensions,  501. 
Sasctuaihe  des  égli.-es  ^otldqucs  et  romanes.  2'li. 
Saulnier  (Joies),  décorateur,  ex()osaMt  au  Silon  de  1814.  224. 
ScALA  (la),  théâtre  de  Milan:  ses  dimensions,  ib. 
ScuLPTiHKs  découvertes  à  l'Aciopole  d'Athènes,  287.  — Sculptures 
grecques  moulées  par  M.  Lehas.  pour  TLcoledes  heaux-arts,'J34. — 
Sculptures  du  temple  de  Diaue  Leucoplirynée  exposées  à  l'air,  282. 
Silos  romains,  147. 

Siret,  inventeur  d'un  procédé  pour  l'assainissemeul  des  égouls,  521. 
Société    centrale  des   architectes  :  Compte-rendu  de   la  séance  du 
14  janvier  I8i4,  'J5.  —  Lettre  de  .M.  Ilaltanl.  ib.  —  Compte-rendu 
sur  les  mesures  d'installation  et  autres  opérations  du  bureau  et  du 
conseil  pendant  le  premier  semestre  de  l'exercice  ISlS-ISii,  ib.  et 
suiv.  —  Situation  de  la  caisse,  137. —  Rapports  des  censeurs  sur 
les  comptes-rendus  qui  précèdent,  ib. —  Délibération  sur  les  propo- 
sitions résultant  des  compte— rendus,  138.  —  Election  de  menihres 
nouveaux.  139. — Observations  présentées  pur  la  Société  de>  arclii 
tectes  à  propos  du  projet  de  loi  sur  les  patentes,  voy.  Patb.ntes. 
—  Société  dencouragerueni  :  Prix  proposés  par  elle,  ô76. 
Statistiqie  des  recettes  et  dépenses  de  la  ville  de  Paris  de  1797  A 
1840,   39.  —  Statistique   monurnenlale  de   Paris,  livraisons  14  et 
13.  281.  —  Matislique  des  prix  du  chemin  de  fer  Hollandais,  527. 
Statlaikei  es  XI",  XII»,  Xlll'=,  XIV",  XVi^eiXVI»  siècles,  433  et  suiv. 
Statl'es  peintes,  ilécouvertes  à  l'hùlel  île  Cluny,  92.  —  Statues  com- 
raémorative^  de  Larrey,  189;  —  de  l'réron.  190;  —de  Casimir  De- 
lavigne,  ib. — de  Duqiiesne,  ib. — de  La  Pérouse,  ib. —  de  Jean  liart, 
ib. — Statues  découvertes  à  r.\cro|)ole  d'.Xthènes.  287. —  Sl.ilues  de 
saint  Louis  et  de  Pliili(ipe-Aus;usle,  à  la  barrière  du  'Irônc,  334.  — 
Statue  de  Itichard  Cœur-de-Lion  à  la  cathédrale  de  Itouen,  431. 
—  Statue  de  Gœthe,  556.  —  Statue  à  SIephenson,  527. 
■Stèles  greci|ues  du  midi  de  la  France,  lit. 

T. 

Temples  romains  de  la  Gaule,  147. — Temple  de  Diane  Leucophrynée. 
dessmé  par  M.  Clergel,  181;  —  Ses  frises  expo.sées  à  l'injure  de 
l'air,  282  —  Temple  de  la  Victoire  Aptère  à  Athènes;  aclièveracnt 
de  sa  restauration,  286;  — de  Minerve  Poliade,  287. 

Tekiies  cuites  romaines,  196. 

Teyssier  (Amédée),  auteur  d'une  notice  biographique  sur  Piel,  273. 

Théaires  romains  de  la  Gaule.  160.  —  Théâtre  de  hunkerque,  son 
achèvement,  190. —  l'réqueuls  incendies  des  théàties,  239.  —  (Con- 
cours pour  un  grand  théâtre  à  Toulouse,  383.  —  Ktudes  sur  un 
Ihéàlre  d'opéra;  piéainliule,  453.  —  L'Oi'Éka  ,  voy.  ce  mol.  — 
Dimensions  des  principaux  théâtres  de  rEurii[)e.  'iOI.  —  Théâtre  de 
Nantes;  sa  restauration,  525;  —  de  Livourne,  527. 

Théorie:  Due  des  divisions  des  matières;  voira  la  table  des  som- 
maires les  articles  contenus  sous  ce  titre. 

TiiEa.>iEs  (Palais  des)  :  Son  musée,  89.  —  Dispo.-ilion  des  llie.-mes  ro- 
mains, 1S6. 

Thumeloup,  arch,  auteur  des  dessins  du  grand  hôpital  de  Milan,  .528. 

TrNETTES,  VIty.  HVGIÈME. 

Toit  :  Nouveau  luit  plat  bitumineux,  82.  —  Avantages  des  toits  plats. 
83.  —  Système  de  M.  Lefiançois,  ib.  —  Préparation  des  substances 
qui  entrent  dans  la  confection  du  nouveau  toit  bitumineux,  83.  — 
Préparation  du  toit  à  recouvrir  de  ces  substances,  84.  -—  .Manière 
de  les  appliquer,  85. 

Toiture  des  églises  romanes  e(  gothiques,  337. 

Tombeau  :  celui  de  Charlemagne  à  Aix-la-Chappelle  :  Uichesses  de 
l'Alleniagne  en  orfèvrerie  du  Moyeu-Atc,  3.  —Cathédrale  d'Aix- 
la-Chapelle,  rt.— Kecherches  faites  danscel  édifice,  4.— la  chà--c 
de  Charlemagne,  ib.  —  Lpoque  à  laquelle  cette  chiisse  fut  faite,  ib. 
—  Ouverture  de  celte  chàs.se,  5.— Otijcls  (pii  y  fuient  liou\és,  th.— 
Klolfes  des  XI"  et  XI t»  siècles  trouvées  dans  l'éali-e.  id.  — l-ouilles 
pratiquées  dans  l'église,  7.  —  Description  de  réi;li>e,  ib.  —  loin- 
beau  de  Gérard  Chorus,  son  architecte,  )6.— liesullats  des  fouilles, 
,4.  —Ueslauralion  projetée  de  la  chapelle  Hongroise.  9.  —  Pierre- 
luniulaires  qui  décorent  ^es  murs  extérieurs  des  églises  romane> 
et  eothiqiies,  43 i. 

To.miieli.es  (les  Gaulois,  1 10. 

ToiiDiNo,  Ihéàlre  de  Itonie,  506. 

FouBS  des  éulises  du  Moyen-Aae,  486. 

I'ranssepts  des  églises  romanes  et  gothiques,  218. 

TRA^sp0RT  du  phare  de  Sullierland,  335. 


Tiii.EBiES,  projet  de  «a  réunion  au  Louvre,  toy.  .Salon. 

Tuiles  roiiiaiiic-(,  146.  — Prix  proposé  pour  la  faliricalion  de»  luilm 

par  la  Société  d'encouragement,  370,  —  Nouveau  mode  de  fabrica- 

lioii  des  tuiles,  521. 

V. 

Vases  romainn.  en  or  cl  en  argent,  195 

Vatican  :  la  Villa  l'ia,  voy.  \\\.\.\. 

'Vaudoyer  (Léon),  arcliileeie ,  auteur  d'un  mémoire  »ur  ITiumidilé 

dans  les  ciuislruclions.  2ii6. 
Ve.ntilation  et  cliaufTaue.  voy.  CiiicrrAGB. 
Vkrhehiks  romaines,  IS/i. 
Viaduc  sur  la  Loire,  432. 
Vi(;,NOLE  centésimal  de  .M.  Ilenard ,  36.  —  L'n  mol  sar  le  livre  de  Vi- 

giiole  et  sur  le»  circonstances  au  milieu  desquelle*  Il  fui  fait,  ib   

(Jrand  nombre  de  mauvais  livres  publiés  sous  le  tilre  de  Yi'gnoln 
37.  —  Tradutlion  du  module  en  langage  décimal .  t6.  —  \ianlas<- 
du  système  duodécimal  »ur  le  système  décimal,  i6.—  Méllio,le nou- 
velle de  M.  ISeiiaril-l'errin  pour  tracer  la  volute,  38.  —  Liililé  du 
livre  de  .M.  Ueiiard-Perrin.  ib. 
Villa  uallo-romaine  découverte  près  d  Elrelal.  191  — €on»idéralious 

sur  les  invasions  des  Karbares,  192. 
Villa  Pia  du  Vatican  :  Ce  que  c'est  que  ce  monument.  15.  —  P»r  qui 
il  fut  coii>lruit,  ih.  —  Influence  de  1  époque  où  il  fut  hiii,  tn  «oo  ca- 
ractère, 16.  —  Caractère  du  talent  de  l'arctiilecle,  Pirro  Liaorio.  i« 
—  liichcsse  de  la  Villa  l'ia.  1".  —  Lxagéraliou  de  l'emploi  de-  al- 
léiiories  de  l'antiquité,  i6.  —  itaisons  qui  devaient  les  faire  exclure 
en  partie  de  lliabilation  d'un  pape,  i6.—  Les  cathédrales  eolliique- 
défendues  contre  .M.  Itaoul-Uocbellc,  ib.  —  Description  de  la  ViIIj 

Pia,  18.  —  La  Loge,  it.  —  Sa  décoration  intérieure,  19. |,e  Vji- 

sin,  sa  décoration  extérieure,  ib.  — Son  plan,  20  —  Le  réz-de- 
cliau.sséeet  sa  décoration,  ib.  —  Lt  premier  élase  el  sa  d/^cnralioo  . 
21.  —  Matéiiaux  employés  dans  la  construction  de  cet  édifice,  i».— 
Uésumé.  ib.  —  Autres  travaux  de  Pirro  Ligorio,  i6. 
Villes  romaines  de  la  (ïaule.  leur  position,  147. 
Visconti,  architecte  :  La  funlaine  Molière,  46.  —  Fontaine  de  la  place 

Sainl-Snlpice,  382.                                                                         ^ 
Vitraux  de  (Jiarircs,  restauration  projetée,  86. Lettre  de  il.  Ar- 
thur Martin  sur  ce  sujet,  ih.  —  Elal  actuel  de  ces  vitraux,  87.  

Itai.sons  <pii  iloivcnl  comballre  ce  projet  de  re>lauialion,  i6.' Inu- 
tilité des  ilépeiises  projetées,  ih.  —  Peu  de  frais  que  iiécès*ilent  leur 
simple  entretien  et  leur  conservation,  88.  —  Emploi  meilleur  que 
l'on  pourrait  faire  des  fonds  alloués  pour  ces  reslauralinn>.  li 
Voies  antiques,  151.— Leurs  différentes  espèces,  152.  —  Uornes  mil- 

liaires.  ih. 
Voirie  de  .Muntfaucon  :  Sa  suppression.  285. 

Volute  :  Nouvelle  manière  de  la  tracer,  (lar  M.  Henard-l'errin.  3.S 
Voûtes  en  berceaux  cylindriques  (équilibre  des)  dans  lesquriles  lr« 
plans  de  tète  sont  perpendiculaires  à  Taxe,  ,57.  —  (  o»rt<  df$  ttm- 
trcs  de  (jmvité.  58.  —  Poids  dos  voussoirs  élémcnlaires.  prrs<iuii« 
exercées  sur  leurs  faces,  ih.  —  On  fait  abstraction  da  ffolleinent 
et  de  l'adhésion  des  mortiers.  59  —La  ré>islaiice  de>  près»  ons  ilan*. 
les  joints  normaux  doit  passer  très-prés  du  mi.ieu  ue  l'épaisseur 
pour  que  la  \oùte  possède  une  gran.le  stabilité,  ib.  —  Pi>«it«on  du 
centre  de  graMié  d'un  voii>soir  élémentaire,  expre>sioii  du  poittfde 
celui-ci,  1)2.  — (iomlilions  de  l'équilibre  d'un  vouloir  élénieulaire, 
63.  —Questions  relatives  A  l'équilibre  îles  voûtes,  tb.  —  Première 
série  de  questions:  Liant  donnée  la  pression  par  unité  de  «urfare 
dans  le>  joinis  normaux  et  les  forces  extérieure».  cou>truire  r-t  ■■  ■' 
ciller  la  courbe  des  centres  de  gravité,  elc  .  61.  —  Premu' 
biènie  :  Voùle-  non  chargée-,  soumises  à  la  condition  que  U  ,  ii- 
siou  par  unité  de  surface,  dans  les  juinis  normaux,  soil  coaslaale. 
ib.  —  Solution  aiialylii|ue  du  problèinc.  66.  —  Branclies  inuginairr» 
dont  la  forme  est  néiuimoiiis  déterminée,  69.  — Traré  de  lacoarbe 
et  des  normales,  intrados  et  extrados,  tb. — Traré  de  la  mtmte 
courbe  au  moyen  de  la  règle  à  calcul,  71.  —  Deuxième  proMèMC: 
Voiiles  non  chargées  devant  recouvrir  un  espace  d'une  large«r  iom- 
née,  72.  —  Solution  analytique,  73.  —Solution  graphique.  7t. — 
Troisième  problème:  EtahlissemenI  d'un  système  de  deux  arcs  de 
voûte  assujélis  .i  .s'appuyer  sur  des  piédroits  donnes  de  liauleor  écair 
ou  inégale,  et  devant  en  outre  servir  de  base,  en  leur  croiteiweiil- 
à  un  troisième  arc  de  voiite  donné,  75.  —  Fqualion  du  problème. 
ib.  et  suiv.  —  llésolulion  de  ces  équations  par  des  appruximalion» 
successives,  78. — Coiislrurlionsreniplaranl  lo>  calcals  précWcnl». 
81 .  —  Pressions  horizontales  aux  naissances,  82. 
—  Voûtes  ou  arches  dans  lesquelles  le«  pressions  extérieure*  de» char- 
ges sont  iiidéteriiiiiiées.256.  —  Uiscu^sionde  l'indélerminatioMyt*- 
duite  par  la  disposition  horizontale  des  assi^es  du  luaMtf  ^ai 
charge  la  voûte,  256-2.'>8.  —  Les  équations  données  da*s  le  pte- 
niier  article  sont  restreintes  aux  cas  où  les  forces  exlérieorc*  >«M 
normales,  lorsque  les  résultantes  de  celles-ci  ne  |>as.>eiit  pas  par  le* 
centres  de  gravité  des  vou-soirs  élémentaires.  2.''>8.  —  Tran<>li8naa- 
lion  des  équations  d'équilibre  dans  le  ras  de  forres  nowilei.  <4. 
Equations  traiisfurmérs,  259. — Cas  où  l'on  néglige  le  poids  éc* 
voussoirs  relaiivcroeul  aux  charge-,  vflus>oirs  ronslmils  en  (onir. 


TABLE  ALPHABKTIQUK  ET  ANALYTIQIE  DES  MATIERES. 


'»-« 


en  bois,  etc. .  ib.  —  Equililirc  d'une  voùle  ^^oumisc,  soi!  inléricure- 
inenl,  soit  cxl^rieuremciil,  à  la  pression  d'un  liquide,  et  dans  la(|iiellp 
on  fait  alistr.'iction  du  poids  des  voussoirs,  200.  —  Inlégralioii  do 

léqualion  difiërentiellc  du  deuxième  ordre  :  —  =   .'^  a6l.  —  lii- 

légrale  première  sous  forme  finie,  2l)2.  —  Première  relation  entre 
les  données  du  problème  et  les  coiislanles  de  l'iMlt'->2ra(uin,  2(j3.  — 
Intégrale  seconde  sous  forme  <le  séries,  ib.  et  "iGi.  —  l)eu\icnie  re- 
lation entre  les  données  des  problèmes  et  les  constantes  de  la 
deuxième  intégrale,  ib.  —  l.a  série  précédente  est  principalement 
applicable  nu  cas  des  fortes  cliargcs.  .Nouvelles  séries  relatives  au 
cas  <lcs  faibles  charges.  Emploi  des  sinus  hyperboliques, 'JG5  et.'266. 

—  Construction  de  la  courbe  dont  l'équation  est  :  p  y  =  ., ,  39.3.  —  Uti- 
lité de  ce  tracé,  ib.  —  I-a  forme  des  arches  doit  se  rapprocher  d'au- 
tant plus  du  plein-cintre,  que  la  ciiarne  est  plus  con«idéralile,  39.'i. 
— Equilibre  dcsarclies  cbarijiéesd'un  massiflernuné  supérieurement 
par  un  plan  horizontal,  590. —  Cette  question  est  celle  relative  a 
rétablissement  des  arches  du  plus  grand  nombre  de  pont-;  ou  de  via- 
ducs, ib.  —  Disposition  de  la  charge  extérieure  d'une  arche,  donnant 
lieu  à  des  pressions  normales  déterminées,  ib.  —  l'res>ions  dans  les 
joints,  ou  à  l'extrados,  représentées  par  des  hauteurs,  comme  ilans 
ta  inécani(|ue  des  fluides,  :J9!l.  —  Epaisseurs  et  fonctions  des  ordon- 
nées verticales,  Wi).  —  Discussion  relative;!  la  su|)pression  desirè>- 
petits  termes  dont  la  présence  compliquerait  trop  l'usaue  des  formu- 
les, Mil,  'Î02et  403.  —  Equations  simplitiées,  403.  —  Calcul  des  coor- 
données de  la  courbe  des  centres  de  gravité,  404. — .Méthode  de 
Legeiidre,  pour  tenir  compte  des  termes  du  deuxième  ordre,  dans 
les  expressions  des  différences  linies.enpartant  des  expressionsdif- 
féreiitielles  du  premier  ordre.  ib.elMih.  — Trace  géométrique  de 
la  courbe  des  centres  fie  ijravilé,  de  l'intrailos  et  de  l'extrados,  en  par- 
lant de  l'expression  du  rayon  de  courbure  et  de  l'épaisseur  en 
fonctions  des  ordonnées  verticales,  i(l6.  —  Détermination  de  l'épais- 
seur à  la  clef,  poussée  contre  les  culées,  408.—  Poids  d'une  partie 
de  la  voùle  et  du  massif,  comprise  depuis  le  plan  vertical  passant 
par  le  sommet  jusqu'à  un  plan  de  joint  quelconque,  409.  —  Inclinai- 
son des  tangentes  à  la  courbe  des  centres  de  aravilé,  et  à  l'extra- 
dos, menées  par  des  points  situés  sur  une  même  normale,  i6.  — 


Poussée  linrixonlale  résultanie.  cl  position  de  son  point  d'appllra- 
lion.  411.  —  Inléarale  (iremière  déduite  de  la  considération  ilc  l'é- 
quilibre du  sysième,  ib.  —  Données  d  un  projet  d'arche.  412.  —  La 
limite  de  la  pression  dan-  les  jninis,  d'après  Navier.  serait  reiiré- 
senlée,  d'après  nos  conventions,  par  une  hauteur  de  tOO"',  4l2.  — 
Cas  où  celte  limite  a  été  évideninieiildé|iassée.  Pilier- prismatiques 
de  l'aqueduc  de  .Spolelte.  ib.  —  Distinclinn  des  arches  d'après  l'aii- 
L'Ie  du  dernier  plan  de  |oini  avec  la  verlicale,  4(3.  —  Itclation  entre 
les  données  d'un  projet  d'arche.  répais.seiir  au  sommet,  la  pres>i<iii 
dans  les  joints  et  l'an^ile  du  dernier  plan  de  joint  avec  la  verticale, 
déiluits  de  l'intégrale  première,  414.  —  Solution  ilu  problème  par 
des  approximations  successives,  remplaçant  la  deuxième  intégrale, 
'b.  — Calcul  des  premières  valeurs  approchées,  dans  les  arches  di- 
tes en  arc  de  cercle,  4L).  —  L'équation  qui  donne  l'épaisseur  :t  la 
clef  ne  présente  pas  d'indéterminalion.  41»).  —  Vériliralion  des  ré- 
sultats dans  chaque  approximation.  4t7.  — Cas  des  arche-  en  anses 
Ile  [laiiier,  ib.  —  La  pression  ilansles  joints  normaux  n'e-t  plus  ar- 
bitraire comme  [irécédemment.  Première  valeur  approchée  de  l'é- 
paisseur à  la  clef,  ib.  —  Kéflexions  sur  la  marche  suivie  dans  I  ex- 
position des  principes  relatifs  à  rétablissement  des  voûtes  rbargées, 
418.  —  .\pplicalion  de  ces  principes  aux  données  qui  ont  dû  >ervir 
de  base  à  la  construction  de  l'arche  du  milieu  du  pont  de  OavanI 
L'épaisseur  à  la  clef,  déduite  de  notre  théorie,  est  précisément  la 
même  que  celle  adoptée  dans  la  con-tructiun.  Considéraiion  sur  l'é- 
cuuomie  du  projet,  419. 

W. 

■Wcyer  (J.  A.),  archilecle  :  .Sa  leltre  à  M    Daly  sur  un  nouveau  mode 
de  fabrication  de  parquets.  517. 


Yvon-Vdiarceau ,  uii  des  rédacteurs  de  la  Rerue.  auteur  de-  articles  : 
Equations  de  l'équilibre  d'un  corps  solide,  dédiiiles  ilu  principe  <le- 
vitesses  virtuelles.  0;  —  Equilibre  des  voûtes  en  berceaux  cvliu- 
drlques,  .^7,  25i).  390. 


FIN   DE    LA    TABLE    ALPIIAUÉTIQUE   ET    AXALYTIQl'E    DES   MATIÈRES. 


TABLK  DKS  SOMMAIIIKS. 


578 


TÂ.BLE  DES  SOMMVIKES 

DONNABJT  L'OUDRE  DAMS  LEQUEZ.  I.XS  PI.ANCBXS  ONT  PARU. 


*•  DE  JANVIER.— INTRODUCTION,  coH.  —  IIISTOIIIE  :  Tomlii-au  de  Charlc- 
inaene,  à  Aii-la-Chapelli-,  parM.  Abthur  Maiitin,3.  —  TMËOKIË  :  Enrialions 
de  l'équilibre  des  corps  soliiles,  ilcduili'S  du  principe  des  vilesses  virluefles,  par 
M.  YvoN  Vii.micKHJ,  9.  —  MK1.ANGES  :  De  la  Villa  Pia  du  Vaiicin,  par  M.  Ai,- 
p|lo^sK  iiB  OAt.oNNK,  )5.  —  Edilité  pai<isik>kk  :  Conseil  municipal  de  Paris,  22 

—  Siluatioii  des  revenus,  dépenses,  embellissemenls,  iravaux  commencés  el  pro- 
jetés de  la  viliede  Pans, 29.—  IIibi.iokrapiiik.  Vignole  centé>imal  de  M.  F.  A.  Kh- 
NAUD,  architeelç,  par  M.  A.,  36.  —  Hanorama  d'Egyple  el  de  Nubie,  de  M.  Ho- 
BKAU,  aichilecle,  59.  —  Tableau  slalislique  des  dépenses  failes  par  la  ville  de 
Paris  depuis  1797  jusqu'à  I8W,  par  M.  Martin  Sainl-Léon,  39.  —  Cuvelle  d'épura- 
lion  pour  le  puils  de.GrencUe,  par  M.  H.  Janmahii,  architecte,  *t.  —  Analyse  di' 
poteries  diverses,  43.  —  Du  cours  de  M.  Chevreul  sur  la  loi  du  contraste  simultané 
des  couleurs,  45.  —Chronique  :  Inauguration  de  la  Fontaine-Molière.  — Uiiumage 
des  Champs-Elysées.  —  Pont-des-Arts.  —  Quatre  planches,  savoir  :  i<t  un  Fron- 
tispice en  deux  cnuleurs  et  un  Taui-titre  imprimé  en  rouge  ;  2o  Un  plan  général  de 
ta  Villa  Pia,  dessiné  par  M.  J.  Bouciikt,  architecte;  3°  une  rue  perspective  du 
grand  vestibule  delà  Villa  Pia,  dessinée  pur  M.  J.  lloucimT  et  grurée  sur  acier  par 
M.  iliBON  ;  4»  une  rwe  générale  de  la  forteresse  de  l'Alhambra.rf  Grenade,  prise  du 
côté  du  palais  de  Charles-Quint  et  de  la  tour  de  Comarès,  dessinée  par  M.  OWKN 
JONBS,  architecte. 

N"  DE  FÉvaiEit.  —  HISTOIRE  :  L'AMiambra,  49.  —  Du  Comité  historique  des  Art» 
el  Monuments,  par  M.Cksar  Dai.ï,  .10.  —  TIIEOKIE:  Equilibre  des  voûtes  en 
berceaux  cylindriques,  par  M.  VvoN  Viliarchai',  57.  —  PKATIQL'E  :  Nouveau 
Toit  plat  bitumineux  expérimenté,  par  M.  A.  I  KFBA^çolS,  architecte,  82.  —  ME- 
LANGES :  De  la  restauration  proj(^iée  des  vitraux  de  Charircs,  par  M.  Ariiilii 
Maiitin,  86.  —  Nouveau  Musée  d'antiquités  nationales  à  l'hAtel  de  Cluny,  par 
M.  ALeHO^SK  DE  Cai.one,  S9.  —Société  centrale  des  Architectes  français,  93 — 
Chroniqvk,  96.  —  Trois  planches  représentant  :  l'une,  sur  métal,  diverses  voûtes 
en  berceau;  une  autre  ,  PI.  .I,  gravée  sur  bois,  une  vue  de  la  Porte  du  Jugement, 
à  l'Alhambra;  la  troisième,  planche  double,  également  gravée  sur  bois,  l'élévation 
et  le  plan  de  la  voûte  arabe  de  la  Salle  des  deux  Swurs,  à'J'Àlhambra. 

X"  DE  MARS.  -HISTOIKE:  L'Alhambra,  par  M.  (ésar  Dai.y,  97.  —  Première  in- 
struction du  comité  historique  des  Arts  et  Monuments  :  Monuments  hies,  1"  et 
2e  époque,  105.- PRATiyiJE  :  Grandes  Portes  d'Atelier,  par  M.  César  Dai.y, H7. 

—  Du  Chauffage  et  de  la  Ventilation,  par  M.  Rkné  Dlvoir,  118.  —  MELANGES  : 
Exposition  quinquennale  de  l'Industrie  française,  121.- De  la  Police  du  Roulage, 
par  un  Ingénieur  en  chef  dus  Ponts-et-Chaussées,  427.  —  Observations  pré- 
sentées par  la  Société  des  architectes  sur  la  loi  des  Patentes,  431.  —  Itulletin  de  la 
Société  cenlralcdes  architectes  (lutle  et  fin),  435.  —  CnROKlQiiE,  437.  —  Le  réser- 
voir du  Puils  de  Grenelle  et  l'éonsson  de  la  ville  de  Paris.  —  Nouveaux  cabmels 
inodores.  —  Guichet  du  Carrousel  :  Un  remède  pire  que  le  mal.  —  Une  réclame 
en  faveur  de  la  propreté  el  de  la  santé  publiques.  —  Simple  dialogue  a  propos 
d'un  palais  pour  l'Industrie  française.  —  Achèvement  des  abords  du  Panthéon.  — 
Percement  d'une  rue  nouvelle.—  Un  architecte  millionnaire.  —  Trés-inipor  tante 
découverte.—  Pcri.ications  nouvri.i.ks  :  Annales  archéologiques.  —  Trois  plan- 
ches sur  métal,  représentant  :  l'une,  pi.  6,  deux  grandes  Portes  d'. Atelier  ;une  autre, 
pi.  7,  un  Calorifère  ventilateur  ;  la  ^e,pl  8,  des  salles  de  bains  el  de  bains  de  pieds 
construites  au  Collège  royalde  Rouen.— En  outre,  \S  gravures  sur  bois  dans  le  texte. 

[«•D'AVRIL.- HISTOIRE:  Première  insiruclion  du  comité  des  Arls  elMonumenls: 
Monuments  fixes,  3<-  époque,  445.  -  PRATIQUE  :  -  Du  chaulT.ige  et  d.-  la  venli- 
lation  par  M.  René  Diivoir,  469.  —  Du  bbinchissage,  par  M.  RB^E  Diivoni,  42,. 
—  MELANGES  :  Salon  de  4844  (4"  article^  par  M.  i.bsar  Dai.y,  478.  -  De  la  crande 
circulation  dans  Paris  el  du  livre  de  M.  H.  Meynadier,  intitulé  :  Pans  sous  le  point 
de  vue  pittoresque  el  monumental,  etc.,  par  M.  Pkrbeymond,  48i.  -  ChromoI'E  : 
Appel  à  nos  Lecleurs;  —  Musée  des  Thermes;  —  Monument  de  l.arrey;  -  Statues 
commémoratives  dans  les  départements  :  —  Théâtre  de  Dunkerque;  —  fouillis  a 
Bavay  •  —  Restes  d'une  villa  gallo-romaine  dérouverte  piès  d'Elrelal.  —  Chauf- 
fage eî  ventilaiion  des  prisons  cellulaires.  —  Trois  planches  sur  métal,  représen- 
tant :  la  PI  9,  un  calorifère  ventilateur,  à  air  chaud ,  l,a  PI.  40,  un  nouvel  appa- 
reil de  lessivage  par  ctvralaticn  intermittente  ;  et  la  PI.  41,  les  plans  et  couprs 
d'une  blanchisserie  d'après  le  système  de  M.  RÉKÉ  DuvoiB.  -  En  outre,  M  gra- 
vures sur  bois  dans  le  texte. 

\«  DE  MAI.  —  HISTOIRE  :  Première  instruction  du  comiiè  des  Arts  el  Monnmenis 
(suite  et  fin)  ;  «loniimenls  meubles  el  Civilisation  chrétienne,  493.  -  PRATiyU  E  : 
Du  chaiilTage  et  de  la  ventilaiion  (3e  article),  par  M.  Rbnr  DtivoiB,208.  -  Mh- 


Du  chaiilfage  v.,  ..^  ...   .- v-     -       .  ,.:  •         .,     ...         ,.     ,.    „, . 

LANGES:  Salon  de  4844  I2e«(  dernier  article),  par  M.  Ck«ab  Dah.  21». 


Ex- 


position de'linduslrie  de  48i4(2e  or(ic/c).  par  M.  I'errrymono,  225.  -  Uibiiogua- 
PHIE  •  De  la  grande  circulation  dans  Paris  et  du  livre  de  M.  Meynadier  [Suile  el 
fin),  par  M.  Perrhymond,  252.  -  Du  règlement  des  mémoires,  235  -  ChroNIQI'E  : 
La  restauration  de  Noire-Dame  de  Paris  confiie  à  M.M.  Lassos  e  Violel-Leduc.  - 
Les  splendeurs  de  l'Hôlel-de-Ville  el  la  fange  des  Halles.  -  Rep  âtrage  du  mur  de 
la  terrasse  des  Tuileries.  -  Arc  de  triomphe  romain  de  Djonisah.  ■-  Iheâlres  n - 
cendiés.  -  Monuments  commémoratirs  dans  les  départements.  -  Incendie  (le  la 
nèche  de  la  cathédrale  de  Laon.  -  Cathédrale  de  Rennes.  -  Travaux  du  château 
de  Pau.  -  Publications  nouveli.ks.  -  Veux  planches  sur  métal  rrprcsentant  : 
l'une  un  modèle  de  fourneaux  de  cuisine;  l'autre,  divers  systèmes  de  ealnrtfcres 
pour  les  écoles  et  les  hOpitaux.  En  outre,  41  gravures  sur  bois  dans  le  lexie. 

X"  DE  JUIW.  -  HISTOIRE  :  Deuxième  instruction  du  Comilc  '"J'orique  des  Arts 
t  Monuments  :  -  Siyles  romain  el  gothique  (chapitre  premier),  244_-  1  HtUKlE  . 
"   ■■         ViLiARCKAi)  i3e  article),  2.16.  —  PKAll- 


De  l'équilibre  des  voûtes,  par  M.  YvoN  V  iliarckai)  i3e  article),  2.16.  -  IRA  II- 
OUE  :  De  l'humidité  dans  les  conslruclions,  par  M.  Léon   Vauuoykb,  architecte. 


la  cathédrale  de  Barcelone.  —  Traraui  eiétaiH  i  rAeropoli»  ir.kiht-nn.  -  Crm- 

•truction  romaine  découverte  a    Pari».  —  l'i       i    , 

planches  sur  métal  représentant  tes  plans,  ' 

ries  el  Itemiies  de  lord  Stafford.  a  hindrei  ;  / 

En  outre,  i9  grarurei  sur  bots  dans  le  texte,  ' 

K'  DE  JL'ii.i.cT.  -  HISTOIRE.  —  Deuiii'MK'  in»trurii'<n  du  Comiii  h.ti»ri<|g«4ri 

Arts  el  Monuments  :  slyle  roman  el  si>  ..    ft$ 

-  PRATIQUE.  -  De  l'humidile  dans  ,  ,  V»b^ 
DOJEB,  architecte,  annote  par  M.  H.  J  >                                                               r 

—  Mon  de  M.  LeI't-re;  M.  Lebaten  i. 
saint  Louis  ;  le  donjon  et  la  ehapeilp  <l>  ^ 

de  la  place  Vaihubert  ;  infurluiic»  de»  i.i..  ^.ji...  -  .;ij  i 

Rivoli;  démolition  de  la  chapelle  des  Annu'n<iid<t  Birj, 

d'un  phare  en  Angleterre.  —  Publication»  nouvelle»  —  /, 

représentant  :  tune,  divers  appareils  pour  eomballre  ou  pttr,n,r  i  i,,.m.j.,, 

l'autre,  un  projet  dhô/atal,  par  .M.  Du  PlT  .  architecte  ;  £■  outre,  \t»  aratmrtt 

sur  bois  dans  le  texte. 

N«  D'AOLT.  —  HISTOIRE  :  Deuxième  initruciion  du  Comité  bi<lorique  de»  An» 
el  .Monument»:  styl.  s  niman  el  gothique  (luite),  S37.  —  PI4.»Tint'K  :  Ccuim  <u 
preniiir  éiage,  par  .M.  tÉSA»  D»LY,  343.  —  De  l'Iiu  '        ntirurUon», 

des  moyens  de  la  prévenir  el  d'y  remédier.  Ilem"  -i  bot»»,  an- 

noié  par  M.  H.  Janmabd  [Suite  el  fin  ."O.  -  y,  ■ijOnulîl-. 

par  M.  Di!  PtY,  architecte,  Si9.  —  .Ml  i  - 

Lk  Péhe,  architecte,  567.  ■ —  .Note»  e[ 

lapreiniére  insiruclion  du  Comité  de»  \  ,    -. .".  .- 

velle  manière  de  conslruire  les  voûte»  dr>  ej(uui>  Oc  P<fu,i;j.-  Wii  pcopow»  par 
la  société  d'Encouragement  pour  l'industrie  naiioaaie,  â'6.  —  Cuboiiocb  :  Tra- 
vaux de  la  ville  de  Pari»,  jardin  du  Luiembourit.  —  Un  tnarrhr  aui  fleur»  a  ta 
place  Saint-Sulpice.  —  Bibliothèque  Sainte-Geiieviéve.  —  (.«ncouri  pour  uu  grand 
ihéJIre  à  Toulouse.  —  Ecole  centrale  de»  an»  et  manufaclorr».  —  Umz  plaisrktt 
sur  métal  représentant  :  l'une,  double,  diverses  figures  el  tracés  rrlaiifsaU  l*»o- 
rie  des  voûlts;  raulre,  les  plans  et  coupes  d'une  ecule  chauffée  el  rmiiUr  par  In 
procédés  de  M.  RÉKÉ  DuvoiB  ;enoulr(,  irente-dtuxgracurrt  sur  t<,iêJaiu  le  le  Tir 

KO  DE  NEPTFnBRE.  —  HISTOIRE  :  Deuxième  insiruclion  du  Comilê  bèaloriqur 

des  Arls  el  Monuments  :  civilisation  chrétienne;  style  rnman  el  iiyle  gubi^ae: 
détails  extérieurs  de  l'église  (suite;,  r-M  —  THEORIE  :  Euinlibrr  d.  •  vodira  eti 
berceaux  cylindrique»  (Se  article),  par  M.  Vvo>  Viihbce4|  .  .^a-.  —  MU  A>CES: 
Trois  joursà  Rouen  (4"  article  ,  par  .M.  h.  Ja>m«»ii.  a,,  'r  i  ■.  .t.  -  (  h><>- 
MQt'E  :  Un  hippoilroine  a  Pari».  —  inaujturaiion  dt->  ' 
Paul  el  de  La  Villette.  —  Grand  viaduc  sur  (a  l.oire.  - 

Histoire  de  l'Art  monumental.  —  Deux  planches  sur  tn ,     . 

divers  déiails  de  la  charpente  de  t  église  Saint-Ouen  à  Hourm,  el  drmx  fifres  re- 
latives à  l'article  sur  Chumidilé;  l'autre,  les  enupesd'un*  salle  a'ktfttai  rhaujfrr 
et  ventilée  d'après  le  système  de  M.  Roi  Octuib.  —  £a  «aiira,  tsmft-st^  fra- 
vures  sur  bois  dans  le  texte. 

K»  D'OCTOBRE.  —  HISTOIRE  :  Deuxième  Insiruclion  du  Comité  lili|iiil^»i   ée« 

Arts  et  Miinuinents  :  civilisation  chrétienne,  »lTle  roman  ri  ni\r  (oikiaaa  ((■•>), 

433  —  PRATIQUE:  Du   4;haufrage  el  de  la  Ventiiaii-n    I-  sririr  .  Cbâoîbfr  et 

Ventilation  des  écoles  et  de»  «aile»  d'asile,  par  M.  I 

inidiie  dans  les  construciion».  des  moyen»  de   l.i 

pléiiient  des  annotations  ajoutée»  au  Mémoire  de  .\l    i  > 

NiABI),  416.  —  Engins  de  construciion;   moufle  a    uiprijust»   *it    U.    N 

architecte,  par  .M.  b^RB«l..  ancien  élève  de  l'Ecole  Polyieclinique.  454.  -   I 

sur  b'S  théâtres  :  l'Opéra,  par  M.  H    .MfV.tiDUB,  4S3.  —  A  ROI LacTBca».  - 

Planches  sur  acier,  representafl  :  l'une  tes  dttrrses  apmtieatfmt  du  rr 

engrenages,  rie  M.  Nkpvki',  architecte:  l'autre,  plamekt  JouUe,  tt  plan  ■■ 

de  M.  H.  M»V!(AI>IEB. 

K°  DE  :«OVEViBRE.  —  HISTOIRE  :  i'  Instruction  du  Comité  hû'oriqiie  de*  arts  et 
monnmenis  :  civilisation  chrétienne;  style»  roman  el  icolliique.  Km  Col  **l  — 
PRATIQUE:  llams  nouants  sur  la  Garonne,  ronslruit»  par  M.  J.  LtraacrK,  ar- 
chitecte, 490.  —  Chauffage  el  venlilalion  d'une  talle  d'hApilal,  par  M.  Hroe  Oc- 
VOIR,  493.  —  Etudes  sur  les  Ibéilre»  :  l'Opéra,  par  M.  H.  liiT:<tDim  «aiie  ,  4SS. 
—  MELANGES  :  Une  découverte  importanie  pour  I  assaintsemenl  de»  tille»,  par 
M.  PERBEVMONn,  512.  —  BiBLioGBAPHii  :  Traité  de»  ordre»  d'archiUciBie  appli- 
ques à  l'arcliiiecture  rurale,  par  le  raarqui»  de  Uauremoai;  coapto-natf*  par 
M.  Du  .MÉGE,  415.  —  r.urres|H)ndancc  :  547  :  Nouveaui  parqueta  ta iir<4J«4*  i  Siraa- 
bo'.irg;  Iravaux  récemment  achevé»,  en  train  d'riermion  el  projeta  dJM le  tfe- 
parlement  du  Haut-Rhin;  iravaux  en  cours  i  Bordeaux.  —  Kotoaarcn 

■  '  'de  de  labrwatioa  4**  bri- 

V  ^-  en  Italie,  itt.—  fnairi 
I    Ii:jron  et  I  finir  auBiii  tfct 
M.  le  prefei  de  boUm ; «ftalre  • 
.1.1  ci..ï:rjii  de  Blot«  -   n al  111 

^lepkm- 
•Un.  — 


procède  d'assainissement  des  egouls,  511.— 

ques  el  des  Unie»,  ib.  —  Sur  l'architei  Inr.-         > 

vallon  du  fer  dan»  la  mi  r,  525.  —  Chu 

valiers  de  la  Lésion  d'honneur  ;  un 

prêcher  de  la  cathédrale  de  Troye»  ; 

lion  du  théâtre  de  Nantes;  église  gothique  .u  i 

caiiisme  pour  toiiles  les  horloge»  il  une  ville  ;staii. 

son.  Grand   Iheàtre  en   construciion  à  Livooru 

Publications  nouvelle».  —  Grand  'iràpiial  de  Milan,  IM.  —  ïmtsftumrtttt  sur  anrr 

repreienlint  :  l'un*,  PI.  ii,  le  plan  cTunt  ttole  /huante  dt  ««Miioa  rvmttruiU 

sur  la  liaroniie,  devant  Bordeaux,  par  El.  J.  Lafmrfu*.  ureiilttu;  —  ■•«  aairr 

/'/.  26,  1rs  Cnupes  el  élévations  de  ce  aièUU  elmhlittrwunt;  —  la  Itmitltmt,  JH-  ». 

iint  travée  du  premier  étage  sur  la  rue.  du  (iranel  Uôftal  dt  MUmu,  d'ufrn  les 

dessins  di  .M.  Thumeloup.  —  t'a  outre.  42  jrararea  sur  Ma  da»u  la  Itxit. 

K>  UK  uECEmiRE.  -  HIS10IRE  :  L'Alhambia  lie  anide),  par  B.  Césaa  Dali. 
52»  —MELANGES:  Troi»  jour»  a  Rouen  .i»  article,  par  M.  H- JaaaiâM,  «r- 
r»i(ei-ie,i58.  —Concours  pour  un  projet  déballe  aux  frain»  pour  la  viliede  Mat*. 
b59  _  Petite  rorrrsponilance,  558.  —  i  a»i.s  ou  HATliars.  —  l'a«  ^aad*  aair 
nriar,  rrprrJCBianl  le  plan  de  la  forimsst  de  f  Àlkmmira  PL  Ht,;  et  f  «nm 
grandes  planches  sur  iois.  représentant  ;  la  PI.  M\  une  laaeriptwa  dt  l'JUhmus- 
bra  ;  la  PI  51 ,  diverses  tues  du  mime  'difir* ,  ta  PI.  5i,  le»  r««j  aet  mrra  ém  Htm 
el  de  t'elang  ;  la  PI.  54,  p<«i«Mra  Afara  wunirami  I*  iftttmê  4*  faaXrafn'—  eu 
routes  stalactites. 


FIN    DE    L.V    TATLE    DES    SO.»M.\IRES. 


T.   V. 


57 


TAHI,E  D::S  293  GRAVLHKS  SUH  KOIS  l>SK«Ki:S  DANS  LK  TKXTK. 


.j8() 


TAinJi  DliS  21)3  CHAVIRES  Sl]H  HOIS  l\SÉHÉi:S  DAIVS  LE  TEXTE- 


AusiDKs  dcs  Eglises  îles  XI"  el  XI 1'  siècles,  "iiô.  —  Al)>iilcs  de  l-'oii- 

Icviaull  et  de  Cdiiie,  48i- 
AitiAMuilA  :  Ariniles.  533. 
Ai.i.KK  couvcrle,  lO'J. 
A.Miio.N  ou  ciiaiie  priiiii.ixe.  'JOS. 
A>iPiiiiiiiliTiii:  l'uiiiaiii.  Ifiii. 
A.MourissiîMKNT  de»  églises  de  (.'.ùme  el  de  Sle-M.ii'ie()e'i'oscniicll<i,3Ul. 

A.MÉKIXES,  li(). 

Auc.AOKs  :  romane,  291.  —  De  .Sainte-Marie  de  Tosraiiclla.  'Vti.  — 
i'Ieiii  ciiiire,  30:2. —  Ituinaiie  de  Saiiit-tJuriiiaiii-des-l'rés,  303.  — 
Surhaussée  cl  Irilobée,  iO. —  Ogivale  de  diiïéreiites  formes.  304. 
—  Surbaissée,  30G.  —  lîoniaiic  décorée,  .307.  —  De  r.\lliaiii- 
bra ,  533. 

Akc-doita.nt,  Mi. 

Ahciiivolths  rorii.iiics  el  golliique.<,  3()'J  et  suiv. 

-XBCS  de  trioiiiplie  romains,  1.58.  —  De  Ucims  el  d'Orange,  i6. 

.Vl'tkl  priiiiitil,  207. 

IUll'sthadë  de  Sainl-'îervais,  339. 

ltA^uEAl:x  ou  fri.«es  de  reuillages  de  Ménil-Aubry.  514. 

itAi>iisriiKbs  des  basiliques  liilines,  205. 

lÎARUOWS,  2il0. 

Hase  des  colonnes  de  St-Denis.  292,  — de  Sl-Gerniain-des-Prés,  295. 

liASiLigLE  ualto-romaine,  165. 

Oa.mi>  romain,  Mil. 

Cariaiide  de  Katisbonne,  i29i. 

CiiAi'iTEAtx  (leuille  de)  grecs,  114.  —Feuilles  de  chapiteaux  gallo- 
romaius,  l'iS.  —  Chapiteaux  romans  et  uolhiques  de  différenles 
lornics  el  de  dillérentes  époques,  295.  et  suiv. 

i;ii.\TEAL  de  l'ierrefonds  :  Arcade  ornée,  315  —  Gargouille.  338. 

t^iBoiiiLM  primilif,  207. 

CiiiQUE  gallo-romain,  Kii. 

Claveaux  des  arcades  romanes  et  gothiques  :  Leurs  décorations,  307. 

Clocuer  de  Kolre-Dame  de  Dijon,  2.55.  —  Clocher  d'Ainay.  à  Lvo!i, 
308,  485.  —  Clochers  en  Normandie  el  de  Saint-Denis,  ^éfi,  —  Clo- 
chers de  campagne,  -487. 

Ci.ocheto.ns  de  Notre-Dame  de  Paris,  —  de  lîeinis,  etc.,  3i3. 

Coi-oNNE  historique  gallo-romaine,  I.M)— Colonne  romane  el  gothique, 
291.  —  l'Ianj.  de  colonnes,  292.  —  Bases,  ib.  —  Fùls,  293  el  suiv. 

—  Leurs  accouplements,  301. 

Co.NsoLEs  pour  les  mats  des  ampliilhé.ilre^,  l()2.  — Consoles  de  la  ca- 
thédrale de  Ucims  et  de  l'église  de  Coulommiers,  292. 
CoNSTBi'CTio.N  cyclopéenuc,  113. 
Combe-forts  des  églises  romanes  el  gothiques,  340;  —  à  Trêves,  ib.\ 

—  à  Cologne,  341  ;  —  à  Saint-Denis,  ib.\  —à  Saint-Gervais,  i6.;  — 
à  Chartres,  342  ;  —  en  Normandie,  eic. ,  ib.  cl  suiv. 

COHBEALX  :  Bords  du  Uhin  ,  Ratisbonne  el  Normandie,  313  el  314. 

Coupe  de  rempart  romain,  154. 

CouBONNEME.M  des  fallcs  romans  et  goiliiques.  Ô57  el  suiv. 

CbÉiNeaux  d'une  église  (bords  de  la  Loire),  339. 

Cromlech,  108. 

Cbosses  eu  pierre,  de  St-Denis.  de  Sl-Gervais  et  de  Clermout.  311. 

DÉcoRATiox  des  murailles  des  églises  romanes  et  golhiques,  289  et 
suiv. 

DoLHEM  ,  109. — Demi-dolmen,  110. 

Kglise  :  —  Du  XI»;  siècle,  sou  plan,  245.  —  De  Rosheim,  248. 

Emplecto.n,  151. 

l'EisÈTBES  des  églises  romanes  el  gothiques,  585.  —  Leurs  différentes 
formes,  586;  —  Du  cloître  de  Cologne,  587.  —  Fenêtres  ogivales, 
ib.  et  suiv.  —  Fenêtres  rayonnantes,  588.—  De  Saint-Jean  de  Latran, 
589. —  De  Saint-Gervais  cl  d'Angleterre,  590.  —  D'Ecouen,  591.  — 
Fenêtres  rectangulaires,  ib.  —  leuêlres  ogivales  dans  des  arcades 
romaues,  592.  —  Fenêtre  triangulaire  curviligne,  595. 


Feuille  erecque  :  1 14. — D'olivier  el  d'acaalhe,  1 18. —  F'risée,  ib. 

Flèche  de  la  Sainle-Chapellc,  489. 

Fonts  baptismauv  (irimilifs,  206. 

Fhontoms  romans  et  uothiqucs,  295  el  suiv. 

liAHGOlu.LK  ilo  l'Icrrefoods,  5.58. 

IIVPOCAUSTE,   166. 

K-ABNAc  :  .Sa  grande  salle  hypostyle.  41 . 

Macebia.  loi. 

.Mâchicoulis  d'.Msues-.Mortes  et  du  rliAlenu  de  Mehun,  339. 

Maiso.n  romaine  :  Sun  plan,  ItMJ. 

.Menhir,  108. 

.Mosquée  du  .Moristan  au  Caire,'39. 

Moulins  romains,  167. 

Muns  d'enceinte  romains.  167. 

Notre-Dame  :  —  De  Taris  :  son  plan.  2-i7;  —  Ses  tours,  486;  —  Do 
Dijon.  25.');  —  De  Tuiliers  :  son  porluil,  250. 

OKiL-DE-BoFi  F  des  églises  romanes,  590. 

Ogives  de  différentes  formes,  504  el  suiv. 

Opus  incertum,  l;iO.  —  Opus  reliculalum,  ib. 

pALMETTts  urccques.  113. 

TiERRE  tournaille,  109. 

Pierres  liées,  154. 
\  TiLK  romaine,  160. 

Pla.n  :  —  d'une  maison  romaine,  166. —  D'une  église  du  Xl<  siècle.  24i(. 
—  De  l'église  Saint-Gcrniain-dcs-Piés  el  de  .Notre-Dame  de  Pari», 
247.  —  De  Saiiit-Jeaii-de-Beauvais.  248.  —  Plan  de  diverses  es- 
pèces de  Iranssepts,  219.  —  Tlan  clés  porches  du  Temple,  à  Paris, 
de  Sainlc-Uaileuiinde  a  Poitiers,  d'une  église  de  Monréal,  en  Sicile, 

251.  —  De  1,1  caihédialede  Reims,  de  Sainl-Vinccnl.  à  Rome.  252. 
De  la  cathédrale  de  Trêves,  (6. 

PLATE-BA.NDEà  angles  arrondis.  507. 

Porches  des  églises  du  Temple,  it  Paris,  de  Sainte  Radegonde.  à  Poi- 
tiers, de  Monréal,  en  Sicile.  251.  —  I>e  la  cathédrale  de  Reims,  de 
Sainl-Vincenl,  à  Rome,  de  Saiiil'/.énon,  à  Vérone,  252.  —  l'orches 
militaires,  255.  —  Porche  de  décoration,  ib. —  Porche  de  la  Ferlé - 
.Sainl-.Vubin,  en  Sologne,  d'une  église  à  Reims,  2M. 

PoBTAiL  de  Noire-Dame  de  l'oitiers,  2.'>0. 

PoBTE  de  ville  rnmaine,  151 . —  Porte  de  Saint-Jean-de-Beauvais.  434. 

Pi'iTS  romain,  167. 

Rempart  romain  :  Sa  coupe,  154. 

Rinceaux  grecs,  511. 

Rose  de  SainI  Etienne  de  Beauvais,  387.  —  .\utre  rose,  391. 

Saint  Denis,  292,  511.  341.  —  Sainl-Etieiine  de  Beauvais  :  Décora- 
lion  des  murs,  289— SainlGeniiaiii-des-Prés,  293,  305.  —  Saiul- 
Gervais  de  Paris.  511,  558,  3.59,  5i0,  590.  —  Saiiil-Jean-<le-Beau- 
vais,  454.— Saint-Jean-de-Lalran,  389.— Saint- Vinceol,  à  Rome, 

252.  —  Saint-Zénon.  h  Vérone,  ib. 

Sainte-Chapelle,  48!».- Sainle-.Marie  de  Toscanella,  502,  303,  509. 

Sainte- Radegonde,  à  Poitiers,  251. 
Silos  romaius,  147. 
Stèles,  114. 

Structure  grecque  de  la  République,  150. 
Tailloir  de  chapiteau  du  XIV<:  siècle,  501. 
Terres  cuites  coloriées,  116. 
Théâtre  romain,  161. 
Tombeau  de  Brézé  à  Rouen,  514. 
Tombelle  gauloise,  110. 
Tours  de  .S'oire-Dame  de  Paris.  486. 

Tbanscept  de  Rosheim,  248.  —  Différentes  espèces  de  transccpU,  549. 
Tuiles  romaines,  146. 

TuvAux  romains  en  terre  et  en  plomb,  156. 
Voies  romaines,  1.52. 


FIN    DE    LA    TABLE    DES    293    GRAVURES    INSÉRÉES    DANS    LE    TE.XTE. 


•i8l 


TAIU.K  DKS  (iHAM)i;S  PLAVCHKS. 


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TABLE  DES  Gl\OI)ES  1>L\N(:IIES. 


:\VtS  Al    ItlIlKlIl. 


9 

to 

11 

ir, 
11 

13 

16 
17 
18, 
19 


p,  TITKIÎS  UKS  Pl.ANCHKS.  '"'S'- 

Frontispice I 

l'iaii  sellerai  de  la  Villa  Pia -,      ^ij 

Vue  intérieure  (lu  veflihulc  de  la  Villa  Pia ( 

Vue  générale  de  l'Alliariilira i     u^. 

'Iliéorie  de  l'équilibre  des  voûtes  en  berceau i 

Alliambra,  vues  de  la  porte  do  la  Justice  et  dcl'Alcazaba.  ■ 

Grandes  portes  d'aielier /    . . , 

Petits  calorifères  à  couiaiil  d'air  chaud i' 

Salle  de  bains  el  de  bains  de  pieds  du  collège  royal  de  Uouen  ' 

Calorifère  ventilateur  en  fonte \ 

.  Appareil  de  lessivage  par  circulation '   192 

Blanchisserie  {Coupe  et  plans) ) 

Fourneau  de  cuisine  pour  collège j   ,,,,. 

Calorifères  ventilateurs  pour  les  hôpitaux  et  les  écoles  .  .  i   '' 

Ueniises  el  écuries  de  lord  SlalTord  [Plans) 

il).  lElévalionil  eoiipes).  .  l 

ib.  [l'ians  cl  détails)  ....  '   -oj 

«■(/.  [Grandes  coupes  il  élévation].  , 

Ue  l'Humidité  dans  les  constructions \ 

Projet  d'hôpital  par  M.  Du  Puy / 


.  '^•«  TITRK.S  DES  PLANClIi:s. 

u«it  ri. 

20.  Tliéoiic  lie  l'équilibre  des  voûtes 

21.  Cliaiiff.iue  et  vcnlihilioii  d'école 

•ii.  Char()eiiledcSt<)uoii:  lieriluniidilédans|p?ron<lnirtii. 
25.  .Mouflcsii  eimren.iiies  de  M.  .Nep\eii. 

■2i.  Plan  d'Opéra  par  M.  II.  Meynadier.  . 

i25.  Ecole  floltanle  de  iialaiion  [Plan; 

-id.  il,.  [Coupes  et  i 

27.  Chauffage  cl  vcutilalimi  d'une  salle  d'h'i 

28.  Grand  hôpital  de  Milan    l'remiiT  étage  sur  lu  rm 

29.  Pl.in  eéiiéraldo  la  fiiricrr.sse  de  l'Alliamlira  . 
.")().   Alhanibra  [lii'rriplidu  dr  lu  porte  de  la  Juitirt 

7)1.  ifc.  iVuet  dirertfi\ 

"2.  »''■  [Cours  du  l.inni  el  de  l'Elang  . 

ôô.  il).  (Plan  el  eovpes  de  la  r*tiite  de 

la  talle  des  Deux  Svurt.  .  .  . 
5i..  ib.  <Syftemedeeonstrii'-i"n-i'^  >■■-- 

les  flalaetilct) . 


V.i 


r/n 


KIM    DK    L.V     lABLi:    DKS    CKA.MIKS    PL.ANCHKS. 


Pini».  —  T>r.  Licimn  »t  iU>»f..  «' •  ni»  i 


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