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Full text of "Sermons de Iean Calvin sur les deux Epistres sainct Paul à Timothee & sur l'Epistre à Tite"

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SERMONS    DE 


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I  E  A  N    CALVIN    S  V  R 

LES       DEVX      Er:^STRES 
faind  Paulà  Timothce^  fur 
l'EpiAreàTitc.      \ 


IMPRIME 

A  Cencucypar  lean  ^nnefoy. 

M.  D.  LXIII. 


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AVX     POVRES     FIDELESESPARS 

PAR    LE    PAYS    DE     FRANCE,     Çr\r  i     D  E- 
firent  de  Vmrc  fainBemcnt  en  Icfus  Qhrijl. 

Conrad  Badius  defire  paix  &  ^alut  en  Dieu. 

E  DEVOIR  de  vraye  amitie,Trefchers  frcrcs,ne  con- 
fiftcpas  feulement  en  la  faueur&  fecours  quonprefente  du- 
rant ia  prorpente,niais  en  la  fidélité'  qu'on  garde,  &  la  fermeté 
qu'on  retient  quand  les  afflictions  font  furuenues .  Toutesfois 
nous  voyons  que  l'ordinaire  du  inonde  ell  d'y  procéder  au- 
trement, &  que  quand  quélqu'vn  a  tout  à  fouhajt ,  chacun  luy 
applaudit  &  gratifie:mais  li  la  chanfe  tourne,  les  amitiez  qui  fembloyent  eftre 
iminortelleSjVienent  à  s'ell:eindre,tellement  qu'elles  ne  ticnent  pas  feulement 
lieu  de  fimplc  cognbifTance.Or  quant  à  nous,qui  auons  pour  Capitaine  &chef 
le  patron  de  parfaite  chanté ,  lequel  ne  nous  encharge  rien  plus  exprès  que  la 
diJechon  fraternelle,  &  nous  ramené  à  fon  exemple,  en  ce  qu'il  nous  a  tant  ai- 
mez ,  lors  que  nous  eftions  fes  ennemis ,  qu'il  n'a  point  refufé  de  mourir  pour 
nous  rendre  la  vie  que  nous  auions  perdue,  il  ne  nous  conuient  pas  en  cett  en- 
droit conformer  au  monde  malin,  ains  tant  plus  nous  fommes  hars ,  reiet- 
tez  &  opprelTez  par  les  infidèles,  tant  plus  nous  deuons-nous  entr'aimer,  af- 
fifter  &  confoler  les  vns  les  autres  enceluy  quieil:noftreconfolation  vniquc 
&  but  de  nortre  loy  e,afçauoir  lefus  Chnft.  Ainli  donc,mes  fi-eres,les  troubles 
&  cfraotions,qui  comme  torrens  impétueux  ontn'agucrespaflé  parddlus 
vos  tertes:&  de  faift  vous  eulTent  accablez  fi  le  Seigneur  n'euft  efté  pour  vous, 
ces  affli(n:ions,di-ie,qui  font  encores  toutes  frefches,  m'ont  donné  occafion  de 
vous  addrefler  le  prefent  volume  de  Sermons,  chofc  qui  vous  eft  autant  necef 
faire  en  ce  temps  pour  voftre  confolation,qu'autrequi  fe  puiffe  prefenter.  Car 
puisqu'il  a  pleuau  Père  de  toute  mifericorde  vous  faire  idoines  pour  auoir 
participation  de  l'héritage  des  Sainftsen  lu.'niere,&-envousdeliurant  delà 
puiflance  des  ténèbres,  vous  trâfpoiter  auroyaume  de  fon  rrefcjier  Fils  par  la 
coguoifTance  de  fa  venté,  y  a-il  rien  qui  vous  fou  plus  c^ceilaire  cjue  d'enten- 
dre le  moyen  cju'il  vous  conuientten"'  pour  conuerfer  en  fa  maifon  comme  il 
appanientî  Or  eft-il  ainfi  que  cestfO's  Epiftrcs  fur  lefquelles  ces  Sermons  ont 
elle  faits,contienét  cefte  doctniji:  en  gejieral.Et  qui  plos  cll,fainft  Paul  a  vou- 
lu-enlaperfonnede  Timoth^&  de  Tite  comme  particulicrement  inftruirc 
chacun  Chrelben  de  fon<leaoir,&  l'exhorter  à  la  perfeuerance  de  l'Euangilc. 
Sur  tout  en  la  féconde  Eputre  à  Tiinothée-,  lors  qu'rl  fe  i'cntoit  prochain  de  la 
mort,il  trame excellem/neiit  du  règne  de  lefus  Chri!l,dc  rcfpcrancc  de  la  vie 
cternellcjde  la  façon  de  batailler  dc^Chrefl:icns,de  la  certitude  de  la  doctrine, 
8c  autres  poinfts  grindement  neceflaires  en  ce  temps .  Et  par  ce  que  voiis  n'a- 
uez  pas  encore  h  prédication  de  l'huangile  en  telle  liberté  que  nous,  d-  que 
Dieu  afeulcin<;nt  raiTemblé  en  la  France  quelques  pctis  troupeaux  pa.r  cj  par 
là,qui  font  journellement  en  crainte  des  loups,  &qu-e  !^s  Partcurs  qui  icar  a 
cômisnc^'euradmrmftréntencorelapafturcdé  vielriif>*i  en  cacHate&;  com- 
me a  la  liefrobbee,  lesfideles  de  pai'deça  ont  eftiinc  que  la  pubhcauon  de  ces 
feanons  vous  fcrott*ran(!iementvtile,arfin  que  pins  tju'il  né  Vous  éil  encore 
dcauïc  d'ertrepleineincnt  répeus  delavoix  vipae ,  en  laqiicHc  on  voit  reluire 


\ 


P  R  E  P  A  C  E. 

vnc  maicflé  pleine  (l'efficacc,au  moins  vous  iouifsicz  des  relicfs,cn  attendît 
que  Dieu  ouurc  la  porte  plus  grande  à  fou  Euangile,  h  ce  qu'elle  ait  pleine 
entrée  au  milieu  de  vous ,  &  qu'elle  foit  rcceue  d'vn  commun  accord ,  par  ce 

Ïourc  peuple  Fran(;ois ,  croupilTlint  il  y  a  fi  longtemps  en  la  fange  de  tant  de 
iipcrftitions.  Qu^and  ic  di  relicfs,ce  n'crt  pas  que  l'eiucde  que  vous  ne  foyez 
dignes  d'ellrc  alsis  à  la  t  x  autant  ou  plus  que  nous:mais  puis  que  le  moven 
vous  en  eft  à  prcfent  olle ,  nous  délirons  qu'au  moins  vous-vous  fentiez  des 
viandes  facrees  qui  nous  font  iournellement  adminiftrecs  en  toute  abondan 
ce  de  grâce  ^benedidion  fpintuclle.  Et li  vous  en  euftesiamaisbefoin,ie 
croy  que  c'efl  à  prefent.  Car  d'vn  cofte'  les  calônies  iniurieufes  vous  naurent 
incciTamment  le  cceur,en:ans  cftimez  feditieux  Se  perturbateurs  de  republi- 
ques, comblé  que  vous  ne  procuriez  que  la  paix:  ce  qui  vous  eft  cômun  auec 
le  Fils  de  Dicu.Lcnomauisi  deChreihensqui  vouseftiniuftemétraui,veu 
qu'il  vous  appartient  de  droicl,  Se  lestitres  iniuneux  qui  v^ous  font  attribuez 
par  certains  Achitophels  &  Amans ,  ennemisiurez  de  la  nation  Chreftien-» 
ne,  font  pour  troubler  grandement,  félon  noilre  infirmité  humaine,  le  repos 
de  vos  confciences.En  après,  les  faux-frcrcs  &  apolliats  qui  efpient  voftre  li- 
bertéjvous  donnent  beaucoup  de  fafchenes.  Les  boutefeux,qui  côme  flam- 
beaux embrafent  les  cocj'rs  des  Princes  Se  iuges,pour  lùfciter  les  perfecutiôs 
à  rencontre  de  vous ,  vous  donnent  occafion  de  grandes  frayeurs.  Sembla- 
blementjces  feftes,qui  comme  efpinesfc  leucnt  aue£  la  bonne  femcnce,afça 
uoir,de  Libertins,Epicuriens,Atheil1;es,Seruetiftes,Call:alionin:es,&  autres, 
quiremettét  fus  les  anciennes  herélles  ou  en  forgent  de  nouuelies,vous  don 
nentbien  de  l'aftaire ,  tellement  que  fans  l'afsiftancc  miraculcufe  de  Dieu  il 
vous  feroit  impofsible  de  rubfiftcr.ParquoVjmcs  freres,il  vous  ell  bô  befoin 
de  vous  anucr  du  glaïue  de  la  p<irole  de  Dieu,&  de  prendre  en  main  le  bou- 
clier de  fbrterelifl:anGe,af<^auovr  la  foy.  Car(comme  dit  faintft  Paul)vous  n'a 
uez  point  la  guerre  feulement  contre  le  fang  &  la  chair ,  mais  contre  les  Re- 
fteurs  du  inonde  des  ténèbres  de  ce  fieclc ,  Se  conu-e  les  malices  fpintuelles 
qui  font  es  lieux  celeftes.  Toutesfois  gardez-vous  bien  de  perdre  courage, 
pour  la  multitude  de  v'oz  ennemis  :  car  puis  que  Dieu  eft  pour  vous ,  qui  fera 
contre  vousîN'ayez  aufsi  efgard  h  voftre  foiblcfTexar  Dieu  n'a-il.pas  choifi 
les  chofcs' faibles  pour  conlondrc  les  fortes?  Il  n'eft  point  ici  queil:ion  de 
glaiues  matériels:  car  (  comme  dit  fainft  Paul  )  les  armures  de  noltre  guerre 
ne  font  point  charnelles,  mais  puitTantes  par  Dieu  à  la  deftruftion  desforte- 
relTes,  par  lefquellcs  nous  deftruifom  les  confeils  Se  toute  hautelTe  qui  s'ele- 
ue  contre  la  cognoilfance  de  Dieu,  Se  rtduifons  en  captiuité  toutes  entrepn- 
fes  à  l'obeifTance  deChrill:.  Prenez  dontlcs  armes  dont  ce  vaillant  capitai- 
ne faincl:  Paul  arme  le  Cheualier  Chreftien  ters  la  fin  de  l'Epirtre  aux  Ephe  • 
fiens ,  Se  Dieu  vo.us  fera  la  s,i  «ac».  de  furmoutei  tous  les  allauts  qui  vous  font 
liurez  tant  en  vos  corps  qu'en  vos  âmes ,  &  cogi.oill:rez  que  nul  n'a  efpcré 
en  luy,&  a  cfté  confus  :  mais  la  nature  de  fa  vidloirt elt  d'y  procéder  par  pa- 
tience,humilite'  &  efperancc.  Pour  conclufion  donc,mes  freres,côme  la  cou- 
ftume  des  alliez  &  confedercz  eft  en  temps  de  guerre  iç  s'entr'aider  de  gés, 
viures  & munitions:aufsi  fçachansque  vous  eftescn comWts côtinuels,nous 
auons  penfé  que  ces  fermons  vous  feroyent  grandement  ivçcellaires  pour 
vous  fortifier  de  plus  en  plus  Se  alTcurer  de  voltrc  légitime  vocation ,  Se  par 
confequent  de  l'afsiftance  de  Dieu.  Vous  les  receurej?  donc  cojnme  vn  nou 
ueau  enuiduaillementde  bonne  prouihon ,  pour  vous  gurder.que  ceux  qui 
vous  ticnët  afsiegez  ne  vous  attamêt.Que  li  vous  n'y  trouuez  vue  te  lie  iifyo  ' 
lîtion  cômc  on  pourroit requérir  en  vn  cfcrit prémédite  &  digéré  de  longuei^l 
main,ne  vous  en  prenez  à  riiuU»$ur,qui  kj  a  limplemêtpronoccz  félon  que  ' 

l'Efpnc 


ARGVMENT. 
l'Efprit  de  Dieu  luy  a  donne  à  parler,  fans  y  auo ir  rcMrdc  de  plus  p  res ,  s*ar- 
rcftantdutout  aufcns&  vraye  interprétation  de  r£fcnture,&  s'accoinmo- 
dantàla  rudenTc  defon  troupeau,  &  à  la  capacité'  desinfirmes.Aufsinelcs 
a-ilpasfaitsà  l'intention  qu'ils  fuflentmisen  lumière  :&- mcfmes  rofe  dire 
que  ce  n'eft  pas  de  fon  vouloir  qu'ils  le  font ,  autrement  il  n'ell  pas  tant  def- 
pourueu  de  grâce  de  bien  dire,qu'il  ne  les  cuft  enrichis  de  l'ornement  requis 
en  telles  Homélies  qu'on  fait  à  loifir.  Par  ainfï  fi  vous  trouuez  des  fentcnce* 
concifes  &  propos  entrecoupez,  confiderez  que  le  gefte  qu'on  ha  en  pronoit 
Çant,aide  beaucoup  à  l'intelligence  des  propos,lefquels  eftans  leus,bien  fou- 
uent  n'ont  telle  grâce  qu'ils  ont  eftans  prononcez.  Puis  quand  on  cft  accou- 
ftume'  au  ftyle  &  fiiçon  d'enfeigner  d'vn  Pafl:eur,on  entend ,  par  manière  de 
parler,àdemi  mot,ce  qu'il  veut  dire.Ne  vous  arreftez  donc  pas  tant  à  l'orne- 
ment externe.qu'k  la  pureté  de  la  doftrine:  &  quand  vous  en  aurez  rèceu  du 
profit,  fçachez-en  gré  àccluydu  niiniftere  duquel  Dieu  s'efl:  ferui  pour  les 
publier:&  en  fécond  lieu  à  feu  maiflre  Denis  Raguencau,qui  les  a  fi  heureu- 
fementrecueilhs  a  l'heure  mefmes  qu'on  les  prefchoit.  Duquel  perfonnagc 
ie  fay  ici  volontiers  mention ,  parce  qu'il  n'auoit  point  fon  pareil  eu  diligen- 
ce d'cfcnrc  par  nombre  &  chittrcs ,  fans  oublier  vn  mot  de  ce  qui  fe  pronon- 
çoit.  &  ie  ne  f<jav  s'il  fe  trouuera  déformais  homme  qui  le  féconde  tant  en  fi- 
délité qu'en  dextérité.  Ce  que  ie  di  à  noftre  grand  regret  pour  le  bien  que 
vous  8c  nous  receuions  de  fes  labeurs  ,  &  pour  la  perte  que  toute  l'Eglife  en- 
courra d'ertrc  fruftree  du  foulagemét  que  (on  induftrie  apportoit.  Cependât 
iomlTez  de  ce  qu'il  a  lai(lc,en  attendant  que  Dieu  en  fufcite  vn  autre. Car  n'c 
ftans  pasaireurcz  d'auoirtoufiours  desPafteiu'sfiexcelIens  endoftnne& 
pieté  comme  celuy  duquel  font  ces  fermons ,  il  eft  bien  expédient  que  leur 
doftrine  foit  rédigée  par  efcrit.  Or  mes  frères,  ic  prie  Dieu  qu'il  vous  rem- 
plifTe  deioye&depaix.     De  Geneue,cc  i.  Alars,     ï^éi. 

ARGVMENT      SVR     LA     PREMIERE 

EPISTRE    DE     SAINCT     PAVL 

à  Timothee. 

,j  E  penfequecefte  Epiftiea  efté  efcrite  ,  non  point  tant  pour  Tiinotliee, que 
pour  les  autres:  &  ceux  qui  confîdereront  diligemment  le  tout ,  s 'accorderont 
auecmoy.  le  ne  nie  pas  que  S»  Paul  n'ait  regardé  aufsi  a  renfeigt»cr&  admone- 
^ZX  fter:mais  ie  veux  dire  qu'il  y  a  plufieurs  cbofes  en  icelle  qui  eullènt  efté  fuper- 
.  fluesjs'il  euft  eu  feulement  affaire  aiiec  Timothee. Il  eftoit  ieune,&  n'auoit  point 
"encores  vne  telle  authorité  quieuftpeu  fuffirepour  réprimer  les  infolens  & 
orgueilleux  qui  fe  fulTent  eleiiez  contre  luy.  Et  il  appert  par  les  paroles  de  fainft  Paul, qu'il 
y  cnauoit  aiicunspourlors  ,  lefquels  eftoyent  pleins  d'oftentation,&  pourtant  ne  fe  fuflcne 
""  "         '  ■    -      -        -      -  -       ", rafez d'ambition,  que ia- 

snde  authorité  que  Timo- 
appert  femblablement  qu'il  y  auoit  beaucoup  de  chofes  à  ordonner 
enEphefe.lcfquellesauoyent  befoin  de  l'approbation  &  authorité  de  faind  Paul. Ayant  donc 
délibéré  d'adinonefter  Timothee  de  beaucoup  de  chofes,iI  a  voulu  aufsi  par  vn  mefraemoyea 
admonefter  les  autres  fous  le  nom  de  Timothee. 

Au  premier  chapitre  ill'arme  contre  aucuns  ambitieux  qui  Tefaifoyent  valoir  en  propo- 
fantdes  queftions  inutiles.  Il  eft  aile  à  recueillir  que  c'eftoyent  luifs,  lefquels  faifansfem- 
bJant  d'eilrezelateuis  delà  Loy.ne  mettoyent  en  auant  que  des  difputes  curieufes,fansauoir 
aucun  efgard  à  edifier.Or  c'eft-ci  vne  prophanation  de  la  loy  de  Dieu,qu'on  ne  doit  nulle- 
ment cndurer,de  ne  rien  recueillir  d'icelle  qui  profite  ,  mais  s'y  amufcr  feulement  pour  auoir 
dequoy  babiller,&  fous  couleur  d'icelle  voaloir  charger  l'Eglife  deicnefçay  quels  fatras  & 
chofes  de  neant.Commecefte  corruption  a  ifgné  en  la  Papauté  plus  de  temps  qu'il  neferoic 
de  befoin. Car  qu'a-ce  efté  de  toute  la  Théologie  Scholaftique,qu'vne  confufîo  &  vn  abyfme 
horrible  de  fpeculations  vaines  &  inutiles?  Et  auiourd'huy  combien  en  troUuera-on  qui  pour 
luonftrerla  lubtilité  de  leur  efprit,  ne  font  point  de  confcience  de  traittcr  la  parole  de  Dieu 

*.  iii. 


A  R  G  V  M  E  N  T. 

«omme  en  fe  iouant ,  ne  plus  ne  moins  que  fi  c'eftoit  quelque  philoTopIiie  proptane  ?  Sainft 
Paul  promet  à  Timothee  d'eftie  fon  'garent  en  la  corrcftion  d'vn  tel  vice  ;  Si  monilre  que 
c'eft  qu'on  doit  apprendre  principalement  en  la  Loy.afin  qu'on  cognoifTe  que  ceux  qmvfent 
delà  Loy  autrement,  ne  font  que  la  corrompre  &deprauer.Etafin  que  fon  authoriténe  foit 
iiicfprifee,apresauoir  confelTé  l'on  indignité, il  monftreaufsi  quel  il  a  efté  depuis  parla  grâce 
de  Dieu, parlât  d'icelie  en  termes  pleins  de  maiefté,&auec  grande  reuerence.Pour  conclufion 
il  met  fin  à  ce  premier  cli  api  tre,fai  faut  vnbonaduertifleraent&auec  auihorité:  par  lequel  il 
conferme  Timothee  en  faine  doftrine  &  bonne  confcience ,  &  donne  frayeur  &  crainte  aux 
autres, leur  propofant  pour  exemple  Hymene«  &  Alexandre.  < 

Au  fécond  chapitre  il  veut  que  toutes  perfonnes  foyent  recommSdcesà  Dieu  es  prières 
publiques ,  Sclingulierement  les  Princes&  Magiftrats:où  aufsi  il  touche  en  paflànt  quelle  v- 
tilite  apporte'au  inonde  la  police  &  l'ordre  du  gouuernement  ciuil.  Il  adioufte  la  raifon  pour 
quoy'on  doit  faire  oraifon  pour  tous:afçauoir  pource  que  Dieu  enprefentant  à  tous  l'Euan- 
gile.&lefusChrift  pour  Médiateur  ,deinonftre  qu'il  veut  que  tous  foyent  fauuez.  Ce  qu'il 
conferme  aufsi  par  fon  Apoftolat ,  lequel  eftoit  fpecialement  deftiné  aux  Gentils. Pour  cefte 
caufe  ilinuite  toutes  perfonnes  de  quelque  lieu  ou  région  qu'ils  foyent,  à  prier  Dieu:  &àce 
propos  il  traitte  quelle  modeftie  &fuicttion  doyuent  raonftrer  les  femmes  enlafainâe 
aflcmblee. 

Au  troifîeme chapitre, après auoir  reinonftré  combien  c'eft  vnechargeexcellented'e» 
Are  Euefque,  il  defcrit  vn  vray  Eucfque,  &  recite  les  giaces  qui  font  requifes  en  luy.  Puis 
après  il  donne  vne  règle,  monftrant  quels  doyuent  eftieles  Diacres  &  leurs  femmes,  enfem- 
hie  celles  des  Euefqucs.Et  afin  que  Timothee  pi  occde  en  toutes  ces  chofes  plus  fongneufe- 
ment  &  en  confcience,  il  réduit  en  mémoire  que  c'eit  d'eftre  employé  au  gouuernement  de 
l'£<»life,  quieftla  maifon  de  Dieu  &  la  colomne  de  venté. Finalement  il  touche  le  principal 
pjiuildc  toute  ladodrinecelefte  ,  &  comme  on  dit  communeement,  le  noeud  de  la  matière, 
afçauoirdu  Fils  de  Dieumaniftftcen  chair  :  au  prix  duquel  on  ne  doit  tien  eftiraer  toutes 
les  autres  chofes  lefquelles  ces  gens  ambitieux  mettoyent  en  auant. 

Au  refte,  quant  à  ce  qui  s'enluit,  au  commencement  du  quatrième  chapitre  il  condamne 
viuement  tant  îesfauffes  doftrines  de  ladefenie  du  mariage  &  des  viandes,queles  fables  in- 
utiles,lefquelles  n'accordentauecce  poinâ  principal. Et  puisapres  iladioufteque  luy  &■  tous 
fidèles  qui  mettent  là  leur  but,n''onf  point  d'autrts  ennemis  que  ceux  qui  ne  peuuent  fouifrir 
qu'on  mette  fon  efperance  au  Dieu  viuant.  En  la  fin  de  ce  chapitre  il  conferme  derechef  Ti- 
mothee par  vne  nouuelle  exhortation. 

Au  cinquième  chapitre  ,  après  luy  auoir  recommandé  modeftie  &  douceur  en  reprehen- 
fions,  il  parle  des  vefues,  lefquelles  on  appelloit  de  ce  temps-la  au  feruice  de  l'Eglife;  Et  ne 
veut  pas  qu''on  les  reçoiue  toutes  indrlferenmient,  mais  leulement  celles  qui  après  auoir  efté 
efprouuees  toute  leur  vie.ferôt  paruenues  iufques  à  l'aage  de  foixate  ans, &qui  n'auront  point 
de  charge  domeltique.  De  là  il  vient  à  parler  des  Preftrcs,&remonflrc  comment  on  fe  doit 
porter  enuers  eux, tant  en  leur  afsignant  d>.quoy  viurc, comme  en  les  cenfurant  &corrigeanc 
leurs  fautes. Il  conferme  ceftedo^rine  par  vne  grandeaduiration,&  luy  défend  derechef  de 
receuoir  aucuns  légèrement  en  l'eftat  depreftrife,c'eftà  dire  duminifterc.IU'exhorteà  boi- 
re du'  vin  au  lieu  d'eau  pour  contregarder  fa  fanté.  En  la  fin  du  chapitre  il  l'admonefte  d'at- 
tendre en  patience, &  l'ufpendre  le  iugement  es  péchez  cachez. 

Au  fîxieme,il  donne  inftruftiondu  deuoir  des  feruiteurs:  &  à  ce  propos  il  charge  arpre- 
ment  furies  faux-dofteurs,  lefquels  debatansde  quelques  fpeculations  vaines,  font  plus  ad- 
donnez  au  gain  qu'à  édification  :  &monftre  combien  c'eft  vne  pefte  dangereufe  &  mortelle 
ou'auarice.  De  là  il  retourne  à  faire  encore  vne  adiuration  femblable  .\  la  premiere,.iduertif- 
fant  Timothee  de  fuyure  &  faire  valoir  les  admonitions  qu'il  luy  a  faiàtes.  Surla.fin.aptei.a-., 
uoir  fait  mention  des  riches  en  palTant ,  il  défend  derechef  à  Timothee  de  ne  s'enuelopperi 
point  en  doflrines  vaines  &  curieufes. Quant  à  la  cômune  infcription  Grecque, laquelle  con 
tient  que  cefte  Epiftrea  efté  enuoyccde  Laodicee,ie  n'y  accorde  point. Car  puis  que  S.Paul 
cfcnuant  aux  Co)ofsiens,lors  qu'il  eftoit  prifonnicr,tcfmoigne  que  ianiais  il  n'a  vtu  les  Lâo- 
dicicns.ceux  qui  f  jut  de  cefte  opinion  que  ie  reiette.font  contrainl  s  de  taire  deux  Laodicecs 
en  Alie  la  raineur.combien  toutesfois  que  les  HiftoiK)grapheb  ne  ractnt  mention  qued'vne. 
Outreplus  S.Paul  auoit  laifle  Timothee  en  Ephefe, quand  il  allait  en  Macedone,  comme  fes 
paroles  le  déclarent. Ou  i!  acfcrit  cefteEpiftre  duchemin.auant  qu'il  arriuaft  là.oueitant  de 


tantiepenfe  plurtolt  qu'il  l'a  eftrite d'ailleurs.  Toute  fois  lachofe  n'eft  pasdtii  grande 
Coiifequence  queievueilledcbatre  auec  ceux  qui  font  de  contraire  opinion.  Le  iiigcinert  ea 
foie  libre  à  chacun. De  nioyjicmonftre  feulement  ce  qui  eft  plus  probable  feloiinion  aduis.    . 

A  R  G'  V 


ARGVMEnT    SV.R     la     SBCaNDË 

ififtrede  fafnSh  ?aali  Timothee. 

j  N  nepourroît  pas  certainement  recueillir  de  Phiftoirede  fainû  Luc^uîd  futeCcri- 
te  la  première  Epiftre,  toutesfoisie  ne  doute  point  que  faind  PanI  n'ait  parlé  à  Ti- 
_  motheeen  prefence,&  qu'il  ne  l'ait  eu  en  fa  compagnie  pour  coadiutetir  en  plulieure 
lieux.  Tant  y  aneantmoms  qu'ilell  ailé  âveoir  qu'il  eftoit  encore  en  Ephefe  quand  ûinft 
Paulluyefcriuoit  cefte  Epiftre.Car  verslafindel'fpiftre  ilfalue  Prifclile  «X:Aquile&One 
fiphorc.delquels  le  dernier  eftoit  Ephefien:  les  autres  s'arreftercten  Ephefe  lors  que  fsfnSt 
Paul  femeic  fur  la  mer  pour  aller  en  ludee.Or  le  pfincipalpoiiiA  auquel  ils'arrellc.c'eftde 
confermer  Timothee  tant  en  la  foy  de  l'Euangilc,  qu'en  la  côftance  &  pure  prédication  d'i- 
celuy.Mais  cependant  la  circonftance  du  temps  eft  bien  à  confidcrer,  afin  de  pefer  ces  exhor 
tations  comme  elles  meritent.SainÛ  Paul  auoit  dcuant  les  yeur  la  mort ,  qu'il  eftoit  près  de 
endurer  pour  le  tefmoignage  de  i'Euangile.  Il  faut  donc  prendre  tant  ce  q  nous  Iifousicidu 
règne  de  Chrift  ,  de  l'clperance  de  la  vie  éternelle,  de  la  façon  de  batailler  des  Chreftiens, 
de  l'alTeurânce  à  confeflèr  Chrilt.de  la  certitude  de  la  dotlrine.non  point  comme  efcrit  d'au 
cre,raaisdu  propre  fang  delainft  Paul. Car  il  n'afferme  cbofe  que  ce  fo:tpour  laquelle  il  ne 
i'offre  à  mourir.  Parquoy  cefte  Epiftre  cil  comme  rne  ratification  folennelle  de  la  doclrine 
lie  faind  Paul. Or  maintenant  il  faut  qu'il  nous  fouuienedece  qui  a  eftc  rcmonltréen  la  pre 
niiere  Epiftre:ifçauoir  que  le  (aintt  Apoftren'a  pas  feulement  elcrit  pour  vn  hôme.inais  que 
fous  ht  perfonne  d'vn  il  a  propofévnedoftrinc  commune,  laquelle  deuft  eftre  baillée  par  l'es 
mains  aux  autres.  Et  premièrement  ayant  loué  la  foy  de  Timothee.en  laquelle  il  auàit  cfté 
nourri  dés  fa  ieuneffe,!!  l'exhorte  de  fidèlement  perfeuerer  en  la  doâ:rine  qu'il  auoit  appri» 
fe,&  en  la  charge  qui  iuy  eftoit  commife:&  quant  8c  quantafin  que  Timothee  ne  perde  cou- 
rage par  fon  einprilonnement,  Se  le  reuoltement  des  autres,  il  s'cfîouit  en  fon  ApoAolat,  & 
aufalairequi  luy  eftappreftéllloueaufsi  Oneiîme  pour  donner  cœur  aux  autres  àfonexem 
ple.Et  pourccque  la  condition  de  ceux  qui  veulent  fcruiràChrifl ,  eft  difficile  &  pénible  ,  ti 
prend  des  fimilitudes  tant  des  laboureurs  que  des  gens  de  guerre:entre  Icfqiwls  les  premiers 
ne  font  nulle  difficulté  de  prendre  beaucoup  de  peine  àcultiuerlaterre  ,  auant  qu'ils  en  ap- 
perçoiuent  aucun  frui£l:S:  les  autres  renoncent  à  toutes  folicitudes  &  affaires,  afin  de  s'adoa 
•erdu  tout  aux  armes, &  s'employer  pour  leur  capitaine.  Puis  après  il  fait  vabrief  fommai- 
redefon  Euângile,&  commande  à  Timothee  qu'il  ait  il'cnfcignerainfiam  autres,  afin  que 
demain  en  mamladoclrineparuienepureàceuxqui  naiftront  après.  Et  de  lA  ayant  fait  de- 
rechef mention  de  fes  liens ,  ils'eleue  en  vne  fainâe  vanterie  ,afin  d'alTeurer  &accouragcr 
toufîours  d'auantage  les  fidèles  par  fa  confiance.  Car  il  inuite  vn  chacun  i  luy  tenir  compa- 
gnie à  confiderer  quelle  eft  cefte  coUronne  qui  nous  attend  au  ciel.  Il  aduertit  aufsi  qu'on  fc 
déporte  de  toutes  difputations  contentieufes,&  vaines  queftions-.recommandant  àl'oppofî- 
te  qu'on  s'employe  à  édifier.  Et  pour  mieux  donner  à  entendre  le  grand  danger  qu'il  y  a,  il 
ditqu'ily  enaeu  aucuns  (.&en  nomme  exprelTément  deux  ,  afçauoir  Hvmenee  &Philete) 
lefquels  eftoyent  tombez  en  vne  refuerie  monftrueufe ,  iufques  à  renuerler  l'efperante  de  la 
Rel'urreftion.i  auoy  ent  ainfi  efté  horriblement  punis  de  leur  témérité  &  outrecuidace.Mais 
pource  quec'eftvn  grand  fcandale  le  plus  fouuent, quand  on  voit  de  telles  cheutes,  mefme- 
nient  de  gens  notables, 5i  qui  ont  cfté  en  quelque  réputation,  il  monftre  que  les  fidèles  ne  fe 
doiuent  point  traubler  pour  cela  ,  d'autant  que  ceux  qui  font  profefsion  externe  de  Chre- 
ftienté,ne  font  pas  tous  pourtant  vrayement  de  Chrift ,  &  qu'il  faut  que  l'Eglife  foit  luiette 
à  cefte  mifere, d'habiter  en  ce  monde  entre  les  mefchans  &  infideles;&  que  nonobftât  le  Sei- 

fneur  conferue&  maintient  iufques  à  la  fin  les  fient  qu'il  a  eleus. Puis  après, il  retourne  à  er- 
orter  Timothee  de  perfeuerer  à  exercer  fidèlement  fon  mini ftere.  Et  afin  de  le  rendre  plus 
fongneux,il  prédit  &  l'aduertit  qu'il  viendra  bien  toft  après  des  temps  bien  fafcheiix  &  dan- 
gereux à  tous  fideles:5i:  qu'il  s'eleuera  des  "ensfort  pernicieux.  Mais  contre  tout  cela, il  le 
conferme,propofant  qu'on  en  doit  efperer  bonne  &.'  heureufe  iflue.Et  fur  tout  il  luy  recora 
mande  de  s'exercer  à  la  faine  dodrine,monftrant  le  vray  &  droit  vfagedel'EfcriturCjafin 
qu'il  fçachc  qu'il  trouuera  enicelle  toutes  chofes  requifes  pour  bien  &feuremét  édifier  l'E- 
glife. Confequémcnt  il  dit  que  fa  mort  eft  prochainc:en  forte  tputesfois  qu'il  y  court  com- 
me vidorieuT  à  vn  glorieux  triomphe.  Qui  eft  vn  tefmoignage  euident  d'vne  confiâce  &  af- 
■feuraRce  admirable. Fimalement  après  auoir  prié  Timothee  de  venir  bien  toft  à  luy,  il  mon- 
ftre la  necefsité  qu'il  ena,eQ  déclarant  fon  eftatprefeiu.£t  c'cft  le  principal  poindfaifant 
coocUifionde  l'EpiAre. 

.*.iiii.     ■ 


ARGVMENT     SVR.    L'EPISTRE 

defaind  ?aitlà  Tite. 

^\^  Aincl  Paul  ayant  feiikment  afsis  les  fondeniensd''vne  Eglife  en  Crete.d'autant  que 
^^t  il  liiytaloit aller  en  d'autres  lieux,(comme  il  n'eftoit  point  aufsi  Pafteurd'vnefcu- 
î^iî;  le  Ifle.mais  Apoftre  des;  Gentils)auoit  donnccliargeà  Tite,  comme  Euangelifte.de 
pouifuiiire  l'ŒUure  commencée. Or  il  eftaileà  vcoirpar  ctfte  Epiltre,  qu'incontinent  apref 
le  partement  de  fainft  Paul ,  Satan  s'eftoit  efforcé  nonfculement  de  renuerfer  le  régime  & 
ordre  de  l'Eglile.mais  aufsi  de  corrompre  la  doftrine.  Il  y  auoit  là  des  gen>i  ambitieux  qui 
enflent  bien  voulu  s'auancer  àenleigner  en  r£gli(e,&eftre  du  nombre  des  Pafteurs.Pource 
que  Tite  ne  vouloit  pas  complaire  à  leurs  defîrs  peruers ,  en  plufieurs  compagnies  on  tenoit 
dcb  propos  tédans  àdetraûion  &  calomnie  fur  luy.  D'autre  part  il  yauoitdco  luifs  lefquels 
fous  couleur  de  maintenir  la  Loy  de  Moyfe.mettoyent  en  auant  beaucoup  de  fariboles.On 
prenoit  plaifir  à  ouir  telles  gens ,  voire  &  ne  fis  faignoit-on  point  de  les  fouftenir.  L'inten- 
tion donc  de  fainûPaulen  efcriuantceci.aeftéd'aduouer  &autiioriferTite,afiii  qu'il peuft 
mieux  porter  vnclî  grade  cliarge.Car  il  n'y  a  point  de  doute  qu'il  y  en  auoit  qui  nefaifoYet 
pa';  difficulté  de  le  iiieiprifer.comme  s'il  n'euft  rien  eu  d'auantage  qu'vn  autre  du  rang  com 
nikin  des  Miniftres  &•  Pafteurs.  II  fc  peut  aufsi  faire  qu'on  oyou  courir  ces  plaintes  contre 
luy  çà  &  là.qu'il  entreprenoit  trop,&  vfurpoit  plus  d'auifcorité  qu'à  luy  n'appar tenoit,  d'au 
tant  qu'il  ne  vouloit  teceuoir  aucun  en  l'eftat  de  Pa/leur  ,  fînon  après  i'auoir  examiné  &  ef» 
prouuc  luy-mcfme.  Et  de  là  nous  pouuons  recueillir  que  faind  Paul  n'a  pas  tant  cfcrit  pour 
lé  regard  particulier  de  Titc  ,  que  généralement  pour  tout  le  peuple  df  Crète.  Car  iln'eft 
pas  vray-femblable  qu'iLiit  ici  voulu  reprendre  Tue,  côme  eftant  trop  facile  à  auàcer  gens 
indignes  en  l'cflat  d'Euefquc  &  Pafteur  :  ne  lemblabkment  qu'il  luy  ait  voulu  bailler  fa 
leçon  comme  àvn  apprenti, ou  à  vn  homme  du  tout  nouueau  en  la  chai  ge,  pour  luy  mocftrer 
quelle  façô  d'enftigner  il  deuoit  tenir  enuers  ce  peuple. Mais  pource  qu'on  ne  l'auoit  point 
en  telle  cftimc&  rcuerencc  qu'il  faloit.faina  Paul  luy  baille  ici  l'authorité  de  créer  de<.  Mi- 
niftres, &  faire  toutes  chofes  appartenantes  air  gouuernement de  l'Eglife,  tout  ainlî  comme 
ileuft  fait  luy-mcfme  cftantprefent:  pouice  aufsi  que  plufieurs  euflent  bien  voulu  vne  autre 
forme  de  dodrine  &  fa^on  d'enfcigner  que  celle  qu'il  tenoit ,  fainû  Paul  déclare  qu'il  ap« 
prouue  celle-là  feule,  rciettât  toutes  les  autres,&  l'exhorte  de  pourfuiuretoufiours  le  train  .- 
qu'ila  commencé. Il  mettre  donc  en  premier  lieu  quel?  perfonnages  on  doit  élire  pour  eftre 
Minittrcs.  Entre  autres  grâces  qu'il  requiert  en  yn  Miniftre,  il  veut  que  ce  foit  vn  homme 
exercé  en  faine  do£Vrine,&  l'ayant  i  main  pour  tefifteraux  aduerfaires.Et  a  ce  propos  il  tou 
chc  quelques  vices  des  Cretcins:  mais  en  fptcial  il  reprend  les  luifs  qui  eftablinoyent  quel- 
quelaindeté  enla  différence  des  viandes  &  autres  chofes  externes.  Pour  réfuter  leur- niai- 
feries,il  met  à  l'oppofite  les  vrais  exercices  de  pieté  &  vie  Chreftienne.  Et  pour  mieux  im- 
primer cette  do£irine,il  defcrit  par  le  menu  quel  eft  le  deuoir  d'vn  chacun  félon  fa  vocation. 
Afin  que  le  peuple  ne  fefafchaftoyant  fouuent  repetef  vne  mefme  chofe,il  commande  nom 
wément  à  Tite d'infïtter  diligemment  8t  afsiduellement  fur  ce  poin£l:&  monftre  quec'eftle 
but  de  la  rédemption  &  falut  qui  nous  a  etté  acquis  par  Chrift.  Et  s'il  y  a  quelque  brouillon 
ou  opiniaftre  qui  contrcdife&  ne  Ce  vueillc  ranger,il  cômande  qu'on  lelailTelà.Nous  voyôs 
donc  maintenant  que  faind  Paul  n"a  eu  ici  autre  regard,  finon  de  prendre  la  caufe  pour  Ti- 
tç,&  luy  tenir  la  main  forte  cependant  qu'il  s'employoit  en  l'ceuutc  du  Seigneur. 

S  £  R 


l  jLueili-'fj'" 


Sermons  de  lean  Caiuin  lur  les  deux 

EPIS  TRES      DE      SAINCT      PAVL 
à  Timothee,  recueillis  par  refcrfuain  ordinaire  pour  le  bien 


&  redificacionde.  ^^ 

LA     PREMIERE     EPI- 
ftrc  de  fain£i  Paul  Apoftre  à  Timo- 


E2lire  du  Seigneur. 


thee, 


C  «  A  P.    I. 


que  ('liniîl  Paul  a  voulu  édifier  tous  ceux  auA. 
gtiels  celle  epiftre  pourroit  eftre  communi- 
quée.EtdefaiLi.ilmonftre  ici  quel  eflle  vray 
ordre  de  PEglUljComme  la  parole  de  Dieu  fê 
,  ■■»  T  j    »  doit  traitter,  &  à  quel  vfage  elle  doit  eftre 

■^  *  i- A^O-  .appliquée.  Il  déclare  quel  eftledeuoir  d'vn 
(IrC  cIp  If//'_r  cJi-ici'ii-ftainfî  nous  voyons  qu'il  n'eft  point 
i'  -'   '       queftion  d'vn  homme  particulier ,  mais  qu'il 

Chrift     p^T    faut  que  tous  y  foyentattcntifî, d'autant  qiie 
I  p-^    c'eftà  for.  Eeiife  que  Dieua  voulu  addrelîcr 

Id  COmmihlO  Celle  dûfbvir.e  par  la  bouche  de  iaind  Paul  Or 
///•  T^'ptj  voyons  maintenant  de  quelle  forme  S.  Paul 

aC  UICH  710-  ^  ç^  ^^  f-^  pretace:  il  dit ,  Va,d  Afojlre  de  l.fi,s 
■■■rS'iUHCUT  ClirtÇr  felonla  commifs'on  cjHtlny  efl  donnée  de 
Tilen  n  f}reSaiii!tnr,C  du  Scig-  eurleftis  Cl.rp- 
Ç^  du  Sei^VCUr  le  fus  Chriji  UO-  W(./?ref/:'«r.î<ff.Nausauonsmonftr>'cideflus 
n  r  trai:tanclesepi!hesauxThellaIonic:éç,chap. 

juC  CJpC'rdViCC,  Z.I3,  que  faillit  Paul monihe par fon  exemple 

*       \'r',-,r~>-Ur'P»,nti\-,-/-'ixfhp-n     que  nul  ne  doit  eftre  efcouté  en  l'Eglife  de 
i     A  1  UlutOCe  mO)!  ^rdyplS  en    ^,^,,  ^^^^  ,^;^,„.  enuoyéxar  il  ne  laSt  point 

îdfoy,  Q-rdCe,Vl\(èricorde  Çy  pdix     quenoftrefoyloitattnbueeaux'hômcsmor- 
J         "  .  n      -r,  J  '  tels,  ni  aux  créatures.  Il  n'y  a  que  Dieu  feul 

Cîepdr  DtCli  nojirC  VCrC-,  IQ-'  de  par    qui  domine  fur  nos  ame^&  faut  que  nous  re 


Icfus  Chrijï  yiojlre  Seigneur, 


p 

•  toute 


ccuionsde  liiy  touteladoârinede  no  lire  fa- 
lut.CependSt.ilnedefceiidpasducielenfor- 
parler  à  nous ,  Se  ne  nous  en- 
,mais  il  veut  que  nous 
moyen  des  hommes, 
pour  toute  J'iîglUc,  comme  on  le  peut  veoir  Pour  celte  caufe  iî  nous  voulos  obéir  h  Dieu, 
par  le  cont-nu  d'icelle.  Car  Timothee  n'a-  il  nous  faut  rcceuoir  fi  Parole  q  nou' eflpref 
iioit  pas  befnm  de  beaucoupd'aduertiilemens  chee  par  ceux  aufquels  il  a  commis  ceffe  char 
que  Uir.i1  Paul  fait  ici.  Il  paile donc  pluftoft-  ge&'ofnce:  carccûxquifevantentde  vouloir 
à  Pûccafion  des  autres  quedeluy.  Etmcfmcs  •  feruir  à  Dieu, &  cependant  me  fpnfent  faPa- 
de  prime  face  on  peut  aifecment  recueillir  ce-  r9le,fous  ombre  qu'elle  leur  efi  apportée  par 
la:carfainftPauls'attribue  le  titre  d'Apofire,  la  bouche  des  hommes,  monflront  bien  qu'il 
&  confernie  fa  vocation  enuers  ceux  qui  ne  n'v  a  qu'hypocriîîe  en  eux.  Et  deiaièl,  ilne 
luyeuflent  point  doré  authorité  s'il  ne  fefull  faut  point  plaider  là  deflus  ,  puis  que  nous 
fait  cognoillre  e/lre  tel.  Mais  quand  il  efcrit  voyons  que  Dieu  a  eilabli  ceft  ordre  ,  c'ella- 
aujtEgufeSjl.Toùdenailelloit  fuffiûmmcnt  fçauoir qu'il v eut gouuerner  fonEglife parla 
approuué,  il  ne  fait  que  toucher  en  brief  ce  prédication  de  TÈuangile  ,  &  qu'il  veut  qtie 
mot  d'Apoftre,  eu  il  s'appelle  lîinplementftr  leshomm.cs  foyertminillrcsde  cel.l.  Ilfaut 
oiteurde  Dicu.Yci  ilmonftre  qu'il  ne  s'eft  eue  grans&peti.f,- rangent  .i  celte  règle  qui 
pomcingeié  de  fa  fantaile, mais  qu'il  a  elle  leur efl donnée,".; laquelle  fera  ferme iiifques 
oidornéùeDicu,  quela  charge  luy  eftcom-  ?.  la  lîndumonde.  Tant  y  a  que  .O.inil  Paul  le 
mifc  par  noftrr  Seigneur  lefus  Chrill.  A  quel  nommant  Apo/lre  avoulu  ic"  déclarer  en  pre 
propos  fait-il  cela,{înon  qu'il  a  regardé  les  niier  lieu, que  les  homines  irdiff  reinmer:!  ne 
autres  plus  que  Timochce  ?  Ainli  donc  ,  nous  doyucnt  pas  eftreefcoutez,fiuon  qu'ils  ayenr 
voyous  que  celle  epiltre  a  tellement  elle  ad-  approbation  qu'ils  parlent  au  nomdcDieu, 
drelîee  àvn  homme,  qu'elle  s'addrefle  auf  i  à  &:  de  noftrc  .Seigneur  Icfus  Chrill.  Au  relie, 
tous,  qu'elle  doit  profiter  en  gênerai  aux  en-  il  monftre  aufii  que  fi  nous  voulons  taire 
fans  de  Dieurcomme  nous  ver'rés  plus  à  plein    hommage  à  Dieu, fi  nousluy  voulons  eftr« 

2..K 


a  PREMIER 

fuiets,  q  nousdeuons  receuoir  Ta  Parole  quSd 
elle  nous  efl:  prelchee  par  k  bouche  des  hom 
mes  qu'il  a  enuoyez.  Cependant  il  ne  dit  pas 
limplement  qu'il  eft  Apollre ,  mais  il  dit ,  D* 
noflrc  Seigneur  If  j;f5  Cfcn'y},  voire  pource  que 
celuy-la  nous  i  elle  ordonné  de  Dieu  fon  Pe 
re  côme  ibuueraiii  docteur, voire  vnique.Tous 
ceux  doc  qui  fe  meflét  d'cnfeigner.il  taut  que 
ils  parlent  au  nom  de  nolbe  Seigneur  lelus 
Chnft:câr  c'eft  de  iuyleul  qu'il eildit,  Elcou 
,''  ■  7'  tez-le.  Quand  cefte  voix  aelleouyedu  ciel, 
*  qu'il  faut  eûouter  lefas  Chrill,  c'a  elle  pour 

clorre  la  bouche  à  toutes  créatures, que  nul  ng 
prcfunic  d'iuancer  cequ'ilaura  torgé  en  Ion 
ceiucau,que  nul  ne  pretéde  d'ellre  mailtrc  ou 
docteur,  car  il  faut  q  cela  foit  reierué  au  Fils 
de  Dieu.Qu;  rerte-ildôc?Q«e  tous  ceux  qui 
enfe^gnëtipuiilent  protelter  en  venté  que  le- 
lus Chrift  parle  par  leur  bouche, coine  S.Paul 
i.Cor.     auûi  le  dit  en  vn  autre  partage, Demâdez-vo' 
13'3-        approbatiode  celuy  qui  parle  enmoyî  c'ella 
fyiaoïr  le  Seigneur  leili-,  dit-il.  V^ih  donc 
pourquoy  notimentildeclare  qu'il  ellApo- 
ftre  delelus  Chnft.c'eft  à  dire  enuoy  e  de  hiy , 
ayant  cômiûion  de  parler  côme  en  fa  propre 
perlonnc:&dit  que  cela s'eft  fait /).îr/'oc</o;<- 
nance   de  Dieu  Ct"  Je  ncjire   Seigneur   Ufus 
cltrift.En  quoy  il  lignifie  q  ce  n'cil  point  aux 
hémcsdes'ingerer:c5meaursi  il  cltditcnl'E 
Hft.f  .4  pîllre  aux  Hebr.Que  nul  ne  doit  vlurper  l'ho 
^  y.       neur  à  loy,  mais  ccluy  qui  eft appelé  de  Dieu, 
que  ccluy-la  pourraiiirc  qu'il  a  charge  Icgiti 
me. Et  de  faici,il  a  falu  q  îeûis  Chrift  melme, 
qui  ert  mailhe  en  lamaiîon,  &:chel:  par  delTus 


SERMON 

ne  eft.qu'ils  foyét  eleus  parmoyen  tel  qt)ieà 
approuue,&  qu'il  nous  eft  môftré  en  ù  parole, 
car  celle  regle-laeftinuiolable.Et  puisil  y  a 
pour  le  (ecôd, qu'ils  s'acquittent  fidelemét  de 
leur  deuoir:&  cela  ellqu.îd  ils  le  tienét  à  la  pu 
redodrinede  l'Euîgile,  qu'ils  ne  s'arreftent 
pointa  leurs inuétions.mais  qu'ils  ccrchét  feu 
lemét  d'exalter  le  nom  de  nofrre  Seigneur  le 
fus  Chri(l,iScqu'il  l'oit  ce  qu'il  a  elle  ordônéde 
Dieu  fonPere,c'ellal"çauoir(come délia  nous 
auosdit)dotleurlouuerain&vnique.Voila  les 
deux  choies  q  l'ont  requi t'es  en  tous  pafteurs  ^ 
veiilét  eflre  recognus  <i;aduouez  pour  mini- 
lires  de  la  parole  de  t>icu,  qu'ils  l'oyéc,  di-ie, 
appelez  félon  l'ordre  de  l'EaJife.&qu'ils  ever 
cet  fidelemét  leur  e'tat,  tafcnât  de  s'acquitter 
en  forte  que  lefus  Chrill  domine  touiiours  en 
ceft  honeur  fouuerain,qu'5  l'el'caute,3c  qu'on 
luy  obeiffc.  Et  voila  pourquoy  il  elldit  qu'il 
faut  q  l'Eglife  demeure  toufiours  charte  à  f  >n 
efpoux.Qu.id  le  f'Chrift  appelle  en  fon  nom    1 
ceux  dcfglsil  le  veut  feruir,ilne  faut  paspour  '     '  ' 
tant  qu'ils  vfurpét  fon  lieu  &  ù  dignité:  c'cft 
côme  fivn  hônieaiioit  cômis  fafemme  à  vn  lié 
ami,  (Se  que  ccluy-la  fuft  le  pmier  qui  tafchall 
de  la  fcduire. Quand  vlôc  ceux  qui  ont  l'office 
d'anoncer  la  parole  de  Dieu,  voiidrôt  mettre 
en  auït  leurs  inuétiôs  propres, ce  fera  faire  ro 
pre  à  l'Eglife  la  foy  qu'elle  doit  à  fon  mari, 
c'cll  à  dire  au  Fils  de  Dieu.  Car  voila  aufsi  en 
quoyS.Paul  inôftrequela  challeté  de  l'Eglife 
confille,  c'cilqu.ulcllenefedesbauche  point  i.Cor. 
de  la  iimplicité  de  l'Euagile^dit-il:  )car  iî  tofl  11.3. 
q  nous  prellôs  l'aureille  à  des  doélnnes  eflran 

ope  r'^t^fV  r/ïiTip  11  vnp  ff.mnip  ^ilnir  ni}f>  Panrpï  ï 


Cor.ri 
0-e~ 


tous, que  celuy-la  ait  e/lé  ordôné  de  Dieu  fon  ges,c'eft  côme  lî  vne  temme  auoit  plié  l'aureil 

Pere.voire  auec  ferment  folennel.côme  nous  le  a  vn  maquereau  pour  la  feduire.  Ainfi  donc 

voyôs  au  Pfe.iio.  Q_u^e  feia-ce  dôc  de  ceux  ^  notôsbienq  les  homes  n'ont  pas  celle  cômif 

font  bien  inférieurs  à  luy,  &  qui  n'ôt  nulle  au  lion  pourgouuerner  l'Eglife  de  Dieu  .T  celle 

thoritc,finon  celle  qu'il  leur  donc?  Or  S.Paul  condition  q  la  dignité  de  lefus  Chrill  foit  a- 

pouuoitdire  qu'il  eltoit  conllitué  Apollre  fe-  nioiiidrie.ne  qcela  luy  emporte  piudiceaucii, 

lonl'ordonn.îcede  Dieu, pource  qu'il  y  auoit  mais  plulloflc'efl  afin  qu'ils  ferâgent  au  do- 


13- C?* 
J3.1. 


eu  vocation  du  cielaucc  miracle  :  mais  cela  ne 
fe  fait  pas  en  tous.Q_iipy  dôc?Dieu  afin  q  rien 
ne  fe  ftill  en  côfus,  mais  q  tout  allaft  par  bon 
ordre  en  fou  Eglifc,a  eilabli  vn  tel  moyen,  & 
,  dôné  charge  &  cômifsion  à  ceux  del"qu;'ls  il  fe 
vouloit  feruirpour  porter  la  Paroi-., c'eil  que 
ils  feroyét  eleus  &approuuez.Quad  dôc  cell 
ordre  fera  ainlî  gardé, côme  les  Apoflres  nous 
l'ont  mûllré, voila  vne  vocation  légitime, &:q 
Dieu  veut  eftierecognoc  côme  de  luy.  Quât 
àce  q  S. Paul  &  lesautres  Apollres  ont  eftc  or 
dônez  parvn  moyéfpccial.cela  eftoit  pource 
qu'ils  elloyentemioyez,  afin  de  mettre  Ii  fus 
Chnften  pofilfsiô  de  fon  royaume.  Mais  de- 
puis q  ce  fondemét  a  elle  mr,  D:cu  a  voulu  q 
ceux  qui  deuoycn t  anonccr  1  Eu jgilc,  fulTcnc 
eleus  &:appr<)uucz,&:  veut  qu'on  fecontétede 
cela,  côme  l'El'criturc  le  moiiftre  en  d'autres 
partages.  Tant  y  a  que  nous  deiions  obferuer 
deux  chofesen  tous  ceux  quianôcent  la  paro- 
le de  Dieu,&  qui  portét  ce  titre  de  paftcurd'v 


ileur  vnique&rdcs  gras  &:des  petis,qu'ô  le  tie 
ne  à  Ci.  parole  qu'il  a  apportée  au  nom  deDieu 
fon  Pere.&ccpédant  toutesfois  qu'é  toute  hu 
milité  &  reueréce  nous  obeifviôs  à  la  doclrine 
qui  nous  tftpfchee  par  les  homes:  q  fi  nous  ne 
en  tenôscôte,nous  ne faifons  point  iniure aux 
créatures  mortelles ,  mais  nous  raôllrons  vne 
rébellion  manifelte  cotre  Dieu  &  contre  fon 
Fils  vniquc.  Maintenat  il  nous  taut  noter  les 
titi  es  î<  S.  Paul  attribue  ici  &  à  Dieu  &  à  nollre 
Seigneur  lefus  Chrill.  Il  dit,  Dieu  nojlre  Sau~ 
Kf«r,c>If/»i  Chrijî nopreefpiraiice.Ucilvriy 
q  ce  mot  de  S.iiiiieur  fouuétesfois  en  l'Efcritu 
!  e  laiiidc  fc  dône  au  Fils  de  Dieu:pource  que 
c'eft  luy  qui  a  parfait  &:accôpli  tout  ce  qui  eft 
requis  à  noftie  filur.Il  a  efp.îdu  lin  lang,afîri 
q  nous  foyô;  lauez  &:  nettoyez  de  nos  macu  - 
les.Ila  eftàcc  ia  nialedicliô  qui  cftoit  fur  no': 
il  nous  adcliurez  &: affranchis  delà  kruitude 
de  mort, il  a  aboli  le  péché. Nous  voyôs  donc 
qu'il  nous  faut  cerclicr  noftre  falut  en  iiollre 

Seigneur 


SVR    LA   I.    A    TIMOTH. 


Seigneur  lefiis  ChriftAqnec'eft  àbondroiâ 
i^u'il  cft  noniiné  noftic  Saiiuciir.Mais  aiifji  ce 
n'i-ft  point  laiT  caïUe  q  S.  Paul  mticuJe  ainfi 
en  ce  paflage  Ditii  le  Peie.Et  pourcjiioyr 
Voyôs  d'oi'i  c'tl}  i]  Iclus  Cliiiit  no'  eli  vtnu. 
Il  nous  aelté  enuoyéde  Ditu  Ion  Pcic,côme 
U.iii  3.     l'Elcritui e  le  po:  te,q  Dieu  a  tât  aime  ie  mon 
i<Î!  &  I-  de, qu'il  n'a  ponit  cipargnt  ion  Fils  vniq.mais 
tean  4.5  l'a  liuré  à  la  mort  pour  nous  .  Pouitât  ijuand 
nousaurôscontépiénoftrc  Tahit  enla  ntonne 
de  noftie  Seigneur  IcAis  Chrift,  iJ  nous  faut 
venir  à  la  i'ourcc  &  fontaine  dot  il  nous  jpce- 
de,c'ellal"çatioirde  ceJte  amour  t]  D»eu  a  por 
tce  au  genre  humain. Voila  pourijuoy  S.  Paul 
nomme  Dieu  noftre  Sauueur  :  iignihat  par  ce 
mot  J  toutestbi:  &  quantes  q  nous  péioiis  au 
bien  qui  nous  a  efte  apporte  &  acquis  par  no- 
ftre Seigneur  IelusClirift,y  nous  tku;ons  nos 
e/pnts  plus  haut,&^  nous  cognoiTsiôs  q  Dieu 
ayât  pitié  de  la  pdition  en  laqlle  tfloit  toute 
laligneed'Adâ.y  a  voulu  pouiuoir,&:  y  a  do- 
nc ce  lemede.c'eft  afçauoirque  noitre  Sei- 
gneur lelus  Chriftnous  cit  venu  retirer  des 
abyiîncs  de  mort  cfquels  nous  eftiôs:  mais  ce 
pcndât  lefus  Chnfttft  appelé  noftre  ffperan 
c^,  afin  g  nous  fçachiôs  que  c'cft  en  luy  qu'il 
nous  taut  appuver,&:  auoir  tout  noltre  repos. 
Car  cornent  pourries  -nous  npprehéder  le  la 
lut  q  Dieu  nous  a  dôné,li  ce  u'eft  q  nous  ayôs 
appomtcmêt auec  Juv  parie  movtii  de  noftre 
Seigneur  lelus  Chrift.-veu  q  ccpcndât  q  nous 
regarderôs  à  la  maiefté  deDicu.il  taut  q  nous 
levons  elpouâtcz.Et  voila  qui  a  eftc  cauie  de 
faire  ccrcheraux  Papiftes  tant  de  patrons  & 
d'aduocats,  tant  de  moyés,  tant  de  menus  fa- 
tras, c'a  e/lé  afin  d'ellre  aflcurez  de  leur  la- 
lut.Et  fi  n'en  font-ils  pas  venus  à  boiitrcar  de 
puis  cu\'/  ie  dcltourne  de  Icfus  Clirift,  il  fjut 
qu'on  foit  en  doute  &  en  peiplexité:&  enco- 
res  que  le-  homes  s'endorment  pour  quelque 
peu  de  téps,  fi  tft-ce  qu'en  la  fin  il  faut  q  mau 
gré  leurs  dents  ils  cognoilFent  qu'ils  ont  efte 
abui'ez  en  leurs  vaines  imaginatiôs.  Tant  v  a 
q  les  Papiftes  ne  cognoiflcnt  point  ce  qui  cft 
ici  déclare  par  S. Paul, que  lelbs  Chrift  eft  no 
ftre  cfperance,c5bien  qu'ils  euffent  cfte défia 
inftruits  en  ceit  article  corne  Dieu  eft/r  s^h- 
»*«r  du  monde,  fi  cft-ce  qu'ils  ne  laiflent  pas 
d'eftre  agitez  çà&la,c5me  on  voit  qu'ils  font 
tr.ïfportez  pour  dire, Il  raut  faire  telle  chofc, 
ilfautauoirtelmoyé,  jlfaut  tenir  vn  tel  che 
imn,&encoi"es  nous  faut-ii  auoir  vn  tel  patrô 
&  vn  tel  aduocat.fi  nous  voulôs  acquérir  gia-. 
ce  deuât  Dieu.Voila  où  en  lont  ces  poures  a- 
«eugles.Et  amfi  apprenons  q  fi  nous  voulons 
eftreaireurez,&  auoir  nos  âmes  paifibles,  que 
il  faut  q  nous  cerchions  &  le  commêcemët  & 
la  fin  de  noftre  falut  en  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift,  que  nous  foyons  là.pleinement  "fon- 
des:,que  nous  ne  penfions  point  qu'il  ioit  ve- 
nu pour  nous  donner  feuiemét  quelque  petit 
gouft  de  la  vie  éternelle:  mais  qu'il  nous  a  ap 
•porté  toute  plénitude  &  toute  perfection  de 


bié.afin  qu'en  Iny  fcul  nous  foyons  rsfîàfiez. 
Suyuons  doc  ce  q  nous  eft  ici  ordone  du  Fils 
de  Ditu,  &:nc  vaguons  poirt  çà  S:  làànoftre 
efcicr.  Car  le  chemin  nous  eft  icimonftré  in- 
talIiblL.-tenoni-nous  l.;.Bncf,ici  S.Paul  nous 
dtclaieq  la  caiife  principale  de  noftre  falut, 
c'cft  la  bonne  volonté,  &  Pamour  paternelle 
que  Dieu  nous  a  portée  fans  que  nous  en  fuf- 
fiôs  dignes,  mais  la  Jiibftace  eft  côprife  en  no 
ftre  Seigneur  Icfus  Chuft.Dieu  nous  a-il  ai- 
niczr  Vo!la(di-ic)le  fondement  principal  de 
noltre  falut. Mais  cément  cft-ce  q  Dieu  nous 
aime  cepédant  que  nous  femmes  pecheurs-ll 
faut  qu'il  hailfe  le  mal  q  eft  en  nous  ,  &  qu'il 
le  dettfte  Nous  voila  dôc  aliénez  de  Dieu,  Se 
par  conftquét  nous  fommes  priuez  &  bannis 
de  la  vie  eternelletnous  voila  abâdonnez  à  la 
mort, nous  femmes  maudits.  Mais  auôs-npus 
ce  lauemét  du  iang  de  noftre  Seigneur  Icfus 
Chrift,  pour  nous  acquitter  enuers  Ditu,  par 
le  lacnfice  qu'il  a  offci  t?le  péché  eft-il  aboli 
en  no' par  la  uiftice  qu'il  nous  a  acquifcr  Voi- 
la côme  la  lubftâce  de  noftre  falut  eft  en  luy. 
£t  pourtant  c'tft  làoù  il  nous  faut  regarder, 
c'cft  là  où  il  taut  q  tous  nos  itns  s'adonnëtriSt 
c  cft  la  principalement  ou  nous  deuons  auoir 
tout  noflre  repos, &:  cercher  cefte  paix  dot  S.  ^"'"■l-h 
Paul  parle, difint.  Que  nous  auons  paix  auec  ^  ^' 
Dieu,d'aut.ït  q  nous  fômes  iuftifiez  par  la  gra 
ce  de  noftre  Seigneur  Itfi;s  Chrift.No'  voyôs 
doc  maintenât  quelle  doctrine  nous  auôs  à  re 
cueillir  des  titres  q  S.Paul  attribue  ici  à  Dieu 
le  Père  &  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Or 
nous  auôs  .icôioiiidrece  qu'il adioufte.Grjcf, 
C"  "'■ift  riconicC}-  f.itx  de  f>ar  Dieu  le  Vere,0' 
de  p»r  iioflre  Siigneurhf^  Chrijl.Ceci  eft  pour 
déclarer  encore  mieux  ce  q  no' auôs  touché: 
car  cômt  S.Paul  a  r.émé  Dieu  noftre  Sauueur, 
&  Icftr;  Chrift  nr^ftre  cfperacc.ainfi  il  entend 
q  tout  ce  qui  appartiët  à  vne  pleine  &;  parfai- 
te telîcité,nous  eft  donc  de  tous  deux  en^rom 
mun.  Carfinous  fcparons  Ditud'autc  leftK 
Chrift, nous  ne  pouuôsauoiraucû  acccs  àltiy, 
pource  t]  Ta  maiefté  eft  trop  haute. Nous  fom- 
mes ici  comme  aux  aby  imcs  de  mort.  Il  fauc 
Jôc  qu'il  y  ait  ce  moyen  d'vnion  en  la  ^ifonne 
de  leur,  Chrift, ou  aurreraét  Dieu  ne  no'  fera 
iamais  ^-.piccq  nous  ne  pourrons  pas  l'iruo— 
quer,n'attédre  nul  bien  q  foit  de  luy,  iiifques 
àtâtqroftie  Seigneur  lefus  Chrift  no' appa 
roifle,&:  qu'il  fe  mette  ià  pour  nous  côduiieà 
Dieu  ion  Pere,&;  qu'il  apjpchc  de  no', en  no* 
tcftifiat  q  Dieu  nous  ferajpchain  en  la  pfon- 
ne.Ordeu.it  q  palier  pi' outre, quât  aux  trois 
mots  qui  font  ici  mis.  Grâce,  &  mtfcruorde,  & 
^dr.r:no'  en  auôs  défia  expofé  les  deux,  çrace 
&  paix,  &;auôs  dit  en  iômc  q  ce  mot  de  nrace 
emporte  q  Dieu  nous  aime,  &  qu'il  fe  déclare 
propice  enuers  nous. Le  mot  de  p.iix  emporte 
en  gênerai  toute _ffperi:e. Or  par  cela  il  nous 
eli:  lignifié  q  nous  iômes  mal-heureux  lufquts 
à  tant  que  Dieu  fe  fou  réconcilie  auec  nous, 

a.ii. 


PREMIER      SERMON 


&  qu'il  nous  ait  receus  enfon  amour,  voire 
quand  nous  aurions  tout  ce  qu'il  eil  pofsible 
de  louhaiter  ,  &  que  le  monde  nous  eftimera 
tant  heureux  que  merueilles, nous  aurôs  beau 
nous  applauiir.tanty  a  que  nous  {erons  toui" 
jours  milerablesjiui'quesà  tant  q  nous  foyoiis 
alTcurcz  que  Dieu  nous  aime, &  qu'il  nouv  re- 
çoit pour  tes  enfans.  Et  pourquoj'.'car  il  taut 
que  tous  les  biens  dont  nous  louilfons  en  ce 
monde, nous  foyent  couertis  à  malheur, &  que 
ils  nous  foyét  bien  cher  vendus, iufqucs  à  tant 
que  Dieu  nou^;  ait  receus  en  Ion  amour.  Mais 
aucôtraire.fommes-nous  aimez  de  Dieuîlbm 
mes-nouj  fodez  en  û  grâce?  il  nous  enuoye- 
ra  ce  qu'il  fçaura  nous  elîre  propre.  Comme 
Hous  voyons  qu'il  perfecutc  ceux  qui  iont  re- 
icttez  de  luy  :  &  encores  qu'il  permette  qu'ils 
ayent  des  biens  félon  le  mode,  il  elc-ce  qu'ils 
n'en  ont  point  vue  vraye  iouifîancc ,  puurce 
qu'ils  font  tculîours  en  troubleimais  à  l'oppo 
iiteil  enuoyeraà  fesenfisce  qu'il  cognoift 
leur  eftre  propre  &;  vtile  ,  &  s'ils  ont  taute  & 
indigence,  il  lesconfolera,  en  forte  qu'ils  te 
pourront  elonfierau  milieu  des  mileres:  corn 
médit  S. Paul, que  quand  nous  auos  celle  cer- 
titude de  l'amour  de  Dieu,  q  nous  auons  nos 
a.Cor.      âmes  qui  fe  repolent  en  luy, nous  pouuôsnon 
j^.jo.      feulement  nous  glorifier  de  l'efperance  qu'il 
nous  donne  de  la  vie  celefte,  mais  en  celle  vie 
p  fente,  fçachans  qu'il  nous  aime,  encores  que 
nous  foyons  affligez,  nous  fommcs  relîouis: 
quand  nous  l'çauôs  qu'il  conuertira  le  tout  à 
noltre  falut,puis  qu'il  nous  doue  délia  ce  len 
timent, qu'il  ena  le  foin.  Voila  corne  lesmife 
res  feruirôtauxenfasdeDieu.&par  cemoyé 
ils  fe  pourrôt  glorifier  en  icelles.  Maintcnât 
donc  nous  voyôs  corne  la  grâce  de  Dieu  eltle 
cômencemét  de  tout  bien,&  de  toute  félicité. 
Et  ce  n'cft  point  fans  caufc  eue  S. Paul  les  c5- 
ioint.Et  par  cela  aufsi  nou .  lommes  admonc- 
ftcz  de  ne  point  mettre  lacharruedeuantles 
bœufs, quâd  nous  demadons  à  Dieu  ce  q  nous 
eft  propre. Mais  voici  l'ordre  q  nous  auos  à  te 
nir,  c'ell  qu'en  pmier  lieu  il  plaife  à  Dieu  de 
nous  receuoir  en  ù  grâce,  &  puis  de  nous  en- 
iioyer  les  chofes  qui  nous  font  nccelTau-es  & 
vtiles.Il  ellvray  q  nollre  nature  tcdia  tout  au 
contraire  ,  tout  ainli  qu'vn  malade  fera  plus 
prefle  de  C\  pat,i5  qu'il  ne  fera  portde  la  eau 
fe  du  mai.Ainfi  quand  nous  prr.ins  Dieu, nous 
luy  demandons  bien  qu'il  nous  donne  du  pain 
à  manger.qu'ilnous  enuoye  toutes  nos  ncccf- 
fitezili  nous  fommcs  malades, qu'il  nous  dône 
guerifon:  &  ii  nous  auo  faute  de  quelque  cho 
le, qu'il  nous  l'enuoye.  Voila  comme  nous  i- 
rons  toulîours  au  rebours  en  priant  Dieu.  Or 
nous  oublions  ce  qui  eft  le  principal, al'çauoir 
fon  amour  &  fa  grâce  ,  &  nous  arrcicons  aux 
choies  inférieures.  L'vn  demandera  d'cfti  e  ri 
clie,  l'autre  vouira  auoir  ce  que  fon  appétit 
porte.  Brief  nous  fommcs  lî  perucrs  en  nos  de 
lirs,  quenousnccjgnoillons  pas  ce  qui  nous 


eftbon.Pour  cefte  caufe,  que  nous  fuluions  ce 
fte  regle-ci ,  c'eft  que  quand  nous  inuoque- 
rons  Dieu.nous  luy  demandions  deuant  tou- 
tes chofes  qu'il  luy  plaife  nous  eftre  propi- 
ce,&  en  noui  pardonnant  nos  fautes, nous  re- 
cueillir à  foy  :  &  puis,  qu'il  nous  gouuerne,  & 
qu'il  nous  conduite  en  tout  &■  par  tout.  Il  efb 
vray  qu'il  nous  faut  eltre  conduits  &  gouuer- 
nezparlon  lainc'l:£lprit,linousle  vouîos  bien 
prier  comme  S. Paul  le  inonftrc  :  mais  cepen- 
dantlinefaut-llpasaul'i  mefprifer  cefte  fa- 
çon qui  nous  eft  ici  déclarée. Q^rant  à  ce  mot 
demi/ï'nV!>yi{«,S.Paulii'en  vfe  point  entoures 
les  autres  epiftres.Et  pourqmycft-ce  donc 
que  pluftolïill'a  mis  ici,  lînô  d'autant  qu'il  a 
dclpioyé  Ion  atFeûion  plus  grande  qu'aux  au- 
tres lieux:  Tant  y  a  cji;e  ce  mot  de  mifcricorie 
n'emporte  rien  plus  finon  vne  dcclaratiô  plus 
certainequc  veut  dire  cemntde  "race  :  car  la 
miiericordedeDieu  eft  caufe  de  ce  qu'il  nous 
aime.Et  pourquoy?  Q_ii'eft-cc  qj>c  Dieu  trou 
uera  en  nous  linon  touc  niJerc-S'il  nous  vou 
loit  aimer  pour  nofrre  dignité,  il  faiidroit  que 
nous  fuf  ions  du  tout  autres  que  nous  ne  fom 
mes. Notons  bien  donc ,  quand  Dieu  nous  rc- 
çoiten  Ion  amour, qu'il  n'ya  rien  quil'indui- 
feà  ccla,lÎ!ion  nos  mileres.  Et  il  y  a  vue  cor- 
rcfpondance  entre  les  niiferes  des  hommes, & 
lamifericordede  Dieu.£tain/îdonc,voul5s- 
nous  eftre  auriez  de  luy  ;;1  faut  commécer  par 
cebou:,c'eftde  fentir  combien  nous  fommet 
mifcrables  crearui  es,&  que  nous  f.immcs  per 
dus  &•  damnez. Ccuv  qui  voudror.t  tfpcrer  là- 
lut,&ne  fciitiront  p  Jint  leurs  pouretcz,  c'eft 
autant  comme  liqutlqu'vnvouloit  fauter  par 
deflus  les  nues.  Appienons, apprenos, quel  eft 
le  cliemî  pour  paruenir.i  cefte gi'ace  de  Dieu, 
c'eft  que  n.ius  foyons  conuaii-cus  c'enos  po- 
uretez,&:  qu'eftas  coiàis  en  nous-inefaie^,d'au 
tant  qu'il  n'y  a  q  toute  iniquité  &  malice  en 
nous, là  deflus  nous  ayôs  recours  .îlamiferi- 
cordeiSc  pitié  infime  par  laquelle  Dieu  eft  ef- 
meu  à  nous  aimer, côbiéq  nous  en  fovôs  plus 
qu'indignes.  Voila  à  quel  propos  S.  Paul  ad- 
ioufte  en  ce  pallage,ce  mot  de mifericordr. Or 
il  eft  vray  que  de  la  mifericorde, comme  nous 
auosdit, procède  lagracermaisilnenous  faut 
point  esbahir  que  Ciinrt  Paul  l'amis  en  fe- 
côdlieu.E;  pourquoyî  C'a  efté  pour  aduertir 
qnous  ne  pouuoi  pas  eftre  agréables  à  Dieu, 
linon  d'autant  qu'il  eft  mifericordieux  enucrs 
nous.  Comme  quand  il  dit  en  vi^  autre  parta- 
ge,Lagraccde  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  z.Cor. 
&  la  diieûion  de  Dieu  noftre  Père  foitauec  13.13. 
vous.il  eft  vray  que  ladilctlionde  Dieu  pré- 
cède en  ordre, comme  nousauôs  dit  que  nous 
n'auons  point  fahit  finon  d'autant  que  leGis 
Chrift  non  a  eftc  enuoyéde  Dieu!. m  Père: 
mais  lainct  Paul  après  auoir  parlé  de  la  giMce 
qui  nous  a  tflé  maniftftee  ,  ,X:  t]ue  journelle- 
ment Dieu  nous  communique  en  la  perfonne 
de  fui)  Fils  par  l'Euangile,  nionftre  que  cela 

vicnr 


9 


SVRLAL    ATIMOTH.  î 

vient  2e  ce  qu'il  Iviy  a  pieu  nous  aimer  par  fa     Commet  eil-ce  que  no-is  i^jmmes  f\iit- enfans 
bonté  gratuite. Voila  en  ibmme  quat  à  ce  paf-    de  Dieu  ?  C'elt  p.ir  la  paroiede  i'Eiiargiie.  Et 
fa<»e.  Venons  maintenant  à  ce  que  dit  S.Paul:     celle  parDle-laa'ou  nous  ellelle  proicice.fi- 
II  appelle  Tiaiothee/o»  iray  fis  en  Ufoy.  Or     non  du  cofté  des  honimti  ?  £t  ainlî  donc  puiï 
ceci  déprime  face  pourroit  eilre  trouue  tftrl     que  les  hommes  font  er.uoyezdcDicu.quilcs 
ge  ,  qu'vn  homme  foit  père  fpituucl ,  veu  que    introduit  corne  en  fon  lieu  afin  de  gaigner  les 
noftie  Seigneur  Itfus  Chrilt  a  défendu  cela,    hommes  à  l'alut,i?;puis  qu'auec  la  Parole, il  ad- 
j.  j. ,,    diûnt,  Qu.'tl  ne  nous  faut  point  auoir  de  pc-    iourte  aufsi  les  Sacremcns ,  voila  Cvjmmevne 
res  enterre,  d'autant  qu'il  n'y  a  que  celuy  qui    naillàncenouuclle  ,&  Dieu  meurtre  là  qu'au 
eit  au  ciel,  qui  mente  ceft  honneur-la  .  Mais     lieu  que  nous  eftions nais  enfanid'Ada,&  que 
tout  ainlî  que  Dieucftant  Père  &de  nos  âmes     nousdemourions  en  fa  maled!i;i-ion,iiuans  au 
&denos  corps, faitcerthonneur aux  hommes    monde,  que  tout  celaeltaboli  ennous parle 
mortels  que  fon  titre  leureft  commun  :  aulsi    moyen  de  fonadoption  gratuite. Puis  qu'auiiî 
quâd  illuy  plaiftd'enuoycr  les  hommes  pour     cft  donc  que  Ict  hommes  fontainii  conftituez 
nousattirer  àlafoy,ils  nou;  font  pères  Ipui-    aunomdeDieu,  &:quepar  leur  moyen  les  a- 
tuels.Il  eft  vray  qu'il  fembleencores  que  ceci     mes  font  appelées  àla  vie  immortelle,  il  ne  fe 
neconuienepouuaueccc  qui  elt:  ditenl'epi-    faut  point esbahir  s'ils  font aufsi appelez  pe- 
H(br.      rtreaux  Htbrieux.Carlaii  y  avnecompaïai-    res. Et  voila  pourquoy  faîd  Paulne  fait  point     -    .   - 
iî-5-       fon  faite  des  pères  charnels  auec  le  Père  de    dithculté  de  fe  nommer  pcre  tant  ici  que  par    '    """** 
nos  âmes, (qui  n'crt  qu'vn)c5me  de  chofcs  op      toutes  fes  epiftres.meimcmét  auxCorinthiés.  l'V'  ^ 
pofites.niais  le  tout  s'accordera  tresbienqu.id    S  jnintention  n'eftpas  de  s'auancer  en  dero-    "  ''^'''' 
nous  aurons  entenducoramentc'tft  que  Dieu    gant  rien  qui  loit  à  D:eu, ne  portant  preiudice 
eftnoftre  Père,  &  comme  les  hommes  le  font,    à  ce  qui  luycftreft  rué, &doi  tertre  g.udé:niais 
Ce  nomde  Père  eit  tant  honorable, qAl  n'ap     pluliol):  S. Paul  magmile  la  grâce  de  Dieti,  le- 
partient  qu'.-i  Dieu  fcul,  mtfmes  au  regard  des     quel  auoiiamlî  engcndiéaes  fidèles  par  fon 
corps.  Et  amlî.quâd  nous  difons  que  ceux  qui    moyen  .  Saind  Paul  cnfjmmene  veut  point 
nous  ont  engédrez  félon  la  chair,font  nos  pe-    obfcurcir  la  gloire  de  Dieu,  ni  attirer  .à  foy  ce 
resjc'ellvne  faconde  pailerimproprcicarv-     qui  neluy  appartiécpointrcar  ce  fcroitvn  fa- 
xiecreatuiemortclle  ne  mérite  pascs-ftedigni     cnlcgeexeciablc:  mais  pluftoft  afin  que  Dieu 
te  il  haute  &  fi  ejcellcnte  :  mais  tant  y  a  que     foit  rccognu  Père  fouuerain, il môftrc que  les 
Dieu  par  f.i  bonté  encores  cleui  les  h  mines    fidclesont  cftéattire?.  àla  vie  celeftepar  fou 
en  ce  degic, qu'il  veut  qu'ils  ffjyé;  appelez  pe-    moycntcommes'il  di  foit, Mes  amis  nous  auôs 
res:  &;c'crtafin  qu'if:  fccogn aillent  tant  plus     t. .us  enfemble  vn  Percde  touç,&de  vous&:  de 
obligez  à  luy .  O.  il  n'y  a  pa:.  grande  ditficuké    nioy,  c'eft  luy  qui  par  fa  vertu  nous  a  regene- 
quanc  àla  vie  preieiitc,  qu'on  appelle  père;     rez,  c'elHuy  qui  nous  maintient:  mais  cepen» 
chainels  ceux  qui  ont  engendré  des  cnfan  .     dant  autfon;  que  la  fcn-:cnccde  vie,  (&devie 
Mais  iliembleque  Dieu  foit  le  feul  Père  de    incoriuptiblt)foit  en  nous, d'autant quenous 
nos  amei,en  telle  forte  que  cela  ne  doyue  pQÎt    auons  rcceu  par  toy  la  doftrine  de  l'Euangile, 
ertre  appliqué  aux  homme'. :&  tant  y  a  qu'il  y     Se  Dieu  s'eft  voulu  feruir  de  ma  perfonne  en 
a  vnemtlincia.fon.Pourquoy-Ileit  vray  que     ccftcndroit .  levous  fuis  donc  vn  père  fpiri- 
c'elt  Dieu  feul  qui  nous  engendre  par  fa  Pa-    tuel,non  point  àl'oppoCtedeDieu, non  point 
z.Vierrc  rôle, laquelle  ien5mc  iemer.cc  de  vie:maii  ce-    pour  duninucr  riende  fa  dionité,  mais  comme 
1.13.       pendcjnt  il  appelle  l'Eglifc,  noftremere  .  Car    citant  fous  luy  &  portant  fa  Parole  ,  laquelle 
J/d.s4-'>  tout  ainfiqu'vneinereconçûit,&:  qu'elle  por-    ilm'auoit  commife. Nous  voyons  donc  niain- 
C"  Gui.   te  les  cnfans,  &  qu'elle  le.  nourrit,  ainfi  Dieu    tenant  à  quel  propos  S.Paul  fenôme  père  des 
4.17.      ayant  touiîours  û  Parole  en  fon  Eglife  ,  veut     fidèles .  Et  de  là  nous  fommes  inftiuitsquefi 
que  nous  loyôs  &c;'2édicz  par  icciJe,&:  nour-    nous  voulos  ertre  recognus  &;aduouez  de  Dieu 
ris  (Soekuez,  lufquc^àce  quenous  foyons  ve-     pour  fes  enfans,qu'il  faut  aufsi  que  nous  foyôs 
J.phe.  < .  ''■'J^  "^'^  aage  d'homme, comme  S. Paul  en  parle,    enfans  de  l'EglIie ,  que  nous  ne  facions  point 
j,.  Voila  donc  l'Eglilc  qui  cftappelee  nortre  me-    comme  ces  apoitats  &  ces  rebelles  qui  vou- 

re  celefte,  &r£fcriturcert  pie  ne  de  cela.  Et  droyentauoir  feulement  vne  Chrertientépar 
S.Paul  declaiantcequi  ena  eftédi:  aux  Pro-  fantafie,  qui  n'ont  finon  vne  imag-nationdia- 
phetes,monrtie  que  c'eft  par  la  parole  del'E-  bolique.Or  demoy,ie  fuis  Chrert!en,ie  tiens 
uangilc.qui  ert  la  Itmcce  de  vie, que  nous  fom    l'Euangile  :  voire  il  ne  leur  courte  gueres  de  _ 

mes  faits  enians  de  Dieu  .  Pour  cela  PEglife  parler  ainfi  ,  mais  cependant  ils  reiettent  tout 
çil  nomee  nortre  mère  au  4. des  Galat.  Or  par  ordre  d'Eglife.iis  fe  veulent  exempter  de  tout 
\nc  melme  raifon  ceux  aufquels  certc  charge  ioug.ils  cerchent  la  ruine  de  ceux  qui  font  cô- 
crtcominJe  de  porter  l'Euangile  ,  font  appe-  mi:,  pour  prefcher  au  nom  de  Dieu.cSclefquels 
lez  peres,qaand  ils  engendrent  en  Itfu>Chiift  ils  deuroyenc  tenir  pour  leurs  pères, s'ih  n'e- 
par  u  femence  de  vie  me  nruptiblc  ,  &  qu'ils  rtoyent  enfans  du  diable,  mais  ce  font  effron- 
nourniren:  les  âmes,  &  qu'Us  les  eleuent  luf-  tcz  &  impudens  iufques  au  bout,  qui  viendrot 
qucs  à  ce  qu'elles  fjycnt  venues  à'perfldion.    ici  prophaner  PEoUfedç  Dieu.  Pourceaux, 

a.iii. 


SECOND     SERMON 


pourceauT.que  ne  vbus  tenez-vous  en  vos  or- 
dures &  infeûions.alîn  de  ne  point  infefter  les 
autres  ?  Voila  comme  il  faut  que  fi  nous  vou- 
lons eftre  tenus  pourenfans  de  Dieu, que  FE- 
glife  foit  noftre  mère,  &  que  les  Mniifties 
ibyent  nos  pères  ;  &  tous  ceux  qui  ne  veulent 
point  fe  ranger  là,  qu'ils  s'en  aillent  (  comme 
i'ay  Jit)auecqiies  Satan  en  enfer  cerchcrlcur 
maifon  :  car  ils  n'ont  ne  lieu  ne  place  en  l'£- 
çlife  de  Dieu.  Et  au  refte',  d'autant  qu'il  y  en 
a  beaucoup  qui  font  fcmblant  d'tilre  fidèles, 
&  qui  prétendront  le  nom  de  ceux  qui  auront 
efte  reformez  parl'£uangile,&toutesfois  que 
il  n'y  aura  qu'hypocrilîe  en  eux,  voila  pour- 
quoy  faindt  Paul  appelle  Tnnothee /o»-i>rajy 
filstnlafoy.  liadiouftecela  pour  le  difcerncr 
d'auec  les  cnfans  qui  eltoyent  baftards .  Car 
le  mot  dontvfe  ici  faind  Paul, ne  fe  peut  airez 
exprimer  ,  il  emporte  comme  fils  naturel ,  vn 
droit  fils.  £t  fainftPaul  auoit-il  des  entans 
qui  ne  fuflent  pas  vrais  &  légitimes  en  la  foy? 
Ouy  bien  :  non  pas  que  la  faute  vemft  de  fon 
cofté,  mais  pource  que  beaucoup  auoycnt  tait 
femblant  de  rcceuoir  l'Euangile  par  la  bou- 
che ,  &  puis  après  qu'on  ne  voyoit  que  malice 
en  eux  &  hvpocnlîe  ,  il  les  delauoue  pour  fes 
enfans  ,&  dit  qu'ils  ne  lont  pointvrais  &  lé- 
gitimes .  Apprenons  donc  que  ce  n'eft  point 
afTç-z  que  nous  ayons  efté  enfeignez  en  l'E- 
uangile,&:  que  nous  ayons  fait  profei'sion  d'y 
adhérer  ,&  que  nous  ayons  ouy  parla  bou- 
che des  hommes  ce  que  Dieu  nous  aura  com- 
mande,mais  il  faut  que  nousdemourions  \rais 

SECOND    SERMON    SVR   LE    PREMIER 

CHAPITRE. 

3  Comme  ie  tay  prie  que  tu  demourajfcs  en  Ephc^  auad  l 'aîloye 
en  Macedone  yfay-le,afin  que  tu  dénonces  k  aucuns  quds  n'cnfcigncnt 
point  autrement'. 

4  Et  qu  ds  ne  s' amujent  point  aut  fables  i;;^  généalogies  qui  font 
fansfinjefquelles  engendrent pluflofl  quefïwns  qu  édification  de  Dieu, 
laquelle  gifl  en  foy,  (fc. 


enfans.que  nous  auifîons  bien  de  toulîours 
luiure  le  droit  chemin  fans  en  décliner  en  fj- 
çon  que  ce  loit.  Car  iî  toll  qu'on  commence  à 
le  desbaucher  ,  &  qu'on  lailîè  la  droite  li^ne, 
que  reite-il  lînon  qu'on  dcuiene  tout  baifard, 
au  lieu  qu'on  cftoit  du  nombre  des  enfans  de 
Dieu,  &  qu'il  auoit  exalté  l'homme  en  cc/l 
honneur  incftimabler  Aduifons  qu'en  la  per- 
lonnede  Timothee  fainrt  Paul  nous  a  voulu 
inlîruire,  que  iî  nous  auons  receu  l'Euangile, 
il  nous  y  faut  tellement  perfiller  que  la  bon- 
ne femence  qui  aura  efi'e  plantée  en  nous  ,  ne 
loit  abbaffardie  ne  corrompue ,  mais  qu'elle 
perfilteiufqu'àce  qu'elle  produile  fon  fruid. 
Et  quand  lera-ce  ?  Apres  que  Dieu  nous  aura 
retirez  de  ce  monde  ,  &  qu'il  nous  fera  fentir 
le  fruitf  &  la  iouillànce  de  noflre  rédemption 
en  fon  royaume  celé  fie. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  nollre  bon  Dieu  ,  en  cognoiflance  de 
nos  fautes  .  Le  priant  qu'il  luy  piaife  nous  tn 
purger,  &:  nous  en  toucher  telliniét  au  vif  que 
nous  apprenions  de  renoncer  à  tcut  ce  qui  cil 
du  mot)de,&  de  noilie  chair,&  que  nous  met- 
tions peine  de  venir  à  luy , voire  &  eu  telle  for 
te  qu'il  nous  reçoiue  côme  les  enfans.  Et  puis 
qu'il  luy  a  pieu  nous  attirer  àfovparla  co- 
gnoiflance de  là  vérité  ,  qu'il  luy  plai  fe  nous 
conduire  uifqu'en  la  fin  ,  &;  nous  tenir  la  main 
lorte.ann  que  nous  ne  foyons  iamais  delloyr- 
nez  de  iâ  faincte  vocation.  Amli  nous  dirons 
tous, Dieu  tout-puiirant,Pere  cclelfc,&c. 


'  £  L  O  N  que  Dieu  nous  fait 
Icefte  grâce  &  honneur  de 
juous  employer  à  fon  ferui- 
'ce,&  que  la  chofe  auisi  le  re 
jquiert ,  chacun  fe  doit  tant 
j  plus  eiforcer  au  labeur  au- 
quel autrtuiét  nous  femmes  par  trop  lafches. 
Et  c'eft  ce  qui  doit  inciter  ceux  qui'font  appe- 
lez à  vn  eitat  grand  &  difficile,  d'y  appliquer 
tous  leurs  iens  iS.;  cltudes.Et  d'autant  que  nous 
deuôs  cognoillre  noltre  infirmité, il  faut  aiifsi 
que  nous  aduifions  àinuoquer  Dieu, afin  qu'il 
nous  c5(Juiie,&  qu'il  fiippleeà  ce  qui  nousde- 
.faat::ant  y  a  que  nous  n'auroiii  nulic  excufe  lî 
f  IVîf  un  lit  nous  ce  regarde  à  quoy  Dieu  l'ap- 


pelle ,  &  en  quoy  aufsi  il  peut  fcruir  .\  {e<.  pro- 
chains. Voila  pourquoy  lama  Pauldu  main- 
tenant à  Timothee  qu'il  doit  péfer  pourquoy 
il  eft  en  la  ville  d'Ephefe.Car  ilfaioit  bien 
que  fainft  Paul  eufl  elle  contraint  a  le  laifler 
là  ,  pource  qu'il  ne  fe  pouuoit  pas  de  Ion  bon 
gré  palier  d'vne  fi  bonneaide,&n  bonr'^'  com- 
pagnie de  Timothee  ,  comme  il  luy  eftoitne- 
ceflaire,  &:  neantmoins  il  le  laifle  en  vne  ville. 
Pourquoy?  finô  àcaufequ'il  y  voyou  des  cho 
fes  d'importance  ,  &  qui  requeroyent  fa  prc- 
fence  .  C'cJldonc  la  raifon  dont  il  vk  main- 
tenant pour  lepicqucr  d'auantagc  àtaire  ion 
dtuûir;Tu  i^.iis  (dit-il)  que  le  t'ay  lailTé  à£- 
phcie;comnic  s'il  difoit,Ta  cop.agnie  m'eitou 

bien 


SVR  LA    I.    A 

bien  profitable,  &  quad  il  a  f.ilu  que  faye  efte 
ieparé  de  toy  ,  ce  n'a  pas  efté  qu'à  grand  re- 
gret :  d'autant  plus  donc  dois-tu  maintenant 
c'effprcerjvoyant  que  tumedefaux.Si  cen'e- 
ftoit  que  l'œuure  auquel  tu  es,deiue  vn  hom- 
me qui  ne  fuft  point  vulgaire  ,  &  qu'il  en  fuft 
meftier,  l'eufle  mieux  aimé  t'auoir  auec  moy, 
&  tu  ppurrois  i'eruir  à  Dieu.  Pourtant  aduife 
que  le  temps  ne  foit  point  là  perdu. Or  regar 
dons  maintenât  ce  que  ûnict  Paul  luy  ordon 
ne.I*  yfux(^dit-il)qite  ru  dinoces  à  aucuns  aut 
ils  n'enfeigntnt  pas  jHtrement,cy  qu'ils  ne  s  a- 
tnu-fent  foint  iUtx  fables  O"  généalogies  infi- 
nies. S.Paul  ne  commande  point  yci  à  Timo- 
tliee  qu'il  prelche, qu'il  fice  Ion  office  accou 
ftumé:car  cela  leroit  fupcrflu:  mais  en  parlât 
à  luy(come  nous  auôs  touché  ce  inatin)il  luy 
donc  authorité,  &  l'arme  à  l'encôtre  de  ceux 
qui  autrement  ne  fe  tuflent  pas  aileemct  ran 
gez  :  voire  pource  que  c'eftoyent  gens  ambi- 
tieux,&  qui  le  vouloyét  faire  valoir,  &■  mcl- 
mes  qui  auoyent  taiché  de  l'urmontet  Timo- 
thee.  Sainft  Paul  dôc  n'inifruit  pas  yci  ccluy 
auquel  il  parle, de  faire  fon  office  fimplcmét, 
mais  plufloft  il  luy  déclare  que  lî  on  mclpnle 
les  aduertifTemêsjque  cela  s'adreflera  à  Dieu. 
Et  c'eftafin  que  les  fidèles  ne  le  laiflent  point 
mener  par  ceux  qui  feulement  pour  s'au.îcer 
eulTent  trouble  tout  l'ordre  de  l'Eglife. Voi- 
la pourvnitem.Cepcdant  nous  voyons  côme 
le  diable  a  toufiours  machiné  decorrôpre  ou 
obicurcir  la  pure  doef rine  ,  que  ce  n'tif  point 
vn  mal  qui  comméced'auiourd'huy.Vray  e/f 
que  Dieu  euft  bien  peu  empcfcher  cela  ,  mais 
il  a  voulu  que  les  fidèles  fulîét  exercez  en  ce 
combat.Commeauiourd'huy  quâdnous  voy- 
ons qu'il  y  a  des  gen';  qui  ne  demandent  que 
de  peruertir  la  bonne  doctrine  ,  ou  de  femer 
quelques  zizanies, fcachons  que  Dieu  no'  cf- 
prouue,&  qu'il  veut  içauoir  quelle  fermeté  & 
confiance  il  y  a  en  nous,&;  Il  nous  auons  prins 
bonne  racine  en  la  foy.Carcôbicn  qu'il  y  ait 
gés  volages  &  des  efprits  cfceruclez  qui  met 
tent  en  auat  beaucoup  de  folies  ^  de  fpccula 
lions  friuoleSjCeux  qui  auront  eilé  bien  con- 
femiez  en  l'Eu.îgile.pcrlîflcront  toufiours&r 
ne  feront  point  desbauchcz  ,  pourtant  que  S. 
Paul  dit  qu'il  faut  qu'il  y  ait  des  herelîes  ,  & 
des  fcdes  ,  afin  que  ceux  q:  i  ont  vraye.Tifnt 
i.C«r.  ^^^"  à  Dieu, foyétefprouuez.d: qu'ils  pafTent 
il.d.19.  <^o"Tne  par  l'eilamine,  que  cela  foit  vn  droit 
examé  pour  difcerner  les  vrais  enfas  de  Dieu 
J'auec  les  hypocrites  .  Voila  ce  que  nous  a- 
uons  à  noter  de  ce  paflàge.c'eff  que  dés  le  c5 
mcncementquei'Erâcile  a  tffé  publié, le  dia 
blc  a  Uifcité  des  brouillons  qui  ont  voulu  met 
tre  en  auÂt  des  folies  nouueiles  pour  fc  faire 
valoir,  &  qui  ont  tafché  d'obfcurcir  la  pure 
fimplicité  de  PEu.Tgile  tît  qu'ils  peuuét,com 
me  en  delguifemét  &  en  fard, pour  la  pcruer- 
tir.Si  nous  voyons  donc  auiourd'huy  le  1cm- 
blable  ,  que  cela  ne  nous  foit  point  nouueau, 


T  I  M  O  T  H.  7 

puis  que  de  tout  temps  Dieu  a  voulu  que  fou 
Egliie  fuft  fuictte  à  ce  mal-ci.  Au  reite,  co- 
gnoiflons  que  Dieu   nous  aidera  ,  &  qu'i!  ne 
foulFrira  point  que  iamais  nous  foyons  tirez 
de  la  venté  pour  fuyure  les  méionges.moven 
nât  que  nous  cherchions  de  nous  tenir  en  Ion 
obeifsace.que  nous  ne  foyons  point  volages, 
pour  eftre  tranfportez  ,  &:aufsi  qu'il  n'y  aie 
point  d'orgueil  en  nous. Car  ce  font  les  deux 
caufes  pourquoy  nous  en  voyôs  beaucoup  qui 
delaifsét  la  puredocfrine  de  faluc:  c'eftq  les 
vns  font  incitez  par  leur  orgueil  de  chercher 
choies  nouueiles,  Se  Dieu  veut  auoir  des  di- 
fciples  q  foyent  hûbles.  Voulons-nous  donc 
profiter  en  fbn  efcole?  Ayons  ctfte  humilité 
de  ne  prelumer  point  de  l'çauoir  par  trop, 
mais  feulemét  d'eftre  enfc-ignez  de  luy  côme 
bon  luy  iemblera.  Et  puis  il  y  en  a  d'autres 
d'vne  légèreté  fi  grade  qu'ils  ne  fe  contétenc 
point  d'auoir  entédu  ce  ^  elf  contenu  en  VR- 
uangile,&  pourtant  ils  \  oudroyent  toufiours 
qu'on  remuaft  mefnage:  &  leur  femble  qu'ils 
ont  les  aureilles  trop  ba tues, fi  on  leur  réitère 
ce  q  eff  propre  pour  les  édifier  à  bié,  comme 
quâd  on  prelchera  de  la  fertu  de  noffre  Sei- 
gneur leûis  Chriil  &;  de  û  grâce,  il  leur  fem- 
ble que  cela  leur  eff  defîa  par  trop  cognu  ,  & 
qu'ils  y  font  tât  &  plus  accouilumez.D'autât 
donc  que  cefte  curiofitc-ci  frétille  en  beau- 
coup de  cerueaux.  Dieu  permet  qu'ils  fe  re- 
pailient  de  vét:car  ils  ne  font  pas  dignes  auf 
fi  d'eftre  nourris  de  la  bône  pafture.  Et  pour 
tât  fi  nous  voulonv  que  Dieu  nous  retiene  en 
la  pureté  de  û  parole, foyôs  hijbles  &  mode 
fies  en  premier  lieu,  &  puis  foyons  fobrcs.S: 
n'appetôs  poît  par  vaine  curiofité,de  içauoir 
pi'  qu'il  ne  no'  e/f  licite, &  aufsi, qu'il  ne  no' 
eft  expcdiét.  Au  relfe,quad  S.Paul  parle  yci, 
d'antremët  enfeigiier,celi  fe  rapporte  no  feu 
lemét  à  la  fub/lke,mais  aufsi  à  la  forme  qu'o 
ap pelle, &  au  ftyle.Ccci  feroit  vn  peu  obfcur 
s' il  u'cftoit  dtclaré  plus  à  plein.  Il  y  a  deux 
chofes  en  la  doctrine  ,  il  y  a  le  liiiet  dont  on 
paile, ou  la  matière:  côme  voila  vn  argumét 
que  no'  prenons,  C'eft  de  cognoiftre  vn  feul 
Dieu  cffre  noftre  Pere,&:  le  cognoiftre  en  no 
ftre  Seigneur  Icfus  Chrift,d'autît  que  c'eft  là 
qu'il  fe  déclare  à  no' côme  en  fon  image  vi- 
uc.  Voila  donc  vn    fuiet  pour  enfeigner  les 
fidèles. Il  y  aura  puis  après  la  façon  de  dedui 
re  les  choies.  Car  côbien  q  la  fubftace  foit  le 
prrcipal,toutesfois  ce  n'eft  pas  encore  le  tout, 
niais  il  faut  que  cela  fe  monftre  auec  vn  ftyle 
jpprepour  enfeigner,  comme  quand  nous  di- 
rons,Dieu  eft  noftre  Père, il  faut  que  d'vn  co 
fté  no'  monitrions  que  cela  ne  no'  appartiét 
pas  finon  par  fa  pure  bôté  &  gratuite:&  quïd 
no'  l'auons  ainfi  cognu  tous, que  nous  conce- 
uionsauAi  quelle  eft   fa  gloire  &  la  maiefté, 
pour  luy  rédre  l'honneur  q  luy  appartiét  :  &  Co/o.i 
que  nous  fçachions  aufsi  que  noftre  Seigneur  a.  %   dj» 
lefus  Chrift  eit  l'image  Yii)e,en  laquelle  nous  y^^' 

a.iiii. 


SECOND    SERMON" 


contcmplonsDitu  le  Pere.voired'aiitat  qu'en 
■luy  font  cachez  tous  les  thicforsde  rageirc& 
d'intcliigcnce,&:  que  là  Dieu  nous  a  delploye 
fa  bonté, la  iuihce,  la  fageiic,  &  vertu  nitinic  : 
que  quand  nous  auôs  lefus  Cluill.ià  nous  fça- 
uons  que  Dieu  fe  veut  approcher  de  nous. 
Quand  donc  les  choies  lont  déduites ,  &  que 
tounours  nous  tafchons de  rendre  PEfcriture 
familière, tellement  que  nous  cognoifTons  que 
c'eft  Dieu  qui  parle  à  nous,  voila  les  deux  cho 
fes  qui  font  contenues  en  la  dot^nne  .  Or  l'ay 
dit  que  S.Paul  en  ce  paflàgene  veut  point  que 
onprefume  d'enfeigncr  autrement  qu'il  n'a- 
uoit  l:ait,&  que  ne  taiioit  encores  pour  ce  téps 
la  Timothee.qui  cftoit  du  tout  côformc  à  kiy. 
Et  pourquoyrCar  fi  on  chage  la  (ubftacc  pour 
abolir  toute  la  vérité  de  Dieu  (comme  les  Sor 
boniUes, quand  ils  baltiirent  des  faulTes  doâri 
nés  qui  font  du  tout  répugnantes  à  la  vraye 
foy)voila  comme  le menfongereoncra  au  lieu 
de  la  venté  .  Il  y  a  vn  autre  mal  qui  ne  ftinble 
pas  eftregrad:&:de  faift,onne  le  cognoilVpas 
élire  tel  ne  prime  lace, mais  fi  eit-ce  vnc  pelle 
mortellequoy  qu'il  en  foit.c'elhafcauoir  qu.ld 
les  chofcs  font  tellement  defguilces, qu'on  ne 
fçait  qu'on  veut  due, que  les  gens  qui  font  me 
nez  d'ambition,  auront  feulement  vn  babil  & 
langage  exquis,  ils  auront  de^  fpcculatiôs  fiie 
ne  fçay  quelles, qu'on  n'y  pourra  nen  mordre. 
Voila  comme  nou'  deuons  piendre  ce  que  dit 
ici  famd  Paul .  Maintenant  nous auons  défia 
quelque  ouuerture  pour  fçauoir  quelle  cft  l'in 
tention  de  l'Apoftre  ,c'eft.'.(Vauoir  qu'on  fe 
tienc  à  la  pure  ilinplicité  de  laquelle  il  auoit 
monlhé  l'exemple.  Et  c'eft  pourquoy  en  la  fe 
condecpilheqce  nous  verrons,  il  c  jr.imande 
d'en'liiure  la  poui  traiture,&c5me  l'tffîgic  vi- 
ue  de  la  doctrine  qu'5  auoit  ouye  de  luv.  Siîiît 
Paul  ne  fe  contente  pas  que T:mothee  prcf- 
che,&qu'il  annonce  la  dodtrine,qu'il  continue 
toufiours  à  enfcigner  le  peuple  côme  il  auoit 
commencé ,  mais  il  luy  du  ,  qu'il  faut  qu'il  fe 
conforme  en  tout  &  par  tout  à  ce/îe  ima^e  vi  - 
ue,&  à  ce  patron  lequel  il  tenoit  deluv.  Nous 
cognoiftrons  mieux  par  l'vfage  &  parla  prat- 
tique  ce  que  fiinft  Paula  entendu  .  Nous  ver- 
rons quelques  fois  que  les  hérétiques  viencnt 
du  tout  renuerfer  les  fondcmés  de  noftre  fo  v. 
Comme  quoy?.  Si  l'vn  nie  que  no/lre  Seigneur 
lefus  Chrift  fjit  Dieu  éternel, d'vne  melme 
circnce  aucc  Dieu  fon  Père,  c'tfl  batailler 
inanifeftemctà  l'encontre  des  principes. .Si  on 
nous  veut  faire  à  croire  que  nous  foyons  au- 
trement fumez  que  par  la  pure  grâce  de  lefus 
C'hrift(commeles  Papilles  ticnent)  qu'ilfaut 
acquérir  Paradis  par  nos  mérites, &  que  ce  qui 
nous  dcfrut.iilc-  fout  liippleer  par  nos  fuista- 
ôions- ,  &  que  c\ft  le  moyen  de  nous  racheter 
enuers  Dieu  :  c'eJt  barailler  manifellement 
contre  ce  qne  Dieu  nous  môftre,&-  c'eft  com- 
me anéantir  la  fub fiance  de  l'Euangile.II  faut 
donc  (jiic  nous  foyons  ici  iur  nos  gardes. Qm: 


fi  on  nous  apporte  autre  dotlrine  que  celle 
qui  efl  contenue  en  la  Loy  &en  l'Euangile, 
que  nousladetcllions  comme  vne  peflc  mor- 
telle.Car  celuy  qui  nous  oftc  la  pure  veritc,& 
qui  la  corrompt, nous  oile  la  vie  de  nos  âmes, 
aies  faufles  dottiiiies  font  autant  de  poifons 
&  venins  qui  fjnt  pour  nous  meurtrir.  Que 
nous  facions  donc  bon  guet  à  ce  qucnou^  ne 
foyons  point  leduits  ne  trompez  par  des  hé- 
rétiques qui  viendront  pour  nous  diuertir  de 
lapuieté  delà  loy  .  vo.la  pour  vn  item.  Mais 
il  y  en  aura  qui  viendront  comme  par  deflous 
terre,  qui  du  premier  coup  ne  renuerferont 
point  la  fubftance,  plulhiil  ils  feront  fcmblât 
de  vouloir  adhérer  à  nous ,  mais  tant  y  a  que 
par  fu&til  moy é  &  par  voyes  obliques  ils  nous 
deftuurnent  delafimplicité  en  laquelle  Dieu 
veut  que  nous  foyons  nourris. Ils  vicr.dront  là 
comme  ferpens  entii  tillans  leur  qucue,ils  au- 
ront beaucoup  de  laçons  de  taiie  oui  feront 
plaifantes  pourattrairc  cS;  pour  pailtie  les  au- 
reilles:  mais  quoy  qu'il  en  f.î:t,ils  parlent  cô- 
me vn  langage  baftaid.  Q^e  fi  on  les  efcoute, 
&fion  s'accorde  auec  eux  ,  voila  toi'tce  que 
nous  auons  apprin.  auparanant,  qui  ellelFacé. 
Et  ainfi  en  ell-il  aàuenu  en  la  Papauré  :  car  là 
aufsi  tout  le  monde  a  changé  de  llyle  ,  telle- 
ment que l'Efciiture  faindle  ell  coii-.me  vn  lan 
gageeilrargc  na  appelé  Théologie,  non 
pas  comme  d  irequi  foit  comune  aux  en- 
fans  de  Dieu, .liais  comme  vne  fcicnce  qui  ell  à 
part  pour  peudegens.  Car  qu'ell-ceque  la 
vraye  Théologie  r  Ce  que  noftie  Seigreur  a 
voulu  eilve  ccinniiin  à  te  us  fes  en  Fans,  àgrans 
&àpctis,corame  il  e/ldit  notamment  au  Pro- 
phète liaie:  &  noilve  Seigneur  lefus  le  cofer- jr,  ,^ 
meau''i.de  fainct  lean,  quepour  eftre  fiddes,  j, 
&  poureilre  du  troupeau  deiTglif-  il  faut 
que  nous  foyons  eiif  ign<z  de  Dicu.Amfidôc 
quand  le  monde  s'ell  addoniié  à  vn  tel  lanca- 
ge, qu'on  a  laifle  l'Efcriture  fiinde,&  qu'il  y  a 
eu  vn  ftylecoutnouueauiS;e'liange,  tcutae- 
fté  confus  &  brouillé:ie  di  encorcs  que  la  do- 
ftrine  ne  fufl  pas  dircfteinent  contraire. Et  de 
fai£t,il  y  a  entre  les  théologiens  Papi/liques 
d'aucunes  chofes  qui  ne  font  pasdu  tout  fàuf- 
fes.le  di  d'aucunes  :car  ;1  v  a  des  corruptions  fi 
vilaines  &  enoim.es,que  les  cheueux  en  doiucc 
drefTer  en  la  teile.Mais  il  y  a  quelques  articles 
qui  ne  font  poinrpleincinenr  faux  d'eux-mcf- 
mes:  mais  fi  ell-ce  que  lain.5t  Paul  les  côdam- 
nc  ici.  Et  pourquoy?  car  il  femblc  que  ce  foit 
comme  des  forciers  qui  ayét  vn  flyle  incognu, 
&  qui  veulent  faire  des  con  urations  ie  ne  fçay 
quelles,oubienquece  fjntdes  gueux  del'ho- 
Itierc  qui  ont  leur  fiyle  à  part:  ils  fe  debatent 
comme  chiens  &  chats  en  vn  langaç^e  contus, 
tellement  qu'ils  ne  fçauent  eux-mefmes  qu'ils 
difent.  Nous  voyons  par  cela  que  c'efl  d'cltre 
autrement  enfcignez.c'ellafç.iuoir  fi  on  pcr- 
uertit  la  doétrine  de  Dieu ,  fen-.ant  des  erreurs 
&  ttôpcricbuianifeflcs,ou  biéfi  ondeftouvnc, 

£  on 


s  VR 

fi  on  de{guire,&  qu'on  farde  la  pure  iîmplici- 
té  de  rEuangile,  qiie  nous  ne  {cachions  ii  on 
parle  de  Dieu, ou  dcquoy.  Voila  commcjious 
ierons  autrement  enieigncz  ,&d\neiaçon 
nouueIle&  eftrange.Or  iainft  Paul  ne  veut 
point  que  cela  (c  race  ,  &  pourtant  il  dénon- 
ce àtousfideleid'cuiter  telles  fpeciUations, 
&denonceà  ceux  qui  le  veulent  taire  valoir 
par  vne  vaine  gloire,  comme  ks  efprits  tre- 
tillans  y  font  incitez,  qu'il  leur  femblera  que 
on  ne  les  prifera  point  alFez, s'ils  prefchcc  pu 
rement  l'Euangileài  faut  baftir  &;  forger  des 
Spéculations  nouuelles,  &  viendront  mettre 
des  fintreluches  en  auant,  il  n'y  aura  que  va- 
nité &menfonge,&  toutestûis  on  leur  applau 
dit:&  voyat  que  cela  eft  bien  reccu,  ils  en  pre 
nent  plus  grande  hardiclle  de  s'auacer.Sainift 
Paul  doncJenonce  à  telles  gens  qu'ils  fe  dé- 
portent, &  qu'on  ne  les  efcoute  point,  &  que 
ils  ne  vienent  point  ici  faire  des  meflinges,tel 
lement  qu'on  ne  fçache  plu^  qu?l  eft  le  viay 
ftyle  &  langage  du  faincflEfprit. Voila  en  foin 
me  tout  ce  qui  nouv  cft  ici  ir.oi-ftré.  Mainte- 
nant pource  que  iev  gens  qui  iont  tranfpor- 
tez  d'ambition,  ne  l'e  laiffcnt  pas  aifetroét  ga 
gner  ,& qu'il  va  vne  arrogance  telle  qu'ils 
font  obilinez  a  maintenir  leur  cas, /ai  net  Paul 
veut  que  Timothce  \  fe  d'authorité  iiiagiftra- 
le, (qu'on  appelle.)ic  veux(d!t-il)que  tu  de- 
noces,  c'eft  àdire.qiie  tu  détendes. Par  cela  il 
n"enttiid  pas  oue  Timotheevfc  d'vne  maiftri 
fe  pour  dominer  lanv  ra.fon.  Cai(c5me  nous 
auons  dit  ce  matin)  il  faut  que  toute  princi- 
pauté l'oit  referuee  à  Dieu  icui,&que  les  liom 
mes  n'entreprenent  point  outre  leur  mef  ire, 
mais  que  pour  maintenir  la  caulc  de  Dieu, 
nous  paillons  :  toutestois  non  point  comme 
en  crainte  &  en  doute,  mais  fçac!i,''s  bien  que 
celuy  qui  nous  a  commis  à  cela,  eft  foiiueiain 
par  deuils  tous,  que  nous  luy  facions  l'hon- 
neur qui  luy  appartiét.  Q^and  vn  homme  fe- 
ra eniioyé  par  fon  prince  en  quelque  ambaf- 
fàde, combien  qu'il  ne  vueille  point  parler  en 
fon  nom  priué  trop  rudement  ,  fi  eft-ce  qu'il 
faut  qu'il  s'acquitte  de  fi  charge  ,  &  lelon  la 
commifsion  qui  luy  eft  donnée  qu'il  parle,  & 
qu'il  parle  en  forte  qu'on  voye  qu'il  ne  fe 
feint  po;nt,pource  qu'il  cognoift  quelle  per- 
fonne  il  fouftient:mefmes  s'il  y  a  quelque  1er 
gcnt  qui  foit  enuoyé  parle  iuge,il  parlera  en 
authorité.Or  qu.ïd  Dieu  nous  enuoye,&  nous 
met  ia  parole  en  la  bouclie,faut-il  que  nous  y 
allion>auec  vne  fimpiicité  fî  grande  que  les 
hommes  en  mefprifent  D!eu,&  qu'il,  fe  moc- 
quentde  fi  parole  que  nous  portons?  Nenni, 
nenni.  Pourtant  {àmft  Paul  arme  iciTimo- 
thee  ,  afin  qu'il  ait  comme  vn  front  d'airain 
contre  tous  orgueilleux  qui  voudront  faire 
desbraues  :  qu'il  leur  dénonce  ,&  qu'il  leur 
l*r<r.i.  mop.ftre  que  Dieu  eft  par  delTiis  eux  :  comme 
lO.iT"  aufsiilen  eft  traittéauprophetcleremic.non 
ii,&!9'  feulement  quand  Dieu  luy  dit  qu'il  le  ccniH- 


LA     I.     A     TIMOTH. 


tue  par  dcflus  tous  les  royaumes  &  les  princi- 
pautez.mais  quand  il  luy  dit,  Il  faut  ^que  tu 
ayes  vn  front  d'airam:  car  on  bataillera  con- 
tre toy,mais  '1  faut  que  tu  fumiontes  :  Si  puis 
il  dit,  Arçue  les  montagnes,  &rcpren  les  co- 
ftaux  :  comme  auf  i  iainft  Paul  dit,  qu'il  faut  ^-^-o''' 
quenousabbaïf  ions  toute  hautefle  qui  s'ele  '°-4-î. 
ue  contre  noftre  Seigneur  Iel"u';Chrift,&que  ^  ^* 
nous  tenions  tous  fens humains  captits.que 
l'Euangile  foit  comme  vne  briàc,&  s'il  y  en  a 
qui  veulent  faire  Am  chenaux  efchappez,  que 
nous  leur  monftrions  qu'il  y  a  leglaiue  de 
Dieu  qui  emporte  fon  exécution  quât  iScquat, 
&  que  ceux  qui  fe  voudront  rebecquer  con- 
tre nous,  ne  demeureront  pas  impunis.  Nous 
voyons  ce  que  Ciintl  Paul  a  entendu  en  ce  paf 
fage.  Il  tant  donc  que  tous  ceux  qui  ont  l'of- 
fice de  pafteur  en  l'£glife,cognoiffènt  qni  les 
a  ordonnez  ence  lieu-là,c'eft  afçauoir  Dieu, 
&  qu'ils  parlent  en  authorité&maiftrife,  voi 
re  n'vfurpas  rien  à  leurs  perfonnesimais  quâd. 
il  eft  qucftîon  de  maintenir  la  vérité  de  Dieu, 
que  nous  pourfuyuions,  voire  quelques  mena 
ces  qu'il  y  ait  :  &  que  lés  hommes  regimbent 
tant  qu'ils  voudront,  fi  faut-il  toutesfois  que 
les  vrais  miniftres  de  lefus  Chrift  tienêt  bon, 
&  qu'Us  monftrent  que  leur  maiftrc  a  préémi- 
nence par  deffus  toute:  créatures,  &  qu'ils  ab 
baiflent  toute  hautefle,  qui  voudra  toufiours 
excéder  là  raefure, comme  nous  auons  dit. En 
fomme,  nous  voyons  que  ce  n'eft  point  aller 
d'enfeigner  ceux  qui  de  leur  bon  gré  fe  ren- 
dront dociles,  &  qui  receuront  volontiers  ce 
qu'on  leur  dit  lirais  il  tant  auisi  rembarrer 
tous  ceux  qui  s'oppofent  à  Dieu  ,  &  qui  veu- 
lent empefcher  que  la  vérité  r.'.iit  fon  cours, 
Tom  ceux  qui  veulent  defguifer  la  vrayc 
religion, qui  veulent  peruertir  l'ordre  de  l'É- 
glifc,  il  i.iuî  que  nous  monilnons  les  dents  à 
telles  gens,fv"  ccninié  que  nou:  n'ayons  point 
de  glaiuemateritl,  ne  dé  puifla.nce  r.iond.v- 
nc,&  qu'eux  en  foyent  ar.mez,  que  toiuesfois 
nous  ne  laifsions  point  peur  cela  d'exécuter 
fidèlement  ncftre  charge.monftrant  (comme 
i'ay  dit}que  la  parole  de  Dieu  n'eft-  point  feu 
lement  par  deilus  les  hommes  mortels,  lujis 
qu'il  faut  que  les  A.'ges  de  paradis  l'adorent. 
Or  fiiiift  Paul  voiilart  exprimer  ce  ou'il  a- 
uoit  dit  en  bnet  (Cenfcigiierautrtmtnttila.d- 
ioufte,(TB'c7;  ne  s'amiffc  pniiit  à  f.ihlcs  &  à  o-e 
nealogies^qui  n'ont  point  Je  /r»(dit-il)  lefijneli 
les  mettent  plufloji  en  nK.int  contentons  ù-  de 
hitts  cjite  ï édification  de  Dieu  tjni  couÇifie  ta 
fiy-  Nous  voyons  ici  plus  clairement  ce  que 
i'ay  défia  cxpofé,  c'elè  afçauoir,  que  fainft 
Paul  n'a  pas  feulement  condamné  en  ce  lieu 
les  dotirines  qui  font  du  tout  faufles ,  &  qui 
contienent  quelques  blafphemes  :  mais  aufsi 
tous  tes  menus  fatras, toutes  ces  fpeculaticns 
inutiles  qui  fôt  pour  deltou:  ner  les  fidèles  de 
la  pure  fimpiicité  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.  Ce  que  fâin£t  Paul  a  compris  fous  ca 

b.i. 


l.Ti'w.3 
1<S. 


33-3I- 
31-33- 


10 

mot  de  Fables:  car  il  n'entcd point  feulcmét 
des  menfonges  qui  font  controuuez,&  qu'on 
peut  redarguerà  Pœil.mais  auti  toutes  cho 
les  mutiles.  Et  le  mot  dont  ilvfe,  empo:ce 
celi.Qu^eft-ce  dôc  que  S.  Paul  reiettc  en  ce 
pafTigeîToutes  choies  curieufes, toutes  fpc- 
culations  qui  ne  font  que  pour  tourmenter 
les  efpnts,&.'  leurdonner  quelque  trouble, ou 
bien  où  il  n'y  a  que  quelque  b^lle  monltre  & 
parade,&  qui  ne  font  point  vtiies  pour  le  fa 
lut  de  ceux  qui  efcoutent.  Or  ceci  doit  bien 
cftre  retenu. Car  ci  après  nous  verrôs.au  plai 
fir  de  Dieu.pourquoy  S.  Paul  en  parle  aiiifî, 
c'eil  d'autant  que  la  parole  de  Dieu  doit  e- 
fVre  vtile,  comme  il  en  parle.  Dieu  donc  ne 
nous  a  point  donné  feulement  fa  parole  afin 
de  nous  paiftre  fans  aucun  profit  :  comme  le 
mode  voudrait  qu'on  luy  chatouillaft  les  au- 
reilles,&  qu'il  y  eufl  ie  ne  fçay  quoy  de  plai 
fant  en  iio^Tant  feuleraét.Dieu  ne  veu:  point 
s'esbatre  ici  aucc  nous, mais  il  veut  que  nous 
ayons  vne  inflrudion  bonne, c'eft  à  dire  que 
no'  receuions  profit  de  fi  parole.Tous  ceux 
donc  qui  n'appliquée  point  la  parole  de  Dieu 
à  bon  profit  &  vlage  ,  lont  contempttu.s  & 
fauflaues  de  la  bonne  dottrine.Bncl,!a  paro 
le  de  Dieu  cft-  comme  propbanee  fi  ce  n'eft 
qu'on  l'applique  à  celle  vtilité  que  nous  en 
rc(-cuion^  bônc  inlhuclion  pouvnoftre  falut. 
Et  amfî  tout  ce  qui  fera  mis  en  auat  fans  au- 
cun fruift,  &  qui  ne  feruira  de  rien  au  falut 
de  ceux  aufqucls  on  parle, cela  ell  tenu  côme 
fable, ce  font  des  côtes  qu'on  nous  fera  pour 
plaifanter,afin  de  nous  faire  palTer  le  temps, 
voire  des  contes  de  la  cicongne,  comme  on 
dit.  Car  Dieu  ne  veut  point  ainlî  le  iouer  a- 
ucc  nous,&  que  nous  le  tenios  comme  vn  ba- 
fteleur:&  toutesfois  voila  l'honneur  que  luy 
font  tous  ceux  oui  cerclient  des  vaines  curio 
lirez  en  l'Efcriturc  fainfte. Comme  au f,i  cela 
ell  reprociie  aux  luih  par  Ezechitl  :  car  ilv 
venoycnt  .i  luy  ,  fa:fans  fcmblant  de  vouloir 
rcccuoir  h  dodrine.ils  le  mettoyent  là  a  les 
pieds  pour  dire  ,  Nous  venons  ici  pour  cJhe 
cafeigncz  au  nom  de  Dieu:  c'elbit  merueil- 
Ics  (le  voir  leur  deuotion:  mais  Dieu  leur  dit 
qu'ils  venoyét  l.i  comme  li  on  alloit  ouir  vn 
mencftrier  qui  louera  de  la  harpe  ou  de  la 
flctite,qui  pailtra  feulement  les  aureilles  d'v- 
xie  chanfiu  plaifantc.O.-  quSd  on  y  vient  ain 
fi.c'eft  le  moquer  pleuitmcnt  de  Dicu,&pio 
phancrfa  parole. Pourtât  apprcuô.  que  Dieu 
ne  veut  point  qu'il  y  ait  des  tépies  pour  gau- 
dir  à  potir  rire,co;nme  il  on  ioiioit  ici  des  far 
cci  :  mais  il  faut  qu'il  y  ait  vne  maiefté  en  fa 
parolcde  laquelle  nous  foyousclmcus&  tou 
chez:  S:  puis  qu'il  y  au  inlhiidion  profitable 
À  falut,&  que  nou;  foyons  nourris  de  ccfte  pa 
ftiire  fpirituelle,  tellement  que  nous  l'entions 
que  ce  n'eft  point  en  vainque  Dieu  a  parle  à 
nous  SainÛ  Paulayantainli  parlé  de  ccsdo- 
ftrmcs  inutiles  en gcneral,en  met  vne  efpece. 


SECOND    SERMON 


afçauoixde^r»*4/i)^/«.  Non  pas  que  tout  ce 
qu'on  pourroit  diredes  généalogies, foit  à  re- 
ietter,mais  il  faut  regarder  le  vice  qui  regnoit 
du  temps  de  S. Paul. Car  les  Iuifs(comme  il  en  SoKitf.j. 
traittc  en  d'autres  partages, &  luy-mefme  s'ex  4.  ^5?-  s, 
pofe  1.1  plus  à  plein)auoy et  tellement  en  recô  0'tit.t. 
mandation  les  chofes  qui  n'eftovent  qu'accef  ]  4. 
foirfv.que  le  principal  eftoit  laiffé  par  euXj 
c'tftalçauoir  la  crainte  de  Dieu.l'efperar.ce 
de  falut  qu'il  auoit  donnée  aux  Pères  :  celle 
alliance  lacree  laquelle  ils  deuoycnt  conioin 
dreauecla  grâce  de  nollre  Seigneur  lefus 
Chrill ,  la  bénédiction  qui  leur  eltoit  promis 
le,&  puis  la  fainctetéde  vie,&  la  règle  de  bien 
prier  Dieu.&d'auoir  fon  refuge  à  luy. Tou- 
tes ces  chofes-U  qui  contenoyent  le  princi- 
palde  la dodrinceftoyent  miles  en  ouldi,  &- 
cependant  il  n'tftoit  queltionquede  ftauoir 
laconter  des  généalogies  fans  profit  aucun, & 
fçauoir  raconter  toutes  les  lignées, comme  fi 
leur  falut  eufb  coniîfté  en  ce  qui  ne  feiuoit  de 
rien.  Voila  pourquoy  fiind  Paul  condamne 
les  généalogies.  Quand  Dieu  nous  a  déclaré 
comme  après  Adam  ,  &nK'fmcs  après  laniort 
d'Abel  la  religion  a  cité  comme  efleune,  ?< 
puis  qu'elle  aellé  remifecommeau  delîus  iuf 
ques  à  Noe  ,  &  que  de  là  encores  tout  a  cité 
corrompu  comme  par  vn  déluge, lînon  en  vne 
mailon  feule:&  encores,  que  le  père  d'Ab.a- 
hams'elloitaddoné  àluperftitions  mefchan- 
tes,&  que  tout  eftoit  plein  d'idolatri es  :cesge 
nealogies-lànouspeuuent  eftre  profitables. 
Apres, quand  depuis  Abraham  iufques  à  Da- 
uid,  nous  voyôs  vn  récit  continuel  des  douze 
lignées, lequel  nous mcine  à  la  lignée  deluda,  r  .„  .g 
de  laqlle  il  auoit  efté  parlé  par  la  bouche  de  „  ^  '    o' 
lacob  en  cfprit  de  prophétie,  ce  ne  font  pas    '^ 
chofes  à  melpriler.Et  pourquoy?Car  là  nous 
contemplons  comme  Dieu  a  gouuerné  fon  E- 
glifede  tout  temps,  &comb;en  qu'elle  tufl 
eu  petit  nombre,que  toutesfoiv  elle  luy  a  efté 
precieufe,&qu'vne  petite  poignée  de  gens  a 
efte  maintenue  par  luy  d'vne  façon  admira- 
ble. Nous  voyôs  comme  les  hommes  ont  cité 
toulîours  enclins  àmal, qu'ils  ont  eftécorrora 
puï,&  que  Dieu  ne  les  a  peu  retenir  en  ion  o- 
beillance.Et  au  rcfte.nous  Voyons  comme  les 
promefles  ont  efté  accomplies  depuis  q  Dieu 
a  choifi  Abraham, nous  voyôs  les  ihofcs  eftre 
aduenues  comme  il  les  auoit  prédites  :  nous 
voyons  comme  le  royaume  a  clic  en  la  fin  e- 
llabli  en  h  lignée  de  luda,  que  le  fceptre  a  c- 

fté  drelTé  comme   lacob   l'.auoit   prononcé  ,>  _  ,„ 
1  nr,-         t./,:, 4P. 

long  temps  auparauant:  mais  comme  1  iilprit  „ 

de  Dieu  luy  auoit  mis  en  la  bouche. Apres  Da 

uid,  nous  voyons  comme  le  royaume  a  efté 

abbatu,&  que  Dieu  l'a  rcdrclTe  en  la  perfonne 

de  noftre  Seigneur  lefiis  Chrift.  Voila  donc 

des  chofes  qui  nous  font  bien  vtilcs  ,voue 

quand  on  les  appliquera  à  bonne  lin  &  v  fage: 

mais  (comme  i'ay  dit)  les  luifs  s'amuioyent 

limplynent  aux  acccfibires,  &  cependant  ils 

laifToycnt 


s  VR    L  A   I.    A 

l.ii/Toycnt  la  fiibftance  ,  comme  auf-i  il  en  elt 
aJucmi  en  la  Papauté.  £n  qiioy  eit-ce  que  les 
eiirans  de  Dieu  le  doiueiit  exercer,  &  appli- 
quer toute  leur  eliude  ?  C'cft  de  cognoiihe 
comme  Dieu  nous  eft  Père  &  Sauueur  ,anifi 
qu'il  s'eftmonltrcen  noilre  Seigneur  lelus 
Chrift.come  auAi  /âir.ct  Paul  le  dit  en  ce  paf- 
rage,que  la  vraye  edrfication  confîfle  en  foy. 
Or  la  foy  n'cfl-  pas  l'cule  ,  mais  elle  emporte 
aul-i  que  quand  Dieu  nou'  aura  pardonné  nos 
pccliez,&  nous  aura  iuftifiez  par  la  pure  bon- 
té,qu'il  nous  aura,di-!e,  refoimez  à  fon  ima- 
ge,que  nous  le  pouuons  inuoquer  en  toute  1;- 
berté,&  en  telle  confiance,  que  nous  ne  dou- 
tions point  de  l'appcller  noitre  Père,  S:  nous 
tenir  pour  fes  entans  au  nom  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chriftrque  nous  pouuos  nous  glo 
rifier  à  rencontre  de  la  mort  &  de  tous  nos 
ennemis  fpirituels:  que  nou',  cheminions  com 
me  en  la  garde  de  noilre  Dieu,  necraignans 
rien  aun'.ilieude  tous  dangers  ,  puis  qu'ainfî 
eft  qu'il  nous  conduit  &  gouuerne  .  Voila  en 
quoy  les  fidèles  Te  doiucnt  exercer  tout  le 
temps  de  leur  vie.Toutesfois  qu'ell-ce  qu'on 
fait  en  b.  Papauté  ?  Ceux  qui  voudront  ci>re 
Théologien' ,  cmployent  vne  grande  partie 
de  leur  vieàdilputer  des  choies  dont  ils  ne 
peuuent  auoir  nulle  relolution .  Car  quand 
ils  auront  bien  combatu  ,  lî  eft-ce  qu'ils  ne 
trouueront  vne  feule  Tyllabe  en  l'Efcriture 
faiuifte  pour  les  refondre  en  leurs  queiciôs.Et 
comment.'Qu'on  difpuceainfideschofes  que 
Dieu  nous  a  voulu  cacher  ?  £t  encores  qu'el- 
les fuflcnt  bonnes ,  Dieu  ne  nous  a-il  point 
ct5itituc  nos  limites  qu'il  ne  faut  point  palier? 
Voire,  &  nous  a  donné  en  l'Efcnture  ce  qui 
eft  bon  &  expédient  de  fçauoir.Car  il  cft  cer 
tain  qu'il  ne  nous  a  point  apprins  feulement 
vn  a.b.c, quand  il  nous  a  donné  fa  parole, mais 
il  nous  a  enfeignéà  pleine  bouche  ;  comme 
t)«».3o.  Moyfe  le  difoit  au  peuple  d'ifrael.  £t  fainft 
^4-  Paul  s'en  glorifie  plus  à  plein, di/hnt  que  l'E- 

i.Cor.i.  uangilc  contient  vne  fageflè  parfaite.  Or  les 
tT'  ?•       doûeurs  fcholaftiques, qu'on  appelle,  le  fort 
beaucoup  tourmentez  àdifputerdequeiiiôs 
dont  on  ne  trouucra  nul  tefmoignage  en  l'E- 
fcriture fâirûc.  Par  cela  donc  nous  voyons 
que  ce  n'ell  point  fans  caufe  que  fainû  Paul 
a  ici  côdamné  toutes  chofes  qui  ne  nous  peu- 
uent édifier, comme  font  toutes  cescuriofîtez 
friuolesdefqiiellei' nousne  reccuons  aucune 
fermeté  de  f;iy,  mais  pluftoil  c'eft  pour  nous 
faire  voltiger  en  l'air,  quand  nous  su;  ons  les 
aureillev  barues  de  ce  qui  a  efté  côtrcuué  par 
les  hommes. Que  fera-ce?  aurons  nous  quel- 
que tondemcnt  pour  nous  appuyer  ?  Nenni: 
mais  plulloftnous  ferons  esbianitz&  agitez 
en  lorte  que  nous  ne  tiendrons  plus  ne  che- 
min ne  fentier  :  nous  ne  fçaurôs  qucc'eilde 
falut,de  toy.ne  d'efperanceibrief  Dieu  nous 
fera  eftrangc  &  incognu,  tellement  que  nous 
n'entendrons  point,  ne  gens  letcrez,  ne  gens 


T  I M  O  T  H.  II 

idiots.  Apprenons  pourtant  fur  cela  de  con- 
gnoifcre  &;  difccrncr  quelle  cd  lafa'^on  de 
bien  enfcigner  que  Dieu  approuue,  c'efl  fuy- 
uant  ce  que  fainct  Paul  declaireici ,  que  nous 
foyons  édifiez  en  Dieu,voire  par  foy.  En  pre 
mier  lieu  faird  Pauldit,Q_u2i'  nous  faut  élire 
édifiez  cnD;cu.  Ce  mot  d edifer  ,  tlï  aflcE 
commun  en  l'Efcnture  fainéle  ,  mais  iln'til 
pas  entendu  de  tous.  Pour  le  bien  entendre, 
notons  que  c'cft  vne  iîmilitude  qui  nous  eft 
donnée,  d'autant  qu'il  faut  que  nous  foyons 
temples  de  Dieu,  pcurce  qu'il  veut  habiter  en 
nous.  Ceux  cuiprofitent  en  bien,  c'eft  à  dire 
en  la  foy,  en  crainte  de  Dieu,  en  fainileté  de 
vie,  il  eft  dit  qu'ils  font  édifiez  ,  c'eft  à  dire 
que  Dieu  les  b.ift.t  pour  eftre  fes  temples ,  & 
qu'il  veut  habiter  en  cux,&  auAi  que  nous  fa- 
cions  tous  enfcmblevn  temple  de  Dieu  :  car  , 
chacun  de  nous  en  eft  comme  vne    pierre. 
Q_uad  donc  nous  feiôs  bien  enfeignez  chacû 
en  Ion  endroit  ,&  qu'aufsi  nous  ferons  tous 
vnis  enfenible  en  droite  fraternité:  voila  com 
meno'  ierons  édifiez  en  Dieu.  Ileft  viay  que 
les  hommes  pourront  aucunesfois  eftre  édi- 
fiez en  orgueil:comme  nous  voyons  que  ceux 
qui  le'plaifcnt  ,en  leurs  vaines  tantafies,<3i  qui 
eftendent  Itnrs  ailes  ,  &  s'enflent  comme  des 
crapaux  ,  penfent  eftre  bien  édifiez.  Las  que 
c'eft  vn  poure  édifice  que  celuy-la  !   Mais 
fainél  Paul  notamment  dit  ici,  qu'il  nous  fauc 
eftre  édifiez  félon  Dieu.  En  quoy  ilmonftrc 
quequandnous  ferons  enfeignez  à  feiuir.i 
Dieu,  i  l'adorer  purement  ,àmettre  noftre 
fiance  en  luy,quc  c'eft  l'édification  qu'il  nous 
faut  fuiure:  Si  toute  doftrinequi  tend  à  cefte 
fin-l.i,&y  eft  confermee,eft bonne  &ûinôe, 
&  faut  qu'on  l.i  reçoiue  :  mais  tout  ce  qui  va 
aiirebours  ,.  il  faut  qu'on  le  reiette  iàns  plus' 
lorgucdifpute.il  n'eft point  qucftiondcs'en 
enquérir  d'ai'antage.Et  pourquoy  eft-ce  que 
on  reiet:e  ceci  t<  cela  ?    Pource  qu'il  ne  foc 
pointa  l'édification  de  Dieu.  Car  Diîu  ne 
nous  veut  point  ainufer  comme  peiis  enfans  à 
des  hochets, ou  à  des  badinages ,  comme  des. 
ioueursde  farce  ,  mais  ih  eut  que  nous  rece— 
uions  vn  telprofit  d;  fa  Parole  ,  qu'elle  foit 
glorifiée  en  ce  que  nous  cognoiftrons  que  là 
gift  noftre  vie  &  noftre  filut.  Ce  n'eft  point 
fans  caufc  que  fainft  Paul  oppofe  à  cefte  édi- 
fication ici  vne  infinité  de  troubles:  car  il  dit. 
Généalogies  qui  n'ont  point  Jf/n.Nous  au5s 
delîadiftingué  entre  ce  qui  fe  peut  dire  des 
Genealogiesjc'eftà  due  lignées  ,auec  profit 
&inltruélion,&auec  ce  qui  eft  fnuole.Ouad 
donc  ùind  Paul  parle  des  Généalogies  qui 
n'ont  point  de  fin,  il  entend  oue  fi  on  s'arre- 
fte  là,&  qu'on  en  face  le  principal ,  que  c'eft 
chercher  l'ombre, &  laifler  le  corps.  Au  reile,. 
cependant  il  monftre  que  fi  les  hommes  laf- 
chent  vne  fois  la  bride  à  leurs  curiofitez,que 
ils  ne  feront  que  chercher  des  queftions  Si 
des  fpeculations  vaines  &  friaoles.  Y  a-il  an. 

b.ij. 


ïi 


SECOND 


k  Terpi'it  humain  quand  il  fe  laifle  gouuerner 
félon  (a  vanité?  quels  difcours  faifons-neus? 
Quand  vn  homme  refue  en  foy ,  &  qu'il  ba- 
ftu  des  chafteaux  en  Efpagne,comme  on  dit, 
ie  vous  prie,  ou  eft-ce  que  fou  efprit  ie  pour 
meine,c'eft  ad;re,  l'on  ceiueau  ?  ne  le  faic-il 
point  courir  &:  trotter  çà&r  là?Ainlî  en  eii-il 
toute-^fois  &  quantcs  que  les  hommes  veulent 
eftre  Tages  à  leur  l:an£a!'.e,qu'ils  cnti  et  en  des 
aby  Imes  lî  grans  que  c'eft  horreur. Bricf,Pe- 
fpnt  hunum  eftcôme  vn  gouffre  iuiatiable  : 
&  quand  nous  entrons  là,nous  loiiimcs  telle- 
ment entortillez  qu'il  n'y  a  nulle  iflue.  Et 
pourtant  voulons-n JUS  auoir  vue  bonne  ûib- 
tilitéJque  nous  loyons  enl'eiirntz  de  Dieu,  & 
ne  nous  addonnons  point  à  nos  iniaginatiôs, 
c'eij  à  dire  ne  nous  addonnons  point  à  ce  que 
nous  pouuons  controuucr  félon  nrftre  fens 
charnel.  Car  Dieu  cognoift  bien  ce  qui  nous 
eit  bon  S:propre,&il  nous  l'a  dcclarértcnons 
nousdouclà.  Or  faindt  Paul  ne  fe  contente 
pas  de  condamner  les  fables  dont  il  a  parlé, 
comme  vaines  &■  inutiles,item  comme  des  la- 
byrinthes dont  on  ne  peut  fortirimais  il  mou 
ftre  qu'elles  emportent  encores  vn  autre  mal, 
c'eft  à  dire  combats, difputes,  &  contentions. 
Au  contraire,  il  faut  que  nous  foyons  paifî- 
bles  pour  tlhe  vrais  enfans  de  Dieu.  Et  ainfî 
donc  ce  qui  efmouucra  des  troubles  entre  les 
hommes, &  qui  n^fl:  point  pour  édifier,  non 
feulement  on  le  doit  reiettcr  comme  inutile, 
mais  on  le  doit  dctefler  comme  pefle.p.Tifon 
&  venin.Et  pourquoyrPource  qu'il  n'y  a  rien 
pire,  ne  qui  emporte  plus  grand  dommage  à 
la  toy  que  d'entrer  en  telles  contentions.  Il 
eftvray  que  le  mot  de  diffuta  ne  fonnepas 
toufiours  mal.  Il  eft  dit  que  faintl  Paul  a  dif- 
puté,  mais  cela  1  cfté  modéré  par  raifon  :  & 
puis  il  y  a  efhé  contraint  pour  donner  refo- 
lution  des  cho  ies  qui  elloycnt  en  doute  &  en 
dii:hcu]té:inais  û  tort  qu'on  entre  en  conten- 
tion &;  débat, voila  Vile  peile  morte  lie:  il  faut 
que  tout  cela  foit  reietté  loin  de  nous,li  nous 
voulons  eftre  tenus  &  repiitez  pour  enfans  de 
Dieu. Et  ainfî  maintenât  nous  voyons  en  foni 


SERMON 

me  qae  fainô  Paul  a.  voulu  ici  rembarrer 
tous  ceux  qui  par  ambition  defguifent  la  pu- 
re (implicite  de  l'Euangile.Et  comment?  par 
leurs  folles  queftions  &  inutiles. Et  puis  U  m5 
ftre  que  quand  vne  fois  ils  fe  i'ont  fouruoyez 
du  droit  chemin, &  qu'ils  ne  tienent  point  ce 
fte'iîmplicite  que  nous  deuôs  tenir,  qu'ils  def 
guifent  la  parole  de  Dieu  ,  qu'ils  excédent 
leurs  limites,  &  font  caufe  que  les  enfans  de 
Dieu  font  diuifez,  au  lieu  qu'il  y  deuoit  auoir 
vnvray  lien  d'i-nité,  d'autant  que  li  parole 
de  Dieu  apporte  aucc  foy  le  mellage  de  paix: 
au  lieu  de  cela,  qu'il  y  ait  des  troubles  &  con 
tentions  qui  ne  pcuuét  linon  deflruire  au  lieu 
d'édifier .  Ainfi,  nous  voyons  que  fairft  Paul 
non  fans  caufe  pour  remédier  aux  vices  qui 
regnoyent  de  fon  temps,  i?;  lefquels  cftoyent 
pour  corrompre  la  (implicite  de  l'Euaneile.a 
monlhé  queDieu  nous  a  donné  la  perfctbion 
de  toute  fagefle  en  l'Elcriture  faincle  .  Et 
pourtant, qu'il  ne  faut  pas  que  les  hommes  & 
les  créatures  s'attentent  de  s'aliéner  de  là, 
mais  qu'dj  fe  contécé:  de  ce  ij  y  eft  contenu. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  n^)ftre  bon  Dieu  en  cognoillancede 
nos  tautcs.le  priât  qu'il  luy  plaife  de  nous  re 
tirer  de  la  vaine  confiace  de  noftre  iens  char 
nel,  nuis  que  nous  le  feruions  tellement  que 
nous  foyons  pleinement  addonnez  à  luy.  Ec 
puis  qu'il  luy  a  pieu  nous  faire  celle  grâce 
que  nous  ayons  fa  Parole  pournnftre  règle, 
que  nous  i'oufnions  d'tftre  conduits  par  iccl 
le,&:  y  eftre  enieignez  de  plus  en  plus,&  que 
ce  loit  Là  toufiours  noftre  but,  d'eif  rc  pleine- 
ment édifiez  en  luy:  &:  que  cependant  luy  Li~ 
cions  ofFrade  &  (acrifice  &  de  nos  âmes  &  de 
nos  corps,  &  que  nous  luy  foyons  tellement 
dédiez  &  côfacrez, qu'il  habite  en  nous, com- 
me en  fes  vrais  temples,  &  qu'il  y  règne  ,  & 
que  fon  image  y  reluife.afin  qu'vne  fois  nous 
puiAions  eitre  participans  de  fa  gloire  im- 
mortelle, laquelle  U  nous  a  appreftee.  Q^ie 
non  feulement  il  nous  face  ceftc  giace  ,  mais 
aufsi  à  tous  peuples  &rations  de  la  terre, &:c. 


TROISIEME      SERMON     SVR     LE 

PREMIER     CHAPITRE. 

5  Or  la  fin  du  commandement  ejl  charité  de  cœur  pur,  (fdel)  on  ne 
confcienccyc;^  de  foj  non  feinte. 

6  Dcfjuclles  cho  fes  aucuns  s'cjlans  dcfuoye^ifefont  conuertis  en 
parole  "vaine, 

7  Voulans  eîlre  docleurs  de  la  Loy,  fi entcndans point  les  chofes 
quils  difentiUe  dcfjuelks  ils  afferment. 


SVR    LA    I.     A    TIMOTH. 


Î.ZI. 


i.U.vi 
4-7- 


E  n'ell  pas  d'aiiiourd'huy 
que  le  diable  corroiiipr-nc 
TEicriture  laincte  prend 
^  cefïe  couuerture  ,  qu'il  ne 
veut  point  amener  doctri- 
ne raauuaife  ,  ne  mefines 
contredire  en  façon  que  ce 
foit  à  la  vérité  de  Dieu.  Et  pourtant  nous  eft 
il  commandé  de  bien  examiner  toute  doâri- 
ne.Car  le  diable  ne  peut  tellement  coulourer 
Tes  menfonges  ^c  tromperies, que  quand  nous 
ferons  vcnu>  à  la  touche  de  l'Êfcriture  iain- 
de,  là  noui  ne  cognoilsioiis  ce  qui  cft  à  rece- 
uoir,&  que  nous  ne  le  puifsions  difcernerd^a 
ucc  les  doftiines  baftardes,  &  ce  qui  aura  elle 
forgé  au  ccrucau  des  hommes.  Tant  y  a  que 
de  prime  face  le  diable  l'ecouurede  ce  man- 
teau, comme  il  a  talu  que  les  Apollres  ayent 
bataillé  contre  ceux  qui  mettoyent  en  auant 
la  Loy  deMoyfe,  voire  comme  lî  l'Euangile 
cuil  elle  contraire  à  ce  que  Moyfe  auoit  en- 
fcigné.Il  tft  vray  qu'ils  ne  le  difoyent  pas  ou 
uertcraent:car  ceux  dont  parle  ici  faindPaul, 
n'eftoyent  pas  des  Imfs  obftinez  ,  qui  eulîènt 
en  deteflation  le  nom  de  noftrc  Seigneur  le- 
fus  Chrifl,  &  qui  condamnaiTent  la  foy  Chre 
ftienneimais  c'tftoyent  gens  doubles,  qui  fai 
foyét  bien  proteftation  de  vouloir  tenir  l'E- 
uangile,mais  tant  y  a  qu'ils  faifoyent  vn  mef 
linge  pour  tout  dcl'guilcr  Si  corrompre  .  Ce- 
pendant comme  iamtt  Paulin  parle,  ils  vou- 
loyent  eftre  ,vcus  &  reputez  dofteuis  de  la 
Loy. Et  ainiî  quand  nous  verrons  qu'il  y  en  a 
qui  abuient  ainii  de  l'Efciiture  fdxr.He,  que 
nous  ne  foyons  point  troublez  outre  mefure 
d'vn  tel  fcandale.  Car  nous  ne  deiions  point 
trouuer  nouueau  ce  qui  a  efté  de  tout  temps, 
&  que  les  fidèles  ont  prattiqué. Ceux  qui  e- 
ftoyentdu  tcpsdc  lainCtPaul.fe  icnt-ilsdcf- 
bauchez  voyans  les  troubles  que  pour  lors  le 
diable  auoit  fufcitezr  Celle  couucrtuie  a-elle 
erté  caufe  qu'ils  ayent  quitté  l'Eu-lgilerNen- 
ni:ils  ont  perlîfté  conltamment.Ainlî  nous  en 
faut-il  faire:car  noftre  foy  ne  pi.'ut  &  ne  doit 
cllre  fans  combat. Au  refte,  notons  que  le  dia 
ble  ne  pourra  iamais  k-dùirc  ceux  qui  font  at- 
tentihàbien  dilcerner.  Et  voila  pourquoy 
fainrt  lean  nous  exhorte  d'clprouuer  les  e- 
fprits:  mais  cela  Ce  feroit  en  vain,  fi  Dieu  ne 
nous  donnoit  vn  certain  moyen  S;  infallible. 
Il  ne  tient  donc  qu'ànoftre  nonchalance  que 
nous  ne  demeurons  Irermes  en  la  pure  vérité, 
quand  nous  vovojis  beaucoup  de  fedes  &  d'o 
pinions  diuerfes.  Car  Dieu  ne  nous  a  point 
fruftrez,  en  nouï  dilant  que  (I  nous  exami- 
nons les  efpri:s,  nous  cognoiftrons  ceux  qui 
qui  fout  cnuoyez,!?-:  ceux  quicourent  d'eux- 
îiieûnesj&deleur  tantaiîc.  Reuenons  main- 
tenant à  ce  que  dit  fainft  Paul. Il  monftrc  quel 
le  cil  la  fin  de  la  Loy  :  &;  c'clt  vn  aduertilfe- 
inent  qui  nous  pourra  fcriiir  en  toutes  les  dif 
iiculîez  que  nous  aurons.  Car  lî  les  hommes 
) 


nous  veulent  barbouiller  de  leur  inucntions, 
nous  pourrons  voir  àquov  Dieu  a  prétendu, 
&  quel  ell  Ion  confeil  &la  volonté.  En  cela 
nous  ne  pourrons  faillir.  Et  c'c/t  le  remède 
que  donne  maintenant  famct  Paul  contre  tou 
tes  ces  curioiîtcz  dont  il  a  fait  mention  cL 
defTus. Car  ceux  dont  il  parle, auoyenc  beau-, 
coup  de  queftions  triuoles  ,  &  qui  ne  pou- 
uoyent  nullement  ediiier.-quand  on  -.'y  eftoit 
bien  tourmenté.il  n'y  auoit  nul  fruirt,&  mef- 
me  nulle  ccrtitude.Mais  encores  qu'on  n'ea 
peull  élire  refolu  ,  c'eftoit  vue  cognoifîânce 
vaine  ,  &  qui  n'apportoit  nulle  ii:lliuCUon. 
SainÊt  Paul  pour  corriger  vn  tel  v;ce  ,  dit. 
Voici  la  fin  de  la  Loy.  Comme  s'il  dcclaroit 
que  Dieu  n'a  pointdonné  fa  Loy  pourmet- 
tre  là  vne  dottrine  incertaine  ,  &  qu'vn  cha- 
cun vague  ,  que  nous  facions  de  longs  cir- 
cuits,&:  que  quad  nous  aurons  enquis  tout'ce 
que  nous  deuons  recueillir  de  là.nous  ne  fça- 
chions  par  quel  bout  il  nous  faudra  commen 
cer:Saincl:  Paul  monflreque  Dieu  en  publiât 
(à  Loy,a  regardé  à  vne  fin&àvnbut  certain, 
auquel  aufuil  nous  faut  tafcher  :  &  quand 
nous  en  ferons  amfi.nous  aurons  la  vraye  a- 
me  de  la  Loy,  ce  ne  fera  pas  vne  lettre  mor- 
tercomme  il  en  parle  en  vn  autre  lieu:  &  non  i-Cor.j.' 
ii  (ment  cela,  mais  ayans  la  pure  cogrîoif-  ^•. 
f.lnce  de  ce  qui  elt  là  contenu,  nous  ferons  vi 
uifiez.  Pourtant,  notons  bien  ,  toutes  fois  Se 
quante;  que  les  hommes  fe  voudront  auan- 
cer,appoitans  leurs  fpeculations,&:  nous  vou 
dront  cnuelopper  de  folles  curiofitez,  que 
voici  le  fouuerain  remède  que  nous  donne  le 
faind  Efprit.c'eft  afçauoir  que  nous  cognoil' 
fions  l'intention  de  Dieu:  quand  nollre  veue 
fera  làdreflee,nous  ne  pourrôs  pas  élire  de- 
llournez  ne  çà  ne  là  :  mais  quand  l'intention 
de  Dieu  notis  fera  incognue&  cachée,  nous 
aurons  beau  fueilleter  &■  lire,-no'  ferons  touf 
iours  elgarez:nous  pourrons  bienmefmesa-. 
uoir  de  la  fcicnce  beaucoup, mais  ce  fera  fans 
profit. Et  pourquoy?  Il  nous  faut  tenir  lèche 
min.  Ce  chemin-ci  fe  pourra-il  cognoiilrc 
ou  difcernerlînon  par  l'intention  de  Dieu» 
&  par  fa  volonté  ?  voila  pour  vn  item.  Re- 
gaidos  d'au.ïtage,qu.at  au  propos  que  S.Paul 
traitte  ici:ce  q  nous  auôs  en  fomme  à  recueil 
lir  de  la  Loy  :  c'efl,  dit-i/,  Charité  d'yn  cœur 
pur,  d'-viie  bonne  cou fciet! ce,  c>' <f  T"»/i'Ji  «o» 
feinte. Côme  il  efl  dit  en  l'autre  paflàge,q  l'E  i.Tw,' 
fcriture  faîfte  eft  vtile  pour  enfeigner&pour  Jig^  ' 
redarguer,  &  pour  admoneller ,  &  pour  ren- 
dre vn  homme  de  Dieu  parfait, ainli  qu'il  fut 
allégué  Dimanche  prochain. Ainfi  en  ce  palîi 
ge  il  niôllre  que  Dieu  nous  a  voulu  côfermer 
en  bicn.qiuad  il  no'  a  dôné  fa  Loy.  Car  ce  n'a 
pas  efte  pour  nous  chatouiller  les  aureilles,  & 
pournous  repiaflredechofesfriuoles,mais  il 
y  a  vnedoélrine  qui  nous  efl  profitable. Et  en 
quoy  c5fifte-elle?Il  eft  vray  q  S.Paul  met  ici 
le  mot  de  ChâxJté  en  premier  lieu.mais  cepé- 


H 


SECOND     SERMON 


dant  il  monAre  que  la  charité  vient  d'vne 
autre  iource  plus  haute  ,  c'eftafjauoir  de  la 
toy,  laquelle  emporte  auec  foy  vue  confcien 
ce  bonne, &  vn  ca-ur  par:&:  puis  Li  charité  en 
eiï  le  fruit  ,  par  lequel  nous  cognoiffons  ce 
qui  eft  caché.Qu^ert-ce  dôc  que  Dieu  a  vou 
lu  apprendre  à  ies  fidèles,  en  leur  donnant  fa 
Loy;Il  les  a  voulu  fonder  en  la  foy.  Voila  le 
premier  &:  le  principal  que  nous  auons  ici  à 
noter. En  quoy  aufsi  (ainft  Paul  nous  moitre 
que  la  Lov  n'a  pas  efte  feulement  dônee, afin 
que  les  hommes  cognulTcnt  quel  eft  leurde- 
iioir,  qu'ils  vefcuflcnt  iuftement,  conuerfans 
auec  leurs  prochains  fans  fraude, lins  malice, 
fans  violence  aucune, mais  que  la  foy  ei\  aufsi 
bien  contenue  là:Sc  c'eft  vn  article  bien  nota- 
ble.Car  nous  en  voyons  la  plufpart  qui  n'e- 
Ifiment  delà  Loy  de  Moyfe,  linon  que  c'eif 
vne  règle  de  bien  viure  ,  &  quelànoitre  Sei- 
gneur nous  nioltre  fa  volonté,afin  qii'vn  cha- 
cun s'adonne  à  fe  maintenir  iaindement ,  & 
fans  aucune  reprehenfîô.Il  eif  ban  vray  que 
c'en  eft  vne  partie  ,  mais  ce  n'eftpas  le  tout, 
&  mefmes  c'eit:  vn  accel]oire,&  non  point  le 
principal,  comme  nous  le  voyons  ici,  que  S. 
PaiJ  met  comme  la  fontaine  de  la  vrayc  do- 
t^rine,  que  nous  foyons  inftruits  en  la  roy.Et 
qu'emporte  ce  mot, linô  que  nous  cognoiliios 
quel  cil  noftre  Dieu,&  le  fentans  eftre  noftre 
Pere,quenous-nous  repolies  du  tout  en  luy, 
que  nous  l'inuoquions  haidiment,ne  doutans 
point  que  nous  ne  foyons  exaucez, &  qu'il  ne 
nousvueille  fecouriraubefoin  ,  &que  nous 
attendions  le  falirt  éternel  qu'il  nous  a  pro- 
mis? Voila  donc  quelle  eft  la  foy  dont  fainil 
Paul  parle,  c'eft afçauoir  que  nou";  fjyés  af- 
feurez  quel  eft  noftre  Dieu,  que  nous  l'ado- 
rions,&  qu'vn  chacun  ne  baftilTe  point  en  ion 
ccrueau  des  idoles  ,  que  nous  n''ayons  point 
vn  Dieu  forgé  à  l'aiicture,mais  que  nous  fça- 
chions  que  le  Dieu  viuant  s'eft  reuelé  à  nous, 
&  qu'il  nous  à  adoptez  par  fa  bonté  gratuite. 
Et  pourquoy?Afin  que  nous  puifsions  recou- 
rir pleinement  à  luy,  &  que  nous  ne  doutions 
point  qu'eltans  (es  enfans ,  nous  ferons  aufsi 
héritiers  de  fonRoyaurae.Or  par  quel  moyé 
pouuons-nous  obtenirvn  tel  priuilege  ,  que 
nous  ayons  cefte  hardieflc  d'appcller  Dieu 
noftre  Père,  Se  que  nous  venions  à  luy  fami- 
lièrement, comme  iî  nous  en  eftions  dignes? 
C'eft  pourcc  que  nos  péchez  nous  font  par- 
dônez  au  nô  de  noftre  Seigneur  le  fis  Chrift, 
&  que  quand  nous  foinmes  membres  du  Fils 
vniquc.que  nou;  pouuons  conclure  que  Dieu 
nous  tient  Se  aduoue  pour  fes  er.fans.  Ainfi 
donc  il  faut  que  noftre  foy  regaide  à  noftre 
Seigneur  lefiib  Chrift,&  que  noftre  veue  s'ad 
drellè  là  du  tout,  ou  autrement  nous  ne  pour- 
rons approcher  de  Dieu  Ion  Père  :  car  nous 
en  fomme:.  par  trop  loin  quant  à  nous.  Tout 
cela,  comme  l'ay  dit ,  eft  contenu  en  la  Loy. 
Car  Dieu  n'a  point  feulement  déclaré  par 


Moyfe  qu'on  viue  droitemét,  qu'on  s'abftie- 
ne  de  dcfrobber  &de  piller, qu'on  ne  commet 
te  point  faux  tefmoignage, qu'on  ne  côuoite 
point  lebien  d'autruy, qu'vn  chacun  s'acquit 
te  fidèlement  de  fon  deuoir  en  l'eftat  où  il 
fera  appelé:mais  il  a  paffe  plus  outre,  c'eft  de 
monftrer  comme  on  le  doit  fcruir:&  non  fcu- 
lemét  cela, mais  ila  déclaré  qu'il  eftoit  le  Pc 
re&  fauueur  de  fon  peuple, aueclequcl  il  a  fait 
fon  alliance  gratuite, &  a  monftré  qu'il  tcnoit 
la  lignée  d'Abrahâ  pour  fon  heritage:&  puis 
celle  promefTea  elle  ratifiée  parles  facrihces 
qui  n'eftoyent  finô  que  figures  du  Médiateur 
qui  nous  a  efté  reuelé. Nous  voyons  donc  que 
la  Loy  n'enfeigne  pas  feulement  comme 
nousdeuons  conuerfer  auec  nos  prochains, 
ni  aufsi  cornmenous  deuôs  feruir  Dieu:  mais 
If  principal  eft  que  nous  foyons  allèurez  de 
no.ftre  falut.Et  comnient?D'aut,u  qu'il  plaift 
à  Dieu  de  nous  rcccuoir  en  ù  grâce  par  le 
moyen  de  fon  Fils  vn^que, d'autant  que  nous 
fouîmes  lauez  &  nettoyez  de  nos  ordtues, 
d'aut.lt  qu'il  nous  a  acquittez  de  nos  dettes, 
defqiielles  nous  eftios  obligez  à  la  mort  eter 
ntllc;bricf,d'autant  q  nous  fommes  luftifiez, 
non  pas  felô  nos  mérites, mais  par  la  pure  bon 
té  de  noftre  Dieu.  Voila  ce  que  nous  auons  à 
noter.  Or  pource  que  pluficurs  font  protefta 
tion  de  bouche  d'ellre  fideles,lefquels  neant- 
moins  ne  tienent  nen  de  Dieu,ne  de  fa  Pa- 
role,S. Paul  notîment  met  ici,la  foy  non  f<.rn 
te.W  eft  vray  que  lî  qiielqu'vn  ha  la  foy , il  fau 
dra  neceflai renient  qu'il  ait  vne  confcience 
pure,qu'il  ait  vn  cœm  droit;m.iis  ici  S.  Pai  1  3 
regardé  l'impudéce  des  hommes  qui  fort  ef- 
frontez  pour  métir,(S>;  fur  tout  quâd  il  eft  que 
ftion  de  fe  couurir  du  nô  de  Dieu.Cômc  nous 
voyons  qu'il  y  a  vne  audace  diabolique  ,  que 
nous  feros  difficulté  d'emprunter  le  nô  d'vn 
hôme,(&  aufsi  cela  nous  feroit  reproché  com 
me  vne  faufleté  vileine  )  mais  d'emprunter  le 
nom  de  Dieu  à  taux  titre, nous  n'en  feros  r.ul 
fcrupule.  Pourtant  S.  Paul  déclare  ici  quelle 
doit  eftrelafoy.quâdil  dit  quelle  ne  foit  poîc 
feinte.Or  par  ce  mot  il  n'ya  nulle  doute  qu'il 
ne  nous  vueille  admonefter  que  la  foy  ha  Ion 
regard  à  Dieu,&  qu'il  ne  faut  point  que  nous 
penfions  ici  vfer  de  fiijion:  que  tout  cel.»  foit 
mis  bas.Qjiand  nous  aurons  affaire  aux  hom- 
mes,il  nous  femblera  que  nous  les  pourros  c5 
tenter  de  belles  paroles,  &  de  quelque  bonne 
mine:  mats  S.Paul  môftre  qu'il  fiut  que  tous 
ces  voiles-la  foyent  oftcz,  quSd  il  eft  queftiô 
de  la  foy. Et  pouiquoy?  Car  Dieu  nous  appel 
le  à  foy,&  veut  que  nous  ne  tendiôs  qu'.i  luy, 
&  que  nous  ayons  là  tous  nos  fens  fichez:  car 
nous  f  çauons  que  nulle  ficlion  ne  fera  receue 
deuant  Iuy,d'autât  qu'il  ne  fe  gouuerne  point 
.î  la  façon  &  à  la  guifc des  hommes.  Ainfi  en 
fomme, S. Paul  nous  avouluaducrtir  en  cepaf 
fagcque  la  foy  ii'eft  pas  vne  opinion  volage, 
quand  nous  aurons  quelque  intelligence  nue 

delà 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH. 


If 


de  la  parole  de  Dieu:quece  ne  fera  point  vn 
bénéfice  de  fçauoir  bien  caqueter  ,  cjiie  ce  ne 
fera  pas  vne  iubtilité  quivoltige  feulemêt  au 
cerueau.Q£py  doncrC'ell  vne  cognoiflance 
viue  qui  a  fa  racine  au  cœur.  Et  pourquoyr 
Car  ici  Dieu  fc  prefente  à  nous&;  il  faut  que 
BOUS  venions  droit  à  luy. Quand  nous  auons 
vne  telle  partie,  il  ne  faut  pi"  que  nous  viîons 
de  ftintifc;car  cela  ne  nous  profitera  de  rien. 
Et  de  tait.aui'si  cela  n'a  point  de  lieu  enucrs 
DicUjComme  nous  auons  monftré.  Nous  vo- 
yons ce  que  laind  Paul  a  ici  entendu ,  Si.  que 
nous  auons  i  noter  de  ces  paroles:c'el}afça- 
uoir  q  pour  bien  profiter  en  la  Loy  de  Moy 
fe.il  tant  que  nous  commécions  par  ce  bout; 
c'eft  d'auoir  foy  en  Dieu:  &  de  ià  aulsi  nous 
voyons  que  la  Loy  nous  eft  bien  vtile.  Et  ne 
faut  pas  que  nous  facions  comme  des  vilains 
pourceaux,  qui  auront  touiîours  ce  mot  en  la 
bouche,ou  plultoft  au  groin:Ho,tout  eft  con 
fomnié,  il  ne  faut  plus  qu'on  s'amule  au  vieil 
Teftaraer.t.  No'  en  v  cirons  de  ceux  qui  font 
ici  mcflcz  parmi  nous, voirecomme  des  pour 
ceaux  pareil  les  biebis  &  agneaux  de  nollre 
Seigneur  Icfus  Chriil,  lesquels  defgorgeront 
tels  blafpliemcs.  Or  à  l'oppofite  ùinft  Paul 
prononce  ici,que  quand  nous  lirons  attenti- 
uement  la  Loy  de  Dicu.que  no'  chercherons 
en  prudence  d'efprit  ce  qui  elt  là  contenu, 
qu'elle  nous  (emira  d'vne  bonne  infhuclion 
pour  nous  amener  à  la  foyiconime  auf  i  nous 
le  voyons  par  experiéce.  Car  d'où  eft-ce  que 
nortre  Seigneur  lefus  Chrift  &  fes  Apofties 
ont  pui  fé  leur  dotèrine  finon  de  Moy  fe  :  Et 
quand  on  aura  bien  elpluche  tout,  on  trouue 
ra  queTEuâgilé  n'eft  qu'vne  lîmple  expofi- 
tion  de  ce  que  Moyfe  auoit  anoncéaupara- 
uant.  Vray  eft  qu'il  y  a  eu  de  l'obfcurite  aux 
ombres  Se  figuresde  la  Loyq  Dieu  n'a  point 
doné  vne  grâce  telle  aux  l'ei  es  anciens  com 
nie  à  nous:  mais  cependat  fi  cil-ce  que  la  fub 
fllcc  de  l'Eulgiie  cil  tirée  de  i  i  que  nous  a- 
uons  vne  foy  co:nmuneauec  ceux  qui  ont  ve 
feu  dcuant  la  venue  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift. Profitons  donc  auiourd'huy  en  la  Loy 
de  Dieu  ,  S:  ne  perdons  point  vn  tel  threfor: 
&  ne  foutiiôs  point  que  ci  s  vilains  &  infâmes 
nous  endeitournent,&  nous  en  defpouillent. 
.l'ay  défia  déclaré  cornent  c'eil  qu'il  no' faut 
apprcdre  d'eftrc  fidèles  par  la  Loy.c'eft  que 
no'cognoifsions celle  ailiâce  que  Dieu  a  lai 
te  auec  les  Jiômes  par  la  pure  bonté.  Vray  ell 
qu'il  a  choili  la  lignée  d'Abrahâ  en  premier 
litu:inais  fi  eô-ce  cepcdant.d'aut.ïtque  lagra 
ce  qu'il  ne  taifoit  alors  qu'à  vn  feiil  peuple, 
doit  eftre  efpadue  par  tout  le  mode,  que  no' 
femmes  en  ceftordre  auiourd'huy,&  par  con 
fequent  héritiers  &  participas  de  la  promeiîè 
de  faJut,qacfté  donnée  iadis  à  Abraham. Car 
qu.id  nous  içauôs  que  Dieu  no'  a  eleus  à  foy, 
&qu'il  no'  veut  retenir  pour  fes  domeltiques, 
nous  pouuons  bien  le  réclamer  comme  nollre 


rere,S<:  auoirtout  noftre  refuge  àluy:i!  n'efl 
plus  queftiondcdouter  de  fon  amour  enuers 
nous, &  fi  Dieu  nous  aime.  Voila  ou  £;ifttoii- 
te  noftre  telicité:  rien  ne  nous  défaut  quand 
nous  ferons  alfeurez  de  la  grâce  de  Dieu.  £r 
ainfi  c'elt  le  moyen  d'apprendre  la  foy  en  la 
doftrinede  Moyfe, alçauoir  decognoiftre  □ 
ce  n'cftoit  pas  en  vain  que  Dieuauoit  ordon- 
né tant  de  lacrifices  &:  de  lauem£ns,&  chofes 
feniblables.Cognoiflons  aulsi  que  Dieu  ii~a- 
uoit  point  baille  à  fon  peuple  des  amufe-fois, 
comme  on  dit,  que  ce  n'eltoit  point  ieudc 
petis  enfans.que  les  facrifices  foknnels  q  fc 
faifoyét:carily  auoit  le  patron  fpitituel  que 
Moyfe  auoit  veu  en  la  montagne. Et  ainfi  no 
tons  que  noftre  Seigneur  a  voulu  retenir  foa 
peuple  à  foy  par  le  nioyé  de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift  :  &  c'eft  là, comme  i'ay  du,  qu'il 
faut  que  noftre  foy  s'arrefte,&  qu'elle  foi  t  du 
tout  appuyee.Car  fi  no' n'auons  lefus  Chnft 
deuantnos  yeux,  il  eft  impofsiblequeno' co 
gnoiAions  rien  de  Dieu.  Et  voila  pourquoy 
il  eft  dit  qu'il  s'eft  reprefenté  à  nous  en  l'on 
image  viue. Nous  ne  pouuons  pas  contempler 
Dieu  en  ù  maieftc  nue.  Il  faut  donc  que  no' 
venions  droit  à  lefus  Chnft.Et  c'eft  luy  aufsi 
par  lequel  Dieu  nous  eft  propice  ,  c'eft  là  ou 
nous  auons  le  lauement  de  nos  ordures  &  pol 
lutions,  c'eft  là  ou  nous  auons  l'acquit  de  tou 
tes  nos  offenfes ,  c'eft  là  où  nous  auons  l'ap- 
pointcmenÇ  pour  no'  reconcilier  auec  Dieu, 
c'eft  là  ou  nous  trouuos  la  pleine  iuftice  pour 
lauer  toutes  nos  iniquitez, c'eft  là  où  no'  trou 
uonslavie  pour  nous  retirer  de  la  feruitude 
de  mort,  c'eft  là  où  no'  trouuôs  la  vertu  pour 
fubuenir  à  toutes  nos  foiblelTes.  Et  ainlî  d'au 
tât  qu'en  lefus  Chrift  toute  plénitude  de  bien 
nou>  eft  apportée,  il  faut  que  nous  cognoif- 
lîon;  que  Dieu  l'a  voidu  donner  au  peuple  aa 
cien, comme  le  but  de  leur  foy:&  auiourd'huy 
par  plus  forte  raifon  il  nous  faut  tendre  là, 
puis  que  leius  Chrift  nous  eftmanifefté  plus 
amplement  qu'il  n'auoic  pas  efté  aux  Pères. 
Cependant,  notons  que  touk'  ceux  qui  ne  veu 
lent  comprendre  de  la  Loy  ,  finon  queUe  elt 
la  façon  de  bien  viure, ceux-là  met  têt  la  char 
rue  dcuant  les  bœuf,(comme  on  dit)£tpour 
quoy  rc.ir  ils  lailTent  le  principal,  c'eft  al'ça- 
uoir  la  foy,de  laquelle  no' auons  parlé.  Vou 
lons-nous  donc  bien  profiter  en  la  Loy  de 
Dieu?  Regardons  les  promelTes  gratuites  qui 
font  là  contenues,  où  Dieu  nous  veut  certi- 
fier de  fon  amour,  où  il  nous  veut  appeller  â 
foy, afin  que  nous  ayons  la  hardiefle  de  l'in- 
uoquer  comme  noftre  Père,  que  nous  fovons 
du  tout  appuyez  fur  fa  bonté.que  no' ne  clou- 
tions point  de  fon  amour,  pour  eftre  certi- 
fiez de  l'héritage  du  falut  éternel.  Voilais 
vray  contétement:&  fans  cela  nous  ne  ferons 
que  b.aftir  en  l'air  ,  que  nous  ne  ferons  poinc 
tondez:  &  l'édifice  que  nous  aurons  fait, s'en 
ira  en  ruinç.Et  fn  ççla  yçit-oncomme  tout  a 
_  j  b.iiii. 


TROISIEME    SERMON 


16 

etié  peruertien  la  Papauté.  Car  combien  que 
ce  mot  de  Dieu  trotte  aflcz  en  la  bouche  de 
chacun, qu'on  parle  de  la  toy.ncantmonis  on 
ne  fçait  que  c'eft  :  car  les  piomefles  de  Dieu 
font  non  feulemët  oblcures,niais  comme  cn- 
fcuelies  du  tout. On  parlera  de  la  çrace,niais 
c'eft  pour  retenir  les  hommes  en  vne  vaine 
prefomption,  voire  diabolique,  de  leurs  au- 
ures  méritoires,  tellemét  qu'on  ne  fçait  que 
c'eftd'inuoquer  Dieuen  certitude.  Par  cela 
no'  voyons  que  la  condition  des  Papilles  eft 
plus  que  mifeiable  .  Or  d'autant  plus  nous 
tauc-ildifcerner  ce  qui  eft  ici  dit  par  fainft 
Paul,  qu^nous  monflre  l'ordre  que  nous  de- 
uons  fuiure,afin  que  le  tout  nous  férue  d'vne 
bonne  inftrudion  &propre  pour  noftre  filut. 
Si  faut-il  que  nous  retenions  auf  i  ce  que  no' 
auons  touché  de  la  l:'oy  non  Feinte, &•  que  no' 
apprenions  non  feulement  d'auoir  vne  belle 
confefsion  au  bout  de  la  langue, mai  s  d'auoir 
vne  racine  viue,  que  nous  ayons  cognu  Dieu 
à  bon  efcient,  non  p.is  pour  fçauoir  babiller, 
comme  beaucoup  font, voire  la  plufpart:mais 
que  la  bouche  ne  parle  (inon  de  l'abondance 
du  cœur,  &  que  nous  puif  ions  dire  aiiec  Da- 
uid,  (Pfcaume  iis'.b.io.)  l'ay  crtu  ,  &  pour- 
tant l'ay  parlé  :  que  ce  qui  fera  f  uy  de  nous, 
n'excède  point  la  mefure  de  noftre  foy.Amfi 
donc,  gard,)ns-nous  bien  de  nou';  applaudir 
pour  plaire  aux  hommes,  &:  pour  auoir  quel- 
que belle  apparence  quant  à  eux,fçachas  que 
no'  n'efchapperôs  point  de  la  main  de  Dieu, 
quand  nous  aurons  fauflement  abufé  de  fon 
Nom.  Or  eft-il  ainfi  que  tous  ceux  qui  font 
femblant  d'auoir  la  foy,  &  ne  l'ont  pas  telle 
que  famft  Paul  déclare  ici,  font  comme  fauf- 
faircs  deuant  Dieu,  pource  qu'ils  ontvfurpé 
fon  Nom  mal  &  iniuftement.Voila  pourquoy 
nous  deuons  tant  plus  prifer  cemotdontS. 
Paul  vfe,  Qjfil  ne  faut  point  que  noftre  foy 
foit  feinte.  Mais  il  a  déclaré  quant  &  quant 
commet  c'eiî  que  la  foy  fe  monftrera  vrayc: 
c'eftafçauoir  quand  elle  fera  coniointe  aucc 
vn  cœur  pur,&vne  confcience  bonne  adroi- 
te.Il  faut  donc  en  premier  lieu  qu'vn  homme 
monitre  qu'il  a  vne  rondeur  &  intégrité  fans 
fiintife,s'il  veut  dôner  ap^p bation  de  fa  foy. 
Car  ce  n'eft  point  /ans  caule  que  S.Paul  en 
parle  ainfi.  Et  nous  voyons  comme  S.Pierre 
•n  parle  aufsi  au  quinzième  chap.des  Aftes, 
yerfét  fi,  difant  que  Dieu  a  purifié  les  cœurs 
des  homme',  par  foy. Si  la  foy  n'eftoit  quV- 
ne  cognoilïance  volage,  ou  quelque  imagina 
tion  que  c'elt  de  Dieu  :  ou  bien  quelque  do- 
ftrine  certaine  &  refolue,  mais  telle  qu'elle 
n'aura  point  fô  fiege  au  ca:ur,S. Pierre  ne  di 
roit  pas  q  les  cœurs  font  purifiez  par  la  foy. 
Car  quâd  :e  feray  bien  entédu,&  grad  clerc, 
&q  ie  fçauray  babiller  des  myfteres  deDieu, 
ce  n'cft  pas  à  dire  que  i'aye  1116  cœur  pur.Or 
cft-il  ainiî  que  quiconques  a  la  foy, il  a  celle 
pureté  comme  fainct  Pierre  le  tcftifie.  Con- 


cluons donc  que  la  foy  iie  vague  point  au  cer 
ueau.que  ce  n'efl  point  \  ne  cognoiflànce  fini 
pie  &  nue  ,  mais  que  c'eft  vue  affeuiance  que 
nous  auons  de  la  bonté  de  noflre  Dieu.  £t 
c'eli  fuyu.rt  ce  que  fainft  Paul  nous  dit  en  l'au 
trcpaflàge:car  il  compaiel'Euangileà  vnmi  i-Cor.; 
roir  où  fc  monftre  la  face  de  Dieu  en  la  per-  ^^^ 
fonne  de  noftre  Seigneur  Icfi^  Chiift:&:  il  tft 
dit  qu'en  contemplât  cefte  face-la,  nousfom 
mes  transfigurez  de  gloire  en  gloire,  pour  e- 
flre  fcmblables  &  conformes  .încllre  Dieu. 
Et  fain£l  laques  aufsi  quand  il  monllre  com- 
me no'  deuons  profiter  en  la  parole  de  Dieu,  ''<'?•!•  i  J 
dit  qu'il  ne  faut  point  que  nous  ayons  com-  Cr  ^4- 
me  vn  miroir,ain<î  qu'vn  homme  s'ira  regar- 
der ,  &  puis  ayant  le  dos  tourné  il  ne  fe  voit 
plus  :  il  ne  faut  point  (dit  fainft  laques)  que 
nous  ayons  vne  telle  cognoiflànce  qui  s'efua 
nouiflc  ,  qui  n'ait  point  de  conftance  en  foy, 
ne  de  fcimcté.  Car  voila, en  vn  miroir  il  y  au 
ra  bien  vne  figure, mais  cela  n'eil  rien  qu'vne 
rcprcfcntaticn.Qj.icy  dorc?Ayons  ce  miroir 
dont  parle  fa;n61  Paul  :  c'efl  qu'en  contem- 
plant la  face  de  noftre  Dieu, nous  foyor.s  trâf 
figurez  en  iccllc,que  nous  foyons  conformez 
.àliiy.Etpource  que  cela  ne  fe  peut  faire  d'vn 
iour,il  faut  que  no' y  croifsions:&c'«ilpour 
quoy  i  I  dit ,  De  gloire  en  gloire.  Qiie  fi  au 
commencement  nous  ne  poui'ôs  cftrepltine- 
mét  confoimcz  à  la  fembiâce  de  noitrt-  Dieu, 
pour  le  moins  tédons  l.i,&  que  nous  y  foyons 
conformez  de  plus  en  plus  tout  letemp'îde 
noftre  vie. Et  airfi  nous  voyôs  comme  la  foy 
apporte  aucc  ioy  vne  bône  confcience ,  pure, 
&;  vn  cœur  droit.  Carauec  la  bonne  confcien- 
ce ,  le  cœur  pur  fera  quant  &  quant  :  ce  font 
chofes  infcpaiables.  Nl3;is  ce  n'tfl  point  fans 
caufe  que  fainft  Paul  a  mis  cev  deux  mots, en 
coresqu'iln'y  aicj  as  grande  diuerfitéde  l'vn 
à  l'autre.  Car  nous  voyons  et  mine  les  hom- 
mes ne  font  point  attirez  à  dioiture  &■  iim- 
plicité,  que  par  forcetccla  eft  tant  contnrire 
à  leur  nature  ,  qu'il  faut  bien  qu'ils  fc  capti- 
uent,&  qu'ils  facent  vtoléce  à  toutes  leurs  af 
feûions,  deu.rt  qu'(.frre  rangez  à  vne  pure  fini 
plicité:attendu  la  hautcflede  cœ;ir,&  l'outre 
cuidance  quiell  en  eux.  Voila  pouiquoy  S. 
Paul  a  vfé  de  ces  deux  mots  pour  fignificr 
vne  mefme  chofe.  Et  ce  fera  affiz  que  ceci- 
nous  foit  exprimé  pour  venir  au  deuant  de 
toutes  les  hypocri-lies  dcfquelles  nous  lom- 
mes  tant  enucloppez  que  c'cll  pitic.Or  com 
me  lainft  Paul  nous  a  yci  déclaré  que  c'eff 
de  -la  foy, aufsi  nous  voyôs  a  quelle  condam- 
nation cefte  docfrine  peut  tourner  à  to'  ceux 
qui  fe  vantent  d'iftre  fidèles  ,  &  ne  tienent 
né  de  Dieu,ne  de  fa  vérité, ou  pour  le  moins 
qui  ne  l'ont  point  receuc  .■»  bon  efcient  &  a- 
uec  vn  droit  zcle  ,  mais  feulement  par  ie  ne 
fçay  quelle  curiofité.Et  à  qui  eft-ce  que  ce- 
la s'adrefle?  Helas!c'clt  vne  condition  quafi 
générale  auioujd'huy.  'Il  tft  vray  qu'on  en 

trouuera 


s  V  R   LA    T.    A  T  I  M  O  T  H. 


trouuera  beaucoup  qui  applaudirôt  à  FEuan- 
gile:  s'il  ne  tien:  qii'.i  baiffer  les  aurcillcs, 
Chrilt  aura  beaucoup  d'eicoliers  ,  pour  le 
moins  il  en  aura  quelque  nombrermais  les  ai- 
nes feront  tenus  aulw  fages  que  nou>  ,  s'il  ne 
faut  que  bajflerl'aureiUe.  Ali  Chrift  ne  fe  cô 
tente  pas  de  cela:  car  il  veut  que  nous  approu 
uions  par  noftre  vie  que  nous  auons  receu  (a 
parole, &  qu'elle  habite  en  nos  ames-.fans  ce- 
la nous  auiôs  beauprotefter  que  nous  vou- 
lons adhérer  à  la  pure  vérité  :  mais  noftre  vie 
nous  démentira  :  &  faudra  que  ce  qui  eftdit 
Tlt.l.Jg  en  vn  autre  paflage.foit  accompli ,  Que  tels 
hypocrites  ayans  bien  confelle  le  nom  de 
Dieu  de  la  langue,  le  renoncent  en  toute  leur 
vie.  Voici  donc  vue  condamnation  horrible 
fur  ceux  qui  auiourd'huy  le  glorifient  d'eftre 
Chreftiens,  veu  qu'on  voit  qu'il  y  a  fi  peu  de 
rondeur  &  de  droiture  par  tout,mais  que  tout 
cft  plein  de  trahifon&de  dcfloyauté  :  &  que 
les  hommes  ertansâiniî  panures  à  Dieu,  ne 
gardent  nulle  équité  enuers  leurs  prochains. 
Quand  nous  voyons  que  l'iniquité  domme 
ainii.que  dira-on  iînon  que  la  foy  ell  abolie? 
Or  tât  y  a  que  ceci  ne  nous  e/1  point  dit  pour 
noitre  condamnation,  mais  c'ell  afin  de  nous 
guider  plulloit  à  Dieu,&  que  nous   pourfui- 
uionsle  chemin  lequel  nous  deuons  tenir  & 
fçauoir.Qjie  tous  ceux  donc  qui  ont  quelque 
fentiment  de  Dieu  &  de  fa  niaicfi:é,cognoif- 
fent  que  lamais  ne  profiterôt  bien  enl'Efcri- 
ture  làinite,  iînon  en  fe  retirant  du  monde. 
Car  les  corruptions  font  auiourd'huy  fi  gran 
des  &  énormes  ,  ou'en  nousmcfant  les  vns 
parmi  les  autres, no'ne  faifons  ouenous  fouil 
1er  &  polluer  :  nous  fomnies  comme  facs  à 
charbonnier, ainfi  que  dit  le  proutrbe.  Pour- 
tant quiconque  le  voudra  ranger  à  Dieu  ,  il 
faut  qu'il  apprene de  fe  recueiTlir.Et  pour  ce 
faire  qu'il  note  bien  ce  qui  cft  ici  déclaré  par 
fainft  Paul .  Maintenant  quand  nous  ferons 
comparaiion  de  cette  doftrine  de  fainct  Paul 
auec  le  train  qui  eft  auiourd'huy  mené  quaiî 
par  tout,  on  trouuera  que  c'elt  comme  le  ftu 
&  l'eau. Sainft  Paul  parle  de  foy, &  cependant 
nous  voyons  qiie  tous  Ibnt  incrédules.  Vcila 
auiourd'huy  ceux  qui  fontalTez  belle  confef- 
lîon  de  croire  à  i'Euan^ile  :  s'il  leur  admeijt^ 
quelque  petite  tentation  &  vulgaire,les  voila,, 
efperdu's. S'ils  eftayent  fondez  en  la  grâce  de 
Dieu,  ne  feroit-ce  pas  pour  les  alleurer  &  en 
la  vie  &  en  la  mort?  Et  toutesfois  il  n'en  eft 
point  de  queftion, ou  blé  s'ils  le  font,ce  n'eft 
que  pour  vne  bouffée  :  les  voila  tantoft  tour- 
nez :  deperfcuereril  n'eneft  point  denou- 
uelles.Et  air.lî, quand  les  hommesnepeuuent 
batailler  contre  les  tentations  que  fiinct  Paul 
leur  dit,  &  qu'ils  ne  peuuent  auoir  leur  refu- 
ge à  Dieu  pour  cfperer  de  iuy  qu'il  aura  le 
foin  de  leur  falut,  &  s'en  tenu  certains, où  tft 
cefte  toy  dont  parle  ici  fauitt  Paul  >  où  eft -ce 
que  ce  caur  pur,&'  cette  bonne  confcience  fe 
trouucront.-N  JUS  voyons  que  tous  deux  font 


17 

guafi  bannis  auiourd'huy  du  mondc.A  parler 
proprement ,  cefte  bonne  confcience-ci.c'cft 
quand  nous  n'aurions  point  de  tcliiioins  qui 
nous  peulTent  redarguer  deuant  le  mode,  que 
toutesfois  nous  puif  ions  protcfter  que  nous 
auons  cheminé  droitemenc  ,   fçachans   que 
Dieu  nous  doit  fuffire  ,  &  q  puis  que  nous  ne 
pouuons  pas  fuir  fon  regard  ,  Se  qu'il  fonde, 
non  feulement  nos  auures,mais  auisi  nos  af- 
fections &  penfees ,  combien  que  nous  ne  lo- 
yons  poifit  fuiets  à  nul  blafme  ne  reproche, 
que  nous  ne  laifsions  pas  de  cheminer  en  pu 
rcté.  Voila  qu'emporte  bonne  cofcience. Car 
qu'on  la  cache  tant  qu'on  voudra  ,  il  faudra 
faire  de  longs  circuits  ,  il  faudra  bien  courir 
la  pofte  pour  la  trouuer  ,  il  ne  la  faut  point 
chercher  ici,  c'cft  vne  femence  bien  rare.  Et 
qu'ainfi  )ùit,nous  voyons  comme  les  hoi^jnes 
ont  bonne  confcience  aux  choies  plus  foien- 
nelles ,  &  qui  emportent  plus  grande  confe- 
quence,qii.;nd  on  en  eft  venu  lufqucs  là, qu'on 
ne  fait  quafi  plus  de  fciupule  de  fe  moquer 
pleinement  de  Dieu  en  feimens  lolennels.Ie 
ne  parle  point  de  ceux  qui  le  font  par  les  bou 
tiques, &  par  les  marchez,  où  le  nom  de  Dieu 
fera  tellement  defchiqueté  que  c'cft  vn  hor- 
reuM&  comme  on  fera  àes  feimens  friuoles, 
aufsi  tout  cft  confit  en  paiiure, qu'on  ne  fçau 
ra  pas  vendre  pourvn  foui ,  qu'on  ne  foit  ou 
menteur  ou  pariure  :  puis  tl  faut  que  le  nom 
de  Dieu  foit  expofé  à  tout  opprobre  ,  qu'on 
s'enniocque  &  qu'on  s'en  loue  aucc  telle  im 
pudence  que  c'elf  pitié.  le  ne  parle  point,di- 
ie,de  ces  l'ermens-la  :  mais  en  la  iuftice  mef- 
me  tout  y  eft  corrompu  :  où  les  fermens  font 
ordonnez  afin  oue  le  ;io:ri  de  Dieu  (oit  prins 
en  reuerence  &.  en  raaieùé  comme  il  doit.  Vn 
homme  viendra  là  :  on  Iuy  fera  leuer  la  inam 
au  ciehc'eft  comme  s'il  eftoit  là  deuant  lama 
iefté  de  Dieu  ,  lequel  auf>i  il  appelle  en  tef- 
moin  de  ce  qu'il  veut  dire.  Las, il  ne  lailTtra 
pas  pourtant  de  fe  pariurer  tout  manifefte- 
mcnt.Et  lurtout,quand  il  eft  queiiion  de  di- 
re la  venté  pour  defcouuiir  les  vilenies.Voi 
la  le  nom  de  Dieu  qui  aura  elté  blalphemé: 
voila  des  extoriîons  mefchantes  qui  auront 
efté  faitesd'vnaura  efté  outragéjl'autfe  aura 
efté  batiijl'autre  aura  efte  piUé. Bien, appelle 
'ondes  tefmoins?Il  n'eft  poît  queftion  qu'on 
puifle  arracher  vn  feul  mot  de  vérité  de  leur 
bouche:  &;  neantmoins  ceux  qui  vienent  là, 
fçauent  bien  que  les  iuges  mefmes  fant  com 
me  tefmoins  du  faié},comme  s'ils  auovent  e- 
Ité  prefen^  à  la  chofe:&  au  bout  de  deux  iours 
on  les  appellera,  &  ils  n'auront  honte  de  iu- 
rer  qu'ils  ne  fçauent  que  c'eft  :  &:  ces  vileins 
patiures  n'en  font  que  torcher  leur  bouche,, 
toutesfois  fi  veulent-ils  qu'on  les  cftime  bôs 
Chreftiens.  Et  qui  font  ceux-là?  Ce  ne' font 
pas  ne  trois  ne  quatre.  Selon  qu'vn  chacun 
peut  el'Lhaper  pour  fe  pariurer, c'cft  airez:tel 
lement  que  c'eft  vn  pi  ouerb(  commun  ,  eue 
tous  ceux  qui  voudrôt  celer  la  verité,ce  font 

t.  i. 


i8 


TROISIEME    SERMON 


léserais  termoinsr&s'ily  en  a  quelqu''vnqui 
porte  reuerence  au  nom  de  Dieu,&'qui  vueil 
le  déclarer  la  choie  comme  elle  va,&  dire  ve- 
nté)Ce  fera  vn  taux  tefmom, tellement  qu'on 
appelle  auiouid'huy  les  bons  tefmoins  ,  les 
panures.  Et  penfons-nous  qu'vne  telle  impie 
té  ,  &  li  énorme  ,&  de  laquelle  Dieu  cft  tant 
prouoqué  à  ire.demcure  impunie?  Nous  fça- 
uons  quelle  malediftion  il  prononce  fur  ceux 
qui  prendront  Ion  nom  en  vam  ;  toutesfois 
ceux  qui  le  mocquentanifi  de  Dieu.voircqui 
le  blafphement  horriblcmét.cc  font  les  bons 
tefmoins  de  ce  lieu,  &  taut  que  l'honneur  de 
la  ville  foit  ici  déchiffré, quâd  les  chofes  l'ont 
ainli  desbordees&confufes.  Bret",  quand  vn 
palsât  aura  ici  leulemét  feiourné  trois  lours, 
il  aura  bien  apperceu  qu'il  n'y  a  plus  ni  hon- 
nefteté  ni  môdcftie  deiiant  les  hommes  ,  &  le 
bruit  de  noftre  ini-araie volera  mefmes   iuf- 
ques  à  cent  lieues  loin.  Cognoifl'ons  quand 
nous  voudrons  ainiî  nous  picqucr  à  rencon- 
tre de  Dieu  par  nos  mauuaifes  couftumes,que 
nous  auons  beau  nous  couurir,  nous  aurons 
beau  alléguer  ,  Chacun  fait  ainiî  :  fi  faudra-il 
que  Dieu  nous  amené  à  ce  ingénient  qu'il  a 
cflabli  par  fa  parole.  Comme  dit  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrifl  ,  Ce  ne  fera  pas  moy  qui 
ïeh.  II.    vous  iugeray  ,  mais  la  parole  que  vous  oyez 
47-  43-  auiourd'huy  de  ma  bouche.  Et  ccpendât  ceux 
qui  ne  font  pas  du  tout  incorrigibles ,  qu'ils 
regardent  à  eux, qu'ils  cognoiflent  que  pour 
eftre  tenus  &  reputez  fidèles, &  pour  tftie  en- 
rôliez au  regiflre  de  Dieu  comme  fes  entans, 
qu'il  faut  qu'ils ayent  vne  bonne  confcience 
j.fie.i.  ^  pure. Comme aufsi  fainil  Pierre  nous  moa- 
ii.  flre,que  fi  nous  croyos  lefus  Chriil  eftre  ref- 

fufcitf.il  tant  que  noftré  confcience  foit  pu- 
re. Voila  dont  il  déduit  la'bonne  confcience, 
quidil  trsitte  du  Baptcfme,  il  la  fonde  fur  la 
refiirreiiion  de  noftre  Seigpeur  lefus  Chrifl. 
Etpourquoy?  Car  regardons  à  quel  propos 
lefus  Chrift  efl  reirufcué:ce  n'a  pas  eflé  feu- 
lement pour  foy ,  mais  c'a  eùé  afin  que  nous 
foyôs  participans  aucc  luy  de  la  vie  éternel- 
le qu'il  nous  a  acquife,&  que  nous  comparoif 
fions  comme  fes  f;  ères  dcuant  Dieu, &  que  ce 
qui  eu  delà  vie  humaine  en  nous,  c'dlàdire 
de  neftie  nature, que  cela  foit  mortifié. Car  la 
vefurrediondenortre  Seigneur  lefus  Chrift 
feroit  inutile  fans  cela.  Il  nous  faut  donc  a- 
uoir  vne  refponfe  de  boniu' confcience  dé- 
liant Dieu.li  nqus auons  cfté  bnptizezaunoin 
&  en  l'authorité  de  noftre  Seigneur  Ufus 
Chrift  ,  &  que  nous  n'ayons  point  fallîfic  le 
,  ligne  de  cefte  alliance  que  Dieu  a  contrariée 
*  auecnous.  En  outre,  il  y  a  cefte  pureté  de 
cceur  qu'il adioufte,  voire  pour  monftier  que 
nousnedeuons  pas  feulement  nous  abftenir 
du  mal  qui  eft  en  nos  mains ,  mais  qu'il  faut 
que  noui  feruions  h  Dieu  d'vne  droite  affe- 
rtian.Car  il  ne  )é  contente  pas  de  toute  J'ap- 
parcBcc  qui  cft  prifee  des  hommes .   Nous 


pourrons  bien  eftre  eftimez  tant  &  plus, mais  _ 
lufques  à  tant  que  Dieu  apperçoiue  en  nous 
cefte  pureté  de  cœur  ,  voila  toutes  nos  œu- 
ures  qui  ferôt  fouillées.  Vne  eau  pourra  bien 
eftre  claire, fi  la  fource  en  eft  vicieufe, l'eau  fc 
ra  amere  au  gouft  :  ainfi  en  eft-il  de  toutes. 
nos  ccuures.Et  vne  herbe  qui  fera  venimeufe, 
ne  laiflêra  point  d'eftre  belle  quefque  fois,  Se 
de  produne  des  fleurs ,  mais  elle  trompe  à  la 
veue,  Se  cependant  le  venin  eft  U  cache:  ainfi 
en  eft-il  de  toute  la  beauté  qui  eft  en  nos  œu- 
ures  quand  nous  n'aurons  point  le  cœur  pur 
&  net  deuant  noftre  Dieu.  Maisauons-nous 
cela?  il  refte  que  nous  conuerfions  auec  nos 
prochains  en  charité  ,  c'eft  à  dire  que  nous 
communiquions  tellement  par  enfemble, 
que  nul  ne  foit  addonné  à  foy  ,  mais  que 
nous  procurions  le  falut ,  le  bien  &  le  profit 
chacun  de  fon  frère  :  car(comme  f.iintt  Paul 
nous  déclare  en  vn  autre  lieu  )  la  charité  ne 
cherche  point  ce  qui  eft  .1  foy.  Ainfi  donc  fi  '  '  , 
elle  eft  viue  en  nos  cœurs  ,  il  eft  certain  que 
nul  ne  fera  tellement  attaché  à  fon  profit  par 
ticulier  ,  qu'il  ne  tafche  de  feruir  à  fcs  pro-  *■ 

chains  ;  &  fi  nous  auons  cefte  affedion-la,  ie 
vous  prie  ferons-nous  enflammez  d'auarice 
pour  attirer  à  nous  la  lubftanced'autruy?  I- 
rons-nous  par  force, &  par  violence?  tafche- 
rons-nous  d'opprimer  nos  prochains,  &  leur 
mettre  le  pied  fur  la  gorge  pourauoir  tout 
auantage  fur  eux?Et  ainfi  que  nous  ne  foyôs 
point  comme  chiens  Se  chats ,  mais  qu'il  y  ait 
vne  telle  charité  en  nous, que  nous  monftriôs 
que  ce  n'eft  point  en  vain  que  Dieu  nous  a 
vnis  enfemble  ,  &  qu'il  veut  que  cefte  vnion 
de  fraternité  qu'il  y  a  mife,  foit  entretenue: 
&  que  cependant  nous  auifionsde  nous  dé- 
dier tellement  au  feruicede  noftre  Dieu,  que 
tout  le  tëps  de  noftre  vie  nous  ne  cherchions 
finon  de  l'honorer,  puis  qu'il  luy  a  pieu  nous 
Tifiter  par  fa  mifericorde  infinie  ,  &  qu'il  no' 
a  voidu  receuoir  pour  fes  enfans ,  afin  qu'il 
nous  foit  Père  :  &  que  nous  ayons  vne  vraye 
fraternité, communiquant  les  vus  aucc  les  au 
très,  telltmétqu'vn  chacun  ne  cherche  point 
fonpiofit  particulier.mais  que  nous  tafchios 
d 'aider  &  fecourir  les  vns  les  autres  ,  comme 
Dieu  nous  a  conioints  enfemble  a  cefte  fin  & 


conditioru 


O  R  nous-nous  proftcrnerons  dcuant  la  ù 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiilancc  de 
nos  fautes  ,  le  priant  qu'il  luy  plaife  nous  les 
faire  tellement  fentir  que  nous  fyons  du 
tout  attirez  à  luy.  Et  pource  que  no'  ve  pour 
ions  lamiis  eftre  fi  bien  def  ouillez  de  nos 
corruptiô.s  charnelles, qu'il  n'y  ait  toufiours 
beaucoup  à  redire  en  nous  ,  qu';l  luy  plailc 
nous  fupporter,infques  à  ce  qu'il  nous  ait  re 
tirez  à  foy  pour  nous  faire  participans  de  fi 
gloire  celefte.  Ainfi  nous  dirons  tous  ,  Dieu 
tout-puilIànt,Pere  celcfte.&c. 


1p 
Q^VATRlEME    SERMON    SVR   LE    P  R  E- 

MIER     CHAPITRE. 

5  Or  la  fin  du  commandement  cjl  charité  de  cœur  pur,  O"  de  bon- 
ne conjcience,  ^  dcfoy  non  feinte. 

6  DefqucUes  chojcs  aucuns  s  cjlans  defuoye^i ,  fejhnt  ccnucrtis 
en  parole  vaine. 

7  Woulans  eflre  docieurs  de  la  Loy ,  nentendans point  les  chojcs 
qu'ils  difcnt,  (f  defjuellcs  ds  ajfamcnt. 


vO  V  s  auons  veu  ce  matin 
)  comme  nous  deuons  profi- 
I  tir  en  li  Loy  de  Dieu  ,  & 
I  pourqupy  aiifsi  eile  no'  eft 
I  donnée  ,c'tft  a  fçauoir  cjiie 
nous  foyons  tondez  en  ia 
grâce  de  nortre  Dieu  pour  efpcrer  falut  de 
luy,&4"e  nous  chem'in  jns  en  la  prefence 
autc  telle  rondeur  &  intégrité  qu'on  c<>- 
gnoiffe  que  c'tft  à  bon  efcient  que  nous  a- 
uons  efté  enfeignez  en  fon  efcole:&  puis, que 
nous  conuerilons  aucc  nos  prochains  fans 
fraude  ,  ne  malice  ,  ni  outrage  ,  mais  qu'vn 
chacun  tafche  de  feruir  à  ceux  âuec  lefquels 
il  vit,  &  qu'en  fomme  nou:  cof^noifsions  que 
Dieu  nous  a  auouez  pour  (es  ent.ins ,  afin  que 
nous  ayons  vne  droite  fraiermté  .  Or  {a<nft 
Paul  ayant  mis  la  fomme  de  la  Loy ,  adioiilte 
tjiie  plitfieurs  s'efl.ms  deflountex.  de  1^  ,  fe  funt 
conuertis  a  -vaniti  de  propr,s.  Il  vfe  ici  d'vne 
fimilitude  prinfe  de  ceux  qui  tirent  de  l'arc 
oude  l'arbaieile,  ou  de  la  haquibute  :  car  ils 
ont  leur  blanc  ,  &  ne  tirent  pas  à  l'auenture, 
niàl'efgaree,ains  vifentau  but .  Sainft  Paul 
donc  nous  monftre  que  Dieu  en  nous  don- 
nant Cl  Loy  nous  a  voulu  donner  vn  chemin 
certain ,  afin  que  nous  ne  foyons  point  fu- 
iets  à  errer  comme  gens  vagabons.  Et  de  fait 
ce  n'eft  pas  uns  caufe  que  Moyfe  propofoit. 
Voici  le  chemin,marchez  :  comme  s'il  dif  jit 
que  les  hommes  ne  fçauent  où  ils  en  font.iuf 
ques  à  ce  que  Dieu  leur  ait  déclaré  fa  volon- 
té:mais  alors  ils  ont  vnê  règle  infallible.No- 
tons  bien  donc  que  Dieu  nous  veut  addreflèr 
tellement  que  nous  ne  pourrons  pas  nous  for 
uoyer,  moyennant  que  nous  le  tenions  pour 
Boftre  guide,  félon  qu'il  eft  prelt&  appareil- 
lé de  faire  ccft  office,  quand  nous  nt  reiette- 
rons  point  vne  telle  grâce.  Voila  que  fainû 
Paula  voulu  lignifier  par  cefie  lîmilitude:c5- 
me  il  eil  dit  que  fous  ceux  qui  n'ont  point  ce 
but  de  s'appuyer  fur  la  grâce  de  Dien,afin 
qu'ils  puiflent  reclamer  Dieu  leur  Pçre,&qiie 
ils  puiflentattédre  falut  de  luy,&qui  ne  che 
minent  pas  en  bonne  confcience,&  d'vn  cccur 
pur  auec  leurs  prochains,quc  ceux-là  font  cô 
me  gens  efgarez  &  toruoyez.'^r  qu'auient-il 
à  ceux  qui  font  ainfi  vagabons,  3i  qui  fe  veu- 
lent efpargnei'  à  leur  elcieuc  en  leurs  vaines 


tantalîes  ?  Il  n'y  a  plus  que  vanité ,  dit  fatnâ 
Paul.  Il  vfe  ici  d'vn  mot  qui  emporte  qu'en 
tous  leurs  propos  il  n'y  a  rien  de  ferme, il  ne 
y  a  nulle  fubftance ,  ce  n'eft  que  vent .  Il  til 
vrayqu'il  y  aura  quelque  appaiéceimais  c'cft 
côme  d'vne  vcfsie  qui  fera  enflee.ou  vne  con- 
fle(qu'on  appelle  ici:)  mais  cependant  quelle 
fermeté  y  a-il, ou  quelle  fubllace?!!  n'y  a  rien 
qui  foJt  ,  il  ne  faut  q  la  pointe  d'vne  efpingle 
pour  tout  creuer,&voiIavnc  peau  fleftrie.Aiii 
il  doc  S. Paul  accapare  toutes  ces  belles  fpecu 
latiôs  qu'aurôt  ces  glorieux  g  fe  veulét  faire 
valoir  fans  édifier  l'Eglifc  de  Dieu.àdes  vef- 
lîes. d'autat  qu'il  n'y  a  rien(dit-il)en  eux  que 
pure  vanité,  ni  en  tout  leur  propos.  Yci  nous 
auons  àrecueillir  double  inlhuôiôil'vne  c'eft 
que  nous  ne  foyons  point  fi  malins  quâd  Dieu 
nous  fait  ce  bien  de  nous  guider  ,  de  tirera 
l'iîfgaree  çà  &  là,  fans  fçauoir  quel  eii  noftie 
but.  Il  eft  vray  que  les  homme?  fe  voudront 
couurir  d'ignorance  quand  ils  auront  failli: 
mais-  nous  auons  défia  monftré  que  fî  nous 
foulFrons  d'eftre  en  feignez  de  Dieu, nous  fou 
me  tans  aucc  toute  humilité  à  la  doftrinede 
la  Loy  ,  que  nous  trouuerons  le  chemin  tout 
certain, &•  qu'il  nous  tendra  Ja  main,  en  forte 
que  nous  ne  pourrons  faillir.  Mais  quant  & 
quant  tendons  au  but  qui  nous  eft  ici  propo- 
féiiS;  làdelTiis  que  nous  tenions  aufipourvr» 
poinftrefohi.ce  que  fainft  Paul adioulte  pour 
le  fécond, c'eitafçauoir  que  nous  aurons  beau 
nous  faire  valoir  deuant  les  hommes:  car  ton 
te  la  fcience  que  nous  aurons  acquife,ne  fera 
tjucventou  fiimee  ,  fi  nous  n'auonscebut  & 
addielïè  ,afçauoir  de  feruiràDuu  en  pure 
confcience  ,  quand  nous  aurons  mis  la  fiance 
denoftre  falut  en  luy&enfapure  bonté,  & 
que  nous  tafcherons  aufsid'a;der&  fubue- 
nir  à  nos  prochain»^.  Or  ceci  eft  bien  con- 
traire au  fcns  charnel  des  hommes  :  car  nous 
appctons  des  chofes  plaifmtes ,  &  fi  on  nrus 
vouloit  croire,  on  remneroit  toufiours  des 
queftions  inutiles  &  fnuoles  pournous  tianf 
porter  en  l'air.  Si  on  nous  parle  de  la  grâce 
de  Dieu,  fi  on  nous  exhorte  à  viurefainfte- 
ment,fi  on  nous  monftre  comme  nous  deuons 
cftre  patiens  en  nos  aduerfitez.fi  on  nous  ap- 
pelle 3  ceft  héritage  du  royaume  desçicux, 
hojce  font  chofes  dôt  nous  oyôs  tât  parler  q 

c.ii. 


Q.VATRIEME     SERMON 


no'  e»  fommes  tous  fafcliez,&  ne  faut  g  nous 
en  auoiv  dit  trois  mots,  que  nous  en  fommes 
(àoul'-.Tant  y  a  neantmoins  que  le  fauitt  E- 
fprit  n'a  point  pronôcé  uns  eau  le,  que  lî  toil 
qu'on  fedeftourne  de  ce  but ,  qu'on  ne  fera 
qu'errer,  voire  en  toute  vanue  &  folie.  Voi- 
la donc  ce  que  nous  auons  à  noter  en  lecond 
lieu  ,  c'elt  af^auoir ,  que  quand  nous  ne  cer- 
cherons  d'ell:re  édifiez  en  foy  &  charité  ,  il 
n'y  aura  que  des  fpeculations  volages ,  qui 
feront  pour  nous  cleuer  en  haut,  mais  en  la 
fin  il  n'y  aura  ne  fondement  ne  fubllance.Et 
par  cela  vo;t-on  quelle  eft  la  Théologie  Pa- 
p.ile:car  ceux  qui  veulent  cilre  rcputezdo- 
fteurs  ,  n'ont  autre  eilude  que  de  queftions 
fnuoles  qui  n'emportent  nulle  doiîriiie  qui 
feit.  Q_uand  vn  homme  fe  fera  bien  rompu 
la  tefte  pour  eûre  Théologien  (  comme  on 
parle  en  la  Papauté  )  il  fera  non  feulement 
bcgue,  mais  du  tout  muet,  s'il  eft  qucftion  de 
fajre  vn  fermon.Et  pourquoyrC'eft  vne  cho 
fe  tout  autre  que  leur  eftude  .  Car  ils  ont  là 
comme  des  feciets  de  forciers,  des  coniura- 
tions  ie  ne  fçay  quelles  ,  (ans  qu'on  les  puifle 
appliquer  à  nul  vfage  .  Njus  voyons  donc 
comme  cesmiierables  font  empoitonnez  de 
Satan.  Et  voila  comme  toute  la  religion  a  e- 
fté  peruertie,  qu'on  a  lemé  des  menfonges  c5 
me  on  a  voulu.  Et  pourquoy  r  Pource  que  la 
parole  de  Dieu  eit  vne  chofe  trop  baifeiS.: 
trop  vulgaire  pour  ces  doileurs  fpe culatifs. 
Or  cependant  li  taut-il  que  ceft  arreft  foit 
tenu  comme  irreuocable, Quand  les  homines 
ti'auront  point  ce  bHt  d'tftre  edifitz  en  foy 
&;  charité, qu'ils  ne  font  que  vaguer,  voire  & 
r'v  a  plus  que  vanité  en  tout  leur  cas.  Or 
fainft  Paul  adiou(te,  Que  neantmoins  ils  yeu- 
lent  ejlre  refutex.  dm'hurs  de  la  Loy,  ne  fc.t- 
rh.iKs  Us  chofe  s  d^)it  ils  p.trlent,  ne  defquelles 
ils  ajfermint.Q_£tA  il  dit  que  telles  gens  veu- 
lent eftre  dofteurs,&  qu'ils  ne  fçauent  ce  que 
ils  difent,  il  mdltrc  qu'il  y  a  deux  chofes  con 
tiaircs  en  eux.  Car  s'ils  auoyent  addonné 
leur  eftude  .à bien  profiter  en  la  Loy  de  Dieu, 
ils  auroyent  vne  certitude  telle  qu'il  ne  fau- 
droit  point  eftre  en  doute,  quand  on  auroit 
efté  enleigné  par  eux.  Celiiy  qui  aura  bien 
profite  eu  i'cfcolede  Dieu  ,  ne  fe  lafchera 
plus  la  bride  .1  fes  imaginations  pour  inucn- 
ter  rien  qui  foit,  mais  il  aura  ccfte  (impli- 
cite de  fe  tenu  à  ce  que  Dieu  nous  monftre 
a  tous. Voila  donc  comme  tous  ceux  qui  font 
deuement  inftruits  en  la  Loy  de  Dieu, auront 
vne  cognoiilancc  certaine  :  mais  ceux  qui  ne 
fç.iuencdequoy  ils  parlent ,  monftrentbien 
qu'ils  fe  font  f  jigez  des  vaines  re(ueiies  ,  & 
qu'ils  ont  voulu  mcfler  leurs  inuentions  pro 
près  parmi  la  vérité  de  Dieu  ,  qui  n'eft  que 
faire  vne  corruption  poi  r  t:>ut  anéantir.    Et 
pourquoy?  Dieu  a-il  parlé  ?  auous-nous  tef- 
moignagc  de  l'Efcriture  ûinae?  Ce  no'  doit 
cftrc  adl'zril  n'y  a  plus  de  queftids  quad  nous 
ferons  ^^ndtz  en  h  vente  de  Dieu.Q^ie  tout 


le  monde  s'eleue  contre  nous  ,  fi  t&.~ct  qu'il 

nous  faut  tenir  bon, &  perfeuerer  en  vne  con 
ftâce  inuincible.  Car  nous  fçauôs(dit  S.  Paul 
en  l'autre  pailàgc).i  qui  nous  auonscreu.  Car 
fi  toft  que  nous  douterons  de  la  pure  parole  i.  Tint», 
de  Dieu, il  tant  que  nous  (oyons  en  branfle,&,i.ii. 
que  nous  ne  (cachions  ce  que  Dieu  veut  dire. 
Or  quelle  elt  la  difcretion  &  prudence  d'vn 
homme,  quand  il  ne  fe  peut  point  aifuiettir  à 
Dieu,  &  qu'il  prend  cefte  audace  de  vouloir 
faire  trouuer  bon  ce  qu'il  aura  iongé  ,  au  lieu 
que  Dieu  (e  referue  cefte  authorité-la  d'eftre 
noftre  feul  MaiftrerSi  les  hommes  s'ingerent 
à  meder  leurs  fantafies  parmi ,  ne  faut-il  pas 
qu'ils  foyent  en  doute  &  en  incertitude?  Tou 
tcsfois  d'autant  que  telles  gés  ne  font  iamais 
de(pourueus  de  hardiefle  ,  il  adioufte ,  Q^ils 
afferment  ce  qu'ils  ne  fpuiten  t  p.tr.  Or  ce  mot 
d'Alfcrmer,  emporte  beaucoup.  Car  (i  fainft 
Paul  eu[1  voulu  ici  traitter  d'vn  (impie  argu- 
ment,c'eft-oit  allez  d'auoir  dit.  Us  ne  1  çauent 
de  quoy  ils  parlent:m.'îis  il  met  ce  mot-ci  qui 
emporte  plus ,  d  faut  que  les  voila  refolus, 
qu'ils  ne  font  que  déterminer, conclure,  pib- 
nÔcer,  &  voudiont  q  tout  le  monde  foit  obli- 
gé à  le«  croireivne  telle  témérité  fe  trouuera 
touliours  en  ceux  qui  n'ont  nul  tondement  en 
Ja  parole  de  Dieu  .  Car  ceux  quicognoiirent 
qu'il  n'y  a  nul  maiftre  lîiion  Icfuv  Chrjft,  au- 
ront cefte  modeftie  en  eux, de  ne  fe  point  auan 
cerriutre  la  mefure  de  leurfov.  Il  eft  vray 
que'quand  nons  aurons  bien  cognu  que  Dieu 
à  parlé  ,  nous  ne  ferons  plus  comme  rofeaux 
brandans,  nous  aurons  vne  foy  immuable  ,  & 
laquelle  fera  viélorieufe  fur  toutes  tentations 
Biicf ,  la  foy.S:  vne  opinion  ,  ou  cuider ,  ne 
ie  peuui  nt  nullement  accoider,  non  plus  que 
la  clarté  auec  les  ténèbres:  car  la  foy  empor- 
te certitude.  Mais  fi  eft-ce  (comme  fay  dit) 
que  les  fidèles  legarderont  toufiours  ce  qui 
leur  eft  donné  ,  &  ne  feront  point  haftif?.  à 
croire.  Ils  auront  biencefte  promptitude  que 
fainct  Paul  loue  ,  en  difant ,  Dés  le  iour  que  r  1  -,  f 
vous  auez  ouy, vous  auez  creu.Ils  léront  donc 
appareillez  a  (Iiyure  ce  qu'il  leur  fera  pro- 
p(3(e  .au  nom  de  Dieu, mais  ce  ne  (era  pas  (ans 
di(cretion  ,  comme  il  en  parle  ailleurs.  Et  fphe.s. 
pourquoy  cela  ?  Car  nous  ("çauons  qu'il  n'y  a  i/- 
que  Dieu  (eul  qui  nous  doit  conduire, &  qui 
doit  gouuerner  nos  âmes  :  &:  (î  les  hommes 
vienent  a  nous ,  &  que  not*s  ne  cli(cernions 
point,  que  nous  foyons  comme  beftes  brutes, 
nous  laiiîàns  mener  par  le  nez, ne  fera -ce  pas 
méfier  le  ciel  auec  la  terre?Car  il  faut  que  tou 
tes  créatures  fe  taifcnt,  cS.;  ^lue  Dieu  feul  par- 
le, S:  que  ce  que  nous  croii5s,f  ut  procédé  de 
\uy,Si  que  nous  en  foyon<;  bien  aireurfz. Voi- 
la donc  quant  aux  fidèles  :  ils  auroni  (  ccm- 
me  i'ay  dit)  cefte  mcdeftie  en  cuv  ,  de  ne  rien 
afFermer  iînon  ce  qu'ils  cognoiffent  tftrede 
Dieu  ,&  aimeront  mieux  fe  tenir  vn  temps 
fufpens.quand  ils  ne  feront  pas  deuement  en- 
ftignez  de  quelque  article  ,  que  d  en  dire  a  la 

volce, 


SVR     LA    I.     A     TIMOTH. 


zi 


Volce,eomme  font  beaucoup  qui  auront  hon- 
te de  rien  ignorer  :  ils  voudront  cftrcgrans 
clercs  ,  &  fçauoir  tout,  &  ne  fçauent  rien.  Or 
les  fidèles  n'iront  pas  auec  telle  haftiuete: 
mais  celuy  qui  s'auance  ,&  qui  prel'ume  de 
dire  ce  oue  bon  luy  leinble  ,  pour  méfier  fes 
fonges  &  rcfueries  parmi  la  parole  de  Dieu, 
ceux  qui  l'ont  tels,  affermeront  tant  &:  plus 
qu'il  n'y  aura  rien  dont  ils  ne  tacent  vne  con 
clulîon  abfolue.pour  dire,  Voila  qu'il  faut  te- 
nir.voiia  qu'il  faut  obferuer.  Pour  celte  cau- 
fe  faindt  Paul  dit  que  telles  gens ,  combien 
qu'ils  afferment,  toucesfois  fi  ii'ont-ils  nulle 
relolution  en  eux:  mais  Us  voltigent  toui- 
iours:&:aul'iile  diable  les  tranfporte  auecv- 
ne  telle  audace,  qu'ils  veulent  que  ce  qu'ils 
difent.r  îc  receu:que  cela  n'eftiînon  vne  fre- 
neiie, qu'ils  n'ont  point  le  fens  rafsis:  ce  leur 
eft  aflez  de  dire.  Voila,  nous  le  tenons  de 
Dieu.  Et  de  ceci  nous  en  auons  l'expérience 
auiourd'hi.y.comme  alors  elle  cftoit  du  temps 
de  fainCl  Paul ,  ainfî  qu'il  en  parle  au  fécond 
chapitre  des  Colofaiens.  Car  l.i  il  exhorte 
les  fidèles  de  fe  tenir  en  la  pure  fiinplicité 
de  l'Euangile.afin  qu'ils  ne  foyent  point  de- 
ceus  par  les  fedufteurs ,  &  par  ce;  dofteurs 
fpeculanf:,  fous  ombre  d'humilité  (dit-U)  & 
de  reuelations  Angéliques,  &  autres  choies 
femblables.U  y  auoit  des  luperftitions  que  le 
diable  mettoit  en  auant  par  gens  cuiieuv: 
SaincT:  Paul  dit  là,  qu'il  faut  que  les  fidèles 
foyent  fur  leurs  gaides  pour  n'eftre  point  ti- 
rez ne  ci  ne  là. Et  puis  iladiouite,  Q_iieceux 
la  font  enflez  de  leur  fens  propre,  &  s'auan- 
cent,&  s'ingerent,  &  fe  mettéc  en  poiftfsion 
des  chofes  que  iamais  n'ont  cognues  .  Ainli, 
nous  voyons  que  ce  n'cfl  pas  d'auiourd'huy 
que  le  diable  a  lufcité  de.  brouillons  qui  ont 
voulu  femer  leurs  zizanies,  8c  qui  ont  ofé  af- 
fermer hardiment  ce  qui  leur  eftoit  inco- 
gnu  :  mais  auiourd'huy  ncus  voyons  que  cela 
le  prattique  plus  que  iamais  .  En  la  Papauté, 
ievous  prie,queK  font  les  articles  qu'on  tien 
dra  les  plus  certains=Si  quelqu'vn  a  nié  la  re- 
furredion  des  morts,  ou  la  vie  éternelle  ,  ce 
ne  lera  pas  vne  herflîe  il  grande  que  d'auoir 
nié  le  purgatoire.  Et  du  purgatoire  quelle 
certitude  en  ont-ils?  Quel  Ange, ou  quel  dia- 
ble leur  a  reuclé  qu'il  y  a  vn  purgatoire  ?  Ils 
l'ont  bafti  en  leur  cerueau  :  &  combien  qu'ils 
ayenttalché  d'amener  quelques  tefmoiçna- 
ges  de  l'Efcriture  fainâ:e,cn  la  fin  ils  font  de- 
meurez confus,  tellement  qu'ils  n'ont  autre 
defenfe  de  leur  purgatoire, finon  l'ancienne- 
té.Ho  voila,  on  l'a  toufiours  ainfi  tenu. Voila 
donc  le  t^onde.nent  de  la  toy,  félon  les  do- 
Ûeurs  Papilles. Et  puis  il  ne  faut  point  reuo- 
queren  doute  que  les  faindis  trefpaffez  ne 
doiiient  eftre  rcclamez  comme  aduocats  &: 
patrons.  D'aller  à  Dieu  iàn^  aucir  quelque 
fainft  Micbel  qui  nous  guide  ,  ou  la  vierge 
Marie, ou  quelque  faint>  que  le  Pape  aura  for 
gé  en  fon  caleiidrier  à  la  polie,  ho  de  cela  il 


n'y  auroit  nul  propos.  Et  comment  ?  à  quel- 
les enfeigi>es?Trouucra-on  en  toute  l'Elcri- 
^tiirc  laincte  vn  feul  mot, vne  feule  fyllabe  oui 
monftre  que  les  créatures  intercèdent  pour 
nouSjc'eft  àdire  ceux  qui  font  trefpaflez?Car 
nousdeuons  biencn  ce  monde  prier  les  vns 
pour  les  autres:&:  cela  nous  eft  commun  &  re 
ciproque, comme  ondit:mais  quant  aux  trel- 
paffez,il  n'eu  eft  fait  nulle  mention.  Aufsi  ne 
taut-il  point  qu'on  en  doute  en  façon  que  ce 
foit.  Touchant  des  chofes  femblables,  com- 
me dt  ces  toiles  dénotions  qui  font  introdui-, 
tes  en  la  Papauté,de  tous  ces  badinages-la  on 
ne  trouuera  rien  en  la  fainûe  Efcrirure.Et 
quoyr  Ce  font  fpeculations,  ce  font  des  fub- 
tilitez  de  mcfsieurs  nos  Maiftres  :  mais  il  les 
taut  tenir  comme  déterminations  telles,  que 
il  ne  foit  point  hcite  de  fe  rcbccquer  à  ren- 
contre. Et  comment  eft-ce  qu'ils  prouuent 
tout  cela;  Ho  c'eft  bien  afllz  qu'ils  l'ayenc 
cuidé.Nous  voyons  donc  queSatan  s'eft  maia 
tenu  en  ccfte  poffefsion-la,  d'endurcir  les 
hommes  en  telle  audace  &  impudence,  qu'ils 
font  beaucoup  plus  hardis  à  affermer  ce  que 
ils  n'ont  iamais  cognu,  que  s'ils  auoyent  bon 
tefnioignagedeDieu&  de  fi vérité.  Or  de 
noftre  paît, nous  auons  à  recueillir  de  ce  paf- 
fage  de  fiind  Paul, de  n'tfti e  point  fcandali- 
fcz  quand  nous  voyons  les  hommes  s'ingérer 
ainfi,  Si  prendre  vn  tel  auantage  au  preiudice 
de  Dieu  :  que  nous  n'en  foyons  point  trou- 
blez, car  ce  n'eft  pas  de  maintenant  que  cela 
commence.  Que  faut-il  donc  ;  Aduifons  de 
noftre  part  d'auoir  cefte  modeftie  &  humili- 
té, que  nous  efcoutions  ,  &  que  nous  foyons 
tardits  à  prononcer:  mais  quand  nous  aurons 
efté  enfeignez  de  Dieu,  qu'alors  nous  ayons 
la  bouche  ouuerte  pour  faire  confcfsion  de 
noftre  foy  ,  mais' qu'il  n'efchappe  point  vn 
feul  mot  de  noftre  bouche  qu'il  ne  foit  bien 
relolu  en  noftre  cœur.Et  comment?  Non  pas 
pour  le  cuider,  &  fous  ombre  que  nous  l'au- 
rons ouy  dire  :  mais  fçach.is  bien  que  nous  le 
tenons  de  Dieu  .  Voila  que  nous  auons  à  fai- 
re.Et  au  refte,  que  tout  ce  qu'on  nous  affer- 
mera, nous  le  tenipns  pour  friuole  ,  iufques  à 
tant  qu'il  y  ait  approbation  de  la  parole  de 
Dieu.  Nous  cuiderons  beaucoup  faire  en  te- 
nant pour  articles  de  foy  ce  qui  aura  efté  mis 
en  auant  par  les  hommes  :  &  c'cft  deroguer  à 
l'authoritéde  Dieu,  &  ledefpouiller  de  fon 
droi(ft  qui  luy  appartient.  Et  voila  pourquoy 
fainft  Paul  condamne  cefte  humilité  feinte,  Qo/.i.iS 
au  paflàge  que  i'ay  allégué.  Comme  auiour- 
d'huy les  Papiftes  diront.  Et  comment?faut- 
il  qu'on  prefume  d'aller  contre  la  détermi- 
nation de  noftre  mère  faindle  Eglife?  Ils  ont 
leurs  c5ciles,aufquels  il  y  a  quelques  conuen 
ticulcs  degros  afniers,qui  ne  fçaiiroyent  par 
1er  vne  feule  langue,  &  laniais  n'ont  leu  trois 
fueillets  de  l'Elcriture  (ainde .  Toutesfoîs 
ceux-là  pourront  corclure  ce  qu'ilt  n'ont  ia 
mais  penfé.Les  Papiftes  auiourd'huy  font  v- 

c.iii. 


az  Q^V  A  T  R  I  E 

ne  grande  brauade  Je  cela.  Mon  Dieu!  com- 
Bie  ils  nous  condamnent  de    prefomption, 
bource  que  nous  ne  voulôs  point  expoler  ain 
n  noftre  toy  à  la  volee:mais  que  nous  la  vou- 
lons referuer  à  Dieu,afîn  que  TobeifTance  qui 
Juy  eft  deue.luy  foit  rendue.Comme  donc  les 
Papiftes  nous  condamnent  en  cela  d'arrogan- 
ce, cognoiflons  que  leur  humilité  eft  diabo- 
lique^: quand  pretendans  d'obéir  à  Dieu  ,  ils 
font  vne  reuolte  manifefte  contre  noflre  Sei 
gneur  Icfus  Chrift:  d'autant  que  c'eft  celuy 
qui  doit  auoir  pleine  authorite  fur  bous  ,  & 
non  point  les  hommes ,  comme  defîa  il  a  efté 
déclaré.  Voila  ce  que  nous  auons  ici  à  rete- 
iiiriSaincl  Paul  adioufte  quant  &  quant,  Q»f 
la  Loy  eft  bonnr  ,  -voire  fi  on  en  -vfe  légitime- 
ment. C'ell  fuyuant  le  propos  qui  a  elté  tou- 
ché ce  matin.  Car  il  auoit  débat  auêc  ceux 
qui  eftoyent  à  demi  luifs ,  &  à  demi  Chre- 
lliens:&pour  fe  faire  valoir,  &  pour  acqué- 
rir quelque  faueur  &  réputation  ,  faifoyent 
ombre  de  la  Loy  .Saindi  Paul  v  auoit  efté  en- 
feigné  dés  fon  enfance,comme  nous  fçauons, 
&  y  eftoit  aflez  exercé  :  mais  il  voyoït  bien 
que  ceux-ci  auoyent  peruei  ti  &  corrompu  la 
Loy  de  Dieu  :  pource  qu'il  n'eftoic  point 
queftion  de  cercherlà  ni  doftrinede  falut, 
ni  règle  de  bien  viure  &  fainftement  :  mais 
des  fpeculations  vaines  &  inutiles. SainftPaiil 
euft  bien  fait  du  fubtil  quant  &  quant  s'il  euft 
voulu:mais  c'euft  efté  faire  d'vn  diable  d'eux, 
que  cela.  Il  ne  faut  point  que  nous  entrions 
en  telles  contentions  pour  i'çauoir  quel  fera 
le  plus  fort  ,  &  qui  l'emportera.  Car  cepen- 
dant que  la  parole  de  Dieu  fei  oit  tirée  com- 
me par  les  cheueux,  tout  feroit  prophané. 
Ainii ,  fainft  Paul  voyant  que  ceux-ci  fai- 
foyent bouclier  du  nom  &  du  titre  de  la  Loy, 
n'a  pas  voulu  faire  le  femblable  :  mais  il  les  a 
rembarrez ,  leur  monftrant  qu'il  n'eftoit  cn- 
semi  de  la  Loy.  Et  puis  il  adioufte  que  tant 
s'en  faut  qu'il  prétende  d'abolir  la  Loydon 
née  par  Moyfejquepluftoftill'approuuepar 
la  doârine:car  tout  ce  qu'il  prefcne,eft  con- 
forme pleinement  à  la  Loy  ,  &  s'y  accorde 
tresbien.  Voila  en  fomme  ce  que  fainû  Paul 
dit.  Or  pour  mieux  entendre  la  déduction  du 
propos,ilditpour  le  premier, Que  la  Loy  eft 
bonne,  voire  fi  on  en  vfe  légitimement.  Ce 
mot  de  Loji  &  légitimement ,  ont  conformité 
enfemble:comme  s'ildiioit.La  regleeftbon- 
re,voirt  fi  elle  demeure  régulière  :  mais  fi  vn 
.k  >mme  defreglé  met  en  auant  ce  mot  de  rè- 
gle,c'eftvnc  puie  moquerie  .  Pourtant  qu'on 
cognoifle  quel  t  It  l'vfage  de  laLoy(dit  fainâ 
Paul)car  nous  ne  fommes  point  en  difpute  fi 
il  nous  faut  tenir  la  Loy  de  Dieu:c(  la  doit  e- 
ilrc  côclu  entre  noiis.Q_ni.iy  donc?  Qi[e  nous 
fçachions  quel  eitl'vfage  naturel. Voila  l'in- 
tention de  fainrt  Paul. Lequel  adioullc  quant 
ic  quant,  que/rt  Loy  n'efl  jijs  donnée  aux  iu- 
Jies.Qae  ne  la  font-ils  fcruir  comme  ilappar 
tient?Car  la  Loy  de  Diea  eft  comme  vne  bri- 


M  E     SERM  ON 

de  pour  retenir  nos  cupiditez  mefchanteî^ 
Voila  les  hommes  qui  font  comme  beftes  fau 
uages ,  ilslafchent  la  bride  à  leurs  appétits: 
l'vn  eft  contempteur  de  Dieu,l'autre  eft  pro- 
phanc.ne  fçachatque  c'eftdevraye  religion: 
l'autre  eft  desbordé  &  diflolu  en  toute  fa  vie, 
l'autre  eft  vn  larron,l'a;itre  eft  vn  paillard, & 
s'il  y  a  encore  des  vices  plus  énormes  iufques 
à  bougrerie,*:  autre  telle  infcûion(dit  fainft 
Paul)  c'eft  1;\  qu'il  faloit  appliquer  la  Loy  de 
Dieuàfon  vïage.Que  ceux  qui  font  ainndef 
bordez ,  que  le  diable  a  enflammez  en  leurs 
mefchantes  afFeÛions,  que  ceux-là  facent  fer 
uir  la  Loy  de  Dieu  pour  fe  brider,  &  fe  rete- 
nir,&  fe  captiuer,afin  que  les  vilenies  du  dia- 
ble ne  dominent  plus  en  eux.  Or  nous  pou- 
uons  bien  prcfumer  que   ceux-ci   aufquels 
fainft  PaulparIe,eftoyent  entachez  de  beau- 
coup de  vices ,  &  que  c'eftoyent  gens  de  vie 
mefchante:&  neantmoins  qu'ils  faifoyent  les 
grans  zélateurs. Comme  auiourd'huy,  ievous 
prie,  quelles  gens  trouuera-on  plus  vileins  Se 
énormes  que  les  moines,  &  tous  ces  doôeurs 
Sorboniques  ,  tous  ces  bons  fuppofts  de  ctft 
Antechrift  Romain :brief,tous  ces  caphars.S: 
ceu'':  qui  auiourd'huy  maintienent  la  Papau- 
té? Q\iandils  entrent  en  chaire  parlans  aux 
beftes  brutes.côme  ils  tiencnt  leurs  auditetlrs 
en  telle  ignorance  ,  que  là  on  ne  iuge  ne  de 
blanc  ne  de  noir:  ils  font  leurs  belles  préfa- 
ces,Comment?Ces  Luthériens  voudroyint  a- 
neantir  toute  honnefteté, qu'il  n'eft  plus  que- 
ftionde  difciplinc  cntr'eux,  qu'ils  voudroyét 
qu'on  mangcaftde  la  chair  au  vendredi.qu'il 
n'y  a  plus   iînon  vne  licence  charnelle  ,  qne 
tout  eft  là  desbordé  ,  qu'ils  veulent  qu'on  fe 
marie,&  qu'il  n  y  ait  plus'  ce  fainil  eftat  Arge 
lique  de  perfeilion  ,  qu'ils  ne  demâdent  finon 
tout  plaifîr  à  leur  chair  ,  &  qu  il  n'y  ait  pins 
de  façon  de  viure  qui  foit  vrayeincnt  fpi;  itu- 
elle.  Et  puis  quand  nous  parlerons  que  nous 
fommes  iuftifiez  par  la  grâce  de  Dieu.  Et  que 
dcuicndront  let  bonnes  auures  ,&lcs  meri- 
tes?Tellement  que  quand  on  orra  parler  tel- 
les gens, il  femblera  qu'il  n'y  ait  fainftcté  que 
entr'eux,&  qu'ils  la  portent  en  leur  marche: 
&  toutesfoit  c'eft  vne  chofe  par  trop  notoi- 
re ,  que  quand  vn  homme  aura  bien  prclché 
de  chafteté  en  chaire, il  tiendra  le  boi  deau  en 
fa  chambre, &  par  toute  la  ville:  que  fi  on  luy 
donne  accès  en  quelque  maifon  ,  c'eft  pour 
tout  empuantir  de  fon  infedtion  .  Voila  quels- 
font  les  zélateurs  de  la  Papauté.  Et  quand  les 
plus  fainds  feront  examinez  ,  on  t:ouucra 
que  les  vns  font  conuaircus  (le  pa;lc'  de  ceux 
qui  font  cognus  &  renommez  par  tout  )  que 
les  vns  feront  conuaircus  de  pariuics.les  au- 
tres de  faufieté,de  larrecinslcs  autres  ne  fe- 
ront nul  fciupulc  de  s'abandonner  à  toute 
paillardife,&  toute  vilenie  :  les  autres  feront 
menez  de  defirs  fi  vilains  &  cnotmes,  lufqucs 
à  cftre  bougres ,  comme  cela  eft  vn  mdlicr 
commun  emr'cux.  Aiufidonc  nous  voyons 

que 


SVR    LA   I.    A    TIMOTH. 


î-^ 


t. 


que  fainft  Paul  a  eu  affaire  à  de  tels  inonftres, 
comme'^  auiourd'kuy  il  y  en  a  en  la  Papauté, 
&  comme  font  tous  ces  aduocats  du  Pape, 
tous  ces  frères  mineurs ,  ces  cKiens  qui  abba- 
yent  à  l'encontre  de  la  vérité  de  Dieu ,  pour 
maintenir  ctft«  tyrânie  infcrnale.C'eftpour 
«juoy  il  dit, Et  bié.me  voici  ici.afçauoir  ti  !'£ 
uangile  tft  contraire  à  la  Loy  de  Dieu  ?  le  di 
que  non:car  qu'eft-ce  que  Ptuangile  annon- 
ce? le  prefche  qu'il  nous  faut  eftrc  reformez 
à  l'nnage  de  Dicu.qu'il  faut  que  l'homme  re- 
nonce à  foy,&  qu'il  mette  bas  toutes  tes  affe 
ûions  s'il  veut  cheminer  comme  il  appartiét. 
Et  quant  à  nos  appétits  mefchaHs,&  quant  au 
mode.que  nous  y  foyons  côme  amortis:  mais 
ue  fur  tout, nous  ayons  cefte  prudéce  de  n'e 
re  point  fages  en  noftre  cerueau,  pour  faire 
ce  que  bon  nous  femblera  ,  ains  que  nous  ap- 
prenions de  nous  addonner  pleinement  à 
Dieu. Voila  la  fomme  (dit  fainùt  Paul)  de  nu 
prédication  quant  à  la  vie  des  hommes. Main 
tenant  ceux  qui  font  des  zélateurs  de  la  Loy, 
quedironivils?  S'ils  veulét  ô  la  Loy  de  Dieu 
foitbien  obfcruce,pourquoy  ne  commencét- 
ils  eux-mefines?Or  ils  viendront  ici  chercher 
des  finfreluches  ,&  conceuoir  des  imagina- 
tions,pour  fçauoir combien  vn  telacud'en- 
fans  après  fa  mort,&  quelle  cil  la  généalogie 
deceftuy-ci.&de  ceftuy-la,&;  i'c  tourmente- 
ront de  beaucoup  de  chofes ,  qui  font  de  nul 
proEt.Et  bien.la  Loy  de  Dieu  en  et  fie  ù  çon 
n'eii-elle  pas  conuertie  à  vn  vûge  prophane? 
Tous  ceux  donc  qui  ne  reçoyuent  point  bon 
ne  infcrsûion  de  la  Loy  ,  n'en  tienent  conte: 
&  pourtant  c'eft  à  ceux-là  à  qui  il  faut  appli- 
quer la  Loy  de  Dieu. Vous  paillars,vous  adul 
tcres ,  vous  diflolus,  &  gens  prophanes  &  vi- 
leins,vous  rebelles ,  vous  contempteurs  de 
Dieu  ,  vous  ne  pouuez  faire  feruir  la  Loy  de 
Dieu  à  réprimer  vos  vices,&  vous  voulez  ne- 
antmoins  contraindre  le  monde  à  garderie 
neiçay  quelles  cérémonies  :  &  cependant  la 
Loy  de  Dieudemeure  là,  comme  fi  elle  auoit 
elle  donnée  en  vain, &  qu'on  le  deuft  anuifer 
à  de--  chofes  qui  ne  ferucnt  de  rien,&defquel 
les  on  ne  reçoit  nul  profit.  A  cefte  heure  nous 
voyons  l'intention  de  ùmâ  Paul.  Or  pour 
bien  fairenoftreprofit  decc  palTàge  ,  notons 
que  quand  les  mefchans  defguil'ent  la  parole 
de  Dieu,  qu'il  ne  faut  point  pourtât  que  nous 
en  foyons  fcandalifez:  comme  il  y  en  a  beau- 
coup qui  ne  demandent  qu'occafion  de  s'alié- 
ner de  la  venté  de  l'Euangile  ,  quand  ils  vo- 
yent  qu'il  y  a  des^troub'e  .Et  que  teroye-ie? 
difent-ili.Nous  voyons  qu'il  y  a  des  opiniôs 
diueifesjilvaut  mieux  que  le  quitte  la  tout. 
Voila  feulement  vn  feftu,5;  on  en  fera  vn  em- 
pcfchement  (î grand  .qu'on  ne  pourra  pas 
marcher  par  dcflïis.Bnef,  le  monde  cft  lî  dé- 
licat,qu'il  cherchera  pluftoft  de  loin  occafios 
pour  fe  desbaucher ,  qu'il  n'ait  quelque  cou- 
leur pour  s'aliéner  de  l'obeillànce  de  Dieu. 
Mais  au  con  traire  ,  il  nous  eu  ici  moniUé  par 


fainft  Paul,  que  quand  toutes  les  tentations 
du  monde  feroyen:  drt(lees,quc  le  diable  fc- 
roit  de  tels  efforts  qu'il  prendroic  rEfeliti;- 
re  iâincle  a  tors  &  à  trauers,  pour  approuuer 
des  erreurs  &  des  chofes  mefchantes  &  exé- 
crables, tellement  que  la  parole  de  Dieu  fe-^ 
roit  fi  confufe  en  apparence,qu'il  fembleroit 
qu'elle  fu/t  proprement  faite  pour  feiuir» 
donner  couleur  aux  erreurs  &  mefchantes- 
tromperies  des  hommes ,  iî  ne  faut-il   point 
pourtant  que  nous  en  foyons  defgouitee.La 
Loy  de  Dieu  n'eftoit-elie  pas  prophanee  eu 
temps  de  fiinft  Paul  par  ceux  qui  i'aiioyent 
ainù  appliquée  àdcs  chofes inutiles?£tdit-il, 
11  vaut  mieux  que  la  Loy  foit  exterminée, vcu 
que  les  hommes  en  abufent  ainfi  ,  &  qu'on  la 
laifle  là  à  part?Non,non:fain(St  Paul  ne  parle 
pas  ainii  :  car  il  fçauoit  que  Dieu  n'a  point 
donné  ù  Loy  pour  la  mettre  lous  le  pied. La 
Loy  ell  bonne,dit-ii,il  ne  refte  finon  que  l'v- 
fage  en  foit  bon  du  cofté  des  hommcs.Et  ain- 
fi,fuyuant  ccfle  regle,qiic  toufiours  nous  glo 
rifions  Dieu  en  fa  parole,  quand  nous  voyôs 
qu'ilyades  malins  qui  prophanent  l'Efcri- 
ture  fainde,la  corrompant  &  defchirint  par 
pièces:  que  nous  ne  ioyons  point  efmeus  par       « 
vn  tel  fcandalc,  pour  blafphemer  contre  la 
parole  de  Dieu:  mais  que  nous  la  mainte-      , 
nions  toufiours  eflre  bonne  &  fainfte.  Et  de 
fait ,  en  la  vie  des  hommes  sous  trouuerons 
bien  vn  fcandale  qui  eft  pour  nous  rendre  la 
Loy  de  Dieu  oditufe.Et  pourquoyrQ_tie  l'v- 
lage  de  la  Loy  foit  tel  -que  fainft  Paul  dit, 
c'eft  afçauoir  que  les  hommes  foyentconfi- 
derez  en  leur  naturel,  &  que  la  Loy  de  Dieu 
viene,  dequoy  feruira-elle  ;  Pour  nous  con- 
damner.  Voila  pourquoy  fainft  Paul  l'appel-  ^•^«•"•î- 
le  vn  meflâge  de  mort ,  qui  n'eft  finon  pour  7*       ^  ' 
nous  enuoyer  malediûion  &  ruine.  Et  puis 
que  la  Loy  de  Dieu  nous  condamne  tous  ,  & 
qu'elle  ne  nous  la ilTe  nulle  efperance  de  fa- 
lut, quant  à  foy  ,  (le  di  à  foy  félon  qu'elle  eft 
pour  régler  noftre  vie:car  S.  Paul  ne  traitte 
point  là  des  promefies).!!  donc  la  Loy  eft  tel 
le  ,  ne  faudra-il  pas  que  nous  la  hayisions, 
voire  fi  nous  y  allons  à  l'eftourdie  ?  Mais  fi 
faut-il  qu'aucc  nos  vices  nous  cognoifsions 
ce  qui  ett  bon  &  fain(ft:c5me  auf  i  lainct  Paul 
en  parle  au  fcptieme  des  Romains ,  après  a- 
uoir  dit  que  la  Loy  n'apporte  que  damnatiô 
aux  homes,  iufques  à  ce  qu'ils  ayét  foy  en  le- 
fus  Chrift.Il  dit  qu'elle  eft  bonne  &  fainde  & 
vtile:car  ce  mal-la  vient  de  nous,&  non  point 
de  la  côdition  de  la  Loy.Pourtât,quand  nous 
voyôs  les  hommes  eftre  fi  peruers  qu'ils  de- 
ftournét  le  vray  fcns  &  naturel  de  l'Efcriture 
famtleà  leurs  inuenti5s,il  ne  faut  point  pour 
celaque  l'authorité  de  Dieu  ne  de  (a  parole 
foit  amoindrie.  C'eft  ce  que  nous  auons  à  re- 
tenir en  premier  lieu.Cependât  notons  aufsi 
quetous  ceux  qui  prenent  occafiondel'E- 
fcritiu-e  fainfte  ,  d'cftrc  feduits  &  tranfpor- 
tci  en  erreurs ,  font  àcohdamncr  nu  double.' 

c.  liii. 


24  c  I N  cxy  I  E 

Il  eft  vray  que  deuant  les  hommes  ils  pour- 
ront bien  auoir  quelque  ft'btcrfuge,  mais  cela 
ne  fera  rien  deuant  Dieu.  Ho,  i'av  cuidé  bien 
faire, i'ay  voulu  m' enquérir  de  la  venté,  maiv 
il  m'eft  mal  efclicu  .  Voila  qu'allégueront 
beaucoup  de  gens  quand  ils  aurÔt  elle  Icduits. 
Mais  il  eft  certain  qu'ils  ne  font  que  mentir, 
d'autant  que  Dieu  ne  permettra  point  que 
ceux  qui  vicnent  chercher  doftnne  de  luy, 
foyét  leduits.  Pourquoy  ?  l'Efcriture  fainfte 
elt  non  feulement  bône  &  fainfte  en  foy,iviais 
elle  eit  bonne  pour  nous,  elle  eft  vtilepour 
noftre  falut.Car  nous  trouuerons  là  que  Dieu 
nous  ell  vn  bon  maiftre  &:  loyal ,  moyennant 
que  de  noftre  cofté  aufvi  nous  luy  foyons  bôs 
difciples.Mâis  qui  eft  cauie  que  nous  fommes 
ainfi  tranfportez  en  erreurs ,  iînon  nosmau- 
uaisappetis,  oubien  nollre  orgueil?  Les  vns 
voudront  plus  fçauoir  qu'il  ne  leur  appartiêt, 
&leront  precipitans  àuiger  deuant  qu'auoir 
fceu  ce  qu'ils  ne  fçauent  pas:les  autres  hetil- 
lent  touiiours,&  ne  demandent  iînon  d'inuen 
teriene  fçay  quoy  de  ncuueau.  Voila  qui  eft 
caufe  que  ibus  ombre  de  l'Elcriture  iaintle 
beaucoup  de  gens  fout  ftduits  :  mais  tant  y  a 
que  il  nous  venons  à  Dieu,  le  rcquerans  à  bon 
elcient  &  en  toute  humilité,  qu'il  accomphra 
"^Jfi.ii^.  ce  qui  eftditau  Pfeaume  ,  c'eftai'çauoir,qu'il 
■fera  ledofteurdes  hûble;.  &des  petis.Et  pour 
tant,  faut-il  craindre  que  noUî  foyons  trom- 
pez quand  nous  aurôs  Dieu  qui  fera  offîcede 
jnaiftre?ll  ne  refte  donc  iînon  que  l'vfagede 
l'Efcriture  fainûe  foit  bon,  c'ft  àdire,  que  ce 
■e  foit  point  pour  attirer  ànos  fantafies  la 
parole  de  Dieu:  mais  que  nous  regardions  en 
toute  pureté  ce  qui  eft  là  contenu,  que  nous 
prions  Dieu  que  par  fon  fain£l  Efprit  il  nous 
iedare  fa  volonté  ,  i'çachans  que  comme  l'E- 
fcriture fainctc  n'a  point  efté  donee  des  hom 
mes,&  qu'elle  n'eft  peint  creueen  leur  iardin, 
qu'aufsi  l'expoiîtion  n'appartient  point  aux 
créatures,  que  c'eft le  fainétEfprit  qui  nous 
déclarera  ce  qui  eft  là  contenu.Qjjand  nous  y 
procéderons  en  telle  forte ,  foyons  afleurez 


ME    SERMON 

que  Dieu  ne  permettra  iamais  que  nous  trou- 
uions  la  Loy  autre  qu'elle  eft  ici  déclarée  par 
lamcf  Paul,c'ertai"çauoir bonnet  telle  qu'il 
n'y  arien  qui  ioit  àieietter,  d'autant  qu'elle 
nous  eft  vtiie.Et  cependant  apprenons  de  ré- 
primer nos  mefchantes  affettiôs.cognoiflàns 
que  Dieu  nous  a  voulu  brider,  comme  des  be- 
ftesfauuages.  Il  cftvrayque  ceci  ne  fe  peut 
pas  maintenant  déduire  au  long, mais  lî  tft-ce 
qu'il  nous  faut  toucher  ce  mot  pour  la  fin, que 
pour  eftrc  bons  difciples  de  la  Loy , il  faut  que 
vn  chacun  regarde  à  ioy  ,&  que  nous  cognoif- 
fions  que  nous  auôs  beibin  d'eftre  bridez  fous 
le  feruicede  noftre  Dieu  :  que  pour  faire  va- 
loir la  Loy  à  noftre  viage,il  faut  q  nous  capti 
uions  toutes  nos  mefchantes  cupiditez,  &  re- 
noncions à  nos  affcdions  charnelles.  Voila 
doue  comme  il  nous  faut  appliquer  la  Loy  à 
noftre  vfage,&:  nous  trouuerons  ce  due  dit  ici 
fainit  Paul, eftrc  veritablc;c'eft  afçauoir,que 
la  Loy  tft  donnée  pour  reprouucr  toute  iniu- 
fticc&  toute  iniquité. Cognoiflons  donc  que 
nous  fommes  coulpaliles  en  tant  de  fortes  de- 
uàt  la  maiefté  de  nolhe  Dieu, que  nous-nous 
humilions  lous  icclle,nous  addonnas  du  tout 
à  Ion  feruice, comme  nous  luy  deuons  eftre  fu 
lets  en  toute  noftre  vie.     A„ 

Or  nous-nous  profternerons  deuant  la  fa- 
ce de  noftre  bô  Dieu  en  cognoiflànce  de  nos 
fautes ,  le  priant  qu'il  luy  plaife  nous  en  tou- 
cher en  telle  forte ,  que  nous  y  defplaifans 
nous  recouriôs  à  luy,&  qu'en  nous  acceptant 
par  là  bonté  gratuite,  il  nous  pardonne  toute 
les  offen fes  quenouî  auons  commifes  par  ci 
deuant,  &  que  tout  le  temps  de  noftre  vie,  il 
face  que  nous  foyons  côformez  à  luy. Et  d'au 
tant  que  nous  fummes  en  ce  monde  comme 
en  vn  chemin,que  nous  approchîos  touliours 
déplus  enplusdecebutqui'nouseft  propofé, 
lufques  à  ce  que  foyt)ns  paruenus  en  ccfte  vie 
celefte,  ou  il  nous  commande  &  de  tendre  &. 
d'afpirer.Qjoe  non  feulement  il  nousface  ce- 
fte  grâce,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  na- 
tions de  la  terre,&c. 


CINQJ/IEME      SERMON     SVR      LE 

PREMIER     CHAPITRE. 

8  Or  nousjcduos  que  la  Loy  ejl  honcfi  aucun  en  v/f  legithnemet, 

9  Scdcham  que  la  Loy  n  ejl  pas  mife  au  iujle ,  mais  aux  imujles 
ç;^  rehelles ,  aux  mefchans  (f  pécheurs,  aux  contempteurs  ^  propha- 
nes,aux  batteurs  de  père  (:/  de  mere,aux  meurtriers, 

10  Auxpailîars,auxhougres,auxrobeurs  degensaux  metcurs, 
aux  pariures,  (f  s'ily  a  quelque  autre  chojc  qui  foit  contraire  à  la  faine 
docîrine. 

Il      Qui  cjî  félon  fEuangile  de  la  gloire  de  Dieu  hencit ,  lequel 
ni  e(l  commis. 


Dunanchc 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH. 


^5 


Imanche  pafle  nous  tnon- 
I  fti-afiiies  à  quel  propos  faiiift 
'  Paul  dit  rci,  Ciue  la  Loy  n'a 
I  pas  efté  cftdblie  pour  les  iu- 
\  llesx'cfl  cju'il  voiiloit  dor- 
ure la  bouche  à  fes  ennemis, 
'  qm  eulTét  voulu  faire  à  croi 
re  aux  fimples  Se  ignorans,  que  fon  intention 
eÛoitd'aboJir  la  Loy  de  Dieu, que  c'eftoit  vn 
apoAat  qui  ne  dcmar.doit  fînon  de  mettre  en 
auant  vne  doctrine  nouuellt  Se  eftrange.  IM- 
poftre  p  jur  repouirer  vne  telle  calônic  mon- 
tre qu'il  n'ha  nulle  occalion  de  hayrla  Loy 
de  Dieu.ne  de  la  reietter.Pourquoy?d'autant 
que  Ja  doftnne.  qu'il  prcfchoit,s'y  accorde 
tresbicn:  &  qui  plus  eu,  que  cela  cft  pmfé  de 
celle  fontaine. Car  l'£uâgile  n'eft  pas  vne  do 
ftnnerspugnante  àla  Loy  que  Moyfe  auoit 
publiée  au  nom  de  Dieu. S.  Paul  donc  môftre 
que"tout  ce  qu'il  enfeigne.n'eft  iîné  pour  ap- 
prouuer&  ratifier  ce  qui  ellcôteru  en  la  Loy 
de  Dieu.  £t  à  Topponte,  il  taxe  {es  ennemis 
qui  auoy ent  ilclguifé  la  Loy  de  Dieu.ne  cher 
chans  rien  linon  ce  qui  pouuoit  feruir  à  leur 
vaine  gloire. Car  pour  fe  faire  valoir.ils  aoo- 
yent  de  belle;  paiades,&  cependant  il  n'y  a- 
uoit  nulle  inllruiliô  qui  fui}  profitable  pour 
le  fàlat  de  ceux  aufquels  ils  parloycnt.S.Paul 
donc  déclare  en  fomme,Qjie  la  Loy  cft  bon 
ne.Voirc.mais  il  faut^dit-il)quel'vfagefoit 
côforme.  £n  quoy  il  monltre  que  fi  les  mef- 
chans  corrompent  &  peruertilïent  la  parole 
de  Dieu.qu'ils  ne  peuuét  faire  qu'elle  ne  loit 
touhours  bonne  &  vtile.  Or  c?éft  vn  poinû 
(côrae  alors  il  fut  dit)  qui  eft  bien  digne  d'e- 
ftre  noté:car  par  là  nous  foinmes  aduertis  de 
ne  faire  pas  côme  beaucoup  de  gens,iefquels 
quâd  ils  voyét  que  la  parole  de  Dieu  eft  tour 
née  ç.i  Se  là.feroyent  cocens  d'auoir  quelque 
couuerture  pour  ne  fe  plus  enqu.'rir  de  la  vé- 
rité de  Dieu,mais  pour  mefprifer  toute  reli- 
gion.Car  voila  l'excufe  qu'ils  prenent,  qu'il 
leur  femble  qu'ils  feroyet  en  danger  de  s'en 
uelopper  en  beaucoup  d'erreurs ,  pource  que 
la  parole  de  Dieu  eil  obfcure,&  qu'ô  ne  Cçait 
âquel  vlâge  on  ladoit  appliquer.  Ceux  qui 
clierchent  telle  occafion,  ne  laiflcnt  pas  d'e- 
ftre  à  condamner  :  car  ici  S. Paul  nous  mon- 
ftre  s'il  y  a  des  gens  malins  quidcltournétà 
leur  mefchante  fantafie  la  vérité  de  Dieu ,  ce 
n'elt  pas  pourtant  qu'elle  en  vaille  pis  ,  ne 
qu'on  la  doiue  reietter:mais  cognoiiTons  IV 
fage,regardons  au  but  que  Dieu  nous  propo 
fe,&ilell  certain  que  fi  nous  tendons  îàd'v- 
ne  affeûion  droite  &  fans  Kypocrifie,  iamais 
Dieu  ne  permettra  que  nous  foyôs  trompez 
ne  feduits.C'eftdonc  côme  nous  trouuerons 
toufiours  bonne  inlhuâion  &lainÛeenrE- 
fcriture:&  Dieu  nous  donnera  cefte  pruden- 
ce.moyennant  que  de  noftrebon  gré  nous  ne 
fermions  point  les  yeux,^  comme  ceux  qui  ne 
demandent  finon  qu'on  les  abufe.  Et  voila 
côinc  le  poure  inonde  a  e&é  aiu£  mal-mcné 


de  tout  temps. Les  homes  font  dignes  que  le 
diable  ks  tranlporte.sMs  nepeuuent  fouifrir 
que  Dic*  les  enfeignc:  pourccqti'ils  ne  s'af- 
fiiiettiirent  point  .1  luy,  &  ne  vicnét  point  auf 
fi. à  lonefcole  en  telle  rondeur  qu'il  ferort 
requis.  Mais  fi  nous  demandôs  d'ellre^delc- 
ment  enfeignez,  Dieu  nous  tendra  la  main,& 
nous  monftrera  que  la  parole  nous  eft  vtile, 
quoy  qu'il  en  foit. Cependant  on  pourroit  ici 
faire  vne  queftion ,  Cément  c'cft  que  S.  Paul 
dit.Que  la  Loy  n'eft  finon  pour  les  iniuftes. 
Car  il  Jtmble  qu'il  vueille  exépter  de  ce  nom 
bre  vne  partie  des  homes, côme  s'il  s'en  trou- 
uoit  de  tant  iuftcs, qu'ils  n'euflcnt  plus  befoin 
de  bride. Mais  nous  fçauôs  que  depuis  le  plus 
grand  lufques  au  plus  petit  nous  Tommes  tous 
coulpablcs  quant  à  Dieu:&  tant  que  nous  vi- 
uronsau  monde  il  n'y  a  celuy  qui  n'ait  beau 
coup  d'infinnitez  Se.  de  vices. Puis  qu'ainfi  efl: 
donc ,  quelle  perfedion  voulons-nous  cher- 
cher aux  hômes?Pourquoy  eft-ce  que  S.Paul 
dit.Que  la  Loy  n'eft  point  donnée  pour  les 
iuftes:  Pour  rciponle,  il  n'eft  point  queftioa 
de  difputer  en  gênerai  de  Tviage  de  la  Loy: 
elle  nous  condamne  tous  ,&  nous  prononce 
maudits,d'autant  que  nou's  fommes  tous  com 
pris  en  ccjte  r.ice  d'Adam, qui  n'emporte  que 
corruption  &  peruerfitc.La  Loy  donc  adiour 
ne  tout  le  monde  deuant  Dieu,  &  fans  en  ex- 
cepter vn  feuhelle  condamne  tous  les  enfans 
d'Adam,  &  monftre  qu'ils  méritent  que  Dieu 
les  reiette,qu'ils  n'ont  autre  attete  ni  efpoir,^ 
finon  d'cftre  aby  fmtz  au  feu  éternel. Ceft  en 
premier  lieu  pourquoy  la  Loy  de  D.eu  nous 
eftdonnee. Maintenant, voyant  que  Dieu  fou 
«iroye  ainfi  fur  nous ,  il  faut  que  nous  recou- 
rions à  cefte  mifericorde  qui  nous  eft  offerte 
en  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  veu  que  fans 
icelle  nous  ferions  perdus  &  damnez  du  tout, 
La  Loy  de'Dieu donc  nousdoit  elpouanter, 
quand  elle  nous  monftre  que  nous  fommes 
dignes  que  Dieu  exerce  fa  vengence  horrible 
fur  nous  :  Se  cela  fe  fait  ,  afin  qu'eftai^s  hiuni  - 
liez  nous  cherchions  noftre  film  en  noftre- 
Seigneur  lefus  Chnft,veu  qu'en  nous  il  n'y  a 
que  puie  damnation.  Voila  pour  vn  item. Or 
encores  que  Dieu  nous  ait  fait  la  grâce  d'a- 
noir  quelque  bonne  affeôiou  &  defir  de  che- 
miner félon  fa  volonté  &iuftice  ,  encores  a— 
nons-nous  befoin  d'eftre  picquez  &  fbliciter 
parlaLoy.  Vray  eft  que  les  enfans  de  Dieu 
font  exemptez  de  cefte  maledi£tiô  dont  i'ay 
touché  :  ils  ne  font  plus  effrayez  ,  comme  fi 
Dieuleur  eftoir  contraire, &  qu'il  vouluft  fai- 
re office  de  iuge  pourvferde  rigueur  con— 
tr'eux;non,car  ils  fçauent  qu'ils  font  affran- 
chis dé  cefte  malediâion-la  ,  par  la  grâce  de 
lefiis  Chrift.  Et  comme  dit  fainft  Paul,  lefus  Colj-if 
Chiiftenla  croix  a  d'efchiré  l'obligé  qure— 
Itoit  contre  nous,  &  l'a  attaché  là,  &  l'a  can— 
cellé,afin  que  quad  nous  viendrons  deuant  le 
fiege  iudicialdeDieu,  nous  foyons  quittes  St 
abfous.Les  £deks  donc  auront  bien  cefte  ai* 

d.i. 


tS  CINQ^VIEME   SER  M  O  N 

ieurance,  qu'ils  ne  feront  point  tiiittezde  iance,comn:îe il  eft  efcrit aux  Prophètes, tant  Uf.ij.js; 
Dieu  ielonia  rigueur  de  la  Loyanairccpeii-  en  Icrcmie  qu''en  Ezechiel ,  où  nolhe  Sci- E:tf.  3s 
liant, il  l:''-ut-il  que  Dieu  les  poulie  touliours  gneur  dit,  Qjig  Dieu  engrauera  Ûl  Loyeni^; 
comme  par  force, tl'autant  qu'il  y  a  beaucoup  nos  cnnailles  ,  qu'elle  ne  Icra  pas  feulement 
de  fuperfluitez  en  eux  :  &:  il  n'y  a  ctluy  de  el'cnte  deuant  nos  yeux, mais  nous  l'aurons  la 
nous  qui  nercxpermiciitc  par  crop.Car  coin  dedans, en  l'o.te  que  noftre  vie  s'y  conforme- 
bien  que  nous  ayons(ainli  que  S.Paul  rraitte  ra.lans  qu'on  nous  y  poufle.  ne  qu'on  nous  y 
au  feptieme  des  Romains)  quenous  ayons,  contraigne. Au  contraire,  ceux  dont  U  ell ici 
di-ie,  vne  loy  qui  nous  conduit  rt  incn.pour-  parle.al'çauoir  qui  n'ont  que  Heite,  &.  vnema 
ce  que  Dieu  nous  a  rt-gencrez  pai  Ion  fainiè  lice  oblhnee  en  cux.ils  ont  btloin  d  eftre  te- 
Elpnt  ,  en  forte  que  nous  aimons  à  le  feruir  nus  comme  enclsaincz  amii  que  bcftes  lauua- 
&;  honorer,toutcsfois  il  y  a  vne  loy  contraire  ges.  Car  nous  voyons  comme  ils  s'efgarcnt, 
en  noftre  nature, c'ell  ai  yauoir  que  nous  lom  &  qu  ils  fe  hurtët  à  l'cncôtre  de  Dieu. Il  faut 
mes  enclins  &addonnez  par  trop  à  rébellion,  donc  qu'ils  foyent  reprouuez.  d'autant  qu'ils 
Il  faut  donc  que  la  Loy  de  Dieu  nous  donne  ne  fe  veulent  point  un  nJre  à  la.fon.ih  ne  veu 
toufiours  que lque»iiguillon  pour  nous  folici-  lét  nullemét  s'alTuiettir,il  taut  que  Dieu  fou- 
ter  à  bien.  Voila  corne  la  Loy  dcDieuelldô-  droye  al'encontred'eux  :&:  ceux-là  ontoc- 
nee  à  tous  en  gênerai ,  voire  en  deux  fortes,  caiîon  (combien  qu  ils  n'ayent  lufte  «aufe)dc 
Premiereinét.c'eltcn  maledicl:iô,en  la  mort:  hair  la  Loy. Il  y  a(di-ie  vne  occafié  mauuaile 
Se  puis  quandDieu  nousa  relcuez  de  ceAe  cô-  qui  procède  de  leur  vice  :  car  il,  le  delpitcnt 
damnation-là  ,  il  faut  qu'elle  nous  folicite  à  Si  cliagr  nent  ,  voyans  que  Dieu  leur  eft  ainii 
bicn,cS;qu'vn'chacun  s'efforce, voyant  comme  contiaire,  Se  qu'il  ne  leur  donne  pas  licence 
Dieu  veut  corriger  nos  vices, &  qu'il  nous  en  d'exécuter  toutes  leurs  ordures  &  vilenies, 
redargue  ,  &  qu'il  y  fe  de  menaces  afin  q  nous  Voila  donc  qui  font  les  vrais  ennemis  de  la 
ne  foyoïis  point  endurcis. Mais  cependant  .S.  Loy  dont  faind  Paul  parle  ici.  Et  c  elf  vne 
Paul  parie  ici  d  vn  autre  viage  de  laLoy ,c'efl  cliofe  qu'il  nous  taut  bien  iioter^car  combien 
afjauoir  de  contraindre  corne  par  force  ceu.ï  que  les  fidèles  apperçoyucnt  que  la  Loy  de 
quine  fe  veulét  point  renger  à  Dieu  enfaçon  Dieu  les  picque  &  les  poingt,li  i-it-ce  qu'i'ls  y 
que  ce  foi t, ou  bien  pour  les  rendre  inexculâ-  trouuent  vne  telle  douceur, que  ceile  amertii 
blés  &conuaincus,ou  bien  pour  leur  taire  hô-  me-la  ne  les  en  defgou/te  po.nt,  qu'ils  aimét 
te,  ou  bien  pour  les  marquer  délia  comme  au  mieux  que  Dieu  les  chaftie,cu  qu'il  les  mena- 
doigt, attendant  que  leiir  honte  foitplusdef-  ce, qu'il  defcouure  leurs  pouietez.qued'eftre 
couucrtedcuant  les  Anges  de  paradis,  &;  de-  enfeuelis  en  leurs  corruptions.  Voila  comme 
uât  toutes  creaturesicar  nous  en  voyôs  beau-  les  tidilcs ,  combien  que  leurs  appétits  char-  0 
coup  qui  ne  fe  veulent  nullement  alluiettir  à  nels  defiralTent  d'e/tie  flattez,  demâdent  ne- 
DKu.Q_uadon  les  adinonefte  de  leurs  vices,  antmoins  d'cftre  corrigez  parla  Loyde  Dieu, 
alors  ils  grincent  les  dens,ils  teinpcltent&  fe  &  s'y  offrent  volontairement  ,  &  reçoyucnt 
defpit£nt:brief,iU  monftrtnt  qu'ils  lont  pluf  en  toute  douceur  &  patience  les  admonitios 
toit  feniblablev  à  belles  enragées  qu'à  créa-  qui  leur  font  faites.Les  mefthans  au  contiai- 
tiires  Jumiaines  .faintt  Paul  parle  maintenant  re  que  font-ils  .=  Ho  il  n'cit  queltion  que  de 
de  telles  gcns,quâd  il  dit,CVue  la  Loy  clt  do-  regimber  à  l'encontre  ,  &  defpiter  Dieu  ;  & 
née  pour  eux, comc  pour  le»  enchainer-.d'au-  quand  ils  voyent  que  la  parole  de  Dieu  les 
tant  qu'ils  ne  pcuucnt  nullement  de  leur  bon  prtfre,ils  entrent  alors  en  vne  rage  plus  que 
gré  fe  renger  a  Dieu,  qu'iK  ne  peuuent  plier  brutale  :  nous  voyons  cela  à  l'ail.  Et  e'elî: 
le  col, qu'ils  ne  peuuét  clcouterraifon:pour-  pourquoy  il  y  en  a  il  peu  qui  puilTent  louffnr 
te  que  combien  que  les  fidèles  ayent  en  eux  que  la  parole  de  DiCu  fi;  prefche  en  fi  vertu 
beaucoup  de  contraditlion,  &  qu'ils  ne  puif-  telle  qu  elle  doit.  Ile  fi  vrayqucpar  cercmo- 
fent  pas  s'appliquer  à  bones  Gcuures  fans  grâ  nie  on  fera  content  qu'on  face  des  fermons, 
«le  dithculté,)!  Cil-ce  neantmoins  que  chacun  &;  que  nous  ayons  le  nom  de  l'Euangile.Mais 
d'eux  ha  corne  vne  loy  efcrite  en  foncœur,  qucyrC^tudii  y  aura  vne  viiucité  dcl'Efpnt 
^u'il  ne  laiit  point  qu'ils  foyent  reprins  d'ail  de  Dieu,  voila  les  murmures  qui  s'eleuent  tat 
leurs  :  mais  ils  ont  leur  tefmoin,  que  quand  il  que  c'cfl  pitié.  Et  quel  Euangile  taudra-il 
n'y  auroit  nulle  efcritiire, qu'il  n'vauroit  nul  d  orefenauant  ,  pour  contenter  telles  gens? 
fermon,  vn  home  qui  fera  touclie  de  l'Ef'prit  Ho  qu'on  ait  des  bafteleurs  qui  louent  ,  c'cll 
de  Dieu, ne  laiiiera  pas  pourtit  de  cheminer  alîcz,il  ne  faudra  phis  ci  après  d'autre  parole 
tome  il  doit.  Car  ce  dclir  qu'il  ha  d'honorer  de  Dieu  que  les  bafteleurs.  Car  on  voudroit 
fon4>ere  £clelfe,luy  eit  come  vne  loy  &  vne  que  la  doctrine  de  1  Euangile  fuit  côuertie  en 
règle  volontaire.  Il  ne  faut  point  donc  que  ieu  &  en  baitelerie, qu'il  n'y  cuft  plu .  de  chai 
nous  ayons  ne  papier  ne  parchemin, il  ne  faut  res  linô  pour  y  mettre  des  bafteleurs, &  pour 
point  q  nous  ayons  lesaureilles  battues  pour  prophaner  tout :&  ce  font  les  pvefcheurs  que 
nous  attirer  àDreu  par  forcermaisqu.id  Dieu  vous  defîrez.  Et  bien,  bien  ,faouleivouj.  Et 
nous  inllruit  ainli  par  fon  fainttEfprit  ,il  faut-il  ainfî  prophaner  la  parole  de  Dieu? 
forme  quant  &  quant  nos  caurs  en  fon.  obeif  Mais  encore  ce  n'eft  pas  la  f'ource  du  mal  que 

ceci, 


SVR   LA    I.   A   TIMOTH. 


27 


'  ceci, elle  e/t  pluftoft  ,d''auiant  qu'on  ne  peut 
porter  que  Ic^  choies  que  iaincl  P.uil  met  ici, 
l'oyciit  dt.chitfrets.£t  qii'ainli  lbit,reg,iiûons 
en  piemier  lieu  ceux  qui  fe  desbauchent  ,  & 
qui  ne  veulent  point  de  loy  r.ede  biide.qui 
ne  veulent  receuoir  nulioug.  Saïuft  Paul  les 
nomme  ici  rcbclle^:&:non  lanseaule.Car  où 
eft-ce  que  fe  monflre  vne  rcbcllion  la  plus 
vileine.lînon  quand  les  hommes  ne  veukut 
point  efirc  fuieti  aniillc  lov  ,  lî  ce  nVft  qu'ils 
leiettent  toute  obeiflancc,  &  tout  vouloir  de 
bien  l'aire:  Or  pource  que  cela  pourroit  cfire 
cbilar.iladioufte,  Guis  côttm^liursde  Dieu, 
&  tnefih.ii's.ï'ir  ces  deux  mots,  il  comprend 
la  tranlgrelsion  des  deux  tables  de  la  Loy  de 
Dieu.  Voila,  (dit-il)  les  vns  font  pleinement 
contépteurs  de  Dieu.les  autres  font  melchâs 
enuers  leurs  prochains.  £tpuis  encorcsilfe 
déclare  plus  priueement  par  d'autres  mots, 
difant  qu'ils  font  prophanes,  ou  fans  lainûe- 
té,  &  poilus.  Par  ce  mot  de  Prophane,  il  en- 
tend (comme  aufsi  le  mot  l'emporte)  qu'Us 
n'ont  nulle  crainte  de  Dieu,  ils  n'ont  point 
de  fainâtté  qui  les  rctiene  pour  fe  dédier  à  la 
foy  &àprieres,&àchofes  ft.mblables:&;  puis 
ils  font  dilïolus  &  desbordez  en  toute  Jeur 
vie.  .Sainft  Paul  a-il  parlé  a.nfi  en  gênerai  ?  li 
met  les  efpeces  plus  cômunes  des  vices  énor- 
mes: commed'vn  coflé  il  met  les  meurtriers 
Ct-  outrageux  ,  leshatteurs  de  ftre  O"  tie  mtre, 
les  larrons.  Us  r.tuij]ùurs,  Us  f.iillarS,Us adul- 
tères: \oue&i  parle  mefmes  des  pailJardifes 
énormes  contre  nature :&:finalemétde«  trom 
peurs,  menteurs,  &:  des  pariures.  Voila  ceux 
qui  font  ennemis  de  la  Loy  de  Dieu  :  ceux-là 
tant  qu'il  eft  pofsible  la  hiyent,&  voudroyet 
bien  que  la  mémoire  en  tuft  eftcinte.  Mais 
ceux  qui  aiment  l'Euangile  de  noftre  Sei- 
gneur Icfus  Chrilt ,  aimeront  quant  &:  quant 
qu'on  crie  contre  les  vices,  &fel"oumettront 
à  cela,  non  feulement  d'vn  efprit  paiiible&: 
bénin  ,  maisd'vnefaçondroite&pure:  ils  en 
fçauronc  faire  leur  profit ,  &  béniront  Dieu, 
quâd  il  ne  permet  point  que  leurs  vices  &ini- 
quitez  croupiflent  là  fans  qu'ils  y  penfent,  & 
que  les  péchez  ayent  la  vogue  fans  qu'ils  fo- 
yentchaftiez.  Voila  quelle  eft  l'afFediou  des 
fidèles.  Mais  quoy  r  Ceux  qui  voudroyent 
qu'on  fe  iouaft  feulement  de  la  parole  de 
Dieii,&  que  ce  ne  fuft  plus  que  farcerie,pour- 
quoy  ell-ce  qu'ils  ne  pcuueiit  porter  qu'on 
parle  à  bon  eldent  ,&  qu'on  crie  contre  les 
corruptions  qui  font  toutes  notoires  r  Cela 
leur  fait  mal  aux  aureilles,car  ils  s'en  fentent 
par  trop  entachez. Nous  voyons  auiourd'huy 
les  choies  tant  confiifes  que  c'tlt  pitié.  Car 
quel  cote  tient-on  de  tant  deblafphcmes  qui 
le  defgorgcnt ,  de  tant  de  fcar.dales  qui  font 
<ontrc  l'honneur  de  Dieu,des  propos  vilcins 
qui  fe  tiendront  contre  la  doftnne,&  mcfines 
parmi  les  rues,  qu  entre  les  Turcs  il  y  aura 
plus  d'hônefteté  ,  qu'il  n'y  aura  pas  en  beau- 
coup de  maifons:  Cependant  on  laifle  couler 


toiit  cela  .-  qt.t-  s  li  le  commettes  chofes  qui 
rcdoi.dcnt  a  J'opprobrcdu  nom  deD!cii,c  tiï 
tout  vn  ,  on  ne  s'en  foucie  pas  beaucoup.  £t 
oi:  eft  le  zèle  que  nous  deuonsauoirà  l'hon- 
neur de  Ditu  :  Nous  fommes  au  temps  que 
difoitic  Prophète  Ifaie  ,  Oil'l  "  y  a  nul  qui  j/^  <^^  ^^ 
s'oppole  au  mal  ,  &;  3.  l'iniuflice  :  que  quand 
tout  fera  contus  entie  les  hommes,  nul  n'y 
remédie  :  cependant  les  iuftLS  (éront  oppri- 
mez,le'  inrocens  feront  foulez aax  pieds,  0i 
toi:te  iniquité  aura  la  vogue.  Si  vn  homme 
ofe  ouunr  la  bouche  pour  reprendre  les  vi- 
ces &.dil]o]utiûns, ou  quandonchantcja  des 
chanions  vileincs  Se  infâmes,  &  quelqu'vn  en 
veut  dire  vn  mot  ,  on  luy  fera  à  croire  qu'il 
a  parlé  contre  l'honneur  de  Gencue  :  telle- 
ment qu'il  n'cfl  point  pofsible  auiourd'huy 
dcrepiendre  les  vices  qu'on  ne  foitaccufé 
d'auoir  commis  quelque  grand  cas  .  £t  V(»ici 
vue  mciueillcufo  fair.cletéde  ville  ,  vous  la 
tenez  meut  IfCrce. .  Il  vaudroit  mieux  que 
tout  le  morde  hift  abyfmé  ,  que  de  dire  que 
telles  impictez  fe  commcttfnt,i'ans  qu'on  en 
ofaft  fonneî  mot.Or  ii  n'en  faut-il  point  par 
1er  toutesfois,  ou  autrement  c'til  à  letter  les 
mains  &  les  pattes  fur  les  poures  innocens, 
qu'ils  feront  là  opprimez  iî  cruellement  que 
rien  plus.  Bnef,  les  chofes  font  lî  vileines 
que  c'ell  vne  horreur  :  &:  il  on  le  remonflre, 
ho  c'eft  à  crier  &  à  fe  tempc/ler.  £t  puis  s'il 
y  a  vne  putain, &  que  fonnoari  l'ait  chafliee,  ' 
(le  neveux  point  approuucr  les  verges  &  le? 
coups  quiapparoiffent)ho,i]  faut  qu'on  fça- 
che  que  c'clt.il  y  faut  mettre  remède, on  trou 
uera  là  bien  à  redire:&  cependant  les  poures 
gens   feront  louiez  ,  que   quiconque  ofera 
niainterii  l'honneur  de  Dieu  ,  il  fera  réputé 
pour  ennemi  de  la  ville.  Or  t.int  y  a  que  S. 
Paul  fait  ici  vi  procès  criminel  contre  tous 
vices:&:ne  iiui  pas  que  nous  peniîons  nous 
exempter  de  la  condamnation  qui  eft  appre- 
ftce  à  tous  contempteurs  de  Dieu  ,  quand  les 
choies  demeureront  en  i'cftat  qu'elles  font, 
le  vous  prie  regardons  commet  nous  en  fom 
mes  auiourd'huy:encores  qu'il  n'y  euftpotnt 
de  prefcheurs  ni  de  chaire.encores  que  nous 
n  eufsions  point  d'Euangile  ,  fuyuons  i'cule- 
ment  le  fens  naturel  que  Dieu  nous  a  donné: 
ne  voit-on  pas  les  confuiions  iî  vilenies  que 
nousdeuons  auoir  la  bouche  clofe,au  lieu  de 
leuerla  tefte  pour  nous  monllrer  ?  Et  ne- 
antinoins   on  voit  vne  telle  impudence  par 
tout ,  que  û  on  veut  reprendre  le.  fcandales 
&  diflolutions  qui  fefont  ,  qui  font  plus  que 
notoires  ,  on  fait  femblant  de  n'en  rien  co- 
gnoiftre  :  on  ne  fera  que  torcher  fa  bouche 
de  tout.  £t  qu'cft-ceîquelni.il  y  a-il?  ce  n'tft 
rien.Qu^on  ait  cognu  cent  fois  où  eft  le  mal, 
er.coies  fe;a-on  de  l'ignorant  ,  &  tous  les 
iours  les  chofes  empirent, c'tft  toulîours  à  re 
commencer,  &iamais  fin.  Pource  que  jamais 
on  ne  commence  à  bien  faire, on  n'a  garde  de 
bie«  finir.  Ainfi  donc  ,  quand  les  chofes  font 

d.ii. 


CINQVIEME    SERMON 


18 

ainfi  remoftitiees ,  voila  pourquoy  il  y  i  tant 
de  gens  qui  font  des  enragea.  Et  puisqu'on 
vicne  par  efpecial  aux  autres  corruptions, 
qu'on  viene  aux  haines  &  faueurs, qu'on  vie- 
ne  par  les  efpeces  que  dit  fainû  Paul,  quand 
on  commécera  par  les  contépteurs  de  Dieu 
&  gens  prophanes,&  ie  vous  prie,  les  faut-il 
marquer?  ne  portent-ils  point  aflez  leurs  ar- 
moiries? Et  mcfares  ils  en  font  venus  iufques 
là.qu'ils  en  font  gloirt:il  faudra  tantoft  qu'il 
y  ait  non  feulL-mcnt  vne  contrairie,mais  que 
la  ville  foit  pleine  de  gens  prophanes ,  &  de 
contempteurs  de  Dieu.  Viay  cft  qu'ils  ne  le 
diront  pas.  Mais  quoy  ?  pourquoy  (onimes- 
nous  ici  aireinblez?  pourquoy  ya-il  des  fer- 
mons ?  pourquoy  y  a-il  l'adininillration  des 
SacremeDs?n'eft-ce  pas  pour  rendre  tefmoi- 
gnage  que  nous  auons  religion?£tcependât 
cêux-ci  font  eftatde  reietter  l'ordre  Eccie- 
llaftique,5i  d'en  eftre  ennemis  mortels  :  mef- 
mes  ils  le  prononcent  à  pleine  bouche:  on  co 
gnoift  cela  aflez  &  par  trop  :  &.  cependant  ils 
dirôt  qu'ils  ne  font  pas  contempteurs,  qu'ils 
ne  font  pas  fans  religion.Et  quoy  donc?Q_iie 
ils  facent  quelque  religion  iiouuelle  qui  foit 
contre  nature,&  qu'ils  s'y  tienent.  Et  puis,iî 
on  parle  des  gens  dilToluSjgens  rebeltes,gens 
dcsbauchcz,  ou  poilus  en  toute  leur  vie  :  &  ie 
vous  prie  qu'on  ouure  feulement  les  yeux, 
&  qu'on  ne  les  ferme  pas  encores  qu'on  ne 
les  guigne  vn  peu:ne  regardons  point  à  plei- 
ne veue, mais  guignons  en  paflànt,&  nous  ver 
rons  les  vilenies  li  grandes  qu'elles  nous  de- 
uroyent  creuer  les  yeux.  Et  ainfi  ,  quand  on 
viendra  aux  autres  efpeces,  on  verra  les  pail- 
lardifes.les  yurongneries.les  dcsbordcmens, 
on  verra  les  outrages,  les  violences,  les  iniu- 
res.Etpuis  fi  on  fait  comparaifon  de  la  Loy 
de  Dieu  auec  la  vie  des  hommes,  telle  quel- 
le eft  auiourd'huy  ,  où  en  ferons-nous?  Car 
quant  aux  violences,  commet  ont-elles  la  »o 
gue  ?  Qjii  eft  ccluy  qui  fupporte  les  bons 
quand  ils  font  opprimez?  Que  n or  feule- 
ment on  leur  mange  la  laine  fur  le  dos ,  mais 
qu'on  les  eigratigne,  qu'on  les  deicliire,  que 
on  les  deuore  :  qui  elt-ce  qui  s'oppofe  là?  & 
qui  monftre  qu'il  a  quelque  pitié  ou  humani- 
té en  foy?  Mais  il  n'cft  queftion  finon  qu'vn 
chacun  face  fon  profit. De  fouilcnir  de  mau- 
uaifes  querelles ,  par  trop  :  celuy-la  eft  mon 
frerc.c'eft  moncoufîn  :  brief,on  ne  fera  plus 
de  fcrupulede  deipiter  Dieu  ,  fous  le  nom 
d'vn  compcrage.  Voila  comirtc  le  Baptcfme 
fera  honoré  entre  nous  :  voila  Ja  marque  de 
l'alliance  que  Dieu  fait  autc  ceux  qui  font 
rachetez  du  fing  de  Ufus  Chr  ft:&  on  en  fe- 
ra vnbrigandage:on  voit  cela  à  l'ail  tout  no 
toircmcnt.  Q^'  les  bons  donc  aycnt  ou  aide 
ou  faneur,  il  n'en  eft  point  queftion  :  pluftoft 
on  voit  comme  il-,  font  foulez  &■  opprimez 
fout  manifeftemcnt.Mais  quand  il  y  aura  des 
nu  fchins,  on  leur  tiendiala  main, on  les  for 
jiliera  en  mal:  cela  eft  cognu  par  trop  ,  cha- 


cun le  voit.  Et  puis  s'il  eft  queftion  d'auoir 
quelque  reigle  &  police, il  femble  qu'auiour- 
d'huy  on  vr^ille  dechafler  &  bânir  toute  hou 
nefteté  du  milieu  de  nous.  Car  que  dira-on 
des  chanlons  vileines  de  paillardife  qu'on 
oit  ordinairement ,  finon  que  ce  font  des  in- 
ftnunens  de  Satan,  ce  font  des  flâbeaux  pour 
allumer  à  mal  les  cœurs  des  hommes ,  qui  ne 
font  défia  que  par  trop  embrafez  d'cux-mef 
mes?  Et  nous  voyons  toutefois  comme  elles 
regnent,&que  ni  Pfcaumes  ni  autres  choies 
hôneftes  ne  peuuent  venir  en  vfrge,  quelque 
peine  qu'on  y  mette.  Et  puis  fur  cela  nous 
voyons  comme  les  maqueielages  font  nour- 
ris,&  qu'il  femble  qu'on  ne  demande  que  les 
mettre  en  poflefsion,  en  forte  qu'on  n'y  puif 
fc  plus  remédier  d'orefenauant:  nous  voyons 
celarles  diflolutions  ne  font  que  par  trop  per 
mifes.Et  puis  qu'on  viene  aux  corruptions* 
finefles  ,  aux  tromperies  &  panures ,  tout  en 
eft  tellement  farci  que  c'cft  vne  horreur.  Où 
eft  auiourd'huy  la  verité?Il  la  faudroit  cher- 
cher bien  loin  :  Se  mefmes  il  n'eft  point  que- 
ftion de  mentir  feulement  l'vn  à  l'autre  pour 
circonuenirceux  qui  ne  font  pas  trop  rufez, 
&  qui  ne  veulent  pas  hurler  auec  les  loups 
(comme  on  dit)inais  le  nom  ic  Dieu  ne-fera 
point  efpargné  :  comme  en  la  iuftice  meûnes 
on  ne  verra  que  pariures,  qu'auiourd'huy  on 
fera  de  ce  vice-la  vertu.  Et  ainfi  il  ne  fe  faut 
point  esbahir  s'il  y  a  beaucoup  de  gens  qui 
font  ennemis  de  la  Loy  de  Dieu  ,  &  de  l'Ê- 
fcriture  fainile.  Et  c'eft  aufsi  pourquoy  ils 
crient.  Et  qu'auons-nous  à  faire  de  tant  de 
liures,&  de  tant  de  commentaires?  ils  ne  peu 
uent  porter  qu'on  mette  en  auant  quelque 
chofe  qui  puillè  feruir  à  l'intelligence  de  l'£ 
fcriture  fainde  ,  &  donner  quelque  aide  aux 
enfans  de  Dieu  pour  eftre  mieux  cnfeignez. 
Ho  voila  ,  ils  voudroyent  qu'il  y  euft  feule- 
ment quelque  Alchoran  de  Mahominet  qui 
ne  fuft  point  cognu:&  cependant  ils  ne  laif- 
feront  pas  de  dire,Q_u'on  prefche  l'Euangi- 
le.Et  ie  vous  prie  mefùeurs  les  doâcurs ,  te- 
nez-nous vn  peuefcole,&  qu'on  fçachequel 
Euangilc  vous  voulez  qu'on  prefche  ,  &  en 
quelle  boutique  vous  auez  bafti  ccft  Euangi- 
le. Car  nous  pref'chons  ccluy  qui  nous  eftco- 
niis  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  lequel 
fait  la  guerre  à  tous  obftinez  &  rebelle^. C'eft 
celuy  par  lequel  il  nous  faut  batailler  à  l'en- 
contre  de  ces  bcftes  farouches  qui  font  plei- 
nes de  rébellion  &  de  cruauté  .  L'Euangile 
donc, qui  eft  le  glaiiie  (pirituti  de  Dieu, nous 
a  eité  donné  .i  ctltc  fin-la  :  mais  pource  que 
~vous  dcl'pitez  Dicu&  l'es  Anges  ,  que  vous  le 
mcIprifvZ  manifcftement  ,  que  vous  reiettez 
toute  pof  ce  &  tonte  difcipline,  vous  takhez 
de  mettre  defjrdre  par  tout.  Voila  pourquoy 
vous  ne  voulez  poilYt  de  ceft  Euangilc. Apres 
vous  voulez  entretenir  les  bouidcaux,iX:  que 
on  n'a.t  plus  ne  honte  ne  veigongne  qui 
foit.ne  crainte  aucune ,  que  tout  foit  iî  con- 
fus 


SVR  LA    I.    A   TIMOTH. 


a* 


fits  qu'on  ne  difcerne  plus  entre  te  blanc  & 
le  noir.Apres,qiie  quand  on  viendra  en  uifti- 
ce  ,  iainais  vne  chofe  ne  foit  prouuee ,  finon 
comme voitre  appétit  le  porte.  Vousfçau- 
rez  bien  taire  valoir  ce  nom  de  lulhce  quand 
bon  vous  lemblera.Comment?Faut-il  que  la 
iitilice  foit  ainll  raefprifee?  Ha  cela  fera  ma- 
gnifié pardellus  les  nues, voire  quand  il  fera 
queftiond'autruyiinais  quand  la  iuftice  s'ad 
dreflèàvous.alors  vous  ladefpitez  manifefte 
ment ,  &  mon/Irez  bien  que  vous  n'en  tenez 
pas  grand  conte:  &:  ce  font  chofesaflez  co- 
gnues.  Et  quand  on  voit  qu'il  y  a  vne  telle 
mocquerie  &  de  Dieu  ,  &  de  la  luftice  ,  que 
peut-on  dire  de  cette  belle  profeCion  que 
nous  taifoiis  d'auoir  la  parole  de  Dieu?  On 
aura  bien  la  bouche  ouuerte  pour  s'en  van- 
ter ,  c'efl  meiueilles  comme  vous  deuifez  de 
U.  iuftice.voire  à  ce  que  voftrc  bien  foit  facré, 
qu'on  n'y  touche  point  ,  niàceluy  de  ceux 
qui  font  fous  vos  ailes  :  mais  cependant  que 
il  foit  permis, &  qu'on  ait  vne  liberté  de  pil- 
ler l'vn.d'outrager  l'autre  ,  de  frapper&  de 
^attre,d'iniurier,&  de  faire  tout  ce  qui  vien- 
dra en  fantalie.nous  monftrons  que  tout  ce- 
la ne  doit  point  élire  permis.  Voila  pour- 
quoy  telles  gars  fonttafchez  quand  on  veut 
appliquer  i'Euangile  de  noftre  Seigneur  le- 
fus  Chriit  àfô  droit  vfage&  naturel.  Q_£g  fe 
ra-cedôcde  l'Euagile  li  on  les  veut  croire? 
ce  fera  vne  dodrine  pendante  en  l'air  ,  vne 
choie  confufe.ou  bien  vne  doûrine  qui  nous 
laifle  à  repos  &  à  noftre  aife, qui  ne  nousvie- 
ne  point  ta fcher:  brief,  vnedoftrine  qui  ne 
defcouure  point  nos  vices  &  nos  ordures. 
C'elt  cebel  euangile  fantaftique  que  telles 
gens  voudroyent  auoir.  Qj?on  parle  main- 
tenant contre  les  fuperditiôs  de  la  Papauté, 
maintenant  contre  vn  tel  badinage ,  mainte- 
nant contre  vn  tel  abus',  mais  cependant  que 
on  ne  touche  point  à  nous ,  que  Dieu  nous 
lailTc  là  ,  &  qu'il  fe  retire  bien  loin  ,  que  Ca. 
parole  ne  nous  foit  point  en  fafcherie  ,  que 
nous  n'en  ayons  point  les  aureiUes  battues, 
voila  leur  euangile.  Mais  au  contraire,  il  eft 
dit,  que  tous  vices  font  repugnans  à  la  dodri 
ne  faine.  Car  dequoy  nous  doit  feruir  h  pa- 
role de  Pieu?  c'eitviie  pafturedenosames: 
&  puis  c'eft  vne  médecine.  Nous  auons  le 
painSc  les  viandes  qui  nous  fcruentde  nour- 
riture pour  les  corps  :  la  parole  de  Dieu  a 
l'vfage  tel  enuers  nos  amev  :  mais  elle  em- 
porte encores  plus  ,  c'eft  que  quand  nous 
fomflies  malades  de  nos  vices,  qu'il  y  a  beau 
coup  de  corruptions  &  cupidittz  mefchan- 
tes.il  faut  que  nous  en  fuyonv  purgez  :  &  la 
parole  de  Dieu  nous  fcrt  maintenantde  pur 
ge,  maintenant  de  faignee  ,  maintenant  d'vn 
bruiiage, maintenantde  diette  :  brief,  tout  ce 
q  les  médecins  pcuuent  appliquer  aux  corps 
humains ,  pour  les  guarir  de  leurs  maladies, 
n'eft  pas  vne  dixième  partie  de  ce  que  la  pa- 
Jolede  Dieu  nous  fert  pour  la  fanté  fpiri-;. 


tuelle  de  nos  anies.Pour  cela  fainGt  Paul  par- 
le ici  de  la  (aine  dodrine.  Car  les  gens  cu- 
rieux Siambitieuxlanguillènt  touiiours,  ils 
n'ont  nulle  fanté  en  eux, ils  font  comme  po- 
ures  gens  defgouftez  qui  luccent  &  Icchtnt, 
&,ne  peuuent  receuoir  nulle  nourriture.Mais 
quand  la  parole  de  Dieu  eft  appliquée  à  fon 
droit  v(âge,il  faut  qu'il  y  ait  vn  combat,  que 
il  y  ait  vne  guerre  àl'encôtre  de  tous  vices, 
&  qu'elle  les  condamne  en  Ibrte  que  les  hom 
mes  foyent  touchez  &  naurez  en  eux-mef- 
mes  ,  qu'ili  foyent  abbatus  &  kumiliezauec 
vne  droite  repeniance  pour  gémir  deuanc 
Dieu ,  3c  s'ils  n'ont  autre  chofe ,  que  pour  le 
moins  ils  foyent  conuaincus,  qu'ils  ayent  va 
remors  en  eux-mefmes,  qu'il  y  ait  comme  vu 
cautère  qui  lesbruPe,&que  Dieu  les  perfe- 
cute  en  forte  qu'ils  foyét  en  exemple  à  ceux 
qui  ne  font  point  du  tout  incorrigibles.  Voi- 
la comme  noftre  Seigneur  veut  que  fa  paro- 
le foitapproprieeen  vn'bon  vfage.Et  pour- 
tant notons  bien  ce  mot  quand  S.  Paul  dit 
que  toutes  les  chofes  dont  il  a  parlé ,  &les 
femblablescontreuienent  à  ia  Ciine  doâri- 
He.Et  quelle?  V^oire  ,  dit-il ,  qui  iftfrlon  f E- 
itan^'U  de  ghiri:  Au  Dieu  bénit .  Or  par  ceci 
faind  Paul  a  voulu  magnifier  la  maicfté  de 
I'Euangile  ,  afin  que  toutes  cieatuies  fu/Tcnt 
inftruites  d'cfcouter  ce  qu'il  leur  monftre 
auec  toute  crainte.  Car  nous  voyons  comme 
les  hommes  font  enclfns  à  fe  re6equer:ils  ne 
diront  pas  de  prime  tace,meûnes  ils  ne  pcn- 
fcrôt  pasqu'ils  facent  la  guerreà  Dieu:  niair 
ils  fe  tafcheront  contre  vn  homme  qu'ils  au- 
ront ouy:puis  après  ils  viendront  à  fe  defpi- 
ter  tellement  qu'on  voit  bien  que  le  diable 
lésa  abbrutis,&  qu'ils  font  comme  transpor- 
tez de  leur  fens  :  car  ils  fe  vienent  hurter  i 
rencontre  de  Dieu  ,  ne  fçachans  pas  qu'ik 
font.  Sainft  Paul  voyant  que  cefte  rebeiliou 
des  hommes  elt  telle  ,  qu'il  eft  difficile  deJa 
donter&  ranger  ,  notamment  met  iciena' 
uant,  que  I'Euangile  eft  de  gloire,  c'eft  à  di- 
re que  c'eft  vne  dodrineglorieufe,  en  la» 
3uelle  la  maiefté  de  Dieu  reluit.  Et  puis  il 
!C  Ju  Dieu  btnit. Et  au  refte,il  s'attribue  l'au 
thoritéd'eftre fidèle  miniftre  de  I'Euangile, 
Se  qu'il  a  eftc  choili  à  cela  ,  &  a  exécuté  ta. 
charge  comme  il-deuoit  Or  voici  des  mots 
qui  méritent  bien  d'eftre  pefez.  Car(comme 
t'ay  défia  dit)  nous  voyons  les  hommes  de- 
puis qu'ils  fontenyurez  en  leurs  vices,qii'ils 
ne  (c  peuuent  iailïer  manier,  ils  font  quafi  in 
traittables.  Si  taut-il  abbatre  cefte  fierté-la. 
Et  par  quel  moyen  ?  c'eft  de  leur  faire  fen- 
tir  la  maiefté  qui  eft  en  la  parole  de  Dieu. 
Car  nous  ne  pouuons  pas  nous  ranger  là ,  fi- 
nonque  Dieu  nous  y  attire  ,&  qu'il  magnifie 
luy-mefme  fa  parole,&  qu'il  l'intitule  en  for 
te  que  nous  ne  foyons  plus  fi  ofez  ne  fi  har- 
dis de  lavilipender.Maintenant  nous  enten- 
dons pourquoy  faind  Paul  dit ,'  L'Euangiie 
n'eftpas  vne  dodrine vulgaire,  cen'eftpai 

d.ui. 


30 


CINQVIEME     SERMON 


vne  choCe  dont  il  fe  faut  iouer  .  Ileft  vray 
que  Dieu  voudra  que  fon  £uagile  fe  prefche 
parles  hommes  qui  font  créatures  fragiles, & 
fouuent  de  petite  valeur ,  qui  feront  comme 
reiettez  :  mais  pour  le  pot  qui  ne  vaudra  que 
vn  liard,  faut-il  qu'vn  threfor  qui  fera  caché 
dedans,  en  foit  pire  ,  ou  qu'il  amoindriire  de 
fà  valeur?  L'or  vaudra-il  moins  pour  le  vaif- 
feau  auquel  il  eft.'On  fçait  bien  qucnon.Ain- 
il  donc,combien  que  noftre  Seigneur  nous  en 
uoye  fa  parole  par  des  hommes  mortels,  fi 
ne  faut-il  point  que  pour  cela  nous  prenions 
occalîon  de  n'en  tenir  conte.  £t  pourquoy? 
Car  c'eft  toufîours  la  Parole  gloneufe  :  que 
s'il  y  amaiefté«n  Dieu,ilfaut  qu'elle  foit  ici 
cognue  ,  &  quiconque  fe  mocquera  de  cefte 
parole  ,  c'eft  autant  comme  s'il  talchoit  de 
cracher  contre  la  face  de  Dieu,  ou  gvi'il  luail 
des  pierres  contre  fon  fiege  royal.  Il  eft  vray 
qu'il  ne  fera  point  pofsible  aux  hommes  d'at 
teindreiufques  là  :  mais  ils  s'efforcent  de  le 
faire  entant  qu'en  eux  eft.  Et  c'eft  pourquoy 
fainft  Paul  en  l'autre  paflage  nous  inonftre 
.- _•  quecen'ertpoint  peu  dechofe  d'auoir  ainlî 

*■  ""  ■  en  mefpris  la  doûrine  de  l'Euangile.  Dieu  a 
'•  '^'  authorifé  la  Loy  quand  elle  fut  publiée  par  la 
main  de  Moyfe.  Et  commet? Pource  que  l'air 
en  a  retenti ,  les  foudres  &  les  teuipeftes  en 
ont  volé  par  le  ciel,  la  terre  en  a  tremblé,  les 
hommes  en  ont  conceu  vn  efpouuantement 
fi  grand ,  que  ce  leur  a  efté  comme  vne  mort 
prefente.  En  telle  manière  Si.  fi  eftrange  Dieu 
a  donné  authorité  àfa  Loy  ,  afin  qu'elle  fuft 
receue  en  crainte.  Maintenant  comparons  la 
J,oy  auec  rEuangilc(dit  fainû  Paul) La  Loy 
ne  nous  a  apporté  que  mort  &  malcdiâion:  & 
l'Euangile  nous  apporte  vie  &  falut.  Il  y  a- 
uoit  vn  voile  de  ce  téps-la  ,  que  Dieu  parloit 
côme  en  ombrage,  &  maintenat  il  fe  reuele  à 
nous  face  à  face,  &  non  feulement  d'vn  ima- 
ge naturel ,  mais  afin  que  nous  foyons  tranf- 
figurez  en  fa  gloire,  &  que  nous  y  profitions 
de  lour  en  lour  :  &  toutesfois  nous  viendrons 
renoncer  à  cefte  doitnne  en  laquelle  Dieu  fe 
déclare.  Se  qu'il  veut  que  fa  gloire  &  fa  maie- 
fté  foit  cognue?  Et  mcfmes  regardons  ce  que 
il  dit  par  fon  Prophète,  Voici  le  temps.&i'el' 
Biouueray  encoreslecicl&  laterre,dit  le  Sei 
gnenr  .  La  terre  auoit  cfté  efmeue  quand  la 
Loy  fut  publiée,  mais  maintenant  que  l'Euan 
gile  nous  eft  appoité  ,  il  faut  que  le  ciel  ibit 
conioint  aiicc  la  terre  pour  cftre  efmeus  :  & 
UOBs  ferons  de  noftre  coftéfi  durs  ,  qu'il  n'y 
Jura  nul  raouuemcnt?Et  mefines  nous  en  ver- 
rons qui  empirent  au  licud'améder.Et  quelle 
brutalité  eil-cel.\?  Sômes-no*  dignes d'cftre 
togn*  m  allouez  entre  les  créatures  de  Dieu? 
Nous  voyons  maintenat  qu'emporte  ce  titre 
de  gloire  qui  a  efté  conioint  à  l'Eulgilt.-c'eft 
que  noui  apprenions  de  nous  humilier:  &fi 
nous,  trouuons  que  noftre  chair  ne  s'y  .nddon 
n,ç  pas  de  fon  bon  gré,qu'vn  chacun  fe  côfer- 
B]eiqu''vucliaci:afc- face  fqrce,  afin  que  nous 


adorions  la  maiefté  de  Dieu  qui  reluit  en  l'E 
uang'le,&  que  nous  luy  facions  hommage.Et 
mefmes  il  n'y  a  nulle  doute  que  ûinft  Paul 
n'ait  voulu  ici  taxer  ceux  qui  voiiloyent  en- 
cores  réduire  les  ombrages  de  la  Loy,  &  qui^ 
cerchoyent  de  petites  finfrclucheç,qui  n'e- 
ftoyent  de  nulle  importance.  Car  il  monftre 
que  maintenant  en  l'Euangile  nous  auons  le 
foleil  de  luflice  qui  nous  efclaire,  ainfî  qu'il  sinL^^.z 
en  eft  parlé  au  prophète  Malachie.  Dieu  ne 
dit  pas  qu'il  fera  luire  fa  parole  comme  vne 
lampe ainfi  qu'en  la  Loy:  mais  il  eft  dit, Que 
le  foleil  de  luftice  viendra,qui  apportera  plei 
ne  fanté  en  fes  ailes:commeauf  i  faincl  Paul 
en  traitte  au  3.  de  la , féconde  aux  Corinth. 
qu'il  n'eft  point  queftion  démettre  enauant 
vne  doûrine  cachée  ou  obfcure.  Car  Dieu  a 
tellement  difpoféde  tout  ce  qui  appartient  à 
la  perfedion  de  noftre  falut, qu'en  la  doftri- 
ne  de  l'Euangile  nous  voyons  claircmét  tout 
ce  qui  nous  eft  vtile.  Il  ne  faut  plus  que  nous 
allions  cerchcr  leseftoilles  quand  nousauos 
le  loleil  en  plein  midi.  Si  nous  fommes  en  la 
nuift,  il  eft  vray  que  nous  ferons  bien  aifcj 
quand  la  lune  luit, ou  bien  d'auoir  les  eftoilles 
qui  nous  ferucnt  de  quelque  conduite  .  Maiç 
dequoy  nous  ieruira  de  demander,  Où  font 
les  planettts&  les  autres  eftoilles, quand  nous 
aurons  le  foleil  qui  nous  luit?  Si  vn  homme  di 
foit,  le  me  fafche,  car  ie  n'ay  q  le  foleil  qui 
meluit:nediroit-on  pa',Et  vilajn, faut-il  que 
tu  refufes  le  bien  que  Dieu  te  fait ,  &:  que  tu 
en  fois  fafchér Apprenons, apprenôs  de  nous 
contenter  de  l'Euangile,  puis  que  Dieu  nous 
a  donné  vne  telle  conduite  qu'il  fçait  nous  c- 
ftre  propre  pour  noftre  falut.  Et  voila 'mef- 
mes pourquoy  S.Pauldonne  ce  titre  à  Dieu, 
qu'il  eft  Dieu  bénit  :  pour  monftrer  qu'il  ne 
faut  plus  que  les  créatures  s'eleuent  en  cefte 
fierté  qui  eft  trop  enracinée  en  leur  nature, 
(car  Toila  qui  nous  deftournc  de  l'obcilTimce 
de  noftre  Dieu,)  fçachant  q  cela  fcroit  pour 
BOUS  mener  .iperditiô.Maudit  fera  ccluy  qui 
ofera  fe  rebccquer  .i  l'cncontre  de  fon  Ciea- 
teur.Et  pourquoy?C'cft  le  Dieu  bénit  :  files 
homes  luy  veulent  côtrarier,s'ils  font  des  ré- 
uefches, s'ils  fe  deftournét  de  luy, qu'y  gagne 
ront-!ls?Rienqui  foit:  ils  demeureront  en  la 
malediition  de  Dieu,&cepédant  Dieu  ne  per 
mettra  point  que  fon  Euangile  n'ait  touliours 
fon  cours  ,  &  qu'il  ne  rteuriffe  en  defpit  de 
leurs  dents .  Ainfi  donc  afin  que  nous  foyons 
partiel  pans  de  cefte  bénédiction  de  laquelle  iJ 
eft  lafontaine, apprenôs  de  nous  rangerplci 
nementà  luy.  C'tft  en  fomme  ce  que  lamdi 
Paul  a  voulu  toucher  en  ces  deux  mots.  Pour 
la  concliifion  nous  auons  à  retenir  ce  qu'il 
met,afçauoir  que  1  Euangile  luy  acftc  com- 
mis.  Ce  n  eft  point  ians  caute  qu'il  adioufte 
ceci. Car  nous  voyons  comme  de  tout  temps, 
que  tous  ceux  qui  ont  refiflé  à  Dieu  &  à  fa  pa 
role,ont  eu  quelque  hypocrifie. Et  côbien  que 
leur  iniquité  tufttQUtcpatcnte,fieft-cc  qu'ils 

n'ont 


s  V  R     LA     I.     A 

n'ont  iamiis  prétendu  de  b'attacVtr  à  Dieu, 
mais  aux  honimes:c5me  nous  voyons  ces  mu- 
tins qui  ont  murmure  contre  Moyfe  &  Aa- 
Komi-i6  ron ,  Et  ceux-ci  domineront-ils  par  deflus 
13.0'      nous?Il  leur  fembloit  ^  Dieu  leur  teilt  grand 
,4.  tort.quâJ il  leur  auoit  donne  AaronS;  Moy- 

fe pour  ks  feruir.Car  qu'elloit-cc  de  leur  ot 
fice.lînon  vnc  charge  bien  fafcIieufc?Et  voi- 
la ces  mutins  qui  font  accroire  à  Moyfc  &' à 
Aaron  qu'ils  veulent  dominer  flir.cu.x, Autant 
en  a-il  elle  icprochc  à  fair.â  Paulicôme  nous 
voyons  que  les  galans  qui  ne  demandoyent 
qu'à  perucrtir  tout  ce  qu'il  auoit  édifié,  ract- 
toyent  en  auant,Ho  commét?Vous-vous  laif 
fez  ici  mener  par  trop,  &  ce ft  homme  a  trop 
grand' authonte  pardeffiis  vous.  Et  à  quel 
Ç! cdit?à  quelles  cnfcignes.'C'ell  la  caufe  pour 
Quoy  ijinû  Paul  notamment  dit  ici  Se  propo- 
ic,que  l'Euangile  luy  tft  commisicomme  s'il 
■  difo  it,  Quand  le  parle  de  l'Euangile.cen'ert 
point  d'vne  doeirine  que  i'aye  forgée  à  la  vo 
leermais  ce  que  vous  oyez  de  ma  bouche ,  elt 
fuyuât  la  commiûiô  que  i'ay  receuede  mon 
Dicu,&  m'en  uns  acquitte f.deltment  enuers 
vous.  Or  par  cela  nous  fommcs  aduertis.que 
fi  amourd'huy  les  mekhans  fe  dcfguifent, 
qu'ils  prenent  ce  mafque,  difans  qu'iL  ne  veu 
lent  point  fe  rebecquer  cotre  Dieu, mais  que 
ils  en  veulent  feulemét  aux  hommes, c'a  tîïé 
vne  rufc  ancienne  de  Satan,  laquelle  il  a  exer 
ceedu  temps  de  S.Paul,  du  temps  de  Moyfe, 
&dutéps  de;  Prophètes:  c'a  eflé  vn  combat 
ordinaire  en  l'Eglifede  Dieu.  Et  pourtant  il 
jie  faut  pas  feulement  protefter  de  bouche, 
mais  il  faut  auûi  quand  on  la  pre  fche,  qu'e.le 
foit  receue  en  toute  himiilite,&  qu'on  puifïè 
difcerner  entre  ceux  .lufqucl',  Dicua  commis 
ce  threfor,  pour  ledifpenftr  fidèlement  aux 
autres,  .&  entre  ceux  qai  abufent  fauflement 
du  nom  de  Dieu. Il  cft  vray  que  le^  fedudeurs 
diront  bien  qu'ils  feruent  .i  Dieu. mais  quoy? 
la  Loy  de  Dieu  fera  toufiours  bonne:  cj:ami- 
nons-la,&  Dieu  ne  permettra  point  que  nous 
foyons  iamais  trompez  quand  l'\fjgc  en  fe- 
ra bon.  Ainfi  donc,  que  nous  foyons  aduertis 
d'vn  cofté, quand  ces  rebelles  viendront  dire, 
Nous  ne  voulons  point  veiiilcr  à  Dieu,  c'eft 
feulement  aux  hommes  que  nous  auons  à  fai- 


T  I  M  O  T  H.      ,  ;  t 

rc:co°noifïons,  di-ie,  qui?  c'tll"  ne  f.ncffedc 
5.-.:anqui  a  efte  de  tout  temps.  Il  faut  dore 
qu  vn  ciiacunqui  voudracftie  tenu&rcpiite 
pour  enfant  de  Dieu,  qu'il  s'alTuiettiire  a  ceil 
ordre  qucDieu  a  niflitiie  en  fon  Eçliû:, quand 
il  a  voulu  que  fa  faiole  fe  prefciiail  par  les 
hommes,  &  qu'il  y  eult  aufsi  police  &:  difciplt 
ne, à  ce  que  les  chofes  ne  foy  eut  point  cyiifu 
fcs.Q_u.vn  chacun  donc  fe  viene  là  ranger  pai 
fiblemcnt:car  quiconques  dira,  le  feroyc  con  ' 
tent  fi  vn  An^e  parloit  du  ciel ,  d'auouer  touc 
ce  qui  eft  contenu  en  la  Bible. Ouy,&  cepen- 
dant il  reietteratout  ce  quitftfideltnient  ti- 
ré de  celle  fontaine, &:  qui  n'eft  qu'vne  expo- 
fition  iîmple  de  ce  qui  eft  làcontcnu.Q,uicou 
que  donc  parie  en  celle  forte  ,  monftre  qu'il 
cft  par  trop  etîrontc,&  qu'il  n'y  a  qu'hypo- 
crilie  en  luy.  Pource  apprenons  d'efcouter 
noftre  Dieu  félon  qu'il  luy  plaift  de  parler  à 
nous,c'eft  afçauoir  que  tous  les  iours  quand 
(à  parole  fe  prefche,nous  la  receuions  paifi- 
blement,&  que  gians  &  petis  s'y  foumettét, 
&  que  Dieu  fou  honore  de  nous  tous,&:  que 
noftre  vie  rende  teûnoignage  que  nous  auôs 
creu  en  luy,voireque  nous  y  auons  creu  pour 
eltre  du  tout  fiens  comme  fon  héritage. 

OR  nous-nouj  profternerons  deuant  la 
face  de^noftre  bon  Dieu, en  cognoiflance  de 
nos  fautes:  le  priant  qu'il  luy  plaifenous  les 
faire  mieux  fentir,&:de  plus  en  plus  que  nous 
n'auons  fait  ci  deuant:votre,  &  les  fentit  en 
telle  <orte,  qu'eftans  naurez  en  nos  cœurs, 
nous  cognoifiions  nos  malheurettz  &  nos  vi- 
ces,pour  nous  humilier  deuant  luy  ,  &  pour 
le  rtcognoiftre  non  feulement  noftre  luge, 
mais  auAi  pour  recourir  à  luy  comme  à  no- 
ftre Père:  que  nous  fouffrions  d'eftre  refor- 
mez par  fa  parole, &  d'eftre  conformez  à  icel 
le:&  que  nous  y  profitions  tellement, que  ce 
pendant  que  nous  conuerfons  en  ce  monde, 
nous  fuyons  petit  à  petit  defpouillez  de  tou- 
tes nos  infirmitez  charnelles,iufques  à  ce  que 
eftans  pleinemét  reueilusde  faiuftice,il  nous 
faceparuenir  à  fon  immortalité  glorieufe.Ja.. 
quelle  il  nous  a  appreftee  au  ciel .  Q_ue  non 
feulement  il  nous  face  celle  grace.mais  aufsi 
à.  tous  peuples  &  nations  delà  tcrre,&c. 


SIXl  EME 


SERMON      SVR 

M  1ER     CHAPITRE. 


LE     P  R  E- 


12. 


le  ren  grâces  à  celuy  qui  7n  a  fortifié, à  le  fus  Chrijî  noHre  Sri- 
^neuTyde  ce  qu'il  ma  e?limé fidèle,  me  mettant  ajônferuice, 

I  j    Mojy  qui  auparavant  eHqye  blajphcmateur  CT  perjecuteitr,  ©^ 
oppreJJeuriO'c.  "  *      ^' 


d.iiii. 


SIXIEME     SERMON 


'  Aintb  Paul  s'elloit  parauât 
'  glorifié  que  l'Euangile  luy 
[  tltoit    commis  en  cLarge. 
;  Or  nons  fjauons  que  c'eft 
Ivn  honneur  qui  iunnonte 
'toute  Ja  dignité  des  hom- 
mes, quand  on  regardera 
qu'emporte  la  prédication  de  l'£u3giie:c'eft 
le  threfor  de  ûlut  :  ceux  qui  ont  ceft  office, 
font  ordonntK  de  Dieu  en  ambafîàde,pour  re 
concilier  le  monde  auec  luy.  Voila  donc  vn 
hôneur  qui  n'appartiendra  point  aux  créatu- 
res mortelles.  £t  c'tflpourquoy  fain^^  Paul 
i.Cor.     enlai.aiu  Corinth.s'efcrie,  Q_ui  eft-ce  qui 
a.Itf.       le  trouuera  fiiffilànt  à  ceci?  Pourtant  il  ne  re- 
lie finon  quand  Dieuchoifit  les  hommes  en 
ceft  eftat,  qu'il  leur  donne  dequoy  y  fournir, 
&les  rende  capables  par  fa  pure  bonté.d'au- 
tant  qu'ils  n'ont  point  cela  de  nature. Suyuât 
celle  raifon,  maintenant  faind  Paul  dit,  Ç>jiil 
ttnd grâces  à   Dieu  lequel  l'afortifé  à  noflre 
Seigneur  tefus  Chrijl.  En  quoy  il  déclare  que 
ce  qu'il  s'eftoit  attribué  d'auoir  l'EuangiJe 
qui  luy  eiloit  commis  en  charge  ,  ce  n'eft  pas 
pour  fe  faire  valoir,ce  n'eft  point  pour  exal- 
ter fes  mérites, néni:  ce  n'efl  point  aufsi  pour 
élire  en  réputation  deuant  les  hommes, com- 
me /il  eftoit  digne  de  cek:mais  qu'il  attribue 
le  tout  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Ainfi 
nous  voyons  que  iainifl  Paul  confefle  ici  que 
il  n'a  pas  efté  eleu  en  dignité  d'Apoftre,ne 
choifiàcela  pour  fes  mentes ,  mais  d'autant 
que  le  bon  plaifir  de  Dieu  a  efté  tel  :  qu'il  n'a 
point  eu  dequoy  fuffire  à  vne  charge  tant  ho 
norableimais  que  le  tout  luy  a  efté  donné  par 
lefusChrift.Voila  quelle  eft  la  fomme  de  fon 
propos  .Or afin  qu'vne  telle  grâce  de  Dieu 
loit  mieux  c ognue, il  côfefle  qu'il  a  efté  blaf- 
phemateur&perfccuteur  de  l'Euangile  :  qui 
font  deux  crimes  tant  énormes, qu'il  mcntoit 
bien  d'eftre  abyCné  au  pi'  protond  d'enfer. S. 
Paul  donc  pour  donner  plus  grand  iuftre  à  la 
bôté  &  mifericorde  deDieu,declare  ici  les  po 
uretez  où  il  eftoit  plongé  auant  que  lefus 
ChrilVeuft  pitié  de  luy  pour  l'en  retirer.Il  ad 
ioufte,Q»'//  a  obtenu  m/yinfDriff, d'autant  que 
iln'a  pas  refifté  à  Dieu  à  fon  efcient ,  ne  par 
tnalice  obftinee:  que  c'a  eJtc  pure  ignorance, 
ou'il  eftoit  aueuglé  ctiidant  bien  faire.Tant  y 
a  que  par  cela  il  ne  prétend  point  eftre  excu- 
fc  du  tout,  mais  c'eft  afin  qu'il  ne  luy  foit 
point  reproché  par  les  nial-vucillans.qu'ila- 
uoit  refifté  à  la  vérité  de  Dieu  parmaunafe 
conkience.  Il  monftre  qu'il  n'a  point  procé- 
dé en  telle  forte  :  toutesfois  il  conclud  que  la 
grâce  de  Dieu  a  efté  tant  &  plus  multipl'ce 
enuersluy.commes'ildifait.Ccqiie  l'allcgiie 
mon  ignorance, ce  n'eft  point  pour  amoindrit 
le  bencfice  qui  m'a  efte  fait.  Car  le  cognoy 
que  Dieu%dcfployé  vncgiace  finguliere  en- 
Bers  moy,  quand  il  luy  a  pku  nrillumincr,  & 
non  feulement  cela,  mais  qu'il  m'a  ordonne 
pour  Apoftrc .  llfaut  donc  que  le  confeiTc 


que  ie  fuis  tant  &  plus  obligé  à  luy  en  cela. 
11  refte  maintenant  que  nous  facions  noftre 
profit  de  cefte  dodrine.  Et  en  premier  lieu 
notons  bien  que  de  prcfchcr  ia  parole  de 
Dieu,ce  n'eft  pas  vne  chofe  petite  ne  vulgai- 
re:car  il  n'y  aura  homme  qui  y  fuffifede  foy 
ne  de  fa  propre  vertu.  11  faut  en  fomine  que 
nous  cognoilsions  quand  Dieu  conftitucdes 
prefcheurs  de  l'Euâgile, qu'en  cela  il  rend  tcf 
moignagc  d'vne  bonté  e.\ceilente,de  ce  qu'il 
daigne  bien  fe  feruirdes  homes  ,  qui  font  in- 
utiles du  tout,  à  vn  office  qui  Airmonte  toute 
leur  faculté. Car  à  parler  proprement, les  An- 
ges de  Paradis  ne  feroyent  pas  dignes  de  por 
ter  vn  tel  ineflage,ni  d'eftre  meflagers  &  am- 
baflàdeurs  du  falut  de  la  vie  éternelle,  de  diC- 
penferlesmyfteres  fccrets  de  Dieu,  de  con- 
fermer  la  remifsion  des  péchez  ,  d'abfoudre 
les  poures  pécheurs,  afin  qu'ils  foyent  alTcu- 
rez  que  Dieu  les  aime,&  les  tient  pour  fes  en- 
fans. Si  nous  cognoiflons,di-ie,tout  ce  qui  eft 
contenu  en  l'Euangile,  il  eft  certain  que  les 
Anges  mefmes  ne  fe  trouueront  point  fiiffi- 
fans  à  vn  tel  off.ce.Et  ainfi  quand  Dieu  choi- 
fit  des  hommes  mortel .  qui  font  poures  vaif- 
feaux  fragiles,  cognciflons  qu'en  cela  il  def- 
ploye  vne  grande  bonté. Ct ci  doit  feruir  tant 
à  ceux  aufquels  Dieu  fait  vne  telle  grâce, que 
en  gênerai  à  tous  fidèles.  Nous  qui  fommes 
ordonnez  pour  prefcher  1  Euangile,  deuons 
cognoiftre  que  Dieu  nou'.  a  honorez, quand  il 
a  voulu  que  de  noftre  bouche  le  tefmoignage 
de  falut  foit  rendu  aux  hémes.que  nous  foyôs 
lefmoins  de  fa  vérité, que  nous  prtfentions  le 
falut  à  ceux  qui  cftoyen;  damnez  &perdus  au- 
parauant.  Par  cela  nous  deuons  eftre  incitez, 
premièrement  à  louer  Dieu,  de  ce  qu'il  luy  a 
pieu  nous  honorer  ainfi:&:  au  refte, cheminer 
en  plus  grande  crainte  &  lolicitude.  Et  ceft 
honneur  fera  bien  cher  vendu  à  ceux  qui  s'en 
acquittent  mal,  mefmes  à  ceux  qui  iront  auec 
vnen6chalâce,&ircftourdie.  Que  Dieu  les 
ait  commis  pour  difpenfer  le  threfor  de  fa- 
lut :  &  cependant  qu'Us  ne  ticnent  conte  de 
tout  cela,quelle  ingratitude?Et  ainfi  penfoas 
de  près  à  nous,  &  foyons  vigilans  à  exécuter 
fidèlement  la  charge  qui  nous  eft  commife. 
Pour  le  fecond,cognoiflons  quel  bcfoin  nous 
auons  d'inuoquer  Dieu,  afin  qu'il  luy  plaifc 
nous  adminiftrcr  la  verta  qiir  nous  défaut. 
Car  fi  nous  ne  ibmmcs  pas  futfifans ,  il  faut 
que  nous  foyons  aidez  d'ailleurs.  Or  fi  eft-ce 
quêtant  s'en  faut  que  nous  puif  ions  en  totiL 
&  par  tout  fournir  àvnc  chargcfi  pelante  5c 
fi  difficile.que  nous  né  pouuons  pas  auoir  vne 
feule  bonne  penfce,pourdire,QVcft-il  defai 
re  ?  corne  faintt  Pai.l  le  trâittc  au  palTagc  que 
i'ay  allégué. Et  mefmes  fi  fatnitPai.lcognoift 
quTl  n'y  ait  homme  qui  fe  puifle  trouuer  idoi 
ne  à  cela,  qu'eft-ce  qu'vn  ch.KÛ  de  nous  doit 
penfer  félon  là  petittfle&:  infirmité?  Et  ainfi 
que  nous  foyons  ardens  à  prier  Dieu, que  fé- 
lon qu'il  coenoiftque  nous  auons  neccfsité 
^  d'gllte 


z.C  or.'}. 


s  V  R     LA     I.  .A     TIMOTH. 


33 


i.Cor. 
11.3. 


d'cflre  aidez  Si  fecounis  par  fa  grâce,  il  nous     fixmité  .  Car  nous  fçauons  que  quand  faindi 
donne  ce  que  nous  n'.iuons  poiut  de  nature,     Paul  parle  d'infirmité,  il  cncend  les  imperfe- 
&  qu'il  fupplee  à  no/lrc  indigence  &foiblef-     ttioni,  les  vices  ,  les  taches   qui  pourioyen: 
fe.  Voila  comme  les  miniftres  de  la  parole  de     empefcher  les  hommes  d'ellre  reccus  en  tel- 
Dieu  doiuent  appliquer  celte  doctrine  à  leur    le  grâce  &:  en  telle  dignité  ,  comme  ilsy  Jonc 
viage.  Cepédant  elle  eftaufsi  vtile  pour  tout     eleuez  .  Par  cela  nous  voyons  que  faind  Paul 
le  peuple.  Car  quand  nous  venons  pour  ouir     a  ici  voulu  fane  comparaifon  entre  fa  quali- 
le  fermon,  Phornme  qui  parle,  pourroit  clhe     té  naturelle  ,  &  entre  ce  que  Dieu  luy  auoit 
contemptible,  &  la  parole  de  Dieu  leroitvi-    donné  par  deflus  fa  nature  humaine  .  Et  de 
lipédee  par  ce  moyen-la, ou  elle  n'auroit  pas     fait,  iamais  lagrace  de  Dieu  ne  fera  bien  co- 
telle  autliorité  corne  il  eit  requis.  Il  faut  doc    gnue, linon  quand  nous  regarderons  que  c'eli 
que  nous  regardions  plus  haut  qu'à  celuy  qui    des  hommes  ,  cependant  que  Dieu  les  laifle 
parle.  Car  commet  eft-ce  que  le  me  tiendray     là.  Mais  quand  nous  aurons  fait  vn  bon  exa- 
aflèuréde  monfalut,veuqu'iln'y  a  que  Dieu    menque  c'tlldes  hommes,  de  ce  qu'ils  ont, 
qui  puifleelhe  fidèle  teûnoin  de  fa  vérité?     &  de  ce  qu'il  leur  appartient  de  leur  propre, 
l'ay  deCa  dit  que  lès  Anges  de  paradis  ne  fui-    nous  hs  verrons  alors  pleins  d£  toute  poure- 
firont  pas  à  vne  charge  li  haute.Et  comment     té  &  mifere,  nous  verrons  qu'il  n'y  a  pas  vne 
vne  poure  créature  qui  n'eft  rien, pourra-elle    feule  goutte  de  bien:  &  que  s'ils  en  ont  quel- 
furmonter  en  dignité  les  Anges?Nous  ferons     que  apparence,  cçla  n'eft  que  fumée,  ce  n'eft 
donc  toufîours  en  doutc,&  la  doctrine  de  l'£-     rien.  Brief,  après  que  nous  aurons  cognu  ce- 
uangile  ne  profiteroicde  gueres  enuers  nous,     la, il  fera  facile  deiuger  de  la  grâce  de  Dieu, 
n'eftoit  que  nous  eufsions  celte  certitude,  &    laquelle  fuppleeàtous  nos  défauts,  laquelle 
que  nous  fufsions  bien  refolus  en  nous,  que     remédie  à  tous  nos  vices.  Voila  ce  que  îàintt 
c'eft  Dieu  qui  nous  enuoye  leshommes,'c'efl     Paul  a  voulu  ici  monftrer,fousce  mot  de/lr- 
luy  qui  lesdifpofc  à  cela,&;  qui  les  rend  idoi-     tifer.  Voila  (dit-il)il  eft  vray  qu'en  moy  ie 
nés,  combien  qu'ils  neiefoyent  pas  de  leur     feroye  toible  ,  en  moy  le  leroyevne  poure 
vertu.Ainfi  fiind  Paul  non  feulement  a  voulu     créature  de  nulle  valeur  :  brief ,  le  n'auroye 
ici  monftrer  aux  prefchcuisde  l'Euangileco      rien  qui  fuftconuenable  à  ceft  office  de  por- 
me  ils  fc  doiuent  humilier,  &  recognoiftre  la     ter  l'£iiangile:mais  toute  ma  vcrtu,toutem3 
gr-,ice  qui  leur  eft  faite  ,  fans  s'cleuer  en  or-    dignité  vient  de  la  pure  ^race  de  noftre  Sci- 
gueil  ne  prciomption.mais  il  a  voulu  en  gène    gneur  lefus  Chrift,  lequel  m'a  qualifié  ainfi, 
laladuertir  tous  fidèles, que  quand  l'Euangi-     il  m'a  rendu  tout  autre  que  leri'eftoye.  Mais 
le  leur  eftprefché,ils  cognoillent  que  cela  ne     pource  que  cela(à  caufe  de  îa  briefueté)eHft 
vient  point  du  coftédes  hômes.mais  que  ceux     elle  obfcur,  faintt  Paul  paflè  plus  outre,  en 
qui  parlent, font  enuoyez  d'vn  plus  grsd  mai     confellànt  (  comme  nous  auons  dit  )  qu'il  e- 
ftre,&  que  s'ils  n'ont  point  en  eux  celle  facul    ftoit  blafphtmateur  contre  Dieu,&peifecu~ 
té,  Dieu  les  difpofe  à  cela  ,  que  c'tft  par  fon     teur  de  l'Êuangilcvoire  aucc  violence.  Ainfi 
faind  Efpiit  qu'ih  font  rendus  f:tfifans.Com    maintenant  nous  voyons  qu'il  n'entend  pas 
nie  auhi  il  en  parle  en  vn  autre  lieu,  Que  nul     que  Dieu  &•  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ait 
ne  pourroit  donnerl'hôneur  à  lelus  Chrift  g     feulement  fuppleé  en  partie  à  quelque  de- 
iuy  appartient,  fi  ce  n'eft  que  le  faintt  Efprit    faut  qui  fiift  en  luy  :  mais  en  fomme  ,  il  con- 
le  conduife,  &  qu'il  gouuerne  fa  langue  à  ce-    fcife  que  tout  ce  qui  eftoit  en  luy  de  nature, 
la.  Voila,  d^e,  comme  nous  pourrons  eftre    a  efte  corrigéicariln'y  auoit  qiiemal.Ilfaut 
affeurez  ,  ayans  ouy  les  promelFes  qui  nous     donc  conclure  que  Dieu  l'a  pleinement  re- 
font données  en  l'Euangile,  &conmie  nous     nouuelé,&  qu'il  ne  fait  point  ici  vn  partage, 
pourrons  eftre  certifiez  de  noftre  falut  :  c'eft    pour  dire,reftoye  quelque  chofe,&:  Dieu  m'a 
en  cognoiflant  que  Dieu  nous  enuoye  les  hô     auancé  quant  au  rtfte.  Mais  phiftoft  il  mon- 
mes,&  qu'il  fe  veut  feruir  d'eux  comme  d'in-    ftre  qu'il  n'a  rien  du  fien,  &  qu'il  tient  le  tout 
ftrumens,  &  que  fon  fainû  Efprit  prelîde  en     d'enhaut.  Là  deflus  nous  femmes  admoneftez 
ceft  office  qu'il  a  conftitué,  &;  qu'il  n'y  a  rien     de  noftre  deuoir ,  ie  di  &  grans  &•  petis,  cha- 
digned'eftremefprifé.PourquoyrPource  que    cim  en  fon  endroit  :  quand  nous  voudrons  e- 
le  tout  procède  de  celuy  auquel  nous  deuons     xalterlagracede  Dieu  comme  il  appartient, 
faire  homage,  recognoillans  que  tout  ce  que     recognoiflons  qui  nous  forames,  &  que  ce  fe- 
ii  nous  enuoye,  eft  hors  de  noilre  iugement,     roit  de  noHs,i:non  que  Dieu  nous  ei;ft  fecou- 
&  par  deflus:qu'il  n'eft  point  qucftiondedif-     rus.Ceci  eft  difficile  àfaire,,d"autant  que  les 
puter  des  chofes  de  Dieu,  fi  on  les  doit  rece-    hommes  ne  demandent  que  d'auoir  quelque 
uoir  ou  non  ,  ou  en  quelle  eihme  elles  doi-    valeur  en  eux  :&  combien  qu'en  vn  mot  ils 
uent  eftre  tenues.  Il  faut  que  nous  lacions     confeflent  qu'ils  tieiicnt  tout  deDieu,fieft- 
ceft  honneur  à  Dieu,  de  magnifier  tout  ce  qui     ce  qu'ils  veulent  que  cela  foit  obfcurci,  &-  ia- 
procedede  luy.C'eftce  que  nou>  auonsàno-    mais  ne  viendront  à  vne  pure  confefsion  & 
tet  quant  à  ce  paflàge,  là  où  faind  Paul  rend    franche  &  fimple   finon  par  force  :fur  tout 
grâces  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Quant     quand  il  eft  qutftion  de  defcouurir  noftre 
à  ce  mot  de  Fprtifier,il  Poppofe  au  mot  d'In-    honte,  que  nous  foyons  confus  en  nous ,  que 

c-i. 


54 


SIXIEME    SERMON 


aospechSi  foyent«ianifeftei,& qu'il  faille 
que  non  feulement  nous  bailVios  la  tefte,mais 
que  nous  foyons  réputée  du  tout  dainnables, 
linon  d'autant  que  le  Seigneur  nous  a  retirez 
de   damnation   par  la  raifericorJe   infinie. 
Q_uanddonG  il  elt  lueftion  que  les  hommes 
reçoyuent  vne  telle  honte ,  ils  n'y  veulent 
point  venir,  mais  reculent  tant  qu'il  leurell 
pofiible:&  vfent  de  tous  fubtertuges.afin  que 
s'ils  ne  le  peiuient  iulliiîer  du  tout,  pour  le 
moini  ils  cerchent  quelques  cachettes  ,  à  ce 
que  leur  uirpitude  ne  foit  point  cognue.D'au 
tant  plus  nous  faut-il  bien  noter  ce  paflàge 
de  faind  Paul.  Car  il  ne  fait  point  vne  confef 
fion  générale, comme  font  ces  hypocrites  qui 
diront,Et  ie  luis  homme,ie  fuis  pecheur:mais 
il  fpecifie  fon  cas  propre,IWjf  <'^f(dit-il)^rr- 
fccuteur  de  Vtglife  de  Dieu,i\y  efté  Uafplie- 
mateuT  de  fa  yeriti.U  ne  regarde  point  ici  de 
le  couurir  fous  ce  nom  d'infirmité  humaine, 
mais(comme  l'ay  défia  touché)il  laifle  à  cha- 
cun la  confefsionde  fes  fautes  propres,  luy 
il  fait  fa  confel"<.ion  de  fon  cofté.  Maintenant 
il  chacun  de  nous  fecopare  auec  fainci  Paul, 
je  vous  prie  ,  n'aurons-nous  point  beaucoup 
plus  d'occafion  de  magnifier  la  bote  de  Dieu, 
&  de  nous  anéantir  du  tout  ?  N'aurons-nous 
point  aufsi  plus  ample  matière  de  recognoi- 
flre  les  vices  aufquels  nous  eflions  plongez, 
iufques  à  ce  que  Dieu  nous  ait  tendu  la  main? 
El  tant  y  a  qu'il  s'en  trouuera  bien  peu  qui 
priferont  ainfi  les  grâces  de  Dieu,  en  s'abba- 
tantdu  tout.£t  pourquoy?  Car  l'orgueil  y  do 
mine  par  trop,&  ccftorgtieil-lafait  que  nous 
difsimulons  nos  pouretez,&  demandons  qu'el 
les  foyent  comme  enieuelies.Et  nous  ne  pen- 
fons  pas  cependant  que  cela  emporte  vne  in- 
gratitude  vilaine ,  pource  que  la  grâce  de 
Dieu  n'ell  point  eialtee  comme  elle  mérite, 
que  nous  dcfrobbons  à  Dieu  l'honneur  qui 
iuy  appartiét.Ainfi  apprenons  de  mieux  prat 
tiquer  ceftc  dodrine  que  fainô  l'aul  nous  mô 
lire  ici  par  fon  exemple:qu'vn  chacun(di-ie) 
s'employe  à  magnifier  la  bonté  de  Dieu,  telle 
que  nous  l'auons  expérimentée  tous,&  qu'vn 
chacun  regarde  à  les  vices.d'autant  que  nous 
ne  pouuons  pas  taire  hommage  à  Dieu  des 
biens  que  nous  auons  receus  de  luy,  fans  con 
feffer  nos  fautes  &o}fenfes:qu'vn  chacun  s'ad 
donne  à  cela.  Se  que  nous  defpouillions  cefte 
fotte  honte,  que  nous  ne  craignions  point  de 
«ftre  fuiets  à  vitupère ,  quand  nous  ferons  re- 
ueftus  de  ce  queDieu  nous  donncra.Car  quâd 
vn  homme  aura  offenfé,  combien  qu'il  .foit 
contus  en  foy.lî  ne  faut-il  point  qu'il  ait  ver- 
gongne  de  cela. Voila  pour  vn  poinrt.  Cepcn 
iiant  notons  aufu  ce  que  fainû  Paul  .idioiide, 
Qm  noftre  Seigneur  leps  Chrift  Ta  efiime  fi- 
^tle  en  le  mettant  att  miniflere.  Par  ces  mots 
il  n'entend  pas  qu'il  ait  eflé  choifi.d'autât  que 
Dieu  a  pieueu  en  luy  vne  bonne  loyauté,  car 
ilyauroitici  contraditlion  manifcrte.  Vray 
eft  que  ceux  qui  fonta*»!  exercez  en  l'Efcri- 


ture  fainûcveulét  faire  leur  profit  de  ce  mot', 
comme  fi  Dieu  en  elifant  ceux  que  bon  luy 
femble,  trouuoit  en  eux  quelq  vertu  cachée, 
&  qu'il  fuft  efmeu  par  vn  tel  regard  :  &  voila 
comme  ceux  qui  nient  l'eleûion  gratuite, cor 
rompent  &  falfifient  TEfcriture  fitinde,  qne 
Dieun'elif  pas  feulement  par  fa  pure  bonté; 
mais  qu'iia  difcretion  ,  voyant  quels  feront 
les  hommes, &  comment  ils  fe  porteront. Voi 
re.comme  fi  tous  n'eftoycnt  pas  d'vne  maflè 
corrompue,  fi  tous  n'eftoyent  pas  damnez.  Il 
tous  n'eftoyent  pas  pleinemét  fuiets  à  Satan. 
Et  auifi  donc  quel  bien  eft-ce  que  Dieu  trou- 
uera en  nous,  &  qu'eft-ce  qu'il  y  pourra  pre- 
uoir,fin,on  le  mal  qui  y  eft,  iufques  à  tant  qiic 
il  y  ait  mis  le  bien  ?  Et  pourquoy  clt-ce  qu'il 
le  met  pluftoft  en  l'vn  qu'en  l'autrCifinô  pour 
fon  eleftion  gratuite?  Ainfi  nous  voyons  que 
Dieu  ne  choiiit  point  les  hommes  pour  les  a- 
dopter  au  nombre  de  fes  cnfans,  pource  qu'il 
les  çreuoiteftre  meilleurs  que  ceux  qu'il  de- 
laifle  &reiette:mais  il  faut  que  fon  bon-plai- 
fir  règne  là,fans  autre  raifon  :  ie  di  raifon  qui 
nous  foit  cognue.  Nous  le  voyôs  en  ce  que  S. 
Paul  a  efté  ordonné  Apoftre:  car  fi  Dieucuft 
cerchéen  luy  quelque  dignité  ,  il  faloit  qu'il 
demeurait  toufiours  en  )â  pcidition.Mais  ce- 
pendant pourquoy  eft-cc  donc  qu'il  dit,  Çlue 
Stfus  Clirifi  fa  e/limifidelerOv  cela  n'cft  point 
d'vne  preuoyance.mais  pluftoft  d'vne  délibé- 
ration que  lefusChrifta  faite  qu'il  le  tenoit 
fidèle. Yci  fainft  Paul  veut  fermer  la'boiiche  à 
tous  mcfdilâns.II  nous  faut  noter  ceftc  circon 
ftance,  comme  iamais  nous  n'aurons  le  fens 
naturel  de  l'Efcriture  fiiinfte,  fi  nous  ne  fça- 
uons  à  quel  propos  les  chofes  fe  difcnt. Voila 
donc  fainft  Paul  qui  cftoit  calomnié  de  beau- 
coup de  gens,  comme  nous  voyons  qu'il  y  » 
toufiours  des  chiens  qui  abbaycnt  contre  les 
feruiteurs  de  Dieu,ne  dcmandans  fînon  de  les 
mettre  en  opprobre,  ou  bien  faire  que  la  do- 
Ôiine  foit  mal  receue,&rqu'5Jadefdaigne.Et 
fainû  Paul  voulant  clorre  la  bouche  à  telles 
gens,dit  qu'il  fe  contente  d'auoir  lefus  Chrilt 
pour  fonautheur  &  fon  garent:c5me  s'il  di- 
foit,  Les  hommes  me  pourront  bien  rcietter, 
mais  il  me  fuffit  que  ie  foye  déclaré  fidc-lc  par 
celuy  qui  a  toute  authorité  en  foy  ,  qui  eft  le 
luge  celefte  qui  en  a  prononcé  :  quand  il  m'a 
mis  en  ceft  office,  il  a  déclaré  qu'il  me  tenoit 
pour  fon  feruiteur,  &  qu'il  me  vouloit  em- 
ployer à  la  prédication  de  fbnEiiangile:il  me 
fuffit  de  cela.  Que  les  hommes  machinent  Si 
detraftent  tant  qu'ils  voudront  .moyennant 
que  i'aye  lei'us  Chriftde  mon  cofté  ,  que  les 
hommes  viencnt  ietter  leur  bec  contre  moy, 
cela  ne  fera  rien;  carc'cit  vnarreftirrcuoca- 
ble  que  celuy  qui  a  efté  donné  par  noftre  Sei 
gncur  leftis  Chrift.Nous  voyons  donc  main- 
tenant l'intention  de  Ciinft  Paul ,  c'eft  afça- 
uoii  qu'il  ne  veut  point  ici  dire  q  lefus  Chrift 
ait  rienpreueucnluy.pourquoy  il  l'ait  appe- 
lé à  ctft  office  tant  honor3ble,mais  feulcmét 

qu'en 


SVR    LA   I.    A   TIMOTH. 


3î 


^u'en  le  mettant  là.il  a  manifefte  &  déclaré 
aux  hommes,  qu'ij  fe  vouloit  feruir  de  luy.S. 
Paul  pouuoit  bien  parler  ainii,, d'autant  qu'il 
eftoit  appelé  du  ciel-mais  no'  en  verrôs  beau- 
coup qui  feront  ordonnez  aux  offices,  qui  ne 
peuuentpas  vferde  ce  lâgage.Pourquoy?Car 
Dieu  n'a  point  prcfidé  à  l'eleftion  qui  a  efté 
faite.Combien  en  voyons-nous  qui  occupent 
la  place  de  Pafteur,&  en  ont  le  titre,  qui  cepé 
dant  ne  ibnt  que  pour  troubler  l'Egliûspour 
peruertir  tout, pour  mettre  ce  qui  eftoit  en  or 
dre.en  grande  confufion;brief,qui  font  plei- 
nement addonnez  à  Satan,  pleins  de  defloyau 
té  &  de  nialice,&  pleins  de  trahifbnJNous  ver 
rons  cela  tous  les  coups. £t  Dieu  quelquefois 
lafche  la  bride  à  Satan, pour  l'ingratitude  des 
hommes.  Quand  nous  ne  fommes  pas  dignes 
d'auoir  de  bons  Pafteurs  &  fidèles, il  faut  que 
nous  en  ayôs  de  tels  que  noftre  appétit  le  por 
te, voire  des  brouillons  qui  mettét  tout  à  per- 
dition &  ruine,comrrté  nous  auons  déclaré. Et 
ainiî  il  y  en  a  beaucoup  qui  font  en  l'office  de 
Pafteurs,  qui  ne  peuuent  pas  dire  neantmoins 
que  Dieu  lésa  troiiuez  tidcles.  Et  pourquoy? 
Car  ils  n'ont  point  elle  ordonnez  de  par  luy. 
Autant  en  eft-il  des  autres  eltats.  Ne  voit-on 
pai  fouuét  3c  par  trop  en  l'eftat  de  iufticc,que 
il  y  en  a  qui  font  là  appelez  du  diable,  &.  lont 
maintenus  &  fupportez  en  dtfpit  de  Dieu.voi 
re  en  defpit  de  nature.^  Car  il  n'eft  point  que- 
ftion  feulement  ici  de  religion,  nedeChre- 
flienté,maisd  honefleté  liumaine,que  les  cho 
fes  font  fi  confufes,  que  c'ell  vne  pleine  bar- 
barie:nous  voyons  cela.Commét?  fous  le  fie- 
gedeiuAice  qui  efl: dédié  à  Dieu.  Il  eft  vray, 
mais  on  le  prophane  .  Et  comment?  la  iuftice 
n'eft-elie  pas  ordonnée  de  Dieu?Oiiy  bien  en 
general:mais  cependant  il  permet  qu'il  fe  ti- 
ce  de  telles  confufions  pour  h  malice  des  ho 
mes.  Ceux  donc  qui  font  tels,  ne  peuuent  pas 
alléguer  nulle  fidelité.Au  contraire, quand  ils 
font  là.ce  n'eft  point  qu'ils  foyéc  eflablis  par 
la  matn  de  Dieu, mais  en  deipit  de  luy ,auec  v- 
ne  confufion  infernale.  D'autant  plus  donc 
nous  faut-il  bien  noter  que  ceci  n'appartient 
finon  iceux  qui  ont  bon  tefmoignage,  &  qui 
peuuent  monflrer  par  efFet  que  c'eft  Dieu  qui 
les  a  choifis  :  pource  que  quand  il  veut  parler 
à  fon  peiiple,qu'il  veut  édifier  fon  Eglife.que 
il  veut  faire  fentir  fa  grâce  &  fa  prefence,que 
alors  il  choilit  les  JiÔmes,&  qu'il  les  met  là,& 
qu'il  monllre  quelques  fignes  ^marques  pour 
déclarer  que  c'eft  de  luy  qu'ils  font  enuoyez. 
Ceux-là  doc  qui  ont  vn  tel  teimoignage,  peu 
uent  due  aucc  fainft  Paul,  que  Dieu  les  a  re- 
putez  fidèles:  mais  ceux  qui  prophanétl'eflat 
où  ils  font,  foit  du  fiege  de  iuihce ,  ou  de  la 
chaire  de  verité:to*  ceux-la(di-ie)  font  coul 
pables  au  double  :&  fi  les  jerfonnes  priuees 
qui  fe  desbordent  à  l'encôtre  de  Dieu,  font  à 
1/41»  i.  condamner,ceux-ci  font  pleinement  diables: 
7©,^  comme  aufsi  en  la  perfonne  de  ludas  Us  ont 
71.  cAénommez  par  JÂ  bouche  de  Icfiu  Chrill. 


Et  d'autant  plus  ceur  qui  font  appelez  en  of- 
fice honorable, doiuent  regardera  eux:  pour 
ce  que  Dieu  les  a  choifis  pour  le  feruir  d'eus, 
&  que  par  leur  moyen  il  veut  que  l'oriirede 
nature  3c  toute  droiture    foit  confertiee  en 
fon  peuple,  voire  tellement  qu'ils  cognoif- 
fent.comme  i'ay  défia  dit,quand  tout  le  tede 
du  monde  fera  à  condamner,  qu'il  Faudra  que 
ils  attendent  vne  horrible  vengeance,  pource 
qu'ils  ont  peruerti  vn  ordre  que  Dieu  auoit 
ainiidedic,  tant  pour  fon  honneur,  que  pour 
le  falut  de  fon  peuple.Voila  qu.ït  à  ce  poinû, 
où  S.Paul  dit  q  lefus  Chriftl'a  eftimé  fiJele. 
Or  on  pourroit  encores  ici  faire  vne  f  ueftiô: 
carludasn'a  point  eiié  choifi  des  hommes, 
c'a  e/lé  par  le  Fils  de  Dieu  :  &  toutesfois  ce 
n'eft  pas  à  dire  qu'il  fiirt  fidèle  ne  loyal.  Mais 
cefte  difficulté  fera  aifcement  folue  ,  fi  nous 
confiderons  la  diuei  fité  qui  eft  entre  ludas  & 
entre  fliind  Paul.  Car  il  faloit  que  ce  qui  eft 
efcritau  Picaumc.s'accomplift  enl'Eglife  de  P/f.41, 
leiùs  Chnft  :  c'eft alçauoir,  que  fon  ennemi  10. 
fuif  l'vn  de  fes  plus  prochains,  &  de  (es  dorae 
ftiques:voire,  &  quemefaies  il  euft  vne  char- 
ge honorable,  afin  qu'il  en  fuftdepofé,&  que 
ccfte  charge  fuftcommife  àvn  autre,  ludas  P/r.y. 
donc  a  tftcchoili  à  ceftc  condition  ,  qu'il  fe-  16, Cr 
roit  Apoftie  pour  bien  peu  de  temps,  &  pour  105,8. 
eftre  débouté  de  ceft  honneur-la,  afin  qu'il  AÛes  1. 
fi;ft  conime  vn  miroirà  tous  :  &que  ceux  qui  16 ,  (y 
font  ordonnez  pour  eftre  miniftres  de  l'E- 10. 
uangile,  chcminafTtnt  en  crainte  &  en  humi- 
lité, de  peur  de  tomber  en  vne  cheiite  fi  vi- 
laine .  Il  a  donc  falu  que  ludas   fuft  choifi 
pour  peu  de  temps:mais  la  condition  de  ùinGt 
Paul  a  t  fté  bien  diuerfe. Pourquoy  ?  D'autant 
que  lefus  Chrift  a  déclaré  que  ce  luy  eftoit  vb 
inftrument  eleu  Se  authentique  ,  &  qu'il  fa- 
loit que  fon  Nom  fuft  publié  par  lu  v  en  tout 
le  inonde.  Voila  donc  le  tefmoignage  qui  a  e- 
llé  rendu  tel  à  fainct  Paul.qu'ila  cfté  ordon- 
né en  ceft  office,  &  que  Dieu  en  eft  tefmoin: 
en  forte  qu'il  n'eft  pluj  licite  aux  hommes 
d'en  douter.Et  c'eft  fuyuant  ce  que  i'av  défia 
touché,  qu'il  parloit  ayant  ceci  bien'feellé 
par  le  famd  Efprit  en  fa  confcience  :  comme 
nul  aufsi  ne  fe  pourra  nommer  fidèle  en  veri- 
té,eft3nt  appelé  en  quelque  office, finon  qu'il 
cognorfTe  &  foit  bien  reiolu  que  Dieu  le  coa 
duit  &  gouuerne,&  qu'il  l'a  choiiî  pour  le  fai- 
re feruir  à  fon  honneui,&  au  falut  de  l'on  peu 
ple.Mainten.ît  pourfuyuons  le  texte  de  faind 
Paul:  il  dit.  Combien  qu'il  fltfi  hlafphemat att- 
tontre  l>itu,i]u''ilfu/l  ptrfecutrur  de  l'ÏHangi     . 
U,C>'  meurtrier,totttesfats  qu'il. i  obtenu  tnife- 
ricorde.  Combien  qu'ici  nous  pourrions  mil» 
ftcr  pourmonftrer  quelle  eft  la  bonté  deDieu 
en  h  peifonne  de  fainéf  Paul,  cela  fera  diffé- 
ré à  vn  autre  foit ,  &  quand  le  texte  nous  y 
mènera.  11  iuffit pour  maintenant  que  nous 
cognoifsions  que  veut  dire  fainû    Paul  par 
ce  mot  ,  Q»'>f '4  ohten»  mifericorde  ,  tourte 
j«#  »«n  /(achaiit  il  a  failli  en  fon  iixreduliti^ 

eÀu 


l^ 


SIXIEME    SERMON 


Saiiift  Pâul  n'entêd  pis  que  les  péchez  qui  fe  fons  fa  iuftice,&  venons  tout  su  reboursic'eft 

commettent  de  volonté,&  à  rcfcient  des  hô-  dont  rompre  ,  entant  qu'en  nous  eft,  l'vnion 

mes,foyent  irremifsibles.  Car  que  leroit-ce?  qui  y  doit  eftre.  Mais  cependant  cela  ne  fe 

La  plas  part  de  ceux  quipechét,  font  redar-  fait  point  d'vne  intention  difpofee  ,  pour  di- 

guez,  &  fenteut  bien  le  mal  qu'ils  cômettent,  re  ,  le  m'attache  à  Dieu ,  ie  le  veux  anéantir. 

&  neantmoins  ils  font  vaincus  des  tentations  Mais  quand  nous  venons  à  blafphemer  con- 

de  Satan.  Si  tous  ceux  qui  ont  olfcnfe  Dieu  à  tre  la  religion ,  que  nous  ne  voulons  point 

leur  efcient,cftoyent  condamnez  fans  exce-  que  la  venté  de  Dieu  foit  receue,mefmes  que 

ption  aucune,ni  cfperance  de  falut.helas  i  où  nous  bataillons  à  l'encontre ,  que  nous  vou- 

cn  ferions-nous?Notôs  bien  donc  que  S.Paul  drions  qu'elle  fufl  anéantie  ,  cela  n'elt  point 

n'a  pas  ici  voulu  faire  en  gênerai  tous  péchez  fane  toit  aux  hommes,  mais  c'eit  faire  guer- 

irremiiîîbles ,  quand  ils  n'auront  point  efté  re  ouuertî  a  Dieu,  côme  lî  nous  iettions  tous 

«ommis  par  ignorance  :  mais  il  a  conioint  ici  nos  efforts  à  l'encontre  de  luy  pour  le  defpi- 

l'incredulité  &:  l'ignorance,  pour  monftrcr  ter  ,&  pour  monftrer  que  nous  ne  luy  voulos 

qu'il  ne  parle  finon  de  rcltfter  à  la  venté  de  point  eifrefuiets.  Etainiî  voila  le  comble  de 

Dieu.Or  c'eftvne  oitenfe  beaucoup  plus  enor  l'extrémité  de  tout  mal ,  quand  nous  venons 

me  que  de  commettre  ou  larrecin.oupaillar-  ainiià  relîller  contre  la  venté  de  Dieu  :  en 

dife.oumeurtre.Et  pourquoy?  Ucllvray  que  forte  que  iî  vn  home  veutainii  batailler  con- 

tous  péchez  nous  doyuent  eftre  deteftables,  trerElcritureiaincfe  ,  contrela  vraye  rcli- 

tnais  cependant  ceftuy-ci  nous  doit  eftre  en  gion,  &  qu'il  le  face  àfon  efcicnt ,  &•  de  pro- 
horreur par  deflus  tous ,  de  nous  eleuer  con-     pos  délibéré,  il  s'enluit  qu'il  eft  reprouué  de 

tre  Dieu,&tafcher  de  faire  qu'il  n'ait  plus  de  Dieu.  Car  laiiiais  Dieune  permettra  qu'vn 

prééminence  ,  que  fa  vérité  foit  conuertie  en  homme  qu'il  a  voulu  referuer  à  foy, tombe  en 

nienfongc,  qu'il  ne  foit  plus  cognu ,  qu'il  n'y  vn  tel  aby fme.pour  dire  ,  le  m'en  vay  de  cer- 
ait  plus  ne  foy  ne  loyauté  entre  les  hommes,     taine  malice  batailler  côtie  Dieu:  ie  cognoy 

&  que  Dieu  ne  foit  plus  honoré  ne  ferui  de  bien  que  celle  dodrine  eft  vraye  ,  maisi'iray 

cux.Helas!  où  eft-ce  aller?  cela  eftdu  tout  tout  au  contraire  ,  letafchcray  de  l'anéantir 

exorbitant  ,  &  cotre  nature:  car  ceux  qui  re-  entant  qu'en  moy  fera.Q^and  vn  home  vient 

fiftent  a  la  vérité, entant  qu'en  eux  efts'efFor  Là, il  porte  fa  marque,  il  eft  lleftri,  le  voila  au 

cent  d'arracher  Dieu  de  fonfîege  ,&anean-  diable:qu'on  le  tienepour  vn  damné.  Toutef 

tir  &  effacer  la  mémoire  de  fa  raaiefté.afin  foispource  que  nous  ne  pouuons  pas  iuger 
Qu'il  ne  règne  plus  fur  le  monde.  Sainft  Paul  de  l'intention  d'vn  homme,  &  de  fon  cœur, il 
«lonc  parlant  d'vnechofe  lî  exécrable, no  fans  ne  faut  pas  que  nous  Ibyons  téméraires,  pour 
caufe  dit  qu'il  l'a  fait  en  ignorance  :  comme  dire,Ccluy-la  a  péché  cotre  le  fain(il  Efprit, 
s'il  difjit ,  Mes  amis,  il  elfvray  que  ceci  fur-  ila  commis  vne  otfenfe  trrem:f>ible  .  Mais 
tnontetous  péchez, ie  blafphemer  Dieu,&  quand  Dieu  nous  manilefte  qu'vn  homme  de 
fouller  au  pied  fa  Parole  ,  de  reietter  ce  qui  certaine  malice  blafpheme  ainfi,  nous  fçauos 
eft  venu  de  luy  :  voila  vne  offenfe  figrande,  S.S  que  noftre  Seigneur  lefus  a  déclaré:  que  lî  Mrjf.  ii.  ' 
que  les  cheueux  nous  deuroyét  drefler  en  la  on  a  péché  contre  luy  ,  que  cela  pourra  eftre  jj^,^  y, 
tefte.quand  nousy  penfons.  l'en  fuis  coulpa-     pardonné:  mais  quiconque  blafpheme  contre 

ble.dit-il.Maisquoyflcnel'ay  pas  fait  à  mo  le  fainft  Efprit,  celuy-la  commet  vne  faute  ir 
efcient:car  ie  cuidoye  feruir  à  Dieu,  i'cftoye     remiisible, qu'il  ne  faut  iamais  attédre  ne  par 

vne  bcfte  eftourdie,quâd  i'ay  efté  ennemi  de  don  ne  grâce  de  luy.  Etcomment  cela?  Sivn 

l'Euangile.NouscognoilTonsmaintenat  l'in-  homme  a  repentance,  n'eft-il  pas  dit  qucE^^.,^ 
tentionde  faind  Paul.  Mais  afin  que  nous  en     Dieu  eft  touliours  appareillé  de  receuoirles  ^^. 

fçachions  faire  mieux  noif  re  proHt ,  diifin-  pécheurs  qui  vienent  à  luy?  Il  eft  vray  ,  fi  vn 
guôs  entre  les  deux  tables  de  la  Loy  de  Dieu,  homme  fe  repent.Mars  d'où  elt-ce  que  la  re- 
Nous  fçauons  comme  Dieu  en  la  première  ta  pentance  vient?rau onî-nous  en  noitre  man- 
ble  de  fa  Loy  nous  monftre  comme  il  veut  che  pour  nous  la  donner  quâd  bon  nous  fem 
eftre  honoré  &  ferui  de  nous  :  en  Li  féconde  bleiar'Ntnni:  c'eif  vn  don  fpecial  de  Dieu.  Il 
table.il  nous  monftre  côme  nous  deuons  con-  en  eft  ainlî  quand  nous  foraines  desboidez: 
uerler  enfemble,  comme  chacun  fe  doit  por-  nous  l'ommes  en  la  feruitude  de  Satan  ,  nous 
ter  aucc  fes  prochains.  Qupfi  nousfaiilons  fommes  en  la  m  jrt  éternelle. Celuy  donc  qui 
contre  nos  prochain?  ,  ali)rs  nous  ne  faifons  fe  repent,  il  eil  rciruicité  des  morts  :  &  fi  vn 
point  guerre  o'.iuerte  à  Dieu. Vn  home  pour-  homme  fe  pouuoit  rclTuicitei- ,  quedeuien- 
■ra  faire  tort  à  fon  frère, ou  en  fi  pcrfjnne,ou  droit  toute  la  pi.iflance  de  Dieu?  Ainfî  no- 
en  fes  biens, ou  en  fon  honneur:  tant  y  a  qu  il  tons  bici  qu'il  faut  que  Dieu  bcfongned'vnc 
ne  veut  point  iliftifier  fon  mal, qu'il  cognoift  vertu  extraordinaire  quand  il  luy  plaift  de 
qu'il  ne  fait  pas  bien  :mais  fi  eft-ce  qu'il  ne  ba  nous  retiierà  foy  :  quand  il  nous  main  tient, 
taille  poiiitdiretl:emeiit(côine  ondit).à  l'en-  &  fait  que  nous  ne  fommes  point  du  tout  alie 
contredcDien.  Ileftvray  que  nous  ne  pou-     nez  de  luy  ,  que  nous  auons  encorcs  quelque 

lions  faillir  en  forte  que  ce  foit, que  la  maietté  petite  goutte  de  religion, c'elf(di-ie)vne  au 

de  Dieu  ne  foit  violée  ;  car  nous  tranfgrcf-  urelinguliercdc  rEl'pritdeDieu.Maintenât 

ce  U3t 


s  V  R    LA   I.    A    T  I  M  O  T  H. 


«UT  qui  vienent  à  blafphemerain  fi.penfons- 
nous  6  Dieu  les  doiue  receuoir  à  merci,  pour 
leur  donner  repentanceîNenni:  mais(comrae 
i'ay  dit)ilfaut  qu'ils  foyét  reprouuez  de  luy: 
car  iamais  il  ne  permettra  qu'vn  homme  tre- 
hufche  fi  bas ,  que  de  blafphemer  manitcfte- 
menc,  &de  s'eleuer  de  propos  délibéré  con- 
tre l'Efcriture  fainfte  ,  &  la  vraye  religion, 
qn'il  nefoit  du  tout  perdu.  Voila  donc  ce  que 
S.Paul  a  voulu  ici  entendrcdif.mc  quM  a  ob- 
tenu mifencorde  de  ce  qu'il  auoit  relifté  à 
r£uangile,qu'ilauoit  bataillé  contre  la  ven- 
té de  Dieu.voirc  non  pas  de  certaine  malice, 
non  pas  cuidant  regimber  ainii  cotre  la  maie- 
fté  de  Dieu  ,  mais  qu'il  l'auoit  fait  comme  vn 
poure  aueugle,&  qu'il  ne  Içauoit  ce  qu'il  fai- 
îbit.  Voila  pourquoy  il  dit  qu'il  a  obtenu  mi- 
fencorde. Combien  que  ce  propos  ne  puiuc 
eltre  maintenat  dcfpelchéjtoutesfoisafin  que 
nous  ayons  quelque  concluiion  qui  nous  édi- 
fie &  nous  inftruife,  notons  bien  que  quand 
nous  feronsdutout  ignorans  .kaueugleSiqiie 
nous  ne  ferons  pas  pourtant  exculables ,  que 
ce  ne  fera  point  vue  couuerture  pour  nous 
abi'oudre  dciiant  Dieu.  Nous  aurons  beau  di- 
re,Ie  ne  le  cuidoye  pas.i'ay  penlé  autrement, 
iénel'aypas  cognn.  Voue,  mais  en  noftre 
ignorance  nous  fonimes  à  condamner,ô:  faut 
que  nous,  pafsions  condamnation,car  nous  ne 
gaigneroni  rien  nousvoulans  luftificr.  VoiJa 
pour  vn  item.Au  refte.fi  ceux  qui  faiilent  par 
ignorance.font  iuftemen^condînezdeDIeu, 
comme  il  faut  que  nous  le  cognoifsiôs,&  mef 
mes  chacun  pour  foy.que  fera-ce  quand  Dieu 
nous  aura  illuminez  ,  qu'il  nous  aura  raonftré 
le  chemin  de  lalut, qu'alors  nous  fermions  les 
yeux  ?  &:me<"mes  que  nous  l'oyons  fi  malins, 
quand  nous  aurôs  receu  vne  telle  grâce, &  que 
Dieu  nous  appellera  d'vn  cofté.ii  nous  allons 
tout  au  contraire,  quelle  condamnation  hor- 
rible deuons-nous  attendre?  £t  ainû  penfons 
a  nous ,  d'autant  que  Dieu  nous  a  retirez  de 


57 


l'incrédulité  en  laquelle  rrous  elîions,  Se  qu'il 
nous  a  illuminez  en  la  foy  de  l'Euangile.Pea 
fons  (di-ie)à  cheminer  en  û  crainte,  &  nous 
auancer  iournellement  en  icelk,  iufques  à  ce 
que  nous  ayons  atteint  .î  ce  lilut  éternel  qui 
nous  eftapp  relié  au  ciel.Et  fur  tout  craigriô» 
d'eftre  reprouuez  de  Dieu ,  &  qu'il  nous  liure 
entre  les  mains  de  Satan, &  que  nous  ne  tom-> 
bions  eu  cefthorrible  abylme  de  bLifphemer 
contre  luy,  comme  nous  en  voyons  d'aucuns 
qui  ont  fenti  quec'eftde  r£uâgile,&  mefme 
ils  en  ont  efté  allez  certifiez,  &  nous  les  voy- 
ons comme  beftes  enragées  defgorger  leurs 
blafphemei.\  Fencôtre de  Dieu.  Et  d'où  pr» 
cède  ceWC'ert  vne  horrible  vengence.Autât 
nous  en  prendra-il  fi  nous  n'apprenôsde  che 
miner  en  folicitude,comme  l'ay  dit  qu'vn  cha 
cun  doit  eftre  fur  ies  gardes,&  prierDieu  que 
il  nous  tiene  la  bride  courte,  &  qu'il  ne  per- 
mette point  que  nous  l'abandonnions  en  for- 
te que  Satan  prene  poflefsiô  de  nous,  &:  qu'au 
lieu  que  nous  auons  elle  illuminez  en  la  foy, 
que  nous  deuenions  belles  fauuages  ,  &  auec 
l'aueugleiuent  quenous  ayons  celle  rebelliâ 
maudire  de  venir  hurter  à  l'encontre  de  Dieu 
&  de  noftre  Seigneur  lefus  Chi  jft.Craignon» 
(di-ie)vne  telle  vengence  :  autrement  il  fau- 
dra que  le  Fils  de  Dieu  defploye  à  l'encontre 
de  nous  cefte  pinflance  qui  luy  a  efté  donnée 
au  ialut  de  tous  croyans ,  &  pour  la  ruine  Se 
condamnation  de  tous  ceux  qui  voudront  em 
pelcher  le  cours  de  fon  royaume. 

O  R  nous-nous  profternerôsdeuant  la  fa- 
ce de  noftre  bon  Dieu, en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  priant  qu'il  luy  plaife  nous  en 
donner  vne  telle  cognoiflance,  quenousy 
foyonsdelplaifans  ,  pour  chercher  toufiours 
ûmifericorde,&  nous  auacerde  plus  en  plus 
en  fa  crainte  ,  &  en  fon  amour,&  eiVla  co- 
gnoiflance de  fa  bonté  félon  la  melurede 
grâce  que  nous  auons  receue  de  luy.  Ainlî 
nous  dirôs  tous, Dieu  tout  pui(Iànt,Pere  celé. 


S  E  P  TI  EME.  SE  RMO  N    SVR    LE    PRE»; 

MIERCHAPITRE. 

Vayohtenii  mifcricorde  de  Dieu  ^  pource  (^ue  non f  cachant  iefayfait 
par  incrédulité. 

..     14     Mais  la  grâce  de  nojlre  Seigneur  a  tant  (f  plus  abondé ,  auec 
foy  O'  dileclionjaquclle  cjl  en  lefus  Chrifi. 

1 5  C'cjl  parole  certaine,  ^  digne  d'cflre  du  tout  receue y^ue  le- 
^s  ChriJ}  ejl  venu  au  ynonde pour  fauuer  les  pécheurs ,  defquels  iefuis 
leprincipal. 

Ous  auons  défia  cômencé  à  ex-  ché,  comme  nous  verros  encores  tantoft  plus 
pofer.à  quelle  intention  S.Paul  à  plein:mais  afin  que  ceux  qui  ont  efté  lUumi- 
met  ici  en  auant  fon  ignorâce,  nez  en  la  cognoiflance  de  Dieu ,  &  en  la  foy 
&  auôs  dit  en  fomme  que  ce  ne  de  l'Euangile,  cheminent  humblemét  en  leur 
eft  pas  pour  amoindrir  fon  pe-    vocation,&  qu'ils  fe  gardée  de  s'eleuer  à  l'en- 

c.iii» 


î8 


SEPTIEME 

contre  de  Dieu  &  de  (à  vérité  qii  leur  eft  co 
gnue.Or.comme  nous  auons  déclaré, c'eftvn 
péché  irrcmifsible  quand  l'homme  mortel 
vient  pour  hurter  dVne  certaine  mahce  con- 
tre Dieu.qn'il  bataille  contre  û  çloire.qu'il 
lafche  d'anéantir  fa  vérité.  Il  taut  qu'vne 
créature  (oit  du  tout  maudite  ,  &  que  Dieu 
l'ait  reiettee  quad  elle  vient  là.Ainlî  dôc  pen- 
fons  à  nous,&  cognoiirons  que  fi  Dieu  nous  a 
pardonné  l'ignorance  en  laquelle  nous  auôs 
vefcu.il  ne  uut  point  que  nous  l'irritiôstcar 
ce  feroit  par  trop  prouoquer  fa  vengeance, 

2uand  nous  voudriôs  luy  eftre  rebelles.voire 
e  noftre  gré,fçachâs  bien  que  c'eft  à  luy  que 
nous  faifons  la  guerre, &  non  point  à  quelque 
creature.Cependant  on  pourroit  icidemader 
iî  les  incrédules  ont  vne  telle  cognoiflance, 
qu'ils  penfent  batailler  contre  Dieu,  fç.ichâs 
bien  le  mal  qu'ils  font. Car  l'Efcriture  laintte 
dit  que  l'infidélité  eil  le  plus  grand  aueugle- 
ment  qui  puiffe  eftre  en  l'homme:  comme  de 
faid  nous  n'auôs  ne  fens  ne  raifon.ii  nous  ne 
cognoiflons  Dieu.Si  cela  eft, il  femble  que  S. 
Paul  côfond  ici  fon  propos, Qiie  c'a  eitépar 
ignorance  qu'il  eftoit  incrédule. Et  puis  il  dit 
aufsi  en  m  autre  paflàge,  que  iî  les  luifs  eul- 
r.Cor.i.  fent  cognu  le  Seigneur  de  gloire  ,  iamais  ils 
J.  ne  l'eullent  crucifié.Et  par  cela  il  prouue  que 

la  (âgefle  des  homes  ne  peut  paruenir  fi  haut 
que  de  cognoiftre  les  iecrets  de  Dieu.  Mais 
cefte  difficulté  fera  aifee  àfoudre,quand  nous 
ferons  comparaifon  de  deux  efpeces  d'igno- 
rance qui  peuuent  eftre  aux  hommes,  comme 
aufsi  on  le  voit.  Il  y  en  a  qui  feront  pleine- 
«ent  ignorans.comrae  ceux  qui  font  pouiFcz 
d'vn  zèle  fot  &.  inconfideré  :  comme  auioiir- 
d'huy  entre  les  Papiftes,il  y  en  a  beaucoup  q 
penfent.faire  facrifice  à  Dieu,quand  ils  perfe 
cutent  les  fidèles,  qu'ils  font  enragez  contre 
l'Euangile.Et  pourqupy?Car  ils  n'entendent- 
pas  que  ce  foit  la  venté  de  Diew:ils  ont  leu^s 
Autres  deuotions  tellemét  imprimées  en  le«ir 
cerueau,  que  tout  ce  qui  viét  au  côtraire,  leur 
eft  deteft«ble.Ceui  donc  qui  font  ainfi  abbru 
»is,font  pleinemét  ignorans:  &  S.Paul  eftoit 
tel  deuant  qu'il  fuft  conuerti.Car  côbien  que 
dés  fa  ieuneflè  il  euft  eftc  exercé  en  la  Loy, 
tt  qu'il  fuft  du  rang  des  doaeurs,il  ne  laiflbit 
pas  d'eftre  vn  poure  aueugle:  corne  il  dit  que 
ks  luifs  de  fon  temps  auoyent  vn  bâdeau  de- 
2.C«r.3.  uant  leurs  yeux,&  ayâs  intelligéce  de  la  Loy, 
■^•tt  if .  demeuroyent  toufiours  ignoras  en  leur  befti: 
fe,àcaufe  qu'ils  n'auoyent  point  le  droit  but, 
t'eft  afçauoir,Icfus  Chrift.Voila  donc  vne  e- 
ipece  d'ignorance  lourde, laquelle  quand  elle 
domine  en  1  home,  le  pouffe  &  l'incjte  à  mal, 
combieo  qu'il  cuidc  bien  faire. Venons  main- 
tenant à  ceux  qui  ptclient  par  malice  :  côme 
il  y  en  3  beaucoup  en  la  Papauté  auiourd'huy 
qui  ne  font  point  pouiTez  par  leur  bône  inten 
.lioo.qu'on  appelle, pour  refiHer  &  contredire 
â  l'Euangile, comme  ils  font. Qjjpy  donc?  La 
.(uifine,i'auarice,ratiibitiô  les  pouUcnt  Si  ks 


SERM  OM 

enflâment.qu'ils  fçauent  bien  qu'ils  font  mal, 
mais  tant  y  a  qu'ils  regardent  d'autre  cofté^ 
que  fi  l'Euangile  vient  en  auant.leur  tyrannie 
fera  abbatue,&  leur  bourfe  ne  fera  plus  four- 
nie comme  elle  eft.Cela  donc  les  incite  à  s'e- 
leuer  contre  lefut  Chrift  ,  &  contre  fa  vérité 
qui  leur  eftcognue.Nousne  pouuons  pas  dif- 
cerner  bonnemétlefqutls  fontpoufllz  d'vne 
telle  rage,  &fidefefperee:carceux-la(c5me 
nous  auôs  ditjlbnt du  toutincorrigibles:mais 
tant  y  a  qu'on  coguoiit  par  experiece, qu'il  y 
en  a  beaucoup  de  tels.Ceux-la  ne  laifllnt  pas 
cependant  d'eftre  aueugles.Et  pourquoy?Car 
ils  ont  vne  frenefie  qui  les  tranfporte,c6bien 
queDieu  leur  face  luiie  faclarté,qu'ilsenfoy 
ent  côuaincus:  toutesfoisils  s'abbrutiirent,& 
font  contens  que  Satan  les  poulTc  çà  Se  là.iuf 
ques  à  ce  qu'il  les  ait  du  tout  eflouidii.  Voila        o 
comme  les  incrédules  font  ignoi.tns:  mais  tât 
y  a  que  ce  n'eft  point  vne  ignorance  limplc. 
Qimy  doncrC'eft  pkiftoft(comme  nous  auôs 
dit)vne  frenefie  qui  eft  coniointe  auec  vne  re 
belliô  maudite, pource  qu'ils  ne  peuuent  eftre 
aflèurez  qur  Dieuapprouue  ce  qu'ils  fontiiS: 
aufyi  il$  ne  tafchenc  pas  de  le  feruir  ni  hono- 
rer. Or  par  cela  nous  pouuons  aifcement  coa 
cluie,que  nô  fanscaufe  S.  Paul  dit  que  fon  pe 
che  luy  a  cité  pardonné ,  voire  d'autant  qu'il 
eftoit  Ignorant ,  pour  le  temps  qu'il  a  eftc  in- 
credule.Nous  auous  maintenant  vne  plus  cer- 
taine déclaration  de  ce  paflàge,  pour  l'appli- 
quer à  noftre  profit:c'elt  que  les  hommes  luf 
ques  à  tant  que  Dieu  les  ait  illuminez   par  la 
grâce  de  fou  S.Efprit ,  font  poures  aueugies, 
&  qu'en  cuidant  bien  faire  ils  lont  rebelles  à 
Dieu  &  à  là  parole.CognoilTonsdonc  qnous 
fomipes ,  fçachons  que  nous  ne  pouuons  pas 
tenir  le  droit  chemin ,  fi  nous  fommes  guidez 
par  noftre  induftrie&prudéce:mais  qu'il  f.iut 
que  la  clarté  du  .S.  Efprit  domine  fur  nous. 
Voila  vnitem.S cachés  que  quand  Dieu  nous 
a  retirez  des  ténèbres  de  la  Papauté  aufquel- 
les  nous  auons  vefcu  ,  c'a  efté  par  fa  grande 
pitié  :  que  nous  eftions  poures  &  mifcrablet 
creatures,quand  il  a  defploy  é  les  chrefors  in- 
finis de  fa  bonté  fur  nous ,  quand  il  n'a  poinC 
permis  que  nous  perifsions  en  vne  telle  con- 
rufion. Or  depuis  qu'il  nous  a  appelez  à  la  co- 
gnoiflance de  l'Euangile  ,  notons  qu  il  nout 
faut  alTuiettir  pleinement  àluy,  donter  tous 
nos  appétits  mauuais,&  tout  ce  qui  eft  de  no- 
ftre fens  charnel:  car  nous  n'y  trouuerc'Mque 
mal.  Et  gardons-nous  fur  tout  de  nous  cleuet 
contre  Dieu  ,  depuis  qu'il  s'eft  manifeftc  à 
nous:  de  refifter  à  ù  volonté  ,  depuis  qu'elle 
nous  eft  cognue.Maintenent  venons  à  ce  que 
S.Paul  adioufte  ,  C''tJ}  tjue  la  grâce  de  Vitit  a 
tfté  multipliée  fur  luy  ti't  C  flits.  En  quov  ii 
môftre  blé  qu'il  n'a  pas  voulu  amoindrir  ion 
péché, côme  défi»  il  a  efté  expofé.Car  fi  c'cuft 
efté  vne  faute  petite  &  légère,  q  d'auoir  ainfi 
côbatu  par  ignorâce côtie la  dodrine  del'E- 
uangile:  S.  Paul X'e  fuft  contenté  de  dire  fîsi- 

pltmcnt, 


SVR  LA  I.   A   TIMOTH. 


59 


pleinent,  Dieu  a  eu  pitié  de  moy  :  mais  il  dit 
que  c'a  efté  vne  grâce  magnifique  &  exeellen 
te.laquelle  s'eft  eflargie  tant  &  plui.Parle^il 
par  fiiftionfnéni:  ilprotefte&côtefleque  fon 
péché  cftoit  crimmel.que  c'a  efté  vne  otfenfe 
il  énorme  qu'il  a  falu  q  la  grâce  de  Dieu  fuft 
corne  vn  abyfme  pour  engloutir  vn  tel  mal  fi 
énorme.  Or  ceci  eft  bien  digne  d'eftre  noté: 
car  fi  no°  ofFenfoRs  Dieu  fi  grieuemét,ne  fç.i 
chans  que  nous  failons.feulement  ayans  cefte 
foie  faiitafiede  cuider  bien  faire,  que  lera-ce 
quand  nous  viendrons  d'vne  volonté  mef- 
cnante  &  rebelle  pour  batailler  contre  luy.' 
Nous  esbahilTons-nous  fi  l'£l"criture  fainÀe 
DÔrae  ce  pcché-la  irreinif>ible,qui  ne  fe  p»r- 
dônc  laroais  ni  en  ceftevie  ni  en  rautrefcôme 
•**•"••  noftrc  Seigneur  lefiis  en  parle.  Faut-il  que 
^"  nous  trouuions  vne  telle  rigueur  de  Dieu  e- 

ftrangefEt  cela  nous  doit  bien  faire  baifler  la 
telVe.afin  qu'vn  chacun  cognoifle  que  nous  a- 
uoas  befoin  d'eftre  retenus  en  bride. Et  d'au- 
tant que  de  Qous-mefines  nous  femmes  tant 
enclins  à  mal.u'eftoit  que  Dieu  nous  gouuer- 
naft  par  fon  fainft  Efprit,  nous  pourriôs  tous 
venir  à  vne  telle  ruine.Car  de  faid  les  exem- 
ples que  Dieu  nous  itionftre  deuant  les  yeux, 
nous  doiuent  bien  faire  fentir  cela. Nous  vo- 
yôs  ceux  qui  mefprifent  la  parole  de  Dieu.ou 
qui  en  abufent  en  quelque  façon  q  ce  foit,qui 
de  prime  face  ferôt  des  gaudiffeurs,  &  ne  refi 
Aeront  pas  pleinement  à  Dieu. Mais  quoyfce 
leur  fera  vn  ieu  de  mal  faire,  de  mener  vie  dif 
folue.de  fe  lafchcr  la  bride  ,  &  (c  douer  toute 
licéce.Sont-ils  là  ven'?On  les  voit  puis  après 
s'emienimer  contre  Dieu,  &  fur  tout  quand  il 
les  touche  au  vifqii'il  leur  donne  des  remors 
qu'ils  ne  peuuét  pas  tuir:ils  empiiét  toufîours 
de  plus  en  plus,  lufquts  à  ce  qu'ils  foyent  ve- 
nus à  cefte  ragediabolique,  de  batailler  con- 
tre la  vérité. Quand  nous  voyons  de  tels  mi- 
roirs cômenoftre  Seigneur  nous  les  monftre, 
qu'vn  chacun  s'humilie,&  que  nous  prions  en 
toute  folicitude  ce  bon  Dieu ,  que  puis  qu'il 
nous  a  tendu  la  main  pour  vn  coup  ,  il  nous  la 
tiene  fern)e,  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  deli- 
urez  de  toutes  tentations.  Voila  donc  ce  que 
nous  auons  à  noter  fur  ce  mot  où  S.  P.iuldit 
que  la  grâce  de  Dieu  s'cft  multipliée  tant  & 
pi'  fur  luy. Il  adioufte  quat  &  quât  le  moyen, 
Q»f  c'a  <Jlé  auec  foy  Cr  dilt^ionqm  tfl  en 
noflre  Stiginur  Ufus  Chrijl .  Yci  l'ainft  Paul 
¥cut  exprimer  comme  il  a  tfté  réduit  au  che- 
min de  falut,  &  par  quel  moyé:  c'eft  afçauoir 
que  Dieu  luy  a  donné  la  foy,  &  qu'il  l'a  rédu 
non  feulement  paifible,  mais  qu'il  a  embraffc 
TEuangile  auec  vne  douceur  amiable  ,  qu'il  a 
là  trouué  tout  fon  plaifir,tout  fon  repos&  tou 
te  fa  ioye.Pour  mieux  entendre  ceci  prenons 
à  l'oppofite  ce  qui  eftoit  en  S.Pauldeuât  qu'il 
fuft  conuerti.  Au  lieu  de  foy  il  n'auoit  qu'in- 
creduLté,  c'eftoit  vnpoure  aueugle.c'eftoit 
vne  befte  enragée.  Voik  vn  homme  qui  a  efté 
nourri  en  ladodrinc  de  la  Loy,cn h  religioii 


des  luifs, lequel  neatmoins  a  taiché  Je  batail- 
ler contre  la  Loy  meirne  ,  contre  la  religion 
qu'il  deuoit  tenir  de  fes  pères  &  anceftrts.Of 
au  lieu  de  cefte  incrédulité  en  laquelle  faind: 
Paul  eftoit  détenu,  il  a  receu  le  don  de  foy,&: 
en  cela  il  a  efté  du  tout  chîgé.  Apres  il  au  ou 
efté  vn  tyran  cruel  contre  l'Euangile  ,  que 
nous  voyons  qu'ileftoit  plein  de  meurtres, 
plein  de  violences,  tellement  qu'il  nedeman  . 
doit  qu'à  faire  efpandre  le  fang  innocct.Vo» 
la  Dieu  qai  non  feulement  luy  fait  trouuer 
quelque  court  en  l'Euangilc.niais  il  l'embrâ.» 
fe  d'vne  telle  amour,  qu'il  i'oubiie  foy-mef- 
me.il  ne  luy  chaut  plus  de  la  vie  ,  il  tient  fon 
honneur  comme  fiente  3c  ordure,  ainfi  qu'il  p^/t,..^ 
en  parle  aux  Phitippiens:  que  tout  ce  qu'il  e-  rt-  8. 
ftiinoit  à  gain,  &  luy  eftoit  en  grande  réputa- 
tion, comme  cefte  fainfteté  de  laquelle  il  pre 
fumoit, qu'il  fe  tcnoit  comme  vn  Angcifdit, 
qu'il  a  tout  cela  en  confufion  &  horreur,  mef 
mes  qu'il  Ta  tenu  côme  ordure  piunte.  Nous 
voyons-donc  maintenant  à  quel  propos  fainâ 
Paul  parle  de  la  foy  &  diledion  qui  eft  en  n» 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Il  n'entend  pas 
qu'il  pvufTe  alléguer  fes  vertus,  ne  qu'il  ait 
rien  merité^poux_4ir£_^  Dieu  au  peu  eftre  ef«  ^ 
meu  paTcela.  Mais  au  contraire  iTveutmon- 
ftrerque  qu-iudDieua  voulu  auoir  pitié  de 
îuy,illuyadonnelafoy  &  la  charité;  làoii 
auparauant  il  eftoit  incrédule,  &•  comme  vne 
bcrte  fauuage  pleine  de  cruauté.  Or  ccpendît 
nous  fommes  admoneftez  de  deux  chofes  :  l'y 
ne  c'eft  que  ce  que  (àinft  Paul  protefte  de  f» 
perfonne  ,  il  nous  le  faut  appliquer  à  nous, 
voiicfans  exception,  car  Dieu  n'appelle  pat 
les  hommes  à  falut  par  autre  moyen  que  ce- 
ftuy-ci:c'tft  en  leur  donnant  la  foy  &  la  dile 
iîion.  Voulons-nous  donc  eftre  héritiers  du 
royaume  de  Dieu?voulons-nous  eftre  retirez 
d«  la  perdition  en  laquelle  nous  fommes  de 
natureftcnosle  chemin  que  S.  Paul  nous  mô- 
ftreencepaflàge:  c'eft  que  Dieu  nous  ouure 
les  yeux  afinde  venir  à  fon  Fils  vnique,&que 
nous  cognoifsios  que  lefus  Chrift  nous  a  efté 
dôné,  afin  q  no'  trouuiôs  noftre  faJut  en  luy, 
que  nous  acceptions  vn  tel  don  &  vn  tel  thre 
for  que  Dieu  nous  prefente  en  l'Euangile, 
c'eft  la  foy  :  &  puisiguenous  ayons  la  chari- 
té ,  qu'eftans  reconciliez  à  Dieu  ,  nous  foy- 
ons  alTuiettis  a  luy  pour  plier  fous  fon  ioug: 
&puis  que  nous  conuerfions  auec  nos  pro- 
chains en  vraye  vnion  &  fraternité.  Voila  le 
chemin  que  feous  auons  à  tenir  fi  nous  deR- 
rpns  de  iouir  du  falur  qui  nous  eft  propofé 
en  l'Eiungile.  c'eft  pour  vn  item.  Mais  c'eft 
vne  doftrine  mal  prattiquee:  car  chacun  dira  ' 
aflez  de  bouche  qu'il  ne  demande  que  d'eftre 
fauuc.  Mais  quoy  î  Combien  s'en  trouuera-» 
il  qui  ayent  tn  zèle  ardent  de  rendre  à  Dieu 
par  foy  vne  obeiflânce  telle  qu'il  la  deman- 
de ,  &  comme  elle  luy  eft  deue  ?  Où  eft  ta 
charité  en  lefus  Chrift?  Nous  voyons  que 
vnchaci^efl  addonné  à  foy,  A:  que  nou» 
"'  "''   "■  e.iiti. 


40 

ne  tenon?  conte  de  ce  que  Dieu  nous  propo- 
fe.Et  d'autant  plus  nous  faut-il  bien  noter  ce 
partage, afin  qu'vn  chacun  apprene  de  repri- 
mer tous  les  empefchemens  am  nous  deftour 
nent  que  nous  ne  foyons  pleinement  réduits 
a  Dieu  ,  &  que  quand  nous  aurons  commencé 
d'elhe' en  bon  train  ,  que  nous  aduiiîonsde 
nousauancer  de  plus  en  plus,  voire  tant  en 
■   foy  qu'en  charité. Le  fécond  article  que  nous 
auons  à  retenir  ,  c'eft  que  la  foy  &  la  charité 
font  dons  de  Dieu, que  les  hommes  ne  peu- 
lient  pas  d'euX-mefmes  s'illuminer,ils  nepeu 
uent  pas  châger  leurs  courages  mauuais  pour 
aimer  leurs  prochains  comme  ils  doiuent ,  a- 
pres  auoiraimé  Dieu:  mais  il  faut  que  cela 
nous  viene  d'en-haut  ,  que  Dieu  nous  refor- 
me par  fon  fainft  Efprit ,  &  deuant  que  nous 
ayôs  la  fay,il  faut  qu'il  nous  ouure  les  yeux, 
&  qu'il  nous  efclaire.   Car  quand  ûintt  Paul 
confefle  ici  que  ces  deux  chofes  luy  ont  efté 
données  de  Dieu,ilnous  monftre  que  nul  ne 
fe  pourra  vanter  de  les  auoir  par  fon  indu- 
ftrie,  ou  qu'il  puiile  alléguer  fcs  vertus  ,  tant 
excellentes  qu'elles  foyent  :  mais  nous  fom- 
iil.es  enfeignez  de  cognoiftre  que  ceux  qui 
ont  la  foy  ,  ils  la  doiuent  tenir  de  Dieu.  Au- 
tant en  eft-il  de  la  chanté  :  &  cependant  fi 
nous  defiillons  ,  comme  il  n'y  a  celuy  qui  ne 
fente  fa  foy  eftre  bien  débile,  &  ne  fente  fa 
charité  bien  maigre  &  froide,  que  nous  priés 
Dieu  qu''il  augmente  &  l'vn  &  l'autre  ,  fça-' 
chans    qu'il   faut    que   cela    nous  viene  de 
luy.   Venons  maintenant  à  ce  que  fainâ  Paul 
adiou/le  .     C'  eft  -rne  parole  certaine  &  di- 
gne cTeflre  fhinement  recette  de  toits  faaj  dstjt 
te  ,  C'#yj  que  le  fin  Chrifl  eft  -venu  four  fan  utr 
les  pécheurs,  defqnels  te  fuis  le  premier.  Yci 
fainû  Paul  fait  vneconfefsion  plus  ample  de 
ce  que  défia  ilauoit  touché,  c'eft  afçauoir 
que  l'ofFenfe  qu'il  auoit  commife  rcfiftant  à 
l'Euangile.eltoit  fi  grande  &  fi  énorme  ,  que 
ç'auoit  efté  vn  miracle  de  Dieu  de  ce  qu'il 
auoit  efté  conuerti.Ccpcndaiit  aufsi  il  appli- 
que cefte  confei'sion  à  vne  doftrine  générale 
pour  tous  enfans  de  Dieu ,  afin  qu'en  fa  per- 
fonne  nous  foyons  tant  plus  afleurei  de  no- 
fire  falut,&  de  la  remif  iondenos  péchez. No 
tés  donc  en  premier  Ueii^ixfaintt  Paul  s'eft 
ici  humilié.afin  que  la  gloire  de  Dieu  fuft  tât 
mieux  cognue.    Et  c'eft  fuiuant  cequi  aefté 
dit<e  matin, que  iamais  Dieu  n'cft  exalté  de 
non?  comme  ;1  le  mérite,  que -nous  ne  foyons 
pleinement  confus  &  abyfmézi'Çarccpcndîî! 
que  l'homme  fe  refcrue  tant. peu  qi'ic  c£*,fbft! 
voila  Dieu  quieftfvuftré  dudroit  qui  lày  Sp 
particnt.  Et  cependant  auAi  que  les  hommes 
couuventleurtLir'pitude,  &  qu'ils  la  cachent, 
Dieu  n'a  point  ce  qui  luy  eftdeu  ,  comme  S. 
Paul  en  parlr  au  3, des  Romains. 'Caren  ijuoy 
eft-ce  qu'il  dit  que  la  çjoire  de  Dieu  reluit? 


SEP  T  lEME    SERMON 


mes  foyent  venus  en  conte  pour  fe  condam- 
ner du  tout,  &  confefler  qu'ils  n'ont  rien  en 
eux  que  toute  malediition.toute  poureté.que 
ce  font  créatures  perdues, &:  pkis  que  mifera- 
bles^ufques  à  ce  qu'ils  en  foyent  là  venus.la 
gloire  de  Dieu  n'eft  pas  cognue  comme  il  eft 
befoin.  Brief,  toutes  les  couuertures  que  les 
hommes  preneht  pour  cacher  leurs  vilenies  & 
ordures,icmt  autant  de  nuées  qui  empefchent 
que  la  gloire  de  Dieu  n'ait  fa  pleine  clarté  & 
fonluftre  enuers  nous.  Il  eft  bien  vray  qu'on 
verra  bien  quelque  clarté,encores  qu'ij  y  ait 
des  nuées  &:  des  brouillas  ,  &  .^ue  le  temps 
loit  couuert  :  mais  fi  eft-ce  que  le  ciel  n'eft 
pas  ferein :  nous  ne  voy os  pas  cefte  belle  clar 
té.comme  quand  l'air  eft  du  tout  vuide  &  pur 
gé.  Ainfi  il  faut  que  nous  apprenions  de  nous 
delcouunr ,  &  de  mettre  en  auant  toutes  nos 
tianfgrtfdons ,  afin  qu'en  cela  &  nous  &  les 
autres  cognoifsions  combien  nous  fommes  te 
nus&  redeuables  à  noftre  Dieu  ,  &  quelle  eft 
la  grandeur  de  d  bonté ,  que  c'eft  vn  abyfine 
p  lus  qu'infini  quand  il  luy  a  pieu  nous  retirer 
de  la  mort  eternclleen  laquelle  nous  eftiôs 
tous.Pefons  bien  dôc  les  mots  de  faind  Paul, 
quand  il  rend  ici  vnctielle  confefsion.  Car 
il  môftre  que  par  ingratitude  il  ne  veut  point 
amoindrir  le  bien  ineftimable  qu'il  auoit  re- 
ceu.Or  qui  tft  celuy  de  nous  qui  doiue  moins 
à  Dieu  que  fàifoit  i'ainft  PauPll  eft  vray  que 
nous  n'aurons  pas  efïc  cruels  tous  pourpcr- 
fecuter  l'Euangile  .  Mais  à  qui  a-il  tenu?  ce 
mal  n'eftoit-il  pas  en  no'?  que  s'il  n'y  a  efté, 
tant  y  a  que  nous  eïtions  comme  belies  fiu- 
uages  pour  repoufier  la  grâce  de  Dieu,  &  fou 
1er  au  pied  la  fainflcveuté.Par  cela  nous  me 
ritions  bien  que  Dieu  nous  reietiaft  du  tout. 
Et  puis  cognoifTons  les  fautes  que  nous  auôs 
commifes  en  tant  de  fortes  &  efpeces.  Brief, 
il  faut  conclure  que  fi  faind  Paul  a  magnifié 
à  bon  droit  la  mifericorde  de  Dieu,  laquelle 
il  auoit  ft ntie,que  nous  fommes  plus  conuain 
eus  par  expérience  ,  que  nous  dtuons  taire  le 
femblable  pour  le  moins.  Cependant  notons 
bien  ce  qu'il  dit ,   Q«'/7  efi  le  premier  de  tous 
les  pécheurs, c'eft  à  dire  le  plus  grand  Si  le  plus 
énorme. Comment  ceci?&  faintl  Paul  n'auoit 
point  efté  ni  vn  paillard, ni  vn  yurongne  ,  m 
vn  gourmand,  ni  vn  larron  ,  ni  vn  homme  de 
mauuaife  vie  ne  diflolue  ,  comme  il  déclare 
qii'tl  cftoit  irreprehenfible  iclon  la  Ldiy  j  & 
qu'il  fe  faifoit  .i  croire  qu'il  eftoit  dfitoift  ui- 
fte.' Pourquoy  donc  s'appelle-il  le  prihcipal 
pecheui?  Or  en  cela  nous  voyons  quelle  bf- 
fe'nfc  c'eftde  refifter  à  la  parole  de  Dieu, en- 
core? qu'on  le  face  par  ignorance,  &.  fans  cui 
der  mal  faire. Nous  auons  vèu  que  fa'nft  Paul 
a  déclaré  qu'il  le  faiioit  non  fçachant ,  ir^ef- 
mès  il  auoit  vn  tel  zèle  qiie  plufieurs  de  nous 
"ont  cuiufques  à  ce  que  Dieu  les  ait  réduits 


C'eft  quand  toute  bouche  eft  clofc  ,  &!  àde  foirs  fou  ioug  :  &  hcantmoîhs  il  (.ft  le  princi- 
nous  cognoiflons  combien  nous  liiy  fomniJ?  pkljJcchtur  du'mondc,,dit-il.  Fait-il  ici  vné 
redcuables.  Aihfi  ,  iufqucsà  ce  que  les  ho'm-    fcSniefsWfl  fathypoc'itllè?  cônie  il  ^'  en  auril 

beaucoup 


SVR   LA    I.    A   TIMOTH- 


41 


be.iucoiip  qui  diiot  de  bouche,  le  fuis  le  plus    Dieu  ne  peut  foufFrir  cek.Cômentdonc  fouf 
grâd  pcclieui  :&  ccpcdantil>  ioiU  enfltz  d'or     fnia-il  que  nou'>  venions  Icuer  les  fourcils  i 
gueil,&  cuident  auoir  vue  grande  lainiicté.     rencontre  de  luy,&  que  nous  le  venions  de-. 
Ail  ûmct  Paul  n'y  a  pas  ainlî  procède  ,  corn-     ipucr?  £fl-ce  vn  pèche  exculable  que  celuy- 
'me  l'a  y  délia  touché  :inais  lia  monibccom-     là,  quand  il  y  a  vne  telle  prelomption  aux  ho 
bien  que  les  hommes  Ibyent  ignoians,  qu'ils     mes, qu'ils  veulent  ainfî  batailler  tôtre  Dieu? 
n'ont  pour  cela   nulle  e.vcufc  deuanc  Ditu,     Or  voila  ou  S.Paul  eltoitpljngé,iui'ques  à  ce 
que  leur  offenfe  &:  iniquité  ne  l'oit  li  enor-     qu'il  ait  efce  don  té  par  la  grâce  de  npftreSei 
me, qu'il  faut  qu'ils  conrellent  qu'il  pourroit     gneur  Icfus  Chnit.Il  fe  côtentoit  de  Ion  l'ça. 
à  bon  droit  foudroyer  contr'cux.  C'cft  pour     uoir,  &  ne  le  pouuoit-on  nullement  rangera 
confermer  la  doftrine  qui  a  delîa  efté  e.xpo-     l'£uangile:il  y  auoit  quant  &  quant  de  l'hy- 
fee  Cl  dellus.Et  de  fait,iî  nous  regardés  quel     pocriiïe.Car  lî  l'hôme  l'elpluche  bien,&  que 
clUe  principal feruice  que  Dîeu  demande  &     il  examine  fa  vie,  il  faudra  qu'il  l'oie  abbatu 
I.  Samu.  accepte  ,  nous  fçaurons  bien  dire  quel'hu-     non  feulement  de  cortul7on,mais  d'vn  defe- 
If. 14.       milué  eftle  facrifice  le  plus  grand qu'd  ap-     fpoir  extrême.  Et  fainft  Paul  feplaifant  en 
prouue.Et  voila  pourquoy  il  ell  dit,  que  l'o-     cela,pouuoit-il  auoir  vne  confcicnce  pure  de 
beillànce  de  foy  eft  comme  mère  de  toutes     uant  Dieu?  Nenni  :  mais  il  eftoit  plein  de  fi- 
vertus  ,  c'en  ell  le  fondement  &  la  fource,&     Ùion.  Il  ell  vray  qu'il  ne  reliftoit  pas  du  tout 
ians  cela  toutes  les  vertus  qui  font  apparen-     a  la  vérité  à  Ion  efcient ,  pource  qu'il  eitoit 
tes,  &  qui  font  prifees  des  hommes  ,  ne  font     ignorant  :  mais  tant  y  a  que  l'hypocrifîe  re- 
que  fumées,  ce  font  autant  de  vices  que  Dieu     gnoit  parmi  cefte  ignorance.  £tce  que  nous 
condamne. Q_uand  nous  aurôs  beaucoup  loué     difous  de  fainct  Paul, il  faut  bien  qu'il  foit  en 
vn  homme  ,  &:  que  nous  l'aurons  mis  au  rang     cores  plus  appliqué  .i  tous  autres.  Et  ainli  ne 
des  Anges, il  fera  reietté de  Dieu auec  tout  ce     trouuons  plus  ellrange  que  Dieu  condamne 
qu'il  a  de  belle  réputation,  finon  qu'il  ait  ce-     ainli  la  rébellion  des  incrédules, encores  auc 
lie  obeilîànce  de  fcy.Amlî  les  homes  auront     ils  prétendent  de  ne  fe  point  eleuerde  mau-. 
beau  dire, le  necuiJoyepa^.il  m'a  lcmblé:car     uais  propos  nedemahce  délibérée:  combien 
aucc  tout  leur  cuider&  leur  réputation, il  fau     qu'ils  cherchent  tous  cfchappatoires  ,  co- 
dra  qu'ils  f'.yent  condanez  dcuSt  Dieu  cônie     gnoiflons  que  Dieu  les  condamne,  puis  que 
rebelles.  Ceci  de  prime  lace  nous  fembleroit     faincl  Paul  déclare  que  telles  gers  font  les 
dur  à  digérer. Pourquoyf  Car  no'  voyôs  com     plus  grans  pécheurs. Ceci  va  bien  loin  .car  au- 
me  les  homes  tafchent  touliûurs  d'tfchapper     lourd'huy  combien  en  trouuera-on  de  ceur 
de  la  main  de  Dieu,&  cherchent  beaucoup  de     mcfmcs  qui  cognoilTcnt  r.Euar.g!le,qiii  pen- 
moyens  obliques. Et  quand  Us  ptuuent  auoir     fcnt  que  tous  ceux  qui  errent  par  lîmplicité, 
celle  couuerture.difans,  l'aycuidebien  ^ai-     (comme  on  parleen  vulgaire}que  tous  ceux 
re:&  pourquoy  Dieu  n'acceptera-ilma  bône     la  font  bonnes  gens,&  qu'il  n'y  a  nulle  malt- 
intention?  Q.uand,  di-ie, nous  pouuons  aile-    ce,nul  venin  en  eux  :  voire,  mais  il  eft  certain 
guercela,il  nous  femblc  quec'eflaflez:  mais     quenousne  feions  pas  iullifiez.lî  cen'ellque 
telles  couuertures  ne  vaudront  rien  déliant     Dieu  nous  ait  renouuelez  par  Ion  S.  Efprit. 
Dieu.  Car  il  prononce  luy  qui  efl  iuge  com-     Et  cela  ne  fe  fait  point  linon  quâd  nous  fom 
petcnt,  que  quand  les  hommes  ne  luy  leruét     mes  attirez  à  la  cognoillance  de  nollre  Sei~ 
point  en  obeilîànce,  tout  ce  qui  eft  en  eux, ne    gneur  lefu'  Chrift.  Il  faut  donc  conclure  que 
fera  qu'ordure  &  abomination  dcuât  luy. S''il    tous  ceux  qui  font  enueloppezen  leurs  vai— 
n'y  auoit  que  cefl  arrell  irreuocable  ,  cfla    nés  fuperftitions, n'ont  qu'hypocrifie  en  eux: 
nous  doit  futfire. Mais  cependant  il  nous  faut     car  autrement  l'Efcrituie  fainde/feroit  du 
réduire  en  mémoire  ce  que.nous  auons  défia     tout  fauflaire. Maintenant  tout  ainfî  que  no'' 
touché  n'agueres  :  c'eltafçauoir  que  iamats     condamnons  les  autres,  nous  fommes  habiles 
l'ignorance  n'efl  telle  aux  hommes, qu'il  n'y     à  nous  vouloiriullifier,  &  ne  cognoifTons  pas 
ait  de  l'hypocrifîe  cachée, &  de  la  malice  ob-    que  nous  auons  aufsilourdemét  failli:&nou9 
ftinee.&dela  rebelliô,&' dumefpris  de  Dieu:     voyons  cela.  Car  ceux  qui  entendent  la  do— 
côme  en  S.Paul  ceJa  acfté.  Car  encores  qu'il    tlrine  del'EuSgile,  cément  eft-ce qu'ails  par- 
fuft  enflâmé  d'vn  fol  zèle,  &  qu'il  penlall  fer    lent  de  leurs  fuperllitiôs  du  téps  paffé  ,  finon 
uir  à  Dieu  ,  fî  tfl-ce  qu'il  elloit  plein  d''or-     en  fe  moquantfC'eil  bien  loin  d\n  g£mir,  & 
gueil,qu'ilfeplaifoit  &s'ellimoit  tât  &  plus,    de  s''y  defpiaire. Combien  en  troujiera-on  qui 
cuidant  plus  valoir  que  le  meilleur  Chrellien     foyent  contrillcz  en  leur  cœur,  q^ind  il  leur 
du  monde  :caraufsi  il  les  auoit  tous  dtttila-     fouuient  qu'ils  ont  elle  plongez  en  leurs  abo 
blés. Et  d'où  luy  procedoic  vne  telle  arrogan     minations  &  idolâtries  fi  mefch.intes?  et  la  ne 
ce.finondc  ce  qu'il  ne  fe  pouuoitafTuiettir  â    kureftrien.  Et  cependant  fainft  Paul  nous 
Dieur<2iisd  il  fe  prifoit  ainfi.ne  faloit-il  pas     déclare  en  fa  perfonne.q  ce  font  des  ofFenfes 
qu'il  hift  cnforcelé  de  Sacan?Car  il  n'y  a  rien     énormes  &  inexcufables  dcuant  Dieu.  Car  li 
que  Dieu  reprouue  plus  que  ccft  orgueil .  Si     les  paillars.les  yurôgnes,les  meurtriers  &  lar 
nous  fommes  outrecuidez  entre  les  hommes,     rons  font  à  cond.iner,il  ne  faut  point  q  nous 
&  <jue  no*vouiiôs  fuppediier  nos  prochains,    cuidions  cllre  abfous.lî  ce  n'eft  d'autant  q^ue 

f.i. 


42- 


'SEPTIEME    SERMON 


Dieu  vfe  d'vQe  fi  grande  pitié  ,  &  qu'il  def-  pechez,afin  qu'vn  chacun  en  Ton  endroit  loue 

ployé  les  thiclbrs  infinis  de  fa  bote  ficmiferi  la  miiericorde  ineftimable  de    Dieu  enucrs 

corde  enuers  nous. Par  ainli,nous  fomines  en  nous.  Qu£  donc  ces  menus  tatras  cellênt.de 

feignez  de  ce  paiTage,  que  les  hommes  aurot  dire, le  ùus  pécheur, ie  cognoy  que  ie  fuis  ho 

beau  s'efforcer  de  feruir  à  Dicu,&;  fe  tourmé  me  :  car  il  lemble  qu'on  le  mocque  de  Dieu 

ter  ,  que  tout  cela  fera  en  vain  ,  lul'ques  à  ce  en  parlant  ainii:  mais  quVn  chaciui  regarde, 

qu'ils  fe  foyét  râgez  à  l'obeilTance  de  la  toy.  Or  çâ,ie  ne  fuis  pomt  pécheur  ftjilemêt  pour 

Tous  ceux  donc  qui  ont  leurs  bonnes  mten-  me  condâner  en  gênerai  auec  les  autres:mais 

lions,  qu'on  appelle,  non  feulement  perdent  i'ay  commis  telles  fautes  deuant  Dicu,^  lîe- 

Icur  temps  ,   &  font  friillrcz  de  tout  ce  qu'ils  iloye  luiet  cncores  à  de  plus  grandes  ,  linon 

cuidentbien  faire, mais  ils  prouoquct  l'ire  de  que  Dicum'eultpicftrue.  £t  nedifonspoîc, 

Dieu, ils  amalTent  dcspcchez  énormes. Q_uâd  ît  ceihiy-ciquoy'  &i  ceftuy-lan'eft-il  point 

ils  vienent  auec  leurs  deuotions.commc  pour  plus  damnabie  que  le  ne  fuis?  Fermons  les 

ouïr  la  mefle  ,  pour  laire  leurs  iTantares ,  &  fe  yeux  quant  à  nos  procliain'v ,  n'allons  point 

tourmenter  en  tout  ce  qu'on  appelle  feruice  chercher  leur  vie  pour  lailler  la  noilre  en  At 

deDieu  en  la  Papauté, q  ce  font  autât  d'ofFen  riere,  mais  qu'vn  chacun  fe  confefle  en  fes 

fes  pour  les  abyûaer  lufques  au  plus  protond  pourecez,  fans  conkller  les  fautes  de  fes  pro 

d'enfer:  difputôs  tant  que  bon  no'  lemblera,  chafs,pour  dire.Helas,  le  ne  fuis  point  vn  pe 

mais  voici  Dieu  qui  a  prononcé  la  tentence  chcur  commun  côme  les  autres  homes  ,  mais 

qui  ne  (e  pourra  point  letrader.Cognoiilons  il  y  a  tant  d'enormitez  en  inoy  ,  que  c'eft 

donc  que  le  prnicipal  où  il  nous  faut  tendre,  vue  horreur  :  &  faut  que  Dieu  dcfploye  eft 

c'ell  de  nous  former  &  de  nous  addôner  à  l'o  moy  vue  grâce  linguliere  pour  me  pardôner 

beilTance  de  la  foy:c'clt  .idire  que  noitrcvie  tant  de  fautes  queie  cômets  contre  luy.Mais 

foit  du  tout  reiplee  à  la  parole  de  Dieu:&  là  (comme  i'ay  dit  )  il  ne  faut  point  que  ceci  fe 

dclFus  cognoifîons  combien  nous  lomracs  mi  prononce  feulement  de  bouche  ,  ains  il  fiiut 

feiableSiS:  quelle  cfloit  noftre  condition,iul-  qu'on  parle  du  cœur.  Car  no'  enverrons  qui 

ques  à  ce  que  Dieu  nous  ait  retirez  des  tene-  parleront  ainli,&  quelque  fois  feront  les  plus 

brcs  de  la  Papauté  oii  nous  citions  entrez,  &  grans  hypocrites  :  Us  diront ,  le  fuis  le  plus 

que  cela  fe  lace  pour  magnifier  la  grâce  de  grand  pécheur  du  monde:  af^auoir  s'ils  fe  re 

noifre  Dieu,  voire  en  foufpirant  pour  les  of-  cognoilfent  peckeurrSi  on  leur  vient  remon 

fcnfes  que  nous  auons  commifes  contre  hiy:  iber  cela, ils  difent  la  fable c6miine,Q_iii  elt- 

&  qu'ayant  pitié  de  tant  de  poures.creatures  ce  qui  ie  dit?  Si  on  les  reprend,  &  qu'on  leur 

qui  s'en  alloycnt  en  perdition, il  ne  permette  dife,Helas,vos  péchez  font  tât  énormes  que 

point  que  ceux  aufquels  il  s'cll déclare, fe  de-  rien  plus  :  Voire  pecbeî   £t  qui  ell-ce  qui  en 

lioarnët  de  luy,mais  qu'Us  y  perfiftét  &:  pour  parle?qui  eft-ce  qui  trouueraà  redire  contre 

luiuent  leur  train  lufques  à  la  fimVoUa  com-  moyrAinlî  voit-on  bien  qu'il  y  en  a  d'aucuns 

me  nous  auons  à  prattiquerce  paflage.Cepen  qui  ne  font  que  fe  mocquer  de  Dieu.quad  Us 

dant  il  nous  tant  Aulsi  noter  ce  qui  a  eilé  tou  fe  feront  confclTcz  eifre  grans  pécheurs.  S. 

che  ce  matin,  que  ce  n'eft  point  allez  qu'vii  Paul  n'a  pas  vfe  d'vne  telle  feintifc  ,  car  il 

chacun  fc  cognoilïe  pécheur  en  geiicrahmais  s'ell  ici  condamné  le  plus  grand  pécheur  ,  Si 

que  nous  deuôs  côfeiler  nos  fautes  fans  fein-  le  premier  ,  comme  vu  capitaine  de  mal  &  de 

tilc,qu'eilans  naurcz  du  iugemét  de  Dieu, no'  pcrdition;voire  Cachant  bien  qu'il  elloit  ain 

ayons  vn  delîr  tant  plus  ardent  de  recourir  .à  ii.Et  pourqiioy?  d'autant  qu'il  auoit  reiîflé  à 

ù  miiericorde.  Car  cependant  que  les  homes  la  venté  de  Dieu. Car  il  regaidoit,Qu'eft-ce 

auront  ceftt  côjîderation  fimple  pour  dire, le  que  la  maielté  de  lefus  Chriftrcar  en  hiy  ha- 

fuis  vn  poure  pécheur ,  Us  viendront  froide-  bite  toute  plénitude  de  diuinité.  Or  i'ay  ba- 

ment  à  Dieu  :  &  q.iand  il  leiu  auia  pardonné  taillé  cotre  luy  contre  celle  fageflede  Dieu, 

leurs  fautes, Us  ne  ciiidcront  pas  élire  fort  o-  par  laquelle  i'ay  elle  créé  &  formé.  I'ay  ba- 

bligezàluy,  mai.  feront  là  comme alFupis.  taille  contre  mon  rédempteur  ,  contre  ccluy 

Qjie  laut-il  donc?Q_ue  nous  luiuioiis  l'exem  de  qui  ie  doy  tenir  mon  falut  :  il  cil  luge  du 

pie  de  S. Paul:  c'ell  afçauoir, que  nous  ii'ayôs  monde,&  ie  me  vien  eleuer  àreiicontrc.^  Où 

point  leulemcnt  celte  imagination  conhife  eil-ce  que  toute  uifticc  conùile,  toute  règle 

que  nous  lommes  pechcurs:mais  que  no'  fen-  &  perfection  de  bien, linon  en  l'Euangile^Or 

tions  en  particulier  quels  fout  nos  pccliez,  &  i'ay  voulu  mettre  tout  ci:h  fous  le  pied.  S. 

quelle  enormité  il  y  a,  &  quelle  vengéce  noirs  Paul  donc  penlànt  à  tout  cela,  non  lans  cau- 

auons  méritée, finon  que  Dieu  nous  reçoiiie  à  fe  fe  confelle  ici  le  plus  grand  pécheur  .  £c 

merci.  Q_u]vn  chacun  f  )nde  lufques  au  plus  ainli,quandvn  homme  voudra  bien  faire  cxa 

protond  de  Ion  cceur, qu'il  regarde  bien  quel  inen  de  fa  vie  pour  fe  condâner  deuant  Dieu, 

le  a  elle  û  vicalin  que  nous  entrions  touv  en  il  ne  faut  point  qu'il  t'icc  le  procès  de  les  voi 

telle  cognoiflancede  nos  fautes, que  nous  en  lins(comrae  i'ay  dit)quand  on  auroi:  cnquis 

puifvions  taire  vue  telle  côfefsion  que  fait  ici  fur  c^ftuy-ci  ou  fur  celtuy-la  ,  on  y  tiouue- 

S.  Paul, non  point  de  bouche,  mais  )>our  nous  roit  plus  de  mal  :  ne  nous  arreilons  (di-ie)! 

dilpofer  plcuicuicut  à  uouï  dcfplaiic  en  nos  perfoimc,maii  que  l'home  s'adiourne  deuanc 


s  V  R    LA   I.   A  T  I  M  O  T  H. 


43 


■  Dieu,  qu'il  regarde  quelle  a  elté  fa  vic,&;  c5 
.me  il  s'elt  porte  tant  cnuers  Dieu,  qu'cnuers 
les  prochaini.  Q_uand  nous  v  procederôs  ain 
fï,  il  ell:  certain  que  uns  fèintifenous  dirons 
auec  fainift  Paul ,  Helas.'qu'ell-ce  q  de  moy? 
Et  quand  nouç  aurons  i\iic  vne  telle  confcT- 
iîon  de  nos  ptcliez  ,  il  ne  nous  couftcra  alors 
rien  de  glorifier  noftre  Dieu:  que  nous  di- 
rons,Helas  Seigncur,oi'i  elloye-ie,  linon  que 
tu  m'tulles  tédu  la  main  pour  me  retirer  de 
la  perdition? comme  nous  voyons  que  fainû 
Paul  en  parle  maintenant .  Car  après  auoir 
tait  vne  telle  confefsion  de  ies  péchez, com- 
me nous  rauons  ouye,0(dit-il)que  la  gloire 
&  l'honneur  foit  rendue  à  Dieu  fcul  qui  eft 
immortel  &  inuifîble,  qui  eft  noftre  Roy  eter 
nel.QuandS.  Paul  parle  ainlî,ilmonftre  que 
il  ne  peut  fatistaire  à  vne  telle  déclaration 
des  grâces  qu'il  a  receues  de  Dieu  :  comme  fi 
il  dif'fit  qu'il  eftoit  comme  aux  abylmes  de 
mort,&  Dieu  l'en  a  rctn£.Q_!_anddoncnous 
penferons  à  la  bonté  &:mifeiicorde  de  Dieu, 
&  a  la  milerable  condition  en  laquelle  nous 
cftions  auant  qu'il  nous  feift  fentir  ià  grâce, 
nous  ierons  incitez  à  faire  confcAion  de  nos 
péchez  :  voire  en  veri  té, à  caule  que  Dieu  en 
lera  le  tefmoin:tellemeiit  que  nous  ne  crain- 


drons point  de  la  prononcer  deuant2Liy,de- 
uant  fcs  Anges, &deuint  toutes  créatures. 

OR  nous-nous  proJlernerons  deuant  Ja 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes  ,  le  pliant  qu'il  luy  plaifc  nous  les 
taire  tellement  cognoiftre  ,  qu'vn  chacun  de 
nous  foit  Ion  iuge,  que  nous  n'attendions  pas 
qu'il  fe  déclare  noftre  partie  aduerfe, ne  qu'il 
nous  pourfuiue  :  mais  que  nous  foyonspluf- 
toft  nos  iugcs,  afin  qu'iftans  abbatus  en  nous 
mcfmes,  il  nous  tende  la  main  ,  &  qu'il  nous 
foit  propice  au  nom  de  noftre  Seigneur  Ic- 
fus  Chrift.Et  pnurcc  que  durât  celte  vie  mor 
telle  nous  ne  fcrôs  lainais  fi  bien  réduits  que 
il  n'y  ait  toufiours  beaucoup  de  pouretez  & 
imperteftions  en  nous  ,  qu'il plaife  a  ce  bon 
Dieu  nous  fupporter  en  nous  corrigeant  de 
iour  en  iour  ,  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  def- 
pouillez  de  toutes  nos  mefchantes  afFeftions, 
&  de  ce  qui  refte  de  noftre  nature  corrôpuc: 
que  nous  loyons  reucflusde  fa  iuftice  ,  de  fa 
pure  fainfteté  ,  laquelle  il  nous  a  promife  de 
nous  donner  en  lefus  Chrift  fon  Fils  noftre 
Seigneur.  Q^ue  non  feulement  il  nous  face 
cefte  grâce,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  na- 
tions de  la  terre,&c. 


LE    P  R  E- 


HVITIEME    SERMON     SVR 

'  MIERCHAPITRE. 

1 7  Or  du  roy  des  fie  des,  immortel  ^  imifihle,  a  DieuJêulQ^e, 
honneur  ^  gloire  a  toujiourjrnais,  Amen. 

18  Fils  Titnothceje  te  recommande  ce  commandement,  que  félon 
les  prophéties  qui  ont  deuant  ejlé  de  toy ,  tu  batailles  par  ic  elles  bonne 
bataille, 

19  Ayant foy  (^  bonne  conjcience  :  laquelle  aucuns  ayans  reiet- 
teejànt  péris  delà  foy. 


j  Ous  deuons  bien  retenir  la 
)  lentence  qui  a  efté  expofee 
jci  delîus  ;  c'eftque  S.  Paul 
'  par  ton  exemple  nous  cer- 
tifia que  nous  cognoifîàns 
poures  pécheurs  ,  nous  ne 
deuons  nullemét  douter  q  le  FiK  de  Dieu  ne 
foit  pieftde  noui  receuoir  à  merci. Car  pour 
quoy  eft-ce  qu'il  a  cité  enuoyé  au  monde, fi- 
non  pour  fauuer  ce  qtltoit  perdu?  Et  côbien 
cjdenottre  natuienous  foyôs  enclins  à  def- 
fiace ,  fi  no'  faut-il  reioudre  en  cela,  que  no' 
r.e  ferôs  pomt  reiettez  du  Fils  de  Dieu,  mo- 
yermât  q  nous  veniôs  à  luy  pour  eltre  parti- 
cipas du  falut  kquel  il  ofïie  en  gênerai  à  to' 
pécheurs.  Mais  il  no'  faut  bien  noter  q  nous 
ne  pouuons  obte«iir  lalut  en  lelus  Chrilt,que 
par  le  moyen  de  la  foy,  qui  emporte  tiue 


nous  foyons  attirez  vrayement  à  luv,  &d'v- 
ne  arfeition  pure,  nous  defplaifans  en  nos 
fautes  :  car  celuy  qui  le  veut  nourrir  en  fon 
mal ,  n'eft  pas  digne  du  remède  que  nous  a 
apporté  le  Fils  de  Dieu  .  Or  pource  que 
nous  fommes  fuiets  à  douter  ,  principale- 
ment quand  il  eft  queftion  de  nous  fier  en 
Duu,  faind  Paul  ratifie  cefte  dodrine  ,  di- 
fant  ,  que  c'elt  vne  parole  fidèle  ,  digne  d'e- 
ftre  receue  ;  comme  nous  voyons  qu'en  d'au- 
tres paiTages  Dieu  iure  en  nous  voulant  iC- 
feurerdela  bonté:  il  ncfe  contente  pointue 
nous  dire  qu'il  nous  fera  tel  qu'il  promet, 
mais  adioulte  le  ferment:^  tant  plus  fommes 
no'  coulpables  d'ingratitude  ,  fi  no'  ne  pou- 
uons nous  appuyer  fur  telles  promcfles  ,  que 
Dieu  no' aide  en  noftre  desfiace,ou  en  noftre 
infirmité. Maintenât  (aintt  Paul adioufte  vne 

f.ii. 


u 


HVITIEME     SERMON 


action  de  grâces, Sr  non  pas  fimple,mais  il  s'ef 

cne,Q^honiteur  0-  gloire  fait  à  D<V»   à  ia- 
titiUyi  celu.y(^àlt-û)qui  eflr-jy  tternel,  qui  ejl 
immortel,qKi  ejl  inui(ibte,  qui  efl  ffnl  fige.  En 
cjuoy  il  monftre  qn"il  eftoit  comme  raui  à  glo 
nfierle  nom  de  Dieu,  fentan:  quelle  grâce  il 
aupit  leceiie.  Et  de  fait,  fi  nous  conlîderons 
fcoramc  ûind  Paul  a  ell:é  conueiti,  &  en  quel 
eftat  Dieu  l'a  trouue,  ç'aefté  vu  miracle  plus 
qu'eflrange,  qu'vn  loup  loit  deucnu  brebis, 
qu'vn  homme  ainiï  enragé  àefpandre  le  lang 
des  martyrs,  fuit  incontinent  tourné  en  pa- 
fteur.voire  &  qu'il  euft  vnefprit  lidebonnai- 
re:vn  homme  plein  d'orgueil  ioit  ainii  humi- 
lié:celuy  qui  cltoit  enyuvé  auparauant  des  ho 
neuis  du  m5de,qu'il  fc  foit  alliuetti  à  tous  op 
probres:celuy  qui  reliftoit  à  Dieu, que  cciuy- 
îa  prene  le  ioug,  &  qu'il  ne  demande  iînon  de 
«ilre  feruiteur  de  lefus  CliriJt,  cotre  lequel  il 
auoit  bataillé. Voila(di-ie)vn  changement  li 
admirable,  que  ce  n'eil  point   fans  caufcque 
5. Paul  s'efcrie, Honneur  &gloire  foit  rendue 
à  Dieu.  Cependant,  combien  O'i'cnuers  nous 
Dieu  ne  tiene  pas  vne  façon  du  tout  feinbla- 
ble,  fi  c/f-ce  que  nous  aiions  bien  occalion  & 
grans  &  petis  de  magnifier  la  bôté  qu'il  nous 
ft  tait  fentir.Qu^ainli  foit  ,il  faut  q  Dieu  nous 
retire  de  la  mort  &  du  prof  jnd  d'enfer,  quîJ 
il  nous  appelle  à  foy .  Cela  feul  ne  doit-ii  pas 
futfire  pour  nou>  rauir  en  la  louage  de  Dieu, 
quâd  nous  cognoiflons  qu'il  eft  impolsiblc  de 
rous  acquitter  enuers  l:iy,  il  nous  voidô-,  con 
feflercôbien  nous  lay  fjnimes  tenu^r Appre- 
nons donc  toutes  fois  &  qu.ites  que  non  ,  pcn 
fons  à  noitre  redéption,  &:  comme  chacun  de 
nous  a  efteattiré  àlacognoiffancede  l'Suan 
gile,  d'cfl-re  touchez  au  vif  de  ccfte  afftftio  & 
de  ce  2cle  ardent  qui  a  cfté  en  S. Paul, afin  que 
pour  le  moins  nous  déclarions  û  non»  me  pou 
uons  pas  faire  pleinement  noftre  deuoir  en 
louant  Dieu  côme  il  appartient. Or  il  nous  ne 
pouuons  nous  acquitter, voila  Dieu  qui  Litii- 
lait  quand  nous  taifons  confefsion  de  nolhe 
ioibleire:&  c'efl  beaucoup  quand  nous  fçauôs 
qu'il  accepte  ce  facrifîce  d'huinilité:que  feu- 
lement li  nous  difons,  Seigneur,  ie  voy  que  tu 
m'as^tant  obligé  à  ta  mifcricoide,  que  l'y  fuis 
contus  quand  l'y  pcnfc  .  ce  mot-la  prononcé 
d  vnvray  coeur  coniéiera  D:eu,&-  l'acceptera 
comme  vn  payemét  qui  luy  feroit  fait,auquel 
il  n'y  auroit  que  redire.  Quand  nous  voyons 
que  Dieu  nous  accepte  ainfi,  n'aurons-nous 
point  plus  ample  matière  de  nous  efforcera 
faire  ce  qui  nous  elt  ici  mouftré  parS.Paul?£t 
quelle  excufe  y  aura-il  en  nous,  lî  nous  foni- 
mes  lî  lafches  S-:  lî  vilains, de  ne  daigner  c!Jt\-f 
fer  pour  le  moins  l'obligation  que  nous  auôs 
enuers  noftre  Dieu,  veii  qu'il  a  ainiî  magnifié 
la  miléncoide  fur  nous, pour  nous  appeller  à 
wliH-Ctpendant  nousauon-  .t  noter  les  titres 
quef.iinét  Paul  attribue  ici  .i  Dieuiil  l'appelle 
f  iy  de  s  (it  iles  ,ettriicl:Sii^uis  [l  rappel!e,.'>«miir 
rt/,il l'appclJe  inuijihU  i^ [cul [agi.- .i\  i:iihii:a 


vray  que  toufiours  cestitres-ci  âfpartienent 
à  Dieuimais  fainft  Paul  les  rapporte  à  l'argu- 
ment qu'il  a  ttaittc,  pour  monftrer  quelle  dif 
ferenceilya  entre  Dieu  &;nous.  Car  voila 
qui  donne  plus  grand  luJtre  à  la  grâce  de  la- 
quelle il  vfe  ,  &  laquelle  il  defploye  pour  no- 
itre falut.  Si  nous  auions  'quelque  dignité  qui 
approchait  de  celle  gloire  de  Dieu,  donti!  elî 
ici  tait  mention  ,  cncores  ne  laiflerions-nout 
pas  d'eitre  obligez  à  luyinia'is  quand  nous  co- 
gnoillonsque  nous  ne  foinmes  aue  vermine, 
qu'il  n'y  a  que  toute  poureté  &mi(ere  en  no- 
itre nature  ,  qu'il  n'y  a  ne  vie  ne  vigueur  ,  ne 
rien  qui  Ioit ,  &  que  nous  venons  àcefte  hau- 
tefle  infinie, qui  eil  Dieurccla  nous  doit  beau- 
coup plus  elmouuoir  pour  le  magn. fier. Nous 
voyons  donc  à  quoy  fainct  Paul  a  prétendu, 
quand  il  a  ainfi  qualifié  Dieu.c'eiV  à  dire  qu'il 
l'a  reueftu  d'immortalité,de  gloire,  d'empire 
étcrnelide  fageffe  :  c'elt  afin  que  les  hcnimes 
en  s'huniiliaat  exaltent  la  maielté  de  Dieu, 
comme  elle  en  elt  digne.  Et  au  relte  ,  fainéi 
Paul  nous  a  voulu  ici  donner  vne  règle  géné- 
rale que  nous  deuons  tenir  &  obferuer  pen- 
fansànollre  rédemption.  Car  fi  on  demande 
pourquoy  c'eftque  DieunoRsa  choiiis,  pour 
quoy  il  nous  a  illuminez,  &:  enalaiile  tant  de 
poures  aueuglesrpourquoy  il  nousachanpcz 
&conuertis  àluy  par  Ion  iainét  £fprit,&que 
les  autres  demeurent  en  leur  dureté,  nous  ne 
pouuons  pas  dire  que  n  jus  loyons  meilleurs, 
&que  pour  cela  Dieu  no'ait  preft  lez  accux 
qu'il  dclaiffc,'ne  que  nous  en  foyons  plus  di- 
gnes :  il  n'y  a  rien  de  cela.  Quoy  donc?  Il  nous 
faut  reuenir  àceqiiil  dit  en  l'onzième  des 
Romains.  Qu_and  il  difpute  que  c'ell  des  iu- 
gemens  deDieu,ils'efcrie,Côbien  tes  voyes 
lont-elles  incomprehenfibles?  &,  Q_iJ  eil-cc 
qui  luy  a  donné,  afin  qu'il  luy  foit  rendu?  qui 
ell-ce  qui  le  pourra  vanter  d'auoir  rien  ap- 
porté du  fien,  pour  dire  que  Dieu  fuit  enclin 
à  l'amier  plus  que  les  autres?  Voila  les  hom- 
mes qui  font  vuides  de  tout  bien ,  il  n'y  a  en 
eux  que  contuiîon,&  Dieu  accepte  &  appelle 
ceux  que  bon  luy  femble,&:  les  appelle,  telle- 
ment qu'il  n'y  a  rien  de  bon  en  eux, mais  il  les 
change,  &  les  renouuelle  par  la  grâce  de  fon 
fainét  Efprit.que  là  où  ils  eftoyent  héritiers 
de  mort, où  il  n'y  auoit  en  eux  q  malédiction, 
il  les  reforme  à  fou  image, il  plante  en  eux  la 
vie&  vne  femence  incorruptible. Q_uand  no' 
cognoilTons  ces  choies  ,  quepouuons-nous 
diielînon  eftredu  tout  eftonr.cz,  &•  nous  cf- 
crier.commefait  l.ilainft  Paul?Q_uçlabylhic 
ell-ce  que  la  giacc  de  Dieu  ?  &  combien  les 
voyes  font -elles  ir.compn  hcniibles.'  Notons 
bien  donc  que  noilre  rédemption  ne  ii;rA  la- 
mais  bien  cognue  de  nous  ,  uifques  .î  ce  que 
nous  foyons  vcriis  à  ceil  e/tonncment  qui  a 
cfté  en  lamcl  Paiil,iS: qui  doit  cftic  en  tousfi- 
deles.   Voila  en  Ijinine  ce  quenous  auons  à 
retenir  de  ce  paflàge. Mais  afin  que  ccq  nous 
auons  touche  eu  brief,i'oit  mieux  &  plus-  pri- 

utemeut 


SVR     LA    T.     A    TIMOTH. 


4î 


ùeement  entendu  :  quand  fainft  Paul  appelle 
Dieu  Roy  des  fîecies,  illîgniiîe  qu'il  ne  faut 
point  que  les  hommes  prclliment  de  le  mclu- 
"  rer  félon  leur  fens  Se  raifon.Poui-quoy?qu''elt 

ce  de  nous  ,  linon  vn  ombrage  qui  ne  tait  que 
voltiger  &s'eriianOLur  tantoft; Quelle  diftan 
,  ce  donc  &  quelle  dmerfité  y  a-il  entre  Dieu 

&nous?&qui  ell -ce  qui  pourra  atteindre  à  ce 
fte  hautefle  qui  ell  en  lonconleil  immuable,^ 
£t  pourtat  fi  nous  voulons  bien  iuger  des  œu 
lires  de  Dieu  ,  apprenons  de  reftreindre  nos 
fens,&  de  ne  point  faire  des  chenaux  cfchap- 
pez:câr  ce  nVll  poinc  à  nous  de  môter  fi  haut 
qu'en  ce  Royaume  éternel, veu  que  nous  lom 
mes  créatures  qui  palTons  incontinent,  Se  que 
nous  ne  taifons  que  changer  à  chacune  minu- 
te de  téps, qu'il  n'y  a  rien  de  certain  en  nous. 
Puis  qu'ainlî  eiî,  cognoiffons  qu'il  nous  faut 
adorer  les  grans  fecrets  de  Dieu:car  nous  ne 
les  pouuons  pascognoiftre  lelon  noftre  rai- 
fon.Et  puis  il  adioufte  pour  mieux  confermer 
cela, que  DiV»  eflimmortel:njn  point  comme 
font  les  Anges, ou  nos  âmes  melmes,  mais  fé- 
lon qu'il  eft  dit  en  vn  autre  palTàge,que  Dieu 
i.Tlm.g.  fc&la  immortalité  en  foy.  Vray  eft  que  Dieu 
!<■•  a  créé  les  Anges  à  cefte  condition  qu'ils  fe- 

royent  immortels, &  qu'ils  viuroyét  à  lamais: 
l'ame  de  l'hommeauhi  ne  périt  pjint  en  la 
mort, elle  n'eft  pas  efteinte:  mais  ctpédin:  ii 
nous  regardons  comme  nos  araes  font  imraor 
telles,  cela  n"eft  point  de  leur  propre  nature, 
cefte  vertu  de  vie  n'y  eft  pas  enclofe  ,  mais  ce 
eft  vn  bien  emprunté, &  q  procède  d'ailleurs. 
Entant  donc  qu'il  plaiftàDieu  de  iouftenir 
nos  âmes  par  la  vertu,  voila  comme  elles  font 
en  eltre,&  qu'elles  fubfiftent:voila  dont  vienc 
leur  immortalité.  Autant  en  cft-il  des  Anges 
de  paradis,  que  fi  Dieu  ne  les  conferuoit  en 
l'eftat  qu'il  îeura  donne,  ils  feroyent anéan- 
tis. Ce  n'eft  point  donc  fans  caufe  que  fainct 
Paul  appelle  ici  Dieu  immortel  :  Se  par  cela  il 
monftre  qu'en  nous  il  n'y  a  nulle'vie:&:  que  fi 
nous  fommcs  fi  fols  de  nous  faire  à  croire  que 
nous  viuons  de  noftre  vertu,  que  nous-nous 
abufons  par  trop  :  puis  qu'ainU  eft  que  nous 
tenons  noftre  vie  de  Dieu,c5tcflons  que  tout 
le  refte  aufsi  nous  eft  donné  de  luy  par  fa  pu- 
re grâce.  Or  en  le  nommant  Inuilible.il  nous 
monftie  que  ce  n'eft  point  à  nous  de  l'aller  ef 
plucher,  &de  vouloir  fonder  ce  qui  eft  caché 
en  luy:car  d'autant  plus  que  l'homme  s'eft'or 
cera  de  fe  vouloir  enquérir  outre  fa  mefure, 
&plus  qu'il  ne  luy  appartient  des  fecrets  de 
Dieu, il  faudra  qu'il  s'efuanoi.ille  d'auantage. 
Ainfi  noton';  bien  que  famct  Paul  nous  a  vou- 
lu inftrHire  à  fobricté  5c  reuerencc,  quand  il  a 
intitulé  Dieu  inuiiîble.Nous  voyons  aiifsi  l'or 
gueil  quieft  en  nous,  que  s'il  eft  queftionde 
parler  de  Dieu, chacun  aura  la  bouche  ouuer- 
te  pour  en  dire  .î  l'aiié£ure:&;au  heu  que  nous 
deunons  le  prier  qu'il  le  manifcftaft  à  nous 
entant  qu'il  nous  clt  expédient, il  n'y  a  celuy 
qui  ne  fou  plus  que  téméraire  à  en  dire  à  la 


volée,  fansyauoir  penfé.  Voyans  donc  vne 
telle  audace  aux  hommes,  ne  trouuons  point 
eftrange  que  iiindi  Paul  les  a  voulu  ici  inodc- 
rer.leur  déclarant  que  Dieu  eft  inuifible,  afin 
qu'ils  ne  s'enquierent  point  de  luy  otitre  me- 
fure. Il  eft  bien  vray  que  Dieu  nous  eft  telle- 
ment inuifible,  qu'il  le  déclare  à  nous  parfon 
image  viue,  qui  ift  en  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.  Il  eft  vray  qu'il  rcfenie  beaucoup  de 
fecrets  qui  nous  font  cachez  &  incomprehen 
fioles  :  car  s'il  fe  maniteftoit  en  toute  perfe- 
ction,quelle  humilité  y  auroit-il  en  nous,  veu 
que  noui  ne  pouuôs  pas  encore  eftre  abbatus 
par  noftre  ignorance  ?  Combien  que  nous 
foyons  conuaincus  d'auoir  le  fens  tant  foible, 
tant  rude,  tant  petit,  tant  grofsierque  c'eft 
merueilles,  &  nouv  en  deunons  auoir  honte; 
fi  eit-ce  que  noui  voulons  eftre  aigus  &  fub- 
liis,  Si  n'y  a  celuy  qui  ne  voltige,  voire  pour 
fe  rompre  le  col. .Si  donc  Dieu  fe  reueloit  plei 
ncraent  à  nou;,  ie  vous  prie,  comment  cft-ce 
que  les  homes  fe  voudroyent  auancerrPour- 
tant  il  nous  eft  bon  que  noftre  Seigreur  fe 
déclare  en  portion  Si  mefure,c5me  aufsi  l'E-  ' 

fcriture  en  parle,  que  h  cognoilTance  eft  di- 
ftribuce  à  chacun,  félon  qu'il  a  pieu  à  noftre  ^pf>(.  4.' 
Seigneur  lefus  Chrift,  &  félon  qu'il  cognoift  7» 
q  i  li  nous  eft  vtile  :  tant  y  a  neantmoins  que 
Dieu  ne  fe  cache  point  du  tout, mais  il  fe  de- 
môftre  à  nous,  voire  afin  que  nous  le  cognolT 
fions,  entant  qu'il  nous  eft  expédient  &  pro-  ' 

pre.Il  ne  nous  porte  point  enuie,que  nous  ne 
Içachiôs  de  fes  fecrets  tant  qu'il  nous  eft  bon: 
mais  retenons  en  premier  lieu  qu'il  eft  inuifi- 
ble quant  à  foy. Par  cela  nous  fommesadmo- 
ncftez  que  nous  ne  le  pouuons  point  cognoi-» 
ftre  finô  par  le  moyen  de  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift.  Et  voila  pourquoy  il  s'appelle  en. 
l'E  fcriture, l'Image  de  Dieu  inuifible  ;  car  ce 
crt  autant  comme  fi  le  faindEfprit  condam- 
noit  toutes  nos  folles  fpeculations  que  nous 
auons  accouftumé  de  forger,quand  il  eft  que- 
rtion  de  penfer.à  Dieu  :  chacun  imagine  ce 
qu'il  voudra  :  car  les  hommes  s'enueloppenc 
en  beaucoup  d'erreurs  ,  quand  ils  fe  forgenc 
ainii  Dieu  à  leur  fan  tafie.  Contentons-nous 
dôc  d'cftrefiinplemtt  amenez  à  lefus  Chrift, 
afin  que  pour  contempler  Dieu,  nous  appre- 
nions de  nous  arrefter  du  tout  .à  luy  ,  pource 
qu.'il  en  eft  l'image.  'Voila  ce  que  nous  auons 
à  retenir. Et  au  refte, contentons-nous  de  fça 
Hoir  ce  que  nous  aurons  apprins  en  l'efchole 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift;  il  eft  l'image 
de  Dicu.voire  vne  image  parfaite, il  n  y  a  que 
redire, ce  n'eft  point  vnpourtrait  à  demi, car 
en  luy  habite  toute  plénitude  de  Diuinité.Ec 
mefmesileftdit  qu'en  luy  font  cachez  tous 
les  threforsde  fagefle&  d'intelligencc.Mais 
tant  y  aq  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  nous 
manitcite  Dieu  fon  Père  entât  q  nousle  pou- 
uons porter,  c'eft  à  dire  félon  que  nous  fom- 
mes  capables.&aufsi  félon  qu'il  nous  eft  pro- 
pre &vtile.Contétons-noiis  decefte  mefure- 

f.iii. 


/ 


4<î 


HVITIEME      SERMON 


re-]a:car  celuy  qui  voudra  eftre  par  trop  cu- 
rieux, voiil.mt  lurmonter  l'efchole  de  'lefus 
Chrilhs'.ibvlmeradutout:&  c  ell  corne  fi  on 
mefpnfoit  d'eicouter  leius  Chrift  quand  il 
parle, &  de  contépler  Ja  clarté  qu'il  nous  mô 
lire  en  Ion  Euâgile.Il  efl  vray  que  nous  ne  co 
gnoilVons  qu'en  partie,  cônie  dit  S. Paul  en  vn 


a  qu'vne  feule  voyequinou^  puiflè amener  i 
Dieu.côme  il  eftditau  if.de  S.Iean.Ie  luis  la 
vove,la  venté, .^  la  vie.Dautît  plus  donc  no' 
taut-il  bicnpiattiquer  ceftedoaiine,  &:nous 
y  exercer,  aiin  q  nous  venions  à  lefiis  Chrill, 
&  qu'ellans  venus  à  luy  nous  ibulFnôs  d'eftre 
enleignez  en  fon  efcliole,  voire  en  toute  hu- 


autre  lieu:  nous  auôs  leuleniét  quelque  gouft    milité:  &  qu'en  le  cognoilîànt  nous  puifsions 
de  la  cognoiffancedenollre  Dieu.nous  y  pro     ■  -■  - 

litons  de  iour  en  lour,  tellement  que  tout  le 
cours  de  noitre  vie  n'eft  qu'vn  chemin,  &  la- 
inais  nous  ne  viendras  à  plénitude  de  cognoil 
lance, que  nous  ne  foyôs  delpouillez  de  no- 
itre chair:  côme  il  eft  dit  que  nous  ne  pouuôs 
pas  veoir  Dieu  tel  qu'il  elt  en  fa  gloire,  iuT- 
ques  à  ce  que  nous  loyôs  du  tout  transfigurez 
a  fon  image.  Mais  cepédant  li  ell-ce  qu'aul'si 
ce  que  dit  S. Paul,iera  accompli  en  nous,  c'eit 


Imiî.tî. 


dire  auisi  que  nous  auons  cognu  Dieu, entant 
qu'il  nous  eftoit  profitable,  &■  entât  auisi  que 
noitre  nature  le  porte,  iniques  à  ce  que  nous 
foyons  pleinemét  renouuclez  en  fa  gloire  ce- 
leile.Et  en  cela  voyons-nous  comment  Dieu 
befongned'vne  façon  ell:rage,qu'il  luy  plaift 
de  nous  illuminer  en  la  cognoillànce  de  fon 
Euangile.Il  cfl:  inuifible  quat  .1  luy.Ouy,  mais 
il  trouuc  le  moyen  de  Te  dcclarer,&  que  nous 
le  puifsions  veoir.Et  comment  ceia?en  noftte 


a Içauoir  qu'au  milieu  de  nos  imperfcctiôs,  au  Seigneur  lefus  Chrilt.  Ainfi  cognoillons  que 

milieu  de  nollre  rudeire,nous  ne  laillerôs  pas  la  foy  ell  vn  miracle  de  Dieu,  par  lequel  il  fe 

de  contépler  Dieu  face  àtace,d'auoir  vne  co  rend  vifible  à  nous, combien  qu'i  1  nous  foit  ca 

gnoilVance  priuee  de  luy,  qu'il  fe  môftrcra  en  chc.&  que  nous  ne  puiisions  nullemét  appro 

cela  eltrevrayemét  noitre  Père,  côme  nollre  cher  de  luy.Et  ainii  nous  voyon'^  côme  il  y  a 

Seigneur  lefus  le  protelte  ,  difant  qu'il  tient  deux  chofcs  contenues  en  la  foy:l'vnc  c'eiH' 

lesdifciples  les  amis,.&;  non  point  leruiteurs;  humili te •&l'autreA'ert  vue  gloire.  Voire,tar 

car  vn  leruiteur  ne  fçaura  point  le  confcil  de  il  nous  faut  bien  luimilier.  Que  ii  nous  pen- 

Ibn  maLftre,mais(dit-il)iemefuis  déclaré  pri  fons  que  nous  fommes  poures  aucugles,  nous 

ueement  à  vous,  &  vousay  reuele  les  fecrets  cognoiltrons  que  la  maieftédeDieu  nous  efl 

de  Dieu  mou  Père.  Voila  donc  vn  ordre  ad-  du  tout  incomprehenfible,  &  que  nous  n'en 

mirable  que  noitre  Seigneur  lefus  garde  en-  pouuons  approcher.  Voila  donc  comme  la 

uers  nous,c'elt  qu'il  ne  nous  donne  point  vne  foy  doit  anéantir  en  nous  tout  orgueil  &pre- 


cognoillance  parfaite  dur.ît  ccÙe  vie  morte 
le,iwais  félon  nollre  capacité:  il  ne  laille  pas 
toutesfois  de  nous  reueler  ce  qui  no'  eilbon, 
en  forte  que  nous  cognoiflons  Dieu  priuee- 
nient,nous  auôs  accès  familier  à  luy,  nous  en- 
tendons (es  fecrets,  entant  qu'il  nous  efl  bon 
&  v  tile.Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  rete- 
nir fur  ce  mot  où  S.  Paul  appelle  Dieu  inuifi- 
ble. Or  il  eit  vray  que  celle  dpdirinedeuroit 
maintenant  eftre  allez  entendue.  Mais  quoy? 
nous  voyons  comme  le  poure monde  s'efgare 


fomption  :  mais  de  1  autre  cofte  nous  auons 
bien  à  nous  glorifier  en  la  bonté  de  nollre 
Dieu, quand  il  luv  a  pieu  nous  ewilter  par  dcf 
fus  la  melurede  tous  nos  fens,  afin  que  nous 
lecognoifsions,  iaçoit  que  dci  nature  cela  ne 
puifle  eltre. Quand  l'aintt  Paul  a  attribué  aiiifi 
a  Dieu  ce  titre  d'Inuifible  ,  il  adioufle,  Q^i'»/ 
efl  fiiù  fitge.  En  quoy  il  demonftrc  qu'il  rai.t 
que  toute  raifon  humaine  &  fagtfle  loit  cou- 
tufe,quand  il  eft  queftion  de  parler  de  Dieu  & 
de  ÎA  luftice.  Que  [es  hommes  donc  ne  l'ima- 


par  fa  folle  temerité,&  s'efloigne  de  Dieu,  &  giiient  point  ici  àleurpoftepour  contrerol- 
eependant  il  ne  tient  point  le  chemin  .  Si  ce 
feul  mot  eftoit  bien  entédu,premicremét  tou 
te  audace  feroit  abbatue  en  nous:  car  chacun 
cognoiftroit.Ou  eft-ce  q  nous  allons?Eii  vou 
lant  fçauoir  q  c'eft  de  Dieu,  nous  entrons  en 
vn  aby fine  incôprehenfible.Mais  quoyJon  s'y 
fourie  fans  y  péfer,c5me  délia  nous  auôs  dit. 
Et  voila  côme  les  hommes  fefont  addonez  à 
tant  d'erreurs ,  à  tant  de  fantaiîes  mefchîtes 
bc  diaboliques:c'eftpource  qu'ils  n'ont  pas  co 
gnu  que  Dieu  eitoit  inuifible.  Car  ils  eulFcnt 
pél'e.ll  nous  le  faut  venir  ccrcher  en  fon  ima 
ge.Dieu  ne  peut  tftie  cognu  par  antre  moyé, 
linqn  que  nous  le  contéplions  en  noitre  Sei- 
•gneua  i«fus  Chiilt.ll  eildôc  impofsibleq  les 
ipmincs  foyct  amenez  à  celle  raifon,  comme 
nous  voyôs  qu'ils  ont  toufiours  cefte  phrene- 
Jie  qui  les  tianfportc,de  vouloir  entédre  plus 


1er  ce  qu'il  tait,que  nous  ne  difputions  point 
à  rencontre  :  car  fans  qu'il  fonne  mot  il  fau- 
dra que  nous  foyons  rembarrez  de  celle  fa- 
gefle  qui  ell  en  luy  feul, telle  que  fi  nous  vou 
Ions  en  auoir  vne  feule  goutte  de  nouf-mcf- 
mes,nous  fommes  du  tout  cnragez.Qu^ell  -ce 
dôcde  la  fageliedes  hommes;  ce  Icra  double 
tolie.  Pourqnoy?  Car  ils  veultnt  defrobbcr  â 
Dieu  ce  qui  luy  appartient,  &  le  veulent  dtf- 
poiuUer  :  ils  ne  tont  finon  le  précipiter  tn 
mine  .  Et  ainfi  retenons  bien  (  comme  nous 
auons  délia  dit  )  que  faintt  Paul  pailant  de  la 
fageiTe  de  Dieu,  fan  comparaifon  entw  luy 
&  les  créatures ,  afin  que  quand  il  ell  que- 
ftion de  noitre  lalut,nous  fçachions  que  nous 
ne  fommes  rien,  que  nous  ne  pouuons  rien, 
qii'd  n'y  a  ne  dignité  ni  valeur  en  nou^  :  vV- 
niefmes  qu'il  n'y  a  ne  vie  ne  vigueur.  Et 


.qu'il  lie  leur  app«rtieiit:&  ccpédaot  ils  s'efga/  puis  que  toutes  ces  choies  font  en  Dieu, qu'il 
jf  QC  à  tiauers  chaps:iS:  nous  fyiuons  qu'il  n'y     nous  faut  recourir  à  luy  ,  le  prians  qu'il  luy 

pLiife 


SVR   LA    I.    A    TIMOTH. 


47 


plîife  nous  inftruire  en  fa  volonté,  f^achans 
que  c'efk  toute  noftie  fagelTe  que  de  nous  al  - 
fuiettiràluy  ,  le  prians  qu'il  noui  retire  des 
abyfmes  de  mort,&  nous  tace  participans  de 
la  vie  dont  ilcftla  l'ource  &fontaine:Iepnâs 
qu'il  nous  appelle  à  ce  royaume  duquel  nous 
cillons  priuez  Si.  bannis. Et  combien  que  nous 
ne  l'oyons  qu'vu  ombrage  qui  pafle  &  s'efua- 
nouittantoit ,  qu'il  nous  donne  vne  fermeté 
en  Iby.Etcependant.puisqu'ildit.Quegloi- 
re  luy  foit  reudue  à  laniais-.cognoilTons  qu'ici 
les  hommes  font  anéantis  en  euxrcomuie  s'il 
difoit  qu'il  ne  faut  ponit  chercher  aux  hoin^ 
mes  la  matière  de  leur  lalut, qu'il  ne  taut  poît 
s'enquérir  que  c'ell  que  Dieu  y  a  tiouue,pour 
quov  il  ai:  elle  elmeu  à  leur  bien  faire  ,  r>en 
de  cela:  mais  glorifions  celuy  auquel  eft  deue 
toute  gloire,  &  non  leuleiuent  pour  vne  bouf 
fce  ,  mais  continuons  à  prclcher  les  louanges 
de  Dieu,&:  en  la  vie  &  en  la  mort. Cependant 
ce  n'eflpas  àdire  que  nous  nepuilsions  nous 
glorifier  en  Dieu.côme  il  a  elle  cxpofc:  mais 
pource  que  les  hommes  le  ieparent  de  luy,  il 
faut  que  leur  opprobre  &  iguominie  loit 
defcouuerte ,  qu'ils  foyent  delnuez  de  tout 
bien,  &  qu'ils  içachent  qu'il  n'y  a  en  eux  que 
maledidion, comme  par  ci  dtuant  il  a  efté  de 
daré.Nous  pourrons  bien  auoir  quelque  vie, 
_nous  pourrons  bien  auoir  quelque  làgelTe  en 
£ontempIant  Dieu.  Voire, mais  comment:  La 
vie  qui  eft  en  nous, nous  eft  donnée  parla  pu- 
re bôcé,  en  forte  qu'elle  clllîene  ,  3c  faut  que 
la  louange  luy  en  foit  rendue.  Nous  n'auons 
point  donc  vne  vie  propre, &  dont  nous  puil- 
iîons  nous  vanterimais  cognoilTons  que  Di.  u 
nous  fait  participas  de  celle  vie  qui  cft  en  luy, 
fc  referuant  toulîours  pai  deuers  loy  la  lou- 
.nnge  qu'il  mente.  Autant  eneft-il  de  la  û~ 
gelfe:  car  nous  fommes  poures  aueugles,mais 
félon  que  Dieu  nous  inftruit  en  û  vérité, nous 
fommes  fages.  Car  qu'tft-ce  que  l'£uangi!e 
iinon  vne  perfection  de  toute  fageffe?  comme 
i.Cor.i.  fiind  Paul  l'a  nommé. Cela aufsi  nous  eft  tel 
7  '  lement  donné  de  Dieu ,  que  luy  le  recognoift 

toufiours  &.  auoue  pour  fien.  Car  il  tie  donne 
point  la  fageffe  aux  hommes  pour  s'endef- 
pouilJer,  pour  amoindrir  ou  rien  diminuer  de 
ce  qu'il  haunaispluftoltc'eft  afin  que  fa  gloi- 
re foit  plus  appaitr.te,  &  qu'on  lappeçoyue 
Iclon  qu  elle  eft  cfpandue  fur  toutes  fes  créa- 
tures.Ainlî  manitcnaiu  en  tll-ilde  ù  gloire. 
£t  pourquoyi'Carnoftie  Sti^jncurnc  retient 
point  fa  gloire  euclofe  en  loy, mais  il  nous  en 
fait  participans. Apres  qu'il  nous  a  defpouil- 
Icz  du  :out,&;  qu'il  nous  a  rendus  confus, qu'il 
dcfcouurenoitre  turpi:ude,tellement  q  nous 
dtuons  auoir  honte  de  nou'.-mefmes,  i]  nous 
reueft  de  fa  gloire  propre. Mais  ce  n'eftpasa- 
fiu  que  nous  l'acceptions  à  noas:car  ce  feroit 
vn  facrilege  trop  vilein  :  mais  afin  que  nous- 
nous  puU.ions  glorifier  en  luy,  félon  qu'il  le 
.Itr.ii.13.  dit  par  l'on  prophète  leremie  ,&  que  S.Paul 
aufsi  l'allègue  en  la  première  des  Corinthies, 


prcinier  chapitre. Voila  donc  en  lomme  ce  q 
noiiS  auons  à  noter  en  ce  panagc.Aprct,fàini;t 
P.iul  retounre  i  ce  qu'il  auoit  commence  à 
due  à  Timothee.Il  l'auoit  exhorté  à  bienfai 
rc  fou  office  &  s'acquitter  fidèlement  d'vne 
charge  11  haute  &  ù  difficile  que  Dieu  luya- 
uoit  cômile:mais  pource  que  Timotheeauoit 
befoin  d'elcre  authorifé,  afin  qu'on  rcceuft  fa 
dodrine  en  toute  reuerence:  (car  il  cltoit  icu 
ne  homme  qu'on  euftpeu  mefpnfer  )  fainct 
P.iul  luy  adonne  authorité  .comme  ileftoit 
nectllàire,afin  qu'il  édifiait  l'Eglife.  Cepen- 
dant ,  poiucc  qu'il  y  auoit  beaucoup  de  gens 
ou  volages,  ou  pleins  d'orgueil  qui  Jetradoy 
cnt  de  S.  Pauliila  faluauAi  bien  qu'il  mon- 
ftraft  qu'il  ne  parloit  point  cq  fon  nom  ,  qu'il 
n'appovtoit  riendu  lien, mais  qu'il  cftoit  en- 
uoyé  de  Dieu,  q  nofne  Seigneur  lefus  Chrift 
luy  auoit  donne  cefte  preeminence-la  ,  qu'il 
parlâft  comme  en  fon  nom,&  en  fa  perfoune. 
Voila  pourquoy  faindPaula  fait  mention  âc 
de  les  fautes  qu'il  auoit  commifes,&  de  fa  con 
uerfation,&  a  magnifié  a  bonté  de  Dieu, d'au 
tant  que  peu  s'en  taloit  qu'il  nefuft  reiette, 
pource  qu'il  auoit  elté  ennemi  de  la  foy  pour 
vn  peu  de  ceps.  Et  cela  a  efté  pour  plus  grade 
approbation  Je  la  dodrine,côme  nous  voyôs 
vn  miracle  de  Dieu.,  en  ce  qu'il  a  efté  fi  toft 
changé.Apres  donc  que  S.Paul  a  eftabli  aiiili 
lonauthonté,&  celle  de  Timothce,  il  reuiêc 
au  propos  :  F//j  Ttm:Tthc:e,àit-il,ie  te  cômaiide 
ce  que  tu  ,is  ouy,-foire  f.Iô  Us  prophéties  oui  ont 
efie  par  ci  deuaiit  de  toy  ,  afin  qu  en  icelles  l» 
guerriyes  "vne  hôiie  guerre, ayant  foy  0-  bonne 
coiifciice.Ce  n'eft  point  fans  caufe  que  S.Paul  ^'""  ?•'' 
exhorte  ainfi  Timothee:car(conime  ildit  en  ^  ''" 
vn  autre  palTage)ce  n'tft  po;nt  vne  charge  pe 
tite  que  de  gouucrner  la  maifon  de  Dieu. Car 
Dieu  veut  que  la  vérité  loit  maintenue  en  l'E 
glife,&  elle  en  eft  côme  le  pilier  pour  la  fou- 
ftenir,elle  en  eft  la  gardiéne,&:  Dieu  a  là  def- 
ployé  to'  les  threfjrs  de  fes  fecrets  celeftes, 
Qj.iâd  donc  vn  home  eft  ccmis  de  Dieu  pour 
Paftcur,  voila  vne  charge  qui  eft  fi  haute  &  iî 
honorable  qu'il  n'eft  point  poAihle  que  nous 
en  veniôs  à  bout.finô  en  nous  eft'orçant,&  no 
point  denoftre  vertu,mais  fel5  que  Dieu  be- 
longnera  en  no' par  fonS.£fprlt.^'oiIa  pour- 
quoy S.Paul  exhorte  ainfi  Timothee.Et  ainfi 
notons  qu'il  ne  parle  pas  tant  à  luy, qu'à  tout 
le  peuple:car  il  faloit(c5ine  nous  auons  dit) 
que  Timothee  fuft  aidé, pource  que  lamais  le 
Kîonde  ii'i  efté  fans  beaucoup  d'efprits  fauta 
ftiquesjfans  desorgueilleuxquieftoyét  pleins 
ou  d'enuie  ou  d'âbition.  Voila  dôc  pourquoy 
S.Paul  exhorteTimothee,non  point  qde  foy 
il  en  euft  befoin,&  qu'il  ne  fuft  affcz  diligent 
à  faire  fon  office  :  mais  il  faloit  que  cela  fuft 
cognu  &  déclaré  à  tout  le  monde.  MaintenSt 
regardons  par  le  menu,  félon  que  le  temps  Je. 
pourra  porter.les  poids  qui  tort  ici  touchez. 
Sainit  Paul  raTsétoii  .à  Timothee  les  prophë 
ties  qm  auoyent  efté  de  luy  ,  deuaiu  qu'il  fuit 

f.iiii. 


4? 


HVITIËME     SERMON 


appelé  en  eefte  charge  &  office  :  car  pource 
tjiie  Dieu  le  voiiloit  leruir  de  ccft  hoiiiuK-  en 
chofes  grandes,  il  liiy  auoit  donne  appi  obi- 
tion  plus  qu'aux  autres:car  nous  ne  liions  pas 
que  tous  ceux  qui  ont  elle  ordônez  Palkuis, 
y  hilFent  appelez  par  prophéties.  "I  imothee 
donc  a  eu  cela  de  particulier, lelon  que  Dieu 
voyoit  qu'il  eftoit  befom.  Et  de  taitt.pource 
qu'il  faîoit  qu'il  feruift  mefiues  entre  les 
Iuifs,&que  Ion  pereauoit  cfte  Payé, il  clloit 
moins  agréable.  Il  y  auoit  auAi  la  leuntlie, 
quipouuoit  empefcherqu  il  ne  tuft  bien  rc- 
ccu  ,  &  qu'on  ne  luy  portait  telle  reuerence 
comme  il  eftoit  requis.  Pourtant  Dieu  auoit 
voulu  confcrmer  ceit  homme  ,  afin  qu'on  co- 
gnuit  qu'il  luy  auoit  tendu  la  niain,&  qu'il  e- 
îioit  authcurde  la  charge  qui  luy  elloit  com- 
mife.Sainft  Paul  maintenant  rainentoit  ceci 
à  Timothee  ,  afin  qu'il  fou  taiu  plus  incite  à 
s'acquitter  ,  &  quM  puifl'e  f?lîfter  en  vne  telle 
grâce  de  Dieu  ,  &  ta  re  qu'elle  ne  fou  point 
anéantie  par  ("a  noncli.ilance  ,  comme  en  vn 
SoȔ4-i4  autre  palTage  il  en  fait  mention. On  pourroit 
trouuer  eftrange  que  fainti  Paul  dit  que  Ti- 
mothee bataille, qu'il  gueiroye.fclon  les  pro 
pheties  qui  ont  eftedc  Uiy:car  puis  que  Dieu 
en  auoit  prononcé  ,  il  n'tlroitpas  en  Timo- 
thee de  faire  que  Dieu  f i  fl  fiuftre  de  fon  in- 
tention. Quand DicH  déclare  quelque  choie 
de  nous  ,ceiagift  en  luy  qu'J  laccomplilie: 
car  l'effet  de  la  parole  de  Dieu  ne  dépend 
point  de  la  volontédes  hommes. Qj^c  feroK- 
cefMais  tant  y  a  que  noilre  office  el\  iî  Dieu 
a  pronôcé  de  nous,  que  nous  ne  dtuons  point 
nous  flatter,  nous  ne  deuons  point  n;. us  ap- 
puyer en  nous-mcfmes ,  mais  plulfoft  ce  que 
Dieu  fe  dcclare,nous  doit  aiguillonner ,  que 
nous  deuons  en  plus  grande  iolicitude  nous 
efforcer  à  venir  là  où  noftre  Dieu  nous  ap- 
pelle. Comme  quoy  f  Voila  noftre  Seigneur 
qui  nous  a  choiiîs  deuant  la  création  du  mon- 
de :  il  n'eft  pas  en  nous  de  renuerfer  ce  de- 
crct-laqui  elf  immuable. Ceux  que  Dieu  aura 
cleus,il  eft  certain  que  Dieu  les  conduira  en 
■forte  qu'il  monflrera  que  ce  qu'il  a  donné  à 
fon  Fils,ne  peut  périr ,  comme  il  en  eft  par- 
lé au  io.de  fainttlehan.  Si  ne  faut-il  point 
que  fous  ombre  de  l'eleflion  de  Dieu  ,  les  fi- 
dèles s'endorment  &  s'anonchalillcnt  :  mais 
pluftoft  ils  fedoyuent  appliquer  .\receuoir 
Jes  promcflesdeDieUjlefquelles  font  certai- 
nes Se  infallibles  :  comme  par  icclles  il  nous 
teflifie  l'affeftion  paternelle  ,  quand  il  nous 
choifit  àfoy  pour  fes  enfans& héritiers. Nous 
deuons  dôc  auoir  cela  pour  refolu,  que  Dieu 
ne  faudra  point  d'accomplir  ce  qu'il  a  vne 
fois  prononcé  de  d  bouchi.-:  mais  cependant 
fi  ne  dcuons-nous  pas  cefTcr  de  rinuoquer,& 
de  recourir  à  luy.cognoiflans  nos  infirmitez: 
combien  que  nous  fçachions  qu'il  nous  aide- 
ra lelon  qu'il  nous  èû  b'-foin  ,  fi  eft-ceque 
nous  ne  deuôspas  eftrc  lafches  ai  l'inuoquer: 
car  il  nous  faut  prattiaucrcn  foiumcceque 


dit  famd  Paul  au  fecôddes  Philippiens,Puis 
qui.  tout  nous  procède  de  Dit  u,  qu'il  nous 
uuniicia  volonté, le  pouuoir,  ^l'exécution, 
&:  le  tout  par  fa  bonté  giatuite,  que  nous  de- 
uons cheminer  tncrauue(S.:  folicitude ,  co- 
gnoillans  noltre  indigtncc:que  nous  venions 
a  Dieu  comme  pouies  inenaians,  voyans  no- 
ftre mfiimite.  Ho  il  ne  faut  pas  que  nous  fa- 
cions  des  braues,que  nous  eltcndios  les  ailes, 
mais  pluftolt  auifons  de  nous  cacher  fous  les 
ailes  de  noftre  Dieu,fous  ûi  prottdion,  pour 
le  prier  qu  il  nous  fouftiene  ,  qu'il  foit  nollre 
appuy  ,  qu  il  nous  fccoure  en  toutes  nos  ne- 
celsitez  lefquelles  il  voit  en  nous. Voila  pour 
quoy  maintenant  lainit  Paul  dit  à  Timothee, 
Que  lelon  les  prophéties  qui  ont  efté  de  luy, 
il  guerroyé.   Car  combien  que  Dieu  ne  peut 
eftit  fiultre  que  Ion  intention  ne  s'accomplif 
k-,ii  clt-ce  qii'il  nous  faut  touliours  regarder 
à  noftre  diuoir  &  office,  &  non  point  tenter 
Ditu.Or(conime  défia  nous  auons  ciijquand 
Dieu  nous  fait  la  grâce  de  nous  preucnir,  & 
qu'il  no'  déclare  qu'l  nous  a  deus  à  foy  afin 
que  lamais  ne  peufionsnl  ne  faut  point  que 
la  delTus  nous  prtfumions  de  noftre  veitu, 
pour  nous  endoimir  en  vne  prcfomptiô  char 
nelle.  Nous  pouuons  bien  kiierhaidimcnt  la 
tefte  pour  nous  glorifier  en  la  grâce  de  Dieu: 
mais  tant  y  a  qu'il  nou-j  doit  tcufiours  fouue- 
nirde  nos  toibleires,&  deuons  lur  tout  rcgar 
der  que  nous  fommcs  ici  comme  expoki  en 
proye  à  Satan  ,  li  nous  n'elhons  aidez  d'en- 
hautrvtuqiie  nous  fommes  du  tout  defrucz  Se 
defpouri.eus  de  dcl"tnre,n'cfto  t  que  Dieu  fuft 
nofhe  bouclier.  Voila  donc  coiume  il  nous 
faut  tftre  vigilans  ,  comme  il  nous  faut  auoir 
fouci  de  recourir  toiifiours  à  Dieu,&inuo- 
quer  fon  nom.  Et  c'eft  la  railon  pomquoy 
fainil  P.iul  adioufte  la  folicitude  qui  doit  e- 
ftre  en  Timothee  ,  pource  que  Dieu  en  auoit 
prononcé.  En  fomme  (  pouicc  que  nous  ne 
pouuons  pas  maintenant  palier  oucre)notons 
que  noftre   Seigneur  ,  en  nous  propofant  fes 
promelTès,  &  nous  dtclar.rt  le  bien  qii  il  nous 
a  fait,  &  qu'il  nous  veut  faire  ,  n'entend  pa.» 
par  cela  de  nous  endormir, tellement  que  no* 
ne  penfions  plus  à  luy, ni  à  nous, &  pour  nous 
rendre  nonchalansmais  pluftoft  il  nous  veut 
faire  cogno.ftie   nos  infirmitez.  Pourquoy 
eft-ce  q  Dieu  nous  déclare  qu'il  nous  a  tleus? 
C'eft  tl'autant  que  nous   eftions   perdus  en 
Adam. Pourquoy  eft-ce  que  Dieu  nous  décla- 
re qu'il  no°  a  appelez  par  fa  pure  gracefÇ'eft 
d\uitant  que  nous  n-c  potuions  venir  .-iluy. 
Pourquoy  elt-cc  que-  Dieu  pi  omet  qu'il  con- 
tinueia  lufques  à  la  fin  de  nous  donner  vne 
conftance  inuinciblc  r"  C'eftpource  que  nous 
fommes  non  feukineiu comme  rofeaux  branf 
lans  ,  mais  qu'il  n'y  a  point  en  nous  la  force 
d'vne  moule hc:  &  comme  le  diable  nousau- 
ro!tgaignez&  opprimez  incontinent,  finon 
que  nous  fuf.ions  f  luftenus  &  preferuez  par 
lavertuinuincibiede  noftre  Dieu  .  Combien 

donc 


SVR    LA    I.    A     TIMOTH. 


49 


donc  que  noiiî  cognoiAions  qii'iJ  n'y  a  rien 
en  nous  qic  foibleifc  &  inrirmite, voire  &  que 
nous  foyons  plus  que  mikiabies  créatures:  lî 
eft-ce  que  nous  dcuons  nous  appuyer  fur  la 
vertu  de  noftre  DicUjCOgnoifTans  qu'iJ  eftaf- 
fcz  puiflànt  pour  Pious  maintenir, que  fa  vertu 
clT:  allez  ir'orte  pour  fubueiiir  à  nofh  e  f  oiblef- 
fc.Et  ainfi  cognoiflans  le  befoin  que  nous  a- 
uons  de  recourir  à  noftre  Dieu,  que  nous  ve- 
nions à  luy  pour  dire  ,  £t  Seigneur  ,  qu'il  te 
plaile  nous  tenir  la  main  torte  ,  &:  que  nous 
demeurions  touiîours  cachez  fous  tes  ailes,& 
que  le  diable  ne  trouue  nul  accès  ni  entrée  eh 
nousique  tu  nous  fois  vneforterefle  telle  que 
Ut  as  promii'e.  Voila  donc  comme  Dieu  nous 
afleure  de  noftre  falut,en  telle  forte  que  nous 
n'en.deuoDs  point  douter  :  &  neantmoins  il 
ne  veut  point  nous  endormir,  nenous  donner 
occafîon  de  nonc}ialance:mais  il  nous  veut  in 
ilruire  à  humilité  &  folicitude,  afin  que  nous 


le  requérions, &•  quenous-nous  appreftions  à 
batailler  touJîour-,  en  ce  monde  ,  iulques  à  ce 
que  nous  ayons  obtenu  la  vitloire  pleine  & 
parfiiite  par  la  mcfnie  giace  qu'ila  côniencee 
en  nous,&:  laquelle  il  nous  fait  lentir. 

O  Rnous-nous  profterneiosdeuant  la  fa- 
ce de  noftre  bon  Dieu, en  cognoillànce  de 
nos  fiiutes ,  le  priant  qu'il  luy  plaile  nous  les 
paidonner,&;  nous  deliurerde  la  malediftion 
en  laquelle  nous  fonimes  détenus, s'il  vouloir 
vfer  de  rigueur  contre  nous.  £t  cepei  dant 
que  par  fon  fainiLt  Ei'prit  il  nous  reforme  à 
fon  image,tellcmcnt  que  nous  afpinons  touf- 
iours  à  luy,cheminans  en  fon  obciflânce,iuf- 
ques  à  ce  qu'ayans  efté  retirez  de  ce  monde, 
nous  ibyons  participans  de  celle  pleine  iufti- 
ce  à  laquelle  nous  deuons  maintenant  tendre» 
Ainli  nous  dirons  tous ,  Dieu  tout  puiflànt, 
Perecekfte,  &c. 


NEVFIEME    SERMON    SVR    LE    PRE- 
MIER   chapitre. 

i8  Ff/y  TiniotheCyie  te  recommande  ce  comma7idement, que  félon 
les  prophéties  <^ui  ont  deuant  cjîé fur  toy,tu  batailles  parkelkshonne 
hatudle, 

15  Ayant  foy  (y  home  cofcience^  laquelle  aucuns  ayans  reiettce, 
font  péris  de  la  foy. 


Ous  auons  veu  ce  matin ,  que 
quand  Dieu  nous  auia  fait  quel 
que  grâce,  &  qu'il  no'  aura  fait 
auf'i  ceft  honneur  de  nous  pro- 
mettre qu'il  nous  côduira  iuf- 
ques  en  la  fin,  que  nous  ne  deuôs  pas  pourtat 
eilre  nonchalans,  mai^  pluftoft  que  ceiî  nous 
doitinciterà  l'inuoquer  de  tant  meilleur  cou 
rage ,  Se  pour  nous  efforcer  de  faire  valoir  la 
vertu  qu'il  a  mife  en  nous.  Voila  ce  que  nous 
auons  à  retenir  pour  continuer  le  propos. Or 
maintenant  S.  Pauladioufte,  que  Timothee 
guerroyé  vne  bonne  guerre  en  vertu  des  pro- 
phéties qui  eïloyét  déclarées  de  luy.  Dieu  a- 
iioit  prononcé(comme  il  a  elle  déclaré  ce  ma 
lin)qu'il  fe  vouloi  t  feruir  de  ceft  homme, afin 
que  l'Eglifefuft  tant  plus  certifiée,  qu'il  n'e- 
ftoit  point  mis  en  ceft  eftat  à  la  voleq,ni  àl'ap 
petit  des  hommes ,  mais  que  Dieu  auoit  ap- 
prouué  fa  vocation. Il  reftoit  qu'il  continuaft. 
Et  voila  pourquoy  S.  Paul  dit  qu'en  icelles  il 
c6batte:c'eft  .idire,Puis  que  tu  as  eu  plufieurs 
tefmoignages  du  S.Efprit,&  que  tu  as  efté  ap 
prouui  ainfideDieu,aduife  défaire  valoir 
oeIa,que  Dieu  ne  foit  point  fiuftré.  Non  pas 
que  l'home  mortel  renucrfe  ce  que  Dieu  au- 
ra eftabli  du  ciel  :  mais  entant  qu'en  nous  eft, 
fi  nous  fommes  nonchalans, nous  renuerfons 
le  conieilde  Dieu.Sainfl  Paul  donc  regardât 
à  cel3,ne  difpute  point  fubtikmenc  de  ce  qui 


ne  fe  peut  faire :mais  ilmonftre  qu'il  ne  tient 
point  aux  homes  que  la  grâce  de  Dieu  ne  foit 
anéantie, quand  ils  ne  la  mettent  point  en  ef- 
fet,ne  foulFrans  de  s'alTuiettir  là  où  Dieu  les 
a  ordonnez.  En  femme,  nous  voyons  encore 
mieux  ici,  que  félon  que  Dieu  nous  aura  auan 
cez,nous  deuons  auoir  tant  plus  de  courage  à 
pourfuyure,  iufques  à  tant  q  nous  foyôs  plei- 
nement venus  à  noftre  Dieu.  Etc'cft  pour- 
quoy nous  auons  dit  q  les  promefles  de  Dieu 
nous  doyuent  eftre  côme  aides  pour  nous  fai- 
re continuer  au  bien.   Car  fi  nous  eftions  en 
doute,&  que  nous  n'eufsions  nulle  refolutior» 
en  nous, nous  ne  pourrions  point  marcher  vn 
pas  fans  nous  reculer  du  bien,  voire  fans  nous 
desbaucher  du  tout:mais  quand  nous  fçauons 
que  Dieu  nous  a  tendu  la  main  ,  Se  qu'il  nous 
c5duit,&  qu'il  approuue  ce  que  nousfaifons, 
de  là  nous  deuons  recueillir  vne  vertu  inuin- 
cible,  pour  furmontcr  tous  les  empefchemes 
que  Satan  nous  mettra.  Or  non  feulement  S. 
Paul  commande  à  Timothee  de  faire  loyau» 
ment  fon  office  ,  afin  de  refpondre  aux  pro- 
phéties qui  auoyét  efté  de  luy, mais  pour  s'ac 
tendre  à  batailler  &  guerroyer  :  &  non  fins 
caufe.  Car  par  là  il  aduertit  Timothee  qii'il 
ne  pouuoit  point  exécuter  la  charge  qni  luy 
eftoit  commife,  fans  grans  côbats.  Et  ceci  cfc 
gênerai  à  tous  ceux  qui  font  comis  pour  anon 
cer  la  parole  de  Dieu.  Vray  cft  qu'il appar-» 


50 


NEVFIEME    SERMON 


tient  aufsi  i  tous  fi(3eles:carnous  ne  pouuons 
feriiir  à  Dieu  que  Satî  ne  nous  rclîfte,  &  qu'il 
ut  ùille  batailler  cotre  les  etForcs  qu'il  nous 
fera. Chacun  lent  en  foy  comme  il  eft  ailaïUi 
de  tous  coftez:il  ne  faut  point  lortir  de  nous- 
mefmes  pour  Içauoir  que  c'eft  de  guerres,  & 
des  ennemis  qui  nous  toui  méttnt,S;  qui  nous 
troublent:car  autant  que  nous  auons  de  pen- 
fees  de  d'afFedions,  ce  font  autant  d'aduerûi 
resqui  nous  deftournétde  fuyure  Dieu&  fa 
parole. Et  puis  il  y  a  des  tentations  intimes  q 
Satan  nous  met  à  la  traucrfe:briet-,les  fidèles 
auront  àbatailler  pour  leruu  à  Dieu,tat  con 
tre  leur  nature, que  contre  beaucoup  de  ten- 
tations que  Satan  ha  toulîours  en  main. Mais 
fur  tous  les  Miniftres  de  la  parole  de  Dieu 
(qui  font  comraeport'eni'eignes,  &  qui  doy- 
uent  môiher  le  chemin  aux  autres)ont  àguer 
royer  il  ils  le  veulent  acquitter  de   leuide- 
uoir  :  car  le  diable  fait  fes  grans  efforts  faut 
qu'il  pcut,pource  que  la  doctrine  de  lalut  qui 
nous  eif  prefchae  par  l'Euangile  ,  cft  comme 
l'amcde  l'Eglifc:  c'eft  le  royaume  de  noftre 
Seigneur  leùis  Chrill,c'tfl:  la  félicité  des  ho- 
mes.Et  ainfi  il  tant  bien  que  toute  la  ruine  de 
Satan  s'approche.  Voila  pouiquoy  iamais  la 
parole  de  Dieu  ne  fe  prclchcque  le  diable  ne 
foie  efmeu  en  telle  tune, qu'il  tafche  de  rom- 
pre le  cours  de  l'£uagile:iSi:  mclmes  il  cnflam 
me  en  pareille  rage  tous  ceux  qu'il  peut:  &  il 
La  beaucoup  de  fuppofts,il  trouuera  toufiours 
des  inflrumcn?  beaucoup  en  ce  monde ,  com- 
me nous  fçauons  que  iufuiiesàce  que  Dieu 
nous  ait  changez  ,  nous  fjmmes  addonnez  à 
mal,&  y  tendons  du  tout.Ainfi  cefte  fimriitu- 
de  que  met  S.  Paul, emporte  beaucoup, quand 
il  du  que  Timothce  guerroyexomme  s'il  di- 
foit  que  ceux  qui  ont  àprefcher  l'Euangilcie 
trompent  ,  quand  ils  cuident  faire  leur  office 
paifiblement  &  lans  contredit ,  &  qu'ils  veu- 
lent feulement  expofer  l'Efcriture.Et  pour- 
quoy  ?  Car  le  diable  ne  foiiffrira  point  qu'ils 
anoncent  purement  la  parole  de  Dieu, qu'il 
n'y  refiile, qu'il  ne  prattique,&;  qu'il  ne  dief- 
fc  beaucoup  de  chofcs  à  l'oppofite  ,  qu'il  ne 
machine  tout  ce  qu'il  pourra.ll  faut  donc  que 
nous  foyons  preifs  à  guerroyer.  Etcen'eil 
point  feulement  en  ce  partage  que  l'Efcritu- 
«ftt.IS.  je  çfi  p^jjg  .  ,„3J5  jj  j.^.gjj.  ^^^  f^^  dônee  à  le- 

^  remie.s'addrefle  àtous, quand  il  dit, Ils  batail 
lerot  cotre  toy .NoftreSeigneur  doc  n'exhor 
tepasfîmplement  fon  Prophète  déporter  le 
ioug  qu'illuy  a  mis  fur  Icdosimais  il  l'aduer 
tit  qu'il  aura  beaucoup  de  cotredil"ans:&  pour 
tant  qu'il  te  prépaie  à  cela.  Car  les  hommes 
liayirentlali)micredcDicu,&  tafchétdel'e- 
fteindre  entant  qu'en  eux  eiï  ,  pource  qu'elle 
defcouurc  leur  infect iô  &  turpitude,&:  ils  vou 
droytnt  auoir  licence  de  mal  faire  en  tene- 
bres.Et  ainfi  il  tft  impoAible  que  l.i  où  la  pa- 
role de  Dieu  fe  prelche, incontinent  il  n'y  ait 
des  troubJes,qij'il  n'y  ait  des  eihieutes  beau- 
coup. Car  comme  aous  voyons  que  les  ton-. 


nerres  s''efmeuuent  en  l'air,  à  caufc  que  l'eau 
qui  eft  là, ne  foutfre  point  que  le  feu  monte, q 
quand  il  y  a  deux  choies  ainlî  repugn.ates  qui 
feconioignent,ilfaut  qu'elles  s'efclatent,  &: 
que  là  fe  procrée  vne  grande  violécerainfî  en 
eft-il  de  la  parole  de  Dieu.  Voila  les  hommes 
qui  ont  vue  telle  arrog.ice, qu'il  faut  que  l'air 
en  retentifle.  Si  vn  bois  verd  &  mouillé  ne 
peut  brufler  qu'il  n'y  ait  de  l'empefcbement, 
&  que  fera-ce  de  noflre  niture  qui  eft  tant 
contraire  à  la  luflice  de  Dieu,  laquelle  fe  dé- 
clare en  l'Euangile?  comme  S.Paul  en  parle.         ■  ■ 
Ainlî  donc  notSs  bien  que  tou^  ceux  qui  von-,  '  ' 
dront  feruirà  Dicu.prelchât  fa  parole, il  faut 
qu'ils  s'arment  en  premier  lieuA' qu'ils  fe  dif 
pofent  à  guerroyer, fçncha!  qu'ils  ne  pourrot 
pas  venir  à  bout  d'anôcer  la  parole  de  Dieii, 
que  Satan  d'vn  cofté  ne  s'efforce  de  les  em- 
pel'cher ,  que  le  monde  ne  s'eleue  ,  &  qu'il  ne 
lette  beaucoup  de  bouillons  :  mais  U  faut  que 
nous  ayons  ccfte  conftance  d'en  venir  à  bout, 
Et  pourquoyfQiiand  S.Paul  a  parlé  de  guer- 
royer ,  il  adioufte  pour  confolation  ,  &  pour 
adoucir  la  fafcherie  qui  pourroit  eftre  en  ce 
monde, queccfte  guerre  eft  bonnercomme  s'il 
difoit  que  lilTue  en  fera  heureufe  :  car  la  vi- 
ftoire  nous  cftproniile  ,  &  ne  nous  pcutfail- 
lir,comme  il  eftditen  cepafljgede  leremie,  ler.i.i^. 
Ils  ^uerroyent  contre  toy:  mais  ils  n'en  vien 
dront  point  au  delTus.  Voila  noftre  Seigneur 
qui  a  déclaré  que  le  monde  fera  lî  peruers  de 
refifter  toufiours  à  ù  parole,de  molefter  ceux 
qui  la  porteront  :  mais  fi  faut-il  en  la  fin  que 
les  malins  demeurent  côfus.Qjynd  lis  aurôt 
fait  tous  leurs  tfforts.  Dieu  ne  lailTcia  point 
de  triompher  d'eux,  &  mefmes  cefte  rebclliô 
&  cefte  rage  qu'ils  auront  môftreé  ,  fera  powr 
donner  plus  grand  luftre  à  la  vertu  que  noftre 
Seigneur  donne  à  la  parole.  Sainft  Paul  donc 
a  ici  exhorté  les  Miniftres  de  la  parole  de 
Dieu, de  ne  fe  point  fafcher,  &:  ne  point  per- 
dre courage  ,  voire  d'autant  qu'ils  feront  vi- 
ftorieux:voire  combien  que  les  combats  foy- 
ent  fort  durs  &  difficiles, qu'il  faut  qu'ils  ioy 
cnt  tout  afleuiez  queDicu  leur  ticdia  la  main 
forte, &  que  iamais  ne  feront  vaincus  de  leurs 
ennemis.  Mais  en  la  fin  il  faudra  ô  tous  ceux 
qui  fe  font  eleuez  contr'tux,periitent.  Nous 
voyons  maintenant  en  fomine  ce  que  nous  a- 
uons  à  noter  de  ce  paflage:c'ell  que  tous  ceux 
qui  font  appelez  pour  enl'tigner  l'Eglife  de 
Dicu,ie  doyuent  difpol'erauant  la  mauiiil  ne 
faut  pas  qu'ilsvienét  dclpourueus.mais  qu'ils  ■ 
foyent  armez  d'vne  vertu  celcfte  pour  batail 
1er  contre  Satan  &  contie  tous  fes  (uppofts. 
Pour  ce  faire  qu'ils  cognoilFent  que  la  volon 
té  de  Dieu  eft  telle, qu'il  veut  que  noftre  Sei- 
gneur lefus  règne  au  milieu  de  (es  ennemis, 
&  que  le  monde  refifte  àfaveri:é  laquelle  le 
prefche:&  qu'en  cela  les  hommes  foyent  rcn 
dus  tant  plus  inexcufables ,  d'autant  que  par 
leur  ingratitude  ils  auront  mis  fous  le  pied  le 
falut  qui  leureiîoit  prefcntc.  Puis  q  Dieu  l'a 

ordon 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH. 


Tt 


ordonné  ainiî,  il  ne  reftc  (înon  qii'vn  chaain 
de  nous-s'apprefte,  iJ  ne  faut  point  que  nous 
defailiion'jau  btloin.  £t  qu"cil-ce  ^]ui  nous 
trompe  quand  nous  perdojis  courage  ,  iinon 
que  nous  auons  nnaginé  que  noui  pouuons 
bien  prefcher  lans  contredit?  Voire,  ûifons 
Dieu  mentci'r.Car  ceux  qui  le  piomettét  ce- 
la,veulent  faire  à  croire  à  Dieu  que  fa  parole 
a  changé  de  nature, &:  que  luy  autvi  changera 
de  propos.  Ainlî  ce  n'eJi  point  de  merueilles 
iî  tous  ceux  qui  veulent  erire  délicats  ,  &  le 
■font  à  croire  qu^ils  n''auront  pas  beaucoup  à 
fouffrir  de  niokltes,en  s'acquittaut  fidelcmct 
de  leur  ofdce  ,  font  friiftrez  de  leur  attente, 
&  que  Dieu  s'en  mocque.  Au  refte,nous  auôs, 
comme  i'ay  touché  ,  bonne  matière  de  nous 
conlbler.quand  il  cfl  dit  que  cefte-  guerre  eu 
î..Tim.4.  bonne.-commeauhinous  le  voyons  en  l'autre 
7^  pairage,I'ay  guerroyé  vne  bonne  guerre, l'ay 

fait  vn  bon  combat:là  il  monftre  que  les  fer- 
uiteurs  de  Dieu  ne  lont  pas  comme  ceuf  qui 
auront  alFez  de  fierté  &  haidiefle  pour  batail 
ier:mais  noftre  Seigneur  les  deihtue  de  vertu 
quâdce  vient  à  l'extrémité. Or  en  ce  combat- 
ci  nous  l'ommes  afleurez  que  Dieu  nous  ten- 
dra la  main  ,  &  que  la  vièfoire  efc  délia  pour 
nous. Et  amiî  que  cefte  promefle  nous  forti- 
fie,afin  que  nouspourfuyuiôs  iufques  au  bout, 
puis  que  la  volonté  de  Dieu  eft  telle, que  nous 
le  feruiôs  en  guerroyant:&  ceci  ne  doit  point 
iéulement  feruir  à  nous  qui  auons  cefte  char- 
ge fpeciale,inais  auûi  que  tous  fidèles  regar- 
"  dent  quandil  y  aura  des  mutins  qui  s'eleuerôt 
contre  h  parole  de  Dieu  ,  qui  ne  tafcheront 
finon  à  mettre  quelque  lume,  ou  quelque  zi- 
zanie, quand  ils  pourront  deltruire  tout, que 
ils  cognoiffent  qu'il  faut  qu'ainfî  foit  ,  puis 
que  Dieu  l'a  ordonné. Et  au  refbc, qu'ils  efpe- 
rent  cefte  ilTue  telle  que  fainct  Paul  promet 
ici,  &  qu'ils  nedoutcnt  point  queD;eu  en  la 
fin  ne  mette  en  confulion  tous  ies  ennemis. 
Cependant  aulsi  qu'vn  chacun  en  fon  parti- 
culier cognoifle  que  puis  que  noltre  Seigneur 
lefus  Chiift  elt  noitre  chef  &  nortre  capitai- 
ne,il  ne  fe  peut  faire  que  noftre  vie  ne  foît 
comme  vn  combat  côtinuehcar  Satan  qui  eft 
ennemi  mortel  du  Fils  de  Dieu,ne  laiffera  ia- 
mais  les  membres  de  Chrift  en  repos,qu'il  ne 
les  tourméte,&  ne  les  tafche.  Ainiî  nous  n'au 
rons qu'inquiétude  enceftevieimaiscôfions- 
nous  en  celuy  qui  a  vaincu  le  môde,&  nousy 
confions  en  telle  forte.que  nous  ne  doutions 
point  que  la  victoire  qu'il  nous  a  acquifc,ne 
foit  noftre. Or  ûiyuos  le  texte  de  fiinû  Paul: 
il  dic,Ay,int  fjy  Cr  bonne  confcience,  laquelle 
aucuns  .lyans  reiettee  fint  péris  canime  d  -en 
naufrage,woire  péris  de  la  toy .Yci  famcf  Paul 
monftre  comme  les  feruiteurs  deDieudoy- 
uent  eftre  equippez  pour  guerroyer  fous  l'en 
feigne  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  c'eft 
afçauoir  de  foy  &  de  bonne  confcience.Voila 
•donc  comme  nous  auons  à  feruir  à  Dieu:voila 
«e  qui  nous  eftneceiîàire.^&ce  qui  ne  doit  & 


ne  peut  faillir:car  par  ce  moi  de  Foy,  fainft 
Paul  entend  bonne  doftrint&.'pure,&  qui  foit 
pour  édifier  l'Eghle, comme  nous  le  verrons 
encoies  plus  amplement  au  chapitre3. Voila 
donc  le  premier  qui  eft  requis  en  ceux  que 
Dieu  enuoyc  pour  anoncer  fa  parole  ,  c'eft 
qu'ils  perfiftcnt  en  pureté  dedoftnnc  ,  qu'ils 
ne  fe  forgent  point  des  im.iginationsfauires, 
&  qu'ils  ne  '.'e  fgarent  point  de  la  droite  reli- 
gion: mais  il  faut  quant  &  quant  qu'ils  ayent 
vnedroite  intégrité  en  eux. Car  ce  n'eft  point 
aflez  que   nous  enfeignions  fidèlement  les 
autres,  finôque  nous  ayons  vn  Zele d'édifier, 
que  nous  auifions  au  falut  de  tous,&  que  nous 
le  facions  ayans  cefte  affeftion  d'honorer   ' 
Dieu  ,  &de  monitrer  le  chemin  &  exemple  à 
ceux  qui  font  conduits  par  noftre  doètrine. 
Maintenant  donc  nous    voyons    poiirquoy 
fainct  Paul  conioint  cesdeuxmots.Car  fion 
enuoyevn  homme  en  combat  contre  des  en- 
nemis forts  Se  robuftes ,  &  que  luy  foit  def- 
ppurueu,qu'il  n'ait  armures  ne  bafton, que  fe.,. 
ra-il?il  fera  bien  toit  vaincu. Il  faut  donc  eue 
nousloyons  bien  equippez  pour  eitre  victo- 
rieux contre  vn  fi  piufTint  ennemi  que  le  dia- 
ble, contre  vne  telle  multitude  que  Satan  ha 
toiifîours  en  main  pour  les  oppofer  àctux 
qui  veulent  feruir  à  DieH:c'eftafçauoir  con- 
tre autant  de  inefchâs  Se  rebelles  qui  f  jnt  par 
le  monde,  contre  autant  de  tentations  qui 
nousvienent  de  tous  coftez.  Orl'equippaoe 
eft  (comme  nous  auons  dit)  que  nous  ayons 
foy  &  bonne  confcience.c'eft  à  dire  que  nous 
foyons  munis  de  bonne  dodrine,  &qi;e  nous 
ayons  non  feulement  zcle  de  feruir  .à  Dieu, 
mats  vne  pure  intégrité  &  rondeur  :  que  nous 
ne  ioyons  point  menez  ncd'auarice.ned'am 
binon, ne  de  rien  qui  foit,  mais  que  nous  ayôs 
ce  but  que  Dieu  foit  honoré  ,  voire  &  eue 
nous  tafchions  de  monftrer  le  chemin  aux 
autres ,  ainfi  que  nous  y  fommes  tenus.  Vray 
eft  que  ceci  doit  citreen   tous  fidèles  ,  qu'ils 
aycntfoy  &  bonne  confcience  :  mais  fitàut- 
il  que  ceux  qui  ont  ceuc  charge  de  poi  terl'E 
uangile,monftrent  le  chemin  A'îqu'ils  fonnét 
la  trompette.  Et  voila  pourquoy  fainft  Paul 
commande  en  particuher  à  Timothee ,  &  en 
la  perfonne  à  tous  ceux  qui  font  appelez  en 
cfiteftai,  d'auoirla  foy,  qu'ils  reduifentce 
qui  eft  efgaré  au  droit  chemin  ,  &:  que  la  pu- 
reté qu'ils  tiendront  en  la  doiftrine,  y  attire 
les  autres,^:  qu'elle  les  fortifie,&  puis  qu'il  y 
ait  l'intégrité  aufvi.Et  ainlî  nous  voyons  que 
cepafTage  contient  vne  doftrine  commune  à 
tous  les  membres  de  l'Eglife  ,  mais  que  par 
efpecial  les  Pafteurs  &:  ceux  qui  ont  la  char- 
ge d'enfeigner,font  exhortez  d'aller  deuant, 
&  de  monftrer  que  ce  n'eft  point  en  vain  qut 
Dieu  les  a  appelez  pour  guider  tout  Ion  peu- 
ple. Or  faintl:  Paul  recommande  ici  fur  tout 
la  bonne  confcience, quand  il  dit.Qjf'aucuns 
l'ayans  reiettee, font  péris  de  la  foy  ,  com- 
roe  fi  quelque  nauire  s'enfondroit  en  la  mer. 

g.ii. 


ci 


KEVFIEME    SERMON 


CeilBot  ie  naufrage  n'eftpaç  commun  en  no- 
ftre  langue,m<iis  nous  ne  pouuons  autrement 
expol'er  ce  que  Tainil  Paul  a  entendu. Il  préd 
ici  la  lîmilitude  de  ceux  qui  vont  par  eau,  foit 
en  n,iuirc,lbit  en  bafteau.  Si  ccux-la  enton- 
drent  par  quelque  tempefte.les  voila  perdus, 
laintl  Pauldit  que  ceux  qui  ie  deftournent 
de  bonne  conlcience  &  d'intcgritc.lontabyr 
mez  par  lei  terapeftes,  comnic-  li  quelque  na- 
/'  uirc  entondroit  au  milieu  de  la  mer.Auil'ons 

donc  de  bien  garder  la  foy,  car  ç'cft  elle  qui 
nous  fouftient,  c'eft  l'appuy  de  noftre  lalii:: 
que  fi  nous  ne  fommcs  là  bien  tondez ,  nous 
Toila  incontinent  enfondrez  aux  abyinies 
d'enfer.  Maintenant  nous  voyons  que  l^iind 
Paul  a  voulu  confcrnicr  l'exhortation  qu'il 
auoit  faite  à  Timothce  quant  à  celle  inté- 
grité &  rondeur,&:  du  deuoir  deluy,&de  to' 
mimftresdela  Parole.  Ceci  eiè  bien  nota-* 
ble:  car  c'eft  autant  comme  fi  laintl  Paul  de- 
-  clareit  que  la  foy  ell  vn  thiefor  fi  grand, que 
il  mérite  bien  d'e/lre  gardé.  Si  vn  homme  a 
quelque  argent ,  il  ne  le  iettera  point  à  l'a- 
bandon :  mais  quand  il  aura  vn  coifre  ou  vn 
buffet  ,  il  tiendra  là  l'on  bien  ferré  ,  &  aura 
toufiours  l'œil  delTus.de  peur  qu'on  ne  le  def 
robbe.  Orl'argent  &:  l'or  ne  font  que  mé- 
taux corruptibles  cSccaduques,  la  foy  eft  vue 
chofe  bicnplus  prccieufe  ,  comme  du  laind 
Pierre.  Puis  qu'ainli  elf  ,  elle  mente d'eftre 
tat  plus  fongueufemét  gardée.  £t  quel  en  eft 
le  coffre  oul'cfhiy?  C'eiî:(dit  S.Paui  )  bonne 
confciéce.  Car  ceux  qui  fe  louent  auec  Dieu, 
&qui  font  des  gaudiileurs,  quand  vne  fois  ils 
auront  cognu  l'Euagile,  qu'ils  n'en  font  que 
babiller,  &cepédanr  font  addonez  à  leurs  va 
nitczjce  font  gcs  prophanes,en  la  fin  ceux-là 
feront  comme  abyfmez.  £t  pourquoy''car  ils 
n'ont  point  côferué  la  foy  qui  elloit  vn  don 
fi  fingulier  &  il  excellent ,  &:  qui  elîoit  digne 
qu'on  le  teinft  ferré, .Je  qu'on.le  gardalîrpour 
ce  qu'ils  n'en  ont  tenu  conte,c'clt  raifon  que 
Dieu  les  face  périr  delà  foy,&  qu'ils  enfon- 
drét.Cela  lera  encores  mieux  entcndu,quand 
nous  regarderons  quelle  eft  la  condition  des 
hommes  durant  celte  vie  mortelle. Nous  fom 
mes  ici  corne  en  vne  mer.  Q^i'cft-ce  q  la  vie 
humaine, &  tout  le  cours  d'icelle?  Vjie  naui- 
gation.  Nous  fommes  non  feulement  voya- 
I.Vle.î,,  gcs  >  comme  l'Efcriture  nous  appelle  ,  mais 
^_2[^  nous  n'auons  nulle  fermeté.  Ceux  qui  vont  à 
pied  &  à  cheual  par  terre, &  bien.encoics  ont 
ils  leur  chemin  certain  &  iolidt  :  mais  il  ne 
faut  point  feiilemét  marcher  en  ce  monde  cô 
me  a  pied  ou  àtlicual,il  faut  que  nous  fjyons 
comme  en  vne  mer,  &:  nou'.  n'auons  nulle  fer 
meté  :  nous  fommes  comme  ceux  qui  font  en 
vn  badtau  ,  ils  font  toufiours  .\  demi  pied 
près  de  leur  mort,  &  le  ballcau  cil  comme  vn 
fcpiilchrc, d'autant  qu'ils  voyentl'tau  tout  à 
]'entour,qiii  elï  prefiedc  lc\  engloutir. Ainfi 
en  eft-ilde  nous  cepédant  q  nous  viiumsici 
bas .  Car  voiia  d'vncoiié  la  fiagilitt  qui  tit 


en  nous, qui  eft  plus  fluide  que  l'eau, que  nous 
ne  faifons  que  nous  elcouler  :  &  puis  tout  ce 
qui  eft  à  renuiron,n'eft  finon  comme  vne  eau 
qui  s'efcouled'vn  cofté  &  d'autre,  &  cepen- 
dant les  vents, les  tourbtUos,  &:les  tempeftes 
s'eleuent  à  chacune  minute  de  temps.  Appre- 
nons donc  que  noftre  vie  n'eft  finon  vne  efpe 
ce  de  nauigation  que  nous  faifons  par  eau,  & 
que  nous  fommes  cependant  luiets  S:  expofcz 
à  beaucoup  de  vents  &  de  tourbillons  .  Puis 
qu'aiiifieft,  que  11  ra-cc  quand  nous  n'aurons 
point  vn  bon  bafteau  ,  &  que  nous  ne  ferons 
point  bien  guidez  ?  Il  faudra  que  nous  cnfon- 
drions,  &  que  les  tempeftes  nous  engouft'rent 
à  chacune  minute  de  temps.  Voila  que  S.  PaiJ 
a  Voulu  dire,monftrant  que  tous  ceux  qui  cui- 
dent  fe  iouer  auec  Dieu, en  la  fin  il  faudra  que 
ils  fentent  vne  horrible  vengeance  de  ce  que 
ils  n'auront  point  gardé  ce  threlor  ineftinia- 
ble  de  la  foy,  qu'après  que  Dieu  les  auoit  illu 
minez, qu'il  s'eftoit  déclaré  à  eux, qu'il  leur  a- 
uoit  donné  certaine  efpcrance  de  £àlut, qu'ils 
ont  ietté  cela  au  vent,  qu'ils  s'en  font  iouez 
comme  d'vne  pelote,  au  lieu  qu'ils  deuoyent 
cacher  ce  threfor  en  bonne  confcience,fe  re- 
cueillir,n'cftrc  point  diltraits  par  les  vanitez 
de  ce  monde,  pour  te  ietter  çà  Se  là  à  l'aban- 
don. Puis  donc  qu'ils  ne  fe  font  point  tenus 
ainfi  enterrez.  Dieu  les  punit  de  ce  qu'ils  ont 
efté  ainfi  volages. Et  pourquoyï  Cai  ils  s'en- 
fondrent.ils  t'ont  comme  au  milieu  de  la  mer: 
&  Dieu  permet  qu'vne  tépefte  s'cleue,  &  que 
elle  les  engloutifle  foudain,  comme  aufsiils 
ont  bien  mérité. Nous  voyons  maintcnat  quel 
le  eft  l'intention  de  l'ainti  Paul,  Se  corne  nous 
deuons  appliquer  ce  pallàge  à  noftre  profit. 
Ilrefte  qu'vn  chacun  imprime  cefte  docirine 
en  ton  caeur,&.'  qu'il  la  reduife  fouuent  en  me 
moire.  Voici  donc  la  foy,'c'eftafçauotr  cefte 
cognoiflance  de  l'Euangile,où  Dieu  le  mon- 
lire  a  nouSj&c'cft  vn  bien  ineltimable  que  ce- 
luy-la.Puis  qu'ainfi  eft,aduil'ons  quand  Dieu 
nous  l'a  donné,  d'en  faire  fi  bonne  garde  que 
ilne  nouset'chappe  point.  Et  comment  cela 
fcra-il;car  de  nouf-mefmes  (côme  l'ay  deiia 
touché  )  nous  fommes  fi  fragilesque  tout  ce 
que  nous  aurons  poiledé  vn  lour ,  s'cfcoulera 
le  lendemain  :  Se  ne  faut  pas  encore  fi  longue 
demeure  :  il  ne  nous  faut  qu'vne  minute  de 
temps  poumons  priuerde  tous  les  bient  qu» 
Dieu  nous  aura  élargis:  voila  comme  nous  en 
fommes.  Maisfiell-ce  que  Dieu  ne  nous  a 
point  donné  la  foy, à  fin  que  nous  en  ayons  la 
iou'ilànce  pour  vn  petit  de  temps  téulcment, 
&  puis  après  que  nous  en  foyons  priucz  ,  il 
veut  que  la  poirefsion  en  foit  permanente.  Et 
comment  le  t'er.a-clle  ?  Le  moyen  nous  eft  ici 
dcclarc:c'eft  qu'en  toute  reueréce  nous  mar- 
chions qu.ind  Dieu  nous  a  monftrt  le  chemin 
de  lalut,  que  nous  cheminions  iéhui  luy  ,  que 
nous  n'ayôs  point  d'hypoc «fie  en  nous,  mais 
cefte  intégrité  &  rondeur  dont  il  (ft  ici  fait 
iiic;ition,&  que  nous  ne  foyons  point  volages 

pour 


SVRLAI.    ATIMOTM. 


pour  eftre  tranrportcz  de  nos  cupiditez  vio- 
létes.qiie  nous  ne  foyons  point  auhi  doubles 
pour  nous  moquer  de  Dieu  &  de  ù  grâce. Cô 
me  nous  voyons  qu'il  y  en  a  qui  voudroyent 
auiourd'huy  prédre  PÊuangile  pour  en  faire 
vn  manteau  &:  vne  couuerture  de  toutes  leurs 
vilenies,que  quand  ils  auront  le  nom  de  Dieu 
en  la  bouche, il  femble  qu'ils  ayent  conûcré 
leurs  iniquite2,&  qu'ils  font  abfous  d'icelles. 
Il  nous  faut  bien  gardcrd'ainii  prophanerla 
parole  de  Dieu, mais  que  nous  la  gardions  eu 
bonne  confcience.  Quand  cela  fera,  ne  dou- 
tons point  que  Dieu  ne  nous  donne    vne 
fermeté  inuincible  ,  combien  que  tous  les 
vents  foufflét,  &  que  toutes  les  vagues  le  iet 
tenta  rencontre  de  nous,  qu'il  kmble  que 
nous  deuions  aby fmer  cent  fois  le  iour ,  que 
Dieu  nous  preferuera  :  car  noftre  lalut  eft  en 
fa  main  ,  &  a  promis  qu'il  nous  fera  pour  ga- 
rent ,  Se  bon  mainteneur  &  fidèle.    Pourtant 
que  nous  n''ayôs  point  maiiuaife  confcience, 
que  nous  ne  vilipendiôs  point  ce  threfor  de 
la  foy,  &  que  nous  facions  l'honneur  à  Dieu 
qui  luy  appartient,  de  nous  retirer  de  toutes 
les  vanitez  Se  diftraûions  de  ce  inonde  ,  Afin 
que  nous  foyos  cachez  fous  la  main  de  Dieu, 
côme  défia  il  a  efté  dit. Nous  auons  à  recueil.- 
Jir  de  là  y  qu'il  ne  nous  faut  point  trouuer  e- 
ihange,  fi  d'vn  grand  nombre  de  ceux  qui  e- 
lloyenc  appelez  à  l'Euangile  ,  il  y  en  a  bien 
peu  qui  perfiltent  :  que  nous  voyons  tous  les 
iours  tant  d'apoftats  qui  efchappent  &.  fe  de- 
ftournent  de  la  foy  ,  &  s'en  aliènent  du  tout: 
il  en  a  efté  ainfi  de  tout  téps.  Et  auiourd'huy 
ce  n'eft  pomt  de  merueilles  que  nous  voyôs 
vne  telle  côfafion.  Et  pourquoy?Carle  mon 
de  n'a  lamais  prifé  ce  threfor  de  la  foy,&  de 
la  doârine  de  l'Euangile  comme  il  deuoit. 
Ainiî  la  plufpart  fe  font  addonnez  .\  des  fol- 
les curiofitez:&:  puis  Dieu  a  lafché  la  bride  à 
Satan.qii'ils  font  tombez  en  des  erreurs  hor- 
ribles &efpouantables  :  qu'ils  fe  font  forgé 
des  religions  eftranges  &:  diaboliques.  Voila 
quelle  eft  l'origine  &  lafource  de  toutes  les 
herefies  qui  ont  efté  de  tout  temp^:  c'eft  que 
ceux  qui  auoyent  entendu  l'Euangile, fe  font 
voulu  monftrer  comme  gens  pleins  d'ambi- 
tion &  d'orgueil ,  &  au  lieu  de  fe  dédier  à 
Dieu  ,  qu'ils  ont  prins  occafion  de  fe  magni- 
ficr:&  Dieu  les  a  fait  trebufcher  en  desabfur 
ditezfi  lourdes  que  les  cheueiix  nousdoiuent 
dreflcr  en  la  tefte  ,  quand  nous  oyons  les  er- 
reurs qui  ont  régné  de  tout  temps.  Mais  au- 
iourd'huy d'autant  que  le  mode  eft  venu  iuf- 
ques  au  comble  de  toute  iniquité  ,  il  ne  faut 
point  que  nous  fyyons  troublez  ne  fcandali- 
iez  s'il  y  a  beaucoup  d'apoftats  ,  &  que  nous 
ne  foyous  que  comme  vne  petite  poignée  de 
gens  qui  perfiftions  en  l'obeiflànce  de  noftre 
Seigneur  [cfus  Chrift ,  &  eu  la  pureté  de  fon 
Euangile.  Car  comment  eft-ce  que  ceux  qui 
ont  cognu  la  pure  doftrine  de  l'Euangile,  en 
font  Icui  profit?  Nous  voyôs  qu'il n'eft  que- 


5:3 


rtion  que  decuriofitez  volages ,  il  n'eft  que- 
ftion  que  de  babil:on  aura  l'^Euangile  au  bouc 
de  la  languc,&  puis  c'eft  tout.Mefmes  on  en 
verra  aniourd'hiiy  beaucoup  qui  feront  fer- 
tiir  l'Eua'gile  à  leur  auarxe,  à  leurs  fraudes  Se 
melchantes  piattiques.que  ce  fera  tout  fucre 
que  de  les  ouïr  parler.  Voire, mais  ce  font  fi- 
lets tendus  pour  tromper  leurs  prochains ,  & 
les  deceuoir ,  que  pour  faire  leurs  fineffes  8c 
mefchantes  prattiques  ,  ils  n'cfpargneronc 
pas  le  nom  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift. 
Nous  voyons  meinies  qu'ils  font  comme  va 
maquerelage  de  l'Euangilerque  pour  colorer 
&  cacher  leurs  vilenies  S:  ordures  ,  ils  pren- 
dront cefte  couuerture, tcllemét  que  voila  vn 
nouueau  Teftament  qui  fciuira  à  beaucoup 
de  gens  comme  d'vne  lettre  de  paiIiardife.Et 
pleuft  A  Dieu  que  telles  chofes  fulFent  inco- 
gnues  :  mais  les  exemples  en  font  aux  yeux 
de  tout  le  monde. Et  ainfî  s'csbahit-on  que  fi 
peu  de  gens  perfiftcnt ,  quand  on  voit  que  le 
nom  de  Dieu  eft  fi  vileinemét  prophané.^Que 
fi  on  fouloit  fa  maicfté  au  pied,  on  ne  luy  fe 
roit  point  plus  grand  outrage,corame  quand 
fa  parole  eft  ainfî  vilipendee,qu'on  s'en  mo- 
que,&  qu'on  n'en  t  ene  cote. Il  faut  bien  que 
Dieudefployc  fon  bras  afin  de  fe  venger  d'v- 
ne :dle  ingratitude  des  hommes,  qu.îdà  leur 
efcient  ils  reicttent  vn  tel  bien  &  vn  tel  thre 
for  que  Dieu  leur  prefcnte. Voila  donc  com- 
ment il  nous  fautconfermer.voyans  tant  de 
rtbelles  comme  il  y  en  a  auiourd'huy  :&  que 
ceux  qui  auoyent  triomphé  du  commence- 
ment, &  qui  monftroyent  fîgne  de  grand  zè- 
le,non  feulement  fe  reculent,  &  fe  refroidif- 
ient ,  mais  regimbent  à  lencontre  de  noftre- 
Seigneur  lefus  Chrift  ,  &  font  ennemis  mor- 
tels de  la  foy  ,  qu'ils  font  noyez  du  tout ,  & 
plongez  au  profond  des  abyfmes  :  quâd  nous 
voyons  cela,  que  nous  n'ayons  point  occa- 
fion d'eftre  troublez  :  qui  plus  eft ,  cela  nous 
doit  feruir  d'autant  d'approbation.  Et  pour^ 
quoy?  Car  noftie  Seigneur  magnifie  lamaie-» 
fté  de  fa  parole  ,  quand  il  punit  ainiî  deuant 
aos  yeux  ceux  qui  s'en  font  iouez  &  inoquezï 
quand  Dieu  les  met  en  vne  ftupidité  fi  bru- 
tale,c'cft  autant  comme  s'il  declaroit ,  C'eft 
àmoy  que  cefte  ofl-enfe  eft  faite.  Pourtant, 
toutes  fois  &quantes  que  nous  verrons  ces 
apoftats  qui  ont  cognu  l'Euangile  ,  qu'ils  le 
reuoltent  &  tournent  leurs  robbes,  cognoif- 
lons  qu'il  ne  s'en  faut  point  esbahir.  Et  pour 
quoy?  car  ils  n'ont  point  conferué  ce  thie- 
lor  de  la  foy  :&  Dieu  leur  a  monftré  leur  in- 
gratitude. Mais  quand  nous  les  voyons  ainfî 
addonnez  à  tout  mal ,  qu'ils  font  mis  en  fenc 
reprouué, qu'ils  n'ont  plus  nulle  hôte,  qu'on 
les  voit  mener  vne  vie  diflolue  :  que  les  vns- 
font  des  yurongnes,  qu'ils  font  tcllemét  con 
fits  en  toute  intempérance,  qu'ils  fontleurs 
meurtriers  eux-niefmes,& de  corps  &  d'ame: 
que  les  autres  menét  vne  vie  diflolue  en  pail- 
Iardife,qu'il  ne  km  chaut  plus  de  nulle  honç 

e.  iii. 


f4 


NEVFIEME     SERMON 


fteté  ,  qu'on  les  monflre  au  doigt, ce  leur  cft 
tout  vn:iis  n'ont  plus  de  vergongnc  :  les  au- 
tres pillét  &  defrobét:  &  puis  on  les  voit  to' 
cnfemble  blalphemer  Dieu  :  on  voit  mefmcs 
qu'ils  n'ont  plus  de  religion:quâd  no'voyos 
de  tels  monftres  qui  ont  etfacc  ce  fentiment 
q  Dieu  a  mis  en  tous  homes ,  &  mefmes  qu'il 
leur  a  engraué.en  forte  qu'il  faut  q  nous  co- 
gnoif.ions  qu'il  ya  vnluge  là  haut, que  ceux 
ci  effacent  entant  qu'en  eux  eft  vne  telle  co- 
gnoiflànce:  quâd  donc  no'  voyons  ces  Athei 
iies  qui  lont  ainlî  desbordez, las.'no'  Tommes 
bien  infenfez  &  aueuglez  du  tout, fi  no"  n'ap- 
perceuôs  vne  vengeâce  q  Dieu  fait. Et  à  quel 
Je  fin?  Pour  magnifier  la  maiefté  de  l'Euagile, 
&  pourmonftrer  que  nous  deuons  cheminer 
en  plus  grande  folicitude  *>:  reuerence.  Voila 
doc  au  lieu  que  beaucoup  de  poures  gés  font 
fcandalizez, quand  ils  voyent  d'aucuns  fc  re- 
uoltcr,que  no'  deuons  prendre  nouuelle  con 
fiimation  de  cela,  car  ce  n'eft  poît  vne  chofe 
nouuelle:  mais  tant  y  a  que  cela  nous  doit  fai 
re  trembler, quand  les  hommes  s'aliènent  ain 
lîde  toute  religiô,&  qu'ils  s'abbrutiiTcnt.  Ce 
neantmoins  telles  gens  font  marris,  quad  on 
les  appellera  par  leur  nom  :  HQ,ie  ne  fçay  q 
c'eft  d'Athcifte,&  ce  nom-l.i  ne  doit  point'e- 
ftre  mis  en  auant.  Voire?&  pourquov  te  mon 
flres-tu  tclfcar  q  ne  fcaura  que  c'eft  d'vn  hô 
me  fans  Dieu,qu'on  te  regarde,&  on  te  ver- 
ra tel.  Ceux  donc  qui  font  les  vrais  patrons 
&  miroirs  d'impiété,  &  de  tout  mefpris  de 
Dieu  ,  &  qui  talchent  d'anéantir  toute  rtli- 
gion:  voudroyét  que  ce  mot-là  ne  fuit  point 
en  vfage.  Et  pourquoy?afinque  leur  iniquité 
tfhs.  1.  fiift  enfeuelie.Or  S.Paul  appelle  bien  Athci- 
b,u,  ftes  ceux  qui  ont  ferui  aux  idoles ,  qiuud  ils 
~  n'ont  point  cognu  le  Dieu  viuant:&  que  fera 

ce  de  toy  qui  es  comme  vn  chien, &  vn  pour- 
ceau,ainfi  qu'on  le  voit?  Apprenons,  appre- 
nons de  tellement  faire  noflre  profit  de  ce 
-paflàge,  qu'vn  chacun  de  nous  fe  tiene  en  bri 
ile  courte,  3c  voyant  que  le  monde  ell  auiour 
d'huy  fi  plein  de  corruption,  que  nous  foyôs 
tant  plus  fur  nos  gardes,&:  que  nous  ayons  ce 
fte  intégrité,  de  laquelle  noftre  foy  foit  mu- 
tae,  afin  q  le  diable  n'ait  point  d'accès  à  no', 
m  d'entrée.  Et  afin  d'eftre  tant  plus  incitez  à 
cela.cognoiflons  que  viuîs  en  ce  monde,  no' 
ne  faifons  que  nauiger,nous  faifons  vn  voya 
ge  comme  par  eau  ,  &  que  nous  ferions  bien 
tort  péris  Se  enfondrez.n'efboit  que  nous  fuf- 
lions  appuyez  fur  la  vertu  de  noflre  Dieu. 
Mais  il  n'y  a  autre  moyen  pour  cftre  confer- 
mezde  luy,&  de  la  grâce  de  fou  S.  Efprit,  h- 
non  de  cneminer  en  intégrité.  Cependant, 
a  nous  voyons  beaucoup  d'apoftats,  f^rachôs 
.qu'il  ne  s'en  faut  point  csbahir  ,  vcu  qu'il  y 
en  a  ii  peu  qui  facent  leur  profit  de  la  d-jrtri- 
ne  qui  leur  cft  prcichee  ,  &  que  ceux  qui  font 
femblant  de  s'accorder  à  la  vérité  de  Dieu, 
]a  renôcent  en  toute  leur  vie:mai<  préparons 
nous  quant  &  quant,aprcs  q  nous  aurons  elle 


ainfi  confermez  contre  tels  fcandales:  appre 
ftons-nous(di-it)  à  voir  de  plus  grandes  con 
fufions, voire  Se  plus  horribles  beaucoup.  Et 
pourquoy?  car  l'iinpicté  s'augmente  de  pluj 
en  plus.  Il  eu  vray  que  Dieu  fait  bien  que  fa 
femence  foit  efpandue  çà  &  là,  voire  maugré 
tous  les  tyrans,quipar  cruawté  tafchcnt  d'.t- 
neantir  ladoftrine:  nous  voyons  auli  qu'il 
la  multiplie.  Mais  ccpédant  qu'y  a-ilr"  quelle 
religion?  c'eft  à  dire,  quelle  reuerence  y  a-il 
en  ceux  qui  commencent  à  croire  à  l'Euangi 
le?  Or  ils  cuident  auoir  ie  ne  fçay  quelle  li- 
berté charnelle:mais  de  s'aiïiiiettir  à  Dieu  & 
à  fa  doftrine  ,  il  n'en  ell  point  queftion  .  Ne 
nous  esbahiflons  point  donc  s'il  y  en  a  tant 
peu  qui  perfîllent  en  l'obeillàncc  de  l'Euagi- 
lexar  il  femble  q  tous  ayêt  confpiré de  refi- 
fter  à  Dieu  ,  que  grans  &  petis  font  enragez 
contre  celle  dodtrine  :  &  pour  cognoiflre  ce- 
la,qu'on  contemple  la  vie  des  hommes, &  l'e- 
ftat  d'auiourd'huy  ,  &  on  trouuera  afiez  de 
tefmomsde  ce  que  iedi,  &  pi'  qu'il  ne  feroit 
de  befoin.  Puis  qu'ainfi  ell  que  le  monde  fait 
fi  mal  l'on  profit  de  ce  thrtfor  de  la  foy  ,  que 
attédons-no'  finon  qu'il  y  vienevn  horr:ble 
déluge, (j  engoaffre  tout,  &  que  Dieu  non  feu 
leracnt  reinette  au  dellùs  la  tyannie  du  Pape, 
mais  qu'il  mette  vne  barbarie  plus  que  bruta- 
lc,&queles  hommes  foyent  abyfinez  &  con 
tondus, c5me  ils  l'ont  mente?  Voila, di-ic,ce 
que  nousauons  à  craindre.  Mars  fi  ne  faut-il 
point  pourtant  que  ceux  aufqiiels  Dieu  a  fait 
la  grâce  denianifefler  favcrite,  que  ceux-là 
loyent  troublez,  ni  fcadalizez  outre  incûne: 
quand  le  ciel  &  la  terre  fedeuroycnî  méfier 
enicmble,  que  tout  dcuroit  cflrc  confu;,fi  ne 
faut-il  point  qu'ils  défaillent.  Et  po  m  qiioy? 
D'autant  qu'ils  ont  veu  deiîa  que  le  inonde 
prouoque  par  trop  l'ire  de  Dieu  :  &  quand  le 
mal  croill,&  qu'il  empire  toufiours  ,  ne  faut- 
il  pas  que  Dieu  belongne  de  fon  collé, &  qu'il 
monltre  qu'ila  pour  recomm.idee  ceftc  digni 
té  facree  de  fa  parole  ,  Se  qu'il  tera  vne  telle 
vengence  ,  qu'on  apperceura  qu'il  ne  peut 
fouitrir  qu'on  abufc  ainfi  de  fon  nom  ,  c?c  que 
on  fe  moque  de  fa  parole?  Voila  donc  com- 
me les  fidèles doiuent  prattiquer  celte  doLlri 
ne.  Et  ainlî  nous  voyons  que  c'eft  vn  palTage 
qui  nous  doit  eftre  vtile  :  car  il  ne  faut  rien 
pour  nous  faire  ietter  la  foy  au  vent  :  non* 
fommesfi  volages,  que  lebien  que  Dieu  a 
mis  en  no  us  ,  s'clcoule  incontinent:&  pour.* 
tant  il  taut  que  nous  foyons  fongueux  de  le 
mettre  en  bonne  garde, &:  le  tenir  ferré:&  fur 
tout  quand  nous  voyons  qu'il  y  a  tant  de  tcn 
tatiôs  à  l'entour  de  nous,&:  auiourd'huy  plus 
que  iamais  ,  que  nous  foyons  munis  pour  di- 
re,Il  cft  vray  que  les  melchans  quand  ils  de- 
laiflent  la  bonne  confcience, qu'ils  s'efcoulct 
&  s'tfuanouillcntîinais  cela  nous  doit-il  trou 
blcr?Cefont  chofcsincôpatiblcs,  qu'vn  hoin 
me  fe  moque  de  Dieu  ,  &  qu'il  retiene  la  toy 
purc:que  fcroit-cc  ccla.''C'eft autant  comme 

s'il 


SVR    LA    T.     A    TIMOTH. 


5Î 


s'il  eftoit  (iit,qiié  Dieu  habitaft  en  vne  eftable  qu'il  les  fortil^e  de  plus  en  plti5,&  les  confcr- 
pleine  d'ordure  &  de  puatife.  La  foy  n'cft-el  me  en  fa  parole.  £t  ainlîque  nous  aduifions 
le  pas  celle  par  laquelle  nous  femmes  transfi-  de  faire  noftre  profit  de  cefte  doârine,  com- 
gurez  en  l'image  de  Dieu  ?  Or  fi  les  hommes  me  c'eft  à  certe  fin  qu'elle  nous  eft  propofec, 
la  veulent  méfier  parmi  vnemauuaife  con-  &  que  nous  prions  Dieu  qu'il  nous  y  confer- 
fcience,  n'eft-ce  pas  renuerfcr  tout  ordre  de  me  de  plus  en  plus,  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait 
rature  ?  Dieu  ne  peut  fouffrir  vne  telle  infe-  retirez  des  combats  où  nous  fommes  mainte- 
ftion.Q_ne  nous  ne  ibyons  point  donc  efton-  nant.&aufquels  il  nous  faut  perfifter  tant  que 
nez,  voyâs  aduenir  que  pluiîcurs  fe  reuoltent  il  luy  plaira  nous  tenir  en  ce  monde, 
ainfî.  Et  de  noilre  colté  foyons  fur  nos  gar-  OR  nous-nous  prollernerons  deuant  1* 
des.veillans  longneufcment,  afin  que  nous  ne  facedenoflre  bon  Dieu  en  cognoiflancedc 
foyons  furprins,  &  que  Satan  ne  puifle  faire  nos  fautes,  le  priant  qu'il  nous  les  face  tellc- 
brefche  pour  auoir  entrée  en  nous, pour  nous  ment  fentir,  qu'auec  vraye  repentance  nous 
troubler,quand  nous  verrons  de  telles  contu  luy  en  demandions  pardon.  Et  cependant  auf 
fions  &  fi  cfpouantables  :  mais  que  toufiours  iî  qu'il  luv  plaife  par  fon  faind  Êfprit  nous 
nous  ayons  cela  en  mémoire, queDieu  autho-  en  corriger ,  en  forte  que  it  nous  fommes  en- 
rife  fa  parole,  &  monftre  combien  elle  luy  eft  trez  au  bon  chemin, il  nous  y  aduance  de  plus 
precieufe,  veu  qu'il  ne  peut  fouffrir  qu'elle  en  plus,  iulques  à  ce  qu'il  nous  ait  fait  venir  à 
foitainfiexpofee  à  moquerie.que  les  hommes  la  perfedion,  à  laquelle  ilnous>faut  afpirer. 
s''en  louent ,  &  en  abuîent  ainli  faufîemcnt.  Et  d'autant  que  nous  fommes  tant  alTaillisde 
Qwnd  nous  voyons  cela,  que  nous  foyons  Satan  &  des  tentations , de  noftre  chair,  &  de 
d'autant  plus  confeimez,  &  que  nous  difions,  tout  le  monde, qu'il  nous  donne  aufsi  la  vertu 
£t  bien,  il  eft  vray  qu'il  femble  bien  mainte-  de  fon  fecours  pour  refifter  à  ces  combats  :  6i 
aantqueles  chofes  foyent  fi  confufes ,  qu'il  que  nous  ne  laifsions  pas  pourtant  d'eftre  af- 
n'y  ait  point  d'ordre  par  tout  :  mais  tant  y  a  feiirez.quand  nous  voyôs  que  la  viftoire  nous 
<jue  quand  Dieu  monîlre  vn  tel  iugement  du  tft  donnée  en  noftre  Seigneur  IcfusChrift,Ie- 
mefprisdefa  parole  ,  en  cela  pouuons-nous  quel  nous  a  promis  que  nous  ne  ferons  iamais 
cognoiftre  qu'il  ne  peut  porter  à  la  longue  de  ituez  de  fon  fecours,  mais  qu'il  nous  munr 
que  les  hommes  abufcnt  ainfi  d'vne  chofeli  ra  contre  tous  fcâdales  que  les  hommes  nous 
precieufe.Etainiî  quand  nous  voyôs  les  con-  pourjont  mettre  en  auant,&  qu'il  ne  fouffrira 
tempteurs  de  Dieu&de  fa  parole  n'en  tenir  point  que  nous  défaillions  quand  nous  iu- 
autrement  conte,  cognoiflons  que  Dieu  les  rons  recours  à  ù  grâce.  Que  donc  nous  le 
met  en  fensreprouué:  &  que  voila  vn  certain  prions  qu'il  nous  tiene  tellement  la  main  for 
tefmoignage  &  infaliible  de  fa  iuftice  celefte.  te.qu'eftans  appuyez  fur  fa  vertu,  nous  pui  f- 
'Voila  comme  les  fidèles  doiucnt  faiie  leur  fions  defpiter  tous  les  aflàuts  que  Satan  nous 
profit  de  tous  les  fcandales ,  &  de  toutes  les  drelTera.Que  non  feulement  il  nous  face  ce- 
tentations  qui  leur  pourroycnt  venir  au  Je-  fte  grâce,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &nauon© 
lunt  :  &que  cependant  ils  demandent  à  Dieu  de  la  terre,&;c. 


<DIXI  EME 


SERMON     SVR 

M  1ER     CHAPITRE. 


LE     P  R  E- 


19  Ayant  foy  ^  bonne  conj'cience,  laquelle  aucuns  ayans  reiet-^ 
tee,Jc)ntpcris  de  la  foy. 

10  Defqucls  ejî  Hymenee  (^  Alexandre ,  lejqHels  i  ay  baille^ 
à  Satan^afin  qu'ils  apprcncnt  de  ne  plus  hlafphemer. 


Ource  que  nous  ne  fommes 
point  touchez  des  iugemens 
de  Dieu  comme  il  feioitne- 
ctl]aire,il  faut  que  les  exem 
l'plcsnousen  foytnt  propo- 
Icz  :  &i  cela  non  feulement 
nous  incite  ,  mais  quafi  nous 
contraint  de  penfermicuxà  nous,  &par  ce 
moyen  de  cheminer  en  crainte  &  fohcitude, 
voue  nous  propofant  vne  maledidion  telle 
fur  nous,  comme  nous  la  voyons  fur  ceux  qui 


auront  efté  obftinez  à  mal.Et  voila  pourquoy' 
faind  Paul ,  après  auoir  menacé  ceux  qui  fe 
moquent  de  Dieu,  ie  iouans  de  fa  parole,  dit  ' 
que  telles  gens  font  engloutis  comme  au  pro 
fond  de  la  mer  :  &  que  Dieu  les  chaftie  telle- 
ment,qu'ils  font  priuez  de  raifon  &  d'intelli- 
gence.Il  adiouftc  deux  exéples  notables  d'v- 
ne telle  punition  de  Dieu:  &  nomme  ici  deur 
hommes:afçauoir, Hymenee  &  Alexandie.lef 
quels  auoyent  efte  renômcz  en  l'Eglife.Et  de 
fait,  iàindii'aul  en  parle  comme  de  gens  qui 

g.iiii. 


c 


fS  DIXIEME 

auoyent  eftc  cognus,  &  mefmes  qu'on  tenoit 
en  grande  eftime,mais  pource  qu'ils  auoyent 
abulëde  l'Euangile,  ainlî  que  font  beaucoup 
d'hypocrites, Dieu  les  aueugle  tellement, que 
ihs'abbrutiffent:  &non  feulement  i'ont  apo- 
ftats,qui  le  font  reuoltez  de  Dieu, mais  fe  dé- 
clarent ennemis  mortels  de  tout  bien.  Saindt 
Paul  les  met  ici  deuat  les  yCU\,aHn  qu'vn  cha 
cun  apprene  de  cheminer  en  toute  humilité. 
Nous  voyons  maintenant  quelle  efl  l'inten- 
tion de  l'ApoftrCjc'eft  de  mieux  imprimer  au 
cœur  de  tous  fidèles  celle  menace  de  laquelle 
ilauoit  vfe:c'eflafçauoir,quelinous  n'auons 
bonne  confcience.que  la  toy  nous  fera  oflee, 
&  que  nous  ferons  delpouillez  de  la  grâce  du 
fainet  Efprit.Mais  cependant  nous  auons  ici  à 
noter  ce,que  i'ay  délia  touché, que  li  Dieu  n'a 
point  efpargné  ces  deux  hommes ,  qui  auoyét 
eu  grande  authorité  &  réputation  en  l'Egli- 
fe  ,  que  nous  ne  ferons  non  plus  fiipportcz. 
Pcnfons  donc  à  nous  :  car  ce  n'tft  point  peu 
de  choie  que  ceux  qui  e/loyét  comme  Anges 
de  DieUjfoyent  trebufchez, voire  d'vne  cheu- 
te  lî  mortelle,  que  ceux  qui  auoyent  pour  vn 
temps  efté  aomme  piliers  de  l'Eglife,  loyent 
deuenus  come  diables:&qu'il  faille  que  faintl 
Paullesdechâire,  &•  quilles  liure  enlapof- 
fefsionde  Satan.  Voila  pour  vn  item:  c'cit  de 
obferuer  la  qualité  de  ces  deux  hommes .  Et 
puis  cependant  nous  voyons  come  fainftPaul 
eftat  mené  d'vn  -v  ray  zèle  de  Dieu, racle  ceux 
ci  du  nombre  &  de  la  compagnie  des  fidèles, 
d'autant  qu'il  les  cognoilt  élire  indignes  de 
tenir  lieu  m  place  en  l'Eglife. Ainfi  no'  voyôs 
que  fainft  Paul  a  oublié  toute  amitie  charnel 
le,  &  qu'il  a  préféré  l'honneur  de  Dieu  à  fes 
affeftions.  Car  ceft  Alexandre  dont  il  parle, 
-  n  c'ellceluy  duquel  aufsi  fainift  Luc  fait  men- 
tion,afçauoii,  quiappaift  le  trouble  &  l'ef- 
^^*  meute  qui  efloit  venue  en  la  ville  d'Ephele.Il 

ell  vray  que  fainû  Paul  félon  les  hommes  e- 
ftoit  aucunement  obligé  à  luy  :  mais  il  n'a 
point  regard  à  cela  ,  quand  il  eft  queftion  de 
l'honneur  de  Dieu.  Or  quecefoitceftuy-ci, 
on  le  peut  recueillir  par  bonne  conietture  & 
raifon,d'autant  qu'il  eftoit  Ephefien:&  faintt 
Paul  a  efcrit  cefte  epilbe  .i  Timothee  en  con 
liderationde  cefte  Eglife-la,&  le  propofe 
pour  exemple,  d'autant  qu'il  y  efloit  renom- 
mé. Et  c'eftoit  vn  aifte  louable  par  foy, quand 
Alexandre  peut  renuerfer  vue  fcdition  gran- 
de,&  la  rompre,  laquelle  non  feulemét  cftoit 
efmeue  cotre  la  perionne  de  lainft  Paul,  mais 
aufsi  contre  l'Eglife. Cependant  nouvvoyons 
qu'il  n'vfc  point  d'vne  vertu  Chrelticne.  Car 
Il  nous  regardons  bien  ce  qui  eft  récité  en  ce 
paflage-la  de  famtl  Luc, Alexandre  veut  par- 
ler en  homme  mondain, auec  des  raifons  appa 
rentes,  pour  aucunement  appaifer  ce  trouble 
qui  s'elîoit  eleué  :  mais  tant  y  a  qu'il  ne  fait 
point  profcfsion  de  ù\  foy,&  ne  fe  met  point 
en  auant  c5ine  tefmoin  Je  lefus  Chrift.  Nous 
.pouuons  donc  veoir  que  c'tltoit  vn  homme 


SERMON 

nageant  entre  deux  eaux,  lequel  vouloit  bien 
eftre  réputé  pour  Chreftic  n,  mais  ccpéi'ant  il 
vouloit  aufsi  caller  ia  voile  ,  &  complaire  au 
mode.  Or  Dieu  ne  peut  fouffrir  vne  telle  fein 
tife.Et  voila  pourquoy  en  la  fin  il  eft  aueuglé, 
&  Dieu  le  priue  de  ccfie  grâce  qu'il  luy  auoit 
donnée  aupaïauant.  Autant  en  eft-il  d'Hyme 
née,  duqt  el  encores  fainft  Paul  fera  mention 
en  la  féconde  epiftreà  Timothee,  là  où  il  fpe 
cifie  come  il  eftoit  peri  de  la  foy.  Car  il  main  ^^yi^^ 
tenoit  que  la  refurreâion  eftoit  délia  faite:  il  ,  _,  -,_ 
imaginoit  vne  refurredion  fantaftique,  com- 
me li  la  vie  que  Dieu  nous  promet,  &  ceft  hé- 
ritage de  la  gloire  celefte  eftoit  ici  bas.  Cela 
eft  deftruire  tousles  fondemens  de  noftre  fa- 
lut:comme  faincl  Paul  aufsi  en  parle  au  quin- 
zième de  la  première  aux  Corinthiens.  Nous 
voyons  vn  aueuglcment  horrible  qui  eftoit 
aduenu  à  ceft  Hymenee,&  neantmoins  (com- 
me délia  nous  auons  dit)il  s'eftoit  porté  aupa 
rauant  en  telle  forte, qu'on  l'auoit  en  grande 
réputation,  &  eftoit  homme  cognu.Êtainfî 
nou-;  voyons  que  Ijincl:  Paul  n'tft  point  ici 
mené  d'vne  affeélion  charnelle, mais  que  c'eft 
lezeledeDieu  auquel iJ  s'alluiettit.  Etpour 
cefte  caufeilfeime  les  yeux  afin  de  n'eftre 
point  dcftouiné  par  aucun  regard  ,  qu'il  ne 
mamtiene  &  la  vérité  de  l'Euangiie,&:  l'hon- 
neur de  Icfus  Chrift  l'on  Maiftre,  defpouiUant 
le:,  hommes,  &  ne  les  fupportât  en  façon  que 
celoit.Et  c'eft  vn  article  que  nous  deuons 
bien  noter  :^ar  nous  voyons  comme  auiour- 
d'huy  il  en  va.  L'honneur  de  Dieu  eftfîpen 
recomin.'idé  à  beaucoup,  &■  qiiafi  à  tous, qu'ils 
aiment  mieux  monftitr  qu'iU  fauorifent  aux 
hommes  mortels, que  de  les  olFenfer, combien 
qu'il  y  ait  iufte  raifon  :  &  fouffriront  par  ce 
moyen  que  le  nom  de  Dieu  foit  foule  aux 
pieds.  S'il  y  a  quelque  chofc  mauuaife,  voila 
Dieu  qui  fera  blafphemé  ,  vn  fcandaie  fera 
grand  en  fon  Eglife  :  il  faudroit  pouruoir& 
remédier  à  cela,&  chacun  fe  recule  ,  &  nul  ne 
s'auance.La  raïf  ji]?Ho,ie  ne  vcuxfafcher  per 
fonne  :  celuy-la  eft  mon  parent ,  celuy-la  eft 
mon  ami,  l'en  fuis  requis  de  tel  coite.  Et  tant 
s'en  faut  qu'on  ait  ce  zèle  de  maintenir  Thon 
neurde  Dieu ,  voire  s'addreflànt  contre  les 
hoinmes,qu'on  ne  pourra  iamais  venir  à  bout 
des  iniquitez  qui  régnent  pour  les  chaftier,& 
pour  y  mettre  ordre,  d'autant  que  chacun  fe 
pariure  :  les  chofes  font  toutes  notoires.  Et  ' 
(comme  l'ay  dit)  on  voit  l'honneur  de  Dieu 
foulé  au  pied,  le  mal  s'augmente  de  plus  en 
plus ,  c5<:  la  poilon  s'efpand  par -tout  .  Ceux 
qui  y  deuoyent  remédier  ,  tout   les  canes,  ils 
baillent  la  tefte  ,  ils  ferment  les  yeux  :  ceux 
qui  pourroyent  aufsi  y  aideraucunement,  dit 
limulent,  &  non  feulement  cela,  mais  encores 
qu'on  les  adiure  au  nom  de  Dieu  de  faire  leur 
deuoir,  ils  aiment  mieux  s'enuelopper  en  vne 
mefine  maledittion  auec  lesautresquede  mo 
ftrcr  quelque  ligne  de  bon  zele.D'autan  t  plus 
donc  nous  faut-il  bien  noter  ce  palTage  ,  où 

iaintt 


SVR    LA   I.    A   TIMOTH. 


T7 


faincl:  P.iul  nous  déclare  que  combien  cju'aii- 
parauant  iJ  cuit  eu  amitié  à  ces  deux  hommes 
dont  il  parle,  &  melines  qu'ils  cuflentfait  des 
a£les  dignes  de  mémoire,  toutesfois  il  tou- 
droye  conti'eux,  pource  qu'il  les  voit  enne- 
mis de  Dieu, pource  qu'il  ne  peut  fouifrir  que 
la  bonne  dottrine  &  la  venté  foit  opprimée 
en  façon  que  ce  foit.Si  nous  voulons  eitre  re- 
cognus  &  aduouez  pour  entans  de  Dieii,clia- 
cun  de  nous  doit  eniuyure  ccft  exemple:  c'eft 
de  ne  plus  nous  arreller  à  toutes  les  choies 
qui  nous  deilournent  de  nous  acquitter  de 
npitre  deuoir  ,  quand  l'honneur  de  Dieu 
vient  en  auant  :  que  cela,di-ie,  nous  face  ou- 
blier tout  le  refte  .  Car  c'eft  bien  raifon  que 
les  hommes  mortels  foyent  mis  bas.que  tou- 
tes créatures  facentioug(c5me  ondit)quanJ 
nous  voyons  que  l'honneur  de  Dieu  ellen 
branle  ou  en  danger  d'eftre  obfcurci  ,lînon 
qu'il  ibit  maintenu  par  nous.  £t  au  refte,  puis  * 
que  ùinCt  Paul  a  nommé  ces  deux  ,  d'autant 
qu'ils  pouuoyent  citre  en  icandale,  &  qu'il  e- 
ftoitbeloin  qu'on  iedomiail garde  d'vne  tel 
le  infeèlion,  noton,  bien  qu'il  nefaut  point 
couurir  l'honneur  des  homme'-,&  que  cepen- 
dant cela  mette  &  emporte  dommage  com- 
mun à  tout  le  peuple  de  Dieu,  c'eft  encores 
vn  article  qui  emporte  bonne  doftnne.  l'ay 
délia  monftré  que  nous  fommcs  enclins, voire 
addonnez  du  tout  à  ces  faueurs  terriennes  & 
charnelles, &  que  cela  nous  einpefche  de  fer- 
mr  à  la  gloire  de  noftre  Dieu.Autant  en  eft-il 
quand  il  faut  conferuer  l'honneur  des  hom- 
mes. Et  quoy?faut-ilqu'vn  homme  foitainiî 
dénigré?  &  ne  deuons-nous  pas  couurir  les  pe 
chez  entant  qu'en  nous  eft-Ouy  bien  :  mais  il 
faloit  fçai'oirs'il  eftennousou  non.  Voila 
dequoyil  fefaut  enquérir,  voire  quand  nous 
voudrons  couurir  h  turpitude  d'vn  homme,fi 
nous  ne  faifons  point  dommage  à  toute  l'E- 
gliledeDieu:  d'autant  que  cependant  il  pour 
ra  efpancher  fon  venin  pour  dc-,baucher  l'vn, 
pour  corrompre  l'autre'.  Comme  nous  voyôs 
ces  malins  quand  ils  fe  feront  desbauchez,ils 
vpudront  attirer  en  vne  mefme  corruption 
tout  le  refte,  &ne  demanderont  qued'mfe- 
ûcr  tout:brief,ils  voudroyent  que  chacun  les 
lelTemblaft:  &  Sata  aufsi  les  pouflè  pour  trou 
blertout  de  plus  en  plus.  Nous  verrons  vn 
homme  eftre  commevne  pelle  commune,  & 
cependant  nous  voudrons  couuni  fon  hon- 
neur.Et  le  Vous  prie,  quelle  humanité  tft-ce- 
là  j  que  pour  eipaigner  l'honneur  d'vii  hom- 
me, noui  mettions  mille  âmes  à  perdition,  & 
que  nous  ibuffrions  que  beaucoup  de  gens 
foyent  fcduits  par  iîmphcite  ,&  qu'ils  pcnf- 
fent?  Notons  bien  donc  ce  que  fait  ici  ùuitt 
Paul,  car  il  n^  fupporte  pont  Alexandre  ne 
Hymenee,mai--  il  les  dcgi jde,&  les  met  com 
me  iur  vn  tfchaffaut,  non  feulement  pour  les 
diffamer  leur  vie  duiant,  mais  qu'après  leur 
mort  iufques  en  la  fin  du  monde  ils  tbyent  en 
ignominie  &  opprobre, &que  quad  on.  en  par- 


lera,on  les  ait  en  dcteftation.Puis  qu'ainli  eft 
que  fainct  Paul  a  ainii  diffamé  ceux-ci ,  félon 
qu'ils  en  eftoyent  dignes,  notons  bien  qu'au- 
iourd'huy  quand  il  y  en  aura  qui  troubleront 
l'Eglil'e  de  Dieu,  qui  tafcheront  de  peruertir 
la  pure  venté,  qui  l'eront  en  Icandale  pour 
mener  beaucoup  de  gens  à  perditiô,qu'il  faut 
que  telles  gens  foyent  monftrez  au  doigt: 
comme  aufsi  nous  l'auons  veu  en  l'Epiftre  j,  rt,  r 
prochaine  ,  où  fainft  Paul  vouloit  q  ceux  qui  '. 
menoyent  viediflolue,&donnoyent  mauuais  *  ' 
exemple  atout  le  refte,fuffent marquez &:  dé- 
celez,alin  qu'on  s'endonnaftgardt,qu'on  les 
fuift,  &  qu'on  ne  femeflail  point  parmi  eux. 
Mais  fur  tous, ceux  qui  s'attachent  à  la  doctri 
ne  de  l'Euangile  ,&  qui  demandent  de  per- 
uertir la  religion,il  faut  qu'ils  foyent  dcsho- 
norez,  &n'eft point  queftionicidc  dil'simu- 
1er.  Et  ceux  qiu  murmurent,  comme  il  y  en  a 
toufiours  qui  grondent  ,&cerchent  occaiîon 
de  blafmer  les  feruiteurs  de  Dieu  ,  quand  ils 
vfentde  la  liberté  quel'El'criture  fainftclcur 
conimande:qu'ils  apprcnent  de  le  taire,  fînon 
qu'ils  vueillentmonftrer  qu'ils  bataillent  ma^ 
nifcftemét  &  de  propos  délibéré  cotre  Ditu. 
Il  y  aura  auiourd'huy  des  canailles, qui  ne  va- 
lent point  qu'on  parle  d'cux,mais  cepédant  li 
nuifent-ils  beaucoup. Or  lî  on  fait  côparaii'on 
d'eux  aiiec  Alexandre  &  Hymenee,  il  eft  cer- 
tain qu'ils  méritent  bien  plus  d'eftre  dilKimez 
&  mis  en  ignom.iniedciTant  tout  le  monde. Si 
S.Paul  n'a  point  fait  fcrupule  de  nômer  ceux 
ci, voire  à  leur  grand'  vergongne  Se  blallne,ie 
vous  prie,f?.ut-il  eftre  fi  délicats  fi  vn  homme 
fouftient  quelque  opprobre  ,  &  fur  tout  après 
qu'il  s'eft  déclaré  cotre  Dieu,faifant  du  rebel 
le  &:de  l'iucorrigiblePEt  faut  -il  pour  cela  que 
ils  fe fafchcnt,iîn(5n  qu'ils declarét  plein ernét 
vouloir  refiftcr  à  Dieu&  à  fon  ùir.tt  Efprit, 
par  lequel  fainû  Paul  a  efté  gouuerné  en  nom 
mât  ainiî  ces  deux  pcrfonnagcs.'Et  c'eû  pour- 
quoy  nous  fommes  contramts  de  parler  con- 
tre le  Pape,  &  contre  tous  fes  complices  :  car 
ce  font  loups  rauifîàns,qui  ne  demardent  que 
àdeuorer  les  poures  brebis  de  lefus  Chnft: 
ce  font  empoifonneurs,ce  font  brief  ennemis 
mortels  de  noftre  falut  :  ce  font  fuppofts  de 
Satan,  ne  cerchans  que  la  ruine  &  perdition 
de  tout  le  inonde.  Si  vn  berger  veut  fane  Ion 
ofiice.ne  criera-il  point  au  loup,  quand  il  \et 
ra  fon  troupeau  eJlre  enuahi?Et  nous  voyons 
les  loups  qui  vont  çà  &  là,  nous  voyons  auec 
quelle  rage  ih  y  procèdent:  fi  noas-nons  tai- 
iions,  ne  l'erions-nous  point  trailhes  .à  l'Egli 
fc  de  Dieu?  ne  iertoïK-nous  point  coidpables 
que  les  poures  âmes  periroyent  ?  &  Dieu  ne 
nous  en  deinandera-il  point  le  conte  ?-Mais 
tout  ainii  que  nous  fommes  côtraint;  de  cri- 
er contre  le  Pape,  aufsi  quand  nous  voyons 
an  milieu  du  troupeau  quelque  loup,  &  quel- 
que danger, faut-il  diisimuler  ?  Si  nous  auons 
lors  la  bouche  clofc  , dira-on  que  nous  fom- 
mes pafteuts  î  Apprenons  donc  de  bienmir- 

hj. 


ï« 


DIXIEME    SERMON 


quer  ccuï  qui  troublent  l'ordre  de  PEglife 
de  Dieu.  Pouree  faire,  qu'ils  loyeiucognus, 
afin  que  nul  n'en  loit  Icduit  ne  trompé,  mais 
qu'on  leituye&detefle. voila  ce  que  nousa- 
uons  à  noter  en  ce  paflâge.  Or  l'.unà  Paul  n'a 
point  prins  plailîr  à  deshonorer  Hymenee& 
Alexandre.mais  il  a  falu  qu'il  adutrtift  les  fi- 
dèles, afin  qu'ihne  fe  meflaflent  point  parmi 
eux,  &  qu'ils  ne  fullent  point  corrompus  par 
leurs  faufles  dodnnes.  Autant  auiouid'huy 
nous  en  faut-il  taire.  Nous  verrons  ces  ver- 
mines qui  ne  demandent  qu'à  pourrir  ou  en- 
uenimerl'Eglilcde  Dieu  ,  nous  verrons  que 
d'vn  coflé  ils  defgouftent  tous  ceux  qui  ne 
font  gueres  termes  &.  coultius,&:  tal'chent  de 
les  diuertir  s'ils  les  voyent  en  bon  train  :  & 
ceux  qui  font  défia  dillolus  &;  pleins  de  vani- 
té, ils  les  cnuenimentdu  tout  contre  Dieu,  & 
contre  la  parole  :  iU  allument  le  feu  ç.i  &  là, 
&par  calomnies  &  faux  rapports,  par  leurs» 
metdifances  ils  fement  leurs  zizanies  &  leurs 
mclchantes  corruptions, nous  voyons  tout  ce 
la.  S'en  tau  -il  taire  ?  cft-il  qucihon  de  fer- 
mer les  yeux  ?  ne  ferions-nous  point  chiens 
muets  eu  ce  failant?  Ainfi  nous  voyons  com- 
me ceux  qui  ont  la  charge  de  p  ;.rcer  la  paro- 
le de  Dieu,  iont  ici  enfeigncz  de  taire  leur  of 
fice ,  afin  cjue  les  poures  brebis  ne  foycnt 
point  par  leur  filtnce  &  dilsimulation  mi- 
nées de  Satan  ,  &  que  les  melchans  n'ayent 
point  la  vogue.  £c  aufsien  fécond  lieu  que 
les  fidèles  apprenent  de  bien  ouurir  leurs 
yeux, comme  aufsi  fainft  Paul  en  p.irlc  en  l'£ 
piflre  aux  Romains  ,  Q  u'on  Ipecule,  dit-il: 
Rom.Itf.  carilvfede  ce  mot-la  :  comme  s'il  y  auoit 
'7'  des  archiers  ou  hacqueburiers  qui   tirafTent 

au  blanc  :  nous  voyons  comme  Us  aiguifent 
leur  veue,  comme  ils  font  attentifs  au  but. 
Sainci -Paul  vfe  d'vne  telle  fimilitude,  dilànt 
qu'on  tace  bon  guet. Et  pourquoy ,?  Pour  no- 
ter,dit-il,tous  ceux  qui  font  fcandalc.qui  per 
uertiflent  la  pure  religion,  qui  iiedemandent 
qued'aneaiuir  leferuicedc  Dieu  ,  &;  la  paix 
de  l'Eglife.  Qm?  nous  vifions  v5c  tirions  donc 
là  comme  à  noitre  blanc,  afin  que  nous  ne 
foyons  point  trompez  par  eux  ■  cir  aucre- 
mcnt  nous  ne  ferons  point  à  excui'cr  .  Voi- 
la ce  quenous  auons  à  noter  en  ce  p.illàge, 
quant  à  ces  deux  perfonnes  que  nomme 
faincl  Paul.  Ayons  aufsi\niemoiredece  quia 
cfté  touché  quant  à  l'herefie  d'Hymenee. 
Ceft  vne  chofe  efpouantable,  que  ccfl  hom- 
me qui  auoit  elle  cnleigné  fidèlement  en  la 
pureté  de  l'Euangile,  voue  par  la  bouche  de 
fâin£i  Paul, qui  meluies  auoit  elle  comme  do- 
meftiquc  des  Apoftrcs, qu'il  foit.di-ic,  tombé 
eu  vne  refuene  fi  brutale,  de  due  que  la  re- 
furredion  foit  faite  .  N  :)us  voyons  les  liom- 
mcs  mourir,nous  voyôs  les  fidèles  eftre  tour- 
mentez ici  bas  ,  fuicts  à  tant  d'afUidions  que 
rien  plus:ccpcndant  fe  faire  à  croire  qu'il  n'y 
a  plus  d'efperance  de  falut ,  que  tout  eft  ac- 
compli, que  c'clt  ea  v«ui  que  nous  attendout 


noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  S:  que  nous  a- 
uons  cefte  fiance  qu'il  nous  deliiircra  de  ce- 
lle vie  corruptible  ,  pour  nous  faire  pattici- 
pans  de  fa  gloire  cclefte  :  que  tout  cela  foie 
abbatu  Se  anéanti, ne  voila  point  vne  chofe  c- 
xccrable?  Ettoutesfois  nous  voyons  que  ceft 
homme  qui  auoit  eflé  tant  familier  auec  les 
Apoftres,eft  là  trebufché.  Et  pourquoy?Pour 
ce  qu'il  s'eiloit  ioué  de  la  parole  de  Dieu,  5: 
que  c'eftoit  vn  hypocrite.  Ainfi  donc  trem- 
blons toutes  fois  &.  quantes  que  nous  oyons 
parler  de  ceft  homme  :  non  point  pour  nous 
déifier  de  la  bonté  de  Dieu  :  car  il  nous  faut 
eftre  rclohb  que  tout  ainfi  qu'il  a  commencé, 
il  parfera  ,&  que  quand  nous  ferons  fous  la 
garde,  quenous  ne  pourrons  périr.  Nous  a- 
uons  la  promelTe  de  noftre  Si-i^neur  lefus 
Chrift  qui  nous  declare,que  fi  nous  le  tenons 
pour  noftre  Pafteur ,  il  ne  permettra  point  j  _,_. 
que  le  diable  gagne  rien  fur  nou^,&  qu'i  1  dcf  ,  « 
ployerala  vertude  Dieu  fon  Pcre,  laquelle  ,9 
fera  vidorieule  par  deffiis  tous  nos  ennemis. 
Nous  ferons  donc  bien  maintenus  ayans  le- 
fus Chrift  pour  noftre  guide .  Mais  appre- 
nons de  luy  eftre  brebis,  &•  de  cheminer  fous 
fon  obeilTince,  drnouv  rcmcttic  du  tout  fous 
fa  protedion.  Et  pour  ce  faire  apprenons  de 
craindre,  veu  la  tiagilité  ^jui  cil  en  nous.  Car 
quand  nous  cognoilfons  que  ic  diable  nout 
auroit  bien  to/1  g.igne2,fi  iiuiis  n'eftions  fou ■- 
ftenus  &■  fortifiez  d'ailleurs,  cela  nous  doit  e- 
ftre  comme  vn  efpcro'i  pour  nous  inciter  d'à» 
uoir  noftre  rehige  à  Dieu,  que  nous  l'inuo- 
quions  auec  toute  humilité  &  folicitude.  Et 
puis ,  quand  fainct  Paul  monftre  ici  la  caule 
pourquoy  telles  gens  font  ainfi  dégradez, 
c'cft  qu'ils  ont  efté  engloutis  comme  au  çouf 
fre  d'enfer,  &  qu'il  déclare  que  c'eft  d'autant 
qu'ils  n'ont  point  eu  d'iiitegrite  &  rondeur 
telle  que  Dieu  la  demande  des  liens  :  quand 
di-ie,  nous  oyons  cela,  qu'vn  chacun  regar- 
de à  foy  de  près,  quenous  facions  bon  exa- 
men de  toute  noftre  vie.  Voila  en  fommece 
que  nous  auons  à  noter  de  ce  pallàge.  Ve- 
nons à  ce  que  faind  Paul  adioHfte,  difant, 
(Tr/'(7  <j  liitré  ù  S.itan  Hymciiee  C>  Alexan- 
dre .  afin  qii^ils  af<frenent  de  ne  p'ns  hUfphe~ 
mfr.  Or  liurer  à  Satan,  ne  lignifie  linon  ex- 
communier vn  hoinnic:&  ccite  façon  de  par- 
ler eft  fondée  en  bonne  raifon.  Car  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  eftant  le  chef  de  fon 
Eghfe ,  promet  qu'il  fera  tellement  noftre 
Roy,  que  nous  ferons  maintenus  par  fa  puif- 
fance,  &  qu'eftans  ainfi  armez  nous  pourrons 
delpiter  &  desfier  tous  nos  ennemis.  Au  con- 
traire ,  quand  nous  ferons  feparez  Si  comme 
retranchez  de  l'Eglile,  n'ayans  plus  lefus 
Chrift  pour  noftre  chef  ,  il  faut  que  nous 
foyons  expofez  à  ia  tyrannie  de  Satan  :  car 
noftre  Seigneur  lefus  règne  entre  les  fiens. 
Voila  donc  quelle  eft  l'intention  de  faincl 
Paul.'c'eft  qu'il  a  excommunié  ces  deux  hom- 
mcs,&  qu'il  les  a  reieucz  du  troupeau  Chre- 

ftiea. 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH. 


Î9 


ftien.  Et  pourquoy  ?afin  (jifils  appienent  de 
ne  plus  blaiplicmer  .On  poiirroïc  dciiunder 
s'illtui  auoi:  cljs  la  bouche  :  car  pliiil^lHl 
Icinble  que  ce  fiifr  Mie  occalîun  de  prendre 
plus  de  licence  à  bklphenier  contre  Dieu, 
quand  il  les  aiioitainii  retranchez  du  mihcu 
des  fidèles.  Vn  homme,  cependant  qu'  laura 
ce  titre  de  Chrcititn  ,  &  qu'oji  le  tiendra  .lu 
rang  commun,  aura  encores  quelque  vergon- 
gne  en  iby  :  iSc  sM  n'.i  vne  telle  modcfne  que 
il  eu  requis,  lî  eft-ce  qu'il  acefte  bride,  qu'il 
ne  veut  point  qu'on  l'ellime  du  tout  pro- 
phane  &  ennemi  de  Dieu.  Mais  quand  vn 
hormiie  fera  dcltiperé,  il  le  desboiae  ,  &n'a 
plus  de  honte:  mais  a  la  bouche  ouucrte  pour 
bJafphemer  tan:  plus  hardiment.  Pouiqiioy 
donc  ell-ce  que  Taind  Paul  a  vlé  de  ce  itrae- 
de  contre  Hymenee  &  Alexandre  ,  &  qu'il 
dit  que  c'cll  pour  leur  clorre  la  bouche  ,  & 
les  empelcher  de  meldire  de  D;eu  &  de  la 
vérité  ,  quand  il  les  a  ainlî   excommuniez? 
Notons  cependant  que   ces  deux  houuues 
n'ont  pas  lailFt  de  mcldire  à  pleine  gorye 
contre  TEuangile,  &:d'elcumer  toutes  leurs 
vilenies  ;  ains  ont   eu   tant  plus    d'audace, 
quand  lainÛ  l'aul  lésa  ainlI  reiettez  du  mi- 
lieu des  fidèles  .*mais  toutesfors  ils  n'ont  plus 
eu  ce  crédit  qu'ils  auoyent  eu  auparauant: 
ils  n'ont  plus  eu  aufsi  accès  pour  corrompre 
les  bons  ,&  mener  les  infirmes  à  perdition. 
Qupy  qu'il  en  loit,  ils  ont  tu  celte  marque 
d'ignominie  :  comme  lîvn  homme  efloittle- 
ftri ,  il  inefdira  bien  coiure  Ion  luije  ,  &  ce- 
pendant il  porte  la  marque  .  Nous  fçauons 
que  ces  pendars  qui  lont  du  tout  delclpercz, 
ne  feront  que  le  moquer  :  ils  diront  mots  de 
gueule  (comme  on  dit  )  contre  leurs  lUges, 
mais  tout  ell  bien  renuerle  quand  ils  font  en 
la  main  du  bourreau  qui  les  attache  ,  &  leur 
apprend  vn  autre  langage  &  Ityle.  Vn  mel- 
chant  qui  aura  cfté  touetté  ,  à  qui  on  aura 
«."ouppc  les   aureilles ,  &  qu'on  aura  banni, 
pourra  mefdirc  tant  &plui  de  ceux  qui  l'ont 
chaftie.  Mais  quoy?  on  n'adiouilera   nulle 
foy  à  tels  mefchans.ni  .î  toute  leur  impu- 
dence. Ils  ont  donc  comme  la  bouche  clcle. 
Ainli  ena-il  eilé  d'Hymcnee  &  Alexandre, 
quand  ils  ont  elle  excommuniez  par  Uwû 
Paul .  Ils  pouuoyent  bien  encores   mcfJire 
contre  l'£uangile,&  blaiphemer  contre  tou- 
te bonne  dodrine  :  mais  tant  y  a  qu'on  co- 
gnoilToit  qifils  auoyent  etté  dechaliez  com- 
me metchans,  comme  boucs  inlccls,  qui  ga- 
ftoyent  tout  le  troupeau  ,  qu'on  les  a  exter- 
minez de  r£gli4"ede  Dieu  :  cela  donc  leur 
fermoit  la  bouche,  pource  qu'on  n'adioufcoic 
poist  de  ioy  à  tout  ce    qu'ils   pouuoyent 
mettre  en  auant.£tau  relie,  fainiSt  Paul  voy- 
oit ,  que    cependant    qu'ils  eftoyent  tenus 
pour  Chrelbens,  on  pouuoit  due,  le  ne  fçay 
a  qui  croire:  voila  Hymenee  qui  nous  ditain- 
iî,  voila  Alexandre  qui  nous  tient  tels  pro- 
pos .  icloa  donc  que  ceiut-ci  eiUni  mdlei 


parmi  les  fidèles  auoyent  accès' pour  femcr 
leur  poifon  ,  lalpcl  Paul  aucoiitraire  dit  que 
ils  ne  pourront  plus  blafphemer  .  Et  pour- 
quoy ?  Cai  quand  ils  ont  elle  excommuniez, 
il  a  elle  commandé  à  tous  fidèles  de  les  fuir. 
Maintenant  nous  voyons  que  cereniededont 
parle  faind  Paul,  a  elle  piopre  &  conuena- 
ble  pour  empelcher  ces  mefchans-ci  de  mef- 
dirc delà  parole  de  Dieu.  Non  pas  qu'ils  ne 
enflent  toufiours  la  malice  enflammée  ,  non 
pas  qu'ils  ne  mach^raflent  toiitceqiril  leur 
elloit  pofsible.  Samct  Paul  donc  n'a  point  bri 
dé  l'audace  ,  voire  raefines  la  ra^e  furieufe 
qui  elloit  en  eux  :  mais  cependant  il  les  a  dé- 
gradez, en  forte   que  toutes  leurs  faufletez 
n'ont  plus  eu  de  lieu,  d'autant  qu'il  leur  a  fer 
mé  la  porte,  afin  qu'ils  ne  peufÛnt  plus  nui- 
re aux  pouresf.deles.Car  cependant  que  nous 
conucrfons  priueement  auec  les  mefchans,  il 
efl  bien  difficile  que  nous  ne  foyons  enta- 
chez de  leurs  vices.  Car  comment  marchera- 
on  entre  les  tfpines  lins  fe  picquer  r  com- 
ment touchera-on  de  la  poix, ou  quelque  au- 
tre orduie  fans  en  tirer  quelque  macule  à 
foy  ?  Il  cft  donc  be foin  que  ceux  qui  ne  de- 
mandent qu'à  tout  corrompre,  foyent  reiet- 
tez loin  de  nous,&  qu'vn  chacun  loit  fur  fes 
gaides,afinde  n'ellre  point ainfî  dcsbauché 
par  eux  .  Mais  quoy  :  Auiourd'huy  il  fcmble 
que  nous  cerchions  à  nous  ruinera  noflre  ef 
cient.Car  tout  ainli  qu'il  nous  elt  commandé 
au  Pfeaume  quinzième,  d'aimer  les  vrais  fer- 
uiteurs  de  Dieu  ,  &  de  les  auoir  en  honneur, 
(comme  aulsi  lainct  Paul  dit, Prenez  bien  >^a; 


Vhil, 


r-îv 


de  à  ceux  qui  font  tels,  pour  les  enluynre  ,  f"7' 
pour  conuerfer  familièrement  auec  eux  :  afin 
qu'ils  vous  donnent  bon  extmpk)  aufsi  nous 
dcuons  craindre  de  nous  mtller  parmi  les  mef 
chans.  Mais  tout  au  rebours,  s'il  y  a  quelque 
desbauché  &  dil^jln  ,  on  ne  demande  linon 
de  fe  méfier  auec  luy  :  s'il  y  a  quelque  mef- 
chant  qui  dtfpite  Ditu.qui  deshonore  fa  pa-r 
rôle, qui  ne  demande  lînondt  mettre  tout  eh 
dilsipation  ,  on  fera  bien  aile  de  l'efcoutcr, 
&d'auoirles  aureilles  pleines  de  fes  mefchâs 
propos.  S'e<bahlt-on  fi  nous  en  voyons  beau 
Coup  qui  lont  auiourd'huy  deftcurnez  du  bon 
ckemin  ?  Il  ne  faut  qif  vn  peu  de  leuain  pour 
aigrir  toute  la  palle  :  ainfi  les  melchans  pro-  _  . 
pos  corrompent  les  bonnes  mœurs,  &  on  les 
cerche,  on  ell  mené  connue  d'vn  appétit  en- 
ragé pour  fe  ioindre  à  cela  .  £t  pourtant  il  ne 
fe  taut  point  esbahir  s'il  y  en  a  tant  de  desbaa 
chez, qui  uc  demandent  lînon  de  tout  peruer- 
tir&  corrompre.  D'autant  plus  nous  faut-il 
bien  noter  celle  doftrine  de  fainâ  Paul  :  c'efl 
quand  il  y  aura  vn  mcfchant  qui  fera  noté  & 
marqué, qu'on  verra  bien  que  fi  vie  fera  mau- 
uaife:  voila  vn  blafphtmattur  ordinaire,  voi- 
la vn  renieur  de  Dieu,  voila  vn  yiwongne» 
voila  vn  contempteur,  voila  vn  paillard,  m 
homme  de  viedilfolue,  on  le  cognoift  tel,  il 
faut  qu'vn  chacun  fou  aduerti  de  le  fuir:&s'il 

h.ii. 


éo 


DIXIEME    SERMON 


tfhi  lionte  en  {oyiqu'il  ne  foit  confus  de  Tes 
péchez  ,  pour  le  moins  que  la  corruption  ne 
tire  point  plus  loin,&  quM  foit  conune  reiet- 
tc  ;  &  que  les  fidèles  cependant  le  monftrent 
aiidoigt.iufqaes  à  ce  qu'ils  ayent  cognu  qu'il 
fc  repent  de  ion  mal. Que  li  cela  fedoit  faire 
en  gênerai  enuers  ceux  qui  ne  font  que  trou- 
bles &  icandales  par  leur  iiiauuaife  vie  ,  en- 
cores  fe  doit-U  plus  obferuer  enuers  ceux  qui 
blafphcment  contre  la  dodlrine  de  lEuangi- 
le.qui  fement  leurs  erreurs  &  mcfchantes  o- 
pinions.qui  mettent  enaiiaiu  leurs  abus  pour 
tenuerferla  pureté  de  latoy.  Quenousap- 
prenions  d'euiter  telles  gens ,  &:  les  reietter 
loin  de  nous,&  mefines  d'admonelter  ceux 
que  nous  voyons  eftre  fuiets  à  tromperies,  & 
lefqucls  pourroyent  eftre  l'eduits  par  les  mef 
chans  propos  des  malins.  Au  re/le,  nous  dé- 
lions bien  noter  ce  mot  dont  liinû  Paul  vfe, 
de  liurcr  k  SjfdHicarparce  moyen  il  nous  de 
clareque  nous  deuons  élire  fongneuxdenous 
tenir  en  la  compagnie  des  fidèles, &  en  l'vniô 
que  nortre  Seigneur  a  dediee  entre  tous  les 
membres  de  fon  Fils.  Voila  noflre  Seigneur 
Icf'us  Chnll  qui  prononce  qu'il  eft  tellement 
Roy  de  fon  £glilc,que  tous  ceux  qui  i'adioi- 
gncnc  àicelle.font  fous  d  protethon  ,  &:les 
veut  garentir  iufques  à  la  fin.  Ne  voila  point 
vne  condition  plus  que  dclîrable  ,  que  le  Fils 
de  Dieu  daigne  nous  prendre  fous  fa  niam  & 
conduite ,  (^u'il  ait  le  foin  de  nolire  falut ,  & 
que  nous  fommes  afleurez  de  ne  iamai.s  périr, 
d'autant  qu'il  cft  tout-puiflànt  ,  &  qu'il  def- 
ployera  la  (ainfî  qu'il  le  promet)  toute  celle 
vtrtu  pour  noftre  falut;  Au  contraire  ,  quand 
riouslommes  feparez  de  l'Eglife  ,  nous  fom- 
mes comme  expo  fez  en  proye  à  Satan,  d'au- 
tant que  Dieu  nous  defauoue,&  ne  penl'e  plus 
de  nous.  Ne  voila  point  vne  menace  qui  nous 
doit  faire  non  l'eulement  craindre, mais  trem 
bler?Il  eft  bien  vray  qu'il  y  en  a  beaucoup 
en  l'Eglile  qui  y  occupent  place ,  lefqucls  ne 
foiù  pas  pourtat  fous  la  garde  de  lefusChrilf, 
mais  ceux  qui  fans  feintifc  fe  rangent  au  trou 
peau,&  qui  cheminent  en  l'obeillance  de  l'E- 
uangile,  iont  afleurez  que  Dieu  leur  tiendra 
la  main  forte  ,  &  que  laniais  il  ne  permettra 
que  le  diable  gaigneriencôtr'eux. Puis  qu'ain 
Il  eft  donc  appren55(iuvuant  ce  que  l'ay  deiia 
ditjde  luyure  le  chemin  où  noftre  Seigneur 
nous  a  intioduits^c'eft d'autant  qu'il  a  eftabii 
Eglifc  entre  nous,  &  qu'il  veut  que  fa  parole 
s'y  prefche,queles  Saciemens  y  foyentadmi 
niftrcz.q  nous  fréquentions  les  l'ermons,non 
pas  pour  nous  acquitter  quand  nous  aurons 
preftc  i'aureillc  à  ce  qui  Icia  du,  mais  pour  y 
profiter:qu'aucc  toute  reueréce  nous  reteniôs 
la  doflrine  que  nous  aurons  ouyc  ,  &  que  les 
Sacremens  nous  feruentde  nous  contermcr 
touiîourSjde  plus  en  plus  en  la  foy  que  nous 
aurons  délia.  Q^and  nous  iiiyurons  ce  train, 
nous  pourrons  cftre  tout  refolus  que  lefus 


Chrift  nous  a  en  fa  garde,&  qu'il  domine  tel 
lement  pardeflus  nous,  que lamais  nous  ne 
luy  pourrons  elchapper;combien  que  le  dia- 
ble nous  face  beaucoup  d'allàuts ,  toutesfois 
que  nous  l'erons  maintenus  d'rne  vertu  plus 
haute  &  plus  grande.  Et  au  relie,  craignons 
(comme  l'ay  dit  )  de  nous  leparerde  l'Egli- 
le,&:  faire  des  beftes  fauuages  :  comme  nous 
enverrons  beaucoup  qui  ne  viendront  iamais 
au  fermon  ,  ou  s'ils  y  vienent ,  ce  n'eftque 
pour  s'en  moquer  ,  pour  en  conceuoir  quel- 
que venin,  &:  pour  s'aigrir  touliours  d'auanta 
ge  contre  Dieu  &  contre  fa  parole.  Q^uand 
nous  les  verrons  côtempteurs  &  prophanes, 
qu'ils  n'aurôt  nulle  honte  de  ietter  touliours 
leur  poifon  contre  l'ordre  de  l'Eglife:quand 
nous  verrons, di-ie,  de  telles  gens,  craignons 
de  leur  reflembler.  Etpouiquoyf  Car  en  la 
finencores  que  les  hommes  nous  efpargnét, 
lî  eil-ce  que  lelus  Chnll  nous  liureia  à  Sa- 
tan, qu'il  faudra  que  nous  foyons  en  la  tyran 
nie  du  diable, quand  nous  n'aurons  point  vou 
lu  eftre  preferuez  par  la  grâce  de  noftre  Sei- 
gneur leius  Chrift.Et  au  relie, que  no"  ayons 
crainte  d'eilre  amli  reiettez  &c  bannis  de  la 
compagnie  des  fidèles ,  vcu  que  lefus  Chrift 
qiiitte  là  tous  ceux  qui  font  feparez  du  rang 
des  iîens ,  &  de  Ion  troupeau.  Voila  quant  a 
cefte  taçon  déparier  dont  fiind  Paul  vfe, 
quand  il  dit,  Qu'ija  liuré.i  Satanceux  qu'il 
a  excommmiiez  du  rang  des  fidèles.  Il  y  a 
pour  la  fin  vn  autre  article  à  noter ,  c'ell  que 
l'excommmiication  n'a  pas  efté  controuuce 
ne  forgée  des  homes  à  piailîr  :  mais  que  c'cft 
vne  reigic  que  noftre  Seigneur  lefus  a  efta- 
blie  entre  les  liens ,  laquelle  eft  inuiolable: 
&  quiconque  tafchede  l'opprimer,il  monftre 
qu'il  eft  ennemi  de  foy  &  de  Chreftienté. 
Ainfi.tous  ceux  qui  bataillent  cotre  l'excom- 
munication, qu'ils  foyent  Turcs ,  &  Payens, 
&  qu'ils  n'abulènt  plus  du  nom  de  Chrellien 
té  pour  le  polluer  comme  ils  font.  Car  lî  ce- 
la auoit  elle  introduit  par  quelque  conlîde- 
ration  humaine ,  on  pourroit  dire  ,  Cela  eft 
des  hommes.qu'il  loitabbatuimais  quand  no 
ftre  Seigneur  lefus  l'a  inftitué  en  fon  Egli- 
fe,  il  a  déclaré  qu'il  vouloit  qu'il  teinft  ,non 
point  pour  trois  iours,comme  il  y  a  des  mo- 
queurs qui  difent  que  l'excçmmunication  n'a 
elle  que  pour  le  temps  que  les  Princes  n'e- 
ftoyent  encores  Chrcftiensimais  au  contrai- 
re ,  nous  voyons  que  lefus  Chrift  a  donné  (a 
promefle  telle,qu'elie  doit  durer  iufques  .î  la 
fin  dumonde,quand  ildit,  Q_ue  ce  qu'on  au- 
ra lié  en  l'Eglife  ,  ftra  lie  au  ciel.  Et  nous  M-îf.Kf. 
voyons  comme  les  Apollres  ont  prattiqué  '^• 
celle  reigle  Se  ccfte  ioy  qui  a  cité  donnée  de 
lei'us  Chrift.  Que  cela  fuit  tout  notoire,que 
ceux  qui  tai"ciie"t  d'anéantir  l'excommunica 
tion  ,  monftrc'it  en  fomme  qu'ils  ne  ticncnc 
du  tout  côte  de  Dicu,qu'iis  ne  croyent  point 
à  l'EfcfJture  /aini1e,non  plus  que  des  chiens, 

&  qu'ils 


SVR  LA    I.   A   TIMOTH. 


€l 


le  qu'ils  fé  mocquent  de  touteChrcftiente.il 
ne  taut  plus  ici  difsimuler  ,  ne  nager  entre 
deux  eaux  :  la  chofe  eft  trop  patente  &  trop 
énorme. Ainfî  notons  bien, toutes  fois  &quan 
tes  que  fainû  Paul  parle  de  l'excommunica- 
tion,que  ce  n'eft  pomt  vne  couilume  à  la  vo- 
lée,que  les  homes  ayent  mifc  fus  à  leurphan- 
taiîe  Se.  à  leur   appétit,  mais  que  cela  le  fait 
«n  l'authorité  du  Fils  de  Dieu  ,  auquel  il  ne 
nouseft  point  licite  de  contredire.  Et  voila 
pourquoy  aufsi  en  ce  palFage  que  i'ay  deiîa 
-  _     j  allégué  de  lapremtereau):Corinthiens,faind; 
Paul  dit  ,  qu'en  la  puiflance  &  authorité  de 
noitre  Seigneur  lefus  Chrill,il  a  liuré  à  Satan 
celuy  qui  auoit  commis  incefte:pour  môftrer 
que  cen'eftpas  vniugement  humain  qui  s'ac- 
complifle  en  l'authorité  humaine,  mais  il  dit 
que  lefus  Chriftprelîde  là,&  déclare  que  l'e- 
xecution  eft  faite  par  Ion  ordonnance,&  par 
la  loy  qu'il  a  eftablie:qu'il  faut  donc  qu'on  fe 
tiene  là  fans  prétendre  de  iamais  ladiAiper 
ne  rompre.  Voila  pour  vn  item. Et  cependant 
notons  que  fi  le  Pape  &  tous  les  liens  ont  abu 
féde  l'excommunication  ,  que  ce  n'eft  pas  à 
dire  qu'il  la  faille  maintenant  mettre  bas. Car 
la  chaire  de  vérité  n'a-elle  pas  efté  chaire 
de  méfonge  ?  Il  ne  faudroit  plus  donc  qu'on 
prefchart.lî  onfevouloitarrefter.\i'abus  qui 
a  efté  en  prefchant.Et  la  plus  grande  abomi- 
nation qui  foit  en  laPapauté,&  l'idole  la  plus 
-exécrable  qui  foit  là  adorée  ,  n'eft-ce  pas  la 
MeflefEt  cependant  faut-il  que  la  Cène  foit 
là  delaiflee  comme  li  ce  n'eftoi:  point  vne  in 
ftitutîon  de  lefus  Chrift?Faut-ii,  di-ie, qu'on 
la  meiprifeàcaufede  la  corruption  detefta- 
blequi  eften  la  Mefle?  Apres,  nous  voyons 
comme  le  Baptefme  a  efté  prophané,&  com. 
me  le  diable  a  fauflement  corrompu  les  cho- 
fes  qui  eftoyent  pour  le  falut  des  hommes:  & 
cependant  lî  nous  voulions  tout  anéantir  ,  & 
mettre  fous  le  pied,&qwcferoit-ce?Ilncfa« 
droit  plus  qu'il  y  euft  de  religion:  il  faudroit 
que  la  mémoire  de  lefus  Chriftfuft  efteinte. 
Ainil  donc  le  moyen  de  remédier  au  mal  qui 
domine.c'eft  que  nous  enfuyuiôs  la  règle  qui 
nous  eft  donee  de  lefus  Chrift:c'eft  afçauoir 
querexcommunication  feface  contre  ceux 


qui  font  de  mauuai^  vie  .  eoBtre  ceujt  qui 
auront   fait  quelque  fcandale  énorme  ,  afin 
que  les  autres  y  prenent  cxeitipie,&  que  ccur 
qui  auront  failli,  foyent  confus ,  que  cela  le» 
incite  à  recourir  à  Dieu  pour  le  prier,  qu'il* 
ayent  cefte  pureté  de  cœur  dont  il  a  efté  par- 
lé,afin  qu'en  adorant  Dieu  comme  il  le  com- 
iuande,vn  chacun  aufsi  férue  à  fes  prochains. 
Et  cependant  que  nous  n'ayons  point  des  cor 
rupcionsmeflees  parmi  nous.qui  foyent  pour 
nous  gafter,&  pour  nous  meneràpeidi:ion:<î 
cela  foit  empefché  ,  afin  que  Satan  foit  rem- 
barré.Voila  comme  on  doit  vferde  l'excom- 
munication,fino  qu'on  vueiile  refîfter  à  lefus 
Chrift.  Et  ainfî  notôs  quand  S.Paula  ici  par- 
lé d'Alexandre  &Hymenee,  que  ce  n'a  pas 
efté  tant  pour  leurs  perfonnes ,  comme  pour 
donner  inftruftiô  générale  à  l'EglifedeDieu, 
afin  que  nous  apprenions  de  cheminer  en  tou 
te  folicitude:  que  fî  Dieu  no' a  appelez  à  foy, 
nous  fçachiôs  qu'il  nous  tiendra  [3.  main  for- 
te,iufques  à  ce  que  nous  ayôs  acheué  le  cours 
de  nofti  e  vie:qii'il  ne  fouffrira  point  que  nous 
foyons  mocqueurs  ne  hypocrites  ,  mais  que 
nous  fuyuions  la  parole  de  fon  Euangile  ea 
toute  liniplicité  &droiture:&  que  nous  foyôs 
vigilans  pour  batailler  à  l'encontre  de  Satan, 
&de  tous  fcsfuppofts,qui  nous  font  lournel- 
lementla  guerre  pour  nous  feduire ,  &  nous 
deftournerdu  bon  chemin.Que  donc  nous  y 
prenions  garde  ,  &(.  que  nous  veillions  telle- 
ment, que  par  ce  moyen-la  nous  perlîftions 
uifques  à  la  fin  en  la  fainfte  vocation  en  la- 
quelle nous  auons  efté  vne  fois  appelez, 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noitre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes  ,  le  priant  qu'il  luy  plaife  nous  les 
faire  fentirdeplus  en  plus,&:  qu'il  nous  ame- 
né à  vne  telle  repentance,  qu'au  lieu  que  nous 
auons  doué  occafiondeblafphemerfonnora, 
il  foit  glorifié  par  nous.  Et  pource  que  nous 
auons  encores  beaucoup  de  foiblefles  &  de  vi 
ces  de  refidu, qu'il  nous  fupporte,iufques  à  ce 
qu'il  nous  ait  pleinement  reformez  à  foy  &i 
fa  iuftice.  Ainli  nous  dirons  tous  ,  Dieu  tout"  # 
puiflànt,  Père  celefte,&c. 


ONZIEME    SERMON     SVR    LE     SE- 

COND      CHAPITRE. 

î  I  ddmoncjle  donc  quauant  toutes  chojès  on  face  requejlest 
omifonsjiipplicationsy^^  aclions  de  grâces  pourtous  hommesy 

z  Pour  les  Kois ,  O"  pour  ceux  cjui  font  conjlituez  en  dignité: 
afin  que  menions  yie  ^aijille  Q'  tranquille  )  en  toute  pieté  O'^on- 
neîleté. 

h.iii. 


ONZIEME    SERMON 


Ependant  que  les  hommes 
s^applicjnét  à  bien, le  diable 
a  moins  d'accès  pour  les  at- 
tirer en  fes  filets  :  car  il  ne 
les  trouiie  pas  tit  dcloiiîr. 
Au  contraire, ceux  qui  s'ap- 
pliquent à  vn  t.is  de  plianta 
fies  vaines  &;  friuoles.s'cxpofcnt  à  Satan,  qui 
les  peut  tranfporter  çà  fc  là  alitement. Et  voi 
la  pourquoy  nousvoyôs  tant  d'erreurs  aum5 
de  ,  tant  de  gens  s'enuelopper  en  dodrines 
fauffes  &  mcfchantes  :  pourccque  de  nature 
nous  lommes  enclins  à  vanité, cS;  cliaciî  le  flat 
te  en  ce  vice.  Voila  donc  Satan  qui  ha  la  vo- 
gue,&  ha  vn  moyen  aile  tant  &  plus  d'attirer 
les  hômesien  forte  qu'on  verra  fouuétesfois 
que  ceux  qui  ont  eu  quelque  bô  cômencemét, 
non  feulement  tourneront  bride  tout  aure- 
bours,inais  ferôt  ennemis  mortels  de  Dieu  & 
de  la  religion.  C'eft  pourquoy  maintenant  S. 
Paul  exhorte  Timothee, que  les  fidtless'em- 
ployeiit  &  s'eftudient  à  Faire  prières  à  Dieu, 
non  leulemét  pour  eux&  pour  l'Eglile,  mais 
pour  tout  le  genre  humain.Ci  dcfllis  U  a  tou- 
ché que  beaucoup  s'adonnoycc  à  des  quciUôs 
curicul'es ,  &  qui  n'emportoyent  nul  profit:  il 
adioufte  doc  vu  vray  remède  Se  bien  côuena- 
ble  pour  fermer  la  porte  .t  Satan  :  c'eft  qu'on 
regarde  quelle  cftude  noibc  Seigneur  approu 
ce.  Le  principal  exercice  qu'ayent  leseufans 
de  Dieu, c'eft  de  pricr:car  voila  aufsi  la  vraye 
approbation  de  noftrefoy, que  nous  ayons  re 
•oursànoftrc  Dieu,&  que  nous  inuoquions 
Ion  nom:  &  que  non  feulement  chacun  pcnfe 
de  foy,&  en  au  fouci,  mais  que  nous  compre- 
fiipns  en  gênerai  tous  ceux  qui  font  toioints 
auecnous,  &auec  lefquels  nousauôs  quelque 
proximité.  Or  eft-il  ainfique  Dieu  amis  vne 
vnion  &:  vn  lien  entre  tous  hommes,  qu'ils  fe 
doyuent  cognoiftre  corne  freres,oubiea  com 
me  prochains.  Il  s'enfuit  donc  que  nous  de- 
lions  prattiquer  ce  moyen-ci  en  priant  Dieu: 
&  ne  faut  pas  qii'vn  chacun  foit  addonné  à  fa 
perfonne.ni  à  fes  amis  particuliers  :  mais  que 
nous  eftédions  noftre  chanté  Se  iolicitude  en 
iiers  tous  ,  &  grans  &  petis ,  Se  ceux  qui  nous 
fontpnucz,  &  ceux  qui  nous  font  incognus. 
"Vray  eft  que  ce  n'eft  point  pour  défendre  de 
mettre  les  degrez  que  i'Elcriture  i'aincle  mef 
mes  nous  enfeigne.  Qm  plus  eft, fi  nous  vou- 
lons bien  prier  Dieu  pour  tous  homes,  il  faut 
«ommenccr  par  ceux  au«c  k-fqucls  nous  fom- 
mes  côioints  en  foy,  &  en  l'obeiflance  de  l'E 
Man^ile:carccux-la  font  comme domeitiques 
delam^ifondcDieu.Mais  tât  y  a  qu'en  priât 
pour  les  fidèles, il  laut  aufsi  que  nous  ayôs  pi- 
tié &  compafsion  des  poures  iiicrcdules  ,  qui 
cheminent  eiicorcs  en  erreur  &  ignorance,& 
«jue  nous  fuppliôs  .1  Dieu  qu'il  les  attire  auec 
Jious,&  que  nous  foyons  tou^  enlcmble  d'vn 
accord.  Maintenant  nous  voyons  quelle  eft 
l'intention  de  S.Paul  en  ce  pairage:c'eft  afça 
iiioit  de  uiôûrerà  quoy  les  enfajis  de  Dieufe 


doyuent  employer:  c'eft  à  ne  point  trauailler 
en  vain,  &  lans  aucun  profit  :  c'eft  à  inuoquer 
Dieu,&:  en  le  priant  auoir  le  loin  du  falut  de 
tout  le  mondc:&:que  foir  &  matin  ils  s'appli 
quent  à  cela. Car  par  ce  moyen  la  porte  fera 
clofc  à  Satan  ,  qu'il  ne  poui  ra  pas  les  feduire 
ne  dirtraire  à.  des  curiofitez  vaines  &•  mefcha 
tes.Mainten.lt  il  refte  de  regarder  par  le  me- 
nu ce  que  dit  ici  S.Vaû.ï e.\-horte(d>t-il)tju^o- 
raifons,  &■  reqiieftes,  (y"  frieres  fe  facent  :  & 
^it'aflions  de  gracts  fe  rendent  ,)  Vieu  :  ■voire 
deuant  tontes  chofes.Q_uanà  il  dit.Deuat  tou- 
tes chofes.il  monftre  par  cela  que  nous  deuôs 
auoir  les  prières  en  fînguliere  rccômandatiô. 
Et  c'eft  vn  mot  qui  pcfe  beaucoup  :  car  l'ay 
défia  dit  que  ceux  qui  font  froids  &  noncha- 
lans  à  prier  Dieu,monftrent  qu'ils  n'ont  nul- 
le foy:pource  que  c'eft  iciqu'elle  s'approuue. 
Voila(di-ic)levray  examépoLir  fçauoir  coin 
ment  nous  aurons  profité  eni'Euangile:  c'eft 
fi  nous  fommesardens  à  prier  Dru, que  nous 
ayons  cefte  afFcttion-la  qui  nous  fclicite  lour 
&  niikl.Car  celuy  g  dira  qu'il  fe  lie  en  Dieu, 
&  qu'il  croit  .à  l'Euangilc,*;  cepédant  ne  tiéc 
conte  de  piier,monftre  qu'il  n'eft  qu'vn  moc- 
qucur  &  hypocrite  :  car  fi  nous  recelions  les 
promeffes  de  Dicu,&:  fi  nous  fommes  afleurez 
de  ce  qu'il  nous  dit, il  nous  le  faut  chercher, 
comme  il  nous  promet  de  nous  cftre  Perc  & 
Sauueiir,il  nous  conuie  à  foy  ,  il  nous  tend  la 
main  ,  il  ne  demande  linon  que  comme  nous 
lommes  appelez  à  la  cognoilTancc  de  fa  ven- 
té,nous  venions  luy  dem.'.iidcr  qu'il  accom- 
plifleles  chofes  que  nous  auom  Llpcrcesde 
luy. Ceux  donc  qui  ont  la  bouche  clofe,&  qui 
font  ainfi  ftupides  &  norchalans  ,  monftrent 
que  iamaitils  n'ont  goufté  les  promeiles  de 
Dieu. Et  ainfi  ce  n'eft  pas  fans  caufe  que  fainft 
Paul  préfère  les  orailbns  Se  requeftes  qui  fe 
doyuent  faire  en  l'Eglife  à  toutes  chofes; 
comme  s'il  difoit ,  Voila  le  principal  auquel 
il  nous  tant  cftre  attétifs.\oila  pour  vn  poîci 
Mais  regardons  maintenant  quelle  eft  noftre 
Chreftienté  :  car  nous  voyons  que  bien  peu 
s'addonncnt  àprier  Dru;ou  ii  on  le  tait,c'eft 
comme  par  cérémonie  &  .'.cquit.Bnef.ce  n'eft 
lînon  comme  vne  monftre  lan^  vertu.ne  zèle 
aucun  :  &  fi  on  eft  bien  froid  à  faire  prières 
publiques, regardons  que  ce  fera  d'vn  chacun 
en  fa  maifon  &  en  fon  priué.Puis  que  nous  a- 
uonsfimal  profité  en  ceft  article  de  prier 
Dieu,  cognoiiroiis  que  nous  n'auons  point 
encores  appréhendé  quelle  eft  la  vertu  de  l'E 
uangile  ,  qu'il  n'y  a  point  à  grand'  peine  vne 
goutte  de  foy  en  nous,  &  encores ,  que  nous 
eftouffons  fi  peu  de  clarté  que  nous  auons  re- 
ceu,entant  qu'en  nous  eft. Que  par  cela  donc 
nous  loyons  incitez  à  prier  Dieu:  exerçons- 
nous-y  plusardeinmét  que  nous  n'auôs  poinC 
fait  par  ci  deuant.  C'eft  ce  qui  nous  eft  ici  tac 
recoinm.rdc  par  faind  Paul.  Ce  qu'il  adioufte 
d'or.itfons  ,  &  retjitefles ,  Se  prières  ,  tend  à  vnc 
incfiue  fin,  &  coufenuc  ce  propos-la.  Samft- 

KaiU. 


SVRLAI.    ATIMOTH.  <îj 

ïâulpouuolt  dire  en  vn  mot ,   Qu^on  face  entre  deux,  fif.int-il  ne^ntmo'ns  que  nous 

prieresjOU  qu'on  face  oraifons  :  il  ne  fe  con-  ayons  pitié  de  leur  perdition,  ..fin  de  reque- 

lente  pas  d'auoir  mis  vnmot  fculement,il  en  rir  Dieu  qu'il  les  attire  à  (oy.Puis  qu'aîii  eu, 

met  trois  qui  emportent  vne  melhie  choie,  notons  bien  quec^cftvnecliofe  trop  peruer- 

Wais  quand  il  inlîfte  furvnpoinft,  c'eiî  afin  fe  quand  chacun  feraaddonné  à  Ton  profit, & 

qu'on  y  penfe  mieux  ,  &  qu'on  loit   touché  qu'il  n'aura  nul  foin  ne  regard  à  fes  pr»- 

plus  au  vif ,  comme  s'il  nous  vouloit  refueil-  chains.  Car  nollre  Seigneur  n'a  point  créé 

1er ,  pourcc  que  nous  fommes  trop  endormis  des  mondes  infinis, afin  qu'vn  chacun  demeu- 

en  ceft  endroit.Apprenons  donc  de  ce  paflà-  rail  là  à  l'efcart ,  viuant  à  toy  &  à  fon  profit 


ge  ,  de  ne  nous  point  lafcher  fi  tort  la  bride 
quand  nous  dcuons  prier  Dieu.  Carilnoiis 
femble  que  c'cft  aifez  d'auoir  eleué  noftre 
xfprit  vne  minute  de  temps  :  mais  retenons- 
nous,  &  fi  nous  Tentons  que  nos  ciprits  s'ef 


priué  :  mais  il  nous  a  mis  les  vns  auec  les  aa» 
très.  Voulant  donc  que  l'habitation  fuft  con» 
niune,il  nous  a  aufsi  obligez, afin  qu'vn  cha-« 
cim  penfe  qu'il  doit  communiquer  auec  iee 
prochains. Et  pour  celte  caufe  il  nous  a  crées 

coulent,  t^ifons  force  ànous-mefmes  pour  d'vne  nature. Quand  le  regarde  vn  homme, il 

nous  tenir  captifs ,  &  exerçons-noiis  à  cela,  faut  que  ie  contemple  là  mon  image,  &  que  ie 

puis  que  fainrt  Paul  nous  met  ici  comme  trois  me  regarde  en  fa  peifonnc,  &queie  m'y  co- 

brides,  afin  de  nous  tenir  par  force.  Priez  gnoille.  Il  y  aencorev  vne  chofe  plus  digne 
Dieu,  dit-il.  Et  comment  le  prierons-nous.?     d'eftre  confideree.c'eft  l'image  de  Dieu  qu'il 

Il  voit  que  nous  lommcsaccouftumezànous  a   engrauee  en  tous.  Si  donc  nous  portons  è 

diltraire  çà  &  là:  Retournez, dit-il, faites  re-  Dieu  quelque  honneur  &  reueiéce,  c'cft  biea 

quelles.  Et  puis  voyant  que  nous  fommes  (i  raifon  que  nous  ne  mefpriùôs  point  fon  ima« 

volages  ,  qu'il  ne  ûifht  point  de  nous  auoir  ge  laquelle  il  a  engrauee  en  tous  hommes:  Ss 

dit  vne  chofe  deux  fois ,  il  met  la  troifieme  que  nous  cognoifsions  cependant  ce  qui  eft 

bride:Faites,dit-il,prieres.Voilacequenous  dit  cnl'Efcriture  ,  C^uf  nul  n'ha  en  haine  fm 

deuôs  bien  noter:  c'eft  afçauoirqueie  faincl  chair:carc'eftvnmôfire,c'eft  vne  chofe  q  eft 

Efprit  parlant  par  la  bouche  de  làinft  Paul,  côtraire  à  toute  humanité.  Or  quâd  il  eft  par 

corrige  ici  la  légèreté  qui  eft  aux  hommes,  lé  de  la  clia!r,cela  s'eftend  àgrans  &  petis,& 

pource  qu'il  voit  que  nous  ne  fommes  gue-  aux  plus  elhanges  du  monde:comme  aufsi  le 

tes  conllans  à  prier  Dieu:&  quand  nous  y  ve  prophète  Ifaie  en  parle.  Nous  voyons  com-  ,/■     .  i 

nons, qu'il  ne  faut  rien  pour  nous  en  dtftour  me  Dieu  nous  a  conioints  à  cefte  condition,  ^ 

ner,  qu'il  eft  bien  difficile  d'y  demeurer  fer-  qu'vn  chacun  s'employe  pour  feruir  à  fet     * 

mes  &  conftâns  comme  il  feroit  requis. Pour  prochains  entant  qu'il  pourra,S:  qs'il  en  au- 

cefte  caufe  ii  nous  monftre  comme  nousde-  ra  le  moyen.  Or  nous  deuons  monftrer  cela 

uons  ini:ftcrli  deiTus  ,  &  qu'vn  chacun  fe  fo-  en  nos  prières  que  nous  faifons  à  Dieu  :  car 

licite  à  prières  S:  oraifons ,  non  feulement  c'cft  le  principal  fecours  que  nous  puifsionf 

pour  loy  &  en  lonparticulicr, mais  pour  tou-  donner  à  ceux  qui  ont  be foin  de  noftre  ai- 

te  l'Eglife,&  en  gênerai  pour  tî:ur  le  inonde,  de.  Si  le  preten  de  feruir  à  ceux  aufquele 

Maintenant  venons  à  ce  que  du  faînd  Paul,  Dieu  m'a  obligé,  il  eft  vray  que  iedoy  regar 

que  nous  dcuons  prier  pair  tau  s  homme  s, &:  no  der  la  faculté  que  i'ay  en  main  :  &  félon  que 

tamment  pour  les  K"lj  ,  c>  piiir  ceux  qui  (ont  l'occafion  s'addonne  ,  il  faut  que  ie  m'appli- 

en  fretmiiiencf  \^  <f;_g;;/fi  .Q^ad  fainft  Paul  que:mais  le  principal  bien  que  nous  puifsiô» 

nons  commande  de  prier  pour  tous  hommes,  faire  aux  homes,  c'eft  d'inuoquer  Dieu  pour 

il  fignifie  que  nous  deuôs  exercer  noftre  cha  eux  ,  &de  le  requérir  pour  leur  falut .  C'eft 

lite  les  vns  enuers  les  antres ,  dcmandans  à  donc  en  ceft  endroit  où  faintf  Paul  commaa 

Dieu  qu'il  tace  merci  à  tous,&  qu'il  nous  re-  de  à  tous  fidèles  d'exercer  leur  chanté. Et  lî 

cueille  enfemble  en  l'héritage  celeile  ,  puis  nous  deuons  eftendre  noftre  folicitude  iuf- 

qu'il  nous  a  créez  &  formez  à  Ion  image.  le  ques  aux  infidèles, a  ceux  qui  n'ont  nulle.coiB 

ay  délia  dit  que  nous  deuons  bien  prier  pour  munauté  auec  nous,q  fera-ce  de  ceux  qui  por 

l'Eghle  deDieuen  premier  degré  :&  mef-  tent  le  nom  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 

mes  lelon  que  nous  fommes  coniointslesvns  qui  ont  vn  mefme  Baptefme  ,qui  font  mem^- 

aux  au  très.  Dieu  nous  permet, &  ordônemef-  bres  de  l'Eglife?  combien  deuons-nous  pen- 

mes  que  nous  en  ay  os  tant  plu,  de  fouci .  Car  fer  de  ceux-là?    Veu  que  fi  nous  mettons  en 

dequoy  feruiroit  ce  fte  fraternité  que  nous  oubli  ,  ou  que  nous  mcfprifions  les  incredu- 

auos  enlemblerSaincf  Paul  donc  n'a  pas  vou-  les,  &  ceux  qui  font  eftranges  du  troupeau, 

luofterles  dcgrcz  qucrEfcnture  lainifeap  nous  en  ferons  rcdarguez  ,  que   fera-ce  de 

prouuc  par  tout:niais  cepcndat  il  a  voulu  de-  ceux  que  Dieu  nous  commande  d'aimer  fpe-. 

clarer  que  non  feulement  nous  deuons  prier  cialementfTellcmcnt  que  ce  palTage  nous  aci 

pour  les  fidèles  qui  ont  défia  quelque  frater-  monefte  de  noftre  deiioir:  c'eft  afçauoir  que 

nitéauec  nous,  mais  pour  ceux  qui  en  font  tous  ceux  qui  portét  le  nom  de  lefus  Chrift, 

bien  ef  oiignez  ,  comme  les  poures  incredu-  nous  doiuent  eftre  recommandez  par  fpecial, 

les:coinbien  qu'il  femble  qu'il  y  ait  vne  Ion-  que  nous  les  aimions'comme  nos  frères,  que 

gue  diftance ,  qu'il  y  ait  vne  muraille  clpeflc  nous  foyons  conioints  &  vnis  auec  eux  :  car 

h.  iiii. 


«î4 


ONZIEME    SERMON 


autrement  nous  ne  fommes  pas  dignes  que 
Dieu  nousaduoue  pour  {es  enfans.Car  quîd 
nous  defchirôs  le  corps  de  lefus  Chriit,(juel 
le  part  &  portion  pretendons-nous  en  ceft 
héritage  immortel  auquel  nous  fommes  ap- 
pelez? Voila  Dieu  qui  nous  a  adoptez  pour 
ies  enfans,voire  lî  nous  fommes  membres  de 
lelus  Chriftlbn  FUs:cequi  ne  peut  eftreque 
nous  ne  foyons  conioints  d'vne  amitié  fra- 
ternelle les  vns  auec  les  autres.  Si  ie  me  fc- 
pare  de  ceux  que  Dieu  veut  auoir  à  foy,ie  dif 
lipe  en  tant  qu'en  moy  eft  le  corps  de  noftre 
Seigneur  Icfus  Clirilh  &ainfi  ie  me  banni  du 
royaume  des  cieux.Mais  quoyfc'cft  encores 
vn  article  bien  mal  confidei  é.comme  nous  le 
voyons  par  expérience.  Car  où  eftPvnion 
que  Dieu  a  dediee  entre  no'A  laquelle  nous 
doit  elhe  plus  que  facree?  Il  n'eft  queffion 
que  de  femager  les  vns  les  autres:nous  fom- 
mes comme  chiés  &  chats:  tant  s'en  faut  que 
nous  cognoifsions  que  nous  fommes  mem- 
bres de  noilre  Seigneur  lefus  Chnll.que  Thu 
manitc  fera  quaii  abolie  entre  nous. Où  eft  la 
droiture  q  y  doit  eftre,  &:  l'équité?  Où  eft  la 
compafsion  &  pitié  pour  fubueiiir  les  vns 
les  autresfC'eft  tout  le  contrairercar  il  fem- 
ble  que  nous  ayons  confpu  é  à  deftruire  tout 
Tordre  que  Ditu  a  eftabli.  Puis  qu'ainii  cil 
«Jonc  qn'au  heu  d'auoir  fouci  de  nos  frères 
&de  nous  exercer  à  bien  faire  ,  &  procurer 
leur  bien  &  falut ,  que  nous  ne  defirons  que 
leur  ruine ,  qu'il  femble  que  nous  ne  deman- 
dions qu'à  les  accabler,  en  cela  voit-on  com 
me  le  nom  de  Dieu  eft  prophané:  vn  ch.icun 
de  nous  fe  vante d'eftre  CJireftien  ,  &  nous 
ne  fommes  rien  moins.  Voila  pourquoy  no' 
deurions  tant  mieux  prattiquer  ce  palTàge, 
quand  fainû  Paul  nous  commande  de  prier 
pour  tous  hommes.  Suyuant  cela  que  nous 
ayons  pitié  des  poures  errans  qui  vont  à  per 
dition,  combien  qu'ils  n'en  foyét  pas  dignes, 
combien  qu'ils  foyent  ennemis  de  l'Eglife, 
&  qu'ils  s'efcartent  loin  de  nous.  Et  fi  nous 
deuons  auoir  pitié  de  ceux-la,que  fera-ce  de 
ceux  que  Dieu  a  conioints  à  fon  Eglife  ,  lef- 
«uels  font  d'vn  mefme  troupeau  auec  nous? 
Que  nous  penfions  donc  mieux  à  cela  que 
nous  n'auons  point  fait  le  temps  pafTé.  Ce- 
pendant fainft  Pauladiouftepar  cfpecial.que 
après  auoir  fait  requeites  pourto'  hommes, 
•on  doit  lîngulieremét  prier  pour  lesKois,  Se 
«eux  qui  font  en  prceminêcc.Eu  quoy  il  dé- 
clare ce  que  i'ay  deiia  touché:  c'eft  afçauoir 
félon  que  Dieu  nous  fait  feruir  les  vns  aux 
autres, qu'il  faut  auf  i  que  noftre  efprit  s'at- 
tache à  cela  ,&  que  cefoit  comme  des  efpe- 
rons  pour  nous  inciter  de  tant  plus.  Si  ainfi 
«ft  que  nous  rcceuôs  par  le  moyen  des  Prin- 
ces S(  des  Magiftracs ,  &de  toute  la  police, 
que  nous  reccuions ,  di-ie  ,  des  bénéfices  de 
Dieu  lingulitrs  ,  voire  incomprcheiilibles: 
t'eft  bien  raifon  que  les  Princes  nous  foyent 
recommandez ,  &  que  nouv  les  préférions  à 


tout  le  refte.  Voila  quelle  eft  l'intention  de 
ùinSi  Paul.  Et  pour  cefte  cauCe  il  recite  en 
brief  les  biens  qui  nous  vienent  par  la  police 
que  Dieu  a  inftituee  au  mondc:c'eft  afçauoir 
que  nous  pouuons  mener  vie  paiiible:&;  puis, 
que  Dieu  eft  ferui  &  honoré.  Tiercemét  que 
la  vie  des  hommes  eft  honnefte.qu'il  y  a  quel 
que  bride  pour  no'  tenir  en  crainte,  que  tout 
n'eft  point  desbordé  ne  diflolu.  Ileftvray 
que  ceci  £e  pourroit  déduire  plus  au  long: 
mais  tant  y  a  que  fainft  Paul  n'a  rien  laifle 
derrière  ,  en  déclarant  en  bricf  quel  profit 
nous  apporte  la  police  terrienne,  &  les  Ma- 
giftrats  qui  y  font  ordonnez.  Cependant  no- 
tons que  i'aintl  Paulauoit  vne  raifon  fpecia- 
)e  de  ce  temps-la  pour  recommander  les  Ma 
giftracs:cai  tous  eftoyent  ennemis  de  l'Euan 
gile  ,  perfLCutcurs  des  poures  Chreftiens ,  & 
meurt riersrgens  prophanes,brief,enflammez 
contre  la  vraye  religion  &  pure.  Or  il  pou- 
uoit  fembler  aux  fidèles  que  de  prier  Dieu 
pour  telles  gés,  il  n'y  auoit  point  de  propos. 
CommentPque  ie  prie  pour  ceux  qui  font  en- 
nemis delà  vérité, qui  voudroyent  auoir  abo 
li  l'Euangile  ,  &  la  mémoire  de  noftre  Sei- 
gneur Itfus  Chrift  ?  ceux  qui  meurtriflenc 
cruellemét  les  fidèles?  c'eft  côme  fi  ie  fouhai 
toye  vne  pefte  mortelle  àl'Eglife  de  Dieu. 
Mais  faintl  Paul  monftre  que  cela  ne  doit 
point  empefcher  les  fidèles  qu'ils  ne  prient 
Dieu  pour  tous  Magiftratv.  Pourquoy?  Une 
faut  point  que  nous  regardions  aux  peribn- 
nes  fi  elles  s'acquittent  auiourd'huy  de  leur 
deuoir  ou  non:  mais  que  pluftoft  nous  regar- 
dions à  l'ordre  que  Dieu  a  cftabli ,  lequel  ne 
peut  eftre  iamais  violé  par  la  malice  des  ho- 
mes, ou  bien  ne  peut  eftre  effacé  du  tout, que 
il  n'endemcure  quelque  refidu. Combien  dôc 
que  ceux  qui  font  en  dignité  ,  &  qui  ont  ie 
glaiue  de  luftice  cnmain  s'acquittent  trei- 
mal,  combien  qu'ils  rempliflent  tout  d'iniu- 
ftice,qu'ils  facent  confufion  plus  grande  que 
ceux  qui  n'ont  nulle  charge  ni  office ,  qu  ils 
foyent  mcfmes  ennemis  déclarez  de  Dieu,  fi 
faut-ilcognoiitre  q  Dieu  a  inftitué  les  royau 
mes, les  principautez,&-  le  fiege  de  iuftice,  a- 
fin  que  nous  viuions  paifiblemét  fous  fa  crain 
te,&.'  que  nous  menions  vie  honnefte:  cela, di- 
ie, ne  peut  eftre  aboli  par  la  malice  des  hom- 
mes.Et  mefme':  nous  voyons  quand  les  tyr.is 
dominent  ,  qu'il  y  a  de  grandes  corruptions: 
toutesfois  encores  cela  eft  plus  tolerable,que 
s'il  n'y  auoit  nul  ordie.  Mettons  comme  eri 
vne  balance  vn  tyran,  ou  plufieurs  qui^exer- 
cent  toute  cruauté, q'.n  pillent  l'vn,mcurtrif- 
fent  l'autre,  &  qui  font  beaucoup  d'autres 
mefch.icetcz  Se  énormes, fous  ombre  de  la  iu- 
ftice: de  l'autre  cofté,  mettons  vn  peuple  qui 
n'ait  nul  chef,qui  n'ait  ne  Magiftrat  ni  autno 
rite  en  foy  ,  mai»  que  tous  foyent  égaux  :  il 
eft  certain  qu'il  y  aura  vue  confufion  plus 
grande  lirpki-  horrible  quand  il  n'y  aura 
point  de  prééminence,  que  s'il  y  auuit  vne 

tyrauaie 


SVR    LA   I.   A  TIMOTH. 


^î 


tyrannie  la  pluç  exorbitante  du  monde  .  Et 
pourijiioy;Car  encores  qu'il  y  ait  des  diables 
encharnez  qui  occupent  le  iiege  de  iuftice, 
combien  qu'ils  s'elFjicent  à  mal  faire  ,  iî  eft- 
ce  que  Dieu  ne  leur  permet  point  de  venir 
iufques  là,  qu'ils  renuerl'ent  toute  iuftice  :  il 
faut  qu'il  y  ait  encores  quelque  trace  de  biê. 
Mais  quand  nous  prions  pour  ceux  qui  font 
en  dignitéjCe  n'eft  pas  encorcô  pour  ctfte  rai 
fon-la  feule  :  mais  afin  que  Dieu  s'en  férue, 
tellement  que  nous  puifsions  par  leur  moyen 
iouir  des  biens  qui  font  ici  côtenus  &:  decla- 
rez.Et  quand  la  lullice  eftmalgouuernee,  & 
qu'il  fe  commet  des  pillages  &  extorfioiis,& 
que  faueur  &  haine, &  chofes  femblables  ont 
la  vogueau  lieu  d'équité  &  droiture:  &bien, 
il  faut  que  nous  penfions  à  nos  péchez  ,  car 
c'en  font  les  fruits  :voila  Dieu  qui  nous  paye 
en  telle  monnoye  que  nous  l'auons  mérité. 
Car  lî  nous  eftions  dignes  qu'il  régnait  fur 
nous ,  il  eft  certain  qu'il  pourroit  choifîr  de 
bons  ottîciers,&  ij  executeroyent  fidèlement 
ce  qu'il  a  ordonné.  Mai-:  d'autant  que  nous 
fommes  rcuefches,  &  que  nous  ne  pouuons 
foufîrir  qu'il  nous  gouuerne,  &  que  nos  paf- 
fions  font  fi  bouillantes  contre  luy,que  nous 
ne  demandons  qu'à  reietter  fon  ioug.il  fe  re 
tire,&(e  tient  comme  à  l'efcart:*:  cependît 
il  nous  donne  de  tels  Magiftrats  &  de  tels 
Princes  comme  nous  l'auons  deflerui.  Co- 
gnoillàns  donc  cela, nous  deuôs  gémir  &fou- 
fpirer  ,  &  baiiTer  la  tefte  ,  d'autant  que  nous 
fommes  chaftiez  de  nos  fautes  :  &  puis  inuo- 
quer  Dieu  qu'il  luy  plaife  de  donner  tels  Ma 
giff.ats,  que  l'ordre  de  iuftice  reluife  entre 
nous  :  c'eft  à  dire  que  nous  le  feruions  ,  qu'il 
foit  adoré  d'vn  cômun  accord  de  tous,  &  que 
toutes  diflolutiôsjchjfcs  vile'neç&mefchan 
tes  foyét  réprimées, &  qu'il  y  ait  paix  &  con 
corde, en  forte  que  nous  ne  fjyôs  point  corn 
mebeftes  fauuages.  Voila  comme  nousde- 
uons  plier  Dieu  pour  les  Magiftrats  &  ceux 
qui  font  en  prééminence.  Vray  eft  que  nous 
deuons  inuoquer  Dieu  pourtou';  Magiftrats, 
comme  il  a  cité  parlé  de  tous  hommes  en  gê- 
nerai. Car  fi  nous  voyons  des  Princes  qui 
traittent  mal  leurs  fuiets  ,  qui  renucifent  la 
pure  doftrine  de  l'Eiiangile  ,  qui  ne  deman- 
dent qu'à  mettre  tout  fous  le  pied, qui  n'ayét 
nulle  religion  en  eux, nous  deuons  bien  auoir 
compafston  &  pitié  de  ceux  qui  font  là  tour- 
mentez. Ainfiles  requtftes  que  nous  faiibns 
pour  les  Rois  &  les  Princes,  ne  font  pas  i'eu- 
lement  pour  ceux  qui  dominent  fur  nous ,  en 
forte  qu'vn  chacun  doiue  auoir  eigard  feu- 
lement à  ceux  fous  lefquel>  il  vit:  mais  en  ge 
neral  nous  deuons  prier  pour  tous  ceux  qui 
dominent.  Cepédant  notons  bien  que  fi  nous 
deuons  prier  pour  ceux  qui  font  eftranges,  & 
fous  Icfquels  nous  ne  viuons  pas:par  plus  for 
te  rai  fon  nous  deuons  bien  auoir  poirr  recoin 
mandez  ceux  qui  nous  tienent  en  leur  prote- 
tlion  Je  iuiettion,  &  que  Dieu  a  côftituez  fur 


nous, afin  que  nous  leur  foyons  fuiets.comme 
aufsi  nous  voyons  que  l'Éfcriture  en  parle,  ^"'"■li- 
En  premier  lieu  nous  auons  Je  royaume  de  "*•  '  >  O* 
noftre  Seigneur  lefus  Cbriû  qui  nous  doit  ''^^^^• 
eftre  recommandé.  Il  eft  vray  que  celuy-la  ''^•3'*» 
eft  priuilegé  par  deflîis  toutes  les  principau-  ^' 
tez  du  nionde,non  feulemét  pource  que  c'eft  '•  ""■• 
l'empire  fouuerain,fous  lequel  toute  puiflàn-  ^•'•'3' 
ce  &  hautelTe  doit  plier  ;  mais  pource  que 
c'eft  là  ou  conillic  toute  noftre  félicité  &  fa- 
lut.Mais  cependant,pourcc  que  toutes  prin- 
cipautez  du  mode  font  corne  figure  &  image 
du  royaume  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrilt, 
nous  les  deuos  auoir  precieufes,&  prier  Dieu 
qu'il  les  coDferue,&  qu'il  les  face  profperer: 
ie  di  en  premier  lieu  des  royaumes  légitimes. 
Q_iiand  chacim  fera  fous  vn  Prince  ,  ou  fous 
des  Magiftrats  en  ville  franche,  &  bien, qu'il 
prie  aufsi  Dieu.  Mais  nous  voyons  encore! 
phF:c'eftafçauoir  que  ceux  qui  font  fous  des 
tyrans ,  qu'ils  doyuent  fpecialement  prier 
pour  eux,  voire  entant  qu'ils  dominent,  & 
qu'ils  tienét  le  fiege  de  iuftice.  Et  pourquoy? 
Priez  Dieu  pour  Babylone(dil"oitle  Propne  ''"'"'•t?- 
te  Ierem!e)caren  la  paix  eft  contenue  voftre  ''■7' 
paix.  Voila  les  luifs  qui  font  tranfportez  en 
Babylone  ,  voire  non  point  que  les  Baby- 
loniens euflent  aucun  droit  fur  eux  ,  mais- 
pource  que  pour  vn  temps  Dieu  les  veut  af- 
fliger. Puis  qu'ainfi  eft  que  Dieu  a  conftitué 
les  Babyloniens  fur  les  luifs  ,  il  faut  qu'il* 
prient  pour  le  Roy,  &  pour  la  police  de  fon 
royaume.  Et  pourtant  notons  bien  ce  que 
nous  deuons  faire  quandnons  auons  des  Ma- 
giftrats Chreftiens  ,  Magiftrats  protefteurs 
de  la  religion,  &  d'ordre  Se  de  iuftice  :  com- 
bien plu':  deuons-nous  eftre  enflammez  à  les 
auoir  recommandez  enuers  Dieu:  Voila  dôc 
l'ordre  que  nous  auons  à  obferuer  ,  c'eft  que 
en  gênerai  nous  cognoifsions  puis  que  Dieu 
a  eftabhla  police  de  ce  monde,  qu'elle  nous 
doit  eftre  precieufe  :  &  que  pourcefte  caule 
nous  deuôs  prier  pour  ceux  qui  font  en  pree 
minence  &  dignité  :  mais  qu'vn  chacun  doit 
prier  pour  fon  Prince,  ou  pour  fes  Magi- 
ftrats félon  que  fera  l'eftat  du  pays,  voire 
par  finguliere  recommandation.  Et  puis  ,  fi 
par  le  moyen  des  Magiftrats  qui  dominent 
fur  nou^Ja  religion  a  fon  cours  &  fa  vigueur,, 
que  Dieu  foit  honoré  &  ierui  comme  il  ap- 
partient, qu'il  y  ait  paix  &  tranquillité  ,  que 
nous  cognoifsions  que  Dieu  nous  donne  tarit 
phisd'occafion  pour  le  prier,  afin  qu'il  main 
tieneceft  ordre,  &  qu'il  ne  permette  point 
qu'il  dechee  ,  &  encores  moins  qu'il  perifle,. 
mais  que  pluftoft  il  <'augmétc,  &  qu'il  fe  con- 
ferme  de  plus  en  plus.  Nous  voyons  mainte- 
nant à  quoy  prétend  ùinft  Paul, quand  il  dit 
qu'on  doit  faire  prières  pour  ceux  qui  font 
en  dignité.  Cependant  il  nous  faut  bien  no- 
ter ce  que  l'ay  défia  dit  :  c'eft  afçauoir  qu'ici 
il  nous  propole  les  traces  q  Dieu  nous  eflar 
git  par  la  main  des  Magiftrats,  afin  que  nous 
1.  i. 


6t  ONZIEME 

foyons  tant  plit";  affedioncz  enuers  eux.  Car 
nous  fçauons  quel  eft  Torgueildes  hommes, 
iufques  à  ce  que  Dieu  les  ait  dontez  par  fon 
fiinâ  Erprit,&:  qu'il  leur  au  apprins  que  c'cll 
d'hamilicé.chàcunvoudroit  citre  roy  de  to', 
&t)'yaccluy  qui  ne  nourrifle  vne  opinion 
de  ("oy.qu'il  mérite  bien  d'tftre  préféré  àto' 
autres.  Voila  donc  comme  les.hommes,com- 
bien  qu'ils  l'oyent  côuaincu-  quMs  ne  fe  peu 
uentpaircrde  pol.ce.ne  vculein aucunement 
s'aiFuiettir  linon  que  Dieu  les  prcfle  ,  &■  les 
amené  à  raifonpar  torce.  Il  elt  vray  que  la 
plus  part  eftâs  côuaincus  qu'ils  ne  font  point 
capables  degouuernei',louifriront  Icgouuer 
nemcnt  public:mais  fi  cft-ce  qu'ils  ne  le  font 
point  d'vn  courage  alaigre  ,  linon  ceux  que 
Dieu  a  enfcignez  (  comme  famtt  Paul  nous 
amené  lA  )  c'elt  afçauoir  qui  cognoiffcnt  que 
noltre  Seigneur  a  voulu  choifir  ceux  qui  do- 
minent comme  miniftrcs  de  (a  bonté,  iS;  qu'il 
nous  veut  gouuerner  parleurs  mains:  &  d'au 
tant  que  nous  asonsbefoin  qu'il  prefide  fur 
nous ,  qu'il  choiiit  ceux  que  bon  luy  femble, 
alin  qu'ils  exercent  fon  office.  Ceux  qui  font 
refolus  de  ce  poindt.s'ailuiettirôt  volontiers 
à  la  luftice  de  ceux  qui  dommcnt  :  m.iis  nous 
ferons  touliours  fauuages ,  iufqucs  à  ce  que 
cefte  raifonait  gaigné  fur  nous.  Sainft  Paul 
donc  nous  met  ici  au  deuant ,  que  ceux  qui 
font  en  prééminence, font  que  nous  menions 
vie  paiiîble,que  nous  accordions  en  la  crain- 
te de  Dieu, 5c  en  toute  hônefteté. Voila  pour 
vn  item.  Or  nous  pouuons  ici  recueillir  quel- 
le perte  c'eft  quand  les  hommes  voudront 
auoir  vn  meflinge,&  qu'ils  voudront  rcnuer- 
ler  la  police. Il  faut  bien  que  telles  gés  foyét 
plus  qu'infenfez,&  que  le  diable  les  ait  com- 
me enforcelez  :  comme  on  en  a  veu  de  noftre 
temps  qui  vouloyent  cela ,  afçauoir  que  fous 
ombre  de  Chre/litnté  ils  tafchoyent  d'abo- 
lir tout  ordre,qu'il  n'y  cuft  plus  de  police  en 
ce  monde.  Util  vray  qu'ils  faifoyent  fem- 
blantd'eftre  fpirituels:  mais  c'eftoyen:  dia- 
bles qui  eulTent  voulu  peiucrtir  toute  iuima- 
nité,&  mettre  vne  telle  conrufion  &  fi  horri- 
ble ,  qu'il  vaudroit  mieux  que  les  liômcs  fuf- 
fen:  deuenusbi.ftes  brutes  ou  loups-garoux, 
qued'auoir  vn  telmeflmge.  Pour  ce  taire  ils 
allèguent  que  noftre  Seigneur  lefus  a  renou 
uelé  le  monde:5;  puis  ,  que  fon  Royaume  eft 
fpihtuel, qu'il  ne  faut  pP  de  glaiuc  matériel, 
qu'on  ne  doit  plus  vfer  de  force  ne  contrain- 
te,&  chofes  f^mblables.  VoirerEt  qujd  il  eft 
ditquelafus  Chrift  eft  venu  pour  renouucl- 
larlemonde,cft-ce  que  cefte  nouue.iute  fe  fa 
ce  &  s'accopIilTc  en  vn  iour?Il  s'en  faut  beau 
coup  ;  c'eft  aflcz  que  nous  profitions  à  eftre 
reiiouufltz  ,  voue  tellement  que  nous  pour- 
fuiuiosccla  tout  le  temps  de  noftre  vie.  lefus 
U->-  f-'7  Chnft  a  bien  certotiice-Ja  (comme  l'Efciitu 
i.Cor.f .  re  le  inonftre^qu'il  nous  face  nouuelles  créa  - 
'7-  tures  :  mais  cependant  nous  feroiio  tculiours 

menez  en  partie  de  noftre  vieille  peau  ,  (ni''tl 


SERMO  N 

y  aura  beaucoup  de  reliqua  du  vieil  homme 
en  nous. Et  ainfî,iufques  à  ce  que  nous  foyôs 
femb labiés  aux  Anges  de  paradis,  nous  auons 
befoin  de  quelque  ordre  &:  bride  qui  nous  tie 
ne  fous  noftre  mefure,&iufques  a  ce  que  no* 
foyons  pleinement  reformez  à  l'miage  de 
Dieu.  Ainfi  notons  bien  qu'ici  fain£t  Paul 
nous  déclare  que  nous  ne  deuons  point  obéir 
aux  M.igiftrats  feulement  ciaignans  d'eftre 
punis,  pource  qu'ils  ont  le  glaïue  aupoing: 
mais  pource  qu'ils  nous  font  miniftres  de  la 
grâce  de  Dieu,  que  nous  les  deuons  &:  hono- 
rer &  aimer  :  &  que  fi  nous  les  reiettons ,  ou 
que  nous  detradions  contr'i.ux,  c'eft  vne  in- 
lure  qui  s'addrellè  à  Dieu  ,  &  non  point  aux 
hommes  mortels:  &  par  cela  nousraonftrons 
noftre  ingiatitude.il  dit  bien  au  trezicme  des 
Roinâins,Q_ut'  quicôques  mefpnfera  la  puif- 
{ance  ,  celuy-la  eft  rebelle  à  Dieu.  Et  pour- 
quoy?  car  ce  n'eft  point  à  l'âuencure  que  les 
hommes  dominent ,  que  les  fcigncuries  ont 
efté  cftablies  comme  on  les  voit  :  cela  vient 
de  la  prouidence  de  Dieu.  Il  nous  faut  donc 
alluiettir  aux  Magiftrats,  non  point  pour  Pi 
re,mais  pour  la  confcience.  Mais  la  Icntence 
redouble  :  pource  que  nous  ferons  rcbtlles  à 
Dieu  CHCorcs  plus,  &  noicre  ingratitude  fera 
trop  vileine,fi  nous  n'obeifTons  aux  bons  Ma 
giftrats  &  fidèles,  cognoillans  les  biens  que 
Dieu  nous  diftribue  par  leurs  niains:c'eif  que 
noltre  vie  feioit  plus  que  brutale,  finon  qu'il 
y  euft  quelque  gcuuernement&  régime  par 
delTus.Pour  côcluiîon  notons  que  fainft  Paul 
a  ici  compris  ce  qui  duit  fcruir  pour  enire- 
tenirle  genre  humain.  Il  y  a  donc  tro'S  cho- 
fes qu'il  met  ici, la  paix,&  la  religion, &  l'hô- 
nefteté.  Quand  il  met  la  paix, c'eft  pour  mon 
ftrerque  les  hommes,  combien  qu'ils  foyent 
d'vnemefme  nature,  ne  fepourroyent  com- 
porter ,  finon  qu'il  y  euft  quelque  bride  pour 
les  tenir.  Les  loups  fe  cogno  illent  bien  par- 
mi les  bois  Si  foreits,  &  les  autres  beites  fau- 
uages  :  mais  il  y  a  vne  nature  fi  perutrfe  ans 
hommes, combien  qu'ils  foyent  crcczà  l'ima 
ge  de  Dieu  ,  qu'à  grand' peine  chacun  pour- 
roit  foutfrir  fon  compagnon  vn  iour,n'«itoit 
que  Dieu  dominaft  par  defîus.Il  tft  vray  que 
cela  ne  i"e  verra  point  toufiours  à  l'œil:  mais 
quand  tout  fera  bien  confideré  ,  on  trouuera 
qu'il  eft  ainficôine  faiiuft  Paul  en  paile.  Voi- 
la quant  .lia  paix.Et  puis  il  y  a  vne  chofeque 
no'u:  deuons  encorcs  auoir  en  plus  grande 
eftimc  Se  rcuerencc  :  c'eft  afçauoirla  crainte 
de  Dieu  ,  quand  les  Magiftrats  iont  confer- 
uatcurs  de  la  viaye  religion.  Il  eft  vray  que 
ceci  ne  fe  voit  pas  trop  bien  pratîiqué  de  no 
ftre  temps  :  car  auiourd'huy  ceux  qui  domi- 
ner, au  lieu  de  maintenir  l'honneur  de  Dieu, 
ils  l'oppriment ,  (Sole  foullent  au  pied.  Ma, s 
tant  y  a  que  c'eft  le  vray  office  qui  appartiét 
aux  Princes  &:  Magilhars,  de  faire  que  Dieu 
foit  adore  .îv;  ferui.Et  les  payens  incfmcs  ont 
bien  cognu  cela;  voire  iionobftant  qu'ils  fi;r- 

fci.c 


SVRLAT.    ATIMOTH. 


«T? 


fent  poures  aueiigles,&  qi^au  lieu  du  pur  fer- 
iiice  de  Dieu  ils  enflent  introduit  beaucoup 
de  fuperftitions  &  idolâtries  mcfchante»; ,  fi 
eft-ce  qu'ils  ont  eu  celle  maxime  &  cefte  rei 
gle  générale  ,  qu'ils  auoyent  befoin  de  l'or- 
dre de  iuftice ,  pour  faire  que  Dieu  fuft  ado- 
ré. Or  puis  que  Dieu  a  tant  honoré  les  Magi 
ftrats ,  que  de  no/lre  cofté  nous  ne  foyons 
point  lafches  de  leur  rendre  ce  que  S.  Paul 
déclare  ici,  c'eft  qu'en  leur  obeiflànt  nous  re 
cognoifsions  combien  nous  femmes  tenus  à 
eux.  Il  y  a  en  troifieme  lieu  ccRe  hôneftcté 
qu'il  met  :  car  lemot  aufsidont  il  vfe  ,  em- 
porte règle  de  tempérance  :  comme  s'il  di- 
foit  que  c'eft  l'office  des  Magiftrats ,  d'eftre 
vigilans  &  attétifs  pour  garder  que  les  hom 
pies  ne  foyent  dillolus  :  que  s'ils  ne  prenent 
garde  à  cela, il  n'y  aura  plus  de  difcretion  de 
bien  ne  de  mal,  m  honte  d'aucune  turpitude, 
tellement  que  les  chofes  iront  comme  entre 
ies  chiens  &  pourceaux  :  brief  ,  les  hommes 
mettront  en  oubli  leur  nature  ,  iufques  à  ce 
que  par  le  moyen  des  Magifliats  noftre  Sei- 
gneur nous  ait  eflargi  vn  tel  bien. Et  ainfi  no 
tons  que  ceci  nous  doit  d'autant  plus  inciter 
a  le  prier  qu'il  vueille  conieruer  les  polices 
qu'il  a  mifesau  monde  ,  &  qu'il  vuelllegou- 
uerner  par  fon  ûwtl  Efprit  ceux  qu'il  a  con- 
ftituez  au  lîege  de  ii;ftice,&  qu'il  les  guide  tel 
lemcnten  toute  droiture  &  en  tout  bien,  que 
nous  fentions  qu'il  domine  Se  par  deflus  eux, 


&  par  leur  moyen  pardefTus  nous ,  a/în  que 
d'vn  commun  accord  il  foit  honoré  &  ferui 
de  tous:&  que  cependant  il  ait  fa  main  eften- 
due  pour  nous  auoir  en  fa  pro  teil!tion,&  pour 
nous  entretenir  non  feulement  en  bône  paix 
cependant  que  nous  viuron^  en  ce  mode  fous 
l'obeifiance  de  ceux  qu'il  a  ordénez  pardcf- 
fus  nous,  mais  qu'il  nous  face  toufioursafpi- 
rer  à  ce  Royaume  éternel  qu'il  nous  a  appre- 
fté  ,  côme  il  nous  a  eflc  acquis  par  le  fang  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift. 

O  R  nou";  -nous  prollernerons  deuant  la  fa 
cède  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  tantes,  le  prut  qu'il  nous  les  face  mieux 
fèntir  ,  tellement  qu'eftans  confus  en  nous- 
mefmes,  nous  ayons  tout  noftre  refuge  à  luy 
pour  le  prier  qu'il  luy  plaife  nous  reccuoirà 
merci  ,  en  nous  pardonnant  tant  d'iniqnitez 
&  oifenfes  que  nous  auons  commifes.  Et  que 
d'orefenauâtil  nous  vueille  corrit^er  de  tous 
nos  vices,  tellement  que  nou^  ne  cherchions 
finon  à  glorifier  fon  fainÛ  nom,  fermant  la 
bouche  à  tous  malins  &  mefdifans  :  &  qu'vn 
chacun  s'efforce  en  fon  endroit  d'entrete- 
nir paix  &  concorde  auec  fe^  prochains,  tel- 
lement que  nous  viuions  tous  enfemble  en 
bonne  vnion  fraternelle  pour  féruir  à  la  c^loi 
re  de  ce  grâd  Dieu, au  nom  cS,:  en  la  perfonne 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  fô  Fils.Qjie 
non  feulement  il  nous  face  cefte  grâce  ,  mais 
aufsi  à  tous  peuples  &:  natiôs  de  la  terre,  &c. 


PREMIER      SERMON       SVR      LE     se- 
cond   CHAPITRE. 

T  I  exhorte  donc  que  deuant  toutes  chofes  on  fjic  e  recjuejies,  orai 
fans  Jûpplicat  ions,  (f  acïions  de  grâces  pour  tous  hommes, 

i  Vour  les  Ro;V,  çy  pour  ceux  qui  font  coflitue^  en  dignité ydjin 
que  menions  viepaifék  ^T  tranquille  en  toute  pieté  CX  honnejîeté. 


Ous  auôs  défia  déclaré  quel 
le  ell  l'intention  de  famtT 
Paul  en  ce  palTage:  c'eft  a- 
fçauoir  que  les  lîdeles  ne 
pnét  point  fculemét  pour 
le  corps  de  l'Eglife,  mais 
pour  tous  hommes  en  gênerai  :  fclsn  aufsi 
^ue  le  Seigneur  lefus  nous  exhorte  de  bien 
faire  à  ceux  qui  nous  perfecutcnt ,  &  prier 
pour  ceux  qui  nous  maudilTent.  Car  nous  ne 
fçauons  pas  s'il  plaira  à  Dieu  de  leur  faire 
inerci,&  ies  ramener  au  chemin  de  f.!lut:mef 
mes  nous  en  deuons  bien  efperer,  puis  que 
tous  font  créez  à  l'image  de  Dieu.  Et  puis 
que  noftre  falut  ne  procède  q  de  li  pure  bôté 
&  gratuite  de  noftre  Dieu  ,  pourquoy  cft-ce 
qu'il  ne  fera  le  femblable  a  ceux  qui  font 
maintenant  en  train  de  perdition  cômc  nous 


auons  efté?  Voila  donc  comme  les  ?îd clés 
doiuét  auoir  louci  de  ceux  qui  ne  font  point 
encoresconioints  auec  eux, mais  pluitollleur 
font  ennemis  mortels.  (3rd'autant  que  pour 
lors  les  Rois  &  les  Princes,  &  toutes  gens  de 
iuftice  eîloyent  fort  contraires  à  l'Euangi- 
le,lain£l  Paulnotamcnt  parle  d'eux,  afin  oue 
les  fidèles  1  cachet  qu'ils  ne  les  douient  point 
du  tout  rcietter,  attendant  que  Dieu  les  in- 
troduifeau  bon  chemin.  Làdeflus  il  mon- 
ftre  combien  il  cft  vtile  à  tous  d'auoir  geoï 
qui  nousgouuernent.  Car  fans  la  police  il  y 
auroit  vne horrible  confuiion  au  monde  :  & 
on  le  voit  par  les  fruifts  que  fainrt  Paul  tou- 
che ici.  C'cft  en  premier  lnu  que  par  le  mo- 
yen des  Princes  &  des  Magiftrats  ,  &  gens 
de  milice  nous  auons  concorde  ,  &:  fomnies 
paifibles  entre  nous.  Car  voila  pourqujy 


6^ 


DO  VZIEME      SERMON 


^es  Mâgifirats  font  armez  du  glaiue  &  du  ba- 
ftonde  iullice  ,  afin  qu'ils  empefchent  que  le 
plus.fort  ne  l'emporte  point,  que  le?  violen- 
ces &  outrages  foyent  réprimées  par  eux, que 
les  bous  foyent  maintenus.il  y  a  fecondemét 
que  nous  auons  quelque  honnefletc  entre 
"nous, laquelle  n'y  feroit  pas.  Car  s'il  n'y  a- 
uoit  loix  S:  quelque  ordre  de  iuflice.la  vie  des 
hommes  feroit  brutale,  il  y  auroit  vne  difsi- 
pation  telle  qu'on  s'addonneroità  toute  vi- 
lenie &  ordurc.que  les  choies  feroyent  &  in- 
fâmes &  énormes.  Comme  nous  voyons  mef- 
mes,  nonobilant  qu'il  y  ait  des  loix  &  ftatuts 
pour  guider  les  hommes  en  quelque  tempé- 
rance &  honncfteté,que  beaucoup  neatmoins 
fe  desbordent.  Or  que  feroit-ce  s'il  n'y  auoit 
nulle  barre, &  que  tout  fuft  licite  à  chacun  ?  Il 
eft  certain  que  les  hommes  feroyent  abandon 
nez  à  vne  confufion  plus  eitreme  &  exor- 
bitante que  les  bcftes  brutes.  Et  puis  il  y  a  le 
principal, C'eft  que  Dieufoit  ierui  &  honoré. 
Ces  chofes-)a  donc  monfrrent  quel  befoin 
nous  auons  d'eftre  fous  quelque  bride,  &  que 
ilyait  desRoisou  Princes, ou  Magiftrats  qui 
gouuerncnt.  Par  ceci  nous  voyons  que  l'eftat 
des  Princes  &  gens  de  iufticeiiVfl  point  con- 
traire à  la  Chreftienté,  cônie  aucune  phanta- 
fliques  l'ont  cuidé.difms  que  nul  Chreftié  ne 
doit  eftre  afsis  au  iîege  de  iu/tice,  &  qu'il  fau- 
droit  que  tout  le  genre  humain  fiiû  abbatu 
pour  eftablir  le  règne  de  noilreSeigneur  lefus 
Chrifl.II  faut  bien  que  tel',  cerneaux  foyét  du 
tout  infenfez  ,  &  que  Satan  leur  ait  ofté  tout 
fens  &  raifon.  Car  la  Chreftiété  eft-ellc  repu 
gnanteà  vie  hônefl:e& modérée.'  e/}-elle  con 
traire  à  la  paix  &  concorde  .>  n'e/l-ce  pas  la 
vraye  règle  de  bien  feruir  Dieu  .' Or  l'office 
des  Magiftrats  tend  à  ceûe  Hn-Ia  .  Il  s'enfuit 
donc  q  ce  font  chofes  côiointes  &  vnies,  &  q 
on  ne  doit  point  feparer.  Vray  eftque  noftre 
Seigneur  Icfus  abiéregnéaumôde  endefpit 
des  Princes, &de  tous  ceu?>-  q  auoyét  le  glaiue 
en  la  main. Et  ne  lautpasauf  i  qla  religiô  foit 
fondée  fur  eux. Car  qu.id  ils  fevoudrôt  eleuer 
.  à  rencotrc,  il  faudra  q  ce  qui  elt  efcrit  au  Pfe 

■''•'■  ■^•aume, foit  accompli  :  c'tftafçauoir  que  lefus 
Chrift  les  cafre,&  qu'il  abbatte  leur  rébellion 
de  fon  fceptre  fpiritucl  comme  d'vn  barreau 
de  fer  :  qu'il  les  mette  fous  fes  pieds,  &  qu'il 
les  rende  côfus  en  leur  audace  &  en  leur  her- 
té.Mais  cependant  fi  les  Magillracs  s'acquit- 
tent deuemét  de  leur  office.nous  verrons  que 
il  y  a  vne  bonne  vnion  entre  ce  qu'ils  font,  & 
l'ordre  du  règne  de  noflre  Seigneur  Icfus 
Chrift.Et  ainfi  notôs  bien  ce  paflage  où  fainft 
Paul  veut  q  nous  prions  pcnir  les  Àlagiftrats, 
afin  qu'ils  loycnt  maintenus  6;  confcrucz  :  & 
niefmes  il  eftdit.afin  que  nous  feruiôs  à  Dieu, 
&que  la  religion  foit  maiiucmic  en  fon  pur 
cftat.  Puis  que  l'office  des  Magi/lrats  tend  à 
cela,  il  s'enfuit  qu'5  ne  les  doit  pointcycluie 
de  l'Egiife.niais  qu'ils  en  fôt  vne  partie  &  \n 
membre  excclleiu,&  non  point  du  rang  com- 


mun.Et  voila  pourquoy  aufsi  quand  les  Pro- 
phetesont  parlé  du  règne  de  noftreSeigneur  'if't'So. 
lefus  qui  eftoit  alors  avenir  ,  notaniment  ils  î.io«il» 
ont  exhorté  les  Rois  &  les  Magiftrats  de  luy 
faire  hommage.  Vray  eft  que  ceci  appartient 
à  tous, qu'on  facrifie  a  Dieu  en  la  perfonne  de 
fon  Fils, qu'on  s'humilie,&  qu'on  ployé  le  ge 
nouildeuant  luy, qu'on  fecôfacreàfon  obeif 
fance,qu'vn  chacun  s'employe  à  maintenir  la 
pure  vérité  de  l'Euangile:  mais  il  y  a  exhor- 
tation fpeciale  qui  s'addrefle  aux  Rois.  Et 
pourquoy;  Pource  qu'il  y  a  double  obliga- 
tion en  eux, à  caufe  qu'ils  font  eleuez  en  vne 
dignité  plus  haute.qu'il  faut  auf.i  qu'ils  fe  co 
gnoiffét  efire  plus  tenus  à  Dieu,&  qu'ils  Pet- 
forcent  d'auantage  à  maintenir  l'ordre  de  l'£ 
glife&  laChrefttnté.  Voila  pourquoy  il  cfl  ^j""*-7- 
dit, Que  les  Rois  viendront  d'outre  mer, afin  ''^•"• 
d'apporter  prefens  Se  ob'ations  facrees  à  ^/'•^-  '° 
Dieu, quand  Dauiddit,Vous  Rois  entendez, 
&:vous  iuges  delà  terre  apprenez.  Etquoy? 
l'intelligence  n'efc-elle  pas  commune  aux 
plus  petisf  Oay  bien:mais  il  tant  que  ceux-là 
montrent  le  chemin ,  d'autant  que  Dieu  les 
approche  plus  près  de  foy, ayant  imprimé  fa 
gloire  &  (a  maieJlé  en  eux:il  faut.di-ie,  qu'ils 
ayent  tant  plus  de  prudence,  &:  qu'ils  appre- 
nent  les  premiers:  fuyuant  auAi  ce  quieftoit 
ordonné  en  la  Loy.queleRoy  du  peuple  de-  H'u.  17, 
uoitauoirvn  liure  exprès  de  la  Loy,afîn  qu'il  iS.i>. 
cognuft  que  fi  les  autres  efioyent  tenus  de 
profiter  en  l'efchole  de  Dieu,  il  laloit  qu'il 
fuftauancéle  premier.  Voila  pourquoy  aufç( 
le  Prophète  liaie  déclare  ,  Que  les  Rois  fe- '/»• 'i'o.  ^ 
ront  nourriciers  del'E^life  Chreftienne.  Il  iS. 
ne  parle  point  de  l'ellat  ancien  qui  fftoit  fous 
les  Prophètes  :  mais  quand  lefus  Chrift  fera 
apparu, qu'il  faudra  que  les  Rois  foyent  pro- 
tefteurs  de  la  Chrcflienté  ,  que  les  Roines  en 
foyent  mères  nourricières.  Nous  voyons  dôc 
que  noftre  Seigneur  lefusa  voulu  recueillir  à 
ioy  &  grans &  petis  ,afin  qu'il  foit  honoré  de 
tous,  &  que  ceux  qui  font  en  dignité, s'humi- 
lient deuant  luy,&  aue  nous  foyons  tous  con 
ioints  ,  &  que  d'vn  commun  accord  nous  le 
feruions.fçachansque  l'empire  fouuerainluy 
a  cfté  donné  de  Dieu  fon  Père,  afin  que  tout 
genouil  foit  ployé  deuant  fa  maitfté.Ccci  eft 
bien  neceiraire,afin  que  les  fuiets  de  leur  part 
foyent  mieux  affedionnez  de  fe  ranger  à  l'o- 
bciflànce  de  la  iultice,  &  de  ceux  qui  tienêt  le 
glaiue.  Car  nous  fçauons  l'orgueil  qui  eft  es 
hômcs,&  en  leur  nature, &  qu'ils  ne  s'alTuiet- 
tiffentpas  volôtiers,  finnn  qu'ils  cognoiflent 
que  la  volôté  de  Dieu  eft  telle.  Q^iand  nous 
fcauôsque  les  Princes  &  gens  de  iuftice  iont 
corftituez  de  Dieu  ,  Si  mefmes  qu'ils  ne  font 
point  afsis  côme  par  violence,commefi  Dieu 
nouschaftioit  par  la  main  des  brigans  ,  mais 
qu'ils  font  là  cômc  lieiitenas  dcDieu.cV  qu'ils 
rcprcfcntcnt  Ç.\  perfonne:  &  cependant  qu'ils 
f  inf  mébre  de  l'Eglife,  voire  honorables,  & 
q  noftre  Seigneur  lefus  veut  q  fa  gloire  reiui- 

fe  en 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH. 


6p 


fe  eh  eux,&  qu'ils  foyent  fes  officiers  :  quand 
donc  nous  cognoiffons  cela ,  nous  auons  bien 
occafion  de  nous  humilier,  non  point  par  for 
ce.mais  de  noftre  bon  gré,  fçachans  que  c'ell 
vn  feruice  agréable  à  Dieu ,  que  les  fuiets 
foyent  en  telle  raodeltie  qu'ils  obeillènt  à 
leurs  fuperieurs.Et  cependant  ceux  qui  domi 
nent,  ont  aufsi  occaiîon  de  s'efiouir ,  veu  que 
Dieu  les  reçoit  de  fon  troupeau  ;  Et  puis  ils 
doiuét  eftre  incitez  de  s'acquitter  de  leur  de- 
uoir,  fçachans  que  c'eft  vne  vocation  bonne, 
&que  Dieu  approiiue. Car  s'ils  n'auoyent  ce- 
fte  cognoilTance-la.queDieu  fe  veut  ieruir  de 
eux,&que  l'eftat  qu'ils  eiercent.eft  légitime, 
que  feroit-ce?Ili  feroyent  touiîours  en  trou- 
ble:&  puis  ils  s'abandonneroyent  à  mal. Mais 
quand  ceci  leur  eftbien  perûiadé  &  refolu, 
que  l'eftat  où  ils  font,  n'a  point  elle  inuenté 
des  hommes  àl'auenture.mais  que  Dieu  l'a  e- 
Habli,  &  qu'il  veut  qu'on  cognoifle  que  c'eft 
vne  vocation  fainâ:e,alors  ils  doiuent  bien  e- 
ilre  efmeus  de  s'acquitter  fidèlement  de  leur 
deuoir.Et  il  n'y  a  nulle  doute  que  iâincl  Paul 
n'ait  ICI  voulu  bailler  k  règle  aux  Rois  &à 
tous  Magiftrats:&auAi  à  l'oppoiîte  monftrer 
quelle  condamnation  leur  eft  appreftee,quâd 
ils  pollueront  le  iîege  qud  Dieu  a  dédié  à  vn 
vfage  fi  bon  .S;  fi  excellent  pour  tout  le  genre 
humain,  voire  &  lequel  fc  doit  rapporter  à  fa 
gloire.qui  eftle  principal.  Voila  donc  ce  que 
les  Princes  &  les  Magilhats  doiuent  recueil- 
lir de  ce  paflàge,  c'elt  qu'ils  auront  à  rendre 
côte  à  Dieu,  puis  qu'il  les  a  eleuez  en  celle  di- 
gnité-la,&:  qu'il  les  a  conftituez  comme  en  fa 
place,&  qu'il  veut  qu'ils  dominent  comme  en 
fa  propre  perfonne  :  Ainfi  Moyfe  S:  leholiia 
_  .  ,  remonlhoyentaux  luses  qui  eftovenc  ordon 
nez  par  eux,  Aduliez  liJcn,vous  n  cites  pas  ici 
en  voftre  nom  priué,  \m  hommes  ne  ferôt  pas 
vosgarents:mais  c'eft  à  Dieu  à  qui  l'honneur 
appartient  de  dominer  par  deflus  tous  :  or  il 
•  veut  que  vous  luy  foyez  ofhciers,&  que  vous 
teniez  ù.  place.Puis  qu'amil  eftdôc, cheminez 
en  crainte  &  en  folicitude  ,  cognoilTans  que 
c'eflvnfacrilegedettitablefi  vous  polluez  le 
fiege  de  lulHce  que  Dieu  a  confacré  à  l'oy  &  à 
fa  maiefté.Et  ainii  il  faut  bien  que  les  Princes 
&gens  de  iullice  regardent  de  près  à  eux.i  ça- 
chans  qu'ils  font  côtables  à  Dieu,&  qu'il  fau- 
dra qu'ils  côparoiflent  deuat  le  Seigneur  le- 
fus  pour  rêdre  côte  de  leur  office  qu'ils  aurôt 
exercé  .  Et  cependant  auAi  S.Paulmonllre  à 
quoy  ils  fe  doiucnt  employer, c'cfl  que  les  hô 
mes  foyét  maintenus  en  bône  paix,  qu'vn  cha 
cun  ait  ce  qui  luy  appartient ,  que  nul  ne  foit 
fouUé  ni  outrage, que  fans  acceptiô  de  perfon 
nesilsregardét  d'eftre  toufiours  pour  le  droit 
&  l'cquite.qu^il  n'y  ait  point  de  fupport  ne  fa 
ueur,  qu'il  n'y  ait  point  de  haine  nedeven- 
geance:&  cepédant  qu'il  y  ait  vne  honneileté 
&  attrempam-e,q  la  vie  ne  foit  point  dilToliie, 
qu'il  n'y  ait  point  d'en ormittz  ,  mais  qu'ils 
tienent  les  hommes  en  bride  pour  reprimer 


leurs  appétits  brutaux:  &  fur  tout  qu'ils  main 
tienent  l'honneur  de  Dieu,  &  la  j  ure  &  droi- 
te religion. C'eft  la  leçon  q  eft  ici  donnée  aux 
Magiftrats,&fur  tout  à  ceux  qui  veulent  eitre 
tenus  &  reputcz  fidèles. Car  fi  les  Payés  &  in- 
crédules ne  font  point  à  excufer,  que  fera-ce 
de  ceux  qui  prétendent  le  nom  de  Dieu,&  qui 
veulent  eftre  aufsi  aduoucz  pour  Chreftiens? 
Cependant  voici  vne  menace  qui  leur  doit 
bien  faire drefler  lescheueux  en  latefte,  que 
ce  paflage  contient,  quand  ils  ne  s'acquitte- 
ront point  de  leurdeuoir.  Voila  dôc  l'ordre 
de  Dieu  qui  cftinuiolabie. Voila  pourquoy  il 
a  eftabli  les  Rois  &  [es  Magift;ats,&  la  police 
humaine,  c'eft  en  premier  lieu.  Que  nous  -ri- 
uio>is,dit  faintt  Paul.e»  toute  pietc.Q_vÇempor 
te  ce  motdepieré  ?c'cft  Phonneurde  Dieu, 
quand  il  y  a  vne  religion  pure&  fainûe  entre 
nous.  Par  ceci  les  Magiftrats  font«duouez 
quand  ilsdefployeiont  le  glaiue  contre  ceux 
qui  troublent  l'Eglife,  cotre  tous  hérétiques» 
&ceux  qui  fement  erreurs &:faufles  opinions,. 
&  ces  phantaftiques  qui  font  menez  de  Te-» 
fprit  de  Satan,  qui  auiourd'huy  voudroyent 
qu'on  donnaft  vne  licence  impunie  à  ceux  qui 
taichent  de  renuerfer  la  vérité,  .iceur  qui 
rompent  l'vnion  de  la  foy,  &  la  paix  de  l'E- 
glii  tellement  qu'ils  inonftrent  bien  qu'ils 
bataillentà  l'encontre  de  Dieu,  &  que  c'eft 
Satan  qui  lespoufle  à  cela.Carnous  oyons  ce 
que  le  faintl  Efprit  prononce  par  la  bouche 
de  fainft  Paul  :  c'eft  afçauoir  que  Dieu  com- 
mande aux  Magiftrats  de  maintenir  la  pure  re 
ligion.Mais  au  refte.quand  ils  ne  le  feronc,v- 
ne  telle  lafcheté  ne  demeurera  point  impu- 
nie. Pourquoy? D'autant  qu'ils aneantilTent 
l'ordre  de  Dieu  entant  qu'en  eux  eft.Sont-i  le 
dignes  d'eftre  ainfi  exaltezPQjri  eft  l'homme 
mortel  qui  s'ofera  attribuer  cefte  dignité-U 
d'eftre  afvis  au  lieu  de  Dieu,  au  fiege  qu'il  a 
conihcré  àfamaiefté?  qu'vne  vermine  &  pour 
ri  ture  foit  là;Or  voici  Dieu  qui  fait  ceft  hon- 
neur aux  créatures  qui  en  font  indignes,  de 
leur  tendre  la  main,  &  leur  dire,  le  veux  que 
vous  foyez  mes  lieutenans  :  &  cepédant  ils  ne 
tiendront  conte  de  celuy  qui  lésa  là  eleuez: 
ils  foulfriront  que  fa  gloire  l'oit  mife  fous  le 
pied, que  fon  nom  foit  prophané,  que  fon  fer 
uice  fou  expofé  atout  opprobre,  qu'il  y  ait 
meflinge  confus  par  tout  :  ne  voila  point  vne 
ingratitude  par  trop  vilaine.=Si  vn  homme  lai  f 
foi  t  feulement  fa  maifon  en  la  garde  d'vn  fien 
ami,&  qu'il  luy  dit,Faites  bône  cherede  mon 
bien,traittez-vous  comme  ma  perfonne:mats 
cepédât  faites  q  la  maifô  ne  fedifsipe  point, 
que  mes  feruiteurs  ne  foyent  point  corrôpus 
ni  desbauchez.iufques  à  ma  venue:  fi  celuy-la 
failbit  vn  borceau  de  la  maifon  qui  luy  auroic 
efté  cômife,qu'ilaJlaft  aliéner  les  titres  &  in- 
Itriunens  pour  priuer  le  maiftre  de  fa  maifon, 
qu'il  induifiil  les  feruiteurs  à  couper  la  gorge 
au  maiftre  quand  il  feroit  de  retour,&  qu'il  y 
meift  vne  confuiîon  plus  que  brutale,  le  vous 

i.iii. 


70  DOVZIEMESERMON 

prie,  vn  telhômenemeriteroit-il  pas  d'eflre 
tiré  à  quatre  clieuaux?Ne  fertoit-ii  point  elti- 


tire  a  quatre  cneuaux.'iNe  leroit-U  po 
mé  comme  vn  monftre  deteftable?  Il  cftbien 
certain.  Or  voici  le  Dieu  viuant  qui  confKtue 
vne  poure  créature  mortelle  pour  rafTeoir  en 
fonfit'ge,&  dire,  le  veux  que  tu  reprefentes 
ma  perfonne,  mais  à  celle  condition  qie  foye 
ierui  &  honoré.CarDieu  ne  veut  pas  icfigner 
fondroiû.pourdire  qu'il  federogue  en  nen, 
re  qu'il  preiudicie  à  fa  gloire,  ne  qu'il  amoin 
drilM;:&  cependant  voici  l'homme  mortel  qui 
ibuffrira  que  la  venté  de  Dieu  foit  vilipen- 
dée,qu'on  fe  moque  de  luy,&  que  la  façô  que 
il  a  ordonnée  pour  régner  entre  les  hommes 
foit  abolie:&  cela  eft-il  tolerable?Ainlî  donc 
que  les  Magiftrats  cognoiflent  bien  quelle 
condamnation  il  y  aura  fur  leur  tefte,  &  l'hor 
TÏble  vengeance  qui  les  attend, lînon  qu'ils  ad 
uifentde  s'efforcer  à  s'acquitter  pour  main- 
tenir l'honneur  de  D;ea,qui  côfifte  en  ce, que 
Ja  pure  religion  ait  lieu&  vigueur  entre  les 
honimes.Regardons  maintcnSt  fi  ceci  eu  bien 
prattiqué  .  Helasil  s'en  faut  beaucoup  :  car 
ceux  qui  dominent, ne  fe  contentent  pas  d'a- 
Boir  celle  dignité  iî  honorable  par  dcilusles 
homes  qui  font  leurs  prochains, mais  ils  veu- 
lent vfurper  ce  qui  appartient  à  Dieu  feul:  en 
forte  qu'auiourd'huy  on  en  trouuera  biépeu 
qui  fe  tienent  en  cefte  mefiire-la  ,  pour  dire, 
Nous  femmes  hommes  mortels,  qui  dominos 
fous  la  maiellé  de  nollreDieH,&  c'cfi:  afin  que 
jious  luy  rendions  ce  qui  ell  fîen,  &  ce  qui  etl 
de  fon  droiâ:  :  mais  au  contraire  il  faut  qu'ils 
mettent  les  troubles  par  tout,  qu'ils  delrob- 
bent:voire  rauiflent  auec  violence  &  outrage 
i'honneur  de  Dieu,  qui  appartient  àluy  Icul, 
qu'ils  confondent  tout,  qu'ils  troublent  tout 
ordre.£tpourquoy?Afin  qu'ils  fefacétgrans 
céme  il  leuj  femble,&  qu'ils  fe  rôpent  le  col, 
comme  ils  en  font  dignes.  Et  voila  pourquoy 

y.  ^    aui'si  noftre  Seigneur  maudit  les  principaii- 

tez  :  c  eil  d  autat  que  ceux  qui  lont  la  alsis,rre 
dominét  point  en  fon  nom,&ne  ie  peuuét  te- 
nir en  ceit  eftat  moyen, pour  dire, Nous  fora- 
mes  hommes  qui  deuons  élire  inférieurs  h  no 
ftre  Dieu,&  dominans  en  fi  place  nous  deuos 
fouftenir  fon  honneur,  &  appliquer  là  toutes 

î/f.x.li  nos  eftudes:comme  il  ell  dit,  Baifezle  Fils,ve 
nez  faire  hommage  au  Seigneur  Uilis.  Il  faut 
donc  que  noftre  Seigneur  monftre  qu'il  reiet 
te  telles  gens, à  caufé  de  leur  ingiatitude  Se  fa 
crilege  detcft.able  qu'ils  cômettent  Iquand  ils 
fe  veulent  ainfî  attribuer  ce  qui  ne  leurappar 
tient  pas. Et  au  rtfte,nous  voyuns  la  noncha- 
lance qui  eftqiiali  par  tout  en  ceux  qui  domi- 
nenr,&ont  l'authorité  de  iuftice.ils  Jeurovét 
appliquer  ici  leur  principale  tlhide,  comme 
nous  l'auons  dcclaré,  &  comme  fii;;£l  P.iul  le 
monftrc  ,  c'eft  que  tous  vefcullent  en  droite 
pieté, que  la  icl'.gion  profpcraft.que  le  fcrui- 
ce  de  Dieu  fiift  ellimé  par  dtllus  tout.  Et  le 
vous  prie,  comment  tÙ-ce  que  les  Magifliats 
jrenent  «eci  à  cœui  ?Bi  ufknt-ils  d'vn  tel  zcle 


que  quand  l'honneur  de  Dien  efl  blefle  ou  6b 
fcurci,  incontinent  ils  taichent  d'y  mettre  la 
raain,&d'y  pouruoir?Nô,non:celeur  elitout 
vn,ils  laiflènt  couler  tout  cela:  nous  voyés  les 
blafphemes  qui  fe  delgorgent  à  rencontre  de 
Dieu.  Si  on  auoit  outrat;e  le  moindre  d'vne 
ville  ou  d'vn  village, il  y  auroit  plus  de  repara 
tion  qu'il  n'y  a  point  del'hôneurde  Dieu.  Et 
n'a-on  point  hôte  d'eftre  venu  iufques  à  cefte 
impudence  de  putain,  de  dire, Ho  commet?  de 
punir  ainfî  les  blafphemes  ;&  que  fcroit-ce? 
car  cela  nous  ellbien-toft  cfchappé  delà  bou 
che,  d'auoir  ou  renié  Dieu,  oudefpité  lefus 
Chriit,  le  defchirant  par  pièces  :  maintenant 
prendre  fa  mort, maintenant  fon  fang,  main- 
tenant fi  chair,  &  le  blafphemerà  tous  les 
coups.  V^oUa, quand  on  aura  iniurié  ie  ne  fcay 
qui, ho, il  faudra  que  l'honneur  foit  repare  in- 
continent. Et  voila  la  maiclléde  Dieu  qui  eft 
en  tel  opprobre, &  on  n'en  tiendra  conte  ?  A- 
pres,  nous  voyons  les  vilenies  qui  fc  commet 
tent  comme  cndefpitde  Dieu,  nous  voyons 
Jemefprisde  fa  parole  &  de  fe«  facremens, 
nous  voyons  que  tout  va  en  decal,  voire  mef- 
mes  en  ruine:  &  ctpédant  on  ferme  les  yeux, 
ou  on  a  les  mains  liees:car  ce  n'efl  point  là  ce 
femble, qu'il  fe  faille  beauconparrefter:  c'eil 
vne  chofe  li  commune  que  quand  ie  n'en  par- 
Icroye  point,  les  petis  enfaus  en  pourroyent 
eftre  luges.Et  ic  vous  prie,  ceux  qui  dominét> 
nedoiuent-ils  pas  bien  craindre  oyanscequi 
eft  ici  dit,c'eft  af^auoir  qu'ils  ne  régnent  que 
à  cefte  condition-la ,  qu'ils  i'oyent  prote- 
ûcurs  de  l'honneur  &du  feruice  de  Dieu, s'ils 
ne  le  font,  qu'ils  renuerfent  l'ordre  de  iufti- 
cc,  &  polluent  ic  fiege  iàcrc  que  Dieu  auoit 
dédié  à  fon  honneur,  &  pour  le  falut  de  tous? 
Et  ainli  nous  voyons  c^ni.-ne  ce  paffage  doit 
cftre  piattique.Et  mefmes  il  y  a  cncores  les 
autres  vices, que  ii  on  vient  à  les  condamner, 
&  que  ceux  qui  ont  quelque  bonne  afFeûion 
reprenent  (  comme  nous  fommes  tous  tenus 
de  ce  faire )&  redargucnt  les  vices  qui  fe  coin 
mettét,ho,  il  ne  fera  uueftion  que  d'outrages, 
voire  de  batteries,  qu  il  ne  faudra  point  for- 
tir  hors  de  la  ville  de  Gencue  pour  eftre  per- 
fccuté  à  caufcde  l'Euangile  :  carquiconques 
voudra  maintenir  l'honneur  de  Dicu,&ne 
pourra  foiiffiir  les  chofcs  ainii  dcsboidees  c5 
me  elles  font, &  les  vilenies  qui  iont  par  tout, 
il  fera  perfc'cuté  comme  entre  des  Payens.Ec 
où  en  fommcs-nous  ?  Où  eft  cela  qui  deuroit 
efti  e,ii  ce  paflàs^e  auoit  tfté  bien  noté  &  mar 
que  f  Et  ainiîdonc,  ceux  qui  tienent  la  place 
de  iufticc,  voyans  l'obligation  à  Inquelle  ils 
font  aftreints, qu'ils  t.ifchct  à  mamtciiurhon 
ncurdeDieu,&  qu'ils  fçachét  que  quand  ils 
auront  fouffcrt  qu'il  foit  mefprifc,  qu'ils  n'ef 
chappcrôt  pas  la  main  du  grand  luge. Cepen- 
dant nou,  voyons  corne  ils  iontzelateursde 
leur  autliorite.Si  quclqu'vn  a  pailé  contre  la 
iufticc, ne  leia-i)  pv)ini"  incôi;n!.nt  puni  en  tou 
te  iiguturJEt  c'eft  lailô.Mtfuics  on  ne  fc  c5- 

ttmera 


SVR    LA    I.     A    TIMOTH. 


7ï 


tentera  pas  de  cela  :  mais  fi  on  a  parlé  contre 
les  drfroliis&  les  desbaiichez,  Ho,  l'honneur 
de  la  ville,  Thonneur  public,  Thonneur  com- 
Hiuntil  femble  que  le  cieldoyue  tomber  bas, 
finonque  bien  toit  on  y  remédie.  Et  toutes- 
toison  n'aura  point  touché  àl'eftat  public, 
mais  on  aura  parlé  des  vices  communs,  voire 
que  commettent  ceux  qut  ne  valent  du  tout 
rien.  Se  qu'on  cognoift  elhe  dévie  brutale  & 
dUTolue.  Mais  encores  prenons  le  cas  qu'il 
n'y  euft  point  autre  affection  que  pour  main- 
tenir l'honneur  des  Magiftrats  :  &  bien, c' cil 
taifon  que  cela  fe  face:car  l'honneur  de  Dieu 
y  efl  blefle  &  mtereffe.  Mais  cependant,ie 
vous  prie, les  Magiftrats  penferoyent-ils  que 
ce  fuit  vne  bône  règle, quand  vn  fergent  au- 
ra efté  offenlé, qu'on  en  ùcc  vne  griefue  pu- 
Bicion:&  cependant  fi  on  leur  crache  au  vifa- 
ge, qu'on  les  viene  arracher  de  leur  hege,que 
ils  fouifrent  cela,  &  qu'ils  ne  poniffent  point 
ceux  qui  fe  feront  ainiî  desbordezfUs  dirbnt 
bien  que  ce  feroic  par  trop  enduré. Or  main- 
tenant qu'ils  fe  comparent  auec  le  Dieu  viuât 
qui  les  a  là  confti tuez. Ils  voudr5t,di-ie,ellTe 
maintenus  auec  toute  reuerence:&  cependant 
ils  iuiifFriront  que  l'honneur  de  Dieu  foit  ain 
fi  abbatu.Et  quel  propos  y  aura-ilfVoila  quât 
à  ce  poinûde  pieté, dont  fainft  Paul  parle. Il 
y  a  quant  &  quant  [hcnntfleté  c  la  tempe- 
Tance.c3.ïce  mot  dont  il  vfe,fîgnifie modéra- 
tion &  grauité,  quand  les  hommes  ne  fe  def- 
bordent  pointa  toute  vilenie,  &que  leur  vie 
n'efl  point  difrolue,raais  qu'ils  viuent  comme 
gens  entendus,comme  gens  qui  difcernét  en- 
tre le  bien  &lc  mal.  Et  c'cft  le  fécond  office 
des  Magillrats.Car  ce  n'eft  point  aflez  qu'ils 
puniflentlcs  meuttics  &  les  larrecins  ,  mais 
s'ils  voyent  des  yiirégneries,  s'ils  voyent  des 
paillardifes,  &  fembJables  dcsbordemens ,  il 
iaut  qu'ils  y  mettent  la  main, s'ils  ne  veulent 
«lire  coulpablesdeuant  Dieu.  Et  pourquoy? 
Car  puis  que  la  police  doit  fcruir  à  ce  que  le 
genre  humain  foit  confeiuc ,  regardons  vn 
peu  h  la  conferuaiion  du  genre  humain  con- 
lifte  plus  au  boire  &  au  manger, qu'vn  chacun 
viue  de  fon  bien, que  chacun  habite  en  fa  mai 
fon,ou  bien  que  les  hommes  monilrent  qu'ils 
font  créatures  raifonnabies  ,  qu'ils  ont  fens 
&  difcretion  en  eux  ,  &;  qu'ils  ne  font  point 
comme  chiens  &  pourceaux. Q_uefi  on  lafche 
la  bride  à  tous  les  vices  qui  font  condamnez, 
comme  aux  yuvongncrics  d'vn  colté  ,  &  aux 
paillardifcs:<î  les  ciianfjn».  vileincs  font  per- 
mîtes,&  les  danfcs  &  dilTolutions:s'il  eJt  lici- 
te de  defgorger  des  paroles  intames  6c  viki- 
■nes  pourattirer  à  pallaidiles  &  autres  diflo- 
lu t ions: fi cela,di-ie,cft  licite, en  quoy  les  ho- 
iries diffcre^-ils  plus  aux  chiens  &  aux  pour 
ceaux?  Il  vaudroit  mieux  qu'il  n'y  euft  point 
de  pain  au  monde  ,  &  que  nous  fufsions  tous 
accablez, que  de  viurcen  telle  confufion:  car 
c'eft  effacer  l'iiiugede  Dieu  qu'il  a  imprimée 
en  nou'.,c'ci>  pcniertir  tout  ordre  de  nature. 


Pourtant,  puis  que  les  Magiftrats  font  con- 
Itituez  pour  maintenir  l'eitat  ùu  genre  hu- 
main,pour  en  eitre  prote£teurs,c'elt  bien  rai., 
fon  quad  parleur  moyen  on  vit  en  toute  hoa 
nelteté  &:  attrempance,  qu'on  prie  pour  eux. 
Mais  regardons  cepédant  coniracnt  ils  s'ac-« 
quittent  auiourd  huy  de  leur  deuoir  encell 
endroit.  Qm  font  ceux  qui  s'oppofcnt  à  tous 
les  fcandales  Scmauuais  exemples  qu'on  voit 
pour  y  mettre  remède?  Q_uand  il  l'cra  queftiô 
auiourd'huy  de  corriger  les  chofes  qui  ten- 
dent à  mettre  côtufionpar  tout,ie  vous  prie, 
qui  eft-cequis'aduanccfMais  plufto.ft  on  ac- 
complit ce  qui  eft  dit  en  liaie.  Que  la  droi- 
ture n'ha  point  d'aduocat  ne  de  procureur. 
Auiourd'huy  qu'on  regarde  par  les  places 
publiques ,  où  eft-ce  qu'on  trouucra  vn  feul 
homme  qui  ait  zèle  pour  corriger  les  fautes 
qu'on  voit  à  l'œil,  &  defquelles  nous  deuriôs 
auoirgrand'honte,  iedi  de  ceux  qui  font  con 
ftituez  en  eftat  public?  Apres ,  qu  on  regarde 
auiourd'huy  par  tout  le  monde.on  verra  qua 
les  fcandales  &  toutes  vilenies  font  tellement 
en  vogue,  qu'il  n'eft  plus  queftion  de  les  pou 
uoir  réduire, qu'on  ferade  couftuaiemauuaifc 
vne  loy,  qu'on  penferaque  tout  ce  qui  eft  en 
vlâge  doit  élire  approuué:&  voila  comme  Us 
vns  tirent  les  autres  à  mal.  Mais  tant  y  a  que 
on  voit  que  grans  &  petis  fe  desbordent  à 
toute  intempérance  &  en  toute  diflolution.Sî 
cela  fe  fait  en  la  Papauté  ,  maJ-heur  fur  les 
Papiftes,  combien  qu'ils  foyentaueugles,  car 
ils  ne  feront  point  excufables  pourtant.Mais 
nous  fomnies  à  condamner  au  double ,  quand 
nous  auons  Dieu  qui  nous  efclaire  ,  que  nous 
fommes  conftituez  en  plein  midi  comme  fur 
vn  tfchatfaut,  tcllemét  que  nous  n'auons  nul- 
le couuerture. Car  fainû  Paul  dit  qu'il  ne  faut  Ef"-Î-^ 
point  que  nous  cheminions  comme  enfans  de  S-lO.ll. 
ténèbres  en  la  nuitl.mais  puis  que  le  Soleil  de 
itillice  eft  fur  nous, c'cft  afçauoir  le  Seigneur 
le  fus  Chrift,par  le  moyéde  fon  Euâgile,noUs 
deuons  auoir  beaucoup  plus  de  modeftie  &  de 
honte  que  n'ont  pas  les  poures  incrédules.  Si 
voyons-nous  comme  il  en  va  fans  que  ie  le 
d:c,  &  fi  le  m'en  taifoye,  ie  feroye  traillre^ 
faullàire  &  à  Dieu  &  au  monde.  Mais  cepea 
d'ordre  qu'il  y  auoit  ici, elloit  vne  efperaiice 
de  remettre  les  chofes  en  meilleur  eftat  qu'el 
les  ne  font  pas  entre  les  Papiftes:&  tout  cela 
s'en  va  bas, ou  pluftoft  il  s'en  eft  défia  allé, en 
forte  qu'il  fera  bien  difficile  de  le  remettre  au 
dclTust  mais  encores  il  femble  que  beaucoup 
tafchent  &  s'efForcentde  tout  corrompre  Se 
peruertir.  Du  commencement  il  yauoit  bien 
quelques  loix  &  ftatuts ,  qu'on  elloit  retenu 
par  quelque  moyen:  maisauiourd'luiy  on  ne 
s'en  fut  que  mocquer.  Voila  les  danfcs  qui 
elloyent  défendues ,  &  à  bon  droitt  :  car  ce 
n'elt  que  pour  inciter  à  paillardife.  Vray  eft 
qu'on  ne  paillardera  point  toufiourt  quand 
on  danfera  :  mais  fi  nous  confiderons  bien 
quelle  eft  la  nature  des  d.mfes ,  on  trouuera 

i. liii. 


7i 


DOVZIEME    SERMON 


que  c'ert  vn  maqiierelage,&  que  quand  les  dan 
fes  feront  pennifes,voila  le  bordeau  tout  ou- 
uert.Non  point(conmieraydit)queles  pail- 
lardifes  y  îbyent  toulîours  aduellement  com 
inifes,mais  les  danfes  tendent  toulîours  à  ce- 
ite  fin-la. On  a  bien  quelque  temps  tait  deten 
fe  de  danfer,  on  a  fait  femblant  d'obferucrla 
loy,merme  il  y  en  auoit  quelques  chaftieiiic's: 
auiourd'huy  on  s'en  mocque ,  tellement  que 
c'eftvne  chofe  permife.Et  des  leux  qu'cft-ce? 
Ils  font  tant  accouftumez  &  ordinaires,que  fi 
on  tafche  d'y  remédier,  c'elt  en  vain  :  car  les 
hommes  font  endurcis  en  cefte  licence  qui 
leur  acftédonnee.&qu'onleuramis  la  bride 
furlecol.il  leurfemble  que  tout  leur  eftlici- 
le.Ainlî  nous  voyons  quelle  condamnation  il 
y  a  en  ce  paflage  déclarée,  d'autant  que  ceux 
qui  fe  deuroycnt  employer  à  faire  qu'on  vef- 
cuft  honeftemét  Se  en  toute  modeltie.s'y  por- 
tent fi  lafchement  &  fi  mal.  Et  puis  il  y  a  la 
faix  &  concor<{e,C[Ut:  nous  menions  vie  paifi- 
ble.qu'il  n'y  ait  point  de  bateries,devioléces, 
d'extorfions.Mais  cela  eft-il  bien  piattiqué.» 
Il  n'en  faut  rien  dire,  on  le  voit,  nous  i'auons 
veu  ,  les  chofes  font  fi  «xorbitantes  que  c'eft 
vne  horreur. Et  cepcdant  quoy?Penfons  nous 
qu^on  viendra  en  vn  tel  aby  fme  ,  qu'on  criera 
helas  ,  &  ne  fera  plus  temps  ?  Nenni:  mais  on 
eftlà  comme  alTopi  ,  voire  du  tout  ftupide.  Il 
faudra  donc  que  noftre  Seigneur  refueille 
ceux  qui  fe  donnent  ainfibon  loiûrdedor- 
jnir.Et  ainfi  nous  voyons  comme  il  eftnccef- 
laireque  les  Magiftiats  s'employcnt  à  faire 
que  la  religion  foit  droitement  obferuee,que 
la  vie  des  hommes  foit  conduite  &  réglée  com 
me  elle  doit:&  puis,  qu'vn  chacun  viue  paifi- 
blement  £àns  faire  tort  àfon  prochain.  Or 
après  que  fainft  Paul  a  parlé  ainfi  des  Magi- 
ilrats,il  Siàiouiie,Que  cela  ift  bon  &  fUifant  à 
Dieu  noftre  Sauuettr,  lequel  -veut  que  tous  hom- 
mes foyent  fauuex.,&  yienent  à  la  cognoffan- 
te  de  vérité.  Quand  faintt  Paul  dit ,  que  cela 
cft  bon  &  agréable  à  Dieu, il  nous  monftre  ce 
que  nous  auons  àobferuer  pour  bien  prier, 
voire  &  en  gênerai  pour  bien  difpofer  toute 
Boftre  vie, c'eft  que  pour  bien difcerner  nous 
ayons  toufiours  deuant  nos  yeux  la  volonté 
de  Dieu  pour  y  obéir. Et  voici  vn  paflage  qui 
dl  bien  notable.  Ileftvrayque  fouuent  ceci 
vous  eiî  remonftré, c'eft  afçauoir  que  le  fon- 
dement de  toutes  vertus  &  la  fource  eft  l'o- 
beiflance.quand  les  hommes  ne  fe  gouuernét 
point  à  leur  phantafie, qu'ils  n'attentét  point 
ceci  ne  cela  félon  qu'ils  le  trouuent  bon, mais 
qu'ils  efcoutcnt  Dieuparler,&  qu'ils  dépen- 
dent du  tout  de  liiy  ,&  qu'ils  fe  tiencnt  aux 
bornes  qui  leur  aura  mifts,brief  qu'ils  ne  s'ad 
uancent  point  finon  quand  ils  cognoiftront. 
Dieu  nous  commande-il  d'ainfi  faire  ?  il  taut 
donc  que  nous  fuyiiions  ce  qu'il  nous  a  mon- 
-  ftré  par  fa  parole.  Voici  vncdoétnne  delà- 
quelle  nous  parlons  fouuent, &  non  fans  cau- 
fc.Car  nous  voyons  comme  les  hommes  veu- 


lent toufiours  auoir  maiftrife,&  qu'ils  s'attri- 
buent beaucoup  plus  qu'il  ne  leur  appartient, 
&  rauilîent  à  Dieu  fon  honneur  ,  &  ont  leurs 
folies  deuotiôs,Et  cela  me  femble  bon  ,  telle 
chofe  ne  fera-elle  pas  côuenable?  Voila  donc 
comme  les  hommes  vculé:  toufiours  defrob- 
berà  Dieula  maiftrife  &authorité  qu'il  ha 
fur  eux.D'autant  plus  nous  faut-il  bien  prat-  i.  Stt,  lyl 
tiquer  cefte  doârine ,  c'eft  ai'çauoir  que  l'o-  2,2,. 
beillànce  eft  meilleure  que  nul  facrifice,com- 
me  Dieu  aufsi  la  préfère  à  tout  le  refte,  pour 
tant  que  c'eft  levray  fondement  pour  bien 
baftir,&  que  c'eft  aufsi  le  feruice  raifonnable, 
comme  fainâ  Paul  le  nomme  au  ii.  chap.des 
Romains,  Mais  en  ce  paflage  il  dit ,  Cela  eft 
bon  &plaifant.Et  pourquoyfPource  qu'il  eft 
agréable  à  Dieu.  Ainfi  nous  voyons  ce  que 
nous  deuôs  regarder,afçauoir  à  ce  que  Dieu 
nousconiniande,&à  ce  qu'il  veut  eftre  inuio- 
lable,pour  nous  tenir  là  du  tout.'carautremët 
nous  ne  ferons  que  nous  efgarer  en  toute 
noftre  vie. Les  hommes  pourront  bien  tracai- 
1er  çà&là,voire  ils  pourront  beaucoup  cou- 
rir ,  lufques  à  fe  rompre  le  corps  &  l'ame. 
Qj2^uront-ils  profité  ?  Se  feront-ils  aduâcez 
pourtant"-Nenni:linon  qu'ils  aurôt  couru  par 
les  champs. C'eft  comme  fi  le  vouloye  aller  à 
Lau2annc,&:que  i'allafle  courir  pai  les  mon- 
tagnes ,  tirant  droit  à  Colonges.  Et  ainfi  en 
font  tous  ceux  qui  fuyuent  leurs  phantafies, 
&  qui  veulent  eftre  maiftres  pour  fe  gouuer- 
ner:tant  s'en  fautqu'iis  approchent  de  Dieu, 
qu'ils  s'en  eflongnét,  &  s'en  reculent  déplus 
en  plus.  Voici  donc  le  but  auquel  il  nous  faut 
tendre,pour  ne  point  courir  en  vain:afjauoir 
de  cognoiftre  ce  qui.eft  agréable  à  Dicu:mais 
fur  tout  quand  il  eft  queîHon  des  oraifons  & 
prières, voici  vne  règle  intalhbleque  le  /ainft 
Efprit  nous  donne.  Voulons-nou.  bien  prier 
Drcu,  &  fçauoir  comme  cela  fe  doit  faire?  re-« 
gardons  ce  qu'il  nous  commande. l'ay  dit  que 
ce  paflage  eftoit  bien  digne  d' eftre  noté.  Car 
nous  voyons  qu'en  ce  qui  eftoit  le  principal 
de  toute  noftre  vie  ,  c'eft  à  dire  aux  prières  Se 
oraifonsjles  hommes  fe  font  donné  vne  licen 
ce  telle  ,  que  la  parole  de  Dieu  n'ha  point  ici 
de  lieu. Dont  eft-ceque  les  Papiftes  cuident  fî 
bien  faire  en  priant  pour  les  trefpaflez,ayans 
les  Sainds  pour  leurs  aduocats  &  patrons? 
C'eft  d'autant  qu'ils  ont  conceu  cefte  folle 
phantafic,dcdue  ,  Etn'eft-ce  pas  vne  chofe 
bonne  de  prier  pour  les  poures  âmes  qui  ne 
fe  peuiient  aider?  Voire  ,  mais  qui  eft-ce  qui  a 
dit  celafHo  on  en  a  ainfi  fait.  Voire ,  mais  il 
faut  regarder  ficela  eftmititué  de  Dieu  on 
no. Qiiand  fainft  Paul  nous  e\liortedeprier, 
il  dit, Cela  eft  b  .n  &  agréable  à  Dieu.  Or  les 
Papiftgs  ne  monftrerontpasvne<fculeiyllabe 
en  toute  l'El'cnture  fainfte.que  Dieu  approu 
ue  ce  qu'ils  font ,  ains  il  n'y  a  que  leur  toile 
opinion  qu'ils  ont  côceiic  fans  propos.Autat 
en  eft-il  de  ce  qu'ilsdifent  ,  Ho  voila  ,  le  ne 
fuis  pas  digne  d'aller  à  Dieu:  il  taut  donc  que 

i'iyc 


s  VR   LA    I.   A   TIMOTR 


75 


i'ayeles  Sainfls  pour  patrons  &aduocats.  £t     nous  rinuoquerôs  au  nom  denollre  Seigneur 


qui  vous  a  donné  ceil  office  d'ordonner  des 
aduocats  en  Paradis  ?  Vray  cft  que  nous  ne 
fommes  pas  dignes  d'aller  à  Dieu, Se  qu'il  faut 
que  nous  ayons  vn  Moyenneur  qui  nous  y  in 
troduife,&  qui  nous  y  donne  acces:inais  Icius 
Chrifteft  inflituéàcela.  Envneuiftice  ter- 
rienne ,  s'il  y  a  aduocat  ou  procureur  ,  il  faut 
qu'ils  foyent  inttituez  parle  luge  ,  ou  autre 


le/us  Chnft,nous  fcntuôs  que  nos  prières  ne 
feront  point  vainesni  inutiJes:conimeil  fera' 
déclaré  plus  à  plein  cefte  aprefdifnec,  au 
plaiûrde  Oieg. 

Cependant  nous-nous  profternerons  de-, 
uant  la  face  de  noftre  bon  Dieu,  encognoif- 
fance  de  nos  fautes,  le  prian  t  qu'il  luy  plaife 
mentilsneferoyent  pasreceusniaduouez.Et  en  effacer  la  mémoire  tellement  qu'elles  ne 
quand  nous  venons  au  Royaume  de  Dieu,  vienent  point  en  conte  deuant  luy:  &  cepen- 
faut-il  que  nous  prefumions  d'eftablirlà  les  dant  qu'il  nous  purge  par  ion  fainft  JEfprit, 
eflats,&  d'eftablir  là  des  aduocats  &  des  pro-  à  ce  que  nous  apprenions  de  nous  mieux  con- 
cureurs  ànoftre  porte  ?  Apprenons  donc  en  former  à  fa  iuftice  que  nous  n'auons  point 
fomme,que  pour  bien  prier  Dien  il  nous  faut  faiû,  iufquesàce  queluy-mefmenousait  du 
fçauoir  quelle  eft  fa  volonté,  &  pour  la  fça-  tout  reformez  à  fa  gloirc.àpres  qu'il  nous  au- 
uoir  il  faut  cognoiftre  ce  qu'il  nousadeclaré  rafait  participans  de  fa  grâce  en  ce  monde 
en  fa  parole,  nous  ranger  a  icelle,  efcouter  ce  pour  y  croiftre  de  nouucau  déplus  en  plus, 
qu'il  nous  dit,&  former  toutes  nos  requeftes  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  amenez  à  la  perfc-» 
félon  la  volonté,&  nous  repoler  fur  les  pro-  ftion.Ainlî  nous  dirons  tous,  Dieu  tout-puif- 
meflts  :&  alors  ne  doutons  point  que  quand     fant,Perc  celefte,&:c. 

TROISIEME    SE  RM  ON    SVR    LE    S  E- 

CONDCHAPITRE. 

3  Car  cela  ejl  bon  0'  agréable  deuant  Dieu  nojlre  Sauueur, 

4  hequel  veut  que  tous  hommes  foyent fduuez^  (f  qu'ils  Vienent 
dlacognoijjancede's>erïté. 

5  Car  ïly  a  vw  X)ieu  çy  ymMoyenneur  <lcDieu&  des  hommes, 
afçauoir  lefus  Chrifl  homme,  qui  s' ej}  donne  foymefmc  rançon  pour 
tous,  dont  le  tefmoignage  fujl  en  [on  temps. 


t-xod.is 

Î.4. 


Vand  nous  niefprifons  ceux 
que  Dieu  veut  eftre  hono- 
iez,c'cft  comme  vouloir  ba- 
tailler contre  luy.Ainfieft- 
il  fi  nous  ne  tenons  conte  du 
falut  de  ceux  que  Dieu  ap- 
pelle à  foy  &  conHie.  Car  il  fembleroit  par 
cela  que  nous  levoudrion'  cmpefcher  d'exer 

•  cer  fa  mifei  icorde  cnuers  les  poures  pécheurs 
qui  iont  en  train  de  perdition.  Voila  pour- 
quoy  S.Paul  vfede  ceft  argument, Que  Dieu 
veut  fauuertoutle  mcde:afin  qu'entant  qu'en 
nous  eft  nous  procuriôs  aufsi  le  falut  de  ceux 
qui  femblenteftre  comme  bannis  di;  Royau- 
me de  Dieu.voiré  du  temps  qu'il  f  ni  incré- 
dules. Or  nous  auons  toiifiours  A  noter  l'e- 

-ftat  qui  fftoit  dii  tépç  de  (âir.d  Paul.  C?(  ft  vit 
chofe  nouuelle  &eft!angeque  i'Lt]art;ilefe 
publiai!  par  tout  le  monde  :  car  il  fembloit 
bien  que  Dieu  euftchoifi  la  lignée  d'Abralia 
àtelle  condition  qur  ie>.  auti.csfufferi  piùiez 
de  toute  efperancedt  falut.  Etidefajd,  nous 
voyor:-  auùi  .ommc  i-Efcirturi    (  .cO.-.tan- 

•  gr.ilit  et  !Îf  HiioptiS;!  '.illé  Dleii.auoit  fatteide 
ce  peuple  f^.■■IJl^^■■.■.^•.:i«i:'«■I'âl!^c^MnlllaiTdc 


caufe  il  adioufle  Ja  rai  fon  qui  cft  ici  contenue, 
c'eft  afçauoir  que  Dieu  vtu:  que  tous  foy  et 
faiiucz:comme  s'il  d!foit,Mei  amis,€'elt  bien 
raifonque  nous  regardions  où  la  volonté  de 
Dieu  tecd ,  &  à  quelle  fin  ,  &  à  quel  but ,  afin 
qu'vn  chacun  s'y  employé  d'y  feruir.  Car 
pourquoy  fommes-nous  en  ce  monde  fînoi» 
pour  aduancerla  bonne  volonté  de  Dieu  en- 
tant qu'en  nous  feia?Ainftdôc,puis  que  Dieu 
veut  faire  tous  hommes  partic;pans  du  falut 
qu'il  a  ennoyé  en  la  performe  de  fon  Fils  vni— 
que, il  faut  quenous  foyons  en  fouci d'attirer 

f.les  poures  ignorans  à  nous  ,  fU.  que  nous  par- 
nenions  cnftmble  en  cefthc  ritageduRoyaa 
meccleftequ!  nous  eft  promis. Cepédantnq— 
tons  que  fainét  Paul  ne  parie  pomtici  decTia- 
ctin  en  particulier  ,  mais  de  tous  eftatsSf  de 
tous  peuples.  Qi^ar.d  c(jnc  rJdit,  QiieDicix 
veut  que  tous  foyent  fauuez  ,  il  ne  faut  point 
ici  péfcr  qu'il  parie  de  lehane  de  Pierre, mai? 
il  iigniiie  que  Dieu  ayant  pnvrr  le  temps  palfé 
<hc!tfivn  ccrtaui  peuple  à  foy.niairitsn.u  veut 
.'•aire  mi  fencorde  à  tout  le  môtide ,  &  à  ceuï 
qoiaa-;ycrt  cftr  ccmmetorelDsdi-'l  tfpeiaii- 
cù  v;  .fi.ut.Car  r.ous  oyons  ce  qu'il  du  en  l'ait  • 

■)tit  paiFage,qiie  ies.Paytn&eftoyét  (ans Dieu,  E/'fc.i.ir 

Lz.  f. 


T  REZ  lEM  E    SERMON 


fans  nulle  promeffe,  pourw  qu'ils  n'efteyent 
pas  ciicores  aflbcier  au  peuple  des  luifs  :  Si 
c'eftoit  vn  piiuileec  fpccialque  Dicuauoit 
fait  à  la  lignée  d'Abraham  de  la  choifir.  Pour 
tanc  S.Paul  n'entend  pas  que  Dieu  vueille  fau 
uer  chacun  homme.mais  il  dit  que  les  promcf 
fci  qui  auoyeiit  efté  donnée';  à  vn  feul  peuple, 
ont  maintenant  leur  eftendue  partout.  Car, 
comme  il  dit  en  cefte  Epiftre  que  nous  auons 
allcguce.la  paroy  a  efté  rompue  à  la  venue  de 
Boftie  Seigneur  Itfus  Chrill,  que  Dieu  auoit 
fcparë  le  peuple  des  luits  d'auec  toutes  au- 
tres nations:  mais  quand  kfus  Chnft  eft  ap- 
paru pour  le  f.ilut  du  raonde.alors  il  a  ofté  ce- 
ite  diuerfité  qui  eftoit  entre  les  luifs  &  les 
Paycns.Dieu  donc  maintenant  nous  veut  em- 
braflcr  tous:&  voila  quelle  eft  l'entrée  de  no 
ilre  ûlut.  Carfi  ce  que  Dieu  auoit  ordonné, 
euft  durétoufîours  .maintenant  nous  ferions 
tous  niaudits,&  TEuagile  ne  nous  feroit  point 
prcfché,  nous  n'aurions  nul  tefmoignagede 
la  bonté  ne  de  l'amour  de  Dieu.  Comment 
donc  fjmraes-nous  entrez  en  la  maiion  de 
Dieu  pour  cftre  les  enfans?  C'eft  pource  que 
nous  ne  lomines  plus  ainfi  aliénez  des  promef 
(es  comme  ont  elté  nos  Peres:mais  quand  le- 
fus  Chrift  eft  venu  pour  eftre  Sauueur  commû 
de  to'  en  gênerai, il  prefente  la  -grâce  de  Dieu 
fon  Père, afin  que  tous  la  reçoyuent. Mainte, 
nant  comme  fainft  Paul  traitte  de  toutes  na- 
tions,aufsi  il  traitte  de  tous  eftats.comrae  s'il 
difoit  que  Dieu  veut  lauuer  les  Rois  &let 
Magiftrats  comme  les  petit.  Et  ne  faut  point 
que  nous  vueillions  reftraindrefa  bonté  pa- 
ternelle feiilcmét  ou  à  nous, ou  à  certain  nom 
bredegcns.Et  pourquoy?car  il  déclare  qu'il 
veut  eftre  propice  à  tou;.  Voila  maintenant 
l'intention  de  S.  Paul.  Et  pour  confcrmer  ce 
propos  il  adioufte,  Que  Dieu  veut  que  tous 
vienent  i  la  cognoiflancc  de  vérité.  Il  nous 
iaut  bien  noter  pourquoy  S.  Paul  vie  de  ceft 
argument. Car  nous  ne  pourrons  pasdeuiner 
la  volôté  de  Dieu,  finon  entant  qu'il  nous  la 
manthfte,&:  nous  en  donne  quelque  ligne  qui 
nousapparoift.  Ceft  vne  chofe  trop  haute 
pour  nous, que  de  fçauoirquel  eft  lecôfeilde 
Dicu-.mais  Itlô  qu'il  nous  le  niéftre  par  effet, 
voila  côme  nous  le  côprenons.  Or  il  eft  vray 
tjiie  l'Eiûgile  eft  nommé  la  puiflànce  de  Dieu 
en  lalut  à  tous  croyans.c'eft  la  porte  de  para 
dii:il  s'enfuit  donc  quand  rEuâgile  fera  pref 
ché  par  la  volonté  de  Ditu  .i  tout  le  monde, 
qu'il  y  a  vn  tcfmoignage  de  falut  qui  eft  coin 
muni  tous.  Voila  comme  S.Paul  prouue  que 
Dieu  veut  que  tous  f  jyent  fauucz.  Car  il  n'a 
point  ordonné  fes  Apofties  pour  fe  retenir 
feulement  entre  les  luifs  :  mais  nousfçauons 
la  conwnifsion  qui  leur  eft  dônee  de  prefcher 
à  toute  créature  ,  d'i-ftre  tefmoins  de  leftis 
Chrift  depuislerufliemiufques  en  Samarie,& 
de  là  par  tout  le  monde.  Les  Apoft»es  font- 
ils  enuoycz  pour  publier  la  vérité  de  Dieu  à 
tous  peuples  &  itous  cftacs.-'lJs'cfuit  q  Dieu 


fe  prefente  à  tout  le  monde,&  que  la  promef- 
fe appartient  &  à  grans  &  à  petis,&  aujt  Payés 
comme  aux  luifs  auparauant.Deuaot  que  paf 
fer  outre,  il  eft  bon  de  rabbattre  la  folie  ,  ou 
pluftoft  la  beilifc  de  ceux  qui  abufent  de  ce 
paflàgede  S.Paul,  pour  anéantir  l'eleihon  de 
noftre  Dieu.  Car  voila  qu'ils  difent.  Si  Dieu 
veut  que  tous  foyent  fauuez,  il  s'enfuit  qu'il 
n'a  point  eleu  certain  nombre  du  genre  hu- 
main,&  qu'il  n'a  point  reprouué  le  rcfte,mais 
que  là  volonté  eft  indifférente. Ainfi  donc  ces 
btftes-ci  qui  ne  font  nullement  exercez  en 
l'Efcriture  fainde,&  toutesfois  veulent  faire 
des  doûeurs.pretendent  qu'il  eft  en  la  liber- 
té des  hommes  de  fe  fauuer,&  que  Dieu  nous 
laifTe  faire,*:  qu'il  attend  fi  nous  viendrons  â 
luy,ou  non,&  qu'il  reçoit  ceux  qui  y  vienent. 
Mai»  cependant  ils  Jeltruifent  le  fondement 
de  noftre  falut:car  nous  fçauons  que  les  hom- 
mes (ont  tellement  maudits.que  l'héritage  de 
falut  eft  bien  elongné  de  nous.Q^  fi  on  aile 
gue  que  lefus  Chrift  tft  venu  pour  remédier 
à  celaril  faut  examiner  ce  qui  eft  en  la  nature 
des  hommes.  Mais  nous  fommes  tous  telle- 
ment contraires  à  Dieu, que  nous  ne  pouuons 
finon  luy.rcfifter:nous  fommes  tellement  ad- 
donnezàmal ,  que  nous  ne  pouuons  pas  con- 
ceuoir  vne  feule  bône  penfee.Ainfi  donc  com 
ment  fe  pourra-il  faire  que  nous  foyons  par- 
ticipans  du  falut  qui  nous  eft  prefente  en  l'£- 
uangile,  finon  que  Dieu  nous  y  attire  par  fon 
S.EfpritfRegardons  maintenant  fi  Dieu  y  at- 
tire tout  le  môde.Nenni:  car  noftre  Seigneur 
lefus  auroii  dit  en  vain,  Nul  ne  peut  venir  â  *'"''"  S- 
moy  qui  ne  foit  enfeigné  de  Dieu  mon  Père.  44-4J- 
Ainli  donc  il  faut  conclure  que  c'eft  vne  grâ- 
ce fpecialeque  Dieu  fait  a  ceux  que  bonluy 
temble,  de  les  attirer,  &  les  toucher  tellemec 
qu'ils  croyent  ï  r£uâgile,&  le  reçoyuent  en 
vrayefoy.  Or  maintenant  qui  eft  caufe  que 
Dieu  choifit  l'vn,&  laiilc  l'autre?  Nous  fça- 
uons que  les  hommes  ne  pourront  paruenir  à 
Dieu  par  leurs  mérites:  ce  n'eft  point  aufsi  q 
ceux  qui  font  eleus.ayent  deflerui  d'eftre  ainh 
préférez  à  leurs  compagnons ,  comme  s'il  y 
cuft  eu  quelque  dignité  en  eux. Il  s'enfuit  dôc 
que  Dieu  dcuant  la  création  du  inôde(coinme 
S.Paul  le  dit  au  premier  des  £phefiens)a  eleu 
ceux  que  bô  luy  a  fcmb  é:&  ce  n'eft  pas  à  no* 
de  fçauoir  pourquoy  ceftuy-ci  pluftoft  que 
ceftuy  -la  :  la  railon  nous  eft  incognue.Et  ce- 
pendant fi  faut -il  confcfTer  que  Dieu  ne  fait 
rien  que  iuftement:mais  tant  y  a  que  nous  ne 
cognoiflons  pas  pourquoy. Ainfi  reccuons  ce 
qui  nous  eft  tant  bien  certifié  en  l'Efcriture 
uintlc,&ne  nous  laifTons  point  ftduire  fous 
ombre  de  ceft  argument  friuole  que  prcnent 
gens  ignorans,  &  qui  ne  fçauent  que  c'eft  de 
toute  la  parole  de  Dieu.  Vray  eft  que  de  pri- 
me face  il  leur  fcmble  bien  qu'ils  ont  belle 
couleur  &  apparente:Dieu  veut  que  tous  foy 
ent  (àuucziil  s'enfuit  donc  qu'il  eft  en  la  liber 
té  d'vn  chacun  d'eftre  illuminé  en  la  foy  ,&  de 

parue 


SVR    LA    I.    A     TIMOTK- 

paruenir  à  raIut.Oi.iy  bic.fi  on  ne  fçauott  queJ 
Je  ell  rintentio  de  ûinCt  Paul:  mais  leafiiei 


y  peuuent  mordre,  comme  on  dit.  Q^and  on 
lira  trois  lignes ,  on  verra  bien  que  S.  Paul  ne 
parJe  point  ici  de  chacune  perfonne  (comme 
nous  auons  dcclaré)niais  il  parle  de  tous  peu 
ples,&  des  eftats  :  Si  môfire  que  ce  n'eft  point 
comme  deuant  Ja  venue  de  lefus  Chriil  où  il 
n'y  auoit  qu'vn  peuple  choifî.mais  que  main- 
tenant Dieu  fe  déclare  Sauueur  de  tout  le  mô 
tfe.l.S.  de.fuyuant  cequiauoit  eltédit,Ton  héritage 
fera  lufques  au  bout  de  la  terre.  Au  refte,  ahn 
que  nul  ne  fe  trompe  ou  ne  fou  feduit  par  le 
babil  de  ceux  qui  deflournent  TEfcriture  fain 
&e,o\i  la  peruertiflènt  pluftolt, regardés  corn 
me  peut  conlifter  le  dire  de  ces  acariaftres: 
Dieu  veut  que  tous  foyent  fauuez.c'eft  à  dire 
chacune  perfonne:voire  â  leur  phantalîe.iii  la 
volonté  de  Dieu  eft  telle  auiourd'huy,  il  faut 
que  dés  le  commencement  du  monde  elle  ait 
elle  femblablc:car  nous  fçauons  qu'il  ne  chan 
ge  point  de  proposai  n'eit  pointmuable  com 
me  font  les  homes. Si  donc  Dieu  veut  auiour- 
d'huy que  tous  foyent  fauuez,ill'a  toufiours 
voulu:&  s'il  l'a  touiîoursvoulu.que  deuiendra 
ce  que  S.Paiil  adiouftr, qu'il  veut  que  tous  vie 
nent  àla  cognoiflànce  de  venté?  Or  il  n'a  e- 
leu  à  foy  qu'vn  certain  peuple  (comme  dit  S. 
Paul  au  i4.des  Aâes)&cepédâtila  laifleche 
miner  les  poures  Paycns  en  leur  ignorance. 
Ne  pouuoit-il  point  «lecuter  fon  vouloir  de 
ce  temps-la  ?  ttmefmes  encores  depuis  l'E- 
uangileil  n'a  pas  voulu  que  du  premier  coup 
tous  cognuflent  l'Euangile.Et  qu'ainfî  foit,il 
Jifl.i«.7aempcfché  que  .S.  Paul  ne  prefchaft  par  cer- 
tains paye, comme  par  Bithynie  &  par  Phry- 
gie.  Nous  voyons  donc  que  Dieu  n'a  point 
voulu  du  premier  coup  que  fa  cognoiflànce 
parueint  à  chacun  home.  Etainlî  ;1  eftaifé  de 
conclure  contre  ceux  qui  abufent  de  ce  palla 
ge,  que  S.  Paul  ne  paije  point  ici  du  confeil 
eflroit  de  Dieu,&  qu'il  ne  nous  veut  point  a- 
mener  iufques  à  celte  eleûion  éternelle  qui  a 
elle  deuant  que  le  monde  fuft  creé,mais  leule 
ment  il  nous  déclare  quel  cft  le  vouloir  de 
Dieu  entant  qu'il  peut  eftre  cogrude  nous. Il 
eft  bien  vray  que  Dieu  ne  varie  point, &  qu'il 
n'ha  point  double  vouloir  :&  auf  i  qu'il  n'y  a 
point  de  femtifc  en  luy  pour  faire  Icuiblint 
qu'il  vucille  vne  chcfe,&:  q  cela  ne  foit  vray. 
Mais  tant  y  a  que  l'Efcriture  nous  parle  dou- 
blement du  vouloir  de  Dieu. Et  comment  ce- 
laf'Puis  que  Dieu  n'eft  point  double, puis  qu'il 


7J 

prchenfiblc.=  AinfîdonciI  n'y  a  nulle  abftrdî- 
té  quand  l'Efcriture  fainfte  nous  parle  de  la 
volonté  de  Dieu  en  deui  fortes  :  non  point 
que  celle  Tolonté-la  foit  double  ,  mais  c'eft 
pour  s'accommoder  à  noftre  foiblefle  ,  d'an-. 
;  tant  que  nous  auons  l'elprit  grofsier  êc  oe- 
Cmt.Et  tout  cela  neantmoins  s'accorde  tres- 
bicn.Pourquoy?  Quand  l'Efcriture  nous  dit 
que  Dieu  a  eleu  ceux  que  bon  luy  a  fcmblé  de 
lunt  la  création  du  monde  ,  voila  vn  confeil 
tftroit  auquel  nous  ne  pouuons  entrer.    Et 
pourquoy  donc  eft-ce  que  l'Efcriture  fairftc 
nous  déclare  cefte  eleûion de  Dieu  eftie  eter 
nellefCe  n'eft  point  fans  caufe  :  car  c'eft  vne 
doftrine  bien  profitable  ,  quard  elle  fera  re- 
ceue  comme  elle  doit. Car  de  là  nous  fommes 
aduertis  que  ce  n'eft  point  de  noftre  dignité 
propre  q  nous  fommes  appelez  à  la  cognoif- 
fance  de  l'Euangile  :  car  nous  ne  valons  pas 
micui  que  les  autres, nous  fommes  tous  prin» 
de  la  race  maudite  d'Adam,nous  fommes  tous 
fuiets  à  vne  mefme  condamnation,  nous  fom- 
mes tous  enclos  fous  la  feruitude  de  mort, 
Ainfi  donc,quand  il  a  pieu  à  Dieu  de  nous  re- 
tirer des  ténèbres  d'incrcdulité,&  nous  don- 
ner la  clarté  de  fon  Euangilc.iln'a  point  re- 
garde en  nous  quelque  feruice  que  nous  luv 
euAions  fait,ou  quelques  vertus  que  nou;  luy 
eufsions  apporteevmen  de  tout  cela  :  mais  il 
nous  a  appelez  comme  il  nous  auoit  choifis 
aupa;^auant.  Et  c'eft  l'ordre  où  funct  Paul 
nous  appelle  en  l'autre  paflage  au  huitième 
des  Romains  :  c'eft  de  ce  que  nous  eognoif- 
fbns  Dieu  ,  qu'il  ne  faut  point  que  nous  er» 
prenions  la  gloire  à  nous,  mais  c'eft  d'autant 
que  noftre  Seigneur  nous  auoit  eleus  en  foy: 
&il  a  voulu  déclarer  cela  partfîtâ.  Voila, 
comme  la  vocition  des  fidèles  dépend  de  ce 
confeil  de  Dieu.  Et  parcemoycn  nous  voy- 
ons comment  &  infques  où  noftic  Seigneur 
nous  déclare  ce  qu'ail  a  d<  ci  été  de  nous  de- 
uant que  nous  fufiions  nais.  Apres, nous  tou- 
che-il par  fon  fainô  Efprit  >  Nous  fommes 
comme  entez  au  corps  de  noftre  Seigneur  le- 
fus Càrift.    Et  voila  la  vraye  aire  de  noftre 
adoption  :  c'eft  le  gage  qui   nous  eft  donné 
pour  afleurance  certaine  que  Dieu  nous  tient 
&  aduoue  pour  fîens, quand  par  foy  nous  Ibm; 
mes  vn;s  à  lefus  Chriit  qui  eft  le  Fils  vnique, 
auquelappartiét  l'héritage  de  vie. Puis  qu'ain 
fi  eft  donc  que  Dieu  nous  donne  telle  appro- 
bation de  fa  volonté  ,  voila  comme  il  nous 
certifie  de  noftre  eleftion  qui  nous  eftoit  in- 


n'y  a  point  de  feintife  en  luy,  pourquoy  eft-    cognue,  &  laquelle  nous  ne  pouuions  apper 
ce  quil  y  a  double  façô  de  parler  de  fa  volon  ■        i  ^ 

térC'cft  àcaufe  denolhe  rudtffeicar  no'  fça 
Bons  qu'il  faut  que  Dieu  fe  transfigure  pour 
côdcftendre  ànous.Pourqjoy  eft-ccqu'if.'at 
tribue  des  yeux  ,  de»  aureiUes,  vn  nez?  Pour- 
quoy eft-ce  qu'il  fe  vtft  d'afftftion  humaine? 
Pourquoy  eft-ce  qu'il  dit  qu'il  eft  courroucé, 
qu'il  eft  contrifté  ;  N'eft-ce  pas  d'autant  que 
nous  ne  le  côprcnons  pas  eu  fa  maiefté  incom 


ceuoir ,  c'eft  autant  comme  s'il  nous  don- 
noit  vne  copié'extvaitce  de  <à  volonté.  Il  ha 
le  regiftre  original  :  mais  tant  y  a  qu'il  nous 
en  .donne  ccimme  vn  inftrument  authenti- 
que, afin  qu'en  noftre  ignorance  nous  foy- 
ons  afleurtz  neantmoins  de  noftre  falut.com. 
me  l'efperance  nous  en  eftdônee,  de  laquel- 
le nous  eufsions  efté  ptiucz  à  iamais ,  iinou 
que  lefus  Chrift  nous  appellaft  pour  eftre- 

Iz.  u. 


'?y 


T^ËZIEM  E     SERMON 


10. 


raébré*  de  fou  corpî.  Atnfi  nous  voyons  com 
bien  c'cfte  doftrine  de  l'eleûion  no'  eft  vtile, 
c'cft  en  premier  lieu  pour  no' humilier  quad 
aous  cognoiirons  que  noftre  falut  ne  dépend 
pas  4e  nos  m€rites,ne  de  nos  vertus  lefquel- 
Ics  Dieu  ait  trouuees  en  nous ,  mais  d'autant 
qa'ilnousa  eleus  deuant  que  nous  tufsions 
nais,  &deuant  que  nous  peufsions  faire  ne 
bicnne  mal. Voila  pour  vn  item.Etpuis,quâd 
nous  cognoiiToiis  que  Dieu  nous  a  appelez  à 
fôy  fuyuant  cefte  elcdion  qui  eft  immuable, 
par  cela  nous  ïbmmes  tant  mienx  certifiez  de 
noftre  falut ,  comme  lefus  Chrift  le  déclare, 
<2iLe  ni^l  ne  luy  raiiiia  ce  qui  luya  efté  don- 
né du  Père. Et  qui  font  ceux  que  le  Père  dé- 
ne  à  lefus  Chrift?  Ceux  qu'il  a  elcus,&  qu'il 
cognoift  cftre  liés.  Puis  qu'ainii  ell  que-Dieu 
nous  a  commis  en  la  g.irde  &  protetUon  de 
fon  Fils,  d'autant  qu'il  nous  auoit  elcus  au- 
parauant  ,  &  que  lefus  Chrift  promet  &  te- 
îtifie  que  rien  n'en  périra,  mais  qu'il  smplo- 
yera  toute  fa  vertu  Diuine  pour  nous  {auuer 
èi  maintenir,  ne  voila  point  vne  confolatiou 
incftimable?  Et  n'eft-ce  point  aufsi  levray 
fondement  fur  lequel  toute  la  certitude  de 
noftre  falut  s'appuyc?  Car  nous  fommes  ici 
toiii  c5me  oiieaux  fur  la  branche, ainfi  qu'on 
dit:  nous  fommes  expofez  en  proye  à  Satan. 
Qji.clle  afleurance  donc  aurions-nous  pour 
demain  &:  pour  toute  noftre  vie  ,  &  mefmes 
■après  noftre  mort, finond'autant  que  le  Dieu 
qui  nous  a  appelez  .i  fjy, parfera  fon  œuure 
comme  il  a  côinencé?  Et  pourquoy?  Cornent 
eft-ce  qu'il  nous  a  recueillis  en  la  foy  de  fon 
Euangile?  cela  eft-il  fonde  lur  nous?  Mais  au 
côtraire,  il  procède  de  fa  pureelcûion  &gra 
"tuite.Ainfi  dôc  nous  en  deuos  eftre  tât  mieux 
certifiez.  Et  ainiî  toutes  fois  Se  quantes  qu'il 
nous  eft  parlé  de  l'eleâion,cognoiflons  qu'il 
ne  no' faut  point  enquérir  ducôfcil  de  Dieu 
outre  ce  qu'il  no'  en  parle,  c'eft  afçauoir  au- 
tant que  nous  en  auôs  de  cognoillance  en  l'H 
fcriture  faiadle.  Voila,  <ij-ie,côme  le  vouloir 
de  Dieu  nous  eft  touché  fimplement,  voire 
ce  vouloir  lequel  il  no'  manifefte  entât  qu'il 
nous  eft  vtile.Or  il  y  a  puis  après  la  volonté 
de  Dieu  qui  nous  eft  comme  patente,  telle 
qu'il  nous  déclare  toutes  fois  &  quantes  que 
ià  parole  nous  eft  prcfchee.  Et  quelle  eft  ce- 
fte  volontc-là?  C'eft  qu'il  nous  conuie  &■  ex- 
horte tousàpenitence;apres  nous  auoir  mon 
ftré  que  nous  fommes  tous  d.imnez  deiunt 
l"y .  .qu'il  n'y  a  que  makdiftion  en  nous  ,  il 
nous  déclare  qu'il  faut  renoncera  n«us-mef 
mes, q^u'il  tant  que  nous  fôrtiôs  de  ceft  abyf- 
me  ou  nous  fommes  plongez.  Qjiand  Dieu 
exhorte  en  gênerai  les  homes  ,  de  là  oii  peut 
iuger  la  volonté  de  Dieu  eftre, que  tous  foy- 
eiit  fauucz,  comme  auhi  il  le  dii;  par  le  Pro- 
JEV.'iS.  phetcEzechiel,  le  ne  veux  point  la  mort.du 
^3>&i3-  pécheur,  mais  qu'il  fe  conuert'ire,&:  qu'il  vi- 
il,  uc.   Comment  tft-cc  que  Dieu  veut  que  les 

pécheurs  fc  conuertiflliu  i"  &  comment  le  lu- 


gérons-nousî?  C'eft  d'autant  qii'il  veut  qu'ôti 
prefche  pénitence  à  tout  le  monde, à  grans  & 
à  péris. Qujnd  il  eft  dit  que  Dieu  receura  les 
pécheurs  à  merci ,  qui  viendront  à  luy  pour 
demander  pardon,  &y  viendiont  au  nom' de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ;  ceftedoârine- 
ia  eft-elle  pour  deux  ou  pour  trois  ?Nenni: 
elle  eft  generale.Ainfi  donc  il  eft  dit  que  Dieu 
veut  que  tous  foyent  fauuez,  voire  non  point 
regardant  félon  noftre  apprehenfion  ,  c'eit  à 
due  entant  que  noftre  efprit  le  porte  :  car  il 
nous  tant  toulîours  reuenirà  ceftemefure-la. 
Et  qu'ainii  foit,  quand  l'Efcriture  parle  de 
r.imour&de  la  volonté  de  Dieu,  regardons 
fi  Iqs  hommes  peuuent  auoir  rcpentance  de 
leur  propre  mouuemcnt&:  inftiu^tion,  ou  fî 
c'eft  Dieu  qui  la  donne, voire  &:  la  donne  d'v- 
nc  bonté  fpeciale.  Voila  Dieu  qui  dit  par  fori 
Prophète,  le  veux  que  tous  fc  couuertiflent. 
Et  l'homme  fe  pourra-il  conuercir  de  foy? 
Nenni:car  fi  cela  eftoit  en  nous,  ce  fcroit  plus 
que  de  nous  crcer;&  l'expérience  nous  en  réd 
allez  conuaincus.Et  c'eft  aufsi  vue  doctrine  af 
fez  certaine  en  toute  l'Efcriturexar  par  tout 
noftre  Seigneur  lefus  s'attribue  la  lou.ïge  de 
noftre  conueriîon,  difant,  Q_u^il  .imolira  nos 
cœurs  qui  font  de  pierre,  &  qu'il  les  pliera  en 
fon  obeilîânce  ,  &  que  c'eft  à  luy  3  faire  de 
nous  donner  non  feulement  le  pouuoir,  mais 
le  vouloir  d'obéir  à  fes  commandemens:briçf 
il  n'y  a  rien  qui  doiuc  t'ftre  plus  commun  à 
tous  fideles,quc  de  glorifier  Dieu  en  ceft  en- 
droit, confelîàns  que  c'eft  à  luy  de  nous  con- 
uertir  ,  que  c'eft  luy  qui  nous  a  tellement  a- 
doptez, qu'il  faut  qu'il  nous  attire  par  la  grâ- 
ce de  fon  fainft  Elprit. Voila  vn  item  qui  doit 
aftrcaflez  refolu.  Quant  à  la  foy,  &  ie  vous 
prie,les  hommes  ont-ils  vn  efprit  fi  aigu, que 
ilscomprenentc^efte  fagelTe admirable  qui  eft 
contenue  en  l'Euangile,  Se  que  les  Anges  nief 
mesadorent?comme(aini5è  Paul  en  parle.  Or 
fi  nous  fommes  fi  outrecuidcz  ,  regardons  ce 
que  Dieu  nous  dit  par  /a  parole.qu'il  faut  que 
il  nous  ouure  les  yeux, qu'il  nous  perce  les  au 
reillesrd'autant  que  l'homme  fenfuel  ne  com 
prend  rien  de  tous  les  fecretsde  Dieu  :  c'eft 
l'Efprit  de  Dieu  qui  nous  les  reuele;bricf,on 
ne  fçauroit  point  lire  trois  lignes  en  l'Efcri- 
ture fainrte,  qu'on  ne  trouue  quelque  feutcn- 
ce  pour  monfirer  que  les  hommes  de  leur  na- 
ture font  aueugles  du  tout ,  lufques  à  ce  que 
Dieu  leur  ait  ouuert  les  yeux:  Se  qu'ils  ne  peu 
lient  approcher  de  luy.iufques  à  ce  qu'il  les  y 
attirc:que  c'eft  vn  don  fpccial  qu'il  nous  elar 
git,qu.ld  il  nous  illumine  en  la  foy  de  là  véri- 
té.Puis  qu'ainfi  eft  que  i.i  conuerfion  des  hom 
incs  eft  en  la  main  de  Diciiril  s'enfuit  qu'il  ne 
la  donne  pointa  tous:  car  l'experiéce  le  mon 
ftrc:  &  ainfi  l'E  fcriture  lainûc  en  parle,  Ton 
Dieu  ne  t'a  point  cncorcs  donné  caur  pour 
côprcndre.  Et  puis  tant  fouiicc  iJ  nous  eft  niô 
ftré  queDicu  ne  lettc  point  come  .i  l'abandon 
ù  grace,mais  qu'elle  eft  feulement  pour  c(ux 

qu'il 


£Kech. 
Il.Iii.lO 

Vliillf.!, 
'3- 


l.Cor.i, 


4. 


SVR  LAI.   A   TIMOTH. 


Su'il  aeleus  ,  &  pour  ceux  qui  font  du  corps 
e  fon  Eglife&  de  fon  troupeau.  Ainfï  donc 
nous  voyons  comme  la  volonté  de  Dieu  doit 
eftre  entendue  en  ce  partage  de  faind  Paul, 
quand  il  dit,  Q^  tous  foyent  fauuez,  c'eft  à 
dire,de  tous  peup les,&  de  tous  eftats.Et  cotn 
ment  cela?  Car  il  propofe,d't-il,fon  Euangi- 
le  à  tous, qui  eft  le  moyen  de  nous  attirer  à  la 
lut.Et  celâneantmoinsprotîte-il  à  tousfNen 
HijCommenous  le  voyons  à  l'œil. Car  quand 
nous  aurons  eu  les  aurciUes  battues  de  la  ve 
rite  de  Dieu, fi  nous  y  Tommes  rebelles, ce  fe- 
ra pour  noftre  plus  grande  condamnation. 
Mais  il  eft  ainli  que  beaucoup  ne  profitent 
pas  en  l'Eaingilc  :  ains  ils  y  empirent  pluf- 
tolt.voirede  ceuv  aufquclsl'Euâgile  fc  pref- 
chclefquelsne  font  pas  tous  fauuez.  Ainiî  il 
faut  que  Dieu  pafle  plus  outre  pour  nous  ame 
ner  à  falut.c'eft  que  non  feulement  il  ordon- 
ne &enuoye  les  hommes  qui  nous  en  feigne  t 
fidèlement,  mais  que  luy  foit  maiftre dedans 
nos  cœurs,  qu'il  nous  touche  au  vif,  qu'il 
nous  attire  à  foy  ,  &  qu'il  face  que  f.i  parole 
ne  nous  foit  point  inutile, mais  qu'il  luy  don 
ne  racine  en  nos  cœurs.  Au  refte,nous  voyos 
maintenant  comme  c'eft  vne  choie  touce're- 
folue  ,  que  la  volonté  de  Dieu  fe  doit  confi- 
derer  doublement  de  nous  ,  voire  félon  no- 
ftre  portceinon  point  qu'elle  f  jit  double  en 
foy(comme  nous  auons  dit)mais  pouice  que 
noltre  infirmité  le  requiert, &;  que  Dieu  con 
defcend  à  nous  non  feulement  en  cela ,  mais 
en  tout  le  refte.  Car  nous  voyons  comme  il 
bégaye  en  fa  parole,  tout  ainii  qu'vne  nour- 
rice fera  auec  des  petis  enfans.  Si  Dieu  par- 
loit  félon  fa  maiefté,  fon  langage  nous  feroit 
trop  haut  &  trop  difficile  à  comprendre, 
nous  y  (eriôs  confus,tous  nos  lens  y  feroyét 
esblouis.  Car  fi  nos  yeux  ne  peuuent  porter 
la  clarté  du  foleil,  ie  vous  prie,  fera-il  en  no 
ftre  efprit  de  comprendre  la  maiefté  infinie 
qui  eft  en  Dieu?  Maintenant  d-inc  il  ne  faut 
point  que  ces  beftes  qui  veulent  deftruire  l'e 
lertion  de  Dieu.abiifent  de  ce  pallage,&  que 
ils  difent  que  nous  faifons  la  voleté  de  Dieu 
double:car  ce  font  des  calomnies  vileines  & 
impudentes. Mais  nousdifons  ce  que  chacun 
voit,  c'eftque  félon  noftre  regard  Dieu  veut 
que  nous  foyons  tous  fauuez  ,  toutes  fois  & 
quantes  qu'il  ordonne  que  fon  Euagile  nous 
foit  prefché.Et  pourquoy?Car  (comme  défia 
nous  auons  dit  )  la  porte  de  paradis  nous  eft 
ouuerte,  quand  nous  fommes  ainfi  conuiez 
pour  eftre  participansde  la  rédemption  qui 
nous  a  eftéacquifepar  noftre  Seigneur  leùis 
Chriit.  Et  c'elc  la  volonté  de  Dieu,telle  Se  fe 
Ion  que  nous  la  pouuons  comprendre  ,  afça- 
iioirs'il  nous  exhortcà  repentance,  qu'il  eft 
p;  eft  de  nous  rcceuoirquandnous  viendrons 
à  luy.  Maintenant  combien  que  nous  ayons 
folu  les  queftionv  qui  fo  peuuent  ici  faire, 
toutesfoisil  ftrabon  d'amener  vne  fimili- 
tudc  pournous rendre  Jadodnneplusfami- 


77- 


liere  :  ie  di  fimilitude  jcefte  cijnfonttité  <jue 
Dieu  met  du  peuple  d'ffrael  auec  nous.Dieu  ^^<*t^^ 
dit  qu'il  a  choifi  à  foy  tous  les  enfans  d'A-  i*'-     ' 
braham,  qu'ils  luy  feront  corne  fon  héritage, 
&  qu'il  les  a  dedtez  à  foy ,  qu'il  les  a  aimet, 
qu'il  les  a  tenus  comme  fés  domeftiqiies.  Et 
cela  eft  vray, voire  d'autant  qu'il  a  fait  fon  al 
liance  auec  tous  ceux  qui  eftoyent  circoncis. 
La  Circoncifion  eftoit-ce  vne  figure  vaine, 
&  qui  n'emportaft  rien?Mais  c'eftoit  vn  cer- 
tain gage  8c  infallible.que  Dieu  auoit  eleu  ce 
peuple-1*  pour  fien, comme  iladuouede  foir 
troupeau  tous  ceux  qui  en  eftoyent  defcen- 
dus.Maiscependant.aiçauoir  s'il  n'y  a  point 
eu  vne  grâce  fpeciale  pour  d'aucûs  de  ce  peu 
ple-la?  Ouy  bien.comme  fainô  Paul  le  mon 
ftre.  Que  tous  ceux  qui  font  defcendus  d'A-  R.»».  f^ 
braham  félon  la  chair,ne  font  pas  vrais  Ifrae  g.w. 
lues  :  comme  aufsi  Dieu  en  a  priué  aucims  de 
ce  bénéfice  ,  afin  que  fa  grâce  Si  bonté  euft 
tant  plus  grand  luitre  enuers  les  autres,  lef- 
quels  ilaappelezà  foy.  Pourtant  voila  ceft© 
volonté  de  Dieuqui  a  efté  au  peuple d'Ifiael 
laquelle  fe  môftrc  auiourd'huy  enuers  nous. 
Pciurquoyfl'Euagile  fe  prefchera  là  où  Dieu 
l'ordonne  ,  &  non  point  qu'il  y  ait  vn  ordre 
égal, pour  dire  que  ce  fou  par  toutrmais  pluf 
toit  nous  voyons  ce  qui  eft  dit  au  Prophète 
Amos, eftre  accompli ,   Que  Dieu  pleuuera  j^m.i^r 
fur  vne  ville,  &  l'autre  demeurera  feiche,que 
il  y  aura  famine  de  fa  vérité  en  beaucoup  de 
lieux.  Et  ainfi  le  Seigneur  enuoye  fon  Euagi 
le  où  il  luy  plaiftitît  y  a  q  ce  n'eft  point  feu- 
lemét  en  ludee.ni  en  vn  anglet  de  pays  que  Œ 
grâce  eft  efpandue  ,  mais  par  tout  le  monde, 
çà  &  là  ,  combien  qu'il  n'y  ait  point  vn  or- 
dre femblable  par  tout.   Si  faut-il  bien-sue 
Dieu  belbngne  plus  outre  en  ceux  lefquels  il 
veut  attirer  à  foy.Car  nous  auons  tous  les  au 
reilles  bouchées,  nous  auons  les  yeux  ban- 
dc-z:quiplus  eft.nous  fommes  fourds  &  aueu- 
gles  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  touchez  ,  afin 
que  nous  receuions  fa  parole.  Voila  donc  la 
volonté  de  Dieu  que  nous  deuons  appreheo 
derdoublcment ,  tout  ainfi  que  l'Efcriture 
i'ainfte  nous  le  monftre:non  pas(coramei'ay 
dit)  que  Dieu  ibir  double  en  foy  ,  ne  que  la 
volonté  foit  diuerfe.    Venons  maintenant  à 
prattiquer  cefte  doélrine.Et  en  premier  lieu 
notons  quand  l'Euangile  nous  eft  prefché, 
que  c'eft  autant  comme  fi  Dieu  nous  tendoit 
les  bras, (ainfi  qu'il  en  parle  par  fon  Prophe 
te  Ifaie)  pour  dire  ,  Venez  àmoy.  C'eft  vne  Jfa.is.l^ 
chofe  qui  nous  doit  bien  toucher,  quâd  nous 
voyons  que  noftre  Dieu  nous  vient  cher- 
cher, n'attendant  pas  que  nous  veniôs  à  luy, 
mais  qu'il  déclare  qu'il  eft  prcft  de  fe  récon- 
cilier auec  nous:  combien  que  nous  luy  ayôs 
efté  ennemis  mortels  ,  qu'il  ne  demande  que 
d'abolir  toutes  nos  fautes,  &  nous  faire  par- 
ticipans  du  làlut  qui  nous  a  efté  acquis  par 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift.   Et  ainfi  nous 
Yoyons  combien  l'Euangile  mérite  d'eftre 

Jlz.iii. 


78 


TR  EZIEM 


prifc,&tjuel  threfor  c'eft,  fuiuât  ce  que  nous 
auons  défia  allégué  du  premier  cJiapitre  des 
Romains  ,  q«e  c'eft  la  puiflànce  de  Dieu  en 
falutàtous  croyans ,  que  c'eftle  royaume 
descieux,  &  que  par  la  Dieu  nous  ouure  la 
porte,  afin  qu'eftans  fortisdes  abylmesoù 
nous  fommes  de  nature  ,  nous  entrions  en  fa 
gloire,  voila  donc  vn  item.  Cependant  no- 
tons auîsi  que  ce  n'eft  point  allez  que  nous 
receuions  la  parole  qui  nous  lera  prefchee 
par  la  bouche  d'vn  homme,  ce  ne  fera  qu'vn 
îbn  qui  fe  pourra  efuanouir  en  l'air  fans  pro 
fit  aucun  :  mais  après  que  nous  aurons  ouy  la 
parole  de  Dieu  ,  il  faut  qu'il  parle  à  nous  au 
dedans  par  fon  fainft  Efprit  :  car  c'eft  là  k 
fcul  moyen  pour  nous  faire  paruenir  à  la  co- 
gnoiflàncede  verité.EtainiiquSd  Dieu  nous 
aura  fait  cefte  grâce  de  nous  illuminer  en  la 
foy, tenons  cela  de  luy,  &  le  prions  qu'il  con 
tinue,&  qu'il  amené  cefte  œuure-la  à  perfe- 
ûion  :  &  ne  foyons  pas  fi  arrogans  de  nous 
cleuer  par  deffus  le  refte,cârae  ù  nous  citions 
plus  dignes  :  nous  cognoiffons  que  c'eft  no- 
ftre  Dieu  qui  nous  a  choifis  ,  &  qui  nous  di- 
fcerne  par  fa  pure  bonté  &  mifericorde  gra- 
tuite. Voila  ce  que  nous  allons  à  noter  ei^  ce 
paflage.  CognoilTonsaufsi  que  les  hommes 
fontaflez  coulpables,  quand  Dieu  l'.ur  a  pre 
fente  fa  parole ,  s'ils  ne  la  reçoiuent.  fit  de 
fait  ceci  nous  eA dit  en  partie,  afin  que  tous 
fidèles  auec  toute  humilité  glorifient  la  grâ- 
ce de  Dieu  enuers  eux  ,  &  en  partie  afin  que 
Jes  incrédules  &  rebelles  ayét  la  bouche  clo 
fe  ,  qu'ils  ne  puiflent  point  blafphemer  con- 
tre Dieu,  comme  s'il  leur  auoit  défailli.  Car 
«ous  voyons  corne  il  conuie  h  falut  tous  ceux 
aufquels  fa  parole  fe  prefche.Si  on  réplique, 
Voite ,  mais  ils  ne  peuuent  pas  venir  à  Dieu. 
Jl  ne  faut  p«int  plaider  ici  :  car  les  hommes 
fe  trouueront  toufiours  coulpables. Si  on  dit, 
£t  il  ne  tient  qu'à  Dieu,  s'ilme  vouloit  con- 
uertir,ne  le  peut-il  pas  faire?Et  quand  ie  de- 
meure obftiné  en  ma  durté  &  malice,  qu'y  fe 
loiî-ic,  puis  que  Dieu  ne  me  veut  pas  con- 
Uertirà  foy?  Or  cela  n'eft  nullement  receua- 
èle,d'autant  que  Dieu  nous  appelle  fuffifam 
ment  à  foy  :  &  ne  le  pouuons  pas  accuferde 
cruauté, ne  qu'il  nous  ait  défailli.  Car  quand 
nous  n'aurions  point  la  parole,  fi  eft-ce  qu'il 
le  faut  confefler  lufte, encore  que  nous  ne  co 
gnoifsions  point  lacaule  qui  l'induit  à  nous 
«n  priuer.  Mais  quand  nous  aurons  tflé  con- 
uiez  de  venir  à  Ditu ,  &  que  nous  aurons  «o- 
gnii  qu'il  eft  prell  de  nous  receuoir  ,  fi  nous 
n'y  venôs,  ne  fommes-nous  pas  côi^aincus  de 
Boftte  ingratitude  &  lafchctéfMais  au  relte, 
notons  qu'il  ne  faut  point  feparer  l'vn  d'aucc 
l'autre, le  faiut  d'auec  lacognoiirance  de  ve- 
lité.  Car  Dieu  ne  veut  point  mentir,  ne  tru- 
ftrer  les  hommes,  quand  il  du  qii'tftîs  venus 
ila  cognoiflancede  veiité.ilsaurôt  falut. S'il 
lie  donne  point  ceflecognoiflànce  à  tous(co 
toe  il  a  elle  délia  dit  )  il  n'y  cCt  pas  tenu  m 


E    SERMON 

obligé.  Et  au  refte,le$  hommes  demeureront 
toufiours  coulpables.  Mais(comme  i'ay  dit) 
apprenons  de  côioindre  ces  deux  mots, Que 
Dieu  veut  que  tous  foyent  lauuez  .  Et  com- 
met? Vcnans  à  la  cognoiflancede  vérité.  Car 
c'eft  afin  de  nous  tenir  en  bride  ,  que  nous  ne 
foyons  point  extrauagans  comme  beaucoup 
font.ChaciJvoudroit  eftré  fauué:voire,mais 
nul  ne  veut  approcher  de  Dieu.  Voila  tom- 
me l'Efcriture  nous  tient  en  cefte  fimpiicité; 
que  fi  nous  defirons  d'auoir  falut ,  il  faut  que 
nous  tenions  le  moyen  qui  nous  eft  ordon- 
né, &  que  Dieu  nous  propofe ,  c'eft  afçauoir 
que  nous  receuions  la  parole  en  obeiflànce 
de  foy  .C'eft  la  vie  eternelle,dit  leûis  Chrift,  Uh.  17  4, 
afçauoir  qu'on  cognoifl'e  Dieu  fon  Père  ,  & 
puis  qu'on  le  cognoifle  auf^i,  &  qu'on  le  re- 
çoiue  pour  feul  Sauueur.  Et  pourtant  apprêt 
nons,fuiuant  ce  qui  nous  eft  ici  déclaré, qu'il 
ne  faut  point  que  nous  doutions  que  noftre 
falut  ne  foit  bien  afleuré  :  car  le  royaume  de 
Dieu  eft  en  no'.  Mais  voulov-nous  que  Dieu 
nous  reçoiue?  Il  faut  que  nous  receuions  ce- 
fte doûrine  que  S. Paul  nous  donne:carla  vo 
lonté  de  Dieu  eft  noftre  vie:voila  côme  nous 
fommes  rellufcitezdes  morts  :  voila  comme 
nous  fommes  appekzà  l'e/perance  de  falut: 
c'eft  que  Dieu  nous  déclare  fon  amour  &  fa 
grâce  :  il  faut  donc  que  nous  en  demeurions 
là.Et  ainii  nous  voyons  en  fommc  quelle  eft 
l'intention  de  fainÛ  Paul,  c'eft  afçauoir  que 
d'autant  que  Dieu  veut  que  fa  grâce  foit  co 
gnue  de  tout  le  monde,  &  qu'il  a  commandé 
que  fon  Euangile  fe  prefchaft  à  toutes  crca- 
tuies,  qu'il  faut  qu'entât  qu'en  nous  eft  nous 
procurions  le  lalut  de  ceux  qui  iontauiour- 
d'huy  cftr.-inges  de  la  foy  ,  qui  femblent  du 
tout  dire  prinez  de  la  bonté  de  Dieu  ,  que 
nous  tafchiôs  de  les  y  amener. Et  pourquoy? 
Car  lefus  Chiift  n'clt  point  Sauueur  de  trois 
ou  de  quatre.inais  il  fe  prefente  à  tous,  voila 
pour  vnitem.  Au  refte,toutes  fois  &qiiantes 
que  l'Euangile  nous  eftprefché.cognoiflbns 
que  Dieu  nous  conuie  à  foy ,  &  que  cela  n'eft 
point  en  vain, que  nous  ne  ferons  point  ftu- 
Ihez,  voire  iiioyenuant  que  nous  venions  à 
luy.  Et  y  viendrons-nous  de  noftre  mouue- 
raét  naturel?Hclas  nonicar  nous  luy  fommes 
du  tout  contraires,  &  n'y  a  nulle  affeûion  en 
nous  qui  ne  luy  foit  ennemie,  comme  S.  Paul 
en  parie  ,  que  nous  luy  fommes  toufiours  re-  "^'''•«■7 
belles.  Mais  quand  Dieu  nous  faitcclte  grâ- 
ce de  nous  toucher  par  fon  S.  Efprit  ,  alors  il 
fait  profiter  Ion  Eiiagile  à  noltrc  falut,  alors 
ildcfploye  cefte  vtrtudc  laquelle  parle  S. 
Paul,  car  nous  ne  croyôs  finon  à  ce  qui  nous 
eft  dit  de  Uiy.Au  nftc.cognoiflons  que  quâd 
rEu.ïgile  nous  auia  eftc  prcfchc,ce  fera  pour 
nous  reiidic  tant  plus  lucxcufabks.Et  pour- 
quoy? Car  pui^  que  dtfia  Dieu  nous  auoit  de 
claré  qu'il  eftoit  p-tft  de  nous  receuoir  i 
merci  quand  nou-  fii  fions  venus  à  luy  ,  aufsi 
noftre  condânation  s'augmétcia  quand  nous 

au  10  ni 


SVR    LA  I.    A    TIMOTH. 


79 


aurons  efié  fi  malins  de  reculer ,  là  où  il  nous 
conuioic  auec  vne  telle  douceur  .  Cependant 
(  fuyuant  Texhortation  qui  eft  ici  faite  )  que 
nous  ne  laifsions  pas  de  prier  pour  tous  hom 
mes  en  gênerai  :  car  faind  Paul  nous  monftre 
comme  Dieu  veut  que  tous  foyét  ûuuci,c''eU 
À  dire  de  tous  peuples  &  nations.  Et  pourtant 
il  ne  faut  point  eltre  tellement  arreftez  i  la 
diuerfîté  qui  fe  môftre  entre  les  hommes, que 
cous  ne  cognoilsions  cependant  que  Dieu 
sous  a  tous  créez  àfun  image  Se  fcmblance: 
que  nous  femmes  fon  ouurage,  que  iâ  bonté 
le  pourra  eftendre  fur  ceux  qui  font  auiour- 
J'huy  bien  eflongnez  de  luy, comme  nous  l'a- 
uons  expérimenté.  Car  du  temps  qu'il  nous  a 
attirez  à  foy,  (  comme  il  a  cfté  déclaré  )  n'e- 
ftions-nous  pas  fef  ennemis;  Pourquoy  donc 
cft-ce  que  maintenant  nous  fommes  domefti- 
quesdela  foy.enfansde  Dieu.Sc  membres  de 
Je noftre  Seigneur  Itfus  Chrift'c''eft d'autant 
qu'il  nous  a  recueillis  à  foy.  Or  n'eft-il  point 
Sauueur  de  tout  le  monde  aufsi  bien  ?  lefus 
Chrift  eft-il  venu  pour  titre  Moyenneur  feu- 
lement entre  deux  ou  troi^  hommes  ?  Nenni: 
mais  il  eft  Moycnneur  entre  Dieu  &  les  hom 
mes. Et  ainfi  tant  plus  dcuons-nous  eftre  cer- 
(i£ez  que  Dieu  nous^.tient  &  aduoue  de  fon 


troupeau, quand  nous  tafchons  d'attirer  ceux 
qui  en  font  comme  eflongnez  auiourd'huy. 
Et  pourtant  foyons  confolcz  &  fortifiez  en 
noitre  vocation:que  s'il  y  a  vue  horrible  dif- 
fipation  auiourd'huy,  tellement  qu'il  femble 
bien  que  nous  foyons  créatures  miftrables, 
perdues  &  damnées  du  tout, que  nous  tafchiôs 
neantmoins  entant  qu'en  nou;  eft,  d'attirer  â 
falut  ceux  qui  en  ferablent  b  en  cftie  eflon- 
gnez :&  fur  tout  que  nous  pifjns  Dieu  pour 
eux.attendans  en  patience  qu'ii  luy  plaifc  de.» 
clarerfon  bon  vouloir  tnuers  cux,c6me  defîa 
il  l'a  déclaré  fur  nous. 

OR  nous-nous  profteruciôs  dcuant  la  fk 
ce  de  noftre  b  on  Dieu  en  cognoiûàncc  de  noi 
fautes:le  piiant  qu'il  luy  flaife  nous  les  faire 
tellemét  fentir.qu'eftâs  abbatus  en  nous-mel* 
mes,nous  prenions  toutesfois  courage  de  ?c- 
nir  i  luy  ,  voire  d'autant  qu'il  nous  comjie  fi 
doucement,  que  nous  ne  aoucions  point  qu'il 
ne  nous  exauce  en  nos  prières  quand  i^ous  le 
requerrons  au  nom  de  noAre  Seigneur  lefus 
Chrift,  &  qu'il  nous  face  toufiourt  feottr  le 
fiuiâ  de  nos  oiaifons,quand  naus  le  requer- 
ront en  viaye  foy  Se  repentancc  .  Que  non 
feulement  il  nous  face  celle  grâce,  mais  aufst 
à  tous  peuples  &  nations  de  U  terce,8<c. 


QJ"  ATRrEME       SERMON       SVR       LE 


SECOND    CHAPITRE. 


5  Car  il  y  a\n  Dieu,  (f  v«  Wioyenneur  de  Dieu  O'  d^^  hommes» 
sS<^x\io\v  lefis  Chrijî  homme, 

6  Qui  s'eji  donné  foy  -  mcfme  rançon  ^our  tous, dont  le  tejmoigns 
ge  enfufl  en  fon  temps, O"*^' 


L  eft  vray  que  le  monde  de 
tout  temps  a  tellement  efté 
efiongné  de  Dieu,  que  tous 
peuples  ont  bien  mérité  de 
eltre  comme  bannis  de  fon 
royaume,  n'ayans  nulle  ac- 
cointaiice  auec  luy.  Pour  ce 
ftecaufenous  voyons  aufii  que  du  temps  de 
la  Loy,ilachoiiî  vn  certain  peuple  ,  SiPi  re- 
cueilli fous  fa  conduite,  ayant  laifTe  le  rtfle 
du  monde  en  confulîon .  Mais  combien  que 
les  hommes  ayent  efté  ainii  feparcz  de  Dieu, 
fieft-ce  que  de  nature  tous  luy  appaiticnent, 
&  comme  il  les  a  tous  créez,  il  faut  auf^i  qu'il 
les  gouuerne,  &  qu'il  les  maintiene  par  fa  ver 
tu  &  bonté  .  Et  ainlî  quand  nous  voyons  les 
hémes  aller. i perdition,  côbien  qu'ils  foyent 


Q»'(7  jr  4  yn  DiV«:comme  s'il  difoit.D'autît 
que  tous  font  créez  de  Dieu,&  qu'il  les  i  Coût 
il  matn ,  il  faut  bien  que  nous  ayons  quelque 
fraternité  enfemble  .  Il  eft  vray  que  ceux  qui 
ne  font  point  d'accord  en  foy  auec  nous,rone 
comme  nos  ennemis ,  &  y  a  longue  diftance: 
mais  cependant  l'ordre  de  nature  nous.mon- 
ftre  que  nous  ne  les  deuons  pas  du  tout  reiec 
ter,  8c  que  nous  deuons  mettre  peine  ,  entanc 
qu'en  nous  fera.de  les  reunir  au  corps,pource- 
qu'ils  font  comme  membres  retranchez.  Et 
de  fait,  quand  nous  voyons  les  hommes  ainfi 
difperfez,  cela  nous  doit  faire  drcfler  les  che 
ueux  en  la  tefte,  comme  fi  nous  voyions  vn 
monftre.  Car  tous  font  d'vne  mefme  nature, 
l'image  de  Dieu  eft  imprimée  en  eux  ,  il  y  a 
comme  vn  lien  infeparable;&  cependant  nous 


incrédules  ,  &  que  Dieu  ne  leur  ait  point  fait     voyons  qu'ils  font  comme  diuifez.  Et  au  re 


ccftc  grâce  de  les  conioindre  à  nous  en  la  foy 
de  l'Euangile,  li  eft-cc  que  nous  en  deuons  a- 
uoir  pitié.&dcuons  tafcherdeles  ramener  au 
droit  chemin  entant  qu'en  nous  eft  .  Voila 
pourquoy  fainû  Paul  en  ce  pallàge  «Ilcgue, 


fte.cc  quideuoit  eftre  là  principale  vnion  en- 
tre nous ,  a  efte  caufe  de  nous  diuifer,  &nous 
rendre  ennemis  ,  c'eftafçauoir  ,  le  feruicede 
Dieu,la  vraye  religion.Ainlî  donc  notés  bien 
quand  nom  voyons  les  poures  incrédules  e-» 

lz.i»u. 


Oy  ATOR2IEME    SERMON 


8d 

ftre  ainfî  efcartez  du  chemin  de  falut ,  qu'il 
nous  en  faut  auoir  pitié, &  mettre  peine  de  les 
fecourir,&  leur  tendre  la  main:&  pour  ce  fai- 
re que  nous  reduiiîôs  en  mémoire  ce  qui  nous 
eft  ici  déclaré  parfaind  Paul,  c'eftafçauoir, 
ait  il  y  a  yn  Dieu.Cm  lî  les  hommes  font  com 
nie  befbes  farouches,  &  qu'ils  le  iettent  amli  à 
l'abandon,  tant  y  a  que  Dieu  n'eft  point  diui- 
fé  :  il  faut  donc  que  nous  taichions  de  reunir 
tout  à  luy .  Q_Liant  &  quant  fainû  Paul  adiou- 
fte,Q»''7  J  a  aufsi  -vn  Médiateur  de  Dieu  &• 
des  hommes.  En  quoy  il  iîgnitîe  que  noftre  Sei 
gneur  lefus  n'eft  point  venu  pour  reconcilier 
vh  petit  nôbre  de  gens  à  Dieu  fon  Père,  mais 
qu'il  a  voulu  eftendre  fa  grâce  fur  tout  le  mo 
de. Et  de  fait,  nous  voyons  comme  par  toute 
PEfcriture  il  nous  eft  déclaré  que  ce  qu'il  a 
foufFert.n'a  pas  efté  feulement  pour  la  remif 
iion  des  péchez  qui  auoyent  efté  commis  en 
Iudee,niais  par  tout  le  mode.  Puis  qu'ainli  eft 
qiie  l'office  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift 
s'eftéd  en  gênerai  .\  tous  peuples, nous  ne  de- 
uons  point  mefpriferce  qu'il  a  fi  chèrement 
racheté'  &  mefmes  puis  que  le  Seigneur  lefus 
nous  conuie  tous  à  ioy ,  &.eft  prtft  de  nous 
mener  &  de  nous  dôncr  accès  amiable  à  Dieu 
fon  Père  ,  ne  faut-il  point  que  nous  tendions 
la  main  à  ceux  qui  ne  fçauent  que  c'eft  de  ce- 
fte  vnion-ci,afin  de  les  faire  approcherJNous 
voyons  donc  maintenant  à  quelle  intention 
c'eft  que  fainft  Paul  dit  qu'il  ya  vn  Média- 
teur entre  Dieu  &  les  hommes.  Cependant  il 
appelle  home  lefus  Chrift,afin  de  nous  mon- 
ftrer  comme  il  s'eft  approché  de  nous. Car  on 
pouuoit  répliquer  ,  Combien  que  Dieu  foit 
Créateur  de  tout  le  monde,  fi  eft-ceque  les 
hommes  s'eftans  ainfi  aliénez  de  luy,  font  di  - 
gnes  qu'il  les  reiette  ,  &  mefmes  qu'il  les  ait 
en  deteftation  comme  fes  ennemis  mortels. 
Et  ainfi,  quand  les  incrédules  n'ont  nul  accès 
m  entrée  à  f»  niaiefté,on  pouuoit,  di-ie,  aile- 
xvet  cela., Pour  cefte  caufe  fainû  Paul  die  ici,  ■ 
Combien  que  les  hommes  par  leurs  dcmeritts 
flcoffenfes  (oyent  ainfi  reiettez-deDieu.&fe- 
parez  de  luy  ,  toutesfois  d'autant  que  lefus 
Chrift  a  prins  noftre  chair,&  s'en  eft  reueftu, 
d'autant  qu'il  a  defcendu  fi  bas  que  de  fe  faire 
Ikomme ,  il  ne  faut  point  que  nous  rompions 
vn  tel  lien  &  fi  facré.Ainfi donc, puis  qu'en  la 
'^erfonne  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
mous  voyons  que  Dieu  a  comme  les  bras  ten- 
dus,pour  rcceuoir  à  foy  ceux  qui  fembloycnt 
cneftrefcparez  :  il  ne  faut  point  qu'il  tiene  à 
nous  que  ceux  qui  auiouid'huy  femblent  eftre 
du  tout  priucz  d'cfperancede  l'alut,ne  reuie- 
ccnt  au  troupeau. Cai  pour  cefle  caufe  noftre 
Seigneur  IcfusChii/ta  enduré  mwrt&paf- 
fion  :  pour  ccfte  caufe  il  s'eit  fait  fiinbLiblt  à 
nous,&  auiourd'huy  il  a  ceft  office  d'intcicef 
fi.ur  ^  aduocat, qu'il  eft  pour  Moyen. :cur  en- 
tre Dieu  &  les  hommes, c'c-ftà  dire, pour  nous 
OMurir  la  porte  ,  &  taire  que  nous  venions  ' 
deu.int  Dieu  ,  &  queapui  luy  foyons  agréa- 


bles.voirs  combien  qu'à  caufe  de  nos  pecheï, 
nous  mentions  qu'il  nous  reiette ,  &  qu'il  ie 
recule  bien  loin.  Maintenant  en  premier  lieu 
notons  que  tous  ceux  qui  ne  ticnentcontede 
amener  leurs  prochains  au  chemin  de  falut, 
ceux  qui  ne  fe  loucient  d'amener  aufsi  les  po- 
ures  incrédules,  &  qui  les  laiflent  aller  à  per- 
dition, monftrent  bien  qu'ils  ne  portent  nuL- 
honneur  à  Dieu,&  qu'ils  diminuent  la  puifTan 
cède  fon  empire  entant  qu'en  eux  eft,  &  que 
ils  luy  veulent  afsigner  des  bornes ,  afin  qu'il 
ne  domine  point  fur  tout  le  monde  :,&  d'auaa 
tage,qu'ils  obfcurciflènt  en  partie  la  vertu  de 
la  mort  &'pafsion  de  noftre  Seigneur  lefuj 
Chrift,  qu'ils  amoindriflent  la  dignité  qui  luy 
a  e^lé  donnée  de  Dieu  fon  Père  :  c'eft  qu'au- 
iourd'hiiyil  foit  Moyenneur,  afin  que  nous 
ayons  la  porte  des  cieux  ouuerte ,  &  que  nous 
foyons  afl'euiez  que  Dieu  nous  fera  propice 
quâd  nous  le  viendrôs  cercher.Et  ainfi  voyôs 
nous  combien  nous  fommts  froids  &  noncha 
lans  à  prier  pour  ceux  qui  en  ontbefoin,&qui 
auiourd'huy  font  en  train  de  mou  &  de  dam- 
nation. Rcuenons  à  ce  pallàge  de  fairft  Paul, 
c'eft  afçauoir,qu'il  y  a  vnDieu:&puis,quena 
ftre  Seigneur  lefus  nous  ayant  réconcilié  à 
Dieu  fon  Père,  veut  que  nous  attirions  les  po 
ures  ignoransauecnous,  que  nous  en  tacions~- 
noftre  deuoir  tant  qu'il  nous  feia  pofsible,a- 
£n  que  nous  ioyons  tous  vnis  en  vn  corps.voî 
Ja  pour  vn  item.  Cependant  nous  auens  ici  v- 
ne  doftrine  digne  de  mémoire, quand  il  eft  dit 
que  noftre  Seigneur  lefus  ell  Médiateur  en- 
tre Dieu  &  les  hômts.Car  c'eft  l'vn  des  prin- 
cipaux articles  de  noftre  f.iy,  que  nous  reco» 
rions  tous  à  Dieu.cftans  certains  d'y  auoir  ac 
ccs,&  qu'il  receuiâ  nos  oraifons.Car  fins  ce- 
la dequoy  no'icnura  toute  la  doitrine  de  l'H 
uâgile,fi  nous  ne  pouuosinuoqucr  Dicu,&  ve 
nir  priueement  àluy,  tftans  tout  aflcurcz  & 
refolus  q  ce  ne  fera  ppint  en  vain,&  que  nous 
ne  ferôs  point  friiftrtz  de  noftre  attente  quâd 
nous  l'aurons  ainfi  inuoqdc  ?  Si  nous  n'auons 
cela,dequoy  nous  fert-il  que  Dieu  foit  nom- 
mé noft'e  Père  &:  Sauucur,&  qu'il  fou  miferi- 
coidieux  à  tous  ceux  qui  le  ce  ichcnt?£t  ainfi 
notons  bien  que  fi  nous  n'auons  cefte  certitu 
de  oue  Dieueft  prcftde  nous  reccuoir  quand 
nous  le  prions,  que  tout  l'Euangile  fera  com- 
me abbatu.  M.-iincenant  comment  pouuons- 
nous  inuoquer  Dieu  ?  Il  c!ftce;tain  que  nous 
ne  fommes  pas  dignes  de  venir  à  luy  .  Et  de 
fait,qui  cft-ce  qui  fe  pourra  aii.iccr?nous  font 
mes  comme  des  vers  de  terie:&  où  eft-ce  que 
il  nous  faut  aller  pour  inuoquer  Dieu?  Il  faut 
fortirdu monde  ,  il  faut  paflcrpar  dcllus  les 
cieux  :  les  Anges  mt fines  de  Pai^dr  ne  font 
pas  dignes  de  venir  à  Dit  u  fans  aiioii  quelque 
moy.niqi'ie  feia-cc  donc  de  n.'us  ?  £c  amfi  il 
tft  impofsible  que  nos  oralons  foytnt  fon- 
diez en  foy,&  que  nous  puif  ionsauoir  la  har 
dielfe  "de  venir  c'tuant  Dieu,  Jinon  que  lefus 
Chriil  le  preftnte  pour  tftie  M-oytnneur, 

qu'il 


SVR     LA    I.     A    TIMOTH, 


St 


qu'il  nous  tende  la  main ,  &  qu'il  nous  pro- 
mette de  noustaiieauoir  accès,  comme  au  fsi 
en  fà  perfonne  nou;  prions  Dieu  ,  &  Tauons 
ici  auec  nous  .Comme  de  fait,  quand  lefus 
Chrift  nous  addrefle,  il  ne  faut  point  que  no' 
doutions  que  Dieu  ne  nous  foit  propice  :  Se 
tant  s'en  faut  qu'il  fe  retire  loin  de  nous,  que 
il  n'attend  pas  que  nous  le  prions.mais  il  an- 
ticipe de  fon  cofté.  Voila  pourquoy  l'ay  dit 
que  ce  paflage  contient  vne  doârine  fort  v- 
tile,  quïd  fainft  Paul  nous  parle  (tyn  Moyin- 
nettr:  car  par  cela  il  nous  déclare  comme  nous 
pouuons  inuoquer  Dieu, ne  doutas  point  qu'il 
ne  nous  foit  prochain,  &  qu'il  aura  toufiours 
l'aureille  ouuerte  pour  exaucer  nos  prières 
que  nous  luy  faifons.  Et  notamment  il  adiou 
fte,  Que  le  fus  Chrijl  efl  homme  :  afin  que  nous 
n'entrions  point  en  ces  difficultez  &  difpu- 
tes,  Comment  Dieu  nous  receura-il ,  veu  que 
nous  f;immes  poures  pécheurs,  veu  qu'il  n'y 
y  quemâlediiftionen  nous?&  cncores  que  ce- 
la n'y  fuft  point, q  nous  fommes  poures  créa- 
tures terreftres,  que  nous  ne  faifons  que  ram 
pericibas,  comment  Dieu  daignera-il  nous 
regarderîA  fin  donc  que  nous  ne  facios  point 
tels  circuits,  &  que  nous  ne  foyons  point  en 
doute,  fi  venans  à  Dieu  nous  le  trouuerôs  pro 
chain  de  nous, fainft  Paul  voulant  foudre  tou 
tes  telles  queftions  ,  dit  que  leliis  Chrift  eft 
homme:fignifiantque  pour  celle  caufe  il  a  ve 
ftu  noftre  chair,&  s'eif  fait  ncftre  frere:c'eft 
afçauoir ,  afin  que  nous  ayons  l'entrée  facile 
venans  au  ciel.cémelt  en  la  perfonne  du  Fils 
de  Dieu  défia  nous  eftiôs  du  rang  des  Anges, 
&  en  leur  compagnie,  comme  à  la  vérité  aufsi 
nous  iommes  par  foy.  £t  c'eft  ce  qui  nou'.  eft 
aufsi  bien  remonftré  par  l'Apoftre  en  TEpi- 
ftreaux  Hebricux  ,  quand  ildit.Que  lefus 
H«i>r.i.  Chrift  eftant  fait  homme,  a  voulu  aufsi  cftre 
ï7-'8,     fuiet  à  toutes  infirmitez, excepte  péché,  qu'il 
&■  4-I3'  n'a  pointvoulu  eftre  exempté  de  nos  pafsiô^. 
Et  pourquoy?Afin  (dit-il)  d'eftre  pitoyable: 
comme  celuy  qui  eft  expérimenté.  Si  vn  hom 
mené  fçait  que  c'eft  de  mal,  il  n'a  point  com- 
pafsion  de  ceux  qui  endurent  ,  mais  il  eft  tel- 
ïemétabbruué  en  fes délices, qu'il  luy  femble 
que  la  poureté  n'eft  rien.  Voila  noftre  Sei- 
gneur lefus  qui  a  voulu  cftre  participant  de 
toutes  nos  miferes,  excepté  qu'il  n'a  point  eu 
nulle  macule  dépêché  en  foy:maisaurefte,il 
a  voulu  fentir  que  c'eftoit  de  toutes  nos  affli- 
ûions.Et  pourquoy?  afin  que  quand  nous  ve- 
nons à  luy.il  foit  enclin  à  nous  dôner  fe  cours, 
&  que  ttfte  expérience  qu'il  a  eue  en  fa  per- 
fonne, Tinduife  à  demander  à  Dieu  fon  Père 
qu'il  nous  foit  propice:&  d'autant  qu'auf  i  la 
vertuluya  efté  donnée  denous  aidcraube- 
1,  i      .  foin,qu'il  ne  nous  défaille  point. Et  puis  l'A- 
poftre  adioufte,  q  nous  ponuons  venir  en  plei 
neconfiance,  fuyuant  aufi  ce  que  nou^auons 
touché,  que  le  thronede  Dieu,  lequel  de  foy 
nous  dcuoit  eftre  efpouaniable  &  terrible, 
mainceoant  notis  ett  gracieux  eo  la  perfonne 


de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Venons-nous 
donc  deuant  Dieu?  Si  nous  ne  contemplons 
que  cefte  haute  maiefté  &  incomprehenfible 
quieft  cnluy,  c'eit  pour  nous  efpouanter  ,il 
faut  que  nous  (oyons  confus, &  qu'vn  chacun 
recule  :  &  mefmes  que  pluftoft  nous  defirions 
que  les  montagnes  nous  conurent,&  nous  ac- 
cablent, que  de  fentir  la  prefcnce  de  Dieu, 
Mais  quand  noftre  Seigneur  lefus  vient  au  de 
liant, &  qu'il  feconftitue  Moyenneur,  alors  il 
n'y  a  rien  qui  nous  doyue  efpouanter,q  nous 
ne  venion  s  la  tefte  leuee  pour  inuoquer  Dieu 
comme  noftre  Père,  ne  doutans  point  qu'en 
la  perfonne  de  fon  Fils  il  ne  nous  aduone  ,  Sc_ 
nous  face  fentir  le  fruift  de  fon  aJoption.en-. 
tant  que  nous  pourrons  venir  prineement  â 
luy,&  luy  defcouurir  nos  necefsitez,  luy  def- 
ployer  toutes  nos  angoiflès  qui  nous  tour- 
mentent,afin  d'en  eftre  foulagez.Or  d'autant 
plus  nous  fàut-il  bien  noter  cefte  doftrine, 
quand  bous  voyons  que  le  poure  monde  a  e- 
fté  priué  de  cefte  confolation.  Car  combien  y 
en  a  -il  qui  cognoiflent  que  lefus  Chrift  ell 
leur  Moyenneur  &:  Aduocat  pour  les  amener 
à  Dieu  fon  Pere-Mais  au  rebours, en  la  Papau 
té  quand  on  veut  prouner  qu'il  nous  faut  a- 
uoir  les  Sainéls  pour  patrons  qui  intercèdent 
pour  nous ,  on  allègue  que  nous  ne  fommes 
pas  dignes  de  côparoiftreJeuant  Dieu. Com- 
me fi  lefus  Chrift  n'eftoit  rien. Il  eft  vray  que 
nous  nedeuonspas  nier  ceft  argument-la  aujt 
Papiftes:Côment?  ne  feroit-ce  point  vne  au- 
dace &  témérité  trop  folle  à  nous  de  venir 
prier  Dieu- Qui  fomnies-noiK?  Il  faut  confef 
fer  cela. Mais  cependant,  dequoy  fert  l'office 
qui  eft  ici  attribué   à  noftie  Seigneur  lefus 
Chrift,  quand  fainft  Paul  l'appelle  M«/fafr<(»' 
&  homme ■'(<(' ett-ce  point  pour  fiippker  à  ce- 
fte indignité  qui  eit  en  nots?Ainfi  donc  d'au- 
tant que  nous  méritions  d'cftie  reiettcz  de 
DieUj&quela  porte  nous  fuft  fermée  }7oiira- 
uoir  entrée  à  luy.voila  pourquoy  noftre  Sei- 
gneur Icfus  Chrift  vient  au  deuant.  Et  ainiî 
maintenant  nous  voyons  ccmme    le  poure 
monde  a  efté  deftituc  de  la  grâce  qui  nous  tû 
ici  offerte.  Et  voila  pourquoy  l'ay  dit  que  tât 
plus  nous  faut-il  eftre  attentifs  à  celle  doftri- 
ne.  Et  ce  n'elf  pas  feulement  entre  les  Papi- 
ftes  que  ce  mal  règne, mais  de  tout  temps  il  en 
aainiî  efté.  Combien  que  les  Payens  allafient 
à  l'cftourdie  en  priant  Dit  u,  fi  eft-ce  que  touf 
iours  ils  ont  efté  conuaincus  que  l'hôme  mor 
telnepeiittrouuergrace,finon  qu'il  ait  quel- 
que moyenneur.Et  ainû  les  Payens  ont  ima- 
giné qu'en  cefte  multitude  d' doles  qu'ils  ado 
royent,  il  yauoit  commedes  péris  dieux  qui 
cftoyent  leurs  moyenncurs,  &  mefmes  oncat 
tribué  ceft  ofKce-la  aux  Anges.  Et  auccn- 
traire.nous  voyons  comme  Dien  nou'  a  don- 
né vn  but  certain  auquel  il  nous  faut  tendre, 
c'eft  que  les  fidèle;  cognoiflent  que  pour  bien 
prier  &deuement,;l  faut  qu'ils  tienent  ceche 
min  &  cefte  regle,de  fonder  toutes  leurs  orai- 

Ï.U 


Et 


QJ/  ATORZIEME      SERMON 


F.  xa.i 


Leul.l 

J.17 


Cd.i 


fons  fur  la  grâce  du  feul  Moyenneur  qui  nous 
aeftc  ordonné.  Et  qu'ainli  Ibic, regardons  ce 
quieft  contenu  en  la  Loy.Q_iiand  Dieuacom 
mande  qu^on  le  priait,  il  a  cependant  mis  l'or 
dre,  c'clt  que  le  peuple  le  teinlt  loin  au  paruis 
du  temple:  quand  on  venoit  faire  les  oraifons 
lûlennelles,  il  ne  faloit  pas  qu'vn  chacun  s'a- 
uan  çaft.nuis  que  le  peuple  le  temft  eflongné. 
Iln'y  auoit  ne  Roy, ni  autre  quifult,qui  oiaft 
approcher  du  l'uUtuairetcar  c'euft  elle  vn  i'à 
crilcge  :  U  n'y  auoit  que  le  leul  facrilîcateur: 
car  il  eftoit  aulsi  la  iîgure  de  noftre  Seigneur 
o.  lefasChnih  Et  voila  pourquoy  ileftoitac- 
Cûuftré  d'accoultremens  nouueaux, qu'il  n'e- 
ftoit  point  là  comme  vn  homme  vulgaire,  ne 
du  rangcommununais  il  efloitcontlicié&de- 
■  dié  du  tout  à  Dieu. Et  ce  Sacrificateur  entrât 
aufsi  au  ûncluaircy  apportoitle  ûng  de  l'ho 
ftie  qu'il  auoit  offerte  en  lacrifice.pour  iîi;ni- 
fier qu'on  ne  pouuoit  trouuer  grâce  deujut 
Dieu,  linon  en  vertu  de  ce  facrifice  qui  dé- 
liait eftre  en  la  perlonne  de  noftre  Seigneur 
lelus  Chrift. Nous  voyons  donc  comme  Dieu 
â  déclaré  par  cefte  cérémonie  folennelle.que 
on  ne  le  poauoit  inuoqucr  iînon  qu'il  y  tnil 
vn  aduocat,  lequel  fuft  conftitué  afin  d'inter- 
céder pour  tout  le  corps  de  l'Eglife  .  Il  a  elle 
auhl  df  claré  qu'il  faloit  que  toute  l'intèrccf- 
lîon  hifl:  tondee  fur  vn  facrifice  qui  après  le- 
roit  offert. Et  voila  pourquoy  iaincl  Paulauf 
lî  en  ce  palTàge,  après  auoir  parlé  de  l'intér- 
cefsion  de  Iclus  Chrift,adioufte,Q«'  s'eft  don 
ne  en  r.incon  jiiur  notts.dr  ce  font  chjfes  in- 
û-parablesquelamort  &pafsiondu  Fils  de 
Dieu,i5;  ce  qu'auiourd'luiy  il  cft  noftre  Moy- 
enneui'.afîn  que  nous  ayons  accès  en  fon  nom 
à  Dieu  fon  Père.  Au  refte,  lefus  Chrift  eft-il 
apparu  pour  monftrcr  la  pure  vérité  &:  la  pu- 
re fubftance  &  perfection  des  figures  de  la 
Loy  ?  Encores  Satan  n'a  pas  dclaiflc  de  s'ef- 
forcer à  mettre  comme  des  nuces  obfcures 
qui  empefchent  le  regard  de  ce  Médiateur 
qui  eftoit  donné.  Et  nous  voyons  mefmes  def 
ia  au  commencement  de  l'Euangile,  que  plu- 
lieurs  hérétiques  ont  imaginé  qu'il  raioit  re- 
tenir les  Anges  pour  aduocats  ,&  que  faincl 
Paul  a  eflé  empeiché  après  ccla:comme  nous 
iS  voyons  enl'Epiftreaux  ColoAiensrqu'ildon 
ne  vn  tel  luftreà  lefus  Chrift,  qu'il  faut  que 
les  Anges  &  les  autres  dignitez  foyent  remi- 
fes  en  leur  rang,&:  que  lefus  Chrift  apparoif- 
fe  par  delTus,  &  qu'il  ait  toute  prééminence. 
Pourquoy  eft-ceque  laind  Paul  trauaille  & 
inlîfte  tant  là  defllis,  iînon  pouieeque  delîa 
lefus  Chrift  eftoit  mené  parmi  les  Anges  par 
aucuns  phantaftiqu^-s  :•  l'inaiemcnt  le  monde 
i'eil  cncorcs  plus  de, bordé. car  on  a  for^é  v- 
ne garenne d'intercefltuis  &  aduocats,  com- 
me les  P.ipiftes  fceondamnent  de  leur  pro- 
pre bouche,  quand  ils  diûnt  qu'on  n'y  co- 
gnoiftpoiiu  Dieapar.iii  le.  Apoftres.  Us  ont 
ce  prouerbe-laqui  eft  bien  vray  :  mais  dont 
fft-il  venu,!)no.Td'autst  qu'ils  ontdwJpouillé 


lefusChrift  de  fon  office, &  luy  ont  donc  tant 
decôpagnons  qu'on  ne  peut  dilcerner  entre 
luy  &  le  refte, qu'il.eft  là  comme  du  troupeau, 
qu'on  ne  fçait  s'il  cft  Moyenneur  ou  non  ?  Ec 
de  tait,  il  y  a  quarante  ans  qu'en  la  Papauté 
il  eftoit  autant  queftion  de  nommer  le  Fils  de 
Dieu  Moyenneur  &  Aduocat, que  de  dire  que 
Mahommet  eftoit  le  rédempteur  du  môdc.Ec 
auiourd'huy  encores ,  combien  qu'en  delpit 
de  leurs  dents  ces  titres  ne  foyent  pas  du  tout 
anéantis, Il eft-ce  que  iîquelqu'vn  appelle  le- 
Uis  Chrift  Médiateur  &  Aduocat,  il  fera  noté 
là  dclPus,  Se  combien  qu'on  ne  l'ofe  pas  con- 
damner pour  hérétique,  incontinent  en  pro- 
cès, afçauoir  s'il  entend  que  Chrift  foit  leul 
Aduocat  ,  &  fi  les  Sainfts  ne  le  font  pas  auec 
luy  :&  fi  vn  homme  veut  exalter  le  Fils  de 
Dieu  pour  luy  refetuerla  dignité  qu'il  a  de 
Dieu  fon  Pere:ho, incontinent  au  t'euuie  voi- 
la pas  vne  chofe  deteftable  ?  Et  d'autant  plus 
taut-il  que  nous  foyôs  armez  de  cefte  doiîtri- 
ne-la,où  fiindl  Paul  monftre  que  nous  ne  pou 
lions  approcher  de  Dieu  ,  que  lefus  Chnft  ne 
nous  y  donne  accès, nous  efrant  Moyenneur:  ^ 

&  qui  plus  eft.lcs  Papiftes  font  fi  effronte7,ie 
di  mefines  leurs  docteurs  ,  quand  ils  veulent 
prouuer  ce  qu'ils  ont  forgé  contre  la  pure  do 
cf  rine  de  l'Euangile,  qu'ils  dilent ,  Ho,  il  e/l 
vray  qu'il  y  a  vn  Médiateur,  mais  il  n'eft  pas 
feul. Quand  on  appellera  vn  home  vn.ce  n'eft 
pas  qu'il  foit  leul  au  mode.  Voire;(?v:  ici  faincl- 
Paul  quand  il  dit  qu'il  y  a  vn  Médiateur, n'eft 
ce  pas  côme  il  auoit  déclaré  qu'il  y  a  vnDieu? 
.S'ih  veulent  que  le  Dieu  viuant  foit  niellé  par 
mi  les  idoles  ,&  qu'il  ne  tiene  pas  feulement 
vne  place,  &  ie  vous  prie,  où  en  l'erons-nous? 
Mais  il  a  falu  qu'ils  tombaflent  ainii  en  fens 
reprouué,  &  que  Satan  les  tranfportaft  en  tel 
le  forte  ,  que  les  petis  enfans  non  feuleme.'Jt 
le  puiflcnt  niocquer  de  leur  beftife,mais  aufsi 
qu'ils  ayent  leurs  blafphcines  en  exécration. 
Et  c'eft  vne  iulte  vengeance  de  Dieu,puis  que 
ils  ont  talché  d'arracher  ceft  office  de  Moy- 
enneur, qu'ils  foyent  cxpofcz  en  opprobre 
pour  auoir  deshonoré  le  Fils  de  Dieu, le  Sci-r 
gneur  de  gloire, ccluy  auquel  le  Perc  conim.î- 
de,  que  tous  &grans  &  petis  facent  homnia- 
ge.deuàt  lequel  tout  gcnouil  fe  doit  ployer, 
en  la  peri'onne  duquel  nous  deuons  adorer  la  -pff,  2,. g, 
maiefté  de  no.ftre  Dieu.Qiiand  au  lieu  de  ce-  q.  pl,ji_ 
h  ons  'en  mocque,eft-ce  ra:fon  q  Dieu  ibuf-  2..  10. II. 
fre  cela  qu'il  n'en  face  vne  hornlde  vcngcan 
ce.-Et  puis, quand  Ic^Papiftes  veulét  eftrc  plus 
aiçus  &  fiibtiis,  pour  tionucr  elchapato^'cils 
difent  que  lefus  Chnft  eil  bien  Médiateur  v- 
niqucv  oire  de  redéption,  q  c'eft  luy  leul  qui 
a  racheté  le  ir.ôdemiais  quant  a  rintercef">ion 
qu'il  n'eft  pas  feul,  pource  qu'vn  chacun  y  a 
place,  &  q  les  lîiincts  trefpailez  ont  aulsi  bien 
ceft  office.  Voire, comme  lî  not.îment  S.Paul 
ne  parlo't  pas  ici  d'interccûion,  ainfî  q  nous 
le  voyon.s.Ciu'eft-ce  qu'il  traitte  en  ce  palfa- 
gcHDit-il  fimplcraent  que  nousauons  efté  ra- 
chetez 


SVR     LA     I.    A     TIMOTH. 


83 


cKetcz  pour  vn  coup  par  le  Ai^g  du  I  lU  de 
Ditu.-Mais  il  dit  «jiie  irbusdciion^  puer  Dieu 
pour  tous  eftatSiâc  pour  tourts  lumnjd'jirt.it 
«ju^il  y  a  vn  Moyenneiir  qui  nous  donc  accès. 
Et  la  circoiiftancedu  lieumonftre  cjuc  lellis 
Chrilt  n\il point  feulement  appc-Je  Moycr- 
neur  au  regard  de  ce  que  par  ù  mort  il  nous  a 
réconciliez  à  Dieu  pour  vn  coup, mais  d'aut.it 
qu'auiourd'huy  ilapparoJll  dciiant  la  face  & 
lamaieftéde  Dieu,  afin  qu'en  Ion  nom  nous 
l'oyons  exaucez:  comme  S.Paul  aiiûi  en  parle 
aiL8.chap.des  Rom.  Car  il  conioint  cesdeux 
offices.c'eft  afçauoir  que  noftre  Seigneur  le 
fus  par  fa  mort  &pafsion  nous  a  a  bious,alin  q 
rien  n'empefche  que  nous  ne  foyôs  agréables 
à  Dieu,  &  qu'auiourd'huy  il  intercède  enco- 
res  pour  nous.  Voila  donc,  ce  q  nous  auons  à 
noter  contre  ces  fubterfuges  &  fubtilitez  dia 
boliques  q  les  Papilles  ont  controuuees  pour 
anéantir  la  grâce  de  noftre  Seigneur  ïeius 
Chrift,&  ledclpouilier  de  fa  dignité  .fiîde  1' 
otficc  qu'il  tient  de  Dieu  l'on  Père.  Or  il  cft 
vray  q  nous  intercédons  bien  les  vns  pour  les 
autres:  côme  S.Paul  auf  i  vfe  de  ce  mot,  quâd 
il  veut  q  chacun  ait  le  foin  de  fes  prochains: 
mais  cela  n'empefchc  pas  q  nollre  Seigneur 
lefus  ne  foit  luy  feul  Moyenntui  .  Et  pour- 
qui)y?Car  h  l'ay  ccfte  liardiefle  de  prier  pour 
nioy.delîa  l'excede  mtfure,ic  luis  vu  loi  trop 
outrecuidé  de  me  venir  pl'cntcr  deu.u  Dieu: 
car  le  ne  le  peux  inuoqucr  q  ce  ne  foit  comme 
mon  Père. Et  qui  eft-ce  qui  m'a  elcué  en  cefte 
nobleire  &  dignité,  q  le  foye  côme  les  Anges 
de  PaïadisîAinii  doc.de  prier  pour  moy  ie  ne 
ôkray  pas,  finon  q  i'aye  lefus  Chrift  qui  me 
donne  la  puiflance.  Q^  lî  chacun  ne  peut  e- 
Ihe  exaucé  pour  foy, cément  tftendrôs-nous 
nos  requeftes  iulques  aux  autres, que  nous  ve- 
nions taire  des  aduocats  Se  procureurs, q  nous 
prionsDieu  de  recômaiider  la  caufe  de  cefluy 
CI  &de  ceftiiy-la?  Il  faut  bien  donc  que  lelus 
Chnft  fou  feul  Médiateur, ou  autremét  nous 
n'aurons  nul  accès  à  Dieu.  Cai  (côme  l'ay  dcf 
ia  dit)  il  fautq  lefus  Chrift  mefines  fou  chef 
des  Auges  pour  les  conioindre  à  Dieu  fon  Pe 
re:&  q  fera-ce  de  nous  qui  en  fommes  du  tout 
/eparcz  par  nos  péchez?  Et  amiî  quad  TEfcii 
'  ture  fainde  no' exhorte  de  prier  les  vns  pour 
les  autres  ,  ce  n'cft  point  en  dcrogant  rien  à  1' 
office  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  mais 
c'tft  que  fous  fon  nom  &;par  fon  moyen  nous 
fommes  tous  vnis  enfemble:  &  quand  chacun 
prie  pour  foy  ,  qu'il  comprene  aufsi  tout  le 
corps  de  PEglife,  &  q  nous  ne  fepariôs  point 
«e  que  Dieu  a  conioint  &  Tni.Mainteniît  lî  on 
allègue  q  cela  pourra  bien  eftre  entendu  des 
i'aincts  trefpafl'ez,  la  refponfe  ettbien  facile: 
c'cit  que  les  Papiftes  n'ont  point  forgé  des 
patrons  &  aduocats  fuyuât  la  doftrine  de  TE 
lcriture,maisc'eft  comme  fi  lefus  Chrift  n'e- 
Jloit  rien.  Pouiquoy  eft-ce  q  les  Papiftes  ont 
faind  Pierre,  faincl  Michel,  &  la  vierge  Ma- 
rie, 6c  que  melmes  Us  ont  forgé  des  i'aincis  à 


leur  appétit, qui  foyent  leurs  patrons?  Lane*- 
tel^ite.difcnc-.ls,  nous  y  contraint  :  car  nous 
ne  iommes  pas  i  ignés  de  venir  à  Dieu  .  Nous 
voyons  comme  Ulus  Chiiftift  forclos  par 
eux,  &  qu'ils  ne  luy  attribuent  rien  qui  foit. 
S'ils  diloyent, Et  bien, nous  plions  les  fainfts 
de  Paiadis,poiirce  qu'ils  font  membres  de  TE 
ghfe-comme  ie  prieray  cefruy-ci  &ceiluy-la: 
ainii  eu  fay-ie  des  faii^ds  de  Paradisili  les  Pa 
piftes  parioyent  ainlî  ,  encores  y  auroit-il 
quelque  modtftie  en  eux.  Mais  nous  voyons 
quar,d  ils  imaginent  des  patrons  là  haut  an 
ciel ,  que  c'tft  en  deftitiiant  lefus  Chiift  de 
ton  office.  Or  c'cft  vn  blafpheme. exécrable. 
Et  puis  encores  que  les  Papiftes  allegaffent  ce 
que  l'ay  deiîa  touché,  ce  n'eftpas  excufc.£t 
pourquoy  ?  Car  quand  nous  venons  deuant 
Dieu,  il  nous  faut  eftre  afleurez  que  nous  pri- 
ons comme  par  fa  bouche.  Car  que  f(,auons- 
nous  que  c'eft  de  prier  ?  mais  il  faut  que  nous 
foyonsenfeignez  de  luy  pour  ce  faire,  &que 
la  volonté  nous  foit  comme  vne  règle  infalli 
blc,  &qiienous  ne  déclinions  point  tant  peu 
que  celoitdc  là,ni  àdextre  ni  àgauche.com- 
meilaefté  traittépar  ci  deuant.quand  S.Paul 
declaroitque  Dieu  ne  veut  point  eftre  prié 
iînon  à  la  volonté, &anon  point  à  l'appétit  des 
hommes.  Et  voil.i  pourquoy  aufsi  il  eft  dit  aa 
dixième  chapitre  des  Romains ,  que  nous  ne 
pouuons  pas  prier  Dieu  que  l'Euâgile  ne  pré- 
cède, car  c'eft  la  lampe  pour  nous  efclairer: 
que  nous  ne  pouuôs  tenir  ne  chemin  ne  voye, 
finon  que  nous  fovons  conduits  &  guidez  par 
1,\.  Il  faut  donc  que  la  dodrine  de  l'Euangile 
nous  foit  la  règle  de  bien  prier. Dieu  nous  ra- 
mene-il  aux  faincis  trcfpaflczrnous  les  coniti 
tue-il  pour  patrons  Se  aduocats?  Nenniril  n'y 
a  point  vne  feule  lyilabe  en  l'Elcriture  fain- 
de qui  en  face  mention. Il  ell  vray  que  cepcn 
dant  que  nous  viuons  au  mode, la  charité  doit 
eftre  mutuelle  entre  nous,qu'vn  chaeû  fe  doit 
exercer  à  prier  pour  fes  prochains. Mainte- 
nant fi  ie  vay  attenter  plus  que  l'Efcriture  ne 
monftre,n'eft-ce  point  défia  m'efgarer  à  tra- 
iiers  champs?Ainfieji  font  les  Papiftes.  le  laif 
ie  maintenant  leiu'  blafpheme  diabolique  que 
i'ay  monftré ,  c'eft  qn'ayans  dechaiîé  lefus 
chrift  de  faplace,ils  luy  conftituecc  des  fuc- 
cefleurs, qu'autant  qu'ils  fe  forgent  de  t'uncis 
pour  leurs  patrons  &  aduocas,  autSt  y  en  a-il 
de  lefus  Chritts.  Mais  encores  q  cela  n'y  fuft 
point,  fi  voit-on  qu'il  n'y  a  qu'incrédulité  en 
toutes  leurs  oraifons.Et  pourquoyrCarils  ne 
ont  nul  tefinoignage  ni  approbatiô  de  l'Efcri 
ture  faindc.Ainfi  les  Papiftes  n'ont  nulle  ex- 
cure,quoy  qu'ils  alleguét  q  toufiours  ils  ne  fê 
deftournent  du  droit  chemin  en  priant  Dieu, 
depuis  qu'ils  cerchét  d'autres  patrons  qui  in- 
tercèdent,que  celuv  que  Dieu  a  ordonne.  Or 
il  n'y  en  a  qu'vu  feu),c6me  i'ay  dit,parlequel 
nous  puifsions  acquérir  grâce.  Vray  eft  que 
nous  deuons  bien  intercéder  les  vns  pour  les 
autres  :  mais  cela  doit  eftre  pour  jnonftrrx  h. 

l.ii. 


84 


QJ  ATORZIEME    SERMON 


fraternité  que  Dieua  mi/e  entre  nous  de  na- 
ture. En  fomme.il  no'  faut  prattiquer  ce  que 
nous  auons  délia  «juché  des  ombres  &  figu- 
res de  la  Lpy .  Car  comme  en  la  Loy.il  eltoit 
dit  que  le  peuple  n''.ipprpcheroit  point  du 
fandtuaire,  mais  qu'il  demeureroit  au  parais 
&  à  l'entrée  du  temple,&  qu'il  n'y  auroit  que 
le  fcul  Sacrificateur  qui  entreroit  là  :  amli 
maintenant  voulons-nous  bien  prier  Dieu? 
cognoiiTons  noftre  indignité  :  c'eftquenon 
feulement  nous  fommescieaturcs  tcrreftreç, 
mais  que  nous  fomines  pleins  d'iniquité, d'au 
tant  que  nous  ibmmes  tous  poilus  &  conta- 
minez en  Adam ,  que  nous  ne  deuons  point 
approcher  de  Dieu  :  &  ainfi  que  nous  ne  pou 
uons  rapporter  que  refus ,  d'autant  que  nous 
ne  fomraes  pas  dignes  d'ouurir  la  bouche  :  8c 
tant  s'en  faut  que  nous  le  puiAions  reclamer 
corne  noftre  Père, qu'il  nous  peut  tenir  com- 
me fesennemis,&  nous  auoir  deteftables.Aîfi 
donc  cognoiflons  la  pouretc  qui  eft  en  nous, 
afin  de  venir  au  remède. Et  quel  fera  ce  reme 
derC'cit  que  nous  ayons  noftre  Seigneur  le- 
fusChiiftqui  foit  noftre  fouueram  Sacrifica- 
teur: car  ccluy-la  a  vue  fois  efpâdu  fon  fang, 
(comme  l'ainél  Paul  le  déclare)  en  rauçon  de 
nos  péchez.  Puis  qu'il  nous  a  réconciliez  à 
Dieu  en  vertu  de  fa  mort  &  pafsion,  ne  dou- 
tons pas  qu'auiourd'huy  Dieu  ne  nous  foit 
propice.  Et  melines  notons  que  lefus  Chrift 
intercède  pour  nous.Etcomment?Tout  ainfi 
laf '.iS.  que  le  fouuerain  Sacrificateur  portoit  les  nos 

9.  des  enfans  d'Ifracl  efcrits  fur  (es  deux  efpau 
les ,  &  que  deuant  fon  eftomach  il  portoit  le 
tableau  où  il  y  auoit  douze  pierres  precieu- 
fesjfignifiant  les  douze  lignées  d'Ifraei:  ainfi 
cognoilTons  que  lefus  Chnft  nous  porte  en 
fon  cœur,&  comme  fur  l'es  efpaules.Car  tout 
ainfi  qu'il  s'eft  chargé  de  nos  péchez  &  ini- 
quitez  en  la  croix  ,  aufsi  maintenant  il  veut 
que  nous  foyons  abfous  de  luy  :  cela  eft  no- 
ftre appuy  Se.  fondement.  Et  ainfi  cognoif- 
fons  qu'e4i  la  peifonne  du  Fils  de  Dieu  défia 
nous  auons  entrée  au  ciehpuis  qu'il  nous  por 
te,  que  nous  fommes  non  feulement  en  vn  ta 
blcau  qui  eftoit  en  figure ,  mais  que  nous  luy 
fommes  imprimez  en  fon  cœur.  Puis  qu'ainn 
eft, ne  doutons  point  que  nous  ne  trouuions 
grâce  «Jeuant  Dieu  ,  quand  nous  y  viendrons 
au  nom  de  ce  Médiateur.  Et  nu  reite, notons 

H<t.io.  ^''^"  ^^  %  ^'^  '^'^  P^"^  l'Apoflre  aux  Hebrieux, 

10.  Qu^auiourd'huy  le  voile  du  temple  eft  rom- 
pu,que  la  voyc  eft  dediee  frefche  au  fang  de 
lefus  Chrift  ,  lequel  ne  périt  iamais.  Puis 
qu'ainfî  eft  donc, venons  hardiment  nou>  pre 
fenter  à  Dicu,quâd  nous  auôs  vn  tel  Moycn- 
neur  qui  intercède  pour  no".  Et  au  relie, puis 
que  Dieu  nous  commande  de  prier  les  vns 
pour  les  autres, cela  n'einptfchera  point  que 
nous  n'ayons  toufîoiirs  noftre  regard  <S:ad- 
dielie  .\  lefu.  Chrift.  Aidons-nous  dcsprie- 
res  de  nos  prochain';,  mais  non  pas  que  ïcfus 
Chnft  ne  demeure  toufiours  en  fon  degré 


fouuerain.  Cependant  gardons-nous  d'imagi 
ner  des  patrôs  &  aduocais  à  noftre  phantafie, 
car  ce  feroit  difpoferles  eftats  du  royaume 
de  Dieu:&  tous  ceux  qui  le  donnent  vne  telle 
licéce,fe  font  côme  grans  maiftres  en  la  mai- 
fon  de  Dieu:&  quelle  outrecuidâce  eft-ce  là? 
Pourtant,  que  nous  n'imaginions  point  d'ad- 
uocats  ne  de  patrôs  félon  que  noftre  cerueau 
le  portera  ,  mais  contentons-nous  de  la  fim- 
plicitéde  l'Efcritiirefainûe.Etau  refte,  no- 
tons bié  que  lefus  Chrift  eft  appelé  feul  Mé- 
diateur,non  feulemêt  pource  qu'auiourd'liuy 
il  intercède  pour  nous,  mais  d'autant  qu'il  a 
enduré  mort  &  pafsion. Nous  ne  pouuons  pas 
donc  attribuer  ceft  office  aux  fâinds  trefpaf- 
fez, que  nous  ne  lesconftituyons  nos  rédem- 
pteurs,&  que  leJfus  Chrift  ne  foit  là  reietté:& 
quel  blafpneme  eft-ce  làeiicores?  D'autant 
plus  donc  nous  faut-il  bien  tenir  arrêtiez 
au  feul  Fils  de  Dieu  ,  afin  que  nous  ne  cher-» 
chions  fa  grâce  à  l'efgaree.que  nous  ne  faciôs 
point  de  longs  dilcours  fans  propos, pour  di- 
re,Comment  fe;a/-ie  exaucé  de  Dicuf  Ce  fe- 
ra quand  nous  y  viendrons  aiinom  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift. Et  au  refte, notons  l'a- 
byfme  où  Dieu  a  laiffe  trebufcher  les  Papi- 
ftes,depuis  qu'vne  fois  ils  fe  font  tournoyez, 
Se  qu'ils  n'ont  point  tenu  le  droit  chemin  qui 
leur  eftoit  afsigné:  nous  voyons,  di-ie,  qu'ils 
ont  eftéabbrutisdutout  :  car  ils  n'ont  pome 
eu  de  honte  d'appeller  la  vierge  Marie  leur 
aduocate:&  puis  après  ils  luyont  donné  les  ti- 
tres qui  ne  peuu?nt  appartenir  qu'au  feul  Fils 
de  Dieu:&:  puis  cneores  ils  ont  pafle  plus  ou- 
tre,de  la  prier  qu'elle  commandaft  à  (on  Fils 
des  chofes  qui  f^nt  fi  enormes,que  c'eft  mer- 
ueilles  que  la  terre  n'aby  fine  de  tels  niôftres. 
Q_iiand  donc  nous  voyons  les  Papiltes  eftre 
plus  brutaux  que  le*  Turcs  &  les  Pâyens,ap- 
prenons  de  glorifiernoftre  Dieu,  &  en  toute 
humilité  le  remercier  de  ce  qu'il  luy  a  pieu 
nous  retirer  de  telles  abominatiôs,&  que  no* 
foyons  tant  plus  inc'tei  à  cheminer  en  crain- 
te &  en  folicitude.Et  cepédant  puis  que  Dieu 
nous  a  donné  vn  tel  Aduocat  &  Médiateur  <j 
fon  Fils  propre.quc.nous  ne  cra'gnions  point 
de  nous  venirprefenter  àluy  pour  l'inuoquer 
en  toutes  nos  necefsitez,  &>]  no  feulemêt  vn 
chacun  face  cela  pour  foy  en  particulier.mais 
q  tous  cnfemble  nous  prions  &•  pour  tout  le 
corps  de  r£glife,&pour  tout  le  gère  humain. 
ORnous-nous  pi  ofternei  os  deuant  la  fa- 
ce de  noftre  bô  Dieu,encognoiflànce  de  nos 
fautcs:lc  pri.u  qu'il  nous  les  face  tellen-.éi:  l'en 
tir.que  nous  cheichions  le  moyen  d'y  remé- 
dier,c'efl  qu'il  nous  les  pardonne  par  fâmi/e 
ricoide.&qu'ilno'retircd'orefenauat  àfoy, 
&  que  nous  ayât  dcfpouiilez  de  toutes  nos  in 
firuiitez  &no^  vices,il  nos  rciufiede^  grâces 
de  fonfiiiniftEfprit ,  afin  que  nous  ne dcfiriôs 
finoii  d'obcir  à  fi  volonté.cn  le  feruant  fclon 
fes  fainéls  commander.iens. Ainfi  nous  dirons 
tousjDieu  tout-puiflànt,  Père  celefte,&c. 

CINCL. 


SVRLAI.    ATIMOTH.  Jf 

CINQJ/IEME    SERMON     SVR    LE    SE- 

COND    CHAPITRE. 

5  Car  iîy  a  v«  Dieu,  O"  v«  Moyemeur  de  'Dieu  çy  des  homes, 
afçauoir  lefus  Chrijl  homme, 

6  Qui  s'ejl  donné  [oy-mefme  rançon  pour  tous ,  dont  le  te f  moi- 


gnage  enfujl  enfon  tempSy  (fc. 


8c  pafsion  de  nbftré  Seigneur  IcfusChrifte'" 

prianc.il  tau:  quenousloyons  en  douce&  e* 
perplexité.  Et  par  ainli  toutes  nos  oraifont 
feront  friuoles  &  inutiles:  comme  l'Efcrîturc  lef,,  j  •• 
au^i  lemonftie,  <jue  fi  nous  ne  prionsen  foy 
&  certitude,  iamaiinous  ne  protiterons  rien. 
Et  en  cela  voit-on  combien  les  Papi/lesfont 
miferables.lelqucls  ne  fe  peuuent  tenir  à  cette 
doftrine.qui  elttat  claire&  tant  infallible;&: 


Ous  auons  veu  ce  matin  (au 

moins  nous  auons  entame  ce 

propos  en  partie  )  <ï  le  Fils 

de  I)ieu  n'elt   pas  auiour- 

d'huy  tellemét  Moyenneur 

pour  nous  faire  trouuer  gra 
'  ce  deuât  Dieu  Ion  Père, que 
ce  titre  &  dignité  ne  luy  loit  touliours  reftr- 
ué.c'tft  afçauoir  quM  a  efpâdu  fou  fang  pour 

nous  :  car  nous  ne  deuons  pomt  feparer  ces  cependant  ils  çxtrauaguent  en  leuis  imagina- 
deux  chofc  (félon  qu'ilatHédeliatraitté)&  tions:&  quand  ils  ont  bien  tracalfé  ,  au  lieu 
mefmes  les  Pères  ont  cognu  cela  du  temps  d'approcher  de  Dieu,  ils  s'en  reculent  touf- 
de  la  Loy.en  la  figure  qui  leur  eftoit  donnée,  iours.  Et  pourquay?  Car  quand  ils  prient  ,& 
Car  le  grand  Sacrificateur  ne  pouuoit  appro-  qu\!s  s'auancent  ainfi  à  leur  pofle,qtieUe  cer 
cher  de  Dieu,fînon  ayant  fat  facnfice  folcn  titude  ont-ils  qfte  Dieu  receura  cela  quâd  ilt 
nel.Pource  notons  bien  que  mihe  Seigneur  vienentàl'muaijueirQja'ya-iliînôvnevame 
lefiis  intercède  maintenant  pour  nous,  li'au-  prefomption  qu'ils  ont  conceue  de  fe  faire  â 
tant  qu'vne  fois  il  nous  a  réconciliez  à  Dieu,  croire  ce  que  Dieu  ne  leur  a  umaispromisîll 
le  payant  de  toutes  nos  dettes.  Car  cependit  faut  doc  qu'ih  foycnt  toufîours  en  branle  Et 
quenousfommes  rcdeaa'jles  àDieu.nous  ne  au  rtrte,quad  !!■  priuent  lefus Chrift de Thua 
pouuons  nullement  nous  tenir  deuant  luy  :  &  ncur&  dignité  facerdotale  qui  luya  elle  don 
il  n'ell  point  queftion  ici  d'or  ou  d'argent,  nce  de  Dieu  fon  Père,  comment  pourroyCnf.. 
nous  fommes  tous  coulpables  de  mort, l'ire  &  ils  rien  obtenir  auec  tels  facrileges.'c'eitdcf.. 
la  inaledidiô  de  Dicueit  fjr  nos. telles. Ainli  piter  pleinement  Dieu.  Que  s'ils difent que 
il  faut  que  nous  foyons  quittes  de  nos  iniqui  leurintentiôn'eltpas  telle  d'attribuer  à  leurs 
tez.ou  lamais  nous  ne  pourrons  ouurir  la  bou  fainds  qu'ils  ont  torgez  ce  qui  appartient  au 


che  pour  prier  Dieu.  Cela  a  eftc  fait  en  la 
mort  &  pafsion  de  nolhe  Seigneur  Icfus 
Chrirt.Sainâ  Paul  donc  nouv  voulant  confer 
mer  en  cefte  dodrine.que  nous  auons  vn  Ad- 
uocat  qui  nous  donne  accès  tac  le  &  priuéà 
Dieu,  dit  Qu^e  cehy-la  mefme i'eji  doni  rand 


Fils  de  Dieu,  li  efl-ce  qu'ils  le  font.  Car  puis 
qu'ils  attribuent  la  louange  de  lefus  Chrift  à 
ceux  qu'ils  appellent  leurs  aduocats ,  il  faut 
quant  &:  quant  que  la  facrificature  leur  appar 
tiene,  tellement  qu'ils  foyent  appelez  redem- 
_  pteurs  du  monde.  Parceia  nous  voyons  com- 

En  quoy  il  lignifie  que  maintenant  nous  ne  me  les  Papiftes  fe  ferment  du  tout  la  porte 
fammes  plus  coulpablts  deuant  Dieu  àcaufe  quand  ils  vicnét  par  circuits  à  Dieu,&,ne peu 
de  nos  pechcz:non  pas  que  Dieu  à  bon  droift  uent  tenir  le  chemin  qui  nous  eft  ici  monltrc. 
ne  nous  puifl'e  reietter.mais  par  la  pure  mife-  Finalemét,  leur  fouuient-il  iamâis  de  la  mort 
ricorde&  gratuite  il  accepte  le  paycmét  qui  &  pafsion  de  lefus  Chrift  quand  ileftqueftio 
en  a  efté  fait  en  la  perlonne  de  fon  Fils.Voi-  de  fe  prefenter  deuant  la  face  de  Dieu?Si  eft- 
la  ce  que  nous  auons  à  noter  en  ce  paflage.Et  ce  que  fans  cela  (comme  i'ay  dit)  toutes  nos 
ainlî  toutes  fois  &  quantes  que  lès  fidèles  fe     oiarfons  font  pollues ,  il  n'y  a  autre  moyen 


difpofent  à  prier  Dieu  ',  qu'ils  cognoillènt 
qu'il  faut  que  leurs  oraifofis  foyét  fanttifiees 
St  con  f.icrees  par  le  fang  de  nofti  e  SeigTieur 
Icfus  Chrift.  Il  ne  fau:  point  ici  d'afperges 
d'eau  bénite  Papale,  mais  il  fiiut  q  le  pris  du- 
quel parle  S.  Paul,refponde,&  qu'il  Ihti'face 
pour  nous  deuant  Dieuiavans  cela  nous  fom- 


delanclifier  nos  prières,  &les  faire  tiouuer 
bonnes  pour  leur  dôner  fermeté  deuât  Dieu, 
finon  qu'elles  foyent  arroufees  du  fang  de  le- 
fus Chrilt.Orde  noftrecofté  prifons  ce  bien 
ineftimableq  Dieu  nous  a  fait,  qiiandilnous 
a  déclaré  quelle  eft  la  façon  de  le  prier  pour 
eftre  exaucez,&  pour  impetrer  nos  requeftes. 


mes  afleurez&refoius.f^achâs  bien  que  Dieu  Voila  quant  à  ce  mot  que  S.  Paul  touche  ici, 
ne  reicttera  point  ce  lacrifice  qu'il  a  déclaré  Qm?  Ufus  Chrifi  s'efl  doué  four  nous  en  ranto. 
luy  eftre  agréable,*  par  lequel  il  s'eft  recon-  Au  refte,  notons  bien  qu'en  attribuant  cela  à 
cilié  auec  nous  &  appointé,  voire  àperpeiui-  noftre  Seieneur  lefus  Chrift,  il  met  bas  tout 
té.Mais  fi  nous  ne  fommes  foodet  en  la  mort    ce  que  les  Hommes  peuuent  prefumer  de  kurt 

1. lit. 


%6  QJ I  N  Z  I  E  M 

fatisfaûiô^,au'on  appelle.  Ce  qui  eft  encores 
vn  poinû  bien  riocabk  :  pourCe  que  de  tout 
temps  le  mode  s'ell  abufé  à  des  menuç  fatras 
pour  appaifer  Dieu,  comme  ii  on  vouloir  ap- 
pailer  la  cholercd\n  petit  enfant  auec  quel- 
ques hochets.  Voila  les  Payens  qui  ont  bien 
coi^nu  qu'ils  ne  pouuoyent  pas  inuoqiier  Dieu 
linon  qu'ils  eulicnt  quelque  moyéneur,(ainiî 
qu'il  a  elle  touché  ce  matin)Q_u]ont-ils  fait? 
Ils  ont  eu  leurs  interceircurs ,  en  forte  qu'ils 
ont  imaginé  mille  moyens  pour  trouuer  grâ- 
ce deuant  Dieu  (comme  les  Papiftes  les  ont 
enfuyuis)qui  fe  font  laucz  &  purifiez:  qui  n'a 
cfté  qu'vne  lingerie  de  ce  que  Dieu  aiioit  or--. 
donné  aux  Pères  :  non  pas  pour  les  amufer  à 
ces  elemens  corruptibles ,  mais  pour  1er  atti- 
rer plus  haut,afçauoiràIelus  Chrill.  Qjj_and 
on  venoit  au  temple  de  Ierulalem,il  y  auoit  a 
Pentree  l'eau  toute  prefte,  afin  qu'vn  chacun 
fe  purifiait  pour  approcher  de  la  maieité  de 
Dieu:  &  les  hommes  par  cela  cognoifloyent 
qu'ils  eftoyét  pleins  d'ordures  &d'infedii5s. 
Mais  ce  n'clloit  point  .iffez  de  cognoiftre  ce- 
la: il  faloitaufsiauoir  le  remede:&  ce  remède 
n'eftoit  pas  en  l'eau, qui  eft  vn  élément  coi  ru- 
ptible,ainlî  que  nous  fçauôs:niaisc'eftoit  déf- 
ia vne  figure  du  fang  de  noftre  Seigneur  lelus 
Chrift.  MaintenâtdôccognoilTons  qu'ilfaut 
q  lefusChrift  fe  mette  auec  le  prix  de  fa  mort 
&  pahiô  ,  pour  nous  appointer  auec  Dieu  fon 
l'ere,&  que  par  ce  moyen  nos  péchez  foyent 
abolis, &  qu'ils  ne  vienent  point  en  côte. Il  ne 
iaut  plus  nous  abufer  comme  fi  nous  pouuiÔs 
acquérir  grâce  deuant  Dieu  par  quelque  cere 
monie  ou  qlque  fanfare,  mais  il  y  a  celle  ran- 
çon dont  parle  ici  S.Paul,qui  nous  monftre  q 
nous  fommes  tous  redeuables  à  Dieu  ,  &  que 
cependant  que  nous  n'apportons  le  prix  pour 
nous  acquitter,il  faut  qu'il  nous  reiette,  qu'il 
nous  maudiire,qu'il  faut  qu'il  nous  ait  comme 
exécrables ,  mais  pour  l'appointement ,  que 
nous  auonslefangde  lefus  Chrift,&  le  facri- 
fice  qu'il  aorfert  pour  nous  &  de  fon  corps  & 
de  fon  ame.  Voila  où  gift  toute  noftre  fiance, 
voila  comme  nous  fommes  afleurez,quâd  nos 
péchez  font  enfeuelis ,  &  qu'il  n'eft  plus  que- 
stion de  conter  auec  Dieu,  d'autant  que  nous 
fommes  abfous  par  ce  moyen. Qujnt  aux  Pa- 
piftes, ileftvray  (Qu'ils  confefleront  bien  en 
partie  q  noftre  remifsion  nous  eft  donnée  par 
le  fang  de  Icfus  Chrift  :  mais  ils  reftraignent 
celA,en  forte  que  c'cft  pleinement  fe  roocquer 
de  la  grâce  qui  nous  a  eftclà  acquife.Et  com- 
mentîCar  voila  la  doilrine  Papale, c'eft  qu'au 
Baptefme  le  péché  originel  nous  eft  remis:  Se 
quand,  ify  auroit  quelque  luif  ou  Paycn  ba- 
ptizé  en  l'aagc-  de  vingt  ans,ou  trente, ou  qua 
ranteans.que  là  les  offeufes  qu'il  auroit  com 
mifes  en  favicUiy  feroyent  pardonnee^:mais 
depuis  que  nous  fonunes  baptife2,qu,ind  nous 
;iuroQS  la)lli,n9uç  hcdeuons  pas  peiiiér  d'ob- 
tenir grâce  3(  pard6n,ij  ce  n'eft  cnappoitaiit 
4juclque  rccompejifç,  ynyçfi  qu'ils  n'qfçnt 


E    SERMON 

pas  nier  q  Dieu  n''\i'e  toufiours  de  mifericor- 
de,&  que  nous  n'ayons  befoin  aufsi  qu'il  nouî 
tende  la  main, &  que  Icfus  Chrift  ne  bcfonijne 
en  ceft  cndroit:mais  tât  y  a  qu'ils  difent  qu'il 
noustaut  latisfairc  à  Dieu  pour  nos  péchez, 
&  que  nous  ne  poiiuons  pas  l'auojr  propicc,iî 
ce  n'eft  que  nous  fatisfacions  quand  nous  au- 
rons failli  en  ceci  &  en  cela,&  qu'il  y  ait  quel 
que  efchange.Or  pource  que  nous  ne  pouuôs 
pas  fatisfaire  à  Dieu  de  ce  que  delîa  nous  luy 
deuons,c5me  vn  home  qui  deuera  cent  efcus 
àquelqu'vn  ,&  luy  deuera  d'autre  cofté  cent 
florins,en  payant  les  cent  florins.ce  n'eft  pas 
adiré  qu'il  ne  fou  toulîours  obligé  à  la  prin» 
cipale  fomme:ainlî  les  Papiftes  voyans  qu'ils 
ne  peuuent  pas  fatisfaire  à  Dieu  en  failânt 
tout  ce  qu'il  a  commande  ,  ils  inuentent  vne 
fatisfatlion  nouuclle,difans  que  nous  pouuôs 
taire  du  luperabondant:^;  combien  que  Dieu 
foit  courroucé  contre  nouv  àc^ufedenos  pe 
chez,  que  nous  auons  les  ui  jyeiis  de  l'appai- 
fer,quand  nous  luy  portons  telle  recompen- 
fe, comme  (ont  les  ccuures  de  fupererogation, 
qu'ils  appellent.  Mais  d'autant  qu'avec  tout 
cela  les  Papiftes  forn  encores  contraints  de 
confefler  que  nous  ne  pouuons  pas  venir  à 
bout  de  recompéfer  Dieu  en  tout  &  par  tout, 
&:  qu'il  eft  impofsible  aux  hommes  d'entrer 
en  payement  auec  luy,  il  y  a  vn  autre  fupple- 
ement  qu'ils  adiouftcnt, c'eft  afçauoir  le  iâng 
des  Martyrs  ,  &  puis  les  clef-,  de  l'Egliie  ,  la 
puilïànce  qui  cil  donnée  aav  Preftrcs ,  en  ce 
qui  leur  fejubkra  bon  d'impaler  en  Iturs  cou 
feires.  Voila  comme  les  Papiites  dcfchiren: 
le  prix  &  rançon  que  noilre  Seigneur  lefus  a 
payée  pour  nous  en  fa  mort  ,  c'cil  que  nous 
lommes  acquittez  du  péché  originel  :  mais 
pource  que  de  noftre  cofté  après  le  Baptelme 
nous  fommes  redeuables  à  D:eu,  finon  que 
nous  trouuions  façon  de  nous  acquitter  par 
recompenlc,  ils  mettent  en  auant  leurs  fatif- 
fatlions,  &.  ce  qu'ils  appellent  œuures  de  fu- 
pereros^ation.Et  au  reite,s'il  y  a  encores  qupl 
que  delaut,',  il  y  a  le  fmg  des  Martyrs,  Se  les 
clefs  de  l'Eglife  qui  fuppleent .  Voila  des 
blafphemes  horribles ,  qui  font  pour  defchi- 
rer  lefus  Chrift  par  pièces  ,  entant  qu'en  eux 
eft.  Sainft  Paul  parie-il  ici  d'vne  rançon  qui 
férue  aux  petis  enfans  tant  feulement  ,&  à 
ceux  qui  ne  font  point  encores  baptifezr'Mais 
au  contraire  il  comprend  ici  toutes  les  fautes 
parlefquelles  nous  ibnimes  coulpablcs  de-m 
uant  Dieu.  Car  il  eft  queftion  de  prier  &  d'à- 
uojr  telle  entrée  &  telle  ouuerture  à  Dieu  q 
nous  le  trouuions  propice. S. Paul  dit  que  cela 
eft,d'autât  que  nous  auons  vn  Adiiocat.  Et  en 
quelle  vertu  eft-ct  que  lefus  Chrift  intercède 
pour  nous  ?  D'autant  qu'il  eft  noftre  rançon 
(dit-il)c'cll  à  dire  le  pr.x  qui  cftoit  dcu  pour 


^f.u 


nosïauces:  tellement  que  ccpc 


dant 


qu 


fômes  redeuables  à  Dieu, la  porte  ijous  eft  clo 
fe,que  nous  ne  pouuôs  pas  venii.potu  le  prier 
Or  n'au$s-ny/'pa:i  bcfoifide  prit'i.  tout  letéps 

de  no 


s  V  R   LA   I.   A  T  î  M  O  T  H. 


87 


de  noftre  vie?  Il  s'enfuit  donc  que  la  rançon 
dont  parle  ici  lainil  Paul ,  s'eftend  à  toutes 
nos  ortenfes ,.  &  que  de  iour  en  iour  il  noui 
faut  là  recourir  ,  &  y  auoir  toute  noftre  fian- 
ce.Et  ce  n'eft  point  feulement  en  cepaflage 
que  l'Efcriture  fainilie  nous  réuoye  à  la  mort 
&  pafsion  de  nbftre  Seigneur  leluy  Chrift,  Se 
à  TefFulion  de  fon  fang  pour  eftre  abfous  de 
nos  fautes  ,  mais  par  tout  il  nous  cft  monftré 
que  s'il  eftoit  queftion  que  les  hommes  s'ac- 
quittalfent  enuers  Dieu  ,  rien  ne  fe  tiouuera 
en  eux  qm  foit  digne  d'vne  telle  reconcilia- 
tion.nequi  en  approche.Apprenonsdoncde 
chercher  en  leùis  Chuft  ce  qui  nous  défaut, 
c'cft  afçauoir  que  par  le  prix  de  fon  fang  no' 
foyons  réconciliez  à  ton  Père ,  &  que  l'accès 
nous  foit  donné  ,  que  nous  puifsions  prier  en 
pleine  confiance. Voila  quant  à  ce  mot  vn  fé- 
cond poinCl  qui  doit  eltre  obi'erué.Mais  pour 
ce  que  CùnÙ.  Paul  a  déclaré  que  la  grâce  qui 
nous  a  efté  acquife  par  le  Fils  de  Dieu,  eftoit 
commune  à  tout  le  monde,  que  ce  n'eftoit 
point  feulement  pour  les  luits ,  &  qu'elle  e- 
lloit  aufsi  générale  à  tous  eftats,  on  pouuoit 
répliquer  àl'encontre,  Et  comment  donc? 
Pourquoy  Dieu  a-il  eleu  vn  certain  peuple 
comme  ion  héritage? Pourquoy  cft-ce  qu'il  a 
voulu  eftre  inuoqué  feulemét  des  luihrPour 
quoy  a-il  enclos  entr'eux  (es  jpmeflcs? Pour- 
quoy luy  a-il  donné  les  figurés,  &  qu'il  l'a 
exercé  en  l'attente  de  ce  grand  Rédempteur 
qui  eftoit  promis  ?  Cela  n'a  pas  efté  linon 
pour  les  enfans  d'Abraham.  Il  fcmbledonc 
que  lefus  Chriil  ne  foit  pas  venu  pour  tout 
le  monde,  &  que  ks  Payens  &  incrédules  ne 
doiuentpas  eltre  participansd'vn  tel  benefi- 
cc,mais  feulement  les  luifs  qui  font  domefti- 
quesdeDreu  ,  comme  il  lésa  appelez.  Or 
pour  ceftecaufe  S.rauladioufte,Ç>«f  le  lefmoi 
gnagedc  ce  cjit'llauoit  dit  ,  a  efti  rii  fi/i  timps: 
comme  s'il  difoit  que  bien  tft  vr.iy  que  dés  la 
création  du  monde  Dieu  s'cltoit  toiiliours  re 
ferué  quelque  peuple, &  mefmes  qujd  i]  auoit 
fait  Ion  alliance  auec  Abraham  ,  qifil  auoit 
exclus  tous  les  Payens  de  l'efperance  de  fa- 
lutnnais  cela  (  dit-il  )  n'eniptfche  point  que 
maintenant  il  n'appelle  .1  foy  tous  hommes: 
combien  qu'il  au  voulu  pour  vn  temps  vler 
enuers  les  luifs  d'vnc  qracc  fpcciale,niainte- 
nant  il  veut  que  les  Payc-n,  en  foyent  parti- 
cipans,  &  qu'il  y  ait  vne  Eglife  qui  s'ellende 
par  tout  le  monde  ,  &  que  ceux  qui  eftoyent 
tflongnezauparau.int, foyent  maintenant  re- 
cueillis au  troupeau.  V  oila  en  fomme  ce  que 
faintt  Paula  ici  entendu.  Pour  auoir  plus  am 
pie  déclaration  &  plus  familière  de  ce  pro- 
pos ,  notons  qu'il  ne  nous  feruiroit  rien  que 
leliis  Chr:ft  nous  eiift  rachetez  de  la  mort  e- 
ternelle, qu'il  euft  clpadu  fon  fang  pour  nous 
réconcilier  à  Dieu,  linon  que  nous  fufsions 
certifiez  d>n  tel  bien,  &  qu'il  nous  fuft  decla 
ré,  &  q.ic  Dieu  nous  appellaft  pour  entrer  en 
polUi'.ioii  de  ce  filut ,  Si  auoir  iouiflànce  de 


ce  prix  qui  a  efté  ainfi  payé  pour  iiou':. Com- 
me voila  les  Turc  ■;  qui  rciettent  h  glace  cu! 
a  efti*  «cquifc  à  tout  le  mode  par  lefusChrij'c: 
les  luifs  font  le  femblable:les  Papiftes, com- 
bien qu'ils  ne  le  difent  pas  ouuertement ,  le 
montlrent  par  effet.  Or  tous  ceux-là  fontauf 
fi  bien  forclos  &banis  de  la  rédemption  qui 
nous  a  efté  acquife  ,  comme  fi  lamais  lefus 
Chriftnefuft  defcendiien  ce  môde.Etpour- 
quoy?Carils  n'ont  pointée  tefmoignageque 
lefus  Chrift  leur  foit  Rédempteur  :  &  enco- 
res qu'ils  en  ayent  quelque  gouft  ,  fi  eft-ce 
qu'ils  demeurent  touliours  aftamcz  ,  &  s'ils 
oyent  feulement  ce  mot  de  Rfrfempfror, qu'il 
ne  leur  emporte  quafi  nulle  fubftace,  ou  bien 
ils  ne  font  nu!  profit  de  ce  <[ui  eft  contenu  en 
l'Euangilc.  Voila  donc  comme  maintenStlesr 
homes  ne  font  point  participans  du  bien  qui 
leur  a  efté  acquis  par  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.Et  pourquoy?  Car  ils  n'en  reçoiuent 
point  le  tefinoignage.Deu.?tque  lefus  Chrilt 
Fuft  apparu  au  monde,  non  feulement  les  Pa- 
yens eftoyét  incredule5,mais  Dieu  leur  auoit 
bandé  les  yeux, qu'ils  n'auoyent  nulle  doftri 
ne, tellement  qu'il  fembloit  que  lefus  Chrift 
ne  fuft  venu  que  pour  vn  certain  peuple:voi- 
re,fi  on  euft  touliours  imaginé  ,  comme  du 
temps  delà  Loy.que  Dieun'auoit  pas  efpan 
du  la  cognoifîànce  de  fa  vérité  par  tout  le 
monde, mais  l'auoit  communiquée  feulement 
à  vn  peuple  qu'il  tenoit  pour  fon  Eglife. Pour 
celle  caufe  fainéf  Paul  du.  Mes  amis,  vray  eft 
que  par  ci  deuant  Dieu  a  donné  fa  Loy  à  nos 
pères, &  a  voulu  les  feparer  du  refte  du  mon- 
de,il  a  teftifié  de  fa  bonne  volonté  en  Ifrael, 
&  n'a  point  fait  ainfi  aux  autres  nations,  com  VJe,  47^ 
me  il  eft  dit  au  Pfeaume.  Et  c'eft  ce  que  dit  lo. 
Moyfe  en  fon  Cantique  ,  que  quand  Dieu  a  Deu.^l. 
voulu  faire  les  partages  du  monde,  il  a  eften-  j», 
du  fes  cordeaux  ,  &  a  choifi  vn  peuple  i  foy, 
feparant  les  autres  comme  eftrançers:  &  ce- 
fte  dignité  appartenoit  feulement  à  la  lignée 
d'Abraha:cela  eftvray  (ditfainû  Paul)niais 
maintenant  il  y  a  cefte  cognoiflance  qui  dote 
eftre  efpandue  par  tout  le  inonde  ,  que  Dieu 
eft  Père  Si.  Sauueur  des  Payens  aufsi  bien  que 
des  luifs.  Ainfidonc  notons  bien  qu'en  cefte 
deduftion  de  fainti  Paul ,  il  nous  eft  monftré 
que  la  mort  &  pafsion  de  noftre  Seigneur  le 
fus  Chrift  nous  feroit  inutile,  fînon  d'autant 
quele  tefmoignagenous  en  feroit  rendu  par 
l'Euangile.  Car  c'eft  la  foy  qu-i  nous  met  eia 
polTefsion  de  ce  falut  :  combien  que  nous  ne 
la  trouuios  qu'en  la  perfonne  de  lefus  Chrift, 
&  qu'il  nous  faille  là  venir, neatmoins  fi  nous 
n'auons  cefte  clef  de  foy  ,  lefus  Chrift  nous 
fera  comme  eftrange,&  tout  ce  qu'il  a  endu- 
ré,ne  nous  feruira  rien, comme  il  ne  nous  ap-  ' 
partient  pas  de  faiél.  C'eft  vne  doûrinebien 
vtile  que  cefte-ci:car  il  n'y  a  celuy  qui  ne  c5 
felTe  que  c'eft  le  bien  le  plus  defirable  qui 
foit  au  monde,  d'eftre  participât  du  falut  que 
lefus  Chrift  nous  3  apporté,  mais  il  y  ena- 

l.iiii. 


CLV INZIEME    SERMON 


I.Ccr.i. 


1.1.3.4. 


8S 

bien  petit  nombre  qui  tiene  le  droit  chemin. 
Car  nous  voyons  comme  l'Euingileertmef 
prifé  ,  nous  voyons  que  tous  font  fourds,  ou 
bien  eftouppent  leurs  aureilles  à  cefte  voix 
que  Dieu  veut  eftre  publiée  par  tout  le  mon- 
de. D'autant  plus  donc  nous  faut-il  bien  pe- 
fercequedit  ici  fainâ:  Paul  ,  c'eft  qu'alors 
nous  iouiflons  de  la  rédemption  qui  a  elle 
faite  par  la  mort  de  lefus  Chrift, quand  Dieu 
tellifie  qu'il  eft  auec  nous  :  quand  vn  tel  bien 
nous  eilprefenté,  &que  nouslepouuons  re- 
ceuoir  par  foy  ,  voila  comme  nous  en  auons 
la  iouiflànce.Et  voila  pourquoy  auiourd'huy 
il  y  en  a  tant  peu  qui  foyent  reconciliez  auec 
Dieu  par  la  mort  &  pafsion  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.  Car  nous  voyons  comme 
vne  grande  partie  du  monde  fe  priue  de  ce 
tefmoignage,  &  nous  voyons  comme  les  au- 
tres le  reiettent,  oubien  qu'ils  n'en  font  pas 
tellement  leur  profit, que  lefus  Chrift  habite 
en  eux  par  foy,afin  de  les  faire  communiquer 
à  tous  fes  biens.Au  refte, toutes  fois  &  quan- 
tes  que  l'Euangile  feprefche,  cognoiflons 
aufsi  (comme  faintk  Paul  en  parle  en  la  pre- 
mière epiftrc  aux  Corinthiens  )  que  c'eft  afin 
que  nous  communiquions  à  Itfus  Chrift,  & 
qu'eftans  entez  en  liiy  nous  ayons  part  & 
portion  en  toutes  fes  richeirev,&  que  tout  ce 
qu'il  a, nous  foit  commun.  Puis  qu'ainlî  eft 
qu'vnefois  il  a  voulu  auoir  fraternité  auec 
nous  ,  ne  doutons  point  qu'en  receuant  nos 
pouretcz  il  n'ait  fait  vn  efchage.afin  que  no' 
fjyons  riches  en  luy.  Q^iant  au  mot  de  tef- 
moignage ,  premièrement  il  eft  bien  vray  que 
Dieu  a  toufiours  teftifié  de  foy.ie  di  mcfmes 
aux  Pavens  :  &  combien  qu'ils  n'euflent  ne 
Loy,ne  Prophètes  ,  Dieu  s'eft  déclaré  à  eux 
entant  que  befo  in  a  efté  pour  les  rendre  i  nex 
«ufables.  Quand  il  n'y  auroit  que  la  pluye  & 
Je  foleil,qii'i)  n'y  auroit  que  l'ordre  de  natu- 
re ("comme  ûin  Paul  en  parl«au  quatorzie 
ihe  des  Aftes  )  ces  tefmoignages-là  font  af- 
fez  Aiffifons  pour  rendre  les  infidèles  con- 
uaincus  qu'ils  ont  efté  ingrats  à  Dieu  ,  lequel 
les  a  formez,  &  lequel  les  a  nourris  en'ce  mô 
dk.Et  c'eft  ce  qui  eft  dit  au  Pfeaume  que  nous 
auons  chanté,  Que  le  ciel ,  &  le  foleil,  ôc  les 
eftoillcs, combien  qu'ils  ne  parlent  point.ont 
vne  telle  refonnance  qu'il  ne  nous  faut  point 
auoir  d'autre*  doâeurs  :  voila  vn  liurecfcrit 
en  allez  grofles  letres ,  pour  nous  monftier 
que  Dieu  doit  eftre  glorifié  de  nous.    Mais 
ce  tefmoignage-la  eftoit  trop  obfcur  pour  la 
Hidefle  &  infirmité  des  hômcs,tellement  que 
tlfaloit  que  Dieu  fercuclaftd'vne  autre  ù- 
çon  plus  ample  :  ce  qu'il  a  fait  par  le  moyen 
de  l'Euangile.    La  Loy  &  les  Prophètes  ont 
bien  efté  côme  vne  lampe  pour  efclairerles 
luifs,  mais  cela  n'appartcnoit  qu'a  vn  feul 
peuple:  maintenant  cefte  grâce  eft  faite  en 
gênerai  à  toutes  nations  du  inonde.   £t  ainiî 
ce  n'cft  point  fans  caufe  que  fiinft  Paul  dit. 
Que  ce  tefînoign.ige  a  efté  referué  en  fon 


temps  :  comme  auAi  il  en  parle  tant  au  der- 
nier chapitre  des  Romains,  qu'aux  Epheftés 
&  fécond  3c  tioilîeme  ,  aux  Co}ofiiens  pre- 
inier:&  nous  verrons  t  n  vn  autre  paflage,c5- 
me  il  magnifie  tant  &  plus  cegrâdfecret  que  $1^^  » 
Dieu  auoit  cache  dés  le  commencement  du  jg, 
monde,&  lequel  il  adefployé'quand  l'Euan- 
gile s'eft  prtfché  ,  tellement  (dit-il)  que  les 
Anges  ont  cela  en  admiration  ,  voyans  cefte 
nouueauté  qui  n'euftiamais  efté  attendue,que 
ceux  qui  eltoyent  ainfi  feparez  de  Dieu,  qui 
eftoycnt  retranchez  &  bannis  de  faiut  ,  que 
ceux-Ia  maintenant  foyent  tenus  &aduouez 
pour  fes  enfans, qu'ils  foyent  membres  de  le 
fus  Chrift,du  lang&de  la  compagnie  des  An 
gesrvoila  vn  fecret  admirable,&  q  doit  efton 
lier  toutes  créatures.  Or  cela(dit  faiâ  Paul) 
auoit  efté  caché  dés  la  création  du  monde: 
mais  voici  le  temps  opportun  ,  le  temps  de 
plénitude  (comme  il  dit  aux  Calâtes)  auquel  Gula.4, 
Dieu  a  voulu  manifefter  ce  qui  eftoit  au  par-  4.  j, 
auant  incognuànos  pères.    Voila  quant  .i  ce 
mot  des  temps  propreSydont  parle  fainft  Paul. 
Et  ainiî  nous  voyons  en  femme  ce  qu'il  dit 
aux  Epheficns ,  c'eft  que  noftre  Seigneurie-  Ef"'.  *• 
fus  nous  eftant  enuoyé  pour  nous  pacifier  a-  ii.i3.'4 
uec  Dieu  foD  Père,  a  public  cefte  paix-ci  à  M« 
ceux  qui-eftoyent  pres,5.:àceux  qui  cftoyent 
loin  ;  la  paroy  a  efté  rompue  tellement  que 
tous  ont  efté  mis  enfemble,  &  ce  difcoid  qui 
eftoit  entre  les  luifs  &  les  Payens,a  efté  abo 
Il  :  là  fainô  Paul  comprend  ce;  dtux  poinât 
que  nous  auons  touchez  ,  c'eft  afçauoirque 
lefus  Chrift  a  efté  noftre  paix.quâd  il  .1  tfpan 
du  fon  fang  pour  effacer  nos  macules  ,  pour 
nous  acquitter  de  nos  dettes,  quand  il  s'cÔ 
expofé  à  toute  malediâion  pour  nous, qu'il  a 
efté  mis  en  opprobres  pour  couurir  ti^ites 
les  fautes  que  nous  auons  cômifes,  alors(dit- 
il)il  y  a  eu  paix  :  &  au  lieu  que  Dieu  nous  e- 
ftoit  ennemi  (comme  au/si  de  noftre  tofté 
nous  luy  eftionsaduerlaires)voila  noftre  ac- 
cord ,  voila  noftre  appointement  qui  a  efté 
fait  &  accompli.  Mais  ce  n'eft  point  encores  .  , 

aflezdecela.QiTy  a-il  donc?  C'eft  que  lefus  EfWr*« 
Chrift  (dit-il)  eft  venu  non  point  feulement  '7» 
en  (a  pcrfonne  ,  mais  en  la  perfonne  de  fes 
Apoftres,&  de  tous  fes  Miniftres,lequel(dit 
il)a  publié  &  annoncé  la  paix.  Et  comment? 
Afin  d'aflèmbler  du  tout  les  luifs  qui  eiioyét 
prochains  .1  caufe  de  ra!liance,&de  cefte  pa- 
ftion  folennelle  que  Dieu  auoit  faite  auec 
leurs  pères:  mais  h  faloit-il  qu'ils  fullcnt  ré- 
conciliez à  Dieu  ]jai  le  moyen  de  ce  rcdenr- 
pteur  lefus  Chriii.Et  nous  voyons  cela  qunJ 
ion  Enaugilc  a  efté  prefchc  pour  confcrmer 
les  luifs  à  Dieur&  puis  cela  s'eft  aufsi  .iddref 
fé  à  ceux  qui  eftoyent  loin  ,  c'eft  à  dire  aux 
poures  Payens  qui  n'auoyét  nulle  approche, 
que  ceux-là  aufsi  ont  eu  ce  mcflàgedc  faiut, 
&  de  cefte  paix  de  Dieu:  ils  on;  cfte certifiez 
que  maintenant  Dieu  leur  pof  te  vne  telle  a- 
mour,qu'ilamisenoubli  toutes  leurs  fautes. 

Et  voi 


s  V  R    LA   I.    A    T  I  M  O  T  H. 


Ss> 


Et  voila  comme  la  paroy  a  efté  rompue,voi- 
h  comme  toutes  ces  cérémonies  par  lefijuel 
les  Dieu  auoit  mis  vne  diuerfîté  entre  les 
luifs  &  les  Payens.ont  eftc  abbatMes.Et  pour 
quoy?  Pource  que  le  te/iiioignage  de  falut  & 
de  grâce  eft  commun   fans  exception  à  tout 
lemonde.  Voila  donc  cefte  doibrinequi  efl- 
maintenant  alfez  clclarcie.c'eft  afçauoir  que 
en  premier  lieu  il  a  falu  que  ncllre  Seigneur 
lefus  refpondilldeuât  Dieu  fon  Perc  de  tou 
tes  nos  dettes, &  quVn  fa  mort  nous  auons  le 
prix  de  noftre  rédemption. Et  puis  pour  le  le 
cond  ,  qu^il  nous  faut  venir  au  telmoignage 
qui  nous  en  eft  rendu  en  PEiian^ilc,  &  que  Ja 
paix  que  Dieu  fit  alors,  nous  eft  maintenant 
anoncee.afin  que  nous  en  iouifsions.On  pour 
roit  ic"  demander  pourquoy  fainû  Paul  ap- 
pelle ce  temps  propre  :  car  les  hommes  pour- 
royent  ici  difputer.  Quelle  faifon  y  a-il  eue 
plusoppertune,  quece  tefmoignagede  labô 
té  de  Dieu  fuft  publié  en  ce  temps-la  pluf- 
toll  qu'an  parauant,  ou  phiftoft  ou  plus  tard? 
Mais  fiind't  Paul  pour  couper  broche  à  toute 
telle  curiolîté, nous  ramené  à  la  feule  proui- 
dcnce  de  Dicu&  à  fon  confeil. Pourtant  con 
tenton':-nous  de  ce  qui  a  fcmblé  bon  à  Dieu: 
&■  que  ne  voyans  point  la  raifon  pourquoy  il 
l'a  fait,  neantmoins  nous  le  glorifions  ,  con— 
fcflàns  que  rie  ne  procède  de  luy  qui  ne  foit 
compairé  en  toute  fagefle  &  droiture. En  fom 
me  fainft  Paul  a  voulu  ici  humilier  l'arrogan 
ce  des  hommes ,  &  abbatre  leur  caquet ,  puis 
qn'ils  font  toufiours  par  trop  haftifs,  à  s'err- 
querirdes  chofes  qui  ne  leur  appartienent 
point:  &:  monftre  que  noftre  ("agefle  eu  d'ac- 
quiefcer  à  ce  qui  aura  femblé  bon  à  Dieu  de 
faire, &  qu'il  nous  doit  iuffire  de  cel.i.  Si  on 
réplique  qu'il  n'eft  point  conuenable  qu'il  y 
ait  changement  en  Dieu, la  refponfe  eft  taci- 
fe.c'eft  afçauoir,  quand  Dieu  enuoye  l'hyuer 
Se  l'efté,  qu'il  ne  change  point  de  propos ,  & 
ne  pouuons  pas  dire  pour  cela  qu'il  foit  mua- 
ble:car  les  chofes  pourroyent  bieneftrc  di- 
uerfcs  ici  bas,&  Dieu  demeurera  toujours  en 
fon  entier.  En  Ja  manière  donc  qu'il  y  a  des 
faii'ons  de  l'année  que  Dieu  difpoie  par  tel- 
le raifon  qu'il  faut  qu'il  y  foit  glorifie  rainiî 
cognoiflons  quand  il  a  voulu  cacher  le  tef- 
moignagc  de  fon  Euangile  pour  vn  temps  à 
tous  les  Payés,  &  puis  quand  il  a  voula  qu'on 
le  piifcliaft  par  tout  le  monde, &  que  ce  temps 
la  opportun  a  efté  choifi  de  luy  telqu''l  l'a- 
uoit  décrété  en  fon  confeil, qu'il  ne  nous  faut 
point  dire  qu'il  foit  muable  pourtant  ,  mais 
que  nous  l'adorions  en  toute  humilité  :  car 
voila  toute  noftre  droite  fagefle, comme  i'ay 
defiadit.    Nous  auons  ici  vn  bon  adiiertifle- 
ment  pour  n'eftre  point  par  trop  chatouil- 
leux en  queftions  vaines  &  inutiles.Car  Dieu 
qui  cognoift  bien  noftre  mefure ,  nous  a  dé- 
claré ce  qui  nous  eftoit  propre  :  il  faut  donc 
que  iio'  appreniôs  en  fon  efcole,  &  non  plus. 
Etaurefte,  quand  nous  trouuerons  quelque 


chofe  eftrangc  ,  &.  que  la  raifon  ne  nous  fe- 
r.\  point  reueJ  ce  ,  recourons  à  ce  qui  nous 
eft  dit,  que  les  iugcmeus  de  Dieu  font  vn  a-  ^fi'iS.C 
byfmc  trop  profond  ,  pour  dire  que  nous  les 
conceuions  maintcn.u.  Que  nous  ayôs  donc 
ceftcmodeltie  dédire  ,  Seigneur,  il  n'y  a  que 
redire  en  tout  ce  que  tu  fais,  quand  il  aura  e- 
fté  décrété  en  ton  côleil.  Voila  comme  nous 
rcceurons  le  temps  opportun.  Et  c'eft  aufsi 
ce  qu'a  entédu  le  Prophète  Ilaic.difant.Voi-  /'•  4i''8 
Cl  les-  iours  agréables.  Or  quand  il  parle  des 
iours  agréables ,  tout  ainfi  que  Dieu  les  a  à 
gré,  aufsi  faut-il  qu'ils  foyent  trouuez  tels  de 
noftre  part.    Il  appelle  les  iours  agrcableï, 
quand  le  meflagc de  falut  eft  porté  par  tout 
le  mode.  Puis  dôc  que  Dieu  defploye  fa  boa 
té,&  qu'il  monftre  qu'il  a  choifi  ce  temps-la 
pour  no'  appeJlcr  à  falut, de  noftre  csfté  que 
nous  ne  foyons  point  reuefches,que  nous  ne 
foyons  point  defpiteux  pour  dire  ,  Et  ie  ne 
trouue  point  bon  cela  :  car  cefte  chagrione- 
nenousempcfche  de  venir  à  Dieu  :  maisac-i 
quiefçons  fimplement  à  cefte  grâce  qui  nous 
eft  offerte  ,  &  qu'il  y  ait  vn  accord  &  comme 
vne  mélodie  entre  Dieu  &;nous,qtic  quand  il 
nous  déclare  que  ce  temps  luy  vient  .\  giéde 
nousappeller  à  foy.nous  difions,  Et  bien  Set 
gncur,  puis  que  tu  parle';,nous  renons  à  toy, 
fçachans  que  c'eft  le  temps  opportun  quâd  ta 
l'asainfi  choifi- Voilace  que  nous  auons  à  no 
ter  en  ce  pailàge:&:  mermes  nous  pouuons  le 
tirer  plus  loin  pour  en  faire  vne  doÛrine  quf 
appâTtiene  i  toute  noftre  vie:  c'eft  afçauoir, 
que  nous  ne  foyons  point  addonnez  par  trop- 
à  nos  appétits,  côme  noftre  nature  nous  y  fo 
licite, mais  que  nous  attédions  toufiours  pour 
vcoir  quel  fera  le  bon-plaifîr  de  Dieu,  Se  que- 
nous  foyons  patiensS:  qiiois  à  cefte  attente- 
la;  &  encores  que  les  chofes  ne  nous  vienenc 
point  3  propos  ,  &  qu'il  nous  femble  par  no- 
ftre raifon  que  Dieu  doiue  faire  tout  autre- 
ment, que  nous  tenions  la  bride  courte  à  nos 
efprits,  &  que  nous  foyons  tellement  fuicts.x 
Dieu  ,  que  fon  confeil  nous  foit  pour  reiglc, 
&  qu'il  nous  fouuicnede  cequielticidir,que 
Dieu  a  fon  temps  opportun  ,  &  qu'il  ne  faut 
point  que  nous  luy  afsignions  terme  pour  fai 
rc  fon  ceuure  :■  celle  maiftrife  ii'eft  point  par 
deuers  nous ,  il  ne  faut  point  nous  enquérir 
dp  cela  par  tiop  ,  comme  il  monftre  au  pre- 
mier des  Aftes.  Lly  a  puis  après  fous  ce  mot 
de  Tcfinoigiiage  encores  vn  poinft  à  obfer- 
ucr  :  c'eftquc  nousnedeuons  point  décliner 
ne  douter  aucunemét  de  ladoftrinequi  nouî 
eft  prefchee, quand  elle  fera  prife  de  l'Euan- 
gile.  Et  pourquoy?  Car  nous  ferions  vne  iniu 
re  trop  grande  à  Dieu, lequel  ne  nous  enuoye 
pas  feuleraentles  homes  pour  tefmoins,mais 
luy  en  fa  perfonne  &  en  fa  maiefté  nous  tefti 
fie  de  fa  grâce  paternelle. Ainfi  donc  notons 
bien  quand  l'Euangile  eft  intitulé  tefmoign.i 
ge  ,  que  c'eft  afin  de  nousmieux  certifier  ,  Si 
que  nous  cognoifsions  que  noftre  Seigneur 

m.  i. 


90 


OJV INZIEME     SERMON 


veut  que  nous  foyons  refolus  en  (abonté.Et 
au  contraire  ,  quand  nous  deutons  après  que 
Dieu  nous  a  déclaré  ainli  fon  bon  vouloir,  & 
que  nous  fommes  encore  en  branfle  ,  &  que 
nous  vfonsde  rebellioncontre  luy  ,  nous  ne 
luy  fçaurions  faire  plus  grand  deshonneur 
que  celuy-la,  d'autant  que  c'cft  le  dcfpouil- 
Icr  de  fa  verité;&:  il  n'a  rien  plus  propre.  Et 
ainficognoiffiMiï^jue  Dieu  nous  elt  teimoin 
de  fa  bonté  ,  toutes  fois  &  quantes  que  fon 
Euangile  nous  cfr  prelliié.  Au  refte, combien 
que  nous  oyon';  parler  des  liomuies  morteK, 
toutesfois  ne  les  prenons  pas  en  qualité  hu- 
maine, mais  cognoiffons  en  quel  degré  Dieu 
les  a  conAituez.c'elt  qu'il  les  a  créez  i'es  tcf- 
moins.  Qu_ând  vn  homme  fera  Notaire  iuré 
en  vn  lieu  ,  il  faudra  que  les  inftrumens  qu'il 
rcceuera.fayent  tenus  pour  vrais  &  authcnti 
ques.Si  les  Magiftrats  qui  n'ont  qu'vnc  peti- 
te eftincelle  de  Fauthonté  de  Dieu,  peuucnt 
cela,  &  que  ce  foit  vn  ordre  bon  Scappronué 
pour  la  police,&  ic  vous  prie,quand  Dieu  en 
uoye  des  hommes  en  celle  qualité,  qu'il  veut 
qu'ils  foycnt  tenus  pou'r  fes  telinoins,  iî  nous 
rciettons  le  meflage  qu'ils  nous  apportent, 
celle  iniure-la  le  fait-elle  aux  créatures;  Vo- 
yons-nous pas  que  rhonneur  de  Dieu  y  eft 
par  tropvileintinent  blefléfPourtant  appre- 
nons de  nùus  ranger  en  plus  grande  obeiiîàn 
«.^  ce  qire  nous  n'auons  point  fait  par  ci  deuant, 
&  que  la  doftnne  de  PEuangile  auec  ce  mot 
de  tejmoignage,  foit  mieux  prifee ,  &  qu'elle 
ait  plus  d'nnportance  enucrs  nous  qu'elle  n'a 
pas  eu  iufques  ici.Finalemét  fainrt  Paul  pour 
céiîrmation  de  celle  doélrine  adioufte,  Qh'H 
a  efté  conflitaé  héraut  cl:r  Apojlre  à  cel.t,&  tj»c 
il  en  farle  en  -vérité  fans  mentir  ,  qu'il  eftdo- 
ileurdes  Vayes  enfoy  &  "»  TfnVé.Par  ceci  S. 
Pauliignitîe  que  l'on  tefmoignage  feroidans 
cela  du  tout  aboli ,  &  melines  fon  Apoftolat. 
Etâinli  tous  ceuï  qui  le  tenoyent&  auoiu- 
yent  pour  Apoftre.il  faloit  qu'ils  cognufllnt 
que  Dieu  auoic  efpaudu  la  grâce  par  tout  le 
monde ,  Se  qu'il  vouloit  auoir  vne  Eolife  re- 
cueillie tant  des  luifs  que  des  Payens,  &  que 
ceux  qui  auoycnt  efté  auparauant  baanis, f«f 
lent  comme  d'vne  maifon.  Nous  voyôs  donc 
maintenant  que  ùmù  Paul  allègue  ici  fon  of 
fice,a)îii  de  monlher  que  Dieu  n'eftoit  point 
feulemét  Sauueur  des  luifs,  mais  de  tous  peu 
pies  en  gênerai.  Et  qu'ainiî  fait ,  notons  ce 
Gal.i.y.  S."'''  '^"  '^^  loy  enl'epiftrc  aux  Galates.c'eft 
j^  que  la  grâce  qui  auoit  efté  donnée  à  Pierre 

quant  aux  luih.luy  eftdonnee  enuersles  Pa- 
yens. Comme  auf^i  fainft  Luc  le  déclare,  Se- 
A^.tj.i  parez-moy  Paul  &  Barnabas  àl'ouurage  au- 
quel ie  les  aychoifîs.Etc'eftaufsi  comme  en 
ces  partages  que  nous  auons  dcfîa  allcguez,& 
aq  premier  chapitre  des  Romain  s, &  par  tout, 
que  notîment  il  le  nomme  Apoltre  des  Gen- 
tils. Combien  que  faind  Pawl  vouluil  faire 
feruir  ceft  argument  en  celte  epiftre  qu'il 
tr^ittc,  touîcjfois  notons  que  c'eft  ici  vn  at- 


ticle  qui  nous  eft  plus  qu'vtile.  Car  fi  fatnâ 
Paul  if  auoit  efté  ordonné  pour  les  Gentils, 
que  feroit-ce  quand  nous  aurions  de  luy  ce- 
fte  doûrine?  Et  bien  ,  nous  la  pourrions  ap- 
prouuer  comme  bonne  Se  fiinàe,inais  cepea 
dant  elle  ne  feroit  que  pour  les  luifs.nous  eu 
ferions  comme  priucz. Il  faut  donc  quefainâ 
Paul  ait  efté  conftitué  Apoltre  pour  les  Pa- 
yens,afin  que  nous  foyons  enfeignez  par  luy 
pour  eftre  amenez  à  l'efperance  de  ûilut ,  Se 
litre  participaus  des  biens  qui  nous  ont  efté 
acquis  par  noUre  Seigneur  lefusChnft.  Ce 
n'eft  pas  donc  feulement  pour  vn  peuple  que 
faind  Paul  a  parlé,  ce  n'eft  point  pour  vn  aa- 
ge,  mais  lefaind  Efprit  par  la  bouche  a  vou- 
lu pouruoir  que  nous  fufvions  bien  approu- 
uez  fur  ceftedodrine,  fçachans  que  c'eftà 
nous  qu'elle  s'addreffe  ,  Se  que  ce  if  eft  point 
à  taullfs  enfeignes  que  nous  croyons  que 
Dieu  ell  noftre  Père  &:  Sauueur  ,  quand  il  fe 
déclare  tel  par  la  bouche  de  ceux  dcl'quels  il 
veut  que  nous  foyons  enfeignez.  Voila  com- 
me nous  deuons  prattiquer  ce  qui  eft  conte- 
nu en  ce  paflage.  Et  cependant  auf>i  notons 
qu'il  n'a  point  magnitîé  fans  caufe  l'oftice 
où  il  eftoit  conftitué  ,  mais  pour  l'ingratitu- 
de des  hommes ,  lefquels  ne  reçoiucnt  point 
la  parole  de  Dieu  comme  ils  doiuent ,  &:cn 
telle  authorité  qu'elle  mérite  ,  comme  nous 
auons  veu  par  ci  deuât.  Il  eft  bd'oin  que.ceux 
qui  font  appelez  en  ceft  eftat  ,  monftrent  à 
quel  maiftre  ils  fcruent ,  &  qu'ils  ne  fc  font 
point  ingérez  d'eux-mefmcs,&:  que  la  dodri- 
ne  qu'ils  portent, fera  ou  en  falut,  ou  en  con- 
damnation, qu'elle  ne  tombera  point  fans 
vertu,  que  ceux  qui  y  àdioufteront  toy.par  le 
moyen  d'icelle  feront  faits  héritiers  du  Ro- 
yaume de  Dieu,  que  les  autres  eu  feront  for- 
clos ,  &  qu'il  y  a  vne  horrible  vengencc  qui 
leur  eft  appreftee, d'autant  qu'ils  ont  mefpri- 
fécelteilodrine  en  laquelle  Dieu  veut  eftre 
honoré  ,  &  qu'on  luy  face  hommage.  Voila 
comme  ici  faiiKt  Paul  magnifie  Teltat  de  fa 
vocation  oii  Dieu  l'auoit  ordonne  ,  afin  que 
fa  prédication  fufttant  mieux  rcceue.  Et  par 
fon  exemple  il  no'  monftre  aufsi  ce  que  nous 
auons  à  faire  ,  c'eft  afçauoir  que  nous  ne  dé- 
clarions pas  feulemét  la  parolede  Dieu,  mais 
que  nous  ayons  cefte  vertu  de  fon  El  prit, 
pourmenaccr  tous  incrédules  Se  tous  rcbel- 
lesren  fomme,que  nous  foyons  tellement  tef 
moins  de  Dieu,que  nousmonftrions  que  Iî  fa 
parole  eft  mefpnfee  en  nos  perfonnes,il  mon 
ftrera  qne  c'eft  à  luy  qu'on  s'addrelfe  ,  d'au- 
tant quec'cft  luy  qui  nous  a  ordonnez,  & 
que  c'eft  luy  quia  parlé  par  noftre  bouche. 
Voila  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paf- 
fage.  Or  (î  faincl  Paid  a  eu  befoin  de  comba- 
tte contre  l'orgueil  &  la  malice  des  hommes 
qui  or.t  vefcu  de  fon  téps,  auiourd'huy  qu'eft 
ce'Car  nous  voyons  l'impiété  qui  lé  desbor- 
de plus  que  iamais.  Et  quant  aux  Papi/les, 
nous  voyons  de  quelle  rage  ils  font  trifpor- 

tei. 


SVR    LA   r.    A    TIMOTH. 


5' 


tc2  potir  exterminer  la  mémoire  de  la  véri- 
té cie  Dieu, s'il  leur  cïloitpohible.  Mais  n'ai 
Jons  pas  iî  loin  ,  rt-gaidons  entre  nouv  com- 
bien la  plufpait  tftprophane,  ie  di  pour  fe 
mocquer  pleinement  de  Die»  ,  &  pour  foul- 
1er  au  pied  Ci  parole  ,  voire  pour  cracher  à 
rencontre.  Nous  en  verrons  bien  qui  diront 
en  vn  mot,  qu'ils  /ont  CL];eftiens  &  veulent 
cftreainli  temas  :  mais  cependant  ont  voit 
qu'ils  ne  peuuent  porter  que  Dieu  parie  en 
telle  iiipcriorité  comme  il  doit:&  non  fcule- 
inent  voifdroycnt  eftre  comme  pair  à  compa 
gnon  (  ainfi  qu'on  dit  )  mais  iJs  voudioyent 
auoir  licence  de  le  mocquer  de  toute  doftri- 
re, qu'on  lafchaft  la  bride  à  chacun, tellemét 
qu'il  n'y  euft  plus  de  religion  :  on  voit  cela  à 
l'oeil:  &  pleufti  Dieu  que  les  choies  ne  fuf- 
fent  point  fi  communes.  Il  eft  vray  que  nous 
cndeurions  auoir  gi and'  honte  :  mais  fi  eft- 
ce  qu'il  faut  bien  qu'vne  telle  turpitude  quâd 
elle  ift  notoire  aux  petis  entans,nous  fou  re 
prochee.  Car  il  y  aura  de  ces  gaudiflcurs, 
quand  ils  viendront  ici  aufiimon  vne  fois  le 
mois, ou  en  fix  fepmaines.ce  fera  pour  cfpier 
fi  on  ne  parle  à  leur  gré ,  &  comme  ils  vou- 
droyent  :  ho,  incontinent  c\ ft  -•  murmurer, 
tout  eft  perdu. Comme  dinianche(pour  exem 
ple)qircft-ce  que  ie  dy  ?  Helas  non  point  la 
centième  partie  de  ce  qu'on  voit:mais  enco- 
res  fi  on  touche  feulement  les  chofes  com- 
me en  pafTant  ,&  (ans  s'y  arreftcr comme  on 
deuroit:  Etcomment?  Il  femble  que  nous  ne 
facions  point  noftre  deuoir:c'eft  bien  à  pro- 
pos,&  ne  fait-on  pas  iuûice  ?  Et  fi  on  la  fai- 
foitjtu  ne  ferois  pas  en  l'tftat  où  tu  es  .  Et 
neâtmoins  ils  voudrôteftre  tenus  pour  Chre 


ftiens.  Ainfi  donc  notons  bien  ces  mots  de 
fainû  Paui,qiiandii  pi otefte  qu'il  dt  tcfmoia 
de  Dieu  :monftrant  que  tous  ceux  qui  font  re 
belles  àl'Euangile  ,  qui  ne  penuent  s'y  alTu- 
ietti  r, qu'il  ne  faut  point  qu'ils  cuident  s'ad- 
dreffer  aux  hommes  mortels,  mais  que  Dieu 
déclare  quec'cft  h  caufe  &  fa  querelle,  &  ltre.\9, 
qu'il  en  fera  le  garent,  comme  aufsileremie  ^.g. 
l'appelle  àctla.Et  ainfi  aduifons  de  nous  af- 
fuiettir  vclmuairemcnt  à  nolhe  Dieu  ,  pour 
plier  le  col  fous  fon  obeillàrce  ,  &  luy  faire 
rhonneur  &:i'hommage  que  non»  luy  deuôsj 
Si  le  magnifier  en  telle  forte  qu'il  nous  leco 
gnoifle  &  aduoue  pour  fes  enfans,&-  que  tout 
letcmpsde  noftre  vie  nous  le  puifsiont  ré- 
clamer comme  noftre  Père  &  Sauueur. 

OR  nous-nous  profternerons deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoifîànce  de 
nos  faiites.ie  priant  qu'il  Juy  plaife  nous  tou 
cher  d'vne  telle  repentance,  qu'eftâs  Ju  tout 
abbatus  en  nous-mefmes  ,  nous  ayons  noftre 
refuge  à  ccluy  qui  nous  eftpreftnté,  afçauoir 
à  noftre  Seigneur  lefu'.  Chrift:  comme  iour- 
nellemeiit  encores  iJ  fe  prefente  à  nous  par 
l'Euangile,quenousJercccuionsen  telle  for 
te  qu'il  habite  à  iamais  en  nous, que  nous  fo- 
yons  confermez  déplus  en  plus  en  luy, d'au- 
tant qu'vne  fois  iJ  nous  a  conioints  &  vnis  à 
Dieu  fon  Père  :  que  nous  ayons  vn  tel  gouft 
de  fon  amour,  que  nous  nedcmâdionsfinon 
d'afpirei  àceftevie  éternelle  ,  iufques  à  ce 
que  nous  venions  à  la  poflefsion  parfaite  d'i 
celle-, quand  nous  aurons  acheué  ce  pèlerina- 
ge terrien.  Que  non  feulement  il  nous  facci 
tefte  gracé ,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  na- 
tions de  la  terre,&c. 


SIXIEME    SERMON    SVR    LE    SE- 

COND      CHAPITRE. 

8     leveuxdonc  queleshommei  facentoraiJhnentoutUcuJetianî  ^ 

leurs  mains  purcsyfans  ire  cr  diffcnfion. 


'  Près  que  fainft  Paul  a  dit 
jque  noftre  Seigneur  lefus 
I  eft  venu  au  monde  pour  e- 
)  ftre  rédempteur  de  tous,  & 
I  que  le  meflage  de  falut  eft 
porté  en  fon  nom  à  tous 
peuples,  àgrans&  àpetis, 
maintenant  il  exhorte  chacun  à  inuoquer 
Dieu.  Car  c'eft  aufsi  le  vray  fruit  de  la  foy, 
que  nous  cognoifsions  Dieu  eftre  noftre  Pè- 
re ,  &  que  nous  foyons  touchez  de  fon  a- 
mour:  la  porte  nous  eft  ouuerte  pour  recou- 
rir à  luy  .nous  auôs  accès  facile  pour  le  prier, 
cfixsi  oiTeurez  <]u'U  aous  regarde  pour  fub- 


uenir  à  toutes  nos  necefsitez.  Car  iufques  i 
tant  que  Dieu  nous  ait  appelez  à  foy  ,  nous 
ne  pouuons  pas  y  venir  fins  vne  audace  trop 
grande.  Si  l'homme  mortel  prefame  des'ad- 
dreflcr  à  Dieu,  ne  voila  point  vne  foile  terne 
rité?  Il  faut  donc  que  noift  attendions  que 
Dieu  nous  conuie,c5mc  aufsi  il  le  fait  par  fa 
parole.  Car  en  nous  promet  tant  d'eft,re  no- 
ftre Sauueur,  il  nous  déclare  qu'il  fera  touf- 
iours  preftànous  receuoir:&n'attédpasque 
nous  le  veniôs  chercher,  ituis  il  fc  prefente, 
&  nous  exhort  e  que  nous  le  prions ,  &  veut 
mefmes  cfprouuer  noftre  foy  en  cela.  Voila  Kom.ic. 
pourquoy  S.Paul  en  l'autre  paflàge  dit.Qu^e  i^. 

m.  u. 


pt 


SEIZIEME    SERMON 


XI. 


les  tommes  ne  peuuent  prier  Dieu  iufques  à    les  vueille  exaucer.Sc  pourcc  aufsi  qu'ils  n'en 


tant  que  l'Euangile  leur  ait  cfté  anoncé  .  Car 
là  nous  entendons  que  Dieu  cft  preftde  nous 
rcceuoir,  combien  que  nous  n'en  foyonspas 
dignes  :  &  puis  quand  ù  bonne  volonté  nous 
cftco£;nue,  nous  pouiions  venir  hardiment  a 
luy.d'autat  qu'il  le  rend  familier  à  nous.Suy- 
iia;itcela  aulsi  il  adioufteen  lamcfme  epiftre 
des  Romains, u.chapitre, Vous  peuples  louez 
le  Seigneur,iniioquez-Ie  tout  fon  peuplcvmô- 
ftrant  puis  que  l'Euangile  cft  commun  aux 
Payens  comme  aux  luiti ,  que  toute  bouche 
doit  eflre  ouuene,  afin  de  pouuoir  reclamer 
Dieu  en  leur  aide.  Nous  voyons  maintenant 
pourquoy  fainft  Paul,  du  propos  qu'il  auoit 
tenu, déduit  celle  doctrine  fcconde.c'eft  af ^a- 
uotr  que  les  hommes  en  tout  lieu  inuoqucit 
Dieu:corame  s'il  difoit.Mes  amis, voici  Dieu 
qui  vou<.  a  receus  en  fon  troupeau,vous  efticz 
aupaïauant  hors  de  fon  Eglife.il  n'auoit  nul- 
le accointance  auec  vous  :  comme  de  taift  les 
PayCHS  eftoycut  eftrangcs  de  toutes  les  pro- 
mefles  que  Dieu  auoit  données  au  peuple  d'If 
rael:maintenant(dit-il)voici  Dieu  qin  vous  a 
recueillis  enfon  troupeau  ,  il  vous  aenuoyé 
fon  Fils  vniqued'vne  amour  paternelle  qu'il 
vous  portoit.  Ainfi  donc  maintenant  vous  a- 
uez  la  hardiefle  de  l'inuoqucr  :  car  c'efl  à  ce- 
fte  fin-la  qu'il  vous  a  rendu  tcûnoignage  de 
fa  bonne  volonté.  Ceci  nous  appartient  :  car 
nous  voyons  toutes  t"ois&  quates  que  la  bon- 
té de  Dieu  nous  efl  tcftifice,  &  qu'il  nouî  pro 
met  grâce,  combien  que  nous  foyons  poures 
pecliewrs:  toutesfbis  &  quantes  que  nous  oy- 
ons aufsi  que  par  la  mort  &:  pafsion  de  nollre 
Seigneur  Icfus  nos  péchez  ont  elle  pardon 


tendent  point  les  promefles  par  lefquclleî 
Dieu  nous  conuietant  doucement  à  foy  ,&• 
nous  exhorte  -i  le  prier:les  Papilles  n'ôt  poîc 
cela. Ils  difent  bié  qu'il  faut  prier  Dieu:  mais 
à  quelles  enfcignes?  Ils  ne  fçauent  oùilscn 
font,ne  comment  ilsdoyuét  approcher. Voi. 
la  vne  miferable  condition  qui  eft  en  eux:d'au 
tant  qu'ils  ne  peuuent  auoir  leur  refuge  A 
Dieji  ,  ils  tremblent  toufiours.  A  l'oppofite 
c'eft  vn  priuilege  ineftimable,  quand  uolhe 
Seigneur  nous  certifie  que  fi  nous  le  prion?, 
ce  ne  iera  pas  en  vain.q  nous  ne  feron-;  point 
h  uftrcz  de  no ftre  attente  en  venant  à  luy  .que 
iamais  nous  ne  ferons  refufez,moyennât  que 
nous  tenions  ce  droit  chemin  duquel  fainû 
Paul  a  parlé  ci  deUks  ,  c'cft  que  nous  ayons 
Icfus  Chrift  pour  noftre  Moytaeur,que  nous 
loyons  fondez  fur  le  mérite  de  fa  moi  t  &paf 
lîon,que  nous  fçachions  que  c'eft  fon  office 
de  nous  carder  ,  &  comme  vne  fois  il  nous  a 
appaifé  Dieu  fon  Père ,  que  maintenant  il 
nous  eft  propice  quand  nous  viendrons  à  luy 
en  ce  nom  &  en  celle  qualité-la.  Voila  donc 
en  quoy  il  nous  faut  exercer  ,  après  que  nous 
aurons  cognu  le  bien  fi  grand  &  fi  infini  que 
Dieu  nous  a  faiûdenoiis  donner  liberté  de 
le  prier,c'efl  que  nous  foyons  diligens  à  cela, 
que  nous  ayons  celte  folicitude  &:  foir&  ma- 
tin de  crier  à  noftre  Dieu  ,  veu  que  les  necef- 
fitez  nous  preflcnt  .à  chacune  minute  de  téps, 
voyans  aufsi  que  (es  promefles  nous  rompét 
iournellcment  les  aureilles, qu'il  nous  folici- 
te  de  venir  à  luy  ou  par  paroles ,  ou  de  faift. 
Q_ue  nous  ne  foyons  point  donc  nonchalans. 
Et  au  refte, notés  toufiours  que  nous  ne  pou- 


nez, que  lors  le  payement  de  nos  dettes  a  efte     uons  prier  Dieu  fans  l'El'prit  d'adopno,  c'eft 
tait, que  l'obligation  qui  cftoit  contre  nous, a    à  dire  fans  eftrealleurez  qu'il  nous  tient  pour 


cfté  defchircc  &  effacée,  que  Dieu  s'cft  recon 
cilié  .luec  nous:  voila  vne  entrée  que  nous  a- 
uons  à  prier  Dieu  :  comme  aufsi  il  le  dit  par 
fon  Propliete  Ofec,Ie  vous  diray.  Vous  elles 
mon  pcuplc:&:  vousme  refpondrcz.Tu  es  no- 
ftre Dieu.  S;  toft  donc  que  noftre  Seigneur 


fes  enfans ,  &  qu'il  no'  en  rend  tefmoignage 
par  l'Eu.igile. Voila  quât  à  vn  ité.  Et  pourta t, 
toutes  fois  &  quantes  que  nous  lifons  en  l'E- 
fcnture  fainfte, Priez  Dieu,loucz-lc:fçachôs 
que  lefruiilde  noftre  foy  nous  cft  là  déclaré, 
que  d'autant  que  Dieu  s'eft  reuelé  à  nous ,  & 


né  vn  accès  facile  à  luy  ,  tellement  que  nous 
le  pouuons  venir  chercher  ,  fçachans  bien 
qu'il  eft  facile  de  le  trouucr,pource  qu'il  viéc 
audeuant  de  nous. Et  c'eft  ce  que  faindt  Paul 
a  entendu  parce  mot  ,  E;i  tout  Ii'ch  .comme 


lia 


en  la  première  ep 


iftrec 


nous  tait  ainll  gouftcr  fa  bonté,  &  nous  pro-    qu'il  s'en  cft  approché, qu'il  nous  a  auAi  don 

met  que  toutainfi  qu'vne  fois  il  nous  a  en-    ~" ■.. -.1-  î  t.-..    --11 

uoyé  fon  Fils  vnique,  qu'en  fon  nom  il  nous 
acceptera,  nedoutôspointde  venir  à  luyrcar 
e'eft  autant  comme  s'il  nous  commandoit  de 
prier,  8c  l'vn  dependde  l'autre.  Que  fi  nous 
auons  foy,  il  nous  la  faut  monftrcren  inuo- 
quant  Dieu  :  &  quand  nous  ne  tenons  conte 
de  prier,  c'eft  vn  certain  fignc  de  l'infidélité 
^ui  eft  en  nous,  quelque  chofc  que  nous  pre- 
tendionsde  croire  à  l'Euangile. Nous  voyons 
maintenant  le  ban  que  Dieu  nous  fait  quand 
nous  liions  ce  priuilej^c  de  le  pouuoir  prier. Il 
cft  vrayquclcv  Papilles  prieront  bien  en  bar 


des  Corinthiens  il  fa- '-Cir.l.t. 
lue  les  fidèles  qui  inuoquent  Dieu.voire  (dit- 
il)  tant  en  leur  lieu  comme  au  noftre.  Là  il 
conioint  les  Payons  auec  les  Iuirs:coinme  s'il 
difoitqu'il  ne  veut  pas  enclorre  l'Eglifede 
Dieu  en  vn  certain  peuple.  Cela  a  bien  cfté 
fous  la  Loy  ,  mais  depuis  que  la  p-iroy  a  cfté 
rompue  ,  &  que  Dieu  a  ofté  l'inimitié  qui  e- 


botant:mais  il  n'y  a  nulle  certitude  en  eut. Et  ft<nt  entre  les  luifs  &  les  Payens.il  y  a  eu  vne 
défait,  ils  lemonftrent ,  quand  ils  cerchcnt  cftcndue  plus  grande  beaucoup  ,  c'eft  afça- 
tant  de  circuits  obliques,  qu'ils  demâdent  des  uoir  que  maintenant  on  peut  inuoquer  Dieu 
patrons  &  des  aduocats.  Çt  pourquoy  eft-ce?  entre  tous  peuples  &  nations,  veu  que  û  gra-. 
D'autant  qu'ils  ne  fcpcuuét  pas  fier  que  Dieu    ce  leur  cft  ainli  communiqaee  .  Au  refte, 

fain^ 


SVR    LA   I.    A 

fainô  Paul  a  voula  aufsi  monftrer  que  les  cé- 
rémonies de  la  Loy  eftoyent  abbatues  de- 
puis que  lefus  Chrift  eftoit  manifefté  au  mon 
de.Car  fous  la  Loy"  il  faloit  venir  au  temple, 
Si  s'aflèmbler  là  pour  inuoquer  Dieu.  Il  eft 
vray  que  les  luifs  prioyent  bien  chacun  en  fa 
rnairon:mais  iln'eftoit  pomt  licite  de  taire  i'a 
criiice  lolennelfinon  au  temple  de  lerufa- 
lem.car  c'eftoit  le  lieu  que  Dieu  auoit  choifi. 
Et  pourquoy  ?  Selon  la  ludetTe  de  ce  peuple- 
la  il  faloit  qu''il  y  euft  des  facrifices,  en  atten 
dant  que  la  vérité  tiift  déclarée  plus  àplein. 
Le  temple  donca  eflé  vn  fignequ'ii  nous  faut 
tous  auoir  vn  but  &vn, regard  pour  vcnirà 
Dieu  .  Et  quel  cft-il  ?  noftre  Seigneur  Icfus 
Chrift.  Car  nous  ne  pouuons  pas  approcher 
de  Dieu  finon  que  nous  ayons  quelque  con- 
duite.il  eft  trop  haut  en  cefte  gloire  &  maic- 
fté  infinie  qui  lurmonte  les  citux:  caràgrad' 
peine  pouuons-nous  ramper  ici  furtcrre.  Il 
taut  donc  que  nous  ayons  vn  autre  regard 
pour  nous  taire  approcher  de  Dieu,  afçauoir 
Tioftre  Seigneur  leius  Chrift.Les  Imts  ont  eu 
cela  en  figure ,  nous  l'auons  en  fiibftance  & 
pleine  venté. Et  puis  il  taloitq 'Dieu  retcinft 
ce  peuple-la  comme  des  petis  enfans  en  l'v- 
n;on  de  la  foy,  par  des  moyens  qui  eftoyent 
conuenables  à  leur  rudeire.  Main  tenant  noHS 
auonv  vne  telle  clarté  en  l'Euangile,  qu'ilne 
eft  plus  befoin  de  ces  ombrages  anciens.  Puis 
qu'ainfi  eft  donc  que  maintenant  l'ordre  que 
Dieuauoit  inftitue  fous  la  Loy,eftaboli,arça 
uoir  du  temple  de  lertifalera,  &  de  tout  le  re- 
ftc  des  cérémonies,  il  ne  nous  faut  plus  arre- 
I  fter  là.Voila  pourquoy  noitre  Seigneur  It/iis 

'""  y  difoit  à  la  Samaritaine, L'heure  viendra, Se  eft 
'"■  "'^  deiïavenue,que  les  vrais  enfans  de  Dieu  n'a- 
doront  plus  en  celtemontagne,ni  mclincs  au 
téple  de  icrHialcm,mais  partout  ilsadorerôt 
le  Seigneur  en  ci'prit  &  venté. Il  y  auoit  gr.id 
debatalors  entre  les  luifs  &  les  Samaritains: 
car  le  temple  d[-  Samarie  auoit  efté  bafti  par 
deipit  desIuifs-cS:  cenx  quiadoroycnt  l.à,pr^- 
tendoyent  l'exemple  d'Abrahâ  ,  &;  d'Ifaat,  & 
de  lacob.Les  luifs  auoyét  la  parole  de  Dieu, 
ii  lefus  Chrift  dit  que  le  temps  palTé'.les  luifs 
ont  cognu  ce  qu'Us  adoroyent, qu'ils  eftoyét 
■reglezàla  dodîrineqiii  cftoit  certaine.  Vous 
aîiez  efté  idolâtres  ,  vous  Samaritains ,  mais 
maintenant  (dit-il)  il  ne  faus  plus  qu'on  dé- 
batte ni  pour  le  temple  de  lerurak'ni.ui  pour 
celuy  de  Samarie. Et  pourquoy?  Car  Dieu  li- 
ra inuoqué  en  efpnt  îc  vente  par  tout  le  mon 
de. Notons  bien  donc  depuis  que  lefus  Chr;ft 
eft  apparu,  qu'il  ne  fau:  plus  que  nous  ayons 
les  ombres  anciennes  de  la  Loy,  mais  conten 
tons-nousd'auoirvn  temple  qui  n'eft  point 
matériel  ne  vifible,  voire  d'autant  qu'en  no- 
ftre Seigneur  lefu^  Chnlr  habite  toute  pléni- 
tude de  Diuinité,iSi:  qu'il  eft  noftre  frereiqu'il 
nous  doit  fufhre  quand  il  nous  tend  la  main; 
quand  il  eft  preftde  nous  prefenter  deuant  la 
face  de  Dicu,&  que  par  fon  moyen  nous  auôs 


T  I  M  O  T  H. 


91 


entrée  au  vray  fanâuaire  fpirituel ,  que  Dieu 
nous  reçoit ,  que  le  voile  du  temple  eft  rom- 
pu, qu'il  ne  faut  plus  que  nou.  adorions  de 
loin  au  paruis ,  mats  que  nous  venions  crier  à 
pleine  bouche,  Abba  ,  Père,  en  toute  langue. 
Car  faind  Paul  dit  notamment  Abba,  qui  e- 
ftoit  vnmot  accouftumé  ,  &lors  envfage  eri 
la  langue  Hebraique,c'cft  à  dire, Syriaque. Et 
il  met  lesdeuxraots,  Abba,  Perf,en  Hebrieu  '^'""•*- 
&  en  Grec,  afin  de  monftrer  qu'vn  chacun  en  ^^'S"^' 
fa  langue  a  maintenant  liberté  d'inuoquef  '^ 
Dieu  :  voire  &  n'y  a  plus  de  lieu  certain  où  il 
nous  faille  veninmais  comme  l'Euangile  a  e- 
fte  publié  par  tout,a!nli  faut-il  monftrer  que 
auiourd'huy  par  tout  le  monde  chacun  peut 
inuoquer  &pner  Dieuen  tout  lieu. Il  eft  vray 
que  maintenant  nous  aurons  bien  des  tem- 
ples :mais  ce  n'eft  pas  à  la  fa  codes  luifs,  que 
il  nous  faille  veniren  vn  certain  lieu  poui  c- 
ftre  exaucez  de  Dieu  :  cela  n'eft  finon  pour 
noftre  commodité.  Quand  il  y  aUroit  vn  lieu 
auMolard.vn  autre  à  la  Fufterie,qui  fer«yent 
aufsi  propres  q  ceftuy-ci,  il  n'y  auroit  point 
de  diftinrtion.  Apprenons  donc  que  mainte- 
nât  nous  n'auôs  plus  les  ombrages  de  la  Loy, 
&  cognoilîons  qu'à  la  venue  de  lefus  Chrift 
toutes  cérémonies  ont  prins  fin.  Et  Cela  nous 
eit  bien  neccflàire  pour  nous  retirer  de  ces 
menus  fatras  qu'pnt  les  Papiftés.mefmes  des 
fuperftitiôs  ^ue  font  qii'obfcurcirles  vraycs 
prières.  Caries  luifs  auoyent  luminaires,  ils 
auoyent  perfums  &  encenfemens,  ils  auoyent 
toutes  chofes  femblables  pour  prier  Dieu:  il 
y  auoit  le  prcftre  de  la  Loy  qui  eftoit  reue- 
itu,  (îgnifiant  qu'il  faloit  vn  Moyenncur  en- 
tre Dieu  &les  homes  qui  ne  fuft  point  de  l'or 
die  cômun.  Les  Papiftes  retienent  tout  cela; 
f^  en  le  retenant  que  font-ils?C'cft  autant  c5 
me  s'ils  rcnonçoyent  lefus  Chrift:ils  ne  le  pé 
fentpas  faire, mais  la  chofeeft  telle  neant- 
mcins.  Dieu  a  voulu  eftre  ferui  en  ombrage 
(  comme  fainft  Paul  le  monftrc  en  l'Epiftre 
aux'.Colofsiens)deuant  que  Itfus  Chrift  (qui 
eft  le  vray  corps,  c'eft  à  dire  la  fubftance  de  Ç"'*/-*' 
toiit)fiift  venu.  Maintenant  ceux  qui  cerchét  '*/?•*" 
telles  cérémonies, ievousprie,nes'efloignent  "  '*/?•. 
ils  point  de  Itfus  Chrift?  ne  declarent-ils  pas 
par  cela  qu'ils  ne  cognoifïcnt  point  que  quâd 
lia  pnns  noftre  chair,  qu'il  a  côucrféaumon 
de,  qu'il  eft  mort  &.reflufcité,  c'eft  afin  que 
maintenant  nous  regardions  àluy  ,  fans  auoir 
ces  figures  puériles  qui  ont  ferai  feulement 
pour  vH  temps  ?  Voila  comme  les  Papiftes  en 
tous  ces  bad: nages  qu'ils  font,non  feulement 
obfcnrciirLHtla  glaire  de  noftre  Seigneur  le- 
ius Chnû,mais  ils  Peffacent  entant  qu'il  leur 
eft  pof.ible.Et  ainfi  apprenôs  d'adorer  Dieu, 
8c  d'inuoquer  purement  faas  auoir  ces  niellin 
ges,  &  chofes  ijui  auront  efté  bafties  en  na- 
ître cerneau,  ou  bien  fans  emprunter  de  U 
Loy  ancienne  ce  qui  ne  nous  conuient  plus: 
brief,  faifons  celte  différence  qui  eft  entre 
no«s  &les_Iuifs,d'autant  qu'il  y  a  eefte  pleine 

m.iii. 


94  SEIZIEME    SERMON 

reuelation  que  nous  aiions  maintenant  en  l'E    ueniméde  cholere  à  rencontre  de  Dieu.  Il 
iiâgilc,  &;nt  faifonj  point  cefteiniureà  Dieu    faut  doncque>nout  prions  Dieu  d'vncoura- 
d'efteindre  la  clarté  qu'il  fait  luire  deuant    ge  pailible.  Et  voila  pourquoy  aufsi  S.  Patrl, 
nos  yeuï:puis  que  le  Soleil  de  iuftice,  c'efta-    combien  qu'il  nous  monilre  que  nous  fovons 
1  çauoir  noftre  Seigneur  lefus  Chrilt,  nous  efl    diligcns  de  requérir  Dieu  r  toutestois  il  met, 
maintenant  manifefté.il  n'ell  plus  queftion  de    que  les  actions  de  grâces  Toycnt  touCours  eô 
cheminer  par  les  ombrages  obfcurs  qui  ont    iointesauecc'eftàdirc.quand  nousauonsnol 
efté   quand  nous  eftions  encoies  loin  de  la    defirs  bouillant, que  nous  ne  laiflons  pas  tou- 
grand'  clarté  qui  cft  depuis  apparue  :  car  a-    tesfois  d'acquiefccr  à  la  bonne  volonté  de 
près  qu'ô  s'eft  dcllourné  de  la  parole  de  Dieu    Ditu:fi  du  premier  coup  il  ne  nous  donne  pas 
il  n'y  a  iamais  de  fin. Nous  voyons  que  les  Pa    fclon  nos  fouhaits.que  nous  attendios,  &  que 
pifles  ont  eu  des  peleriraçcs,&;  les  ont  enco-    nous  l'oyons  patiens.  11  faut  donc  prier  Dieu 
res  auiourd'huy,pour  cercher  Dieu  en  tracaf    làns  murmurer, fans  nous  defpiter.cela  eft  bié 
fant  cà  Se  là.  Et  que  font-ils  f  S'auancent-ils    vray,  fans  mefmes  vfer  de  réplique  pour  luy 
quand  ils  auront  marche  beaucoup  de  pas?Ce    demander  pourquoy  c'eft  qu'il  nous  laifle  laa 
eft  autant  que  s'ils  tournoyent  le  dos  à  Dieu:    guir:  mais  le  fens  de  fainâ  Paul  en  ce  pafTage 
Se  qu'ils  courét  le  plus  ville  qu'ils  pourront,    eft  autre  :  car  il  regarde  à  la  circonftance  que 
ils  ne  feront  que  fe  rompre  &  iambes  &  col,    nous  auosdeiîa  déclarée, que  les  luifs  euffcnt 
voire  pour  s'eflongner  de  Dieurque  fi  nous  le    bien  voulu  exclure  les  Paycns, qu'il  leur  fcm- 
voulons  prier  comme  l'Euangile  nous  le  corn    bloit.QjJoyhious  fommes  les  enfàns  deDieu, 
mande,  &  ainfi  que  Dieu  fe  monftre  par  tout,    il  nous  a  choifis:&  la  lignée  d'Abraham  n'au- 
•&qu'il  nous  appelle  à  foy,il  faut  que  nous  luy    ra-elle  point  plus  de  priuilege  que  les  natiôï 
refpondions.Ceux  donc  qui  trottent  de  cofté    incircocifes?Les  Payés  d'autre  cofté  fe  moc- 
&  d'autre  par  deuotion.monftrent  bien  qu'ils     quoyent  des  Juifs,  Et  ils  font  toufiours  petis 
fe  forgent  des  idoles:  &  en  ctla  ils  delaillènt     enfans,  les  voila  à  l'a  b  c  :ils  ne  cognoiflent 
le  Dieu  viuant,  &  fe  retirent  du  tout  de  luy.     point  que  les  cérémonies  ont  prins  fin  :  nous 
Et  ainfi  nous  fommes  tant  mieux  confermez     ne  fommes  pluscncefte  enfance,  nous  fom- 
de  la  grâce  qui  nous  a  efté  faite,  quand  Dieu     mes  venusen  l'aagede  perfcftion,  tellemcrvt 
nous  a  monftté  fa  face  paternelle  en  l'Euan-    que  nous  n'auons  phn  befoin  de  telles  aides 
gile  ,&  que  iournellement  il  nous  exhorte  à    comme  fous  la  Loy.  Voila  comme  les  luifs 
le  prier,  nous  déclarant  aufsi  la  façon  comme     mefprifoyent  les  Payens ,  &  les  dcftiaignant 
nous  y  deuôs  procéder. 'Vfons  de  ce  bien, puis     ne  les  receuoyent  point  en  leur  compagnie, 
«ue  nous  en  fommes  mis  en  poflefsi on, c'eft  à     Les  Payens  d'autre  cofté  fe  mocquoyei.t  de 
dire,qu'ellans  fondez  fur  les  promefles  de  l'E     la  rudtfle  des  luif;,  pource  qu'ils  eftoyent 
nangile,  ayans  lefus  Chrift  qui  nous  dôneac-     toufiours  retenus  en  ces  petis  rudimcnsdela 
ces,  que  nous  foyons  tout  afleurez  que  Dieu     Loy.  De  là  venoyent  beaucoup  de  fchifmes, 
aous  regardera  en  pitié, &  que  nous  aurons  li     que  les  vns  eftoyent  bandez  contre  les  au- 
berté  de l'inuoquer  à  pleine  bouche, (ans  dou     très ,  &  l'Eglife  eftoit  comme  defchirte  par 
ter  qu'il  nous  exaucera  en  toutes  nos  roque-     pièces:  &'nous  fçauonsque  Dieu  nous  reeom 
ftes.Or  fainft  Paul  dit,  Que  ceU  fe  face  fans     mande  fur  tout  vnion  &  fraternité. Et  de  fait, 
Jijfenfons,  &•  ftint  diffutte:  car  le  fécond  mot     quelle  cft  la  forme  de  prier  qui  nous  eft  don- 
dont  il  vfe  ,  fignifie  proprement  difpute .  Et     née  par  noltre  Seigneur  Icl'us  Chrift?  Noftre 
pourquoy  met-il  ceciîll  eft  vray  qu'en  priant     Père  qui  es  es  cieux.  Sec.  11  ne  nous  dit  point 
Dieu,  il  ne  faut  point  que  nous  apportions  là     q'u'vn  chacû  appelle  Dieu  en  fon  particulier: 
aos  chagrins  pour  nous  defpiter  contre  luy,     quand  ie  di,  Noftre,  ie  parle  au  nom  de  tous, 
comme  celuy  qui  tient  prier  Dieu  en  fe  faf-    chacun  dira  le  femblable.  Ainfi  donc  nous  ne 
ehant,ouenmurmurant  par  impatience  des  af    aurons  point  d'accès  pour  prier  Dieu  ,  que 
ftiftions  qu"'il  enuoye  :  &  cela  n'eft  pas  faire     nous  ne  foyons  conioints  enfcmble  :  car  cc- 
gueres  d'honneur  a  Dieu ,  H  nous  le  prions     luy  qui  fe  ftpare  d'auec  fcs  prochains,  fe  fer- 
eoramepar  reproche.  Voila  beaucoup  de  gens     me  la  bouche,  tellement  qu'il  ne  peut  pas 
quifont  fembiant  dcprier:maisquovîc'cft  en     prier  Dieu  à  la  façon  qui  nous  cft  ordonnée 
«onteftant  àl'encontre  de  Dieu  :  ils  fe  faf-     de  noftre  Scicneur  lefus  Chrift  :  brief.i!  faut 


chent  ,ils  fe  tourmentent  de  ce  qu'il  ne  les 
traitte  pas  à  leur  gré^Us  viedrôt  dÔc  à  Dieu, 
mais  ce  fera  pour  fe  defpiter  contre  luy  :com 
me  fi  vn  mari  fe  mefcontentoit  de  fa  femme. 
Et  comment?vous  dturiei  faire  ainfi,  vous  ne 


que  nous  ayons  vn  accord  &  vn  lien  de  vraye 
vnion  enfcmble  ,  deuant  que  nou";  appro- 
chions de  noftre  Dieu  pour  nous  prtftntcrà 
luy.  Pource  qu'il  y  auoit  ces  difcors  &  ces  dif 
puces  que  nous  ations  dites  entre  les  luifs  & 


vous  acquittez  point  de  voftre  deuoir:ou  que  les  Payens,  faind  Paul  monftre  que  iufques  à 

la  femme  demandant  quelque  chofc  à  fon  ma  ce  qu'ils  fe  foyent  reconciliez, ils  ne  pcuucnt 

Ti,luy  reprochaft.  Et  vous  n'aucz  point  fouci  pas  inuoquer  Dieu,  &  qu'ils  feront  reiettez. 

île  moy  .  Voila  comme  beaucoup  de  gens  en  Voila  pourquoy  il  met  qu'ils  prient  fans  con 

font,  qu'il  vaudroit  mieux  que  iamais  ils  ne  tentiôs  &  (ans  difpute,c'eft  à  dire  qu'ils  n'cn- 

priaflènt,  que  «le  venir  auecvn  coeur  ainfi  en-  trent  point  en  telle  altercation  l'vn  contre 

l'autre: 


s  V  R   L  A    I. 


Pautré  '.  que  les  luifs  ne  s'auancent  point  par 
defltisles  Payens  à  cauk  qu'ils  ont  efté  les 
premiers  appelez  ,  &  que  les  Payens  aufsi  ne 
les  condamnent  pas  pour  leur  rudeffe  :  que 
toutes  ces  difputes  là  celTent(dit  famft  Paul J 
&  qu'il  y  ait  vne  bonne  reconciliation  faite, 
afin  qu'ils  déclarent  qu'ils  ont  tous  l'Efprit 
d'adoption. ,  c'eft  à  dire  que  l'ETprit  de  Dieu 
les  gouuerne ,  celuy  qui  apporte  auec  foy 
paix  &  vnité.  Or  de  là  nous  auons  à  recueillir 
vne  doârine  gênerai  e  ,  c'eft  deuant  que  nous 
puifsionseftre  difpofez  pour  bien  prier,  que 
nous  ayons  cefte  fraternité  que  Dieu  nous 
Coramande,&  ccfte  vnion:car  il  ne  nous  veut 
point  ouïr  ctacun  de  nous  à  part,  mais  il  veut 
qu'il  y  ait  vne  refonnance  &  vne  mélodie  en 
la  bouche  de  tous, combien  qu'vn  chacun  par 
le, combien  que  chacun  foit  mefme  feparé  en 
fon  lieu,&  que  nous  priés  Dieu  en  Iccret.tou 
testois  lîfaut-ilque  no ftre  accord  yieneau 
ciel,que  nous  difions  tous  d'afFcftion  &  en  ve 
rite,  Noftre  Pere:que  le  mot  de  noftre,  nous 
lie,&  nous  vnifle  tellemét  qu'il  il'y  ait  qu'vne 
fcule  voix.comme  s'il  n'y  auoit  qu'vn  coura- 
ge &  vn  cfprit.  Voila  que  nous  deuons  rete- 
nir.Ec  au  rclte.quîd  nous  prions, conioignôs 
autiiles  Eglil'es  :  li  nous  voulons  bien  prier 
Dieu  ,  que  nous  ne  facions  pas  comme  beau- 
coup qui  ne  demandent  qu'à  diuiter  ce  que 
Dieu  a  côiaint,rous  ombre  de  quelque  petite 
cérémonie  qui  ne  fera  lien  ,  que  nous  foyons 
feparez  côme  vn  corps  defmcmbré.  Ceux  qui 
y  pi  ocedcntainii,  monftrent  bien  qu'ils  font 
polFcdez  del'efpnt  de  Satan,  qu'il  y  a  vne 
phrenefic  qui  les  tianf'porte  poui  difsiper  la 
viaye  conionûionque  Dieuainife  entre  les 
lîens.Ainiî  donc, que  telles  difputes  foyent  ra 
clees  &  inifcs  bas,  &  que  nou^  prions  Dieu  en 
liberté, fçachans  bien  que  pui'.  que  noftieSei 
gneur  lefus  nous  eft  mauittfte  à  tous ,  qu'il 
nous  veut  attirer  à  loy  pour  nous  conduire  à 
Dieu  fon  Père.  Il  eft  vray  que  ne  us  ne  pou- 
uo  ns  pas  eftre  conioints  auec  ceux  qui  fefe- 
parcnt  de  nous:  comme  voila  les  Papiftcs  qui 
ié  diront  Clircftiéj;mais  quoy^ptut-on  auoir 
nulle  communication  de  pricie  autc  euxrNen 
ni  :  par  ce  qu'ils  ont  dclailTc  lefus  Cfcrift:  & 
nous  fçauon,'.  qu'en  déclinant  de  luy  tant  peu 
que  ce  foit,nous  ne  tcnôs  plus  le  chemin, no' 
ne  faifons  que  vaguer  a  trauers  champs.  Puis 
donc  que  le»  Papiftes  fe  font  feparez  de  lefus 
ChriR-,il  y  a  vne  trop  longue  diftance  entre 
eux  ^t  nous  :  mais  ton»  ceux  qui  fe  voudront 
ranger  à  lefus  Chnft.ilnous  leur  faut  tendre 
la  main,ahn  que  a' vn  accord  mutuel  nous  ve- 
nions nous  rendre  à  Dieu  noltre  Père.  Or 
comme  cela  doit  eftre  prattiqué  en  gênerai, 
aufsi  chacun  doit  fe  ranger  tant  qu'il  luy  fe- 
ra pofsible  auec  tous  fes  prochains  ,  quand 
nous  voudrôs  eftre  exaucez  de  Dieu  tous  en- 
t*^tth.^.  femble.Et  voila  pourquoy  noftre  Seigneur  le 
a.13.14.  fus  dit,Quf  fi  quelqu'vn  viét  pour  oiFrir  fon 
oblation  à  l'autel,'!  t:aut  qu'il  laiflè  làpluAolt 


A    T  I  M  O  T  H.  j,y 

fon  ofFïandc  pour  fe  recôfilietâuec  Ion  freiû 
lequel  U  aura  ofFenfc,  que  de  cuider  que  Dieu 
le  reçoyue  quand  il  fera  ainli  en  picque  &  ctt 
rancune.  Voulons-nous  donc  auoir  Dieu  pr« 


pice?  Il  faut  que  toutes  inimitiez  (oyÉt  mife« 
bas  entre  nous:car  d'autant  que  nous  fomttles 
diuifcz, voila  Dieu  aufsi  qui  nous  reictte,  car 
ilne  receuralînon  ceux  qui  font  membres  de 
fon  Fils:&  nous  ne  ponuons  pas  eftre  mebres 
de  lefus  Chrift.que  fon  S.E<prit  ne  nous  gou- 
uerne,lequel  efti'Efpritdepaix  &  vnion,coia 
me  nous  auons  déclaré. Apprenons  doncd'e- 
ftre  en  bonne  amitié  &.  fraternelle  les  vns  a« 
ucc  les  autres,  lî  nou>  voulons  que  Dieu  n«us 
reçoyue  à  foy  ,  &  qu'il  ait  fon  giroa  eftendil 
quand  nous  viendrons  pour  le  prier.  Voila  ce 
que  nous  auons  en  fomme  à  retenir  de  ce  fiC- 
fage.Et  quand  nous  voyons  qu'il  y  a  quelque 
chofeqm  no"  peut  empefcher  de  prier  Dieu. 
coFnoiîTons  que  c'eft  le  diable  qui  nous  met 
des  barres  au  deuant,  &  fuyons  cela  comme 
pefte  mortelle. Et  c'eft  encoret  vn  poind  que 
nous  deuons  bien  noter.Car  nous  en  verrons 
beaucoup  qui  ne  demandent  finonà  s'entre» 
battre  par  difputes,côme  fi  la  parole  de  Dieu 
eftoit  faite  pour  nous  feparer  les  vns  d'auee 
les  autres.  Nous  auons  défia  dit  que  la  droite 
fin  de  l'Euangile  cil  de  nous  appeller  à  Dieu, 
afin  que  nous  fovons  conioints  &  vnis  en  nos 
prières  &  requeftes.Or  fi  ceux  qui  par  difpu- 
tes côtentieufespriétainfi,  &  qu'ils  s'eieuent 
les  vns  cotre  les  autres, ils  tafchent  d'anean*. 
tir  la  gloire  de  Dieu  entant  qu'en  eux  eft,  ils 
peruertilTcnt  toute  bonne  doârine,ils  renuer 
fent  l'intentiô  de  Dieu,  &  bataillét  cotre  icel 
le  pour  l'aneantir.ll  ne  faut  point  donc  qu'ils 
s'attendent  d'eftre  exaucez  en  leurs  prières, 
puis  qu'il  n'y  a  point  cefte  vnité  &  concorde 
pour  tendre  à  Dieu  au  nom  &  par  le  moyé  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift.S.Paul  adioufte, 
Leuaos  Us  mains  fures.En  quoy  il  fignifie  que 
nous  ne  deuons  point  abufer  du  nom  de  Dieu 
venans  à  luy  auec  nos  ordures, mais  qu'il  fauc 
que  nous  foyons  purifiez. Or  l'oraifon  eft  ap.. 
pelée  ficnfice,&  nô  fans  caufe.Car  nous  fça 
uons  que  du  temps  de  la  Loy.quâd  on  vouloic 
facrifier,  il  fe  faloit  lauer  auparauant,  Pour- 
quoy? Car  noltre  Seigneur  vouloit  admonet 
fterles  homes  qu'ils  font'pleins  de  fouillure» 
qu'ils  font  pollus,&  ne  font  pas  dignes  de  ve» 
nir  à  luy,  iufques  àce  qu'ils  ayent  receu  vne 
purgatiô,&,fontcÔrae  rouillez. Il  eft  vrayque 
mamtenât  puis  que  les  figures  de  la  Loy  Ibnc 
abbatues,  &  qu'elles  ont  prins  fin,  qu'il  nous 
faut  venir  à  lefus  Chrift:car  c'eft  aufsi  noftre 
feul  lauement.Cependant  toutesfois  il  ne  fauc 
pas  qu'vn  chacun  s'entretiene  &  fe  nourriflè 
en  fes  pollutions  :  car  pour  cefte  caufe  lefus 
Chrift  nous  eftdôné,  afin  qu*il  nous  renouuel 
le  par  fon  S.Efprit,&  que  nous  ne  foyos  point 
addonnez  à^los  cupiditez  mefchantes.Appre- 
nons  donc  que  Dieu  ne  nous  appelle  point  à 
foy  pour  apporter  là  ngs  ordures,&  nos  infe«» 

m.iiii. 


9S 


SEIZIEME     SERMON 


ôions  &  puantifes  deuant  liry ,  mais  il  veut  q 
nousfoyons  préparez  pour  le  bien  prier.  Et 
comment  ferons-nous  préparez?  C'eft qu'il 
nous  faut  auoir  noftre  refuge  à  la  remifvion 
de  nos  péchez ,  &  quand  nous  voudrons  prier 
Dieu.il  faut  que  ceci  nous  viene  en  mémoire: 
Helasl  Seigneur,  ic  me  voy  ici  plus  que  con- 
fus:car  quant  à  moy  ie  fuis  plein  de  pol  unon 
&  d'ordure.en  forte  qu'il  faut  que  ie  foye  re- 
ietté,  iufques  à  ce  que  l'aye  prms  vne  pureté 
d'ailleurs  ,  c'eA  af  jauoir  de  noltre  Seigneur 
lefus  Clirill. Voila  comme  encognoiflàntnos 
taches  &  macules, il  nous  faut  recourir  à  ceftc 
fontaine  où  nous  pourrons  eftre  lauez ,  c'ell 
afçauoir,puis  que  lefiis  Chri/l  a  elpandu  fon 
lang  pour  noftre  lauemcnt ,  que  nous  ferons 
aufsireputezpurs  deuant  Dieu  «St  tout  nets. 
^t  aurefte  notons ,  combien  qu'il  n'y  ait  en 
nous  que  toute  infedion,  quand  Ufus  Chnft 
nous  a  appoité  l'efprit  de  laindcté.que  quant 
&  quant  il  nous  a  purgez  de  nos  vices,  telle- 
ment qu'il  nous  adonné  accès  deuant  Dieu. 
£t  pour  celte  caufe  faillit  Paul  dit,  Qujil  veut 
que  les  hommes  en  priant  Dieu  leuent  les 
mains  pures.  Il  eftvray  qu'il  regarde  ici  aux 
cérémonies  de  la  Loy;  mais  il  fait  vne  compa 
raifon  tacite  entre  cequieftoit  extérieur  de 
ce  temps-la,  &  ce  que  nous  deuons  auoir  au- 
iourd'huy  à  la  vérité:  comme  s'il  difoit.  Mes 
amis,  du  temps  de  la  Loy  &  du  vieil  Teft.i  - 
ment, Dieu  a  entretenu  fon  peuple  en  celle  ce 
remonie, qu'il  faloit  cilre  purifié  deuat  qu'of 
frirnul  facrifice.deuatmefmes  que  faire  pro- 
fefsion  folennelle  de  fa  foy  au  teraple.Main 
tenant  il  eftvray  que  ces  chofes-la  ne  font 
plus  en  vfage  pour  les  Ghreftiens,mais  il  faut 
retenir  la  fubftance.  Et  quelle  eflcefte  fub- 
ftance.'C'eft  que  nous  n'ayons  point  de  l'eau 
vifible  pour  nous  lauer,  mais  que  nous  veniôs 
au  fang  de  lefus  Chrift  quicftnoftre  lauemét 
fpijituel.Comme  de  faiû.quand  il  efl  parlé  du 
XXf .35.  fiinû  Efprit.il  eft  intitulé  eau  nette:refpan- 
î.y,  dray  les  eaux  nettes  &  pures  fur  vous,&  en  fe 

rc2  purgez  ,  dit  Dieu  par  Ezechiel.  Et  ccfte 
promelîe  fe  rapporte  notamment  à  la  venue 
dç  lefus  Chrift.Voila  donc  Dieu  qui  déclare 
qu'au  lieu  de  ces  figures  anciennes  qu'ilauoit 
données  aux  luifs,  &  au  lieu  d'vne  eau  maté- 
rielle &  corruptible,  il  nous  donne  la  vérité 
de  tout,  nous  certifiant  que  nous  ferons  net- 
toyez pa  r  fon  fainû  Efprit.Sainft  Paul  donc 
maintenant  nous  ramenelà,&  nous  monftre, 
qu'au  lieu  des  kuemens  extérieurs  qui  ont 
cité  iadis,il  faut  que  nous  ayons  celle  pureté 
fpirituelle.qu'cftas  lauezparl'Efprit  de  Dieu 
(qui  cft  l'eau  nette  &  pure)  nous  puifsiôs  no* 
venir  prefenter  deuant  luy.  Il  elt  vray  qu'il 
parle  notamment  des  mains.mAK  nous  fçauôs 
qu'en  l'Efcriture  par  les  mains  font  fignifîecs 
toutes  œuures.  Et  pour  cefte  caufe  il  eft  dit, 
P/*»ltf-6  lelaueray  mesmaii-sen  innocence,  &ciicui- 
ray  ton  autel.  Seigneur.  Danid  parlant  iinfl 
regarde  bié  aux  figures  de  la  Loy, mais  il  mon 


lire  comme  nous  en  deuons  maintenant  vfcr. 
Nous  entendrons  ceci  plusaifeement  en  re- 
gardant à  l'oppoCte  comme  Dieu  reproche 
aux  luits  par  fon  Prophète  Ifàie ,  qu'ils  ve-  •'"'  '"'* 
noyent  apporter  leurs  mains  fouillées  en  fon  '3'r4-l» 
temple  :  Venez -vous  ici  polluer  mon  fainû 
lieu,quand  vous  venez  faire  femblantde  m'in 
uoquer  au  temple,  &  cependant  vous  auez  les 
mains  fanglantcs.vous  elles  pleins  de  malice 
&de  fraude.vous  eftes  des  meurtriers,dts  lar 
rons,&  des  pariures?Et  qu'eft-ce  autre  chofe 
quand  vous  venez  ainiî  faire  ftmblant  de  me 
requérir  auec  vos  mains  pollues,{înon  me  fai- 
re la  guerre,&  me  defpiter  tant  qu'il  vous  cil: 
pofsible  ?  Comme  nolire  Seigneur  reproche 
que  les  luifs  venoyent  leuer  leurs  mains  fan- 
glantes  deuant  luy:  aufii  au  contraire,il  nous 
commande  ici  par  la  bouche  de  •iin£l:  Paul, 
que  nous  leuions  les  mains  pures  ;  c't  It  à  dire, 
que  nous  ne  foyons  point  enueloppez  en  nos 
mauuaifes  affetlions ,  &que  cela  auf  i  fe  dé- 
clare en  toute  la  vie. Nous  voyons  maintenric 
ce  que  faind  Paul  a  entendu ,  c'ell  afçauoir 
qu'ayans  ce  pruuicge  de  prier  Dieu  facile- 
ment,&  de  nous  retirer  à  luy  comme  à  noftre 
Père  ,  il  ne  faut  pas  que  nous  peniîons  eftrc 
exaucez  quand  nous  y  viendrons  ainlî  poilus 
que  nous  fommes  de  nature  ,  que  nous  vien- 
drons là  porter  nos  ordures  &  puantiles  pour 
tout  infecferrcar  il  he  pourra  fouffnr  que  fon 
nom  fort  ainlî  prins  en  vain. Mais  au  contrai- 
re il  faut ,  puis  que  lefus  Chrift  ell  venu  pour 
rouspuriHer,&  que  cell  office-la  cil  attribue 
à  l'Elprit  qu'il  a  receii  pour  nous  en  faire 
participans  ,  qu'vn  chacun  s'eftudie  .i  pureté: 
&  d'autant  que  nous  ne  lepouuons  pas  faire 
de  noftre  vertu  ,  que  nous  recourions  à  noftre 
Seigneur  lefus  Chnft  ,  qui  eft  la  fontaine  de 
toute  pureté, comme  c'eft  là  aufsi  qu'il  nous 
faut  chercher  toutbien.Cepend.it  il  nous  faut 
aufsi  noter  pour  concIulionfinale,que  fainfl 
Paul  parlant  de  leuer  les  mains,  regarde  à  la 
façon  qui  a  cfté  accouftumce  de  tout  temps 
quand  on  a  voulu  prier  Dieu.c'eft  deioindie 
les  mains  pour  les  leuer  en  haut  :  cela  de  foy 
n'emporte  rien,  mais  c'eft  vn  exci  cice  qui  eft 
bon  &  propre  quand  il  fera  réduit  à  fon  but. 
le  di  que  cela  n'emporte  rien  de  foy  ,  quand 
nous  leuons  les  mains,  mais  la  fin  cft  bonne  & 
vtile,voireneceflàire.Et  poiuquoy?Nousvoy 
ons  la  rudeilc  qui  cft  en  nous ,  que  nous  ima- 
ginons toufiours  que  nous  fommes  trop  loin  ' 
de  Dieu,  &qu'aufi  il  n'eft  pas  prochain  de 
nous  pour  nous  exaucer.  Quand  nous  auoas 
ce  ligne  extérieur, c'eft  pour  nous  confermer 
que  Dieu  nous- cft  prochain  quand  nous  le 
cherchons. Et  d'autre  coftc.nous  voyons  auf 
li  noftre  parelTe  ,  nous  fommes  tant  tardifs 
que  nous  auons  beibin  d'cftre  incitez  à  priè- 
res ,  &  vne  telle  façon  nous  y  fert ,  c'eft  vne 
aideconuenablc  pour  nous  mciter  à  chercher 
Dieu ,  quand  nous  tendons  amli  les  mains  en 
haut:&  puis  nous  auons  befoin  quant  &  quant 

de 


SVR     LA     I.     A    TIMOTH. 


97 


de  prie;  Dieu,  non  point  comme  s'il  eftoit 
vne  idole,  &  qu'ii  cicnuncLiil  dV/lre  ferui 
«         d'vne façon  ch.irneJle  :  miiisquM  nous  faut 
eleuer  par  dclTus  tous  nos  i'ens,  raefmes  qu'ii 
nous  faut  eitre  delpouillez   de  toutes  nos 
atfeftions  terre/lrcs  ,  &  de  toutes  les  cho- 
(it%  qui  nous  rctienent  ici  bas.  Et  pource  que 
nous  n'auons  point  d'ailes  pour  voler  iufques 
au  ciel,  en  ieuant  ainii  nos  mains, c'tlt  ligne 
ou'i!  nous  faut  eleuer  là  haut  en  el'prit  par 
loy.  Nous  voyons  maintenant  comme  ctlte 
façon  d'eleucr  les  mains  au  ciel, n' cil  pas  fu- 
perflue  quand  elle  fera  réduite  à  fa  droite  fin 
.  &i  fonvfage.  Maintenant  donc  apprenons 
toutes  fois  &  quantes  que  nous  auons  les 
mains  iointes  &  leuees  au  ciel,quec'ert  pour 
nous  conduire  à  Dieu  félon  noftre  petitefle, 
&pournousaduertirquec''eftàluy  fcul  qu'il 
nous  fautauoir  noftre  recours,  &quenous  ne 
pouuons  auoiracccs  à  luy,  linon  en  nouïele- 
uant  pardeflîis  tout  lemonde,  c'eftà  dirt  en 
nous  retirant  de  toutes  nos  pafsions ,  &  de 
toutes  les  penfees  &  phantafies  lourdes  &  ter 
reftres  que  nous  auons ,  qu'il  faut  que  nous 
foyons  defpouillez  de  tout  cela:coinme  auf- 
fi  quand  nous  difons ,  Noftre  Père  qui  es  es 
cieux.nousfommes  aduertis  qu'il  le  faut  cher 
cher  là ,  &  qu'il  nous  y  faut  monter  par  foy  : 
combien  que  nous  habitions  ici  en  terre  ,  que 
nos  afFeftions  foyent  leuees  là  haut.Voiia  de 
quoy  nous  fommes  admoneftez  parcefte  c«- 
remonie.  Et  quant  &  quant  apprenons  de  re- 
noncer à  toutes  autres  façons  qui  ne  font 
point  approuuecs  de  Dieu,  mais  cognoiflbns 
que  tout  noftre  falut  eft  en  luy-  Et  pourtant 
^ue  nous  y  ayons  noftre  confiance  ,  &  qu'il 
_  nous  fuffife  'de  l'auoir  en  noftre  aide  &  fe- 
cours:car  fi  nous  ne  le  croyons  ainfi,  lacere- 
inonic,encores qu'elle foit  bonnedefoy,  fera 
vaine  &  fuperfliie  :  mefmes  notons  bien  que 
tous  ceux  quiaurontleué  les  mains  au  ciel,  & 
cependant  feront  retenus  ici  bas, qu'ils  fecon 
damnent, comme  s'ils  efcriuoyent  là  leur  con 
damnation:c'eft  tout  autant  comme  fi  de  leur 
propre  main,&  de  leur  feing  manuel(comme 
ondit)ils  ratifioyent,  le  fuis  vn  hypocrite.ie 
fuis  vn  fauflàire,  ie  fuis  vn  menteur,ie  fuis  vn 
pafiure. Carie  vien  ici  protefterdeuant Dieu 
que  ie  le  cherche  là  haut,&  tontcifois  ie  fuis 
letenu  ici  bas:ie  déclare  que  l'ay  ma  fiance  en 
luv,&  ie  la  mets  en  raoy.ou  aux  creatures:ie 
déclare  que  ie  fuis  ekué  au  ciel  par  foy,&  ie 
fuis  plongé  en  ces  cbofes  terriennes.  Voila 
comme  ceux  qui  n'ont  point  leur  atfeûion 
droite  à  Dieu  ,  qui  n'ont  poiat  leur  recours  à 
hiy,  qu'en  Ieuant  leurs  mains  au  ciel  ils  font 
vne  fignaturc  qui  leur  couftera  bien  cher:  car 
ils  font  conuaincus  &  condamnez  fans  aucun 
remède  ,  ^ue  Dieu  prend  cela  comme  Vn  tef- 


moignage  à  l'encoatre  d'eux ,  qu'il  ne  leur 
faut  point  former  d'autre  procès. £t  Je  faiiS, 
Dieu  a  voulu  que  cefte  ca^tmonie  ait  duré, 
mefmes  entre  les  Payens.afin  que  ce  fuft  pour 
les  rendre  inexcufables.  Voila  les  Payens  qui 
ont  eu  leurs  idoles  ,  comme  les  Papiftesau- 
iourd'huy  auront  leurs  marmouzets.  Or  tant 
y  a  qu'ils  ont  bien  fceudire.Leuons  les  mains 
auciel.  Etquieft-ce  qui  parle  ainfi?  Ce  ne 
font  pas  les  Prophètes  deDieu,ccn'eib point 
Moyfc.cen'elt  point  lefus  Chrift  feulement, 
mais  iici  Payens  3.irS\  prophanes  qu'ils  ont 
efté  ,  ont  toufiours  vféde  ces  mots  :  comme 
on  le  voit  en  leurs  liures,  quand  ils  ont  efté 
en  quelque  necefsité  ,  Leuons  les  mains  au 
ciel ,  il  nous  faut  leuer  les  mains  au  ciel.  Et 
qu'eft-ce  à  dire  cela  ?  Dieu  leur  a  arraché  ce 
tefmoignage-là, comme  fi  on  mettoit  vn  mal- 
faiteur à  la  géhenne  ,  afin  qu'il  fuft  conuain- 
cu  de  (k  propre  bouche.Ainfi  notons  bien  que 
totuîours  cefte  cérémonie  a  efté  accouftumee 
mefnie  entre  les  Payens ,  d'autant  que  les 
hommes  font  contraints  de  chercher  Dieu  '<! 
haut.  £t  combien  qu'ils  n'euflènt  que^t^urs 
idoles  qu'ils  ont  appelez  dieux,fi  eft-«e  qu'ils 
ont  toufiours  pioteftc    qu'ils  cWrchoyent 
Dieu  &  fa  maie fté.  Pourtant  cognoUïbns  que 
fi  c'eft  vn  tefmoignagepaurla  condamnation 
des  PayCni ,  &  qu'ils  foyent  conuaincus  par 
cela  au  dernier  iour  d'auoir  abufé  de  cefte  cé- 
rémonie ,  quelle  excufc  y  aura-il  pour  nous, 
ievous  prie  ,  quand  l'vfagenous  eft  déclaré 
en  TElcrifure  fainde  ,  &  que  Dieu  nous  in- 
ftruit  fi  priueement?  Et  ainfi  apprenons,  tou- 
tes fols  &  quantes  que  nous  deuons  prier 
Dieu, que  nous  foyons  diftraits  de  toutes  nos 
falicitudes  terreftres  ,&de  toutes  nos  affe- 
ftions  mefchan  tes, comme  nous  fçauons  qu'il 
y  a  beaucoup  d'empefchemens  qui  nous  re- 
tardent de  tendre  droitement  à  Dieu. Et  pour 
tant, quand  nous  leuons  \t%  mains  .lu  ciel,  co- 
gnoiflbns que  c'eft  afin  que  là  nous  cherclnôs 
Dieu  parfoy,&quecelane  fe  peut  faire  que 
nous  ne  foyons  retirez  de  toutes  folicitudes, 
&  de  toutes  les  affeûions  mauuaifes  de  no» 
ftre  chair. 

O  R  nous-nous  proftemerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes ,  le  priant  qu'il  luy  plaife  en  ciïa- 
ter'la  mémoire  ,  afin  que  nous  foyons  receus 
de  luy  :&  cependant  qu'il  nous  fortifie  &  ûn- 
£tifie  de  iour  en  iour  par  fon  fainfit  Efprit, 
iufques  à  ce  que  nous  foyons  pleinement  def- 
pouillez de  toutes  nos  imperfe(ftions&  vices. 
Et  pource  que  cela  ne  fcptut  faire  durant  ce- 
fte vie  mortelle,  qu'il  nous  fiippo ne-en  nos 
infirmitez,  iufques  à  ce  qu'il  les  ait  du  tout  a- 
boLes. Ainfi  nous  dirons  tous, Dieu  toutpoif- 
fant.Pere  celeAe,&c. 


5» 

SEPTIEME    SERMON     SVR    LE    se- 
cond  c  h  a  p  i  t  r  e. 

'  '$"'■■  Vdràllement auj^i  ^ueles  femmes i  dccoujlrejit enhahithon- 
Kejîeauec\ergongne  ^  modesîie,  nonpointentrejjcs,ou  enor,ouen 
ferles  iOU  en  yeflementfomptueux: 

io     Mdisenceluyqut  ejîconuendhïe  aux  femmes  demonflrdntes 
îd  CTdinte  de  Dieu  par  bonnes  œuures. 

.ii.>    Que  Id femme dpprene en fdeticeduec toute fiiettion. 


I  Oiis  auons  dit  ce  matin  que 
1  faincl  Paul  monflrant  lepri- 
'  uilege  que  Dieu  nous  a  don- 
j  né  de  v.enir  à  luy  ,  Si  de  le 
Ipouuoir  pruicement  inuo- 
I  quer.adiouile,  que  nous  de- 
'  uons  nous  prep<»rer  à  toute 
fMndeté.  Car  ce  n'eft  point  rai  l'on  que  nous 
apportions  deuant  Dieu  nos  ordures  :  il  faut 
donc  qi^  nous  mettions  peine  d'crtre  ûndi- 
fiez.Or  ceU ne gift  point  en  ceicmonies.com 
me  du  tempsdc  la  Loy.mais  en  etprit  &  véri- 
té. Et  comme  ci  defliis  il  a  commandé  aux 
hommesde  leuerles  mains  pures  &i'.i;ttesau 
ciel.aufd  ni.iintenant  il  dit  que  fi  les  femmes 
veulent  iouir  d'vn  tel  bien  &  lî  grand,  d'eftre 
réputées  Elles  de  Dieu  pour  pouuoir  venir  à 
luy  conune  à  leur  Pere,&  y  auoir  leur  refuge,. 
il  faut  qu'elles  s'accouftrent  modeliemét  en 
habit  couenable,&  non  point  eu  trcffes,  &  en 
ces  petites  curiofîtee  qu'ont  les  femmes  ,  ni 
aufsi  en  foroptuollté  d'orne  de  pierres  prc- 
cicufer,(car  fainei  Paul  a  mis  vne  cfpece.pour 
le  touc,en  nommant  les  perles)  brief  (dit-il) 
qu'elles monftrent  vn  accouihcment  conue- 
nable  à  des  femmes,  qui  font  profefsion  de 
crainte  de  Dieu  par  bonnes  ccuures  .  Nous 
voyons  doncquelle  elt  l'intention  de  laind 
Paul  en  ce  lieu.Maisilpourroit/l'mbler  qu'il 
t'amufe  àdes.cliofcs  trop  petites,  &  qui  ne 
valent  point  le  parler.Iailiàtit  des  vertus  plus 
grandes, &aufquelles il  deuoit  plus  inlîilcr. 
D'autre  part  on  pourroit  aui'ii  demander, 
pourquoy  il  parle  deraccouftrcmêt  des  ftm 
mes,pliiftoii  que  de  celuy  des  homme^.Or  no 
tons  qucfaind  Paula  voulu  ici  toucher  vn  vi- 
ce auquel  les  femmes  font  enclinesiie  natu- 
ie,&par  trop  addonnecs,c'eftafçauoir  ce  fui 
appétit  de  femonll:ier,&:  d'eftre  pompeufcs, 
afin  qu'on  les  regarde  de  loin:poiucc  que  les 
femmes  font  entachées  de  ce  vice-l.i,  S.  Paul 
notamment  en  parle  ici.  Ilift  vrayquc  li  vne 
fçmme  s'abftient  de  toute  parure  ,  &  qu'elle 
s'accouftrc  fi  modeiVeinét qu'il  feroitpoisiblc 
cela  ne  fera  pas  le  tout. Mais  auAi  fiiuÀ  Paul 
ncs'cftpas  làfimplenientarrtftércar  nous  ver 
lons'en  la  fin  qu'il  a  concliid  comme  les  fem- 
mes fe  doyuent  accouftret  eu  telle  forte  que 


elles  facét  profefsionde  crainte  de  Dieu  par 
bonnes  œuures.  Il  n'cft  point  donc  quelhoii 
tant  ieulement  des  robbes,audescottts,&  de 
tout  le  refte  ,inais  en  gênerai  de  toute  la  vie. 
Maintenant  donc  nous  voyons  enfommecc 
que  faintt  Paid  a  voulu  dire ,  c'eif  que  fi  les 
femmes  veulent  luuoquer  purement  Dieu,  il 
faut  qu'outre  le  nom  de  Clneltienti  qu'elles 
portcnt,auf>i  elles  ayent  l'effet, qu'elles  mon 
Ihent  par  boues  œuures  qu'elles  ont  t/lé  en- 
feignees  eiirtfchole  de  Dieu. Or  prenons  ce 
mot  -la  deuant  que  \enir  au  parcitulierrcar  en 
ce  faifant,  nous  ll-rons  tant  mieux  iiiforme^ 
de  l'intention  de  fainct  PanI ,  pour  recueillir 
aufsi  de  ce  pallage  l'inftruLlion  qui  y  eil  con-  . 
teiiue.  Tout  ainiî  donc  qu'il  a  requis  que  les 
Ironrmes  leualftiu  les  mains  pures, aiiAi  dit-il 
que  les  femmes  doyuent  faire  proitfjion  de 
foy  &:  de  crainte  de  Dieu,  voire  par  bonnes 
œuures. Or  quand  il  parle  de  donner  tefmoi- 
gnage  de  la  foy  ,  c'ell  fuyiiant  ce  que  nous  a- 
uons  déclaré  ce  matin, c'tit  afçauoir  que  nous 
ne  pouuons  pas  inuoqucr  D;cu,  que  nous  ne 
foyons  tondez  en  fa  parole,&  que  nous  n'ay- 
ons bonne  inftrutbion.  Oreft-il  ainiiqueles 
femmes  ont  befoin  d'auoir  leur  refuge  a  Dieu 
comme  les  hommes;  il  faut  donc  qu'elles  foy 
ent  inltruites  en  r£uangile.£t  de  faiiit.  Dieu 
n'a  point  fcparé  les  hommes  d'aiiec  les  fem- 
mes, quand  il  kur  a  donné  la  du^iine  de  d- 
lut  >  mais  il  a  voulu  que  ce  bien  Si  ce  thrtfor  Marc  if. 
tufi  commun  aux  vns  &  aux  autreS)Commc  auf  i^ . 
fifair.û  Pierre  dit,  Que  l'héritage  du  Royau  i.Vîer.i. 
me  des  citux  nous  eft  communiqué  àtous,&  -. 
que  Dieu  a  voulu  acco;np2giicr  les  hommes 
auec  les  femmes  en  ccft  endroit.  £t  aiiifi  no- 
tons bien  en  premier  lieu,  que  les  femmes  ne 
font  point  exemptes  d'cftie  eiiffignees  en  là 
parole  de  Dieu  ,  &  ceux  qui  Içs  en  on  t  voulu 
priucr.font  larrons, voire  I.icrileges.  Et  main 
tenant  puis  qu'ainii  eft  que  Dieu  appelle  Ic's 
femmes  pour  receuoir  doctrine  de  ia  bouche 
facrec,qu'elies  nefoyent  point  nonchal.iiites 
àcela^maisqUe,-.  çognoiflcnti^uisq  Dieu  kur 
fait  vn  tel  honneur,  queccft  bien'  raifi)ri  que 
elles  appliquent  leur  eftude  pour  y  profiter, 
voire  entant  qu'il  leur  fci'a  conuenable.  Or 
venons  .tu  fecond:e'cft  qu'elles  doyuent  taire 

confcf 


s  V  R    LA   I.    A 

confcf.ion  «le  leur  foy  par  bonnes  Ofiiurer. 
Qj^ind  l'aintt  P.uil  pailc  aînfî,  il  enrend  qu'il 
Bdatritpaî  de  poiccrce  titre, mais  que  la  vie 
doit  rendre  telinoynage  lî  nous  fommes  fi- 
dèles ou  non. Il  raut  donc  pour  approuuer  no 
lire  foy.quc  nous  ayons  les  bônes  ccunves,  & 
que  cela  ratifie  que  nous  ne  babillôs  point  en 
vain  de  la  paroJe  de  Dieu  ,  â  nou;  ne  fail'ons 
pas  ierablant  d'y  croire, mais  que  nous  l'auôs 
receuc,&  qu'elle  ha  racine  viue  en  nous. Il  eft 
\ray  que  ceci  eft  commun  aux  hommes  com- 
Bie  aux  leHimesrinais  notons  que  quand  fauitt 
Paul  parle  ici  des  femmes ,  il  oblige  encore 
plus  les  hommes, A  faire  vne  telle  déclaration 
île  leur  toy.Cars'il  y  auoit  excufe.il  eftbien 
certain  qu'elle  appartiér  pluftoft  aux  femmes 
■qu'aux  hommes  ,  à  caufe  de  leur  infirmité.  Et 
bien  ,  il  faut  lupporter  ces  poures  créatures 
fragiles.  Mais  s'il  eftainfi  que  les  femmes,  fi 
elles  ne  monltrent  par  effeA  qu'elles  font  en- 
feigncesdeuement  en  la  parole  de  Dieu  ,  & 
quels  bonne  vie  n'en  relpjnde,  n'ont  point 
d'excufe,  &  que  e  fanirt  £fpnt  les  condam- 
reici.que  lera-cc  donc  des  liommesîne  men- 
tent-iis  pas  d'ellre  condamntzau  double?£t 
ainfi  retenons  bien  que  nous  iommes  fauffiii- 
les  en  prétendant  le  nom  de  I>ieu,  finon  que 
par  bônes  œuures  nous  declanos  noftre  foy, 
&  que  ce  n'eft  point  en  vain  que  nous  auons 
receu  l'Euangile.  Et  maintenant  notons  bien 
«n  quel  temps  nous  iommes.  Voila  les  Papi- 
lles qui  font  punis  de  Dieu  ,  d'autant  qu'ils  fe 
-glorifijBtd'eftre  Chreftieiiv ,  Se  foat  néant- 
moins  diflolus  entoure  leur  vi^:.  Or  il  ne  fe 
faut  point  e^bahi^  s'il  y  a  vue  telle  confuiion 
&  il  énorme  en  ces  poures  ignorans  qui  ne  fça 
uentquec'eft  de  bonne  doanne&pure:  tant 
y  a  neantmoins  qu'il  leur  couftcra  bien  cher 
^'auoir  amfi  abufe  du  nom  de  Dieu.  Mais  qtie 
■fera-ce  de  nous?  car  nou-  prétend  jn;  d'clhe 
relonncz  :  Se  ce  imt  trottera  en  nollre  boii- 
che.Et  à  la  venté  Dieu  nou;  a  fait  vne  grâce 
•trop  ineftimable, quand  illuy  a  pieu  nous  pre 
iler  la  vraye  doctrine  de  fon  Euangile  ,  nous 
retirant  des  corruptions  &  vilenies  ou  nous 
auons  vei'cu. Noftre  vie  dôc  doit  luire  comme 
vne  lampe.  Mais  fi  nous  auons  rEiiang:le  en 
-roftre  bouche  ,  &  cependant  fommes  du  tout 
poilus  en  noftre  vie,  5f  menons  vn  tr.undcf- 
iordé  &diflolu  ,  ie  vous  prie  ,  n'y  a-il  point 
vne  horrible  vengeance  appreftce  fur  nous,  à 
caufe  que  nous  auons  ainfi  fa):1fié  ce  titre  fa- 
cré  du  nom  de  Dieu  ?  Et  pourtant  retenons 
bien  de  ce  paflage  ce  qu£  la  côfefsion  de  foy 
«mporte  ,  non  point  feulement  que  la  langue 
parle.mais  que  toute  h  vie  re)ponde,fiiyuant 
XiHn  TO.  ^^  'î"^  "^'^  fainû  Paul,  de  faire  profchi'on  de 
'  Chreftienté  par  bonnes  œuures. Or  s'il  eft  ain 

-,'■,,'  fi  qu'il  nous  faille  faire  confcfsion  de  foy, où 
Cari. If.       '        -n.  1  1    >  -  ' 

„  nousmoltronsqu  il  nyancvertu  ne  vigueur 

du  fiiinûEfprit  en  nouî,  concluons  que  ceux 

qui  renoncent  Dieu  parkursoeuures.parce- 

ù  fe  dedatenc  allez  infidèles  deuant  les  hom 


T  I  M  O  T  H-  95 

mes. Et  ne  faut  point  plaider  là  deflus, comme 
nous  en  voyons  beaucoup  qui  diront ,  Ho  de 
nioy  .i'enten  deftre  aùAi  bon  Chrtftien  â  nul 
autre  .  Qu'on  protiuife  leur  vie,  &  elle  les  de  _..        ^ 
inentira;car  (côme  dit  S.  Paul)  ils  renoncent  '"^•'•'** 
Dieu  par  leurs  niauuaifes  ccuuies  :  ainfi  Dieu 
les  delauoue  de  fjn  cofté  ,  vonc  quelque  ba- 
bil qu'il  y  ait  au  bout  de  la  langue.  Voiia  pour 
vn  lîcm.Ormainteniit  S. Paul  avant  parlé  d'r 
ne  telle  déclaration  q  doyutn  t  taire  les  fem- 
mes de  leur  foy, il  nunftre  que  c'eft  b:en  rai- 
fon  qu'elles  aycntvn  habit  côuenable.î  cela: 
corne  s'il  difoit.Si  vne  femme  s'accouftre  co- 
rne vne  paillarde, qu'elle  foit  impudique  &  ea 
fcscotenances,&en  fesfobes,&  en  fi  parure, 
n'y  a-il  point  là  vne  repugnance.'dira-on  que 
cela  conuiene  à  vne  femme  qui  fait  telle  pro- 
fefsion?  Nenni.  Ainfi  dpnc.pui.s  que  les  fem- 
mes doyuét  rendre  tefinoignagede  leur  foy 
par  bonnes  œuurcs,il  s'enfuit  qu'elles  doyuét 
eftre  auf -i  accouftiees  fobrcmcnt  &  auec  mo- 
deftie.  Mais  rcuenons  maintenant  àce  oui  .1 
efté  touche, c'cft  afçauoir  que  S.  Paul  ne  s''Ad- 
drefle  poinr  du  tout  aux  accouftrcnjens,c5me 
fic'eftoit  là  tonte  la  fommc  qu'il  veutcôman-. 
der  aux  femmes  ,  &  qu'il  n'y  euft  j;oint  d'au- 
tres vertus  requife-rrinais  il  a  voulu  ici  toucher 
vn  vice  aiiquei(c5me auf  i  nous  auous  decia- 
re)clles  font  trop  enclmcs.c'tft  afçauoir  à  «e 
lie curiofité  de  feparcr,afind'eftre  regardées 
de  loin. Il  cft  certain  que  i  nous  voulos  impo 
fer  certaine  loy  furies  accouitremés  des  t'cm 
mes,à  grand' peine  cela  fe  pourra-il  faire  Jl 
eft  vray  qii'aucunefois  les  gonuerneurs  qui  a— 
uoyent  la  police  en  main ,  ont  efté  contraints 
d'y  mettre  quelque  bride. Car  cefte  intempé- 
rance a  eftede  tout  téps,  que  les  fcnwies  ont 
eu  ccft  appétit  fi  briiflant;  qu'il  a  falu  qu'auec 
chaftimeiis  &  punitiçs  en  y  poiinieufl-&  fans 
cela  on  n'en  pouuoitvenir  à  boiu.  Enouoy 
nous  voyons  q  cefte  cupidité  qui  eft  aux  fetn 
mes  de  fe  paier,eit  comme  vnebcfte  enragée, 
d'autant  qu'il  la  faut  ainfi  tenir  en  cordeaux 
&  en  chaînes. Voila  dôc  les  Magiihats  Payés     " 
&  incrédules  qui  y  ont  biê  mis  certaines  loiïi 
&  ceux  qui  auiourd'huy  fouiFrent  les  ibflv- 
ptuofitcz  fi  grandes  &eTccelsiues  ,  dtarovent 
auoir  honte  qiiand  ils  donnent  pkis  de  licen- 
ce que  n'ont  tait  les  Payens.  Mais  de  nollre 
collé  nous  ne  pouuons  pas  mettre  vne  cer- 
taine loy,pour  dirciCeia  e/1  défendu, cela  eft 
permis:  voire  traittant  par  le  menu  de  cha- 
cune chofe.  On  en  pourra  bien  en  gênerai  ti- 
rer vne  doânne  infallible:inais  fi  on  veut  de« 
ch'.tfrc:  tout  ce  menu  bagage  des  accouftre— 
mcnsdcs  femmes,  que  fcroit-ce*  lamais  on 
n'en  viendroit  à  bout,  &:  il  faudroit  venir  iuf- 
ques  à  vne  efplingue.  Là  donc  il  nous  faut 
eftre  i'obres,  regardans  ce  que  Dieu  a  défen- 
du,&  qu'il  s'eft  contente  de  reprouuer  les  vi— 
ces  qui  font  en  C(ô  endroit.  Tant  y  a(coii*- 
mc  l'ay  dit)  que  nous  pouuons  bien  lecueiUrr 
vflc  fomme  de  ce  qui  nous  eftHionftrc  en  fa  pa 

luii. 


400 


DIXSEPTIEME    SERMON 


rôle.  Il  eft  dit  ici  que  les  femmes  foyent  ac- 
couftreejdecentement.  Saind  Paul  metvn 
mot  qui  emporte  autant  qu'ornement  :  mais 
'c'cft  pour  mieuï  taxer  celle  cupidité  folle  & 
peruerfe  dont  les  femmes  font  ainfi  enflam- 
bees  :  car  il  leur  lemble  qu'elles  ae  feront 
point  bien  parées,  finon  qu'il  y  ait  de  la  fu- 
pcrfluité.  QjiJnd  donc  les  femmes  fe  vou- 
drôt  orner  à  leur  phantafie.il  faut  q-u'tlles  ex 
cèdent  mefui  e,  il  faut  qu'il  y  ait  &  de  la  pom 
pe,&  de  1«  vanité ,  &  de  rambition,&  de  vai- 
ne gloire  qui  les  trïlporte.  S.iind  Paul  donc 
mouftre  à  l'oppolite,  que  tout  ce  que  les  fem 
mes  prendront  d'ornement  fiiperflii ,  ce  font 
autant  de  defguifemens  que  Dieu  condam- 
ne ,  & lefquels  aufsi  les  defguifent  comme  ii 
elle;  eftoyent  m.iiquees,  comme  fi  elles  pre- 
noyét  vn  habit  d'homme.  Voila  donc  ce  que 
faindPaula  entendu  parlant  decellaccou- 
ftrcmcnt  orné  qui  doit  eftreaui  fcmmes,c5- 
me  s'il  difoit ,  le  fçay  comme  les  femmes ,  li 
elles  croyent  leur  phantafie ,  voudront  e- 
ftre  ornées  de  fuperfiuité:mais  cela  eft  com- 
me ordure  deuant  Dieu.  Il  faut  donc  qu'el- 
les s'accouftren.t  &  foyent  parées  d'vne  au- 
tre façon.EtcômentfUvfe  ici  de  deux  mots, 
d'ont  l'vn  lignifie  proprement  honte  ou  ver 
gongne,&  l'autre  lignifie  attrempance  ou  fo- 
brieté  &  modeftie.Or  il  nous  faut  bien  noter 
que  fain£l  Paul  couche  ici  au  doigt  les  deux 
tices  dont  les  femmes  font  entachées,  &  qui 
font  comme  les  deux  fourcesde  toutes  les  lu 
perfluttei  qui  ont  régné  de  tout  téps  au  mon 
de,&  régnent  cncores  auiourd'huy.  Q_im  cit- 
ce  qui  elineut  les  femmes  d'appeter  d'cftre 
aHi  parées,  Se  quetout  reluife  àl'entourd'el 
Jes?ll  y  a  deux  caufes.  l'vne.c'eft  l'ambition, 
c'eft  à  dire  la  vaine  gloire  &  rorgueil:&  l'au 
tre.c'eft  la  vanité  ,  qu'elles  aiment  qu'on  les 
regarde,  qu'elles  veulent  touiiours  élire  bel- 
les.Or  cela  eft  ibuucnt  conioint  aiiecvn  plus 
grand  mahcar  elles  ne  penfcnt  point  de  plai 
le  tant  feulement  à  leurs  maris,  comme  elles 
prétendent  celle  couuerture:  mais  elles  veu- 
lent aufsi  auoir  ces  amorfes  pour  attirer  à  el 
les, comme  on  en  voit  beaucoup.  Voila  donc 
les  deux  vices  qui  font  ici  taxez  parf.iinil 
PauI.Et  en  cela  il  nous  baille  vh  moyen  alFez 
bon  Se  propre  poui  corriger  tous  les  excès, 
ti  toutes  les  fuperfluitcz  qui  font  aux  accou- 
fliemens des  femmes.  Commençons  parce 
mot  dchonteoude  vergongne.  SaindPaul 
entend  que  les  femmes  ne  domét  point  eftre 
ijfFrontees, qu'elles  ne  doiuent  point  eftre  hô 
tnaces,&  en  l'omine  qu'elles  ne  douicnt  point 
eftre  impudiques ,  mais  qu'elles  doiuent  co- 
gnoiftre  la  vertu  qui  leur  conuient  le  mieux, 
c'eftd'eftre  modelles,*:  ne  fe  point  par  trop 
inonftrer,ne  ietter  i  l'abandon.  Qjiand  cela 
feroit  aux  femmes  ,  il  eft  certain  que  t.int  de 
menus  fatras  qu'on  y  voit ,  tant  de  fiiificlu- 
ctes  feroyent  mifcs  bas:  li  ne  faudroit  point 
entrer  en  longue  difpute  pour  dirc,£ft-il  li- 


cite d'auoir  des  aureillettes,  d'aùoir  de  telle» 
coiffes,  d'auoir  des  trèfles  pour  kschcueux» 
d'auoir  des  doreures,  ceci  &  cela  ?  Et  pour- 
quoy  ?  Car  vne  femme  conlidereroit ,  Il  faut 
que  ie  foy  e  modefte  pour  obéir  à  Dieu, il  faut 
quei'aye  vergongne  :  car  voila  le  vray  orne- 
ment d'vne  temme  qui  craint  Dieu.  Si  donc 
les  femmes  auoyent  celle  confideration-!a, 
il  eft  certain  que  toute  cefte  fuperfluité  s'en 
iroit  efcouler ,  comme  nous  auons  dit .  Mais 
quoyîAuiourd'huy  les  femmes  font  plus  dtf- 
bordees  qu'elles  ne  furent  iaraais  :  fur  tout  /l 
on  va  à  ces  grans  cours,  à  grand'  peine  pour- 
ra-on là  dilcerner  entre  les  hommes  <5c  les 
femmes.  Il  eft  vray  que  les  honmies  abufe- 
ronc  de  cela  aufsi  bien  de  leur  part .  car  ils 
prendront  les  habits  des  femmes.  Se  les  fem- 
mes ceux  des  hommes, tellement  que  voila  v- 
ne  confulîon  horrible,  comme  li  le  monde  a- 
uoit  conlpiré  pour  renuerfer  l'oidrc  de  na- 
ture.&  puis  il  y  a  aufsi  ce  beau  lullre  qu'elles 
appctent.Et  pourquoyîll  femble  que  ce  foy- 
ent des  enfeignes.On  ne  mettra  point  vne  en- 
feigne  en  vne  tauerne ,  linon  que  la  porte  foit 
ouuerte  à  tous  venans.  (5r  eft -il  ainii  que  les 
Kmmes  qui  fe  parent  ainli  pour  attirer  les 
yeux  &  le  regard  des  hommes ,  il  feinblc  que 
elles  tendent  leurs  filets .  C'tft  donc  autant 
comme  fi  elles  tenoyent  tauerne  publique  de 
leurscorps.il  eft  vray  que  toutes  ne  le  feront 
pas:  mais  la  chofe  tend  à  cefte  fin-la,  qu'il  eft 
bien  difficile  que  telles  pompes  &  telles  bra- 
uetez  n'emportent  toufiours  quelque  mac- 
qucrelage,  combien  que  la  paillardife  ne  fait 
pas  touliours  coiiiointe  auec.  Amfi  donc  no- 
tons bien  quand  faind  Paul  parle  de  cefte  ver 
gongne&modeltie,  qu'en  corrigeant  vn  vi- 
ce il  ofte  toutes  ces  fupcrfluitez  dont  nous 
voyons  que  les  femmes  font  fi  bouillantes, 
qu'il  n'y  a  iamais  fin  en  leur  cas  ,  qull  n'eft  ia 
quellion  ne  btfoin  d'y  aller  par  le  menu. Or  fi 
cefte  alFedion  &:  cupidité  peruerfe  eltoit  bien 
purgée, il  eft  certain  que  les  femmes  s',iccou- 
Ihetoycnt  modcltement,  &  qu'on  ne  verroit 
plus  ces  defguilcmens.  Voila  vne  ttmme  qui 
fera  comme  vne  idole  peinte,il  y  aura  auiour- 
d'huy des  fards,  il  y  aura  des  doreures  ,  des 
faufles  perruques, &  cliofes  femblables:  après 
nous  voyons  vne  telle  pompe,  que  quand  vne 
Diane  fort  ainfi,  il  femble  propitnunt  qu'el- 
le vueilledcfpiter  route  honte,  toute  mode^ 
ftie,  toute  hôncfttté  comme  vne  putain, pour 
dire.lle  viendray  ici  comme  vne  chienne  chau 
de,ic  feray  effrontée,  pour  monftrei  ma  tur- 
pitude à  tout  le  monde:nous  ne  verrions  plus 
d'-ic,  toutes  ce.  chofcs-la.  Si  les  femmes  te- 
noyent cefte  règle  de  modeftie ,  elles  ne  fe- 
royent point  ainfi  doraillees,  elles  n'.iuroyét 
point  les  teftes  defcouuertes:biief,  elles  n'au 
royent  pas  tant  de  fomptuofitez  qui  font 
pour  batailler  contre  la  modeftie  &  hônefte- 
té  que  fainû  Paul  loue  ici, fi  tour  cela(commc 
i'ay  dit^  eftoit  rettanclié.  Mais  quoy  l  Nous 

voyons 


SYR  LÀ    I.    A 

v*v««$ebmme  les  femmes,  quelque  profef- 
(ion  de  Chreftienté  qu'il  y  ait, n'ont  point  en 
cor^  apprins  cefte  leçon. Et  ne  faut  point  di 
re,  Ce  font  chofes  indifférentes:  (comme  on 
a  cefte  fubtilité  pour  fe  couurir  )  ne  font-ce 
pas  chofes  que  Dieualaiflees  en  la  liberté 
des  hommes.que  de  fe  parei?£t  faut-il  qu'on 
cfpluche  de  tant  pres.  qu'on  foit  fi  fcrupu- 
leux  pourceci.qa'on  vienc  iufques  à  des  man 
chons.àdes  collets,  pour  fçauoir  quelles  cho 
Ces  font  les  plus  desbordees?  Et  tout  cela  ne 
font-ce  pas  parement  de  corps?  Voire?  «om- 
me  s'il  n'y  auoit  pas  liberté  ,  moyennant  que 
nous  eufsions  attrempance. Comme  quand  vn 
Eomne  fçaura  dilpofcr  de  fon  bicn,&  qu'il  le 
gouuernera  en  forte  qu'il  en  viue  fans  ledif- 
liper:  &  bten.il  aura  liberté,  fon  bien  luy  fera 
mis  entre  les  mains.  Mais  vn  enfant  qui  ne 
•fçait  q  c'eft  de  manier  argét,  faudra-il  qu'on 
luy  baille  tout  pour  en  faire  à  fon  plaifirfNô: 
il  fera  gardé  iufques  à  ce  qu'il  foit  en  aage. 
Et  aufsi  vn  homme  infenfé  aura-il  le  manie- 
ment de  fes  denierSjCombien  qu'il  foit  riche? 
Le  laiflera-on  iouir  de  fon  bien  à  fa  phanta- 
lîe?  Neini.  Apprenons  donc  puis  que  Dieu 
nous  a  fait  la  grâce  de  nousdôner  liberté  d'v 
fer  de  ces  cholc's-ci,c'eftàdiredes  accouftre 
mens,  comme  du  boire  &  du  manger  :  appre- 
nons, di-ie,  d'auoir  celte  inoJeltie  Air  nous, 
qui  nous  férue  côme  de  bride ,  &  que  ce  nous 
foit  autant  comme  fi  nous  auiôs  vn  curateur. 
Voila  ce  que  nous  auonsà  retenir  en  fonime. 
Il  y  a  puis  après  l'ambition  &  l'orgueil.  Car 
les  femmes  fepourrot  accouftrer  comme  des 
paillardes, &  toutcîfois  il  n'y  aura  point  trop 
grande  fomptuofité.  Il  fe  pourra  bien  faire 
qu'vne  femme  n'aura  point  robe  de  prix, elle 
n'aura  point  aufsi  ni  or  ni  pierres  precieufes: 
mais  cependant  elle  ne  lailfeia  pas  d'tftre  ex 
cefsiue  &  hipcrflue.  Et  pourquoy?  D'autant 
Qu'elle  aura  vne  façon  impudique  ,  vileine  & 
auâtageufc.  Voila  donc  le  premier  vice.  Mais 
le  fécond  eft.que  les  femmes  fe  pourront  ac- 
couftrer allez  modefttment  ,  qu'on  n'y  ver- 
ra pas  cefte  pompe  effrontée  dont  l'ay  fait 
mcn  tion  ,  mais  on  y  verra  vne  braue te  &  vne 
pompe  pour  dire  ,  le  veux  ]u'on  cognoifle 
que  l'ay  dcquoy.tellement  qu'vne  femme  fe 
pourra  accouftrer  fimplcment ,  qu'il  n'y  aura 
point  tant  de  mignardife,  ne  toutes  ces  peti- 
tes finfreluches  que  nous  auons  dites ,  lî  ne 
laiflera-elle  pas  toutesfoisd'eftre  condance 
deuant  Dieu. Et  pourquoy?Car  fi  cefte  vani- 
té dont  nous  auons  fait  mention  ,  eft  vn  vice 
danable,&  que  fera-ce  de  l'orgueiPque  fcra- 
cc  de  celte  hautefle,  quand  les  femmes  fe  veu 
lent  faire  valoir?  Ainfi  donc  voici  le  fécond 
où  il  no*  faut  infifter:  car  ce  n'eft  point  allez 
qu'vne  femme  n'ait  point  d'accoiiftremens 
trop  defreiglcz,&  que  Dieu  necôdamne  pas, 
mais  il  faut  auf>i  qu'il  y  ait  vne  attrempance 
M  vne  modeftie  pour  corriger  cefte  ambition 
il  haurclTe  &  pompe.  Oi  (  comme  i'ay  deiîa 


T  I  M  O  T  H.  ïzi 

dit)quând  nous  voudrlont  iKhiffier  de  près 
toutes  ces  fanfares  depuis  les  pantotiflcs  iuf- 
ques au  chaperon  ,  cela  ne  fe  pourroit  faire: 
mais  qu'vne  chacune  feiîime  regarde  i  foy,- 
&  qu'elle  penlé,Et  bien.lî  ie  n'ay  point  cefte 
folie  de  me  vouloir  parer  pour  eftre  veuc, 
tant  y  a  que  ie  pourroye  eftre  aufsi  entachée 
d'orgueil,  que  ie  demanderoye  d'avoir  vn  ac 
couftrement  plus  braue  que  les  autres,&plus 
fomptueux,afin  qu'on  me  cognoifle. Qu'vne  f 

chacune  femme  donc  regarde  bicn-à  iby  ,  Bc 
face  examen  de  ces  deux  vicer  ;  car  le  fainéb- 
Efprit  eft  aflez  fage  pour  nous  reformée.  Oc 
nous  voyons  qu'il  nons  a  ramener  à  ces  deuK 
fources-la.Et  quand  nous  trouueriôsiuoyen 
deguarir  telles  maladies ,  il  eft  certain  qa'o» 
ne  vcrroit  plus  les  pompes  ainfi  excefsiues.ii 
n'y  auroit  plus  m  tel  luftre  entre  nous  com- 
me il  eft.  Voila  donc  en  fommc  ce  que  nou« 
auons  à  noter.Que  fi  ceci  eft  conunandéaur 
fcnimies,par  plus  forte  raifon  l'eft-il  aux  ho- 
mes: car  il  les  vices  que  fainft  Paul  condam- 
ne ,  eftoyent  à  fupporter.pluftoftonexcu- 
fera  les  femmes  que  les  hommes.Et  pourtant 
nous  voyons  comme  Dieufqui  eft  iuge  com- 
petenc)tn  parle.  Que  les  hommes  donc  ap- 
prenent  des'accouftrer  &  fobrement  &mo-. 
deftemét,en  forte  que  l'orgueil  &  vanité  foit 
retranchée  en  eux.  L"orgueil,di-ie,que  nou» 
n'appetions  point  par  nos  beaux  accouftre- 
mensdenous  prifer  &  de  nous  faire  valoir 
par  dcflus  les  autres  ,  &  que  nous  n'ayons 
point  aufsi  des  mignardifes  braues  pour  no* 
faire  reluire  ,  comme  fi  nous  tftendions  not 
ailes  ainfi  que  des  .paorts  pour  nous  y  mirer: 
que  ces  deux  vices-la  foyent  corriges  en 
nous.  Car  il  n'y  a  rien  qui  defplaife  plus  i 
Dieu  que  l'orgueil  &  cefte  hautefle  &  ambi- 
tion, pour  dire,  lemonftreray  qui  ie  fuis,& 
quand  on  me  verra, on  fçaura  queie  fuisd'e- 
liât  &  de  qualité.  Or  c'eftvn  vice  quin'eft 
point  petit  que  celuy-la:  car  il  ne  fe  peut  fai 
re  quand  nous  fommes  ainfi  enfler  &  arro- 
gans,  que  cefte  curiofité  folle  ne  procède  de 
cefte  fource.  Et  ainfi  ncdifons  poifit  queee 
foyent-ci  des  péchez  petis  &  légers,  mais 
pcfons-les  àla  balance  de  Dieu,&  alors  nous 
verrons  ce  que  la  chofe  v3ut,&  ce  qu'elle  ei« 
porte.  Et  de  fait  nous  voyons  quand  Dieu 
redargue  fi  alpremét  la  vanité  qui  eftoit  aux 
femmes  du  temps  du  Prophète  Ifaie,  qu'il  les  jr,  •  jj-j 
menace  d'vne^unition  horrible:  il  ne  le  fait  ' 

point  (ans  caufe:&  mefraes  le  Prophète  com 
bien  qu'il  n'euft  pas  efté  parmi  les  femmes  en 
leurs  cabinets  pour  s'enquérir  de  tout  ce  bi- 
gage-la  ,  fi  eft-ce  qu'il  déchiffre  par  le  menu 
tous  ces  affiquets,  qu'il  vfe  quafî  d'vne  ving- 
taine de  mots.pour  déclarer  toutes  ces  fuper 
fluitez  ^ui  eftoyent  aux  fcmmes.Et  puis  il  ad 
ioufte ,  Que  Dieu  leur  rafera  leur  cheuelu- 
re,&  qu'elles  s'en  iront  toutes  chauues,  qu'il 
leur  coupera  leur  accouftremeat  iufques  aux 
feSes,  ^u'on  cognoiftia  toute  leur  vilenie» 

n.iu. 


lOl 


DIXSEPTIEME    SERMON 


qu'il  faudra  qu'on'les  ait  en  mocquerie  &  en  Dieu.  Et  Phônefteté  de  quoy  /ert-elle?  Sans 

opprobre. Qliand  nous  voyons  que  Dieu  fait  le  péché  de  Phôrae  nous  n'aurions  point  hon 

des  menaces  li  dures,&  qu'il  fe  mocque  quâd  te  d'eftre  nudr.  Q^im  eft  caufe  que  nous  por- 

les  femmes  foHt  ainfi  parées  ,  qu'elles  cm-  tons  noftre  vergongneauec  nous ,  linon  que 

ploytnt  quali  tout  leur  temps  k  s'accouilrer  Dieu  nous  a  voulu  imprimer  vne  marque.cô- 

ainii  fongneufemét.que  cela  eft  noté  de  luy,  me  ilonaiioit  fieftri  vn  malfaiteur, pour  dire, 

qu'il  eft  comme  enregiftré en  fon  bureau,  Iça  On  cognoiftta-^on  maléfice  en  tan  front? 

chons  quand  telles  fuperfluitez  régneront  en  Ainii  noftre  Seigneur  a  imprimé  au  corps  des 

tre  nous ,  que  fi  nous  ne  les  voulons  corriger  hommes  &  des  femmes,  vne  honte  &  vne  tur 

de  noftre  bô  gré,  il  faudra  que  Dieu  vfed'vn  pitude  qui  nous  fait  cacher.  Or  maintenant 

remède  violent.  Ainlî  donc  notons  que  te  quand  les  hommes  &  les  femmes  fe  voudrôc 

n'eft  point  fans  caufe  que  faind  Paul  infiite  ainfi  parer  en  fuperfiuité  &  excès ,  &  qu'ils 

ci  defllis,  voire  attendu  que  ce  vice  a  efté  cô  eftendront  leurs  ailes  comme  des  paons ,  ie 

munde  tout  temps:  &  puis  qu'outre  cela  il  vous  prie,  ne  bataillent -ils  point  contre  l'or 

procède  de  deux  tant  mauuaifes  fources  qui  drc  de  nature?  ne  veulent-ils  point  defpiter 

defplaifent  fur  tout  à  Dieu,afçauoir  de  cefte  Dieu,&  monftrer  qu^ils  n'ont  nulle  honte  de 

vanité  ,  quand  nous  fommes  enyurez  en  nos  leurpeché?  Voila  donc  à  quoy  nous  deuonr 

folies:  &  puis  il  y  a  l'orgueil  quant  &  quant,  regarder.  Et  cependant  notons  ce  qui  eâ  e- 

que  nous  voulons  eftre  parez  afin  qu'on  nous  fcrit  en  faind  Pierre  ,  c'eft  afçauoir  que  no- 

regarde,&  qu'on  nous  prife.Puis  qu'ainlî  eft,  ftre  ornement  eft  intérieur.  Car  li  nous  pen- 

inaintenant  nous  voyons  quelle  inftruûion  fionsànous  orner  deuant  Dieu  &  deuaut  fes 

nous  auons  à  recueillir  de  ce  pailage  ,  ledi  &  Anges  ,  nous  n'aurions  pas  fi  grand ioilir  de 

hommes  &  femmes. Q_ue  les  femmes  cognoif  chercher  des  paremens  pour  lecorps.  Celuy 

fent, Puis  que  le. famtt  Efprit  s'addrefle  ainfi  qui  fe  foucied'^ftre  tant  bien  accouftré  ic 

à  nous,  Sinon  feulement  en  ce  paflàge  ,  mais  bien  paré  ,  c'eftlîgnequ'ilafonamc  roiiil- 

,        aufsi  en  piufieurs  autres  de  l'£fciiture(com-  Ice.pleined'orduie,  &  qu'il  ne  fe  fouciegue 

*•    "'■'■  me  au  troifieme  de  la  première  epiitre  de  res  delà  nettoyer, ne  de  l'entretenir. Si  donc 

'■  fainû  Pierre  ,  au  paflaged'Ifaie  que  nius  a-  nous  voulons  eftre  ho  incites  eii  nos  accou- 

-V'''3''5'  uons  allégué  ,  &  beaucoup  d'autres  )  il  faut  ftremens ,  que  faut-il  faire.'   Noton  bien  ce 

que  nous  cognoifsions  pourquoy  c'eft  que  que  dit  fainù  Pierre  où  il  nous  morft.e  corn  i.Tir.f^ 

Pieu  nous  folicite  &  nous  exhorte  à  telle  ment  c'eft  que  D:eu  veut  que  nous  fuyons  f,e"8. 

inodeftie&  fobneté:  c'eft  d'autant  que  nous  parez  deuant  luy.  Et  deqiioyfd'humilité.d'at 

fommes  par  trop  fuperflues  en  nos  accouftre  trempance  ,de  fobricté  ,de  modeftic  ,de  pa- 

mens,  &  qu'il  eft  bien  difficile  de  corriger  ce  tience  ,  &  toutes  chofcs  fcinblables.  Et  mcf- 

■     mal-ci. Or  il  faut  que  nous  cogno.iflàns  la  ma  mesquand  nous  aurons  efté  dcfpouillcz  de 

ladie  ,  venions   pour  chercher  la  médecine,  nos  vices  &  de  nos  cupditez  mtfchantcs.voi 

Quand  donc  les  femmes  apperceurot  3c  ceft  la  le  lainft  Efprit  qui  règne  en  no':  &  ce  font 

orgueil,  Si  cefte  vanité ,  qu'elles  bataillent  à  les  ornemés  dont  il  eft  tant  f juué t  parlé,  que 


I.  P/r.J. 

4. 


quelque  vergongne  &  honnefteté, qu'elles  fe  dons  de  fon  S.Efprit:c'cft  là|oii  il  nous  faloit 

tieiient  en  bride  ,  qu'elles  n'ap,petënt  point  trauailler.  Péfons-y  donc,&  alors  il  ne  nous 

d'eftre  veues ,  ned'auoirvn  grand  luftre  :  Si  fera  point  difficile  de  nous  reftraindicde  tou 

puisqu'il  y  ait  aulsil'attrempance,c'eft  .î  di-  testes  façons  excefwuesefquclles  les  mon- 

requ'elles  foyent  humbles,  pour  ne  s'addon  dains  font, par  trop  addonncz.d'aïuant qu'ils 

jier  point  à  cefte  hautefle  &  à  cefte  ambition  n'ont  que  faire.  Notons  bien  donc  quêtons 

Ja  qui  eft  contraire  à  l'attrempance  &  fobrie  ceux  &  celles  qui  ne  penfent  qu'.\  fe  parer, 

4é  dont  parle  famft  Paul.    Q.ue  les  hommes  n'ont  nul  foin  de  leurs  âmes ,  &  qu'il  ne  Icar 

aufsi  de  leur  part  cognoiflent  pourquoy  les  chaut  de  s'accoulher  deuant  Dieu,&  en  leurs 

«ccouftremens  font  faits, afçauoir  pour  dcu;c  amcs.  Or  c'cftoit  11  (  comme  l'ay  dir  )  qu'il 

râlions. Car  il  y  a  l'hôntfteté  3c  la  necefsité:  nous  faloit  eftrr  attcntifs:5:  nous  voyons  ce 

ia  necefsité  clt  de  nous  garder  du  froid  Se  du  qui  eft  dit  en  l'Etciiture.quc  noftre  Seit;neuT 

xhaut:  l'honneûcté,  c'eft  pour  nour  couurir,  ne  nous  a  pas  laiflé  defnucz.   Car  non  leule- 

voire  en  telle  forte  que  la  cQUuerturefoit  de  ment  il  nous  a  promis  de  nous  reueftirdes 

tente  &conuen.ible.  Or  touchant  11  nccefsi-  grâces  de  Ion  faind  Eiprit,nuis  il  nauiadon 

lé, on  pourra  bien  tenir  reigle,  que  l'homme  ué  Icfus  Chrift  pour  noftre  parement,  du- 

voyant  côme  le  boire  Se  le  manger  font  pour  quel  nous  dcuons  cftre  reuellus  Q^anddonc  Rom. 13, 

tirer  nourriture  &fiibft3nce,  qu'aufsi  les  ac-  nous  ferons  la  arrefteZinouspalRroiisaifec-  ,^^_ 

couftremés  font  pour  ne  le  point  ie^ter  là  c5  ment  par  ce  monde  fans  nous  ciuul  ippercn 

me  àl'abandon  pour  endurer  froid  &  chaud,  hcaiicoupdt  fuperfluitez.  Et  au  relie  (com- 

Mais  quit  à  l'iiônefteté  on  y  palle  mefure.en  me  l'ay  délia  touche)  quand  ces  deux  inauuai 

forte  qu'il  Itnible  que  dq"  vueilliôs  defpiter  (es  racines  ferout  oftees  en  nous.il  ne  faudra 

point 


s  V  R     LA     I.    A 

Joint  c^u'il  y  ait  d'excès  ne  de  fomptuolué,il 
nous  fuffira  d'cftre  reueftus  des  dons  &  gla- 
ces de  rEfprit  de  Dieu  &  de  noftre  Seigneur 
lefus  Cliriil.qui  eft  noftfe  vray  ornement, 
«omnie  il  a  cite  dit  .  Apres  que  fainft  Paul  a 
parlé  de  l'accoiilirement  des  feraraes,il  adiou 
ûe,Qu^clles affrencnt  en  fiUnce  &•  en  rcfoi, 
auec  toute  fiutttion  .Or  ceci  notamment  elt 
dit,  pource  qu'il  y  a  beaucoup  de  femmes  qui 
VondroyeRt  eftre  plus  fagcs  ,  &  quiauroycnt 
plus  grand  appccu  beaucoup  de  le  taux  va- 
loir que  non  pas  les  lrorames:nous  voyons.dl 
le,  celle  folle  ambition  :&  cela  cft  batailler 
cotre  nature.  Voila  pourquoy  fainft  Paul  ay- 
ant touché  vn  vice  auquel  les  femmes  font  par 
trop  addonnees ,  adiouile  aufii  bien  l'autre. 
Caril  alléguera  puis  après  les  raifons  pour- 
quoy les  femmes  doyuent  eftre  pailibles,& 
duyuent  apprédre  fans  vfurper  autliorité  pu- 
blique:maii  conteiitons-noiis  ici  qu'il  a  regàr 
dé  ce  qui  ellpit  à  corriger  aux  femmes,  Si  qui 
cft  auhi  principalement  à  retrancher.  Com- 
me vn  médecin,  quand  il  verra  vne  partie  là 
où  la  racine  du  mal  rclîde,  il  s'addrefl'e  là.  Si 
vn  homme  vient  au  confcil,  &  qu'il  dife,  l'ay 
malde  telle, l'ay  ceci.i'ay  cela. le  médecin  re- 
gardera dont  cela  procède, &y  appliquera  les 
remèdes  qui  y  font  conuenables.  Oi  le  faind 
Efprit  qui  eil  bon  médecin  de  tous  vices  fpi- 
rituels.nous  donne  aufsi  les  remèdes  qui  nous 
font  propres.  Et  voila  pourquoy  l'ainct  Paul, 
après  auoir  corrigé  cède  vanité  qui  cil  aux 
femmes  en  leurs  accouilrimés,  iladiouftc  auf 
fi  ccfte  correiiion  contre  l'orgueil  Se  l'appé- 
tit de  fe  faire  valoir.  Il  eft  auliiviay-ftmDla- 
blequede  ce  temps-la  (  comme  nous  voyons 
i.Coc.     qu'il  en  elloit  aducnu  en  1*  ville  deCoriiuhc) 
14.14.     il  y  auoit  des  femmes  qui  clloycnt  par  trop 
outragcufes .  Car  fous  ombre  que  D.eu  leur 
fait  ceft  honneur  de  leur  coin; n-miquer  la  pa- 
role,  les  appeller  en  vn  mcf.ne  héritage  de 
vie, il  leur  Icmbloit  qii'ellesne  deuoyent  plus 
cîlrc  fuiettes  aux  hommes. Oi  lî  cc;le  folle  te 
mérité  des  femmes  auoit  délia  tltc  en  Corin- 
thc,  (  comme  nous  Ici'errons  au  paffage  de 
fainél  Paul-qii'il  faudra  déclarer  pUu  à  plein) 
aufsi  il  ne  fc  peut  faire  qu'en  la  ville  d'Ëphe- 
fe,  &aux  pays  circonuoifins,  il  n'y  euft  vne 
lemblable  aiTogance  &  prefomption  aux  fem 
mes.  £t  autant  en  peut-on  uiger  de  celle  cu- 
rioiîté  d'accou/lremés. Car  nous  fçauonsque 
ce  pays  d'Afie  a  elle  fort  fupeiflu  ,  &  qu'il  y  a 
eu  des  fomptuolîtez  beaucoup  plus  grandes 
qii'ici:&  pourtant  qu'il  faloit  que  les  remèdes 
y  fuflent  adioulltz  .  Voila  donc  qui  a  efmeu 
faincl  Paul  déparier  ainiî,  Q£c  les  femmes 
apprcnent  de  parler  en  lllsnce  auec  toute  lu- 
iettion.  Vray  efl  qu'en  cemniun  il  faut  bien 
que  les  hommes  reçoyuentctfte  leçon  com- 
me les  femmes ,  c'ell  afçauoir  d'apprendre, 
voireen  totitefuiettion&cn  repos  :  carnous 
fomraes  tous  difciples  de  Dieu,  voila  pour  vn 
icem-  QjiiconaUes  donc  refufe  de  profiter  & 


T  I  M  O  T  H.  70J 

d'ellre  enfeigné  ,  celuy-la  ne  peut  porter  le 
ioug  de  Icfus  Cbrift,  &:nc  veut  point  tftrede 
fon  troupeau  .  Car  lî  nous  ibnimcs  brebis,  il 
nous  faut  el'couter  la  voix  de  nollre  palleur: 
&  nous  fçauons  que  c'ell  à  celle  condition 
que  lefus  Chrift  nous  a  appelez  à  foy ,  que 
nous  profitions  en  l'on  efcholeiout  le  temps 
de  nollre  vie.  Ceci  donc  n'eft  point  feule- 
ment pour  les  femmes,  qu'elles  apprenent  :  il 
fant  que  les  hommes  y  ayent  leur  paît.  Ce- 
luy  qui  cuide  d'tllre  li  fage,  qu'il  n'ait  plus 
bcfoin  d'ellre  enfeigné  ,  eil  vn  toi ,  voire  vu 
enrage  du  tout  :  car  noftre  viave  iagelît;  cft 
decognoiihe  que  nous  fommes  ignorans ,  a- 
fin  d'eltre  touliours    confermer  de  plus  en 
plus  en  la  bonne  dotliinc  .  Et  ainlî  ne  pen- 
Ions  point  que  ceci  fjit  diuers  entre  les  hom- 
mes iSeles  feimnes,  qu'il  faut  que  les  femmes 
apprenent:  il  ne  faut  point  quenulpenfed'e- 
Itre exempté  de  cefte  regle-ci  .Comme,' me 
voici  en  l'office  d'eûfcigner.maisce  n'eitpaS 
qu'il  né  faille  que  fapprene  -aufsr  bien  que 
les  autres .  le  ne  fuis  point  exempté  du  rang 
commun,  qu'il  ne  me  faille  eftre  difciple  de 
lelus  Chriflrmalheurfurmoy  quand  ie  mon- 
teray  ici  en  chaire, que  iemettray  enauantla 
doctrine  de  falut ,  iînon  que  i'y  profite  de 
mon  collé.  Il  faut  donc  que  celuy*  qui  parle, 
&  ceux  qui  efcouteht,  foyent  enfeignez  tous 
cn.commun  :;iiais  lî  femme  a  cefte  condition 
feparce.c'e  11  qu'il  faut  qu'elle  apprene,&  que 
elle  n'ait  point  l'office  d'enfeigner  .  Et  voila 
pouiquoy  fainft  Pial  a.dim\ûe,En  Jlltnce,tiiiee 
t^-ute  fuicttion.  Il  faudra  bien  queJés  hommes 
foycnt  fuiets,  &  qu'aucc  vn  efprit  coy  &  pai- 
fibleils  profitent  en  la  parole  de  Dku'icar 
nous  ne  ferons  pas  toui  appelez  à  ceft  office 
d'enfeigner,  il  fufSra  qu'il  yen  ait  quelque 
petit  nombre  ,&  que  les  autres  efcoutent  en 
lilence:  que  s'il  y  en  a  de  fi  orgueilleux  qu'ils 
ne  veulent  fouffrir  d'eftre  ênfeigncz,  qu'ils 
s'en  aillent  eftre  difciples  de  Satan  ,  c'eft  i    - 
dire  qu'il  les  aueugle  ,  &  qu'il  les  enforcelle 
pour  les  rendre  du  tout  fhipides.  Ainfî  donc 
notons' bien  que  fi  nous  voulons  profiter  en 
l'efchole  de  Dieu,  tant  hommes  que  femmes, 
il  faut  que  nous  ayons  cefte  fuiettion  ^  ceft 
tfprit  paifible  duquel   nous  auohs  parléi; 
mais  (■  comme  défia  il  a  eftédit  )  il  faut  que 
les  femmes  cognoiflcnt  que  Dieu  les  range 
encores'à  vne  autre  fuiettion,  c'eft  qu'elles  ne 
font  pas  pour  exercer  l'office  d'enfeigner, 
&  que  ce  n'eft  pas  à  elles  de  s'en  mefler .  Ec 
pourquoy?  Les  raifons  feront  alléguées  ci  a-   - 
près,  comme  nous  auonsdit:  qu'illeur  futfife 
que  c'eft  ici  le-  fainÛ  Efprit  qui  parle.  Car  fi  • 
les  femmes  veulent  enfeigner,  à  quel  titre  le    • 
feront-elles  ?  Si-  elles  ne  font  enuoyees  de    ' 
Dieu, on  les  doit  reietter,  &  auoir  en  exécra- 
tion,voire  comme  les  Jiommesrque  fi  vn  hom 
me  n'eft  appelé  de  Dieu  à  cela  ,  &  qu'il  n'y  ^ 
ait  vocation  expreffc,  il  ne  doit  nullement  e- 
ftie  efcouté  .  Que  fera-ce  donc  des  fenrunes 

n.iiii. 


fô4 


DIXHVITIEME      SERMON 


^ui  en  font  exclufes  du  tout  ?  Voila  donc  en 
Ibmme  ce  que  bous  auons  à  noter  de  ce  paf- 
fage.attendant  le  refte.  £t  ainfî.combien  que 
fainfl  Paul  s'addre£e  notamment  aux  fem- 
mes, fi  cil-ce  que  les  hommes  doiuent  profi- 
ler en  ccfte'inftruôion,&  que  nous  en  pouuôs 
r«cueillir  chacun  fa  part ,  tellement  que  nous 
fommes  tous  admoneftez  à  modeftie  &fobrie- 
té,&  nous  contenir  honnertement  tant  en  ac- 
souftremcns  qu'en  tout  le  relie,  Si  de  chemi- 
ner en  telle  manfuetude ,  que  nous  ne  décli- 
nions point  de  l'obeiflance  de  noftre  Dieu, 
mais  que  de  iour  en  iour  nous  profitions  en  ù 
parole  ,  puis  qu'il  nous  fait  la  grâce  de  nous 
y  enfeigner. 

O  R.'  nous^ious  pro  Aernerôs  douant  la  fi 
ce  de  noftrc  bonDieu  en  cognoiflànce  de  nos 
faucesi  le  priant  qu'il  nous  les  face  tellement 


fentir.que  nous  apprenions  de  nous  y  deCplii 
re  de  plus  en  plus  ,  &  que  nous  en  facionv  vn 
tel  examen,  que  ce  foit  pourdefcouurirjtou- 
te  l'hypocriiie  qui  eften  nous:&que  nous  ne 
foyonsplus  addonnezànous  flattcr.mais  que 
nous  cerchions  les  remeder  que  Ditu  nous 
môftre,  afin  qu'en  toute  fobrieté  &  modeftie 
nous  tendions  à  la  vie  ceitfte,  pafians  par  cc- 
fk  vie  caduque  ea  telle  hafliueté  ,  que  nous 
ne  foyons  point  cnuclopper  aux  chofes  qui 
ont  accoulhimé  de  nous  retarder,  pour  nous 
dmertirdu  dro't  chemin  de  falut ,  mais  que 
nous  y  foyons  aduancez  de  plus  en  plu!>,  luf- 
ques  à  ce  que  Dieu  nous  ait  defpouillez  des 
corruptions  de  noftre  chair,  pour  nous  reuC'- 
ftir  de  ceAe  gloire  crledeià  laquelle  nous  ten 
dons.  Que  non  feulement  il  nous  face  ceûc 
grâce,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  nations  de 
la  terre,&ç. 


HVITIEME     SERMON      S  V  R.     LE    S  E- 

COND     CHAPITRE. 

la     Oric  ne  permets  point  que  la  femme  enfeigne,  ne  quelle  vfe 
d*  authoritê  fur  fhomme,mah  quelle  foit  enfilence. 

13  Qar  Adam  a  efïé  premier  formé,  O"  E«e  après. 

14  Et  Adam  n'a  point  efïtjèduiï,  tnais  la  femme  a  ejîc  feduite, 
(^  d  efïé  en  tranfgrefion. 


I  Ous  auons  cômencé  à  trait- 
j  ter  pourquoy  faind  Paul  en 
'ce  paflagenotammét  a  de- 
I fendu  aux  femmes  d'vfur- 
[pcr  Toffice  d'enfeigner:  ce 
'  eft  afçauoir,  d'autant  qu'il 
faut  que  l'Eglife  de  Dieu 
ait  certain  ordre  &  police,que  les  chofes  n'y 
fcyent  point  confufes.  Car  ce  feroit  grand' 
konte  que  nous  n^eufsions  pour  le  moins  l'hô 
Bcftcté  que  nature  enfeigne  aux  Payens  .  Or 
•it-il  ainfi  que  ceux  qui  ne  fçauentquec'eft 


vray  que  de  prime  face  on  penferoit  que  ce- 
fte  raifon-ci  ne  fuit  point  aîTez  l-èrme:  car  tel 
pourra  eftre  deinier  quant  à  foy  >  lequel  fui  - 
montera  neantmoins  en  dignité. Ccluy  qui  t/l 
plus  excellent  que  nioy  (  dit  Ican  Bapti/lc) 
viendra  après  moy.  Mais  fainft  Paul  regarde 
ici  ce  qu'il  déclare  plus  à  plein  en  l'onzième 
chapitre  de  la  i.aux  Corinth.  c'e/l  afçauoir, 
(  comme  défia  nous  auons  touché  )  que  l'hom 
me  n'a  pas  eAc  créé  pour  la  femme  ,  mais  la 
femme  pluftofteft  donnée  à  l'homme  pour  ai 
de  inférieur,.  Voila  donc  la  première  raifon 


4e  Dieu  ne  de  vraye  religion, ont  encores  en-  qu'amené  fainft  Paul  :  comme  notamment  il 

ti'cui  quelque  police.  Il  faut  bien  donc  que  eft  dit,  Voici  l'os  de  mes  os ,, voici  ma  chair 

«•la  foit  obferué  entre  nous.  Maintenât  il  eft  proprc;c'eft  donc  côine  vn  acccfloire  de  l'hô 

certain  que  les  femmes  n'ont  iamais  efté  re-  me,que  lafemme.  Ilyavne  raifon  fecôdequi 

«eues  en  office  public.Et  qui  eft-ce  qui  a  em-  ne  vient  point  de  l'ordre  premier  que  Dieu 

sefché  cela.finon  que  Dieu  a  imprimé  en  na-  auoit  inftitué  en  nature,  mais  c'cft  vnc  puni- 

tutevne  telle  £ognoiflànce,qu'encore$  qu'on  non.\dam{àit-il)ii'ufitseflcfediiit.  Nonp.u 

BC  foit  point  enfeigne  d'ailleurs,  lîfçait-on  que  (ainft  Paul  vueille  exempter  Adam  qu'il 

kienquece  feroit  vne'chofe  indécente  que  n'ait  aufsi  pechépar  l'aftuce  de  Satan  (com- 

)ei  femraei  gouuernaflcnt  les  hommes?  Voila  me  l'Efciiturc  k-  raonftre  aflez)miis  il  entéd 

dpnç  l'intention  de  ûin£t  Paul ,  &  du  fainû  que  la  femme  a  efté  la  fource  du  mal,  pourcc 

ïfprlt  *q«î  a  parlé  par  fa  bouche.  Or  afin  que  qu'elle  eftoit  la  plut  fragile ,  que  le  Diable 

la  chofe  fuft  tant  mieiw  approuuec,il  adiou-  l'eft  venue  alTaillir  en  premier  lieu,  qu' citant 

ile  deux  raifons:  la  première  c'eft  que  quand  circonuenue,  elle  quant  &  quant  a  attiré  fon 

Dieu  a  créé  l'homme, il  luv  a  donné  la  femme  mari  à  ferablable  ruine.  C'eft  doc  raifon  maia 

tour  aide:  D»>»  (dit-il)'»'<»  foim  trtilxfcm'  tenant  qu'elle  foitchailiee  ,  &  qu'elle  porte 

»»  r«  Ptimitr  i»»,m4»j  *i  a  fui  l  ftiimmc .11  eft  quelque  marque  de  fon  inal ,  afin  de  s'humi- 

*  ■  lier 


Gen.i, 

i3,i.<»* 

Tin.ll-P 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH. 


tOf 


lier  deuant  Dieu. Nous  voyons  m aintenîc  que 
Ja  première  railbn  cja'.inune  li:iia  PauJ ,  tft 
tirt-e  de  ce  que  Dieu  auoit  inftitué,  iiThom- 
me  &  la  femme  fuirent  demeurez  en  Jeur  ni- 
tegritc&  premier  eftat  :  c'efl:  afçauoirque  1' 
honune  ell  conftitué  chef  de  la  femme  ,  &  la 
femme  eft  comme  vne  aideà  Thomme.  voila 
pour  vn  item.  Or  il  eft  vray  que  maintenant 
nous  fommes  decheus ,  &  l'homme  meritoit 
d'eftre  débouté  de  toute  la  prééminence  que 
Dieu  luyauoit  donnée:  car  il  n'eftoit  pa  di- 
gne d'eftre  nombre  entre  les  créatures,  mtf- 
mes  auec  ksvermines.Toutesfois  pourcc  que 
le  mai  eft  commun  tant  à  l'home  qu'à  la  fem- 
me, il  ne  faut  point  que  cela  empe  Tchèque  la 
femme  ne  Ibit  toufîours  fuiette.  Et  puis  nous 
fçauons  que  la  bonté  de  Dieu  a  furmonté  la 
malice  des  hommes.  Car  combien  qu'Adam 
"  euft  mérité  que  Dieu  le  priuaft  de  fout  bien, 
f\  eft-cequ'il  luy  en  a  encores  latlfé  quelques 
traces,  &  quelque  refidu.  Vray  eft  que  nous 
l'ommes  defpouiUez  de  cefte  gloire  qui  auoit 
efté  mile  en  Adam, que  l'image  de  Dieu  ne  re- 
luit plus  en  nou';  comme  elle  faifoit  :  néant- 
moins  fieft-ce  qu'encoresDicualaifle  quel- 
ques petites  eftincelles  de  cefte  image,  qu'el- 
le n'eft  point  du  tout  ef'ùceé.  Dont  vient  ce- 
fte raifon  &  intelligéce  que  nous  auons?.Com 
bien  qu'il  n'y  ail  que  vanité  en  nos  efprits,  fi 
eft-ce  toutesfoJS,  que  nous  différons  d'aucc 
les  beftes  brutes.  C'eftpource  que  Dieu  n'a 
point  permis  que  nous  fuf,ions  anéantis  du 
tout.  Il  nous  a  donc  voulu  referuer  en  quel- 
que degré.  D'où  vient  aufsi  que  nousioui<# 
fonsdes  biens  de  la  terre  ,  que  nous  fommes 
nourris  &:  fubllantez  des  fruitVs  que  Dieu  en- 
uoye  ,  que  les  beftes  nous  feruent ,  que  nous 
fommes  veftuv  de  leuf  laine  Se  de  leur  peau,/î- 
non  que  noftre  Seigneur  ne  nous  a  point  vou 
lu  punir  à  la  rigueur  extreme?Ainfi  donccom 
bien  qu'Adam  euft  mérité  d'eftie  mis  du  tout 
bas,  &  de  n'auoir  plus  d'authorité  fur  la  fcin- 
me,lî  eft-ce  que  Dieu  a  voulu  qu'il  y  euft  en- 
tores  quelque  reiîdu  de  l'ordre  naturel.  Voila 
pour  vn  Item. Or  il  y  a  le  fécond  qui  eft  aufsi 
bien  à  noter  ,  c'cft  qu'après  la  cheute  tant  de 
l'homme  que  de  la  femme,  il  faut  que  la  fem- 
me cognoilfe  qu'elle  eft  plus  coulpable  que  1' 
honmie,  pource  qu'elle  a  efte  feduite  par  Sa- 
tan, &  a  tellement  diuerti  fon  mari  de  l'obeif 
fance  de  Dieu,  qu'elle  a  efté  vn  inftrument  de 
mort  pour  menertoutaperdition.il  faut  dôc 
que  la  femme  cognoifle  ,  &  qu'elle  apprene 
que  c'eft  de  s'afluicttir:  puis  qu'elle  s'eit  ainfî 
cleuee  contre  fon  Créateur, &  non  pas  feule- 
ment contre  fon  mari  :  c'eft  bien  raifon  que 
maintenant  elle  foit  mifc  bas,&  qu'elle  porte 
comme  vne  note  d'ignominie  &de  honte  en 
foy.  Nous  voyons  encores  plus  clairemét  ces 
deux  raifons,&à  quelle  fin  elles  fe  redi'i- 
lent.  Or  maintenant  il  nous  faut  noter  vne 
bonne  doftrine  de  ces  mots  de  fainift  Paul. En 
premier  liçu,quid  il  eft  queftion  de  nous  bien 


gouucrner.aduifanî  ce  que  Dieu  a  inftitué,  & 
que  cela  nous  foit  vne  régie  certaine  écintal-, 
liblc.  Les  homes  voudront  eftre  toufiours  fi- 
ges &  Aibtils  pour  rtgai  der  ce  qui  leur  eft  bô, 
&  félon  qu'ils  en  iugent,ils  veident  q  cela  foit 
fuyui  :  mais  cependant  ils  ne  cognoilfent  pas 
ce  qui  eft  efcrit.Que  ce  qui  nous  femble  haut  i^f  j -^ 
&•  e.tcellcnt ,  ne  Tera  qu'abomination  deuant  j.^ 
Dieu. Ainfî  apprenons  de  fuyure  li  do<îlrine  q 
famft  Paul  nous  monftre  en  ce  paflâge ,  c'eft 
afçauoirde  tenir  Tordre  de  Dieu:&  quand  v- 
ne  chofe  aura  c-fté  inftituee  de  celuy  qui  a  tou 
te  puifl'ance.que  nous  ne  répliquions  point  là 
dtirus,mais  que  ce  nous  foit  la  vraye  règle  & 
fouuerainc .  que  nous  n'ayons  point  cefte  au- 
dace d'alléguer  ceci  ou  cela,'côme  noftre  ph^ 
tafie  le  porte  :  car  quand  »1  n'y  auroit  que  ce- 
fte rebellion.il  eft  certain  que  ce  que  nous  at- 
tenterons.ne  peut  nullement  eftre  approuué: 
&  tant  s'en  faut  qu'il  foit  louable,qu'il  eft  di- 
gne d'tftce  puni,  pource  que  nous  ne  portons 
point  à  Dieu  rhonntur  qui  luy  appartient, 
quand  nous  ne  pouuons  fouffrir  d'eftre  gou- 
uernez  par  fa  main  &  par  fa  volonté.  Voila 
donc  vne  doftrine  générale  que  nous  auons  i 
recueillir  de  ce  palfage,  c'eft  que  nous  n'ayôs 
point  cefte  audace  ,&  que  nous  ne  foyont 
point  il  haciKs  de  varier,ni  enfraindre  en  fa- 
çon que  ce  foit  l'ordre  de  Dieu,  &  ce  qu'il  a 
inftitué.mais  quecela  fou  obferué  de  nous  a- 
uec  vne  telle  reuercncc, que  quand  nom  co- 
giloiftrons,Voila  comme  Dieu  l'entend  :qu'il 
n'y  ait  plus  de  réplique. Et  de  fait.ilfau't  bien 
que  nous  foyons  par  trop  rudes  &  fauuages.fî 
nous  ne  pouuons  accepter  comme  bon  &  rai- 
fonnablect  quenous  fçauons  eftre pl.iifanti 
Dieu  .  La  femme  aura-elle  occaiîon  de  le  re- 
becquer  ici  Se  d«  fe  plaindre,  puis  qu'elle  voit 
que  fon  Créateur  l'a  aflliicttie  en  puiflàncedc 
mari?Le  pot  fe  plaindra-ilcontre  fon  potier-  R.oj».  y, 
Qu2cft-ce  qu'ont  ne  l'homme  ne  la  femme?  n. 
Eft-il  en  eux  de  fe  venir  eleuer  à  l'cncontre 
de  Dieu,  comme  s'il  ne  leur  faifoit  point  rai- 
foii?Etainfi  il  n'y  a  point  d'argument  plusfuf 
fifant  que  celuy  qu'amené  lainft  Paul  pour  af 
fuiettir  les  femmes,  c'fftqu'ellesdoiuent  re- 
garder que  leur  cÔdition  ne  peut  eftre  autre, 
&  ne  doit  aufsi, que  celle  que  Dieu  leur  a  don 
nee.Pourqnoy?  Carpiiis  qu'elles  ticncnt  leur 
viede  luy, c'cft  bien  raifon  qu'il  ait  toute  puil 
fance  pour  les  rcgiercomme  il  voudra. Or  eft 
il  ainfi  que  Dieu  a  crée  Thomme  par  fa  bonté 
çr-ituite,  il  luv  adonnéla  fupetiorité  qu'il  a 
par  dtflÎK  la  femme  :  il  a  voulu  à  l'oppcfitc  ^ 
la  femme  fuft  fuietteal  faut  donc  qu'on  fe  cô 
tente  de  cela. Si  la  femme  demande,  Et  pour- 
quoy  eft-ce  que  l'hôme  aura  telle  preemiiKi» 
ce.>Dieu  l'a  voulu  ainli:  &  nous  ne  poimôs  pas 
alléguer  mérite  pourquoy  Dieu  nous  ait  pré- 
férez aux  femmes  :  comme  aufsi  celuy  qui  eft 
plus  excellent  que  fes  compagnons, ne  pour- 
ra pas  dire  quecela  foit  de  fa  dignité  propre. 
Mais  ceux  qui  ont  plus  receu^le  Dieu,  font 

o.i. 


10* 


DIXHVITIEME    SERMON 


tant  plus  oblige!  à  luy.cognoiflàns  <jiie  cela 
vient  de  fa  bonté  gra.uite  :  ie^  autres  qui  font 
moindres  &  inférieurs,  doyuent  cognoiftre 
^ue  Dieu  les  a  voulu  tenir  en  telle  bride,tant 
y  a  cependant  que  nous  auons  bien  dcquoy 
tous  eniemble  le  glorifier.  Car  quelle  ingra- 
titude fera-ce  àla  femmclî  elle  ne  fe  conten 
tepas  d''eflreence  rang  moyen  où  Dieu  Ta 
nife?  Les  beftes  brutes  quand  elles  fçauroyét 
parler,ne  (eroyent  pas  ii  ingrates  :  car  elles 
pourroyent  alléguer  qu'eilev  font  créatures 
de  Dieu  comme  nous. Et  pourquoy  eft-ce  que 
les  cheuaux  font  alTuiettis  à  noftre  feruice> 
les  bœufs, les  afnes,les  moutons.'que  non  feu- 
lement on  en  vfe  pour  les  employer  en  vn 
grand  trauail&  pénible  tout  le  temps  de  leur 
vie ,  mais  il  faut  que  leur  chair  mefme  npus 
ferue  de  nourriture  î  Or  nous  cognoilîons  la 
grande  libéralité  &  infinie  de  noftre  Dieu  en 
cela,  qu'il  nous  a  donné  vn  tel  vfage  fur  fes 
créatures.  Voila  la  femme  qui  eft  en  degré  er 
cellent,  combien  qu'elle  foit  finette  à  l'hom- 
me, fi  ell-ce  neantiuoins  qu'elle  porte  enco- 
res  l'image  de  Dieu  en  fon  endi  oit.  £t  ainfî, 
quelle  ingratitude'  fera-ce,  fi  elle  ne  fe  con- 
tente de  ce  qui  luy  elldoimé?  Qujnd  nous  aï 
léguerons  tous  eniemble  pourquoy  c'cftque 
Dieu  nous  a  mis  en  cefte  vie  caduque  ,  &  que 
no'  ne  foinmes  point  en  tel  degré  que  les  An- 
ges deparadis.ie  vous  prie.deuons-nous  elhe 
receus  à  tels  murmures  ?  Nous  voyons  bien 
que  nous  fommes  dignes  d'eftreabyfmez  du 
tout,&  que  la  mémoire  des  homes  &  des  fem- 
mes fuft  rafee  du  monde. Puis  qu'ainfi  eft,  ap- 
prenons (  fuyuant  ce  quei'ay  défia declaré)q 
c'eft  la  raifon  la  plus  fuffifante,  que  ccfte-ci, 
pour  nous  tenir  en  bride  à  la  volôté  de  Dieu, 
c'eft  de  cognoiftre  la  conditipn  en  laquelle  il 
nous  a  mis .  Or  cependant  il  nous  faut  aufsi 
faire  noftre  ptofit  de  la  raifon  féconde  ,  c'eft 
que  la  femme  porte  la  punition  Se  chaftiment 
ce  l'on  péché.  Il  ell  vray  qu'il  n'y  a  eu  qu'E- 
i»e  qui  a  failli:mais  comme  Dieu  a  puni  le  gen 
re  humain  fur  le  péché  d'Adam  ,  aufsi  faut-il 
4ju'en  toutes  femmes  la  faute  de  la  trafgrcf- 
iion  d'Eue  foitpunic.Cela  nous  pourroit  iém 
bler  eftrange  :  mais  Dieu  qui  eft  iuge  compé- 
tent,en  a  donné  fonarreft  irreuocable.  Que 
gagnerons-nous  maintenant  fi  nous  venons 
prétendre  cefte  couleur, que  fi  Adam  a  failli, 
il  doit  comparer  fonoffenfe,  &  non  pas  nous? 
Oreft-ilainfi  que  Dieu  en  la  pcrfjnne  d\n 
homme, auoit  doué  le  genre  humain  des  pri- 
nilegcs  qu'il  auoit  mis  en  noftre  natuie:aiifsi 
nous  en  auons  efté  defpouiUez  en  la  perfon- 
jie  de  ceft  homme-la. Mamtenant  donc  ce  que 
BOUS  fommes  luiets  à  maladies ,  ce  que  nous 
fommes  fuiets  à  tant  de  pouretez  8c  miferes, 
qu'en  la  fin  la  mort  domine  fur  nous,  que 
nous  voyons  qu'il  y  a  vne  telle  corruption 
en  noftre  ame  &  en  noftre  corps,  que  c'eft  v- 
ne  horreur,  toirt  cela  procède  du  pechc  d'A- 
cLicj.  Il  eft  vray  que  ce  n'a  eue  qu'vn  homme 


qui  a  failli,  mais  fi  eft-ce  que-Dieu  nous  pu- 
nit iuftcment.  £t  ne  faut  pas  que  nous  oU" 
urions  ici  la  bouche  pour  nous  plaindre  •■  car 
il  nous  en  aduiendra  comme  il  en  eft  dit  au 
Pfcaume  f  i,  Que  Dieu  fera  iuftifié  toufiours 
quoy  qu'il  en  foit ,  quand  les  hommes  l'au- 
ront blafphemé,  &  qu'ils  auront  defgorgc 
tout  ce  qu'ils  auront  peu  ,  fi  eft-ce  que  Dieu 
demeurera  toufiours  iufte,  quoy  qu'il  en  foit, 
&  en  defpit  de  leurs  dents  :  &  eut  demeure- 
ront toufiours  confus.  Or  tout  ainfi  que  nous 
fommes  abyfmez  à  caufe  de  l'offenfe  commi- 
fe  par  Adam ,  aufsi  faut-il  que  les  femme* 
foyent  afluietties  en  ceft  endroit  àlatranf- 
giefiion  d'Eue  .d'autant  qu'elle  a  l'eduit  fon 
mari  après  que  le  diable  l'a  dcftournee  de  la 
droiture  qui  deuoit  eftre  tant  en  elle  qu'en 
fon  mari.  Or  il  eft  vray  que  fainft  Paul  parle 
ici  notamment  des  femmes,  afin  qu'elles  por- 
tent paifibleinent  la  fuiettion  ,  Se  que  ce  ne 
foit  point  maugré  elles  qu'elles  foyent  en  fer 
uitude.raais  qu'elles  prefentent  k  Dieu  ce  fl- 
crifice  d'himiilité,  pour  dire.  Puis  qu'il  te 
plaift  nous  chaftier.nous  voici:  Se  nous  n'y  re 
nons  pascômebeftes  fauuages,  mais  puis  que 
tu  veux  eftre  noftre  Pcre ,  &  que  tu  nous  fais 
ceft  honneur,  nous  fommes  preftes  à  t'obeir. 
Voila  donc  l'intention  de  fainû  Paul .  Mais 
tant  y  a  qu'en  commun  nous  fommes  tousin- 
ftruits  &iiommes  &:  femmes  de  regarder  à  ce 
que  i'ay  défia  touché,  c'eft  afçauoir  que  les 
mifcres  de  ce  inonde  nous  font  autant  d'ad- 
uertiflemens  de  la  faute  qu'Adam  a  commit, 

f:  de  la  cheute  mortelle  en  laquelle  il  eft  tre- 
ufché ,  quand  il  ne  s'eft  point  tenu  fous  l'o- 
beilTance  de  fon  Crcateur.raais  qu'il  a  appetc 
cefte  hautefle  qui  ne  luy  appartenoit  point, 
quand  le  diable  luy  a  fait  à  croire  que  luy  & 
fa  femme  feroyent  comme  petis  dieux,  qu'ils 
auroyent  cognoiflance  du  bien  &  du  mal  :  ce- 
fte ambition-la  a  tranfporté  Adam  pour  le  re 
tirer  de  celle  intégrité  en  laquelle  Dieu  l'a-, 
uoit  mis. Maintenant  dune  quand  nous  voyôt 
les  pouretez  qui  nous  enuirônent  en  cefte  vie 
mortelle,  &  que  nous  ne  faifons  que  languir 
ici  bas ,  &  que  nous  fommes  fuiets  finalement 
à  la  mort, que  nous  fentonslescupiditeamef 
chantes  qui  bataillent  en  nous  à  l'encontre 
de  Dieu,que  nous  fommes  lî  fragiles  que  c'eft 
pitié:&  quand  Dieu  nous  fait  la  grâce  d'afpi- 
rer au  bien  ,  que  nous  regimbons  toufioursi 
rencontre, qu'il  y  a  toufiours  des  cupiditczfi 
grandes,  q  nous  ne  pouuons  pas  nous  ranger: 
quand  donc  nous  voyons  &  dedaii':  &  dehors 
que  noftre  vie  eft  tant  pleine  de  corruptions, 
cognoiflons  que  nous  recueillons  les  fruiûs 
du  péché  d'AJâ.  Puis  qu'ainfi  eft  qu'en  fâ  per 
fonne  nous  auons  offtnfé  noftre  Dieu  ,  que 
nous  n'auôs  point  iouy  des  grâces  qu'il  nous 
auoit  donnces,mefmes  qu'il  y  a  eu  cefte  mak- 
ce  &  rébellion  de  ne  luy  pouuoir  faire  hôina 
ge  quand  il  nous  auoit  aiiifi  eleuez  par  deflut 
tout,qu'ii  nous  faifoit  comme  côpagnons  de» 

Anges, 


s  V  R    LA   I.    A 

Anges ,  qu'il  nous  meiicit  comme  en  parçil 
rang.cogiioiflbns  quenuinttnannl  faut  (^ue 
nous  foyons  ici  accablez  de  roi ftres,&  que  no 
Ûïe  Seigntur  nous  defpite,  &  qu'il  noui  laif- 
fe  en  noltre  vilenie  &  opprobrc.Baiffbns  doc 
la  tefte  touîcsfois  &  quantes  que  &  au  corps 
&en  l'ame  nous  voyons  les  fruits  du  pcche, 
&  les  chaftur.ens  que  Dieu  nous  cnuoye.Mais 
quoy?ceci  eft  bien  mal  prattiqué.car  nous  fça 
uons  bien  gémir  Se  iioui  plaindre  quand  les 
cliofes  ne  nous  viendront  pointa  grc.Ileft 
y  ray  que  du  principal  il  ne  nous  chaut  gueres, 
c'eft  afçauoir,  quand  nous  voyons  que  le  dia- 
ble a  tant  de  puiflance  fur  nous,  Se  qu'il  nous 
feduit  en  tant  de  fortes, que  nous  fonimes  en- 
clins à  des  affeftions  mefchantes  &  rebelles  i 
rencontre  de  Dieu.  Qua"<l  *^°"*^  """^  voy ô» 
celle  feruitude  de  péché  qui  domine  en  nolhe 
nature,  cela  pafle  &  s'efcoule,  que  nous  fom- 
mes  trop  eftourdis.Mais  félon  que  nous  fem- 
mes fenfutls  &  pleins  de  terre,  linous  auons 
quelque  maladie,  fi  nous  foiifFrdns  pourettz, 
ho, nous  rçauronsbicngemir.côme  l'ay  délia 
déclaré.  Mais  quoy  ?  cependant  nous  ne  ve- 
nons point  à  la  caufe  du  mal.  C'eft  comme  lî 
quelqu'vn  ayant  la  fiture  chaude  crioit ,  le 
•brufle.ie  meur  de  foif:niais  il  ne  regarde 
point  à  la  fieure,  ne  dont  elle  vient.pour  cer- 
cherguarifon.Ainfî  en  fommes-nous.Et  tant 
plus  nous  faut-il  bien  noter  cefte  règle  qui 
nous  ell donnée  par  le fainû  E fpnt,  c'eil  tou 
tcsfois  &  quantes  que  nous  voyons  en  nos  a- 
mes  les  mauuaifes  cupidicez  qui  font  rebelles 
contre  Dieu  ,&  qu'en  nos  corps  nous  voyons 
tant  demiferes ,  que  nous  cognoifsions,  Hé- 
las, noftre  Seigneurnous  remonllre  que  nous 
ne  fo.mmes  plus  en  cefte  intégrité  en  laquelle 
ii  nous  auoit  mis,&  qae  nous  fommes  dccheus 
de  cefle  condition  fi  honorable  qu'il  nous  a- 
uoit  donnée  ,  que  maintenant  nous  fonimes 
priuez  des  biens  qu'il  nous  aiioit  mis  entre  les 
mains. Et  pourquoy  cela  ?  Afin  que  nous  pliôs 
tous  le  col,  &  que  nous  luy  demandions  par- 
don de  nos  ofFenfes,  &  que  nous  ne  luy  foyôs 
point  rebelles,  mais  que  nous  apprenions  de 
leceuoir  lés  prijces  qu'il  nous  diftribue  iour- 
nellement  auec  plus  grande  reueréce  que  n'a 
pas  tau  noftre  père  Adam:&  que  nous  appre- 
nions d'en  vfer  en  forte  qu'elles  ne  nous 
foyent  point  oftees,  &  que  l'vfage  en  reuiene 
tant  à  noftre  falut  comme  à  fà  gloire.  Voila 
donc  ce  que  nous  auons  à  recueillir  de  ce  paf 
fage,  c'eft  que  toutes  les  pourecez  que  Dieu 
enuoye  en  ce  monde  pour  le  péché, elles  nous 
Solicitent  à  cognoiftre  quelle  eft  noftre  con- 
dition :  &  de  laque  nous  entrions  en  examen 
de  nos  fautes, voire  pour  nous  condamner  de- 
vant Dieu  :&  après  nous  eftie  condamnez, 
pourluy  demander  pardon,  &  le  prier  qu'il 
nous  rcuefte  des  biens  que  nous  auons  per- 
dus par  noftre  ingratitude  :  qu'il  nous  refor- 
me par  fa  luftice  ,  &  nous  repare  par  la  grâce 
4c  noftrç  Seigneur  lefus .  Voila  comme  les 


T  I  M  O  T  H.  107 

hommes  4' les  femmes  apprendront  de  s'hu- 
milier :  car  il  y  a  aiifsi  ample  matière  pour  ce 
faire  :  &  cependant  chacun  en  fon  degré  ap- 
prendra de  glorifier  Dieu  uns  s'eltiier  par 
prefompiion. Comme  quoy?  Lamortcftcora 
inune  aux  hommes  &  aux  femmes,  les  mala- 
dies &  les  autres  pourctcz  .  il  faut  donc  que 
tou^  baif>ions  la  tefte, &  que  l'homme  exhor- 
te la  fimme,  &  la  femme  l'homme,  de  fe  def- 
plairedcuant  Dieu,  &:dccognoiftie  qu'il  n'y 
a  en  eux  que  toute  iniquité. Il  y  a  ercores  les 
autres  aduertifiemens  plus  gians ,  c'eft  que 
tant  l'homme  que  la  femme  font  non  feule- 
ment pleins ,  mais  font  quafi  farcis  de  toute 
rebcllion,d'ig norance,d'increduli te, de  frau- 
de,d'hypocrifie,&  chofes  féblables.  Or  main 
tenant  qui  eftceluy  qui  s'ofera  glorifier  î  II 
faut  donc  que  nos  fautes  nous  admoneftent 
de  recourir  à  Dieu,&  de  confeller  que  deuant 
luy  nous  fommes  comme  peidus  &  defefpe- 
rez.  Voila  donc  ce  qui  eft  commun  &  gênerai 
aux  hommes  &  aux  femmes .  Or  maintenant 
les  hommes, d'autant  qu'ils  ont  peine  de  gui- 
der &  gouuerner  leuis  familles,  qu'ils  tra- 
uaillcnt  ;  &  puis  ,  il;  n'auront  point  dequoy 
nourrir  ne  ftmmcs  ni  enfans  fouuent  ;  &  au 
refte  ,  quant  à  la  maifon,  au  lieu  d'auoir  aide 
qui  leur  fubuiene,  la  femme  fera  quelquefois 
vn  Satan  à  l'homme  ,  pour  legehenner:& 
bien,  que  l'homme  cognoifle  que  ce  font  les 
fruifts  de  Ces  péchez  :  tellement  que  fi  nous 
fufsions  demeurez  en  cefte  intégrité  de  na- 
ture, le  mariage  feroit  vneftat  defirable,il 
n'y  euft  eu  que  ioye.attions  de  graces,&  lou- 
ange de  Dieuic'tuft  eftévne  félicité  fansfaf- 
chcrie  aucune,  il  n'y  euft  e»  que  redire.  Mais 
maintenant  on  voit  tant  d'amertumes  qu'il 
nous  faut  humer,  on  y  voit  tani  de  tenta- 
tions,tant  de  fafcheries.  Et  dont  procède  ce- 
la ?  C'tft  d'autant  que  nous  auons  tftc  priuer 
de  la  benediûion  de  Dieu  .  Que  les  hcmmet 
donc  cognoiilcnc,Côment?ic  deuroye  domi- 
ner lâus  nulle  difhculté,attédu  que  Dieu  m'a 
uoit  donné  la  femme  pour  m'tftre  fiiiette  ,  & 
qu'elle  m'obeift  comme  à  fon  chef:  &  ie  vco y 
maintenant  le  contraire  :ii  faut  donc  queie 
cognoifle  ici  la  punition  de  mon  péché.  Voi- 
la comme  les  hommes  fedoyuent  humilier  en 
leur  endroit. Les  femmes  de  leur  cofté,qu'el- 
les  fc  foumettent  volontairement  à  la  peine 
qu'elles  auront  au  mefrage  ,  &'  qu'elles  co- 
gnoiflcnt,  Voila  Dieu  qui  me  chaftie  de  l'or- 
gueil qui  a  t  fté  en  la  première  ù  mme .  Or  i] 
eft  certain  que'Dieu  n'exerce  point  furies  hâ 
mes  ne  furies  femmes  vnetyrannie,pour di- 
re qu'il  loit  cruel,  mais  pluftoft  s'il  nous  cha- 
ftie ,  c'eft  pour  nous  faire  fentir  nos  mala- 
dies: &  il  ift  fibon  médecin,  que  quand  nom 
aurons  noftre  recours  à  luy,  il  nous  fera  fen- 
tir fsi  grâce  .  Tant  y  a  qu'il  taut  que  nous  tt- 
duifions  ceci  fouuct  en  mémoire,  c'eft  que  lej 
femmes  cognoiffcnt.  Il  eft  v ray  que  fi  l'hom- 
me &la  femme  fuûen;  demeurez  en  leur  incc«: 

O.U. 


io8 


DIXHVITIEME    SERMON 


point  d'vne  feruitude  contrainte  ni  forcée, 
mais  elles  eulTent  efté  eftabiies  en  forte  que 
kureftat  euftefté  vn  plein  contentement  & 
repos.  Mais  raaintenaïuil  tant  qu'elles  foyét 
Ge  t  iS  cônie  en  fevuitude,  félon  quM  eit  dit, Ton  ap 
petit  fera  lluet  à  rhomine:c>ftà  dire  tu  n'au 
ras  plus  de  gouuernement  :  tuas  mal  fuiui  la 
volonté  de  ton  Dieu:  &  pourtant  ton  appétit 
fera  comme  bridé  :  c'eft  à  dire, il  ne  faut  plus 
que  tu  ayes  voix  pour  parkr.mais  que  tu  lois 
fuiette  à  ton  man,c?c  que  là  Toionté  foit  la  tie 
ne  :  &  que  tu  te  conformes  là  ,  en  bien  vfant 


yuent  reietter  de  leur  rang  ,  mais  qu'ils  le 
doyuent  tenir  en  degré  pailiblc  &  amiable,  *: 
honorer  les  femmes  entant  qu'elles  leur  font 
dônees  pour  compagnes. En cefte  façon  nous 
voyons  que  tous  5:  grans  &  petis.  Se  ceux  qui 
ont  fuperiorité,&  ceux  qui  font  en  fuiettioii, 
ont  occafion  de  glorifier  Dieu  d'vn  commun 
accord",  voire  cognoiflans  que  tous  luy  font 
redeuables,dmu'ilvfed'vne  bonté  .idui;rab le 
enuerseux.Et  au  relie, que  tous  aufsi  ont  oc- 
calion  de  bailTer  la  telle  ,  Se  d'cftre  confus  en 
leurs  péchez,  félon  aufi  que  Dieu  les  admo- 
nelle qu'ils  font  coulpablesdeuant  luy:&  cè- 


de la  grâce  que  ie  t'auoye  faite.Voila  donc  ce    pendaiitde  viure  enchanté  &  concordeles 


que  les  femmes  doiucnt  penfcr.  Et  au  relie, 
que  les  hommes  regardent  que  Dieu  leur  a 
cncorcs  donné  quelque  domination:  &  com- 
bien qu'ils  fulTent  dignes  d'eftre  f  jullez  aux 
pieds  des  cheuaux.dcs  porcs,&  des  afnes,que 
ils  meiitaflent  d'eflre  mangez  de  toute  ver- 
mine, d'eftre  exemptez  pleinement  du  rang 
des  créatures ,  qu'encoret  Dieu  leura  laiile 
quelque  domination.  Cependant  toutesfois 
qu'ils  cognoiffent  que  cela  ne  vient  point  de 
leur  dignité,  &  qu'ils  apprenét  de  ne  le  point 
exalter.  Que  les  femmes  aufsi  cognoiircnt 
qu'cncores  qu'elles  foyent  fuicttes,  lî  cft-ce 
que  Dieu  leur  fait  vne  grande  grace,qiiand  el 
les  font  mifes  comme  en  poffefsion  de  cefte 
prééminence  qui  eft  donnée  aux  tommes  par 
delîus  les  beftes,quandilcftdit.  Vous  domi- 
neiez:  que  cela  nous  eft  donné  commun  &  à 
l'homme  &  à  la  femme. Or  puis  que  Dieu  leur 
alaifle  encores  cefte  dignité,&inelmes  qu'il 
ne  lésa  point  déboutées  de  l'efperance  de  fa 
lut,  qui  eft  le  principal  ,  en  cela  comme  en 
tout  le  relie  elles  doiuent  glorifier  Dieu& 
magnifier,  comme  il  en  elt  digne.  Et  d'autre 
colle,  que  les  hommes  aufsi  cognoifTent  ce- 


vnsaiiec  les  autres. Voila  lev  trois  poindls  que 
nous  auons  à  noter  en  fomme,c'cll  que  quand 
Dieu  nous  punit,  nous  ne  pouuons  pas  l'accu 
fer  ,  pluftoll  nous  ne  pouuons  pas  nier  que 
nous  ne  foyons  par  trop  rebelles  à  ù  bonté. 
Et  pourt.ît  cosnoiflons  que  touiioiirs  il  nous 
cfpargne,  &  qu'il  vfe  d'vne  milericorde  infi- 
nie einicrs  nous.  Etainli  il  y  a  argument  de  le 
glorifier. Pour  le  fecôd.ilfaut  aufsi  que  nous 
baifiions  la  telle ,  cognoifliins  que  fcs  challi- 
mens  font  pour  nous  doîer,&  qu'il  noNs  faut 
oublier  celle  arro£;ance  qui  eft  cniacinee  en 
nousde  nature  ,  que  nous  gemifsions  dcuant 
Dieu,que  nous  ayons  honte  de  noiif-mefmes, 
&  que  nous  ne  foyons  point  incorrigibles 
quand  nojlre  Seigneur  nous  veut  faire  fentir 
nos  péchez  pour  en  palfer  condamnation: 
qu'vn  chacun  fe  rage  à  cela. Et  puisque  ceux 
quiontdominatiô,  en  vfent  en  forte  uu'ili ne 
mcfprifent  poîtceux  qui  leur  Ion  t  inférieurs, 
mais  qu'ils  cognoiflcnt  qu'ils  leur  font  rede- 
uables:  &  (comme  l'ay  dcfia  allègue)  que  les 
hommes  qui  auront  prééminence  fur  les  fem- 
mes ,  ne  penfent  pas  que  Dieu  leur  ait  donné 
vne  tyrannie,  &  que  les  femmes  ne  leur  foy- 
<juefaind  Paul  remonftrcençe  paflâge  que  ent  plus  rien:car  elles  font  leurs  compagnes, 
i'ay  allégué  de  l'onzième  chapitre  de  la  pie-  ainfi  que  fainft  Paul  en  parle:&:pourtat,  qu'il 
miere  aux  Coriinhics,c'tft  afçauoir  que  tout    faut  que  le  genre  humain  s'tntretitnc  par  ce 


ainfi  que  la  femme  eft  venue  de  l'homme,  que 
aufsi  les  hommes«font  maintenus  par  les  lem 
mcs,&  que  Dieu  les  a  tclleniét  accompagnez, 
qu'il  faut  qu'ils  fe  nourriflent  en  concorde 
amiable:&  que  fi  l'homme  vouloit  reietter  la 
fcmrae.c'eft  comme defpiter  Dieu.  Et  pour- 
<juoy?  Car  premièrement  nul  ne  pourroit  e- 
llre  au  monde  s'il  n'auoit  efté  crée  de  perc  & 


lien  que  Dieu  a  mis, qui  nous  doit  élire  vn  lié 

£icré.   Puis  qu'ainfi  cil  donc  ,  rangeons-nous 

paifiblement  à  cela  pour  nourrir  concorde 

Icsvnsauec  les  autres  :  car  voila  comme  en 

gênerai  nous  pouuons  appliquer  ceci  à  toute 

noftre  vic,& pouuons  bien  iccueillirvne  do- 

Ûrinedc  ce  paflagc  qui  feruira  Si  à  grans  &  à 

petis.   Si  le  mari  abufe  de  fon  au:horité  ,  & 
^         I  T^        1 r.;.._n.i i' .. 


demere.  Or  Dieu  n'a-il  point  dit.  Honore     quandDiculuy  aura  fait  ccft  honneur  d'auoir 


ton  perc  Se  ta  mère?  Si  donc  ie  mefprife  les 
femmes ,  il  faut  que  ie  me  reiette.  Car  d'où 
fuis-ie  venu?  Se  par  quel  moyen  Dit  u  m'a -il 
<:reé?  Ne  m'a-il  point  donne  ma  mère  qui  a 
efté  par  delVus  nioy,&:  à  laquelle  iedoy  hon- 
neur?«Sc  en  la  perfonne  de  ma  mère  ne  le  doy 
ie  point  h  toutesfemmes?  Voiladonc  com- 
me nousdcuons  canucrfcr.fuvuaiu  l'ordon- 
nance de  faindl  Paul ,  que  Dieu  n'a  point  tel- 
lement eleué  les  hommes  <ju'ils  doiuent  do- 


prééminence  par  dcllîis  vne  femme, lî  c'ell  vn 
homme  volage  &  dillolii,  qui  donne  occafion 
à  ta  femme  de  fe  dc.bauchcr ,  ou  qu'il  la  ru- 
dovc,  ou  qu'il  foie  vn  maiiuaiv  mtfnagerqui 
difsipe  tout  ,  il  eft  certain  que  ctll  honneur 
qu'il  auoit  receu  luy  fera  vendu  bien  cher. 
Ainfien  ell-il  de  toutes  les  preemintces  que 
Dieu  donne  en  ce  monde. C'cll  v»e  chofc  ho- 
norable que  de  porter  la  parolede  Dieurmais 
c'tll  à  plus  grande  condanin3tion(commedic 

faii:ft 


SVR   LA    I.    A    TIMOTH. 


lOp 


Uj.hï'i,  ûinû  laques  )  (î  nous  nepenfons  de  nous  y 
employer  auec  crainte  &  humilité.  S'il  y  a  de 
Fambition,que  nous  appetions  d'tftrc  vcus,& 
tle  nous  faire  valoir.malheur  fur  nous,noflrc 
condamnation  eft  tant  plus  gricue.  Car  fi  vn 
homme  qui  eft  appelé  à  l'ofiice  d'enfeigner, 
ne  chemme  côme  il  doit  pour  l'édification  de 
tout  le  peuple,  s'il  ne  s'acquitte  fidelemét  de 
fon office,  l'honneur  auquel  il  aura  efté  mis, 
luy  couftera  trop  cher ,  il  vaudroit  mieux  que 
iamais  n'euft  fceu  que  c'cft  de  chaire  ,  ne  de 
l'office  qui  luy  elloit  comrais.que  d'auoir  oc 
.  cupé  vne  telle  place  ,  &  n'auoir  point  ferui  à 
Dieu  cormneildeuoit.  C'eft  auûivnechofe 
facree  que  la  iuftice&la  conduite  des  Magi- 
ftrats.Mais  quoy?qu3nd  ceux  qui  font  eleus  & 
ordonnez  pour  gouuerner ,  font  en  fcandale, 
qu'il  y  a  des  corruptions  il  grandes, que  ceux 
•u'on  penfe  qui  deuroycnt  donner  bon  exem 
ple.n'ont  en  eux  que  haines  &  faueurs,  au  lieu 
d'équité  &  droiture.que  ceux-là  ne  fc  fouciét 
de  fctuir  à  Dieu  ne  maintenir  fon  honneur.ce 
leur  eft  tout  vn  que  leschofes  aillent  en  per- 
dition ,  qu'elles  foyent  les  plus  confufes  du 
monde:que  les  blafphemes.que  les  paillard"i- 
fes  &  autres  vices  foyent  fupportez  ,  &  qu'au 
lieudemonftrerbon  exemple, ils  foyent  con 
tempteurs  de  Dieu  &  de  fa  parole,&  qu'ils  ne 
demandent  fiiion  que  la  bride  foit  lafchee  à 
tous  vices, qu'il  y  ait  vne  licence  desbordee  à 
tout  mal, que  lei  bons  foyét  opprimez  &  foui 
lez, qu'il  y  ait  double  aulne  &:  double  mefure, 
qu'on  facetout  par  acception  de  perfonnei: 
quand  on  n'aura  point  failli,  que  neantmoins 
on  foit  incontinent  puni  au  double  ,  &  qu'on 
face  à  croire  aux  innocens  qu'ils  font  les  plus 
coulpables  du  mjnde,&  cependant  que  les 
autres  foyent  fupportez  :  &  quand  ils  auront 
commis  des  offenfes  fi  grieues  que  le  monde 
ne  les  peut  fupporteMue  neaiumoins  ils  de- 
meurent impunis.meimes  qu'on  leue  le  men- 
ton pour  les  endurcir  tant  plus  au  mal  :  &  ou 
efc-ce  aller?  Voila  donc  l'honneur  que  font  à 
Dieu  ceux  qu'il  a  eleuez  en  fa  place,  &lef- 
qnels  il  a  conftituez  comme  fes  lieutenans  & 
officiers.  Ainfi  donc  nous  voyons,  combien 
■que  fainft  Paul  ait  parlé  notâment  ici  de  l'or 
dre  &  des  hommes  &  femmes,&  pour  mettre 
règle  au  faind  Mariage, toutesfois  que  nous 
fommes  tout  enfeiçnez  en  commun  que  nous 
deuons  vfer  des  grâces  de  Dieu:&:  ceux(com- 
me  i'ay  dit)  qui  font  eleuez  plus  haut ,  qu'ils 
cognoiffent  auec  toute  humilité.iS:  crainte, 
qu'il  faut  qu'ils  s'acquittent  de  leur  deuoir, 
fçachans  qu'ils  a  iront  à  rendre  conte  àDicu: 
&  qu'ils  ne  dominent  pas  pour  Icuis  beaux 
y  eux, comme  on  dit ,  mais  c'cft  afin  que  Dieu 
foit  honoré  fur  tous,&  que  les  hommes  foyét 
mamtenus  en  bonne  paix. Et  voila  aufsi  pour 
fluoy  l'ay  touché  du  c5mencement,qu'il  nous 
fautobferuer  ceft  ordre  naturel  que  Dieu  a 
eftabli  entre  nous.  Car  iamaisnous  ne  pour- 
rons eltre  induits  de  refpondrc  à  noftre  vo- 


cation ,  c'eftàdirede  mettre  peine  à  faire  ce 
qui  eft  de  noitre  office  ,  finon  que  nous  con- 
templions pourquoy  &  à  quelle  fin  ne  ftre  Set 
gneur  appelle  chacun  de  nous  en  fon  cftat: 
c'cft  que  les  Miniftresdcla  parole  rtgaidtnt 
pourquoy  c'eft  que  ceft  office  leur  eft  donné, 
il  faut  conclure  que  ce  ii'tft  point  qu'il  y  en 
ait  quelque  certain  nombre  qui  foyent  regar- 
dez ,  &  qu'ils  parlent,  &:  que  les  autres  facent 
filéce,&  qu'on  prife  leur  fçauoir,  &  qu'on  fça 
ches'il  y  a  grâce  ou  nô. Pourquoy  donc?C'eft 
pourl'edificatiô  de  tous.Noftre  Seigneur  a-il 
voulu  q  ie  foye  ici  en  chaire  pour  elTre  regar- 
dé.-Mais  il  a  voulu  que  ie  foye  côme  vne  trom 
pette,afîn  de  recueillir  à  iby  &  en  fon  obeif» 
lance  le  peuple  qui  eft  fien,  &  que  ie  fove  du 
troupeau  comme  les  autres.  Quand  donc  nia 
voix  fera  ouye  ,  c'eft  afin  &  que  vous  &  moy 
foyons  tous  affemblez  pour  eftre  le  troupeau 
&  de  Dieu  &  de  noflre  Seigneur  lefiis  Chrift-, 
Quand  donc  nous  Cognoiftrôs  cefte  fin  pour 
quoy  Dieu  nous  a  ici  mis,alors  il  ne  fera  plus 
queftiô  de  nous  eleuerimais  voyans  que  nous 
fommes  obligez  à  tous  ceux  qui  no'  font  com 
mis  en  char£;e,nous  ferons  enfcigncz  par  ce- 
fte cognoilTance  à  dire ,  Il  faut  que  nous  tra- 
uaillions  diligemment  fur  peine  d'eftre  coul- 
p-ibles  quand  nous  n'aurons  ferui  à  l'Eglife  de 
Dieu.felon  qu'il  nous  y  auoit  afluiettis.  Il  eft 
vray  que  l'office  d'anoncer  la  parole  de  Dieu 
eft  vn  grand  honneur  &  excellent  :  mais  fine 
laiiïc-il  point  d'eftre  vne  feruitude  ,  combien 
qu'elle  foit  honorable.  Aufsi  les  Rois  &  les 
Princes,&  toutes  gés  de  iuftice,encôres  qu'ils 
ne  foyent  point  comme  magiftrats  ordonnez 
en  quelque  office  fubalterne.mais  qu'ils  foy- 
ent princes  eux-mefmes,  pourquoy  eft-ce 
qu'ils  dominent  pardefTusles  hommesfpour- 
quoy  eft-ce  que  Dieu  a  inftitué  les  royaumes, 
les  principautez  &  feigneuries  ?  Eft-ce  qu'il 
vueille  feulement  eleuer  vne  poingnee  de  gcs 
par  defllis  les  autres  ?  Nenni  :  mais  il  a  voulu 
pouruoir  au  bien  des  petis,  quand  il  a  inftitué 
certain  ordre  &  police.  Ainfi  donc, quand  les 
Magiftrats  font  eleuez  en  ceft  hôneur,  qu'ils 
regardent  à  cefte  fin  que  met  ici  fainû  Paul, 
qu'ils  contemplent  l'ordre  de  nature ,  qu'ils 
cognoiflent.  Voici  noftre  Seigneur  qui  nous  a 
mis  en  fa  place,  mais  c'a  efté  à  ce  regarda  à 
cefte  fin, que  nous  fermons  au  bien  comman. 
Nous  fommes  donc  obligez  à  tous  ceux  auec 
Icfquels  nous  conuerfons,&  fur  lefquels  nous 
auons  authoritc  ,  qu'ils  nous  doyuent  eftte 
tellement  fuiets  ,  que  toutesfois  nous' ferons 
contables  deuant  Dieu.  Que  fi  maintenant 
nous  foufFrons  que  l'vn  foitfoullé,  que  l'au- 
tre vfe  d'aftuce  ou  violence,  &  que  tout  cela 
foit  fupporté  par  nous,il  faudra  que  nous  ve- 
nions deuant  le  luge  celefte,qui  fera  pour  rc« 
primer  tout  ce  qui  aura  eilé  desbordé  en  ce 
monde  ,  quand  il  nous  faudra  comparoiftre 
deuant  luy  :  il  ne  faudra  point  là  de  partie 
pour  nous  accuferj  il  ne  faudra  point  de  pro« 

o.iii. 


DIXNEVFIEME     SERMON 


no 

cureur  fifcal  pour  nous  tirer  en  caufe  ,  mais 
Dieu  fera  office  luy-mefme  pour  nous  àd- 
iourner  de  faire  noltre  procez,&  de  nous  con 
damner.  Voila  donc  comme  chacun  doit  ap- 
pliquer ceci  à  fon  profitrcjue  les  Minillres  de 
la  parole  foyent  fongneux  en  leur  endroit  de 
s'acquitter  de  leur  charge  ,  &  voyani  qu''' Y 
a  tant  d'imperfeûion  en  eux,  qu'ils  s'efForcet 
d'autant  plus,&  qu'auec  grande  folicitude  ils 
inuoquent  Dieu,  afin  qu'il  les  gouuernepar 
fon  fainft  Efprit ,  &  qu'il  leur  donne  la  vertu 
de  pouuoir  venir  à  bouc  de  leur  charge  qui  eft 
tant  difficile.Qujnd  ils  voyentque  le  monde 
eft  fi  malin  &  iî  peruers  ,  qu'il  reiette  toute 
bonne  doârine  ,  &  qu'il  y  tantdedifficultez, 
que  le  diable  drefle  tant  de  fcandales  ,  qu'il 
fenible  que  tout  doyue  périr  à  chacune  mi- 
nute de  temps ,  il  laut  qu'ils  prenent  plus  de 
courage,&  qu'ils  fe  fortifient  par  la  grâce  de 
Dieu.  Voila  donc  comme  les  tentations  qui 
font  à  caufe  du  péché, ne  nous  doyuent  point 
desbaucher  ne  dilhaiie  de  noftre  vocation, 
mais  nous  doyuent  tant  plus  inciter  à  faire 
noftre deuoir.  Les  Magiftrats  d'autre  cofté 
aufsi  ,  qu'ils  regardent  qu'ils  auront  vnefois 
à  rendre  conte  deuant  vn  luge  qui  marque  & 
note  maintenant  tout  ce  qu'ils  font:qu'ils  fe- 
ront coiilpables  deuant  luy  quand  ils  permet 
tront  que  la  dodrine  &  le  lugement  ferôt  ren- 
uerfez.  Et  pourtant  ils  doyuent  cheminer  en 
plus  grande  folicitude,  pourdire.Et  bié.il  eft 
vray  que  nous  deuons  ici  dominer,  mais  c'eft 
àcefte  condition  que  Dieu  foit  honoré  fur 
tout,  &  puis  que  fon  peuple  foit  maintenu  en 
bonne  paix  &  concorde  :  que  fi  nous  voyons 
qu'il  y  ait  desbeftes  farouches  quivienenc 


heurter  des  cornes  ,  qui  veulent  mordre  de» 
dentj,&  que  nous  n'y  puihions  pas  mettre  tel 
ordre  qu'ils  ne  facent  beaucoup  de  mal  &  de 
violence,cognoiflons  que  ce  font  les  fruits  de 
nos  péchez.  Et  cependant  recognoiflons  la 
grâce  que  Dieu  nouv  fait,  quand  il  ne  permet 
pas  que  tout  aille  enconfiiiion.mais  qu'il  ya 
encores  quelque  bride. Voila  donc  comme  les 
chaftimens  que  Ditunous  t  nuoye.nous  doy- 
uent foliciter  tous  enfemb.'e  à  faire  noftre  de 
uoir.  Et  cependant  que  les  maris  &  les  fem- 
mes retienentcequi  leur tft  ici  monftré.c'eft 
afçauoirde  gouuerner  paifiblemét  leurs  mef- 
nages,fçachan$puis  que  le  mariage  eft  vn  e- 
ftat  inilitué  de  Dieu  ,  qu'il  doit  eftre  aufsi 
maintenu  en  toute  pureté  &  cratnte,&  qu'vn 
chacun  aufsi  de  fon  cofté  doit  mettre  ptine  1 
cela.  Mais  pource  que  le  temps  ne  porte  pas 
que  nous  en  difions  plus  maintenant ,  le  relie 
fera  referué  pour  vne  autre  fois. 

Nous-nous  proftcrnerons  deuant  la  face 
de  noftre  bon  Dieu  en  cognoilïànce  de  nos 
fautes,  le  priant  qu'il  nous  les  face  tellement 
lentir  pour  nous  y  defplaire  ,  que  cependant 
il'nous  reforme  à  fon  image,  &  que  nous  ne 
dtmandiôs  linon  à  cheminer  félon  fcs  fainfts 
commandemens ,  &  que  nous  y  profitions  de 
plus  en  plus,renon^ans  à  toutes  inauuaifes  af- 
feûions  qui  nous  empekhent  dp  le  feruir.Et 
pource  qu'il  y  aura  toufiours  beaucoup  d'in- 
firmitez  en  nous,qu'il  nous  fuppotte  iufques  à 
ce  quM  nous  ait  pleinement  reueftus  de  fa  in- 
ftice:ce  qui  fera  quand  il  nous  aura  retirez  de 
celte  vie  corruptible.  Ainli  nous  dirons  tous 
de  coeur  humblement ,  Dieu  tout-puiflànt, 
Pereceiefte,&c. 


NEVFIEME     SERMON     SVR     LE    SE- 

COND      CHAPITRE.       ^ 

ij      Car  Adam  a  ejle  premier  forme,  CT*  Eue  après. 

14  Ef  Adam  na  point  ejléjeduit,  mais  la  femme  a  ejïé  feduite, 
CT*  a  ejïé  en  tranfprcpon. 

1 5  Elle  fera  toute  sfoisfauuee  par  génération  d'enfans  ,Jielle  de- 
meure enfoy,  O"  dileciion,  O'fanSiification  auec  madcjlie. 


N  fe  pourroit  esbahir  com- 
me Dieu  par  la  bouche  de 
fon  Apoftre  défend  ici  aux 
femmes  d'auoir  la  charge 
d'enfeigner,  veu  qu'ilafat 
cefle grâce  à  d'aucunes:  com 
me  nous  voyons  queDebo- 
ï^5'4«4' ra non  feulement  a  efté  ProphctelTc,  raaisa 
gouuernéle  peuple  de  Dieu. Il  pourroit  donc 
fembler  de  prime  face  qu'il  y  a  ici  quelque 
contredit.  Mais  nous  deuons  diftiiiguer  entre 
l'ordre  commun  que  Dieu  veut  elbe  obleruc 
Àes  hommes  pour  rcglc,&  entre  ce  qu'il  fait 
<i'vue  lajoneftrangc.Dieudonceu  uiftituant 


vne  loy  qu'il  nous  faut  garder  pour  liiy  0- 
beir ,  ne  derogue  p.is  cepen<lant  i  fa  llbe^* 
té.qu'il  nepuillè  pour  quelque  taifon  btfoiï- 
gner  d'vnc  autre  forte  ,  voire  par  miracle. 
Car  il  ne  faut  pas  que  Dieu  foit  fiiiet  à  la 
loy,  d'autant  que  toutes  loix  procèdent  de 
fa  volonté.  Non  pas  qu'il  nous  faille  rien  i- 
magincren  Dieu  linon  droit  &  iufte:car  c'eft 
vnblafpheme  déparier  d'vne  puillànceab- 
folue,  comme  fi  elle  eftoit  defreglee.  Mai» 
tant  y  a  que  Dteu  ha  fa  volonté  pour  loy  ,  8e 
ce  qu'il  ordonne  entre  nous,  ne  luy  doit ,  Se 
ne  peut  aufi  luy  porter  prciudice  ,  qu'il  ne 
face  ce  <nic  bon  luy  fcuibic.    Voila  donc 

comme 


SVR   LA   I.    A    TIMOTH. 


m 


«omme  Dieu  a  peu  vfer  d'vne  femme  pour 
gouuernerfon  peuple. Et  notons  que  ^'a  efté 
pour  derpiter  les  hommes  >  voire  coiiune  fi  il 
leurvouloit  taire  cefte  ignominie  ,  que  nul 
d'eux  ne  fuft  digne d'e(trc  en  eftat  ne  digni^ 
té.  Comme  s'il  faifoit  parler  les  pierres ,  vn 
éel  miracle  n'eft-il  point  pour  peruertir  Tor 
dre  de  nature?()uy  :  mais  c'ef^  la  condamna- 
tion que  Dieu  mettra  iur  les  hommes. Quel- 
que fois  il  pourra  bié  aduenir  ou  en  Tn  pays, 
ou  en  vne  ville,  queleschofes  feront  fi  con- 
fufes  ,  que  Dieu  Fera  comme  par  dcfpit  quM 
n'y  aura  ne  prudence,ni  équité,  raais  que  l'e- 
fiat  fera  tout  abbatu  :  li  le  monde  fe  caift,  & 
qu'on  iouc  à  l'esbahi,&  que  mû  n'ofe  fonner 
mot ,  Dieu  fufcitera  quelque  fol  qui  parlera. 
Ce  n'eft  pas  à  dire  pourtant  que  les  fois  ayét 
art<i£ce  de  pouuoir  profiterimais  Dieu  par  ce 
moyen  fe  moque  de  «eux  qui  veulent  eftre  re 
[Tutez  lages,d'autant  qu'ils  ont  la  bouche  clo 
fe.qu'ils  font  muets  quand  il  faloit  parler,  & 
les  met  là  corne  des  trocs  de  bois, qu'ils  n'ont 
ne  viuacité  ni  efpnt  non  plus  que  des  pier- 
res. Dieu  donc  fe  mocque  d'eux  ,  &  leur  fait 
opprobre  quand  il  ouure  ainlî la  bouche  d'vn 
muet ,  qui  remonHre  les  fautes  &  fcandales 
qui  fe  comettent,&  aufquels  on  ne  veut  point 
remédier.  Ainlî  notés  qu«de  ce  téps-la  Dieu 
a  fufcité  Debora,pour  monftrer  aux  ho^imej 
leur  lafcheté  quand  l'Eglife  ertoit  en  feruitu 
de,&  qu'il  n'y  auoit  plus  d'cfpoir.mais  cepen 
dant  il  n'a  pas  voulu  changer  ceft  ordre  corn 
mun:  il  y  a  eu  vn  miracle  qui  a  ferui  pour  ce- 
fte  hcure-la ,  &  fans  preiudice  ,  comme  nous 
auoRS  déclaré.  Nous  voyons  donc  en  fomme 
qu'il  n'y  a  point  de  contredit  en  ce  que  Dieu 
impofe  vne  loy  que  nous  deuont  garuer,&  en 
tre  ce  que  par  ia  vertu  il  fera  côme  extraor- 
dinaire,qu'il  feia(di-ie)  des  chofes  qui  ne  fe 
lont  point  réglées  à  la  façon  cômune.Q^nt 
À^r/S.  à  ce  qu'il  a  efpandu  de  Ton  ûmd  Efprit  au  tô 
M,  mencement  de  l'Euangile  fur  les  femmes auf- 

fi  bié  que  fur  les  homes, &:  qu'il  y  enaeud'au 
cunesqui  ont  eul'efpritde  prophétie,  cela 
aufsine  contreuient  p.>iiit  à  ce  queditfainâ 
Paul.  Car  les  filles  de  Philippe,  combien  que 
j^n  ,j  Dieu  leur  euft  donné  la  grâce  de  propheti- 
_^  '  '  fer  ,  n'ont  pas  eu  pourtant  l'office  de  parler 
en  l'afleinblce ,  mais  Dieu  s'en  eft  ferui  pour 
orner  l'Euangile  :  Se  quar,d  elles  ont  eAé  en 
côpagnie  de  femmes, Li  t  lies  ont  defployé  la 

frace  qui  leur  elloitdô'nnee:  côme  il  pourra 
ien  aduenir  qu'vnc  femme  en  fa  maifon  au- 
ra plus  de  prudence  que  fon  mari ,  &  en  vftra 
pour  gouuerner  fa  famille.  Nous  voyons  que 
la  maifon  de  Nabal  euft  cfré  perdue  fans  la 
i-S<».it.  prudence  d'Abigail.Ainfi  donc  en  aduiendra 
'■*•  il  quelque  fois,  &  vne  femme  douée  de  telles 

grâces  pourra  bien  faire  ce  qui  eilde  fon  offi 
ce  en  toute  humilité  &  modeûie  ,  tellement 
qu'elle  fuppleera  s'il  y  a  faute  en  fon  mari. 
Mais  cependant  n  faut-il  que  ccA  ordre  que 
Dieua  eïtabli,ciene.  Voila  donc  ce  que  nous 


auons  à  retenir  de  ce  pallâge.  Et  ainfi  con-< 
cluonsque  la  feinmedoit  élire  fuiette  ,  8c  Ce 
doit  tenir  quoye,côme  fiinû  PauU'ordonnc 
ici.  On  pourroit  cependant  faire  vne  que.» 
ûion  :  car  ùiaâ  Paul  amené  ceft  argument 
pour  môftrer  que  les  femmes  ne  doiuét  point 
auoir  la  charge  Se  l'office  d'enfeigner,  d'au- 
tant qu'elles  font  fuiettes,&  qu'elles  ne  doi- 
uent  point  auoir  l'authori  té  de  parler.  Or  il 
s'enfuiuroit  par  cela  que  nul  ne  pourrait  en- 
feigner ,  finon  qu'il  fufi  Roy  ou  prince.  Lee 
Pafteurs  de  l'Eglife  ne  font-ils  pas  futets 
aux  Magiftrats  ?  NcantmoinsC  elt-ce  que 
Dieu  les  enuoye,&  qu'il  leurdomie celle c5- 
mifsiondegouuerner  fon  peuple,  quant  ice 
qui  concerne  le  regine  fpirituel.  La  refpon- 
fe  à  cela  ell.qu'vn  homme  pourra  bien  félon 
quelque  regard  eûte  fuict,&  cependant  il  ne 
laifTera  pas  d'auoir  authorité  félon  vn  autte 
regard diuers  :  côme  nous  fçauons  que  Dieu 
a  feparé  ces  deux  chofes,  l'eftat  de  police  ter 
reftre  ,  &  le  régime  fpirituel  de  fon  Eglife. 
Voila  les  Magiftrats  qui  dominent ,  ils  font 
afsis  au  fîege  de  iultice,  Dieu  leur  a  donné  1» 
glaiuepour  gouuernerfon  peuple.  Or  d'au- 
tant que  les  Pafteurs  6c  les  Miniftres  de  Ia 
parole  de  Dieu  font  membres  du  corps  ,  il 
faut  qu'ils  foyent  fuiets  aux  Magiftrats:  mais 
cependant  cela  ne  derogue  point  à  l'authori- 
té  de  la  doilrine  qu'ils  portent  ,&  qu'ils  ne 
prefidentenla  vertu  &  au  nom  de  Dieu  fur, 
toute  hautefle  terrienne,c5me  il  eft  dit  en  le-  '"•'•'^ 
remie  ,  le  t'ay  conftitué  fur  les  royaumes ,  Se 
fur  toutes  principautez.  Quant  eft  donc  de» 
Miniftres  de  la  parole  de  Dieu,  en  leurs  per- 
fonnes  entant  qu'ils  font  homes,  il  faut  bien 
qu'ils  foyent  fuiets  aux  loix, qu'ils  fe  rendent 
obeiflâns  aux  Magiftrats ,  &  qu'ils  leur  por- 
tent honneur  &  reuerence  :  mais  cependant 
qu'ils  cognoiflent  que  le  Maiftrc  auquel  ilc 
feruent ,  aaiithoritc  &  empire  fouuerain  fur 
toutes  créatures.  Se  qu'ils  parler  en  fon  nom: 
&  pourtant  que  leurdodrine  n'eft  point  fu- 
iette  ne  bridée  à  ceux  qui  voudront  s'eleuer: 
mais  pluftoft  qu'ils  regardent  â  ce  que  dit  S. 
Paul  en  la  féconde  des  Corinthiés,  c'eft  .ifça  *•  C""» 
uoir.d'abbailTer  toute  hautefle  qui  fe  vondra  lO  .f. 
eleuer  contre  lamaicftéde  noftre  Seigneur 
lefusChrift,  &  tenir  tous  fens  captifs  ,Sc  ré- 
primer tous  appetis  desbordeï  qui  ne  peuuét 
foufFrir  nulle  fuiettion  ni  obeiflànce.  Voila 
donc  côme  félon  plufieurs  regards  vn  home 
pourra  eftre  fuiet,&  pourra  eftre  en  authori- 
té.  Mais  quant  aux  fenunes.il  y  a  cefte  raifoii 
que  ûin£t  Paul  a  ci  deflus  amcnee,que  Dieu  a 
ellabli  vne  règle  inuiolable  qui  doit  durer  iuf 
ques  en  la  fin  du  monde  :  puis  que  l'home  ell 
créé  pour  le  chef  de  la  femme,  Se  que  la  fem- 
me eft  vne  partie,  &  comme  vn  accefloire  de 
l'hôine,  il  faut  qu<  nous  fuiuions  ce  train-la, 
te  que  grans  8c  petis  s'y  rangent.  Et  cepen- 
dant cognoiflons  fi  ces  chofes  vont  mal ,  & 
qu'il  y  ait  des  confiifions  grandes  nonfeule- 
Oi  iiii. 


DIXNEVFIEME     SERMON 


114 

ment  aux  maifons ,  mais  en  l'eAat  publique, 
voire  tant  au  régime  fpirituel  qu'à  la  police 
terreftre,  cognoilFons,  di-ie  ,que  Dieu  nous 
veut  faire  honte  par  cela,&  nous  monftre  que 
nous  ne  fommespas  dignes  qu'il  foit  comme 
afsis  au  milieu  de  nous  pour  y  auoir  toute 
ïCt.^A.  ''i3'l^'^''^s,raais  qu'il  nous  abandonne:  cômeil 
dit  par  fon  Prophète  Ifaie  ,  qu'il  fera  régner 
les  femmes  &  les  petis  enfans,  c'eft  pour  dé- 
clarer qu'il  quittera  la  prééminence,  &  que 
tout  fera  diflolu  &  difsipé.  Quand  les  cho- 
fes  font  ainfî  confufes ,  cognoifTons  que  c'eft 
vne  iufte  vengeance  de  Dieu  pour  nous  met- 
tre en  opprobre  .d'autant  que  nous  ne  fom- 
mes  pas  dignes  qu'il  preiîde  au  milieu  de 
nous.  Au  reile.qu'yn  chacun  cependant  regar 
de  à  foy,  Se  qu'il  foit  comme  refueillé,  &  que 
nous  fumions  ce  qui  nous  elt  ici  déclaré  par 
faind  Paul, c'eft  de  ne  point  nous  rebecquer 
contre  l'ordonnance  de  Dieu.  Or  venons 
maintenant  à  ce  qu'il  adioufte,  Que  la  femme 
fera  fiHuee  par  génération:  c'eft  à  dire  en  por 
tant  des  enfans, -i>oirr  mny en nant,dn-il,qii  el- 
le perjifle  en  foy  ^  en  charité  ,  gr  auec  >iV 
fainde  &  attrempanee.  Sainû  Paul  non  fans 
caufe  adioufte  cefte  confolation  pour  adou- 
cir cefte  triftefle  que  les  femmes  pouuoyent 
conceuoir  de  ce  qu'il  a  dit  auparauant ,  c'eft 
afçauoir  qu'elles  font  caufe  en  la  perfonne 
d'Eue,  de  la  ruine  que  nous  voyons  fi  mifcTa 
blc  i'ur  tout  le  genre  humain.  Nous  ioinmei 
maudits  de  Dieu ,  nous  fommes  enfans  d'ire, 
le  diable  domine  fur  nous  ,  nous  fommes  en 
feruitude  de  mort  eternelle.il  n'y  a  que  cor- 
ruption enneftrcnature:brief,nous  ibmmes 
du  tout  abyfmez.Et  qui  en  eft  caufe? Les  fem 
nies:elles  font  ici  rédues  coulpables,  &  Dieu 
prononce  ceft  arreft-la  qui  eft  pour  les  faire 
defefperer.fi  elles  ont  quelque  crainte  &  ap- 
prehenfion  de  l'ire  de  Dieu.  Or  noftre  Sei- 
gneur veut  bien  humilier  fes  créatures  ,  mais 
ij  ne  les  veut-il  pas  mettre  en  defefpoir,  que 
elles  n'ayent  toufîours  quelque  moyen  :  car 
après  qu'il  a  abbatu,  il  redrene ,  comme  nous 
en  voyons  ici  vn  bel  exemple.  L'orgueil  des 
femmes  a  bien  efté  condamné  par  fain£l  Paul 
quand  il  a  monftré  que  fi  elles  fe  veulent  glo 
rificr ,  qu'elles  regardent  à  Eue  ,  qui  nous  a 
tous  ruinez  ,  &  nous  a  mis  en  la  malediûion 
de  Dieu,&  lous  la  tyrannie  de  Satan, voire  & 
le  tout  par  fon  outrecuidance.  Puis  qu'amfi 
eft,que  les  femmes. ne  Icuent  plu^  le  bec  :  car 
ici  toute  leur  prcfomption  eft  afllz  abbatue. 
Mais  cependant  ilyauoit  danger  (comme 
nous  auons  dit)  que  les  ftinmes  ne  defaillif- 
fent ,  &  qu'elles  ne  pcrdiflen:  tout  courage, 
comme  tî  Dieu  leur  fcrmoit  ici  la  porte  de  fa 
lut,  comme  s'il  les  rcndoit  incapables  d'cfpe 
rer  en  luy.  Sainû  Paul  donc  adioufte  vn  bon 
remède  &  conuenable  à  cela,&  leur  dit, Que 
oonobftant  le  mal  qui  eft  procédé  d'Eue  ,  û 
eft-ceque  Dieu  ne  veut  point  faire  defefpe- 
ter  du  tout  les  fcnuncs  :  il  fe  contente  de  lc< 


tenir  en  bride ,  afin  qu'elles  ne  s'eJeuent  pas, 
mais  pluftoftqu'clies  s'humilient  :  &  cepen- 
dant qu'il  ks  rappelle  .î  foy,&  leur  donne  le 
moyen  de  retourner  en  l'eftat  dont  elles 
font  decheutes ,  c'eft  afçauoir  (dit-il)  quand 
elles  cognoiiFent  leur  vocation.  U  eft  vray 
que  fainèt  Paul  met  ici  vne  efpece,  de  porter 
les  enfans.mais  fous  cela  il  compiéd  ce  qu'il 
dit  aufsi  notamment  de  la  malediftion  de  la 
femme  quand  elle  eft  afluiettie  à  telles  pei- 
nes. Car  nous  f^uons  que  les  femmes  ayans 
conceo  ne  font  pas  fans  peine  &  fans  fafche- 
rie.nous  voyons  qu'elles  font  dcl"gouftees,il 
y_a  aufsi  beaucoup  d'accidés,  &  puis  elles  fça 
uét  la  peine  que  c'eft  de  porter  enfans:  l'heu 
re  vient-elle  d'accoucher?  elles  cognoiflent 
ce  qu'emporte  la  malediftionde  Dieu  laquel 
le  nous  auôs  défia  touchée.  Il  faut  puis  aprej 
qu'elles  ayêt  fouci  &  folicitude  nuiû  &  lour 
de  nourrir  leurs  enfans ,  que  la  viande  qu'el- 
les prendront,  foit  làconuertieenlaiû:  l'en- 
ten  des  femmes  qui  font  nourrices rcar  ûinft 
Paul  ne  parle  point  ici  de  ces  délicates  qui  le 
veulent  exempter  de  la  condition  des  tein- 
mes.mais  des  femmes  fidèles  qui  s'acquittent 
de  leur  deuoir,  &  quand  elles  font  me;cs, el- 
les cognoifTcnt  à  quoy  Dieu  les  aaffuietties,' 
&  portent  cela  patiemment.  Amfi  donc  nous 
voyons  que  fous  vne  efpece  fainft  Paul  a  vou 
lu  ici  admonefter  que  fi  les  femmes  fe  fju- 
mettent  de  leur  bon  gré  &  en  toute  patien- 
ce a  ce  que  Dieu  leurcommande,&:  que  por- 
te leur  eîUt,  c'eft  vn  facrifice  qui  eft  agréable 
à  Dieu,&  que  la  malediftion  qui  auoit  efté  mi 
fe  fur  toutes  femmes  en  la  perfonne  d'Eue, 
eft  comme  anéantie, car  Dieu  les  reçoit  en  fa. 
grâce  &  en  fon  amour.  Cependant  pource 
qu'on  pourroit  trouucr  des  femmes  Païen- 
nes Se  incrédules  qui  feront  bonnes  mères.  Se 
trauailleront  pour  leur  mefnage  volontaire- 
ment ,  fainô  Paul  ne  fe  contente  point  d'a- 
uoir  mis  ce  qui  peut  eftre  commun  aux  fem- 
mes qui  n'ont  nulle  crainte  de  Dieune/eli- 
gion  ,  mais  il  dit  qu'il  faut  que  la  foy  y  foit 
auec  &  charité,  &  qu'elles  viucnt  faincteniét, 
&  qu'il  y  ait  ceitc  att;  emparée  &modtftie 
dont  il  auoit  fait  mention  ci  dtfllis.Or  fur  ce 
partage  nous  auons  à  recueillir  vne  bonne  do 
ftrine,&  vtile  à  tous, afçauoir  tant  hômts  que 
femmes  ,  c'eft  que  Dieu  ne  nous  veut  point 
pleinement  rendre  confus  quand  il  nous  pro 
pofe  nos  fautes ,  mais  feulement  qu'il  nous 
veut  humilier, voyant  la  prefomption  qui  fe - 
roitautremét  en  nous.  Il  faut  donc  que  Dieu 
rabibate  les  clou.t  tant  aux  homes  qu'aux  fein 
mes  ,  &  qu'il  vfe  ds  violence  ,  veu  qu'il  n'eft 
point  aifé  de  corriger  la  hauteflc  qui  cil  en 
nous  finon  par  force  :  mais  tant  y  a  neant- 
moinsqu'encores  Dieu  appaife  loufiours  û 
rigueur  Se  i'adoucit ,  ttlkinent  qu'il  ne  veut 
point  que  nous  perdions  courage. Et  cornent 
fait-il  cela?  C'eft  en  nous  donant  bon  efpoir, 
Cl-  nous  prouicccu  que  quelques  fautes  qu'il 

y  ait 


SVR  LA    I.    A   TIMOTH. 


115 


y  ait  en  non; ,  encoresne  noU5  veut-iJ  point 
riietter>  corne  nous  envoyons  icivn  ex-éple 
noc.ible.Et  ainfi,  côbien  que  les  femmes  fuy- 
ent  d'vnc  nature  craintuie  ,  &  «qu'elles  peri- 
royét  aiiec  ce  regret-ci  fi  on  les  voiiloit  mat- 
ter,  &  fi  on  leur  vouloit  mettre  le  pied  iur  la 
gorge  ,  fi  cft-ce  que  fainit  Paul  ne  leur  don- 
ne point  occafion  de  le  faiclier  &  placquer  là 
tout  :  poiirce  qu'on  leur  pourvoit  icprtjclier 
qu'elles  ont  eftc  caufe  d'auoir  ruiné  tout  le 
genre  humain, ii  eft-ce  qu'encores  il  leur  pro 
pofe  ici  la  bonté  de  Dieu,  pour  leur  déclarer 
que  cela  n'cmpt fcliera  point  leur  ialut, voire 
moyennant  qu'elles  ne  facent  point  des  re- 
iiefclies.ne  des  endurcies.  Notons  bien  donc 
que  fainét  Paul  vfe  ici  d'vne  confolation  qui 
eft  bien  propre.quand  il  monftreaux  femmes 
que  leur  falut  leur  eft  mis  au  deuant,  mefmes 
en  la  condânation  qu'elles  fent^t  pour  leurs 
peehezrc'eft  gr.ird'  chofe.Car  fi  Dieu  punif- 
foit  les  femme.'-, &  puis  que  de  loin  il  leur  mô 
ftraft  quelque  efperance  de  falut  ,  il  leur  de- 
ueroit  ûifnrc:  mais  c'tft  beaucoup  plus  quad 
elles  peuuentcontemplerla  bonté  de  Dieu  & 
fi  grâce  en  la  punition  qu'elles  endurent  & 
qu'elles  Tentent  pour  leur  péché.  Car  (c'ôme 
défia  nous  auonsdit)pourquoy  eft-ce  queles 
femmes  portent  leurs  enfans  auec  fi  grandes 
fafchcries?pourquoy  eft-ce  qu'elles  cnduret 
fî  grandes  djulturs  au  trauail  S:en  l'enfante 
met:  pourquoy  eft-ce  que  celeureft  vnecho 
fe  fi  pan  bl"  de  nourrir  leurs  enfans?Tout  ce 
la  procède  de  la  malediftion  de  Dieu.  Or  S. 
Paul  leur  baille  ici  vn  miroir  à  i'oppofîte, 
c'eft  qu'en  cefte  punition  elles  apprehendct 
la  grâce  de  Dieu.  Et  pourquoy?  Car  fi  elles 
font  patientes  &;paifibles,&  qu'elles  ne  fe  re 
becquent  point  à  tH  chaftimét  que  Dici;  leur 
cnuoye  pour  leur  falut,  qu.âd  il  Icurfuit  en- 
durer douleur  &  trSiiail ,  qu'il  fiut  qu'elles 
mettent  peine  à  nourrir  leurs  enfans, voila  vn 
facrifice  agréable  à  Dieu,&  qu'il  accepte  :  Se 
qu'il  faut  que  les  femmes  fe  cognoifftnt  &  re 
pute  it  en  cela  bien-heureui'es ,  que  Dieu  n'a 
point  voulu  tellement  dcfployer  fon  ire  en 
l'otfenfe  qui  a  efté  côraife  en  la  perfonne  de 
Eue,  que  cependant  il  ne  foit  toufîours  de- 
meuré leur  Père  ,  &  qu'il  ne  leur  pionftre  fi- 
gne  d'amour  paternelle.  Notons  tien  donc 
que  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  fainft  Paul 
a  ici  fait  mention  exprefle  du  trauail  qu'ont 
les  femmes  à  enfanter ,  &  de  tout  le  refte  qui 
eft  d'exercer  leur  office,afçauoir  de  gouuer- 
ner  leur  mefiiage.  Il  eft  vray  cependant  que 
les  mocqueurs  de  Dieu  trouuer^t  eftiançe  q 
fainft  Paul  parlant  ici  du  falut  des  femmes, 
les  ramené  à  cela  ,  que  fi  eftans  enceintes  el- 
les portent  patiemment  leur  douleur,  &le 
trauail  aufsi,&  qu'elles  nourriflent  leirrs  en- 
fâs, c'eft  pour  retourner  en  la  grâce  de  Dieu. 
Mais  quoy?contentons-nous  que  le  (ainft  E- 
fprit  qui  eft  iuge  competen,t  ,  en  a  ainfi  pro- 
noncé.  Et  pourtant  ne  trouaons  pdiht  cela 


étrange:  car  combien  queles  homes  veulent 
félon  leur  phantafie  iuger  des  vices  &  des  ver 
tus,  tant  y  a  que  c'eft  Uicu  feul  auquel  il  ap- 
partient  de  prifernos  œuures,  8c  dedirece 
qu'elles  valent.Dieu  a-il  condamné  quelque 
chofefnousauons  beau  laprifer,tout  cela  ne 
feruira  rien. Au  contraire, ce  qui  nous  eftcon 
temptible,  Dieu  l'cftiine&  le  tient  précieux. 
Comme  voila  du  trauail  des  femmes  qu'elles 
onten  portant  kiirsenfinsibien  ellvray  que 
félon  le  mode  cela  ne  fera  giieres  prile:  mais-' 
fi  elles  rct;3rdcnt  à  Dieu,  &  qu'elles  cognoif 
feiit  qu'il  les  a  là  a{luieties,que  ce  font  les  tra 
ces  du  péché  d'Eue:  quand  en  tel  combat  el- 
les gemiflent  &  loul'pirent  à  luy,il  reçoit  vne 
telle  obeiflance.Brief.il  nous  tant  retenir  ce-  ,  t,  rr' 
fte  leçon, Q^'obeifsâcc  vaut  mieux  que  tous  ,, 
les  facrifices  du  monde.Et  mefmes  ceci  n'eft 
pas  feulement  pour  rembarrer  les  mocque- 
ries  des  gens  profanes ,  &  des  contempteur^ 
de  Dieu, mais  pourabbatre  l'orgueil  des  hy- 
pocrites ,  lefquels  forgent  ci:  baftiflent  ie  ne 
fçay  quelles  refueries  à  leur  pofte  pour  s'e- 
xempter du  mariage.  Corne  en  la  Papauté,  il 
femble  qued'eftreen  mefnage  ,  c'eft  vn  eftat 
poilu  du  monde':  voila  côme  les  Nonnains  & 
les  Moines  ,  &  toute  cefte  ordure  de  caphars 
ont  accouftumé  de  parler ,  Ceftuy-ci  eft  du 
monde,  c'eft  à  dire  marié  :  ce ftuy-la  eft  d'E- 
glife, c'eft  à  dire  fpirituehen  parlant  ainfi, ils 
tienent  le  mariage  comme  vne  chofc  profa- 
ne &'pollue.  Et  c'eft  vne  honte  qu'vn  Pape, 
ceft  Antechr'ft-la  ,  a  bien  ofé  vomir  ce  blaf-  ^ 

phcmc diabolique.  Que  ceux  qui  fontenla  ""'•'•• 
chair, ne  peuuent  plaire  à  Dieu  :  c'eft  à  dire, 
ceux  qui  font  mariez.  Voila  les  belles  expo- 
fitions  de  PEfcriture  qui  fsnt  proccdees  de 
cefte cauerne  d'enfer.  (5r  ici  qu'cft-ce  qu'il 
nous  eftmonftré  en  l'authorité  de  Dieir?a(ça 
uoir  que  fi  les  Moines  &.  les  Nonnains  fe  gld 
tifient  en  leur  chnfteté  ,  &  deviure  en  oifîue- 
té,  &  appellent  cela  eftat  (pirituel ,  que  Dieu 
declarequec'eftvn  train  detcftable  &■  mau- 
dit. Apprenons  donc  que  fi  vne  femme  eft  en 
fon  mefnage,  qu'elle  foit  empefchee  après 
{es  enfins",  à  les  torcher  ,  h  les  pigner  ,  à  les 
efpli!cher:oufielle  eft  nourrie*  ,  qu'elle  foit 
nuift  &:  iour  debout  ,  qu'elle  endure  froid  & 
chaud  ponr  leur  donner  la  mammelle  ,  qne  fi 
elle  fupporte  cela  patiemment,  fçachant  que 
c'eft  que  Dieu  ord5ne,S:'qu'il  approuue, ce- 
la luy  eft  vn  facrifice  de  bonne  odeur.  Que 
donc  les  Nonnains  demeurent  en  leurs  con- 
uents  &:  en  leurs  cloiftres ,  &:en  leurs  bour- 
deauT  de  Satan  :  ie  di  mefmes  encores  qu'el- 
les ne  hilTent  point  putains  côme  elles  font, 
corne  il  y  a  encores  pis  de  ces  abominations 
de  Sodome  ,  faifans  des  chofes  fi  énormes  & 
fi  abominables  que  c'eft  vne  horreur  ;  enco- 
res, di-ie,  que  toutes  ces  vilenies-la  n'y  fuA 
fent  point ,  fi  eft-ce  que  toute  la  chaftetc  que 
elles  pretendent,n'ert  rien  enuers  Dieu  ,aii 
f  rix  de  ce  qu'il  a  ordoriné,<:''eft  afyiuoir  qac 

p.i. 


Tl4 


DIXNEVFIEME    SERMON 


com'jien  que  ce  Toyent  chofes  cotemptibles , 
&  qui  femblent  eftre  de  nulle  valeur  ,  qu'vne 
femme  ait  peme  d'adrefler  fon  mefnage  ,  de 
nettoyer  les  ordures  dt  fes  enfans ,  de  tuer 
les  poux,&  autres  chofes  {emblablej,que  tout 
cela  lera  mefpnlé  ,  qu'on  ne  le  daignera  pas 
mefines  regarder,  ce  font  toutestois  facrilî- 
ces  que  Dieu  reçoit  &  qu'il  accepte  ,  comme 
fi  c'ertoytc  chofes  precicufes  &  honorables. 
Ainlî  donc, que  les  femmes  eftudient  ceftc  le- 
çon-ci &  iour  &  nui£V,afin  qu'en  premier  lie« 
elles  s'employent  à  leur  mefnage  :  quand  les 
femnes  feroyent  les  plus  parefk-iifesdiimon 
de  ,  il  eft-cequ'il  y  a  ici  allez  argument  pour 
les  refuciller,&  pour  corriger  cefte  lalcheté- 
li.  Et  cornent?  Qiiandnous  trauaillons,c'cft 
feruir  à  Dieu,&  non  point  aux  homes. Quand 
vu  mari  d'autre  part  verra  que  fa  femme  s'em 
ployé  tout  au  long  du  iour  à  faire  ce  qui  eft 
d."  Ion  oftîce.qu'il  regarde aufsi  à  quoy  Dieu 
l'appelle  ,  afin  de  faire  fon  deuoir  de  fon  co- 
fté:car  l'home  n'eft  pas  nay  à  oiiîucté  ,  ne  la 
femme  auAi.Ainiîdonc  que  les  tcmme^(com 
me  l'ay  dit)regardent  ici, car  li  y  aairezd'oc 
cafion  pour  corriger  toute  parclïè, quand  el- 
les veront  qu'il  cil  quellion  de  feruir  à  Dieu. 
Et  cômcnt?  quand  elles  mettront  la  main  à  la 
pafle  (comme  on  dit)  &  qu'elles  s'applique- 
ront à  bon  vlage  pour  ne  point  fuir  la  iuict- 
tion  à  laquelle  Dieu  les  a  foumifes  ;  car  c'eft 
fe  rebecquer  contre  nature,  quand  on  ne  fuit 
pas  la  vocation  ,  qui  eilnofftre  vraye  reigle, 
c'eft  à  dire  ce  qui  cil  de  faire,  &  ce  que  Dieu 
ordonne  à  chacun  de  nous  ,  félon  Peftat  au- 
quel il  eft  appelé.  Ainli  donc, que  les  femmes 
ayent  ce  but-la  pour  dire,  Or  lus  ,  encores 
que  le  monde  ne  regarde  point  à  moy,  lî  cft- 
ce  qu'il  me  faut  employer  ici,  car  Dieu  me  le 
commande.  Voila  quant  au  premier,  que  les 
femmes doaient  prendre  vne  occafion  àeftre 
diligentes  :  &  puis  elles  ont  aufsi  à  conlîde- 
ler.que  quand  elles  s'acquitteront  de  leur  de 
uoir  en  taifant  ce  qui  eft  de  leur  office  ,  cela 
eft  accepté  de  Dieu  ,  combien  qu'il  foit  mef- 
prilc  des  hommes.  Et  (i  on  du,  Et  qu'tft-ce 
que  celaf  Vne  femme  fera  fon  mefnage  ,  elle 
hiera  fi  quenouille,  &ccla  eftiemcftier  des 
femmes.Comme  mefines  il  y  en  a  de  ces  fols, 
lefquels  quand  ils  parleront  de  la  quenouil- 
le des  femmes, &  de  traitter  les  enfans, reict- 
teront  tout  cela  ,  Slïe  mefpriferont.  Mais 
quoy?  Le  luge  celeftc  qu'en  dit-il?  Qu^e  cela 
luy  eft  vne  chofe agréable,  &  qu'il  l'accepte, 
&  que  cela  viendra  en  fcs  conte'..  Aiaii  donc, 
que  les  femmes  apprenent  de  le  rcliouir  qu.ïd 
elles  feront  leur  deuoir:&  n  cela  eft  contem- 
ptible,  que  ccfte  confolation  addoucilfe  tout 
le  regard  qu'elles  pourront  auoir  quant  au 
monde  ,  pour  dire  ,  Dieu  -ae  voit  ici  ,  &  fes 
Anges  ,  lelqutls  font  tefmoins  fufHfans  de  ce 
que  ic  fay  ,  encores  qu'il  ne  l'oit  aj>pronué 
quant  au  monde.  Voila  ce  qu'oiu  à  noter  les 
femmes.  Mais  cependant  (  comme  i'ay  dit) 


il  faut  aufsi  que  les  hommes  de  leur  cofte  re 
cueilléc  ici  inftrudion.Car  lîles  femmes  font 
fauuees  quand  elles  allaitteront  leurs  enfans 
de  leurs  mammelles  ,  quand  elles  les  torche- 
rant  &  nettoyèrent ,  quand  elles  auront  cfté 
falchees  à  les  portertauhi  les  hommes  quan4 
ils  prendront  peine  à  nourrir  leur  mefnage, 
qu'ils  trauailleront ,  félon  ce  qui  eft  dit ,  Tu  r  -,  ' 
viuras  en  la  lueur  de  ton  vifige:  quand  donc  • 

les  hommes  chacun  en  fon  ineftier&  en  fon 
eftat, mettront  peine  de  s'employer  là  :  &  s'il 
y  a  des  fafcheries  pour  le  mefnage, qu'ils  fup 
portent  leurs  temmes,  &.  qu'ils  leur  donnent 
courage,  qu'ils  les  aident  tant  qu'il  leur  fera 
polsible  ,  comme  Dieu  les  a  coniointsd'vii 
lieninfeparablc  :  quand  ils  feront  refueillez 
pour  leurs  enfans ,  qu'ils  en  auront  des  ibu- 
cis  ,  moyennant  qu'ils  portent  cela  patiem-» 
ment,  qu'il;  fe  reiiouillent,  voyans  que  Dieu 
lesbenit  enlcur  labeur,  ce  luy  font  autant 
de  facrifices ,  comme  nous  aaons  déclaré.  Si 
ceci  eftoit  bien  imprimé  au  cœur ,  il  eft  cer- 
tain qu'on  verroit  reluire  vn  autre  ordre  en 
mariage  qu'on  ne  fait  pas.  Mais  quoyPily  ea 
a  bien  peu  qui  fçachent  que  c'elï  de  feruir  à 
Dieu,  &  qui  fe  fondent  là.  Et  qu'ainli  foit.le 
mariage  fera  ici  célébré  en  la  compagnie  des 
fidèles,  mais  le  plus  fouuent  ceux-  qui  fe  pre- 
fentent  pour  palTer  vne  telle  obligation  &  li 
folennelle,  cognoilTent-ils  que  Dieu  prelide 
au  milieu  de  nous,  &  que  c'eft  en  fon  nom 
que  nous  llipulons  ici  les  promclles?  Co- 
gnoillènt-il'  cela!  Nenni  ;  mais  la  plus  part 
vienentici  comme  des  veaux  ,  &  des  moges. 
Sont-ils  deuant  la  chaire?  Ils  feront  lî  bien 
inftruits  ,  qu'ils  ne  pourront  dire  chofe  que 
ce  foit.  Il  fera  ici  parlé  de  l'office  du  man 
Se  deceluydela  femme, &  ils  n'y  entendront 
rien  du  tout,  non  plus  que  belles:  &:  puis 
encores  qu'ils  euffent  ouy  quelque  mot  pour 
eftrc  éditiez  ,  nous  voyons  que  11  toft  qu'on  a 
les  talons  tournez  ,  qu'il  n'eft  plus  queftion 
que  de  tous  dei>bordemens ,  Se  ceux  qui  font 
les  plus  dilTohis ,  ce  font  les  plus  vaillans, 
Q_nanddonc  le  faind  mariage  eft  ainlî  pro- 
fane,il  ne  fe  faut  point  esbahir  s'il  y  a  de  li 
grans  difcors  comme  on  les  voit ,  &  lî  Dieu 
s'en  retire.  Car  quand  nous  ferons  coinpa- 
railbn  de  ce  qui  eft  ici  cfcrit ,  &  de  l'eftac 
ainlî  corrompu  qu'on  k  voit  au  monde,  tant 
plus  auons-nous  à  gémir  ,  &  en  gemiirant  à 
nous  recueillir  fous  l'obc.llancc  de  iiollrc 
Dieu.  Car  li  la  plus  part  le  m  jcque  de  ce  qui 
eft  ici  monihc  par  Jaind  Paul,  que  les  hom- 
mes foyent  desbordez  i  toute  intempéran- 
ce,que  les  femmes  lovent  oifîues ,  &  qu'elles 
ne  deraanJent  lin  >n  s'exempter  de  tout  la- 
beur,&  que  tout  aille  en  dif  ipacion.gaidons 
nous  bien  de  rtlTcmbler  à  telles  gens  :  mais 
qii'vn  chacun  s'employe  à  ce  en  qiioy  Dieu 
l'aura  mis  en  ocuureique  li  les  bœufs  portent 
le  loug  quand  on  les  y  aura  accouftumez.quc 
noijs  qui  cognoiflons  à  quelle  fin  nous  fom- 

■    .   me» 


SVRLAI.    ATIMOTH. 


3»? 


me^  crcei ,  apprenions  de  porter  le  ioiigc|ue 
Dieu  nous  mettra  deflùs ,  c'tit  à  dire  qu'vn 
chacun  fe  range  à  fa  vocation.   Voiia  donc 
en  fomme  ce  que  nous  auons  à  noter  quant 
â  ce  mot  où  fainil  Paul  dit  ,  Que  les  femmes 
feront  ûuuees  portans  des  cnfans.  Venons 
maintenant  i  ce  qu'il  met  de  la  toy  &  chari- 
té ,  lanfiiHcation  &  attrempance.  l'ay  défia 
dit  que  c'tft  pour  difcerncr  entre  les  fidèles 
&  les  Payens.  Car  entre  les  Payens  on  y  a 
bien  veu  des  femmes  vertueufej^  voire  plus 
(  iedi  en  apparence  )  qu'on  ne  verra  quel- 
que fois  entre  ceux  qui  ie  reiiôment  cftre  de 
l'Eglife  de  Dieu. Or  donc  il  les  femmes  s'ac- 
quittent de  leur  deuoir  rculemenc  quant  au 
mefnage  pour  nourrir  leurs  enfans,pour  tra- 
uailler  en  la  maifon.ce  n'eft  pas  alTez:  car  il  y 
en  a  eu  (comme  nous  auoni  dit)  qui  n'ont  eu 
nulle  religion  ,  3c  cependant  n'ont  pas  laiflc 
toutesfois  d'auoir  ctfte  vertu  qui  eii  à  prifer 
quant  au  monde.    Apprenons  donc  que  ce 
n'tll  point  le  principal  que  les  femmes  tra- 
uaillent  aiiiiî  en  leur  mtfnagcmais  qu'il  faut 
que  la  foy  aille  dcuant  &  la  chanté  :  &  puis- 
qu'elles fbyent  femmes fainftes  ,  c'ell.i  dire 
que  la  crainte  de  Dieu  les  gouuerne  ,  &  qu'il 
y  aitcefteattrcmpâce  dont  il  auoit  fait  mcn 
tion  cideiTuç,  qu'il  y  air  ceftemodcftie,  que 
les  teinmes  n'appetent  point  de  fiipcrfluité 
ne  de  pompe,  nuis  qu'elles  ayent  celle  hon- 
te djnt  fâiticl:  Paul  a  parlé  par  ci  deuant.  Voi 
la  d  )nc  la  (  Dmme  de  ce  qui  eft  ici  mis  pour 
conclufion.  Or  nous  auons  à  obferuer  que 
quand  des  femmes  Payennes  Se  incrcduJcs 
ont  eflé  bonnes  mefiiagercs  ,  qu'elles  n'ont 
point  regardé  à  D.eu  :  Se  pourtant  que  cela 
n'a  p  Jint  I  lié  mis  en  conte  ,  &  ne  mente  pas 
d'eftre  réputé  pour  vertu.  Il  eftvrayquele 
monde  l'eft  mera  toufiours:  mais  deu.lt  Dieu 
cela  ne  vient  point  en  conte.  Et  pourquoy? 
Niusauôsd  fia  dit  qfivnc  féme  trauaillea- 
pre  •  (es  enfans,  ou  à  les  porter,ou  i  les  nour 
rir.&qu'tUe  s'aflliiettifle  pleinement  àlavo 
Ion  té  de  Dieu, que  celuv  fil  vn  Cicritice.  Et 
pourquoy?    D'autant  qu'elle  s'humilie  ,  co- 
gnoilîant  que  ce  font  autant  de  chaftimens 
pour  fes  péchez  :  cognoiflant  que  puis  que 
Dieu  a  prononcé  vne  telle  fentence  ,  que 
c'eftbien  raifonqaenul  ne  repli<|ue  à  l'en- 
contre-:  que  fi  vne  telle  obeiflance  n'yell, 
tout  le  relie  ne  fei-a  rien  que  fiimee.  Comme 
vne  femme  qui  ne  fera  point  injlruite  er  la 
foy  ,  &qui  n'aura  point  de  bonne  doélrine 
pourauoirefgardà  Dieu  :  ileftvray  qu'elle 
craindra  celle  ignominie,  qu'on  ne  la  mon- 
tre au  doigt  ,  qu'on  ne  fe  mocijue  d'elle 
quand  elle  ne  fera  point  bonne  nu  fnagere, 
qu'elle  ne  fera  point  en  bon  exemple,  mais 
puis  qu'elle  ne  tient  conte  de  Dieu  quant  au 
relie,  il  faut  qae  tout  cela  foit  reietté  ,  com- 
me de  fait  ii  ne  mérite  pas  d'ellrc  réputé  pour 
vertu. Ainfi  donc  ,  notons  bien  que  les  meil- 
ieurcsGCUuret  que  nous  puifsions  iàire,Befe-« 


ront  neantmoins  de  nulle  valeur,  niaisqur 
Dieu  lesrepiouue  fi  elles  ne  procèdent  de 
la  foy:car  c\ll  la  racine  de  laquelle  les  bons 
fruits  prouienét,&  Uns  ccfle  racine-U  il  n'y 
a  rien  qii'vne  belle  apparence,  mais  qui  n'a 
nulle  fermeté  en  iby.  Voila  donc  ce  que  no' 
auons  à  obferuer  ,  que  faincl  Saul  n'a  point 
adioullé  ici  en  vain  ce  mot  de  foy, pour  decla 
rer  que  toutes  les  vertus  qu'on  pouira  prifer, 
ne  feront  point  louées  de  DitiiCcomme  auf- 
fi  elles  ne  méritent  nulle  louange)  finon  que 
la  foy  en  foit  le  fondement  ,  &  quelles  pro- 
cèdent de  là.Et  puis  quand' lainét  Paul  a  part- 
ie de  la  foy,  ilmonllre  les  chofes  qui  fonc 
toufiours  coniointes ,  &  qui  font  comme  infe 
parables,  afçauoir  la  chanté  8c  fanftifica- 
tion.  Comment  ell-ce  que  nous  mon/Irons 
que  nous  renonçons  aux  abominations  de 
ce  monde  pour  nous  dédier  à  Dieu?  n'eft-ce 
point  par  la  foy?  Qm  elt  caufe  de  nous  vnir 
ainfî  tous  enfcmble  comme  frères  &  fœurs? 
n'eft-ce  pas  qu.îd  nous  cognoilTons  que  Dieu 
nous  a  choifis  pour  fes  entans?  Qm  cil  caufe 
aufsi  de  Pattrcmpance  ,  que  nous  ne  fommef 
point addonntz  ,;  ces  folies  mondainesrn'eft 
ce  pas  d'autSt  que  Dieu  nous  appelle  à  fheri- 
tage  ccleile,  &  qu'il  nous  monitre  q  ceux  quT 
s'attachent  à  ce  monde ,  n'ont  iamais  cogim 
que  c'eftde  la  vrayevie  nedefalut?   Ainll 
donc  ,  notons  que  tant  la  charité  que  la  fan- 
flification  &  attrempance  procèdent  de  la 
foy.   Or  c-ependant  pour  conclufion,  il  faivt 
aufsi  obferuer  en  vn  mot,  que  faind  Paul  n'a 
point  voulu  ici  eltablir  des  mérites ,  comme 
s'il  difoit  que  la  caufe  de  noflrefalut  fu/laux 
bonnes  ceuures,  que  les  fcmn>es  le  fauuaflent 
quand  elles  s'appliqueront -à  faite  Iturde- 
uoir,nenni  :  car  faind  Paul  n'encre  pas  ici  eu 
diipute  fi  Dieu  fera  rcdcuable  aux  hommes 
quand  ils  auront  bien  fait ,  S:  s'il  eft  tcn,;  de 
les  recompenfer:ricn  de  cela. Mais  feulement 
il  nous  veut  confoler  ,  voire  &  nous  donner 
courage  en  trauaillatit ,  afin  quff  nous  fça- 
chions  que  Dieu  daigne  bien  regarder  ce  qui 
eft  de  nulle  valeur  ,  finon  qu'il  l'accepte  par 
fa  bonté  gratuite.    Notons  donc  que  S.  Paul 
n'a  point  ici  voulu  faire  vn  conte,  pour  dire 
que  Dieu  nous  foit  obligé, mais  il  a  voulu  feu 
Icment  monftrer  que  &  homes  &  femmes  doi 
uent  fidèlement  s'cployer  à  ce  qui  eft  de  leur 
charge  &  de  leur  office ,  puis  que  noftre  Sei- 
gneur eft  fi  libéral  &  fi  humain  qu'il  daigne 
bien  regarder  ce  qu'ils  font  ,  &l'approuuer, 
combien  qu'ils  n'en  foyent  pas  dignes. Voila 
doncTintentionde  S.Paul.  Et  c'eft  peruerttr 
le  paflâge,qu,id  on  voudra  ici  drclTerdes  mé- 
rites,quand  on  voudra  luftificr  les  homes  par 
leurs  ceuures. Q_u^.il  no'  fiifrife  donc  que  nous 
ayons  le  falut  qui  nous  a  eftéacquis  par  lami 
fericorde  de  Dicu.ôc  par  le  fang  de  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift  ,  quiaeôé  efpandu  po«« 
laucr  toutes  nos  macules:  qkie  nous  trauail- 
Ijpns  auec  »n  bon  courage  ,  fçachans  tme 

p.ii. 


iTtf 


VINGTIEME 


SERMON 

pour  y  eftre  confus  :  &  neantmoins  que  nouî 
neUil'sions  pis  «le  retourner  àluy:veuquede 
fa  bonté  infinie  il  nous  tend. les  bras,&  ne  de- 
mande finon  à  nous  reccuoir'.  Et  cependant 
(ju'il  luy  plail'e  aufsi  nou?  taire  la  grâce  que 
paflans  par  cefte  vie  terreftre  nous  puifsions 
nous  y  employer  félon  la  bonne  volonté, & 
qu'il  ne  nous  tace  point  mal  d'y  endurer  beaa 
coup  de  pouretez  &deniiferes,  puis  que  ce 
font  autant  d'aides  pour  nollre  lakit  :  &  que 
cebonDieu  aufsi  accepte  toutes  c€s  choies, 
combien  qu'elles  foyent  mel'prifees  du  mon- 
de.Que  non  feulement  il  nou'.  face  celle  grâ- 
ce, mais  aufsi  à  tous  peuples  &  nations  delà 
terre, &c. 


noftre  Seigneur  nous  conduit  par  ce  moyen- 
la  à  falut.  Quand  il  nous  y  conduit ,  ce  n'ell 
pis  à  dire  que  nous  le  méritions  pourtat,mais 
c'eft  le  moyen  qu'ilaordôné.Ainfi  donc  que 
vn  chacun  fe  prefente  à  Dieu,&  que  nous  pre 
mon;;  le  tcein  aux  dents .  Cependant  toutef- 
fois  que  noftee  conuerfation  foit  paifible,que 
nous  l'oyons  pteftsdenous  alTuiettir  à  tcxite 
bonne  police.veu  qu'elle  eft  pour  nolhe  bien 
&:  noftre  profit, puis  que  Dieu  l'a  ainh  ordon- 

OR  nous-nous  prolterneros  deuant  la  U 
ce  de  nolhc  bonDieu  tn  cognoillànce  de  nos 
fautes,  le  priant  qu'il  noux  les  face  tellement 
fcntir,  que  ce  foit  pour  nous  y  dcfplaire  ,  & 

PREMIER  SERMON    SVR    LETROIS- 

I  E  M  E      C  H  A  P  I  T  R  E. 

I  Vdrok  certaine,  S  /  aucun  appctc  ï office  cT  Euefque,  il  dcfir  c  \ne 
œuure  excellente. 

z  II  faut  donc  que  /'  Eucfiquefoit  irreprehenfihlc-mari  d\nc  feu- 
le fenime^ycillant.pmdentjmodcslc,  recueillant  volontiers  les  eftran- 
ger s, propre  a  enjcigner, 

3  Non  point  addonne  au  Vin, ne  hateur,  ne  conuoiteux  de  gain  dcf- 
honne?le:maïs  hHmain,non  noifcux>non  auaricieux: 

4  Bien pouruojantaja famille,  ayant  fes  enfansfàets  en  toute 
reuerencc. 

rcï»r?vita,i?^K  AinQ  Paal  auoit  ci  defTus  de  fafchees d'eftre  déboutées  de  l'office  d'enfei 

I  fendu  aux  femmes  d'enfei-  gner  ,  &•  qu'elles  ne  cuidcnt  point  qu'on  leur 

gner.  Or  afin  qu'on  ne  peu-  face  tort ,  faind  Paul  inonlh  e  que  mcfmcs'  il 

I  fart  que  les  homes  deulfent  n'elt  point  permis  à  tous  hommes, &  que  c'tft 

,  eftre  inditferemment_admis  vn  eilat  digne  &  excellét.Cela  donc  lurmon 

à  ccft  office  ,  maintenant  'il  te  la  portée  des  femmes ,  &  kur  pouuoir.  Et 

•^nonAre  que  ce  n'cft  pas  à  d'autre  cofté,  afin  que  chacun  nes'ingerc 

tous  qu'il  appartient. Et  cependant  iladuertit  pas,&  qu'il  ne  femble  qu'il  loit  permis  à  tous 

les  femmes  qu'il  ne  leur  doit  point  faire  mal  fins  dil'cretiond'enfeigncr.faind  Paul  nion- 

fi  Dieu  ne  les  reçoit  pas  pourauoir  la  bouche  lire  qu'il  faut  auoir  chois  &  élection  en  ceci: 

ouuerte,  &  \  furper  cell  ertat  qui  cft  tant  ho-  &  e  inonllrt(comnie  délia  nous  auons  decla 

norable,  pource  que  les  hommes  mefmes  n'y  ré)  non  point  leulcment  pour  ceux  qui  lont 

peuuent  fuffire.Car(comme  faind  Paul  decla  appelez, afin  qu'ils  ayent  leur  leçon, maisafin 

re)il  faut  qu'vn  home  foit  exquis  pour  eftre  qu'on  garde  cefte  règle  &  ceft  ordre  quand, 

choifi  à  ctfte  vocation.  Il  ne  faut  point  donc  on  ha  .\  clne  vn  Pafteur  ,  qu'on  ne  picne  pas 


trouuereftrjgelîlcs  tcihmcscn  font  exclues. 
Voila  pourquoy  mainteiiantil  prend  occafiô 
de  traitter  quels  doyuent  elhe  les  Paftcurs. 
Or  ceci  n'cft  pandit  fciifjnient  pour  inftnuie 
ceux  q  font  appelez  en  ccfl  office,  mai',  pour 
dôncr  vnc  rcglegcncralc,afin  qu'on  ne  choi- 
lille  point  à  la  Voice  dcsgenv  mal  propres,  &: 

quruo  foyent  p->int  paui-'incttreen  oppfobre  après  :  li  oiido!t  taire  quelque  cliofe  légère, 
ni  eu  niefpris  la  pàroiedc  Dieu.pldft'oft  qu'ils  on  s'en  acquitte  aileement:mais  s'il  y  a  qucL- 
foyent  pour  la  faire  hanorer.  Nons  voyons  que  grand'  cntrcprife,  il  faut  là  appliquer 
maintenant  l'intention  <lefainrt  Paul.  En  pre  -tous  les  cfprits  ,  &  faut  qu'on  pounioye  .\ 
mier  lieu,  afin  que  les  femmes  ne  foyét  point  beaucoup  de  chofes.  £t  mcûnes  nous  voy- 
ons 


le  premier  qui  s'offrira  ,  mais  qu'on  chmlilic 
filô  la  ûiffifauce.Pour  celle  caufe  ildit,  C'r/î 
-vtie  parole  certaine,  cjiie  qii'conq'ie  .ippete  t  of- 
fice d  eiijei^ticr,  il  dvfire  Tue  oc»  re  exellinte. 
Or  nous  fçauon'.quc  ce  qui  cft  evccllêc,  n'tft 
pas  fans  grande  dithculcc:  iVlon  oue  les  cho- 
,  aiifvi  il  taut  qu'un  trauaille 


s  VTl    LA    I.    A    T  I M  O  T  H. 


ons  félon  qu'vn  meftier  emporte  grand  ar- 
tifice, qu'il  faut  qu'aufsi  qu\n  homme  foit 
doué  de  grâces  plus  exquifes:li  vn  meftier  cfl: 
Ttilgaire,&  bien,  on  prendra  le  premier  qui  fc 
offrira.  Voil.l  donc  en  quel  lens  &  à  quel  pro- 
,  pos  ûinifl  Paul  dit  que  l'office  d'Euefque  clt 
vnc  o:uure  excellente.  Or  notons  que  le  mot 
d'Euefque,  n'cft  point  comme  on  l'a  prins  en 
la  Papautéjpour  vnebefte  cornue  qui  fe  rc- 
ueft  de  mitre,de  crofle  &  de  tels  b.idinages,  & 
puis  qu'il  loit  là  comme  vne  idole  :  mais  Pa- 
îlcur,Miniihe,Euclque,  Preftre.iout  cela  en 
l'Efcriture  elt  prini  pour  vn:c'e/l  à  dire, pour 
ceux  qui  font  appelez  en  l'Eglile  de  Ditu.a- 
fin  d'cnfeigner  ,  &  de  gouuerner  fa  maifoii: 
côite  lainèt  Paul  en  traître  confequemment, 
atnii  que  nous  verrons. Il  eft  vray  que  le  Pape 
&  les  liens,  c'eftàdire  toute  ccite  canaille  & 
ordure  qui  fe  nomme  Clergé,  ont  tellement 
corrompu  les  choies  fainôlcs  ,  que  ces  mots 
font  qualî  en  déshonneur  aux  ignorans:  mais 
ilne'taut  point  tant  permettre  à  Satan  ,  qifil 
dcihuife  ce  qui  eftbon  &  approuuedc  Dieu. 
Car  qu'a-ce  elté  des  temples  de  la  Papauté, 
lînon  des  bordeaux  de  Satan,  l.i  ou  les  idoles 
ont  dominé, &  là  où  il  n'y  a  que  toute  abomi 
nation:  Or  cependant  le  temple  deuant  Dieu 
nelaiffe  pavd'iftre  réputé,  qu'il  ne  faut  pa»; 
que  le  diable  a't  celle  authonté d'abolir  ceq 
Dieu  a  inftitué.CXue  faut-il  donc?  Q^on  co- 
giioifTe  l'abus, qu'on  le  cjndâne,&  qu'on  s'en 
retire:^:  cependant  que  la  règle  qui  a  elle  in- 
Itituee  de  Dieu  fe  gaide  &  s'obferue,  comme 
elle  cil  inuioIable:&  melines  c'a  tllé  vne  cho- 
,  fe  mauua:fe,c5bien  qu'elle  fuit  anciéae  :  mais 
tant  y  a  que  c'a  cfté  vne  prolanati  jn  de  prcn- 
\  dre  le  titre  d'Euefque,  pour  vn  qui  auoit  prce 
inincnce  par  deilus  les  autres, •&:  que  ceux  qui 
font  inlerieurs,  tullent  Prellres:  car  c'a  elle 
deroguer^aullyle  &*langage  du  fainét  Efprit: 
&  nous  dtuons  auoir  cela  fur  tout  en  recôman 
dation.dc  ne  i  ien  changei  au  Itylc  de  l'Efcri 
tuie  faincte.Car  cncores  que  nous  retenions 
ce  qui  ell  làcôtenu,li  eil-ce  qu'il  ne  faut  rien 
pournous^diuertir,  en  forte  que  nous  auons 
incontinent  oublié  à  parler  côme  il  taut.  Co- 
gnoiirons  donc(c5me  l'ay  delîa  dit,)que  le  S. 
£fprit  parlant  de  ceux  qui  font  ordônez  Mi- 
nillres  de  la  parole  de  Dieu,  &  qui  font  elcus 
pour  gouuerner  l'Egiife.il  les  intitule  Pa- 
fleurs. Et  pourquoy?  Car  Dieu  veut  que  nous 
foyôs  ici  vn  troupeau  de  brebis  &  de  montés 
pour  nous  régler  à  luy,  efcoutans  fa  voix  ,  & 
nous  laiirins  gouiJerner,&:  conduire  paiiible- 
ment.D'aut.mtdonc quel'Eglife  cllaccôpa- 
ree  à  vji  troupeau  ,  ceux  qui  ont  la  charge  de 
la  guider  par  la  parole  de  Dieu,  font  nommez 
Pafleursi&puis  le  mot  de  Pafteur  lignifie  an- 
cien,non  point  d'aage,maisd'otfice:cômede 
tout  téps  on  a  appelé  .inciés  ceiix  qui  gouuer 
nent;  melmes  entre  les  gés  profaiies.Ôr  le  S. 
Efprit  a  retenu  celle.fimilitude-lâ,donnant  le 
nom  d'ancien  à  ceux  quidloyét  choilis  pour 


117 

ansncer  laparoledeDieu.il  lésa  aufsi  nom- 
mez Euefques,  c'cU  à  dire  veillans  fur  le  trotj 
peau, pour  méflrer  que  ce  n'eft  pas  vne  digni-» 
té  oïliue  quand  vn  home  ellappelé  en  ctft  e- 
Itat,  &:  qu'il  ne  faut  point  qu'il  face  de  l'ido- 
le, mais  qu'il  cognoifle  qu'il  eAenuoyé  pour 
procurer  le  falut  des  âmes, qu'il  s'y  employé, 
&:  qu'il  veille  là  defllis  ,  &  qu'il  y  trauaillc. 
Nous  voyons  donc  la  railbn  de  ces  mots  :  & 
puis  que  le  fainilEfprit'nous  les  a  donnez  ,  il 
nous  les  taut  retenir.moyennant  que  ce  foit  à 
bon  vfage  &:fainéi:.Or  pourfuyuôsmaintcnât 
ce  qui  ell  ici  déclaré  .  Ctluy  ijui  defre  l'office 
d'7.iiefijKe(dit  S.Paiil)/7  dffire{ou  appetejrwff 
œiiiire  excAl-mte.  Par  cela  il  mô/lre  que  celuy 
qui  alpire  à  eftre  Pafleur  en  l'Eglife  de  Dieu, 
doit  bien  en  premier  lieu  poifer  la  difficulté 
de  l'olficetqu'il  ne  faut  pas  qu'il  s'ingerc  ici  à 
l'aueinure.côme  fi  c'cftoit  vne  chofe  bien  ai- 
fee  :  qu'on  regarde  (dit  S.Paul  )  félon  que  la 
chofe  eil  grande  &;  haute,  qu'aufsi  on  ne  peut 
exercer  vn  tel  eflat,  finon  qu'on  ait  rcceu  ver 
tu&:giaced'enhaut.Caril  faut  bien  qu'vn  hâ 
me  ioit  doué  d'vn  grand  cfprit,  de  fçauoir,  & 
d'autre-  chofes  ntceflàires,  quand  il  efl  em- 
ployé en  celt  endroit  .11  ne  faut  point  donc 
qu'il  loit  efmeu  d'vn  fol  appétit, &  d'vne  cupi 
dite  volage,  mais  qu'il  cognoifle  qu'il  £fi:  im- 
pof  iblc  de  fatisfaireàtel  office,  finon  qu'il  y 
aitdequoy.  Et  pour  mieux  approuucr  le  pro- 
pos,&  afin  qu'on  y  penfe.S.Pauldit,  Quec'ejl- 
■vne  parnU  certaine.  Il  vfe  de  cefte  préface,  co 
me  s'ildifoit,  Nous  en  verrons  beaucoup  qui 
s'auanceront.côme  les  plus  inutiles  feront  les 
plus  hardis:  mais  qu'il  y  ait  ici  côme  vne  bar 
re:&  deuant  qu'vn  home  s'ingère,  qu'il  penfe 
de  longue  main  à  la  difficulté  qui  eJl  en  ceft 
office,  &i  alors  il  fera  retenu  ,  il  ne  fera  plus 
ainfi  precipit.ît.  Voila  donc  ce  qui  cfl  fignific 
par  celle  préface  de  fainél  Paul, à  ce  que  fa  do 
ttrine  ioit  tant  mieux  confîderee, voire  pour- 
ce  que  les  appétits  des  hônics  font  trop  bouil 
lans,&:  qu'ils  s'auancent  ei;  f.irte  qu'on  ne  les 
peut  à  grand' peine  retenir  finon  par  force. 
Mais  deuant  que  palTer  outre,on  pourroit  ici 
demâder.fi  on  peut  appcter  vn  tel  office  fans 
offenfer  Dieu,  qu'il  femble  qu"vn  tel  defir  ne 
procède  que  d'ambition  :  car  d'appeter  ,  ce 
tll  toulîours  vnc  chofe  mauuaife  &  vicieufe. 
Mais  faind  Paul  n'a  point  ici  parlé  d'vn  defir 
qui  viendra  d'vne  telle  foiirce  ,  c'eft  afçauoir 
quand  vn  home  pour  fa  vaine  gloire,  ou  pour 
fe  taire  valoir,  ou  pour  s'encichir  defire  d'e- 
(Ire  en  e(lat:car  fans  diilinclion  cela  fera  touf 
iours  condané.  Sainft  Paul  donc  a  parlé  ici  d' 
vn  autre  defir. Et  de  fait,  notons  que  pour  ce 
temps -la  on  ne  pouuoit  pas  eflre  'Minilîre  de 
la  parole  de  Dieu, ni  Pafleur,-qu'onnes'eïpo 
ûll  quant  &  quant  au  martyre:les  Chrefliens 
elloyent  perfecutcz  en  forte  que  la  mort  pen- 
doit  à  la  tefledeceuxquien  faifoyentprofef 
fion.Qji'eiloit-ce  donc  des  Palleurs  lefquels 
ontraittoit  beaucoup  pkis  cruellement  ?  £c 

p. m. 


n8  VINGTIEME 

ainfîilnous  faut  poifcrcefte  circonftaiiceciu 
temps ,  quand  fainft  Paul  parle  ici  d'vn  tel 
defir.  Car  li  vn  home  le  preparoit  alors  pour 
feruir  à rEgli!e,cVftoit  à  cefte condition, <juc 
du  iour  au  lendemain  il  fuft  preft  d'cftre  me- 
né au  gibet.  Côme  nous  voyons  auiourd'huy 
en  la  Papauté  ,  que  les  Chreftiens  font  touf- 
iours  fur  le  bord  de  la  folle  :  non  pas  qu'on 
leur  face  cefle  grâce  de  les  enterrer,  mais  ils 
ont  toufiours  la  mort  deuant  les  yeux  :  ain- 
fî  en  eftoit-il  du  tép<  de  fainrt  Paul.  Mais  en- 
core cefte  qudhon  n'tft  point  du  tout  folue. 
Car  combien  que  faind  Paul  prefuppofe  que 
ceux  qui  eftoyent  incitez  d''vn  bon  defir, pou- 
uoyent  appeter  de  s'employer  au  fcrmce  de 
Dieu  &  de  fon  Eglife.tant  y  a  qu'encores  l'em 
ble-il  qu'vn  homme  ne  puille  point  appeter 
vn  tel  office /ans  vne  vaine  prefomption.  Et 
pourquoy?Car  qui  eft-ce  qui  fe  trouuera  fuf- 
lîfant  pour  exercer  vne  charge  fi  grande  &  fi 
pefante  î  comme  fainft  Paul  auAi  en  parle  en 
»n  autre  lieu  en  ce  paflage  des  Corinthiens: 
car  il  ne  fe  contéte  point  de  dire  que  cela  fur 
monte  la  faculté  &  vertu  de  tous  homes,  mais 
il  s'efcrie  comme  par  tftonncment,Et  qui  fe- 
ra idoine  àcecifCiuenous  foyons(dit-il)ara- 
bafladcurs  de  Dieu  pour  faire  appointement 
auec  le  monde,  qu'au  lieu  que  les  homes  font 
perdus  &  damnez, nous  les  réconcilions  pour 
cftreenfans  de  Dieu  ,que:nous  les  afleurions 
que  Dieu  les  accepte  &  reçoit  pour  les  faire 
héritiers  de  fon  royaume,que  nous  foyons  tef    nuer  vn  tel  exercice,  c!e  là  on  peut  iuger  qu'il 


S  E  R  M  O  N 

uoir  cefte  conficae,qùe  Dieu  no* gardera  par 
fon  fairû  Efprit,&:  que  ce  qui  nous  défaut, fe- 
ra fuppleépar  fagrace.Voilacc  que  S.  Paul  a 
prefuppofe.  Et  qu'ainfi  ibit,  fi  nul  ne  pouuoit 
defirer  licitement  l'off  ce  d'enftigrer  ,  à  quel 
propos  tftudieroit-il  pour  s'y  apprf  fter  ? 
Qm'nd  vn  homme  s'adcénera  du  tout  àl'E- 
fcriturc  faincle,&  qu'il  s'y  exerceu,  n'eft-ce 
pas  à  cefte  irtcntion  que  s'il  plaiftàDicu  de 
l'employer  à  fon  feruice ,  qu'il  foit  difpofé  i 
cela?£t  mefmcs  on  nourrira  les  enfans  en  ce- 
fte efperance  :  &'  c'eft  vne  chofe  bonne ,  afin 
quel'Eglifede  Dieu  ne  demeure  point  def- 
pourueue  :  &:  feroit  bien  A  defirer  que  beau- 
coup de  pères  cuflent  cefte  affedion-ci,&que 
les  enfans  y  refpondiflènt  aufsi  de  leurco- 
fté  .  Mais  on  fe  foucic  tant  peu  de  feruir  à 
Dieu&  à  fon  Eglife,,  que  nulne  voudroit  a- 
noir  vn  eufant  prefcheur.  Pourquoy  ?  En  ce- 
la monftrons-nous  le  zèle  que  nous  auons  à 
Dieu. Et  au  refte, (comme  l'ay  défia  dit)  fi  on 
met  des  enfans  à  l'efchole.*:  qu'on  les  conti- 
nue là,  c'cft  à  l'intention  de  les  faire  feruir: 
caries  lettres  doyuent  auoiv  quelque  vfâge, 
&  fi  on  les  addonne  du  tout  à  l'Efcriture  fain 
fte,çe  fcrapour  les  préparer  ,a(în  que  quar.d 
il  plaira  à  Dieu  de  leur  tend'C  la  main  ,  ils  ne 
foyent  point  nouices,  Se  qu'ils  ayent  deqnoy 
pour  fournir  à  vne  telle  charge.  Si  cela  eft  li- 
cite d'enfeigner  les  enfan.,  ii  les  hommes  e- 
ftans  venus  en  aage  peuucnt  toui  ours  conti- 


nioins  de  la  remiAion  de^  pecheztqui  fera-ce 
dit-il,  qui  fera  fuffifant  à  cela  ?  Ainfi  donc  il 
femble  qu'vn  home  ne  puilTe  appeter  vne  tel- 
le charge,  qu'il  ne  foit  outrecuidé,  &  qu'il  ne 
oublie  fa  foiblelTe.Nous  fommes  par  trop  in- 
utiksjvoire  les  plus  fuffifans  &  les  plus  excel 
lens,  pour  procurer  vne  telle  oeuurede  Dieu 
comme  il  appartient  Et  comment  donc  pour 
rons-nous  porter  cefte  ambaflade  fi  haute 
dont  nous  auos  parlé.'Et  puis  il  n'ell  pas  que- 
ftion  de  fiire  feulement  vn  fermon  quand  vn 
homme  fera  prefcheur,  mais  il  faut  qu'en  gê- 
nerai &  en  particulier  il  fç.iche  que  c'eft  d'a- 
noncerla  parole  de  Dieu  pour  édifier,  afin 

2 u'clle  profite  .  Or  il  y  a  les  autres  chofes 
ont  nous  traitterons  tantoft .  En  fommr,  il 
femble  que  ce  defir  dont  parle  fainO  Paul, 
Ibit  toufiours  conioint  à  quelque  folle  pre- 
fomption. Mais  notons  que  faind  Paul  n'en- 
tend pas  ici  qu'vn  homme  fouhaite  de  s'em- 
ployer à  cefte  charge  d'anoncer  la  parole  de 
Dieu,  comme  fi  de  fon  induftrie  &  de  fa  pro- 
pre vertu  il  y  fufhfoil. Car  nous  dcuons  touf- 
iours notcrce  qui  s'enfuit  en  ce  paflage  que 
i'ay  allégué  de  la  féconde  aut  Corinthiens, là 
cù  fainft  Paul  dit  que  nous  ne  pouuoiis  auoir 
vne  feule  bonne  pcnfcedc  nouf-mtfme>^,mais 
que  Dicubefongne  en  nous  :&  voila,  dit-il, 
dôtvict  noftre  fiifHfance.Côbien donc  qu'il 
nous  faille  craindre  &  tftre  en  foixi,  attendu 
■Doktc  infirniitt,licft-cc  que  nouf  deuonsa- 


cft  bien  j^mis  de  fo;  haiter  cefte  charge.  Mais 
ccpéd.tt  il  y  adcux  chofes  :l'vnf  c'eft,  qu'il  ne 
lâutpointq  l'appctitfoit  entache  de  qnelq 
ambitiô  ou  vaine  gloire:  &voîla,pourquoy  S. 
laques  dit, Mes  ami':,  n'<ippetez  point  d'eftre  j_,„  -  j  • 
maiftres.  côme  chacut!  1 1\  chatouillé  d'vn  tel 
defir  ,  que  c'cft  vr.e  belle  chofe  &  honorable 
d'auoir  quelque  maiftnfe,  d'cftre  eyalté:  or  il 
dit, Gardez  -vous  d'eftre  eiitachtz  de  quelque 
ambition.  Voila  le  premier  que  nous  auons  à 
obfcruer.  Il  eft  vray  que  tous  proteftcront 
bien  qu'ils  ne  défirent  qu'à  feruir  à  l'Eglife 
de  Dieu  :  mais  que  chacun  s'examine:  quand 
nous  aurons  contente  les  homes,  ce  n'eft  rien 
fait,nous  auons  à  rcfpôdre  o'cuant  Je  luge  ce- 
lefte.  Ainfi  donc, ceux  qui  diront  qu'ils  ont  de 
fir  de  profiter,  quand  ils  s'offrent  pour  anon- 
cer  la  parole  dv  Dieu,  qu'ils  entrent  en  eux- 
mefincs,qu'ih  fondent  leurs  pensées, S:  qu'ils 
regardent  s'ils  pcuuét  prottfter  deuant  Dicti 
&  fes  Anges.qu'ils  ne  font  point  menez  d'au. 
cune  conuoitiic  d'eftrc  veuî  ne  d'eftie  pri- 
fi.2,  qu'ils  ne  cerchcnt  finon  dc  fe  confacrcr 
tellement  à  Ditu,  qu'ils  ne  foveiit  point  inu- 
tiles.mais  qu'ils  édifient  fon  troupeau.  Voila 
pour  vn  item.  Or  le  fécond tft  aocores ,  que 
ceux  qui  défirent  comme  il  appartient  vn  tel 
office, le  facct  auec  humilité, c'eft  .i  dire  qu'il» 
ne  foyct  point  il  volages  de  ptefiimcr  de  leur 
vertu,*  qu'il  leur  femble  qu'ils  ferôt  meruei! 
lcs:qu'il  n'y  ait  point  dôc  vne  telle  outrecui- 
dance. 


s  V  R   LA    I.    A    T  r  M  O  T  H. 


dance,  «nais  qu'en  cognoiflàr.tJeur  infirmité 
ils  ferrent  les  efpaule^ ,  &  craignent  d'entrer 
en  vne  charge  fi  difficile  &  que  leur  ddîr  foit 
feulement  fondé  fur  ccfte  confiance, qu'ils  f  ça 
«ent  que  Dieu  les  guidera ,  &  que  t'il  y  a  en 
euT  quelque  foiblelTe, Dieu  pouiuoiia  a  toiii. 
Voila  donc  le  fécond  qui  eft  ici  requis.  Et  de 
U  nous  pouuons  iuger  qu'vn  Iiomme  ne  dciî- 
rera  iamaisd'eftrePalleur.qu'il  ne  le  craigne, 
&  qu'il  ne  le  fjye  pour  vn  autre  regard  qu'il 
ne  i'appetera.Vn  hSrne  deiîrcra  bien  de  s'em 
ployer  en  cefte  charge, voire  cognoiiTant  que 
c'eli  vn  ûcnfîce  agréable  à  Dieu.cognoilTant 
que  nous  ne  pouuons  mieux  cmployci  &;  no- 
ure  vie  &  noftre  mort ,  qu'à  retirer  a  ùlut  les 
poures  âmes  qui  eitoyent  perdues, &  en  train 
de  mort  éternelle. Nous  pourrons  donc  deiî- 
reràcefte  condition  d'eftre  Miniilres  de  la 
parole  de  Dicurmais  cependant  lî  nous  regar 
dons  quelle  cft  la  difficulté,  fi  nous  penfons  à 
nous  &  à  noflre  portée, il  cil  certain  que  nous 
fuirons  tant  qu'il  lerapoûible,  &  voudrions 
bien  en  eftre  exemptez  :  ou  encores  que  nous 
ayons  cefte  charge-la  ,  ce  fera  à cefte  condi- 
tion que  nous  délirions  que  Dieu  en  appelle 
de  plus  ("iffifans.tcllemét  qu'ils  fcruét  mieux 
à  l'Eglife.ll  ne  faut  point  qu'on  le  couure  ici, 
il  ne  taut  point  chercher  fubccrfuge  :  mais  il 
eft  certain  que  celuy  qui  n'ha  point  certecon 
fideration-la  en  defir.it  cell  ofiicc.n'eft  qu'vn 
glorieux, qu'il  eft  mené  d'vne  affedion  mau- 
uaife  ,  qu'il  luy  femble  qu'il  ait  quelque  bon 
ïele:&  combien  qu'il  protcfte  qu'il  ne  deman 
de  linon  de  feruirà  Dieu&  à  fon  Eglife, com- 
bien que  cela  s'entortille  parmi  le  marché  ,  fi 
cft-ce  toutesfois  qj'jii  voit  bien  qu'il  n'y  a 
qu'ambition  Se  vaine  gloire  en  vn  homme, s'il 
n'ha  cefte  crainte  poui  le  retenir ,  &  qu'il  ne 
defire  que  l'Eglifc  loit  pourueue  fans  luy. 
Voila  donc  qu.ît  h  ce  mot  dot  vfe  faind  Paul, 
quand  il  dit.  Si  quelqu'vn  defire  l'officed'E- 
uefque.Orceci  s'eftend  encore»  plus  loin  :car 
nous  auons  à  recueillir  vne  doctrine  générale, 
c'eft  afçaiioir  que  de  quelque  eft.u  que  nous 
foyons ,  nous  pouuons  licitement  defirer  de 
nous  y  employer  ,  encores  que  la  charge  foit 
haute  ,&  qu'elle  furmonte  noftre  capacité. 
Qui  plus  eu, il  eft  impofiible  qu'vn  home  fér- 
ue loyaument  à  Dieu ,  ô.  qu'il  chemine  en  fa 
vocation  comme  il  appartient ,  finon  qu'il  ait 
vn  tel  dcfir.Et  pourquoy?  Cependant  q  noiK 
faifons  vne  choie  A  regret,  elle  n'eft  qu'.ide- 
mi  faite.  Siic  traincles  iambes,&  que  ic  ne 
puifle  remuer  les  bias,&  que  lera-cc?ie  feray 
beaucoup  de  bcfongne  en  vn  iour.Il  faut  dôc 
que  nous  foyons  volontaires, &  que  nous  ay- 
ons vn  franc  courage, quand  il  ell  queltion  de 
nous  acquitter  de  noftre  dcuoir.ouy  en  quel- 
que office  que  nous  foyons.  Ainfidonc  il  faut 
bien  que  nous  ayons  quelque  defirde  nous 
employer.  Quand  vn  homme  defire  d'eftre 
marié  ,  combien  que  k  mariage  ait  des  char- 
ge- ,  que  toutesfois  après  s'tjftjp  rccommâdé  à 


Dieu.ilefpexe qu'il  pourra  goiiucrner  {6  mef- 
na£;e ,  &  q  là  deifus  li  prene  le  treiii  aux  déts„ 
côme  on  ûit.Si  va  liôme  ha  grand  mefnage,&; 
bien  ,  ilappetcra  d'y  pouuoir  futfire:  mais  en 
appelant  aufsi,  qu'il  demâde  à  Dieu  qu'il  luy 
dône  la  faculté  &la  vertu  de  ce  faire. Si  nous 
venôs  plus  haut  en  quelque  charge  publiijue, 
là  il  y  a  encore  des  ditficulter  plus  grandes. Si 
nous  venons  àl'eftatde  iuftice,il  eft  certain  ô 
ce  maniement -la  requiert  vne  plus  grade  ver 
tu  que  d'vn  mefnage  piiué.  Or  tant  y  a  qu'va 
homme  ne  pourroit  faire  office  de  Magiftrat, 
finon  qu'il  ait  vn  courage  aLiigre,voirei8i:  qui 
ne  fera  point  fins  dcllr.  Mais  cependant  no- 
tons(côme  l'ay  délia  dit)qu'en  dcfiiaiit  nous 
deuons  aufsid'autrecofté  fouiiaiter  que  Dicti 
pouruoyc  toufiours  les  places  de  perfonnes 
plus  idoines  que  nous  ne  fommes  pas,  Se  que 
nous  craignions, &  ne  fuft-ce  finon  pour  che- 
miner en  fûlicitude  &  inuoquer  Dieu  afin  ql 
nous  c5Juife.Carceluy  qui  necognoiitpoinc 
fon  infirmité, le  voudra  eleuer,&:  Dieu  le  laif 
fi  là  précipiter  en  beaucoup  de  mauuaifes  ren 
contres.  Vo:Ia  le  payement  de  noftre  outre- 
cuicance,quand  nous  netcnôs  conte  de  prier 
Dieu  :  &  puis  Hous  fommes  nonchalans  là  oii 
nous  deuerious  veiller  ,  &  eftre  en  folicitude. 
Notons  donc  qr.e  ces  deux  chofes  ne  fe  peu- 
ucnt  &ne  fcdoyuét  lamais  feparer,c'eftafça 
uoir  vn  bon  defir  que  nous  ayons  de  feruir  à 
Dieu ,  en  quelque  eftat  qu'il  nous  appelle  ,  & 
puis  vne  crainte  que  nous  ayôspour  chemi- 
ner en  fohcitude  en  noftre  vocatio,  pour  touf 
iours  requérir  l'aide  de  Dieu,  afin  qu'il  nous 
goimerne&  qu'il  nous  côduife  ,  &  q  nous  luy 
puilsions  fcruir  en  fon  Eglile,nonobftât  tou- 
te noftre  infirmité. Ainli  donc  nous  voyons  ce 
que  i'ay  dit.c'eftafçauoir  combien  que  fainèè 
Paul  parle  ici  notamment  des  Euefques&des 
Paftcurs,  fi  eft-ce  qu'i  I  donne  vne  inftruftioa 
cômune  à  tous  Chrtftiés,  chacun  en  fon  eftac 
&■  offîce:c'eft  q  là  où  Dieu  nous  appelle, noua 
ayons  vn  defir  &  vn  franc  vouloir  de  le  feruir: 
car  fans  cela  aufsi  il  n'acceptera  rien  de  nousr 
&  mefmes  qu'vn  chacfi  entre  eu  foy  pour  pea 
fer  à  fon  infirmité,  &  que  làdeflus  nous  priés 
Dieu  qu'il  luy  plaife  de  nous  accepter,  &  de 
remédier  à  toutes  les  fautes  qu'il  cognoi/t  e- 
ftreennoiis:&que  cependant  nous  ayôs  aufsi 
lamodeftie  que  Dauid  protcfte  d'auoireuc. 
Seigneur, ie  n'ay  poît  cheminé  en  chofes  gran 
des  ni  admirables  par  deflîis  moy  :c'eft  à  dire 
Seigneur,ie  n'ay  point  leué  lesyeux:cômen'a 
gueres  no'  voyiôs  en  lob, que  ceux  qui  regar 
dent  le  foleil  &  la  lune, font  côme  s'ils  vou- 
loycnt  prédrela  Inné  aux  de«ts,c5me  on  dit, 
qu'ils  ne  demandét  finon  d'eftre  grans  quant 
au  m5de.Q_ue  nous  n'ayôs  point  dôc  celte  fa 
lie-là,mais  que  nous  auifiôs  de  nous  humilier 
pluftoit:&  s'il  plaift  à  Dieu  de  no'  eleuer,gar 
dons  nous  bié  de  monter  trop  haut  de  peur  de 
nous  rompre  le  col, comme  il  taut  qu'il  en  aii- . 
uicne  à  tousprefôptiieux  %  fe  cofient  en  leur 
'■"•':    "' p.iiii. 


uo 


VINGTIEME     SERMON 


propre  vertu. Or  fi  en  toiK  cftats  nous  deiions 
auoir  ccfte  modeftie ,  p.ir  plus  forte  raii'on 
quand  il  eil  quelhon  d'vn  office  excellent ,  & 
qui  requiert  des  vertus  e.vquiies  &:  grandes,  & 
rares,  tant  plus  deuons-iioiis  cftre  touchez  & 
de  rcucrence  &  de  crainte  :  &:  fur  cela  prier 
Dieu  qu'il  ne  permette  point  que  nous  loy- 
ons  eleuez  pour   trcbulchci  en   ruine,  mais 
s''il  nous  eleue, que  nous  foyons  toulioursau 
deflous  de  luy,&;  que  fi  nous  chaccllons  quel- 
que fois, il  nous  retiene  &  nous  fortifie:&:  ce- 
pendant ii  nous  fommes  en  quelque  haut  de- 
gré,,q  noftrc  cœur  ne  laifle  pouit  d'eftre  bas: 
carceluyq  ferale  pi' haut,  s'il  ne  iurraôteles 
autres  en  humilité, il  eft  certain  qu'il  fe  préci- 
pitera toufiours  en  grande  ruine  &confufio. 
Comme, la  chairede  vérité  où  on  prefche,  au 
ra  bien  preeminence,non  feulemét  afin  qu'on 
foit  ouy  deloin  ,  mais  afin  que  ladoftriue  qui 
fe  porte  parla  bouche  d'vn  home, foit  receue 
en  plus  grande  reuerence,&  qu'vn  chacun  s'af 
fuicttifle  à  icelle.  Mais  au  contraire  ,fi  celuy 
qui  eft  là  monté  ,  ne  regarde  b;en  à  foy  pour 
cognoiftrc  fes  fautes  &:  impcrft(flions,&  pour 
inuoquer  l'aide  deDitu,il  eft  certain  qu'il  luy 
coufferabien  cher  d'eltie  ainlihaut  monté: 
q  non  feulemét  il  lentira  le  mal  en  fon  corps, 
mais  qu'il  trebufchcra  en  vne  ruine  de  laquel 
le  il  ne  le  pourra  iamais  rclcuer.  Ainfi  donc 
penfons  diligemment  à  nous  ,  &  cognoilTons 
que  ce  n'eli  point  (ans  caufe  que  fainft  Paul  a 
fait  cefte  admonition-ci  à  tous  ceux  qui  doy- 
iient  eftre  eleus  Miniftres  de  la  parole  de 
Dieu. Or  cependant  nous  auonsaufsi  à  rédui- 
re en  mémoire  ce,  qui  a  efté  touché,  afçauoir 
<jue  fainifè  Paul  ne  parle  point  feulement  pour 
ceux  qui   font  appelez  en  ceft  office:  mais  il 
admonefte  Timothee  &  ceux  qui  ont  la  char- 
ge d'élire  des  Pafteurs, qu'Us  auifent  bien  que 
l'Eglife  de  Dieu  foit  pourueue  comme  elle 
doit,&  qu'vn  fiege  fi  honorable  ne  foit  point 
infefté d'ordure, &  qu'5  n'y  introduife  point 
des  fcandales  ,  &  des  chofes  qui  pourroycnt 
mettre  en  opprobe  rEuangile,&  tout  l'ordre 
ie  l'Eglife  &  de  la  Chreftienté.  11  faut  donc 
en  premier  lieu  q  ceux  qui  font  choifispour 
tftre  Miniftres  de  la  parole  de  Dieu ,  regar- 
dent de  fe  conformer  .1  cefte  admonition  qui 
eft  ici  donnée  par  fainô  Pauhceux  qui  y  pour 
royent  eftre  appelez  au  temps  aduenir, qu'ils 
fe  préparent  &  fe  difpofcnt  félon  que  fainft 
Paul  les  admoneile:  cependant  ceux  aufsi  qui 
ont  à  pouruoii  en  tel  lieu  &;  en  tel  cftat, qu'ils 
regardent  de  s'en  acquitter.  Car  s'ils  veulent 
vferde  liberté  pour  dire  ,  Ho  ie  le  puis  faire: 
&  qucfera-ce?Ainfi  notons  bien  que  le  fiinct 
£fprit  a  misvne  obligation  cftroite  fur  ceux 
«jui  ont  la  chargede  pouruoir  à  l'Eglife  de 
Dicu:&  cela  ne  fe  doit  point  feulement  ob- 
fetuer  en  clifant  des  Pafteurs  ,  mais  auf  i  en 
les  retenant.  Car  comme  ccluy  quitafchera 
par  brigues  ou  par  mcfchans  moyens d'auan- 
ccr  quelqu'yc  en  ceft  office,  defpité  Dieu ,  Se 


peruertit  tout  l'ordre  de  l'Eglife  en  tant  quVn 
luy  eft:aufsi  quand  vn  homme  eftant  Paltcur 
ne  lert  que  d'ignominie  &:  opprobre  à  l'Eçli- 
fe.d'autant  qu'il  s'cftmal  gouuerncen  l'offi- 
ce ,  ceux  qui  le  retienent,  Se  qui  tafchent  à  le 
maintenir, fe  monftrent  en  cela  ennemis  mor 
tels  de  Dicu,&;  regimbent  .^rencontre  de  luy 
tant  qu'il  leurcftpol'Mble.  Or  tant  y  a  qu'on 
verra  ceci  fouuentesfois:  car  ceux  qui  deuroy 
ent  purger  l'Eglife  de  Dieu  de  telle  ordure, 
font  bien  contens  qu'il  y  ait  des  prefcheurs 
tels  quels. Et  pourquoyp  Afin  de  fe  maintenir 
cependant  en  leurs  iniquitez.  Car  fi  vn  pref- 
cheur  chemine  comme  il  appartient ,  il  aura 
tant  plus  de  liberté, &  aura  la  bouche  ouiicrte 
pour  reprendre  les  vices.&  pour  s'oppofer  au 
mal:car  quand  vn  Pafteurauia  zèle  de  Dieu, 
il  eft  certain  qu'il  le  voudra  acquitter  fidcle-i 
ment  de  fon  deuoir.  Or  beaucoup  de  gens  ne 
cherchent  point  cela:car  ilsvoudroycnt  auoir 
des  hommes  à  demi  muets:&  s'ils  parlent,  que 
ce  foit  feulement  parceremoie,  &  qu'on  fc 
mocque  de  toutes  les  reprehenfions, qu'il  n'y 
ait  nulle  authorité.  Voila  dore  poiirquo y  teau 
coup  tafchent  de  maintenirdes  mcfchans  en 
cefte  office  qui  eft  de  gouuerner  l'Eoliil- de 
Dieu:  mais  tant  y  a  qu'en  ce  failanr  ils  fe  de- 
clarét  ennemis  raortef.  de  Dieu,ainfi  que  déf- 
ia nous  auons  monftré.  Pourquoy?  Car  l'aincî 
Paul  ne  parle  point  ici  feulement  d'tlireceux 
qui  n'ont  point  encores  tfté  en  l'office, mais  il 
monftre  quel- doyuent  eftre  ceux  qui  iéront 
foufFerts  &  endurez  en  ceft  eftat ,  c'eft  afça- 
uoir  ceux  qui  feront  fans  reproche, comme  il 
adiouftc  puis  apres,&  eftans  douez  des  vertus 
que  nous  auons  récitées, i5.-qu'il  faudra  dccla- 
rer,eftans  purs&  nets  des  vices  que  fainct  Paul  • 
codainne  ici,  comme  chofes  qui  ne  font  po.nt 
fupportables  en  vn  Miniftre  de  la  parole  de 
Dieu. Or  venons  maintenant  à  ces  vertus  que 
fainft  Paul  requiert  en  tous  Muiiftrcs  delà 
Parole. Il  dit  qu'on  ne  doit  point  choilîr  hom 
me  en  ceft  eftat  qu'il  ne  foit  irreprehcufible. 
Or  il  eft  vrayque  les  plus  parfaits  auront  bien 
des  infirmitez  &dcs  vices  en  eux,  tellement 
qu'on  ne  pourvoit  pas  trouuer  entre  les  hom 
mes  vnfeul  Miniftre  fi  on  vouloir  qu'il  n'y 
euft  nulle  tache. Mais  faincIPaul  tant  ici  qu'en 
l'epiftre  .1  Tite, monftre  aflez  ce  qu'il  entend, 
c'eft  afçauoir  qu'il  n'y  ait  point  de  tache  no- 
table furvn  homme. Ceux  donc  qui  f)nt  Mi- 
niftres de  la  parole  dcDieu.d'autât  qu'ils  font 
créatures  mortelles  ,  auront  bien  des  vices, 
mais  il  fliut  qu'ils  foycnt  fupportez.Et  mcf- 
mes  nous  voyons  qu'en  la  Loy,  combien  que 
le  grand  S.icnficateur  reprefentaftla  perlon- 
ne  de  lefuv  Chnft  ,  &  af^ftait  deuant  Dieu 
pour  moyenneur,&  qu'il  fei il  les  ficrificesde 
reconciliation  ,  fi  cft-ce  qu'il  offroit  pour  fes 
péchez  en  premier  lieu  ,  comme  l'Apoftrele 
déclare  en  l'epiftre  aux  Hebrieux  :  D'autant 
(dit-il}que  le  grand  Sacrificateur  eftoit  choi  H*fcf.7, 
fidu  milieu  des  hommes ,  il  faloit  qu'il  ie  re-  ^7- 

cogmift 


s  V  R    L  A,  I.  .A     T  I  M  O  T  H. 


cognuft  pécheur,  &  ne  fe  pouuoir  faire  autre 
nituc. Maintenant  donc  ceux  qui  feront  eleus 
pour  anoncer  la  parole  de  Dieu ,  feront  bien 
pécheurs.  £t  de  faift  ,  noftie  Seigneur  lefus 
Chriftn'a  point  feulement  enfeigné  TEglife 
de  dire,  Pardonne-nous  nos  fautes  :  mais  il  a 
donné  aufsi  cckt  leçon  à  fesdifciples  en  pre- 
mier lieu:&  ce  n'ell  point  par  hypocriiic  <j«e 
nous  demandons  à  Dieu,  Pardonne-nouv  nos 
péchez  :  mais  c''eft  en  proteilant  que  nous  a- 
uons  beaucoup  de  vices  pour  lefquels  il  nous 
faut  genur.d'autantq  nousn'en  ferons  point 
defpouillez  lufques  à  tant  que  nous  foyons 
retirez  de  ce  monde.  Mais  quand  nous  fom- 
mes  fuiets  à  des  infirmitez,  ce  u'eft  pas  à  dire 
qu'vn  péché  notable  doyue  eftre  fouffert  en 
nous.Comme  quoy?  Si  vn  homme  eft  ou  pail- 
lard, ou  yurongne ,  ou  larron,  ou  pariure,  ou 
qu'il  ait  quelque  autre  vice  criminel,&  ccluy- 
la  fera-il  digne  d'cftre  en  ctft  office  fi  hono- 
rable de  reprefenter  la  pcrfonne  de  lefus 
Chrift ,pour  teftifier  la  rcmifsion  des  péchez, 
&poureilre  là  comme  tefmoin  du  falut  des 
3mes  ?  Nous  voyons  donc  maintenant  quelle 
eft  l'intention  de  fainft  Paul ,  c'eft  ;ifçauoir 
quand  nous  auons  à  choifir  vn  homme  pour 
dire  conftitué  miniftre  de  la  parole,  qu'il  ne 
faut  point  prendre  vne  perfonnc  entachée 
d'infamie.  Qujil  y  ait  donc  cela  en  tous  mi- 
nières de  la  parole  de  Dieu,  qu'ils  ne  foyent 
point  dénigrez  de  quelque  blafme  ,  qu'on  ne 
puoTe point  dire  ,  Tue.  vn  criminel ,  tu  n'as 
pas  cheminé  droitemcnt, pourtant  tu  n'es  pas 
digne  d'eftre  en  office  honoi.ible.  Or  lî  cela 
doit  eitre  obferiié  en  toute  police, que  feia-ce 
de  l'Eglife  de  Dieu,  &  de  ceil  ordre  qui  doit 
demeurer  inuiolable  .•'  Ainiî  donc  il  faut  bien 
q.uVn  homme  loit  exempté  de  tout  blafme, 
qu.id  il  ett  appelé  à  ceft  office. Or  l'àinîï  Paul 
ayant  monftré  que  les  miniftrcs  de  la  parole 
de  Dieu  doyuent  eftie  tels.iladioufte,  Qj*'ils 
foyentmaris  d  -vne  fcule  f  mmc.Oa  a  entendu 
ce  palTage  c5muneement,Q_u'vnhôme  n'cuil 
point  efté marié  deux  f.jis:  maisc'eft  vne  pu- 
re mocquerie.comme  on  le  peut  apperceuoir, 
de  l'auoir  ainfi  entendu.  Et  c'eft  encores  vue 
chofe  plus  fotce  &  plus  lourde  ,  afçauoir  de 
dire,Marid'vne  feule  féme:c'eft  àdire,  qu'il 
n'ait  qu'vne  Eglife  :  défaire  cefte  allégorie 
fctte, c'eft  vnbadinage.SainÛ  Paula  entendu 
autrement  ce  paflàge-ci, c'eft  afçàuoir  pour- 
ce  qu'il  y  auoit  cefte  corruptiô  entre  les  luifs 
qui  eftoiten  vfagedelôg  tempsafçauoirque 
plufieurs  auoyétdeux  ou  trois  femmes, fainft 
Paul  condamne  ce  vice-la,  &  le  condamne  en 
telle  forte  ,  qu'il  ne  veut  point  qu'il  foit  nul- 
lement fupportc  en  vn  miniftre  de  la  parole 
de  Dieu.Orpource  que  cela  ne  fe  peut  point 
defpefcher  pour  cefte  heure  ,  il  fera  referué 
pour  l'apres-difnee.Mais  cepêdant  monftros 
l'intentiô  principale  de  fainft  Paul, pour  con- 
clure &  faire  fin.Pourquoy  eft-cc  que  S.Paul 
notaramét  parle  ici, QJj'vn  miniftre  de  la  pa- 


121 

rôle  de  Dieu  doit  eftre  niarid'vne  feule  fem- 
me.-C'eft  tendant  .i  ce  qu'il  adioufte  en  la  fin. 
Que  fi  vn  homme  ne  ffait  ^ouuerner  ù  mai- 
fon, commet  pouruoyia-il  a  toutel'Eglife  de 
Dieu?  En  fomme  S.  Paul  met,  Q_iie  celuy  qui 
eft  choifi  en  tel  eftat,  fe  doit  porter  hônefte- 
ment  en  fon  priué.Et  c'ell  vne  règle  naturel- 
le aufi  bien  en  toutes  autres  chofes  publi- 
ques .Si  vnhôme  ne  fçait  quec'tftdcgouuer- 
ner  famaifon  ,  ic  vous  prie, le  doit-on  pren- 
dre pour  manier  vncftat  public?  Voila  vndif- 
fipateur,&  on  en  voudra  faire  vn  gouuerneur 
de  viile,ou  d'vn  pays.  Celuy  qui  aura  mSgé  fa 
fubft3ce,qui  fera  vn  fol  cftourdi.ceiuy  qui  au- 
ra efté  desbauchc,  il  faudra  qu'il  règle  les  au- 
tres,il  faudra  qu'il  ait  maniement  public:&  5 
fera-ce?Nous  voyôs  doc  que  cela  eft  du  tout 
répugnant  à  nature.Ainli  donc  notons  que  S. 
Paula  ici  voulu  déclarer  qu'vn  homme  ne  fe- 
ra iamais  propre  pour  feruir  à  TEglife  de 
Dieu  ,  pour  anoncer  la  doûrinc  de  l'Euangi- 
le.s'il  ne  fe  porte  en  fon  priué  hôneftement, 
&■  qu'il  ne  face  qu'on  ait  bon  tefmoignage  de 
luy,&:  qu'il  foit  approuué.Or  ceci  n'eft  point 
ftul(  met  pour  les  miniftres  delà  parole, mais 
nous  auons  à  recueillir  vne  doftrine  généra- 
le, c'elt  quâd  on  doit  appeller  quelques  gens 
en  eftat  public  .qu'on  regarde  en  premier  lieu 
qu'ils  ayent  conuerfe  hôneftement  entre  les 
honimes,&  qu'ils  fe  foyent  portez  en  telle  for 
te  qu'on  ne  leur  pui/Te  rien  reprocher:&  que 
quand  on  voit  qu'ils  ont  bien  gouuerné  leurs 
perfonnes  &  leur  incfnage, qu'on  efpercaufii 
qu'ils  gouuernerôt  tout  vnpeupte.Mais d'au- 
tant qu'on  ne  penfe  gueres  à  cts  chofes,  c'eft 
bien  raifon  que  tout  foit  confus  &  difsipé  en 
trenous.  Etdc  fàift,  pourquoy  cft-ce  qu'on 
voit  de  tels  fcandales,  &  que  les  chofes  vont 
ainiî  de  pl^t, qu'on  crie, Tout  eft  perdu ;pour- 
quoy?  La  fan  te  vient  de  nous, quand  nous  fai- 
fons  ce  de. honneur  à  Dieu,  de  ne  point  co- 
gnoiftre  quelle  eft  Ja  difficulté  des  charges 
honorables  qu'il  nous  cômct,&'  qu'on  femoe 
que  ainfi  de  fon  nom. Quand  doc  il  y  a  fi  peu 
d'ordre  en  ceft  endroit,  il  faut  bié  qu'on  fpit 
payé  de  mefmes,&  que  Dieu  fe  venge  de  ceft 
opprobre  qu'on  luy  fait,  quand  vn  homme  fe 
fera  mal  gouuerné  en  fon  particulier ,qu'il  ne 
laifle  point  toutesfois  d'eftre  en  eftat  public, 
voire  &  qu'il  y  foir  conftitué  comme  en  Ae{~ 
pit  de  Dieii.Il  ne  fe  faut  donc  point  esbahir  û. 
leschofes  fontainfi  confufes.Et  pourtant  re- 
tenons bien  quelle  eft  l'intention  de  S.  Paul: 
c'ettque  quand  on  appelle  quelqu'vn  pour  a- 
noncer  la  parole  de  Dieu ,  il  faut  qu'aupar-  . 
auantilait  eftéefprouué.  Et  corrunent?en  la 
perfonne,&  puis  en  fon  mefnage,  qu'il  fe  dé- 
clare eftre  tel  que  quand  il  aura  gouuerné  fâ 
maifon  corne  il  appartient,  qu'on  efpere  qu'il 
fe  portera  auf  i  bié  en  PEglife  de  Dieu,  ^  en 
tout  vn  peuple.Voila  donc  ce  que  nous  auons 
a  retenir  pour  main tenant.Et  au f-i  notés  bien 
que  S.Paul  a  ici  voulumettrevnebridcà  toivs 

q.i. 


112. 


VINGTIEk4.E    SERMON 


ceux  qui  Ce  doyMat  mefler  de  gouuernement 
publiC)  c'eft  qu'ils  oonduifent  en  attrempace 
les  cKofes  qui  leur  font  commifes  ,  afin  qu'ils 
s'y  porcét  en  coûte  crainte  &  Kumilité.flc  qu'ô 
ne  i'auance  point  par  vne  folle  prefomption 
&  outrecuidance  -.Se  que  ceux  qui  ont  quelque 
t{Liniement,  y  procèdent  touUours  en  toute 
Tolicitude:&  fur  tout  quand  nous  ferons  com- 
rais  fur  l'Eglife  de  Dieu  ,  que  nous  aduifîons 
de  nous  en  acquitter  fidelcment,conime  l'in- 
tention de  Dieu  eft.Et  cependît  cognoiflons 
auf'.i  le  foin  que  noftre  Dieu  ha  de  noftre  fa- 
Iut:car  fainû  Paul  n'a  point  parlé  de  fon  in- 
duftrie  propre,  mais  il  a  cftc  organe  du  tâiniî 
Efprit.  Dieu  donc  déclare  par  ce  moyen-la 
Je  foin  qu'il  ha  de  nous ,  quand  il  ne  permet 
point  que  nous  foyons  expofez  en  proyc  ni  à 
rabandô,mais  qu'il  veut  que  nousfoyôs  pour 
ueus  de  gens  idoines  &  propres  pour  nous  fer 
uir.  Nous  cognoiflons  donc  par  cela  l'amour 
paternelle  qu'il  ha  enuers  nous  :  c'eft  vn  tef- 
nioignage  du  foin  qu'il  ha  que  noilre  falut 


foit  procuré  comme  il  appartient.  Voila cc 
que  nous  auons  à  noter  pour  maintenant:  &4e 
refte  fera  referué  pour  monftrer  cefte  excel- 
lence dont  parle  fainift  Paul. 

OR.  n«us-nous  profterneios  deuant  la  face 
de  noftre  bô  Dieu  en  cognoiflànce  de  nos  fau 
tes.Ie  priant  qu'il  nous  les  face  tellement  fen 
tir.que  cc  foit  pour  nous  abbatre  du  tour  de- 
uant luy.âfin  d'auoirnoftre  refuge  à  fa  mife- 
ricorde.Et  cependant  aufsi  qu'il  luy  plaife  de 
nous  conduire  tellement,  que  puis  qu'il  nous 
a  appelez  à  fa  cognoiflànce, &  qu'il  nous  a  re 
tenus  pour  eftre  de  fon  troupeau  &.  de  fa  mai- 
fon, il  ne  permette  point  que  nous  foy 5s  coni 
me  belles  efgarees,  mais  que  toute  noftre  vie 
foit  réglée  en  fon  obeiflànce.Et  pource  qu'il 
y  aura  toufîours  beaucoup  d'mfirmitez  en 
nous,  qu'illuy  plaife  noui  fupporteriufques 
à  ce  qu'il  nous  ait  purgei  de  tous  nos  vices  & 
imperfections.  AinC  nous  dirons  tous.  Dieu 
tout-puiflant,Perecelefte,5:c. 


SECOND     SERMON    SVR    LE   TROIS- 
IEME    CHAPITRE. 

I  Parole  certaine,  Si  aucun  appete  l'office  (ÏEuef^ue,  il  dejire  vne 
ctuure  excellente. 

X  il  faut  donc  que  /'  Eucjquefoit  irreprchenfible,  mari  d'ynejm- 
le  femme, \eilla7ityprudent,  modeHe,  recueillant  volontiers  les  eîiran- 
g  ers  .propre  a  enfeigner, 

.L  Non  point  addonné  auyin,nehateur,neconuoiteux  de  gain  def" 
honneîle:maîs  humain,non  noifeux,non  auaricieux: 

4  Èienpouruojant  à  fa  famille,  ayant  fes  enfânsfuiets  en  toute 
rciîcrence. 

nous  délions  obferuer  que  quand  Dieu  a  m« 
celte  règle  certaine  fur  le  mariage  ,  elle  n'a 
pas  efté  gardée  comme^elle  deuoit  :  car  plu- 
îîeurs  fe  font  donné  liberté  trop  grade,  com- 
me ce  pays  d'Orient  a  toufiours  efté  fuie  ta 
cela:&  n'y  a  doute  quand  les  ùinùs  Patriar- 
ches ont  eu  plufieurs  femmes ,  qu'ils  n'ayent 
efté  feduits&  corrompus  par  la  mauuaife  cou 
ftunieicomme  nous  voyons  que  c'eft  vne  cho- 
fe  difficile  quand  on  fera  en  quelque  pays  où 
vn  vice  règne, de  s'en  garder.Si  l'yurongnerie 
cft  cômune,  on  ne  larcputera  plui  pour  vice, 
elle  fera  plus  que  tolerablc  :  autant  en  eft-il 


Ous  auons  commencé  à  expo 

I  fer  ce  matin  l'intention  de 

I  S.  Paul,  quand  il  veut  qu'vn 

I  Paftéur  d'Eghfe    foit  mari 

]  d'vne  feule  femme.  Mainte- 

'runtil  refte  de  fçauoir  plus 

'  au  long  pourquoyfainS  Paul 
a  requis  fpccialemcnt  cefte  vertu  en  ceux  qui 
doyuent  anoncer  la  parole  de  Dieu.  Car  ce- 
la doit  eftre  commun  à  tous  fideles:nous  fça- 
uôs  q  cefte  règle  a  efté  inftitueede  Dieu  à  ce 
i\e  condition  que  deux  fuflènt  en  vne  chair. 
11  ne  dit  pas  trou  ou  quatre  :  mais  comme  la 

femme  ell  crcée  pour  rhommc.aufsi  d'autre  de  la  paillardifc.  Voila  pourquoy  nous  auons 
colié  l'homme  a  efté  créé  pour  la  femme. Ain  .\nouspieferuei-,fçachansquefi  nous  ne  vou- 
fî  donc  c'eft  vne  chofe  exorbicante,&du  tout  Ions  nous  perdre  à  noftre  efcicnt,&  lafcherla 
contraire  à  l'incenrion  de  Dieu, fi  \n  homme  bride  à  Sat.i  à  ce  qu'il  nous  incite  à  mal,  nous 
ha  deux  femmes.  Il  ftmbicroit  donc  cftrange  nedeuont  point  eftre  fi  volages  de  rou;  nour 
que  fainâ  Paul  parlant  ici  notammét  des  Pa-  rir  en  quelque  vice  quand  nous  l'aurons  ac- 
fleurs  de  l'Eglife  ,  leur  attribue  cefte  vertu,  couftumé.D'autant  donc  q  c'eftou  vne  chofe 
«oisuaii  fi  eiJe  oe  deuoit  pas  cûte  en  cous.  Or    p«r  trop  «ccouftumçe  au  pays  d'Oritnt,qu'vn 

iiommc 


SVR    LA    LA    TIMOTH. 


«*5 


Lomme  cuft  deux  femmes  ou  trois,  les  {âinfts 
Patriarches  fe  l'ont  aufsi  bien  addônei  à  cela: 
&  c'a  eiïé  vn  vice  deteftable  en  eux.  Comme 
quand  AbrahS  a  prins  Agar.il  n'y  a  nulle  dou 
le  qu'en  cela  il  ne  foit  reprehenCble.  Qnand 
lacob  a  prms  Rachel  api  c^  auoir  efpoufe  Lea, 
ç'aefté  vne  chofe  vileine&cnoime,  iedi  ou- 
tre l'inceftc  qu'il  a  eu  les  deux  foeuis.il  y  a  eu 
Tautre  péché  ,  qu'ilapafle  l'ordonnance  de 
Dieu  g  deuoit  cftre  facree  &  inuiolable. Voi- 
re &  n'y  a  point  d'excufe  en  ce  qu'il  auoit 
efté  trompé:carileuftfalu  prcntieremét  qu'il 
confefTaft  qu'il  n'euil  point  efté  marie  à  Lea, 
«u bien  qu'il  fecontentaft  d'elle  /eule  s'il  la 
vouloit  auoir  pour  femme.  Or  toutainfi  que 
les  Patriarches  ont  eilé  corrôpus  par  la  mau- 
uaife  couftume,aufsi  leurs  enfans  eiUs  defcen 
«lus  de  leur  race  ont  pris  cefte  couleur,  quand 
ils  fe  font  donné  licécc  d'auoirplulïcurs  fem 
ines.Q_uand  Abrahâ  &  lacob  en  auoyent  ainfi 
vfé,  paieillement  Dauid,& leurs  ftmblables, 
voila  qeftoit  caufe  que  cefte  couftumeeftoit 
entre  les  luifs  du  temps  de  S.Paul.qu'vn  hom 
me  euft  plufieurs  femmes.Or  ce]a(c5me  nous 
auôs  declaré)n'a  pas  efté  pourtat  licite:mats 
tant  y  a  qu'vn  tel  mal  ne  fe  pouuoit  corriger 
du  premier  coup. Car  quand  vn  mal  cft  cômis , 
on  n'y  trouue  pas  aifeement  remede,&  com- 
me il  feroit  àfouhaitter.Sainft  Paul  doc  con 
damnât  ce  qu'on  appelle  poligamie.c'cft  à  di- 
lela  pluralité  des  femmes ,  n'a  peu  remédier 
que  les  femmes  qui  auovent  efté  ainfi  prifes 
par  ignotance.fuflènt  répudiées  par  leurs  ma 
ris,&  qu'ils  les  delaiflàflentrmais  il  a  foufTert 
cela  comme  vn  vice  &  vne  chofe  mauuaife  au 
cômun  populaire.  Cependant  il  n'a  pas  voulu 
qu'il  fuft  enduré  en  ceux  qui  deuoyent  eftre 
corne  miroirs  de  prudéceau  peuple:  car  voila 
les  miniftres  de  la  parole  de  Dieu  qui  doyuét 
monftrer  le  chemin  aux  autres.  Quand  donc 
vn  mal  fera  excufé  en  vn  home  particulier,  il 
fe  doit  corriger  plus  afprement  beaucoup  en 
vn  home  de  noftre  eftat.  Voila  dôc  pourquoy 
S.Paul  a  reqs  ici  vne  telle  vertu  aux  Pafteurs. 
Maintenant  nous  auons  la  principale  expolî- 
fion  de  ce  pailàge  :  mais  il  refle  de  recueillir 
doârine  qui  nous  foit  propre  en  édification 
de  ce  que  nous  auons  déclaré  enbrief.  Nous 
voyons  ici  en  premier  lieu,que  c'eft  de  laifTer 
régner  les  vices,  &  de  n'y  point  mettre  ordre 
du  premier  coup. Car  la  mauuaife  coulhime  m 
continent  tourne  en  loy,&  cuidera-on  que  ee 
qui  eft  en  vlàge.foit  licite. Voila  qu'on  gâigne 
quand  vn  vice  de  prime  face  cémencera  d'e- 
»re  introduit deuât  qu'il  foit  en  vfage:chacii 
le  fçaura  bien  condâner  :  &  meûnes  ceux  qui 
ont  quelque  hônefteté  &  qlque  hôte  en  eux, 
en  feront  fcrupule  r  mais  fi  auec  le  téps  on  s'y 
endurcit, &  qu'ô  ne  tiene  côte  de  le  corriger, 
là  deflus  on  cuide  q  le  mal  foit  permis.  D'au- 
tant plus  donc  deuôs-nous  eftre  attétifs  à  re- 
yrouucr  le  mal  deuât  qu'il  fou  entré  en  pof- 
(e{siou,S<  i  y  mettre  ordre  deuât  le  ccup.Or 


quand  vne  maladie  a  gagné  fur  vn  komffie,on 
h.i  grand' peine  de  la  defracinercA:  fi  du  com- 
mencement on  y  pouruoit.le  remède  eft  bien 
aifé. Autant  en  eft-ildes  viceî  &  péchez, qu'ô 
n'y  peut  trouuerguarifon  puis  qu'vne  fois  ils 
ont  cômencé  h  régner,  qu'on  pé fera  S  ce  foic 
vne  chofe  qui  doyue  eftre  ordinaire.Et  pleuft 
à  Dieu  que  cefte  leçon-ci  fiift  bien  obfertice. 
Mais  quoy  ?  il  fenible  que  iamais  on  ne  fera 
venuaffezà  tép'i  d'exalter  les  vices,&  en  fai- 
re vertu,qu'auiourd'huy  il  n'tft  point  queftiô 
de  pouuoir  donner  quelque  crainte  pour  cor- 
refti5:car  on  allègue  q  la  rigueur  trop  gran- 
de eftinfupportable.Voire,niais  cependant  il 
vaudroit  mieux  qu'on  punift  rudement  les  vi^- 
ces.qued'amaflèrvn  threforde  l'ire  de  Dieu, 
&  que  quand  les  nxeCJians  auront  efté  efchap 
pezdes  h5mes,qHe  Dieu  nous  cnneloppè  to" 
envnemefme  côfufion:  &  qui  plus  eft,q  ceux, 
qu'on  aura  voulu  fupport  er»  en  la  fin  foyent 
cnuoyez  à  leur  ruine  par  faute  d'auoir  efté 
ch.ifticz  humainement. Auiourd'huy  quâd  on 
parlera  de  punir  les  paillardifcs,&  bien,il  eft 
vray  eucores  qu'ô  n^oferoit  pas  d're  Qu*il  ne 
le  faille  ainfi^maiscepédant  pourle  premier, 
quelle  corretlion  y  a-il  ?  Car  fî  on  fait  fem- 
blânt  de  punir  vn  paillard, on  l'entioyeen  pri 
fon, c'eft  à  dire  en  vne  tauerne,voire,&  vne  ex 
uerne  bien  desbauchee.  Voila  qaelle  en  eft  la. 
punition,  tellement  que  Dieu  &  fa  iuftke  fc- 
,ront  mis  en  opprobre.  Et  puis  punit-on  vfi 
paillard.'  il  y  en  aura  vne  douzaine  qui  elchap 
peront  :  &  chacun  le  voit  à  l'œihil  n'y  a  pcr- 
fonne  q  les  iuges  qui  foyent  borgnes  ou  aueii 
glcs  en  ceft  endroir,les  petis  enfans  en  vont  à 
la  moiiftarde.  Or  eneores  trouucra-on  en  ce- 
la trop  grande  rigueur.  Des  blafphemes  qnel 
fcrupule  en  fait-on  plus?Si  vn  homme  eft  ou- 
tragé, incontinent  il  faut  que  la  rcparatiôcn 
foit  f3ite:le  nom  de  Dieu  fera  dt  chiqiicté  par 
pieces,&  on  ne  fçauroit  trouner  moyen  qi/vn 
tel  mal  foit  reprouué,  lequel  fera  puni  mefines 
entre  les  incrédules.  Nous  fàifons  profef  ion 
de  l'Euangile,  &  toutesfois  le  nom  de  Dieu 
ferablafphcmé  fans  aucun  chaftiment  ,&  ne 
s'en  fait-on  que  mocquer.  Autaten  eft-ildes 
vices  femblables. Voila  vnyurongne  qui  fera 
cônre  vn  pourceau, &  ne  le  fera  point  fealemét 
pour  vn  jour,  ou  pour  quelque  fois  l'an  ,  mait 
c'eft  vn  ordinaire, qu'à  grand'  peine  y  trouue- 
ra-oc  lobrieté  vne  heure.Or  qu.id  telles  gens 
fe  font  accoiiftumez  à  entonner  ainfi  le  vi  n,il 
eil  certain  qu'ils  porteront  leur  yurotignerie 
trois  iours ,  qu'ils  deuienent  du  tout  brutaux. 
Et  bien, cela  eft  permis. En  Jafin  que  pouuôs- 
nous  recueillir  d'vne  telle  douceur, quand  on 
fupporte  ainfi  les  vices?  En  premier  lieu  nous 
ne  faifons  qu'amaffer  du  bois,&  l'ire  de  Dieu 
s'emflamme  tout  àvn  coup» que  nous  fem- 
mes esbahis  après  anoir  couué  long  temps 
noftre  ordure  ,  que  Dieu  la  defcoaurira  fou- 
dain  à  noftre  côtufion:  pnisque  nous  fommes 
auifi  addonnes  à  nous  £actcr ,  il  faudra  i^ae 

q.ii. 


ItJ^ 


VINGT   ET    VNIEME    SERMON 


nous  payés  tout  en  vn  iour  les  arrérages  que    bruit, demeureront  fourds.tcllement  qu'ils  ne 
nous  aurons  faits.  £t  cependant  nous  Terrôs 
qu'on  gaigne  quand  vn  vice  n'tft  pas  corrigé 
tn  temps  opportun  :  c'eftcomme  vn  yuron 


gne  quand  on  ne  le  chaftie  pas  du  premier 
coup  de  i^on  intemperanceiapres  auoir  gour- 
nundé  ,  il  taut  qu'il  deuiene  vne  poure  cha- 
rongne,' qu'il  tombera  par  pièces.  Et  après 
qu'il  n'y  aura  plus  dequoy,il  faut  s'addonner 
à  larrecins  &  à  pillages  :  car  puis  qu'vn  hom- 
me eft  ainfî  affiiandé.il  luy  eft  impofsible  de 
fe  pouuoir  chaftier.  Et  qui  en  elt  caufefpour 
ce  qu'on  l'a  trop  ûipporté.  Autant  eu  eft-:l 
des  paillardiû-s:  nous  voyons  quelî  vn  hom- 
me n'eft  chaftie  quand  il  aura  commencé  à 
mal  faire,  il  fc  lettera  comme  à  l'abandon,  & 
prendra  tant  plus  d'audace  ,  &  le  diable  l'a- 
ueugle  en  telle  forte  qu'il  empire  de  plus  en 
plu>:  Si  en  la  fin  il  adutendra  quelque  meur- 
tre, iSi  voila  le  gibet  pour  toute  recompenfe. 
Et  voila  comme  Dau  (c  venge  du  mcfpris  de 
fjn  nom  ,  quand  il  voit  que  les  hommes  ne 
lienent  conte  de  punir  ceux  qui  l'iniuricnt 
ainlî, qu'il  faut  qu'il  les  face  toniber  en  gr.ms 
inconueniens. Voila  donc  qu'on  gaigne  à  fup 
porter  ainiî  les  vices.  Et  d'autant  plus  nous 
faut-il  noter  la  leçon  que  non?  deuôs  recueil 
lir  du palTage  de  faiiift  Paul,c'cft  afçauoir  que 
fi  auant  le  coup  on  ne  retranche  les  vices ,  ils 
auront  vai  telle  vogue,qu'on  n'en  pourra  ve 
nir  àbout  quand  on  voudroit  bien.  Et  voila 
pourquoy  l'Apoftre  en  l'cpiltre  aux  Hebr. 
H  h  <  !t  "°"5  exhorte  à  couper  les  mauuaifes  herbes, 
&  garder  bien  qu'elles  ne  pullulét  point  par 
trop  entre  nous,  &  fur  tout  qu'elles  ne  croif- 
fent,  quand  il  y  a  quelque  bonne  feméce  que 
elle  ne  foit  point  cftoutfee.que  les  mcfchan- 
tcsherbes  ayent  tellement  gaigne  qu'on  ne 
puiffe  nettoyer  vn  champ  que  tout  ne  foit  ga 
fté  &  peruerti.Prenons  donc  garde  à  ces  cho 
fes  :  &  que  nous  ayons  plus  de  7ele  qu'on  ne 
voit,5c  qu'on  a  veu  par  ci-deuant,  pour  renie 
dier  aux  vices  qui  font  côme  en  poirefsion,& 
que  mefmes  on  fait  reigle  d'auoir  ofFcnfé 
Dieu  ■,  &  que  la  couftume(comme  i'ay  dit)eft 
eonuertie  en  loy.voila  pourvu  item.  Et  no- 
tons aufsi  que  Dieu  permet  que  les  hommes 
fe  desbordent  ainiî  quand  ils  ont  donné  en- 
trée à  Satan  ,  &  que  l'iniquité  domine  au  mi- 
lieu d'eux,qu'ils  n'ont  plus  nulle  difcretion. 
Qjyd  on  nous  parlerad'vnvice,  liil  ya  quel 
que  intégrité  entre  nous ,  chacun  en  pourra 
cftre  iiige:on  dira, C'eft  vne  choie  vilcine.ce 
Ja  n\'ft  pas  à  fouffrir.  Mais  quand  on  a  laiflé 
couler  vn  rnal,&  que  chacun  s'y  cft  trop  alïïi- 
ietti.on  n'en  tient  phis  conte, &•  n'en  tait-on 
plus  defcrupule.Et  qui  en  cftcaukrCefb  que 
nous  fommes  aiicuglczpar  la  iufte  Vengean- 
ce de  Dieu  ,  que  nous  ne  voyons  plus  noftre 
turpitude  ,  d'autant  que  nou>^auons  les  yeux 
esblouis.  Et  tout  ainfique  ceux  qui  auront 
e/lèlong  temps  en  vn  lieu  inftft  ,  demeure- 
root  comme  punais ,  ceux  'qui-  orroniP grarîd 


peuuent  plus  riendifcerner  :ain(Ieneft-il  de 
ceux  qui  le  flattent  en  leurs  vilenies  &  iniqui 
tez,  qu'il  faut  que  Dieu  leur  ofte  tout  fens  & 
raifon,  qu'ils  ne  difcernent  plus  entre  le  bien 
&  le  mal.Preuenons  donc  vne  telle  punition: 
&  cependant  que  Dieu  nous  fait  la  grâce  de 
nous  monftrer  que  nous  la  pouuons  fuir,  que 
nous  le  facions.  Il  y  a  pour  le  fécond  ,  qu'il 
nouifaut  garder  de  prendre  cefte  couuerture 
f  riuole  de  nos  predeceireurs,cuidans  eftre  ab 
fous  deuant  Dieu,quand  nous  allcguerôs  Te- 
xemple  decertuy-cioudeceftuy-Ta:Ho,com 
ment?  vn  telperfonnage  en  a  ainti  ïfé:  ne  me 
Icra-il  donc  pas  licite?  Voire?c6me  fi  vnhom 
me  pouuoit  preiud  cier  à  la  Loy  &  à  la  vente 
de  Dieu.V-oici  Dieu  qui  nous  déclare  ce  qu'il 
approuue&  condamne  :  vn  homme  fera  tout 
au  rebours.Et  peut-il  par  fon  exemple  violer 
ce  que  Dieu  a  eftabli?  Voit-on  pas  que  c'eft  v- 
ne  chofe  contre  raifon?  Et  neantinoins  il  n'y 
a  celuy  qui  ne  le  gaudifle  fou  ;  \  n  tel  mateau: 
Et  comment?  n'en  pouuons-nous  pas  bien  fai 
re  ainli.  Et  fur  tout  quand  il  y  a  des  ptrfonna 
ges  excellen;,â:des  gians  feiuiteurs  de  Dieu 
qui  ont  commis  quelque  faute, il  nous  femble 
que  ce  n'eft  plus  pechccomme  il  en  va  de  l'e- 
xemple d'Abraham, voila  Abraham  qui  eft  vn 
miroir  de  toute  faiucfeté  &  perfedion  ,  mais 
cependant  il  a  failli  en  ceû  endroit,  quand  il 
a  eu  plufîeurs  femmes.  Ce  n'a  point  efté  pour 
la  concupiicence  de  fa  chair,  pour  dire  que  ce 
fuft  vn  homme  desbordé,  qui  appetaft  comme 
ces  gens  difloluî  àauotrl'cs  voluptez  :  il  fe 
contentoit  aflcz  de  la  femme .  Et  qui  eft -ce 
qui  le  folicite  à  cela?  C'eft  Sara  fa  femme.  Et 
pourquoy  ?  Pource  que  l'incrédulité  la  pouf- 
fe à  vn  tel  mal ,  qu'il  luy  femble  puis''  qu'elle 
eft  vieille  &  ancienne, qu'Abraham  ne  pourra 
plus  auoir  d'enfans  d'elle  :&  pource  qu'elle 
fçait  que  la  promelTe  luy  eftoit  faite  ,  qu'en 
fi  fcmence  le  fahitdu  monde  cftoit  promis, 
elle  va  par  vne  folle  imaginatiô  foliciter  fon 
mari  à  vne  chofe  qui  ne  luy  tftoit  point  lici- 
te. Or  il  eft  vray  que  Dieu  n'a  pas  imputé  ce- 
fte faute  à  fon  léruiteur  Abrahamunais  tant  y 
a  que  nous  ne-ladeuons  pas  reputer  vertu, 
qu'elle  ne  foit  toufiours  à  condamner .  Car 
Dieu  ne  veut  point  que  fa' vérité  foit  obfcur- 
cie  (comme  nous  auons  dit)fous  ombre  de  1' 
authoritéd'vn  homme  mortel  :  ccLi  aufsi  ne 
fcroit  pas  de  raifon,  line  faut  point  diminuer 
la  gloire  de  Dieu  ,  pour  cxcufcr  ceux  qui  au-t" 
ront  failli  en  ceft  endroit. Et  mclmesno' vo^» 
ons  par  rEfcriture.qii'Abîahâaeii  fon  paye- 
ment d'auoir  excède  la  règle  de  Dieu.  lacob 
aufsi:  nous  voyons  ce  qui  eft  aducnuà  Dauid. 
Voila  donc  de  grans  perfonnages  qui  ont  lail 
litmais  ce  n' eft  pas  pour  amoindrir  le  péché,' 
ne  pourdonner  exciifc  àceux  qui  les  cnfuy- 
uront .  Et ainlî  notons  bien  que  cen'eftque 
folie  h  nous  de  cercher  tels  fubterfiiges 
pour4irÉ,  Ceftuy-ci  enavfé,  ct/luy-la  nous 

a  monftré 


SVRLAI.   ATIMOTHT. 


IIÇ 


amonftréle'chemin.  Mais  quand  la  vie  des  fte.Bethclauoitbienefté  vn  lieu  bon  pour  la 
hommes  fera  da  tout  reiglee  à  la  parole  de  cob  :  mais  depiiiv  que  Dieu  veut  qu'on  ûcri- 
Dieu,  &d'autant  qu'ils  nous  conduiront  U,  fie  enlerufalcm  ,  li  leprouue  tout  ce  quia- 
que  nous  tafchions  de  les  enfuiure:maisquad  uoit  elle  aiiparau.mt  en  vl'age.  Voila  donc 
ils  auront  décliné  du  bon  chemin, gardons  de  Dieu  qui  déclare  que  c'cftvne  maifonde  mal 
faillir  après  eux:carnous  ne  ferons  pas  excu-  heur  &  d'iniquité  que  ce  lieu-la  qu'on  auoit 
fables  pourtant.  Ce  nous  eftencores  vne  le-  bafti  pourluy  faire  facrifice.  £t  poiuquoy/ 
çon  bien  profitable  que  cefte-ci,  &  mal  prat-  Car  il  préfère  A  tous  facrifices  l'obeiflànce  ; 
tiquee.Elle  nous  eft,di-ie,bien  profitablercar  comme  il  eft  déclaré  au  premiei'  liure de  Sa- 
y  a-il  rien  plus  neceflàire ,  que  de  compalTèr  muel.  £t  nous  voyons  qu'autant  en  eii-û  ad-  '•  S"*-**» 
toutes  nos  œuures  à  la  pure  parole  de  Dieu?  uenu  aux  Samaritains  :  Nos  pères  (dit  cefte  , 
Or  ft  Diéb  u'a  point  maiftrile  fur  nous ,  Se  femme  parlant  à  lefus  Chrifi  )  n'ont-ils  pas  '*'''4'*» 
que  nous  ne  luy  foyôs  point  foiets  en  ce  qu'il-  adoré  en  cefte  môtagnefOr  cela  n'eft  de  nuU 
nous  commande.que  fera-ce?Au  refte.fi  nous  le  va)cur:car  Dieu  qui  auoit  ordonne  le  tem- 
enfuiuons  les  hommes  fans  difcretion  ,  c'eft  pie  de  lerufalem ,  ne  vouloit  point  qu'on  fe 
autant  derogueràDieu-,  qu'il  ne  foit  point  deftournaiHe  la  parole  de  Dieu, fous  ombre 
elcoutéde  nous,  mais  ce  qu'il  aura  pieu  aux  que  les  hommes  auoyent  donné  vn  télexera- 
hommes  de  faire,  encores  qu'il  ne  l'ait  point  p'e.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir 
approHué":  n'eft-ccpas  preiudicierà  laparo-  quant  à  ce  quefainû  Paul  monftre  encepaf- 
le  de  Dieu?  Et  où  en  fommes-nou<;?  ne  voila  fage,  c'eft  que  la  pluralité  des  femmes  eftoi'c 
point  vne  coufufion  trop  enorme?Ainfi doc,  venue  en  vfage  parmauuaife  couftume,  &  fur 
d'autant  plus  deuons-nousobferuer  diligera  tout  fie  c-e  qu'on  s'eftoitpar  troparreftéaur 
ment  ce  que  nous  auons  dit,c'eft  al'çauoir  de  vices  des  fainfts  Patriarches,  lefquels  l'Efcrt 
efcouterceque  Dieu  nous  commande  ,  &de  turefainûenous  propofebien  pour  voir  quel 
le  fuiure  purement  &finiplement,  &neregar  les  vertus  il  y  a  eues  en  eux,mai'i  cepédâtelle 
der  point  àce  que  le  rcfte  du  monde  fait.  C5  monftre  aufsi  bien  qu'il  y  a  eu  de  l'infirmité,' 
«ne  les  Papille'; ,  quand  ils  imaginent  tout  ce  afin  que  nous  apprenions  de  nous  humiliefi  ^ 
que  bon  leur  femble,&  qui  leur  vient  au  cer-  Et  voila  pourquoy  le  Prophète  Malachie  for '*''^*'^ 
ueau  ,  tant  s'en  faut  qu'ils  foyent  imitateurs  me  cefte  complainte  ,  comme  eftant  folicité  '^' 
des  Sainfts  (  comme  ils  fe  vantent  )  qu'ils  ne  des  femmes,  combien  qu'on  fe  couuriftdece 
fçâuét  à  quelle  fin  ni  i.  quel  but  les  feruiteurs  fte  excufe-ci,&  qu'on allegaft, Les  fainfts  Pc 
de  Dieu  ontiamais  tédu:&làdeirus  ils  feiet-  resen  ontainlî  vfë  :  cela  n'tft point  valable,- 
tent  à  la  volée  pour  faire  ceci  &  cela. Quand  dit-il.Car  l'home  qui  reiette  fa  femme  après 
ils  pourront  alléguer  l'exemple  d'vn  Sainft,  eftre  marie, &  fe  fepare  de  Ci  partie.il  eft  par 
les  voila  bien  fondez  ,  ce  leur  femble  ,  qu.ind  ii*re,il  eft  fauflaire,  Se  mérite  d'eftre  extermi 
ils  diront,  Vn  tel  Sainft  a  ainfî  fait.  Or  il  ne  né  du  rang  des  hommes.Neantmoins  encores 
faut  point  que  nous  foyonseftonnez  .quand  vn  telpecnéferoitplusàfupporterquc  laplu 
ces  poures  ignorans  courent  ainfi  comme  ralité  des  femmes,  dit  le  Prophète  :  car  vous 
grues ,  &  qu'ils  s'cnueloppent  enfemble  ,  8c  inoleftez  vos  femmes  en  langueurs  &  deftref^ 
qu'ils  vont  le  grandchemin  des  vaches, (com  fes  ,  &n'eft  point  pofsible  qu'elles  puiflenc 
me  on  dit)mais  tenons  toufîours cefte  reigle,  inuoquer  Dicu.Pource  qu'on  fçait  bien  q  les- 
(comme  elle  doit  eftre  infalliblc^que  ce  que  femmes  par  ialoulie  ne  fepeuuent  nullement 
Dieu  a  défendu,  foit  tenu  pour  mauuais ,  en-  fupporteri&cepédant  elles  ne  laiflent  pas  de 
cores  que  tout  le  monde allaft  au  rebours  :  &  crier  à  l'autel  de  Dieu.Ie  fuis  côtiaint  d'ouir 
que  ce  que  Dieu  a  commandé, foit  tenn  pour  telles  côplaintes.dit  le  Seigneur.Péfez-vous 
bon  ,  encores  que  tout  le  monde  n'en  tiene  que  ie  vous  puifle  eftre  propice  quad  il  y  aura 
conte. le  laiffe  ici  à  dire  que  les  Papiftes  s'a-  de  telles  côtradiftions  entre  vo'fNous  voy»' 
bufent ,  quand  ils  nou',  allèguent  les  fainfts  ons  làcôme  le  Prophète  Malachie  reprouue 
Peres:car  ils  prendronc^des  moine$&  des  ca  ce  qu'on  penfoit  eftre  excufable,à  caufe  que 
pharsradotez,au-lieude  C\:  ranger  à  ceux  que  les  hommes  auoyent  ainfi  fait.  Et  pouroller 
l'Efcriture  fainftenous  propofe  pour  exem-  vn  telfubterfuge  ,  où  eft-ce  qu'il  rameneles 
ple.Mais  quand  ils  n'âuroyent  point  cefte  fo  Iuifs?A  la  première  ordônance  de  Dieu:Ce-. 
lie  ^^fteft-ce  enco'es(comme  nous  auons  de-  lu'y(dit-il)qui  nous  a  créez, ceiuy  qui  eft  po- 
ciifé)  que  Dieu  doit  toufiours  auoir  prccmi-  ftre  Pcre,  n'a-ii  pas  fait  vn  feul  homme,&-  ne 
nênce..  Car  voila  aufsi  enquoyles  luifs  fe  luy  a-il  pas  adiouftévné  femme?  N'euft-il 
font  âbufez  anciennement, ie  di  au  leruice  de  pas  peu  faire  qu'il  euft  donné  trois  ou  quatre 
Dieu ,  qu'il  leur  a  fcriiblé  q  tout  ce  que  leurs  femmes  à  vn  home?  NTauoit-il  parefp;it  d'a- 
Perei  auoyent  fait  ,  ils  le  pouuoyent  tenir  bondance  en  luy?  Et  toutesfois  il  n'i  point 
pour  bon.Ornoftve  Seigneur  leur  auoit  bàiU  donné  trois  Eues  à  vn  Adam,maisil  a  dit,Fàl 
kùreigle,  laquelle  ik  mêfprifoyent  pour  fons  vne  aide.Iln'eft^  là  parlé  que  (TVifeiidè)  = 
enfuiure  l'exemple  des  Pères.  Ils  ont  adoré  c'eft  à  dire  la  femniejlaquelle  Diéù  a  conioin 
en  Bethcl ,  pource  que  lacob  y  auoit  facrifié.  te  à  vn  homme.  Nous  voyons  par  cela  que  le 
Voire,  mais  Dieu  condamne  cela/  &  leiJéte-  Prophète  met  bas  tpus  les  exemples  qu'on 

^.iii. 


VIMGTDEVXIEME     SERMON 


pourroit  amener  des  homme:,  déclarant  que 
Us  nedoiuent  en  rien  preiudiciet  k  la  reigle 
oueDieunout  a  donnée,  de  l3(]uelle  il  ne 
i»o'  faut  deftourner  en  façon  que  ce  foit.  Paf 
fons  outre.  Quand  {âin  Paul  dit  que  les 
miniftres  de  la  parole  de  Dieu  doiucnt  e- 
ftre  maris  d'vne  feule  femme  ,  il  raonftre  que 
ce  qui  feroit  fupportable  en  vn  particulier, 
doit  efte  condamné  en  ceux  qui  font  en  eftat 
public.Non  pas  que  les  vicesjae  foyent  toul- 
ioursàcondaner  par  tout  où  ils  fe  trouuét! 
mais  tant  y  a  qu'vn  homme  qui  fera  feulemét 
nechanique ,  &  qui  ne  fera  point  de  renom, 

Îiourra  bié  eftre  excufé  en  ces  yices  notables, 
equel  on  pourra  purger  &  réduire  petit  à  pe 
tit:  &  cependant  quoy  qtl'il  en  foit ,  fi  eft-ce 
qu'on  n'vferapomt  de  rigueur  extrême  en- 
uers  luy.  Mais  celuy  qui  doit  eftre  comme  v-> 
ne  lampe  pour  efclairer  le  refle  du  peuple, 
sui  doit  monllrer  le  chemin ,  qui  doit  eilre 
comme  vn  port'enfeigne  ,  quand  celuy-la  fe 
desbauche,il  eft  â  punir  doublement.jEt  pour 
quoy?  Car  il  faut  que  la  vie  des  miniftres  de 
la  parole  foit  en  édification  :  &  fur  tout  que 
ce  qu'on  pourroit  cxcufer  en  d'autres  ,  foit 
corrigé  en  eux,&  qu'on  ne  les  fupporte  poit. 
Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  obferuer  de 
«e  paflàge.  Et  autât  en  eft-il  de  tous  ceux  qui 
font  d'eftat  &  d'authorité:que  s'ils  difent.Et 
auoyf  vn  pour£  homme  en  fera  bien  autant. 
Voire,  mais  celuy-la  s'il  pèche,  ce  n'eft  qu'à 
luy  ,  &  fa  faute  ne  tirera  point  vn  fi  grand 
fcandale:mais  celuy  qui  a  receurne  telle  gra 
ce  de  Dieu,&  qui  eA  eleué  en  haut,  tellemét 
qu'on  le  peut  voir  de  loin ,  s'il  trehufche  ,  ie 
vous  prie,  n'attirera-il  point  entant  qu'en 
Juy  eîlfes  prochains  en  ruine?S'il  tôbe  quel- 
que petite  loge,&  bien, elle  ne  fera  mal  a  per 
fonne  :  mais  n  vn  grand  édifice  s'en  va  bas,  il 
y  a  vne  domaine  de  maifons  à  l'entout  qui 
pourront  çlhe  accablées  deffous.Ainfi  en  eft 
il  de  ceux  5  Dieu  aura  exaltée.  Que  donc  les 
miniltres  de  la  parole  de  Dieu  apprenent  de 
fe  tenir  en  vne  bride  plus  eflroite  que  les  au 
tres,&  fur  tout  quâd  ils  voudront  eftre  corre 
âeuTS  des  vices.qu'ik  regardent  biende  n'en 
«ftre  point  entachez.  Car  prenons  le  cas  que 
in  homme  fuft  pur  &  innocent,  fi  eft-ce  tou- 
lesfois  qu'encorcs  faut-il  qu'il  exerce  plus 
grande  rigueur  enuers  foy.qu'cnuers  fespro 
«hains.  Ainfidonc,  d'autant  que  Dieu  nousa 
«onlhtuez  pour  reprendre  les  fautes  commu 
jier  des  autres ,  qu'vn  chacun  de  nous  appre- 
nede  t'efpliicher,&  regarder  tellemét  i  foy, 
que  nous  n'ayons  point  ce  reproche  «jui  nous 
foitmisaunez,  Médecin guari-ioy  le  pre- 
Biier ,  &  puis  tu  penferas  des  autres  malades. 
Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  obferuer.Or 
•epédaot  notons  que  fi  des  vices  font  fuppor 
tcï  à  caufe  qu'on  n'y  peut  remédier,  ce  n'ert 
pas  qu'on  ne  doiue  tafcherà  y  -mettre  ordre 
tat  qu'il  eftpofsible:mais  il  faut  vfer  de  mo- 
yens propret  4c  conuttublcs.   Co.mme  août 


vpyons  ici  que  S,  Paul  n'a  peu  retrancherdn 
premier  coup  cefte  pluralité  de  femmes:  non 
pas  que  la  chofe  fuft  bonne  ,  mais  pource  que 
c'eftoit  vn  vice  qui  auoit  duré  de  15g  temps, 
&  aufsi  que  la  guarifon  eftoit  par  trop  vioien 
te,  fi  vn  homme  eufl  reietté  vne  femme  fecon 
de  qu'il  auoit  trompte.Il  faloit  donc  que  ce- 
la fuft  fouffert  pour  vn  temps ,  iufques  à  ce 
qu'il  y  euft  moyen  de  le  corriKer,&  q  les  ho- 
mes de  leur  bon  gré  cognulSènt  qu'ils  s'e- 
ftoyent  par  trop  lafché  la  bride:  Se  que  k  fé- 
conde féme aufsi  cognnft  en  fon  enëroit,que 
il  eiloit  difficile  de  fe  comporter  en  vn  tel 
meflinge  qui  eft  controuué  contre  Pordont 
nancede  Dieu,  &  la  reigle  qui'l  auoit  donee, 
lu^ues  à  tât  donc  que  les  homes  &  femmes 
fkl^nt  ainfi  volôtairement  réduits,  8c  de  leur 
bongré,on  n'y  pouuoit  mettre  ordre.  Or  de 
là  cognoilToijs,  fi  vn  vice  a  prins  racine  fi  pro 
fonde  qu'on  ne  le  puifle  aifeement  dcfracl- 
ner,que  nous  auons  tousàgemir.cognoiilans 
que  c'eftàbon  droit  que  Dieu  nous  punit 
ainfi,  d'autant  que  nous  n'auons  point  efté 
fur  nos  gardes  en  temps  opportun.  Quïd  m 
homme  fera  aduerti  de  fe  cocregarder,&  que 
il  continue  de  plus  en  plus  en  fes  excès ,  C  on 
ne  le  peut  guarir  quand  il  voudroit,  ne  faut- 
il  pas  qu'il  cognoiflèiHelas  iefuis  ici  languif 
iânt,c'eft  raifon  que  i'endure  beaucoup  :  fi  ie 
eufle  receu  bon  côfeil,  l'eulle  preuenu  vn  tel 
mal:or  ie  n'en  ay  tenu  conte,  mais  ie  me  fuis 
tellement  oublié  que  le  n'ay  donné  nul  or- 
dre en  mon  cas:  maintenant  me  voici  incura-, 
ble  ,•  les  médecins  ne  fçauent  que  faire.  Vn 
homme  qui  fe  verra  ainfi  à  l'extrémité  ,  ne 
pourra  prendre  excufe  de  fa  faute  .  Ainfî 
de  noftre  cofté ,  fi  nous  voyons  des  vices 
trop  enracinez,quenous  cafchions  d'y  pour- 
uoir,  &  que  nouscognoifsions  que  noftie  Sei 
gneur  par  ce  moyen-la  nous  veut  faire  hon- 
te &  vergongne  :  &  cependant  quoy  qu'il  en 
foit,  ne  laiflons  pas  de  corriger  ce  que  Dieu 
condamne ,  afin  que  le  mal  ne  germe  point 
par  trop  long  temps  :&  fi  ce  n'eft  du  premier 
iour,iIvaui  mieux  tafdqueiamais,commeon 
dit.  Cependant  nous  voyons  ici  quelle  tft  la 
fainâeté  Papale  ,  d'autant  que  le  Pape  n'a 
point  penfé  que  les  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu  fuiïent  (âinûs  ,  finon  qu'ils  s'abftinf- 
fent  du  mariage.  Voila  que  les  Papiûes  allè- 
guent. Qu'en  la  Loy  anciéne  il  faloit  que  le 
grand  Sacrificateur ,  quand  il  entroit  au  fan- 
ûuaire,  fuft  feparé  d'auec  fa  femme  :  8c  puit 
que  ce  leur  eft  vne  chofe  ordinaire  du  facti- 
face  qu'ils  orfirent  à  Dieu ,  qu'il  faut  que.ce- 
luy  qui  eft  en  tel  cf[at,renonce  du  tout  au  ma 
riage,&  qu'il  ne  f&mefle  point  parmi  les  fem 
mes.  Or  quant  au  premier,  les  Papiftes  blaf- 
phement  contre  Dieu  ,  en  difant  que  les  Fa- 
fteurs  de  l'Eglife  Chreftienne  font  appelé» 
pourfacrifier  lefusChrift.Carla  Mcuc(c5- 
roe  nous  fi{auons)eft  vne  chofe  deteftable.  Se 
du  toutdia^olique.  Il  eft  rray  que  Dieu  nous 

corn 


SVR    LA    I."    A    TIMOTH. 


nr 


'tomsninie  it  lâciifiei  let  âmes  que  nous  luy 
acquérons  par  le  moyen  de  l'£aangile,(com- 
K«m.ll>  mefainâ  Paul  en  parle  aui  Romains  )  mais 
I,  du  Sacrificateur  de  ta  Loy  ancienne ,  il  a  eité 

figure  de  noAre  Seigneur  lefus  ChriA,il  a  re- 
prefentéfaperfonne,&  celan'eft  point  au- 
tourd'Kuy  en  nous.  £t  ainfï  c'eft  vn  argument 
brutal ,  8i  meCmes  blafpliematoire  (  comme 
nous  auons  roonfti  é  )  >^ue  celuy  dont  les  Pa- 
piftcs  ont  ifeduitle  commun  populaire,guand 
ils  n'ont  point  donné  licence  à  leurs  preftre» 
de  fe  marier,â[  en  font  venus  iufques  lâ>d'3p- 
peller  Tefut  de  mariage,  poUutiô'qui  eft  en- 
core? vn  fécond  blafpnemc.d'auoirainfî  vili- 
iîffr.ij.  pende  l'ordonnance  de  Dieu. Car  il  eilditno 
4'  tanunent ,  que  le  mariage  tfl  honorable  en 

tous-  le  faind  Efprit  a  prononcé  cefte  fenten 
ce.  £t  voila  les  Papes  qui  ont  defgorgé  cefte 
viieine  &  puante  parole,  que  l'cftat  de  maria- 
ge eftoit  poilu.  Sçauroyent-ils  batailler  plus 
apertement  à  l'encontre  de  Dieu .'  Or  cepen- 
dant (comme  l'ay  défia  dit)oous  voyons  que 
iâmd  Paul  qui  a  efté  organe  dejnoftre  Sei- 
gneurlefus  Chrill.n'a  point  trouuc  eftrange, 
que  les  Pafteurs  &  ceux  qui  ont  charge  da- 
nonceria  parole  de  Dieu,  fuflent  mariez  :  & 
melmes  entre  leurs  vertus  il  a  requis  cela. 
Vray  elV  qu'il  ne  le  requiert  point  cômevne 
chofe  neceflàire  de  foy  :  car  de  fait  nous  voy- 
ons qu'il  s'cA  abltena  du  mariage,foit  que  ia- 
mais  n'ait  eu  femme,  ou  bien  qu'il  fuft  vefue. 
Se  qu'il  fe  teinft  feparé  :  il  monllrPtoutesfois 
lu'iln'auoit  point  compagnie  de  femme  ,  & 
efire  que  chacun  fuft  femblable  à  luy.  Or  s'il 
euft  cognu  que  le  mariage  fuit  neceflàire  aux 
prefcheursde  TEuangile  ,  U  euft  voulu  don- 
ner exemple  en  fa  peifonne  .  Il  ne  requiert 
point  ici  Je  mariage  comme  neceflàire  ,  mais 
fi  eft-ce  qu'il  le  tient  &  le  repute  ici  vertu. 
Nous  voyons  donc  quand  la  miniftres  delà 
parqk  de  Dieu  font  mariez  ,  &  qu'ils  tienent 
meûuge,  que  c'eft  vn  ordre  que  Dieu  approu 
ue,&  qu'il  fanftifie  par  fa  bouche  propre,  cn- 
cores  que  les  hommes  le  condamnent.  Et  au 
refte,  il  faut  qu'vn  chacun  regarde  À  foy  :  & 
d'autant  que  tous  n'ont  point  le  don  de  con- 
tinence, ceux  qui  voyent  qu'il  leur  eft  expé- 
dient &  vtile  de  fe  marier.qu'ils  vfent  du  ma- 
riage comme  d'vn  remède  bon  Se  fàirô,&  qui 
cftapprouué  de  Dieu.  Et  encores  que  cela  ne 
y  fùft,  (i  eft-ce  que  le  mariage  eft  en  liberté  à 
vo  home:  encores  qu'il  ne  foit  point  côtraint 
de  necefsité  fi  grande ,  fi  eft-ce  que  tonfiours 
il  fe  pourra  marier ,  &  le  mariage  eft  bon  & 
louable  en  foy. Et  «fia  en  eft  iuge.'  Dieu  :  il  ne 
faut  point  fe  rebecqucr  à  l'cncôtre.  Vray  eft 
que  ceux  iiquiil  eftdônéde  fepouuoir  abfte- 
(iirdumaruge,&  que  cependant  ils  cognoif- 
fent  qu'ils  pfuuent  mieux  fetuir  àDieu,doy- 
tient  demeurer  en  ceft  eftat  :  mais  qu'ils  co- 
gnoiflènt  aufsi  qu'ils  ne  font  point  à  préférer 
pour  cela  aux  autres.De  moy.ie  ne  veux  poît 
^u'ôm'ictiibue  àYcriu  £ie  ne  fuit  point  nu* 


ï 


rit  :pluftoft  c'eft  vnvice  en  moy.fi  ie  pouuoye 
mieux  feruir  i  Dieu  en  mariage  que  de  domcu 
rer  c5me  ie  fuis,  ie  ne  crain  point  q  ie  ne  puif 
fe  protefterdeuant  Dieu  &  les  homes,  q  icne 
fulTe  marié. Mais  ie  cognoy  mô  tnHnnité,que 
peut  eftrc  vne  femme  ne  ie  trouueroit  pas  bié 
»uec  moy.  Qupy  qu'il  en  foit,  ce  que  ie  m'ea 
abftien.n'eft  finoc  afin  d'eftre  plus  libre  de  fec 
uir  à  Dieu.  Et  ce  n'cft  pas  que  ie  penfe  eftre 
plus  vertueux  que  mes  freres:fy,fy^fi  i'auoye 
cefte  faufle  opinion-la,  &  que  ie  me  vouluuâ 
gloiifier  envne  chofequi  n'eftriende  foy. 
Âinfi  donc  qu'vn  chacun  vfede  celleJiberté 
qui  nous  eft  permife,&  que  nous  en  louiAionc 
tellement  q  nous  regardions  toufiours  de  fuy 
ure  le  moyen  q  Dieu  nous  dône  d'édifier  !'£-. 
glife,chacun  en  ion  endroit.  Voila  en  femme 
ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  pailàge.  £e 
i'ay  touché  notâment  ceftarticle,  pource  que 
nous  voyôs  en  la  Papauté  qu'on  a  fait  vne  ver 
tu  admirable  de  ne  fe  point  marier ,  voire  les 
preftres  &  les  Euefques  &  leurs  femblablCs, 
iefquels  fe  font  voulu  exépter  des  charges  pe 
nibîes  du  mariage.Mais  cepédant  nous  voyôc 
l'horriblé  vengeace  de  Dieu  qui  y  règne,  par 
les  abominations  qu'ils  ycômettent,  àcaufa 
que  le  mariage  a  efté  ainfi  vilipendé,  &  qu'ils 
ont  fait  vne  vertu  de  ce  q  eft  totalement  cou 
traire  à  l'ordonnance  de  Dieu,  voila  donc  ce 
que  nous  auons  à  retenir. Or  quâd  ûinû  Paul 
a  .linfi  p3rlé,il  adioufte,  Q»»  l  Euefque  doit  »- 
fire  yigilant  :  ce  que  le  titre  aufsi  porte .  £t 
puis  îfres.frmltnf.  &  puis,  biin  réglé,  qu'il  aie 
vne  vie  liénefte,  &  fur  tout  qu'on  voye  com- 
me vne  lumière  en  fes  moeurs.  Yci  fainû  Paul 
ne  recite  point  toutes  les  vertus  qui  pour- 
royent  eftre  requtfes  en  vn  homme  :  mais  il 
prend  quelques  efpeces ,  afin  de  nous  mon> 
ftrerque  celuy  qu'on  ordonne  pour  anoncer 
la  parole  de  Dieu,  doit  eftre  d'vne  vie  fi  bien 
réglée,  que  ce  foit  pour  édifier  les  autres  par 
fon  exemple.  Voila  donc  l'intention  de  CiinBt 
Paul:  il  note  ici  les  vertus  plus  fpeciales,& 
qui  font  plus  requifesenceft  eftat  :  comme 
d'eftre  vigilant , d'eftre   fobrc, d'eftre  pru- 
dent ,  Si  modcfte  .Voila  donc  les  vertus  qui 
doyuent  eftre  en  vn  homme  qui  aura  charge 
d'enfeigner  le  peuple  de  Dieu .  Sainâ  Paul 
euft  peu  dire,  Que  l'homme  qu'on  choifirx 
en  ceft  eftat,ne  foit  point  larrô.ou  meurtrier: 
comme  défia  il  a  dit  qu'il  ^faut  qu'on  foit  ex« 
empté  de  tout  crime  en  gênerai ,  &  comme 
pour  môftrer  qu'on  ne  doit  point  prendre  vn 
homme  en  ceii  office  qu'il  ne  "foit  exempt  de 
toute  iniure&  opprobre,  il  dira  ci  après  que 
il  faut  qu'on  ait  bon  tefmoignage ,  mefines 
des  eftrangers.  Mats  ici  (  comme  défia  nous 
auons  déclaré  }  il  regarde  comme  vn  homme 
pourra  feroir  à  Dieu  en  ceft  eftat,  car  s'il  n'y 
a  &  vigilance,  &  prudence,  &  tempérance, 
que  léra-ce  ?  N'imaginons  pas  donc  que  ce 
foit  pour  vn  homme  nonchalant ,  ce  n'eft 
jst.pour  vn  fay-neant  ^u(  ceft  office  t£ 

q.iiii. 


iiZ 


VINGT    ET    VNIEME    SERMON 


ordonné  .  Les  Papiftcs  quand  ils  voudront 
faire  vn  Euefque.apres  Tauoir  fait  preftre(c5 
me  ils  difent)  après  luy  auoir  engrailFé  les 
doigts.apres  luy  auoir  fait  vne  plus  grade  ra- 
fure  ,  &  puis  luy  auoir  baillé  (à  mitre  ,  aueç 
deux  cornes  fur  fatefte,&  puis  vn  baftô  tortu 
en  fa  main  ,  &  puis  le  bel  aneau  en  fes  doigts: 
voila  vn  homme  defgmi'e  pour  iouer  vne  far- 
ce qu^vn  Euefque  Papal:  &  cepcdant  que  fait 
il  ?  Ho,  il  cft  vray  que  les  Euefques  en  la  Pa- 
pauté ne  font  pa.  fans  charge  :  carc'tftàeux 
de  dédier  les  Ëglifes,  de  confâcrer  les  autels, 
de  faire  le  crefme,de  doner  les  ordres.&faitc 
tous  tels  badmages:voila  donc  enquoy  les  E- 
uefques  s'occupent  en  la  Papauté  .  Mais  ici  il 
p'tti  point  queflion  de  telles  fanfares,ce  n'tft 
point  vne  dignité  o'fîueque  l'office d'Euef- 
que.c'eft  vne  ceuure  Se  vn  trauail  qui  eft  cxcel 
lent,côme  dit  ici  fainâ  Paul.  Puis  qu'ainfl  eA 
donc  que  nollre  Seigneur  nous  dône  vne  char 
ge, voire  qui  eft  bien  pefante  &  difficile,  il  ne 
cfl  pas  queftion  ici  de  nous  cndoimir.Cen'efl 
point  donc  (ans  caufe  que  fainft  Paul  requiert 
ici  vne  vigilance. Autât  en  ell-il  de  la  pruden- 
ce,de  la  fobrieté,&  de  l'hônefteté  de  vie. Car 
après  qu'vn  homme  aura  mis  peine  de  fe  gou 
uernercn  forte  qu'ilfoit  en  bon  exemple  aux 
autres,il  faut  auf\i  qu'il  ait  prudéce  &  difcre- 
tion  pour  fçauoir  reprendre ,  &  pour  fe  gar- 
der des  filets  de  Satan  qui  luy  feront  tendus. 
,  Ainfî  donc  fainû  Paul  a  tant  plus  fongneiife- 
jncnt  declaré.qu'il  faut  qu'vn  homme  foit  at- 
trempé, qu'il  ait  prudence  :  &  que  fur  cela  il 
foit  orné  en  fes  nioeurs,c'cft  à  dire  ,  qu'il  foit 
en  fî  bon  exemple  en  toute  fa  vie  ,  qu'on  co- 
gnoiflè  qu'il  chemine  en  la  crainte  de  Dieu, 
&  qu'on  voye  que  c'eft  à  bon  efcient  qu'il 
parle. Nous  voyons  donc  maintenant  en  fom- 
jne  comme  fainû  Paul  requiert  ici  les  vertus 
qui  font  conuenables  à  noftre  office:nous  ad- 
uertiiiànt  aufsi  tous  en  gênerai ,  quand  nous 


auons  àchoilrr.gens  quiluyent  pour  porter 
la  parole  de  Dieu  ,  Se  pour  élite  dodttursien 
fon  Eglile,  que  nousUtuons  rcgaideràceux 
qui  y  font  fpeciakmen  rappelez  :&  fur  tout 
que  la  vie  rei'pondeà  ladoiirine  ,  car  c'eft  le 
principal  que  veut  ici  fair.ctPaul.Voila  ce  que 
nousauons  à  noteren  fonime.  Et  cependant 
qu'vn  chacun  aufsi  cognoiflc  que  les  vertus 
qui  l'ont  ici  requifes  en  tous  niiniltres  delà 
parole  deDieu,font  pour  donner  exemple  au 
troupeau.  11  faut  bien  qu'vn  chacun  cognoif- 
fe.que  quand  il  eft  dit  qu'il  faut  que  les  mini- 
ftres  foyent  gens  prudens,  atttempez ,  qu'il» 
foyent  nonneftes  en  mocurs.c'eftahn  que  cha 
cun  feconfoime  àleur  exemple  :  car  ce  n'eft 
point  pour  tio.s  ou  quatre  feulement  que  ce- 
la eft  dit ,  mais  pour  tous  en  gênerai .  Voila 
donc  comme  il  faut  que  l'exemple  des  hom- 
mes nous  profite.d'autant  qu'il  nous  condui-» 
rontdroitement  félon  la  volonté  de  Dieu. 
due  s'ils  en  déclinent  tant  peu  que  ce  foit,  il  • 
ne  faut  pas  que  nous  leur  attribuons  celle  au- 
thorité  q-nous  les  enfuyuions  pour  cela:mais 
tenons-nous  à  ce  que  dit  fàinft  Paul,afça- 
uoir  que  nous  deuos  enfuyure  les  hommes  en 
ce  qu'ils  feconformét  du  tout  à  la  pureparo 
le  de  Dieu,  &■  qu'ils  font  imitateurs  de  lefus 
Chrift,  pour  nous  conduire  au  droit  chemin. 
OR.  nous-nousprofterneronsdcuant  la 
facede  nofjlrebon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes,  le  priant  qu'il  luy  plaifc  nous  les 
faire  tellement  ftntir  que  nous  auilions  de 
nous  corriger  ,&' que  nous  y  mettions  peine 
de  plus  en  plus,gemiilàns  toufîours  à  caufe  de 
nos  infirmitez  .  Et  pource  que  nous  forames 
tant  redeuables  ànoftre  Dicu,qu'il  luy  plaife 
nous  fupporter  par  fa  bonté  infinie,  iiifques  à 
ce.qu'ilnousaitdutout  reucftusde  faiufHce, 
&  conformez  i  fon  image  glorieufe.Que  non 
feulement  il  nous  face  cefte  grâce,  mais  aufsi 
à  tous  peuples  &  nations  de  la  terre,&c.-' 


TROISIEME     SERMON     SVR     LE 

TROISIEME        CHAPITRE. 

1  Vdrok  certaine, Si  aucun  appete  f  office  ^Euef^ue.il  deftre  v«e 
auure  excellente. 

X  II  faut  donc  que  î  Euejquefoit  irreprehenfible,  mari  d'yneJeU' 
le  femme  >y>eillant  prudent,  modeste,  recueillant  \olontiers  les  eîlran-^ 
gcrs, propre  a  enfeignery 

3  "Non point  addonné  au  y>in,ne  hateur,  neconuoiteux  de  gain  <?f/- 
honne?le:maïshumain,nonnoifeux,nonauaricieux: 

4  Bien  pouruoyant  àfa  famille,  ayant  fes  enfamfuiets  en  toute 
rcuerencc. 

Nous 


SVR    LAI.    A    TI  MO  TH. 


Ous  n'auons  point  fcuic- 
mcnc  ici  â  trait.erles  ver- 
^'  tus  (j  fainft  Paul  requiert 
^  en  ceux  qu''on  doit  ordon 
ner  Palkurs  en  FEglile 
de  Dieu  ,  mais  noter  auisi 
à  quelle  lîii  il  prétend  :  car 
il  faut  que  tous  reçoyuent  doctrine  coniune 
de  ce  qui  eft  ici  contenu. Il  ell  vray  que  fainft 
Paul  s'addreflc  à  ceux  qui  ont  la  charge  d'é- 
lire des  Pafteurs:  mais  cependant  ceux  qu'on 
élit,  &  qui  font  appelez  à  ceft  eftat,  doyuent 
cognoilire  que  Dieu  leur  met  côme  la  bride 
fur  le  col,  &  leur  déclare  à  quelle  condition  il 
les  appelle  à  fon  feruice.  Et  puis, que  tous  fi- 
dèles de  leur  colle  doyuent  en  gênerai  pen- 
fer.quâd  Dieu  requiert  ftinûcté  de  vie  &bon 
exemple  en  ceux  qui  doyuent  anoncer  la  pa- 
role ,  que  c'cft  afin  que  les  autres  les  enfuy- 
uent:  &que  ladoftrine  ait  tant  plus  d'autho- 
rité, qu'elle  foit  côme  ratiiîee,  quand  on  ver- 
ra q  et  luy  qui  parle, ne  femocque  point, mais 
qu'il  y  procède  en  la  crainte  de  Dieu ,  &  qu'il 
a  imprimé  en  fon  coeur  ce  qu'il  prononce  de 
bouche.  Notons  bien  donc  eue  fainft  Paul  n'a 
pas  feulement  voulu  chanter  la  leçon  à  ceux 
qui  doyuent  élire  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu,&  qui  doyuent  auf.i  eftre  eleus,mais  il  a 
voulu  auisiaduertir  tous  fidèles  de  fe  confor 
mer  àccfle  règle  qu'il  met  ici. Comme  de  fait 
Dieu  ne  cômandc  point  feulement  auxmini- 
^ires  de  fa  parole  d'eftre  attrépez,d'cftre  mo 
deftes,d'eftre  fobres,  d'eftre  vigilSs  à  leur  vo 
cation, cela  ell  cômun  à  tous  Chreftiens:  mais 
(côme  l'ay  défia  touchéjd'autât  que  le  trou- 
peau qui  eil  aflerablé  , doit  oui r  la  parole  de 
Dieu  par  la  bouche  d'vn  home, il  faut  que  ce- 
luy  qui  parle,teftifie  de  fait  que  c'eft  à  bon  ef 
cient,&  qu'il  porte  telle  rtueréce  à  la  doilri- 
ne  qu'il  anôce, qu'il  s'y  veut  râger  le  premier: 
S:  qu'il  veut  déclarer  qu'il  n'impofe  point  feu 
lemét  loy  aux  autres, mais  que  la  fuiettion  cft 
c5mune,&  que  c'eftàluy  de  cômencer. Voila 
di-ie,ce  que  nous  auôs  à  noter  en  ce  palîàçe. 
Et  d'autât  plus  nous  y  faut-il  mieux  péfer,  â' 
nous  voyons  la  difficulté  qu'il  y  a  de  nous  at- 
tirer àDieu.Car  côbien  q  cefte  dôdrine  nous 
foit  prefchee,&  q  nous  foyons  conuaincus  de 
noftre  deuoir,&  q  nous  n'ayons  point  de  fc3- 
dalespourno'desbaucher,mais  q  nousfoyos 
incitez  àbien.tant  y  a  qu'encores  ne  pouuôs- 
nous  approcher  de  Dicu.Ainfi  doc  nous  auôs 
befoin  de  bien  noter  tou  es  les  aides  qu'il  no' 
done.afindefuppleerà  noftre  infirmité.  Q.i)i 
pis  eft,  nou?  en  voyons  beaucoup  qui  ne  dc- 
mandét  qu'vne  vaine  couutrture  &  friuole: 
qiiâd  ils  feront  dillolus  en  leur  vie  &■  desbau- 
chez,  moy énât  qu'ils  puiflent  alléguer  q  leurs 
Pafteurs  ne  font  point  meilleurs  ,  ce  leurift 
anez:les  voila  iuftcs.cc  leur  léble.  Car  auiour 
d'huy  qui  cftcaufe  qu'il  fc  trouuera  dev  Pa- 
fteurs diffolus,&qui  ne  refpôdent  point  .1  leur 
vocation?  Le  peuple  lesdcmande  telston  fera 


bicnaifed'auoir  quelque  liberté.Nonpointq 
cela  profite  :  car  la  condânation  fera  pluftoft. 
double  à  ceux  qui  font  ioyeux  qu'on  vfe  ainiî 
de  flatterie. Mais  quoy  ?fi  eft -ce  q  c'cft  vn  vice 
cômun, côme  l'ay  dit. D'autant  plus  donc  no* 
faut-il  obltruer  C£  que  dit  ici  S.r.iul,afin  que 
vn  chacun  entant  qu'en  luy  cû,  tafche  q  l'£- 
glife  de  Dieu  foit  bien  édifice  par  Phonnefte 
té  de  ceux  qui  anoncent  l'Eu,igile,&:  qu'on  ne 
les  foutfrc  point  quad  ils  fcrôt  d'vne  vie  mau- 
uaife,&  qu'ils  ne  feront  qfcandaliferrque  cela 
(bit  exterminé,  &.-  qu'il  n'y  ait  point  vue  telle 
ordure  croupiflante  au  temple  Dieu ,  ni  en  là 
maifon:car  toute  ûinûeté  doit  là  reluire, que 
il  ne  faut  point  que  le  fiege  qui  a  efté  côftitué 
de  Dieu, foit  prophané  par  la  mefchâte  vie  de 
ceux  q  s'y  gouuernent  mal.  Voila  dôc  à  quoy 
il  nous  tant  tendre.  Et  fi  nous  voyons  que  lès 
chofes aillent  autrement  qu'iln'eft  requis, co 
gnoilTonsquec'eftvn  fignede  l'ire  de  Dieu, 
Et  pourtant  il  faut  que  nous  regardions  donc 
le  mal  procède,  c'eftafçauoir  que  non  feule- 
ment pluiîeursdemâdent  ànourrir  les  vices, 
mais  aufsi  ils  s'y  baignent  :  afin  que  cela  leur 
férue  d'autant  d'excufe,&  q  leurs  vices  n'ap- 
paroiflent  pas  côme  ils  feroyent  autrement." 
Et  puis, d'autant  q  ceux  qui  fe  portent  loyau- 
ment  au  feruice  de  Dieu,  ont  plus  de  liberté^ 
ils  ne  demandent  finon  de  leur  clorre  la  bou- 
chera; quand  il  y  aura  vn  homme  qui  fera  en- 
taché de  quelque  Vice,  il  faudra  qu'il  applau- 
dilTe  à  ceftuy-ci, qu'il  flatte  ceftuy-la,  afin  de 
fe  niaintenirr&  fi  on  l'a  fupporté, le  voila  obli 
gé  d'autant.  Or  quand  nous  cognpiflons  que 
ce  mal  refide  en  nous ,  ne  trouuons  point  e— 
ftrange  fi  noftre  Seigneur  ne  fufcite  &  qu'il 
n'enuoye  point  de  gens  qui  nous  foyent  com 
me  miroirs  de  toute  perftiliô:&  l.\  delTus  pre 
nons  CDurage(c6me  l'ay  défia  dit)  chacun  en  " 
fon  endroit. Et  que  les  mintftres  de  la  parole  ' 
cognoifïèntde  leur  cofté.ptirs  que  Dieu  a  dé- 
claré qucL  feruiteurs  il  veut  auoir  en  ceft  e- 
ftat,que  ceu.Y  qui  ne  tafchent  point  à  confor-  ' 
mer  leur  vie  à  vne  telle  règle  ,  fouftiendronc 
en  la  fin  vne  condamnation  horrible  ■-  Si  que 
tous  fidèles  quand  ils  voyent  que  ladoifVnne 
eftconfermce  par  la  bonne  vie  de  ceux  qui 
les  enfcignent, qu'ils  foyét  tant  plus.incitez,  ' 
cémenou'^  voyons  auisi  que  l'Apoftreen  par' 
le  en  l'epiftre  aux  Hebrieux  ,  lequtl  ramené 
1.1  les  fidèles  qui  auoyent  eu  de  bons  Pafteiir*, 
qu'ils  contemplent  leur  conuerfation ,  afin 
qu'ils  foyent  tant  plus  refolus  de  fuyure  lai 
doftrine  au'ils  auront  ouye  de  leur  bouche. 
Car  c'eft  aufsi  comme  pour  feeller  ce  que 
nous  prefchons,  quand  nous  cheminons  en 
crainte  de  Dieu, &  qu'on  pourra  appercenoiir 
que  nous  ne  parlons  point  fculemét  pour  les 
autres, mais  principalem.ent  pour  nous. Et 
quand  les  Pafteurs  auront  ainfi'perfifté  iuf- 
ques  en  la  fin, &;  que  leur  conuerfacipaaura  e- 
fté  bonne  &  louable,  voila  leur  doftrine  (jiH 
doit  titre  rendue  plus  authentique.  Appie- 

I.L 


tjo  VINGTDEVXIEME 

rons  donc  de  faire  noftre  profit,  quand  Dieu 
nou'i  donne  vn  tel  auantage,  &  fçachons  que 
ceux  qui  ne  feront  point  confcrmtz  par  la 
bonne  vie  de  leurs  ramiftres ,  feront  d'autant 
plus  condamnez  ,quMs  feront  plus  inexcufa- 
bk's  dcuant  Dieu  .  Si  nous  ïoyons  de',  fcan- 
dales,&  que  les  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu  ne  foyent  point  tels  qu'ils  doyuent  e- 
ftre, après  auoir  cognu  (comme  l'ay  délia  dit) 
>  que  c'elt  vn  iîgne  de  Pire  de  Dieu  ,  fçachons 

aufsi  que  la  faute  nous  en  doit  élire  imputée: 
&  fur  cela  tafclions  d'y  remédier. Mais  cepen 
dant.quoy  qu'il  en  loit,  qu'on  ne  penfe  point 
clcre  quitte  quajid  on  aura  allégué,  Ho,  ceux 
qui  nous  doyuent  goUL'.erner  ne  font  pas  mi- 
Mar.  If.  euï  que  nous.  Car  11  vnaueugle  conduit  l'au 


SERMON 


14,  tre,  tous  deux  trebulclieront  en  la  f  lile  ,  dit 
nolhe  Seigneur  Icfus  CluJL  Q^flnd  donc  il 
y  auroit  gens  ordonnez  pour  anonccr  la  pa- 
role de  Dieu,  qui  mènent  vne  vie  fcandaleufe 
&desbordee,que  nous  ne  les  enlliyuions  pas, 
&  q  la  doclrine  de  Dieu  n'ait  pas  moins  d'au- 
thoritc  &:  reuercnce  enuers  nou,:  car  ce  n'cft 
pas  raifon  aufsi  qu'on  la  mefprife  pourtant, 
car  fon  authorite  ne  dépend  point  de  la  vie 
des  bommes.Qui  font  les  homaies.'Peuuent- 
ils  faire  que  la dodnne  de  Dieu  ne  demeure 
louliours  en  fon  entier  ?  Si  elle  perd  fon  au- 
thorite pour  eux,  où  fera-ce  aller  ?  Mais  au 
contraire,  apprenons  de  nous  ranger  du  tout 
à  Dieu, combien  que  nous  voyons  des  fcanda- 
les.que  nous  ne  laifsions  pas  de  fuyurc  noftre 
train  ,  Ârcognoiffons  qu'il  faut  que  la  parole 
de  Dieu  demeure  toufîours  en  fon  entier. 
Tant  y  a  que  li  nous  ne  Ibmnies  conterincz 
par  l'exemple  de  ceux  qui  nous  enfeignent,& 
qui  nous  monftient  le  chemin  de  craindre 
Dicu:nous  aurons  tant  moins  d'excufe,  d'au- 
tant que  nous  auions  tant  plus  de  moyen  & 
d'aide  pour  nous  faire  cheminer  comme  il  ap 
partient .  Venons  maintenant  à  ce  que  faincf 
Paul  tiaitte  quant  aux  vertus  qu'il  reqiiieit 
en  tous  ?i{icitr',.lld\:,Q^jl<fjjait foires, & 
atinmfiiX.  Cr  mjtiejles  :  ou  b:en  ornez  en  leur 
vie  ,  c'tft  à  dire  ,  qu'il  y  ait  vne  honnelteté. 
Nous  auons  délia  dit  que  ces  vertus  n'cftoyét 
pas  feulement  pour  les  miniftres  delà  paro- 
Je:mais  d'autant  que  leur  vie  eft  plus  contem 
plee  ,  &  qu'ils  doyuent  aufsi  parler  comme  au 
nom  &cn  l'authorité  de  Dieu, il  faut  bien  que 
il  y  ait  quelque  aiguillon  pour  nous  inciter 
quand  nous  voyons  comme  iK  fe  gouuerncnt. 
Ainli  doncc'eft  raif'on  que  les  miniftres  de 
h  parole  de  Dieu  fur  tous  les  autres  foyent 
txcellcus  en  vertu.  Et  de  fa'.t,  ceux  qui  vien- 
dront prcfclierd'lionncflctéidc  challeté,  d'at 
trt;;rapance,&  cependant  feront  gens  diflolus 
&  intemper.cz,&  ne  l^auront  que  c'eft  de  mo- 
deftie,  ne  fe  inoqueiu-ils  pas  pleinement  & 
de  Dieu&  du  monde?  il  ell  vrayCcommedelîa 
nous  auons  dit)q;:c  lî  les  miniftres  ne  fpnt  pas 
tels  qu'il?  doyuent,  Dieu  pourtant  doit  cftrc 
cïaJté,  Si.  qac  la  dacli<i)e  qui  procedcde  luy, 


doit  eftre  receue  fans  qu'on  t'en  deftourne.* 
Mais  tant  y  a  qu'vn  tel  moqueur  ne  doit  eftre 
nuUemet  lupporté, quand  il  viendra  exhorter 
les  autres  à  eftre  modeftes,  fobres,  &  attrem- 
pei,  Si  que  fa  vie  tirera  tout  au  rebours.  Ainfî 
donc  notons  bien  que  ce  ii'eft  point  fans  cau- 
fe  que  iainâ  Paul  requiert  tout  ceci  aux  mini 
ftres  de  la  parole  de  Dieu:mais  cepcdant  c'eft 
afin  que  nous  fçachions  là  où  c'cft  qu'ils  nous 
doyuent  conduire, &  que  nous  ay  5s  cela  bien 
imprimé  en  noftre  mémoire. Pourquoy  eft-ce 
que  taincl  Paul  traitte  de  la  vie  des  miniftres» 
car  il  1  eut  déclarer  à  quelle  fin  c'eft  que  Dieu 
a  inltitué  des  Pafteurs  qui  ayent  l'otrice  d'a- 
noncer  fa  parole.C'eft  pour  nous  monftrer  le 
bon  chemin,  c'eft  pour  nous  monftrer  à  quel 
but  il  nous  taut  tendre.  Selon  donc  que  Dieir 
commande  aux  Pafteurs  de  fe  gouuemer  pru- 
demment,en  toute  modeftie.cn  toute  honne- 
ftecé.en  toute  attrempance,  c'eft  autant  com- 
me s'ildifoit,  Q^  tout  foit  bien  ordonné  en 
mon  Eglife,  &  que  ceux  aufquels  l'ay  commis 
la  charge  de  côduire  &  goiiuerner  les  autres, 
marchent  deuant,  &  que  le  troupeau  les  fuy- 
ue  :  c'eft  que  vous  foyez  attrempez,  que  vous 
foyez  tous  fobres  &  modeftes. Voila  en  quoy 
nous  apperceuons  mieux  ce  quei'ay  touché 
n'agueres,  c'cft afçauoir,  que  Dieu  n'addielle 
point  feulemét  ici  fon  propos  à  ceux  qui  font 
en  chaire  pour  prefchcr,  mais  il  monftre  coin 
me  il  veut  que  fon  Eglife  foit  réglée.  Or  fur 
tout,  S.Paul  requiert  que  les  miniftres  foyent 
propres  à  enfeigner:  &  cclie  vcrtu-cieft  fpe- 
ciale  .à  eux  :  car  voila  aufii  pourquoy  ils  font 
choilîs.  Il  if  eft  pas  donné  à  tous  de  prefchcr, 
&  de  traitter  la  doctrine  de  Dieu  .  Combien 
qu'vn  hommefoit  fidèle,  combien  qu'il  ait  v- 
ne  grande  fainûetc  en  fa  vie,  tant  y  a  qu'il  ne 
aura  point  cefte  vertu  en  foy  de  pouuoir  trait 
ter  la  parole  de  Dieu  en  telle  façon  qu'elle 
foit  b'en  receue.  La  docfrine  doc  n'cft  pas  en 
tous:&  quand  la  doflrine  y  eft,  encore  l"iut-il 
titre  idoine  :  car  fainit  Paul  ne  dit  point  ici, 
qu'vn  homme  foit  fçauant  :  ce  n'eft  point  af- 
fezrniais  il  dit,  qu'il  foit  propre  à  en  feigner, 
c'eft  à  dire  qu'il  ait  cefte  taçon-la, qu'il  y  foit 
duit.  Il  y  en  aura  donc  qui  feront  fçauans ,  &: 
neantmoins  lîn'aurot-ils  point  cefte  grâce  en 
eux  de  pouuoir  appliquer  ladoûrine  pour  la 
faire  profiter  aux  autres,  afin  qu'on  en  foit  c- 
difié.  Nous  voyons  donc  que  lamft  Paul  a  ici 
rais  vne  marque  qui  eft  propre  &  fpeciale  aux 
prefeheurs  de  rEu.î{^ile,en  difant  qu'ilsdoy- 
uciit  l'ftre  propres  s  enleigner.Or  deuant  que 
pallt  r  outre,  nou-  voyons  ici  quelle  impuden 
ce  c'eft  à  ce  cierge  du  P.Tpc  ,  d'alléguer  leur 
Hiérarchie,  qu'ils  appc'llent .  Car  ils  fe  van- 
tent, pour  monftrer  que  ncus  lonunes  llliil- 
niatiques&  reti.rnchcï  de  l'Eglile  de  Dieu, 
qu'ils  ont  ia  principauté  facree  ,  l'ordre  que 
lefusChrifta  cftabli,qui  doit  perlîftcr  iufquct- 
en  la  fin  du  monde.  £  t  en  quoy  confifte  cefte 
Hicrarchie.quMs  appellent  f  Elle  commence 

par 


s  VR    LA    I.     A    'T  I  M  O  T  H. 


^P. 


par  les  Euerques&  MÙi  le  faut-il:  mais  rcgar 
doiij  quels  fout  Jc-s  £iieJ<jucvdela  Papauté.  li 
Itur  femble  qu'ils  (ierogucnc  à  leur  oifice, 
quand  ils  monteront  eu  vncchanerc'eiî  affcz 
quVn  Eutlquc  vienecni'Eglifeauec  l'on  ro- 
quet &  Vf)  aneau  ,&  auec  tout  Je  relie  du  ba- 
duiage:&:  puis  aux  grandes  ûftes  qu'il  Toit  en 
fon  pontiticJt,  ayant  fes  cornes  iur  la  tclie 
pour  taire  peur  aux  petis  cnfans  .  Il  ciï  vray 
qu'ils  feront  bien  Icniblant  d'eftre  eiiipefciicz 
en  e€S  grans  myrteies,  comme,!  taire  lecicl- 
ine,&  autres  telles  ordures, qu'il  faut  que  cela 
fbit  reierué  aux  prélats.  Mais  tant  y  a  queli 
ils  veulent  cflre  Eucfques  tels  que  Dieu  ap- 
prouue  ,  &  pour  maintenir  certe  Hiérarchie, 
qu'on  appelle,  c'cit  à  dire  l'ordre  Se  la  police 
de  l'Eglife,  il  faut  qu'ils  foyent  propres  à  en- 
feigner.Qu^on  examine  tous  les  Euelquesde 
la  Papauté,  quel  fçauoir  eft-ce  qu'on  y  trou- 
uerarOrils  fçauent  autant  que  c'tflde  l'Efcri 
ture  lainfte  que  des  veaux. Et  cepédant  il  faut 
qu'ils  aycnt  grâce  à  autre  choie  qu'à  enfei- 
gnerjc'elt alçauotr  à chafler.à  louer,  à païUar 
der,.îcho/es  Icmblables.  Amlî  dôc  nous  voy- 
■  ons  que  c'cft  vne  pure  moquerie  &  par  trop 
effrontée,  qu'ils  .s'ofent  vanter  d'auoirtjuel- 
que  ordre  d'Eulilc  &  quclqiie  régime,  d'aut.it 
que  tout  ce  qu'ils  ont,clt  pleinement  contrai 
re  àce  qui  cft  inllituéde  TElprit  de  Dieu.  Or 
cela  n'ettpas  feulement  pour  les  condamner, 
Jnais  c'eftalînque  de  noftrepart.quâd  ilsal- 
iegueront  leur  Hiérarchie, qu'ils  prétendront 
ces  titres  tant  magnifiques,  qu'à  pleine  bou- 
che ils  fe  vanteront  d'ellre  l'Eglile  de  Dieu, 
nous  ayons  à  nous  en  moquer  comme  d'vne 
vâterie  faulTe  &  vaine.  Or  ii  l'Eglile  de  Dieu 
«ftoit  en  la  Papauté,  que  leroit -ce  de  nous? 
Car  nous  n'clperons  point  de  remifsion  des 
péchez  linon  en  l'£glife,&  nous  n'auôs  point 
d'cfperancc  de  iàlut  linon  en  la  remi  Aion  de,s 
pechezrnous  voila  donc  tous  damnez. Et  ainlî 
il  faut  que  nous  fçachions  &  loyons  bien  cer 
titiez  q  le  Pape  n'a  linon  vne  fynagogue  dia- 
bolique ,  &  que  tout  fon  Clergé  n'eft  qu'vne 
ordure  &  puantile,que  ce  n'iit  qu'vne  vermi- 
ne de  toute  celte  canaille  qui  a  leictté  l'Egli- 
fe de  Dieu.  Combien  que  le  Pape  eftant  An- 
technft  foit  alsis  au  faiiduaire  de  Dieii,(com 
mcnousauons  veuparci  deuant)lî  eft-ce  tou 
lesfois  qu'il  n'cft  point  djgne  d'ellra  rçco-r 
gnuniauouc  pour  paAeur  d'Eglife  ,  fje  tous 
(es  femblablcs.il  fauti  donc  que  nous  ayôs  cc-- 
la  tout  refolu,  afin  que  nous  fçachiopsdcfpi- 
ter  toute»  leurs  vanteries ,  &  que  nous  f(;a- 
chions  qu''ellans  conioints  anoure  chef  le  fus 
Chrift.&vnis  tn  vrayc  concorde  de  fçjy  fejqn 
PEuâgile  &la  vérité  qui  y  cftcontenijç,  pouf 
pouuon j  nous  glorifier  deuât  Dieu  8ç  dcuaiit 
fes  Anges,q  nous  fomniej  fon  troqpeJU  ,.qif ij 
nous  tient  &  aduoue  pour  fes  cnfans  6c  âome 
Aiques,Toirc  d'autant  que  par  fon  Eufingile 
il  habite  &  rcfide  au  milieu  de  nous.  Voila  ce 
gueoousauonsànoter  en  premier  lieu  :  car 


aufsi^oilîiCommcnous  pnuuons  eftrc  fordt«  . 
fur  vne  telle  certitude  ,  c'tft  quand  Dieu  de- 
meure auec  nous,  &  qu'il  nous  cho;lît  pour  e- 
ftrefcs  temples.  Mais  qu'il  foit  ainli  que  les 
mm  litres  de  la  parole  ce  Dieu  doyuent  tftre 
propres  pour  cnleigner  ,  làmct  Paul  dtclaïc 
mieux-  fon  intention  en  l'cpiltrc  à  Tite,  où  iJ 
dit,  qu'il  faut  qu'vn  palteur  retiene&  embraf  Titti^. 
le  la  doctrine  qui  efl  félon  la  toy  ,  qu'il  ait  ce 
threfor-la  enclos  en  fa  confciti'ce,  voire  afin- 
qu'il  puilfe  exhorter  en  prééminence  ceux 
qui  font  débiles,  &  qu'il  puifle  ramener  an  . 
<lroit  chemin  les  eriâs:  &  puis  aufsi  qu'il  puif  ■ 
fe  rembarrer  tous  ceux  qui  reiiltent  à  la  ven- 
té. Voila  donc  ce  qui  eli  requis  en  ceux  que 
Dieu  approuuc  pour  Euefques  &  Pafteuri, 
pour  prellres,  pour  miniltres  de  la  parole,  ce 
elt,  qu'ils  ay«t  ladoftrine  qui  ell  felô  la  foy. 
Or  par  cela  faind  Paulmonftre  que  tout  fça- 
uoir prophanc  doit  eltre  reietté,&  qu'il  n'eft 
point  qucltion  que  les  hommes  apportent  ce 
qu'ils  auront  forgé  en  leyr  tclle,qu'ils  mettét 
en  auanr  leurs  fubtilitez  pour  le  faire  valoir, 
nenni:  mais  il  tant  que  la  doftrine  foit  pure  !c 
félon  ia  foy.c'eft  à  due  que  ccluy  qui  voudra 
enfeigner  l'Eglile  de  Dieu,  foitddcipJ'eiqu'ii 
ait  cité  en^'elthoiedeceluy  quielt  Icmaillre 
louuerainde  nous  tous  :  que  fa  doctrine  donc 
loit  félon  la  foy.  Voila  pour  vn  item.  Et  puis 
il  faut  aufsi  que  celuy  qui  elt:ainfiappelé,ait 
celte  grâce. Et  voila  pourquoy  faintf  Paul  ad- 
iouftcQu^il  puifle  exhorter  ceux  qui  fe  ran- 
gent volontiers,  &  qui  font  obeilTansà  Dieu 
las  nulle  difticulté,  &  qu'il  puifle  aufsi  reiîfter 
à  tous  côtredifans.à  tous  ennemis  de  la  vérité 
qui  ne  tafchent  lînon  h  obfcurcir  la  pure  do- 
ctrine. Or  puis  qu'ainlî  elt  que  fainif  Paul  a  i- 
ci  mis,  vne  marque  pour  difcerner  les  vrais  ■ 
Palleurs  d'auec  ceux  qui  font  baltars  &  con- 
trefaits :  retenons  ce  que  l'av  dclîa  dit ,  qiie 
nous  fommcs  afleurcz  d'auoir  l'Eglile  de 
Dieu  quand  fa  parole  eft  prefchee,  quand  el- 
le elt  portée  piircmcnt  ,  quand  les  erreurs 
font  reiettcz &  condamnez  entie  nous, que 
la  pureté  de  l'Euangile  aura  fon  cours  :  voila 
vne  marque  infalliblc,  voila  comme  Dica 
nous  aduoueia  pour  fon  troupeau.  Que  les 
hommes  nous  condamnent  tant  qu'ils  vou- 
dront I  que  les  Papiltes  le  dreilent  auec  leur 
oi-gueil ,  &:  levantept  d'auoir  ia  Hiérarchie, 
tout  cela  n'clt  q  ,fiente.Et  pourquov  ?  car  puis 
qu'd  n'y  a  point  celte  marque  de  Dieu,  il  n'y  . 
a  plus  que  faulltté.  De  noltre  partnouspp»,- 
uoHs  dire, puis  que  la  parole  de  Dieu  nous  C;ft 
prefchee  purement,quenous  auonsja  doétti- 
f\ç  qui  elt  félon  la  toy  :  &  quand  noiv^  dççf/tôs 
lescrreurs,  les  fuperltitions,  &  l;cu^ps  chofej 
qui  répugnent  àla  parole  de  Etieu,' que: c'cft 
autant  comme  il  Dieu  auoit  mis  vn  cachet,  & 
qu'il  euit  imprimé  en  nous  la  marque  d^flre 
domelliques  de  fon  Eglile.Il  eft  vray  que  ce- 
la ne  feruira  rien  à  tous  hypocrites,  m  à  tous 
contempteurs,  comme  il  y  en  a  beaucou». 

r.ji. 


Oi 


VINGTDEVXIEME      SERMON» 


«ai  font  meflet  parmi  les  fidcles  U  où  là  pi- 
lo'le  de  Dieu  fe  prefche  :  les  vus  fe  iettent 
comme  i  Tibandon,  les  autres  n'iront  qu'en 
.  fcintifc,lcs  autres  monftreront  alTez  qu'ils 
tnefprifentDicu.iS  feront  comme  pourceaur, 
ceux-là  ne  gaignét  riend'âuoir  fujrui  la  com- 
pagnie de  ceux  qui  ont  ouy  la  parole  de  Dieu, 
mais  ce  fera  vne  plus  grande  condamuation 
pour  eux. Cependant  fi  eft-ce  que  par  tout  où 
la  parole  de  Dieu  s'anonce  puiement,&  là  où 
il  y  a  gens  qui  fuyuent  le  fil  de  l'Efcriture 
{3infte,&  qui  ne  defguifent  ne  corrôpent  poît 
'  Japurcdodrine.quelàon  peut  conclure  qu'il 
y  a  Eglife  de  Dieu.  Car  les  hommes  ne  font 
point  lugescorapctens  de  ceci:Dieu  fe  rcfer- 
aeceftauthorité-lade  déclarer  quelle  eftfon 
£glifc:  ce  qu'il  fait  en  ce  qui  nous  eft  ici  mon 
ftrc  par  la  bouche  de  fainft  Paul.  Voila  donc 
vn  arreft  irreuocable.  Et  c'eft  vne  iinguliere 
côfolation  que  nous  au5s, toutes  fois  &  quan- 
tes  qiie  nou->  fommes  alTeinblez,afçauoir,puis 
que  la  parole  de  Dieu  nous  eft  portée  fidèle- 
ment,que  nous  fçachions  que  Dieu  eft  au  mi- 
lieu de  nous, &  qu'il  y  prclîde, que  nous  auoiis 
laprefencede  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift, 
&  que  nous  fomraes  vnis  a  luy  comme  mem- 
bre's  à  lelir  chef.  Q_iund  donc  nous  fommes 
ilTeurez  de  celi,ic  vous  yy:ie,n'y  a-il  pas  bien 
deijuoy  nous  reliouir?  Ainlîdonc  notons  que 
c'cil  vn  bien  ineftîmable  que  Dieu  nous  fait, 
quand  (.i  parole  nous  eft  ainii  portée  ,  &  que 
nous  auons  gens  qui  fe  peuuent  acquitter  d'v 
ne  telle  chaigc,  qui  ont  le  fçauoir,  &'  qui  ont 
aufsi  le  moyen  de  nous  édifier:  car  c'eft  au- 
tant comme  fi  Dieu  fc  monftroit  à  nous  en 
perfonne  vifible,  que  nous  n'auons  pas  moins 
d'afleurance  d'eftre  conioints  à  luy  ,  &  qu'il 
î«C«r»».  nous  gouuerne,  que  s'il  fe  monftroit  comme 
,,  „  face  à facercommcaufsi  faillit  Paul  le  dit, que 
nous  le  contemplons  en  ce  miroir  de  1  tuan- 
gile  pour  cftre  transfigurez  en  fa  gloire.  Ce- 
pendant nous  auons  aufsi  vn  bel  auantage, 
que  nous  pouuons  desfier  tous  ceux  qui  fe 
deftournent  de  la  pure  doftnne  de  PEuangi- 
le:  carc'cft  autant  comme  s'ils  fe  bannilToy- 
cntde  l'Eglife  de  Dieu. Les  Papiftes  fe  vante 
font alTez, (comme  l'ay  défia  dit)  mais  tant  y 
a  qu'ils  fe  font  eux-mefines  retranchez  du 
corps  de  lefus  Chrift ,  en  forte  qu'Us  font 
maintenant  comme  membres  pourris ,  qu'ils 
•n'ont  rien  de  commun  auec  le  Seigneur  lefbs, 
d'autant  qu'ils  ont  corrompu  &  fallifié  ii 
ittârque.tjui  eft  fa  parole,  pour  s'addonner 
'aux  menfonges,  idolâtries  il:  fupeiftitions  qui 
reçneht  entr'euv.  Or  cependant  notons  de 
noftrecofté  ,  que  (i  vn  homme  n'ha  ces  deux 
poinfts  q«è  nous  auons  touchez, c'eft  afça- 
uoirqu'il  foir  eitertîé  en  fElcrinirc  fainiSe, 
qu'il  foit  fondé  en  la  doflrme  de  la  foy, telle 
nient  qu''il  piiilTe  cnfcigncr  lès  autres, &  rem- 
barrer les  cnnemis,'qii''il  n'cft  point  conuena- 
kle  à ccft  office  d'anoncer  la  parole  de  Dieu. 
£t  de  faiftjque  fera-ceiî  vn  homme  ha  feule- 


mét  quelque  petit  gouft,&  qu'il  ne  fpit  point 
bien  alFeuré  ae  fon  bafton ,  comme  on  dit?,  II 
fera  esbranlé  tout  les  coups:  &  nous  fçauons 
que  les  plus  fols  &  les  plus  ignorans  font  les 
plus  hardis.  Vn  homme  qui  n'aura  pas  grand 
fçauoir,fe  voudra  mettre  en  auant.Ji:  ne  vou- 
dra rien  ignorer. qu'on  luy  face  beaucoup  de 
queftions  ,  incontinent  il  aura  la  bouche  ou- 
uerte,3c  en  parlera  à  l'auenture:  voila  comme 
en  font  ceux  qui  n'ont  gueres  cognu.  Au  con 
traire,  ceux  qui  font  exercez  ,  5c  qui  ont  pluf 
de  fçauoir.ils  fe  retienent.&font  plus  crain- 
tifs. Pourqiioy?  Ils  fçauent  la  difficulté  qu'il 
y  a  de  refpôdreaunora  de  Dieu:3c  puis,d'a- 
tant  Qu'ils  ont  plus  enfoncé  les  chofes,  ils  co 
gnoill'ent  qu'il  n' eft  point  qucftion  de  volti- 
ger feulement  comme  en  l'air  ,  &  de  refpon- 
dreàceci  ou  à  cela,  mais  qu'il  faut  venir  à  la 
inoelle.qu'il  ne  faut  point  demeurer  à  Pefcor 
ce.Si  donc  vn  homme  a  feulement  goulté  c5 
me  en  palTant  que  c'eftde  l'Etcriture  faincie, 
qu'il  l'ait  feulement  Icchee  comme  au  bout 
du  doigt,  &  que  fera-ce  finon  toute  folie  ,  & 
qu'il  profanera  à  chacun  coup  la  parole  de 
Dieu?  Il  n'eft  point  donc  qucftion  que  nous 
difions  ceci  ou  cela  d'vne  matière  ,  mais  que 
nous  en  traittions  à  la  vérité,  afin  que  ceux 
qui  oyent  noftre  doftrine  ,  foycnt  afleurei 
pour  dire.  Voila  vn  article  de  foy.  Ainfî  ce 
n'eft  point  fins  caufc  que  ùïSt  Paul  requiert 
qu'vn  home  foit  propre  à  enléigner.  Etpuit 
ce  n'eft  pas  le  tout  que  nous  cdifiôs  ceux  qui 
fe  rangent  paifiblement-,*  qui  fe  laiflent  con 
duire.niais  il  faut  que  nous  fçachions  rembar 
rer  les  ennemis  qui  s'eleuent  contrôla  véri- 
té de  Dieu  ,  &  repoufler  tous  menfonges  qui 
feroycnt  pour  corrompre  la  puicdodrine: 
&  cela  aufsi  fe  peut  monftrerpar  la  fimilitu- 
de  du  berger.Nous  fommes  appelez  Pafteurs: 
celuy  qui  eft  commis  fur  vn  troupeau  de  mou 
tons.cen'eft  pas  allez  qu'il  conduife  le  trou- 
peau,mais  il  faut  qu'il  ait  vne  autre  voix  pour 
crier  contre  les  loups  &  les  larrons. Si  vn  pa- 
fteur  fible  feulement  pour  alTembler  fes  mou 
tons  &  fes  brebis ,  &  quand  vn  loup  viendra, 
qu'il  foit  furprins  &  faifi  de  crainte, qu'il  foit 
l.à  comme  vn  muet  ,  qlie  les  larrons  cniiahif- 
fent  le  troupeau,  qu'ils  defrobbent ,  8c  qu'ils 
coupent  les  gorges,  &  que  le  pafteur  fe  taife 
cependant,  &  que  fera-ce?  Ainfi  donc  quand 
nous  aurions  bône  grâce  d'enieigner,  &  mon 
ftrcr  la  vertu  de  Ditu  .i  ceux  qui  demandent 
d'eftre  bien  gouuerntz  ,  &  que  nous  n'ayons 
nulle  vertu  pour  vreprimer  les  faullcs  dodVrl- 
nes, pour  rébarrer  les  hérétique^,  pour  chaf- 
fér  le&loups  rauiflans,pour  crier  contre  ceux 
qUiinfrâét  le  troupeau  par  leurs  corruptiôsi 
contre  toutes  ces  canailles  qui  meinent  vie 
fcUndiiléufe  &  diflolue ,  (  car  ils  f.mt  comme 
larrons  qili  vienent  pour  dcfconfire  le  trou- 
peau ■)  fi  nous  ne  pouuons  crier  .i  l'eiicontre, 
nom  ne  faifons  que  la  moitié  de  noftr(?  ofiî- 
ce.Il  faut  donc  que  nous ayonj  double  voix, 

que 


s  V  R     LA    I.    A    T  ï  M  O  T  K. 


•Î5 


que  nous  ayos  vne  voix  douce  pour  exhorter 
ceux  qui  fe  rendront  dociles,  &pour  les  gui- 
der au  droit  chemin:&  que  nous  ayons  vne  au 
tre  voix  pour  crier  contre  les  loups  Se  les  lar- 
rô§,afin  de  les  chaiïer  du  croupeau,& de  main 
tenir  la  pure  doûrine  de  Dieu  ,  qui  eft  la  pa- 
fture  de  vie ,  afin  qu'elle  ne  foit  point  rauie  i 
ceux  aufquels  Dieu  l'ordonne.  Voila  donc  ce 
que  nous  auons  à  noter  fur  ce  palTage  ,  là  où 
£iinA  Paul  veut  &  ordonne  que  les  £uefques 
&  Preftresfoyent propres  à en<eigner.Or ce- 
pendant notons  ici  que  chacun  edadmonei^é 
de  fon  deuoir.pour  receuoir  la  doûrine  quad 
elle  nous icia  prefchee.  Pourquby  eft-il  dit 
que  les  Pafteurs  doyuent  cftre  propres  à  en- 
feigner?  C'eft  afin  que  nous  reccuions  tous  in 
ftru^ion  commune ,  que  nous  ne  foyons  pas 
comme  atFamcz.  Car  puis  que  la  parole  de 
Dieu  eft  vne  pafture&  vne  fubftance  delà- 
quelle  nos  âmes  doyuét  cftre  nourries, il  faut 
que  tous  foyent  aduertis  d'ouir  la  doftrine 
quand  elle  nous  elt  prefchee.  Car  fainft  Paul 
ne  veut  pas  qu'on  hice  ici  vne  parade  Icule- 
nient,&  qu'vn  homme  fe  monftce,  Se  que  cha- 
cun luy  applaudille  pour  dire  ,  O  voila  bien 
parlé, ô  le  grand  fçauoir.ô  l'efprit  fubtil  I  II 
n'elt  pa;qucft:ô  de  tout  ccla;maisil  faut  que 
celuy  qui  preiche, commence  par  foy  ,  &  puis 
qu'il  tafche  d'attirer  tout  le  troupeau  à  l'o- 
beilTance  de  Dieu ,  &  qu'il  y  aille  en  crainte, 
en  humilité  Se  en  foltcitude  :  cependant  que 
tous  cognoiffent  que  c'eft  pour  eux  que  Dieu 
a  eftabli  vn  tel  ordre.  Q_uand  vn  homme  fera 
mon  é  en  chaire,eft-ce  alin  qu'il  foit  regardé 
de  lom  ,  &  qu'il  foit  en  prei^-minence?  Nenni; 
«tais  c'eft  afin  q  Dieu  parle  à  nous  par  labou- 
ched'vn  homme:&il  nous  fait  ccftegrace-Ia 
de  fe  prefenter  ici,i&  veut  qu'vn  homme  mor- 
tel foit  fon  mcHàger  :  &  par  cela  il  veut  aufsi 
efprouuer  l'obeillancedenoftrefoy.Puis  que 
ainJi  eft  donc,  notons  quand  il  eit  dit  que  les 
Paitcurs  doyuent  eftre  propres  .1  enfeigner, 
que  c'eft  afin  qu'vn  chacun  fcdifpofe  à  efcou 
ter.iSL  que  nous  loyons  comme  rauis  en  efton 
nemenc  pour  dire  ,  Dieu  daigne-il  bien  eftre 
noftre  doiieur  en  la  perfonncd'vn  homme 
niortel?il  n'eft  pasdonc  queftion  ici  que  nous 
ayons  l'aureille  fourde  quâd  noftre  Seigneur 
fc  déclare  ainfi  priueement  à  nous  :  mais  que 
nous  Içachions  que  ù.  volonté  eft  que  nous 
allions  en  fon  efchole  poury  profiter,  &  que 
nous  foyôs  tous  refokis  de  faverité.quc  nolis 
ayons  cefte  alTeurance-la  ,  que  nous  fuyuons 
la  règle  de  la  parole  de  Dieu, que  c'eft  de  luy 
que  nous  tenons  la  foy,  que  nous  ne  fommes 
point  menei  à  l'appétit  de<  hommes  çà  &  là, 
mais  que  nous  fommes  fondez  <?;  appuyez  fur 
la  venté  qui  nous  eft  enuoyeedu  ciel, laquelle 
eft.intallible.NoUs  voyons  donc  cornent  c'eft 
que  S.Paul  n'a  pas  feulement  voulu  exhorter 
ceux  qui  ont  à  ch^ifir  des  docteurs.  S:  les  or- 
donner.mais  qu'en  gênerai  il  nous  a  nionftré 
^uei  eft  noftre  ofiîce ,  afin  que  nous  foyons 


tous  bons  efcholîersde  noftie  Dieu,{>uis  que 
il  nous  fait  la  gr.icc  d'eftre  noftre  dodeur,  tk 
qu'il  s'abbaifle  mfquet-U  qu'il  veut  parfcr-pri 
ucement  ànous  ,  afin  que  nous  foyons  enfei- 
gnerz^  fa  bonne  volonté.  Et  cependant  no- 
tant aufsi  que  BOUS  auons  â  faire  noftre  profit 
de  cefte  dodrine  qu'il  nous  propofc,  en  deux 
manières. L'vne  c'eft.que  nous  ne  foyôs  point 
vagabons  en  noftre  ignorance,  mais  que  nous 
fçachions  où  c'eft  qu'il  nous  faut  tenir  :  que 
nous  ne  foyons  pas  comme  ces  fols  eftourdit 
qui  difent.Ho.de  moy  ie  n'ay  point  tant  vef- 
cu  au  monde  que  ie  ne  fçache  bien  cornent  il 
faut  viure.  Et  côment  le  fçaii€t-ils?Selon  leur 
folle  ceruelle:  que  s*î"lï  ont  trouuc  «ne  chofo 
bonne ,ils  veulent  que  Dieu  la  tiene  pour  rei- 
le.Gardons-Bous  d'vne  telle  arrogance:mai« 
que  nous  fçachions  comme  tl  nous  faut  gou- 
uerner.d'aurant  que  nous  luyuons  feulements- 
la  parole  de  Dieu,d'aucantque  nous  auons  as 
pliqué  tous  nosfens  à  ce  qui  eft  contenu  ea 
l'Efcriture  fainfte,&:  que  nous  voulons  efcou-. 
ter  Dieu  parler  uns  aucun  contredit  8c  repli-. 
que,&nous  donter  pleinement  en  fon  obeif- 
fance. Voila  le  premif-rfruift  que  nous  auons 
à  recueillir  de  la  parole  de  Dieu  ,  quand  nom 
ferons  bien  dcuemcnt  etifeigneT,8c  non  point 
pour  cheminer  à  rai:enture,comme  les  Papi- 
ftcs  qui  auront  leurs  deuotions  folles  pour  di 
re,  le  fay  cela  à  la  bonne  intention:  mais  ce- 
pendant ils  n'ont  nulle  certitude  en  tout  leur 
cas.  Or  Dieu  ne  veut  pas  que  nous  y  aillions 
ainfî,  mais  que  nous  fçachions  qu'il  approuué 
ce  que  nous  filfons,  d'autant  qu'il  eft  confor 
me  a  fa  parole.  Et  cela  nous  doit  donner  tant 
plus  grand  courage  de  feruir  à  Dieu  d'vn  îele 
tant  plus  ardent, quand  nous  ne  fommes  point 
en  doute  de  ce  que  nous  faifons  s'il  eft  bien  ou 
mal  tait, mais  que  Dieu  nous  rend  tefmoigni 
ge  que  noftre  fcruice  luy  eft  agréable. Et  pour 
quoy.'Pource  que  nous  ne  faifons  pas  fclo  no- 
ftre appétit,  nous  ne  viuons  point  à  noftre  po 
fte  ne  phantafie,  mais  félon  qu'il  eft  ordormé 
&  commandé  par  la  parole  de  Dieu.  Voila  vn 
item. Et  puis, nous  deuons  profiter  en  la  paro- 
le de  Dieu.afind'eftrealleurezde  noftre  foy, 
que  nous  ne  foyons  point  esbralez  à  tous  vêts 
côme  des  rofeaux.mais  que  la  parole  de  Dieu 
nous  férue  d'armures ,  corne  aufsi  fainét  Paul  ^P'-f'"^ 
en  parle,difant  que  c'eft  vne  honte  fi  ceux  qui  *• 
ontefté  enfeignez  en  l'Euangilc,font  menez 
comme  à  la  pippee  ,  &  qu'on  les  deftourne  çà 
iSc  là.  Nous  monftrons  bien  aufii  que  nousa- 
uons  efté  mauuais  efcholiers, quand  nous  fom 
mes  fi  prompts  Se  volages  à  receuoir  les  here- 
fies  &  erreurs  qu'on  nous  raetenauant.  Ap- 
prenons donc  quand  nous  venons  ouir  la  pa- 
role de  Dieu,  que  ce  n'eft  pas  feulement  pour 
cognoiftre  ce  qui  eft  bon,  mais  que  c'eft  pour 
eftre  munis  ,  &  pour  eftre  armez  contre  tout 
mal  ,  afin  que  ne  foyons  feduits  ne  trompes 
par  fauffes  doftrines  :  quand  le  diable  fufcite 
des  boute-feux  qui  vienent  pour  nous  def- 

r.  iii. 


^ 


VtNGTD^VXIEME     SERMOÎ^ 


baucher, que  nous,  fçachionî  les  repoufler.  Il 
ellvray  que  cela  eft  attribué  pcoprement  aux 
Pafteurs,  (comme  délia  nou<;  auons  dit)  niait 
litaut-il  neantmoins  cju'vn  chacun  de  nous 
foit  fur  les  gardes  ,  &  que  les  plus  pctis  &;i- 
,  diots  ayent  encores  cefte  ttrmeté-la  en  leur 
foy  ,  de  n'eltre  point  esbranlez  du  premier 
coup  par  les  erreurs  qu'on  viendra  ietter  en 
allant.  Brief ,  que  Satan  tende  fc.  filets,  qu'il 
«nette  fes  appaih  pour  machiner  la  ruine  de 
noftie  foy,  ii faut-il  que  nous  ayonsdcquoy 
pour  relîfterà  telles  tentations:  &lî  nous  ten 
tons  en  nous  vne  telle  infirmité  que  noltre 
foyiullaifeeàesbranler.que  nous  priôs  Dieu 
qu'il  nous.fortifîe  ,&  que  cela  foit  pour  au- 
gmente r  vn  plus  grand  delir  en  nous  pour  e- 
Itre  attentifs  &  pour  regarder  de  plus  près 
v(i  chacun  à  foy  que  nous  n'auons  point  fait 
parcidcuant.Ët  puis,comme'Dieu  nous  don- 
ne de  quoy  refifler  à  Satan  &  aux  ennemis  de 
fa  vérité  quand  il  nous  propofe  fa  parole, que 
nousaduilions  bien  de  ne  nous  en  deftourner 
en  quelque  façon  que  ce  foit ,  mais  que  nous 
y  foyons  enfçignez  &confeinici  de  plus  en 
plus:carcen'ell  point  fans  caufc  que  la  pa- 
role de  Dieu  efl  appelée  noftre  glaïue  fpiri- 
tucl.Nous  auons  donc  vne  bonne  efpee  quand 
I  nous  aurons  la  parole  de  Dieu.  Ce  n'eil  pas 
fans  caufe  que  l'efperance  eft  appelée  heau- 
me, que  la  foy  ell  appelée  halecret,  bouclier, 
&  que  nous  ferons  tien  equippez  quand  nous 
aurons  tout  cela:  car  Dieu  ne  nous  veut  point 
fruftrer,  mais  il  nous  monftre  que  fa  parole 
nous  feruiraà  telvfage  comme  il  luy  en  don- 
ne le  titre,  quand  nous  la  fçauons  bien  appli- 
quer cojnme  il  faut.  Voila  donc  quant  à  ce- 
lle marque  que  fain£i:  Paul  a  mife  comme  fpc- 
ciale  pour  les  miniftres  de  la  parole  de  Dieu. 
11  met  au  re/le  ,  Qu'ils  recoyiicnt  les  tjlran- 
vers-.cur  le  refte  ne  fe  pourroit  point  defpef- 
clier  maintenant-il  n'y  aura  donc  que  ce  mot 
pour  conclufion.  Ce  ii'eft  point  lans  caufe 
que  notamment  fainct  Paul  a  requis  ceci  en 
tous  Pa/teurs  ,  c'eft  qu'ils  foyent  humains 
pour  recueillir  les  elhangers.  Et  mefmes  iî 
iious  pcnfons  au  temps  auquel  il  cftoit ,  ceci 
eitoit  bien  necefiaire. Car  c'eftoit  comme  au- 
iburd'huy  que  les  poures  enfans  de  Dieu  iont 
■  ,^  ,  ,^  ;  dechaflez  ,  &  font  là  comme  poures  oïl'tawx 
^  .xju'onaura  volcz,il-.  ne  fçaucnt  où  ils  fe  doy- 
>ient  retirer:  s'ils  ne  font  reaiellis  ,  les  voila 
cxpofez  en  proyc  ,  qui  feroit  pour  leur  fai- 
r«  perdre  tout  courage.  Sainït  Paul  donc  non 
(fans  caufe  exhorte  les  miniftres  de  la  paro- 
le de  Dieu  d'auoiv  ccfte  humanité  de  recueil- 
lir >olontiers  les  cftrangers  ,  &de  leur  don- 
ner accès  f.icile  &  humain. Il  eit  vray  que  ce- 
Re  vertu  doit  tftre  commune  à  tous  fidèles: 
car  quand  nous  n'aurions  que  l'oide  de  natu- 
J-e,il  nous  eufeignc  alfez  d'cftre  humains  en- 
tiers cé^ix  qui  font  delf  itucz  de  toute  aide, qui 
font  delnuei,  en  forte  que  fi  on  ne  leur  fub- 
«enoit.ce  feroit  vne  grande  pitié:nat«ie  donc 


nous  monftrccela.Mais  il  y  a  vne  confidcra- 
tion  fpeciale  aux  enfans  de  Dieu.  Il  eft  die 
que  nous deuons  nous  cognoiftre  eftrangers 
c  ace  monde,  C  nous  voulons  que  Dieu  nous 
accepte  pour  les  héritiers.  Il  faut  en  premier 
lieu  que  nous  confefsions  ,  &  que  nous  ayons 
cela  ariefté  en  nous,  qu'ence  monde  nous 
fommes  eftrangers.  Car  celuy  qui  conftitue 
ainlîfonnidici  ba'.,&quine  fecognoift  point 
eftranger  en  la  terre  ,  il  faut  qu'il  foit  banni 
du  Royaume  des  cicux,  comme  l'Apoftre  'e  „  i 
monftre  en  l'Epiftreaux  Hebneui.  Auiour-  '  * 
d'huy  donc  ce  n'eft  .à  autre  condition  que 
Dieu  nous  tient  pour  fes  enfans  ,  fînon  que 
nouspafsions  par  ce  monde  comme  eftran- 
gers &:hofteliers,ainfiqu"il  en  parle.  £t  ainii 
tous  enfans  de  Dieu  ayans  vne  telle  confide- 
rationdoyuêt  eftre humains  enuers  kseftran 
gers:&  fur  tout  quand  ils  voycnt  qu'on  pcr- 
Iccute  les  fidèles, qu'on  les  dechalTe,  encores 
doyuent-ils  eltrc  plus  touchez.  Car  il  faut 
bien  que  les  cocursfoycnt  de  fer  &  d'airin, 
qu'il  y  au  plus  ae  cruauté  qu'aux  beftes  bru- 
tes &  fauuages ,  s'ils  ne  font  efmeus  de  com- 
pafsion  quand  ils  voycnt  qu'on  dtchalleain- 
ii  les  enfans  de  Dieu  pour  la  dottrine  de  leur 
falut.  Cefte  vertu  donc  fera  bien  commune 
à  tous:  mais  faintl  Paul  veut  que  les  mini- 
ftres de  la  parole  monftrent  le  chemin,  Se 
qu'ils  donnent  vn  tel  exemple,  que  les  autres 
auf  i  foyent|  indi.ics  &  incitez  à  rccufiliir  les 
eftrangers.  Nous  l'çauons  doue  maintenant 
l'intention  cie  fainit  Paul.  Or  puiu  faire  no- 
ftre profit  de  ce  paflagt, notons  bnefi'cnicnt 
que  ceux  qui  font  appelez  en  cifte  citât  d'a- 
noiicer  la  parole  de  Dieu,  fe  doyueiu  co- 
gnoiftr«  tellement  eftre  pctionni  s  publiques, 
qu'ils  ne  Iont  point  ordonnez  pour  t  ux-nicf- 
mes  ,  mais  qu'ils  ie  communiquent  tant  qu'il- 
leur  fera  pofsibleà  ceux  qui  ont  befoin  d'e>- 
ftre&:  exhortez  &confolcz,  &  confeillez  ,& 
admonertez,  &  d'auoir  quelqr.e  kcours  :  il 
faut  cela  en  premier  lieu.  Et  puis,  quant  eft 
du  troupeau  ,  que  tous  fidèles  chacun  en  fon 
endroit  cognoiflent  aufsi  qu'ils  fe  doyutnt 
employer  pour  leurs  prochains ,  voire  pour 
ceux  qui  leur  l'ont  eftrangers.  Car  puuiquoy 
font-ils  eftrangers  en  ce  monde  ?  C't  ft  afin 
que  de  noftre  Cûfté  nous  foyons  contorincz 
à  eux,  &  que  nous  n'ayons  point  d'habita- 
tion certaioe.ponr  dire  que  nous  demeurions 
toujours  en  vn  lieu  ,  mais  que  nous  foyons 
prcfts  d'cftre  remuets  ça  &  là  félon  le  boa 
vouloir  de  Dieu.  Voila  dore  ce  que  n(vus  a- 
uons  àprattiquer  de  ce  p.iflàge  ,&  far  tout 
quand  la  necefsité  du  temps  v  cfticar  c'eft  vn 
aiguillon  nouueau,côine  nous  auons  dit.Com 
meauiourd'huy  ,  qu.iudnous  voyons  la  rage 
des  incrédules  &  des  ennemis  de  PEuangilc- 
eftre amfienliammcc  ,  de  noftre  cofténedc-, 
uons-nous  pas  pour  le  moins  eftie  tUncus  de 
pitie  &  coropafsion  de  ceux  qu'on  dcchaflè 
ainli^qui  font  contraints  de  quitter  leur  pays, 

ne 


SVRLA    I.    ATIMOTH. 


'5Ç 


fte  deuoBS-sous  pas  di-je,  les  fecourir  entant 
qu'en  nous  fera?  Et  fi  nous  ne  le  ùifons ,  ne 
monftrerons-nous  pas  bien  que  nous  fom- 
mes  digues  d'eftre  defauouez  de  Dieu,  Si.  ra- 
clez du  roUe  de  fes  en£ins?Car(comrae  délia 
nousauons^it  )  ceux  qui  ne  fe  cognoiflent 
point  cftrangers.ne  faut-il  pas  qu'ils  le  b.in- 
nilTlnt  em-mcrmes  du  royaimie  de  Dieuf  Et 
fur  tout  ceux  qui  crient  contre  les  eftrâgers, 
&  quimefuies  prendront  ce  mot  par  iniure, 
ceux-là  ne  fçauroyent  mieux  protefter  qu'ils 
oe  font  pas  dignes  d'eftre  nombrcz  au  rang 
des  enf.ius  de  Dieu  ,  ne  d'eltre  receus  en  fon 
Eglife  nonplus  que  chiens  ou  pourceaux, que 
ils  foyent  excommuniez  &  reprouuez,  enco- 
res  qu'on  ne  les  condamne  pas:mais  qu'on  ac 
cepte  feulemét  le  tclinoignage  qu'ils  ont  ren 
du  d'eui-mcfmes ,  il  ne  tauc  que  ce  mot-la, 
quand  vn  homme  prendra  pour  iniure  qu'vn 
autre  foit  eftranger,  &  qu'il  ait  quitté  ion 
pays  pour  ieruirà  Dicii ,  ou  qu'il  en  ait  efté 
dechafle  par  la  tyrannie  &  cruauté  des  mef- 
chans:il  faut  qu'vn  tel  loit  luy-melme  fon  iu 
ge:  c'efl  comme  s'il  protcftoit  qu'il  n'a  nulle 
part  au  royaume  de  Dieu  .qu'il  n'eft  point  de 
fon  Eglife, qu'il  n'ell  point  du  nombre  de  (es 
fidèles, mais  qu'il  eft  vn  excommunié,  vn  re- 
prouué,  qu'il  eftvn  enfant  du  diable, qu'il  eft 
luy-mefme  retranché  de  la  compagnie  des 
Cnreftiens:  briet,  qu'il  n'ell  pas  digne  que  ce 
titre  de  foy  luy  foit  communiqué.  Voila  ce 
que  nous  auons  à  noter.  Vray  eft  qifaiifsi  les 
tftrangers  doiuent  ertre  ici  admoneftez  de 
leur  corte,puis  que  Dieu  les  recômande,  que 
ils  n'abufent  point  d'vn  tel  nom  &  d'vn  tel 
priuilege.  Carfî  vn  homme  a  obtenu  vn  pri- 
uilege  d'vn  Piincc,&  qu'il  en  abufe,que  fous 
ombre  du  bien  &  de  Thonncurque  le  Prince 
luyS  fait.il  commet  quelque  outrage.nt  lera 
il  point  puni  au  double?  11  eft  certain.  Ainfî 
donc  que  ceux  que  Dieu  a  recommandez  re- 
gardent ,  que  puis  qu'il  a  vn  tel  foin  d'eux  ,  il 
fjutbiéqu'ili  atluilL-nt  d'vfer  d'vne  telle  gra 
ce,en  forte  que  Dieu  en  foit  honoré.  Or  ce- 
ci eft  bien  à  noter  ,  &  fur  tout  auiourd'huy. 
Carnous  en  verrons  beaucoup  qui  fc  diront 
eftredechaflczpour  la  parole  de  Dieu,  q  tou 
tesfoismonftrent  mal  parefFcct  que  ce  titre- 
la  leurappartiene.  le  ne  parle  point  encores 
«le  ces  trompeurs  qui  vferont  de  tels  nicnfon 
ges  :  mais  il  y  en  a  beaucoup  qui  à  la  vérité 
auront  cftédechalTcz  par  les  tyrans  &  enne- 
mis de  la  foy.  Sont -ils  venus  en  l' Eglife  de 
Dieii^commcnt  s'y  gouuerncront-il-  ?ll  vau- 
droit  beaucoup  mieux  qu'ils  eulïent  perfecu- 
té  les  fidèles  ,  que  d'auoir  fouftecu  opprobre 
nemolcfte  pour  la  parole  de  Dieu,  puis  qu'ils 
vienent  ici  contaminer  &  polluer  r£t;iile  de 
leur  mefchante  vie  &  dillplue  :  ilvaudroit 
mieux  qu'ils  fufllnt  plongez  auï  ténèbres  les 
plus  profondes  de  la  Pafauté  ,  que  d'eftie  ici 


venus  pour  eftieenfcandale  à  tout  le  mon- 
de.Il  y  en  a,di-ic, beaucoup  de  tels:&  plcuft  à 
Dieu  que  les  exemples  ne  tulFent  pas  lî  com- 
muns unais  on  voit  ces  d'csbauchez  qui  menée 
vne  vie  profane,  &  qui  font  en  mefpris  de  ia 
parole  de  Dieu,  qui  donnent  occalion  aux  i» 
crédules  d'auoir  la  bouche  ouuerte  peur  biaf 
pheiner  à  rencontre  de  la  pure  doiirine.  Et 
cependant  viendront-ils  ici?Ho,c'eft  pour  Ja 
parole  de  Dieu. Et  ce  fera  toutesfois  pour  l»r 
cins,pour  meurtres,  Se  autres  maléfices.  Ho, 
c'eftaffez,  moyénant  qu'ils  ayent  ce  beau  ti- 
tre de  la  parole  de  Dieu:gens  volages, desbân 
chez  ,  qui  ont  fait  quelque  afte criminel ,  ho, 
tout  fe  couuie  de  ce  manteau  :  Se  voila  com- 
me le  nom  de  Dieu  eft  profané.  D'aut.«  plue 
donc  faiit-il  que  ceux  qui  veulent  prétendre 
vne  telle  proteftation  ,  aduifent  de  ne  poinc 
abufer  du  bien  que  Dieu  leur  fait. Voila  pour 
vnitem.  Et  cependant  que  ceux  aufquels  le 
fàinttEfprit  parle  ,  ne  foyentpointdesbau- 
chez  de  bien  faire.  Ileftvrayque  la  malice 
du  temps  nous  contraint  d'vferici  de  gran- 
de piudence  :  que  fi  onvouloit  croire  à  ceur 
qui  dtfent  ,  le  fuis  venu  pour  la  parole  de 
Dieu:que  feroit-ce?  quelle  mocqueiie?où  en 
ferions-ncus?  Car  nous  voyÔs  des  galans  qui 
tous  les  iours  nous  yienét  ici  affronter.  Mais 
quoy  qu'il  en  foit,  que  nous  ne  foyons  point 
deftouinez  de  bien  faire  k  ceux  qui  en  font 
dignes, &•  que  nous  ne  foyons  pas  côme  ceux 
qui  le  desbauchent  quand  ils  voyent  quelque 
fcandale:  Ho, voila  vn  telquifaifoitdu  Chre 
ftien  qui  a  fait  telle  chofe,  il  a  donné  vn  mau 
uais  exemple.  Si  nous  voulions  nousarrefter 
1.1, &  que  feroit-cc?  £tpourtant(comme  i'ay 
dit }  encores  qu'il  y  ait  beaucoup  de  canail- 
les qui  menteroycnt  d'eftne  exterminez, Il  ne 
faut-il  pas  pourtant  que  nous  reiettions  ceux 
qui  à  la  venté  font  les  hoftes  de  Dieu  ,  &  qui 
font  dechaflez  de  leurs  maifons  :  que  nous 
leur  tendions  la  main  afin  de  les  fecourir  cô- 
me nous  voudrions  eftre  fecourus  ,  Si  qu'ils 
foyent  recueillis  par  nous,puis  que  Dieu  par 
fa  bonté  infime  nous  promet  de  nous  aflein- 
bler  tous  en  la  fin  en  fon  royaume  celefte. 

O  R  nous-nous  profternerons  deu^nt  la  ti 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  priant  qu'il  nous  les  face  telle- 
ment fentir,que  nous  ne  demandions  en  tou- 
tes nos  miferes  finon  d'auoir  noftre  recours 
à  luy :&  que  noftre  vie  foit  du  tout  conforme 
à  fa  volonté.  Et  s'il  y  a  encore  des  fautes^ 
foiblefles  en  nous ,  comme  il  ne  fe  peut  faire 
qu'il  n'y  ait  beaucoup  à  redire  en  nous,  qu'il 
luy  plaife  nous  fupporter  iufques  à  ce  qu'il 
nous  ait  defpouillez  de  tous  les  vices  de  no- 
ftre chair,  aufquels  nous  fommes  maintenant 
fuiets.  Ainiînous  diros  tOHS,Dieu  tout-puif- 
fant,Perecelefte,&c. 

r.Hii. 


/ 


156  S  E  R  M  O  N    X  X  1 1  r. 

QJ/  ATRIEME     SERMON     SVR     LE 

TROISIEME     CHAPITRE. 

3  Non  point  addonné  au  vis  ,  ne  bateur ,  ne  conuokcux  de  gain 
dcshonnejle,mais  humain,non  noifcux,non  auaricicux: 

4  Btenpouruojant  a  fa  famille  >  ayant fes  enfamfuiets  en  toute 
rcuercnce. 

5  Qi^f  aucun  ncfçait  hienpoumoir  a  fa  famille, contment  aura 
il  le  foin  de  /'  ^glife  de  Dieul 


Près  que  faind  Paul  a  com 
I  mandé  ijue  ceux  qu'on  choi 
jfit  pour  élire  Paileurs  en 
JrEglife  de  Dieu,  foyét  pro 
.près  à  enfeigner  ,  humains 
^cnuers  cjux  qui  fontperfe- 
'  cutez  pour  le  nom  de  Dieu, 
&  qu'ils  foyentaufsi  de  vie  honnefle.fçachas 
bien  gouuerner  leur  raaifjn,  ri  adiuufte  qu'ils 
ne  doiuent  point  cftre  entachez  dt-  quelques 
vices  qu'il  nomme,  comme  d'eftu-  eltouidis, 
d'tftre  auaricieux. Voila  donc  des  choies  qui 
ne  font  point  à  fjuifrir  en  vn  hoinrne  quidoit 
enfeigner  les  autres.Carque  fera -ce  de  la  do 
ftrine,&  cornent  fera-elle  receiie.fi  vn  hom- 
me y  va  .-i  l'efgaree  ,  &  qu'il  foit  plufljflVn 
gendarme  qu'vn  prefcheur.  D'autre  collé  il 
efl  impofiible  qu'vn  homme  appcte  à  gai- 
gner,&  qu'il  fe  vueiUe  enrichir,  qu'il  ne  cor- 
rompe la  doctrine  de  Dieu  par  faueur  ou  par 
flatterie.  Ainfi  donc  ce  n'efr  point  fans  caufe 
que  fainû  Paul  notamment  déclare  que  ces 
vices  ne  font  poît  h.  endurer  en  tous  Palleurs. 
Jl  commande  donc  qu'on  les  choifilTe  amia- 
bles,&  non  point  bateurs  ,  &  qu'ils  mefpri- 
ient  l'orgueil  &  les  richefles  de  ce  monde. 
Maintenant  nous  voyons  en  fomme  ce  que 
.  fainft  Paul  a  entendu.  Or  pourfuiuant  ce  que 
nous  auons  commencé ,  notons  bien  qu'ici  S. 
Paul  donne  vne  dodrine  commune,  &:  qu'vn 
chacun  peut  appliquer  à  fon  v  fage.  Car  pour 
quoy  efV-ce  que  les  miniftres  delà  parole  de 
Dieu  nç  doiuent  point  eftre  auaricieux?  L'a- 
waricc  fera  toufiours  idolâtrie  partout  où  el 
Iç  fe  tiouueia  :  en  forte  qu'vn  homme  ayant 
addonné  fon  caur  aux  biens  de  ce  monde, ou 
Ij liera  Dieu  ,  &  mettra  tellement  fa  confiance 
çn  fon  argent,qu'il  en  fera  Vu  idole,  il.  y  met 
ira  fa  foy  ,  &  y  aura  tout  fon  refuge.    Nous 
voyons  donc  que  l'auarice  n't/lpas  fculeraét 
4  cgndamner  en  ceux  qui  aponcent  la  paro- 
le de  Dieu ,  mais  en  tous  fidèles  fans  exce- 
ption.Pourquoy  donc  lainft  P.aul  parle-il  Jci 
ïculcment  des  minillies  de  la  parole?  C\ft 
d'autant  qu'ils  doiucjit  monftrcr  le  chemin 
aux  autres ,  &  comme  la  parolçde  Duu  con- 
damne l'auarice  en  tous,  qu'ils  en  dcftournéc 
par  leur  exemple  ceux  qui  y  pourroyét  eftre 


addonnez.  Qu^auons-nous  à  prefcher  quand 
nous  fomnies  montez  en  chaire  ,  finon  qu'vn 
chacun  fe  remette  entre  les  mains  de  Dieu, 
le  cognoiflant  fjn  Père  nourricier?Or  fi  no' 
ne  mettons  en  Dieu  noftre  fiance  >  qu'il  fera 
l'entretenement  de  noftre  vie  ,  qu»;  fera-ce 
delà  vieeterncllefComment  pourrons-nous 
auoir  ctft  appuy-la  ,  qu'il  ne  faudra  point  i 
noirs  recueillir  en  fon  Royaume, quand  nous 
ne  pourrons  pas  efperer  qu'il  ait  le  foin  de 
nous  auiourd'huy  &  demain.Tous  ceux  donc 
qui  voudront  fidèlement  feruir  à  Dieu  ,  doi- 
uent exhorter  tous  fidèles  â  prattiquer  cefte 
leçon,  de  prier  Dieu  qu'il  leur  donne  leur 
pain  ordinaire.  Parlant  ainfi  nous  protcftons 
q  nous  tenons  noftre  vie  de  la  main  de  Dieu, 
&  que  c'eft  de  luy  dont  nous  attendons  d'e- 
ftre  fubftentez,  &  que  nous  n'auons  autre  re- 
fuge qu'à  fa  prouidence:tenon>.  cela  tout  con 
clud,qu'il  aura  toufiours  le  foin  de  nous  com 
me  vn  bon  père  defesenfans.  Nou- deuons 
aufsiadmonefterles  riches  qu'ils  ne  foyent 


point  enflez  d'orgueil ,  qu'ils  n'ayent  p^int 
leurs  coeurs  enueloppez  en  leurs  biens , 
qu'ils  foyent  preftsdeles  quitter  toute? 
&  quantes  qu'il  plaira  à  Dieu  ,  &  qu'ik  foy- 


ent poures  en  eux-mefmes  ,  combien  que 
Dieu  leur  donne  grande  abondance.  Nous 
auons  aufsi  à  exhorter  les  poures  d'autre 
cofté  ,  qu'ils  prenent  en  p.Tticnce  leur  con- 
dition ,  fçachans  que  Dieu  leur  diftriboece 
qu'il  leur  faut ,  qu'il  cognoift  ce  qui  leur  eft 
propre,  il  fçait  leur  portée.  En  fbmme  nous 
auons  à  condamner  l'auarice  ,  &  nous  ef- 
forcer tant  qu'il  nous  fera  pofsible  pour  en 
retirer  grans  &  pefis.Orauons-nous  fait  ce- 
laîil  nous  faut  monftrer  le  chemin  :  &  com- 
bien que  nul  ne  fera  excufé  voul.u  faire  bou- 
clier d'vn  prefcheur  qui  n'aura  pas  tait  fon 
deuoir,  &quc  nous  ferons  tousdairm-Tblcs  de 
nant  Dieu,cependant  fi  faut-il  que  nous  don- 
nions approbation  à  la  doûrme  ,  que  quand 
nous  viendrons  ici, nous  ne  foyons  pas  com- 
me des  effrontez  pour  faire  de  belles  cxhor- 
tation,s-,&  puis  après  nous  en  mocqucr,  &  que. 
onapperçoiix  en  toute  noftre  vie  que  nous 
eftimions  comme  table  tout  ce  que  nous  di- 
fons.  Voila  donc  pourquoy  faind  Paul  a  no- 
tamment 


SYR   LA   I.   A  TIMOTH. 


'57 


tamment  condamné  Tâiiarice  en  touspref- 
cheurs  de  rEiiargile.  Mais  cependant  lî  faut 
il  qii'vn  chacun  regarde  à  l'oy  :  Si  comme  ce- 
ftc  doitrine  s'addielfc  à  tous- ,  <ju\iufsi  grans 
ôfpetis  la  prattiquent, combien  qu'ils  foyent 
perfonnes  priuçes.  Au  relie,  quand  nous  au- 
rons apprins.à  condamner  rauarice  ,  &  à  la 
fuir  comme  vneptfte  mortelle, que  les  mini- 
ftrcs  de  la  parole  de  Dieu  regardent  à  eux  de 
plus  près. Et  pourquoy?  Car  ce  rCelï  pas  com 
me  d\n  homme  particulier,  qui  fera  entaché 
d'vne  telle  conuoitife.quM  n'aura  plus  ne  rai 
fon  ne  prudéce  en  foy  :  &  bien,ceftuy-]a  s'en 
va  à  perdition;ni3is  vn  miniftre  corrompra  la 
parole  de  Dieu,comme  nous  voyôs  que  ceux 
qui  tafchent  à  faire  leur  profit ,  ne  font  que 
defguifer  la  pure  doftrine  ,  &  l'obfcurcir  en 
forte  que  ce  n'eft  plus  vérité.  D'autant  donc 
qu'vn  homme  ne  peut,  eftre  auaricicux  qu'il 
nefalfîfiela  doiîlrine  de  Dieu  quand  il  fera 
au  miniftere, d'autant  plus  deuons-nous  pcn- 
ferà  n'cftre  point  entachez  d'vn  tel  mal, qui 
feroit  vne  corruption  &  vne  perte  mortelle 
en  toute  l'Eglife  de  Dieu.  Car  qu'eft-ce  que 
la  do£lrine  que  nous  portos?  Comme  il  a  efté 
dit  ce  matin, c'eft  la  nourriture  des  âmes.  Or 
eft-ll  ainlî  que  fi  nous  y  méfions  quelque  aua 
rice  ,  il  faut  que  la  doftrine  foit  comme  em- 
poifonnee,c'eil  autant  côme  qui  iettera  quel 
que  poifon  dedans  le  pain  oii.dedansje. -vin. 
Nous  femmes  donc  coulpablcs  comme  rricur- 
triers  deuant  Dieu,  pource  que  nous  fommes 
fiiuflàiresde  la  doifrine.nons  fommes  empof 
fonneurs  des  âmes,  au  lieu  de  les  nourrir  c5- 
hie  bons  Pafteurs.  Puis  qu'ainfi  eft  donc ,  que 
ceux  qui  font  appelez  pouranoncer  la  paro- 
le de  Dieu  fe  ticnent  fur  leurs  gardes ,  &que 
ils  rcgardét  cefte  leçon  qui  nous  eilicimon 
ftrce.c'eftafçauoirdemcfprifer  l'argét.Gar 
iufques  à  tant  que  nous  foyons  là  venus, il  eft 
impofsible  que  nous  feruions  à  Dieu,  ne  que 
nous-nous  teniôs  en  vne  droite  pureté,  mais 
nous  defguiferons  tout.  Voila  donc  pour  vn 
item.  Or  cependant  notons  que  c'eft  d'aua- 
rice  par  ce  que  fainft  Paul  en  déclare  ici.  A- 
pres  qu'il  a  défendu  aux  miniltres  de  la  paro 
le  de  Dieu  d'cftre  auaricieux  ,  ou  appetans 
gain  deshonnefte,il  admonefte  qu'ils  mefpri- 
fent  l'argét:  car  de  faiil:  aufsi  le  mot  en  la  lan 
gue  dont  vfe  faind  Paul ,  fignifîe  tant  qu'on 
apper  çoiuc  que  vaut  auarice,c'eft  à  dire  cupi- 
dité d'eftre  riche.  Or  ceci  n'eft  point  ùiper- 
fiu,ce  n'eft  point  l'expofitiond'vn  mot  feu- 
lement, mais  c'eft  vne  doftrine  d'vne bonne 
fubftânce.  Et  pourquoy?  On  aura  beau  nous 
prefcher  contre  l'auarice,  iufques  A  tant  que 
nous  ayons  cognu  quel  mal  c'eft  pour  notw 
en  garder. Si  vn  vice  m'cft  incognu.ie  m'iray 
fourrer  dedans,  &  le  diable  me  viendra  faifir 
deuant  que  i'y  ayepenfé.  Il  faut  donc  que 
nous  fçachions  difcerner  les  vices. Chacun  di 
ra  bien  que  l'auarice  eft  vne  chofe  mefchan- 
te  &  deteftable,  mais  cependant  iï  eft-ce  que 


tous  fe  iettcnt  là  comme  pourcs  beftes  brur- 
tes, chacun  y  fcraaddôné.Êt  pourquoy?D'aa 
tant  que  nous  ne  cognoifloiu  point  (comme 
i'aydit)dequoy  nous  parlons.  Notons  bien 
donc  que  fi  nous  n'auonsapprins  àmefprifer 
l'argent ,  c'eft  .\  dire  que  nous  ne  l'ayons  en 
horrcur.d'autant  qu'il  nous  rend  comme  he- 
bcteZjnous  ne  fuirons  iamais  l'auarice. Voila 
vn  item. Et  cément  fera-il  pofsibleCdira  quel 
qu'vn)  qu'on  n'appetel'argentïQuand  nous 
dem.îdons  .i  Dieu  npftre  pain  ordinaire,nouj 
proteftôs  défia  que  nous  fommes  cotens  d'c- 
ftre nourris  de  luy  au  lour  la  iournee  .  Ainfi 
doncvn  homme  ne  peut  vferde  ccfte  forme 
derequcfte,  qu'il  n'ait  défia  quitté  fon  atFc- 
ftion  à  l'or  &  à  l'argent  ,  pour  dire  ,  l'atten 
que  Dieumenourriflè,  &  qu'il m'entretiene, 
comme  il  m'a  défia  fait  fentir  vne  tellebon- 
te.Ilne  faut  point  donc  quei'addonne  telle-, 
ment  mon  çccur  à  l'or  &  à  l'argcnt,q  l'en  ou- 
blie Dieu.  Si  doc  no'  pouuôs  prattiquer  cela, 
nous  ne  trouuerons  plus  elhange  den'audir 
point  cefte  conuoitife  qui  nous  brufie  ,  &  qut 
foit  comme  vne  fournaife  ardéteen  nous:  c5 
me  nous  voyons  que  tous  ceux  qui  appetent 
d'eftre  riches, il  faut  qu'ils  foyent  leurs  bour 
reauxjc'eft  le  premier  payement  qu'ils  reçoi 
uentqueceluy-la.  Ainfi  doncpour  monftrer 
que  cefte  cupidité  de  s'enrichir  ne  peut  eftre- 
qu'vji  homme  ne  foit  aueuglé,qn'iLnc  fe  pré- 
cipite en  des  fauffes  &  mefchances  phanta-» 
h"es,^  .»  beaH£oup.d'iniqu'£i!ez,(3inrt  Paul  par 
le  ici  nbtamnrent  de  gain  deshonnefteoii  vi- 
lain. Car  il  eft  impofsible  qu'vn  homme  qui 
deiîrtd'en  auoiT,&  qui  a  concfad  cela, ne  foit 
comme  phrenetique,&  qu'il  ne  s'aoeu^le  tel- 
lement qu'il  n'y  aura  point  de  raifon  ne  d'e- 
quitc  en  luy. Il  ne  regardera  poît.  Cela  in'e'ft: 
il  licite?cela  m'eft-il  defèndiir  mais  il  fe  iet- 
tera par  tout  comme  vne  beftefauiiage.Ainiî 
donc,  d'autant  que  nous  voyons  les  pourcs. 
créatures  de  Dieu  eftre  menées  par  l'auarice 
en  fi  grade  perdition, qu'vn  chacun  face  bon. 
guet,&  que  nous  apprenions  de  batailler  cott 
tre  nos  cupidite2  fi  nous  les  voyons  rendre 
à  l'auarice ,  que  nons  apprenions  de  les  re- 
trancher,^'que  nous  ayons  ce  contentement 
lequel  feul  nous  peut  rendre  riches ,  comrrie 
ditleprouerbe.  Et  ce  contentement  ne  fera 
pasfinon  en  ceux  qui  fe  peuuerit  du  tout  re- 
pofer  en  Dieu;comme  aufsi  l'Apoftre,  quand 
il  a  déclaré  en  l'epiftrcaux  Hcbricu\-,q[ùe  Icc 
fidèles  doiiicnt  eftre  retirez  &  exemptez  de 
toute  auarice,il.idiQiiftc,Voire afin  qu'ils  cd- 
gnoiflent  que  c'eft  en  Dieu  que  gift  leur  fuf- 
fifance ,  &  que  celuy-la  ne'les  lailîerapoint. 
En  quoy  il  fiçnifie  que  cependant  que  l'infi- 
délité domine  en  nous, il  faut  aufsi  que  ce'leii 
d'auarice  y  foit.Carqiii  eftcaufeqnc  les  hoi» 
mes  demandent  de  s'auànccr,  finpn  qu'ils  ne 
cognoifTent  point  que  c'eft  l'office  de  Dieu 
de  leur  donner  ce  qui  leur  défaut?  Car  après 
que  nous  aurons  cognu,  &  que  nous  ftronî 


n% 


SERMON     XXIII. 


'  bienperfuâdez  que  Dieu  a  le  foin  de  nous,  & 
qu'il  ne  permettra  point  que  rien  nous  de- 
faille, il  eft  certain  que  ce  t^eu-la  fera  efteint, 
ou  tellement  appaife,que  nous  ne  bruflerons 
plus  comme  nous  auons  de  couftume.  Voila 
donc  d'où  procède  ce  contétcment  qui  pour- 
ra corriger  cefte  rage  d'auarice  en  nous,  afça 
uoir  quand  nous  aurons  apprins  que  noltre 
Seigneur  a  le  foin  de  nous  fubftenter  ,  &  de 
nous  pouruoir  de  ce  qu'il  nous  faut.  Et  cela 
encore  nous  déclare  mieux  combien  l'aiiari- 
ce  nous  doit  eftre  deteftableicar  il  eft  impofsi 
ble  qu'vn  homme  appcte  à  s'enrichir  qu'il 
ne  renonce  Dieu:  pource  que  li  nous  attri- 
buyons  à  Dieu  la  vertu  fouueiainc  qu'il  a  par 
dcuu'!  nous ,  il  eft  certain  que  nous-nouî  re- 
poferions  en  luy.    Car  quand  nous  fommes 
agitez  de  telle  inquiétude ,  qu'il  nous  fcmble 
que  nous  foyons  perdus  fi  nous  n'auons  de- 
quoy  ,  c'eft  figne  que  Dieu  n'a  nul  crédit  ni 
authortté  enuers  nous.  Et  voila  pourquoy  S. 
Paul  aufsi  attribue  ce  titre  d'idolâtrie  à  î'a- 
uarice.carnous  voyons  que  ce  font  chofes  in 
réparables.  Q_uand  les  hommes  mettent  leur 
confiance  aux  biens  de  ce  monde  (  qui  font 
toutesfois  corruptibles  Se  caduques  )  ils  en 
font  leurs  idoles, &  y  font  tellement  addon- 
nez  que  Dieu  ne  leur  eft  plus  rien  :  &  mon- 
ûrent  par  cela  leur  incrédulité, tellement  que 
toutes  les  promelFes  de  Dieu  ne  les  pcuuent 
aireurer:mais  pluftoft  ils  le  laiflènt  tranfpor- 
ter  à  Satan.d'autant  qu'ils  s'arreftcnt  du  tout 
en  ces  chofes  tranfitoires  :  &paj  ce  moyen 
s'eflongnentde  Dieu  qui  eftoit  preft  de  les 
receuoir  à  foy.  Il  y  a  les  autres  vices  que  S. 
Paul  reprend.qui  font  aaf.i  à  noter.Il  dit  que 
vn  Pafteur  ne  doit  pas  eftre  yurongne.  Il  eft 
vray  que  le  motdont  vfe  fainû  Paul,  lïgniiïe 
proprement  excefsif  en  vin  :  mais  il  emporte 
aufsi  ce  vice  qui  eft  aux  yurongnes  :  car  ils 
font  eftourdis  &  farouches,  il  n'y  a  nulle  hu- 
manité en  eux.  \  Et  voila  pourquoy  il  oppofe 
Je  mot  d'amiable ,  quand  il  adioufte  vne  cor- 
teûion  de  ce  vice-la:  il  met,di-ie,à  l'oppolî- 
te,qu'vnEuefquefoit  amiable  ,  qu'il  ne  foit 
point  noifeui  ne  quereleux.il  déclare  enco- 
re$  mieux  fon  intention.adiouftant  qu'vn  Pa- 
[fteur  ne  doit  point  élire  batcur ,  mais  qu'il 
doit  eftre  paifible ,  &  qu'il  doit  fuir  tout  dé- 
bat Se  contention.  Voila  en  fomme  ce  que  S. 
Paul  a  voulu  dire.  Or  notons  qu'aupaïauanc 
il  auoit  défia  parlé  de  la  fobrieté  :  &  ne  s'eft 
pas  contenté  de  dire  que  celuy  qui  prefche 
la  parole  de  Dieu, fc  doit  garder  d'yurôgne 
rie,maisiladitnotammfnt,qu'il  fjit  fobre. 
Que  fcra-ee  fi  vn  homme  i'e  g.irde  feule- 
ment d'eftre  yure  en  forte  qu'il  ncpuifteni 
aller  ni  parler?  fera-ce  vne  grande  vertu?  les 
yurongnes  mcfines  fe  contrcg.irdtront  aucu 
ncment.Mais  fainâ  Paul  veut  qu'il  y  ait  vne 
fobrieté  plus  grande  aux  miniftres  de  la  pa- 
role de  Dieu,  c'eft  afç.iuoir  qu'ils  fe  rctienét. 
Se  tju'ils  ne  boiucnt  point  iufqucs  il  enta/Ter 


le  vin  pour  l'engoufirer  enleuryentre  ,  mais 
qu'ily  aitattrempance  3c mefure.Or  mainte- 
nant il  parle  d'vne  autre  efpeced'yurongne- 
rie.  Car  nous  en  verrons  beaucoup  qui  font 
eftourdis,  &  qui  y  vont  à  l'efgaree  aufsi  bien 
deuant  defîuner  qu'après  fouper.  Or  pource 
que  cela  eft  commun  aux  yurongnes,par  fini» 
Iitude  on  appelle  aucunCifoisyurôgnes, ceux 
qui  font  ainfi  eftourdis  &  efuentez  ,  &  qui 
n'ont  nulle  douceur  &  amitié.  Nous  voyons 
donc  en  fomme  que  ûinû  Paul  a  ici  voulu 
cômander  aux  miniftres  de  la  parole  de  Dieu, 
qu'ils  s'eiludiaflent  à  eftre  paifibles  ,  &  à  fuir 
toute  contention  &noife;  &  a  voulu  pareille 
ment  commander  à  ceux  qui  les  clilént,  d'ad- 
uifer  bien  qui  font  ceux  qu'ils  mettront  en 
tel  office ,  Se  qu'ils  ne  foyent  point  entacher 
de  ce  vice  pour  eftre  eftourdis, à  pour  fe  tem 
pefter  fans  propos,mais  qu'il  y  ait  en  eux  vne 
douceur  paiCble,  qu'ils  foyent  humains  pour 
fupporter  les  infirmes,  pour  appaifermefraes 
ceux  qui  font  trop  excefsifs&  trop  bouil- 
lans,car  c'eft  l'office  de  ceux  qui  font  confti- 
tuez  Pafteurs  en  l'Eglife.Et  comment  pour- 
ront-ils remédier  aux  autres,  finon  qu'en  pre 
mier  lieu  ils  fe  gardent  de  telles  maladies? 
Or  cependant  notons  que  ce  que  requiert  ici 
lainâ  Paul  en  ceux  quidoiuent  monftrer  e- 
xemple  à  tout  le  troupeau, eft  commun  à  tous 
les  enfans  de  Dieu.  Et  fi  nous  voulons  que  le 
Dieu  de  paix  habite  Se  règne  au  milieu  de 
nous  ,  ne  faut-il  pas  que  nous  foyons  paifi- 
bles?Si  nous  voulons  eftre  recognus  pour  fes 
enfans, ne  faut-il  pas  que  nous  oublions  tout 
débat  Se  contentionfCViu  eft  le  prince  de  com 
bat  finon  lediable?Q_uanddonc  nous  ferons 
diuifez  comme  chiens  &  chats,  qu'il  n'y  aura 
que  troubles  &  débats  entre  nous ,  il  eft  cer- 
tain que  le  diable  y  aura  fon  règne  ,  &  Dieu 
en  fera  comme  reietté.    Et  pourtant  notons 
quefainû  Paul  n'a  pas  ici  voulu  mettre  vne 
vertu  (pecialc  qui  compete  feulement  ivn  pe 
tit  nombre  de  gens,  mais  il  veut  môftrer  que 
tous  enfans  de  Dieu  doiuent  eftre  paifibles  Se 
modeftes,  Se  qu'entant  qu'en  eux  eft,  ils  doi- 
uent chercher  la  paix  ,  &  nourrir  fraternité 
entre  les  Chreftiens.  Cependant  potirce  que 
nous  en  deuons  monftrer  le  chemin,  tant  plus 
deuons-nous exterminer  les  débats  &  conten 
tions,  &  faire  qu'ils  n'ayent  point  de  lieu  ca 
tre  nous. Et  voila  pourquoy  en  l'autre  pallà- 
ge  il  eft  ditjQue  ce  n'cil  point  vnechofede- 
centeni  coniTenable  à  vn  feruiteurdc  Dieu, 
d'cftrecommevn  gendarme  ,  &  de  prendre 
noife  Se  querelle  fans  propos  :  à  l'oppofite 
qu'il  faut  qu'il  foit  humain, &  qu'il  fupporte. 
Car  fans  cela  il  eft  impofuble  que  nous  ne 
foyons  tempe ftatifs. Et  pourquoy?  Combien 
y  a-il  d'occafions  j)our  nous  mettre  hors  des- 
gons?  Car  fi  le  diable  machine  d'enflammer 
no  ifes  8e  débats  par  tout  ,  il  eft  certain  qu'il 
commei^cera  aux  miniftres  de  la  Parole,  il 
fera  Jâ  Cçs  principaux  efforts  :  &  puis  auLsi  il 

faut 


SVR   LA  I.   A 

faut  qu'iJ  paflè  beaucoup  de  chofcs  par  leurs 
niains ,  &tles  affaires  qui  les  peiment  tour- 
niencer  :  &  non  feulement  ils  fe  fentiront 
chaigeï  ,  maii  ce  fera  pour  les  faire  defpiter 
iufques  au  bout ,  finon  que  Dieu  les  foullie- 
ne.  Car  ils  verront  de  Tingraticude  aux  vns, 
de  la  rebeJl'on  aux  autres  ,  de  la  malice ,  des 
fraudes ,  aes  tromperies ,  &  de  la  fcintife  par 
tout.  Ce  n'eft  dôc  point  fans  caufe  que  fainft 
Paul  a  corrigé  ce  vice  en  tous  fidèles  ,  &  dé- 
claré qu'il  conuenoit  mal  fur  tout  aux  mini- 
ftres  de  la  parole  de  Dieu.d'autant  qu'ils  doi 
uenteftre  amiables,  &doiuent  fupporter:car 
5'ilsnefe  démettent  de  cefte  rigueur  extrê- 
me ,  il  eft  certain  qu'il  faudra  qu'ils  foyent 
cicefsifs ,  8c  qu'ils  trouuent  toufiours  à  re- 
muer. Voulons-nous  donc  eflre  attrempez  & 
modeilres }  que  nous  apprenions  en  premier 
lieu  de  fupporter  beaucoup  de  vices,  &  de  ne 
point  prendre  les  choies  à  la  rigueur.Or  ce- 
ûe  vertu  cft  d'autant  plus  difficile  ,  que  les 
hommes  s'addonnent  toufiours  aux  extremi- 
tez.ll  y  en  aura  qui  non  feulement  feront  ex 
cei'sifs  en  colère  ,  mais  ils  ie  porteront  côme 
des  gendarmes ,  qu'il  n'y  aura  qu'efcarmou- 
ches  en  eux  ,  on  n'orra  que  noifes  &  querel- 
Jes.voila  vne  extrémité  qui  eft  vicieufc,&  par 
tout  où  on  l'apperçoit.elle  cft  à  condamner. 
Mais  il  y  a  vne  autie  extrémité  qui  appro- 
che plus  de  la  vertu  ,  c'eft  quand  vn  homme 
ne  fera  point  addonné  à  eftre  trop  excefsif, 
qu'il  ne  prendra  point  des  noifes  particuliè- 
res ju'il  haira  tout  cela  :  mais  cepédant  il  ne 
laiflera  pas  d'auoir  quelque  véhémence  trop 
grande, &  des  bouillons,  qu'on  ne  fçaura  par 
quel  collé  on  fc  doit  abordera  hiy.  Voila 
donc  vne  extrémité  mauuaife  ,  &  coutesfois 
elle  procède  d'vne  bonne  racine.  Qj^and  vn 
homme  fera  ainiî  excefsif,  il  e/t  vray  qu'il  fe 
ra  mené  d'vn  bon  zèle  :  mais  il  n'y  a  point  de 
attrempance  ne  de  mefurecommeilfcroit  re 
quis,&  ce  vice-la  ne  lailTe  point  d'cflre  àcô- 
damner  toufiours.il  y  a  l'autre  extrémité:  ce 
pendant  que  plufieujs  condamneront  celle 
véhémence  ,  laillàns  couler  les  chofiis ,  ils  ne 
tiendront  conte  ne  de  redarguer  les  vices, ne 
de  menacer  les  concepteurs  de  Dieu  :  briefil 
r'y  aura  en  eux  que  toute  froidure:&  cepen- 
dant ils  fe  voudront  excufer  pour  dire,  Et  c5 
mcnt?n'cft-il  pas  dit  qu'vn  feruitcur  de  Dieu 
doit  eftre  patient?  Il  eft  vray  qu'il  faut  que 
nous  fupportions  beaucoup  de  chofes,il  faut 
que  nous  foyons  équitables  pour  n'efplucfier 
point  tout  i  la  rigueur  extrême:  mais  ce  n'eft 
pas  à  dire  pourtant  qu'il  nous  faille  eftre  laf 
ches  &nonchalanspour  quitter  l'hôneur  de 
Dieu. Car  fi  nous  voyons  que  Dieu  foit  offen 
fé,qu'il  y  ait  quelque  fcâdale  en  l'£glife,que 
les  vices  cémencent  de  fe  desborder,  en  for- 
te que  le  troupeau  foit  infeûé  de  corruption 
&depuantife,ievous  prie,faut-il  que  là  nous 
ayons  la  bouche  fucree  pour  dire.  Regardez, 
aduifeK ,  penfez  vn  peu  f  Ce  n'eft  pas  ainfi 


T  I  M  O  T  H.  i5<7 

qu'il  faut  £iite.  Et  s''il  y  a  vne  telle  noncha- 
lance en  nous  ,  cependant  le  diable  n'aura-il 
point  fait  comme  vn  déluge  &  vne  rauinepar 
tout?  Ainfi  donc  regardas  que  plufieurs.com 
bien  qu'ils  foyét  menez  d'vn  bonzele.nelaif 
fent  point  d'eftre  cxcefsifs ,  &  par  ce  moyen 
d'eftre  à  condamner.  Les  autres  font  encorcs 
pires  :  car  fous  ombre  d'eftre  humains  ils  fe 
mocquent  de  Dieu,&  fort  caufe  que  fa  vérité 
eft  en  opprobre,  q  les  vices  ont  la  vogue, que 
Satan  ne  peut  eftre  reprimé, q  le  iugement  de 
Dieu  eft  en  mefpris .  D'autant  donc  que  nous 
en  voyôs  beaucoup  de  tels,  aduifons  de  prier 
Dieu  qu'il  donne  prudéce  à  ceux  qu'on  a  c5- 
mis  pour  auoir  la  charge  d'enfeignér  ,  qu'ils 
fe  puiflent  porter  modereement,  &  qu'ils  gar 
dent  bien  de  fléchir  ne  d'vn  cofté  ne  d'autre. 
Se  qu'ils  ayent  vn  tel  zèle  ,  qu'ils  ne  laiflenc 
point  cependant  de  pafler  outre  en  leuroffi-  < 
ce, quelque  contradiûion  qu'il  y  ait.  Et  au  re 
fte  ,  qu'Us  fe  gardent  encores  mieux  de  toute 
flatte rie:combien  qu'on  prene  couleur  d'ami 
tié,de  douceur,&  de  patience:car  il  vaudroit 
mieux  auoir  vne  rigueur  exctfsiue  que  de  flat 
ter  ainfi  ceux  qui  faillent,&:  de  les  nourrir  en 
leur  perdition.  Et  mefmes  côbien  qu'vn  hom 
me  foit  humain  &  équitable  en  foy ,  fi  ne  laif 
fera-il  point  voyant  la  nccefsité  de  môftrer 
quelque  figne  de  rigueur  Se  de  violence. Pour 
quoy?  Vn  père  mefme,combien  qu'il  ne  vou- 
droit  point  auoir  donné  vne  chiquenaudeâ 
fon  enfant,il  ne  lailTèra  point  de  luy  dire  des 
mots  cuifans  qui  le  feront  pleurer, &  fera  fem 
blant  de  le  vouloir  déshériter  &  bannir  de  la 
maifon,me£ines  il  fera  quelquefois  contraint 
de  le  fouetter  :  &;  bien,  il  en  vfe  en  forte  que 
les  coups  luy  font  autâtdc  ma!  qu'à  l'enfant 
qui  les  reçoit.  Vn  père  pour  cela  fera-il  in- 
humain?Nenni:mais  il  procure  le  /jlut  de  fou 
enfant.  Ainfi  donc  vn  homme  ,  encores  qu'il 
fou  humain  &  bénin, &  qu"'ii  ûipporte  les  in- 
firmes, ne  laiflera  point  toutesfois  de  redar~ 
guer  viuement  les  vices.  Tant  y  a  qu'il  noof 
faut  toufiours  prendre  garde  h  nous ,  fi  nous 
vfons  de  rigueur.que  cependant  on  apper  çoi 
ue  que  nos  coeurs  ne  font  point  enuenimez, 
&  que  nous  ne  laiflbns  pas  d'auoir  cefte  affc- 
ûionde  fupporter  ceux  quifaillcnt,combicn 
qu'on  les  puiffe  condamner  pour  vn  coup. Or 
quâd  S.Paul  a  not.ïment  requis  ces  vertu';  au,t 
Pafteurs>  il  adioufte  ,  Qjiih  doiutnt  bien  go»- 
utrntrUuri  mai  'oni  ,  auoir  leurs  eiifans  fuiett 
en  r^uerence.poUTce  que  deCa  nous  auôs  trait 
té  ceci,  il  n'eft  ia  be foin  de  nous  y  arrcfter:il 
fufEra  en  fomme  de  retenir  ce  qui  a  efté  dé- 
claré plus  à  plein  ci  deirus,c'eft  afçauoir  que 
vn  home  ne  doit  point  eftre  retenu  pour  gou 
uerner  le  troupeau  de  Dieu,qu'il  ne  fe  puifle 
porter  conft.iment  en  fa  perfonne.  Vray  eft 
que  S.  Paul  ne  fê  contenti  point  encores  de 
cel3,mais  il  met  aafsile  meftiage.  Pourquoy? 
La  maifon  d'vn  fidèle  doit  eftre  comme  vne 
petite  Eglife.Les  payés  qui  ne  fçauoyét  q^ne 

f.  ii. 


14-0 


SERM  O 


c'efti'Eglife,  ont  dit  qu'il  n'y  amaifon  qui 
ne  foit  comnvevne  image  &•  figure  de  quelque 
gouuernemcnt  public. Les  Empires  font  gras, 
lesprincipauttï  ,&  autres  cftats  publiques: 
mais  tantyaqu''vn  pourc  homme  viuanta- 
ucc  fa  femme  &  fes  cnfaiis,  &  feruiteurs,  doit 
eftrc  en  fa  niaifon  comme  vngouuerneur  pu- 
blic. Mais  les  Chreltiensdoyuenrpafler  plus 
outrc,c>it  qu'vn  chacun  père  de  famille  Iça- 
chcqueDieuraconftitué  en  ce  lieu-la  pour 
fçauoirgouuerncr,&  femme, &:  enfans,&l'er- 
uiteurs  :  tellement  que  Dieu  foit  honoré  au 
milieu,  &:  que  tous  hiy  facent  hommage.  Puis 
qu'ainii  eft  qu^■n homme  fçaura  gouuerner  ia 
maifon  .c'cildeûa. quelque  bonne  c-fprcuue 
oui  eft  en  luy.  Non  point  que  cela  fui-frfe  :  car 
ilfc  pourra  bien  faire  qu'vn  homme  fçaura 
bien  gouuerner  fou  mefnage,  &:  cependant  ne 
fera  pas  propre  à  vne  charge  fi  ptfante  que  de 
conduire  vn  peuple  :  mais  tant  y  a  que  c'ell 
quelque  bonne  marque  quand  les  homes  font 
pailîbles  en  leur  mefnage  ,  &  qu'ils  le  fçauent 
tellement  conduire  qu'ils  y  viuent  honnefte- 
ment  &rans  reproche.  Voila  donc  ce  q  lainÛ 
Paul  a  entendu.  Et  au  relie,  il  parle  aulsi  des 
enfans, comme  il  parlera  ci  après  des  femmes: 
mais  maintenant  il  ne  touche  lînon  des  en- 
fans. Et  pourquoy  ?  Car  celuy  qui  voudra  s'ac 
quitter  de  fon  denoir  eftant  Palleurd'vne  E- 
glife,ilfaut  qu'il  foit  comme  père  de  tous  les 
iideles.  Or  maintenant  vn  liomme  ne  pourra 
gouuerner  deux  ou  trois  enfuis  quandilics 
aura  en  fa  maifon  :  ils  feront  fes  fils  propres, 
&  cependant  il  ne  les  pourra  tenir  fuiets  ,  ils 
feront  fourds  à  tout  ce  qu'il  leur  dira  :  com- 
ment donc  pourra  -il  gouuerner  ceux  qui  font 
de  loin,&  qui  luy  font  comme  incognus,  voi- 
re &  qui  cuideront  eftre  plus  fages  beaucoup, 
&  qui  pcn/eront  n'auoir  point  befoin  d'e- 
Ihe  en  feignez  ?  Comment  pourra-il  tenir  en 
crainte  les  hommes,  quand  fa  femme  propre 
ne  luy  fera  point  fiiictte?  Ainlî  donc  ne  trou- 
iions  point  eftrange  s'il  eli  requis  en  tous  Pa- 
yeurs qu'il»  foyentbons  pcres  de  famille  ,& 
qu'ils  (cachent  que  c'tft  de  bien  gouuerner 
leurs  enfans. Et  notamment  il  parle  d'vne^r.» 
«/ tf'.c'efl  .îdire'que  les  enfans  des  Paftcurs  ne 
foyent  point  dllFolus  :  ildefirecela  fur  tout, 
&  qu'ils  femaintienent  en  obeiflance  paiii- 
h le. Car  fi  on  voit  les  enfans  desPaflcurs  eftrc 
des  fjippofts  de  tauerne,des  fpadacins.des  bat 
leurs  de  paiic,des  loueurs  pleins  de  toute  dif- 
foiution.des  petis  pa:llaideau.v  :  &  ie  voiis 
prie  ,  comment  les  autres  pourront-ils  cftre 
desbordez  au  prix?Vn  prefchcur  montera  en 
cliairc,  il  criera  contre  lesdesborikmens ,  il 
dira  que  la  ieuncfle  efl  effrontée  ,  qu'il  n'y  a 
plus  nulle  mi)deflie:cS; cependant  fi  fes  entans 
(ont  plus  mal  complexionnez  que  les  autres, 
ou  bien  qu'ils  foyent  du  rang  commun,  ne  fe 
niocqucut-iis-  point  de  Dieu&de  la  doctrine? 
Or  ce  n'cfl  point  encoresaflcz  de  condam- 
ner les  cnfinv,  mais  il  faut  condamner  les  pc- 


N     XXI IL 

res, quand  ils  fouffriront  que  leurs  enfans  fâ- 
eent  pis  que  tout  le  reftc.  Ainfi  donc,  toutes 
fois  iquatesqueles  prefcheursdoyuct  mon- 
ter en  cnaire  ,  quand  ils  font  en  leur  maifon, 
qu'ils  regardent  bien, Or  ça,iem'en  vay  pour 
nionftrerle  chemin  aux  autres.  Dieu  me  fait 
ceft  honneur  &  cefte  grâce  que  ie  porte  fa  Pa 
rôle  qui  eft  la  règle  klaqucUe  il  nous  ùut  te 
nir  tous  fuiets,  ileftqueftion  ici  de  comencer 
par  ma  perfonne  ;  car  fi  icveiix  addreffer  les 
autres  à  filut  ,  &  que  l'en  foye  cependant  de- 
ftourné,quefera-ce?Et  puisquâdie  voudray 
rcmonftreraux  homes  S;  aux  femmes  cément 
il  fe  taut  gouuerner,que  ie  voudray  rcprédre 
leurs  vices, fi  en  ma  maifon  les  chofes  vont  fi 
mal  qu'on  s'en  puilTe  mocquer  ,  que  fcra-ce? 
Apres, i'avaufsi  à  guider  les  enfans:car  il  faut 
que  &:  grans  Se  petis  foyent  enfeignez  en  coni 
mun  delà  doctrine  que  ie  porte.  Or  fi  mes  en- 
fans font  diiroliis, que  fera-cefCeft  ce  q  nous 
auons  ici  .à  retenir  en  premier  lieu. Or  cepen- 
dant appliquons  aufsi  ceftcdoftnneà  l'vfage 
de  chacû.Car  pourquoy  efl-ce  que  S. Paul  oiv 
donne  que  les  Pafteurs  ayent  leurs  enfans  Bié 
réglez  en  bonne  difcipline  &  en  bonne  vie, fî- 
non  afin  qu'ils  puilTent  anf  i  bicenfcigner  les 
autres  comme  leurs  enfan-rQuiconques  donc 
voudra  eftre  réputé  fidèle ,  Se  du  troupeau  de 
Dieu,  quand  il  viendra  au  fermô,  &.' qu'il  orra 
vn  prefchcur  parler, foit  en  fa  maifon,  foit  en 
chairc.qu'il  penfe  bien.Noftre  Seigneur  veut 
qi;e  i'elcoutece/hiy-cic5nie  mon  père, &:  que 
ie  reçoyuedoftrine,  &:  confeil,i5c  admonition 
de  luy. Si  nous  voulôs  eftre  reputez  entans  de 
Dieu, il  nous  en  faut  venir  l.à. Car  ceux  quidi- 
ro.nt.  Ho,  ie  n'ay  que  faire  à  vous:  eftes-vous 
mon  prince  pourmegouuerner.''ilsmonftrent 
alTcz  qu'ils  font  pires  q  Payésipour  lemoins 
ils  ne  fçauent  que  c'eftde  religion  nedetoy. 
Car  noJtre  Seigneur  ne  nous  veut  point  gou- 
uerner par  autre  moyen  que  celuy  qu'il  a  or- 
donné,c'eft  que  les  homes  qui  nousaiioncent 
û\  Parole.nous  foyétcônie  fécond»  percs  fous 
luy.QuiCÔquesdôc  nepourra  foiilFrird'eftre 
cnieigné  de  Ion  Pafteur,&  le  receuoir  comme 
fon  pere,ccluy-la  renonce  à  Dieu  eiH.it  qu'en 
luy  cft,&:  déclare  qu'il  n'ha  nulle  Chreftieiité 
en  luy.  Voila  que  S.Paul  a  voulu  ici  moiiftier. 
Et  inefmes  nous  deuons  encores  appliquer  ce 
fte  doilrine  .i  vn  autre  vfage:car  qu.'id  S.  Paul 
dit  que  celuy  qui  ne  f^aitgouuerner  l'.\  maifô, 
ne  pourra  point  poiiruoii  a  PEgliie  de  Dieu, 
il  nous  môftrc  que  fi  nous  ne  fç.liiôs  que  c'eft 
de  nous  guider  entre  iiofis  ,  qu'à  grand'  peine 
pourrons-nous  reformer  les  auri  es.  Or  cefte 
admonitio  nous  eft  auiourd'hii v  bié  vtilc:  car 
noftre  Seigneur  nous  a  appelez  .\  la  ccgnoif- 
fance  de  fa  parole,  non  feulement  afin  q  nous 
cheminiô.droitt met  entre  nous,  &  qu'vn clia 
cû  le  porte  tellemct'qu'il  édifie  fes  prochains, 
mais  nous  deuôs  eftie  corne  i.îpe';  pour  cfcJai 
rer  de  loin.  Ornons  voyons  ie  poure  monde 
auiourd'Jiuy  eftre  plégc  en  ces  ténèbres  horri 

blcï 


SVR     LA    I.     A     TIMOTH. 


i4f 


blés  delà  Pâpautétnous  faifons  profcfsionde  fions  donner  exemple  aux  autre';  pour  les  at- 
auoir  rEiiangile,'&  que  nous  fommes  enfei-  tirer:ie  di  mefmcs  à  ceux  qui  font  ignorans.Sr 
gner  en  la  doftrine  de  ialut  :  &,  toutesfois  qui  Ibntauiourd'huy  ennemis  de  la  paiolede 
comment  edifierons-nous  les  autres ,  quand  Dieu. Car  <t  nous  n'auôs  vn  tel  gouuerncmét, 
nous  ne  fçauons  que  c'eft  de  nous  gouuerner  &  vue  telle  difcipline  entre  nous,  que  les  po- 
entre  nous  ?  Nous  fommes  comme  cliiens  &  uresignorans  cognoilïênt  que  nous  fommee 
chats,  &  nousenfeignerons  aux  Papiftes  que  reformez,  il  eft  certain  qu'ils  auront  bien  oc- 
c'ell  de  viure  fraternellement  ?  Nous  ferons  cafion  de  fe  moquer,  quand  nou:  les  voudrôt 
pleins  de  IrVaude  &:  malice,  &  nous  dirons  que  corriger  de  leurs  vices.  Voila  donc  comme  il 
il  faut  garder  loyauté  ?  Il  n'y  a  ne  iuftice  ne  faut  qu'vn  chacun  apprenc  pour  foy  :  &  puis 
«Iroiture  entre  nous,  &:  uousdiros  que  les  au-  en  fecôdlieu  qu'il  regarde  en  fa'maifon:&  fi- 
tres  fe  doyuent  abftenir  de  tout  outrage  ,  de  nalemcnt  que  tous  enfemble  nousapprenione 
icruautcz,de  rapines  ?& quel  propos  y  a-tl?  deferuirà  Dieu  d'vn  accord  ,&  qu'il  n'y  ait 
Nous  voudrons  qu'on  apprene  la  chaftcté  de  ne  murmure  ne  rébellion  en  nous,  que  nous 
nous,&  les  païUardifes  y  régneront, il  n'y  au-  foyons  comme  membres  d'vn  corps  ,  afin  que 
ra  qu'ordure  &puâtife.Ainfi  doc  nous  voyôs  Dieu  nous  recognoille  &  auoue  corne  fes  en- 
que  S.Paul  a  tellement  addrcflefon  propos  à  fans, quand  chacun  en  fon  endroit  aura  tafché 
ceux  qui  doyuent  élire  &  ordonner  Paftcnrs  de  le  feruir,&  d'attirer  à  vne  mefnie  obeiflàn 
en  l'Eglifede  Dieu,&:aufi  à  ceuxqui  fontap  ce  ceux  qui  en  eiîoyentellongncz.Que  noue 
pelez  en  ceft  ofRce  ,  qu'il  nous  a  enfeigné  ce  profitions  dôc  en  cela  de  plus  en  plus.iufqu'à 
que  nous  auôs  tous  à  faire  en  gênerai. Et  ainiî  ce  que  nous  foyons  tous  recueillis  à  noftrc 
que  tous  fidèles  apprenent  de  leur  collé  de  fe  Dicu,&  paruenus  au  but  où  il  nous  appelle, 
gouuerner  en  forte  en  leur  particulier ,  que 

Dieu  foit  honoré  &  fcrui  de  tous  d'vn  comun  OR  nous-nousprofterneronsdeuant  la 
accord:mais  fur  tout  que  nous  auifiôs  aufsi  de  face  de  nollre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
noflre  coflé,nous,di-ie,.T  qui  Dieu  a  donné  ce  nos  fautes,  le  priant  qu'il  nous  les  face  telle- 
Ile  charge  de  conduire  fon  Eglife  ,  d'auoir  &  ment  f'eiuir.que  nous  apprenions  de  nous  hu- 
afFeélion  Se  folicitude  paternelle  enuers  tous  milier:&  combien  que  nous  foyons  confus  eh 
ceux  que  Dieu  nous  a  cômis  en  charge. Q^âd  nos  péchez, que  nous  ne  laifsions  pas  pourtâc 
vn  homme  aura  des  cnfans,  qu'il  cognoiile,  de  recourir  à  luy,&  le  requérir  comme  noftre 
Dieu  m'apprend  ici  en  ma  maiionquel  iedoy  Pere.Q^illuy  plaifeaufsinous  fupporter  en 
cflre  enuers  toute  fonEglife. Et  ceux  qui  n'en  nos  infirmitcz,&  cependant  les  delcouurir  en 
ont  point.qu'ils  cognoiffet  ce  q  nature  porte,  forte  que  nous  le  venions  cercher  comme  no 
que  tout  ainfi  qu'vn  pcre  feraaddônc  àaimer  rtrt  mcdccin:&:  que  quand  il  nous  aura  attirez 
fes  enfans,  il  faut  aufsi  qu'iK  ayent  auec  l'a-  à  foy, nous  ne  demandions  finon  d'eftre  con- 
tnour  la  folicitude  de  gouuerner  &  conduire  formez  à  <it  volonté  ,  qu'il  n'apparoille  rien 
au  chemin  de  frlutceux  que  Dieu  leur  a  don-  en  toute  noftre  vie,  finon  vndefir  de  le  feruir 
nez  en  charge.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  &•  honorer, &;que  par  ce  moyen  les  poures  in- 
à  noter. Et  puis,  que  nous  apprenions  de  nous  crédules  foyent  attirez  au  chemin  de  falut,a" 
gouuerner  tellemét  entre  nous,  que  nous  puif  fin  qu'il  foit  magnifié  de  nous  tous,iS;c. 


C  I  N  Q_V  lEME     SERMON     S  VR    LE 

TROISIEME        CHAPITRE. 

6  Qujl  ne  foit  point  nouucau  apprenti,  de  peur  qiteHant  enflé  d* 
orgueiljil  ne  chee  en  la  condamnation  du  diable. 

7  II  faut  qutl  ait  bon  tcfmoigyiage  au  fi  de  ceux  qui  font  de  c/c- 
hors,afin  quil  ne  tombe  en  reproche,  çy  aux  laqs  du  diable. 

'ttfj^'S^  Près  que  (ainft  Paul  a  mon-  homme  en  la  condanation  de  Satan. Et  pour- 
tant laincl  Paul  veut  que  ceux  qu'on  choilît 
pour  Pafteursde  l'Eglife,  foyent  de  longue 
main  apprins  de  feruir  à  Dieu,  qu'ils  foyenc 
comme  mattez,  que  leurefprit  foit  bien  rete- 
nti, afin  qu'il  n'y  ait  point  ces  folles  outrecui 
uét  ily  a  de  l'orgueil  mcllé,  danccs  qui  ont  accouftumé  d'eftre'' en  gens 
<ju'vn  homme  quand  il  commence  en  quelque  qui  ne  font  point  encore  exercez. Finalement 
chofe,il  luy  femble  qu'il  eft  vn  grand  xfo-  ildit,  Q«'i7  faut  que  ceux  c^u  on  ordonne  Va- 
ûeur.Or  celte àrabition-kfait  utbufchcr  vn    fitHrs,  a^ent  bon  tefmoi^n.i^e  des  increduUsi 

Cm. 


Itré  quels  doyuent  tftrc  les 
Parteurs.pour  conclure  fon 
propos  il  adiouftc,Q«'(7j  ne 
Jiyiièt  pùint  ejlre  niuueMiX 
.ippren tl s:iX' Zwtim  que  fou- 


I4S  SERMON     XXIIII- 

c'eft  àdirequemefmes  les  ennemis  de  la  foy  quand  on  veut  élire  des  Pafteurs,qu*ilnefaBt 
ne  trouuent  rien  à  redire  fur  eux  ,  afin  que  le  pointprédreàla  voleegens  qui  ne  font  point 
nom  de  noftre  Seigneur  lefuv  Chrift  n'en  ibit  encore';  experimctei^  qui  font  venus  de  nou 
blafphenié,  &  qu'on  ne  dife  que  c'ell  vne  po-  ueau  à  la  foy,  car  ils  ne  fçauent  encores  que 
urc  aflemblee  que  des  Chrelliens ,  d'autant  c'eft  de  porter  le  ioug.Il  faut  donc  qu'vn  hô- 
que  ceux  qui  ont  charge  de  gouuerner  au  mi-  me  loit  bien  formé,  Se  que  de  15g  temps  il  ait 
,  lieu  d'eux.font  infâmes ,  &  qu'il  y  a  des  vices  fuyui  vn  bon  train,  à  ce  qu'il  ne  foit  point  ai- 
&  des  crimes  dignes  d'opprobres.  Afin  donc  feementdiuerti.Car  que  fera-cefi  vn  tomme 
que  la  religion  Chreftienne  ne  foit  point  ain  après  auoir  fait  femblât  d'auoit  bonne  graui- 
«  en  mocquerie ,  fainû  Paul  veut  qu'on  choi-  té,fe  desbauche,  &  qu'on  ait  honte  de  l'auoir 
lîfTe  des  Pafteurs,  contre  lefquels  meûnes  les  ainfi  choifi  auant  qu'il  fuft  bien  efprouué  ?  Ec 
incrédules  n'ayent  que  mordre  :  &mefmesil  ce  que  dit  S.  Paul  des  Pafteurs,doitaufsieftre 
môftre  qu'il  en  pourroit  aduenir  vn  autre  in-  obferué  &  prattiqué  en  tous  ceux  aufquels  on 
conuenient.c'eft  qu'eltans  tombez  en  oppro-  donne  charge  publique  :  car  ce  qu'il  adiou/le, 
bre,  ils  feroyent  furprins  de  Satan.Car  qu'a-  peut  aduenir  à  tous:  c'eft  afçauoir,  que  quand 
itiendra-il  quand  vn  homme  cft  diifamé,finon  les  hommes  fe  voyét  eleuez  en  dignité,  lînoa 
qu'il  s'endurcit  en  ion  impudence  ,  tellement  que  Dieu  les  ait  bien  dontez,  &  qu'ils  ayet  ap 
qu'il  n'a  plus  honte  de  rien,  &  le  diable  alors  prins  d'eftre  du  tout  afluiettis  à  luy,  inconti- 
cn  prendpoflefsion?Ileft  vray  quelemot  de  nent  ils  s'eleuent  en  vne  folle  outrecuidance, 
D»/îfc/f,  fepeutaufsi  rapporter  aux  hommes,  &  s'oublient  pour  s'abandôner  à  maJ:&;pleuft 
car  il  fignifie  calomniateur ,  &  celuy  qui  de-  à  Dieu  que  les  exemples  n'en  fûfltnt  pointiï 
irade  fauflement.  Mais  ici  fainft  Paul ,  cora-  communs. Mais  on  voit  à  l'œil  ce  qui  nous  eft 
me  on  peut  veoir,  parle  du  diable,  &  nionftre  icimonftré  par  S.Paul,  c'eft  qii'vu  nomme  qui 
que  ceux  qui  font  ainfi  expofez  àiniure,  ne  n'a  point  encores  efté  bien  tonne  en  l'obeif- 
pcuuent  pas  euiterquele  diable  ne  domine  lance  deDieu  ,  quand  il  fera  cleué  en  dignité, 
fur  eux  ,  d'autant  qu'Us  font  du  tout  effron-  il  ne  fçait  plus  quel  il  cft ,  le  voila  comme  en- 
tez .Dieu  doncques  nous  fait  ici  deux  bons  yuré,  &  ne  luy  faut  rien  pour  le  faire  entrer 
aduertiffemens  &vtiles  :  l'vn  ,  c'eft  que  ceux  en  beaucoup  de  folles  fantafies.  Or  il  enad- 
^uifont  pour  gouuerner  en  fon  Eglife,ne  uieridra  enlafin  ceque  du  fainft  Paul,c'eûa- 
uoyuent  point  eftre  nouices, qu'il  ne  faut  pas  fçauoirque  cefte  enflure  dot  il  parle,  fera  eau 
qu'ils  foyent  nouueaux  apprentis,  mais  expe-  fe  d'vne  ruine  horrible.'car  Dieu  ne  peut  por 
rimentez  de  longue  main  ,  &  défia  tout  for-  ter  que  les  hommes  s'eleuent  ainfi  :  nous  fça 


mez  au  feruice  de  Dieu  .  Il  cft  vray  qu'il  y  a 
d'auties  raifons  pourquoy  cefte  règle  de 
fainft  Paul  doit  eftre  obferuee  :  mais  il  nous 
fuffira  bien  de  ce  qui  eft  ici  contenu,  c'eft  a- 
fçauoir,  qu'vn  homme  ne  pourra  feruir  fidè- 
lement à  l'Eglife,  fînon  qu'il  y  foit  bien  ap- 
prefté,  car  cela  ne  peut  eftre  fans  long  vfage 


uons  qu'il  eft  ennemi  de  tous  orgueilleux, que 
fon  office  eft  d'abaifler  les  ^fourciJi  hautainst 
&  quand  nous  prcfuraonsde  nos  veïtuç,&  que 
nous  voulons  élire  plus  qu'il  ne  nous  .ippar- 
tientjil  faut  que  Dieu  relifte,&:  qu'il  heurte  & 
choque  contre  nous,  &  que  nous  fentions  vne 
trop  grand  durté  en  luy. Voila  comme  il  faut 


Vray  eft  que  Dieu  pourra  bien  former  vn  que  cefte  doftrine  foit  appliquée  .1  tous  ceux 

homme  en  trois  iours, tellement  qu'il  fera  du  qui  ont  charge  publique,  comme  aufsi  l'Eicri 

tout  idoine  Si  propre  pour  anoncer  la  pa-  ture  faindie  le  monftre  en  tant  de  palTagev. Et 

lole  de  Dieu  :  mais  il  ne  faut  point  que  nous  pourtant ,  que  ceux  qui  font  mis  en  eftat  ho- 

attendions  en  faifant  noftre  office,  que  Dieu  norable,foyent  gens  modeftes,  &  qui  défia 

befongne  par  miracle:il  nous  faut  eftre  fuiets  ayent  apprins  de  feruir  à  Dieu,  &  foyent  cora 

à  ce  qu'il  nous  aura  commandé  par  fa  parole,  memattcz  eneux-mefmes ,  pour  auoir  vn  e- 

Si  nous  voulions  difputer  de  la  puiflance  de  fprit  pofé&rafsis.Or  il  eft  vray  que  les  hom- 

DieUi&làdeflîis  faire  des  entreprifes,qu'y  au  mes,  quand  il  pkift  à  Dieu  de  les  honorer, ne 

:ra-il  que  témérité  ?  Et  Dieu  monftrera  qu'il  auroyent  point  occafion  de  s'enorgueillir  »fi 

ne  veut  point  que  nous  y  procédions  en  telle  ils  regardoyent  bien  à  eux  .Mais  quoy  îon 

forte. Ainfi  donc  regardons  ce  que  Dieu  nous  voit  quel  eft  le  naturel ,  &  combien  il  y  en  a 

commande.  Se  fuyuons  la  règle  qu'il  nous  im-  peu  qui  fçachét  fe  retenir, finon  que  Dieu  .lit 

pofe,&  là  deflus  attendons  que  tout  ira  bien,  befongne  puiflàmment  en  eux,  &  qu'il  les  ait 

qnâJ  nous  luy  aurôs  obei;  il  nous  taut  fermer  appreltez  à  modcftie. Quand  vn  home  lera  e- 

les  yeux  atout  ce  qui  nous  pourroit  venirau  leué  en  dignité,  d'autantplusapproche-il  de 

deiiant,  comme  nous  voyons  que  les  hommes  Dicu,&  en  cela  il  doit  eftre  inftrtiit  à  s'abbaif 

fout  ùibtils  à  controuucr  des  choies  pour  s'e-  fer.  Car  quelle  cft  la  principale  inftruftion  & 

xcnipter  d'obéir  àDitu.  Or  il  nefiut  pas  que  la  meilleure  que  nous  puifsions  auoir  pour 

nouv  en  facions  ainlÎMttendons  queDicucon  baiflerles  yeux,pourn'eftre  point  enflez  d'ar 

duira  tout  abonne  ifrue,moyennant  que  nous  rogance,  pour  ne  point  nous  attiibuer  ceci  ne 

fuyuions  ce  qu'il  nous  aura  ordonné  .  Voila  cela,[finon  quand  nous  regardons  .î  Dieu.' car 

donc  pourquoy  il  nous  faut  bien  retenir  cefte  c'eftvn  miroir  qui  nous  monftre  qu'il  n'y  a 

leçon  qui  nous  eft  ici  monftrce,c'eftaf^auoir  que  pourecé  en  nous .  Auili  donc ,  d'autant 

^uc 


SVR   LA    I.    A   TIMOTH. 


»4) 


que  le»  hommes  font  eleuez  en  haut,  ils  doy- 
ucnt  s'abbai{rer,&  cognoilUe  en  ceftemaielté 
de  Dieu  qu'ils  ne  l'ont  rien  en  eux,  qu'il  n'y  a 
rien  de  quoy  ils  fe  puiflent  glorifier.  Mais 
nous  voyons  (comme  i'ay  dit)  tout  l'oppofi- 
te:&  d'autant  moins  ce  vice  fera  inexculable, 
quand  il  y  a  vne  telle  ingratitude  en  nous  qui 
nous  aueugle.Et  pourtât  retenons  qu'vnhom 
me  ne  fera  lamais  apte  d'auoir  quelque  char- 
ge publique, ne  de  gouuerner, qu'il  n'ait  prins 
vnplycnfoy  decheminer  en  toute  modeftie, 
&  de  n'eftre  point  enfle  d'arrogance  :  car  lî 
loftqu'vnhémc  fevoit  exalté,  le  voila  com- 
me vne  irnagcqu'il  s'adore  ,  &  ne  fçait  s'il  eft 
homme  ou  non.  Ainfî  donc  en  aduiendra-il  à 
ceux  qui  prefuraentde  l'hoimcurq  Dieu  leur 
fait  quand  ils  font  ainfî  eleuez  en  haut  :  mais 
fur  tout  cela  doit  eftre  obferué  aux  Parteurs 
de  l'fglife  qui  ont  charge  d'anoncerladoâri 
ne  de  îalut.Carqu'eft-ce  que  nous  prefchons 
finô  qu'il  faut  que  toute  gloire  humaine  foit 
abbatuc,  &que  Dieufjit  exalté  au  milieu  de 
nous  f  Car  fi  les  hommes  veulent  s'attribuer 
vne  feule  goutte  de  louâge.voila  Dieu'qui  eft 
comme  obfcurci  &abbaiÏÏe.£t  ainfî  le  princi- 
pal de  TEuangile  c'eft  de  monftrer  aux  hom- 
mes qu'ils  n'ont  rien  de  quoy  ils  fe  doyucnt 
exalter,  afin  que  nous  ayons  tous  la  bouche 
clofe,&  que  nous  apprenions  de  chercher  tout 
noftre  bien  en  Dieu.  Or  puis  que  nous  deuons 
inlîfterlà  deflus  ,  ne  faut-il  paî  qu'aufsi  nous 
monftrions  exemple  d^humilité  &de  mode- 
flicfSi  vn  homme  vient  déclarer  que  nous  de- 
uons cheminer  en  la  crainte  de  Dieu,tellemét 
qu'après  auoir  cognu  nos  miferes  que  nous 
n'ayons  nulle  prefompti5,&  cependant  qu'on 
le  voye  comme  vn  paon,&  que  fcroit-cc?Re- 
tenons  bien  donc  quel'vne  des  principales 
vertus  de  ceux  qui  ont  charge  de  gouuerner 
rEglifc,&  de  porter  la  parole  de  Dieu  ,  c'cil 
qu'ils  fe  gardent  bien  de  s'enfler  ,  &  d'auoir 
vne  folle  arrogance  qui  les  tranfporte.  £t  au 
rcfte,poifons  bien  ce  que  dit  fainû  Paul  de  la 
condamnation  du  diible  :  car  il  nous  monllre 
que  la  cheute  du  diable  eft  venue  de  là,  qu'il 
n'a  point  cognu  l'honneur  qui  luy  eftoit  fait 
de  Dieu  ,  &  s'eft  voulu  exalter  par  trop.  Et 
c'eft  aufsi  la  ruine  du  genre  humain  que  ceft 
orgueil,  c'eft  le  vice  qui  nous  a  tous  mis  en 
perdition.  Et  ainfî,  d'autant  plus  nous  faut-il 
noter  ce  que  fainft  Paul  met  ici  :  car  iln'eft 
poin  t  queftion  d'vnc  cheute  Icgere.mais  c'ell 
vn  trebufchement  mortel  &  irreparablc,quâd 
BOUS  tombons  enjla  condamnation  du  diable. 
Et  fur  cela  apprenons  de  nous  garder  d'or- 
gueil,veu  que  nous  ferons  côpagnons  du  dia- 
ble quand  ce  vice  dominera  en  nous  :  comme 
nous  ne  pouuons  pas  approcher  de  Dieu,ni  c- 
ftre  participans  de  l'héritage  de  falut,  que  eu 
toute  humilité. Comment  eft-ce  que  nous  par 
uenons  à  ce  bié  d'eftre  adoptez  de  Dieu  pour 
fcs  enfansS:  heritiers?n'eft-ce  pas  en  cognoif 
faut  qu'il  n'y  a  en  nous  que  corruption  ïc  pé- 


ché,que  nous  fommes  du  tout  perdus  &defe- 
fpcrez,  &  venans  à  Icfus  Chrilt  afin  que  par 
fon  moyen  nous  obtenions  mifericorde?  Puis 
qu'ainfî  eft  donc  que  l'humilité  eft  celle  qui 
nous  amené  à  Dieu,&  qui  nous  ouure  la  porte 
de  Paradis,  &  nous  fait  trouuer  grâce  enuers 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  afin  qu'il  nou» 
reçoyue  pour  nous  prefénter  àDieu  fon  Père; 
à  l'oppolite  concluons  que  l'orgueil  nous  »c- 
couple  auec  Sata,  &  fait  que  nous  foyons  ex- 
clus du  royaume  de  Dieu,quand  ce  vice  noue 
tranfporte.Et  pourtant  ceux  qui  font  en  quel 
que  eftat  honorable,&  aufquels  Dieu  aura  de- 
parti  de  fes  grâces  pour  les  mettre  en  authori 
té.qu'ils  regardent  bien  à  eux,&  qu'ils  facene 
bon  guet  pour  n'eftre  point  furprins  de  cefte 
condamnation  du  diable:  &ceuz  qui  font  pe- 
tis  &  mefprifez  félon  le  m6de,qu'iis  cognoif- 
fent  que  tant  moins  ont-ils d'occafion  de  s'en 
fler.  Et  ainfiquegrans&petis  apprenent  de 
s'abbailTer,  &  de  fe  retenir  en  telle  forte  que 
Dieu  ait  la  prééminence  par  deflus  tous  ,8e 
qu'il  n'y  ait  perfonne  qui  appete  d'eftre  exal- 
té outre  fa  mefure  :  contentons-nous  de  ce 
que  Dieu  nous  appelle  à  foy.afin  que  nous  ay- 
ons de  quoy  nous  glorifier  en  luy  feul.Et  ce- 
pendant ne  prcfiinions  rien  de  nous ,  comme 
aufsi  il  n'y  a  point  d'argument.carce  q  Dieu 
a  mis  en  nous.ue  nous  doit  point  elcuer,  mais  j.Corli»^ 
pluftoft  il  nous  faut  fentir  combien  nous  fom  i  »o, 
mes  obligez  à  luy,&  la  deffus  cognoiftre  qu'il 
n'eft  queftion  que  de  nous  anéantir  ,  afin  que 
quand  nous  luy  aurons  attribué  la  gloire  qu'il 
mente  ,  il  foit  pareillement  noftre  gloire  & 
noftre  lànûification  ,  comme  il  en  parle.  Or 
quant  àcequefàinû  Paul  dit  que  les  Pafteurs 
doyuent  auoir  bon  tefinoignage  des  incrédu- 
les,  ce  n'eft  pas  qu'il  nous  faille  eftre  prifex 
des  mefchans  ,  comme  il  y  en  a  qui  appetent 
quelesmefchans  lesayent  en  eftime:  car  ce- 
la ne  fe  peut  faire  ,  que  nousneconfentions  à 
leurs  iniquitez.Etaurefte,ie  vous  prie,quelle 
folle  cupidité  fera-ce,que  nous  délirions  d'e- 
ftre aimez  de  ceux  qui  mefprifent  Dieu,&  qui 
foullét  aux  pieds  lefus  Chrift  noftremaiftre? 
Pluftoft  nousauons  à  fouhaiterque  les  mef- 
chans nous  reiettent,&  qu'ils  fe  mocquent  de 
nous,attendu  que  nous  ne  les  pouuons  pas  a- 
mener  à  cefte  raifon  ,  qu'ils  rendent  à  Dieu 
Thon  neur  qui  luy  eft  deu,&  qu'auec  t  oute  re- 
uerence  ils  s'a/Iuiettiflent  à  fa  parole.  Mais 
combien  que  nous  ne  deuons  pas  appeter  que 
les  mefchans  nousaiment,fi  faut-il  qu'ils  ay- 
cnt  la  bouche  clofe,&  quand  ils  voudront  mef 
dire  de  nous, qu'ils  foyent  confus  en  leurjim- 
pudence.  Voila  ce  que  fainû  Paul  a  entendu: 
non  pas  que  les  incrédules  prifent  ceux  qu'ils 
cognoiffent  eftre  feruiteurs  de  Dieu,&  que  de 
leur  bon  gré  ils  louent  leurs  vertus, mais  qu'ils 
n  ayét  que  mordre  fur  eux.  Vray  eft  que  nous 
ne  pouuons  pas  encores  empefcher  les  enne- 
mis de  vérité  ,  qu'ils  ne  iettent  beaucoup  de 
blafmes  fur  nous  :  mais  il  faut  cependant  que 

f.  iii>. 


-  144- 


SERMON    X  XIII  I. 


nou'i  foyons  exemptez  de  tout  crime  ,  &  que 
lf5  melchans  ne  puilTent  mettre  ceftc  note  & 
macule  lur  TEglUe  de  Dieu, que  ceux  qui  ont 
charge  de  la  gouuerner  &  conduire  foyent  vi 
leins.gens  intames.deviemefchante.Voila  en 
fomme  ce  que  S.Paul  a  entendu.Nou-;  voyons 
doue  ici  ce  qui  nous  eft  monftré  en  d'autres 
paffàges ,  c'eft  afçauoir  que  nous  deuons  en- 
tant qu'eti  nous  ell  taire  q  Dieu  ne  foit  point 
blarpncmc,&que  les  merdians  n'ayent  point 
"  occaiion  de  fcmocquerde  l'Euangile  ,  Se  de 
l'ordre  que  nous  auons  en  l'Eglife.Carii  par 
noftre  imprudence  nous  allons  expofer  Dieu 
en  opprobre  ,  cela  lera-il  à  pardonner?  Ainfî 
donc  cognoiflons  que  TEglife  doit  eftre  tel- 
lement gouuernçe, que  nous  deuons  touiiours 
auoir  efgard  à  ceux  qui  nous  efpient  &:  qui  ne 
demandent  linon  à  diflàmer  le  nom  deno-- 
flre  Seigneur  letusChrift,  &dela  foyque 
BOUS  tenons ,  qu'entant  qu'en  nous  fera  nous 
emperchions  qu'ils  ne  puilTent  mefdire  :  & 
s'ils  le  font, que  ce  foit  à  fauffes  enreignes,& 
qu'ils  foyeiit  redarguez  en  leur  impudence. 
Voila  ce  que  iainft  Paul  a  voulu  enfeigner.Et 
cependant  notons  aufti  que  ceux  qui  tombêt 
en  opprobre,  font  en  la  fin  pofledcz  du  dia- 
ble,tellement  qu'ils  s'endurciflent  à  tout  mal, 
&  que  le  diable  les  conduira  en  iorte  qu'il  n'y 
aura  plus  de  remède  ne  de  moyen  de  les  rame 
ner  au  droit  chemin:  &c'eft  vne  chofe  qu'on 
ne  voit  que  par  trop.  Sivn  homme  a  encores 
efté  retenu  lufques  là, qu'on  l'eilimeeftrede 
bonne  confcience,&:  qu'il  y  ait  quelques  mar 
ques  enluydela  crainte  deDieu,&  qu'il  y  ait 
vne  honnefteté  qu'on  prife,celafera.caufede 
1  e  rctenir;comme  Dieu  fait  valoir  fes  grâces, 
que  ce  nous  font  autant  de  brides. Mais  à  l'op 
pofite, quand  vn  hômc  fe  iette  hors  des  gons, 
&  qu'il  eft  comme  defefperé,&  que  chacun  le 
detefte  ,  &  qu'on  voit  qu'il  eft  perdu  du  tout, 
U  deflus  il  s'endurci^,  8i  n'y  aura  plus  nulle 
honte  qui  foit,  rien  ne  le  retiédra  que  le  dia- 
ble ne  le  poflede  du  tout.  Or  combien  que  S. 
Paul  parle  ici  des  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu.iî  eft-ce  que  tous  en  gênerai  ont  ici  à  re 
tueillir  vne  bonne  admonition  &  bien  vtile, 
c'cftafçauoir  que  nous  aduiiionsde  cheminer 
tellement  que  nous  ne  foyons  point  en  diflïi- 
me.quc  noftre  vie  ne  foit  point  en  tel  (câda- 
le  qu'on  nousmonftre  au  doigt ,  &  que  nous 
foyons  comme  puants  :  autrement  il  faudra 
qu'en  la  fin  nous  receuions  ce  loyer  diioncl  il 
eft  ici  parlé. Et  plcuft  à  Dieu  qu'on  n'en  vcift 
point  les  exemples  ,  mefmes  en  ceux  qui  font 
de  noilre  eftat ,  &■  qui  ont  la  charge  &  office 
d'anonccria  parole  de  Dieu. Mais  il  faut  que 
nous  foyons  miroirs  de  la  vengcnce  de  Dieu, 
quand  nous  ne  cheminerons  pas  comme  il  ap- 
partient.Si  Jonc  vn  miniftre  fe  dcsbaiiche,& 
au  lieu  de  mettre  peine  que  fa  vie  foit  en  édi- 
fication à  tous,  qu'il  foit  vn  effronté,  &:  qu'il 
fe  desborde  en  yurognerie  ,  ou  en  difTolu- 
tiôs,ou  en  païUardifes,  ou  en  ccci,ou  en  cela, 


qu'en  aduiendra-il.=  Il  faut  comme  Dieu  noitî 
a  eleuez  afin  d'cftre  regardez  de  loin, qu'on  le 
marque, qu'on  s'en  mocque,&  qu'il  foit  com- 
me vne  fable  à  toirs ,  &  que  les  petis  enfans 
mefmes  i'ayent  en  derifion. Alors  vn  miniftre 
voyant  que  fi  mauuaife  vie  l'a  ainlî  dénigré, 
il  s'endurcit,&  le  diable  en  prend  alors  plei- 
ne poflefsion  ,  qu'il  faudra  qu'il  foit  pire  que 
tous  les  autres. Cependant  notons  que  chaain 
en  fon  degré  fe  doit  dôner  garde  de  ne  point 
tomber  en  vne  telle  cheute:  car  nous  voyons 
aufsi  bié  les  autres  qui  ne  font  point  pafteurs 
ni  miniftres,quand  ils  fe  font  desbauchez, s'ils 
voyent<ju'ils  foyent  en  opprobre  à  tous,ilne 
leur  chaut  pP  de  rie, ils  n'ôt  plus  nulle  vergô- 
gne.Qjjand  vn  homme  aura  quelque  hônefte 
té  en  foy,&  qu'on  l'eftimera  craignant  Dieu, 
cela  luy  feruira  de  bride  (  comme  nous  aûons 
ditjqu'il  ne  fe  desbordera  pas  ainfî  outre  me- 
fure  :  &  puis  il  y  aura  toufiours  moyen  de  le 
retenir  quand  on  verra  des  vices  en  luy, qu'on 
aura  quelque  accez  pour  l'admoncftér  ,  qu'il 
ne  fera  point  du  tout  incorrigible.  Mais  qu.îd 
vn  homme  voit  qu'on  le  rciette,  alors  il  ron- 
ge fon  frein  ,  &  fe  desborde  &  fe  lettc  à  tra- 
yers  chanrps, qu'il  n'y  a  plus  nulle  honnefteté 
en  luy.Craignonsdonc  qu'vne  telle  vtngen- 
ce  de  Dieu  ne  tombe  fur  nous,  &:  qu.îJ  il  nous 
a  appelez  à  foy  ,  &  qu'il  nous  a  fait  la  grâce 
de  nous  mettre  fon  ioug  fur  le  col ,  que  nouî 
apprenions  de  nous'  tenir  toufiours  riiodefte- 
ment,&  de  ne  nous  point  e<garer.  Voila  donc 
comme  fiinifl  Paul  parlant  des  miniftres  de  la 
parole  de  Dieu, a  donné  vne  inftruftinn  com- 
mune &  générale  à  tous  Chreftiens.  Or  ayant 
traitté  des  Pafteurs ,  il  adioufte  qii'auAi  les 
Diacres doyuenreftre  graues&r  modcftcsen 
leur  vie, bien  attrcpcz, qu'ils  nedoyuent  poinr 
eftrelangars ,  combien  qu'il  met  double  lan- 
gue:&  puis, qu'ils  ne  doyucnt  point  eftre  ad- 
donnez  au  vin, ni  dçain  de'-honnefte,  &  mef- 
mes qu'il?  doyuent  auoir  le  ftcret  de  la  foy 
en  bonne  confciencc,&  qu'on  les  doit  efprou 
uerdeuant  q  les  mettre  en  ofticcSarnil  Paul 
ne  parle  point  ici  des  feriiiteurs  domeftiques' 
de  ceux  qui  ont  la  charge  de  porter  la  parole 
de  Dieu  :  mais  d'autant  qu'il  eft  quellion  du 
reçime  fpirituel  q  Dieu  a  mis  entre  ks  ficns, 
fainft  Paul  veut  que  ceux  qui  font  ordonnes 
tant  pour  anoncer  l'Euangile  ,  comme  pour 
auoir  le  foin  des  poures, foyent  de  vie  irrcpre 
henfible,&:  qu'ils  foyent  en  bon  exemple, afin 
que  les  bons  foyent  confeimcz,&-  que  les  mcf 
chans  foyent  confus,  .^qu'ils  n'ayent  point 
occafion  de  vilipender  la  foy  &'  la  Chreftien- 
té.Ce  mot  de  Diacre, emporte  fimpicmcnt  ce 
que  nous  appelles  miniftre:  mais  ici  il  eft  cer- 
tain que  lâind  Paul  le  prend  poniceux  auf- 
qucls  ce  nom  eft  proprement  attribue  en  l'Ef- 
criture  lâinde, comme  nous  le  voyons  au  fix- 
iemedes  Actes, &  en  d'autres  lieux  aufsi. Il  efl 
vray  qu'en  gênerai  tous  officcsd'Eglifes  font 
^jommcz  Diaconies.c'eft  à  direminifteres  ou 

fcruiccs: 


s  VR'    LA     I.     A     TIM  O.  TH. 


'4î 


feruicesîcar  lesPafteurs  ne  font  pou  ordônez 
ne  clioifîs  pour  dominer. Pourquoy  dôcfPour 
Je  feruice  des  fidelcs:comme  il  eft  dit.  Qu'on 
I.Cor.4.  nous  réputé  &  qu'on  noustiene  pour  ferui- 
I.  teurs  de  leliis  Chrift  ,  &  pour  fcruiteurs  aufsi 

de  fon  peuple  &  de  l'on  troupeau.  Quicôques 
donc  voudra  etlre  réputé  Palteur  ,  il  ne  faut 
point  que  celuy-la  vfurpe  feigneurie.mais  au 
contraire  qu'il  s'addonneàferuir  à  ceux  auf- 
quels  il  eft  conltitué  :  car  aufsi  nous  ne  pou- 
•  uons  feruir  à  Dieu  iînon  en  fcruant  à  fon  peu 
pie. Nous  ferons  biensdonc appelez  Diacres, 
mais  c'eft  en  fens  gênerai:  cependant  les  Dia 
cres  font  ceux  qu'on  ordonne  pour  auoir  le 
foin  des  poures,  &pour  diftribuer  les  aumof- 
nes.Et  que  fainâ  Paul  le  prene  ici  en  tel  fens, 
il  appert  par  l'ordreicar  nous  auons  veu  qu'il 
a  traittédureçime  public  de  TEglife-Ord'au 
tant  que  les  Pafleurs  font  ceux  aufquels  Dieu 
a  ordonné  la  conduite  de  fon  peuple,  S.  Paul 
les  a  mis  en  premier  lieurmaintenant  iladiou- 
fte  ceux  qui  les  fuyuent  en  degré  inférieur, 
afçauoirles  Diacres.  Or  combien  que  nous 
voulons  qu'on  noustiene  pour  bons  Chre- 
lliens  reformez  ftljn  l'ordre  de  l'EuangiJe, 
toutesfois  on  ne  fçait  quafi  que  c'eft  de  Dia- 
cre.Ce  nous  ellvnegrand'  honte  quand  nous 
parlons  des  Papiites,  que  nous  dirons  qu'ils 
font  Chreftiens  baftars:&:  la  vérité  eft  b:é  tel- 
le,que  tout  y  eft  confus,  qu'ils  font  apoftat", 
ayant  renuerfé  toute  la  police  que  Dieu  auoit 
rnife  entre  les  fiens  :  nous  pouuons  bien  donc 
reprocher  cela  aux  Papiftes  :  mais  cependant 
il  faloit  que  de  noftre  cofté  nous  fufsios  bien 
reliez  .  Car  que  gagnerons-nous  d'accufer 
ceuï  que  Dieu  condamnera  ,  fi  nous  femmes 
cnueloppez  en  vne  mefme  condamnation?Or 
voulons-nous  monftrer  qu'il  y  ait  reformatio 
entre  nous?il  faudroit  cômencer  par  ce  bout, 
c'eftafçauoirqu'ily  euft  des  Paftcursqui  por 
taflent  purement  la  doûnne  deialut ,  &  puis 
qu'il  y  euft  des  Diacres  quieufTent  le  foin  des 
poures. Il  eft  vray  qu'il  y  en  aura:mais  on  efti 
nie  que  ce  foit  '^n  office  profane.  Ceux  qu'on 
appelera  &  hofpitaliers ,  &  procureurs  d'ho- 
fpital ,  penfons-nous  qu'ils  foyent  en  office 
ecclefiaftique?  &  eux-mefmes  le  cognoilTent- 
ils?Car  s'ils  eftimoyent.  Voici  Dieu  qui  nous 
a  appelez  en  office  ,  &  en  vn  eftat  iacré,  il  eft 
conioint  à  celuy  des  miniftres  &  des  pref- 
cheurs,  &  de  ceux  qui  ont  charge  de  gouuer- 
ner  TEglife  de  Dieuril  eft  certain  qu'on  y  che 
mineroit  en  autre  reuerence  qu'on  ne  tait 
I  point.Maisquoy;  onferuira  aux  homes  pour 
tout  potage,&  ne  fera  point  queftion  de  Dieu. 
Il  eft  vray  que  fon  nom  fera  prétendu  :  mais 
cependant  qu'on  y  penfe  ,  ne  qu'on  y  vueiUe 
penfer,  on  voit  tout  le  contraire.  Car  quand 
on  en  fait  eleûion.ceux  qui  les  elifent.y  pen- 
fent-ils  :  Penfent-ils,  Nous.auons  àtrouuer 
gens  qui  gouuernent  le  bien  des  poures  :  ce 
font  les  facrifices  qu'on  offre  auiourd'huy  à 
Dieu  que  les  aumofiies:  il  faut  donc  qu'elles 


foyent  diftribuees  par  ceux  qu^  Dieu  aura 
comme  .igrcables  à  vn  tel  eftat, &:  que  lesDia 
cres  qui  font  choifis  foyent  comme  les  mains 
de  Dicu,&  qu'ils  foyent  là  en  office  facré.Co- 
gnoift  on  celaell  s'en  faut  beaucoup.  Et  ne  fe 
faut  point  esbahir  fi  on  a  aufsi  peude  regard 
aux  Diacres,  comme  aux  Anciens  &aux  Pre- 
ftres  dont  famû  Paul  parlera  ci  après:  car  on 
y  va  aufsi  à  la  volée. Qjje  s'il  eft  quellion  d'é- 
lire gens  pour  auoir  la  conduite  &.  fuperinté- 
danccenl'Eglife,  c'eftàdire  ceux  du  confi- 
ftoire,c5<:  ie  vo'  prie, en  quelle  reueréce  y  prov 
cede-on?  Eft-il  queftion  d'y  obferuer  honne- 
fteté  ni  ordre  de  Dieu?Ceux  qui  y  font  ordô- 
nez,  dira-on  que  ce  foit  au  nom  de  Dieu?  On 
voit  toutl'oppofite.QjJelque  fois  on  fe  vou- 
dra pleinemét  mocquer  de  Dieu,  qu'ô  y  met- 
tra gcs  à  la  volee,&  qui  n'ont  en  eux  rien  qui 
foit  pour  dire  qu'ils  puillent  s'acquitter  'd'vn 
tel  eftat  à  l'honneur  de  Dieu  &  à  l'cdifîcatioa 
de  fon  Eglife.Et  ainfic'eft  vnecôfufion  àde- 
plorer  que  celle  qu'on  voit  entre  nous,qu'vne 
grande  partie  font  fi  profanes, c'eft  à  dire  qui 
n'ont  nulle  reuerence  à  Dieu  ni  à  la  parole, ni 
à  l'ordre  de  fon  Eglife,  qu'ils  ne  fçauent  que 
c'eft  qu'ils  font,en  forte  quelesPapiftes(de/^ 
quels  nous  fçauons  fi  bien  parler)aur5t  beau- 
coup plusd'hônefteté  eneuxque  nous  n'auôs 
pas  :  pour  le  moins  ils  auront  ce  but  gênerai 
quand  on  parlera  de  l'ordre  de  J'Eglife,Ho,il 
faut  qDieu  domine  par  delTus. Il  ellvray  qufe 
cela  ne  dure  point:mais  cepédant  (i  eft-ce  en- 
cores  qu'ils  font  conuaincus  en  eu'S-mefmesv 
Ho, il  faut  que  Dieu  prefide  en  l'Eglife.  Mais 
entre  no'  on  en  eft  venu  iufques  i.i, qu'il  n'efi 
plus  queftion  ne  de  Dieu  ,  ne  de  l'Eglife.  Ec 
quoyPLes  hommes  domineront  pour  vn  téps, 
mais  il  faudra  que  Dieu  bcfôgne  vn  iour  auec 
grande  violence, &  qu'il  frappe  àgrans  coups 
de  marteaux. Puis  qu'ainfi  eft  que  no'  ne  vou- 
lons point  de  noftre  bon  gré  fçauoir  que  veut 
dire  cefte  fuiettion  que  Dieu  nous  commâde, 
quand  nous  ferons  ainfi  farouches  ,  que  nous 
reictterôs  fon  ioug,il  faudra  qu'il  face  vne  re— 
formation  violente  au  milieu  de  nous ,  après 
que  nous  auros  long  temps  abuié  de  fon  nom. 
Or  tant  y  a  que  nous  deuons  bien  noter  ces 
pafîàges.où  il  no' eft  déclare  quel  ordre  Dieu 
a  eftabli  en  ion  Eglife, afin  que  nousaduifions 
de  nous  y  conformer  le  plus  qu'il  nons  fera 
pofsiblc:&  fi  nous  ne  venons  point  du  tout  a 
cefte  perfection, pour  le  moins  que  nous  foy— 
ons  au  chemin, &•  que  nous  ayons  quelque  bue 
auquel  nous  tendions  pour  y  profiter  de  plus 
en  plus. Pour  ce  taire  cognoiflons  que  lesDia 
cres, c'eft  à  dire  les  hofpitaliers  &  les  procu- 
reurs des  poures  ,  ne  font  point  feulement  en 
office  terrien,niais  qu'ils  ont  vne  charge  (pi— 
rituelle  qui  fert  à  l'Eglife  de  Dieu  :  &  pour- 
tant qu'ils  doyuent  eftre  prochains  des  mini- 
ftres de  la  parole  de  Dieu,  &de  ceux  qui  ont 
la  charge  tant  pardoftnne  que  par  remon- 
ftrâncede  maintenir  le  peuple  de  Dieu,  ea 

C.V. 


f4(î  S  E  R  M  O  N    X  X  1 1 1 1. 

crainte  &  en  lionnefteté  Je  vie.  Voila  pour  yn  Voila  lebiende  rhofpital ,  voîla  lebiendc» 

item.  Et  de  faiû  (comme  i'aydelia  déclaré)  poures.voila  le  bien  de  TEglife:*:  cependant 

lesaumofnes  ne  font-ce  pas  facriHces  qu'on  qu'on  le  gourmandera  ,  qu'il  fera  trant'porté 

offre  i  Dieu  pour  luy  faire  hommage  .'Or  àTappeiit  des  hommes  :  il  eil  certain  que 

ceux  qui  ont  lacharge  deles  diftribuer  ,ne  nous  ferons  doubles  facrileees.  Etainiiiinc 

4oyuent-ih- pas  penfer  qu'ils  feruent  à  Dieu?  faut  point  de  difputes  fort  fubtilesdc  tefmoi 

Il  eft  vray  que  ceux  qui  fait  en  eftat  de  iufti-  gnages  de  l'Efcriture  fainâe  pour  monftrer 

ce, feront  aufsi  bien  au  feruice  de  Dieu  :  Se  de  noltre  vilenie:  mais  cela  mefmes  feruira  pour 

faid  il  leur  imprime  Û  marque  ,  Si  leur  attri-  defcouurir  la  honte  de  ceux  qui  veulent  eilre 

bue  fon  titre,&  les  appelle  fes  enfans.fes  lieu-  tenus  Chreltiés,  quand  ils  ne  fçauét  que  c'cft 

tenans  &  officiers.  Mais  ceftuy -ci  appartient  delà  règle  que  Dieu  a  ordonnée  en  fon  trou- 

au  régime  fpirituel  que  Dieu  a  eltabli  en  fon  peau.Ainfî  pour  le  prefent  (attendant  quele 

EglifciVell  afçauoir  les  Diacres.  Celuy  qui  relte  s'eipofe)  retenôs  ce  qui  eft  ici  déclaré, 

eft  threforier  ,  quand  il  ne  s'acquittefapoint  c'eft  afçauoir  que  tous  ceux  qui  font  eleus 

de  fon  deuoir,il  eft  certain  qu'il  fera  coulpa-  pour  diftribiier  les  aumo^nes,&  pour  gouuer- 

blenon  feulement  deiiant  les  hommes ,  mais  ner  le  bien  des  poures,  que  non  feulement  ils 

aufsi  deuant  Dieu  :  mais  les  Diacres  ont  les  font  en  eftat  public,  mais  qu'ils  appartienent 

threfors  de  l'Eglife  à  difpenfer  ,  c'eft  à  dire  au  régime  fpirituel  de  l'Eglife ,  &  qu'ils  font 

ceux  qui  font  du  tout  dédiez  à  Dieu,  &  ne  là  comme  officiers  de  Dieu,  afin  de  diftribuer 

doyuent  pointeftre  appliquez  en  vfages  pro-  les  iacrificesqui  luy  font  offerts  &  confierez; 

phanes.  Quand  nous  parlons  des  Papiftes,  &  puisqu'il  s'en  veut  feruir  en  vn  eftat  (î ho-. 

nous  difons  qu'ils  font  facrileges ,  &  à  bon  norable,  que  c'eft  bien  rai  fon  que  de  leur  co- 

droiû:c3r  le  bien  d'Eglife  (qu'on  appelle)  île  ils  aduifcnt  de  cheminer  en  crainte,  com- 

ne  doit  eftre  appliqué  fînon  aux  vfages  ecclc-  me  ayans  à  rendre  conte  à  vn  trop  grand  inai- 

fiaftiques.c'eft  idire  pour  nourrir  lesPafteurs,  ilre.Ét  tout  ainlîque  ceux  qui  font  appelez  à 

pournourrir  lesmaiftresd'efchole,  qui  lont  ceftecharge.doyuent  eftie  initruitspar  l'ad- 

pour  entretenir  femencocn  r£glife,&  les  au-  monition  de  faiiiû  Paul  de  s'en  acquitter  loy 

très  chofes   femblables  ,  &  fingulicrement  aument ,  aufsi  quand  on  les  élit, qu'on  y  pro-. 

pouraourrir  les  poures.  Or  quand  nous  au-  cedeauec  telle  leuerence  comme  il  le  com- 

rons  condamné  les  Papiftes,fi  nous  taifons  le  mande  ici, fînon  qu'au  dernier  iour  on  vueillc 

femblable,  8c  que  les  biens  de  l'Eglife  foyent  eftre  coulpable  d'auoir  perucrti  l'ordre  de 

gourmandez, qu'on  lesdifsipe,&  qu'on  les  at-  l'Eglife. Car  fi  nous  voulons  auoirEglifcen- 

tire  çà  &  li,&  qu'on  ne  cognoifTe  pasqu'ils  tre  nous, il  faut  que  nous  ayons  ce  régime  que 

font  dédiez  à  Dieu  ,  ne  fommes-nous  point  Dieu  a  e/tablicomeinuiolableipour  le  moins 

doubles  fàcrilegesî  Voila  vne  belle  reforma-  que  nous  tafchions  de  nous  y   conformer: 

«on  :  on  pourra  bien  dire  que  nous  femmes  quand  nous  n'aurons  point  laperfeftion.qtic 

beaucoup  pires  que  les  Papiftes.  Il  eft  vray  nous  ne  laitsions  pas  d'afpirer&  tendre  touf- 

qu'ils  auront  ces  canailles  de  prcftres&de  iours  à  ce  but  qui  nous  eft  ici  propofé  paHe 

moines  qui  font  des  gouffres  pour  engloutir  fain£^  ApoAre. 
tout  ie  bien  qui  eft  dcdié  â  Dieu  :  &  ceux-Ia 

icuis  auront  à  rendre  conte:mais  en  la  Papau-  O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la  fa 

te  lî  eft-ce  qu'on  dira  que  le  bien  d'Eglife  eft  ce  de  noftre  bon  Dieu  en  coenoiflânce  de  nos 

facré,&  qu'il  doit  eftre  difpenfé  en  telle  for-  fautes,  le  priant  qu'il  nous  les  face  tellement 

te  que  les  aumofnes  en  foyent  faites  aux  po-  fcntir  que  nous  aduifîons  de  retourner  à  luy, 

ures.  Et  de  fai(flils  ont  leurs  canons  anciens,  eltanî  abbatus  pour  les  offenfes  que  nous  a- 

&ne  diront  point  du  contraire,  que  le  bien  uons  commifes  par  cidcuantpour  en  obtenir 

des  clercs(qu'ils  appcllct)c'cft  à  dire  de  tous  gracc.Et  cependant  qu'il  luy  plaife  de  bcfon- 

ceui  qui  feruent  a  l'Eglife,  que  tout  ce  bien-  gner  tellement  en  nous  ,  que  nous  foyons  du 

la  vient  aux  poures.  Voila  donc  les  Papiftes  tout  reformez  en  l'obeifTance  de  ù  fainrte  vo 

qui  ne  feront  pas  tous  coulpables ,  mais  ceux  lonté  pour  cheminer  fclon  fes  fainfts  com- 

qui  ont  le  iiuniement  de  ce  bien-la.  Or  entre  mandemens.  Ainiî  nous  dirons  tous,  Dieu 

noui.quanel  le  bien  fera  difsipc,&  qu'on  dira,  tout-puifrant,Pere  celcfte,&c. 

SIXIEME    SERMON    SVR    LE   TROIS- 
IEME    CHAPITRE. 

8  SemhUhlement  il  faut  que  les  "Diacres  Joyevt  modejîes ,  non 
point  doubles  en  paroles,  ni  addonncz  à  beaucoup  de  \in,ne procurant 
gain  deshonnejîe. 

9  hyans  lefecret  de  lafoy  en  pure  conjciencc. 


s  V  R    L  A    I.     A    T  I  M  O  T  H.  147 

10     Ef  quiceuxfiyoït  premièrement  efprouucz  >  puisferuent  e- 
flans  trouuez  irreprehenfiUes. 


Ous  aaons  veuce  matin  de 
iqiieleûat  fainft  Paul  traitte 
I  ici.c'tft  afçauoir  de  ceux  oui 
'  cr.  l'Eglii'e  ancienne  cftoy et 
ordonnez  pour  diftribuer  les 
'  aiimofnes.  Or  il  eft  certain  ^ 
'  Dieu  veut  cju'vne  telle  règle 
A)it  obferueeen  fonEglife.c'eltafçauoir  tjue 
on  ait  le  foin  de»  poures:&  non  feulemét  que 
chacun  en  Ton  priué  Tubuiene  à  ceux  qui  font 
poures:mais  qu'il  y  ait  eftat  public,<ju  il  y  ait 
gens  ordonnez  pour  auoir  le  foin  de  ceux  <jui 
font  en  necefsité,afin  q  les  chofes  foyét  con- 
duites comme  il  appartient  :  &  ficela  n'eft.il 
eft  certain  qu'on  ne  fe  peut  vanter  qu'il  y  ait 
vne  Eglife  bien  ordonnée, &  félon  la  doctrine 
Âc  l'Euangiie.mais  c'eft  autant  de  confufion. 
Et  pourtât  il  nous  faut  regarder  à  nous:  (co- 
tte deiîa  nous  auons  touché  ce  matin  )  car  fi 
nous  reprochons  aux  Papiftes  qu'ils  ne  fuy- 
uent  pas  l'ordre  inftitué  par  noftre  Seigneur 
le/îjs  Chrift ,  ils  peuuent  dire  le  femblable  de 
nous  quand  ceci  nous  defaudra, c'eft  quand  le 
bien  qui  eftoit  dedié  à  Dieu  ne  fera  pas  deue- 
nient  &  fidèlement  difpenfc,&  qu'il  n'y  mira 
pas  gens  propres  comme  fainft  Paul  l'or- 
donne à  cefte  charge  &  office.  Orpourcefte 
caufenous  faut-il  bien  noter  les  chofes  qui 
font  icicôtenuei.En  premier  Jien,  faind  Paul 
veut  que  les  Diacres  foyent  graues  &  pofez: 
âpres  qu'ils  ne  foyent  point  langars.ou  dou- 
bles en  langage:&  puis  qu'ils  ne  foyent  point 
addonnez  ni  au  vin  ni  à  l'auarice.Sous  ce  mot 
Ae  grauité  ou  attre  jnpance  ,  fainft  Paul  com- 
prend tout  ce -qui  eft  pour  vne  vie  bié  réglée. 
En  fomme  il  veut  qae  les  Diacres  monftrent 
bon  exemple, qu'ils  ne  foyent  point  gens  vo- 
lages ni  diflolus  .  Au  refte ,  il  y  a  trois  vertus 
«jui  leur  font  /peciales:  l'vne, qu'ils  ne  foyent 
point  doubles.  Car  fi  vn  homme  fait  femblât 
d'auoir  pitié  de  ceux  qui  ont  befoin  d'cftre  fé 
«ourus,  &  puis  en  derrière  qu'il  ne  demîde  fi- 
non  d'atfamer  les  poures  gens ,  qu'il  n'y  ait 
ne  pitié  ne  Jiumanité  en  luy  :&  fi  en  fomme  il 
n'y  a  que  fiction  en  {es  propos, qu'il<lonn€  de 
Teau  bénite  en  promettant  beaucoup,*:  qu'il 
«cface  rien,  nous  fçînés  qu'il  n'y  a  rien  phis 
contraire  à  l'ofKce  de  Diacre.Autant  en  eft-il 
Je  l'yurongnerietque  fi  vn  homme  eft  addon 
né  à  gourmandife  ,  il  ne  luy  chaut  comme  les 
autres  foyent  traitiez  :  &  puis  il  voudra  aufsi 
pluftoft  aider  à  fej  fembj3blej:car  s'il  y  a  quel 
flue  gourmand  qui  ait  mangé  &difsipé  mal  fa 
lubftance ,  celuy-Ia  fera  le  premier  en  degré 
quand  il  fera  queftion  de  faire  aumofnes.fi  on 
en  permet  la  piiiffance  à  gens  addonnez  au 
Tin.Firulement ,  autant  en  eft-il  de  ceux  qui 
aiment  leur  gain  ,  &•  ne  tafchent  que  de  faire 
leur  profit.  Etsacfioe»  nous  fgauons  qu'vn 


auaricieux,encores  qu'il  ne  desbourfe  rien.'fi 
tft-ce  qu'il  luy  fafche  qu'on  defpende ,  c'eft 
afltz  mais  qu'il  y  en  ait  pour  luy  :  que  fi  on 
luy  arrachoit  les  tripes  du  ventre  .  on  ne  luy 
feroit  pas  plus  de  mal  que  quand  on  ha  pitié 
pour  fecourir  aux  poures  ,  &  que  s'il  y  a  de 
quoy,qu'on  leur  e(largit,&  qu'on  le  difpenfe. 
Il  y  en  a  donc  qui  voudroyent  que  tout  le  bié 
du  monde  fuft  comme  enfeueli:  car  ce  qu'ils 
ne  peuuent  ferrer ,  il  leur  femble  que  c'eft  au- 
tant perdu  pour  eux.  Nous  voyons  donc  que 
fàinft  Paul.apres  auoir  requis  que  les  Diacres 
foyent  de  vie  honnefte&  bien  réglée, non 
fans  caufe  met  ces  trois  vertus.c'eft  qu'ils  foy 
entdroits,qu'il  y  ait  vne  fimplicité&  rondeur 
de  parole  en  eux, qu'il  y  ait  aufsi  vne  attrem« 
pance  &i  fobricté  au  boire  &  au  manger:  fina- 
lement qu'il  n'y  ait  point  de  chicheté  ne  d'a- 
uarice ,  mais  qu'ils  mefprifent  tellement  l'ar- 
gent ,  qu'ils  ne  demandent  que  de  fidèlement 
difpenfcr  cequ'iJs  ont  entre  mains.  Or  tes 
chofes  font  aflez  claires,  &  pourroyent  eftre 
aifeement  entendues,finon  que  la  corruption 
fuft  a  grande  entre  nous ,  que  le  fainft  Efprit 
ha  comme  vne  langue  incognue  quand  il  par- 
le des  chofes  où  nous  ne  deuons  point  trou- 
uerd'obfcurité.  Ceci  n'auroit  befoin  de  lon- 
gue expofition, quand  les  Diacres.c'eft  à  dire 
les  procureurs  des  poures,  feroyent  fobres  8c 
modeftcs,&  gens  entiers ,&  non  point  addon- 
nez à  aiiarice  :  mais  d'autant  qu'en  premier 
lieu  on  ne  fçait  que  veut  dire  ceft  oflfîce  & 
eftatdont  parle  fainft  Paul,&  puis  qu'auiour— 
ïi^huy  on  fait  de  vice  vertu  ,  voiJa  poiinquoy 
ce  qui  eft  ici  contenu,nous  eft  comme  eftran- 
ge.Or  en  cela  monftrons-nous  bien  quelle  eft 
noftre  Chreftienté:s'il  ne  tient  qu'à  nous  vaa 
teT,il  n'y  a  que  ref  ormatiô  de  J'EuSgiie  entre 
nous:m3is  cepêdant  voici  la  touche  où  il  nou» 
faut  efprouuer  ,  comme  nous  auons  défia  dit*' 
Or  en  premier  lieu  ,  quand  on  parlera  de» 
Diacres.c'eft  vne  chofe  quafi  fauua^e:  te  poi» 
ceux  qui  font  ordonnez  pour  auoir  Je  foin  in 
ponres,ie  vous  prie.commét  s^d  acqtiittent- 
ils.'Commc  gens  prophanes  qu'ils  font,  &  ne 
cognoiflent  point  à  quoy  ils  font  appelez.  Je 
ne  parle  point  en  gênerai  de  tous.mais  ie  par 
Je  du  vice  qui  e/J  par  trop  commun  &  ordinai- 
re:i5f  pJenft  à  Die«  que  les  chofes  fuflènt  tel- 
Jes  ,  que  nouseufsions  de  quoy  nous  efiouir, 
voyans  vne  conformité  entre  Ja  règle  de 
Dieu  ,  &l'vfagequi  feroit  entre  nous.  Mais 
quand  on  voit  qu'il  femble  qu'on  ait  confpi- 
ré  à  defpiter  Dieu  lîr effacer  J'eftat  qu'il  auoit 
eftabli  en  fon  Eglife,n'eft-ce  pas  vne  cho/ê  2 
déplorer?  Or  fi  nous  ne  voulôs  ouir  cefte  do- 
ûrine,  Si  la  receuoir ,  &  là  prsttiquer  ,  fi  nous 
feruira-elle  de  condamnation  ,  pour  mon— 
ibrei  qu'ayans  la  doûrinc  de  l'Euangile  pure^ 


Î4^ 


SEkMON    XXV. 


nouj  n'aaofis  point  d'ordre  entre  nous ,  mais 
demandons  toute  confuiîon  pluftoft;  &:  mel- 
mes  gardons  que  Dieu  ne  tarde  point  beau- 
coup à  punir  vne  telle  ingratitude, &  fur  tout 
quand  nous  voyons  que  iî  peu  de  bien  qui  e- 
floit  drellé  entre  no', s'en  va  efcouler,&  qu'il 
femble  qu'on  ne  l'aura  iamaisaflez  toft  anea- 
ti.  Quand  donc  nous  voyons  vne  telle  mali- 
-ce  &  lî  nnpudente.que  peut.'on  efpererf  Mais 
pluilofl(comme  l'ay  dit)il  faut  que  nous  crai 
gnions  vne  horrible  vengeance  de  Dieu.  Si 
auiourd'huy  on  vouloir  aftraindre  ceux  qui 
fe  nommCiit  Diacres ,  &  qui  font  appelez  à 
C€ft  eftat,  àcefteregle  que  fainfl;  Paul  nous 
met  ici,  ho  ,  il  leur  fembleroit  qu'on  leur  fe- 
roit  grand'  iniure.Et  pourquoy rcar  ils  ne  i'ça 
uent  que  c'ell  de  feruir  à  Dieu  :  comme  aufsi 
ils  ne  cognoiflent  pas  que  ceU  office  appar- 
tient au  régime  fpirituel  de  rEghfe.  Or  tant 
y  a  que  Dieu  ne  foulfrira  point  que  fon  nom 
foit  ainfî  prophané  .  Si  on  parle  à  ceux  qui 
les  elil'ent  ,  ceux-là  aufsi  entendent  enco- 
res  moins  que  c'efl:  que  veut  dire  la  condui- 
te de  la  maifon  de  Dieu,&  le  i'oin  de  difpen- 
fer  les  aumofnes.  Regardons  donc  diligem- 
ment  ce  qui  nous  eft  ici  monftré ,  c'eft  d'au- 
tant qu'vn  chacun  eft  auacé  en  PEglife,  qu'il 
doit  eftre  exéple  à  fes  prochains  :  &  puis  que 
Dieu ie  veut  fcruir  des  Diacres  à  vne  chofe 
honorable,  qu'Us  foyent  d'vne  vie  pofee  & 
modefte:&  cependant  qu'ils  ne  foyent  point 
addonnez  à  gourmandife, qu'ils  fçachent  que 
c'eil  de  fobrieté  &  de  continence  en  leur  vie: 
&  aufsi  cela  eft  requis  pour  la  vigilance  ,  que 
les  Diacres  ne  foyent  point  yurongnes.  Car 
s'ils  doiuent  auoir  le  foin  non  feulement  de 
dilpél'er  ce  qui  leur  eft  commis, mais  de  s'en- 
quenr  où  il  y  a  necefsité  ,  &  où  le  bien  fe  de- 
ura  employer,!!  ce  font  des  yurongnes, il  fau 
dra  qu'ils  foyent  cftourdis  :  de  chercher  en 
eux  aucun  foui  pour  s'enquérir  où  il  y  a  po- 
tireté,&  là  où  ilfaudia  donner  fecours.trou- 
uera-on  vne  telle  vertu  ,  c'eft  àdirectfte  vi- 
•gilance  en  des  yurongnes  qui  ont  leurven- 
trepourleur  Dieu?  Et  purs  y  trouuera-on 
nulle  prudence  quand  ils  feront  abbrutis  de 
leur  vin  ,  &  que  l'yurongnerie  dominera  tel- 
lement fur  eux ,  qu'ils  reflemblerpnt  pluftoft 
à  des  pourceaux  qu'à  des  créatures  railonna- 
blesîOr  tant  y  a  qifilfaut  que  ceux  que  Dieu 
anra  ainli  honorez  de  les  appeler  pour  auoir 
le  ibin  des  poures,  s'eftudient  à  iobrieré,  &  à 
retrancher  toute  gourmandife  ,  afin  qu'Us  ne 
foyent  point  empcfchez  (comme  nous  auons 
dit)  d'auoir  telle  folicitude  comme  leur  char 
ge  le  demande.  Et  au  rcfte, s'ils  notent  bitn  ce 
qui  eft  ici  dit  de  ccfte  rôdeur, ils  verront  com 
bien  ccfte  vertu  eft  nccellàire  :  car  quand  Vn 
homme  n'a  point  vne  droite  fimplicité  ,  il  eli 
certain  que  lamais  un  ne  trouueia  fccours  en 
Juy.  Et  voila  aufsi  pourquoy  faind  Paul  met 
celte  vertu  en  ceux  qui  doiutnt  adminiftrcr. 
Il  eft  vray  qu'il  met  vne  allaigrelTe  aufsi  en 


ceux  qui  ont  le  foin  des  poures ,  afîn  qu'ils  ne 
donnent  point  à  regret,  mais  quand  ils  voyét 
que  le  bien  eft  employé  comme  il  doit,  qu'ils 
s'eliouiflent  de  ce  que  Dieu  fait  paffer  par 
leurs  mains  des  facnfices  qui  luy  font  agréa- 
bles :  mais  il  faut  que  celte  rondeur  aille  de- 
uant.  Q^e  donc  ils  ne  foyent  point  doubles 
en  langage.Et  puis  il  y  a  cefte  libéralité  fina- 
lement, laquelle  conlifte  en  deux  chofes  :  eu 
premier  lieu  que  ceux  qui  font  eftablis  pour 
feruir  aux  poures, ne  cerchent  point  leur  gain 
ne  leur  profit,  qu'il  leur  ûiffife  que  Dieu  ap- 
prouue  le  feruice qu'ils  luy  rendent,  combien 
qu'ils  le  facent  aux  hommes,  voire  à  ceux  qui 
font  mcfprifez  ,  toutesfois  que  c'eft  où  ils  fe 
peuuent  le  mieux  employer  qu'à  cela:qu'Us  fu 
contentent  donc  que  Dieu  les  approuue .  Et 
cependant,  qu'Us  aiment  beaucoup  mieux  que 
l'argent  qui  leur  eit  commis  foit  ainfî  fidèle- 
ment employé,  que  de  l'auoir,  ou  d'eftre  ap- 
pliqué à  mauuais  viage. Voila  en  l'omme  com- 
me les  Diacres  ne  doyuenc  point  eftre  addoii 
nez  à  leur  profit  particulier.  Mais  encores  ne 
eft -ce  point  aiîez  de  celi  ,(iiion  qu'il  y  ait  ce- 
fte libéralité  &  franchife, qu'Us  foyent  bien  ai 
(es  quand  Us  verront  les  poures  eftre  (écou- 
rus,&:  s'il  y  a  quelque  ind!gence,que  le  remè- 
de y  foit  quant  Se  quant .  Et  en  cela  voit-on 
combien  nous  fomines  loin  de  cefte  règle  de 
lainft  Paul  :  car  qu'eft-il  qucftion  de   faire 
anioûrd'huy  :  Penfe-on  depjuiuoiraux  ne- 
cefsitez'deuant  mefmes  qu'elles  ibyent  co- 
gnues?  S'enquiert-on  là  où  U  y  aura  indigen- 
ce ?  Mais  on  ne  demande  linon  à  confumer 
tout,  que  quand  il  y  aura  des  pouretez  tant  Si. 
plus, c'eft  tout  vn:ho,il  faut  eipargner. Voire, 
il  eft  vray  :  car  (comme  nous  auons  dit)  U  eft 
befoin  que  les  Diacres  ayent  grande  pruden- 
ce :  pource  que  tout  le  bien  qui  eft  ordonrté 
aux  poures, feroit  tantoft  c5fumé,iî  on  croy- 
oit  tous  ceux  qui  demandent.  Nous  voyons 
l'importunité  qui  eft  en  beaucoup,  &  qui  n'ôt 
nulle  coniideration.  Ceux  qui  lont  oilits,  oU 
qui  ne  trauaUlent  point  volôtiers,  feront  con 
tens  qu'on  leur  apprefte  la  table  pour  fouper 
quand  Us  auront  difné. Les  autres  penlentque 
on  les  doit  aideràviure  plusdelicamcnt.  Et 
puis  quand  vn  homme  a  quelque  charge, il  luy 
femble  qu'on  luy  fait  grand  tort  finon  qu'on 
luy  diftribuer&ciiacun  penlé  eftre  le  plus  po- 
ure,  quand  U  voudra  qu'on  luy  tace  aumofne. 
Depuis  qu'on  eft  là  venu, qu'vn  homme  délire 
d'eftre  ffcouru  du  bien  d'autruy.il  eft  certain 
qifil  voudra  toulîours  eftie  préfère  à  chacun, 
&  à  tout  le  rtfte.AinHU  eft  befoin  q  les  Dia- 
cres foyent  piudcns  &  modérez  ,  &  qu'Us  ne 
ayciit  la  main  ouiiertc  uns  propos.  Car  s'il  y 
a  quelque  peu  pourdiftribuer,&  qu'en  vn  iour 
on  le  cofumart.i^-  que  icroit-cc;Toutesfois  lî 
f.iut-il  qu'on  efpargne  tcllemét  qu'on  ne  foit 
point  cluchc  ii  Dieu  dône  dequoy.que  le  bien 
l'oit  employé  là  où  on  voit  qu'il  y  anecelsité 
de  maladie,qu'ily  3itch3rged'enfans,&  cho- 
fe» 


SVR   LA  I.    A    TIMOTH. 


149 


fdB'femblableî.  Et  nou'ideuonsauoir  grand'    blié, quand  les  Papiftes  enTç.uirontbienmef 


honte  auiourd'huy,  que  les  aumofnes  qui  ont 
eftc  faites  par  les  poures  incrédules, l'ont  ain- 
fimaldiftribuces.Qj^sn'i'l  "'y  auroit  ne  ter- 
res ne  poflefsions'.ne  bien  d'Eglife, qu'on  ap- 
pelle ,  mais  qu'il  faudroit  qu'vn  chacun  don- 
naft  fon  ofFrade,^:  que  de  cela  on  fubuint  aux 
poures.fi  nous  voulons  eftre  tenus  Chreihés, 
&  qu'on  eflime  qu'il  y  ait  quelque  Eglife  en- 
tre nous, il  faut  que  cefte  police  fe  monfl:re,& 
qu'elle  s'obferue.  Or  eft-il  ainiî  que  les  po- 
ures aueugles  qui  ont  vcfcu  en  la  Papauté  ont 
laifle  du  bien.  Il  elt  vray  qu'ils  n'ont  pas  en- 
tendu quel  en  deuoit  eftre  l'vfage:  car  ils  ont 
fondé  des  Meflès  ,  &  chofes  femblables  :  Se 
puis  il  y  a  eu  ces  gouffres  qui  ont  tout  englou 
ti.  Mais  tant  y  a  qu'on  n'a  peu  abolir  l'ordre 
ancien  qui  eft  approuué  par  l'Efcriturc  fain- 
ûe,  c'eftafçauoir  que  te  bien  d'Eglife  main- 
tenant foit  employé  comme  il  dort  :  premiè- 
rement pour  la  nourriture  des  Pafteurs,pour 
entretenir  les  efcoles ,  &  pour  fubueniraux 
poures ,  afin  que  toufiours  on  tace  aumofne 


dire?  Voila  donc  le  blé  qui  fera  au  grenier,il 
eftaux  poures, il  n'eft  point  ic  queftion  d'hô 
me  ne  de  feigneurie ,  il  cft  queftion  de  Dieu, 
corne  c'eftceluy  qui  ne  fouttrira  point  que  le 
bien  qui  luy  a  efté  offert  en  facriHce,  foit  ap- 
pliqué A  vfage  prophane.  Autant  en  eft-il  du 
refte.Or  quand  on  auroit  diftnbué  ce  bien-la 
corne  il  appartient, iî  eft-ce  qu'encores  n'eft- 
on  pas  quit  ce, qu'vn  chacun  ne  face  aumofnes 
en  Ion  priué,&aumolnes  publwjues  ,  afinquc 
les  poures  foyent  recourus  comme  il  appar- 
tiét.  Mais  il  l'eroit  .1  defîrer  que  les  chofes  ne 
vinlfcnt  pas  à  vne  telle  confuiîon.  Et  pour- 
quoyJCe  n'eft  pasd'auiourd'huy  qu'on  a  cô- 
meneé  à  en  parler ,  les  parois  mcfmes  en  de-> 
uroyent  retétir:&  cepc'dant  lesaureilles  des 
homes  fontii  fourdes  ,  qu'on  voit  bien  que 
chacun  nedemâde  linon  de  croupir  en  (on  or 
dure. Or  il  ne  feroit  queftion  que  de  pourfui- 
ure, corne  il  y  auoit  quelque  petite  efperance 
de  bien:mais  tout  s'en  va  ane.atir.Quand.dôc 
nous  voyôs  cela,  il  faut  que  les  bons  &  les  etl 


entre  les  enfans  de  Dieu,&  que  ceux  qui  font     fans  de  Dieu  gemiflent ,  prians  Dieu  qu'il  y 
s  du  mieux  qu'on     mette  la  main  :3c  s'il  eft  befom  de  reforma:. 


en  necefsité, foyent  fecourus  du  mieux  qu'i 
pourra.  Or  maintenant  nous  fçauons  quel  eft 
le  vray  vfage  d'employer  le  bien  qui  a  efté 
confacré  à  l'Eglife  :  car  iî  on  le  gourmande, 
&  qu'on  s'en  loue  à  plaifîr  ,  &  que  tout  cela 
foit  appliqué  à  cho  fes  prophanes  (  comme  il 
eft)il  ne  faudra  point  feulement  que  nous  en 
rendions  conte  deuant  Diciï&  deuant  fes  An 
ges,maisles  Papiftes  en  feront  nosiuges.  Et 
c'eft  vne  vergongne  trop  vileine  ,  qu'auiour- 
d'huy  on  n'einployera  le  biéde  l'Eglife  pour 
la  plus  grande  partie, qu'.\  vlàge  tout  contrai 
re  à  la  volonté  de  Dieu. Et  les  Papiftes  fcj.ni- 
ront  bien  faire  leur  profit  de  cela  pour  bla  f- 
phemer  l'Euangile  :  &'de  fait  nous  leur  en 
donnons  occaiîon,  entant  qu'en  nou^  eft  :  & 


tion  vioIéte,il  vaut  mieux  qu'ils  foyent  mat- 
tez  àg-rans  coupsdebaftons  ,  que  de  nourrir 
telles  infcftions  entre  nous,  &  fouffrir  que 
Dieu  foit  ainlî  mocqué,  &  que  l'ordre  de  l'E 
glife  ioit  difsipé.  Voila  donc  ce  que  nous  a- 
uons  à  noter  en  fomme  de  ces  vertus  que  S. 
Paul  met  ici  aux  Diacres.  Or  il  adiouftc  quât 
&  quant,  Q/^'ls  ayent  lemyfiere  ic  la  foyeit- 
fiire  confdece.  Par  ce  mot  il  lignifie  queceur 
qui  font  en  ccft  office  de  Diacre.d'autant  que 
ils  ont  charge  publique  en  l'Eglife,  doiuent 
eftre  mieux  enfeignez  en  ladoârinede  falut, 
que  ceux  qui  font  du  cômun  peuple.  Vray  eft 
que  fi  nous  fommes  Chreftiens  &  enfans  de 
Dieu, il  faut  que  nous  ayons  profité  en  l'efco 


cependant  encores  il  y  aura  de  bons  nicfna-     le  de  lefus  Chrift  :  la  foy  eft  cÔmune  à  grans- 
gers  qui  diront  ,  Ho,  il  faut  retrancher  tant     &.'àpetis,  voire  lufques  aux  plus  idiots  :  &ne 


qu'il  nous  lera  pofsible.  Et  comment  eft-ce 
qu'il  faut  efpargner.?  Ho,  s'il  eft  queftion  de 
quelques  folles ,  on  ne  fçauroit  trop  defpen- 
dre  :  mais  voila  les  membres  de  lelus  Chrift 
qui  periflent  de  faim  &  de  foit  :  il  faut  donc 
qu'on  les  fccouie.  Il  eft  vray  que  fî  nous  e- 
iîions  tels  que  nous  deurions  eftre  ,  cela  de- 
uroit  bien  elhe  obferué,  comme  l'ay  dit,  en- 
cores qu'il  n'y  euft  autre  bien  :  mais  il  n'eft 
point  queftion  ici  qu'on  demande  qu'vn  cha- 
cun contribue,  que  chacun  ouure  fabourle 
pour  dire,  Teneznnais  qu'on  dilpenfe  feule- 
ment ce  qui  eft  du  bien  des  poures  ,  &:  qu'on 
l'applique  où  il  faut  qu'il  foit  employé.  Ce- 
pendant on  diia,  Ho, il  faut  efpargncr.  Voi- 


laut  pas  que  nous  imaginions  auec  les  Papi- 
ftes ,  vne  Chreftientc  telle  qu'il  leur  femble, 
que  c'eft  afîez  d'auoir  efté  baptizez,  &  qu'on 
nefçache  plusque  c'eft  de  Dieu  ne  de  reli-» 
gion:il  faui,di-ie,  que  cefte  doûrine  s'eften- 
de  iufques  aux  plus  rudes.  Mais  tant  y  a  que 
ceux  qui  font  eleuez  en  degré  fuperieur,  dor 
uent  bien  auoir  plus  de  cognoiflance,  &  eftre 
mieux  confermez  en  l'Euangile  ,  que  s'ils  e- 
ftoyent  poures  gens  qui  demourauènt  touf- 
ioursenleur  maifon,S;  qu'ils  n'euflent  nul  e- 
ftat.  Nous  voyons  donc  maintenant  en  fom- 
me quelle  eft  l'intention  de  fainâ  Paul. Mais 
il  conioint  le  myftere  delà  foy  auec  bonne 
confcience,  d'autant  qu'on  en  voit  beaucoup 
re?  &le  blé  mefmes  .i  qui  eft-iï?qui  eft  celuy     qui  fçauront  babiller  aflez  de  TEuangile  ,  Se 


qui  pourra  dite.  Cela  eft  mien?  mais  au  con- 
traire, tous  ceux  qui  le  voudront  appliquer  à 
'autre  vfage, voila  vn  ficfilege  qu'ils  commet 
tent,la  chofe  eft  toute  notoire.  Et  ne  faut-i] 
point  qu'en  la  chaire  deVerité  cela  ibit  pU- 


cependant  n'ont  autre  chofe  que  la  langue. 
Or  S.  Paul  veut  que  les  Diacres  approuuent 
Jeur  toy  par  fainde  vie,&  non  point  fculeméc 
en  apparence  quant  aux  hommes, mais  qu'il  y 
ait  intégrité  de  fonfcience  pure.  Mais  ici  il 

t.iii. 


ijo  s  E  R.  M 

nous  faut  regarder  pourquoy  {alù  Paal  a  rai« 
Stcrttd*  lafoy:<^2.  efté  pour  magnifier  la  do 
ôrine  de  l'Èuangile.  Car  ce  mot  de  myfltrr, 
Taut  autant  à  dire  comme  Secret.  Pourquoy 
dôc  fainft  Paul  attribue-il  vn  fecret  il  la  foy? 
c'eft  afin  que  nous  cognoiAions  l'honneur  & 
la  grâce  que  Dieu  Fait  aux  hommes,  quand  il 
le;  appelle  à  la  cognoiHànce  de  Ton  Euâgile. 
Car  il  n'eft  point  queftion  de  choie  vulgaire, 
ne  qui  entre  en  noftrc  cerueau  :  il  n'eft  point 
«ucftion  d'vne  fcience  que  nous  puifsions  ac- 
éuerir  par  noftre  induftrie  ,  mats  c'eft  vn  fe- 
cret qae  Dieu  nous  reuele.En  forame  S.Paul 
a  voulu  monftrer  que  nous  approchons  telle- 
ment de  Dieu,  quand  il  nous  fait  participant 
de  la  cognoiflàucede  fon  Euangiîe.que  c'eft 
comme  s'il  nous  declaroit  fes  fecrets  admira- 
ble? :  comme  àla  venté  Dieu  defploye  Ion 
coeur  enuers  nous,  quand  il  luy  plaift  de  nous 
inftruire  en  la  parole  de  falut.  11  eft  vray  que 
les  môdains  ne  tiendront  conte  de  l'Euâgile, 
qu'il  leur  femble  que  c'eft  vne  chofe  bafu,  & 
qu'il  n'y  a  point  aflèi  de  fubtilité  pour  eux: 
mais  ceux  qui  oritjrayemét  goufté  le  côtenu 
&  la  fubftace  de  l'tuîgile,fçauét  qu'il  outre- 
,  yalle  tous  nos  îens.  Or  il  n'y  a  doute  que  S. 
Paul  n'ait  ici  voulu  defpiter  ceft  orgueil  & 
ingratitude  des  hommes ,  quand  il  dit  que  la 
foy  gift  en  vn  fctret  :  car  c'eft  afin  que  les 
hommes  ne  penfent  point  eftre  tant  habiles, 
que  de  fçauoir  ce  qui  appartient  à  leur  falut, 
iufques  à  ce  que  Dieu  les  ait  illuminez  par  (i 
jrace:  &  quand  nous  venons  ouir  le  fermon, 
ou  que  nous  prenons  l'Efcriture  fainûe  pour 
la  lire, que  nous  n'ayons  point  ceftc  folle  ou 
irecuidance,de  penfer  que  nous  côprendrons 
bien  tout  ce  qui  nous  fera  dit ,  &  ce  que  nous 
aurôs  lcu,parnoftre  phantafîe.mais  que  nous 
y  venions  auec  reuerence,  nous  atiendans  du 
tout  à  Dieu.fçachans  bien  que  nous  auons  be 
foin  d'eftre  enfeignez  par  fon  S.Efprit,&  que 
fans  cela  nous  ne  pouuons  nullement  côpren 
dre  ce  qui  nous  elimôllré  en  fa  parole.  Nous 
voyons  maintenant  en  fomme  quelle  eft  l'in- 
tention de  S.Paul.  Il  eft  vray  qu'en  gênerai  il 
magnifie  ici  la  doftrine  de  noftre  falut ,  di- 
fànt  que  Dieu  nous.v  reuele  des  fecrets  admi 
ïables,at  qui  furmôtcnt  toute  noftre  mefure-. 
mais  cepédant  il  déclare  que  les  Diacres  doi 
uent  citre  mieux  enfeignez  que  le  cômun  peu 
f  lc:3c  côbien  que  la  foy  fou  cômune  à  grans 
&  .1  petis ,  que  ceui-la  y  doiuent  efiie  mieux 
CÔttrmtz.Or  de  ce  pallage  nous  pouuons  re- 
cueillir qu»  tous  ne  peuuent  pa.  eftre  égaux 
enl'Eglifjcde  Dieu.  Il  eft  vray  que  les  igno- 
»ns  ne  doiuent  point  chercher  couleur  pour 
«ftreeicufez  ,  quand  ils  ne  mettront  peine  J 
profiter  de  iour  en  iouricar  il  n'y  a  celuy  qui 
ne  doiue  eftre  enfeigné  de  Dieu  :  comme  le 
l/>.t4.n  Prophète  Ifiic  en  pavle;  &côrae  noftre  Sei- 
Vlat,  II.  gneurdeclare  qu'il  eft  leMaiftredcs  petis  & 
3iO,  des  hûbles:  ainti  faut-il  que  nous  foyôs  bons 

^fciples  :  &  il  ne  faudra potat  de  fon  cgfté  à 


ON    XXV. 

faire  fon  office,  moyennant  qu'vn  chacun  de 
nous  s'abbaifle,&  que  nous  foyôs  ardés  à  ef- 
couter  ce  qui  nous  fera  publié  en  fon  nom.  Si 
que  nous  appliquions  là  toute  noftre  eftude 
fidèlement.  Mais  quand  tous  aurôt  rais  peine 
d'eftre  enfeignez  de  la  bouche  de  Dieu  ,  £ 
faut-il  que  ceux  qui  font  en  heu  eminent, re- 
gardent qu'ellans  conferraez  ils  attirent  les 
autres  au  bon  chemin:cômedit  S.  Paul  au  14. 
des  Rom.  Vous  qui  eftes  robuftes  en  la  foy,  tj)m.i4 
fupportez  ceux  qui  font  débiles.  Voil.i  pour-  j  ^  jj^ 
quoy  Dieu  ne  diftnbue  point  fes  grâces  egâ-  j. 
lement  ,  afin  que  ceux  qui  font  les  plus  auan- 
cez  attirent  leurs  prochains, &  qu'ils  les  fup- 
partent,&  qu'ils  les  édifient  entant  qu'en  eux 
fera.Or  fi  on  ne  difccrne  point  de  choifir  gês 
qui  ayent  le  myftere  de  la  foy  en  bonne  con- 
fcience  quand  on  veut  faire  des  Diacres.n'eft 
ce  pas  vn  mefpris  manifefie  de  Dieu?  Si  on 
veut  élire  vn  hofpitalier  ,  oudes  procureurs 
de  l'hofpital ,  gens  qui  diftribuent  le  bien  de 
l'Eglife,  &  qu'on  ne  regarde  point  quelle  re- 
ligion il  y  a  en  eux  ,  ne  quelle  cognoiflànce 
de  Dieu,  ne  cornent  ils  font  oidéncz  en  l'E- 
glife ,  voila  Dieu  qui  prononce  qu'on  doit  a- 
uoir  cefte  vigilâcc-la,&  qu'il  ne  la  faut  point 
mettre  en  oubli.  Or  on  y  fermeia  les  yeux. 
En  cela(di-ie)ne  voit-on  pas  que  manifefte- 
ment  la  parole  de  Dieu  eft  comme  toullee  au 
pied?  Etencores  il  y  auradenos  braues  qui 
ne  voudront  point  que  iamais  on  fonne  mot 
d'vn  tel  defordre  ,  Its  diabks  d'enfcrne  fe- 
royent  point  pis  :  &'  cependant  il  n'en  faut 
point  parler.  Voire?  &  qui  tfpargnera-on? 
Qvund  Dieu  fera  ainfi  vilipcndé,qu'on  mon- 
ftrera  euidcmmenr  qu'on  ne  tient  conte  de 
fa  parole,  que  iamaiï  il  n'y  eut  vn  tel  mefpris 
en  l'Eglife  de  Dieu,co»ime  ou  le  voit  auioiir 
d'huy  ,  5t  cependant  on  s'en  taira?  &  que  fe- 
roit-ce  à  dire?  Et  c'eft  ce  que  l'ay  défia  tou- 
ché ,  que  cefte  doûrine  ne  peut  eftre  portée 
qu'il  n'y  ait  vne  horrible  confufion  fur  nous: 
Â:finousne  fentons  maintenant  la  main  de 
Dieu  ,  fi  faudra-il  que  nous  cognoifsions  en 
defpit  de  nosdents.qu'apres  nousauoir  long 
temps  attêdu,  il  fe  monftrera  noftre  luge.  Or 
cependant  nous  auons  aufsi  bien  à  poifer  ce 
que  S.Paul  adiouftc,Ci>*»/«  Diatreifoytnt  f- 
ffroHU<K  tn  fremitr  lieu,  fir  fuis  tjti'ils  aJmi- 
ni Prent ,cjuand on Iti  aura  troHueK  irrtfrehen- 
fiblts.ll  baille  ici  vne  inionftion  plus  rftroite 
àceux  qui  ont  la  charge  d'élire  les  Diacreft 
Il  faut(dit-il)qu'on  les  ait  efprouucz:  8c  puis 
quand  on  les  trouue  irreprehcnfibtes ,  c'eft  à 
aire,  fans  maouaifcnote  d'infamie,  qu'on  les 
mette  en  l'otlice  ,  finon  qu'on  vueille  dcfpi»- 
ter  Dieu.  Car  quand  le  fainft  Efprit  nous  a 
aduerris  en  telle  firte  ,  5:  queLidelfuson  y 
va  à  Teftourdie,  qu'on  ne  regarde  ni  à  l'hon- 
neur de  Dieu,  m  à  la  necef^ité  des  poures,  ni 
au  gouiiernement  que  Dieu  veut  tftre  entre 
nous.ie  vous  prie,nc  môftie-on  pas  qu'on  ne 
fjait  que  c'eft  du  gounerncmcat  de  l'EpIifc.» 

Nom 


SVR    LA    I.     A 

Mous  dirons  afleZ)Refortnation,à  pleine  bou 
che:inais(comme  l'ay  défia  deciaie)il  ne  faut 
point  q  Dieu  nous  cnnoye  «les  Anges  du  ciel 
pourdeûouurir  noftrc  tnrpitude:  car  les  Pa- 
piflet,  quelques  ignorans  qu'ils  l'oyent ,  fçau» 
ront  bien  monftrer  la  vilenie  qui  eft  iî  puante 
entre  nous  que  c'eft  vne  }iorreur,que  l'air  mef 
me  en  eft  infcâé.  Et  ainfi  nousToyons  que 
beaucoup  Te  vantent  auiourd'huy  de  l'Euangi 
te,  lefquels  font  plus  grans  ennemis  de  Dieu, 
«jue  s'ils  eAoyent  du  tout  ignorans,  &  que  ia- 
inais  n'euflcnt  goufté  TEferiture  fainûe  :  car 
les  Turcs  pour  le  moins  auront  quelque  reue- 
rence  à  leur  religion  ;  mais  on  s'eft  desbordé 
(ufquei  là ,  qu'on  ne  tient  conte  auiourd'huy 
de  l'Euangile  .  Il  eii  vray  que  les  Papiftes  fe- 
ront bien  enragti  iiifques  là.qu'ils  ne  fe  vou- 
dront nullement  ranger  à  ce  qui  eft  contenu 
en  la  parole  deDieurmais  quoy  qu'il  en  foit, 
û  i:aL,t-il  qu'ils  ayent  ce  principe.que  l'Efcri- 
ttlre  fainûe  doit  auoir  fon  cours.  Ils  la  defgai 
iënc,iis  la  prophanent,  tellement  que  tout  eft 
confus  entr'cux  :  Se  fi  eft-ice  toutesfois  qu'ils 
ont  torreur  de  dire  qu'on  fedoyue  ainfi  def- 
border  contre  Dieu,pour  ne  rien  fuyure  de  ce 
qu'il  commande.  Mais  de  noftre  collé,  quand 
onaura  ouy  tout  ce  que  Dieu  ordonne.qu'on 
l'aura  entendu  pleinement,  que  tout  aura  cité 
déchiffré  par  Je  menu,  on  n'en  fera  q  torcher 
fa  bouchc.ou  pluftoft  le  mufeau.car  telles  gés 
ne  font  pas  dignes  d'eltre  reputez  créatures 
humaines ,  mais  ce  font  chiens  maftins  qui  fe 
font  desbordct  en  vne  impudence  plus  vilei- 
ne.que  n'tft  celle  des  putains  de  bordeau.  Or 
fi  faut-il  neantmoins  que  nous  cognoifbions 
que  ceci  eft  efcrit  pour  noftre  inftruftion,  ou 
bien  Dieu  nous  le  tera  (entir  à  noftre  ruine, 
quand  nousneluy  aurons  point  voulu  eftre  fu 
iets  pour  luy  obéir.  Or  cependant  faintl  Paul 
idlou(ït:,(^Hc  ceux  tjui  auron  t  bien  adminijirr, 
t'acquerront  -vnhoniifgré ,  (;r  liherté  en  la  foy 
t^i  ejl  en  nffirc  Seigneur  ic- fus.  Et  cependant 
aufsi  ilmet  que  l'examen  des  Diacres  s'eften 
de  lufques  à  leurs  femmes,  &  à  leurs  maifons. 
Or  ie  vous  prie,  s'il  faut  que  la  femme  d'vn 
Diacre  foit  modefte  en  fa  vie,  qu'elle  fe  con- 
duifc  paifiblemcnt ,  qu'elle  ne  foit  point  lan- 
garde.iii  addonnce  à  babil. q  fcra-ce  de  l'hô- 
me  qui  eft  en  office  public  ?  La  femme  n'(ft 
point  en  charge  publique  comme  fon  mari,  fi 
faut-il  neStmoins  qu'elle  refponde,  &  qu'elle 
cognoifle  que  Dieu  ayît  appelé  fon  mat i  en 
l'eftatjc'eftà  fin  qu'elle  fe  conforme  i  luy 
pourdonner  bon  exemple.  Si  donc  l'eïamen 
des  Diacres  va  lufques  à  la  temine ,  que  fera- 
ce  de  l'homme  proprc.'Mais  ce  fera  de  la  fem 
me  autant  que  du  mari, que  la  femme  fera  vne 
diableflè  pour  difsiper,&  Je  mari  fera  vn  hom 
tne  plein  de  cruauté,  au  lieu d'auoir  quelque 
Jiumanité  en  foy.  Et  puis  il  n'y  aura  nulle  re- 
ligiô,^u'il  ne  fçaura  que  c'eft  de  Dieu:&  tout 
cela  s'enueJoppeen  teJmcflinge,  ou  pluftoft 
««fulîon  infernale,  comme  elle  eft  enue  ceux 


T  I  M  O  T  H. 


'î» 


qui  fe  vanteront  d'auoir  l'Euangile  ,  8e.  n'en 
ont  ricn.lJ  eft  vray  que  ces  paroles  nous  poor 
ront  fembler  vnpcu  dures, quâd  il  en  eft  par» 
léimais  fi  faudra-il  q  ceci  noui  foit  mit  au  de- 
uant  au  dernier  iour  ,  quand  nous  ne  l'aurona 
point  cognu  durant  noftre  vie  .  Et  cependant 
ilnousfaut  noter  ce  que  dit  fainâ  Paul,  Q_u.e 
les  Diacres  s'acquerront  vne  bonne  liberté 
enla'foy  de  lefas  Chrift,  &vnbon  degré, 
ayans  bien  adminiftré.  Il  eft  vray  que  ceci  ne 
fc  pourroit  pas  déduire  tout  au  long  pour  ce 
iour,  mais  il  fuffira  d'auoir  entendu  en  brief 
l'intention  de  fainû  Paul.  Et  en  premier  Jieti 
notons  que  les  Papiftes  ont  corrompu  fotte- 
ment  ce  paflage.quand  ils  ont  dit.QJi^vn  Di» 
cre  qui  aura  bien  exercé  fon  office,  l'acquer- 
ra bondegréde  Prcftnfe.  Et  voila  pourquoy 
quand  ils  veulét  faire  des  Preftres,  il  faut  que 
ils  ayent  eftéauparauant  Sou -diacres  &  Dia- 
cres. Or  pourquoy  eft-ce  que  les  Papiftes  in-» 
ftituent  les  Diacres?  c'eft  pour  iouer  vn  badi- 
nage,  tout  ainfi  que  des  bafteJeurs  .  Car  ceur 
qu'ô  fait  Diacres  &  Sou-diacres  en  la  Papau 
té,cft-ce  pour  auoir  le  foin  des  poures,&pour 
diftribuer  les  aumofnes  ?  Nenni  :  mais  en  1» 
Mefle  ils  feront  là  reucftus,&  ioueront  la  far 
ce  auec  le Preftre.Et  puis,  ont-ils  ioué  vn  tel 
badinagc  ;  on  les  fait  Preftres  puis  après.  Er 
n'eA-ce  point  par  trop  fe  mocquer  de  Dieu» 
Car  faintl  Paul  n'a  pas  entendu  que  les  Dia- 
cres dcuflcnt  eftre  Pafteurs  d'Eglife  ,  il  s'en 
faut  beaucoup.  Vn  homme  qui  fera  propre  i 
l'office  de  Pafteur ,  ne  pourra  pas  eftre  Dia- 
cre ,  &  ne  fera  pas  idoine  pour  diftribuer  les 
aumofnes.Et  auf  ii  à  l'oppofite.il  y  en  a  beau- 
coup qui  pourrôt  auoir  le  foin  des  poures,  lef 
quels  ne  feront  point  pour  enfcisner.  I J  faut 
donccognoiftre  ce  que  Dieu  a  donné  à  cha- 
cun.Mais  fainû  Paul  aufsi  par  ce  mot  de  De- 
gré,n'a  pas  entendu  la  Preftrife  ne  l'office  de 
Pafteur ,  mais  il  a  voulu  dire  que  ceux  qui  fe 
gouverneront  bien,  feront  en  plus  grande  au- 
thorité. Comme  quand  vn  homme  s'eft  porté 
en  fon  eftat  fideJemct,&  qu'il  a  monftré  qu'il 
dcmandoit  de  feruir  à  Dieu  ,  &  s'acquitter  en 
bonne  confcience,  iJ  n'y  a  nulle  douce  que  lec 
mefchâs  mefmes  feront  confus  en  vn  tel  per 
fonnage,  &  faudra  qu'il  foit  honoré,  voil* 
donc  vn  bon  degré ,  ait  S.  Paul,  qu'ils  auront 
acquis.  Et  puis  il  adioufte  aufsi  bien  la  liberté 
<jui  tji  tn  ïefu$  chrijl.  En  quoy  il  fignifie  qufr 
ceux  qui  ne  s'acquittent  point  de  leurdeuoir 
&  de  leur  charge,  il  faut  qu'ils  foyenten  fer- 
uitude  :  car  toufiours  on  leur  viendra  repro- 
cher,Et  qui  es-tu'C^uandvn  homme  fera  def 
bordé, &  qu'il  aura  quelque  note  d'infamie,0M 
qu'il  y  aura  en  Juy  des  fautes  fi  lourdes  qu'on 
les  puifle  mettre  audeuant.il  ne  pourra  ia- 
mais  s'acquitter  de  fon  deuoir,pour  la  crainte 
qu'il  aura  des  reproches  qu'ô  luy  pourroit  fai 
re  pour  fcs  vices.  Ainfi  doc  il  ne  fe  faut  point 
esbahir  fi  ûinft  Paul  donne  plus  grande  liber 
U  jceiu  qui  auront  bien  exerté  l'office  eftâs 

J.iiii. 


ici 


SERMON    XXVI. 


Diacres.  Et  nous  voyons  l'expérience  de  ce- 
la:non  pas  que  ces  choies  fe  puifTent  manite- 
.nant  defpeîcher ,  mats  qu'il  nous  fuflîfe  cjue 
S.Paul  ayant  parlé  des  rcrames  tant  des  Pa- 
fleurs  comme  des  Diacres ,  nous  a  déclaré  en 
quelle  recômandation  Dieiia  rhonneilecéde 
fon  Eglife ,  &  que  rien  ne  foit  confus  entre 
nous.  £t  fur  cela  il  nous  monflre  comme  nous 
dcHons  eftre  pnidens  àchoiiîrgens  qui  fc  por 
tent  côme  il  appartient,  tant  pour  anoncer  la 
doiîtrinede  falut ,  que  pour  fubuenir  aux  po- 
ures:  &que  les  temmes  aufsi  regarder  de  leur 
cofté  de  s^en  acquitter  .  Car  côme  fainft  Paul 
veut  qu'en  l'eledlion  on  ait  prudence  &  aduis, 
aul'si  il  monftre  la  leçon  à  ceux  qui  font  choi 
lis  &  ordonnez  en  cert  ellat.  Q^e  donc  ceux- 
là  aduifent  de  cheminer  en  telle  crainte  &  fo 
licitude,  qu'ils  édifient  par  leur  bon  exemple 
l'Eglife  de  Dieu  :  &  que  les  femmes  aufsi  s'ac 
cordent  àcela,  &  qu'il  y  ait  vne  telle  corre- 
fpondace.quc  quand  on  ne  pourra  pas  mefdi- 
redcs  Pafteurs  &  Diacres ,  qu'on  ne  fe  iette 
point  pour  mefdire  de  leurs  temmes, &  que  la 
parolede  Dieu  ne  foit  point  vilipendée  par 
ce  moyen-la. Ainlî  donc,  que  les  femmes  tant 
des  Parteurs  comme  des  Diacres  notent  bien 


ce  qui  eft  ici  dit,d'cftre  graues  A:  pofees,  &  n' 
eftre  point diflolues.  Car  combien  que  cela 
doyue  eftre  commun  à  toutes  femmes  fidèles, 
neantmoins  il  faut  que  les  femmes  des  Pa- 
fteurs &  Diacres  foyent  comme  des  miroirs» 
&  qu'elles  édifient  par  leur  bon  exemple  tout 
le  refte:  que  fi  elles  ne  le  font,  tant  moins  fe- 
ront-elles excufables. Voila  donc  ce  que  nous 
auons  à  retenir  en  attendant  que  le  refte  fe 
deduile. 

O  R  nous-nous  profterneronsdeuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes, le  priant  qu'il  luy  plaife  nous  gou- 
uerner  tellement  que  noftre  vie  s'addonne 
à  le  feruir&:  honorer  Icloii  fa  fa infte  paro- 
le ,&  qu'eu  gemilTint  pour  les  otfenfes  que 
nous  auons  commii'es,nous  recourions  à  fa  mi 
fericorde,  pour  en  obtenir  pardon  :  voire  & 
pour  en  eftre  feparez  tout  le  temps  de  noftre 
vierc&qu'il  nous  lupporte  cependant  que  nous 
trauaillerons  fous  le  fardeau  de  noftre  chair 
&  de  noftre  nature  corrompue  ,  &  que  nous 
aurons  à  batailler  contre  nos  vices. Q_u^  non 
feulement  il  nous  face  cefte  grâce,  mais  »ufsl 
à  tous  peuples  &  nations  de  la  terre,&c. 


SEPTIEME     SERMON      SVR      LE 

TROISIEME      CHAPITRE. 

14  le  tcfcri  ces  chofesjoyant  efperance  que  ie  Viendray  en  hrief 

atoy: 

1 5  Afiyi  que  tuf  caches,  Jï  ic  tarde,  comment  il  faut  conucrjèr  en 
la  maijôn  de  DiÇH,qui  cjî  l'EgliJc  de  Dieu  Vmant,  colomne  (f  fermeté 
de  "vérité. 

'  Ous  aHons  vcu  la  fainftcté  leur  ofSce.ont  la  bouche  clofe,qii'il  n'y  a  nul 
I  &perfeftion  que  faind  Paul  le  authonté  en  eux, &à  bon  droit  on  s'en  peut 
requeroit  en  tous  ceux  qui  mocquer,  &  s'ils  ont  encores  quelque  bouffée 
ont  quelque  charge  publi-  de  hardiefle  ,  cela  ne  dure  point  :  &  quand  ils 
que  en  l'Eglife  de  Dieu  :  là  feroyent  les  plus  hardis  du  mode, fi  cft-ce  que 
dcflîis  auAi  nous  auons  veu  ils  n'ont  point  de  grauité,  en  forte  que  la  do- 
la  concluiion  qu'il  faifoit,  urine  fou  bien  receue  .  D'autant  plus  done 
<)ue  ceux  qui  fe  portent  loyaumêt  eu  ceft  of-  ceux  qui  font  appelez  en  ccft  eftat,  (e  doyuét 
fice,acquiereBtauthorité,&  ont  aul"si  plus  de  appliquer  .à  bien  faire  en  leruant  fidèlement 
hardiefle  en  la  foy  qui  eft  en  noftre  Seigneur  à  Dieu  &  au  bien  commun  .  Mais  en  ceci  nous 
lefus  Chrift. Or  faincl:  Paul  parlant  ainiipre-  voyons  quelle  honte  nous  deuons  auoir  de 


fuppofe  qu'il  y  ait  bon  ordre  &  pohce  au  peu 
pie  de  Dieu  .  Car  quand  cela  eft  ,  ceux  qui  fe 
font  acquittez  fidèlement ,  font  aufsi  en  hon- 
neur,&  les  recognoift-on  pour  leur  porter  re 
uerence.Orce  n'cft  point  pour  exalter  les 
perfonnes,  mais  afin  que  telles  gens  ayét  plus 
grand  moyen  &■  taculté  de  feruir  à  Dieu,  que 
on  les  efcoute  ,  qu'on  reçoyue  confcil&.ad- 
monition  d'eux,  qu'ils  puifllnt  remédier  aux 
maux  quand  Us  les  verront.  Voila  où  laïucl: 


noftre  eftat  .  Car  tant  s'en  faut  que  les  bons 
l'oyent  auiourd'huy  honorez,*:  qu'ils  acquiè- 
rent quelque  reuerence,  afin  qu'on  les  efcou- 
te, qu'aucontraire  il  n'y  a  que  ks  mefchan'! 
qui  ayent  la  vogue,  &  qui  foyent  redoutez,  & 
qi>i  ayent  tout  crédit .  En  cela  ,di-ie,  nous 
voyons  que  les  choies  font  par  trop  contulf  s 
entre  nous  .  Où  fera  donc  auiourd'huy  la  li- 
berté? Non  pas  en  la  foy  ,  mais  en  tout  mal, 
entre  ceux  qui  font  du  tout  endurcis,  telle- 


Paul  a  prétendu  .  Or  nous  auons  touché  en     ment  qu'Us  n'ont  plus  nulle  honte  .  Et  quand 
brief  que  ceux  qui  ne  font  point  dcuemeut     ils  vDycnt  qu'on  leur  permet  tout  ce  que  leur 

appétit 


SVR    LA   I.    A   TIMOTH. 


IÎ3 


•ppetit  porte.il  leur  femble  que  tout  leur  Toit 
licite. Il  n'y  a  plus  neloy  ne  raifon  pour  eux, 
ni  hônefteté.ni  hôteaucune:  cela  eft  par  trop 
commun. Cependant  les  bons  font  opprimez, 
&  u'ofent  fonner  mot .  S'il  y  a  qucltjn'vn  qui 
reprencle  mal ,  &  qui  tafctie  de  réduire  les 
chofes  à  bien.il  fera  aflailii  de  tous  cofte2,on 
J'abbayera,on  ne  tafchera  nu'à  le  mordre.voi 
re  i  le  confumer  du  tout  :  tellement  que  tous 
ceux  qui  veulent  feruir  à  Dieu, A:  qui  défirent 
que  les  chofes  aillent  bien, font  bays&mole- 
ftez  du  tout .  Voila  à  quelle  enormité  nous 
femmes  venus.Au  refte,  nous  n'en  voyons  pas 
beaucoup  qui  foyent  empefchez  pour  mainte 
nir  la  bonne  querele:  car  chacun  trahit  la  vé- 
rité :  on  lailFe  aller  les  chofès  le  pis  qu'elles 
peuuent,  &  nous  fommes  au  temps  dont  par- 
j»  loit  le  Prophète  Ifaie ,  Que  la  droiture  &  e- 

"V"    ■     quité  font  dechaflêes  du  milieu  de  noas,&  n'y 
-  aperfonnequi  aitzeledes'oppoferaumal.II 

ei\  vray  que  chacun  dira  ce  qui  en  elh-  mais  ce 
pendan t ce  n'eft qu'en  cachette, &  il  femble 
qu'on  ait  confpiré  de  nourrir  lemal.&del'a- 
mener  iufques  au  comble .  Cependant  lire  & 
la  maledi£tion  de  Dieu  non  feulement  fe  nour 
rit  entre  nous, mais  elle  s'enflïme.Ainfi donc 
par  ce  paflàge  de  fainft  Paul  nous  voyons  que 
tout  eftpcruerti,&  que  tant  s'en  faut  que  no* 
ayons  Eglife,  qu'on  peut  appejceuoir  tout  le 
contraire  entre  nous  .Car, ceux  qui  chemi- 
nent comme  il  appartient  ,&  qui  s'efforcent 
de  ieruir  purement  à  Dieu,  tant  s'en  faut  que 
par  ce  moyen-la  ils  acquièrent  plus  grande 
liberté  ,  qu'on  les  marque  comme  ennemis, 
qu'on  ne  demande  fînon  à  leur  mettre  le  pied 
£ir  la  gorge. Et  aucôtraire.nons  voyons  5  les 
mefchans  côme  beftes£âuuages font  tout  ce 
qu'ils  veulent, &  qu'on  les  craint,  &  qu'on  les 
ledoute,  &  que  ceffe  licence  qui  leur  eft  don  - 
née,  eftcaulède  le?  rendre  tant  plus  hardis. 
Voyans  donc  vne  telle confuiîon  ,  n'auons- 
nous  point  occafion  de  gémir  &  auoir  honte 
de  nous,cognoiflans  que  Dieu  n'y  règne  nul- 
lement, mais  le  diable  en  a  pleine  poflefsion.' 
Allons  maintenant  nous  vanter  d'auoir  TE- 
uangile  de  Dieu.  Vray  eft  que  fâ  parole  eii  i- 
ci'pre{chee:mais  cependant  ne  voit-on  pas  le 
mefpris&la  moquerie  toute  pleine  ?  Or  tant 
y  a  que  les  hommes  auront  beau  s'endurcir 
contre  Dieu  ,  fi  faudra-il  que  cefte  doftrine 
demeure,&  qu'elle  nous  foit  prefchee  en  tef- 
moignage,&  qu'au  dernier  iour  ceci  nous  foit 
ramentu.finon  que  Dieu  s'auance  :  comme  ie 
Redoute  point  que  fa  main  ne  foit  prochaine 
pour  nous  chafticr  &  reformer .  Or  il  y  a  ce- 
pendant ce  que  famft  Paul  adioufte,  qu'il  t  f- 
crit  ces  chofes  àTimothee,  a/»<j»*  s'il  tar- 
dait de  venir,  qur  Timothee  cognolffe  comme  il 
fe  doit  porter  en  la  mai  fonde  Dieu  .  Yci  fainct 
Paul  l'exhorte,  Se  en  fa  perfonne  tous  fidèles, 
de  chï-miner  en  grande  crainte  &  Iblicitude, 
quand  il  eftqueftion  du  régime  fpirituelde  1' 
Eglife. Et pourquoy  ?  Cii lamaifon  de  DiVi* 


(dit-iU  où  il  habite,  tjt  U  feufienimiut  de  f* 
■vérité.  Voici  deux  titres  qui  font  honorablex, 
tellement  qu'il  n'ert  point  queftion  de  nou» 
iouer  quand  noftre  Seigneur  nous  appelle  à 
le  feruir  en  ceft  cftat  dont  fainft  Paul  a  parlé. 
Il  faut  bien  donc  que  nous  craignions  de  fail 
lir  ,  puis  que  Dieu  nous  fait  ceft  honneur  de 
nous  donner  le  gouuernement  defamaifon, 
voire  en  laquelle  il  refîde,&  veut  que  fa  ma- 
ieilé  foit  cognue  ,  &  laquelle  foit  comme  l'e- 
ftuy  où  fa  vérité  foit  gardée,  afin  qu'elle  foit 
maintenue  &  confcruee  en  ce  monde.  Quand 
donc  cela  y  eft ,  ne  faut-il  pas  que  ceux  que 
Dieu  a  ainfi  honorez, tréblent,  &  qu'ils  foyée 
vigilans  pour  exercer  la  charge  qui  leur  eft  c5 
mife?  Ainfi  donc  nous  voyons  quelle  eftl'in- 
tention  de  fainô  Paul.  Or  deaant  que  pailcr 
outre,  il  nous  eft  expédient  de  rêpouflèr  l'inr 
pudence  àtf,  Papiiles  qui  abufent  de  ce  paUà- 
ge^our  eftablir  leur  tyrannie .  Car  quand  ils 
ont  bien  magnifié  l'Eglife  deDieu,il  lenr  fen» 
ble  que  tout  eft  gagné  pour  eux  .  Or  il  fau— 
droit  en  premier  lieu  qu'ils  prouuaflfènt  que 
c'eft  l'Eglife. Et  tant  s'en  faut  queparcepaf 
fage  ils  le  puifTent  monftrer,  qu'ils  font  con- 
uaincusde  l'oppofîte. Pourquoy?  11  eft  du  par 
S.  Paul,  Que  l'Eglife  eft  la  raaifon  de  Dieu, 
Or  ils  ont  dechalïe  iioftre  S'eigneur  lefus 
Chrift,  tellement  qu'il  ne  règne  point  an  mi- 
lieu d'eux,  voire  à  telle  condition  qu'il  a  efté 
eonftitué  Roy  de  Dieu  fon  Pere:car  c'eft  afin 
que  nous  luy  facions  hommage,  nous  rangeas 
du  tout  à  fa  doftrine.  Afçauoir  fi  les  Papiftcs 
permettét  à  lefus  Chrift  de  les  gouuuerner  pa 
rement  &  paifibicment?  Mais  aucontraire,  ils 
veulét  forger  ce  que  bon  lenr  femble, &  qu'on 
reçoyie  tout  pour  articles  de  foy.  Ils  meflét, 
ils  brouillent,  &  confondent  la  doftrine  de  1^ 
Euangile  parmi  leurs  fonges  qu'ils  ont  con- 
trouuez.  Ainfi  donc  on  voit  bien  que  ce  n'eft: 
point  la  maifon  de  Dieu  qu^vne  telle  fynago- 
gue  dont  lefiis  Chrift  eft  dechafle  .  Or  il  y  » 
aiifii  ce  que  S.  Paul  adioufte,  K^ueTtgU/e  doie 
fnuflenirla  vérité  Je  ''  ieu.  Or  maintenait  ojï 
voit  qu'elle  eft  opprimée  fous  la  tyrannie  di» 
Pape:  on  voir  que  les  méfbnges  régnent  là  du 
tout, qu'il  n'y  a  qu'erreurî.corruptions  &  iàa 
latrie»;. Puis  qu'ainfî  eft.on  peut  bien  conclure 
qu'il  n'y  a  nulle  Eglife  de  Dieu.  Voila  que  1er 
Papiftes  auront  profité, quand  on  leur  accor- 
dera tout  ce  qu'ils  demâdent  touchant  l'Eelr 
fe  de  Dieu.  Mais  encores  nous  faut-il  pafier 
plus  outre  :  car  S.  Paul  n'a  pas  entendu  ce  que 
les  Papiftes  imaginée,  c'eft  à  dire  que  l'Eglife 
nepuifTe  errer, d'autant  qu'elle  eft  gouuernee 
par  le  S.Efprit,&qne  tout  ce  que  bon  luy  fen* 
blera,doit  eftre  leceu.Mais  auc5traire,fain£l 
Paul  attribue  ce  titre  à  rEglife,qu'elle  eft  cô- 
me fa  fermeté  .  d'autant  que  Dieu  veut  que  f» 
vérité  foit  prefchee  par  la  bouche  des  homes: 
&  a  inftitué  ce  miniftere  de  fà  parole, afin  que 
nous  cognoifsions  fa  vol5té,&;  qu'elle  ne  puif 
fe  point  eftre  airaehee  d'entre  nous.d'autaor 

v.i. 


iî4 


SERMON     XXVI. 


que  Dieu  vfe  d'vn  tel  moyé.afïn  que  fa  vérité 
fait  cogiiue  des  homes,  &  que  d'aage  en  aage 
on  la  reçoyue. Voila  pourquoy  il  eft  dit  q  l'E 
glife  eil  le  pilier  .  Or  les  P.ipiftes  au  rebours 
prenét  occafîon d'enfeuelir  la  doftrine  de  TE 
uangile,  quand  ils  difent  que  PEglil'e  ne  peut 
crrer:Aduirons,difent-ils,  que  Dieu  nous  in- 
fpirera:  &cepédantilsdelaiirent  la  parole  de 
Dieu,&  leur  femble  qu'ils  Ce  pequent  efgarer 
çà  Se  là,&  quand  ils  le  forgeront  quelque  clio 
fe,q  cela'ne  peut  eftre  mauuais.  Et  pourquoy? 
Hojl'Eglil'e  ne  peut  errer. Voue, mais  aucon- 
rraire,  regardes  à  quelle  condition  noftre  Sei 
gneur  a  honoré  fon  Eglife ,  corne  il  efl  ici  dit 
par  S. Paul. Ce  n'eft  point  d'autât  qu'il  met  la 
bride  fur  le  col  aux  hommes, pour  dirc,Inuen 
tez  ce  qui  vous  viendra  en  phatafie:mais  il  les 
tient  liez  &  obligez  à  fa  parole,  corne  il  en  eft 
«T  .  ^  parlé  au  Prophète  Ifaie,Voici,ravmisraa  pa 
■'  rôle  en  ta  bouche,&  de  tes  enrans,  &.de  toute 

ta  lignée  d'aage  en  aage  à  perpétuité. Cornent 
donc  cfl-ce  que  Dieu  promet  qu'il  régnera  au 
milieu  des  iicns?  Ce  n'eft  pas  qu'en  difant  que 
il  les  doit  infpirer  ,  fur  cela  ils  fe  proniettent 
&  fc  donnent  congé  de  forger  des  s,rticles  de 
foy.N:)n:  mais  il  du  qu'il  mettra  fa  p.iroleen 
la  bouche  de  noftre  Seigneur  lelus  Chrift ,  & 
de  ceux  qui  deurôt  prefcher  en  fon  nom.  Car 
cette  promeffe-la  n'eft  point  faite  pour  le 
téps  de  la  Loy,  mais  elle  eft  propre  à  l'Eglife 
Chrefticnne,  Se  doit  durer  iufques  en  la  Hn  du 
monde. Et  ainfi  nous  voyôs  maintenant  côme 
l'Eglife  doit  eftre  le  pilier  pour  fouftenir  l.i 
venté  de  Dieu.  Ce  n'eft  point  que  Dieu  vuejl 
le  defcédre  du  ciel, qu'il  nous  vueille  aufsi  en- 
uoyer  des  Anges  qui  nous  apportent  des  reue 
lations  de  là  haut:mais  il  veut  eftre  manifefté 
par  {3.  parole:5:  pour  cefte  caufe  il  a  voulu  que 
il  y  ait  des  Pafteurs  en  l'Eglile  qui  anoncent 
fa  verité,&par  lefquels  on  foit  enfeigné.N'i- 
uons-nous  point  donc  cela.'nous  n'auons  plus 
d'Eglife  de  Dieu  ,  mais  nous  fommes  coulpa- 
bles  d'auoir  anéanti  fa  vérité,  entant  qu'en 
nous  eft  ,  nous  en  fommes  traiftres  &  meur- 
triers.Et  pourquoy?  Car{c5me  i'ay  déclare) 
Dieu  pourroif  bien  maintenir  fa  vérité  d'vne 
autre  façon  qiland  il  luy  plairoit  ;  car  il  n'eft 
point  attaché  à  ces  moyens  intérieurs, &  fi  n'a 
nul  beloin  de  l'aide  des  hommes:  mais  tant  y 
a  qu'il  veut  que  fa  vérité  foit  cognue  par  la 
prédication  qui  eft  faite  côine  il  a  commandé, 
&  qu'il  veut  que  ceft  ordre  s'obferue.  Eft-il 
ainiî?quand  nous  voudrions  quitter  la  predi- 
cati5,que  leroit-ce?  ne  fcroit-ce  point  eftein 
dre&:  anéantir  la  verué  entant  qu'en  nous  fe- 
R.om.1.  """'t'Il  eftdit  que  l'Euangilc  (côme  il  fe  prcf 
j^_  che)eft  la  vertu  de  Dieu  en  faliit  à  tous  croy- 

ans. Et  cornent  cela?Ert-ce  que  Dieu  n'a:t  au- 
tre vertu  iinon  en  cefte  voix  des  homes, &  en 
ce  fon  qui  s'efcoulc  en  l'air?  Nenni:inais  tant 
y  a  que  Dieu  a  iiiftitué  ceft  m.ftrumét-la,  afin 
que  quand  nous  voudrions  eftre  reftaurezpar 
i'j.  vertu, nous  venions  ouir  û  parole  en  toute 


reuerence,&  alors  nous  fcntirons  que  la  do- 
ftnne  n'eft  point  vaine  ni  inutile, mais  qu'elle 
aura  fon  erfecl  ,&  qu'il  la  fera  valoir  pour 
nous  appeler  à  la  vie  éternelle. Or  la  foy  viét 
derouyc(commefaind:  Paulenparle)&:no'is  R<""-lO« 
fçauons  quec'eft  la  foy  qui  viuifie  nosa...es,  '7- 
lelquelles  autrement  font  mortes  &:  perdues. 
Ainfi  notons  bien  le  fens  naturel  de  fainft 
Paul. Car  de  là  nous  pouuons  cognoiftre  com 
bien  les  Papilles  font  effrontez  &  brutaux  de 
alléguer  ce  partage  pour  eftablir  vne  tyran- 
nie qui  eft  eieuee  tout  au  rebours  de  ce  que 
fainct  Paul  a  ici  entendu.  Cependant  ce  n'cfl 
point  affez  que  nous  ayons  dequoy  redar- 
guéries  Papiftes,  mais  il  nous  faut  aufsi  eftre 
édifiez  par  la  dodrine  qui  eft  ici  contenue. 
Zt  ainfi  en  premiei'  lieu  ,  que  ceux  qui  ont  la 
charge  d'anoncer  la  dodrine  de  l'Euangile, 
regardent  bien  à  eux  de  près.  Et  pourquoy? 
Car  lis  font  conftituez  en  la  niaifon  de  Dieu 
pour  la  gouuerner.  Si  vn  homme  mortel  fait 
ceft  honneur  à  quelqu'vn  de  luy  remettre  la 
garde  &  conduite  de  fa  maifon,  &de  tout 
fon  bien  d'autre  ne  fera-il  point  lalche  s'il  ne 
s'acquitte  comme  il  pourra,  &  qu'il  ne  mette 
toute  peine  de  conuerfer  en  forte  que  celuy 
qui  s'eft ainfi  fié  en  luy,  ait  occafionde  s'en 
contenter?Mais  fi  vn  prince  ordonne  vn  mai- 
ftre  d'hoftel ,  celuy-la  ne  fera-il  poirit  enco- 
res  plus  tenu  de  l'acquitter  loyaument  ?  Or 
voici  le  Dieu  viuaiitqui  ordonne  en  fa  mai- 
fan  &  en  fon  temple  ceux  qui  doyuent  anon- 
cer  fa  parole  comme  fes  procureurs  :  il  veut 
qu'en  fon  nom  ils  conduifcnt  le  pcuple,&  que 
ils  portent  le  melïàge  de  falat.  le  vous  prie, 
quand  cela  eft, quelle  fohcitilde,  quelle  crain- 
te y  doit-il  auoir  ?  Et  ainfi  que  ceux  qui 
font  ordôncz  miniftics  de  la  parole  de  Dieu, 
cognoiffcnt  qu'ils  n'ont  point  feulement  af- 
faire aux  hommes,  Se  qu'ils  ne  regarder  point 
à  l'honneur  &  à  la  dignité  de  l'office  pour  fe 
eleuer  ,  mais  pluftoft  qu'ils  cognoiflent  que 
tant  moins  auront-ils  d'excufe,  s'ils  ne  che- 
minent droiteinent,  c?c quec'eft  vn  horrible 
facrilegc,  &  qu'il  leur  eft  apprefté  aufsi  vne 
terrible  vengeance  ,  finon  qu'ils  tafchentde 
feruir  à  Dieu  comme  ilappartiét. Voila  donc 
comme  en  premier  lieu  nous  fommes  exhor- 
tez de  faire,noftre  office,  en  forte  que  félon 
que  Dieu  nous  a  voulu  honorer ,  voire  qui  en 
citions  plus  qu'indignes,  de  noftre  cofte  nous 
tafchions  à  refpondrc  à  noftre  vpcation  .  Or- 
cependant  il  y  a  ici  vne  doiitrine  commune  à 
tous.  Car  quand  l'Egl'.fe  tft  nommée  la  mai- 
fon de  Dieu  v;«.iHt,cela  nous  doit  bien  cfiieil- 
1er,  afin  que  nous  cheminions  autrement  que 
nous  ne  fîiifons  pas.  Car  qui  eft  caufe  de  nous 
faire  ainfi  endormir  en  nos  vices ,  &•  de  nous 
y  flatter,  ou  bien  que  nous  faifons  tant  peu  de 
fdupule  de  nou'.  prophaner,  qu'vn  chacun  fe 
cigare  ,  &  que  les  dillolutions  s'augmentent 
de  plus  en  plus  ,  finon  qu'il  nous  femble  que 
Dieu  ne  nous  voit  pas ,  que  nous  fommes  ef- 

longnea 


SVRLAI.    A     TIMOTH. 


I?)' 


V 


lonçnezdefa  prefence  ,  &  que  noiiç  fommes 
loin  de  noitre  Seigneur  Icfiis  Chrjft?  Etainiî, 
d'autant  nous  faut-il  plus  noter  ce  mot,  que 
la  parole  de  Dieu  Ce  prcfche  entre  nous,  que 
Dieu  y  habite  ,  qu'il  nous  eft  ici  prefent,& 
qu'il  preiîde  en  noftre  compagnie:  comme  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift  prononce  ,  Qjielà 

Hat. iS.  où  deux  ou  trois  feront   aflemblez  en   fon 
2-0.         nom,  il  eft  au  milieu  .  Or  nous  fçauons  qu'en 

C»/.i.p.  luy  habite  toute  plénitude  de  diuinité.  Ainfi 
donc ,  toutesfois  &  quantes  que  le  Diable 
tafchera  de  nous  endormir,  &  que  nous  fe- 
rons attachez  aux  vanitcz  de  ce  monde, que 
noftre  chair,  félon  qu'elle  tire  toulîours  bas, 
nous  trainera  en  fes  mefchantes  cupiditez, 
que  cefte  fentence  nous  viene  au  deuant&en 
mémoire,  que  Dieu  habite  au  m'iieu  de  nous, 
&  que  nous  fommes  famaifon.Ornotons  que 
Dieu  ne  peut  habiter  en  lieuprophane,famai 
fon  n'elt  point  vn  cftable  à  pourceaux, mais  il 
faut  qu'il  ait  vnem.ufon  facree  &vn  temple. 
Et  comment  cela  ?  Ho,  il  n'eft  point  quefKon 
que  mus  foyons  parez  de  pompes  qui  relui- 
fentdeuant  les  hommes:  car  Dieu  ne  prendra 
point  plaifîr  à  toutes  ces  vanitez  du  monde: 
mais  il  faut  que  nos  ornemens  foyent  fpiri- 
tuels,  que  nous  foyons  reueftus  des  grâces  de 
fon  (àinft  Efprit.  Voila  &  l'or,  &:  l'argent.  & 
les  pierres  precieufes  dont  parle  le  Prophète 

ya,6o.(S  Ifaic, quand  il  defcrit  le  templede  Dieu.Ainfi 
donc  apprenons  que  d'.'.utant  que  Dieu  nous 
fait  cefte  grâce  que  ù  parole  nous  foit  pref- 
chee,  c'eft  afin  qu'il  reiîJe  entre  nous,  &  que 
nous  foyons  fon  temple.  Et  pour  ce/le  caui'e 
foyons  aduertis  de  nous  purger  de  toutes  nos 
pollutions  ,  &  d'y  renoncer  ,  afin  que  nous 
foyons  vn  heu  conueaable  à  la  fainftcté  de 
Dieu.  Or  quand  nous  aurons  vne  tjlle  afFe- 
ftion,  ce  partage  nous  doit  bienrefiouir,  veu 
que  noftre  Seigneur  fe  conioint  .i  nous,&  que 
il  veut  faire  (à  relidence  &  en  nos  corps  &  en 
nos  âmes. le  vous  prie, qui  fommes-notis?Po- 
ures  charongnes  ,il  n'y  a  que  pourriture  en 
nous,&ie  ne  parle  point  feulement  du  corps, 
mais  il  y  a  encores  plus  d'infeftion  &  de  pu- 
antifeen  nos  ames,qu'iln'y  a  point  aux  corps 
les  plus  pourris  &  les  plus  ladres  qu'on  i'çau- 
roit  amener.  Or  cependant  voici  noftre  Sei- 
gneur qui  nous  veut  édifier ,  afin  que  nous 
foyons  fes  temples, &  que  fa  maiefté  relîde  en 
nous.  Et  quelle  grâce  eft-ce  là  ?  Ainfi  donc 
(comme  raydit)nou3  auonsbien  occafionde 
nous  confoler  en  ce  paflàgc  ,  moyennant  que 
nous  tendions  àtefte  pureté  qui  eft  aufiire- 
«juife,  d'autant  que  Dieu  veut  que  nous  fuy- 
ons conioints  àluy,  &  qu'il  nous  fanftifie  par 
fon  fainft  Efprit .  Voik  donc  ce  que  nous  a- 
uonsànoteren  ce  paflàge  .  Or  quant  au  fé- 
cond titre,  il  emporte  au  fsi  vne  grande  l'ubftan 
ce,  c'eft  afçauoir  que  l'Eglife  eft  le  filier  & 
frmament,ou  fermeté,  &  eilablilTement  de  Ja 
-venté  de  Dieu  .  Nous  auons  défia  touché  en 
brief,  qu'il  ne  faut  point  que  Dieu  emprunte 


rien  des  hommes  pour  là  nccefsité  .    Dieu 
donc  fans  noftre  moyen  pourra  faire  que  la 
vérité  règne,  mais  il  nous  fait  ccft  honneur 
&cefte  grâce  de  nous  employer  en  vne  cho- 
fe  fi  digne  &  û  prccieufe.  Nous  auons  dit  que 
il  pourroit  ici  mcfmes  nous  instruire, fans  que 
nous  ouifsions  la  voix  de  la  bouche  d'vn  hom 
me  :  il  pourroit  bien  aufsi   nous  enuoyer  fes 
Anges,  comme  il  a  fait  anciennement  à  fes  fer 
uiteurs .  mais  il  nous  appelle  &  recueille  er» 
fon  Eglife,  &  c'cft  là  comme  la  houlette  qu'il 
veut  dreiîèr  entre  fon  troupeau,  c'eft  le  l'ce- 
ptre  royal  par  lequel  il  veut  que  nous  foyons 
gouuernez.  Dieu  donc  nous  a  enclos  fa  véri- 
té en  l'Efcriture  fainfte,&  d'auantage  a  vou- 
lu que  fa  doctrine  nous  foit  prefchee  &  ex- 
pofeeiournellement .  Car  quand  fainil  Paul 
parle  de /«  yen' té  ,  il  attribue  notamment  ce 
mot  à  la  doftrinede  falut  que  Dieu  nous  a  re- 
uelee  en  fa  parole.  Non  pas  qu'il  n'y  ait  aufsi 
vne  vérité  quand  nous  tiendrons  nos  propos 
c6n'uns:car  fi  nous  ne  mentons  point, cela  eft 
vérité  :  mais  d'autant  que  ce  font  chofes  que 
nous  traittons  par  enfemble  ,  iaincl  Paul  dit 
que  la  do^^rine  de  Dieu  (  qui  eft  la  lemence 
incorruptible  dont  nous  fommes  reçenerez 
en  la  vieccicfte)  eft  la  vérité  :  comme^aufsi  il 
en  traittcaux  Colofsiens, quand  il  dit  que  ce  (-•„/ 
eft  l'Euangile  de  filut  qui  eft  la  vérité  de  j,^^   / 
Dieu.  Et  c'cft  comme  tant  de  fois  faincl:  Jean    ,^ 
en  parie.que  quandilveutmagnifierl'Euan- 
gile.il  la  nomme  la  vérité:  comme  s'il  difoit, 
que  fins  cela  nous  ne  fçauons  rien,  que  tout 
ce  que  nous  pouuons  comprendre, eft  friuo- 
le,&:  qu'en  iceluy  feu\  nous  fommes  bien  fon- 
dez &  appuyez  .  Et  de  faiil ,  que  feroit-ce 
quand  ne  recognoilTans  point  noftre  Dieu, 
nous  cognoiftrions  le  ciel  &  la  terre?  Si  Dieu 
nous  eft  incognu  ,  di-ie,  helas ,  ne  fommes- 
nous  pas  plus  que  miferables  ?  Or  tout  âinfî 
que  Dieu  a  imptimé  fon  image  en  fa  parole, 
aufsi  c'eft  là  où  il  fe  reprefente  à  nous  ,  & 
veut  eftre  contemplé  comme  face  à  face,ainfi 
que  lâinft  Paul  en  parle  au  3  &  4.  de  la  fecon 
de  aux  Corinthiens.  Ce  n'cft  donc  point  en 
vain  quefainci:  Paul  attribue  ce  titre  à  la  pré- 
dication de  la  parole  de  Dieu, que  c'eft  la  vé- 
rité. Et  puis  outre  ce  que  nous  auons  déclaré 
oue  Dieu  fe  mon  ftre  là  à  nous ,  c'eft  aufsi  le 
moyen  de  noftre  falut,  c'eft  toute  noftre  vie, 
c'eft  tout  noftre  bien,  c'eft  la  femence  par  la- 
quelle nous  fommes  entendrez    pour  eftre 
encans  de  Dieu,  c'eft  la  nourriture  de  nosa- 
mes  :  brief  nous  fommes  vinifiez  par  la  parc-  lea^.i4. 
le  de  Dieu, comme  il  en  eft  parlé  au  f  .de  (âinft 
lean.  Puis  qu'aiufî  eft,  notons  bien  ce  mot  de 
Vérité  ,  afin   que   nous    prenions  tant  plus 
grandgouftà  la  doôrinc  qui  nous  eft  pref- 
chee. Or  cependant  retenons  aufsi  ce  que 
fainft  Paul  dit,  c'eft  afçauoir  que  la  vérité  eft 
maintenue  entre  nous  , d'autant  que  l'Euan- 
gile fe  prefche  ,  &  que  lei  hommes  font  or- 
donnez à  cela .  En  premier  lieu  ,  nous  fom- 

v.ii. 


i^6 


SERMON      XXVI. 


Mes  mirerableîfcôrnme  nous  auons  dit)fînon 
que  nous  cognoifbiôs  noflre  Dieu.  Le  moyen 
«utl  eft-»l ,  iïnon  que  nous  foufFrions  d'eitre 
cnfeignez  par  fa  parole,puis  qu'il  le  veut  ain- 
fi,  &  qu'il  Ta  ordonne  ?  Ainiî  donc  apprenons 
de  chercher  ce  threior,  &  d'appliquertoute 
noftre  eftude  aie  trouuer:&  quand  Dieu  nous 
fait  la  gracede  nous  l'otfnr.que  nous  le  rece- 
uions  comme  poures  afFamez  ,  &  que  nous  y 
foyonsaddonnez  du  tout:&  quand  il  nous  fe- 
ra louir  d'vn  tel  bien, que  nous  l'oyons  retirez 
des  chofes  de  ce  monde.qui  nous  font  mefpri 
fer  cefte  grâce  ineftimable  de  Dieu.  Voila 
quant  au  premier.Et  puis  pour  le  t'ecôd.d'au- 
tant  que  la  vérité  de  Dieu  ne  peut  point  ré- 
gner en  nous  ,  fi  ce  n'eil  que  l'fuangile  nous 
foit  prefché.prifons  quant  &  quant  cefte  pre- 
dicacion-ci ,  veu  que  Dieu  eit  retiré  d'aiiec 
nous  &  edongné.finon  que  l'Euangile  <e  pref 
che.  Or  li  ceci  eftoit  bien  obferué,  nous  ver- 
rions vne  autre  reuerence  qu'on  ne  tait  pas 
de  la  parole  de  Dieu  &  de  la  doftrine:  Se  qu.1t 
&  quant  nous,ne  ferions  pas  fi  prophanes  com 
me  nous  fommes.Carauiourd'huy  on  nefçait 
que  c'eft  de  l'Eglife.Il  eft  vray  qu'on  le  vante 
ra  alTez  qu'à  Geneue  l'Euangile  le  prefche,  & 
qu'il  y  a  vne  reformation  félon  la  parole  de 
Dieu.  Mais  quoy  ?  cependant  fi  on  vfe  de  ce 
mot  d'Eglife.on  ne  fçait  que  ceû.  Il  eft  viay 
qu'encores  ceux  qui  reciteront  leur  créance 
diront  bien,Iecroy  l'Eglifevniuerfclle.mais 
ils  parlent  vn  langage  qui  leur  eft  comme  in- 
cognu.Les  Papiftes  font  abbrutis  tellement  à 
ce  mot  d'Eglife, qu'ils  font  enforcelez.en  for 
te  qu'ils  ne  difcernent  point  ,&  leur  femble 
qu'ils  font  attachez  à  la  tyrannie  des  homes, 
éc    qu'ils  n'ofent  pas  s'enqucnr  de  l'Egli- 
fe  de  Dieu:maisils  ont  leurs  fottes  deuotions 
aufquelles  ils  fqnt  tellementaddonnez, qu'on 
ne  les  en  peut  diuertir  pour  les  ramener  au 
droit  chemin  de  falut.  Denoftre  cofté  nous 
<lir5s  bien  que  nous  auons  la  parole  de  Dieu, 
mais  nous  ne  fçauons  q  c'eftdece  mot  d'Egli 
fe.nousne  fçauôsquelmoyé  il  y  a  pour  main 
tenir  la  parole  de  Dieu  :on  voit  quel  mefpris 
il  y  a. Il  eft  vray(comine  i'ay  dit)que  la  Parc 
le  fe  prefchera  entre  nous,  mais  quel  côte  eft- 
ce  qu'on  en  tient?on  le  voit.ii  ne  le  faut  ia  di- 
re.Et  puis  cependât,outre,cc  que  chacun  vou- 
.     dra  eftre  fon  doûeur  à  part.il  y  en  a  beaucoup 
qui  lont  faoulsde  r£uangile,&  leur  femble  q 
ils  n'en  ont  que  trop  cognu,  côme  à  la  vérité 
il  y  en  a  trop  pour  leur  côfulion:  car  ils  ferôt 
coulpablcs  au  doiible,entant  qu'ils  auvôt  gou 
fté  les  dons  celelles,&  cependant  ce  feront  de 
tels  contépteurs  côme  on  les  cognoift  :  .ifça- 
uoir  tant  faouK  de  la  parole  de  Dieu  que  plus 
n'en  pcHuent  :  &  on  voit  qu'ils  ne  demandent 
qu'à  reietter  toutehon'  ftetéS:  reutréce, tou- 
te religiô.&quivoudroyétauoir  toutperuer- 
ti,8c  que  nous  fufsions  non  point  comme  des 
Turcs  qui  auront  cncores  vne  reiuréce  .i  leur 
diablerie,  mais  que  nous  fufsions  comme  des 


chiens  ou  des  belles  brutes  {ans  nulle  honne- 
fteté,qu'on  ne  fceuft  que  c'eft  de  Dieu.ne  d'e 
ftre  gouuernez  par  luy.on  voit  cela  tout  no- 
toirement.   Etainfi  tant  l'en  faut  que  nous 
ayons  dequoy  nous  glorifier  en  l'Eglife  ,  8c 
en  l'Euangile  que  Dieu  nous  a  donné.que  ce 
nous  doit  eftre  vne  grande  vergongne  que 
Dieu  nous  efclaire  ainli,&  que  cependît  nous 
foyons  addonnez  à  toute  turpitude, &  que  ce 
nom  d'Euangile  foit  en  opprobre  aux  igno- 
ras &  aux  poures  incrédules. Mais  il  y  a  bien 
pis,  car  nous  fommes  caufe  que  le  nom  de 
Dieu  eft  blafphemé  ,  &  qu'on  fe  mocque  de 
l'Euangile.Au  refte.fi  nous  fçauions  faire  no 
ftre  profit  de  ce  qui  eft  ici  contenu  ,  nous  au- 
rions à  nous  efiouir  tant  &  plus ,  quand  nous 
voyôs  que  Dieu  veut  que  fa  vérité  foit  main- 
tenue  par  le  moyen  de  cefte  prédication. 'Voi 
la  les  hommes  qui  n'ont  en  eux  que  menfon- 
ge,  mais  Dieu  s'en  veut  feruir  pour  tefmoins 
de  fa  venté,  il  leur  en  a  commis  la  garde.  Et 
combien  qu'il  n'y  ait  pas  beaucoup  de  gens 
quianoncent  la  parole  de  Dieu ,  &:  que  tous 
ne  foyent  pas  en  ceft  office  ,  fi  eft'-ce  que  ce 
threforeftcôniunà  toute  l'Eglife.Il  eft  vray 
que  nous  ferons  fpecialement  ordonnez  pour 
prefcher  la  parole  de  f.iiut,  mais  cependant  à 
qui  eft-ce  que  Dieu  a  donné  ce  threfor?  Eft- 
ce  à  trois  ou  à  quatre,  à  dix, ou  à  vingt?  Non: 
mais  à  fon  Eglife, comme  faind  Paul  en  par- 
le ici. Nous  fommes  donc  gardiens  de  la  veri 
té  de  Dieu,  c'eft  à  dire  de  fon  image  precieu- 
fe ,  de  ce  qui  eft  concernant  la  maitfté  de  la 
dodriiic  de  falut.de  la  vie  du  monde.  Quand 
Dieu  nous  appelle  à  vne  charge  fi  honorable, 
ie  vous  prie,n'auons-nouspoint('commei'ay 
défia  dit  )  dequoy  nous  efiouir  tant  &  plus? 
Mais  cependant  notons  auAi  qu'/l  nous  faut 
faire  bonne  garde  d'vn  tel  threfor,&  qu'il  ne 
foit  point  prophanc  entre  nous ,  qu'il  ne  foit 
point  expofé  en  mocquerie.  Mais  nous  co- 
gnoiflbns  ceci  bien  inal:&  toutesfois  fi  eft-ce 
que  fainft  Paul  aainfipatlé,  non  feulement 
pour  l'inftruftion  de  ceux  qui  doiuent  pref- 
cher l'Euangile  ,  mais  c'eft  afin  que  tous  en- 
fcmble  cognoifsions  le  bien  que  Dieu  nous 
fait,  quand  fa  parole  eft  ainfi  purement  anon 
cee.  C'eft  vne  chofe  grande  &  haute  que  no- 
ftre  falut. Or  toutesfois  fi  eft-ce  qu'il  nous  le 
faut  obtenir  par  le  moyen  de  l'Euangile. Car 
(comme  défia  nous  auons  déclaré)  lafoy  eft 
ramedenosames:&  tout  ainfiquenos  corps 
font  vinifiez  par  l'ame  ,  aufsi  eft  l'ame  parla 
foy.  Nous  voila  donc  en  la  mort,  nous  fom- 
mes pourris  au  fcpiilchre  iufques  à  ce   que 
Dieu  nous  appelle  à  la  cognoiflance  de  fa  ve 
rite. Or  maintcnât  il  eft  dit  qu'il  ne  faut  poît 
que  nous  craigniôs  que  Dieu  ne  nous  aduoue 
pour  fes  enfans  quand  nous  rcceurons  fado- 
îlrine.  Une  faut  point  que  nous  volions  par 
delïïis  les  nues:  il  ne  fuit  point  que  nous  tra- 
cafsions  pour  pafler  outre  mer,que  nous  en- 
trions aux  abyfmes  ;  car  puis  que  nous  auons 

Il  paroie 


SVR   LA    I.    A   TIMOTH. 


tV7 


la  parole  de  Dieu  au  cœur  &  en  la  bouche 
p^.30.  (comme  difoit  Moyfe)  ce  nous  doit  eftreaf- 
^14.  fez.CognoilTons  donc  que  Dieu  nous  ouure  la 
porte  de  Paradis,  quand  nous  oyons  les  pro- 
melTes  qui  nous  font  faites  en  fon  nom,&  que 
c'eft  autant  comme  s'il  nous  tendoit  l'a  main 
vifible,&  qu'il  nous  déclarait  qu'il  nous  reçoit 
Se  aduoue  pour  (es  enfans.  Voila  donc  ce  que 
nous  aurions  à  retenir  de  ce  paflâge.Or  Dieu 
nous  feelle  cefte  doftrine  par  les  lignes  qu'il 
nous  a  adiouftez.Car  il  efl  certain  que  lei  Sa- 
cremens  tendent  à  celte  tin  que  nous  cognoif 
fions  que l'Eglifc eft  la  raaifon de  Dieu.enla- 
quelle  il  refide,  que  nous  cognoifsions  que  la 
vérité  y  eft  maintenue.  Car  quand  nous  ibm- 
mes  baptizez  au  nom  de  nolhe  Seigneur  lefcï 
Chrift,nous  fommes  introduits  pour  élire  do 
mcftiques  de  Dieu  :  c'eft  la  marque  de  noftre 
adoption. Or  il  ne  peut  eftre  noftre  Père  que 
nous  ne  foyons  comme  lous  fes  ailes,  &  qu'il 
ne  nous  gouuerne  par  l'on  fainâ  Efprit.Com 
me  nous  enauons  letefmoignage  tout  clair 
au  Baptefme,&  en  la  Cène  encores  plus,  c'eft 
à  dire  nous  y  auons  vne  déclaration  plus  ex- 
prefle.qiie  Dieu  eftconioint&vniauec  nous. 
Car  voila  noftre  Seigneur  lefus  qui  nous  mon 
ftre  que  nous  fommes  fon  corps ,  qu'vn  clia- 
cun  de  nous  en  eft  membre,  &  qu'il  eft  telle- 
ment noftre  chef  ;  que  nous  fommes  n  lurris 
de  fa  fubftice&vertu:que  comme  le  corps  ti- 
re fa  nourriture  du  chef,  auf»i  lefus  Chnft 
nous  déclare  qu'il  veutauoir  vne  vieconmiu- 
ne  auec  nous ,  Se  que  nous  foyons  participans 
de  tous  fes  biens.  Quand  cela  nous  eftmon- 
ftrc.nevoila  point  allez  pourquoy  la  vérité  de 
Dieu  nous  doyue  eftre  precieufefNe  voila  pas 
vn  miroir  auquel  nous  contemplons  que  Dieu 
non  feulement  habita  au  milieu  de  nous,  mais 
qu'il  habite  en  chacun  de  nous  ?  Dieu  nous  a 
tellement  vnis  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
qu'il  ne  veut  point  que  nous  foyons  feparez 
en  façon  que  cefoit  d'auec  luy  ,  ni  diftraits. 


Car  comme  Dieu  de  foncofté  nous  tiendra 
promelTe,  &  qu'il  n'a  point  parlé  que  l'effet 
nes'enfuyue.aufsi  ne  veut-il  pas  que  nous  ve- 
nions à  luy  corne  menteurs  &  panures  &  fauf 
faires.  Or  maintenant  qu'on  regarde  comme 
nous  fommes  difpofcz  a  receuoir  Dieu  ,  non 
point  comme  vn  hoftcpalTjnt.mais  corne  ce- 
luy  qui  nous  a  eleus  pour  fes  domiciles  per- 
pétuels,voire  qui  nous  a  dtdicz  i  foy  comme 
fes  temples,&que  tous  tnfcmble  fommes  con» 
me  fa  maifon  qu'il  a  baftie  de  plulieurs  pier- 
res. Commentdonc pourrons-nous  receuoir 
noftre  Dieu?  le  ne  di  point  à  la  façon  des  Pa- 
pilles, quitorgent  Dieu  à  leur  appétit  pour 
J'engloutir  en  leur  ventre.  Car  il  n'eft  point 
qucftion  d'vne  telle  brutalité  ,  ains  de  rece- 
uoir noftre  Dieu  à  la  vérité. Orce  fera  quand 
nous  monterons  là  haut  par  foy  ,  &que  noue 
lerons  vrayement  vnis  à  noftre  Seigneur  le-. 
fusChrift,comme  i'ay  défia  allégué  au  paflà- 
gede  fainft  Paul.  Et  cela  edU  entre  no'is? 
Mais  au  contraire  il  femblc  quenout  vueil- 
lions d'vne  certaine  malice defpiter  DieuSc 
chafler  lefus  Chnft ,  à  ce  qu*ils  n'ayent  plus 
nulle  accointance  auec  nous  :  qu'oniegarde 
vn  peu  les  dtfordres.  Qne  s'il  faloit  que  ie 
les dechilFraire.quand  feroit-ce  fait?Mais  que 
vn  chacû  ouure  les  yeux. Il  eft  impofsible  que 
nous  peniïons  aux  confufions  qui  régnent  au- 
iourd'huy  entre  nous  ,  que  nous  n'en  foyons 
abyfmez,  voirefinous  auoos  vnegouttede 
crainte  de  Dieu.  E t  d'autant  qu'on  s'y  piaift 
ainfi,&  qu'on  ■i''y  flatte,il  femble  q  nous  foy- 
ons du  tout  hebetez,&:qiie  ce  qui  eft  dit  au  ,, 
Prophète, foit  accôpli  en  nous  ,  c'eft afçauoir  •''' 
que  nous  auons  vn  efprit  d'yurongnerie ,  vn  '*•*'^'•*^ 
efprit endormi,  que  nous  ne  difcernonsplus  ''^' 
rien. Si  cefte  vengencede  Dieun'eftoit  entre 
nous,  ileft  certain  que  nous  aurions  vn  autre 
fentiment  de  nos  pouretez  que  nous  n'auons 
pas. Mais  quoy?!l  faut  que  les  Papiftes,  quel- 
ques aueugles  qu'ils  foyent ,  nous  foyent  or- 


4.  I9.e: 


C^uand  doncnous  auons  cela ,  n'eft- il  point    donnezde Dieu  pour  iuges  :  car  ils  voyétno* 

„..„«-.„„  j'„n.,.>  ,...^ nu ;_.n.:      vilenies  qui  font  fi  grandes  &  fi  énormes  «^ue 

rie  plus.  Or  cepédant  nous  n'y  pefons  point. 
Tant  yafcortmei'aydefia  dit)que{înousa-. 
liions  vne  gou  tte  de  crainte  de  Dieu,  nous  de 
urions  eftre  anéantis,  nous  deuriôs  auoirnoa 
feulement  honte  .mais  horreur  de  fi  grandes 
confufions  comme  on  les  voit  de  en  particu' 
lier  &  en  public.On  voit  di-ie,chiens  eftre  tel 
lement desbordez, qu'il  femble  qu'ils  ayent 
propofé  de  s'eleuer  contre  Dieu  ,  &  de  faire 
tout  au  rebours  de  fa  volonté.  Quant  à  moy, 
voyât  qu'il  y  a  fi  peu  de  fruit  des  admonitiôs 
qu'on  fait  tous  les  iours,  s'il  n'eftoit  queftion 
fînon  de  dire.ie  profiteray  en  redarguant,fi  ie 
continue  ,  i'aimeroye  mieux  me  taire,  car  il 
femble  que  cela  foit  occafion  de  les  plus  irri- 
te; ,quc  toutes  les  remonftrances  que  ie  fay  au 
nom  de  Dieu  fe  prenét  côme  par  defpit,  pour 
dire, Nous  en  ferons  tout  au  rebours.  Voilace 
qu'on  gaignc ,  qu'il_  femble  que  la  parole  de 

v.iii. 


queftion  d'eftre  rauis  en  ceft  honneur  inefti 
tnable,&  que  nous  apprenions  de  plus  en  plus 
de  nous  retirer  des  corruptions  de  ce  monde, 
afin  que  nous  puilsioiis  vrayement  monftrer 
par  eSeSt  que  ce  ii'cft  pas  en  vain  que  le  Fils 
de  Dieu  veut  que  nous  appartenions  à  luy? 
Comment  eft-ce  que  nous  fommes  vnis  à  no- 
ftre .Seigneur  lefus  ChriftfC'eftqu'eftans  pe- 
j  ()/,.},  .^,lerins  en  ce  inonde,  &  que  paflàns  nous  foy  os 
jf^  vrais  citoyens  des  cieux  ,  comme  fiinû  Paul 

en  parle. Et  de  faidt  ,  quand  il  nous  exhorte  à 
nous  retirer  de  toutes  nos  mefchantes  afFe- 
ftions,il  nous  appelle  à  noftre  chef. Voila  le- 
fus Chrift  ,  d  r-il ,  qui  eft  noftre  vie,  il  habite 
aux  cieux:  ne  f.ut-il  point  dôc  quenousmet- 
tions  peine  de  noiv,  approcher  de  luy?  Main- 
tenant ceci  tft  bien  à  noter,pource  que  la  Cè- 
ne de  noft  t  Seigneur  lefus  Chrift  fe  doit  ad- 
miniftrer  Oimanche  prochain.  Or  regardons 
vn  peu  quelle  di/pofition  il  y  a  entre  nous. 


1^8 


SEÏIMON     XXV I. 


Dieu  ne  foit  que  pour  endurcir  ces  mal-heu- 
reux.tellement  qu'on  voit  que  les  chofes  ibnt 
li  dcteftables.ie  ne  di  pas  en  particulier,  mais 
en  public ,  qu'il  femble  qu'on  vueill  c  dil'pitcr 
&  Dieu  3i  le  monde  :  &  chacun  le  fçaura  bien 
dire  en  fa  maifoniinais  perlonnc  n'y  remédie, 
pour  dire,  Auifonsvn  peu  à  faire  que  les  cho- 
ies aillent  mieux:  mais  on  empire  ioiirnelle- 
nient,&  femble  qu'on  n'aura  iamaisalTez  toft 
defpité  Dieu.  Et  puis  on  voit  les  autres  def- 
bordemens ,   Car  qu'eft-ce  des  blafphemes 
qu'on  oit  iournellement,  despariures,  &des 
autres  mefpris  du  nom  de  Dieu  ?  Ne  voit-on 
pas  mefmes  qu'on  ne  tient  nul  ordre,que  tant 
s'en  faut  que  Dieu  fou  honoré  à  bon  elcient 
&   fans  hypocrifie  ,  que  beaucoup  n'aiment 
Dieii,&  n'en  font  le  ferablSt,  mefmes  ils  font 
gloire  de  fe  retirer  de  tout  ordre  d'Egiife 
pour  eftre  pires  que  Turcs  ou  Payés,  ou  ie  ne 
fçay  quoy?Cela  donc  fe  voit  à  l'œil, &efl:  par 
trop  cognu,  voire  des  pctis  enfans.  En  outre 
aufsi  on  voit  des  autres  diflolutions, tellement 
<jue  tout  eneft  plein, que  les  pallardifes  feront 
toutes  c5munes:&encores  ces  canailles  vien- 
dront ici  iouer  de  pafTe  palTe  ,  que  quand  il  y 
en  aura  vn  d'eiitr'eux  conuaincu  de  paillardi- 
fe.ils  diront,  Ho,  ce  n'eft  pas  ceftuy-la  ,  c'eft 
vnautre  qui  eft  àcent  lieues  d'ici:  &  il  ne  fera 
pas  queftion  fculemét  de  fe  mocquer  des  hom 
mes.mai.s  de-Dieu:&  fon  nom  fera  làpropha- 
né  &  expofc  en  opprobre.  Q^and  donc  tout 
fera  bien  conté  &  rabbatu  ,&:  qu'on  aura  re- 
gardé la  chofe  ,  il  femble  (  comme  i'ay  delîa 
dit)que  la  parole  de  Dieu  ne  nous  férue  plus, 
Jînon  d'efclairer,  afin  qu'on  nous  contemple 
de  loin  ,  &  que  les  Papiiles  &  autres  infidèles 
foyent  là  ordonnez  pour  nous  uiger  des  enor 
mitez  &  vilenies  qui  régnent  entre  nous.  Et 
de  moy.ie  puis  dire  que  l'ay  hôte  de  prefcher 
la  parole  de  Dieu  en  ce  lieu ,  quand  il  y  a  des 
confufioTis  lî  vileines  comme  on  les  y  voit:& 
ques'ilelloitàmon  fouhait  parriculier,ie  de- 
fiieroye  que  Dieu  m'euft  retiré  de  ce  monde, 
&  que  ie  ne  deulTe  point  ici  viure  trois  iours 
«n  teldefordre  qui  y  eft. Allons-nous  mainte 
nant  ^lorifierd'auoir  quelque  reformation,& 
quel'Euangile  feprefche  :  car  tout  cela  fera 
contre  nous.  Il  ne  faudra  pas  inefmes  que  les 
feruiteurs  de  Dieu  nous  condamnent ,  mais 
(comme  i'ay  dit)  il  faudra  que  les  aueugles 
foyent  nos  lUges.quâd  en  taftôrHnt  ils  pcuuét 
cognoiftre  noftre  vilenie.  Et  cependant  ie  ne 
fçay  fi  Dieu   nous  enuoyera  des  bourreaux 
quand  nous  n'auons  point  voulu  receuoirles 
admonitions  qu'il  nous  faifoitdefa  bouche. 
Il  y  a  alTcz  lon^  temps  qu'il  nous  a  aduertis, 
&  il  y  a  grand  danger  qu'il  ne  parle  plus  à 
nous, mais  qu'il  letie  fa  main  ,  voire  vne  main 
armée, &  qu'il  nous  reforme  d"'vnc  façon  vio- 
lente. Car  nous  ne  fommes  pas  dignes  qu'il. 
remédie  plus  â  nos  vices  doucement  &  d'vne 


bonté  paternelle, comme  il  auoit  tafché  de  fai 
re.  Et  puis  qu'il  a  amfi  perdu  fa  peine  ,  le  ne  ^j 
fçay  que  ce  fera. Or  cependant  auifons  à  nous. 
Car  ces  chofe^-ci  nous  font  dites  non  point 
à  noftre  contufion  :  ce  n'eil  point  pour  nous 
aiguillonner  contre  Dieu, mais  c'eft  afin  qu'en 
cognoiflànt  nos  pouretez  ,  nous  apprenions 
de  nous  y  defplaire  mieux  que  nous  n'auons 
point  ^ait  parcidcuant.que  nous  ne  deueniôs 
point  endurcis  &  obftinez  à  l'encontre  de 
Dieu,  mais  que  félon  qu'il  nous  appelle  à  re- 
pentâce,&  qu'il  déclare  qu'il  eft  preftde  nous 
receuoir  àmerci  quand  nous  retournerons  à 
luy,  que  nous  cmbrafsions  les  promefles  qui 
nous  font  faites  par  fa  parole  ,  &  que  nous 
craignions  aufsi  les  menaces  qui  y  font  conte 
nues:&  que  ceux  qui  font  en  eftat,  public  re- 
gardent bien  de  .s'acquitter  de  leur  deuoir 
mieux  qu'ils  n'ont  fait  ,  afin  que  ta  iuftice  ne 
foit  point  prophanee  :&  que  ceux  qui  font 
conftituez  rainiftrcs  de  la  parole  ,  ayent  vn 
zèle  de  Dieu  pour  purger  toutes  ordures  & 
pollutions  qui  ont  vne  telle  vogue:&  que  cha 
cun  aufsi  penfe  à  fa  maifon,&  que  des  maifons 
on  viene  aux  perfonnes,&  que  nous aduifions 
de  nous  purifier  tellement  ,  que  quand  nous 
receurons  la  fainfte  Cène  de  noftre  Seigneur 
Icfus  Chrift ,  nous  foyons  cnnfcrmez  de  plus 
en  plus  en  fa  grâce,  pour  eftre  entez  en  fon 
corps, &  eftre  vrayenient  vnis  à  luy,&  que  tou 
tes  les  promefles  que  nou.s  oyons  en  l'Euan- 
gile,foyét  mieux  ratifiées, c'eft  afçauoir  qu'il 
eft  noftre  vie,  que  nous  viuons  en  luy  comme 
il  habite  en  nous  :  &  que  là  delTus  aiif';i  nous 
puifsions  nous  glorifier  que  Dieu  nous  auouc 
&  tient  pour  fcs  enfans,  &  que  nous  foyons 
tant  plus  ardens  àTinuoquer  ,  &  à  nous  con- 
fier en  fa  bonté  ,  &  qu'il  nous  conduife  telle- 
ment par  fon  fauidEfprit, qu'à  noftre  exem- 
ple les  poures  errans  foyent  ramenez  au  droit 
chemin  :  comme  auiourd'huy  nous  voyons 
qu'il  y  en  a  tant  qui  font  en  train  de  perdi- 
tion. Et  pourtant  qu'il  luy  plaife  de  fe  mani- 
fefter  par  (à  grâce  pour  habiter  non  feule- 
ment en  vne  ville  ,  ou  en  quelque  petite  poin- 
gnee  de  gens ,  mais  qu'il  règne  par  tout  le 
monde, &  qu'vn  chacun  le  férue  &  adore  com 
me  il  le  mérite. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la  fa 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de  nos 
fautes,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les  faire 
tellement  fentir  que  nous  foyons  vrayement 
abyfmez  en  nos  pouretez, &  que  nous  en  foy- 
ons naurez  en  telle  forte  que  nous  ne  deman- 
dions autre  médecine  lînon  d'appeter  que  ce 
bon  Dl^u  nous  nettoyé  par  le  fang  de  fon 
Fils,8!r  qu'il  nous  conduife  tellement  par  fon 
fiinft  Efprit ,  qu'eftans  reformez  à  fa  iuftice 
nous  apprenions  de  nous  addonnerdu  tout  à 
fon  obcilTànce.  Ainfi  nous  dirons  tous ,  Dieu 
tout-puiflantjPerecelefte.&c. 

HVITIE 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH.  iS9 

HVITIEME      SERMON      SVR      LE 

TROISIEME     CHAPITRE. 

1^  Et  fans  cotrediSl  lefecret  de  pieté  ejî  grand  ^que  Dieu  ejl  ma^ 
mfeflé  en  chair yiufiifié  en  Efprit,-s>cu  des  Anges  ,  prefché  aux  Gentils, 
creu  au  monde ,  (f  receu  en  gloire. 


Oiis  allons  veu  ce  matin  que 
Bjfaincl  Paul  exhortant  Ti- 
fy  mothee  à  s'acquitter  deue- 
V  ment  de  f.i  charge,  luy  mon 
ftre  en  quel  degré  d'hon- 
J.^  neur  Dieu  Ta  eleué  ,  l'ayant 
'^    conftituépourgouuerner  Ta 
maifon  :  femblablenient  il  luy  monftre  qu'vn 
tel  office  ef^  hojioiable,  pourccque  l'Eglile 
fouillent  en  ce  mende  la  vérité  de  Dieu  ,  & 
quec'eft  vnechofe  la  plus  precieule  que  nous 
fçaurions  rouhaiter  ,  quand  Dieu  eil  cognu 
entre  nous  pour  eftre  adoré  &  lerui,&  û  nous 
fommes  certains  de  la  vérité  pour  obtenir  fa 
lut.Or  tout  cela  no"  eft  coferué,&  vn  tel  thre 
for  nous  eft  donné  en  garde  par  le  moyen  de 
l'Eglile.fuyuant  ce  propos  que  S.Paul  adiou- 
fte,que  celle  vérité  dont  il  a  tait  me'tion,doit 
bien  eilre  prifce  des  i\5mei  plus  qu'elle  n'eft. 
Et  qu'ainfi  foit.quel  fecrct  ell-ce,  &  combien 
admirable  ,  que  Dieu  foit  manifefté  en  chair, 
que  Dieu  fou  fait  hommerNe  voila  point  vne 
chofe  qui  outrepafle  tellemét  nos  efprits.que 
quand  il  nous  ell  déclaré, nous  deuôs  eilre  ra- 
uis  en  eflonnemcnt?  Or  cependant  nous  auos 
bonne  approbation  q  leûis  Chrift  eftant  hom 
memortel,neantmoins  efi  le  vray  Dieu  viuât 
ui  a  créé  le  monde.  Car  cela  nous  a  elle  tefli 
é  par  fa  vertu  celefte:5;  puis  nous  voyôs  d'au 
très  miracles,  c'cllafçauoir  qu'il  a  elle  pref- 
ché entre  les  Pavens  qui  auparauan:  auoyent 
efté  bannis  du  royaume  de  bieu:qiie  la  foy  â 
eu  fon  cours  par  tout  le  monde, laquelle  pour 
lors  elloit  enclofc  entre  les  Iuifs,&  faloit  que 
lefus  Chrift  fuft  exalté  en  gloire,*:  qu'il  fufl 
afsis  à  ladextre  de  Dieu  fon  Père  pour  obte 
nir  royaume  fouuerain.  Et  iî  cela  eft  mefprifé 
des  hommes, leur  ingratitude  fera  côdamnce, 
d'autant  que  les  Anges  mefmes  ont  ici  apper- 
ceu  vnechofe  qui  leur  tftoit  ircognue  aupara 
uant.Car  Dieu  leur  a  voulu  cacher  le  moyédc 
noftre  redemption,afin  que  la  bonté  fuft  tant 
plus  admirable  à  toutes  cieatures.  Maintenât 
donc  nous  voyons  l'intention  de  fainét  Paul. 
Or  d'autât  qu'il  auoit  appelé  l'Eglife  dcDieu 
gardiéne  de  la  venté ,  maintenant  il  monftre 
que  cefte  venté  eft  vn  threfor  qu'on  ne  peut 
aflez  prifer.  Et  comment  cela? Regardons  ce 
qui  eft  contenu  en  l'Euangile  ,  afçauoir  que 
Dieu  s'eft  telJemct  abbaifle  qu'il  a  vellu  no- 
ftre chair, que  nousauons  fraternité  auecce- 
luy  qui  eft  le  Seigneur  de  gloire,celuy  qui  do 
mine  fur  les  Anges, qu'il  s'eft  anéanti  iufques 
ii  de  fe  conioindre  a  nous ,  &  de  prendre  la 


l 


forme  &  figure  d'vn  feruiteur,voire  pour  fou 
ftenir  la  malediûion  qui  no'  cftoit  deue,  que     _ 
faind  Paul  fous  ce  mot  de  Chair  ,  comprend 
aufsi  tous  les  acceffoires  que  lefus  Chrift  a 
receus  en  fa  perfonne  ,  c'ell  afçauoir  qu'il  a 
efté  fuiet  à  toutes  nos  infirmitez, excepté  pé- 
ché. Vray  eft  qu'il  n'y  a  eu  nulle  macule  en 
luy, mais  toute  pureté  c&  perfeûion  :  cepen- 
dant ii  eft-ce  qu'il  a  efté  fait  &c  rendu  inHrmc 
comme  nous,  afin  que  maintenant  il  ait  com- 
pafsion  de  nos  foiblefles  pour  y  fubucnirjfcô 
me  il  eft  môftré  en  l'epiftre  aux  Hebrieux,)  H«6. 
&  non  feulement  cela  ,  mais  luy  qui  n'auoit  lî. 
nul  peché,a  foulFert  la  peine  à  laquelle  nous 
eftions  tenus,  qu'il  a  efté  comme  maudit  de 
Dieu  fon  Père  quand  il  s'eft  oifert  en  facrifi- 
ce,  afin  que  par  fon  moyen  nous  loyôs  main- 
tenât benits,&  que  fa  grâce  de  laquelle  nous 
eftions  forclos, eft  efpâdue  fur  nous. Or  quâd 
nous  penfons  à  cela,  le  vous  prie,  ne  deuons- 
nous  pas  eftre  eftonnez  en  forte  que  tous  nos 
fcnsdefaillét'CognoilTons  quec'eftdeDieu, 
que  fa  maiefté  nous  eft  incomprehenfible.qui 
contient  toutes  chofes  en  foy,  &  qui  ne  peut 
eftre  nullement  contenue ,  cefte  maiefté  ,  di- 
ie  ,  laquelle  les  Anges  adorent  :  cognoiflons 
combien  nous  fommes  débiles  &  rudes  pour 
paruenir  fi  haut  qu'elle  foit  coniointe  à  no- 
ftre chair.  Q^'y  a-il  en  nous?  Q^and  nous 
aurons  regardé  à  noftre  Dieu,fi  nous  entrons 
en  comparailon,  helas.'approcherôs-nous  de 
cefte  hautefle  qui  furmonte  tous  les  cieux? 
Mais  plulloft  quelle  accointiice  y  auôs-nous? 
Car  il  n'y  a  que  pourriture  en  nous ,  il  n'y  a 
que  péché  &  mort.  Et  que  le  Dieuviuant,  la 
fontaine  de  vie,la gloire  eternelle,la  puiflàn 
ce  infinie,  que  tout  cela  fe  viene  non  feule- 
ment approcher  de  nous ,  &  de  nos  miferes, 
de  nos  pouretez,  de  nos  fragilitez  ,  &  de  cell 
abylme  de  toute  vilenie  qui  eft  aux  hommes, 
excepté  toufiours  p^ché  ,  que  non  feulement 
la  maiefté  de  Dieu  approche  de  ceci, mais  que    »_ 
elle  y  foit  céiointe  &  vnie  en  la  perfonne  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift?  Et  lefus  Chrilt 
qui  eft-il?Dieu  &  homme?  Et  comment  Dieu 
&:  home?  Quelle  diftance  y  a-il  de  Dieu  auec 
l'homme?  Car  nous  fçauons  qu'en  noftre  na- 
ture il  n'y  a  que  toute  pouretéS:   mifere,  il 
n'y  a  qu'vn  abyfmede  toute  puantife  &:  infc 
ûion:  &  cependant  qu'en  la  perfonne  de  no- 
ftre Seigneur  lefus  Chrift  nous  voyôs  h  gloi 
re  de  Dieu  qui  eft  adorée  des  Anges ,  &  que 
nous  voyôs  quant  &:  quat  l'infirmité  de  l'hom 
me  ,  &  qu'il  n'eft  qu'vn  feul  Dieu  &  homme. 


160 

ne  voila  point  vnfeeret  qui  doit  eAre  magni 
fié  non  feulement  de  paroles  ,  mais  en  forte 
que  nous  y  foyons  tous  comme  rauis.Et  d'au 
tant  plus  que  nous  y  penfons,que  nous  appre 
niés  d'adorer  vn  tel  miracle  qui  iamais  n'euft 
ertépenfé  des  Angestcommeaufsifainft  Paul 
en  traitte  ici. Puis  qu'ainfî  eft  que  le  fainû  E- 
fprit  a  voulu  magnifier  la  bote  de  Dicu,mon 
ftrant  combien  elle  nous  doit  cftreprecieu- 
fe  ,  aJuifons  de  noftre  cofté  de  n'eftre  point 
ingrats ,  &  de  n'auoir  point  nos  efprits  tant 
enferrez,  q  nous  ne  foyôs  attentifs  à  goufter 
vn  tel  myftere ,  fi  nouç  ne  le  pouuôs  cognoi- 
ftre  du  tout.  Car  c'eft  bié  aflez  aufsi  que  nous 
ayons  quelque  cognoi(Iànceobfcure,&  qu'vn 
chacun  fe  contente  de  fa  mefure.voyât  la  pe- 
titefle  qui  eft  en  nous,  &attédant  leiour  que 
ce  que  maintenant  nous  voyons  en  partie, 
nous  foit  du  tout  reuelé,&  en  perfcûionnnais 
tât  y  a  qu'il  nous  faut  bien  ici  appliquer  tou 
tes  nos  eftudes.  Or  cependant  nous  voyons 
&  la  malice  &  Ti  ngratitude  des  hommes. Car 
combien  y  en  a-il  de  ceux  qui  veulent  cftre  re 
putcz  Chreftiens,&  s'en  vantent  à  plcmebou 
che.qui  cognoiflent  vn  tel  fecretfOr  tout  ain 
lî  que  nous  ne  fçauons  que  c'eft'  de  la  vérité 
de  Dieu  ne  de  la  doftrinede  l'Euangile, aufsi 
nous  n'auons  cognoiflànce  de  ce  qui  nous  eft 
ici  déclaré.  Pourquoy  eft-ceque  fainftpaul 
appelle  myftere  de  foy  ,  que  lefus  Chriftait 
efté  maniftfté  en  chair, hiy  qui  eft  Dieu  eter 
Bel?  C'eft  comme  s'il  difoit,Mes  amis, quand 
nous  fommes  recueillis  .î  Dieu  ,  &  que  nous 
fommes  incorporez  en  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift,  voila  à  quelle  fin  nous  fommes  créez: 
c'eft  que  nous  cognoifsions  que  Dieu  eft  con 
ioint  &  vni  à  no'  en  la  perfonne  de  fon  Fils. 
Or  maintenant  il  faut  conclure  que  nul  ne 
peut  eftre  Chreftien.finon  que  ce  fecret  dont 
parle  ici  fainâ  Paul,  luy  foit  cognu.  Qu'on 
Mce  maintenant  examen ,  &  qu'on  demade  & 
iJiommes  5c  à  femmes  s'ils  fçauent  que  veut 
dire  ce  mot ,  Q.ue  Dieu  a  efté  manifefté  en 
chair.  A  grand'  peine  en  txounera-on  de  dix 
J'vn  qui  fçache  rendre  confefsion  d'vn  petit 
enfant.Toutesfois  il  ne  fe  faut  point  esbahir 
de  cela:  car  nous  voyons  auf,i  la  nonchalan- 
ce &  le  mefpris  qui  eft  en  la  plus  grad'  part, 
ïournellement  ilfera  monftré  comme  Dfeu 
s'eft  veftude  noftre  nature:mais  côment  fre- 
qoente-on  les  fermons?  quieft-ce  qui  s'em- 
pefche  beaucoup  à  lire  l'Efcriture  fainûe?  Il 
y  en  a  bien  peu  qui  prenent  le  loifir  ,  chacun 
til  occupé  à  fes  befongnes:  &  quand  il  y  au- 
ra vn  iour  la  fepmaine  referué  pour  eftre  en- 
feignez  ,  après  qu'on  aura  efté  diftrait  fîx 
iours,s'il  y  a  feulement  vn  iour  choifî,  où  on 
s'alTemble  pour  auoir  quelque  inftrnftion, 
lors  il  fe  faut  esbatre  &  efiouir  :  les  vns  s'en 
iront  aux  champs, les  autres  bcuront:  comme 
il  eft  certain  que  maintenant  on  en  trouue- 
roit  autant  que  nous  fommes  iciaffemblez  au 
nom  de  Da'u,qui  boiueat,&leur  fcuible  ^ue 


SERMON     XXVII. 


cefte  heure  feroit  mal  employée,  finô  qu'elle 
fuft  prophanee  corne  en  defpit  de  Dieu,  Le?- 
autres  feront  occupez  à  iouer ,  Se  les  brelans 
fe  tiendront.  Ainfi  donc, quand  nous  voyons 
que  beaucoup  comme  de  propos  délibéré  fu- 
yent  la  doftrine,  s'esbahit-on  s'il  y  a  vne  tel 
le  beftife  ,  8c  que  l' a  b  c  des  Chrftiens  nous 
foit  caché,  &  qu'on  nous  parle  comme  vn  lan 
gage  eitrange,fi  on  nous  dit  que  Dieu  eft  ma 
nifcfté  en  chair?  Or  tant  y  a  que  cefte  fenten 
ce  ne  fe  peut  effacer  du  regiftrc  de  Dieu,c'eft 
afçauoir ,  que  nous  n'auons  nulle  foy  fi  nous 
nccognoiflons  comme  noftre  Seigneur  le- 
fus s'eft  conioint  à  nous,  afin  que  nous  foyôs 
fes  membres,  &  qu'il  foit  noftre  Chef.  Et  ai> 
refte.il  fcmble  que  Dieu  nous  vueilleparfof 
ceefmouuoirà  penfervn  tel  fecret,  quand 
nous  y  fommes  endormis.    Car  les  herelîes 
que  Satan  mettra  en  aiiant,  ne  vienent  pas  de 
cas  d'auenture  ,  mais  Dieu  nous  exerce  îûa 
que  nous  foyons  comme  ftylez  par  pratti- 
que  à  ce  que  nous  n'auions  point  entendu 
auparauant.  Or  nous  voyons  que  le  diable  re 
mue  ces  vieux  brouets, comme  maintenant  de 
nier  la  nature  humaine  de  lefus  Chrift,onde 
nier  fa  m-aiefté  Diuijie,  ou  de  mefler  tout, que 
on  ne  cognoifle  pas  deux  natures  diftin,5ies 
en  luy ,  ou  bien  de  faire  à  croire  qu'il  n'eil 
plus  ceft  homme  qui  a  accompli  les  promef- 
fesen  la  Lny,  &par  confequét  qu'il  foit  de- 
fcendu  de  la  race  d'Abraham  &  de  Dauid.Or 
cela  fe  fait-rl ,  que  tels  erreurs  &  herefies 
qui  ont  efté  du  commencement  de  l'Egli/e- 
Chreftienne,  encores  auiourd'huy  reuienenr 
en  au.n?C'eft  DieuCcomme  l'ay  dit )qui  nous 
veutftyler  ,afin  quanous  foyonrconfermer 
en  la  vérité  de  fon  Euagile.Etd'autant qu'il 
voit  q  nous  y  ■fon'imes  ainfi  nochalansil  nous 
y  attire  côme  par  force.  Et  'ainfi  notons  hieit 
cesmotsqui'font  ici  couchez  defainil  Paul. 
En  premier  lieu  ildit  Quf  Vitu  a  ejié  manlfe 
flé  en  chair.  Or  quand  il  appelle  lefus  Chiift 
Dieu  ,  il  luy  attribue  cefte  nature  qu'il  a  eue 
deaant  la  création  du  monde. U  eft  vray  qu'il' 
n'y  a  qu'vn  f(  ul  Dieu  :  mais  en  cefte  eflêncé 
feule  fi  faut -il  que  nous  comprenions  le  Pe-.- 
re,&  puis  que  nous  comprenions  vne  ftgeflè- 
qui  ne  fe  peut  feparerde  luy  ,  &vne  vertu" 
permanente  laquelle  a  toufiours  efté  en  luyv 
&  y  fera.  Voila  donc  lefus  Chrift  qui  eft  vray 
Dieu,  entant  que  deuantque  le  monde  fuft  . 
créé  &  de  toute  éternité  il  a  efté  la  (agelTe  de 
Dieu.  Or  maintenant  il  eft  dit  qu'il  a  efté  ma' 
nifêftc  en  chair.  Par  ce  mot  de  chair  (Aind 
Paul  exprime  qu'il  a  efté  vray  homme,  &  que 
il  a  veftu  noftre  nature  :  mais  cependant  par 
cemotMdii'/îyTc'.ilmonftre  qu'il  y  aeudeur 
natures.  Tant  y  a  neantmoins  qu'il  ne  fauc 
point  imaginer  vn  lefus  Chi  ift  qui  foit  Dieu, 
puisvn  lefus  Chrift  qui  foit  homme:  mais  il 
faut  que  nous  le  cognoifsions  luy  feul  Dieu 
&  homme.  Diftinguons  tellement  les  deux 
natures  qui  font  en  luy  ,q  nous  cognoifsions. 

Voila 


s  V  R   L  A   I.   A   T  I  M  O  T  H. 


iffi 


Voila  le  Fils  de  Dieu  qui  tft  noftre  fi  ere.Or 
i'ay  dit  que  Dieu  permet  que  les  herefies  an- 
ciennes ,  donc  l'Êglife  a  efté  troublée,  fe  re- 
muent encore  de  noilre  temps,  alîndenous 
aiguilir  tant  mieux.  Mais  d'autre  part  no- 
tons auisi  que  le  diable  s'eil  efforcé  tarit 
qu'iJluya  efté  pofsible  de  renuerferceft  ar- 
ticle de  foy  ,  pource  qu'il  voit  bien  que  c'elt 
l'appuy  de  noftre  falut.  Car  lî  nous  n'auons 
ce  lecret  dont  parle  fainft  Paul ,  que  fera-ce 
de  nous?  Car  nous  femmes  tous  enfans  d'A- 
dam :  nous  voila  donc  maudits:  nous  fommes 
en  l'abyfme  de  mort:brief,nous  fommes  en- 
nemis mortels  de  Dieu  :  &  ainii  il  n'y  a  plus 
•  que  condamnation  &  mort  en  nous,  iufques  à 
ce  que  noiis  cognoifsions  que  Dieu  nous  eft 
venu  cherc}ier:&  pource  que  no'  ne  pouuiés 
monter  à  luy,  qu'il  eftdefcendu  à  nous.  luf- 
ques  à  ce  que  nous  ayons  cognu  cela,  ne  fom 
.  mes-nous  point  plus  que  mifi.rabIcs?Pource 
ftecaufe  le  diable  a  voulu  tant  qu'il  a  peu  abo 
lir  cefte  cognoiflànce.ou  bien  la  brouiller  de 
fesmenfonges, tellement  (ju'elle  full comme 
peruertie.  D'autre  part,  quand  nous  voyons 
qu'il  y  a  vne  telle  niaiefté  en  Dieu,  comment 
©•fons-nous  approcher  de  luy  ,  attendu  que 
nous  fommes. pleins  de  raiferes?  Il  fàutdonc 
que  nous  venions  à  cefte  vnion  de  la  maiefïé 
de  Dieu  auec  la  condition  humaine.  Et  ainiî 
en  tout  &par  tout.iufqu'à  tant  que  nous  ay- 
ons cognu  la  maieflé  Diuine  quieftenlefus 
Chriii,&  l'infirmiié  de  l'homme  qu'il  a  prin- 
fedenous,  ileâmipofsible  que  nous  ayons 
nulle  efperance  ,  que  nous  puifsions  recourir 
à  la  bonté  de  Dieu  ,  &  auoir  la  hardiefle  de 
l'inuoqueT,  &  retourner  à  luyrbrief  nous  fom 
mes  du  tout  reiettez  du  Royaume  celefte ,  la 
porte  nous  eflclo{è,&ne  pouuons  en  appro- 
cher en  façon  quece  foit.  Or  voyant  que  le 
di.ible  a  ici  appliqué  touf  ce  qu'il  auoitd'ar- 
tifîce,c'eft  afcauoir  de  peruertir  ceite  doibri- 
ne,  voyât  que  noflre  falut  y  eftoit  fondé.que 
deuons-nous  faire  finon  d'y  eflre  tant  plus 
confermez,afin  que  quoy  qu'il  machine.nous 
ne  foyons  iamais  esbranlez  de  la  foy  qui  eft 
contenue  en  l'EuangilefNotons  donc  en  pre 
mier  lieu  que  iamais  nous  ne  coçnoiftron^  le 
fus  Chrirtpour  noftre  Sauueur,iu^u'à  ce  que 
nous  ayons  cognu  qu'il  a  efté  toufiours  Ditu 
cternel.Et  de  fait,il  faut  que  ce  qui  eft  efcrit 
.  au  Prophète  leremie  ,  foit  accompli  en  luy, 

■'■  Q^conque  feglorificqu'il  fe  glorifiede  me 
*■  ^'      cognoiftre.dit  le  Seigneur.  Sainû  Paul  mon- 
ftre  que  ceci  doit  eftre  appliqué  à  la  per- 
fonne  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Sui- 
uant  cela  il  protefte  qu'il  n'a  eftuné  nul- 
le doctrine  ne  fçauoir  ,  linon  d'entendre  que 
c'eftde  lefus  Chrift.Etau  refte,commcnt  fe- 
ra-il poftible  que  nous  ayons  noftre  vie  en 
luy,  finon  qu'il  foit  noftre  Dieu,  que  nous 
foyons  maintenus  &  preferuez  par  fa  puifïàn- 
itte.i'^.  ce?  Comment  nous  pourri  on  s -nous  fi  ct  en 
î.  luy?car  il  cil  efcrit.Mal-heur  fur  l'hôme  qui 


met  fa  foy  en  la  chair,  ouaubras  de  l'hôme, 
ou  en  la  creature.Apres, comment  pourrons- 
nous  eftre  retirez  de  la  mort  linon  par  la  ver 
tuinlînie  de  Dieu?  Car  c'eftàluv  que  les  if- 
fuesdela  mortappartienent  ,  comme  il  eft  I"/'.  tfS» 
dit  au  Pfcaume?  Nous  voyons  donc,  encores  ^•'•i» 
que  l'Efcri  ture  ne  rendift  nul  tefmoignage  de 
la  Diuinité  de  lefus  Chrift.qu'il  eft  impofsi- 
ble  que  nous  le  cognoifsions  pour  noftre  Sau 
ueur,  finon  en  luy  attribuât  toute  niaiefté  Dr 
uine,confeflàns  qu'il  eft  le  vray  Dieu  ,  d'au- 
tant qu'il  eft  la  fagefle  du  Père  par  laquelle 
le  monde  a  efté  créé,  &  par  laquelle  aufsiil 
eft  maintenu  en  fon  eftat.  Et  pourtant ,  que 
nous  ayons  cela  tout  conclu  ,  toutes  fois  & 
quantes  qu'on  nous  parlera  de  lefus  Chrift, 
de  leuer  nos  fens  en  haut,&  d'adorer  cefte  ma: 
iefté  qu'il  a  eue  toufîours  &  cefte  elTence  in- 
finie deuant  qu'il  fuft  veftu  de  noftre  chair. 
Voila  donc  pour  vn  item.  Or  il  y  a  de  l'autre 
cofté,qu'il a  efté  manifeftc  en chair,c'eft  adi- 
ré fait  home  fembiableà  nous  en  toutes  cho 
fes(ditrApoftre)excepté  péché.  Et  quand  '1  h  j,  ^ 
dit, Excepté  péché, c'eft  à  dire  que  noftre  Sei  / 
gneur  lefus  n'a  point  eflé  coulpable.qu'il  n'a 
point  efté  pollué  d'aucune  macule  :  ma»  ce- 
pendant li  n'a  pas  laifîe  pourtant  de  porter 
nos  péchez  ,  c'a  efté  vn  fardeau  qu'il  a  receii: 
afin  que  nous  en  fufsions  defchargez  par  & 
grâce. Tat  y  a  qoe  nous  ne  cagnoiSôns  point 
lefus  Chrift  eftre  Médiateur  entre  Dieu  8c 
nous, finon  l'ayant  contemplé  homme.  Et  de 
fait, quand  fainft  Paul  nous  a  voulu  donner  ci 
deflus  courage  d'inuoquer  Dieu  au  nom  de 
noftre  Seigneur  lefus,  notamment  il  l'appel- 
le homme  :  Il  y  a  vn  feul  Dieu  &  vu  Media-  i.  T/m»,! 
teur  lefus  Chrift  ,  qui  eft  homme.  Pourquoy  i.t.j, 
eft-ce  qii'iinous  ramené  là  ,  finon  afin  que 
nous  puifsions  en  fon  nom  â:  par  fon  moyen 
venir  pri;ieement  à  Dieu  ,  cognoiflâns  que 
nous  fommes  frères  de  lefus  Chrift  qui  eft 
fon  Fih  vnique?  Et  au  refte,  quand  nous  cher 
cherions  noftre  falut  hors  de  noftre  nature^, 
que  feroit-ce?  ne  ferions-notts  pas  esbfouis 
tantoft?  Il  faut  donc,d'autant  qu'il  n'y  a  que 
péché  en  tout  le  gère  humain, que  nous  trou- 
uionsaufvi  bien  la  luftice  &  la  vieennoflfre 
chair. Si  dôc  Icfus  Chrift  n'auoitvraye  vniori- 
fraternelle  pour  eftre  homme  femblable  à 
nous ,  que  feroit-ce?  Laifions  tout  le  refté,. 
mais  prenôs  fa  mort  &  pafeion. Voila  la  mort 
de  lefus  Chrift  qui  eftappelee  Sacrifice  vni-  H<5r,yî, 
que  &  perpétuel,  par  lequel  nous  fommes  re  o-.i^. 
conciliez  à  Dieu.  Et  pourquoy  cela?  Sainû  Rom.  v^. 
Paulnous  monftre  la  raifon  au  cinquième  des  b.iiÀ 
Romains  quand  il  dit, Comme  parla  prefom- 
ption  d'vn  homme  nous  fommes  tous  dam- 
nez ,  aufbi  par  robeiflanced'vn  homme  nous 
auonsrecouuré  falut. Si  nous  n'auôs  cefte  co- 
gnoifîànce  que  la  faute  qui  auoit  efté  faite 
en  noftre  nature,a  efté  réparée  en  la  meime 
nature, que  feroit-ce?où  eft-ce  que  nous  pour 
riôs  eftre  appuyez?Voila  donc  cômc  la  mort 


h.y. 


ïUhr. 
l6. 


Kam.S.f. 
Hfir.4. 


\€i.  S  E  R  M  O  N    X  X  V  1 1. 

de  noftre  Seigneur  lefas  ne  nous  profitera  fon  Fils  vnique, de  fon  Fils  naturel.  Et  Corn- 
rien  ,  iînon d'autant  qu''il  a  efté  fait  homme  ment  fommes-nous  defoncorpsfPource  que 
femblable  à  no'. Et  puis.fi  lefus  Chrift  eftoit  ils'eft  voulu  conioindreànous,afin  que  nous 
feulemct  Dieu,ie  vous  prie.en  fa  refurrettion  foyons  participans  de  fa  fubftace.Et  par  cela 
aurions-nous  quelque  certitude  ou  gage  que  voyons-nous  que  ce  ne  font  point  des  fpecu- 
nousdeuôs  vnc  fois  relTufciterfBien  ell  vray  lations  fubtiles  quand  on  nous  parle  que  le- 
que  le  Fils  de  Dieu  ell  refliifcité.  Voire,mais  fus  Chrift  a  vertu  noftrechair.Car  voila  où  il 
il  n'eft  pas  femblable  3  nous. Or  A  Poppolîte,  nous  faut  venir  pourauoir  vne  vrayecognoif 
quand  on  nous  dit, Le  Fils  de  Dieu  ayât  pnns  fance  de  la  foy  (  comme  i'ay  délia  monftre) 
vn  corps  femblable  au  noftre,  eftant  defcendu  qu'il  eft  impolMble  que  noftre  fiâce  foit  dioi 
de  b  race  de  Dauid  ,  ccluy-la  eft  refllifcitc:  tement  en  Itfus  Chrift, linon  que  nous  appre 
nous  concluons  hardiment ,  qu.;  puis  que  no-  hendions  la  nature  humaine  :  comme  aufsi  il 
ftre  nature  qui  eft  corruptible  de  foy-mefme,  faut  auoir  cognu  fa  raaiefté,  deuant  que  nous 
&  qui  n'aquecorruption^cft  eleuce  enlagloi  puifsiôs  mettre  en  luy  la  tî.îceJ9  noftre  falut. 
re  celeile  en  la  perfonne  denollre  Seigneur  Aurefte,  ceii'ellpas  encores  tout  que  nous  , 
lefus  Chrift  ,  défia  nous  habitons  aux  cieux,  cognoifsiôs  que  lefus  Chrift  elt  Dieu,  &  que 
comme  faindPaulen  parle  en  Tepiftre  aux  il  eft  homme, linon  que  nous  adiouftiôs  quant 
'  Ephellens.  Et  d'autant  plus  font  deteft.ibles  &  quant  qu'il  n'y  a  qu'vne  perfonnc  en  iuy. 
ceux  ^ont  voulu  anéantir  la  venté  de  la  natu  Et  le  diable  encores  en  ceft  endroit  a  brallé 
re  humaine  enla  perfônedu  Fih  deDicu.Car  tout  ce  qu'il  a  peu  pourpeiuertir  outiefgiii- 
lediablea  fufcité  ajicienncmnt  des  brouillés  fer  celle  dodrine  que.làinil  Piul  nous  mon- 
quiontferaé  que  lefus  Chrift  eftoit  bien  ap-  ftre  ici.  Car  il  y  a  eu  des  hérétiques  qui  ont 
paru  en  figure  d'hommc.mais  que  ce  n'cftoit  tellement  méfié  la  maieftc  &■  rclîencc  Diui- 
point  la  vraye  fubftancc-  Et  en  cela  ils  ont  ne  de  lefus  Chrift  auec  fa  nature  humaine, 
tafché  non  leuleincnt  d'abolir  la  niifericorde  qu'ils  ont  penfé  quant  &  quant  que  fon  eilcn 
de  Dieu  enuers  nous  ,  mais  cependant  voila  ce  celcfte  fuft  conuertic  en  ch.iir  &  en  hom- 
aufsi  noltrc  foy  du  tout  abbatue.  Les  autres  me.  Et  voila  comme  Seruet(duquel  l'ay  déf- 
ont imaginé  qu'il  auoit  apporté  vn  corps  du  ia  parlé  )  auec  les  autres  blafphcmes  exécra- 
ciel,  comme  s'il  eftoit  feparéd'auecnous.Et  blés  &:  diaboliques  ,  difoit  que  lefus  Chrift  à 
c'eftauf  i  ce  que  ce  mal-hcureu-;  hérétique  efté  fait  homme.  Or  que  s'enfuyura-il  par  ce 
qui  a  efté  exécute  ici, amenoit  tnaumt ,  que  laf  II  faudroit  que  Dieu  renonçaft  fa  nature, 
lefus  Chrift  auoit  eu  vn  corps  de  tout  temps  &  que  fon  eflence  fpirituelle  fuft  conuertic 
dés  la  création  du  monde  ,  qu'il  auoit  eu  vn  en  chair.  Et  où  feroit-ce  aller?  i.t  puis  ilad- 
corpscompofé  de  quatre  eleinens  qui  n'ont  ioufteen  fécond  lieu  ,  que  maintenant  lefus 
point  efté  créez  ,  &  que  la  Diuinité  eftoit  a-  Chrift  n'eft  plus  homme, mais  fa  chair  eft  det 
lors  en  figure  vifible:&  toutes  fois  &quantes  fiée.  Et  voila  encores  vn  autre  alambic  par  le 
que  les  Anges  font  apparus  ,  que  c'eftoit  Ion  quel  lefus  Chrift  a  paffe.  Voici  vn  merueil- 
corps.non  point  engendré  de  femence  humai  leux  alchumifte,  de  vouloir  faire  tant  d'cll'en 
ne ,  mais  qu'il  eftoit  bafti  des  ces  phantalîes-  ces  nouuelles  de  lefus  Chrift. Or  le  diable  a- 
la.  De  faire  vne  telle  alchumie  pour  compo-  uoit  bien  lufcité  de  telles  refueries  aiiciéne- 
fer  vn  corps  au  Fils  de  Dieu,  ou  eft-ce  aller?  ment  pour  troubler  la  foy  de  l'Eglife  :  mais 
Etqucdeuiendra  ce  que  ditl'Apoftre,  Q^e  ceci  fe  renouuelle  encore  de  noftre  temps. 
Dieu  n'a  point  fait  ceft  honneur  aux  Ançes,  Notons  bien  donc  ce  que  S.  Paul  nous  nion- 
d'eniioycr  fon  Fils  qui  luft  de  leur  condition  ftre  ici  :  car  il  nous  dône  bénes  armures  pour 
&  qiialté,mais  qu'il  l'a  fait  femblable  à  no',  eftre  munis  contre  ces  erreurs,  c'cftafçauoir 
&qu'en  cela  il  monftroit  combien  il  nous  ai-  qu'il  y  a  en  lefus  Chrift  la  Diuinité,il  yaauf 
moit?  Quedcuiendra  ce  qui  eft  dit,  Qj^^il  a  ii  lachair.Il  ne  faut  point  doc  que  nous  mcf- 
prinsnoftrenatureafind'auoirviaye  frater-  lions  ce  que  Dieu  nous  môftre  audoigtd'vn 
nité  auec  nous:que  mefmes  il  a  efté  fait  km-  cofté  &  d'autre. Voulôs-nous  donc  bien  con- 
blable  à  nous ,  afin  d'auoir pitié  de  nos  infir-  fiderer  lefus  Chrift?  contemplons  en  Iuy  cc- 
mitezpour  y  fubuenir.''E<flalcmcnt,pourquoy  fte  gloire  celcfte  ,  contemplons  ccfte  ellcnce 
eft-ce  qu'il  a  prins  la  more  finon  afin  de  nous  qu'il  a  eue  de  toute  éternité.  Et  puis  venons 
en  dcliiirer?  Bi  ief,il  a  efte  f.iit  ûuiéce  de  Da  .i  fa  nature  humaine  qui  n  jus  eft  là  monftree. 
i;id  ,  afin  qu'il  fuft  cognu  le  Redenipteui  qui  V;,>ila  donc  pour  vn  item,  que  nous  puisions 
eftoit  promis  ,  &  qui  de  tout  ttirps  a  efte  at-  diftinguer  en  noftie  Seigneur  le  fiis  Chrift  les 
tendu  des  Pcres.  Tout  cela  û  ra  iiii,:é  4.  aS-  deux  n.uures.  Et  ceci  n'cft  point  pourfpccu- 
batu.  Ainfî  donc, recordons  bien  ceftauicle  1er  en  l'air,  mais  il  f.iut  q^ie  nous  le  pratti- 
où  il  eft  dit ,  Que  le  Fils  de  Dr  u  eft  a;^paru  qnions  pour  nourrir  noftre  foy.  La  railonr'Si 
en  chair,  c'eft  adireque  vrayeaicnt  ila  efté  nous  voulons  chercher  en  lefus  Chrift  vie,  il 
tait  homme,  &  qu'il  nous  a  vois  à  Iuy  ,  voire  faut  que  nous  entendions  qu'il  a  en  foy  tou- 
d'vn  lien  fraternel,  en  forte  que  nous  pouuôs  te  maiefté  Diuine  :  car  d  eft  efcrit  au  Pfeau- 
mainten.Tt  appeler  Dieu  n;  ftre  Pcre.Et  pour  me  ,  oue  la  fontainede  vicgift  en  Iuy  ,  &  que  Vfe.  }6, 
quoy?  d'autant  que  nous  fommc^  ducorps  de  nous  voyôs  clair  en  la  clarté. Si  nous  voulons  c.9. 

eftre 


SVR    L  A   I.   A  TIMOT  H. 


1^5 


eftre  maintenus  cotre  le  diable, &  cotre  tous 
110V  ennemis,!]  faut  que  nous  cognoil'sions  le 
lus  CJirilteftre  Dieu. Voulons-nous  en  fom- 
ine  mettre  noftre  fiance  en  luv?il  eft  queftion 
aufsi  de  cognoiltre  qu'il  a  toute  puiflance:ce 
qu^il  n'auroit  pas  finon  eftant  Dieu  .    Voila 
donc  côme  pour  bien  exercer  noftrefoy  afin 
que  nous  puifions  eftre  pleinemét  fondez  en 
lefus  Chrift,  il  faut  que  nous  cognoifsions  <a 
nature  Diuine&  fon  efTence  d"'vne  part.   Et 
puis  quand  nous  chercherons  la  reinifsion  de 
■nos  péchez  ,  la  fatisfadion  de  nos  dettes ,  le 
moyen  d'inuoquer  Dieu ,  d'ellre  fecourus  en 
nos  infirmiteZjSc  d'ellre  deliurez  de  la  maie- 
diftion.il  faut  que  nous  trouuiôs  lefus  Chrift 
prochain  de  nous,&  que  nous  le  voyôs  là  cô- 
me home:  Si  que  pour  ce  faire  nous  cognoif- 
fions  fa  nature  laquelle  ila  prinfede  nous, 
afin  qu'il  ne  nous  farlle  point  faire  de  longs 
circuits  pour  trouuer  en  Iny  ce  quiappartiét 
a  l'efperancede  noftrefalut,  pource  qu'il  a 
elle  offert  pour  eltre  noftre  Médiateur,  & 
pour  nous  réconcilier  à  Dieu  fon  Père.  Ainfi 
donc  maintenant  ii  cft  aifé  de  voir  qu'il  nous 
faut  appréhender  la  nature  humaine  en  no- 
ftre  Seigneur  Iclus  Chrift,  pour  la  diftipguer 
de  fon  eflence  &  de  fa  niaieftc  celefte.Or  ce- 
pendant lî  faut-il  aufsi  que  nous  côioignions 
ces  deux  natures  en  vneperfonne.  Q^el  eft 
donc  le  Dieu  dont  parle  fainft  Paul?  C'cft  Je 
Fils  de  la  vierge  Marie  ,  qui  a  la  vie  en  foy, 
ceiuy  qdia  efte  kiiet  à  la  mort.  Quicftceluy 
qui  a  toute  pu:l'{ànce?C'cft  celuy  qui  s'eft  fait 
foible  Se  débile  :  cetuy  qui  a  porté  la  puni- 
tion de  nos  péchez  ,  ettla  fontaine  de  vie.  Il 
faut  doc  que  nous  apprcniôs  d'vnir  ca  deux 
chofes  ,  &  non  point  les  ftpai-er.  Car  fi  nous 
forgeons  vn  lefus  Chrift  Dieu, 5:  pnis  que  ce 
Juy  qui  a  fouffert  eftant  nay  de  la  vierge  Ma 
lie, qui  eft  mort  &  relTiifcité,  foit  vn  homme 
à  part  ,quefera-ce?  Ainfi  donc  notons  bien 
que  ce  mot  Hamfeftc,  conioint  les  deux  natu 
res,  en  forte  qu'il.fàut  que  nous  cognoifsiôs 
lefus  Chrift  non  point  double  ,  mais  vn  feul, 
combien  qu'il  ait  deux  natures.   Nous  auons 
deux  yeux  en  la  tefte  ,  &  chacun  œil  peut  a- 
uoir  fon  regard  à  part  :mais  quand  nous  con- 
templons vne  chofe,  fi  nos  deux  yeux  s'ad- 
donnent  à  icne  içay  quoy,noftre  veuc  qui  de 
foy  eftfeparee,feconioint&  s'vnitLpour  s'ad 
dôner  du  tout  A  Tobieft  qui  nous  fera  mis  au 
deuant.  Voici  donc  vne  telle  fimilitude,  c'eft 
afçauoir  que  tout  ainfi  que  nous  auons  deux 
yeux  en  la  tefte  ,  aufsi  en  lefus  Chrift  il  y  a 
deux  natures  diuerles.Maisfi  faut-il  que  no- 
ftre  foy  foit  plus  fimple  que  nos  deux  yeux: 
ijue  le  regard,di-ie,fpirituel  de  noftre  efprit 
s'eleue  tellement, que  nous  cognoifsions  que 
lefus  Chrifteftant  Fils  de  Dieu, eft  aufsi  Fils 
de  l'homme  pour  eftre  fait  noftre  frère.  Et 
jncfmes,ie  vous  prie,y  a-il  chofe  plusdiuer- 
fe  que  le  corps  humain  d'aucc  l'ame?  Voila 
Tamequi  dt  vn  elpritinuifible  qiii  ne  fe  peut 


voir  ne  toucher ,  qui  n'a  point  de  lieu, qui  n*a 
point  toutes  ces  paf  ions  charnelles.  Voila 
le  corps  qui  eft  vne  mafle  corruptible,  fuietre 
à  pourriture,  qui  eft  vne  chofe  vifible, qui  fs 
touche:  le  corps  a  fcs  proprietez  qui  ne  con- 
uienent  nullement  à  l'ame.   Et  qu'eft-ce  que 
l'home?  C'eft  vne  créature  baftie  d'vn  corps 
&  d'vn  anie.Si  Dieu  a  vfé  d'vn  tel  artifice  en 
nous  quand  il  nous  a  faits  hommes  de  deur    : 
natures  daucrfes,  pourquoy  trouuerons-nous 
eftrange  qu'en  lefus  Chrift  il  y  ait  eu  vn  plus 
gr.id  miracle  de  Dieu?  Ainfi  donc  que  ce  mot 
Manifefter,dont  fainft  Paul  vfe, foit  bien  ob- 
ferué  de  nous ,  afin  que  quand  nou.  venons  à 
lefus  Chri ft,  après  auoirdiftingué  fon  eflen- 
ce Diuine  d'auec  fa  nature  humaine,no'  le  re 
ceuions  Dieu  manifefté  en  chair ,  c'eft  .\  dire 
celuy  qui  eft  vrayeraent  noftre  Dieu, que  tou 
tesfois  en  vne  telle  perfonne  il  s'eft  vni  auec 
nous,  tellement  que  puis  qu'il  a  efté  homme, 
nous  fommes  enfans  de  Dieu, puis  qu'il  eft  no 
ftre  fatisf.iiSfion,  nous  fommes  defchargez  da 
fardeau  de  nos  péchez, puis  qu'il  nous  a  deli- 
urez de  toutes  nos  pouretez.que  maintenant 
nous  auôs  I<?s  richenes  parfaites  eu  luyihricf, 
puis  qu'il  s'eft  .ilUiietti  ,i  la  mort, que  mainte- 
nant nous  fommes  afleureïde  la  vie. Or  après 
que  fainft  Paul  a  parlé  ainfi, il  adioiifte,  Qw'r/ 
a  tfté  iiiflifé  en  offrit.  Ce  mot  de  lufliftr  en 
l'Etcriiure  ,  fe  prend  fouuent  pour  eftre  ap- 
prouué. Quand  il  eft  dit  que  Dieu  eft  luflifié, 
ce  n'eft  pas  qu'il  deuiene  iufte  ,  ce  n'eftpas 
qu'il  foitabl'ous  des  homes  côme  s'ils  eftoy- 
ent  tes  inges ,  &  qu'il  fuft  tenu  à  leur  rendre 
conte.  Nenni:mais  c'eft  quand  la  gloire  qu'il 
mérite, luy  eft  attribuée  &  rédue,  que  nous  le 
confeflbns  tel  qu'il  eft. Comme  auf  i  il  eft  dit 
que  l'Euangile  cft  iuftifié  en  celle  façon,  c'eft  ^''^-  "' 
af'çauoir  quand  les  hommes  en  tonte nbeiïïàn  "•'>'• 
ce  le  reçoiuét,que  par  foy  ils  s'humiliët  fous 
ladoftrineque  Dieu  leur  er.feignt  :  ainfi  en 
cepaflàgeil  eft  dit  que  lefus  Chrifta  tfté  iu- 
ftifié en  Efprit.  Et  ponrquoy?  Afin  qu'on  ne 
rcftime  pas  feulemêt  fous  ccfte  figure  humai- 
ne en  laquelle  il  s'eft  raôfti  é,  &  tn  cirftc  infir 
mité  qu'il  a  eue<:ômune  auec  les  homes  mor 
tels. Il  ne  faut  point  donc  qu'on  s'arrefte  à  la 
prefence  corporelle  de  lefus  Chrift  poar  fça 
uoir  que  c'eft  de  luy  ,   fous  cefte  figure  qui  a 
efté  vifiblc  ,  mais  il  mnts  faut  regarder  pins 
haut.  Et  cément?  C'eft  ce  que dir' S.  lehan  au 
premier  chapitre, Que  Dieu  a  efté  fait  chair, 
ou  la  parole  de  Dieu, qui  vaut  autant.  La  pa- 
role(dit-il)qui  dtoit  Dieu  deult  la  création 
du  inonde,a  efté  faite  chair,  c'eft  iî  dire  elle  a 
tfté  vnie  à  noftre  nature, en  telle  forte  que  le 
Fils  de  la  vierge  Marie  eft  Dieu  ,  mefmes  le 
Dieu  eternel.Or  après  auoir  parlé  ainfi, ilad- 
iouftc.ÇjB?  UgloiTf  qui ap^ntient  nu  Tils  ynt 
c]»e  de  nitu,aefié  cognue  en  luy.    En  quelle 
forte?  Carilya  en  lefus  Chrift  plus  que  l'hô 
me  ,  &  que  ce  qu'il  a  prins  de  nous.    Qupy 
donc?  La  puiflance  de  Dieu  infinie  s'eft  là 

i.ii. 


«54-  '^  SERMON    XXVII.  ^ 

monftree,  tellement  qiie  c'a  efté  vneappjoba  incognu&  incomprehenfîble.  Voila  le  pre^" 
tion  certaine  que  le/us  Chrifteftoic  Dieu.  Et  mier  que  nous  auons  à  noter.  Le  fécond  eft, 
Toilaaufsi  pourquoy  (ainû  Paul  au  premier  que  nous  foyons  attentifs  quand  il  nous  eft 
chapitre  des  Romains ,  ayant  dit  que  lefus  dit.Voicivnfecret.Or  il  ne  taut  pasquenous 
Chriftaefté  fait  de  la  lemence  de  Dauid,  ad-  foyons  endormis:  Dieu  nous  prépare  &  nous 
ioufte  qu'il  a  efté  déclaré  Fils  de  Dieuenpuif  aiguifeafîn  que  nous  penfions  àceftedoftri- 
fance.  Notons  bien  donc  que  ce  n'eft  point  af  ne,&  que  nous  y  méditions:  &  quand  nous  en 
fezde  contempler  lefus  Chnft  de  nos  yeux  aiiroiis  eu  quelque  petitgouft,  que  nous  taf- 
icharnels ,  car  nous  ne  monterons  point  plus  chions  d'y  profiter  tout  le  téps  de  noftre  vie. 
haut  qu'à  rhomme:  mais  quâd  nous  voyons  q  Au  refte,  quand nou5  aurons  cognu  le  Fils  de 
par  miraclcs,que  par  vertus  il  s'eft  demonftré  Dieu  eftreconioint  ainlîànous,quenous  re- 
Fils  de  Dieu.v  oila  vne  fignature, voila  vneap  gardions  en  luy  ce  qui  nous  y  eA  tant  magni- 
proBation  telle.qu'il  ne  faut  plus  douter  q  le-  fié.c'efb  afçauoir  cefle  vertu  &  cefte  puillance 
fus  Chrift  s'eftant  ainlî  abb.iilTe,n'a  point  tou  celefte  du  S.  Efprit.  Voila  donc  lefus  Chrift 
tesfois  quitté  famaieilé  celefte:  maisqu'ap-  qui  n'eft  point  feulemét  apparu  homme,  mais 
prochansde  luy  en  toute  confiance  comme  ilamonftré  par  effeftqu'ileftoit  leDieu  tout 
de  noftre  frère ,  nous  l'adorions  comme  no-  puiflant,  comme  toute  plénitude  de  Diuinitc 
ftre  Dieu  éternel,  &  celuy  par  lequel  nous  a-  a  habité  en  luy.Quand  nous  aurons  cognu  ce 
uons  efté  créez  ,  &  par  lequel  nous  fommes  la.nous  pourras  bien  fcntir  que  ce  n'eft  point 
maintenus.  Voila  donc  pourquoy  laincl  Paul  fans  caufe  que  iainft  Paul  prononce  que  tous  Ca/of,  ; 
notamment  adioufte,  Que  lel'uv  Chrifta  efté  les  threfors  de  fagefle  (ont  cachez  en  noftre  d.j. 
tullifié,voire  en  Efprit  Maintenantfaifonsvn  Seigneur  lefus  Chrift.  Nous  aurons  donc  co- 
petit  recueil  de  ce  qu'il  auoit  touché  aupara-  gnu  &  haut  &  bas,  &  de  long  &  de  large,  tout 
uant:carle  tcmpsne  porteroit  pas  que  ce  qui  ce  qui  nous  cft  propre  pour  noftre  falut,quâd 
cft  ici  contenu,  fuft  déclaré.  Voulons-nous  nous  aurons  appréhendé  ce  Médiateur,  voire 
donc  auoir  vn  fommaire  de  noftre  foy  &  de  en  fa  maiefté,  en  forte  que  nous  puifsions  ap  - 
noftre  Chreitienté?  Il  faut  que  nous  cognoif  puyer  noftrefoy  fur  luy, corne  furnoftreDieu 
fions  que  Dieu  a  efté  manifellé  en  chair,  com  vn!que,&  que  nous  l'aurons  contemplé  com- 
me aufsi  en  ce  paflage  que  i'ay  allégué  n'ague  me  no  ftre  frere,lequel  non  ieulemcn  t  s'eft  ap 
res  du  premier  des  Romains, fainti  Paul  aylt  proche  de  nous,  mais  il  s'y  eft  vni  &  conioint 
fait  mentionde  l'Euangile,  iladioufte  que  c'  tellement  qu'ila  efté  faiûvne  mefme  fubftan 
eft  vn  meflâge  qu'il  porte  de  lefus  Chrift,  le-  ce. Quand  donc  nous  aurôs  cela.cognoiflons 
quel  a  efté  fait  fils  de  Dauid  félon  la  chair ,  &  que  nous  fommes  venus  à  la  perfeftion  de  fa- 
s'cft  déclaré  Fils  de  Dieu.Sans  cela  nous  n'a-  geffe  de  laquelle  parle  faind  Paul  en  vn  autre 
uons  plus  d'Eglife  ,  fans  cela  nous  n'auons  lieu,pour  nous  glorifier  pleinement  en  la  bon 
plus  de  religion,  fans  cela  nous  n'auons  plus  té  de  Dieu, de  ce  qu'il  luy  a  pieu  nous  efclai- 
de  falut  :  il  vaudroit  mieux  que  nous  fufsions  rer  par  la  clarté  de  fon  Euangile,afiu  de  nous 
beftes  brutes  fans  raifon  n'intelligence  ,  que  attirer  en  fon  royaume  celefte. 
de  n'auoir  point  cefte  cognoiflance,  que  le-         O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la  fa 
fus  Chnfteft  venu,  voire  pour  vnir  la  maiefté  cède  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de  nos 
Diuine  aue.c  noftre  nature  qui  eftoit  fi  poure  fautes,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les  faire 
&  lî  miferable  que  rien  plus.  Mais  cependant  tellement  fentir,quevoyans  que  nous  fommes 
ind  Paul  ne  s'eit  point  conten-  du  tout  perdus  &  damnez ,  nous  regardions  à 


i.Cor.i. 
6.7. 


notons-que  iainit  Paul  ne  s'eit  point  ( 
té  du  mot  deFo^,  mais  il  a  dit  quec'eft■»'»/<r- 
frff,afinque  nous  ne  venions  point  ici  ap- 
porter noftre  fierté,  nofti  e  arrogance ,  com- 
pe  nous  voyons  que  les  hommes  veulent  e- 
ftre  fubtils.  Et  voila  qui  eft  caufe  de  fufciter 


la  maiefté  du  Perc  celefte  ,  &  qu'il  nous  fa- 
ce la  grâce  de  tellement  nousdifpoferà  fon 
feruice,que  nous  ne  demandions  lînon  de  dé- 
dier toute  noftre  vie  àfa  bonne  volonté.  Et 
puis  qu'il  luy  a  pieu  nous  côioindre  à  fon  Fils 


tant  d'hercfies ,  c'eft  l'orgueil  qui  a  efté  en  vnique,  quand  il  a  pnns  noftre  nature  humai- 
ces  deteftables  que  lediablea  polFedez,  com-  ne,  en  foite  que  nous  fommes  vn  corps  &  vne 
me  il  eft  père  d'orgueil.  Et  de  fait,i'arrogan-  fubftai-ce  auec  luy,qu'i_l  nous  gouuerne  telle- 
ce  a  efté  toufiours  mère  de  toutes  herelîes.  ment  par  ion  faind  Efprit  .qu'il  nous  rcco- 
Ainlî  donc,  quand  nous  oyons  ce  mot  de  Se-  gnoifle  &  aduoue  touliours  pour  les  enfans 
crft,  retenons  deux  choies  :  l'vne  ,  que  nous  par  le  moyen  de  ccftt  vnion  lacree.  Etd'au- 
apprenions  de  captiuer  tous  nos  fens ,  que  tant  qu'il  y  a  toulîours  beaucoup  de  vices& 
nous  ne  cuidions  point  par  noftre  fubtilitc,  d'impcrfcrtions  en  nous  cependant  que  nous 
par  noftre  efprit  aigu  paruenir  à  vne  telle  viuons  en  ce  monde.qu'il  luy  plaife  nous  fup- 
hauteffe  que  de  cogiio;ftrc  comment  cela  porter  &  nous  en  purger  toufiours  de  plus  en 
s'eft  fait  ,que  Dieu'ait  pnns  noftre  nature  phis.iufques  à_ce  qu'il  nous  ait. imenez  au  but 
hLimaine  :iJ  faut  qu'ici  tous  les  fens  humains  de  toute  pcrfcdion.  Que  non  feulement  il 
dcfailllent.  Et  pourtant  apprenons  de  mon-  nous  fice  cefte  grâce,  mais  aufsi  à  tous  peu- 
ter  par  defliivnouv,&  d'adorer  ce  qui  notis  eft:  pies  &  nations  de  Jaterre,&c. 

*  P  R  £ 


s  V  R    LA  .1.    A    T  î  M  O  T  H.  i6^ 

PREMIER     SERMON     SVR     LE    QV  Ar 

T  R  I  E  M  E        CHAPITRE. 

î  Or  /'  Efprit  dit  ntamfeîlement ,  qu'a  l'aduenir  aucuns  defau- 
iront  de  Ufoy/amufans  aux  efprits  ahufeurs ,  (f  'ff^^  doBrines  des 
diables. 

i     Pdr  fhypocrifie  de  ceux,  qui  parlent  menjhnges,  ç^c. 


N  cognoift  la  vanité  des  ho 
mes  en  beaucoup  de  forte;: 
mais  le  principal  tclmoigna 
ge  qu'on  en  puifle  auoir, 
c'cft-  dé  ce  qu'ils  ne  fe  peu- 
uent  contenter  quand  Dieu 
les  veut  enfeigner,⣠qu'a- 
près auoir  protefté  que  la  doûrine  leur  appor 
te  falut.il  monftieaufsi  dequoy,  &repaift,  & 
contente  leurs  âmes  tant  qu'il  eftpofsible,s'il 
y  auoit  quelque  raifon  en  eux  :  mais  cepen- 
dant 'Is  ne  font  que  vaguer  ,  &  ne  demandent 
qu'à  fauter  en  l'air ,  fans  auoir  aucun  fonde- 
ment .D'autant  donc  que  les  hommes  ne  fe 
peuuent  tenir  à  la  vérité  de  Dieu,  en  cela  co- 
gnoift-on  combien  leurs  efprits  font  volages, 
voire  &  errans.puis  qu'ils  ne  cerchent  qu'à  va 
guer.  Or  cependant  Dieu  nous  met  des  bar- 
res ,&  voyant  la  légèreté  qui  eft  en  nous,&  la 
folle  conuoitife  qui  nous  tranfporte  ,  il  nous 
retient,  ou  pour  le  moins  il  nous  monftre  que 
il  nous  faut  du  tout  arrefter  à  fa  parole.  Mais 
auec  la  folle  curioiîté  il  y  a  aufsi  vne  rage, que 
nous  fommes  infatiableS'en  nos  appetis,&  re- 
belles quant  &  quant  :  quoy  que  Dieu  face, 
nous  ne  voulons  point  fouffrir  qu'il  nous  tie- 
ne  bridez  ,  qu'il  nous  captiue  .  Voila  donc 
deux  vices  bien  grans  qui  fe  monftrent  en  no 
ftre  nature:l'vn  elt,  que  nous  fommes  volages 
&  inconftans:l'autte,que  nous  fommes  rebel- 
les, &  ne  pouuons  eftre  aucunement  alTiiiettis 
à  Dieu.  Mais  encores  le  mal  fe  cognoift  plus 
grand,  fi  on  confidere  quelle  eft  la  doftrine 
que  Dieu  nous  propofe  :  car  elle  donne  plus 
grand  luftre  à  noftre  ingratitude .  Si  Dieu 
nous  monitroit  quelque  chofe  petite, \S:  bien, 
encores  y  auroit-il  quelque  excufc  fi  nous  cer 
cillons  d'auantage  •  mais  quand  il  omire  les 
threfors  infinis  de  fa  fagefle,  &  qu'il  n'cfpar- 
gne  chofe  qui  nous  foit  vtile  à  falut,  ne  faut- 
il  pas  que  nous  foyons  malins  &  peruers, 
que  nous  ayons  les  richefles  infinies  de  la  fa- 
gefle de  Dieu,&  cependant  que  nous  vaguiôs 
en  nos  curiofitez?  Et  c'cft:  ce  que  nous  auons  à 
retenir  de  ce  paflàge  de  faincl  Paul.  Car  il 
nous  a  propofe  quelle  eftoit  lafommedel'E- 
uangi]e,en  difant ,  que  c'eft  vn  grand  fecret, 
que  Dieu  foit  manifcflé  en  chair, &  quecepen 
oantil  fo^t  approuué  toutesfois  en  Efprit,& 
qu'tftant  glorifié  il  ait  efpandu  la  clarté  de 
fon  Euangile  par  tout  le  monde  ,  tellement 
que  les  Payens  quieftoyentdu  tout  reicttez 


&  profanes ,  font  accompagnez  auec  les  An- 
ges de  Paradis ,  qu'il  y  a  eu  vn  lien  commun' 
pour  vnir  ceux  qui  eftoyent  en  la  feruitude 
de  Satan, qui  eftoyent  plongez  en  ce  profond 
abyfme  de  malediftion ,  auec  les  enfans  de 
Dieu  ,  ceux  qui  ont  toufiours  iouy  de  cefte 
gloire  celefte.  Ne  voila  point  vne  chofe  qui 
doit  bien  eftonner  tous  nos  (ens  i  Or  cepen- 
dant fainâ  Paul  monftre  que  les  hommes  ne 
fe  tiendrôt  point  àceftedoftrinc,  &  qu'ils  fs 
reuoltcront  de  la  foy  :  combien  qu'ils  ayenc 
cognuvntel  fecret  &  fi  admirable,  que  Dieu 
foit  defcendu  à  eux  :neantmoins  qu'ils  ai- 
ment mieux  fuyure  les  menfonges  de  Satan, 
&  eftre  ruinez  &  menez  à  perdition, que  d'ef. 
coûter  le  Fils  de  Dieu  quand  il  s'eft  manife- 
fté  en  chair,  <S:'qu'il  veut  faire  office  de  Do-> 
fteur  pour  lesamener  à  falut  .  Or  cependant 
fainâ:  Paul  monftre  que  le  vray  remède  pour 
nous  tenir  en  robeiflànce  de  Dieu  ,  c'tft  que 
nous  appliquions  toute  noftre  eftude  à  ce  qui 
cft  contenu  en  fa  parole  ,  que  nous  infiftions 
l.ide{rus,&  que  ceux  qui  ont  la  charge  d'anon 
cer  i'Euangile  ,  foyent  diligcns  à  monftrer 
quelle  eft  la  vraye  inftruftion  des  fidèles, 
c'eft  afçauoir,d''eftre  du  tout  aflïiiettis  à  no- 
ftre Seigneur  leftr  Chrift,  &  de  n'en  décliner 
tant  peu  que  ce  foit ,  finon  qu'ils  fe  veulent 
deftourner  du  chemin  de  faluttcar  c'eft  la  per 
feftion  de  toute  fagefle  ,  que  de  cognôiftre  le 
Fils  de  Dieu  félon  qu'il  a  efté  manifefté,  çcm 
me  il  eft  dit  qu'en  luytous  les  threfors  en 
font  cachez. Maintenant  donc  nous  voyons  à  Ct/.l.t.' 
quel  propos  fainft  Paul  adioufte  ce  figne,ÇJ»* 
le  monde  fe  révoltera  de  la  foy  :  c'cft  à  ce  qiie 
nous  cognoifsions  que  ce  n'eft  point  fans  eau 
fe  qu'il  nous  aaducrtis  en  quoy  Dieu  nous 
veut  exercer ,  &  ce  que  nous  auons  à  retenir 
de  fon  efchole:  c'eft,  di-ie,de  nous  addonner 
du  tout  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  &  de 
difcerner  ce  qu'il  nous  a  apporté,fçachâs  que 
quand  nous  aurons  profité  en  cela,  il  n'y  a 
point  occafîon  de  cercher  d'auantage.  Car 
ceux  qui  ne  fe  contentent  point  de  lefut 
Chrift,deshonorent  Dieu,  lequel  s'eft  là  mon 
ftré  en  toute  perfection  &  plénitude  de  grâ- 
ce &  de  vertu.  Or  maintenant  il  nous  faut  en- 
trer par  le  menu  à  ce  qui  eft  ici  monftre  de 
fainét  Paul.  Il  dit,  L'E/fr/t  dit  manifepement 
<]Ke  ci  afres  les  hommes  fe  révolteront  de  la  foy. 
Comme  s'il  difoit,  Ce  n'cft  point  aflez  que 
ceux  qui  ont  la  charge  de  porter  I'Euangile, 

z.iii. 


Ifitr 


SERMON  X  xvrii. 


anoncent  ce  qui  eftboo&  vtilc,  mais  il  faut 
qu'ils  s'efforcent  de  modérer  les  efprits  qui 
de  leur  nature  font  par  trop  volages ,  8c  que 
nous  foyons  aufsi  biendifpofez  de  receuoir 
la  pafture  de  vie  ,  car  ce  n'eft  point  aflèz  de 
nous  l'auoir  mifeaudeuant  .  Sivn  homme  a 
bon  appétit,  &  qu'il  ait  difcretion  de  manger 
par  mefure,  qu'on  luy  baille  la  viande ,  il  en 
prendra  en  lobrieté  ce  qu'il  luy  en  faut.  Or 
autant  en  feroit-il  de  nous  ,  quand  nous  au- 
rions bon  iugement  &  droit  pour  difcemer 
la  bonne  viande,  &  ce  qui  nous  eil  vtile  pour 
édifier  no5  âmes. Mais  quoyrnous  fommes  def 
gouftez:&  outre  cela  nous  demandons  d'eftre 
repeus  d'ordures,  &  de  vilenies,  qu'au  lieu  de 
choifirce  que  Dieu  nous  prefente,  &  qu'il  co 
cnoiftnous  eftre  propre,  nous  irons  prendre 
des  chofes  vileines  &  puantes ,  mefmes  nous 
ne  demandons  qu'à  nous  empoiTonnerà  no- 
ftre  efcient .  Ainiî  voit-on  que  les  hommes 
font  plus  defpourueus  de  fens  &  de  raifon, 
quant  à  la  vie  de  leurs  ames,que  les  belles  bru 
tes. Il  eft  vray  qu'vn  malade  ou  vn  yurongne, 
ou-quelqu'vn  qui  fera  defgoiifté  par  autre  rai 
fon, prendra  bien  appétit  à  des  chofes  mau- 
uaifes  dont  il  fe  pourroit  gaJkr  :  mais  tant  y 
a  encores  qu'vn  homme  n'ira  point  cercher 
ni  fiente,  ni  autre  ordure  pour  fourrer  en 
fon  ventre  ,  &  s'il  cognoift  qu'il  y  ait  quel- 
que poifon ,  il  s'en  gardera.  Mais  il  ftm- 
ble  que  nous  ayons  confpiré  aucc  Satan  de 
prendre  toutes  les  vilenies  qui  procèdent 
de  luy,  qui  font  mortelles  quant  à  la  vie  fpiri- 
tuelle.  Etainfi  maintenant  faind  Paul  décla- 
re que  quand  il  auoit  admonefté  les  fidèles 
en  le  perfonne  de  Tiinothee  ,  de  fe  tenir  à  la 
puredoftrine,que  ce  n'eft  point  fans  caufe.Et 
pourquoy  ?  Pource  qu'il  ne  fuffit  pas  ,  dit-il, 
qu'on  prtfche  ce  qui  eft  bon  &  vtile.Car  fi  les 
hommes  eftoyent  bien  difpofez,  qu'ils  rcceuf 
fent  ce  que  Dieii^  leur  propofe  ,  &  qu'ils  fuf- 
fent  fi  dociles  qu'ils  y  peuflent  ranger  leurs 
efprics,  afinde  s'affuiettir  àce  qui  ell  bon,  il 
fuffiroit  d'auoir  dit, Voila  que  Dieu  vous  dé- 
clare .  Mais  d'autant  que  les  hommes  font 
nialins,  qu'ils  font  ingrats  ,  qu'ils  font  per- 
uers,  qu'ils  ne  demandent  que  les  menfonges 
au  lieu  de  la  vérité,  qu'ils  le  desbauchent  ai- 
feciiienc,  &  qir.ipresauoircognii  Dieu,  ils  fe 
deftournent  &  s'aliènent  deluy  ,  pour  celle 
caufc  il  faut(dit  fain£l  Paul)  que  nous  foyons 
retenus  qiiafi  par  force ,  &  que  Dieu  après 
nous  auoir  fidèlement  enfciçne z  ,  nous  ex- 
horte à  pertîfter  en  l'obeiflance  de  fa  Paro- 
le,pour  ne  flcchir  ne  ç.i  ne  là,  Se  n'cftre  point 
comme  rofcaux  branlans,  n'eftre  point  fuiets 
à  receuoir  les  menfonges.  Ainfi  nous  voyons 
quelle  eft  l'intention  île  faintt  Paul.  Suyuant 
cela  cognoillbns  qu'il  eil  expédient  que  Dieu 
nous  rcfucille  fouuent ,  &  quand  ri  le  fait, 
que  ce  n'ell  point  fans  propos  .  Car  C  comme 
i'ay  délia  du)  ilnousdeuroit  bienfiilhre  d'a- 
uoir eqtauiu  (a  lîiiipk*oiojité  .  Mais  quoy» 


regardons  noftre  nature  combien  elle  eft 
peruerfe.  Et  pourtant  fouffrons  d'elhc  ad- 
moncftez  quand  on  nous  a  déclare  ce  qui  eft 
bon,  qu'on  nous  exhorte  de  nous  y  tenir  :  Se 
encores  que  nous  ayons  elle  aduertis ,  fi  on 
nous  redargue ,  voire  par  force ,  Si  qu'on  vfe 
de  reprehcnfions  qui  jious  foyent  aigres , 
cognoiflons  que  c'e/l  pour  noftre  profit. Voi- 
la ce  que  nous  auons  à  retenir  en  premier 
lieu  dt  ce  palTàge .  Or  cependant  nous  voy- 
ons aufsi  le  foin  paternel  que  Dieu  a  de 
nous,  qui  nous  doit  encores  mieux  incitera 
retenir  les  admonitions  qu'il  nous  fait.  Puis 
qu'ainfi  eft  que  de  fi  long  temps  cefte  pro- 
phétie nous  a  efté  donnée,  en  cela  ne  voyons 
nous  pas  que  Dieuapreuenu  le  danger?  que 
cognoillàpt  que  les  hommes  fe  peuuent  def- 
baucher,/il  n  a  point  permis  qu'ils  perilTent 
par  ignorance  ,  mais  qu'il  leur  a  mis  comme 
vne  barre,  qu'il  leur  a  crié  de  loin,  Gardez- 
vous,  faites  bon  guet,&  ne  vous  laiflcz  point 
feduire  par  l'aftuce  de  Satan  .  Nous  voyons 
donques  en  cela  quelle  folicitude  Dieu  a  de 
noftre  lalut,  quand  il  nous  veut  déclarer  que 
il  lafcheroit  la  bride  à  Satan  pour  dcceuoir 
tous  ceux  qui  feroyent  prtfts  à  l'efcouter. 
Voila  pour  le  ftcond.  Or  cependant, l'.'.duer- 
tillèmcnt  que  i'ay  défia  touché, c'cft  alçauoir 
que  non  feulement  nous  femmes  &  malins  & 
pleins  de  vanité  ,  &  que  nous  n'appctons  que 
menfoiiçe,mais  aufsi  que  nous  iomnies  rebel- 
les ,  &:  qu'il  eft  plus  difficile  lie  chcuir  de 
nous  ,  &  de  nous  bien  donter  ,  n'tftoit-il  pas 
fuffifant  pour  tenir  les  hommes  en  la  fuiet- 
tion  de  Dieu  ?  Il  le  deuroit  eftre  .  Or  fi  voit- 
on  l'horrible  difsipation  qui  eft  aduenue. 
Ceux  qui  ont  mieux  aimé  de  fuyure  les  troin 
pênes  de  Satan  ,  que  d'adhérer  à  la  vérité 
qui  leur  eftoit  cognue  ,  font-Us  cxcufables? 
Qu^allegueront-iis  ?  Y  a-il  ici  ignorance  ? 
Car  Dieu  a  parlé,  &  auoit  aduerti  haur& 
clair  tout  le  monde  .  Cependant  fi  voit-on 
qu'vnc  grande  partie  s'eft  efgaree  ,  &  de  fon 
bon  gré  s'eft  allé  mettre  en  vne  horrible  con 
fufion.  QjK  dira-oii  làfinô  que  ce  n'eft  point 
feulement  folie  qui  eft  aux  hommes  ,  mais 
qu'ilyavne  horrible  confufion,vne  rébel- 
lion ,  &:  vne  rage  telle  qu'il  faudra  bien  que 
Dieu  y  befongne  ,  comme  il  eft  requis  ,  pour 
leur  ofter  toute  excufé,  quand  ils  n'ont  point 
voulu  eftre  gouuernez  par  luy,  mais  qu'à  leur 
efcient  ils  aiment  mieux  eftre  tranfportez  de 
Satan  à  perdition  ,  que  de  fuyure  celiiy  qui 
eftoit  toutprcftde  les  mener  à  (àlut?  Voila 
encores  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paf- 
fage  ;  combien  que  maintenant  ic  le  touche 
légèrement,  pource  qu'il  fera  befoin  que  ces 
chofes  foyent  déduites  plus  à  plein  ci  après. 
Au  refte  ,  ihinft  Paul  ne  fe  contente  pas  de 
dire  que  l'Elprit  parle  ainfi  ,  mais  il  adioufte, 
que  c'eft  vne  prophétie  claire  &  toute  pa- 
tente :  comme  s'il  difoit  ,  qu'il  faut  bien  que 
nous  drefùons  ici  les  auwillcs ,  car  Dienaie 

parle 


SVR   LA  I.    A    TIMOTH. 


itf7 


parle  point  yn  langage  obfcur  ,  &  duquel  on 
puiffe  douter,  mais  il  nous  admonefte  en  telle 
îorte  que  fi  nous  taillons  c'eft  d'vne  certaine 
malice,&  d'autant  que  nous  n'auôs  point  vou 
lu  efcouter  la  lemonftrance  qui  nous  a  efté 
faite.Or  combien  que  les  prophéties  n'ayent 
point  efté  fi  claires ,  tant  y  a  que  iamais  Dieu 
ne  parle  qu'il  ne  vueille  que  nous  receuions 
iniîruftion  de  ce  qu'il  nous  dit. Et  c'eft  vn  blaf 
pheme  quand  on  allègue  qu'on  ne  peut  co- 
gnoiftre  ce  qui  eft  côtenu  en  l'Elcriture  fain- 
de.  Car  Dieu  Ce  mocquera  bien  des  hommes 
volontiers,  en  leur  diJant:  Efcoutez  moy  :  & 
cependant  qu'il  les  teinft  en  l'ufpcns,  en  forte 
qu'ils  ne  peulTent  prendre  aucune  refolution 
ne  certitude  .Et  puis.la  parole  de  Dieu  feroit 
elle  nommée  clarté  ,  li  elle  nous  laifToit  ainii 
en  doute  &  en  fcrapule  ,  &  que  nous  ne  Iceuf- 
fions  de  quel  cofté  nous  tournera  Nous  ne 
pourrions  auoir  fî  petite  chandelle  qu'elle  ne 
nous  feruepour  nous  môftrer  le  chemin.  Voi- 
ci la  parole  de  Dieu  qui  ell  appelée  vne  lam- 
pe,mefmes  vn  foleil ,  &  nous  dirons  que  nous 
n'y  cognoiffons  rien  ?N'eft-ce  pas  falfifier  & 
anéantir  les  titres  que  Dieu  attribue  à  fa  Pa- 
role? Et  ainfi  notons  qu'il  ne  tient  qu'à  nous 
que  nous  ne  fovons  deuemtnt  aduertis,&  que 
Dieu  ne  nous  retire  de  tout  da."!ger,  &  que  le 
chemin  de  falut  ne  nous  foit  tout  nianitefte: 
mais  nous  feimons  les  yeux  ,  ou  bien  nous  ne 
daignons  les  ouurir  quand  Dieu  nous  dit, Re- 
gardez :  nous  bouchons  iiosaureilles,  ou  bien 
nous  faifonsdes  fourds ,  ou  fommes  coinme 
des  chenaux  trop  engraiflcz  quand  il  nous 
veut'inftruire.Il  eft  vray  que  nous  ferons  touf- 
iourscoulpables  en  nos  erreurs, &noftrc  igno 
rance  ne  nous  pourra  point  feruir  de  bou- 
clier ,  pource  que  Dieu  parle  haut  &:  clair  ,  Se 
fait  office  de  bon  dofteur:  mais  tant  s'en  faut 
que  nous  fovons  agneaux  ou  brebis ,  que  non 
feulement  nous  n'efcoutons  point  la  voix  de 
celuy  qui  nous  doit  mener  ,  mais  qui  pis  eft 
nous  regimbons  comme  des  beftes  lauuages  à 
rencontre  de  luy ,  &  de  ceux  qu'.l  nous  en- 
uoye.Ainfi,d'autant  plus  nous  faut-il  bien  no 
ter  ce  qui  eft  dit  par  iainû  Paul, que  ccfte  pro- 
phétie qui  a  efté  donnée  du  commencement 
de  l'Euangile  eftoit  certaine,  &  que  le  monde 
n'a  point  efté  Icduiifl  ni  abufc  en  forte  qu'il 
ait  aucune  excufe.mais  pluftoft  qu'il  y  a  eu  de 
lacertaine  malice  &  de  la  rébellion  ,  &  qu'en 
cela  nous  pouuons  veoir  que  nos  cfprits  ne  fe 
peuuent  donter  qu'à  grana'  ptinc.  Or  le  mot 
que  (.und:  Pauladiouile  emporte  aufsi  beau- 
coup,quand  li  dit,Q«';i«  ttiiips  À  -venir  le  mon- 
de fc  dejlournera  c5"  f'  rtf.oltera  de  la  foy  :  & 
vfe  ici  du  verbe  dont  eft  venu  le  mot  d'apo- 
/lat  :  comme  s'il  difoit  que  ceux  qui  auoyent 
efté  deuemeut  en  teignez  en  l'Euangile  fe- 
royent  apoftats.periures  &  defloyaux  à  Dieu, 
qu'ils  renonceroyent  la  foy  à  laquelle  ils  a- 
iioyentcfté  appelez.  Voila  vne  circoiiftance 
qui  nous  deuroit  bien  faire  drefTcr  les  che- 


ueux  en  la  tefte.  Viay  eft  que  quand  nous  11- 
fons  les  hiftoires  nous  deuons  eftre  esbahis 
que  le  monde  s'eft  ainfideftournéde  Dieu,& 
que  chacun  s'eft  efgaré  ,  &  que  tous  fe  font 
desbauchez  çà  &  là  :  comme  depuis  la  créa- 
tion du  monde  le  feruice  de  Dieu  a  efté  com- 
me abbaftardi  ,  voire  dés  la  vie  d'Adam  ,  qui 
tous  les  iours  pouuoit  crier  ,  l'ay  efté  tormé 
le  premier  hoiimie  ,  ie  n'ay  point  efté  engen- 
drédepere  ne  de  mère  ,  voici  Dieu  qui  m'a 
créé,  lequel  s'ell  manifcfté  à  moy ,  ie  tien  de 
luy  tout  ce  que  fay  :  &  toutesfois  on  voit  que 
durant  U  vie  il  n'y  a  eu  qu'idolâtries  &  fuper- 
ftitions ,  tellement  que  Moyfe  recite  cela 
comme  vn  miracle  ,  que  le  feruice  de  Dieu  a 
efté  reftituédu  temps  de  Seth.  Or  quand  nous 
lifons  les  hiftoires  (comme  i'ay  dit)  nous  de- 
uons eftre  eftonnez.  Vray  eft  que  le  naturel 
des  hommes  eft  de  s'addonner  à  tout  mal; 
mais  tant  y  a  encores  que  c'eft  vn  monftre, 
que  nous  qui  fouîmes  créez  de  Dicunepuif- 
iions  l'adorer  &  nous  tenir  à  luy  quâd  il  nous 
fait  cefte  grâce  de  fe  decbrer  à  nous.  Or  ve- 
nons outre  cela  audeluge.Car  voila  vnexem. 
pie  mémorable  pour  retenir  les  hommes  :  & 
combien  qu'ils  fc  fuflcnt  desbordez  iufquet 
au  bout, fi  tft-ce  que  celaeftoit  pour  les  rete- 
nir par  force, &:  d'vn  remède  violent,  i'i  voit- 
on  tantoft  après  le  déluge  ,  du  viuant  de  Noé 
&i  de  (es  enfans,que  le  monde  a  décliné  en  fu- 
perftitions  comme  du  temps  pafle.  Cela  nous 
doit  faire  frémir.  Mais  qui  plus  eft,  voila  le 
peuple  d'ifrael  qui  auoit  vcu  tant  de  mira- 
cles, auquel  laLoyauoit  efté  publiée  ,  nous 
voyons  comme  il  ne  s'eft  peu  tenir  à  la  vérité 
qui  luy  cftoit  certaine  &infallible  :  il  eft  tan- 
toft queftion  d'adorer  des  veaux  ,  maintenant 
de  lé  baftir  ie  ne  fçay  quoy  :  ces  chofes-la  nous 
deueroyent  fembler  eftranges  ,  commeelles, 
font. Et  puis  quand  nous  voyons  tant  de  re-, 
bellions,  comme  nous  voyons  au  liuredes  lu- 
ges, l'îi:  en  tout  le  temps  qui  à  fuyui  :  quand 
nous  aurons  bien  regardé  à  tout  cela,  ce  nous 
font  autant  d'admonitions  &  de  miroirs, qu'il 
fout  bien  que  les  hommes  foyent  endiablez 
quand  ils  ne  fe  peuuét  tenir  au  feruice  de  Dieu 
qui  les  a  créez,  &aut)uelils  font  tant  tenus  & 
obligez.  Mais  c'eft  encore  beaucoup  pis  de 
nousrcar  noftre  apoftafie  eft  plus  énorme.  A- 
prcs  que  noftre  Seigneur  lefus  eft  venu  au 
m5de,&  que  Dieu  a  parlé  à  nous  à  pleine  bou 
che  pour  eftre  enfeignez  ,  &  que  maintenant 
nous  auons  les  fecretsdu  Royaume  des  cieui 
qui  nous  font  reuelez ,  en  forte  que  Dieu  ne 
nous  tient  point  feulement  comme  fes  fer- 
uiteurs,mais  côme  fes  enfans,qu'il  nousreçoit 
en  fon  giron»  &  toutesfois  qu'après  auoir  co- 
gnu  r  Euangile,  après  auoir  efté  enfeignez  en 
la  dodrine  qui  emporte  toute  pertc£ti5,&  qui 
nous  appelle  auec  les  Anges  de  Paradis, com- 
ment fe  peut-il  faire,  que  nous  deuenions  apo 
ftats,qHe  nous  puiAiôs  renoncer  noftre  Dieu 
qui  s'eft  monftré  li  benin  &  pitoyable  enuers 

x.iiii. 


168 


nous  ?  Et  ainfî  notons  bien  ce  mot  que  fainft 
Paul  met  ici  :  car  il  iîgnifie, combien  qu'alors 
il  y  euft  vne  telle  pureté  de  doftrine,  &  que  le 
Fils  de  Dieu  refonnaft  ,  que  la  vertu  du  faiud 
Efprit  fufb  toute  manifefte ,  que  les  Apoftres 
fuffent  viuans.ceux  quiauoyent  le  telinoigna 
ge  de  leur  redemptior, qu'ils  vcilTent  iournel- 
lement  les  dons  viiîbles  par  lefquels  Dieu  ra- 
tifie la  doûrine  comme  s'il  y  euft  appofé  des 
féaux  authentiques ,  combien  donc  que  cela 
foit,  dit  fainâ  Paul.fi  eft-ce  que  le  monde  eft 
fi  malm  qu'encores  il  abandonnera  la  vérité 
qui  luy  eucognue.il  renoncera  ion  Dieu, fon 
Créateur,  &  fe  deftournera  après  le  diable,  il 
fe  conuertira  à  menfonge,  &  demandera  d'e- 
ftre  aueuglé  en  fa  perditiô  fk  ruine. Orce  que 
fainét  Paul  a  prédit, on  voit  qu'il  eft  aduenu,& 
l'expérience  en  eft  par  trop  trifte:mais  il  y  en 
a  bien  peu  qui  y  penfent.Il  eft  vray  quand  on 
nous  dira  qu'après  que  l'Euangile  a  efté  pu- 
blié.apres  que  la  vérité  de  Dieu  a  efté  cognue 
affez  priuecment ,  que  les  hommes  ont  efté 
desbauchez.ou  bié  qu'ils  ont  fouffert  4  le  dia- 
ble leur  creuaft  les  yeux:nouçcanfeflons  tous 
queceftc  chofe-la  fe  monftre  ,&que  voyans 
les  fuperftitions  fi  lourdes  Se  fi  brutales  qui 
ont  rcgné.nous  femmes  aflezconuaincus  que 
eefte  prophetie-ci  n'a  point  efté  vainer  mais 
cependant  nul  n'y  penfe.Q_u3nd  nous  voyons 
la  peruerfité  des  hommes  eftre  telle  qu'iLs'^en 
vont  ruiner  à  leur  efcient,  fommes-nous  tou- 
chez de  cela  pour  auoir  crainte  &  frayeur  que 
nous  ne  foyons  abyfmez  comme  nos  pères? 
Nenni  :  nous  n'y  penfons  point,mais  ce  nous 
eft  comme  matière  de  rifee.  Nous  fçaurons 
bien  nous  mocquer  des  fottifes  de  la  Papauté, 
mais  cependant  nous  ne  cognoiflons  pas  que 
le  monde  par  ce  moyen-la  s'eft  reuolté  de 
fon  Dieu  ,  voire  qu'il  a  mieux  aimé  d'obéir  à 
Satan  qu'à  celuy  qui  l'auoit  racheté ,  &  que 
nous  auons  efté  tous  en  ces  abyfinesd'erreur, 
8c  que  nous  auons  efté  retirez  par  là  grâce  & 
vertu  inc5prehenCble:nous  ne  penfons  point 
à  cela.  Or  fi  eft-ce  que  ce  paflage  nous  donne 
rne  telle  inftruftion.Etainfi  donc,  quand  au- 
rourd'huy  les  Papiftes  allèguent  que  ce  feroit 
v-ne  chofe  trop  eftrange  que  le  monde  fe  fuft 
aliéné  de  lapuredoftrine  de  l'Euangile ,  en 
premier  lieu  notons  que  rien  n'eftaduenu  qui 
if'ait  efté  prononcé  par  l'Efprit  de  Dieu>du- 
quel  fainA  Paul  a  efté  organe.  Voiladonques 
vn  arreft  folennel  auquel  il  nous  faut  tenir, 
c'eftque  le  monde  fedeuoit  reuolter  del'o- 
beiflànce  de  l'Euangile.  Et  pourtmt  les  Pa- 
piftes vfent  d'vn  fac  mouillé  pourfe  couurir, 
quand  ils  al  lèguent  que  c'eft  chofe  trop  eftran 
ge  &  incroyable,que  Dieu  ait  ainfi  laifle  errer 
le  monde  par  fi  longue  efpace  de  temps.  En 
fécond  lieu  notons  qu'ila  falu  qu'il  y  euft  vne 
horrible  peruerfité  aux  homes ,  voire  du  tout 
diabolique  ,  de  fe  pouuoir  reuolter  après  que 
Dieu  les  a  enfeignez  fi  priueement,  qu^ils  a- 
uoyencvne  doctrine  £  faniiliete;  ^ue  fUr  cela 


SERMON     XXVIII. 

ils  ayent  tout  quitté,  &  qu'ils  fe  foyent  ietteï 


en  des  tromperies  fi  lourdes  ,  voire  iufqups  â 
s'aueugler  du  tout  à  leur  perdition,  qu'il  faut 
bien  qu'ils  ayent  efté  plus  que  malins.  Or  ce- 
la nous  touche:carnous  en  auons  efté  partiel- 
pans.Et  pourtant  cognoiflons,  puis  que  Dieu 
nous  en  a  retirez,  que  fi  nous  faifons  mal  no- 
ftre  profit  de  rEuangile.comme  nous  faifons, 
&  qu'on  le  voit  par  trop  ,  il  y  a  danger  que 
Dieu  n'enuoye  des  abfurditez  pllis  grandes 
au  monde  que  iamais  elles  n'ont  efté,&ne 
font  encores  en  la  Papauté.  Et  de  faift ,  nous 
n'auons  point  changéde  nature,  finon  d'au- 
tant que  Dieu  nous  retient  par  fon  fainft 
Efprit.  Q^eft-il  donques  de  faire  ?  Puis  que 
nous  fommes  ainfi  aduertis  ,  qu'vn  chacun  en 
fon  particulier  cognoilTe  qu'il  y  a  vne  telle 
fragilité  en  foy  ,  qu'il  fe  trouueroir  efcoulé 
comme  eau  ,s'iln'eftoit  retenu  d'enhautpar 
la  vertu  du  fainft  Efprit.Ainfi  donques  prions 
Dieu  d'vn  commun  accord, que  tout  ainfi  que 
il  nous  a  amenez  à  la  cognoiflànce  de  fa  véri- 
té,il  nous  donne  vne  telle  côltance  que  nous 
y  perfeuerions  iufques  en  la  fin  ,  Se  que  nou« 
demeurions  fermes  en  la  foy  que  nous  auons 
receire  de  luy .  Il  y  a  aufsi  cep<  ndant  à  noter, 
quefi  nous  voyons  beaucoup  de  rebelles, il  ne 
faut  point  que  nous  foyons  troublez  pour  ce- 
la,ne  que  noftre  foy  s'e  branle. Et  c'tft  enco- 
res vn  aduertifllment  bien  vtile.Car  nous  en- 
voyons beaucoup  qui  s^eftonncnt&  font  fcî- 
dalizez  quand  quelqu'vn  fe  desbauche  j  qu'il; 
leur  femble  qu'ils  doyiient  s'attacher  à  Iuy:54 
commentJvoila  vn  tel  qui  a  ch.igc  de  propos. 
Voire.mais  s'il  faut  que  nolhe  foy  Vesbranle 
toutes  fois  &  quantes  qu'vn  homme  fera  de— 
iîonrné  de  Dieu,&  que  fera-ceJCar  nous  fça- 
uonsque  tout  le  genre  humain  eftmuablc,le- 
ger  &  inconftant ,  ne  us  femmes  d'vne  nature 
rebelle  àDieu.nous  fçauos  qu'il  n'y  a  en  nous 
que  vanité  &  menfonge. Et  ainfi  donc  il  y  au- 
roit  vne  poure  fermeté  en  noftre  foy,  fi  nous 
deuions  eftre  renuerftz  toutes  fois  &  quantes 
qu*il  adulent  quelque  fcandak  qu'vn  homme 
fe  desbauche&  fe  pertiertit.  Mais  tant  s'en 
faut  que  nous  deuions  nous  esbianler  quand 
nous  voyons  de  tels  exemples ,  que  fî  tout  le 
monde  fe  changeoit ,  fi  faut-il  que  nous  de- 
meurions conftans,quoy  qu'il  en  foit.Et  voi- 
la à  quelle  fin  tend  ce  qui  nous  eft  icimonftré 
par  fainft  Paul.  Il  neditpas.Qu^vn,  ou  trois, 
ou  vn  petit  nôbrc  degens,mais  il  dit,  Aucuns 
fe  defiourneront  delà  foyS^ns  afsigner  le  nom 
bre.Et  nous  auons  veuen  l'epiftre  aux  Thef- 
faloniciés  qu'il  difoit  encore?  plu^.-rar  il  par- 
le là  d'vne  reuolte  gcneraleril  ne  dit  pas, Au- 
cuns .maisilmet  vne  confufion  horrible.  Et 
tout  ainfi  que  le  làinft  Efprit  nous  admone- 
fte.cognoiflonsaufsi  qu'il  nous  faut  tenir  bo, 
&  auoir  vne  conftance  inuincible  au  milieu 
des  tépeftes  &  orages  que  nous  pouuons  voir. 
Que  fi  ceux  qui  ont  goiifté  la  venté  dé  Dieu, 
qui  ont  efté  fidèlement  enfeignez  ,  fe  dcsbau- 

chcnt. 


SVR   LA    I.    A    TIMOTH. 


i69 


chcnt,  il  ne  faut  paî  que  nous  les  cnfiiyuions 
pjur  nous  enuciopperen  vnemefinc  conflt- 
fion.mais  recueillons-nous  en  l'obeiflànce  de 
noftrc  Dieu,  &  foyons  incitez  à  le  prier  qu'il 
nous  maintienç  fous  l'ombre  de  fes  ailes,  afin 
que  Satan  ne  puifle  rien  gagner  /iir  nous.  £t 
quand  nous  cheminerons  en  telle  luimilité,ne 
doutons  point  que  ce  bon  Ditu  ne  face  vne 
garde  fidèle  de  nous ,  &  qu'aulu  no/tre  Sei- 
gneur lefus  exerce  fon  office  :  comme  ildit: 
Uan  17.  Que  tout  ceque  le  Père  iuy  a  mis  entre  les 
mains  &donnéencharge,illepreferuera  tel- 
lement que  rien  n'en  pourra  périr,  mais  qu'il 
gardera  tout  iufques  au  dernier  iour.Ainiîdôc 
foyons  feulement  brebis  au  Fils  de  Dieu,  & 
fouffrons  d'eftre  gouuernez  par  lny,&  prions 
le  qu'il  nous  addrefle  toufîours,  &  foyés  tout 
perfuadez  que  Dieu  fera  valoir  cefte  admoni 
tion-ci ,  tellement  que  nous  fentirons  qu'elle  ^ 
cft  fuffifânte  pour  nous  garder  <l'eftre  tranf- 
portez  par  tous  Icç  fcandnles  que  Satan  aura 
fiifcité  pour  periicr tir  ou  esb râler  noftrefoy. 
Or  fainrt  Paul  adioufte  quant  &  quant  ,  que 
ceux  dont  il  parle,  entendront  aux  effrits  de 
menf)nge.far!arts(àit-il)en  hyfocnfie  &-  fttn 
tife  ,ayans  leun  cotifciences  (aitterix.ees.  Or 
tous  ces  mot'-ci  emportent  beaucoup. En  pre 
mier  lieu.quSd  il  parle  de  ces  efprits  abufeurs 
oudoftrinesdu  diable, il  nous  veut  nionftrer 
deux  chofes.L'vne  eft.qu'il  ne  nous  faut  poît 
efVre  volages  ni  crédules  par  trop,  pour  rece- 
uoir  fainsdifcretion  tout  ce  qu'on  nous  dira. 
Le  fécond  c'eft  qu'il  nous  veut  rendre  dete- 
ftables  toutes  les  faillies  dofi-rmes  qui  font 
pour  nous  diuertir  de  l'obeilïàrce  de  noftre 
Dieu.  Voila  doncques  deux  articles  que  nous 
auons  ici  à  obferuer.  Q_uant  au  premier,  no- 
tons qiie  les  vrais  Prophètes  qui  ont  efté  en- 
uoyez  de  Dieu,&  qui  fc  font  acquittez  dcue- 
ment  de  leur  office  ,  ont  toufiours  protcfté 
qu'ils  ne  parlent  point  en  leur  nom  ,  &  qu'ils 
ne  mettoyét  pas  en  auant  leurs  fonges  &  ref- 
ueries,  mais  que  c'eftoit  l'Efprit  de  Dieu  qui 
parloir  parleur  bouche.  Et  il  faut  bien  que 
cefte  protcftation-la  foit  faite 'quand  nous 
voudrons  eitre  efcoutez.  Car  qui  fommes- 
nous  pour  eftre  obéis  ,  &  pour  gouuerner  les 
autres?  Vne  créature  mortelle  peut-elle  ou 
doit-elle  aufsivfurper  vne  telle  authorité  & 
maiftrife?Ainfi  doncques  il  faut  bien  (comme 
aufsi  lainft  Pierre  dit  en  fi  première  cpiftre 
chapitre  quatrième  en)  que  celuy  qui  parle, 
qu'il  parle  comme  apportant  de  Dieu  ce  qu'il 
prononce ,  &  qu'il  ait  cefte  certitude  en  foy. 
Voila  donc  pourquoy  les  fainfts  Prophètes 
ontordinairemétvfé  de  cefte  préface, Qu^ils 
n'eftoyent  point  perfonnespriuees ,  qu'ils  ne 
prétend oyent  point  aufsi  rien  amener  de  leur 
cerneau  ne  de  leur  inuention  propre, mais  que 
ils  n'eftoyent  finon  organes  &  inftrumens  de 
l'Efprit  de  Dieu:&celaaefté  en  vfage com- 
mun à  toute  l'Eglife.  Et  de  faiû  ,  voila  aufsi 
côme  Dous  auons  à  receuoir  la  parole  de  Dieu 


en  toute  reiierencc,  pour  cognoiftre  que  les 
hôjnes  n'en  fjnt  pas  les  principaux  autlieurs, 
mais  feulement  miniftres.  Carfiie  tenoye  la 
Loy  commedeMoyfe,  le  Pfautier  comme  de 
Danid,&  comme  des  autres  Prophètes, &  fem 
blablemtntde  cequieft  côtenu  en  toutel'Ef 
criture  fainifte,&  que  feroit-ce  ?  le  pourroye 
difputer  fi  cela  doit  eftre  tenu  ou  non :ie  pour 
roye  répliquer  à  l'cncontre  des  hommes  mor 
tels.  Mais  vnett  Ile  couuerture  eft  abbatue 
quand  Dieu  authorife  fa  Loy  &  toute  lado- 
ftrine  qui  eft  contenue  en  l'Lfcriture  fainfte. 
Cen'eft  point  doncques  fanscaufe  que  ce  lan- 
gage a  efté  commun  en  rEglife,de  dire.  Voici 
l'Efprit  de  Dieu  qui  parle.Côme  de  faift  nous 
voyons  quand  l'Efcriture  fainfte  eft  alléguée 
parles  Apoftres,ils  ne  diront  pas  toufîours, 
Dauidou  Ifaie  a  diftainfï:mais  l'Efprit  a  bien 
prononcé  par  la  bouche  de  Dauid ,  ou  par  la 
bouched'Ifaie.  Voila  doncques  comme  la  do- 
ftrinedeDieua  efté  mifeen  eftat ,  elle  a  efté 
comme  eltablie  en  fa  maiefté ,  quand  on  co- 
gnoift  que  Dieu  en  eft  le  principal  autheur& 
vnique.Gr  cependant  voicile  diable  q  fe  tranf 
figure, &  prend  vnemafque,&le  defguife  pour 
faire  3.  croire  qu'il  parle  au  nô  de  Dieu:bTief, 
il  eft  fînge  pourcontrefaire  tout  ce  que  Dieu 
ordonne  pour  noftre  falut.Et  voila  pourquoy 
les  fedufteurs,&  tous  ceux  qui  ont  peruerti  la 
vérité,  ont  allégué  en  leurs  préfaces  qu'ils  e- 
ftoyent  pouffez  de  l'Efprit  de  Dieu,  iufques 
à  démentir  les  vrais  Prophètes  :  comme  nous 
voyon^qu'il  eft  aduenu,  &  que  cefte  audace  a 
efté  en  eux.  Et  voila  pourquoy  maintenant  S. 
Paul  dit  notamment ,  Quilyaura  des  effrits 
menfongersjifqueh  feront  efarttt^Ju-  chemin 
de  la  foy.  Et  pourquoy  les  appelle-il  efprits? 
pourquoy  ne  dit-il pluftoft, Il  vaurades  hom 
mes  malins  qui  viendront  tout  1  enuerfer,&  de 
faift,ils  auront  la  vogue, &  tout  le  monde  leur 
applaudira  ?  pourquoy  fainft  Paul  ne  leur  at- 
tribue-il ce  titre  d'homme  &  de  créatures.' 
pourquoy  les  appelle -il  efprits?  C'eft   afin 
que  nous  ne  foyons  point  esblouis  par  ces 
beaux  titres  &  préfaces  quand  on  nous  dira. 
Voici  l'Efprit  de  Dieu  qui  parle  :  mais  que 
nousdifcernions:&fi  nous  auons  l'efprit  trop 
rude  &  débile, que  nous  priés  Dieu  qu'il  nour 
donne  prudence  &  difcretion  afin  de  n'cftre 
point  abiiftz.  EtdefaicV  nous  voyons  la  ne- 
ceficé  quieftoit  que  fainft  Paul  parlaftainfî. 
Comment  eft-ce  que  le  Pape  viendra  aueu- 
gler  les  poures  ignorans  qui  font  en  fes  filez, 
°\- fous  fa  tyrannie  ?  Une  dit  pas  que  tout  ce 
qu'il  fait, eft  faufledoftrine.mais  qu'il  ha  l'E- 
fprit de  Dieu  en  fa  manche,  &  que  d'autant 
qu'il  reprefente  l'Eglife  ,  qu'il  ne  peut  errer. 
Et  ainfî  tout  ce  qu'on  orra  de  moy  (dit-il)  il 
le  faut  prendre  comme  fî  l'Efprit  de  Dieu  e- 
ftoit  apparu.  Voila  le  Pape  qui  nous  deftourne 
de  la  doûrine  ijui  nous  eft  certaine:!!  eft  con- 
trainten  defpit  de  fes  dents  de  confeffer  qut 
Dieu  nous  a  donné  fa  Loy  ,  que  les  Propiie- 

y.i. 


I70 


SERMON     XXVIII. 


ties  font  aursi  venues  de  luy ,  que  PEuagilc  efl 
la  venté  qui  nou;  ci\  rcueicc  dev  tieux  :  mai; 
cependant  il  voudio.t  que  ccfte  dottiine 
fuit  cnleuelie  :  &  qu'au  heu  on  refcoutafl: 
parler, &  qu'on  luy  obeift  en  tout  &  par  tout. 
Et  de  taicè  il  n'a  p  ouïe  eu  honte  de  dire  que  11 
LoyocTEuangiIc  nt  f -nt  queiudimenv.oul'a 
b  c  ,  mais  qu'a  faut  chercher  la  perfcûion  de 
dodiine  aux  fiind;  conciles. Voda  le  princi- 
pe &  le  fondcmert  de  toute  la  Papauté.  Or 
donc  ,  puis  que  le  d'abledeuoit  prendre  vne 
telle  couleur,  lia  ùluau.'^.ique  le.  fiielesay- 
ent  eilé  munis  aupaïauantA' que  Dieu  ait  mis 
vne  barre  pour  empekher  que  Satan  n'cu.^  la 
vogue, &  que  le  monde  ne  fuft  tout  abylme.Il 
ne  taut  point  qu'on  allègue  aucune  evcufe,  3c 
qu'on  ait  pechc  par  ignorace:  car  voici  iain£l 
Paul  qui  notâmentadeclaré  que  ceux  qui  vicn 
drontcômefedudeurs.qui  tal'cherôtd'empoi 
fonner  les  âmes, d'anéantir  le  royaume  de  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift.d'obfcurcir  la  pure 
té  de  la  doiftrine,&:  conuertir  la  vérité  en  men 
fonge, ne  diront  pas  Nous  venons  ici  appor- 
ter ce  q  bon  nous  femble:  mais  ils  auront  vne 
qualité  plus  grande, c'eil  qu'ils  feront  connue 
Prophètes-  de  D:eu,&  que  tout  ce  qu'il;  met- 
tent en  auant  font  leuelations du  S.Elprit  le- 
quel parle  en  eux. Comment  eft^-ce  q  le  com- 
pagnon du  Pape.afçauoir  Mahommet,a  pro- 
cédé pour  mettre  en  auant  ce  qu'il  a  peu  pour 
feduire  ces  pourescnragez  qui  font  abriiueziSc 
cmpoifonnezde  fa  taulTedodrine?  U  dit  que 
le  S.Efprit  hiy  a  tout  reuclé.Et  le  Pape  quo)? 
Le  ferablable:ils  parlét  tous  deux  comme  par 
vne  bouche.  Or  cependant  voici  l'Efpritde 
Dieu  qui  déclare  qu'il  ne  faut  point  que  nous 
foyons  fi  crédules  pour  rcceuoir  fansdifcre- 
tion  ce  q  nous  fera  du. Et  pourquoyfll  ha  vne 
doftrine  à  laquelle  il  nous  f.uit  examiner  tout 
ce  qu'on  nous  prellhe.  Et  puis,  où  eft-ce  que 

gift  celle  prudence  L^  difcretion  ?  l'ETprit  de     ucnt,  ne  qu'ils  y  prenent  quelquegouiî  :  mais 
Dieu  ha  ces  deux  offices.  Il  a  efté  donné  à  no     par  certaine  malice,  d'autant  qu'ils  nous  font 


créature  defefperee:qui  eftceluy,dt-!e,qui  Ce 
vouluftainfi  abandonner  à  Satan  qumd  ilau- 
roit  cfteaduertidecela?Et  fainû  Paul  décla- 
re ici ,  il  nous  fommes  deftournez  de  la  pure 
dodrinc  de  l'Etiangilc  ,  &  de  la  (implicite  qui 
clt  contenue  en  l'Efcriture  faiuûe  ,  que  nous 
ne  fuyuons  plus  les  horames,que  nous  nefbai  , 
mes  point  de Itouniez  aux  créatures,  mais  que 
le  diable  domine  fur  nous.  Qjianddonc  nous 
oyons  ce  la  ,  n'eil-ce  pas  pour  nous  tairO  fre- . 
m  r.iSc  pour  dire  ,  Helas  1  nous  voila  perdus  & 
abyfmcz  ,  puis  que  le  diable  ha  telle  poflcl^iô 
fur  nous!  Deuons-nous  pas  bien  donc  eftre 
folicitez  de  nous  tenir  à  la  pureté  de  PEuau- 
gile,  quand  nou;  voyons  qu'il  yavn  tel  dan- 
ger de  i'en  deftouri-.err'JÉt  ainli  aduifonsde 
cheminer  fous  la  protedlion  de  noibe  Dieu,/! 
nous  voulons  que  le  diable  n'ait  point  de  mai  , 
ftrif  c  fur  nous.  Ez  cepédant  notons  que  faind 
Paida  ici  tonné  du  cielfous  ce  mot  de  Diable, 
pour  nous  monftrer  que  tous  ceux  qui  fe  def. 
bauchent  après  auoir  cogiiu  la  vérité  deDieu, 
qu'ils  n'ont  point  d'excufe  :  caràleur  efcient 
ils  veulent  élire  efciaue^  du  diable,ilï  veulent 
eftre  perdus, q';a.:d  ils  ne  fe  veulent  point  te- 
nir fous  la  fmcrtun  de  celuy  qui  les  a;:oi:  vi- 
nifiez. Et  touresfois  nous  voyons  qu'aiaour- 
d'huy  il  ne  courte  rien  à  ceux  quiontcogmi  la 
vericéde  l'EujgiIe,de  rectuoir  des  fauiles  do 
ftrines,celcur  efl  tout  vntles  vm  par  côuoiti-  , 
fe,  folle  curiolité,  les  autres  par  vne  certaine  . 
malice, les  autres  par  detpitdes  homes. levo* 
piie  ,  ne  voit-on  pas  àrœi!  qu'il  y  en  a  de  fi 
malins  qui  fjnt  contens  d'.ipprouuer  les  do- 
ârincs  les  plus  exécrables  du  monde  ,  le,  he- 
rcfies  q  fynt  mcfines  en  horreurauxPapilles, 
qui  neâtmoins  ferôt  ici  reccuspar  ces  bôs  iup 
pofts  de  la  Chreft:enté?Et  pourquoy?  En  de- 
fpit  de  ceux  qui  anoncent  la  parole  de  Dieu. 
Car  ce  qu'ils  en  font  n'eftpa  qu'il  .l'approu- 


flreSeigneur  Iefas,afin  qu'il  no°  en  diftnbuaft 
les  dons,  &  que  par  ce  moyen  il  nous  retcmft 
au  chemin  de  fahit.Et  ainfid5capprcnov(fuy 
nant  ce  q  l'ay  défia  dit)d'examiner  toute  do- 
ilrine  à  1  Efcriturc  fainde  qui  en  eJt  la  vraye 
touche. Et  d'autant  que  nous  fommes  trop  de 
biles  &  trop  grufsiers, prions  noftre  Seigneur 
lefus  qu'il  no'face  particip.as  de  l'Efprit  qu'il 
a  rcccu,afin  que  nous  ibyôs  prudcns  pour  di- 
fcerner  entre  le  bié&  le  mal.  Voila  (jiiant  à  ce 
mot  d'Efprit.  Or  pour  le  fécond  à  i'oppofite, 
S.Paul  dit  que  telsefprits  font  du  diable,  afin 
que  nous  foyons  tant  plus  efpoiiantez  pour 
nous  donner  garde  des  fauflesdoélrines.Car, 
ic  vous  prie,  qui  c/lceluyqui  vouluft  s'addon 
ncr  audiable  quand  il  cognoirtra  ,  Voila  ton 
ennemi  mortel, voila  le  pcredc  méfongcc'eft 
ccluy  qui  a  elle  meurtrier  desames  dés  Jcco- 
mcncemciit.c'eft  le  princedc  mort  qui  reviét 
chercher  pour  cmpefchcr  ton  /âlut  &  pour  te 


ennemi  ,:&  fous  celle  coulcur-la  ils  s'en  vont 
dôner  à  Satâ. Et  qu'ils  y  foyét  du  tout,&qu'il 
en  prene  telle  polFelsiô, qu'ils  loyêt  en  exem 
pie  à  tous  ceux  qui  ne  font  point  du  tout  in- 
corrigibles. Les  autres  par  vne  légèreté  vola- 
geicar  l\  toflqu'vn  vent  foufdc, ils  le  vont  hu- 
mer .Et  ccpciidant  ils  ne  ptnfciit  pas  à  ce  qui 
efl  icidit,  qu'en  ce  failàntils  fe  mettent  en  la 
polTelsion  de  Satan  ,  ils  luy  f .mt  hommage 
comme  à  leur  maillrc  &  i  ccluy  quia  domina 
tion  fur  eux.  Nous  aurons  en  abomin.ition  les 
fjrciers  :  &àbondroit.  Or  tous  ceux  qui  rc- 
çoyucnt  ainfilesfauflesdoftrincs  ,  fontfcm- 
blables  .à eux  .d'autant  qu'ils  s'addonncnt  à 
Satan. Pourrons-nous  contredire  à  celai"  Nen 
ni  :  ou  le  fiinft  Efprit  feroit  menteur  en  ce 
paflage.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  àjio- 
tcr.Et  au  refte.qiiand faintl  Pauldit  que  ceux 
qui  fe  reuoltcnt  ainfî,  efcoutent  les  elprits 
forciers,  &  des  doûrines  du  diabJe.il  monftre 
pcrdreifi  tu  luy  prcftes  l'aitreiUcte  voila  vne    par  cek  qles  homes  font  enforceJez  du  tout, 

quand 


SVR     LA.     I.     A    TIMOTH. 


»7i 


^»Mi;(I  ayan<  cognu  Dieu  (comme  Jefîa  nous 
allons  dit  )  ilsk-  Jailftnt  ainfi  ftduire  i  leur 
tfciét.Carl^-cognoilTacede  Dieu  feroit  touT- 
iours  vne  fortcrtfle  inuincible,  que  le  diable 
ne  pourroit  taire  nulle  brcche  pour  entrer  à 
nouSilinôqde  iious-mefmeçnous  luy  vinfsiô'i 
ouurir  la  porte  pour  nous  afiliiettir  aluy.Il  ne 
tient  donc  finon  à  faire  bon  guet  ,  que  nous 
ne  foyonî  à  (auueté,&  '^le  Dieu  ne  nou?  pre- 
fcrue  luliju'en  la  fin.  Mais  quoy  ?  iaicd  Paul 
monltre  tjui  en  cft  caufe.Il  ell  vra y  que  ce  paf 
JÙgc  ne  fe  pourroit  pas  maintenant  nu  tout  ex 
poferrmais  lî  faut-il  neantmoinv  oue  nous  en 
diiîonsvnmot.  Car  quand  il  dit  que  ceux-ci 
viuent  en  hypocrifie ,  &  qu'ils  ont  leurs  con- 
fciences  cauterizees  ,  il  monftre  que  les  fedu- 
fleurs  qui  apportent  les  doârines  baftardes, 
&  qui  corrompent  la  pure  veritcde  Dieu,que 
ceux-là  ne  demandent  qu'à  efteindre  la^lar- 
tédevie.  Et  pourquoy  ?  Pour-ce  qu'ils  n'ont 
point  de  droiture  ne  rondeur  en  leur  coeur, 
qu'ils  voyent  qu'en  approchât  de  Dieu  il  faut 
qu'ils  renoncent  à  cux-intrmes,&  qu'ils  chan 
^ent  de  volonté  &  de  raifon  &  de  tout.  Ho,l1 
n'eft point  queftion  de  receuoir  celaicar  c'efV 
vne  choie  difficile  à  l'homme  que  de  fe  quit- 
ter foy-mefme.  Et  poiirce  que  nous  ne  pou- 
uons  point  venir  à  Dieu  finon  eftans  defpou:!^ 
lez  de  nos  affeûions  &  cupiditez  mauuaifes, 
&  de  tout  ce  qui  eft  de  noftre  nature.voik  les 
fedudleurs  qui  s'entortillent  comme  des  fer- 
pens.Ih  feront  bien  fembLît  de  venir  à  Dieu, 
mais  ils  s'en  recuUent  cependant  :  ils  feront 
beaucoup  de  circuits.mais  ce  n'eft  point  pour 
s'auancer.  Voila  donc  qui  eft  caufe  que  les  fe- 
dufteurs  n'approcheront  lamais  de  la  clarté 
de  l'Euangile.  Or  comme  faint't  Paul  note  ici 
la  caufe  qui  incite  les  feduiîeursà  peruertir 
labonne  doftrine  &  pure,  aiif?i  d'autre  part  il 
lignifie  que  ceux  qui  les  efcoutent  &:  qui  s'ad- 
donncnt  à  eux,  &  fe  laiirent  desbaucher,  font 
aufii  bien  pleins  d'hypocrifie,&  qu'ils  ont 
vne  coufcience  brûlante,  qu'il  n'y  a  que  mau- 
uaiftié  en  eux ,  tellement  qu'Us  veulent  fuyr 


Difi.',&  mettre  des  voiles  entre  deu»  a^nc  Je 
peuiK-nt  regarder  en  leur  mauuaire  co'nfcien- 
ce. Voila  donc  comme  l'Euangile  a  efté  per- 
uerti  de  tout  temps:  Scauiourd'huy  nous  voy 
onv  encore  le  ftmblable,qui  ert  bien  à  noter. 
Mais  pource  que  nous  ne  pouuons  pas  dédui- 
re le  tout, qu'il  nous  fiiffife  maintenant  de  fca 
uoir  que  ii  nous  voulons  ef>re  munis  «ontre 
toutes  les  aftuces  &  embufches  du  diable,  fi 
nous  ne  voulons  point  tomber  en  fes  filets, 
mai';  ef>re  retenus  en  l'obeiflancc  de  Di*i ,  il 
nous  faut  en  premier  lieu  nousdefpouiller  de 
ton  ces  teiiitifts  ,  renoncer  à  toute  hypocri/îe 
&  fiôion,afin  que  nous  puifsions  nous  addon- 
ner  à  Dieu  en  toute  (implicite  pour  fuyure  la 
pureté  de  fa  Parole.  Et  ceperidant  que  nous 
ne  foyons  pas  negligens  à  difcerner  la  pure 
doftrined'auec  la  faufle  :  Si  pour  ce  faire  que 
nous  prions  Dieu  qu'il  nous  donne  vne  tell« 
vigilance  que  nous  ne  puifsions  eftre  feduits. 
Voila,  di-ie,ce  que  nous  auojis  à  faire,  lî  nous 
voulons  que  cefte  admonition  qui  nous  eû  ici 
donnée  parle  fainfl  EfpritjBous  profite,& 
nous  férue  à  falut- 

O  R  nou':-noBÇ  proffernerons  Jeuanl  la  fit 
ce  denoftre  bon  Dieuencognoiflancedeno» 
fautes,le  prians  qu'il  hiy  plaife  les  abolir  tel- 
j£Biént,que  nous  puifsions  nous  addreflèren 
pleine  confiance  à  Iuy,comme  il  luy  a  pieu  de 
nous  y  appeller  en  la  perfonne  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.Et  comme  vne  fois  il  s'eft 
approché  de  nous  en  iceluy,&  qu'il  eft  defcen 
du  iufqu'ànos  miferes,&s'eilmefmes anéan- 
ti pour  nonseleuerauciel,que  toufiours  il  fa 
ceceftofEce  de  nous  recueillir  à  foy  telle- 
ment que  nous  iouiisions  de  la  certitude 
de  fa  grâce  &  de  fj  bonté  ,  ne  doutans  point 
que  toufiours  il  ne  nous  conduife  par  fora 
fainûEfprii ,  pour  nous  faire  approcher  de 
plus  en  plus  de  luy  iiifques  àce  qu'il  nous  art 
pleinement  conioints  au  dernier  iour.  Que 
non  feulement  il  nous  face  cefte  grâce ,  mais 
aufsi  à  tous  peuples  &  nations  delaterre,&c:. 


SECOND     SERMON     SVR     L  E    Q^V  A- 

TRIEME      CHAPITRE, 

I  Or  /'  Ejprit  dit  notamment, qu'es  derniers  temps  aucuns fc  rC" 
uolteront de ldfoy,s'amifans aux ejprits trompeurs,  (^ auxdoBr'mcs 
des  diables. 

1  Varlhypocrifie  de  ceux  qui  parlent  menfonges  ,  ayans  leur 
conjcience  cautérise  a 

3  DefendaTisJcy  marier,  commandans  de  s'ahjlenir  des  Viandes 
que  Dieu  a  créées  pour  en  yifcr  aucc  aïlion  de  grâces  aux  fidèles,  ^  à 
ceux  ^ui  ant  cognu  la  Mérité* 


SERMON    XXIX. 


^■^^5?  Ou«  auons  déclare  cideflîis 
Q&,  que  tous  ceux  <jui  preten- 
S^fy.  jgj^j  (jg  feruif  à  Dieu  en  ap 
parence  &  par  cérémonies 
I  externes,  ont  leur  confcien 
ce  comme  nauree  ,  qu'il  n'y 
a  pomt  de  pureté  ne  droitu 
re  en  eux.  Car  celuy  qui  chemine  droitement 
.&en  rôdeur  âc  integnté.approchera  de  Dieu, 


fainft  Pauhmais  le  principal  eftd'en  tirer  vfle 
règle  générale  pour  l'appliquer  à  toute  no- 
ftre  yie.Voulôs-nous  donc  fefuir  Dieu  eh  vé- 
rité? Entrons  en  nous,  fondôs  ce  qui  elt  caché 
en  nos  cœurs  ,  3c  faifons  vn  bon  examen  & 
droit.  Si  nous  Tentons  que  noftre  nature  tend 
à  feintife ,  &  que  nous  appelions  de  nous  ac- 
quitter légèrement  enuersDieu,  cognoiflons 
que  c'eft  vn  vice  mefcbant,&  q  noltre  confcié 


non  point  par  lôgs  circuits,  mel'ines  il  fe  con    ce  cft  comme  bruflee  d'vn  cautère  quâd  nous 


formera  à  ce  qui  eft  contenu  en  la  Loy ,  ou 
Dieu  demande  vn  feruice  fpirituel.c'eft  afça 
uoir  que  nous  cognoil'siôs  que  tout  bien  viét 
■  de  luy,  afin  d'elhe  appuyez  fur  fa  bôté  &  d'y 
mettre  toute  noflre  confiance,  que  nousl'in- 
iioquions  ayans  tout  noftre  recours  à  luy, que 
nous  fouffnôs  d'eftre  gouuernez  par  fa  main, 
&  par  fon  fainft  Efprit ,  renonçans  à  toutes 
nos  afftftions  mefchantes  :  que  nous  viuions 
auec  nos  prochains  en  droiture  i'ansnuireà 
perfonne,tafch.is  de  profiter  à  tous,  que  nous 
fbyons  fobres  &  chartes.  Voila  donc  celuy 
quia  fa  confcience  pure,tendiadroit  à  Dieu, 
&  fe  conformera  au  feruice  fpirituel  qui  nous 
eft  monftré  en  PEfcriture  fainâe.  A  l'oppo- 
fitCjCOUS  ceux  qui  ne  font  que  tourner  ài'cn- 
tour  du  pot,&  veulét  s'acquitter  enucrs  Dieu 
par  des  cérémonies  &des  menus  fatras,  mon 
firent  qu'ils  ont  vne  arrière-boutique  U  de- 
dans, &  qu'ils  ne  la  veulen;  point  defployer: 
&  combien  qu'ils  tafchét  de  côplaiie  à  Dieu, 
toutesfois  fi  ne  veulent-ils  point  approcher 
de  iuy.ils  feroyent  contens  de  dire,  Faifons 
treues  enfemble ,  &  que  nous  ayons  quelque 
moyen  de  nous  accorder.  Mais  cependant  fi 
eft-ce  qu'ils  fe  veulent  tenir  à  part,  &  ne  veu 
lent  point  eftre  côioints  &  vnis  à  Dieu  en  vé- 
rité. Et  c'eft  vn  article  que  nous  deuons  bien 
noter, non  feulement  afin  d'entendre  ce  paf- 
fagede  faind  Paul, mais  pour  régler  aufsitou 
te  noftre  vie.  Sain>îl  Paul  dit  ici  que  ceux  qui 
défendront  de  manger  certaines  viandes  ,  8c 
qui  défendront  le  mariage,  ont  vne  confcien 
ce  comme  bruflee  d'vn  cautère,  c'eft  à  dire 
qu'il  y  a  vne  rongne  &  vne  vermine ,  &  vne 
pourriture  en  eux  ,  tellement  qu'ils  ne  font 
point  paillbles  enuers  Dieu.  Et  pourquoy  ce 
la?  llidiouHeqt'ils  {>rononcent  meitfonge  en 
hypocrife  :  comme  s'il  difoit ,  qu'ils  ne  cher- 
chent point  le  vray  feruice  de  Dieu  &  natu- 
rel,mais  qu'ils  le  defguifent  &  le  contrefont. 
Notons  bien  donc  ,  quand  les  hommes  fe  de- 
ftourncnt  ainfi  à  des  inuentions  friuoles ,  5: 
qu'ils  y  conftituent  le  leruice  de  Dieu  ,  qu'il 
n'y  a  que  feintife  en  eux, qu'iln'y  a  point  d'in 
tegrité  ,  mais  qu'ils  font  double!»  ,  &  mcfmcs 
pource  qu'ils  ont  des  apofttimes  cachées  là 
dedans,  ils  ne  dem.ident  linon  des  cmplaftrcs 
pour  couurir  l'ordure:  &  au  lieu  de  chercher 
vne  viaye  médecine  ,  ils  font  caufe  de  faire 
tout  pourrir,&  que  le  malcroupiflelà  dedSs, 
&  qu'il  s'augmente  de  plus  en  plus.  Or  main- 
tenant nousauons  l'intelligence  dcce  lieu  de 


n'auôs  point  de  fimplicilé,  de  droiture,  ne  de 
pureté  U  dedans.  Ainfi  deuant  q  paflèr  outre, 
aduifons  de  purger  ceftefeintilc  q  nousauôs, 
laqlle  Dieu  Teiette,&  ne  peut  foutfrir.  En  fai 
faut  cela  nous  méditerons  droitemét  le  ferui- 
ce qu'il  nous  cômande, c'eft  afçauoir  qu'il  eft 
fpirituel. Or  nous  entédons  le  feruice  deDieu 
eftre  fpirituel,  d'autant  qu'il  ne gift  point  en 
des  menus  bagages, côme  de  ne  point  manger 
chair  vn  tel  lour.d'aller  en  pèlerinage, de  oar 
boter,de  faire  tels  agios ,  d'vferde  telles  cé- 
rémonies: tout  cela  n'cft  que  badiner,  ce  font 
ieus  de  petis  enfanv.Et  ne  penfons  pas  q  Dieu 
s'en  contente,  car  il  n'eft  pas  charnel  comme 
nous:  fi  cela  nous  femble  bon.nepéfonspas  q 
Dieu  fe  transfigure  pour  côpiaireà  nos  appe 
tits:car  félon  qu'il  cftefpiic.il  veut  eftre  aufsi 
ferui  en  efprit  &  veiitc.  Et  c'eft  la  fentéce  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chriftau  quatricmedc  If«4--Î> 
fainéHean:il  nous  ramené  à  la  nature  de  Dieu 
qui  eft  toute  diuerfe  à  la  noftre:iSc  c'eft  afin  de 
corriger  ceft  abus  duquel  les  homes  s'abrutif 
fent  à  leur  efcient:car  ils  fe  trôpent  en  fe  fai- 
fant  à  croire  que  Dieu  ne  reiettcra  point  ce 
qu'ils  approuuent  de  leur  cofté  .  Or  c'eft  vne 
pure  mocquerie  ,  d'autant  que  nous  fommes 
charnels,&  Dieu  ell  fpirituel.  Il  ne  faut  point 
donc  cuider  qu'il  accepte  ou  ait  agréable  vn 
feruice  qui  fera  feulement  en  belle  apparéce, 
&  qui  n'aura  que  le  dehors:  ne  pcfonspasque 
Dieu  s'amufc  là,  car  il  demande  la  vc  rité  .  Et 
qu'eft-ce?  Côme  l'ay  défia  dit,  qu'après auoir 
fondé  toute  noftre  fiance  en  luy,  nous  l'inuo- 
quions,  &  qu'il  foit  noftre  feul  refuge  ;  &  que 
nous  aduifiôs  d'cftrc  ûnûifiez  pour  nous  dé- 
dier du  tout. \  fa  volonté, que  nous  foyons  mo 
deftes,  purs,  &chaftescnnoftrevie,que  nous 
viuions  en  vraye  loyauté  auec  nos  prochains, 
fans  nuire  ou"faire  fraude  ou  violence  à  pcr- 
fonne  :  &  qu'il  nous  fouuiene  aufsi  que  Dieu 
demande  luftice,  &  iugement ,  &  mifericordc. 
Et  puis  en  l'autre  paflàge  du  Prophete.Q_ifil  Ofee  6.6 
veut  mifcricorde  &  non  point  facrifice  :  qu'il 
veut  eftre  ferui  à  bon  elcicnt  ,&  non  point 
en  ces  menus  fatras  que  les  hypocrites  in- 
uentent ,  comme  s'ils  le  vouloyent  payer  en 
monnoye  de  petis  enfans:ne  penfons  pas, 
di-ie  ,  que  Dieu  fe  vueille  conformer  à  notis 
en  ces  petis  badinages,  car  il  demande  la  pu- 
re vérité  .  Voila  dore  comme  nous  deuons 
appliquer  .i  noftre  inftruftion  cefte  ftnten- 
cc  de  (ainft  Paul,où  il  dit.  Que  ceux  qui p.tr- 
lent  en  hjifocrife,oat  leur  conjlience   bmf- 

ler 


s  V  R  L  A    I.    A  T  I M  O  T  H.  ijj 

Ut  Vtmmi  ifn  cautirt.  Voulons-nous  donc  té:que  nous  apprenions  de  nous  arrefter  plei 
auoir  vne  pure  doârine  pour  bien  régler  no-  nemét  3  ce  qu'il  ordonne, que  nous  fçachiont 
ftrevie?  Qup  nous  cognoifsions  qu'en  pre- 
mier lieu  noftre  Seigneur  veut  pofledernos 
affeûions  &  comme  nos  entrailles,  qu'il  veut 
U  régner  &  auoir  fon  fîege.  Et  ainfi  mettons 
peine  &  efForçons-nous  de  nous  nettoyer  de 
toute  feintife,  que  nous  ne  foyons  point  dou 
blés:  &  quand  nous  fentirons  que  noftre  natu 
re  nous  tire  tout  au  rebours.qiie  nous  ne  con 
Tentions  point  à  cela  ,  &  ne  nous  y  complai- 
fons  point ,  mais  purgeôs  cefte  ordure  qui  eft 
là  cachée  au  dedâs,&  ne  fiifons  point  des  em 
plaftres.oudescouuertures  fnuoles.  Quand 
nous  en  feronsainiî,  nous  n'aurons  plus  vn 
feruicedefguifé  ne  baftard.mais  nous  aurons 
ce  fcruicefpirituel  qu'il  ordonne  enl'Efcri- 
ture  fainde:&  alors  nous  ferons  afleureï  que 
noftre  vie  luy  fera  agréable.  Et  en  cela  peut- 
on  difcerner  fi  la  doûrine  que  nous  portons, 
quant  au  feruice  de  Dieu  ,  eft  vraye  ou  non, 
quand  elle  fera  comparée  auec  celle  des  Papi 
ftes.  Il  eft  vray  que  les  Papiftes  fe  tourmen- 
tent beaucoup  pour  feruirà  Dieu, mai':  cepen 
dant  que  font-ilsî"  A  quov  eft-ce  qu'ils  s'ap- 
pliquent finon  à  des  bagages  que  noftre  Sei- 
gneur n'aiamais  requis,  &le)"qi.iels  pluftoftil 
condamne^Il  faut  feruir  Dieu,  diront  les  Pa- 
piftes. Sur  cela  il  n'y  a  ne  fin  ne  mefure  ,  ils 
font  comme  forcenez  après  leurs  folles  deuo 
tions.MaisquoyfUs  barboteront  deuît  leurs 
marmouzets.ils  ferôt  chanter  des  Meffes,  ils 
fonderont  ceci  ou  cela, ils  trotteront  en  pelé 
rinage,  ils  courront  d'vn  autel  à  l'autre  ,  il  y 
aura  l'eau  benifte  d'vn  cofté  ,  le  luminaire  de 
l'autre, il  y  aura  les  pardons  &  indulgences, il 
y  aura  cefte  fiiperftition  de  s'abftenirde  inan 
ger  chnir  vn  tel  iour  ,  de  taiie  fefted'vn  tel 
fainft ,  d'auoir  beaucoup  de  faicerics  quand 
tout  eft  dit. Or  fainâ  Paul  nous  a  voulu  decla 
rerque  quand  on  cherche  de  telles  façons 
obliques  pourferuir  Dieu  ,  &  poui  luy  com- 
plaire ,  c'eftvn  certain  fignc&  approbation 
que  laconfcience  eft  bruflee ,  &  qu'il  y  a  vne 
ordure  cachée  là  dedans.  Et  pourquoy?  Car 
c'eft  corrôpre  &  deprauer  le  vray  feruicede 
Dieu,lequel(corame  i'aydit)  conlifteen  cho 
fes  plus  grandes  .  Il  eft  vray  que  les  hommes 
fe  plairont  en  cela:&  nous  voyôs  de  fait  coin 
mêles  Papiftes  font enyurcï  en  leurs  folies, 
&  ccmme  ils  s'y  flattent ,  &  y  font  endurcis 
&  rebelles  contre  Dieu.  Mais  que  gagneront 
ih?  Car  quand  nous  voyons  que  Dieu, qui  eft 
efprit ,  veut  eftre  fcriii  d'vne  autre  £içon  que 
celle  que  les  hommes  inuentcnt.que  profite- 
rôs-nous  de  nous  deftourner  de  la  règle  que 
ils  nous  ado  Miee?  Et  ainfi  apprenons  de  ne 
nous  pointg.uuierner  à  noftre  guife.car  c'eft 
vn  abus ,  c  imme  nous  auons  dit.  Cependant 
donc  qu'ciUce  que  nous  prefth5s?Q_ii'jl  faut 
que  poiir  ben  adorer  Dieu  nous  luy  appor- 
tions n  fart  cœur  voire  que  nouv  ayons  no- 
ftre fianct  du  tout  fondée  fur  luy  ,&«i  là  bon 


te:' 

nemec  acequ  11  oraonne, que  nous  iça 
que  pour  le  bien  ferurr  il  nous  faut  déporter 
de  toute  noftre  raifon  &  prudence  charnel- 
le .qu'il  ne  faut  point  lafcher  la  bride  i  nos 
cupiditez&defirs,mais  qu'il  nous  fautrepo- 
fer  de  nos  ceuures  afin  qu'il  nous  gouuerne,& 
qu'il  befongne  en  nous  par  fon  fainû  Efprit, 
que  nous  ne  parlions  de  iuy  qu'en  toute  reuc 
rence  ,  Se  quand  il  nous  viendra  en  mémoire, 
que  ce  foit  pour  luy  attribuer  toute  iuftice  & 
gloire. Et  puis  que  nous  viuions  auec  nos  pro 
chains  honneftement ,  fans  faire  tort  à  nul, 
que  fclon  le  moyen  qui  nous  eft  donné, nous 
tafchions  de  profiter  à  ceux  qui  ont  faute  de 
noftre  aide:brief,que  nous  foyons  hamains  8c 
pitoyables,  &  qu'il  y  ait  équité  en  no*  &droi 
ture. Voila  ce  que  nous  prcfchons  en  fomme. 
Orde  l.\  on  peut  recueillir  que  nous  ne  déli- 
rons que  d'attirer  les  hommes  à  la  Loy  que 
Dieu  a  donnee,&  d'y  conformer  leur  vie.  Ain 
fi  donc  il  ne  faut  point  longue  difpute  pour 
cognoiftre  fi  tout  ce  qu'on  appelle  feruice  de 
Dieu  en  la  Papauté  ,  eft  vnechofeJkoDne& 
fain£le,ou  bien  fi  ce  n'eft  qu'ordure  que  Dieu 
condamne ,  &  qu'il  a  mefiiies  en  exécration. 
Or  âpres  que  faindt  Paid  a  parlé  ainfi, il  adion 
fte  deux  efpeces  de  ces doélrines  qu'il  auoit 
condamnées  ci  deirus,c'eftafçauoir,Quedes 
trompeurs  qui  voudront  forger  àleurpoftc 
des  nouutaux  fcruices  de  Dieu ,  défendront 
(dit-il)/f  mariage  ,  (<r  les  yiandes.  Or  hinGt 
Paul  a  déclaré  que  c'eft  ici  vne  prophétie  "er 
prefle.  Et  pourtant  il  a  aduerti  non  feulemêt 
ceux  de  fon  temps ,  mais  tout  U  monde  ,  afin 
qu'on  fe  gardaft  de  telles  tromperies.Main- 
tenant  regardons  fi  vn  tel  aduertiflement  de 
Dieu  tant  clair  &  patent  a  profité  comme  il 
deuoit .  Mais  au  contraire  ,  tantoft  après  la 
mort  de  faind  Paul  font  furuenus  des  héréti- 
ques qui  ont  accompli  cefte  prophétie.  Or  il 
ne  faloit  point  trduuertela  eftrange:car  puis 
que  le  fainû  Efprit  l'auoit  prononcé.il  faloic 
qu'il  enadueinft  ainfi.  Mais  nous  fommes  fur 
vn  autre  article  ,afçauoirfilemondea  veillé 
&  a  fait  bon  guet  pour  ne  point  eftre  feduic 
&  trompé  par  telle  feintife.  Or  nous  voyonj 
que  tous  quafi  fe  font  desbordez  comme  fi  ia 
mais  il  n'y  euft  eu  inftrudJion  pour  remédier 
à  vn  tel  mal.  Voila  les  hérétiques  qui  ont  con 
trouué  que  les  viandes  ettoyent  à  euiter,voi- 
re  certaines  efpeces  :  &  mefines  aucuns  ont 
condamné  les  viandes  ,  finon  qu'elles  fuflent 
comme  en  forcelees&  charmées  .  Les  autres 
ont  défendu  le  mariage  comme  vne  foailleu- 
re  &  vne  pollution:les  autres  ont  eu  certaine 
deuotion  pour  s'abftenir  de  telle  forte  de 
viandes.  Voici  le  fainft  Efprit  qui  fe  monftre 
véritable.  Mais  cependat.en  ce  que  beaucoup 
fe  font  laifle  abufer  par  ces  trompeurs-ci,  8c 
v\  qu'ils  ont  enueloppé  en  leurs  faulTes  doâri 
nés  beaucoup  de  poures  .imes,qu'il  y  a  eu  des 
feâes  qui  les  ontiuyuis ,  en  cela  voit-on  que 

y.iii. 


»74 


SERMON     XXIX. 


le  monde  n€  demande  fînon  d'eftre  trompé 
de  fon  bon  gré.  Si  feulement  il  y  eiift  eu  des 
hérétiques  qui  eufTent  amené  tels  erreurs,que 
il  ft;  faloit  abftenir  des  viandes,  que  le  maria- 
ge eftoitvne  chofe  pollue:  &bié,on  euftveu, 
Nousauonseltéadmoneiki  par  l'Efpritde 
Dieu  :  il  nous  faut  donc  donner  garde.  Mais 
quand  il  y  en  a  beaucoup  qui  fe  tranfportcnt, 
&  qui  reiettent  raduertifleraent  de  S.  Paul, 
qui  fe  laiffent  ainfi  feduire  ,  en  cela  ne  co- 
gnoift-on  pas  que  les  hoipmes  fe  creuent  les 
yeuï  d'eux-mefme$,&  qu'ils  efteignét  la  clar 
té  qui  eftoit  pour  les  conduire  au  bon  che- 
min, &  qu'ils  demandent  d'errer  &  vaguer  çà 
&  là?  Or  (  comme  i'ay  défia  touché  )  on  co- 
gnoift  par  les  hiftoires  que  ces  mefchans-la 
ont  eu  grade  Aiite  &  longue  queue,que  beau- 
coup fe  font  laiffé  corrôpre  par  eux.  Et  mef 
mes  il  n'y  apointeuvne  feule  fefle  :  mais 
<}Uand  on  regardera  bien  les  hiftoires  ,  iJ  y  a 
eu  plus  d'vne  douzaine  de  fefles  qui  ont  ten 
du  9  ceftc  fin-ci  :  &  combien  qu'elles  fiifTent 
diuerfes,&  qu'ils  euflent  des  principes  eftran 
ges,&  qu'ils  iècontrediflcEt  en  beaucoup  de 
chofes,  fi  eft-ce  que  tous  ont  eu  cela, de  vou- 
loir (feruir  Dieu  en  s'abftenant  des  viandes  & 
du  mariage  :  &mefmes  aucuns  d'eux  fe  font 
intitulez  de  titres  qui  emportoyentcela,En- 
çratites,Continens  :  comme  nous  voyons  les 
Moines  &  les  Prcftrcs  en  la  Papauté  ,  qui  di- 
ront qu'ils  ont  le  vœu  de  continencc,pource 
qu'ils  reiettent  le  mariage.  Ainfi  en  a-il  efté 
de  ces  hérétiques  anciés,qui  n'ont  point  eilé 
depuis  cinq  cens  ou  mille  ans,  mais  tanloft  a- 
presle  tépsde^  Apoftres-.où  mtfmes  s'ils  ont 
vefcu  deuat  que  tous  les  Apoftres  foyent  dé- 
cédez du  monde  ,  tant  y  a  qu'à  grand""  peine 
PEuangile  eftoit-il  encarts  femé, qu'il  eftoit 
encore:  «n  herbe  ,  que  la  foy  eftoit  encores 
bien  debilcjvoila  le  diable  qui  femeces  ziza- 
nies parmi,  &  brouille  &  corrôpt  la  pure  fim- 
plicité  de  la  pure  doftrine  de  Dieu. Car  voila 
vne  feue  des  Encratites  d'vn  cofté  ,  &  beau- 
coup d'autres ,  Icfquelles  il  n'eft  ia  befoin  de 
nommer  ici,  car  cela  ne  feruiroit  qu'à  mon- 
tre &  à  parade  :  mais  ceux  qui  font  exercer 
aux  hiftoires  ,  fçauent  bien  qu'il  y  a  eu  plus 
d'vne  douzaine  de  feftes  :  &  cependant  il  n'y 
auoit  qii'vne  poignée  de  gens  qui  creuflcnt  à 
l'Euangile,au  prix  de  la  multitude  infinie  des 
incrédules.  Ne  voiia  point  vne  choft  horri- 
ble ,  que  le  diable  ait  vne  telle  vogue  d'auoir 
ainfi  tout  corroinpu?Les  hommes  pourront- 
ils  auoir  aucune  excule  qu'ils  ont  efté  igno- 
rins,  &  qu'ils  ne  fçauoyct  pa'i  que  c'efto't  de 
tels  erreurs,qu'ils  n''cn  auoyent  point  efté  ad 
uettis  ,  &quc  iamais  ils  n^e*ilTc'nt  efté  eiifti- 
gncz  de  la  volonté  de  Dieu?  pourront-ils  a- 
mencr  telle  excufe?CarIe  faind  Efprit  a  don 
lié  ccfte  prophétie  cxprelTe  ,  il  a  ciic  à  haute 
voix  qu'on  fe  dannaft  garde  de  tels  trom- 
peurs.   Et  cependant  voici  les  hommes  qui 
«ntdefpicé  Dieu  à  leur  efcient,quand  ils  ont 


reietté  l'admonition  qui  leur  eftoit  faite  fi 
«laire  &  fi  patente. CognoilTons  par  ccla,c5- 
bienque  nous  tafchions  de  nous  ccuurirda 
titre  d'ignorance  pour  auoir  quelque  fubter 
fiigedcuantDieu  ,  que  cela  n'eft finonnous 
couurijrd'vn  fac  mouillé.  Et  pourquoy?  Car 
nous  appelons  de  nature  d'eftre  ftduits:&de 
fait,  nous  ne  pouuons  fouffrir  que  Dieu  nou» 
gouuerne.  Et  la  rai  fon?  C'eft  ce  cautère  qui 
nous  brufle  là  dedans  quand  nous  auons  vne 
mauiiaife  confcience.  Et  d'autant  que  Dieu 
fonde  nos  cœurs ,  &  qu'il  veut  que  nous  ve- 
nions àluy  en  toute  rondeur.voila  pourquoy 
nous  appetons  d'eftre  trôpezrcar  noftre  hy- 
pocrifie  nous  poulie  là,  de  tourner  à  l'entour 
du  pot ,  afin  de  ne  point  approcher  de  Dieu, 
&  n'adhérer  pleinement  à  luy.  Puis  qu'ainfî 
eft,  ne  penl'ons  point  que  ce  titre  d'ignor.îce 
nous  doiue  feruir  de  couleur  ,  &  n'abufons 
plus  des  vains  fubterfuges  pour  excufer  le 
monde  en  fa  phrenefie  &  en  fon  aueuglcmét. 
Car  il  eft  certain  que  toutes  les  herefies  qui 
ont  regné,&  régnent  encores  auiourd'hny  en 
la  Papauté, procèdent  d'vne  iuôe  punitionde 
Dieu,  d'autant  que  les  hommcs(comme  nous 
auons  veu  en  l'epiftre  aux  Thellàloniciens)  i.Thiff. 
ne  pcuuent  fouffrir  que  Dieu  les  efclaire  .  Il  i.*,î. 
faut  donc  qu'ils  foyent  enferrez  en  troubles. 
Voila  quant  à  ce  poinft.Au  refte  notons, com 
bien  que  les  hérétiques  dont  il  a  efté  parlé, 
ayeni  cft^é  condamnez  par  ceux  qui  auoyent 
quelque  crainte  de  Dieu ,  toutesfois  fi  eft-ce 
qu'ils  ont  inftdc  de  leurs  erreurs  tout  le  niô 
de,  qu'il  y  en  eft  demeuré  trop  plus  de  refidu 
qu'il  n'eftoit  à  fouhaitcr.Q^'ainfi  foit,ceax- 
la  mefmesqui  les  ont  côdamnei,  ont  efté  en- 
tortillez en  partie  parmi  eux.  Viay  eft  qu'ils 
ont  eu  toufioursen  deteftation  ce  qu'ont  dit 
&  les  Encratites  (  dont  nous  auons  parlé  )  & 
leurs  femblables  ,  qu'il  fe  faloit  abfttnirdes 
viandes.Card'impofer  loy.&dire,  Vne  telle 
viande  eli  pollue, &  quiconqucs  en  mange, ell 
fouillé  &  contaminé  deuat  Dieu^c'eft  vn  blaf 
pheme  infupportable.  Ceft orgueil-la  donc 
d'impofer  telle  loy  a  efté  condamné.  Autant 
en  eft-il  du  mariage.  Mais  cependant  fi  eft- 
ce  qu'on  a  eu  quelques  folles  deuotions, pour 
dire  qu'il  eftoit  bon  encores  de  s'abftenir  de 
certaines  viandes  pour  feruir  à  Dieu.  Or  Sv 
Paul  condamnera  ccft  erreur  &  cefte  iupct- 
ftition  ci  après  Amonftrera  que  c'eft  entores. 
vn  fccôdabus.Ainii  nous  voyÔs  que  cefte  in- 
feftion  a  efté  efpâdiie  tellcinét  que  t-ousqiia- 
fi  ont  eu  quelque  tache  &  macule  de  ces  îaul 
fesdoftrincs:  non  pas  qu'ils  y  aytm  confenti 
pleinement  ,  mais  tant  y  a  qu'ils  en  ont  eité 
fouillez  ,  &  en  i.&  demeuré  quelque  t^fidu  eu 
eux.  Le  nul  ceprixiant  s'cftaugnienté:cai-en 
la.  fin  cefte  malédiction  a  gagne  ,  &  eft  venue 
au  dclTus,  qu'on  a  trouué  bon  de  s'abftenir  de 
ccrtaiiies  viadcs  eu  certains  iours.  Le  vendre 
di,  en  rhoueurde  la  pafsion  de  Icfus  Chrift, 
U  ue  fera  f  oint  licite  de  manger  chair.  Api  et, 

lefab 


SVR    LA   I.    A     TIMOTH. 


le  fabmedi  eft  venu  ,  comme  U  fuperftition 
croill,  &  quand  die  a  commencé  à  pulluler, 
ce  n'elt  iamais  fait. Voila  donc  comme  le  dia- 
ble en  la  fin  a  eu  la  viûoire,  qu'on  a  défendu 
les  viandes  en  certain  iour.  Et  puis  le  maria- 
ge a  efté  condamné  quant  au  Clergé,  &  a-on 
cuidé  que  s'il  y  auoit  des  Moines  &:  des  Non- 
nains  qui  feillent  vœu  de  continence,  cela  e- 
ftoit  vn  facrifice  agréable  à  Dru,  &  vn  orne- 
ment de  l'Eglife.  Et  là  deffus  on  a  crtimé  que 
le  mariage  fuft  vne  pollution,  &  que  ceux  qui 
deuoyent  adminiftrer  les  Sacremcns,ne  dtul- 
fent  pas  eftie  méfiez  parmi  vne  cbofe  infeâe, 
&  qu'ils  ne  pouuoyent  eftre  fandifiez  à  Dieu, 
finonen  renonçant  à  compagnie  de  femme. 
Voila  donc  comme,  nonobflant  l'admonition 
du  fainûEfprit,  les  hommes  de  leur  bon  gré 
fe  font  aueugkz,  &  font  entrez  en  ce  labyrin 
the:&  combien  que  Dieu  leur  tendilt  la  main, 
&  qu'il  les  en  retiraft,  touteSlois  ils  ne  l'ont 
pas  voulu  efcouter.  (iue  maintenant  on  aille 
dire.Htlâs,  &  ceux  qui  font  du  commun  peu- 
plefaut-il  qu'ils  foyent  damnez  ,  pour  n'a- 
uoir  point  tenu  vn  bon  moyen  ,  artendu  que 
leurintction  eftoit  bonne? Voire?qiiand  Dieu 
a  decla:  é  iju'obtiflance  vaut  mieux  que  facri- 
fice, Ici  h'jmmei  nonobftant  au  lieu  d'obéir, 
veulét  fane  ce  que  leur  cerueaii  portc:&  quSd 
Dieu  les  adueitira.  qu'ils  le  defpitent,  qu'ili 
s'en  mocquent,  qu'ils  crachent  contre  toutes 
ces  admonitions  comme  par  difpit. qu'ils  ail- 
lent tout  au  rebours  &  à  l'oppolite  de  tout  ce 
qu'il  leur  a  commandé  ;  quelle  excufcy  a-il 
en  cela  .-  Ainfidonc,  il  eù  certain  que  l'igno- 
rance qui  a  efté  depuis  leconimencln-.eut.n'a 
iainais  efié  fias  orgueil  &  fan;  rébellion  :  Se 
Ceft  orgueil-la  aulsi  eft  coniomt  auec  hypo- 
ctilie,  &  a  vne  confcience  maiiu.i.fe,  &  pleine 
d'ordure,  &  laquelle  ne  peut  louifiir  d'eftrc 
purgée.  Voila  donc  ccme  nous  auons  à  confî- 
derer  ce  qui  cft  auenu,  voire  afin  de  cheminer 
fongneufement  en  la  crainte  de  ITieu:  &  d'e- 
/Ire  attentifs  à  l'.iJmonition  qu'il  nous  dône. 
Car  li  nous  fomnies  dociles,  &  que  n<.us  puif- 
iions porter  d'tftre  enfcignezde  Dieu,  il  eft 
certain  eue  laniaiv  nous  ne  pourrons  errer.  Il 
nous  fci.i  bon  côdiitti-ur  it  fidèle,  mais  il  faut 
que  noi:s  ayons  les  aiircilit-  ilroflte<;  pour  re 
ceuoir  la  doctrine  qu'il  nous  dcne,&  fur  tout 
cjuand  l'cxpcnence  nous  y  conduit  ,  que  nous 
voyons  C'jinnic  ceux  qui  ont  mci'prife  les  ad- 
uertiiremens  du  famct  £fprit,fe  font  trâfpor- 
tez  en  tant  d'hereiiirs,  qu'ils  i"e  fjnt  attramez 
tn  perdition,  voue  fous  couuerture  de  pieté. 
Quand  nous  voyons  cela,  d'autant  plus  nous 
faut-il  eflre  fur  nos  gardes ,  afin  que  nous  ne 
foyôs  point  aueuglez  par  Satan,&  feduits  par 
les  altuccs des  hommes,&  qu'ils  ne  nous  mè- 
nent point  à  la  pipee,  mais  que  nous  fuyuions 
la  v€rité  de  Dieu  qui  ellvne  règle  infallible. 
En  la  fin  nous  voyos  encoresde  noftre  temps 
comme  le  diable  règne  en  la  Papauté.en  forte 
que  li  le  fetuicc  de  Dieu  ne  fera  qu'en  menus 


Ï7Î 

fatra';,  &  en  ces  ordures  que  fàinSt  Paul  con- 
damne. Et  notamment  ces  deux  efj:eces  qu'il 
touche  ICI  au  doigt  Jious  doyuent  feruir  d'v- 
ne  pleineapprobation.queles  Papiltes  n'ont 
autre  maiftre  que  le  diable,  &que  tout  ce  que 
ils  appellent  feruice  de  Dieu  ,  a  efté  forgé  & 
bafti  en  la  boutique  d'enfer  .  Vray  eft  qu'ils 
s'excufent  fous  ccfte  couleur  qu'ils  ne  défen- 
dent point  fimplemét  les  viandes,  6c  qu'ils  re 
condamnétpas  aufsi  fimplcmcnt  le  mariage. 
Voirc,ma!s  les  hérétiques  anciés  ont-ils  aufsi 
iîmpiement  défendu  les  viandes?  Car  c'etift  e- 
fté  couper  là  gorge  à  tout  le  morde  s'ils  euf- 
fentainli  fait..Sainâ:  Paul  doncdifant  que  ces 
tiôpeurs  cond.incront  les  viandes, fignifie  que 
ils  auront  des  charmes  &:  des  façons  de  for- 
celleiicspour  reprouuerles  viâdes,comme  û 
d'elles-meûnes  elles  n'eftoyent  point  pures, 
qu'en  mangeant  certaines  efpeces  on  ne  peut  ' 
pas  manger  des  autres,  que  cela  ne  tuft  point 
licite, Autant  en  eft-il  du  mariage.  Et  de  fait, 
la  prattique  nous  monftre  afTezquela  chofe 
eft  du  tout  telle  que  iedi.  Maintenant  donc, 
quelle  cxcufe  auront  les  Papiftes  quand  ils  dï 
ront  qu'on  ne  mangepoint  chair  le  vendredi, 
ni  enCa.cfme.ni  en  toutes  les  veilles  de  l'an, 
ou  la  chair  eft  défendue  ?ne  voila  point  vne 
p.)llution  qii'ils  mettent  en  la  viande,  cébien 
qu'on  en  piiifle  vfcr  en  d'autres  iours?  Mais  fi 
la  vi.îde  de  foy  eft  pure  &  nette, pourquoy  ne 
f.  la-il  point  licite  d'en  manger  le  vendredi 
comme  le  Dimanche?  Qjielle  raifon  y  a-il  en 
ccla.tinon  qu'ils  ont  conccu  vneihiagination 
faulTe  &  maudite  pour  condâner  la  viande  que 
Dieu  a  créée?  Et  puis, ils  ne  fe  font  point  feu» 
kment  contétez  de  cela.mais  d'eftablir  vn  fer 
uice  de  Dieu  à  la  polie  &  fantafie  des  homes. 
Voila  vne  chofe  que  le  fainft  Efprit   reprou- 
ue,  quand  on  met  ainft  vn  licol  fur  |es  [côfcien  ' 
ces, pour  les  obliger  à  ceci  ou  à  cela. voila  eni- 
cores  vne  doftrine  diabolique.Or  que  les  Pa- 
piftes le  f2cét,il  eft  tout  notoire:il  n'y  a  point  ' 
donc  d'exciifepour  eux.  Et  aufsi  du  mariage, 
quand  ils  le  détendent  àcetix  de  leur  Clergé, 
n'tft-ce  pasautat  comme  fi  ccft  eftat  n'eftoit 
pas  fainclpour  feruir  à  DieufComme  de  fait,  ' 
ils  n'ont  point  eu  honte  de  l'appeller  propha  ' 
ne.Et  mcfmes  voila  vn  Pape  qui  a  bien  ofédef 
gorger  ce  blafpheme  diabolique  (  duquel  ils 
ont  fait  vn  Canon)Ciue  ceux  qui  eftoyent  en 
la  chair.ne  pouuoyét  plaire  à  Dieu:&  ont  rap 
porté  cela  au  mariage.l'eftimant  comme  pol- 
lu:&  pourtant  l'ont-ils  défendu .  Si  le  diable 
eftoit  viCble  au  monde,oferoit-il  blafphemer 
plusvileinement  que  cela?  Ainfi  donc,  il  n'ell 
plus  queftion  que  tous  ces  fubterfuges  puif- 
fent  rien  valoir  pour  les  Papiftes.  Quant  à 
ce  qu'ils difent.  Ho,  cène  forames-nous  pas 
defquels  le  fainct  Efprit  a  prophetizé  .  Car 
voila  vn  tel  heretique.Tatian,  qui^ftauthew 
d'vne  telle  fcfle .  Et  les  autres  hérétiques  ■ 
n'en  pouiioyent-ils  pas  dire  autant ,  comme 
les  Cathariens,  &  Montaniiles  ?  Et  finAlc^ 

y.iiii. 


176 


SERMON   xxrx. 


l 


I. 


ment  les  Manichéens  ne  pouuoyent-ils  pas  lonté.ains  de  cognoiftre,  Dieu  a-il  comman- 
dée chacun  en  leur  temps,  Ho  ,  ce  n'eft  pas  dé  cela.'il  le  faut  donc  faire.  Dieu  l'a-il  defen 
nous  defqucls  fama  Paul  a  parlé ,  c'efl-dVn  du.'il  le  faut  fuir.  Voila  les  hommes  qui  leue- 
tel.Et  fur  cela  ils  fefuflènt  renuoyez  l'vnà  ront  les  cornesiS.- quandils  auront  ferui  Dieu 
Tautre.Et  feront-ils  neatmoins  excufez  pour  à  leur  fantafie.qu'ils  aui  ont  fait  des  loix  à  leur 
cela?  Nenni:  car  Dieu  eit  iuge  fans  acception  porte,  ils  voudront  que  Dieu  trcuue  bon  tout 
deperfonnes,  &ilaenueloppéenvne  mefme  cela:  &  qu'il  accepte  leur  façon  de  viure  que 
condamnation  tous  ceux  qui  voudront  feruir  ils  auront  baftie  en  leur  cerueaii,  &  où  eft-ce 
en  hypocrifie,  qui  inuenteront  des  feruict s  à  aller  cela?Ho,c"eft  vne  chofe  trop  facree  que 
leur  porte  :  tous  ceux-là  font  ici.  condamnez  le  feruicede  Dieu.  Et  cependant  nous  vien- 
par  le  fainct  Efprit  :  il  n'ert  point  ouertion  d'  drons-nous  ingérer  à  le  peruertir ,  &  faire 
vn  homme  ou  d'vne  feile,  mais  il  eit  queftion  tout  au  rebours,  fous  ombre  de  dire,  Cela  me 
de  la  doûrine  telle  que  Dieu  veut  eftre  obfer  plairt  :  il  faut  donc  que  Dieu  y  foit  afluietti? 
uee,  &de  fuyure  le  chemin  qu'il  nous  à  mon-  Ne  voila  point  le  diable  qui  tranfporte  les  ho 
ftré.  Voila  l'hypocriiîe  qui aueugle  leshom-  mes.quandilsinuententainfi  des  feruices  de 
mes,  quand  ils  veulent  cercher  des  aides  ex-  Dieu  ?  Et  puis,  notons  encoresque  noscon- 
ternes,afin  de  ne  venir  point  droit  à  Dieu,  fcieiices"  doyuent  eftre  tenues  en  certe  pure 
mais  de  tourner  à  l'entour  du  pot,  corne  deiîa  lîmplicitéd'obeir  àDieu.Orquand  les  hom- 
nousauons  dit  qu'on  en  fait  en  la  Papauté. Et  mesrepouflcnt  tout  cela,  &  que  leurs  inuen- 
ainfî  cognoiflons  la  grâce  que  Dieu  nous  a  fai  rions  font  obferuces  au  lieu  de  ce  que  Dieu 
te,  quand  il  nous  a  retirez  de  tels  abyfmes,&  commande:ne  voila  point  Dieu  qui  ertdebou 
p'iî  nous  a  monftré  que  ce  n'ert  pas  en  telle  té  de  fon  droitrEt  cependant  les  Papirtes  en- 
açonqi^il  veut  eftre  honoré  de  nous .  Mais  coresdiront  que  c'eft  humilité  •  car  c'eft  vne 
ici  on  pourroit  faire  vne  quertion,  Afçauoir  vertu  louable  de  ce  qu'ils  veulent  obferuer 
comment  fainû  Paul  a  parlé  fî  afprement  de  les comniandemens  de  l'Eglife..  Et  c'cft  vne 
telles  loix,qui  femblent  ertre  de  petite  impor  humilité  plus  fiere  Se  plus  arrogante  que  tous 
tance. Prenons  le  cas  que  les  hommes  qui  ont  les  orgueils  du  monde.  Et  pourquoyrlls  vien 
inuété  qu'il  fe faloit  abftenir  de  mager  chair,  dront  defpiter  Dieu,&  comme  luy  cracher  an 
que  le  mariage  eftoit  poilu,  ayent  efté  trom-  vifage.pour  s'aflliiettir  &  complaire  aux  hom 
peurs  (  comme  l'Efprit  de  Dieu  les  appelle)  mes. Et  fur  cela  ils  feront  humbles,voire  com 
mais  cependant  que  ce  foit  doftrine  diaboli-  me  le  diable.  Ainfî  donc ,  notons  bien  que  ce 
quelEtpourquoy  ?  y  a-il  fi  grand  mal  de  dire  n'eft  point  fans  caufe  que  fainft  Paul  appelle 
que  Dieu'foit  fetui  en  cela,encores  qu'il  y  ait  ici  doOrine  des  diables,  de  penfer  feruir  Dieu, 
de  la  fuperftition  &  de  la  folie?  Et  bien,ie  fe-  en  s'abftenant  de  manger  de  certaines  vian- 
ray  tela  de  fuperabondant,  quand  le  neman-  des.  Il  y  a  pis  encores,  c'cft  qu'on  veut  faire  à 
geray  point  chair  le  vendredi, ni  en  Carefme.  croire  à  Dieu,  qu'il  fe  paflera  bien  du  feruice 
Il  eft  vray  que  cela  ne  fera  point  neceflàire,  fpirituel  qu'il  a  commandé  .  Les  hommes  fur 
mais  ma  deuotion  y  ert  :  &  puis  que  cela  n'eft  cela  fe  donnent  licence  de  mal  faire,  ils  font 
d'efendu,encores  que  i'aye  liberté  d'en  vfer.fi  pleins  de  fraude,  pleins  de  defloyauté ,  pleins 
ert-ce  que  ie  m'en  abftiendray.  Et  quand  l'y  de  malice,  pleins  d'outrages,  pleins  de  trahi- 
procederay,  auec  vne  telle  intention  ,  eft-ce  fons.pleins  de  violence  &  de  cruauté:&  cepen 
vne  dotlrine' diabolique  que  cela  ?  eft-ce  vn  dant  ilsferont  bons  bigots,  ils  feront  beau- 
blafpheme  fi  énorme  comme  fainft  Paul  en  coup  d'agios  &  de  cérémonies .  Et  ie  vuof 
parle  ?  Voila  donc  ce  qu'on  pourroit  ici  aile-  prie, quand  on  peruertit  ainfi  l'ordre  de  natu 
guer.  Mais  la  folution  eft  facile .  Car  en  pre-  le.le  diable  n'a-il  pas  bien  la  vogue  ?  Les  po- 
raicr  lieu,  notons  que  ce  n'eft  point  peu  de  ures  âmes  s'en  vont  à  perdition,  on  confon- 
chofc  de  peruertir  le  vray  feruicede  Dieu&  dra  le  droift  &l'cquité, la  volonté  de  Dieu  n' 
naturel.  Sainft  Paul  quand  il  nous  môftre  que  aura  ne  heu  ni  accès  entre  les  hommes  :  &  ce- 
nous  deuons  renoncer  à  nouf-mefmes,  anean  pendant  on  ne  dira  pas  que  c'eft  le  diable  qui 
tir  toute  noftre  fantafie&tous  nos  defirs&  •  y  rcgne  .Ainfi  donc  ne  penfons  pas  que  ce 
afFeftions  ,  pour  complaire  à  Dieu ,  adioufte,  ibit  chofe  fi  petite  comme  il  fciiible  de  prime 
Que  ce  feruice-laeftraifonnable.  Cômes'il  face, quand  on  dira,  Et  bien,  il  eft  vray  que  ce 
difoit.  Quand  les  homes  veulent  feruir  Di(u  n'eft  point  le  principal  de  ftruir  Dieu  en  s'ab 
à  leur  guifc,  qu'ils  troublent  &  peruertiflent  ftenant  de  manger  chair  ,  mais  encores  ie  le 
toute  raifon,que  tout  eft  confus  alors. Et  ainfi  fay  par  deuotion  :  &  puis  qu'ainfi  eft,  faut-il 
notons  bien  quand  nou<;  voulons  iinienter  des  qu'il  foit  reietté  fi  aigrement  ?  Voire  ,  mais 
feruices  de  Dieu  à  noftre  fantafiç  ,  que  voila  nous  n'appcrceuon^pav  ce  qui  tft  ici  dit,  c'cft 
vne  arrogance  qui  n'ert  point  à  fupporter.  Et  afçauoir  que  le  diable  a  la  vogue  toutcsfois 
pourquoy  ?  Dieu  veut  auoir  certe  authorité  &  quantes  que  les  hommes  baftiflent  ainfi  des 
fur  nous, de  nous  gouuernerril  veut  que  toute  loix  pour  condamner  les  viandes  &  le  maria- 
la  difcrction  &  prudéceque  nous  aiions  pour  ge.  Car  voila  vndeshonneor  &vn  grand  6p- 
iugerdubien  &  dumal,foit  de  Tefcouter  luy  piobre  qu'on  fait  à  Dieu, d'autant  que  les 
fsul,  ic  de  ne  rien  entreprendre  outre  Cl  vo-  viandes  qu'il  a  créées  â  l'yfage  des  hommes, 

fout 


s  VR    L  A    I.    A    T  I  M  O  TH.  177 

fjiit  reiettee'!  comme  s'il  y  auoit  quelque pol     hupiaines  ont  quelque  couleur  S<  apparence 
Jution  ,  Dieu  eft  acciifé  comme  sM  n'auoit     d'Iiumilité  .  Sainifi  Paul  ne  les  intitule  point 
-point  efté  fagc ,  mais  mal-aduifé,  ne  fçaciunt     fans  caiife  en  telle  forte:  car  aufsi  nous  voyôs 
quelle  règle  nous deuons.tenir-Voila.encores     que  ccft  l'excufe  commune.  Quand  ces  bi- 
•des  enormiceziî  brutales,  qu'U  faut  bien  que     gots,  qui  veulent  mettre  toute  leur  fainûeté 
Je  diable  aueugle  les  hommes  quad  ils  eh  vie-     en  cérémonies, fe  voudrét  iuftifier,  ils  diront, 
nent  iufques  la.Dieu  a  créé  les  vi5des,&  nous     Et  bien,  &  quandie  feray  ceci  &  cela,  ie  fuis 
les  prefence  comme  fi  vn  peieappafteloit  fes  tant  plus  humble  ,  le  m'en  vay  en  l'honneur 
enfans  ;  &  voila  les  hommes  qui  diront,  Ho,il  de  Ditu  adorer  vn  marmozet.Ie  m'en  vay  bai 
nous  faut  garder  d'vne  telle  viande.Et  pour-  fer  vn  tel  autel,  &  ceci.  Se  cela  :.quand  ils  au- 
quoyiC'eftcommeî'ilsdifoyent,  Elle  e/t  pol     ront  fait  ainfi  tous  ces  menus  fatras,  ho,  il 
lue,&c'eftfainftetéde  s'en  abftecir .  Or  à  qui  leur  femble  qu'il  n'y  a  que  toute humilité.Or 
cft-ce  qu'on  fait  vn  teldesh5ncur?Eft-ce  àla  fiinû  Paula  déclaré  en  la  vertu  deDieu  que 
viande?Nenni;mais  au  Createur.pourccqu'il  les  inuentions  humaines  pourront  bien  auoir 
■en  auoit  ordonné  l'vfage  tel  qu'il  a  voulu.  Et  quelque  belle  apparence  de  vertu,  &  que  ceux 
les  hommes  ne  fe  contentent  pas  de  cela,m.iis  qui  auront  ainfi  leurs  folles  dénotions, fembie 
la  reiettent  comme  vne  chofe  pollue  i:  &  ce-  ront  eflre  humbles,  &  k  fê  feront  aufsi  à  croi 
pendant  Dieu  l'auoit  dediee  àvn.fainft  vfa-  lemiais  quoy?  Ils  viendront  baifér  les  piedsà 
ge  Autant  en  ont-ils  fait  du  mariage.  Noftre  Dieu,&  lay  cracheront  au  vifage.Et  où  cft-ce 
Seigneur  a  déclaré  que  tous,  ceux  quines'en  aller  cela  ?  Ils  diront,  le  veux  feruirDieu  en 
pourront  abftenir, en  doyucntvfer.  Qui  plus  m'abfter.antd'vne  telle  viande.  Etiquieft-ce 
eftifivn  homme  mefmes  voit  (  ehcorev  qu'il  qui  Ta  créée '.n'eft-ce  pas  Die». 'Eràquelvl. 
ne  fuft  point  contraint  par  necefsité  )  qu'il  Jâgeauf  iPa-il d£ftinee,fînon  afin  que  les  hô-. 
puifle  mieux  feruir  Dieu  eftant  marié,  qu'il  le  mes  en  foy cnt  repeus  Si  nourris  en  fobrieté» 
doit-fàko,  cognoiflânt  que  c'eft  vncftat  plai-  Or  voici  la  bôtéde  Dien  qtri  fe  deGfare,qnâd 
fant  &  agréable  à  Dieu. Voila  donc  Dieu  qui  a  il  nous  nourrit  &  fiibftanteen  ce  mondepar 
parlé:&  nous  viendrons  luy  clorre  la  bouche,  le  moyen  des  viandes.  Et  cependant  tuteiet— 
&nous  rebecquer  à  l'cncontre  pour  dire, .^i  tes  ce  qui  procède  de  Iny, voire  &  le  fais  mau— 
faut-il  que  nous  ayons  vne  regjepliis  parfai-  gré  qu'il  en  ait:5;  toutesfois  tii  diras  que  tu  le 
te  &  plus  entière  que  celle  que  Dieu  approu-  veux  honorer.  Voire.'tu  fais  bien  femblant  de 
«e:&où  eft-ce aller  î  Ainlïdonc,ily  atant  de  luy  baifcr  les  pieds,  mais  c'efl  autant  comme 
raifons  qui  nous  montrent  que  le  diable  eft  fi  tn  Iny  donnois  vn  coup  de  poing,  comme  li 
inuenteur  de  telles  doârincs  ,  quenousauons  tuiettoisen  la  boue  le  bien  qu'il  te  prefente, 
Iwen  occafion  de  louer  Dieu  ,  &  luy  rendre  a-  pour  le  fouller  au  pied. Et  encores  non  feule- 
ftion  de  grâces  de  ce  qu'il  nous  a  retirez  d'v-  ment  tu  ne  tiens  conte  d'vne  telle  grâce  5c 
ne  telle  confufion,  &  qu'il  nous  a  monfrré  le  bonté  de  (on  Dieu,  mais  tn  viens  entoresTac 
feul  moyen  de  le  feruir ,  tellement  que  nous  cufer  qu'il  n'a  point  cognu  que  c'eft  qui  eft 
foyons  alTeurez  que  noftre  vie  luy  eft  agréa-  propre  pour  ta  nourriture  &  pour  ton  falut. 
ble.que  nousadherioris  fimplementà  fa  pa-  Voila  donc  où  (ainft  Paul  nous  ramené.  Pour 
rôle  fans  y  adioiifter,qiienou^  n'allions  point  tant  apprenons  de  tellement  vfcr  des  chofes 
par  ces  ciicuits,&  ces  voycs  obliques, &com-  que  Dieu  a  ordonnées  à  noftre  vCige,  que  no- 
me à  Ja  trauerfe  ,  mais  que  nous  fuyiiions  la  ftrevie  foit  réglée  à  fa  volonté.  Voila  ce  que 
pure  règle  qui  eft  contenue  en  fa  parole.  Or  nous  deuons  tenir  pouria  vraye  perfeôion. 


auoit  quelque  pollution  .  Et  pourquoy  .' C.«r  noftre  cofté  ne  craignons  point,  encoi'es  que 

Dieit(du-il)!ej  a  trtées  pour  en  fftr  autc  aflion  les  hommes  nonsaccufenr,  puis  que  Dieu  ap- 

^*^jf«,  voire  aux  fidèles  &  à  ceux  qui  co-  prouue  la  règle  que  nous  tenons,  &  que  nous 

gnoiflent  la  venté.  Puis  que  Dieu  a  créé  les  fiiyuons  ce  que  bon  luy  femble  :  ne  nous  fions 

viandes,  eft-il  à  l'homme  mortel  de  les  oftcr,  point  à  noftre  raifon  ou  prudence,  car  il  n'y  a 

&'d'empe  (cher  l'vfage  qui  nous  eft  permis  du  que  vanité  &  nienfonge  en  nou^rmais  co- 

Createur.'Et  .linfi  donc, quâd  fainct  Paul  nous  gnoiflôns  que  noftre  vraye  fagelTe  eft  de  luy: 

ramené  à  Dieu,c'eft  pour  nous  déclarer  qu'en  obéir.  Or  il  eft  vray  que  ceci  ne  fe  pourroit 

cuidant  bien  faire  nous  ofTenfons  mortelle-  pas  defpcicher  pour   maintenant  :  il  faudra, 

ment  ccluy  que  nous  voulons  honorer  .  Et  donc  referuer  le  reftc.  Wais  notons  pour  la- 

pourquoy?  le  viendiay  faire  femblant  de  bai  fin  ce  que  (ainét  Paul  dit,  Q«*  r  />»  aor^onné 

fer  les  pieds  de  Dien,& cependant  ie  luy  don  tes  viautfet  à  ceux  qui  font  pjtle!  ,  que  c'eft- 

nerayvn  grand  coup,  on  ie  luycracheray  au  pour  nous  mon ftrerqne  nous  deuons, pour 

vifage:  &  ainfi  en  font  tous  ceux  qui  fe  veulét  bien  vfer  des  créatures  de  Dieu ,  regarder  i 

acquitter  enuers  luy  en  s'abftcnaat  des  vian-  luy  qui  en  eft  Tautheuricomme  aufti  il  adiou- 

des.  Et  pourquoy  ?  Il  eft  vray  C  comme  ûinû  fte,  que  c'eft  auec  action  de  grâces  qu'il  nous 

CoI.i.t3  Paul  dit  aux  Colofsiens  )  que  les  inuentions  faut  receuoii  les  biens  de  Dieu. Qiie  nous  ne 


i7«  S  E  R  M  O 

foyons  paî  comme  ces  cîiiens&  pourceaux 
^ui  gourmandent  &  deuorent  les  biens  de 
Dieu,&  cependant  ne  fçauent  que  c'eft  de  liiy 
ne  de  fa  bonté,  &mefmes  qu'ils  prenent  oc- 
calîondele  mettre  en  oubli  par  leurs  gour- 
mandifes  &  intempérances ,  Si  polluer  ce  que 
il  auoit  dédié  à  bon  vfage.  Voulons-nous  doc 
vfcr  fobrement  des  créatures  de  Dieu,  telle- 
ment qu'il  nous  foit  licite  de  les  receuoir? 
Qiif  nous  les  prenions  auec  aûion  de  grâces, 
c'elt  à  dire,  que  nous  foyons  pleinement  de- 
diezàDieu  .que nous cognoifvions  que  c'ell 
luy  qui  eft  noftre  père  nourricier  ,  que  nous 
luy  rendions  grâces  de  tant  de  biens  qui  nous 
élargit  :  c^uand  nous  venons  à  table.que  ce  ne 
foit  iaraais  fans  auoir  inuoqué  le  nom  Je 
Dieu,  que  nous  n'en  fortions  point  linon  auec 
aûion  de  grâces  .Car  il  eft  certain  que  tous 
ceux  qui  mangent  ainfi  fans  prier  Dieu,c'e(i:  à 
dire  la  plus  part, font  pires  que  btftes  brutes. 
Q_u'on  ailDe  par  les  tauernes  &  par  les  mai- 
fons.qu'on  regarde  la  façon  d'y  viure,  il  n'eft 
point  mention  d'inuoquer  Dieu  ,  ne  de  le  re- 
mercier ,  tellement  que  les  Turcs  nous  de- 
uroy  enc  faire  hôte  en  cela'.car  pour  le  moins 


N    X  XX. 

ils  auront  quelque  façon  d'honorer  Dieu. 
Tant  y  a  que  nous  ne  fçaurions  manger  va 
morceau  qui  ne  foit  maudit  Se  exécrable  de- 
uant  Dieu,  fi  ce  n'efl  en  recognoiflant  celuy 
qui  nous  donne  les  viandes  ,  3c  qui  nous  re- 
pailtàcefte  fin  qu'il  foit  ferui  &  honoré  de 
nous,  &que  nous  cognoifsions  qu'il  nous  ap- 
pelle à  foy,  &  qu'il  fe  veut  monitrer  Père  pi- 
toyable enuers  nous  :  moyennant  que  nous 
luy  foyôs  vrais  eniâns,  nous  alTuiettiflàns  pal 
iîblementiluy  &à  fa  parole  ,  comme  c'eûà 
cefte  fin-la  qu'il  nous  a  créez  au  inonda. 

-OR  nous-nous  proftcrneronsdeuanil* 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
DOS  fautes,  le  prians  qu'il  luy  plaife  les  corri-» 
ger  tellement  qu'il. nous  les  pardonne  parla 
bonté,  &  que  pour  Taduenir  il  nous  ticne  tel- 
lement la  bride  que  nous  neiàcions.pointdes 
beftesefchappees,  mais  qu'il  nous  conioigne 
pleinement  à  foy  ,  &  qu'il  nous  conduife  par 
ïbn  fainû  £fpht,en  telle  forte  qu'il  nous  face 
paruenir  à  ce  but  auquel  il  nous  appelle,  c'eft 
afçauoir^à  la  vie  celefte  .  Ainil  nous  diront 
tous, Dieu  tout-puiflantjPere  ceki^eji&i:. 


TROISIEME    SERMON    S  VR     LE 

QJ^ATRIEME     CHAPITRE. 

i  Or  l'Efprit  dit  notamment  qu'es  dernier i  temps  aucuns  defau-- 
dront  de  la  foy,  samufans  aux  cfprits  abufcurs  c^  aux  docîrines  des 
blesy 

t  Var  îhypocrtfie  de  ceux  qui  parlent  mensonges ,  ayans  leur 
confciencecautcrizce: 

i  Defendansfoy  marier,  commandans  de  s*ahîîenir  des  viandes 
que  Dieu  a  créées  pour  en  vfcr  auec  aSlion  de  grâces  aux  fidèles  ^  a 
ceux  qui  ont  cog  nu  la  vérité. 

4  Car  toute  créature  de  Dieu  efi  bonne ,  (f  rien  ncjl:  à  rciettcr, 
quand  il  ejîprins  auec  action  de  grâces: 

5  Car  elle  cflJanSlifice par  la  parole  de  Dieu  ç^  p^^  oraifon. 

fîeps  peuuent  créer  vnemoufcJie  .  Qjjand  il» 
défendront  à  vn  homme  de  manger  du  bauf 
oudumouton,  il  faudroit  pour  le  moins  que 
ils  fceulTent  créer  |ie  ne  fçay  quoy  .  Et  ainii, 
quelle  aud-ace  &  orgueil  cft-ce  à  eux  d'empcf 
cher  que  l'ordre  que  Dieu  a  inftitué  n'ait  Ion 
cours?£tau  refte.nousdeuons  bien  poifcr  ce- 
fte fentence  de  fainil  Paul ,  quand  il  dit,  Que 
toute  créature  de  D'eu  eft  kontie  ,eftant  reieiit 
auec  aflion  de  fraces.Or  en  cela  il  fignifie  que 
il  nous  faut  toufiours  regarder  la  volonté  de 
noftre  Dieu,'&  nous  y  arrefter  du  tout  :  com- 
me de  fait  >  c'cft  pour  le  moins  qu'on  luy  at- 
tribue 


E  matin  nous  forames  de- 
meurer fur  ce  propos  ,  que 
en  défendant  l'vfage  des 
viandes  que  Dieu  a  créées, 
on  iuy  fait  deshonneur, co- 
rne ïM  n'auoit  point  tfttaf 
fci  aduifé  de  régler  Ja  vie 
deshoramesj&dc  lugcrcequi  leur  eft  bon  & 
propre  pour  leur  falut.Et  c'tit  vn  article  que 
nous  dcuons  bien  noter  :  car  ceux  qui  entie- 
prenent  d'impofer  loix  pour  obliger  les  amcs, 
yeulent  vfurper  Toffice  &  l'authoritc  de 
Dieu  .  Or  qu'on  fçache  fi  le  Pape  &  tous  ks 


SVR     LA     LA     TIMOTH. 


'7!> 


liibue  ceft  honneur  ,  que  de  s'aflliiettir  à  J»  certitude  que  nous  auons  que  Dieu  nous  per- 
regle  qu'il  aniife.  Et  par  cela  font  aufsi  fo-  met  de  faire  ceci  ou  cela. Quand  donc  ie  man 
lues  les  que/lioiis  friuoks  qu'on  pourroit  ici  ge,  il  faut  que  l'aye  cognu  que  Dieu  approu- 
faire  :  comme  aucuns  niocqucurs  demandent,  ueque  ie  foye  nourri  à  fes  defpens,&  qu'il 
fi  vn  ferpent,  qui  eft  «rcature  de  Dieu  ,  fera  me  donne  de  quoy.  Si  ie  n'ay  ccffe  certitude- 
bon.  Sainit  Paul  n'a  pas  eflendu  f  n  piopc;  fî  la,&  vne  telle  refolution,  il  eft  certain  que  ie 
loin,  mais  c'eft  fuyuant  ce  qui  fftoitdclado-  pèche  &  ofFenfe  :  car  cependant  que  nou» 
ftrine  qu'il  tiaitteici,c'eflafçauoir  que  nous  tremblons  Se  fommes  en  doute,  nous  ne  ren- 
nedeuonspoint  chanceler  ned'vn  coftc  ne  dons  pointa  Dieu  l'honneur  qui  luy  appar- 
d'aùtre  ,  pour  fçauoir  ce  quinous  eft  licite,  tient.Et  de  fait,en  cela  nous  voyons  rameur 
qu'il  ne  faut  point  regarder  çà&  là,  &  en-  que  Dieu  nou'^  porte,  quand  il  veut  que  nous 
<{Uerir  beaucoup,  mais  il  nous  faut  tenir  à  ce  ayons  repos  en  nos  confcierces  iufques  an 
que  Dieu  a  ordonné  .Or  npus  fçauons  qu'il  boire  &  au  manger.  Si  vn  homme  ne  fçait 
n'a  point  créé  les  ferpens  pour  les  faire  man-  comment  il  en  eft  auec  Dieu,  &  qu'il  m  ange, 
ger  aux  hommes  .  C'eft  donc  vn  propos  de  &  qu'il  ne  fçache  fî  cela  luy  eft  permis  ou 
gens  brutaui,  voire  du  tout  enuenimez  à  mal,  non  ,  le  voila  comme  en  torture.  Or  Dieu 
que  d'amçner  telles  chofes ,  &  fî  eitrauagan-  pouruoit  à  vn  tel  mal,  &  veut  qu'en  beuuant 
tes .  Et  puis,  quand  aufsi  on  dira  que  toutes  &  mangeant  nous  ayons  ceffehberté  de  nous 
viandes  ne  font  pas  propres  à  vn  homme,  que  efîouir  deuantluy,  comme  il  en  parle  en  l'E- 
vn  malade  ne  doit  point  manger  d'vne  chofe  fcrinire,&luy  rendre  aûion  de  grâces,  pour 
qiji  luy  fera  <lefendue  par  le  médecin,  s'il  ne  dire  ,  Seigneur  ,  le  bien  que  i'ay  receu,&  la 
veut  tenter:Dieu:cel.»  aufsi  s'accorde  auec  ce  nourriture  qui  me  maintient  iournellement, 
queditfaind  Paul  .Car  il  n'entend  pas  que  ie  cognoy  qu'ils  vienent  de  toy  •&  pourtant 
nous  vfions  de  tout  indifféremment  fans  di-  ie  t'en  ren  grâces, puis  que  tu  daignes  bien  a- 
fcerner ,  mais  que  nous  regardions  ce  que  uoir  le  foin  d'vne  fî  poure  créature.  Nous 
Dieu  a  cognu  nous  eftre  bon.  Il  faut'donc  fai-  voyons  donc  quelle  amour  Dieu  nous  porte, 
re  comme  vne  corrcfpondance  de  l'ordre  que  quand  il  veut  que  nous  avons  nos  confcien- 
Dieua  mis,  auec  Tvfagequenpusdcuons  te-  ces  à  repos,  iufques  à  ces  chofes  qui  font  pe- 
nir.&  fuyure. Dieu  ayant  créé  les  viades,aauf  tites ,  comme  il  femble.  Et  pourtant  voila  ce 
fi  raooftré  l'vlage  .tel  ou'il  en  doiteffre.il  y  a  que  nous  auons  à  no  ter  de  cefte  fentence  de 
k  fobrieté  quant  à  1  ame  :  &  puis  quant  au  ùkinâ  raul,c'eftafç-auoir,que  foiten  bcuuaot, 
corps, cela  aufsi  eflcofnforme,  qu'il  y  ait  di-  ouenm,ângcant,  ouen  vfant  des  autres  cre.i- 
fcretion,  félon  qu'vn  homme  fe  trouue  mal,  tures  qui  feruent  à  maintenir  cefte  vie  tranfî- 
s'il  doit  ieufnerdotout,  ou  bien  s'il  fe  doit  ab  toire,  il  nous  faut  toufîours  regarder  la  vo- 
ifenir  devin  oudechairicela  eff  en  fa  liberté,  lontéde  noflre  Dieu:quandnous  l'aurops  co 
Aiais  fanû  Paul  ne  traitte  point  ici  de  toutes  gnue,  qu'il  nous  faut  tenir  à  icelle  fans  enque 
«es  chofes.  <iupy  donc .'  Il  nous  monflre  que  rir  plus  outre,  il  ne  faut  point  reiener  ce  que 
nous  dcuonsvfer  des  viandes  fclon  que  Dieu  Dieu  nou^  met  en  main,  quand  il  dit,  Vous  en 
l'a  commandé. Et  pourquoy?Car  c'eft  luy  qui  pouuez  vfer  librement  auec  aôion  de  grâces, 
nous  nourrit  &•  fubffâte.c'cft  donc  raifon  que  Et  fi  nous  enquêtons  plus  aiiant,  ce  nVft  paj 
on  vfe  de  ce  qu'il  nous  élargit  ft  Ion  fa  volon  vnedeuotion  bonne  dTair^lemai'^  p.'uftcflv- 
té.  voila  en  fomme  ce  que  nous  auons  à  ndter  ne  infidélité  maudite.  Et  outre  cela, il  y  a  Pin 
de  ce  paflage.  Et  c'eft  vne  doftrine  plus  vtile  gratitude ,  pource  qu'il  ne  nous  fuffit  point 
qu'il  ne  fembleroit:  pource  que  fainft  Paul  en  que  Dieu  nous  ait  donné  le  congé  ,  mais  nous 
la  première  aux  Corinthiens,  chapitre  dixie-  voulons  effieplus  gransmaiffres  que  luy,  ou 
me,  verf.  3',  nous  dit ,  qu'il,  nous  faut, faire  bien  nniir  fon  authorité  pour  l'attribuer  aux 
toutes  chofes  au  n6m.4e  Dieu.  £{,commeijt  komraes  mortels  .  Or  «pendant  fainft  Paul 
fêla?  Soit  Cdit-il)  que  nous  beuuions  ou  que  monftrçqucl'vfage  desbonnes  créatures  ne 
tnous  mangions  ,il  eft  befoin  que  nous  ayons  peut  appartenir  à  tous  pour  leur  falut ,  mais 
vne  confcience  paifiblercar  fans  cel?  nous  i^e  .feulement  à  ceux  qui  ont  cognu  la  venté.  La 
fçaurions  manger  vn  morceau  de  pain  Jans  of  ,  ra^ifon  n'cft  pas  ici  exprimée,  mais  au  premier 
fenfcrDieu._ Quand  ie  vjendray  à  table,  ft  je  chapitredePepirtreàTite,  illa  met ,  Qre  1» 
pren  nu  refeftion,  il  eft  impofsible  que  ie  homme  incrédule  fouille  tout  ce  qu'il  attou- 
mangedubiendeDieiifcommeproceaant-de  che:  comme  il  en  eft  aufsi  parlé  au  prophète 
luy  )  ii  ie  ne  le  cognoy.  Or  quand  iç  cognoy  Aggee ,  combien  que  ce  ne  Toit  pas  du  tout  i 
que  Dieu  me  ledpnne,  il  faut,  qw,e,  if .  tiepe  ^ccp^opos,  n?ais  ii  y  alà  vne  doctrine  gcnera- 
pour  tout  tefolu  qu'il  m'eft  licite  d'j:p , ,y  fer /e     le  ,  que  quand  vn  homm      '"     " 


ï 


lomme  eft  fouillé  ,  il  infe- 


lonû  volonté.Siie  n'ay  vne  telle  fojvlu/îôn  Jle  tout  ce  qui  vient  à  luy  .  Voila  pourquoy 
pnnfe  en  moy  ,  te  feray  toujours  en-^fpuj;e  aux  facnfîces^fî  vne  chofe  qui  de  nature  eftoit 
*■  en  fcrupule  fî  cela  eft  bon  ou  mjiuuAis,  Or  fainfte&dediee  à  Dieu, eftoit  touchée  par  vn 
faina  Paul  dit  notamment  (  parlant  de  telle  homme  poilu,  elle  eftoit  fouilke.  Ya-il  rien 
R*m,i4.  matière.)  que  ce  qui  eft  fait  fans  fov,  eff  pe-  plus  fainif  ne  plus  facré  que  la  prière  ?  .'Ci  eft- 
".  che  .  QiTentend-il  par  ce  mot  de  foy  î  Vne    re  que  quand  nous  inuoquons  le  nom  deDieu, 

z.ii. 


ï8o  S  E  R  M  O 

nous  ne  fâifons  que  le  prophaner  fi  nous  fom 
mes  malins,&  que  nous  n''ay5s  point  vnedroi 
lureen  nous  de  recourir  àluy  en  foy  &ea 
ref  entince.Puis  qu'vn  homme  uicredule  pro- 
phine  roraifon  (qui  eftvne  chofe  fi  facree) 
que  fera-ce  des  viandes  corruptibles?Notons 
bien  donc  quervfagedes  bonnes  chofes  ne 
fera  point  approuué  finon  que  nous  ayons  la 
foy  en  nous  laquelle  nous  fan£tifie,&  par  con 
feqiient  les  chofes  qui  nous  font  donneesde 
Dieu.lleft  dit  au  if.des  Aâes.quec'eftlafoy 
qui  purifie  noS  cg:urs:cefte  pureté-la  s'eftend 
plus  auant,  c'eit  que  quandvn  homme  ha  fon 
coeur  pur,s'il  reçoit  les  biensqueDieuluy  di- 
ftribue  pour  fon  vfage  ,  qu'il  ne  pollue  rien. 
PourquoyîCar  il  eft  net.  Amfi  doc  il  ne  pour 
ra  point  fouiller  les  choies  qui  de  leur  nature 
font  défia  nettes. Q^uand  l'auray  bié  laué  mes 
mainSiie  peux  manier  les  choies  qui  font  pu- 
res,&  ie  ne  les  noirciray  pas:  miis  fi  le  manie 
'  Tn  linge  le  plus  blanc  du  Imonde,  &  que  i'aye 

les  mains  fouillées ,  voila  pour  toutinfefter. 
Ainfî  en  eft-il  quand  nous  aurons  celle  purifi- 
cation en  nos  coeurs  laquelle  Dieu  demande, 
&  qui  procède  de  la  foy  ,  que  nous  pourrons 
licitement  vfer  de  toutes  bôncs  créatures  lâns 
crainte  de  les  polluer. Nous  voyons  pourquoy 
fainâ  Paul  dit  ici ,  Çivf  l^f'g'  </"  -viandes  /ji 
hon  ^furanxfdeles  tant  feulement.  Vray  eft 
qu'on  pourroit  ici  cfmouuoir  vne  queftion, 
afçauoirfi  les  mefchans  &  les  reprouuez  n\- 
fent  pas  des  bonnes  créatures  de  Dieu,  veu 
qu'il  eft  dit  qu'il  fait  luire  fôn  foleil  furies 
bons  &  fur  les  mauuais?Nous  voyons  par  ex- 
périence que  les  mefchans  fouucntesfois  au- 
ront les  biens  de  Dieu  en  plus  grand'  abon- 
dance que  n'ont  pas  les  fidèles.  Mais  ce  font 
deux  chofes  diuerfes.que  le  don  de  Dieu  &  le 
moyé  de  le  rcceuoir. Quand  Dieu  nous  fouf- 
fre  de  iouir  de  fa  grâce  ,  cela  de  fon  cofté  eft 
pur&faina:  dunoftreileft  poilu  ,  finon  que 
nous  ayons  cefte  pureté  que  nous  auons  dite. 
Combien  donc  que  les  mefchans  iouiflent  des 
biens  de  Dieu,  voire  iulques  à  les  regorger, 
toutcsfois  ils  ne  laiflentpasde  les  contami- 
ner,entant  qu'en  eux  eft.  £t  defaia.nousde- 
uons  toufiours  auoir  mémoire. que  Dieu  pro- 
prementacreé  le  monde  pour fes  enfans:  & 
voila  aufsi  pourquoy  ils  en  font  nommez  he- 
.  ritiers  auec  Abraham  leur  père.  Qwind  doric 
les  incrédules boyuent& mangent, ils  defrdb 
bent  àDieuce  qui  leura  efté  donné rcombien 
que  Dieu  les  lailfe  boire  &  manger  ,  fi  cft-ce 
qu'il  n'approuue  point  ceft'vfage-la,'car  ils  ne 
«ont  point  du  nombre  de  fes  tnfans,&  le  tont 
leiir  eft  impute  àlarrecin  &  àpfll.ige.  Voifa 
aufsi  pourquoy  il  eft  dit, que  ce  qui  eft  cônrjç- 
Tje.  8.6.  nu  au  Pfeaumehuitieme.eftaccôpli  en  lapt'r- 
^'ip.  Tonne  de  noftre  Seigneur  lefiis  Chrift.c'dtâ- 
fçauoir  que  Dieu  luy  a  donne  en  poflcAidn  la 
terre, le.  beftes  des  ch.ips,les  oifcaux  du  ciel, 
les  poiflonîdes  eaux.Et  pourquoy.'Car  par  le 
péché  nous  Tomnaes  priiKZ  de  tout  bien  ,  nous 


N  .  X  X  X. 

ne  fommes  pas  dignes  de  toucher  vn  mor- 
ceau de  pain,  ni  vne  goutte  d'eau  :  mais  nous 
fommes  reftituez  par  le  moyé  &  par  la  grâce 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  en  cefte  pof- 
fetsion-la  ,  que  quand  nous  fommes  adoptez 
pour  enfans  de  Dieu  en  fon  nom  ,  nous  pou- 
uons  en  bône  confciéce  v  fer  de  toutes  crcatu 
res.car  elles  font  à  lefus  Chrift  noftre  chef, 
&  à  tous  ceux  qui  font  mébres  de  fon  corps'. 
Or  eft-il ainfi  que  nous  fommes  entez  en  luy 
par  foy.  Voila  donc  pourquoy  nous  pouuons 
licitement  vfer  dû  boire  &  du  manger ,  voire 
moyennant  que  nous  ayons  foy  en  premier 
lieu.  Or  il  nous  faut  bien  noter  que  S.Pa'J  ne 
s'eftpas  contenté  du  ihotde  foy,  pource  que 
beaucoup  de  gens  en  abufeht,  mais  il  veut  ex 
primer  te  qu'il  emporte.  0»;^  ,dit-il,5»i  ont 
cogna  la  verité.W  ne  dit  point  ici  deux  chefes 
diuérfes,mais  il  monftre  qlie  c'eft  d'cftre  fide 
le  en  fomme  :  c'eft  afçauoirqu'on  aitcognu 
la  vérité  de  Dieu. Et  pourquoy  cela?Nous  a- 
uorts  dit  quecemotde  Fo^  ne  coufteragtie- 
res  a  beaucoup  de  gens, comme  nous  voyons 
que  les  plus  grans  contempteurs  de  Dieu  fe 
vanteront  d'eftre  bons  catholiques.  Autant 
en  eft-il  des  poures  ignorans  qui  n'ont  la- 
maisgoufté  que  c'eft  de  nulle  doctrine  ou  re 
ligion:briet,ils  font  des  beftes  brutes  :  qu'on 
leur  demande  s'ils  font  Chreftiens  ,  il  leur 
femble  qu'on  leurfait grand  tort  deleur fai 
re  vne  telle  queftion.  Voila  donc  tout  le  mon 
de  fidèle,  fi  on  en  veut  croire  vn  chacun  en 
fon  endroit.Mais  Dieu  defauoue  cefte  couuer 
ture  fauflèA:  vaine  de  la  foy  ,  &  monftre  que 
ce  n'eft  point  vn  titre  qu'il  faille  ainfi  pio- 
phaner.Et  pourquoy?  Car  la  foy  eft  vne  co- 
gnoiflàncede  la  volôté de Dieu.Si  donc  nous 
ne  fommes  deuement  enfeignez  en  la  doâri- 
nedefalut,pour  inuoquerDieu  purement  co 
me  noftre  Pere.pour  mettre  noftre  fiance  en 
luy, pour  le  feruir  &  honorer  comme  il  appar 
tient, pour  cheminer  auec  nos  prochains  corn 
me  nousdeuons:  fi  nous  n'entendons  ces  cho 
fes  qui  font  requifes  comme  les  principaux 
poindls  que  Dieu  veut  eftre  communs  à  tous, 
nous  aurons  beau  dire  que  nous  auons  foy, 
carie  faihft  Efprit  prononce  en  ce  paflàge 
que  Dièu  nous  tient  pour  incrédules. Notons 
bien  donc  que  la  foy  n'eft  point  vne  imagina 
tion  friiiole  :  comme  les  Papiftes  diront  que 
la,  foy  eft,de  croire  en  leur  mère  fainéte  Egli 
fc:&  puis  ils  nefçjuét  s'il  y  av'n  Dieu  au  ciel, 
ilsne  fça'uent qui  eft  leur  Rédempteur,  ilî 
n'entendent  nullement  comme  ri  faut  prier 
Dieu, ne  comment  il  faut  viure. Nous  voyons 
^dobc  qu'ilf-iiit  que  nous  ayons  entendu  ,  & 
que  hotls' ayons  cfté  droitement  enfeignez 
'poyr^'u'àlr  là-  foy.  Or  pource  que  le  diable 
m'efe  des  fai.-flttez  beaucoup  ,  &  de  (i:s  men- 
fôn^e»:  [îafmi  la  pure  vérité  de  Dieu, notam- 
ment/Tiiriift  Paul  dcclare'q'icla  foy  n'fftpas 
vneciçnoiflîince  volage  ,  mais  i^iCtl  tiut  que 
elle  fou  appuyée  fur  vac  bonne  dcilnne  & 

certaine 


s  V  R   LA  I.    À   T  I  M  O  T  H. 


certaine.  Or  eft-il  ain/î  que  les  hommes  de 
leur  naturel  font  menteurs. Il  n'y  a  donc  ven- 
té finon  celle  que  nous  tiendrons  de  Dieu.Et 
f(.4m.I0.  c'ert  ce  qui  eftditen  l'autre  paflàge,  q  la  foy 
I7,  cftpar  i'ouye,  &cefte  ouye-la  n'eft  pas  d'vn 

bruit  commun  de  ce  qui  femble  bon  à  chacun 
d'auancer.mais  que  nous  venions  en  Tefthole 
de  Dieu,&  qu'il  foit  noftre  Maiftre,&  q  nous 
rangions  nos  entendemens  à  fa  famde  parole. 
Et  ainfi  ce  paflage  emporte  beaucoup,  quand 
il  fera  deuement  obferué  comme  il  le  mente. 
Or  venons  maintenant  à  ce  qu'il  dit, Q»»»»»- 
tts  yiades  font  fanCiifees  far  la  fareU  de  Dieu- 
O"  f'»' prieret  .C^eft  vne  déclaration  de  ce  que 
nousauons  n'agueres  touché:  S:  quand  nous 
aurons  entendu  cefte  doûrine  ,  il  ne  faudra 
point  d'expofîtion  plus  longue  du  paflage.  Il 
dit  donc  que  toutes  chofes  que  Dieu  à  créées 
nous  font  fanôifiees  pat  la  parole  de  Dieu  & 
par  prières.  Il  femble  donc  qu'il  y  ait  ici  quel 
quecontradidhon.veuquepar-cideuant  il  a- 
uoit  prononcé  que  toute  créature  eftoit  bon- 
ne. Il  fembledonc  qu'il  ne  foit  pas  bon  de  la 
lànûifier.  Car  ce  qui  eft  bonde  foy,  &  ce  qui 
eu.  pur,qu'ha-il  befoind'eftre  lanftifié  d'auan 
tage?  cela  eR  foperflu, comme  il  femble.  Mais 
ici  faiiiûPaiil  parle  plus  diftindement  qu'il 
n'auoit  fait.  Il  eu  vray  qu'il  auoit  comprins 
enbrieftout  ceque  maintenant  ildeduit  plus 
au  long  :  mais  à  caufe  de  noftre  ntdefle  il  eft 
bon  que  les  chofes  nous  foyêt  mafchees,  afin 
de  les  mieux  digérer.  Voici  donc  fainii  Paul 
qui  déclare  que  toutes  créatures  de  Dieu  fout 
bonnes,  ic  neiitmoins  il  dit  qu'il  faut  qu'elles 
foyent  (ànûifiees  de  noftre  cofté.  Pourquoy 
cela  ?  l'ay  defîadit  qu'eftansdefcendus  delà 
race  d'Adam, nous  n'auons  en  nous  que  toute 
corruption.  Puis  qu'ainfî  eft  ,  nous  louillons 
entant  qu'en  nous  eft  le  ciel  &  la  terre.  L'£- 
feriture  dira  fouuentesfois  que  la  terrea  efté 
maudite,  qu'elle  a  eftc  polluée.  Et  comment? 
Afçauoir  par  l'iniquité  des  habitans.  Et  de 
Éiià  notons  que  toutes  les  créatures  de  Dieu 
gemilTent  quand  ellesvoyét  que  nous  les  ma- 
nions mal  ,  &  que  nous  en  abufons.Il  eft  vray 
que  le  foleil  nous  efclaire  ,  mais  c'eft  comme 
maugré  foy ,  quand  nous  ne  feruons  point  à 
Dieu.  Vray  eft  qu'il  n'ha  point  de  fcntiment: 
iom. 8.  niais  faind  Paul  toutesfois  exprime  cela  par 
il»  telles  limilitude<;, quand  il  dit  que  toutes  créa 
tures  de  Ditu  ^emifl'ent.qu'ellesfont  comme 
vne  femme  qui  eft  prochaine  de  fon  terme, la 
quelle  ne  demande  que  d'enfanter.  Ainfî  les 
créatures  de  Dieu  demandent  qu'il  les  afFran- 
chifle  .T  caufe  de  celle  conuption  du  péché. 
Puis  qu'ainfî  eft  nous  ne  pouuons  pas  receuoir 
les  biens  de  Dieu, c]u'il  n'y  ait  quelque  moyen 
de-  les  fandificr  à  noftre  vfagc.  La  raifon? 
Nous  ne  fo.-nmes  pomt  capables  d'eftre  nour- 
ris &veftns,  ne  que  Dieu  nous  face  quelque 
graccquenousne  foyonsfanftifiez.  Et  pout- 
^uoyfDe  noftre  nature  nous  fommcs  sono» 


iSt 

pus,  il  nous  renoce&defaduoue  pour  fes  en- 
fans  ,  car  nouifommes  maudits ,  &  n'appor- 
tons que  raortauec  le  péché  du  ventre  de  la 
mere.Et  en  ceci  nousauons  bien  occafionde 
nousdefplaire&de  nous  humilier. Commet? 
Le  foleil  de  foy  eft  vne  créature  fi  noble  ,  8c 
reantmoins  fa  clarté  ne  peut  paruenirà  nous 
qu'en  condamnation, fi  elle  ne  nous'eft  fanfti- 
fiee.  Par  quel  moyen  ?  Par  la  foy.  Autant  en 
eft-il  du  boire  &  du  manger  ,  5c  de  tout  le  re- 
ftc.  Voila  des  chofes  qui  font  bonnes ,  &  ce 
font  des  marques  Jcdes  tefmoignages  de  la 
bonté  paternelle  de  Dieu  enuers  nous,&  tou- 
teslois  nous  ne  fçiurions  prendre  vne  miette 
de  pain, ni  vne  goutted'eau  qui  ne  foit  fouil- 
lée parla  pollution  qui  eft  en  nous. Il  faut  que 
ilfe  face  vne  dédicace  nouuelle  de  cescrea- 
tures  de  Dieu  ,  ou  l'vfage  en  fera  vilein  ,  3c 
plein  d'infeûion.  E:qui  en  eil caufe  ?  Noftre 
mal  ice.  Voila  donc  à  quoy  faincl  Paul  a  regar 
dé,difantqueles  créatures  de  Dieu  nous  (ont 
dédiées  en  bon  vfage&pur,quand  Dieu  nous 
recognoift  S:  aduoue  pour  fes  enfaiis,  8c  qu'il 
nous  conftitue  heritiersde  tous  les  biens  qu'il 
a  créez.  Or  fommes.nous  ainfi  dcdiet  ?auons 
nous  cognu  la  poureté  qui  eft  en  nous  pour 
demander  à  Dieu  qu'il  nous  purifie?D'autre- 
part  cognoiflons  aufsi  la  grâce  que  Dieu  nous 
monltre  quand  il  veut  que  l'vfage  de  tous  fes 
bénéfices  nous  foit  fainû.Defîa  c'eft  beaucoup 
que  nous  foyons  nourris  au  defpens  de  Dieu: 
mais  il  ne  fe  contente  point  décela,  il  nous 
amené  bien  plus  haut, c'eft  afçauoir,  quand  le 
boire  8c  le  manger  eft  fanûifié.  Comment?  A 
caufe  des  infirmitez de  noftre  nature.  Quand 
vn  homme  boit  &  mange, en  cela  voit-il  com- 
bien il  eft  fragile  :  car  il  faut  qu'il  prene  fub- 
ftance  d'vne  chofe  qui  eft  morte  &  infenfible. 
Le  pain  n'ha  point  de  vie ,  8c  toutesfois  c'eft 
vninftrument  que  Dieu  a  donné  pour  nous 
fortifier.  L'homme  donc  recognoift  en  cela 
que  c'eft  de  luy.  Or  cependant  nollre  Sei- 
gneur veut  qu'il  y  ait  ici  vn  tefmoignage  de 
noftre  adoption  ,&  que  non  feulement  nous 
ayons  cela  certifié  qu'il  ha  le  foin  de  noft,re 
corps, &  de  cefte  vie  caduque,  mais  qu'il  nous 
veut  conduire  plus  haut:&  qu'en  beuuant  &  en 
mangeant  nous  cognoifsions  qu'il  nous  eft 
Pere,&  qu'il  veille  fur  nous,&  qu'il  nous  veut 
côduirc  à  <oy,&  que  le  pain  nous  eft  côme  vne 
approbation  qu'il  nous  veut  eftre  Pere,&  que 
il  nous  aduoue  pour  fes  héritiers.  Voila  donc 
qu'emporte  en  fécond  lieu  ce  mot  de  fanéli- 
f cation.  Etfi  cela  eftoit  bien  entendu,  il  eft 
certain  que  les  mefchans&  gens  prophanes 
n'abuferoyent  point  ainfi  du  bien  de  Dieu, 
comme  ils  font  :  icnedi  pas  feulement  en  ce 
qu'ils  ne  rendent  pas  louange  à  Dieu  telle 
qu'il  Ja  mérite  ,  mais  qu'*ils  fe  desbordent  en 
toute  intempérance  &  brutalité.  Voila  défia 
vne  vilenie  par  trop  «norme  quand  ki  hom- 
mes fourreni  h  viande  ta  km  fac ,  &  quMs 

z.  iii. 


i8i 


SERMON     XXX. 


entonnent  le  vin,  &  que  cependant  ils  ne  re- 
gardentpoint  à  Dieu.qu'il  n'ell  point  queftiô 
de  dire ,  Beneit  foit  Ion  nom ,  c'eft  luy  qui 
nous  fubftantc.    Voila ,  di-ie ,  vne  brutalité 
trop  vileine  en  ceux  qui  viuent  ainfi  ,  &  les 
doit-on  aiioiren  exécration  comme  des  mon 
lires.  Mais  quand  les  hommes  fe  creueni  ,  & 
qu'ails  ne  tienent  nulle  mefure ,  que  les  vns 
boyuent ,  que  les  autres  fe  foulent  en  telle 
forte  qu'il  n'y  a  plus  nulle  raifon  ni  iiioma- 
nité  en  eux  ,  cognoiflent-ils  que  Dieua  or- 
donné les  viandes.afin  que  l'vfage  en  foit  fan 
ûifié?  Helas ,  il  s'en  faut  beaucoup  :  caries 
hommes  s'abbrutiflent  tellement  au  boire  Se 
au  manger ,  qu'ils  ne  fçauent  plus  que  c'eft 
d'eux  ne  de  Dieu  ,  ne  de  celle  îainfteté  dont 
parle  fainft  Paul.   Etde  faift ,  nous  voyons 
quelle  eft  la  couftume  ordinaire. Et  pourtant 
fe  faut-il  esbahir  fi  Dieu  nous  retranche  nos 
morceaux, veu  que  nous  abufons  ainfiUcs  bon 
nés  créatures  ?  On  fe  plaindra  qu'on  n'eft 
point  nourri  à  contentement. Voire,mais  que 
vn  chacun  s'«xaraine,&  qu'il  regarde  s'ilauoit 
tout  à  fouhait  &  en  abondance  comment  il 
en  vferoit.  Or  eft-il  ainiî ,  que  combien  que 
Dieu  en  tiene  beaucoup  en  bride  courte  ,  & 
qu'il  les  affame  à  demi  ,  toutesfois  il-,  ne  laif- 
fent  pasencores  de  regimber. Que  feroit-ce 
donc  s'ils  eftoyent  nourris  plus  délicatement? 
Ils  l'eroyent  incontinent  des  chcuaux  rcft.fs, 
il  ne  feroit  queftion  que  de  regimber  contre 
leurmaiftre  ,  ainfî  qu'il  eft  dit  au  cantique  de 
Moyfe  ,  Q_ii^vn  peuple  engraiffé  fera  comme 
des  cheuaux  qu'on  aura  long  temps  tenus  en 
l'eftable,  que  quand  on  s'en  vaudra  feruir,  on 
ne  les  pourra  douter  en  quelque  manière  que 
ce  foit. Ainfi  en  eft-il  des  hommes. Pour  ccfte 
caufe  Dieu  nous  fait  grande  grâce    quand 
nous n'auons  poiat  les  chofes  à  noftreappe- 
tit,puis  que  nous  ue  pouuons  licitement  vfer 
comme  il  veut  de  l'abondance  qu'il  nous  don- 
ne. Or  tant  ya  que  nousdeuons  bien  poifer 
ce  mot  (  comme  il  emporte  beaucoup  )  que 
Dieu  non  feulement  veut  qu'en  liberté  nous 
mangions  des  viandes  qu'il  a   créées  ,  mais 
qu'il  veut  qu'elles  nous  foyent  fanftifiees  ,  a- 
fin  qu'elles  nous  feruent  comme  d'aides  pour 
approcher  de  luy,&  nous  «onfenner  de  plus 
en  plus  en  la  confiance  que  nous  auons  de  la 
bonté  &  de  fon  amour  :  brief,  que  les  viandes 
feruent  au  falut  éternel  de  nos  âmes:  &  com- 
bien que  leur  propre  vfage  foif  de  maiiuenii 
les  corps  en  ce  monde, fi  eft-ce  que  Dieu  nous 
veut  conduire  plus  lom,  c'eft  que  nous  fovons 
pleinement  afteurez  de  l'amour  qu'il  nous 
porte  ,  &  qu'il  nous  tient  pour  fes  enfans  ,  & 
que  noftre  lalut  eft  confermé  par  cefie  nour- 
riture temporelle  qu'il  nous  donne  &-q  nous 
rectuons<le  luy. 'Venons  maintenant  à  ce  qu'il 
adioufte  pour  déclaration  de  ce  qu'il  auoit 
touché  CI  deflus.  Le  moyen  de  fanûificr  les 
viandes  quel,  eft-il/  La  parole  ùe  Dieu  S(  U 


prière  .ditfainû  Paul.  Il  n*trt  point  queftion 
ici  que  nous  les  fanâifions  de  noftre  cofté, 
mais  Dieu  qui  eft  la  fontaine  de  toute  lainûe- 
té  ha  ceft  otKce:ii  nous  a  dôné  fa  parole  pour 
dédier  les  viandes  à  noftre  vfage.Et  comment 
cela?Q_ueIle  eft  cefte  parole  dont  parle  fainft 
Paulfce  font  les  promeflès  dont  l'ay défia  fait 
mention.  Il  eit  dit  en  l'Efcriture ,  Q^e  Dieu 
n'a  point  créé  le  monde  pour  luy  ,  comme  il 
n'en  ha  nulle  necefsité ,  mais  c'eft  àcaufede 
nous.  Vray  eft  quefebonté  s'eltend  lufoues 
aux  beftes  ûuuages ,  iufques  auxafnes ,  auK' 
cheuaux  &  aux  chiens  ,  mais  tant  y  a  que  les. 
beftes  font  mefmes  créées  pour  l'homme.  En 
fomme  tout  fe  rapporte  là ,  que  Dieu  nous  a 
conftituez  feigneurs  &  maiftres  pour  iouir 
des  bonnes  créatures.  Or  cependant  il  nous 
faut  venir  à  lefus   Chrift ,  comme  défia  nous 
auons  dcclaré:car  chacun  de  nous  fe  trouuera 
indigne  de  manger  vn  morceau  depam  Et  de 
faiû.puis  que  nous  fouîmes  maudits, c'eft  bien 
raifon  que  Dieu  nous  bannifle  de  fon  royau- 
rae,&  que  nous  n'ayons  ne  part  ne  portion  à 
ce  qui  doit  eftre  propre  àfes  domeftiques: 
mais  quand  nous  venons  à  lefu'^Chrift.comme 
il  eft  appelé  héritier  du  monde,  afin  que  nous 
foyons  participans  des  biens  qn'il  a  receus, 
ceft  héritage  aufsi  eft  communeement  donné 
à  tous  fidèles  en  la  perfonne  d'Abrahri.Quâd 
donc  nous  auons  la  parole  de  Dieu, c'eft  la  li- 
berté qu'il  nous  donne  d'vf».'r des  biensqu'il 
acree2,&  qu'il  nous  monftre  que  c'tft  afin  que 
nous  tendions  à  luy, &  que  nous  fçachiôs  qu'il 
nous  eft  Père,  voila(di-ie)  la  parole  de  Dieu 
qui  nous  fanîlifîe  les  viandes.  Or  fi  ainfi  eft 
qu'il  nous  faille  auoir  la  parole  de  Dieu  pour 
feulement  boire  &  manger  ,  que  fera-ce  de  i» 
vie  celefte  qui  eft  beaucoup  plus  grande?  Si 
nous  faifons  comparaifon  de  la  nourriture  de 
nos  corps  auec  la  vie  fpirituelle  ,  il  y  a  aufsi 
longuediftance  entre  le  cielA  la  terre,  corne 
il  y  a  entre  ces  deux  chofes.Orfiainfieftque 
nous  ne  pouuons  eftre  nourris  quant  au  mon- 
de,que  la  parole  de  Dieu  n'aille  deuant,&  que 
elle  ne  foit  comme  vne  lampe  pour  monftrer 
queleft  le  bon  vfage  &  licite  desbiésde  Dieu, 
quand  nous  afpirerons  làhautàlavie  inunor- 
telle,que  fera-ce  ?  Ne  faut-il  pas  q  Dieu  nous 
fantVifie  en  la  foy  que  nous  avions  par  fa  pa- 
role? Et  fans  cela  que  pouuons-nous  imagi- 
ner finon  furaee ,  &  menfongc,  Si  tromperie? 
Et  pleuft  à  Dieu  que  ceci  faft  mieux  cogiiu 
qu'il  n'eft,&  qu'on  lemeditaft  corne  il  le  iiie- 
rite.Mais  quoy.'Combicn  en  voyons-nous  qui 
fe  foucienc  de  la  parole  de  Dieu  î  le  ne  di  pas 
que  ce  foitl'ordinaircnnais  fi  on  s'arrtfte  tat 
peu  que  ce  foit,  il  nous  femblc  que  c'eft  aflei 
d'auoir  cognu  en  paflant  qu'il  y  a  vn  Dieu: 
mais  qu'on  s'exerce  en  la  doftriue  de  TEu.igi 
le, qu'on  y  continue  tous  les  iours,  ho, il  lem- 
ble  que  cela  foit  inutile. Or  tât  y  a  que  S.Paul 
non  fans  cai^c  nous  monftre  que  toutes  tes 

promelTcs 


s  V  R   L  A   I.    A 

promefl*es  de  Dieu  >  fans  cela  ne  nous  pour- 
ront rien  profiter  à  lalut,  mais  que  le  tout 
nous  fera  conuerti  en  malediftion.Apprenôs 
donc  d'addrefler  là  toutes  nos  penfees,&  d'y 
appliquer  toutes  noselludes,afçauoirde  co- 
gnoiftre  la  bonne  volonté  de  Dieu  ,<Scd'y  e- 
flre  tellement  confermez  que  nous  n'atten- 
tions rien  au  contraue.raais  que  nous  tenions 
toufiours  cela  certain, que  Dieu  nous  conduit 
&  nousgouuerne.  Voila,  di-ie,  la  façon  &  le 
moyen  de  dédier  les  chofes  au  vray  vfage  des 
hommes.  Or  notons  cependant  qu'il  ne  pro- 
fitera point  d'auoir  la  Parole,  iînon  qu'elle 
foit  receuc  par  foy,  comme  il  eft  dit  e  n  l'epi 
flre  aux  Hebricu!c,qu'elle  ne  profite  rien  aux 
incrédules. Sainû  Paul  donc,en  difant  que  les 
viandes  nous  font  fancbifiees  par  la  parole  de 
Dieu.entend  qu'il  nous  faut  receuoir  cefle  pa 
role-la.£t  c'eit  ce  que  défia  il  adit.que  com- 
me il  a  trait  té  de  lacognoiflàncede  la  véri- 
té, difant  que  c'eft  là  la  vraye  foy,maintenlt 
il  déclare  quelle  eft  cefte  vérité,  lldit  (jt'il 
faut  ^utlU  fTocede  Je  Ditu,8c  que  nous  alliôs 
en  fon  el'cole.  Ici  no'  fommes  encores  mieux 
confermez  de  ce  que  nousauons  touché.c'eft 
que  la  foy  ne  doit  point  vaguer  ne  çà  ne  là, 
mais  qu'elle  doit  auoir  fonappuy  en  Dieu, ou 
autrement  elle  feroit  morte.  Il  eiï  vray  que 
les  Turcs  font  allez  obftmcz  en  leurs  refue- 
ries.  Nous  voyons  aufsi  comme  les  Papi- 
ftes  s'endurciffent ,  voire  font  du  tout  enia- 
gez  contre  Dieu,  &  obfcurciflent  toute  bon- 
ne dotlrine  ,  qu'ils  ont  conclud  &  refolu  de 
fe  tenir  à  ces  corruptions  de  leurs  ancefties. 
Maisquoy?  Cependant  y  a-il  nulle  fermeté 
en  euxfHelas  il  s'en  faut  beaucoup.  Voulons 
nous  donc  auoir  vne  foy  permanente  Se  con- 
fiante? Il  faut  qu'elle  prcne  fon  fondement 
en  Dieu  feui.Et  c'eft  ce  que  fainû  Paul  mon- 
ftre  ICI.  Or  fi  cela  eft  requis  aux  viandes  cor- 
ruptibles ,  que  fera-ccdu  principal?  Quand 
les  Papiftes  auront  des  patrons  &  des  aduo- 
cats  pour  aller  àDieu.ih  diront,  Ho, voila, il 
me  le  fembleainfî.  Voire  ,  mais  s'il  eft  que- 
ftion  feulement  de  manger  vn  morceau  de 
pain.l'Efcriture  nous  monftre  qu'il  nous  faut 
*uoir  la  parole  de  Dieu:&  fi  nous  ne  fommes 
certifiez  de  celuy  qui  nous  ledône,  q  ce  n'eft 
rien  ,  qu'il  n'y  a  que  pollution  en  nos  viâdes. 
Helas.'&  que  fcra-cedes  chofes  fi  precieufes, 
comme  de  l'honneur  de  Dieu?  L'oraifon  luy 
eft  vn  facrifice  fi  honorable:combien  donc  y 
deuons-nouseftre  attentifs?  Apres, quand  les 
Papiftes  fcruiront  Dieu  à  leur  guife,  ils  allé- 
gueront toufiours  leurs  bonnes  intentions. 
Mais  quoy?  s'ils  ne  peuuent  licitement  boire 
ne  manger  que  Dieu  ne  leur  ait  monftré  fa 
volonté,  faudra-il  qu'ils  entreprenent  des 
chofes  fi  hautes  &  excellentes,côme  de  chan 
ger  la  règle  de  viure ,  8c  de  faire  ceci  ou  cela 
quanta  la  viecelefte?  Voila  meCnesaux  Sa- 
cremens ,  toute  la  plus  grande  fainâeté  des 
Papiftes  eft  cefte  exécration  de  Meflè ,  &  ce 


T  I  M  O  T  H.  iSj 

blafpheme  diabolique. Et  fur  quoy  le  fondée 
ils  finon  qu'il  leur  fcinble  que  ccladoiuee- 
ftre  bon?  Voire,  mais  faut-il  à  la  fantafie  des 
homes  aller  facrifier  le  Fils  de  Dieu.'  Il  n'eft 
point  qucftioa  ici  de  tuer  vne  poule  ou  vn 
mouton  pour  en  manger,  il  n'eft  point  que- 
ftion  de  boire  vn  verre  d'eau ,  ou  de  tirer  vn 
verre  de  vin  d'»n  toneau,  mais  il  eft  queftion 
de  facrifier  lefus  Chrift ,  le  falur  éternel  dat 
poures  âmes. Les  Papiftes  ont  vfurpé  ceftc  aa 
dace-là.de  vouloir  facrifier  lefus  Chrift.coni 
me  ils  diront  que  leur  Mefle  eft  vn  faciificc 
en  lemifsion  des  péchez. £t  qui  leur  en  a  doa 
né  la  marque?  Où  eft  la  parole  de  Dieu?  Ils 
n'en  ont  point  vne  fyllabc  ,  il  n'y  a  que  leur 
folle  fantafie.  Helas.'&  quelle  arrogance  ett- 
ce  là?  Les  diables  d'enfer  pourroyent-ils  a- 
uoir  vne  plus  grande  liardieffe  pour  defpiter 
Dieu?  Et  ainfi  retenons  bien  que  le  principal 
que  Dieu  demande  de  nous,c'eft  cefte  mode- 
ftie  de  nous  laifler  gouuerner  par  fa  pure  pa- 
role :  que  s'il  eft  queftion  de  nous  tourner 
ne  çà  ne  là,  nous  ayons  toufiours  cela  deuant 
nos  yeux.  Dieu  nous  donne-il  liberté  de  fai- 
re ainfi?faifons-le  donc?  Nous  ledcfend-il? 
gardons  bien  de  pafler  outre.  Voila  comme 
noftre  vie  pourra  cltie  agréable  à  Dieu:mais< 
fans  vne  telle  iiifttuûion,  tout  fera  côfus, en- 
cores qu'il  y  ait  belle  apparence  deuant  les 
hommes.  Si  quelqu'vn  tafche  de  fcruir  àfotl 
père  &  à  fa  mete  ,  cela  eft  bien  vn  feruice  a- 
greabic  de  foy:mais  fi  vn  homme  ne  cognoift 
paint  qu'il  s'acquitte  de  fon  deuoir,  &que 
Dieu  l'a  obligé  à  père  &  à  mcre,  tout  le  ferui 
ce  qu'il  leur  fera,  n'eft  qu'abomination.  Vn 
h  jnime pourra  faire  fon  deuoir  enuers  fa  fem 
me, mais  s'il  n'eft  fondé  en  foy,&  qu'il  tafche 
de  complaire  à  Dieu,  fçachant  bien  qu'il  a  re 
quis  cela  de  luy, tout  fera  reictté.  En  fomme, 
nous  voyons  que  la  condition  des  hommes 
eft  mal-ncureufc,finon  d'autit  que  Dieu  leur 
fait  cefte  grâce  de  les  guider.  Mais  à  l'oppo- 
fitc,  quand  nous  fommes  efclairez  par  là  pa- 
role,nous  auéî  vn  bien  ineftiniable,  que  nous 
pouuons  franchement  marcher,  &  aller  çà  & 
là. Et  pouiquoy?Car  no'  faifons  ce  que  Dieu 
appiouue,  &  le  faifons  d'autant  qu'il  nous  eft 
permis  de  luy.  Voila  donc  quanràce  mot  de 
faroleJe  Dtf»,quemet  fainâ  Paul.  Or  il  ad- 
ioufte  quant  &  quant  U  priVrr.fuiuant  ce  que 
il  auoit  dit  de  l'aftion  de  grâces.  Et  c'eft  va 
mot  que  nous  deuons  bien  noter.  Car  nous 
en  voyons  beaucoup  qui  fe  vantent  d'auoir 
la  foy.mais  puis  après  ils  s'appuyét  &  fe  fon- 
dent en  euT-incfmes  ,  &  ne  fçauent  que  c'eft 
d'inuoquer  Dieu ,  ne  de  luy  rendre  la  louan- 
ge qui  luy  eft  deue.Sainû  Paul  donc  monftre 
que  la  foy  &  la  prière  font  chofes  infepaia» 
blés  :  côme  de  fait  il  eft  impofible  que  nous 
foyons  vrayement  perfuadez  que  Dieu  nous 
nourrit, que  nous  n'allions  à  luy  pour  luy  re- 

3uerir  qu'il  nous  donne  noftre  pain  quoti- 
ien.  Vn  homme  pourra-il  dire  qu'il  ait  foy 

z.iiii. 


,184 


SERMON     XXX. 


en  Dieu, quand  il  ne  fçait  que  c't  ft  de  l'inuo- 
quer?  Nous-nous  mocquonsdonc  en  ce  fai- 
famt,li  nous-nous  vantons  d'auoir  la  toy  cer- 
taine. Car  notons  que  la  foy  emporte  touf- 
ioursl'inuocationdunom  de  Dieu:  c'trtà  di 
re, quand  nous  femmes  enltignez  de  la  bonté 
de  Dieu, que  nous  auons  les  promeflesde  fon 
amour,  parlefquelles  il  nous  conuiede  venir 
à  luy  ,  qu'il  faut  que  nous  foyons  incitez  & 
efmeus  à  le  requérir  ,  &:auoirà  luy  tout  no- 
llre  refuge.Et  voila aufsi  quel  eft  le  vray  exa 
men  &  efpreuue  pour  monftrer  que  nous  a- 
uons  foy,  cVft que  nous  foyons  fohcitez  à 
prier  Dieu,  &  pour  recourir  à  luy,  &  luy  de- 
manderce  qu'il  voit  nous  eftrepropre.Ceux 
qui  font  eftonnez  en  eux-mefmes  ,  s'ils  ont 
faute  de  boire  ou  de  manger  ,  &  qu'ils  ne  re- 
courent pointa  Dieu,  qu'ilsfe  tienentlàcô- 
nieftupides,&  qu'ils  ne  cherchent  point  1ère 
medeen  fa  bonté  ,  ccux-la  mon  firent  qu'ils 
n'ont  iamais  goufté  fes  promefles,S:  qu'ils  ne 
fçauent  que  c'eft:  le  di  encores  qu'ils  en  oy- 
ent  parleijtant  y  a  qu'il  n'y  en  a  nul  vray  fen 
timent  ni  apprehenfion  viue  en  leurs  cœurs. 
Et  pourquoyfCar  la  prière  eftie  feul  tefmoi 
gnage  pour  monftrer  fi  nous  auons  foy  ou 
non. Voila  donc  ce  que  nous  anons  à  retenir. 
Au  re  fte,  pour  mieux  entendre  l'intention  de 
feinft  Paul ,  notons  que  dcuant  la  prière  il  a 
mis  la  parole  de  Dieu:  car  aufsi  ne  pouuons- 
no'auoir  nul  accès  pour  approcher  de  Dieu, 
finon  que  fa  parole  nous  y  conduife.Quifom 
tnes-nous?  Qi^and  ileft  queftiond'inuoquer 
Dieu  comme  noûre  Père  ,  (î  nous  n'auons  la 
bouche  ouuerte  par  le  congé  qu'il  nous  don- 
ne, ce  fera  vue  témérité  trop  grande  de  nous 
renir  prefenter  deuant  fa  maiefté.Ainfî  donc, 
tous  ceux  qui  veulent  prier  Dieu, il  faut  qu'ils 
foy  ent  enfcigneï  en  fa  parole.  Et  voila  pour- 
quoy  nous  di/bns  que  toutes  les  prières  des 
Papilles  ne  font  que  puantife  deuant  Dieu. 
Car  fi  on  demande  à  ces  poures  gens  quelle 
certitude  ils  ont  Je  la  volonté  de  Dieu, ils  ne 
fçauent  que  dire  .  finon  tout  au  rebours  de 
bien:&de  fait  ils  iront  à  l'auenture.  Retenôs 
donc  que  pour  eftre  bien  difpofeï  à  prier 
Dieu, il  faut  que  nous  ayons  inftruftion  de  fa 
parole:&non  feulement  pour  dire  que  nous 
auons  cognu  ie  ne  fçay  quoy  ,  mais  que  nous 
/oyons  bien  certifiez  que  nous  pouuons  ve- 
nir à  Dieu, d'autant  qu'il  nous  appelle  ,  &que 
nous  fommes  auf^  afleurez  qu'il  nousexau- 
cer.i.d'autant  qu'il  nous  l'a  promis. Voila  doc 
pourquoy  S.Paul  a  bien  côioint  ce;  deux  cho 
fcs  ,  &  mt  fines  qu'il  a  mis  la  parole  de  Dieu 
ep  premier  degré ,&  qu'il  aadioiirté  la  prière 
ci|)mme  pour  l'accelToire  ,  pource  qu'elle  en 
dépend.  La  foy  donc  eftcelle  qui  nous  con- 
duit à  prier  Dieu.  Au  rclte,  notons  que  fous 
ce  mot  de  l>ritr;,  hwQ.  Paul  a  aiifi  comprins 
l'aiflnn  degraces.  Carceluy  qui  demande  à 
Dieu  fon  pain  ordinaire  ,  il  faut  bien  qu'il  le 
j-emci-cie  qu.td  il  l'a  receu.Ec  fans  cela  quelle 


ingratitude  fera-ce  à  no'  d'auoir  cognu,  Voi 
ci  Dieu  qui  a  exaucé  ma  requefte,&  cependîc 
que  iele  laille  là.'Sidonc  nous  mettons  en  ou 
bli  la  grâce  de  Dieu  que  nous  aurons  obte- 
nue par  nos  requeftes.noftreoraifon  merite- 
elle  d'ellre  receue?  Nenni  :  car  c'eft  pleine- 
ment femocqiier  deDieu.Ainiî  donc, notons 
que  fainft  Paul  lous  ce  mot  de  fritre,  a  quant 
&  quant  coprins  l'aôion  de  grâces. Or  main- 
tenant adiouftons  ce  qui  a  efté  défia  touché, 
c'eft  que  fi  nous  ne  pouuons  prier  Dieu  pour 
luy  demander  noftre  pain  quotidien  ,  lufques 
à  ce  qu'il  nous  ait  inftruits  à  ce  faire  par  fa 
parole',  que  fera-ce  quand  nous  luy  viédrons 
demander  qu'il  foit  noftre  Sauueur,qu'il  nous 
retire  des  abylines  d'enfêr,qu'il  nous  pardon 
ne  nos  fautes  ,  qu'il  nous  défende  &  garen- 
tilTe  contre  Satan  ,&:  qu'il  nous  donne  vertu 
pour  refifter  à  toutes  tentations?  Ces  cho- 
fes  qui  concernent  le  falut  éternel  de  nos  a- 
mes.ne  font-elles  pas  beaucoup  plus  grandes 
que  le  boire  &  le  mager?  Il  eft  certain. Il  faut 
bien  donc  que  nous  ayons  efté  en  feignes  de 
Dieu  auparauaiit. Or  ceci  eft  bien  à  noter. Car 
quand  nous  venons  à  Dieu  en  luy  demandant 
que  fon  nom  foit  fanftifié  ,  voila  vne  chofc 
qui  furmonte  meûnes  le  falut  de  nos  aines. 
Or  fi  nous  nefjauons  pouiquoy  ,  fi  nous  n'a- 
uons nulle-certimde  que  la  volonté  de  Dita 
eft  telle, que  nous  n'ayons  iamais  goufté  la  do 
élrine  de  fon  Euangile,que  fera-ce?  Ne  voila 
point  vne  oraifon  vaine &friiiole?  Apres,  fî 
nous  demandons  î  Dieu  qu'il  nous  pardonne 
nos  ofFenfes ,  qu'il  nous  défende contie  tous 
les  aflàuts  de  Satan  ,  qu'il  nous  fortifie  par  tu 
vertu.afin  que  nous  bataillions  contre  toute» 
tentations,  fi  nous  requerôs  cela,  &  que  nous 
n'ayons  nulle  approbation  que  nous  deuions 
obtenir  noftre  demande  ,  mais  que  nous  val- 
lions  en  ignorance,rerons-nous  exaucez?  Or 
pour  iouir  de  la  grâce  de  Dieu,  comme  nous 
auons  dit ,  il  faut  que  nous  ayons  cefte  certi- 
tude que  i'ay  dite.  Ainfi  donc  ,vouIons-nous 
Ijien  prier  Dieu,  tellement  que  nos  requtftes 
luy  foyent  agréables ,  &  qu'elles  produifent 
leur  fruift  &  efteft?  apprenons  de  mieux  mé- 
diter les  promeflesde  Dieu  que  nous  n'auons 
fait  par  ci  deuant  ,  &nous  exercer  à  la  mé- 
moire Se  fouuenanced'icelles  ,  comme  nous 
auons  befoin  to*  les  iours  de  prier  Dieu  que 
il  ait  pitié  de  nous ,  veu  que  nous  fommes  fi 
miferables  de  trebufcher  à  chacune  minute 
de  temps. Et  fi  nous  fommes  bien  afleurez  de 
la  remiAiondenos  péchez, voila  qui  fera  que 
nous  aurons  la  bouche  ouuerte  pour  prier 
Dieu,5:  venir  priiiec  met  iî  luytfans  cela  nous 
fommes  forclos  de  le  pouuoir  inuoquer.  Car 
iufques  à  ce  que  nous  ayons  cognu  que  Dieu 
nous  appelle  à  foy,&  qu'il  no'  y  appelle  non 
point  en  crainte  ni  en  doute, mais  en  aflèuran 
ce, nous  ne  pourras  iamais  approcher  de  luy. 
Voila  ,  di-ie  ,  comme  nous  deuons  inceflam- 
ment  méditer  les  proraeflès  de  l'Efcritnçe 

/  famite. 


SVR  LA    I.    A   TIMO  TH. 


i8ç 


ftincte.  cVftde  ce  que  Dieu  déclare  «ju'il no' 
pardonne  nos  pecliez  toutes  tois  &  cjuanics 
que  nous  le  requérons  :  &  pour  ce  faire  qu'il 
nous  (ouftiédra  par  la  vertu  de  fon  S.  Efprit, 
qu'il  fera  noftre  bouslicr  ,  qu'il  aura  vn  tel 
foin  du  falut  de  nos  âmes  ,  qu'il  ne  foijfrira 
pas  que  Satâ  gagne  rien  fur  nous.  QuSdnous 
méditerons  ces  promefles-la  pourles  faire  va 
loir,en  telle  forte  que  i'ay  dit,noiis  fentirons 
que  ce  n^eft  poît  en  vain  que  noftre  Seigneur 
nous  les  a  donnees,nous  fentirons  fi  bonté  & 
l'amour  qu'il  nous  porte  ,  8t  nous  mooftrera; 
comme  il  veutauoir  pitié  de  nous  comme  de 
fes  enfans,  voire  quand  nous  le  recognoillrôs 
pour  Père  ,  fouffrans  d'eftre  conduits  par  fa 
parole,  &d'eftre  enfeignez  en  icelle,  comme 
c'efl  le  principal  exercice  auquel  li  nous  veut 
appliquer  coûte  noftre  vie. 


QV 


O  R.  nouî-nous  proûernerSsdeuant  la  iâ- 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognotflànce  de 
nos  fautes ,  le  prians  qu'il  luy  pJaife  nous  les 
pardonner  par  ia  bonté  infinie.  £c  combien 
que  par  noftre  ingratitude  nous  ayons  méri- 
té d'eftre  priitez  de  tous  les  biens  qu'il  élar- 
git ici  ba^  aux  hommes, &:  par  plus  forte  rai- 
fon  de  ceft  héritage  celeftc  ,  que  neantmoint 
il  ne  lailTe  pas  de  nous  en  faire  participans,âf 
qu'il  nousconfernie  de  plus  en  plusenl'efpe 
rance  de  la  vie  immortelle  ,  iufques  à  ce  qtie 
nous  ayant  retirez  de  ce  monde,ilnous  intro 
duifeencefte  ioye  permanente  qu'il  nous  3 
appreftee  au  ciel  pour  viure  à  iamais  ,  &  re-« 
gner  auec  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Quf 
non  feulement  il  nous  face  cefte  grâce  ,  mai» 
au&i  à  tous  peuples  Se  nations  de  la  terre,&Ci. 


LE 


ATRIEME     SERMON     SVR 

Q^V  ATRIEME     CHAPITRE. 

6  Si  tu  propojès  ces  chojes  aux  frères  y  tu  feras  bon  MhiJIre  de  Ic^ 
fis  Chrifl,  nourri  es  paroles  de  foy  (f  de  bonne  doSirme  <^etu  as 
enfuyuie. 

7  M  ais  reictte  le  s  faites  inut'des,  Q'fèmhlahks  à  celles  des  yieit 
les:  (y  exerce-  toy  en  la  crainte  de  Dieu. 


Ous  fçaiiôs  que  la  pius  part 
de;  homes  fe  lafle  bien  toft 
de  ce  qui  livy  feroir  bié  pro 
fîuible.&  prend  pluftollplai 
-ir  à  chofes-  frmoles  &  inu- 
tiles: &  en  cela  monftrons- 
nouv  combien  nous  foraines 


fert  fclon  nnfîrmitéftumaine,toatesfoisiI« 
eflé  exalté  en  gloire ,  afin  que  nous  foyon» 
attirez  auec  luy.  Voila  donc  vne  chofe  à  la- 
quelle on  fe  doit  bien  appliquer,&  qiiad  nous 
n'aurons  autre  eftude  tout  le  temps  de  no- 
ftre vie, ce  fera  beaucoup  profité  quand  nous 
cognoiftrôs  qiie  le  Fris  de  Di'.-u  eft  ici  de/ce» 


deflituez  de  bon  iugement.Or  cependant  ce-    du  j  nous,  qu'il  a  accompli  toutes  chofes  qui 


Itiy  qui  doit  enfeigner.fe  fafche  quâd  il  voit 
qu'on  ne  prend  nul  appétit  à  fa  doûrine  fi 
elle  eftbône:  &  cela  quelque  fois  induit  ceux 
qui  ont  la  charge  d'anoncer  l'Euangile ,  à 
s'addonnet  à  vne  façon  eftrîge  laquelle  n'é- 
difie point.  Pour  cefte  caufe  fainft  Paul  dit 
ki  à  Timothee,  combien  que  les  homes  fty- 
ent  chatouilleux  des  aureilles ,  &  qu'ils  vou- 
droyent  qu'on  leur  côtaft  tous  les  iours  quel 
que  ncuueauté  ,  neantrooins  queceluy  qui  a 
TûfSce  d'enfeigner  ne  doit  point  auoir  ef- 
gard  ?.  cela,  pour  côpiaire  aux  appetis  fols  & 
defordonnez,  mais  qu'il  doit  fuiure  fon  train 
pour  inftruiie  fidelemet  ceux  qui  luy  fontcô 
mis  en  charge  ,  &  là  deflus  doit  iuger  ce  qui 
eft  bon  &  propre  pour  toufiours  édifier  les 
hommes  en  foy  &  en  l'obeiflânoe  de  Dieu. 
Nou  auons  ouy  par  ci  deiiant  cequefâinft 
Paul  difoit  à  Timothee  pour  luy  monftrer 
quelle  eft  la  fomme  de  la  doûrine  de  l'Eiian- 
gjle.ce  grand  feciet  &  admirable  ,  que  Dieu 
s'eft  déclaré  ici  en  chair  ,  &  que  nous  auons 


eftoyét  reqiiifes  à  noftre  falut, q\i'en  luy  nous 
auons  plénitude  de  tous  bien^,afin  d'eftre  par 
ticipans  de  fa  gloire  immortelle.  Que  nous 
eftendios  tous  nos  fens  &  efprits  haut  &  baî,. 
&de  long&  delarge,il  eft  certain  que  la  ha* 
telle  d'vn  tel  myfterefurmonte  tout:&  aufs» 
c'eft  là  où  il  nous  faut  continuer  ,  c'eft  là  où' 
on  fe  doit  employer  :  Se  cependant  fi  eft-ce 
que  les  hommes  appetent  toufîours  quelqiies 
nouueautez.  Or  iî  faut-il  qu'vn  prefcncur 
quand  il  fe  voudra  acquitter  de  fon  deuoir.nc 
foit  point  comme  vn  rofciu  branlât  pour  gr» 
tifier  à  telles  fantafies,  mais  qu'il  cherche  d'e 
dilier.  Etainfidôc  non  fan',  caufc  fainft  Pauli 
adioufte,  Que  Timothee  propofi  Ui  chirf<  s  dnnt 
ita  parlccomme  s'il  difoit,  Ù  eft  vray  que  les 
homes  félon  qu'ils  font  voLlges.voiidroyent 
blé  qu'on  leur  apportaft  quelques  chofes  plai 
fautes,  8;  leur  femble  que  s'ils  ont  ouy  vne 
fois  que  lefus  Chrift  leur  eft  venu  pour  Sau- 
ueur.que  c'eft  afl"e7.,&  que  cela  n'êft  point  t,ît 
difficile  qu'il  le  faille  réitérer  :  mais  que  tu 


fenti  fa  vertu  celeftc:&côbien  qu'il  ait  fouf-    n'ayes  point  efgard  à  ces  chofes. Nous  voyôs 

Au 


i8tf 


SERMON    XXXI. 


donc  en  {ommt  <}uelle  eft  rincencion  de  S. 
Paul.  £t  cependanc  notons  qu'ici  non  feule- 
ment il  monflre  b  leçon  aux  Palpeurs  en  la 
personne  de  Timochee ,  mais  aufsi  à  tout  le 
peuple  Chreilien.  Il  eft  vray  qu'en  premier 
lieu  nous  Tommes  ici  admoneftez  de  la  rè- 
gle que  nous  deuons  tenir ,  c'eft  de  n'eftre 
point  tranfporiez  félon  les  fols  appetis  de 
ceux  qui  demandent  qu'on  les  paifle  de  beau- 
coup de  curiofitez  friuoles  ,  mais  qu'il  nous 
faut  tenir  à  ce  qui  eu  ferme,  &  qui  peut  bien 
édifier:  &  cependant  lî  les  homes  defdaignét 
la  doârine  ,  qu'ih  en  foyent  foulez  ,  &  que 
nous  voyont  qu'il  y  ait  comme  vn  degaft  ,ne 
laiil'ons  pas  pourtant  de  touùours  inliller  fur 
ce  qui  eft  vcilc,  comme  nous  ne  pouuôs  auoir 
ks  aureilles  trop  batues  de  ce  qui  eR  le  prin- 
cipal de  noftrc  falut ,  &  en  quoy  tout  noftre 
bien  côlifte.  Voila  donc  pour  vn  item. Mais  ce 
pédant  (i  faut-il  que  tous  en  gênerai  cognoif 
Cent  ce  qu'ils  doiuent  defîrerrc'eft  qu'en  pre- 
mier lieu  ils  ne  foyent  point  chatouillez  de 
vaines  curiofîtez  &  inutiles,comme  de  nature 
nous  y  fommes  par  trop  enclins:&  puis  en  le 
cond  lieu,  que  nous  gardiôs  bien  de  nous  laf- 
fer  de  ce  qui  nous  eft  bon  8c  profitable  pour 
noftre  falut.Orcôme  beaucoup  de  prefcheurs 
d'eux-mefmes  font  par  trop  addônez  à  ambi 
tion,&  pour  trouuer  grâce  Se  faueur  cherchét 
feulement  ce  qui  peut  plaire.aufsi  d'autre  co- 
fté  le  peuple  eft  caufe  de  faire  décimer  du  bô 
chemin  les  prefcheurs.Et  pourquoy?car('c5- 
me  dit  S. Pierreries  hommes  ont  les  aureiller 
frétillantes, &  veulent  eftre  rcpeus  de  contes 
plaiCins,&côme  de  farces  ou  fables, amfi  que 
S.Paul  les  appelle  ici.D'autant  que  les  hom- 
mes font  ainli  couoiteux  comme  des  femmes 
grolTès  qui  auront  leurs  appetis  desbordez;& 
bié.voila  qui  eft  caufe  que  d'aucûs  prefcheurs 
s'abbaftardi(rent,&  fe  defguifent,&  transfigu 
rent  ladoôrinede  Dieu  ,  qui  eft  comme  l'a- 
neantir.Et  ainfi  apprenons^commei'aydelîa 
ioHché)que  S.Paul  en  la  perfonnede  Timo- 
theeadmoncfte  ici  to' fidèles  ^e  n'eftre  poû 
jinfî  addônez  i  des  folies  plaifintes.Et  quoy 
'   d5c?qu'il';  rcgardét  ce  qui  leur  pourra  mieux 
profitcr.Et  quoy?que  nous  foyonsenfeignez 
de  la4>onté  infinie  de  noftre  Dieu  comme  el 
le  nous  a  efté  monftree  en  noftre  Seigneur  le 
fus  Chrift.que  nous  foyons  redarguez  de  nos 
vices.  Il  n'eft  point  dodt  queftion  quâd  nous 
Tiendrons  ouir  la  parole  de  Dieu,  de  vouloir 
qu'on  nous  parle  de  chofes  plaifanies,  &  que 
nous  fuyons  côme  repeus  de  vent,  pour  dire, 
l'.iy  apprins  ceci  de  nouueau  ,  &  i'en  fçauray 
deuifer:&  puis  après  que  to'  les  iours  ce  foit 
i  recommencer,  que  nous  ne  demandions  fi- 
non  qu'on  nous  conte  ceci  &  cela  ,  &  quand 
nous  en  aurons  eu  les  aureilles  bien  batues, 
nous  ne  fçaurôs  que  tout  cela  vaut,ni  à  quoy 
il  téd:car  il  n'y  aura  nul  profit. Gardôs-nous 
bien  donc  d'appetcr  telles  curiofitez  quand 
nous  Jefiroos  d'cftre  cnfeignez  par  la  parole 


de  Oieu:car  c'eft  la  prophaner  du  tout.eom- 
me  il  eft  dit  en  l'autre  partage,  Toute  l'Efcri  t.Ti'w». 
tureeft  vtile.Enquoy  fainû  Paul  môftre  que  i-d.i<. 
Dieu  n'a  point  voulu  que  fonEfcriture  tuft 
appliquée  pour  donner  palTe-téps  aux  hom- 
mes, &  pour  les  faire  rire  ,  ou  bien  pour  leur 
dôner  matière  d'en  fçauoir  babiller:  nô,non, 
mais  Dieu  a  regardé  â  ce  qui  nouseftoit  bon. 
Ainfi  donc  appliquons  l'Efcriture  fainde  à 
tel  vfage,  car  autrement  nous  ferons  coulpa- 
blcs  de  facrilege,comme  ayans  pollué  ce  que 
Dieu  auoit  dedié  àvn  vfaje  meilleur,  c'eft  à 
noftre  £tlut,commedita  efté.  Ainfi  donc  vou 
lons-nous  que  ceux  qui  ont  la  charge  de  no' 
enleigneriayent  la  bouche  ouuerte,&  foyent 
difpofcz  inous/nonftrer  le  chemin  de  lalut? 
De  noftre  cotténe  les  induifons  point  à  mal, 
&  ne  foyons  point  caufe  qu'ils  transfigurent 
la  doûrine de  Dieu.Ec  cément  cela?que  nous 
ne  foyons  point  addonnez  à  des  fols  appetis 
pour  fauter  en  l'air,  mais  que  nous  cherchiôs 
d'eftre  édifiez.  Et  la  façon  eft  telle  que  l'ay 
dite.qued'vnepart  nous  foyons  condamnez 
en  nos  vices,  &  que  nous  lentions  le  iogemêt 
de  Dieu,&  l'ayant  apprchcndc,&  cognu  corn 
bien  la  vengeaceeft  horrible  fur  les  obftincz 
&  rebelles  ,  que  nous  apprenions  de  gémir  8c 
eftre  côfus  en  nos  perfunnes  :  &  là  deflus  que 
nous  appréhendions  cefte  bonté  ineftimable 
qui  nous  a  efté  monftree  en  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift,eeftegrace infinie  qui  n ous a  efté 
faite  par  fon  moyen,  qu'eftas  là  fondez  nous 
inuoquions  Dieu,nous attendions  le  iour  au- 
quel noftre  falut  nous  fera  reuel£,&  que  nous 
pafsions  parmi  les  côbats  &  les  miferesde  ce 
monde  ,  eftans  armez  de  patience  pour  obéir 
à  la  bône  volonté  de  noftre  Dieu,nous  lânfH 
fians  à  fon  feruice.  Voila(di-ie)ce  qu'il  nous 
faut  chercher.Et  au  refte,s'il  no"  femble  que 
nous  ayons  défia  apprins  cefte  doârine  ,  Se 
qu'elle  nous  foit  alft?  cognue  8c  familiere.ne 
nous  abufons  point  en  cela.Carce  n'eft  point 
aflèz  que  nous  ayons  entenducequi  eft  vray, 
il  faut  qu'il  no°  foit  remis  au  deuât,  car  nous 
auons  courte  mémoire.  Et  de /aie,  quand  la 
bonne  doôrine  Se  vtile  nous  fafche  comme  fi 
elle  eftoit  fuperflue,entrons  en  examen  pour 
eognoiftre ,  Or  ça  ,  as-tu  inuoqué  ton  Dieu 
d'vn  tel  zèle  que  tu  dois&  en  telle  folicitude? 
Qu|d  nous  fentons  que  nous  fommes  froids 
&  nonchalâs  à  prier  Dieu, il  faut  coclure  que 
nous  auons  donc  mal  profité  en  la  foy.Car  lî 
nous  cognoifsions  i.i  bonté  de  Dieu, il  eftcer 
tam  que  nous  ferions  enflamez,voire  du  tout 
rauis  à  icelle  :/i  nous  cognoifsions,  di-ie,  les 
threfors  qui  font  en  lefus  Chrift,ne  feroit-ce 
pas  pour  nous  faire  mefprifer  tout  le  monde, 
afin  de  tédre  à  luy  &  y  alpirerfll  eft  bien  cer 
tain.Or  maintenant  à  grand*  peine  pouuons- 
nous  ouurir  deux  ou  trois  fois  le  iour  la  bou- 
che pour  prier  Dieu  en  vn  mot  :il  y  a  rne  laf« 
cheté  fi  grande  que  c'eft  pitié.  En  cela  voit- 
on  que  ladoârinede  foy  n'eft  pas  imprimée 

enngt 


SVRLAI.   ATIMOTH. 


.87 


en  nos  coeurs  comme  il  l'eroit  rtijuis.Ce  nVft 
pas  donc  chofç  fuperflue  quand  on  nouç  met 
tra  au  dcuant  ce  que  nous  auons  défia  enten- 
du :  car  nous  n'en  pouuonî  trop  fçauoir ,  & 
quand  nous  aurons  examiné  noftre  vie,&  que 
no'  apperceuerô^  qu'en  tout  &  par  tout  nous 
Tommes  defaillans  ,  nous  cognoiftrons  que 
nous  auons  trefmal  retenu  ce  qu'on  nous  a- 
uoit  monftré,&  que  nous  auons  bcfoin  qu'on 
nous  rolicite,&  que  la  mémoire  nous  l'oit  re- 
frefchie.  Voila  comme  nous  ne  ferons  iamais 
las  d'efcouter  ce  qui  nous  eft  bon  pour  noftie 
filiit,  encores  que  foir&  matin  cela  nous  l'oit 
reiteré,&  nous  cognoiArôs  que  l'vfage  nous 
en  eit  toujours  propre.  Voila  donc  ce  que 
nous  auons  à  retenir  en  ce  paflàge.Or  quand 
le  peuple  feroit  addonné  à  telles  vaniiez  ,  fi 
fàut-il  neantmoiiis  que  les  Minières  deia 
parole  de  Dieu  tienét  bon,  &  qi^Jilt  ne  fe  dé- 
tournent pas  i  tous  vents,&  qu'ils  ne  tafciict 
point  de  gratifier  aux  hommes  :  qu'ils  ne  Us 
flattent  pas  ,  maisqu'ili  fe  contentent  de  ce 
qui  eft  ici  dit ,  d'ellre  bons  Miniftres  de  Ic- 
fus  Chrift.  Voila  donc  à  quoy  il  nous  faut  re 
garder  (î  nous  voulons  prattiquer  ce  que  S. 
Paul  nous  commande,  c'eft  que  nous  fermiôs 
les  yeui  quant  aux  iugemens  humains,  Se  que 
il  nous  futKfe  que  le  Maiftre  qui  nous  a  mis 
cnceuure,nous  approuue.Car  celuy  qui  vou- 
dra élire  fauorifé  des  hommes ,  il  cA  certain 
qu'il  ne  Fera  que  Tarder  la  parole  de  Oien. 
r.Cof.i,  Comme  fainâ  Paul  aufsi  aux  Corinthiens, 
J.17.  parlant  de  ceux  qui  veulent  ainfi  gratifier,  & 
qui  délirent  qii-'on-leur  applaudiue,  il  les  ac- 
compare  â  des  maquignons  qui  fardent  les 
marchandifes  ,  &  qui  Tes  corrompent  en  les 
derguilânt.  Voila  c6me  la  parole  de  Dieu  e/l 
obfcurcie,  qu'elle  n'a  point  fa  pureté  nayfue 
comme  elledoit,quand  les  homes  regardent, 
Ho,ceci  fera  trouué  bon  ,  vpila  comme  i'ac- 
ouerray  faueur,  voila  comme  on  dira  que  ie 
luis  fçauanttl'autre  fefera  à  croire.Ie  fuis  vn 
beau  parlier:comme  beaucoup  cherchent  tel 
les  vaines  louanges. £t  pleull  à  Dieu  que  tous 
«eux  qui  doiuent  monter  en  chaire, fuflent 
purs  comme  il  feroit  bien  requis  de  ce  vice- 
ci,&  que  nous  eufsions  noftre  principal  con- 
tentement de  feruira  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift:  &  côme  c'eft  à  luy  qu'il  nous  faut  ren 
dre  conte.comme  c'eft  luy  qui  noys  a  confti- 
tiiez  à  faire  ceft  office ,  qu'auûi  il  nous  fuffit 
qu'il  nous  app.rouuaft ,  &  que  noftre  fcruice 
luy  fuft  agréable. Or  combien  qu'on  en  voye 
beaucoup  ,  &  plus  qu'il  ne  feroit  à  fouhaiter, 
qui  font  bien  aifes  quâd  onleurapplaudit,& 
au'ils  ont  lebruit.l'vnd'eftre  vndofteurbien 
lubtil,  l'autre  d'auoir  vne  belle  lâgue  &  bien 
faconde,  &b;en  friande  , l'autre  «Tauoir  vne 
grande  dextérité  pour  fçauoir  déduire  &  ce- 
ci &  cela,  que  neantmoins  nous  apprenions 
de  regarder  à  noftie  Seigneur  lefus  Chrift 
au  lieu  de  telles  ambitions.  Et  cependant  no 
tons  que  ce  it'eft  point  ùas  caufe  que  ûùnû 


Paula  ainfi  parlé  â  Timothee.  Il  eft  vray  que 
Timoihee  de  fa  part  n'auoit  pas  Q  grand  be- 
foind'cftre  exhorté  à  ceci  .'car  nous  fçauons 
letefmoignagequiluy  eft  rendu  en  d'autres 
lieuximais  pluftoft  en  fa  perfonne  fainâ  Paot 
a  ici  voulu  ijionftrer  à  tous  Paftcurs  quel  eft 
leur  office. Et  cependant  il  nous  faut  aufsi  re 
tenir  que  ctftc  epiftre  eftoit  commune  à  tout 
le  peuple:  8c  d'autant  que  beaucoup  eftoyent 
par  trop  délicats,  &  qu'ils  eullènt  bien  appe.» 
té  que  toufiours  on  leur  euft  propofé  doâri- 
ne  nouuelle,  fainâ  Paul  les  a  ici  retenus  en 
bride.  Or  tât  y  a  que  fi  eft-ce  que  fainû  Paul 
parlant  à  vn  home  qui  eftoit  d'vne  telle  per- 
feûion  &  fi  vertueux, non  fans  caufe  luy  a  dé- 
claré qu'il  fe  deuoit-  contenter  d'çftre  bon  Se 
fidèle  feruiteur  de  lefus  Chrift:comme  s'il  di 
fottique  tous  ceux  qui  ont  la  charge  depref- 
cher  foyét  admoneftez  de  fe  recueillir  à  eux» 
Se  de  n'auoir  autre  ccnfideration  que  de  plat 
re  au  Maiftre  auquel  ils  doiuent  feruir.Car  il 
n'y  a  rien  plus  aifc  que  d'eftre  tranfporteefi 
to/l  que  nous  tafchons  de  coptaife  aux  hom- 
mes mous  fbmmes  comme  efuanouis^u*il  n'y 
a  plus  de  fimplicité  en  la  do^rine  ,  tsais  elle 
fera  du  toutbaftarde  ,  comme  aufsi  les  hom- 
mes font  tous  les  iours  des  changemens  aou- 
usaux.Ainfi.puis  que  âinâ  Paul  parlant  àTî 
mothee  luy  a  déclaré  qu'il  faloit  qu'il  cher- 
chaft  feulement  d'eftre  bon  &  loyal  feruiteur 
à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  notons  que 
iamais  nous  ne  pourrons  porter  la  parole  de 
Dieu  comme  nous  dcuons  pour  édifier  l'E- 
glife  ,  finon  que  nous  ayons  les  yeux  ferme» 
quant  aux  hommes ,  &  que  nous  ne  foyons 
point  menez  de  quelque  cupidité  d'côre  en  e— 
ftime  ,  &  qn'on  nous  loiie  ,  &  qu'on  prifc  00 
noftre  grand  efprit.ou  noftre  fçauoir,oo  no- 
ftre babil  :  qu'il  taut  que  nous  ayons  oublié 
tout  cela  fi  nous  voulons  édifier  l'Eglife  de 
Dieu,  &  que  nous  deCriôs  feulement  de  dohs 
acquitter  en  forte  que  le  Maiftre  qui  nous  a 
enuoyez,  fe  contente  de  noftre  labeur  &  de 
noftre  feruice.  Or  au  refte  fainft  Paul  adiou- 
fte.T»  as  tfté  nourri  en  la  foy  ,  Cr-emla  bonae  J» 
llrine{dit-il)&'  Pas  fm'uitmoojlrt  donc  <ju'aim 
p  eft.  Ici  fain£l  Paul  pour  mieux  confermer 
fon  propos  &  l'exhortation  qu'il  auoif  mife, 
dit  i  Timothee  que  pat  ce  moyen  ri  approu» 
oera  par  efFeft  qu'il  a  efté  bien  nourri  en  h  pi» 
redoflrine  de  l'Eiiargile.  11  eft  vray  que  le 
mot  dôt  il  vfe,  pourroit  eftre  prins  aufsi  pour 
l>l!:i*rrjj/ài»t:niais  ponrce  qa'il  n'y  a  q  ce  mot,, 
le  fens  naturel  eft  celuy  que  l'ay  i  ceitéiafça- 
uoirqiieTimotheequîd  ilinfiftera  fiir  cequt 
peut  édifier  les  enfans  de  Dieu  ,  &  les  faire 
croirtre  de  plus  en  plus  en  foy  &  fainôeté  de 
vie,que  par  cela  il  monftrera  qu'il  a  efté  nour 
ri  en  la  foy:corame  s'il  difoit,  que  Timothee 
a  efté  enfeigné  dés  fon  enfance  purement  ca 
la  vraye  religion  :  ainfi  qu'il  en  parlé  en  la 
féconde  epiftre ,  qu'il  auoit  e\i  &  fa  mère  ,  &  *•  T/W» 
fa  grand'  mère  qui  eftoyent  femmes  fidèles,  i><<.4. 
•  A-  ii. 


i88 


SERMON     XXXI. 


Sjqiie  Tans  auoir  autre  mai  fi  re  d'efchole  ne 
dottcur.que  mefmes  en  la  raaifon  dés  fon  en- 
fance il  auoit  cognu  quec'eftoitdela  droite 
vcritc.  Suyiant  cela  nuinten.mc  il  luy  dit, 
Que  tiitnonjlres  que  tu,  as  eftcifxrri  en  lafiy  O" 
eiiU  bonne  Aoclrine.  Or  ici  nous  voyons  ijuM 
cft  requis  que-celuy  qui  doifconduire  les  au- 
tres,de  longue  main  ait  efté  bienduit  &bien 
Tormc.Vray  eft  que  Dieu  pourra  bien  renou- 
ueller  les  hommcs:mais  tant  y  aquec'eftvne 
chofe  bien  vtile  quand  il  fe  peut  faire  que  ce- 
luy  qui  eft  appelé  pour  enfeigner ,  de  tout 
temps  ait  fceuque  c'eit  de  la  crainte  de  Dieu, 
&  qu'il  s'y  foit  exercé.  11  eft  vray  que  de  no- 
ftre  temp-  il  a  bié  falu  que  Dieu  ait  retiré  des 
abyfmes  d'incrédulité  ceux  qu'il  a  employez 
pour  mettre  en  auant  la  pure  doctrine  del'E- 
uangile:iTuis  tint  y  a  encores  qu'il  leur  auoit 
lailîé  quelque  Icmencede  religion. Il  eft  vray 
qu'ils  eftoyent  ignorans,  qu'ils  eftoyent  com 
me  poures  beftes  efgarees  ainfï  que  le  refte du 
môde,&:s'ils  fuffent  demeurez  enceft  eftat.ils 
ekoyent  plongez  en  perdition:  mais  encores 
Dieu  lesj  refcruez,&  leura  laifle quelque  pe 
tite  femence.Tant  y  a  que  ce  que  dit  ici  (ainft 
Paul.n'cft  pas  fans  caufe ,  qu'il  eft  befoin  que 
celuyqui  doiteftre  conduiîeurd'vn  peuple  & 
du  troupeau,  ait  de  long  temps  efté  nourri  en 
la  crainte  de  Dieu  ,  &  en  la  pure  doftrine  de 
foy.Et  notamment  fainft  Paul  met  ici  ¥oy  O" 
btnne  doSlrine  ,  comme  chofcs  non  feulement 
infeparables.mais  qui  tédent  à  vne  mefme  fin. 
Car  comme  nous  verrons  tantoft  plus  à  plein, 
>  ces  queftions  inutiles  ont  quelque  apparence 
<le  doftrine ,  &  pour  cefte  caufe  elles  feront 
plaifantes:  &  quand  on  mettra  en  auant  quel- 
que fubtilité  bien  aiguë, les  aureilles  fedreflè 
ront,  &  chacun  délirera  de  comprendre  tout 
ce  qui  fera  dit:  mais  cependant  ce  n'eft  rien  q 
fumée.  Et  pourquoy  ?  Car  il  n'y  a  que  ce  feul 
fondement  de  foy  fur  lequel  ondott  baftir:3f 
c'eft  ce  qui  eft  ici  nommé  Ronne  doc}rine,c'c(i 
adiré  vtile.Et  ainfî  donc  nous  voyons  que  S. 
Paul ,  quand  il  parle  de  la  foy  &  de  la  bonne 
doûrine  ,  veut  monftrer  que  iî  nous  cognoif- 
fions  que  c'eftde  la  grâce  de  Dieu  pour  nous 
y  appuyer,  &  poiir  mettre  là  toute  la  confian- 
ce de  noftre  faktt,&  fi  nous  fçauions  que  c'eft 
de  luy  obéir,  qu'alors  nous  ferions  enfeignez 
comme  il  faut,&  que  fans  cela  nous  pourrions 
auoir  toutes  les  fpeculations  du  monde, il  n'y 
aura  que  vanité  &menfonge.  Et  ainfî  notorrs 
bien  que  tous  ceux  qui  auront  efté  enfcignfz 
pourauoir  quelque  fermeté  en  eux,  tafcherot 
aufsi  d'attirer  leurs  prochains  &  les  rendre 
conformes  à  cefte  rcgie-la:  au  contraire, mus 
ceux  qui  veulent  plaire  au  monde  ,  &  qui  de- 
mandent qu'on  leur  applaiidiflV  ,  mDuftrent 
bien  qu'ils  ont  vn  cftoinacli  creux  &:  viiidc  ,  & 
qu'ils  ne  trouuent  là  nulle  fubftance.&Tqne  ia- 
mais  n'ont  efté  nourris  en  la  parole  de  Dieu. 
Comme  prenons  Je  car  qu'il  y  ait  vne  nourri- 
ce qui  foit  vne  babii]arde,&  vne  yurongnefle: 


&  bien,  elle  pourra  caqueter  beaucoup  ,  elle 
pourra  faire  des  mines,qu'il  femblera  qu'elle 
foit  la  plus  fongneufe  du  mode  après  fon  en- 
fant.Mais  quoyrfi  eft-ce  que  c'eft  vne  yuron- 
gneffe  pleine  d'intempérance  &  de  babil ,  & 
qu'au  lieu  de  dormir  de  nuict.elle  fera  addon- 
nee  à  pail!arder,tellemét  qu'elle  n'aura  point 
de  laift,&  le  poure  enfant  ne  fera  point  nour- 
ri. Au  contraire,  celle  qui  trauaillera  volon- 
tiers,&:  cependant  prendra  nourriture  Se  fub- 
ftance  auec  fon  repos  ordinaire  ,  elle  pourra 
aufsi  nourrir  fon  enfant .  Ainfî  en  eft-il  de 
ceux  qui  doyuent  anoncer  la  parole  de  Dieu. 
S'ils  ont  beaucoup  de  babil,]io,il  fcmblc  qu'ils 
foyent  grans  dofteurs,  &  que  rien  ne  leur-  ef- 
cbappe:&;' quand  ils  cauferont  àplaifir,chacun 
incontinent  drefle  le-  aureilles  ,  &  s'esbahit- 
on,mefmes  on  s'efgayeen  cela,  &fcmble  que 
on  ait  profit^eaucoup  quad  on  aura  efté  ab- 
bruuéde  chofes  friuoles  par  l'efpace  d'vne 
heure,  il  femblc  qifon  en  creue  :  &  ceux  qui 
font  ainfî  fpeculatih,  il  eft  certain  qu'ils  cui- 
dent  Se  fe  font  à  croire  qu'ils  ont  beaucoup 
profité  :  mais  cependant  il  eft  certain  que  ce- 
luy  q  aura  ainfî  fjneftomach  creux, ictte  tout 
dehors, tellement  qu'il  n'y  demeure  nulle  fiib 
ftance.Or  celuyqui  eft  vrayemét  nourri  en  la 
foy,&:  qui  a  quelque  inftruftion  pour  fov-mcf 
me,  celuy-la  cerchera  coformite  générale  en 
tous  Ces  prochains  :  que  s'il  profite  en  la  do- 
ûrine  de  Dieu  ,  il  demandera  qu'elle  foit  re- 
ceue  des autresd'vnefemblableatFeftion, tel- 
lement qu'vn  chacun  croifie  &  s'augmente, & 
que  nous  venions  tous  en  cefte  perfeûion  d' 
aage  de  laouelle  parle  fainft  Paul  au  quatriè- 
me des  Ephcfiés.  Ainfî  doc  ce  n'eft  point  fans 
caufe  que  fainft  Paul  dit  à  Timothee  ,  tjur  s'il 
infifie  fur  cet  chtifet  oû  il  a  profité,  qu'il  mon- 
ftrera  qu'il  a  efté  bien  nourri  en  la  doftrine, 
que  fon  ame  en  a  efté  repeue,&  qu'elle  en  a  ti- 
ré telle  fubftance,que  c'eft  aufsi  pour  nourrir 
les  autres.  Il  y  ad'auatagecncemot,  que  Ti- 
mothee auoit  fiiyui  ia  bonne  doôrine.  Or  ce 
mot  n'eft  point  fuperflu.  Car  combien  en'voit 
on  qui  dés  leur  enfance  ont  goufté  la  parole 
de  Dieu.&rmefmcs  ont  receu  telle  inftruftion, 
qu'il  femblera  qu'ils  doyuent  eftre  des  demi- 
anges,*:  puislàdeflus  ils  fedesbauchét, telle- 
ment qu'on  voit  que  ce  font  diables  pluftoft? 
Et  pleurt  à  Dieu  qu'il  en  faluft  cercher  les  e- 
xemples  bien  loin.  Mais  quôy?  Nous  voyons 
ceux  qui  ont  efté  cnfeignez  en  l'Euangile  dé- 
liant qu'ils  fceHfrentparler,&  fcmbloit  que  ce 
deuft  eftre  metueillcs .  Or  ont-ils  continué? 
Mais  tout  au  rebours  il  femble  qu'ils  veulent 
defpitcr  Dieu.Etde  fait.il  vaudroit  beaucoup 
niieiiv  qiieiainais  n'eiiftent  ouy  fonnermot 
de  l'Euangile  ,  que  d'eftre  ainfî  desbordez  ,  (5f 
de  fe  retirer  du  bon  chemin  auquel  Dieu  les- 
auoit  introduits  par  fa  grace.Par  cela  dôques' 
nous  voyons  que  ce  mot  emporte  beaucoup, 
quand  fainft  Paul  dit  àTiinothce,  qn'eftant 
nourri  en  la  bonne  doftrine,ii  Ja  pourfuyuc,& 

y  con- 


s  V  R  1  A   I.    A     T  I  M  O  T  H. 


iSy 


y<on£inuc.  Làdeffus  notons  que  c'eftvn  don 
Ipecialjvoite  fingulier  que  Dieu  fait  aux  hom 
mes,  quand  ilsperiîftent  conftamment  «nce 
qui  eit  bô  &  propre  pour  leur  falut.'Car  de  na 
turenous  lommes  volages,  &niefmes  tout  ce 
^ui  eft  bon,  nous  eft  qiialî  contraire,  &  ce  qui 
cft  contre  noilre  appétit  on  ne  nous  y  peut 
faire  continuer  iufques  en  la  fin .  D'autant 
plus  donc  nous  t'aut-il  eftre  fongneux  de  pour 
fuyure  &  d'auoir  celle  perfeueraiice,  &  fur 
tout.quand  Dieu  dés  noftrc  enfance  ou  nolhe 
teuneuc  nous  aura  tendu  la  main,&  nous  aura 
déclaré  fa  volonté  :  que  nous  mettions  tant 
plus  de  peine  à  y  adhérer, S;  que -nous  le  priés 
qu'il  nous  fortiHe  par  f.i  vertu,  afin  que  nous 
ne  foyons  pas  légers  comme  vne  plume ,  ou 
comme  de  la  paille,  pour  eftre  agiter  ça  &  là. 
Voila  ce  que  nous  auons  à  retenir.Et  au  refte, 
notons  que  ceux  qui  auront  vne  fois  tiré  bon 
ne  fubftancede  la  parolede  Dieu,  auront  vne 
racine  viue  qui  produira  toufiours  fes  fruits. 
Or  à  l'oppofite,  ces  gens  volages,  qui  fe  def- 
bauchent  ainfi  aifeement.raoïiftrent  que  ia- 
mais  ils  n'ont  efié  droitement  inftruits,  qu'il 
n''y  a  qu'hypocnfie  en  eux  ,  Se  quelque  cnofe 
<jui  foit  apparue, que  toutesfois  il  n'y  a  eu  nul 
le  fermeté.  Or  Ciinft  Paul  ayant  amfî  parlé  à 
Timothee.adioulîe  ,  Çh<  i7/<>jy<f  les  fablet  en- 
fants &  fem\>Ul)\es  à  eeUes  des  VieillUs.  En 
quoy  il  fignifieque  ce  n'eft  ponit  aflez  qii'va 
bon  doâeur  qui  a  la  charge  &  office  d'enfei- 
gner  ,  s'abihene  de  mettre  en  auant  des  er- 
reurs,&des  doftrines  faufles,  mais  qu'il  doit 
bienauoir  efgardàcefte  vtilité  que  j'aydite. 
Or  fainû  Paul  ne  fait  point  ici  comparaifon 
de  la  bonne  doûrine  à  des  erreurs  mefchan- 
tes  qui  font  pour  nous  fedutre,  &  qui  font  du 
tout  contraires  àla  verité:mais  il  fait  vne  a'i- 
tre  comparaifon,c'eft  quand  il  y  a  vne  façon 
d'cnfeigner  laquelle  n'emporte  point  d'ido- 
lâtrie de  fov,  ni  de  fauflecé  qui  foit  toute  pa- 
Tente,  nuis  tant  y  a  qu'elle  eft  friii  le  :  qu'on 
cerche, qu'on  fonde, &  on  trouueri  qu'il  n'y  a 
nulle  édification  .  Or  celuy  qui  fe  veut  em- 
ployer fidèlement  au  feruice  de  Dieu, ne  doit 
pas  feulement  fuir  les  menfonees  (  dit  fainû 
Paul  )  &  les  fuperftitions  qui  font  pour  em- 
poifonner  les  âmes  ,  mais  il  doit  aiifsi  fuir  les 
faUet  frafanes  ,  c'eft  à  dire  les  fubtilitez  qui 
ne  peuuent  édifier, &  qui  nccontienent  nulle 
inftruftion  qui  (oit  bonne  pour  le  falut  des  a- 
mes.  Voici  vn  paflage  qui  eft  bien  digne  d'e- 
ftre  noté  .Car  nous  voyons  que  c'a  efté  vne 
partie  des  corruptions  qui  font  venues  au 
monde,&  qui  regnét  encores  auiourd'huy  en 
la  Papauté.Vray  eft  que  là  il  y  aura  des  doftri 
nés  tant  abfurdes&  des  erreurs  tant  lourds  & 
brutaux  que  rien  plus:  nous  fçauons  que  l'ido 
latrie  y  eft  auAi  vileine  &:  énorme  qu'elle  fut 
iamais entre  les  Payens,  que  li  tout  le  feruice 
de  Dieu  eil  corrompu  ,brief  qu'il  n'y  a  rien 
qui  ne  fo;:  abaftardi.Or  tels  erreurs  no'  doy- 
uent  eftre  deteftables  :  mais  il  y  a  vn  mal  qui 


eft  encores  plus  cache,  &:  qui  n'eft  point  co- 
gnudu  cémun  peuple. Car  cRcores  quelado- 
àrinedes  Papi.ftcs  ne  full  point  faufle  côme 
elle  eft,qu'ellenehift  point  peruerfc:ficft-ce 
qu'elle  eft  profane,  côme  famft  Paul  la  nom- 
me ici. Pourquoy  ?  Ils  ont  des  queftions  qu'ils 
debatent  de  chofts  oii  il  n'y  a  nul  profit. 
Q_uand  vn  home  auroit  cognu  toutes  les  que- 
ftiôs  qui  font  debatucs  aux  cfcholes  de  Théo- 
logie de  la  Papauté, il  n'y  auroit  que  vent.  Or 
cependant  on  s'y  tourmente  tant  &  plus, &  ne 
en  peut-on  venir  à  boufcar  il:,  mettent  en  a- 
uanc  des  qiieftions  qu'on  ne  pourra  iamais  re 
foudre  linon  en  deuinant:&  quand  vn  homme 
voudra  ccrcherdes  fecrets  de  Dieu,  defquels 
il  n'y  a  point  de  déclaration  en  l'Efcriture 
fainftc, n'entre-il  pas  en  vn  abyfme?Or  les  Pa 
piftes  ont  eu  ceft  orgueil  &  cefte  audace  en 
eux, de  fe  vouloir  enquérir  de  ce  qui  nous  «foit 
eftre  incogiiu.  Et  ainfi  donc  voila  côme  Dieu 
a  retiré  £à  vérité, quand  le  monde  Pa  ainfi  cor 
rompue.  Deuant  que  les  chofes  fuflènt  fi  loiJr 
des  &  fi  brutales  comme  on  les  voit  en  la  Pa- 
pauté,il  y  auoit  défia  ces  corruptions  que  l'ay 
touchees.c'cftafçauoir  que  le  monde  s'addon 
noit  à  des  menus  fatras,  &  queftions  friuolet 
&  inutiles.qu'il  n'cftoit  queftion  que  de  volti- 
ger.Dieu  a-il  veu  qu'on  polluoit  ainfi  fa  fain- 
Cte  Parole'il  a  lafché  la  bride  à  Sa  tan, &  là  def 
ius  eft  venu  ccft  horrible  aueuglemcnt  qu'on 
voit. Notons  donc  qu'il  y  a  deux  chofes  con- 
tenues en  la  parole  de  Dieu  .  l'vnc  eft  qu'elle 
nous  morftre  quelle  eft  la  pure  &  la  droite  vc 
rité.afindeno*  retirer  d'erreurs, d'idolâtries, 
de  méfûiiges.de  ténèbres.  Voila  pour  vn  item. 
L'autre  c'eft  qu'il  y  ait  bône  inlîruftion  pour 
noftrefalut.Et  ainfi  ceux  qui  ont  la  charge  de 
enfbigner.ne  doyuét'pat(c6me  défia  i'ay  de- 
claré)s'abftenir  defaulTedoftiine  &demen- 
fonge  tant  feuleinét,  ce  n'eft  qu'vne  partie  de 
leurdeuoir  :  mais  ils  fcdoyuent  abfteniraufsi 
de  toutes  curiofitcz  qui  ne  peuuent  feruir  que 
pour  faire  iafer  les  hommes  comevnepieen 
cage:ou  bien  q  font  pour  endormir  les  efprits 
fans  qu'il  y  ait  profit  ni  édification  .  Nous 
voyons  donc  maintenât  quelle  eft  l'intention 
de  fainft  Paul. Or  i'ay  dclîa  monftré  que  c'eft 
vn  vice  qui  3  régné  par  tout  lem5de:mais  fça 
chons  que  nous  pourrions  tomber  en  fembu- 
ble  dager.fi  nous  n'obferuôs  la  règle  qui  nouï 
eft  ici  donnée  par  l'Efprit  de  Dieu.  Quf  faut 
il  donc  que  nous  facions  de  noftrecofté,  nou» 
qui  auons  l'office d'anoncer  l'Euangile?Q_ue 
nous  apprenions  de  regarder  bien,&  iuger  ce 
qui  eft  profitable,afin<le  nous  y  exercer,&  no 
feulemét  que  nous  eftudions  à  cefte  pureté  de 
doftrine ,  afin  de  ne  mettre  en  auâ  t  nul  raen- 
fongenimauuaifeiizanicmais  qiienousayos 
en  recommandation  d'édifier  TEglife,  &  que 
cefte  prudence  foit  toufiours  en  nous(conime 
i'ay  dit)  de  fçauoir  que  l'Elcriture  fainfte  eft 
donnée  aux  hommes  pour  leur  vtilité.Sur  ce- 
la que  nouJ  fuyoni  ta  fables  profanes ,  c'eft 

A.iii. 


Ij>» 


SERMON    XXXI. 


i^ite,  ^ui  ne  peuuent  poijU  former  les  hom- 
mes ta  feruice  de  Dieu ,  &  que  tout  le  peuple 
de  fa  part  regarde  bien  de  n'eftre  point  ain£ 
frétillant  pour  appeterclioresioutilec.mais 
qu'il  cerche  vne  bonne  fermeté  &  vne  ûibftan 
ce  pour  eihe  nourri  en  la  parole  de  Dieu.com 
me  elle  eft  la  pafture  de  nos  âmes.  Voila  pour 
quoy  aufsi  fainéi  Paul  appelle  telles  fpecula- 
tions  fthles,  &  puis  frafatiei ,  Cr  fcmUabltî  à 
det  tontes  que  font Jtiyitilltt  .lï  e  viiy  que  fî 
on  luge  félon  Ton  cerueau,on  dira  que  ce  font 
des  chofeï  hautes  &  fubtiles.  Quand  il  y  aura 
de  ces  queftions  que  nous  auons  défia  ait  qui 
fe  ferôt  de  chofes  incognues,voila  les  efpritt 
qui  fontrauis  :  comme  de  nature  nous  fom- 
mes  enclins  à  cefte  maladie,  que  nous  Tommes 
tantofl  fafchez  de  la  bonne  doArine  :  &  ce- 
pendant nous  voudrions  qu'on  remuaft  touf- 
iours  noiiueaumefnagc,&  qu'on  nous  feift  vo 
lerpardeflîis  les  nues  fclon  noftre  imagina- 
tion. Et  voila  pourquoy  on  trouuera  les  que- 
flions  inutiles  tant  bonnes .  Mais  fainû  Paul 
en  Tauthorité  de  l'Efprit  de  Dieu  déclare 
que  ce  ne  font  que  fables.  Allei  vous-en(dit- 
il)auec  vos  fubtilitez  tat  aiguës, que  vous  pen 
lëz  eftre  compagnons  des  Anges  de  paradis 
quand  vous  aurez  volhe  ceiueau  bien  efchauf 
ré  en  telles  folies,mats  ie  prononce  que  ce  ne 
font  que  fables.Aurefle.encoresnefeconten 
te-il  point  de  les  nommer  fables,  pour  abba- 
ire  l'orgueil  qui  eft  en  ces  prefomptueux  qui 
veulent  faire  des  grans  doûeurs,&  cependant 
ont  l'eftomach  enflé  de  vaines  fpeculations, 
mais  il  met  qu'elles  font  frofanes,  c'eft  à  dire, 
pollues, qu'il  n'y  a  nulle  fainfteté.  Car  ce  mot 
de  Pro/â»*,s'oppofe à  toute  fainûeté:  &  quâd 
Dieu  nous  dédie  à  foy  ,  nous  fçauons  que  c'cft 
Tne  chofe  facree,&  qu'aucremct  nous  ne  pou- 
uons  eftre  dédiez  à  Dieu:  mais  aucontraire.ce 
qui  eft  comme  reietté  de  Dieu,&  qui  n'a  nulle 
accointance  auec  li|y,  &  qui  n'en  peut  nulle- 
ment approcher.cela  eft  nommé  profane,c'cA 
i  dire  conune  vne  chofc  fouillée  ,  vne  chofe 
pollue.  Or  fainâ  Paiîl  appelle  ici  fables  prafa- 
net,  toutes  ces  fpeculations  qui  ne  font  point 
pour  faire  régner  Dieu  entre  nous,&  nous  af- 
fuiettir  à  luy.  Car  le  règne  de  Dieu  en  quoy 
coniïfte-il>  c'eft  que  nous  foyons  feparez  des 
Ordures  de  ce  monde  âtde  noftre  chair, q  nous 
appreniont  d'y  renoncer  de  plus  en  plus,  tel- 
lemét  que  Dieu  nous  gouucrDC  par  fon  làin£^ 
Efprit,  &  que  nous  foyons  purgez  de  nos  affe 
Aions  mauuaifes  ,  que  nous  foyons  retirez  de 
nos  mauuaifes  oeuuret.La  doArine  doc  qui  ne 
tend  pas  à  cela, eft  nommée  TTifane.,Ei  pour- 
quoy? pource  qu'elle  n'emporte  q  fouilleiire, 
.&  tant  s'en  faut  qu'elle  nous  face  approcher 
de  Dieu,que  pltiftoft  elle  nous  en  recule  &:ef- 
lôgne.Et  puij  fainû  Paul  met  encoresvn  mot 
plus  propre  pour  abbatré  l'arrogance  &  fierté 
de  ceux  qui  îc  veulét  ainfi  magnifier  entre  les 
hommes  fous  ombre  de  leurs  fubtilitez  fiiuo- 
lcs,les  renuoyant  aHit'yitilles.Cit  telles  gens 


encores  qu'ô  leur  reproche  de  n*aaoir  en  eut 
qu'orgueil,  il  ne  leur  en  chaut  pas  beaucoupr 
mais  fi  on  leur  dit  qu'ils  font  fots  &  badins, 
cela  leur  creue  le  co:ur  .  Et  pourquoy  >  car 
moyennant  qu'vn  homme  ambitieux  foitpri- 
fé,  qu'on  dife,  qu'il  a  bonne  grâce ,  ce  luy  eft 
tout  vn:puis  apres.fi  on  dit  qu'il  n'y  a  que  va- 
nité en  luy  ,q  mefmes  il  n'eft  qu'vn  mocqueur 
&  vn  contempteur  de  Dieu  ,  qu'il  ne  Elit  que 
iouer  vne  farce  comme  vn  bafteleur.il  ne  s'ei> 
fait  que  gaudir,  il  hume  tous  tels  opprobres, 
moyennât  qu'on  l'ait  toufiours  en  reputatiô, 
qu'on dile  que  c'eft  vn  homme  bien  parlant, 
que  c'eft  vn  home  fubtil,&  vn  efprit  aigu.  Or 
pour  cefte  caufe  fainfb  Paul  dit,  Allez  ,  allez 
aux  vieilles  auprès  des  cendres ,  car  vous  n''e> 
ftes  pas|  dignes  qu'on  vous  accompare  à  des 
gens  idiots, ni  à  ceux  qui  n'ont  iamais  apprint 
a  ni  b  àl'efchole,mais  vous  eftes  plus  hebe- 
tez  que  les  vieilles  quand  elles  font  leurs  coi» 
tes  aux  petis  cnfans:c6me  s'il  crachoir  à  l'en- 
contre  de  toute  cefte  pôpe  &  braueté  de  ceux 
qui  ne  cerchent  finon  qu'on  les  prife.  Nous 
voyons  donc  maintenant  comme  faind  Paul  a 
ntbbacu  le  caquet  de  tous  ceux  qui  ne  cerchét 
point  d'édifier  l'Eglife  de  Dieu  comme  il 
faur.  Et  au  refte,afin  que  nous  foyons  admo- 
neftezde  nous  exercera  tout  cel3,ildit,  Errr 
ce  tay  en  la  crainte  de  Vieui&c'eû  ce  que  nous 
auons  touché  du  cômencement.Et  ainfi  donc 
notons  que  celuy  qui  voudra  s'acquitter  de 
fon  office, quand  il  eft  ordôné  Pafteur  en  i'E- 
glife  de  Dieu,  quM  faut  qu'il  applique  fon  e- 
ftude  à  cheminer  en  la  crainte  dç  Dieu,  qu'il 
regarde  K  ce  qui  eft  propre  à  ccl^,  &  qiiM  s'y 
foit  duit:i5i  quand  il  aura  cômencé  par  fa  per- 
fonne,  alors  il  pourra  aufïi  amener  les  autres 
&  les  guider  au  bon  chemin.  Voila  en  fomme 
ce  que  nous  auons  à  retenir.Et  quant  &  quant 
qu'il  nous  fouuiene  toufiours  que  fiinù  Paul 
n'a  point  parlé  à  vn  homme  feul,  mais  qu'il  a 
voulu  que  ceci  s'.iddreflàft  à  tous .  Voulon*- 
nous  donc  eftre  vrais  efcholiers  de  noftre 
Dieu?(comme  il  nous  fait  cefte  grâce  de  noi» 
enfeigner  tous  les  iours)  Que  nous  ayons  ce 
fondemét  pourbaftirdeflus.c'eftla  vraye  pif 
fé:  car  ce  mot  que  nous  tranflatons  crainte  Jt 
D'V»»,emporte  vne  bonne  reuerenee  telle  que 
Dieu  loit  honoré  entre  nous.  Or  quand  nous 
auons  cela, alors  nota  pouuons  baftir  :  mais  au 
contraire,  fi  nous  ne  commençons  par  ce 
bout.cncorcs  que  nous  ne  feiAions  que  hieiU 
leter  en  l'Efcnturc  fainfte,&qu'on  nous  pref 
chaft  depuis  le  matin  iufques  au  foir.&quede 
nuiû  encores  nous  ne  cefsifvions  de  méditer 
ce  que  nous  auriôs  ouy,il  eft  certain  que  tout 
s'cfcouleta  céinc  eau.il  n'y  aura  nulle  ferme- 
té. Voulons-nous  donc(commci'ay  dit|)pro- 
fiter  en  l'cfchole  de  noftre  Dieu,  afin  que  (a 
doftrine  nous  foit  vt'Ie,&que  nous  en  foyons 
bien  édifiez? Que  nous  ayôs  toufiours  ce  fon- 
dement, c'eft  que  nous  tafchions  de  nous  ad- 
dôner  âl'obeillànce  de  noftre  Dieu,  qu'il  foil 

exalté 


SVR   LA  1.    A    TIMOTH. 


culte  au  milieu  de  nous.quM  ait  la  reiierence 
qu'il  merite.Quand  cela  y  fera,  nous  pourras 
bien  bailir.  £t  au  relie  .  pource  que  nous  ne 
nous  pouuons  pas  addonner  à  la  crainte  de 
Dieu,&  que  nous  ne  pouuons  pas  auoir  aucun 
gouft  ne  courage  de  le  feruir  &  honorer,  finô 
Tayanscognu  vn  Pcre  tant  amiable  que  nous 
puifsions  nous  repofcrdu  tout  en  luy  ,  &  que 
nous  y  puifsions  auoir  noftre  refuge.que  nous 
recourions  àce  qui  eft  déclaré  toucHant  no- 
ftre  Seigneur  Icfus  Chrifb ,  que  là  Dieu  nous  a 
tellement  defployé  foncœur,  que  nous  fom- 
mes  certifier  de  fon  amour.Ainiî  donc  appré- 
hendons celle  grâce  qui  nous  efl  offerte  par 
le  Fils  de  Dieu  ,  &  laquelle  il  nous  communi- 
que iournellement  :  quand  nous  aurons  receii 
vne  telle  grâce,  que  nous  venions  priueement 
i  noftre  Dieu,fçâchans  qu'il  eft  preft  de  nous 
receuoir.  Et  cependant  que  nous  foyons  tant 
plusefmeus  Se  incitez  de  l'aimer, puis  qu'il 
BOUS  a  preuenus  de  ûl  bonté  infinie  :  que  nous 


191 

ne  foyons  point  ingrats  a  tant  de  bénéfice» 
qu'il  nous  a  clargis,mais  que  nous  apprenions 
à  nous  remettre  du  tout  à  fon  obeiflancc.afin 
de  l'honorer  &  le  feruir  tout  le  temps  de  no- 
flre  vie  ,  &  de  cheminer  en  fa  crainte  pour  y 
eflre  confe  rmez  de  plus  en  plus  félon  que  nout 
en  fommes  exhortez  par  fa  parole. 

O  R.  nous-no«is  proAernerons  deuant  la  fà 
ce  de  noflre  bon  Dieu  en  cognoidànce  de  not 
fautes ,  le  prians  qu'il  nous  les  face  tellement 
fentir  que  ce  foit  pour  nous  réduire  à  vne 
vraye  crainte  de  fon  iugement ,  &  qu'eflans 
puis  après  retournez  à  luy  en  confiance  qu'il 
nous  receuera  à  merci ,  qu'il  nous  face  fentir 
le  fruit  delà  remifsion  de  nos  péchez  qu'il 
nous  a  faite  par  noilre  Seigneur  lefus  Chrift, 
&  qu'il  nous  côdaife  par  fon  fainâ  £fprit,ic> 
quel  nous  renouuelle  tellement  que  nous  ne 
cherchions  fînon  de  conformer  toute  noilre 
vie  à  fes  fainâs  commandemens.  Ainfi  nour 
dirons  tous,Dieu  toue-puilIànt,Pere  cele.&c. 


CINQJ/IEME      SERMON       SVR      LE 

QJ^ATRIEME     CHAPITRE. 

Exerce  -  toy  en  la  crainte  de  Dicit. 

8  Car  r  exercice  corporel  ejî  peu  profitable ,  mais  îd  crainte  de 
Dieu  ejl  profitable  à  toutes  choies ,  ayant  promejfe  delà  Vie pre fente, 
0»  de  celle  qui  ejl  a  venir. 

nous  foyons  patieas  en  tout  ce  qu'il  nous  im» 
pofe,&  que  nous  regardions  touliours  à  la  vie 
celelle.  Voila  doc  i'eftude  des  enfans  dcDieu, 
&OÙ  ilsfedoyuent  arrefter  du  tout.  Or  ce- 
pendant fainâ  Paul  monftre  que  ceux  qui  s'a- 
mufent  à  des  menus  fatras.n  y  tendent  pat, 
mais  pluAofl  ils  fe  deAournent  du  droit  but. 
Comme  ceux  qui  veulét  plaire  h  Dieu  par  cho 
(es  externes ,  par  cérémonies ,  parabftinence 
de  mager  chair  en  vn  iour,par  ceci,  &  par  ce-« 
la,  il  leur  féble  qu'ils  ont  fait  merueilles  quad 
ils  auront  eAé  occupez  à  tels  badinages.  Or 
tout  cela  n'ell  rien.  Sainâ  Paul  dôc  nous  mon 
ftre  qu'il  nous  faut  retrancher  toutes  ces  cho« 
fes-la  quand  nous  voudrôs  venir  dro^it  à  Dieu. 
Et  voila  pourquoy  il  dit,Q««  ttxertite  corfo- 
Tel  tjl  ptH  pTofitthle .  En  quoy  il  entéd  q  les  ce» 
remonies  ne  font  pas  de  grande  valeur,&  que 
Dieu  ne  les  prife  point  beaucoup.  Il  n'y  a  dôc 
que  1  a  droite  religion,&  qu'on  chemine  en  pu 
re  confcience  que  Dieu  requière: & aufsi  c'eli 
laque  rhomme  fidèle  trauaille  du  tout.  Car 
(dit-il) /«  trainu  d*  Dieu  tfl fufJifantt.ÇXwA 
nous  n'aurions  point  le  relie  de  ces  accellôi- 
res,qu'il  nous  fuffife  moyennât  que  nous  che 
minions  d'vn  droit  cœur  félon  que  Dieu  le 
commande  :  car  en  ce  faifant  nous  auons  les 
promelTes  non  feulement  du  Royaume  des 
cieux,  mais  de  celle  vie  tranfitoire ,  que  Dieu 

A.iiii. 


Vyuant  le  propos  qui  a  elle 
ielia  entamé  ce  matin  lainâ 
Paul  exhorte  ici  Timothee, 
3:  en  fa  perfonne  tous  fidè- 
les feruiieurs  de  Dieu,  de  fe 
addonner  du  tou  t  à  la  v  raye 
Se  pure  religiô.  Car  les  hom 
mes  vont  toufiours  par  circuits,  &  au  lieu  de 
t'auancer  au  bon  chemin ,  ils  fe  trauaillent, 
voire  au  double  plus  qu'il  ne  feroit  befoin, 
mais  en  chofes  inutiles.  Coniuie  nous  voyons 
que  les  Papilles  fe  tourmentée  tant  &  plus,& 
nefont  iamais  laflez  en  leurs  dénotions, qu'ils 
appellent:aucant  en  ell-il  de  tous  idolâtres  & 
incredules,quoy  qu'on  leur  impofe  de  charge 
ce  leur  eft  tout  vn,&  rien  ne  leur  courte:  ouy, 
moyennât  qu'ils  n'approchent  point  de  Dieu, 
ii  qu'il  ne  fonde  point  lufques  en  leurs  cœurs. 
Et  ce  n' eft  point  d'auiourd'huy  que  cernai  a 
Val.i  i  commencé, il  a  règne  des  la  création  du  mon- 
1^  '  '  de  :  comme  auAi  le  prophète  Ifaie  reproche 
aux  luifs, qu'en  tr.icaflaut  ils  ont  prins  beau- 
coup de  peine,  3c  le  t»ut  a  efté  perdu,  pource 
qu'ils  n'ont  point  tenu  le  droit  chemin.  Ainlî 
ooncfainft  Paul  pour  corriger  vn  tel  vice, dit 
qu'il  nous  faut  bié  regarder  quel  feruice  Dieu 
tlemande  &  approuue,  c'eft  af (auoir  qu'vn  cha 
cun  de  nous  tende  à  luy  en  pureté  de  cœur,  & 
que  nou^  rinuoquiôs  comme  nolhe  Pcre.que 


19^ 


SERMON     XXXII. 


Unuis  ne  nous  defaudn.  Nous  voyons  donc 
maintenat  quelle  eft  l'intentiô  de  fainft  Paul, 
c'eft  afçauoir  de  monftrcr  ce  qu'il  auoit  n'a- 
gueres  touché.que  quand  les  hommes  s'occu- 
pent à  feruir  Dieu,  ou  pour  ne  point  manger 
cKair  vn  certain  iour.ou  pour  s'abftenir  de  ce» 
~     ci  ou  de  cela  fans  que  Dieu  leur  ait  comman- 
dé, que  ce  font  des  menus  bagages ,  &  autant 
de  farees.Qu,'eft-il  donc  de  Faire?  Que  nous 
cognoifsions  que  Dieu  veut  eftre  ferui  non 
lean^.c,  point  à  noftre  porte,  mais  félon  fa  nature.  Et 
44.         ain(î(comme  il  eft  efcrit)  il  faut  que  nous  al- 
lions à  luy  en  rondeur  &  intégrité  de  coeur. 
Or  il  el\  vray  que  de  prime  face  cefte  doûri- 
ne  femble  eftre  aflez  claire  ,  &  qu'il  ne  feroit 
pas  grand  meftier  de  s'y  arreftertmais  fi  d'au- 
tre cofté  nous  cognoiffons  l'inclination  des 
hommes,  il  nous  fera  facile  de  iuger  que  non 
fans  caufe  faind  Paul  nous  a  ici  donne  vne  tel 
le  admonition. Et  pourquoyîl'ay  défia  mon- 
ftré  en  pallàntique  quand  les  hommes  veulent 
feruir  à  Dieu.du  premier  coup  ils  fe  vôt  fout 
rerendes  cérémonies, voire  fuperflues,&  leur 
femblera  qu'ils  ont  beaucoup  fait  quad  ils  au- 
ront inii  peine  à  chofes  qui  ne  valent  rien. 
Comme  en  la  Papauté  ,  quand  les  Papiftes  fe 
veulent  acquitter  de  ce  qu'ils  appellent  ferui- 
te  de  Dieu, il  faut  bien  qu'ils  foyent  en  fouci 
&  inquiétude  grande.  Or  cela  ne  leurcouile 
rien:mais  fi  eft-cequ'ils  y  font  aflpeûiônez  iuf 
eues  au  bout.Voyâs  donc  que  de  nature  nous 
tendons  là,&  toutesfois  que  c'eft  peine  perdue 
&  frullratoire  deuant  Dieu ,  que  nous  foyons 
tenus  en  celle  bride  que  fainû  Paul  nous  met 
ici  à  tous  en  ce  mot  ,   Que  de  nous  exercer 
quant  au  corps ,cela  n'eft  point  de  grande  va- 
leur.Or  il  ne  parle  point  ici  de  fe  pourmener, 
ne  de  iouer  à  la  paume, ni  à  la  boule ,  ni  de  la- 
_--— —  bourer  le»  chainps,ne de  chofe  femblable.Car 
«juâd  vn  homme  trauaillera  pour  fa  vie,  il  fert 
àDieu,  &cela  eftvne  partie  de cefle  pieté dôt 
il  fait  mention,  &  laquelle  il  loue  tant.  Mais 
ftinft  Paul  par  ces  exejcicet  corportls  ,  entend 
en  fommc  tout  ce  que  nous  faifons  pour  plai- 
re à  Dieu  outre  fa  Parole:  corne  de  garder  v- 
ne  telle  fefte  ,  ne  manger  point  chair  vntel 
iour,auoir  vne  telle  deuotion, aller  en  pèleri- 
nage,porter  la  haire,  ieufner  vne  telle  veille, 
aller  à  matines,  que  l\n  voudra  eftre  vcflude 
gris,  l'autre  de  blanc  ,  l'autre  de  noir,  l'autre 
portera  la chorde, l'autre  ceci, l'autre  cela :voi 
la  di-ie, toutes  ces  dénotions  que  le  monde  fe 
forge  &  baftitpjurferuir  à  DieB,q  fontcom- 
priiites  fous  ce  mot,  Xi'everc'ctç a^rpor.ls.^t 
pourquoy  eft-ce  que  fainû  Paul  a  ainfi  parié? 
C'eft  au  regard  du  vr*y  feruiccde  Dieu  le- 
quel cft  fpirituel,comn»enous  .^uons déclaré. 
Voila  Dieu  q  veut  polTcder  nos  cœurs, il  veut 
làaujir  fon  lîcge  pour  nous  gouuerner.  Il  cft 
vray  qu'il  faut  bien  que  les  pieds  irmainsail- 
Icnt  qiiant&  pliant  ,  tellement  que  fi  l'Efprit 
de  Dieu  nous  gouuerne,  cela  aiifsi  fe  monihe 
par  toutes  uos  oeuuces.  iliis  cependant  en 


quoy  eft-ce  que  conllflc  le  IVruice  de  Dieu? 
C'tû  que  nous  foyons  do  tout  appuyez  fur  fa 
bonté,cerchansfaIut  en  luy  feul.Êt  puis.d'au 
tant  que  nous  auôs  &  obtenons  par  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift  tout  ce  qui  nous  eft  necef- 
Jâire,que  nous  ayons  là  noftre  addre(re,&  que 
là  deflus  nous  inuoquiésDieu,&que  nous  por 
Mons  paifiblement  les  miferes  &affliftionsdc 
ce  mcde,  q  nou^  foyon»  &fobre',5;  téperans, 
iufques  à  ce  que  noftre  Seigneur  nous  retire 
de  ce  pèlerinage  terrien.  Voila  donc  côme  le 
fétuicedcDiei»  eft  i^irituel.d'autant  qu'il  c5- 
fifte  en  cefte  intégrité  qi'aydite.Aufsi  au  cô« 
traire.quâd  nous  ne  voulSs  point  feruirDieu. 
mettans  noilre  fiance  en  luy,l'inuoquans,&  y 
ayans  tout'jioftre  recours  ,  nous  tenans  plei- 
nement à  lefiis  Chrift,  portans  en  patience  f» 
croix,&  chemfinans  en  ce  mode  toufîours  pour 
afpirer  au  Royaume  des  cieux,qu,îd,di-ie,no* 
ne  voulôs  point  feruirDieu  en  telle  forte.mais 
que  Tvn  trotte  en  pe)erinage,q  l'autre  obfcr- 
ue  vne  telle  fefte  ,  penfont  appaifer  l'ire  de 
Dieu  ,  que  l'autre  fait  ceci,  l'autre  cela,  voila, 
des  exeicices  corporels, lefqucls,combien  que 
fainft  Paul  ne  touche  point  encores  ici  aux  fu 
perftiti5s,tant  y  a  en  fomme  q  nous  lesdeuôt 
bien  noter.  Car  il  y  a  deux  vi^  es  c»  ce  que  S. 
Paul  taxe  ici:  Tvn  c'eft,  que  les  hommes  pen- 
fent  auoir  beaucoup  fait  &  dtflcrui  enuers 
Dieif,  en  s'eftant  ainfi  tourmenté  le  corps ,  & 
beaucoup  occupé  à  quelques  cérémonies.  En* 
cores  qu'ils  n'imaginent  point  de  mériter  Pa- 
radis par  cela,  qu'ils  ne  conçoyuent  point  ce- 
fte confiace  diabolique  d'ohliper  Dieu,  &  que 
il  n'y  ait  point  vne  necef  itédc  loix  ,  lî  eft-ce 
neantmoins  que  fi  les  hommes  s'amufent  à 
ces  choies  externes, qu'ils  pourront  eftre  em- 
pefcJic2&  retardez  de  venir  droit  à  Dicu.Voi 
la  vn  vice  délia  que  fainft  Paul  condamne. Or 
il  y  en  a  vn  autre  beaucoup  plus  errorjne, c'eft 
eeltiy  qui  règne  en  la  Papauté. Car  non  feule- 
ment les  hommes  voudront  s'employer  du: 
tout  à  feruir  Dieu  en  abftinence  de  chair  ,  en 
portant  la  haire,  ou  en  ceci,  ou  en  cela:  mais 
ils  cuident  faire  des  oeuures  méritoires, &pen 
fcnt  aofsi  acquérir  falut  par  ce  moyen.  Cefte 
opinié  diabolique  eft  beaucoup  plus  mtfchan- 
te  que  ne  feroit  point  l'exercice  corporel  de 
foy.   Ceci  feroit  encores  plus  obfcurfînous 
n'auions  l'exemple  ies  ancif  ns,&  cela  donne 
ra  plus  grâdluftre  à  ladoilnne  que  nous  vou- 
lons expofer.  T.wtoft  après  le  temps  des  A- 
poftres,  nous  voyons  que  la  moineriea  com- 
mencé. Or  de  ce  temps -la  il  n'y  auoit  point 
de  rattx  perpétuels  comme  auiourd'huy,&  Ti 
dolatrie  ne  regnoit  point  encores  ,  que  ceux 
qui  tftoyent  raomi  s.cftoycnt  comme  hermi- 
tes.lefquels  toutesfois  tiaualloyent  fort  pour 
gagner  leur  vie,  voire  &  cependant  vinoyent 
fortfobrement.en  r)rte  qu'ils  pouuoyent  fat 
re  de  grandes  aumofjies.Car  pource  qu'ils  fe 
cotcntoyent  démanger  du  pain  bis  &  des  her- 
bes, beaucoup  y  en  auou  fam  boire  vin,  ils  fe 

couchjy 


s  V  R     LA     I.     A    T  I  M  O  T  H. 


»95 


C'iuc^^yent  Tur  h  terre. Voila  vne  vie  fort  au 
ft;:re,cic  coucher  fur  terre.  Anciins  m';fmes  ne 
s'ofoyent  pas  coucher  ,  mais  dormoyeiu  tout 
deboutaupre;d\neparoy.  Et  puis  ils  n'ofoy 
ent  pas  goufter  feulemét  de  l'huile.mais man- 
geoyent  les  herbes  toutes  crues,  ou  biébouil 
lies  auec  du  fel  Se  de  Teau  ,  &  n'ofoyent  pas 
toucher  vne  laifche  de  pain,&  mefmes  ils  n'o 
foyent  pas  parler. Voila  vne  grande  aufttrité 
de  vie:qui  eft-ce  qui  ne  diroit  que  telles  gens 
eftoyent  du  tout  tranfportei  au  fcniice  de 
Dicu.=Or  tant  y  a  que  ce  n'elloyent  qu'exer- 
cices corporels,  que  ces  bonnes  gens  s'tftans 
ainfî  tourmentez  n'auoycnt  pas  beaucoup  ga- 
çnc.CarDieun'approuue point  telles chofes, 
&  ne  veut  point  aufsi  nous  y  amufer  :  mais  il 
nous  e.fhorte  de  méditer  cefte  vie  celefte  qui 
nous  a  eftéacquife  parnoftre  Seigneur  leius 
Chtift,  querenonçansau  monde,  à  tous  nos 
defirs,  &  qui  plus  cfl ,  à  noftre  raifon  propre, 
nous  luy  foyons  pleinement  fuiets  ,  que  nous 
mettions  peine  de  trauailler  en  folicitude  ,  & 
neantmoins  quenous-nous  repofîonsdatout 
en  luy. Voila  dôc  les  vrais  exercices  fpirituels 
où  noftre  Seigneur  occupe  (es  enfans.Orfcô- 
mei'.iy  dclîa  dit)vo!!a  ceux  qui  ont  voulu  fer 
uir  Dieu  .i  leur  guife  ,  qui  ont  inuenté  des  fa- 
çon? de  faire  bien  fort  pénibles  Stpefantes, 
qui  ont  eu  beaucoup  de  tourmcns:mais  tant  y 
a  qu'ils  n'ont  fait  quebatt  e  l'eau,  comme  on 
dit  :  ce  font  ieux  de  petis  enfàns.  Toutesfois 
cela  aefté  fortprifé.comnne  nous  fçauons  que 
de  nature  les  hommes  voulans  feruir  à  Dita  a 
leur  phantafîe, félon  qu*ils  font  charnels  troo 
uét  beau  ce  qui  apparoift  au  dehors, &  en  font 
cfmeus,&  leur  fe mbif  que  Dieu  le  doyue  ap- 
prouuer  aufsi  bien. Celle  grande  aufteritc  dôc 
aefté  en  grande  admiration  ,  qu'on  eftimoit 
que  ces  hermites  fuflent  défia  pardeflustes 
nues,  qu'eftans  ainfi  retirez  du  monde  ils  fiif- 
fênt  comme  demi-anges.Voila  comme  on  le.» 
a  prifez,  &  qu'ils  ont  efté  en  admirarion.  Or 
maintenant  comment  en  eft-il?  Vrayeftque 
nos  moines  font  bien  loin  de  celle  grande  ri- 
gueur &  aufterité  de  vie,  que  leur  fobrieté  eft 
de  manger  plus  que  leur  foul,&  Jamais  n'auoir 
fâure,&  viare  cependant  au  defpens  d'autruy, 
fans  s'occupera  nulle  vocation  que  Dieuap- 
prouue:&-au  refte,  on  fçait  que  ce  font  pow- 
ceaui  en  l'auge.Mais  prenons  le  cas  qu'ils  fuf 
fent  femblables  en  leur  vie  a  ceux  defquels 
nous  auons  fait  mention:  il  y  a  cependant  vn 
orgueil  diabolique,dc  ce  qu'ils  appellent  leur 
conuerfîon,  vn  fécond  baptefme  :  leur  vie,  vn 
eftat  de  perfê£lion  :  &  leur  femble  que  non 
feulement  ils  méritent  Paradis  erruers  Dieu, 
mai;  il«  ont  encores  du  réplage  pour  fuppleer 
au  défaut  d'autruy.qu'ils  font  tant  de  bonnes 
oeuures,  qu'ils  en  ont  à  reuendre.  Et  d'autre 
cofté  il  n'y  a  pas  feulement  ces  exercices  cor 
poreIs,mais  des  lîiperfiitiôs  mefchantes:  corn 
me  d'adorer  des  idoles  ,.de  chanter,  Meflfe,de 
faire  toutes  ces  aboininàtions  9c  vilenies  (|ui 


font  dircÛe.-îicnt  côtraires  à  la  pure  vérité  de 
Dieu. Par  Cela  nous  voyons  que  fair.ft  Paul  ne 
parle  point  des  fiiperftitions  quand  il  y  a  quel 
que  outrecuid.icc  enThôme  qui  voudra  feruir 
Dieu  en  ccremonie,mais  il  parle  de  ce  qui  de 
foy  ne  feroit  point  à  condamner  cômemau- 
uais,  fi  non  que  les  homes  s'y  arreftalîênt  par 
trop. Et  voila  où  gift  le  vice, que  cependant  ils 
ne  penfent  point  au  principal  quand  ilss'amu 
fentainfi  i»  Taccefloire.  Q£i  plus  eft,  il  n'y  a 
nulle  doute  que  Timotliee  ellant  lâinâ.côme 
on  le  peut  veoir,&  que  le  tefmoignage  luy  en 
eft  donné, toutesfois  nelaifloit  pasd'eftretou 
chc  decefte  folie  ,  qu'il  s'amufoit  par  trop  à 
ceft  exercice  corporel ,  iufques  à  blelîèr  fon 
eftomach  par  faute  de  boire  vin  ,  &  fe  rendre- 
inutile:  non  pas  qu'il  penfaft  mériter  Paradis 
par  cela:  tant  y  a  qu'il  s'y  eft  trop  arrefté,  en 
forte  que  S.  Paul  eft  côtraint  de  luy  comman- 
der de  boire  du  vin.afTnde  s'addonner  micur 
au  feniice  de  Dieu. Il  ne  faut  pas  que  ce  coni- 
niandemcnt-la  foit  donné  àgueres  degensi 
tant  y  a  que  ceft  exercice  corporel  eftoit  peu 
profî.ible  àTimothec,  attendu  qu'il  en  pou- 
uoi  t  cftre  moins  difpofé  à  feruir  à  Dieu.Et  aiit 
fi  il  nous  faut  regarder  à  quelle  fin  nous  de- 
nons  rapporter  tout  ce  que  nous  faifons,&:  fiir 
tout  que  Dieu  ne  foit  point  fruftré  de  ce  quM 
requiert  de  nous,afçauoir  que  nous  cheminiôs 
en  <acrainte,&en  rondeor&  intégrité  de  con 
fcience.Nous  voyons  donc  maintcnât  en  fom 
me  quelle  eft  l'intention  de  fainft  Paul. Et  airv 
fî,  voulons-nous  bien  feruir  à  Dieu  ?  l>rvfons 
point  de  cérémonies  &  chofes  qui  nous  fem— 
blent  belles  à  noftre  fantafîermais  à  l'oppofite 
regardons  à  ce  que  Dieu  approuue.Car  côme 
il  eft  dit  .-lu  Frophete ,  fes  yeux  cherchent  la; 
venté.  I!  veut  que  nous  .-lyons  ccfte  rondeur 
de  cc?ur  pour  nous  appliquer  du  tout  à  fon- 
olicilïàrcerapres  que  nous  l'aurôs  cognu  pour 
Père  ,  que  nous  luy  foyons  enfans  pour  che- 
miner deuant  luy  félon  fa  Parole, q  nous  ayôs 
là  tout  noftre  refuge,  &  que  nous  meditiôs  la 
viecelefte  ,que  ce  foii  là  noftre  eftude  pour 
nous  exercer  toutle  temps  de  noftre  vie.  Voi- 
la don  q  ues  ce  que  nous  auons  à  faire  .  Or  ff 
nous  cuidons  beaucoup  proffter  par  chofts 
externes, c'eft.vn  abus,  cela  ne  fera  que  nous 
diftraire  Sfnous  deftourner  du  bon  chemirr. 
Vray  eft  qu'en  fefuant  Dieu  nous  vferons  d'e 
xercices  coi-porels  entant  qu'il  (éra  befoinr 
nous  regarderôs  de  nous  feruir  &  de  ce  corps.; 
S:  de  ce  que  Dieu  a  créé  à  vn  vfage  temporels 
nous  regarderons,di-ie,de  nous  feruir  de  tour 
ceIa:voire  afin  que  ce  nous  foyent  autant  d'af, 
des.  Mais  fi  nous  penfons  que  Dieu  requière* 
feulement  cela,&  q  le  principal  demeure  der- 
rière,tout  ce  que  nous  ferons  n"'eftque  fatrasr. 
il  faut  regardera  vne  autre  fin.De  quoy  nous 
feruira  l'abftinenceîC'cft  pour  faire  que  nous 
né  foyons  point  a'ffriandez  aux  délices  de  ce 
monde,&  quand  rroftre  Seigneur'nous  voudrï 
humilier  en  poureté,  qiie  la  portions  patiem- 

B.i^ 


194 


SERMON      XXXI 1. 


tnent,  que  nous  foyons  prefts  de  fouffrir  tout 
ce  qu'il  luy  plaira.que  nouî  fouifrions  d'eftre 
gouuernez  par  luy, que  nous  ne  foyons  point 
enueloppez  auï  choies  de  ce  monde, que  nous 
ne  foyons  point  empefchez  tellement  qu'vn 
chacun  ne  s'acquitte  de  ton  deuoir ,  que  nous 
foyons  agiles  pour  prier  Dieu  ,  &  pour  eftre 
continuels  en  oraifon,  quenous  foyons  iblici 
tcz  de  penfer  a.  nos  pcchez  quand  noftre  Sei- 
gneur nous  en  touche  ,  &  qu'il  nous  enuoye 
quelques  afflidion> .  Voila  donqucs  à  quoy  il 
non»  faut  fairv;  fcruirl'abftinéce. Et  autant  en 
eft-il  de  toute^  les  chofcs  femblablesqui  ap- 
partienent  à  l'exercice  du  corps.  Mais  tant  y 
a  qu'il  ne  faut  point  mettre  la  charrue  deuanc 
les  boeufs,  côme  on  dit  :  il  faut  cômencer  par 
ce  bout,  que  nous  iuuoquions  Dieu  ,  quenous 
cJicminionsdeuant  luy  en  pureté  deconicicn 
ce:&quâd  il  luy  plaira  de  nous  exercer  en  po 
uretez  &:  miferes.que  nous  portiôs  cela  patié- 
ment .  Qjie  donques  nous  ne  facions  pa- le 
chef  &  le  fondcmêt  de  ce  que  fainû  Paul  a  ici 
cond,ininé, mais  quenous  CDgnoiùions  q  ceux 
qui  s'amufct  par  trop  àPaufteritéde  vie, n'en 
font  point  plus  agréables  àDieu.Q_iie  fera-ce 
doncques  quand  il  y  aura  ce>  ûipcllitions  vi- 
leines  &  brutales, par  Icfquelles  les  homes  per 
uertiflent  du  tout  le  vray  feruice  de  Dieu, corn 
me  nous  voyons  en  la  PapautéfSi  les  Papilles 
veulct  feruir  Dieu,&  bien,  s'ils  ont  avenir  au 
temple,  quand  ils  entreront  là, il  faut  de  l'eau 
bénite, qui  ell  pour  cfTaccr  leur  Baptefme  en- 
tant qu'en  eux  ell.  O.it-ils  ainfi  blafphtmé 
Dicu?ils  s'en  iront  profternerdeuant  vn  mar 
jnouzet.  Voila  vn  (acrilege  exécrable. Apres, 
ils  iront  adorer  leur  grand  Dieuqui  repofcen 
leur  boite,c'cft  à  dire  l'idole  leplusvilein  qui 
foit.côbien  qu'il  ne  foit  guère-;  grand, vn  nior 
ceau  de  pain  ou  d'oublié:  tant  y  a  que  l'Ii.m- 
ncur  du  Dieu  vniant  icra  l.i  attribue  àceft  ido 
le.Apres'ihaurôt  leurs  chSdelles,&  leurs  cn- 
cenfemcns,&  tous  ces  menus  bagages  qu'ils 
ont  iniiétez,quine  f-jnt  linon  que  corruption 
du  vray  feruicc  de  Dieu. Ce  ne  font  pas  donc 
feulement  exercices  corporels  oncles  fiiper- 
flition'sde  la  Papauté.maisce  fontiniientions 
q  le  diable  a  forgées  afin  d'abolir  le  vray  fer- 
uicc de  Dieu,&  de  mettre  en  allant  des  chofcs 
qui  font  du  tout  répugnâtes  à  fa  purt  Parole. 
11  eft  vray  que  l'abus  le  plus  deteftabie  eft  ce- 
ftuy-ci,que  les  Papilles  par  ce  moyen  -la  veu- 
lent obliger  Dieu, qu'il  leur  fcmbleqw'ils  font 
beaucoup  pour  luy  ,  &  qu'il  fera  tenu  de  leur 
en  rendre  loycr.Maistâi  y  a  qu'on  voit  com- 
me en  tout  &:  par  tout  les  Papiftes  font  bien 
loin  de  ce  que  traittc  ici  fainft  Paul.Ileltviav 
que  c'eft  délia  vn  vice  en  ceux  que  fainft  Paul 
condamne:  mais  les  Papilles  en  ont  beaucoup 
déplus  exorbitans.  Et  ainfi, puis  que  S.Paul  a 
condîné  ceux  qui  veulent  par  au/leritc  de  vie, 
&  par  chofcs  fcrablables  feruir.iDicu.cobien 
qu'ils  ne  facent  run  qui  foit  cotre  l'Etriture 
uiutie.qu'ilsn'ayJt  point d'idolatiicj  en  eux, 


que  iera-ce  quand  les  hommes  feront  Ju  pi* 
qu'ils  pourront.  Se.  que  le  feruice  de  Dieu  qui 
doit  eltre  fpirituel,fera  côuerti  en  des  badina 
ges,en  des  farceries,&  en  des  chofes  que  Dieu 
reprouue  du  tout  par  fa  Parole?  Voila  pour- 
quoy  l'ay  dit  que  celle  doftrine  eft  bien  ne- 
cefTaire  quand  elle  fera  obferuee  comme  elle 
doit.Ainli  notons  que  celuy  qui  cht-rche  d''ho 
norerDicu  en  lîmplicité  de  cccui,cobien  qu'il 
n'.iit  p  jint  grades  pompes  fciô  le  môde.qu'ii, 
ha  tout  ce  qui  doit  fuffire.Et  au  reile,ceux  qui 
voudrôtauoir  grand  luftre  &  grande  pope, 'il 
elt  vray  qu'ils  pourrôt  eftre  pnfez  S:  honorez 
du  monde, &pcn  fera -on  qu'ils  aycnt  des  ver- 
tus admirables, mais  tout  cela  n'eft  que  fumée 
&:menfonge  deuant  Dieu.  Ceci  fera  encores 
mieux  entédu  par  la  côparailbn  q'j'5  peut  fai- 
re de  ceux  qui  s'addônentainlî  àdes  cercmo- 
nieî,&  de  ceux  qui  feruét  .i  Dieu  en  pure  (im- 
plicite.Prenons  de  ces  moines  qui  eftovcnt  le 
temps  palTé  deuant  q  lacnnfulîon  Papale  fuft 
venue  au  môde:nous  auij-.  délia  dit  qu'ils  n'a- 
uoycnt  point  vne  fauffe  doctrine  côme  ont  au 
ioLird'huy  les  Papiftc'.:ils  ii'auojct  point  auf 
fi  les  fuperftitionî  qje  rEfcriturc  faincte  con 
damne, mais  lU  auoyent  celle  grande  rigueur, 
qu'il  leur  fembloir  qu'ils  ne  pouuoyciit  allez 
;  doter  leur  chair.En  quelle  forte?  l'ay  .'.ileeué 
qu'ils  n'ofoyét  pas  mefines  Ce  coucher  fur  ter 
re.mais  fc  tenoye't  debout:fiquelqu'vn  man- 
geoitdu  pâin,c'tftoit  en  le  pelant  à  demi  on- 
ce,ou  à  vn  quart  pour  iour:&  beaucoup  n'euf- 
fcn:  ofc  mâger  vne  miette  de  pain.  Et  puis  ils 
eftoyent  lifols  qu'ils  ne  vouloyét  point  par- 
lcr:c5mc  cela  eft  récité  en  Phiiloire  Ecclcfia 
ftiquepourvne  gr.ide  vertu, qu'vn  moine  vou- 
lant biéprattiqucrle  Pfeaume  que  nous  allons 
chanté  ce  matin  ,  aefté  feptans  {ans  parlef. 
Voy.ît  celaon  cftoit  raui  encftonncniê::Com 
ment?voila  vn  tel  bô  hermite  qui  eft  côme  ra- 
ui en  fainclcté,  on  voit  bien  qu'il  a  pleinemct 
renccé  au  monde, q  fi  fa  propre  fœur  va  à  luy, 
il  ne  luy  parlera  pas.O  quelle  vertu  l  Et  puis, 
quand  on  voit  q  ces  bônes  gés  ne  s'oient  pas 
coucher, qu'ils  ii'ofent  pas  m.îger  no  feuleniét 
de  la  chair,mais  du  pain.qu'iK  n'ofét  boircde 
l'eau  la  moitié  de  leur  foui ,  qu'ils  n'ofent  pas 
inefniedifccincr  entrevne  eau  de  fontaine, ou 
quelque  eau  qui  eft  troublée  ,  ne  voila  point 
grand' chofe  ?  Nous  voyons  donc  quand  les 
hqmes  fe  font  occupez  à  telles  chofes,  qu'on 
les  a  cleiicz  par  dcflus  les  nues,  qu'on  a  prifé 
beaucoup  cela.  Mais.ccpendant  que  nous  prc 
rions  des  pouies  Laboureurs  qui  feront  en 
leurs  maifons. Voila  vn  homme  qui  aura  char 
ge  d'cnfans,  il  aura  grand  befoin  &  necefsité, 
&  pourtant  il  faut  qu'il  s'efforce  iufquesau 
bout  pour  gagner  fa  poiire  vie:  quand  il  vien- 
dra en  (â  niatlbn  ,  vn  enfant  crie  ,  l'autre  le 
fafche,  l'autre  eft  malade  :  &  bien  il  faut  que' 
lepoure  hf^mme  fupporte  toutes  ces  char- 
ges-Ja  ,  &  n'aura  pas 'fouuentesfois  de  quoy 
fe  nourrir  &  luy  &  fa  fimille:&  bien,le  poure 

hom 


P/..r.3?. 


SVR    LA    I.    A    TÎMOTH. 


rpî 


liôme  fe  recômanle  A  Dieu  il, va  faire  fon  la- 
beur Ht  piiis.cju.ld  il  m.ige,&  qu'il  lia  dtquoy 
l'tûiSilanter  ,  :1  cogiioift  qr.e  le  labeur  de  i'es 
mains  eft  bcnic  de  Dieiulur  cela  il  i'en  va  cou 
cher ,  &  s'il  lia  des  falcherics,  illes  remet  en 
Dien,&  les  hiy  recôniande:  &  quand  il  prend 
fon  repos ,  ce  n'eft  pa*  feulement  afiaque  le 
rcAedefa  vieilfoit  plu.difpos  àcrauailler, 
mais  afin  d'elhe  recueilli  au  lepos  qui  no'  eft 
apprefté  au  ciel.Et  bié,ce  labeur-Ia  n'iia  poTt 
grand  luftre, ce  fenible.Apres, voila  vn  home 
luechanique  qui  trauaillcra  de  fes  niain<:&  en 
cores  qu'il  ait  prins  beaucoup  de  peine, fi  eft- 
ce  que  bien  fouuent  il  n'aura  pointdequoy  fe 
fubftâter.mais  ilpaflèauiour  la  iournee.il  bé- 
nit Dieu  qui  luy  donne  fanté:il  fe  confolc  ce 
pendant,  car  ilcognoift  que  fa  vie  eft  agréa- 
ble à  Dieu:côbien  qu'il  foit  mefprifé  du  mon 
de,&  qu'on  n"en  tiene  pas  grand  conte,  fi  eft- 
ce  qu'il  cognoift  ,  Tout  ceci  eft  accepté  de  la 
main  de  Dieu.Q^and  nous  ferons  comparai- 
fan  de  ces  deux-la  ,  nous  verrons  mieux  l'in- 
tention de  fainû  Paiilqund  i!dit,Q^*/dfrd/« 
te  de  Dieu  eft  -vtile  .î  toutes  cbofcS.  Il  eft  vray 
que  cela  fera  côtemptiblc  au  monde, ou  n'ap- 
perçoit  point  que  vaut  la  iimplicité  d'vn  po- 
ure  idiot  ,  on  ne  fera  point  grand  bruit  quand 
il  fe  tiédra  quoy  en  fon  mefnage  ,  on  n'eftime 
rien  cela  :  mais  cependant  voila  des  f^crifîces 
qui  font  précieux  àDieu.  f^n  cotraire.ccix  qui 
font  degrans  agios  ,  qui  auront  de  belles  pa- 
rades,qui  fcrontainfiprifez  du  monde,  &que. 
foHt-ils  ?  Le  principal  leur  défaut:  car  ils  ne 
donnent  point  de  lieu  à  ce  que  nous  auons  dit, 
afcauoirde  regarder  droit  àDieu  pour  rnettre 
leur  fiance  en  luy,&  l'inuoquer  en  pureté  de 
confcience.Puis  qu'ainfi  eft,  notons  bien  .]Ue 
quand  vn  homme  cheminera  en  rondeur  de 
caur,&:  qu'il  mènera  vnevie  fimpîe,voire  co- 
gnoiflànt  qu'il  eft  deuant  Dieu,que  nous  fça- 
chions  queceluy-la,  combiéque  le  monde  ne 
le  prife  gueres.toutesfois  eft  compagnon  des 
Angcs,&q  lafimplirité  quieft  en.luy  eft  beau 
coup  plus  vertueufe  que  tout  ce  qui  eft  de 
grand  monftre  deuant  les  hommes,  &  qu'on  a 
accouftuméde  prifer.Puis  qu'ainfi  eft(comme 
i'ay  dit)  tenons-nous  là, &  que  nous  y  appli- 
quions toute  noftreeftude.  Maintenant  nous 
voyon.',  qu'il  ne  nous  faut  plus  iugerdu  ferui- 
ce  de  pieu  félon  l'apparcce.Et  voila  en  quoy 
les  Papiftes  s'abufent  ;  car  ils  fe  plaifenten 
leurs  badincries  :  &'pourceque  tout  ce  qu'ils 
ont.confifte  en  belles  miçies ,  &qu'vn  chacun 
ha  de  gras  apoareils  pour  feruir  Dieu,&  pour 
eftre  pjuseftimé  ,  ils  s'endurciflent  toufiours 
de  plus  en  plus  en  leurs  fuperftitiôs.Ôrau  con 
traire,  fouffrons  den'eftregueres  priftz  felô 
le  monde,  qu'il  ne  nous  chaille  s'il  ne  nous 
faut  point.de  grandes  pompes  &  brauades ,  & 
que  nqusne  monftricMis  point  nos  eftandars 
}>ournouifaireveoirdelGin:c5bicn  que  tout 
cela  nous  défaille,  c'eft  tout  vn,  contentons- 
soutde  cheminet  en  cefte  londeux  &  fimpU- 


citéqiie  Dieu  demande,  car  c'eft  au  fvi  où  tout 
fon  feiuicf  coiififtc.Quiind  vn  hômcfera  forè 
deuoir,  encores  qu'il  foit  poure,  &  qu'il  n'ait 
point  des  mignardifes  beaucoup,  qu'ii  n'ait' 
point  des  laçons  de  faire  exquifes  pour  atti- 
rer la  faneur  des  homes, fi  cependant  il  chemi 
ne  droit,  &  qu'il  regarde  ,  C'eft  à  mon  Dieu  à 
qui  ic  doy  feruir:  &:  que  fur  cela  il  l'inuoque, 
qu'il  fe  repofe  du  tout  fiir  luy  ,  qu'il  chemine 
en  û  crainte  &  en  l'obeiflance  de  fa  Parole, 
encores  qu'il  y  ait  beaucoup  de  chofe squi  luy 
défaillent .  moyennant  qu'il  ait  fon  afFeftion 
droite  à  Dieu, encores  q  tout  le  mode  le  mor- 
de, qu'il  ait  beaucoup  de  fafcheries  &  de  mo- 
leftes,&  que  mefmes  il  ne  foit  pas  eftimé  beau 
coup, qu'il  fe  contente  neâtmoins  de  cefte  fînj 
plicité-la:car  lacraintedeDieu(dit  S.  Paul) 
eft  vtile  à  toutes  chofes  :comme  s'il  difoit,que 
c'eil  la  vertu  des  vertu'.c'eft  le  comble  de  tou 
te  perfection.  Et  quand  les  hommes  voudront 
bien  ordonnerkurvie  ,  qu'ils  ne  s'occupent 
point  à  beaucoup  de  menus  fatras, mais  qu'ils 
s'eftudient  à  fuyiire  la  pure  religion  ,  laquelle 
côfifte  en  ceftepraintede  Dieii,&cnceftefim 
pliçité  de  cûfur comme  non;  auons  dif."  Or  il 
adioufte  que  quand  nous  ferons  ainfi,nous  au- 
rons cognoiflance  que  Dieu  prut  fuffiretant 
à  la  vie  prcfen  te  qu'à  celle  qui  n'eft  pas  enco- 
res apparue. Ceci  eft  pour  nous  donner  coura 
ge,  afin  que  nous  ne  doutions  point,  moyen- 
nant que  nous  fermons  à  Dieu  en  pu;-eté  de 
ca-ur,que  tout  n'aille  bien. Et  pourquoY?QiiJ 
eft-ce  que  nou  demandons  plus  finon  que  no 
ftre  Dieu  nous  gomierne  ,&  qu'il  ait  vilfoia 
paternel  de  nous, afin  de  nous  aider  au  befoin, 
de  no'deliurer  de  toutes  nos  necefsitc2,brief 
de  nous  tenir  la  main  forte,  tellement  q  nous 
fnyons  toufiours  gouuerneï  &  garentis  par 
Iny?  que  demandons-nous  plus  >  ne  voila  paî 
vne  félicité  &  vne  ioye  parfa:tcrQj;ard  nous 
irons  ainfi  en  rondeur  &  intégrité  de  coeur, 
combien  que  nous  n'ayons  point  vne  vcmi 
apparéte,que  nousnc  foyons  point  prifczdu 
mode, que  nous  n'ayons  point  vne  fi  belle  ap- 
parence que  les  hommes  la  demandent  ,  c'eft 
allez  que  noftre  Seigneur  nous  ait  pour  agréa 
blés,  que  nous  foyons  afleurez  de  (on  amour, 
&  que  nous  conuerfions  en  ce  monde  f^achSs 
qu'il  ne  nous  dçfaudra  point,  &  qu'en  fa  fin  il 
ne  nous  recueille  en  ceft  heritape  telefte  qu'il 
nous  a  promis.,  Or  puis  qu'ainfi  eft  que  fainft 
Paul  nous  a  ici  voulu  exhorter  à  la  crainte  de 
Dicu,en  nous  inonftrant  qu'elle  apporte  tour 
bien  &  toute  félicité  auec  elle  ,  que  nous  ap- 
prenions denous  remettre  là  quand  il  eft  que— 
ftion  de  régler  noftre  rie.  Carte  n'eft  point 
aflcz  pour  fuyure  Dieu  qu'on  plaife  aux  hon» 
mes,niais  il  faut  regardera  Dieurcar  lufques 
à  ce  quVn  homme  le  toit  ainfi  retueilli  ,  ia- 
maisil  ne  pourra  marcher  au  bon  chemin  ,  il 
ne  fera  que  vaguer  tout  le  temps  de  fa  vie. Ap 
prenons  donqucs  de  régler  noftre  vie  felop 
Dieu^votxecl>eIchans  eniuy  tout  noftiebieiv 

BJi. 


Ijtf 


SERMON    XXXH. 


comme  taùi  c*eft  là  qu*il  côlifte ,  &  que  nous 
feroBs  trompez  en  le  cherchant  ailleurs.  Or 
cependant  nous  auont  diligemment  à  noter 
«eque  faintk  Paul  dit, Qu^en  craignant  Dieu 
floniculcmct  nous  forames  alTeurer  de  la  vie 
à  venir.raais  de  celle  vie  caduque.  Il  eftvray 
que  le  principal  que  nous  deuôs  délirer  ,c"eft 
que  Dieu  puis  qu  il  nous  a  adoptez  pour  fcs 
cnfans,  ne  permette  point  que  nous  foyons 
iamais  banis  ni  exclus  de  fon  heritage.Il  tant 
donc  querliomnie  fidcle  tende  de  tout  fon 
cœur  ,  de  tout  fon  delîr,  &  de  toute  fon  atfe- 
ftion  â  cefte  vie  celefte,  &  que  nous  portions 
patiemment  tes  miferesjopprobres  &  fafche- 
xies  de  ce  monde,  &  raefines  que  nous  appre- 
nions de  nous  glorifier  en  nos  tribuiations, 
comme  fainû  Paul  en  parle  au  quinzième  des 
Romains.  Quand  donc  nous  ferions  les  plus 
mal-heureux  du  monde,  lî  faut-il  prédrc  cou 
rage:corame  de  fait  fainfl:  Paul  confeire  bien 
au  quinzième  de  la  première  aux  Corinchiés, 
que  fi  on  eûime  les  enfans  de  Dieu  félon  la 
condition  prefente ,  ils  ferôt  plus  inifcrables 
que  les  incrédules.  Et  ainfi  il  nous  faut  bien 
addonner  noftrealfeftion  à  la  vie  celefte  ,  & 
pafler  outre  ce  mode. Mais  tant  y  a  que  nous 
deuons  cependant  prendre  courage  en  la  bon 
té  de  noftre  Dieu.d'autant  qu'il  nous  veut  ici 
■entretenir, &  auoir  le  foin  de  nous  cependant 
que  nous  fomines  en  ce  pelerinage.il  eft  vray 
que  de  prime  face  on  trouueroit  ici  quelque 
contradiûion ,  d''autant  qu'en  cefte  fentence 
que  r.iy  alléguée  de  fainft  Paul  ,  &  .\  l'e.tpe- 
ricnce  qu'on  voit  à  l'œil ,  il  nous  eft  monflré 
<jiie  fi  on  nous  cô'îdcre  quat  au  monde ,  nous 
lommes  plusraiferables  que  toutes  créatures. 
Or  notons  qu'vn  morceau  de  pain  vaudra 
plus  àvn  Chrtftien,que  toute  l'abondîcedu 
monde  àvn  incrcdule.Car  vn  incredule,com- 
■feien  qu'il  mange  &  qu'il  gourmande  les  biens 
de  Dieu,  il  ne  fçait  dont  il  lésa  reccus ,  &  fa 
confcience  cft  toufiours  (  comme  nous  auons 
dit  par  ci  deuant)comme  bruflee  d'vn  caute- 
re.qii'il  n'y  a  point  de  repos. Et  qu'eft-cedôc 
que  tout  le  bien  qu'ont  les  contempteurs  de 
rXieu?QuJils  ayét  tout  à  fouhait.que  leur  vie 
Toit  eftimee  heureufe  tant  &  plus.helas  il  n'y 
aquepôuretéeneux  :  car  ils  ont  vn  ver  qui 
les  ronge  au  dedSs.ils  oiit  leurconlciéce  pro 
f  re  qui  Tes  tourmente-car  puis  qu'ils  ne  regar 
dét  pointa  Dieu, il  eft impofsible qu'ils puif- 
fent  rouir  de  fesbié*&de  fes  bénéfices. Et  au 
contraire.quandles  fidèles  reçoiuét  les  biens 
qu'ils  ont  coine  delamain  de  Dieu  pour  luy 
en  faire  recognoiflance  ,  voila  comme  il  eft 
dit  qu'ils  ont  les  promeflès  de  la  vie  prefente. 
Mais  il  y  a  encores  plus:  car  ce  n'cft  point  le 
tout  d'auoir  les  biens  en  main, mais  il  faut  e- 
ftre  alTeurez  qii'aii  nlilieu  di  la  poureté.au  mi 
lieu  dés  dangers  &  de  la  mort  mefmé  ,  Dieu 
nous  fauuera  toulîoui-s.  Q^âd  les  infidtles  au 
J-byent  tout  ce  queleur  cœiir'-porte,  (îeft-ce 
qu'il  leur  fembl'c  que  terre  leur  d'oiuc  faillir: 


ils  font  en  fouci  Si  en  inquiétude  perpétuelle.' 
Ainfi  donques  ils  ont  leur  Jvie  comme  pen- 
dante d'vn  filet.ainll  que  dit  Moyfe  :  &  n'au- 
ront pas  feulement  les  agitations  qu'auront 
les  fidèles  quand  ils  fe  trouueront  enferrez, 
mais  ils  ferot  là  du  tout  effarouchez,qu'ils  ne 
fçauront  à  qui  recourir,ni  à  quoy  fe  tenir,en- 
cores  qu'ils  foyent  bien  munis  félon  le  mon- 
de.Au  contraire.combien  qu'il  femble  que  les 
fidèles  foyent  tellement  agitez  qu'ils  n'ayent 
point  vne  feule  minute  de  repos, tant  y  a  que 
ils  ne  laiflent  point  d'auoir  leurs  confciences 
paifîbles,d*autât  qu'ils  cognoiflent  que  Dieu 
leur  eft  propice.Et  côbien  qu'ils  ayentbeau- 
coup  de  fafcheries  &  de  moleftes ,  tant  y  a 
qu'ils  ne  toberont  iamais  que  fur  leurs  pieds. 
Et  pourquoy?   Car  nous  fçauons  qu'il  eft  dit 
au  Pfeaume  ,  que  s'ils  tombent  fept  fois  le 
iour,  qu'ils  feront  rcleuezneantmoins  :  tou- 
tesfois  &  quantes  qu'il  nous  aduiendra  quel- 
que mal,  nous  fçauons  que  nous  auons  noftre 
garent  au  ciel  pour  nouS  en  deliurer  .  Ainfi 
donques  nous  marcherons  hardiment  parmi 
tous  les  dangers  de  ce  monde,  quand  nous  en 
ferons  enuironncz  &  circuis  déroutes  pars. 
Et  pourquoy?  fçachans  que  Dieu  a  fa  main  e- 
ftenduc  pour  nous  garentir,  &  qu'il  cft  noftre 
protcdeur.  Et  ainfi c'cftvn  priu:legeineftima 
ble  que  d'auoir  cefte  afleurâce  que  fainft  Paul 
attribue  ici  aux  enfans  de  Dieu,  quand  ils  che 
minent  en  bonne  confcience,  tellement  qu'ils 
cognoiftrôt  que  cefte  promclTe-ci  n'eft  point 
fruftratoire.  Et  ainfi  prenons  courage,  &•  paf- 
fons  hardiment  parmi  tous  les  troubles  de  ce 
monde,bata!llons  contre  toutes  les  tciuatiôs 
de  cefte  vie  caduque, fçachans  que  noftre  Sei- 
gneur nous  y  maintiendra  par  fa'vertu,iufques 
à  ce:que  nous  en  ayons  pleine  viftoirc:  &:  con 
fermons-nous  de  plus  en  plus ,  comme  lainft 
Paul  dit  que  nous  fomraes  efprouuezpar  les 
affliftions ,  afin  que  nous  apprenions  d'eftre 
toufiours  plus  conJlans  en  foy  &  en  efpe- 
tance  ,  fçachans  que  l'efperance  ne  confond 
iamais.  Voila.,  donques  ce  que  nous  auons  à 
retenir  pour  maintenant  de  ce  palïage,  en  at- 
tendant que  le  refte  fe  dcduife  plUs  à  plein. 

O  R  nous-hous  proftetnerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  fai- 
le  la  grâce  qu'eft.îs  abbacus  en  nous-mefmes 
&  humiliez  pourla  cdgnoiflance  de  nos  of- 
fen  fes, nous  puifsions  geiiiir  en  forte  qu'il  ait 
pitié  des  miferes  au  fquelles  nous  femmes  cô- 
ftituez .  iEt  que  cependant  il  nous  touche  tel- 
lement pai  fjn  fainft  Efprit ,  que  nous  ne  de- 
mandions finon  de  nous  ranger  à  luy  ,  &  que 
nous  ne  foyons  point  fi  fols  de  nousarrefter 
àcequé'bohnvus  fémblc  ,  veii  que  tout  cela 
n'eft  rien  c'ftimë  deuànt'luy  ,'  mais  qiie  nous 
regardions  â  fa  bohneVoIônté  ,  pour  nous  y 
conformer  .  Et  d'au'tant  qu'il  nous  appelle  I 
ce  leruice  fpirituel  qui  gift  en  pureté  de  con- 
fcience 


s  VR    LAI.    A 


T I  M  O  T  H.  IS7 

Aii,&  à  laquelle  il  nous  faut  tnaintenantarpi- 


fcienee ,  que  nous  mettioni  là  tout  noftre  de 

tir.Sc  que  nous  y  l'oyons  difpofez  de  plus  en  rer.    Que  non  feulement  il  nous  face  cefte 

plus ,  iufques  à  ce  que  nous  foyons  confor-  grace.mais  aufsi  à  tous  peuples  &  aa«ions  de 

mes  à  cefte  iuftice  qui  elt  aux  Anges  de  para-  U  terie,&c. 

SIXIEME     SERMON     SVR     LE 

Q^V  ATRIEME    CHAPITRE. 

p      C* ejï parole  certaine, (f  digne  d'ejlreentiereittentreceuc. 

10  Car  pour  cela  nousfommei  en  fafchene ,  çy  fômmes  yitupe- 
re2;}pource  que  nous  efperons  au  Dieu  yiuantj^ui  ejl  lefauueur  de  tous 
hommes , principalement  dcsjideles. 

11  Commande  ces  chofes,0'  l^s  enfeigne. 


.  Ainû  Paul  auoit  dit  que  les 
I  hommes  craignis  Dieu  non 
1  feulement  feioyent  aflèu- 
rez  de  la  vie  celefte  ,  mai» 
I  aufsi  que  Dieu  les  gardera 
I  en  ce  monde ,  &  qu'il  aura 
toufiours  pitié  d'eux  ,  &  fe 
monftrera leur  Père. Or  nousauons  bien  mon 
ftréquecen'eitoit  point  où  les  iîdeles  fe  doi 
uent  arreftcr,  qu'à  ce  qui  nous  eft  promis  tou 
chant  cefte  vie  caduque:car  il  nous  faut  touf- 
ipurs  tendre  i  ce  but  du  Royaume  celefte  où 
Dieu  nous  appelle  &  nous  attire  :  mais  les 
biens  qu'il  nous  diftribue  en  ce  monde, nous 
fontcomme  aides  pour  nous  faire  marcher  à 
luy  ,  d'autant  que  li  nous  appréhendons  (a 
bonté,  ou  paur  le  moins  défia  nous  en  itntôs 
quelque gouft.  Et  ainfi  c'eft  à  cefte  occafion 
d'afpirer  plus  outre,  afin  que  nous  foyons  raf 
fafiezcftaiis  pleinement  conioints  à  luy.voy- 
ans  fa  face  laquelle  maintenant  nous  ne  pou- 
uons  encores  contempler  pour  noftre  infir- 
mité &  rudefle.Or  ccpendant.pource  que  les 
fidèles  font  de  pire  condition  en  ce  monde 
queles  incrédules,  &qu'il  lemble  propremét 
que  Dieu  les  mette  ici  comme  à  l'abandon, 
qu'il  ne  luy  chaut  de  ceux  qui  le  fcruent  & 
honorent.mais  qu'il  leur  tourne  le  dos,  &les 
abandonne  au  befoin  ,  fainil  Paul  pour  ofter 
vn  tel  fcandale  dit ,  Q_ue  bien  ift  vray  que 
nou^fommes affligez  &en  opprobre,  mais 
£ue  cela  n'empelche  point  que  Dieu  ne  foit 
gardien  de  nos  vies  ,  &  que  nous  ne  foyons 
toufiours  garantis  par  luy,  &  que  cefte  doftri 
ne  ne  foit  tenue  vraye,  qu'if  a  noftre  falut 
pour  recommandé.  Voila  donc  à  quoy  S.Paul 
prctéd, c'eft  d'ofter  la  doute  qu'5  pouuoit  fai 
re  touchant  cefte  fentence  que  nous  auons 
veue.Q^Dieua  promis  à  ceux  qui  leferui- 
ront  en  pure  c  infciéce,  d'eftre  leur  Sauueur. 
Si  on  allègue, Cément  cela?onvoit  tout  Top- 
pofite.  Car  ii  vn  homme  de  bien  s'efforce  de 
marcher  comme  il  d  it.on  le  molefte,  onl'in 
iune,  il  fera  tourmenté',  dtaiTuieitiàbeau- 


eaunw 


coup  de  fafcheries.Dequoy  donc  luy  fert  d*« 
uoir  cheminé  droitement?  comme  nous  voy- 
ons que  cefte  tentation-la  eftaduenueà  Da-  p/>^« 
uid,C'eftdÔc  en  vain  que  l'aylaué  mes  maint,  _»  ,, 
que  l'ay  eftudié  à  toute  pureté.  Carcepédant 
il  voit  que  Dieu  le  dclaifle, comme  il  femble. 
U  eft  donc  comme  esbranlé  ,  &  ne  fçait  plus 
que  dire.  Or  afin  que  nous  puifsions  repouf- 
fer vne  telle  tentation,  fainâ  Paul  nous  ame- 
né ici  deux  poinû/^  qui  font  bien  à  noter.  En 
premier  lieu,dit-il, quand  nous  foufFrôs.Ojï 
if.:it!.jnt  <ju  nous  ef^  Tes  a»  V  itu  y'uaitt. Com 
me  s'il  difoit ,  Voyons  la  cauft  de  nos  affli- 
ûions,  &  nous  aurons  dequoy  noos  confolert- 
car  Dieu  nous  veut  exercer  quand  nous  efpé-' 
rons  en  luy,  il  veut  efprouuer  fi  nous  fommes 
vaillans  gendarmes  pour  demeurer  toufiours 
conftans.  Voil.idôc  pourquoy  il  permet  que 
nous  foy6satfligez,qu'onfe  mocquedenous, 
que  mefmes  on  nous  deldaigne.  Puisque  la 
volonté  de  Dieu  eft  telle,  confolons-nous  en 
cela. Et  puis  il  y  al'ilTje  quant  &  quant:  Of«» 
fdit-il).yî  fauuettrde  tous  hommes:pîT  plus  for 
te  raifon  il  eft  Père  de  ceux  qu'il  a  prins  en  fz 
garde  ,  &  qui  fe  remettent  du  tout  à  luy.  Ici 
donc  fainâ  Paul  fepare  nos  affligions  d'auec 
celles  des  incrédules.  Et  commétîC'eftà  eau 
fe  que  l'ifTue  leur  eft  bonne ,  que  s'ils  fe  font 
employez  au  feruicede  Dieu  eftans  affligez, 
c'eft  vne  arteurance  de  leur  foy.  Or  fi  Dieu 
deliure  tous  hommes  ,  nous  oubliera-ildef. 
quels  iflavnfoin  fpecial  ,  pui  que  nous  fem- 
mes de  fa  maifon  ,  &  qu'il  nous  a  adopter 
pour  fes  enfansfAinfi  donc  il  faut  conclure  U 
delTis,  combien  que  les  fidèles  foyent  vilipea 
dez  en  ce  monde,côbien  qu'ils  endurent  beau 
coup  de  miferes,  toutesfois  ils  ne  lailTent  pas 
pourtant  d'auoir  les  proraeflès  que  Dieu  a 
le  foin  d'eux,  &  que  leur  falut  luy  eft  pour  rc 
commandé,&  qu'il  les.garentirade  tous  Jeurs 
m'aux:&  là  deflus  nous  voyons  que  rien  ne  di- 
minue noftre  félicité.  Quand  donc  vn  hom- 
me s'addonnera  au  feruicè  de  Dieu,&  qu'il  ne 
demandera  finond'acheuer  le  cours  de  la  vie 

B.iii. 


ipS 


SERMON     XXXIII. 


en  pure  confciéce,  il  a  tout  ce  qu'on  peut  dé- 
lirer. Et  pourquoy?  Car  en  ce  monde  Dieu 
penfera  de  kiy  ,  &  quoy  qu'il  liiy  aduiene  ,  iî 
eft-ce  qu'il  Icntira  par  etfeû  qu'il  eft  en  bon- 
ne main  &  en  bonne  garde  quand  il  a  fon  ga- 
rent au  ciel.  Et  puis  le  principal  eft  ,  quand 
nous  fçauons  où  eft  noftre  héritage  &  noftre 
repos  éternel.  Caries  biens  dont  nous  pou- 
uons  jouir  en  ce  mode, ne  font  pas  pour  nous 
y  retenir.mais  pour  no*  y  faire  pafler.Q.u,id 
Tn  voyager  fera  aflez  bien  traitté  en  vn  lo- 
gis,ce  n'eft  pas  qu'il  y  demeure  pourt.ît.mais 
celaluy  doit  donner  courage  de  paracheuer 
fonchemin  tant  mieHx:ileftoitlas,il  fe  rcpo- 
fe  :  il  auoit  faim  ,  &  il  a  dequoy  fe  repaiftre. 
Ainfi  donques  il  fe  délibère  tant  mieux  de 
pourfuiure  fon  chemin. Et  ainfi, quand  noftre 
Seigneur  nous  donne  quelques  commoditez 
en  ce  monde  ,  &  que  nous  fommes  fupportez 
de  luy.c'eftafin  que  nous  foyôs  tant  mieux  ai 
guillônez  pour  pourfuiure  noftre  courfe,  ten 
dans  toufiours  au  but  où  il  nous  appelle.  Or 
nous  voyons  donc  à  quoy  nous  deiions  appli 
quer  ce  partage  de  S.Paul.quâd  ildit,C>»'  <''fl 
fnf  farole  certaine ,  ^ue  nous  fommes  ajfligex, 
(^innpfrohre  ,  d  aHtaut  ijue  nous  eÇfirons  an 
Dieu  ^•iuan t. Or  en  premier  lieu  il  nous  mon- 
ftre  quelle  doit  eftre  la  caufe  de  toutes  les 
_.  fafcheries  que  nous  endurons  en  ce  monde, 
"■      corne  aufs  i  S.  Pierre  en  parle difant.QM  nul 

■  de  vous  ne  doit  foufFrircôme  larron, ou  meur 

trier,oupaillard,maiscômeChrfftié,&qu'en 
cela  nous  deuôs  glorifier  Dieu  quand  il  nous 
fait  cefthôneur  de  porter  fa  marque,que  no* 
ne  fommes  point  punis  pour  nos  péchez, mais 
que  pluftoften  nos  affligions  &' angoilles  il 
nous  recognoift  &  aduouc  pour  liens.  Voila 
donc  comme  nos  pafdons  font  côme  iâcrees 
&  honorables  deuant  Dieu,  quand  nous  endu 
rons  pour  efperer  en  luy.  Et  cefte  caufe  nous 
,  fepare  d'auec  les  iniques:car  tous  les  contem 

pteurs  de  Dieu  ,  &  toutes  gens  profanes  qui 
ne  penfent  qu'au  mode,  pourquoy  eft-ce  que 
ils  fouffriront  finon  pour  leurs  cupiditcz  en- 
ragées ,  finon  pour  leurs  iniquitez,  pour  leur 
Kiefchante  confciéce,  pour  leurs  difloUitiôs, 
pour  leurs  folles  entreprinfes  &mefchates, 
pour  leurs  mefchantes  traffiques  ,  pour  leur 

'  cruauté,^  chofes  femblables?  Or  ccux-h  fôt 

maudits  en  leurs  affliûions.Mais  quand  Dieu 
BOUS  fait  la  grâce  qu'en  fouffrant  nous  por- 
tons fes  armoiries ,  nou^  auons  biendequcy 
nous  refiouir  en  cela:car  c'eft  rne  digniré  qui 
n'appartient  point  aux  homes  moi  ttls.  Vray 
eft  que  ceci  eftdur&eftrange  àThommc:  car 
nous  iugeons  toufiours  que  ceux  qui  foufFrét 
opprobre  ou  quelque  autre  fafckerie  font  mi 
ftrables.  Voire-,mais  tant  y  a  que  le  fainft  E- 
fprit  prononce  q  c'eft  vn  priuilege  que  Dieu 
fait  à  fes  enfans  ,  de  fouffnr  pour  fon  Nom 
t:  pour  fa  querelle.  Il  nous  faut  donc  ici  te- 
nir tous  nos  fens  captifs. Et  voila  auûi  pour- 
quoy (iiaù  Paul  met  cefte  preface,r4ri>i«  fd* 


le  (dit-il)c>'  J'^netTeflrereeeue  :  comme  s'il 
difoit,  Mes  amis,  il  eft  vray  que  finous  vou- 
lons croire  noftre  fantafie.nous  fuirons  touf- 
iours lespouretez,lcsatfliftions&  lescôtem 
nemens  du  inonde, car  cela  eft  contraire  À  i^o 
ftre  nature.  Mais  cependant  voici  noftre  Sei- 
gneur qui  déclare  que  ces  chafes  nous  font 
bônes,&  qu'il nou',  fait  grand  honneur quîd 
nous  pouuons  fouffrir  pour  luy:contentons- 
nous  de  cefte  fentence  ,  &arreftons-nous  là, 
&  ne  lafchons  point  la  bride  à  nos  fens  na- 
turels. Voila  donc  fainû  Paul  qui  veut  par 
cefte  préface  captiuer  tout  ce  que  l'homme 
peut  iuger  félon  la  chair,monftrant  que  pluf- 
toft  il  nous  faut  acquiefcer  à  la  fentence  de 
Dieu,  Que  nous  fommes  bien-heureux  quad 
nous  fouffrons  pourvue  querelle  iufte.Or  no 
tamment  il  dit,Pii«r«  que  nous  efpiros  an  Vieit 
■viitant. En  quoy  nous  auÔs  à  noter  ce  que  l'E 
fcrituredit  en  d'autres  paflàees  plus  i  plein, 
que  l'efperance  ne  nous  laiflera  iamaiscon- 
fus.Puis  qu'ainfi  eft  donc  que  la  caufe  de  nos 
atfliftions  eft  d'cfperer  en  Dieu  ,  ne  pepfous 
pas  que  nous  foyons  dcftituez  de  fon  aide  en 
tel  bcibin,ne  penfons  pas  qu'il  nous  reiette, 
combien  qu'il  dif'imule, combien  que  du  pre 
miercoup  il  ne  nous  donne  point  la  main,  ce 
la  ne  doit  pas  cftreprins  comme  fi  nous  e- 
ftions  du  tout  abandonnez  de  luy  :  car  cefte 
fentence  feroit  fauffe,  Que  les  hommes  ne 
feront  iamaisfruftrez  efperans  en  Dieu.  Et 
ainfi  regardons  là  toutes  fois  &  qiiante^  que 
nous  fommes  troublez  en  nos  affligions  ,  & 
que  noftre  foy  fera  comme  à  demi  vaincue, 
regardons, Et  comment?poure  créature, tu  es 
affligée,  mefmes  d'autant  que  tu  cfpcres  en 
Dicu.-piiis  qu'ainfi  eft,ne  penfes-tu  point  que 
c'eft  vn  examen  de  ta  foy  ,  &  que  ton  Dieu  Ce 
monftre  fi  parient  quand  il  te  tîent  de  fe<  do 
meftiques?   Ainfi  donques  il  faut  que  tu  fois 
fortrlié,&'  que  tu  ne  t'arreftes  point  à  l'appre 
henfionde  ton  fentiment  charnehil  fautdôc 
que  tu  te  confoles  en  cela,  d'autant  que  tue- 
fperes  en  Dieu  ,  Se  que  tu  es  affligé  pour  la 
caufe  qui  te  fepare  d'auec  tous  les  mefchans. 
Et  au  rtfte  ,  cognoiflons  (  comme  l'ay  défia 
dit)que  fi  l'efper.ice  que  nous  auôs  en  Dieu, 
eft  caufe  de  nous  faire  affliger,&  de  nous  met 
tre  en  opprobre,  que  cela  eft  contre  le  na- 
turel de  toutes  lesmiferes,  les  fafcheries,  les 
tourmens,&  les  trifteflès  que  n  ous  pourrions 
endurer.  Il  eft  vray  q  poiiretcde  foy,  d'eftre 
chafte  d'vn  pay<  à  l'autre,  d'eftre  de fpué  d'a- 
mis.de  pârcns,d'c (tre  affligé  &  mole  fté,  d'e- 
ftre tourmenté  &  iniurié  ,  d'eftre  morftré  au 
doigt  ii  mocqué  ,  que  toutes  ces  chofes-la  de 
leur  nature  font  adiierfitez  ,(  comme  on  le* 
nomme  )&  procedenide  Jamalcdtâion  que 
Dieu  a  mife  fiir  le  genre  humain  pour  le  pé- 
ché :  mais  quand  Dieu  nous  a  làit  la  grâce  de 
cOgnoiftre  qtie  nous  enduros  pour  fon  Nom» 
que  nous  fommes dcchifle2,emprifonncï:que 
on  no*  pillera  &  rauira  toute  noftre  fubftâce. 


SVR   LA   I.    A   TI  M  OTH. 


ii>9 


qne  nous  ferons  en  opprobre  à  cau/e  du  tef- 
tnoign.ige  de  fon  Nom.que  tontes  les  miferes 
que  nous  pourront  fouffrir,  nous  feront  con- 
uerties  en  noftre  contrairc:c'eft  afçauoir.que 
elles  nous  feront  tefmoignagede  l'amour  de 
noftre  Dieu.S:  qu'il  nous  adiioue  pour  fîens,& 
ratifie  l'adoption  qu'il  a  faite  pour  nous  tenir 
comme  fes  enfans.Or  ici  on  pourroit  alléguer 
qu'il  s'en  faut  beaucoup  que  les  fidèles  endu- 
rent toufiours  pour  le  nom  Je  Dieu:car  iour- 
nellement  l'expérience  monftre  que  nous  fom 
mes  chaftiez  pour  nos  péchez  :  &  l'Efcriture 
aufsi  le  porte,  qu'il  faut  que  le  iugement  com 
i.Vier.  nience  par  la  maifon  de  Dieu ,  voire  quand  il 
4-'7'  ■  cftquefîion  que  Dieu  corrigenos  fautes  .  Il 
femble  donc  qu'alors  ceci  ne  nous  appartie- 
ne  plus.  Il  eltvray  que  quand  nous  endurons 
pour  nos  pechez.que  celle  cololation  ne  nous 
peutfcruir  pour  cftre  appropriée  à  noftiev- 
iàgc,  c'eil  que  nous  enduros  pour  auoir  noftre 
eiperance  en  Dieu. Mais  notons  que  les  fidè- 
les aufsi  ne  peuuent  pas  tous  auoir  confola- 
tion  égale  en  leurs  miferes .  Ccluy  qui  endu- 
re pour  lès  maléfices ,  Dieu  le  veut  humilier 
iufques  là  qu'il  toit  confus  Si  abbatu,  qu'il  ait 
la  bouche  clole.Cehiy  qui  foutFre  &  eft  perfe- 
cuté  poUrle  tefmoignage  dcTEuangile,  peut 
leuer  le  front ,  &  fe  glorifier  en  ceft  honneur 
qui  luy  eft  fait ,  d'autant  que  Dieu  l'a  choilî 
pour  tefmoin  de  fa  vérité.  Voila  donques  vne 
confoLitiondiuerfe  entre  les  fidèles. Or  celuy 
que  Dieu  punira  pour  les  taute*;  qu'il  a  cômi- 
fes.ne  laillera  pas  d'eftre  bien-heureux  en  fes 
afflift'os.Mais  quoy.'il  ne  peut  paç  cftre  con- 
foléd'vnemefuie  pareille  que  font  les  Mar- 
tyrs qui  rendent  tefmoignage  à  l.i  venté  de 
Dieu  par  leur  fingVoila  vn  itt  m^que  nous  a- 
uons  à  noter .  Oï  cependant  il  y  -i  auhi  deux 
pointiv  qu'il  nous  faut  obferuer  à  l'oppolîte. 
L'vn  c'eft.que  ceux  qui  enduicnt  pour  le  nom 
de  Dieu,  doyucnt  cependant  c^gnoiftre  qu'il 
y  aurait  occafion  de  les  punir'pour  leurs  fau- 
tes quand  Dieu  les  voudroit  traitter  en  ri- 
gueur. Maisquoy  î  il  les  efpargne  ,&  ne  veut 
point  qu'Us  endurent  pour  les  fautes  qu'ils 
ont  commifes  :  &  cependant  il  veut  que  leurs 
pafiions  foyenc  honorables,  &- fe  conioint  là 
auec  euï.  Voila  donques  vn  Martyr  qui  fera 
au  feu, il  eft  viay  que  quand  on  luy  drtlle  vne 
potence  ouvn  gibet ,  cela  eft  plus  honorable 
que  ne  font  pas  tous  les  lîeges  de  la  uiftice 
(  qu'on  appelle)  qui  les  ont  condamnez  .  Car 
combien  que  le  liège  de  iufticc  foit  dédié  à 
Dieu,  toutesfois  les  iuges  qui  perfecutent  les 
enfans('eDicu,font  pires  que  les  brigafis.Car 
voila  le  lîege  dt  iuftice  qui  eft  pollué  par  l'hô 
me  inique  quand  il  fera  ainlî  plein  de  cruauté, 
qu'il  fera  exécrable  deuant  Dieu  :  &  le  gibet 
qui  de  foy  eftoit  plein  d'opprobre,  fera  plus 
honorable  que  ne  lira  point  le  throne  d'vn 
Roy  quand  il  aduoue  les  perfecutions  .  .Si  eft- 
ce  cependant  qu'il  faut  queceluy  que  Dieu  ap 
pelle  paiu-  rendre  tefmoignage  à  iavcritéjCo 


gnoiiTe,  Hclas  mon  Dieu,  il  y  a  tant  de  fautes 
en  moy.que  tu  pourrois  bien  pour  icelles  me 
punir  encores  plus  rudement  beaucoup,  &  ce 
que  tu  ne  le  fais  pas,  pourquoy  eft-ce,  finon 
que  par  ta  bonté  tu  me  côftitues  ici  four  main 
tenir  vne  caufe,la  dignité  de  laquelle  ne  ra'ap 
partient  pas?  Ay-ie  mérité  d'eftre  tefmoin  de 
la  doârinc  de  falut, d'eftre  comme  ton  procu- 
reur pour  maintenir  ta  caufe  ?  Et  qui  fuis-ie. 
Seigneur?  Voila  donc  vn  poinîJ  que  nous  auos 
à  notcr,afçauoir,que  les  enfans  de  Dieu  quad 
ils  fûulfriront  pour  efperer  en  luy,  ne  lailFe- 
ront  pas  d'eftre  poures  pécheurs,  &  qu'il  an^ 
roit  lufte  laifon  de  les  affliger  pour  ce  re- 
gard,mais  il  ne  le  veut  point  faire  .  Et  ainlî  il 
les  confolc&leur  donne  vn  cour.-ige  tant  plus 
grand.  Voila  vn  item  que  nous  auons  à obfer-. 
ucr.Or  le  fécond  eft,quâd  nous  n'auons  point 
cefte  confolation  particulière  que  fainû  Pau! 
donne  ici  à  ceux  qu'on  pcrfecute  pour  le  non» 
de  lefus  Chrift,&:  pour  le  tefmoignage  de  l'E 
uangile.que  nous  ne  deuons  pas  cftre  pourtâc 
côme  dcfconfits,inais  nous-nous  deuons  con- 
tenter de  cefte  autre  confolaiion  qu'il  adiou- 
fte.Et  queileeft-ellcJOr  il  eft  vray  que  ie  fui* 
affligé  pour  mes  péchez  dira  vn  poure  home, 
qu.ind  il  fe  trouuera  prefle  de  maladie.ou  bien 
qu'on  le  dtfpouillera  de  fa  fubllance  :  il  doit 
penfer.  Or  voila,  i'ay  mal  vfé  de  ma  fanté ,  ii 
faut  donc  que  ie  foye  ici  abbatu,ie  me  fuis  cf- 
giyé  par  trop  :  &  Dieu  voyant  que  ie  fuis  vne 
belle  tfgarcc,  q  ie  fui^  côme  vn  chenal  reftif, 
me  dote  quîd  il  m'amaigrit  ainlî:i'eftoye  par 
trop  orgueilleux  en  mon  bien,  &  Dieu  m'en  a. 
delpoutllé:ic  m'eftoye  eleué  par  ambition.  Si 
no.'tie  .Seigneur  me  monftre  icique  ienede-» 
uoye  point  monter  iî  haut,  ni  eftendre  lî  loin 
me-  ailes.  Voila  donc  comme  les  fidèles,  quâd 
ilsfoulfrent  pour  leurs  péchez  ,  doyuent  co- 
gnoiftre,  Et  b!en,ie  ne  fuis  pas  digne  d'endu- 
rer pour  auoir  mis  mon  efperance  au  Dieu  vi- 
uant,mais  tSt  y  a  que  ie  ne  perdray  point  cou 
rage. Et  pourquoy?  Car  noftre  Seigneur  nous  ■ 
promet  que  nous  ne  laiflerons  pas  d'eftre  bé- 
nits de  luy  en  nos  affligions,  en  l'inuoquant, 
voire  combien  que  nous  endurions  pour  nos 
péchez  .  D'autît  donc  que  Dieu  n'a  point  feu 
ïement  promis  à  fes  (Martyrs  deleur  donner 
viéioirc contre  les  ennemis  de  vérité,  &  con- 
tre tous  les  tourmens  qu'on  leur  fera  pour  la 
querelle  de  l'Euangile,  mais  il  nous  a  promis 
a  tous  en  général  quand  nous  ferons  chaftiez 
pour  nos  fautes, qu'après  qu'en  humilité  nous 
ferons  venus  à  luy  confeflàns  la  dette,  nous 
rendans  coulpables,  que  nous  ferons  abfous 
de  luy  ,  &  mefmes  qu'il  nous  chaftie  afin  que 
nous  ne  perifsions:  comme  fainû  Paul  notam 
met  en  parle  en  l'onzième  de  la  première aur 
Corinthiens ,  que  toutesfois  Se  quantes  que 
nous  fommes  batus  des  verges  de  Dieu  ,  c'eft 
afin  que  nous  ne  perifsions  point  du  tout ,  3C 
qui  plus  eft,  tous  ces  chaftimens-ci  nous  fer- 
ucnt  de  médecine.  Voila  donc  comme  quand 

B.iiii. 


200 


SERMON    XXXIIT. 


Dieu  ne  nou5  fait  point  ceft  honneur  &  cefte  Elprit.tout  défaut,  &  quand aufsi  il  cfpand  fa 

grâce  de  fouffrir  pour  fon  Nom.mais  que  no'  vertu.que  toute  la  ter le  tft  renouiielte  de  fes 

endurons  pour  nos  péchez, nous  deuonsauoir  créatures  reprenans  vigueur .  En  cefte  forte 

noftre  refuge  à  famifencorde  ,&cognoiitre  donc noftre  Seigneur  eftfjuueur  detous  kô- 

que  puisqu'il  luy  plaiftque  nous  fouffrions  mes,  c'eftàdire  que /abonces'ellend  lufques 

celt  opprobre,  que  nous  ne  fonimes  pas  delH-  aux  plus  mefchans  qui  font  cflongnezdc  luy, 

ï.  C(>r)'».*"^^P°"'^'*"''^^^'*  promeire:car  ileftditque  &  qui  ne  méritent  point  d'y  'auoir  aucune  ac- 

10.13.     ''  eft  fidèle  ,&  qu'il  ne  permettra  point  que  cointance,qui  deuroycnt  tftre  retra^ichez  du 

nous  foyôs  tentez  outre  noftre  portée, &  que  nombre  des  créatures  de  Dieu, &  abyfmez:  & 

il  feraf-ruir  &  profiter  toutes  nos  afflictions  cependant  nous  voyons  comme  Dieu  encorcs 

à  noftre  falut:  &  quand  nous  feros  purgez  par  eftend  iufques  là  fa  grâce,  car  la  vie  qu'il  leur 

ce  moyen-la ,  que  ce  fera  pour  nous  attirer  à  donne  ,eft  vn  tefmoignage  de  ù  bonté  .  Puis 

repentance.que  ce  fera  pour  nous  faire  telle-  qu'ainfieft  donc  que  Dieuaainfien  recômar» 

ment  condamner  nos  péchez, que  nous  ne  fe-  dation  ceux  qui  luy  font  côme  eftrangers.que 

rons  point  condânez  par  luy. Voila  donc  com  fera-ce  de  nous  qui  fommes  fes  domeftiques? 

me  il  nous  faut  contenter  de  fes  promcfles.  non  point  que  nous  foyons  meilleurs  ne  plus 

Ainfî  nous  voyons  combien  que  Dieu  ne  con  excellons  que  ceux  que  nous  voyons  eftre  re- 

fole  pas  les  fîens  en  mefure  égale, tant  y  a  que  prouuez  de  luy  ,  mais  le  tout  nous  procède  de 

nul  ne  fe  doit  defcmforcer  quand  il  eftaffli-  fa  mifericoide  gratuite,  qii'ilfe  réconcilie  a- 

gé. Et  pourquoy?  Car  ceci  nous  doit  bien  fuf-  uec  nous  en   noftre  Seigneur    lefus  Chrift, 

fire  quand  il  n'y  auroit  autre  chofe,  que  no-  quand  il  nous  a  appelez  à  la  cognoiflànce  de- 

ftre  Seigneur  a  promis  d'auoir  pitié  de  nous,  rEuangile,&  alo  s  il  nous  ratifie, &  nous  feel- 

quand  nous  ferons  abbâtus ,  &  recognoifTans  le  fa  bonté  enuers  nous,  tellement  que  nous 

nos  pech  z  que  nous  ferons  receus  de  luy  à  deuons  eftre  perfuaJtz  qu'il  nous  tient  pour 

pardon.  Appuyons-nous  hardimen:  là  demis,  fe<  cnfans.Puis  qu'aiufi  t  ftdonc  qnous  voyôs 

f^'  cependant  humilions-nous  quâd  nous  voy-  qu'il  nourrit  ceux  qui  font  eftonguez  de  luy, 

dis  que  nous  ne  fommes  point  encores  difpo  que  nous  a'.liô ,  nous  cacher  fou^  ks  ailes:car 

fez  à  foufFrir  pour  le  tefmoignage  de  l'Euan-  quand  il  nous  aura  prinsen  f.\  proteftion,  il  a; 

gile.Cela  nousdefaut-ilr  Et  bien,  noftre  Sci-  déclaré  qu'il  fe  monftrcra  Ptre  enuers  nous, 

gneur  nous  veut  par  cela  monftrerque  nous  Et  penfons-nous  donc  eftre  reicttei  de  luy, 

ne  fommes  point  tant  approchez  de  luy. qu'il  &  que  nous  foyons  tellement  enferrez  en  nos 

nous  donne  fes  armoiries:  mais  cependant  cô  miferes,  qu'en  la  fin  rous  n'en  foyons  de!i- 

tentons-nous  qu'il  nous  bénira  en  nos  mifc-  urez?N'attendron';-noHS  pasiffiiedefîrable& 

res,& conuertira  le  mal  en  bien  pour  nous  le  heureufe  de  la  bonté  de  noftre  Dieu,  quand 

faire  tourner  à  falut .  Voila  donc  ce  que  nous  nous  la  voyons  &  contemplons  iufques  aux 

auons  à  retenir  quant  à  ce  paflàge. Or  touchât  mefchâs,iufques  aux  beftes  brutes  ?en  cela  ne 

ce  que  lâinift  Paul  dit,  Qjie  Dieu  eftfauuenrje  luy  ferons-nous  pas  trop  grand'  iniure?Que] 

toits  hommes,0'  principalement  des  fiieUs,c'cii  les  font  les  promcfles  que  nous  auons  de  luy, 

■vn  argument  qu'il  tire  de  ce  que  nous  voyons  par  lefquelles  il  s'oblige  à  nous?Nc  nous  mô- 

à  l'oeil,  que  Dieu  maintient  toutes  créatures,  ftre-il  pas  qu'encores  que  nous  fufsions  enni 

voire  côbien  qu'elles  ne  luy  foyent  pas  fi  pre  rônez  de  mille  morts, la  vie  eftaffenreeïll  eft 

cieufes  comme  (es  enfans  qu'il  aadopteiz.Car  vray  que  noftre  vie  femble  bien  eftre  cxpofec 

ce  mot  de  $4»»»c-»r,ne  fe  prend  pas  ici  en  fa  fi-  i  Jata  &  à  tous  les  ennemis  de  nos  ames-mais 

gnification  propre  &  eftroite ,  qu'on  appelle,  tant  y  a  que  Dieu  la  conferne ,  voire  &  d'vne 

pour  le  regard  du  falut  éternel  que  Dieu  pro-  façon  miraculeufe.  Et  ainfi  ne  faut-il  pas  que 

met  à  fes  eleus,  mais  il  fe  préd  pour  celuy  qui  les  fidèles  apprenent  de  fe  contenter  de  ces 

deliure,  &  qui  garentit .  Or  voyons-nous  que  promefles-la  ?  Au  reftc  notons  bien  que  Dieu 

Dieu  garentit  mefmes  les  incrédules,  côme  il  dejiure  les  fiens,  non  pas  que  cela  apparoifle 

>l4t.;.     eft  dit  qu'il  fait  luire  fon  foleil  fur  les  bons  &  toufiours  au  fens  charnel, mais  tant  y  a  qu'en 

^j.          fur  les  mauuais.  &  nous  voyons  que  tous  font  la  fin  il  nous  le  faut  appiehcnder  parfoy.ll 

ri  peus  par  û  bote,  que  tous  font  deliurez  de  faut  bien  que  noftre  foy  foit  cachee:(_comnie 

beaucoup  de  dagcrs.  Voila  donc  comme  il  eft  fainft  Paul  en  parle)  &  cjuand  ildit'eiî  l'autre  Ri"».& 

ici  appelé  Sauueur  de  tous  homes,  non  point  lieu,qce  que  nous  efperons.nousne  le  voyos  ^A- 

au  regard  du  falut  fpirituel  des  âmes ,  mais  point ,  &  que  noftre  lalut  eft  enclos  en  cfpc- 

pource  qu'il  maintient  tontes  fes  créatures.  rance:ilmonftrequ'ilfaut  queles  fidèles  fer- 

Anfi  mefmes  il  eft  dit  qu'il  faune  les  beftes,  ment  leurs  yeuxqiiantau  regard  des  chofes 

T/i.Jrf.fc'eft  adiré,  qu'illes  garde. Si  noftre  Seigneur  prefentes ,  pour  eftre  alTeurezdcleur  falut. 

ne  faifoit  c roiftre  l'hetbe  pour  la  pafture  des  Mais  quoy?  tant  y  a  que  Dieu  (-comme  nous 

beftes,  &■  que  feroit-ce  ?  Et  mefmes  encores  auonsdit)lespreferue  d'vne  façon  miraculeu 

qu'ily  ait  nourriture  pour  les  beftes,  fi  eft-ce  fe:  quoy  qu'il  en  foit,  nous  ne  ferons  iamais 

qu'elles  ne  viuent  pas  fi  la  vigueur  ne  leur  eft  fruftrez  que  cefte  fentence  ne  foit  vérifiée  eo 

donnée  du  ciel,  comme  il  eft" dit  au  Pfcaume  nous,  c'eftafçauoir,  que  Dieu  eft  noftre  fau- 

centquatricme,  que  ûtoftijuc  Dieu  retire  fon  ueur  quand  nous  efferôs  en  luy  ,&  que  noftre 


s  V  R     L  A     I.     A     T  I  M  O  T  H.  2cr 

foy  y  t'/l  appuyée.  Puis  qu'ainfi'  e/1  qu'il  dai-  ■  nous  aiioni  cfla,nedciions-ndii5  pas  nous  lef 
giit- bien  garder  ceux  qui  ]e  tic  fpitêcceux  qui     iouir  au  milieu  de  nos  affligions  ?  Il  lûbiea 
s'elfirouchent  arrière  de  iuy,S:  qui  ne  femet     certain.  £t  quSd  nous  aurons  retenu  cefiele- 
tent  point  fous  fa  proteiiion,puis  qu\ncores     çon.nous  autos  beaucoup  profité,  non  pas  feu 
il  les  veut  maintenir.S^-  le  fait,  (  comme  nous     lemcnt  pourvn  iour,  mais  pour  tout  le  temps 
le  voyôs)que  fera-ce  de  nous  ?  voire  puis  que     de  noftre  vie.  Et  voila  pourquoy  fàinft  Paul 
il  nous  a  clroiiîs  &  adoptez,  mefmes  qu'il  s'tH     dit,Tnfeigne  cts  cho[es,ou  les  remonfirercar  le 
obligé  fi  eftroitement  à  nous  par  des  promef-     mot  l'emporte  .  En  quoy  fainft  Paul  fignific 
fes  infinies  ,  lefquclles  nous  font  comme  vne     que  c'efl  vne  doftrine  fur  laquelle  il  nous  faut 
forterefle  inuincible,  dont  nous  deuons  eflre     infifter,  q  cen'eflpoint  aflezde  l'auoir  ouye 
de  tous  collez  munis  ,  pour  repoufler  toutes     vn  lour  comme  en  p.iflànt,  mais  qu'il  nous  en 
les  tentatios  du  diable  &  du  monde?Mais  touf    faut  auoir  les  aureilles  batues,que  la  mémoire 
iours  apprenons  de  leuer  nos  efprits  par  def-     nous  en  foit  refreiclne,&;  que  cela  ne  peut  la- 
fus  tout  ce  que  nous  voyons,  pourauoir  Dieu     mais  eftre  trop  dit. Et  pourquoy?  Car  nous  ne 
Sauueur.Et  pourquoy.'  Car  (comme  i'ay  défia     pouuons  porter  d'eftre  affligez  &  d'eflre  ex- 
ditjil  faut  que  noif  re  (AÏm.  foit  caché,  &  que     polcz  à  la  mocquerie  des  homes,  comme  nous 
Dieu  preferue  les  fiensd'vnc  façon  eltrange,     voyons  côbien  nous  fommes  tédres  &debiles. 
laquelle  n'entre  point  en  noftre  fens  naturel.     Nous  auons  donc  beioin  d'en  eitre  informez. 
Et  ainfi  donc  bataillons  contre  toutes  telles     Et  ce  n'tft  point  aflez  que  fouuentesfois  nous 
desfiances, &  côtr'e  toutes  les  doutes  qui  nous     ayons  efte  aduertis  de  ceci.mais  il  faut  qu'in- 
viendrôt  en  fantafie,afinde  retenir  celle  con     ceflànmiét  il  nous  foit  remis  au deuant  ,&que 
fôlation  de  fainft  Paul  quand  nous  ferons  en     nous  y  foyons  pleinement  addonnez,  afin  de 
atllitlion.  Et  combien  que  nous  foyons  en  op     mieux  retenir  celte  doftrine.voiia  doc  à  quoy 
probre,qu'on  nous  crache  au  vifage, combien     S.Paul  a  pretédu,dilànt  qu'il  faut  que  ces  cho 
que  nous  foyons  tourmentez  des  hommes ,  &c     fes  foyét  enfeignees,&  qu'on  les  cômande.Ec 
qu'il  femble  que  nous  foyons  l'ordure  de  ce     fous  ce  mot  de  Comw^nrftr.il  nous  méftre  que 
monde(comme  fainft  Paul  en  parle  en  vn  au-     c'eftici  où  il  faut  faire  inl}ance,&  non  pas  eiî 
tre  lieu)  toutesfois  nous  ne  fommes  point  mi     ces  menus  bagages  de  ftruir  Dieu  en  ceremo- 
ferables, d'autant  que  nous  auons  noftre  refu     nies.  Ceux  qui  veulent  côftituervn  feruiccde 
ge  à  Dieu  ,  lequel  nous  conuie  à  foy  ,  &veut     Dieu  en  chofes  externes,  obferueront  des  c5 
que  nous  mettions  nos  charges  en  fon  gJron,     mandemens  friuoles:  côme  nous  voyons  û  les 
&  promet  non  feulement  nous  en  defchar-     Papilles  font  feueres  à  faire  garder  les  loir 
ger  ,  mais   nous   donner   pleine  deliurance     qu'ils  ont  ballies  à  leur  fantafie  .  Car  fi  on  a 
quand  nous  aurons  ainfi  trauaillé  à  fon  fer  -     mangé  vn  morceau  de  chair  en  lour  défendu, 
uice.  Voila  donc  en  quoy  les  fidèles  fedoy-     ho, voila  vn  crime  irremifsible  :  fi  on  a  remué 
lient  exercer  en  celle  vie  tranfitoire,  c'eft  que     vn  doigt  au  iour  de  fc/le,il  femble  que  le  ciel 
ils  fe  remettent  du  tout  à  Dieu,  &  àviure  &:  à     doyue  tomber.  Nous  voyons  donc  par  expe- 
mourir. Et  au  refte,qu'ils  fçachent  que  c'efl  à     rience  que  ceux  qui  vfurpent  domination  fur 
l'heritagedu  Royaume  des  cieux  qu'ils  doy-     les  âmes  auec  tyrannie, renueifent  la  doftrine 
uentafpircr,  à  ce  repos  éternel  qui  leur  a  e-    de  lalut  par  l'obferuation  de  leurs  loix  que 
ilc  acquis  par  no/lre  Seigneur  lefus  Chri/l,     ils  commandent  auec  vne  iiguenr  extrême, 
qu'ils  ont  tefmoignage  de  leur  adoption, com     Pourcefle  caufe  fainft  Paul  dit  qu'il  ne  nous 
me  l'arre  leur  en  efl  donnée  en  leur  caur  par    laut  point  inf  lier  fur  ces  ccmmandemens  frr- 
le  faindl  Efprit .  Ilsdoyuent  doncafpirer  là,     uoles,  mai*  qu'il  faut  commander  les  chofes 
mais  encores  ne  doyuét-ils  point  douter  que     qui  font  requifes  de  Dieu.  Au  rcfle,  notons  à 
Dieu  ne  leur  enuoye  toufiours  ce  qu'il  co-     qui  c'efl  qu'il  parle,  afçauoir  à  Timotbee  qui 
gnoiltra  eftre  bon  &  propre  quant   à  leurs     n'eftoit  ne  roy  ne  prince,  mais  feulement  mi 
corp!:&;  s'ils  font  tourmentez  &:  affligez,  que     niftiede  la  parole  de  Dieu. En  cela  dôc  fainâr 
ils  fçachent  que  Dieu  les  veut  tfprouuer  par     Paul  authorife  ceux  qui  ont  la  charge  d'anon' 
ce  moyen  :  mais  qifils  ne  doyuent  pas  pour-     cer  l'Eu.îgile.afin  qu'ils  parlent  en  verité,fça- 
tant  laifler  de  fe  refiouir  en  luy, comme  fainfl:     chans  de  qui  c'ell  qu'ils  font  enfeignez,  &•  qui 
Paul  dit  au  î. des  Romains. Et  pourquoy?  Car     les  a  commis  en  ce  fl  office.  Or  puis  que  Dieu 
noUreobciflànce  (dit-il)  ell  tant  mieux  con-     veut  que  nous  parlions  en  fon  Nom  ,  il  faut 
fermée  quad  nous  fommes  ainfi  en  affliftion.     bien  que  nous  luy  rendions  l'honneur  qui  luy 
Sinousn'enduriôsnulmal,  que  nous  fuf  ions     appartient,  c'tll qu'il  foit  exalté  ayant  mai- 
toufiours  à  noflre  aife  ,  nous  ne  cuidcrions     ftrife  fur  tous.Vray  eft  qu'il  nous  fait  la  gra- 
point  auoir  nul  befoin  ou  necefsitéde  recou     cède  nous  prier  &  nous   exhorter  (  comme 
nr  à  Dieu,&  par  cela  nous  ferions  comme  ilu     fainîl  Paul  en  parle  )  &  pour  nous  faire  plus 
pides  :  mais  fi  nous  fommes  en  opprobre,  que     grand'  honte  &  plus  grand  reproche  à  noflre 
nous  (oyons  affligez,  nous  retournons  à  luy,     gr.'de  ingratitude.  Car  fi  noftre  Seigneur  s'ab- 
nous  luy  demandons  fecours ,  ayans  fenti  le     balfle  lul'que'  là  de  nous  prier,  de  nous  exhor 
befoin  que  nous  auons  de  fon  aide. Voila  doc     ter  &■  admoneller,  ne  faut-il  pas  q  nous  foyôs 
vne  cfperâce  qui  nous  doit  fortifier.  &  quand     pkb  qneperuers  fi  nous  ne  plions,  voire  fous 

C.iv 


idi  SERMON 

vn  ioug  tant  Joux  &ainiable?Mais  cela  ne  de- 
rogue  point  â  Ion  authorité  ,  que  toulîours  fa 
parole  n'emporte  commâdement.  Et  que  fe- 
ra-ce  du  Dieu  viuant  ?  y  a-il  comparaison? 
Ainfi  donc  ,  quand  noilre  Seigneur  parle  ,  ne 
faut-il  pas  quenous  tremblions  fous  luy  ,  que 
nou5  luy  facions  hommage, cognoiflans  l'em- 
pire foiiuerain  qu'il  a  par  defilis  nous?  Et  d'au 
tant  que  nous  ne  le  voyons  point  en  fa  per- 
fonnevilible  ,&  qu'il  ne  nous  enuoye  point 
des  Anges  duciel,  mais  qu'il  ordônedes  hom 
mes  mortels  qui  parlent  en  fon  nom  ,  il  faut 
bien  qu'ils  ayent  la  charge  de  nous  comman- 
der ,  voire  non  point  de  par  eux  ,  ne  de  nous 
impoter  loix ,  comme  faincl  Paul  notamment 
dit,  Commattdf  ces  choses,  afçauoir,  après  que 
tu  auras  mis  en  auant  la  doârine  de  falut,  que 
tu  parles  en  telle  forte  au  nom  &  en  l'aiitho- 
lité  de  Dieu,  que  tout  genouil  fe  ployé  deuât 
luy,&  qu'vn  chacun  s'humilie  en  fon  obeilTan 
ce.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  noter  en 
ce  palIàge.Or  d'vn  collé  que  les  miniflres  de 
la  parole  de  Dieu  cognoiflent  à  quel  Maiftre 
ils  feruent,&qui  c'eftqui  les  employé  :  qu'ils 
faccnt  que  la  doÛrine  loit  receue  en  toute  re 
uerence  ,  &  qu'ils  ne  fouffrent  point  entant 
^u'en  eux  fera,qu'ellc  foit  raocqiiec  ou  mef- 
prifee  des  mefchans:  côme  aufsi  nous  voyons 
qu'en  d'autres  lieux  fainû  Paul  magnifiant  le 
miniftere  de  TEuangile  dit,  Nous  auons  certe 
authorité  de  douter  tous  Contempteurs  de  la 
do£lrine,&  d'abbatre  toute  hautelfe  q  fe  vou 

■  dra  eleuer  côtre  nollrc  Seigneur  lefus  Chrift, 
qu'il  faut  que  tout  orgueil  fe  rangea  cefte 
vertu  qui  nous  eft  commife  ,  non  point  d'vn 
glaiue  matericl,mais  de  la  vengeancede  Dieu 
fur  tous  ceux  qui  fedreflentainfi  côtre  la  do 
urine  qui  nous  eftcommife .  Voila  pour  vn  i- 
tem.que  les  minières  de  la  parole  font  ici  ad 
moneltez  par  le  fain^  Efprit  de  traitter  la  do 
ârine  qu'ils  portent  en  telle  maiefté.que  tous 
facent  honneur  au  Maiftre  qui  les  a  e'nuoyez. 
Or  ii  tous  Chreftiens  en  gênerai  font  admo- 
ncllez  de  receuoir  paifiblement  ceux  qui  par- 
lent au  nom  de  Dieu  ,  &  de  porter  reuerence 
à  la  doânne  pour  l'honneur  de  celuy  qui  les 
enuoye,  regardons  maintenant  quelle  Chre- 
flicnté  il  y  a  en  tous  ceux  qui  diront  à  tous 
coups, Ho,  il  ne  vous  appartient  pas  de  me  cô 
mander.  Mon  ami,  tu  ne  fçaurois  mieux  dire 
que  tu  neveux  point  que  Dieu  domine  fur 
toy.ne  qu'il  y  ait  aucun  droid.  Car  voila  l'o- 
beilTance  qu'il  requiert  de  nous, c'eft  que  pai- 
fiblement  nous-nous  afluiettifsions  à  fa  paro- 
le ,  comme  il  a  ordonné  fon  Fils  Paftcur  fur 
nous  ,  que  nous  luy  fovons  dociles  &•  débon- 
naires comme  brebis  en  la  perfonne  de-;  mini 
ftres  qu'il  conflituc  en  fon  nom.Q_nand  donc 
les  hommes  font  (i  peruers  qu'ils  ftdrcfltnt 
contre  ccft  ordre  qui  cfl  iniîitué  du  Fils  de 
Dieu,  ne  monftrent-ils  pas  qu'ils  fe  veulent 
ouuettement  eleuer  contre  luy?  Et  ainfi  Jonc 


XXXllI. 

telles  gens  déclarent  par  effe£l  qu'il  n'y  a  nul 
le  religion  en  eux .  Et  il  ne  faut  point  trouuee 
eftrange  qu'ils  fe  lebecquent  ainfi,  quand  on 
leur  remonftre  leurs  fautes  :  car,  qui  pis  eft, 
quels  triomphes  fait-on  comme  en  defpit  de 
DieUfHelas.'noftre  Seigneur  a  bien  donné  oc 
cadon  de  pleurer  &  de  gcmir.Sc  à  vous.enfans 
de  Geneuc,&  à  moy  auec  vous,  comme  il  faut 
qu'vn  Pafteur,quand  iladuient  quelque  fcan- 
dale  en  i'Eglife,  foit  le  premier  à  faire  le 
dueil  pour  demander  pardon  à  Dieu,  afin  que 
tout  le  peuple  le  fuyue .  Et  (comme  l'ay  dit) 
Dieu  nous  donne  bien  occalion  de  cela,voire 
&  nous  y  contraint  par  force  :  &i  cependant 
tant  s'en  faut  qu'on  y  penfe,&  qu'on  monftre 
quelque  ligne  de  repentance  ,  que  pluftoft  on 
tait  les  triomphes  comme  en  defpit  de  Dieu. 
Et  où  en  eltes-vouif  A'nûdonc  voila  les  tef- 
moignages  qu'on  voit  à  l'œil ,  que  tous  ceux 
qui  ne  peuuent  fouffrir  qu'on  leur  commande 
au  nom  de  Dieu,  &  qu'on  leur  remonftre,  qui 
fe  drelTent  contre  toutes  admonitions, que  ce 
font  des  diables  encharnez  qui  n'ont  plus  ne 
loy  ne  bride, ne  modeftie  aucune .  Or  tant  y  a 
quenous  voyons  ici  ce  que  Dieu  nous  mon- 
ftre,c'ell  quand  il  parle  à  nous  ,  voire  com- 
bien que  ce  foit  parla  bouche  des  créatures 
fcmblables  à  nous,&:  qu'ils  n'ayent  point  d'au 
thorité  quant  à  eux  .neantmoins  qu'il  veut 
que  fa  parole  nous  foit  redoutable ,  que  nous 
tremblions  fous  icelie  ,&que  grans  &  petis 
s'y  afluiettiflent ,  &que  nous  fçachions  que 
c'elt  luy  qui  eft  noftrc  Maiftre  &  noftre  Roy, 
&  que  nous  plions  fous  ceft  empire  fouuerain 
qu'il  a  fur  toutes  créatures. Voila  donc  ce  que 
nous  auons  à  taire,&  par  ce  moyen  nous  mon 
ilrerons  quenous  appartenons  .\  fon   trou- 
peau,&  que  nous  ne  demandons  iînon  de  nous 
ranger  fous  fa  main,  afin  de  n'eftre  point  efga 
rez  çinelànnais  de  nous  tenir  pour  cert.iius, 
combien  qu'il  nous  faille  pafler  par  beaucoup 
d'afflirtions,  que  puis  que  noilre  Seigneur  le- 
fus nous  a  prins  en  d  proteûion,  nous  ferons 
gardez  fidèlement ,  &  fentirons  en  la  fin  que 
noftre  falut  eft  immuable, quand  ce  bon  Dieu 
nous  aura  deliurtz  de  toutes  les  pouretez& 
miferes  aufquelles  nous  fommes  maintenant, 
&  qu'il  nous  aura  dorme  pleine  viâoire  con- 
tre tous  les  combats  par  lefquels  ilnous  veut 
auiourd'huy  humilier. 

OR  nous-nousprofterneronsdeuant  U 
face  de  noftre  bon  Ditu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  tace  telle- 
ment fentir ,  que  de  plus  t n  plus  elles  foycnt 
amorties  en  nous  •  &  que  cepcndaxit  les  grâ- 
ces de  fon  faiucl  Efprit  croiflent  &  s'aiigmen 
tent ,  &  que  nous  en  fovons  tellement  forti- 
fiez ,  que  nous  furmontions  toutes  les  tenta- 
tions i^ui  nous  dcftournent  de  luy  ,  &  de  che- 
mmer  félon  la  règle  qu'il  nous  a  donnée  en 
fa  Loy. Ainfi  nous  nous  dirons  tous,Dieu  tout 
puiflànt,  l'ère  cclcfte.&c. 

SEPT- 


s  V  R    L  A   I.    A    T  I  M  O  T  H.  ioj 

SEPTIEME       SERMON      SVR      LE 

Q_yATRIEME     CHAPITRE. 

1 1  Que  ml  71  c  mefprïfe  ta  ieuncffe  :  mais/oh  l'exemple  des  fidè- 
les en  parole  )  enconuerfation,  en  dileSiion,  enefprit^en  foy,  ^  en  pu- 
reté. 

1  j  lufjuà  ce  quç  te  vieneyfois  attentif  à  la  kcîurej  à  admonition, 
(^adoBrine, 


Ous  auons  veu  ce  matin  com- 
me fç  doyuét  porter  ceux  auf 
quels  Dieu  a  commis  la  char- 
ge d'anoncer  fa  parole  :  c''eA 
de  donner  authorité  au  Mal- 
ftre  aciquel  Us  feruéctellemét 
qticce  qu'ils  anoncét, (oit  receu  en  toute  reue 
rcnce  .  Or  pource  qu'il  tft  beloin  que  de  no- 
ftre  part  nou.  monllrions  que  Dieu  nous  em- 
ployé à  Ion  feriiice  ,  famÛ  Paul  adioufte,  que 
Tmiotheedoit  eilre  patron  &  miroir  en  tou- 
te vertu  ,  afin  qu"'ûn  ne  prene  point  oc-calion 
en  hiy  de  fe  macquerde  fon  oflice  ,  qu'il  ne 
foit  point  en  fcandale, tellement  que  la  doftri 
ne  de  Dieu  par  ce  moyen-la  foit  comme  pro- 
phanee.Et  notamment  il  parle  de  Taage.pour 
ce  qu'il  eftoit  ieuiie  homme  :  il  monftre  que 
cela  ne  doit  pas  cmpefcher  qu'on  ne  Tefcou- 
te,  &  qu'on  ne  reçoyue  ce  qu'il  dira,  moyen- 
nant qu'au  relte  il  fe  porte  en  fidèle  feruiteur 
de  Dieu.  Voila  en  fomme  ce  que  nous  auons  à 
recuiillir  de  la  première  fentence  qui  ellici 
couchée  .  Or  pourmieinc  appliquer  le  tout  à 
no.ftre  vûge,  notons  qu'il  ne  faut  point  touf- 
iours  raefuter  la  fagefle  par  les  ans,  comme 
nous  voyons  que  Timothee  eftant  ainfi  excel 
Jent  comme  il  en  a  le  tefnoignage,  eftoit  plus 
ieune  que  beaucoup  aufquels  il  monftroit  h 
<hemin. Voila  comme  EHeu  diftribne  fes  grâ- 
ces,  tellement  que  celuyqui  aura  beaucoup 
Tefcn  au  monde  ,  n'a  point  dequoy  fe  gloii- 
fier  .Et  cependant  nous  auons  aufiàobfcr- 
uer  ,  que  fi  Dieu  a  ainfi  conflitué  vn  homme 
comme  vn  exemple  de  toute  vertu,  on  doit 
prifer  &  honorer  ce  qu'on  cognoilt  eftrede 
Dieu,ou autrement  l'ingratitude  ne  s'addref- 
fe  point  à  l'homme  mortel  .  Et  cependant 
nous  voyons auf^i  quels  font  les  vrais  orne- 
mcnsdont  les  Pafteurs  de  l'Eglife  de  Dieu 
doyuent  élire  parezicen'eft  pas  qu'ils  fedef- 
guifent,  comme  nous  voyons  qu'en  la  Papau- 
té les  Euefqucs  pour  fe  faire  vénérables  vont 
chargervnemittre  àdeux  cornes,  vne  crofle: 
brief  les  voila  dp  tout  desfigurez,  comme  s'ils 
auoyent  à  iouer  quelque  farce. Or  Dieu  n'en- 
tend pas  que  fes  feruiteurs  foyent  ainfi  ornez, 
afin  qu'on  les  honore  .  Qupy  donc  ?  Qij^en 
leur  vie  &  en  leur  Joftrine  ih  acquièrent  tel- 
le réputation  qu'ils  puiffèntauoir  authorité, 
Jk  û  onicsnjefprife,  que  cela  viene  de  l'or- 


gueil &  de  la  malice  de  ceux  qui  ne  tienent 
contedes  grâces  du  faind  Efprit. Nous  auons 
donc  ici  vne  inftruftion  commune  ,  combien 
que  fainû  Paul  parle  à  Timothee  :  ie  di  com- 
mune non  feulement  pour  les  minières  de  la 
parole  de  Dieu,  mais  en  gênerai  pour  tout  le 
troupeau  .  De  noftre  cofté  ,qu'auons-nous  à 
faire  finon  de  cheminer  en  telle  forte  que  la 
doftrine  que  nous  portons ,  foit  vérifiée  par 
noftre  vie  ,  qu'on  puiflc  apperceuoir  à  l'œil 
que  nous  y  procédons  à  bon  èfci'ent  &  d'vne 
afFcftion  pure  ,  &  que  c'eft  à  Dieu  que  nous 
ieruons  ?  Qvie  noftre  vie  donc  rende  teCnoi- 
gnage  que  ce  n'ift  point  vne  chofe  vaine  ne 
friuole  que  la  doôrine  qui  procède  de  noftre 
•bouche  ,  mais  que  c'eft  la  vérité  que  Diea 
nous  a  commife  :  &  fur  cela  que  ceux  qui  dé- 
firent d'obéir  à  Dieu  ,  &  qui  le  craignent, 
monftrent  que  ce  tefmoignage-la  profite  en- 
uers  eux  .Or  quand  nous  voyons  vn  homme 
quia  Tofifice  de  Paftcur,  &■  qui  nous  enfei- 
gne  ,&  cependant  qu'il  conforme  tellement 
fa  vie  à  la  parole  de  Dieu, qu'on  cognoift  que 
il  ne  demande  finon  que  Dieu  foit  honoré, 
quand,di-ie, nous  voyons  cela.fi  on  n'en  tient 
conte,  n>ft-ce  pas  mefprifcr  Dieu  tant  en  la 
doftrine  qui  nous  eft  offerte  en  fon  nom,  que 
en  ce  que  nous  voyons  qui  procède  de  luy? 
Car  fi  vn  homme  procède  en  telle  forte,  il 
eft  certain  que  Dieu  y  bcfongne  ,  &r  que  le 
fainft  Efprit  s'y  manifefte  .  C-e  n'eft  point 
dôc  refifter  àvn  homme  mortel,  mais  au  Dieu 
viuant  .  Or  cependant  notons  que  fi  les  Pa- 
fteurs ne  font  pas  tels  qu'ils  deuroverrt  eftre, 
ceur'qui  mefprifent  la  doûrine  deDicu.ne  fe- 
ront point  pourtant  excufcz  .  Si  le  conuerfe 
mal.Sr  que  ie  mené  vne  vie  diflolue, quand  on 
(prendra  occafion  de  fe  mocquer  de  Dieu  ,  Se 
de  fouller  au  pied  l'Eiiangile  ,  fous  ombre 
que  ie  ne  me  porte  pas  fidelemét,ie  vous  prie. 
Dieu  foufrira-il  que  ma  vie,  combien  qu'elle 
foit  mefchante  ,  derogue  à  fa  vetité?  Ainfi 
donc  notons  que  la  parole  àt  Dieu  n'eft  pas 
•tellement  fondée  furies  hommes  ,  qu'on  la 
puilTe  mefprifer  quand  celuy  qui  eft  Paftrur 
viura  mal,&  qu'il  donnera  fcandale:mais  fi  eft 
ce  qu'entant  qu'en  nous  eft,  nous  fommes  eau 
fe  d'vn  te!  mal.&faudra  que  nous  en  rendions 
conte  .  Quand  Dieu  nous  aura  choifis  &  ap- 
pelez pour  anoticer  fa  parole, fi  nous  ne  fom- 

C.ii. 


io4 


SERMON      XXXIII  T. 


mes  en  bon  exéple  à  toute  l'£glife,&  que  l'vn 
fe  desb.iuche,raiiti'e  s'cfgare,  rautie  le  moc- 
aiie  de  ce  qu'il  aura  entendu,  &  que  la  foy  par 
ce  moyen-la  aille  en  confalion&  ruine, il  tau 
dra  que  nous  refp ondions  detiant  liiy  d^vn  tel 
facrilege.Et  pourquoy?£ntant  qu'en  nous  eft 
ncus  aiion»  expole  en  mocquene  la  vérité  de 
Dieu  qui  eftoit  iacree.Or  li  nous  a  commis  vn 
threlor  incibraable  ,  atiu  que  nous  en  foyons 
gardiens;  (comme  nous  Fanons  veu  par  ci  de- 
liant)  &  nous  r.iUons  fouiller  &  propluner. 
Voila  donc  vne  hornblecondamnanôappre- 
fi:ee  à  tous  ceuï  qui  ne  ie  rangent  pas  fidèle- 
ment au  l'eruicede  Dieu, quand  ils  font  appe- 
lez pour  anoncer  la  doftrine  de  PEuaugile. 
Mais  cependant  il  nous  faut  retenir  ce  que 
ùinâ  Paul  a  entcndu,c'ert  alçauoir  que  les  R- 
<leles  ,  voyans  que  leurs  Pafteurs  cheminent 
droit,  &  qu'ils  leur  monftrent  le  bon  chemin 
entant  qu''en  eux  eft  ,  doyuent  eftre  tant  plus 
contermez,  &  qu'il  y  ait  tant  moins  d'cxcuie 
pour  eux.linon  qu'ils  prenent  courage  d'aller 
■à  DieUjfe  conformans  aux  miroirs  &  patrons 
qui  leur  font  mis  deu.u  leurs  veu:;:côme  aufiî 
l'Apoftre  en  parle  en  Pcpiftreaux  Hebrieux, 
que  s'il  y  a  tu  gens  fidèles  qui  nous  ayent  edi 
fiezenladoàrine  de  TEuangile, que  nous  de- 
uoi.s  eftre  tant  plus  incitez  de  la  iiiyure  :  car 
e'eft  autant  comme  lî  Dieu  nous  feelloit  la  ve 
rite  de  f  jn  Euangile  par  ce  que  nous  voyons 
en  eux.  Voila  doue  l'intention  de  fainct  Paul 
que  nous  deuons  retenir,  c'eft  qu'en  contem- 
plant les  vertus  de  ceux  qui  ont  la  charge  de 
nous  enfeigner,  nous  foyons  tant  plus  incitez  ^ 
à  bien,  &  que  cela  nous  férue  de  fortification 
pournoftre  foy,&  que  nous  fjyons  tant  plus 
armez  cotre  tous  les  fcandales  que  Satan  nous 
drefle  pour  nous  desbaucher.  Or  notamment 
fainft  Paul  requiert  de  Timochee  ,   qu^il  foit 
patron  en  d^clrtiie  O"  in  conacrfation  de -vie  a. 
tous  fideLs.  Sur  quoy  nous  anons  à  obferucr 
qu'il  ne  luffit  pas  que  celuyquiefl  conftitué 
pafteur  enl'Eglifede  Dieu, meine  vne  bonne 
vie  d'irrcprehenfible  ,  mais  il  faut  qu'il  ait  la 
bouche  ouuerte  pour  exercer  ion  eltat  auquel 
il  eftappelë.  La  doclnne  donc  eft  requifc  en 
premier  lieu,  mais  cependant  la  bonne  vie  eft 
coniointeaufsi  auec.  VoiJa deux chofes  infe- 
parables  en  ceux  que  Dieu  ordonne  pour  gou 
uerner  fon  £gl:  fe  ,  que  là.  doûrine ,  &  la  vie 
honiiefte  &  faintte  :  ce  que  nous  deuons  bien 
noter. Car  nous  voyons  que  les  Papiftes  ("ont 
endurcis  à  fe  glorifier  de  leur  hierarch!e(que 
ils  appellent  )  qu'il  ne  leur  l'emble  pas  qu'on 
leur  puilTe  arracher  ce  titre  de  l'Eglife  de 
Dieu,  d'autant  qu'ils  ont  l'ordre  ficré,  com- 
me ils  difent.  Et  liir  quoy  fe  fondct-ils  (inon  ' 
fur  leurs  badinagesdont  nous  auôsdciîa  tou- 
che? quemTyennant  que  les  Euefqnev  foyent 
mafqiicz,  &  qu'ils  ne  foyét  point  veftus d'ha- 
bits communs, mais  qu'il  y  ait  force  fanfares, 
ho  ,  il  ne  faut  plus  difpiiter  fic'efi  l'Eglifc  de 
Dieu  ou  non:&:  cependat  ce  fout  chiés  muets. 


ils  ne  fçauentfînon  mor3re&  ronger.  Mais 
qu'ils  abbayent  contre  les  loups,ils  n'ont  gar 
deicar  eux  mefmes  font  loup^  Se  iarrôs,  quâd 
on  voit  qu'ils  pillent  &  qu'ils deftruifent  tout 
le  troupeau. Et  de  leur  vie  quelle  cft-elle  non 
pluj?  Voila  p  jurquoy  l'ay  dit  qu'il  nous  faut 
bien  noter  ce  pallàge  :  car  fainct  Paul  nous 
monftre  quelles  Ibnt  \es  marques  des  bons  Pa 
Iteurs  qui  doiuent  &  mentent  d'eihx  itco- 
gnus  pour  feruiteurs  de  noftre  Seigneur  le- 
lus  Chrift:ce  font  ceux  qui  dônent  bon  excm 
pie  en  cesdeux  chofes ,  c'eftafçauoir  en  do- 
drine  &  en  conuerfation  de  bonne  &  famfte 
vie.  I-l  faut  donc  que  la  doclrine  aille  deuant, 
comme  l'ay  déclaré. Car  fi  vn  homme  chemi- 
ne droit  ,  &  qu'il  ait  de  grandes  vertus  &  ex- 
cellentes, cependant  qu'il  ne  fonne  niot.il  fe 
ra  bien  réputé  Chreftié ,  mais  il  ne  fera  point 
Pafteur.  Et  pourtant  il  faut  que  la  parole  de 
Dieu  refonne  en  noftre  bouche,  fi  nous  vou- 
lons auoir  ce  titre,  &  refpondre  â  cela.  Ainfi 
donc  ce  n'eft  pa.  en  vain  que  fainrt  Paul  fous 
la  pei  fonne  de  Tunothee  exhorte  tous  ceux 
qui  ont  charge  en  l'Egiil'e  de  Dieu  de  mon- 
Itrer  bon  exemple  en  doctrine.Or  cependant 
il  déclare  en  foniine  quelle  eft  la  bon  ne  con- 
uerfation de  laquelle  il  auoit  parle  ,  quand  il 
met  ces  mots  de  charité  ,  de  foy,  d'efprit,  & 
de  pureté.  Il  eft  vray  que  fainct  Paul  ne  tait 
pas  ici  vn  grand  regiftre  de  toutes  les  vertus 
qui  doiuent  eftre  en  vn  bon  Pafteur,  car  il  en 
auoit  défia  allez  traitté  par  ci  deuant,  &  la  re 
pétition  euft  efte  fuperflue:  mais  en  Ibmme  il 
monftre  ce  qui  eftprincipaleinet  requis,  d'au 
tant  que  la  chanté  tft  l'accomplillemeiu  de 
la  Loy,  c'eft  vn  lien  de  Dieu  pârfaijC  (comme 
il  en  traitte  en  d'autres  partages)  Or  ce  mot 
de  Charité  eft  generahcar  comme  il  faut  que 
noftre  vie  fou  réglée,  &:  fe  rapporte  là ,  nous 
pourrôs  auoir  beaucoup  de  belles  vertus  qui 
feront  louables  deuant  les  homes, fi  nous  n'a 
uons  charité,  ce  ne  fera  qii'vne  vaine  peintu- 
re. Voila  donc  pourquoy  fiind  Paul  en  pre- 
mier lieu  commande  a  Tiniothee, que  pour  e- 
ftre  vn  bon  miroir  il  s'eftudie  à  chante. Mais 
cependant  il  met  aufsi  la  foy,  qui  elt  bien  ca- 
chée,&  ne  ieroit  point  en  exemple  finon  que 
elle  le  declaraftpar  les  fiuits.  La  foy(di-ie) 
ne  fera  point  cognue  des  hommes  par  foy, 
mais  entant  qu'elle  fruétifie  ,  les  hommes  en 
pourront  auoir  approbation  ,  tellement  que 
nos  prochains  y  prendront  bon  exemple.  Et 
comment  cela?  Ôiiand  vn  homme  porte  re- 
ueréce  à  la  parole  de  Dieu,&'  qu'il  ne  demaii 
de  finon  qu'vn  chacun  en  foit  tdifié, qu'on  in 
uoquc'  Dieu  purement ,  voila  les  fruits  de  la 
foy  qui  pourront  rendre  tel  ttlmoignage  à 
nos  prechains  qu'ils  y  prendront  garde,  & 
feront  confermtz  voyans  ce  qui  eft  en  nous. 
Et  c'eftainii  que  fainèf  Paul  l'a  entendu, coin 
mandant.  Timochee  qu'il  ait  chanté  auec  la 
foy  ,  pour  monllrer  le  chemin  à  tou'  fidèles. 
Or  notamment  il  met  le  mot  (tî  Jl^rh  :  car  il 

ÙHt 


SVR   LA  I.    A   TIMOTH. 


faut  bien  qu'il  y  ait  vne  viuacité  fpecialc  en 
ctux  quidoyuêt  porter  l'tnreigne,&  qui  l'ont 
pour  guider  le  relie  du  troupeau.  Il  cil  vray 
que  tant  la  foy  que  la  charité  procèdent  de 
TElprit  de  Duu:come  il  ellmonltré  en  d'au- 
tres palTàges.  Et  de  fjiift  nous  ne  pourrons 
auoirvne  feule  goutte  de'bien,  qui  ne  nous 
viene  de  cefte  fontaine-la:que  lî  l'homme  ne 
puifedelà  tout  ce  qu'il  peut  auoir ,  il  eu  ira- 
poiiibie  qu'il  produire  vne  feule  goutte  de 
bien, ni  vne  feule  bône  vertu. Pourquoy  donc 
eft-ce  que  S.  Paul  attribue  l'Efpnt  aux  mini- 
ftres  de  la  parole  de  Dieu?Or  il  parle  de  celte 
viuacité  qui  doit  eftre  plus  grande  en  eux, afin 
de  coduire  le  refte  au  bon  chemin.  Nous  voy- 
ons donc  quant  à  ce  mot  quelle  eft  l'in  tention 
de  fainrt  Paul.  Or  pour  conclulionil  mec  la 
pureté  :  corne  s'il  difoit.que  Timothec  ait  vne 
telle  lainâ:e:é  de  vie  en  loy,qîi'vn  chacun  foit 
incité  à  honorer  la  doftnne  .  Voila  d  jnc  en 
fbmme  ce  que  nous  auons  à  recueillir  de  ce 
paflàge  :  c'ell  que  cambien  que  l'authorité  de 
la  parole  de  Dieu  ne  foit  point  appuyée  fur  la 
bonne  vie  des  homme*,  toutestois  qu.îdnous 
auons  vne  telle  approbation  ,  que  cela  nous 
doit  tant  plus  enflammer ,  Se  que  nous  aurons 
tant  moins  d'excufe  douât  Dieu  &  deuant  les 
homes, fi  nous  ne  pnfjns  la  doftrine  qui  nous 
eflpref<fhee,  veu  qu'elle  nous  ell  latitîee  com 
me  il  Dieu  auoit  appofé  quelque  feau  pour  la 
rendre  tant  plus  auchétique  enucrs  nou..Puis 
qu'ainlieft,  d'autant  pluilesbons  Pafteurs  fe 
doyuent  efforcer  purement  afin  queladjftri- 
ne  qu'ils  porten",ait  tant  plus  d'approbation, 
^•q  l'onla  reçoyuc  en  toute  reuerence.  Or 
fainct  Paul  ayant  parlé  ainliadioufte  ,  Iuftjins 
a  Cf  qiie  ie  -vune  qte  ta  fois  atttnitfa  la  le.' tu— 
ff>&  i  exhortation,  c^  à  doCh'ne.  Or  notam- 
ment il  exhorte  ici  Timothee  à  faire  fon  de- 
uoir:  mais  il  n'y  a  doute  qu'il  n'ait  plus  regar 
dé  à  toute  l'Eglife  qu'à  vn  homme  feul, lequel 
r'auoit  pas  fort  grand  befoind'eftre  incité, 
pource  qu'il  couroit  alTez  de  foy  ,  ainlî  que 
nous  auons  défia  traitté.  Voila  donc  le  faiuâ: 
Efprit  qui  met  en  auant  vne  doCÏi  ine  généra- 
le qui  appartient  à  tous  Pafl:c;urs  de  l'Eglife 
Chreflienne.  Et  pource  que  fainû  Paul  auoit 
cnuie  de  venir  ,  il  met  vn  mot  de  fon  voyage. 
Mais  denoftre  cofbé  retenons  ce  qui  eft  ici 
contenu, comme  vne  règle  qu'il  nous  faut  ob- 
feruer  tout  le  temps  de  noftre  vie.Sainft  Paul 
parle  de  favenue,fîgnifiantqu'encores  qu'el- 
le foit  prochaine,Timothee  ne  doit  pas  cftre 
nonchalant  pour  ctluC  jmbien  que  tum'at- 
tendes,dit-il,&qu'eftant  Uvenu  ie  befongne 
ray  félon  la  grâce  que  Dieu  m'a  faite,  neant- 
moinsgarded'ellre  oilîf.que  tu  trauailles ,  & 
que  tu  t'employes  vertueuf--ment  iufques  à  ce 
que  ie  loyearrmé.  Ormamtenât  faifjnv  com 
paraifon  de  Ti.notheeauec  nous:car  nous  n'a 
lions  pasaaiouid'huy  d'.'tels  perfonnages  que 
fainft  Paul  ,  qui  nous  puiflent  fecourir  au  bc- 
rotn,qui  puiflent  redreflcr  les  thofes  quand  el 


20Ç 

les  defcoulent.  Il  faut  (lotie  que  nous  foyons- 
tant  plus  ardeus  à  ce  qui  nous  eft  ici  monlbé, 
c'ell  que  nous  ayons  f  jin  d'exhorter  ie  trou- 
peau qui  nous  ell  c5m:s,&  de  l'enfeigner.  Or 
pource  fane  il  faut  bien  que  nous  foyons  at- 
tentifs à  lire  l'Efcricure  fainde.Car  que  pou- 
uons-nous  apporter  de  nollrecreu?Il  faut  que 
nous  foyons  difciplesde  Dieu  pour  exercer 
l'office  de  dofteur.carlî  l'home  forge  en  fon 
cerueau  ce  qu'il  met  en  auant  ,  il  n'y  aura  que 
vanité. Il  faut  donc  que  nous  puilîons  de  ceJte 
fontaine, afin  de  faire  boire  les  autres  ,  &  que 
nous  profitions  tous:comme  il  en  eft  parié  en 
Ifaie,  Qu'il  faut  que  nous  foyons  tous  enfei-  j/^  . .    . 
gnez  de  Dieu,  tant  celuy  qui  parle  ,  que  ceux  1^1',^^'^, 
quiefcoutent..  Voila  donc  en  fommece  que  ., 
nous  auons  à  retenu  :  c'eft  que  ceux  que  Dieu 
à  conftituez  miniftres  de  fa  parole, doyucnt  e- 
ftre  attétih  tant  à  profiter,  qu'.i  enfeigner  les 
autres. Or  en  premier  lieu  ildit.Swx  attentif  à 
la  ledure.Et  pourquoy?r.iy  delîa  en  brief  tou 
chéla  raifon  ,  afçauoir  d'autant  que  nous  ne 
pouuons  rien  apporter  linon  ce  que  nous  au- 
rons apprins  en  l'efchole  de-Dieu.  Et  cément 
Dieu  nous  enfeignera-il  lînon  que  nous  pui- 
iîons  de  ù  Loy  &  de  l'es  Prophètes  ce  que  no' 
deuons  mettre  en  auant.''Car  il  nous  faut  rete- 
nir ce  qui  eft  dit  par  faincl  Pierre,  Celuy  qui  '•  ^''•4»' 
parle  ,  qu'il  parle  comme  anonçant  la  parole  '■'■' 
de  D;eu  ,  que  nous  foyons  afleurez  de  noftre 
bafton,que  nou  n'auôs  point  inuenté  ne  for- 
gé la  dodrine  de  laquelle  nous  fommesmini- 
lires, mais  que  nous  la  tenons  de  Dieu.  Voila 
donc  pourquoy  notament  il  eft  dit,  Soisatt.n 
tifà  la  hclitre.  Or  outre  cela  nous  auons  aufsi 
a  noter  que  Timothee  ne  pouuoit  auoir  autre 
Icûuredece  temps-la, lînon  la  Lay  &les  Pro 
phetes.Ainfi  donc  nous  voyôs  qu'auiourd'huy 
il  nous  faut  exercer  en  cefte  dodrine-la.fi  no' 
voulons  bien  édifier  l'Eglife  de  Dieu.  Voici 
deux  points  qui  font  dignes  d'eftrenoteztl'vn 
c'eft,  que  nous  ne  pouuons  point  exercer  no- 
ftre office  fînonayans  profité  en  l'Efcriture 
fainfte.tellcmét  que  nous  foyonsdifciples  de 
Dieu  ,  Se  que  nous  foyons  tous  en  ce  rang-la, 
que  nous  puifsiô»  protefter  que  noftre  foy  eft 
fondée  fur  la  pure  vérité  de  Dieu.  Voila  pour 
vn  item. Le  fécond  eft,qu'auiourd'huy  le  vieil 
Teftamé.  n'eftpas  fuperflu, qu'il  ne  faut  point 
le  lailFer  là  comme  vne  chofe  moific  de  vieil- 
lelle,mais  qu'il  nous  le  faut  appliquer  en  vfa- 
geautant  queiamais.  Vray  eft  que  les  figures 
de  la  Loy  lont  bien  pa{rees,mais  la  fin  &  la  ve 
rite  demeure  toulîours:&puis  lado(!îrine&:  la 
fubftance  qui  eft  là  contenue,nous  doit  aiiiour 
d'huy  feruir  autant  qu'elle  a  fait  ladis  aux  Pe 
res  qui  ont  eftédeuat  la  venue  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.  Or  combien  qu'il  fuffiroit 
d'âuoir  noté  en  brief  ces  deux  articles,  lî  eft- 
ce  qu'ils  font  bien  dignes  d'eftre  dcduif.  plus 
au  long.afi'i  d'eftre  reteiiu.  &  entédus.  Et  de 
ti:d  ,  il  n'cft  point  queftion  ici  feulement  de 
nous,  afin  que  nous  fjachioris  ce  qui  nous  eft 

C.iii. 


106 

commandé  de  Dieu:mais  fainû  Paul  en  la  per 
fonnede  Timothee  monrtre  ce  qui  eft  vtile 
pour  le  Talut  de  tous  enfans  de  Dieu,&  qui  ap 
pai'tienc  en  commun  à  tout  le  troupcau:&  cela 
aufsi  fe  peut  iuger  par  la  doftrine  quand  elle 
fera  bien  entédue.Car  n'auons-nouç  pas  tous 
intereft  (  ie  di  chacun  fidèle  en  fon  endroit) 
de  fçauoir  que  noftre  foy  ne  doit  point  eltre 
en  branfle  pour  receuoir  tout  ce  qui  nous  fe- 
ra propofe,  fans  lugement&difcretion,  mais 
que  nous  deuons  eftre  enfeignez  comme  de  la 
bouche  de  Dieu?Il  n'eft  point  donc  ici  qUi  fiiô 
que  les  hommes  foyent  fages  &  fubtils  à  leur 
phantafie.car  il  y  auroit  vn  poure  fondemét, 
il  y  auroit  vne  fermeté  trop  maigre  :  mais  il 
faut  que  ceux  qui  s'auancent  pour  parler  en 
J'Eglife  de  Dieu  ,  foyent  défia  exercez  en  la 
l.oy  &  éf  Prophètes ,  &  en  toute  l'Efcnture 
fainûc, tellement  qu'ils  n'apportét  rien  finon 
ce  que  Dieu  leur  a  donné,  &  qu'ils  protellent 
qu'ils  ne  font  que  mettre  enauantla  parole 
àe  Dieu  comme  de  main  en  main, puis  que  ce- 
la eft  comim  à  tous. Il  faut  dôc  que  nous  prat- 
iquions cefte  docltine,&  qu'en  cela  nous  co- 
gnoifsions  le  foin  que  Dieu  had*  noftre  fa- 
Lit ,  puis  que  notamment  il  ne  veut  point  que 
ceux  qui  font  en  ccft  eftat  auancent  leurs  (on 
eesSi  refuenes.mais  qu'il  fe  referue  toulîours 
l'office  de  Maiftre,&  qu'il  veut  auoir  cefte  au 
thorité  de  noiis  conduire  comme  ilcognotft 
qu'il  eftbcfoin  pour  noftre  falut.  Qaâd  donc 
nous  voyons  que  Ditu  penlc  ainfi  de  nom, ne 
deuons-nous  pas  prendre  tant  plus  grand  cou 
rage  pour   examiner  la  doftrine  qu'on  nous 
met  en  a«ant  ,  &  que  nous  foyons  rcfolus  Se 
certifiez  que  nous  la  tenons  de  Dieu  ,  comnve 
de  la  fontaine  de  toute  vérité  ,  quand  nous  a- 
uoBS  fon  Efcriture  fainfte?  Voila  ce  que  nous 
auons  à  noter  en  premier  lieu  ,  c'eft  afçauoir 
«ue  Dieu  n'enuoye  point  des  gés  qui  prefchéc 
leurs  fubiilitez  ,  &■  ce  qui  leur  femblcra  bon, 
Inais  que  noftre  office  eft  tout  mefiiré  ,  afin  q 
nous  tenions  de  luy  tout  ce  que  nous  auons  à 
anoncer.  Or  cependant  nous  auons  à  venir  au 
fécond  poinû,  c'eft  afçauoir  que  la  Loy  n'eft 
pas  du  tout  fuperflue  ,  nile  vieil  Tcllament, 
mais  que  c'eft  vne  chafe  permanante  ,  &  qui 
iah  touiîours  retenir  (a  vigueur  iufqucs  en  la 
fin  du  monde.II  eft  vray  que  tous  ceux  qui  ont 
la  crainte  de  Dieu,  confeflent  cela  fans  con- 
tradiOion  :  mais  nous  verrons  ces  pourceaux 
^ui  voudroyent  mettre  tout  en  côfufion  entre 
nous,  qui  defgorgeront  ces  blafphemes,  Et  à 
^uel  propos  nous  vient-on  rompre  les  aureil- 
les  de  ce  vieil  Tcftament ,  ne  des  Prophètes? 
cela  n'eft-il  pas  palTéîEt  confummatii  cft.Voi 
la  corne  ces  chiens  maftins  abbayent,  &  mon- 
trent en  cela  qu'ils  font  contépteurs  de  Dieu. 
Et  combien  qu'ils  ne  parlent  que  du  vieil  Te- 
ftament.ho.fi  voudroyét-ils  bien  auoir  aneai) 
ti  tout  ce  qui  eft  de  Dieu  ,  Si  qw'il  n'y  cuft 
.point  de  Chieftienté  ,  Etde  faift,  la  chofecft 
alTez  notoire  :  &  on  voit  leur  turpitude  ,  que 


SERMON       XXXIII  I. 


fans  la  regarder  encores  la  peut-on  flarirer, 
tant  eft  puante  &  inkfte.Or  d'autant  que  ces 
vileins  ofent  ouurirla  bouche  pour  dénigrer 
ce  threfor  que  lîoftre  Seigneur  nous  a  donné, 
&  Taneantir,  s'illeureftoit  pofsible, d'autant 
plus  nous  faut-il  obferuer  les  paflages  oiile 
fainâ  Efprit  prononce  qu'auiourd'fcuy  la  Loy 
&les  Ptophetesnous  doyuent  édifier,  &  que 
là  eft  contenuevne  doânne  qui  nous  eft  corn 
mune  auec  les  Pères  anciens.  Car  à  quel  pro- 
pos fainû  Paul  euft-il  commandé  à  Timo- 
thee d'eftre  attentif  à  lire  la  Loy  &  les  Pro- 
phètes ,  finon  que  cela  fuit  vtile  &  propre 
pourenfeigner  toute  l'Eghfe;  C'eft  donc  de 
là  qu'il  nous  faut  auiourd'huy  puifer  la  doéiri 
ne  ,  &  faire  que  les  fainfts  tefmoignages  de 
Dieu  auiourd'huy  ayent  leur  vigueur  &autho 
rite  en  dcfpit  de  ces  chiens  maftins  qui  ab- 
bayent ainli.  Or  au  refte  ,  notons  bien  qu'vn 
miniftredela  parole  fera  muni  de  tout  ce  qu'il 
luy  faut,  &  equippé  (comme  on  dit  )  quand  il 
fera  exercé  en  l'Efcnture  fainfte.  11  eft  vray 
que  nous  ne  pouuons  auoir  trop  d'aides  quand 
il  eftqueftion  de  feruirà  Dieu  :  mais  tant  y  a 
que  le  tout  fe  doit  ici  r.pportcr,c'eftque  no* 
foyon  .  fag es , d'à ucant  que  nous  auons  profité 
en  l'efchole  de  Dieu. Cela  donc  eft  la  fuffiiân- 
ce,  voire  la  perfeftion  des  miniftres  de  la  pa- 
role de  Dieu,  c'eft  qu'ils  ayent  bonneinteili- 
gcnce  de  TEfcriture  fainâe  ,  &  qu'Us  en  foy- 
«nt  fidtlescipofitfurs:  quand  ils  auront  cela, 
ils  ont  tout  :  mais  s'ils  extraiiagucnt  de  cofté 
&  d'autre, il  n'y  a  plus  que  vaniré, comme  nous 
le  voyons  en  ceux  qui  appetent  d'eftre  bien 
prifez  comme  gens  fubtils  &  aigus.  Il  eft  vray 
qu'ils  auront  beaucoup  de  pompes,  &  on  leur 
applaudira  :  mais  cependant  il  n'y  arien  de 
ferme, ne  qui  édifie  ceux  qui  les  oycnt.  D'au- 
tant plus  donc  nous  faut-il  bien  retenir  ce 
paflàge  :  car  en  lifant  la  parole  de  Dieu  nous 
ferons  fiiffifamment  munis  de  ce  qu'il  nous 
faut  pour  édifier  l'Eglrfe  comme  il  appai  tiét. 
Et  au  refte  ,  retenons  auf.i  que  ceux  qui  nous 
oycnt, doyuent  tendre  à  ce  but  ,  c\ftquepar 
ce  moyen  ils  foyent  amenez  k  Dieu  ,  &  qu'ils 
cognoilïcnt  ce  q  eft  cotenu  en  fa  parole, qu'ils 
Y  foyent  confermezdeioureniour.  Car  il  ne 
faut  point  qu'on  vif  ne  chercher  des  curiofî- 
tez  friuoles  &  inu  îles  ,  mais  que  les  fidèles  fe 
contentent  d'eftre  amenez  à  Dieu,  tellement 
que  celuy  qui  pzrlcSr  ceux  qui  efcoutét(coni 
me  l'ay  dit)  demeurent  au  rang  des  difcipies. 
Voi  aaoncce  que  noiisauons  à  retenir.  Or 
cependant  ceux  qui  ont  vne  telle  charge, doy- 
uent bien  regarder  de  prcsàeux.  Car  fi  Timo 
thee  ,  qui  eftoit  tant  auancc  en  comparaifon 
des  autres ,  a  eu  bcfoin  d'vne  telle  admoni- 
tion, que  fcra-ce  de  nous  ?  Quelle  diftance  y 
a-il  entre  eeft  homme  qui  auoit  efté  choilî 
par  le  fainft  Efprit,  (comme  nous  le  voyons) 
&entrenous  qui  ne  faifons  que  ramper  fur  ter 
rc'Or  il  a  talu  neantmoins  que  Timothee  s'e- 
ftudiaftàlire,afin  qu'il  cuft  de  quoy  pour  cou» 

muni 


SVR  LA    I.    A 

îl»iini<}uer  à  tout  le  peuple  de  Dicu.Ciiie  pou 
«ons-nou«  donc  finon  que  iournellemét  nous 
tafchions  de  nous  auancer?Et  en  cela  voyons 
nous  (ju''ily  en  a  beaucoup  qui  n'ont  iamais 
gueres  cognu  de  cefte  chargea  qui  n'y  pen- 
lent  enfaçopquece  fou.Carcôbien  en  voy- 
ons-nous de  ceux  qui  s'appellét  Miniftres  de 
la  parole  de  Dieu,  &  qui  veulent  eftre  liono- 
rei:& cependant  quelle  peine  mettent-ils  de 
s'cfForcer,&  d'eftre  côfermez,  afin  qu'ils  ay- 
ent  moyen  de  mieux  exécuter  leur  charge? 
Nous  en  verrons  beaucoup  flairer  le  bon  vin 
des  tauernes,&  où  il  y  aura  i  rire  &  gaudir, 
c'eftlioù  ilsfe  trouuer5t:iln'eft  point  que- 
ftionde  liures  ne  de  lefture.c'eft  aflez  qu'ils 
montent  en  chaire  vne  fois  ou  deux  la  fep- 
maine,  &  qu'ils  parlent  deuant  des  beftes  que 
ils  entretienent  toufiours  enbeftife.tellemé!. 
qae&celuy  qui  parle  ,&ceiix  quiefcoutent, 
t'en  vont  bien  contens  :  car  le  peuple  ne  de- 
mande pas  d'eftre  édifie.  Et  voila  pourquoy 
Dieu  enuoye  de  tels  idoles.Car  nous  deuons 
fentir  vne  vengeace  de  Dieu,  quand  ceux  qui 
occupent  la  place  de  Pafteurs,  l'ont  des  chiés 
malhns.gens  diflolus  en  leur  vie,  gourmans, 
&  ie  ne  fçay  quels  ,  &  qui  n'ont  nulle  doftri- 
ne,  ou  s'iK  en  ont,  ce  n'efl  lînon  par  cérémo- 
nie,qu'ils  diront  ce  qui  leur  vient  au  bec, voi- 
re à  la  volée  fans  difcretion.  Qjjand  cela  fe 
voit,  il  n'y  a  nulle  doute  que  Dieu  ne  s'eflon 
gne  de  nous,  voiie  d'autât  q  nous  ne  fommes 
pas  dignes  d'eftre  gouuerncz  par  luy.  Et  ce- 
pendant fi  on  remonftre  à  telles  gens ,  ils  fe 
defpitent  quand  ils  fe  voyent  ainlî  melpri- 
fez.  Et  ceux  qui  veulent  eftre  honorez  ,  que 
n'ont-ils  dequoy :Comment  efl-il  dit  à  Tiino 
thee  ,  Qjtf  Dulnt  mtfpri[<:  tjieHncffe^  n'cll-ce 
point  afin  que  la  doctrine  de  Dieu  tuft  rcceue 
en  authorité  &  reuerence,nonobitant  fa  leu- 
nefle?  Ouy  bien,raais  fi  faloit-il  que  la  vie  re 
fpondifl.Et  cependant  nous  voyons  des  gens 
qui  feront  tant  contemptibles  que  rien  plus, 
qu'on  a  honte  de  les  regarder.  Et  quel  hon- 
neur eft-ce  qu'ils  s'acquierétfEt  ainfi  notons 
bien  que  fi  nous  ne  mettons  peine  de  profiter 
tout  le  tép'.de  noftrevie,afindepouuûir  édi- 
fier ceux  dont  la  charge  nous  efl  cominil'e, 
nous  fentirons  vne  horrible  confufion,  &  fe- 
rons grifuement  condamnez  deuant  Dieu, 
veu  qu'il  efl  commandé  à  Timothee  (  qui  e- 
ftoit  vn  Ange  au  prix  des  autres  )  de  profiter 
en  la  ledure  de  l'Efcriture  fainfte.  Or  cepen 
dant  notons  aufsi  ce  que  fainâ  Paul  adioufte 
quant  à  l'exhortation  de  la  doftrine.  Car  ce 
n'eil  point  alFez  qii'vn  homme  eftudie  en  l'on 
cabinet ,  &  qu'il  foit  grand  dofteur  &  fiibtil, 
mais  il  doit  quant  &  quant  mettre  en  auant  la 
dodtrine  qui  luy  eft  commife  de  Dieu,  &  pro 
duirece  threfor  pour  le  cômuniquer  à  tous. 
Il  eft  vray  que  chacun  n'aura  pas  la  grâce  de 
enfeigner  :  mais  notamment  ce  propos  s'ad- 
drefle  à  ceux  qui  font  en  l'office. Lifons-no' 
donc.'que  ce  ne  foit  pas  pour  cftie  gras  dccs, 


T  I  M  O  T  H.  Ï07 

&  qu'on  nous  prife,  &  cependant  que  nous  te 
nions  l'ihtelligence  de  l'Efcriture  fainde  ca- 
me lerree  &  enclofe:mais  quand  nous  aurons 
receude  Dieudodrine&  inihuûion  ,  ij  faut 
que  les  autres  en  ioyét  édifiez  auec  nous.  Va* 
la  donc  cômc  fainû  Paul  a  conioiat  ces  deu«, 
c'eft  que  nous  deuons  profiter  en  l'efcole  de 
Dieu.Sc  y  mettre  peine:&  puis,qu'i!  faut  que 
en  exerçât  l'office  de  Paiteur.les  autres  foy- 
ent  amenez  à  vne  raefme  cognoiflànce  par  ce 
moyen,  &  que  nous  leur  communiquions  ce 
que  nous  auons  receu,  à  telle  côdition  Se  fous 
tel  fi,  qu'il  ne  nous  doit  point  eftre  propre  à 
nous,  mais  commun  à  toute  l'Eglife  :  comme 
auAi  fainû  Paul  enparle.fur  tout  au  douziè- 
me des  Romains,  &  autreziemede  la  premir 
reaux  Corinthiens. Cognoiflbns  donc, quand 
Dieu  nous  fait  cefte  grâce  d'auoirplus  d'in- 
telligence de  l'Efcriture  fainûe  que  les  au- 
tres,qu'il  nous  oblige  tant  plus  ,&nous  rend 
dettcurs  à  tout  le  troupeau,  qu'en  tant  qu'ea 
nous  eft  nous  deuons  defployer  ce  que  nous 
auons  comme  vne  chofe  commune,âc  que  nul 
ne  s'attribue  en  particulier  ce  qu'il  aura  re- 
ceu de  Dieu  ,  finon  qu'il  vueille  eftre  larron 
non  point  d'or  ne  d'argent,  maisd'vne  cho- 
fe qui  eft  beaucoup  plus  prccieufe  ,  afçauoir 
de  la  doftrine  de  falut.  Et  ceci  eft  non  feule- 
ment pour  corriger  l'oifiueté  qui  pourroit 
eftre  en  ce(ix  qui  lont  miniftres  de  la  parole 
de  Dieu,  mais  pour  abbatre  aufsi  en  eux  tou- 
te ambition  &'  appétit  de  fe  faire  valoir.  L'oi 
fiueié  doit  bien  eftre  refueillee,  quand  il  ell 
dit  qu'il  ne  faut  point  que  nous  fpeculions, 
que  nous  foyons  comme  des  Philofophes  oi 
fif';,mais  qu'ayans  leu,il  faut  mettre  en  auant 
ce  q  nous  aurons  apprins  en  l'tfcolede  Dieu. 
Voila  donc  corrmie  nous  ferons  incitez  à  met 
tre  peine  que  tout  le  monde  foit  bien  édifié 
par  noftre  labeur. Mais  il  y  a  le  fécond  que  ie 
ay  touché,, c'eft  que  fi  vn  homme, quand  il  au 
ta  Pinteligence  de  l'Efcriture  fàinék,  garde 
cela  pour  foy  ,  &  qu'il  n'en  baille  qu'à  lèche 
doigt(côme  on  dit)afin  d'eftre  prifé,ij;  qu'on 
retourne  à  luy,  &  que  perfonne  n'entende  ce 
qui  eft  des  plus  grans  fecrets,  &  plus  cachez: 
fi,di-ie,vn  homme  eft  tel, il  ne  diftribue  point 
le  don  de  grâce  que  Dieu  luy  a  fai  t  à  ies  fre 
res.mais  il  leur  rauit  le  pain  de  vic,&.'  cefte  pa 
fture  celefte  de  la  parole  de  Dieu. Ainfi  donc, 
apprenons  que  ceux  qui  feront  eleuez  plus 
haut,trebufcher5td'vne  chcute  plus  mortel- 
le, finon  qu'ils  auifent  de  cômuniquer  les  gra 
ces  qu'ils  auront  receues  de  Dieu.Â:  qu'ils  les 
diftribuentencommun  à  tout  le  corps  de  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift,  &  qu'vn  chacun  ea 
re çoiue félon  fa  mefure.  Voiladonc  ce  que 
nous  auons  à  obferuer  en  ce  partage. Et  au  re- 
ftc,notons  auf  i  que  fainft  Paul  non  fans  cau- 
feamis  lidoSlrineSc  t exhijrtittion.W  e&yxzy 
qu'il  met  l'exhortation  deuant  :  toutesfois 
nous  ne  deuons  pas  beaucoup  infifter  làdef- 
fus.'car  nous  fjauôs  que  ceft  ordre  n'eft  point 

C.iiii. 


208 


SERMON    XXXIII  I. 


obferué  en  l'Efcriture  fainfte  ,  de  mettre  les  ment  en  feignez, &:  que  nous  fommes  (î  froids 
degrez  premiers  ou  féconds  toufiours  ,  mais  &  nonchalans  que  ncii  phis,&;  pourt.it  qu\n 
il  ûiffit  qu'en  fomme  nous  ayons  l'mtention  chacun  eit  contraint  de  péfcr  qu'il  n'tft  pomt 
de  l'ETprit  de  Dieu, qui  eft  qu'vn  Paiteur.s'il  que/lion  de  fe  iouer  ainlî  auec  Dieu  ,  mais 
veut  blé  faire  fon  office, &  s'en  acquitter  loy  qu'il  taut  que  nous  receuions  ce  quinous  eft 
aument ,  ne  doit  pas  propofer  la  hmple  do-  déclaré  en  l'on  nom  à  bon  elcient.  Voila,  di- 
ûrine,  pour  dire  ,  Voila  ce  qui  y  ell  ;  mais  il  ie,à  quoy  doiuent  feruir  les  exhortations. Or 
doit  qu.int  &  quant  exhorter.  Il  y  a  donc  en  donc  celuy  qui  a  la  charge  d'anoncer  la  pa- 
fommedeux  chofes  requifes  ,  c'eft  que  nous  rôle  de  Dieu,  qu'Une  penfe  point  eftie  quit- 
donnions  intclligéce  bonne  &  faîne  de  ce  qui  te  quand  il  aura  mis  en  auant  la  bonne  doftri 
eft  requis  pour  le  falut  des  fideles:&  puis  que  ne, pour  dire,  Il  no'  faut  dû  tout  zppuyer  fur 
nous  adiouftions  quant  &  quant  la  vehemen-  la  feule  grâce  de  Dieu.il  faut  que  nous  rccoa 
ce, afin  que  la  doftrine  touche  les  coeurs  plus  rions  àluy  ,  il  faut  que  noftre  falut  Ibit  fondé 
au  vif,  &  que  non  feulement  on  cognoifle  ce  fur  le  mérite  de  la  mort  &  pafsion  de  noftre 
qui  eft  bon,  mais  qu'on  foit  incité  à  le  luiure  Seigneur  lefus  Chrift ,  &  que  nous  cognoif- 
&yadherer.  Voila  les  deux  chofes  qui  font  fions  que  tous  nos  mérites  ne  font  rien  en- 
ici  coniointes,&n'eft  point  licite  de  les  fepa-  uersDieu:  &  puis  tout  le  refte  de  la  doftrine. 
rer.  Si  nousauons  les  aureilles  remplies  de  Q_u^on  nous  dife  ,  Mes  amis ,  voila  que  Dieu 
mots  bien  colorez  ,  cela  ne  profitera  gueres.  commande  ,  voila  l'expofition  pure  &iîmple 
Et  pourquoy?  Q_uand  vn  homme  dira  beau-  de  la  Loy.  Vn  homme  donc  qui  montera  en 
coup  ,&  que  cependant  il  ne  monftrera  point  chaire  pour  inlhuire  le  troupeau  de  Dieu, 
que  ce  qu'il  propofc,  ellde  Dieu,  qu'elle  au-  qu'il  ne  péfe  point  s'eftre  acquitté  loyaumét 
thorité  y  aura-il?Il  eft  vray  qu'on  l'efcoute-  en  péfant  ainiî.  Et  pourquoy?Il  n'y  aura  que 
ra.  Comme  nous  voyôs  qu'vn  home  qui  vfe-  froidure  cependant  :  mais  il  faut  que  les  ex- 
rade  rhétorique  ,  pourra  bien  efmouuoir  les  hortations  foyent  adiouftces  pour  viuifierla 
cœurs  :  &'encores  qu'il  fou  vn  mefchant  ,  &  dodrine,  afin  qu'elle  foit  nayfHe,&  que  nous 
qu'il  ne  tende  qu'à  nial,&  à  induire  vn  peuple  en  foyons  touchez  comme  il  appartient.  Et 
à  toute  confufîon  ,  fi  eft-ce  qu'il  pourra  bien  comme  celle  charge  eft  donnée  à  tous  Mini- 
fe  faire  valoir:mais  il  y  a  vne  autre  chofe  re-  ftres  delà  parole  de  Dieu.aufsi  faut-il  qu'vn 
quifc  aux  feruiteurs  de  Dieu:  c'eft  que  la  foy  chacun  en  fon  priué  apprenc  que  ceci  s'ad- 
precede:&  puis  après,  que  le  zèle  y  ioit  con-  drelle  à  luy .Souffrons  donc  d'eftre  aiguillon 
ioint  pour  l'accompagner  comme  vn  accel-  nez  quand  nous  aurons  cognu  ce  qui  eft  bon, 
foire:que  h  foy(di-ie)foit  comme  le  fonde-  qu'on  nouv  incite, qu'on  attife  le  feu, afin  que 
ment  fur  lequel  on  baftiire,&  que  le  zèle  foit  nou-.  bruflions  du  zèle  de  Dieu,  &  qu'il  morti 
i'cdifice.  Voila  pourquoy  fairftPauldit  no-  fie  par  force  nos  concupifcences  :  &.'  quand 
tamment ,  S^is  .ittentifù  la  Joflr:ne  :  comme  nous  fjmmes  deftournez  du  bien,&."  que  nous 
s'il  difoit,quc  noui  (leuons  tellement  porter  fommes  entortillez  en  toutes  les  vanitez  de 
la  parole  de  Dieu  ,  que  ceux  qui  nous  efcou-  ce  monde  ,  que  nous  defirions  qu'on  nous  en 
lent,  cognoifltnt  que  c'eft  la  pure  vérité  ,  &  retire.  Qjieîi  nous  ne  fouffrons  cela  patiem 
qu'ils  s'y  puiflent  tenir,&'  que  la  certitude  Je  ment,  la  parole  de  Dieu  fera  comme  vne  cho 
foy  qu'ils  ont  ne  foit  point  pour  vaguer,  ne  fe  morte,  là  où  il  n'y  aura  gueres  de  viua- 
poureftre  en  quelque  opiniondouteufe.Com  cité.  Et  en  cela  voyôs-nous  qu'il  y  en  a  bien 
me  nous  voyons  qu'il  y  en  a  qui  diront ,  le  peu  qui  ayent  goufté  que  c'eft  de  la  parole  de 
croy  que  cela  eft  bon  ,  il  me  le  iémblc.  Mais  Dieu. Vray  eft  qu'on  fouffrira  comme  par  ac- 
que  nous  foyons  arreltez  &  refolus  que  ce  quit  qu'on  propofe  la  doftrine  :  mais  quand 
qu'on  nous  propofe, eft  la  doftrinede  Dieu,  on  vfe  de  véhémence,  &  qu'on  crie  ,&  qu'on 
Voila  donc  le  premier, c'eft  que  les  Miniftres  tempefte  ,  Et  y  a-il  ordre  ?  Ho,  il  ne  faur 
de  la  parole  doiuent  appliquer  leur  eftude  à  point  fouffnr  cela.  Voire?  comme  fi  Dieu 
faire  que  ce  qu'ils  propofent, foit  bien  certi-  auait  cefte  paiflion  auec  nous ,  &  qu'on  luy 
fié  ,  qu'il  ait  tel  tefinoignage  ,  que  les  fidèles  euft  donné  congé  de  pai  1er  feulement  à  de- 
cognoilTent  qu'ils  ne  font  point  menez  à  l'a-  mi  bouche.  Ho, non,  il  taut  que  noftre  turpi- 
uenture.mais  que  c'eft  la  vérité  toute  certai-  tude  foit  defcouuerte  ,  quoy  qu'on  tafche  de 
ne  &  infalIible.Cela  eft-iPll  faut  que  les  ex-  la  coauririS:  ne  penlons  point  qu'ion  luy  puif 
hortations  fuiuent  quant  &  quant.  Et  pour-  fe  impoler  filence.  Il  n'eft  point  noftre  inte- 
quoy?  N  JUS  voyôs  la  tardiueté  &' ludeffe  qui  rieur  pour  dire  qu'on  luy  puifle  impofervne 
eft  en  nous.Q^and  nous  aurons  cognu  ce  qui  telle  loy. Or  tant  y  a  que  nous  voyôs  q  bcau- 
eft  vicieux  ,  ce  n'eit  pas  à  dire  pourtant  que  coup  voudroyét  que  la  parole  de  Dieu  n'euft 
nous  foyons  reformez:  chacun  fera  addonné  iinon  vn  demi  cours, pourdire  ,  Q_ii'on  pro- 
à  foy,  chacun  cftât  préoccupé  de  fesaffcctiôs  pofecequi  eft  bon,  &:  ce  qu'on  doit  taire: 
mondaines  fera  comme  à  demi  mort,  &  il  n'y  mais  qu'on  ne  viene  point  picquer,  qu'on  n'v 
aura  point  de  vigueur  en  la  parole  de  Dieu,  ie  point  de  véhémence  ni  d'afpreté.  Quand 
Nous  voyons  donc  qu'il  eft  befoin  que  nous  nous  voyons  cela  ,  c'eft  fignc  que  telles  j;ens 
Icachions  que  noiis  u'auoQS  point  eltédeue-  n'ont  iamais  cognu  que  c'eft  de  foy.  Or  tant 

y  a 


SVR   LAI.  A  TIMOT  H. 


l©y 


V  a  oueceux  qui  veiilet  auoir  réputation  d'e-  OR  nous-nouî  profternerons  deiunt  la 

ihc  li<ltles  ,  fe  doiueiit  rendre  dociles,  &  co-  face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoillance  de 

gnoiltre  qu'il  faut  que  non  feukmêt  ils  adhe  nos  fiutes.le  pnans  qu'il  nous  les  face  fentir 

rent  à  la  pure  vérité  de  Dieu ,  &  qu'ils  reçoi-  de  plus  en  pluî,  voire  pour  nous  en  retirer,& 

uent  paiiiblementce  qui  procède  de  luy.mais  que  nousauifions  de  tellemét  venir  à  luy, que 

qu'ils  fourfi-ét  d'cftre  redarguez  de  luy  qu.ld  nous  en  approchions  de  iour  en  iour.  Et  que 

il  en  fera  befoin  ,  &  que  la  dottrine  de  Dieu  cependant  fi  nous  clochons  par  infirmité ,  & 

ait  telle  vigueur  enuers  eux,  qu'ils  en  foyent  niefmes  que  nous  facions  beaucoup  decheu- 

viuifiez:  comme  aufsi  la  parole  de  Dieu  a  ceft  tes  ,  Se  que  nous  foyons  efgarez  du  bon  che- 

office-la.Quedonc  nous  y  perfcueriôscon-  min.qu'il  nous  redrefle,&  qu'il  nous  fuppor- 
ftammét  fans  nous  en  deftourner  en  quelque 


façon  que  ce  foit ,  afin  que  d'vn  commun  ac- 
cord nous  rendions  à  Dieu  la  louage  qui  luy 
appartiét.afin  qu'il  foit  glorifié  en  nous.iuf- 
ques  à  ce  qu'il  nous  ait  receus  en  fa  gloire  ce 
leAe  où  il  nous  appelle. 


qu'il  nous  reareiie,(X  qii 
te  en  toutes  nos  foiblefles  ,  iufques  à  ce  que 
no'  en  foyôs  defpouillez  &deliurezdu  tout. 
Que  non  feulement  il  nous  face  cefte  grâce, 
mais  aufsi  à  tous  peuples  &  nations  de  la  ter 
re,  &c. 


L  E 


HVITIEME     SERMON     SVR 

Q_V  ATRIEME    CHAPITRE. 

14  Ne  ntcts  point  a  nonchaîoir  le  don  qui  ejl  en  toy  ,  lequel  t  ejl 
donné  par  prophetie,auec  Tinipofition  des  mains  en  la  Vrejlrijè. 

1 5  Exerce  ces  chofes,fois  en  ces  €hofes,afin  que  tapourjùitefoit 
manifcflec  a  tous- 

elles  nous  doiuent  eftre  jJrecieufés,  apprends- 
de  les  faire  profiter  comme  Dieu  l'entend  8e 
le  commande.  Et  ainfî  qii'vn  chacun  regarde 
à  foy,  &qu'il  fçache,  &  qu'ilentreen  côtede 
ce  qui  luy  cft donné,  cognoiflànt  ql'intétiort 
de  Dieu  n'eft  pas  q  cela  foit  mis  fous  le  picd^ 
Qupy  donc'L'vn  a-il  bon  cfpritiTautre  a-il 
force  &  vertu  ?  l'autre  a-il  doftrine  ?  l'autre 
eii-il  en  office  &  eftat?qu'vn  chacun  péfe  que 
Dieu  veut  eitre  ferui  &  honoré  de  tels  moy- 


L  y  a  deux'  raifons  qui  noifç 
doiuent  induire  &•  folieiter 
à  employer  les  grâces  de 
Dieu  pour  les  faii  e  valoir  & 
ftruir.L'vne  c'eft.que  ce.'uy 
qui  ne  tafche  point  de  met- 
tre en  vfage  la  grâce  qu'il  a 
ieceue,enfeuelit  entant  qu'en  luy  eft  la  gloi- 
re de  Dieu. Car  Dieu  veut  eftre  honoré  quâd 
il  nous  a  élargi  des  biens  :  &  quand  nous  les 


fupprimons  tellement  qu'ils  ne  font  point  co  ens.  Voila  donc  ce  qui  nous  doit  inciter  k  fai- 
gnus,c'eft  autant  comme  fi  on  lettoit  vfi  thre  revaloir  les  grâces  de  Dieu.Q^iconquesfe— 
for  en  l'eau.  OrDieuneveut  point  quece  ra  ici  nôchalat, fera  tenu  pour  ficri!ege,d'au-' 
qu'il  a  deftiné  à  fa  louange,  foit  ni  anéanti, ni  tant  qu'il  aura  prophané  ce  que  Dieu  auoir 
effacé.  U  y  a  l'autre  raifon,  que  félon  q  Dieu  dédié  à  vn  vfage  fi  noble  &:  fi  excellent,  corne 
BOUS  fait  plus  de  grâce  ,  il  nous  oblige  quant  nous  auons  dit.  Or  cependant  nous  fraudons 
&  quant  à  nos  prochains, afin  qu'ils  en  foyent  aufsi  nos  prochains  quand  nous  ne  penfons 
édifie^.  Car  chacun  n'eft  pas  riche  pour  fov,  point  de  les  aider  entaritqu'en  nous  fera,  fe- 
mais  nousdeuons  communiquer  enftmble  ce  Ion  la  faculté  q  Dieu  nous  aura  mife  en  mam, 
que  nous  auons  receu>&que  le  profit  en  foit  l'ay  dequoy  édifier  mes  prochaîs.ic  m'en  de- 
commun  :  comme  aufti  fainft  Paul  en  traitre  porte,  ie  ûiis  vn  larron  :  car  ce  que  Dieu  m'a' 
aflèz amplement  au  douzième  desRoniains,  donné.n'tftoit  pas  à  moy.que  ie  lepeufle  fup 
&  au  douzième  delà  première  aux  CorintK.  primer, le  fruit  en  cft  commun, mes  prochains 
Voila  (  di-ie  )  les  deux  regards  que  nous  de-  en  deuoyêt  eftre  édifiez. Qilîd  donc  ie  tour— 
nons  auoir  afin  de  ne  pas  enfeuelir  les  dons  neainfia  mon  particulier  ce  que  Dieu  auoit 
de  Dleu,raais  de  les  appliquer  en  vfagc.Nous  ordôné  à  mes  prochains, il  faudra  que  ie  foye 
Mrtt'lf.  fçauons  ce  qui  eft  dit  en  la  fiinilitude  du  fer-  punid'auoir  retenu  ce  que  les  autres  deuoyéc 
141  O"  uiteur  nonchalant,  lequel  auoit  en  feueli  l?ar-  receuoir  par  mon  moyen:  carie  fuis  vndiftri, 
*J'  genide  fonmaiftre.Car  il  luy  eftoit  comman  buteur  dtfloyâl,commel'Efcriture  aufsi  nons 
dé  de  lé  faire  profiter  :  lemaiftrcnon  fans  mor.ftre  que  c'eft.i  cefte  condition-la  qi)e  no' 
caufe  fe  courrouce  de  ce  que  fon  argent  a  e-  ftrc  Seigneur  nous  diftribue  les  dons  de  fon' 
lié  ainfi  inutile.  Or  les  dons  queDieunous  S.Efprit:comme<î  le  bien  d'vne  maifon  nous 
élargit,  valent  beaucoup  mieux, &  font  plus  à  eftoit  mis  en  charge  ,  non  pas  pour  le  gour- 
eftimer  que  l'or  ne  l'argent  :  car  ce  font  les  mander, &  pour  en  faire  ce  que  bon  nous  fcni' 
marques  du  fainû  Eiprit.  Ainû  donc  puis  que  blcra,mais  pour  en  vfer  côme  le  maiftre  l'or— 

D.i. 


ionne.  Voila  pourqnoy  CxinSk  Paul  maince- 
aant  commande  i  Timothee  ,  quilnemette 
foint  a  nonchahir  Us  grâces  cfiiil  a.  recettes. 
Non  l'eulement  fainft  Paul  a4monefte  Timo 
thee  qu'il  fera  mal  s'il  tourne  en  mauuais  vfi 
ge,&pour  nuireàTEglifc  ,  «  qu'il  a  receu, 
mais  il  adioirfte  que  s'il  ne  remploye,qu'il  ne 
talche  de  le  faire  feruir  &  valoir, il  fera  coul- 
pabledeuant  Dieu.  Il  eft  vray  qu'ici  fainft 
Paul  parle  à  vn  homme  feul,mais  celle  do&ri 
ne  eft  commune  ,  &  chacun  doiteftrefolicité 
de  cefte  exhortation  pour  s'acquitter  de  l'on 
deuoir.Cognoiuons  donc  quand  Dieu  nous  a 
mis  en  ce  monde,  &  qu'il  luy  a  pieu  noif;  elar 
girdes  dons  de  fou  fainâ:  Efprit,  quec'efta- 
fin  qu'il  en  foit  honore.  Et  au  refte,d'autant 
que  nous  auons  àviure  eftans  liez  en  vraye 
Tnion  de  charité  ,  qu'vn  chacun  regarde  d'é- 
difier fes  prochains  entât  qu'en  luy  feia.Voi 
la  donc  comme  nous  ne  mectrôs  point  à  non- 
chaloir  la  grâce  de  Dieu,  alcauoir  qu.îd  nous 
metttons  peine  qu'elle  profite  à  tous  en  com 
mun,&  que  la  gloire  en  reuiene  à  celuy  qui  en 
eft  digne:  que  chacun  ne  s*aiiatice  point  pour 
fon  ambition,  pour  Te  monftrer  &  poureftre 
prilï-  car  c'eft  defpouiller  Dieu  du  dioit  que 
iitneritermais  plujtoft  que  toute  noftrc  incen 
tion  &  noftre  but  l'oit  qu'on  cognoiirc  la  bon 
té  de  Dieu  quand  il  s'efi  mouftré  ainfl  libé- 
ral enuers  nous,  &  qu'il  ne  nous  a  rien  efpar- 
^né.  Q£e  donc  Dieu  foit  cognu  autheur  de 
tout  bien,  &  qu'on  luy  en  rapporte  la  louan- 
ge:^ voila  comme  fes  grâces  ne  feront  point 
raifes  i  nonchaloir.  Et  au  relie,  fclon  que  la 
gloire  de  Dieu  nous  eft  precieul"e,&  que  nous 
auons  cher  le  falutde  nos  prochains.auifons 
que  toutes  les  grâces  du  faintl  Efprit  foyent 
la  rapportée:^  ,  comme  aufsi  elles  y  tendent. 
Or  notamment  fainft  Paul  parle  de  la  grâce 
que  Timothee  auoit  reccuc  eftant  ordonné 
Pafteur:  car  il  parle  de  l'impofition  des  maïs, 
ti  delà  Preftiile.Vray  eft  que  ce  mot  de  Pi-*- 
J{rife{e  peut  rapporter  à  celt  office  auquel  e- 
ftoit  Timothee,  qui  eftoit  la  compagnie  des 
Preftres  ou  Anciens ,  c'eft  àdire  des  Paftcurs 
del'Eglife.  Or  cependant  nous  fçauons  que 
Jhinâ  Paul  veut  Jire:car  quant  à  cefte  fenten 
«c  il  n'y  a  nulle  obfcurité:  c'eft  q  Timothee, 
quîd  il  hit  ordonné  Pafteur.auoit  receu  grâ- 
ce de  Dieii.  Voire,&  fainil  Paul  luy  remon- 
tre ,  puis  qu'ainfi  eft  que  cela  eft  aduenu  par 
prophétie  ,  q  Dieu  l'auoit  marqué  afin  qu'on 
le  choifïft  à  ti  I  cftat.que  cela  le  doit  plus  en- 
flammer,5:luy  donner  meilleur  courage,  veu 
que  c'euft  efté  re/îfteràOitu  &à  fon  clcâiô 
quand  il  ne  fe  f  ift  loyaumét  porté  en  fon  of- 
fice. Or  pour  faite  nuftre  profit  de  ce  paflà- 
ge  ,  nous  au«ns  à  noter  en  picmier  hea  ,  que 
c,efte  cérémonie  de  mettre  les  mains  fur  la  te 
lie  de  ccliiy  qu'on  tftablilFoit  pour  Pafteur.a 
efté  en  vfage  entre  les  Apofties,  côme  ils  ont 
touliours  retenu  quelque  forme  qui  auoit  e- 
fté  accouftiiincc  de  long  temps  çn  l'Eglifc  de 


SERMON    XXXV. 


Dieu.  Quand  doc  on  ordonnoit  des  Pafteurii 
il  y  auoit  ce  figne  extérieur,  qu'on  leur  met- 
toit  les  mains  fur  la  telle. Pourquoy  cela?pour 
en  fairevne  oblation  facree  à  Dieu  :  car  c'a 
efté  la  façon  de  la  Loy,d'offrir  ainfi  les  facri 
ficcs.  Et  au  refte,en  prières  folennelles  aufsi 
les  Pères  anciens  ont  eu  cela(comme  nous  le 
voyos  mefmes  deuant  la  Loy )qu'ils  raettoy- 
ent  les  mains  fur  la  tefte  de  celuy  qu'ils  vou- 
loyent  recômander  à  Dieu. Maintenant  nous 
voyons  que  ce  n'a  pas  efté  vne  chofe  fuper^. 
flue  ,  que  d'ordonner  ainfi  des  Paileurs  auec- 
impofition  des  mains.  Et  pourquoy?Car  tant 
eux  que  tout  le  peuple  eftoyent  adraoneftez 
que  ii  vn  homme  eft  appelé  à  cefte  charge  de 
picfchcr  la  parole  de  Dieu  ■  qu'il  n'eft  plus  â 
foy.ni  en  fa  liberté  ,  qu'il  faut  qu'il  fe  dedie 
pleinemct  i  Dieu. Non  pas  qu'il  ne  taille  que 
tous  fidèles  foyent  aufsi  bien  de  ce  rang  Se  de 
cefte  condition:comme  S.Paul  ne  parle  point 
feulement  aux  rainiftresde  la  parole  ,  quand 
ii  dit,  le  vous  exhorte  par  la  mifericorde  que  Rj»»»».lt« 
Dieuadefployce  fur  nous ,  de  vous  offrir  en  '• 
lacrifîces  viuans  :  mais  il  eft^end  cela  à  tous 
enfans  de  Dieu  ,  &  i  tous  fidèles  fans  diftin- 
ûion.  Mais  cependant  il  eft-ce  que  celuy  qui 
eft  appelé  pour  anoncer  la  doilrine  del'E- 
uangile  ,  &  pour  adininiftrer  la  pafture  de  vie 
&  de  falut ,  celuy-la  a  encore  vne  aftritlion 
plus  grâdc.il  n'eft  plus  àfoy.maisdu  tout  de- 
ftiné  à  l'Eglifc  de  Dieu-  Voila  donc  J'aduer- 
tiffement  qui  eftoit  dôrié  par  ce  %ne  de  l'im 
poiîtion  des  mains. Et  puis  d'autant  que  c'eft 
vnecliarge  fi  haute  &  fi  pefanre  que  dépor- 
ter l'ambaflàde  de  falut,  de  recôcilier  les  ho- 
mes auec  Dieu,&  les  alFeurer  de  la  remifsion 
de  leurs  péchez,  il  faut  bien  que  Dieu  befon- 
gne  ici.  Car  ce  n'eft  point  fans  caufe  q  fainii 
Pauls'efcrie  en  la  féconde  aux  Corinthiens, 
Et  qui  eft-ce  qui  pourra  eftre  ftitfifant  à  vne 
charge  fi  ditficite  ?Mais  il  y  a  ce  remède, c'eft 
afçauoir,quc  puis  qu'il  plaift  à  Dieu  de  fe  fer 
uirdes  hommes  en  tel  cllat.il  leur  donne  auf- 
fi  dcquoy  y  fournir.  Tant  y  a  qu'il  faut  bien 
que  ceux  qu'on  eftablit  pour  eftre  Pafteurs, 
foyent  pleinemét  dédiez  à  Dieu,  afin  qi'il  les 
gouuerne  par  fon  S. Efprit,  qu'ils  luy  loyent 
folennellemcnt  recommandez,afin  qu'il  leur 
donc  efprit  tant  de  prudéce  que  de  Içauoir, 
qu'il  leur  dônp  efprit  de  vertu  &  de  zèle, qu'il 
leur  donne  efprit  de  conftace,  qu'il  leur  don- 
ne efpritde  charité  &  douceur  ,  &  patienOiC. 
Qjjiifdonc  les  mains  ont  efté  ancienneme^it 
impolies  à  ceux  qui  eftoyent  eleus  Se  ord(;/n- 
ncz  pour  Pafteurs,  en  cc-Ja  les  fidèles  on/pro 
tcftc  qu'il  faloit  bien  que  Dieudcljjl^aft  de 
fa  vertu  ,  afin  que  le>  hommes  fe  peutlent  fi-, 
delement  acquitter  de  leur  office.  Voila  donc 
pourquoy  famft  Paul  en  ce  partage  parle  de 
l'impofîtion  des  mains  à  Timothee. Or  il  mô 
ftre  quant  &  quant  qu'vn  tel  ligne  n'a  pas  e- 
fté  vain  ne  friuole:car  Dieu  l'a  fait  valoir  en 
y  adiou/lant  fa  grâce.  Pource  que l'eleftior» 

de  Ti 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH. 


ISÏ 


de  Timothee  eflort  ftinfte,  qu'elle  iifl oit  re- 
liée comme  elle  daioit  ,  Dieu  auTsi  y  ell  in- 
teriienu,&  y  a  p:eficlé:&  quand  la  prière  a  c- 
fté  faite  pour  ta  perfonne  de  l'homme,  Dieu 
a  fait  fentir  par  effed  que  tout  ce  qu'il  a  or- 
<lonné  ,  n'eft  pas  vain  ni  inutile  .mais  que 
l'eflicacedc  fon  S.Efprit  y  ell  couiointe.Voi 
la  en  fomme  ce  que  nous  aiiou?  à  retenir.  Ojt 
côbicn  queS.PauIpaile  ici  àTnnoclice,  tou- 
tesfois  la  doôrine  eft  pour  nous.  Apprenons 
donc,  quand  il  faut  auoir  des  miniilrcs  qui  a- 
lîoncét  la  parole  de  Dieu,  qu'vn  chacun  doit 
auoir  le  foin  de  prier  alors, car  ce  n'eft  pas  vn 
ieu  de  petis  cnfans,<:omm€  on  dit.  Ueft  que- 
ftion  que  l'Egiife  de  Dieu  foit  gouucrnee  c5 
me  il  l'ordonne. Il  vfe  de  ce  moyen-la, 5;  veut 
qu'on  l'obferue  ,  &  qu'il  foit  inuiolable  iuf- 
ques  àla  fin  du  monde.  Vouiôs-nous  donc  e- 
Jlre  gouuernez  de  DietiPcognoiflons  qu'il  no* 
faut  auoir  en  finguliere  recommandation  de 
choilîr  des  minières  quifcyent  fidèles,  &■  qui 
foyent  propres  pour  exercer  leur  off  ce.Car 
^conie  nousauons  veu  par  ci  deuant)  ce  n'ert 
pas  vne  chofe  contéptible  que  àe  gouucrner 
la  maifon  de  Dieu. Il  nou".  faut  puis  âpres  ré- 
duire en  mcnioireceque  S.Paul  alors  a  adiou 
fté  ,  qu'il  y  avn  fecret  qui  furmonteinefmcs 
l'efpritdes  Anges,  que  Dieu  a  cfté  manifcflé 
en  chair.  Puis  qu'ainfî  eftfJonc  quelesniini- 
ilres  de  la  parole  fôt  app<  Irz  pour  gouuerrer 
la  maifon  de  Dieu, qui  e/l  fon  Egli-fe,  le  pilier 
qui  fouftict  la  verite:quâd  vn  tel  threfor  leur 
eft  commis,  c'eftque  ce  fccret  admirable  que 
Dieu  a  voulu  publier  au  mode  nous  eft  poité 
par  km  bouche.il  fiut  hienfcomnie  i'ay  ditj 
que  nous  ayons  le  foin  de  prier  Dieu  qu'il 
rou':  addreffe  en  forteque  les  bémes^quife- 
ront  choifi'ifoyét  vrai<^  inftrumensdefquels 
il  fe  férue  pour  noftrc  falut.  Voila  donc  pour 
vn  item.  Et  cependant  notons  quand  nous  y 
procec'Srons  ainfî,  qu'vn  chacun  de  ion  cofté 
priera  Dieu  qu'il  gonuerne  ceux  qui  fot  pour 
porter  h  parole,  q  Dieo  monftrera  parefFeû 
que  nos  prières  ne  fcrôt  point  vaines, que  les 
liôices  ne  ferot  point  choifis  qu'il  ne  leur  di 
ftribue  ce  qui  fera  requis  &  neceflàire  pour 
s'acquitter  de  leurdeuoir.Au  re)le,no' voy- 
ons maintenantque  c'eft  à  bon  droiû  fi  Dieu 
ne  nous  donne  point  gens  qui  s'acquittent 
mieux,&  par  lefquels  aufsi  l'Egiife  foit  gou- 
ucrnee vertueufemcnt.  Car  qui  eft  celuy  qui 
penfeàprier  Dieu  qu'il  touche  par  fon  S.E- 
fprit ceux  qui  font  côftituez  en  ceftcftat?Les 
yns  voudroyent  qu'il  n'y  euft  mils  miniftres, 
le  qu'il  n'y  euft  nulle  forme  de  religi6,^non 
quelque  ieu, quelque  badinage,teliement  que 
la  parole  de  Dieu  fuft  du  tout  crfeuelie.  Et 
ils  ne  fe  cachet  point,  5  ce  font  chiens  effron 
tez  qui  abbayent  côme  fi  feulemét  le  fon  &  le 
fcrtutdela  parole  de  Dieu  les  tourmentoit: 
car  ils  fe  gardée  bien  que  leurs  aureillcs  n'e*i 
foyent  point  tiop  ropucsrils  gôurmadent.ils 
jurongncnt  cependant  qu'on  prefche.  Il  eft 


vray  qu'ils  vrédront  bien  ici  quelque  fois, voi 
re  tant  feulcmct  pour  faire  môftrermais  fine 
laifîent-il'- pas  d'eftie  des  pourceaux  à  l'au- 
ge pour  réuerfer  toute  doftrine.Et  quand  on 
voir  q  les  fermons  les  fafchent  ainfi,&  qu'ils 
fe  defpitent  à  l'encontre,  ne  peut-on  pas  co- 
gnoiftre  qu'ils  font  biéloin  d'auoirvne  telle 
folicitude  &:  Tcle.côme  S.  Paul  le  monftre  ici 
que  tous  Chrcfriens  doiuttauoir,  pour  prier 
Dieu  que  fon  Eglifc  foit  toufiours  bien  four 
nie  de  fidèles  Pafteurs?  Qj^ant  eft  des  autres, 
il  ne  leur  en  chaut, il  leur  femblc  que  cela  ne 
les  c5cernepoint,&- qu'ils  ne  s'en  doiuét  fou 
cier,&  qu'il  ne  letir  touche  en  rien  quels  mi- 
niftres  £1  y  ait.  Qjiâd  dôc  il  y  a  vne  telle  non 
chalance  Scmefpns,  fefaut-il  esbahir  fi  Dieu 
n'addrellè  point  toufiours  des  Pafteurs  côme 
il  feroit  àdefirer?Et  mefmcs  c'eft  vn  miracle 
quand  noftre  Seigneur  cnuoye  auiourd'huy 
gens  qui  tafchent  ^défirent  d'anoncer  bien 
Se  purement  fa  parole,  qui  procurent  le  falut 
de  l'Egiife,  &  qu'il  y  a  quelque  affcftion.  En 
ccla,di-ie,il  faut  bicnque  Dieu  fuinionte  no 
lire  malice  &  ingiatitude,  veu  que  nulne  pen 
fe  à  le  prier. Or  tant  y  a  que  celte  doûxine  de 
ueroit  eftre  mieux  obfeiuee  de  nous  ;  c'eft  a- 
fçauoirque  s'il  y  a  fai;tc  d'vn  Pafteur  pour 
l'Egiife  ,  vn  chacun  doit  cftre  en  fooci  côme 
de  fon  cas  propre, &  qu'alors  on  prie  Dieu  AT 
demment  qu'il  choifiiTe  celuy  qu'il  cognoift 
eftre  idoine  pour  exécuter  vne  telle  charge 
quÉd  elle  luy  fera  cômife. Comme  nous  voy- 
ons aul'si  que  les  Apoftres,quâd  ils  ont  voulu 
ordonner  des  Pafteurs,  non  feukmctont  fait 
telles  prières  communes,  mais  ontadioufté 
ieufi-esafin  qu'on  y  proccdaftauecplusgran 
de  véhémence  ,  &  que  chacun  fuft  mieux  ad— 
ucrti  qu'il  n'eftoit  point  qutfiioii  d'vne  cho- 
fe vulgaire.    Si  donc  nous  voulons  que  Dieu 
gcuuernefbn  Eglifc  de  nofrre  temps,  &  qu'il 
y  air  gensqui  foyent  conduits  par  fon  fainû 
Efprit  afin  de  s'employer  pour  noftre  falut, 
apprenons d'eftre  plus  fongneuxde  fuiure  la 
règle  qui  nous  eft  ici  moniireeic'eft  qu'on  re 
commâde  a  Dieu  ceu\'  qui  font  en  l'office, a- 
fin  qu'il  fe  férue  d''eiix  ,  Sr  qu'il  defploy  e  tel- 
Itmet  la  vertu  de  fon  S.Efprit, qu'ils  ne  foy- 
ent point  inftiumés  morts  ni  inutiles. Si  ainff 
eft,f(;achons(côme  l'ay  dit)que  Dieu  ne  per 
mettra  iamais  que  les  figues  qui  font  ordon- 
nez de  luy,foyctit  fruflratoires,.  que  lefruift 
ne  s'en  cognoifle.  Et  voila  pourqnoy  il  eft 
du  que  Timotheea  receu  grâce  eftant  appe- 
lé en  fon  office, quand  onluy  a  mis  les  mains 
fur  la  tefte  ,  que  c'a  efté  pour  le  fanâifier  au 
fermée  de  Dieu  ,  &  pour  ratifier  fon  eleftioB 
auccceftc  cérémonie  fainfle  ,  &  que  Dieu  a- 
uoit  approuuee  de  tout  temps. Ce  figne  done 
n'a  point  efté  vne  chofe  friuole,&  côme  vne 
ombre  &•  vne  figure  vaine. Car  fainft  Paul  no 
tamcnt  dit  qu'alors  il  luy  a  efté  dôné grâce* 
Mars  no*  deuôs  aufsi  obfcruer  cefte  fobrieté 
&  modeftie,  de  ne  ri«n  attéter  de  noftre  xer- 

D-it. 


lit 

«eau  :  car  nout  voyons  comme  il  en  cft  adue- 
nu  au  monde ,  &  U  prattique  en  eft  auiour- 
d'huy  trop  mamfefte  en  la  Papauté.  Voila  les 
Papilles  qui  ont  inuencé  pour  la  Prcftrifcdes 
Sacremens, qu'ils  appellent.  Or  il  y  a  vne  au- 
dace diabolique  aux  hommes ,  quand  ils  drel- 
fent  ainlîdesceremonies,  voirtS:  les  appel- 
lent Sacremens,  comme  s'ils  tenoyent  là  at- 
tachée la  grâce  de  Dieu  ,  &  la  vertu  de  fon 
f.iin£t£fpnf&noui  voyons  ce  qui  en  eu  ad- 
uenu.  Voila  le  Papeqiii  ordôncra  fes  Preftres 
aiiecgrand'  pompe  .  Il  eft  vray  que  Pimpûlî- 
tion  des  mains  y  fera ,  mais  ce  n'eft  que  com- 
me vn  petit  acceffjire  ,  cela  ne  luy  eft  rien. 
Cependlt  il  les  faudra  oindre  &  grailFer.  Car 
auhi  les  Prertres  de  la  Papauté  ne  font  point 
appelez  au  feruicc de  Dieu  pour  eflrePafteurs 
d'Êglife ,  mais  Us  font  inftitiiez  pour  eftre 
bourreaux  de  lefus  Chrifl.atin  de  Je  meurtrir 
tous  les  iours  :  car  autant  de  Mefles  qu'on 
chante  en  la  Papauté.ce  font  me;rc;es  de  le- 
fus Chrift.  Car  ils  dilent  qu'iK  le  l'acrihent  a 
Dieu  fon  Père:  &  le  facrificc  ne  fe  peut  taire 
fans  (Iiiiçicômemefiues  le  tellainent  requiert 
cela. Puis  donc  qu'ils  veulent  vûirpcr  ccft  of- 
fice de  facrifier  lefus  Chrifl,  c'eil  autant  com 
me  s'ils  s'appeloyent  fes  bourreaux.  Et  voila 
qu'emporte  la  Preftrifcdc  la  Papauté, c'ert  vn 
facrilege  infernal. Mais  cependant  il  y  a  auf- 
fî  les  cérémonies  qu'ils  ont  inuétces, qu'il  leur 
faut  graiffer  les  doigts  ,  qu'il  leur  faut  eftre 
defguifez.  Et  qu'ell-ce  que  tout  cela  linon  vn 
<harme  &  vne  forcclerierEt  Dieu  auf'ii  a  tour 
né  en  malediciios  toutcela.Car"qu'efl-ce  des 
prertres  de  la  Papauté,  fiaon  qu'ils  deuiencnt 
diables,  encorcs  qu'ils  culFent  cfté  Anges  au- 
païauant?  Dieu  doc  les  rend  tellement  hebe- 
tez,  qu'on  ne  voit  entr'cux  lînô  vn  abyfnc  8c 
vne  confufion  infernale  ,  que  ce  qui  dloit  de 
Dieu  en  eux,  eft  du  tout  anéanti .  Apprenons 
donc  de  n'ellre  point  téméraires  pour  forger 
des  figues  à  noftre  poite  ,  mais  côtétons-nous 
delafimplicitcque  Dieu  nous  a  ordonnée  ,& 
alors  no' fentirôs  par  experiéce  qu'il  n'a  rien 
inftitué  en  vain  ne  fans  profit. Mais  fi  nous  ex 
cédons  mefure,  &  que  chacun  le  donne  licéce 
de  faire  ceci  ou  cela,il  eft  certain  que  Dieu  fe 
mocquera  de  noftre  folie  &  arrogacej,  &  nous 
rendra  confus.  Voila  donc  ce  que  nousauons 
à  retenir. Et  voila  pourquoy  l'Efcriture  lain- 
fle,quad  elle  nous  parle  du  Baptefme  &de  la 
Çenede  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, nous 
monftre  qce  n'eft  point  en  vainque  l'eau  no' 
eft  mife  fur  la  tefte.  Car  puis  que  Dieu  a  infti 
tué  ce  figne-la,&  qu'il  veut  que  nous  en  vfiô ,, 
il  le  fera  aufsi  valoir  ,  qu'il  nous  fera  vn  bon 
lefmoignageque  nous  ferons  lautz  &■  purgez 
de  nos  macules  X:pol!utiôs  par  le  fang  de  fon 
Fils,  que  nous  ferons  renouuelcz  par  la  vertu 
de  fon  ùindl  Efprit,  &  que  par  ce  moyen  auf- 
li  ce  qui  eft  de  noftre  chair  &  de  noftre  natu- 
,  re  mauuaife,  fera  amorti  en  nous.  Et  pour- 
quoy ?Car  il  en  eft  rautheur,fa  proraefie  y  eft 


SERMON    XXXV. 


côiointe,&  c'eft  à  luy  feul  de  s'obliger  enuer« 
nous. Autant  en  eft-il  de  la  lainde  Cène.  Car 
puis  que  noftre  Seigneur  lefus  a  voulu  que 
nous  la  célébrions ,  pour  eftre  certifiez  qu'il 
eft  noftre  viande  &  noftre  bruuage.quad  nous 
venôs  â  celte  faintle  table.ce  n'eft  point  pour 
mangerleulementvn  morceau  de  pain,  &  boi 
re  trois  gouttes  de  vin,  mais  pour  eltre  parti- 
cipas de  ia  vie  de  noftre  Seigneur  lefusChrift, 
pour  eftre  repeus  de  fa  propre  fubftance,pour 
lentirque  fi  vie  nous  eft  commune.  Voila  doc 
comme  noftre  Seigneur  befongne  par  la  ver- 
tu de  fon  faiirôElpricen  ces  lignes  qu'il  a  in- 
rtituez.à  ce  qu'ils  foyent  inftrumens  de  valeur 
8r  de  vertu.  Mais  voila  les  Papiftes  qui  ont 
voulu  auoir  vn  milion  de  Baptefmes.Car  l'eau 
bénite  qn'cft-ce  ftlon  qu'ils  en  difentj'vn  mil 
le  de  Baptefmes. Voire, comme  fi  Dieu  n'auoit 
point  efté  afiez  iage  pour  inftitucrce  qu'il  co 
gaoïlFoit  nous  eftre  vtile  II  a  voulu  que  les  fi- 
dèles fe  côtcntafTcnt  d'vn  Baptefnic  pour  tou 
te  leur  vie:  voilâtes  hommes  qui  le  corrom- 
pent,S:  font  tout  au  rebourt.S:  difent  que  ce- 
la ne  fuffit  point  ,  linon  qu'il  y  ait  vn  mémo- 
rial qui  renouuelle  le  Baptefme  qui  s'eft  fait 
pour  vn  coup.  Etainlî  qu'cft-ce  de  tous  les 
afperges  de  l'eau  bénite  Papale?Aiitant  de  re- 
nonccmens  de  la  foy,&  pour  anéantir  ce  que 
Dieuauoit  iiiltitué.U  ne  le  faut  point  donc  ef- 
bahir  fi  Dieu  les  abbrutit  en  telle  forte  qu'ils 
n'ont  ne  fens  neraifon  ,  Seau  lieu  de  fe  net- 
toyer qu'ils  fe  polkicnt  &  fe  plongent  en  l'or 
dure  &  en  la  fange  plus  profond.  Autant  en 
cft-ii  de  leur  Mclïe  :  car  là  non  feulement  ils 
ont  peruerti  l'vfagc  pur  &  légitime  de  la  Cène 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift ,  mais  ils  ont 
eftabli  vne  abomination  du  tout  contraire  à  la 
faintte  Cène.  Nous  retenons  le  facnfice  feul 
&  viMque&  perpétuel  quia  efté  otfert  par  le- 
fus Chrift  en  la  croix:&  ces  diables  font'àcroi 
reque  lefus  Chrift  eft  iournellement  otfèrt 
par  eux,&  vfurpent  celte  dignité  laquelle  le- 
fus Chrift  (comme  dit  l'Apoftre)  n'a  pas  ofé 
prendre  à  foy  ,  mais  qu'il  a  attendu  que  Dieu 
fon  Père  le  conftituaft,  voire  auec  ferment 
folennel ,  comme  il  eft  dit  au  Pfeauine  ,  I  ay 
iuré,&  ne  m'en  repentiray  point ,  tu  es  le  Sa- 
crificateur  éternel  félon  l'ordre  de  Melchife- 
dech.  Or  donc  maintenant  nous  voyons  que 
tout  ainli  que  les  lignes  que  nous  auons  de  ia 
main  de  Dieu  &  de  fonauthoritc,ne  font  pas 
inutiles  nefruftratoires.aufsi  aucôtraire  nous 
foiniiies  admoneftez  de  ne  rien  attenter  de  no 
Itre  cerucau  &  à  noftre  appetit,mais  de  fuynre 
lîii^f  lement  ce  que  Dieu  à  inftitué  ,  lans  pre- 
fiimerd'y  adioiilter  ce  que  bon  nous  lenible. 
Or  cependant  fainft  Paul  dit  queTimothee 
a  efté  inftitiic  Paftcur  par  prophétie:  non  pas 
que  cela  fuit  commun  ,  mais  d'autant  que  Ti- 
mothee  eftoitchoifi  cntic  les  autres  ,il  faloit 
que  Dieu  luy  donnaft  quelque  marque  fpe- 
ciale.  Ce  n'eft  point doncvne  chofe  reqiiife 
en  tous  Pafteurs  qu'il  y  ait  prophétie  ,  que 

Dicu 


Helr.f. 
6.f. 

pyv.iio. 
4- 


SVR  LA  I.    A   TIMOTH. 


*'J 


Dieu  <îeclar«  du  ciel  qu'il  veut  auoir  ccftuy- 
ci  ou  ceftuy-la:  mais  il  nous  faut  contenter  de 
cefte  fimplicité,  qu'ayant  fait  examen  .ayant 
inuoqué  le  nom  de  Dieu  nous  choilîrsions 
ceux  que  no'  cognoiftros  eftre  propres  pour 
le  feruir  .  Mais  cependant  notons  que  ce  n'a 
point  efté  fans  caufeque  Timothee  a  eu  ce 
que  fainâ  Paul  luy  attribue  de  fpecial ,  d'au- 
Xant  que  TEglifL  Chreftiennen'tftoit  pas  en- 
*cores  dreflee  alors ,  &  qu'il  faloit  que  Timo- 
thee euft  vne  charge  plus  pefante  quen'a- 
uoyentpas  beaucoup  de  fon  ordre  &de  ion 
eftat.Il  y  auoit  encores  vne  raifon.c'cftfa  icu 
nèfle,  qui  le  pouuoit  cnipcfcher  qu'iln'euft 
authonte  par  delTus  de  vieilles  gens.Car  il  ne 
cftoit  pas  feulement  ordonné  en  vne  Eflife 
(comme  nousauonsveu  par  ci  dcuant  )  il  fa- 
loit qu'il  dominai!  mefme  entre  les  eftian- 
gers.Orcela  requeroit  bien  vne  perteftion 
grande  ;  &  comme  lei  hommes  ne  fe  rangent 
point  volontiers ,  il  faloit  que  Timothee  fuft 
approuué  comme  de  la^'olx  de  Dieu.  Voila 
donc  pourquoy  cefte  prophétie  auo.'t  elle 
donnée  pour  luy  .  Au  rcltc,  après  que  fainft 
Paul  a  fait  cefte  exhorution, il  adioufte.E.Vfr 
ce  ces  chops,  Sois  y  :  c'eft  i  dire  que  tu  y  infi- 
ftes,  Quetu  t'y  occupes  du  tout,  teficment  (]ne 
tonauancemcnt  foit  m.m'f'flr  Or  quand  fainft 
Paul  commande  à  Timo'.hce  d'exercer  ces 
chofes,&  d'y  mettre  toute  fon  eftude,&:de  s'y 
tenir  comme  lié,  ce  n'eil  pas  feulement  fuy- 
uant  ce  que  nous  auons  veu  ,  qu'il  ne  mette 
point  à  nonchaloir  cequia  elté  donné  pour 
i'vfage  commun  des  fidèles  :  mais  il  y  .1  plus, 
c'eft  afçauoir,  qu'il  ne  s'amufepointàchofes 
vaines,  mais  qu'il  regarde  ce  qui  peut  ftruir 
au  falut  du  peuple ,  h.  ce  qui  peur  mieux  édi- 
fier.Ceci  donc  s'oppoi'e  à  toute  ambition, &  à 
toute  cupidité  ,  &  à  toutes  chofes  qui  ne  peu- 
uent  gueres  édifier,  &  qui  ne  font  point  pro- 
fitables pour  le  làlut  des  enfans  de  Dieu  .  Or 
en  cela  (âinft  Paul  nous  monftre  combien  il 
eft  neceflâire  que  ceux  qui  font  appelez  pour 
anoncer  la  parole  de  Dieu, regardent  de  près 
à  ce  qui  peut  feruir  à  l'Eglife  :  car  c'eft(com- 
nie  nous  auons  dit  )  vne  charge  qui  fiirmonte 
toute  faculté  humaine. Or  cepédant  le  diable 
tafche  à  nous  diiiertir.mefmes  fous  efpece  de 
bien.  Quelquefois  ceux  qui  font  miniftres  de 
la  parole  de  Dieu,  s'occuperont  à  ceci  ou  A  ce 
la,  iSl  ne  lailTcront  point  de  tafcber  à  édifier, 
mais  ils  ne  tienét  point  le  droit  chemin.  Il  eft 
donc  requis  vne  grande  prudence  en  ceux  qui 
doyucnt  porter  la  parole  de  Dieu,  à  ce  qu'ils 
enûiyuent  ce  qui  eii  bon,  &  ce  qui  eft  vtile  à 
tous ,  afin  de  ne  s'amufer  point  à  ie  ne  feay 
qiioy  defiuolf .  où  ils  prendrôt  beaucoup  de 
pt-tne,  &:  fan';  grand  [ircfic  :  &  puis  il  eft  aife 
que  les  hommes  f">  j  é:  me  nez  ainfi  d'affeftion 
pour  plaire,&  ils  regardent  de  gratifier  quel- 
que fois  pi  i(t  )ft  que  d'fd  fier .  V  )ila  pour- 
qtny  fanift  Paul  exhorte  fi  cftroitumpnt  Ti- 
mothcCjde  b'txcicer  en  ces  chofci  :  corne  s'il 


difoit,  Qup  Ict  paAeurs  qui  doyiictit  ânoncer 
la  parole  de  Dieu,  quand  ils  regarderont  bica 
à  la  chaigc<)ui  leur  eft  co«mnfe,  ne  prendifit 
foint  loilir  de  s'amufe<i  chofes  vâines:car  il 
y  a  dequoy  pour  s'appliquer  du  tout ,  quâdilï 
ne  feront  lînon  propofer  la  grâce  infinie  que 
Dieunousamonftrçcen  fon  Fils;  &  qu'ils  ex 
horterontles  enfans  de  Dieu  à  fe  dédier  «lu 
tout  àceluy  qui  les  a  rachetez  (i  chèrement; 
il  y  aura  là  de  l'affaire  tant  &plus.AinfidonC 
quand  les  miniftres  de  la  parole  feront  ce  que 
Dieu  leur  ccmmande,<ls  n'auront  point  loifir 
de  perdre  leur  temps.  Se  dieftre  diuertis  ou  di 
ftraits  ç.i  &  là. C'eft  ce  que  fainû  Paul  a  entea 
du  en  ce  paflàge.  Or  notamment  il  dit ,  A.  fit 
ijue  ton  tiitancement  foit  maoifeflé.Cil  ce  n'eft 
point  aflez  que  nous  demeurions  toufiours  eii 
vn  trainimais  il  no'  faut  marcher  plus  outre: 
&  non  pas  feulement  nous  ,  mais  que  nous  at- 
tirions le  peuple  à  ce  qu'il  nous  fu  y  uctcar  celt 
auancement  dont  parle  famft  Paul,  s'eftend  i 
toute  l'Eglife. Comment  eft-ce  que  celuy  que 
Dieu  a  oidonné  pour  anoncer  fa  parole  s  a- 
uance.-C'eft  quand  fon  feruice  eift  profitable, 
&  qu'on  en  eft  confermé  en  foy  8c  en  crainte 
de  Dieu, S;  qu'on  y  profite  de  plus  en  plus.Au 
reile,vnc  peifonncpriuees'auancera, quand  il 
Icntira  qu'il  goufte  mieux  les  promelTes  de 
Dieu  qu'il  n'auoit  point  fait,  quand  il  eft  plus 
fongneuxS:  plus  ardent  à  prier.qu'il  peut  re- 
fifteraux  tentations, qu'il  eft  plus  patient, que 
il  fe  retire  de  ce  monde,  afin  d'afpireràla  vie 
celefte.  Voila  comme  nous  auScerons  ckacun 
de  nous  en  fn  perfonnc.  Maisceluy'qui  eft  en 
cftat  public,  qui  eft  ordonné  pourmonftrerle 
chemin  à  tous, ne  s'auancera  pas  luy  feul  •  car 
il  faut  qu'il  attire  le  troupeau  que  Dieu  luy  a 
commis  en  charge  .  Quand  donc  fainû  Paul 
dit  à  Timothee,  que  fon  auancement  foit  no- 
toire, il  n'entend  pas  feulemétque  Timothee 
profite  en  vertu'  quât  à  fa  perfonnc, mais  que 
il  s'employe  tellement  que  tous  fidèles  foyét 
attirez  à  Dieu,&  qu'ils  croiflènt  &  s'augmen- 
tent en  la  foy  &  en  tout  bien,  &  en  toutes  ver 
tus.  Voila  ce  que  fainû  Paul  a  entendu  en  ce 
paflage.  Or  appliquons  cefte  fentéce  à  noftre 
inftruftion.  Car  puis  qu'il  a  efté  commandé  à 
Timothee  de  tellement  s'efforcer  &  mettre 
peine  de  faire  valoir  les  grâces  de  Dieu,  que 
fon  auancement  fuft  nianifi'fté,auiourd'huy 
l'intétion  de  Dieu  eft  femblabie  enucrs  nous; 
car  fa  parole  nous  eft  auioiird'huy  portée  à 
mefme  condition  ,  que  nous  f  lyons  inftruits 
iournellement,  voire  non  pas  pour  demeurer 
toufiours  en  vn  poinû.car  ce  feroit  aflez  que 
nous  eufsiôs  vne  fois  cognu  ce  que  Dieu  nous 
a  déclaré  en  la  parole  ;  mais  il  ne  fe  contente 
pas  q  nous  ayons  efté  cnfeignez,  côme  quand 
on  enuoye  les  petis  enfans  à  l'efchole,  &  puis 
on  les  retire,  qu'il  n'eft  point  queftion  que 
toufiours  ils  foyent  à  l'efchole  ,  mais  il  faut 
qu'ils  prattiquent  ce  qu'ils  auront  apprins  en 
quelque  temps.  Dieu  n'en  fait-il  pas  ainfides 

D.ui. 


au 


Chreftiens  ?  ilnereut  pas  que  nous  ceAions 
■quand  nous  aurons  ony  deux  ou  trois  ans.cô- 
mefînous  eftions  afltz  grans  clercs,  mais  il 
Tcut  que  nous  foyôs  efcholiers  tout  le  temps 
de  nollre  vie  .  Puis  qu'ainfî  eit ,  coçnoiflbnr 
que  l'vfagede  ctftedoftrine  qui  le  prefche 
en  TEglife  iournellement.doit  eftrc  perpecu- 
«Ue.Ainfi  donc,d''autat  que  Dieu  nous  eniioye 
la  mefmc  doûrine,  &  qu'il  nous  l'ordonne  ,  il 
faut  aufsi  que  nous  foyons  auancez  &  confer- 
mez  de  plus  en  plus  &  en  foy  Se  en  repentan- 
te,pour  faire  valoir  la  grâce  de  Dieu  laquel- 
rous  eil  offerte  par  la  prédication  dtTfuan 


SERM  ON    X5:XV. 

fa  iiiftice. Voila  à  quoy  il  nous  faut  penfer-  Et 
ainfi  toutes  fois  &quances  que  la  cloche  foiv" 
ne  pour  nous  appellerau  ftrmô.cognoiflbns» 
Helas,  le  Seigneur  a  bien  pourueu  à  tout  ce 
qu'il  cognoirt  nouseftre  expédient  pour  no- 
ftre  falut.  Car  nous  fommcs  infirmes  .noftrc 
foy  eftencores  cémeen  herbe,  nous  fommcs 
eflongnez  de  luy  :  mais  par  fa  bonté  il  nous 
rappelle,  que  quand  il  luy  plaift  que  fa  parole 
nous  foit  prefchee,  il  nous  félicite  de  venir  Ê 
luy  ,&  ne  veut  point  que  nous  foyons  telle- 
ment enueloppeaen  nos  dclices  &afPef(ioiTt 
mondaines,  q  nous  n'^ayons  encores  le  moyen 


gile.Car(comme  nous  auons dit)  ce  <jue  Dieu     de  retourner  àrepentance  ,  comme  il  nousy 

a  inftitué.il  le  fera  quant  &  quant  ferniràno-     ■"  '"---  — -' '  (..«.»  r.  -...  i~  -^ 

lire  falut  >&  y  adiouilera  l'efficace  de  fon 
fainûEfprit.il  l'augmentera  par  auancement, 
en  forte  que  nous  fentirons  qu'il  n'a  rien  com 
mandé  en  vain.  Car  par  la  prédication  de  fon 
Euangile.il  nous  fait  tellemét  profiter  en  foy 
&  en  patience  ,  <jue  nous  pouuons'fup^orter 
toutes  affliftions, ainfi  que  faindPiul  entrait 
te  en  ce  texte  que  nous  auons  len ,  &  qtn  fera 
expofé  après  difner.  Or  en  fomme  fçachons 
<jue  nous  refiflons  à  Dieu,  &  repoufTons  entSt 
qu'en  nous  eft  fa  giace,  finon  que  nous  croif- 
fions  iournellement,&  qu'on  apperçoyue  que 
nous  marchons  &  nous  auançons  en  Dieu, co- 
rne nous  fçauons  aufsi  que  cefle  vie  terrcftrc 
eft  vn  chemin  ,  que  Dieu  ne  rrous-a  point  mis 
ici  bas  pour  regarder  çà  &  là, mais  il  nous  dé- 
clare qu'il  nous  faut  cheminer.En  quelle  for^- 
te  ?  Oriln'efî  point  queflion  feulement  qite 
les  iambes  Ce  remuent.mais  il  faut  que  de  tou- 
tes nos  penfces  &  afFeûions,de  toutes  nos  for 
ces  nous  tendions  à  noftre  Dieu:veu  que  nous 
fommes  encores  fi  eflongnez  de  luy,  que  notis 
mettions  peine  d'y  eftre  coioints,&  d'y  adhe 
ler  :  veu  que  noftre  foy  eft  tant  débile  ,  que 
jious  appliquions  noftre  eftude  à  la  côfermer 
de  plus  en  plus  :  veu  que  nous  fommes  tant 
froids  à  prier, que  chacun  fepicque  &  s'aiguil 
]onne,afîn  d'auoir  vne autre  ferueur  &  zèle 
d'initoquer  le  nom  de  Dieu.veu  que  nous  foni 
mes  tant  tnueloppezennos  délices  &  volu- 
ptcz  mondaines,  que  nousfacions  tant  que  ce 
qui  eft  du  .monde,  foie  mortifié  en  nous  ,  que 
chacun  s'efuertue  çà  &  là ,  d'autant  que  nons 
fommef  fi  froids  à  méditer  la  vie  celtfte,  que 
nousy  tendions, voire  &que  nous  fçachions 
que  cela  ne  fe-peut  faire  fans  combat,  &  qu'il 
nous  faut  batailler  non  feulement  contre  le 


diable,  &  contre  toutes  les  tentations  qu'il 
nous  fufcite,maiï  contre  noftre  nature.  Car  la 
principale  guerre  qu'ont  les  fidèles  eft  con- 
tre eux-melrncs  ,  Tcu  qu'il  n'ya  en  nous  ne 
Teines  ne  nerfs  qui  ne  refiftent  à  Dieu,  &  que 
toutes  nos  pcnfees'  'S;  affcftions  (  comme  dit 
fainft  Paul  au  huitième  des  Romains  )  font 
'butane  d'inimicicz  morcelles  contre  Dieu  de 


conuie.Car  à  quel  propos  )ei  oit-ce  que  la  pa- 
role de  Dieu  nous  feroit  prefchee  iournelle- 
ment  tout  le  temps  de  noftre  vie,  finon  pour 
remédiera  nos  infîimitezï  Dieu  donc  nous  co 
gnoift&  aduouede  fon  troupeau  ,  puis  qu'il 
veut  que  nous  foyons  en  fon  efchole  tout  le 
temps  de  noftre  vie.  Mais  gardons-nous  qu» 
Dieu  ne  permette  qne  nous  foyons  priucz  de 
vn  tel  bien,  qu'au  lieu  qu'il  luy  pla  ftde  nous 
tendre  les  bras  ,&•  qu'il  eft  fi  vigilant  après 
nous  (  comme  il  en  parle  par  fes  Prophètes) 
décrier  &  foir  &  marin  , comme  fi  vn  père  fe 
leuoit  poilr  induire  fes  enfans  à  bien.-jduifc as 
di-ic,que  I>ieu  ne  permette  au  lieu  que  fa  Pa- 
role nous  eiï  prefchee,  &  qi^il  a  vne  telle  fo- 
licitude-dc  noftre  falut,  qu'il  ne  nous  reiettï, 
&  nous  detàuoue  pour  fiens  ,  puis  q  nous  fom- 
mes fi  ingrats  de  mefprifer  vne  telle  grâce  *: 
bonté  comme  il  lamonftreenuersnous:  m.ais 
que  nous  tendions  à  ce  profit  &  à  ceft  aduan- 
cemcnt  duquel  parlf  faincV  Paul  ;  &  que  ceux 
qui  ont  charge  d'anoncer  la  parole  de  Die-u 
fur  tout  ayent  cezelt;,  &•  qu'ils  regardent  à 
eux.pourdire,  Pouiciuoy  eft-ceque  Dieu  mTa 
ici  conftitué?  c'eftafin  quel'Eglife  s'aiigmcn 
te  de  plus  en  plus,&  que  le  faUic  des  hommes 
foit  toufîours  procuré.  Qjie  les  miniftrp s  doc 
ayent  toufiours  ce  regard-la,  afin  de  fp  pie- 
quer  d'auanwge.Jt  que  chacun  en  fon  endroit 
y  penfe:  &  royans  que  telle  eft  l'intention  de 
■Dien,que  nous  y  tédions,&  que  nous  tafchios 
de  nous  y  conformer,  de  peur  que  noftie  ré- 
bellion ne  fufcite  vne  horrible  vengeanc-e, 
quand  au  lieu  d'approcher  de  Dieu  nous  en 
ferons  reculiez  .  Approchons-nous  donc  de 
luy  de  plus  enphis,  voyans  qu'il  vfe  de  tons 
moyés  qu'il  cognoift  nous  eftre  ptopres  pour 
nous  attirer  à  foy,  fufques  à  ce  qu'il  nous  ait 
recueillis  en  fon  Royaume  éternel. 

OR  nous-nou-  profterneronsdenant  la 
face  de  noftre  bonDreu  en  cognoifTance  de 
nos  fautes  ,  le  prians  qu'il  luy  plalfe  de  nouî 
en  retirer  :  &  cependant  qu'il  nous  y  fuppor- 
te  iufquesàce  qu'il  nous  en  ait  nettoyg:  du 
tout, Ainfi  nous  dirons  tous,  Dieu  tout-puif- 
fant,Perc  celefte,S«;. 

KEVFIE- 


s  V  R  L  A    T.   A   T  1  M  O  T  H.  ^M, 

NEVFIEME    SERMON     SVR    LE    QJ  A- 

TRIEME     CHAPITRE. 

j6     'Entcn  àtoyo"^  ^<*  docirinc:fois  pcrjèuerant  en  ces  chojès:  car 
en  cefdifint  tu  tefauuercts  toy-mefntc  CT  ceux  qui  tcfcoutcnt. 

Afoitqueparcideuâtfaina     furnosteftes  quand  nouî  n'auront  regarni 


Paul  cuftaflezaduertiTirao 
chee  de  penfer  à  tellement 
édifier  rÊglife  de  Dieu  par 
bonne  doànne,  qu'âufsi  il 
donnaft  bon  exemple  en  fa 
vie  ,  tant  y  a  que  derechef  il 
confcrme  ce  propos,  non  point  feulement  au 
regard  de  l'homme  auquel  ilparloit,  mais  lia 
dôné  vne  doctrine  qui  tuft  permanéte  en  tout 
temps.  Voila  Jonc  vne  règle  générale  que  S. 
Paul  donne  à  tous  Paiteurs.c'ell  qu'ils  regar- 
dent àeui  en  premier  lieu  pour  cheminer  quït 
à  leurs  perlonnes  fainftement ,  &  puis  qu'ils 
prenent  garde  aufsi  au  troupeau  qui  leur  eft 
conmiis,aiîn  de  luy  donner  pafture.  Voila  doc 
deux  chofes  qui  font  requifes  en  nouç  qui  a- 
uons  la  charge  de  gouuerner  l'Eglife  de  Dieu, 
qu'il  faut  que  nous  pendons  de  chemineren 
lorte  quenoftre  vienefoit  point  en  fcandale, 
mais  en  bon  exemple  :  &  puis  d'autant  que  la 
preud'homie  ne  luffit  point  en  celuy  qui  doit 
auoir  la  bouche  ouuerte ,  qu' aufsi  la  dodrine 
foitcôiointe  quant  &  quant. (Quiconque  veut 
C«»t.ii  eftre  tenu  &  réputé  Chreftien  ,  doit  penfer  à 
''•  foy.commeauf^i  cefte  admonition  eft  donnée 

Tfra.xi9  atout  le  peuple  par  Moyfc.  Et  voila  pour- 
vitm.  quoy  il  eft  dit  que  la  Loy  de  Dieu  nous  doit 
guider  ^fin  que  nous  foyons  fur  nos  gardes. 
Mais  ce  que  fainâ  Paul  adioufte  en  fecôd  lieu 
eft  notamment  pour  les  Pafteurs  qui  ont  char 
ge  publique:car  Dieu  ne  lésa  point eleus  fans 
câufe  en  cell  ofiîcc-la.Or  notamment  ils  font 
exhortez  de  prendre  garde  àeux.Car  comblé 
que  chacun  fidcle  dayue  eftre  prudent  pour 
régler  (a  vie.&doyue  faire  bon  guet  pour  n'e 
ftrc  point  furprins  des  tentations  de  Satan,  8c 
aufsi  doit  preuenirtous  les  dangers  def^uels 
nous  fomraes  enuironnez  ,  tant  y  a  que  ceci 
n'eft  point  dit  en  vain  aux  minillres  delaPa- 
jole  :  car  ceux-là  font  comme  vn  chandelier 
qui  eft  mis  fur  vn  buffet  ou  fur  vne  table  ,  que 
ils  doyuent  efclairerde  loin.  Il  eft  bien  dit  à 
tous  Chreftiens  en  gênerai ,  d'autant  qu'ils 
portent  la  clarté  de  vie  quand  Dieu  les  a  illu- 
minez par  fz  Parole,  qu'ils  doyuent  monftrer 
bon  exemple,&  qu'ils  doyuent  cheminer  pru- 
demment alîn  d'inftriiire  les  ignorans.  Mais 
C  cela  eft  requis  en  tous  fins  exception  ,  que 
fera-cede  ceux  que  Dieu  a  conftituez  pour 
monftrer  le  chemin  à  tout  le  reftc?  Ainfi  donc 
il  y  a  beaucoup  moins  d'excufe  aux  Pafteurs 
qui  doyuent  anoncer  la  parole  de  Dieu  s'ils 
cheminent  delordonnément,  qu'aux  hommes 
priuez.U  eft  vray  que  tous  feront  condamnez 
4euant  Dieu  :  nuisJa  vengence  fera  double 


l'office  où  Dieu  nous  a  appelez  ,  roire  à  cefte 
condition  que  noftre  vie  Ibit  comme  vne  ap- 
probation de  la  dodrine  pour  luy  donner  plus 
d'authorité .  Et  pourtant  cefte  adnonition-ci 
doit  bien  eftre  méditée  de  nous:  que  fi  feule., 
ment  nous  montons  en  chaire  pour  parler.cn- 
cores  que  nous  eufsions  la  meilleure  grâce 
qu'on  pourra  fou'haittcr  ,  celan'eft  rien,  c'eft 
comme  &  vn  bafsin  d'airin  fonnoit:il  eft  vray 
qu'il  pourra  eftre  ouy  de  loin, il  pourra  battre 
les  aureilles:ou  bien  qu'il  y  euft  quelque  clo- 
che qui  euftvn  fon  Iplaifant.  Voila  comme 
nous  en  ferons  quand  nous  aurons  bonne  do- 
ftrine  en  la  bouche,&  que  noftre  vie  fera  raef- 
chante  Se  diflblue.  D'autant  plus  donc  noue 
faut-il  bien  reCorder  cefte  leçon  ,  c'eft  afça- 
uoirquece  n'eft  point  aflèz  que  nous  ayons 
purement  anoncé  la  parole  de  Dieu,que  nous 
ayons  expofé  fidèlement  l'Efcriture  fainfte, 
que  nous  ayons  appliqué  ce  que  nous  traittôs 
à  l'vfâge  du  peuple,mais  il  taut  que  noftre  vie 
parle  quant  &  quant, &  que  nous  tafchions  de 
bien  marcher  ahn  que  les  autres  nous  fuyuent. 
Il  eft  dit  de  tous  fidèles  qu'ils  doyuent  telle- 
ment attirer  leurs  prochains  à  Dieu, qu'ils 
aillent  quant  &  quant  :  car  voila  comrae"le 
Prophète  Ifaie  en  parle, Allons  pour  monter  I/î<.i.«.S 
en  la  montagne  du  Seigneur.Mais  il  y  a(com- 
me  i'ay  dit)  vne  déclaration  plus  eftroite  en 
nous  qui  fommes  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu.  D'autant  plus  donc  deuons-nous  eftre 
fur  nos  gardes  à  fin  de  tellement  reglerno- 
ftre  vie.que  nous  rendions  tefmoignage  par 
èffeù  que  ce  n'eft  pas  en  vain  que  Dieu  nous 
a  choilis,  &  que  nous  defîrions  de  tellement 
môftrer  lebon  chemin  de  falut  atout  lemon- 
dc.que  nous  allions  deuât, que  nous  tafchions 
d'approcher  de  Dieu  tant  qu'il  nous  fera  pof- 
fible.  Voila  donc  pour  vn  item.Mais  S.Paul  ne 
veut  pas  que  feulement  les  miniftres  de  la  Pa- 
role s'eftudient  à  preud'homie  ,  car  cela  doit 
eftre  en  tous:mais  il  requiert  aufsi  d'eux ,  que 
ils  foyent  attentifs  à  la  doftrine.  Ainfi  donc, 
quand  nous  aurons  vcfcu  fans  reproche,  que 
nous  aurons  eftécommemiroirs  detoute  hon 
nefteté  &  crainte  de  Dieu  ,  &  de  toute  vertu, 
nous  ne  fommes  pasquittes  niabfous  pourtat: 
car  Dieu  nous  a  ordonnez  pour  anoncer  la 
parole.  Mal-heur  donc  fur  nous  fi  nous  fom- 
mes oififs  en  ceft  endroit,  comme  aufsi  fainft 
Paul  en  parle.  Et  pourtant  difcernons  entre 
les  eftats  &  offices.  Il  eft  vray  que  tous  Chre- 
ftiens font  bié  tenus  d'édifier  leurs  prochains 
félon  le  moyen  qu'ils  en  ont  :  mais  tant  y  a 
que  par  fpecial  Dieu  nous  3  commis  la  char 

D.iiii. 


216 

gede  parler  en  fon  Nom. Il  faut  doc  que  nous 
ayons  touliours  la  bouche  ouuerte.Or  fî  celte 
marque-ci  eft  donnée  à  tous  ceux  qui  font  co 
mis  pour  gouuerner  l'Eglile  de  Dieu  ,  il  faut 
conclure  que  ceux  qui  ne  donnent  au  peuple 
nulle  inftruûion.ne  fe  peuuét  pas  nommer  ni 
Prelats.ni  Euefques,ni  Anciens, ni  Pafteurs.ni 
Miniftres  :  ces  titres-la  font  vfurpez  faufle- 
liîent  de  tous  ceux  qui  font  chiens  muets.  Et 
de  là  nous  voyons  queleltle  régime  de  l'E- 
glife  Papale.  Ilsfe  vanteront  affèz  que  leurs 
Euefques  font  fucceflèurs  des  Apoftres,&  que 
ils  reprefentédes  Principautezceleftes:  mais 
cependant  quelle  dpftrine  pourra-on  tirer  de 
eux  ?  A  grand'  peine  donneront-ils  ce  qu'ils 
iront  pas  :  &  meCiies  il  leur  fembleque  cela 
derogue  à  leur  dignité  epifcopale,  démonter 
en  chaire  pour  prefcher.  Cependant  lî  eft-ce 
qu'à  pleine  bouche  ils  fe  nommeront  Prélats 
de  l'Eglife.Voire.mais  voici l'Efprit  de  Dieu 
qui  Icsdefjuoue.-ilnefaut  point  que  nous  c5- 
bations  beaucoup  pour  les  defpouillerdes  ti- 
tres qu'ils  s'attribuent  faiiiremêt:car  ils  font 
defmentis  par  fainû  Paul.lcquel  prononce  en 
Pauthorité  de  Dieu^  que  ceux  qui  ne  prenem 
point  garde  à  la  dotbrme  ,  ne  doyuent  point 
eftre  tenus  pour  Pafteurs.  Voila  donc  ce  que 
nous  auons  à  noter  en  premier  lieu.c'^eft  afça- 
Hoir  que  tous  ceuxque  Dieu .T eftablis  pour 
anoncer  fa  Parole, doyuent  quant  à  leurs  per 
fonnes  cheminer  fainftement  pour  dôner  bon 
exéple  à  tout  le  peuple, &  fe  doyuent  contre- 
garder  fur  tous  autïes,  puis  q  Dieu  les  appel- 
le en  premier  lieu,&  en  degré  foiuierain  pour 
Tenirà  luy:&que  cependant  ils  fe  doyuct  em 
ployer  à  la  doftrine.Or  afin  q  ceci  fuft  mieux 
cbferué.fainft  Paul  adioufte  qu'il  faut  que  Ti 
mothee  &  tous  ceux  qui  font  de  fon  cftat ,  y 
perfiftent.Ce  n'eftdonc  point  affèz  qu'vn  fio 
me  tafche  de  bien  faire ,  fînon  qu'il  contrmie 
iufques  au  bout  :  ce  n'ert  point  aflez  que  par 
bouffées  il  enfeigne,mais  il  faut  qu'il  fe  difpo 
fe  à  ne  fe  iamais  lafler  en  trauaillant  pour  édi- 
ter l'Egli/e  de  Dieu.  Comme  on  enverra  qui 
pourront  bien  quelquefois  auoir  vn  figne 
ie  bon  zele.mais  cela  fe  refroidit  tantoft,  car 
il  n'y  a  nulleconftance.iln'ya  nttl  fil  perma- 
nent .  Sainâ  Paul  donc  déclare  que  celuy  qui 
tft  appelé  pour  gouuerner  l'Eglife,  ne  fe  doit 
iamais  laflèr,  foit  enmonftrant  bon  exemple 
en  fa  vie  ,  ou  bien  portant  la  parole  de  Dieu 
pour  toufiours  dôner  pafturede  falut  autrou 
peau  II  nous  faut  donc  perfîfter  en  cela, car  le 
mot  dont  vfe/Jiuiît  Paul,emporte  autant  corn 
me  s'y  arrefter.  En  fomme  il -veut  dire  que 
Dieu.quand il  appelle  vnfiôme  pour  eJlre  mi- 
ni ftre  de  fa  Parole  ,  ne  le  prend  point  à  loage 
pour  trois  ionrs,ou  bien  pourvn  petit  de  téps, 
mais  il  veut  qu'il  s'addonne  du  tout  à  fon  fer- 
mée Eft-il  ainli.'Il  ne  faut  point  donc  q  nous 
foyos  oifîfs  ne  lafches,mais  que  nous  fuyuiÔs 
k'  train  que  Dieu  nous  a  m5n:ré.-&  qu.id  nous 
aurons  (rauaiilc  vn  aa ou  deux,<^ue  nom  f^a- 


SERMON     XXXVI. 


chions  que  ce  n'eft  rien  fait,  lî  iufques  au  bout 
nous  ne  perfiflons  conftamment.  Et  celle  ad- 
monition eft  plus  que  neceflairercar  nous  voy 
ons  quelle  foiblefle  il  y  a  en  nous.  Er  d'autre 
cofté  nous  expérimentons  partropque  Satan 
machine  tant  qu'il  luy  eftpofsible,dcdesbau- 
cher  ceux  qui  ont  bon  courage  ,  &  pour  leur 
rompre  le  cœur,  afin  qu'ils  défaillent  au  mi- 
lieu du  chemin. Encores  que  la  charge  q  nous 
auons  ne  fuft  pas  tant  difficile  nepefante  ,  de 
noftre  cofté  nous  fommes  tant  infirmes  qu'i^ 
ne  faut  rien  pour  nous  faire  cefler  ou  tourner 
bride. Or  eft-il  ainfi  qu'il  y  a  de  grandes  diffi-^ 
cultez:  &  cependant  voici  le  diable  qui  brafle 
tout  cequ^il  peutafindenousdiuertir.  Com- 
ment donc  pourrons  nous  eftre  conftans  pour 
nous  acquitter  enuers  Dieu  &  fon  Eçiife  ,  (î 
cefte  leçon  n'eft  biéimprimeeennoftre  cœur 
&en  noftre  mémoire,  afçauoir  que  Dieu  no* 
à  tellement  obligez  à  foy, qu'il  nous  faut  là  e. 
ftre  attachez  du  tout  y  qu'il  ne  faut  point  que 
no'  preniôs  occafiô  c'e  nous  lafler  quoy  qu'il 
adutene.mais  que  nous  marchions  iufques  à  ce 
que  nous  foyons  paruenus  à  noftre  but.  Voila- 
donc  ce  que  nous  auons  à  noter  en  ce  paflàge. 
Mais  combien  que  fainft  Paul  s'addrefle  par 
fpeciaJ  à  ceux  qui  ont  charge  de  gouuerner 
l'Eglife  de  Dieu, fi  nous  fâut-il  recueillir  vne 
exhortation  comune,  de  nous  aieftcr  à  ce  que 
noftre  Seigneur  nous  morftre,  attendu  la.lége 
rets  &  inconftance  qui  eft  en  nous-  toas.H  n'y 
a  celuy  qui  ne  fente  côbien  nbns  /bmmes  vo-^' 
.lages  :  &  puis  iournellement  que  s'en  faut-il 
que  nous  ne  foyons  tranfportcz  par  Satan, en 
Ibrte  que  nous  oubhons  à  chacune  minute  de 
temps,  (S  Dreu  &  noftre  lâlut ,  n'eftori  qu'vn- 
chacun  s'aiguillonaft?  Pour  cefte  caufe  notés 
que  fainft  Paul'non  feulemét  a  parlé  à  vn  homi 
me.ou  à  vn  eftat,mais  il  a  voulu  aufsi  aduertir 
tous  fidèles ,  que  iamais  ils  ne  fe  tiendront  a» 
fêruice  de  Dieu  s'ils  ne  fe  conferment  en  per 
feuerance, voire  maugrc  tout  ce  que  Sata  leur 
pourra  fufciter  dé  troubles.  Que  donc  iamais 
ils  ne  fe  lalTentrcar  c'eft  la  fin  de  cefte  exhor- 
tation que  met  ici  fainft  Paul.  Or  cependant 
il  monftre  à  Timothce  le  profit  qui  reuiendra- 
de  fon  zele&  de  fi  fermeté.s'il  continue  i 
bien-faire,&  qu'il  ne  tourne  point  bride,non— 
obftantqu'ilait  àrefîfler  à  beaucoup  de  com- 
bats:f.ir  (dit-il)*»  rf  falf.mt  t»  te  fauutras  û» 
teux  ijui  t'oyent.  Il  n'y  a  celuy  de  nous  qui  ne 
defire  fon  falut  ,  voire  les  pliK  peruersledi- 
ront:&  combien  que  cela  ne  leur  touche  point 
le  cœur,  lî  eft-ce  qu'encores  font-ils  efineus 
d'vneafftâion  .qu'ils  voudroyent  eftre  fâu- 
uez;mais  d'en  tenir  le  moyen  il  n'en  eft  point 
de  nouuelles  :  car  ils  defpitent  Dieu  comme 
d'vne  malice  délibérée, &  s'.ibandonner.i  à  Sa- 
tan à  leur  perdition  :  mais  tant  y  a  encores- 
qu'on  voit  cefte  affeftion  eftre  imprimée  en 
txju  hommes, qu'ils  défirent  leur  falut.  Or  S. 
Paul  monftreici  à  Timothee,que  c'éft  fon  fa- 
lut de  cheminer  côme  il  eft  exhorté  de  faire. 

£i  ^uts 


SVR    LA    I     A    TIMOTfî. 


i'7 


E'.  pui'i  il  !ii^'  îtiicine  vne  râil'in  plus  grande: 
Cir  le  ialiitCdit-iO-ic  :ou:e  r£gl:(c  tVilmis 
en  ;-.i2:n.  Voila  Dieu  qui  t'a  di)iiné  tn  charge 
tout  fjn  troupeau  pour  le  coiu!uire:(i  tu  t'ac 
quittes  fidèlement, c'cTî  pour  ûujcr  tous  ceux 
qui  t'eicoutent  :  mais  il  tu  es  kl'clic,  &  que  ta 
vie  foit  fcanualcufcou  que  tu  ne  ticnc;  conte 
d'anoncer  la  parole  de  Dieu  ,  tout  fera  dili- 
pé,  voila  vneconfulîon  horrible  qui  aduien- 
dra.Ainii  donc, puis  que  Dieu  t'a  conftituémi 
niftre  du  làlut  des  âmes  ,  il  faut  bien  que  tu 
t'employes  tant  plus  puifîàmment  &  auec  vn 
plus  grand  zele  &  ardeur.  Voila  donc  en  fora 
me  ce  que  fiinft  Paul  a  entendu. Or  on  pour- 
roit  ici  demander  comment  c'cft  qu'vn  hom- 
me fe  fauue  :  car  nous  fçauons  que  ceft  hon- 
neur eft.referucà  Dieu  fcomme  il  le  mérite) 
qu'il  eft  appelé  noflre  Sauueur  ,  &  que  nous 
tenons  noilre  falut  de  luy  pour  luy  en  fairt 
hominage.&pourluy  en  rendre  toute  la  lou- 
ange.S^  chacun  de  nous  fe  fiuue,  que  refttra- 
il  plus  à  Dieu?  Car  il  femble  bien  que  fainct 
Taul  elcue  ici  les  hommes  par  trop  ,  quand  il 
leur  donne  celle  chirgc&  office  de  fepou- 
uoir  fumer.  Mais  l'Efcriture  iSinile  vfede 
ctfle  façon  de  parler, quand  elle  nou':  exhor- 
te de  fuyure  noftrc  vocatiô  e;>  laquelle  Dieu 
nous  appellera  cela  n'eftriéderogueràDieu, 
ri  amoindrir  fon  honneur  en  façon  que  ce 
fbit.  Voila  donc  Dieu  qui  ha  le  titre  de  S.ni- 
ueur.commeilen  eft  digne. Et  pourquoy:Car 
comme  il  mus  a  créez ,  aufvi  il  nous  reforme 
à  fon  image  pour  H'îus  imprimer  la  marque 
de  fon  adoption,  afin  que  nous  foyons  fes  en- 
,  fans  &  héritier'".    De  nature  nous  fomipes 

e/longnez  de  Dieu,  nous  fammes  perdus  & 
damnez.  Or  luy  ayant  pitié  denoftremifere, 
&  ne  voulant  point  que  nous  perifsionT,  nous 
retire  à  foy:  car  d'autant  qu'il  clf  la  fontaine 
dévie  ,  quand  il  nous  appelle  à  Iby  ,  voila  en 
quoy  gift  noftrc  <âlut.  Et  comment  e/l-ce? 
Q_uand  il  nous  illumine  par  fi  Parole  /ic  par 
fon  fainû  Efprit,  8c  qu'il  reforme  nos  cœurs 
afin  que  nouï  le  fcruions  en  toute  pureté  ,  & 
quand  il  nous  donne  la  vertu  de  pe-  feueran- 
ce  ,  &  qu'il  nous  tient  la  main  pour  batailler 
auec  nouscortre  Satan,  &  contre  tous  les  af- 
fiuts  qui  nous  font  dreflèz. Nous  voyons  donc 
que  tout  noftre  falut  procède  de  Dieu:c'ett 
Iny  qui  le  commence  ,  c'eft  luy  qui  le  con*i- 
Bue ,  c'eft  luy  aufsi  qui  le  parfait  :  &  ne  faut 
point  que  l'homme  s'attribue  ici  rien  qm  foit 
iufqucs  à  vne  feule  goutte.  Mais  d'autant  que 
Dieu  fe  fert  de  nous  ,&  qu'il  mus  conflitue 
comme  fes  inftrumens ,  et  qui  hiy  ell  propre, 
nous  ell  communiqué, voire  par  titre,  comme 
ileftdit  QUe  les  miniftres  delà  Parole  font 
1.  "■•3'  aideç  de  Dieu.  Et  en  quoy  aides  ;  C'eft  pour 
"■  édifier  fon  Eglife.  Et  toutesfois  cela  luy  eft 

feifle  en  l'Efciture  fainfte  ,  que  comme  ila 
fondé  fon  Eglife,quc  c'eft  à  luy  de  la  mainte- 
nir &  conferuer,&  de  la  mènera  fa  pcrfeûiô. 
.Conunent  donc  cela  eft-il  donné  à  vn  homme 


mortcIrOr  combien  que  nous  foyons  inutiles, 
toutesfois  il  plaift  à  Dieu  de  nous  employer  à 
fjn  ouuragc.Tout  ainfi  qu'il  no"  fait  ceft  Jjon 
ncur  ,  combien  que  nous  en  foyons  indignes, 
de  le  vouloir  feruir  de  no'  en  vne  chofe  a  no- 
ble Se  n  excellente  côme  eft  le  falut  des  hom- 
mes,aufsi  il  nous  cômuni^ie  ce  titre  tant  ho- 
norable,que  nous  fommes  i'e^  coaduitcurs.j^ij 
tant  en  eft-:l  du  fa'ur  particulier  d'vnchacun. 
Car  quand  Dieu  nous  guide  &  gouuerne  par 
l'on  ùu'iû  El'prit ,  &  dit  que  nous  faifons  no- 
ftre falut(nô  pas  que  cela  foit  en  noftre  main, 
ne  qu'il  procède  de  noftre  vertu  ou  induftrie, 
mais  c'eft  d'autat  que  Dieu  befongne  en  telle 
forte  que  nous  ne  fommes  point  comme  des 
pierres  ou  des  troncs  de  bois:)il  nous  déclare 
fa  bône  volonté,  il  nous  infpire  la  foy.il  nous 
donne  toutes  les  grâces  de  fon  fainA  Efprit: 
&  quand  cela  eft  en  nous, nous  le  pouuons  ap- 
pcller  noftre. Te  ut  ainfî  que  le  pain  que  nous 
mangeons ,  combien  qu'il  nous  foit  donné  de 
la  pure  libéralité  de  noftre  Dieu  ,  toutesfois 
nou<  l'appellôs  noftre:  ainfî  en  eft-il  des  dôs 
dufa;nft  Efprit.  Et  voila  pourquoy  S.  Paul  .. 
auxPhJlippiés  exhorte  les  fidèles  de  faire  leur  ^"'•^''*' 
falut  :  mais  il  adioufte  que  cela  doit  eftre  en 
toute  crainte, fçachit  que  c''eft  Dieu  qui  nou» 
donne  le  bon  vouloir,&  l'exécution, &;  le  tout 
par  fa  pure mil'ericorde. Puis  qu'Sinfi  eftdonc 
que  Dieu  commence  &  partait  en  nous  ce  que 
nous  tenons  de  luyi&  que  le  bon  vouloir,  ScÏ3 
force  de  l'exécuter  vient  tout  de  fon  Efprit» 
Si  qu'il  doit  eftre  attribué  à  la  pure  grace,nous 
deuons  bien  chcm'ner  en  crainte  ,  baiflàns  le» 
yeuY,n'ayans  nulle  prtfamption  qui  tKius  en- 
fle.Mais  d'autant  que  nous  fommes  inftrumés 
de  Dieu,  où  il  defploye  fa  vertu,  il  nous  faut 
employer  à  ce  qu'il  nous  appelle  ,  &  auifcr  de 
n'cftrc  point  oififs.  Ainfî  d,:>n  ck  cminôs  en  la 
vocation  de  Dieu, &  alors  nous  ferons  noftre 
falut. Et  commétle  ferons-musîC'eft  à  dire,. 
Dieu  le  fera  en  telle  forte  que  nous  ferons  fes. 
inftrurrrens.Ii  ne  nous  faut  point  donctroïKier 
eftrange  que  fainft  Paul  dit  ici  à  Timothee, 
qu'en  viuant  fain6>enie't,&  s'àcquittantde  fou 
office, il  fe  fauuera.Car  fainfl  Paul  ne  difpute 
point  ici  de  lacaufcde  noftre  falut,  ni  à  qui  1* 
louange  en  doit  eftre  dônee,?!  n'eft  point  que- 
ft  on  de  tout  cela:maisc'cftque  l'home  s'em— 
ployé, fçachint  toutesfois  qu'il  ne  peut  rien, 
qi'il  n'eft  rien  du  tout,&  qu'il  fe  laiiïègouuer 
ner  .à  Dieu,&  qu'ii  cognoifTè  que  la  grâce  qui 
luy  eft  faite, il  ne  l'auoit  point  meritce,&  tou- 
tesfois qu'il  chemine  félon  fa  vocatiô.Et  voi- 
la en  quoy  lesPapiftcs  s'abufcnt,qu'eft.is  pré- 
occupez de  ceftc  ph.ltafie  infernale, qu'il  faut 
que  l'homme  ait  fon  franc  arbitre, qu'il  puifle- 
coopérer  auec  la  grâce  de  Dieu  ,  qu'il  puifle 
quelque  chofe  de  foy.incotinét  qu'il  y  a  quel' 
que  mot  ou  fyllabe  en  l'Elcrituie  fainfte  où' 
il  eft  parlé  .i  l'homme  de  faire, l.idefTus  ilscoa 
ciuent  qu'il  y  a  donc  quelque  puifl^mce&queF 
que  faculté.Voire,  mais  l'Efcriture  nous  mon. 

E-i. 


UiS 


St  RMON 


ftraKjucliftneftredeuoir.nc  nousveut  point 
cnflerdre  vanité  ,  pour  dire  que  nous  ayons 
quelque  pcfomptio  fauflc  de  nos  vercus:mais 
leulemét  elle  bous  enleigne  qu'il  ne  nous  faut 
joint  flatter  en  parcfle,  qu'il  ne  nous  faut 
•  oint  eftre  morts  qjand  Dieu  nous  viuifie. Au 
refte  ,  elle  nous  mc5ïiftre  dont  c'eii:  qu'il  nous 
faut  rcceuoirce  que  nous  n'auôspas.Ornous 
fbnimes  vuidesde  tout  b:c,il  n'y  en  a  pas  Tne 
feule  goiltte  en  nous:  il  faut  donc  que  nous  le 
receuionsd'enliaut.  Et  ainfi  notons  bien  que 
faind  Pauln'a  pas  voulu  donner  quelque  oc- 
cîfîon  d'orgueil  aux  hommes.afin  qu'ilv  fepn 
fafl'ent  en  eux,  mais  Iculcmcnt  il  k-ura  voulu 
Bionilrer  que  Dieu  fe  veut  fenur  de  nous  ,  &• 
qu'il  nous  veut  appliquer  àl'vfage  auquel  il 
nous  a  ordonnez  :  qu'il  faut  qu'vn  chacun  de 
nous  fe  Liifle  conduire  1  Dicucomnie  bon  luy 
/emblcr3,&  que  nous  nefacions  pointdesrc- 
uefches  ,  mais  que  nous  apprenions  de  nous 
ranger  à  luy  ,quoy  qu'il  en  loit.  Voila  pourvu 
itcm.Qjunt  au  rccond.ûincT:  Paul  en  à:  faut  à 
Timotbee  ^  Qj*  ilfmiterj  ceux  qui  Pefcwttnt, 
nionlire  de  quelle  importance  eft  d'anoncer 
TEuangilc  de  Dicu:elle  efi  pour  édifier  à  falut 
vue  Eglifc  ,  ou  pour  la  ruiner, &;  la  mettre  en 
perdition. Et  lî  cecieftoit  bien  cognu.nous  de 
noftrccofté  ferions  plus  vigilans  acheminer 
droitement.&ànous  efforcer  à  bien  feruir  l'E 
glife  :  &  tout  le  peuple  auAi  cognoilhoit 
mieux  quel  bénéfice  Dieu  luy  tait  quid  il  luy 
çnuoyedes  Pafteurs  fidèles,  &  les  auroit  en 
plus  grande  recommandation.  Voil.idonc  en 
femme  ce  qui  eil  contenu  en  ce  pafl'ige  :  que 
s'il  y  a  vn  bon  docteur  qui  s'acquitte  pleine- 
ment d'anoncer  la  parole  de  Dieu  ,&qui  taf- 
çhe  de  donner  bon  exemple  en  favie, qu'il  foit 
comme  le  mmiflre  de  falut ,  que  Dieulecon- 
Hitue  afin  d'appcllcr  à  falut  tout  le  troupeau. 
Et  au  contraire,  quand  vn  homme  fera  non- 
chalant à  enfeigner ,  que  ce  luy  fera  tout  vn 
comme  les  chofes  aillent, qu'il  n'aura  nul  ze- 
Je  ,  qu'en  fa  vie  ce  fera  vn  desbauché ,  que  ce 
fera  vne  perte  mortelle, quand  nous  oyons  ce 
la, en  premier  lieu  cognoilTons  que  Dieu  nous 
maudit,  quec'cftvn  iiguede  vengence  quand 
nous  n'auons  point  debonsPafteurs.mais  que 
nous  fomracsdeftituczde  gens  qui  nousanon 
cet  ladoiirinede  fâlut.&aufqucls  il  ne  chaut 
comme  les  chofes  aillent.Si  donc  nous  auons 
des  gens  qui  corrompent  &  falùfient  la  bon- 
ne doftrine,ou  bien  qu'ils  foyent  de  vie  mau- 
uaife  ou  fcandaleufe  ,  c'elt  autant  comme  fi 
Dieuparloit  du  ciel  pour  nous  faire  fç.iuoir 
qu'il  fe  retire  de  nous, S:  que  nous  ne  fomme^ 
pas  dignes  d'eftre  enfeigncz  de  luy  ,  ne  qu'il 
nous  gouuerne  :  &  non  feulement  nou".  auons 
ce  tefmoignage-la.mais  voila  comme  la  por- 
te d'enfer  qui  eft  ouuertepour  iibus  faire  tre 
bufcher  tous  en  perdition.  Voila  ce  que  nous 
auons  .à  noter  en  premier  lieu.  Or  combien  y 
en  a-il  qui  y  penfent  .''  Mais  au  contraire,  il  y 
en  a  beaucoup  qui  voudroyent  auoir  feule- 


XXXVI. 

ment  des  idoles  qui  feiflent  quelque  monftre 
en  chaire, &  quelque  parade,  &  au  refte  que  la 
parole  de  Dieu  fufV  gardée  en  vn  coffre, corne 
les  Papiftes  gardent  leurs  reliques.  Nous  en 
voyons  beaucoup  qui  voudroyet  fe  louer  aiiilî 
auec  Dieu,&  fe  taichent  quaa  ils  voyent  quel 
que  zèle  d'anoncer  la  parole  de  Dieu  pure- 
ment,de  redrefler  les  chofes  confufes, de  cor 
nger  les  vices. Que  dira-on  de  ctux-la,(înon 
qu'ils  ont  comploté  auec  Satan  pour  effacer 
toute  la  grâce  de  Dieu,  afi;i  d'aller  en  perdi- 
tion.'Car  ce  n'efl  point  par  ignorace  qu'ils  pe 
chét:  ce  que  S.Paul  dit  ici  n'cfl  point  oblcur, 
s'ils  croyent  en  Dieu  ,  &  qu'ils  croyent  que 
l'Efcritiire  ùinfte  fjit  l'a  parole.  De  quoy  il 
nous  faat  bic  douter  quant  à  cux,veu  que  l'im 
pieté  eft  !l  grande  &  H  énorme  auiouid'hiiy,  S 
ceux  qui  le  diront  Chreftié,  à  pleine  bouche, 
ne  font  que  fe  mocquer  fi  vileinemét  de  Dieu 
&  de  fa  parole  ,  qu'ils  ne  font  pas  dignes  d'e- 
ftre accomp.irezaux  Turcs, ni  aux  Payés, mais 
ce  font  des  chiens  &:  des  pourceaux  qui  veu- 
lent defpiter  Dieu  tout  ouuerteinét,&:  le  mon 
ftrentaffez  par  cfFeCt.  Mais  s'ils  croyent  que 
ce  qui  eft  ici  prononcé  de  fainil  Paul, fait  pro 
cédé  du  fainfl:  Efprit,il  n'y  faut  point  de  gJo- 
ie  comme  à  vn  palTage  difficile:  car  il  déclare 
quand  il  y  avndotleur  qui  ne  s'acquitte  point 
de  fon  deuoir,que  voila  côme  le  gouffre  d'en- 
fer qui  eftouiiert,  que  Dieu  defplove  fa  ma- 
leJiiflion  fur  tout  vn  peuple.Au  contraire  no- 
tons bien, fi  h  parole  de  Dreu  nous  eft  fidèle- 
ment preichee,.?i:  que  ceux  qui  l'anonccnt  taf- 
chent  à  nous  édifier  aufi  par  bonne  vie,  que 
voila  en  quoy  confîfte  n'.>ftie  filut.  £t  ii  ne 
nous  faut  point  troiiuerceci  eftrange.veuque 
faind  Paul  appelle  l'Euangile  la  puiflànce  de  „ 
Dieu  en  falut  à  tous  croyans.Maisquov?lly  '  * 

en  a  bien  peu  qui  défirent  d'appliquer  cefte 
vertu-ci  à  eux.  Ils  diront  bien  qu'ils  défirent 
d'eftre  fauuez  ,  mais  cependant  ils  foullcnt  la 
dodrinede  Dieu  au  pied,  ils  voudroyet  auoir 
exterminé  tout  ordre  d'Eglife.ils  s'en  décla- 
rent ennemis  maniteftes  autant  ou  plusque  les 
Papiftes. Cela  donc  fecognoift:  &  toutesfois 
il  voudroyent-ils  qu'on  les  teinft  pourgrans 
Chreftiens.  Voire  ,  mais  il  faudroit  qu'ils  fe 
baftiflcnt  vn  lefus  Chrift  tout  nouuuau  :  car 
nous  voyons  que  Dieu  a  voulu  comme  atta- 
cher le  falut  de  nos  amcs  à  la  parole  qui  nous 
eft  prefcliee  en  fonNom,&  par  fon  authorité. 
Etpicuft  à  Dieu  que  telles  gens  enflent  re- 
couuré  des  Pafteurs  à  leur  l'ouhait ,  &  que  ce 
fulKi  leur  falut.Icvoudroveeftre  bien  loin  de 
Gcneiie  :  &  picuft  .i  Dieu  que  i  mais  ie  n'en 
deulTe  approcher  de  cent  feues  près  pour 
leur  faire  plaifir, moyennant  qu'il  y  euft  gens 
qui  defiialfent  leur  filut.Mais  quoy?  Ils  vou- 
droyent auoir  des  diables. S:  telles  gens  eftoy 
ent  marris  que  noftre  vie  fuft  vicieufe  ,  que 
nous  fufions  trop  lafches  d'enfeigncr  ,&:de 
confermcr  la  bonne  doiffrine  par  bon  exem- 
ple &  par  bonne  conucrûtion:&  bien, en  cel.i 

jlnous 


SVR     LA     I.     A    TIMOTH. 


2I5> 


H  nonî  f.mdioit  cognoiftre  noflre  vice  &  no- 
lï.c  tiirp:tuJe  ,  &  coiifcircr  aiac  honte  que 
nous  allons  m.il  clumi né.  Mais  quoy-  Un'cft 
qucftioîi  linon  Je  dcfgorgcr  lem  vei:in  con- 
tre nouî, d'autan:  quciiousdcfiron';  (quilque 
infirraué  qu'il  y  ait  en  nou';,&  que  nous  foy- 
ons  bié  loin  de  nou^  acquitter  de  uoftrc  char- 
çc)aue  Dieu  l'oit  (trui  &:  lionoié.o.:  qu'on  luy 
rende  l'honneur  &  l'authoritc  qui  luy  appar- 
tient. Mais  cependant  ou  dira  que  nous  vou- 
lons faire  ceci  ou  cela.Toutesfois  quand  tout 
fera  conté  &  rabbatu  ,  après  qu'on  aura  bien 
gazouillé  &  de  domination, cSc  de  principauté, 
&  de  tout  ce  que  les  malins  ont  accouftumé  de 
mettre  en  auant,  fi  efi-ce  qu'on  voit  bien  que 
leur  but  eft  qu'il  n'yaic  plus  d'ordre  ne  de  po 
lice, qu'il  n'y  ait  plus  de  reuerence  à  la  parole 
de  Dieu,Qu'ô  s'en  mocque  en  telle  forte  corn 
me  on  voudra.  Voila  en  quel  débat  nous  fom- 
nics  auioiud'huy  ,  &  qui  a  elle  dcniené  fi  long 
temps:  &  l'ordure  croupit  en  telle  forte  qu'il 
n'elt  plus  qucft  on  de  le  dif^imulcr  ,  mais  il 
faut  que  foir  &  matin  nous  en  p.irlionv  :  car  la 
vilenie  eft  trop  gra;::d';.Et  quand  elle  fera  co- 
gnue  bien  loin  ,  &  qu'en  la  maifun  nous  n'en 
î'çaurons  rien,  ou  bien  que  nous  ferons  fcm- 
blanrdene  lapa-,  veoir.ie  vous  prie,ne  ferons 
nous  pa  alors  bien  àcordamner?  Or  donc 
pour  venir  au  propos  de  fainâ  Paul,  ou  p!uf- 
toft  pour  le  continuer ,  auifons  à  ce  qui  eft  ici 
dit  :  c'eft  que  11  nous  dcfirons  d'tftre  fauuez 
parla  main  de  Dieu,  ii  faut  que  nous  cher- 
chions noftre  falut  en  la  doûnne  qui  nous  eft 
portiCen  fon  Nom.  Defpitons-noiis  contre 
les  hommes ,  mais  ce  fera  à  nos  dtfpens.  Car 
ceux  qui  eftans  chagrinez  ne  veulent  ne  boire 
ne  manger  ,  à  qui  font-ils  tort  ou  domni.ige? 
Ainiî  dtfpitons-nous  cotre  la  parole  de  Dieu 
en  haine  des  hommes  ,  il  faudra  que  nous  pe- 
iifsions.  Or  puis  qu'ainli  tft  que  Dieu  nous  a 
voulu  enuoyer  Ils  hommes ,  &•  qu'il  veut  que 
rous  foyons  inftruits  par  leur  bouche  ,  qu'ils 
nous  ftiuemde  guides  pour  nous  monftrer 
noftre  falut ,  auifons  de  ne  point  irriter  Dieu 
en  repouflànt  fa  grâce  à  noftre  efcient.  Voila 
ce  que  nous  auons  à  retenir.  Et  cependant, 
quand  Dieu  r\ous  prefcnte  vne  telle  aide  de 
falut  ,  c'ert  afçauoir  que  fa  parole  nous  foit 
prefchee,  &  que  nous  foyons  édifiez  par  bon 
exemple, que  nous  fjcions  valoir  vn  tel  fhre- 
for:car  autrement  noftre  ingratitude  fera  in- 
excufible.  Maintenant,  pource  que  tous  ceux 
qui  fe  difent  Chreftiens,n  e  le  font  pa?,  fainû 
Paul  dit  que  Tmiothee  famiera  ceux  cjui  l'tf- 
(outcnt  :  fignifiant  qu'il  ne  tiendra  qu'à  ceux 
que  Dieu  appelle  par  fa  paro!e,qii'ili  ne  fov- 
«nt  menez  au  chemin  de  falut  quâd  ils  auront 
vn  Paftcnr  fidèle  qui  les  guide.  Or  il  s'en  faut 
beaucoup  que  tous  foyent  tel  auditeurs  com 
nie  faind  Paul  le  requiert  ici. Il  <  ft  vray  qu'au- 
cuns viendront  au  temple  quand  bon  leur 
femble  ,  roire  &  p  our  monlher  qu'ils  veulent 
auoir  licence  de  n'eftre  point  fuiets  à  l'ordre 


commun,  ni  .i  aucune  police.  IK  vienent  donc 
ici  pour  dire  ,  l'y  fien  :  mais  c'eil  quand  bon 
me  kuiblc;car  de  moy,  ho  ie  ne  fuis  point  du 
rang  commun. 11  y  en  a  donc  qui  demeureront 
en  telle  ftup'dité  ,  qu'ils  ne  feront  quedor- 
mirauliciide  profiter.  Les  autres  ne  feroat 
point  tant  abbrutis  ,  &  y  aura  en  eux  quelque 
honneftecé,!ls  ne  feront  point  elfronttz  pour 
vouloirdefpiter  Dieu  ,  &  mettre  fous  le  pied 
l'ordrede  l'Eghfermais  tant  y  a  qu'ils  auroBt 
lesaureilles  bien  longues:  car  ce  leur  eft  tout 
vn  de  chofe  qu'on  leur  diiè.  Lesvns  feront 
endormis  ,  les  autres  feront  pleins  de  venia 
comme  ctapaux,&  repoulTcront  toute  doftri- 
ne  fans  qu'ils  cognoiflentce  qui  leur  eft  re- 
monftré  :  les  autres  viendront  ici  pour  efpies 
ce  qu'on  dira:conime  notamment  le  Prophè- 
te reproche  cela  aux  malins  ,&  aux  ennemis 
domiftiques  de  l'Eglife  de  Dieu  ,  qu'ils  ef- 
pient  ceux  qui  parlent ,  qu'ils  font  le  guet:  & 
quand  ils  pcuuent  auoir  vn  mot  d'auantage, 
c'tft  à  faire  grand  bruit ,  Ho  ,  il  ne  faut  pas 
fouftrir  ceci,  ho  il  y  faut  rcfiftcr.  Voila  donc, 
comme  beaucoup  de  ceux  qui  fe  diront  Chre— 
iticns.monftrcntaflez  qu'ils  ne  font  point  de 
la  compagnie  des  auditeurs  qne  fainft  PauF 
entend  ici.  Et  pourquoy  ?  Car  làinft  Paul  ne 
parle  point  ici  de  ceux  qui  oyent ,  coiiime  iî 
quclqu'vn  contfmploit  fi  face  en  vn  miroir 
(a:nfique  fainft  laques  en  donne  la  fimilitu-  Uq.i,Ji 
de)  mais  il  parle  de  ctiixqui  reçoyiient  pai-  23, 
fiblement  la  docfrine  ,  &qui  font  dociles  non 
feciiement  pour  vn  iour  ,  mais  continuent  de 
profiter  enl'cfchole  de  Dieu.  Quand  donc 
nous  prefterons  aiiifi  l'aureille  à  Dieu,  que 
nous  fouffriions  d'eftre  enfeigneapar  luy  ,  & 
que  nous  monlherons  ce  defii-la,  non  point 
pour  peu  de  temps,  mais  pour  toute  ncftia 
vie, alors  nous  ferons  tenus  pour  bons  tfcho- 
liers  &•  audueun  de  ia  parole  ,  &.  ferons  par-' 
ticipaiis  du  falut  qui  nous  y  tftofîcit  irraivfi 
au  lieu  d'efcoutei  ,  les  vus  boufchent  lesau- 
reilles,les  autres  font  c-c^irime  cnyurtz.les  au- 
tres font  endormis  &s'affc  pffent ,  les  luties 
ne  font  que  fe  mocqucr  ,  iJ  n'cft  pas  en  pohs= 
d'amener  telles  gens  à  fahit  :  car  puis  qu'ils 
refiftent  à  Dieu, qu'y  pouuons-nous  faiie  ?£c 
voila  pourquoy  l'Euarg'le  ,  qui  de  fa  natur» 
doit  eflie  vne  odtirr  de  vie  ,  eft  coniieitiecir. 
mort. Et  en  cela  voit-oii  quelle  eft  la  perucr— 
fité  de'  hommes. Dieu  fait  luire  fon  foleil  fur 
nous ,  &  nous  prenons  occailon  d'eftre  pliiy. 
aueugkz.  Voila  Dieu  qui  nous  cnuoye  {à  pa- 
role afin  de  nous  faue  cheminer  en  fon  o— 
beiflance  ,  &  celaeft  pour  nous  endurcir  d'a- 
uantage. Q_i.and  donc  nous  peruertlTons  ain— 
fi  l'intention  de  Dieu  ,  ne  faut-il  pi.>  qu'il  y. 
ait  vne  maudite  rébellion  en  nous?Brief  nous, 
tournons  la  clarté  en  ténèbres ,  la  vie  eai 
mort, le  pa.n  en  poifor.:voila  ce  que  nciis  fai— 
fons.Ma;saprei  que  fair£t  Paul  a  dit  que  TE— 
uangile  àcaiife  de  la  maKce  des  hommes  leuE 
eu  vne  odeur  de   mort ,  il  adioufte  toutes— 


iiA  S  E  ïl  M  O  N 

fais  que  c'tft  vne  odeilv  fouefue  à  Di€u:&:ad 
ioiifte  cela  Ho;ammeat,a£n  que  nous  preniôs 
courage.  Qusnd  nous  voyons  l'ingratitude 
des  hommes  ,  &  que  nous  ne  les  pouuons  pas 
amener  i  Talut  comme  ilferoit  àfouhaiter.iî 
ne  t'aut-il  pas  laifler  de  nous  y  employer.  Si 
donc  nous  voyons  que  les  hommes  s'aillent 
|)crdre,&  qu'Us  reiettent  la  grâce  qui  leur  elt 
offerte  par  noftre  moyeu,niarch5s  touliours 
outre:mais  c'cft  à  leur  condanation  que  nous 
prefchons.Et  bien,  combien  que  ce  leur  fait 
vne  odeur  mortelle  que  la  dodrine  qui  proce 
Je  de  noftre  bouche  ,  &  que  cela  les  face  pé- 
rir ,  toutesfois  fi  eft-ce  vnc  bonne  odeur  & 
fouefue  i  Dieu, dit  famtl  Paul;  il  accepte  no- 
ftre feruice.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à 
noter  pour  côcluiîon  de  ce  partage  ,  c'cft  que 
les  rain:flres  de  la  parole  de  Dieu  doiuét  s'ad 
drelTer  à  tou;,&  à  grans  &  à  pctis,ils  doiucnt 
auoir  ccfre  aiFcdion  d'cdilîer  tout  le  monde: 
mais  s'il  y  a  des  lourds  o  ne  les  puillent  ouir, 
s'il  y  a  des  malins  qui  les  reiettét,  s'il'  y  a  des 
mocqueurs  qui  mettéc  tout  en  confufîon,  que 
faut-il  faire?  Qu^ils  pourliiiuent  touiiours,& 
j,  ,  qu'ils  appellent  ceux  qu'ils  pourront  à  Dieu, 
J^-  S.d.  jon^^g  ji  cftdit  au  prophète  Haie,  Me  voici 
&  les  enfans  que  tu  m'as  donnez. Il  faut  donc 
que  nous  mettiés  peine  d'attirer  tout  le  mon 
de  à  falut:\'il  y  en  a  des  reuelches  &  des  fau- 
uages  qui  fe  retirét  du  troupeau,&bien,moy- 
cnnat  que  nous  ayons  procuré  leur  falwt  en- 
tant qu'en  nous  cil,  que  nous  pafsions  outre, 
l'cachans  que  celle  odeur  mortelle  ne  laifle- 
ra  pas  d'eftre  bonne  deuat  Dieu  &  agréable: 
&<lifûTis  auec  le  prophète  Ifa!e,Seigneur,me 
Toici ,  &  les  enfans  que  tu  m'as  donnez  :  fça- 
chîs  qu'il  faut  que  Dieu  donc  à  (on  Fils  ceux 
qui  font  fîens,&  que  fon  Fils  nous  paifTe,  afin 
-  qu'il  en  foit  le  louuerain  Paileur. Voila  donc 
«■e  que  nous  auôs  à  retenir.  Et  au  reftc.il  faut 


XXXVI. 

qu'vn  chacun  face  fon  profit  de  cefte  doôri- 
ne,&  fur  tout  que  nous  ne  foyons  point  fcaii 
dalifei  quand  nous  vetrôs  des  gens  fauuages 
&  des  beJlcs  farouches  qui  ne  le  voudiôt  nul 
lement  ranger  à  Dieu ,  qui  n'auront  point  vn 
efprit  paifible  &  débonnaire  pour  obéir  à  la 
vraye  doftrine.Quand  donc  nous  verrons  de 
telles  belles  fauuages  qui  ne  font  que  tout  ga 
fter&  mettre  difcord&diflenfion  en  i'Egli- 
fc ,  que  nous  n'en  foyons  point  fcandalifez, 
nonobllant  leurs  machinations  &  prattiques, 
maisccgnoiflàns  que  le  diable  par  ce  moyen 
la  tafche  de  nous  faire  perdre  courasje  ,  que 
nous  ne  laifîions  pas  pourtant  de  to.iiiours 
perfiilcr  à  anvincer  ccile  do£l:ine  qui  dl  la 
puillance  de  Dieu  pour  noftre  ûlut  :  quand 
nous  y  aurons  couru  défia, que  nous  y  perfe- 
nerio;is  tout  le  temps  de  nollre  vie,&  iufqu£$ 
à  la  mort. 

O  R  nous-nouî  profternerons  deuant  la  £i 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoilTance  de 
nos  fautes  ,  le  prians  qu'il  Kiy  plaife  de  nous 
amener  à  vnc  telle  repentance,  que  nous  ge- 
mifsions  de  l'auoir  ctfcnfé,&  d'auoir  conti-CT 
uenu  à  fes  l'ainûs  comraandemens,&  que  nous 
foyons  enflambezd'vn  tel  zcle,  nue  nousne 
demandions  finon  de  nou^  conformer  du  tout 
à  fa  iuftice,'&  d'eftre  defpouillcz  de  nos  alFe- 
ftions  monda!nes,alîn  qu'il  nous  reuefte  de  fa 
gloire.  Et  que  cependant  il  ait  mémoire  de 
tous  ceux  qui  font  el^arez  de  fon  troupeau, & 
qu'il  lesrappelle,"qii'illes  illumine  en  la  co- 
gnoiflàncede  fa  vérité, en  laquelle  nouscioif 
fions  tous  de  plus  en  plus  iufques  à  ce  que  no' 
venions  i  cefte  perfcûion  que  nous  atten- 
dons, &  à  laquelle  il  nous  faut  afpirer  tout  le 
temps  de  noftre  vie  .  Et  pour  ce  faire  il  luy 
plaife  fufciter  des  vrais  &  fidèles  minillres 
de  fa  parole.&c 


PREMIER      SERMON      SVR     LE- 

C  I  N,Q_y  I  E  M  E     C  jH  A  P  I  T  R  lE. 

1  Ne  repren  point  rudement  ccluy  qui  cjî  ancien ,  mais  admone- 
jïe-le  comme  percdes  ieunes  comme  frère  s  y 

z  Le  s  femmes  anciennes  comme  mères, les  ieunes  comme  fcurs,  en 
toute  chaîlctê.Hoyiore  les  yefues  qui  font  vrayetnetit  vefues. 


Ous  fçauons  que  bien  peu  de 
gens  pcunét  fouffrir  qii't)n  les 
reprenc,  tncorev  qu'iis  ayent 
failli, &  qu'ils  fe  fcntcntcoul- 
pables.  Car  il  y  a  en  pxfiiiier 
lieu  l'orgueil  qui  empefche  la 
plusjjart  de  s'afluicttir  à  corrediô:&puis  no' 
auons  vne  folle  honte  que  nous  aimons  miru* 
continuer  en  nos  vices,  que  d'en  cftrcauertis, 
afin  de  nous  tn  garder.  Poifr  cefte  ciufc  iltft 


bcfjin  g  celuy  qui  doit  rcprédre  les  pécheurs, 
a:t  en  fuy  q.iclquc  modération  &  attiépance, 
afin  d'adoucir  ce  qui  pourroit  cftre  par  trop 
aigre  en  la  remonllrance  qu'il  leta.  Comme 
nous  voyons  qu'vn  médecin  voulant  donner 
quelque  bi  image  àvn  malade, l'adoucira, pour 
ce  q  la  médecine  de  foy  eft  trop  fifcheufe  ,  & 
y  mc/lcia  quelque  fucre,  ou  bien  quelque  (y- 
rop.Ainfi  il  eft  vtilc.à  caufe  delà  icpugnance 
que  l'ay  due ,  que  finous  voulons  profiter  eo 

adino- 


s  VR   L  A  T.   A  TIM  O  T  M.  221 

adraoneftant  ceux  qui  ont  failli,  que  nous  v-  ftre  admoncftez  en  p.-.i  ticulicr  ,  comme  nous 
fiôs  de  quelque  humanité  &  douceur. Sur  tout,  voyons  aufsi  qu'en  Êztcîiiel  il  n'cd  point  feu  ^^'-i^i' 
cela  eit  bien  requis  enuers  les  vieilles  gens  lemcnt  dit  que  le  Paileur  c<t  commis  de  Dieu 'J-4. 
qui  font  plus  difficiles  àgouuerner,&  plus  pour  mcnci  le  troupeau  pai{lrc,mais  que  foa 
chagrins.  Car  il  leur  femble  qu'ils  ont  allez  office  tilde  foulagcr  les  de  bjles,Sc  de  guainr 
vefcu  au  monde  pour  fçauoir  ce  quieftbon,  les  malades, &  de  remédier  à  toutes  les  infir- 
me fevoudroyent  exempter  de  toute  remon-  mitez  qui  y  font.  Ainii  donques  quand  nous 
ftrance  fous  ombre  de  leuraage.combien  que  voudrons  nouî  acquitter  enuers  Dieu  i;ceuic 
ils  en  ayent  plus  grand  mcftier  que  les  autres,  qu'il  nous  a  commis  en  charge, ce  n'eft  point 
tellement  que  quâdvne  vieille  perfonne  s'ad-  allez  que  nous  prci'entions  ladtidrine  en  ee- 
donne  à  mal,  cela  eft  beaucoup  moins.îfup-  neral.mais  quand  nous  voyon;  qiielqu'vn  qui 
porter  qu'il  ne  feroit  point  en  vne  ieune  pcr-  eft  desbauclié,  nousdtuôsmettie  pc ine.de  le 
fonne.(5r  tat  y  a  que  les  vieilles  gens  ne  font  ramenei  au  bon  chemin  ,  qiiai.d  nous  voyons 
pas  trop  patiens  ii  an  les  corrige.  Par  ainfi  il  l'autre  cftic  ùfché  &  defolé  ,  que  nous  taf- 
faut  vfer  de  prudcce  enuers  eux,  afin  de  leur  chions  de  le  reliouir:  quand  nous  voyôs  quel 
faire  trouucr  la  correiiion  bonne,  &  Tadou-  qu'vn  qui  eft  dur  d  l'cfperon  ,  qu'il  foit  pic- 
cir  ,  tellement  qu'ils  l'endurent ,  &  qu'ils  en  que  &  aiguillonné  ainli  que  {à  nature  le  por- 
puiflcnt  faire  leur  profit.  Voila  pourquoy  S.  te.  Voila  donques  ce ^iie  nous  auons  à  noter 
Paul  en  ce  pailàge  dit  à  Timothte  qu'il  ne  en  ce  paffage. Or  cependant  il  nous  faut  aufsi 
faut  point  qu'il  ludoye  les  vieilles  gens, mais  auiferquc  fainâ  Paul  ne  veut  point  qu'on  fto 
qu'il  les  exhorte  comme  pères  &  nieies.  Car  porte  les  anciens  iufquei  là  que  de  les  nour- 
aufsi  nous  auos  veu  que  Timothee  eftoit  en-  m  en  leurs  vices  :  car  s'ils  ont  befoin  d'tftre 
cores  ieune  home, &  ceux  qui  cftoyent  beau-  admoncftez,  il  faut  qu'on  le  face.  Il  eft  vray 
coup  plus  aagez  que  luy  ,  euflcnt  peu  repli-  qu'ils  voudroyent  bien  qu'on  les  efpargnaft, 
quer  qu'il  eftoit  encores  trop  ieune  pour  les  S:  qu'ils  ne  fulient  nullement  touclicz  :  mai* 
rudoyer  ainfî.Sainft  Paul  donc  vfe  du  moyen  nous  voyons  le  moyen  que  Dieu  ordénepar 
qu'il  cognoift  eftre  conuenable  .  Or  par  ce-  la  bouche  de  fainû  Paul ,  c'eft  que  les  vices 
la  nous  voyons  que  celuy  quia  la  charge  de  foycnt  tOLiïours  redarguez  &  en  ieunes,&e« 
porter  la  parole  de  Dieu  ,  ne  doit  pas  leule-  vieux, qu'on  ne  les  nourrille  point  par  flatte- 
ment  en  gênerai  expofer  l'Efcriture  fainftc,  nés,  que  les  hommes  quoy  qu'ils  afîeguent, 
&  reprendre  les  vices,  &  arguer  ceux  qui  ont  ne  foyent  point  priu'.legez  de  correûion  & 
failli,  mais  il  doit  aiifsi  auoir  prudence  &di-  difcipline.qu'ilyait  feulement  cela, qu'on  ne 
fcretion  enuerschacBn,&  telle  prudence  que  s'aigriffe  point  par  trop.  £t  fur  tout  quanl 
Jadoûrine  qu'il  portera,  foit  bien  reccue  de  n  jus  voyons  vne  vieille  p.'rfonne  ,  encores 
luy.oufielle  nel'cft,  au  moins  q  celanepro-  fin.t-ïl  honorer  i'aage,  qu'on  vfede  douceui 
cède  point  de  fa  faute.  Ca^  il  pourra  bien  ad-  &:  humanité  tant  qu'il  fera  pofsible.  Vray  eft  • 
uenir  qu'vn  homme  apies  s'tftre  acquitté,  que  cela  doit  cftreentédu  de  ceux  qui  ne  font 
trouucia  neantmoins  des  gens  reuefches  en-  point  du  tout  incorrigibles. Car  (î  vn  homme 
«ers  les  admonitiôs  qu'il  tera.cnrores  qu>l-  ancien  eft  endurci  àmal,  Se  qu'il  vueille  faire 
les  foyent  bien  douces  &  gracieufes.mais  ci-  du  rebelle  contie  Dieu  iufques  au  bout, alors 
la  ne  viendra  point  de  fa  faiite:toutesfois(c5  il  y  laut  procéder  auec  plus  grande  vehemen 
me  i'ay  delîa  dit)  nous  qui  auonscharge  d'en  ce  :  mais  deiiant  qu'on  l'ait  eflavé  ,  fi  faut-il 
feigner  le  peuple,  non  feulement  nous  dcuôs  que  celle  attrtnipance  foit  gamee  que  met 
regarder  ce  qui  eft  profitable  .1  tous  en  coin-  ici  faiiiû  Paul,  c'eft  afçauoir  qu'on  les  exhor 
mun.ains  dcuons  auoir  ce  regard, de  traittcr  te  comme  percs ,  encores  qu'ils  ayent  failli, 
chacun  félon  que  I'aage  le  porte.  Maisnous  Or  il  eft  certain  que  quand  celuy  qui  doit  re 
auons  aufsi  à  noter  quât  &  quant  que  ce  n'cft  nionftrer  àvii  homme  ancien  la  faute  qu'il  au 
point  aflcz  qu'vn  homme  qui  eft  Pafteur  en  ra  laite,  s'il  fe  met  deuant  les  yeux  la  perfon 
■l'£glife  de  Dieu,  prtfche,&  qu'il  iette  la  pa-  nedupere,  il  fera  retenu  en  quelque  reue- 
role  en  l'air  :  il  faut  que  nous  ayons  nufsi  rence  &modeftie.  Et  voila  pourquoy  Ciinft 
les  admonitions  priuees.  £t  voila  en  quoy  Paul  notamment  nous  dit.  Que  Dieu  nous 
beaucoup  fe  trompenticar  il  leur  femble  que  prelente  les  anciVnj  comme  nos  ^frff,&  qu'il 
l'ordre  de  l'Eglife  n'eft  fait  finon  afin  qu'on  veut  que  nous  ayons  ce  regard-la.  Voila  don 
fe  trouue  au  téple  vne  heure  la  fepmaine  ou  ques  le  premier  poind  que  nous  auons  àno- 
quclqucs  iours,&-que  là  vn  homme  paile,  Se  ter.  Or  quant  à  ceux  qui  font  égaux  en  aage, 
qu,îd  il  fera  defcendu,  qu'il  ait  comme  la  bou  làind  Paul  veut  qu'on  les  tiene  comme  frerei 
che  clofe.  Ceux  qui  penfent  cela,  mouJlrent  &  faurs.  Et  cela  eft  aufsi  bien  pour  nous 
aflcz  qu'ils  n'mt  lamais  cognu  que  c'eft  de  adoucir  ,  à  ce  que  nous  n'exercions  point 
Chreftienté  ne  d'ordre  de  Dieu.  Car  comme  trop  grande  rigueur  contr'eux  ;  comme  aufsi 
nous  voyons  en  ce  pal]age,&  que  défia  Cl  de-  il  faut  que  les  frères  &  fœurs  ayent  entr'eux 
uant  il  a  efté  monftré,quand  celuy  qui  anon-  quelque  gracieufeté  ,  ainfi  que  nature  mefme 
ce  la  parole  de  Dieu,aura  enfeigné  le  peuple,  1  ordonne. Pour  cefte  caufe  donc  quand  l'aa- 
il  faut  qu'il  regaideceux  qui  ont  befoin  a'c-  ge  fera  pareil,  S.  Paul  veut  qu'il  y  ait  comme 

E.iii. 


221 

vne  fraternité ,  &  que  cela  foit  cauie  de  nous 
faire  vfer  d'admonitiôs  humaines,  tellement 
que  nul  ne  l'oit  ofTenlé  ,  voire  finon  qu'il  ie 
Tueilledelpiter  à  fon  efcient  >  comme  délia 
nousauons  touché  qu'il  v  en  a  beaucoup  qui 
le  font  en  quelque  forte  qu'on  les  puifle  prf  n 
dre,  &:  iaraais  on  ne  les  peut  gagner,  car  ils  fe 
font  obflinez  contre  Dicii,&:  ne  peuuét  fouf- 
frir  qu'on  les  rcdargue.  Telles  gens  donc  ne 
profiteront  lamais ,  combien  qu'on  vfe  d'vne 
façon  tant  humaine  qu'il  eftpofsible.  Pour- 
quoyfLe  diable  les  pofllde.ils  s'aigriflênt  en 
toute  amertume,  ils  ont  ccft  efprit  de  pointe 
dont  l'Efcriture  parlc.pour  s'enuenimer  con 
tre  Dieu,&  pour  reietter  toute  bonne  adme- 
nition.Nous  en  voyons  beaucoup  que  le  dia- 
ble a  tellement  deprauez, qu'on  p'a  nul  moy- 
en ni  accès  à  eux  pour  Jes  redrefler.  Mais  fi 
vn  homme  n'cft  point  encores  du  tout  enJur 
ci  en  fes  vices,  quand  on  luy  portera  vne  mé- 
decine attrempce,  il  eft  certain  que  cela  fera 
pour  le  faire  fléchir ,  8c  luy  amollir  le  coura- 
ge. Ainlidonques  nous  voyons  en  fonimc  ce 
que  fainfb  Paul  a  voulu  dire  ici.  Car  combien 
qu'il  parle  à  ceux  qui  ont  la  charge  d'enfci- 
gncr  ,  leur  monilrant  quel  efl  leur  office  en- 
uers  le  peuple,  il  rlt-ce  quecefte  admonition 
nous  conuient  a  tous.  Car  fi  on  nous  traitte 
amiablemcnt  quand  nous  auons  failli  ,  &  que 
nous  fcntions  qu'on  vfc  d'afFcftion  fraternel 
le,&:  qu'on  cherche  noftre  falut,  quand  nous 
voudrons  élire  rebelles ,  ctftc  ingratitude-la 
ne  s'addrefle  point  à  vn  homme  mortel,  mais 
nous  dcfp'tons  Dieu  ,  &c6triftons  fon  hiv.ù 
£fprit  entant  qu'en  nous  eft.  Et  pourquoy? 
Car  nous  voy  os  que  Dieu  a  ordéné  ce  moy- 
en afin  que  nous  profitions  en  fa  doânne  ,  & 
que  nous  ne  foyoni  point  endurcis  en  nos  pe 
chez.  Il  ne  veut  point  que  nos  vices  fe  cou- 
urcnt,&  qu'ils  croupiffent  là,  qu'on  ne  les  co 
gnoilfe  point  ,  &  qu'ils  ne  foyent  point  rc- 
prins.  Dieu  donc  ne  veut  point  qu'on  vfc  de 
telles  flattcnesicar  cela  engédrera  vne  pour- 
riture incurable  :  mais  il  veut  que  les  vices 
foyent  rcprins.quc  nous  foyôs  abbatus,  voi- 
re encotes  que  les  péchez  foyent  redarguez 
auec  douceur  Se  humanité  ,  toutesfois  quand 
cela  fe  fait ,  fi  nous  ne  pouuons  porter  telles 
admonitions  fi  amiables, ce  n'cft  point  del^i- 
ter  les  hommes  ,  mais  c'cft  faire  la  guerre  à 
Dieu  .Vcila  ce  que  nous  auons  à  retenir.  Et 
fi  ceci  cftoit  bien  obferué  ,  nous  verrions  vne 
autre  obeiflance  qu'on  ne  cognoift.Car  cha- 
cun fuija  les  admonitions,  &  h  tort  qu'on  ou 
Bre  la  bouche  pour  redargucr  quelqu'vn,  voi 
la  comme  vne  guerre  ouuertc  ,  voila  vne  ini- 
mitié mortelle. Et  pourquoy?  Car  nous  ne  re 
gardons  point  que  c'eit  i  efifter  à  Dieu  quand 
on  iciette  aniC  les  admonitions  qui  fe  font 
en  fon  Nom  ,  &  par  fon  commandement.  Et 
ainfi, d'autant  plus  nous  faut-il  noter  ce  paf- 
fage,  où  il  nous  eft  monftré  que  Dieu  ne  veut 
point  que  les  vices  foyent  nouiiis  en  les  dif- 


SERMON    XXXVII. 


fimulant.mais  qu'on  les  corrige aaec dou- 
ceur &  modeftie..  Or  nous  auons  encores  à  re 
cuciliiidece  palTage  vn  autre  article  ,  c'eft 
que  félon  qu'il  nous  eft  commandé  à  tous  de 
reprendre  &  redaiguet  nos  prochains ,  que 
nous  fumions  la  rcçle  qui  tft  ici  contenue, 
d'autïtque  toute  correction  tft  aigre  S:faf- 
cheufe  ,  qu'elle  foit  addoucie  le  mieux  que 
nous  pourrôs,afin  qu'elle  foit  mieux  receue,. 
&  qu'elle  profite. C^uand  S.Paul  dit  q  TiniQ- 
theef.ice  cela  auec  tcute  chafleté  quant  aux  ie» 
nesfcmmes,tl  n'entéd  pas  que  Timothee  s'ak 
ftiene  de  façonsdiflblues;car  c'eftoit  vn  ho- 
me de  grande  fain£teté:mais  encores  veut-il 
ipreuenir  les  foufpeçons  qu'on  ponrroit  pren 
dre(côme  le  monde  eft  malin)&  fi  toft  qu'on 
voit  parler  vn  homme  auec  vne  ieune  femme, 
encores  que  ce  foit  pour  fon  falut  ,  voila  des 
propos  qui  en  volent, A  des  murmures. Sainrt 
Paul  donques  voyant  que  Timothee  pour- 
roit  eftte  fuiet  à  telles  calônies,  l'admoncfte 
d'eftre  prudét  en  ceil  endroit, &  s'il  faut  qu'il 
communique  auec  les  ieunes  femmes  pour 
lesadmonefter  de  kurdfuoir,qu'iile  face  en 
telle  crainte,  que  les  mifchans  ayent  la  bou- 
che clofe,&  que  les  infirmes  n'en  foyét  point 
ic.ïdalilez  ,  qu'ils  ne  puifTcnt  conceuoir  aucii 
ne  mauuaile  fantafic  qui  les  trouble.  Et  c'cft 
encores  vn  paflagc  qui  eft  bien  digne  d'tftre 
noté.  Car  nous  fçauons  que  le  diable  ne  ta{- 
che  finon  de  rendre  la  paiole  de  Dieu  odicu 
fc,&  fur  tout  il  vfe  d'vn  tel  artifice  pour  no' 
cmpcfcherque  nous  n'fxercions  la  ch.ugs 
que  Dieu  nous  a  commife.  Q_ue  s'il  poiiuoit, 
iamais  n'y  auroit  fcrmon  ne  doiftnm  :5,:  qu.id 
il  ne  peut  venir  àbuut  de  cela,  il  voudroit 
bien  quand  on  monte  en  chaire,  qu'où  fcift 
vn  feimon  comme  fi  des  orgues  chantoycnt, 
qu'il  y  euft  là  vne  doftriiie  telle  que  perfon- 
ne  n'en  fuft  touché  ,  &  qu'on  s'm  rctournaft 
comme  on  fcroit  venu:3iufi  que  nous  voyons 
ces  gaudilTeurs,  gens  profanes,  qui  vcudroy- 
ent  que  tout  fuft  en  confufîon.  Quelle  pré- 
dication eft-ce  (  ie  vous  prie}  qu'ils  di  man- 
dent? Q^ie  la  doûrine  foit  comme  pendue  au 
croc,&  que  ce  fo' t  comme  fi  on  auoit  ouy  vne 
fleute  :  amfi  que  la  coniparaifon  en  tft  dônce 
en  Ezechiel, qu'on  ne  dift  finon,  O  voila  bien 
prefchf  .'o  voila  vn  beau  fermon'  Et  comniétâ 
il  n'y  auroit  nul  profit  m  édification  pour  les 
auditeurs.  Et  toutesfois  c'eft  ce  que  cherchét 
auiourd'huy  beaucoup  de  gens. Et  ce  prouer- 
be.  De  prcfcher  félon  le-  texte  ,  n'emporte 
finon  que  la  paiole  de  Dieu  n'ait  plus  ni  vfa- 
ge  ni  vertu  entre  nous.  Se  qu'on  fou  là  com- 
me en  des  cachettes  ,  Se  que  Dieu  ne  nnu'  ef-  Hrfc.  ^,' 
claire  point.  Or  au  côtraire  il  eft  dit.Qjic  la  ^.12, 
parole  de  Dieu  doit  eftre  vn  çLui  e  trâthant 
des  deux  cofttz, qu'il  n'y  doit  auoir  m  m  el- 
le,ni  os, ni  péfces.ni  affccliôs.quc  tout  cela  ne 
foit  I.  ndé,q  Dieu  ne  face  vn  examen,  &  com 
me  vne  anaiomie  de  toutCN  les  partie^  de  nos 
ames.  £t  puis  eu  l'autre  paffàge  il  eft  dit, que 

Tofface 


5VRLAI.    A    TIMOTtf. 


I»f  S.itf  Toffice  de  h  parole  de  Dieu  eftde  nous  cfplu 
cher  iaf<ju''au  bout ,  &  de  mettre  en  auant  les 
«hofesque  nous  voudrions  couurir  :  comme 
aufsi  il  eft  dit,  que  tout  ainfi  que  Dieu  eft  ce- 
Jlifî.l.i4  '"y  l"*'  fonde  les  coeurs, &  que  cela  kiy  appar 
I.  Cor.i.  tient  .qu'il  veut  aufsi  que  cefte  vertu-lafoit 
jj_  en  là  parole.  Ainiî  donc,  pource  que  Tartifice 

de  Sacan  eft  de  nous  empefcher  que  nous  n'a- 
noncions  librement  la  parole  de  Dieu,  quand 
il  ne  peut  pis  faire, il  trouue  ces  cal5nieb:Voi 
re:  Et  comment  ?  fous  ombre  d'admonefter& 
Je  redarguer.vn  preflieur  aura  liberté  de  dire 
ceci  Se  cela  :  puis  vn  prei'chtur  aura  liberté  de 
entrer  en  vne  maifon.Et  puisd''autre  s  chofes 
qu'on  pourra  allcgaer.Voila  pourquoy  fani£t 
Paul  veut  que  nous  ayons  ccfte  prudence  de 
preuenir  ces  murmures  ,&  toutes  les  choies 
qui  feroyent  pour  rédre  la  doclrine  que  nous 
portons  odieufe  .  Et  ainfi,  que  ceux  qui  vou- 
dront profitera  toute  l'Egiife  regarder  bien 
de  ne  point  donner  occaiîon  ni  aux  irfiimes, 
ni  aux  gens  malins  d'eftre  l'candal.fcz,oubien 
de  mefdire  &  detracler  qiiHd  ils  exercent  leur 
charge.  Voila  pourquoy  fair.ft  Paul  ordonne 
àTimothee  qu'en  pailat  aux  leunes  femmes, 
ilaitcn  foy  vne  telle  grauité  qu'on  ne  puilTe 
côceuoir  aucune  fiifpicion  mauuaife,  mais  que 
il  foit  retenu, &  que  la  pai  oie  de  Dieu  ne  foit 
point  fuiette  àmocquerie  par  ce  moyen-la. 
Or  fi  Timothee  a  eu  befoin  d'vne  telle  admo 
niti5,que  fera -ce  de  nous  qui  à  beaucoup  près 
n'auons  pas  profité  comme  luy,fur  tout  en  vn 
tel  exercice;  Ainfi  donc  apprenons  d'eftiefur 
nos  gardes,&de  nous  abftcnir  de  to' propos, 
&de  toutes  côtenances,& de  chofe<;  qui  pour 
royent  engendrer  quelque  murmure, tellcir.ét 
que  ceux  qui  voudront  mei'Jire  de  nous.foyét 
confus  :  &  quand  on  s'enqucftera  de  la  chufc, 
&dela  vérité, qu'ô  trouue  qu'ils  font  mefmes 
cfFronter, quand  ils  inuèntcnt  &  controuuciit 
telles  calomnies;  Voila  ce  que  nous  auonv  à 
noter  .  Mais  cependant  il  faut  qu'vn  cliacun 
aufsi  applique  cefte  admorrition  à  fon  vfjge: 
car  fainit  Paul  nous  mon  ftre  comme  nous  a- 
uons  à  conuerfer  auec  les  hommes,  voire  en 
telle  façon  qu'il  n'y  ait  ne  paroles, ne  conte- 
.  Bance  qui  puilFe  donner  quelque  marque  fini- 
ftre.Sicela  eftoit  bien  obferue,  on  ne  verroit 
point  vne  telle  licence,iS:^ar  côfcqiient  il  n'y 
auroit  point  tant  de  fcandales  entre  nous  co- 
rne on  les  voit.Mais  il  y  en  a  bien  peu  qui  pen 
fent  à  ce  qui  eft  dit  en  l'autre  palîàge  ,  Que 
chacun  édifie  fon  prochain  en  bien.  Car  ùin6t 
Paul  nous  remonftre  là  oue  nous  ne  dtuons 
flom.TT.l  point  eftre  addonncz  à  nous,  qu'vn  ch.icun  ne 
fe  dr.it  point  complaire  le  contentant  de  fa 
pcrfjnne  ;  mas  puis  que  Dieu  nous  a  obligez 
lesvnsaux  autres,  que  nous  auifions  de  nous 
acquitter  enuers  no ,  pri.chains.En  quelle  for 
te  ?  Pour  les  édifier  en  bien,  dit  iaiuû  Paul; 
Or  il  y  en  a  bcn  peu  qui  prattiquent  ceftc  le- 
çon, mais  plulloft  thaciin  f  lafche  la  bride, 
Que  fi  nous  voyons  qu'on  foit  fcandalifé  en 


aa5 

nous,  voila  ce  qu'on  orra  ,  Ho»  ce  m'eft  tout 
vn.ie  ne  l'dy  point  fait  pour  mal,&  qu'on  s'en 
fcandalifé  ii  on  veut .  Mais  il  nous  faloit  ab- 
ftenir  de  toute  apparence  de  mal. Car  ce  n'cft 
point  afltz  que  noftre  confcicnce    foit  pure 
deuant  Dieu  ,  lînon  que  nous  cliions  toutes 
mauuaifes  occalîons  deuant  les  hommes,  cojn 
me  nous  leur  (ommesdetteurs.  Ainlidonques 
cheminons  en  telle  honefleté  qu'on  ne  puiflc 
foufpeçonncr  aucim  mal  de  nous  .  Et  com- 
bien que  fain^  Paul  s'addrefle  à  Timothee, 
fçachons  que  cela  appartient  à  tous  fidèles, 
&  que  chacun  en  doit  fane  fon  profit  feio^ 
fou  clhît  &:la  charge  qui  luy  cftcommifede 
Dieu.  Au  refte,  après  que  fainft  Paulanion- 
ftré  comme  Timothee  fe  doit'gouuerner,  ad- 
moneftant  ceux  qui  ont  .failli  ,  il  adioufte  va 
autre  aducrciilenient  quant  aux  vefues  ',  di- 
fant,  Qjt'il  honore  erlles  ^ui  fent  yr^yemcnt 
yefues.  Or  ce  mot  S  honorer,  emporte  qu'il  es. 
ait  le  foin  pour  les  prendre  en  fa  charge,  & 
comme  en  û  protcÛion.Et  ceci  notamment: 
efl  dit,  pource  que  les  vefues  qui  eltoyencdef' 
la  anciennes  (  comme  il  fera  déclaré  plus  1 
plein  )  cfloyent  receuescomme  à  l'hofpitaf, 
&  les  ncurnlloit-on.  Vray  efl  qu'elles  ne  laif 
foyent  pas  de  trauaiiJer:mais  s'il  y  auoit  quel 
que  indigence, cela  eftoit  fupporté  par  les  au- 
mofne^j&ceptndant  elles  eftoyentaufsi  pour 
Iciuir  aux  malades  :  brief,  celles  qui  eftoyent 
vefues, fc  dcdioyent  du  tout  pour  feruir  à  l'E- 
glife  ,  &  eftoyent  comme   perfonnes  publi- 
qiies,&en  portoycntaufi  le  nom,  qu'elles  c- 
ftoyentminifties.  Car  comme  les  hommes  e- 
ftoyent  pour  Jiftnbuer  les  aumofnes ,  &  les 
recueillir ,  les  vefi.es  eftoyent  pour  foulager 
les  malades ,  &  pour  faire  le  mefnage  entre 
les  pouresqui  eftoyent  ainfi  nom  ris  d'aumof 
nés  .'Or  d'autant  que  les  vefues  qui  eftoyent 
ainlî  receues  ,  eftoyent  en  quelque  honneur 
(  car  elles  eftoyent  conlàcrees  à  Dieu  )  fainél 
Paul  notamment  dit  à  Timothee, qu'il  ho- 
nore celles  quf  font  vrayement  vefues.  Or 
par  ce   mot  de    Vrayemtnt ,  il  fignifie  qu'il 
ne  taut  point  receuoir  toutes  velues  ,  com- 
me il  fera  déclaré  en  la  procédure  du  texte. 
Si  vne  vefue  (  dit-il  )  a  des  enfans  ,  qu'el- 
le demeure  en  fa  maifon  ,  &  que  les  enfans 
appienent    auec    les   vefues   de   faire   leur 
deuoir,&  de  rendre  la  pareille  à  ceux  qui 
les  ont  engendrez  :  car  cela  tft  bon  &  agréa- 
ble deuant  Dieu .  Et  puis  fainô  Paul  encores 
fpecifie  plus  clairement  quelles  vefues  doy- 
uent  cftre  receues  en  ceft  eftat,afçauoir,cel- 
les  qui  font  defolees,&  qui  n'ont  point  de  fe- 
cours  du  cofté  des  homes ,  que  celles-là  doy- 
ucnt  eftre  receues  pour  eftre  nourries.  Et  ce- 
pendant elles  s'employét  aufsi  à  feruir  les  po 
ures  :  mais  ii  y  a  fur  toutqu'encores  qu'vne 
vefue  foit  deiblee,  faindft  Paul  veut  qu'elle  fe 
attende  Sc  efpere  en  Dieu  :  car  cela  fera  pour 
tenir  les  vefues  en  bride, quand  elles  auront 
cfté  receues  en  l'Egluc ,  que  fi  elles  mettent 

E.uii. 


an  s  E  R  M  O 

ainfi  leur  efperance  en  Dieu ,  elles  ne  feront 
point  diuerties  ducollé  du  monde  :&  puis  il 
veut  qu'elles  foyent  permanentes  en  prières 
&oraifonf  nuiÛS:  iour.  Voila  en  fomme  ce 
cjue  fainct  Paul  a  voulu  ici  dire  .  Car  combien 
<jue  ci  apies  il  faudra  parler  plus  à  pkin  de 
ccll  ordre  des  velues  &  de  la  pohce  qui  tftoit 
en  PEglife  ancienne,  toutesfois  nouj  auonsà 
noter  pour  le  prel'ent,  qu'alors  il  y  a  eu  ce 
qu'auiourd'huy  nous  n'auons  pas.  Il  eft  vray 
qu'il  y  aura  entre  les  Clirelhens  quelques  ho- 
Ipitaux  ,  mais  la  chofc  tû  iî  maigre  que  c\ft 
pitié. Et  toutesfois  quand  on  voudra  faire  cô- 
paraiTjn  de  nollre  temps  à  celuydont  parle 
laind  Paul,  ie  vous  prie  ,  n'auons-nous  point 
meilleure  occalion  de  maintenir  ce  qu'il  or- 
donne ici. qu'ils  n'auoyét  de  ce  temps-la?  Car 
les  poures  Chreltien>  elloycnt  perlccutez,  ils 
auoyent  toulîours  le  coût  au  fur  la  gorge,  ils 
efloyent  expofez  en  proye,  ih  cftoycnt  com- 
me poures  vagabjns  n'ayans  rien  de  certain. 
Sidonques  on  fait  comparaifon  de  li  charité 
qui  eftoit  alors  auec  celle  d'auiourd'huy.no' 
deuons  auoir  grand'  honte.  Et  encore»  y  en  a 
il  qui  voudroyent  bien  que  les  liofpitaux  fuC- 
fent  appouris.&s'ii  ne  leur  confie  ricn:fi  eft- 
ce  qif ih  voudroyent  cncores  que  ctlafufta- 
neanti, qu'il  leur  fait  fi  mal  au  coeur, qu'il  leur 
femble  qu'on  leur  arrache  les  boyaux  quand 
on  donne  quelque  chofe  pour  la  nourriture 
des  poures.  Helas,  c'eft  bienaniere  que  tous 
les  lours  on  feifl  oblation  comme  de  ce  temps 
ia  il  fe  faifjit.  Il  n'y  auoit  pointj'de  rentes  ne 
de  poflefsions.il  n'y  auoit  rien  de  fondé.mais 
il  faloit  qu'au  iour  la  iournee  on  rccueilliil 
les  aumofnes  pour  nourrir  les  malades,  &  les 
jourcs,  &  les  vefues  :  tant  y  a  que  Dieu  y  be- 
îbngnoit,  &  les  fidèles  auoyent  en  eux  vne  tel 
Je  compafJon, qu'il  y  auoit  pour  fubueniraux 
pouretez  de  ceux  qui  ne  fe  pouuoyent  nour- 
lir.  Or  maintenant  que  d'ancienneté  il  y  aura 
des  reuenus,  il  y  aura  des  fondations  (  qu'on 
appelle)on  ne  demande  finon  à  retrancher,  & 
«lue  tout  cela  foit  raui  aux  poures ,  &  qu'on 
leur  ofte  le  pain  comme  de  la  bouche  ,  &.  que 
«e  qui  auoit  elle  dédié  à  Dieij,5c  qui  deuoit  e- 
ftre  tenu  pour  chofe  facreç, qu'on  le  profane, 
8;  qu'on  l'applique  à  des  vfages,ie  ne  di  point 
•liucrs  de  l'intention  de  Dieu,mais  qui  font  du 
tout  repugnans. Et  ainfi, toutes  fois  &quantes 
«ju'il  nias  eft  parlé  de  l'ordre  ancicr](comme 
fcinft  Paul  en  touche  ici  )  ce  font  autant  de 
condamnations  &  de  procès  pour  nous  ren- 
dre inexcufables.  Car  quîd  la  parolede  Dieu 
3  eu  {:i  vigueur, qu'a-on  fait  ?  Il  y  a  eu  dequoy 
nourrir  ceux  qui  cfloyent  en  indigence, il  y  a 
eu  quelque  police  ,  il  y  a  eu  gens  qui  fe  vou- 
loyent  bien  employer  au  feruice  des  poures, 
les  autres  n'ont  point  efpargné  leur  fubftan- 
ce:&  toutesfois  il  n'y  auoit  vn  ftuldenicr  de 
reucnu,  il  n'y  auoit  mille  maifon  finon  à  loa- 
gc.  Voila  donques  comme  Dieu  nous  propofe 
V»  miroir  aui^ucl  il  nous  faloic  conformer  .Or 


N     XXXVII. 

finousv«nons  regardera  nous ,c'efl tout  le 

contraire:car il  lemble  qu'on  ait  confpiréde 
faire  tout  au  rebours  de  ce  qrvi  a  eilé  obferué 
en  l'Eglife  ancienne  .N'tlt-ce  pas  donques 
autant  comme  fi  Dieu  nous  faifoit  noftre  pro 
ces  pour  nous  rendre  confus  ?  Mais  il  y  en  a 
bien  peu  qui  en  ibycnt  touchcz:Vtant  y  a  qu'il 
nous  coulîera  bien  cher,  quand  celt  ordre-ci 
nous  aura  cité  moultré,&  que  nous  n'en  au- 
rons tenu  conte  :  &  faudra  ,  puis  qu'auiour- 
d'huy nous  fommes  fi  ftupides.que  Dieu  nous 
refueille.  Et  mefines  nous  voyons  (  fans  aller 
plus  loin)  que  les  poures aueugles  &les  enne 
mis  de  la  vérité  nous  cond.uienf&Dieu  nous 
fait  celte  honte  de  les  cdftituer  nos  iiiges.  Les~ 
Papilles,  quand  ils'ji'ont  que  nous  reprocher 
pour  la  dodr-ne,  que  dirôt-ils  finon  que  nous 
auons  prins  l'Euaiigile  ,  afin  que  les  biens  de 
Eglife  tuffent  gourmandez  ,  &  que  les  hofpi- 
taux  fiiflent  en  pillage, &  que  tout  cela  foitdif 
fipé  ,&  qu'il  y  cuft  vn  mtfiiiige  tel  que  tout 
fuftperueiti  f  Voila  donques  ce  que  les  Papi- 
lles allèguent  pour  nous  ditFamer  .  Et  pour- 
qiioy?  si'autatque  nousne'l'ommes  pas  dignes 
d'cflre  rcdarguez  par  la  bouche  de  Dieu.  Car 
nous  ne  voulons  point  t  fcouter  ce  qui  eil  con 
tenu  en  l'Efcriturc  faincle,là  où  noftre  ofEce 
nous  tftdccl.ué,  nous  bouchons  les  aureilles, 
&faifjns  des  fourds  .Voila  pourquoy  Diew 
nou,s  enuoye  aux  incrédules ,  afin  que  nous 
foyons  condamnez  par  eux  à  noftre  plus  gran 
de  confufion.  Voila  donc  en  fomme  ce  que 
nous  auons  à  obferuer  en  ce  palTàc, e  :  &  non 
feulement  pourdemcurer  tels  que  nous  fom- 
mes,mais  pour  gtmir,  afin  de  remédier  aux  vi 
ces  qui  font  infupportables  .  Or  cependant  il 
nous  faut  noter  touchant  des  vefues  ,  qu'en 
partie  on  les  receuoit  ,  afin  qu'elles  hiffenr 
nourries  fi  elles  n'auoyent  point  dequoy,  &: 
en  partie  afin  qu'elles  s'appliqiiaiTent  au  fer- 
uice des  poures.  Et  pource  qu'en  s'appliquât 
à  cela, elles  eftoyent  au  fi-niice  cômun  de  l'E 
glife.c'eftoit  vn  eftat  faci é  &  honorable  .  Voi 
h  donc  ce  qu'il  nous  faut  retenir  en  premier 
lieu  pour  auoir  intelligence  de  ce  q  dit  fainèb 
Paul,&'  aufsipourcn  fçaaoir  faire  noftre  pro- 
fit.Et  mefmes  il  eft  bien  requis  q  nous  foyons 
admoneftez  de  ces  chofcs  ,  pouicc  que  Satan 
(ainli  qu'il  eftvn  fingequi  contrefait  touf- 
joursles  œuuresde  Dieu)  a  bafti  vne  façon 
nouuutlIe:voire,&  en  defguifint  ce  qui  eftoit 
inftitué  de  Dieu.toutestois  a  prins  fa  coiiuer- 
ture  de  ce  que  fainft  Paul  dit  en  ce  paflage: 
combien  qu'il  y  ait  autant  j dire  qu'entre  le 
iour  iScla  nuift.Car  les  nonniins  des  hofpitaux 
font  procedeesdece  qui  eft  ici  dit.  Mais  no- 
tamment fainft  Paul  ordonne  que  les  vefues 
ne  foyent  point  reccues  deuanr  l'aage  de  foi- 
xanteans  ,  &•  qu'elles  ayent  cfté  mariées  vne 
fois  tant  feulement, comme  nous  verrons.  Or 
puis  qu'ainfi  eft ,  que  fainft  Paul  a  eu  ce  re- 
gard,c'e.ft  bien  tout  l'oppofite  de  ce  qui  a  efté 
ainfi iuftitue par  les  ignoians,&  qu'auiour- 
d'huy 


SVR    LA   I.    A    TIMOTH. 


iij 


d'hiiy  on  obferue  en  la  Papauté. Et  voila  pour 
<)iioy  l'ay  dit,  qu'il  faut  que  nou".  foyon";  mu- 
nis,  quand  nous  cognoiffons  l'intention  de 
fainft  Paul,  pourappliquer  à  noftrc  in/liuftiô 
ce  qui  eiï  ici  contenu.  Or  venons  maintenant 
à  l'aduertiflcmcnt  qu'il  donne  à  Timothee: 
Honore  (  dit-il  )  Us  -vtfMS  qui  fnnt  -vriiytnitnt 
fefuet.tious  voyons  ici  qu'il  vtut  qu'on  face 
bonexamen  d'vne  perfonne  quand  il  e(i  que- 
ftion  de  la  mettre  en  office:  Se  c'eft  vnechofe 
bien  digne  d'eltre  obferuee.  Car  les  ertats, 
combien  qu'ils  concernent  la  police  des  hom 
mes,  toutesfoisiîdoyuent-ils  eftre  dédiez  i 
Dieu.Pourquoy?  Car  il  en  eiï  le  maiftre  fou- 
uerain,&  le  tout  fe  doit  aufsi  rapporter  à  luy. 
Quand  vn  prince  voudra  ordonner  (à  mai- 
fon.il  aura  en  grSd  maiftre  qui  fera  les  eflats. 
Or  Dieu  pour  nous  donner  meilleur  courage 
à  le  feruir,  ne  met  peint  feulement  ici  basvn 
grand  maiftre, mais  il  veut  auoir  le  loin  &  fo- 
licitude  de  tous  les  ellats  qu!  font  en  fon  E- 
glife  .  Ainfi  donc  notons  bien  que  quand  on 
doit  employer  quelque  perfonne  en  office,  & 
qu'il  eft  cboifi  à  cela. qu'il  faut  faire  examen, 
ou  on  profane  le  1  eu  nuquel  il  eft  conftitué. 
Et  celle  iniure-la  ne  fe  fait  point  aux  créatu- 
res ,  elle  fe  fa-t  à  Dieu  mefme  .  Dequoy  eft- 
ce  que  lâinft  Paul  pai  le  ici  ?  cVft  de  la  proui- 
fion  des  vefue'',lcfquelle';(comm''  nous  auons 
ditjdeuoyent  feruir  pour  penfer  les  malades, 
^'cependant  eftoyent  nourries  d'aumofnes. 
Or  (î  ainfi  eft  que  Timothee  foit  admoneftc 
de  ne  point  reccuoir  toute'^  les  v(  fues  qui  fe 
pouuoyerrt  prefenter,  .?,:  celles  aufsi  qui  n'e- 
ftoyent  point  dignes  d'cftre  reccues  en  ceft 
eftat.fînous  regardons  cefte  vocation  félon  1' 
apparence,Ia  chofc  n'eftpas  fort  grande:  que 
fèra-cedSc  des  offices  qui  fmt  beaucoup  pi' 
excellésjQuand  il  /êraqueftiô  de  choifîr  vn 
iôme  pouranoncepla  parole  de  Dieu, ie  vous 
prie,  quel  foin  8f  quelle  prudéce  doit-on  ici 
auoir  pour  ne  point  protancrlelîege  de  veri 
té?  Car  voifa  (  comme  nous  auons  veu  par  ci 
deuant)le"gounernement  &  régime  de  la  mai 
-fon  de  Dieu  qui  nous  eft  commis  ,  &  quant  & 
«^uant  nous  auons  K  porter  le  meflàge  de  fa- 
wt  aux  hommes,  le  tbrefor  de  ce  grand  my- 
ftere  nous  eft  commis  en  garde,c''eft  qucDieu 
efl  manifcfté  entre  les  hommes.  Ainîî  donc 
quand  il  eft  queftion  d'élire  des  Pafteurs  ,  ie 
vous  prie, ne  faut-il  point  vfer  d'vne  pruden- 
ce beaucoup  plus  grande  que  celle  qui  eft  ici 
requife  quant  aux  vefues  ?  Qjiç  nous  foyons 
donc  bien  auifez  en  ceft  endroit.  Car  R  vn  ho 
me  veut  auoirvn  f-ruitcur,  il  regardera  bien 
de  lechoiïïr  propre.&s'ilya  quelque  in.iuuai 
fê  tache,  iamais  on  ne  luy  pourra  perfuader 
qu'il  le  reçoyueen  (à  maifon.Ceftuy-la  cft-il 
yurongne?Ie  n'^ay  garde  de  m'en  charger.  Ce 
luy-la  eft-il  fufpeft  de  larcin?  cft-il  paref- 
içux?eft-illang3rd  ?  nous  l'çaurons  bipn  nous 
garder  de  tous  ces  vices  qui  nous  pourroyét 
porter  preiudice  &  dommage  ,cojnnie  nous 


fommes  addonnei  à  noftre  profft:&  pourtant 
noos  ne  voudrons  point  rc ceuoir  vn  feruiteur 
vicieux.Mefmcs  C  quelqu'vn  veut  prendre  vn 
bouuier  pour  fon  bcftail ,  encores  voudra-il 
qu'il  foit  diligent  ,&•  qu'il  y  ait  delà  preu- 
d'hômic.Or  fi  on  doit  choifir  vn  maiftre  pour 
gouuerncr  les  enfans ,  on  aura  moin-;  de  foin 
en  cela  fouuentesfois  qu'on  aura  point  d'vn 
berger  qfi-ra  pour  penfer  les  beftes.Et  qui  en 
eft  cauft?Vnaucug!cmét  brutalq  eft  entre  les 
hommes. Mais  encores  venons  plus  outre. S'il 
tftqueftion  dechoilîi  gens  qui  prefîdct  fur  la 
iofticc,&  qui  gouuernét  au  nom  de  Dieu,  non 
pas  feulement  les  petis  enfans, mais  les  grans, 
commet  y  procede-on?  On  n'y  penfegueres, 
comme  on  levoit,  &Iachofeeft  déplorable, 
qu'il  femb  le  qu'on  vueille  faire  deshonneur  à 
Dieu, en  profanât  ce  qu'il  auoit  lanûifié  pour 
noftre  falut.Car  ce  n'eft  que  toute  mocquerie 
auiourd'huy  quand  on  doit  mettre  gens  en  of 
j^ce.  On  regarde  feulement  à  la  cérémonie  & 
À  l'appareiîce,  comme  fi  on  vouloit  iouer  vne 
ftrce.Et  non  feulemét  cela, mais  il  feinble  que 
on  vueilleprouoquerla  vengeance  de  Dieu, 
mettant  gens  qui  foycnt  comme  choifis  pour 
les  plus  peruer*.  Voila  comme  on  fegouuer- 
ne  aux  eleftions.Brief.il  ne  fera  point  queftiô 
que  les  eftats  auiourd'huy  foyent  honorez, 
mais  ilnefcraqneftion  qne  de  pouffer  en  a— 
uant.  Et  quelles  gens  'Ceux  qui  nevaudront 
rfen,&  ne  font  pas  fenlemét  femblantd'eftre 
bons.  Car  pour  eftre  mieux  auancfz  ,  il  faudra 
qu'ils  fe  déclarent  ennemis  de  Dieu  ,  qs'ils 
foycnt  addonneï  à  toute  corruption  ,  qu'ils 
monftrcnt  qu'ils  vcu'ét  fupporter  trutes  mair 
uaifes  quereles,  qu'ils  ne  dcmâdent  fîncn  que 
tout  aille  en  confus.  Voila  ceux  qui  feront  e- 
leutzcn  crédit  &•  authoritc  .  D'autant  plus 
donc  nous  faut-il  noter  ce  pafïàge:  &  mefmes 
nous  auons  befoin  auiourd'huy  de  cefte  ad— 
monitiô:car  l'cleftion  s'approche  de  ceux  qui 
dovuent  cftre  eftablis  au  goiiuernement  de  ce 
fte  République. Or  ie  vous  prie, comment  pr» 
ccde-on  en  telle  eleclion?Car  ilne  faiit  poinr 
que  i'attende  à  Dimanche  prochain  pour  dire 
vnechofequi  eft  toute  manifefte.  Qjrand  il 
eft  queftion  d'élire  &  choifir  les  Magiftrats, 
on  deuroit  iftre  ici  pour  inuoquer  le  nom  de 
Dieu, afin  qu'il  prcfidaft  au  confeil  qu'il  don- 
naft  efprit  de  prudence  &dedr9inire.  Mais 
cepédant  où  fera-on?Auxtanernes,ouauieu,. 
&  ceux  qui  ont  voix  d'élire  ,  ce  font  ceux  qui 
fréquentent  moins  les  fermons  .  Il  eft  vray- 
qu'on  ne  les  verra  gueres  non  plus  venir  les 
autres  iour'  au  temple  :  cependant  ils  fe  pre- 
fcnteroni  les    premiers  au   confeil  rererali. 
&:  voudront  auoir  laplus  haute  voix  ,  enco- 
res qu'ils  n'aycnt  monftré  en  toute  'eur  vie 
aucun  figne  de  Chreftienté    Cependant  c'elF 
alors  qu'ils  ie  de^borderont  le  plus,  &:  qu'il  y 
aura  plus  grand defordre.  Caren  vn  t  liour 
on  les  verra  venir  auf  c  vne  impudence  vilai- 
ne, &  feront  par  bandes  cerne  s'ils  rouloyenr 

F.i. 


^Jk 


2irr  SERMON 

faiie  leurs  monftres.Et  d'où  fortent-iU?D'vn 
cabiret.aii  lieu  qu'ils  deuroycnt  citrc  ici  pour 
jnuoquer  le  nom  de-  Dieu,  5r  pour  regarder  en 
eux-mefme5,Or  ç.a,ftous  auons  auiojrd'huv  à 
eltregens  quidomiuentau  nom  de  Dieu:maiv 
iln'eft  point  qucftion  de  les  choiiir  à  naître 
appétit, d'autant  qu'ilçdoyuét  ici  prclidcr  en 
Paiithorité  de  Dicu-Gaidôs  bien  donqucs  d'y 
mettre  gens  iinon  qu'ihayent  celle  atFedion 
&;  ce  zèle  de  dominer  en  telle  forte  que  Dieu 
foit  lerui,  &  qu'il  ait  touliours  f jn  degrt  j'ou- 
ueraiii  &:  Ion  empire,  ik  que  graus  &:  petis  Kiy 
facent  hômage.Et  puis  cliacuu  en  Ion  particu 
lier  doit  penfcr  ainiî.Or  ça,ie  doy  clire  vn  hô 
me  qui  aura  puillance  fur  ma  vie,  il  doit  gou- 
uerner  la  luftice  :  &  quand  tout  fera  à  repos 
chacun  aura  ce  qui  luy  appartient  :  voire  s'il 
plaift à  Dieu qie  nouç  foyons  entretenus  fous 
la  protecHon  &  ombre  de  iuJlice  ,  &  qu'il  ne 
permette  point  que  nous  foyons  comme  de? 
belles  lauuages.  Voila  (  di-ie  )  à  quoy  on  de- 
uroit  penfer.Mais  le  fait-onrNenni.Et  il  faut 
auf>i  qu'on  remporte  tel  falairc  qu'on  l'a  me- 
nte.En  fonime.coinbicn  que  lacliole  meritc- 
roit  qu'il  en  hifldit  d'auantage,  retenons  que 
quand  il  eft  queftion  d'ordonner  gens  en  que! 
queeftat  que  Dieu  ait  conlliriié  enfon  Eglil'e 
pour  le  bien  commun,  qu'il  faut  c.vammcr  les 
perfonnes:&ii  or»  ne  le  fait,  &: qu'on  profane 
les  chofes  fainâ:es ,  qu'on  defpite  Dieu  :  fça- 
chons  que  cefte  conhifion  rcuicndra  fur  la  te- 
ûe  de  ceux  qui  aurôt  par  fiueur  5i  corruptiô, 
ou  par  quelque  autre  regard  voulu  auancer 
ceux  que  bon  leur  fcmble,  Se  que  leur  appétit 
porte.  Ainlî  donc  apprenons  de  nous  condui- 
re tellement  quand  il  eft  queftion  de  mettre 
ordre  en  l'Eglife  de  Dieu, qu'il  n'y  ait  nul  of- 
fice contaminé  par  des  perfonnes  vileines ,  & 
qui  font  indignes  de  l'hôiieur  qu'on  leur  pro- 
cure .  Car  fi  cela  doit  eflre  obierué  aux  plus 
petis  eftats  (comme  fainû  Paul  nous  monftre 
en  ce  partage)  quand  nous  venons  aux  plus 
grans  ,  que  nous  en  ayons  plus  grand  foin  & 
îolicitude:&  quand  nous  en  ferons  ainlî,  il  elt 
certain  <pe  Dieu  nous  bénira,  &  môitrera  que 


X  X  X  V  1 1. 

il  domine  entre  nous.&donnerafon  Efprit  i 
ceux  qui  font  conftitucz  en  charge  pour  les 
conduire  à  exercer  ce  qui  eft  de  leur  ofhce:5c 
ainlî  nous  fentirons  fa  vertu  telle  entre  nous, 
qn'vn  chacun  aura  occalîon  de  s'elîouir  en 
fon  particulier,  &:  tous  en  commun  de  rendre 
aftions  de  grâces  à  ce  bon  Dieu, quand  il  nous 
aura  lî  bien  pourueus.  Mais  quand  nous  vou- 
drons psurluyure  ce  que  nous  auons  commen 
cé.c'ert  afçuioir  de  s'ctforccrde  mettre  con- 
fiillon  en  l'Egliie  de  Dieu,  il  nous  raonftrera 
qu'il  peut  bicu  départir  du  milieu  de  nous, co- 
rne il  nous  aura  fait  la  grâce  d'y  relider  pour 
vn  temps. Car  li  fa  gloire  eft  départie  du  tem- 
ple de  ferulalem, comme  il  le  monftrcau  Pro 
phete  Ezcchiel,&que  le  temple  qu'il  auoitap 
pelé  la  inaifon&  fon  repos  éternel  ,ait  efté 
vuide  de  ù  grâce  ,  &  que  ce  loit  efté  vn  lieu 
profane  ,  notons  qu'auiourd'huy  quand  nous 
ne  pourrons  j'outrnr  que  Dieu  domine  au  mi- 
lieu de  nous,5c  qu'il  nous  done  gens  qui  foyéc 
pour  nous  conduire  enta  crainte,  mais  que 
nous  voudrons  auoir  gens  dcsbaucJicz  qui  ne 
fe  foucicront  gueres  ne  de  Dieu  ne  de  noftre 
(alut, qu'il  nous  pourra  bien  accorder  nos  fou 
haits ,  mais  ce  fera  pour  nous  monitrer  que 
nous  ne  fommes  pas  dignes  d'cftre  gouuer- 
nez  de  luy  .Et  quand  il  nousauraainlîdelaif- 
fcz,  que  pourrons -nous  deuenir  ;  Ainlî  donc 
penfons  de  près  à  nous ,  &  que  nous  prions 
Diciigu'il  luy  plaife  nous  fufcitergens  auf- 
quels  il  donne  fon  fainftElprit,  &lefquclsa- 
uec  prudence  ayent  ce  zelc  &  afFcÛion  de 
nous  gouuerner  en  forte  que  le  tout  le  rap- 
porte à  luy,&:  qu'ils  lacent  fur  tout  qu'il  foie 
feriii  &  honoré  entre  nous. 

O  R  nous-nous  profterncrons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes  ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les 
pardonner, &:  en  abolir  la  mémoire, &  d'orcf- 
enauant  nous  reformer  en  telle  forte  que  no* 
ne  demandions  iînondc  nous  conformer  du 
tout  à  fes  fainfts  commandemcns.  Ainlî  nous 
dirons  tous, Dieu  tout-puiffant,  Peic  ccltfte, 
&c. 


SECOND     SERMON     S  V  R     LE 

C  I  N  Ci_V  lEMECHAPlTRE. 

4  Maisfi  (Quelque  vefue  a  des  cnfans,  ou  des  fjcueux,  qu  ils  ap- 
prenent  premièrement  à  monsirer  leur  pieté  enuers  leur  propre  mai- 
fin,  (f  à  rendre  la  pareille  a  leurs  parens  :  car  cela  ejî  bon  (y  agréable 
deua?7tDieu. 

5  Celle  qui ejl  vraycment  \efue,  (^  dclaijfcc feule ,  a  efpcrance 
en  Dieu,  ç^  ejl  permanente  en  prières  ç^  ^raijons  nui^  c;^  iour,nîais 
celle  qui  ejl  en  délice  s, en  \iuant  cjî  morte. 

Nouî 


s  VR     L  A     I.     A     T  IMOTH. 


Ous  i'ç.iuons  quelle  e/lTin- 
t(.-nt:On  de  faiati  P^ul  en 
ce  pair-.ijt,  c\ft  (jiie  !a  po- 
lice <jtii  eltoit  bon  ne  &  fain 
tte.tiill  niaintcii'.ie,  .S:  c|irel 
le  j'oblenia/l  toiiliuiirs  : 
c'ell  afçauoir,  qu'en  rice- 
uant  les  vêtues  pour  tlhe  nourries  aux  dtl- 
pens  communs .  iScaufii  pour  feruir  aux  po- 
ures, qu'on  eull  t.'gard  à  et  lies  qu:  en  eftoycnt 
digues.  Or  maintenant  làuitt  Paul  dit  en  pre- 
mier lieu  ,  Q^if/T  ^«f/</«f -v(/7(f  4  Jet  eiif.:ns, 
il  faut  qu'elle  commence  pariamailon  pour 
nioiiftrer  comme  elle  a  la  crainte  de  Dieu  ,  & 
ou'ence  failant  elle  rende  la  pareille  à  ctux 
oui  Pont  mile  au  monde  .  Car  il  faut  que  le 
genre  liumain  s'entretiene  par  ce  moyen, que 
coût  ainli  que  nous  auons  elle  nourris  par  nos 
pères  &  mères,  nous  facions  le  feniblable  en- 
aers  ceux  que  Dieu  nous  donne ,  &  qu'il  nous 
commet  en  charge  .  Et  pource  que  nous  ne 
pouuons  pas  rendre  la  pareille  à  nos  ance- 
îtrcs  en  leurs  ptrfonnes,que  nous  la  rendions 
à  ceux  qui  font  dcfcendus  de  leur  race  .  Mais 
pour  mieux  comprendre  la  dodrine  de  faiiift 
Paul,  notons  quand  il  parle  ici  d'excrar  lieté, 
que  c'cfl  d'autant  que  fous  ombre  de  la  crain- 
te de  Dieu  ,  &de  quelque  deuoiion,  plulKurs 
vefues  Ce  pouuoyent  exempter  de  leurs  char- 
ges domeftiques'  comme  nous  voyons  que  les 
moines,  quand  ils  fe  fourrent  en  vn  cloiftre, 
diront  bien  que  leur  intention  eft  de  iVruir 
Dieu,  &  mener  vue  vie  fpintuclie  :  mais  ce- 
pendant ils  font  priuilegcz  de  ne  rien  faire, 
&  font  exemptez  de  tout  bien, comme  on  dit. 
Voila  comme  il  en  pouuoitaduenir  à  des  vef- 
ues.Et  pourtant  fainet  Paul  dit  qu'elles  appre 
nentquc  c'ill d'txercer  p^eté  ,  &d'auoir  vne 
vraye  religion  &  droite  enueis  leur  famille. 
Pourquoyril  tft  vray  que  ce  mot  de  P.Vtr,  li- 
gnifie proprement  le  feuiicedc  Dieu  .  Car  la 
religion  aufsi  fe  rapporte  à  cela  .  Q_u'eft-ce 
que  religion?  (non  pas  comme  on  le  prend  en 
la  Papauté,  mais  en  fon  fins  naturel  )  C'tft  la 
reuercnce  que  nousdeuonsà  Ditu  pour  ertrc 
du  tout  fiiicts  à  fa  parole,  pour  l'honorer  coin 
me  il  le  demande,  pour  l'inuoquer,  pour  nous 
dcdicr  à  fon  obcidance.Mais  cepembnt  pour 
ce  que  Dieu  veut  efprouucr  le  feiuice  &  l'hon 
Fieur  que  nous  luydeuons ,  il  nous  rciuioye  à 
père  &  àmerc:  car  ccux-la  rcprcf  nttnt  û 
perfonnc.Ainfi  donc  il  y  a  vne  efpecc  de  pie- 
té quand  les  enfans  honorcn  t  perc  &  mère,  & 
qu'aufsi  les  peies  reprefentent  la  perfonne 
de  Dieu  enuers  leurs  enfans  ,&:  qu'ils  font 
leur  office.  Voila  donc  pourquoy  fainft  Paul 
dit  qu'il  ne  faut  point  qu'on  prene  cefte  cou- 
uerture  de  pieté  ou  deuotion  quand  on  fe 
veut  exempter  des  offices  que  Dieu  nous  en- 
ioint,&  qu'il  veut  &  ordonne.  Car  c'eTl  pluf 
toù.  renuerfer  toute  re]igion|,  &  abufer  fauf- 
fement  du  nom  de  Dieu.  Voila  leiîmple  fcris 
à.eùisx£t  Paul,  &  le  but  aufsi  où  il  tend.  Pat 


227 

cela  nous  fommesadmoneftcz  (comme  il  Icra 
cncorts  derechef  tantoftcxpofc  plus  à  plein) 
de  ne  feruir  Dieu  à  noilre  faiitalie  en  inefpii- 
fant  les  chofes  aufqiiellcs  il  veut   que  nous 
foyons  comme  attachez.  Voila  Dieu  qui  or- 
donne qu'vn  enfant  loit  luict  à  fon  ptie,oue 
vnpcre  aufsi  ait  le  foin  de  nourrir  fes  en- 
fans, iX;  les  tenir  en  crainte  ,  &  en  bonne  foli- 
citudc.  Si  (bus  ombre  de  feruir  Dieu  ,  le  père 
ne  tient  conte  de  fes  enfans ,  &  que  l'enfant 
aul"si  reiette  fon  père,  il  tft  certain  qu'ils  fal- 
sifient la  religion.  Et  pourtat  nous  auons  à  re- 
cueillir vne  bonne  doctrine  de  ce  palîàge  de 
fainit  Paul,  c'cJl  que  pour  bien  feruir  à  Dieu, 
nous  auiliôs  d'appliquernoftre  tfludc  à  ce  que 
il  requiert  de  nous.côbien  que  cela  fera  quel- 
quefois mcfprifédu  monde. Car  nous  fçauonç 
que  Dieu  ne  peut  rien  rtceuoirdc  nos  mains: 
&qu'ell-cc  que  nous  luy  pouuons  apporter? 
quel  profit  aura-il  de  nous  ?  Puis  qu'ainfi  eft, 
notés  bien  qu'il  nous  faut  employer  .1  ce  que 
il  nous  mcnflre  :  car  c'cfl  là  où  il  veut  efprou 
uer  fi  nou;  le  craignons ,  &  fi  nous  fouîmes 
prelhdeluy  rendre  obeillànee.  Celuy  donc 
qui  ne  tient  conte  de  faire  fon  office  cnuers 
fes  prochains  ,  monllrc  qu'il  n'a  nulle  crainte 
de  Dicu.Qrand  ilkuibieia  tfirc  tout  confiû 
en  bon  zelc,  il  n'y  aura  que  vanité  &  hypo- 
crifie.  Et  pourquoy  ?  c''eû  la  vraye  touche  ou 
Dieu  examine  fes  feruiteurs  ,  quand  ils  s'em- 
ployent  à  bonne  choie  ,  &  qu'ils  s'eftudient  à 
faire  leur  dcuo:r  enuers  leurs  prochains.  Ce- 
ci feracncores  plus  facilement  entendu  par 
cxeinples,&:  ne  faut  point  aller  plus  loin,qu'i 
ce  que  nous  auons  délia  touché.  Voila  en  la 
Papauté  ceux  qui  voudront  élire  les  plus  ex- 
cellent en  toute  fainiîteté,  barboteront  beau- 
coup. Voila  des  amufe-fols  pour  tout  potage: 
car  ils  ne  font  que  badiner  .cuidans  feruir  à 
Dieu .  Mais  encores  prenons  le  cas  que  ce 
qu'on  appelle  feruiee  de  Dieu  en  la  Papau- 
té, ne  full:  point  vicieux  ne  corrompu  ,  qu'il 
n'y  cuft  ne  lupcrftition  ni  abus, tant  y  a  enco- 
res que  les  Papiftes  ne  font  que  battie  l'eau 
quand  ils  s'arrcftcnt  &•  s'amufent  du  tout  à 
leurs  cérémonies.  Et  pourquoy  ?  Car,  cepen- 
dant iU  me^prifent  ce  que  Dieu  auoir  ordon- 
né ,  &  chacun  placqutra  la  charge  que  D.iu 
luy  auoit  inife  iur  les  cfpaules.  Voila  le  lousr 
que  nous  dtuons  receuoir  qui  eft  conuerti  en 
fupciltition  :&  cependant  nous  ne  voulons 
elhe  nullement  fuiets  à  Dieu  ,  combien  que 
nous  facions  feniblant  de  luy  vouloir  obéir. 
Or  quand  les  hommes  &  les  femmes  auront 
bien  fait  des  bigots  ,  &:  que  cependant  ils  ne 
tiendront  conte  de  s'acquitter  de  leur  charge 
&de  leur  vocation  ,  penfons-nous  que  Dieu 
accepte  rien  de  tout  cela  ?  Nenni .  Aiiifi  don- 
ques  notons  bien  que  pour  approuucr  po- 
ftre  pieté  ,c'efl  à  dire,  pour  monllrer  à  bon 
efcicnt&fans  feiutifequc  nous  rafcJions  de 
feruir  à  Dieu  ,  qu'il  nous  faut  employer  à  ce 
qu'il  nous  commande  .  Si  on  dit,  Ho  ,  quand 

F.ii. 


ftlS 


SERMON      XXXV111. 


nom  tafchoms  de  bien  faire  aux  hommes.ccla 
eft  feruir  à  Dieu.  Ouy  ,  moyennant  que  nous 
(çndions  à  cefte  fin.   Car  vn  homme  pourra 
bien  trauiiller  pour  nourrir  fes  enfans.la  ftm 
me  aufii  de  fon  collé  tera  Ion  deuoir,  &  Dieu 
s'acceptera  rien  de  tout  cela.  Voire, fiiion  que 
ils  ayét  ce  regard,  Voici  Dieu  qui  veut  efpioei 
ueriioftre  obeifiance  quand  il  nous  a  donné 
deientans  ,  qu'il  nous  a  commandé  de  les  in- 
ftruirecn  fa  crainte,  d'en  auoir  le  foin,  d'en 
porter  la  tafchcrie  qui  nous  en  reuient.  Car 
puis  quec'cll  vn  iacritice  agrcâblc  à  Dieu,  il 
nous  faut  ici  appliquer  toutes  nos  vertus.  Si 
rhomme  &  la  femme  n'ont  ce  regard -la, il  eft 
certain  que  tout  ce  qu'ils  feront, ne  fera  point 
vn  feruice  de  Dieu  ni  approbation  de  leur  pie 
tc.-niais  quand  ils  fuyuront  cefte  doftrir.e-ci, 
ce  feront  autant  de  facrifices  qu'ils  offrent  à 
Dieu  que  ce  qu'ils  feront  fcJoii  fa  parole,  &: 
ce  qui  eft  de  la  vocation  de  chacun  en  parti- 
culier. Voila  donques  ce  que  fainft  Paul  a  en- 
tendu. Or  maintenant  iladiuiiflc  pour  conftr 
mer  tant  mieux  fon  dire  ,  que  cela  e(i  bon  çy 
agréable  a  Vi'U.  Voire, comme  s'il  difoit  qu'il 
y  a  vne  conf orniitc  entre  la  Loy  de  Dieu  & 
l'ordre  de  nature  qui  eftengrauc  en  tous  hom 
mes.  Deiîa  nous  donnons  ccft  examen  quand 
il  nous  eft  dit,  que  il  chacun  fe  veut  acquitter 
de  fon  deuoir  ,  il  taut  qu'il  rende  la  pareille  à 
fes  anceftres  quand  il  fera  fidèle  enuers  fa 
maifoncmais  cefera  pcudechofe  quand  nous 
tiendrons  cefte  honneftcté-la,&:  que  nous  ta- 
fcherons  de  faire  ce  qui  eft  de  noftre  office 
enuers  les  hommes  ,  &  cependant  que  Dieu 
foit  mis  en  oubli.  Saindl  Paul  donc  non  fans 
caufe  nous  ramené  ici  au  principal ,  &  nous 
moiiftre  que  tout  ainll  que  ceux  qui  reiettcnt 
leur  famille,  &  n'en  ont  nul  foin  ,  font  piresq 
incredules:aiif  iau  contraire  que  ceux  qui  ta- 
fchent  de  s'acquitter  ,  &  s'employent  fidèle- 
ment ,  non  feulement  doyuent  eftre  approu- 
uez  des  hommes,  mais  que  Dieu  aufsi  accepte 
leur  feruice.  Nous  voyons  donc  maintenant 
outlleeft  l'intention  de  fainft  Paul ,  c'tfta- 
içauoir   de  monftrer  qu'en  fuyuant  l'ordre 
naturel  auquel  chacun  de  nous  doit  eftre  en- 
clin, encores  que  nous  n'enflions  n'Efcriture 
ne  Loy, toute  fuis  qu'outre  ce  que  cefte  hon- 
nefteréeft  louable, &  qu'elle  mérite  aufsi  d'e- 
ftreprifee  deuant  les  hommes ,  que  nous  de- 
uons  eftre  efmcus  d'autant  que  Dieu  accepte 
vn  tel  Icruice  ,  Se  qu'iirapprouuc.  Or  nous  a- 
uonsà  recueillir  de  ce  paflage  vne  bonne  do- 
ânne  8c  vtile  ■■  c'eft  qu'il  n'y  a  rien  qui  nous 
doyueplus  inciter  à  taire  noftre  deuoir  ,  que 
quand  il  nous  eft  dit  que  cela  eft  plailant  à 
Dieu.  Car  nous  denrions  auoir  grand' honte, 
Veu  que  Dieu  nous  faitceft  honneur  de  rcce- 
U)ir  cequi  procède  de  nos  mains  ,  &  déclarer 
que  cela  luy  plaift,  &  cependant  que  nous  foy 
ons  lafches.  Car  regardons  qui  nous  fem- 
mes Se  ce  que  nouï  pouiions  faire.   Htlas, 
Boùi  fjmines  créatures  tant  inutiles  que  c'cft 


pi  tié.'Il  eft  vray  que  quât  au  mal  no»  ne  fom- 
mes  que  trop  habiles,  &  chacun  trouueraaf- 
fez  de  moyen  de  faillir  &  d'otfenfer  Dieu: 
mais  quant  au  bien  ,  il  eftimpoAible  d'en  ti- 
rer vne  feule  goutte  de  no',  finon  que  Dieu 
l'y  mette.  Et  puis  encores  qu'il  nous  gouuer 
ne  par  (on  fainft  Efprit  ,  &  qu'il  nous  donne 
affeâion  de  bien  faire  ,  toutesfois  il  y  a  tant 
d'infinnitcz  que  c'eft  pitié,&  toulîours  la  bon 
ne  afFeftion  &  le  zelc  que  nous  auôs  de  feruir 
Dieu, fera  meflé  parmi  beauc  oup  d'empefche 
mes, en  forte  que  tout  ce  qui  procède  de  nous 
fera  comme  fouillé.  Mais  quoy  qu'il  en  foit. 
Dieu  ne  laiflè  point  d'accepter  ce  que  nous 
luy  deuons ,  voire  d'vne  pure  gratuité  :  non 
pas  que  nous  le  méritions,  ne  que  nos  œuures 
foyent  dignes  d'eftre  ainfi  receucs  de  luy. 
Quand  donc  nous  oyons  que  Dieu  de  fa  pu- 
re &  libérale  volonté  nous  fait  ccft  honneur 
de  receuoir  ce  qui  procède  de  nous  corne  vn 
feruice  bon  &  laintî,  n'y  deuons-nous  pas  e- 
ftre  bien  affirtiénez?  chacun  ne  doit-il  point 
s'efforcer  tant  qu'il  luy  fera  poAible  de  fai- 
re chofe  que 'Dieu  accepte  ,  &  qui  luy  foita- 
grcable?Atnlî  donc  noté';  toutes  fois  &  qiian 
tes  que  l'Efcriture  nous  déclare  que  Dieu  ac 
ceptenos  fcruices ,  que  c'eft  pour  nous  faire 
hôte,finon  que  nous  loyons  cnfllmcz  à  appti 
quer  toute  noftre  eftude  pour  faire  ce   qu'il 
requiert  denous,(Sc  pour  nous-  efforcer  telle- 
ment que  nous  tafchions  d'v  employer  tou- 
tes nos  vertus.  Voila  pour  vn  itéra.  Et  cepen 
dant  aufsi  notés  que  c'eft  la  vraye  règle  pour 
cognoiftre  ce  qui  eft  bon, de  recourir  à  la  vo- 
lonté de  Dieu.  Comment  donc  fçaurôs-nous 
qu'vne  chofe  eft  iouablcîSi  Dieu  l'approuue. 
Âinfî  que  la  volonté  de  Dieu  nous  foit  pour 
toute  raifon  &:  fagcfll-,&  que  nous  appreniés 
que  ccn'eft  point  fans  caufe  qu'il  eft  dit,  que  i.Samu. 
obeifiance  vaut  mieux  que  facnfice.  Car  voi-  if.it, 
la  aufsi  en  quoy  Dieu  eft  prifé&  honoré, c'eft 
que  nous  fçachions  que  de  nou>  afluiettir  à 
luy  ,  c'eft  la  plus  grande  perfeûion  que  nous    ' 
puifsions  auoir  :  qu'il  ne  faut  point  que  les 
hommes  inuentent  ne  ceci,  ne  cela ,  ou  qu'ils 
"regardent  ce  qui  fera  trouué  bon  pour  auoir 
bruit  &  réputation  deuant  le  monde, mais  feu 
lemcnt  qu'ils  tafchent  de  complaire  à  Dieu, 
&  de  fe  ranger  à  fon  obeiflànce.  Voila  en  fé- 
cond lieu  ce  que  nous  auôs  à  recueillir  de  ce 
paftàqe,  quand  fainil  Paul,  pour  monftrer  ce 
qui  eft  bon, dit  que  Vieu  i^.iccel>te.O:  il  .idiou 
ftc  quant  &  quant  pour  plus  ample  déclara- 
tion de  fon  dire  ,  que  celle  tjni  efl  ■vr.tyement 
■vefue  O-  (iefo!ee,ifpere  en  Dieu,<0'  continue  tn 
prières  c  nra'fiitinHit  Cr  "''"■•   1^'  fainiit  Paul 
n'entend  pas  que  toutes  vt  hies  ne  doiiient  c- 
ftrc  fidèle'  &•  auoir  efperance  en  Dieu, mais  il 
marque  celles  qui  font  du  rang  duquel  nous 
auô'  pailcce  matin  :  comme  s'il  diloit  qu'on 
ne  doit  point  clne  toutf  s  celles  qui  fe  prtfen 
tent  ,  mai'  qu'on  doit  choiiiraucc  difcrction 
celles  qui  fontproprcs  pi.urfciuir  àl'Efj/ifc. 

Or  en 


SVR   LA    I.    A    TIMOTH. 


iiî) 


Or  en  qinoy  les  pourra-on  cognoiftre  ?  quelle 
en  feralamârque?Ila<iioufte,  qu'elles  foyent 
deftituee^  du  coilé  des  hommes, &  qu'elles  e- 
fperent  en  Dieu,&  qu'elles  s'addénent  à  priè- 
res &oraifons.  Puis  que  nous  auons  Tinten- 
tion  defainft  Paul.maintenît  tirons  ladoftri- 
ne  que  nous  dcuons  recueillir  Je  ce  paiTàge. 
Quand  il  dit,Qu_{ celle  qiti  efl  trayemet  -vtfue 
tCr  (lefotee,eJpere  en  Dieu  ,  il  n'entend  pas  que 
les  femmes  mariées  ne  doyuent  aulsi  efpercr 
en  Dieu,&  les  hommes  mariez  aufsi  bien. Car 
ceux  qui  ont  des  enfans.li  ccux-la  fe  doyuent 
fonder  fur  leurs  enfans  &  s'y  arreflcr,  où  fe- 
_.  „  râ-cealler?Il  eft dit  que  Dieu  beneit  ceux  auf 
•'  ■  *  quels  il  donne  des  cnfans:lemariage  aufsi  eft 
vne  iîngulicre  bencdiâiondeluy.  Orlijnous 
eftions» diftraits  parle  mariage  d'efpereren 
Dieu, ou  feroit-ce  allerîlàinft  Paul  donc  n'en 
tend  pa';  que  ceux  qui  font  mariez -foyent  em- 
pefchfz  d'auoir  vne  vraye  foy  en  Dieu  ,  &  de 
y'appuYer  en  fa  bonté. Il  n'entend  pasau{si  de 
mettre  vne  telle  barre  qu'ils  ne  face't  ne  prie 
res  ni  oraifons,maisc5mcau  7.de  la  premiè- 
re aux  Corinthiens  il  dit ,  qu'vn  homme  veuf 
ha  plus  de  loifir  de  vacqneràDieu,&  qu'il  n'ha 
point  beaucoup  d'cmpcfchement ,  comme  le 
mariage  le  porte  ,  &  la  folicitude  qu'on  peut 
auoir  des  enfans:  aufsi  en  ce  paflàge  il  dit.que 
la  temrae  vefue  fera  plus  induite  à  efperer  en 
Dieu  quand'elle  n'ha  ni  appuy  ni  fupport  du 
coftédes  hommes  ,  qu'elle  cft  du  tout  comme 
abandonnée  :  que  (î  elle  regarde  de  tous  co- 
ftez.il  n'y  a  perfonne  qui  luy  tende  la  main, il 
n'y  a  perfonne  qui  s'en  approche.  Qnand 
donc  vne  femme  fe  verra  ainlî  deftituec.fainft 
Paul  dit  qu'elle  ha  plus  d'occafion  d'efperer 
en  Dieu.  Or  ceci  ne  fe  doit  point  appliquer 
feulement  aux  femmes  vefues,mais  en  gênerai 
nous  auons  à  recueillir  doftrine, que  fi.15  que 
nous  fommes  deftituez  de  moyens  humains, 
nous  deuonieltre  tant  plus  incitez  à  chercher 
Dieu,  &  à  nous  remettre  du  tout  à  luy.  Il  eft 
vray  que  fi  Dieu  nous  donne  des  moyens,que 
les  hommes  nous  fauorifent,&  que  nous  foy- 
ons  fécourus  par  eux, mal-heur  fur  nous  &  fur 
noftre  ingratitude  fi  nous  ne  cognoifTons  que 
tout  cela  procède  de  Dieu  ,  afin  de  toufiours 
regarder  à  luy:mais  fi  nous  ne  fommes  fuppor 
»  tez  en  ce  monde  ,  &  n'y  trouuons  faueur  & 
aide,fieft-ceque  nous  ne  fonimcs  pas  tat  prcf 
fez  ,  qu'il  ne  faille  que  nous  tendions  à  Dieu 
de  tout  noftrecourage.Pour  ceftecaufedonc 
il  eft  dit, que  fi  noftre  Seigneur  nous  coupe  la 
broche,  &  que  nous  n'ayons  plusd'attenteau 
monde,  qucc'eftafin  de  nous  mieux  retirer  à 
foYiqund  il  nous  dcfpouilleainfi  de  tout  moy 
en.  Pourquoy?  D'autant  que  nous  ne  venons 
iamais  à  luy  q  par  côtrainte.Mais  pour  mieux 
faire  noftie  profit  de  cefte  dodrine  .notons 
en  premier  lieu  qu'ici  noftre  ingratitude  nous 
eft  reprochée.  Car  iî  nous  faifons  noftre  pro- 
fit corne  il  appartient  des  aides  que  Dieu  nous 
met  en  main  ,  félon  que  nous  fommes  fccou- 


vus  des  hommes, nous  deurions  toufiours  eftrc 
confermez  tant  plus  en  fa  bonté.  Voici  mon 
Dieu  qui  me  dÔne  fecours  de  là  où  ie  ne  l'euf- 
fe  point  attendu  Car  tout  le  bien  que  les  hom 
mes  me  font.proccdede  liy.  Nous  dcuons 
donc  eftre  confermez  tn  la  bonté  de  Dieu 
pour  nous  fier  tant  mieux  en  luy,&: j)our  per- 
fifter  à  Pinucquerr&deuons  tant  plus  cftie  cf- 
meus  à  luy  rencireaftionde  graces.Ortoutau 
contrair  e , voila  comme  vn  voile  qui  nous  eft 
mis  deuant  ici  yeux  ,  tellement  que  nous  ne 
regardons  plus  à  Dieu ,  mais  nous  chcrcbons 
les  hommes, &  fommes  là  comme  enyurez  ,  & 
nous  femblc  que  nous  pouuons  bien  mettre 
noftre  appuy  en  eux. Nous  voyon.s  donc  coin 
me  Dieu  ici  déclare  noftre  ingratitude  .d'au- 
tant que  nous  abufons- des  grâces  qu'il  nous 
élargit  par  la  i\\»in  &  par  le  moyen  des  hooi- 
mes.Or  voyarts  cela, qu'auons- nous  à  faire  fi- 
non  de  nous  foliciter  puis  que  cemaleften 
nous,  &  que  Dieu  le  cond.nmne  ,  &  qu'il  n'eft: 
point  aufbi  ftipportable?  Ne  faut-il  pas  que 
chacun  foit  vigiIant?Q_uanddonc  nous  auons 
faueur  en  ce  monde,  que  nous  fommes  aimet, 
quenous  auons  beaucoup  de  moyens  que  no«s 
auons  des  amis  qui  demandent  ée  s'employer 
pour  nous, vtiIJonsde  peur  que  Satan  ne  noue 
esblouifle,&  qu'il  ne  nous  deftouméde  Dietr, 
attendu  que  nous  y  fommes  tant  enclins ,  &: 
que  noftre  ingratitude  nous  tire  U:craignonr 
de  mettre  Dieu  en  oubli  quand  il  fe  monftre 
ainfi  libéral  enutrsnous ,  que  de  nous  prefter 
les  hommes  qui  nous  fouftienent&  fauori.« 
fent,  mais  pluftoft, prénom  occafion  de  luy 
rendre  grâces  de  fabonté,&que  nous  foy  ons 
toufiours  plus  confermez  en  la  fiance  que 
nous  deuons  auoir  en  luy. Voila  pourvn  item. 
Mais  cependant  pource  qu'à  grand'peinefe 
peut-il  faire  que  nous  ne  foyons  retenus  & 
comme  enueloppez  en  ce  monde  quand  les 
cliofcs  nous  y  vicnent  à  propos  &  à  noftre 
grc.cognoiflons  qu'il  nous  faut  gémir,  &  que 
Dieu  nous  admoncfte  que  nous  fommes  coul- 
pables  deuant  luy  ,  d'autant  que  nous  n'auons 
point  fcnti  le  bien  qu'il  nous  faifoit.Condam- 
nons-nousdonc,afin  den'cftrepoint  condani 
nez  de  Dieurque  nous  ne  foyôs  point  diftraits 
de  luy  par  les  moyens  qu'il  nous  aura  donnez 
en  ce  monde.  Voila  ce  que  nous  auons  à  faire. 
Mais  aufsi  à  loppofite  notôs  bien  que  fi  Dien 
nous  defpouille  de  tout  fupport, que  nous  foy 
ons  corne  delnuez, qu'on  nous  reiette,&  mef- 
mes  qu'il  femble  que  tous  nous  foyent  enne- 
mis,cognoiflbns  (di-ie)  que  Dieu  nous  attire 
à  foy  parce  moyen,  veu  q  nous  fommes  trop 
aifez  à  nous  endormir.  Qjiand  nous  auons  en 
ce  monde  quelque  occafiô d'y  paflcrle  temps, 
nous  fommes  incontinent  aifopis ,  il  ne  nous 
fouuient  plus  de  mettre  noftre  fiance  en  Dieu, 
ne  de  le  requerir.Au  contraire  Dieu  nous  ref-> 
ueille  quand  il  ne  permet  point  que  les  hom- 
mes nous  foyent  amis ,  mais  qu'il  veut  que 
nous  foyons  delaiiltz  d'eux  ,  &  quand  nous 

F.iii, 


i30 


SERMON     XXXVIII. 


netrouuons  pi?ce  que  nous  aiioiisciiide.fça- 
chons  que  c'tft  autant  comme  fi  Dau  nous 
vcnoit  tirer  l'aurcille  pour  dire,  Or  ça  ,  tu 
tlors  ,  &  tuas  elle  long  tempr  fans  pcnfer 
à  moy  ,  il  faut  donc  que  tu  retournes  mainte- 
nant. Voila  comme  quand  ks  fidèles  s'arre- 
ftent  par  trop  ici  bas,  &  qu'ils  y  f  nt  corne  per 
Jus  &  effarez  ,  Dieu  les  réduit  au  droit  che- 
min :  comme  s'il  leur  diloit ,  Il  faut  mainte- 
nant que  vous  appreniez  de  retourner  à  moy 
pour  y  mettre  tout  voftre  fondement, &  vous 
y  appuyer.Car  quand  vous  for.df  z  voftre  efpe 
rance  au  monde  ,  c'cll  autant  comme  fi  vous 
vouliez  ballir  eu  lamer ,  ou  bienenPair.  Et 
en  cela  voyons -nous  la  bonté  de  noltre  Dieu: 
car  nous  ne  fomines  pas  dignes  qu'il  fe  décla- 
re noftre  Sauueur  quand  nous  auons  ainfi 
ibufé  de  fà  grace,&  qu'au  lieu  de  tendre  à  luy 
comme  il  nous  y  conuioit ,  nous  auons  prins 
occafion  de  luy  tourner  le  dos  ,  qu'cncores  il 
ait  pitié  de  nouî  ,&  qu'il  ne  permette  point 
que  nous  foyons  du  tout  efgarcz  ,  mais  qu'il 
nous  redrcfle,&:  qu'il  procure  unftre  Hilut  en 
toutes  fortes.  En  cela  donc  nou\  jyons  occa- 
fion de  macjnifier  fa  bonté.  Mais  ci.|><;r.dant 
apprenons  aufside  faire  noftre  profitducha- 
Ifiment  qu'il  notii  enuoye,  que  quand  nous  a- 
«ons  efle  fi  malins  de  mettre  Dieu  en  oubli, 
quand  il  nous  faifoit  la  grâce  de  nous  attire; 
à  foy,&  de  nous  monftrer  que  c'ed  en  luy  feul 
qu'il  nous  faloit  mettre  nollre  efpcrance,  ap- 
prcnons(Qi-ic)fialors  nous  fomnies  deilitucz 
de  fecours  humain  ,  de  nous  humilier  (S:de 
.-«ognoiflre  que  Dieu  veut  que  nous  venions 
tant  plus  fongncufcment  à  luy  :  &  quand  il 
nous  deflitue  de  tous  moyens  ,  que  c'eftafin 
qu'il  n'y  ait  plus  rien  qui'nousempefche, qu'il 
n'y  ait  plus  d'entre -deux,  qu'il  n'y  ait  plus  de 
voile  qui  nous  oftufque  les  yeux, mais  que  no' 
fenfions ,  Or  ça  ,i!  ne  refte  finon  ce  refuge 
d'aller  droit  à  Dieu,&  qu'il  nous  prene  com- 
me en  fi  proteifiion  &:  fauucgarde  ,  que  nous 
apprenioas,  quand  nous  foinmes  dcftituez  du 
cofté  des  hommes  de  nous  fier  pltinement  en 
Dieu  ,  cognoiflàns  que  c'eft  le  temps  oppor- 
tun,comme  aufsi  il  ert  dit  au  Pfcaume  31. Car 
le  temps  opportun  e/l  l.i  nomme  quand  nous 
fommcs  en  angoilfe,  &  que  nous  n'en  pou- 
Bons  plus, que  Dieu  nous  a  uiin  uifques  à  l'ex- 
Tiemitë  ,  qu'il  faut  que  nous  venions  à  luy. 
Vfons,di-ie,d'vne  telle  occafion. Voila  quant 
à  ce  poinèl  d'efperer  en  Dieu.  Or  il  eft  vray 
'•que  les  femmes  vefues  cependant  doyuent 
retenir cefle  doctrine  &:  admonition, i^uisqu'el 
kes  n'ont  plus  l'ombre  du  mari  ,  quand  Dieu 
les  appelle  à  foy  ,  &  qu'il  faut  qu'elles  fe  re- 
mettent du  tout  à  luy.  Mais  afin  d'auoir  tant 
plus  piand  courage  de  ce  faire  ,  qu'elles  pen- 
fent  a  l'honneur  que  Dieu  leur  fiit ,  combien 
«qu'elles  foyentdeftituees  de  fupport  humain, 
«ju'il  fe  prefente  de  fon  bongrc  d'cftreleur 
protefteur,&  lesauoiren  fa  garde. Que  donc 
•      ks  fcnunas  vefues  fe  cpnfolcni  en  cela ,  Se 


qu'elles  fe  remettent  pleinement  à  Dieu. Au- 
tant en  cfr-il  de  ce  que  fainft  Paul  adiouftc 
quant  aux  prières  &  oraifons.  Il  cftdit  en  gCr^ 
neral  à  tous  fidèles,  qu'ils  doyuent  continuer 
a  prier,  &  que  jamais  il  ne  nous  faut  lafler  en 
ctla,&  mefmes  il  efl  dit  que  nous  deuons  eftre 
quafi  importuns, cômc  il  en  eft  parlé  auiS.cha 
pitredefaindLuc.il  efl  vray  que  Dieun'ha 
point  meftierd'cftre  folicité  par  nous  :  mais 
il  nous  veut  exercer  quand  nous  le  reque- 
rons,iS:  veut  que  nous  foyons  patiens  pourat 
tendre  fon  feccur  .  Et  encore  que  nous  n'ay- 
ons point  efté  exaucez  du  premier  coup  ,  fi 
faut-il  que  nous  perfiftions  àl'inuoquer  :  car 
Dieu  accepte  vne  telle  perfeuerancc  comme 
vn  fcruice  honorable.  Or  cela  eft  dit  à  tous 
fidèles.  Pourquoy  donc  lâind  Paul  J'appli- 
que-il aux  vefues  fi'mplement?  c'eft  fuyuant 
ce  que  l'ay  défia  touché  du  paflage  de  la  pre- 
mière aux  Coiinthiens,  que  les  vefues  font 
moins  empefchees  que  celles  qui  ont  mefna- 
ge  à  gouuerner  :  car  il  faut  qu'elles  s'arre- 
ftent  là.  Et  pour  mieu.v  comprendre  ceci, no- 
tons que  les  vocations  f  nt  diuerfcs.  Il  faut 
qu'vn  chacun  regarde  la  façon  de  viurc  en  la- 
quelle il  eft  appelé:  car  autrement  il  n'y  aura 
que  fingerie  en  nous ,  comme  il  eft  dit  par 
(aindt  Luc  Qii'Anne  fille  de  Phanuel,  laquel- 
le receut  lefus  Chriftauec  .Simeon,eftoit  qua- 
fi toufîours  au  temple  s'exerçaiu  tant  .i  prier 
Dieu  qu'en  ieufnes.  Oi  nous  voyons  des  bi- 
gotes qui  voudront  fuyurc  ceft  exemple! 
mais  qu'en  aduicndra-il  .'  Nous  voyons  ce 
qui  fe  fait  en  la  Papauté  ,  que  beaucoup  trot- 
teront d'vn  autel  à  autre,  que  ce  ne  fera  pofnt 
allez  d'auoir  ouy  vue  couple  de  Mefles ,  mais 
il  faudra  encores  auoir  quelques  dénotions 
extraordinaires.  Or  ont  elles  bien  ainfi  cou- 
ru? qui  eft -ce  qui  penfe  cependant  de  leur 
mefn.ige  ?  Iln'tft  point  queftion  qu'elles  fe 
méfient  de  rien  qui  foit,mais  elles  font  déli- 
cates ,  &  quand  clle^  tetourncnt  ,  tout  ce  que 
elles  ontapprins  à  l'Eçlife  ,  c'eft  d'miuritr, 
de  frapper  ,  de  battre  ,  &  fe  defpiter  :  Lrief, 
voila  comme  vne  tcnipefte  qui  retourne  à  la 
miifon.  Ho  ,  voila  vn  beau  feruice  de  Dieu. 
Si  eft-ce  neantmoins  qu'il  leur  fcmble  qu'el- 
les font  venues  en  vn  degré  plus  haut  que  les 
Anges.  Et  pourquoy  ?  Ho  ,  elles  enfuyuent 
l'exemple  de  cefte  fainfte  ProphetelTedont 
parle  ifainft  Luc.  Et  comment  ?  c'eft  bien 
tout  au  contraire:  car  ce  que  faifoit  Anne, 
eftoit  fuyuant  ce  que  fainft  Paul  déclare  ici, 
que  d'autant  qu'elle  eftoit  ia  fort  ancienne, 
&r  qu'il  n'eftoit  plus  queftion  de  gouuerner 
neniaifonne  famille,  elle  s'occupoit  àprier 
Dieu  ,&:  cependant  elle  auoit  les  ieufnes  en 
recommandation.  Il  faut  donc  qu'vn  ch.i- 
cun  regarde  à  foy, &.îl'eftat  auquel  il  eft  ap- 
pelé ,  car  fans  cela  il  n'y  a  que  toute  confu- 
fion  en  noftre  vie:chacun  s'ingérera  .1  faire  ce 
que  Dieu  ne  luy  ordonne  point,  5:  mefmes  ce 
qui  cit  coatrairc  à  fon  oESce  fouuentesfois. 

£c 


luct.iS 


SVR   LA   I.   A  TIMÔT  rt. 


131 


Et  c'eft  vn  article  que  nous  deuons  bien  no- 
ter. Cjr  nous  voyons  ce  qui  eftaduenu  en  Ja 
Papauté  ,  &  le  tout  fous  ombre  de  dcuotion. 
Les  diuorces  ont  cfté  faits  en  mariage, par  ce 
^ue  la  fanme  folicitoit  ton  mari  de  le  faire 
tnoine,&  elle  nonnain. Voila  vn  diuorce.voi- 
lâ  vn  mariage  qui  t  ft  corrompu.  Comment? 
Ce  lien  doit  cftre  inuiolabie  ainfi  que  Dieu 
Ta  inftitué,cependâut  il  ne  coultera  rien  à  ces 
bigots  &  bigotes  de  rcnuerfer  certe  ordon- 
nance de  Dieu. Ne  voila  point  vne  choie  plus 
qu'infernale  &  diabolique,  quïd  les  hommes 
attentent  de  peruertirvn  tel  ordre?  Q_uand 
iis  mederoyent  le  ciel  &  la  terre, il  n'y  auroit 
poiat  vne  confulion  plus  horrible.  Nous  a- 
uons  donc  \  noter  cefte  doctrine,  c'eil  afça- 
uoir  qu'il  faut  bien  qu'vn  chacun  regarde  à 
fon  eft.it.  Et  ainlî ,  que  doit  faire  vne  femme 
quand  elle  a  inefnage  à  goouerner.loit  qu'el- 
le ait  mari  ou  non?  Qji'clle  penfe  de  s'em- 
ployer à  la  charge  que  Dieu  luy  a  commife. 
Si  elle  a  des  enfans, qu'elle  les  nournfle.qii'cl 
le  les  entrecicne  :  li  elle  a  mari ,  qu'elle  face 
fon  mefnagc  paifiblement,  fçachat  que  Dieu 
accepte  cela. Car  lî  elle  veut  Ipeculer  en  l'air 
&fe faire  valoir  pour  cauler&  pour  v fer  de 
belles  mincs5:ceremonies,iln'ya  que  fatras 
en  celâj&c'cft  vne  chofc  puante  qu'il  faut  re 
ietter.  Apprenons  donc  que  noftre  Seigneur 
reçoit  comme  vn  feruice  agréable,  quand  vn 
tomme  &  vne  femme  regardent  à  leur  cftat, 
&  qu'ils  cognoiflcnt ,  Voici  Dieu  qui  nous 
veut  employer  à  telle  chofe.  Il  ne  faut  point 
donc  que  nous-nous  y  tfpargnuins.mais  que 
nous  mettions  les  mains  3  la  parte  .comme  on 
dit.  Quand  d»nc  &  les  hommes  &  les  fem- 
mes fuiuét  ce  train-la,  Dieu  les  auoue,&  met 
en  fei  côtes  tout  leur  feruice.  Mais  au  côtrai 
re ,  il  eft  certain  que  ce  n'cft  que  pure  ambi- 
tion &  folie  quand  les  hommes  &  les  femmes 
le  veulent  exempter  de  leur  charge  fous  om 
bre  du  feruice  de  Dieu  ,  ou  de  quelque  deuo- 
tion  qu'ils  ont  imaginée.  Voila  donc  comme 
doit  eftre  entendu  ce  que  dit  faind  Paul  de  la 
perleuerance  qu'ont  les  vefues  à  prier  Dieu, 
c'eft  afçauoir  d'autant  qu'elles  ne  font  point 
diftraites  par  autre  occupation.  Or  ceci  doit 
cftre  appliqué  tellement  à  leur  vfage  ,  que 
nous  retenions  toufioursceftc  règle  générale 
que  nous  auons  alléguée  ,  c'eft  al'çauoir  que 
nous  deuôs  inuoquer  Dieu  incelTamment.que 
Se  loir  &  matin  il  nous  faut  exercer  en  cela, 
&  nuit  Se  iour.  Mais  il  y  a  vn  tel  moyen  ,  que 
cependant  noftre  Seigneur  veut  qu'vn  cha- 
cun s'applique  à  fa  befongne,&  que  nous  re- 
gardions à  quoy  il  nous  appelle  ,  &  ce  qu'il 
nous  impofe  pour  noftre  façon  de  viure,  afin 
de  la  fiiiure  pailîblemciit  chacun  en  fon  eftat. 
Oi  ccpédant  félon  qu'vn  chacun  a  plus  de  loi 
fir, qu'il  penfe  à  fe  recueillir  à  Dieu  tant  plus 
fongneufement.  Car  (comme  fainiï  Paul  ad- 
ioufteraàia  proceduredu  textc)ceux  qui  vi- 
uent  délicatement,  âc  qui  ne  demandent  qu'à 


riure  en  oifiueté,font  comme  desanortons.il 
eft  vray  qu'ils  auront  de  belles  mines  5;  bel- 
le apparence ,  mais  il  n'y  a  que  cela.  Car  ils 
font  inutiles:&  quand  l'home  ne  fert  de  rien, 
ne  vaudroit-il  pas  mieux  qu'il  fuit  du  tout  r» 
clé  de  ce  monde  que  d'eftre  vne  créature  foc 
mee  à  l'image  de  Dieu?Q_u'oB  ne  tire  nul  fer 
uice  de  nous,&  que  nos  prochains  n'en  foycc 
nullement  fecourus  ni  aidez, où  fera -ce  aller? 
Voila  donc  comment  c'eft  que  chacun  ,  après 
auoir  regardé  ce  qu'il  deuoit  faire  fclon  fon 
office,felon  qu'il  pourra  auoirloilîr,  il  fe  re- 
cueille, &  qu'il  s'efforce  de  prier  Dieu  tant 
plus  fongneufement.  Exemple:  Si  vn  horamc 
Se  vne  femme  ne  font  point  chargez  d'enfans, 
il  eft  certain  qu'ils  feront  moins  eicufcz  s'ils 
ne  fréquentent  les  fermons,  voire  posrpou- 
uoirmefmes  inftruirclesautres.&pour  s'inct 
ter  d'âuantage,&  s'ils  ne  s'employent  à  tou-> 
tes  autres  chpfes  qui  font  requifes  de  ceur 
aufquels  Dieu  donne  plus  de  liberté.  Quand 
vn  homme  fera  chargé  de  beaucoup  d'enfans, 
&  bien,il  fkut  qu'il  les  addrefle  ,  il  s'applique 
là:maisvn  hôiue  qui  aura  des  biens,  aura  boa 
loilîr,il  n'aura  point  de  folicitudevrgétequt 
l'empelche  beaucoup  :  fi  vn  tel  homme  fe  re- 
pofe,&:  qu'il  ne  daigne  s'appliquer  à  rien  qui 
foit ,  &  qu'il  ne  prene  point  occafionde  cela 
de  prier  Dieu  plus  afFeûueufement ,  d'eftre 
plus  fréquent  aux  fermons,  il  eft  certain  qu'il 
abufc  de  cefte  liberté  que  Dieu  luy  donnoit. 
Autant  en  eft-il  de  tout  le  reftc,  c'eft aflet  de 
auoir  amené  vn  exemple .  Mais  en  gênerai 
il  nous  faut  penfer que  Dieu  nous  exempte 
de  telles  fohcitudes  du  monde, afin  de  nous  re 
cueillir  à  foy,&  nous  donne  alors  plus  de  loi 
lir  &  de  liberté  ,  a  ce  que  nous  racquions  11. 
Q^ie  lî  nous  ne  le  faifons ,  nous  aurons  ranc 
moins  d'excufe  ,  &  la  condamnation  en  fera 
plus  grande  fur  nos  tcftes.  Voila  donc  ce  que 
nous  auon>^  à  noter  en  ce  paflàge,quand  il  eft 
dit  que  celles  qui  font  vrayement  vefues, inuo 
qucnt  Dieu. Or  notons  aufsi  que  ceci  doit  fer 
uir  à  tous ,  félon  qu'vn  chacun  eft  deftitué  c» 
ce  inonde, qu'il  doit  s'approcher  de  Dieu ,  Se 
l'inuoqucr  tant  plus  ardemment. Et  c'eft  auf- 
li  ce  que  fiind  Paul  a  entendu  ,  car  non  fans 
cauié  il  a  conioint  les  prières  &  oraifons  a- 
uec  refperancercar  aufsi  ce  font  chofes  infe- 
parables.Commcntdonc  pourrons-nous  dire 
que  nous  efperons  en  Dieu?  Car  celuy  qui  eft 
oifit  ,  &  qui  demeure  là  affopi  ,  monftre  alTez 
qu'il  ne  s'eftiamais  attendu  à  Dieu  ,  &  qu'il 
ne  regarde  point  à  luy.  Saind  Paul  donc  ay- 
ant conioint  l'efperâce  aucc  l'oraifon,  mon- 
ftre que  félon  qu'vn  chacun  de  nous  fera  de- 
ftitué de  tout  fupport  en  ce  mode,  après  que 
il  aura  fondé  fon  efperance  en  Dieu,  qu'aufsi 
il  fedoit  appliquer  à  prières  &  oraifons.  Et 
pleuftàDieu  que  ceci  fuft  bien  imprimé  en 
noftre  mémoire. Mais  quoyrnous  fçauôs  bien 
nous  complaindre  à  chacun  coup,  Helas,ie  ne 
fiiispoint  fccouru,  &  chacun  m'abandonne.' 

F.iiii, 


iji  SERMON 

mais  cependant  fommes-nous  foliciteux  de 
prier  Dicu?Il  eft  vray  que  de  fon  cofté  il  no' 
y  appelle  &  conuie  :  mais  qui  eft-ce  quiTc- 
fcoutefOn  dira  bien,Ho,t'ay  mon  efperance 
en  Dieu.  Mais  qu'vn  chacun  regarde  à  foy,& 
qu'il  fe  iuge  {ans  flatter ,  8c  nous  ferons  tous 
conuaincus  que  nos  orailons  ne  font  que  vol 
tigeren  l'air, que  iamais  nous  n'auons  regar- 
dé à  Dieu  à  bon  ei'cient.Il  ne  faut  point  donc 
d'autre  tefmoignage  que  celuy-la  pour  re- 
darguer  noftre  infidélité.  Et  amfi  ,  d'autant 
plus  nous  faut-il  bien  noter  ce  paflàge,  quad 
iainft  Paul  nous  ramené  à  prier  Dieu  quand 
nous  fommes  deftituezdu  cofté  des  hommes. 
Et  notammét  il  parle  de  perfeuercr  nuiû  & 
iour  :  car  ce  n'eft  point  aiTez  qu'il  y  ait  des 
bouffées,  mais  il  faut  qu'il  y  ait  vn  train  égal, 
&  qu'il  continue.  Il  eft  vray  qu'il  parle  des 
vêtues  ,  afin  qu'elles  foyent  efprouuees  de 
longue  main  ,  &  qu'on  ne  prene  point  vnc 
vefuequi  aura  monftré  quelque  bon  ligne 
pourvn  mois  ou  pourvn  peu  de  temps. Sainft 
Paul  donc  a  bien  regardé  à  cefte  elettion  de 
laquelle  il  parle  :  mais  quoy  qu'il  en  foit ,  il 
nous  met  ici  comme  vn  patron  de  ce  que  nous 
auons  à  taire  ,  tellement  que  pour  bien  prier 
il  ne  faut  point  que  nous  foyons  affeûionnez 
de  le  prier  quand  la  necelsité  nous  y  côtram 
dra  ,  &  puis  que  nous  retournions  à  nous  en- 
dormit :  mais  il  nous  f,)ut  auoir  ce/le  perfe- 
uerance  de  laquelle  il  parle  ici ,  comme  toute 
FEfcriture  aufsi  nous  y  exhorte.  Et  de  fait, 
fi  les  prières  font  la  principale  partie  du  fer- 
uice  de  Dieu,'&  de  l'honneur  &  de  la  louan- 
ge que  nous  luy  deuons ,  taut-il  que  nous  fa- 
cions  hommage  à  Dieu  ieulemenr  pour  vn 
coup,  &  puis  que  nous  le  quittions-là?  Ne 
fàut-ilpas  que  toute  noftre  vie  fe  rapporte  à 
luy?  Apprenons  donc  de  nous  exercer  à  prie- 
ies&  orailons  en  telle  forte,  que  quand  nous 
aurons  commencé  le  matin  ,  nous  continuy- 
ons,  &  que  la  nuidl'rcfponde  au  iour  ,  Se  qu'il 
•y  ait  vne  mélodie  conforme  &  correfpondaa 
le  en  toute  noftre  vie  ,  tellement  que  Dieu 
foit  toufiours  honoré  de  nous  .  U  eft  vray 
(comme  i'ay  dcfiadeclaté)qu'ilne  nous  faut 
point  faire  vn  meftier  de  prières ,  corne  nous 
voyons  qu'il  y  a  eu  de  ces  bigots  qui  ont  vou 
lu  mener  vne  vie  contemplatiue  :  Ho  ,  il  taut 
prier  Dieu.  Et  mefmes  à  bon  droift  on  a  de- 
tefté  anciennement  ceux  qui  fe  font  nommez 
Prieurs  ,  à  caufe  qu'il  leur  fcmbloit  qu'il  n'y 
auoit  nulle  Chreftienté  finon  qu'on  barbo- 
taft  toulîours  :  &:  d'autant  qu'Us  ne  faifoyent 
autre  chofc,  on  les  a  ainli  detcftcz.  Et  pour- 
quoy?  Car  ils  auoycnt  conuerti  vnecLofe  fi 
âinâe  que  l'inuocation  du  nom  de  Dieu  ,  en 


XXXVIII. 

vne  chofe  mcfchante.  Et  de  fait,  les  moinet 
&nonnainsdela  Papauté  ont  aufsi  voulu  fai 
re  vn  meftier  de  prier  Dieu  non  feulement 
pour  eux  ,  mais  ont  donné  leurs  lagues  à  loa- 
ge,  penfansfaire  vn  feruice  bienagreableà 
Dieu  d'eftre  nui£l  &  iour  à  barboter,  &  à  hur 
1er  en  leurs  temples. Or  faind  Paul  n'a  point 
voulu  introduire  vne  telle  fupeiftition  entre 
les  enfans  de  Dieu  ,  mais  il  a  voulu  monftrer 
comme  les  fidèles  doiuent  toufiours  commen 
cer  par  l'inuocation  du  nom  de  Dieu  quel- 
que chofe  qu'ils  ayent  à  faire  :  comme  aufsi 
nous  nepouuons  pas  remuer  vn  doigt  fans 
fon  aide.  Apprenons  donc  de  commencer  par 
là  ,  afin  qu'il  nous  gouuerne.  Et  puis  auons- 
nous  commencé  par  ce  bout-la?il  nous  y  faut 
continuer  en  beuuant  &  mangeant.Ex  puis  ei> 
prenant  noftre  repos,  que  toufiours  nous  re- 
gardions à  Dieu.  Et  cependant  qu'vn  chacun 
s'applique  félon  fa  vocation  &  fon  eft.ude  vi 
ure.  Et  au  refte,  fcl  jn  que  chacun  aura  loifir 
de  s'exercer  en  prières  &  oraifons ,  &  fré- 
quenter les  fermons ,  &  lire  i'Efcriture  fiin- 
cie.qu'il  cognoiflè,  Voici  Dieu  qui  m'oblige 
tant  plus  à  venir  à  luy  :  car  il  y  a  vn  lien  tant 
plus  cftroit  quand  il  me  donne  vne  telle  li- 
berté.Il  faut  donc  que  fapproche  de  luy, que 
ie  l'innoque  tant  plus  fongneutement.  Se  que 
iem'addonnedu  tout  à  cela.  C'eftenfomme 
ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ccfte  doûrine 
de  fainft  Paul. 

OR  nous-nousproftetnerons  deuantla  fa. 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiffance  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  nous  les  tace  mieux 
fentir  que  nous  u'auons  point  fait:&  puis  que 
nous  fommes  pleinement  deftituez  de  (a  ver- 
tu en  nous,  &  ne  la  pouuons  trouuer  aux  créa 
tures,que  nous  apprenions  de  recourir.!  luy, 
&  s'il  luy  plaift  d'ciprouuer  noftre  infirmité 
en  ceft  endroit ,  qu'il  ne  nous  donne  aide  ne 
fupport  du  cofté  des  hommes,  que  nous  foy- 
ons admoneftez  que  par  cela  nous  ne  le  de- 
uons pas  mettre  en  oubli ,  mais  pluftoft  que 
nos  efprits  doiuent  eftre  cituez  en  haut  pour 
le  recognoiftre  la  fontaine  de  tout  bien  :  Se 
que  quîdilluya  pieu  nousdeftituer  de  moy- 
ens humains ,  c'tft  afin  que  nous  recourions- 
tant  plus  ardemment  à  luy  pour  nous  confier 
en  fa  bonté  ,  &  poux  y  elfre  confermez  de 
plus  en  plus  :que  cognoillàns  cela, il  nous  fa- 
ce la  grâce  de  nous  ranger  volontairement  à', 
luy  ,  &  de  nous  afluiettir  à  fa  main  ,  fçachans 
que  nous  ferons  à  feureté  quand  nous  ferons- 
fous  (es  ailes  &  fous  fa  coniluite,&  qu'il  nous, 
tiédra  là  comme  cachez.  Quf  non  feulement 
ilnous  face  cefte  grâce, mais  aufsi  à  tous  peu. 
pies  &  nations  de  la  terre,i5.;c. 


TROISIEME    SERMON     SVR 

C  I  N  Q_y  I  E  M  E    CHAPITRE- 


LE 


7      Commande  au^'t  ces  chofc  s, afin  qii  elles  Çoy  et  fans  reproche. 


s  V  R     L  A     I.     A     T I  M  O  T  H.       -  255 

8  Qucfiducu7i  ncL  foin  àesficm ,  «Cf  principalement  de  ceux  de 
fa  famille, il  a  mcUfoy,(yejlpire  qu\}2  infdcle. 

9  Qhc  la  vefucfoit  elcue  noyant  pas  moins  de  fixante  ans,  qui- 
a  ejlé femme  d\n feu!  mari, 

10  Ayant  tcfmoignage  en  bonnes  œuures  ,f  elle  a  nourri fcs  en- 
fans  fielle  a  heberpé  les  fur  ucn  ans  ^fi  elle  a  laué  les  pieds  desfainSls,fi 
elle  afuhucnu  aux  afflige:^,fclle  aperfueré  en  toute  bonne  œuure. 

11  Mais  rcfuje  les  'vefucs  qui  font  plus  leujies:  car  quad  elles  ont 
rible  contre  Chr  ijl, elles  fe  y  eulent  marier, 

1  z  Ayans  leur  condamnation,  entant  quelles  ont  faufje  leur  prC" 
tmerefqy. 

chalan'î, comme  tous  quafî  le  font.  Qui  eft  ce 
luy  qui  fe  pourra  eicufer  qu'il  ne  foit  tardif 
à  feruir  Dieu?  Ainlî  donc  nous  fommes  admo 
neftez  d'tlire  folicitez,  &  qu'on  nous  reduifè 
en  mémoire  ce  que  nous  aurons  délia  cognu, 
afin  qu'il  nous  entre  au  cctur,  &  que  nous  ea 
foyons  touchez  au  viï",&  que  le  diable  ne  ga— 
il  eftqueftionde  nous  acquitcer.Or  cepédant  gne  rien  pour  nous  empcfcher  que  Dieu  de- 
les  hommes  qui  appetent  nouueauté,  vou-  ion  collé  ne  nous  poufletoufiours. Voila  doc 
droyent  bien  qu'on  leur  chatouillail  les  au-  ce  que  nous  auons  à  retenir  en  fomme  ,  c'ell 
reilles  de  quelque  chofe  friuole  ,  qu'on  leur  que  (î  nous  déclarons  Amplement  ce  que  no— 
apportait  toufiours  quelque  doQrine  à  leur  lire  Seigneur  nous  commande, la  doÛrinefe- 
fàntalîe  :  &  penfent  quand  on  leur  ramentoit  ra  bien  froide  :  mais  il  faut  qu'ayans  propofé 
ce  qu'auparauant  ih  ont  entendu,  que  ce  Toit  ladoftrine  pure&lîmple,  nous  tafchions  de 
peine  perdue  :  il  leur  femble  que  cela  foit  fu-  pouflèr  ceux  qui  font  nonchalans  ,  &  quand 
perflu.  Or  Dieu  qui  ne  veut  point  complaire  nous  verrons  que  nous  n'aurons  point  aflèr 
ànosfolsappetis  &  friuoles  ,mais  nous  veut  profité  pour  vn  coup, que  nous  retournions  à 
édifier  en  (a  crainte  &  en  toute  fainfteté  de  ce  que  nous  auons  déclaré.  Et  au  Te^e  ,  que 
vie,  commSde  notamment  que  les  chofes  qui  nous  ne  foyons  point  addonneï  à  ambition 
nous  font  profitables, nous  foyent  fouuent  re    pour  fuiure  ce  qu'il  plaira  aux  hommes.con»- 


'wr^f 


Ombien  que  ce  qui  concer 
ne  le  deuoir  de  chacun  de 
nous  foit  aiféà  entendre, 
toutesfois  il  efl  befoin  que 
nous  en  foyons  fouuentef- 
fois  admoneftez  :  car  nous 
auôs  courte  mémoire  quad 


duites  en  mémoire.  El  voila  pourquoy  fainft 
Paul  dit  ici  que  Timothee  exhorte  les  fidè- 
les de  ce  qu'aiiparanant  il  auoit  touché  ,  ou 
bien  qu'il  leur  mette  en  auant  tous  les  icurs 
ces  chofes.  Non  pas  qu'elles  foyent  fi  obfcu- 
res  :  car  il  a  parlé  ci  dcfllis  connue  les  vtfues 
■fe  dotuent  çouuerner,&  comme  chacun  aufsi 
en  fon  eftat  &  en  fa  taçon  de  viure  doit  iér- 
HiràDieu&  à  fes  prochains  :  ce  n'clî  point 
vne  chofe  fi  haute  ne  iî  cachée  ,  que  chacun 


me  il  y  en  a  beaucoup,  Icfqciels  voyans  qu'on 
leur  applaudit ,  veulent  toufiours  auoir  quel- 
que doftnne  fretiDaiite  où  on  prene  plaiiîr:: 
au  contraire, regardons  à  ce  qui  eft  vtilepour 
c-chtîerle  peuple  en  la  crainte  de  Dieu.  Et 
.-.uAi  que  tous  c<.u^  qui  défirent  de  profiter 
cil  la  parole  de  Duu.mettét  fotis  fe  pied  toi» 
te  cunofité,  &  qiund  ils  viendi  ôt  au  fernion,. 
que  ce  ne  foit  point  pourauoir  quelque  do- 
^rinequi  leur  phife  léh>n  h  chair,  mais  que- 


n'y  puifle  mordre  du  premier  coup,  voire  les    ils  cherchent  d'elb  e  enfeigncz  à  profit,  c'eft 


plus  ignorans  &  les  plus  rudes.  Mais  ccpen- 
dît ,  ce  qu'on  nous  atirs-tirt  auiourà'huy,nous 
efchappe demain,  oumefmes  ils'efcoulcde- 
uant  qu'auoir  tourné  la  main.  Voila  donc 
pourquoy  fainfl  Paul  notamment  comman- 
de à  Timothee  de  fouuent  trahter  ces  chofes, 
pource  qu'elles  feru£t  à  l'inftruftion  des  ho- 
mes. Oi- de  ce  pafîàge  nous  auons  à  recueillir 
que  ce  n'eft  point  auèz  qu'vn  homme  qui  au- 
ra la  charge  de  prefcherla  parole  de  Dieu, 


à  dire  qu'il-  foyent  incitez  à  mieux  feruir 
Dieu, à  mettre  leui  fiance  en  luy,  8c  qu'ils  ne 
fe  la fchent  point  quâd  ils  orront  et  qui  auoit 
eflédit  auparauant.  Car  vne  telle  repetitio» 
n'eft  point  fupeiflue  ,  d'autant  que  nous  auo» 
tantoft  mis  en  oubli  ce  qui  nous  eftoit  neceC 
faire  pournoftre  falut.  Voila  donc  ce  qtic 
aousauonv.i  retenir  en  fomme  de  ce  pallà- 
gcde  fainft  Paul.  (Dr  potamment  ildit,  A/"» 


tjip'ils  foyent  ir>-eprehinf!hles:à''iutîr\tc^ue  la  do^ 
monrtre  ce  qui  eft  bon,  mais  il  faut  que  celle  firme  que  Dieu  commande  de  publier  en  fo» 
doftrine  foit  con fermée, il  faut  qu'il  y  ait  des  Eglife,  eft  pour  reformer  noftre  vie  &  la  re- 
aiguillons pour  picquer  ceux  qui  font  non-    gler  ,  en  iorte  que  nous  le  feruinns  en  toute 

Ci. 


2-54 


SERMON     XXXI  X. 


iàinâeté.  Sdon  donc  qu''vn  chacun  monftre- 
r.i  pAr  Ùl  vie  qu'il  i  entëdu  que  c'elt  de  la  do 
urine  de  laLuc.il  le  monftrcra  aiihibon  elco- 
lier  &fàclede  lefusChnih  mais  quâd  la  vie 
•ne  fonneia  mot ,  c'ell  iigne  que  n.us  n'auons 
iamâis  goufté  TEuaiYgile  ioun  clcicnt.   Ec 
pourquoy?  Comme  ù:uct  Paul  lï  m  jnftie  en 
ce  pallage  ,  il  faut  que  la  parole  de  D;cu  ga- 
gne cela  fur  nou'î ,  de  nous  retirer  de  nos  vi- 
ce:,3f  de  nous  rangera  fa  bonne  volonté, que 
nous  monflrions  que  nous  ne  foinmes  plus  ad 
dônel  ànous-mef.nesiufqiiçs  à  tant  que  cela 
y  foit ,  il  cft  certain  que  nous  proplianons  la 
parole  de  Dieu. Et  voila  auf.  i  pouiquoy  tant 
îbuutnt  il  elt  réitéré  en  la  Loy.que  Ûieu  n'a 
point  voulu  feulement  donner  des  fpccula- 
tions  vaines  Afon  peuple, mais  quMluy  adon 
né  la  règle  de  cheminer  drcuement.   Dieu 
non,  a  reuclé  fes  fccrets.  Et  pourquoy'' a£n 
que  nous  adhérions  a  luy  de  tout  uoftre  coeur 
&de  toute  noftre  vertu.  Et  voila  pourquoy 
i.Timo.  aufii  fainû  Paul  en  vn  autre  palTage  dit  que 
3-16.        rEliriturecftvtile  :  comme  s'il  diioit ,  que 
ceux  qui  n'en  reçoiuét  point  d'inlhuclion.ia 
prophanét,&en  abufentfaulTemét.Et  à  quoy 
tendccfte  vtilitt?c'e(lque  nous  foyons  ren- 
dus pai  faits,  que  nous  approchions  de  noftre 
Dieu,  &  que  iournellenient  nous  foyons  tant 
plusconiointsà  luy  ,  iufques  à  ce  qii'tllans 
defpouillez  de  toutes  nos  affedions  char- 
nelles ,  &  de  ce  que  nous  auons  de  corru- 
ption,nous  foyôs  du  tout  ficns.  Or  après  que 
fainû  Paul  a  déclaré  à  Timothec  qu'il  eft  be- 
foin  que  les  fidèles  foyent  fouiient  admone- 
ftez  ae  ce  qui  eft  propre  pour  les  faire  acquit 
ter  de  leur  deuoir,adioufte  ,  Qi^e  ceUy  qui  tie 
poMruoit  point  aKx  fins,  izfiir  tout  à  fes  dome- 
Jl!ijites,a  renié  la  foy,  qu'il  efl  pire  iji*-m  infitit- 
U.U  adioufte  ceci ,  pource  que  n'agueres  il  a 
déclaré  que  les  vefues  qui  auoyent  quelque 
famille  en  leur  charge.deuoyent  eftre  là  coin 
me  arrellees.  Car  (corne  nous  auons  dit)  il  y 
enauoit  qui  fous  ombrededeuotion&du  fer 
uicedeDieu,  fe  vouloyent  exempter  de  ce 
<jiii  cftoit  de  leur  office  propre.  Saifift  Paul  a 
monflré  que  pour  bien  fcruir  à  Dieu  il  nous 
faut  feruir  à  nos  prochains. Car  Dieu  ne  peut 
rien  receuoir  de  nos  mains.  Q^el  profit  luy 
apporterÔ5-nous  ?  Mais  il  veut  efprouuerno 
ftre  obeiflànce  quand  chacun  de  nous  s'enar 
ployepour aider  àceui  entre  lefqucls  il  con 
uerfe.  Quand  donc  nous  auôs  vne  droite  cha 
rité,&  que  nous  ne  fommes  point  oififs,niais 
qu'vn  chacun  s'efforce  de  bien  faire  à  ceux 
aufquels  il  cil  tenu,  voila  vnferuicc  qui  efta- 
greableà  Dieu. Suiuant celle  fcntence  S.Paul 
adioufte  pour  plus  ample  confirmation  ,  que 
celuy  qui  ne  poumoit  point  aux  liens ,  c'cft  à 
dire  à  lès  enfans ,  &  à  ceux  qui  luy  f  jnt  com- 
mis en  charge  ,  &  fur  tout  aux  domeftiques, 
c'eft  à  dire  à  ceux  qui  font  encore  fous  fa 
main  &  en  fa  maifon.a  renié  la  foy  ,&  qu'il  eft 
pire  (jo'vn  infidèle.  Car  vn  père  &  vue  mcre 


pourront  bien  auoir  des  enfans  mariez, &  qui 
tiédront  leur  mefn.ige  î  part. Il  y  a  dôc  dear 
de!^rez  entre  les  enfans. Il  y  en  a  qui  font  co- 
rne émancipez  quand  ils  font  en  mariage  ;  les 
autres  qu'on  appelle  enfans  de  tamille  ,  font 
encores  fous  la  main  du  père,  ils  font  de  U 
niaifon.  Or  fainft  Paul  maintenant  dit  que 
ceux  qui  ne  tienét  conte  de  leurs  enfans, &de 
ceux  qu'ils  o'it  en  charge, fur  tout  de  leurs  do 
meft:qu£s, qu'il,  font  pirc^  qu'infidèles. Pour 
quoy?  Ca»  U  ne  faut  point  que  nous  ayons 
de  loix  couchées  par  efcrit  :  il  ne  faut  point 
que  n  JUS  ayons  de  lôgnes  prédications  pour 
nous  monftrer  qu'vn  père  doit  gouuerner  fes 
enfans ,  Si  qu'il  les  doit  guider  pour  les  faire 
paruenir  en  quelque  bon  train  ;  il  ne  faut 
p<jint,di-ie,que  Dieu  fe  reuelc  du  c:el. Pour- 
quoy.'' Nous  auons  cela  cngraué  de  nature  ea 
nous.  Q^on  aille  interro^uer  les  Payens:^: 
chacun  pourra  donner  ceftc  leçon  :  il  ne  faut 
point  aller  à  l'efcole:  &  qui  plus  eft, les  beftes 
brutes  en  leur  qualité  nous  peuuét  enfeigrcr 
ceci. Il  eft  vray  qu'vce  befte  n'aura  point  l'e- 
fprit  ne  mémoire  pour  recognoiftre  fa.  feinen 
ce  :  nuis  tant  y  a  que  les  bclies  depuis  les  oi- 
fcaux  du  ciel  iufques  aux  befte. •  fauuages,s'ac 
quittent  de  leur  deuoir.iufques  à  ce  que  Dieu 
les  en  exépte.Nous  voyons  la  folicitude  que 
auront  les  beftes  pour  leurs  petis:  &  à  quelle 
etolecll-ce  qu'elles  ont  apprins  ccftedo- 
clriiie?  C'eft  Dieu  qui  leur  a  baillé  vne  incli- 
nation de  nature.  Les  Payens  en  ont  beau- 
coup phis:  comme  aufsi  c'eft  bien  raifon  que 
les  créatures  raifonnablesaycnt  d'auantage 
beaucoup  que  les  beftes.  Puis  qu'ainfi  eft  que 
ceux  qui  détaillent  en  leurs  oflices.font  pires 
que  les  incrédules,  il  ne  faudra  point  de  paro 
le  de  Dieu  pour  les  condamner:ils  ne  pcuuct 
alléguer  ignorance  de  religion:  car  nature 
les  deuroit  induire  à  ceLi.Les  voila  donc  con 
uaincus  &inc?cufables.Il  eft  vray  qu'on  trou 
uera  bien  aflez  d'incrédules  qui  reietteront 
leurs  enfans,*:  qui  leur  feront  cruels,  ou  bien 
qui  leur  mettront  la  bride  fur  le  col, ne  tcnas 
conte  de  les  enfeigner.  Mais  fainû  Paul  ne 
parle  point  ici  de  ce  que  les  hommes  font:  il 
parle  de  ce  qu'ils  cognoiflent  qui  eft  à  faire. 
Voila  donc  en  fomme  le  contenu  decefte  fcn 
tence  .  Or  ici  nous  auons  à  noter  en  premier 
lieu,  que  c'eft  vne  cxcufe  trop  Iriuole  quand 
on  allègue,  Ho,  voila,  ie  ne  fuis  point  enfei- 
gnc  en  la  parole  de  Dieu:ou,  ie  ne  fuis  point 
clerc.  Car  il  y  a  des  chofes  que  noftic  Sei- 
gneur a  tellement  imprimées  aux  hommes, 
queduvétrede  la  mère  quart  ils  en  font  cn- 
fcignez.  Il  cft  vray  que  ccpcdant  nous  ne  laif 
fons  point  d'cftrc  poures  aiicugles,&  que  no* 
ne  fçauons  que  c'cft  de  feruir  Dieu,  que  nous 
n'auons  ne  rcsjle  ne  voye  iufques  à  tant  qu'il 
nous  ait  tendu  la  main  ,  iufques  à  tant  qu'il 
nousait  illumine2:toiit  cela  eft  bié  vray. Mais 
cependant,  fi  vn  hommp  prétend  coiiuerturs 
d'ijHorâce  quand  il  paillarde.quâdil  defro- 

be,& 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH. 


*3J- 


l>e,&  qu'il  s'addonnea  autres  maléfices,  &  lia 
tiiremcfme  ne  nouv  enkigne-clli- pa^  ce  qui 
doit  eftrc  cognii  à  toiis?Ho  voila, le  n'ay  pctt 
elle  enlcii^nc  en  PEuâgile.E:  n'aiiois-tii  poît 
en  nature  vne  dodrine/litfirantiPnc  tçauoi';- 
tu  pas  diTcerner  entre  le  bien  &  le  mal,  com- 
Rum.  I  "^^  (ainâ  Panl  en  parle?  N'auons-nous  point 
i-_  vnecognoiflancc  fr.fKfaiite  pour  nous  rédre 

conuaincus au  dernier  ioiir,  que  nousmcritôs 
d'eftre  condamnez?  Et  iî  nou>  enfcueliirons 
maintenant  tous  les  remords  que  Dieu  nous 
donne,  fi  eft-ce  que  nous  ferons  refueillezau 
dernier  iour  ,  A  faudra  que  ce  que  nous  pen- 
fons  eftre  maintenant  bien  caclié,  fe  Ut  fcou- 
ure.  Ainfi  donc  c'cft  vne  clioft  trop  puérile 
d'alléguer  que  nous  n'auons  point  filé  enl'ei- 
^nez  en  l'Euâgile  de  ce  que  nous  deuons  fça 
uoir  mcfmes  de  nature.  Or  fi  ainfî  eft  que  le 
foin  que  doiuent  auoir  les  pères  ou  mères  de 
leurs  enfans ,  eft  vn  office  tellement  naturel 
qu'il  ne  faut  point  que  Dieu  en  parle  en  fa 
Loy.ni  en  fon  Euangilerque  défia  nous  fora- 
ines alTcz  condamnez  fi  nous  allons  au  con- 
traire :  que  les  incrédules  mefmcs  fe  pourrôt 
ieuer  contre  nous ,  retenons  bien  que  quand 
noftre  Seigneur  nous  donne  quelques  poin- 
tes dedans  nos  ccrurs  poui  fentir  quel  eft  no- 
flre  deuoir  &  office  ,  que  c'eft  autant  comme 
s"'il  parloit  à  nous  fans  fc  feruir  des  hommes, 
&  fans  nous  mettre  nulle  Efcnture  dcuat  les 
yeux.  Et  celuy  qui  reiette  vne  telle  cognotf- 
ïânce,il  efteint  entât  qu'en  hiy  eft  l'Elprit  de 
Dieu,&  liiy  ertrcbellcÂpprenons  doncquSd 
il  plaira  à  Dieu  de  nous  faire  fentir  fa  volon- 
té, de  luy  eftre  obeiflâns  ,  &cognoiftreque 
c'eft  luy  qui  nous  poufle.Voik  pour  vn  item. 
Au  rtfte  ,  notons  que  ceux  qui  fous  ombre  de 
deuotion(comme  il  acftéditauparauât^veu- 
lent  s'cTcpter  de  bien  faire  à  leurs  prochains, 
qu'ils  pourront  beaucoup  trauailler,  mais  ce 
fera  peine  perdue  ,  d'autant  que  Dieu  veut 
cfprouuer  noftre  feruice  en  ce  qu'vn  chacun 
mette  peine  d'aider  à  fes  prochains ,  voire 
ftlon  lesdegrezque  Dieu  a  conftitnezen  na- 
j  ture.  Et  voila  pourquoy  aufsi  la  charité  eu 

"  '^'  ■*  nommée  lien  de  peiftftion.accomplifTement 
de  la  Loy  :  pourquoy  il  eft  dit  que  quand 
nous  conuerfons  auec  nos  prochains  çn  bien 
fàtfant,  &nousabften3ns  de  toute  nuilance, 
que  nous  fommcs  irreprehcnfibles,  comme 
fainû  Paul  en  parleau  premier  des  Ephefiés. 
Voila  donc  encores  vn  article  que  nous  auôs 
1  noter  en  ce  paflàge.  Or  cependant,  pefons 
bien  la  comparaifon  qui  eft  ici  mife  ,  Qu_e 
nous  fommes  pires  qu'infidèles  qu.id  nous  ne 
fuiuons  point  l'ordre  de  nature. Non  pas  que 
beaucoup  de  poures  ignorans  ne  foyent  bru- 
taux iufques  1 .  d'oublier  ce  qui  eft  de  leur  o-f 
ficetmai^  tant  y  a  que  dénature  tous  cognoif 
fent  que  les  pères  font  redeuables  à  leurs  en- 
fans.  Or  puis  qu'ainfi  eft  ayons  honte  quand 
ftous  ne  ferons  point  ce  que  nous  cognoif- 
fons  cAre  bô,  oielint  iâns  dire  enftigncz  par 


la  parole  de  Dieu.  Et  pourquoyî  Car  il  ne 
nous  laudra  point  d'autres  luges  que  les  po- 
ures ignorans  :  ceux-là  f.ront  conliitucz  de 
Dieu  à  noftre  plus  grande  confufioii  &  ver- 
gongne.  Si  ceci  tftoit  bien  obù-ruc,  nous  ne 
ferions  pas  fi  lafches  à  faire  noftre  deuoir. 
Mais  quoy  ?Auiourii'huy  il  n'y  a  celuy  qui  ne 
fe  flatte  en  ceftefaufTecognoiflànce  qu'il  prc 
tend  de  l'EuangilcEt  nous  voyons  aufsi  que 
nousfômes  coulpablcs  au  double.  Q^âd  Dieu 
nous  appelle  .'i  ioy  ,&  que  fa  parole  nous  de- 
uroit  efclairer,  tant  s'en  faut  que  nous  foyôs 
auancezcn  faindctcdevie.quefi  oncfpluche 
bien  &:  qu'on  examine  noftre  vie,  on  trouue- 
ra  que  nous  fommes  pires  que  les  ignorans. 
Nous  fçaurons  bien  nous  moquer  des  Papi- 
ftes:  &  ces  poures  gés  font  là  en  des  ténèbres 
horribles:niais  voici  la  vérité  de  Dituqui  ne 
nous  eu  pas  feulement  comme  vne  lampe  ar- 
dente ,  ains  comme  le  foleil  qui  luit  en  pleia 
midi  pour  nous  monftrer  le  chemin  de  falur. 
Et  comment  eft-ce  que  nous  viuons?  Qu'on 
regardes.- qu'on  chcrchecequi  fe  fait  entre 
les  Papiftes.Il  eft  vray  que  là  il  y  a  beaucoup 
de  corruption  ,  &  on  pouiu  dire  qu'encores 
font-ils  plus  desbordez  que  nous. Prenons  le 
cas  qu'ainfi  foit:  mais  cependant  fi  eft-ce  que 
ils  fe  condamnent,&  après  s'cftrc  codamnez, 
ils  cheichent  des  moyens  pour  appointer  a- 
uccDieu.  Ils  ont  leurs  fitisfàftions ,  ils  ont 
leurs  badinages,&  s'efforcent  de  chercher  les 
remèdes  quand  ils  ont  failli,  encore  que  tout 
ce  qu'ils  font, ne  foit  que  menus  fatras.  Et  de 
noftre  cofté  quoyrNous  prenons  vne  licence 
de  mai-faire,  de  defpiter  Dieu  côme  à  noftre 
efcient:&  qu.idnous  auons  ainfi  rcuerfé  tout 
ordre  ,  que  nous  aurons  reietté  tout  ioug  de 
noftre  col  ,  il  n'eft  plus  queftion  que  de  nouî 
efgayerd'auâtage.  Et  ainfi, que  refte-ilfinon 
que  cefte  fentcnce  s'exécute  fiir  nos  teftes, 
ou  il  eft  dit  que  nous  fommes  pires  que  les  ia 
crédules;  Or  en  quelle  efcoleauons-nous  ap 
prinsd'eftre  enduicisen  telle  forte.?  Voila 
pourquoy  nous  fommes  impatiens  ,  que  nous 
nefaifons  que  nous  defpitcr  quand  ks  vice? 
nous  fontmis  en  auât,  &  que  nous  en  fonime» 
redargiit  z.  Les  petis  enfans  cognoilFcnt  no- 
ftre turpitude  ,  &  cependant  il  ne  nous  en 
chaut.Ne  faut-il  pas  que  nous  fcyons  comme 
enioicelez?  Les  poures  ignorans  qui  n'ont  ta 
Jamais  vne  gouttedepurt  doûnne  ,  tant  y  a 
qu'encores  ont-ils  quelques  remords :&  nous 
fommes  là  fi  tfouidis,  que  n<^s  ne  difcernôï 
point  entre  le  bien  &  le  mal. Ne  fommes-no* 
donc  pa'  pires  que  les  infidelcsPEtau  refte,ti 
nous  faut  encore  venir  plus  loin.  Car  quand 
les  poures  Papiftes  feront  desbordtz  audou^ 
ble  ,  on  pourra  dire  toiifiours  ,  Hc  las ,  on  ne 
les  admonefte  point:ils  font  feduits  par  leurs 
caphars,  &mtfnics  on  les  ei  dort  en  leurs  vi- 
ces,comme  nous  en  voyôs  l'exemple.  Or  ce- 
pendant voici  Dieu  qui  nous  foliate^il  nous 
rcliieille,  il  ne  fouffrc  point  que  pe  rfonnc  de 

G.ii. 


i.ys 


51RM  O  N 


.'«Ml, 


'3- 


rout  fcnourriffe  eo  fon  mal ,  ou'il  ne  nous 
propofe  noitre  condAmnation.  iit  cependant 
nouî  tuy  refilions,  &  loitimcs  liobftuici .  tic 
voila  point  encore  vne  condamnation  bcju- 
coup  plus  grande?  Ne  faut-ilpas  reutniràcc 
que  dit  noitrc  Seigneur  Icfus  Cliiifc,  que  puis 
nue  lonas  a  profité  entrcles  Paycns  qui  n'a- 
uoyent  iamais  goufté  la  Loy  de  Dieu  ,  que  fi 
luy  nous  anoncela  dodrmede  fon  Euangi- 
Ic  ,  &  que  nous  ne  la  receuions  pas  comme  il 
appartient,  que  ceux  de  Ninaie  nous  condam- 
neront ?  Or  auiourd'huy  Ditu  ne  tait  point 
cefte  grâce  aux  Papiftev  de  leur  enuoyer  des 
Prophètes,  il  les  iaiffe  li  en  leur  perdition: 
mais  cependant  c'cfl-fau:c  d'ellre  enieignez 
qu'il .  font  amit  corrompus  .  £t  de  nofiie  co- 
fté,  quand  Dieu  fe  leue  de  inat'.n(c  jmnie  il  le 
die  )  &:  quM  le  couche  tard,  cVft  à  dire  ,  qu'il 
eft  afNiduc-1  pour  nous  donner  bonne  inllru- 
ûion  &  vtile  ,  &  que  nc.us  demeurons  touf- 
lours  ainfi  croupiflàns  en  nos  ordures, ne  voi- 
la pas  ce  que  i'iind  Paul  dit  en  ce  partage  .ac- 
compli en  nous  ?  Or  donc  apprenons  de  nous 
réduire  à  noftre  Dieu, mieux  que  nous  n'auons 
fait  auparauant,^  craignons  celle  honible 
ccyidamnation  ,  c'eft  que  quand  nous  aurons 
effacé  l'ordre  de  nature,  lequel  Dieu  auoit 
engrauc  en  nos  CŒurs,quc  nous  Tommes  pires 
que  les  incredules.Et  pourquoy  ?  Car  ils  fp- 
ucnt  bien  les  chofes  qui  font  de  laire  en  ce.l 
endroit, &:  nous  les  mettons  en  oubli. D'autre 
cofté,  les  incrédules  auront  quelque  extufe  à 
demi,non  pas  du  tout  :  mais  tant  y  a  que  leur 
péché  n'ell  point  fi  grief"  ne  fi  énorme  deuant 
Dieu  .d'autant  qu'ils  n'ont  nulle  doûrine  .  Et 
de  noftre  cofté  ,  quandaous  auons  lesaureil- 
les  bâtucs  des  exhortations  que  Dieu  nous 
fait, que  nous  voyons  qu'il  trauaille  tant  pour 
nous  amener  à  luy,  fi  nous  hiy  fomraes  ii  re- 
belles que  decertaine  malice  nous  luy  foyons 
obftinez  iufques  au  bout,  n'eft-ce  point  à  no- 
ftre grande  confufion  ?  Or  tant  y  a  que  ceci 
eft  par  tJ.op  commun.jCar  auiourd'huy  on  au- 
ra beau  prefchef  beaucoup  de  gens ,  ils  font 
lellement  préoccupez  de  Satan  &  de  fes  illu- 
lîons  ,  que  ce  leur  eft  tout  vn  quoy  qu'on  di- 
te ,  combien  qu'ils  foyent  picqUez  ,&  qu'ils 
ayent  des  poinûures  terribles  (ainfi  que  leur 
confciéceleureftvnbourreau)tant  y  a  qu'ils 
repouflent  le  iugemct  de  Dieu  tant  qu'il  leur 
eft  pof  .ible.On  déclarera  aflez  quel  eft  le  de- 
uoir  d'vn  chacun.On  rcmonftrera  &  en  gêne- 
rai &  en  particulier  ,  Voila  quelle  eft  la  règle 
de  tou4  Chreftiens.  Onmonftiera  puis  après 
l'office  d'vn  père  de  famille:  on  déclarera  auf 
<î  l'office  d'vn  Miniftre  de  la  parole  de  Dieu 
&  des  Magiftrats.Les  vus  murmurent  Se.  gron 
dent  fi  toft  qu'on  gratte  leurs  rongnesiles  au- 
tres font  eflourdis  ,  &  ne  s'en  fondent  en  fa- 
çon que  ce  foit:  voire  combien  qu'on  parle  & 
qu'on  infifte  fur  cefte  doftrine,  fieft-ce  que 
beaucoup  ne  fçauent  quec'eft  d'eftre  rcpre- 
iienfibles.  On  verra  d'autre  cofté  ces  gros 


X  X  X  l  x.i 

yurongnes  qui  font  hcbetcz  corne  des  vilein» 
pourceaux, qui  fonttellemét  enyurez  en  leur» 
péchez  ,  qu'ils  font  fi  vileins  ii  fi  puants  que 
chacun  leideteftcq  les  petis  enfans  pourroy 
cnt  f  (Ire  leurs  iuges:&  cependant  eux-mefines 
i".c  cognoiflcnt  pas  leur  turpitude.  Car  au  lien 
de  s'humilier  &  d'auoir  quelque  honte:les  voi 
la  comme  des  punais  qui  font  confits  du  tout 
en  leur  vilenie  :  &  puis  ils  fe  desbordent  en 
telle  extrémité, qu'ils  n'ont  plus  de  honte  ne 
de  doleance  de  leurs  péchez, mais  ils  font  en- 
i'orcelcz  de  Satan  pour  n'en  auoir  plus  de  fen 
tiinent.  Tant  ya  que  telles  gens  fenttronc 
que  ce  u'eft  point  en  vain  quelainft  Paul  he- 
rautde  Icfus  Chnfta  prononcé  cefte  fenten- 
ce.Que  telles  gens  font  pires  que  des  infidè- 
les. Car  s'il  yauo^t  aux  poures  ignorans  11 
moitié  de  l'inftruftion  qui  eft  ici  catre  nous, 
il  yauroit  plus  de  fruift.Ainfi  il  faut  bien  que 
vn  tel  threfor  nous  foit  cher  vendu  quand 
nous  l'aurons  ainfi  prbpliané,  c'tft  i  dire  que 
nous  aurons  ainfi  abufé  de  la  parole  de  Dieu, 
&  de  fon  nom  facré.Or  cependant  fainû  Paul 
adioufte  ,  ÇJk'h»  n'elrft  point  lie -vtftie  ,fnin 
cju  elle  Alt  foi  xunte  uni  fmrlemoins  ,  &  au  el- 
le ait  ejlé  femme  d'-m  mari  feu  l ,  f]!*  e/lea't  tef- 
mo'gnare  en  Uiiinesttuures.  Et  quelles?  d'auoir 
nourri  lés  enfans,d'auoir  bien  fai  t  aux  poures 
affligez,  &  les  auoir  fecourus ,  de  ne  s'eftrc 
point  cfpsignee  pour  receuoirceux  qui  cftoy 
Clic  defpourueus  de  logis.  Qjmnd  donc  les 
vefues  feront  telies,qu'on  les  reçoyiie,&  non 
autrcinét.Ornous  auôsdefiadcclarcci  deflus 
de  qucleftat  il  parle. Car  ces  vcfues-cieftoy- 
ent  en  office  d'Eglife ,  comme  on  le  voit  par 
le  dernier  chapitre  des  Romains  ,  où  il  re- 
commande vne  vefue  qu'il  appelle  miniftre 
del'EglifedeCenchree.  Les  vefues  doncc- 
ftoyent  pour  feruir  aux  poures, &  pour  les 
fongner ,  &  pour  fournir  à  telles  charges  qui 
font  propres  aux  femmes  :&ceft  eftat  eftoit 
honorable,  comme  en  la  maifonde  Dieu  tous 
cftats  font  facrcz.  Et  combien  que  félonie 
monde  ce  foit  vne  chofe  contempcible  de  ' 
feruir  aux  poures,  tant  y  a  que  ce  font  autant 
dcfacrificesde  bonne  odeur  à  Dieu.  Et  ain- 
fi,ceft  eftat  eltoit  noble  deuant  Dieu  &  de- 
uant (es  Anges.  Au  refte  ,  quand  faintt  Pau! 
neveut  point  qu'on  elife  des  velues  qu'à  foi- 
xante  ans  .c'eft  qu'ayant  efgard  qu'elles  fe 
dedioyent  aufcruicederEglife,clles  renon- 
eoyentdelàen  auant  à  leurs  mefnages.  lia 
dit  aufsi  qu'il  n'en  faloit  point  prendre  de 
celles  qui  auoyent  enfans  à  nourrir.  Il  traitte 
maintenant  de  celles  qui  eftoyentlibres:tou- 
tesfois  il  requiert  encore  quelqu'autre  con- 
dition ,  c'eft  de  l'aage.  Car  vne  vefue  qui  euft 
efté  encoresieune  ,  euft  peu  auoir  enuie  de  fc 
remarier,  &  c'ciift  efté  vne  confiilion,  que 
après  s'eftre  ainfi  dediec  au  feruicc  de  !'£- 
glife,  elle  s'en  fuft  retirée.  Sainci  Paul  donc 
rjtamment  parle  de  l'aage  entre  autres  cho- 
fts,afiii  qu'elkt  ne  foyent  reccues  dtuanr 

ce  temps 


SVRLAI.    A    TIM  O  Tlf. 


457 


l 


ce  temps  de  foixante  ans  ,  &  au  reAe  qu''elles 
foyent  bien  efprouuees  .  Or  pour  bien  faire 
noftre  profit  Je  ce  paflàge.retenons  ce  <ju'il  a 
déclaré,  cVftafçauoir ,  que  les vefues  qui  ont 
des  entans.les  doyuent  gouuerner,  &  qu'elles 
fedoyuent  employer  à  cela.  Car  ceite  pour- 
uoyâcedont  fainâ  Paul  a  patlc.n'eft  pas  feu- 
lement de  la  nourriture,  mais  le  principal  eft 
delà  bonne  inftruûion  que  doyuent  donner 
les  anciens  aurieunes.QjMnd  Dieu  aura  don- 
né des  enfans  à  vn  homme,  ce  n'eft  pas  afin 
u'ilait  feulement  la  charge  de  leur  donner 
u  pain  à  manger.raais  le  principal  eft  la  bon- 
ne inftruûion.  Et  voila  en  quoy  il  nous  faloit 
occuper:mâis  on  voit  auiourd'huy  tout  le  cô- 
traire.  U  eft  vray  que  les  pères  encores  aurôt 
folicitude  de  nourrir  leurs  enfans ,  non  pas 
tous.Car  combien  voit -on  de  gourmans  &d' 
yurongnes  qui  s'en  iront  dcfpedre  en  vn  iour 
en  la  tauerne  tout  ce  qu'ilç  pourront  gagner 
la  moitié  d'vne  femaineïQujdifsipent  &  en- 
gouffrent tout  ?  Et  puis  il  faudra  que  les  po- 
ures  enfans  meurent  à  demi  de  faim.Nous  ver 
rons  donc  de  ces  beftes  brutes,;,qui  ont  oublié 
tout  ordre  &  honneftcté  de  nature  .  Mais  en- 
core la  plus  part  auront  le  foin  de  nourrir 
leurs  enfans,  mais  cependant  où  e.ftl'inftru- 
âion?  Qui  pis  eû,  nous  en  verrons  beaucoup 
qui  ne  demandent  lînon  que  leurs  enfans  les 
lurmontent  en  toute  meichancc'té  :  ils  crai- 
gnent d'auoir  honte,  &  que  leurs  enfans  ne 
foyent  meilleurs  qu'eux.  Voila  vn  contem- 
pteur de  Dieu  ,  vn  homriie  malui  &peruers, 
plein  de  fraude  fittrahifon,  faits  confcie'cene 
loyauté,  qui  en  attrappant  là  où  il  peut,  vou- 
dra que  fes  enfans  luy  rcflemblent.  Il  fera  vn 
paillard  Se  vn  vilein,  il  s'efiouit  quand  fes  en- 
fans monftrent  qu'ils  font  comme  vermines 
corrôpues  dés  l'aage  de  fix  ou  û-pt  ans.  Nous 
verrons  donc  cela  communémét:  tant  y  a  que 
bien  peu  péftnt  à  dédier  leurs  enfans  a  Dieu, 
pour  dire  qu'ils  viuent  purement,  &■  que  Dieu 
en foit  honoré,  &  qu'ils  feruent  à  leurs  pro- 
chains.Combien  y  en  a-il  qui  regardent  à  ce- 
la? Il  eft  vray  qu'ils  cerchcront  aflez  d'eleuer 
leurs  enfans, de  les  mettre  en  credit.de  les  fai 
re  riches  :  mais  toufiours  le  principal  défaut, 
&  met-on  la  charrue  deuSt  les  bœufs. Or  d'au 
tant  plus  nous  faut-il  bien  noter  ce  partage 
de  fainft  Paul ,  c'eft  que  ceux  qui  ont  chaige 
publique,  foit  pour  nourrir  leurs  enfans ,  foit 
qu'ils  foyent  en  eftat  pour  gouuerner  le  peu- 
ple,que  félon  que  nous  fommes  vnis,nous  de- 
uons  penfer  les  vns  des  autres  .Car  il  y  a  les 
degrez.qu'vn  père  fera  plus  tenu  à  fon  enfant 
qu'il  ne  fera  point  à  vn  autre  qui  ne  luy  attbu 
che  point  de  fi  près,  encore  qu'il  foit  fon  pa- 
rent .  Vray  eft  que  le  parentage  encores  nous 
induit  à  cela.  Q_ue  les  anciens  ad uifent  d'édi- 
fier les  ieunes  en  bien. Et  puis  il  faut  que  nous 
ayons  vne  conionftion  &  vne  affinité  vniuer- 
felle  .  Car  nous  fçauons  que  nous  fommes 
créez  à  l'image  de  Dieu,que  nous  fomines  vne 


mefme  chait,ie  di  <out  le  gf  re  humain.  ToiU 
donc  à  quoy  nous  deueriôs  penfer.  Or  il  n'eft 
queftion  auiourd'huy  de  pouruoir  auxnecefsi 
tez  de  nos  prochains.finon  quand  ils  ont  vne 
mauuaife  caufe .  Vn  père  nourrit  fes  enfant 
quant  au  ventre,  mais(côme  i'ay  dit)  pour  les 
inftruire  en  bien  &  en  bonne  doÊtrine ,  il  n'en 
eft  point  de  nouuelles ,  pluftoft  on  les  entre- 
tiendra en  toute  vilenie  &  corruption:  &  c'eft 
là  où  il  fera  queftion  de  parenuge,autrement 
on  ne  pourra  auoir  ne  tirer  nul  (ecoursuelle-. 
mentqù'vn  pourc  hôme.quand  il  fera  deftitué 
d'aide, il  aura  beau  cricr:tout  le  monde  aura  1* 
aureilk  bouchee,&  la  main  fermee.que  les  af 
flige7,S:qui  feroyent  dignes  d'eftre  fubuenuf, 
ne  le  ferot  nullemét  de  ceux  qui  eo  auroy et  le 
pouuoir.Mais  qtiât  aux  inalefices,s'»l  faut  pre 
fter  la  confcience,  s'il  fautdefpiter  Dieu,  hi^, 
voila  où  on  eft  grand  coufin  .voila  où  on  Ce 
veut  employer  du  tout.  Voyant  donc  que  ceU 
eft  peruertir  l'ordre  de  nature,  &  qu'il  femble 
que  nous  ayons  confpiié  contre  Dieu,  d'autât 
plus  nous  faut-il  fentir  noftre  inal^afin  de  no* 
reformer  félon  l'admonition  qn  faincl  Paul 
nous  fait,  que  chacun  penfe  de  pouruoir  aur 
fiens,  voire  d'y  pouruoir  en  telle  forte  que  le 
principal  ne  foit  point  laifle  derrière.  Au  re- 
fte,quadlain£i  Paul  parle  ici  de  l'eleéHon  det 
vefues,  en  cela  il  nous  monftre  quel  foin  on 
doitauoir(c6me  défia  il  en  fut traitté diman- 
che pafle)  Mais  ceftedoftrine  mérite  bic  que 
on  y  retourne  encore,  veu  que  le  fainû  Efprit 
qui  eft  la  règle  de  toute  fagefle,  a  redoublé  i- 
ci  deux  fois  vne  mefme  chofe.Puis  qu  ainfî  eft 
donc,  il  eft  bon  que  ce  propos  foit  encore  ta.. 
mentu,&  fur  tout  quand  le  temps  aufsi  le  por- 
te Scia  circonftancedu  iour  .Car  pourquoy  eft 
ce  que  fainû  Paul  tant  fongneufement  exhor 
te  que  les  vefues  ne  foyent  point  eleues.finon 
qu'on  les  choififle  telles  qu'elles  puilTcnt  fer 
uir  en  l'Eglifede  Dieu,  S;  qu'elles  fepuiflènt 
acquitter  de  IcurdeuoirîC'cft  pource  qu'il  les 
faloit  mettre  en  charge  publique.  Voire, mais 
fi  on  faitcomparaifondecefteftâtaueclefic- 
ge  de  iuftice  Se  Tauthorité  des  Magiftrats,  ou 
auec  l'office  de  portera  anôccr  la  parole  de 
Dieu ,  il  eft  certain  que  ceci  feroit  en  degré 
bien  inférieur.  Car  puis  que  nous  voyons  que 
Dieu  a  voulu  qu'on  vfail  de  prudence  telle,  & 
de  difcretion.en  ordonnant  les  vefues  qui  de- 
uoyent  feruir  aux  poures ,  que  fera-ce  quand 
ondoit  élire  des  Magiftrats  qfoycnt  fes  lieu- 
tenans  en  ce  monde  pour  goui:erncr  en  fon 
nom,  quâd  ondoitchoifirdes  Pafteurs  quia- 
noncciu  la  doûrine  de  ûlut,  qui  portent  l'am 
baftâdeenfon  authorité  pour  reconcilier  les 
hommes  auec  luy  :-Ne  faut-il  pas  qu'on  y  aille 
auec  vne  affeftiô  finguliere,&  qu'on  fe  donne 
garde  de  profaner  les  eftats  que  Dieu  a  dé- 
diez à  fon  honneur?  Mais  quOy?  Ceci  eft  tant 
mal  obferué  que  c^eft  pitié. Car  quand  on  doit 
faire  des  eleftions, corne  auiourd'huy  fedoy- 
uent eliie  les  gouuerneurs,  Si  demain,  &  dc- 

C.iii. 


Z38 


SERMON    XXXIX. 


inain,&  toute  la  (t  inaine  qu'on  doit  poiiruoir 
à  l'eftat  de  la  vilic,  &  à  l'ordre  de  iuiiicc  ,  <]iii 
eu  vne  cLofe  fi  fainfte,  combien  y  en  a-il  qui 
penfcnt  à  Dieu  ?  L'elcdtion  Ja  plus  lolenneJle 
fe  fera  maintenant:  ceux  qui  viendront  là,  où 
font-ils  en  partie  ?  l'en  ay  rencontré  de  mes 
ruftres  q  iepourroye  bien  marquer  au  doigt, 
mais  iln'eliia  befoin  ,  car  on  lescognoiftal- 
fez  :  les  Vns  s'en  alloyentdeuers  le  Bourg  de 
four,  les  autres  tiroyent  ici  bas. Il  leur  femble 
aufsi  qu'ik  n'culTent  point  eu  loifîr  de  deiiu- 
ner,  linon  de  choilîr  l'heure  du  fermon  .  l'ay 
reu  cela  de  mes  yeux  en  venant  au  templc.Et 
n'eft-ce  pas  vne  honte  par  trop  notoireJAinfi 
donc,  quand  nous  voyons  que  nous  qui  deue- 
rions  défia  élire  grans  docteurs  en  la  parole 
de  Dieu,  veu  qu'elle  nous  eft  ii  familièrement 
tous  les  ioursprefchee, que  nous  femmes  en- 
cores  fi  hebetez  ,  mefmes  qu'il  y  a  vn  efprit  il 
brutal  en  nous, n'eft-ce  pas  vne  grand'  honte? 
Or  donc  pen'fons  que  ce  n'eft  point  fanscau- 
fe  qu'il  nous  eft  déclaré ,  quand  on  doit  élire 
«les  gens  en  charge  publique,qu'il  y  faut  aller 
auec  reuerence:auec  fo)icitude:autremétc'elt 
pour  prouoquer  l'ire  de  Dieu  fi  on  pollue  le 
fiege  de  iufticc  ,  y  menant  gens  qui  n'ayent 
acle  ni  affection  pour  l'honorer  Se  pour  le  fe  r 
uir  .  Or  donc  la  circonft.ince  du  temps  nous 
monftre  que  puis  que  faind  Paul  a  ainfi  recô- 
mandé  l'^leâiô  des  vefues.il  faut  qu'on  appre 
ne  (fi  on  ne  veut  du  tout  fe  ruiner)  de  pratti- 
quer  mieux  qu'on  n'a  point  fait  iulqnes  ici, 
d'auoir  crainte  &folicicude  quand  les  eleftiôs 
fe  doyen  t  faire,  tellemët  que  Dieu  y  prefide, 
&  qu'il  face  que  tous  foyent  gouucrnez  par 
/on  fainil  Efprit,  &  qu'ils  ayent  zèle  &  affe- 
<lion  à  fa  parole.D'autre  cofté  ceux  qui  doy- 
Kent  goimernef,  qu'ils  pcnfent  bien  aufsi  à  ce 
que  dit  fainft  Paul.c'eftafçauoir,  que  s'ils  ne 
s  acquittent  fidèlement  de  leurs  offices,  il  ne 
faudra  point  que  les  Anges  defcedent  du  ciel 
pour  les  condamnei:car  cela  eft  de  l'ordre  de 
nature.Les  Payens  n'ont-ils  pas  cogmi  que  c' 
eft  de  iuftice,&ce  que  les  Magiftrats  doyucnt 


faire?  Ainfi  que  les  Magiftrats  apprenant  que 
ils  font  conftitucz  comme  pères  du  peuple,  Se 
que  s'ils  n'ont  le  foin  paternel  pour  pouruoir 
à  ceu  X  qui  leur  font  commis  en  charge ,  il  ne 
leur  faudra  point  d'autres  luges  q  les  poures 
Payés  &  aueugles  qui  ont  cognu  que  c'tftque 
cmportoit  ceft  office-la. Or  la  prouifion  n'eft 
point  feulement  pour  les  corps,  mais  afin  que 
nous  viuions(comme  dit  fainft  Paul)  en  toute 
honnefteté,&  en  la  crainte  de  Dieu  principa- 
lement. Quand  donc  S.Paul  monftre  à  quoy 
les  Magiftrats  doyuent  pouruoir,  &  quel  foin 
ils  doyuent  prendre  de  leurs  fuiets,notammét 
il  nous  propofe  la  crainte  de  Dieu.Quad  dôc 
les  Magiftrats  fouffriront  que  les  boni  edits 
&  les  loix  foyent  violées, &  que  tout  fera  dif- 
fipé,  que  voyans  les  fcandales  aufquels  il  fe- 
roit  befoin^le  remédier, ils  ne  s'en  foucieront 
point, apprenons  qu'il  ne  faudra  point  q  Dieu 
mote  en  l'on  fiege  pour  les  condâner:  car  leur 
condamnation  eft  délia  toute  appreftee,  quâd 
ils  ne  fatisferont  point  à  leur  office  .  Et  ainfî, 
qu'vn  chacun  en  Ion  endroit  aduife  de  faire 
fon  dcuoir,&  q  tous  en  cômun  nous-nous  ren 
diôs  dociles  à  Dieu,  pour  faire  que  miftie  vie 
foit  réglée  à  fa  volonté ,  8c  qu'elle  foit  par  ce 
moyen  irrcprehenfible.  Et  que  cependant  il 
nous  face  la  grâce  que  fa  parole  nous  addrefle 
en  telle  forte  qu'eftans  gouuernez  par  fon 
faind  Efprit ,  nous  ne  demandions  fiuon  de 
profiter  de  plus  en  plus  à  luy  obéir. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftrebonDicu  en  cognoillànce  de 
nos  fautes, le  prias  qu'il  nous  en  vueille  mieux 
toucher  q  nous  n'auons  point  efté  par  ci  de- 
uant, &  que  nous  ayant  ouuert  les  yeux,  nous 
cognoifsions  les  pouretez  qui  font  en  nous 
pour  nous  y  defplaire ,  afin  de  cercher  le  re- 
mède .  Et  que  ce  bon  Dieu  nous  reforme  tel- 
lement que  nous  ne  demandions  finon  deglo 
rifier  fon  fainâ  nom,&:  de  nous  reformer  à  (es 
fainûs  cômandemens.  Ainfi  nous  dirons  tous, 
Dieu  tout-puiiTantvPerc  celefte,&c. 


L  E 


QJ/ATRIEME      SERMON      SVR 

c  I  N  Q_V  lEME    CHAPITRE. 

5  Que  U  \efuefoit  cleue  ri  ayant  pas  moins  dejoixante  ans,  c^ui 
tût  efte femme  d\nfeul  mtCriy 

lo  Ayant  tcfnioignage  en  bonnes  ceuurcs,  fi  elle  a  nourri  fes  en- 
fan  s  yft  elle  a  hébergé  les juruenans,fi  elle  alaucles  pieds  des  faincls,  fi 
elle  afiibuenu  aux  affUgc^fielleaperfeueré  en  toute  bonne  œuure. 

Vand  nous  lifons  l'ordre  qui  contenu  en  ce  paflàgc,  ouy  quant  àlapratti- 

eft  ici  récité  par  fainft  Paul,  que.  Car  où  font  auiourd'huy  les  velues  qui 

nous  dcuons  auoir  grand' hon  ayent  ceft  office  honorabde  , duquel  nous  a- 

te  que  la  doftrine  de  l'Euan-  uons  fait  mention  ci  deflus  ?  Nous  voyons 

gile  foit  prefchcecntrçnous,  donc  que  la  parole  de  Dieu  n'a  pas  vne  telle 

*  que  nous  ne  fçachlons  que  c'eildc  ce  qui  eft  vigueur  en  nous  comme  il  feroit  à  fouhaiter, 

(d'autant 


SVR    LA    I.     A 

d'autant  que  nous  en  aurons  la  doftrine,  mais 
l'exercice  il  le  faut  chercher  bié  loin:  mefmes 
ce  nous  eil  comme  vne  chofe  eftrange&in- 
cognue  :  tant  y  a  que  le  tefmoignage  nous  en 
cil  ici  mis  au  deuant ,  &  non  fans  caufe.  Car 
c'efl  afin  qu'en  premier  lieu  nous  apprenions 
de  garder  vn  tel  ordre  en  l'Eglife,  que  nous 
«ognoifsions  que  c'cft  Dieu  qui  prelîde  au  mi 
lieu  de  nous ,  &  qu'il  nous  gouuerne ,  &  que 
tour  ce  qui  eftde  fou  feruice  nous  l'eftimions 
iàcré.afin  de  n'attenter  rien  par  nosaftediôs, 
fçachans  qu'il  faut  feulement  que  ce  que  Dieu 
a.  eftabli  pour  le  régime  de  ion  Eglife  fe  prac- 
tique, &  que  ce  que  nous  n'auons  point  vne  tel 
le  police  comme  fainft  Paul  la  met  ici ,  nous 
doit  apprendre  de  baifler  les  yeux,  cognoif- 
Cias  que  c'eft  autant  de  vice  en  nous  ,  dont  à 
bon  droidaouspouu3$eftieredai^ue2,&dôt 
les  Papiftes  nous  pcuuent  faire  reproche.  Au 
relie  ,  notons  bien  ce  que  faind  Paul  met  ici. 
En  premier  lieu  il  ne  veut  point  qu'on  elife 
des  vefues ,  ne  qu'on  les  rcçoyue  à  moins  de 
foizantcans.Et  pourquoy?Njus  auons  défia 
expoCé  que  celles  qui  cfloyent  receues  en  tel 
Iieu.renonçoyent  à  leur  mefnage,  &eftoyent 
comme  perfonnes  publiques  pour  feruir  aux 
poures.  Or  (i  quelque  vefue  après  s'eftre  ainiî 
offerte  &  dediee  à  l'Eglife  fe  retraûoit ,  c'e- 
ftojt  vne  leoereté  vileine,&  vn  fcandale.Et  de 
faiâ,cela  eftant  quelque  fois  aduenu.auoit  ti- 
ré vne  queue  encores  plusmauuaife.d'autant 
que  telles  femmes  fe  voyans  comme  notées 
d'iufamie,renonçoyent  du  tout  à  la  Chreftien 
té  comme  pardefp  t.  Voila  donc  la  railon 
pourquoy  faïud  Paul  ne  veut  point  qu'on  prc 
nedes  verues  qui  ay ent  moins  de  foixante  ans. 
Ileft  vray  que  le  mariage  de  foy  n'eft  point 
reprehenlible ,  Si  n'emporte  nulle  mauuaife 
tache, voire  moyennant  qu'vn  chacun  regarde 
àiacôdition  ou  il  eft  appelé. Or  d'autant  que 
les  t.iinmcs  pourroycnt  encorcs  eftre  fuicttes 
à  fe  marier  quand  elles  ne  feroyé:  point  hors 
d'aage,  voila  pourquoy  fainft  Paul  notammêc 
exclud  toutes  celles  qui  ont  moins  de  foixan- 
te ans.  Ceci  eft  bien  digne  d'eftre  noté  :  car 
nous  voyons  comme  l'Èfprit  de  Dieu  a  pour- 
ueu  à  tous  inconueniens,&  afin  que  s'il  y  auoit 
vne  vefue  reccue, qu'elle  n'abandonnaft  point 
l'Eglife  en  renonçant  à  la  promefle  qu'elle 
auoit  donnée.  Et  comment  y  a-il  pourueu? 
Par  le  moyen  que  le  mariage  a  eu  toufiours 
foncours,&  n'a  pas  cfté  condamne.  D'autant 
donc  que  le  mariage  eft  vn  eftat  approuué  de 
Dieu,&  fi  faind.faiiiû  Paul  n'a  pas  voulu  don 
ner  occafion  que  celles  qui  eftoyent  encores 
en  aage  de  fe  marier  ,  fulTent  deftournees  de 
cela,  Se  de  leur  liberté  ,  mais  il  a  voulu  retenir 
&referucr  celle?  qui  n'auoyent  point  occa- 
fion de  fcmaiier  iamaisplus:&:ne  fe  contente 
point  encores  de  l'aagcmais  il  adiouftc,Q«>/ 
Us  ayent  eflé  femmes  J  tn  fml  mari .  Comme 
s'ilditoit  qu'vnc  femme  qui  auracudcux  ou 
txpi«  maris^  encores  poijrrâ  prendre  le  qua- 


T  I  M  O  T  H.  259 

triemepluftoft  qu'vneverueqinaura  tenu  fan 
mefnage  paifiblement  aptes  le  trefpas  de  fan 
mari  fi  elle  demeure  en  viduité,&  qu'on  voye 
par  longue  efpace  de  temps  qu'il  ne  luy  pre- 
ne  point  enuie  de  trouuer  eonditioit nouuelle: 
cela  fait  qu'on  fe  peut  beaucoup  mieux  aflèu- 
rer.  Ainli  nous  voyons  le  moyen  que  ùtintk 
Paul  a  tenu  ici, afin  que  les  vefues  qui  s'e/loy- 
ent  vouées  à  l'Eglife,  perfiftaflent  à  faire  leur 
deuoir  ,  &  cependant  que  Je  mariage  ne  fuft 
point  blafiné  ,&  que  la  liberté  aufsj  ne  futi 
point  rauie  à  perfonne d'en pouuoir  vfer  com 
me  Dieu  l'a  permis.  Et  c'eft  vn  article  que 
nous  deuo'ns  bien  noter  :  car  nous  voyons 
comme  fous  ombre  de  cha  frété  il  s'eft  engen- 
dré tant  d'ordure  &  tant  de  puanttfe  que  le 
monde  en  a  eftéinfeûé.i:  eft  encores  de  pre- 
fent,&  ce  depuis  qu'on  a  forgé  ceile  imagini- 
tion  diabolique ,  que  ceux  qui  s'abftenoyent 
du  mariage  ,  menoyent  vne  vie  angelique  ,  m 
eftat  de  perfeâion.  Là  delTus  il  a  1-àlu  que  les 
gens  d'£glife(qu'on  appelloit)fuflent  priuer 
de  fe  pouuoir  marier.Etpuisilya  eu  les  moi- 
ncries  qu'on  a  eftablies  là  deflus,afin  de  vouer 
virginité.  Or  il  eft  vray  que  les  preftres  Se  les 
moines,  &  les  nonnains  fe  font  bien  abftenus 
du  mariage.Mais  quelle  chafteté  y  a-ij  eue  en 
beaucoup,  voire  qualî  en  tousîNe  voit-on  pas 
auiourd'huy  que  cefte  preftraille  ,  &  tout  ce 
clergé  de  la  Papauté  eft  caufe  que  les  maria- 
ges lont  violez  &  corrompus,  qu'il  n'y  a  plus 
de  foy  ni  honnefteté aucune  ?  Ne  voit-on  pas 
que  les  preftres  qui  ont  le  moyen  d'auoir  des 
putains  ,  tiendront  autant  de  tordeaux  qu'il? 
pourront  deceuoir  de  femmes  &  de  filles  ;  Et 
puis  de  ces  autres  fallourdiers(qu'on  appelle) 
de  ces  preftres  qui  Ce  louent  à  lix  blancs ,  ou  à 
deux  fols ,  pu  à  deuxcarolus  ,  ne  voit-on  pas 
comme  ils  trottent  par  les  rues  afin  de  s'infi- 
nuer  parles  maifons.qu'ils  irôt  çà&  là,&  s'ils 
peuuét  vne  fois  mettre  le  pied  en  vne  maifon, 
c'eft  autant  comme  fi  le  diable  y  auoit  entré, 
&:  encores  pis?Et  pourquoyfCar  comme  Dieu 
a  in'ftitué  le  l'aind  mariage.aufsi  veut -il  qu'on 
l'ait  en  honneur  &  reucrence  ,  Se  quand  on  le 
mefprifc.il  faut  que  Dieu  foit  iniurié  quant  & 
qumtTor  il  ne  peut  loulFrir  cela. Notons  donc 
que  ces  ordures  qui  ont  régné  lufques  ici  au 
monde ,  &  qu'on  y  voit  encores  auiourd'huy, 
font  autât  de  vengencesdeDieu, rie  ce  qu'on  a 
ainfi  prophané  le  laind  mariage, qu'il  a  falu  «ï 
tout  fuft  ainfi  dilTolu  &  de^bordé.Or  il  y  a.en- 
cores  vue  autre  raifon:c'cft  que  Dieu  a  voulu 
punir  l'arrogance  de  ceux  qui  ont  rtietté  le 
remède  qtii  eftoit  bon  &  propre  pour  leur  fra- 
gilité. Ceux  qui  fe  jiourrôt  palkrdu  mauage 
auiourd'huy  ,pourront-iK  fe  promettre  rien 
pour  lereltede  leur  vie  ;  Il  eft  vray  queceur 
qui  fe  peuuent  contenir,  pemient  ,  &  doyutnt 
aufsivùrdectfte  grâce  de  Dieu, ouy  bien  en- 
cores s'ils  font  plus  libres  &  pl'ikfpoicz  pour 
s'addonner  pleinemét  au  ieruice  de  Dieu.Car 
encojes  qu'vn  home  euft  le  don  de  continen- 

G.iiii. 


i4o 


SERMON        XL. 


ce,&  qu'il  fc  pcuft  paflcr  de  Rmine,  lî  toutcf- 
foii  il  cognoift  que  le  mariaçe  liiy  foit  plus 
propre, &  quM  leruira  "mieux  à  Dieuefraiu  un 
li  conioiiu  A  vue  femme, il  le  doit  faire.  Mais 
quand  vn  homme  fera  fi  oucrccuidé  dédire, 
le  ne  me  veux  lamais  marier, ie  fay  vœu  à  Dieu 
que  ie  viiiray  en  chaftetéin'eft-ce  pas  le  inoc 
querde  Dieu  &  du  faiiiil  mariage  ?  Nous  ne 
pouuons  pas  remuer  vn  doigt  fans  la  pure  gra 
ce. Or  il  y  a  des  dos  que  Dieu  n'élargit  point 
à  tous ,  mais  il  les  diltnbue  comme  bon  luy 
femble.  Or  la  continence  eit  nommée  entre 
tous  les  autres, &  la  manière  d'en  vfer  n'eft  pas 
facile,  qu'vn  chacun  ne  comprend  point  cela, 
Mtfft.ip.  dit  leftis  Chrill:&  iainft  Paul  môftrc  que  c'eft 
II.  vn  donlîfpecial  qu'il  ne  nous  en  faut  point 

faire  vne  règle  generale.pour  dire  qu'vn  cha- 
cun fe  promette  ce  qu'il  ne  peut  pas  faire:c'eit 
pafTer  noftre  mefure  que  cela.  Et  puis  quand 
nous  ne  voulons  point  vfer  du  remède  5  Dieu 
nous  a  mis  en  main  pour  nodlre  foiblefle.n'elè 
ce  pas  drelTer  les  cornes  pour  hurter  contre 
k  luy  ?  Il  ne  fe  faut  point  donc  esbahir  iî  Dieu 
s'eft  vengé  aufsibien  tn  ceft  endroit, quand  il 
a  permis  que  nous  ayons  veu,&  que  nous  voy 
ons  encores  auiourd  huy.dcs  fc.idales  fi  enor 
mes  que  les  cheueux  nous  en  deuroyent  dref- 
ferenlateftc.  Car  il  n'y  aura  pas  feulement 
les  paillardifes  ,  maisil  yades  chofes  beau- 
coup pluçdeteftables:&  c'eft  le  payement  de 
leur  arrogance, quand  ils  ont  bien  ofé  defgor- 
gerce  blafpheme  qu'ils  ont  tiré  de  cefte  ca- 
uerne  d'enfer  ,  que  le  mariage  efloit  vne  pol- 
lution, &  que  pour  mener  vne  vie  angelique, 
pour  mener  vn  eftat  parfaite  entier, il  s'en  fa- 
ioitabflenir  du  tout.  Dieu  donc  pour  venger 
vne  impieté  fi  brutale  ,  a  lafché  la  bride  a  .Sa- 
tan,en  forte  que  les  chofes  ont  efté  ainfi  con- 
/ufes  comme  on  les  voit. Et  d'awtant  plus  nous 
faut-il  bien  noter  ce  palTage  defainft  Paul, 
où  nous  voyons  combien  que  le  feruice  que 
faifoyent  les  vefues  à  PEglifc.fuft  bon,neant- 
moin-s  que  Dieu  n'a  point  voulu  que  cela  em- 
pefchaft  le  cours  ordinaire  du  mariage.  Et  au 
reftc,il  n'a  point  voulu  qu'5  receuft  les  vefues 
«lii  cftoyent  encores  en  cllat  de  fe  marier, 
non  pas  que  cela  euft  encores  empefchélema 
liage ,  mais  tant  y  a  qu'il  veut  monllrer  qu'il 
faut  que  la  liberté  que  Dieu  a  eftablie  au  mon 
dc.foitreferuee  à  chacun,  S(  que  l'honneur  du 
fainft  mariage  foit  maintenu. Et  en  cela  voit- 
on  que  Dieu  n'cft  point  contraire  en  {es  com 
Kiandemens,  mais  il  faut  que  tout  s'accorde, 
Yoirc  moyennant  que  nous  puifsionsnousaf- 
fuiettir  pleinemêt  àluy.Q^ât  àce  que  fainft 
Paul  adioufte  ,  Quilf.:u-tlifue  les  -refiles  ayent 
tefmoi^nitge  en  toute  bonne  auurt  :  par  Cela  il 
^  declareqceux  qu'on  appelle  en  cftat  public, 

"  f..  ne  doyuent  pas  eftie  conilituez  fous  bonne 

efpetanccpour  dire  ,  On  verra  qu'vn  tel  fçait 
faire:  mais  que  délia  on  doit  auoir  eu  quelque 
expérience.  Comme  fi  on  prend  vn  homme 
pour  eftre  mi«iii[C  de  la  parole  de  Dieu  ,  & 


qu'on  dife,  Pofsible  qu'il  fe  gouuemera  bien, 
il  ne  s'eft  point  desbauché,on  n'a  point  veude 
mal  en  luy  :  &  qu'on  le  lette  ainfi  à  la  volée. 
Dieu  punira  celle  tcnienté.  Et  pourquoy?  Il 
faut  que  le  tefmoignage  précède ,  que  celuy 
qu'on  choifit  en  vne  charge  tant  difficile  ic 
honorable, foit  défia  efprouué,&  qu'on  ait  co- 
gnu  fa  fufhfance.  Autant  en  eft-il  de  tous  a». 
très  office^:  il  faut  qu'auparauat  on  ait  cognu 
ce  qu'on  choifit.  Et  le  vous  prie,  fi  on  va  au 
marché  pour  acheter  ou  des  poires, ou  des  pe- 
ines ,  encores  en  voudra-on  auoir  le  gouft,  & 
en  fçauoir  le  creu.  Et  quand  il  eft  queftion  de 
choifirdes  gens  qui  feruentàDieu  ,  voire  en 
des  eftats  ex cellens,  qu'on  les  prenecommeft 
on  faifoit  vn  Roy  de  la  feue  ,que  le  premier 
venu,&leplusefceruclé,  que  celuy  là  occupe 
la  placc,&  où  fera-ce  allerMinfi  donc  notons 
que  quand  il  e/i  queftion  d'ordonner  gens  eo 
eftat  public.il  faut  qu'ils  foyent  efprouuez,  & 
qu'on  fe  puiflc  fier  en  eux,q  défia  on  ait  quel:- 
que  tefmoignage  qu'ils  feront  deuement  leur 
office :&  fi  on  y  procède  autrement,mal-heur 
fur  ceux  qui  s'auancent  ainfi.  Carfinousfai- 
fons  côparaifon  de  l'office  dont  ttaitte  fainft 
Paul  en  ce  palîàge  ,  auec  le.'  charges  qui  font 
plus  hautes,  &  qu'on  n'ait  nulle  difcretion, 
&  qu'on  y  aille  à  l'eftourdie  ,  c'eft  vne  plus 
grande  condamnation  pour  nous.  Voila  donc 
ce  que  nous  auons  à  retenir  quand  fain£l  Paul 
monftre  qu'il  faut  que  les  vefues  ayent  tefmoi 
gnage.  Or  notamment  il  dit ,  En  toute  bonne 
ctuHTe.ll  eft  vray  que  plufieurs  vertus  font  re- 
quifescn  vne  vefue  qui  doit  eftre  receue:maiî 
le  principal  eft,qu'on  l'ait  vcu  mettre  la  main 
à  la  pafte,  &  qu'elle  ait  déclaré  par  bônes  œu- 
ures  que  c'eft  à  bon  efciét  qu'elle  craint  Dieu, 
&  qu'elle  le  veut  feruir.Et  ceci  ha  plus  longue 
eftendue  :  car  combien  qu'aux  miniftres  de  la 
parole  de  Dieu  le  fçauoir  foit  requis, la  dexte 
rité  d'enfcigner,&'  autres  grâces,  tant  y  a  que 
la  preud'hommie  tient  toufiours  le  fouuerain 
degré.  Qiy  fi  vn  homme  n'a  vefcu  en  forte 
qu'on  puifle  iuger  qu'il  lia  vne  droiture  &  in- 
tégrité en  luy  ,  que  fera -cède  tout  lerefte  fî- 
non  fumée  ?  On  aura  beau  auoir  fçauoir  ex- 
quis ni  beau  lang.ige  ,  &  tout  ce  qu'on  pourra 
fouhaitter  au  rcfte  :  iî  l'intégrité  n'eft  en  vn 
homme, tout  cela  n'eft  que  vanité,tout  eft  cor 
rompu. Autant  en  cft-il  &  desMagifhats,*:  de 
tous  offices.  Ainfi  donc  poifons  ce  mot  de  S. 
Paul, ou  auec  le  tefmoignage, il  adioufte  l'elpe 
ced'approbatiôquedoyuent  auoir  tous  ceux 
qu'on  met  en  quelque  cftat  public.  Au  refte, 
fainft  Paul  monftre  quelles  bonnes  oeuuresil 
entend, c'eft afçauoir(dit-il)  5(7<j  yepteanmr 
ri  fes  enfuns  ,  fi  elle  a  hébergé  les  prures  ejlrnn- 
girs  ,0"  fubuenu  à  ceux  tjui  efl-,yint  en  itffif 
éHon,  &  fi  elle  s'efl  employée  à  bit  n  faire  à  ceux 
qui  iiHoyent  netefiité  ae  /i'»  fi  cours .  Or  il  nous 
faut  bien  noter  ce  que  fainft  Pauldiiicircaril 
fpccifie  les  bônes  cruures.Non  pas  qu'il  nous 
faille  auoir  efgard  mxx  pompes ,  ni  à  la  cere- 

mouie: 


s  V  R    L  A     LA 

monieimais  qtiandon  apperçoit  cjiielqiieboii 
ne  fimplicité  Si  droitc.'comme  ijiund  vue  tcm 
nie  aura  nourri  fes  enfaiis ,  &  «qu'elle  les  aura 
entretenue  &  inftruits  en  la  crainte  de  Dieu. 
Et  comment  cela  ^  Si  vne  femme  n'a  point  eu 
d'enfans,eft-ce  à  dire  qu'elle  foit  moins  apte 
à  celt  office?  Nenni  :  mai<;  il  fuliît  qu'on  eliie 
celles  qu'on  coguo.ft  crtrc  propres  pour  met- 
tre la  main  à  l'ocuure.qui  n'ont  point  cfle  c5- 
me  ces  délicates  qui  diront ,  Voila  ,  ie  ne  puis 
pas  nourrir  mon  entant,  i\  ie  royoye  cner.ie 
mourroye  de  dueil.ie  ne  pourroye  pas  porter 
la  peine. Aux  nourrices.aux  nourrices, incon- 
tinent qu'il  eft  parti  du  ventre.  Sainâ  Pau! 
donc  monftre  que  les  femmes  ne  feront  point 
propres  pour  feruir  à  Dieu&  a  fon  Eglife,  lî- 
non  qu'elles ayent  efté  bonnes  mefnagcres  en 
leur  maifon.qu'elles  ayét  prins  peine  de  nour 
rir  leurs  enfans,&  de  foufFrir  les  molcftes  qui 
y  font.  Il  eft  vray  qcela  ne  fe  peut  faire  fans 
grand  chagrin:  mai',  fi  eft-ce  que  puis  q  Dieu 
accepte  ce  feruice,&  qu'il  y  a  obligé  les  fem 
ines(comme  nous  auons  veu  par  ci  dciiant)  & 
que  c'eften  cela  qu'il  veut  efprouucrlcur  pa- 
tience,non  fans  caufe  derechef  fainft  Paul  dit 
ici.que  fi  vne  femme  fait  trop  de  la  migrwrde, 
&  qu'il,  n'y  ait  que  le  babil  en  la  langue.qu'el- 
Je  ait  feulement  quelque  belle  parad'., qu'il  ne 
Teut  point  qu'on  Telife  ayant  cfgard  à  l'Sppa 
rence, comme  fi  on  eftimoit  ù.  Chreftiété  par 
belles  mines:  fy,fy,tout  cela  n'eft  que  fatras. 
£t  pourtant  il  ne  fc  faut  point  arrefter  à  cel- 
les qui  ont  quelque  monftre  &.  quelque  hypo 
crifie.mais  qu'on  regarde  les  femnves  qui  ont 
volontiers  exerce  leur  office  ,  &  qui  s'y  font 
employées  du  tout. Vne  femme  cognoift-elle 
que  Dieu  l'oblige  à  nourrir  fes  enfans?elle  ne 
lera  point  pompeufe  ni  trop  délicate  ,  qu'elle 
ne  s'applique  à  faire  fon  petit  mefnagne,  non 
point  feulemêt  pour  feruirà  fon  mari, ou  pour 
auoir  le  foin  de  fa  famille.mais  pour  bien  fai- 
re felô  fon  pouuoir  &  faculté  à  fes  prochains, 
pour  fubuenirauxpouTes&  indignes, &fecou 
rira  ceux  qui  n'ont  n'aide  ne  fupport.  Et  no- 
tamment (ainû  Paul  parle  des  eftrangers,d'au 
tant  qu'en  ce  temps-la  lesperfecutioes  eftoy- 
ent  grandes ,  &  que  beaucoup  de  poures  gens 
eftoyent  chaflèz  de  leurs  maifons, qu'il  faloit 
qu'ils  demeuraflènt  en  pays  eftranges  pour  fe 
fauuer.D'autat  donc  que  la  cruauté  des  enne- 
mis de  Dieu  eftoit  telle,&  que  les  poures  gens 
eftoyent  côme  defpourueus, qu'ils  ne  fçauoy- 
ent  où  fe  retirer, il  faloit  bié  qu'il  y  euft  quel 
que  charité  entre  les  Chreftiens  pour  les  re- 
ceuoir.  Et  atnfi  notamment  fainft  Paul  mon- 
ttreqcelles  quin'ont  point  eu  de  tels  exer- 
cices, qui  n'ont  point  efté  efprouuees  de  lon- 
gue main  pour  bien  faire  iufques  aux  eftran- 
gers.quand  elles  feront  dédiées  à  PEglife.que 
elles  ne  feront  iamais  propres  pour  faire  ceft 
eftat  public  de  penfer  les  poures.carcela  leur 
fera  en  de(clain.Nous  voyons  donc  maintenît 
riuieiuioade  S.  Faut.  Orlàdeflùs  reteuors 


T  I  M  O  T  H.  241 

en  fomme.quand  nom  atîons  à  ordonner  g.tns 
en  quelque  ofKcc  ,  qu'il  faut  regarder  ce  que 
l'oHlce  rcqiiiert.Ya-ilprudéce  requiri.?iUaut 
donc  cht relier  vn  home  prudent. Y  a-il  droi- 
tujc  &  preud'homniie,côme  elle  eft  toufiours 
en  quelque  cfrat  que  ce  fou  r  il  faut  que  nous 
ayons  ce  poind  pour  le  principal,  &  qu'il  foit 
préfère  à  tout  le  reftc.Apres,y  a-il  diligéce  & 
chofes  femblablesîil  faut  dôc  pouruoir  à  tout 
cela.  Et  c'cft  ce  que  nous  auons  à  noter,  qu.'il 
faut  que  nou^  ayon>.  les  yeux  bandez  pour  ne 
point  accepter  les  perfonnes,iuf.jues  à  ce  que 
BOUS  ayons  fait  côparaifon  de  l'tftat  où  nous 
fomines,  pour  l'accôparer  à  noftre  fùfïîfance. 
Car  R  nous  cémençons  par  l'hôincpour  dire. 
Ho,  voila  vn  homme  qui  eft  vn  galand,  il  fera 
menieil)es:tout  cela  ne  fera  que  pope  &  vaine 
apparence. Mais  fi  on  s'enquiert  de  l'eftat  pre 
mierement,&  qu'on  regarde,.  Voici  vne  chofë 
difficile  qui  ne  fe  peut  pas  exetuiter  aifémentr 
qui  eft-ce  qui  en  peut  venir  à  bout?  Et  puis  eu 
fécond  lieu  il  faut  auoir  bône  prudécei&alors 
on  regarde  fi  l'homme  refpond  à  ce  qui  eft;  re- 
quis.Mais  quâd  on  cômence  par  la  perfonne^ 
tout  eft  gaftc&  perucrti.Ainfi  donc  apprenôs 
(fil  Viiat  la  doûrinede  fainft  Paul)qti'en  choi- 
filîant  ceux  qui  doyuét  exercer  quelque  char- 
ge en  l'Eglife  de  Dieu,deconfiderer  fur  tout  - 
ce  que  l'office  porte.  Et  cependant  que  nous 
.iduifions  d'appliquer  en  eftat  ceux  qui  feront 
cogiiiisfuffifîs,&qaur5taufsimôftrédequoy 
en  toute  leur  vie,&  qui  auront  efté  approuufi 
défia  de  longue  main.C'eft  ce  que  nous  auon» 
à  retenir.  Or  S.  Paul  adioufte  quant  &  quant, 
(^'onreftttf  les  -refues  plus  ieunes  Et  pour— 
(^noy?  Qstand  elles  ont  rihlé  contre  U  fus  Clirijl, 
elles  fc  -veulent  marier. O'  1^  diffus  elles  ont  -vne 
iufte  condamnation ,  poarce  cjn'elles  nnocent  leur 
fnfemicre  foy.  Or  quand  fainft  Paul  côinandeà 
Timothee  de  rcietter  les  vefues  plusieunes, 
ce  n'eft  pas  pour  leur  faire  deshonneur,côms? 
il  y  en  a  qui  fe  fentiront  niefpriftes  quand  on 
ne  les  choifira  peint  en  eftat. Voire, mais  fi  el- 
les n'y  font  point  propres?  Il  faut  doc  q  nou? 
regardions  l'intention  de  lainrt  P.iul, qu'il  n'a 
point  voulu  que  les  vefues  plus  ietines  fuflent 
en  eftat  public, à  caufe  de  leur  ange:  mais  c'eft; 
afin  de  remédier  aux  icandales  qui  pouuoyent 
adiienir,  d'autant  qu'vne  vefue  s'tftant  ainlT 
offerte  au  fciuice  de  l'Eg'ife  ,fi  elleappctoit 
de  fe  remarier,troublcit  l'ordre  qui  eftoit  re— 
ceu  entre  les  fîdcres,&  mefme»  elle  faulToit  fk 
promefle. Voila  donc  .î  quoy  fàinù  Paul  a  re- 
gardé notamment.  Et  c'cftaufsi  pourquoy  ii  . 


dit  <ijt''el'.sr;bhnt  f'^"'"'  ^'f"'  Chrifl.ou  qu'eli 
les  regimbent,qu''eljj^:bntdifloUies,&  fe  ict 
tent  à  l'abandon  end  .pitdeDicu.  Etlaraf— 
fonPCe  qui  fera  à  fupporter  en  vne  fémc  ma- 
riée,ne  doitpointcftre  fouffèrt  en  vne  vefue- 
teUe  comme  il  en  eft  ici  parlé.  Si  ie  cuidoye- 
faire  comme  <^ielque  ieune  compagne  àmi^ 
rier  ,  &  que  ie  me  permiflc  vne  telle  licence 
comme  vn  homme  qii  n'ha  nulle  charge ,  que- 

H.i/ 


14* 


S  E  R  M  O  >J       XL. 


fcroit-ee?  pourroit-an  foulfnr  cela  ?  U  faut 
qii'ily  aitgriuité  &iujdcrtieenceiix  qui  l'ont 
en  elUt,  &  qui  ont  quelque  charge.  Notons 
bien  doc  que  faind  Pauldifain  que  telles  vcf 
ucs  ont  riblé  contre  lefusCKnft.lignihe  qu'el 
\e\  (e  font  lilché  la  bride  à  beaucoup  de  diilo 
lutions ,  tellement  qu'elles  font  nnpudiques 
qu'il  y  auoit  de«  gelles,  &  le-,  côcenauccs  qui 
n'cftoyent  point  pour  refp.indre  àleur  citât. 
Voila  quec'eftde  iibler  contre  leûiv  Cluift. 
Orileltdit  q:^e  teltrs  vffties  ont  leurcomlam- 
nation  ,  ^curce  quelUi  Mit  renonce  leur  frtmiiTt 
f'y.  Deuauc  que  palFcr  outre  il  faut  regarder 
ce  que  J'aind  Paul  a  tntendu  par  la  première 
fojf.  Les  Papiftes  ont  efté  ehfrontcz  quand  ih 
allèguent  ce  pailàgc  pour  approuucr  les  vœux 
de  leurs  moiueN:  uiaiv  en  cela  voit-on  q  Dieu 
les  a  du  tout  aueuglez  ,  Se  que  d'eux-mcfmet 
ils  le  prollituenc  iSc  le  ietteut  en  opprobre. Et 
pourquoyîÇar  ih  ne  fi;-auroyent  mieux  decla 
rçr  qu'ih  ont  direiiemét  bataillé  cotre  Dieu, 
&  ont  voulu  (c  dotuicr  licence  contre  luy  ,  Se 
fc  font  defpitez  contre  ce  qu'il  auoit  eftabli 
pour  vn  ordre  perpétuel. En  premier  lieu  no- 
llre  ScigiHur  n'ordonne  point  de  vorux  ne  de 
promeires  pour  dire  que  cela  doyue  abolir  le 
ma  nage, cS:  comme  lî  c'eftoit  vn  eftat  de  per- 
feftion.ainfiquelcs  Papifte?  l'ont  penféimais 
c'eft  à  vn  autre  regard.  Voila  vue  vefuc  qui  le 
donne  au  feruice  de  TEgliferor  elle  n'eft  plus 
en  là  liberté,  il  tant  qu'elle  s'applique  à  faire 
ce  qui  eftdc  fa  charge, côme  fi  elle  eftoit  ma- 
riee.Or  en  cela  elle  a  fait  défia  côme  vne  pro 
mefle:  mais  cefte  promelTe  fait-elle  que  le  ina 
riage  loit  poilu  de  foy,&  que  celle  continen- 
ce (qu'on  appelle)  loit  vnever:u  angelique? 
Nenni:Dieu  n'a  point  regardé  à  tout  cela. Or 
au  contraire, quand  les  Papiftes  ont  introduit 
les  vœux  des  nonains  8:  des  moines,  fur  quoy 
fe  font-ils  fondez?  C^ue  c'eftoit  vnechofe 
f»infte  de  foy  que  de  s^abftenir  du  mariaçc, 
que  c'efloit  vu  eftat  de  perfeiftion.  Voila  vne 
ûiablerie  en  premier  lieu. Or  paiTons  plus  ou- 
tre :  &  le  cas  pofé  que  la  fin  pcMir  laquelle  les 
yapiftesontcontrouuc  tels  voeux  fuit  bonne, 
tant  y  a  que  yoila  Dieu  qui  a  déclaré  qu'il  ne 
faut  point  qu'rne  femme  attente  de  s'abftenir 
du  mariage. iufques  à  ce  qu'elle  ait  pafle  l'aage 
de  faixante  tn'i.  Et  pourquoy  cela  ?  il  y  a  du 
danger.Qui  le  Toit?  c'eft  Dieu:  le  remède  cft 
tel  comme  il  nous  eft  ici  monftré. Or  que  font 
les  Papiftes  là  defluj?Il  n'eft  point  qucftiôde 
ce  que  Dieu  défend, ne  de  ce  qu'il  commande, 
pluftoft  ils  rcnuerfcnt  Se  fouUent  au  pied  tout 
l'ordre  qu'il  a  inftitué  ,  3:  vont  ertablirdes 
Toeux  à  leur  pofte.Et  quels  ?  Il  eft  vray  qu'en 
leurs  canons  anciens  on  voit  qu'il  n'eft  point 
licite  d'ordonner  vne  nônain  iufqucs  à  l'aage 
de  qiiarantcneuf  ans,&  encore?  cela  petit  à  pe 
lit  eftoit  furuenu  de  corrupti5:&  puis  ils  font 
▼eniis  à  diminuer  iufqaes  à  quarante  an$:&  on 
voit  lescanoris  quiontefté  faits  de  cela. Et 
dcptjii  on  s\ft  rauifé.Et  nous  viédrons  i  ttem 


te,  iufques  à  la  moitié  du  terme,  &  de  l'inten-  • 
tion  que  faind  Paul  ordônc.Et  à  la  fin  ils  font 
venus  à  y  mettre  les  petisenfans  quine  fçi~ 
uent  point  encorej  parler ,  qui  n'ont  encores 
nulle  cognoiiraiice.  Etainfices  mal-heureux 
ne  fçauroyent  mieux  monftrer  qu'ils  ont  ren- 
uerfé  &  corrépu  la  parole  de  Dieu  pour  efta- 
blir  ce  qu'ils- ont  fongé,  qu'ils  ont  pollué  le 
faind  mariage, &  l'ont  reicttc  come  rnecho- 
fc  que  Dieu  aurait  défendue  ,  pour  fe  profti- 
tucr  en  toute  rilenie&ordure,où  onvoit  que 
ils  l'ont  plongez. Et  par  cela  on  peut  conclure 
qu'ils  fe  font  cleuez  manifeftemét  contre  Ic- 
fusChrift  ,  qu'ils  luy  ont  rliii  fon  au.horité, 
pour  dire  qu'il  n'ait  plus  de  puifTancc  pour  les 
gouuerner,mais  qu'ils  peuuent  faire  ce  q  leur 
tcfte  &  leur  phantâfie  porte. Et  quel  facrilege 
eft-ce  làfQûjnddôc  iln'y  auroit  que  ceft  ar- 
ticle, encores  voit-on  J  les  Papiftes  ont  pro- 
phané  la  parole  de  Dieu:&  toutesfois  fi  eft-ce 
qu'ils  nous  allèguent  ce  pallage  ponr  prouuer 
que  c'eft  vne  belle  choie  que  de  vouer  chaftc- 
tc,&  qu'il  y  a  quelques  vccui  qui  font  approu 
uez.  Vray  eft  q  tous  vceiix  en  gênerai  ne  font 
point  à  condamner  ,  mais  il  faut  detefter  tou» 
ceux  qyi  contreuienét  àl'ordônancedcDieu. 
Voila  Dieu  qui  a  ordonné  le  mariage  atout 
fans  eiceptionis'il  y  a  quelqu'vn  qui  fe  puill'e 
côtenir,5ibien,  voila  vne  g i ace  que  Dieu  luy" 
fait:cepcndant  ilfaut  qu'il  chemine  en  humi- 
lité,qu'il  fe  recômandeà  Dieu  pour  dire, Sei- 
gneur, tu  m'as  gouiierné  par  ton  fainâ  Efprit 
iiifqiies  ici,i!cfpcre  q  tu  mecôduiras  à  l'adue- 
nir:  toutesfois  s'il  te  plaift  m'appeller  au  ma- 
riage, ce  n'eft  pas  raifon  que  ie  contreuicne  â 
ton  ordônancc.  Voila  doc  rhiimilitc  qui  doit 
cftre  en  tous  enfansdc  Dieu.  Or  inainteniit  lî 
vn  homme  ou  vne  femme  fait  vœu  pour  rom- 
pre le  mariage,&  pour  cftablir  vn  eftat_de  vi- 
ure  lequel  ils  ne  fçauét  pas  s'il  cft  plaifant  Sc 
agréable  à  Dieuounô,voilavn  voeu  qui  eft  du 
tout  contraire  à  Dicu&  à  fa  parole:  &  refont 
les  vœux  que  nous  reiettons.Or  tels  font  tous 
les  vœux  de  la  Papautéicar  les  preftrej,&  moi 
nés,  &  nonnains  vouent  de  iamaisn'eftre  ma- 
riez pourdefpiter  Dieu  notoirement,(ainfi  â 
nous  auons  dit)comme  s'ils  auoyent  la  chaftc 
té  en  leur  manche, comme  s'ils  eftimoyét  que 
lemariage  fuft  thc  pollution:car  en  s'en  vou- 
lant garder  ils  cftabliflènt  en  ce  monde  vne 
façon  de  viure  nouuelle  &baftarde  que  Dieu 
n\i  iamais  cognue.  Comme  quand  les  moines 
vouent  poureté, c'eft  pour  eftre  nourris  au  def 
pens  d'autruy  :quâd  ils  youen  t  obedience,c'cft 
pour  cftre  exemptez  de  toutes  Joix,&  de  tou- 
te bonne  police. Car  l'immunité  dont  fe  van- 
te ce  clergé  Papal.qu'eft-cc autre chofe  finon 
vne  licence  de  viure  comme  bon  leur  femblc- 
ra?  Les  moines  ne  feront  fuiets  ni  .i  Rois  ni  i 
Princes, ni  à  pères, ni  à  mères  :  bricf ,  ils  per- 
uertiflcnttout  ordre  de  nature.  Et  puis  ils  ne 
font  point  fuiets  à  Dieumefme;  ils  voueront 
feulement  obcilïànce  euuers  leur  Pricur.voiri 

pour 


SVR    LA    r     A    TIMOTH. 


i45 


pour  s'en  mocqucr  encores  comme  on  le  voit 
manitciamciu.C'clldonc  vue  conKulioiidia- 
bolicjuc  ijuc  de  tous  les  vœux  qui  ont  elle  ain 
fi  eftâblii  contre  la  parole  de  Dieu,  &cc  font 
ceux-Ja contre  Iciquels  nous  crions  auiour- 
d'huy.Et  ainlî  donc,  ii  les  Papifles  vouloyent 
faire  trouuer  leurs  vœux  bons  &  légitimes, en 
premier  lieu  il  faudroit  qu'ils  cognufTent  que 
le  niariagc  de  foy  eft  bon  &  fain£i,&  que  qu.îd 
on  s'en  abAieni.cela  fe  doit  faire  pour  vncau 
ire  fin  &  regard,comme  pourauoir  plus  de  li- 
berté de  ferutr  à  Dieu,&  de  s'éplover  en  quel 
que  charge  en  laquelle  on  eft.  Voila  donques 
ce  qu'il  laudroïc  que  les  Papiftes  fciflent  en 
premier  lieu,&  puis  obferuer  la  rcgle  de  fainû 
Paul,qu'il  met  qu'on  ne  prefume  point  de  vou 
crchafteté,ou  continence.finon  qu'on  ait  paf 
ie  l'aage  de  le  inarier.Car  les  Papiftes  abulent 
encores  de  ce  mot,quâd  ils  difent.  Vouer  cha- 
ileté  :  comme  û  vn  mari  n'elloit  point  charte 
auec  fa  femme.  Or  cela  eft  faire  iniure  trop 
grande  à  Dieu,  lequel  a  voulu  que  l'home  fuit 
«onioint  à  fa  femraercat  fi  c'eftoit  vne  vie  dif- 
folue  &  impudique,  où  feroit-ce  aller?  Vray 
eft  que  beaucoup  de  gens  abufent  du  mariage, 
&  y  en  a  de  tels  qui  ne  différent  gueres  à  pail- 
lards :  car  ils  ne  cognoiflènt  point  qu'ils  font 
coDioints  au  nom  de  Dieu  pour  fe  tenir  fobre 
ment  &  en  toute  modeftie.  Mais  tant  y  a  que 
le  mariage  defoy  n'empefche  point  que  les 
liômes  &  les  femmes  ne  foyét  pudiques. Mais 
reuenonsà  la  rcgle  de  faind  Paul.  Ilfaudroit 
que  les  nonnains  cuflènt  foixanteans  deuant 
que  vouer  chafteté  :  &  puis  qu'elles  ne  vouaf- 
ienc  point  pour  Étire  des  poupées  en  vncloi- 
ûreji:  fe  tenirlà  pour  faire  des  agios  ,  mais 
que  ce  fuft  pour  feruir  auv  poures,&  pour  s'em 
ployer  à  bon  efcient  en  la  charge  qui  leur  fe- 
roit  coramife.  Quant  aux  hommes,{î  le  terme 
de  foixante  ans  eft  afsigné  aux  femmes  ,  il  en 
faudroit  bien  quatre  vingts  pour  les  hommes: 
&  alors  les  mariages  ne  feroyent  point  ainfi 
gourmandez  comme  ils  font ,  qu'il  n'y  aiiroit 
point  vne  telle  corruption  qu'on  la  voit  par 
tout. Mais  il  faut  bien  que  Dieudefployefon 
ire  fur  tous  ceux  qui  fe  font  eleuez  en  tel  or- 
£ueil,(côrae  nous  au5sdit)pour  nier  le  fainâ 
mariage. Au  rcfte,  quâd  fainft  Paul  dit  que  ces 
femmes  dont  il  parle  ,  ont  leur  côndamtuition, 
pource  qu'elles  ont  renoncé  à  leur  première 
foy,  il  met  ce  mot ,  d'autant  que  ces  femmes 
ayans  ainfi  riblé  fe  feparoyent  du  tout  de  l'E 
glife&  de  la  Chreftiété.ttde  faift.nous  voy 
ons  quand  vn  homme  aura  perdu  toute  honte, 
qu'il  fe  desborde  iufqu'au  bout ,  &  mcimes  il 
fait  fa  gloire  d'eftre  mefchant.  Si  vn  homme 
n'eft  point  en  mauuaile^ftime,  encores  retien 
dra-il  fa  réputation  «  crédit  :  mais  quand  il 
voit  que  fa  melchancetéfedefcouure,  &  qu'il 
eftdeteftable  à  toutes  gens  de  bien  .alors  il 
s'en  va  cueillir  vue  audace  ,  qu'il  femble  quM 
ait  côgc  de  mal  faire,&  de.dcfpiter  Dieuuinfi 
^ue  Aous  ToyoM  qu'il  j  ena  <k  ces  ruftret 


qui  femocqtientde  toute  religion  ,  qui  foi; f 
mai  ris  fi  ijiuiqii'vn  hait  fculcmét  fcmblantde 
vouloir  feruir  à  D. tu, Ho, tu  es  du  rang  des  hy 
pocritcstu  es  mortifié.  Voila  les  blafphemet 
qui  feront  oiiys. Et  où?en  la  Papauté?  Nenni, 
nenni  :  ici  au  mil'cude  nous, on  verra  ccsga- 
lans  qui  fe  gaudiflent  de  Dicu,&  de  toute  re- 
ligion ,  qui  en  font  venus  iufques-là,  de  blaf- 
phemer  ainfi  Dieu  à  gueule  ouuerte.Et  qui  lej 
V  a  amenez  ?  Nous  voyons  le  miroir  en  fainft 
Paul, d'autant  qu'on  leur  a  permis  vne  licence 
de  mal  faire, qu'on  les  flatte  en  leurs  mefchan 
cetez,  &•  voyans  cela  ils  fedcsbordenr  envne 
plus  grande  audace  :  mais  c'cftpour  les  faire 
précipiter  en  ruine, quâd  la  licence  qu'on  leur 
a  donnée  a  eftt  caufedc  les  faire  plus  empi- 
rcr:cela  augmentera  aufsi  tant  plus  leur  con- 
damnation .Et  pourtant  nous  auons  bien  à  no« 
ter  l'admonition  générale  de  ce  lieudefainft 
Paul,  c'ert  afçauoir  quand  on  choifit  des  çen» 
pour  les  mettre  en  office ,  on  doit  regarder  fi 
ils  y  feront  propres  &  idoines,  ou  autrement 
c'eft  leur  mettre  la  chorde  au  col  ,  comme  on 
dit. Si  vn  homme  décline  en  fon  petit  mefna- 
ge,&  qu'il  ne  s'acquitte  point  de  fon  deuoir, 
il  n'efchappera  peint  la  main  de  Ditu:mais  ce 
pendant  encores  Ce  tiendra-il  en  quelque  hon 
ncfteté,  àce  que  fa  vilenie  ne  foi t  cognuedc 
tout  le  monde  :  il  voudra  toufiours  qu'on  le 
tiene  pour  homme  debien.  Mais  quand  qucl- 
qu'vn  iera  aiLincé ,  &  cependant  fera  vn  con- 
tempteur de  Dieu  ,  vn  homme  prophane  ,  vn 
homme  fans  loyauté  ,  vn  blafphemateur,  ra 
homme  qui  fera  affamé  d'vne  part  ,  Si  qui  ne 
demande  que  d'en  auoir  ,  qui  ne  fçait  de  quel 
cofté  en  attraper,  de  l'autre  cofté  qui  fera  ef- 
claue  de  Satan  ,  vn  homme  qui  fe  fentira  obli- 
géaux  nicfchans,pourdire,llfautque  ie  pafle 
par  leurs  mains. Et  pourquoy?  Ce  font-ils  qui 
m'ont  eleué  ,&  faut  que  ie  me  maintienepar 
leur  moyen. Qjîand  donc  on  mettra  vn  hom- 
me eneftat,  qui  fera  tot^tment  deftitué  de 
l'Efpritde  Dieu  ,  n'elf-ce  pas  pour  le  ruine  r, 
8c  pour  luy  faire  rompre  le  col?II  eft  bien  cer 
tain:carDieu  dif  ipcra  toutceja.d'jutant  que 
leschofesont  efté  conduites  tout  au  rebours 
de  fon  intention,&  qu'on  n'a  point  eu  efçard 
à  fon  honneur,ni  au  falut  du  peuple.  Et  ainfi 
notons  bien  que  quand  on  eleue  des  gens  qui 
ne  font  point  propres  pour  exercer  vn  eftat, 
c'eft  autant  comme  fi  on  leur  mettoit  la  chor 
de  au  col.  Voila  qu'apportent  tontes  ces  bel- 
les faucurs  pour  dire  ,  le  feray  \ aloir  ceftuy- 
la,il  fiutau.îccrceftuy-ci.Car  il  faut  en  la  fin 
que  la  contulîon  en  viene  fur  la  tefte  de  tous 
ceux  qui  s'en  feront  mfflfï. D'autant  plus  dôc 
nous  faut-il  bien  noter  la  doftiine  qui  eft  ici 
couchee.c'eftafçauoirquc  fi  vne  vtfuc,quand 
elleauroit  efté  au  feruicedel'Eglifc,  rcnon- 
çoit  du  tout  à  la  Chreftienté  fe  voyant  eftre 
marquée  d'vne  mauiuife  note,  que  fera-ce 
de  ceux  qui  lont  en  efiat  plus  haut  &  plus  di- 
gnefS'ils  fe  voyét  diffamez, ic  tous  pric,ne  fe 

H.ii. 


144 


SERMON     XL  T. 


ieh.  6: 
7«. 


destorderot-ils  point  plus?  Et  on  en  voit  les 
eiéples  par  trop  notoires ,  leur  turpitude  eft 
cognue  de  tous,  &  cependant  ils  n'en  tienent 
côte.Il  eft  vray  que  telles  gens  le  plaindront 
aflèi,  Ho,côment?fcaut-il  endurer  ;^''on  mef 
dife  toufiours  ainfi  de  nou'.?Hclas,'&:  que  faut 
il  mefdire/Ciup  perfonnc  n'en  parle,&  qu'on 
regarde  quels  ils  lont ,  &  ne  faiidroit-il  pas 
qu'ils  euflènt  creué  les  yeux  aux  ignoras, s'ils 
ne  veulét  eftre  cognus  tels  qu'ils  font?&;  mef 
me  leur  vilenie  eiF  fi  patente  qu'on  la  peut 
veoir  de  bien  loin. Il  eft  vray  qu'ils  font  (î  im 
pudens  en  leurs  vices, qu'ils  ne  tout  pas  fem- 
blantdeles  vouloir  cacherunais  lîeft-ceque 
encores  veulét-ils  eftre  reputez  gens  de  bien. 
£t  comment  feroit-il  pofsible;  Orcepédant 
quadilsYoyét  qu'ils  fonrdeteftables  à  tous, 
Ho,  voila,  iamais  on  ne  fe  fiera  en  nous,  puis 
que  tout  le  inonde  cognoift  noftre  gouuerne 
méc:&  la  deflîis  ils  fe  desbordent.  Et  d'autat 
plus  qu'ils  feront  eleuez  en  crédit  ,  qu'ils  fe- 
ront en  quelque  el^at  honorable  ,  voila  pour 
les  faire  encores  plus  diables  qu'ils  n'eftoyét 
auparauât,  corne  ce  n'eft  point  fans  caufe  que 
lefus  Chrift  appelle  ludas  diable ,  à  caufe  de 
l'eftat  honorable  auquel  il  eftoit ,  qu'il  faut 
que  l'ire  de  Dieu  fe  cognoiflc  tant  mieux  en 
luy.  Ainli  donques  retenons  cefte  doftrine,& 
cependant  apprenons  de  cheminer  modcftc- 
inét  chacun  en  fa  vocation.  Car  combien  que 
notâment  S.Paul  parie  ici  des  vefiies.tant  y  a 


qu'en  cômun  nous  fommes  tous  admonelter 
de  cheminer  en lobrieté  &  roodeftic,  &  q  cha 
cun  en  fon  endroit  fe  contiene  en  telle  hône 
fteté,que  noftre  Seigneur  Itfus  y  domine  pai 
fiblement  côme  fur  des  brebis  &  agneaux,  & 
que  noftre  vie  foit  vn  tednoignage  que  nou» 
ne  demandons  linon  d'eftre  conduits  de  luy, 
aKn  de  fuiure  le  chemin  qu'il  nous  monftre, 
&  non  point  regîberà  l'encôtre  de  luy,  &fa» 
re  des  g.îbades  pour  Icdefpiter,  mais  de  nous 
alTuiettir  tellement  à  luy  &  à  fa  parole,  qu'il 
ait  toute  prééminence  iur  nous. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la  fa 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  nous  les  face  telle- 
mét  fentir,  que  nous  apprenios  de  nous  humi 
lier  fous  fon  iugement  pour  n'cftre  plus  fi  har 
dis  de  nous  eleuer  cotre  luy  ,  mais  pluftoft  de 
recourir  à  la  mifericorde,  afin  qu'il  nous  ac- 
cepte,non  point  en  noftre  dignité  ou  mérite, 
comme  nous  fçjuons  qu'il  n'y  a  rien  en  nous 
qui  luy  puifle  eftre  agréable,  mais  qu'il  nous 
reçoiue  au  nom  &  parlemoyen  de  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift.  Et  que  cependant  il  nous 
face  la  grâce  qu'vn  chacun  fe  porte  tellemct 
en  fa  vocation  qu'en  gênerai  &  en  particulier 
on  cognoilTe  que  grans  &  petis  fe  veulét  ran 
gcr  à  fa  bône  voloté,  &que  fon  Efprit  domi 
ne  paifiblement  fur  nous  tous.  Et  que  pour 
ce  faire  il  luy  plaife  fufciter  vrais  &  fidèles 
miniftres  de  fa  parole,&c. 


C  I  N  Q_V  lEME     SERMON     SVR     LE 

C  I  N  Q_y  lEME    CHAPITRE. 

1 1  Mais  rcfufe  les  yefues  qui  font  plus  ieunes:car  quand  elles  ont 
rihîé  contre  Chrifi,ellesfe  'veulent  marier, 

II'     Ayans  leur  condamnation,  entant  qu'elles  ont  faujjc  leur  pre- , 
mierefoy. 

13  Et  auec  cela  au  fi  eîîans  oifeufes,ellcs  apprencnt  d'aller  de  mai 
fon  en  matfon'.i;:^'  non  feulement  oijèufes.mais  aufibahïllardes  ,xy  ^t*- 
rieufes,deuifansdechofesquine font  point  licites. 

14  le  \eux  donc  que  les  ieunesfe  marient,  qu  elles produijcnt  li- 
gnée,quelle  s  gouuernent  le  mefnage,  cr  quelles  ne  donnent  aucune  oc 
cafion  a  ïaducrfaire  de  mal  dire. 

1 5  Car  de  fia  aucunes  fe  font  defuoyees  après  Satan. 

Ous  auons  veu  par  ci  deuant  à  bon  cfcient.&auec  cela  ils  troublent  les  au- 
quel mal  apporte  l'oifîueté:  tres.tellementqfaina  Paul  appclloit  vie  pai- 
(  comme  faind  Paul  en  traitte  fiblc  qiund  vn  homme  s'addonnc  à  trauailkr 
aux  ThelTaloniciens)  car  ceux  pour  gagner  fa  vie  ,&  s'occupe  àlon  labeur. 
->w^-  ^.-r  qui  n'ont  que  faire  ,  s'empef-  Car  ceux  qui  n'ont  que  faire  ,  &  ne  le  veulent 
chcnt  beaucoup  plus  que  ceux  qui  trauaillent  point  meflerde  leurs  befongnes.il  fcmbic  que 
'  '        ■*               '  touiiourt 


SVR  LA    I.    A   TIMOTH. 


Hs 


toufiours  ils  doiuét  forger  vn  nouueau  mon- 
■de,Toila  corne  ils  s'empefchenfll  n'y  a  donc 
vray  repos  linon  qii'vn  chacun  s'acquitte  de 
fon  deuoir,  &  face  ce  qire  Dieu  luy  comman- 
de, 8c  ce  que  fon  eftat  porte  &  requiert.  Sui- 
uant  cela  aufsi  S.  Paul  maintenant  dit ,  Que 
les  vefues  quand  elles  font  nourries  auï  def- 
pens  communs  de  l'Eçli  fe.s'addonnent  à  oi- 
liueté,&del.-i(dit-il)'.'enl"uiuétencoresd'au 
très  vices:car  on  les  verra  trotter  par  les  mai 
fons,  elles  voudront  humer  toutes  les  nouuel 
les  d'vne  ville,  &  là  delltis  babiller  de  ce  que 
elles  aurôt  ouy  en  vu  lieu  pour  l'apporter  en 
l'autre.'quand  on  voidde  tels  incôueniens.on 
y  doit  remédier  s'il  eil  pofsible.  Sur  cela  doc 
S.Paul  ordône  que  les  leunes  vêtues  qui  font 
encores  mariabîes.fe  marient,  &  l\  Dieu  leur 
donne  des  enfans,  qu'elles  les  nourriflent.  Se 
elles  auront  alors  à  qnoy  s'occuper, tellemét 
que  l'oilîueté  n'y  dominera  point,  elles  n'au 
ront  plus  loilîr  de  babiller  çà  Se  là, car  le  mef 
nage  les  tiendra  en  la  nraifon.il  faudra  qu'el 
les  feruent  là  à  Dieu,  &  à  ceux  aufquels  il  les 
aura  obligées,  comme  à  leurs  maris  &  à  leurs 
enfans.  Maintenant  donc  nous  auons  l'inten 
tion  de  fainrt  PJti!  :  nuis  faifons  aufsi  nollre 
profit  de  cefte  doctrine. fçachans  que  ce  n'eft 
point  fans  propos  que  S.  ?aul  a  conioint  ces 
trois  chofes,roifîueté,la  curiolîté  Scie  babil. 
Or  voila  comme  Dieu  punit  ceux  qui  font  c5 
me  fainéants,  &  qui  ne  daignent  s'employer 
à  quelque  chofe  vtile, qu'ils  font  affamez  delî 
rans  toulîours  d'auoir  quelque  vent  qui  fouf 
fle.  Et  la  curioiîtéles  a-elle  vne  fois  gagnez? 
Voila  comme  vne  fournaifequi  brufle  touf- 
iours,ils  n'ont  point  de  repos  nedecefle  :  Se 
cependant  il  faut  aufsi  qu'ils  dcfgorgent  co- 
rne la  poifon  ,  quand  ils  auront  humé  l'eau,  il 
faut  qu'ils  la  reiettent.Ainii  en  eft-il  de  tou- 
tes gens  addonnez  à  curioiîré  ,  que  le  babil 
viendra  tantoft  après.*  Apprenons  donc  de 
nous  employer  à  ce  que  nous  pourrons  cha- 
cun en  fon  endroit:  celuy  qui  aura  quelque 
art, qu'il  labeure  comme  Dieu  l'ordonne:ce- 
luy  qui  aura  mefnage  à  gouuerner,  qu'il  s'y 
occupe:que  les  femmes  penfent  aufsi  de  leur 
cofté.que  Dieu  ne  les  a  point  créées  en  ce  mô 
de  pour  eftre  oifiues,  mais  qu'elles  font  pour 
s'employer  à  chofes  vtîles  &  neceflàires  auf- 
fibien  que  les  hommes:  qu'vn  chacun  regar- 
de à  cela,&  que  par  ce  moyen  nous  (oyons  re 
tenus  afin  de  ne  trauailler  point  nos  pro- 
chains.afin  de  ne  faire  point  grîd  bruit,  mais 
mener  cefte  vie  paifible  &modefte,delaquel 
le  S.  Paul  a  parlé  par  ci  deuant.  Or  venons 
maintenât  au  remède  qu'il  adioufte,  aiçauoir 
t^^ilyeut  <jue  les  "refins  plus  ieu>ies  fe  m.triet. 
Il  fembleroit  de  prime  face  que  cefte  docftri- 
nede  fainrt  Paul  ne  fuft  pas  digne  d'vnApo- 
ftre  :  car  l'Euangile  eft-il  pour  trafhquer  les 
mariages?Il  femble  que  S.Paul  vueille  ici  pic 
quer  les  femmes.comme  fi  défia  leur  chair  ne 
les  aiguillonnoit  point  aflèz  à  fc  marier.  On 


ne  penferoit  point  donqnes  que  cefte  dotlri- 
ne  fuft  fpirituelle. Mais  quad  tout  (éra  regar- 
dé,ce  n'eft  point  fanscaufe  que  S.Paul  a  ex- 
horté ici  les  ieunes  vêtues  à  fc  marier. Car  en 
premier  lieu, nous  voyons  que  la  fupcrrtition 
aregnéquafi  de  tout  temps  fur  le  mariage, 
qu'on  a  eftimé  que  c'eftoit  vn  eftat  comme 
prophane  &  pollu,&  que  ceux  qui  cftoyi-t  ma 
riez.ne  pouuoyent  feruir  à  Dieu.  Or  S.  Paul 
au  contraire  monftre  que  fi  le  mariage  cft 
fait  envfoy&  en  chafteté,&  en  ciaîte  de  Dieu, 
qu'il  eft  fainiît  &  honorable  .comme  li  tir  dit 
aufsi  en  PEpiftreaux  Hcbrieux.  Et  au  rc^e.il  Hf?»,!}, 
veut  aufsi  môftrer  aux  femmes  qu'elles  ne  fe  4- 
doiuent  point  defpiter  quand  on  les  rcfufera 
en  ceft  eftat  public  duquel  il  a  fait  mention: 
car  il  fembleroit  que  ce  fuft  comme  vne  efpe 
ce  d'ignominie  quand  on  ne  voudra  point  re- 
ceuoir  les  ieunes  vefues  ,  comme  li  elles  n'c- 
ftoyent  point  du  nombre  des  Chrtfticns:  aia 
fi  que  nous  fçauons  bien  alléguer  qu'on  nous  • 
fait  tort ,  finon  qu'on  nous  ticne  en  crédit. 
Mais  S.Paul  à  l'oppolîte  déclare  que  ce  n'eft 
point  pour  les  reculer  fi  on  ne  les  reçoit  en 
ceft  eftat  dont  il  parloittcar  elles  peuuent,dit 
il, feruir  à  Dieucftâs  mariees.Chacun  ne  fer» 
pas  pourueu  en  oFiice  ,  il  ne  faut  point  que 
nous  regardions  i  ceftuy-ci,  ni  à  ceftuy-la,& 
faire  vne  mefure  pareille  entre  no*:car  nous 
fçauons  que  le  pied  ne  fera  point  l'office  de 
l'œil, ne  le  bras  ne  fera  point  l'office  de  la  te 
fte.Tout  ainfi  donc  que  les  membres  font  di- 
ftinguez  en  vn  corps  humain,ainfi  faut -il  que 
en  l'Eglife  de  Dieu  les  eftâts  foyent  diftri- 
buez,&  qu'vn  chacun  regarde  à  ce  qui  luy  tii 
propre,  &  qu'il  fe  contente  de  feruir  à  Dieu: 
que  nous  n'appetions  point  de  nous  eleuer. 
félon  que  nous  verrons  quelqu'vn  par  deflus 
nous  ,  que  nous  ne  luy  portions  point  eiiuie, 
que  nous  n'alléguions  point. Et  pourquoy  ne 
fuis-ie  là  comme  vn  td?Mais  regardons  fim- 
plcment  de  feruir  à  Dieu ,  voire  félon  noftre 
portée  ,  comme  défia  nous  .luons  dit.  V  lili 
donc  l'intention  de  S.  Paul, quand  il  coman- 
dc  que  les  vefues  plus  ieunes  fc  mariée.  Or  ici 
cepédantnous  fomme-,  admoneftcz  que  le  ma 
riage  n'eft  point  vne  chofe  pollue  ,  comme 
l'ont  imaginé  beaucoup  de  fanraftiques:mais 
que  c'eft  vn  eftat  fainft, lequel  Dieu  fe  refer-  . 
ue  afin  qu'il  y  domine, 5:  qu'il  y  prefide.Et  ce 
la  nous  doit  feruir,non  point  feulement  pour 
auoir  en  deteftation  cefte  tyrannie  qui  règne 
en  la  Papauté  ,  afçauoir  que  le  Pape  a  cuidé 
auoir  vne  perteÔion  angelique  quard  il  a  for 
gé  les  moineries  ,  qu'il  a  priué  le  Clerçc  du 
mariage:  mais  on  voit  qu'en  cela  il  y  a  vne  re 
pugnace  manifefte  entre  l'Efpritdc  Dieu  ,  Si 
ceux  qui  ont  ainfi  défendu  le  mariage  .Car  S. 
Paul  n'a  point  ici  parlé  de  fon  ccru-.au:  voici 
Dieu  qui  prononce  ce  qu'il  veut  eftVe  obfer- 
iié  de  nous  pour  vne  règle  infall'ble:&  ccpen 
dant  les  hommes  mortels  font  fi  enragez  de 
conceuoir  en  leur  tefte  ce  que  bon  leur  fem- 

H.iii.  •• 


14^ 


SERMON    XLI. 


ble  pour  contreuenir  direûement  à  ce  que 
Dieu  ordonne.  Ainli  Jonc  nous  deuons  bien 
dcteitcrccs  lions  diaboliques,  quand  nous 
voyons  que  l'ordre  de  Dieu  eil  ainfi  violé  & 
dellruit.  Mais  et  ftc  doûrine  emporte  du  pro 
fît  &  de  Pedificacion  pour  nous. Car  ceux  qui 
ibnc  mariez,  doiuenc  iAre  tant  plus  incitez  à 
fcruir  à  Dieu ,  &  prendre  courage ,  quand  ils 
voyent  que  Dieu  approuue  ceft  eftat,  &  qu'il 
y  veut  eftre  honoré.  Cela  n'eft-il  point  vn 
bon  aiguillon  pour  nous  foliciter  afin  que  le 
mariage  fe  rapporte  au  feruice  de  Dieu,&que 
ceux  qui  y  font,  tendentà  ce  but-la  ,  qu'il  y 
ait  vn  accord  entre  le  mari  &  la  femme,  pour 
dire  qu'ils  le  dédient  du  tout  àDieu.fçachâs 
qu'il  les  a  contoints  enTemble,  &  qu'il  bénira 
celle  vnion,  &  qu'elle  fera  fainde  Se  approu- 
uce  de  luy.'  Et  au£si  d'autre  cofté  nous  fom- 
tnesici  tenus  en  bride,afin  que  ceux  qui  font 

I  marier,cognoiirent  que  ce  n'eft  point  pour 
l'oublier  &  pour  s'addonner  i  vne  volupté 
brutale,  mais  que  Dieu  doit  touiîourt  eilre 
preferé,&  que  le  mariage  tend  bien  à  vne  fin 
plus  noble  plus  precieufe  que  de  contenter 
l'appétit  de  la  chair.  Et  quoy  donc?C'eft  que 
l'homme  viue  chaftement  auec  fa  femme,  que 
la  femme  foulage  fon  mari,comnie  elle  a  efté 
créée  à  cefte  intention-Ia.  Maintenait  nous 
voyons  que  faind  Paul  a  donné  vn  précepte 
bien  vtile, ordonnant  que  les  vefues  plus  ieu- 
nes  fe  mariaflent:comme  s'il  difoit  qu'il  faut 
qu'vn  chacun  regarde  à  quoy  il  eftappelé,  & 
que  nous  ne  foyons  point  comme  finges  pour 
nous  contrefaire  ,  félon  que  nous  verrons  vn 
exépledeuant  nos  yeux,que nous  concluons, 

II  faut  donc  faire  ainfi.  Car  chacun  doit  re- 
garder fa  portée:  &  mefmes  il  faut  que  Dieu 


ce,  que  là  il  y  aura  vne  fainfteté  plus  granda 
8c  plus  approchante  du  royaume  des  cieux, 
qu'il  n'y  aura  point  en  vn  cloiftre.ie  ne  di  pas 
ae  ces  inoincriesdelaPapauté,carce  font  au 
t.«  debourdeaux  &  de  cauernes  d'enfer,mait 
ie  di  en  vn  cloiftre  qui  feroit  pur  de  toute  fu 
perftition,&  où  il  n'y  auroit  point  d'impudi- 
cité.  Apprenôs  donc  de  feruir  à  noflre  Dieu, 
non  point  félon  la  belle  apparence,mais  com 
me  il  l'ordonne;  contentons-nous  quenoftrc 
feruice  luy  foit  agréable  ,  encores*quenous 
foyons  contéptibles  deuant  le  monde.  Quad 
fainâ  Paul  parle  que  les  femmes  doiuent  j>ro- 
cretrligntf,  fous  ce  mot  il  comprend  toute» 
les  peines  qu'endurent  les  femmes  à  nourrir 
leurs  enfans:comme  ci  deiliis  il  a  môAré  qu'il 
n'entendoit  point  que  les  femmes  fulTentmi 
gnardes,&  qu'elles  appetaflent  tellemct  leur 
plailîr  ,  que  de  vouloir  fuir  toute  fafcherie. 
C^iiand  donc  noftre  Seigneur  a  ordonné  que 
les  femmes  enfantent  auec  peine,il  veutauf- 
fi  qu'elles  facent  office  de  mères.  Et  fainâ 
Paul  réitère  cela  maintenant:  comme  s'il  di-» 
foit,  que  fi  vne  femme  s'addonnoit  à  eftrc  au 
temple  tout  au  long-du  ioHr,&  à  prier,&  chan 
ter  ,  que  cède  façon  de  viure  ne  fera  point 
tant  acceptable  à  Dieu,  comme  fi  vne  femme 
citant  mariée  porte  patiemment  ce  qui  eft  de 
fa  charge,de  nourrir  fes  enfans,  de  veiller  a- 
pres,  de  les  addrefler  ,  &  mettre  toute  peine 
&  foin  à  les  inftruire.  Qilâd  donc  vne  femme 
s'appliquera  à  cela,  &  qu'elle  aura  fon  but  de 
■feruir  à  Dieu  ,  cognoiflànt  que  c'eft  luy  qui 
J'appelle  à  vne  telle  charge,S.Paul  dit  que  ce 
ci  fera  beaucoup  plus  approuue  :  &  non  làns 
caufe.car  Dieu  demande  obeiflànce.Etau  re- 
fle  ,  nous  fommes  tranfportez  de  nos  vainet 


nousgoiiuerne  en  ceft  endroit,  que  nous  fça-  fantafies,  nous  faifans  à  croire  que  ce  qui  ne 
chions  à  quoy  nous  fomines  propres ,  &  puis  fera  rien,eft  plus  que  merueilles.D'autat  que 
ce  qu'il  nous  permet, quelle  eft  ù.  vocation,&     les  hommes  fe  trompent  ainfi  en  leur  fol  iu- 


que  parce  moyen  il  ioit  efcouté  de  nous.  Or 
cependant  nous  voyons  (comme  il  a  efté  dit) 
que  Dieu  ne  prifera  point  toujours  cefte  bel 
le  apparence  telle  que  les  homes  approuucnt, 
mais  il  regardera  plus  haut ,  voire  &  plus  bas 
quant  &  quant.  Dieu  regarde  plus  haut.c'eft 
afçauoit  à  cefte  humilité,qui  eil  vne  vertu  fin 
guliere  :  9c  il  regarde  plus  bas ,  c'eft  qu'il  ap- 
prouue  ce  dont  on  ne  tiendra  conte. Comme 
il  femble  qu'vn  poure  homme  mechanique  & 
vne  femme,  quand  ils  feront  enfemble,  qu'ils 
auront  beaucoup  de  peine  .\  nourrir  leurs  en- 
fans,  &  à  gagner  leur  vie  ,  qu'il  foycnt  eflon- 
gnei  de  Dieu:&  cependant  on  voit  ce  qui  en 
eft  dit  par  le  fainft  Efprit ,  Que  Dieu  habite 
«n  ces  mefnages-la  pluftoft  qu'il  ne  fera  pas 
en  vn  cloiftre.  Car  encores  qu'il  n'y  euft  que 
chafteté  en  vn  cloiftre, &  qu'il  n'y  euft  point 
de  toutes  ces  ordures  qui  y  font, que  les  ido- 
lâtries mefmes  en  fyil^pt  chalTecs ,  tant  y  a 
que  Dieu  dominera  en  vn  petit  mcfnage  où 
il  y  aura  beaucoup  de  pouretez,  Si  où  le  mari 
Alafemaes'addonneronti  faire  leurolffi- 


gement,&  cependant  <Ju'ils  n'efcoutent  point 
Dieu  p3rler,voila  pourquoy  noftre  Seigneur 
abbat  toutes  nos  entreprinfes ,  Se  les  réuerfe, 
&  monftre  que  c'eft  bien  raifon  qu'il  foit  fer 
ui  &  honoré  de  nous  comme  il  Je  commande. 
Or  maintenlt  S.  Paul  examine  encore  mieux 
fonintention.endifant,  Qnt  les  femmes  ma- 
riées gomtement  leHrmtfiiag*.  En  quoy  il  figni 
fie  ce  que  défia  nous  auons  touché  ,  que  les 
femmes  doiuent  toufiours  péfcr  à  quoy  c'eft 
que  Dieu  les  appelle  .  Or  Tordre  de  la  créa- 
tion eft  inuiolable.  Il  eft  dit,  U  n'eft  pas  bon 
quel'hônic  foit  feul:  Dieu  luy  a  ordonné  vne 
aide  qui  hift  prochaine  de  luy.Ciue  les  fem- 
mes donc  notent  bien  ce  paflage  Comment? 
Dieu  fera-il  fiuftré  de  m'auoir  créée  &  mife 
au  monde?  Or  m'y  a-il  mife  afin  que  ie  foye 
vne  aide  à  mon  mari.  Et  quelle  eft  cefte  aide, 
finon  que  ie  m'occupe  à  faire  mon  mcfnage, 
&  que  le  porte  la  moitié  du  fardeau  auec  luy? 
Nous  voyons  donc  maintenant  où  c'eft^que 
fainâ  Paul  ramené  les  vcfucs,c'eft  en  fommc 
à  la  vocation  de  Dieu ,  qui  eft  U  vraye  règle. 

Sel» 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH. 


*47 


ii  li  Jroite  Conduite  des  hommes  &  des  fem- 
mes .  Carquand  nous  ^voudrons  taire  ce  que 
bonnousfemble.tout  ei^lgâfté.II  ne  reftedôc 
Cnon  que  Dieu  domine,  &  que  fon  authorité 
vaille  tant  fur  nous,  qu'il  nous  fufiife  de  nous 
offrira  luy, voire n'attentans  point  ceci  ne 
c«Ii,  mais  nous  addônans  du  tout  à  luy  obéir. 
Voila  cefteiîmplicité  qui  vaudra  mieux  que 
tous  les  feruiccsdu  monde.  £t  ainfî  retenons 
bien  que  le  diable  a  esblouy  les  yeux  des  Pa- 
piftes,  quand  il  leur  a  fait  à  croire  que  les  vies 
eftoyent  mondaines  &  feculieres.finon  qu'on 
fe  feift  prcltre.ou  moine, ou  nonnain.Orç'a  e- 
fté  poui  reduirelespouresames,afîn  que  ceux 
qui  eftoyent  marier,  fe  donnalTent  licence  de 
mal  faire,  comme  s'ils  auoyent  la  bride  fur  le 
col,  8c  qu'ils  ne  penfaflent  point  au  ioug  de 
Dieu  ,  Se  qu'il  ne  refidaft  point  au  milieu  d' 
eux.  Cependant  fous  couucrture  de  fainâeté 
il  l'eft  commis  des  ordures  fi  grandes  Sc&e- 
normcs  que  c'a  cftc  pour  infeûer  tout  le  mon 
de  ,  ainfi  qu'il  en  a  efté  traitté  par  ci  deuant: 
Riais  tant  y  a  que  le  diable  a  voulu  gagner  ce 
poinft,que  ceux  qui  eftoyent  mariez, tant  ho- 
mes que  fcmmes,fedonnaflent  licence  de  s'e- 
xempter de  Dieu  -  comme  il  le  mariage  em- 
portoit  cela  ,  &  qu'il  fuft  de  telle  condition, 
qu'jl  n'y  euftpcrfonne  qui  fe  mariaft.finon  a- 
fin  d'auoir  licence  de  s'eftôgner  loin  de  Dieu. 
Or  à  l'oppofite  il  nous  eft  remonftré  q  quand 
l'iomme  8c  la  femme  foncconioints  en  vraye 
foy,  8c  en  bonne   conlcience  :  voila   Dieu 
qui  les  accouple  ,  &  les  tient  là  mieux  ,  qu'vn 
bomme  qui  voudra  labourer  fon  champ  ne 
tiendra  deux  bcruf:,.  Et  ainlî  notons  bien  que 
pourcftre  retenus  en  l'obêiflàncede  Dieu,  il 
BOUS  faut  cognoiftre(comme  il  a  efté  dit)  qu'il 
nous  fait  ceft  hôneur  Si  cefte  grâce,  de  fe  vou 
loir  foucicr  de  nous.combicn  qu'il  femble que 
cefoit  en  chofes  de  nulL- valeur ,  &  me  fines 
dont  les  hommes  ne  tienent  contc:que  noftre 
Seigneur  vfe  de  ce  pTiuilegc-Ia  ,  qu'il  veut  5c 
que  le  mariage  ,  &  que  le  trauail  que  les  fem- 
mes pren.ent  à  gouuerner  leur  mefnage,&  tou 
tes  telles  chofe5,foyent  pour  le  g  orifier  .  Or 
quand  fainft  Paul  a  ainfi  parlé, il  adiouft^-.Q*» 
elles  fe  Anyuent  hien^arJcr  Je  donner  cccjpon  à 
l'aduerfifre,  tellement  ifii'il  ait  dtijHoy  fourmef 
dirc.Yci  fainû  Paul  entend  que  ce  n'eft  point 
aflcK  que  les  vefues  s'abftienent  de  tout  vice, 
mais  qu'elles  doyuent  aufsi  noter  que  les  mef 
chansjc  les  ennemis  delà  foy  ne  puiflent  a- 
uoir  quelque  couleur  de  mefdire  ,  &  defgor- 
ger  leurs  blafphemes ,  en  forte  que  le  nom  de 
Dieu  foit  diffamé. Saind  Pauldoncveut  que 
les  vefues  ayent  cefte  prudencf-la  ,  afin  de 
clorre  la  bouche  à  tous  malins  &  mcfdifans. 
Or  (î  cefte  confîderation doit  eftre  aux  fem- 
mes.que  fcra-ce  en  gênerai  de  nous  tous  ?  Ne 
deuons-nous  point  auoir  plus  de  prudence,a- 
fin  de  repoufler  toutes  calomnie^,&:  d'cmpcf- 
cher  que  les  mefchans  ne  detraâent  point  de 
nous,  voire  au  déshonneur  &  à  l'opprobre  de 


Dieu  &  de  fa  parole  f  Mais  il  y  en  a  bien  peu 
qui  s'en  acquittent:pluftoft  il  femble  que  nous 
ayons  comploté  auec  les  ennemis  de  la  foy, 
pour  leur  donner  occafion  de  meidire.  Car  S 
nous  pelions  que  nous  fommes  coulpables  tou 
(es  fois  &  quantes  que  les  mefchans  &  aduer- 
fairesde  Dieu  detraâent,&  qu'ils  calomnie t, 
&  fe  mocqucnt  de  la  profefsion  que  nous  far 
fons  d'auoir  la  doârine  de  l'Euangile,  Se  que 
ils  ont  occalion  de  mefdire,  il  eft  certain  que 
nous  .auiferions  mieux  à  nous  .  Or  eft-il  ainfî, 
qu'vn  chacun  cognoift  alTet  que  nous  fummcf 
erpiez,&  que  les  Papiftes  ne  demandent  fînoB 
à  le  mocquer.d'autant  que  nous  proteftons  de- 
vouloir  eftre  mieux  reformez ,  d'autant  qae 
nous  auôs  la  droite  fîmp  licite  de  doûrine  que 
ont  tenue  les  Apoftres.  Or  cependant  ils  font 
au  guet,  &  s'ils  peuuent  noter  quelque  vice  en 
nous,ce  fera  pour  s'en  mocquer.  Quand  il  ne 
nous  en  chaut ,  &mefmesquc  nous  leur  don- 
nons occafîondece  faire,  ie  vous  prie,  quelle 
excufe  V  aura-il?  Mais  c'tft  par  faute  de  pen- 
fer  à  ce  que  dit  ici  faiiiâ  Paul  :  &  non  feule- 
ment nous  dcuons  penferaui  Papiftes  :  mais 
entre  nous ,  n'y  a-il  point  de  ces  gaudifTeurr 
qui  dcfcouure':  leur  impieté?  Et  ceux-là  quîd 
ils  ptuuent  nous  furprendre  en  quelque  cho.. 
fe,n'ont-ils  point  occalion  dédire,  Ho,  voila 
que  c'tft:  ciux-ci  voudront  tenir  tout  le  mon 
de  en  telle  aufterité  que  rien  plus  :  8c  cepen- 
dart  qu'eft-ce  qu'il  y  a  de  mieux  cntr'eux» 
Ordonc  pcfons  bien- cille doûrine  de  fainti 
Paul .  Car  combien  qu'il  traitte  ici  des  vef- 
ues par  efpecial,  toutes  fois  fî  tft-ce  que  nou« 
fommes  toui  admoncftci  en  commun  ,  que 
pour  no'  acquitter  enuers  Dieu.ce  n'eft  point 
affez  que  noftre  confcicnce  foit  pure  &  nette, 
&  de  cheminer  fins  mauuaiftaffeûion  ,maijs 
nous  deuons  aufsi  adioufter  cefte  prudence, 
que  les  ennemis  ayent  la  bouche  chofe  quand 
ils  voudront  mefdire  de  nous,  que  leur  inipu- 
dence  foit  cognue,  &  que  nous  foyons  touf- 
iourspreftsde  rendre  conte  de  ce  que  nous 
aurons  fait,&  qu'on  ne  puiffc  auoir  nulle  cou- 
leur de  blafphemer  contre  le  nom  de  Dieu  8c 
fa  parole.d'autant  qu'il  yauri  quelque  appa- 
rence de  nul  en  nous. Et  mcfmes  fi  fainft  Paul 
veut  (comme  défia  nous  auonsdit  )  que  les 
femmes  foyent  i\  prudentes,  8c  fi  bien  aui- 
fees,  que  fera-ce  des  hommes  ;  Et  quand  par 
leur  tolie  &  légèreté  ils  feront  expofcz  en 
opprobre,  quelle  excufe  y  auia-il  ?  Il  eft  vray 
que  nous  ne  pourrons  point  efchapper  que 
on  nemcfdifede  nous:mais  retenons  ce  qui  a 
efté  dit.que  l'occafion  n'en  foit  point  donnée 
de  noftre  cofté,  ne  par  noftre  imprudence:  Se 
mcfines  que  les  mefchans  foyent  conuaincus 
quand  ils  ouuriront  la  bouche,  qu'on  cognoif 
fe  que  leur  mefdifance  n'eft  que  mcnfonge 
&calomnie,&  fi  on  veut  ouiirir  les  yeux,  fi  on 
\  eut  s'enquérir  de  la  vérité, on  trouuera  qu'ils 
mentent  impudemment.  C'eftdoncafTez  que 
nous  ayons  (entant  qu'en  nous  (era)cmpefché 

H.iiii. 


a4H 


SERMON     XLI. 


que  les  malins  .n'ayent  point  dequoy  dctra- 
fter.  £tâu  refte  ,  s'il  faut  que  nous  endurions 
opprobres  &  mocqueries, portos  cela  patiem 
ment.  Voila  on  fomme  ce  que  nous  auôs  à  re- 
tenir. Et  cependat  notons  luiVi  que  quand  on 
mefdiradenous,  encores  q  deuant  Dieu  nous 
foyons  innocens ,  qu'il  nous  faut  bailler  les 
yeux,  pource  que  nous  n'auons  point  eftc  fi  fa 
ges  de  nous  garder.Et  nous  aurons  beau  auoir 
quelque  bonne  coniideration  en  nous,  iî  Dieu 
'  nous  cliallie,  foyons  modeiles  à  porter  cela: 
mais  ccpédant  gardont-nous  de  fcandale  tant 
qu'il  no'  fera  pofsible.veu  que  Dieu  veut  que 
noftr^  vie  foit  ornec  par  nous ,  côme  il  eft  dit 
en  l'autre  paflàge  :  &  puis  qu'il  nous  a  impri- 
mé fa  marque,  qu'elle  ne  foit  poit  fouillée  de 
rien  qui  contreuiene  à  fon  honneur .  Et  voila 
pourquoy  faind  Paul  dit  notaniment><J«»  PaJ 
uerfairt  n'ait  point  otcapoo  dt  mefdirt .  Or  il 
entend  bien  que  nous  ne  fçaurions  cheminer 
adroitement  que  toufîours  le  diable  (  quieA 
père  de  menfonge)  ne  tafche  à  nous  dif&mer. 
£t  nous  voyÔs  que  les  fafinûs  Patriarches  qui 
ont  vefcu  en  ce  monde  commemiroirs  de  tou 
le  pureté,  n'ont  pas  neantmoins  laifle  'd'eftre 
calomniez.  Mefmes  on  voit  ce  qui  eft  aduenu 
au  Fils  de  Dieu;  &  notament  fainft  Paul  nous 
i.CtT.i.  dit  qu'il  nous  faut  cheminer  par  opprobre,  Se 
f,  par  bonne  renoramee.lîgnifiât  qu'il  nous  taut 

clorre  les  yeux:  car  nous  ne  pouuons  fuir  que 
on  nedetrafte  de  nous,&  qu'on  n'en  meidife. 
Et  bien.ie  icray  fouuétestois  en  cefte  perple- 
lité-la,  que  ie  feray  mocqué  :  toutesfois  en- 
tiers Dieu  ie  ne  fuis  point  coulpable  .  Quand 
il  me  faut  fouftenir  telles  calomnies  faufles,& 
que  les  hommes  prenent  couleur  &  occafion 
de  detrafter,  que  faut-il  là  faire  ?  Cheminons 
(  dit  fainft  Paul)  par  opprobre  âufti  bien  que 
par  bonne  renommée  .qu'il  ne  nous  chaille  fi 
les  hommes  mefdifent  ainfi&detraftent  de 
nous.Mais  il  dit  après,  Çyn  ilsn aytnt point  de- 
^oy  mefdire.  Car  les  raefchans  fans  propos  & 
fans  raifon  abbayent  comme  des  chiens  enra- 
gez,ils  ne  demadent  finon  à  mordre  pour  dé- 
grader k  nom  de  Dieu.  Or  donc  notons  bien 
qu'il  fuffit  que  les  mefchans  n'ayent  dequoy 
mefdire, côbien  qu'ils  le  facent.  Comme  quâd 
làinft  Paul  dit  que  nous  cerchions  la  paix,  il 
adioufte, Entant  qu'en  nous  eft.Et  pourquoy? 
Qaand  nous  ferons  paifibles,  que  nous  procu 
rerons  de  viure  en  bonneamitiéauec  tout  le 
inonde,  il  fiut  neantmoins  que  nous  foyons 
ennemis,  &  mefmes  que  nous  fàcions  la  guer- 
re aux  mefchans.  Car  comment  leur  pourrons 
nous  compbire  ,  (S:  comment  leur  pourrons- 
nous  eftre  amis  ,  finon  en  offenfant  Dieu,  & 
nourriflant  toutes  kurs  iniquitez  !  Il  fautdôc 
que  nous  foyons  ennemis  des  raefchas,&  faut 
aufsi  que  nous  les  irritions  beaucoup  de  fois, 
&  que  nous  prenions  qaerele  à  l'encontre  d' 
eux:car  il  nous  faiidroit  eftre  traiftres  à  Dieu 
fi  nous  voulions  viure  en  paix.  D'autant  donc 
^ue  les  ChreHiem,  ^uand  ils  Auront  fait  leur 


deuoir ,  ne  peuuent  neantmoins  eftre  amis  1 
tout  le  môde.faind  Paul  met  cefte  exception, 
difant, Entât  qu'en  vous  fera:c'eft  àdirc,  en- 
tant que  vous  verrez  q  vous  le  pourrez  faire 
feruans  à  Dieu  ,  ne  vous  deftournans  point  de 
voitre  fimplicité.Ainfî,c'eftlaire2  q  nous  ayôs 
ofté  l'occafion  de  mefdire  de  noftre  cofté.  Et 
au  refte, s'il  faut  que  nous  foyôs  diffamez, por 
tons  cela  patiemment  ;  car  nous  auons  vn  boa 
garant  au  ciel,  lequel  fera  reluire  en  la  fin  no- 
ftre intégrité  comme  l'aube  du  lour,  ainfi  que 
il  en  eft  parlé  .Il  eft  vray  que  pour  vn  temps 
Dieu  fouffrira  que  les  fiens  foyent  humiliez» 
&  qu'on  en  merdife:mais  il  faut  que  nous  por- 
tions cela  auec  doucear,attendans  que  noftre 
Seigneur  maintienenoâre  intégrité.  Voila  ce 
quenous  auons  à  retenir  de  ce  paflage.  Or  en 
la  fin  fainft  Paul  dit  ,QU^autunesfe  JontdeJh§tr- 
nets  a-fres  Satan.  Il  allègue  encores  vn^plus 
grand  inconuenient,duquel  il auoit  défia  tou- 
ché.c'eft  que  de  ces  vefucs  on  voitCdit-il)que 
défia  il  y  en  a  eu  qui  ont  quitté  la  foy,  &  ont 
abandonné  Dieu:les  voil»reuoltees:les  exem 
pies  nous  doyuent  bien  aduertir  d'y  prendre- 
garde,  Yci  en  premier  lieu,  il  nous  eft  monftré 
que  pour  le  moins  nous  dcuons  eftre  fages  par 
l'expérience.  Il  eft.vray  qu'on  dit  que  c'tft  la. 
maiftreflè  des  fols  ornais  fi  vaudroit-il  mieux 
encores  venir'à  raifon  tard  que  iamais. Quand 
on  voit  qu'vnmaleft  aduenu, n'y  doit-on  pas 
remédier  ?  Et  ceux  qui  ne  le  font ,  monftrent 
qu'ils  font  du  tout  obftinez  &  endurcis, en  for 
te  qu'ils  ne  fe  veulent  point  corriger. On  ver- 
ra beaucoup  de  fcandales  aduenir:&-bien,que|. 
le  eftl'occafion?On  trouuera  la  fource  quant 
&  quant .  Il  fàtidroii  donc  pouruoir  à  telles 
chofes.Or  fi  on  n'y  pouruoit  point,c'eft  figne 
qu'on  veut  nourrir  le  mal,&  meûnes  qu'on  ell 
bienaife  qu'il •s'augmente,&'  qu'il  sîempire, 
iufques  à  ce  qu'il  foit  venu  au  comble.Appre- 
nonsdonc  toutesfois  &  quantes  que  Diea 
nous  fufcite  des  troubles ,  que  «'eft  pour  nous 
aduertir>afin  que  nous  foyons  tant  plus  fon- 
gueux de  remédier  aux  chofes  mauuai  fes  ,  & 
d'y  pouruoir,ouy  s'il  eft  en  noftre  main:c3r  il 
nous  faut  toufiours  regarder  aux  moyens  que 
Dieu  nous  dône.  Ceci  s'eftend  bien  loin:niais 
il  fuffit  d'enauoir  touché  quelques  exemples. 
Si  nous  voyons  des  fcaridales  en  vn  pays ,  it 
faut  regarder  dont  cela  procède  ,  afçauoic 
pourcc  que  le  nom  de  Dieu  fera  b&fphemé,  & 
que  quand  on  parle  de  TEuangile  on  voit  les 
conttmpteurs  de  Dieu  s'en  mocquer,auiquels 
il  n'y  a  nulle  religion  :  qu'entre  nous  il  y  en. 
aura  de  fi  desbordez ,  qu'ils  voudroyent  que- 
onlafchaftlabride  à  tout  le  monde  pour  fai- 
re tout  ce  que  bon  leur  fembleroit .  Et  voii* 
comme  la  doftrine  de  t'Euangile  eft  diffamée- 
en  eux  ,  d'autant  qu'ils  en  font  profeAion  à 
pleine  bouche  :  que  s'ils  eftoycnt  luifs ,  ou 
Turcs,  ou  Payens,  &bien,  paflc  :  mais  quand 
on  voit  que  le  nom  de  Dieu  eft  comme  foullé 
au  pied^&i  qu'on  n'y  remédie  point,<^ue  peut- 


on 


s  V  R   L  A   I.    A 

on  attend*  là  dcffus  ?  Apres  .cjiiaiid  les  kr- 
jnons  ne  font  point  ti"cqijtntez,(i  les  gcns-Je- 
uienent  profines  ,  &  qu'ils  ne  fçachtnt  plus 
<^ue  c'eft  de  confcience  ,  ncde  rcipciance  de 
là  vie  éternelle,  cela  n'cA  point  noiiucaii .  Or 
«jiie  faut-il  donques  ?  Il  y  faut  pouriioir  ,  & 
quand  on  n'y  met  nulle  prouilion  ,  c'ell  ligne 
que  le  mal  a  gagné  du  tout,&  qu'on  veut  con- 
feimer  Satan  à  l'empire  qu'il  aura  delîa  o£- 
cugé.  Q_ua«donvoit  les  païUardi/es  régner, 
nedeuroit-on  point  pen fer  aui  occalîons  ,  & 
cognoiftre  qu'il  ne  fe  faut  point    csbaliir  ii 
tout  eft  ainfi  desbordé.'Car  quand  telles  clio- 
fes  font  pcrmifes  ,  la  porte  elt  ouuerte  à  tou- 
te vilenie  &  ordure  ,  qvi'il  n'y  aura  plus    d' 
honneiletc  entre  les  hommes  &  les  femmes. 
Quelque  fois  on  eftimera  que  c'eft  peu  de 
chofe  que  de  ceci  &  de  cela  :  mais  ce  font  les 
préparatifs  pour  corrompre  toute  honneftc- 
té.pour  mettre  vneconfufion  telle,  qu'ail  fau- 
dra qu'vne  ville  Jeuiene  bord  eau.  Cinanddôc 
oncognoifl  toutes  ces  cîiofts. ne  faut-il  point 
y  pouruoir,  finon  qu'on  vucille  tenter  Dieu  à 
fon  efcicnt?  Ainlî  donques  retenons  de  ce  paf- 
ùge  de  fainû  Paul,  que  s'il  aduient  des  fcan- 
dales  entre  nous  ,  &  que  Dieu  parle  ,  &  qu'il 
nous  foliote  de  faire  noflrc  Jcuoir.&depre- 
uenir  les  maux,  qu'il  nous  faut  obfcrucr  les 
remèdes  quM  nous  offrc,&  qui  font  conuena- 
bl'es, félon  qu'il  nous  les  mettra  en  main.  Voi- 
la quant  à  vn  item.  Or  il  faut  maintenant  que 
vn  diacun  regarde  en  fon  endroit.  Qjie  ceux 
qui  font  en  eftat  public  cognoifTent ,  S'il  ad- 
ulent quelque  mal  entre  nous, Dieu  nous  ref- 
ueillc:  noBs  auons  efté  endormis,  il  faut  donc 
quenoiK  penfionsde  tenir  la  bride  plus  cour- 
te, &  que  nous  veillions  mieux  lur  ceci  que 
nousn'auons  point  fait:  autrement  il  eft  cer- 
tain qu'on  verra  vn  déluge  qni  furmontera,  & 
nous  ne  pourrons  point  empcfcher  les  abomi 
nations  quand  elles  auront  par  trop  dominé. 
Et  ceux  qui  font  perfonnes  p-iuces, qu'ils  re- 
gardent à  leur  mefnage  :&  puis  que  chacun 
vieneà  faperfonne  :  Oriefiiis  tombé  en  tel 
mal .  Et  pourquoy  ?  car  i'auoye  auparauant 
«hoppé  en  telendroitril  faut  donc  que  ie  m'en 
donne  garde  par  ci  après .  Voila  ce  que  nous 
auonsànoter  .Et  de  là  voit-on  quelle  efl  1' 
obftinationdes  Papiftcs.canl  n'tfl  point  que- 
lconque les  rcMionftrances  ayent  lieu  entre 
eux.  le  ne  parle  point  feulemét  de  ce  CIcrgc, 
de  ces  moineries ,  &  de  ces  cloiïtres  oïi  Satan  , 
domine  pleinement,  &  où  il  atout  pcruerti: 
mais  on  voit  la  corruption  qui  eft  qiiaiî  géné- 
rale par  tout  :  &  cependant  fi  eû-ce  qu'ils  ne  ' 
▼eulent  nullement  ouïr  qu'on  parle  du  remè- 
de :  n'eft-ce  point  batailler  du  tout   contre 
DieuïCariainft  Paul  ne  dit  pas  que  toutes  les 
vefues  fe  foyent  reuoltees,  mais  il  dit,  A»cu- 
nrx.Or  il  veut  qu'on  preuiene  ce  mal,afin  que 
le  Cours  en  foit  enipefché.  Et  que  feri-ce  dôc 
quand  nous  aurons  tant  d'expériences  qu'el- 
les nous  creuerûnt  lesy€uxî£tc''cÔce  <juc 


T  I  M  O  T  H. 


149 


nous  auons  à  noter,  qu'il  nous  faut  eftrefages 
en  ceft  endroit ,  pour  fuyurc  touliours  et  qui 
eft  dt  Dieu  .  Car  il  nous  faut  retenir  le  bien, 
ent.int  qu'en  nous  fera, pour  le  fi parer  d'aucc 
le  mal:  commt  anfsi  fiinft  Paul,  quand  il  voit 
qu'il  y  a  des  vefues  qui  fe  font  rtuolttes  après 
Satan  ,  ne  condamne  pas  tout  Teflat  ,mais  il 
v(ut  qu'on  cmpifchc  celles  qui  poiirruytnt 
flirre  le  fcuiblable.  Et  ainfi  (comme  l'ay  ilit) 
fcpaions  toufîours  le  bicnd'autc  le  mal, car  c' 
cil  la  vrayc  tîifcretio  que  celle-là. Et  qui  plus 
eit,  quand  nous  voudrons  donner  remcdc,  que 
nous  ayons  toufi()ur^  ccHe  confidciacion  en 
nous,£t  bien.  Dieu  comaïaude-il  telle  chok! 
s'il  nous  aduenoit  tous  les  inconueniens  da 
monde,  ce  n'ilT  pas  à  nous  d'y  pouruoir  :  car 
les  liommes  font  malins  quand  ils  voudront 
attenter  quelque  chofe  qui  ne  leur  fera  point 
pcrmile;  fuyuons  donc  ce  que  Dieu  comman- 
de ù  ordonne.  Comme  auiourd'huy  il  y  en  a 
qurdir  nt.  Ho,  telle  chofe  pourroit  aduenir. 
Et  vo"  c  fies  bien  prcuoyas:  voire,vous  voyez 
plus  loin  &  plus  aigu  que  Dieu,Ho,voire,mair 
voila  vne  telle  confequence,  telle  chofe  peut 
aduenir.  Voire,  il  faut  que  nous  abbations  ce 
qui  eft  de  Dita:  voila  des  diables  qui  viencnt 
hurterdes  cornes  àl'encontrede  Ditu:&  ce- 
pendât  il  leur  ftmble  que  ce  n'cft  rien  de  tout 
ce  qu'ils  entreprcncnt,  &  qu'ils  doyuent  de- 
meurer impunis.  Or  notons  bien  que  nous  ne 
deuons  point  .luoir  vne  telle  preuoyance,  que 
nous  attentions  rien  deccquieftdeDieit.car 
il  faut  qu'il  demeure  en  fon  cntierrmais  quant 
eR  de  ce  que  nous  poutxons  manier  pour  no- 
ftrevfage  ,  notons  qu'il  nous  faut  toutesfojs 
difcerntr  lïecc  qui  eft  bon  &  vtite  ,  &  de  ce 
qm  nous  eft  ncccflàire,qn'iInous  y  taut  tenir. 
Il  ne  faut  point  que  nous  regardions,  Ho, cela 
n'fft  point  inauuais  du  tout:nenni,mais  il  faut 
que  noiisvfiôs  de  ce  qui  nous  eft  nus  en  main, 
en  forte  que  It  mal  foit  f  mpefché  entant  que 
en  nous  fera.  Et  cependant  notons  ec  que  dit 
fainit  Paul,  Qwe  les  vefues  qui  s'eftoycnt  cf- 
gareesdubon  chemin  ,s\ftoycnt  reuohies  a~ 
fTis  S.tt.m.\\  eft  vray  qu'il  ne  parle  ici  que  des 
femmes  vefues:  mais  nous  en  poDuons  recueil 
lir  vne  doftnne  générale  ,  QW  fi  toft  qu'y!! 
homme  qui  eftpit  au  chemin  de  faliit,  fe  des- 
bauche,  il  prend  Satan  pour  fon  capitaine ,  & 
s'addonnc  à  luy,  &  s'y  rend  comme  vn  efcla— 
ne.  Ncfaifons  point  noftie  conte  quand  non», 
aurons  riblé  contre  Di(:ii ,  &  que  nous  auront 
reietté  fon  ioug,  que  nous  foyons  en  liberté: 
nenni,  Dieu  ne  fouffrira  point  ce!a:m.iis  qu.TsI 
nous  aurons  ufufcd'eftrc  à  luy,  il  faudia  que 
nous  changions  de  matftre  en  defpit  de  nos 
dents,  &  que  Satan  fnccede  au  lieu  de  ccluy 
que  nous  n'aurons  point  voulu  accepter  .  De 
feruiràDieii ,  c'eftvne  condition  iî  amiable 
que  rien  plus,  le  lougde  noftre  Seigneur  re- 
fus Chri/l  eft  fi  doux  &  fi  gracieux  ,  qu'il  dé- 
clare qu'il  nous  veut  ilipporter  en  toutes  nos 
infirmitez .  Or  cependant  nous  ne  pouuoot 

1.1. 


IÇO 


SERMON     XLII. 


fouffiir  d'cftre  goimernez  ne  de  Dieu  ,  ne  de 
celiiy  auquel  il  a  donné  toute  authoiité  par 
deflus  nous,  c'cft  afçauoii  lefiiv  Chrift  noihe 
Seigneur.  C^ue  taut-il  donc;  C'eil  v  n  lufte  û- 
laiie  que  Satan  viene,  Si  que  nous  luy  facions 
hommage, &  que  nous  loyons  vn  Eirdcau  tous 
luy.  Voila  donques  ce  que  ûind  Paul  a  voulu 
déclarer  eace  pa!Tlige.£t  pourtant  penfons  à 
uousxarpuis  que  TEuangile  nous  cfîprelché, 
voila  lefus  Chnft  qui  eteuc  Ijn  lîege  &:  ion 
fceptre.il  nous  monllre  qu'il  veut  cfïre  nofrre 
Roy  ,  &  qu'il  nous  tient  pour  ion  peuple. 
Quand  nous  auons  ainlî  taie  profefsionde  T 
Euangile,  (i  nous  ne  perliftoai  lulques  à  la  tîn, 
s'il  naiisadaicnt  de  nous  dcsbauclier  en  £i- 
on  que  ce  foit,  non  feulement  nous  refufons 
'eihe  en  robciffancc  du  Fils  de  Dieu  ,  mais 
nous  donnons  toute  maillrife  far  nous  à  Sa- 
tan,&  l'occupera, &:  faudra  que  nous  foyons  à 
fui  foruice  endefpit  de  nos  dents.  Si  cecicft 
vne  choie  horrible  ,  Se  qu'il  nous  face  drefler 
Ils  cheueux  eu  la  telLe,ie  vous  prie, ne  deuons 
nous  point  élire  adnioncftez  mieux  que  nous 
n'auons  eil:e,de  rtous  cacher  fous  les  ailes  de 
noftre  Dieu,  Si  nous  tenir  là  quois  ,  côme  des 
petis  poufiins,&:  no'  laiflcr  gouueruerpar  luy 


I 


à  ce  qu'il  no'  reforme  tellemctpa^on  fainfl 
£fprit,que  nous  ne  foyons  plus  li  volai^es  Se  fi 
cfgarcz  comme  nous  auons  eilé  ?  Or  pour  ce 
faire  aduifons  qu'il  nous  taut  auoir  pour  con 
duitenoflre  Seigneur  lelus  Chrift:car  iînous 
voulons  eftre  vraycmcnt  le  peuple  de  Dieu.il 
Elut  que  ce  que  dit  le  Prophète, foit  accompli 
en  nous,  que  le  peuple  marchera,  &  leur  Roy 
Dauid  ira  douant .  Ainfi  donc  foufFrons  que 
lefus  Chrift  marche,  Se  puis  que  nous  le  fuy- 
uiôs  pour  approcher  toufîours  de  plus  en  plus 
de  noftre  Dieu  Et  puis  qu'auiouid'huy  il  no' 
efclaire  par  fon  Euangile,que  nous  ayons  touf 
iours  i"a  doctrine  deuant  nos  yeux,&:  que  nous 
le  fuyuions  pas  à  pas,  voire  elcoutans  fa  voix 
comme  de  noftre  bon  Pafteur  ,  ainfi  qu'il  en 
parle  au  dixième  de  fain£t  lean. 

O  R  nous-nous  profternerons deuant  U 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  3e 
nos  fautes  ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les 
faire  mieux  fentir  que  nous  n'auôs  point  fait. 
Et  cependant  qu'il  nous  attire  tellement  à 
foy,  que  nous  ne  demandions  finon  dedcdier 
le  relie  de  noftre  vie  à  fon  honneur. Ainli 
nous  dirons  tou^,Dieu  tout-puiflànt,Peie  ce- 
lcfte,&c. 


SIXIEME     SERMONSVR     LE 

C  I  N  Q_V  lEMECHAPlTRE. 

y6  C^ft  vn  hovimc  fidèle  yOu  \>}je  femme  fidèle  a  de  s  ^efiue^^que 
illcurfuhuienc,  ^quel'EgîifencnJoitgreuee,a  ce  qn  elle  ait  ajjèz 
Pour  celles  qui  font  yrayemcnt  yefues. 

17  Les  Vreslres  qui prcfideyit  bien,Jôye}it  réputé^  dignes  de  dou 
hle  honneur:  principàement  ceux  qui  labourent  en  la  Varole  c^  do~ 
cîrine. 

18  Car  tEfcriture  dit,  Tu  ne  lieras  point  la  gueule  du  hœuf  qui 
foule  le  grain. EtyVouurier  ejl  digne  defonfalatre. 


1  nous  fçauions  garder  le 
moyen  en  tontes  chofes,  on 
n'auroit  point  tant  de  peine 
à  nous  retirer  de  nos  vices 
comme  on  a,  mais  nous  de- 
.clinons  toufiours  à  quelque 
extrémité .  Voila  po'irquoy 
ceux  qui  ont  la  charge  d'enfcigner  ,  doyuenc 
fe  retenir  prudemment,  afin  de  traitter  telle- 
ment la  dodrine,  qu'ils  ne  donnent  point  oc- 
calîonaux  hommes  d'en  blaiplicmer.  Car  no- 
ftre n.iture  tendra  là,&  Satan  aul'si  a  beaucoup 
d'artifices  pour  y  aider,&de  noftre  cofté  nous 
ne  demamlons  linon  ànous  fouruoyer.  Or  le 
di  ceci.pource  que  maintenant  fainci  Paul  ^ 
commande  à  ceux  qui  auront  des  vefues  de. 
li'ur  parentage,  de  leur  donner. dequoy' le 


nourrir. Et  comment.=Ce  fer3,dit-il,autânt  cf- 
pargner,  tellement  que  l'Eglife  pourra  four- 
nir à  celles  qui  font  vrayement  vefues .  Nous 
voyons  que  ùind  Paul  veut  qo'on  relerue 
pour  Tes  nccefsitez.  de  l'Eglife  tant  qu'il  fera 
pofsibleje  bien  qui  eftoit  pour  lors  ordonné. 
Or  maintenant  comment  eft-ce  que  le  monde 
vfera  de  cefte  doÛrineiTl  ne  fera  queftion  que' 
dechichétè,&detenir  la  main  ferrée,  car  ori. 
craindra  toufîours  que  la  terre  ne  faille.  Voilà 
donc  pourquoy  il  tautbien  auifcr  de  tiaittcr 
tellement  la  doctrine,  qu'elle  ne  donne  point 
occalîonaux  malins  de  le  deftournerde  leur" 
dcuoir  ,preiians  quelque  oouucrture,  comme 
nous  voyons  qu'on  le  fait,  &  qu'vn  chacun  de 
ndus.y  éftçnclin.  5r  lainû  Paul  a  bien  icgir- 
déac&îa,iijCânt.<lu'il  vait  dequoy  pouruoir 


SVR    LA   I.    A    TIMOTH. 


2^1 


aux  vefues.Q^iat-dcemot  fera  bien  pci'é,com 
bien  que  ceux  qm  veulent  cftre  pr.r  trop  du- 
chés,ftcent  vil  bouclier  de  ce  pallnge:  coutcs- 
foi«  on  le";  peut  redarguer  touliours  ,  c]  (aintè 
Paul  ne  veut  point  qu'on  efpargne  iinon  ià  où 
'  il  faut,  &  puis  qu'on  regarde  à  telle  fin  qu'on 

doit.  Il  ya  donquesici  deux  poinfts  à  noter: 
^      l'vnc'eft,  quand  on  veut  eipargner  .combien 
qu'on  ayc  quelque  confideration  ,  toutesfois 
il  ne  faut  point  qu'on  détaille  à  ce  qui  eu  ne- 
ceflàire  &  requis  :  l'autre  c'eii ,  qu'on  ne  foi: 
point  chiche  fous  ombre  de  quelque  belle  ex- 
cufe,  mais  qu'on  ait  le  coeur  droit,  &  fi  on  re- 
feruece  qu'on  a  entre  mains,  que  ce  ne  foit 
point  par  auarice.que  ce  ne  foit  point  pour  1' 
appliquera  mauuais  vfage,  mais  .pour  e:i  ftr- 
•  «ir  à  Dieu  comme  il  le  cômandc.  Or  touchant 
<Iu  premier,  il  fera  beaucoup  mieux  entendu 
par  exemples.  Vn  homme  aura  du  bien  pour  s' 
aider  :  il  luy  furuient  quelque  mal  extraordi- 
naire, il  craindra  d'auoir  tante  peur  l'année 
qui  vient:&  cependant  ou  il  fe  la iflcra mourir 
detaim,ou  il  ne  cerchera  point  fecours  en 
quelque  maladie,  ne  i  oila  point  vne  folle  re- 
ferue.-Qjie  l'homnic  craigne  tant  d'auoir  fau- 
te l'an  qui  vient,  qu'auiourd'huy  quand  Dieu 
le  touche  de  fa  main  ,  il  ne  vucille  point  s'at- 
der  de  rien  qui  foit  ?  Autant  en  Itra-il  quand 
nous  alléguerons  de  loin  des  couuertures  ,  &: 
cependant  voici  Dieu  qui  nous  touche  quafi 
au  doigt  tout  foudain,'5:  nous  voudrons  là  di- 
re,Et  voire,  mais  ceci  &  cela  :  cependant  i'ay 
dequoy  pour  fournir  à  vnencctAité  vrgente, 
c'efl  autant  comme  fi  Dieu  me  prefentoit  ce 
qu'il  faut  là  faire.Nous  voyons  donc, comme 
i'ay  défia  dit,  qu'ici  nous  fommes  exhortez  à 
pourfuvure  ce  qui  eltde  noftre  deuoir ,  félon 
que  Dieu  nous  lecommâde,  &  félon  que  nous 
en  auons  le  moyen  &  faculté:  comme  vn  hom 
me  doit  regarder  à  foy  &  à  fa  famille  ,  &  par 
ordre.il  doit  regarder  àceux  qui  luy  font  pre 
tentez  de  Dieu  comme  fes  plus  prochains.  Et 
en  gênerai  il  faut  aufsi  regarder  à  tous  ceux 
^ui  pcuuent  auoir  faute  entre  nous.  Car  quâd 
il  n'y  auroit  que  noftre  nature  commune, ce- 
ladefia  nous  doit  toucher  pour  leur  fubue- 
irir  :  mais  s'il  y  a  ce  parentage  fpintuel ,  que 
Dieu  nous  ait  appelez  pour  etlre  (es  eiifans.ce 
lien-la  ell  beaucoup  plus  eftroit  &  plus  facré. 
Viinfî  donques  penfons  toufiours  de  tournir  à 
ce  que  Dieu  nous  cômande  pour  le  temps  pre 
'       fent,  &  fernions  les  yeux  pour  riiduenir,qu.îd 
nous  n'aurons  point  dequoy  pour  fatisfaire  à 
ce  qui  nous  peut  venir  en  fanta:lle  .JEt  pour- 
quoy.-  Car  Dieu  veut  qu'on  luy  face  cefthon 
neur  de  s'appuyer  fur  fâ  pouruoyanrc.  11  eft 
vray  que  ceci  pourroit  eftre  obfcur,mais  ce  ne 
fera  finon  d'autant  que  la  plus  part  font  l'au- 
reille  fourde  .  Car  fi  en  premier  lieu  nooîe- 
ftions  bien  perfuadez  que  Dieu  ,  félon  qu'il 
voudra  que  nous  ayons  faute,  nous  donnera 
aufsi  les  xemedes  conuenables ,  nous  ne  fe- 
zions  pasentelfouci&  perplexité  <}ue  nous 


fomm»s:  &  puis  nout  aurions  ceci  imprime  m 
no*^  mcinoues,  que  Dit-u  veut  ouc  nou'.  faciôs 
à  heure  prclciuc  ce  qu'il  oidonnc  fans  regar- 
der plus  loin:  il  n'y  auroit  nulle  obfcurité  en 
ccfte  docriine.  Aiait  l'incrcdulivé  nous  aucu- 
gle  en  telle  forte  que  nous  ne  pouiions  appre 
hcndcr  ce  que  Dicii  commande,  &  fommes  en 
inquiétude  pour. nous  enquérir  comme  nous 
pourrons  faire  d'ici  à  dix  &  vingt  ans .  Mais 
tant  y  a  CjUe  ccft  aitide-ia  doit  eftre  médité 
de  to'  fidèles,  c'eft  afçauoir  que  Dieu  ne  veut 
point  que  nous  efpargnios  ce  qu'il  nous  a  mis 
entre  les  mains,  finon  en  nous  acquittant  de 
noftre  dcuoir,  fclon  que  nous  voyons  qu'au- 
iourd'huy il  nous  folici  te, qu'il  ncusmonftre, 
&  qu'il  nous  déclara, Faites  ceci  ou  ccla.Or  vc 
nons  maintenant  à  bfin,qui  cft  qu.îd  nous  ef- 
pargnons, qu'il  ne  faut  point  que  nous  preten 
dions(comme  nous  auons  de  couftume)  quel- 
que excufe  friuole,  &<ju'il  y  aitde  la  feintife 
en  nous,&  que  nous  foyons  doubles,  mais  que 
nous  ch(tninionsrondeir.ét..Si  i'cfpargne.qiie 
ie  n'allcgue  point  ,  lelï  fay  pour  bonne  lai- 
fon,  demoy  le  ne  fuis  point  mené  d'aoaiice* 
que  nous  n'y  allions  point  en  cefrc  forte,maiç 
que  Dieu  nous  foit  tefmoin  &  iuge ,  que  nous 
ne  pretédiors  finô  de  gouncrner  ce  qu'il  nous 
aura  donné,  &  que  nous  legouucrnions  telle- 
ment que  nous  en  puifsiôs  rendre  conte  fidèle 
dtuant  luy  :  &  que  nous  ayons  toufiours  cela, 
de  mieux  aimer  que  tout  le  bien  du  mode  tVft 
peri&  aby  fine, que  d'y  eftre  enfeuelis. Quand 
nous  aurons  ces  deux  chofesqui  font  ici  no- 
tées par  S. Paul, nous  aurons  quant  &  quant  ce 
fte  médiocrité  qui  eftrequife  pour  bien  cfpar 
gner  ,en  forte  qtie  nous  ne  ferons  point  chi*. 
clie<:  par  trop.S:  ne  ferons  point  menez  d'aua- 
ricenon  plus.  Voila  pourquoy  il  dit  en  pre- 
mier ltei\,Qr^e  fi  aucun  a  des  ftfiiei,  qit'il  y  fiujr 
«//JV:&- puis  iladicufte  ,  AfucjH''ily  ah  der^uoy 
four  fournir  A  cvUis  cjui  font  Trjyemcgt  -vef.ies, 
£n  premier  liei!  lainft  Paul  monftre  que  nous 
•deuons  fatisfàire  .î  noftre  deuoir  ,  &■  y  mettre 
peine  entant  qu'en  nous  fèra:&  puis  s'il  y  a  re 
férue,  que  ce  foit  tendant  à  ce  but,  qu'il  y  ait 
toufiours  dequoy  fournir  à  ccque  Dieu  nous 
commande  ,  &  non  point  que  nous  foyons  des 
gouffres  iniàtiables.  Or  d'ici  nous  auons  à  ti- 
rer vne  bonne  doftrine,c'eft  quand  nous  fom 
mes  en  charge  publique.que  nous  difpenfions 
le  bien  qui  nous  eft  commis  en  telle  forte  que 
nous  n'alléguions  point,£t  comment?  Il  pour 
roit  aduenirtelle  chofe:  car  ce  que  nous  auôs 
maintenâtdeuant  les  yeux  doit  eftre  picferé. 
Quelle  folie  fera-ce  quad  vn  homme  fera  du 
bon  mefnager,  &  cependant  qu'il  feconfiime 
du  tout?  Ceft  ce  qu'on  dit  en  prouerbc,Qi;e 
vn  homme  voudra  efpargnervn  fould  en'& 
bourfe,  &  cependant  illaiflera  plonuoir  en  fa 
maifon,{bus  ombrededire.Et  quoy?Ho,ilme 
faudroit  trop  d'argent  fi  iefaifoye  monter 
les  ouuriers  pour  rccouurir  ma  maifon  ,  il  me 
faudroit  uop  de  tuilles.  Voiie,  &  cependant 

I.ii.' 


t^l 


SERMON    XLII. 


fiMlâ  U  p!iwé  qoi-pooriira  &  chciirons.S:  ci  a-  V\n.  Or  on  trouuerialTer  d'aduocats  pour 
leiions ,  &.  tout  ce  qu'il  y  a,  que  tout  Icra  gi-  faire  donner  du  bien  d'autruy ,  on  verra  des 
fté:  voila  vn  homme  qni  fera  taxé  à  cent  clcus  zélateurs-  qui  fçauront  tant  bien  recomman- 
de domnsage  paru  tolic.  Ainlien  ell-ildc  der  que  rien  plus,Ho,Paumofneeft  tant  bien 
ceux  qui -Veulent  ctpargncr  lo  ne  (ç.iy  quny,  ici  employee-niais  s'il  eftquertion  de  tirer  vu 
&  Cependant  ne  regardent  po!nt  de  t;>urnir  j  denier  de  ia  bourCe,  ho,  il  leur  femble  qu'on 


ce  que  Dieu  leur  donnc.M.ii;  le  principal  cil, 
que  nous  ayons  ceftcintcgnté  tnnou',dei;e 
pomc  chercher  des  cxculcs  vaincs  comme 
nous  auons  accou/himé,  que  chacun  .'.Ueg'ie- 
T.v,  Ho,  voila, ievoudroye  bien  faire  ce  qu'on 
m'ordonne,ma'';i'ay  des  cntaiis,ray  d'autres 
charges  ,  &;  ie  Tçay  que  Dieu  approuue  que 


leur  arrache  les  boyaux  du  ventre:  &  toutef- 
fois  ce  feront  ceux  qui  feront  les  plus  affe- 
ctionnez à  faire  donner  ,  &mefmesfion  ne 
Kiuce  qu'ils  auront  dit,  incontinent  c'efti 
crier, qu'il  femblera  que  tout  foit  perdu  lî  on 
ne  leur  veut  obtempérer  .  Dont  vienent  ces 
grans murmures  .dont vienent  les  fcandales 


l'en  aye  le  f  lin.  Il  ell  vray  que  voila  quelques     îînon  de  ces  aduocats  qui  ne  voudroyét  point 
belles  couleurs  :  mais  fi  on  fonde  le  cœur,  on     faire  vneaumofne  valant  vn  denier?  Mais 
n'y  trouuera  qu'hypocritic  dedans, qu'il  n'y  a     quoyfpour  recommander  ils  font  trop  prodi 
qu'auaricc  qui  règne, &  qu'on  en  trouuera  bié     gués, ils  feront  leurs  befongnes,  &  cepeildic 
peu  qui  faccnt  ofHce  de  pcre  pour  s'acquitter    il  faut  qu'on  leur  obeiire,&  fi  on  ne  fait  à  leur 
de  leur  deuoir  enuers  ceux  aufquels  Dieu  les     gré  ii  tort  qu'ils  auront  ouuert  la  boyche,voi 
oblige.  D'autant  plus  donques  dcuons-nous     la  vn  murmure.  On  voit  donc  cela  tous  les 
purger  nos  confcicnces  atin  que  nous  chemi-     ioiir».  Et  ainiî  d'autant  plus  nous  faut-il  bien 
nions  en  iîmplicité  pour  ne  prétendre  point     noter  cefte  dodrine  qui  eft  ici  contenue.c'eft 
vnecouuertureobliqiie.&eftreconuaincus  de     que  nous  ne  foyons  point  feulemét  aduocats 
uant  Dieu,  &  deuant  fes  Anges ,  qu'il  y  ait  eu     pour  faire  du  cuir  d'autruy  large  couroyc, 
aucune  femtifeen  nous. Cependant  aut'si  nous     mais  qu'vn  chacun  s'employe  félon  fafacul- 
voyons  comme  ch.-icun  doic  prendre  les  char-    té,voire,&  qu.rd  chacun  aura  fait  aumofne  de 
ces  fur  foy  ptuftoll  que  de  les  remettre  fur  le     ce  que  Dieu  luy  aura  donné  ,  que  les  aumof- 
commun  :  &  c'ert  vue  leçon  que  nous  deuons     nés  publ'ques  aufsi  fe  facét  l'elon  qu'on  pour 
bié  noter,  pou rce  qu'elle  cft  h  malprattiquee.     ra.  Maisretenosce  que  fainâ  Paul  nous  mon 
Car  qui  eft  celuy  qui  ne  demande   d'ertrc     ftre,que  celuy  à  qui  attouchc  la  charge,  s'il  a 
exempt  de  tout  ce  qu'il  deura,^  cependant  on     quelque  pouie  de  fonparéiage  auquel  il  doi 
ne  fe  fouciera  gueres  que  le  commun  eu  foit     ue  tournir,qu'il  ne  remette  point  cefle  char- 
chargé  ,  on  fera  du  cuir  d'autruy  large  cou-     ge-la  au  public,  afin  qu'il  y  ait  dcquoy  four- 
roye.comrae  ondit?Et  pleuft  a  Dieuquecela     iiir  à  ceux  qui  font  dertituez  de  toute  aide, 
ne  hirt  point  tant  cognu  par  experiencc:mais     Q_uand  cela  fera, tout  ira  paiiîblement,  &  les 
on  en  a  quafî  les  yeux  creucz,  que  chacun  au-     murmures  qu'on  oit,âr  dont  il  procède  bcau- 
la  incontinent  vn  bouclier  pour  repoufler  tou    coup  de  fcandale<:,cefleront.S3inft  Paul  ay.ït 
les  charges  , Ho,  voila,  de  moyie  [n'ay  point     ainli  parlé  des  vefuesadiourte.Q"»/"  Ancici 
tel  bien  qui  puifle  fournir  à  tant  de  cholls:&     (ou  Preftres,qui  vint  iuti()Ufquels  s''ttnploy- 
puis  i'ay  ici  .\  faire.  A  qui  eft-ce  donques  que     ent  dtuement,^  Pacquitttnt  de  Ifitr  ({eMoir,di>i 
on  renuoye?au  commun. Et  le  S.  Efprit  qu'en     »«»f  rJJre  rep».te\  dignes  de  double  honneur,cy 
prononce-il?  Qu^vn  chacun  (dit-il)  s'efforce    fur  tout  ceux  tjui  tr.muillent  en  Lt  Varole  c?-  da 
félon  fa  faculté.afînque  l'Eglife  ne  foit  point    urine.  Car  il  eft  efcrit.QuJonne  lie  point  la  Deu.  if, 
chargee.Or  nous  auons  les  aureilles  bouchées    gueule  du  bœuf  qui  foule  legrain  ,  ou  qui  la-  4, 
àvne  telle  admonitiôifi  faut -il  toutesfois  que     boure  la  terre. Si  Dieu  a  eu  le  foin  des  beftes,  i.Cor.f, 
tant  plus  nous  auilions  à  nous  ,&;  que  nous  ne     par  plus  forte  raifon  il  faut  bien  que  nous  y. 
foyons  point  tellement  menez  de  noftrepro-    ayons  humanité  entre  les  hommes,  que  nous 
fit  particulier ,  que  ce  qui  nous  eft  ici  pronon     nefoyoTis  point  fî  cruels  de  tirer  la  iiieur  8c 
ce  n'aille  deuant,&  ne  foit  vnebride  pour  re-    lafubftancede  ceux  que  nous  laiflons  mou- 
primer  toutes  nosaffefti ons  8:cupiditez,c'eft    rir  defaim,  mais  comme  le  prouerbecômun 
afçaiioir  que  chacun  doit  entrer  en  foy  pour    a  toufîours  efté ,  Que  l'oauricr  eft  digne  de  M^f.ig,* 
cognoiftre  à  quoy  Dieu  l'oblige  ,  voire  &  fe    fon  falaire.   Si  cela  doit  eftre  gardé  enuers  jq_  ' 
doit  efuertuer  de  fournir  de  fon  bien  propre,    tous,  par  plus  forte  raifon  enuers  ceur  qui  jl„,  ,g, 
afin  que  l'Eglife  ne  foit  point  foulée.  Quand    nous  adminiftrentlapafture  fpirituelle  dont  _^ 
nous  ferons  cela  chacun  pour  foy  ,  nous    nos  aines  font  nourries. Or  deuant  que  paflcr 
ne  laiflerons  pas  de  contribuer  aux  charges    outre,  nous  auons  à  noter  ici  que  fainft  Paul 
publiques ,  comme  fainft  Paul  entend,  que    met  denxefpecesdegouuerneurs  d'Eglilé.Il 
ceux-là  qui  eftoyent  chargez  de  leurs  vefues,     met  «eux  qui  trauaillent  en  la  Parole, &  ceux 
ne  laiffjyent  point  de  faire  aumofnes,qui     qui  font  pourpenfer  des  moeurs,  &  pour  veil 
eftoyent  diftribuees  parccux  qui  y  eftoyent    1er  (ur  les  diflolutions  qui  fe  peuucnc  faire, 
ordonnez.  Mais  auiourd'huy  tSt  s'en  faut  que    afin  qu'il  y  ait  quelque  police,&  que  les  gens 
beaucoup  s'acquittent  de  tous  les  deux, qu'on     ne  foyét  point  diflolus,  VoiJa  donques  deux 
n'en  trouuera  point  la  moitié  qui  fuffifent  à    efpeccs  d'Aiicieni  que  met  ici  fainft  Paul  :  il 

les 


SVR    LA    I.     A 

Ie<  appelle  toasyreftres.ou  AncienJ.Orileft 
certain  que  de  ce  temps-U  on  ne  fçauoit  que 
vouloit  dire  celte  prcftrJle  Papale  :  car  ceux 
<iw  font  crcet  «n  la  Papauté  pour  Preftres.iis 
ne  font  ordonnez  finon  bourreaux  de  lefai 
Chriftponr  leûcrifieriouraelleraent,  quicft 
vn  blafpheme  abom;.nable:raais  voila  la  mots 
excellent  toucesfoisdont  ces  belles  cornues 
vferont  enordonnant  Icurt  Preilres,c*crt  que 
ils  doyuent  facrifier  Icfus  Chriil.afin  d'appât 
ferTire  de  Dieu,&de  réconcilier  les  homme? 
auec  luy.  On  ne  fçauoit  que  c'eftoit  de  ctfte 
preftnfe-Ia  du  temps  de  faiiiô  Pauhmais  quad 
il  parle  desAnciens.il  môftre  que  ce  font  ceux 
qui  fontapprouuez  de  Dieu,5tdefquels  on  ne 
fe  fçauroit  pafler  lî  oo  veut  auoir  vn  régime 
fpintuel,  tel  que  Dieu  l'a  eftabli  du  commen- 
cement, &  qu'il  veut  eftrc  obferué  iufqiies  en 
la  (indu  monde.  Or  défia  nous  voyous  que 
{iinù  Paul  met  les  Anciens  qui  trauaiilcnt  en 
la  parole  de  Dieu:*:  puis  lien  metd"autres,& 
dit  que  tou^  ceux  dont  il  parle  .doyuent  bien 
prefider.  Il  s'enfuit  donquc-;  qu'il  y  auoit  des 
Anciens  qui  n'eftovt  nt  ^oint  prefcheurs,  qui 
n'auoycnt  point  Toftice  d'ciifeigncr ,  ni  d'à- 
noncer  h  parole  de  Die u.Et  de  quoy  feruoy- 
ent-ils?llN  iiioyeiit  regard  fur  les  mcrurs.afin 
d'admoneJKr  ccuk  qui  failloyent ,  &  de  ne 
point  fodffrir  les  fcandales  publiques, afin  d'.i 
iioirauthirité, comme  cftis  cftablis  de  Ja  part 
de  toute  l'Eglife.  Qjijndi)  y  auoit  quelque 
erimc,comme  noifes.debats,  rapineï, fraudes, 
outrage$,iniures,pai!Iardife$,ceux-ladeuoyét 
eftre  vigilan'i  fur  tous  ces  vices,  comme  aiifsi 
rEglifelcurdonnoit  fuperintédancc.Or  puis 
qu'ainiî  eft  ,  qui  eftceluy  de  nous  maintenant 
qui  ofcr.i  attenter  contre  l'ordre  du  fiincl 
Êfprit?  Et  toutesfois  on  voit  l'audace  diabo- 
lique qui  y  eft, qu'on  tient  autant  de  conte  de 
ce  qui  eft  allégué  derF.icriturc  fainc^e,  com- 
me h  on  alleguoit  \  pc  fable  d'Efopet:  voila  la 
Chreftienté  d'ici-.]Uicft  vn  liorrrblemonftrc. 
£t  quand  on  voit  tilles  choies, certes  il  feroit 
bien  à  fouliaiter  q  Dieu  ne  nous  laillîi II  point 
viure  en  vn  fiecle  li  desbordé, que  In  parole  de 
Dieu  en  vn  lieu  où  on  tait  profcfsion  de  l'E- 
uangile  ,  ait  autant  d'aiitJinrité  coinmclion 
auoit  raconté  quelque  conte  plaifint  d'vn 
homme  prophanc.  Or  fi  on  croyoit  qu'il  y 
euftvnDieu  au  ciel ,  il  ell  certain  qu'on  feroit 
touché  autrement,  &  qu'il  yauroit  quelque 
crainte:mâis  tous  ceux  qui  vienentà  l'encon- 
trede  celle  ordoiinance,  n'ont  de  religion  no 
plus  que  des  chiens  :  s'ils  eftoyent  Turcs  ou 
luifs,  on  ne  s'en  esbahiroit  point  tantrmais 
ils  font  pires  que  belles  brutes.  Et  il  ne  faut 
point  trouuer  eflrange  que  leur  turpitude  & 
vilenie  fe  defcouure  en  telle  forte,  il  faut  que 
cela  foit  notoire  à  tous ,  d'autant  qu'ils  n'ont 
nulle  honte  de  <'eleuer  ainlî  contre  Dieu.  Or 
tant  y  a  que  c'eft  vne  marque  qu'ils  n'ont 
point  de  religion.quartd  ilsmefprifentainfi  la 
doftrine  de  Dieu,&  que  ces  vileins  ofent  auec 


T  I  M  O  T  H. 


'?» 


vne  telle  furie  Faire  la  guerre  l  leur  Créateur, 
il  faut  bien  que  nous  contemplions  en  leurs 
peifonnes  mefmesvne  horrible  vtngcnce  S: 
inaledi£Hon  de  Dieu  ,  8c  que  (î  pour  vn  tcmpï 
Dieu  les  efpargne  ,  ce  terme-la  leur  ferabica 
cher  vendu.Ordonques  retenons  ce  qui  nous 
ell  ici  dit  par  fainft  Paul,Qu|il  y  a  deuï  cfpc- 
ces  d'Ancicns:que  Dieu  pour  bien  gouuerner 
fon  Eglifca  voulu  qu'il  y  cull  des  Miniftrci 
qui  anonçalTcnt  fa  parole,  &qui  fuHcntPa- 
(îcurs:apres  cela,  qu'ily  cull  auKigens  quant 
&  quant  qui  fuHent  pour  gouuerner  ,  St  qu'on 
eltufl  &  cholîft  ceux  qui  eiluyent  de  vie  bon.. 
ne  Se  fainâe.qui  auoyent  délia  acquis  quelque 
authoritt,&  qui  auoyentaufw  quelque  pruden 
ce  pour  fournir  à  vne  telle  charge.  Or  pourrj 
on  changer  ce  que  Dieu  a  commandé  comme 
vnechofe  inuiolable?  Qjj^on  s'efforce t.Tîic 
qu'on voud ra  ,  mais  enlafin  nous  fentivonr 
que  Dieu  ne  peut  fouffrir  que  les  hommes  tca 
uerfentainfifon  ordre,  &  qu'ils  bataillent  di- 
reûement  pour  tout  peruertir.  Tenonydonc 
ceci  comme  vne  chofe  inuiolable.  Il  eft  vray 
^ucdelî.1  de  long  temps  le  diable  atafchéde 
lairc  ce  meflinge,  en  telle  forte  qu'il  y  adifia 
treize  cens  ans  qneles  lâintlsperfonnages  qui 
culltnt  déliré  que  Dieu  eullefié  purement  l'er 
ui.ic  (ont  plaints  que  cefl  ordre-ci  auoit  efté 
corrompu.  Et  comment?ou  par  nonchalance, 
ou  par  orgueil  :  que  ceux  qui  de  ce  temps-la 
auoyét  la  charge  d'anôcer  la  parole  de  Dieu, 
auoyent  attiré  telle  puiflance.àeux,qu'il  n'e- 
floit  plus  qucftion  d'élire  gens  qui  eulltnt  fu- 
perin tendance  pour  gouuerner  l'Eglife.  D'au 
tant  plus  dôques  nous  f.rjt-il  talchcrde  nous 
maintenir  en  celle  pure  intégrité  que  nous 
voyons  fortir  de  celle  fontaine  de  vie,  ouand 
noilre  Seigneur  lefus  a  déclaré  qu'il  vouloit 
que  fon  peuple  fufl  ainlî  gouuernc.  Perliilo.ns 
donc  en  cel.i,&  gardons  bien  de  rien  changer: 
mefnies  ayons  honte  que  nous  fommeibien 
loin  de  cell  citât  dontparle  fainft  Paul.  Car 
qu'cll-cc.ie  vous  prie, de  l'ordre  que  nous  te- 
nons entre  nousj'C'c 11  comme  vn  petit  ombra 
ge  tant  feulement ,  de  ce  qui  ell  ici  dcclaré.  Si 
on vouloitexammer-que  c'cllvn  C'onitftoirc 
qui  eft  entre  nous,hclas,  combitn  >'(n  faut-il 
que  nous  n'ayons  cefte  perfection  ligrande 
côme  on  l'a  obfcruee  du  temps  des  Apoftrcs? 
Et  toutesfois  encores  y  en  a-il  fcommc  on  le 
voit)à  qui  cela  fafche,voire  q  feulemét  l'om- 
bie  de  ce  qu'ils  cognoiflent  eftrc  procède  de 
Dieu  ,  les  tourmente.tout  ainlî  que  le  diable 
fera  tourmenté, &  agitera  les  hommes  en  plus 
grande  furie  quand  Dieu  defploy'c  fa  vertu. Et 
ainlî  il  ne  faut  linon  cefte  petite  ombre  pour 
defpuer  lesmefchans,&  les  ennemis  domefti- 
qucs  de  Dieu. l'appelle  ennemis  domeftiqucs, 
ceux  qui  font  profefsiô  de  rEHangile,5;  mon- 
ftrent  qu'ils  fontplus  contraires  que  les  Pa- 
pilles.Or  tant  s'en  faut  qu'il  nous  faille  recu- 
ler ,  que  nous  deuons  câiclier  pluftoftde  nous 
auancer,cognoillâns  qu'il  y  a  encores  longue 

l.iii. 


î?T 


■"SERMON       XL  IL 


diftance  entre  nous&  l'ordre  qui  aefté  prac- 
liqué  du  temps  des  Apoftres.  £tainlî  prions 
Dieu  quM  nou';  cont-crme  tellement  qu'il  re- 
fide  au  milieu  denous,&que  pluftoft  il  amené 
les  choies  en  meilleur  cftat  pour  approcher 
tant  mieux  de  la  règle  deû  parole,  que  de  re- 
culer vn  ftul  pas,  veu  que  nous  ioinmes  enco- 
res,non  point  au  milieu  du  chemin,  mais  qu''à 
grand'  peine  auons-nous  commencé  pour  en 
bien  dire.  C'eftvn  article  que  nous  auons  à 
obferuer  en  ce  pafTage.  Or  cependant  il  nous 
faut  aufsi  noter  ,  quand  ûintt  Paul  parle  des 
Anciens  ,  qu'il  n'entend  pas  tous  ceux  qui  en 
ont  le  titre.mais  ceux  (^mpreflJent  biea,Sc  qui 
font  leur  deuoir.  Or  fous  ce  mot  de  Vrefider, 
notons  que  c'eftvn   office  honorable  que  de 
gouuerner  l'Eglife  de  Dieu,coiixme  il  en  a  efté 
parlé  cideflus.Il  eft  vrayq  no'ne  pouuôs  eftre 
Pafteurs ,  nous  ne  pouuons  eftre  miniftres  de 
la  parole.nous  ne  pouuons  eftreAnciens.finon 
en  feruant  à  Dieu  &  à  fon  peuple:  brief,  nous 
ne  polluons  feruir  àDieu,que  nous  ne  Ibyons 
feruiteurs  de  fon  Eglife,&  de  fes  fidèles, com- 
me lainft  Paul  en  parle  au  quatrième  de  lapre 
miere  aux  Corinthiens.  Quelle  eitdonccefte 
dignité?  Ce  n'eft  pasvne  façon  de  prelîder 
comme  aurôt  les  Princes  &  les  feigneurs.mais 
c'eft  comme  vn  feruice. Glorifions-nous  donc 
feruans  au  troupeau  qui  nous  eft  commis. Car 
(comme  deiîa  l'ay  touché)  il  eft  impofiible 
t]ue  nous  feruions  à  Dieu,  fînon  nous  dedians 
au  feruice  de  fon  peuple  :  mais  cependant  fi 
faut-il  fçauoir  que  ce  feruice  eftcôioint  auec 
la  dignité.  Or  on  voit  le  mefpris  qui  eft  quafi 
par  tout  lemonde,qui  procède  de  cefte  ingra 
titude ,  que  bien  peu  de  gens  reputent  à  quoy 
c'eft  que  Dieu  nous  a  appelez  &  choifîs.  Car 
il  leur  fenible  que  les  prcfcheurs  font  comme 
des  valets  d'eftable  ,  &  qu'on  en  pourra  faire 
a  fon  plaifiryqu'on  les  pourra  manier  pour  di- 
re.Tire  ci,tourne  là.  On  voit  ceft  orgueil  en 
4'auciîs.Pourquoy?Carianiais  n'ont  goufté  ce 
mot  dont  parle  ici  fainÙ.  Paul,  c'eft  afçauoir 
que  nous  ne  pouuons  pas  anoncer  la  parole  de 
Dieu ,  finon  en  prcfidant.  Il  eft  vray  (comme 
i'ay  défia  dit)  que  ce  n'eft  point  vne  fuperin- 
lendance  impériale,  ce  n'eft  point  vne  domi- 
nation ne  principauté  :  mais  c'eft  afin  que  la 
pj-role  de  Dieu  l'oit  authorifee,&  qu'on  reco- 
gnoiflè  que  nous  deuons  eftre  efcoutez  com- 
me peresdesenfans.  Si  vn  enfant  reiettefon 
père  quand  il  Padmonefte  ,  &  luy  donne  bon 
confeiljildefpiteDieu.  Autant  en  eft-ild'vfl 
homme  qui  lait  profefsion  d'eftre  fidele,&:  ce 
.pendant  reiette  toute  la  doûrine  deceux  que 
il  cognoift  luy  eftre  ordonnez  de  Dieu  à  ceft 
office  paternel.  Voila  donc  pourquoy  faind 
Paul  a  ici  vfé  dece  mot  de  Vrefider.  Or  reue- 
«onsàce  quei'aydeCa  touché, c'eft  que  Dieu 
ne  commande  point  qu'on  honore  tous  cçux 
qui  ont  ce  titre  ,  mais  feulement.il  veut  qu'oo 
^'acquitte  entiers  ceuxx^ui  font  leur  deuoir; 
<£(  en  cela  toit -on  ijuclle  impudence  c'eft  au 


Pape' ,  &  â  tout  fon  Clergé ,  qui  voudroyent 
qu'on  les  recogmift  Euefques,  Prélats,  &:  tout 
ce  qu'il  eft  pofsible  de  penfer.  Car  ils  enflent 
leurs  ioucs  ,  quand  il  eft  queftion  de  s'intitu- 
ler ,  qu'ils  auront  leurs  pompes  magnifiques, 
qu'il  femble  que  la  terre  doyue  tremblera 
chacun  mot  qu'ils  s'attribuent  t  mais  cepen- 
dant fi  faut-il   veniràce  quedit  S.  Paul,  c'eft 
que  les  fidèles  ne  font  point  tenus  finon  à  ceux 
qui  prefident  bien.   Q^'ori  regarde  mainte- 
nant que  c'eft  que  font  les  Euefques,&  tout  le 
Clergé,  c'eft  à  dire  toute  cefte  vermine  de  la 
Papauté.  Eft-il  queftion  de  fçauoir  que  vaut 
leur  charge  ?  Nenni:  mais  il  faut  fçauoir  que 
vaut  vn  bénéfice  porté  àcent  lieues  loin  ,  & 
qu'vn  homme  n'en  approche  iamais  finÔ  pour 
fon  esbat  quand  il  en  voudra  auoirla  vcue. 
Mais  quant  eft  de  fe  dédier  à  Dieu  &  à  fon 
peuple,il  n'en  eft  nulle  mention.  Voyant  que 
leschofes  font  ainfi  corrompues ,  que  faut.'iJ 
que  nous  facions  ?  C'eft  de  tenir  cefte  règle 
qui  nous  eft  d5needuciel,&  ne  prenons  point 
cefte  couuerture  pour  dire  ,  Ho  ,  les  hommes 
peiiuent  abufer  d'viie  telle  chofe.  Et  Diea 
n'eft-il  point  allez  fage  pour  y  pouruou?  Or 
voila  ce  qu'il  nous  commande, liiyuons-le  fim 
plcment,  &  gardons-nous  bien  que  les  chofes 
ne  déclinent  point  en  mal.  Et  fi  on  voit  qu'il 
y  ait  danger  que  tout  ne  fe  peruertifle,  voici  le 
fain6^  Efprit  qiii  y  remédie  ,  quand  il  eft  dit, 
Qjte  les  V^fleurs  doynent  trMiaiUer  en  Lt  paro- 
le (j'doSlrine:  &  que  les  autres  Anciens, com- 
bien qu'Us  n'ayent  point  l'office  d'enfeigner 
l'Euangile.doyuent  toutesfois  s'employer  à 
faire  ce  qui  eft  de  leur  vocation  &  eftat.  Et 
ainfi  quand  nous  ferons  obeiflàns  à  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift,  iS:qiievolontairemét  nous 
fuyurons  ce  qu'il  nous  monftre,  que  les  hom- 
mes facent  tout  ce  qu'ils  pourront  pour  cor- 
rompre le  bien,  que  le  diable  aufsi  machine 
auec  toutes  fes  aftuces  qu'il  ba,de  nous  diuer- 
tir  du  bon  chemin,  nous  ne  pourrons  tomber 
que  fur  nos  pieds,  comme  on  dit.  Mais  quand 
nous  voudrons  eftre  fins  &  cauts  de  noftre  co 
fté,&  trop  aigus, Dieu  permettra  que  nous  fe- 
rons lurprins  en  beaucoup  de  fortes  :  &  nous 
en  fommes  dignes, fi  nous  ne  nous  contentons 
de  l'efcouter  limpleniét  pour  faire  ce  qu'il  or 
donne.Tant  y  a  qu'ici  fainft  Paul  a  rembarré 
envn  mot  tous  ceux  qui  fe  vantét  d'eftre  Pre-. 
lats  en  rEglifc,&  d'eftre  Euefqu€s,quis'attri. 
buent  quelque  oiïice&  dignité  ,.&  cependant 
fon  t  des  idoles  &  des  chiens  muets  :  fainû  Paul 
les  repouflc,  &  leur  ferme  la  porte,  en  difant 
que  fi  on  veut  eftr*  réputé  ou  Paft«ur  ou  An- 
cien en  l'Eghfcyce  n'eft  point  aflezd'auoirvn 
titre  volant,d'auoirIaplacc:maisil  faut  con- 
fidererfivn  home  fait  facharge.&s'il  sV.cquit 
te  de  la  cômifsion  qui  luy  eftd5nee:voila  com 
me  il  en  faut  vfer.Et  quad  nous  en  feros  ainlî, 
noftre  Seigneu,r  régnera  au  milieu  de  nous,  Sc 
nous  profpererons  par  ce  moyentmais  en  vou. 
lanc<leclmer,il  eil  certain  que  nous  ne  ttrerôs 

qu'à 


s  VR     L  A   I.    A  TIMOTH. 


*j# 


"(^u'à  noftre  ruine.  Il  y  a  au  refte,  qu'il  eft  dit, 
Varote  ,  &  DoShrine  :  ce  qui  eft  bien  à  noter. 
Car  il  môllre  que  nous  pourrions  taire  beau- 
coup d'autres  chofes ,  &  pourrions  alléguer 
que  nous  n'aurions  nul  loifir,  mais  cependant 
il  faut  regarder  principalement  à  quoy  Dieu 
nous  appelle.  Or  le  Pape,  quand  on  dira  que 
c'eft  vne  befte  oifiue  ,  fçaurabien  répliquer 
qu'il  fouftient  les  fardeaux  du  inonde:  ki  E- 
uefques  cornus  feront  empcfchez  tant  &plus 
à  leurs  inanigâces  qu'ils  ont  controuuees  en 
leur  tefte  :  mais  cependant  il  n'y  a  rien  de  ce 
que  Dieu  requiert  d'eux. Et  au  relie, que  ceux 
qui  voudront  eitre  reputez  Pafteurs ,  doiuent 
notamment  s'appliquer  à  -celte  parole  .    Eî 
comment?Eft-ce  pour  en  faire  vne  eftude  fe- 
crete  en  vn  cabinet?    Nenni  :  mais  pour  l'in- 
ftrudion  commune  de  l'Eglife.  Voila  pour- 
quoy  fainft  Paul  a  voulu  adionfter  le  mot  de 
èaBrine.  Il  fuffifoit  bien  d'auoir  dit  ,  V.xrole: 
maisilmonrtre  quenousnedeuons  point  fpe 
culer  en  priué  ce  que  bon  nous  femblera, 
mais  quand  nous  auons  eftudié,  que  ce  foit  a- 
fin  que  les  autres  profiten  t  auec  nous ,  Se  que 
l'inftruûion  en  foit  commune  i  toute  TEgli- 
fe. Voila  donques  quelle  eft  la  vraye  marque 
pour  bien  difccrner  le?  Pafteurs  que  Dieu  ap 
prouue ,  &  qu'il  veut  eftre  maintenus  en  fon 
£glife,&  ceux  qui  s'attribuent  ce  titre  &  hon 
neur  :  &  cependant  font  exclus  &  reiettezde 
luy,&du  faind  Efprit.  0,r  quand  f^infl:  Paul 
dit  que  ceux  qui  trauaillent  ainiî  en  doftrine 
&  parole,&  qui  s'occupent  à  enfeigner, qu'ils 
doiuent  eftre  nourris  aux  dcfpens  communs, 
&  qu'on  les  doit  auoir  en  telle  eftime  ,  qu'ils 
n'ayent  faute  de  rien.  Saind  Paul  n'a  point 
parlé  ainiî  comme  cherchant  fon  profit.  Car 
nous  voyons  que  là  où  il  y  auoit  fcindale  ,  il. 
s'eft  abrtenuQece  qui  luy  euftetté  licite.  Il 
eilvray  qu'il  a  bien  prins  falaire  des  Egliles 
poiir  lefquelles  il  ne  trauailioit  point,  qu'il  a 
fouffert  qu'on  hiy  apportaft  argent  de  deux 
cents  lieux  loin  pour  lis  neccfsitez:  mais  ce-r 
P_endantlî  eft-ce  qu'il  a  mifux  aimé  ttauail- 
1er  de  fes  mains  propres ,  que  de  donner  oc- 
cafion  aux  mefchans  de  detr^fter  ,  comme  il 
traitte  cela  en  d'autres  lieux.  Et  en  ce.paflà- 
gc  fainâ  Paul  n'a  point. regardé  à  foy,mais  il 
a  parlé  en  l'authorité  de  Dieu  ,  afin  que  l'E- 
glife né  foit  point  defpourueué  de  gens  qui 
puiflent  fidèlement  enfeignist.  Car  le  diable  a 
eu  ceft  artifice  dés  le  conimencement,  qu'il  a 
voulu  affamer  les"bons  Pafteurs,  afin  qu'ils 
peufTent  Heiîfter  ,  Se  qu'il  y  en  eult  bien  peu 
quis'employaflentàanôcerla  parojede  Dieu. 
Il  eft  vray  quad  il  y  aura  desfacrificateurs  de 
Baal ,  comme  on  les  voit  en  la  Papauté  ,  que 
cela  ne  courte  rien  à  nourrir,  que  cefte  veimi 
ne  fera  bien  entretenue  ,  chacun  trauaillera 
pour  nourrir  ces  ventres  oififs:  &  toutesfois 
à  qui  eft-ce  que  cela  s'offre  fïnon  au  diable? 
Mais  le  monde  eftainC  enragé.  Cependant 
s'il  eft  qucfhon  de  nourrit  ceux  qjji  an{iHçc  t 


la  parole  de  Dieu.il  femble  qu'on  arrache  les 
entrailles  de  ceux  qui  ont  la  charge  de  les  en 
tretenir.tellement  qu'il  n'eft  queftion  que  de 
retrâcher:  &Satâa  toufiours  fes  fuppofts  qui ■ 
ne  tafehent  finon  de  priuer  les  Pafteurs  de 
leur  nourriture  ,  afin  que  l'Eglife  n'ait  poinf 
de  pafture  ipirituelle  quant  &  quant.   Voila 
donques  à  quoy  fainif  Paul  a  regardé  en  ce 
paflage.Et  ainfi  ne  prenos  point  cefte  recon». 
mandation  qui  eft  ici  contenue ,  comme  d'vn 
homme  mortel,  mais  efcoutons  Dieu  parler, 
&  fçachons  qu'il  n'a  point  eu  acception  de 
perfonnes.mais  que  cognoiflànt  ce  qui  eftoic 
profit.îble  à  toute  fon  Eglife ,  &  voyant  que 
beaucoup  eftoyeiit  lafches  &  froids  enccit 
endroit ,.  il  a  donné  vne  règle  à  ce  que  ceux 
qui  doiuent  anoncerl'Euangile,  foyent  nour 
ris.comme  nous  voyons  aufsi  que  faincl  Paul 
en 'parle  en  d'autres  liéiix  ,  &  qu'il  en  traitte 
plus  à  plein  en  l'Epiftre  des  Corinthiens.  Il 
eft  vray  qu'il  en  parle  aux  Galatiens ,  mais  là 
il  en  fait  vne  longue  deduite.Or  Dieu  a  vou» 
lu  retenir  la  malice  de  Satan, lequel  voudroic 
qu'il  n'y  euft  nul  entretenement  pour  ceuK 
qui  doiuent  anoncer  la  parole  de  Dieu  ,  afin 
qu'il  n'y  euft  plusdedoûrine  ,  que  tout  fuft 
peruerti,que  les  coiruptioBS  dominaflent  c5 
me  vn  delugc,qûe  tout  fuft  confus  &  difsipc. 
Noftre  Seigneur  donc  a  pourueu  à  ce  mal. Ce 
pendat  aufsi  il  a  cognu  l'ingratitude  du  mon- 
de. Car  fi  l'Eglift  de  fon  cofté  eftoit  vplon.« 
taire  pour  s'acquitter  de  fon  deuoir,  il  eft  cer 
tain  que  Dieu  n'infifteroit  point  là  deflus ,  il 
fuffiroit  d'en  auoir  dit  m  feulmor:mais  quâd 
il  voit  qu'il  y  a  tant  de  mefcognoiflànce'îno- 
tons  que  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  tant  in 
ftamment  il  a  monftré  ce  que  nous  deuos  fai- 
re. Il  eft  vray  qu'il  y  en  â  beaucoup  qui  fe- 
royent  contens  qu'on  defpendift  tant  &  plus, 
moyennant  qu'il  n'y  euft  point  de  chaire  qui 
fuft  libre  poui"  parler:mais  pource  qu'on  leur 
çiatte  leurs  rongnes,  ils  ne  peuuent  fouiFrir 
cela  ,  &  voudroyent  que  toute  doûrine  fuft 
mife  fous  le  pied.  Et  comment?  Ho, il  ne  faut 
que  trois  prefcheurs  :  &:  n'eft-ce  point  afTez? 
Voire?Or  il  leur  femble  qu'vn  fermon  ne  cou 
fte  né  plus  que  leur  fera  vnebeuuette.  Quad 
telles  gens  auront  defieuné  ,  ho,  ils  ne  laifle- 
ront  pas  de  fane  grand'  chère  audii'ner.   Et 
puis, le  goufter  vient-il?c'eft  à  recommencer: 
&  fur  cela  ils  ne  laiflerôt  pas  encores  de  bien 
.  foupper  :  &  mefmes  quand  ils  auront  fouppé 
ii.ifques  àcreuer.  encores  faudra-il  faire  col- 
lation.Voila  donc  comme  ces  yurongnes  qui-.; 
feront  cinq  repas  le  ioiur  ,  penfcnt  qu'on  doit 
bien  faire  autant  de  fermons  ,  &  que  cela  ne 
doit  rien  coufter  non  plus  qu'à  tenir  là  leurs 
propos  :  mefmes  quand  ils  auront  dcfgorgé 
leurs  blafphemes ,  que  c'en  doit  eftre  autant 
d'vnfermô,  cène  leur  eft  rien, ce  leur  femble. 
Et  puis  il  n'y  a  nulle  vigilance  ,  il  n'eft  point 
queftion  d'cftudiér,  de  regarder  à  ceci  o.u  3, 
cék ,  ila'eft.poin.t.  (jucftjvndf  .confoler  çeu«  ■ 

I.iiii. 


l^f 


SERMON     XL  ni. 


qui  en  ont  bcfoin,  de  vifîtcr  les  malades,  rien 
qui  foit  de  tout  cela.  Et  cepcndat  telles  gens 
n'ont  point  honte  de  gronder  ainli  comme 
des  pourceaux  qui  viendrôc  ietter  leur  groin 
pour  tout  corrompre  &  renuerfer.  Ainiidonc 
BOUS  voyôs  par  expcriencequecen'eft point 
fans  caule  que  Ditii  a  voulu  pouruoirà  la 
nourriture  de;  miniftres  de  fa  parole  ,  &  re- 
d.irgucr  quant  &  quant  la  malice  &  ingrati- 
tude qui  eit  aux  hommes.  Mai';  poiircc  que  le 
léps  ne  porte  pas  que  le  refte  fe  puiiTe  defpef 
cher  raaintenât,nou$  le  referuerons  à  vne  au- 
tre fois. 

Cependant  nous-nous  profterneron?  de- 
uât  la  maiefté  de  noftre  bon  Dieu  eu  cognoif 
ûace  de  nos  tautes,le  prians  qu'il  nous  les  fa- 


ce mieux  fentir  que  nous  o'auoris  point  fait.ét 
que  d'orcfcnauant  nous  appreniôs  à  nous  ac- 
quitter chacun  de  (à  charge  &  de  fon  deuoirr 
que  nous  tafchions  aufli de  Toulager  nos  pro- 
chaine ,  &  que  nouv  portions  les  fardeaux  les 
vns desautres  mutucUement.Etcependatque 
nous  exaltions  ce  bon  Dieu  entre  nous  ,  afio 
aufsique  nous  foyons  fouftenusde  fa  vertu  & 
de  fa  grâce  iufques  en  la  fîn:&  quM  nous  au- 
gméte  en  tous  les  dôs  de  fon  S.Efprit,&  qu'il 
les  face  valoir  tellement  que  de  plus  en  plus 
nous  foyons  conformeià  fa  gloire  iufques  à 
ce  qu'il  nous  y  ait  tranffigurez  du  tout  en  fon 
royaume  celefte.  Que  non  feulement  il  bohs 
face  cefte  grâce ,  mais  aufsi  à  tout  peuples  Se 
nations  de  la  terre,&c. 


SEPTIEME     SERMON     SVR     LE 

C  I  N  CL.V  I  E  M  E    C  H  A  P  1  T  R  E. 

17  Les  Anciens  quiprefident  bien ,  foyent  réputé^,  dignes  de 
double  honneur  :  principalement  ceux  qui  labourent  en  la  Varole  (^  en 
doShine. 

18  Car  ÎEfcriture  dit,  Tu  ne  lieras  point  la  ^euïe  du  bœuf  qui 
foule  le  grain.Et,Vouurier  eîl  digne  defonfalahre. 

15  Ne  reçoy  point  d'accujâtion  contre  T  Ancien  finonfous  deux. 
outrais  te fnoins. 

zo  Kepren  deuant  tous, ceux  qui pechent,a^n  que  les  autres  auf- 
jî  en  ayent  crainte. 

me  fpiritBel  de  l'Eglife  Je  Dieu.  Et  cepcndat 
ceux  qui  fc  dirôt  Prelats.penfent  que  ce  n'eft 
point  choie  qui  j'accorde  à  leur  dignité  que 
d'anoncer  la  parole  de  Dieu.  LesCurcxferÔr 
leur  profne:  mais  ce  n'eft  que  tonte  niocque- 
rk.  Ainfi  donc  notons  bien  que  Dieu  nous  a 
ici  donné  vne  règle  certaine  &  infallible  pour 
iuger  queh  font  les  vrais  Prélats  qui  ont  1ère 
gime  dt  fon  Eglifc  ,  c'eft  i  fcauoir  ceux  qui 
trunaillent  en  la  ilofîrine.Ot  ce  mot  de  trauail 
emporte  qiTïiNyfaut  mettre  peine  à  hô  efciét, 
que  ce  n  eft  pasvn  ieu  ou  vne  cérémonie, 
mais  qu'on  s'y  doit  employer.  Et  cependant 
fainil  Paul  ne  parle  poiin  feulement  de  Joitri 
n«,mais  il  met  la  Pan  If  deuant ,  pour  fignifiet 
que  la  doârine  que  nous  portons ,  doit  cÙfe 
tirée  de  la  pure  parole  de  Dieu:  que  ce  n'tft 
point  aux  hommes  mortels  d'auancer  ce  que 
leur  fantafie  porte,  &  ce  qu'ils  auront  imagi- 
né.Car  il  ne  faut  pointque  nous  foyons  fagct 
à  noftre  appétit ,  mais  que  Dieu  ûomincluy 
feul,5£  que  nous  foyons  enfclgner  de  iuy.  Or 
cclacft-il?  Sainû  Paul  déclare,  Quectux^ut 
s'ac^HÎtent  fjelttnent  Je  leur  deuoir ,  font  ii- 
vnet  dt  double  honntur  ,  qu'on  doit  auoir  plus 
d'efgard  Heurs  perfonnes,  qu'aux  vefues  dot 

il 


Ous  iuons  cSmcncé  àraon- 
ftrcr  quels  font  les  vrais  Pre 
ftrcs  q  Dieu  approuuc  :  non 
'  point  ceux  que  le  Pape  a  or 
donnc2,ou  fes  Eucfques;car 
'  il  les  a  introduits  pour  eftre 
comme  bourreaux  de  le  fus 
CKrift,  le  facrifians,  cômc  fi  ce  n'eftoit  point 
affcz  qu'il  fe  fuft  offert  vn  feul  coup  pour  no- 
Itre  rédemption  eternelle,ainfi  que  TEfcritu- 
le  le  porte.Et  puis  les  Preftres  aufji  en  la  Pa- 
pauté font  cftablis  pour  faire  d'autres  linge- 
iies.  Mais  cependant  voici  DieuiuidecLire 
par  la  bouche  de  fainft  Paul, que  \ii  vrais  Pre 
ères  ou  Pafteurs  de  l'Eglife,  ce  font  ceux  qui 
travaillent  en  la  V^irole  &•  en  lai{oiUrine:com~ 
ne  s'il  eftoit  du, pour  enfeigner  purement  ce 

2 ni  eft  contenu  en  la  parole  de  Dieu. Ce  font 
onc  deux  chofcs  infcparables  félon  Dieu  & 
fon  ordre  qu'il  a  eftabli ,  que  le  titre  de  Pa- 
âeur  ,  d'Euefque.de  Preftre,  ou  d'Ancien,  ou 
de  Miniftre  ,  &  de  pfcfcher  &  anonct-r  la  pa- 
role de  Dicu.Et  de  là  on  peut  luger  quelle  cil 
cefte  Hiérarchie  dont  les  Papiftes  fe  vantent, 
comme  ils  difent  qu'ils  ont  vne  principauté 
tiicree,&  que  c'eû  a  «ui  <^u'appattici  le  régi- 


SVRLA     I.    ATIMOTH. 


*S7 


Pc»». Il 
10. 


i.Cor.?. 
4- 


Rom.  i{, 
17- 


llauoit  fait  cidefTus  mention.  Et  d'autat  que 
le  monde  eft  par  trop  ingrat  en  ctft  endioit, 
il  adioiifte  auf>i  la  probation  ,  ÇJ^f  Us  haufs 
tncfmescjin  traK.tilltiit  paurnous,furiiit  fnfifl.in- 
tex.,cjuon  les  nourrira.  Et  Thumanité  le  porte, 
comme  Salomon  dit ,  L'homme  fage,  &  qui  a 
quelque  raifon  en  foy,  penfcra  fon  clKual,& 
ne  le  voudra  point  greucr  outre  mcdire  ,  ne 
le  charger.  Si  nature  nous  monfcrc  que  nous 
deuons  vfer  d'équité  enuers  les  be/les  brutes, 
que  deuôs-noiis  faire  enuers  nos  prochains? 
Serons-nous  là  cruels?Vn  bœuf  qui  laboure*- 
ra  les  champs, ou  qui  foulle  le  blé, fera  nour- 
ri :  &  ceux  qui  adminillrent  la  pafture  fpiri- 
tuelle,ceux  qui  font  conftituez  de  Dieu  pour 
nourrirnosames,  ceux-là  feront-ils  mefpri- 
fez?  Il  y  aaufsi  l'autre  règle  qui  eft  tirée  du 
droit  commun  ,  &  de  la  couftiime  qui  fe  doit 
obferuer  entre  les  hommes, c'eft^B^  celuy  qni 
trauaillc  ,ffl  dign- de  loyer.  Puis  qu'ainiî  eft 
donc, que  ceux  qui  trauaillét  pour  le  falut  de 
nos  âmes ,  la  chofe  la  plus  precieufe  qui  foit 
au  monde,  ayent  dequoy  le  nourrir  :  comme 
aufsifainft  Paul  en  traitte  en  d'autres  parta- 
ges plus  à  plein :&  ne  l'a  point  fait  pour  foy, 
mais  d'autant  qu'il  voyoït  la  malice  de  beau 
coup  de  gens,&:  que  les  vns  murmuroyét  con 
trc  les  Pafteurs,d'aut.u  qu'ils  eftoyent  nour- 
ris aux  defpés  comnuis  de  l'Eglife.-  les  autres 
euflcnt  voulu  qu'on  les  euft  quafi  affamez  :  & 
le  diable  aufvi  machine  cela  ,  qu'il  voudroit 
qu'il  n'y  euft  homme  qui  montaft  iamais  en 
chaire  pour  enfeigner.  Sainâ:  Paul  donc  (  ou 
pluftoftle  fainft  Efprit  de  Dieu  parlant  par 
fa  bouche)a  voulu  remédier  à  vn  tel  mal. Pour 
cefte  caufe  il  déclare  qu'on  doit  auoir  le  foin 
de  ceux  qui  s'acquittent  fidèlement  de  leur 
office, eftans  conftituez  Pafteurs.  Et  de  fait, 
nous  voyons  cequ'ilditenl'epiftre  aux  Ro- 
mains,qu'il  oblige  les  Payens  qui  eftoyét  aux 
régions  lointaines ,  aux  luifs  qui  habitoyent 
en  lerufalem  ,  pourceque  l'Euangile  leur  e- 
ftoit  venu  de  là:  Vous  eftes  tenus,  dit-il,  en- 
uers eux.  Et  pourquoy?  Car  d'où  eft-ce  que 
vous  eftprocedee  ladoftrine  de  falut?  Tou- 
tesfois  ce  n'eftoyent  point  ceux-là  qui  l'a- 
uoySt  apportée:  It  eft-ce  que  fam£i  Paul  veut 
que  les  Payens  qui  habitoyent  en  Grèce  ,  & 
aux  jutres  pays  lointains  ,  fuffent  obligez  3 
ceux  de  lerufalem  ,  &  qu'ils  leur  enuoyaflcnt 
de  leurs  biens.  Et  pourquoy?  Car  l'Euangile 
leur  en  eft  vemi.  Et  que  fera-ce  donc  de  ceux 
qui  enfeignent  en  leurs  propres  perfonnes,& 
qui  s'occupent  là?  Maintenant  nous  voyons 
à  quoy  faîil  Paul  a  regardé, difant,</K*on  dmt 
auoir  le  foin  de  ceux  cjiti  trauaillent  e»  U  dochi 
ne  (p-  en  la  farote-  Et  fi  nous  regardons  à  no- 
ftre  temps  ,  nous  pourrons  aifeement  iuger 
que  ce  n'eft  point  uns  caufe  que  faind  Paul  a 
ici  parlé  de  la  prouifion  &  nourriture  des  mi 
niftres.  Car  il  n'eft  point  qneftion  auiour- 
d'huy  qu'on  fe  taille,&  qt,;  chacun  contribue 
pour  le  falaicedccenx  qui anoncent  l'Euan- 


gile. Car  le  bien  qui  a  efté  mal  employé  le 
temps-  pafTé  pour  le<:  aboininacions  de  la  Pa- 
pauté,&  qui  a  tfté  defpendu  en  toute  vilenie, 
doit  eftic  remis  en  l'on  droit  vfage  &  légiti- 
me, que  les  poures  en  foyéc  nourris, &  les  mi 
niftres  qui  anoncent  la  parole  de  Dieu, &:  que 
les  efcoîes  en  foycnt  entretenues.  Or  mainte 
nantdonc  ,  que  nul  ne  fe  fent  chargé  en  fon 
priué.encores  ne  iailTe-on  pas  defc  defpiter, 
qu'on  orra  les  murmures, qu'aucuns.parlét  du 
falaiie  desminiftres  ,  comme  fi  on  leur  arra- 
choit  les  tripes  du  ventre. Et  pourquoy  cela? 
Ilsmonftrent  que  le  diable  les  poulie  &' les 
gouuerne.Car  puis  qu'il  ne  leur  courte  rié.de 
quoy  eft-ce  qu'ils  fe  toumiêtent  tant?Et  ainiî 
cognoilTons  qu'ils  font  organes  du  diable  ,  Se 
qu'il  les  faut  fuir  &detefter  corne  des  pertes 
mortelles  qui  voudroyent  auoir  anéanti  lave 
rite  de  Dieu  fi  en  eux  eftoit.Brief,on  les  co- 
gnoift  ennemis  de  Dieu  manifeftes:  car  nous 
voyons  comme  Dieu  a  parlé:or  ils  y  contre- 
difent.  Ainfî  donc  nous  voyons  que  ce  n'eft 
point  fans  caufe  que  notammét  il  eft  parlé  de 
la  nourriture  de  ceux  qui  anoncent  la  parole 
de  Dieu  .  c'eft  afin  qu'on  ne  leur  prene  point 
leur  viure,&  mefines  que  ceux  qui  font  enlêi- 
gnez  ,  cognoiflent  qu'ils  leur  font  dettcurs» 
pource  qu'ils  reçoiuent  la  pafture  fpirituelle 
par  leurs  mains ,  &  q  Dieu  les  a  cômis  à  cela. 
Et  au  refte,qu'on  aille  aufsi  au  deuant  de  cell. 
artifice  du  diable  ,  c'eft  qu'il  n'alfame  point 
ceux  qui  doiuêt  s'occuper  à  anoncer  la  paro- 
le de  Dieu,  afin  que  par  ce  moyen  on  en  foit 
deftitué.Et  de  fait  nous  voyons  comme  Dieit 
a  permis  que  le  monde  fïift  aueiiglé  quand  it 
s'eft  ainfi  môftré  ingrat  en  ceft  endroit. Car  il 
y  a  eu  toulïours  des  faciificatcurs  des  idoles 
qui  ont  erté  nourris,  &  leur  a-on  farci  le  vert 
tre,  tellcmét  qu'ils  ont  tiré  le  fàng  &  la  moet 
If  des  os, qu'ils  ont  piHé  le  poure  monde  :  & 
cela  a  efté  (ùpporté.  Mais  quoyrles  hommes 
font  dignes  d'ertre  ajnfi  magez  par  cesch.és 
&  par  ces  loups, quâd  ils  ne  c.ignoiflcnt  point 
quelle  eft  l'obligatiô  qu'Us  ont  enuers  ceux  <| 
Dieu  leur  enuo  ve,  afin  de  leur  apporter  la  do 
ftrine  de  vie  &  de  falut.  Or  ccpédant  S.Paul 
adioufteauf>l,Q«'f  renf  doit  fniin  rectuoir  accui 
fation  <(i»/r'f«.v  ,  f>tca  fous  Ion  tefmoignage  de 
deuv  ou  trois.    On  pourroit  trouucr  ertrange 
que  fainft  Paul  donne  ici  aux  minirtres  de  la 
parole  vn  priuilege.  Car  ilfàut  qu'ils  fiiyent 
tenus  en  bride  plus  eftroite,  &  e'elt  bien  rai- 
fon:car  c'ert  à  eux  de  mcftrer  le  bon  chemin. 
Tant  s'en  faut  donc  qu'ils  doinent  eftre  priui 
legez ,  &  auoir  plus  de  licence  que  le  rcrtedu 
peuptc.qu'ils  doiuent  auoir  vne  règle  plus  au 
ftere  &  plus  rude.  Mais  fainâ  Paul  n'a  pas  ici 
voulu  fupporter  les  vices  en  {i(^ô  que  ce  fuft, 
comme  il  le  môftre  aflez  en  ce  qxfiIaJioufte, 
que  eeHx  qui  rnt  failli'  fy-nt  redar^iteK  ,  Tor^ 
dttiant  tous, al n  qu'ils  f-iyent  en  e\tmt>le ,iux  ait 
tres,(^  que  chacun  apprene  de  cr.i'ndre.   Nous 
voyous  donc  le  moyen  ipi  eft  ici  tenu  par  le 


1^8 


SERMON    XLÏII. 


S.Efprit.  Et  quant  au  priuilegc  qu'il  donne, 
ce  n'eft  point  l'ans  caufe:car  nous  voyons  que 
les  miniflrcs  font  plu?  fubiets  à  beaucoup  Je 
calomnies  &  fauljes  detraftions ,  que  :ie  l'ont 
pouit  les  autres.  Et  qui  eit-ce  qui  mené  cela 
linon  Sata  qui  bralTè  tout  en  fa  boutique?  Car 
c'cil  aufsi  le  plus  grand  moyen  qu'il  ait  pour 
nous  defgoufter  de  la  parole  de  Dieu  ,  quand 
on  ti'ouueraà  redire  lur  lesmmiftres,  Ho.ce- 
ci,&  cela.  Qn^ind  tels  bnuts  le  rement,&  que 
ils  font  receus.cela  eftcaufe  qu'on  fs  deftour 
ne  de  la  parole  de  Dieu  ,  &  qu'elle  n'a  plus 
telle  autfiorité  &  reuerence  enucrs  nous  coin 
me  elle  doit.  Il  y  a  eu  donc  iufte  raifon  pour- 
qiioy  faind  Paul  a  comme  par  taçon  de  pri- 
iiilcge  détendu  qu'on  ne  reçoyue  point  ac- 
cufation  haft.uenient  contre  les  minillres  de 
la  parole  de  Dieu. Et  cependant  on  voit  qu'il 
n'a  point  voulu  t'uiorifer  aux  perfonnes,  mais 
qu'il  a  eu  elgard  à  Dieu  &  à  la  vérité, afin  que 
il  n'y  ait  point  vn  mel'pris  pour  s'ellongncr 
derEiiangile  fous  ombre  qu'on  pourra  mef- 
dire  des  hommes,  &  qu'ils  i'crôc  notez,  &  que 
on  leur  imputera  quelque  blafme.  O:  cepen- 
dant,que  ce  pnuiiegenefoit  point  excefsif-',il 
appert:car  fainâ:  Paul  lîmplcnient  nous  rame 
ne  à  l'équité  commune ,  voire  &  à  la  loy  de 
Dieu  qui  a  efté  eftablie  en  genrtal  pour  tous. 
Car  il  crt  dit  que  l'homme  ne  fera  point  con- 
dânc  iînon  fous  deux  ou  trois  telmoins  ,  que 
vn  iuge  ne  doit  point  le  trop  hafler  pour  af- 
feoir  fentence  de  condamnation  fur  quelque 
coniefture  qu'il  aura  ,  ou  à  l'appetit  de  quel- 
qu'vn, qu'il  faut  preuue  légitime  de  deux  tef- 
ijioins.  Si  cela  eft  ordonné  en  gênerai  pour 
tous,  faind  Paul  veut  qu'il  foitobierué  aux 
miniftres  de  la  Parole. Nous  voyôs  donc  que 
il  ne  leur  donne  point  vn  priuilcge  excefsif, 
mais  d'autant  qu'il  cognoift  qu'on  les  char- 
ge,&  qu'on  les  blafme  le  plusTouuent  fans  oc 
caiîon,il  môftre  qu'il  faut  qu'ils  foyct  main- 
tenus en  leur  intégrité.  Voila  donc  la  loy  c5 
niune  de  Dieu, à  laquelle  faind  Paul  fe  règle. 
Le  Pape  en  a  bien  vféd'vne  autre  façon  :  car 
quâd  il  parle  de  fesEuefques,  il  ne  veut  point 
qu'ils  foyent  accufez  finon  qu'il  y  ait  foixate 
deux  tcfmoins,&que  les  Cardinaux  ne  foyét 
point  accufez  finon  qu'il  y  ait  feptante  deux 
tefmoins.  Et  on  cft-ce qu'on  trouueroit  vn  iî 
grand  peuple?  S'ilfaloii  pour  la  paillardife 
d'vn  EuefqueamalPer  foixâte  deux  tefmoins, 
afin  qu'ils  le  viHent  là  couclié  auec  la  putain, 
&quâdefb-ce  qu'vn  Euefque  feroit  corrigé? 
Ne  voit-on  point  q  le  diable  les  a  côme  en- 
forcelcz  quand  ils  fe  font  donné  vue  telle  li- 
cence &  priuilege  ,  pour  dire  qu'il  faille  foi- 
xantedeux  tefmoins  pourprouucr  la  paillar- 
dile  d'vn  Preftre?Et  toutesfois  ils  n'ont  poît 
eu  vergongne  de  coucher  cela  en  leurs  facrez 
canons.  Et  en  cela  voit-on  que  Dieu  les  a  de- 
ilituez  de  tout  fens  Se  raifjn,  quand  il  a  vou- 
lu que  leur  turpitude  fuft  cognuc  de  tout  le 
mode  iufqucs  aux  pctis  enfans.Or  fainfl:  Paul 


n'a  garde  d'introduire  vn  teldefordre.Qupy 
donc?  Il  s'ell  contenté  de  l'ordonnance  de 
Dieu, félon  qu'elle  eft  contenue  en  fa  loy.  Le 
plus  grand  priuilege  donc  quedoiuent  auoir 
les  Pafteurs  qui  anoncent  fc  parole  de  Dieu, 
c'ell  qu'ils  doiuét  eftre  honorez.  Tat  y  a  que 
iî  ne  les  faut-il  point  nourrir  en  leurs  vices, 
niais  ce  qu'on  leur  doit  donner,  c'eAd'obfer 
uer  pluftoft  enuers  leurs  perfonnes  l'équité 
de  Dieu,c'eftafçauoircelle  quieft  mifcen  la 
loy,&  au  droiLt  commun, comme  nature  nous 
ie  monllre, qu'on  ne  doit  condamner  perfon- 
ne  finon  fous  bon  tefmoignage  de  deux  pour 
le  moins.  Il  dit  doc  que  cela  foit  obferuéaux 
miniftres,  &  on  ne  leur  fera  point  de  tort. 
Pourquoy  cela  elt-ildit  d'eux  par  efpecial? 
l'ay  défia  allégué  la  raifon, que  le  diable  ma- 
chine toufiours  de  les  dilfamer  ,  afin  de  faire 
vue  brèche  en  l'Eglife,que  la  parole  de  Dieu 
foit  en  opprobre, &  qu'on  s'en  puilTe  moquer, 
&  qu'elle  ne  foit  plus  receue  en  telle  reuereo 
ce  qu'elle  mérite,  &  que  toute  bonne  dodri- 
ne  loit  dénigrée.  Q_iKind  donc  nous  voyons 
que  le  diable  tafche  à  ce  but  ,  de  noftre  cofté 
aduifonsy:  caraufsi  le  diable  ellant  ennemi 
mortel  de  noftre  falut,demandede  nous  pri-, 
uer  de  la  pafture  de  vie,  côme  fi  vn  enipoifon 
neur  nous  oftoit  legouft  de  toute  viade.Q_ue 
donc  nous  luy  refiftions  entant  qu'il  nous  fe- 
ra pofsible. Or  outre  ce  que  le  diable  vie  d'v- 
ne  telle  prattique  ,  nous  voyons  que  chacun 
n'eft  que  par  trop  crédule  pour  liun>er  ce  qui 
fera  dit:  quad  il  y  aura  quelque  mauuais  bruit 
des  miniftres  de  la  parole  de  Dieu  ,  cela  fera 
receu  promptement,  &  femble  qu'on  frétille 
d'appétit  d'en  ouir  quelque  diffame.  Voyans 
donc  qu'vn  tel  vice  règne  par  trop  ,  il  eft  be- 
foin  d'vfcrde  bon  remède  &  propre,  non 
point  pourexcufer  les  pcri"onnes,mais  d'au- 
tat  qu'il  eft  queftion  de  la  doàlrine  dont  nous 
fommes  miniftres  &  difpéfateurs.  Et  de  fait, 
cefte  eniiie  &  celte  malice-la  eft  enracinée  en 
la  nature  des  homes, que  toufiours  ils  tafchcc 
s'ils  peuuent  de  trouuerà  redire  &:  à  mordre 
en  ceux  qui  ont  l'office  de  les  corriger.  Cela 
mefmes  a  efté  du  par  les  Payés,  qne  ceux  qui 
dominein,font  fuiets  à  beaucoup  de  mauuais 
rapports ,  non  point  feulement  pource  qu'ils 
font  en  lieu  eminent,&  qu'on  les  voit  de  plus 
loin,  mais  pource  que  les  petisont  quafi  leur 
reuenge  quand  ils  voyent  quelque  vice  ,  ou 
qu'ils  le  peuuent  imaginer  en  ceux  qui  font 
plus  excelles,  &qui  ont  aiithoritépar  deflîis. 
Voila  donc  comme  les  petis  &  ceux  quilont 
mefprifcz,  ont  côme  vue  efpece  de  venge.îce 
quand  ils  peuuent  trouuer  ,\  mordre  inr  ceux 
qui  font  en  lieu  plus  digne, &  en  vn  degré  fu- 
pcrieur.Or  maintcn.it  les  miniftres  qui  anon- 
cent la  parole  de  Dieu.douient  auoir  la  bou- 
che ouuerte  pour  corriger  le-,  vices, peur  tai- 
re les  remonftr.lccs, pour  mettre  en  aiiant  les 
menaces  de  Dieu.  Ceux  qui  feront  ainfi  rc- 
prins,&:  aufquels  on  gratte  les  rongnes  ,  font 

picqu,-2 


SVRLAI.    ATIMOTH. 


picqueï  &  enuenimez,  &  necefllnt  iiirqueç  k 
ce  qu'ils  ayeiu  peu  trouucr  qucloue  occaiîon 
de  fe  reuengcr  contre  ceux  qui  les  ont  ainfî 
reprins:&  côbien  qu'il  n'y  ait  nulle  couleur, 
fî  ne  cefTent-ils  point  de  machiner  tout  ce 
qu'ils  peuuent.  Nous  voyons  donc  d'vn  cofté 
l'aftucede  Sacan  qui  nedemâde  finon  démet 
tre  quelque  mal  fur  les  minillres  de  la  paro- 
le de  Dieu  ,  afin  que  ladaftrine  foit  vilipen- 
dée,&  que  nous  en  foyons  dcfgouftez.  Nous 
voyôs  aufsi  dont  procède  cefte  crédulité  trop 
grande,  que  nous  preftons  fî  volontiers  l'au- 
reille  pour  ouirmefdire  de  ceux  qui  nousdoi 
uétenfeigner.c'eftpource  que  nos  vices  font 
defcouuerts  par  eux.  Voyâs  cela  nous  douons 
bien  iuger  que  ce  n  ell  point  fans  caulê  que 
fainâ:  Paul  a  voulu  ici  pouruoir  que  les  mini 
ftres  de  la  parole  de  Dieu  ne  foycnt  point 
blafmcz  à  tort, car  c'eftl'intereft  commun  de 
tous  .  Qu'eft-ce  que  nous  pouuons  gagner 
quand  on  fe  pourra  venger  de  ceux  qui  anon 
cent  la  parole  de  Dieu,  &  qu'on  les  aura  dif- 
famez?Voila  où  le  diable  pietéd,de  nous  de- 
ftournerdc  la  parole  de  Dieu,  parlemefpris 
de  ceuT  qui  l'anocent.  Et  voila  pourquoy  no 
**^f-  ^3-  itre  Seigneur  Ufus  Chrift  difoit ,  Q^and  ks 
Scnbes  &  Pharifîens  font  afsis  l'ur  la  chaire 
de  Moyfe, qu'on  les  efcoute  pour  faire  ce  que 
ils  diient,e^cores  qu'eux  nele  facent  pa'i.Or 
là  il  ne  veut  pas  approuuer  toute  doârine(cô 
me  les  Papiftes  fe  font  armez  de  ce  paUat-e) 
mais  lefus  Chrift  monflre  que  fi  le-  perfon- 
nes  viuent  mal,&  que  leur  vie  foit  difToliie,  & 
qu'ils  facent  fcandale  en  l'Eglife,  que  toutef 
rois  cela  ne  doit  nullement  deroguer  à  lama 
iefté  de  la  loy  de  Dieu,  &  de  toute  fa  parole, 
que  cela  ne  doit  point  abolir  la  reuerece  que 
Dieu  demîde  que  nous  luy  portions.  Or  tant 
y  a  donc  que  fî  les  mimftres  font  ainfî  diffa- 
mez,la  doftrine  de  Dieu  eft  corrompue  :  non 
point  que  cela  foit  licite,  mais  nous^fommes 
a  malins  &  peruers,que  fi  toft  que  nous  pen- 
fons  auoir  quelque  excufe  de  nous  exépterde 
l'obeiflance  de  Dieu.chacû  y  fait  fes  efforts. 
Et  ainfi  donc  nous  voyon'.  maintenant  que 
toutel'Egiife  de  Dieua  intertft  ,  quand  les 
miniflres  font  diffamez, que  leur  vie  efl  en  op 
probre.Et  pourquoy?Carladoftriiiede  Dieu 
par  colequent  n'a  plus  vne  telle  maieflé  com 
me  elle  doit, &  qu'elle  merite:bnel'.nous  fom 
mes  priuez  du  plus  grand  threforque  Dieu 
r.ous  donne  en  ce  monde  ,  c'eft  que  nos  âmes 
foyent  attirées  à  luy  Or  donc  ici  faipft  Paul 
ji'a  point  regarde  aux  perfonnes,^côme  l'ay 
défia  dit  )  ni  à  Te/lat  auquel  il  eftoit  appelé, 
mais  il  apiuffoft  voulu  maintenir  le  falut  de 
tous  lîJeies  ,  il  a  procuré  le  bien  commun  de 
l'Eglife.  Et  au  relle,qu'ilnous  fouuienedece 
qui  a  deha  eflc  touché  ,  c'eft  afçauoir  outre 
ce  que  S.  Paul  ne  donne  point  ici  vn  priuilc- 
ge  ex'cefsit-aux  miniftres  ,  qu'il  n'entend  pas 
que  le  mal  foit  nourri,  ne  qu'on  les  lupporte 
en  leurs  vices  nullement:car  il  adioufte,  Q^e 


ceux  <ju! aumnt failli  ,  foyrHteorr'geK  litH.-.nt 

tous:  qu'ils f-tycnt  mis  en  fpei:!.. de.  Sainfl  Paul 
donc  ne  veut  point  pour  i'hôneur  de  l'eftat, 
qu'on  ferme  les  yeux  quand  il  y  aura  quelque 
faute  ou  quelque  crime  aux  miniftres,  mais 
que  pluftoft  ils  foyent  punis  au  double,  cônie 
défia  nousauons  dit  que  la  bride  doit  cftre 
plus  cftroite  beaucoup  à  ceux  qui  anôcent  la 
parole  de  Dieu, qu'au  rcfte  de  tout  le  peuple. 
Le  Pape  a  fait  beaucoup  de  loix,  &  y  a  là  vne 
efpece  de  grande  feuenté.voire.mais  cepen- 
dant voila  tout  le  Clergé  qui  eft  exempté  de 
toutes  loix.  Et  combien  qu'ils  ayent  des  ca-. 
nous  anciens  qui  leur  commandent  de  faire 
ceci  ou  cela,cen'efi  rien, car  ils  s'efpargnent 
les  vns  les  autres  ,  &  cependant  il  n'y  a  point 
de  police  commune  pour  eux.  Nous  voyons 
que  les  moines  auec  leur  faîftetc  diabolique, 
s'il  y  a  des  crimes  énormes  entr'eui ,  ils  vou- 
dront le  tout  enfeuelir.  Eipourqucy?  Pour 
I'hôneur  de  l'ordre,  difent-ils.Or  faimfl:  Patil 
n'a  point  fuiui  vne  telle  confi)fion  ,  mais  ilâ 
monftré  qu'on  ne  peut  mieux  honorer  l'eftat 
Ae%  miniftres  ,  finon  en  raclant  tous  ceux  qui 
fe  gouuernent  mal ,  que  l'Eglife  de  Dieu  en  * 
foit  purgée  ;  car  e!le  ne  doit  point  eftie  vne 
eftablc  à  pourceaux.  Vn  homme  priué  fera-il 
excommunié  pour  paillardife  oupourchofe 
femblîble?  Qu'vn  miniftre  foit  dégradé  quàc 
&■  quant  de  fon  eftat,  outre  ce  qu'il  fera  ex- 
communié.Vn  home  pour  yuronçnerie  fera- 
il  reprin'.fQuJvn  miniftre  foit  ch.ifrc.Q.iiaiid 
donc  on  y  procédera;  ainfi,  c'eft  afçauoir  que 
ceux  qui  ont  la  charge  <5c  office  d'anoncerla 
parole  de  Dieu, commenceront  par  leurs  per 
fonnes  à  eftre  feueres ,  &  à  fe  tenir  en  bonnç 
bride  &  en  bonne  difcipline,alors  orrne  pour 
ra  point  dire  qu'ils  foyent  par  trop  priuile- 
gez  quand  ils  feront  maintenus  en  leur  inté- 
grité, &  que  ce  ne  fera  point  en  fàueiir  d'eur 
mefmes  ,  mais  àcaufe  que  la  parole  de  Dicu' 
ait  fon.iuthorité,  &  qu'elle  foit  receue  com- 
me il  appartient ,  ainfî  qu'il  a  efté  défia  dit. 
Maintenant  nous  voyons  que  fainS:  Paul  n'a 
po'nt  parlé  en  home  mortel ,  &■  qu'il  n'a  riere 
chrrché  ne  pour  foy  ne  pwir  fes  côpagnons, 
mais  que  Dieu  nous  a  déclaré  par  fa  bouche 
ce  que  nous  deuôs  obfcruer,  &  ce  qui  tft  pour 
le  profit  &  falut  des  âmes. Il  refte  maintenanc 
de  prattiquer  ecfledoflrine.  Et  en  premier 
lieu  ,  toutes  fois  Srquantes  que  nous  ocrons 
mal  parler  de  ceux  qtii  anôcent  la  parole  de 
Dieu, que  nous  ayons  le  diable  futpcdt,carles. 
calomnies  forciront  toufioursde  fâ  boutique» 
Et  ainfî  enquerons-ncus  diliremment  :  ie  ne 
di  pas  qiiennns  fermions  les  yeux  ,  quand  on 
nous  voudra  defcouurir  quelque  mal ,  &  que 
nous  ayons  auf.i  les  aureilles  bouchées  pour 
n'en  rien  ouix  :  niau  contraire  ,  fî  toft  qu'on 
orra  mal  parler  des  miniftres  ,  qu'on  s'en— 
quiere  s'il  eft  ainfî  ou  non  :m.ais  cependant 
coanoifTons  qu'il  nous  faut  auoir  ce  regard), 
que  i'ay  touché  ,  que  le  diable  ne  dema::Lie: 


a(?o 


SERMON    XLIII. 


finon  de  nous  defgoufteï  dcJ  miniftret  pour 
Bou'v  iliener  de  U  paK>lc  de  Dieu.S:  que  nous 
li  hayfsionî,  oubienqu^elle  n'j't  point  fa  di- 
gnité enuers  no'  telle  qu"'dle  doit,  &  qu'il  eii 
icquij.  Que  nous  foyons  toufiour*  Jrmez  de 
èeli  pour  cftie  prudens,  &  pour  nous  retenir, 
ifin  de  ne  iuger  poi«t  à  la  volce:&  quîd  nous 
aurons  trouuéquelcî  minifti es  l'ont  iniufte- 
mcnt  Mal'mez.que  nous  dcteltiôs  ceux  qui  les 
dcnigi'cnt  iinli.£t  pourquoy?C.ir  ih  l'ont  iup 
j'  ifti  de  Satan,  ce  l'ont  les  inftrumens  par  lef- 
iiuels  il  vient  lemer  telle  zizar.ie.afin  que  la  l'c 
incnce  de  Dieu  ne  croiiTe  &  ne  fruftifie  point 
en  nous.  Or  maintenant  ceux  qui  ont  l'erui  iuf 
nues  ici  à  Satan,&qui  ont  encores  délibéré  d' 
y  fcruir, qu'ils  regirdét  en  quel  lieu  &  en  quel 
le  eftnne  on  les  doit  tenir  .  Car  il  cft  certain 
qu'entre  les  Papiftcs  il  n'y  a  point  vue  plus 
grande  inipudcce  qu'il  y  a  quelque  tois  entre 
ceux  qui  îr  dil'ent  Chrcftiés.pour  calomnier, 
&  pour  diifanier  iniuftement  ceux  qui  cc'rchct 
&  qui  procurent  leur  ûlut  entant  qu'en  eux 
ell.Or  regardôs  toulioursà  celle  droite  fin  où 
le  l'aind  El'prit  nous  addreire,  c'ell  que  la  pa- 
role de  Dieu  ait  l'on  authorité.&c  que  nous  l'ef 
coûtions  volontiers,  &  que  nous  y  prenions 
gouft  pour  en  eftre  raflafiez  :  veu  que  c'ell  la 
vie  de  nos  aines,&  que  fans  icclle  nous  défail- 
lons. Q_iie  donc  nous  ne  foutfrions  point  d'e- 
ftre  abbruuez  de  mélonges,que  le  diable  braf- 
fe  par  tous  artifices  qu'il  peut  pour  nous  en 
tvôper  &  feduire:que  fi  nous  luy  preftons  Pau 
rcillc,  c'eft  autant  corne  lî  nous  loutFnons  que 
quelqu'vn  no'  veinll  nicfler  parmi  noftre  foup 
pe  &  noflre  viande  ou  bruuage, quelque  herbe 
amere  pour  no'  defgoufter.ou  qu'il  feift  quel 
que  meflinge.en  forte  que  nous  tufsions  l.i  af- 
famez auprès  de  noAre  nourriture. Sçaurions- 
BOt«  gré  à  celuy  qui  nous  viendroit  ictter  des 
cendres  en  noftre  fouppe?Ou  à  celuy  qui  vien 
droit  ietter  delà  fange  ou  de  la  bouc  fur  no- 
ftre viande?  Ou  à  celuy  qui  meflcroit  quelque 
vilenie  parmi  noftre  vin?  Voudrions-nous  re- 
ceuoircela,&:  le  prendre  de  noftre  bon  gré:  Il 
cft  certain  que  non.  Or  ceux  qui  vienent  ainlî 
mcfdire  des  miniftres  &  pafteurs.ils  ne  denian 
dent  finon  à  corrôpre  la  viande  &  pafturc  que 
Dieu  nous  propofe  pour  noftre  falut  :  &  tou- 
tesfois  voila  dequoy  nous  fommes  tant  con- 
uoiteux  que  rien  plus.  Et  il  appert  bien  que 
nous  n'eftimôs  gueres  le  ûlut  de  nos  amcs,  3c 
qu'il  no'  eft  bien  mefprifé  &  bien  vilein.Que 
donc  nous  foyons  mieux  aduifcz  ordinaire- 
tnét  que  nous  ne  fommes  pas  en  ceft  endroit; 
mais  quand  nou.  voyons  que  les  miniftres  le 
gouuernét  mal,qu'vn  chacun  s'employe  tant 
qu'il  luy  fera  pofsible  .i  racler  telle  ordure,  cSc 
que  TEglife  de  Dieu  ne  foit  point  intcdtcc  de 
l'candales.  Car  (comme  l'ay  défia  dit)  elle  ne 
doit  point  eftre  vne  eftable  à  pourceaux,  c'eft 
vn  temple  dédié  .\  Dieu  &:  à  là  maiefté  ,  afin 
qu'il  refide  au  milieu  de  nous.  Et  que  nous  ne 
iiourriûlons  point  les  fcandalcs ,  mais  qu'vn 


chacun  trauaille  à  les  ofter  en  {<tn  endroit, 
comme  fainft  Paul  ordonne  ici  que  les  Pre- 
ftresjcombien  qu'ils  aycnt  cfté  en  cftat  faind, 
en  eftat  que  Diçu  prife  &  honore  ,  toutcsfoiï 
doyuent  eftre  redarguezdeuanttou$,& com- 
me fi  on  les  mettoit  fur  vn  efchatfaut.Ont-ils 
commis  quelque  crime?qu'ils  foyent  en  exem 
pie  à  tous,&  que  chacun  y  prenegarde,&  que 
ils  monftrent  le  chemin  :  quand  il  eft  queftion 
de  corriger  les  vices  ,  qu'ils  commencent  par 
ce  bout-la. Quand  nous  tiendrôs  vn  tel  moy- 
en,iScqu'il  fera  bien  prattiqué  entre  nous  ,  les 
vices  ne  feront  point  fupportez  fous  ombre 
de  la  parole  de  Dieu,&  de  la  dignité  qui  eft  en 
ctft  eftat  &  office. Cependant  il  ne  faudra  pas 
que  nous  ayons  licence  de  mal-faire:carquâd 
nous  ferons  tenus  en  bride  plus  eftroite  ,  le 
peuple  fera  pourueu  de  bons  Pafteurs .  Voila 
donc  ce  que  nous  auonsànoter  fi  nous  vou-. 
ions  bien  appliquer  celle  dodrine  à  noftre 
vlage.Etau  rcfte,  poifons  ce  mot  quand  il  eft 
à\l,Afn  que  les  autres  CTaiviieni.Qiï  quand  on 
verra  vn  miniftrcde  la  parole  de  Dieu  eftre 
ainfi  dégradé  ,  &.  qu'il  trcbufche  comme  de 
haut  en  bas ,  cela  nous  doit  beaucoup  plus  ef- 
mouuoir:voila  vnfcandale  qui  nous  doit  fane 
trembler iScdrelTcr les  cheueuxenla  tefte:car 
voila  la  chaire  qui  cft  le  ficgc  de  Dieu  dont  il 
veut  gouuerncr  nos  âmes.  Le  liège  de  lufticc 
eft  bien  honorablc:mais  quand  il  tft  queftion 
de  ce  régime  fpirituel,Dieu  nous  veut  condui 
re  iufques  au  Royaume  des  cieux  :  comme  ce- 
luy qui  eft  pour  parler  au  nom  de  Dieu  ,  elt 
comme  vn  Ange.ainli  mit  le  prophète  M.ila- 
chie  en  parle, il  eft  mcltagtr  de  Dieu. Et  làintl 
Paul  vfe  de  cefte  fimilitude  d'ambaflàde.  Voi- 
la vn  homme  mortel  qui  n'eit  rien  de  foy,  qui 
reprefentela  perfonnede  Dieu. Or  fi  nous  le 
voyons  là  condaniné,&  qu'il  loiten  opprobre 
àcaufequ'il  aura  failli  ,&  qu'il  n'aura  point 
exécuté  fidèlement  fon  office,  ne  voila  point 
vne  admonition  commune  à  tous  ?  &  ne  de- 
uons-nous  pas  eftre  beaucoup  plus  touchez 
quand  nous  voyons  vn  tel  fpeitaclerAinfi  dôc 
notons  que  Dieu  n'a  point  voulu  qu'en  fon 
Eglifeon  efpargnaft  les  gians  non  plus  que 
les  pctis:  mais  au  contraire  ,  quand  vn  grand 
aura  failli, il  doit  eftre  puni  au  double.  Il  fera 
beau  voir  qu'vn  iuge  puniiré  les  crimes, &  ce- 
pendant qu'en  foy  il  vaille  pis  que  k  s  autres, 
ou  bien  qu'il  face  le  fcmblable  ,&  que  quand 
il  aura  failli,  il  foit  exempte  :  quel  propos  y 
aura-il  en  cela  ?  c'eft  contre  nature.  Notons 
donc  que  Dieu  veut  files  grans  faillent  qu'ils 
foyent  en  exemple  .à  tous,&  qu'ils  ne  doyuent 
point  eftre  ûipportcz.m.'.i.  qu'ils  ccnimincét 
la  danfe  pour  eftre  punis ,  afin  que  les  autres 
cheminent  en  craiiue  ,  °<  qu':K  pcnkiit  tant 
mieux  à  eux  pour  cognoillrc  qui.'  s'iK  taillét, 
qu'ils  ne  T  ront  eljiargncz  nô  plii' .  Q_i^ic  nous 
recueillions  donc  de  ce  p.iftage  vne  doctrine 
commune  pour  tous, pour  les  grans  &:  poiii  les 
pctis,  que  nous-nous  foumcttions  tous  à  cefte 

difc/j> 


M4/.1.7 

i.Cor.f. 
10 


s  VR  LA    î.   A  TIMOTFÎ. 


cUfcipline  que  Di«u  a  introduite  pour  nous 
ranger  à  luy  ,  vpire  en  telle  forte  «jue  les^c- 
chez  ne  demeurent  point  impunis:niais  quand 
il  Vauravne  faute  commife  en  quelque  per- 
fonnage  que  ce  foitiOU  de  quelque  eftat  ôc  qua 
lité  qu'il  l'oit,  qu'on  ne  le  lupporte  point,ains 
qu'il  foit  puni  :  voire  en  telle  lortc  qu'on  co- 
gnoirte  que  nous  lu:  voulons  point  nourrir  les 
vices  entre  nous,  Se  que  cela  tourne  en  edifica 
tion.au  lieu  qu'il  pourroit  eftre  en  fcandale. 
OR  nous-noiis  profternerons  deuant  la 
face  de  noAre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 


16T 

Bof  fautes ,  le  priant  qu'ii  luy  plai/e  «otit  le» 
faire  tellement  (èatir,  que  ne^s  retournions 
tous  k  luy  ,  &  que  cependant  ti  oow  t^e  U. 
main, à  ce  que  de  plu:  en  plut  il  nous  reâutfe  k 
foy,&  qu'il  ne  permette  poiar  que  nous  foyôt 
efgarez  pour  nous  eflôgner  de  fa  Parol^:  mait 
qu'il  nous  y  conferme  de  iour  en  iour.â  ce  que  ■ 
nous  n'en  Soyons  iamaii  de Aourneï.&que  ce- 
pendant il  nous  fupporte  en  nos  infirmitez^ 
lufques  à  ce  qu'il  nous  en  ait  dcfpouilJtï  du 
tout.  Ainll  nous  Jiroas  tous  ^Dieu  rouc-pujf^ 
fan  t ,  P  ère  ceieiie,&c. 


hvitieme    sermon    s  V  k    le 

C  I  N  CL.Y  lEME    CHAPITRE, 

2,1  le  tddiure  deudnt  Dieu  ^  le  Seigneur  Icfus  Chrifi  ,■  cr"  l^f 
Anges  elcus,quc  tu  gardes  ces  chojes  ftnshdilif  iugancnt,  nefaijant 
rien  félon  djfcclion.    * 

XX  N  impofe  point  tojl  les  mains  fur  aucun ,  ^  ne  communique 
point  aux  péchez  d  autruy: garde  toy  pur. 


Ous  auons  vevîpar  cideuant, 
côme  c'eilvne  chofe  noble  & 
precieule  de  gouuerner  l'Egli 
le  de  Dieu,  qu'aufsi  il  elt  fort 
difficile  de  s'en  acquitter  dcue 
nient.Et  voila  pourquoy  fainft  Paul  ayant  dé- 
claré à  Timothee  quel  eftoit  Ion  otticc,  con- 
clud,  Qu^il  aduifebienà  foy  ,  comme  ayant 
Dieu  pour  fon  iugc,  &  le  Seigneur  Ufus ,  Se 
tous  lesAnges  pour  tefaioins, qu'il  regarde  ce 
qu'il  a  à  faire  ici  bas  au  troupeau  de  Dieu. 
Nous  voyons  donc  que  faiiict  Paul  ne  le  con- 
tente pas  d'vn  limple  adiiertillcmét  pour  en- 
feigner  Timothee  de  ce  qu'il  a  à  faire,  mais  il 
l'adiure  &  l'adiourne  comme  dcuant  k  licçe 
iudicial  de  Dieu,  afin  qu'il  ait  plus  gr.îd'crain 
te  &  folicitude  :  non  point  que  Timothee 
quant  à  foy  eufi  bcfoin  d'eftre  ainli  pTclVé-car 
nous  fçauons  le  tcfmoignage  qui  luy  eft  ren- 
du. Mais  fainû  Paul  a  regardé  a  deux  chofes: 
rvne, qu'il  vouloir  que  Timothee  tult  aimé 
contre  tous  mefdifans.  Car  il  n'auoit  pas  vne 
authorité  (î  grande,  qu'on  ne  s'tlciiait  contre 
luy,&  qu'il  n'y  eult  quelque  fois  de  gens  ma- 
lins qui  eftoycnt  prcfts  à  dctraûcr.Saimft  Paul 
donc  veut  qu'il  {ice  les  chofes  comme  ayant 
les  feruitcurs  de  Dieu  coniointsaucc  hiy.  Et 
puis  il  a  voulu  au  fsi  donner  vne  règle  commu 
nc&r  générale  à  tous  ceux  qui  font  en  office 
fpecial.Car  celle  epiftre-ci  eftant  efcrite  .î  vn 
liomme,doit  fciuir  à  tous  fidèles, qu'eftant  ef- 
crite oudattce  en  vn  ioiir,  elle  doit  auoir  fon 
vlage  perpétuel  ;ufqiies  en  la  fin  du  mode.  Or 
venons  maintenant  .i  ce  qui  eft  ici  contenu. 
Quand  fainct  Paul  dit.V  t'','.dluTe  (leu.t>it  IiiV» 
(^  le  Seinttmr  Icfin,  C /'■'  A"gc3  :  il  n'entend 


pas  de  faire  les  Anges  pareils  k  lefus  Chrift, 
comme  s'ils  eftoyent  iuges  du  mode  :  car  cela 
a  cfté  donné  au  Fils  feul,commc  il  en  eft  par- 
lé au  f  .de  fâinrt  lean,  &  par  toute  l'Efcriture 
fainàic,  &  que  l'article  au  fsi  de  noftre  foy  le 
porte. Mais  cepédant  S. Paul  a  aufsi  voulu  ad- 
iourner  Timothee, &  en  fa  perfonne  tous  mi. 
mitres  de  la  parole  de  Dieu  ,  comme  fi  on  fai- 
loitvnaûefolennel.  Carlemot  aufsi  tmpor- 
tc  cela, comme  quand  on  appellera  vn  homme 
en  ingénient, &  que  là  on  prend  aftc,&  qu'il  s' 
oblige:fainct  Paul  en  vfc  3infi,&  ccfte  fimilitu 
dc-la  eft  bien  à  noter.  Car  il  fignifie  que  ceux 
qui  ont  la  charge  d'anôccr  la  parole  de  Dieu, 
ne  ptuutnt  rien  faire  en  cachette, d'autât  que 
ils  l'ont  regardez  de  Dieu  &dcs  Anges,  &•  que 
toiislcurs  pas  font  notez  &  maïqiitz.  Ce/}  le 
premier  que  nous  auons  à  obferuer  en  ce  paf- 
fage.  Or  de  là  nous  auons  à  recueillir  vne  bon 
nedoLtrine&vtilcpour  tous-car  par  ccnioyc 
nous  fommes  aduertis  de  l'amour  que  Dieu 
nous  porte  ,  quand  il  luy  plaift  de  veiller  fur 
nous  ,  &  regarder  à  tout  ce  qu'il  faut  en  fon 
Egiiie.Nous  fommes  poures  créatures  qui 
ne  méritons  pas  que  Dieu  nous  lailTc  >  iure  au 
morde:  encorcs  qu'il  fiift  t(](inj;nc  de  nous, 
mais  fi  ne  laille-il  point  de  noi:s  porter  vne 
te  Ile  atFeâion, qu'il  nous  l^àit  bien  kntir  fi  mi 
fericoide,fur  tout  quand  nous  f  .mines  afti  ni- 
blcz  pour  eftre  conduits  &:gouucme2  par  fa 
Parole, il  prelide  alors  au  mille  u  de  nous,  &•  y 
tait  fa  refidcncc,&  y  a  fin  re  pos.  comme  aul- 
fi  l'Efcriture  appelle  l'Eghfe  ,  le  repo.v'dé 
Dieu.Etc'cftvn  article  qui  eft  bien  notaTjle  ^J'-^^- 
pournoiis  monftrer  que  noftic  -Stiqnciir  ne  ''*" 
no'dchlilTe  point, que  l.iin.iis  il  n-.  nous  tour- 

K.ui. 


ne  le  dos.  Et  ainfî  nous  auons  à  nous  confoler 
tous  enfemble  ,  quand  nouç  voyons  que  ceux 
qui  portent  la  doftrinede  l'Euangiie,font  ad 
iournezdeuant  Dieu  &  deuaiir  (es  Anges.  £t 
pourquoy  ?  d'autant  que  PEuangile  n'eft  laif- 
fee  aux  hoipmes,  à  ce  qu'ils  la  traittent  à  leur 
•appétit, .mais  Dieu  retient  touiîours  l'empire 
fouuerain,  &  veut  aiiAi  que  les' Anges  ibyent 
ici  auec  nous  pour  eftre  tcfmoins  de  la  dottri 
ne  qui  nous  efîanoncee.  Mais  comme  les  mi- 
niflres  font  ici  refueillez,telkraent  qu'il  faut 
bien  (  s'ils  ne  font  par  trop  ftupides  )  qu'ils 
tremblent  quand  ils  ovent  que  Dieu  par  fon 
héraut  fainft  Paul, les  adiourneicideuant  fon 
Jîege  iudiciai,  &  qu'il  veut  qu'il -fe  face  acle  fo 
lennel  de  ce  qu'Us  auront  fait, afin  que  les  coh 
tes  en  foyent  rendus  au  dernier  iour .  Comme 
donc  de  noftre  coflé  nous  deuons  bien  penfer 
ànous,  &cftre  vigilans,  aufsi  chacun  en  fon 
endrpit  doit  bien  appliquer  cefle  dottrine  à 
fon  vfage.Car  ii  ceux  qui  oyent  iournellemét 
la  doiSrine  de  l'Euangile,  &  en  ont  les  aureil- 
les  batues,  n'y  profitent  comme  il  appartient 
pour  eltre  édifiez  en  la  crainte  de  Dieu,  &  en 
toute  faiiicieté  de  vie,  il  faudra  que  nous  re- 
fpondions  deuant  Dieu,&  ne  fera  ia  befoinde 
faire  longue  en  quefte,  &  de  former  autre  pro 
tés.pource  que  Dieu  eft  ici  au  m  lieu  de  nous, 
leius  Chriftnous  eftprcfcnt,&  fes  Anges  mef 
mes  rendront  tefmoignage  de  noftre  ingra- 
titude quand  nous  n'aurons  receu  en  telle  re- 
utrencela  parole  de  falut  comme  elle  le  mé- 
rite.Ainii  en  fomme  nous  voyons  que  les  Pa- 
fteurs  font  exhortez  de  faire  leur  dtuoir  ,  tel- 
lement qu'ils  ne  pourront  efchapper  la  main 
de  Dieu.  Et  y  a  ici  vne  menace  horrible  con- 
tre ceux  qui  n'on:  point  mis  peine  à  s'acquit- 
ter :&  cependant  tout  le  troupeau  ei):  enfei- 
çné  auf  1  bien  de  fon  office,  que  nous  adui- 
fions  de  profiter  cependant  que  Dieu  nous 
fait  la  grâce  de  n©u'.  ouurir  la  porte,  afin  que 
BOUS  le  venions  ouïr  ,&  de  nous  tenir  ici  ef- 
chole  faifant  office  de  Maiftre  &  Dofteur  par 
le  moyen  des  hommes  qui  font  coiilhtuez  en 
ctflc  charge.  Or  cependant  notons  aulsi  que 
toutes  fois  &  quantes  que  la  doftrine  de  Dieu 
TOUS  eft  prefthee,  nous  fommes  adnionctlez 
que  noui  auons  bcfoin  de  nous  adiourner  ,  & 
chacun  doit  faire  ceft  office  ,  il  ne  faut  point 
que  nous  attendions  que  Dieu  nous  cnuoye 
des  fergeans,  mais  chacun  fedoit  en  vertu  de 
ctftc  fcntcncc  folicitci  &  penfer  àfoyique  fi 
auiourd'huy  Dieu  ne  fait  point  femblant  de 
punir  nos  péchez,  il  ne  les  a  pas  mis  toutef- 
fois  en  oi.bli.que  le  tout  eft  enrcgiftré  dctiant 
h;y.Q_Me  cela  donc  nous  viene  en  mémoire, a- 
£rde  cheminer  comme  il  appartient,  &  ne 
ncus  point  iafchtr  la  bride  par  trop  .  Or  no- 
tamment fainil   Paul,  après  auoir  parlé  de 
Dicu,adioiiftc,  Ah  nom  de  iiofre   Seifiieur  lefr.i 
Chr!fl  :  poiiicc  que  c'eft  en  fa  perfonne  qu'il 
nous  J-siit  eftreiut-fz,  comme  ce  priuilege  luy 
a  tilc  dor.rcic.-'.r  t'i  ft  en  luy  eue  ce  paUasc  de 


SERMON     XLIIII. 

Ifaie  fe  doit  accomplir,  comme  ùànû  Paul  le 


dit  au  14.  des  Romains ,  que  tout  genouil  fe 
ployera  deuât  lefus  Chrift.  Et  voila  Dieu  qui 
lure  qu'il  faut  que  toutes  créatures  refpon- 
dent  deuat  fon  thront  :  mai  cela  eft  vérifié  en 
la  perfonne  de  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift, 
dit  iâinft  Paul  .Ainfî  donc  il  n'y  a  nulle  doute 
qu'ici  le  iugenient  que  Di^a  ordonné, ne  foie 
exprimé  par  le  nom  de  lefus  Chrift ,  afin  que 
noilre  foy  regarde  touiîours  à  cefte  venue der 
niere  qui  nous  eft  promife  .  Et  ii  maintenant 
noftre  Seigneur  lefus  nous  eft  caché, que  nous 
n'apperceuions  point  fa  maiefté  vifible,  que 
nous  ne  laif  ions  pas  de  nourrir  cefte  efperan 
ce  en  nos  coeurs, qu'il  viendia,&  qu'alors  il  fe 
ra  tftabli  comme  il  appartient;  &  fi  fes  chofes 
font  auiourd'huy  confufes, qu'elles  viendront 
en  leur  eftai  &■  perfeûion.  Voila  donc  comme 
les  fidèles  doyuent  en  patience  fe  letenir  luf-  ' 
ques  à  la  manite-ftation  de  noAre  Seigneur  le- 
fus Chrift  ,  dont  l'Efciiture  parle  .  Au  rcfte, 
quand  nous  vo^on,  que  les  Anges  fontordon 
nez  comme  fpeftateurs,  &  qu'ils  font  leguet 
fumons  pour  eftre  tefmoms  de  tout  ce  qui  fe- 
ra pafle  en  l'Eglife,  tant  plus  fommes-nous 
confermez  en  cefle  amour  que  Dieu  nous  por 
te:  car  il  ne  fe  contente  pas  de  preiider  entre 
nous ,  mais  il  employé  aufsi  fes  Anges  pour  Pk-PI" 
veiller  fur  noftre  falut,  comme  il  en  eft  parlé  "• 
en  d'autres  paflages  .  Or  tout  ainfî  que  Dieu 
nous  déclare  fon  amour ,  &  nous  en  rend  tef- 
moignage, aufi  deuons-nous  eftre  édifiez  en 
foy  &  en  certitude,  voyans  que  nousauôs  tou 
tes  les  vertus  celeftes  qui  nous  enuironnent. 
Se  que  c'eft  autant  comme  fi  Dieumettoit  fon 
camp  tout  à  l'entoor  ,  que  nous  fufsions  mu- 
nis, &  qu'il  y  euft  vne  forterefle  inuincible 
pour  nous  garder  &  garentir  de  tous  nos  ad- 
uerfaires.  Voila  donc  côme  nous  auons  occa- 
fion  de  nous  refiouir.d'antant  que  Dieu  a  efta 
bli  fet  Anges  à  noftre  feruice,&  pour  eftre  mi 
niftres  de  noftre  fahit,  &  le  procurer  en  forte 
qu'ils  foyent  tefmoins  contre  ceux  qui  n'au- 
ront point  gouucrné  l'Eglife  quand  elle  leur 
eftoit  commife. Notamment  fainft  Paul  les  ap 
pelle  Angrs  ihus,  voire  afin  que  nous  foy  ons 
touchez  d'vne  plus  grande  rcuerencc.  Car  ce 
font  les  principautez  de  Dieu,  ce  font  comme 
(es  mains ,  &  en  eux  il  defploye  fa  maiefté  & 
vertu:  côme  le  rayon  efpâd  fa  clarté  par  tout 
le  monde,  ainfî  les  Anges  font  les  ravons  de 
la  gloire  de  Dieu,  pource  qu'elle  nous  eft  co- 
gnue  par  leur  moyen.  Sainft  Paul  donc  non 
i'ans  caufc  a  ainfî  intitulé  les  Angcs:mais  cepé 
dant  notons  aiifsi  qu'il  les  veut  fe-parcr  d'aiits 
ceux  qui  font  trebufchez.Car  les  diables  n'ôt 
pas  cfté  créez  fi  peruers&  malins  qu'ils  font, 
ennemis  de  tout  bien  ,  d'vne  nature  faufle  Sl 
maudite  :  ils  ont  efté  Anges  de  Dieu  ,  mais  ils 
n'ont  pas  cfté  eleus  pour  perfîfter  ,ains  font 
dcchcus. Dieu  donc  s'eft  refcrué  ce  qu'il  a  vou 
lu  d'entre  fes  Ange'. Et  ainfî  nous  auons  défia 
vn  miroir  de  l'clt  ftic  gratuite  de  D:t«  au  ciel, 

fi  us 


SVR   LA  I.    A   TIMOTH. 


affj 


fans  que  nouî  venions  iufqiies  au  monde.Or  fl 
la  grâce  de  Dieu  nous  apparoift  iiifquesaux 
•  Anges, que  fera-ce  de  nous?  Car  tout  le  genre 

y*-î  •/  humain  a  elle  perdu  &  ruiné  en  Adam(comme 
("^'^•i  nous  fçauons)&  fommes  tous  maudits, &  naif- 
fons  enfans  d'ire,  comme  l'Efcriture  en  par- 
le. Que  faut-il  donc  linon  que  Dieu  nous 
choilillè  par  fa  pure  bonté, puifque  dés  le  ven- 
tre de  la  mère  nous  fommes  corrompus  ,  & 
fommes  aliénez  de  luy  i'  Il  faut  bien  que  fon 
eleûion  gratuite  domine  pour  nous  feparer 
d'auec  les  repïouuez  qurdcmcurét  en  leur  per 
dition.Nousdcuons  bien  donc  noter  ce  paila- 
ge.que  faincV  Paul  parlant  des  Anges, monftrc 
que  leur  dignité  procède  de  ce  que  Dieu  les  a 
choilîs  &  eleus  àfoy.  Et  ainlî  par  plus  torte 
raifon  nous  ne  fommes  point  difcernczd''a- 
uec  toutes  les  creatnres  quiapparoilTent.finô 
d'autant  que  Dieu  nous  fepare  par  là  miferi- 
corde.Or  venons  maintenant  à  celle j)rotelhi 
tion  que  fait  fiintl  Paul.'Qj;'  '»  g.trdes  ces  cho 
fes(dil-il)fjiis  h.ij}iueté  de-  iitgniient,ne  décli- 
nant point  en  -vne partie.  11  ell  certain  que  Ti- 
mochee  n'efloit  point  fuiet  à  corruptiô.il  n'e- 
ftoit  point  aufsi  vn  homme  léger  ni  tfuenté' 
toutesfois ,  faind  Paul  ne  l'admonefte  point 
fans  propos. Car(c5mei''ây  dit)ce  n'eft  point 
feulement  pour  fa  perfonne  qu'il  l'adinoiiefle 
ainlî  ,  il  baille  vne  règle  commune  à  tous  mi- 
niftres  de  la  parole  de  Dieu. Mais  tant  y  a  auf- 
lî  que  Timothee  a  receu  vn  tel  aduertiffcmét 
auec  toute modeftie.Brief,faintl  Paul  ne  par- 
le point  ici  à  gens  desbauchez,à  gens  ou  il  n'y 
a  nulle  raifon, &  qui  ont  le  cerueau  bouillant, 
mais  il  parle  à  tous  bons  miniJlres  &  fidèles. 
Car  s'il  addrefloit  fon  propos  à  ceux  qui  occu 
pent  la  place  des  feruiteurs  de  Dieu,&  ne  font 
aucunement  idoines  à  vn  tel  office ,  il  vferoit 
d'vn  autre  langage. Notons  donc  qu'en  la  per 
fonnede  Timothee  il  veut  ici  exhorter  tous 
fidèles  feruiteurs  de  Dieu  q  fôt  idoines  d'exer 
cer  vne  telle  charge  ,  &.  qui  tafchent  de  s'en 
acquitter  fijieleinenc:  mais  tant  y  encores  que 
ils  ont  befoin  d'ellre  retenus  ,  qu'ils  n'ayent 
point  ceftehafliuetéde  iugement.qu'ilsnede 
clinent  point  en  nulle  partie. Or  ces  deux  cho 
fes  tendent  à  vn  but. Car  nous  déclinons  quel- 
quefois à  vne  partie  pource  que  nous  fommes 
préoccupez  ou  de  faueur  ou  de  haine  ,  quand 
les  prefens  dominent  par  trop.Saind  Paul  n'a 
pas  entêJu  celarcar  ce  ne  feroit  pas  chofe  dé- 
cente à  vnferuiteur  de  Dieu,  de  fe  lailTer  ga- 
gner d'vne  atfedion  mauuaife  pour  condaner 
l'innocent, pource  qu'il  lehait:&  pour  main- 
tenir lemefchant,  d'autant  qu'il  l'aime,  &de 
fe  lailTerainfî  gagner  par  corruption.  Pour- 
quoy  donc  .*>.  Paul  dit-il  qu'on  ne  doit  point 
décliner  en  vne  partiefU  cntéd.par  trop  gran 
de  facilité.  Encores  qu'vn  homme  foit  pur.  Si 
qu'ilait  bon  zèle, toutesfois  fi  pourra -il  decli 
ner  par  fois. Voila  à  quoy  S.Paul  en  femme  a 
»regardé.Or  puis  que  nous  entendes  ce  qu'il  a 
voulu  dire, il  relie  d'appliquer  celle  doibine  à 


nollre  vfage.Et  en  premier  lieu  notons  ce  qui 
a  elle  dit, que  ceci  n'eil  point  fuperflu.que  les 
minillres  de  la  parole  de  Dieu  font  exhortez 
de  ne  fe  point  haller.Et  pourquoy?Qjj3d  no* 
ferions  les  plus  aduifez  du  monde  ,  qu'il  y  au- 
rpitgrandemodeftie&  granité  en  nous,fieft- 
ceque  les  gens  font  importuns  ,  l'vn  picquc, 
l'autre  allume  le  feu,l'autre  poufle:brief,c'eft 
vne  grande  vertu,  voire  finguliere  ,  quand  vn 
home  fe  peut  retenir  pour  prefter  l'aureille  à 
ce  qu'on  luy  dira,&  cependant  qu'il  ne  fe  ha- 
lle point  par  trop. Et  ainii  nous  voyons  lane- 
cef  ité  quieftoit  que  le  fainûEfprit  nous  don 
naft  vne  telle  regle.Au  refte.côme  ceci  ell  c6- 
mandé  aux  miniltres  de  la  parole,aufsi  faut-il 
que  tous  ceux  qui  font  en  charge  publique  le 
prenent  à  eux  ,  5;  qu'ils  l'eflendent  à  leur  in- 
flruftion:  car  c'elt  vn  ordre  qui  doit  élire  ob- 
fcrué  ,  mefmes  en  iuflice ,  de  ne  point  fe  trop 
haller.  Ileflvray  que  ceux  qui  voudrôt  vfer 
de  meure  délibération, prendront  excufepour 
ne  iamais  rié  faire:cômenous  voyôs  ceux  qui 
font  froids  &  lafches,vfcrontd' vne  telle  cou- 
uerture,  qu'ils  craignét  de  fe  hailer par  trop. 
Or  il  ne  faut  point  faire  de  vice  vertu:car  ce- 
lle hailiueté  dont  parle  faind  Paul  ,n'ellpas  0 
diligence.Vn  home  pourra  e/lre  haflif  en  fou 
ofrice,il  pourra  cflre  feruent,&  quand  les  cho 
fes  fe  feront  de  luy, il  y  aura  vne  exécution  vi 
ue,&  cependant  il  ne  fera  point  trop  haflif.Et 
pourquoy?  Telle  hailiueté  gill,  quand  on  dé- 
cline en  vne  partie, c'ell  à  dire  qu'on  laifleles 
chofcs  qu'on  doit  faire, &  cepëdant  qu'on  s'a- 
nuileàcequi  n'ell  pas  tant  expédient.  Tant  y 
a  qu'il  nous  faut  aduifer  de  tellement  nous  re- 
tenir ,  que  l'importunité  des  gens ,  ou  bien  la 
crédulité  de  noflre  efprit  ne  nous  précipite 
pa<.:coinme  nous  voyons  rexperience,que  ce 
mal  a  par  trop  règne  au  mode  de  tout  temps, 
&  qu'encores  auiourd'huy  chacun  s'en  fenti- 
ra:&  cependant  il  y  en  a  bien  peu  qui  cherchée 
le  remede.Or  s'il  nou^ft  commandé  de  nous 
garder  de  trop  grande  facilité,  encores  que 
nous  ayons  vn  bon  zèle  ,  ie  vous  prie  ,  quelle 
condamnati5&  vengence  eftapprellee  à  ceux 
qui  n'vfent  point  feulement  de  halliiieté,mais 
de  certaine  malice?  Comme  nous  enverrons 
auiourd'huy  qui  auront  double  mefure  &  dou- 
ble aulne.  Q^nd  il  fera  quellion  d'vne  cauXe 
toute  pareille, voila  deux  perfonnes  qui  vien- 
dront,l'vn  fera  condamné  pour  le  mefme  faift 
duquel  l'autre  feraablous.  Et  pourquoy  ell- 
ce  qu'il  y  a  vn  iugement  fi  diucrs  en  vne  mef- 
me caufe?£il-ce  que  le  iuge  ait  elle  préoccu- 
pé d'ignorâce,&:  qu'il  cuida  11  bien  faire;  N'éni: 
mais  d'vne  certaine  malice, que  les  vns  feront 
corrompus  par  prefens, les  autres  fe  font  ven- 
dus à  Satan  pour  maintenir  toutes  les  mauuai- 
fcsquereles  qui  viendr6t,&:  s'y  cfforceiôt  en- 
tant qu'en  eux  fcra.Et  puis  quîd  ils  ferôt  ain- 
lî enuenimez  cotre  toutes  gens  de  bien, ils  lé- 
rot  procureurs  de  tous  vices, &  en  la  fin  il  fau 
dra  qu'ils  s'ab.idonnét  à  tcute  vilenie. Et  c'ell 

K.iui. 


a6'4 


SERMON       XLIIII. 


te  qu'on  voit  auioiird'liiiy ,  &  la  chofe  cft  par 
trop  notoirc.Carfi  ceyxqiii  ciiident  bien  fai- 
re,&  ont  bon  zele.font  condamnez  en  leur  in- 
conlidcration.pource  qu'ils  font  par  trop  cre 
dules.que  lera-cedeceux  qui  y  procedet  ainfi 
d'vne  certaine  malice  ?  Notons  bien  donc  la 
règle  qui  eft  ici  donnée  à  tous  ceux  qui  ont 
charge  publique.afin  que  nous  prenions  garde 
à  nous ,  &  voyans  que  nous  ferions  par  trop 
mal-aduilez  en  ceft  endroit ,  que  nous  prions 
Dieu  qu'il  nous  donne  efpritde  prudence  & 
difcretion,à  ce  que  nous  ne  foyons  point  com 
me  rofeaux  branlas,  pour  eftre  agitez  de  tous 
A      vents,  que  nous  ne  plions  point  çà  &  là  pour 
eftre  démenez  à  l'auéture,mais  qu'il  y  ait  vne 
bride  qui  nous  retiene,  &  que  nous  ne  iugions 
de  rien  finon  que  nous  ayons cognu  premiè- 
rement comment  il  en  va.Or  apres'que  fainft 
Paul  a  parlé  ainiî  en  gênerai ,  il  adioufte  vne 
efpece  qui  rcipond  à  ce  propos, difant,  N'/mf  o 
Je  point  haflmementles  mains  fur  jttcutt ,  &  ne 
commitniijue  point  au  v  pechex.d'autruy:  garde 
toy  pur. Yci  il  conterme  ce  que  nous  auons  ton 
ché  n'agucres,c'eft  qu'il  a  voulu  armer  Timo- 
thee  contre  beaucoup  de  murmures  qui  fe  pou 
•        uoyent  leuer  cotre  luy.Et  ainiî  en  fa  perfonne 
il  a  voulu  aduertir  tous  ceux  q  ont  la -charge 
de  gouucrnerl'Eglife  ,  de  ne  le  point  fafcher 
quand  on  mefdira  d'eux,  &  que  pour  gratifier 
aux  hommes  ils  iledeclinent  point  quoy  qu'il 
en  foit,  mais  qu'ils  regardent  à  Dieu,  comme 
il  les  a  exhortez  par  ci  deuant.qu'ils  ayent  les 
yeux  dreflcz  en  haut  ,  &  qu'il  iaiflcnt  couler 
tous  ces  bruits, &  toutes  ces  folles  deuifes  que 
on  pourra  faire  ,  qu'ils  mettent  cela  fous  le 
pied. Comme  quoy  ?  Nous  aurons  afTcz  d'ap- 
probation encefte  efpece  quefainft  Paul  tou 
che  ici. Si  vn  homme  arriue  nouuellement,  on 
fera  tout  preftdeluy  bailler  la   chaire:  car 
H  y  en  a  beaucoup  qui  font  iî  pleins  de  curio- 
fité  ,  &  aufquels  les  aureilles  frétillent  telle- 
ment, qu'ils  appcteat  toufiours  chofe  noo- 
uclle,&  voudroycnt  touliourschangef  dedo- 
ûcursdix  fois  la  fcpmaine.  Or  cependant  li 
m  homme  qui  ha  la  charge  de  conftitucr  les 
ininiftres,n'acquiefce  .-i  tels  appetis ,  on  dira, 
H(i,côment?pourquoy  cft-ce  qu'il  fe  réd  tant 
<lifficile?illuy  fcmble  qu'il  n'y  a  que  luy,  c'eft 
vn  homme  qui  craint  qu'on  ne  s'auance  par 
trop,  il  voudroit  toufiours  auoir  le  bruit ,  il 
pcrtfe  que  fi  quelqu'vn  auoit  meilleure  grâce, 
.iju'il  pourroit    gagner  fur  hiy.  Oubitnfîon 
ne  l'accuft  point  d'orgueil  ,  on  l'accuferade 
chagrin  ,  on  trouucra   toufiours  à    redire  en 
(eux  qui  ne  voudront  point  complaire  à  ces 
•  fols  appetis.  Il  cft  vray  que  cela  ne  doit  point 
trop  effaroucher  ceux  qui  font  en  ceile  char- 
ge :  mais  fi  eft-ce  que  quand  cela  aduient ,  on 
voit  que  ch.^cun  en  dira  (à  râtelée,  tellement 
qu'il  cft  unpofsible  que  d'vn  homme  qui  vou- 
dra feriTtr  fidèlement  à  Dieu,cftaiit  en  charge 
de  porter  fa  parole  ,les  vns  ne  difent  ,  Ccft 
tomme  eft  trop  credule,il  ha  incontinent  l'au 


reille  ouuerte  pour  rcceuoir  tout  ce  qu'on  luy 
dit,ii  n'y  a  perfonne  qui  foitbien  vcnudeuant 
luy, que  ceux  qui  luy  ieront  quelque  rapport. 
Les  autres  diront,  Il  ne  s'appriuoife  point  fa- 
cilement,il  femble  qu'il  vueille  eftre  tout  feul 
d'vne  opinion.  Il  y  en  a  d'autres  quidiront. 
On  voit  bien  qu'il  ne  s'accorde  qu'à  ce  qu'il' 
veut,&  ne  le  peut-on  faire  aller  au  contraire, 
Bricfileft  bien  difficile  que  nousnefoyorw 
fafchez  quand  nous  oyons  ainfi  mefdire,&  que 
on  nous  viene  picquer,cela  eft  pour  noui  faire 
fléchir  d'vn  cofté  oud'autre.  Pourceftecau- 
fe  S.  Paul  dit  à  Timothee,  N'accorde  point 
(dit-il)  aifeement  qu'vn  homme  foit  receu, 
que  tu  regardes  bien  ceux  qui  doyuent  eftre 
mis  en  office.qu'ils  ayent  efté  efprouuez, voi- 
re de  longue  main, que  ce  foyentgens  cognus 
Se  defquels  on  ait  certain  tefmoignage  par 
langue  experiéce.Or  cependant  fi  tu  vois  que 
les  autres  foyét  trop  faciles, qu'ils  ne  deman- 
détfino  qu'on  yproccde  à  la  volée, ne  te  méf- 
ie point  parmi  ,  (dit-il)  ne  communique  point  à 
leurj  pechex..Vr»y  eft  qu'aucuns  cxpofentque 
toutes  les  fautes  qui  icront  commifespar  ceux 
qui  auront  efté  inîtituez  à  l'auenture, retombe 
ront  fiir  ceux  qui  les  auront  introduits  :  cela 
eft  bien  vray.  Mais  fainft  Paul  a  voulu  ici  ar- 
mer notamment  les  miniftres  contre  tous  les 
bruits,murraures&:detractiôs  qui  fepourroy- 
ent  drefler  contr'eux  ,  &  fe  dreflent  de  faift, 
comme  nous  le  voyons.  Si  les  autres  (dit-fl) 
veulent  mal-fairc ,  que  tu  ne  comman-iques 
pointa  leurs  péchez,  que  tune  fois  point  en- 
ueloppé  parmi  eux,  &  qtu  defpites  tous  ceur 
qui  fe  mefcontenteront  de  toy ,  car  c'eft  à 
Dieu  auquel  tu  as  à  rendre  conte.  Or  puis  que 
nous  fçauons  à  quel  propos  fainft  Paul  aainfi 
exhorté  Timothee  ,  aduifons  de  faire  noftre 
profit  de  cefte  doftrine  ,  &  notons  que  iamais 
vn  homme  ne  pourra  purement  anoncer  la  pa- 
role de  Dieu,&  faire  fon  office, finon  qu'il  ait 
les  yeux  fermez  à  toute  la  réputation  qu'on 
pourra  auoir  de  luy,  qu'il  ait  les  aureilles  bou 
chces  à  toute  calomnies,  car  il  nous  en  faudra 
hunier  beaucoup.  Si  nous  voulions  contenter 
tout  le  monde, que  feroit-cc.'  Iln'yauroit  au- 
tre expédient  finon  de  renoncer  à  Dieu, com- 
me aufsi  fainil  Paul  dit,   Que  cclny  qui  ne '^'''•'•'** 
peut  renoncer  au  monde, il  ne  peut  eftre  ferui 
teur  de  Icfus  Chrift,  ce  font  chofes  insépara- 
bles.Voulons  nous  donc  feruir  à  Dieu  &.  à  fon 
Eglife?Il  faut  eftre  armez  contre  beaucoup  de 
murmures  &  de  fiux  rapports, il  faut  qu'on  iu- 
ge  de  nous  de  cofté  &  d'autre,  que  quand  l'vn 
nous  aura  accufé  d'eftre  trop  crédules,  l'autre 
dife  qu'on  ne  peut  rien  gagner  enuers  nous, 
il  fiut  que  nous  pafsionspar  là.Et  au  rcfte.n» 
tons  bien  quand  il  cft  dit,  Q;<*<'  noui  ne  commu- 
niquions point  aux  pcchex  d^autruy  ,  c'cft  afùï 
que  nous  ne  cuidions  point  eftre  exempter 
quand    nous  ferons  bouclier  d'auoir  bcau^ 
coup  de  voix  pourdire  ,  le  n'ay  pas  efté  feul, 
chacun  eftoitd'atcoidA'Iu'y  feroy-ic.'y  pon 

uoy-ie 


SVRLA     I.     A    TIMOTH. 


uoys-ie  contredire  ?  Q^ie  nous  ne  penfîon; 
point  donc  i^iie  ccftc  excufe-la  doyiit  valoir 
deuantDieu.  Et  pourtant  notons  bien  ccfte 
exhortation  ,  quand  nous  voyons  la  difficulté 
qui  eften  noftre  office. Car  fi  nousauions  tout 
le  monde  qui  dift  Amen  ,  &  encores  que  nous 
peufsions  proteftcr  que  le  mal  ne  fv.l\  point 
procédé  de  nous.finousy  aiiôi  communiqué, 
nous  ne  laiflerons  pas  d'eftrc  condamnez  dé- 
liant Dieu.  Et  pourquoy  ?  Il  eft  efcrit ,  T»  ne 
communiqueras  point  aux  fttchex.  des  autres  :  il 
faut  quand  nous  voyons   le  mil  >  que  nous 
declarionsqu'il  nous  derplaift.Il  eft  vray  que 
vn  feul  home  ne  pourra  pas  reiifter  touliours: 
mais  tat  y  a  qu'il  nous  faut  empefchcr  ce  que 
nous  voyons  eftre  mauuais ,  Se  quand  nous  ne 
pouuonsle  Corriger,  il  nous  faut  vferde  pa- 
tience en  celarmais  quoy  qu'il  en  foit,lî  faut- 
il  condamner  le  mal,&  y  refifler  s'il  elt  pofsi- 
ble.  Or  combien  qu'ici  fainft  Paul  parle  aui 
minières  de  la  parole  de  Dieu.toutesfois  cha 
cun  doit  appliquer  cefte  inftruftion  à  fon  vfa- 
ge.Comme  ceux  qui  font  en  f  ftac  de  iultice  & 
de  gouuernement  piiblic,auront  beau  dire  que 
ils  voudroyent  que  tout  allait  mieuï  ,  qu'il  ne 
tient  point  à  eux,m.iis  que  la  plus  forte  partie 
le  gagne,  qui  n'eft  pas  toufiours  la  meilleure. 
Il  faut  en  premier  lieu  qu'ils  monftrent  qu'ils 
ont  reiîflé, qu'ils  ont  tafché  que  les  chofes  fuf 
fent  bien  c5duites:bricf,qu'ilsn'ont  point  dil" 
fiinulé  qu.id  ils  ont  vcu  que  la  plus  part  fe  de- 
ftouriioit  du  bon  chemin,  Si  qu'ils  n'ont  point 
confentiaux  péchez  d'autruy.&r  n'y  ont  point 
communiqué.  Or  il  eft  ainli ,  que  quiconques 
ne  refiftepointà  vnmauuaiscôfeil.à  vne  cor- 
ruption,ou  à  quelque  iniquité,  celuy-la  eon- 
fent  &  y  accorde. Et  ainu,tous  ceux  qui  aurot 
prins  vn  faux  vifage  pour  fe  defguifer  ,  &  qui 
n'auront  point  franchement  maintenu  la  do- 
ôrine  de  la  vérité, &  la  religion,font  compli- 
ces des  mefchans.  Et  pourquoy  ?  Nous  oyon? 
.  ,         ce  qui  eft  ici  dit  par  ftiiiû  Paul. Et  en  gênerai 
•^  il  dit  en  vnaurepaUage,Q^  nous  communi- 

quons aux  péchez  ,  encores  que  riou^  foyons 
perfonnes  priuees,  finous  ne  les  redaiguons. 
Qugveut  dire  cefte  admonition.Nccommu- 
quez  point  aux  oeuures  infruûueufes  des  tene 
bres,mais  pluftoô  redarguez-les?A  qui  eft-ce 
que  fainâ  Paul  parle?Eft-eefeuIemétauxmi- 
niftres  qui  prefchent  la  doftrinede  l'Enangi- 
le?Eft-ce  feulement  aux  Magiftrats  &  à  ceux 
qui  ont  leglaiue  &  legouacrneaientde  lapo- 
liee?Mais  a  tous  Chreftiens.à  grans  &  â  pctis. 
Il  eft  donc  dit  que  nous  ne  communiquiorrs 
point  aux  péchez  d'autruy.  Et  en  quelle  for- 
te?Enles  redarguant.  Etairrfi,  celuy  qui  fait 
femblant  de  flatter  fon  pro€hain,&  qui  ferme 
les  yeux  quand  il  voit  que  Dieu  eft  offénfé, 
celuy  mefmes  qui  y  confcnt.lêra  encores  plus 
coulpable.  Notons  bien  donc  que  nous  auons 
conte  difficile  à  rendre  deuant  Dieu ,  finous 
auons  cheminé  parmi  les  corruptions  du  mon 
de.en  teJk  fofte  qu'il  ait  fcmblé  ^nous  y  fuf- 


fions  accordans.Et  d'autant  plus  dcuôs-nous 
nied/ter  cefte  doftrinc  ,quâiidnous  voyons 
d'vn  coftc  qu'auiourd'huy  il  y  a  vne  telle  li- 
cence de  mal -faire, qu'il  (Imble  que  la  couftu 
me  foit  comme  loy.Or  quand  vn  tel  vfage  fur 
monte, le  mal  a  defîa  tellement  gagné  ,&i,'cft 
desbordé  iul".jues-l.i, qu'on  cuide  qu'il  foit  per 
mis.E:  pourquoyfCh.Tcun  en  vfe.Qii'vn  hom 
me  foit  conuarncu  qu'il  fait  mal ,  moyennant 
qu'il  ait  beaucoup  de  compagnons, il  luy  fem- 
blcqu'il  eft  excufé.Et  l'vlagc  commun  eft  tel, 
il  fuit  vrler  entre  les  loups,  dira-on.  Or  nous 
voyôs  que  les  péchez  d'autruy  ne  ferôt  point 
poumons  excufcr  deuant  Dieu  •&  combien 
que  tout  le  monde  faille  aucc  nous,  nous  ne 
kifleronspas  d'eftre  enueloppez  en  vnemef- 
mecondamnationipenfunsdoncàcela.  Mais 
encores  que  nous  n'ayons  point  ne  pillé  ,  ne 
defrobbé,que  nous  n'ayons  point  paillarde  ne 
yurongné,  que  nous  n'ayons  point  efté  diflo- 
lus  en  mal  pour  eftre  complices  de  ceux  qui 
defpitent  Dieumanifeftement,tant  y  aqu'en- 
cores  ne  f'  mmes-nous  point  purs,  &  ne  pou- 
uons  efchapper  de  la  main  de  Dieu,  fînon  que 
nous  ayons  eftre  exemptez  des  corruptions 
qui  apparoiflent ,  en  les  redarguant  félon  no- 
ftre  faculté. Comme  quoy  ?  Nous  verrons  que 
le  nom  de  Dieu  fera  blafphemé, nous  verrons 
d'autres  chofes  vileines  :  fi  nous  faifons  fem- 
blant de  baifler  le  col ,  nous  ferons  condam- 
nez d'auoir  communiqué  à  toutes  les  difTolu- 
tions  du  mode:  comme  il  eft  dit  que  celuy  qui 
n'ha  point  vertu  en  foy  de  déclarer  que  le  mal 
luv  defplaift,&  qu'il  le  reprouue,que  celuy-la 
communique  aux  péchez  d'antruy.Orauiour— 
d'huy  combien  y  ena-ilqui  penfent  à  cefte 
doftrine  ?  On  n'aura  les  aitreilles  batues  que 
des  blafphemes  qui  fe  font  contre  Dieu,  on- 
voit  tant  de  vilenies  &dilIofHtions:qui  eft-ce 
qui  s'y  oppofe?n  n^y  a  nulle  liberté  de  ce  fai- 
re ,  &  nul  aufsi  n'ofe  ouurir  la  bouche.  Ainff 
donc  nous  voyons,  combien  qiie  les  hommes 
fe  flattent, qu'ils  ne  laifîent  point  d'eftre  cor» 
damnez  de  Dien  ,  lequel  nous  iugera-fclon  fa- 
parole.  Se  non  point  félon  nosexeufes  friuo— 
les  que  nous  amènerons, nous  voulans  couunr 
d'vn  fie  mouillé, comme  on  dit.Or  fi  ceux  qnr 
n^ont  cula  hardicffe  de  red.Trguerles  vKcs.crji 
cores  qu'ils  s'en  foyent  retirez  ,  û  ceux-là  ne 
font  point  du  tout  purs  &  innocens.que  fera- 
cede  ceux  qui  les  fupportent  ârmaintienent? 
Voila  vn  homme  qui  fçaura  bien  que  le  nom> 
de  Dieu  eft  blafphtmé  ,  il  aura  tité  tcfn^oirp 
d'vn  periure,on  de  quelque  fraude,de  quelque- 
iniure  &  outrage  ,  &  cependant  tant  s'en  faut 
qii'il  ait  1*  bouche  ouuerte  pour  reiîfleraav 
mal,  qu'ilfe  fàitcommc  partie  pour  eftre  ad- 
uocat  de  toutes  mauuaifes  caulês.Et  telles  gés 
font-ils  dignes  d'eftre  du  rarg'de;  fidèles  ,  Se 
d'auoir  Itf u  en  PEglife  de  Dieu?lls  font  pluf- 
toft  dignes  d'eftre  reiettezaucc  les  chiens  Se 
pourceaux.   Et  toutesfois  on  leur  ti;t  grand? 
tortfi.  onne  les  tient  comme  lïippolts  de  1» 

£.1- 


SERMON       XLV. 


foy.Ec  àquelles  enleignesPD'autat  plus  donc 
noib  taïu-u  bien  noter  ces  pallages,  où  il  cft 
parlé  uc  ne  point  communiquer  aux  pecliez 
d''autruy.  Brief,  conitiic;!  que  nous  poumons 
ertretranfportcz  comme  d'vne  ttmpelle  vio- 
lente  ,  pource  que  le  mal  domine  par  tout  le 
monde, qu'vn  chacun  (c  retiencde  cefle  bride 
la,  que  Dieu  nous  appelle  à  loy  afin  que  nous 
ne  flechiûions  point  à  Tappcùt  des  honi:ner: 
&  qu'il  nouM  fouuicne  aiihi  de  ce  mot  que 
falnd  Paul  a.lt-.ulle  pour  conclulion  ,  Cirie- 
toy  ]Jl»r:quek■^  loiulleures  d'aucruy  ne  foyent 
point  pour  te  contaminer.  Q^nJ.  vn  homme 
fera  inteclé,ii  ie  me  vien  trotter  parmi  fon  or 
dure  ,  ietire  vue  partie  de  Tinfedion  à  nioy, 
s'il  demeure  louiilc  comme  ilelloit  au  para- 
uant,ccla  n'amende  point  ma  caule.Ainfi  déc 
regardons.!  tant  de  pouretez  qui  fontaiiiour 
d'iuiy  cfpanduev  fur  toute  la  terre  ,  tellement 
que  nou'i  y  tommes  plongez, que  nous  penfîôs 
.1  nous,&:  que  nous  fçachios  qu'il  ne  faut  point 
cheminer  parmi  les  pollutions,  non  pas  k-ule 
ment  des  incrédules,  mais  de  ceux  qui  le  van- 
tent d'eftre  du  peuple  de  Dieu,&  de  Ion  Egli- 
fe.Q_u'vn  chacun  donc  fc  conferue  pour  n'e- 
ftrc  point  pollue  :  car  quand  ù'mù.  Paul  dit  à 
TiiTiothee,G.(r(/f-fo'y  j)Kr,il  ne  parle  point  feu 
lementdes  infections  qui  efloyent  parmi  les 
Payens,  parmi  ceux  qui  fedeclaroyent  enne- 
mis de  Dieu  ouuerts ,  mais  il  parle  des  vices 
inteiieurs  qui  eitoyent  en  l'Eglife,  mefines 
iufques  aux  miniftres  &  Pafteurv ,  que  iî  ceux- 
là  eitoyent  fouillez^qu'il  ne  faloit  point  pour 
tant  queTimothee  fc  meflaftauec  eux. Or  puis 
qu'amlîcftquc  les  vices  qui  font  en  ceux  qui 
doyuent  monftrcr  lecheminde  falut  comme 
miroirs  de  toute  faintteté  ,  fi  ces  vices-la,  di- 
ie  ,  ne  font  point  pour  nous  eifcufer  deuant 
Dicu.aduifons  de  n'alléguer  point  pour  excu- 


fe,Vn  tel  faitainfi,ie  ne  fuis  pas  lepremier.ic 
ne  fuis  pasfeul.  Non,  que  tout  cela  foit  mis 
bas:  &  quand  le  mal  fera  ainlî  desbordé  ,  que 
nous  foy  ons  tant  plus  fur  nos  gardes, que  nous 
foyons  tant  plus  folicitez  à  prier  Dieu  qu'il 
nous  prefcrue.que  nous  ne  perifsionspointau 
déluge  ,  &;  qif  ilnous  face  tellement  cheminer 
parmi  les  efpines,qire  nous  n'en  foyons  point 
tfgrat'gnez.que  nous  paf.ions  tellcmét  parmi 
les  cpnuptious  ,  qu'elles  ne  nous  attouchenc 
point.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  faire, 
c'tftd'eftre  iur  nos  gardes  ,  &  de  veiller  fon- 
gneufement  quand  nous  voyons  que  nous  ti- 
rerions beaucoup  de  corruptions  îî  nous  vou- 
lions croire  Satan  ,  (i  nous  foufFrions  d'eftre 
agitez  çà  c&là.par  ceux  auec  lefquels  nous 
conuerfons.  Que  cela  donc  nous  foliciteà 
eflre  fur  nos  gardes, &  à  prier  Dieu  qu'il  nous 
face  la  grâce  que  nous  puifsions  nous  remet- 
tre entre  fes  mains ,  afin  qu'il  nous  guide  en 
telle  forte  qu'il  nous  garde  innocens  &purs 
des  iniquitcz.defqiielles  nous  pourrions  élire 
corrompus  fans  fa  fauuegarde. 

OR  nous-nous  prollerneronsdeuant  la  fa- 
ce de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de  nos 
taures  ,  le  prians  qu'il  luv  pl;iile  nous  en  tou- 
cher cncores  plus  viuemeiit.afin  de  nous  y  dcf 
plaire:&  qu'aucc  repentance  nous  recourions 
àluy  ,1e  prians  qu'il  ait  pitié  de  nous  pour 
nous  defpouillcr  de  toutes  nos  imperfections 
&  vices.  Et  cependant  qu'il  nous  retiene  en 
telle  forte  que  lamais  nous  ne  foyons  eflon- 
gnez  de  hiy  ,  mais  qu'il  nous  attire  toufiours 
de  plus  en  plus  .à  foy.tendans  au  but  auquel  il 
nous  appelle ,  combien  que  nous  n'y  foyons 
point  encores  paruenus  ,  &  mefmes  que  nous 
clochions  au  milieu  du  chemin. Que  non  feu- 
lement il  nous  faceccfte  grâce  .mais  aufsi  à 
cous  peuples  &  nations  de  la  terre,&c. 


NEVFIEME       SERMON       SVR      LE 

C  I  N  Q_V  lEME     CHAPITRE. 

.  1}  Ne  hoy  point  cCorefenduant  d'edu ,  mais  \fc  d' 'vu peu  de  \>in 
pour  ton  ejîomach,  c;^  pour  les  maladies  que  tu  asfouuent. 

i4  Lf  ;■  pochez  d'aucuns  hommes  jont  manifcjles  de  foy ,  \enans 
cnauanten  iugemcntt^f  des  autres  ilsfuyuent  après. 

2-5  SemhlMevient  aufsi  les  bien- fait  s  font  dejôy  manifefles:  o* 
ceux  qui  font  autrement,  nepeuuent  ejlre  celez. 

N  pourroit  trouuereftran-  à  vnApoftre  de  lefus  Chrift:&' aufsi  nous  fça- 

gc  Comme  faindt  Paul  ayant  uons  qu'entant  qu'en  luy  eftoiciil  deuoit  reti- 

l'othce  d'exhorter  tout  le  rer  les  hommes  delà  terre  pour  les  faire alpi 

monde  à  lobrieté  ,  aduertit  rer  au  ciel  ,  &  à  la  vie  fpirituelle  ,  à  quoy  ceci 

I  ence  pallàgeTimotheeque  Btirefpond  p'oint.  Maisen  premier  lieunous 

,  il  elt  bô  qu'il  boyue  du  vin.  «MRs  .\  noter  que  les  hommes  ne  tienent  ia- 

Car  de  prime  face  cela  femblccftre  répugnât  mais  mefure  linon  que  l'Efpntde  Diculcs 

couuerne 


SVR    LA   I.    A    TIMOTH. 


^C^J 


gouuerne.S;  les  ticne  cômeen  bride,  ie  dien- 
cores  qu'ils  viR'illcn:  bien  faire, &  que  leur  in- 
tention foit  d'afpirerà  vertu.  Et  cela  nous 
monftrecôbien  nousauous  btfoind'inuoqucr 
Dieu  afin  qu'il  nous  donne  prudence ,  °<  qu'il 
nous  môftre  ce  qui  eft  bon  de  taire  en  tout  & 
par  tout.  Et  au  relte,  nous  deuon'^  aiifsi  noter 
que  Dieu  nous  aime  tant  qu'il  ha  le  foin  de  no 
ftre  nourriture,  afin  qu'en  ce  monde  &  en  ce- 
ftevie  corruptible  nous  apprenios  deiîa  .î  gou 
fter  fon  amour  paternelle  pour  eftrcconter- 
mez  en  l'efperancede  la  vie  celeftc,qu'il  ha  le 
foin  de  nos  corps  ,  afin  que  nous  ne  doutions 
point  que  nos  âmes  luy  font  plus-que  prccicu 
fes.Et  puis  il  ne  faut  point  que  nous  trouuiôs 
eftrange  fi  fainft  Paul  a  remôitré  à  Timothee 
ce  qui  luy  eftoit  propre  &  vtile  pour  le  faire 
mieux  difpofer  au  feruice  de  Dieu  &  de  fon 
Eglife.  Or  donc  notons  pour  auoir  l'intelli- 
gence de  ce  palTige,  que  ce  n'eft  point  le  tout 
de  mener  vne  vie  auftere,car  on  pourroit  eftre 
excefsif  en  cela. Il  faut  donc  reuenir  au  moyé 
ou  médiocrité  ,  qu'on  appelle  :  car  c'eft  là  où 
gift  la  droite  vertu. Maintenant  fi  on  deman- 
de,Et  c5ment?Elloit-il  decet  à  vn  Apoftre  de 
lefus  Chnftjd'exhorter  vn  homme  à  boire  du 
vin?Lâ  refponfe  fera  facile, c'eft  qu'en  tout& 
par  tout  iufques  au  boire  &au  manger,  Dieu 
veut  que  noftrevie  foit  réglée,  afin  qu'é  vfant 
de  fes  créatures  nous  le  puiiMons  feruir  ,  que 
nous  foyôs  propres  pour  bien  fiire.Et  en  ce- 
lafcomme  i'ay  défia  tonché)nous  voyons  l'a- 
mour ineftimable  que  Dieu  nous  porte, quand 
il  ha  le  foinde  noitre  nourriture  caduque. Et 
de  faicl,  (\  nous  n'ellions  prrfuadez  que  Dieu 
prefide  fur  noftre  boire  &  fur  noftre  manger, 
cornent  hiy  pourrions-nou<  demander  noftre 
pain  ordinaire  comme  nous  faifonsPcela  ne  fe 
feroit  point  en foy  ni  en  certitude  .  Et  puis 
nous  frauonsce  qui  eft  dit  par  S.Paul  en  l'au- 
tre palTàge.quoy  q  les  fidèles  fac et, qu'ils  doy 
uent  rapporter  le  tout  au  no  de  Dieu, voire  en 

V  prenant  leur  repos  &  leur  nourriture. Q^iand 

doc  nous  entendes  que  Dieu  fe  foucie  de  no- 
ftre boire  &  de  noftre mangerjen  cela  voyons 
nous  qu'il  fe  déclare  vrayement  Père  en  tout 
ii  par  tout,&  qu'il  veut  que  nous  en  ayons  tef 
mo:gnagc&  approbation  iufques  .i  nos  corps 
qui  ne  font  maintenât  que  poures  charognes. 
Or  cependant  notés  que  Dieu  veut  qu'on  vfe 
de  (t^  créatures  qu'il  a  appliquées  à  noftre  vfa 
ce  tellemét  que  nous  le  puifuôs  fèruir,  &  que 
nous  fçachiôsquele  pain  &  le  vin  &  lesauties 
viandes  font  côme  dédiées  à  cela, que  nous  en 
foyôs  fouftenus, voire  pour  n'eftre  point  inu- 
tiles en  ce  mode. Dieu  nous  pourroit  bien  fiib- 
ftanter  fins  boire  ne  fans  mâger,c5mede  tairt 

"3  ih  eft  (  fcrit,  que  l'home  ne  vit  pas  du  pain.  Et 
cornent  le  pain  nous  pourroit-il  viuifier.veu  q 
c'eft  vne  créature  mortefNous  ne  pourras  pas 
tirer  du  pain  ce  qui  n'y  eil  pas. Or  eft-il  ainfi 
qu'il  n'y  a  nulle  vie. H  fautdonc  que  nous  co- 
gnoifsiôs  que  c'eA  Pieu  qui  nous  nourrit  par 


fivertu  fccrete.  Mais  cepend.'îr,puis  qu'il  luy  - 
a  pieu  d'ordonner  les  viandes  accla,cognoil- 
fons  qu'il  veut  qu'eftans  en  ce  mode  nous  loy 
ons  fubftantez.PourquoyïCar  ce  font  autant 
d'aides  pour  nous  y  entretenir.  L'hômc  donc 
doit  auoir  foinde  fa  fanté  tant  qu'il  luy  eft 
pofsible  ,  &  non  tant  pour  le  regard  de  foy,ij 
p:ur  s'appliquer  à  bicn-faire:  félon  que  Dieu 
l'aura  appelé  à  quelque  eftat,  qu'il  peni'e  qu'il 
ne  doit  pas  tftre  inutile. Or  mainten,n  f\  nouï 
rapportés  le  boire  (Me  manger  à  cefte  fin-la, 
ce  fera  vne  grîde  vertu  à  nous,  céme  aufvi  l'in 
tcntiondc  S.Paul  eft  tclle.Or  il  nous  faut  re- 
ucniraupropos  qui  a  cfte  touehé,c'eft  eue  les 
homes  qu.ld  ils  cui'-.-nt  quelquefois  bicn-fai- 
re,&  fcruirà  Dieu.nf^  fcrét  pointaflez  prudes, 
&  qu'il  y  aura  de  la  faute:  comme  Timothee 
en  men.u  vne  vie  auftere,  iufques  à  ne  goufter 
point  (le  v  n,auoit  quelque  regard  bé  &  fainft 
Caril  n'fftoit  pas  menéd'vne  telle  fiiperfti- 
tion  qu'il  cuidaft  que  ce  fuft  œuure  méritoire, 
où  qu'il  vouluft  eftablir  vn  feruice  de  Dieu,  à 
ne  point  boire  de  vin:  il  n'auoit  pas  vne  telle 
extrémité.  Mais  cepcndat  lî  eft-ce  qu'il  auoit 
vne  trop  grande  rigueur  en  fon  viure  ,  quand 
il  ne  vouloir  point  goufter  de  vin. Voila  donc 
Timothee  qui  tend  àvnbon  but,,^"  ne  deman- 
de fine  à  fe  retirer  de  toutes  délices  de  ce  mon 
de,  afin  qu'il  puilTè  mieux  vacquer  à  fon  offi- 
ce,&qu'il  médite  d'vn  efprit  plus  alaigre  la  vie' 
ctlefte,  <?v  qu'il  y  conduife  les  autres ,  &  qu'il 
fou  comme  vn  miroir  de  fobrieté  &abftinen- 
ce:toutcela  eft  bon  &  louable  en  Timothee. 
Mais  cependant, puis  qu'il  a  efté  redargué  par 
l'Efprit  de  Dieu  ,  cognoifTons  qu'il  y  a  eu  de 
la  faute  en  luy,  &:  que  ce  nous  foit  vn  exeple, 
que  quand  nous  aurons  le  meilleur  defir  qu'il 
eft  poAible,  encores  noiis  pourrons  décliner, 
en  lorte  qu'il  y  aura  du  vice,d'autât  que  nous 
ne  garderons  point  la  médiocrité.  Car  fi  ctla. 
fe  trouue  en  T'.mothee  ,  qui  eûoit  vn  homme 
fi  excellent  ci-mme  nous  auons  vcu,  que  fera- 
ce  de  nous .'  Ainfi  apprenons  de  nous  humilir r 
deuant  D:eu,&  quand  nous  aurons  vn  bon  zè- 
le,&  que  ce  que  nous  ferons, de  fi<y  fera  digne- 
d'eftre  prifc,qi!''  ncores  nous  ne  laifsions  pa^ 
de  pr:«r  Dieu  qu'il  nous  guide, &  qu'il  nous  re- 
tieneen  tel  moyen, que  nous  ne  pa  fions  point 
nos  bornes, que  nous  ne  foyés  point  exceisifs 
neçànc  l,à.  Voila  donc  en  fommece  que  nous 
auons  à  retenir  qu,-.nt  à  cepafTage.Etaii  refte, 
que  touffeurs  cela  foitobferué  en  noftre  mé- 
moire, que  nous  vfions  des  biens  que  Dieu, 
nous  diftribue  afinde  le  pcuucirfcruir.  Car 
il  ne  faut  point  que  nous  beiruions  &  man- 
gion'>  feulement  pour  viure, &  tant  moins  que 
nous  viuions  pour  boire  &  pour  mangeii- 
mais  il  faut  qu'en  beuuantiS;  en  mangeant 
nous  aduifions  pourquoy  c'tft  que  Dieu  nous 
a  mi'  au  monde, S:  pourquoy  il  nous  y  retient:: 
c'eft  qu'vn  chacun  de  nous  s'applique  à  l'ho» 
norer  tant  qu*"il  luy  fera  pofsible, que  nous  fa- 
cions  aufsi  noftre  deuoir  de  feTuir  à  nos  pror- 

L.  ii> 


16S 


SERMON    XLV. 


chiins  comme  cliacun  y  eft  obligé  ,  car  il  y  a 
ce  lien  mutuel  de  charicé  qui  nous  aftrainc  k 
cela.  Voila  donc  ce  cjue  nous  auons  à  obfer- 
uer  en  noftre  vie.afin  <jue  puis  que  Dieu  nous 
a  créez  à  fon  image ,  &  qu'il  no'  a  tait  ce  bien 
que  nous  foyons  nourri»  à  fesdefpcns,  cepe« 
dant  nous  mettions  peine  à  le  fcruir  entant 
qu'en  nous  fera.Au  rcfte.nous  dcuons  bien  a- 
iioir  honte  quand  iouniellement  on  cric  con 
ire  noftre  intempérance ,  &  qu'on  n'en  peut 
venir  à  bout  ,  veu  qu'il  a  falu  que  Timothec 
fuftadmoneftéd'vneaufterité  trop  excefsi- 
ue.  Auiourd'huy  où  fe  trouueront  ceux  auf- 
quels  il  faille  due  que  leur  boire  ne  foit  plus 
d'eaiifCar  on  en  verra  la  plulpart  qui  ne  fcau 
ion:  p.iî  tenir  mefure  au  vin  ,  &  ne  leur  ara 
pas  allez  qu'il;  l'appetcrK,mais  qu'ils  i'enton 
nent  comme  des  goulïres.  Ou  voit  la  gour- 
Biandile  qui  ert  vn  vice  tant  commun  que  rien 
plus.  Et  de  fa!t,encores  qu'il  n'en  fuit  l"o;mé 
mot,  la  cliofedc  loy  eft  (i  vileine  &  li  brutale 
qu'on  en  deuroit  auoir  honte  •  Se  neantmoins 
on  voit  comme  les  hommes  font  endurcis  en 
ce  vice  d'intemperace,&  qu'on  ne  les  en  peut 
retirer.  Qtynd  donc  nous  voyons  qu'il  a  ta- 
lu  admontftcr  les  feruiteurs  de  D;cu  du  com 
mencement  de  l'Euangile,  à  ce  qu'ils  n'vial- 
fent  point  d'vne  telle  rigueur  fur  leurs  per- 
fonncs,&:  qu'ils  prinflent  plus  de  libertc:pu!S 
qu'il  les  a  talu  aduertir  de  cela  ,  Se  cependant 
que  nous  ne  puifsions  tenir  nulle  fobrieté  & 
modeftie  en  noftre  nourriture,  mais  que  la 
plufparts'aflopi£rent&  du  boire  &du  m.iger, 
quelle  condamnation  fera-ce  à  nous?Coinnie 
on  voit  que  ces  gourmas  font  là  du  tout  abru 
tis  ,  &  qu'on  n'en  peut  arracher  nul  feruice 
qui  foit:ils  font  hebetci  pour  leur  yurongne- 
rie:&  combien  qu'ils  fourrent  le  mufeau  plus 
auant  qu'il  ne  feroit  de  befoin,  (ï  voit-on  tou 
tesfois  qu'encores  le  matin  ils  n'ont  pas  cu- 
uc  le  vin  du  foir.on  voit  que  toujours  ils  font 
remplis  :  brief,il  n'y  a  ne  corps  ni  ame  qui  ne 
foit  fuffoqué  &  corrompu.  Qjund  nous  voy- 
ons cela,n'elt-ce  pas  pour  nous  faire  honte  fi 
nous  faifons  comparaifon  de  nous  aucc  ceux 
qui  ont  efté  admonefttz  de  ne  point  vferd'v 
ne  façon  de  viure  trop  eftroite  &  trop  aufte- 
re?  Or  maintenant  il  nous  faut  faire  vn  brief 
recueil  de  ce  paflàge.c'eft  qu'en  premier  lieu 
nouscognoifsionslabonté  paternelltde  no- 
ftre Dieu,  quand  il  luy  plaift  auoir  le  foin  de 
noftre  boite  &  de  noftre  mager.Et  outre  ce- 
la,qu'il  nous  déclare  qu'en  prenant  noftre  rc 
feâion  nous  pouuons  vfcr  des  bonnes  creatu 
rcs  qui  font  dedices  à  noftre  vfage.tellcmcnt 
qu'il  prelîdera  fur  noftre  boire  &  fur  noftre 
manger,&  que  nous  pourrons  nous  efiouir  en 
tint.  14  fa  prefencc  (  corne  il  en  eft  parle  en  la  Loy) 
j».  &  que  nous  pourrons  mcfmes  en  la  nourri- 

ture du  corps  tftrc  conterniez  ,  comme  en 
tout  &  par  tout  Dieu  nous  tient  pour  fes  cn- 
f.ins  ,  &  puis  qu'il  nous  gouuernc  en  ce  mon- 
de ,  que  nous  ne  doutions  point  quand  nous 


ferons  parucnus  enccft  héritage cclefteiqu'a- 
lors  en  perfeûion  nous  ne  le  trouuiôs  tel  que 
nous  le  pouuons  goufter  auiourd'huy.  Voila 
pour  vn  item. Et  pour  le  fécond, que  nous  ap- 
prenions de  tenir  vne  telle  mefure  en  noftre 
faconde  viure.qu'il  n'y  ait  point  vne  aufteri- 
té  trop  grande,car  Dieu  ne  veut  point  que  les 
hommes  fe  tuent  d'eux-mefmes.  Q_ue  donc 
nous  ne  trauailliôs  point  nos  corps ,  nous  ab- 
itenas  des  biens  que  Dieu  nous  élargit, &  que 
il  nous  a  mis  entre  les  mains.  Mais  cependant 
aufsi  que  nous  auifions  de  n'eftre  point  gour- 
m.ïs  pour  no*  creuer,&  pour  opprimer  nos  for 
ces  Se  vertus. PourquoyJLe  boire  &  le  manger 
doy Lient  ftruir  aux  hommes  pour  les  fubftan- 
ter:&  il  nous  en  prenons  vne  telle  charge  que 
cela  nous  opprime,  n'eft-ce  point  peruertir  1* 
ordre  de  Dieu?Et  cependant  notons  que  ce  u' 
eft  point  à  nous  qu'il  nous  fiut  viure, mais  que 
Dieu  no'  a  obligez  à  nos  prochains, qu'il  faut 
donc  qii'vn  chacun  s'employe  à  bien  faire ,  8c 
que  pour  ceftc  caufe  nous  beuuions  &  man- 
gions. Or  h  nous  fommes  ainfi  detteurs  à  nos 
prochains,  par  plus  forte  raifon  nous  le  fouî- 
mes à  Dieu  pourl'inuoquer.  Qujiiiddôc  nous 
fommes  chargez  de  viande  Se  de  bruuagc, tel- 
lement que  nos  efprits  font  amortis  ,  &  que 
nous  ne  pouuôs  pas  prier  Dieu  d'vne  afFedlion 
droite,  nous  anons  corrompu  les  biens  qu'il 
nous  faifoit.&proplianédu  tout  comme  facri 
leges.Etainli.que  nous  afpirions  toufiours  au 
but  qui  nouscft  piopofe.  Et  au  refte,  pratti- 
quons  ce  qui  elt  ait  en  l'autre  palÎ3gc,quc  no* 
fçachions  vferd'abôdance,  Se  auf  i  porter  p.i 
tiemment  la  pourcté.Si  Dieu  nous  donne  de- 
quoy  pour  eftre  nourris  à  noftre  aife,  Se  bien, 
que  nous  le  remercions  de  cela  :  &  cependant 
que  nous  en  vllôsauec  toute  fobrieté,  Se  pour 
garder  modeftie  entant  qu'il  nous  fera  pofsi- 
ble  :  que  là  où  Dieu  nous  fait  la  grâce  de  nous 
efiouir  ,  que  nous  ncconiiertirsions  point  l'a- 
bondance que  nous  auons  en  main, à  délices  & 
à  voluptcz  :  8c  qu'il  nous  fouuiene  encores  de 
ce  qui  eft  dit  en  l'autre  partage  au  n.des  Ro- 
mains, qu'il  ne  faut  pas  que  nous  ayôs  le  foin 
de  noftre  chair  pour  luy  l.ifcher  labride  ,  & 
hiy  donner  tous  fes  appétits,  car  il  n'y  auroit 
nulle  fin.Qu^cls  font  nos  appétits?  Ce  font  be 
ftes  fauuages  ,&  gouffres  infatiables .  Il  faut 
donc  que  nous  venions  à  ctfte  ncccfsité  d(jnt 
parle  fainft  Paul  en  ce  paflage-la.Et  au  refte, 
quand  nous  n'aurons  point  dcquoy  pour  eftre 
nourris  Se  fiibftantez,  que  nous  portions  cela 
patiemment,  fçachans  que  Dieu  pourra  bien 
conuertir  en  manne  tout  ce  qu'il  nous  donne, 
que  celuy  qui  mangera  des  racines,  fcia  aufii 
bien  fubftanté  par  la  bcnediftion  de  Dieu, que 
celuy  qui  aura  des  viandes  e.vquifes ,  &  cehiy 
qui  fe  voudra  oouiierner  par  meilleur  régime. 
Seulement  ne  lertons  point  Dieu  :  qiiand  il 
nous  donne  à  choilîr, que  nous  en  v(ïon*:niais 
que  nous  regardiôs  i  ce  qui  n(  us  eft  propie  & 
vtile  pour  noftre  fanté ,  &  que  nous  en  vlions 

fobrc- 


SVR   LA  I.  AtlMOTH. 


169 


fobrement.  Et  au  rcfte  ,  que  nous  regardions 
fur  coût  de  fuir  toutes  fuperftitions  :  comme 
Quand  nous  voyons  que  les  hommes  cuident 
feruir  Dieu  en  ne  beuuant  point  de  vin, en  ne 
inâgeant  point  de  chair,  &  que  fur  cela  ils  s'o 
pinia firent  pour  ne  point  fe  ranger  à  nulle  rai 
fon  ne  coni'eil.  Côme  nous  voyôs  qu'vn  Cliar 
treux,  quand  il  feroit  affeuré  de  racheter  fa 
vie  pour  auoir  mangé  vn  morceau  de  chair, il 
en  fera  fcrupuie,&  cuidera  taire  vn  grâdfacri 
fice  à  Dieu,  de  fe  tenir  au  poifloa,&:  luy  fem- 
ble  que  par  ce  moyen  il  acquiert  paradis.  Or 
voilades  martyrs  du  diable  qui  reiettent  les 
moyens  que  Dieu  leur  a  ordonnez  ,  qu'ils  fe 
tuent  manifeftement ,  &  fe  delpitent  contre 
tout  ordre  de  nature. Apprenons  doncd'vfer 
en  telle  forte  des  moyens  que  Dieu  a  ordon 
nez ,  que  nous  rapportions  le  tout  à  fa  droite 
fin.  SM  eft  queftion  de  chofcs  necelTaires  dcf 
quelles  on  ne  fe  puifle  exempter  fans  défail- 
lir à  noftre  deuoir,  alors  encores  que  les  ma- 
ladies nous  vienent,  encores  que  nous  voyô-s 
beaucoup  d'inconueniens,  lî  faut-il  pafler  ou 
ire.  Si  vn  homme  penfe,  Voila  que  Dieu  me 
commande.mais  en  ce  faifant  ie  me  greue,ce- 
la  m'cft  pénible  ,  &  ie  fens  que  cela  funnonte 
mes  forces  :  fi  l.i  deflus  il  fait  du  délicat ,  & 
qu'il  défaille  à  fa  vocation  ,  qu'il  repouflè  le 
ioug.il  ell  certain  que  ce  n'ell  plus  vfcr  de  me 
diocrité.  Et  ainli  donc  il  ne  faut  pojnt  efpar- 
gner  noftre  vie  ,  Se  tant  moins  noftre  fanté, 
quand  Dieu  nous  commande  quelque  chbfe, 
mais  en  ce  qui  eft  moyen,  &  que  Dieu  a  mi';  à 
noftre  liberté,  &  où  il  y  a  des  remèdes  qui 
nous  font  offerts  ,  8c  mcfmes  defquels  il  veut 
que  nous  vfions  ,  c'eft  vn  orgueil  diabolique 
de  nous  en  vouloir  abftenir.'Et  l'exemple  en 
eft  au  boire  &  au  manger,  &  en  cbofes  fembla 
blés  qui  nous  font  permifes  ,  &  à  noftre  liber 
té,  moyennant  que  nouv  nedefaillions  point 
en  noftre  office, mais  que  cela  no*  férue  pour 
nous  rendre  plus  propres  à  fcruirà  Dieu  8c  à 
nos  prochains.  Voila  donc  à  quoy  fc  rappor 
te  ce  confcilde  famd  Paul.  £c  là  defiiis  nous 
pouuons  iuger  que  ce  n'eft  point  vne  doÛri- 
neà  mefpriferque  cefte-ci:  car  il  eft  bon  que 
noftre  vie  foit  reigice  iufques  auK  chofcs  les 
plus  petites,  comme  eft  le  boire  &  le  manger, 
puis  qu'ainfî  eft  ,  nous  auons  befoin  que  Dieu 
nous  aduertiflc:&  en  cela  voyons-nous  que  lî 
nousl'efcoutons,  &  que  nous  foyons  prefts 
de  luy  obéir  en  tout  &  par  tout, qu'il  n'y  aura 
chofe  fï  petite  ne  lî  bafle  où  il  nenou<:goii- 
uerne,&  dont  il  ne  nous  monftre  lechemin.Il 
ne  faut  point  que  nous  alleouionr  que  Dieu 
nous  laifFc  là  .i  Pefgarce,  Se  que  nous  lomiiies 
en  perplexité  &  en  donte.  Il  eft  vray  pour 
nous  humilier  que  ûniiient  il  nous  laDÎcra  en 
doute,  qu'tftasangoiflVzen  noselprits  nous 
.ne  fçauron^  de  quel  coftc  nou'i  ton:  nerrinais 
tant  y  a  que  ii  nous  l'inuoquonsquc  nous  taf 
chions  de  nous  rendre  dociles  .  luy,  en  la  fin 
il  nousinôftrcra  ce  qui  eft  de  faire,  que  nous 


ne  fléchirons  iamais  ,  que  quand  nous  aurons 
à  marcher  vn  pas,  à  tourner  vn  doigt  delà 
main,  nous  ferons  afleureï  de  la  banne  volon 
té  de  noftre  Dieu.  Mais  ccpcdant  aufsi  regar 
dôs  bienàce  qui  eft  dit  par  S.Paul  au  14.de»- 
Romains ,  Qu'il  nous  faut  eftre  bien  fondez 
en  telle  certitude  ,  que  nous  entendions  qu» 
Dieu  approuue  noftre  vie. C'eft  peu  de  chofe, 
ce  femble,du  boire  8c  du  mager,  mais  nous  pe 
chons  en  mangeant,  fi  nous  ne  fommes  certi- 
fiez de  la  bonne  volonté  de  Dieu  ,  comme  S. 
Paul  le  déclare  là.Car  fous  ce  mot  de  Foy,il 
entend  la  certitude  qui  doit  eftreen  toiv  fide 
les,  que  Dieu  les  approuue  quand  ils  boiuent 
&  qu'ils  mangent ,  voire  s'ils  le  font  félon  là 
volonté.  Voila  donc  la  modeftic&  humilité 
que  nous  deuonsauoir.c'eft  de  n'attétcr  rien 
à  la  volee  ,  mais  que  noftre  vie  fe  compafle  i 
l'obeiflance  de  la  parolede  Dieu, côme  nous 
voyons  qu'il s'accômode  à  nous,&  qu'il  ^on- 
defcend  à  noftre  infirmité  iufques  là. qu'il  ne 
veut  point  nous  défaillir  en  rien  qui  foit.  Or 
quand  S.Paul  a  parlé  de  cela  ,  il  adioufte  vne 
autre  doftrine  qui  eft  plus  haute, c'eft  (>»?>« 
pecheX.  d'tiHCiinsfe  dtclarettt  ■>•  ■/î,?f  dit-il)  Q-  i 
la  haflr,  &  femble  qu'ils  courent  i  leur  iuge- 
ment.Mais  il  y  en  a(dit-il)qui  fuiuét.  car  ils 
cioupifleiit  pour  vn  temps,  &  font  cachez, ils 
font  cnfeuelis  iufques  à  ce  que  Dieu  le^  reue 
le  furie  tard, qu'on  diroit  qu  ilseftoyentabo 
lis  du  tout ,  que  Dieu  les  refueille  &  les  pu- 
blie .  Autant  en  eft-il  des  bonnes  ttuures  & 
Ae%  vertus  :  car  Dieu  les  fait  reluire  aucunef- 
fois  du  premier  iour,&  elles  fe  haftent  de  ve- 
nir en  auantrmaisqueiquesfois  elles  font  co- 
rne fous  le  pied  ,  qu'on  ne  les  apperçoit  pas. 
Or  tant  y  a  qu'en  la  fin  Dieu  les  fait  reluire. 
Voila  en  £omme  ce  que  fainû  Paul  traitte 
ici.  Maiv  cela  fcroit  obfcur  fi  en  premier  lieu 
nous  ne  fçauians  quel  a  efté  le  confeil  &  l'in- 
tention du  fainô  Efprit.Ici  il  n'y  a  doute  que 
Dieu  n'ait  voulu  remédiera  deux  tentations 
qui  nous  pourroyent  eftrc  bien  fafcheiifes. 
C'eft  vne  grande  tentation  quand  nous  voy- 
ons des  mefchans  contépteurs  de  Ditu  qui  le 
defpitent  en  toutes  Ibttes.qui  ne  font  qiie  tr* 
uailler  l'Eglife  ,  qui  ne  font  q  perucrtir  tout 
ordre,*:  que  nous  ne  f "çauons  par  où  commen 
cer  pour  chafTer  du  temple  de  Ditu  vne  tel- 
le ordure.  Nous  verrons  les  fcandalcv,&  ce- 
pendant nous  ne  les  pouuons  empefcher.Voi 
la  vn  combat  qui  eft  bien  dur,qiiâd  nous  fom 
mesalTcz  conualnciisqucceuv  qui  mcfprifent 
ainiî  Ditu,&.<c  defpitent  contre  fa  Parole, ne 
valent  ricn,&  toutcsfois  on  ne  fc.iura  pas  les 
retrar.clur  du  premier  iour  comme  il  feroit 
3.  ibiihaiter.  Ils  font  comme  dev  maladies  en 
vn  corps ,aufquclles  onn'ofc  toucher,  car  on 
craint  en  les  incitant  qu'on  efmeiiuc  vp autre 
mal  plusdangeieuv.  S'il  y  •<.  vn  cli.^cre.le  voi 
la  cncharné.onne  Içait  comme  Pafi.iiJlir.car 
il  y  a  lianger  qu'il  ne  ^'enu  niinc  tant  pln< ,  & 
qu'il  n'entre  encores  ded.îs  le  corp-.,&  cu'vne 

L.ui. 


270  s  E  R  M  O  N     X  L  V. 

inflammation  s'engendre.  Il  y  a  donc  beau 


coup  de  pecluz  qui  font  tehaux  hommes.Or 
cela  eft  caule  que  lesenfans  de  Dieu  font  faf 
chez  &  contriflez  ,voyans  qu'ils  n'ont  J  as 
Je  remède  en  main  pour  pouruoir  aux  vices. 
Tant  y  a  qu'il  nous  faut  tflre  patiéns  (  com- 
me l'ay  dit)quand  il  plaira  à  Dieu  de  nous  e- 
sercer  aiiilî  ;  car  il  y  a  beaucoup  de  maux  qui 
ne  fe  peuucnt  ni  fuir  ni  chalTer.Il  les  faut  doc 
•  endurer  uifqu'â  ce  que  le  téps  opportun  foit 
venu,&'  qu'ils  foyent  meurs ,  Si  que  l'apofte- 
me  creue.comrat  on  dit.  Voila  d'vn  cofté  l'in 
tétion  de  S.  Paul.ou  plulloitdulaindl  Efprit, 
quand  il  parle  des  péchez  qui  croupilTent.que 
Dieu  les  tiédra  cachez  pour  vn  temps,  qu'on 
ne  les  pourra  pas  luger  comme  il  feroit  à  re- 
quérir. Quarrt  aux  vertus, c'eft  aufsi  vne  cho 
fe  bien  fafcheufe  ,  quand  nous  voyons  qu'vn 
homme  en  bien  faifant:&  qui  s'acquitte  fidè- 
lement de  fon  deuoir,qui  chemine  en  telle  in 
tegrité  qu'il  n'y  a  que  redire,  que  toutesfois 
il  fcmblera  qu'il  ne  vaille  rien  ,  qu'on  conuer 
lira  tout  en  mal ,  qu'il  fera  fuiet  à  beaucoup 
decalônies  &decradions,  combien  qu'il  tace 
du  contraire,  &  qu'il  tafche  de  s'accômoder, 
qu'on  ne  ceffera  point  de  niefdire  de  hiy:  voi 
lavnechofe  bien  fafcheufe  quand  il  va  vne 
telle  ingratitude  au  mode, que  les  vertus  font 
conuerties  en  vices,  &q«e.  ceux  qui  font  le 
mieux, foit  les  plus  blafmez.Mai^JDieu  nous 
veut,  aulsi  bien  humilier  en  ceft  endroit.  Et 
pour  celle  caufe  il  eftdit,Q_ue  les  bônes  oeu- 
ures,cncores  qu'elles  ne  fc  ha-ftent  point  à  fe 
monftrer,  &qu'elles  ne  font  point  cognues 
pour  eftre  prifees  félon  qu'elles  le  méritent, 
que  toutesfois  Dieu  en  la  fin  lesdefcouurira, 
files  auront  leur  tefmoignage  :  ce  fera  fur  le 
tard  ,  mais  cependant  contentons-nous  que 
Dieu,nou^-  a  donc  vne  promcfTe  laquelle  s'ac 
complira.  Pu;s  que  nous  auons  l'intention  du 
lainrt  Efprit,  il  nou.  eft  maintenant  facile  de 
cognoiftre  où  fainft  Paul  nous  mené  .  il  y  a 
(dif-il){{es  fechex.  qiti  couvrent  n  leur  iii^emét. 
En  cela  nous  voyons  vne  prouidence  admira 
ble  de  Dieu  .  car  nous  fçauons  que  les  hom- 
mes cachent  leur  turpitude  tant  qu'il  leur  eft 
pofsible,  &  appliquent  là  tous  leurs  fcns:  que 
fi  vn  homme  a  vne  goutte  d'efprit  en  foy  ,  il 
le  tournera  ,i  ccftc  aftuce  de  cacher  fes  vices, 
afin  qu'il  ne  foit  point  en  opprobre. Les  hom 
mes  donc  auront  alfcz  de  fubtilité  pour  fouir 
1]'a.zi9.  des  caiiernes,  (comme  dit  le  Prophète  If.iic) 
tellement  qu'ils  vouJroycnt  tromper  Dieu, 
Si  on  voit  qu'ils  s'efforcent  de  ce  faire.  Qne 
on  regarde  cornent  c'eft  que  les  homes  font 
fubtilsjon  rrouuera  que  c'eft  .i  mal  faire,  voi- 
re en  telle  forte  qu'on  ne  trouue  pnint  à  mor 
dre  fur  eux.  Voila  donc  tout  l'artifice  qui  cft 
au  monde, c'eft  qu'v'n  chacun  veut  auoir  lîceii 
ce  _5<  libeité  de  m.U-'r,iiie,&  cepédant  le  cou- 
urir  tellcmét  que  1'.  s  homes  ne  puiflcnt  pnint 
les  accufcr:&  puis  que  mefmes  ils  fc  moauct 
»Je  Dieu,qui  tft  bien  pis.  Or  tant  y  a  que  cela 


fe  peut  bien  voir  à  l'oeil.  On  voftdoncCçôme 
i'ay  défia  dit  )que  Dieu  fe  déclare  iuge  quand 
les  hommes  fe  précipitent ,  qu'ils  s'aiiancenc 
d'eux-mefmes,  qu'il'  cherchent  leur  ruine  cô 
me  s'ils  fe  ittcoyent  là  à  l'abandon  :  on  voit 
cela.  Nous  en  verrons  d'aucuns  qui  fçauront 
affez  mentir  pour  fe  defguifer  ,  qu'ils  fe  con- 
treferont, comme  ils  font  pleins  de  trahifon 
&  malice:  ils  feront  fort  aigus  à  chercher'des 
fubterfuges ,  on  les  voit  tels  :  &  toutesfois  fî 
voit-on  i  l'oppofite  qu'ils  fe  desbordent  ,  & 
commettent  des  aftes  fivileins,  quejeur  tur- 
pitude fera  toute  notoire. Voyant  que  les  ho 
mes  fe  iettent  ainfi  comme  poures  yurôgnes, 
&  qui  n'ont  plus  de  fens  pour  fe  retenir  ,  que 
ils  s'expofent  à  ignominie  d'eux-mefiiies(c5 
me  S.  Paul  en  parle  au  premier  des  Rom.)en 
cela  ne  cngnoift-on  pas  vn  ingénient  manife 
fte  de  Dicii?il  cft  bien  certain.  Et  c'eft  aufsi  à 
ce  propos  que  fainft  Pau!  en  parle, qu'il  mon: 
ftre  qu'il  feroit  impofsible  que  les  homes  fe 
deshonoraflent  de  leur  bon  gié, qu'ils  fe  mif 
fent  ainfi  en  opprobre  &en  ignominie  à  to', 
que  Dieu  ne  les  euftmis  en  fens  reprouué, 
car  c'eft  contre  nature. Nous  auons  défia  dé- 
claré ,  &  la  chofe  fe  cognoiftaufsi  par  expe- 
rience,que  c'eft  là  où  les  hommes  appliquent 
toutes  leurs  forces,  quand  ils  ont  offenfé,  de  - 
chercher  quelque  menfopge ,  quelque  cou- 
leur &■  quelque  fard  pour  couurir  leur  turpi- 
iude,c&:  font  fort  fubtils  à  cela.Cepédant  tou 
tesfois  ils  fe  mettét  hors  des  gons.ils  fe  def- 
couurent  en  forte  que  chacun  voit  leur  vile- 
nie. Quand  donc  les  hommes  courent  ainfi 
à  leur  deshonneur, &  qu'ils  n'ont  plus  de  hon 
te  ,  n'eft-ce  pas  figne  que  Dieu  leur  a  creué 
les  yeux  ,  &  qu'il  les  a  liurez  entre  les  mains 
de  .Satan  qui  les  précipite  en  telle  forte?  Tou 
tes  fois  &  quantes  donc  que  nous  voyons  les 
mefchans  s'addonner  à  m.il,  voire  Se  en  telle 
licence  que  le  monde  cognoift  leur  turpitu- 
de ,  regardons  plus  haut  ,  &  cognoiflons  que 
c'eft  vn  iufte  iugemét  dé  Dieu, lequel  les  pciuf 
fe  ainfi  en  telle  ruine. Voila  donc  ce  que  nous 
auons  à  obfcruer  en  ce  que  dit  S.Paul,Q«'i7  jr 
jii^ttiicun!  pechex  le  (quels  femantfeflcnt  a  la 
h.tJte,Sc  côme  auant  le  cotrp,&  courent  à  leur 
iugement.  Car  Dieu  ne  permet  pas  qu'on  fa- 
ce longue  inquifition  ,  que  ceux  qui  font  ainfi 
fiifisde  Satan,  d'eux-mefmes  courent  &s'a- 
uancent  en  leur  condïnation  :  non  pas  qu'i-k 
le cuident  faire,  c.ir  ils  voudroyent  bien  re- 
cullers'il  leur  eftoit  pof  ible:  mais  par  force 
Dieu  les  côtiaint, comme  fi  vn  iuge  tenoit  vn 
malfaiteur  à  la  torture  pour  hiy  faire  contel- 
fcr  ce  qui  eftoit  cadié  auparauant;  ainfi  Dieu 
a  vne  violence  forcée  pour  contraindre  les 
mefrhans  afin  qu'ils  fe  iettent  à  l'abandon, en 
forte  que  leur  vilenie  foit  cognue  de  tout  le 
ni5de,&:  ou'elle  foit  deteftablc.Or  quand  tel-, 
les  choi'et  aduicnentjnoftre  office  cft  d'y  met 
tre  rcnude  entant  qu'en  nous  Icra.  Car  c'tft 
aufsi  à  ce  propos  que  S.Paul  a  donné  ccftad- 

ueitiflcment 


SVR     LA    I.     A     TIMOTH. 


2-/1 


«ertiflement  à  Timothce  :  comme  s'ildilbit, 
que  ceux  qui  font  en  charge  publique,  Joyiict 
eftre  vigilans,&  qu'ils  ne  doyuent  point  taire 
des  borgnes:fi  Dieu  précipite  les  mefchans,& 
qu'il  les  amené  à  leur  ingénient ,  qu'il  ne  les 
faut  point  efpargner:  que  li  on  laiflè  des  vices 
impunis  quand  Us  feront  amenez  en  clarté,  c' 
eft  comme  fî  on  couppcit  la  main  de  Dieu ,  & 
qu'on  ne  voulull  pas  vfer  du  remède  qu'il  or- 
donne.Et  qu'ainli  foit,  Tay  delîa  dit  que  li  les 
mefchans  fe  haftent  pour  eftre  condamnez,  c' 
eft  Dieu  qui  les  ypoulïë.  Or  quand  ceux  qui 
font  conltituez  pour  maintenir  bon  ordre  & 
police  entre  les  hommes  ,  ne  t'ont  point  leur 
deuoir,&  qu'ils  ferment  les  yeux,&  que  ce  qui 
fera  tout  manifefte,  qu'ils  tout  feinblar.t  qu'il 
lair  eft  cache  &  incognu  ,  en  cela  n'vfent-ils 
point  d'vnelafcheté  trop  grade.-  Notons  bien 
donc  que  Ciinù  Paul  nous  a  ici  propofé  le  iu- 
gement  de  Dieu, afin  que  ceux  qui  ont  charge 
en  l'Eglife,  fçachent  que  toutes  fois  Se  quan- 
tes  qu'il  leur  viendra  en  notice  quelque  mal, 
ou  quelque  fcandale.qu'iline  Faut  point  qu'ils 
renfeueiiflcntjS:  qii'ils  foufFient  que  cela  s'ef 
coule:  car  il  faudra  eu  la  fin  qu'ils  en  refpon- 
dent,&  qu'ils  en  rendét  contedeuat  Dieu.  Ap 
prenons  donc  quand  noftre  Seigneur  met  les 
chofes  en  clarté,  que  c'cft  afin  qu'on  y  pour- 
uoye,c'cft  afin  que  l'Eglife  fou  purgée  :  c'ell 
afin  que  les  fautes  foycnt  corrigées  comme  il 
appartient,  &  que  le  mal  foit  repouffe,  &  que 
mefmeson  ne  le  laifTe  point  croiftre:  comme 
aufsi  i'Apollre  nous  admonefte  qu'il  faut  ar- 
racher les  mauuaifes  herbes  quand  on  peut,  & 
qu'il  ne  faut  point  attédre  qu'elles  ayent  creu 
par  trop  :  carce  feroit  pour  nous  creuer  les 
yeux  ,  &  il  ne  lera  plus  temps  d'y  remédier 
quand  les  corruptions  auront  par  trop  domi- 
né.Retenons  bien  donc  qu'il  taut  que  nous 
foyons  attentifs ,  toutes  fois  &■  quantes  que 
Dieu  amené  les  mefchans  à  leur  condamna- 
tion,on  les  doit  chafticr,  &:  non  point  loufFrir 
leur  mefchanceté  quand  elle  feiadefcouuer- 
te. Voila  pourvn  item. Mais  cependant  il  nous 
faut  noter  qu'ayans  fait  tout  dcuoir  ,  encores 
ne  laiflèronb-nous  point  d'auoir  beaucoup  de 
vices  entre  nous,voirc  des  vices  lecrets,  &  tel 
lement  fecrets  qu'on  les  apperceuera:  nous  fe 
rons  bien  contiaints  d'en  gémir,  mais  il  n'y  a 
point  de  côdamnation  prelle.Et  en-  cela  Dieu 
veut  elprouuer  noftre  patience.  Il  tcroit  bien 
que  nous  mènerions  vne  vie  angclique  entre 
nous.&qu'il  n'y  auroit  celuy  quinemonftraft 
le  droit  chemin  à  fes  prochain'^,  qu'il  n'y  au- 
roit  nulle  corruption,  nulle  hypucriiie  nief- 
mes.  Dieu  donc  pourroit  tellement  conduire 
fon  Eglife,  que  nous  aurions  vne  mélodie  ce- 
lelle  entre  nous,  que  nous  aurions  vne  conter 
mité  fi  belle  que  le  nom  de  Dieu  feroit  magni 
fié  par  tout  :  mais  il  li  y  pla  It  que  fon  Eglife 
foit  femblable  à  vneaiie,où  la  paille  (fiiiTef- 
lee  parmi  le  bon  grain, qu'elle  eft  fcuiblablc  à 
des  lets  ou  tou'.  poillons  s'afiemblcr.t  f.:  bons 


Se  mauuais.'qu'il  y  a  des  cbrruptiôs  &  des  fcan 
dales  beaucoup, que  les  bons  font  méfiez  par- 
mi les  mefchans,  que  les  vns  mènent  vie  j»io- 
fane  &desbordee,que  les  autres  font  des  hy- 
pocrites &  defloyaux:  Dieu  veut  que  ces  trou 
blés  foyent  entre  nous,  &  qu'il  y  ait  vn  eftat 
ainfi  confus  pour  efprouuer  noftre  patiécc,  & 
pour  nous  inciter  aie  requérir.  Car  combien 
no«s  feroit-il  difficile  de  marcher  ainfi  entre 
les  efpines,  n'cftoit  que  nous  fufsions  prefer- 
uez  de  luy  miraculeufement  ?  Et  ainfi  appre- 
nons que  s'il  y  règne  des  maux  entre  nous, que 
ils  foyent  comme  apoftemes  cachées ,  ainli 
qu'il  y  a  beaucoup  de  maux  qui  couuent  aui 
corps  humains,  lefquels  n'apparoiflcnt  point 
du  premier  c6up,&aufqucls  on  n'oferoit  poît 
donner  remède  fi  toft  qu'on  voudroitiainli  no 
ftre  Seigneur  veut  qu'au  corps  de  fon  Eglife 
il  y  ait  beaucoup  de  péchez  lefquels  ne  fedef 
couurent  point  du  premier  iour, voire  pour  e- 
ftre  corrigez.  Car  combien  qu'ils  foyent  au- 
cunement cognus  Se  manifeftes,  (î  ne  peut-on 
pa>  venir  à  bout  de  les  arracher, qu'il  faut  que 
nous  portions  cela  patiemment  :  que  quand 
nous  verronsvnmefchant,vn  contempteur  de 
Dieu, il  eft  vray  que  notrs  defirerons  qu'il  fuft 
exterminé  ,  &  il  feroit  aufsi  à  fouhaiter  qu'il 
fu.ft  ofté  du  milieu  de  nous,  &  que  l'Eglife  en 
fiift  purgée, toutesfois^i  ne  fçait-on  comment 
y  aborder:  &  Dieu  en  cela  d'vn  cofté  nous  pic 
que  &  nous  aiguillonne,  quand  nous  auons  de 
quoy  nous  fakheriSc  nous  tourmenter  .  Mais 
tant  y  a  qu'il  nous  faut  confoler  en  ce  que  dit 
famift  Paul,  que  c'eft  comme  vne  maladie  que 
vn  homme  fentiraen  foy,  ilappellelemede-i 
cin.mais  on  n'en  ofe  pas  approcher.  Et  pour- 
quoy?Le  mal, combien  qu'il  foitcognu  en  par 
tie,neantmoins  n'eft  pas  tcllemét  defcouuert, 
que  le  remède  s'y  puifle  donner  promptc- 
ment.  Et  plcuft  à  Dieu  que  l'expérience  n'en 
fuft  pas  telle, côme  il  feroit  à  fouhaiter  :  mais 
puis  qu'il  no'  faut  eftre  ainfi  exers^.cognoif 
ions  que  nous  ne  gagnergns  rien  à  nous  defpi 
ter  outre  mefure  II  eft  vray  que  nous  pourras 
bien  nous  en  fafcher,  &  le  deuons  aufsi,  pour 
gemir:niais  quoy  qu'il  en  foit,  bridons  nos  'e- 
fprits  en  patience,  &  ne  ibyons  pas  comme  d' 
aucuns  qui  voudroyent  rompre  l'anguille  au 
gcnouil ,  côme  on  dit,&  iont  picqutz  qu'td  ils 
voyent  que  du  premier  coup  on  ne  s'auance 
pas  pour  retrancher  le  mal .  Voue,  mais  nous 
fçauons  que  fi  on  vouloit  mettre  le  cautère  & 
le  tcu  à  toutes  les  playes  ,  que  fi  on  vouloit 
coupper  tous  les  membres  qui  feroyent  vlce- 
rtz,en  la  fin  vn  poure  corps  maleficié  que  de- 
uiédroit-il?Ainfi  en  eft-il  de  l'Eglife  de  Dieu. 
Apprenons  donc  de  nous  retenir,  que  nous  ne 
ayons  point  ccfte  haftiueté  trop  grande  :  car 
(comme  l'ay  dit~)  Dieu  nous  veut  humilier.cn 
cela.  Il  eft  vray  que  nous  ne  deucns  point  ce- 
pendant nous  flatter,  &:  qu'il  ne  tau:  pas  aulsi 
que  nous  tirions  ceci  .i  quelque  nonchalance, 
pour  dire,Ho,qu'y  fencs-nous;ll  faut  laifl'er 

L.iiii. 


ac  puuiuuii   n  luut  te  uuc  iioicrc  ûcigncur  mu  on  qch 

nous  met  en  auantrraais  quand  nous  aurons  v-  fait  en  put 

fc  d'vne  telle  diligenceiCognoilTons  qu'enco-  doyue  ÙC 

les  faut-il  qu'il  y  ait  des  maux  cachez  ,  &■  qui  nous  leftr 


,  ayi  S  E  R  M  O  N     X  L  V. 

croupir  le  mal  qu'on  ne  peut  guarir.  Talchôs  foyons  diffamez,  &  qu'on  detraâe  de  nous,  & 

de  pouruoir  à  tout  ce  que  noftre  Seigneur  qu'on  dtflourneàmal  toucceque  nous  auons 

V-  fait  en  pure  coni'ciéce.combien  que  cela  nous 
Tclier ,  toutesfois  fi  taut-il  encores 
qu'il  y  ait  des  maux  cachez  ,  &:  qui  nous  ieitraindre,&  prier  Dieu  qu'il  nous  face 
croupiirentjvoire  &  dont  nous  fentironsgran  lagracede  nous  tenir  paifiblememà  foy ,  & 
de  aigreur,  &  toutesfois  nous  n'y  pourras  pas  qu'il  nous  fuffîfe  d'cftre  approuuez  en  fa  pre 
donner  guarifon  .  Cependant  nous  auons  à  fence,  combien  que  le  monde  nous  elhmemef 
nous  confoler.quand  il  eu  dit  que  neantmoins  cbans,&  qu'il  y  ait  vne  telle  ingratitude,  que 
Us  pecheKfuytient,  c'eft  à  dire  quand  vn  hom-  pour  tout  falaire  nous  foyons  diffamez  quand 
me  aura  bienjmachiné  &  tracaflc  çà  &  là,  qu'il  nous  aurons  tafché  de  feruir  à  chacun.  Que 
fera  tout  esbaiiy  que  le  péché  eft  après  fes  ta-  fur  cela  nous  attendions  ^u'il  plaife  à  Dieu 
Ions,  &  qu'il  ne  l'a  point  abandonné  de  loin,  de  faire  reluiie  noftre  innocence,&  de  la  met 
Ceci  eft  exprimé  afin  q  nous  ne  foyons  point  tre  en  auant  aux  hommes .  £t  au  refte,  fi  nos 
eftonnez  par  trop  fi  Dieu  ne  reuele  point  la  bonnes  ccuures  reluifent ,  que  nous  n'en  pre- 
turpitude  desmelchans  fitoftque  nous  vou-  nions  point  nulle  ambition  pour  eftre  prifea, 
drions.Sainû  Paul  donqnes  nous  monftre  que  mais  qu'il  nous  fuffife  d'auoir  glorifié  Dieu, 
nous  ne  perdons  pas  noftre  temps  quand  nous  &  d'auoir  édifié  nos  prochains  ,  &  leur  auoir 
aurons  longuement  attendu. Pourquoy?C3r  il  donné  bonne  doftrine  &  inftrufti»»  ,  comme 
femblera  que  les  vieux  péchez  foyent  effacez,  nous  voyons  que  notammét  fainô  Paul  a  vou 
<jue  iamais  on  n'en  doyue  parler  ,&  on  fera  lu  toucher  cela  .Neantmoins  fi  quelque  fois 
tout  esbahy  que  Dieu  les  viendra  refueiller,  lesmefchans  font  aiianecz  en  l'f  glife,  &que 
qu'ils  feront  ramentiis  quand  on  n'y  penfera  ceux  quidoyuent  porter  lapaiole  de  Dieu, 
plus. Si  donc  nous  auons  patience,&  que  nous  foyent  des  diables, &  qui  ne  demandent  finon 
demeurions  quois  8e  paifibles ,  nous  cognoi-  à  pcruertir  tout  bien  :  fi  nous  voyons  de  tels 
ftronsen  lafinquecequi  eft  ici  efcrit.eft  ve-  fcandales, attendons  que  Dieu  befongne.fça- 
ritable,  c'eft  que  les  péchez  combien  qu'ils  n'  chans  qu'il  y  mettra  la  raain.côbien  que  pour 
apparoiffent  point  toufiours  ,&  que  ceux  qui  vn  temps  il  nous  efprcuue  &  nous  humilie. 
les  ont  commis,  foyent  tellement  fupportez,  Voila  comme  il  nous  faut  prattiquer  ce  palla- 
lu'il  femble  que  iamais  il  n'en  doyue  eftre  ge  de  faincl  Paul, Si  quelque  fois  les  bons  font 
ait  mention  ne  memoire.que  Dieu raonftrera  reculiez  ,&  qu'ils  foyent  comme  opprimez, 
tju'iln'a  rienmisenoubli.Etcelaeft  dit  pour  qu'il  femble  que  tout  le  monde  ait  confpiré 
laconfolationdes  fidèles  :  mais aufsi  que  lei  contr'eux,  &  bien,  que  nous  cognoif  ions  ce 
mocqueurs  de  Dieu  penfent  à  cefte  menace,&  qui  eft  ici  dit,  qu'il  n'aduiendra  pas  toufiours 
qu'ils  cognoinent  qu'ils  n'auront  rien  gagné  que  les  bonnes  œuurcs  foyent  en  clartc,&que 
quand  pour  vn  temps  ils  feront  demeurez  im-  elles  foyent  cognues,  mcfraes  qu'on  les  foui- 
punis  ,  mefmes  qu'ils  fe  feront  glorifiez  en  lera  au  pied ,  mais  tant  y  a  qu'en  Li  fin  on  les 
leurs  iniquitez,  qu'il  leur  femblera.  Et  qu'eft-  pourra  difcerner  .  Remettons-nous  donques 
ce  que  nous  peuuent  faire  les  hommes?£t  mef  en  la  main  &  en  la  prouidencede  DieH:&  puis 
mes  ils  oferontdefpiterDieu.pource  qu'il  les  qu'il  gouuerne  fon  Eglifc,&  qu'il  a  promis  de 
aura  efpargr.ez  longue  efpace  de  temps. Mais  prefiocr  au  milieu,  que  nous  ne  doutions  pas 
qiloy  qu'il  en  foit.ceci  fera  accompli  en  la  fin,  qu'il  n'amené  à  bonne  ifllie  tous  les  troubles 
c'eft  que  leurs  pechezJes  fuyuront  mefmes, c'  &fcandales  delquels  il  aura  voulu  efprouucr 
eft  à  dire,  combien  que  Dieu  les  ait  là  lailTez  noftre  patience  pour  vn  coup, 
comme  .T  l'abandon  ,  que  toutesfois  ils  n'ont  OR  nous-nous  profterneronsdeuant  la. 
pas  laifle  de  traîner  toufiours  leurs  cordeau.T,  face  de  nollrc  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
&  leurs  vieux  péchez  viendront  en  mémoire,  nos  fautes,  le  prians  qn^il  nous  les  face  mieujt 
comme  auf.i  il  eft  dit  au  Pfeaume.Ainfi  ce  paf  fentir  que  nous  n'aués  point  fait,  voire  Se  que 
fage  doit  feruir  tant  de  menace  pour  effrayer  nous  en  foyons  tellement  touchez,  que  nous 
les  mefcb-in?  &  contempteurs  de  Dieu,  corn-  retournions  à  hiy,  qui  eft  le  feul  médecin  qui 
mcde  côfolation  pour  adoucir  la  triftefle  qui  nous  peut  donner  guarifon ,  afin  qu'il  purge 
pourroit  eftre  aux  fidèles, afin  qu'ils  ne  fe  faf-  nos  confciences    de  toutes  mauuaifes   affe- 
chent  point  par  tropde  veoir  que  lesmefchas  aions,&  qu'il  nous  reforme  tellement  à  fa iu- 
font  medez  parmi  les  bons ,  &  qu'on  ne  peut  fticc ,  que  nous  ne  demandions  finon  k  nous 
pas  purger  l'Eglifedu  tout  d'vne  telle  infe-  ranger  félon  fes  fainûs  commandemens .  Et 
ftion  &  ordure  comme  on  voudroit  bien  .  Au-  cependant  qu'il  nous  fiipporte  en  nos  mfirmi 
tant  en  eft-il  des  vertus,  comme  nous  dirons  tcz,  iiifques  à  ce  qu'il  nous  en  ait  du  tout  def- 
en  vn  mot ,  d'autant  que  le  temps  ne  porte  pouillez  pour  nous  transfigurer  pleinement 
point  qu'on  en  traitte  d'auant.içe.  Si  donc,  en  Ton  image  .  Ainfi  nous  dirons  tous ,  Diea 
quelquefois  il  aduicut  qu'en  bien  faifant  nous  tout-puiflàns.Peie  cclefte,&c. 

PREMIER 


t 


s  V  R    L  A   I.    A    T  I  M  O  T  H.  275 

.  P  R  E  M  lE  R     S  E  R  M  O  N     S  V  R     LE 

SIXIEME    CHAPITRE. 

I  Tousjerfs  qui  font f)us  le  ioug, qu'ils  eîliment  leurs  ntdiîires  di 
gnes  de  tout  honneur ,  afin  que  le  nom  de  Dieu  O'fa  doShine  ne/oit  hla- 
Jphemee. 

i.  Ef  ceux  qui  ont  maiîlres  fidèles ,  quils  ne  les  tnefprifent point, 
fource  qù  ds  font  freresmais  pluîiojl  quils  les  feruent  pource  qu'ils 
font  fidèles  0*  aime  z^c^^ns  part  icipans  du  bénéfice.  Enfeigneces  cho 
JèSfO'lesadmonefle. 


Ous  auons  veu  ee  matin  cô- 
I  me  on  doit  procéder  en  l'E 
glife  de  Dieu  fur  la  corre- 
^  Sien  des  vices ,  c'eft  qu'on 
V;  iuge  de  ce  qui  fera  cognu  & 
approuué.  Car  Dieu  (  com- 
me nous  auons  déclaré  ) 
nous  veut  humilier  en  ceJt  endroit,  quand  les 
chofes  nevienent  point  du  premier  coup  en 
cognoilHince,  qu^il  nous  faut  languir  voyans 
le  mal,  &  n'y  pouuans  donner  ordre  quand 
'  nous  voudrions.  Vray  eft  que  nous  deuons  e- 
llre  vigilâsàfaire  ce  qui  eften  nous:mais  tant 
y  a  qu'il  faut  aufsi  eftre  patiens  s'il  neplaift 
■  pas  à  Dieu  de  nous  donner  moyen  de  purger 
toutes  les  infections  qui  font  au  milieu  de 
nous.Ainfi  le  iugement  des'vices  ne  fera  point 
égal,  mais  on  verra  ce  que  Dieu  nous  met  en 
main  :  car  ce  n'eit  point  à  nous  d'occuper  fon 
lieu.il  fe  referue  de  cognoiftre  tout:de  noftre 
'cofté  nous  voyôs  ce  qu'il  nous  môftre,  &  non 
plus:&  ceux  qui  font  trop  haftifs  pour  cognoi 
ftre  cela,  font  iniure  à  Dieu,  en  ce  qu'ils  veu- 
lent entreprendre  plus  qu'il  ne  leur  eft  per- 
mis ne  licite.  Et  en  cela  voit-on  que  les  vices 
fccrets  &  les  vices  notoires  ne  doyuent  point 
paiïer  par  vnc  règle  .  Or  ci  deflus  fainû  Paul 
difoit  que  tant  s'en  faut  qu'on  doyue  efpar- 
gnerceux  qui  portent  la  parole  de  Dieu,  que 
pluftofls'ils  ont  failli,  ils  doyuent  eftre  en  e- 
ïemple.qu'onles  doitredarguerdeuant  tous, 
afin  que  chacun  s'y  miré ,  &  qu'on  en  ait  plus 
grand'  crainte.  Car(comme  nouîs  voyons  ici) 
cela  ne  peut  eftre  entendu  que  des  vices  qui 
font  manifeftes:  quand  vn  homme  en  fera  con 
uaincu,on  ledoit  redarguer  :  mais  fi  Dieu  ca- 
che /â  turpittjJe, attendons  en  patience, 'e  mal 
n'eft  pas  encores  meuri .  Et  c'eft  vne  chofe 
bien  digne  d'eftre  obferuee .  Car  il  y  en  a  qui 
voudroyent.fi  vn  fcandale  a  e  fté  commis, que 
Padmonition  s'en  feift  en  cachette, &  en  l'au- 
reille,  (  comme  on  dit)  &  qu'il  n'y  euft  point 
aufsi  de  carreûion  qui  tou'rn.ift  en  exemple. 
Or  telles  gens  ne  fçauent  quelle  procédure 
.  Dieu  a  ordonnée  en  fon  Eglife.  Car  ce  qui  tft 
dit  que  nous  deuons  admonefter  ceux  qui  ont 
ïiiiUi^otaniment  il  eft  exprimé,Si  ie  voy  moa 


frère  en  faute,  &  que  i'en  foye  tefmoin ,  ie  le 
doy  en  priué  réduire  ,  s'il  eft  en  moy  .  Mais 
quand  vn  fcandale  fera  cognu  de  tous,  &  que 
l'Eglife  en  fera  troublée ,  fuffira-il  d'vne  ad- 
monition particulière?  Cela  feroit  pour  tout 
peruertir.  Car  iî  ie  comence  pour  le  premier, 
il  faudra  qu'il  y  en  ait  mille  ou  plus  qui  facéc 
le  femblable.  Et  ira-on  à  la  procefsion  après 
ctluy  qui  aura  commis  vne  faute  publique  & 
notoire  ?  Nous  voyons  donc  qu'il  n'y  aitroic 
nul  propos. Et  ainfi  notés  bien  ce  qui  eft  con- 
tenu en  ce  paflage de  fainû  Paul:  c'eft  afça- 
uoir,lî  les  péchez  vienent  en  clarté,  qu'on  les 
corrige,  afin  que  !e  fcadale  foit  aboli,&  qu'on 
nedifepas,  Celuy-laena  bien  autant  fait,  & 
n'a  pas  efté  corrigé.  Car  fi  on  ne  punit  point 
ceux  qui  ont  failli  ,  il  eft  certain  que  cela  eft 
comme  vne  licence  que  les  autres  prendront  à 
mal,&  fè  desborderont  tant  plus.  Il  faut  donc 
que  nous  obfeniions  cefte  règle  q  nous  auons 
défia  touchee.Mais  cependant  fi  les  vices  fane 
là  retenus  tellement  qu'on  n'en  puifle  iuger 
iufqu'à  tant  que  Dieu  y  mette  ordre  ,  foyons 
patiens.  En  femme, voyans  ce  que  Dieu  nous 
met  entïe  mains, contentons-nous  de  faire  no 
ftre  office,&  cepédant  gemiflons  s'il  faut  en-, 
durer  des  chofes  mauuaifcs,  d'autant  que  le  rd 
meden'eftpas  encores  appareillé. Voila  donc 
en  fomme  ce  que  nous  auôs  à  retenir.Or  main 
tenant  fainft  Paul  adioufte  vne  autre  admbni 
tion,  Que  les  ferfs  (  qui  font  comme  efclaues) 
oheijjent  à  leurs  maiftres'zvohe  combien  qu'ils 
foyent  incrédules ,  afin  que  la  parole  de  Dieu 
'  n'en  foit  point  blafmeç, comme  fi  elle  abolif- 
foit  tout  ordre  A;  police  entre  les  hommes  .Si 
les  maiftres  fontfideles,  tant  plu-;  (  dit-il)  les 
ferfs  doyuent-iK  eftre  enclins  &  affeftiônez  à 
leur  obéir.  Carpuis  que  Dieu  lésa  c5ioints& 
vnis  en  l'cfperance  de  falut,  ils  doyuènts'ad- 
donncr  d'vn  couiage  tant  plus  prompt  à  faire 
leur  deiioir.  VoilaCdit  fâinft  Paul)  les  chofes 
qui  font  àenfeigner.  Comme  s'il  difo't  que  ce 
qui  concerne  d'amener  les  hommes  à  bo'e  & 
faTcte  vie,&  de  les  tenir  en  la  crainte  de  Dieur 
&  de  s'ac  uitter  auf  i  de  leur  deuoir  mutueli,. 
doit  eftre  toufiours  en  la  bouche  de  ceux  qui 
anoncent  TEuanglle  ,  &  qui  font  coir.n-.ii  de 

■M.!. 


i74 


SERMON    XLVl. 


Dieu  pour  P.iftcurs.  En  i'ommcil  Jeclare  que 
il  ne  tant  point  que  nous  pail'sions  les  aurtri- 
Ics  de  vaincs  (peculations  ni  penftes.mais  que 
nous  tafdiions  d'editîcr.  Se  que  nous  mcccions 
en  auant  la  dottiinequi  ell  vtile.Or  ici  en  pre 
miet  lieu,  notôs  que  l'cftat  des  inaiilrcs  &  des 
{f  ruiteurt  n'eftoit  pav  tel  pour  ce  teinps-la 
côme  ilelV  aHiourd'huy:  car  on  n'auoit  point 
de  ftruiteursàlo.igc  qui  hilFcnt  en  liberté  de 
partir,mais  iU  cftoyét  cfclaues,  comme  on  en 
\{e  cncores  en  d'aucuns  pays,  que  depuis  que 
vn  homme  eftoit  acheté, c''eftoit  pourcflre  à 
vie  S:  à  mort  en  fiiiection, qu'on  en  pouuoit  v- 
feraiiec  grande  aftrii5lion  Si  rigiieiir;ce  qui  ne 
le  peut  point  taire  en  l'humanité  que  nous 
gardons  entre  nous. Or  il  eft  viay  que  nous  a- 
uons  à  louer  Dieu  de  ce  qu'il  a  ofté  vne  telle 
el'pece  de  leruitude  qui  clloit  tort  cruelle. 
Mais  tant  y  a  que  cependant  il  nous  tant  bien 
obfciuer,  que  s'il  a  talii  que  ces  poures  efcla- 
ues,  qyi  citoyent  tenus  lous  vn  ioug  tant  c- 
ltroit:voire  quali  comme  s'ils  euflcnt  eltédes 
bœufs  ou  des  aines ,  leruilllnt  patiemment  à 
leurs  maiftres,&:d'v ne  atïcdion  frâche  &droi 
te, par  plus  forte  railon  ceux  qui  auiourd'huy 
font  fuiets  &  en  condition  meilleure  Se  plus 
douce,  n'auront  nulle  e.rcufe  quand  ils  feront 
reuefches,  &ne  voudront  plier  le  col  pour  fe 
rendre  obeilTàns.  Voila  donc  comme  nousa- 
uôs  àprattiquerceftedoûrinedefainft  Paul, 
c'eft  qu'en  gênerai  il  admonefte  tous  ceux  qui 
font  en  fuiettion.d'obeir  à  leurs  fuperieurs,& 
de  s'acquitter  de  leur  deuoir,&  de  ne  faire 
point  cela  par  contrainte  ou  par  necefsité  for 
cee,ni3is  d'vn  franc  courage.Mais  afin  q  nous 
foyons  tant  plus  addonnez  à  nous  rendre  fu- 
iets quand  il  plaift  ainfi  à  Dieu.rcgardons  à  ce 
qui  a  efté  dit.  Faifons  comparaifon  de  nous  a- 
uec  ceux  qui  du  temps  de  fainft  Paul  ont  efté 
efclaues,qu'on  les  traittoitlî  rudement  quec' 
cftoit  pitié  ,  &  toutesfois  Dieu  ne  les  a  point 
exemptei  d'vn  tel  ioug. Puis  qu'ainfi  eft,quâd 
auiourd'huy  nous  ferons  fi  délicats  que  nous 
ne  pourrons  fouffrir  vne  fuiettion  moyenne, 
que  nous  ferés  des  rebelles,  ne  voila  point  v- 
ne  ingratitude  trop  grande,  &  qui  n'eft  point 
fupportable  en  façgn  que  ce  foit?Nous  voyôs 
donc  enfommequandilplaiftà  Dieu  de  nous 
afluiettir.que  là  dtflus  il  veut  que  nous  ayons 
Tn  cœur  paifîble.benin  &  ployable,&que  nous 
ne  demandions  finon  de  faire  ce  qu'il  aura  re- 
quis de  nous .  Mais  d'autant  que  les  hommes 
prefument  volontiers  de  leur  dignité,  &leur 
fcmble  qu'il  n'y  a  celuy  qiii  ne  foit  digne  d'a- 
uoir  prééminence  pardcflus  fes compagnons, 
&  n'y  arien  plus  contraire  inoftre  nature  que 
de  nous  abbaifler,pour  ccftc  caufe  fainift  Paul, 
afin  de  coupper  broche  à  telles  obicilions, 
dit,  J-e s  ftrft  qui  funt  fous  U  io»».En  cela  il  li- 
gnifie que  quand  vn  homme  eft  fuitt.il  nedoit 
pas  fpeculer  en  foy  s'il  eft  de  plus  giâd  tfprit 
que  celuy  qui  domine  par  delTus  Itiy,  ou  s'il  a 
des  vertus  plu»  cxccllentes.ous'il  eft  de  meiJ- 


kiir  parcntage.ou  s'il  a  quelque  condition  et» 
foy  pourquoy  pluftoft  il  deuft  prelîder  que  d' 
cftre  efl  feiuitude  :  il  ne  faut  point  que  toutes 
ces  chofes-la  nous  vienenten  la  fantafie:com 
meaufsien  l'Epiftre  aux  Romains  il  donne 
vn  aduertilTement  fcmblable,  là  où  il, ne  parle  RoOT.rjU 
point  des  ferfs  ,mais  il  parle  en  gênerai  de 
tous.difant  qu'il  nous  faut  eftre  fuiets.&obeir 
aux  fuperioritez  :  Dieu  a  ordonné  les  policet 
duinonde(dit-il)  &  veut  qu'on  ait  les  Princes 
5:  les  Magiftrats  en  reuerence.  Or  là  deffus  il 
adioufte,  Ceux  qui  font  tleuez  en  haut  &  en 
dignité  dominent:comme  s'il  difoit.que  ce  n* 
eft  pas  à  nous  de  faire  enquefte  àqueldroift 
&  .i  quel  titre  vn  Prince  domine,  Se  s'il  y  a  ver 
tu  en  luy  pourquoy  il  doyue  eftre  honoré,  Si 
s'il  a  cela  de  iuftc  luccefsion  5:  héritage:  com 
me  nous  auons  nos  elprits  qui  nous  chatouil- 
lent toufiours,  Si  mefmes  en  ceft  endroit,  car 
chacun  voudroit  pluftoft  dominer  que  feruir. 
Il  nous  lera  doncaJe  d'entrcrcn  telles  que- 
ftions  :  mais  fainft  Paul  notamment  dit  qu'il 
nous  faut  contenter  de  cognoiftre  qiie  il  »r 
Prince  domine.il  n'a  point  cette  puilîànccquç 
elle  ne  luy  ait  efté  donnée  de  Dieu.S'il  y  a  vii 
Magiftrat,  combien  que  parambition  ou  par 
niauuaife  piattique  il  loic  là  parucnu.combien 
qu'il  s'y  foit  mis  par  violence  ,  toutesfois  iuf- 
ques  à  ce  que  Dieu  le  dégrade ,  il  faut  qu'vB 
chacun  luy  obeifle,  (Si;  qu'on  plie  le  col.  C'cft 
donquesce  quieft  auAi  entendu  en  cepallà> 
ge,dirant,Cf«.ï  qui  font  [nus  U  lou^  .  Car  Dieu 
fçait  bien  pourquoy  il  no'  a  abbaiirez,5c  pour 
quoy  il  a  eleué  les  autres  .  Vray  ett  que  bien 
fouuent  vn  homme  qui  meriteroit  bien  d'eftrei 
en  quelque  grande  principauté ,  fera  vn  petit 
compagnon  mefpriï'é  de  chacun, à  grand'  pei- 
ne pourra-il  'gagner  fa  vie  fimplcment  :  mai» 
tant  y  a  qu'il  faut  qu'il  regarde  à  l'ordre  de 
Dieu, car  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  Dieul' 
aainii  mis  bas. Il  eleue  beaucoup  de  gens, voi- 
re pour  Icsmettrejen  ruine  &  contulîon  :  a- 
pres  qu'ils  fe  feront  bien  auancez,  il  faut  en 
la  fin  qu'il  les  abyfme  :  &  cependant  s'il  luy 
plaiftde  tenir  les  fiens  en  bride  courte  ,  c'eft 
pour  leur  profit  &  lalut'.  Car  côbien  que  nous 
ayons  de  grandes  vertus ,  fi  ne  veut-il  point 
toutesfois  que  nous  prcfumions  par  trop  coin 
me  s'il  y  auoit  quelque  haute  dignité  en  nous: 
pluftoft  il  veut  anéantir  tout  ce  qui  nous  peut 
enfler,afin  que  nous  auifions  de  ne  point  paf- 
fernos  limites,  mais  que  nous  foyons  comme 


petis  enfans  (  ainlî  que  Uauid  en  parle  )  qui  •' 
font  priucz  de  la  mammelle,qui  ne  fçauét  que  ^' 
c'eft  de  s'cleuer,  ne  fe  faire  valoir  ,  qu'il  faut 
que  nous  foyons  accépartz  à  cela.  Amfidonc 
paifons  ce  mot  de  fainft  Paul.quad  il  dit,  Q«r 
fi  nous  fommes  fous  le  ioug,  il  f.tut  nue  nous  fi  r- 
uiotts  à  ceux  qui  dominent  far  Je/Jus  nous.  Voi- 
rc,&  cepédant  qu'vn  chacun  regarde, Ce  n'cft 
point  à  moy  de  m'elire,  ce  n'cftpoint  à  moy 
de  me  colloqiiw  en  tel  degré  ni  en  tel  licgcil 
faut  que  l'y  foyeappclédc  Dieu. Or  puis  qu'il 

fc 


p/'.JJt. 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH. 


i7< 


fc  veutreriiirdemoy  en  tel  cflat.ciue  i'.iille 
mon  cliemiri,&  qucic  foye  pailiblc,  ne  palVant 
point  mes  bornes,n'attetant  rien, Je  peur  que 
Dieu  ne  me  fteciiphe  en  ma  folle  témérité. 
Carcen'e/tpointà  no'd'vfiirperccftc  autho 
rité,  mais  c'ell  à  Dieu  de  nous  temlre  la  main, 
&  qu'il  diitribueJî  chacun  la  condition  en  la- 
quelle il  veut  qu'ô  foit.Si  cefte  doibrine  eftoit 
bien  imprimée  en  nous,  il  ne  faudroit  point 
longue  raifon  pour  nous  donterrmais  d'autant 
qu'vn  chicimafpire  en  haut,&:ne  pëfons  point 
que  c'eft  à  Dieu  de  nous  donner  des  ailes, que 
c'elt  à  luy.aulsi  de  nous  dreflcr  le  lîege  auquel 
il  veut  que  nous  foyôs.ou  bien  de  nous  aiUoir 
simplement  à  teri.e:lî,di-ie, nous  coçnoiùions 
cela, nous  ne  lerions  plus  iî  fols  ne  ii  arrogans 
de  vouloir  monter  plus  haut  qu'il  ne  nous  ap- 
partient. D'autatplus  donc  nous  faut-il  bien 
noter  cefte  fîmilitude  de  long  ,  que  met  ici 
ùinâ  Paul,  afin  que^Jiacuniiit  cela  pour  rcfo 
lu  en  loy  ,  quand  nous  fommes  en  condition 
èafle  &  contemptible,  qnand  quelqu'vn  n'a  ni 
honneur  ne^ redit,  que  cela  luy  cft  comme  vn 
ioug  que  Dieu  luy  a  mis  fur  la  tei^e  ,  &  qu'il 
faut  qu'il  porte  cefte  fuiettioxi-la  ,  non  point 
«omnie  cft.ît  venue desliommes ,  mais  comme 
la  règle  que  Dieu  luy  impofe.  Or  venons  à  ce 
que  faind  Paul  adioufte ,  c'eft  qu'il  ne  fuffit 
point  que  les  ferfs  obciflent  à  leurs  maiftres 
comme  par  contrainte,  mais  qu'ils  les  doyuét 
•  eftimeriij;nesde  tout  honneur:  comme  aufsi 

en  l'autre  partage  il  dit,  Qu^ils  ne  doyucnt 
Ceî.J.ii  point fcruir  comme  à  l'œil,  po^r  côplaire  aux 
hônies,  mais  qu'ils  doyuent  rapporter  le  tout 
à  Dieu.  Il  eft  vray  que  c'eft  vnechofediffici- 
Jemiais  il  faut  batailler  contre  tout  orgueil  & 
piefomptiô  en  ceft  endroit, afin  que  nous  ren- 
iions à  Dieu  l'honneur  que  nous  Juy  deuons. 
Si  donc  vn  homjne  «ft  cialtten  quelque  di- 
gnité par  defllis  nous ,  quand  il  fera  mefchant 
ou  malo.ftru  ,  ou  qu'il  y  aura  des  vices  nota- 
bles, que  nous  aurons  trouué  pourquoy  il  ne 
foit  point  digne  d'eftre  Jà,  fi  eft-ce  qu'il  nous 
faut  porter  V  ne  telle  reuerence  à  l'ordre  Je 
Dieu, que  nous  l'eftimions  digne  de  tout  hon- 
neur,puis  que  Dieu  l'a  honoré.  Voila  doc  vn 
Jiommc  qui  fera  en  puiflànce:  s'il  a  cfté  confti 
tué  ou  p.irmefchantesprattiques,  ou  par  vio- 
lence.ou  par  autre  moyen  illicite:&cependât 
qiiecefeit  vn  côtempteiirdeDicu.ou  vi^  hy- 
pocrite,que  ce  foit  vn  homme  où  iJ  n'y  a  nul- 
le religion, que  ce  foit  vn  efceruelé,  ou  quexe 
foit  vne  pure  befte,  que  ce  foit  vn  home  non- 
chalant &  efféminé:  s'il  y  a  donc  beaucoup  de 
■telles  chofes  à  redire.fi  faut-il  cependant  que 
nous  foyons  retenus  de  cefte  confidcration, 
pour  dire,  Dieu  toutesrois  l'a  voulu  honorer^ 
&  il  fçait  pourquoy:  il  faut  doc  que  ■ic  me  tie- 
ne  ici  bridé  fous  la  police  de  Dieu.  Voila.di- 
ie,comme  nous  deuons  eftimer  dignes  de  tout 
tanneur  ceui  que  Dieu  eleue,  combien  qu'en 
leurs  perfonnes  bous  pourrons  allez  trouuer 
à  redire  potirquoy  ilt  deyuent  eftre  mefpri- 


fci. Brief.il  nous  faut  ici  defpiter  les  vices  qui 
fe  monftrent  jui  pcrtonnes,  afin  que  cela  ne 
derogue  en  rien  h  l'ordre  de  Dieu ,  &  ne  luy 
porte  nul  preiiidice.  Or  ce  que  le  di.n'cft  p^s 
pour  faire  que  les  vices  foycnt  nourris  ni  (i.p 
portez  .comme  on  ne  fedoit  p  s  dcfguifer 
quand  vnminiftre  de  la  parole  de  Dieu  ncfe 
gouucrncra  pas  en  telle  perfeftion  qu'il  doit: 
li  faut-il  cependant  veiller  defrus,&  que  ceux 
qui  font  en  fcandalcfoyent  racifï.Qjrand  auf 
fi  il  vauragens  enPeôat  deiufticequi  feront 
corrompus,  &  qui  defaudront  à  leur  office,  il 
faut  bien  qu'on  y  pouruoye  tant  qu'il  fera 
pofsible:  mais  cependant  ii  nous  faut-il  auoir 
cefte  confîderation,q*ie  chacun  en  fon  priué 
doit  obéir  à  ceux  que  Dieu  auraainfi  confti- 
tiiez  en  honneur:&  ne  doit-on  point  faire  ce- 
la par  contrainte,  mais  on  doit  porter  cefte  rc 
uertnce  à  Tordre  de  Dieu, l'honore  ceftuy-ci, 
voire  d'autant  qu''ila  pieu  à  Dien  l'exalter 
ainlî  en  Ivaut  :  il  n'cft  pas  digne  de  cel.T,  mais 
puis  qu'il  plaift  ainfi  à  Dieu,  voila  que  ie  re- 
garde,&  dequoy  ie  me  contente.  Or  cependât 
nous  auôs  à  recueillir  de  ce  padage,  que  Dieu 
ne  veut  point  auoir  vp  (eruice  forcé  de  nous, 
maisvolôiaireiiedimefmes  quand  il  fera  que- 
ilion  d'obéir  à  ceux  qui  nous  traittent  mal  & 
criiellemét. Comme  û  nous  eftions  fous  la  ty- 
rannie- de  gens  quine  dcmandaflent  qu'à  nous 
manger ,  toutesfois  fi  eft-ce  qu'encores  Dieu 
veut  là  auoir  vne  obeiflànce  de  ctcur.Et  pour 
qiioy?C*eflbien  raii'on  puis  qu'il  regarde  l'âf 
feftion  intérieure  du  cœur ,  qiie  tebluy  foit 
prefenté  comme  le  principal  feruicc.  Car  no' 
pourrons  employer  tous  nos  membr«s,&  fai- 
re tout  ce  qui  nous  fera  pofsible  penfans  fer- 
uir  à  Dieu,  que  rien  ne  luy  fera  ^^reable  fi  le 
caur  ne  maichedeuant .  Or  eft-il  ainfi  que  \a 
fiiiettion  que  rcndct  les  feruiteurs  àceux  qui 
ontauthoritcpardeflîis  eux  ,  ne  fc  rapports 
point  aux  hommcs.mais  à  Dieu,  comme  defî.t 
nous auons déclaré'.  Mais  cependant, fi  Dieu 
veut  que  nous  foyons  fuiets  à  ceux  qui  domi- 
nât mal  par  defliis  notis,&  qui  abufentde  leur 
pnifl.incr.Srnous  tourmentent  iniuftcnKnt,  & 
nous  font  tort  &  iniure,  ie  vous  prie  ,  qiund  il 
fera  queftion  qu'vn  enfant  obcifle  à  fon  père 
q  le  traitera  himi.iincnient,<]u'vnefemmc  foit 
finette  à  foiT  m.iri  lequel  Juy  fera  doux,  &  s'ac 
quittera  irmtiii Ht ;ncpt  de  (ondeuoir,linousy 
allons  par  forer, que  fcra-cc?  Autant  eneft-il 
de  tout  le  rffte.  Comme  qjjandfaindPaiil  par    * 
le  des  aumofnes,il  dit-  que  Dieu  aime  ceux  qui  '  * 
donnent  d'vn  cœuralaigre  ,&•  qu'il  ne  veut 
point  qu'on  y  aille  comme  par  necefsité.  Ainfi 
que'nous  en  voyons  qui  aucunement  pourrôc 
donncr.mais  il  leur  femble  qu'on  Icurarrache 
les.boyajixïlu  ventre  :  faintt  Paul  dit  que  tout 
cela  ne  vaut  rien  ,  &■  ne  fera  iamais  accepté  de 
Dieu.Et.pourquoyîCar  il  veut  auoir  des  ebl* 
lions  volontaitesk  C'f ft  ce  que  nous  luôs  à  te 
tenir  furce  paflàge.là  où  fainft  Paul  veut  que 
notis  eftimions  dignes  d'honneur  ceux  qut 

M.ii. 


x-^G 


S  E  H  M  ON     X  L  V  I. 


ne  le  méritent  p»s ,  comme  il  parle  ici  des  in-  le  col.Pourquoy?On  dira  que  l'Euangile  mef 
crédules. Et  pourquoy  les  eftimera-on  dignes  vne  confuiîon  par  tout ,  qu'elle  faitmaiftres 
d'honneur  ,  veu  qu'ils  n'ont  point  de  vertu  en  ceux  qui  deuroyent  eftre  valet^:&  à  l'oppofi- 
euïquiraeritecelarC'cit  qu'il  no"  faut  regar-  te. Et  puis, qu'elle  donne  licence  de  peruertir 
der  plus  loin,afpuoir  qut;Dieu  le?  a  ainli  ele-  tout  droit!  &  raifon  .   Voila  donc  comme  le 
uez. Car  l'homme  quelquefois  aura  dignité  en  nom  de  Dieu  fera  blafphemé  :  car  encores  que 
fay.mais  ceux-ci  Tont  d'ailleurs, d'autant  que  celle  occafion  n'y  foit  pas  ,  &  que  les  fidèles 
noftreSeigneur(commeray  dit)mefmes  pour  tjnt  qu'il  leur  e(l  pofsible  tafchentde  fe  te- 
îcurcontulion  les  voudra  ainli  eleuer  pour  vn  nir  tout  coyemét,&  obéir  à  leurs  ftiperieurs, 
temps,  &  nous  voudra  humilier  denoltre  co-  Ç\  cll-ce  qu'on  ne  laifle  pas  démettre  fus  eux 
fie.  Or  combien  que  celle  condition  fott  dure  vne  telle  calomnie.  Nous  voyons  comme  les 
&  fafcheufe.fi  nous  y  faut-il  ranger  pourtant,  mefchans  auiourd'huy  mettent  l'Euangile  en 
Et  au  refte,  que  ce  que  l'ay  touché  n'agueres,  honte  &  en  opprobre  à  ce  titre  :  or  iî  eft-ce 
nousconfole,  c'eftafçauoir  que  (1  Dieu  veut  toutesfois  qu'il  n'y  a  nulle  raifon.  Q_ue  fe- 
que'nous  foyons  mefpnfez  félon  le  monde.il  roit-ce  donc  fi  ies  ferfs  fe  vouloyent  rebec- 
hiit  cela  pour  noftie  bien:  car  il  fçait  qu'il  ne  quer  ,  &qu'vn  chacun  s 'eleuall,  &qu'on  ne 
nou'.  fcroir  point  profitable d'eftre  plus  auan-  peull  porter  la  fiiiet ion,  mefines  que  tout  or- 
ccz  ,  comme  nouv  voyons  que  beaucoup  fout  dre  public  full  aboli  i  qu'il  n'y  eull  plus  ne 
précipitez  de  leur  grâdeur,&que  cela  eltcaufe  loix  ne  flatuts  :  où  feroit-ce  aller?  nediroit- 
de  les  abyfmer.  Dieu  dôc  prefcrue  quelq  fois  on  pas  que  la  doiflrine  que  no'  portos, eft  cail 
les  iîcns ,  quand  il  les  fait  ainfi  ramper  quafi  à  fe  de  rauir  aux  homes  ce  qui  leur  appartient, 
terre,  au  lieu  de  les  mettre  en  haute  parade, &  S:  de  mettre  confufion  aux  grans  &  aux  pe- 
qu'ils  foyent  regardez  de  loin.  Et  voila  pour-  tis?  Sainft  Paul  donques  veut  que  nous  ayôs 
quoy  aufsi  S.  Paul  dit  au  feptieme  de  la  pre-  ce  regard-la  :  car  combien  que  notamment  il 
miereaux  Corinthies.Si  tu  es  appelé  en  ferui-  s'adrelleaux  ferfs, &  qu'il  touche  ici  vneefpe 
ce, ne  t'en  chaille. Corne  s'il  difoit,Mes  amis,  ce  de  fcandalc  qui  pouuoit  eflre  alors  ,  nous 
il  n'ell  point quellion  de  nous  tourméterquâd  auons  toutesfois  à  recueillir  vne  admonition 
iious  voyons  les  melclians  fur  nos  telles,  qu'il  générale  de  ce  propos  .c'tftque  fi  par  nos  vi 
nous  les  faut  porter  fur  nos  efpaules ,  &  que  ces  l'Euangile  éll  en  opprobre, la  fiute  en  eft 
cependant  ils  nous  tienent  le  pied  fur  lagor-  double  ,  &que  nous  ferons  plus  giiefiiement 
ge, qu'ils  nous  foulent, qu'ils  nous  oppriment:  coulpables.il  eft  vray  qu'encoi  es  que  le  nom 
car  Dieu  côuertira  ce  mal-la  enbié. Ainfi  fouf  de  Dieu  ne  foit  point  blafnié,&  que  celuy  qui 
frons  que  Dieu  nous  humilie  ainfi, &  ne  foyôs  aura  failli ,  foit  confus  en  fa  honte  ,  tant  y  a 
point  contriftezcôme  fi  cela  nous  eftoit  dom-  qu'il  ne  làifle  point  défia  d'auoir  allez  grief- 
rnageable:  car  noftre  Seigneur  le  pourra  bien  ue  condamnation  fur  foy.  Mais  quand  nous 
conuertirànoftrefalut.  Voila  dôc  en  quoy  il  ouurons  la  bouche  aux  mefchans,  qu'ils  peii- 
faut  que  les  fidèles  fe  confolent,  c'eft  qu'ils  ne  uent  detrafter  de  l'Euangile  ,  &  s'en  peuuent 
ont  nul  dommage  ,  encores  qu'ils  negouuer-  moquer,  pour  le  moins  qu'ils  prenent  celle  li 
nent  point  en  ce  m5de,&:qu'ils  ne  foyét  point  cence-la ,  &  en  ont  quelque  couleur  deu.tt  les 
cleuez  en  dignité,  mais  pluftoft  qu'ils  fedoy-  hommes  ,  n'eft-ce  point  vne  vengeance  plus 
uét  glorifier  en  leur  petitelïè,d'autâtqueDieu  horrible  pour  nous?  Car  outre  la  faute  que 
les  fait  compagnes  des  Anges  en  fon  Royau-  nous  auons  cômife  enuers  Dieu,  outre  ce  que 
meeternel,qu'illesaadoptezpour  fesenfans,  nous  auons  violé  fa  Loy  &  fa  iullice  ,  noiisa- 
&  pour  eftre  membres  de  noftre  Seigneur  le-  uôs  armé  les  mefchans  cotre  luy.  Nouspriôs 
fus  Chrift:cela  ne  nous  doit-il  point  eftre  af-  de  bouche  que  fon  Nom  foit  fandifié  ,  &  ce- 
feifle  feray  melprifé  félon  le  monde, ie  n'au-  pendant  à  caufe  de  nos  ofFenfes  nous  l'expo- 
ray  ni  eftat  ni  office  ,  on  femocquedemoy:  fons  en  moquerie, la doftrine  en  laquelle  no* 
ouy  ,  mais  cependant  mon  Dieu  m'a  choifl  auons  tout  noftre  falut,  fera  mife  en  rang  ,  & 
pour  eftre  fon  heritier.voire  pour  eftre  parti-  fur  le  bureau  ,  que  les  ennemis  diront  qu'elle 
cipant  de  fa  gloire:ie  fuis  membre  de  fon  Fils  eft  caufe  de  tout  mal.  Quand  cela  viendra  de 
vnique,  les  Anges  me  recognoiflent  &auouét  nous,&:  qu'il  nous  pourra  eftre  imputé.ie  vous 
de  leur  rang  comme  ayans  fraternité  auec  prie, ferons-nous  excuCibles?  Or  fi  ceci  a  deu 
meyiil  faut  donc  que  ie  porte  patiemment  le  eftre  obfcrué  du  temps  de  fainiîl  Paul,auiour- 
mefpris  du  monde  ,  que  ie  n'appcte  pas  \<i\  de  d'huy  le  befoin  en  eft  autant  ou  plus.  Car  les 
eftre  glorifié.  Que  donc  ccfte  confideràtion  ■  aduerfaires  de  l'Euagile  font  le  guet,  &  nous 
nous  viene  en  mémoire  ,  toutes  fois  &  quan-  efpient,&  s'il  y  a  quelque  apparence  de  mor- 
tes que  nous  voyons  que  félon  le  mondé  nous  dre  fur  nous,- voila  l'Euangile  qiii  eft  defchi- 
ne  fommes  pas  tant  auancez    comme    nous  ré  par  pieç*es,ils  abbayent  comme  chiens  enrà 
voudrions. Et  au  refte,  fainft  Paul  nous  mon-  gez'àl'encontre  .encores  qu'iK  n'y  puilTcnt 
ilre  que  le  nom  de  Dieu  fera  blafphemé  quad  mordrernous  voyons  cela,  &•  cependant  nous 
iious  ne  pourrons  nous  afluicttir  de  noftre  ne  lailTons  pas  toutesfois  de  nous  ietter  à 
bon  gré,&  que  nous  ne  ferons  point  pai-  l'abandon:  Voila  pourqtioy  i'ay  dit  que  ccfte 
fibies  pour  porter  le  ioiig  qui  nous  eft  mis  fur  admonition  de  fain^l  Paul  eftaufsi  opportune 

que 


SVRLAI.    ATIMOTH  a; 

fraternité  ne  doit  poît  faire  enorgueillir  ceux 

qui  font  conteinptibles  félon  le  monde,&  <jui 
/",_- J«  .a»:.  »A«.   i^  .i';l^  «'i.I  l^«. ; -II  _- 


qaeiamais  ,d'autaatque  nous  fomraes  regar- 
aez,&  que  tous  ceux  qui  côtredifent  à  TEuan- 
gile.ne  demandent  linon  d'en  mefdire  quand 
il  voyent  que  nous  chemines  mal.Maisquoy? 
.Qjiieft-ce  qui  fegaide  de  nial-faireafin  de 
•clorre  la  bouche  aux  mefchans  ,  &  d'honorer 
la  bonne  doftrine  ,  afin  qu'elle  demeure  en  fa 
dignité  &  réputation?  A  qui  eft-ce  qu'il  chaille 
beaucoup  de  cela  î  Mais  plultoft  il  femble  que 
nous  ayons  côfpiré  auec  les  ennemis  de  Dieu, 
&  que  nous  ne  cerchions  qu'occafîonde  les 
faire  parler. Nous  fçauôs  bien  que  quand  nous 
ferons  comme  nous  auôs  accouftumé,par  tout 
les  fcandales  voleront ,  &  qu'on  dira  ,  Voire, 
quelle  reformation  eft-ce  que  ceux-ci  preten 
dent?  Ils  veulent  eftre  plus  fages  que  tout  le 
raonde:&  cependant  où  eft-ce  qu'on  voit  que 
ils  foyent  meilleurs  ?  Où  eft-ce  qu'ils  fe  font 
amendez?On  oit  ces  propos-la  qui  fe  tienent: 
&  quand  nous  n'en  aurions  les  aureilles  ba- 
tue$,fi  eft-ce  que  nous  n'en  fommes  pas  igno- 
rans;&  toutesfois  nous  empirôs  tous  les  iours, 
&femble  qu'vn  chacun  de  nous  le  baigne  quâd 
H  oit  ainfi  blafphemer  le  nom  de  Dieu. Or  tat 
y  a  que  tousles  opprobres  qu'auront  defgor- 
gez  les  incrédules  nous  feront  vendus  bien 
cher  quand  le  mal  fera  procédé  de  nous, &  que 
ils  auront  prins  couuerture  (îir  nos  vices.  Voi 
la  pourquoy  il  nous  faut  bien  retenir  cefte  ad- 
monition que  met  iA  fainû  Paul,  Q_iie  la  do- 
ûrine  de  Dieu  ne  fait  point  blafphemee,  dit- 
il.  Or  venons  maintenant  À  ce  qu'il  adioufte, 
(UiefiUsmaiflresftntfîAeleSyUuc  les  faut  point 
mtffrifer,d'aittant(]U''ils  font  frères,  maispluf- 
toft  qu'il  les  faut  eftimer,àcaufede  la  foy  que 
Dieu  leur  a  donnée  ,  qu'il  les  a  adoptez  com- 
me fes  enfans  ,  &  qu'il  les  a  faits  participans 
de  fes  graces,qu'il  ne  faut  point  que  cela  nous 
donne  occafion  de  les  vilipender, mais  pluftoft 
que  nous  deuons  prendre  courage  à  les  hono 
rertant  plus.  Yci  nous  voyons  en  premier 
lieu  l'ingratitude  des  hommes  :  car  s'ils  n'e- 
ftoyent  enclins  à  ce  mal  que  fainil  Paul  corri- 
ge ici,l'admoniti5  feroit  fuperflue.Ainiî  don- 
ques  notons  que  quand  nous  aurons  trouué 
«juelque  occafion  de  nous  eleuer  par  dclTus 
nos  prochains,  nous  tendrons  toiifiours  là,& 
ne  faut  point  que  nous  allions  à  l'efcole  pour 
apprendre  cefte  leçon:  car  chacun  en  feraaf- 
fez  grand  doâeur  pour  foy.  Or  il  y  a  vne  in- 
gratitude vileine  en  cela  ,  que  ie  verraydes 
grâces  de-Dieu  en  vn  homme, elles  feront  auf- 
fi  enmoyA'fur  celaiediray,Etqu'eft-il  plus 
querhoy?  n'eft-ce  point  le  plus  grand  hon- 
neur qu'il  puifle  auoirque  d'eftrc  enfant  de 
Dieu  ?&  cependant  puis  que  ie  fuis  du  nom- 
bre, ne  fuis-ie  pas  fon  frère?  Or  il  éft  dit  que 
celuy  qui  eftde  petite  côdition  quant  au  mon- 
de,fe  doit  glorifier  en  fahautelfcid'aut.int  oue 
Dieu  l'a  anobli ,  &  qu'il  l'a  choifi  ,ui  nombre 
de  fes  enfans.  Mais  par  cela  doit-il  mcfpiifLT 
ceux  que  Dieu  a  voulu  eleuer  par  dclfu'.  luy? 
Ainiî  donques  notons  bien  que  ce  titic  de 


fontde  petit  eftat.  Qu^ils  n'aillent  point  aile- 
guer,Ceftuy-la  eft  mon  frere:mais  cependant 
Dieuluy  a  aufsi  donné  vn  autre  parentage. 
Nous  fommes  frères,  &  cela  n'empefchera 
point  que  l'vn  ne  foit  maiftre,  &  l'autre  valet, 
que  l'vn  ne  foit  pere,&  l'autre  enfant, que  i'vn 
ne  foit  en  office  de  magiftat,&  l'autre  perfon- 
ne  priuee.  Ainlidonques  cognoiflons  noftre 
ingratitude  &  malice  en  ce  qu'vn  chacun  de 
nous  feroit  folicité  à  mefprifer  ceux  qui  doy- 
uent  dominer  par  deffus  luy  ,  fous  ombre  que 
noftre  Seigneur  nous  a  conioints  enfemble. 
Car  cefte  vnion  facree  qu'il  a  mife  entre  nous, 
ie  di  de  fraternité  ,  d'autant  que  nous  l'inuo- 
quonstous  d'vne  bouche  comme  noftre  Père, 
cela  n'empefche  pas  qu'il  n'y  en  ait  l'vn  in- 
fericur,&  l'autre  fuperieur ,  qu'il  faut  qu'en 
telle  condition  que  Dieu  nous  appelle  ,  nous 
demeurions  paifibles  ,  comme  ici  làinftPaul 
nous  le  monftre.Or  fi  ie  fuis  fuiet  à  vn  Prince 
incrédule  ,  voila  celuy  qui  fert  au  diable  qui  a 
domination  fur  moy  :  voila  vne  chofe  eftran- 
ge  du  premier  coup:mais  fi  faut-il  cognoiftre 
par  là, que  Dieu  me  veut  humilier,  cômcdcfîa 
nous  auons  dit.  .Si  maintenant  ie  fuis  foiwvn 
Prince  fidèle ,  &  qu'il  demande  que  Dieu  foit 
ferui  &  honoré, &  qu'il  fe  cognoilTe  eftre  frè- 
re de  tous  enfans  de  Dieu,afin  d'vfer  tellemèt 
du  giaiue  qu'il  ha  en  main,&  de  prefiderau  fie 
ge,que  cependant  il  férue  à  Dieu  &  à  fes  pro-« 
chains:quand  i'auray  vn  tel  aduantagc  ,  Dieu 
ne  m'oblige-il  pas  beaucoup  plus  à  m'acquit- 
ter  de  mon  deuoir?Et  fi  ie  ne  le  fay.ne  fuis-ie 
pas  ingrat  à  noftre  Dieu?  Ainfi  donques  non 
ïans  caufe  fainft  Paul  met  ceci  pour  déclarer 
que  ceux  qui  diront  que  leurs  fuperieurs  font 
leurs  frères  ,  n'ont  point  d'occafion  pour- 
tant de  les  mefprifer  ,  mais  pluftoft  d'au- 
tant que  la  foy  déclare  que  Dieu  lésa  con- 
ioints auec  nous ,  en  ce  qu'il  les  a  appelez  i 
l'elperance  de  vie ,  que  cela  nous  doit  tant 
plus  encourager  ,  qu'il  ne  faut  plus  que  nous 
trouuions  eltrange  de  leur  obéir.  Et  pour- 
quoy? Car  Dieu  reluit  en  eux,il  y  amis  fa  mar 
que,  &  les  a  tellement  approchez  de  luy, que 
outre  ce  que  nous  les  cognoiflons  nos  frères, 
puis  qu'il  nous  a  foumjs  à  leur  fcruice  ,  qu'il 
faut  que  nous  leur  obeifsions.  Ainfi  donqiiès 
notons  quand  Dieu  nous  fait  ce  bien  &•  priuî- 
legequexeux  qui  dominent  fur  nous, font  auf- 
fidu  rang  &  du  nombre  de  (es  enfans,  que  cela 
nous  doit  faire  tant  mieux  afluiettir,  &  que 
nous  ayons  vneaffeftion  droite  de  porterie 
ioug  qui  nous  eft  impofc  ,  voire  d'autant  que 
nous  voyons  les  marques  de  Dieu  en  ceux  aijf 
quels  nous  ferions  autrement  difficulté  d'o- 
béir.Mais  ceei  doit  eftre  eftendu  encores  plus 
loin,  c'tftafçaiioir  que  nous  deuon'  honorer 
tous  ceux  qui  font  bien  aimez  de  Dieu,  quand 
nous  aurons  cfté  mcfme  conioints  à  eux  cndi- 
ledlion  &  priuautt.Car  combien  que  nous  foy 

Nl.iii. 


ayS 


SERMON     XLVI. 


If!,.^. 


om  participans  d*ï«  mefrae  bien,&  d'vn  mef-  qiioy  ?  Car  ce  n'cft  point  aflei  que  nom  foy- 

iiic  heritagc,li  cft-ce  que  it  me  doy  foumcttre  ont  enfcignez  en  ce  que  nous  contcileron^  e- 

à  les  honorer  ,  cucores  que  ie  loy  e  égal  à  eut  ftre  bon, comme  de  bouche  nous  dirons  allez, 

en  ceft  endroit ,  d'autant  qu'ils  ne  demandent  Ceftedodiine  cil  bonne:  maisnouinelaifle- 

finon  queie  viene  à  Dieuaucccuxuutrcment  roiiî  pas-  de  touliours  retenir  nos  affedionî 

iieferoy-iepas  par  trop  délicat  &  intraitta-  maïuiaifei, ,  &  quand  noii';  aurons  honoré  de 

ble,fi  ie  ne  peux  loutiFrir  vue  telle  condition?  bouche  la  doûnne de  Dieu, nous  la  Foulleront 

Etainli  apprenons  en  l'omine  d'honorer  les  aupiedcn  toutenoftre  vie:  ceque  nous  fai- 

gracesde  Dieu  quand  elles  nous  lèront  miles  fons  quand  nous  y  fommes  rebelles.  Il  ne  fuf-. 

deuant  les  yeux:&  quand  nous  verres  vnhom  lira  point  donques  que  la  doftrine  nous  foit 

me  qui  aura  en  foy  quelque  ligne  de  craintede  vne  fois  propofee  ,  mais  il  faut  que  nous  foy» 

Dieu  &  de  foy.que  nous  le  prilions  tant  plus,  ons  picquez  &  exhortez,  Se  quecela  nous  foit 

que  nous  demandions  de  nourrir  toute  amitié  fouuent  réduit  en  mémoire,  afin  de  maintenir 

auec  luy,que  nous  le  fupportions  entant  qu'en  le  bien  que  Dieu  aura  mis  en  nous.   Voyant 

nous  fera  ,  que  nous  délirions  de  nous  accor-  donques  <ju'il  s'en  faut  beaucoup  que  les  hom 

dcr  auec  luy.  Et  qu'vn  chacun  regarde  à  ce  >ne$  ne  fe  rangent  en  telle  obeiflànce  qu'ils 

qui  nous  eft  ici  dit,  puis  que  Dieu  nous  a  ainli  doyucnt ,  tant  plus  les  miniltres  delaparole 

alFemblez,  que  nous  coonoifsionsquec'efta-  doyuent-ils  s'efforcer  vertucufement  à  redui- 

fin  qu'il  nous  face  tou<;  Tes  héritiers, que  nous  re  les  hommes  de  leurs  rebellions  ,  afin  qu'il* 

auons  vn  Eiprit  q«inoiis  gouuerne  ,  que  nofis  le  rendent  dociles  ,&  qu'en  toute  humilité  ilt 

auons  vne foy^que  nous  auôsvn  Rédempteur,  apprenent  de  s'alTuiettir  &à  Dieu&  à  ceux 

que  nous  auons  vn  Baptefme:  car  fous  ce  mot  aulquclsil  auradonnéauthorité.  Voila  don- 

de  fct«»/rfr,toiit  cela  eft  comprins. Quand  dôc  ques  àquoy  iaini't  Paul  a  tendu.quaBd  il  a  par 

nous  auons  cela,  que  nous  apprenions  d'eûi-  le  à  Timothee  d'exhorter  fongneufement.ft 

mer  les  grâces  de  Dieu  afin  qu'elles  nous  m-  par  cela  nous  deuons  eftre  adinonellez  de  bi« 

duifent  à  toute  humanité  ,  Se  que  nous  pratti-  reccuoir  les  exhortations  afin  que  nous  y  foy 

■  quions  cependant  la  le-^on  <^ue   fainft  Paul  ons  confermez  ,  &  qu'vn  chacun  en  fon  en- 

nous  monftre  en  l'autre  palTagej-c'eft  que  no'  droit  y  penfe  :  car  par  ce  moyen  noJtre  Sei- 

fommes  redcuables  les  vus  aux  autres  en  cha-  gncur  veut  efprouuer  noftre  obeiflànce  &  l'hô 

rite,  car  c'eftvn  lien  qui  nous  doit  bien  fulfi-  neur  que  nous  luy  deuon«rendre,quand  nous 

re.Et  retenons  quant  &  quantce  que  dit  faintt  ferons  ainfi  fuiets  aux  hommes  mortels, félon 

Paul  pour  conclu-lion, c'cft  gx-'o»  doit  tnfeigner  que  bon  luy  ftnible  de  nous  appeller  chacun 

ctstl>ofes,Sc  qu'il  ne  les  faut  pas  feulement  pro  en  fa  vocation. 

f  ofer  pour  vn  couj),mais  qu'il  y  en  ait  de  Ion-  OR  nous-nous  proftcrnerons  deuant  ia  fi- 
gues exhortations,&  tant  qu'il  fera  de  befoin.  cedenoftrebon  Dicu.leprians  qu'il  luy  plai- 
Et  par  cela  il  fignifie  que  la  dotlrine  n'aura  fc  nous  faire  fentir  nos  fautes  de  plus  en  plus: 
point  fon  ciFettcSc  ù  vertu, finon  qu'elle  nous  &-cependant  qu'il  nous  en  retire,  &  qu'il  nous 
cdiiîe  en  la  crainte  de  Dicu:comme  s'il  difoit,  donne  à  cognoillre  que  noftr-e  règne  n'eft 
il  eft  vray  qu'on  .pourroit  difputerplus  fubti  point  en  ce  monde  ,  &qu'aulvi  -ce  n'eft  point 
lement  d'autres  matières:  mais  cependant  re-  ici  qu'il  nous  le  faut  chercher ,  afin  que  nous 
gardons  à  ce  qui  nous  eft  vtile,&  à  ce  qui  nous  apprenions  de  porter  patiemment  beaucoup 
eft  propre  pour  nous  ran^er.commei'ay  défia  de  moleftes,po»retcz,&  mifcres  .iufquesà  ce 
dit.Car  on  ne  nous.pcut  donter,  tant  fommes  qu"'il  nous  en  ait  deliurez  Se  affrâchis  du  tout, 
huacains:  il  nous  eft  donques  befoin  d'eftre  re  Et  que  nous  fçachions  aufsi  qu'il  domine  ttl- 
(enus.  Et  pource  qu'vn  chacun  conçoit  cefte  lement  fur  tous  eftats, que  ce  luy  eft  vne  chofe 
liautefie.qu'il  y  aquelque  chofe  en  luy  qui  le  a^ reable,qu"vn  chacun  fuyue  fa  vocation, voi- 
pourroit  Mire  cleuer.noftre  Seigneur  au  con-  re  à  laquelle  il  fera  appelé.  Q_iie  donc  il  luy 
traire  nous  monftre  qu'il  nous  faut  rangera  plaife  nous  conduire  tellement  en  ce  monde 
cefte  modeftie.decneminer  fimplement  en  par  fon  lainû  Efprit,  que  combien  que  nous  y 
uoftre  vocation  .quelque balTeÂ:  contempti-  foyons  en  condition  balTe&  contemptible, 
ble  qu'elle  foit  félon  les  hommes.  •Q_iiâd  nous  nous  ne  larfsionspastoutesfoisd'efperer  que 
aurons  prattiqué  cefte  doftrine  ,  nous  aurons  il  nous  eleuera  en  vne  dignité  excellente ,  & 
beaucoilp  fait ,  non 'feulement  pour  vn  iour,  qu'il  fera  que  les  opprobres  que  nous  aurons 
mais  pour  toute  noftre  vie.  Ainfi  donques  ce  endurez  en  cefte  vie  mortelle,  nous  feront 
n'eft  point  fans  caufe  que  fainft  Paul  dit.Quç  conuertis  en  fon  royaume  en  gloire  d'iinmor- 
iltaut  quelesbons  minlftress'eftudientàinet  talité,   Quçnon  feulement  il  nous  face  celte 


ire  la  bonne  doârine  cnauant:&.puis  iLadiou 
lie,  Qitilf\t»t  infifltf  à  txhertativnt.  Et  pour- 


grace ,  mais  aufsià  tous  peuples  &  nations  de 
la  terre,  &c. 

SECOND 


s  V  R  L  A    I.    A  T  I M  O  T  H.  ^7» 

SECOND     SERMON     SVR     LE 

SIXIEME    CHAPITRE. 

3  Si  aucun  en  feigne  autrement ,  CT*  ne  confent  aux  faines  paroles 
de  nojlre  Seigneur  lefus  Chrijî,  O'àla  doBrine  ^ui  efl félon  la  crain- 
te de  Dieu, 

4  îceluy  efl  orgueilleux,ne  fçachat  rien,  mais  Unguiffant  entour 
queflions  O'  dehats  de  paroles, de/quelles  s  engendre  enuie,noiJêJniu' 
res,tnauuaiJèsfufpicions, 

5  Vaines  difputations  d'hommes  qui  font  corrompus  ^entende-' 
ment,0'fi"^P^^^Z  ^^  mérité, reputans  pieté  eflregain. 


Our  comprendre  Tadmoni 
lion  qui  cil  ici  dônee  par  S. 
Paul  à  Timothee  ,  &  pour 
l'appliquera  noftre  vl'age, 
il  nous  doit  fouucnir  en  pre 
mier  lieu  de  ce  q  a  eùé  craie 
ce  par  cideuanc  :  car  fainâ 
Paul  prefuppofe  qu'il  a  monftré  quelle  eft  la 
bonuedodrine  à  laquelle  il  nous  tauc  cenir. 
Or  nousauons  veu  qu'il  ineccoic  ce  grand  fe- 
crec  &  admirable  de  la  fuy  ,  en  ce  que  Dieu 
Dousa  enuoyé  fon  Fils  vnique,  &  s'eft  cômu- 
niquéànousen  la  perfonne  d'iceluy.  Q£and 
donques  nous  auons  lefus  Chrifl  ellanc  veAu 
de  noflre  chair  &  nacure ,  nous  ibinmes  par 
fon  moyen  conioincs  à  Dieu  le  Pere,&  en  luy 
auons  couce  perfeâion  de  bien.  Or  cepédanc 
il  nous  faut  aufsi  cognoiflre  les  verxus  de  no 
lire  Seigneur  lefui  Chrift:  car  combien  qu'il 
ait  fouffert  feloi^Tinfirmicé  de  ù  chair  vne 
pafsion  pleined'ignominie.cancy  a  que  Dieu 
l'a  exalté  en  gloire  :  &d'au(anc  que  les  grâ- 
ces du  fainft  Efprit  onc  cfté  defployees  en 
luy,uous  cognoiflons  que  la  gloire  donc  il  eft 
fait  mention  au  premier  chapicre  de  S.  lean , 
afin  que  nous  puifsions  nous  appuyer  du  tout 
fur  noftre  Seigneur  lelus  Chrill,  cognoiflans 
qu'il  nous  e(t 'donné  pour  fontaine  de  vie  & 
de  falut,  &  que  nous  foyôs  aufsi  incitez  à  luy 
.  faire  hônuge,  non  point  failement  pour  flé- 
chir le  genouildeuant  luy, mais  pour  nous  ad 
donner  à  fon  l'eruice,  &  luy  dédier  nos  corps 
&  nos  âmes  en  toute  pureté.  Or  fainft  Paul 
ayât  parlé  de  ce  haut  myfterc  lequel  nous  eft 
reuelé  par  TEuangile ,  a  auisi  déclaré  que  la 
doctrine  que  Dieu  veut  eftre  prefchee  en  fon 
Nom.n'ellpas  feuleniét  pourchatouillernos 
aureilles,niais  elle  eft  pour  nourrir  nos  aines; 
&  puis  qu'elle  nous  doit  apporter  bonne  in- 
ftruûion  &  vtile  pour  régler  noftre  vie.  Et 
mefmes  il  eft  notanunent  parlé  du  principal 
exercice  où  les  fidèles  û  doiucnt  employer, 
c'eftd'inuoqucr  fon  Nom.  Car  voila  quelle 
doit  eftre  noftre  cftude,de  recoririr  à  Dieu  en 
toutes  nos  nccefsitcz,  le  prians  qu'il  nous  tie 


ne  eu  fa  main  5c  en  fa  proteâion,  5r  non  feule 
ment  que  nous  ayons  le  foin  de  nous  ,  mais 
aufsi  de  nos  ptocbains.Voila  donc  quelle  eft 
la  fommc  de  la  pure  doârine  qui  doit  eftre 
iournellement  prefchee  ,  &  à  laquelle  on  fe 
doit  tenir,c'eft  que  cognoiflans  qu'il  n'y  a  en 
nous  que  toute  poureté  &mifere,  nous  ve.- 
nions  chercher  Dieu ,  voire  tenans  la  voye  & 
l'addrelFe  qu'il  nous  a  donnée.  Car  il  eft  mi- 
pofsible  que  nous  approchions  de  Dieu.llnon 
d'autant  qu'il  luy  a  pieu  fe  communiquer  à 
nous:orcela  s'eft  fait  en  la  perfonne  denO'» 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift.    Il  faut  donc  que 
nous  appréhendions  cefte  grâce  qu'il  nousa 
donnée  ,  &  de  laquelle  nous  pourrons  iouir« 
ou  il  ne  ciédra  qu'à  nous,  c'eft  qu'eftans  meni 
bres  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  par  foy, 
nous  ne  doutions  point  qu'il  ne  nous  condut 
fe  à  Dieu  fon  Pere,&  par  cofequent  au  Roy- 
aume des  cieux.  Or  cela  prefuppofe  que  noue 
receuions  de  lefus  Chrift  ce  qui  nous  défaut: 
car  il  n'y  a  en  nous  que  toute  poureté,  mais  il 
faut  que  nous  foyons  enrichis  des  biens  que 
lefus  Chrift  nous  a  apportez  ,  &  lefquels  il 
nous  donc:  &  là  delTus  que  nous  ayons  la  har 
dicfle  d'inuoquer  Dieu  &  de  recourir  à  luy  :& 
cependant  que  nous  apprenions  de  régler  no 
ftre  vie  comme  il  appartiét.  Se  non  pas  qu'vn 
chacim  fe  forge  quelques  deuotions  1  fonap 
petit.  Car  le  feruice  de  Dieu  eft  corrompu 
quand  les  homes  veulent  ainlî  apporter  leurs 
inuentions  propres,&  nous  fçauons  que  Dieu 
demande  fur  tout  obeiflànce  ,  comme  ce  luy 
eft  le  principal  facrifice.  Il  ne  faut  point  don 
ques  que  nous  attentions  de  faire  ce  que  no- 
ftre cerueau  portera ,  ce  n'eft  qu'abus  quand 
les  hommes  s'addonnent  ainlî  à  ce  qu'ils  onc 
imaginé.  Et  au  relce,cômenous  fommeschar 
nels,no*voudri5s aufsi  appaifcr  Dieu  de  nos 
façons ,  (comme  fainft  Paula  iraitté)  que  le 
diable  introduiroit  fes  dodrines,  qu'on  pen-^ 
ferait  que  Dieu  prendroit  en  payement  R  on 
s'abftenoit  de  manger  certaines  viandes, lî  on 
s 'abftenoit  du  mariage  .Qui  eft  caufe  que  les 
hommes  apportent  à  Diiu  ces  menus  fatras, 

M.iiii. 


iSo 


SERMON     XLVII. 


qu'il  Iciif  fcmble  qu'en  cérémonies  &  en  cho- 
fes  extérieures  ils  paruienent  à  grande  fain- 
fteté  Se  perfedionfCVft  iju^ils  mefurenc  Dieu 
à  leur  aulne  :  pource  que  rious  Tommes  gref- 
fiers &  terreftres ,  nous  transfigurons  Dieu  à 
noftre  tantaiïe  .  Ainlî  donques  fainâPaula 
monftré  qu'il  nous  faut  tenir  à  la  pure  &  iîm- 
ple  parole  de  Dieu,  laquelle  nous  monftre  vn 
feruice  Tpirituel.  Or  après  auoir  déclaré  ces 
chofes.il  aJioufte  ,0^»  eeUy  qui  enfeigne  au- 
trement,efl  vn  orgueilleux  Qr  yne  befie-.comme 
s'ildifoit,  que  les  hommes  fe  pourront  bien  . 
tranfporter  par  leur  ambition  pour  amener 
des  façons  d'enfeigner  plus  fubtiles,  comme 
nous  voyons  que  les  aureilles  nous  chatouil- 
lent d'vne  vaine  eu riofité,<jue  nous  voudrions 
qu'on  nous  repeuft  de  vent ,  comme  il  y  en  a 
beaucoup  aufsi  qcerchentdecôplairc  au  mô 
de  &  de  gratifier,  voyant  qu'on  demande  cho 
fes  nouuelles.ils  conçoiuent  ceci  &  cela. Mais 
fainÛ  Paul  déclare  qu'il  n'y  a  qu'orgueil  &  be 
ftife,  quand  on  ne  tafche  point  à  edifier,voire 
félon  la  reigle  qu'il  a  dpnnee  ci  deflus.  Nous 
Toyons  donc  maintenant  ce  qwe  i'auoye  tou- 
che:c'ert  afçauoir  que  pour  bien  comprendre 
ce  qui  eft  contenu  en  ce  paflàge  ,  il  nous  faut 
réduire  en  mémoire  ce  qui  a  efté  traitté  par 
ci  deuant.à  caufe  que  fâinft  Paul  fait  compa- 
raifon  de  deux  chofes  oppofites ,  afçauoirde 
la  doûrine  que  Dieu  ordonne  ou'on  publie,i& 
de  toutes  les  fubtiliteï  que  les  nommes  inuen 
tent ,  voire  fans  regarder  ce  qui  eft  propre  à 
vrayeinftruftion.  Or  notons  cependant  que 
fain£t  Paul  ne  parle  pas  de  ceux  qui  corroni- 
poy  ènt  la  vérité, &  la  conuertiffbyent  en  men 
fonge,quiapportoyent  des  faufTesdoftrines, 
&quidemandoyent  que  le  nom  de  Dieufuft 
blafphemé  ouuertement:mais  il  parle  de  ceux 
qui  i'e  deftournoyent  de  la  droite  fimplicité. 
Or  c'eft  défia  obfcurcir  la  vérité  de  Dieu  ,  & 
la  corrompre,  quand  on  ne  l'applique  point  à 
{à  droit  vfage  auquel  Dieu  l'a  voulu  deftiner. 
Il  eft  dit  que  la  doûrine  de  l'Euangile  eft  la 
pafture  de  nos  âmes.  Or  fi  on  nous  vouloit 
nourrir  de  chofes  qui  n'ont  nulle  fubftance, 
combien  qu'elles  foyent  plaifantes  1  la  veue, 
combien  qu'il  y  ait  aufsi  quelque  faueur  de 
prime  face  à  la  bouche ,  toutesfois  s'il  n'y  a 
nulle  nourriture,  que  fera-ce?  nous  demeure- 
rons affamez  ,  ou  bien  nous  ferons  feulement 
enflez  mangeans  beaucoup. Si  on  nous  vouloit 
paiftre  de  le  ne  fçay  quelles  fleurs  ,  oud'au- 
tres  chofes ,  &  qu'il  n'yTîuft  point  de  pain 
ne  de  viande  qui  pcuft  nous  fouftenir,  fi  nous 
«n  mangeons  peu ,  il  n'y  aura  que  faim  ,  &  (i 
nous  en  mangeons  beaucoup,  Pcftumach  fera 
rempli  feulement  ,  mais  il  n'y  aura  nulle  fub- 
ftance ,  encores  que  nous  en  foyons  comiT>e 
ereuez.Ainfi  en  eft-il  desdoftrincs  qui  u'cm- 
portét  point  vraye  édification.  Il  eft  vray  que 
de  prime  face  elles  font  plaiiantes ,  &  on  s'^y 
dclcfte, voire  à  caufe  queno<;  cfprit'-  fjnc  vo- 
lages,&  adJonncz  par  trop  àvanitc;mai:  tant 


y  a  que  nos  araes  n'en  font  point  nourries. 
Brief,  pour  comprendre  l'intention  de  fainii 
Paul,  il  nous  faut  mettre  trois  degrez  de  do- 
ftnne.Il  y  a  la  pure  façon  d'enfeigner  qui  eft 
conforme  à  l'Efcriture  fainûe.c'eft  à  dire  cel 
lequieft  vtile  pour  nous  édifier  en  la  crainte 
de  Dieu.  Et  puis  il  y  a  vne  façon  d'enfeigner 
qui  n'eft  point  du  tout  mauuaile,qui'n'empor- 
te  point  d'idolâtrie,  m  bla(pheme,nichôfe  di 
reftemét  répugnante  à  la  vérité  de  Dieu:mais 
tant  y  a  que  c'eft  vne  façon  baftarde  ,  pource 
que  la  parole  de  Dieu  eft  défia  defguifee  ,  & 
qu'on  la  tranfpoite  de  fon  vfage  naturel  & 
légitime.  Il  y  a  pour  le  troifieme  degré  ,  des 
doftrines  faufles&mefchantes,  qui  peruertif 
fent  du  tout  la  pureté  de  l'Euangile.  Or  main 
tenant  nous  oyons  ce  que  dit  fainft  Paul ,  il 
parle  feulement  des  fpeculations  vaines ,  & 
qui  n'ont  point  de  fermeté  ,  combien  qu'on 
ne  les  puille  pas  condamner  du  tout ,  qu'elles 
foyent  faufles  &  mefchantes.m'ais  quoy  qu'il 
en  foit  il  n'y  a  point  làde  profit.que  ceux- qui 
en  ont  les  aureilles  batues,  ne  peiiuent  pas  e- 
ftre  amenez  à  Dieu  pour  fe  répofer  du  tout 
en  fa  grâce, pour  goufter  fa  bonté  infinie,  co- 
rne il  l'a  déclarée  en  noftre  Seigneur  leius 
Chrift:ils  ne  font  point  incitez  à  l'inuoquer, 
&  auoir  leur  reluge  à  luy  :  ils  ne  font  point 
confermez  pour  s'addonner  à  toute  fainfteté 
de  vie,&  fe  dédier  du  tout  au  (eruice  de  Dieu: 
quand  cela  n'y  eft  point, ce  font  chofes  friuo- 
les  &  inutiles.  Voila  donques  de  quoy  fainâ 
Paul  parle.  Or  ceci  eft  bien  digne  d'eftre  no- 
té:car  il  fe  rapporte  à  ce  qu'il  dit  en  vn  autre  j,,t;.». 
lieu, que  l'Efcriture  eft  vtile,voire,toute:com  j^^ 
me  s'il  difoit,que  Dieu  rie  nous  a  point  donné 
fa  Parole  pour  vn  paflè-temps  ,  que  nous  en 
iafions  comme  de  qiielque  chanfon  de  plaifir, 
mais  afin  qu'elle  noui;  profite.  QjJand  don- 
ques nous  ne  poarrôs  appliquer  la  parole  de 
Dieu  à  ceft  vfage-la  ,  nous  la  profinqns ,  & 
voila  défia  vn  facrilege,Diea  y  eft  déshonorer 
car  nous  en  ferons  comme  vn  meneftrier  qui 
louera  de  la  harpe  ou  du  lue  ,  &  cependant 
il  n'y  aura  que  les  aureilles  qui  foyent  ba- 
tues. Or  nous  voyons  qu'il  detefte  cela,  car 
il  veut  que  là  Parole  entre  en  nos  âmes ,  que 
nous  en  foyons  touchez, qu'il  y  ait  vn  examen 
fait,&  côme  vne  anatomie  de  toutes  nos  pen- 
fees  &  afFeûions.  Sur  cela  que  noftre  vie  puis 
après  foit  reformée,  &  d'autant  que  c'eft  vne 
femence  viue  que  la  Parole  de  falut ,  qu'elle 
produife  fes  fruits,&  que  nous  môftrions  que 
ce  n'eft  point  en  vain  que  Dieu  no' a  inftruitï 
en  fon  efchole  .  Notons  bien  donques  toutes 
fois  Stqiiantes  que  nous  venésau  fetmon,  oa 
bien  q  chacun  en  fon  pridc  prend  l'Efcriture 
fainfte  pour  lire,  que  nous  deuôs  auoir  ce  but 
la  d'eftre  édifiez  ,  voiteen  foy&  en  crainte 
de  Dieu.quenous  foyons  attirezà noftre  Sei- 
gneur Icfu'.  Chrift,  cogno/flans  q  c'eil  en  luy 
que  Dieu  s'cft  communiqué  à  nous ,  afin  que 
nous  le  pofledions  comme  noftre  héritage, 

que 


s  V  R    LA   I.  A  T  I  M  O  t  H. 


iS» 


que  noMS  méditions  les  grâces  qui  nous  font 
données  en  lefus  Clirift ,  puis  qu'il  nous  faut 
puifer  de  fa  plénitude, côme  il  en  el}  parlé  au 
premier  de  S.Iehan.  Auifops  dVftve  incitez  à 
magnifier  la  bonté  de  Dieu,  voire  non  feule- 
ment de  bouche  ,  mais  par  bonnes  auures,  & 
en  toute  noftre  vie  :  auifons  de  l'tnuoquer  Se 
recourir  à  luy  toutes  tois  &  quantes  que  nous 
fommes  vifittz  de  quelque  mal.-aiiifons  de  me 
diter  la  vie  celcilc  parmi  les  pouretez  &inife 
res  de  ce  monde  ,  cognoiflans  que  Dieu  nous 
veut  vifiter  par  croix  &  têt  ations.afin  de  mor 
tifier  toutes  les  corruptions  q  font  en  no',& 
que  no' defpouiUiôs  noftre  vieille  peau  pour 
cftre  reformez  à  l'iiuagede  noftre  Dieu.Voi 
la  le  but  auquel  il  nous  faut  tendre  ,  ou  bien 
nous  ferons  coulpables  deuant  Dieu  d'auoir 
pollué  les  chofes  fainftes.  Car  la  parole  de 
Dieu  eft  vn  threfor  ineftimable  ,  &  fi  nous  en 
vfoiTî autrement  que  i'ay  dit,il  eft  certain  que 
rous  lafouillerôs  en  nos  ordures,-côme  ceux 
qui  Tappliquét  à  quertions  curieufes,  ou  ceux 
qui  s'enveulent  faire  valoir  par  ambition,  ou 
qui  tafchent  d'en  faire  leur  profit,  comme  S. 
Paul  en  parle  en  la  fin.  Voila  donqucs  ce  qne 
npusauôs  à  noter  en  premier  lieu. Or  fi  fainft 
Paul  vfe  d'vne  telle  rigueur  auec  véhémence 
contre  ceui  qui  s'addonnent  à  vaines  fpecu- 
Jations ,  &  qui  delailTentJa  fimplicité  d'  l'£- 
uangile  quand  ils  traittent  des  qucftions  vai- 
nes, que  fera -ce  de  ceux  qui  empoifonnét  les 
âmes  par  leur  faufle  doftrine?  Penfons-nous 
pas  qu'il  y  ait  vne  horrible  vengeance  appre 
îlee  fur  ceoi  qui  ont  ainfi  peruerti  la  venté 
de  Dieu<'Nous  voyons  côme  ceux  qui  ne  font 

3ue  traitter  des  queftions  friuoles,font  con- 
amnez.fainâ  Paul  n'en  parle  point  finon  cô 
mel'Efpritde  Dieu  le  touche -il  dit  toutef- 
fois  que  telles  gens  font  pleins  d'orgueil, vui 
des  de  toute  fciencc,qu'ils  font  priuez  de  vé- 
rité, qu'ils  font  tranfportez  d'entendement: 
&  puis  ,  que  c'eft  vne  ziianie  mauuaife  pour 
•  infcfterl'Eglife,&d'*enuies,&de  contétions. 
Se  de  mefchans  débats  ,  &  chofes  femblables. 
Quand  S.  Paul  foudroyé  ainfi  cotre  ceux  qui 
ne  fontqu'obliqMemétdefguiferla  parole  de 
Dieu  ,  ie  vous  prie  ,  que  fcra-ce  de  ceux  qui 
corrompent  entant  qu'en  eux  eft  tout  ce  qui 
cft  contenu  enl'Efcriture  famfte.'qui  s'eleuét 
contre  Dieu,  Se  le  defpitent,qui  feruét  au  dia 
blepourabbruuer  les  pouresamesde  fauffeté 
&  de  menfonge?  Comme  en  la  Papauténous 
yoyons  que  non  feulement  la  parole  de  Dieu 
eft  tranfporteeà  ambition  ,  mais  corrompue 
du  tout,que  là  on  n'y  cognoift  rien.  Or  no- 
tons donc  en  quelle  recômandation  nous  dé- 
lions auoirla  pure  façon  d'enfcigner,  laquel- 
le eft  propre  pour  édifier  nos  âmes  tant  en 
foy  qu'en  lacraintede  Dieu.Etauiourd'huy 
nous  auons  l'expérience  de  ce  que  nous  auôs 
défia  touché  ,  c'eft  afçauoir  qu'il  y  a  trois 
rangs  diuersde  doftrine. Comme  nous  voyôs 
ceux  qui  défirent  de  feiuir  à  Dieu  en  droitu- 


re de  coeur  ,  qui  n'vfent  point  d'vne  ilietori- 
que  vaine,  qui  ne  fardent  point  leurs  propos, 
qui  ne  cirïlouillcnt  point  les  aureilles  pour 
gratifier  au  monde, que  font-ili?  lis  regarder 
cequicftvtile  pour  cefte  pafture  fpintuelle 
des  âmes. Et  puis.d'autât  que  cefte  pafture  de 
Dieu  eft  aufsi  vtile  pour  corriger  les  vices, 
qui  font  côme  maladies  de  nos  âmes, ils  l'ap- 
pliquent auhi  àceft  v£âge-la.  Ceuxdonques 
qui  voudront  fidèlement  s'employer  au  fer- 
uicedc  Dieii,ayani  la  charge  de  porter  la  do 
ftrine  de  l'Euangile,  ne  regardent  finon  l'vti 
lité  du  peuple  &  le  falut  des  âmes  :  voire  ,  3c 
quand  ils  auront  ce  regard,  la  gloirede  Dieu 
ira  dcuât, comme  aufsi  elle  le  mérite  bien. Or 
il  y  en  a  d'autres  qui  ne  blafphement  pas  ou- 
uertcnient,  qui  nemettét  pasenauantdesdo 
ilrines  faufles  &;  mefchantes  qu'onpuiflecoa 
damner, ciimme  fi  elles  eftoyent  du  tout  con- 
traires àl'Efcriture  (ainfte:mais  il  y  avn  ba- 
bil &  vne  vaine  fpeculation  &  curioiîté,qu'ils 
ne  demandent  finon  à  chatouiller  les  aureil- 
les: &  puis  ils  mettront  en  auant  des  queftiôs 
curieufes  &  friuoles.qui  s'efuanouiflènt  en  la 
fin  comme  vent.  Voila  doques  ceux  dont  par 
le  faïe't  Paul,  qu'on  cognoift  auiourd'huy  par 
experience.Or  il  y  a  rextremité,&  c'eft  cora 
me  leprofoi]dde  l'abyfme.quandles  poures 
âmes  fontcmpoifonneesde  méfonge:&  mef- 
mesenla  doftrine  des  docteurs  Papiftes  on 
verra  tous  ces  deux  vices  que  i'ay  touchez. 
Car  ce  qu'ih  appellent  Theologie,n'eft  finon 
pour  tourméter  les  efprits  de  vaines  fpecula 
tions, qu'ils  font  lientortiliezen  leurs  curio 
fitez,&  trauaillent  beaucoup,  &  vne  queftion 
engendre  l'autre,  tellement  quec'eft  vn  laby 
rinthe.   Il  eft  vray  qu'on  ne  pourra  pas  dire 
que  toutes  ces  queftions  contienent  autant 
de  blafphemes  :  mais  c'eft  défia  (  comme  i'ay 
déclaré  )  peruertir  la  parole  de  Dieu  ,  quand 
elle  n'eft  point  appliquée  à  fon  droit  vfage. 
Et  ce  que  le  di  fera  beaucoup  mieux  cognu 
de  ceux  qui  ont  aucunement  goufté  que  c  çft 
de  cefte  dotlrine  fophiftique.  Car  en  toutes 
leurs  efcoles  il  eti  certain  que  iamais  on  n'y 
traittevn  fcul  article  d'édification.  Quand 
on  fera  là  depuis  le  matin  iufqucs  aufoir ,  on 
orra  dès  refueries  beaucoup  ,  mais  qu'il  y  ait 
vn  feul  grain  de  nourriture  pour  l'ame,qu'on 
puifle  recueillir  le  moins  du  monde  qui  foit 
pour  inciter  les  caurs  à  la  crainte  de  Dieu, 
néni:mais  pluftoft  tout  eft  là  prophané,qu'ils 
ont  tellement  defguifé  tous  les  myfteres  ce 
Dieu,qu'il  femble  que  ce  foyent  chofes  pro- 
fanes quand  ils  difputent  de  leur  Théologie. 
Mais  s'ils  montent  en  chaire  U  y  a  bien  pis: 
il  n'eft  pas  queftion  feulement  de  faire  volti- 
ger les  efprits  en  l'air,  &  les  entortiller  en 
beaucoup  de  vaines  fantafies,  mais  de  les  de*» 
rtournerdeDieu  à  toutes  fuperftitions,voiire 
qu'il  y  a  côme  vne  brutalité;  que  s'il  eft  que- 
ftiond'adorer  Dieu  ,  comment  en  feront-il», 
linon  de  renuoycr  le  pouremondeà  desid'o- 

Ni. 


Ci>?.r.3 


iSi  SERMON 

les  &  ides  mirmozcts?  Dieu  fera-il  honoré 
quâd  fa  gloire  liiy  fera  rauie  pour  la  tiafpor 
1er  à  des  créatures  mortes&  iiifcnlîble  ,ou  il 
n'y  a  que  corruption?  Au  coiuraire.au  lieu  de 
inuoquer  Dieu  ,  &  s'adrelTcr  à  luy  au  nom  de 
noftre  Seigneur  Icfus  Chrifl/h  ont  leurs  pa- 
trons &  aduocatv  aufqiicls  ih  attribuct  l'iian 
ntur  que  Dieu  s'eft  rcfi^riié  à  luy  fciil.  E:  au 
refte  ,  s'il  eft  qucftion  dt  fc  fier  en  Dieu  ,  le 
franc  arbitrales  mentes, les  fatiitadiôs  vien 
dront  en  auant  pour  empsfcher  les  cieatures 
de  fe  remettre  du  tout  à  noftre  Seigneur  Ic- 
fus Chrilt  &  s'appuyer  fur  fa  b  )nte  gratuite. 
Nous  voyôs  danquc^^  côme  là  il  n'y  q.ic  bl.if- 
pliemes  qui  fjnt  pourdefpiter  Dieu, pour  a- 
neantir  pleinement  fa  doftrine.voire  non  feu 
lement  par  façons  obliquesmais  ouuercemét, 
que  le  diable  monftre  li  fes  cornes,  qu'il  taut 
en  partie  que  les  homes  foyent  ab;iuis  quâd 
ils  s'addonnent  à  la  doftrine  Papale,  ou  bien 
qu'ils  fjyent  enflez  d'orgueil  pour  le  faire  à 
croire  qu'ils  valet  beaucoup  .  ou  qu'il  ne  leur 
chaille  de  l'hôneur  de  Dieu.  Côuie  quand  ce 
vient  aux  Sacremens.onvoit  côme  toutell  là 
renuerfé,&  qu'ils  n'ont  rier.  laiffe  d'entier  de 
ce  qui  a  eité  inftitué  par  noftie  Seigneur  le- 
fus  Chrift.qui  ell  la  iageffede  Dieu  fon  Pere, 
&  auquel  âufsi  font  enclos  8;  caclirz  tous  les 
threforsde  (à  plenitude,c5me  S.Paul  en  par- 
le. Or  tout  ce  qu'il  nous  a  donné,  a  eftc  mef- 
chamment  corrompu  îuec  vneaudacediabo- 
lique.  Ils  ont  conuerti  la  Cène  de  nolUe  Sei- 
gneur lefus  Chrift  en  cefte  abomination  exé- 
crable de  Melle.  Et  du  Baptefme  nous  voyôs 
comme  il  en  va  ,  qu'il  a  efté  delguifé  là  aufsi 
bien,  quand  ils  ont  introduit  des  autres  facre 


X  L  V  1 1. 

fabonté.côinelleftdit  aufsi  que  c'eft  là  où  il 
nous  faut  chercher  tout  noftre  falut.Et  cepc 
dant  que  nous  apprenions  aufsi  à  dédier  no-> 
ftre  vieauferuice  de  Dieu  ,  puis  qu'il  nous  a 
acquis  à  foy  chèrement,  que  nous  luy  foyons 
vrais  facrificcs,&q  nous  ne  le  feniionspoinc 
à  noftre  pofte  ,  mais  félon  qu'il  l'a  ordonné, 
cognoiflans  que  le  feruice  qu'il  approuue.eft 
fpirituel.  Et  au  refte,  qu'vn  chacun  regarde  i. 
fjn  eftatjà  quoy  il  eft  appelé  :  que  nous  tta- 
uaillions  volontiers  :  que  les  pères  ayent  le 
foin  de  leurs  enfans.les  mères  aufsi, quvn  chà 
cun  s'addonne  à  faire  ce  qui  eft  de  Ion  office 
Si  de  fon  cftat ,  cognoiflànt  que  noftre  Sei- 
gneur par  ce  moyen  fera  glorifié  en  nous. 
Qjund  nous  aurons  cela  pour  recommandé, 
ne  doutons  point  que  Dieu  ne  nous  donne  la 
difcretionde  fuir  Icsdoftrines  qui  font  pour 
nous  retirer  du  bon  chemin,  &  que  nous  ne 
puifsions  faire  ce  que  dit  fainû  Pâul,de  nous 
feparerdeceux  qui  apportent  autre  faconde 
enfcigner  que  celle  qu'il  a  touchée  parci  de 
uant  .   Celny  dotiques  <jii'  tnf-igne autrement, 
dit-il  :  &  pour  le  mieux  exprimer  iladioufte, 
Cduy  tjui ne  fe  r.mge  point  aux  faines  farolet 
ée  \efus  Chr'jl ,  £?•  à  la  tioc'r  ne  qui  efi  ftion  la 
crainte  ae-Dieit,la  vrayr  pitté  Cjr  rtlig'on.ARn 
que  nous  ne  fufsions  point  en  doute  quant  à 
ce  mottcCaulre  faccn  :  ou,  diuerfe  ,  faind  Paul 
nous  déclare  ici  quelle  eft  là  règle  de  bien  en 
feigner  .  c'eft  que  les  paroles  foyent  faines, 
dit-il.  Or  quand  il  les  nomme  ainli,  il  entend 
qu'ellev  nous  apportent  vtilité  ,  que  nous  en 
foyons  édifiez,  comme  l'ay  défia  dit  que  c'eft 
la  pafture  de  nos  âmes  que  la  doûrine  que 
Dieu  nous  enuoye  :  c'eft  premièrement  la  fe- 


inens  forgez  en  leur  boutique.  Or  dôc  il  faut    mence  par  laquelle  nous  fommes  engendrer 


bien  que  ceux  qui  s'addonnent  à  la  doârinc 
Papalci  foyent  ou  contépteursde  Dieu  inani 
fcfte«,qu'il  ne  leurchaut  de  riçn,ou  qu'ils  s'a 
kufent  de  leur  bon  gré, &  qu'ils  permettent  à 
Satan  qu'il  leur  creue  les  yeux. D'autant  plus 
donc  nous  faut-il  retenir  cefte  admonition 


en  la  vie  celeiie,  c'eft  noftre  nourriture,  c'eft 
vne  médecine  ibrief,  c'eft  le  tout.  Etainfiil 
nous  faut  regarder  que.lle  dotlrine  nous  ap- 
porte fanté ,  &  celle-là  il  nous  la  faut  tenir 
c6tneenuoyee&  procédante  du  Fils  de  Dieu: 
mais  toute  doftrine  friuole  ,  de  laquelle  nous 


de  fainâ  Paul ,  c'eft  que  tous  ceux  qui  enfei-    ne  pouuons  tftie  édifiez  ,  il  faut  que  nous  la 
gneront  autremét  qu'il  n'a  déclaré  ci  defllis,     fi^ons,encores  qu'il  n'y  ait  autre  mal  que  ce 

fte  difsimulatjoD ,  qu'au  lieu  de  la  viande  on 
nous  propofe  »ne  moquerie  &  vn  abus .  Et 
puis  notamment  encores  fainft  Pauladioufte 


font  gens  tranfportez  d'orgueil,&  gens  igno 
rans.combien  qu'ils  fe  veulent  faire  grans  do 
tleurs  &  fort  habiles ,  qu'il  n'y  a  en  eux  que 
corruption, qu'ils  font  priuezdelapure  veri- 
té:que  nous  les  fuyons  donc  côme  pertes  mor 
telles.  Il  eft  vray  que  ùi\r\Ot  Paul  parle  ici  à 
Timothee,luy  déclarant  qu'il  ait  àfefeparer 
de  telles  gens  :  mais  de  noftre  cofté  nous  fom 


cCmotdep/>Ȏ  ,  qui  emporte  quenous  met- 
tions toute  noftre  fiance  en  Dieu,  afin  de  re- 
courir à  luy  ,&de  l'inuoquer  luy  feul(com. 
me  i'ay  déclaré  )  &  que  nous  cheminions  en . 
fa  crainte,  obeilfaas  à  fa  fainfte  volonté  ,&, 


mesaulsiaduertisengene.raldefuirvn  teldef    que  nous  ne  le  feruions  finon  en  renon^anti 


guifementde  la  pure  fimplicité  de  l'Euâgile. 
Que  faut-il  donques.'  Retenons  cefte  forme 
de  ladoûrine  que  fainâ  Paulamifecideflîis, 
&(comme  i'ay  défia  déclare)  recourons  à  no 
ftre  Dieu  ,  &cognoiflons  lefus  Chrift  &  les 
vertus  qui  font  en  luy,afin  que  nous  trouuiôs 
en  luy  tout  le  comble  de  ioye,&  q  nous  ne  va 
guiôs  plus,  &  ne  foyôs  pi'  iettez  ne  çà  ne  là, 
tsAK  (^ue  nous  foyons  pleinemct  appuyez  fur 


toutes  nosaffeftions  &:voluptez,&mefmesà 
toute  prudence  charnelle:  car  cependant  que 
les  hommes  veulent  eftre  fages  enleurccr- 
ueau.ileftimpofsible  qu'ils  fe  ragent  à  Dieu, 
ne  qu'ils  luy  obeirtcnt.  Maintenant  donques 
nous  voyons  que  l'admonition  de  faincl  Paul 
n'eft  point  obfcure  :  encores  que  nous  bou- 
chions nos  aureilles,  ii  eft-ce  que  nous  fom- 
tnet  conuâincutde  ce  qu'il  vcuc  dire  ,  &  ne^ 

tiendra 


SVR   LA   r.    A    TIMOTH. 


283 


tiéiti  qu'à  nous  qVvn  chacû  ne  fe  puifle  gar- 
der de  ces  doftrines  perueilc^.Mais  (juoy?Le 
monde  veut  eftreabuféà  fonefcient.  Qm  eft 
caufe  {ju'auiouid'huy  les  erreurs  dominent, 
&  que  c'eA  comme  vn  deiuge  qui  couurc  cou 
te  ta  terre ,  &  qu'iJ  y  en  a  ii  peu  qui  puilFert 
s'afluiettir  pleinement  à  Dieu?  Ceft  la  non- 
chalance qui  procède  d'vne  certaine  malice: 
car  les  hommes  ne  demandent  point  deve- 
nir à  Dieu  en  pure  rondeur  ,  ils  l'ont  contens 
decircuir,  &  cependant  ne  peuucnt  appro- 
cher de  luy .  Or  quand  nous  cherchés  de  tels 
difcours.c'eft  bien  raifon  aulsi  que  Dieu  nous 
lailTe  vaguer  ,  &  cependant  que  le  diable  ait 
fes  fuppofts  qui  nousdeftoiirnent  ç.  &  là  ,  & 
qui  nous  mènent  par  des  chemins-  tortus  ,  & 
nous  facent  tracafler  tout  le  temps  de  noftre 
vie ,  nous  eflongnans  du  but  auquel  nous  de- 
UODS  tendre. Il  faut  donc  que  les  homes  s'im- 
putent le  mal  de  leur  ignorance:car  s'ils  va- 
guent,qu'ils  foyent  tranfportez  çA&là,c'eft 
par  leur  faute,  (comme  l'ay  defîa  dic)pource 
qu'ils  n'ont  point  cherché  de  venir  droit  à 
Dieu.Et  ainfi,  oiiurons  les  yeux  &•  les  aurcil- 
les,  &  nous  fçaurons  faire  noftre  profit  de 
cell  aduertiffement  que  Dteu  nous  donne  ,  & 
ne  tiendra  qu'à  nous  que  nou":  nedifcernions 
ceuï  qui  font  bons  &  fidèles  Pafteurs,  d'.nicc 
ceux  quicorromptnt  &  falfifient  la  vérité  de 
Dieu,que  nous  ne  fuyon'i  comme  peltesmor 
telles  ceux  qurnous  abruiiétde  menfon£;e& 
dt  vanitcz  ,  &  ne  nous  donnent  point  vne 
viaye  pafture.afin  d'en  eftieraffàficz.  Voila 
ce  que  nous  auons  àobferutr.  Or  cependant 
il  nous  faut  noter  ce  qui  a  défia  cfté  couché, 
c'eft  afçauoir,  comment  fainft  Paul  dégrade 
ici  tous  ceux  qui  flechifïênt  du  droit  chemin; 
c'eft  qu'en  pitmier  lieu  il  les  nomme  orgueil 
Uux-.éi  puis  fecondement  htpei-.comme  s'il  di 
foit  que  l'orgueil  les  aueiigle,  &  cependant 
qu'ils  n'ont  pas  ce  qu'ils  appetent.Carpour- 
quoy  f  ft-ce  que  les  hommes  mettent  en  auac 
des  iubtilitez  &  queft:5s  friuoles,  finon  pour 
fe  faire  valoir,afin  d'eltre  prifez  corne  grans 
dodcurs  &  bien  aigus?  Or  fainft  Paul  dccla- 

ÎV<?.  1.7.  re  qu'ils  ne  font  que  beftes.  Ex  pourquoyfcar 
la  vrayefagefle  ,  c'eft  que  nous  foyons  in- 
ftrujts  en  la  cramtc  de  Dieu,  comme  l'Efcri- 
ture  le  porte.  £t  nommant  ces  doreurs  fub- 
tils,  orgueilleui  &  enflez,  il  lignifie  que  nous 
ne  pouuons  profiter  en  leur  efcole.  Et  pour- 

Vft.  i$.Z  quoy?car  il  eft  dit  que  Dieu  enfcigne  les  pe- 
tis&  les  humbles.  Voulons-nous  cftredeue- 
ment  enfeignez  en  la  parole  de  Dieu  ,  Se  que 
nous  en  receuions  le  fruiâ  qu'elle  nous  doit 
apporter?  Il  nous  f«ut  commencer  par  ce 
bout  d'humilité  &  de  petitelTe,  que  nous  ne 
prefumions  point  de  nous  eleuer,mefmes  que 
ayans  cognu  que  nous  fommes  pouresaueu- 
gies,  qu'il  n'y  a  poît  vne  feule  goutte;  de  bien 
en  nous,  voiie& qu'en  fommenousne  ioat- 
mes  que  poures  belles,  nou^  venions  poure- 
Aie  enfeigaez  de  Dieu  ficde  noAic  Seigneoi 


lefus  Chrift  ,  qui  nous  a  efté  ordonné  pour 
Mai/Ire  &  Dofteur,  mcfmes  que  nous  le  rece 
liions  côme  noftrc  Paihur  pour  ouir  la  voix, 
que  nous  iiiy  foyons  comme  agneaux  &  bre- 
bis,cognoiltans  que  nous  ne  fommes  pas  fut- 
fifans  pour  nous  gouuerner.  £c  au  refle,  que 
noiisapprenions  de  nous  anéantir  du  tout,& 
de  hayrnos  vices,  afin  de  detefter  noftremef 
chante  nature,  britf.que  nous  apprenions  de 
cheminer  en  celle  hôtedenous-mefmes,  que 
nous  foyons  pleinement  confus.  Voila  donc 
côme  lamais  nul  ne  fera  bon  efcolier  de  Dieu 
qu'il  ne  foit  hiible  &  petit.  Or  ceux  qui  font 
enflez  d'orgueil, comment  nous  pourront-ili 
amener  au  droit  chemin,  quand  ils  en  font  du 
tout  (f!ongnee,&meirnes  qu'ils  tendent  tout 
au  rebours?    Fuyons  donc  tous  ceux  qui  font 
menez  d'orgueil  &  d'ambition, car  il  eft  cer- 
tain qu'ils  ne  pcuuentfinon  nous  précipiter 
aufceux,  comme  le  diable  les  gouuerne  ,luy 
qui  eft  le  perc  d'orgueil ,  ainfi  nous  ferons  a- 
hyfmez  en  vne  mefme  confiifion.  Apprenons 
donc  de  nous  recueillir,  &■  nous  tenir  comme 
ft  rrc3,S.'  que  eeux  qui  cheminent  ainfi  en  toB 
te  vanité  ne  nous  conduifcnt  pas, que  nous  ne 
foyons  point  menez  çj  &  là  comme  à  la  pi- 
pée.Voila  pourquoy  fiinO  Paul  aici  mis  l'or 
gueil  en  premier  lieu  ,  ce  n'eft  pas  feulement 
pour  donner  vne  marque  d'ignominie  à  ceux 
qui  deprauent  la  parole  de  Dieu  pour  la  met 
trc  en  confufion  &  defgmfement,mais  c'eft  à 
ce  qu'on  les  detefte,&  qu'on  cognoifle  qu'on 
ne  peut  poinc  proficer  fous  eux,  mais  pluftoft 
y  eftre  corrompu  &  depraué.  Or  cependant  il 
•fe  moque  de  leur  outrecrfidance  quand  il  dit. 
Ils  nefçaucnt  rien  ,  car  ils  aiment  beaucoup 
mieux  eftre  eftimez  fort  fçauans  que  d'eftre 
cftimez  gens  de  bien  :  comme  nous  voyon» 
tous  ces  Ijraues  qui  s'appliquent  à  des  fiibti- 
litez  vaines  &  friuoles,  moyennant  qu'on  les 
ait  en  réputation  de  dofteurs  aigus ,  ce  leur 
efi  afltz  ,  car  de  preud'hommie  il  ne  leur  en 
chaut. Or  fainil  Paul  note  cefte  folle  coriofi- 
té,8(s'en  moque,  quand  il  dit,  Ils  ne  fçauent 
rien:&  nous  veut  nionftrer  que  ceuxqui  font 
ainfi  pleins  d'orgueil, fe  paifTent  deveht.  Et 
pourquoyî  car  qui  efl-ce  qui  chatouille  ainfi 
les  hommes ,  &  qui  les  fohcitedc  s'.nddonner 
ainfi  à  des  vaines  fpe culationsrCeft  qile  nous 
voulôs  fçauoir:voila  vn  defir  naturel.Ieveux 
fçauoir.Mais  quoy?nou$  ne  fçauôs  quelle  eft 
la  vraye  fcience:  car  il  nous  femhle  que  rouj 
fçaurôs  beaucoup  quad  nous  ferons  enuclop-. 
pez  en  beaucoup  de  menus  fatras ,  que  nous 
fçaurôs  faire  des  queftiôs.que  nous  les  fçau-. 
rons  debatre,&  que  nous  fçaurons  déncr  vne 
refponfefoudainede  tout  ce  qu'on  nousde- 
mâdeta.  <2_uiddonc  nousaurôs  vn  efpiitain 
fi  aigu  ,  ho  ,  il  nous  femble  que  voila  vn  beau 
fçauoir  &  fort  excellent.  Or  fainô  Paul  dé- 
claré que  tous  ceux  qui  ne  font  point  deue- 
menr  édifiez  en  la  crainte  de  Dieu, ne  fçauent 
riea.Et  pourquoy fil  eft  dit  que  le  ch«f de  fa-  ft»>i-7  ' 

N.ii. 


zH 


SERMON     XLVII. 


gefle  cft  la  crainte  de  Dieu.  Q^and  les  hom- 
mes ne  fe  cognoiirent  point ,  &:  qu'ils  ne  co- 
gBoiflent  point  Dieu,ie  vo'  prie,  cju'cft-ce  de 
tout  le  reftc?  Or  tous  ceux  qui  s'anuUtnt  ainli 
à  des  queftions  friuoles.ils  ne  tendent  point  à 
Dieu. Et  pourquoy?Car  en  tendant  à  Uiy  ih  le 
cercheroyét  comme  leur  perc  &  leur  maiflre: 
leur  pcre.di-ie.afin  de  l'aimer  (  corne  il  en  elt 
Iial.l.6.  pj^ig  jy  Prophète  Malachie  )&  de  luv  porter 
tout  honneur:&  leur  maiftre,.ifiii  de  cheminer 
en  fon  obeilTance  ,&  en  fa  crainte ,  en  le  cer- 
chant  comme  noftre  Sauueur  en  lefus  Chrift, 
qui  eft  le  principal.  Car  autremét  lainais  nous 
ne  goufterÔs  la  bonté  paternelle  cnuers  nous, 
&auAinou$  nepourruns  pas  nous  rangera 
fon  feruice,  nous  ne  pourrons  pas  le  craindre 
cômcnoftre  Dieu,  nous  ne  pourrons  pas  met- 
tre noftic  lîance  en  luy,  lî  nous  ne  regardons 
ànoltre  Seigneur  lefus  Chrirt,  voire  en  telle 
forte  que  renonçans  à  nos  aff.'Ûions  charnel- 
les pourncu5  retirer  du  monde  ,  nousappre- 
nionsdenousdetlicr  pleinement  àlàiulHcc, 
pour  eftredifpofez  de  recourir  àluy.  Voila 
comme  on  peut  prouuer  que  tous  ceux  qui  fe 
addonnét  à  vaines  curioiitez.ne  fçauent  rien. 
E t  pourquoyr'Car ils  n'ont  nulle  cognoiflàn- 
ce  dcDitu.  Etpuis,  s'ils  fecognoiflent  eux- 
mcfmes,  il  eil  certain  que  ce  n'ell  pas  tout  de 
conceuoir  que  c'cftde  la  nature  des  hommes, 
mais  il  faut  qu'ils  refiftentaui  tentations  :  ce 
qu'ils  ne  peuuent  faire  s'ils  s'addonnent  à  des 
débats  pleins  d'oiiîueic,&  qu'ils  difputent  de 
ceci  &  de  cela,  qui  ne  peut  apporter  nul  pro- 
fit. Voila  les  hommes  qui  fe  doyuent  cognoi- 
ûre  efclaues  de  péché,  ils  doyuent  fentir  les 
liens  du  diable,  &  de  mort,  &  de  malediftion 
qui  eft  en  eux,  qu'il  y  a  vnabyfme  d'iniquité 
en  leur  nature,  tellement  qu'ils  doyuent  eftre 
conuaincus  qu'ils  font  dignes  de  mort  éternel 
lc,&  qu'ils,  n'ofent  pas  fe  prefenter  deuant 
Dira.d'autât  qu'ils  font  fes  ennemis  mortels. 
Qujindnous  penferions  bien  à  cela,  ie  vous 
prie,aurions-nous  loilir  de  voltiger  ainfi,&de 
faire  nos  brauadesîNous  voyons  bien  doc  que 
tous  ceux  qui  s'appliquent  ainli  à  oifiuetc  ,'Sc 
qui  fe  forgent  des  eftudes  vaines  ,  n'ont  nulle 
fcience  en  eux,  ils  n'ont  q  du  vent  qui  les  en- 
fle, combien  que  deuant  les  hommes  ils  foyc  t 
beaucoup  eftirae2,&  qu'ils  fe  plaifent  en  leurs 
vaines  curioiîtez  ,Et  voila  aufsi  pourquoy  S. 
Paul  notâment  adioufte,  Qu^ilinefont  que  la» 
^  r»rr,  efiams  frmex.  ie  la  ytrité.  Il  aUoit  dit  que 
U  doûrine  de  lefus  Chrift  eft  faine,&  mefmes 
il  l'auoit  ainii  nômee,  pource  qu'elle  nous  ap- 
porte guarifon:côme  c'cft  la  médecine  de  tou 
ces  nos  maladies  fpirituelles.nous  en  tirés  auf 
Û  rraye  iùbftance  pour  en  eftre  nourris.  Or  au 
contraire,  qu'aduiendra-il  quand  nous  vou- 
dras eftre  grant  dofteurs  fans  eftre  édifiez  en 
la  crainte  de  Dieu,  8c  en  la  foy  de  noftre  Sei- 
gneur leCus  Chrift  ?  Nous  languirons  comme 
yn  hocnme  qui  fera  defgoufté,  il  cerchera  (es 


appetit$:&  bien,il  trempe  le  doigt.il  fucce,  il 
crache:&  puis  après, il  verra  vnc  vi5de,&  d'au 
tant  que  ion  eftomach  eft  délia  rempli  de  mau 
uaifes  humeurs  &  corrompues ,  il  luy  femble 
cncores  qu'il  pourra  prédrc  appétit  à  la  vian- 
de-mais li  toft  qu'ill'ha  en  la  bouche,eile  luy 
flaire  mal.Ainii  en  eft-il  de  tous  ceux  qui  s'ad- 
donnent ainli  à  vaines  difputes,  ou  bien  il  y  a 
vn  appétit  ii  desborde ,  que  les  hommes  vains 
&  tnuoles  ne  fe  peuuent  iamais  fouler  de  que- 
ftions inutiles.  Prenons  la  fimilitude  plus  pro 
chaine.On  en  verra  qui  ne  peuuent  manger  de 
bonnes  viandes, mais  fi  on  leur  apporte  quel- 
que ordure, ils  s'en  foulét,  voire  iufques  à  s'en 
creuer  du  tout.  Quand  il  yauravne  viande 
niauuaife.il  n'en  faudroit  qu'vn morceau  pour 
faire  mal  à  l'eftomachi&ils  en  prendrôt  trois 
douzaines.Or donc, tout  ainiî  oue  les  gens  def 
gouftez  &iiial  fains  ne  fe  peuuent  aflcz  rem- 
plir de  maiiuaifes  viâdes,  qui  font  comme  de- 
mi poifons  :  alnfi  faind  Paul  dit  notamment, 
que  ceux  qui  cherchent  auifi  à  s'enfler ,  &  qui 
appliquent  toute  leur  eftuJc  à  des  queftions 
fiiuoles,<S:  non  point  àcftreenl'eigncz  fidèle- 
ment en  la  doélrine  de  Dieu,&  en  la  fimplici- 
té  de  l'Euangile.que  ceux-là  font  comme  ma- 
lades qui  ont  Tcftomach  corrompu  de  mauuai 
fes  humeurs, &  qui  nedemandcnt  encores  que 
de  le  remplir  de  viandes  mauuaifesA  nuifan- 
tes  pour  toufîours  augmenter  leur  mat.   Ne 
voulons-nous  point  donc  à  noftre  efciét  nous 
elongnerde  Dieu  &de  la  pureté  de  fa  paro- 
le,qui  eft  la  dodrine  de  falut?Ne  voulôs-nous 
point  eftre  priuez  d'vn  tel  bien,  mai?  en  eftre 
iouiflàns  tout  letemps  de  noftre  vie? Que  no* 
apprenions  de  nous  contenterde  la  fimplici- 
té  de  l'Euangile ,  que  nous  ne  foyons  iamaic 
fafchez  d'ertre  confermez  en  la  crainte  de 
Dieu&  en  fon  amour,  &  en  la  cognoiflàncc 
des  grâces  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  a- 
fin  qu'eiiansdu  tout  dédiez  à  luy  il  nous  atti- 
re à  l'efperance  de  la  vie  celefte.    Que  donc 
nous  ne  foyons  iamais  foulez  de  cela, mais  que 
nous  ayons  vn  appétit  continuel  d'cftre  ainfi 
repeus  &  ralTàfiezde  cefte  pafture  celefte  ,  & 
en  la  vie  &  en  la  inort,&  nous  fentirons  que  la 
doilrine  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  eft 
faine,  &  que  nous  en  pourrons  eftre  guaris 
pleinement ,  &  qu'elle  nous  conduira  au  but 
qui'nouseft  propofé,quand  nous  ferons  reti- 
rez de  celle  vie  caduque.eftans  defpouillez  de 
toutes  les  corruptions  de  noftre  chair. 

OR  nous-nousprofternerons  deuant  la  fa- 
ce de  noftre  bon  Dieu, en  cognoiflàncc  de  nos 
fautes ,  le  prians  qu'il  nous  les  face  tellement 
fentir,  qu'tftans  confus  en  nous-mefmes  nous 
ne  demandions  finon  de  nous  ranger  à  ky.Et 
que  cependant  il  nous  fupporte  en  nos  infir- 
miter ,  «ufqiies  i  ce  qu'il  nout  en  ait  deliurex 
pleinemét.Ainfî  nous  dirons  tous,  Dieu  tout- 
putflant.Pere  celcftc,&c. 

TROU 


SVR    LA    I.    :A    TIMOTH.  iFj 

TROISIEME     SERMON      SVR     LE 

SIXIEME    CHAPITRE. 

3  S;  aucun  enfeigne  autrement,  çy  ne  confent  aux  faines  paroles 
de  woHrc  Seigneur  U[us  Chrijl,  o'dla  doctrine  quicjl  félon  la  crainte 
de  Dieu, 

4  Iceluy  ejl  or gueilleux,ne fâchant  rien^mais  languijfant  entour 
queîlions  cf  débats  de  paroles ,  dcfquelles  s'engendre  enuie,  noifc,  in^ 
iures,mauuaifs  fifpicions, 

5  Vaines  difputations  d'hommes  qui  fnt  corrompus  d'entende- 
ment, (f  fnt priur^de  yerité,  reputans  pieté  eîlregain.  Sépare- toy 
de  ceux  qui  fnt  tels. 

6  Certes  pieté  auec  contentement  ejl  grand  gain. 

7  Car  nous  n'auons  rien  apporté  au  monde  ^  il  ne  faut  pas  douter 
lue  rien  dufin  en pouuons  emporter. 

nom  auons  à  retenir.  Et  de  fait,  nous  royont 
ce  <jui  en  eftaduenu,  &  que  cefte  menacc-ci  n' 
cft  pas  tombée  à  terre.  Car  au  lieu  c^uon  de- 
uoit  feruir  à  Dieu  en  paix  &  vnion,  les  hom., 
mes  ont  eité  comme  chiens  &  chats.  £t  qui  en 
a  cfté  caiifciînon  qu'ils  n'ont  point  acqutefcé 
pleinement  à  la  pure  dodrine  de  l'Euangile, 
mais  ont  voulu  contenter  leurs  fols  appétits» 
Dieu  leur  a  rendu  le  falaire,&  en  la  fin  le  com 
bledetout  malyaefté  adidufté,dont  parfe 
fairft  Paul  auisi  bien  en  ce  lieu ,  c'eft  que  les 
hommes  ont  eité  priuez  delà  verité.Combiea 
que  Dieu  euft  allumé  la  clarté  de  fon  Euanj^^ 
le  par  tout,  mcfmes  que  le  Seigneur  lefus  fuft 
comme  rn  folcilponr  illuminer  tout  le  mon- 
de,on  voit  lès  horribles  ténèbres  où  le  monde 
eft  plongé. Et  pourquoy  ?  C'eft  (comme  l'ay 
dît)le  payemét  de  ceux  qui  n'ont  point  receu 
la  grâce  qui  leur  eftoit  offerte,  mais  fe  font 
enyurezen  leurs  folies. Puis  que  le  monde  n'a 
point  voulu  fe  tenir  du  tout  à  la  parole  de 
Dieu,  &  ne  luy  a  point  rendu  l'obeiflânce  qui 
hiy  appartenoit,  mais  qu'vn  chacun  a  voulu  e- 
ftre  fage  en  fo»  cerueau  ,  il  a  falu  aufsi  qu'ils 
s'tfuanomflent  en  leurs  follet  inuentionS. 
Quelle  yurûngnèiie  a-ce  eftéquè  de  cefte  bc 
ftife  où  font  encores  les  Papiftesî  Si  les  cnten 
démens  n'cuffèntefté  du  toufpeniertis,  cela 
fuit-il  iamais  aduenu  ?  Apres  que  lefus  Clirift 
auoit  cftéanécé  ,  qu'onfe  fuft  addone  à  telles 
pouretez  &abominatiôs?  il  eftoit  inipofsible. 
CognoiflTons  donc  vn  iiifte  chaftiement  de 
Dicu.en  ce  que  la  vérité  a  cfté  comme  efteio- 
te  &  abolie  au  mondes  c'eft  pource  que  cha- 
cun a  voulu  eftre  fage  s'addonnant  à  fes  fan- 
taiics ,  &nes'eft-on  peu  tcnii  en  cefte  brid» 
d^obeiflance ,  pour  eftre  repcu  de  la  pafture 
laquelle  Dieuauoit  of{Vrte,comrae  ioutntilk» 

N.iii. 


'  Ource  que  de  nature  les  hô- 
'  mes  font  tant  addonnez  A  ce 
i  fte  folle  conuoitife  de  fça- 
uoir  toulîours  le  ne  fçay 
'  quoy  de  nouueau ,  ce  n'eft 
point  allez  de  les  aduertu 
que  h  parole  de  Dieu  nous 
doit  edifier,&  qu'il  ne  nogs  faut  point  amuû-r 
â  chofes  vaines,car  ce  ne  feroit  point  pour  def 
raciner  vne  maladie  qui  feroit  lî  profonde: 
tnais  il  eft  befoin  aufsi  que  nous  foyons  admo 
néftezde  fuirtoutet  cunolîtez  mauaaifes ,  & 
qui  ne  peuuentlînon  empoifonner  nos  âmes, 
&  les  desbaucherde  la  dodrine  de  falut  .  Et 
Toila  pourquoy  fainâ  Paul  en  ce  partage  ne 
dit  point  feulement, Que  ceux  qui  mettent  en 
auant  des  chofes  vaincs  i9e  inutiles,  ne  valent 
rien,&  qu'on  n'en  doit  tenir  conte,  mais  il  dit 
<jue  ce  font  gens  corrompus, priuez  de  vérité, 
infenfez  :  que  ce  font  pertes  qu'il  faut  fuir,  & 
qu'vne  doftrine  quand  elle  ne  tendra  point  à 
nous  édifier  en  la  crainte  de  Dieu  ,  non  feule- 
ment fera  fuperflue.mais  qu'elle  apportera  a- 
uec  foyvne  infedion  grande,  qu'il  y  aura  des 
fruidt  de  mefmes,  comme  il  parle  ici  d'enuie, 
de  contention,d'iniure,  &  chofes  femblables. 
Nous  voyons  |donc  l'intention  du  fainft  E- 
fprit, c'eft  qu'en  premier  lieu  no'  cognoifsiôs 
<jue  Dieu  ne  parle  point  à  nous  en  vain,  mais 
pournoftre  profit  S:  falut.  Secondement,  que 
fi  nous  appelons  choùs  vaines ,  comme  des 
fpeculationi  qui  ne  nous  peuuent  feruir  de 
tien,  en  la  fin  il  faudra  que  Dieu  nous  puniffe 
âcaufede  noftrecuriofité,&que  nousayons 
Boifes,debats,iniures,enuies  entre  nous, com- 
me c'eft  le  payementde  tous  les  curieux  qui 
oe  fe  contentent  pas  d'eftre  conduits  en  bon- 
ne £mph'dté .  Voila  <io«c  en  fommc  ce  que 


aS<> 


SERMON     XLVIir. 


».C«r.î. 
«7- 


ment  nous  la  receuos.ou  il  ne  tient  qu'à  nous. 
Voila  pour  vn  item .  Or  maintenant  laiiidè 
Paul  pour  la  fin  adioufte.Q»»  telUt  ge»t  tou- 
rnent la  pittéefiregain,  c'eit  à  dire  qu'ils  font 
meftier  &  marchandile  de  la  doftrinc  de  i'E- 
iiâgile,  comme  iî  la  religion  eftoit  vn  art  pour 
gagner. Il  y  en  a  donc  qui  eftiment  que  la  pie- 
té ne  foit  hnon  pour  remplir  leur  bourfe ,  dit 
fainft  Paul.  Or  quand  cela  y  ell,  il.ne  fe  peut 
faire  que  tout  ne  foit  peruerti  :  comme  aufsi 
quand  fainfl  Paul  protelte  qu'il  a  puremct  ad- 
miniftrérEuangile,ildit  qu'il  n'a  pas  elle  co- 
rne les  macquignons  qui  faident  la  marchan- 
dife,& la  fallîHent  pour  abulèr  les fimples.Par 
cela  il  monftreque  li  ceux  qui  ont  la  charge 
d'enfeigner.pretendent  àleur  profit,  il  faudra 
que  la  venté  foit  corrépue  mefchaniment  par 
eux  ^&  qu'ils  deuiendront  macquignons ,  au 
lieu  d'élire  miniftres  de  Dieu  .  V  oila  en  fom- 
me  où  faind  Paul  prétend.  Mais  notons  qu'i- 
ci il  ne  parle  point  feulement  à  vn  homme, 
mais  à  tous  en  gene^ral,  afin  qre  nous  rçceuiôs 
cell  adiuertilTement,  qu'en  efcoutaiu  ceux  qui 
fe  veulent  faire  valoir,  chacun  de  nous  fe  dé- 
çoit de  fon  bon  gré  ,&  ne  demandons  fiuon 
que  le  diable  nous  aueugle,&  qu'il  nous  tranf 
porte  .  Or  il  n'y  aceluy  qui  talchc  d'en  taire 
fon  profit, mais  tous  tédent  au  rebours. Q_uSd 
donc  le  faind  Efprit  nous  déclare  que  ceux 
qui  defguifent  la  parole  deDieupar  ambition 
ou  auarice, tournent  1,1  religion  en  gain,&  que 
ils  en  veulent  faire  foire  &  traffique  de  nos  a- 
Bies,  nous  voyons  que  quiconques  s'addonne 
à  eux, ne  cercne  que  fa  perdition  &  ruine  .  Or 
ceci  eft  biendigned'ellienoté  .pource  que 
(comme  i'ay  défia  dit)  n'eftoit  que  nousa- 
uons  horreur  de  nous  ietter  ainfi  aux  liens  de 
Satan,il  n'y  a  celuy  qui  n'ait  les  aureiUcs  fré- 
tillantes :  Se  nous  expérimentons  par  trop  ce 
qui  eft  dit  en  la  féconde  Canonique  de  faiiicl 
Pierre  ,  c'eft  que  les  aureilles  nous  chatouil- 
lent toufiours,  apperans  nouveauté,  &  chofes 
eurieufes  .  Maiv  quand  nous  oyons  que  ceux 
qui  defguifent  ainfi  la  parole  de  Dieu ,  font 
marchans  de  nos  âmes,  (  comme  aulsi  fainft 
P;crre  en  traitte)^  qu'ils  traffiquentde  nous 
&  de  noftrefalut, voire  fansconfcience,&que 
ils  ne  font  nul  fcrupule  de  no'  précipiter  aux 
enfers,  d'abolir  mefmes  le  prix  qui  a  elté  ex- 
pofé  pour  noftre  redemptiô,  il  eft  certain  que 
ceux-là  ruinent  les  âmes,  &  fe  mocquent  aufsi 
du  fang  de   noftre    Seigneur   lefus   Chrift. 
Quand  nous  oyons  cela.ne  deuôs-nous  point 
auoir  endeteftation  telsdofteurtîEtau  refte, 
l'expérience  nous  monftre  aflti  que  nous  dé- 
lions   retenir  ceft   aduertiflement  de   faindl 
Paul.  Car  comment  eftce  qu'on  a  démené  la 
ieligion:-N'ena-on  point  fait  comme  vne  foi 
rejEn  la  Papauté  qu'eft-il  aduenuf  Les  Sacre- 
mens  font  expo  fez  en  vente  ,&  tout  le  refte 
de  noftre  falut  eft  là  comme  taxé  à  prix  :  la- 
nuis  ludas  n'a  phis  vendu  le  Fils  de  Dieu  en 
{»  perfonne,que  lePape  Si  toute  cefte  puanci- 


fe  de  fon  Clergé  ont  vendu  lex  grâces  de  fon 
faincl  Efprit,  &  tout  ce  qui  appartenoit  à  fon 
office,  &  ce  qui  eftoit  propre  pour  noftre  fa- 
lut. Quand  nous  voyons  cela  ,  n'auons-nou» 
point  à  nous  tenir  fur  nos  gardesrOr  défia  il  a 
efté  déclaré  que  ccn'atftéqu'vne  iuUe  puni- 
tion de  Dieu  fur^'ingratuude  du  monde.Au- 
tant  auiourd'huy  nous  en  pourra-il  aduenir, 
&  encores  pis.Et  ainfi  penfons  à  nous. Mais  a- 
pres  que  fainû  Paul  a  condamné  ce  vice-la  en 
ceux  qui  corrompent  la  vérité  de  Dieu ,  il  ad- 
ioufte  en  vn  fens  tout  contraire ,  qu'il  eft  bien 
dit  queUpitti  eft  yn grand  gain.  Voire,  mais, 
non  pas  ainfi  qu'en  difpucent  ceux  qui  font 
maichans  des  âmes.  Qupy  donc  ?  C'eft.que  & 
nous  craignons  Dieu  ,  nous  fommes  aflVz  ri- 
chesjcaril  n'y  aura  rien  qui  nous  défaille:  vâi 
la  vne  pleine  félicité  &  parfaite. Ainfi.d'vn  co 
fté  faiiid  Paul  accufe  les  faux  dofteurs  qiri 
traffiquentde  la  parole  de  Dieu.&l'expoftnt 
en  vente' pour  en  faire  leur  profit  &  remplir 
leur  bourfe  :  de  l'autre  cofté  il  nous  monftre 
comme  nous  gagnerôs  beaucoup,  quand  nous 
pourrons  appliquer  à  noftre  profit  fpintuel  la 
doûrine  de  falut  :  car  voila  ou  confifte  tout 
le  bien  des  homes.  Nous  dirons-tous  que  nou» 
appetons  d'auoir  félicité  .  Or  il  n'y  a  qu'vn 
feul  moyen,  c'eft  que  Dieu  nous  reçoyue  i 
foy,qu'cftans  fous  ta  protection ,  le  tenans  c5 
me  noftre  Peie,  nous  luy  depiandioiis  d'vn  co 
fté  noftie  pain  ordinaire:  &  puis, qu'il  nous  de 
tende  contre  tousennemis:  finalement, qu'il 
nous  paidonnenos  péchez, &  qu'il  ne  permet 
te  point  que  iamais. nous  penf  ions.  Q£and 
donc  nous  aurÔJ  cela,  c'eft  le  comble  &  la  per 
feûipn  de  toute  ftlicité  &  contentement.' 
Si  donc  les  hommes  pouuoyent  bien  appli» 
quer  la  religion  à  leur  profic.il  eft  certain  que 
elle  fcroit  vr  gain  ineîtimable  ,  &  vn  threfor 
infini .  Mais  il  y  en  a  qui  ne  penfent  finoai 
leur  bourfe  &  i  leur  ventre,&  ceux-là  peruer- 
tilfent  tout .  Or  donc ,  après  que  fauaft  Paul 
nous  a  exhortez  à  fuir  ceux  qui  depiauent  & 
falfifient  la  pure  Cmplicité  de  l'Euangilcà 
caufe  qu'ils  demandent  de  faite  leur  profit,  tt 
de  s'auancer  félon  le  monde  ,  iladuuifte  que 
il  nous  faut  .cercher  vn  autre  gain  plus  excel- 
lent &  plus  noble  que  ceftuy-la.  Vray  eft  que 
Dieu  ne  nous  donne  point  ia  Parole  ,  afin  que 
nous  demeurions  poures  &  vuides  ,  il  nous 
veut  enrichir  en  tout  &  pat  tout .  Mais  com- 
ment cft-ce  }  Ce  n'eft  pas  que  nous  ayons  nos 
cupi,ditez  qui  font  infatiables ,  Se  que  chacun 
vueille  que  Dieu  luy  complàife:  mais  conten- 
tons-nous de  ce  qu  il  nous  donnera  ,  &  alors 
rien  ne  nous  defaudra  pour  vne  pleine  félici- 
té.Et  voila  pourquoy  il  adioulte,  contenttmêt. 
Il  eft  vray  que  ce  mot  fe  peut  prendre  en 
deux  fortes:  car  (comme  on  dit  en  prouerbe) 
il  n'y  a  riche  que  le  content .  Ainfi  donc  nous 
pourrons  expofer  que  la  pieté  eft  vn  grand 
gain,'voire  fi  les  hommes  ne  lafchent  point  la 
^ride  à  leurs  (ouoitifcs.Cai  alors  s'ils  fe  trâf» 

joitcnt 


SVRLAI.    AT 

portent  par  leurs  concupifcences  i  voila  vnc 
.  fournaife  qui  iette  &  feu  Se  flamme,  &  le  bois 
n'y  faut  iamais.Mais  lî  nous  pouuons  nous  ré- 
primer ,  tellement  que  nous  portions  patiem- 
ment ce  que  Dieu  nouv  donne  ,  voila  comme 
la  pieté  nous  fera  vn  grand  gain.  Or  il  y  a  auf 
fi  le  contentement  de  ce  que  Dieu  nous  donne 
ce  qu'il  fçait  nous  eftre  propre  :  comme  delîa 
nous  auons  veu  que  la  piete  ha  les  promefles 
non  feulement  de  la  vie  aduenir.mais  aufsi  de 
la  vie  prefente.Qijand  donc  nous  chemineras 
en  la  crainte  de  Dieu,  nous  ferons  non  feule- 
tnét  aûeurezde  noUre  falut  fpirituel.iiiaisauf 
fi  cependant  que  nous  aurons  à  cheminer  par 
ce  monde,  combien  que  nous  y  foyons  eftran 
gers,&  que  nous.y  foyons  enuirônez  de  loups 
Se  de  beftes  lâuuages.combien  qu'on  nous  op- 
prime par  iniures  &  violences, toutesfois  fi  eft 
ce  qu'eftans  en  la  protetiiondc  noftreDieu, 
nous  ne  pourrons  faillir  d'auoirce  qu'il  nous 
faudra. Il  eft  vray  que  nous  ferôs  traittcz  mai 
grement  quelquefois:  tant  y  a  que  Dieu  nous 
a  promis  d'auoir  le  foin  de  nous,  &  monftrera 
P/* .34.11  qu'ainfi  eft.Et  voila  pourqiioy  il  eft  dit,  Que 
les  lions  c  jurent  quelquefois  affamez  ,  com- 
bien qu'ils  foyentdes  belles  rauilîànces  ,  tant 
y  a  qu'ils  ne  pourront  pas  toulîours  trouuer 
leur  proye.  Or  l'homme  fidèle,  combier.  qu'il 
n'ait  ne  dents  ni  ongles ,  &  qu'il  ii'vfe  point 
d'outrage.qu'il  ne  rauilTe  à  pcrfonne  fa  fubfta 
ce,  tant  y  a  qu'il  fera  repeu  de  Dieu,  voire  aa 
temps  de  famine.  Nous  voyons  donc  mainte- 
nant quçUe  eft  l'intention  defainiîl  Paul.c'eft 
denousinonftierque  les  homes  fout  bien  pçr 
uert  &  malins  quand  ils  appliquent  à  leur  gain 
temporel  vue  chofe  fi  precicufe  comme  eft  la 
doâiinede  r£uangile.£tpourquoy?Voila  oii 
gift  toute  noftre  félicité, que  Dieu  no'  aduoue 
pour  fes  enfans,&  qu'il  fe  déclare  noftre  Père. 
Or  donc  notons  bien  que  quand  Dieu  nous 
aura  ainfi  enrichis  ,  puis  que  nous  auons  tout 
cequ'ileft  pofsiblede  foubaiter  pour  noftre 
bien  parfait ,  que  voila  où  noftre  ingratitude 
fe  monftre.quand  nous  reiettons  vn  tel  thrc- 
for,  &  que  ceux  qui  doyuent  réceuoir  vne  fé- 
licité fi  grande  comme  Dieu  leur  donne,  s'en 
vontamuferàdes  menus  fatras ,  voire  &  veu- 
lent remplir  leurs  bourfes.C'eftcôme  fi  nous 
voulions  faire  foridre  en  abyûne  les  benedi- 
ftionsde  Diçu ,  pour  en  faire  d'vne  liurevn 
fcrupule.ou  moins.  Qwnddonc  les  hommes 
aneantilTent  amfi  les  grans  biens  &  ineftima- 
blesq  Dieu  leur  fait  &  leardiftribue,  ne  faut- 
ai. ^..VVjïlpas  qu'il  y  ait  vne  grande  malice  eneuï?  Et 
ainfi  apprenons  de  chercher  tout  noftre  bien 
&  noftre  heur  en  feruant  à  Dieu ,  voire  d'au- 
unt  que  nous  ferôs  heureux  &  en  la  vie  &  en 
la  mort.polTedâs  noftre  Seigneur  lefusChrift: 
_, .  I  jj  corne  aufsi  fainft  Paul  déclare  que  tout  le  re- 
'■'•  •  fte  luy  a  efté  fiente  &puâtiVe;ray(dit-il)cfti- 
me  tout  le  refte  non  feulement  dômage,  mais 
aufsi  ic  Pay  eftimé  puantife  &  ordure.ll  met  le 
dommage  :  ppurquoy?  Car  quelque  fois  pour 


1  M  O  T  H. 


aSy 


fauuer  noftre  vie  nous  quitterons '&  cheual  & 
malette,&  tout  ce  qu'il  ya.Vn  marchad  quâd 
ilfe  voit  entre  les  mains  des  brigans.il  ne  fait 
peint  fcrupule  de  ietter  la  bougette  s'il  s'en 
peut  fuir.Âinfi  cneft-ildeceui  qui  font  en  1« 
mer, fi  la  tempefte  les  prefle  par  trop, ils  iettét 
&  marchâdife  &  viduailles  pour  venir  à  bord, 
leur  vie  leur  eft  en  plus  grande  recommanda- 
tion que  les  biens  de  ce  monde.  Sainû  Paul 
fuyuant  cela,dit  qu'il  a  volontairement  renoa 
ceikce  qui  luy  eftoit  defirable  au  parauant, 
voire  eftimant  dommage  tout  ce  qui  l'empef- 
choit  de  venir  à  lefusChrift.  Mais  encorct 
pource  que  quâd  vn  homme  iette  fa  bougette. 
Se  qu'il  voit  qu'il  eft  appouri ,  il  ne  Jaifle  pa* 
de  regreter  ce  qu'il  a  perdu, &  fe  dc/pite  &  fe 
fafche.combien  qu'il  ait  mieux  aimé  faire  vne 
telle  perte  pour  fauuer  fa  vie.quede  s'expolèr 
à  la  mort.pour  cefte  caufe,di-ie,S.Paul  adiou* 
fte  que  tant  s'en  faut  qu'il  ait  rien  regretéde 
tout  ce  qu'il  aimoit  au  parauant,&  qu'il  auoic 
en  grande  reputatiô,que  l'ay  eftimé  cela  (dit- 
il)  comme  fiente,  comme  charongne  ,  comme 
chofe  puante, afin  que ie  pofledafle  monSei-  fhUip.t. 
gneur  lefus.Etpourquoy  ?  Il  met  la  raifonen  ctt. 
vnau:rc  paflage ,  Que  nous  gagnons  &  en  la 
vie  &  en  la  mort, quand  nous  pofledons  noftre 
Seigneur  leftis  Chrift,&  fommes  membres  du 
Fils  de  Dieu,  qui  eft  noftre  héritage.  Et  c'eft 
ce  qui  auoit  efté  dit  au  parauant ,  mefmes  par 
les  Prophetes,deuantqu'il  y  euft  vnereuela- 
tionfi  pleine  comme  auiourd'huy  elle  nous 
eft  donnée  en  l'EuangilcDieu  eft  mon  parta-  pc^_  .g 
ge,&ray  euvnebonneefchcutê,!emeconten  ^  {, 
teray  de  luy. Puis  qu'ainfi  eft.apprcnons  donc 
auiourd'huy  de  chercher  toute  noftre  félicité 
à  nous  addonner  à  Dieu  ,  &  contentons-nous 
qu'il  nous  promet  d'eftre  noftre  heritage.que 
nous  fouffriôs  aufsi  qu'il  nous  poflède,&:  qu'il 
nous  conduife  comme  fiens ,  &  qu'il  cheuifle 
de  nous.quc  nous  ne  foyons  plus  en  noftre  li- 
berté,mais  du  tout  dédiez  à  fon  feruice. Voila 
pour  vn  item.  Et  afin  que  nous  ayons  meilleur 
courage.apprenons  de  goufter  cefte  promefle 
que  l'ay  défia  touchée  ,  c'eft  que  Dieu  nous 
tendant  la  main  pour  nous  conduire  à  la'  vie 
celefte,  nous  dit  qu'il  ne  nous  de  faudra  poinc 
au  milieu.  Si  nous  auionsfeulement  cela  ,quç. 
l'héritage  du  Royaume  des  cicox  nous  eft  ap- 
prefté,nedeuri5s-nous  point  furmôter  toutes 
les  tentations  de  cemondePne  feroit-ce  poinc 
aflez  pour  adoucir  toutes  trifteflès  &  fafche- 
ries?  Mais  encores  quand  il  nous  eft  déclaré 
que  Dieu  pouruoira  à  toutes  nos  necefsitez, 
&que  d'autant  que  no^is  femmes  infirmes, que 
il  nous  fupportera  :&  combien  qu'il  ne  nous 
traitte  point  félon  nos  appetis  (comme  aufsi 
tl  ne  nous  feroit  pas  vtile,ainsil  faut  qu'il 
nous  retranche  nos  morceaux)  neantmoins 
qu'encores  il  fe  monftrera  toufiours  Père,  voi 
re  enucrscescorpscorruptibles:combicn  que 
nos  corps  ne  foyentque  charongnes,  toutef- 
iôis  que  Dieti  encores  veille  pour  les  confcr- 

N.iiii. 


2S8 


SERMON       XLVIII. 


lier  quand  il  nous  donc  nourriture  euuntc]ue 
il  nous  eft  meftierrquand  nous  aiions  cela,  ne 
deuôs-nous  point  nous  inciter  tant  plus  pour 
nous  addonnerdu  tout  àDieu  ,  renonçans  à 
toutes  mefcliantes  cupiditezqui  nefont  que 
Boui  plonger  aux  aby  fines  de  mort?Or  cepen 
dant  pource  qu'il  eft  difficile  que  les  hommes 
fe  retienent^  qu'ils  dontent  tellement  toute 
auarice.que  ri>.nneles  empefche  d'afpirerau 
Royaume  des  cieux,  fainû  Paul  dit  ,Ô»fnous 
a'auons  ritnaf forte  tn  ce monde,zp'  ^t' '''ft  il"> 
fe  notoire  que  nous  ;>'<»  pouuons  rien  emporter, 
Qjie  faut-il  donc  finon  de  nous  contenter  d'e 
ftre  vertus  &nourris?Sain£l  Paul  ne  parle  poît 
ici  félon  la  perfection  qui  doit  eftre  aux  en- 
fans  de  Dieu, mais  il  nous  veut  faire  contem- 
pler ce  que  nous  cognoiflons  de  noftre  fens 
xuturel  :  ce  qui  fera  aufsi  confefle  entre  les 
Payens  &  incrédules.  Les  Payens  fans  auoir 
ouy  vn  feul  mot  ne  deLoy  ncd'Euagile,dir5t 
bien  que  nous  n'auons  rien  apporté  en  ce  mon 
de,&  qu'il  nous  en  faut  retourner  tout  nuds: 
ils  diront  aufsi  que  quand  nous  fommes  nour- 
ris &  veftus.il  nous  doit  fuffire.Or  cependant 
BOUS  ferons  profefsion  delà  vie  fpirituelle,il 
ueferaqueftion  que  de  parler  de  Dieu  entre 
nous,&  neantmoins  nous  fommes  fî  addorinez 
au  monde.qiie  ce  qui  doit  eftre  cognu  des  plus 
idiots  &  des  plus  beftes,nous  efchappe  ,  que 
■  BOUS  n'y  penfons  point,que  nous  fommes  tel- 
lement tranfportcz  d'auarice,qu'vn  chacun  de 
Ère  &  appete  fans  fin  &  fars  cefle,  &  ne  regar 
«Ions  pomt  pourquoy  c'eft  que  nous  defirons 
d'auoir  ne  d'amafler.  Maintenant  donc  nous 
auons  la  droite  intention  de  fainft  Paul ,  c'ert 
qu'il  nous  a  voulu  ici  propofer  ce  qui  de  na- 
ture doit  eftre  tout  notoire  aux  hommes,  afin 
^ue  nous  ne  prétendions  nulle  excufe  eu  nos 
«upiditez.Mais  encores  afin  q  ceci  foii  mieux 
cognu, notons  quand  faind  Paul  dit,Q[<tr  nous 
femmes  tonten)  ayans  tfeqHoy  nous  reftir,  &•  de- 
tjttoj  manger  :  qu'il  nous  ramené  à  ce  qui  nous 
<loit&  nous  peut  aufsi  fuflîre  pour  maintenir 
noftre  vie.  Ceci  feroit  obfcur  s'il  n'eftoit  de- 
tiare  plusaulong.il  y  a  premièrement  les  ne 
«efsitez  de  noltre  vie  :  nous  ne  pouaons  pas 
sous  palTer  eo  ce  monde  de  boire  ne  de  man- 
ger,nous  auôs  befoin  aufsi  d'eltre  couuerts  & 
veft^ls:voila(di-ie)ce  que  nature appete&  de 
nfande.  Mais  il  y  a  les  cupiditez  des  hommes, 
^ui  n'ont  ne  fin  ne  mefure.Vn  homme  n'appe 
tera  pas  fimplemét  le  boire  &  le  nianger,mais 
il  appetera  des  friandifes  ,  &  beaucoup  de  vo- 
luptez&  delices:âr  puis  il  ne  fe  côtente  point 
tncores  qu'il  ait  dequoy  fe  nourrir. Et  en  cela 
voit-on  que  nous  fommes  pires  beaucoup  que 
les  bcftes  brutes:  car  vne  beile  fuit  fon  natu- 
icl.Il  eft  vray  qii'vne  befte  demandera  paftu- 
Te:quâd  elle  eft  lafle.elle  fe  veut  repoferrmais 
f  n  homme  n'ha  nulle  raifon  en  foy  ,&  quand  il 
«ft  «ueftion  d'appeter.c'eft  toufiours  à  recom 
(Dcncer  ,  qu'encores  que  Dieu  nous  donne  au 
liauble  Si  ai»  triple  ce  (^u'il  ngus  faut,  fieft-ce 


que  nous  en  voudrions  encorej  cent  fois  au- 
tant: vn  monde  ne  fuffira  point  à  vn  feul  hoin 
me,  il  faudroit  que  Dieu  cieaft  des  modes  nou 
ueaux  pour  chacun  de  nous  s'il  nous  vouloit 
contenter.Etainfi(comme  i'ay  dit)c'eft  touf- 
iours à  recommencer.  Et  notons  bien  quand 
ùitiû  Paul  dit  ici,No»^  fommes  tontius  ayans  * 
Loire  iy  a  manger,Zr  eftahs  -y»/î«/,qu'il  lignifie 
que  fi  nous  ne  cognoiflons  cela,  nous  fommes 
comme  des  monftres,renon  çans  à  ce  que  nous 
deuons  lentirde  nature,  ^  fi  nous  auions  quel 
queattrempanceen  nous.chacun  fe  tiendront 
en  quelque  mefure.  Qni  eft  donc  caufe  que 
nous  fommes  ainfî  desbordez?C'eft  qu'vn  cha 
cun  oublie  ce  qu'il  luy  faut, nous  ne  regardât 
point  à  noftre  necefsité  ,  ni  à  l'vfage  légitime 
des  biens  de  Dieu,  mais  nous  voulôs  eftre  con 
fits  en  toutes  nos  délices.  Voire,  mais  là  il  n'y  i(_f„^  j.^ 
a  point  de  fin  :  comme  faind  Paul  aufsi  en  vn  j  a. 
autre  lieu  parlant  de  la  folicitude  que  nous  de 
uons  auoirde  cefte  vie,  &  qu'il  nous  faut  fou- 
cicr  de  nos  corps, il  dit ,  Non  point  pour  les 
conuoitifes.li  met  la  mefme  diftinûion  de  la- 
quelle nous  traittons  maintenant.  Car  il  nous 
fera  bié  licite  &  permis  de  fongner  nos  corpsi 
&  Dieu  n'eft  pas  fîauftere  enuers  nous  qu'il 
ne  vueille  qu'vn  chacun  regarde  ce  qui  luy  eft 
propre  pour  fa  fanté  ,  que  nous  n'vfionsdes 
commoditez  qui  nous  font  mifes  entre  mains  : 
mais  cependant  fi  nous  lafchons  lajbride  à  nos 
cupiditez  ,  il  n'y  a  nullt  fin ,  nous  fommes  du 
tout  perdus  &abyfmez.  Et  tant  y  a  qu'enco- 
res ne  fuffit-il  point  d'auoir  cefte  nioderatio 
telle  que  fainô  Paul  la  met  ici.car  il  nous  faut 
pafler  plus  outre,  e'eftafçauoirqu'écores  que 
nous  n'ayons  ni  à  boire ,  ni  à  manger,  toutes- 
fois  que  nous  ne  laifsions  pas  de  nous  afluiet- 
tir  à  Dieu.car  il  fçaura  bien  conuertir  les  pier 
res  en  du  pain, quand  il  luy  plaira, fi  nousauôs 
faute.Au  refte,il  nous  fçaura  bien  aufsi  nour- 
rir fans  pain  &  fans  eau:  il  a  fait  tomber  la  man 
ne  du  ciel  pour  nourrir  le  peuple  d'Ifraelau 
defert  :  il  a  bien  au  fsi  nourri  Moy  fe ,  il  a  bien 
nourri  Elie  &  noftre  Seigneur  lefus  Chrift 
fans  pain  ni  fans  manne,  m  (ans  autre  moyen. 
Et  de  faift,  nous  auons  la  doctrine  générale, 
que  nous  ferons  fubftantcz  toufiours  par  la 
parole  de  Dieu  procédant  de  fa  bouche,  qu'il 
fuffira  qu'il  nous  maintiene&conferue.enco- 
res  que  tous  les  moyens  inférieurs  nous  defail 
lent.  Et  pourtant ,  fi  les  fidèles  ont  faute  de* 
biens  de  cemonde,fi  faut -il  qu'ils  fe  remettét 
à  la  bonne  volonté  de  Dieu  ,  &  qu'ils  pratti- 
quent  ladoftiineqee  met  ftinft  Paul  aux  Phi  thi.^>t% 
lippiens,d'eftre  poures  &  riches. Quand  Dieu 
nous  donne  abondance,  que  iious  en  vfions  en 
toute  reuerence  &fobricté  ,  fi  nous  auons  de 
quoy  manger, que  ce  ne  foit  point  pour  appe- 
ler les  frians  morceaux.mais  que  nous  aduiliô» 
à  ce  que  Dieu  nous  permpt ,  &  à  quelle  fin  il 
nous  a  donné  cefte  abondance-la.  C'eft  donc 
vne  fcience  grande  &  fort  difficile  àpratti- 
quer.de  fcauoir  eftre  riche,  t'eft  à  dire  i'vfer 
^  *  fobre 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH 


Kom.; 


X\S9 

allons  nos  appetis  qui  font  in/Jtfables:&  tou- 
tesfois  le  corps  d'vn  chacun  de  nous  ne  peut 
pas  tout  cns:;ou!Frer  :  qu'vn  homme  fecrcue, 
qu'il  cn^Ioutiflc  tout  ce  qu'il  pourra,  /ieft-ce 
que  le  plus  robufte  du  monde  ne  pourra  pas 
tant  marger  que  fera  vn  bœuf  ou  vn  cheual: 
S:  cependant  nous  n'auons  nul  contentement. 
Noiu  voyons  donc  comme  les  hommes  s'ou- 
blient,&  quand  ils  auront  confefie  de  bouche, 
&  qu'ils  coçiioiflrctccftedoftrine,  &  dont  ils 
font  côuaincus, qu'ils  lamettrôt  fous  le  pied. 
Et  qui  en  c/l  caufe  linon  qu'ils  s'aueuglent  en 
leurs cupiJitez  excefsiues.'Et'ainfinous  neper 
dons  point  temps  reduifant  en  mémoire  ce 
qui  eft  ici  dit ,  Ç>»f  nrus  n'aurns ritn  apferté  en 
cemondf.Et  en  premier  lieu.notons  ce  que  les 
Payés  mefmesont  bien  fceu  mettre  par  efcritj 
que  nous  ayons  &  faim  &  foif ,  encores  que  que  Dieu  a  voulu  nous  déclarer  que  nous  foin 
nous  ayons  froid ,  qu'il  ne  faut  point  que  la     mes  les  plus  miferables  qui  foyent  ,  à  caufe 

que  nous  venons  ainfî  tous  nuds  du  ventre 
delamcre.  Il  eft  vray  queles  autres  belles 


fobrement  des  richclTes:  mais  il  faut  aufsi  que 
nous  fçachion<;  que  c'tft  d'eflre  poures,&:ce- 
ûe  fcicncen'eftpas  moindre  que  l'autre.  Car 
nousvoyons  cômc  ceux  qui  ont  faute  de  qnel- 
qi#  chale  fe  chagrin|'nent:&;  qui  pis  eft,eiico- 
les  q  Dieu  ne  nousdef.iillc  poiiit  ai'.iourd'huy 
&demain,  fi  nous  n'auons  longueprou!Ùon,il 
n'cftqueftion  que  de  murmurer  courre  Dieu: 
voila  comme  en  font  la  plus  part. Puis  qu'aintî 
eft  donc  que  noftre  nature  ell  ainh  infirme,  & 
que  nou;  fommes  lî  pleins  d'infidtlité,  &  que 
la  rébellion  procède  de  là  ,  que  nous  ne  nous 
pouuons  contenter  de  Dieu  finon  qu'il  nous 
iette  à  pleine  palee  tout  ce  que  nous  délirons, 
voila  pourquoy  l'ay  dit  qu'il  nous  faut  paflcr 
plus  outre, &  que  ce  n'eft  point  aflcz  qu'on  fe 
contente  d'eftre  vertu  &  nourri,  mais  encores 


lyons  rroia,  qu  iJ  neraut  point  q 

fiance  qnenousauonscn  Dieu,defaille,  corn 

,    „  me  aufbi  fain£t  Paul  en  parle  au  huitième  des 

''   Romaini:Puis  qu'ainfi  eft  que  Dieu  s'ert  con- 

ioint  à  nous  en  noftre  Seigneur  lefus  Chr'ft, 

&  que  nous  fommes  aireurezde  (a  bonté  pa- 


viendroBt  bien  toutes  nues, mais  elles  appor- 
tent vne  peau  qui  leur  fert  d'accouftrement. 
Mais  l'homme  ha  faute  de  vefture  ,  Ik  cepen- 


ternelle,il  il  n'y  a  rien  qui  nous  puiflc  feparer    dant  il  n'en  ha  point.  Voila  dôc  Dieu  qui  nous 


de  cela.  Pourquoy  ?  Encore'  qu'il  nous  faille 
cheminer  tous  nuds  ,  encores  qu'il  nous  faille 
eftre  affamez, qu'il  nous  faille  fftre  affligez  ,& 
pafler  par  le  glaiue  (dit-il)  fi  eft-ce  que  nous 
deuons  tjufionrs  eftre  refolus  ,  d'autant  que 
Dieu  eft  noftre  Père, qu'il  ne  permettra  point 
que  nous  foyôs  tentez  outre  nit  fure,mais  que 
il  pouiuoi.ra  aux  necefsitez  aulquelles  nous 
ferons,  quand  il  cognotllra  que  nous  ne  fçau- 
Tons  plus  que  deuenir.il  nous  donneja  la  ver- 
tu de  les  furmonter.  Voila  à  quoy  doyiét  s'ar 
lefter  les  enfan:  de  Dieu.  Mais  cependant,  ft 
nous  n'auons  contentement  d'eftre  veftus& 
nourris, non  point  félon  nos  fouhaits.mais  fe 


monftre  quelle  eft  noftre  poureté  &  noftre 
indigerce.Orilya  vne  autre  chofe  plus  hau- 
te que  les  Payens  n'ont  pas  obferuee,c'eftque 
Dieu  nous  a  voulu  apprédre  de  recourir  à  luy, 
quand  nous  fommes  ainfi  deftituez  de  tout  ce 
qu'il  nous  faut. Il  eft  vray  qu'vn  enfant  fçaura 
bien  allaitter  fi  mère  :  mais  tant  y  a  que  û  on 
le  laifle, il  défaut, il  ne  fçauroit  chercher,  non 
pas  prendre  ce  qu'il  aura  de  befoin.  Mais  les 
oifeaux  fi  toft  qu'ils  font  efclos  ,  commencent 
à  becqueter.'v-  les  beftes,  combien  qu'elles  al- 
laitent,c'eft  à  dire  les  petis,fi  eft-ce  qu'enco- 
res  ont-ils  quelque  fnduftrie,ils  fuyuent  la 
mere^uand  elle  s'en  ira  ,  ils  courent  après, & 


Ion  la  neccfité.  il  eft  certain  qu'on  nous  doit    duprciTi;crcoup  ils  commencent  à  manger  & 


reiiuoyer  aux  beftes  brutes  pour  profiter  en 
leur  efchole  ,  nous  ne^pmmes  pas  dignes  que 
Dieu  fc  monftre  dofteur  enuers  nous  quand 
nous  auons  vne  cupidité  plus  exccfsiue  q  les 
beftes  brutes:  les  lions  mefmes  nous  pourront 
redarguer  de  leur  part,&  nous  pourrôt  e  nfei- 
gner  noftre  leçon. Venons  inaintcnat  à  ce  que 
iainft  Paul  a  mis  pour  fondement,  c'^/?  o«? 
nous  n'auons  rit»  apporté  en  ce  monde,  &  qii'auf- 
Ji  il  eft  certain  ,  c'eft  une  chofe  triu!e  p.itcnte  nue 
nous  n'en  pottuom  rienempnrter.  Il  eft  vray  que 
de  prime  face  ceci  femble  par  trop  vulgaire: 
&  de  faiftles  poures  aueugles  l'ont  confelTé: 
mais  tant  y  a  que  les  hommes  mbnlhent  bien 
en  ce  qu'ils  font, que  ceci  s'efcoule  de  leur  me 
moire, &:  qu'ils  n'ont  point  cefte  pcrfuallô  bié 
imprimée  au  cœur.  Il  eft  vray  que  fans  fcinti- 
fe  tous  diront  que  nous  ne  pouuons  rien  reni- 
porterd'ici,comme  nous  n'y  auons  rienappor 
tc:maiç  cependant  regardons  comme  les  hom 
mes  foiit  tranfportcz  pour  attirer  tout  à  eux, 
qu'vn  chacun(coramei'aydit)voudroitauoir 


à  le  pouruoir.Et  cependant  nous  fommes  po- 
ntes créatures  qui  défaillons  du  tout.  Dieu 
par  cela  nous  inftruit  à  recourir  à  luy,  &  y  a— 
Hoir  toute  noftre  confiance.  Or  puis  qii'ainlî 
eft  qu'il  fe  monftre  Pcredes  créatures  humai- 
nes,&  qu'il  les  nourrit  &  fubftante  après  qu'il 
les  a  mifes  au  monde.voire  du  temps  qu'elles 
ne  pcuiient  pas  remuer  vn  petit  doigt,  pour 
chcrclier  quelque  fccours,tn  cela  n'auôs-nouï 
pas  fiffifante  approbation  que  Dieu  ne  nous. 
defaudra  iamais,  voire  fi  nous  pouuons  nous 
appuyer  fur  luy  ,  &  y  auoir  noftre  refïige? 
Nous  voyons  maintenant  combien  cefte  do- 
ftrine  eft  vtile  quand  nous  la  fçaurons  bien 
prattiquer  ,  c'eft  afçauoir  que  nous  n'auons 
rien  apporté  en  ce  monde. Car  nous  cognoiC- 
fons  d'vne  part  n  -.iire  m  fere  :  &  d'autre  part 
la  foîicitude  qtie   Dieu  a  eue  de  nous  des  le 
commenccmert  ,  &  quedetîa  du  ventre  de  la 
mère  il  nous  a  monftre  qu'il  a  fait  tel  office 
de  père  ,  que  nous  poiuions  b'en  nous  fier  en 
luv  pour  toiifiours  en  acte  ndre  iecours,  &  que 


VU  monde  à  loy. Et  qui  eft  caufe  de  cela;  Nous    il  ne  nous  defaudia  en  rien  quand  nous  af» 

O.j. 


1.90 


SERMON     XLVIII. 


prendrons  de  recourir  i  luy  .Aa  refte, quand  il 
eftdit  àloppolïte  ,  Q»?  "»«•»  »«■  pouifons  rien 
fjn  farter:  ceci  nous  doit  eftre  encores  remé- 
moré. Carnons  Ibmmes  libeite?  que  nous  ne 
pt^nfons  point  à  la  mort ,  comme  il  eft  dit  au 
t[ta.^9.  Pfeaume  49, qu'on  verra  tous  les  iours  les  hô- 
tf.  mes  mourir,  &  qu'on  les  traînera  II  comme 

troupeaux  de  moutons:  &  bien, nous  Içaurons 
bien  parler  de  la  fragilité  de  no ftre  vie, quand 
nous  voyons  que  ieunes  &  vieux  dccedêt.He- 
laslce  n'cft  rien  quede  nous.  £t  au  refte,que- 
"  cft-ce  de  noftre  lantérSi  nous  fjinmes  auioiu- 

d'huy  lains.demaiunous  ferôs  malades.  Vray 
eft  qu'il  nous  femble  bien  que  nous  deuons 
triompher  &  tlorir  :  mais  Dieu  le  mocque  de 
BOUS  Se  de  nos  toiles  entreprinléi  .  Et  quand 
nous  voyons  nollre  vie  eftrc  iî  brietue  &  li  ca 
duqucpourquoyne  fe  contente-on  de  ce  peu 
que  Dieu  nous  donneîBriet.nous  ierons  tous 
crans  docteurs  quand  il  eft  queftion  de  pref- 
cherdelabriefueté  de  noftre  vie:  raaisquoy 
qu'il  en  l'oit,  les  enfans  monllrent  qu'ils  fuy- 
ucnt  le  train  de  leurs  pères  ,  comme  dit  là  le 
Prophète  ,  quand  nous  auons  vcu  les  hommes 
T/M.45).  £jij-ç  jjg  jj  hautes  entreprinfes ,  Se  que  Dieu 
'■*'  leur  coupe  la  broche,&  qu'il  leur  mcM.ftre  que 

tout  s'en  va  en  fumée  ,  ceux  qui  ont  apperceu 
cela,&  le  peuuent  dire  aux  autres, n'y  pealént 
point,  ils  font  tellement  tranfportcz  de  cefte 
folle  prcl'omption  qu'ils  ont  de  viure  cent  ans 
après  la  mort ,  voire  mille ,  que  quand  ils  ont 
beaucoup  amalTe.cc  ne  leur  eft  rien.  Si  on  de- 
mande à  vn  home,  Pourquoy  eft-ce  que  vous 
tranaillez  tant?Ho,ie'ne  fçay  ce  qui  me  pour- 
ra aduenir.ne  combien  ie  doy  viure, ni  en  quel 
le  necefsité  ie  me  peux  voir.  Celuy  qui  parle 
ainlî  aura  de  quoy  fe  nourrir.voire  s'il  deuoit 
viure  fix  foisaut.ît,&  toutesfois  encores  n'ha 
il  point  alle2,ce  luy  femble. Nous  voyons  dôc 
qu'il  nous  femble  que  nous  deuoas  tJIlt  em- 
porter auec  nous. Et  defaiâ,l'ambition  enco- 
res s'augmente,  Se  femble  qu'ils  doyuent  de- 
fpiter  Die»  quand  ce  vient  à  leur  trefpas.Dieu 
nous  ramené  «  c'ft exercice-ci,   Nous  fom- 
nies  fortis  duventre  de  la  mère  tous  nuds ,  & 
nous  ne  remportons  en  terre  linon' quelque 
linceul  pour  couurir  noftre  turpitude  écjhôte. 
En  quoy  noftre  Seigneur  nous  fait  prattiquer 
maugréquc  nous  en  ayons  ce  qui  eft  ici  dit. 
Or  cependant  lî  eft-ce  qu'aucuns  bataillét  par 
leur  ambition  contre  l'ordre  de  nature ,  pour 
dcfpiter  &  Dieu  &  les  homes.  Dont  eft  venue 
ccfte  fulle^upidité  de  grandes  funérailles,  3c 
de  toutes  ces  pompes  qu'on  fait  après  la  mort, 
de  faire  des  dons,  &chofes  femblables  ,finon 
pour  dcfpiter  Dieurmanifeftement?Il  eft  vray 
que  toufiours  la  deuotion  fera  pour  couleur. 
Voire  ,  mais  l'hypocrifie  eft  pleine  d'orgueil 
&  d'ambition, &  ce  font  deux  chofes  infepaïa- 
bles  ,  qic  ceux  qui  f jnt  femblant  d'ordonner 
tellesch  )fes  pour  le  falutde  leurs  âmes  ,  Se 
qui  font  faire  des  funérailles.  Se  de  grandes 
pompes  à  leur  trefpas,  veulent  defpiter  Dieu, 


ils  veulent  rcnuerfcr  l'ordre  de  nature,  (com* 
me  nous  auons  dit)  S:monftrent  comme  du- 
rant leur  vie  ils  ont  elle  des  gouffres  inlatiâ- 
bles ,  qu'après  leur  t  refpas  ils  veulent  faire  le 
fcm'jlabk|Ci:a!tamerceiix  qui  viendront  après 
eux. Nous  voyons  cela  à  Tceil.  Ainlidoacuo-» 
tjns  bien  quand  ûind  Paul  dit  ici  ,  Qji^e  mus 
n'aKonsrUitaj>(>ortcat*  monde, O"  <J»'il  efl  notoi- 
re ime  n>*s  n  c-it  pim-'nr  aiipi  riot  retenir  à 
»ous  :  que  li  nous  auions  cela  bien  imprimé  en 
nos  cœurs, nous  ne  ferions  point  tant  addon- 
ncz  à  nos  concupifcéces  chamelles, nous  n'en 
ferions  potnt  ainlî  tranfportez  comme  nous 
en  fommes  :  mais  tant  y  a  encores  que  quand 
nous  aurons  cognu  ces  chofes,  nous  aurons  co 
gnuce  que  les  Payens  ont  bien  fceudire.Tant 
plus  d»nc  deuons-nous  auoir  de  vergongne, 
qu'après  auoir  proteltc  que  nous  demandons 
de  croire  à  IefusChrift,&:  après  auoir  confef-. 
fcque  tout  noftre  faluc  &  tout  noftre  bien 
gift  en  luy.ccpendant  nous  foyons  entortillez 
en  ce  môde.qu'il  nous  femble  que  iamais  nous 
n'en  aurons  allez.  Apprenons  donc  de  retenir 
ce  principe  qui  eft  pardtlTus  lefens  humain, 
c'ei\3i(<:3.\ioil  cjte  il  pieté efi  vn^.iin  ituftima- 
bU.  Car  les  hommes  fjauront  bien  dire  que 
nous  fommes  venus  tous  nuds ,  &  qu'il  nous 
faut  retourner  tous  nuds  en  la  terre:  ils  fçau- 
ront  bien  dire  que  fi  nous  voulons  contenter 
nature,  qu'il  ne  faut  point  de  choies  de  grand 
pr  x.qucc'ellpeu  de  choie  dn  corps  del'hom- 
me  quin'appete  point  Tes  délices:  les  Payens 
diront  bien  cela.  Mais  cependant  ils  n'ont 
point  regardé  aux  cupiditez  qui  dominent  en 
n  jUs,  &  comme  nous  lommes  corrompus  par 
le  peché*d' Adam, tellement  qu'il  eft  unpofsi- 
bledenous  donter  ,  lînon  que  Dieu  y  mette 
vne  bride  pour  nous  retenir, d'autant  que  tous 
nos  appetis  font  comme  beftes  enragées ,  & 
qu'aufsi  nous  fommes  tant  ftupides  &  terre- 
itres,que  nous  ne  penfons  qu'au  monde,  &  ne 
regardons  point  à  la  vie  ccltlte.  Les  Payens 
donc, combien  qu'ils  Ondauinaflent  les  con- 
uoitifçs, comblé  qu'ils  diflént  que  i'auance  elt 
vne  chofe  li  exécrable  que  rien  plus,  &  que 
c'cft  vue  rage  que  des  folles  entreprinfes  des 
hommes,  toutesfois  li  n'ont-ils  point  tenu  de 
moyen  pour  nous  amener  à  vne  bonne  mode- 
ration.Ôr  denoftre  part  nous  fçauons  où  gift' 
la  vraye  fehcité,  &  faïaiit  Paul  nous  en  donne 
ici  vne  vraye  règle, laquelle  il  nous  faut  tenir, 
c'elt  qu'en  cognoilTànt  que  Dieu  eft  noftre 
Pcre  ,  nous  apprenions  de  nous  addonnerdu 
tout  à  luy,  &  comme  il  s'eft  donné  à  nous  en 
la  perfonne  de  fon  Fils  vnique  ,  que  nous  ne 
doutions  point  qu'il  ne  nous  donne  les  chofes 
qui  font  moindres  &  inferieures.comme  il  en 
traitte  en  vn  autre  palTrige  ,  que  quand  nous  M4t.7.ix 
auons  lefiis  Chrift  qui  tit  noftre  ,  puis  qu'en 
luy  habite  toute  pienicudc  de  dminité  ,  pcn- 
fons-nous  que  Dieu  nous  lailTc  ici  périr  qu'il 
ne  nous  fubuiene  qi:and  bcfom  f,  ra  ?  Ainlî 
donc,  quandinous  pourrons  inuoquer  noltre 
I  Dieu 


s  V  R     LA     î.     J 

Dieu  au  nom  denoftre  Seigneur  Icfii'.  ChiUt, 
&  que  nuuç  le  polllderonv ,  3i  qu'il  louyia 
de  nouspailîblement,  &  qu'il  nous  recognoi- 
ftra  pour  liens:quand,Ji-ie,ceIa  y  fera.ne  de- 
mandons ritnplus,&  attendons  ccfte  per- 
fetlion  &  fufrifance  qu'il  nous  a  promife: 
non  point  que  Dieu  ne  permette  que  nous 
foyons  ICI  exercez  ,  &  qu'il  ne  fouffre  mcfraes' 
que  nous  foyons  affligez  en  beaucoup  de  for- 
tes: mais  que  nous  foyons  coufiours  afleurez 
qu'il  ne  fera  point  chiche  de  nous  diftnbuer 
de  fes  biens, tant  lelon  le  corps  que  félon  l'â- 
me: toutesfoi;  ce  fera  toufiours  en  pouruoy- 
ant  de  ce  qu'il  cognoiftra  nous  cftre  vtile 
pour  noftre  faluc. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la  fa- 
ce de  noûre  bon  Dieu.en  cognoiflanccde  nos 
fautes, le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux  fen- 
tir  que  nous  n'auons  point  fait ,  &:  qu'il  ne 
fermette  point  que  nous  foyons  addonnez 
à  ce  monde  &  à  ces  chofes  caduques,  comme 


l    TIMOTH.  251 

nous  y  fommes  par  trop  attachez  &  plongez, 
mais  qu'il  nous  efclaire  &par  fa  laincte  pa- 
i-ole,&  par  fon  faintl  Efprit ,  tellement  qu'en 
contemplant  la  vie  éternelle  nous  apprenions 
de  palier  pat  ce  monde  ,  voire  d'y  courir  ,  & 
que  nous  ne  foyons  point  retenus  par  les  em- 
pefchcmens  qui  ont  accouflumé  de  nous  di- 
uertir  du  bon  chemin.  £t  que  nous  ne  foyons 
point  fi  volages  de  nous  deftourner  de  la  do- 
ctrine de  falut ,  mais  que  nous  la  fuyuions 
quand  ce  bon  Dieu  nous  aura  fait  la  grâce  de 
nous  en  donner  quelque  gouft  ,  que  nous  de- 
mandions d'y  profiter,&  d'y  eftie  confcrmez 
de  plus  en  plus ,  afin  que  les  tentations  de  ce 
monde  ne  nous  retardent  ou  empeichcnt  au- 
cunement,que  nous  ne  pourfuyuions  toufiours 
noflre  courfe.afin  de  tendre  toufiours  là  haut 
au  ciel ,  où  ce  bon  Dieu  nous  appelle  &  con- 
uie.  Qjje  non  feulement  il  nous  face  celte 
grâce  ,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  nîtions  de 
la  terre,  &c. 


03^  ATRIEME       SERMON       SVR      LE 

SIXIEME      CHAPITRE. 


9  Car  ceux  qui  yeulent  cflre  richeî,  tombent  en  tentation,  (^  an 
îaqs,0'cnpkfieursdeJîrsfolsO'  nuifibles ,  qui  plongent  les  hommes 
en  dcjlruBion  (^  perdition. 

10  Car  la  racine  de  tous  mctux  cefl  auarice:  laquelle  aucuns  appe- 
tins*ont  erré  delà  foy ,  C3'  fe  font  eux-mc[me  s  enueloppez  enplufieurs 

douleurs. 

11  Mais  toy,è  homme  de  Y)icu,fuy  ces  chefs:  (^  enfuy  iuîlice,  la 
crainte  de  Dieu.foy, chante, patience  ^douceur. 


J 


Ombien  que  fainiîl  Paul  ci 
deffus  notamment  ait  parlé 
des    Miniftres  ,   toutesfois 
par  occalîon   il  traitte  vue 
dottrine  générale, &  qui  ap- 
partient à  cous:  c'eft  quand 
les  hommes   demandent  à 
s'enrichir  ,  qu'ils  le  rendent  comme  â'.i.x  liens 
du  diable,  &  en  toute  contulion,  &  ne  le  peut 
faire  aatrement.   Car  (  comme  il  adioufte) 
il  n'y  a  mal  que  l'auance  n'apporte  :  par  le; 
fruits  oncognoiit  l'arbre.    Or  quand  fainct 
Paul  a  mis  cela, il  adioufte.que  pour  remédier 
à  ce  vice  que  nous  voyons  fi  mortel  ,  il  nous 
faut  mettre  noftre  fiance  en  Dieu, chercher  le 
Royaume  celefte,viure  les  vus  auec  les  autres 
en  bonne  équité  ,  fans  appeter  le  bien  d'au- 
truy.  Or  d'autant  que  la  nature  des  hommes 
tire  toufiours  à  mal ,  fi  nous  ne  fouîmes  bien 
purgez  ,  il  faudra  que  Tsuarice  domine  en 


nous.  Et  le  moyen,  c'eft  que  nous  regardions 
à  Dieu,&  que  nous  conuerfions  auec  nos  pro- 
chains comme  il  nous  le  commande.  Voila  en 
fomme  ce  qui  cft  ici  traittc.Mais  pour  mieux 
déduire  toutes  ces  matières  ,  &  les  appliquer 
à  noflre  vfage  ,  en  premier  lieu  nous  auons  ^ 
noter  que  ùmti  Paul  ne  parie  point  icide 
l'or  &de  l'argent ,  comme  fi  c'cftoyent  cho- 
fes mauuaifcs  de  leur  nature  ,  car  Dieu  les  i 
créez  poui  l'vfagc  des  hommes  ;  mais  il  parle 
de  ceftappetit  dtfordonné  auquel  Satan  noiîs 
incite, &  not^remahce  pareillement.  U  ne  dit 
pas  donc  que  ccluy  que  Dieu  bt^nira  ,&  qui 
fera  riche,  tombeaux  filets  de  Satan,  &s'ea 
va  à  perdition  ,mais  il  parle  de  ccft  appetiot 
C«(.v  (dit-il)  qui  -veulent  eflre  riches.    Or  ce- 
ci mente  bien  d'eltre  oblerué  ,  afin  que  les 
hommes  ne  reiettcnt  point  lacoulpc  fur  les 
créatures  de  Dieu  quand  ils  s'en   trouuent 
mal  ;  car  s'ils  en  abulent ,  c'ett  leur  £iute,. 

G.  II. 


Ipt 


SERMON     XLIX. 


tfautint  qu'ils  font  peruers.  Il  eft  vray  que    te  qu''ils  ne  cognoilTent  point  leurs  fautes,  ils 
l'or  &  l'argent  font  occalîon  de  leur  ruuie:     ne  regardent  point  au  danger  où  ils  font ,  &  i 
mais  à  qui  ell-ce  que  le  mai  en  doit  cftrc  im-    la  folle  qui  ell  Jcuant  leurs  pieds,  iufques  à  ce 
puiéfinonà  nous.'  Car  ii  nous  pouuonsappli-     quMsy  loyent  trebuichez.Tant  y  a  que  nous 
quer  ànoftrevfagc  l'or  &  i^argent.ce  ne  fera    cjgnoiflrons  toufiours  ceci  eflre  véritable,  c' 
point  pour  njus  induire  à  attirer  à  nous  le     eiltjuf  ceitv  cjai  ycitlent  efirerich.s, tombent  en 
bien  d'autruy,  pour  ellie  des  çoufrrcs  ml.itia     tent.tti:,n.  Et  pourquoy  ;  Premièrement,  nous 
blés, pour  rapincr  par  ci  Se  par  là.ce  fera  pour    fçauonsque  les  affeftions  des  hommes  lamais 
bien  faire  in  js  prochains  au  befoin,  &pour     ne  feront  bien  réglées ,  qu'il  y  aura  toulîours 
nousen  feruir  à  noftre  necefsité.  Nous  voy-    de  l'excès  &  de  l'intempérance  .  Il  fit  vray 
ons  donc  maintenant  côuie  fainft  Paul  a  par-    quel!  nous  auions  noltre  nature  entière,  qu'il 
lé  pruderainent.aiîn  que  les  hommes  ne  prinf    n'y  eull  point  de  corruption  du  péché  origi- 
fent  point  vne  couueriiire  vaine  pont  dire     nel ,  nous  pourrions  appeter  lans  qu'il  y  euft 
que  l'or  &  l'argent  les  feduife  ,  &  qu'il  n'y  a     nul  vice  .  Car  quand  Adam  a  elle  créé.  Dieu 
que  corruption:carcefteiniure  rctourneroit    luy  a  bien  donné  vn  fens  fuiet  à  affedtion  8c 
à  Dieu, pource  qu'on  ne  peut  pas  mefdire  des     appetits:mais  maintenant  que  le  pcché  atout 
bonnes  créatures  ,  que  le  nom  de  Dieu  n'eu     infeftc,  que  nous  femmes  tous  corrompus  de 
foit  bbfphcmc.  Saint!  Paula  coupé  broche  à    ce.fte  ladrerie  fpirituelle,  il  eft  impof  iblr  que 
telles  cxcufes.nionftiant  que  li  nous  pouaios    nous  appetions  ne  ceci  ne  cela  ,  qu'il  n'y  ait- 
appliquer  à  noftre  vfige  l'or  &  l'argent, qu'il     quelque  faute  ,&  que  nous  ne  fiyons  touf- 
ii'y  auroit  nulvice  ,  il  n'y  auroit  rien  qui  of-    lotus  excel-.ifs':  comme  mcfnies  vn  h  imnie  en 
fenfaft  Dieu:  ma;s  tout  cela  procède  de  celle    l'amour  de  Ci  femme  &  de  fes  enfau  (qui  font 
fource  de  cupidité.  Oroyans  cela,  cognoif-     chofes  bonnes  )  faillira.  Pourquoy  ?  Ce  n'eft 
fons  matntenantcombicnnous  fominesà  con    point  que  cefte  amour-la  de  fjy  doyue  eftrc 
damner,  véu  que  nousdeprauons  ainiî  l'vfa-    condamnée, ne  que  Dieu  la  rcprouut,  pluftort 
ge  des  chofes  qui  font  bonnes ,  &  que  Dieu     il  la  commande  :  mais  c'cft  que  nous  fommes 
aufsiaujit  ordonné  à  noftre  feiuice:  cela  eft    entachez  de  vice,  &  que  toufiours  le  p'.ché 
direfteniétbataillercbntreccluy  duquel  tout    nous  corrompt.  Q^e  fera-cedoncd'appeter 
bien  procède  .  Car  voici  Dieu  qui  a  rcg.irdé     l'or  &  l'argent?  C'eft  vne  chofe  beaucoup  pi- 
aux  necefiitez  des  hommes, il  ne  leur  a  voulu     rc  .  Or  voila  cjuant  au  premier  .d'autant  que 
défaillir  en  rien  :&  comme  il  a  créé  le  blé,  le    nos  concupiiccnces  nous  tranfportcnt  t^uf- 
vin,&  autres  chofes, comme  il  nous  a(en  loin     iours,  &  qu'elles  font  chatcuilleufes,  &  qu'el- 
me)  voulu  nourrir  &  veftir,il  a  adioulté  l'ar-     les  ne  gardent  point  bonne  mcfiire, qu'il  nous 
cent,  afin  que  les  hommes  peulPent  coramuni    faut  eltre  fufpefts  en  tous  nos  appétits .  Mais 
querlesvns  aueclesautres.  VoiladoncDieu    encores  il  y  a  vne  autre  raifon  plus  appa- 
qui  a  eu  vne  bonne  règle:  &  cependant  ce  qui     rente,  c'eft  que  Dieunou^  comm.idc  à  chacun 
eftoit  fi  bon  &lîpropre  pour  noftre  falut,     denousde  receuoir  cequ'ilnou  doiinr.  Si  vn 
nous  l'allons  tourner  tout  au  rebours  ,  corne     homme  eft  riche,il  faut  qu'il  vfe  du  bien  qu'il 
C  nous  voulions  defpitervnfî  bon  Père  &  )î    a  entre  mains  ,  voire  en  faifant  h  mniage  à 
pitoyable. Nous  auons  donc  bien  occafion  de     Dieu:  ce  qui  ne  fe  peut  faire  qu'il  ne  foit  qu.ît 
bailler  les  yeux, veu  que  nous  fommes  11  per-    &quantpreftde  lereligner:  &  puis,  qu'il  en 
uers  de  corrompe  ainiî  l'ordre  de  nature.  Ce    vfe  comme  il  appartiét.Il  y  a(di-ie)  deux  cho 
pendant  notons  bien  ce  que  ditfaindl  Paul,     fes  requifes,  lî  nous  voulons  bien  vferde  nos 
Que  ceux  cjui  fe  yiitUnt  inr:ch!r,tcmbent  h  lies     richeflcs.  f  ic  di  ceux  qui  les  ont  &  les  poffe- 
Cr  à  filets  du,  diaUe.  Si  ondemandoit  à  ceux     dent.)Pour  le  premier,  il  faut  qu'ils  foyét  po 


fe  rendre  captifs  au  diable, &  fe  précipiter  en  point  attachez  à  leurs  richeflcs,  mais  quand  il 
ruine.Us  diioyent  bien  que  non.Mais  cepen-  plaira  à  Dieude  les  appourir,  qu'ils  luy  remet 
dant  cell  appétit  defordonné  qu'ils  ont  d'à-    tét  le  tout  entre  fes  mains  &  qu'ils  ne  dcman- 


cnafler  des  biens ,  Se  qu'ils  concluent  qu'il  en  dent  finon  d'auoir  leur  contentement  en  luy. 

fâutauoir,qiioyqu'ilenfoit,Toire&fanste-  Voila  pour  vn  item.  Et  puis,  cependant  que 

nir  mefure  ,  tout  cela  monftre  bien  qu'ils  fe  Dieu  leur  fait  la  grâce  de  imiir  des  richeflcs 

veulent  perdre  à  leur  efcient.Pour  cefte  eau-  qu'ils  poflcdent,  qu'ils  en  fçachent  bien  vfer 

fe  fainft  Paul  nous  remonftre  qu'il  eft  impof  modercemcnt,  quece  ne  foit  pas  pour  gour- 

fible  que  les  hommes  ne  perifltnt,&  ne  s'acca  mader  à  eux,  &  pour  atramcr  leurs  prochains, 

blent  de  tout  malheur  qu.îd  ils  font  ainfi  me-  pour  en  faire  leurs  pompes,  S:  leurs  biauetcz, 

nez  de  cefte  conuoitife.Ii  eft  vray  qu'on  fe  ^e  mais  qu'il  y  ait  toulîours  W  fage  tel  qi!C  Dieu 

ra  bien  à.croire(  comme  aufsi  nous  le  voyôs)  le  commande.  Or  fi  nous  fommes  poures, 

qu'on  peut  appeter  l'or  &  l'argent ,  fans  que  Dieu  veut  que  noftre  patience  foit  exercée  en 

on  s'enueloppe  comme  fainft  Paul  en  parle,  ceft  endroit-la,  &  que  nous  dépendions  du 

mais  ceux  qui  feperfuadent  cela  ,  fe  trouue-  tout  deltiy  .Ccluy  qui  a  prou,qu'ilne  fe  fie 

ront  en  la  fin  trompez.  Du  premier  coup  le  point  en  fonabondonce  :  celuy  qu;  eft  poure 

:ux,Uktfcduitcnfor-  &  humble  ,  qu'il  cognoilTt  qu'il  a  fon  perc  au 

ciel. 


diahlc  leur  bâde  les  ycui. 


s  VR     L^   I.    A   TT  M  O  TH. 


Kj^ 


cîel,&que  labenedidionde  Dieu  vaut  mieux 
que  tous  les  threfors  du  monde  ,  voirc  que 
tous  les  royaumes. Qiijjd  nous  aurions  am-if- 
fé  tout  ce  qu'il  eft  pjiiible  de  fouliaiter  ,  & 
que  Dieu  fouffle  deirus,  tout  s'en  ira  au  vent: 

1/4.40.7  ^comme  l'Efcriture  le  monftre^  mais  iî  Dieu 
nûMS  veut  bénir  ,  quelque  peu  qu'il  nous  ait 
d5né,ccla  nous  iuftira,  ce  nous  fera  alTcz  que 
nous  viuionsau  iourla  iournce  ,  pource  que 
toufiours  la  main  de  Dieu  s'cllendra  fur  nous 
pour  nous  contenter.  Or  puis  qu'.iinli  eft  que 
Dieu  a  mis  cefte  règle,  qu'il  a  la  ffc  celte  loy 
aux  hommes.de  fe  contenter  de  ce  qu'il  don- 
ne i  chacun, quiconqucs  appete  d'eftre  riclie, 
ceiuy-la  reictte  pleinement  le  ioug  ,&nc  fe 
veut  point  aflu:ettir  à  l'ordre  de  Dieu  ,  mais 
efV comme  vne  belle  fauuage  &  efgaree.Nous 
esbahilTons-nousdonc  tî  Dieu  fe  moque  d'v- 
ne  telle  rébellion, quand  il  voit  que  les  hom- 
mes ne  fe  peuuent  tenirà  luy,  &  qu'ils  ne  peu 
uent  tenir  le  chemm  où  il  les  conduit?  Nous 
CibahifTons-nous  s'il  permet  à  Satan  vne  tel- 
le licence,  qu'il  les  attrappe  en  fes  filets,  que 
ils  foyent  fa  proye.A:  qu'en  la  fin  il  les  même 
d  perdition  &  ru'iie.  Ce  n'cft  point  donc  fans 
caufe  que  famft  Paul  a  ici  prononcé  que  tous 
ceux  qui  défirent  d'f  lire  r  ches, tombent  aux 
filets  du  diable.  Qu'cft-  1  dinc  de  faire?  Ad- 
uifons  i  non, Si  que  nousav  mis  cela.de  nous 
contenter  d'tltrc  nourris  en  ce  monde  ,  fca- 
chans  que  Dieu  s'ell  referué  ccft  office, com- 
me il  veut  quenouïl'.iy  demandions  noltre 
pain  ordinaire.Làdcilusqu'i'n  chacun  tiaiiail 
le,&:  qu'il  face  fin  deuoir.  Et  bien  fî  Dieu  ou 
trenoftrecfperace  veut  que  nouv  foyon'i  aug 
nientcr  ,&  qu'il  face  croiftrc  notirebicn,  re- 
mercions-le.comme  aufsi  :1  efl  dit  au  Pfcau- 
Vje.itj.  f,ie,  que  Dieu  quelquesfoJS  nourrira  fe<;  en- 

'*"  fans  cependant  qu'ils  doruen::  non  pas  qu'il 

faille  que  les  fidèles  f->yeut  oilîfs  ou  noncha 
lans,  nvais  tant  y  a  qu'ils  ne  ferôt  point  tour- 
mctcz  de  cescupjditcz  inauiiaifcs, qu'ils  ne  de 
manderont  point  de  s'enrichir  ,  mais  ils  vont 
leur  train  ,  &  attendent  ce  qu'il  plaira  à  Dieu 
lcurdonner,&  fe  remettent  du  tout  à  luy. Ce 
(le  confcience  ainlî  paifîblc,  ell  come  vn  dor 
mir  ,  5c  Dieu  ne  laiffcra  pis  de  bénir  les  fîcns 
quelquefoistvoire  quîd  il  verra  qu'il  leur  fe- 
ra bon  &  vtile  pour  leur  falut.Mais  cependat 
demeurons  Ti.de  nous  remettre  en  la  main  de 
Dieu, 3c  receuoir  ce  qu'il  nous  donne.  Et  ce- 
pendant gardons-nous  de  ceft  appétit,  finon 
^uenous  vueilliôsnous  liurer  .1  Satan.  Et  qui 
ell-ce  qui  veuteflre  tra'llre  de  fjn  fahit?  Ne 
voila  point  vn  grand  aueuglcment,  voire  vne 
rage,  quâd  les  hommes  f-  vont  donner  .-i  leur 
ennemi  mortel  ,  qu'ils  fe  iettent  dedans  fes 
laqs ,  &  non  point  feulement  afin  que  le  dia- 
ble s'en  ioue, mail  qu'il  les  accable  du  toiit,& 
qu'il  les  plonge  aux  abyfncs  de  perdition? 
Q*.;i  ell-ce  qui  voudroit  taire  cela  s'il  l'auoit 
bien  premediré?Toutesfois  quiconques  appe 
te  d'eftrc  riche  ,  il  le  fait ,  comme  il  nous  eft 


monftrc  ici,&  comme  aiifsi  cliacun  le  ronfcf- 
fera.  Soyonsdonc  l'ur  nos  gaules  ,  &J-"uvonî 
comme  vne  pelle  mortelle  rclt  appétit  dont 
parle  ICI  fainft  Paul.  Voila  donc  qu.mtàvn 
item. Et  pourtant  fi  vn  homme  elt  riche, qu'il 
fe  garde  bien  d'auoir  fon  cœur  attaché  aux 
richefles.mais  qu'il  en  vfe,  voire  comme  fi  du 
lour  à  l'autre  ildeuoit  eftreappoun  ,  &  qu'il 
face  fon  conte  que  ce  n'cft  point  vu  hérita- 
ge perpétuel  d'auoir  ni  champs, ni  pollef.iôs, 
ni  or,ni  argent  en  bourfe,  mais  que  Dieu  luy 
en  donne  l'vfage  lufqu'à  tant  qu'l  luy  plai- 
ra. Et  puis,  que  ceux  qui  font  poures,fc  con- 
tentent de  ce  que  Dieu  les  nourrit ,  qu'ils  fe 
fient  en  luy.&r  pour  eux  &  pour  leurs  enfans. 
Ceux  qui  ont  moyennement  dequoy,  qu'ils 
ne  demandent  point  de  s'augmenter  plus  ou- 
tre, mais  qu'ils  s'entretienent  en  leur  médio- 
crité. Et  cependant  que  tous  aduifcnt  de  bien 
faire  les  vns  aux  autres.Sc  de  fubuenir  à  leur» 
prochains.  Quand  nous  aurons  cela, Satan  ne 
pourra  rien  gagner  fur  nous  :  quoy  qu'il  ait 
fes  filets  tendus ,  tant  y  a  que  nous  ne  feront 
poû  (i  proye.  Pourquoyr Voici  le  vray  moy- 
ycn  de  nous  en  prefcruer.  Mais  afin  encoics 
que  celle  doûrine  (oit  mieux  entendue  ,  pre- 
nons l'expofition  que  fainifl  Paul  en  donne, 
difanr ,  oue  l'autir'ce  efl  rac'Ke  Ai  tous  maux . 
Q_nand  il  parle  ainfi,  il  n'entend  pas  que  tous 
les  péchez  que  les  hommes  commettent. pro- 
cèdent d'auarice:  comme  vn  gourmand,  vn  y- 
urongne  ,  ouvn  paillard  ,  vn  blafphemaceur, 
pourra  bien  élire  exempté  de  ce  vice  .  Voila 
vn  paillard  qui  difsipera  le  fien,voiIa  vngnur 
mand.ou  quelque  fol  efuenté,  qui  pour  fe  fai 
re  valoir  de  fpendra  fon  bien,  il  n'y  a  point  li 
d'auarice.  Et  comment  donc  fainft  Paul  dit- 
il  que  l'iuarice  eu  racine  de  tous  maux?  Il  ea 
tend  qu'il  n'y  a  mal  que  l'auarice  n'apporte, 
c'tit.i  dire, qu'elle  ne  puifTe  apporter.  Com- 
me quoy?  Voila  les  haines,  les  enuies,  mau- 
uaife  foy.periureSitraliifîns,  violences,  em- 
pnifonnemens,  corruptions:  toutes  ces  cho- 
fcs-ia  ne  peuuent-elles  pas  venir  d'auarice? 
Car  vn  home  qui  appete  de  s'enrichir, fera  en 
premier  lieu  addoiinc  a  foy-melme  du  tout, 
tcllemét  qu'il  en  oubliera  (e^  prochains,&:  ne 
tiendra  conte  de  perfonne  q  de  foy;il  ell  tcl- 
lemét traf'porté,  qu'on  a  beau  luy  parler  d'é- 
quité &  droiture  ,  il  n'a  que  fon  profit  pour 
recommandé:  il  tourmentera  l'vn.il  opprime 
ra  l'autre:  il  mange, il  gourmande  la  fub/lace 
d'autruy;  il  pille  .tout.  On  voit  donc  en  quel 
feus  famtt  Paul  a  dit  que  l'auarice  eft  racine 
de  tons  maux.  Carfi  vn  home  cllauaricicuï, 
cft.mtami  de  foy(c6ine  nous  auons  déclaré) 
il  n'aura  nul  fouci  de  fes  prochains, on  n'y  co 
gnoillta  ni  faueur.ni  amour,  mais  il  votidroit 
que  tout  fi;(lfien  ,  &  luy  femble  que  tout  le 
monde  ne  luy  puiflTe  fuf.îre.  Au  refle,  ù  nous 
voulions  proc  der  p  ir  ûidre,il  taiidroit  coin 
mcncer  pai  Ir-,  que  i'aiiar  ce  apporte  vn  mef- 
piis  de  Dieu.  Car  fî  vn  hôiiic  apneie  de  s'tn- 

O.ui, 


i94 


SERMON    XLIX. 


richir,  il  liiy  fcmbic  que  Dieu  nVft  rien,  &  fe 
.  fiera  plii\(cëme  il  l'cra  Juci  après)  eniespoi' 
fcAions  &  en  fes  thrcfors,  tju'il  neteraau 
Dieu  viuant.en  forte  qu'il  en  tera  des  idoles. 
Et  puis  quand  il  aura  beaucoup  aniallc'.le  voi 
la  enflé  crorgueil,qu'il  iHcIprile  ck.icun.D6c 
Pauarice  fait  la  guerre  principalemét  à  Dieu, 
puis  après  à  tout  le  monde  ,  voire  en  diuerfes 
fortes. Car  l'auaricc  ne  peut  eilre  fans  traude 
&  malice,  tellement  que  ccUiy  qui  en  veut  a- 
iioir, imagine  tout  ce  qu'il  peut  pour  tromper 
ceftuy-ci,pour  frauder  ccil^uy-la,&  nes'efpar 
gnera  en  iien  qui  loit.  Il  le  panureia  d'vn  co 
ftc,il  trahira  de  l'autre, il  métiraa  tous  coups. 
Et  puis  il  y  aura  les  violecLS,  la  haine  ne  peut 
faïUu'.cepcdant  les  machinations  &  mei'chan 
tes  prattiques  s'cnfuiurôt  de  tous  collez. No' 
voyôs  donc  que  S.  Paul  non  fans  caufe  a  nom 
nié  l'auarice, racine  de  tous  niaux:cmnme  s'il 
<iifoit  que  quand  vn  home  lera  entaché  d'aua 
rice  ,  il  faudra  qu'en  la  fin  il  foit  enflé  d'or- 
gueil, qu'il  foit  vn  panure,  qu'il  foit  plein  de 
out  rage  év  de  cruauté, qu'il  machine  tout  mal, 
qu'il  n'ait  loyauté  à  perionue, qu'il  n'ait  nul- 
ledroiture, nulle  religion  en  foy, qu'il  nepen 
fe  linon  de  del'pouiller  grans  &  petis.  Voila 
donc  comme  vn  cafilogue  ou  vnrolle  que  S. 
Paul  a  voulu  nicEtre  ici  de  to' vices  qui  pro- 
cèdent d'auancc.  Nous  pourras  bien  donc  of 
fenfer  Dieu  &  nos  prochains  fans  efti  e  aiiari 
cieuxicônvevnblafphimateurq  oftenlegnef 
licmét  Dieu  quld  il  prophane  Ion  laiiii:t  nom, 
vn  paillard  otfenfe  &  Dieu  &  fes  prochains, 
vn  yurôgne  fe  tue  &  elt  fon  _^pte  bourreau. 
Si  cepédant  il  pollue  les  bonnes  créatures  de 
Dieu.  Il  y  aura  donc  beaucoupd'otfenfes  qui 
fe  commettront  fans  auarice'mais  cependant 
quand  l'auarice  domine  en  rious  ,  il  faut  que 
nousfoyons  addonnez  .i  tout  raal:qu'on  re- 
garde, qu'on  efpluchc,  &  on  trouuera  q  c'ell 
vn  abyfme  des  aby  fmes,  quâd  les  hommes  fe 
lailTent  auilî  traafporter  à  Satan. Et  voila  auf 
lî  pourquoy  S.Paul  adiouli:e,Qji'aucuns  y  e- 
flans  tôbez,ou  aucuns  rappetans,oot  erré  de 
la  foy.  Côbien  que  cciie  façon  de  parler  foit 
impropre, il  eA-ceque  S.Paulaaffez  exprimé 
ce  qu'il  vouloit  dire:  car  il  no'  met  touiîours 
deuant  les  yeux  ccfte  cupidité  dont  il  a  fait 
mention  n'agueres.Car  côbien  qu'vn  homme 
foit  poure,fi  ne  laiffera-il  pas  toutesfois  d'e- 
ftre  captif  fous  les  liens  de  Satan.  Et  pour- 
quoy? Q_iiand  l'appctit  y  cft,le  mal  y  règne, 
&  nous  voila  plôgez  en  cefte  perdition  de  la- 
quelle il  auoit  parlé  ci  deflii'  .il  ne  faut  point 
donc  que  les  poures  fe  flattét  comme  s'ils  e- 
ftoyent  exépttz  du  mal  que  S.  Paul  condâne 
ici.  Carqiiâd  nous  n'aurons  rien, ii  nous  appe 
tons  d'auoir  ,  nous  ne  laiffons  pas  toutesfois 
d'eflre  en  celle  maudite  fcruitude  ,  que  le  dia 
ble  loit  noltre  prince  pour  faire  de  nô'  tout 
ce  que  bonluy  femblcra.Et  aijifi  nous  royôs 
que  S.Paul  a  bien  exprimé  ce  qu'il  vouloit  di 
rc,  &  nous  a  donné  bonne  dovtiinc  Si.  inltru- 


élion.  Or  notamment  il  dit,  Qw^'  ceux  rpti  Dp- 
f  ctent  ainj!  iVi  Jtre  riches  ,  d^fudUnt  lie  Ltf'y, 
Cy  s'eiiueloppfttt  en  plu  fiitn douleurs.  Q_uâd  il 
dit  qu'ils  delaillét  de  la  foy, c'ell  que  du  tout 
ils  s'eflôgnent  &  s'aliènent  de  Dieu;  après  a- 
uoir  long  tép?  barguingné, qu'ils  fefeparent 
du  rang  des  fidcles,&  vont  comme  gens  defe- 
Iperez.  Et  de  la  aufsi  procèdent  les  douleurs 
defqucllesil  parle.  Nous  voyons  maintenant 
côme  S  .Paul  fe  déclare  mieux  en  ce  qu'il  a- 
uoitdit.  Il  auoit  parlé  des  tentations, il  auoic 
parlé  des  afluces  ou  filets  du  diable ,  il  auoit 
parlé  des  cupiditez  lottes  &  mauuaifes:  niam 
tenant  il  met  le  comble,  difant  que  quand  les 
hommes  fe  lérôt  ainli  corrompus ,  il  faut  que 
lis  renoncent  pleinemêt  Dieu  &  la  toy  Clîre 
llienae,&  puis  qu'ils  foyêt  comme  en  vn  en- 
fer, que  Dieu  les  perltcute  d'vn  collé,  &  que 
cependant  ils  ne  lailTcnt  pas  de  pouifuiure, 
combien  qu'ils  voyent  leur  luinc, qu'ils  ferôc 
comme  enforcelez  ,  qu'ils  feront  en  telle  fu- 
rie ,  qu'il  n'y  aura  plus  de  moyen  de  les  pou- 
uoir  retirer  du  mal. Or  quâd  S.Paul  parle  des 
cupiditcz  lottes  &  pcruerfes  ,  il  n'entend  pas 
que  les  hommes  qui  font  auaricieux  foyent 
reputez  lois.  Car  quelle  fagelfe  prife-on  ea 
ce  monde,  linon  celte .alluce  de  pouuoir  trom 
per  l'vn  &  piller  l'autre?  qu'on  dira,  Ho,ceft 
homme  Içaitbien  penfer  à  fes  artaires,le  voi 
la  (âge, le  voila  canonizé.  Et  cependant  il  ne 
lallfc  pas  d'elbe  vn  loup  ou  vn  renard,  qui  de 
uore&;  niant;e  tout  ce  qu'il  peut,  &  puis  il  au 
ra  fes  allaces  &  malices  pour  attrapper  de 
chacun. Mais  fainÛ  Paul  parlant  de  lottes  eu 
pidltez, entend  que  les  hommes  s'oubliét  tel- 
lement qu'ili  ne  fçauent  plus  que  c'cft  ne  de 
religion  ne  de  lulticc, comme  on  le  voit  ma- 
nitiftemtnc.  Si  ce  n'eftoit  qu'vn  chacun  cil 
addonne  à  Ion  profit ,  il  ne  taudroit  point  e- 
fludier  beaucoup  pour  luger  equitablcment. 
Car  li  on  no'  parle  de  quelque  taittoùnous 
n'ayons  point  cfgard  aux  petl'onnes  ,  &  que 
nul  aufsi  ne  nous  ûduil'e,  fans  q  nous  foyons 
docteurs  ne  gians  clercs  ,  nous  fçaurons  bien 
dire,  Voila  le  mal, voila  le  bien,  voila  le  tort, 
voila  le  droiét.Et  qui  nous  l'a  enfeigne?Dicu 
a  engraué  en  nos  cœurs  de  nature  vue  telle 
cognûiflîince.  Orù  elt -ce  que  tout  fera  per- 
ueiti,  fi  nous  entrons  en  conlideration  de  no 
ftre  profit  ou  dommage ,  ou  que  nous  foyons 
menez  de  faucur  ou  de  haine,  il  n'y  aurarai- 
fon  qui  ne  foit  peruertie  :  c'eft  côme  li  on  a- 
uoit  vn  pot  d'acre  pour  elFacer  vne  efcriturc 
qui  fera  belle, cSi:  qu'on  pourra  lireaifeement. 
Mais  celte  cupidité  diabolique  nous  auei>gle 
en  forte  que  nous  oubliés  toute  iuitice  &  tou 
te  raifon.  Voila  dôc  pourquoy  S.Paul  au  nom 
de  Dieu  condamne  ici  de  fottife  tous  ceux 
qui  peruertilit'nt  ainfi  leur  bon  (eHs,&  qui  fe 
laifil-nt  ainfi  tuer  à  mal,  en  forte  qu'il  n'y  a 
plus  de  difcretion  ne  de  iugeraent  en  eux:  a- 
prcs  auoir  oublié  Dieu,  Satan  nous  laifira  de 
prime  face;  vray  efl  que  nous  ne  le  verrons 

point 


< 
J 


SVRLAI.    A     TIMOTH. 


point,mais  cependant  les  kômes  le  tranfpor- 
tcnt,&  pouiliiyuc»:  toufîours,  &  quand  ils  au- 
ront aduancé  trois  pas  pour  s'addonner  à  Sa- 
tan,il  ne  leur  chaut, &  leurs  iensaufsi  lontef- 
blouis  ,  iufques  à  ce  que  du  tout  ils  détaillent 
de,la  foy.  Or  notamment  fainft  Paul  a  parlé 
de  ces  cupiditez  fottes  deuant  q  venir  au  coin 
ble,  afin  que  nous  H\ittenilionï  pas  ces  extre- 
mitcz  qu'il  met  ici.de  nous  ietter  à  nollre  per 
dition  quand  nous  ferons  ainlî  aliénez  de  la 
foy. Puis  qu'ainii  eft  donc, toutes  fois  &  quan- 
tes  que  noftre  profit  bou^  esblouit  les  yeux,& 
que  défia  le  diable  prend  polîehion  de  nous, 
&  que  nous  luy  donnés  toute  inaiftrife  &  au- 
tborité  pour  nous  ietter  à  perdition,  que  nous 
recourions  à  celle  doClrine  q  Dieu  nous  mon- 
llre,  c'eft  afçauoir,  qu'en  premier  lieu  chacun 
fe  contente  de  ce  qu'il  aura  iuftemeat,  &  que 
nous  puifsions  demander  en  bonne  confcicn- 
ce  &  pure  noftre  pain  ordinaire ,  à  celuy  qui  a 
promis  d'cftie  noftre  père  &  nourricier  .  Car 
celuy  q  voudra  viure  de  rapines  &  de  fraudes, 
renonce  pleinement  à  la  nourritute  que  Dieu 
luy  a  promile.Voulons-nous  donc  demander 
à  Dieu  ce  que  noftre  Seigneur  Icfus  no'  a  mis 
en  la  bouche, que  nous  foyons  nourris  du  pain 
que  Dieu  nous  donneîU  nous  faut  abftenir  de 
toutes  ces  mefchâtes  cupiditez  qui  font  pour 
nous  faire  defi loyer  du  droit  chemin, &:  de  cc- 
fte  droiture  q  Dieu  a  imprimée  en  nos  coeurs. 
Ori'ayditque  fiintl  Paul  notamment  amis 
cela  deuant  que  venir  à  l'extrémité, afin  qu'vn 
chacun  veille  &  face  bon  guet.  Pourquoy  ?  11 
ne  fera  plus  temps  quand  nous  ferons  défaillis 
de  la  toy  :  &  neantmoins  lî  voit-on  par  expé- 
rience que  fa  mil  Paul  nous  a  ici  propofe  le  lu 
gement  de  la  vengeance  de  Dieu  deuant  les 
yeux,  telle  qu'elle  fe  déclare  iourncllcment. 
Voila  ceux  qui  ("ont  auancieux  qui  içauront 
bien  faire  de  belles  mines,  &  cependant  ce  (e- 
ront  de  grans  bigots,  qu'on  eftimera  qu'il  n'y 
a  deuotion  que  pour  eux:  ils  prétendront  fauf 
fement  le  nom  de  Dieu,  &  melmes  ils  en  abu- 
feront  en  leurs  troperies  louuentesfois.Nous 
voyons  donc  comme  les  auaricieux  ne  s'alie- 
Bcnt  point  du  premier  coup  de  la  foy.  Mais 
quoyrils  ne  la^fferont  pas  de  s'addonnerà  ces 
cupiditez  folles  ,  tellement  qu'on  veria  qu'ils 
ne  l'çjuent  que  c'cft  de  raifon  ne  de  droiture. 
Il  eft  vray  qu'ils  auront  bien  Dieu  au  bout  de 
la  langue  ,  &femblera  qu'il  n'y  ait  que  toute 
humanité  en  eux,  qu'ils  mordrôt  affez  en  ria  t: 
mais  quoy  qu'il  en  foit.iî  pourra-on  appcrce- 
uoir  pai  leur  cruaute,qu'ils  ne  demandent  qu' 
à  fine  leur  profit, reiettans  là  &  toute  la  parc 
le  de  Dieu,&:  toute  iuftice,&  mefmes  toute  e- 
quité  humaine. N  jus  voyons  donc  cela. Or  les 
home?  fe  iont-ils  amli  louea  quelque  temps? 
Se  1  jnt-ils  ainii  pourraenez  en  leurs  mefchan 
tes  traffiqucs  .'  Q_iyndUs  verront  qu'ils  ne  fe 
pcuuent  nulleméc  accorder  auec  Dieu, ou  que 
il  fj;it  rcdaigiKz  par  les  ancres,  &  que  leurs 
iniqmtez  fe  dcftouurent,U  n'eft  plus  (jueftion 


finon  de  renécer  pleinementDieu.S:  fairp  des 
gens  dcfcfpeiez.Nous  voyôs  cela.  £t  aptes,  li 
on  les  pouuoit  examiner  mieux, on  trouucioit 
qu'ils  font  en  amertumes  hornbles ,  d'aman: 
que  leur  conicienceles  tient  là  enchaînez  de- 
uant Dieu,&  mefmesils  font  toufiours  tiaiif- 
portez,  qu'ils  ne  fçauent  ce  qu'ils  doyucnt  lar 
re,ni  où  ils  veulét  aller.  Quand  nous  voyons 
cela,nedeuons-nou£  point  cftre  aduertis  de 
nous  garder? Et  noftre  Seigneur  ne  nous  don- 
ne-il point  vne  inftruétion  vtile  corne  aux  def 
pensd'autruy.'  Mais  qaoy  ?  Nous  ferraens  les 
yeux  à  tous  tels  exemples, &jfemble  que  nous 
vueillion  côploterauec  Satan  pour  nous  met- 
tre en  les  filets,  Se.  pour  nous  captiuer  du  tout 
fous  luy. Or  puis  qu'ainfi  cft,nous  fommes  di- 
gnes de  périr  nialfaeureufemét ,  quand  nous  n' 
efcoutons  point  les  admonitions  que  noftre 
Dieu  nousdéne.Il  regarde  noftre  h  agilité, il 
regarde  mefmes  que  toutes  nos  cupidité^  font 
peaierfes(coinme  il  a  efte  dit)  il  )»veut  remc 
dier:  pour  ce  faire  il  nous  monftrecômenous 
pourrons  preuenir  le  mal,  il  nous  propofe  ces 
remedes-ci.côme  nous  vei  rons  après. Cepen- 
dant nous  ne  luy  donnons  nulle  audience  .11  , 
nous  dit.  Regardez  àvous,  poures  gens  :  il  eft 
certain  q  vous  deuriez  perir.carde  vouf-mef- 
mes/chacun  fe  iette  aux  abyfmes,&la  fin  fina- 
le feia  de  quitter  &la  religion  &  rtlpeiance 
de  filut, que  vous  deuiendrez  côme  bcftes  biu 
tes:&  ne  faudra  point  que  nul  vous  tourniéte- 
car  vn chacun  fetourméteia  aflez,&  fegeliea 
nera.Dteu  nous  aduertit, nous  voyons  dequoy- 
nousauôs  approbation  certaine  de  ce  qui  no' 
eft  prononcé  de  ù  bouche:  ccpedant  nul  ne  s' 
en  garde.  Qu^eft-ce  que  nous  pouuons  alle- 
gucrPAinfidonc  apprenôs  de  faire  noftre  pro 
fit  de  celle  doclrine:  &  quad  nous  verrons  des 
gens  qui  fe  defuoyerôt  a:niî  d'equité  &  droitu 
re,entédons  q  l'inue  en  fera  mauuaife,fi  Dieu 
n'a  pitié  d'eux  pour  les  en  retirer  :  car  il  fau- 
dra,après  auoir  bien  barguingné, qu'ils  fe  pré- 
cipitent iufques  li,des'alientr  de  Dieu  ,  &  de 
monftrer  qu'ils  n'ont  plus  nulle  accointace  a- 
uec  luy. Et  puis  cela  eft-il?  Il  faiidia  que  le  dia 
ble  ayant  prins  maiftnfe  fir  eux, les  tiaitte  en 
vn  tyian  cruel ,  &  qu'eux-mefmes ,  quand  ils 
auront  beaucoup  fâfché  &  molefté  les  poures 
genSjfe  chagringnpnt  &  le  teinpeftcnt,  telle- 
ment qu'il  ne  leur  faudra  point  (comme  nous 
auons  dit)d'autre  bourreau, mais  ih  auront  c5 
me  vn  cautère  qui  brudera  toufiours  en  eux. 
Ils  ont  allumé  le  feu  pour  confumer  les  au- 
tres, mais  fans  eftre  confunitz  ,  il  faudra  que 
ils  bruflent  fans  fin  &  fans  ceffe.  Attendons  ce 
fte  fin-la  :  &  cependant  qu'vn  chacun  de  nous 
regarde  à  foy  ,&  que  nous  prions  Dieu  qu'il 
ne  permette  point  que  nous  tombions  en  ces 
horribles  cupiditez  ,  c'eft  à  dire  ,  que  nous  ne 
foyons  point  tellement  addonnez  à  noftre 
profit,  que  nous  ne  fuyuions  ce  qui  eftiuftê 
&  raifonjiable  ,  autrement  bous  deuicndrons 
comme  bcftes  brutes. Car  quel  eft  le  propre  de 

O.  iiii. 


■9^ 


SERMON     XLIX. 


l'homme,  finon  de  fç.iiioirdiTcerner?  S\  nous 
n'auons  prudence  de  ingerdubien  &  du  mal, 
fowmes-nous  dignes  d'clire  au  rang  des  hom 
«les  ?  Or  puis  tju'iJ  y  a  vrt  tel  aueuglement  en 
tous  ceux  qui  demandent  leur  auantage  aux 
Jelpens  d'autruy,  qu'ils  ne  fçauent  plus  que  c' 
eft  ne  de  bien  ne  de  ni.il.c'eft  à  dire,qu'ils  ma- 
chinent le  mal  exprefiement,  nous  auons  bien 
à  prier  Dieu  qu'il  nous  tiencla  bride  courte, 
afin  que  nous  ne  foyons  point  enueloppez  en 
telles  cupiditez,  de  peur  de  tôber  en  celt  hor- 
lible  aby  fjtie,  c'eft  de  renoncer  finalement  la 
foy  Chreftienne,&d'abâdonnernoftre  Dieu, 
&  nous  feparer  de  fon  Eglife  &defon  trou- 
peau.Or  après  que  /ainû  Paul  nous  a  monftré 
que  nous  deuons  fuir  l'auarice  comme  vne  pe- 
fte  mortelle,  il  adioufte  à  l'oppofite  le  remè- 
de. Car  (côme  nous  auons  dit)il  nous  faut  ba 
tailler,voire&  faire  grad'  force  à  nos  paf»i5s, 
fi  nous  voulons  eftre  purgez  de  ce  mal-ci. 
Il  faut  doffc  que  nous  enfuyuions  ce  qui  eft  i- 
ci  àit,Vuy  ers  chofes,0'  fnfiiy  iuPUe.fny,  pieté, 
tharité  ,manfuerH<{e  .  Qu^nd  faincl  Paul  dit, 
Fiiyces  choies  ,  il  eft  viay  qu'il  nous  faloit 
bien  contenter  de  cela. Apres  auoir  cognu  les 
maux  qui  font  ici  déclarez  ,  ne  fi  mincs-nous 
pas  bien  enragez  fi  nous-ne  les  fuyons  ?  Mais 
pource  que  nous  fommes  tellement  incitez  au 
mal,  que  lî  on  ne  nous  met  barre  ,  &que  Dieu 
ne  nous  retire  quafi  par  force,  iamais  nous  ne 
pourrons  fuir  l'auance, voila  pourquoy  fainft 
Paul  nous  ramené  à  la  foy,  à  la  pieté,  &  à  in- 
dice, charité,  &  manfiictudc  :  comme  s'ildi- 
foit,  qu'en  premier  lieu  il  nous  faut  regaider 
à  quoy  nous  fommes  nais ,  &  pourqiioy  c'elt 
que  nous  viuons  cpfcmble  :  c'eftque  Dici' a 
inftitué,&  comme  dedié  vne  compagnie  entre 
tout  le  genre  fcumain  .  Il  eft  vray  que  les  vns 
feront  focieté  particulière  aucc  Icj  autres: 
mais  fi  eft-ce  que  nous  ne  pouuons  pas  fuir 
cefte  focieté  commune  &  générale  que  Dieu 
a  mife  entre  tous  hommes .  Qjjant  à  la  poli- 
ce.vn  chacun  pofTcdera  bien  ce  qui  luy  eft  pro 
prc:  toutesfois  ccfte  communauté  demeure 
toufiours  entre  les  hommes,  c'eft  qu'ils  foyét 
obligez  les  vns  aux  autres  de  viiire  comme 
frères, &  de  s'aider:cequi  ne  fc  peut  faire  que 
nous  n'ayons  tefte  iufticedont  paile  fiinft 
Paul.  Voila  donc  le  lien  de  concorde  pour  re 
tenir  les  hommes  en  vnité,  &  pour  confcruer 
le  genre  humaiiKen  foinme,  c'tft  qu'il  y  ait  iu 
fiice,&  que  pour  garder  cefte  iuftice  &  droi- 
ture, nou;  ne  facions  à  autruy  finon  ce  que 
nous  voulons  qu'on  nous  face .  Il  eft  vray  que 
•e  mot  de  iuflice.  Ce  prend  aucunes  foi  s.  en  au- 
tre fens.-mais  ici  fainft  Paul  parlé  de  la  droitu 
re  que  nous  deuons  garder  chacun  en  fon  en- 
droit,  que  nous  conuerfions  Icsvnsauec  les 
autres ,  en  fjrte  que  nul  ne  nuifc  à  fon  pro- 
chain, &  que  nous  ne  gagnions  rien  que  par 
moyen  licite,  &  que  nous  aduifions  de  ne  com 
mettre  ne  fraude, ne  violence,  ned'attrapper 
ïien  qui  foit.Britf.i'ay  défia  dit  cnvn  mot  que 


quand  nous  ferons  comme  nous  voudriôs  que 
on  nous  feift  ,  nôu"  aurons  cefte  luftice  dont 
parle  fainft.Paul.Mais  qui  eft-ce  qui  no' pour 
ra  là  amener  ?  C'eft  la  foy  &■  la  pieté .  Quand 
fainft  Paul  parle  de  foy,  il  faut  que  nous  rap- 
portions ce  mot  à  la  circonftance  du  lieu.  Il 
eft  vray  que  Li  foy  a  beaucoup  de  parties,  elle 
comprend  plufieurs  chofcs  :  mais  il  nous  faut 
regarder  le  fil  du  texte,  &  la  procédure  que 
tient  ici  fainûPaul.  Pourquoy  donc  eft-ce 
qu'il  met  la  foy  comme  vn  remède  pour  nous 
purger  d'auarice?  C'eft  d'autant  que  l'infidé- 
lité eftl'allumette.ou  le  bois, ou  le  feu  qui  no* 
enflamme,  &  qui  nous  tranfporte  d'auarice. 
Voila  pourquoy  l'Apoftre  aufsi  en  l'Epiftre 
aux  Mebrieux,  quand  il  en  parle  ,  notamment 
nous  ramené  à  ce  qui  eft  dit  au  premier  chapi 
tre  de  lofaé,  le  ne  te  laifleray  point ,  ie  ne  te 
defaudray  en  rien,  dit  le  Seigneur  .  Quand 
nous  aurions  ccfte  fcntéce-labien  perfuadee, 
toute  auarice  fcroit  mife  fous  le  pied,  il  n'y 
auroit  plus  nul  appétit  defoidonné  au  monde, 
mais  il  yauroit  vn  contentement  raifonna- 
ble,que&  poures  &  riches  reietteroyent  i'ar 
gent  comme  fiente, finon  qu'on  en  vferoit  fe- 
lon  que  Dieu  l'a  creé-mau  cefte  cupidité  dia- 
bolique corrompt  &  peruertit  tout .  Qj.i  eft 
donc  caufe  que  les  homes  font  ainfi  trarfpor- 
tez, qu'ils  fe  de<^fient  de  Di(u,f  '  qu'il  kiir  fem 
ble  que  la  terre  leur  doyue  faillir,  finon  qu'ils 
ne  coijnoifTcnt  point  que  la  bepediûiop  de 
Dieu  vaut  m:eux  que  tout  ce  qu'ils  pourroyét 
auoir  au  refte?Autrement  s'il-  lity  demandent 
leur  pain  ordinaire,  ce  n'efrque  parhypocri- 
fie. Qrand  donc  nou:  aurons  bien  entendu  ce 
paflagede  TEp  ftre  auY  Hebrituv  ,  nou'  ver-- 
rons  notamment  pourquoy  faiuft  Paul  parle 
icidela  foy. Voulôs-nous  donc  eftiebien  put 
gez  de  toute  auarice?  Rcpofons-no'  en  Dieu, 
ayôs  cefte  promefledu  tout  rcfolue,  puis  que 
il  nous  a  prinN  en  fa  proteftion  ,  que  iamais 
nous  ne  ferons  defttuez  de  luy  au  befoin,  que 
nous  ne  ferons  defnuez  de  rien  qu'il  nous  tail 
le.  Vray  eft  que  nous  ne  ferons  point  nourris 
toufiours  fi  grafllment  que  noftre  appétit  le 
porte,  mais  tant  y  a  que  Dieu  monftrera  qu'il 
ne  nous  a  point  mis  en  oubli  .  Or  quand  nous 
aurons  cela. alors  nous  ferons  contens  (côme 
i'ay  défia  dit)fi  Dieu  nous  donc  des  biens, que 
il  nous  face  la  grâce  de  les  pofleder,  nous  en 
pourro-ts  iouir:voire,mais  ce  fera  fans  y  cftre 
trop  afFcftionnez,  fans  eftre  détenus  en  ccfte 
maudite  feruitude  dont  font  enueloppez  les 
auaricieuy.mais  nous  irons  franchement  là  où 
c'eftque  Dieu  nous  voudra conduire.pour di- 
re q  du  iour  au  lendemain  nous  foyons  prcfts 
de  quitter  ce  qu'il  nous  aura  mis  entre  les 
mains,  quiîd  il  luy  plaira  noiis  en  deflaifir.  Or 
roïintcnant  nous  voyons  que  tous  ceux  qui  s 
addonnent  à  l'auarice, par  ce  nxiyen  fontcon 
uaincus  d'cftre  infidèles.  Ils  auront  beau  pro- 
tcfter  d'eftre  Chrefhens,mais  tant  y  a  que  l'a- 
uarice exprime  toufiours  l'iiifidelité  des  hom- 
mes? 


SVR    LA    T.    A    TIMOTH- 


Zy7 


&  quiconques  appcte  d'eftre  riche,  il  monflre 
par  ctfeft  qu'il  ne  fe  fie  point  en  Dieu, qu'il  n' 
attend  nul  bien  de  luy, qu'il  ne  fe  reporc  point 
fur  le  foin  paternel  qu'il  a  promis  auoir  de 
nous.Apres  que  fainft  Paul  a  parlé  de  foy  ,  il 
adiouAe, Suy  pieté.  Il  eft  vray  que  ce  font  cho 
fes  coniointes  &  infeparables  :  mais  tant  y  a 
qu'il  a  encores  voulu  exprimer  plus  que  par 
ce  mot  de  Foy  :  comme  s'il  difoir,  que  fi  nous 
feruons  à  Dieu  en  toute  pieté, nous  chemine- 
rons en  fa  crainte,  &  aurôs  vne  vraye  religiô: 
&  fur  cela  nous  afpirerons  au  Royaume  cclc- 
fte.Pourquoy  fommes-nous  Chreiticns?Pour 
quoy  fommes-nous  baptiltz?Pourquoy  inuo- 
quons-nous  Dieu  ?  Eft-ce  feulement  pour  vi- 
ure  en  ce'monde.poury  auoir  nos  voliiptez& 
délices  ?  Nenni  :  mais  c'eft  pour  afpirer  phis 
liaut,&  pour  cognoiftre  qu'il  nous  faut  tcdre 
au  Royaume  de  Dieu,  fçachans  que  noftre  he 
ritagc  tû  es  cieux  ,  auquel  il  nous  faut  courir 
pafîàns  par  ce  mode  fans  nous  y  arrefter  nul- 
lement.Or  quand  il  y  a  vne  telle  condition  en 
nous.c'eft  à  dire  q  nous  n'auôs  point  ici  vn  ha 
bitacle  permanent, mais  qu'il  nous  faut  tendre 
en  haut,  &  que  Dieu  nous  appelle  iournellc- 
mét  pour  venir  à  luy,ie  vous  prie, fi  nous  fcm 
mes  plusaddôrezà  l'auarice, aurons-nous  ex- 
cuferSinous  fommes  encores  cnueloppez  aux 
chofes  de  ce  mode,  api  es  que  Dieu  nous  aura 
remonftré  la  briefueté  &  fragilité  de  noftre 
vie, ne  faut-il  pas  que  nous  foyons  plus  qu'i  n- 
ragez?  Or  toutesfois  on  voit  comme  le  aiiari 
cieux  prenent  plaifir  à  fe  plonger  en  ce  mon- 
de:&  puis,  encores  qu'ils  foyent  bien  aduertis 
de  leur  mortelle  condition, il  leur  fembleqje 
ils  doyuent  viure  cent  mille  ans  après  leur 
mort,iln'ya  nf  fin  ne  cefll-, leurs  appetis  font 
inlâtiablcs.Oraucôtraire  fi  nous  cognoiflons 
que  noftre  Seigneur  nous  merici  comme  po- 
ures  cftrangers.qui  ne  font  que  paireriS:  puis, 
que  nous  fommes  en  vn  combat  où  il  faut  ba- 
tailleraf  iduellemét.ce  feroit  aflcz  pour  nous 
depeftrer  de  toute  auarice.Et  puis  ;1  nous  faut 
cognoiftre  d'autre  cofté.que  nous  ne  pouuons 
pas  tendre  au  Royaume  des  cieux  fans  morti- 
fier nos  afFeftions  charnelles.il  eft  dit,  Là  où 
cft  ton  threfor,là  aufsi  fera  tô  coeur.  Si  noftre 
threfor  eft  aux  cieux,  il  eft  certain  que  cefte 
rage  diabolique  fera  quSt  &  quant  efteinte.  S: 
que  nous  mortifierons  tout  ce  qui  nous  empef 
fhede  venir  à  Dieu, qu'il  faudra  oue  tout  c-eli 
fait  3bbatu,&  que  de  iour  en  iour  nous  traiiail 
liBns après  pour  retrancher  toutisces  fuper- 
fluitez  qui  nous  abiifentici  bas.  Et  ainfi  nous 
voyons  que  non  fans  caufe  fainft  Pauladou- 
ftc  ce  mot  de  Vietr,  qui  vaut  autant  à  dire  (jiie 
religion  &crainrede  Dieu  ,  qu'il  le  comoint 
fdi-ic^à  la  foy.difant  que  quand  nous  aurons 
mis  noftre  fiarce  en  Dieu,  &:  que  nous  atten- 
dras de  luy  noftre  nourriture, il  faut  aue  noirs 
ayons  eneores  ce  rcç.irdde  ne  viure  point  en 
ce  mode  comme  G  c'eftoit  rcftre  but,  i^-  de  ne 
nous  y  arreltcr  poict^iais  que  nous  tendions 


au  Royaume  celefte  .Or  ayant  ainff  parle,  il 
nous  ramené  puis  après  à  charité  &■  àmanfue- 
tude, comme aufvi  nous  auons  acheminer  cii 
toute  bonne  amitié  auec  nos  prochains  ,au-t 
trement  nous  ne  monftrcrons  pas  que  nous 
ayons  la  iufticedont  il  a  fait  mention.  Et  par 
cela  voyons-nous  que  par  tous  ces  mots  qu'il 
met  ici, il  ne  veut  finon  confermer  l'exhorta- 
tiô  qu'il  auoit  laite, c'cft  afçauoir  de  fuyure  iu 
frice  &  droiture. Et  cément  la  fuyurons-nons? 
En  premier  lieu  ,  en  mettant  noftre  fiance  en 
DicuiX:  puis  afpirans  au  Royaume  celefte;  8c 
tiercement,  viuans  en  bonne  amitié  les  vns  a- 
uec  les  autres. Car  celuy  qaime  fon  prochain, 
ne  le  voudra  frauder.  Et  finalement, que  nous 
aimions  manfuetude.c'eft  à  dire,q  nous  foyôs 
débonnaires  les  vns  aux  autres ,  que  nous  ne 
foyons  point  des  renards  pour  circonucnirles 
fimples,mais  que  nous  foyons  humains:  car  il 
fautCccn-me  défia  nous  auons  dit)que  l'auari- 
ceemporte  toulîours  cruauté  auec  foy. Main- 
tenant nous  voyôs  quelle  eft  cefte  doûrine.il 
ne  refte  finon  de  la  prattiquer.  Or  en  premier 
lieu,  penfo'ns  bien  à  nous  :  que  fi  ncus  n  gar- 
dons h  Satan, l'ennemi  mortel  de  noftre  fallut,, 
fi  nous  cognoiflons  qu'il  ait  toi'fiours  Ces  fi- 
lets tendus  pour  nous  furprerdre  .qu'il  foit 
comme  vn  lion  bruyant  qui  ne  dcniarde  '-.u'à 
nous  deuorer  (comme  fainft  Pierre  en  parle) 
vn  chacun  de  nous  pcrfera  2  fe  garder  .  Voici  '•  "'*•'•?'?' 
noftre  Seigneur  qui  nous  dit&no.us  déclare,  S- 
fi  nous  appelons  les  richtfles  de  ce  monde, 
que  c'cft  nous  addonner  audiable,&  nous  met 
tre  (11  ctfte  feruitudemaudite,  qu'il  ait  toute 
niaiftrife  par  deflliv  nous  .Ainfi  donc  tenons 
en  bride  toutes  nos  aifeclions  mauuaifes  pour 
ne  point  nous  addonner  à  ces  appétits  defor— 
donnez  d'auaricc  .  Et  d'autant  que  de  nature 
nous  y  fommes  par  trop  enclins ,  Se  que  nous 
ne  p.^urrions  pas  afpirer  d  ce  Royaume  éter- 
nel fans  batailler,  &  fans  qu'vn  ch.icun  s'ti'for 
ce  ,  que  nous  prenions  les  remèdes  qui  nous 
font  ici  donnez  :  voyans  que  nons  fommes  il 
farcis  d'incrédulité  ,  Si  que  nous  ne  pouuons 
nous  fier  en  Dieu,  recourons  à  la  foy  ,  &  pri- 
ons ce  bon  Dieu  qu'il  nous  face  du  tout  dé- 
pendre de  luy, &  nous  yappuyci,&  qu'il  nous 
face  goufter  fa  prouidence  ,ahn  que  nous  ne 
doutions  point  que  ce  ne  nous  foit  affez  qu'il 
veille  fur  nous,  &  que  d'autant  qu'il  cft  iiche, 
qu'il  a  des  biens  pour  nous  élargir  au  t.Tnt  que 
il  nous  en  faut, &  que  noHs-nous  repofions  là. 
Q_ue  s'il  ne  nou- donne  ce- q  noftre  chair  ap 
pete, pour  cela  nous  nelaifsions  pasd'afpirer 
toufiours  au  Royaume  des  cieux  ,  car  par  G» 
moyen-la  ai'isi  il  nous  veut  retirer  d'ici  bas 
pour  nous  eleucr  à  luy. Et  puis  avôs  cntreno*' 
charité  ,  fçachans  que  Dieu  ne  nous  a  point 
créez  chacun  pourfoy ,  mais  il  veut  que  nous 
foyons  addonncz  les  vns  aux  autres ,  dV  que 
nous  ayons  vn  efprit  debon.aire  pour  chemi- 
ner en  toute  humanité  &:  douceur  ,  que  nous 
n'ayons  point  vne  cruauté  pour  nous  faite 

P.i. 


2,<j8 


SERMON       L. 


comme  des  bcftes  ûuuagcs.  Quand  cela  y  fe- 
ra ,  il  n'y  a  doute  que  la  milice  Si  droiture.n'y 
rogne  qiianc  Se  quant  ;  &  fi  la  iuftice  y  règne, 
Dieu  feiaaufsi  feruiJc  tous  d'vn  commun  ac- 
cord. Et  cependant  l'argent  le  pnirra  pour- 
inencr  cncie  noui  CinsquM  loit  ànoftre  rui- 
ne &  perdition ,  mais  nouç  en  pourrons  vfer 
comme  Dieu  nous  Pa  donne,  &  par  ce  moyen 
Dieu  fera  glorifié  en  toutes  fes  créatures ,  & 
cognoiftrons  aufsi  par  expérience  quel'vfage 
en  cil  propre  pour  noftre  falut. 

OR  nous-nous  profternerons  deuanc  U 


face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflaivce  «le 
nos  fautes ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  de  nous 
moitifiei  de  toutes  no$  affectons  terrcflrcs 
aulquelleinous  fommes  par  trop  addonnez, 
afin  que  renonçans  àicelles  nous  tendions  là 
où  ilnoLis  appelle. Et  que  cependant  nous  che 
minions  tellement  par  ce  monde,  que  nous  n' 
y  foyons  point  arreltez  ,  mais  que  nous-taf- 
ch:ons  de  retrancher  de  lour  tn  iour  toutes 
les  corruptions  qui  font  en  nous  ,  iufques  à  ce 
qu'il  nous  en  ait  pleinement  defpouillcz  pour 
nous  reueftirde  fa  iuftice  .  Ainfi  nous  dirons 
tous, Dieu  touc-puiflànt,Per€  celefte,&;c. 


LE 


e  I  N  Q_V  lEME     SERMON      SVR 

SIXIEME     CHAPITRE. 

1 1  Bataille  la  bonne  bataille  defoy ,  appréhende  la  v/e  éternelle, 
à  lac^ucllc  tu  es  appelé  y  Cf  en  as  fait  bonne  couj'ejiion  deuant  beaucoup 
de  tefmoins. 

13  le  ienioin  deuant  "Dieu  qui  yiuijrc  toutes  chofes ,  q'  dcuint 
IcjùsChrijl^qui atefmoigîié fous  V once  V date  bonne  confefion, 

'4      Q^^  ^^  gardes  ce  commandement,  (^'c. 


Ainéi  Paul  ce  matin  nous 
déclarant  les  remèdes  pour 
fuir  l'auance  &  les  maux  qui 
en  procèdent, nous  a  exhor- 
tez notamment  à  patience, 
&  non  fans  caufe.  Car  nous 
I  fommes  folicitez  à  gain,  par 
ce  que  chacun  voudroit viureà  fonaife.Or 
quand  nous  auo  ns  vn  tel  regard  à  nos  coinmo 
«Jitcz ,  il  eft  impofsible  que  Satan  ne  fe  meflc 
patmi,&  qu'il  ne  nous  fcduife,&  nous  face  def 
border  outre  mcfure.  Et  ainfî  nous  ferons  fou 
ucnt  tourmentez, on  nous  fera  beaucoup  d'in- 
iures  Si.  de  tors,  nous  ferons  fafchez  par  l'vn, 
pillez  par  l'autre  :  &  fi  nous  ne  fommes  armez 
de  patience,  comment  fuWîfterons-nous  ?  Et 
comment  pourrons-nous  auoir  vne  telle  at- 
trempance,  de  ne  point  appeterquoy  qu'il  en 
foit,gainillicite:Mais  pourceque  la  patience 
des  ndtks  s'eftend  bien  loin ,  &  comprend 
fous  foy  beaucoup  de  parties,  notament  fainft 
Paul  a  mieux  déclaré  fon  intention  ,adiou- 
ftant,  Que  iwHt  ctmhattons  :  comme  s'il  difoit, 
que  la  foy  ne  peut  ertre  fans  combat. Qjjicon- 

Îuet  voudra  que  fon  feruice  foit  approuué  de 
)icu ,  il  faut  qu'il  fe  difpofe  i  la  bataille,  car 
nous  auons  vn  ennemi  qui  ne  fe  lafle  iamais. 
Ainfi  donc  maintenant  nous  voyons  à  quoy 
regarde  faind  Paul,c'cftafin  que  nous  ne  trou 
Nions  point  eftrange  ce  qu'il  auoit  dit  de  pa- 
tience, qu'vn  chacun  face  fon  conte,  d'autant 
que  Dieu  nous  a  appelez  à  fon  fennec ,  qu'il 
nous  veut  aufsi  exercer  en  côbat.Car  il  pour- 
roic  bien  ccmr Satan  bridé, il pourroic  bien 


empefchcr  que  nous  n^eufsions  nulle  tenta- 
tion,que  nous  tui>ions  à  repos  pour  aller  no- 
ftre chcmm.Or  nous  voyons  que  Satan  a  beau 
coup  de  moyens  pour  nous  tafclier,  &  Dieu 
luy  lafche  la  bride  ,  Si  luy' donne  vne  telle  li- 
cence .  Il  s'enfuit  donc  qu'il  nous  faut  cltre 
bons  gendarmes  ,  ou  nous  ne  pourrons  eftre 
bons  fidèles.  Il  cft  vray  qu'il  deurou  bien  fuf- 
fired'auoir  dit  cela  en  vn  mot ,  mais  pource 
quccefte  dodrine  cft  tant  difficile  à  pratti- 
quer,ellc  a  befoin  d'cftre  encores  mieux  exa- 
minée, afin  qu'vn  chacun  ait  occafion  d'y  mi- 
eux penfcr,&  de  la  réduire  fouuent  en  memoi 
re  .  Nous  difons  que  la  foy  n'eft  iamais  fans 
combat. Et  pourquoy?  Car  ii  vn  homme  fe  dif 
pofe  àbienfaire,&àfe  rangera  Dieu,  le  dia- 
ble luy  apportera  beaucoup  de  difficultez 
pour  le  desbaucher,le  monde  cft  plein  de  trô- 
peries.que  nous  ne  pouuons  point  marcher  vn 
pas  fans  auoir  rnaviuaile  rencontre,  nous  che- 
minons ici  entre  les  efpines,ceux  qui  nous  de- 
uroyentauancer,nout  recullent:  carie  diable 
fe  Icrt  de  k  malice  de  ceux  auec  lefquels  nous 
conuerfons:&  quand  quelqu'vn  nous  fera  mal, 
il  nous  donne  occahon  de  luy  rendre  la  pa- 
reille, ou  pour  le  moins  nous  perdons  coura- 
ge ,  qu'il  nous  fafche  que  nous  foyons  ainfi 
gourmandei.qu'on  nous  mange  la  laine  fur  le 
dos  quand  nous  y  allons  en  limplicité,  &  que  • 
nous  ne  demandons  finon  de  faire  ce  qui  cft 
de  noftre  deuoir.Et  au  reftc, encores  que  l'hô 
me  Chrtftien  ne  forte  point  hors  de  foy  ,  fi 
cll-ce  qu'il  faut  qu'il  comb'atc  pour  pcrlîftcr 
ce  la  foy.  Q^'ainù  foit.il  «'y  a  nen  plus  con- 
traire 


SVR     LA     I.     A     TIMOTH. 


3-99 


traire  à  noftre  nature  que  de  quitter  tes  cho- 
ies tcrrcrtres,  &n'y  eihe  point  addoniuz  ,  & 
de  cercberde  toute  noftre  arfcdion  &enten- 
4lcment  ce  qu'on  ne  voit  point,&  ce  qui  eft  du 
tout  caché  à  nos  ye«ii,&  quieftdu  tout  incô- 
preheuiibJe  à  nos  fcns.Ii  faut  que  rhonime  H- 
âele  sVlcue  par  dellus  foy  ,  quand  il  elt  que- 
Ihon  de  péfer  au  Royaunte  de  Dieu  &  à  la  vie 
ccetnclle.  Or  cependant  nous  l'çauons  comme 
nos  efprits  font  enclins  à  ce  que  neuf  auons 
en  mam.  Comment  donc  feia-il  pofMble  que 
nous  perfîjtionsen  la  t'oy,que  nous  ne  farions 
force  &  violence  àtoute  noftre  nature  .^Ainfi 
donc  I  quand  ces  tentations  nous  vicnent  au 
deuant',  &  que  nous  fommes  incitez  i  comba- 
tte ,  faifons  vni>ouclier  de  celle  doftrine  de 
fain£l  Paul ,  c'eft  que  la  foy  n'eft  iamais  fans 
•combat.que  nous  ne  pouuons  feruir  à  Dteu  li- 
non eltans  gendarmes.Et  pourquoy?Car  nous 
auons  les  ennemis  au  deuant,  nous  en  lommes 
enuironnez  de  toutes  parts.  Et  ainll  il  eft  be- 
foin  que  cous  {oyons  accouftumez  à  batailler, 
ou  il  bous  faudra  défaillir  .Puis  qu'dinlî  cft 
que  nui  ne  peut  feruir  à  Dieu  fans  s'exercer  en 
patience,  &  au  milieu  des  afjfli^ions  dont  les 
cnfans de  Dieu  fonttourraentcz  ,  .que  nous a- 
uiilons  à  ne  point  renorKcr  à  noftre  foy,  mais 
qu'il  nous  faut  iiiarchcr  outre.  £t  bien,ie  vou 
droye  que  ie  me  peurte  du  tout  employer  à 
louer  Dieu  aucc  reliouilTance  ,  &  tftre  en  re- 
pos Se  contenteinent,<jue  ie  ne  fufle  point  mo 
lerté  du  cofté  des  hommes  ,  que  ie  ne  fentilTe 
aucune  répugnance  en  moy,mai$  que  tous  mes 
fens  s'addonnaflcnt  à  bien  faire  :  cela  feroh  â 
delîrerimais  cependant  Dieu  me  vait  rfpiou- 
uer,  &  faut  que  l'a'ye  la  principale  guerrcxon 
tremes  afFtchons  propres  :  &  puis,  quand  le 
diable  raedrtfiera  beaucoup  de  combats,  que 
ie  ne  foye point  vaincu  :  qcand  les  tentations 
viendront  de  tous  coftti, que  ie  ticnebon,qiic 
ie  loye  feime  &<oiiflant.  Il  ne  faut  point 
donc  queie  foye  icrdebilicé.fiiion  que  le  vueil 
le  renoncera  la  foy.  Or  que  fcroit-cedequit 
ter  la  foy  h  laquelle  Dieu  m'a  appelé  ?  Ainli 
donc  marchons  outre,&  ne  trouuons  point  e- 
flrange  que  cefte  vie-ci  foit  pleine  de  beau- 
coup d'aflàuts,&  qu'il  nous  faille  rellfter  à 
beaucoup  d'ennemis,  &  que  nous  deuons  d'vn 
iour  à  l'autre  cueillir  force  nouuelle  pour  no* 
arfliiettir  à  -cefte  condition  à  laquelle  Dieu 
veut  que  nous  foyons  fuiets.  Voila  pour  vn  i- 
tem.Mais  cependant  fainft  Paul  adoucit  la  tri 
ûeflt:  que  les  fidèles  peuuent  conceuoir.quand 
il  kur  dit  qu'ils  auront  à  combatte  tout  le 
temps  de  leur  vie:  c'eft  q\iand  il  adioufte,  tjur 

I.  Cor.S.  **  """^'"  'fi  ^""^^oraff  -''1  difoit.  Nous  n'a- 
j^_  uons  point  vne  guerre  douteufe  :  comme  en 

vn  autre  paflage  il  du  que  nom  ne  combatons 
point  à l'aucnture. Nous  voyons  les  Princes 
gui  pour  leur  ambition  liazdrderont  tout  ce 
qu'ils  ont ,  ils  fe  mettront  en  danger  d'eftrc 
dcrpouillez  de  toute  leur  puiflance  :  nous 
vt>yoivs  les  gendarmes  qui  pour  Auoir  gages 


de  gens  qui  trauailleroyent  aux  vignes  A'.itnt 
champs,  s'en  vont  e»pofcrlcur  vitaiihazaid. 
£t  qui  les  mené  à  cela?  Vnc  efperancc  dourcu 
fe,  il  n'y  a  rien  de  certain.  £t  puis  fouucntcf- 
fois  encores  qu'ils  ayent  tout  gagné  ,  qu'ils 
ayentlaviôoirc  de  leurs  ennemis,  quel  tiuid 
leur  en  reuient-il?  Or  quand  Dieu  nous  appel 
le  au  combat ,  &  qu'il  nous  veut  auoir  comme 
louldats  fous  fon  enfeigne,ce  n'eft  point  a  ce- 
fte condition-la,  mais  nous  fommes  aflcurcz 
que  la  guerre  fera  bonne  &  heurcufe.Et  ainfi, 
fainft  Paul  a  voulu  confokr  les  fidèles  en  les 
exhortant,  comme  aul'si  Dieu  s'accommode  à 
nous.quand  il  nous  monftre  quel  eft  noftre  de 
uoir,  qu'il  déclare  aufsi  que  quand  nous  fe- 
rons ce  qu'il  nous  commande,  que  le  tout  re- 
uiendra  à  noftre  profit  &  falut.Il  eft  vtay  que 
fi  nous  citions  bien  auilez,il  nous  deuroit  fuf- 
firede  cognoiière  la  volonté  de  noftre  Dieu. 
Voila  où  il  nous  faut  refoudre  :  puis  que  no- 
ftre Seigneur  ordonne  les  cliofes  ainfi  ,  paf- 
fons  parla,  nous  ne  deuons  point  difputcr  li 
deflîis.Maispourceque  nous  fommes  tantdiF 
ficiles  à  gouuerner,  nous  foirancs d'autre  co- 
ilépar  trop  délicats:  5;  pois  il  ne  faut  rien 
pournous  amortir  le  courage,  que  nous  fom- 
mes fi-fiagiles  que  c'eft  pitié, noftre  Seigneur 
nous  monftre(comme  l'ay  défia  dit)qiie  >'il  e-C 
prouue  noftre  patiéce,qu''il  nous  impofc  quel 
que  loy  qui  nous  foit  dure  ,  s'il  permet  que 
nou  fuyons  fa fchez  &  tourmentez  de  beau- 
coup de  tentations,  qu'il  le  fait  pour  noftre 
bien.  Se  que  l'ilKic  fera  toufiours  hturtufe  & 
defiiable:  combien  que  pour  vn  temps  les  cho 
fes  loyert  aigres,  &  que  nous  rechignions  :  8c 
que  s'il  nous  tftoit  pofsible.nous  voudrions  re 
•cul!cr,&  nousiiesbordf  r,tant  y  a  q  Dieu  mon 
ftrc  en  la  fin  qu'il  difpcfc  tellement  ce  mal-la, 
qu'il  le  fait  retourner  à  noftre  profit  *;  auarta 
ge  .  Et  ainfi  nous  deuôs  bien  pcfer  ce  mot  que 
fainiT  Paul  met.  Que  UgHerrt  dts  tnfaus  it 
VitH  ift  LoJine  à  teux  ^ui  a^mbattf.tlT  en  cô- 
batant  ils  ne  perdent  point  kur  temps,  pour- 
ce  qu'ils  «e  font  rien  à  l'auenture  .  Et  pu  s  il 
adioufte  encores  poirr  mieux  ccfermer  le  pro 
pos,  que  le  falaire  que  Dieu  nous  propofe,  tC 
eft  point  de  quelques  figes  d'or  ou  d'argenr, 
mais  il  y  a  la  vie  eterne jfe  Or  (corne  il  eft  dit 
en  l'autre  paflage  que  nous  auôs  touché)fi  les 
hommes  par  vne  ambition  friuole  font  telle- 
ment enfiambcz ,  qu'ils  n'efpargncnt  poJnr 
kur  propre  vie,  que  iera-ce  de  nous  ?  Q^ielle 
lalcheté,&  combien  incxcufablc,  fi  quelqu'vn 
s'efpargne  quand  Dieu  ne  nous  met  point  eft 
auant  quelque  loyer  temporel,  quelque  pièce 
d'argent, quelque  poflèftion  tranfitoirc&' ca- 
duque, trwis  qu''il  nous  taille  la  vie  éternelle, 
qu'ildeclare  qu'ilnedemande  finon  de  nous 
auoir  pour  fcs  héritiers,  que  nous  foyens  par- 
ticipas de  fa  gloire  Si  de  fon  immortalité,  qur 
nous  iouifsions  de  tous  fes  biens,  &  de  iuy  en 
fomme  ;  Quand  Dieu  nous  eleue  iufques  là,, 
se  faut-il  pas  que  nous  foyons  par  ttop  fiupi^ 

F.ii. 


JOP 


SE  RMO  N      L. 


de(  fi  toiv:  «as  fterfs  ne  s*efforcent  à  fuyure 
ce  combat  du^^iiel  le  loyer  elHî  grand  &li  in- 
e(hmabîe''Ain<id6c  il  nous  ùutauoir  ces  trois 
dcgrer  que  faind  Paul  met  ici.  Le  premier, 
eVllqueli  foyp-e  peut  cltre  fans  beaucoup 
d'aflâuts,  &  que  la  vie  dcv  tntans  de  Dieu  cil 
comme  vne  gendarmerie  en  ce  monde. Le  fé- 
cond eft,  qu'il  ncnouîdoit  point  ùlclierli 
Dieu  nous  elprouue.car  ce  n'eft  point  a  Taucn 
ture  que  nous  batailiô>,nous  ne  lommes  point 
eu  Jauger  de  perdre  noftrc  vie  Cinsla  recou- 
urer.ni  d'ellre  dclpouillcz  ou  de  bien, ou  d'iiô 
neur,  mais  l'iiruede  nollre  gendarmerie  eft 
dclîrable, d'autant  que  Dieu  pieiidc  fur  noUs, 
que  c'elt  luy  qui  nouv  appclle,&;  ne  veut  point 
quenous  perdion:;  nalh'c  temps.  Et  au  relie, 
qae  nous  fçachions  pour  le  troiiieme  ,  que 
Dieu  ne  le  contente  pas  de  nous  recompcn- 
fer  en  ce  inonde  ,  mais  il  nous  propol'evne 
cliole  beaucoup  plus  excellente,  c'eft  l'herua 
ge  du  Royaume  des  cieux.D'autant  donc  que 
il  veut  que  nouspafsions  par  ce  monde  afin  de 
venir  à  iuy.&de  louir  àiamaisde  ù  gloire  Se 
béatitude  immortelie  ,  laquelle  il  nous  a  ac- 
quife  tant  chèrement  par  le  fang  de  noftre 
Seigneur  lefus  Clirift  ,n'eft-cepas  railon  que 
vn  chacun  de  nous  s'applique  du  tout  à  cela? 
Et  ainfi,fomraes-nous  retenus  en  ce  monde, & 
iceschofes  quenous  voyons?  Q^nd  nous 
pourras  faire  coinparaifon  de  la  vie  ctlelle  à 
tout  ce  qui  tft  defïrable  en  ce  monde ,  le  vous 
prie,  combien  que  les  honneurs,  les  richefles, 
les  cémoditez.les  délices, &  toutes  choies  auf 
quelles  les  hoinmcs  s'addonent,nous  pla.lcnt, 
ne  faut-il  pas  qu'elles  foyent  corne  tiente& 
ordure  quandil  eftqueltion  delà  gloire  de 
Dieu .' Car  il  n'eft  point  queftion  feulement 
que  Dieu  fe  monftre  noftre  Père  en  ce  mode, 
&  qu'il  nous  face  fentir  fa  grâce,  en  nous  don 
nant  quelques  biens  tranfîtoires:mais  de  dire 
.  ^'  que  nous  foyôs  de  fa  natureCcôme  fainû  Pier 
reen  parie)  que  nous  loyons  conioints  a  luy, 
qu'il  foit  vnauec  nous, ne  voila  point  vnpriui 
lege  qui  furmonte  toutf  Or  pour  le  quatrième, 
faind  Paul  met ,  A  laquelle  aufsi  t»  et  appelé. 
Ceci  emporte  en  premier  lieu  vne  confirma- 
tion de  ce  qu'il  auoitdit.  Appréhende  la  vie 
éternelle. Car  ce  n'cft  point  aux  homes  de  ga- 
gner le  Royaume  des  cieux,  nedeleconque- 
îier:ferôs-nous  aflez  vaillans  pourcefaire?  & 
quand  nous  y  courrions,  toute  noftre  force  3c 
confeil  n'y  feruiroit  de  rien. Mais  qu.id  noftre 
Dieu  nous  y  appelle,nous  pourrons  marcher: 
car  nous  aurons  v.n  bon  garent, nous  ne  ferons 
point  fondex  fur  quelque  efperance  que  nous 
aurons  imaginée  follement  en  noftre  cerueau, 
ou  deflÀis  qlquc  promelTe  que  nous  aura  faite 
vn  homme  mortel ,  ou  fur  quelque  apparence 
que  nous  verrons  deuât  nos  yeux, comme  tou- 
tes ces  chofes-la  nous  peuucnt  tromper:  & 
nous  voyons  comme  s'en  trouuent  ceux  qui 
s'y  appuyét.Mais  quand  noftrcSeigneur  nous 
a  tendu  Ja  main,  que  nous  cbemiaions  hardi- 


ment:car  nous  cognjifttos  que  ce  n'eft  point 
en  vain  que  nous  courons.  Voila  qui  nous  doit 
pleinement  confoler,  afin  que  nous  ne  flechif 
lions  nullemêt  quoy  qu'il  nous  aduiene:quâd 
BOUS  verrons  les  chofes  du  tout  confufes,  re 
gardons  à  la  vocation  de  noftre  Dieu.  Ainû 
donc  nous  voyôs  que  l'ainrt  Paul  a  voulu  con 
fermer  ccftedodruie.endifït  que  Timothee 
tft  appelé  à  la  vie  éternelle.  Or  ce  qu'il  dit  à 
vn  homme, appartient  à  tous  en  gênerai.  Car 
(comme  dclia  nous  auons  dit  )  il  n'a  pas  ceft 
office  de  nous  introduire  au  chemin  de  falut, 
mais  il  faut  que  Dieu  nous  y  conduife.  Et  au 
rcfte  ,  en  cela  voyons-nous  que  les  hommes 
n'acquièrent  point  leurfalut  parleur  iiidu- 
ftrie,mais  que  le  tout  procède  de  la  bôtégr» 
tuitc  de  Dieu.  Afin  donc  que  nul  ne  prene  ici 
occalion  de  magnifier  (ex  mérites  ,  &  de  dire 
que  nous  pouuons  quelque  chofe,  que  c'eft  à 
nous  denouî  aiûcerpour  obtenir  la  vie  eter 
neUe,fainèl  Paul  rembarre  toutes  telles  refue 
ries,en  difant  qLie  nous  apprehendi ou»  la  vict 
d'autant. que  Dieu  nous  y  a  appekî.Vray  eft 
qu'il  non-,  faut  traua:ller,,3i  nous  efforcer.voi 
re  mcfmes  par  delTus  toutes  nos  vertus:  mais 
tant  y  a  quecen'cftniauvueiliant.niau  cou- 
rant,(comme  faind:  Pauldit)inais  àceluy  qui  Roi»  .  S>' 
fait  mifericorde.Car  ce  n'eft  point  de  noftre  iS- 
bon  vouloir,  ou  denoftrecourfe  que  nous  ob 
tenons  lavie  éternelle, pource  que  non  feule- 
ment nous  lonimes  lafches&  inutiles  atout 
bien, mais  nous  tirons  toutau  rtbours.iufqu'à 
ce  que  Dieu  nous  ait  difpokz  à  courir, &  que 
il  nous  ait  mis  au  droit  chemin.  Si  les  homes 
fuiuent  leur  naturel  ,  que  feront-ils?  Ils  font 
enragez  au  inal,&  du  tout  ljouillans,tclkinét 
qu'il  n'y  aura  en  eux  nulle  peu  fee  qui  necom 
bâte  contre  Dieu.Q_uant  au  bien, nous  n'auÔs 
garde  d'y  penfer:  car  pour  bien  faire  nous  ne 
fcaurions  auoir  vne  feule  penfee,côme  l'ainâ 
Paul  en  parle. Et  ainli  c'eft  Dieu  qui  no' met  z.Cor!a, 
en  train, il  nous  difpefe  à  courir,  il  nous  mon  j.ç. 
ftre  le  chemin.A-il  faitcela?encores  n'eft-ce 
point  aflez:car  au  milieu  du  chemin  nous  clo 
cherons,&  tomberons  leauentesfo'is,  mefnies 
il  nous  aduicndra  de  fouruoyer ,  Il  faut  donc 
que  Dieu  fupplee  à  toutes  ces  fautes ,  Se  qu'il 
rende  fa  vocation  ferme  en  nous  ,  &  qu'il  la 
fortifie  par  cefte  mefmc  grâce  dont  elle  eft 
fource  &  origine.   Tout  ainfi  donc  que  Dieu 
n'a  point  eftéefmeuà  nous  donner  efperance 
de  falut  pource  qu'il  ait  veu  en  nous  quelque 
bié,mais  pource  qu'il  luy  a  pieu,  &  luy  a  pieu 
par  fa  pure  inifericorde:aufsi  quand  il  conti- 
nue à  nous  conduire, iufqu'àce  que  nous  foy- 
ons  paruenus  au  port  de  falut ,  c'eft  d'autant 
qu'il  luy  plaift.  Voila  donc  vn  cours  conti- 
nuel de  la  vocation  gratuite  de  noftre  Dieu 
enucrsnous  ,  tellement  qu'ici  les  homes  font 
abbatus ,  &  n'ont  point  de  quoy  le  glorifier, 
comme  il  eft  dit,  qu'il  nous  faut  parfaire  no- 
ftre falut.  Voila  comme  Du  u  ne  veut  point  Vhill .  i. 
que  nous  foyons  piiifs,mais  tant  y  a  que  c'eft  u, 

atie« 


s  V  R    LA  I.  'A   T  I  M  O  T  H. 


auec  crainte  Se  tremblement. Et  pourquoy?car 
c'eft  Dieu  qui  befongne  en  nous, nous  donnât 
Je  vouloir.nous  donnant  rerfed,&  le  tout  fé- 
lon fonbon  plaifir.  Etfoiçons-nous  tant  tju'il 
nous  fera  pofsibie.mais  fins  prefomptiô.fins 
arrogance.Ne  penfons  point  ici  de  bien  faire 
pour  nos  mentes, ne  pource  que  l'homme  foit 
digne  d'ertre  exalté  à  Toppoiitede  Dieu ,  car 
cependant  la  grâce  de  Dieu  feroit  obfcurcie, 
voire  anéantie  du  tout.  Gardons-nous  donc 
de  celle  refuerie,  &  ne  faifons  point  côinc  les 
Papiftes ,  que  quand  il  cft  parié  de  bien  faire, 
voila  le  franc  arbitre  &  les  mentes  qui  vicnét 
enauant.Mais  quand  il  nous  eft  commandé  de 
faire&de  neu>efforcer  ,  cognoillons  que  la 
vertu  nous  procède  d'ailleurs  ,  c'eft  h  dire  de 
l'Efprit  de  Dieu  :  cognoUFons  qu'il  n'ya  en 
nous  ne  prudence  ne  difcrctiô,  mais  qu'il  laut 
que  Dieu  nous  y  guide, &  quand  il  a  commen- 
cé ,  qu'il  faut  qu'il  parface,  &  qu'il  fupplee  à 
toutes  nos  infirmitez.Si  nous  cognojlPjns  ce- 
la.ayons  touliours  l'iniquité  en  detcftation, 
cheminons  en  folic!tude,inuoquons  celuy  qui 
nous  a  vne  fois  receus  à  pitié,  qu'il  continue: 
car  autrement  il  nous  faudra  défaillir  àcha- 
cune  minute  de  temps.  Q^.'.iid  il  y  aura  vne 
telle  humilité.  Dieu  fera  glorifié  comme  il  en 
eft  digne.  Et  cependant  les  fîJeles  ne  feront 
point  côme  des  troncs  de  b:)is.  Et  pourquoy  ?' 
car  ils  befongneront  en  telle  forte  qu'ils  co- 
gnoiltront  toulîours  le  Seigneur  qui  befon- 
gne en  euxiils  s'efforceront  ,mais  liscognoi- 
ftront  que  leur  force  leur  procède  du  ciel,  & 
qu'ils  ne  l'ont  point  d'eux-mefmcs.  Et  en  la 
fin  ils  cognoiftrontqu'enapprchendant  la  vie 
éternelle,  ils  n'ont  point  de  vertu  ned'indu- 
ftrie  dont  ils  fe  puiflent  glorifier,  mais  qu'ils 
tienent  tout  de  la  bonté  de  Dieu.laquelleaeu 
fon  cours  permanét  cnucrs  eux.  Voila  en  foui 
me  ce  que  nous  auons  à  obferuer  de  ce  paflà- 
ge.  Or  maintenant  nous  auons  aufsi  i»  noter 
que  noflre  ingratitnde  eft  par  trop  vileine  ,  fi 
nous  quittons  la  vocation  de  Dieu. Car  de  di- 
re qiienoftre  Seigneur  nous  aie  regardez  nous 
qui  fommfes  poures  vers  de  terre  ,  pour  nous 
choilirau  nombre  de  fcsenfans, qu'il  nous  ait 
apprtfté  ion  héritage  celefte,  qu'il  nous  en  ait 
donné  l'efperance  Se  certitude  ,  &  cependant 
q  le  cela  foit  mefpnfc  de  nous ,  que  le  inonde 
nous  retiene  ,que  ces  chofes  caduques  nous 
feduifent ,  que  nous  foyons  aliénez  &  priuez 
d'vn  tel  bien  par  noftre  ftupidité  bru  talc, quel 
le  ercufe  y  aura-il  pour  nous  ?  Et  toutesîois 
nous  voyons  cômeilcn  va.car  ilne  faut  point 
d'autres  tefmoins  pour  nous  accufer  ,  &  pour 
faire  noftre  procès. Si  vn  chacun  fe  vante d'c- 
ftreChrcftten  ,  à  quel  titre  cft-ce  finon  d'au- 
tant que  Dieu  s'eft  déclaré  noftre  Père?  Et  (î 
nous  lommes  fes  enfans,à  quoy  nous  appcllc- 
ilfàla  vieetcrncUe.Oreft-il  queftionde  l'ap- 
préhender.En  quelle  forte  finon  parce  moyé 
que  nous  auons  dcfîa  exprimé?  Car  nous  ne 
pouuons'fans  batailler  paruenir  là  où  Dieu 


•V» 

ordonne.Ainfîdonc  quand  on  verra  qne  noue  . 
ferons  retenus  en  ces  chofes  caduques,&  qu'il 
ne  taut  rieti  pour  nous  desbauchcr  ,  que  nous 
fommes  tant  fragiles  que  rien  plus  ,  que  fi  toA 
que  Satan  nous  foutfleenl'aureille.noiis  fom- 
mes tranfportez  bien  loin,  &  qu'au  lieu  de  re- 
tourner au  droit  chemin ,  on  voit  qii'rn  cha- 
cun s'amufe  en  ces  chofes  de  ocant  ,  que  dira- 
on  ?  Ne  voit-on  pas  comme  nous  ne  tenons 
conte  de  la  vie  éternelle  ,d'vn  telthrefor  ,  8c 
de  l'immortalité  mefme  de  noftre  Dieu?  Or 
tant  y  aquececia'eltpasefcrit  en  vain. Pen- 
fons jonques  de  nous  efueilleiyR:  que  nous  ne 
foyons  pas  fi  endormis  comme  nous  fommes. 
Au  refte,  d'autant  que  les  hommes  fe  fafchcnt 
par  fuccefsion  de  temps,  &encores  qu'ils  ay- 
ent  eu  quelqae  zèle  ,  qnand  c'eft  toufiours  à 
recommencer  .qu'ils  deuienent  lafches&  fc 
refroidiffent,  voila  pourquoy  faintl  Paul  no- 
tamment dit.  Appréhende:  il  faut  (dit-il)  que 
tu  paruiencs  là.  Et  il  s'expofe  encores  mirm 
en  vn  autre  lien  aux  Ph^I'ppiens  tioificme 
chapitre,verfetii,en  difant,Qu^iln'eft  point 
encores  paruenu  où  il  prétend.  I)  fe  propofc 
pour  exemple, &  dit, Mes  freres,combicn  rue 
i'aye  beaucoup  trauaillé  ,  fi  cft-ce  qne  :e  ne 
fuis  point  encores  à  mon  butiil  faut  donc  que 
ic  m'efforce,  &  que  l'aille  toufiours  en  aiunt, 
ne  regardant  point  ce  qui  eft  derrière.  Or 
fi  famrt  Paul  a  eu  befoin  de  s'inciter  ainfi.qiie 
fera-ce  de  nous  ,  ie  vous  prie  ?  Ne  faut-il  pas 
quand  vn  homme  à  grand'  peine  aura  marché 
vn  pas, qu'il  regardeau  chemin  qu'il  luy  refte? 
V'eu  que  fainft  Paul  qui  auoit  delîa  fait  vn 
gtandchemin,qui  auoitcouru  ij  vaillamment, 
toutesfois  s'incite  &  s'efforce  ,  ne  faut-il 
point  que  celuy  qui  ne  fait  que  fortir,  &  qui 
n'a  encores  gueres  auancé  ,  regarde  beaucoup 
plus  .1  foy  pourappliquer  &  employer  toutes 
les  forces  &  eftudes  pour  obtenir  ce  que  Dieu 
nous  propofe  ?  Et  notamment  il  dit  qui' ne 
mus  f, lut  point  regardera  ce  qui  cfh  derrière. 
Pourquoyfcarnous  voudrions  toulîours  con- 
ter auec  Dieu. Et  comment''  l'ay  fait  ceciii^ay 
fait  cela  :  n'eft-ce  point  alFez?  Voire?  .i  quelle 
condition  eft-ce  que  Dieu  nous  a  apjicKzà 
(in  feruiceîEft-cepour  vn  afte  ou  poui  deux, 
&  puis  après  qu'il  nous  donne  congé  afin  que 
vn  chacun  fe  repoferNon.maisafin  quenous- 
nor  dédions  à  |hiy&'  àviure&:  àmoiiiir,& 
que  nous  foyons  fiens  du  tout.  Ainfi  donc  gar^ 
dons-nous  bien  de  prendre  cefte  excufe  iur  ce 
que  nous  aurons  fait, pourdire, l'ay  combatu,- 
l'ay  tant  trauaillé  :  &  n'eft-ce  point  aflez?  Et' 
que  les  autres  n'ont-ils  leur  tour?Ne  penfons 
point  à  toutes  ces  chofes  qui  nous  pcuiient 
rendre  lafches,  mais  regardons  à  ce  qui  cft  de 
rcfidu,&  pourfuyuos  ce  qui  nous  eft  corpman- 
dé,autremét  ne  penfons  point  auoir  rien  fait: 
car  il  vaudroit  mieux  n'auoir  point  commen- 
ce, que  de  perdre  ainfi  courage  au  milieu  du 
chemin.  Et  au  refte,  fainct  PauladioufteconT- 
tinuant  fon  propos  ,  Que  Timnthee  auoit  fait 

P.iii. 


5of 

■vue  l>oime  touftfslùh  dtu  attt  plufîtitrs  ttfmolns. 
Par  cck  mots  il  a  voulu  tant  plus  encourager 
à  perfiilcr  en  ce  combat  de  toy  dont  il  i  parlé. 
Car  (comme  nouv  auonsdit)  c'k&.  vne  grand* 
honte  qu'»n  homme  ait  bien  commencé, & 
puis  après  cju^il  le  reuolce,  qu'il  tourne  bride , 
&  Qu'on  le  voye  tout  changé.  Car  on  ne  j'e- 
itonneia  point  il  vn  c^i  lamais  n'a  donné  efpe 
rance  de  foy ,  continue  à  mal-t'aire  ,  qu'il  ibit 
touiiours  desbauchc-:oB  dira.Ho.cepoure  hô- 
tne.il  ne  f^auoit  quec'cûde  Dieu, ne  de  la  vie 
éternelle  ,  lamais  n'a  lieu  que  c'eft  ne  de  ver- 
(u,ne  d'honneûeté, voila  vne  poure  beAe.  On 
parlera  ainfi.on  dira,  C'eft  vn  yurongne,  c'eft 
vn  paillard  ,  c'eft  vu  nelchant ,  il  a  efté  (our- 
iours  tel,ileftc5iît<en  Ton  ordure.Mais  quad 
vn  homme  aura  môftré  <igne  de  feruir  à  Dieu, 
&  s'eft  employé  iidelement,  Se  qu'il  aura  efté 
comme  vn  miroir  de  rainâeté,qu'il  aura  don-> 
Dé  bon  exemple  ,  &  aura  édifie  beaucoup  de 
gens,fî  puis  après  il  change  propos  ,  &  qu'il  fe 
aesbauche,&  qu'il  fe  propl>ane,&  qu'on  le  co 
gnoillè  tout  contraire  à  ce  qu'il  eftoit  aupara 
iiant,on  le  tiendra  comme  vninonftre.chacun 
l'aura  en  deteftaciô.  Et  pour  cefte  caufe  fatnâ 
Paul  dit  a  Timothee  ,  Qu'il  ai^oit  reniuhttune 
tonfcfsion'  deuant  pluJîeurJ  tejmoini.  Par  cela 
nous  fommcî  admonellez  -quand  Dieu  nous 
a  fait  la  grâce  de  cheminer  aroitement  com- 
me il  appartient, que  c'tft  vne  obligation  plus 
eftroite  pour  nous  ,  afin  que  nous  cognoif- 
fîons  qu'il  ne  nous  efl  point  licite  de  décliner 
ne  fléchir,  mais  qu'il  faut  prendre  tant  plus 
de  courage  à  Paducnir.  Il  y  en  abeaucoup  qui 
«uidcnt  auoir  racheté  les  olfenfes  qu'ils  com 
mettent  qu.^nd  ils  allégueront  leurs  belles 
prouelTcs  du  temps  paUe:-comme  nous  voy- 
ons ceux-mefmes  qui  lamais  ne  feirent  rien 
qui  vaille,  mais  il  a  iemblé  que  ce  fuft  quel- 
que chofe.ilsont  eu<juelquebelleapparen- 
<e  de  bien.  Et  fur  cela  ils  fe  desbauchent ,  & 
font  des  diables ,  &  veulent  toutesfois  qu'on 
fcs  repute  comme  Anges  ,■  Comment  ?  l'ay 
fait  ceci  Acela  (  diront-ils)  Brief,  on  feroit 
des  Chroniques  de  leurs  belles  vertus ,  qui  ne 
font  rien  toutesfois.  Mais  prenons  le  cas  que 
ilsayent  efté  comme  Anges  de  paradis ,  tant 
plu»  grande  vergongne  y  aura-il  pour  -eux, 
&  tant  moins  d'excuie  de  ce  qu'ils  allegyent, 
&  tant  plus  grande  corifufîon  deuant  Dieu, 
&  deuant  tous  les  liens.  Et  pourquoy  ?  Car  ce 
qu'ils  ont  fait  auparauant,  n'eft-il  pas  vn  tef- 
irioignage  qu'ils  ont  cognu  qu'il  faloit  feruir 
à  Dieu?  Et  s'ils  fe  font  fafchci  de  ce  faire, & 
qu'ils  fe  foyent  peruertis,  faut-il  leuramcncr 
autre  raifon  pour  les  conuaincre?Leur  vie  paf 
fec  ne  refpondra-ellc  point  qu'ils  ne  pèchent 
plut  par  ignorance,qu'il  n'y  a  nulle  couucrtu- 
Tcpoui  eux,inaisqur-d'vnepure  malice, com- 
me eftan*  tndiablei  ils  fe  rcuoltct  &:  reicttcnt 
ic  ioi^  de  celiiy  qui  les  anoit  appelez  à  fon 
obciflancc  ?  Ainti  donques  notons  bien  l'ad- 
ueuiiTuncnt  qui  a«vu  cft  ici  doiiné,c'eft  afca- 


SERMON     L 


uoir  quand  Dieu  nous  aura  mis  en  bon  irain, 
&  que  nous  aurons  efté  comme  pour  conduire 
nos  prochains  à  bien  ,  que  nous  ilommes  tant 
plui  obligez  à  perlifter:  que  fi  nous  defaillôs, 
ie  fcandale  en  cftdoubié:&:  d'autant  que  Dieu 
t'eil  manifellé  à  nous ,  il  ne  faudra  point  qut 
nous  prétendions  ignorance, quand  il  nous 
aura  ainfi  examinez  en  toutes  fortes. Nous  fe- 
rons donc  beaucoup  plus  «oulpables  quand 
nous  ne  pourfuyurons  point  noftre  courfe, 
après  -qu'vne  fuis  Dieu  nous  aura  tendu  Is 
main.  Or  il  nous  faut  noter  que  S.  Paul  par- 
lant ICI  de  la  bonne  confef  ion  qu'a  rendu  Ti- 
mothee.il  n'entend  pas  feulement  vne  confef- 
lionde  boucfae,mais  <le  vie:car  c'eft  aufsi  l'ap 
probation  que  nous  deuons  donner  de  noftre 
foy,&  de  l'efperancc  que  nous  auons  du  laluc 
éternel. Si  nous  ne  faifonsque  parler,  cela  fe- 
ra bien  maigre.Mais  quand  vn  homme  fe  por- 
te tellement,  qu'on  apperçoit  que  c'eft  à  bon 
cfcient  qu^il  proteftc  de  feruir  à  Dieu,&  qu'il 
porte  la  doftrine,voila  vnechofe  biencôclue 
&  certaine.  Timothee  donc  eft  ici  loué  par 
faind  Paul,  de  ce  qu'en  fon  eftat  &  condition 
il  s'eftoit  fi  bien  acquitté, qu'on  pouuoit  veoir 
qu'il  ne  feruoit  point  à  Dieu  par  feintife, qu'il 
anon-çoit  l'Euangile  comme  eftant  afleuré  que 
c^ftoit  la  pure  vérité  &  infallible  en  laquelle 
coniifte  le  làkit  des  hommes.  Or  ayant  fait 
vne  telle  contefsion,  il  en  eft  loué,  mais  c'eft 
à  te\  fi, qu'il  faut  qu'il  perfifte.  Et  notamment 
il  du,DeH<jnt  fhjieurs  tefmoini-.comme  s'il  di— 
foit  que  Dieu  l'auoit  conftitué  comme  fur  va 
elchalFaut.  Comme  fi  vn  homme  n'eft  gueres 
cognu,  que  fa  vie  foit  comme  en  cachette,  s'il 
luy  aduient  de  faillir  ,  cela  ne  portera  pas  fi 
grand  dommage  que  s'il  auoit  eu  grâd  renom 
entre-les  fidèles, qu'il  euftefté  tenu  comme  vn 
pilier  d'Eglife:cependant  s'il  fecorrôpt,  voila 
vne  grande  ruine. Si  quelque  pièce  d'vne  mai- 
fon  qui  ne  fera  point  d'importance  s'en  va 
bas ,  l'édifice  demeurera  en  fon  entier  :  mais 
s'il  y  a  vn  des-  principaux  merubres  qui  tombe, 
voila  vne  ruine  totale.  Ainfi  en  eft-ilde  ceux 
que  Dieu  aura  conftituez  en  cmincnce,  &  lef- 
quels  font  mis  comme  en  fpeftacle  à  tous, que 
s'ils  fe  peruertiflent,  ils  font  caufe  que  beaa- 
coupfedesbordcnt ,  &  d'autant  leur  condam- 
nation en  eft-elle  plus  grietiie.  Conioignons 
donc  ceci  à  tout  le  refte, c'eft  que  fi  Dieu  nous 
a  fait  la  grâce  que  nous  ayons  efclairé  lesaii- 
tres,cognoiirons  aufsi  que  nous  fsrons  efçlai- 
rez,c'eû  àdire  que  n  nous  auors  failli  en 
nous  defcournant  du  bon  chemin, nous  aurons 
plufieurs  tefmoins  qui  crieront  vengcnce  à 
Dieu  contre  nous, qu'autant  que  nous  en  auôs 
édifié  au  paraiiaiit ,  feront  autant  de  voix  par 
lefquelles  nous  ferons  conuaincus  Si  condam- 
nez. Puis  qu'ainfi  eft  donc  ,  quand  chacun  de 
nous  aura  eu  bonne  entrée  ,  &  qu'il  aura  che- 
miné coiiinic  il  doit  ,  qu'il  foit  tant  plus  fiMV- 
gncux  de  pourfuyure  fa  courfe  iuîqu'au  bout. 
Car  tant  s'eufaut,fi  nous  auoui  bienfait  povir 

vn 


SVR   LA   I.    A  TlX*OTH. 


vn  tempi',  ^ue  cela  nous  duiue  refioidir,  <{ae 
aoftre  vie  palFee  nous  doit  l'eruirtôme  d'vn 
cfperoa  pour  no*  picq^ier  à  recognoiftre  touf 
iours  les  grâces  que  nous  aurons  receucs  de 
Dieu.'&  quand  nous  les  aurons  bien  employ- 
ées ,  cela  nous  doit  foliciter  à  bien  taire.fça- 
chansque  Dieu  nous  dilpofe  ïfoy  ,  &nout 
ayat  ainli  bien  dirpofcz,!!  faut  que  nous  foy" 
ons  en  exemple  aux  autres  ,  &:  lur  tout  ceux 
qui  ont  quelque  renom  en  r£glife,&  qui  foat 
y  eus  de  plufieurs,  c'tft  alin  de  ne  point  réuer 
fer  ce  qu'ils  auront  édifié  ,  autrement  il  fau- 
dra qu'il  y  ait  vne  horrible  vengeance  fur 
eux.s'ilsfe  deftournét  du  bien  que  Dieu  leur 
auoit  fait,  &:  qu'ils  aneaatiflènt  la  grâce  que 
ils  auoyent  receue.  Or  combien  quVn  cha- 
cun fclon  fa  qualité  duiue  appliquer  celte  do 
ftrine  à  fon  vlâge.tant  y  a  qu'en  gênerai  el- 
le nous  appartient  à  tous.  Carileltdit  d'vn 
coflé,que  les  roiniAres  de  la  parole  de  Dieu 
Hutt.  j.  font  comme  lapes  ardétes.qu'ils  font  la  clar 
14.  té  du  monde:  mais  en  gênerai  (ainÛ  Paul  auf 

fi  dit  à  tous  Chreftiens, qu'ils  portent  la  lam 
pe  ailiimce  quad  ils  ont  cognoiflànce  de  l'E 
u.igiJc.Ii  faut  donc  que  nous  cheminions  par 
nii  les  ténèbres  de  ce  monde .coçnoiflans  que 
Dieu  nous  a  mis  comme  furvn  cfchalfaiit ,  a- 
fin  que  nous  foyons  regardez  de  loin. Et  ain- 
iî  craignons  de  nous  touruoyer  quar.d  nous 
auons  le  chemin  tout  fait  deuant  nous,&:  que 
Dieu  nous  conduit  &  gouuerneccraignos.di- 
ie.d'autant  plus,  afin  de  n'ellre  caufe  de  per- 
uertir  ceux  qui  par  noftre  exemple  pourroy- 
cnt  eAre  difpofer  i  bien  faire.Et  pource  que 
la  confef  ion  des  hommes  n'eft  pas  fuffifan- 
te  linô  qu'elle  toit  mieux  fondée, fainft  Paul 
piour  conclufion  ramené  Timothee  ,  &  en  la 
perfonnc  d'iceluy  tous  fidèles ,  à  regarder  à 
nortre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  &  à  la  confef- 
fion  qu'il  a  faite  fous  Poce  Pilate.Il  eft  vray 
(comme  défia  nous  auons  dit  )  qweccluy  qui 
a  fait  confeûion  bonne  ,  qu'il  doit  eftrc  tant 
plus  difpoféà  l'aduenif ,  que  cela  nous  doit 
donner  courage  quand  Dieu  a  commencé  en 
nous  ,  que  nous  tendions  à  n.oftre  perfcûion: 
nuis  cependant  fi  faut-il  que  nous  afpirions 
plus  haut,  c'eft  que  le  Fils  de  Dieu  a  cômen- 
cé  ,  &:  que  nous  ne  faifons  que  fuiure ,  8c  que 
nous  lommes  participans  de  la  côfcf!.ion  que 
lia  faite  deuant  Ponce  Pilate:  voila  qui  nous 
doit  dôner  beaucoup  plus  de  courage.  Et  voi 
la  pourquoy  fainft  Paul  dit,Q»'i/«i  enioint  à 
Timothee  deujHt  DtrH,leqi*cl  -v:\tifie  toutes  clio 
fei^  &  deuant  lefus  Chrifi,  lequel  a  fait  bonne 
conftffton  fous  Vonce  ?ilate,q»' il  pourfuine.  Oi 
pour  mieux  faire  noftre  profit  de  cefte  do- 
ctrine.nous  auons  à  noter  que  non  fans  caufe 
faind  Paul  vfed'vne  telle  véhémence  ,  car  il 
cognoift  combien  la  chofe  eft  difficile.  Il  eft 
yray  qu'il  parle  ici  à  tous  fidèles.  Mais  quoy 
qu'il  en  foit,  Timothee  y  eft  comprins, voire 
luy  qui  défia  auoit  approuué  fon  zcle  &  fa  c6 
fiance  t  <iu>  s'elioit  li  bien  acquitté  que  nen 


305 

plus:  teutesfois  encores  faut-il  qu'il  foitex-. 
horté.cômeauec  vne  admonition  que  Ùintk 
Paul  luy  fait ,  qu'il  l'adiourne  deuant  Dieu, 
qu'il  luy  met  lefus  Chrift  deuant  les  yeur, 
qu'il  luy  fait  vne  iniôâion  fi  eftroite.Et  pour 
quoy  ceJaHl  eft  certain  q  fi  c'eftoit  vne  cho- 
fe aifee,&  à  laquelle  il  ne  faljift  pas  beaucoup 
ï'arrcfter  ,  faind  Paul  lé  fuft  contenté  de  di- 
re en  vn  mot.B-egarde  i  ton  office,il  faut  que 
tu  t'y  employés  loyaument ,  tu  fçais  A  qui  tu 
fers:  ainfi  donc  pren  courage.  Mais  quand  il 
luy  dit,Dieu  eft  ton  luge,  il  te  faudra  rendre 
conte  deuant  fon  throne,  &  deuât  le  fiege  de 
famaicfté,  ie  t'adiourne  deuant  noltre  Sei- 
gneur lefus  Chrift,qui  eft  conftitué  noftre  lu 
ge,que  fi  tu  ne  fais  ton  deuoir  pour  perfifter 
conftamraéc ,  ie  pourray  protefter  que  ie  t'ay 
déclaré  cequieftoit  requis ,  Se  que  tu  n'en  is 
tenu  conte:notons  bi<n,di-ie,que  lî  nous  vou 
lonsDous  employer  au  feruice  de  Dieu,  il  ne 
faut  pas  nous  y  acquitter  à  la  legere,nepen- 
ferenvenirà  bout  quand  nous  y  aurons  ap- 
pliqué toutes  nos  forces.Et  pourtant  nous  a- 
Hons  à  requérir  Dieu  qu'il  luy  plaifc  de  nous 
fortifier,*  de  nous  difpofer  tellement,  com- 
bien que  nul  homme  ne  foit  idoine  ne  fiiffi- 
fant  pour  faire  ce  qui  eft  de  fon  deuoir  ,  que 
toutesfois  nous  en  venions  à  bout ,  eftans  ai- 
dez &  fecourus  de  luy.  Voila  en  premier  lieu 
côme  les  fidèles  lent  admoneftez  d'auoir  leur 
refuge  i  celuy  qui  les  peut  rendre  capables, 
veu  que  nous  ne  le  pouuôs  eftre  de  noftre  ni 
ture.  Or  fi  cela  doit  eftre  en  tous  Chreftiens 
fans  exception  ,  que  l"cra-ce  des  miniftres  de 
ta  parole  de  Dieu  qui  ont  vne  charge  beau- 
coup plus  haute  ,  Se  par  confequent  plus  diflî 
cile?  Ne  faut-il  pas  qu'ils  penfentde  près  à 
eux?  Or  cependant  fi  ne  faut-il  point  que  la 
difficulté  nous  trouble.  Comme  nous  en  ver- 
rons beaucoup  qui  regardas  la  befongne  ont 
lecccur  failli  qnandils  voyentque  cela  fur- 
monte  leur  portee:Ho,côment  feroit-il  pof- 
fible  que  ie  feilTe  cela?  le  me  fens  débile, &  ie 
voy  que  cela  eft  vn  grand  faix  ,  &  qui  me  fe- 
roit  inliippoi:table.Non,non,trauaiilons  feu- 
lement ,  combien  que  les  choies  nous  foyent 
difficiles, Dieu  bcfongnera  pour  nous. Et  puis 
que  fainft  Paul  nommant  des  chofcs  qui  fur- 
montent  la  force  des  hommes ,  ne  laifle  pas 
toutesfois  de  les  exhorter  à  les  faire, cognoif 
fons  qu'il  n'y  a  point  d'excufe  d'alléguer  que 
nous  auons  efté  eilonnez  &  efperdus  ,  voyans 
que  nous  ne  pouuions  pas  fournir  à  la  charge 
que  Dieu  nous  mettoit  furies  efpaules:  car  il 
fçait  ce  que  nous  pouuôs  faire,  c'eft  afç.iuoir, 
rien  du  tout.Et  au  refte,il  ne  nous  veut  point 
defaillirj&nenousdefaudra  iamai«,  moyen- 
nant que  nous  cheminioos  en  humilité,&  que 
nous  apprenions  de  nous  afluiettir  à  luy  ,  Se 
de  nous  remettre  du  tout  entre  fes  mains. Voi 
la  donc  ce  que  nous  auons  à  noter  .  Et  d'au- 
tant que  ces  chofcs  feroycnt  pour  nous  def- 
courager  quand  nous  ne  regarderions  poin{ 

Paiii. 


30.4 


SERMON     L  I. 


.  plus  loin  qu'iu  mode,  notons  bien  aufsi  la  cir 
conlbnce  que  faincl  Paul  adioufte,  &  que  ce- 
la foit  pour  conclufion.quSd  il  dit,  Ç>»»  Die» 
•viuifie  toutes  clnfes  :  car  par  cela  il  nous  veut 
Hiôftrer,  combien  qu'il  femble  que  nous  foy- 
ons  poures  gens  &c  miferables,que  noftre  co- 
dition  loit  m.iudite,que  nous  foyons  en  mef- 
pris  &  opprobre  quant  au  monde,  que  les  vns 
nous  menacent ,  qu'ils  fe  moquent  de  nous, 
qu'Us  nous  tirent  la  l.îgue.que  les  autres  nous 
tourmentent ,  que  nous  foyons  tenus  comme 
reprouue2,toutesfois  qu'il  ne  nous  faut  point 
défaillir  pourtant, car  Dieu  viuifie.Regardôs 
donc  à  celle  vie  que  Dieu  tiét  cachée  en  foy, 
&  qu'il  aman  ifeitee  quand  il  l'a  reûelee  par 
fon  fomft  Efprit  ,  &  qu'il  en  a  rendu  bon  tef- 
moignage  en  fon  Euangile.  Quand  donc  le 
monde  aura  confpiré  noftre  mort  cent  mille 
fois,  que  nous  ferons  tenus  pour  condamnez, 
que  nous  ferons  en  opprobre ,  paiTons  outre, 
car  noftre  vie  ne  coniîfte  point  ici  bas, elle  ne 
dépend  point  des  hommes, ne  de  leur  réputa- 
tion,ni  de  leur  cred:t  :  n'tftinions  point  cela, 
mais  furraontons  toutes  les  tafcheries  que  le 
diable  4ipus  met  au  deuant  pour  nous  amortir 
le  courage,  cognoiflàns  que  c'eft  Dieu  qui  vi 
uifie  toutes  chofes  ,  il  tient  noftre  vie  en  fa 
main,  il  en  fera  bône  garde  &  feure,&'  il  veut 
aufsi  que  nous  tendions  à  luy  ,  que  cela  nous 
fuffife,  fçachans  qu'il  ne  nous  fruftrera  point 
de  ce  qu'il  nous  a  promis.  Voila  donques  à 
quoy  a  tendu  ici  fainft  Paul.  Il  eft  vray  qu'il 
en  fera  plus  ample  déclaration  ci  après  :  mais 
fi  nous  faut-il  en  fomnie  retenir  cela, afin  que 
toutes  fois  Se  quantes  que  nous  ferons  agitez 
au  milieu  des  tentations  de  ce  monde  ,  Se  de 
toutes  les  fafcheries  qui  nous  aduienent.nous 
{"cachions, Si  eft-ce  que  Dieu  ne  nous  a  point 
appelez  en  vain  à  foycil  faut  dôqucs  qne  nous 
foyons  toufioiirs  à  luy.  Voire, &  fi  nous  fen- 
tons  beaucoup  d'infirmitez  qui  nous  incitent 
ànousdesba«cher,que  nous  voyons  d'vn'co- 
fté  l'ingratitude  des  hommes  &  leur  malice, 
de  l'autre  cofté  qu'il  femble  que  nous  ne  pro 
£tions  rien  en  bien  faifant,  que-ce  foit  peine 
perdue,fi  faut-il  (comme  i'ay  défia  dit)  nous 
efforcerde  regarder  à  Dieu. Et  puis,fommes- 
nous  tenus  ici  comme  arrefte2?PalTons  néant 
moins  par  delTus  telles  barres  :  combien  que 
il  femble  qu'il  y  ait  de  grofles  montagnes  ,  fi 
faut-il  que  nous  ayons  comme  des  ailes  pour 


voler  quand  nous  ne  pourrons  marcherV&  la 
foy  &l'efperance  que  nous  auons  en  Dieu, 
nous  feruirontde  cela, tellement  que  nous  cô 
prendrons  la  vertu  qui  ell  en  luy  ,  &  laquelle 
il  fe  refcrue  comme  fon  office  propre  ,afça- 
uoir  de  viuifier.  Or  Dieu  ne  viuifie  finon  ce 
<jui  femble  eftre  mort. Il  faut  dôques  que  chic 
rainansconlime  nous  deuons  ,  &commenous 
fommes  appelez,nous  foyons  comme  reprou 
uez  du  mode,  &  qu'il  femble  que  la  mort  no* 
menace  ,  qu'elle  nous  enuironne  de  tous  co- 
ftez. Et  pourquoy?  Autrement  Dieu  n'execu- 
teroit  point  ce  qu'il  s'attribue  en  ce  paflàge, 
afçauoir  de  nous  viuifier:mais  au  milieu  de  la 
mort  nous  pouuons  efperer  la  vie ,  fçachans 
que  nul  ne  nous  pourra  fafcher  quand  la  ver 
tu  inuincible  de  ncftre  Dieu  fera  fur  nous, 
que  ceux  qui  auiourd'huy  nous  moleftent, de- 
meureront confus,  &  Dieu  fera  qu'en  la  fin 
nous  triompherons  auec  noftre  Seigneur  le- 
fus  Chrift. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  ,  en  cognoiffance  de 
nos  fautes ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les 
faire  mieux  fentir  que  nous  n'auôs  point  fait, 
pour  nous  ydcfplaire,  &  pour  nous  appro- 
cher de  luy  de  iour  en  iour.Et  s'il  y  a  eu  quel 
que  apparence  de  bien  en  nous,  comme  de  (a 
grâce  il  nous  a  introduits  en  l'efperance  de 
fon  falut, que  nous  y  afpirions  tellement, qiie 
de  plus  en  plus  nous  tafchions  de  faire  valoir 
tes  grâces, fur  tout  pour  relîfteraux  tentatiés 
&  combats  de  Satan, céme  nous  voyons  qu'il 
s'efforce  de  nous  empefcher  que  nous  ne  fer 
uiôs  à  noftre  Dieu:&  que  par  ce  moyen  nous 
furmontions  tous  les  troubles  &  fcâdales  qui 
nous  pourroyent  aduenir,&  qu'ils  ne  foycnt 
point  pour  nous  faire  reculer  ,  ne  chager  de 
propos,  mais  qu'en  cognoiflànt  que  nos  con» 
bats  feront  heureux, voire  &  que  nous  demeu 
rerons  vi^orieux  pardefliis  le  diable  ,  quand 
nous  ne  nous  deftournerons  pointde  noftre 
Dieu, que  nous  recourions  à  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift,  lequel  nous  conduife  &  gouuer- 
ne  comme  noftre  bon  capitaine,bataill.is  coa 
-ftam-ment  fous  fon  enfeigne  en  pure  confcien 
ce  &  ijitcgrité,  iufqu'à  ce  qu'en  fa  vertu  nous 
obtenions  la  viftoire  contre  tous  nos  enne- 
mis. Q_ue  non  feulement  il  nous  face  cefte 
grâce,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  nations  de 
la  terre,&c. 


SIXIEME     SERMON     SVR    LE 

SIXIEME    CHAPITRE. 

I  î  Je  tenioin  deuat  Dieu  qui  Viuifie  toutes  chofes ,  (^  deuant  le- 
fus  Chrij}  qui  a  tefmoigné  fous  Vonce  ViUte  bonne  confcf^ion, 

)4  Que  tu  gardes  ce  commandement  fans  macule  iQ'finsrc-' 
f>rehe-nfion>iufques  à  l'apparition  de  noflre  Scigneurlefus  Chrijl, 

U      L,tquelle 


s  V  R   L  A   I.    A   T  I  M  O  T  H.  30f 

1 5  Laquelle  en  fis  temps  montrera  le  lien-  heureux  (ffc^^  ^^"^ 
ce,Koy  des rcgnans,0'  Seigneur  desfeigneurians, 

1 6  Qmjèula  immort  alité  y  Cf  hahite  lumière  inaccefihle  :  lequel 
■nul  des  hommes  n'a  yeUyO'»(^p^^^  -veoiriauquelfoit  honneur  O'p^^f- 
fance  éternelle,  Amen. 

Ou5  aiios  défia  iecl^ré  par  point  nous  inciter  beaucoup  plii":?   Vraycft 
ci  douant  pourqiioy  fainft  que  lefus  Chrifl  n'a  point  vfé  de  beaucoup  de 
Paul  vfe  d'vne  telle  veh--  piopoî  denant  Pgnce  Piiatefon  iugeA  nicf- 
!  inence.voulant  eihorter  Ti  mes  il  s'eft  teu.Il  tfl  vray  qu'il  n'cftoit  point 
mothee  à  ^'acquitter  de  Ton  qucftion  alors  de  maintenir  fon  intégrité,  car 
deuoir.Car  il  l'adiourne  ici  il  eOoit  là  pour  receuoir  condamnation.  le- 
deuant  Dieu  ,  illuymctcn  fus  Chrift  donc  ne  veut  point  rcl'pondre  de- 
auantque  lefusCiritt  a  rendu  bonne  coiiftf  liant  Pilate.Pourquoy?car  il  demande  de  fa- 
fion.pour  nous  doflnercouragc:&  puis  il  ad-  tisfaire  à  la  volonté  de  Dieu  fon  Père  ,  &au 
ioufte  les  chofes  que  nous  auons  récitées,  &  décret  qui  auoit  eifé  conclu  ,  qu'il  fcait  que 
qu'il  faura  expofer  tantoft.Pourquoy  cela?  Il  par  fon  facrifice  il  abolit  les  péchez  du  mon- 
niôftre  que  fi  nous  ne  fommes  fouftenus,mcf-  de.Ufuï  Cbrift  d6n«jues  fouftenant  la  perfon 
rues  eleuez  en  haut  pour  regarder  droit  à  ne  des  pécheurs  ne  fedefeiKl  point  :&:  com- 
Dieu.en  oubliant  le  monde,  que  cefte  charge  me  il  auoit  elle  dit  par  le  Prophète  Ifaie  ,  il  I/Tj.fJ^, 
de  bien  &  fidelemét  feruir  à  l'Eglil'e  de  Dieu  cft  mené  à  la  mort  comme  vn  agneau  qui  efl 
cft  par  trop  difficile  ,&  qu'il  n'y  a  celuyqui  tondu,  fans  qu'il  fonne  mot.  Mais  cela  ne  re- 
n'y  defailliil.felonrinfirmité  qui  eilen  tous  pugncpointàccqui  eftici  dit  ,  Qu'ilarenJu 
lommes.  Parquoy  nous  fommes  aducrtis  de  hcnne  confcfficn.  Carenfe  taifant  il  a  tant  & 
loufiours  regarder  au  Royaume  éternel  de  plus  approuué  la  vérité  de  Dieu  fon  Pe rc  ,  & 
Dieu,  afîji  de  nous  fortifier  ,&  de  furmonter  la  mort  qu'il  a  fonfferte  ,  a  efté  pour  don- 
toutes  les  difficultez  qui  BOUS  pourroyét  cm  ner  authoritéà  PEuangile  ,  qu'auiourd'huy 
pefcher  à  faire  noAre  office. Et  notamment  il  quand  on  propofe  la  doftrine  de  fakit  ,  il 
dit,Ci«f  D(V»  -vfurfie  toutes  thofts:  afin  que  la  fiut  que  nous  foyons  côfermez  en  la  try  d't 
condition  prcfente  qui  elt  fafcheufe  félon  la  celle,  que  nous  drefsions  laveue  au  fangde 
chair  ,  ne  nousdeftourrre  point  du  droit  che-  l'agneau  /ans  macule  qui  aeftéelpandu.Com 
iTiin.Car  quand  nous  aurons  mis  peine  À  bien  me  anciennement  fous  la  Loy  ,  le  liure  eftoit 
faire  ,  il  fcmble  que  nous  ayons  perdn  noftre  arroufé  du  fmg  du  facrifice  ,  ainfi  faut-il  au— 
temps ,  pource  que  le  monde  nous  reprouue,  iourd'huy,  toutes  (on  Si  quantes  qu'on  nous^ 
Se  fe  moque  de  nous ,  que  le  bien  eft  conuerti  parle  au  nom  de  Dieu  ,  que  le  fang  de  Ic(ûs 
en  mal  parla  malice  des  hommes:S:puis  no-  thrifînotisviene  en  mémoire, &  que  nou^  fça 
ftre  labeur  ne  profite  pas  en  telle  forte  com-  chions  que  l'Eu.lgileea  eflarrouie,  afin  d'en 
me  il  feroit  àfouhaiter  ,  lefruitlne  s'cnap-  aunir  pleine  approbation  &;  infallible ,  Se  que 
perçoit  point  du  premier  coup. Il  fembledôc  noflre  foy  foit  là  tellement  appuyée  ,  que 
que  c'eA  vne  peine  inutile  que  d'anoncer  la  quoy  que  Satan  machine, il  ne  nous  puifT?  ef- 
pa rôle  de  Dieu.  Mais  il  nous  doit  fouuenir  branler. Car  quel  honneurautrement  ferions 
de  ce  que  dit  feinft  PauI,combien  que  le  mon  nous  à  lefijs  Chrift  ,  fi  fa  mort  ne  nous  furîj- 
df  nous  condamne  &  nous  reprouue  ,  ou  bien  foit  pour  la  certitudede  noftre  foy?  Ne  fe- 
<]u'il  nous  ait«n  me/pris  ou  opprobre,  toutef  roit-ce  point  anéantir  la  pafsion  qu'il  aendu 
fois  qu'il  nous  faut  contenter  que  Dieu  nous  rfe?  Ne  feroit-ce  point  fouller  fon  (ângau 
approuué, &  qu'il  nous  retirera  de  cefte  efpe-  pied ,  veu  qu'il  eft  nomm-é  le  fang  du  Tefta— 
cède  mort,de  laquelle  nous  fommes  mainte-  ment  nouoeau  Se  éternel  ,qui  cft  le  vrayfeau, 
'  '                         '     ~  comme  nous  auons  défia  dit?  Et  ainfi  cen'efi 
point  en  vain  que  fàinft  Paul  protcfte  en  ce 
paiTà^e,  que  nous  fàifons  iniure  à  noftre  Sei- 
gneur lefiis  Chrift  ,  &  ne  portons  point  à  fon- 
fang  qu'il  a  efpandu  pour  noftre  f.ilut,  l'hon- 
neur qui  luy  appartient ,  fi  nous  n'erfuiuôs  ce 


rant  enuironnez.  Suffife-nou^  de  cela.  Et  au 
re.'le  ,  fainctî.aul  nous  propofe  ici  ccftc  con- 
fcAion  que  lefus  Chrift  a  faite  deuant  Pila- 
tciconime  s'ildif3it,que  nous  auons  vn  Mai- 
fxrc  qui  nous  monftrc  le  chemin,  lequel  nous 
dcuons  enfuini e.  Car  fi  la  doftrine  de  PEuan 


gile  n'auoit  point  eu  vn  teltcfmoignagt  com  fteconfcfsion  qu'il  a  rendue,  quand  il  aexpo- 

Tne  fàinO.  Paul  recite  ici ,  c'eft  d'eftre  ftelke  fc  fa  vie  pour  non    afleurer  que  ce  qui  nous 

&  ratifiée  par  le  fang  du  Fils  de  Dieu, nous  "e  eû  prefché  en  fon  Nom, eft  la  vérité  de  Dieu 

auriôs  pas  vne  telle  occafion  de  là  porter  vail  certaine  &  permanente.  Nous  dciios  donques 

iantment.M.iis  quand  nous  voyons  que  Dieu  prendre  courage  de  cheminer  hardiment ,  & 

l'a  tcUcmcntautlionree, que  lefus  (;hrift  n'y  combien  que  le  monde  refiftc  à  cequinous 

apoiat  cfpargné  fa  propre  vie,celanc  doit-il  eitanoncc,  que  nous  ne  laifsiôs  pas  foui  tant: 


30<î 


SERMON     L  î. 


d'')-  cflre  refolu<:  J;  fur  tam.ccui  qui  ont  ccft 
.«fticc  d'.iiioiKet  l'Eiiaugile ,  qu'ils  cognoif- 
Icnt  cju'ih  Ile  pcuuét  eftre  lifchcs  en  cêft  en 
drcnt  ,  qu'ils  ne  défaillent  comme  periures  à 
ccluy  qui  les  »mis  en  œuure.car  lefus  Chrift 
rl\  leur  côJuûcur.Ôr  il  ne  leur  dit  point.Al- 
Icz:  mais-  il  leur  comm.ïde  de  venir  après  luy, 
comme  il  cft  ailé  dcuant ,  ainfi  que  nous  fça- 
oons.  Et  pourtant, toutes  fois  &:  quantes  que 
neuj  fommes  froids  &  tardifs, ou  que  les  téta 
lions  de  ce  monde  J'oycnt  pour  nous  empef- 
chcr ,  que  nous  preniôs  l'ejikortatiô  qui  nous 
crt  ici  taitc  par  fainift  Paul ,  c'elt  puis  que  le 
FfK  de  Dieu  a  rendu  vn  tel  tcfmoignage  ,  & 
que  par  fon  cïéple  il  nous  a  enfeignez  de  ce 
que  nous  deuons  faire ,  qu'vn  chacun  s'incite 
&■; 'aiguillonne  .i  pourfuiure  fa  vocation.tei- 
leinent  que  maugré  Satan  ,  en  defpit  de  tou- 
tes les  çontradiâions  des  hommes,  &  de  leur 
malice  obfiinecnout  ne  lailVions  pas  d'execu 
ter  la  charge  qui  nous  eft  commife.  Orno- 
lamment  S.  Paul  dit  à  Timothee,Ç)»'(7  ^4r</* 
te  commatKlcm^t,  eftaitt  irreprthettfibU  &  font 
m.ituif  ,  iufjues  à  U  yen»c  de  noflre  S  eigneur 
hfus  chrifl .  Eti  quoy  il  iignilîe  que  Dieu  ne 
nous  prend^oint  à  (on  feruicc côme  on  prcn 
dra  vn  feruitcurà  louage  pour  vn  an  ou  pour 
dcux.ou  bien  qu'il  ne  nous  reçoit  point  aufsi 
comme  les  fouldats  qui  ne  feront  que  pour 
Tn  mois  ou  pour  trois,  mais  c'eft  i  perpe-tui- 
té.à  viurc  Se  à  mourir  qu'il  nous  faut  employ- 
er au  frruice  de  Pie»  &de  fon  Fils  vniquc. 
A\i  leiï» ,  pourcc  que  le  falaire  de  noftre  la- 
beur efl  maintenant  caché,  &  que  nous  ne  i'ça 
«ont  pas  Tiflue,  fclon  l'homme ,  de  tous  nos 
Comhati,  ûinû  Paul  ramené  ici  Timothee,& 
«n  la  perfonne  d'iccluy  tous  miniftres  de  l'E 
Mangiie  ,  âcefte  dernière  leuclation  que  nous 
attendons.  Car  il  faut  qu'en  patience  nous  tù 
.«ion:  ce  qui  nous  eft  commandé ,  iufques  à  ce 
^ue  lefus  Chrift  rienc  comme  il  nous  l'a  pro- 
■tis  ,  &  qu'il  nous  monftre  le  fruift  du  lâlut 
^u'il  nous  a  acquis  par  fa  mort  &  pafsion.Or 
en  ces  mots  nous  voyons  encores  plus  claire 
■icnl  ce  que  i'auoye  louché ,  c'eft  que  fainft 
VauJ  appelle  ici  tous  les  miniftrcsdelaparo 
le  de  Dieu  à  ce  regard  fpiritucl  qu'ils  doi- 
vent auoir ,  de  par  ce  moyen  pour  les  retirer 
i\i  monde ,  afin  qu'ils  n'aycnt  point  les  yeux 
«sblouis,&  qu'ils  ne  s'amuicnt  point  aux  cho 
fes  prefentes  Si  viiïblec ,  pource  que  fans  cela 
il  eft  impofstbie  que  nous  pourfuiuions  trois 
^urs  à  bien  faire.  Car  pour  vn  item, la  doâri 
9e  de  Dieu  fera  raefprifee  d'flrn  cofté,  &  beau 
«oup  ne  fe  contenteront  point  del'auoiren 
iefdain  ,  mais  ils  y  rcfiftent  furicufement ,  & 
la  voudroyent  anéantir .  Nous  voyons  Icf 
feux  allumez,  nous  voyons  les  horribles  me- 
luces  qu'on  fait,  la  cruauté  qui  s'exerce  con- 
tre tous  les  tcfiuoins  de  Dieu.  Et  puis  (  lànt 
aller  plus  loin  )  au  milieu  de  nous  combien  y 
«-il  de  fcandales^  combien  y  a-il  de  chofes 
^ni  nous  pouiroyeai  fafckcr  Si  totun>e«ter 


pour  nous  faire  tout  q^iitterl*. ,  n'cftoîtqac 
nous  regardif  ions  i  la  venue  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  ChiiftfPuis  qu'ainli  eft,  que  nouï 
ne  foyôr  point  fafche^de  ccfte  attéte  quand 
nous  l'aurons  loyaumeni  ferui.  Voila  don- 
ques  à  quoy  fainû  Paul  a  tendu,endifant,G.»r 
de  ce  Commandemint  influes  k  U  -tenite  (y  n» 
nelation  tfn  fiU  Je  Dieu.  Et  ainfi.ceui  qui  ont 
l'office  d'anoncer  l'Euangiie, veulent-ils  s'ac 
quitter  côrat  il  appartient;  Qu'ils  palTcnt  oti 
ne  ce  pionde  ,  qu'ils  ne  s'amul'ent  point  aux 
chofes  caduques ,  ni  à  ce  qu'on  voit  ici  bas, 
raai^  qu'ils  ayent  toufiours  leurs  cfprits  elc- 
ucz  en  cefte  cfperanee  de  la  venue  du  Fils  de 
Dieu,  qu'ils  cognoiflènt  que  c'eft  luy  qui* 
ordonné  vnc  telle  police  enl'Eglife,  qu'il 
veut  que  l'Euangiie  fe  prefchc  en  fon  Nom» 
c'eft  luy  qui  monftrcra  en  la  fin  que  U  Loy 
qu'il  a  auihorifee.n'cft  pas  vaine:  &conibiea  ■ 
qu'auiourd'huy  le  mode  foit  malin  Si  ingrat, 
toutesfots  quand  nous  aurons  chemine  com- 
me ilappartiéten  noftre  vocation,  qu'il  nons 
fiiffira  bien  de  l'auOir  pour  noftre  garent. 
Voila  ce  que  nous  auoins  à  retenir  en  fomme. 
Or  combien  que  faind  Paul  parle  ici  pare- 
fpecial  à  ceux  qui  doiucnt  conduire  les  au- 
tres, tant  y  a  que  c'eft  vnedoârmc  commu- 
ne pour  tous  enfans  de  Dieu.  Car  nous  voy- 
ons qu'il  nous  faut  marcher  entre  beaucoup 
d^fpines  ,  il  y  a  beaucoup  d'obftacies  qui 
nous  pourroyent  retarder,  il  fcmble  mcf- 
nies  qu'il  ne  foie  point  pofsible  de  paflcr  ou- 
tre, licen'eftqiie  Dicunousdonnc  vnc  ver- 
tu par  deffus  toutes  les  facultés  humaines!. 
Et  ainli ,  quand  nous  voudrons  cheminer  lc« 
Ion  Dieu  ,  apprenons  &  recordons  fouiicnt 
cefte  leçon  qui  nous  eft  ici  monftreé,  c'cil  ci'4 
uoirnosentçndemensarreftez&côiiie  fiches 
à  la  venue  de  noftre  Seigneur  Itfus  Chrilh     . 
Pourquoy  ?   Nous  voyons  tout  corrompu  i 
renuiron,&  n'y  acehiy  qui  ne  foit  pour  nous  ' 
desbaucher  :  nous  voyons  le  diable  qui  nout 
fufcitera  des  troubles  Si  des  fafcherics,  S:  de 
noftre  cofté  nous  fommes  tant  fragiles  qu'en 
cores  que  nous  eufsions  le  chemin  tout  pl.îirt 
&  aifé,  li  eft-ce  qu'à  grand'  peine  pourrons- 
nous  leuervn  pied  ,  tant  s'en  faut  que  non* 
courions  vifte  comme  il  eft  requis.  U  y  a  en- 
cores d'aïuntagc ,  c'eft  que  de  noftre  nature 
nous  tirons  tout  an  rebours,  Si  quand  Dieu 
nous  aura  incitez  par  fa  grace,il  y  a  toufioiirii 
de  la  débilité  fi  grande  meflee  parmi ,  qu'on 
n'apperçoit  gueres  d'auancemét, encores  que 
vn  chacun  s'efforce.  Puis  qu'ainli  elldoccno 
tons  que  cefte  dottrine  nous  eft  plut  que  ne- 
ccflàire,  c'eft  de  nous  refoudre  à  l'attente  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift,&de  Jeucrljnot 
yeux, afin  que  nous  ne  foyonspoint  defcoura 
gez  fi  les  chofes  ne  vienent  point  \  noftre  ap 
petit, &  mcfmes  que  nous  ayons  beaucoup  de 
occafiôs^e  nous  diiiercir  du  bon  chemin.  Piii<, 
qu'ainli  cfVqiic  le  PiKde  Dieu, qui  eft  appât» 
pour  BoiUe  talitt,  viendra  accôplirrn  prrfc- 

ûiogi 


SVR     LA   I.    A   TIMOTH. 


307 


éion  ce  oii'il  a  commencé  par  Ta  mort ,  que 
nous  foyons  là  connue  liez  ,  Si  que  nous  fur- 
nionrioiis  parce  moyen  toutes  <lifficultc2:& 
«juoy  que  Saunbrafle  pour  nout  aliciicr  du 
royaume  de  Dicu,tautestbis  que  nous  ne  hh 
lions  pas  de  pourjfuiure  iufqu'cn  la  fin.Brict, 
«'cft  ce  que  1" Apoftrc  nous  dit  au<iixiemc  des 
lirbrieui.fi nous  voulons  eftrepatticipanï  de 
tout  ce  qui  nous  a  cfté  acquis  par  le  Fils  de 
Dieu,  que  nous  auons  bcfoin  de  patience  :  a- 
prcs  qu'il  a  déclaré  que  Iclijs  Chriit  ayant 
îbiiffcrt  pour  les  péchez  du  mordc,tft  monté 
au  cielÂ'quedclàilnous  tant  cfpercr  favc- 
suejl  adioufte,Q^<e  foit  pour  cftre  armez 
de  patience.  Car  ce  n'eli  rien  fait  lî  le  fruict 
decefte  redéption  qui  nous  a  crté  acquifc.ne 
fcmôftre parla  foy .car autremét cela  feraa- 
oeâtit&perira  pour  nous^inlî donc  cognoif 
fons  quec'eûprincipalenient  où  il  nous  ta- 
loit  exercer,  que  de  clorrc  les  yeux  à  cescho 
€cs  prefemes.de  n'eftre  point  ccueloppcz  en 
Tcilat  de  ce  monde  qui  eft  tranfîtoire  &  cadu 
^ue  ,ntais  de  pouuoir  attendre  reroluemét  la 
♦tnuedenoftre  Seigneur  lefusChrilt  ,&n> 
telle  confiance  que  nous  p erCliions  iu£qu'à  la 
fin  :  que  nous  neloyonspoinilaflczd'auoir 
«heniinc  long  téps  ,  mais  conclues  qu'il  nous 
faut  toufiourschcroiner  lufqu'àce  que  Icfus 
Ch  rill  viene,  ^  nous  auons  à  perlîftcr  lulqucs 
li.Ecau  reAe.pourcequenoHsfçauonsrini- 
portunitéqni  eftennoftre(uture,(ainâ  Paul 
pour  lemedier  à  vn  tel  vice^dioufte,Q»r  1)  >'«♦ 
mu^iftPcra  ht  -ytoue  de  uafirr  SttvnfUr  fefus 
Chrifl  tu  faa  tetafi .  Côme  sMdiloii  qlapa- 
ticce  à  laquelle  il  nous  exhorte, ne  pourra  «- 
iVre  en  no*,qu'en  premier  lietuios  appuis  ne 
foyent  railàliez  :  que  nous  ne  Toyorn  point  fî 
lialhfs  ne  &  bouLUans  côme  nous  auûs  accou 
Ihimé  d'eârc  «inaistjue  nous  apprenions  de 
noas  modérer  ,  Tcirecognoiflàns  que  Dieu  a 
les  faifons  &  les  téps  en  ûmain.  Si  qu'il  nous 
conduira  félon  fon  côfeil  mieux  que  nous  ne 
f^'aurions  pcuCer.  £t  voila  pourquoy  fàincl 
Paul  ditiQuf  fa  finuc  uoitt fera  tnanifcfitetn 
fin  tnafi  frafre  i  xomme  s'il  di<bii  que  les 
iiommesen  leur  kafliueté  neCçauenc  ce  que 
ik  demandent, au'il  y  a  toutiours  de  la  teme 
titc  en  eux.  Il  tauidonqucs  que  les  fidèles  ic 
temcttenii  Dieu,  &qu''als dépendent  de  luy 
&  de  fon  décret,  &  qu'ils  ne  fayent  point  im 
portûs  pour  le  youloir  Aunmcr  toutes  fois  & 
quantes  que  lafanufie  leur  viendra  en  la  te- 
lle. Et  quand  les  cliofes  fe  feront  autrement 
■qu'ils  ne  voudroyent,  il  n'cft  pas^uellion  de 
Jtruictiir  ainfi  Dieua  nous  :  mais  foumettons 
nous  à  luy  8(  à  fa  bonne  volonté.  Nous  fçau- 
Tons  bien  attédre  les  fâifons  de  l'année.  Pour 
-quoy.»  car  flous  f^auoos  bien  que  ce  feroit  fo 
J  ic  à  nous  ,  &  que  nous  ne  pourrions  pas  pcr- 
ticriir  Je  cours  de  nature.Q^âd  doaques  Phy 
ticr  Commence,  nous  feiuôs  le  froid  qui  nous 
prcîTe.îl  eA  rray  que  nous  voudriôs  que  déf- 
ia ic  piira-terops  fuâ  venu  ;  isait  tant  y  a  que 


nous  l'attendons.  Poiixqiioyr  car  Dit»  a  cou 
flitué  vn  tel  ordre  qui  ne  lé  peut  cliangtr. 
Qjjc  nous  bridions  donques  nos  nppctis  :nun 
point  que  nous  n'ayôs  quelque  fouhait  pour 
chercher  ce  qui  nous  cff  dcfirable.mais  li  cû 
ce  qu'il  faut  qu'il  y  ait  vne  bride.  Si  vne  fcm 
me  eftenceinte,elleaura  la  patience  d'atten- 
dre qu'elle  ait  accompli  fon  terme. Et  quand 
vn  laboureur  feme,(c5me  S.Paul  vie  de  celle 
fimilitude-la  )il  iette  fa  femence  en  terreau 
hazard  de  h  gclee.de  la  pluye  &  de  la  fechc- 
rtilc:il  attéd  la  bonne  volonté  de  Dieu, qu'il/ 
face  profiter  la  ûmencc,  &le  labeur  qu'il  a 
tnh  i  cultiucrla  terre.  Puis  qu'en  ces  chofcs 
delavicprefentenous  auons  cifteconlidcra 
tion,  n'cft-cepas  raifon  aufsi  qu'en  ce  qui  ap 
particnt  au  royaume  fpirituelde  Dieu ,  nous 
foyons  modérez  iufques  là,  de  nous  remettre 
à  celuy  qui  a  toute  conduite  en  fa  nuin ,  &:  aa 
quel  endripudenos  dents  il  nous  faut  élire 
luietsrOi  la  foy  emporte  vne  telle  obciiflàji- 
ce,  que  nous  vueilionsdenoflre  bon  grcce 
i^ue  Dieu  nous  comande.  Ainlî  donques  rete- 
nons ce  mot  de  S.  Paul,&  pefons-ie  comme  il 
le  mérite;  c'efl  que  Dieu  reueJera  la  venue  de 
fon  Fils  au  téps  opportun  qu'il  fçait  nous  c- 
flre  bon  &  exptdiét  que  cela  fc  face.Nous  ea 
nuye-il  donques  Je  laixguir  en  ce  mode  ,  que 
nous  voyons  les  perfccutionsd'vncoftc  qui 
font  cotre  les  cntansde  Dieu,  que  nous  voy- 
ons l'iaipicté  il  «norme,  que  nous  voyons  k« 
■moqueursdc  Dieu  s''elcuer,  que  nous  voyoïi* 
ces  chiciniailins  qui  abbayét,  que  nous  voy- 
ons ces  pourceaux  quiicttét  leur gioin  pour 
rcueifer  toute  fàinct«é&:  religion.qucnouc 
voyons  les  desbordemcs  &  diflolutions?notjs 
fa(che-ild''eftre  en  tel  cflat, voire  d'autant  S 
Dieu  n'y  remédie  point,  &aiefines  qu'il  dil- 
iîmule?<iue  nous  peniîcns  àce  qui  eft  ici  dit, 
c''cllafçaiiQir,eombieD  que  les  chofcs  foyent 
tnaintenât confulii,que Dicules  fçaura bica 
ramcïier  en  leur  -ordre  &  en  leur  pcrfeûion. 
Cômem?  Pource  que  la  dernière  venue  de  no 
fire  Seigneur  lefus  ■Chrlft  e/l  appelée  le  iour 
'qui  doit  reltaurertout.Etau  rcftc,fï  le  temps 
nous  tardc,&  qu'il  nous  ft-mblc  trop  long.co 
gnoifTons  quecen'eft  point  à  nous  d'en  dé- 
terminer icar  nous  femmes  auciigles  en  cift 
endroit, &auons  vn  appétit  trop  haftif.  Mais 
puis  que  Dieu  s'eft  referué  les  faifons  de  l'an 
née.  Si  qu'il  conduit  le  fokil  &  la  lune  ,  c'eil 
bien  raifon  aufsi  qu'il  conduife  ce  qui  appar- 
tient à  fon  Royaume  cekfle.  Voila  dofic  quâc 
àce  mot  de  Saifon  frnfre  ,  qu'il  ne  faut  point 
que  lc<:  hommes  fe  dônent  ici  licence dt  fom 
mer  Dicu,&  de  le  vouloir  ranger  à  leur  fanta 
£e,mais  pluftoft  qu'ils  luy  douent  l'jiwthori- 
■té  qui  luy  eft  deue,  c'cft  q  luy  cnuoye  fô  Fik 
quand  le  temps  fera  accompli.  Nous  fçauonf 
mefines  que  la  venue  première  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrifl  a  cflé  long  temps  attédiie 
des  fainâs  Pcresauec  grand  defïr,  voire  autx 
gesaillcmcns:  &  toutcsfois  &  eâ-ce  q  Dicuos 

Qài. 


J.Cor.  f. 
10  ,  O 
'f.37. 


5oS 


SERMON     LI. 


sYfl  point  hiîké  pour  cela.La  raifon  ?  Le  téps 

.  depli-'iiitude  n'eftoic  pasencores  venu  ,com- 

'''^'  me  rElcnture  l'appelle.  Puis  qu'ainfieft  doc 

que  noftre  Seigneur  lefus  a  efcc  enuoyé  pour 

n.)US  réconcilier  p.tr  la  moit  &  paAionatiec 

Dieu  {on  Père, lors  que  le  ct-mps  de  plénitude 

eft  venu,  fçachôs  qu'aufsi  il  nous  fera  nianife- 

fté  en  fa  ûu'jn  opportune  ,  &  non  point  celle 

que  nous  aurons  conceue  en  noftre  cerucau, 

mais  celle  q'ie  Dieua  délibérée  en  fonconfeil 

éternel  &  '.'.n'.r.iiable  .Autant  en  ell-il  de  l'E- 

u.uigilc- TEiungile  n'a  pas  efté  du  premier 

-  ..,  j-  coup  prefchéau  monde.  £t  voila  pourquoy 

ii  ."/j/j».  '"''Jfi'^  P^"'  ^•■"'t  au  dernier  des  Romains,  que 

,  9  çolo.  *^'^'  Eplieiîcns,  Colofiiens,  &  en  d'autres  paf- 

T  1  ^     ,    faeeî.dit  que  c'a  elle  vn  fecret  incognu  Se  in- 

tim  i  ;o '-^'"P''^'""'^' "■' "°"^ '"■''■"''"'" '^'^'^^'''^''•" 
$ite  i.i.  '^'•'^  i'emblable  en  celle  £piltre-ci.  Voila  don 
aues  l'Euangile  qui  elt  publit  loudain,  voire 
outre  l'opiniuii  des  tommes, qu'on  cfl  tout  ef 
b.ihy  que  Dieu  s'eft  ainlîcômimiqué  à  toutes 
ii.itions,  vcu  qu'il  auoit  choiiî  vn  certain  peu- 
ple aiiparauant  :  &  cela  mefmes  a  efté  iî  nou- 
iieau.que  les  Anges  en  font  efmerueillez:  com 
me  fainft  Pau!  dit  de  la  grâce  qui  eft  aufsi  ap- 
parue: car  l'Euangile  a  eilé  reueléà  ccfte  con 
dition,  &  nous  en  voyons  encores  le  friiict,  d' 
autant  que  nous  cheminons  par  toy  ,  &  non 
point  par  veue:&  ce  fruift-la  nous  eftdeclaré, 
pource  que  Dieu  Ta  ainfi  ordonné  quand  il  s' 
eft  rcuclé  à  nous,c5me  l'ay  défia  dit.  Et  de  Là, 
nous  fomraes  adinoneitez  que  iamais  les  hom 
mes  ne  fe  pcuiiét  tenir  en  la  fuiettion  de  Dieu 
fans  s'humilier,  fans  tenir  tous  leurs  fens  C3- 
t.  Ctrin-  ptiucz.Et  voila  pourquoy  aufsi  fainft  Paul  no 
lO-î.       tammentdit.entre  les  autres  proprietez  de  1' 
Euangile.qu'H  faut  qu'il  nous  apprene  àcapti 
uer  nos  efprits.  Car  cependant  que  nous  va- 
guerons,il  faudra  «)ue  toutes  nos  pcnfecs  com 
bâtent  contre  Dieu:&  noUs  voyons  auf<.i  com 
jne  ceux  qui  frétillent  &  qui  voltigent  en  T 
air.ne  fe  peuucnt  nullement  contenir  en  ceftc 
fobrieté  qui  eft  requifc  aux  fidèles  ,  Se  fe  def- 
bauchent,&  s'aliènent  pleinement  de  Dicu,& 
fe  priuent  de  ce  thrcforqui  leur  auoit  efté 
commis. Pour  cefte  caufe  apprenons  que  pour 
e.ftre  fuiets  àDieu,il  nous  faut  renoncer  à  nos 
fens,  &  à  tout  ce  qui  eft  de  noftre  nature  ,  & 
que  Dieu  domine  en  telle  forte  nue  nous  luy 
foyons  comme  captifs.  Or  f.!incl  Paul  adioii- 
ftc,Q»f  Timnthee  gjrdc  ce  précepte,  eft^wt  ir- 
reprehenfMe  ir  fans  yn.icuU  .Comme  s'il  di- 
foit, qu'il  ne  fe  peut  acquitter  de  fon  deuoir 
édifiant  l'Eglife  de  Dieu,  qu'il  nemonftre 
bon  exemple  de  vie  ,  qu'il  ne  chemine  en  tel- 
le intégrité, qu'on  appcrçoyuc  que  c'eft  à  bon 
efcicnt  qu'il  fcrt  à  Dieu  ,  qu'il  foit  pur  &  net 
de  toute  foiiillure  &  pollution  .  En  fomme, 
ftinil  Paul  veut  ici  dire,  que  ce  n'tft  point  af- 
fez  que  les  miniftres   de  la   parole  de  Dieu 
ayent  la  bouche  ouuertc.qu'ils  s'efforcent  d' 
enfcignerdroitemcnt , félon  la  pureté  de  l'E- 
ujngile,ceux  qui  leur  font  commis  en  charge, 


mais  qu'il  faut  quant  &  quant  que  la  vie  re- 
fponde.Car  fi  nous  cftions  comme  des  Anges 
en  chaire, &  puisque  nous  fufsions  desbordei, 
&  qu'on  n'apperceuft  en  noftre  vie  finonvn 
mclprisde  Dieu  ,  que  nous  fufsions  des  moc- 
quturs,gcns  prophanes,Gueferoi*-ce?  le  nom 
de  Dieu  ne  feroit-il  point  vilipendé  par  ce 
moyenrAinfi  donc  notons  que  fainét  Paul  rc^- 
quicrt  ici  vue  conformité  entre  la  vie  Se  la  do 
ftiine.  Il  eft  vray  que  ceux  qui  prendront  oc- 
cafion  demcfpnfer  l'Euangile  par  les  fautes 
des  homes, ne  feront  point  àexcuferrmaistanc 
y  a  de  noftre  part  qu'il  nous  faut  tellement 
régler  noftre  vie, qu'elle  foit  pour  orner  la  do 
ftrine  que  nous  portons,&  pour  en  mieux  cer 
ttfierccuY  qui  Tefcoutcnt  de  noftre  bouche. 
Voila  donc  en  fomme  ce  que  S.  Paul  a  voulu 
dire, que  ceux  qui  font  Paftturs  del'F.çlifede 
Dicu.doyucnt  eilre  fermes,  .S:  ne  point  fede- 
ftourncrdi'ibon  chemin  ,  quoy  qu'il  aduiene. 
La  raifon;  C'eftque  Dieu  ne  les  a  point  prins 
à  les  gages  feulementpour  trois  mois.ou  pour 
quelque  certain  tempi  ,mais  il  veut  qu'ils  dé- 
diant pleinement  .i  luy  lewr  vie  &  leur  mort.Et 
pour  ce  faire  que  non  feulement  ils  cnfeignét 
bonne  duftrine,niais  qu'aufsi  ils  teftificncque 
ils  veulét  fcruir  à  Dieu, voire  menans  vne  tel- 
le vie  que  les  autres  y  prcnent  exemple.  Or 
combien  que  ceci  foit  notamment  dit  aux  mi- 
niilres  de  la  parolede  Dicu,toiitesfois  en  gê- 
nerai fi  faut-il  que  les  fidèles  regardent  d'ap- 
pliquer à  leur  vfage  &  inftriidtion  ccfte  do- 
ftrine.C.ir  nous  fçauons  le  depoft  qui  nous  eft 
mis  en  main.'Dicii  nous  a  cômis  à  tous  le  thrc 
for  incftimablc  de  fon  Euangile.  Q_nç  faut-il 
donc' Que  nous  le  gardiôs, voire  &  qu'il  nouj 
fouuiene  de  ce  qui  a  eftc  dit,c'cft  afrauoir  que 
plufieurs  àcaufe  de  leur  manuaife  confcirncé 
fe  fontplongcz  aux  abyfmes, tellement  qu'ils 
ont  renoncé  la  foy,&  fe  font  retranchez  de  la 
maifondeDieu.priuez  &bannisde  toute  efpè 
rancc  de  filut.  Il  tant  donc  que  la  pu  re  con- 
fcicnce  foit  comme  vn  cofFre  pour  garder  la 
foy  ,  ou  .lutrement  ce  threfor  fera  t  xpofée?! 
proye  à  Satan ,  &  nous  en  ferons  defpouillez 
àbondroiél ,  quand  nous  ne  cheminerons  pas 
irreprchenfibles  &  fans  macule.  Vray  eft  que 
nous  ne  pouuons  pas  fi  bien  faire  qu'il  n'y  ait 
toufîours  à  redire  en  nous'  car  cependant  que 
nous  vluons  au  monde  ,  nous  auons  àdcman- 
der  que  Dieu  nous  pardonne   ros  péchez, 
comme  aufi  nous  luy  fommes  redeuables  :  & 
la  fouuerauie  pcrfeftion  de.'  fiJdes  ,  c'cft  de 
r'^cngnoiftre  qu'il  y  a  encores  beaucoup  d'in- 
firinitfz  Se  de  vices  en  eux  ,  pour  gcmir.  Si 
pour  fe  confcïTer  rcdiiiablcs:  niais  tant  y  a 
qu'il  nous  f.vn  approcher  de  cebwt.    Qj'and 
dorciainfi  Paul  commande  j  Tfmotheed'e- 
ftre  irieprthenfible<S(:  fans  macule, il  n'tnterd 
pas  que  cependant  que  nou^  fommes  veftus 
de  noftre  chair  corruptible,  nous  puifsions  a- 
uoir  vne  perfeftion    Angélique,  tellement 
qu'il  n'y  ait  iitille  'tfl.ïcule  en  nous  :  mais  il 

entend 


s  V  R    L  A'  I.    A 

«ntend-^^Til  nous  faut  difpofcr  noftre  vie  en 
forte  ~qd'on  voye  que  nollre  but  ei\  d'c/lre 
parfaits  &  fins  reprehenliou  auiourdu  Sei- 
gneur.ainlî  qu'il  en  cft  parlé  au  premier  des 
£phenens,&  en  d'autres  paflages  :  car  li  il  ne 
du  pas  que  nous  foyons  parfaits  auiourt'huy, 
mais  il  dit  qu'il  nous  faut  cheminer  en  profi- 
tant iufqu'à  ce  que  foyons  dcfpouillez  de  tou 
te  corruption,  &  que  Dieu  repare  en  nous  fon 
iraage.cSc  que  noas-  foyons  pleinement  renou- 
uelez  en  luy. Voila  encores  ce  que  nous  auôs 
anocer  enceliea.  Or  quant  au  refte.U  tendà 
ce  but.que  li  auiourd''huy  il  leiiible  que  l'E- 
uangile  ne  nous  profite  rien  ,  il  ne  faut  point 
pour  cela  le  mefprifer  ,  nifauoircn  moindre 
eftime.Si  tous  lés  gransdeccmqjide.k-';  Rois 
&  les  Pritices  femocquentdc  Dieu  ,  ou  qu'ils 
foycnt  ennemis  de  la  religion, il  ne  taut  point 
que  nous  en  foyoïvs  fcadalizcz  pour  élire  trâf 
portez  loin  de  Dieu,  mais  abbailTins  toute 
grandeurs:  hautefle  terrienne  .  Voila  ce  que 
fainâ  Paul  a  entendu,difant,Q»ir  I  'V»  <fl  fcid 
Vrnce,<]ii'fl  ejhlf  Koy  dcsregnatis  ^e'gniur  des 
ftignturians  .  ijuf  c'tfl  ly.yftul  cjui  j  tmmortuli- 
te':comme  s'il  difjit.Il  eft  vray  que  les  £dt  les 
pourroyent  bien  eftre  débilitez  en  leur  foy, 
quand  ils  regarderont  aux  cbofes  pref-ntcs. 
Car  lesgransde  ce  monde  on  tendent-ils  li- 
non qu'ils  voudroyét  aiioir  furmôté  les  pues, 
&  fouler  Di  .u  aux  piedi  ?  On  voit  qu'ils  fe 
iouét  de  la  religion  comme  d'vue  pelottc,  on 
voit  incfmes  qu'ils  en  font  ennemis  mortels, 
qu'ils  la  perfecutent  d'vne  rnge  lî  grande  que 
tout  le  monde  en  eft  efFrayé:on  voit  ces  cbo- 
fes .  Cependant  que  dira-on  des  enfans  de 
Dieu?  On  les  monftreaudoigt.il  fcmble  que 
ils  foyent  fols,  tellcmét  que  ce  qui  eft  dit  par 
I/4.S.18.  ]è  Prophète  Ifaie.eftauiourd'huyaccôpli  en 
nous,  c'eftq  les  incrédules  nou;  tienentcôme 
des  môftres.Et  quoy?  ces  ponre>  lois  ?  à  quoy 
péfent-ils  ?  q  veulent-ils  dire?  Et  il  faut  viu:  e 
auecles  viua as,il  faut  vrlcrauec  les  loups  .  Et 
quov?ils  veulent  qu'on  foit  toulîours  en  per- 
plexité: ils  ne  parlent  que  de  la  vie  éternelle, 
&  n"'ont  pas  loifir  de  fe  donner  du  bon  temps. 
Voila,  di-ie,  comme  nous  ferons  repiitez  fols 
l.Vier  %.  ^  infcnfez  par  les.incredulcs.  Et  fainCt  Pierre 
l.iA,      dit  qu'il  faut  que  cela  f  lit  accompli  en  nous: 
comme  le  Prophète  Ifaie  enauoit  fait  la  com 
plainte  de  fon  temps:il  faut  que  les  Chreftiés 
expérimentent  auiourd'huy  le  fembiable.  Or 
cependant  nous  voyons  qu'il  ne   faut  rien 
pour  nous  effaroucher,  il  ne  faut  qu'vne  mouf 
che  nous  voler  à  trauers  des  yeux  ,  nous  voila 
eftonnez  :  &  puis  nous  fommes  attachez  au 
monde,  que  quâd  nous  voyons  les  pompes  des 
princes  tcrriens,que  nous  voyons  ces  grandes 
Ifcauetcz,  que  nous  voyons  tous  ces  appareils- 
at!  monde, nous  voila  intontinét  préoccupez, 
que  nous  ne  fçauons  plus  que  c'cCi  du  royau- 
me dé  Dieu,  i<  le  mettons  en  oubli.  Et  qui  en 
cltcaufe  ?  C'eft  que  nr.us  n'efcoutont  pas  c? 
^uicfticidttparMiotl  Paul,  Cat  nous  pour- 


T  I  M  O  T  H, 


JOj;- 


rions dcfpitertoutes  princip.-iutcï  terriennes 
quand  elles  s'eleuent  à  l'encontrcdc  Dieii.fi 
nous  cftions  bien  perfiiadez  que  Dieu  cft  le 
feul  Prince.'Roydes  rtgnans,  Se  Seigneur  des 
feigneurians:!!  cela  eftoit  bien  imprimé  en  no 
ftre  mémoire,  tous  ces  menus  fitras  du  mon- 
de ne  nous  feroyent  rien  pour  nous  eûonner: 
i'appefleces  menus  fatras, tout  ce  que  les  ho- 
mes pcuuent  amener  pour  faire  la  guerre  à 
Dieu.  Combien  qu'ils  penfent  qu'ils  peuucnt 
beaucoup ,  cS;  qu'il  ne  tient  point  à  cur  qu  il»- 
ne  fc  facent  valoir  tant  Se  pIus:toutesfois  puis 
qu'ils  fe  prcnent  à  la  maiefté  de  Dieu,  tout  ce 
qu'ils  pourront  attenter, n'eft  que  fumce,  ce 
n'eft  mellnes  que  fiente  &  ordure. Et  ainiî  no- 
tons bien  ce  que  dit  faini"^  Paul.c'eft  afçauoir 
que  pour  bien  eftre  confermez  en  la  crainte 
de  Dieu, pour  n'eftre  poîc  esbiouis  des  vanitcz 
de  ce  monde, ne  tranl'portczdes  allechemcns 
de  Satan  ,  ne  pour  eftre  furmontcz  d'aucune 
tentation, ne  pour  eftre  effrayez  de  nullepom 
pc  S:  hautefle  terrienne  ,  1!  nous  faut  attri- 
buer à  Dieu  ccft  empire  fouiierain ,  &  cefte 
principauté  qu'il  a,  ttllenict  que  tout  genouil 
ployé  deuant  luy,  &  luy  face  hommage  ,'qiie 
nous  cognoifsionsque  c'eft  luy  feul  qui  cft 
Prince.  Non  pas  que  les  Princes  terriens  ne 
méritent  d'eftre  honorez  ,  voire  quand  eu x- 
mefmes  fe  tiendront  en  leur  ordre  ,&  qu'ils 
auront  ccfte  modeftie  d'cx.ilter  l'honneur  de 
Dieu  par  dclïïis  tout,*:  qu'ils  fe  cn^noiftront 
eftre  fes  officiers, qu'ils  voudrot  qu'on  le  tie- 
ne  en  degré  fouuerain,  &:  qu'il  foit  feriii  com- 
me il  en  fft  digne.  Qu.id  Jonc  les  Princes  ter 
riens  auront  cela, lors  ils  méritent  d'eftre  ho- 
norez: Se  mefines  encores  qu'ils  foyent  enne- 
mis de  Dieu  &  de  fon  Eglife,  fi  cft-ee  qu'en  ce 
qui  concerne  la  police  ,  il  leur  faut  attribuer 
honneur  &  crédit ,  on  fe  doit  alTuiettir  àeuï 
pour  garder  les  loix  &  edits  qu'ils  font  :  car 
en  ccft  endroit  la  fcntcncede  fainft  Paul  a  r--,  .. 
lieu, Qui  refifte  à  la  puilTànce,il  refifte  à  Dieu  -, 
qui  l'a  enuoyee.  Mais  quoy  qu'il  en  foit,  fi  ne  "' 
faut-il  point  que  cela  empcfchc  que  Dieu  ne 
retiene  ce  titre  qui  luy  cft  ici  donné, c'cftaf  ça 
uoir,que  luy  feul  eft  Prince  .  Et  comment  ce- 
la ?  Ccft  qu'il  n'y  a  nulle  principauté  qui  ne 
dépende  de  luy.  Qiland  on  dira  en  vn  royau- 
me,Il  n'y  a  que  le  Roy  qui  foit  Prince. Apres, 
quand  on  dira  en  v ne  ville  fr.iche,Il  n'y  a  eue 
les  Sindiques&  Confeihce  n'eft  pas  pourem- 
pefcher  le  commun  ordre  des  officiers  ,  lef- 
qiiclsdoyuent  auoir  intégrité.  Mais  tant  y  a: 
s'ils  vûirpent  quelque chofed'eux-mefnies, ce 
ii'cftpasà  dire  que  cela  doyue  valoir. Car 
quand  vn  officier  vondroit  attenter  contre 
ceuxlcfquels  l'ont  eftabli,  &defiiich  il  tient 
t.TUt  ce  qu'il  a, que  fcroit-ce?Ain(î  en  cft-il  de 
tous  les  Rois  &  les  Princes  mondains, uu'il  n' 
y  a  point  de  principauté  qui  ne  procède  de 
Dieu  i  il  n'y  a  que  la  fiene  ûule  qui  f  jit  vni- 
que, toutes  les  autres  font  comme  fiSalterncs, 
qu'il  faut  quelles  dépendent  de  là  haut.JEt 


;t<» 


SERMON    LIl. 

('comiiif  f.iiiK^  Pml  dit  envn  autre  piflùgc} 
tout  Aiiili  4JUC  t»ut  parer. ugccfl  de  Dicti.aul- 


».  Cof.7, 


»3.  . 


Ji  tDutf  principauté  dt  de  Dieu  ,  &  fe  doit  là 
nppertcr.  Aiiifi  donc,notons  bien  quâd  nous 
vcirons  ces  pompes  mondaines  qui  s'cleucnt 
à  rencontre  de  Dieu,  tjuc  nous  verrons  ceft 
orgueil  diabolique  qui  eft  aux  Princes,  que 
fi)us  ombre  de  Pauthorité  qu'ils  ont,  ils  voii- 
«icoyciu  vfurpcr  rhonncurde  Dieu,  que  tout 
cela  ne  nous  eftonne  point. Et  pourquoyîCar 
Hous  fçjuons  que  le  monde  palle  aucc  ta  figu- 
re, comme  S.Paul  eu  parle.Qu^eft-ce  de  tou- 
tes les  principautez  de.  ce  monde  >  vnc  figure 
qui  iemonftre  ,  mais  elle  fera  abolie  en  fon 
temps:car  alors(dit  fainil  P3ul)cefleront  toB 
tes  principautez,  quand  lefus  Chrift  viendra: 
il  ùudra  que  tout  ce  qui  eft  maintenant  haut 
&  eicelknt  au  mondc,fpit  aboli,car  il  cA  tcm 
porel.  Pourquoy  eil-ceque  les  principautez 
ont  efté  iniJitiiees.»  Ceft  pour  l'yCige  de  celle 
vietranfîtoire.Puis  donques  <ju'ainîi  eft,quad 
lefus  Chrift  viendra  reflablir  tout ,  il  faudra 
^ue  ce  qui  fert  maintenant  au  moDde,ceiIè,  S: 
«ju''il  prene  fin,quccela  foitcafTc  &  aboli.  Par 
cela  donc  nous  voyons  que  c'ertàion  droift 
Clic  Dieu  fe  nomme  feul  Prince  ,  afin  que  les 
grandeurs  de  ce  monde  ne  nous  loycnt  point 
comme  des  bandeaux  ou  des  voiles  tqui  nous 
«iirtourncnt  Jivcue,ou  nous empefcbcnt  que 
nous  ne  regardions  droit  à  Dieu  &  i  no-ftre 
Seigneur  It fus  Chrift.Ainfi  donc  aniourd'huy 
JcAis  Chrirt  cft-il  mefprifé?ne  tient-onconte 
in  Royaume  des  cieuxî  les  mondains  font-ils 
Jcursbraiiades  J  ont-ils  leurs  délices  &voly- 
ptcz'Et  bien.cependant  nous  femmes  comme 
po-.res  vcrsde  terre.uows  fommes  en  inefpris, 
nous  i'orames  eftimez  comme  reprouuez:(3!n- 
fi  que  fainft  Paul  en  parle  )  fi  faut-il  que  nous 
funnontions  telles  tcntations.Et comment? Il 
fft  vrayquc  pour  yn  temps  les  hommes  s'ef- 
gayent ,  8c  font  leurs  monftres  :  &  cependant 
Dieu  n'apparoift  .point,  il  fnnblequ'"il  ne  fc 
foucie  de  lout-ccla'.mais  attendons  en  patien- 
«e,iufques  à  ce  que  le  royaume  de  noïtre  Sei- 
gneur lefus  Chrift  nous  loitmonftré ,  comme 
ûena  eAé défia  touché auparauant  .Et  quand 
sous  aurons  ceft  aduis  &  ccfte  prudence  en. 
•oas,*!?  portera  noihc  Seigneur  IcfusThoo- 


neurquiluy  appartîeni.alofs  nous  fcronî re« 
tenus  :  quoy  qu'il  en  foit,  que  nous  ne  porte» 
rent  point  d'euuie  aux  mondains  de  toutct 
leurs  voliiptcz,  de  leurs  honneurs,  de  toute  I2 
félicité  qu'ils  imaginenttqu'il  leur  fcmblc  que 
ils  foy«nt  des  demidieux,&  s'enyurent  en  eux 
mcfinc$,&  t'oublient  tellement,  qu'ils  ne  pca 
fent  plus  eftre  hommes  mortels,  ni  créatures.. 
Et  voila  pourquoy  ils  ofent  en  telle  audace 
dcfpiter  Dieu.  Nous  ne  ferons  donc  point  e« 
Itonnezde  tout  cela  .  Et  pourquoy ?Nous  au- 
rons toujours  ccftc  doftrine  tefolue,Si  eil-cc 
que  le  Fils  de  Dieu  a  fon  Royaume  luy  feul.  U 
eil  vray  que  maintenant  cela n'apparoit  point 
à  noftre  veuc ,  nous  ne  le  comprenont  point 
mefines  félon  noilre  fens  naturel ,  mais  par 
foy  il  nous  tîut  contempler  ce  <jui  eft  «nuifi- 
blc,&:  cependant  nous  tenir  afleures  quVn  1» 
fin  Dieu  montrera  cômc  il.efl  luy  feul  Exnpe'^ 
rcur,  non  feulement  du  ciel ,  mais  aufsi  de  I4 
terre,&  qu'il  a  tout  en  fa  main  :  9t  que  tout  ce 
qu'atiiourd'huy  reluit ,  n'eft  rien  que  ivunee. 
que  ce  fontchofes  qui  perilTent  &  qui  pre« 
nent  fin.  Puis  qu'ainii  cû  donc ,  pourfuyuoal 
de  feruir  à  noflre  Dieu,afpirons  a  cefDietiui'» 
ge  qui  nous  eft  promis,&  nous  ne  ferons  point 
trompez  de  rjoftrc  el'perance.  Et  combien  que 
auiourd'huy  les  mondains  fe  facent  à  croire 
qu'ils  fontbicn-heureux.&qu'ilsfemocqucru 
de  nous  comme  fi  nous  eftions  fols  &  infen» 
fezjtant  y  a  qu'en  la  fin  Dieu  monflrera  qu'it 
ne  nous  a  point  appelez  àfon  feruice  pour 
nous deceuuir  ,  mats  ilnous  fera  participans 
de  la  gloire  qu'il  a  donnée  i  noftre  Seigneur 
Icfus  Chriii.  Et  combien  qu''auiour<i'huy  cJle 
ne  nous  foit  point  encores  prefente,  qu'acné 
nous  fera  m.inifeftceen  temps  opportun. 

OR  nous-nous  profternerons deiunt  la 
face  de  noftre  bon  l>ien  en  cognoiflàncc  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  Tes  face  telle» 
tnent  fentir,  qu'aucc  vraye  defplaifance  nom 
retournions  à  luy  pour  en  eftre  purgez  &  net» 
toyez.  Etcependant qu'il  nous  fupportepar 
fa  grâce  &bonté  tnfinie,iufquesàcequ'ilnout 
aitamenezà  noftie  fel'citc  parfaite,  &  qu'ail 
nous  ait  fait  compagnons  des  Anges  du  ciei* 
Ainfi  nous  dirons  tous^Dieu  tout-puiflan«« 
Père  cclcftf,&<-. 


SEPTIEME     SERMON     SVR     LE 

SIXIEME    CHAPITRE. 

15  Laquelle  enfès  temps  monîlrerd  le  hien-henreux  z^feulVr'm 
€e,K^oy  des  régnons ,  zs"  Seigneur  desfeigficurians, 

16  Onijeul  a  immortalité,  CJ*  habite  lumière  inaccej^ihle,i  lequel 

nid  des  hommes  Titt  yeUtQ"  ne  peut  fcoir  :  auquel Jaithonneur^^ptiJ-^ 

fmcç  éternelle fAmea, 

Die  a 


SVR    LA    I.    A    TIMOTH.  5" 

Ico  n'dcue  point  çn  ce  roo»    nous  fçauons  lufsi  que  nor  »mf  « »e  pcrilTone 


I  de  ceox  aut  font  en  quelque 
degré  d'honneur  afin  de  les 

■  mettre  en  ritupere  :  mais  la. 

1  malice  det  hommes  fait  que 

'  ceux  qui  ont  efté  exaltez  en 
honneur ,  foyent  puitaprc» 
Comme  deilituex de  Dieu  .d'autant  qu'ils  ne 
Cognoiffcnt  point  leur  mefure.  Et  nous  yoyôs 
fi  toiV  qu'vn  homme  cft  parucnu  à  quelque 
rftat  &  dignité,  eômc  il  j'oublie,  &  ne  fe  con- 
tente point  de  mefprifer  tes  prochains,  mais 
iidrefle  l'on  orgueil  contre  Dieu.  Il  faut  donc 
que  Die»  abbaitTc  vne  telle  hautcfle  ,  comme 
clic  cfl diabolique.  £t  voila  pourquoy  il  nout 
faut  eftre  armez  contre  toates  le  pompes  de 
ceux  qui  font  grans  au  mode,  afin  que  nous  ne 
foyons  point  eftonnei  d'eux  ,  que  louHours 
Dieu  n'ait  fou  droid.S:  qu'en  tout  &  par  tout 
il  foit  obey  comme  il  le  merite.Et  c'cft  la  rat 
fon(côrae  ce  matin  nous  l'auosdccIaré^poHr-  ^ 

Kioy  Ciinci  Paul  attribue  à  Dieu  les  titres  qui    pcrliller  et»  l'obeiflance  de  Dieu ,  eft  vn  do< 
ont  ici  Contenus  ,  Q»e  luy  feitl  efi  Vn'nce,  ipt  il    qui  leur  procède  d'aïUeuxi ,  &  aufji  l'immor^ 


point  en  la  mort:combien  qu'elles  Ibycnt  l'e- 
parees  d'auec  lescorps,û  eA-ce  toutettott  que 
Dieu  les  garde  iul'ques  au  dernier  iour.Ainh  il 
fembie  que  fainû  Paul  renuerfe  »b  principe 
de  nollre  foy,quand  il  dit  qu'il  n'y  a  qucDito 
immortel,  veu  qu'il  a  fait  çeltc  grâce  untaur 
hommes  qu'aux  Anges.de  leur  donner  immor 
talité.Mais  celle  queilion  fera  aifément  foluo 
quand  nous  aurons  obferué  que  faind  Paul  ne 
veut  point  ici  déclarer  ce  que  Dieu  a  cômuni- 
quc  à  les  créatures,  ou  non  :  mais  ce  qui  cil  de 
ion  propre. Vray  eft  donc  que  les  Anges  font 
cfpnts  immortels, que  ce  Ae  qualité  auf^i  con- 
uicnt  à  nos  amc$,mais  cela  n'eft  point  de  natu.» 
re:  car  tout  ce  qui  *  eu  commencement,  peu» 
auoir  fin,&  peut  aller  en  décadence,  voiiepC'* 
rir  du  tout.  Or  eli-it  ainfi  que  les  Angei  fuuc 
crcez:amlî  de  nature  nous  ne  diront  pas  qu'il* 
ayent  vn  cftat  permanent,*  qu'ils  ne  puillent 
changer,  maisccfte  confiance  qu'ils  ont  de 


l 


tjl  le  Rnjr  dei  régnons.   Car  de  ce  tcmp-ia  ,  fi 
Timotljee  k  tous  les  feruiteurs  de  Dieu  euf- 
fcntellc  anellcïaur  chofes  du  monde,  il» 
ciillcijt perdu, courage,   d'autant  que  toutes 
fcs  forces  de  la  terre  eftoyent  ennemies  de 
Dieu  ,  Membloit  que  l'E'jangile  deuft  eftre 
âbyfiiié  parceiri  quiauoyent  quelque  crédit 
&  autbotité.ll  faioit  donc  que  les  fidcJes  ap- 
prinilènc  de  leucr  les  yeux  par  dcfiîis  le  mon- 
de ,  5c  s'appuyer  fur  ceft  empire  éternel  de 
Dieu  ,  cognoiQàns  que  quand  il  a  eftabli  les 
principautcz  de  ce  monde,  ce  n'a  point  efté 
pour  rien  amoindrir  de  ce  qui  liiy  cft  dcu  ,  ne 
pour  oblcurcir  fa  principauté  fouueraine.  £t 
notamment  fainâ  Pauladiouftc,  C)iit  l'immor- 
titlitê  itfp4Ttient  a  Dieufcul  :  ce  qui  doit  eftrc 
entendu  par  manière  d'expoiition  :  pource 
«ju'on  ne  peut  nier  que  pour  vn  temps  les  gran 
dcurs  de  ce  inonde  n'ay cnt  quelque  appaiccc: 
mais  fainû  Paul  môftrc.d'autant  qu'elles  paf- 
fint  &  qu'elles  s'efcoulét, qu'il  ne  nous  y  faut 
point  fonder.  Or  Dieu  ha  vn  tftat  permanent 
&  inimiiable  ,  c'eft  là  où  il  nous  faut  tenir  :  cf 
<]ui  le  mue  &  ch.îge,ne  doit  point  eftre  de  tel- 
le vertu  enuers  nous.q  nous  en  foyôs  esbran- 
lez.Brief.fainâ  Paul  veut  que  nous  ayons  vne 
fermeté  en  nous  pour  ne  point  eftre  volages, 
félon  que  les  hommes  fe  plairont  en  ce  mon- 
îie'.cAx  il  nîj^auroit  nulle  conftance  en  noftre 
f  oy,  mais  elle  branleroit  à  tous  vents.  11  faut 
lionc  que  cefte  éternité  dont  il  parle,  laquelle 
ne  fètrouuera  qu'en  Dieu  feul ,  nous  retiene 
en  telle forte,que  tout  cequicftcaduque,foit 
«le  nulle  eftimc  ,  &  que  nous  le  puifsions  mef- 
prifer. Mais  deuant  que  palTer  plus  aiiant,  il 
nous  faut  foudre  Ict  difficultez  qu'on  pour- 
ïoit  iciallcguer.Carde  prime  face  on  ttuuue<- 
roit  cûrangece  que  fainci  Paul  dit,Qw  Un  y  a 
^*  T>UiKfin'  ji't  immtrt/il'fr  en  foj.  Car  noiit 
if auoas  que  Jet^Anges  font  rfj^nts  immortel») 


talité  .  Autant  en  eft-»l  de  nos  âmes  .  Et  de 
faift ,  le  péché  n' eft -il  pas  matière  de  corru- 
ption pour  nous  ancaotirf  Et  quand  nous  voir- 
ons que  les  hommes  font  tant  aiuables,  &  que 
ils  tournent  â  tous  rcnts  ,  Jf  qu'ils  ne  demeu- 
rent pas  vne  muiute  de  temps  en  vn  propos, 
cela  ne  fcroit-il  point  pour  nous  faire  due  q 
ce  n'eft  qu'vn  ombrage  que  de  noftre  vie» 
Mais  cependit  Dieu  ne  laille  pas  de  nouscô» 
muniqucr  cefte  iromottalitc  ,  en  vertu  de  ce 
qu'il  a  infpiré  vne  fois  vie  en  l'homme  quand 
il  l'a  créé. Il  faut  donc  reuenir  à  ce  qui  cft  dit 
au  Pfeaume  centquâtriemc,Quç  Ci  Dieu  reti- 
re fon  Efprit  des  créatures,  tout  fera  trouble 
&  confus,  &  en  la  fin  nous  périrons  ,  &  feront 
anéantis.  Voire  mais  d'autant  qu'il  luy  a  pieu 
infpirer  en  nous  ce  don  d'immortalité ,  &  que 
nous  l'auons  non  point  de  noftre  vertu,  no» 
point  que  cela  nous  foit  propre  pour  nous  en 
glorifier, il  nous  luy  en  faut  faire  hémage,fç4 
chans  que  c'clt  de  luy  que  nous  le  tenons. te 
voila  en  quoy  nous  différons  d'auec  les  beftes. 
brutes .  Car  li  Dieu  ne  eonferuoit  aux  hônict 
la  vie  qu'il  leur  a  donnée  ,  la  mort  d'vn  hom« 
mc&  d'vn  cheual  ou  d'vn  chienferoit  du  tout 
parcille.il  n'y  auroit  nulle  diuerfité:  car  non* 
nefommcs  point  ne  plus  nobles,  ne  plus  di- 
gnes,m3ij  le  tout  nous  vient  de  ce  qu'il  a  pies 
à  Dieu  nous  donner  ce  priuilege  fpecial ,  que 
nous  foyons  imm,ortels.  Et  au  refte  ,  notons 
bien  que  fainû  Paul  outre  cela  a  voulu  ici  ei« 
pruner  la  vraye immortalité,  qui  eft  que  nout 
adhérions  â  Dieu.Car  les  diables  &  le!^ rep/ou 
uez  ne  laiHcnt  pas  de  viure  ,  combien  qu'ilc 
foye»t  aliénez  de  Dieu  ,  mais-la  mort  leur  fe» 
roit  beaucoup  meilleure.  Ilvaudroit  mieux 
que  tamait  ne  fuflent  nais  ,  ou  qu'ils  tulFcnt 
bien  toft  anéantis ,  que  de  viure  à  telle  condi- 
tion,c'cftafçauoird'auoir  Dieu  pour  Icurcon 
traire,  &  4'cftrc  rcie««  dt  luy.  Mais  S.Paul 

Qj.iii. 


jn 


SERMON     LU. 


parle  ici  de  la  vraye  vie,&  môftre  qu'elle  n'ell 
fff-iS.9  finon  en  Dieu  :  comme  il  eft  dit, qu'en  luy  en 
eu.  la  fontaine  &  la  fource  ,  &  que  c'eft  de  là 
dont  il  nous  faut  puiler.  £n  fomme  ici  fainft 
Paul  nous  monftre  que  quand  nous  aurions 
tout  ce  qu'il  eft  pofsible  de  fouhaiter  encefte 
vie  preftnte ,  que  nous  aurions  la  faueur  du 
inonde, que  nous  ferions  riches,  que  npus  au- 
rions fanté  corporelJe.qiie  rien  ne  nousdefau 
droit,neantmoins  que  uou^  ferons mifcrables, 
ce  n'eft  que  fumée  de  tout  cela. Et  pourquo y? 
Car  fi  nous  n'adhérons  à  noftre  Dieu.il  n'y  a 
point  de  vie  certaine,!!  n'y  a  point'd'eftat  qui 
dure  ,  mais  le  tout  s'efcoule.  Voulons-nous 
donc  auoir  vne  droite  fclicité?Qii,e  nous  adhe 
rions  â  noftre  Dieu:&  fi  cependant  nous  voy- 
ons le  monde  qui  nous  abule,&  qu'il  ait  beau 
coupd'obiefts  qui  foyent  pour  nous  deitour- 
ner  du  bon  chemin,  paflons  outre,  refiftons  à 
cela.Et  pour.quoy?  Car  fi  nous  voulons  aaoir 
vne  longue  durée  ,  venons  à  nollre  Dieu  ,  & 
n'ayons  point  d'autre  but, marchés  toufiours 
iufquesàceque  nous  l'oyons  là  paruenus.  En 
■  fomme,fainâ;  Paul  fait  ici  comparaifon  entre 
•  la  vie  qui  eft  tant  appetee  des  hommes,  &  cel 
'le  à  la  quelle  nous  deuonsafpirer.  Carpour- 
quoy  eft-ce  que  les  vns  font  tranfportez  d'a- 
uarice  ,  les  autres  d'ambition  ,  que  le  monde 
nous  poffede  tellement  que  nous  ne  penfons 
poiiit  à  Dieu,qu'il  ne  nous  peut  ranger  à  foy, 
que  tout  ce  qu'on  nousprefche  du  Royaume 
des  cieux  ne  nous  touche  point  au  vif?  C'eft 
que  nous  n'imaginons  que  cefte  vie  qui  fe 
monftre  déliant  les  yeux,&  nous  ne  regardés 
pas  cependant  que  ce  n'eft  rien  qu'vn  petit 
ombrage  &  figure, flc  qu'il  ne  faut  que  tourner 
la  main  que  tout  le  pafle.  D'autant  que  nous 
fommes  ainfi  ftupides ,  nous  auons  befoin  de 
recorder  cefte  leçon  de  fainû  Paul  ,  c'eft  que 
on  ne  doit  point  tenir  pour  vie  vn  tel  paffige 
&  fi  brief.Quoy  donc? Vne  condition  qui  de- 
meure Si  qui  foit  ferme.  Or  trouuera-on  cela 
au  mordt?  Les  hommes  feront-ils  immortels 
qwand  ilsfe  plairont  en  leurs  vertus, &  en  leur 
crédit  &  richefles.  Qu'ils  cherchent  &  haut 
ti  bas.il  eft  certain  qu'ils  s'efiianouiront  touf- 
iours.Ainfi  donc  il  faut  venir  à  Dieu, ou  nous 
ne  trouuerons  point  de  vie  qui  doyue  e  ftre  te- 
nue pour  telle.  Puis  qu'ainfi  eft  ,  oublions  le 
inonde  quand  il  eft  queftion  d'acheuer  noftre 
courfc  ,  qu'il  eft  queftion  de  nous  employer  à 
la  charge  qui  nous  eft  commife.combienquM. 
nous  fcmble  que  cefte  condition-la  foit  pire 
que  celle  des  incrédules.  Combien  que  nous 
voyons  beaucoup  de  bazars ,  combien  que  les 
menaces  noHs  eftonnent ,  toutesfois  fi  faut-il 
furmonter  tout  cela  ,  d'autant  qu'il  n'y  a  im- 
mortalité quVn  Dieu  feul.Et  quand  nous  au- 
rons cefte  doûrine  bien  ciigiauec  en  nos 
<œurs,il  nenous  fera  point  mal  de  quitter  ce- 
fte vie  pour  trois  iours  ,  fçachans  que  nous  la 
M.it.  le,  rec ouurcrons  en  noftre  Dieu  :  comme  noftre 
*f  •  Seigneur  Icfas  dit,Qu.e  ccluy  qui  perdra  fou 


ame, c'eft  à  dire, qui  ne  tiendra  contede  fa  vie, 
mais  l'aura  en  mefpris.que  ce'luy-la  la  met  en 
bonne  garde  &  feure.Et  pourquoy?ear  quand 
les  fidèles  le  retirent  ainfi  du  monde.qu'ils  ne 
craignent  les  dangers ,  ne  chofes  femblables, 
qu'ils  fe  defpouillent  franchement  de  ce  que 
le  inonde  appete  par  trop  ,  ils  approchent  de 
Dieu,&  approchans  de  luy  ils  font  participas 
•de  fa  vie  &de  fon  immortalité.  Voila  donc 
comme  nous  ferons  vn  bon  efchange,&  à  no- 
ftre auantâge  &  grand  profit,  quand  nous  au- 
rons oublié  la  vie  de  ce  monde,  pour  ne  nous 
y  point  arrefter,  &  que  nous  ne  demanderons 
finon  d'adhererà  noftre  Dieu»  Et  voila  pour- 
quoy  faintl  Paul  nous  propofe  la  recompenfe  ""  ■  3*7. 
en  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,&  nous  dé- 
clare que  quant  à  luy  il  a  tout  quitte,  &aefti- 
mc  comme  perte  Se  dommage  ce  qui  l'empe- 
fchoit  de  venir  à  lefus  Chrift ,  &  mefmes  il 
luy  a  cfté  comme  puant  &  exécrable.  Et  pour 
quoy?Non  point  afin  qu'il  demeuraft  defpour 
ueu  &  indigent, mais  afin  qu'il  trouuaft  en  le- 
fus Chnftce  qu'il  auoit  quitté  quant  aumon- 
de:  comme  aufsi  il  dit  qu'à  viure  &:  à  mourir 
lefus  Chrift  nous  eft  vn  bon  gain  quand  nous 
le  tenons  &polTcdons  comme  il  nous  eft  don- 
né de  Dieu  fon  Père,  comme  iournellement  il 
ft  prefcnte  àiious.afinque  nous  iouifsions  de 
luy  &  de  tous  les  bitns.  Or  après  que  fainft 
Paul  a  par  lé  de  Timmortalité  de  Dieu, il  adiou 
lie  ,  Çhi'il  habite  TBf  clarté  inatccfsihh  :  Si  dit 
que  lamais  nul  homme  ne  l'a  veu  &  ne  le  peut 
veoir.En<ju6y  ilfignifieplus  expieflcmentcc 
que  nous  auons  touché  ci  deflusiafçauoir.que 
pour  bien  honorer  Dieu ,  il  ne  nous  le  faut 
point  mefurer  félon  noftre  fensne  félon  no- 
ftre phantâfie.mais  qu'il  faut  monter  par  Aef- 
fus  noftre  mefure,&  nitfmes  pardcffus  tout  le 
monde.  Car  fi  nousdifputons  de  Dieu  feloa 
noftre  apprehenfion, que  fcia-ceî  Nous  voy- 
ons comme  les  hommes  fe  transfiguient.  Et 
aa  rcfte  ,  nous  fommes  tant  ftupides  que  nous 
ne  pouuons  furmoiiter  nos  fcns  corporels:  o4i 
bien  encores  que  nous  cuidions  eftre  lubtiis  & 
aigus ,  tant  y  a  que  nous  défaillons,  &  toutes 
nos  fagcfles  s'efuanouifient  à  my  chemin  ce- 
uant  que  nous  parucnionsau  but.LciPhilcfo- 
phes  qui  ont  eu  vn  grand  cfprit&  excellent, 
n'ont  lamais  cognu  que  c'eft  de  la  vie  cdefte. 
Il  t  ft  vray  que  Dieu  les  a  fait  parler  pour  ren- 
dre tefmoi^nage  au  monde  ,  aHn  de  leur  ofter 
toute  excuïe  d'ignorance,  &  ont  prononcé  de 
belles  fentenccs, que  les  hommes  n'ont  point 
eité  créez  pour  viure  fciikmtnt  ici  quelque 
peu  de  temps  ,  comme  nous  "voyons  que  cha- 
cun de  nous  ne  fait  que  paffer  par  la  terre. 
Mais  quoy  ?  ce  n'a  pas  efte  vne  cognoiflance 
certaine, qu'ils  ayent  «ntcndu  que  les  hommes 
fuflent  créez  à  l'image  de  Dieu,&  que  par  ce- 
la ils  font  immortcl'.,&  que  Dieu  leur  a  appre 
fté  Ittif  héritage  là  haut  au  eiel  :  iair.ais  tous 
les  fages  du  monde  n'ont  allégué  cefte  doiJri- 
&e.  Encores  que  iioasfufùonsconuaincus  ,  fi 

cit-ce 


s  V  R    L  .A    I.    A    T  I  M  O  T  H 


313 


eft-ce  que  nous  Tommes  tant  farci;  &  11  pleins 
de  toutes  les  vanitez  du  monde  ,  cjne  nous  ne 
pouuons  afpircr  là  haut.  Qjiand  vn  bomuie 
aura  confciTe  que  noftre  vraye  félicité  eft  au 
ciel,&  que  nous  f^jmmes  pèlerins  ici  bas  ,  que 
nous  n^auons  point  vne  demeure  permanente 
iinon  aucc  Dieu  ,  quand  nous  aurons  confelFé 
tout  cela,&  que  ce  n'aura  point  efté  par  fcin- 
tife,  mais  que  nous  en  aurons  efté  perluadez, 
encores  ne  lailTons-nous  pas  d'eftre  entortil- 
lez en  ce  monde  ,  &c  de  croupir  ici  comme  fi 
nous  y  dénions  demeurer  àianiais.Nous  voy- 
ons comme  les  tommes  trauailkn  t, comme  ils 
le  tourmentent. Si  on  leur  demande,  Et  qiioy? 
n'v  a-il  point  de  meilleure  vie-'Et  qiloydonc? 
chacun  le  confeflera  &  fans  hypocrilïe:car  ils 
le  cognoifleiitainfi.Mais  cependant  les  voila 
abrutis,à  caufe  que  leur  incrédulité  a  défia  ga- 
gné place  en  eux,  &  que  leurs  aifeûions  font 
desbordees,  &  qu'ils  n'en  peuuentauoir  telle 
vifèoire,  qu'ils  fe  retirent  de  ce  qui  n'eft  rien. 
Et  ainfi  donc  ce  n'eft  point   fans  caufe  que 
fainâ  Paul  met  ic!,Ç>»f  DiVk  habite  -rne  clarté 
inaccffsible-,c''<.{ï  à  dirc.de  laquelle  on  ne  peut 
approcher. Or  par  ce  mot  de  cLrtc,  il  fignifie 
que  fi  nous  ne  contemplons  point  les  biens 
ineftimables  q  Dieu  nous  a  apportez,  cela  ne 
vient  point  d'..bfcurité  qui  foit  en  Dieu, ni  en 
la  grâce  qu'il  nous  offre.    Q_uoy  donc  f  C'e/l 
pource  que  nous  auonï  ici  les  yeux  troublez, 
que  Satan  nous  auengle  ,  que  toutes  nos  affe- 
ftions  ,nos  folicitudes,  nos  cupiditez  font  au- 
tant de  bandeaux  pour  eftouper  nos  yeu)r,mef 
mes  pour  nous  les  crcuer.  Notons  bien  donc 
que  nous  auons  ici  double  doiiVine  en  ces 
deux  mots.Sainft  Paul  dit  que  Dieu  habite  en 
clarté.  Par  cela  il  demon/tre  que  quand  nous 
ferions  capables  de  coiïnoiftre  ,&  que  nous 
aurions  les  yeux  clairs   &bien  purgez,  nous 
verriôs  la  clarté  en  laquelle  Dieu  habite. Mais 
quovrnous  n'y  auons  point  d'acccs.La  r.iifon? 
C'cft  qu'il  nous  faut  imputer  la  faute  à  noftre 
vice  ,  que  nous  fommes  par  trop  débiles  pour 
môter  fi  haut. Et  de  faid.le  foleri  mefme  nous 
efl  vn  bon  tefmoin  de  Tinfirniité  qui  eiî  en 
nous:  carfinous  d relions  les  yeux  à  la  clarté 
du  foleil,  nous  voila  esblouis:  &  toutesfoi';  ce 
n'cft  qu'vne  créature ,  voire  infc  nfible.   Que 
fera-ce  donc  quand  nous  voudrons  venir  iuf- 
ques  à  noftre  Dieu?  Car  il  cft  certain -que  la 
vcue  de  nosaraes  eft  beaucoup  plus  tendre  & 
dcbile,  que  n'eft  pas  celle  de  nos  yeux  corpo- 
rel';.Et  ainfi  notons  bien  que  Dieu  n'til:  point  ' 
caché  en  obfcurité.  Car  qv\'efi-ce  que  fa  gloi- 
re iinô  vne  lumière  qui  reluit  par  tout?  Et  mef 
mes  dont  procède  la  clarté  du  foleil,&:la  rai- 
fon  que  nous  auons  ennos  efpritsrDieu  n'cft- 
tlpoint  l'origine  de  toutrPuis  qu'amiî  eft  dôc 
que  tout  ce  qu'il  y  a  de  clarté  au  monde  vient 
de  hiy,^que  c'eft  luy  qui  illumine  tout, il  faut 
bien  qu'il  foit  tout  enuironné  de  clarté:(com 
P/f.104.  me  il  eft  dit  au  Pfeaume)iîi.aisccpend.it  fi  nous 
*v  regardons  quels  nous  foiumes.nous  confefle- 


ronsauec  faine}  Paul,  que  nous  n'auorj  ni  ac- 
cès,ni  approche  à  cefte  cla;  tc-la,  que  nous  en 
fomincs  du  tout  foi  clos  &  ef  ogncz.  Et  peur- 
quoy?  Car  nous  fommes  par  trop  hebetezau 
morde.  Et  qui  eftcaufedc  ceftaiieuplement- 
ci?  C'eft  en  premier  lieu, que  nous  n'.uions  pas 
l'efprit  fiifhfant  pour  monter  fi  haut  :  &  puis, 
que  nous  fommes  préoccupez  &  iaifîs  de  be- 
aucoup de  vanitez, que  toutes  nosatFcttions  & 
penfecs  font  autant  d'empei'chemens  qui  nous 
eftongnent  de  Dieu.  Puis  qu'ainfi  elt  donc,  il 
ne  fe  faut  point  esbaJnr  fi  les  hommes  n'ap- 
prochent nullement  de  Dieu  ,  voire  quant  i 
eux. Car  cependant  nous  fçauons  ce  qui  eit  dit 
au  Pfeaume ,  Approchez  de  luy,  Se  vous  ferez  I'/<'-34-* 
efcIairez.Cela  n'eft  point  dit  en  vain,  Dieu  ne 
femocque  point  de  nous  pour  dire,  VonsnVa 
approcherez  iamais ,  ie  vous  defpite  ,  ie  vous 
veux  faire  honte.    Mais  au  contraire ,  il  nous 
conuie  humainement  à  foy ,  &  nous  déclare 
qu'approchans  deluynous  ferons  illuminez. 
11  fat  donc  cefte  grâce  àceux  qu'il  a  eleus 
p^ur  fes  enfans ,  de  les  attirer  à  foy,  &  quand 
ils  y  font  venus,ilsvoyent  fa  clarté, &  en  louif 
fent.Mais  cela  n'eft  point  d'vne  vertu  humai- 
ne: car  fa-nct  Paul  parlant  en  ce  paflàge  de  la 
clarté'inaccefsible  en  laquelle  Dieu  habite, 
nous  dénote  que  cependant  que  les  hommes 
font  cnueloppez  en  leur  fens  propre,  qu'ils  fe 
plairont  en  leur  fagefre,&  qu'ils  feront  plon- 
gez aux  chofcs  de  ce  monde  ,  iamais  n'appro- 
cheront de  Dieu,  qu'ils  feront  du'toiil  bru- 
taux ,  qu'ils  n'auront  nul  gouft  delà  vie  cele- 
fte  ,  que  cefte  vie  les  rauira  du  tout ,  qu'ils  ne 
dennndtront  qued'eftre  riches,d'eftre  en  cre 
dit,d'eftie  honorez  .d'auoir  ceci  &  cela,  d'a- 
uoir  leurs  voluptez  &  plaifirs  .  Que  faut-il 
donc?Si  nous  voulons  vrayement  eftrecfclai- 
rezdeDien  afin  que  nous  n'errions  point  ea 
ce  morde,  que  nous  ne  choppions  point ,  que 
nous  ne  treaufchiôs  point  en  vne  cheute  mor 
telle  ,  qu'en  premier  lieu  nous  quittions  tour 
noftre  fensfçachans  qu'il  faut  que  Dieu  nons 
elcue  pardelTus  toute  faculté  humaine,  ou  ia- 
mais nous  ne  communiquerons  auec  luy  ,  ia- 
mais nous  ne  fçaurons  que  c'eftde  iâ  gloire  ne 
de  (a  maiefté.iamais  nous  ne  ferons  efmeus  de 
tendre  à  cefte  vie  bicn-heureufe  qni  nous  eftr 
appiefteeau  ciel.    Voila  donc  l'intention  de 
fain£l:  Paul. Or  fi  cecieftoit  bien  cognu,  il  n'y 
auroit  point  tant  de  combats  ni  difputes  qu'il 
y  a  par  le  monde. Car  qui  eft  caufe  que  les  no- 
mes dcfthirent  ainiî  la  vérité  de  Dieu,&  qu'ils 
la  tournent  ça  &  là,&:  la  falfifient ,  finon  cefte 
aud.Tcedi.ibolique, qu'il  leur  femblequ'ils  font 
bien  idoines  pour  iuçer  de  ce  qui  leur  eft  pro- 
poteîD'autant  donc  qles  hommes  prefumxnc 
de  leur  fagefle  propre, ils  veulct  méfier  le  cieC 
aucc  la  terre  ,  &  confondent  tout.  Or  fi  nous 
fçauions  que  Dieu  habite  vne  clarté  inaccefsi— 
ble,cela  feroit  bien  pour  nous  humilier,  fça- 
chans  bien  que  noftre  cfprit  ne  peut  nulle- 
ment approcher  de  Dieu.ne  des  fecrets  de  foi» 


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I-p/>.i.iî 


y4  SERMON     LU. 

Royaume  ,  il  yautoit  vnefobrieté&  mode-  eftincelle.  Voila vne  clarté  infinie  en  Dictit 
t!ic  en  nous-  pour  fouffrir  d'crtre  enll-ignezde  trauaiUons  tant  qu'il  nous  fera  poAiisle,  nous 
Di^u,  &  nul  ne  cuideroitcftrefage,  mais  tous  n'en  aurons  pas  feulement  vn  petit  rayon, iuf- 
d'vnaccord  nous-nous  rendrions  dociles  pour  qucs  à  ce  qu'il  nous  foit  rendu  vilible.  Or  plu- 
dire, Seigneur ,  enfeigne-nous,  &  ccquenous  lieurs  ont  difputé(comme  lainû  Pauldit)quc 
aurons  apprinscnton  efcholc  nous  fuffira,  on  ne  peut  veoirDieu.  Veu  que  1  Efcriture 
nous  ne  voulons  point  pUisl'çjuoir  que  ce  que  déclare  que  nous  le  verrons  tel  qu'il  eft  quand 
tu  nous  auras  déclaré.  Voila  doc  le  vraymoy-  nous  ferons  transfigurez  en  fa  gloire,  (car  voi 
en  de  nous  con'oindre  en  robcuTance  delà  la  comme  faind  lehan  en  parle  en  fa  Canoni- 
foy.c'cft  que  nous  tenions  ceci  pour  conclud,  que  ,  au  troifieme  ckapitre  ,&  l'Efcnture  eft 
que  la  clarté  en  laquelle  Dieu  habite  n'ell  pleine  de  celle  doiflrine-la  :  nous  fçauonsce 
point  capableà  no,  efprits.  Et  au  refle  ,  cela  qui  eft  dit  au  Pfeaurae  feizieme.q  nous  ferons 
feroit  aufsi  pour  rctrai>c))-;r  toutes  vaines  eu-  ralfalicz  de  fon  regard, que  voila  la  perfedion 
riolitez,  comme  nouvvoyons  que  les.  hommes  de  no  lire  felicité,c'eftnoli:reioye  accomplie, 
appctent  de  fçauoir  plus  qu'il  ne  leur  compe-  q^iand  nous  ferons  conioints  à  nollre  Dieu 
te.  Or  comment  eft-ce  qu'il  nous  faut  appro-  pour  le  contempler  tftans  femblables  à  luy) 
cher  de  Dieu  ?  Pource  que  nous  ne  pouuons  comment  eft-il  donc  dit  que  nul  ne  peut  veoir 
pas  monter  lufqiies  à  luy,  il  nojs  fait  la  grâce  Dieu  ?  Or  cefte  difficulté  le  peut  aifeemenc 
de  de  fcendre  à  nous, afin  de  nous  eleuer  à  foy  :  foudre.Toutesfois  deuant  que  venir  à  plus  ain 
miisdeuant  qu'il  nous  y  attire,  il  s'abbaille,  pie  déclaration  ,  notons  bien  qu'il  nous  faut 
c'eft  .idire,!]  le  fait  petit.  Ec  nous  voyons  de  tiaittcr  ceci  auec  reuerece,  &non  pas  comme 
faictcomme  en  PElcriture  il  s'accommode  à  font  ceux  qui  nedcmandent  qu'àmonter  bien 
noltre  rudeUe.Car  li  Dieu  parloit  fclon  Ci  ma  haut  pour  fc  faire  prifcr.  Oi  noftrc  Seigneur 
iellé  ,  que  feroit-ce  ?  qui  ell-ce  quipourroit  Icfu>  nous  monftre  par  quel  bout  nous  deiions 
rien  mordre  à  fon  fty  le?  fon  langage  de  qui  fe  commencer,  quand  il  elt  queftion  de  con  tem- 
roit-il  entendu?Mais  il  parle  félon  noflre  por  p!er  la  gloire  de  Dieu  fon  Pcre.-c'cft.ifçauoir 
tee. Et  voila  comme  il  s'abbai{re(ainlî  que  l'ay  quenous  ayons  les  yeux  purs&ncts,  &Jcs 
délia  dit)  afin  de  nous  eleuer  à  foy.  Et  pour-  cx-urs  quant  &  quant. Bicn-heureux  font  ceux  M.jf  f-.j.S 
tant  le  commencement  delavraye  fagelle,  qui  font  purs  de  coeur ,  car  ils  verront  Dieu, 
c'efl  aueles  hommes  fçachent  qu'ils  ne  pour-  Cependant  félon  que  nous  lommes  troublez, 
royeiu  approcher  de  Dieu  ,  iufques  à  ce  qu'il  Dieu  nous  eft  caché,&  ne  daigne  pasaufsino' 
les  viene  tirer:  &  fur  cela  qu'ils  fecontencent  receuoir  ne  fe  moiiftier  à  nous,  car  nous  n'en 
de  fçauoir  ce  qu'Us  auront  retenu  de  luy  ,  &  fommes  pas  dignes. Or  eft-il  ainlî  que  l'arabi- 
q'i'ils  quittent  toutes  leurs  folles  fpcculatiôs,  tion  domine  en  nous,  nous  lommes  troublez: 
ciai£;nans  d'entrer  en  vn  abyfine  dont  lamais  s'il  y  a  d'autres  vanitez  qui  nous  transfigurée, 
ils  ne  pourront  fortir,quand  ils  voudront  fçâ-  c'ell  bien  loin  d'approcher  de  Dieu.  Il  nous 
uoirplus  qu'il  ne  leur  eft  licite. Au  refte,rete~  faut  donc  commencer  par  ce  bout,  quenous 
nons  ce  qui  a  efté  dit ,  c'eft  que  Dieu  nous  a  foyons  purifiez  ,  que  les  choies  de  ce  monde 
ouuert  fon  Royaume  par  l'Euangile ,  afin  que  qui  nous  corrôpent  &.  nous  feparent  de  Dieu, 
nous  y  entrions  défia:  comme  il  ell  dit, que  les  foyciH  retrâcheesiquandcela  y  lera,  voila  vn 
fidelesfontpaflczde  mort  àvie, que  nous  foin  bon  preparatif.  Or  venons  maintenant  àce 
mes  afsis  aux  lieux  celeftes  :  non  point  que  que  l'Efcriture  nous  déclare.  Il  eft  dit  au  pre- 
nons voyons  prefentement  ces  choies  ,  mais  mier  chapitre  de  fainti  lehan.que  iamais  hom 
d'autant  que  Dieu  nous  a  reuelé  ce  qui  eft  in-  me  n'a  veu  Dieu,  mais  le  Fils  vnique  qui  eft  au 
iiifible  au  fens  humain ,  &  nous  en  a  donné  vn  fein  du  Père  nous  l'a  reuelé. Et  comment  cela? 
tefmoignage  fi  certaine  fi  familier  ,  que  nous  C'eft  vne  comparaifon  d'entre  les  Pères  an- 
pouuons  non  ieulcment  approcher  de  fa  clar-  ciens  &le  peuple  nouueau,ou  bien  d'entre  les 
té,  mais  nous  y  entrons  &  y  communiquons  fidèles  qui  ont  vefcu  fousla  Loy.S:  les  Chre- 
entant  qu'il  nous  eft  vtile  pour  noftre  falut.Et  ftiens  qui  font  auiourd'huy  enféigiiez  par  l'E- 
voilaàquoy  tend  ce  que  fainttPauladioufte,  uangile.  Dieu  donques  iufques  à  la  venue  de 
Que  nul  homme  ne  Ta  iamais -veu,  &  ne  le  peut  fon  Fils  vnique  a  efté  comme  caché:  &  voila 
-vto/V.IIs'expofefoy-mefme.&môlhe  ce  qu'il  pourquoy  noftre  Seigneur  lelus  eft  appelé  l'i- 
a  entendu  par  ce  mot  inaccefiibU  :  c'eft  âfça-  mage  de  Dieu  inuifible:non  pas  que  les  fainils  ^"'•'•'l- 
uoirquenul  homme  ne  peut  veoirDieu.  Et  Patriarches  &  Prophètes  n'ayent  euvnevi- 
comment  cela?  félon  noftre  fens ,  comme  l'ay  fion  qui  leur  a  profité  pour  les  amener  .à  filut, 
défia  dit.  Il  n'eftpoint  iciparlé  de  la  veue  du.  mais  tant  yaque  c'eftuit  vn  regard  bien  ob- 
corps  ,  mais  de  toutes  les  apprehenfionsque  fcur  :  car  Dieu  ne  fe  monftroit  pas  encores 
nous  pourrons auoir.  Q_uç  les  hommes aigui-  comme  en  face.  Il  eft  vray  que  qiiandileft 
fent  leurs  efprits  tant  qu'ils  voudront  ,  qu'ils  parlé  de  Moyfe,il  eft  dit  que  Dieu  s'cftmon-  Nomi.li. 
eilendent  toutes  leurs  fagcfles  &  haut  &:bas,  ftré  en  face  à  luy  :  lacob  en  dit  bien  autant:  S. 
fieft-ce  que  iamais  ne  pourront  contempler  mais  c'eft  en  voulant  m.ignifîer  la  grâce  que  Ccne-it. 
Dieu.c'eftà  dire  le  cognoiftre  tel  qu'il  eftiqui  Dieu  leur  a  fiite,  quand  il  luy  a  pieu  de  fc  re-  30. 
plus  eft  ,  iamais  n'en  pourront  auoir  vne  feule  uelcràeux.  Mais  cependant  encores,  toutes 

les 


SVR    LA  I.    A   TIMOTH. 


v<; 


les  vifions  qu'a  eu  Moyle,5:  qu'a  eu  lacob  ont 
eflé  oblciiies,  au  prix  de  ce  q  noflre  Seigneur 
IcfusCIirift  nouï  a  apporte.  E:  voila  pour- 
quoy  il  cil  dit  que  le  Fils  vnique  quia  elléaf- 
lf/».l.lS.  ''S  au  fein  ou  au  giron  de  Ton  Père,  noy;  a  ra- 
conté les  chofes  qui  auparauant  eftoycnt  ca- 
chées &  incomprehcniiblcs. Voila  donc  délia 
deux  degrez  :  l'vn  c'cft,  que  les  Pcres  anciens 
ont  apperceu  Dieu:  voire  mais  c'a  eflé  en  pe- 
tite portion  au  prix  de  nous.quad  noftre  Sei- 
gneur lefus  cft  defcendu  au  monde.  Voila  le 
Soleil  de  iuftice  qui  eft  apparu  ,  par  lequel 
nous  pouuons  mieux  contempler  Dieu,&  beau 
coup  plus  clairement  que  n'ont  pas  fliit  les 
fâinds  Pères ,  entant  qu'il  s'ell  déclaré  plus 
priueement  à  nous.  Or  quand  nous  difons  que 
lefus  Chrift  eft  l'image  viuede  Dieufon  Pè- 
re ,  ce  n'eil  point  en  celle  perfonne  humaine 
qui  eilici  appaïue.en  laquelle  il  a  conucrfé.Il 
a  conuerfc  auec  les  hommes  pour  vn  temps, 
mais  cela  fe  rapporte  àl'Euangile,  comme 
J&inft  Paul  en  traitte  en  la  féconde  des  Corin 
thiens.    Il  faut  donc  que  nous  apprenions  à 
contempler  Dieu.quand  il  luv  pkiil  de  le  ma- 
nifcfttr  à  nous,  comme  il  le  tau  toutes  fois  Si 
quantes  que  lefus  Chri/1  nous  eft  prefché;l'ça 
chons  que  Dieu  nous  defploye  là  fon  coeur, 
que  là  il  fe  manifefte  entant  que  nous  le  pou- 
uons porter, entant  qu'il  nous  eft  propre  pour 
noflre  inltruûion.  Ouurons  donc  les  yeux:  & 
d'autant  que  nous  les  auons  par  trop  troubles, 
prion';  Dieu  qu'il  nous  lesdeliure  de  toujeiii- 
pelchemens  ,&  qu'il  nous  illumine  par  fon - 
faini't  £l'prit,afin  que  nous  le  voyons,  &  que 
nous  le  voyons  en  telle  forte  par  efperance, 
,j  I  qu'en  la  fin  nous  iouifsions  de  celte  deruie- 

'rc  veue  dont  faintl  lehanpaiIe.Et  voila  pour 
quoy  faindl  Paul  dit  que  nou'.  iommes  comme 
abfens  de  Dieu,  voire  d'iutant  que  nous  che- 
minons par  foy  (dit-il)  &  non  point  par  vi- 
fîon.  Il  femble  que  ce  foytnt  choies  contrai- 
■  '  '^^  res:car  fainû  Paul  parlant  de  la  Loy&  de  l'£ 
uangile  ,  dit  qu'il  n'y  a  plus  de  voile  qui  nous 
retiene  que  nous  ne  contemplions  Dieu  aper- 
tement:car  l'Euâgile  (dit-il)uous  eft  comme 
vne  entre'e  au  Royaume  des  cieuî:  Dieu  appro 
che  de  uous,&  ne  no'  faut  plus  alléguer  d'ob- 
fcurite  aucune,  car  il  n'y  a  rien  de  confus  ne 
d'incertain.  Puis  qu'ainfî  eft  que  nous  auop.s 
les  threfors  de  fagefle  qui  nous  font  ainli  ex- 
pofez.nous  auons  la  vifion  de  Dieu,voire  face 
à  face,côme  il  eft  dit  au  troificme  chapitre  de 
la  féconde  aux  Corinthiens.  Mais  quand  en 
cefte  mefine  epiftreau  cinquième  ,  il  eft  dit 
que  nous  ne  cheminôs  point  par  vifîon,  il  en- 
tend d'vne  vifion  aétuelle:&  puis  il  vient  à  ce 
Ite  monifeftation  laquelle  gift  en  efpciance, 
«omme  il  ellditau  huitième  desRomains,Ce 
qu'encores  nous  ne  voyons  pas  ,  il  faut  qu'il 
conlîfte  en  eiperance.  11  nous  faut  donc  con- 
clure que  les  fecretsduRoyaumede  Dieu  no' 
lont  cachez  aâuellemét,  c'eft  à  dire, que  nous 
ij'cn  auons  poiutvne  polfeisiô  prefenu;,.nous 


ne  les  pouuons  veoir  à  l'œil ,  ni  toucher  à  Ja 
main.  Et  pour  mieux  comprendre  le  tout,  il 
nous  faut  mefmes  rcuenir  à  ce  pallàge  que  ne' 
auons  touché  de  famèt  lehan,  car  ilnouseit 
vn  tresbon  expnCteur.en  difant.  Nous  fçauôs 
que  nous  femmes  enfans  de  Dieu  :  mais  ccLl 
n'apparoifr  poini(felon  que  nous  auons  dit)il 
ne  nous  eft  point  viiîblc:&  toutesfois  nous  en 
auons  vne  bonne  certitude.  Comme  s'il  pro- 
teftoitque  noftre  foy  n'ell  point  douteufe, 
qu'il  ne  faut  point  y  aller  parcuider,ma;s  que 
il  nous  faut  eftre  tout  alTeurez  que  Dieu  nous. 
a  rendu  telinoignage  de  fon  adoption.  S:  qu'il 
nous  en  a  donné  vn  ii  bon  gage  au  fang  de  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chnft  ,  qu'il  faut  que  cela 
nous  férue  d'vne  pleine  approbation  qu'il  eil 
noftre  Père, que  quand  noui  l'inuoquerons  en 
vne  telle  foy  &  lî  refolue,  nous  ne  doutions 
nullement  qu'il  ne  nous  recognoifTe  pour  fes 
enfans. Or  quad  nous  auôs  tout  cela,  ne  voila: 
point  délia  vne  vifion?  Car  ccfte  i'cience  ue 
peut  eftre  que  l'homme  ne  cognoilTe.   Maiç 
fainél  lehan  adioufte  ,  qu'il  n'apparoift  point 
encores.  Et  comment  ?  Voire  l'clon  Phomme, 
&  félon  toute  raifon  charnelle.  Il  faut  donc 
que  cefte  l'cience-ci  fo  it  côicinte  auec  la  foy. 
Or  lafoy  eft  vneviftondes  chofes  inuifiblcs, 
&  vne  fubftance  des  chofes  lointaines, comme 
l'Apoftre  en  parle  en  l'onzième  de  l'Epiftre 
aux  Hetvrieux.  Il  femble  bien  de  prime  face 
qu'il  y  ait  ici  contrariété. Cornent  ?  Vifîon  de 
ce  qui  ne  fe  voit  point?  Mais  ce  qui  Icrable  e- 
ftre  impofsible  à  Feiuendement  humain  &  à- 
l'ordre  de  nature,  eft  pofjibie  quand  il  elî 
queftion  du  Royaume  des  cieux.  Il  eft  dit  que  lA'^4-4 
ail  n'a  point  veu,&  l'aureille  n'a  point  ouy,(S: 
n'eft  point  monie  aii  cofur  Je  l'homme  ce  que 
Dieu  a  prépare  .\  ceux  qui  lanncnp.  Ainli  dôc 
Dieu  en  foy  eil  inuiiîble,&:  en  fa  maieilc  &ca 
fon  elTence  :  les  biens  aufqutls  nous  fomr.)es- 
conuicZji'ont  incomprehi:  ciibles  à  noftre  fens 
naturel:  &  tant  y  a  que  Dieu  par  le  miroir  île 
fon  Eu.ingile  ,nous  fait  contempler  ce  qui  ne 
fe  peut  voir  par  raifon,  ne  par  intelligence  de' 
l'homme.   Voila  comme  la  foy  til  vne  viiîoa 
des  chofes  qui  ne  fe  peuuét  veoir. Et  puis  c'eft;- 
vne  fi/brtancedes<hofes  lointaines.  Commet 
m'appuyeray-ie  iur  ce  q  eft  eilfjngnc  de  moy? 
Comment  me  feray-ie  vn  fondement  pour  ba 
fttr,  &  pour  reîîiter  à  toutes  les  tentations  du- 
monde?Or  regardons  quellediftanceil  y  a  du 
ciel  à  la  terre. II  lemble  donc  que  nousdeuons 
cftrecomme  rofeaux  branlans ,  &  qu'il  n'y  ait 
nulle  feiTiieté.  Or  tant  y  a  que  Dieu  veut  que 
nous  pofledios  fon  Royaume  par  el'poir:  com: 
niedeiia  nous  auons  allégué  du  premier  cha- 
pitredes  Ephefiés,  que  nous  fommcs  af  is  aux 
lieux  celeftesjd'autant  que  lefus  Chnft.qui  eft 
noftre  chef,en  a  piins  pofleAion  pour  tout  le 
corps  de  fon  Eglilc.En  voila  donc  vne  fubftan' 
ceimais  tant  y  a  q  les  chofes  ne  iailTent  point 
d'eftre  eflÔgntes  :  corne  aui'si  l'Apoftre  du  cni 
l'Epiftre  àuxJHebrieux,  qu'il  nous  faut  £cher. 

R.  11.. 


5ifî 


SERMON    LU. 


nodrrCanelireanciel.C.ir  fi  ceux  qui  n.iiiigent 
Air  la  mer, quand  ils  iettét  leur  anchre  au  pro 
fond,  ticnent  bon  parnai  les  vagues  &  les  tem 
pertes ,  n^âurons-nous  point  plus  de  fermeté 
quand  l'anchre  de  noftre  foy  fera  fichce  en 
DicuîCombien  donc  que  nous  l'oyons  eflon- 
gnez  de  la  gloire  des  cicux  ,  iî  ert-ce  neaiit- 
jnoins  que  nousnc  laiflcrons  pas  d'enauoir 
vne  bône  lublhice  pour  y  eftre  appuyez,  quâd 
Ja  parole  de  Dieu  aura  l'on  prix  &  l'on  autho- 
rité  cerne  elle  doit  cnuers  nous.  Auili  main- 
tenant nous  voyons  en  lomme  côme  nul  hom 
me  ne  peut  voir  Dieu:car  cepedant  que  nous 
ïonuc;  Tons  au  inonde  ,  ileft  certain  que  nos 
ftnj  ne  paruiendront  point  lî  haut  que  de  cô 
templer  Teffcncc  de  Dieu  qui  cft  du  tout  inui 
fvAs.  Il  haut  donc  renécer  à  tout  ce  qui  eftde 
rhomnie  &  de  la  chair ,  corne  il  ei\  dit  en  vn 
autre  pallàge,  que  la  ch.iir  &  le  fang  ne  pofFe 
j.Cor.  II.  deront  point  le  royaume  de  Dieu.Or  cepcn- 
jo.  dant  Dieu  ne  laiffe  pas  toutesfois  de  l'e  mani- 

fefter  à  nous  en  quelque  forte, voire  Se  trouue 
la  vnmoyen qui  nous  eftvtile  ,  c'eftquepar 
fon  Eu.ïg'.le  il  nous  prefente  vne  image  en  la 
quelle  nous  le  pouuons  contempler  :  comme 
en  lefus  Chrift  nous  auôs  toute  plénitude  de 
bien, nous  auons  &  la  iuftice  de  Dieu,&  ù  ver 
tu,&  fa  fagefle,  &  fa  gloire,  &  tout  ce  qu'il  y 
a  ,  corne  aufsi  fon  eflc-nce  y  eft  en  perfeftion. 
Quand  donc  lefus  Chriit  nous  eft  aufi  lèue 
lé, voila  Dieu  qui  fe  monftre  ànousimais  ce- 
pendant li  faui-il  que  nous  donnions  lieu  à  la 
foy  &  k  Tefperance  ,  &:  que  nous  attendions 
que  les  chofes  qui  nous  font  auiourd'huy  niô 
Jlrecs  comme  en  vn  rwVoir  &  en  obfcurité, 
nous  foy ent  reuelees  :  (  ainfi  que  fainft  Paul 
en  parle  au  73.  de  la  première  aux  Corinth.) 
&  que  nous  facions  ccft  honneur  à  noftre  Sei 
gneur  Icfiis  Cluift  d'auoir  patience,  (comme 
il  a  efté  déclaré  ceniatin)!ufques  à  ce  qu'il  ap 
YaroilTe  pour  accomplir  les  chofes  qui  font 
encores  comme  en  branle.  Il  eft  vray  quela 
vie  nous  a  efté  acquife  par  fa  mort  Se  rcfurre 
ftion  ,  mais  le  huift  de  la  iouilTànce  n'eft  pis 
encores  venu  iufjues  j  nous.  Cheminons  doc 
en  cfpoir,  &  cepedant  ne  lailTons  pas  de  nous 
afTeurerdes  chofes  que  nous  ne  omprenons 
point,  8c  que  nous  ne  foyons  pointabrutis  a- 
uec  les  mondains  &:  les  incrédules  qui  diront, 
U  n'crt  qued*eftrc:&:  regardent  ce  dequoy  ils 
peuuent  cftre  faills. Voila  comme  parlét  ceux 
qui  n'ont  iamais  fceu  que  valoit  la  bonté  de 
Dieu  &  Ci  vérité. Or  il  ne  faut  point  que  nous 
en  foyons  ainlûmai .  cognoilTocs  que  ccft  E- 
ftre  du  monde, n'ift  rien, que  cela  s'cfuanouit 
tantoft.cognoi/Tons  que  tout  ce  que  les  hom- 
mes ciiideut  poircderen  ce  mode,  n'eft  qu'v- 
ne figure  qui  les  déçoit  ,  cScfjnt  toutesbahis 
quand  ils  te  voyent  vuides  &dcl"nutz  de  tout 
ce  qu'ils  pcnfoyent  auoir  :  comme  celuy  qui 
'X  ai\ra  fongé  qu':!  eft  Roy  ,  &  qu'il  eftenvn 
'**)  grand  banquet ,  s'il  s''cf  leille,  il  trouue  qu'il 
•^cft  tout  afFainéjil le  trouue  vn  poarc  ocliAie. 


) 


Ainfi  donc  fçachons  qu'il  nous  faut  cheminer 
par  ces  chofes  baffes  fans  nous  y  amufcr  .  £t 
cependâtiCombien  qn'auiourd'huy  Dieu  pour 
efprouuer  noftre  foy  ,  &  l'honneur  que  nous 
luy  portons  ,  nous  tiene  comme  priuez  &  de 
foy  &:  de  fes  richeffes,&:  de  tous  fcs  biens  fpi- 
rituels, que  nous  nelaifsipns  pas  toutesfois  de 
les  pi ifer  beaucoup  plus  que  ce  qui  fe  voit  en 
ce  monde, &  dont  nous  auons  l'vfage  prefcnt: 
car  ccit  vlage-la  pafle  ,  mais  nous  attendons 
de  iouir  des  biens  de  Dieu  qui  font  perma- 
nens,  voire&  de  le  pofTeder  luy  qui  eft  Sei- 
gneur de  nous.Et  pour  conclufion  faind  Paul 
adioufte,  Qk?  c'efl  en  luy  qti'tfl  gloire  &  "»- 
pire  éternel. Ll  cft  viay  que  ce  titre  tend  ii  ma- 
gnifier Dieu,  afin  que  no'  luy  facions  hômage 
&grans  1.^  petis:mais  cepedant  fainft  Paulauf- 
lî  regarde  plus  loin,  c'eft  de  nous  hure  aimer 
ce  royaume  de  Dieu  ,  &  aufsi  que  nous  le  pri- 
fions  tellement, que  tout  ce  qui  eft  du  monde, 
ne  nous  foit  rien  en  comparaifon .  Vray  eft 
qu'il  nous  faut  honorer  ceux  aufquels  Dieu  a 
donné  la  puiflance  en  ce  mode.  U  faut  que  les 
peuples  foyent  fuiets  àleurs  Princes  ficalciirs 
Magiftrats,voire  ^qu'ils  les  honorent. 11  tiut 
que  les  feraiteurs  obeiflent  à  leurs  maifties, 
les  enfans  à  leurs  percs  :  nousdeuous  l'hon- 
neur mutuel  aufsi  chacunà  l'on  prochain, cou» 
me  l'Efcriture  le  porte, Mais  cela  n'empefche 
point  que  Dieu  feul  ne  fou  honore  .  Et  pour- 
quoyî  Car  tout  l'hôneur  que  nous  faifonsaiir 
hommes,  fe  doit  rapporter  à  luy,  autrement  il 
n'eft  pas  bien  règle:  comme  les  poures  incré- 
dules,quand  ils  honorent  leurs  Princes, ils  laïf 
fcnt  Dieu  derrière ,  ils  le  renoncent,  &  fe  rc- 
cullent  de  luy:Ho,voila,  difent-ils,  il  fautvi- 
urecome  ceux  qui  ont  domination  fur  nous. 
Et  cependant  Dieu  fera  là  quitté .  Qjund  vn 
maiftre  voudra  contraindre  Ign  feruiteur  à 
mal ,  ou  bien  que  le  leruiteur  aufsi  de  fon  bon 
gré  nedrmande  iînon  de  complaire ,  queFvn 
fera  macL|uereau,  l'autre  fera  vn  larrgn,  l'au- 
tre fera  vn  yurongne  &  vn  desbauché:  que  ks 
enfans  auAi  refiembleront  à  leurs  pères, ils  ne 
vaudront  rien  :  voila  vn  honneur  p^erue.s  8c 
maudit,  voila  vne  confuiion  qui  peruci  tit  l'or 
dre  de  nature.  Mais  quand  nous  honorerons 
ceux  qui  font  conftituez  au  nom  de  Dieu  ,  & 
que  cependant  Dieu  retiendra  fon  degré  fou- 
uerain,  &  que  ceux  qui  dominent, ne  demande 
ront  iînon  de  feruir  à  Dieu,&'  d'inciter  les  au- 
tres à  ce  faire, V  oila  comme  Dieu  iera  feul  ho 
noré.  Et  pourquoy  ;  Car  tout  l'honneur  que 
nous  rendons  chacun  en  fon  endroit  à  ceux 
qui  nous  font  égaux  ou  fuperieurs,  cft  pour 
magnifier  l'honneur  de  Dicu,.àce  qu'il  ait  touf 
iours  la  prééminence. Et  voila  aufsi  pourquoy 
il  exerce  fon  empire  fui  nous  :  car  les  loix  & 
polices,  &  chofes  femblabics  font  pour  nous 
entretenir  en  crainte  S:  en  f  liettion.Et  au  rc- 
fte.quand  S.Paul  dit,  Qjte  l  honniur  ^  tmpirj? 
efl  perpétuel  en  !  iiK  fiUl  c'eft  afin  que  nou   ap 
prenions  de  tellement  paiier  par  cmôdc.que 

rien 


SVR  LA    ï.    A  TIMDTH. 


3'7 


tien  ne  nous  eftonne: quand  nou';  verrons  tou 
tes  les  puiflaiices.lesprincipaucez.les  royau- 
mes,les  raoiurchies,  que  nous  verrons  toutes 
choies  femblables  s'armer  contre  Dieu,  qu'il 

•Icmble  que  nous  dcuons  élire  engloutis  arn 
^raia  de  Tel, que  les  dangers  nous  enuironnét 
de  tous  coftez,  que  nous  ne  loyons  point  ef- 
frayez pour  cela.  Et  poiirquoy?  Il  nous  faut 
furmonter  toutes  telles  tentations ,  d'autant 
que  Dieu  ne  nous  appelle  point  à  vn  royau- 
me temporel,  mais  à  ce  royaume  qui  durera 
fans  fin.quad  tous  les  royaumes  &  empires  de 
ce  monde  feront  abolis, corne  il  a  efté  traitté. 
O  R  nous-nous  prollernerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  coçnoifTancede 


nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  f^ice  fentir 
pour  nous  humilier  deuaiu  fon  nigement  ,  & 
luy  en  demander  pardon:&  qu'il  nous  refor- 
me tellement ,  que  nous  ne  demandions  iîiion 
de  proiiter  en  l'efperace  de  ce  Royaume  ce- 
lell:e,&  y  profiter  de  plus  en  plus.Scnous  de- 
fpouillerde  tous  les  empefchemens  qui  nous 
furuiendront  en  cemonde  .  Et  d'autant  que 
nous  fommes  débiles, &  que  nous  ne  pouucns 
point  nous  auancer  d'vn  pas  pour  aller  à  luy, 
qu'il  nous  y  attire  par  fon  S.Ei'prit,nous  (np 
portant  touliours  en  nos  foiblefles,  iufques  à 
ce  qu'il  les  ait  corrigées  du  tout.  Que  non 
feulement  il  nous  face  cefte  grâce,  mais  aufsi 
à  tous  peuples  &  nations  delà  terre,&c. 


HVITIEME     SERMON     SVR    LE 

SIXIEME     CHAPITRE. 

17  Commande  a  ceux  qui  font  riches  en  ce  monde, qu  ils  ne  foy- 
cnt  point  hautains  en  courage, c^  quih  ne  mettent  point  leur  efperan- 
ce  en  l  incertitude  des  richcjjcs ,  mais  en  Dieu  Viuant  j  qui  nous  baille 
toutes  chojcs  abondamment  pour  en  "vfèr' 

■    j8      QhjIs  facent  bien,  qù  ils foyeiit  faciles  a  dijïribueriCommu- 
nicans  volontiers.. 

19  Se  faifxns  thrcfor  d\n  bon  fondement  pour  îaduenir  :  afn 
quils  obtienent  la  yie  éternelle. 

o  V  s  voyonscôbitn  il  eft  dif-  monde,  mais  il  veut  que  les  riches  foycnt  ex- 

Êîh^tS^Q  fic'le  .  quand  les  hommes  ont  hortez  de  ceLi.Pourquoy^Car  ils  tp  ont  me- 

xll'!^\ril^  quelque  obicû  pour  les  retenir  Iticr  ,  comme  dcfia  nous  auons  dit.  Vfay  cfl 

au  monde,  qu':lç  aillent  droit  à  quidon  les  reprime  ainfî,q  ce  leur  eftvne  cho 

Dieu,  &  quand  ils  ont  occafion  fe  falcheiife,car  il  leur  femble  bien  qu'on  les" 

de  s'arrefter  ici  ,  qu'ils  ne  ten-  doit  efpargner  plus  que  tout  .emoiide:d'au. 

dent  ni  afpirent  au  ciel. Au  c5craiic,ii  ne  leur  tant  qu'ihYe  mirent  en  leurs  plumes  comme 

faj.it  quaii  rien  pour  s'eleuer  ,  &  cftrc  enflez  des  paons, ih  voudroyét  que  chacun  s'abba.-f- 

d'orgueil,  tcllcip.ét  qu'ils  niefpnfent  l)icu,&  fafc  fous  eux.qu'on  n'ofe pas  .!  grad'  peineles 

ne  tienent  conte  de  l'a  parole  ,  &  ne  fçauent  regarder  entre  deus  yeux.  Voila  quelle  cft 

pi'  que  c'ell  de  luy  obeir.Et  cela  eft  par  trop  Ta":  rogance  de  ceux  qui  ont  des  bi^n;.  Mais 

commun  aux  riches, d'auclt  qu'il  leur  fcmble  fainft  Paulaucontrairc,pourabbatrc'ctft  oa- 

qu'ils  ne  lent  plus  du  rang  vulgaire  ,  &  qu'ils  gueil,  dit  que  ceux  qui  font  riches,  n'ont  que 

ont  quelque  condition  à  part.  Là  delTus  ils  fe  vne  vaine  apparence  ,  &  vn  luftre  qui  palTc  & 

font  à  croire  merueilles,5:  reiettït  tout  loug,  s'efuanouit  tantoft, qu'il  ne  faut  pas  pourtant 

&  leur  iemble  que  c'eft  honte  à  eux  de  s'aflli-  qu'ils  prefument  à  caufc  qu'ils  Cjm  abondaus 

iettir  m  à  Dieu,ni  à  fa  dotlnne.Et  puis  que  ce  en  or  &  en  argent  ,  &  qu'ils  ont  de  grandes 

Tice  règne  en  eux,  ils  ont  befoin  de  corre-  poflefsions.car  ils  en  feront  tantoftdclpouil- 

ftion  telle  que  faina  Paul  la  donne  ici. Car  il  lez. Et  qu'ainlî  foit.quelle  ell  la  vie  de .  hom- 

ne  parle  point  d'vneexhortatiô  qui  foitgene  mes  en  foy  lînon  vnecourfe  bien  voiaçcPOr 

raie  pour  tous,  mais  qui  notamment  douVcr-  les  biens  n'en  font  qu'vne  accelîoire.  Fant-il 

mr  de  médecine  à  ceux  qui  prefument  fjus  donc  qu'ils  donnent  telle  occaiîon  d'nrt;iicil 

ombre  de  leurs  richeires,&  fe  veulent  eleucr,  à  ceux  qui  les  poffcdétPCar  quand  faii-tVpaul 

&  ne  tiencnt  quafi  plus  conte  du  royaume  les  a  admonellez  qu'ils  ne  font  riches  que 

deDieu,eftan' par  tropaddonnezauxchûfes  pour  vn  moment ,  &  que  cela  fe  pailcra  tan- 

tranrttoirev.  Saiiiâ  Pauldonc  ne  dit  point  iCi  toft.tl  met  aufsi,  qu'ils  fe  rendent  pctis:  Com- 

a  Timothee,  qu'il  commande'  fins  evception  m  nde  /««-.dit-il,  ou  cnicin.ou  dcuôcc.Et  en 

a  tous  hommes  detficminer  enhmirlité,  &  cela  voyons-nous  cinmc  fc  prattique  ce  que  i.C.-r. 

de  ne  fe  point" fieta^'bichs  caduques  de  c6  ildit  en  vn  autre  paflàge.quei'EMangilc  doit  10. J. 

R.iu. 


3.S 


SERMON     LUI. 


X 


abbaiffer  toute haiitelTe  qui  s'eleiie  contre  la  brecjue  Dieu  lésa  mis  en  quelque  preeminen 

maitfté  de  noilrc  Sergoeur  Icfiis  Chrift.  Vo-  ce, ou  qu'il  leur  a  élargi  des  biens  plus  ample 

yons-nous  donc  les  hommes  qui  le  veulét  fai  ment  que  non  pas  à  beaucoup  d'autres.  Or  ve 

re  par  trop  val  jir,  d'autan:  qu'il';  {ont  en  di-  nons  maintenant  i  la  iiibftance  de  ce  qui  eft 

gnité  &  honneur  ,  &  d'autant  qu'ils  font  ri-  ici  contenu.  Sainfl  Paul  en  premier  lieu  veut  ' 

ches?n  tant  que  cela  foit  rabbaillé&niis  bas,  que  les  riches  ioyétaduertis  de  n'eflre  point 

car  l'Euangile  autrement  n'auroit  point  fon  hautains  en  courageicar  les  nchefles  volon- 

cours.  Vùila  en  quoy  Icfus  Chrift  veut  eftre  tiers  apportent  orgueil, &  cela  viét  par  la  per 

magnifie,  voila  côme  il  drefle  Ion  iîege  royal  uerCté  des  hommes. Car  nous  fçauons  que  ce 

au  milieu  de  nous  ,  c'eft  quand  toute  hautefle  qui  procède  de  Dieu.ne  nous  doit  point  cor- 

n'eft  plus  rien  eftimee,  &  que  les  hommes  ne  rompre, côme  aufsi  il  ne  fait  pasdefoy  :  mais 

prétendent  point  de  s'eleuer  contre  luy  pour  il  y  a  vne  telle  malice  en  nous,  que  nous  con 

reietter  fon  iou^,mais  que  grans  &  petis  l'a-  uertiflons  à  mal  tous  les  biens  que  Dieu  nous 

dorent ,  &  luy  font  hommage.  Et  amfi  nous  diftribue.  Au  refle,nous  fçauons  que  l'orgueil 

voyons  maintenant  en  premier  lieu  ,  comme  vient  de  celle  lolle  imagination  en  laquelle 

faind  Paul  prépare  ceux  qui  autrement  fe-  les  hommes  s'enyurent  &  s'esblouiflent.cui- 

royent  préoccupez  d'arrogâce, pour  ne  point  dans  élire  demi-dieux  s'ils  ont  des  biens.  Et 

receuoir  la  doftrine  qu'il  leur  propofe.   Car  pourtât  fainifl  Paul  vient  iufqu'à  la  fource.di 

quand  il  dit  que  les  richeffes  ne  font  qu'vne  f^nt  tQ^ilsfi  garde,  d'efperer  enPincfrtituJe 

petite  fumée, c'efl  afin  que  les  hommes  ne  s'y  Jes  ricl>e{fes.i-i  nôihien  donc  que  fainft  Paul, 

abufent^>lus,comme  Us  ontaccouftumé,quâd  pour  corriger  l'orgueil  dot  les  hommes  font 

ils  cuidêt  aflezauoir  pour  eltre  exemptez  du  enflcz,quandik  ont  leur  bien  en  trop  grande 

rang  cominun,&  pour  efbre  pnuilegez,que  ce  admiration.dit  qu'il  ne  faut  point  qu'ils  s'at- 

la  n'eft  qu'vne  figure  quis'efuanouit  tantoft,  tachent  l.r car  cefte  efpeiance  que  nousmet- 

&  qui  n'a  nulle  durée. Et  qu'ainfi  foit,  qu'ell-  tons  aux  biens  du  monde  eft  caufc  de  nous 

ce  que  du  monde^Voiladonc  vn  bon  prépara  faire  enorgueillir  ,  que  nous  mettons  Dieu  en 

tif,afÎQ  que  les  riches ,  &  les  gés  honorables,  oubli,  que  no'  mefpnfons  nos  prochains, que 

|{  ceux  quHont  en  crédit  &  honneur,  ne  fe  re  nous  cuidons  eftre  dci  idoles.   Etainlinous 

tirent  point  de  l'obeiffance  de  lefus  Chrift,  voyons  comme  il  nous  faut  conioindre  ces 

&  qii'ils  ne  cuident  point  auoir  priuilegc  par  deux  mots.  Pour  le  troifieme  faimil  Paul  ad- 

deilus  les  autres  pour  eftre  exemptez,   mais  ioude,  Q^t  les  riches  doiiie?it  tpre  admonefteK 

qu'ils  reçoiuent  le  ioug  que  Dieu  impofe  à  d'effurer  a-.  Dit»  ■viu.tnt.  lojuel tiens  dcnite  toi* 

tous  les  iienv.Et  cependant  notons  aufii,d'au  tes  choffsliheralcmintàfufJî/-"tc  e.  Ici  S.  Paul 

tant  plus  que  les  hommes  fout  eleuez  ,  qu'ils  nous  monftre  comme  nous  pourrons  deftour- 

ont  be  foin  qu'on  corrige  tout  orgueil  &pre-  nernoftre  efperance  des  biens  caduques  de 

fomption  en  eux  :  car  il  n^y  a  rien  plusaifé  ce  m5de,c'eft  afçauoir  en  la  roett.it  en  Dieu, 

que  de  nous  liauffer, quand  il  y  a  quelque  pe-  Car  nousauons  les  efprits  remuans,  tellemét 

tite  occafion.  Et  qu'ainlî  foit.nous  voyôs  fou  que  iamais  nous  ne  ferons  à  repos  (mon  que 

uent  les  hommes  côbatre  contre  nature:com  nous  ayons  trouué  vn  certain  appuy.  Il  y  au- 

bien  qu'ils  foyent  poures  maloftrus,  qu'ils  ne  ra  donc  toufiours  de  l'inquiétude  &  trouble 

ayent  nipuiflance,nicredit,nihonneur,ni  pa  pour  nous  agiter  iufq-ues  à  tant  que  nous  ay- 

rcntage,ne  rien  qui  foit,  fi  ne  laiflent-ils  pas  ons  trouué  où  il  nous  laut  auoir  contente- 

d'eftre  enflez  comme  crapaux,&  creuét  d'or-  ment.  Et  ainfî  iufqucs  à  ce  que  nous  ayons  ap 

gueil.  Que  fera-ce  donc  quand  il  y  aura  quel  prins  de  regarder  à   Dieu  pour  nous    tenir 

que  matière  de  s'enorgueillir?  Et  ainfi,   que  pleinement  .î  luy,  il  faudra  que  nos  efpriti 

ceux  atTfqiiels  Dieu  a  donne  des  biens  en  a-  foyent  toufiours  en  branle,  que  nous  ayons 

bondance,&qui  font  eleuez  en  degré  d'hon-  des  mouuemens  pour  nous  tranfportcr  çà  & 

neur ,  fçachent  qu'ils  ont  plus  grand  meftier  là. On  aura  beau  nous  dire,  Qujeft-ce  que  des 

d'eftreaduertisde  leurdeuoir  .d'eftre  humi-  biens  de  ce  monde?  nous  voyons  qu'il  n'y* 

Jiez  &  rangez  en  obeiflànce  ,  que  n'ont  pas  nulle  aiTeurance.  Qu.'eft-cedes  honiieurs?ce 

ceux  qui  fontdebalTe  &  petite  condition  :  &  n'tft  q  himee.Q_u'elt-cemefme;decefte  vie?: 

qu'ils  oublient  toutes  ces  folles  fantafies  que  ce  n'eil  qu'vn  fonge  :  il  ne  faut  q  tourner  la. 

conçoiuent  beaucoup  de  gens,  Voirc?&:  corn  main,  &  nous  voila  deuenus  poudre  &  cèdre» 

ment  s'attache-on  à  moy?faut-il  que  ie  foye  On  aura  beau  nous  remoiiftrer  ces  chofes,, 

ainfi  traitté?  Tous  ceux  qui  y  proccderôt  am  tout  cela  ne  nous  feruira  de  rien  ,  iufques  à 

fi,  ne  gagneront  rien,  car  ils  regimbent  con-  ce  que  Dieu  nous  foit  prcfenté, qu'on  nous  aie 

tre  l'tfperon.  Mais  fi  ccux-la  font  ainfi  des  monftré  que  c'eft  .\  luy  qu'il  nous  faut  adhe- 

beftes  fiuuages  &  rcuefches,  que  tous  fidèles  rer,  &  no'  y  tenir  du  tout. Et  voila  pourquoy 

&  enfans  de  Dieu  apprcnctceftc  le^on, c'eft  tou-tes  les  belles  remonftrances  qu'ont  lait 

de  peur  qu'ils  ne  s'cleuent  par  trop, qu'il  leur  les  Ph:lofophes,  n'ont  rien  valu.  Car  ils  ont 

eft  expédient  &  vtile  d'cftre  reprimez,  &  que  affcz  parlé  de  la  fragilité  de  ctfte  vie  terre- 


on  les  tient  en  bride  courte,  afin  qu'ils  ne  {i- 
eent  point  des  cheuaux  efchappcz ,  fous  oin- 


\ 


ftre,  &dcrertat  incertain  des  hommes  :  ils 
ojjt monftré  <jue  ce  font  chofss  fruftratoires 


SVR     LA    I.     A    TIMOTH. 


1^9 


que  de  cuideranoimofVrc  félicité  en  nos  pof 
(efsions.en  nos  feigneuries,ni  en  rien  qui  foit: 
ils  ont  monftré  que  c'eft  vn  abus  que  de  cut- 
der  auoir  rien  ici  bas  en  quoy  ils  le  puiflent 
gloritîer.  Ces  grans  Philofophes  qui  iamais  n' 
aucyent  rien  cognu  de  Dieu,  eftans  conuain- 
cus  par  eTperience.ont  affcz  traitté  &  difputé 
de  ces  chofes  :  mais  cependant  ils  n'ont  gue- 
res  profité, d'autant  qu'ils  n'ont  point  cerché 
le  vray  remède  à  cela,  c'eft  afçauoir ,  de  fon- 
der les  hommes  en  Dieu,  &  leur  déclarer  que 
c'eft  luy  feul  duquel  il  nous  faut  contenter: 
&iufqu'à  tant  qu'on  foit  là  venu,  toulîourson 
fera  en  beaucoup  de  perplexitez,  comme  i'ay 
défia  dit.  Notons  bien  lonc  l'ordre  que  fainift 
Paul  a  tenu  ici:  car  il  ne  parie  point  idemie 
bouche, il  nous  baille  vne  doftrine  pleine,  &  à 
laquelle  il  n'y  a  que  redire .  Mais  afin  d'en 
mieux  fairenoftre  profit, commençons  parce 
bout,  c'eft  qu'il  nou;  fiut  efperer  au  Dieu  vi- 
uant,  lequel  nous  donne  richement  toutes  cho 
ki  à  fufrifance  ,  ou  pour  en  vfer  .  Saind  Paul 
parlant  ainfi  ,  n'entend  pas  qu'il  nous  faille 
efperer  en  Dieu  Amplement,  pource  que  c'eft 
de  luy  que  nous  auons  la  promefle  de  noftre 
Ûlut  fpirituel  :  &  c'eft  aufsi  à  cefte  condition 
qu'il  s'eft  fait  noftre  Père  ,  &nous  achoifis 
pour  fes  enfan; ,  afin  que  nous  foyons  héri- 
tiers de  la  vie  celefte  :  fainft  Paul  n'entend 
pas  (implement  cela,  mais  il  comprend  cefte 
vie  tranlîtoire.  Comme  s'il  difoit,  Comme 
nous  deuons  efperer  en  Dieu  pourparucnir 
au  Royaume  des  cieux  ,  &  qu'il  faut  que  nous 
foyons  fondez  &  appuyez  fur  fa  pure  grâce 
&  mifericorde,d'auiat  qu'il  nous  a  appelez  au 
nom  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,pour 
pofleder  le  falut  qu'il  nous  a  promis:  aufsi  ce- 
pendant que  nous  viuons  en  ce  monde  ,  ce- 
pendant que  nous  auons  befoin  de  boire  &  de 
manger,  il  nous  faut  auoir  cefte  refolution  en 
nous ,  que  c'eft  l'office  propre  de  Dieu  de 
nous  fubftâter,&:nous  dôner  tout  ce  qu'il  nous 
faut.  Et  ceci  eil  commun  tant  aux  riches- que 
aux  poures .  Car  lefus  Chrift  n'a  point  laifle 
vne  faconde  prier  feulement  pour  les  po- 
ures, mais  en  gênerai  il  a  donné  vne  règle  que 
il  neus'faut  fuyure  :  car  là  il  nous  a  dit  que 
nous  deuons  demander  noftre  pain  ordinaire 
de  iouren  iour.  Par  cela  nous  proteftons  que 
l'office  de  Dieu  eft  celuy  qui  a  défia  efte  trait 
lé,  c'eft  alçauoir,  de  nous  fubftanter  ,  comme 
vn  père  appaftelle  fes  enfans:  ainfi  Dieu  s'eft 
referué  cela,  qu'il  veut  que  nous  demandions 
de  fa  main  noftre  nourriture.  Or  fainft  Paul 
dit ,  Q»'/7»3«f  donne  rich.ment  toutes  chofes: 
non  pas  que  nous  ayons  tous  nos  fouhaits ,  & 
que  Dieu  nous  foule.  Car  nous  fçauons  que 
nos  appétits  font  desbordez  :  &  fi  Dieu  nous 
donnoit  ce  que  nous  demandons  ,  ce  feroit 
pour  nous  eftrangier  ,  comme  nous  fommes 
des  gouffres  ,  &  n'cft  pas  queftion  feulement 
de  nous  contenter  de  mefure  &  de  fobrieté, 
mais  il  n'y  a  cduy  qui  ne  ie  vouluft  plonge^ 


aux  délices  de  ce  monde  ,  pour  gourmander 
en  toute  intempérance  :  &  mefmes  nous  ne 
voudrions  pas  feulement  gourmander  en  tou- 
te intempérance',  mais  auoir  &  amalTer  dee 
biens  pour  nous  creuer  les  yeux,  &  nous  e- 
ftouffer  en  noftre  abondance  .  Voila  que  c'tft 
des  hommes  félon  leur  nature.  Dieu  donc  ne 
nous  donne  pas  richement  félon  noftre  de- 
fir  tout  ce  qu  il  nous  faut  :  mais  fi  eft-ce  qu'il 
n'eft  pas  chiche  qu'il  ne  nourrifle  fes  enfanc 
comme  41  cognoift  qu'il  nous  eft  propre. 
Nous  voyons  défia  la  libéralité  de  Dieu,  qu'il 
ne  défaut  point  au  pouremonde,  maisqu'W 
fubftante  ceux  qui  fe  remettent  àluy,&  quil* 
inuoquent .  Et  s'il  a  le  foin  de  tous,  (  comme 
nous  l'auons  veu  par  ci  deuant  )  mcfprifera 
il  fes  fidèles  ?  les  mettra-il  en  oubli  ?  Et  afin 
que  nous  ne  prenions  point  ce  mot  R/Vfc»- 
mf»^  ,  pour  dire  que  Dieu  nous  doyue  ietter 
à  l'abandon  tout  ce  que  noftre  courage  ap- 
pelé ,  fainâ  Paul  met ,  Vfur  nojlre  rfige  :  ou, 
à  fuffifance  :  comme  s'il  difoit,  que  Dieu  re- 
ftraint  fes  largeflès  &■  fa  libéralité  ,  comme 
il  voit  qu'il  nous  eft  meftier  d'cftre  fecourus 
de  luy  ,  qu'il  diftribue  à  chacun  ce  qu'il  co- 
gnoift luy  eftre  bon  &  propre .  Apprenons 
donc  de  nous  contenter  de  cela  .  Au  refte, 
voici  en  fomme  la  doûrine  qu'il  nous  faut 
obferuer,  c'eft  que  non  feulement  pour  la  vie 
celelle  &.  pour  le  falut  de  nos  amesnous  efpe- 
rions  en  Dieu,  mais  que  pour  cefte  vie  cadu-- 
que  ,  &  pour  tous  fes  accefToires  nous  fça- 
chions  que  quand  Dieu  nous  amis  au  mon- 
de ,  il  s'eft  referué  ceft  officed'eftre  perede 
famille  ,  Scd'auoirle  foin  de  nous  comme  de 
fes  créatures ,  que  c'eft  de  kiy  qu'il  nous  faut 
attendre  tout  bien,  c'eft  à  luy  où  il  nous  faut 
auoir  tout  noftre  recours  .  Or  fi  nous  prions 
Dieu  en  vérité,  &  non  point  en  feintife  ,  il' 
faut  qu&^noftreafleuraace  foit  fichée  du  tout 
en  luy,  ôî  que  nous  prenions  cefte  refolution- 
la.q'ic  nous  fommes  bien  perfuaJcz  que  Dieu 
eft  celuy  qui  nous  fubftante  de  iour  en  iour. 
Alors  nous  aurons  vn  bon  moyen  de  retirer 
noftre  efperanne  des  chofes  caduques  de  ce 
monde,  &  de  toutes  les  corruptions  aufquel- 
les  les  hommes  s'abufent  ,&s'enyurent  con- 
tinuellement. Car  qui  eft  caufe  que  les  riches 
s'enorgueilIifTent  (  comme  délia  nous  auons 
déclaré)  finon  pource  qu'il  leur  femblc  qu'ils 
n'ont  point  de  befoin  de  Dieu  quand  ils  ont 
belle  prouifiô,  qu'ils  ont  leurs  greniers  pleins 
&  leurs  caues  ?  Combien  qu'ils  ne  defpitent 
point  Dieu  de  bouche,  fi  eli-ce  qu'ils  fonf  là 
corne  ftiipides:car  cependant  ils  ne  regardent 
pas  que  tout  cela  leur  peut  eftre  raui  en  vne 
minute  de  temps.  Et  puis,  combien  que  Dieu 
leur  lailTe  la  polTefsion  de  leurs  biés  pour  quel 
que  temps,  qu'il  femocquera  ncantmoinsde 
leur  folie  en  les  retirant  de  ce  monde, qu'il  ne 
leur  permettra  point  d'en  vfer.Vn  homme 
pouria  auoir  aflez  de  quoy  boire  &  manger, 
&  cependant  il  faudraqu'il  en  foitpriué,  & 
'K.  ivii. 


310  SERMO 

pu'il  foit  l.\  comme  eftoiiffé  au  milieu  de  fes 
lirgefTes.Si  les  riches  cogiioilToyét  cela, il  eil 
cei  :ain  qu'ils  ne  penferoyent  point  tantà  ce- 
lle vit  caduque,  &  ne  Icroyent  point  fi  fuiets  à 
leurs  biens  pour  en  faire  des  idoles.  Ainfi  doc 
quand  nous  aurons  lecordécefte  leçon  ,  d'e- 
fptrer  au  Dieu  viuant,  &  luy  attribuer  l'hon- 
neur qui  luy  appartient ,  c'tfl:  afçauoir  que  c' 
eft  à  luy  denous  donner  (  cornme  nous  auons 
dit  )  tout  ce  qu'il  cognoift  nous  eflre 'propre 
pour  noflre  vfage.'Sc  à  fuffiûnce  :  alors  toute 
celle  vaine  efperance  de  laquelle  les  mon- 
dains &  les  incrédules  s'enyurent,  fera  corri- 
gée aifcment ,  que  nous  n'efpererons  plus  en 
Pincei  tirude  des  nchefle'..  C'ell  vn  mot  enco 
res  que  nous  auons  bien  à  noter  .  Car  fainft 
Paul  pouuoit  bien  dire  fimplemét, Qu'ils  n'e- 
fpercnt  point  en  leurs  richtllès:mais  :ldit,E« 
/'/Hffrf;fH(ff, lignifiant  que  les  biens  que  nous 
auons  en  main  fe  pourront  efuanouir  tantoft, 
«[u'ils  feront  tantoft  efcoulc'z  :  comme  aufsi 
nous  le  voyons.  Car  combien  que  les  riches 
facent  leur  conte  que  iamais  terre  ne  leur  fau 
dra:  toutesfois  nous  voyons  comme  Dieu  les 
eu  piiue  ,  &non  feulement  pour  leur  inflru- 
ôion,  mais  pour  les  côftituer  miroirs  &-  exem 
pies  ,  afin  que  les  autres  foyenr  enfeignez  à 
leurs  defpés,  de  ne  fe  fier  aux  biens  caduques. 
Sainû  Paul  nous  inonrtre  ici  quelle  beftife  c' 
eft  aux  homme  de  fe  fier  aux  richeires,cn  di- 
lant,(^-'''/j»f  fit  ils  efpiTtnt  au  '  ieu  liuaitt. 
Se  non  fias'  caufe  .  Car  fi  la  benedidion  de 
Dieu  eft  fur  nous,&  qu'il  nous  fou  fauorable, 
«ouspouuons  ertrc-aflfurez  que  rien  ne  nous 
peut  faïUir.que  la  grâce  qu'il  nous  a  promife, 
quand  il  a  déclaré  qu'il  nous  fubuiendra  en 
tout  &  par  tout,  eli:  fuffifante  pour  nous  con- 
tenter ,  que  nous  pouuons  piufer  de  cefte 
fontaine-la,  &  en  prendre  tous  les  iours,  fans 
craindre  qu'elle  nous  défaille. Mais  ffhous  ve 
Bons  puifer  en  nos  richeiîes ,  Si  que  nous  n'e- 
ftimions  rien  celle  beneiliftion  ,  comme  lî  elle 
BOUS  efioit  fuperflue  :  il  faudra  que  Dieu  nous 
face  fentir  par  expérience  que  les  richefTes  s' 
efcoulent ,  que  ce  n'eft  qu'vne  figure  qui  nous 
cfchappe,&  qui  s'efuanoirit  bien  tofl.Êt  ainfi, 
cependant  que  les  riches  de  ce  naonde  pofle- 
den:  les  biens  que  Dieu  leur  a  donnez  ,  &:  que 
ils  en  ioiiiflent ,  que  de  longue  main  ils  s'ac- 
couflument  à  cefte  doctrine  de  fainft  Paul ,  &c 
qu'ils  en  vfent  en  diùnt ,  Ceci  n'eft  rien,  tout 
ceci  eft  incertain,  gardons  de  nous  y  arrefter. 
Qjjand  ils  aurôt  bien  médité  cela,  alors  Dieu 
continuera  fabenedi6Hon  enuers  eux  ,  &  fera 
qu'ils  iouiront  de  ce  que  défia  il  leur  adonné. 
ÂUis  aucontiaire,  s'^ils  ne  penfent  i  l'jncerti- 
lude  dont  parle  fainft  Paul, il  faudra  qirils  en 
foyent  cnleigntz  .i  leurs  defpens  &  à  leur  con 
fuiion.Or  l'ay  de  fia  dit  que  quand  nous  ferons 
defpouiJlcz  de  celle  vaine  efperance,  voire  de 
celle  yurongne rie  qui  nous  aucugle  ,  quand 
nous  cuidons  auoir  noftre  félicité  aux  biens 
«duqucs  de  ce  monde  >  que  l'orgueil  quant  & 


\ 


N  L  î  I  r; 

quant  fera  abbatu.Et  ainfî d'autant  plus  effor- 
■  çons-nous  .î  cfperer  en  Dieu,  pour  retirer  no 
lire  cœur  des  richelîes  du  mode, afin  que  nous 
cheminion-:  en  modcllie  :  &  que  ceux  qri  font 
riches ,  ne  mefprifejit  point  leurs  prochains, 
qu'ils  ne  fe  mettent  point  en  oubli ,  qu'ils  ne 
fe  facent  rien  à  croire  d'eux  ,  comme  s'ils  e- 
floyentplus  dignes  que  les  autres  ,  mais  que 
plullofl  ils  cognoiffent  que  d'autant  plus  ils 
font  obligez  à  Dieu,  en  ce  qu'il  kur  a  élargi 
de  fes  biens  ,&  qu'il  s'ellmonftié  fi  libéral  en- 
uers eux. Se  cognoiflans  ainfi  tenus  à  Dfeu  ,  il 
eft  certain  qu'ils  ne  tafchcront  que  de  chemi- 
ner en  toute  mâfuetude  aucc  leurs  prochains, 
&'  fur  tout  ils  oe  feront  point  tranfportez  de 
fier- é,pour  oublier  le  Royaume  de  Dieu, pour 
oublier  laviefpirituellc  qui  leur  cil  tous  les 
iours  offerte  en  l'Euangile:  ils  ne  ferort  point 
tranfportez  de  pompes,  ne  de  vanitez,  ne  de 
chofes  femblables  .  Voila  donc  en  fomme  la 
doilrine  qui  nous  eft  ici  propofee  par  fainft 
Paul .  Or  le  principal  eft  qu'elle  foit  pratti- 
quf  e,  &  que  nous  commercions  par  cefte  efpe 
rance  que  nous  deunns  auo'r  en  Dieu  ,  &  que 
puis  après  nou.  fcachions  que  tous  ceux  qui  s^ 
attachent  aux  biens  de  la  terre, fe  trompent  à 
li'ur  "fcient ,  veu  au'il  n'y  a  rien  de  feime  ni 
de  longue  durée.  Efli  dtfîus  que  nous  appre- 
nions à  nou<  glcirifieren  ce  que  Dieu  nous  a 
appelf'Z  à  des  biens  plus  hauts  &•  plus  evcel- 
lens  que  ne  fjnt  pa  toutes  les  r  chcflrs  du 
monde, quand  il  nou'^  a  fait  fes  héritiers.  Qjie 
il  n'v  aitdùc  rien  qui  nous  cmpefche  que  nous 
ne  tédions  toufiours  àla  vie  celefle,&  que  ce- 
la ne  nous  creue  point  les  yeux.  Or  après  que 
fainél  Paul  a  remédié  aux  vices  que  nous  co- 
guoiiTîns  par  trop  communs  entre  les  hom- 
mes,il  adi.uflc  qnant  &  quant  ,  Que  les  riches 
Joyuent  iftre  exhortex.  de  f.iire  tlulii'n  :  &  Je 
dniintr-potintiirs,  0-  d'être  cammunicat'fs,  zy' 
difir  riches  enhofin's  iruiirts ,  Ces  trois  ten- 
dent quafi  à  vn,  c'eflafçauoir  que  les  gens  ri- 
ch'-s  ftcent  du  bien,  qu'ils  A-yent  communies 
tifs,&  qu'il'  donnent  volontiers .  Mais  tant  y 
a  que  ce  n'e/f  point  vn  langage  fuperflu.  Car 
quand  fainft  Paul  veut  qu'on  les  exhorte  de 
faire  du  bien,  c'efl  pour  fignificr  que  la  ma- 
tière leur  eft  donnée  de  Dieu. Car  ielon  qu'vit 
chacun  a  de  faculté,  Dieu  efproiiue  quelle  eft 
fon  affi  ftion  .  Celuy  qui  n'a  rien,pourra  eftre 
libéral, car  il  aura  pitié  &  compafsion  des  po- 
ures  indigensrs'ileftoit  en  luy, il  leiirfubuien- 
droit:cepédant  il  ne  s'efpargne  pas  de  ce  que 
il  peut:  À  s'il  ne  peut  rien,  pour  le  moins  loti 
courage  s'ouure.  Mais  ceux  qui  ont  des  biens 
en  abondance.  Dieu  les  met  là  comme  àl'el- 
prcuue.Ainli  donc  S.Paul  en  commandant  aux; 
gens  riches  de  faire  du  bien,  les  aduertit  que 
c'eft d'autant  que  Dieu  leur  a  donné, voire 
comme  s'il  leur  auoit  commis  fou  bien  entre 
leurs  .rains,&  qu'il  les  en  euft  couflituezdij- 
penfateurs,  comme  tonte  l'Efcriturc  nous  eu 
parlc,&  qu'à  La  vérité  il  nous  faut  penfe  r  que 

félon 


^ 


SVR   LA    I.    A   TIMOTH. 


3ÎC 


félon  que  chacun  aura  receu  plus  ou  moins,  iJ 
faudra  qu'il  rende  conte.  Voila  donc  quant 
au  premier  mot.  Or  il  s'enfuit,  Ef  de  donner 
•volontiers  :  qui  efl  le  plus  général.  Car  fî  les 
hommes  cognoiffent  que  leur  faculté  tende 
à  cefte  fin  de  s'employer  là  où  la  necersité  fe 
voit,  alors  ils  font  efmeus  de  donner  volon- 
tiers.Mais  dont  viendra  vne  telle  vertu  ?  Car 
nous  fçauons  que  chacun  fe  rcftraint ,  &  cha- 
cunyeut  ferrer  pour  foVi&  ce  qu'on  donc,  on 
cuide  qu'il  foit  perdu  .  Il  faut  donc  qu'il  y  ait 
cefte  vertu  que  fainft  Paul  adioufte.c'cft  afça- 
uoird'eltre  communicatifs .  Et  qu'eft-ce  que 
ceci  emporte?  Que  nous  cognoif  ions  quand 
Dieu  nous  a  ainii   couioints  enfcmble,que 
chacun  cft  redeuable  à  fcs  prochains .  Si  Dieu 
nous  euft  voulu  tenir  chacun  à  part,  &  bien, 
nous  n'aurions  pas  cefte  necefsité  qui  nous 
contraint  de  conuerfer  les  vns  auec  les  au- 
tres :  mais  maugré  qu'en  a  vent  les  hommes,  fî 
faut-il  qu'ils  communiquent  enfemble  .  Voila 
donc  où  il  nous  faut  reuenir,  voire  &  cognoi- 
ftre  que  Dieu  nous  a  voulu  faire  comme  mem 
bresd'vn  corps.  Et  tout  ainli  que  Toeil  ne  fe 
peutpaflerdu  pied  ,  la  main  ne  fe  peut  palier 
de  l'aureille  ,  la  bouche  ne  fe'peut  palTerdu 
ventre  ,  aufsi  que  &  grans  &  petits  ne  fe  pcu- 
nent  pas  contenter  chacun  de  (a  perfonne, 
mais  qu'il  nous  faut  eftrevnis  ,  &  qu'il  nous 
faut  auoir  comme  vn  lien  mutuel  de  fraterni- 
té. C^uand  nous  aurons  ce  regard-la  ,  chacun 
conclura   puis  après  :  le  voy  mon  prochain 
qui  a  faute  de  moy,  fi  i'eftoye  en  telle  extré- 
mité, ie  voudroye  eitre  fecouru  :  il  faut  donc 
que  ic  face  le  femblable.Brief  cefte  communi 
catron  dont  parle  ici  faincl  Paul,  cft  cefte  af- 
feftion  fraternelle  qui  procède  du  regard  que 
nousauons  quand  Dieu  nous  a  conioints  en- 
femble, &  qu'il  nous  a  liez  corne  en  vn  corps, 
&  qu'il  veut  qu'vn  chacun  s'employe  pour  les 
prochains,que  nul  ne  foit  addonné  à  fbn  par- 
ticulier, mais  que  nous  feruions  tous  en  com- 
mun .  Maintenant  nous  voyons  qu'il  n'y  a 
point  de  fuperfluité  au  langage  de  fainft  P.iul. 
Or  en  premier  lieu,  il  veut  que  nous  conlîde- 
rions  nos  facultez  ,  afin  qu'vn  chacun  s'em- 
ploye félon  le  moyen  qui  luyeft  donné  de 
Dieu .  Sur  cela  que  nous  foyons  communica- 
tifs, quenous  ayons  pitié  &  compafsion  de 
ceux  qui  endurent ,  que  nous  fçachions  qu'il 
ne  nous  faut  point  feparer  les  riches  des  pc- 
ures  ,  les  grans  des  petits  ,  mais  que  nous  fa- 
cions  tous  vn  corps,&  que  celuy  qui  femble  e- 
flre  le  plus  excellent,  qu'il  foit  le  moindre  en 
courage .  Qu_e  nous  ayons  donc  cefte  liaifon 
qui  foit  entretenue  comme  facree  :  &  alors  il 
eft certain  que 'nous'donnerons  volontiers,  c' 
eft  à  dire,  chacun  ne  fera  pasainfi  reftraint  & 
chiche  comme  nous  fommes ,  d'autant  que 
nous  fommes  pleins  de  cruauté  ,  ne  cognoif- 
fans  point  .i  quelle  condition  Dieu  nous  a  mis 
au  monde,  &  pourquoy  c'eft  aufsi  qu'il  nous  a 


a  voulu  adtoufter  vn  autre  aiguillon  ,  pcmr  in- 
citer les  riches  à  bien  faire.dil^nt ,  Q«'o«  U;ir 
commande  deflre  riches  en  bonnes  ccuures .  Or  i- 
ci  il  fait  vne  comparaifon  de  l'or  &  dé  l'ar- 
gent.'des  poflefsions  ,  du  blé,  du  vin,  des  mai- 
fons,  &  chofes  femblables ,  auec  les  bonnes 
œuures  ,  qui  font  les  richefles  permanentes, 
celles  que  Dieu  reçoit  &  accepte  ,  &  qui  vie- 
nent  en  conte  deuaiTt  luy.  Telles  richefles 
font  celles  qui  ne  nous  peuuent   faillir  ,  & 
dont  nous  iouirons  en  la  compagnie  des  An- 
ges .  Ainfi  donc  nous  voyons  pourquoy  ce 
mot  E»  bonnes  a[uitres,e{i  adioufté.  Car  pour- 
quoy eft-cc  que  les  hommes  font  fi  tenans,  & 
que  l'auariceles  empefche  de  bien  faire,  fi- 
non  qu'ils  prifent  par  trop  leurs  richefles  ,  & 
qu'il  leur  femble  que  quand  ils  font  diminuez, 
tout  eit  perdu  ?  Voici,  maintenanr  ie  fuis  ho- 
noré,i'ay  crédit  à  caufe  de  mes  biens:  &  fî  i'e- 
ftoye pareil  &  égal  à  beaucoup, que  feroit-ceJ 
on  ne  tiendroit  conte  de  moy,  ie  ne  me  pour- 
roye  maintenir  ainfî  .  Il  y  a  d'autres  vaniciz 
âufsi  qui  font  caufe  que  nous  fommes  par 
trop  folicitez  à  nous  enrichir ,  &  cela  nous  cf- 
blouit  les  yeux. Pour  cefte  caufe  donc, appre- 
nons quelles  font  les  vrayes  richefles  .  Car  fî 
ceci  nous  venort  en  men>oire,  que  les  bonnes 
œuures  font  les  vrayes  richefles  que  Dieu  ap 
prouue  ,  &  qui  ne  nous  peuuent  faillir  ,  &  qui 
ne  font  point  fuiettes  ni  à  corruption,  ni  à  iar 
cin  :  il  cft  certain  que  nous  les  cercherions 
plus  que  note;  ne  faifons  pas,&-par  confequenr 
nous  ferions  retirez  de  cefte    folle  cupidité 
des  biens  da  monde, nous  n'y  ferions  pas  ainfî 
plongez, comme  nous  voyons  que  la  plus  part 
y  cft ,  &  quafi  tous .  Et  ainfî  fous  ce  mot  pe- 
fons  bien  cefte  concluiion  que  fainft  Paul  i 
voulu  fàire,afin  que  fî  nous  appetons  par  trop 
les  richefles,  que  nous  vueillions  eftre  en  di- 
gnité quant  au  monde  ,  que  nous  demandions 
d'eftre  honorez,  &:anoir  la  vogue  ici  bas  en 
terre, nou';  cognoifsions,voire,mais  il  y  a  d'au 
très  richefles  qui  font  plus  precieufes    &  de- 
firables,afçauoir celles  que  Dieu  approuue, 
&    lefquelles  demeurent   toufîours   en    fon 
Royaume  .  Et  ainfî  que  nous  appliquions  là 
toute  noftrc  alFcftion,&  non  point  en  ces  cho 
fes  qui  ne  font  que  pour   nous  tromper  .  Et 
pour  mieux  exprimer  cela,  fainft  Paul  adiou- 
fté,Qa*  nous  f.teicns  -vn  threfor  d^tn  bon  fonde- 
ment four  Padiien:r,  afin  d'obtenir  la  -vieeter^ 
nelle  .  Sous  ce  mot  de  bon  fondement ,  fainft 
Paul  taxe  encores  mieux  la  vanité  qui  trom- 
pe les  poures  mondains ,  &  ceux  qui  ne  peu- 
uent eleuer  les  yeux  â  Dieu.  Car  ils  appetenc 
beaucoup  ,  &  leur  femble  félon  qu'ils  auront 
entafle  grande  quantité  de  biens,  que  les  voi- 
la au  comble  de  leurs  Ibuhaits,  voila  leur  fé- 
licité, pour  le  moins ,  félon  qu'ils  imaginent. 
Or  cependant  regardons  vn  peu  corne  ils  ga- 
gnent beaucoup  d'eftre  tant  riches .  Les  voifa 
auec  leurs  richefles  toufîours  flottans  au  mi- 


élargi  de  fes  biens. Mais,  encores  fainft  Paul    lieude  la  mer,  ils  n'ont  qu'angoifles  &  folici- 

S.i. 


?" 


SERMON    LUI. 


tudet  qui  lei  tourmentent  &  tranfportent  çà 
Si  là.  Il  cft  vray  quMs  s'endormen:  quand  ils 
voyent  qu''ils  ont  des  biens  tant  &  plus,& 
qu'ils  mefpni'ent  Dieu,  5c  s'aflopiffent  :  mais 
ils  ne  lailtcntpas  toutcsfois  d'cftrc  toufiours 
en  tourment  &:en  ternpeflc  .  Ne  voila  pas  vn 
poure  fondement ,  quand  les  hommes  l'ont 
ainlî  agitez  ,  comme  s'iU  cfloyent  au  milieu 
de  beaucoup  de  tourbillons  en  vue  incr  ?  Les 
autres  font  encores  pis  :  car  ils  s'accablent 
fous  le  faix  Se  l.i  pcfanieur  de  leurs  richcflcs, 
que  tout  ce  qu'ils  ont  am.illé.n'ell  (înon  com 
me  vne  montagne  pour  les  creuer  ,  &  pour 
leur  rompre  le  col  .  Il  efl:  vray  que  les  riches 
fc  plaifiut  bien  en  leur  abondance  :  quand  ils 
manient  leur  or  &  leur  argent ,  les  voila  en 
c;iandes*delices,&:  en  grandes  voluptez.ce  fem 
ble  .  Mais  cependant  lî  on  pouuoit  contem- 
pler en  quel  cftat  cil  leur  efprit  ,  on  trouue- 
roit  qu'ils  font  là  comme  en  vn  abyfme,&  que 
tout  ce  qu'ils  pofledent,&  ce  qu'ils  pretendét 
d'auoir  ,  n'ell  {înon  pour  les  accabler  de  plus 
en  plus.iufques  à  ce  qu'ils  encreuent.  Et  ainlî 
c'eft  bien  arrière  d'auair  vn  bon  fondement 
fur  lequel  ils  s'appuyewt  pour  eftre  bien  alFcu 
rc2:c'eft  bien  arrière  d'auoir  vn  bon  appuy  &: 
certain  auquel  ils  fe  repofent.Saintt  Pauldôc 
a  ici  parlé  plus  que  proprement ,  quand  il  ex- 
horte les  riches  à  fc  faire  vn  bon  fondement, 
leur  difant,que  c'eft  là  le  vray  threfor.  Qu^ils 
fe  confient  (dit-il)  fur  ce  threfor  .  Et  qiioy? 
faifans  vn  hon  fondement ,  car  c'eft  la  mai  que, 
cependant  que  les  riches  du  monde,  quand  ow 
leur  parle  de  threfor,  ne  pcnfent  ilnon  d'ac- 
quefter  &  champs  &  prez,&  vignes,  &  d'auoir 
leurs  coffres    bien  garnis ,  &  d'auoir  gran- 
de prouiiîon  .  Voila  donc  le  threfor  de  ceux 
nui  ne  peuuent  regarder  plus  loin  qu'au  mon 
de  :&  voila  pourquoy  Us  s'arreftent  du  tout 
à  ces  cho<vs  caduques.  Mais  lî  taut-il  qu'en 
ne   prenant  point  de  fondement ,  ils  baftif- 
fent  en  l'air. Et  pourquoy  ?  Car  leur  efprit  eft 
plein  de  vanité, c'eft  comme  vne  veAie  qui  re- 
luira,&  fera  bien  pleinc.mais  il  n'y  a  que  vent 
cependant  .  Ainlî  donc  en  eft-il  de  tous  ceux 
qui  trauaillent  tant  pour  ccflt  vie  caduque.  Il 
eft  vray  qu'ils  parleiot  aflcz  de  threfor,  &  on 
penfera  que  rien  ne  leur  défaille,  on  verra  là 
vne  grand'  pompe, on  verra  vn  grand  amas, ils 
attirct  de  cofté  Si  d'autre,  &au  long  &  au  lar 
ge,  &  haut  &  bas,  ils  ont  de  grans  monceaux. 
Mais  cela  n'efl  point  pour  eftre  fondez, il  n'y 
a  nulle  dureciqiii  pis  eft(comme  deiîa  nous  a- 
uons  dit)outre  ce  qu'ils  vaguent  ainlî  en  leurs 
Tanitez,il  faut  qu'en  la  fin  les  richefles  Jes  ac- 
cablent, &  qu'elles  les  cretient  &confuinent 
du  tout,c'eft  bien  arrière  de  le  fonder. Et  ain- 
fi,qu'eft-il  de  taire  '.  Que  nous  afpirions  à  ce- 
lle vie  éternelle',  comme  fainft  Paul  en  parle 
pour  conclulion.  Et  quand  nous  aurons  cefte 
alFectiô.il  eft  certain  que  les  richefles  ne  nous 
pourront  plus  empelcher  que  nous  ne  ten- 
<lions  à  Dieu  :  qui  plus  eu ,  elles  nous  fcrorit 


bonnes  aides  &  moyens  pour  sous  aduaneer 
à  noftrefalut:carvpour  ccftecaufeaufsi&à  ce 
fte  intetion  nous. font-elles  données  de  Dieu. 
Pourquoy  ert-ce  que  Dieu  élargit  aux  hom- 
mes des  biens  du  monde  plus  que  leur  vfage 
le  rcquiertrll  veut  efprouuer  (comme nous  a- 
uons  touché  )  leur  chanté,  s'ils  font  humains 
ou  non,  quand  il  leur  a  donné  matière  de  bien 
faire.  Mais  tant  y  a  que  les  fidèles  ,  quand  ilj 
font  riches,  ont  dequoy  s'aduancer  :  car  ils 
font  incitez  à  remercier  Dieu,cognoiflans  que 
il  s'cft  ainfi  monftré  large  enuers  eux.  Au  re-. 
fte, ils  ont  à  batailler  contre  l'orgueil,  contre 
les  pompes  &  délices  de  ce  inonde  ,  &  quand 
ils  y  reiîftent  en  la  vertu  du  faind  Efprit,c'eft 
encores  vn  autre  aduancemcnt  pour  eux  .  Et 
puis  ils  regardent,  l'ay  dequoy  pour  fubuenir 
à  mes  prochains ,  s'il  y  a  des  poures  indigens, 
ie  fun  tenu  de  leur  bien  faire  :  voila  encores 
vne  autre  approbation  enuers  nous  .  Et  aiafi 
nous  voyons  comme  en  toutes  fortes  les  ri- 
cheires  fjnt  pour  aduaccr  les  enfans  de  Dieu, 
&  pour  les  faire  approcher  de  l'héritage  ce- 
lefte.Et  poirrtant.ceux  qui'afpireiit  à  la  viee- 
ternelle, n'auront  garde  d'elhe  retenus  ni  en- 
ueloppcz  aux  biens  de  ce  monde  ,  ils  ne  tour- 
neront point  à  leur  confulion  ce  que  Dieu 
leur  a  ordonné  pour  leur  fahit  .  Mais  quoy?, 
Combien  en  trouuera-on  qui  cerchent  la  vie 
éternelle,  &  qui  baftiflent  fur  ce  fondement? 
Les  hommes  tracalTent  beaucoup  ,  on  voit  les 
peines  qu'ils  prenent ,  comme  ils  fe  trauail- 
lent ,&  qu'ils  le  meurtrillciit  comme  s'ils  c- 
ftoyent  leurs  bourreaux  ■  mais  cependant  qui 
eft-ce  qui  penfe  au  Royaume  de  Dieu?Agrâd' 
peine  fera-il  queftion  de  remuer  vn  doigt. 
Dieu  nous  appelle  loir  A:  matin, il  nous  folici- 
te  :  il  ne  faut  point  qu'il  nous  magnifie  beau- 
coup les  richelfes  des  cicux,nous  les  deurions 
aflez  cognoiilrcmiais  entores  l'Efciiture  no* 
en  parle  félon  noftre  capacité  :  &  cependant 
nous  ne  daignons  pas  penferàcequi  nousde- 
uroit  eftre  tout  accouftumé.  Et  ainlî,  d'autanc 
plus  cefte  do&ine  nous  cft-elle  neceilaire, 
quand  nous  oyons  que  faiKtt  Paul  notamment 
nous  met  ici  la  vie  éternelle,  afin  de  nous  rcti 
rerdc  monde,  afin  que  nous  ne  foyons  plus  lî 
brutaux  de  nous  arrefter  ici  bas, mais  que  nous 
cognoifsions  a^ue  Dieu  nous  a  créez  &  ordon- 
nez à  vne  choie  beaucoup  meilleure ,  &  à  vne 
condition  beaucoup  plus  digne  &  excellcn- 
te,c'eft  d'cft^re  héritiers  du  Royaume  celefte. 
Et  ainfi  que  nous  tendions  là,  que  nous  y  ap- 
pliquions toutes  nos  penfees  &crtudes.Etc6- 
bien  que  nous  foyons  comme  poures  eftran- 
gers  en  cefte  vie  prefente.que  nous  ne  laif- 
lîoHS  pas  pourtantd'eftreafleurezdela  viee- 
ternelle  ,  comme  de  noftre  héritage  qui  ne 
nous  peut  faillir.  Ainfi  donc  il  laut  commen- 
cer par  ce  fondement, c'eft  que  Dieu  nous  at- 
tire v  payement  à  foy,  &  que  nous  n'afpirions 
pas  feulement  pour  vn  lour  à  cefte  vie  celefte, 
mais  que  nous  y  foyons  pleinement  arreftcz, 

& 


SVR    LA   I.    A    TIMOTH. 


•^  -y  ■> 


ic  que  nos  eCpths  foyent  occupez  là .  Quand 
.nous  y. procéderons  en  telle  forte,  alors  tou- 
tes nos  ûciiures  feront  vn  bon  baftinienc .  Car 
aous  cercherons  de  palier  tellement  par  ce 
monde,  que  touSours  noilre  afFedion  fuit  de 
parucnir  à  noltre  Dieui,  voire  tcnans  le  droit 
chemin,  &  les  moyens  qu'il  nous  a  ordonnez, 
&  qui  nous  font  propres. 

OR  nous-nous  profVcrnerons  dcu.int  la 
face  de  nollre  bon  Djcu  en  cognoilLmce  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  tace  telle- 
ment fentir  ,  que  noux  apprenions  de  nous  y 
mieux  defplairer&degcniir  en  nos  vices  &  en 
nos  corruptions,  &  cognoilire  que  li  le  mon- 


de nous  efl  contraire,  &  que  nous  y  foyons 
enuironnez  de  tant  de  tentations  ,  que  nous 
tendions  au  paracheuement  de  noftre  coui  fe, 
&  que  nous  bataillions  conftamment  pour  par 
uenirau  but  qui  nous  eft  propofé.  Et  cepen- 
dant qu'il  plaife  à  ce  bon  Dieu  d'appliquer  à 
tel  vfagc  tous  les  biens  qu'il  nous  fait  &  diftri 
bue  de  iamain,  que  nous  ne  foyons  point  iî 
malins  de  les  tourner  tout  à  l'oppolîte  de 
fon  intention  ,  mats  que  nous  les  facions  va- 
loir, afin  qu'il  foit  ferui  &  honoré  de  noirs  ,  & 
que  cependant  noftre  falut  en  foit  d'autant 
plus  aduancé.Q_ue  non  feulement  il  nous  face 
cefte  grâce,  mais  aufsi  à  tous  peuples  &  na- 
tions de  la  terre.&c. 


NEVFIEME     SERMON      SVR      LE 

SIXIEMECHAPITRE. 

io  O  Tmothecgardc  ce  qui  tejl  commis ,  euitant  "vanité,  pro- 
phine  de  habil,  çy  les  oppofitions  defcience  faujjement  nommée: 

XI  Laquelle  aucuns  anonçans  ont  erré  en  la  foy .  Grâce  joitanec 
toy.Amen. 


I  nous  cognoifsions  bien  la 
dignité  &  le  prix  des  grâ- 
ces que  Dieu  nous  a  faites, 
nous  ferions  plus  foiigncux 
^  les  garder,  &  en  taire  no- 
{,  flre  profit ,  &  pour  les  ap- 
pliquer aufsi  à  noflre  vfa- 
ge.  Mais  d'autant  que  nous  foraines  tantad- 
donnez  aux  choies  caduques  de  ce  monde, 
voila  qui  fait  que  les  dons  tpirituels  ne  font 
gueres  prifez  de  nous  :  &  auf-;!  ils  penllent 
par  noftre  nonchalance  .  D'autant  plus  donc 
auons-nousbefoin  de  celle  leçon  qui  nous  eft 
ici  donnée  par  faind  Paul,  quand  il  dit  qii?  iî 
Dieu  nous  a  commis  fon  Evangile,  c'tft  vn 
threfor  meftimable,&  qu'il  nou-  faut  prendre 
peine  de  le  garder .  Et  puis,  que  chacun  aufsi 
en  fon  endroit  regarde  quel  eft  fon  depoft. 
.  Selon  que  Dieu  aura  choifî  vn  chacuh  pour  le 
mettre  en  quelque  office  ,  qu'il  liiy  aura  aufsi 
diftribué  quelques  grâces  de  fouEfprit,  vipi- 
la  vn  depoft.  Et  au  refte.pourccque  raous  au- 
rions bcayçqup  d'occaiîons  en  ce  laaride 
pour  nous  faîre  quitter  ce  que  Dieu  nous  au- 
ra doncé,  Se  qu'il  nous  elchapptra  des  mains 
fans  que  nous  y  peniTons ,  ûintl:  Paul  adicu- 
fte,  que  Timotheepour  faire  Jro;teinent  fou 
c-'îce  fe  retire  de  toutes  ambitions  &  vani- 
tez,  qu'il  le  contente  de  feruir  finiplemcut  à 
Dieu.  &  d'anoncerl'Euaagilcqui  luy  eft  com 
laitS-  Nous  voyons  donc  maintenant  en  fnm- 
me.quclle  eft  l'intencion  de  ù'.aù,  Pau1,&  cç- 
î>ien  cefte  dortrine  nous  eft  propre. M.v  afin 
qu'elle  fuit  mieux  entendue,  premiecqpient  il 
aousfiut  noter,. qHe  ce  u'eft  point  fans  caiife 


que  fainfl:  Paul  appelle  ici  depoft,  la  grâce  que 
Timothee  auoit  receuepour  eftre  Paftturde 
l'Eglifc  Chreftienne.  Car  tout  ce  que  Dieu 
nous  élargit  de  fes  dons,  c'cft  à  celte  charge 
que  noU-.  le  tacions  valoir  &  profiter  :  non 
point  qu'il  en  puiiTe  rtctuoir  aucun  gain,  car 
il  eft  atfez  riche  de  foy  :  mais  feulement  que 
ion  nom  en  foit  glorifié  .  Selon  donc  qu'vn 
chacun  fera  appelé  en  quelque  eftat ,  ou  bien 
que  Dieu  luy  aura  fait  plus   de  grâce  qu'à 
vn  autre,  qii'ilpenfe  qu'il  aura  vu  conte  tanc 
plus  difficile  à  rendre.  Car   Dieu  ne  nous, 
met  point  (es  grâces  entre  les  mains  pour  en 
abufer,pour  les  profaner,  comme  font  beau- 
coup :  mais  c'eli  à  cefte   condition   qu'elles 
foyeni  toufîours  dédiées  à  fon  honneur, &  que 
nous  les  rapportions  là.Comme  quoy?  Ceiuy 
quia  desenfans,do;t  pcnferque  c'cft  vn  de- 
poft que  Dieu  luy  a  donné  en  charge  :  comme, 
fi  quelqu'vn  recommandoit  à  fon  ami  le  bicm 
qu'il  aura  quand  il  doit  partir  de  fa  maifon„ 
qu'il  luy  en  conimift  la  clef,  ou  bien  qu'il  luy 
c^oniiaft  là  boijrie  en  garde.  Les  pères  donc  3c 
^tneres.doyuent  garder  leurs  enfans  comme- 
.leur  .eftans  coiprais  de  Dieu  à  cefte  conditioa 
quMs  ay-cnt  à  en  rendre  conte  .  Ceiuy  aufi 
qui  eft  appelé  à  vne  charge  plus  grande  &: 
plus  haute,  commeceux  qui  ont  laïufticecn 
main,&Le  glaiue.doyiientpenfer:  Dieu  rem'' 
appiutici  eflabli  afin  que  ie  domine  ,  mais  c'' 
eft  afin  que  le  le  férue  loyaument  :  Se  cefte  di- 
gnité de -laquelle  ilan'a  honoré  eil  comme  va 
depoft.  D'autaiît  qu'il  m'a  co.mmis  la  charge,, 
il  t.uit  que  ie_m'y  g-ouuerjie  en  forte  que  ic  ne 
foy.e^gijjt.  co«,ii;able  d!éri  auoir  abufé  .  Ainfc 

Sf.ii. 


3H 


SERMON     Lini. 


en  eft-il  de  ceux  oui  font  Pafteurs  fur  TEglife  las,  afin  qu\n  tel  bien  ne  périme  point,  Scqiib 
de  Dieu.  Cir  le  threfor  de  TEuangile  leur  eft  nous  n'en  foyons  point  priuez  ni  deipouil- 
commic ,  &  ce  (ont  les  clcts  du  Royaume  des  Ici  par  noftre  ingratitude.  Voila  pour  vn  ité. 
cicuT.Conime  toutes  fois  Si  quantes  que  nous  Mais  cela  eft  à  obferuer  côme  vne  règle  corn 
anonçon»ladaarincdefalut,nousmonftrons  muneàtous  fidèles  c!c  enfans  de  Dieu.  Hya 
tjue  Dieu  eft  preft  à  receuoir  tous  ceux  qui  puis  après, que  les  pères,  les  maiftres,doiuent 
viendront  à  liiy  ,  que  la  porte  leur  eft  ouucr-  confiderer  que  ce  qui  Itur  eftcômis  enckar- 
tc  pour  le  pouuoir  inuoq'ier,&  poureftre  af-  ge.fe  doit  rapportera  Dieu. Que  leurs  enfîs 
feurez  que  leur  héritage  leur  eft  apprefté  là  donc  foyent  tellement  cnfeignez  que  Dieu 
haut,  &  ne  leur  peut  faillir.  Ainlî  donc  nous  en  ait  toufiours  la  propriété.  Car  quant  aux 
voyons  que  la dodrine  de  rEuangilenonsell  pères  terriens ,  ils  nedoiuent  pas  eftmier  que 
comme  vn  déport, à  nous,di-ie,qui  en  fonimes  leurs  entansloyent  tellement  à  eux, que  Diea 
côfticucz  miniftres  &difpcnûteHrs.()r  main-  n'en  ait  toulioMrs  la  polTef'ion  foiiueraine. 
tenant  c'eft  à  nous  de  rcg.trder  quelle  eftia  Autat  en  cft-ildetonc  le  rcfte.CarDieuveut 
<^nité  de  ce  chreior.Car  il  n'eft  polt  qneftiô  dominer,&  non  point  refîgner  fon  otfice:cô- 
ici  d'or  ne  d'argét, ne  de  chofcs  corruptibles:  bien  qu'il  nous  en  face  comme  participans, 
il  eft  qiieftion  du  ialut  éternel  des  amcs ,  que  qu'il  fe  monftre  ainlî  libéral  enucrs  nous  ,  li 
Dieu  Toit  glorifié  en  nous ,  q  noftre  Seigneur  eft-ce  toutefois  qu'il  ne  veut  point  quitter 
Icfus  obticnc  l'empue  Ibuuer.iin, afin  que  tout  fon  droit. Ainfi  apprenons  de  luy  referuer  ce 
genouil  le  ployé  deuït  lay:il  eft  queftion  que  qui  luy  appaitient,&  que  nous  luy  l'oyons  fi- 
la mort  qu'il  a  lourferte,  ne  nous  loit  point  dclcs.qiiâil  il  nous  auia  commis  quelque  cho- 
vauie  ne  inutile.maisqu'elle  férue  pour  noftre  ie:voire  en  venté, tellcmét  que  nous  en  puif- 
rcdemption.  Maintenant  donc  nous  voyons  lions  rendre  bon  conte  au  dernier  iour. Au  re 
que  ce  n'eft  point  vn  depoft  vulg.iire  que  ce-  fte  ,  comme  il  nous  eft  ici  comr.iandcde  car- 
luy  dont  faincl  Paul  parle.  Et  pourtant  tous  dernoftredepoft,&  fur  tout  que  les  miniltres 
ceux  que  Dieu  aura  commis  &  ordonnez  pour  delà  parole  de  Dieu  font  exhortez  de  ce  fai 
eftreminiftres  defaparole,doyuentbicn  peu-  re  en  laperfonnede  Tiniothec  :  auhi  ilnous 
fer  ,  d'autant  que  les  clefs  du  Royaume  des  faut  obferuer  que  Dieu  a  noftre  falut  en  gar- 
cieux  leur  font  commifes, qu'ils  doyuent  gar-  de,&  que  c'eft  le  depoft  qu'il  maintiendra  fur 
der  ce  threfor-ci  qu'il  ne  perifle  point ,  corn-  tout.CXifainfi  foit.fi  nous  auions  noftre  falut 
me  il  fera  quand  nous  n'en  tiendrons  conte:  entre  nos  mains, &  que  nous  en  fufsions  gar- 
ainû  que  nous  voyons  que  tout  a  cfté  proplia-  diens,que  feroit-cc?  Et  en  cela  deuons-nous 
r.é&  corrompu,  .\caufe  que  ceux  qui  eftoyent  prendre  tant  plus  de  courage  ,  pour  nousef- 
appelez  Pafteurs  fe  font  contentez  du  titre, &  forcer  à  taire  ce  qui  nous  eft  dît  par  S.  Paul, 
«cpendant  fefont  mocquezde  Dieu, ont  frau-  Car  fi  Dieu  nous  auoit  mis  la  bnde  lur  le  col, 
dé  fon  Eglife  de  ce  qu'ils  luy  deuoycnt,  &c  ne  qu'il  ne  luy  chaluft  de  noftre  falut, qu'il  nous 
leur  a  chalud'anoncer  la  doêlrine  qui  leur  e-  laillàft  faire  ce  que  bon  nous  fembleroit ,  & 
ftoit  coramife.Nousvoyons  que  par  ce  moyen  qu'il  ne  penfaft  point  de  nous, que  feroit-ce? 
tout  a  efté  peruerti. Comme  il  y  a  auiourd'huy  Chacun  feroit  côme  efgaré  ,  &  tout  s'en  iroit 
m  abyfine  fi  horrible  en  la  Papauté  ,  que  c'eft  en  diisipation  par  ce  moyen  ,  tout  le  monde 
pour  nous  faire  drelTèr  les  cheueux  en  la  tefte  periroit.  Mais  voila  comme  Dieu  befongne, 
quand  nous  y  penfons.  Et  ainfi  (comme  i'ay  ilferefcrue  ceft  otfice  de  garder  noftre  fa- 
defia  touché)que  tous  ceux  que  Dieu  a  telle-  lut.  Voila  pourquoy  fainft  Paul  en  vn  autre 
ment  honorez, qu'il  veut  qu'ils  foyent  difpen  paffage  dit,  Celuy  qui  garde  mon  depoft,  eft 
fateiirs  d'vn  tel  threforde  la  viecelcfte.ayent  fidèle.  Côme  s'il  difoit,  Il  eft  vray  que  ie  fuis 
foin  de  s'acquitter  de  leur  deuoir,&:  qu'en  tou  vne  poure  créature  &  fragile:  il  eft  vray  que 
te  crainte  ils  gardent  ce  threfor  qui  leor  eft  tant  de  tentations  me  pourroyent  taire  coin 
commis.  Cependant  ,  qu'vn  chacun  aufsien  meefuanouirlafoy;maisiemerapporte(dit- 
Ibn  endroit  penfe  qu'il  eft  redeuableà  Dieu  il)toufiours  à  Dieii,&  repofe  en  luy.  Et  pour 
de  tout  ce  qu'il  a  receu  ,  afin  que  nous  ne  laif-  quoy?  D'autât  qu'il  a  voulu  prédre  cefte  char 
fions  point  périr  par  noftre  nonchalance  les  ge  fur  foy  de  maintenir  mon  faliit  ,&  d'en  e- 
graces  qu'il  nous  auraelargiei ,  mais  que  nous  ftrelegarent:d'autant  qu'il  eft  fidèle, &  qu'il 
les  facions  profiter. Voila  donc  comme  il  nous  ne  peut  fruftrer  les  fiens, voila  où  ie  me  fie;& 
faut  prattiquer  cefte  doftrine  ,  &  l'appliquer  i'acheucray  ma  courfc  hardiment  &  fans  au- 
'à  noftre  vfage.  Or  combien  que  le  touche  cune  doute  ,  fçachant  que  le  Dieu  qui  eft  af- 
feulement  ceci  en  brief ,  toutesfois  chacun  fez  puiffant  pour  confcriierfes  eleus  ,  ne;îie 
doit  eftre  aflez  enfeignc  quelle  eft  la  foinme.  defaiidra  point.  Or  cepédant  après  que  Dieu 
Et  ainfi  quêtons  regardent  à  leur  vocation,  a  déclaré  que  noftre  falut  n'eil  point  en  ha- 
Nousauons  premièrement  tous  enfemble  la  zard  ni  en  branle  puis  qu'il  l'a  en  fa  main  & 
foy  ,  qui  eft  vn  depoft.  Car  Dieu  nous  a  illu-  en  fa  proteftion,il  veut  qu'vn  chacun  deiious 
minez  en  la  cognoiflànce  de  fa  vérité  ,  il  s'exerce,  &  nous  met  comme  entre  les  mains 
nous  a  fait  comme  gardiens  du  threforde  cequieftfien  ,  ce  qui  luy  eft  propre  :  il  nous 
fon  Euangile.  Il  nous  faut  donc  cftre  vigi-  fait  ceft  honneur-la  de  nous  le  commettre, 

comme 


z.  Timt, 
i.u. 


SVR    LA    I.     ATIMOTH. 


3^^ 


comme  finous  en  edions  difpenfateurs  t  &:ce  ncceftoflîce  àfon  Fils  rnique  Je  le  tenir  et| 

pour  efprouuer  noftie  fidélité  ,  &  aufsi  pour  famain,&<l'en  fairebonnegarde  étieuie.AiH 

nous  exercer  ,  afin  que  nous  ne  foyonj  point  fi  donc  nous  n'auons  point  occafîon  d'eftre 

oififs.  Il  faut  donc  conioindrc  ces  deux  cho-  lafches  quand  il  nous  tft  commandé  de  garder 

fes-la.Et  quant  àla  première  ,  c'cft  afçauoir  noftre  déport.  Et  pourquoy?Car  deuant  tou- 
que Dieu  eft  le  l'cul  gardien  de  noihe  falut,  .     -    - 


fainft  Pierre  le  déclare  encores  mieux  au  pre- 
mier de  fa  Canonique  première  ,  quand  ildit 
que  riieritage  nous  eit  gardé  là  haut.  Car  fi 
noftrefalut  elloit  ici  bas.ilfcroit  fuietàbeau- 
coup  dechangemcns:iliry  auroit  rien  de  fer- 
liie:car  tious  fommes  ici  comme  en  vne  foreft 
pleine  de  brigans  ,  ou  comme  en  vne  mer  qui 
eft  agitée  de  tourbillonscotinuels.il  faut  doc 
que  noihe  falut  foit  li  liauc  ,  pour  eftre  en  vn 
bon  port  &  alFeuré-Or  cependant  fi  fommes- 
Doùs  ici  bas  :  &  nous  voyons  qu'il  ne  faut  rien 
pour  nous- esbranler  ,&  que  le  diable  a  telle 
puilTauce  fur  nous ,  que  nous  fommes  -comme 
poures  brebis  fans  aucune  defenfe:&  il  y  a  vne 
troupe  de  loups  rauiffins  pournous  engloutir. 
Q^e  fera-ccdoncr.Sain(ft  Pierre  adiouftc,Cô- 
me  noftre  héritage  inconuptibleeft  gardé  là 
liant  ,  qu'aufsi  nous  fommes  gardez  ici  bas. Et 
comment  ?  Eft -ce  par  nolire  induftrie,  ou  que 
nous  foyons  aflcz  habiles  gés  pour  nous  mani- 

tenii?Nenni:mais  il  dit,  Parla  vertu  de  Dieu,  qu'en  ce  monde  nous  facions  valoir  ce  qu'il 
par  foy.Côme  s'il  dfoit, Mes  amis, qujd  nous  nous  aura  mis  entre  les  mains.  Etpourcefte 
^enfons  qu'en  ce  monde  tout  fe  remueA'qii'iJ  caufe  il  vfe  de  cefte  fimilitude.que  les  dons,& 
y  a  des  agitations  foudaines  ,  &  qu'il  n'y  a  ici  les  eftats  aufsi  aufquels  Dieu  nous  a  appelez, 
rien  de  permanent ,  eleuons  les  yeux  là  haut:  font  commedesfommes  d'argent,  eu  quelque 
Dieu  nous  a  fait  ceft  honneur  qu'il  veut  que  marchandife.  Mais  cependant  fi  faut-il  auoir 
noftre  héritage  foit  hors  de  tous  dangers,  que  ceci  bien  imprimé  en  noftre  mémoire,  quel'E 
il  foit  exempté  des  mutations  de  ce  monde,  &  uangile,  &:ce  qui  en  dépend,  n'eft  pas  comme 
des  reuolutiôs  qu'on  voit  chacun  iour.Or  d'au  vn  threfor  caduque  du  monde ,  mais  que  c'eft 
tât  qu'il  nous  faut  cheminer  en  cefte  terre  iuf-  vn  bien  qui  eft  beaucoup  plus  à  eftimer  ,  afin 
quesàceque  Dieu  nous  rçtireà-foy.cognoif-  que  nous  foyons  tant  plusardens  à*e garder, 
fonsque  nonobftant  nos  infirinitez  ,  fi  eft-ce  S:  que  nous  y  foyons  vigilans  ,  afinden'eftrc 
que  Dieu  nous  maintiédra-car  c'eft  en  fa  ver-  point  furprins:  comme  noftre  Seigneur  lefus 
tu  que  nous  fommes  ici  côferuez  au  milieu  de  nous  admonefte  de  veiller  fongneufement, 
tous  les  allants  que  .^atan  nous  pourra  efmou-  que  nous  foyons  toufiours  debout  :  puis  que 
noir.  Et  comment  ?  Par  quel  moyen  ?  C'eft  Satan  nous  efpie,  puis  qu'il  fait  toufiours  le 
(dit-il)par  foy .Voila  doncDieu  qui  defploye     g^'ct  pour  nous  rauir  ce  threfor.gardons  bien 


tes  chofes  Dieu  nous  deciaie  qu'il  k*ia  la  par 
de  de  noftre  falut, &  qu'il  le  retient  à  foy,&  ie 
fereferue,afîn  de  lemaintenir.Et  au  rcfte.s'il 
nous  veut  exercer  ici  bas  ,&nous  faire  ceft 
honneurde  nous  mettre  &  diftribiier  fes  era- 
ces  entre  les  mains  afin  que  nous  en  (oyons 
dilpenfateurs  ,qu'vn  chacun  s'employc  à  ce 
faire  :  &  (comme  l'ay  défia  dit)  'jue  non ,  ne 
foyons  point  tant  esblouisau  regard  des  cho- 
ies caduques, que  les  dons  fpiritutls  doptDieu 
nous  a  voulu  honorer  ,  ne  nous  foyent  touf- 
iours beaucoup  plus  précieux.  Et  ainiî  donc 
cognoiflons  que  l'Euaugile  n'eft  pas  comme 
vne  pièce  d'argent ,  mais  que  c'eft  vn  threfor 
inertimable.  lleftvray  que  tout  ce  que  nous 
auons  de  faculté  eft  acconiparc  à  quelque  fom 
me  d'argent  que  Dieu  nous  aura  mile  entre 
les  mains  pour  la  faire  valojr.  Car  il  nous  ac- 
compareàceux  qui  font  auxga^esd'autruy; 
ainfi  qu'vn  marchant  aura  fes  taiieurs  ,  il  les 
enuoye  pour  tr.ifhquer  ,  noftre  Seigneurveut 


fâmain  puiflante  pour  nous  maintenir.  Et  au 
refte  ,  nous  fentons  cefte  vertu-la  par  foy, 
quand  nous  fommes  appuyez  en  ù  vérité  ,  Se 
que  nous  ne  doutons  point  puisqu'il  nous  a 
promis  de  nous  garétir.qu'il  le  fera:quc  nous 
fommes  comme  en  poflèfsion  &  iouillànce  de 
fa  vertu  Diuine  pour  eftre  inuincibles  contre 
tout  ce  que  Satan  pourra  machiner  fur  nous. 
Et  voila  pourquoy  aufsi  noitre  Seigneur  lefus 
Chrift  voulant  confoler  les  fidèles,  afin  qu'ils 
ne  le  troublent  point  parmi  tant  d'agitations 
du  monde,  il  dit,  Le  Perc  qui  vous  a  donnez  à 
moy,  eft  puiffint  par  delTus  tous.  lefus  Chrift 
donc  nous  enuoye  à  la  puilTmcede  Dieu  ion 
Père  ,  pour  monftrer  qu'il  faudroit  que  Dieu 
fuft  vaincu  (i  noftre  falut  eftoit  en  doute, ni  en 
incertitude.  Et  au  refte  ,  il  adioufteaufi  qu'il 
lera  noftre  protertcur  , afin  que  nous  rccou- 
riou',  a  luy  ,  &que  nous  fç.ichions  que  noftre 
falut  eft  recommandéà  Dieu,puis  qu'il  a  don» 


que  nous  ne  luy  foyons  en  proye.  Et  pour  ce 
faire  ,  qu'il  nous  fouuiene  de  ce  qui  a  efte  dit 
ci  dclTus,que  la  bonne  confcience  eft  le  moyé 
de  garder  ce  threfor' de  l'Euangile  ,  quand 
nous  cheminôsen  lacraintede  Dieupuremct, 
&  que  nous  auons  toufiours  nos  fens  eleiiez  là 
haut,  &  qu'vn  chacun  fe  refueille  pour  obéir  à 
Dieu,&  fe  dédier  du  tout  à  luy.  Voila  comme 
nous  garderons  ce  threfbr.necraignans  point 
les  larrons  qui  le  poiirroyent  defrobber  :  car 
Dieu  ne  le  permettra  point.  Mais  fi  nous  fom 
mes  noiichalans,n'eft-ce  pas  raifon  que  le  dia 
ble  ayant  vne  telle  entrée  en  nous  que  nous 
luy  huions  ,  nous  del'pouille  ,  &  que  nous  de- 
meurions là  defnuez  ?  Voila  donc  ce  que  nous 
auons  à  noter  quanta  ce  paflage.  Or  ce  qui 
s'enfuit  fedoit  rapporter  fimplcment  aux  mi- 
niftrcs  de  la  parole  de  Dieu.  Saintl:  Paul  ad- 
uertit  Timothce,  d'nii ter  toute  r,ir.itc'  prnpha- 
ne  de  h.ibil ,  ^  toute  ot^fofnen  de  fcit nce  fnuf- 

S.ui. 


i,i6 


SE  R  M 


fematmommee.  Par  cela  il  entend  que  ceux 
qui  font  appelez  pour  prelcher  FEuangile, 
pour  enlcigner  le  troupeau  de  noftrc  Seigneur 
ïefus  Chnit,  Se  le  conduire  ,  ne  peuuent  point 
s'acc^uitterde  leurdeuoir  ,  lînon  qu'il?  reiet- 
tent  toute  ambition, &  qu'ils  n'appetent  point 
de  plaire  aux  hommes, ne  d'eftre  veus,ne  d'e- 
ftreen  réputation  :  qu'ils  eftiinent  tout  cela 
comme  chofetriuole  ,  &  qu'ils  ie  contentent 
d'édifier-  l'Eglile,  de  procurer  lefalutdesa- 
mes,de  magnifier  la  maiefté  de  noftreSeigneur 
lelus,&  faire  que  tout  le  range  en  l'obeiflan- 
ce  de  Dieu. Et  en  ibmme  ,  qu'il  leur  iufflfe  de 
propoler  en  auant  la  fimplicité  del'Euangi- 
le,&  d'enriclur  ceux  qui  demandent  eftre  rai- 
fafiez  des  biens  de  Dieu  :  qu'Us  le  contentent 
de  cela, &  qu'ils  n'appetent  point  ce  que  beau- 
coup tont.c'eftafçauoir,  d'eftre  pniez,  qu'on 
leur  applaudiife  quand  ils  auront  vn  babil  luu 
tam,  qu'ils- auront  des  lubtilitez  ,&:  qu'ils  au- 
ront monftré  vn  efprit  bien  aigu, qu'ils  auront 
vne  grande  brauade  :  U  faut,dit-il,  que  toutes 
ces  chofes-la  fjyent  miles  bas, ou  lamais  nous 
ne  feruirôs  à  Dieu  &  à  Ion  EgUle.  Et  pourtât, 
que  cefte  fcience  que  les  hommes  appetent, 
n'eft  finon  vne  pure  vanité,  d'autant  qu'il  n'y 
a  rien  de  iblidc.  Samft  Paul  dit  qu'on  pourra 
bien  reputer  pour  fcience  ce  que  les  hommes 
appetent  de  leur  doctrine,  cela  pourra  bien 
plaire. Comme  on  dna,  Voila  vn  fage  homme, 
voila  vn  homme  qui  eft  bien  lettré  ,  quand  il 
Tçaura  bien  taire  fes  grans  nionftres ,  &  eilen- 
dre  fes  ailes  comme  vn  paon.Pour  cefte  caule 
fainfl:  Paul  dit, Que  les  hommes  en  ayent  tel- 
le réputation  qu'ils  voudront ,  mais  tant  y  a 
que.c'e/i^n  fol  babil  que  toute  cefte  fcience- 
la  qui  n'St  point  fondée  en  l'Efcriture  fain- 
ôe.Car  la  perfeftiô  de  noftrc  fageflcjc'eft  que 
nous  foyôs  enfeignez  de  Dieu,&  que  nous  de- 
meurions en  nos  bornes:quand  nous  fuyurons 
lîmplement  ce  qu'il  luy  plaift  de  nous  mon- 
ftrer,que  cela  nous  foit  allez. Ainfi donc  qirad 
les  hommes  extrauaguent,&  qu'ils  s'enuclop- 
pcnt  ainfi  en  leurs  fpeculations,il  n'y  aura  que 
inéfonge,il  n'y  aura  que  tauffetc  &  abiis,coin 
bien  que  cela  foit  réputé  grande  fcience. Ainfi 
donc  nous  voyons  l'intention  de  fainftPaul.il 
eft  vray  qu'il  ne  parle  finon  aux  miniftres  de 
h.  parole  ,  mais  tant  y  a  que  cefte  admonition 
BOUS  profite  ,i  tous. Car  côme  ici  les  Pafteurs 
font  aduertis  de  leur  deuoir ,  aufsi  tous  ceux 
qui  doynent  efcouterla  parole  de  Dieu  par 
leur  bouche, lont  enfeigntz  quelle  doctrine  ils 
doyuent  cftiuier,  afin  de  n'auoir  point  lesau- 
reilles  chatouiUeufes",  pour  appeter  quelque 
nouueauté,&  desqueftions  curitufes, ainfi  que 
le  monde  y  eft  addonné  par  trop  ,  &  qu'il  y  a 
de  ces  glorieux  qui  lé  veulent  faire  valoir;  que 
«ela  foit  rcictté  de  nous ,  tk  que  nous  dciuan^ 
dions  d'eftre  repeus, quand  nouî  venons  cher- 
cher la  pafturede  noftre  Dieu.  Mais  deuant 
toutes  ckofes  ilnous  faut  eiicores  fojider  ici 
plus  outre  ce  que  S.Paul  a  entendu  par  ce  mot 


O  N      L  I  1 1 1. 

de  tanhi  frofhamc  de  b,thil  :]pource  qu'il  y  a 
deux  mots  Grecs  qui  font  prochains  l'vn  de 
l'autre, &  quafi  du  tout  feinblables  :  &  quant  i 
la  prononciation  ,il  femble  quafi  que  ce  foit 
tout  vn.Il  y  a  eu  leiture  duierié,  qu'aucuns  au 
lieu  de  Vanné  ,  ont  mis  Nouueauté  debabilî 
toutesfois  lavraye  lefture  &  liquide  eft  de  va- 
nité.Or  cependant  ce  motde  Va«/>f',emporte, 
autant  que  Vuidange,qu'jl.n'y  aqii'vne  appa- 
rence triuole,qu'il  n'y  a  poLntde  fermeté. Voi 
la  donc  quant  au  premier.afçauoir  que  S.Paul 
veut  que  la  façon  d'enfeigner  que  tienent  les 
feruiteurs  deDieu  ait  fubftâce  en  foy,&  qu'el- 
le ne  foit  point  enflée  côme  des  confies, (ainii. 
qu'on  dit)ou  des  vefsies, qu'il  n'y  ait  point  ici 
vne  refonnance  pour  faire  grand  bruit,  &  ce- 
pendant qu'il  n'y  ait  rien  au  dedans.  Notons 
bien  donc  que  la  doârine  de  Dici:  «  oit  empor 
ter  fubftance.Etde  faift,  voila  pourquoy  elle 
eftaufsinômee  viande  &:no«riiture:  car  nous 
ne  ferons  point  repeus  des  aureilles.  Et  puis, 
quâd  il  y  auroit  vn  bel  appareil  feulemét  envn 
banquet, S;  qu'il  n'y  auroit  rien  pour  manger, 
que  feroit-ce?Or  ainfi  en  eft-il  de  cefte  façon 
ponvpeulé  qu'ont  ceux  qui  s'addonnçnt  a  am- 
bition :  car  ils  auront  grand  luftre  &grande 
monftre,  il  femblera  que  ce  foit  merueilles:8c 
quand  ils  ouuriront  li  bouche,  les  propos  que 
ils  mettront  en  auant, feront  fi  enflez  qu'ils  re 
tentirontaux  aureilles  ,  qu'il  femblera  qu'ils 
doyuét  réplir  du  premier  coup  les  eftomac hs. 
Mais  quoy?Il  n'y  aura  q  vent  cependât. Voila 
pourvu  item.  Or  S.Pauîadioufte  qu'vne  telle 
vanité  de  voix  bié  refonn.îte  eft  prophane.  Et 
pourquoyfCar  nous  dcwôs  eftre  fanftifiez  par 
laparoledeDieH:c"eft  àdire.qla  fainftete  de 
Dieu  fe  inôftre  là:  tellement  que  nous  fommes 
trâsfigurez  en  icelle,&  qu'on  cognoilTe  q  c'e/t 
vrayementvne  doftrine  pour  lenouueler  nos 
ames,&pour  les  reformer  à  l'miagc  de  Dieu. 
D'autât  donc  q  le  vray  but  de  la  doctrine  qui 
nous  doit  eftre  prefchec,e/l  de  nous  fanftifier 
à  D:cu,nous  retirant  des  aborainatiôs  du  moa 
de,  quand  il  y  aura  cefte  vanité  que  i'ay  dite, 
&  qu'il  n'y  aura  que  pôpes,  cela  fera  propha- 
ne ,  c'cft  à  dire  comme  vne  phant.afie  char-  . 
nelle  qui  n'aura  aucune  dottrme  ,  finon  quel- 
que fubtilité.  Et  bien  cela  pourr.i  plaire  ,  & 
celaaufsi  fera  pour  occuper  les  ftns  humains: 
qu'on  dira,  Voila  de  belles  fpeculations.Mais 
cependant  Dieu  fera  comme  enftucli.  D'au- 
tant donc  que  toute  cefte  rhétorique  qu'ont 
les  gens  ambitieux  n'attire  point  le  monde  à 
Dieu,  &  ne  le  dédie  point  à  Ion  leru'ce  ,  voi- 
la pourquoy  elle  cû  nommée  prophane  par; 
fainft  Paul.  Or  maintenant  aduifons  de  fai- 
re no.ftre  profit  de  cefte  admonition.  Et  en 
premier  litu.que  ceux  qui  font  ordonnez 
Pafteurs ,  aduifent  bien  de  fiiyure  la  fimpli- 
cité de  l'Euaiigile  ,  de  n'auoir  point  vn  ba- 
bil artetté ,  mais  qu'ils  fe  contentent  d'e- 
difier  les  gens  en  Ja  crainte  de  Dieu.  Bncf, 
qu'ils  rcgaident  pluftoft  au  piotit  &  au  la.- 

lutdcs 


SVR   LA   I.    A   TIMOTH. 


3^7 


falut  des  anSes  qu'à  fe  faire  valoir:  fi  cela  n'y 
eft,on  ne  verra  que  corruption  en  tout  ce  que 
ils  pourront  fairc.Il  cft  vray  qu'ils  pourront 
pour  vn  temps  fe  plaire:mais  quoyfce  ne  fe- 
ra que  fumée.  Eftudions-nous  donc  à  celle  at 
irépance.que  toutes  fois  &  quantes  que  nous 
montons  en  chaire  pour  faire  noftrc  office, 
nous  ayons  ceci  bien  imprimé  en  nos  efprits, 
de  reietter  toute  vanité  profane,  que  noia 
n'ayons  ponitvn  babil  pour  amufer&  con- 
tenter le  monde,  pour  chatouiller  les  aureil- 
les,  que  tout  cela  foit  loin  de  nous,  mais  que 
nous  demandions  feulemét  d'édifier.  Quand 
donc  il  y  aura  fubflance  en  nos  propos,  voila 
ce  qui  fera  prifé  de  Dieu,  voila  ce  qui  édifie- 
ra fon  Eglife.  Et  cependant  conioignons  auf 
fi  ce  titre  de  fainûeté  :  que  la  doétrine  que 
nous  portons, ne  fente  point  vne  pliiloi'opliie 
mondaine.Comme  il  y  en  a  beaucoup  qui  dcf 
guiferont  TEuangilerque  fi  on  les  oit, cela  ne 
fentira  pas  vne  feule  goutte  de  la  maiefté  de 
l'Elcriture  iainfte ,  que  c'eft  autant  comme  fi 
on  oyoit  quelque  conte  de  plaifirpour  rire. 
Or  gaidons-Hous  de  cclarcar  il  cftditquela 
fainderéde  Dieu  doit  reluire  en  la  dodrine 
que  nous  portons,c'e(t:  àdire  qu'on  cognoif- 
fc  l.\  comme  la  police  du  faind  Elprit  &  de  la 
vertu  fpirituelle  exerce  vnc  lurifdition  i'ouiie 
raine  par  l'Euangile,  pour  condâner  le  mon- 
de,&  pour  le  réduire  en  l'obeifTànce  de  Dieu, 
pour  édifier  les  confciences,&  pour  les  mor- 
tifier, d'autant  que  la  parole  de  Dieu  doit  e- 
ftre  comme  vn  glaiue  çranchant  de  deux  co- 
ftez  ,  afin  de  fonder  iufques  au  profond  du 
cœur:qu'iln'y  ait  ni  péfees.ni  afix'dions,iuf- 
qu'à  la  moelle  des  os  ,  que  tout  cela  ne  foit 
«fprouué.  Q^e  nous  penfions  à  cela  fur  tout: 
voire  quant  à  noftre  eftat.c'eft  àdire  quant  à 
ceux  qui  ont  la  charge  &  office  de  porter  la 
parole  de  Dieu.  Or  l'ay  dit  q  ccfte  dodrine 
nous  côcerne  to'  en  gênerai. Car  come  on  en 
verra  beaucoup  qdeinâdent  de  plaire  au  mon 
de,&  de  gagner  les  auditeurs  par  bône  giace: 
aufsi  combien  y  en  a-il  qui  ne  demandent  fi- 
non  qu'on  leur  chante  vne  mufique  ioyeufc? 
que  quand  ils  viendront  au  fermon  ,  ou  qu'ils 
liront  la  parolcde  Dieu  ,  ils  voudroyent  que 
cela  fuft  leulement  pour  les  refiouir  ,  &  que 
Dieu  leur  leruift  pour  pafle-temps .  Et  de 
fait ,  qui  eft  caufe  que  ceux  qui  deuoyent  pu- 
rement enfeigner  l'Eglife  ,  &  en  iîmplicité, 
s'addonnentà  des  fpeculations  friuoles.finon 
qu'ils  voyent  les  hommes  élire  defgouftcz,& 
auoir  vn  appétit  defordonné?Car  fi  les  audi- 
teurs de  leur  part  ne  deraandoyent  finon  d'e 
ftre  nourris  &  repeus  de  la  vraye  fubllance  q 
Dieu  ordonne  pour  la  pallure  de  nos  âmes, il 
cft  certain  que  ceux  qui  ont  l'office  d'enfei- 
gncr,ne  feroyent  point  tentez  de  rien  dcigui 
fer  ne  de  farder  la  parolede  Dieu:  comme  S. 
Paulaccompare  àmacquignons  tous  ceux  qui 
ne  fuiucnt  point  l'Euar.gile,  mais  vftnt  de 
fard  &  de  belles  couleurs  pour  gagner  le  mo- 


de. Les  miniftrcs  donc  ne  Teroyent  point  ten 
teï  de  corrompre  la  parole  de  Dieu  ,  s'ih  ne 
voyoyent  ceux  aufqueU  ta  doânne  l'adrcf- 
fe.eftre  ainfi  corrépus  cnTeurt  appétit, D'au- 
tant pi  us  donc  nous  faut- il  obferucr  celle  rè- 
gle. Et  côme  faind  Paul  défend  à  TimotKee 
de  ne  point  s'enuelopper  en  vanité  propha- 
ne  de  babil, qu'aufsi  nous  ne  foyons  point  cht 
touillez  de  cela.  Quand  chacun  viédra  al^fer 
mon, qu'il  regarde  ;  Or  ça,ie  ne  vien  point  ici 
pour  ouir  quelque  refonnancc  ,  afin  Je  m'en 
retourner  en  la  maifon  comme  fi  l'eftoye  ve 
nu  veoir  vn  balleleur,  ou  bien  que  i'eufie  our 
des  chanfons  de  mufique  :  il  n'eft  point  que- 
lliôde  venir  chercher  en  la  doftrinede  Dieu 
nosappetis  charnels. Q_uoy  donc?  La  palture 
de  nos  âmes.  Ainfi  fuffife-nousd'auoir  vne 
vraye  fuWlance  qui  nous  foit  mife  en  auant, 
&  que  nous  retenions  nos  fensafin  qu'ils  ne 
s'efgarentpas,&que  nous  ne  lafchions  point 
la  bride  à  nos  vaines  curiofitez  ,  aufquelles 
nous  fommes  par  trop  enclins  de  nature.mais 
tendions  toufiours  à  noftre  Dieu  ,  lequel  veut 
que  nous  prenions  plaifir  en  fa  parole  :  non 
point  d'autant  qu'elle  nous  apportera  quel- 
que refonnâce  friuole,ou  quelques  belles  fpe 
culations&  fubtiles  :  mais  pource  que  nosa- 
mes  en  feront  nourries  &  repeues .  Voila  ea 
premier  lieu  ce  qu'il  nous  faut  obferuer.  Et 
au  lefte  ,  que  nous  penfions  aufsi  àcefte  fain- 
deté  de  laquelle  nous  auons  fait  mention. 
Pourquoy  ell-ce  que  iournellement  l'Euan- 
gile nous  cil  prefché?C'ell  afin  que  no°  foy- 
ons retirez  des  poUutiôs  du  monde, que  nous 
foyons  dédiez  à  Dieu.  Puis  qu'ainfi  elldonc, 
n'appetons  point  vne  laçon  d'çnfeigncraf- 
fedee  ,  qui  foit  comme  vne  philofophiede 
Payens:que  nous  cognoifsions  que  Die;u  a  iin 
primé  fa  marque  en  l'Elcriture  fainde  ,  afin 
qu'on  cognoilTe  que  c'tftluy  qui  parle  ,  Si 
qu'il  n'y  a  rien  ducoftédes  hommes,  finon 
qu'ils  font  minillres  &  inftrumens  :  mais  que 
c'eftdeDieu  feul  que  procède  la  doftrine, 
que  c'eft  deluy  qu'elle  nous  vient  ,&  qu'elle 
nous  monftre  comme  il  nous  fautalTuiettir  i 
fa  iuftice.  Apprenons  donc  d'apporter  vn  tel 
defir  quand  nousvenonsau  fermon, c'eftque 
Dieu  nous  fandifie  par  fa  parple:  comme  auf 
fi  c'eft  fon  vray  vfage  ,  come  noftre  Seigneur  "''•^•^4- 
lefus  en  parle, que  nous  fommes  vinifiez,  voi- 
re par  1^  dodrine  que  nous  auons  ouye.  Voi- 
la donc  en  fomme  comme  il  nous  faut  appli- 
quer cefte  fentence  de  faind  Paul  à  noftre  in 
ïlrudion.  Or  il  adioufte  encore?  aucc  la  vani 
té  de  babil, /'o/i/'i'/f/o»  <te  fcience  f,iufjtmet  mm 
mec.  Or  fous  ce  mot  (Toppcftiou  ,  faind  Paul 
entend  ce  qui  s'eleue  pour  obfcurcirla  do- 
drine aue  Dieu  nous  donne, &  qui  eft  contrai 
rt-  À  l'Efcriture  fainde.  Car  nous  voyons  que 
l'Euangile  n'a  pas  grand' pompe  :  Dit  u  qui 
a  formé  les  langues ,  pouuoit  bien  donner  à 
les  Prophètes  vne  autre  apparence, &  vn  plus 
grand  luftre.  Il  cft  vray  tpe  nous  trouueions 

S.iiii. 


3i! 


S  :E  R  M  O  N 


bien  en  quelques  Prophètes  vue  façon  de-par 
1er  quiert  polie  ."iSi  Dieu  a  voulu  monftreren 
cela  qu'il  poUuoit  bien  faire  tous  ceux  d«f- 
queh  il  Te  vouloic  ferniriaui'i>t  eloqucs  qu'ont 
iamais  efté  les  phiigrans  Orateurs  du  mon- 
de:riïais  il  liiy  a  fufti  d'en  dôner  quelque  mon 
ftre.  Cependant  nous  voyons  que  rEfcnture 
faïfte  eli  fart  iimplc,  qu'il  femble  que  ce  foit 
vne  doftrine  feulement  pour  les  idiots:&  ce- 
la tie  s'eft  point  fait  ians  caufe.  Car  d'vn  co- 
llé, Dieu  a  voulu  ofter  toutes  excufes  aux  hô 
mes  ,  afin  que  fous  ombre  qu'ils  font  rudes  & 
nonlettrez.ils  s'excuiâflènt.pourdire,  Nous 
n'auons  point  elle  enleignez.  Comme  nous 
voyons  qu'il  y  en  a  beaucoup  qui  diront,  Ho, 
de  moy  ,  ie  ne  fuis  point  clerc ,  ie  n'ay  point 
hanté  les  efcoles.Il  leur  femble  qu'ils  ont  la- 
ué  leurs  mains  pour  viure  en  leur  brutalité, 
quand  ils  auront  mis  cela  en  auant.  Or  Dieu 
leur  ofte  tous  fubterfuges, quand  il  nous  a  pre 
fente  fa  doftrine  en  telle  forte  que  les  plus  ru 
des  y  ont  leur  part.  II  ne  faut  donc  point  que 
on  foit  grand  doûeurpoureftre  partici|>ant 
delà  doftrine  de  Dieu  :  car  il  fe  conforme  en 
telle  forte ,  qu'il  bégaye  auec  nous  ,  afin  que 
&  grans  Se  pctis ,  &  hommes  &  femmes  puif- 
fent  eftre  repeus  de  ceùe  nourriture  celelte. 
Voila  pour  vn  item. Or  il  y  a  aufsi  cependat, 
que  Dieua  voulu  efprouucrnoJtre  obeiflan- 
ce.  Car  voila  l'humilité  denoilrefoy  qui  le 
monftre  quand  nous  foufFrons  d'cftre  enfci- 
gnez  par  vn  bûuuier:c5nie  Dieu  a  bien  choi- 
fi  Amos  de  ce  meftier-la  :  que  nous  n'auons 
point  hôte  aufsi  de  nous  afluiettir  à  des  pef- 
cheurs  &  gens  mechaniques,  comme  nous  fça 
uons  que  les  Apoftres  ont  efté.  Et  combien 
qu'ils  parlent  ainfi  rudement,  &  qu'ils  u'ayét 
point  vn  ftyle  fort  excellent ,  qu'ils  n'ayent 
point  vn  langage  poli  pour  contenter  lesau- 
reilles,toUtesfois  que  nous  ne  demandions  fî- 
non  d'eftre  repeu«  de  la  fubftance  qui  eft  con 
tenue  en  leur  dodlrine.  Voila  en  quoy  nous 
monftrons  noftre  obeiflance  ,  noftre  roy  eft 
■vrayement  humiliée.  Et  puis  d'autre  codé, 
nous  auons  vn  plus  certain  tefinoignage  de  la 
vci  tu  de  noftre  Dieu  ,  quand  nous  ne  fommes 
point  attirez  par  moyens  humains  ,&que  les 
hommes  ne  defployent  point  ici  vne  grande 
dextérité. Comme  quand  nous  lirons  les  rhe- 
toriciens ,  &  philoiophes  Payens,  il  eft  vray 
que  nous  pourrons  bien  eftre  touchez  :  mais 
«ela  eft  d'autant  que  celte  éloquence  a  vne  vi 
gueur  ,  &  que  brief,  nous  voyons  que  ce  n'eft 
point  la  vertu  de  Dieu  qui  befongne  là  :  mais 
que  c'eft  vne  conformité  qui  fe  rapporte  à  no 
ftre  nature.  Mais  quand  noilre  Seigneur  par- 
le fïmplement  &  d'vne  façon  rude&  grof- 
fiere,  &que  nousfentôs  là  vne  telle  vchemen 
ce  que  nous  foniraes  touchez  au  vif,  en  cela 
cognoiflons-nous  fa  vertu,  &  que  noftre  foy 
eft  fondée  furla  gr.icede  fonEfprit ,  comme 
fainrt  Paul  en  parle  aux  Corinthiens.  Nous 
voyons  donc  maintenant  pourquoy  Dieu  a 


L  I  r  I  T. 

voulu  jppofer  la  doûrine  de  falut  en'telle  fa- 
çon &  Il  baflè  ,  &  qui  eft  contemptible  quant 
au  monde,  comme  par  trop  vulgaire.  Or  ce- 
pendant, le  diable  fçachant  bien  que  les  hô- 
■raes  volontiers  feroyent  toufiours  voltigeas 
en  l'air,  &  qu'ils  ne  demandent finondes  fpe 
culatioDs  qui  les  tranfportent ,  viendra  met* 
tre  en  auât  vnefaçon  de  doûrine  qui  eftpora 
peufe.  Sainft  Paul  appelle  cela  Ofpofitjn.  La 
doftrine  de  Dieu  fe  propofe  tout  doucemcr, 
&  s'appelle  la  pafture  de  nos  âmes ,  afin  qu'il 
nous  fuffife  d'eftre  goiiuernez  par  la  main  de 
Dieu, lequel  vfed'vne  grande  priuautéauec 
nous,  quand  il  nous  propofe  C  familièrement 
i'a  parole.  Or  le  diable  voyant  bien  qu'il  y  a 
des  efprits  hautains  &  volages ,  leur  viét  met 
tre  en  fantafiede  faire  de  grandes  monftres, 
que  ceftevanité  de  babil  profane  dot  S.Paul  a 
fait  mention  n'agueres  eft  côme  vn  grand  lu- 
ftre.Or  combien  ([u'il  femble  que  la  doftrine 
de  Dieu  doiue  eftre  du  tout  enfeuelie  quand 
le  diable  eftend  ainiî  fes  ailes ,  &qu'ilafes 
grandes  tapifleries, hautes  &  larges, fi  ne  faut 
il  point  que  nous  foyons  efmeus  pour  cela  de 
nous  deftourner  de  la  pure  fimplicité  de  l'E- 
uangile. Ainfi  donc,combien  que  ceux  qui  ont 
l'office  de  porter  lemeflagede  iàlut ,  &  qui 
doiuent  prcfcher  la  dotlnne  de  noftre  Sei- 
gneur k'fus  Chrift,puiflent  acquérir  plus  grâ 
de  réputation ,  en  ayant  vn  langage  affilé,  en 
ayant  vne  apparéce  pour  plaire  aux  hommes, 
en  ayant  de  belles  rhétoriques  ,de  beaux  di- 
ftons,&  brocards, &chofes  femblables,  qu'en 
fuyuant  Amplement  la  pureté  de  TEuangilc, 
fi  ne  taut-il  point  qu'ils  s'en  deftournét  pour 
tant. Si  on  allegue,&  comment? Voila  des  op- 
pofitions  qui  fe  mettront  en  auant  contre  la 
puredoftrine.  Quand  vn  glorieux  viendra 
pour  arguer,  il  femble  que  la  parole  de  Dieu 
doiue  eftre  foulée  au  pied. Et  fi  on  ne  luy  re- 
lîfte.que  fera-ce?  Or  qu'il  ne  nous  chaille  de 
cela,  faifons  ce  que  Dieu  nous  commande ,  & 
fuiuons  le  chemin  qu'il  nous  monftre.finsv- 
fcrde  fubtilité  vaine  &  fuperflue  ,  combien 
que  ceux  qui  voudrôt  impugner  la  vérité, s'en 
vueillent  aider.  Nous  voyons  donc  l'intctioa 
de  S. Paul. Or  côme  il  exhorte  ici  Timothee,. 
&  en  fà  perfône  to'  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu.notôs  bien  qu'il  nous  faut  déporter  de 
cela.  Et  côbien  q  nous  voy ôs  les  fuppofts  de 
Satan  qui  fe  facét  valoir,  neantmoins  ne  leur 
portons  point  d'enuie:qii'ilsiettent  leurs  ef- 
cumes  tant  qu'ils  voudront, cependant  feruôs 
â  Dieu  fimplcmcnt,  contentons-nous  de  la 
mefure  qui  nous  eft  donnée.  Et  quand  nous 
en  ferôs  ainfi  ,  nousaurôs  cefte  fobrieté  pour 
dire. Il  eft  viay  que  le  monde  prifera  comme 
grande  fcience  ce  qui  ne  feruira  de  rien(coin 
me  nous  voyons  que  cela  eft  par  trop  com- 
mun )  mais  ce  n'eft  que  faufleté  ,  ce  u'cft  que 
mcnfonge.  Et  combien  que  cela  s'oppofeà 
Dieu  ,  &  qu'il  femble  que  les  folles  fpecula- 
tions  que  les  caphars  &  gens  fcmblable';  ap- 
portent 


SVR   LA    I.    A   TIMOTH. 


portent,  foyentpour  anéantir  ccfte  parole 
de  Ditu.pourcc  qu'elle  eft  ainlï  baffe,  tant  y 
a, puis  qu'elle  a  vn  (i  bon  fondement  que  la 
vérité  ,  qu'elle  lera  maintenue.  Allons  donc 
toufiours  noilre  train  ,  &  ne  décimons  point 
dn  droit  chemin,  combien  que  le  monde  foit 
fi  malin  &perucrs  pour  mal  iuger.  Et  no- 
tamment S.  Paul  dit  que  ceux  qui  ont  voulu 
s'addonner  ainfi  à  babil,  ont  trré  en  Li  foy. 
c'eft  à  dire  ,  qu'en  la  Hn  ils  fe  ("ont  aliénez  & 
comme abbaftardis  de  la  pure  vérité  de  Dieu. 
Or  ceci  eft  bien  notable  .    Car  du  premier 
coup  il  n'aduiendra  point  que  ceux  qui  s'ele- 
uent  ainfi,  ic  qui  cherchent  de  le  faire  valoir 
au  monde, renuerfent  la  vérité  de  Dicu,qu'ils 
propofent  des  fauffes  doûrines  :  mais  tant  y 
a  que  la  parole  de  Dieu  perdra  (a  maiefté, 
qu'on  ne  cognoillrâ  plus  que  c'eft  Dieu  qui 
parle  ,  que  les  confciences  n'en  feront  point 
touchées.  Voila  le  premier  nwl.Mais  en  la  fin 
rortre  Seigneur  ne  permet  point  que  fa  Paro 
le  foit  ainfi  mife  en  ieu  ,  qu'on  s'en  moque, 
qu'on  en  face  vne  farcene.   Il  aueugle  don- 
quesceux  quianeantiffent  ainfi  la  maiefté  de 
fa  Parole, tellement  qu'ils  la  profanent  &  pol 
luent  en  des  erreurs  bien  lourds.  Et  d'autant 
que  leurs  efprits  font  fretillans,  il  faut  qu'ils 
imaginent  ceci  &  cela:&  Dieu  lafche  la  bride 
à  Satan  qui  les  trafporte. Voila  donques  pour 
quoy  fainft  Paul  menace  ceux  qui  dcfguifent 
ainfi  la  pure  fimplicité  del'Euangile.Or  ccfte 
menace-ci  s'addrelTe  aufsi  bien  en  commun  à 
tous.  Carfi  nous  fommes  conuoiteuxd'ouir 
des  nouuelles  ,  &  d'auoir  vn  babil  profane  ,  il 
eft  certain  que  Dieu  en  la  fin  nous  oftera  la 
droite  pafture:  que  nous  aurons  du  vent  pour 
tout  potage  pour  nous  remplir.mais  il  n'y  au 
ra  point  de  fubftance  qui  nous  nourriffe ,  &  .i 
laquelle  nous  puifsiôs  prendre  contentemét, 
jf-^^ .,  ,   côme  le  Prophète  Ifaiedit ,  que  c'eft  le  vray 
-j,   ,        repos  des  âmes, que  nous  efcoutiôs  Dieu  par 
j„  1er  ,  &  quand  on  nous  propofe  fa  vérité  ,  Que 

nous  tendions  là  :  &  puis  qu'il  fe  déclare,  que 
nous  foyons  comme  attachez  à  la  clarté  de 
l'Euangile  ,  &  que  nous  ne  demandions  finon 
de  louir  de  ce  threfor  qui  nous  a  efté  donné, 
afin  que  la  poflefsion  en  foit  permanente.  Et 
fi  nous  n'en  voulons  poin»^  eftre  priuez  ,  que 
nos  cupiditez  volages  ne  nous  tranfportent 
point  çà&  là,  qu'il  nous  fufhfe  d'ouir  ce  que 
noftre  Seigneur  nous  enuoye  ,  &  ce  qui  nous 
eftpropofé  fimplemétdel'Efcriture  fainfte. 
Et  auec  la  menace  qui  noiu  eft  ici  faite  par 
fainft  Paul ,  l'expenence  nous  doit  bien  faire 
trembler.  Car  nous  voyons  comme  il  en  eft 
âduenu  en  la  Papauté.  Dont  eft  procedee  vne 


y-9 

telle  corruption  comme  on  l'y  voitfqu'il  km 
ble  qu'on  ait  voulu  pleincmét  defpitcr  Ditu, 
pour  ruiner  tout  ce  qu'il  auoit  édifié  par  la 
Loy.par  fes  Prophètes, 5:  parl'Euangile.'que 
il  y  a  des  abominations  fi  lourdes  que  c'eft  v- 
ne  horreur,  qu'il  faut  que  les  hommes  foyét 
du  tout  hebetez  pour  receuoir  cefte  dorfn- 
ne-la?Or  il  n'y  a  nulle  doute  que  tout  ce  mal 
ne  doiuc  eftre  imputé,  pourcc  que  les  homes 
ne  fe  font  point  contenus  en  la  lîmplicité  de 
rEuaiigile:&:  il  a  falu  que  Dieu  fe  fou  vengé, 
pouice  que  les  hommes  ont  voulu  eftre  plus 
fages,enfaifant  plus  qu'ils  n'auoyentappriiis 
dehiy.Voyansdonques  qu'on  eft  venu  en  des 
ténèbres  fi  efpelTes,  que  les  hommes  ont  efté 
abbrutis  de  delaifTer  la  pure  vérité  de  Dieu, 
que  le  diable  a  gagné  vne  licence  fi  énorme, 
pource  qu'on  ne  s'cft  point  contété  de  la  fint 
plicité  de  l'Euangile, craignons  vne  telle  ven 
geance.Car  elle  nous  eftaufsi  bienappreftee, 
quâd  nous  voudrons  eftre  par  trop  fretillans, 
que  nous  donnerô!  vogue  à  nos  concupifcen 
ce-;. Si  donc  nous  ne  voulons  point  errer  en  \x 
foy, c'eft  à  dire, nous  retenir  en  la  pure  doftri 
ne  de  falut ,  auifonsde  fuir  touteambition  Se 
vanité,  &  que  ceux  qui  portent  la  parole  de 
Dieu.nedemadent  que  d'édifier  le  peuple  ea 
lacrainted'iceluy  ,  monftrer  comme  il  nous 
le  faut  inuoquer,&  comme  nous  deuons  auoir 
noftre  refuge  à  luy.Et  au  refte,tous  ceux  qui 
vienent  pour  efcouter  l'Eu5gile,  qu'ils  n'a'W- 
ent  autre  defir  finon  d'eftre  faniftifiez  à  Dieu, 
afin  qu'il  les  aduoue  de  fon  troupeau, pour  e- 
ftrc  repeus  de  la  vraye  fubftance  de  fa  Paro- 
le,qui  eft  la  pafture  de  leurs  âmes  :&  qu'il';  ne- 
l'oyent  point  feulemét  de  leurs  aureilîes  char 
nelles,mais  que  Dieu  leur  dône  vne  vraye  r» 
cine  &  viue,  afin  que  par  ce  moyen  ils  foyenir 
attirez  à  la  vie  eternelle,à  laquelle  nous  fon\ 
mes  iournellement  conuiez. 

O  R  noiis-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  ,  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  nous  les  face  telle- 
ment fentir.quede  plus  en  plus  auec  vraye  re 
pentance  nous  retournions  àluy:&:  que  nous 
apprenions  à  le  magnifier,  fur  tout  quand  il 
s\ft  déclaré  à  nous  fi  priueemcnt  par  fa  paro 
le.  Et  que  le  requerans  qii'il  luy  plaife  nous 
pardonner  nos  fautes  panées,  nous  deman- 
dions aufsi  d'eftre  conferinez  par  fon  fain£ir 
E<prit  de  iour  en  iour,  iniques  à  ce  qu'il  nous 
ait  defpouillez  de  toutes  les  corruptions  de 
cefte  vie  prelênte,pour  no'  reformer  du  tout 
à  la  iuftice.  Ainfi  nous  dirons  tous.  Dieu  tout 
puiflànt,Pere  cekfte,&;6. 


LOVE     SOIT     DIEV. 


T.L 


530 

Sermons  de  lehan  Caluin  fur  la  fe- 

CONDE    EPISTRE    DE    SAINCT 
PauIaTimothee. 

LA   SECONDE    EPiSTRE   DE    SAINCT 

Paul  Apoftre  à  Timochee. 

G  H  A  P.     I. 

A  V  L  Apoflre  de  le  fus  Chrifl,par  la  y>oloté  de  Dieu, 
félon  la  promejfe  de  yiejacjuelle  ejl  en  le  jus  Chnj}, 

A  Timothee  montre fcher  fils ,  grdce ,  miséricorde  y 
(^paix  de  par  Dieu  le?cre ,  0*  deparlefus  Qhrifino 


jlre  Seigneur. 


S'^^t?^  A  s  O  I  T  qu'en  tout  ce  que  fainâ; 
i^^<  Paul  nous  a  laiffé  par  efcrit ,  il  nous 
tSii^  faille  confidercr  que  c'eft  Dieu  qui  a 
parlé  à  nous  par  la  bouche  d'vn  homme  mor 
tel,&  que  toute  fa  doftrine  doit  élire  receue 
en  authorité&  reueréce  telle  comme  fi  Dieu 
feraonftroit  viliblement  duciel,  neantraoins 
il  y  a  encores  en  celle  Epillte  vn  regard  fpe 
cial,  c'eft  que  famâ:  Paul  eftat  en  prifon .voy- 
ant fa  mort  prochaine,  a  ici  voulu  confermer 
fa  foy,  comme  s'il  l'euft  feellee  de  fon  fang. 
Ainfi  donc, toutes  fois  &quantes  que  nousli- 
fons  celle  Epiltre,  queTcllat  auquel  eiloit 
pour  lors  fainû  Paul ,  nous  viene  dcuant  les 
yeux  ,  c'ell  afçauoir,  qu'il  n'atcendoit  fînon 
de  mourir  pour  le  tcfmoignagede  l'Euangi- 
le,amfi  qu'il  a  fait,  comme  en  portant  l'enfei 
gne.pour  nous  donner  tant  plus  grande  certi 
tude  de  fa  doctrine, &  cela  no'  touchera  plus 
au  vif.  côme  à  la  vérité  fi  on  lit  celle  Epiilre 
diligément.on  trouuera  que  l'Efprit  de  Dieu 
s'y  eft  déclaré  en  telle  forte,  en  telle  maiellé 
&  vartu, qu'on  eftcontraintd'ellre  comme  ra 
ui.  Quât  à  moy,ie  fçay  que  celle  Epiftre  m'a 
autant  profité  que  nul  liure  de  l'Efcriture,  & 
tous  les  lours  encores  profite:&  quad  chacun 
y  regardera  fongneufemét,il  n'y  a  doute  que 
il  ne  trouue  le  femblable.  Et  fi  nous  defirons 
d'auoir  vn  tefmoignage  de  la  venté  de  Dieu 
qui  nous  tranfperce  le  cœur ,  nous  pouuons 
bien  nous  arreiler  ici.  Car  il  faudra  qu'vn  ho 
me  foit  bien  endormi  ,  &  plus  que  ftupide ,  l\ 
Dieu  ne  befongne  en  luy  qu.îd  il  orra  la  do- 
ftrine  qui  en  fera  tirce.  Voila  ce  que  nous  a- 
uons  à  obferuer  dcuant  qu'entrer  en  pro- 
pos. Or  cependant  nous  voyons  derechef  ce 
qui  acfté  déclaré  c-n  l'autre  Epillre, c'ell af^a 
uoir  que  S.  Paul  n'a  point  eu  ici  regard»  vne 


feule  perlone,  mais  à  toute  l'Eglife  de  Dieuf 
Qu'ainfi  foit,  s'il  euft  efcrit  priueementi  T* 
mothee.il  n'auoit  nul  beloin  de  mettre  ce  ti- 
tre,Q«;  (7  efloit  Apnflre  félon  Lt  -ooloté  de  DifUt 
car  cela  eiloit  allez  perfuadé  à  Timothee  qui 
l'auoit  cognude  long  temps,  8c  qui  auoit  ap- 
probation de  ce  qui  ell  ici  contenu  :  melines 
nous  voyons  quand  il  n'y  a  eu  nul  contredit 
que  faind  Paulnefuft  réputé  pour  Apoftre 
de  lefus  Chrift,  qu'il  nes'cft  point  empefché 
pour  vouloit  certifier  les  fidèles  de  cela. No- 
tons bien  donc  ,  cobien  que  cefte  Epifti  e  por 
te  le  nom  de  Timothee  ,  toutesfois  qu'elle  a 
eftc  dediee  à  toute  l'Eglife  de  Dieu  ,  afi"n  que 
auiourd'huy  elle  nous  férue. Or  cepédantno 
tons  bien  que  S.  Paul  quand  il  s'appelle  ferui 
teurde  lefus  Chrift, môftre  que  toute  l'autho 
rite  qu'il  demande, n'cft  point  comme  fi  on  le 
preferoitaux  autres,  mais  que  Dieu  foit  exal 
té  &  obey  en  luy. Car  de  tait, ceux  qui  fcpor 
tent  fidelemét  en  l'Eglife  de  Dieu,  ne  deman 
dent  point  d'vfurper  aucune  raaiftrife  à  eur, 
pluftoftils  cherchét  que  lefus  Chrift  ait  luy 
fcul  toute  prééminence  ,  qu'on  fc  foumette  à 
luy, côme  il  no'  a  efté  eilabli  dofteurde  Dieu 
fon  Père, qu'on  fe  tiene  à  ce  qu'il  dira.  Il  laut 
donc  que  toute  hautefle  humaine  s'abbaifle 
quad  il  cil  queftion<le  la  dignité  de  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift, S:  que  ce  qui  a  efté  dit  par 
lehan  Baptifte,  toit  accompli ,  c'eft  afçauoir  If/;.3.30 
que  tous  fiyct  diminuez, &  que  luycroilTede 
plus  en  plus.  Au  relie  ,  fainifl  Paul  aufsi  nous 
moftre  que  noftre  foy  nedoit  point  eftre  fon 
dec  fur  les  hommes ,  mais  qu'elle  doit  touf- 
iours  auoir  fon  but  à  Dieu,&  .\  cthiy  qui  par- 
le en  fon  Nini,afç.uioir  à  noftre  Stigneur  le 
fus  Chriil.  Quand  doc  les  homme  s'tlcuent, 
&prcnentvu  tel  degré,qu'ils  voudroyé:  que 

on  creuA 


s  VR     LA   IL    A    TIM  O  TH. 


on  creiift  à  leur  porte, qu'ils  vfurpcnt  cefte  li- 
céce  de  baftir  des  articles  de  foy ,  ils  detpouil 
lét  le  Fils  de  Dieu, ils  luy  rauiffent  ce  qui  luy 
appartient  :  carc'eft  de  luy  leul  que  le  Père  a 
prononcé,qu''on  l'efcoute.Et  s'il  y  a  auiour- 
d'huy  homme  digne  d'eftre  el'couté  ,  fainft 
Paula-il  efté  le  moindre?  Or  eft-il  ainfi  qu'il 
nes'eft  rien  attribué  quant  à  luy, mais  feule- 
ment a  prins  le  nom  de  Icfus  Chrift,  d'autant 
qu'il  eftoit  enuoyé  de  luy  pour  porter  le  mef 
fagequiluy  eftoit  commis.  Et  afin  que  nous 
foyons  certifiez  qu'il  ne  s'ingeroit  point  fauf 
fement ,  il  adioufte  que  c'eft/f /o»  U  yolôté  de 
Dieu,.  Car  (comme  du  l'Aportre  en  l'Epiftre 
^'''■'i'^  aux  Hebrieux  )  nul  ne  fe  doit  ingérer  ,  c'eft 
vne  chofe  trop  noble  &  trop  prccieufe  de 
gouuerner  l'Eglife  de  Dieu.pour  dire  que  les 
hommes  prenent  cefte  fiardielTe  :  mais  il  y  a 
Dieu  qui  s'eft  referué  ceft  office  d' ordonner 
ceui  que  bon  luy  femble.  Or  il  a  commencé  à 
lefus  Chrirt ,  afin  qu'en  luy  nous  ayons  com- 
me vn  patron  gênerai.  Combien  qu'à  noftre 
Seigneur  lefus  appartiét  toute  maieftéS:  em 
pire.fî  eft-ce  qu'il  a  voulu  encores  eftre  depu 
lé  de  Dieu  fon  Père  auec  ferment  folennel. 
Pourquoy.^  Il  nous  efl  comme  vn  miroir,  que 
les  chofes  ne  fe  doiuent  point  faire  contuié- 
ment  en  l'Eglife  de  Dieu  ,  mais  que  chacun 
doit  attendre  fa  vocation. Et  notâment  lainft 
Paul  parle  ici  de  la  volonté  de  Dieu. Car  cô- 
bien  que  les  homes  quelques  fois  eliront(cô- 
me  Dieu  a  voulu  que  la  police  foit  gardée) 
toatesfois  fi  eft-ce  que  Dieu  gouuernc  touf- 
iours  quand  les  chofes  font  bien  conduites. 
Vray  efl:  qu'il  y  a  eu  vne  confîderation  pro- 
pre en  l'office  d'Aportre:car  il  a  falu  q  I3ieu 
parlaft  comme  en  perfonne.Mais  quand  il  eil 
queftion  de  tous  les  prefcheurs,  &  du  régime 
ordinaire  de  rEglife,cela  doit  auoir  lieu  que 
tous  paruienent  à  ce  degré  d'otfice  par  la  vo 
lonté  de  Dieu, que  fon  nom  foit  inuoqué,afin 
qu'il  prefide  au  confeil.que  celuy  qui  i'era  ap 
pelé  ,  ait  tefmoignage  que  ce  n'efl  point  du 
cofté  des  hommes,  que  ce  n'eit  point  par  fon 
ambition  ne  par  autre  mauuaife  prattique. 
Nous  voyons  donc  en  fommequefainil  Paul 
a  voulu  ici  monflrer  qu'il  n'efl  pas  en  cha- 
cun de  s'auancer  ,  mais  que  Dieu  nous  doit 
tendre  la  main  ,  qu'il  y  ait  bon  ordre  en  l'E- 
gliie,  &  que  les  chofes  né  foyent  point  confu 
fes.  Et  cependant  il  refcrue  toufiours  à  Dieu 
fon  droit, afin  qu'on  coçnoifle  qu'il  n'a  point 
refigné  fon  empire  ,  mais  qu'il  veut  que  les 
iîens  luy  foyét  fuiets.Et  en  cela  voit-on  auf- 
lî  vne  amour  finguliere  qu'il  nous  porte.  Car 
quand  il  difpofe  félon  fa  voloté  les  eftats  en 
fon  Eglife  ,  c'eft  ligne  qu'il  y  eft  prcfent ,  Se 
^u'il  veille  delfus.  Q^ud  nous  voyons  vn  tel 
loin  que  Dieu  a  de  nous  ,  &  que  c'tftluy  qui 
Eou':  pouruoit  de  Pafteurs ,  que  c'eflluy  qui 
les  choifit ,  en  cela  (di-ie)  nous  fommes  tant 
plus  admoneflezd'vne  bôté  infinie  qu'il  nous 
ing«ftre,  &  auons  dequoy  nous  confoler,ma- 


gnifians  cefte  bonté  paternelle  qui  nous  tit 
ICI  teftifiee.  Or  cependant  il  y  a  aufsi  vn  au- 
tre poinft,c'eft  que  fainrt  Paul magnjfie  ici  la 
feulegracede  Dieu, fans  alléguer  fes  mentes, 
fans  dire  qu'il  ait  deflerui  ceft  honneur.  Car 
quand  il  parle  de  la  volonté  de  Dieu  ,  il  y  a 
comme  vne  comparaifon  tacite  entre  vne  e- 
leûion  gratuite  que  Dieu  fait  de  nous, &  en- 
tre les  mérites  que  nous  pourrions  apporter, 
comme  il  femble.  Les  hommes  voudroyenc 
bien  toufiours  eftre  reputez  aflcz  habiles  ,  & 
qu'on  imaginaft  quelque  vertu  en  eux, par  la- 
quelle Dieu  leur  fuft  obligé.  Saind  Paul  au 
c5traire,quâd  il  fe  nomme  Apoftre,nedreire 
point  la  crefte  pour  dire  qu'il  s'y  foit  auan- 
cé  ,  mais  il  remet  le  tout  à  la  bône  volonté  de 
Dieu  &  à  fon  plaifir  :  comme  s'il  difoit  qu'il 
n'eft  point  queftion  d'enquérir  s'il  a  efté  meil 
leur  que  d'autres,  ou  plus  idoine.  Il  eft  vray 
que  cela  y  eftoit,  d'autant  que  Dieu  l'auoic 
formé  "  mais  cependant  il  fe  démet  de  ce  que 
les  hommes  orrr  accouftumé  d'attirer  à  eux. 
Sainû  Paul  donques  côfefis  qu'il  n'eft  point 
Apoftre  pource  qu'il  l'auoit  defleraiv  mais 
d'autant  que  le  plaifir  de  Dieu  eft  tel.  Et  eiî 
cela  voit-on  (  fuiuant  la  doftrine  laquelle  eft 
par  tous  fes  efcrits)côme  il  ne  laifle  rien  aux 
hommes  dequoy  ils  fe  puiflent  glorifier.mais 
veut  que  Dieu  apparoiflè  en  tout  &  par  toxit^ 
Or  il  y  a  puis  après  vn  mot  adioufte  qui  em- 
porte beaucoup  •  Delà  pronuffe  de  -vie  qui  ej{ 
en  lefus  chrifl.  En  quoy  fiiinû  Paulmonftre 
que  les  Apoftres  n'ont  point  efté  créez  pour 
eftre  comme  chiens  muets,  ou  des  idoles.maiî 
pour  anoncer  la  doftrine  de  fâlut ,  &  en  eftre 
tefmoins.  le  di  que  ce  poinâ  emporte  beau- 
coup. Car  nous  voyons  que  le  Pape  auec  fes 
belles  cornues  n'ont  point  honte  de  s'appel- 
1er  fucceflèurs  des  Apoftres.&  cepédant  fi  on 
les  veut  attirer  en  chaire  pour  exercer  ceft 
office  ,  cela  derogue  à  la  dignité  Epifcopale, 
voire  ce  leur  femble.  Or  faind  Paul  monftre 
ici  qu'il  n'y  a  nulle  dignité  de  prélat  ni  d'£- 
uefque,ni  de  Pafteur,finon  pour  porter  &  a- 
noncer  l'Euangile.  Tou9  ceux  donques  qui 
voudront  auoir  quelque  preanincnce  en  l'E- 
glife,il  faut  qu'ils  cognoiffent  que  c'eft  à  ce- 
fte charge  que  Dieu  les  a  cftabbs,  qu'ils  pro- 
pofent  la  doftrine  de  falut.Ec  ainfi  que  le  P* 
p.;  fe  vante  tant  qu'il  voudra  de  fa  Hiérar- 
chie,&  qu'il dile  que  tous  ces  marmoufets-la, 
c'eft  à  dire  ces  Euefques  qui  le  tienent  là,  re- 
prefentent  l'Eglife  ,  il  ne  faut  que  ce  mot  de- 
fainfl  Paul  pour  monftrer  leur  impudt  nce  ,  & 
pour  leur  arracher  ce  mafque  duquel  ils  fe- 
couurent.  Car  s'ils  nous  anonçoyLr.t  la  veri-- 
té  de  D!cu,&  qu'ils  nous  fuflent  tefmnins  de' 
rtoftre  fahii,il  ne  faudroit  point  contredire  à"' 
ce  qu'ils  allèguent. Mais  ccperdant  qu'il'  per 
uertilFcnt  toi  t  ordre  ,  voire  d'autant  qu'il  ne 
leur  chaut  d'exercer  ceft  office  que  Dieu  leur 
a  commi' ,& mcfines  s't  n moqient,il  leur  l"em' 
ble  que  cela  ne  leur  fou  point  dccent,&  qu'il 

T.u. 


3îi  S  E  R  M  O  N    n 

ne  c-ôuiene  point  à  leur  eft«f.Il  ne  faut  point    Paul  traitte  ici  de  l'Euangile  ,  c'eft  que  Dieu 
vlerdfe  ioguedifpute:  car  s'ils  l'ont  Eueftjues,    n'a  point  voulu  qu'il  nous  l'oit  prefché  pour 
il  faut  qu'ils  ayêt  la  bouche  ouaerte  pour  pre-    gain  qu'il  y  ait  de  fa  part,  mais  c'eftpour  no- 
Icher.  To'.itesfois  encores  n'elt-ce  pas  alTez    lire  profit.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  no 
que  les  hommes  faccnt  office  de  prefcheurs,     ter.  Et  cependant  ce  n'eft  point  fans  caufe  que 
mais  il  faut  qu'ils  loyent  vrais  mciragersde     fainct  Paul  monftre  qu'il  le  propole,  voire  en 
Dieu,&  qu'ils  ne  mettent  point  enauant  leurs     lelus  Chriltxarpar  ce  mot  il  nous  veut  mon- 
fongeç  &  refueries ,  mais  ce  qu'ils  auront  re-    ftrer  que  Dieu  nous  a  plus  honorez  que  les 
ccu, qu'ils  le  difpenlcnt  fidèlement  fous  y  rien    Pères  anciens, &  qu'il  nous  a  clcuez  en  vn  de- 
adioufter. Et  voila  pourquoy  iainct  Pauluo-    gré  par delTus  eux. Et  d'autant  plus  fommes- 
tamment  pailede  la  promelfe  de  vie:  comme    nous  à  condamner  ,&  noltie  ingratitude  ell 
s'il  difoir, qu'il  n'apportepoiBtdes  longes  que    tant  plus  inexcufable,  lînous  ne  venons  auec 
il  ait  baftis  en  l'on  cerueau, qu'il  n'a  point  auf-    vn  deiîr  ardent ,  à  vn  tel  conui  que  Dieu  fait, 
fi  ramalfé  ça  &  là  quelque  dodrine  e/lrange,     quand  il  luy  plaift  qu'on  nous  propofe&  que 
mais  qu'il  propofe  ce  que  Dieu  luy  acomman     on  nous  prtfche  fonEuangile  .  Ileft  vray  que 
de.Reccnonsdinques  que  tous  ceux  qui  veu-     de  tous  temps  Dieu  a  promis  aux  fidèles  le 
lent  dire  recognus  Palpeurs  en  l'Eglile  de     l'alut  que  nous  attendons  auiourd'huy,  &  qui 
Dieu.doyuent  s'aihaindre  àcelte  règle  ,  c'cft    nous  eft  prefenté  en  l'Euangile,  &  c'a  eûé  le 
d'anoncer  l'Euangile  en  celle  forte  qu'il  n'y     fruid  de  leur  adoption.  Cardequoyleureuft- 
ait  nul  meflinge  m  corrupnonde  leur  collé,    il  feruide  fçauoir  que  Dieu  eftoit  leur  Sau- 
Crpendant  l'aind  Paul  aufsi  nous  rend  ici  l'on     ueur  &  Pere.finon  qu'ils  euflent  tendu  à  la  vie 
miuiftere  amiable, afin  que  nous  fçachions  que     celefle  ;  Ainfi  donc  les  Pères  fous  la  Loy  ont 
c'eitnoftre  l'ouuerain  bien  que  de  l'efcouter     bien  eu  vne  efperance  femblable  à  celle  que 
&  rcceuoir.  Car  pourquoy  &:  à  quelle  fin  eft-    -nous  auons  auiourd'huy.  Mais  tant  y  a  qu'ils 
ce  que  Dieu  nous  l'ufcuedes  docteurs  qui  nous     ont  efté  comme  en  fufpcns ,  qu'ils  ont  langui, 
prel'chent  l'Euangile  ?  Eft -ce  pour  auantage     &  y  a  eu  toufiourscôme  vnedcftrefle,  iniques 
qu'il  y  ait?Nenni:mais  il  procure  nollre  falut.     .à  ce  que  lefus  Chrift  fuft  apparu  :  car  c'clt  en 
Quand  donques  nous  voyons  que  Dieu  n'a     luy  que  toutes  les  promeffes  de  Dieu  oir  leur 
regardé  finon  à  nofttebien&  profit,  quand  il   'ouy,&r  leur  certitude  ,  Se  que  Dieu  les  ritifie. 
3.  voulu  que  fon  Euangile  l'oit  publie  ,  nous     Ainfi  donc  notons  bien  que  famftPaulen  par 
fommes  plus  que  malins  li  nous  reful'ons  d'e-    lant  de  la  promeirede  vie, nous  monftre  qu'au 
Ure  ainfi  conduits:car  c'clt  comme  fi  nous  de-    iourd'huy  elle  nous  eft  plus  priueement  mife 
fpitions  Dieu  en  voulant  repouffer  la  vie  que     en  auant, qu'elle  n'a  elle  fous  la  Loy. Car  nous 
il  nous  offre. S'il  veiioit  exiger  Ion  droit,  com     auons  lefus  Chrift  qui  eft  raccoinplilfement 
me  vn  Prince  quidemâderafes  tributs,  cSd que    de  toutes  chofes  qui  font  requifes  pour  noftre 
il  vfaft  de  rigueur  telle  qu'il  pourroit, encores     rédemption  ,  en  luy  nous  contemplons  ce  qui 
faudroit-il  plier  le  col.Mais  nous  aririôs  quel     a  efté  figuré  comme  eu  ombrage  à  nos  Pères, 
que  excule  deuat  les  hommes  de  dire,  Si  Dieu     Et  ainfi^comei'ay  défia  déclaré)  malheur  fur 
fc  monltroit  Père  &  Sauueur  enuers  nous,     nous  fi  nous  n'auôs  les  aureilles  drelTees  pour 
nous  ferions  contcns  denous  ranger  à  luy:     receuoirla  proinelTe  quand  Dieu  nous  lof- 
niais  quand  il  n'y  a  que  frayeur  ,  il  ne  fe  faut     fre,  voire  &  l'accomplit  par  effeften  la  per- 
point  esbahir  fi  nous  reculons.   Nous  pour-     Tonne  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.Orcon 
rions  alléguer  cela.  Or  maintenant  il  n'y  a     fequemment  faintl  Paul  adioufte  ,  A  Tiwotfcf» 
nulle  exckil'e  telle.  Et  pourquoy?  CarDieune     monfls  aimr,gr,tce,mifcricorde,  &■  faix  Ae  par 
parle  point  finon  pour  noftre  bien:  il  veut  que     rieu,  le  Vtre  ,  o- de  par  nnfire  Seigneur  iefns 
l'on  amour,  fa  mifericorde  ,  fa  bonté  infinie     c/»>-//î-.  Quand  il  appelle  Timothee  fon  fils, 
nous  fovent  mifes  au  deuant.que  nous  foyons     c'eft  d'autant  qu'il  l'auoit  engendré  en  l'E- 
certifiez  de  noftre  falut ,  que  nous  foyons  re-     uangile.  Et  ceci  n'elt  point  contraire  à  la  len 
tirez  de  la  mort  éternelle  ,  que  nous  foyons     tence  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  quand 
deflicz  des  liens  de  Satan, que  nous  l'oyons  af-     il  défend  d'auoir  nul  père  en  ce  inonde  :  car 
franchis  de  Ja  feruitude  de  mort  poureftre     c'eft  afin  que  nous  regardions  tous  à  Dieu, 
héritiers  de  fjn  Royaume.    Qjund  donques     qu'il  foit  honoré  de  nous,  &  que  nous  luy 
Dieu  ne  prétend  qu'à  cela,  ne  faut-il  pas  dire     foyons  fuiets.  Si  donc  chacun  fe  baftit  vn  pe- 
que  nous  foyons  par  trop  enforcellez  de  Sa-     re,  voila  Dieu  qui  eftpriué  de  fon  honneur, 
tan, li  nous  ne  fommes  prompts  à  receuoir  v-     Mais  quand  nous   lommes  amenez  a  Dieu 
ne  telle  do£trine?Ainfi  doncquand  nous  fen-     feul,  &  qire  cefte  doOrine  nous  eft  fidèlement 
tirons  en  nous  quelque  rébellion  ,  ou  bien     prefchee  ,  que  tout  parentage  dépend  de  hiy, 
quelque  contredit,  ou  quelque  tardiueté  trop     &  que  nous  adhérons  à  la  vérité, que  nous  luy 
grande,  que  nous  ne  ferons  pas  fi  agiles  qu'il     portons  l'honneur  qui  luy  appartient ,  celan' 
feroit  requis  pour  nous  lailfcr  conduire  par     empefche  point  que  cependant  ceux  qui  nous 
la  bouche  de  Dieu,  que  nous  n'aurons  pas  vne     enfeignent  la  doif  rine  de  l'Euangile,  ne  nous 
telle  ardeur  ,  ni  vn  tel  zèle  comme  il  feroit  à     foyent  comme  pères. Pourquoy?  Dieu  befon- 
fouhaiter,rreduifons  en  mémoire  ce  que  fainrt    gne  par  leur  moyen  ,  &  ks  eftablit  comme  en 

fon 


SVR     LA   II.     A     TIMOTH. 


fon  lieu",  non  point  pour  deroguer  rien  à  Ton 
droit, (comme  deiîa  nous  juons  déclaré)  mais 
quîd  Dieu  eft  Perc  foimer.im,  les  homes  font 
inférieurs  à  hiy,&  ne  laillent  pas  de  no'  eftre 
pères, &nous  fommes  leurs  enfans:voirc  cjiiH 
ils  nous  apportent  la  femcnce  incorruptible, 
par  laquelle  nous  fommes  régénérez  pour  e- 
ftre  entans  de  Dieu:  quand  auhi  ils  nous  nour 
riront  de  cel^e  mefme  dodrine.  Car  les  £uef- 
quesdela  Papauté  le  pourront  bien- nommer 
perej(comme  ils  le  noinnient)mais  cependant 
ils  «'ont  dequoy  pour  vlurper  vne  telle  di- 
gnité.Car  il  elt  dit  que  nous  tommes  faits  en- 
fans  de  Dieu  par  l'Euangilcqui  ell  la  kmen- 
ce  incorruptible.Maintenant  tous  ceux  qui  ne 
prefchent  point  TEuangile,  ne  peuuent  allé- 
guer aucune  patcrnité.ou  bien  ils  engendrent 
dci  enfans  ballards  que  Dieu  defauoue  &  re- 
prouue.  Notons  bien  donc  quand  fainû  Paul 
s'eft  ici  attribué  l'honneur  de  père,  que  ce  n'a 
eftelinonau  regard  de  l'Euangile  qu'il  por- 
toit:<S>:  puis  qu'il  eftoit  miniltre  de  Dieu,  qu'il 
a  engendré  les  araes.  Et  en  cela  voyons-nour 
comme  Dieu  belongne  par  la  parole  qui  nous 
eit  prefchec, qu'il  n'y  a  point  vre  voix  qui  l'on 
ne  feulement  en  l'air, &  qui  s'efcoule  :  mais 
Dieu  adioufte  la  vertu  de  Ion  fainû  Efprit.tel 
lement  nue  nou';  profitons  quand  chacun  fe  re 
tire  ainfi  entre  les  mains  de  Dieu  .  Il  eft  cer- 
tain que  fi  nous  venons  au  temple,  nous  n'or- 
rons pas  feulemétvn  home  mortel  parler.mais 
nous  fentirons  que  Dieu  parle  à  nos  âmes, 
qu'il  eit  Maiftre, voire  par  û  vertu  fecrete  :  li 
nous  louche  tellement  que  la  voix  humaine 
entre  au  dedans,  Se  qu'elle  nous  profite  telle- 
ment que  nous  en  fommes  reftaurez  &  nour- 
ris. Voila  ce  que  nous  auons  à  retenir  fous  ce 
mot  de  ?ere.Et  cependant  il  n'y  a  nulle  doute 
que  faincl  Paul  n'ait  ici  propofé  Timothee 
comme  vn  exemple  à  tous  fidèles  .  Et  ainû  il 
nous  exhorte  que  nous  l'oufFrions  pailiblemét 
d'elhe  réduits  à  Dieu  par  la  doftrine  de  l'E- 
uangile ,  &  que  ceux  qui  nous  apportent  cefte 
doftrine-la  ,  foyent  receiis  de  nous  comme 
peres.non  point  pour  en  faire  des  idoles,  non 
point  pour  amoindrir  en  façon  que  ce  foit  1' 
honneur  de  Dieu,  mais  pour  nous  feruir  d'eux 
félon  que  Dieu  nous  les  a  comme  dédiez  :  Se 
puis  qu'il  veut  dtfployer  fa  vertu  par  leur 
moyen  ,  que  leur  labeur  ne  foit  point  inutile 
enuers  nous.  Notons  bien  donques  que  Tinio 
thee  nous  monftre  ici  le  chemin  ,  que  (i  nous 
voulons  eftre  tenus  pour  enfans  de  Dieu,  il 
nous  faut  ranger  à  l'obeilTance  de  fa  Parole, 
tellement  que  ceux  qui  nous  anoncent  l'E- 
uangile, foyent  efcoutezde  nous ,  voire  nous 
loumetrans  à  ce  qu'ils  nous  apportent  au  nom 
de  Dieu, en  toute  docilité  &•  rcuercnce.  Et  voi 
■  la  pourqu:)y  notâniét  il  tft  dît, par  le  Prophe 

tja.sr.jg  jç  j,-_j,g  p^i'y  jjj^j  j^^^  parole  en  voftre  bouche. 

hre  ?    9  ^'  quand  Dieu  dit  qu'il  fera  cognu  pour  Pe- 

V     ■   '      re,il  adioufte  que  l'Eglife  eft  mère  de  cou   fes 

enfans.Au  refte,lî  Tmiothee  qui  eftoit  eleu  de 


535 


Dieu  come  vne  perle  entre  let  autres,  s'eft  te- 
nu en  ce  degré  d'enfant,  ic  vous  prie,  que  fera 
ce  de  ceux  qui  à  grand' peine  font  à  l'a  b  c?£c 
ncantmoins  nous  voyons  tuiourd'huy  vn  tel 
orgueil  qu'il  n'eft  point  qucftion  de modcftic 
ne  de  fobrieté  :  c'eft  honte  à  ceux  qui  fe  veu- 
lent reclamer  Chreftiens,  det'afluicttir  à  nul 
ordre  ni  police.  Or  tant  y  a  que  coft  exemple 
qui  nous  eft  ici  donné,nionftre  qu'vne  telle  ar 
rogance  ne  demeurera  point  impunie  deuant 
DieH  Parquoy  retenons  ce  qui  a  défia  efté  dit, 
c'eft,  puis  qu'il  plaift  à  Dieu  de  nietti  e  en  la 
bouche  des  hommes  la  femencede  vie,  &  que 
il  veut  que  nous  foyonsrenouueler  par  icelle, 
qii'vn chacun  s'afluiettifle  àceft  oidre-la  :  & 
quand  nous  aurons  cfté  cnfeignez  parles  hom 
mes,  que  nous  facions  vn  telhômage  à  Dieu, 
que  nous  monftnons  que  nous  ne  laiflonv  pas 
d'accepter  fa  Parole ,  encores  que  ce  foit  vn 
threfor  en  vn  vaifleau  fragile,  &  de  nul  prix, 
comme  faintt  Paul  en  parle  aux  Corinthiens.  ,  ^ 
Venons  au  refte.t  dit,  Gr,»f<-,  »j//(riVw(/*,  c>-  *  '"' 
faix  de  par  DiV»  U  Vere,  c  de  par  mjire  Sei- 
gncar  ltfu.s  cjn-ijh.  Il  eft  vray  q  ces  deux  mots 
Crace  iy  p.iix, (ont  bien  quali  en  toutes  le»  là 
liitations  que  fait  fainâ:  Paul  en  fes  Epiftres. 
Yci  il  entrelace lemotdeMjyif/csri/f.  Quand 
il  parle  de  la  grâce  de  Dieu,  il  entend  fon  a-- 
niour, qu'il  nous  foit  propice, &  qu'il  nous  ac- 
cepte.Mais  d'autant  que  cela  ne  fe  peut  faire 
que  par  fa  mifericorde.il  a  exprimé  ici  ce  qu'it 
a  touché  plus  eff  brief  aux  autres  pafla^e,.N(> 
tons  bien  donc  que  fauicl:  Paul  fous  le  mot  de 
Mipricorde.novs  a  voulu  ramener  à  ccfte  four 
ce  de  la  grâce  de  Dieu.  Comment  eft-ce  que 
Dieu  nous  fauorife?Comraét  eft-ce  que  nous 
luy  fommes  agréables?  Q_nand  ccfte  queftioa 
eft  mile  en  auant,  entrons  en  examen  de  nos 
perfonneî,&  nous  venons  qu'il  n'y  a  en  notw 
quemifere.c'eft  vn  abyfme  herribie  de  toute 
pourecé. Comment  donques  Dieu  nous  aime- 
ra-il? Commet  pourrons-nous  trouiier  grâce 
enuers  luy,  fi  ce  n'cft  qu'il  ait  pitié  &  compaf 
fionde  nos  pouretez?£t  pourtant  (cômei'ay 
dciiadeclaré)Jamifencorde  de  Dieu  eftrori 
gine&  la  fourcedc  U  grâce  &:dt  l'amourque 
il  nous  porte,  quand  il  luy  plaift  nous  aimer, 
&:nous  receuoir  comme  vn  père  fes  enfaiis.- 
Pour  tftre  dôc  aidez  de  Dieu,&  afin  qu'il  nous 
foit  propice,  il  faut  premièrement  qu'il  nous 
ainxe.Mais  comment  cela?Par  fa  bonté, pour- 
ce  qu'il  n'y  a  en  nous  finô  toute  mifere.VoyIt 
que  nous  lorames  poures  créatures  &  dânees, 
qu'il  n'y  a  nul  efpoir  de  falut,  il  ouure  les  en- 
trailles de  fa  mifericorde,  (comme  TEfcritu- 
re  en  parle)il  defploye  vne  aifeft ion  de  toute 
bonté,  que  n'ayât  point  cfgard  à  ce  que  nous 
fommes  indignes, il  prend  occafion  de  nous  ai 
ri'i-i  .d'autant  qu'il  voil  que  nous  fommes  per 
dus.VoiJa  mes  créatures  ,  &  cependant  Satan 
dom;ne  delîus:  les  voila  comme  plongées  aux 
abyfmes  profonds  de  la  mort:il  faut  donc  que 
ie  les  en  récite.  Nous  voyons  maintenant  que 

T.  m. 


354 


SERMON    I. 


ce  mot  que  fainft  Paul  a  ici  adioufté  ,  n'eft 
point  ûiperflu  :  &  combien  qu'il  ne  l'exprime 
point  par  tout,  neantmoins  il  faut-il  que  nous 
foyonsaduertis  d'entrer  iufques  à  ceftcmifc- 
iicorde,fi  nous  voulons  eflre  bien  certifiez  de 
la  faueur  paternelle  de  noftre  Dieu  .  Or  ce- 
pendant notons  aufsi  que  Dieu  n'eft  point  mi 
fericordieux  enucrs  nous  pour  vb  coup  ,  mais 
qu'il  continue  (  comme  aufsi  il  en  eft  befoin) 
iufques  à  la  mort .  Car  comment  eft-ce  qu'il 
nous  fûbuient  tous  les  iours  quanti  nous  fom- 
mes  agitez  de  nos  mauuaifes  tentations  ?  C'elt 
luy  qui  nous  fortifie.  Et  comment  cela?Pour- 
ce  qu'il  nous  eft  pitoyable  .  Comment  eft-ce 
qu'il  nous  pardonne  nos  péchez  ?  C'eft  pour 
cefte  mefme  caufe.  Ainfî  donques  notons  bien 
que  la  mifericorde  de  Dieu  a  fon  cours  per- 
manent enuers  nous ,  qu'il  ne  nous  la  faut 
point  fentir  feulement  en  ce  qu'il  nous  a  du 
commencement  adoptez  pour  fes  enfans.mais 
qu'elle  a  fon  fil  continuel  ,  &  qu'il  en  vfe 
iournellement  enuers  nous ,  &  qu'il  ne  celTe 
de  la  faire  découler  fans  fin  ,&  ainfî  qu'elle 
eft  tcfufiours  coniointe  à  cefte  grâce  de  la- 
quelle il  eft  ici  fait  mention  .  Or  venons  à  ces 
deux  mots  que  fainft  Paul  met  communee- 
ment  en  fes  Epiftres .  Il  eft  vray  que  pource 
que  nous  en  auons  parlé  ci  defliis  ,  il  n'eft  ia 
befoin  d'y  inlîfter  par  trop:m3is  fi  faut-il  en- 
eores  réduire  briefuement  en  mémoire  ce  qui 
eft  dit,c'eft  en  premier  lieu.que  Dieu  nous  e- 
ftant  propice  ,  nous  enuoye  tout  ce  que  nous 
pouuons  fouhaiter  pour  noftre  telicité:  com- 
me au  contraire  ,  quand  il  nous  fera  ennemi, 
ou  que  nous  ferons  reiettez  de  luy,  il  n'y  au- 
la  que  malheur  fur  nous ,  ie  di  encores  que 
nous  eufsions  tout  à  fouhait.  Car  les  incré- 
dules pourront  bien  manger  leur  foui ,  ils 
pourront  eftre  eleuez  en  honneur  &  crédit, 
ils  pourront  auoir  fanté,s'efgayer,  faire  leurs 
triomphes ,  tout  leur  viendra  à  propos  :  mais 
tout  cela  leur  fera  conuerti  en  malediâion.Et 
pourquoy  ?  Caries  biens  que  Dieu  nous  élar- 
git, ne  nous  font  point  fanftifiez  pour  noftre 
£ilut,finon  que  deuant  toutes  choies  nous  fen 
tiens  qu'il  nous  eft  propice  &fauorable.  Voi- 
la pourquoy  fainft  Paul  comméce  par  ce  mot 
de  Gnîff.monftrant  qu'il  ne  nous  faut  point  e- 
ftre  tant  abbrutis  de  cercher  les  chofes  terre- 
ftres,  car  ce  feroit  comme  mettre  la  charrue 
Jcuant  les  bœufs,  (  comme  on  dit  )  mais  qu'il 
nous  faut  toufiours  leuer  la  tefte  en  haut. 
Quand  vn  pourceau  cerchera  pafture,  il  flai- 
le  en  bas,  il  lette  le  groin  ,  il  fouille  par  tout: 
ainfi  en  font  ceux  qui  s'attachent  par  trop  au 
monde  .  Car  ils  ne  cognoillent  point  que  le 
vray  bien  ,  &  la  félicité  parfaite  des  hommes 
«onlifte  en  ce  que  Dieu  les  reçoyue  ,  &  qu'il 
les  ait  pour  agréables.  Voila  comme  les  ir.cre 
dules  fe  contentent  d'eftre  riches ,  il  d'auoir 
leurs  délices  &  voluptez,  &  s'abandôner  à  ton 
tes  leurs  concupifcences:S:  puis  de  fe  faire  va- 
loir, Se  puis  d'acqucrir,  &  d'abonder  félon  le 


monde  :  voila  tout  leur  bien,  &:  toute  leur  fé- 
licité .  Or  au  contraire,  il  nous  faut  auor  ce- 
fte prudence  ,  qu'ayans  les  biens  du  monde, 
ayans  nos  aifes  &  commoditez,&  toutes  cho- 
fes, nous  cerchions  que  Dieu  nous  foit  Père, 
&  qu'il  nous  tiene  pour  fes  enfans .  Quand 
nous  aurons  cela,  obferuons  en  fécond  lieu  & 
inférieur  ,  la  paix  que  met  aufsi  bien  fainft 
Paul  .  Car  fous  ce  mot  de  faix ,  il  comprend 
toutes  chofes  qui  nous  Ibnt  propres  &:  con- 
uenables ,  ce  que  nous  appelions  profperité» 
Ne',penfons  point  donc  profperervrayement, 
finon  d'autant  que  nous  ferons  aimez  de 
Dieu  .  Et  au  refte  quand  (ixnll  Paul  conioint 
la  paix  auec  l'amour  de  Dieu  ,  ilfignifie  que 
Dieu  eft  afltz  riche  pour  nous  donner  tout 
ce  qu'il  nous  faudra  ,  quand  de  noitre  cofté 
nous  demanderons  d'eftre  aimez  de  luy  ,  qu'il 
ne  faut  point  que  nous  craignions  de  tout  le 
refte. Et  c'eft  encores  vn  poinâ  bien  notable: 
car  nous  voyons  comme  noftre  nature  nous 
folicite  à  dtffiance  ,  &  nous  femble  toufiours 
que  terre  nous  doit  faillir. Et  cependant  quel 
honneur  faifons-nous  à  Dieu  ?  Nous  confef- 
ferons  qu'il  eft  noftre  Pete  ,  &  chacun  fe  glo- 
rifiera de  ce  titre  :  &  cependant  fi  rien  nous 
défaut ,  nous  fommes  en  telle  angoifle  que  c* 
eft  pitié,  nous  fommes  là  en  perplexité,  com- 
me fi  Dieu  ne  pouuoit  rien,  comme  s'il  eftoit 
defpourueu  de  moyens  pour  nous  fecourir. 
Voyans  donques  que  nous  fommes  ainfî  agi- 
tez de  deffiance ,  d'autant  plus  nous  faut-il 
méditer  cefte  doârine  ,  S:  y  appliquer  noftre 
eftude.quand  il  dit  que  fi  Dieu  nous  eft  propi- 
ce, il  ne  faut  point  douter  qu'il  ne  nous  face 
profperer,&  que  par  (a  benediôion  il  ne  nous 
donne  ce  qui  eft  requis  r  m.TJs  quoy  qu'il  en 
foit,  contentons-nous  de  la  firaple  grâce  de 
Dieu  .  Il  eft  vray  que  nous  luy  pourrons  bien 
demander  tout  ce  qui  nous  fait  befoin  ,  iuf- 
ques à  vn  morceau  de  pain  pour  manger  :  il 
faut  que  nous  defchargions  toutes  nos  folici- 
tudes  en  hiymiais  tant  y  a  qu'ilnous  faut  com 
mencer  au  principal,  c'eft  afçauoir  à  l'amour 
qu'il  nous  porte  ,  &  que  nous  fçachions  qu'il 
a  le  foin  de  noftre  falut  :  &  quand  cela  eft, 
qu'il  nous  fiiftife ,  encores  que  tout  le  refte 
nous  défaille.  Or  fainft  Paul  finalement  mec, 
D*  f.îC  Tiieu  U  Père ,  C  nijlre  Seigneur  \efus 
Chrifi  .  En  quoy  il  conferme  la  dortrine  que 
nous  auons  detiaexpofée  :  c'eft  que  fi  les  hom 
mes  cerchent  d'auoir  tout  ce  qui  leur  cil  pro- 
pice ,  il  ne  faut  point  qu'ils  i'eflongnent  de 
Dieu.  Et  toutesfois  nous  voyons  comme  nos 
appétits  voltigent  ça  &là:  &  cependant  qui 
eft-ce  qui  ccrche  Dieu?  Il  eft  vray  que  nous 
en  parlerons  en  vn  mot  :  mais  qu'vn  chacun 
regarde  de  pres.X;  on  trouuera  que  nous  vou- 
drions bien  que  Dieu  fuft  fc-paré  ,  &•  qu'il  feift 
fes  befongnes,  (  comme  on  dit  )  &  cependant 
qu'il  nous  laiflaft  ici  efgayer  .  Voila  comme 
les  hommes  f -nt  abbrutis.  Or  pour  cefte  cau- 
fe faïuél  Paul  nous  monftre,  c^uW  ne  faut 

point 


SVR   LA  II.    A   TIMOTH. 


point  que  nous  cherchions  ancune  félicité  fî- 
non  en  Dieu.  Car  nous  pourrons  amafler  beau 
coup  ,  que  toutes  les  créatures  du  monde  nous 
foyent  t-auorables,fi  eft-ce  qu'au  lieu  d'aduan- 
cer  nous  reculerons, iufques  à  ce  que  nous  ioy 
ons  venus  à  Dieu.Ec  cependant  il  nous  décla- 
re q  nous  luy  pouuons  bien  demander  cela  en 
pleine  côfîance,  &  el'perer  qu'il  nous  fera  ot- 
troyé.Et  pourquoyjCar  ilne'nous  faut  point 
-_.^  conlîderer  iîmplement  en  Dieu  fa  maieité, 
ftS  mais  aufsi  le  nom  de  Pere.duquel  il  veut  eftre 

>*'?  comme  reueflu.afin  que  nous  ayons  accès  plus 
familier  à  luy. Notons  bien  donques  que  faindl 
Paul  ne  nous  parle  pas  ici  nuement  de  Dieu. 
Car  quand  nous  cuiderions  approcher  de  luy, 
félon  que  nous  fommes  tant  indignes ,  nous 
ferions  effrayez  &  comme  eiîarouchez  :  mais 
il  du  qu'il  eJt  Père  quant  &  quant.  Et  ainfî.il 
nous  certifie  qu'il  ne  veut  point  élire  cognu 
des  iîens  fans  fa  miiericorde:  &  par  fon  exera 
pie  il  nous  exhorte  à  chercher  la  paix  enDieu, 
&  en  la  grâce  dont  il  a  fait  mention.  Et  c'eft 
encores  vn  mot  qui  doit  bien  eftre  médité  de 
nous. Car  la  maiefté  de  Dieu  nous  fera  touf- 
iours  elpouuantable ,  û  nous  regardons  en 
luy  qu'il  eft  f  ulement  Créateur.  Il  faut  don- 
ques toutesf  ois  &  quantes  que  nous  délirons 
que  Dieu  nous  reçovue  ,&  que  nous  voulons 
auf  I  prendre  hardielTe  pour  venir  à  luy  ,  que 
ce  mot  de  Père  nous  viene  deuant  les  yeux: 
ce  qui  ne  fe  peut  faire  que  nous  n'ayons  Icfus 
Chrift  pour  Médiateur.  Et  voila  pourquoy 
aufi  faind  P.ml  a  mis  ,  î^'ofl-re  Se'gneur  l^fus 
Chrifi.  Ileftvray  qu'en  difant  qne  la  grâce 
&  la  paix  nous  vienent  de  luy  comme  de  Dieu 
fon  Pcre  ,il  nous  monftre  qu'il  nous  le  faut 
adorer,  &  qu'il  n'elt  point  vne  fimple  créatu- 
re ,&  qu'il  ha  ce  que  n'ont  point  ni  les  hom- 
ines,ni  les  Anges.Il  faut  bien  donques  qu'ici 
nous  prenions  vntefmoignage  delà  Diuini- 
tédenoftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  afin  qu'il 
foit  exalté  de  nous  f  Ion  qu'il  le  mérite. Mais 
cependant  fainft  Paul  nous  veut  confcrmer 
en  ce  qu'il  a  dit,  c'eft  que  lurdimeut  nous  de- 
mandions àDieu  grâce  &  paix,&  que  nous  luy 
demandions ,  voire  pource  que  nous  auons 
noftre  Médiateur  qui  nous  donne  fiance  de 
faire  telle  requefte.  Et  c'eft  ce  que  l'ay  delîa 
touché  ,  que  nous  ne  pouuons  conceuoir  que 
Dieu  foit  noftre  Père  ,  finon  que  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift  fe  prefente  ,  &  qu'il  décla- 
re qu'il  eft  le  Fils  vnique,  &  que  nous  fommes 
entez  en  fon  corps  par  foy  quand  nous  fom- 
mes fes  membres, que  tout  ce  qu'il  ha  de  pro- 
pre il  nous  le  communique  par  fa  pure  bonté, 
non  pointqu'il  nous  foit  deu.mais  pource  que 
il  defplove  les  richelTès  de  la  mifericorde 
de  Dieu  fon  Père  enuers  nous.  Ainfi  donques 
nous  voyons  qu'il  n'y  a  rien  de  fuperflu  en 
celle  falutation  de  fainft  Paul.  Et  combien 
qo'ilait  parlé  à  Timothee,fi  eft-ce  qu'il  a  don 
né  à  tous  vne  re^le  cxnmune.  Voulons-nous 
doncmefmes  félon  cefte  vie  prefente  eftre  à 


35Î 

repos.  Il  faut  que  deuant  toutes cliofes  noue 
cherchions  d'eftrc  aimez  de  Dieu;  Se  puis  que 
nous  fçachions  le  moyen ,  car  nous  n'en  fom- 
mes pas  dignes.  Ilfaut  donc  venir  à  noftre  Set 
gneur  lefus  Chrift. Or  fi  ainfi  eft  que  pour  ceft 
eftat  caduque  de  ce  monde,&  ce  qui  concerne 
noftre  nourriture  corporelle,  ilfaut  que  nous 
commencions  par  ce  bout ,  d'auoir  Dieu  pro- 
pice,que  fera-ce  s'il  eft  queftioadu  falut  éter- 
nel de  nos  âmes  f  Si  nous  voulons  manger  vn 
morceau  de  pain  ,  boire,  &  eftre  reueftus  pour 
noftre  necefsité  ,  il  faut  que  toufiours  nous 
foyons  fondez  là  defTus ,  que  Dieu  nous  re- 
garde en  pitié  ,  &  que  nous  commencions  par 
fa  bonté  gratuite. Si  nous  ne  pouuons  ne  boire 
ne  manger  ,  ni  receuoir  toutes  les  autres  chq- 
fes  qui  concernent  la  vie  prefente ,  que  ce  ne 
foit  a  noftre  confufîon  ,  finon  d'autant  que 
Dieu  nous  bénit  par  fa  grâce  ^  d'autant  plus 
deuons-nous, quand  il  eft  queftion  de  la  vie  ce 
lefte  ,  nous  remettre  du  tout  à  la  grâce  de 
Dieu,nous  afleurer  pleinement  en  cefte  ado- 
ption qu'il  a  faite  par  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift,  &  n'eftte  point  fi  outrecuidez  de  pen- 
fer  que  nous  ayons  de  quoy  pour  nous  faire 
paruenir  à  ce  falut  qui  nous  eft  promis  en  l' E- 
uangile.  Oublions  dorques  tout  ce  qui  eft  de 
noftre  collé  ,&  commençons  par  l'adoption 
de  Dieu. Et  au  refte, quand  Dieu  nous  aura  v- 
ne  fois  receus  à  merci ,  inuoquons-le  hardi- 
ment ,  ne  foyons  point  comme  ces  poures  in- 
crédules qui  font  toufiours  enfufpens,ne  fça- 
chans  s'ils  font  exaucez  ou  non,  mais  que  cela 
nous  foit  tout  perfuadé  &  conclud  ,  que  puis 
que  Dieu  nous  aimç  ,  tout  ira  bien  pour  nous, 
voire  quand  nous  aurons  cefte  amour-Ia  ,  que 
rien  ne  nous  peut  faillir, d'autant  que  Dieu  ha 
tout  en  fa  main,  il  eft  la  fontaine  de  tout  bien, 
&  de  toute  félicité. Nous  voyons  donc  comme 
en  la  fimple  amour  de  Dieu  ,  il  faut  que  tout 
noftre  falut, &:  la  louange  d'iceluy  foyent  tel- 
lement enclos, qu'vn  chacun  fe  glorifie  hardi- 
ment,&  qu'il  ne  doute  point  d'eftre  fauué.  £t 
pourquoy.'D'autât  qu'il  a  pieu  â  Dieu  de  nous 
aimer, combien  que  nous  en  fufsions  indignes. 
Voila  comme  nous  auons  àleuerla  teftefans 
aucune  doute, quand  Dieu  nous  a  teftifié  qu'if 
nous  vouloit  eftre  Père  en  noftre  Seigneur  le 
fus  Chrift, qu'il  nous  faut  marcher  hardiment, 
furmontans  tous  empefchemens  qui  nous 
pourroyent  retarder  devenir  à  noftre  Dieu, 
iufques  à  ce  que  nous  foyons  entrez  en  ce 
triomphe  qui  nous  eftapprcitéau  ciel.  Et  com 
bien  qu'il  nous  faille  maintenant  batailler, voi 
re  iufques  à  la  mort  ,  &  que  mefmes  noftre  vie 
foit  cachée  ,  que  toutesfois  nous  ne  doutions 
point  que  Dieu  ne  nous  foit  Père  ,  puis  cju'il 
nnus  porte  cefte  affeftion  paternelle  de  laquel 
le  parle  ici  lâinft  Paul. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la  f.i- 
ce  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  des 
fautes  innumerables  que  nous  ne  celTons  de 
commettre  iournellement  contre  luy, le  prias 

T.iiii. 


335  '    S  E  R  M 

qu'il  luy  plaife  les  abolir  tellement  que  rien 
ne  nous  cmpcfclie  que  nous  ne  venions  à  luy, 
voire  en  confiance  qu'au  nom  de  noftre  Sei- 
gneur leltis  Clinit  nos  macules  feront  eifa- 
cees  deuant  luy  ,  &  que  nous  ne  lailTerons  pas 
d'eftie  tauonfez  de  luy  comme  fes  propies 
enfans,nonobrtant  coulCs  les  infirmitez  &cou 
tes  les  miferes  qui  lonLen  nous. Et  cependant 
qu'il  nous  donne  vn  tel  gouftde  fa  mifericoi- 
de,que  nous  ne  doutions  point  puis  qu'il  veut 
auoir  le  foin  de  nous,  que  toutes  chofes  iront 
bien.  Qjie  nous  apprenions  de  nous  remettre 
à  (a  prouiJence.atin  que  nous  confians  en  luy, 
nous  ne  foyons  point  agitez  çà&làpourc- 
ftre  toufiours  en  branfle  ,  que  nous  ne  foyons 
point  attrappez  par  Satan  entre  les  filets  dot 


ON       II. 

il  a  accouftumé  de  nous  furprendre  quand  il 
nous  voit  ainli  volages.Et  pourtant, que  nous 
cheminions  tellcitient  parmi  ce  inonde  ,  que 
toufiours  nous  ayons  noftrc  veue  eleueeace 
Royaume  celefte.  Et  puis  qu'ainfi  eft  que  ce 
bon  Dieu  nous  a  donné  les  promefles  Se  de  la 
vieprefente,&dela  vie  à  venir.que  naus  foy« 
ons  admoneftez  en  tout&  partout  de  nous 
remettre  à  luy  ,  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  de- 
liurez  de  tous  les  combats  qui  nous  tourmen- 
tent &moleftent  maintenant,  pour  nous  atti- 
rer en  ce  repos  qui  nous  a  elle  acquis  parte 
fang  de  noftre  Seigneur  lefus  Clirift  .  Clap 
non  feulement  il  nous  face  cefte  grace> 
maisaufsi  à  tous  peuples  &  nations  deUtei- 
re,&c. 


SECOND       SERMON       SVR      LE 

PREMIER      CHAPITRE. 

3  le  ren  grâces  a  Dieu ,  auquel  ie  jèrs  dés  mes  anceJJres  en  pure 
confcience ,  que  fans  cejjcr  tay  mémoire  de  toy  en  mes  prières  nuiSî  (X, 
iour: 

4  Dcfirant  te  yoir ,  ayant  fouuenance  de  tes  larmes  :  afin  que  w 
joye  rempli  de  ioye'. 

5  Keduijànt  en  mémoire  la  foy  non  feinte  qui  cjl  en  toy ,  laquelle 
a  habité  premièrement  en  ta  mère- grand  Loide,  CT  en  ta  mère  Eunice: 
(Xfuis  certain  quelle  habite  aufsi  en  toy. 


A  foinme  de  ce  que  nous  a- 
,7]l)^(j*&T^  uons  maintenant  Icu  eft,que 
L^  k./^4ir«,f  faina  Paul  déclare  l'affe- 
dion  qu'il  porte  à  Tirao- 
thee  :  &  adioufte  la  raifoa 
pourquoy  ,  c'eft  afçauoir 
d'autant  qu'ille  voyou  ho- 
me craignant  Dieu  ,  &  qui  auoit  toufiours  eu 
quelque  bonne  femence  désfon  enfance.  Or 
tepcndant  notôs  qu'il  déclare  ces  chofes,  non 
point  tant  pour  le  regard  de  Timothee,  que 
pour  ceux  aufquels  il  vouloit  que  l'Epiitre  fiift 
commune  ,  afin  que  par  là  chacun  en  hiit  édi- 
fié. Or  de  noftre  corté  le  principal  elt,  de  re- 
cueillir de  «efte  lecture  la  doftrine  qui  nous  ap 
partiét.En  premier  lieu,la  folicitude  de  famtt 
Paul  à  Timothee  nous  doit  feruir  d'inftru- 
ftion.Car  d'autant  que  Dieu  noub  a  conioints, 
c'eft  bien  raifon  qu'vn  chacun  dé  nous  penl'e 
de  fes  prochains  qui  luy  attouchent  :  ie  ne  di 
pas  de  ceux  qui  nous  font  prochains  félon  la 
chair, mais  puis  que  Dieu  nous  eft  Père  à  tous, 
auilons  de  nourrir  cefte  fraternité  qu'il  a  dé- 
diée au  fang  de  noihe  Seigneur  lefus  Chrift. 
Et  ainfi.prucurons  entant  qu'en  nous  fera,  le 


falut  Je  tous  ceirr  qui  font  domeftiques  de  h 
foy. Et  au  refte,que  les  Pafteurs  qui  ont  char- 
ge pubhque  en  PEelife  ,  ayent  ceci  pour  re- 
commandé. Car  il  fout  bien  que  leur  zèle  fur- 
monte  celuy  qui  fera  en  vn  homme  priuc  ,  le- 
quel n'a  autre  regard  finon  qu'il  eft  membre 
de  l'Eglife.  Voila  donc  pourquoy  fainft  Paul 
a  teftihédu  foin  qu'il  auoit  de  Timothee ,&  de 
fon  falut. Nous  voyons  d'auantage.quadDieu 
aura  auancé  vn  homme, &  qu'il  l'aura  doué  des 
grâces  de  fon  fainil  Efprit ,  que  ce  n'eft  pas  à 
dire  pourtant  qu'il  ne  nous  faille  toufiours 
prier  pour  luy  .Car  il  n'y  aura  iamais  telle  per 
feftion  en  ce  monde, que  nous  n'ayons  befoin 
d'eftre  auancez  de  plus  en  plus  ,&  que  Dieu 
nous  tende  toufiours  la  main  ,  le  prions  qu'il 
nous  augmente  (es  dons  ,  qu'il  retranche  les 
corruptiôs  qm  font  en  nous.  Quand  donc  il  y 
aura  vn  homme  excellent ,  Se  comme  vn  demi 
Ange  ,  il  eft  vray  que  nous  auons  occalion  de 
rendre  grâces  à  Dieu  ,  de  ce  qu'il  auiaainfie- 
fpandti  in-  luy  les  dons- de  fon  fainft  Elprit, 
mais  cepéJant  cncores  faut-il  que  nous  pnôs 
Dieu  qu'il  continue  à l'augiTiiîter,  iniques  àce 
qu'il  l'ait  amené  à  fa  perfection.  Ot  11  nous  a- 

uoiis 


s  V  R     LA     I  !.     A     T  1  M  O  T 


lions  bcfo/n  de  prier  ainlî  pour  ceux  qii 


:Dicii 
a  tant  auancez  ,  que  fera -ce  des  poures  gens 
qui  ne  fout  que  commencer,  qui  font  encores 
bien  débiles  ,  qui  ont  feulement  quelque  petit 
gouft  de  la  vérité?   Ne  dcuons-nous  point 
auoir  tant  plus  grande  folicitude  pour  eux?  Il 
eft  bien  certain.  Ainli  donques,  tailonv  noftre 
conte  que  iamais  il  n'y  a  eu  créature  morcelle 
en  ce  monde  qui  n'cuft  befoin  qu'on  la  recom 
mandaft  à  Dieu  ,  afin  que  ce  qu'il  auoit  com- 
mencé,il  le  parfeift.  Pourquoy?  Car  les  hom- 
mes font  touliours  en  chemin,  cependant  que 
ils  viuent  fur  la  terre. Et  cela  nous  doit  enfei- 
gner  à  humilité, que  nul  nefe  prife,quenul  ne 
fe  contente  de  fon  eftat,pour  dire,  le  fuis  venu 
là  où  il  faloit  que  ie  veinfTe.  Mais  cheminons 
toufiours,&  prions  Dieu  qu'il  nous  auance.fça 
chans  bien  que  nous  n'auons  point  encores 
appréhendé ,  comme  faindt  Paul  en  parle  aux 
Phihppiens  troilîeme  chapitre,  verfet  u.  Or 
il  y  a  aufsi  d'autre  coflé  ,  que  laind  Paul  nous 
monftre  que  chacun  de  nous  ne  doit  point  feu- 
lement rendre  grâces   à  Dieu  pour  les  biens 
qu'il  a  receus  de  luy,mais  quand  il  aura  diftri- 
bué  de  Ces  dons  à  nos  frères  ,  que  la  ioye  en 


d;.crnne,noton,  le',  mots  dont  ùh.à  Paiilvfe. 
ïl  ditjSe/on  <jue  iefay  mémoire  de  toy  njcijl.im- 
nunt  en  mes  prières  ,  iiuUt  O-  iour.  Yci  nous 
voyons  ce  que  l'ay  défia  touché, c'eftafçauoir 
combien  fainû  Paul  a  eu  pour  recommandé  le 
falut  de  Timothee,  quand  fans  ceiTe  il  luy  en 
fouuenoit.  Mais  cependant  notons  aufsi  que 
les  prières  de  lainft  Paul  eftoyent  fréquentes; 
car  il  dit,  E»mïj  /ir/tr«,nH<ff  &  ioitr. Il  ne  luy 
fouuenoit  point  de  Timothee  en  fes  refueries, 
comme  ceux  qui  aiment  charnellement,  fe  foa 
uiendront  aflez  de  leurs  amis, voire  pour  boi- 
re à  eux  en  leur  abfence  ,  ou  pour  en  parler: 
mais  l'amitié  Chreitienne  ha  vne autre  cliofe 
plus  grande ,  c'efl-  quand  chacun  fe  prefente  k 
Dieu, &  que  là  nousdifons,Noftre  Pere.que  là 
nous  penfons  à  ceux  aufquels  nous  femmes 
conioints ,  &defquels  nous  ne  deuons  point 
nous  feparer.Et  quand  nous  ne  pourrons  fai- 
re vn  rolle  entier,pour  le  moins  que  nous  pre 
nions  les  efpeces,&  que  nous  prionsDieu  pour 
ceiu  qui  s'employent  à  fon  feruice,pour  ceuK 
aufquels  on  cognoift  qu'il  y  a  eu  zele,&  d'au- 
tres vertus  pour  glorifier  le  nom  de  Dieurque 
nous  ayons  pitié  de  ceux  qui  trauaillent,&  qui 
font  tourmentez  au  milieu  des  ennemis  delà 


doit  eftre  commune  à  tous,&  pareillement  l'a- 

ûion  de  grâces. Il  eft  vray  que  félon  que  Dieu     foy,  qui  font  comme  poures  brebis  entre  les 

s'eft  monftré  libéral  enuers  moy  ,  il  faut  bien     loups ,  que  nous  ayon'.  pitié  &conipafçion  de 


que  ie  me  fente  plus  obligé  enuers  luy,  &  que 
cela  m'incite  à  luy  rendre   grâces  pour  ma- 
gnifier fon  nom  :  mais  fi  elt-cc  que  ie  ne  doy 
point  me  tenir  encio'  ni  enferré  en  ce  regard 
de  ma  perfonne,il  faut  aufii  que  ie  contemple 
la  bonté  de  Dieu  enuers  toute  (on  Eglife,en- 
uers  chacun  de  ceux  qui  font  du  troupeau.  Et 
d'autant  que  cefte  variété  de  grâces  qu'il  a 
efpandues  fur  les  fiens  appartient  à  (a  gloire, 
que  ie  f  )ye  aife  quand  ie  verray  que  mes  f  rc- 
res  ont  de  qu  iy  pour  feruir  à  Dieu,&  qu'il  les 
pouire,&  les  conduit,&  gouuerne  ,  que  ie  voy 
vn  bon  accord  de  ceux  qui  tendent  à  bien. 
Nous  voyons  donques  qu'il  ne  faut  point  que 
chacun  regarde  feulement  à  foy  ,  mais  qu'il  y 
ait  communication  générale  ,  quand  Dieu  di- 
ftribue  ainfî  les  dons  de  fon  faintl  Efprit  à  fes 
fidèles,  qu'vn  chacun  l'en  doit  remercier.  Or 
par  cela  nous  voyons  quelle  malice  c'eft,  que 
nous  portions  enuieà  ceux  lefquels  Dieu  au- 
ra ornez  de  fes  graces:comme  le  pliis  fouuent 
nous  voyons  que  les  hommes  font  enchns  a 
cela,que  chacun  voudroit  auoir  tout  pour  foy. 
Et  cependant  il  eft  dit,que  fi  Dieu  a  mis  de  fes 
grâces  aux  autres  ,  qu'il  nous  faut  fentir  vne 
ioye  en  nos  cœurs ,  comme  fi  nous  auions  re- 
ceu  tout  cela.  Et  de  fai£l,  fi  nous  eftions  bien 
aduifez,  nous  cognoiftrions  que  nos  frères  ne 
poffèdent  rien  qui  ne  reuiene  à  noftre  profit 
&  falut. Selon  donc  que  Dieu  a  efpandu  les  dos 
de  fon  Efprit  par  ci  &  par  là,il  procure  noftre 
profit  &  falut. Et  voila  pourquoy  nous  fommes 
tant  plus  tenus  de  luy  en  rendre  grâces.  C'cft 
en  fomme  ce  que  nous  auons  à  recueillir  de  ce 
yaflàge.Et  pour  mieux  eftre  côferraez  en  celte 


eux,&  de  tous  ceux  qui  font  en  quelque  neccf 
fité ,  félon  que  nous  en  aurons  cognoilîànce, 
que  nous  foyons  picquez  pour  les  prefenter 
deuant  Dieu,afin  qu'il  luy  plaifede  les  fecou- 
rir  félon  qu'il  voit  que  le  befoin  y  eft.  Voila 
côine  il  nou".  faut  monftrer  amis:ce  n'eft  point 
pourauoir  vne  fouuenance  félon  lemonde,de 
ceux  qui  nous  attouchent  ,  mais  fur  tout  que 
nous  les  recommandions  à  Dieu  comme  faindt 
Paul  en  parle  ici.  Et  cela  vaut  cent  mille  fois 
mieux  que  toutes  Icsamitiez  du  monde-ce  n'eft 
qu'ordure  quand  les  hommes  s'aiment  enfem 
ble,  &  qu'il  n'eft  point  queftion  que  Dieu  foit 
teirnoin  de  l'amour  qu'ils  fe  portent  l'vn  à  l'ait 
tre,&  que  cela  reuiene  à  luy,&  qu'elle  foit  vn 
moyen  pour  le  foucier  aufsideieur  falut  e ter 
nel.  Mais  (comme  l'ay  défia  monftré)  fi  nous 
voulons  prattiqiier  ce  que  du  ici  ùintt  Paul, il 
nous  faut  auoir  vne  autre  ardeur  de  prier  que 
nous  n'auons  point.    Car  ceux  qui  font  tant 
froids ,  qu'ils  ne  fçauent  s'ils  doyuent  prier 
Dieu  vne  fois  la  fepmairic, comment  pourront 
iisprotefter  ce  que  dit  ici  fiinû  Paul.c'eft- 
afçauoir  quenuiti  &  iour  il  fait  mémoire  de 
Timothee  en  priantfVoici donques  vn  exem- 
ple mémorable, c'eft  que  nous  ne  deuons  point 
prier  Dieu  feulement  vne  fois  le  iour  comme 
par  acquit ,  mais  que  nous  deuons  retourner 
fouuent  à  ceft  exercice, &  nous  y  picquer  voy- 
ant noftre  parefle,  &  qu'vn  chacun  s'y  poufîe 
quand  il  s'y  trouuera  trop  froid. Car  il  ne  fut- 
fit  point  de  cognoiftre  ce  vice  ,  mais  il  y  faut 
remédier,  ainfi  quei'ay  dit.  Picquons-nous 
donques  ,  &  qu'vn  chacun  foit  fon  foliciteur, 
n'attendant  point  qu'où  le  rudoyé.  Car  que 

V.i. 


53S 


SERMON    1 1: 


ferons-nous  d'auantage  mie  ceft  exemple  de 
fainfl:  Paul  ?  Et  au  refte ,  fi  nous  n'auons  autre 
zele  &  ardeur  pour  prier  Dieu.ce  tefmoigna- 
ge-ci  nouî  feriiira  d'vne  horrible  condamna- 
tion,Il  eft  vray  que  nous  n'auons  pas  receu  P£ 
fpritdeDieu  en  mefure  lî  ample  que  fainft 
Paul, &  tous  ne  peuuent  eftre  égaux:  mais  tant 
Y  a  que  nous  ne  pouuons  auoir  vne  iî  petite 
portion  Je  lagrace  de  Dieu.qu^ellene  fedoy- 
iie  déclarer  encelt  endroit.c'efi  q  nous  ayons 
afFedionde  le  prier  ,  &  que  cela  ne  foit  point 
parccreinonie ,  mais  que  nous  y  retournions 
fbuucnf.que  nous  oublions  tout  le  refte  pour 
eleucr  nos  ca-urs  à  Dieu  ,  encores  que  nous 
ayons  nos  belongnes  à  faire, que  Dieu  reçoy- 
tie  quelque  gemillement  de  nous:  ouaud  nous 
voyons  les  poiiretez  qui  font  par  tout  le  mode 
que  nous  voyons  les  contulîons,q  nous  voyôs 
les  necefsitcz.q  nous  prions  Dieu  qu'il  eften- 
de  fa  main  pour  nous  fecourir  ,  ou  pour  le 
moins  que  nous  lettions  quelque  foufpir,  & 
que  nolire  Seigneur  exauce  cela  ,  &  que  nous 
cftendions  cclK'  tolicitude  iniques  à  nos  pro- 
chains, qu'vn  chacun  ne  pejife  point  feulemét 
de  foy,  mais  qu'vn  chacun  aduife de  procurer 
lefalut  de  tout  le  corps  de  TEglife  en  gêne- 
rai. Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir  de 
celle  circonftancc  quieftici  mife.  Or  quand 
fainû  Paul  die  ,  g(t'<7  ci  fm^enance  des  larmes 
de  Timothee  ,  ^  de  la  foy  non  feinte  (jui  efloit 
en  luy ,  par  cela  il  nous  monftre  que  félon  que 
nous  aurons  cognu  vn  homme  eftre  doué  de 
bonté  ,  que  nous  le  deuons  tant  plus  honorer 
&  aimer  ,  voire  lî  nous  aimons  Dieu.  Et  cefte 
«dodrine  nous  doit  léruir  à  double  vfage.  Car 
fouuent  nous  auons  des  cupiditez  efgarees, 
que  nous  n'auons  nul  efgard  lî  les  hommes 
ont  vne  droite  pieté,c'eft  à  dire  que  nous  ap- 
perceuions  des  marques  de  crainte  de  Dieu  en 
eux  ,  lî  nous  cognoilTons  qu'ils  cheminent  en 
pure  confciencie  ,  que  nous  voyons  en  eux 
quelque  bonne  affedion  ,  nous  n'auons  point 
d'efgard  à  tout  cela  ,  &  pourtant  nos  amitiez 
font  volages. Mais  à  l'oppofîte,fi  nous  eftions 
bien  réglez  ,  quand  nous  verrions  vn  homme 
élire  droitemcnt  conduit  de  l'Efprit  de  Dieu, 
&  que  Dieu  luy  auroit  tellement  imprimé  fon 
image  que  nous  fentirions  qu'il  habite  en  luy, 
il  faudroit  que  nous  fufsions  afFcftionnez  à 
aimer  telles  gensique  lî  nous  ne  le  faifons,  ne 
fommes-nous  pas  plus  que  ftupides&  brutaux? 
Il  eft  dit  notamment  au  Pfcaume  quinzième, 
L'homme  craignant  Dieu  aimera  tous  ceux 
qu'il  cognoiftra  eftre  tels ,  &  qu'il  mefprifera 
les  mefchans  &  iniques.  Quand  nous  verrons 
des  contempteurs  de  Dieu  qui  ne  feront  nul 
fcrupule  dele  defpiter  ,  &  qu'eftans  desbau- 
chez  peruertiront  tout  entant  qu'en  eux  fera, 
nous  deuons  auoir  telles  gens  en  deteilation 
comme  peftcs  mortelles,  que  nou',  ïtis  tenions 
(di-ie)  comme  puans  pour  les  fuir  &•  reiettcr. 
Aufsi  a  l'oppolite  ,  quand  nous  voyons  des 
gens  craignaus  Dieu ,  qui  font  coniomcs  aucc 


nous  en  telle  affeâion  ,  il  eft  certain  que  fi 
nous  ne  les  aimons  ,  &  que  nous  ne  leur  por- 
tions honnenr,nous  mefprifons  Dieu,  &l'in- 
iure  viendra  à  luy  ,  &  faudra  qae  nous  en  ren- 
dions conte.  Ainiî  donc  apprenons  de  nous 
corriger  de  toutes  vanitez  en  ceft  endroit,  & 
que  nous  foyons  affeûionnez  enuers  lesper- 
fonnes  félon  que  nous  y  verrons  bonté, crain- 
te de  Dieu, foy,  droiture.  Et  cependant  aufsi 
nous  fommesadmoneftez  chacun  de  nous  ,  de 
cheminer  droitement ,  fi  nous  voulons  qu'on 
nous  aime. Si  donc  ic  délire  d'eftre  recomman 
de  aux  prières  des  fidèles,  que  le  donne  occa- 
fîon  qu'on  ait  foin  de  moy,  &  que  chacun  face 
le  fcmblable.  Souuent  il  nous  femblera  qu'on 
nous  fait  grand  tort  quad  on  ne  penfeia  point 
de  nous. Mais  quoy?  Si  on  regarde  quels  nous 
loniuies  ,  nous  méritons  bien  qu'on  nous  ou- 
blie ,  &  qu'on  nous  laifle  là  pour  ce  que  nous 
valons. Et  ainlî,aiin  que  Dieu  exauce  les  orai- 
fons  des  liens ,  &  qu'au  fsi  de  leur  part  ils  foy- 
ent  incitez  à  prier  pour  nous  ,  prattiquons  ce 
qui  eft  ici  dit,qu'oncognoilTe  que  nousaimons 
le  Royaume  de  Dieu  ,  Se.  comme  il  veut  qu'on 
penle  de  nous,que  nous  penlîons  aafsi  .\  luy,(S: 
alors  nedoutons  point  que  nous  ne  foyons  fe- 
courus  de  luy  au  befoin.  Voila  ce  que  nous  a- 
uons  à  retenir  fur  ceft  article.  Or  maintenant 
venons  à  ce  que  fainiîl  Paul  dit  de  fa  perfonne. 
11  protefte  ^»'//  adore  le  Diea  de  fes  anceflres 
tn  pure  cinfcieuce.  Il  n'y  a  nulle  doute  q  fainft 
Paul  n'ait  ici  voulu  repoufler  les  calomnies  & 
faux  blafmes  dont  il  eftoit  diffamé  entre  les 
luifs.  Car  beaucoup  le  tenoyent  comme  vn 
apoftat  qui  s'eftoit  reuolté  de  la  Loy  deMoy- 
fe,  qui  auoit  delailTé  le  Dieu  de  fes  Pères ,  la 
religion  en  laquelle  il  auoit  eftc  nourri. Saincl 
Paul  donc  veut  ici  monftrer  qu'il  adore  le 
Dieu  d'Ifracl,  qu'il  perfifte  en  la  vraye  &  pure 
religiô  qui  a  tlîé  du  temps  de  la  Loy,  &  mef- 
mes  quand  il  adioufte  en  pure  confcience,i\  mon 
ftre  qu'il  n'a  point  efté  efmeu  m  d'orgueil,  ni 
d'ambition, ni  de  folle  conuoitife,c5me  beau- 
coup de  gens  appetent  nouueauté  .d'autant 
qu'ils  n'ont  point  de  confcience  qui  lesarre- 
fte  &  les  retiene  en  la  crainte  de  Dieu.  S,.\\n^ 
Paul  donc  monftre  que  ce  qu'il  tenoit  de  l'E- 
uaugile.n'c.ftoit  point  par  vne  cupidité  vaine, 
mais  qu'il  fe  déclare  eftre  là  comme  deuant 
Dieu,&  qu'il  ne  fe  veut  point  faire  valoir  de- 
uant les  homes, ni  fe  prifer,mais  qu'il  fe  con- 
tente d'adorer  le  Dieu  viuant.  Voila  en  fom- 
me  à  quoy  faiiirt  Paul  a  prétendu.  Or  ici  nous 
auons  ànotcr  que  iî  vn  Âpoftre  tant  excellent 
comme  luy.a  efté  ainfi  dénigré  parles  mef- 
chans,nous  ne  deuons  point  trouuer  eftrange 
files  feruiteursde  Dieu  font  exercez  en  celle 
façon. Et  au  refte, fuyuons  l'exemple  de  (.iinEt 
Paul,c'eft  que  nous  puiAions  auoir  ce  bouclier 
en  la  main  pour  rembarrer  toutes  les  faillies 
calomnies  dont  ou  noiisfIiarge,&  dont  on  taf 
chcdenous  rendre  odieux  deuant  les  hom- 
mes ,  que  nous  puifsious  toufiours  monftrer 

(di-ie) 


SVR    LA   II.    A    TIMOTH 


339 


(<li-ie)  à  la  vérité  ,  Si  non  point  nous  vanter 
feulement  de  bouche,  que  nous  feruons  au 
Dieu  viuanc,  &  que  nous  y  procédons  en  pure 
confcience.  Q_iiand  nous  aurons  ce  tefmoigna 
ge-la  deuant  Dieu,  &  que  nous  pourrons  aufsi 
monftrer  de  quoy  deuant  les  hommes ,  il  faut 
que  nous  portiôs  en  patiéce  les  murmures, les 
fauflètez.les  mélonges  qui  fe  feiuent  de  nous: 
car  ce  n'eft  pas  raifon  que  nous  ayons  plus  de 
priuilege  que  n'a  eu  faind  Paul.  Voila  quant  à 
fa  perfonne.  Mais  cependant  ici  nous  auons 
vne  bonne  règle  de  bien  feruir  à  Dieu.  Car 
fuyuant  ce  quieftdit.qu'il  regarde  au  dedans, 
&  non  point  à  l'apparence  qui  eft  prifee  des 
hommes,  il  n'eft  point  queition  que  nous  fer- 
nions  Dieu  feulement  des  mains,  &des  pieds, 
mais  il  faut  que  noftre  cœur  marche  deuant. Le 
vray  feruicedc  Dieu  donc  fera  cordial,  félon 
aufsi  ce  qui  eft  dit  en  la  Loy ,  Tu  aimeras  ton 
Dieu,  tu  adhéreras  â  luy  de  tout  ton  caur.  Il 
eft  vray  que  Dieu  veut  bien  que  nous  emplo- 
yons toutes  oos  facultez,&  tous  nos  membres 
à  fon  feruicc,  que  le  tout  luy  foit  dédié  ,&  ïe 
faut  aufsi:&de  faift,vn  bon  arbre  fe  monftre- 
ra  toufiours  par  les  fruifts  extérieurs. Et  ainfi, 
quand  nous  aurons  vne  affedion  cordiale  de 
feruir  à  Dieu,il  faudra  bien  qu'elle  fe  monftre 
en  toute  noltre  vie, que  toutes  nos  œuures  foy 
ent  comme  les  fruiifts  de  cefte  bonne  racine. 
Mais  tant  y  a  que  pour  bien  feruir  à  Dieu ,  il 
faut  que  deuant  toutes  chofes  nous  ayons  ce- 
fte pure  confcience  dont  parle  faincl:  Paul. 
C^ue  nous  n'ayons  point  feulement  vne  vie 
bien  modérée  deuant  les  hommes, &  vne  hoii- 
neftetc  qu'il  n'y  ait  que  redire,que  nous  n'ay- 
ons point  des  vertus  admirables  :  brief ,  il  ne 
faut  point  que  nous  foyons  dorez, mais  il  faut 
que  l'or  foit  au  dedans:&  ne  faut  point  q  nous 
ayons  feulement  quelque  apparence  ,  mais  il 
faut  que  nous  foyons  maf  ifs,  c'eft  à  dire,  que 
la  crainte  de  Dieu  fou  ferme  &  folide  en 
nous.Ainfidonc^î  nous  regardons  pourquoy 
Dieu  detefte  tant  rhypocrifîe.qm  vaut  autant 
comme  fidion  ,  quand  les  hommes  fe  contre- 
font ,  &:  qu'ils  ont  feulement  quelque  mafque 
poureftre  trouuez  vertueux,  nous  trouuerons 
que  c'eft  à  bon  droift.  Et  pourquoy?  Car  c'eft 
toute  corruption  de  fon  feruice.  Voila  donc 
vn  facrilege.  Car  fi  le  feruice  de  Dieu  eftper- 
nerti,  voila  fon  nom  qui  eft  prophané  ,  ce  qui 
ne  fe  peut  faire  fans  facrilege  :&  puis  on  con- 
nertitfa  vérité  enmenfonge,  qui  eft  encores 
pour  anéantir  ù  gloire,  &  le  tranffigurer.  Et 
ainlînon  fanscaufe  l'hypocnlie  eft  tant  de- 
teftâble  à  Dieu.  Et  d'autant  plus  nous  faut-il 
tendre  à  cefte  pure  fimplicitc  &  rondeur, qu'vn 
chacun  de  nous  fë  prefente  deuant  Dieu  pour 
examiner  ce  qui  eft  en  luy,  &  quand  on  n'aura^ 
nul  regard  au  monde, qu'on  face  cefte  conclu- 
fion  ,  Si  faut-il  que  ie  foye  aduoué  de  mon 
DieuiCar  quand  tout  le  monde  m'applaudira, 
&  qu'on  rjetromie  rien  à  redire  en  moy,&  ce- 
pendant i^ue  ie  foye  r«ictcé  de  mou  luge  ce- 


lefte,qu'auray-ie  gagné?  Qjjand  donc  noui 
auronscefte  conchilîon-Ia  pour  dire, le  ne  me 
contente  point  delà  réputation  que  lepour- 
ray  acquérir  enuers  les  hommes,  finonquema 
confcience  foit  pure  deuant  Dieu,  &  que  f  aye 
afFeûion  de  profiter  en  fa  crainte:  quand,  di- 
ie,nous  aurons  ce  regard-la,  tous  les  fcruices 
que  nous  rendrons  à  Dieu,  luy  feront  agréa- 
bles tmais  fans  cela  ce  ne  fera  quefumee:nous 
pourrôs  auoir  tant  belle  parade  que  rien  plus, 
mais  cène  fera  que  fiente  &  ordore  quanta 
Dieu.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir 
en  ce  palfagc  ,  touchant  la  bonne  confcience. 
Or  fainft  Paul  adioufte  <j»';7  adore  ce  VieM-ci 
dés  fes  anccjlres.  Pourquoy  ?  l'ay  defîa  allé- 
gué la  raifon  .d'autant  qu'on  luy  reprochoit 
qu'il  auoit  forgé  vne  religion  à  la  volée,  & 
qu'il  s'eftoit  abaftardi  tellement,  qu'il  auoit 
lailTé  le  Dieu  de  fes  Pères.  Or  il  monftre  que 
il  adore  le  Dieo  viuant ,  lequel  auoit  premie- 
reiitent  elea  Abraham  &  fon  lignage  ,  lequel 
auoit  donné  fa  Loy  par  Moyfe  ,  lequel  auoic 
parlé  par  fes  Prophètes.  Sainift  Paul  donc 
monftre  qu'il  ne  s'eft  point  diuerti  delado- 
ftrine  ancienne,  qu'il  n'a  point  inuenté  vne 
religion  incognue,  mais  qu'il  perfifte  en  la 
Loy  de  Dieu,&  aux  Prophetes,qu'il  fe  main- 
tient à  la  pureté  qui  a  efté  de  tout  temps, qu'il 
n'eft  point  tel  qu'on  fe  doyue  tenir  comme  vn- 
apoftat. Voila  en  fomme  à  quoy  il  a  prétendu. 
Comme  auiourd'huy  nous  voyons  que  les  Pa- 
piftes  nous  chargent  d'vne  mefme  calomnie. 
Car  ils  font  à  croire  aux  fimples  &  idiots ,  que 
nous  auons  controuué  vne  façon  de  viure 
comme  eftrange.que  nous  auons  anéanti  tou- 
te la  fimplicité,  &  que  nous  ne  tenons  rien  de 
ee  qui  a  efté  receu  par  les.  Apoftres ,  &  par  le"! 
Martyrs. Or  nous  fçauons  bien  tout  le  contrai 
re.  Car  pouiquoy  combatons-nous  contre  les 
Papiftes.finon  d'autant  quenousn'accordons 
point  à  leurs  tromperies?Carils  ont  forgé  en 
leur  boutique  tout  ce  qu'ils  appellent  feruice 
de  Dieu ,  leurs  articles  de  foy  ,  &  tout  le  re- 
fte. Voila  donc  les  Papiftes  qui  ont  fait  vn  tri- 
potage &  vn  meflinge  de  men foiiges  qu'ils  ont 
ramalfez  çà  &  là  :  &  cependant  nous  deman- 
dons qu'on  fe  tiene  à  la  Loy,  aux  Prophètes, 
&  à  l'Euangilc  :  que  Dieu  a  là  donné  vne  do- 
âriue  parfaite  ,  Scoù  il  n'y  a  que  redire  :  que 
c^eftla  doôrine  qui  doit  eftre  cfcoHtee,&:3 
laquelle  on  fe  doit  aflîiiettir  .  Voila  ce  que 
nous  difons.  Ainfi  donc  nous  voyons  qu'il  a; 
Êilu  que  fainâ  Paul  vfaft  de  cefte  defenfe  qui 
nous  eft  auiourd'huy  neceflaire.Et  ce  nous  eft 
vne  belle  confoJation  quand  nous  voyons 
qu'il  ne  nous  faut  point  chercher  des  ex- 
cufes  çà&  là  pour  clorre  la  bouche  aux  Pa- 
piftes ,  &  à  toutes  leurs  f.iuffcs  obieélions:- 
mais  qu'ilnous  fuffife  que  faiuél  Paul  ait  re- 
fpondu  en  noftre  nom.Pourquoyr'La  caufe  eft 
du  tout  femblâble.N'auons  -nous  point  à  nous 
refiouir  quand  Dieu  nous  côftitue  faind  Paul 
pour  aduûcat  &  procureur  de  noftre  caufe,, 

V.U. 


34^ 


SERMON    III. 


contre  les  Papiftes?  Tellement  que  nous  ne 
fomnies  poït  empel'che7.auioiird''huy  il'aiioir 
quelque  réplique  lie  noftrecerueau,mais  il  tuf 
'fie  (le  produire  &  mettre  en  au.int  ce  que  S. 
Paul  a  déclaré  de  fa  bouche,  voire  ellant  coii 
duit  par  rEfprit  de  Dieu. Or  fi  nous  auouî  S. 
Paul  paur  noftrc  aduocac ,  voila  le  taiutl:  E- 
fprit  qui  nous  aduoue  du  ciel.  E:  inefmes  S. 
Paul  a  eu  vne  procuration  futrilante  pour  mô 
ftier  qu"'il  ne  pailoit  point  en  qualité  d'hom 
me  mortel ,  ne  de  créature  ,  maiç  quec'eftoit 
au  nom  &  en  Tauthorité  de  Dieu.  Ainlî  donc 
-que  nous  prenions  courage  quand  nous  voy- 
ons que  les  Papilles  nous  blalment  à  tort,  & 
que  cela  ne  nous  tourmente  point  par  trop, 
puis  que  noitre  Dieu  prend  la  caufe  ,  &  qu'il 
nous  donne  vne  telle  defenl"e,qu'encores  que 
nous  eufsions  la  bouche  fermée  ,  il  ne  lailTera 
point  de  monftrerqueles  Papilles  feront  con 
damnez  en  toute  leur  vaine  gloire.  Mais  ce- 
pendant il  fcmbleroit  que  faind;  Paul  voulufb 
ici  dire  que  ceux  qui  chagent  de  façon  de  fai 
refont  à  condamner.  Car  nous  ne  pouuons 
pas  nier  que  nous  n'ayons  beaucoup  innoué: 
car  il  a  faluaulsi  retirer  le  poure  monde  qua 
fi  des  abyfmes  d'enfer.  Nous  fçauons  qu'en 
la  Papauté  il  n'y  a  rien  qui  ne  foit  peruerti. 
Ainfi  donc  il  a  falu  faire  vn  gradchangemct. 
Mais  lafolutioneftbienaifeeàceci  Carquad 
Ùinà  Paul  parle  de  fesancellres ,  il  n'entend 
pas  d'approuuer  toutes  les  fuperftitions  qui 
eftoyent  luruenues ,  comme  alors  ily  auoit 
des  erreurs  tant"&  plus  entre  les  luifs.  Sainft 
^    Paul  n'^  garde  de  fe  vouloir  là  enuelopper: 
mais  fl  parle  de  fes  anceftres,  entant  qu'il  e- 
ftoit  defcendu  d'Abraham  :  &  par  ce  moyen 
il  rapporte  le  tout  à  celle  origine  ,  &  k  celle 
fource  de  l'alliance  que  Dieu  auoit  faite  auec 
les  luifs.Comme  quand  nous  dirons  que  nous 
tenons  la  foy  des  faindls  Pères  ,  nous  parlons 
en  vérité.  Et  pourquoy?  Qjii  font  nos  Pères 
r/V,44;i  (fuiuant  ce  qui  eftdit  au  Pfeaume  )  fînon  les 
Apoftres ,  &  ceux  qui  ont  elle  commis  pour 
publier  l'Euangile  par  tout  le  monde  ,  &  les 
Martyrs  qui  les  ont  enfuiuis.Nous  proteftos 
donc  en  vérité  que  nous  tenons  la  foy  des 
fainfts  Pères ,  &  cependant  nous  rapportons 
le  tout  à  l'Euangile.  Mais  quand  les  Papilles 
fe  glorifient  de  tenir  la  foy  des  Pères ,  c'eft  à 
fauffes  enfeignes.  Et  pourquoy?  Car  ils  amè- 
nent pour  leurs  pères  ,  des  poures  abiifez  qui 
ont  elle  au  temps  d'ignorance:  ils  prendront 
des  moines  qui  ont  fongé  &  refué  beaucoup 
de  menus  fatras.  Voila  donc  les  pères  des  Pa 
pilles.    Etd'auantage  ,  quand  ils  fe  veulent 
feruir  de'  doûeursancicns,i|çprédront  leurs 
■    erreurs  :  &  ce  qui  e/l  là  de  bon  &de  pur  ,  fe- 
ra reietté  ,  qu'il  femble  qu'ils  ayent  confpiré 
d'anéantir  toutes  les  grâces  de  Dieu.  S'il  y  a 
cependant  quelque  chofe  mal  couchée,  s'il  y 
a  quelque  lefture  pour  colorer  leurs  refue- 
ri es, voila  ce  qu'ils  prenent,  voila  en  quoy  ils 
adhèrent  à  leurs  pères.  Autant  en  cftoic-il 


du  temps  de  fainél  Paul.  Ainfî  notons  bien  que 
iaind  Paul  ne  veut  pas  ici  condamner  touc 
changement  qui  fe  fera  quand  la  religion  au- 
ra elle  mal  conduite,  &  que  les  hommes  y  au- 
ront apporté  de  leurs  inuentions  :  il  faut  que 
tout  cela  foit  retranché,  il  faut  qu'on  reuiene 
à  la  pure  Si.  lîmple  religion  de  Dieu,  afin  que 
ce  fondement  demeure,  que  Dieu  feul  règne, 
&  qu'il condtufefon  peuple.  Mais  fainftPaul 
difant  qu'il  a  adoré  Dieu  depuis  fes  anceftres, 
entend  qu'il  n'a  point  derogué  à  la  pure  reli- 
gion telle  que  Dieu  l'auoit  ellablie  entre  les 
luifs. Et  de  là  aufsi  nous  voyôs  que  fainft  Paul 
n'a  pas  voulu  ici  dire  en  gênerai, que  celuy  qui 
pourra  alléguer  fes"anceflres,  foit  iuflifîépar 
ce  moyen,  car  ce  feroit  v«e  pure  mocquerie. 
Les  Turcs  auiourd'huy  fçauront  bien  dire. 
Nous  feruons  à  Dieu  depuis  nos  anceflres:car 
il  y  a  beaucoup  de  temps  palTe  que  Mahomet 
les  a  abbruucz  de  fes  refueries  diaboliques. 
Voila  doc  enuiron  mille  ans  que  ces  mal-heu 
reux  font  enyurez  en  leurs  folies, ils  pourront 
alléguer  que  leur  religion  n'ell  pas  nouuelle. 
Mais  quand  elle  auroit  elle  dés  la  création  du 
monde,  ce  n'eft  rien  dit.  Pourquoy  ?  L'idola- 
trie  a  efté  de  ce  temps-la.Nouv  voyons  qu'el- 
le n'apoint  efté  feulement  quand  le  mode  fut 
reftaurré  après  le  déluge  .  Auparauant  le  nom 
de  Dieu  eiloit-il  inuoqué  par  tout  ?  Nenni: 
mais  il  eft  dit  que  la  lignée  de  Seth  eftoit  cel- 
le où  Dieu  eftoit  ferui:  Se  c'eil  Comme  vn  mi- 
racle,quand  li  pureté  du  feruice  de  Dieu  n'eft 
trouuee  qu'en  vne  fi  petite  poignée  de  gens. 
Ainfi  donc  l'ancienneté  ne  fuffira  point'  pour 
approuuer  vne  religion  ,  ce  leroit  vne  beftife 
trop  lourde;  car  par  ce  moyen  il  n'y  auroit  re 
ligion  plus  certaine  que  toutes  celles  qui  font 
mefch3tes,&  que  Dieu  a  endeteftation.Mais 
fainâ  Paul  prefuppofece  que  nous  auons  def 
ia  dit,c'eft  afçauoir  qu'il  eftoit  defcendu  de  la 
race  d'Abraham, &  que  le  Dieu  qui  eftoit  là  a- 
doré,n'eftoit  pas  vne  idole, mais  que  c'eftoit  le 
Créateur  du  ciel  &  de  la  terre.celuy  auquel  il 
nous  faut  venir  pour  auoirfalut,  celuy  qui  eft 
vrayement  noftre  Pere.Et  voila  pourquoy  auf 
fi  noftre  Seigneur    lefus  difcerne  entre   les  '"**  4» 
Juifs  &  les  autres  nations.  Vous  ne  fçauez  que  ^^• 
vousadorez.il  eft  vray  qu'il  parle  à  la  Sama- 
ritaine :  mais  ce  peuple-la  auoit  encores  plus 
d'affinité  auec  les  luifs  ,  que  tout  le  rcfte  du 
monde. Car  les  Samaritains  eftoyent  circôcis, 
&  fe  vantoyent  d'adorer  le  Dieu  d'Abraham: 
ils  faifoyent  les  facrifices  à  la  façon  des  luifs: 
mais  cepédant  fi eft-ce  qu'ils  n'eftoyent  point 
aduouez  par  la  Loy,  meimes  qu'ils auoyent  v- 
ne  religion  baftarde.  lefus  Chrift  prononce 
qu'ils  ne  fçauent  ce  qu'ils  font.quec'eftpeinc 
perdue, Vous  mettez  beaucoup  de  peine  à  fer- 
uir Dieu,  mais  il  reiette  tout  cela,  car  vous  ne 
fçauez  que  vous  adorez, il  n'y  a  point  de  certi  £_»_/• 
tude  .  Or  à  l'oppofite,  il  dit,  Nous  fçauons  ce     "     ''"■ 
que  nous  adorons  .  Il  parle  la  des  luifs ,  qu'ils 
cognoiffoyent  qu'ils  adoroyent  le  vray  Dieu. 


SVR   LA  II.   A  TIMOTH. 


34r 


Et  pourqnoy?  Car  ils  en  aiioyent  vn  tefmoi- 
gnage  iiifallible  par  la  Loy.qiii  eftoit  bien  c5 
tennee  par  Talliance  qui  auoit  efté  faite  en- 
core plu?  anciennement  en  lanlain  d' Abra- 
ham.Notôs  bien  donc  que  fainft  Paul  ne  par- 
le point  ici  fans  exception  de  tous  Pères  & 
anceftrçs,  mais  de  ceux  qui  font  fondez  en  la 
rente  de  Dieu ,  &  qui  ont  elté  enfeignez  par 
luy.Etainfî  que  nous  foyonsadmoneftezd'a 
uoir  prudence  &  difcretion, quand  il  eft  que- 
,ftiondedire,N>)s  Pères, Nos  Peres:que  nous 
n'y  allions  point  à  la  volée.  Car  autrement 
nous  ferôs  ferablables  aux  Turcs  &  aux  Pay- 
ens:&  quand  nous  aurons  gagné  noftrecaufe 
.  deuant  les  kommes  ,  qu'aurons-nous  profité? 
Que  faut-il  donc?  C^ue  nous  puifsions  choi- 
fir  les  Pères  qui  font  vrayement  enfans  de 
Dieu  ,  afin  qu'il  y  ait  vn  lignage  légitime.  le 
parle  maintenant  du  lignage  fpintuel-.&ainfi 
que  nos  Pères  foyent  enfans  de  Dieu  (  com- 
pile l'ay  defîa  dit)afin  que  le  tout  fe  rapporte 
à  luy.  Or  nous  auros  cela  quand  nous  fuiurôs 
la  pure  fimplicité  de  l'Euangile  S:  de  TEfcri- 
ture  faincle,&  que  nous  chercherons  le  Dieu 
qui  s'eft  là  manifefté.alors  nous  ne  pourrons 
faillir:  &  combien  que  le  mode  nous  condam 
ne.fi  nousfommesafleurez  d'eftreappj'ouuez 
là  haut, cela  nous  doit  bien  fuffire. Voila  dôc 
quant  à  ce  mot  où  fainâ:  Paul  parle  de  fes  an 
ceftres.Orilmet  puis  a.pres,Qjt'il  nnd gracet 
à  Diet  de  la  foy  nonf^^inte  q»i  cftoit  en  Timo- 
thee,  liiqutlle  auoit  haf"té  aupar.iuant  enfume 
re-granJ  Loi  de,  (^  en  fa  mère  Eunicf,  &  qit'tl 
eft  ferf»adé  qu'elle  hahite  anfji  en  /»^. Quand 
fainû  Paul  parle  de  la  foy  non  feinte  ,  c'ert 
encores  pour  confermer  le  propos  qu'ila- 
uoit  tenu  de  la  pureconfcience  ,  comme  aufsi 
ilauoitainli  intitulé  la  foy  en  la  première  E- 
piftre.C'eft  vne  doctrine  que  nous  deuôs  bien 
noter. Car  fi  ayans  à  faire  auec  nos  prochains 
nousdeuons  cheminer  en  rondeur,  l'hypocri 
fie  fera  toufîours  deteftable  à  Dieu.  Que  fe- 
ra-ce  quand  nous  venons  deuant  luy?  Si  nous 
tafchôs  de  tromper  vn  homme  mortel,  Dieu 
ne  peut  Ibuffrir  cela.  Or  quand  nous  le  vou- 
dras tromper,  &  nous  moquer  de  luy, S:  nous 
en  iouer  comme  d'vn  petit  enfant  ,  où  eft-ce 
aller,  ie  vous  prie?  NTeft-ce  pas  fe  moquer 
par  trop  de  ù-  maiefté?  Ainfi  donc  ce  n'eft 
point  fans  caufe  que  ce  titre  eit  attribué  à  la 
foy,qu'elle  eft  fans  hypocrifîe  &  fans  fiftion. 
Voulons-nous  donc  eftre  fidèles?  Q_iie  nous 
foyons  defpouillez  en  premier  lieu  de  toutes 
.  nos  fictions  defquelles  nous  fommes  enuelop 
pez  tant  &  plus.  Nous  voyons  qu'elle  eft  no- 
ftre  nature:que  l'homme  fenourrifle  tel  qu'il, 
eft  ,  il  fera  toufiours  enueloppé  en  mille  fub- 
terfuges  ,  qu'il  fe  trompera  foy-mefme,  il  fe 
fera  à  croire  merueilles  de  foy,  &  cependant 
il  fera  toutabbruti  :  car  nos  vices  nous  font 
cachez  ,  &  mefmes  nous  leur  fermons  volon- 
tiersles  yeux,  ne  cherchas  qu'à  nous  flatter. 
Ainfi  donc  pour  cftre  vrayement  fidcles,com 


mençons  par  ce  bout ,  c'eft  afçiuoir  de  nom 
def.pouiller  de  toutes  nos  fantalîes  charnel- 
les ,  &  de  toutes  nos  feintifes  efquelles  nous 
fommes  par  trop  enclins  &  addonnez.  Et  par 
cela  nous  voyons  que  ce  n'eft  point  vne  cho 
fe  vulgaire  que  la  toy.  Il  eft  vray  qu'vn  cha- 
cun s'en  vantermais  nous  fentirons  finaleméc 
qa'elle  eft  precieufe  deuant  Dieu  ,  &  qu'il  ne 
faut  point  vfurper  vn  tel  nom  ainfi  à  l'auentu  . 
ture  comme  on  fait.  Chacun  dira, le  liiis  fide- 
le:&  voudra  eftre  réputé  tel.  Mais  quoy?Ce- 
pédant  tous  font  pleins  d'hypocrifie,  tous  fc 
louent  auec  Dieu.Côbien  donc  que  le  monde 
face  bon  marché  de  la  foy,  fi  eft-ce  que  nous 
voyqns  que  c'eft  vne  chofe  bien  difficile  d'c 
ftre  réputé  fidèle,  d'autât  qu'il  eft  requis  que 
nous  foyons  purgez  de  tous  nos  menfonges, 
de  tous  nos  fubterfuges ,  que  nous  ayons  ap- 
prins  de  nous  defplaire  en  nos  vices,  &  de  Icï' 
fonder  en  telle  forte  que  nous  ne  foyôs  plus 
doubles  Jeuant  Dieu,  &  qu'en  nous  condam- 
nant nous  ne  demandions  finon  de  nous  con- 
former du  tout  à  luy.  Voila  donc  qu.it  à  ce  ti 
tre  de  la  foy  qui  eftoit  enracinée  en  la  perfô 
ne  de  Timothee.Et  cela  nous  doit  feruird'ia 
ftruâion  générale  à  tous ,  comme  fainfl  Paul 
adiouftepour  mieux  confermer  Timothee, 
qu'il  pourfuiue  le  bon  train  où  il  eftoit  en- 
tré ,  quand  il  a  eu  fa  mere-grand ,  &fa  merc 
qui  ont  eu  vne  vraye  foy.  Pourquoy  eft-cc 
qu'il  ne  fait  mention  ici  du  père  aufsi  bien? 
Il  nepouuoit  pas,  car  il  eftoit  Payen,  ainfi 
que  l'ainO:  Lucie  recite  aux  AQ.es.  Voila  dôc  ,  rt 
Timothee  qui  eft  engendré  d'vn  père  Pay-  ■^'^•^^•* 
en,  &fon  lignage  paternel  eftoit  poilu  de-  * 
liant  Dieu,cSc  condamné  :  mais  du  cofté  de  fa 
mère  il  eftoit  luif.  Voila  pourquoy  fain£t 
Paulnotamraent  luy  propofe  l'exemple  de  fa 
merc.  Cognoiffons  donc  qu'ici  l'orgueil  des 
homes  eft  rabbatu:  car  il  n'eft  point  queftioa 
de  fe  prifer  félon  les  degrez  qui  font  ici  bas 
en  terre. Il  eft  vray  que  l'homme  eft  à  préfé- 
rer à  la  femme,  voire  quant  à  la  police,  qu'il 
faut  qu'il  ait  toufiours  la  prééminence  &  la 
(dignité  d'eftre  le  chef  de  la  femme.  Mais  fi 
l'homme  s'efgare, qu'il  foit  idolâtre  &  vn  def 
bauché, qu'il  foit  peruers:  quand  la  femme  fe 
tiendra  à  la  parole  de  Dieu  ,  qu'elle  aura  le- 
fusChriftpour  fon  chef  deuant  les  Anges  de 
paradis,elle  furmontera  tous  les  hommes  qui 
fe  feront  ainfi  efgarez,&  faudra  que  ce  qui  eft 
dit  des  enfans'de  Dieu,  foit  accompli  en  vne 
.femme.  Que  nous  marcherons. fur  tous  nos  'j'''44.^ 
ennemis, que  nous  leur  foulerons  la  tefte  aux 
pieds. Notons  bi^n  donc  que  tout  orgueil  de 
la  chair  eft  ici  abbatu,afin  que  nous  rendions 
à  Dieu  l'honneur  qui  luy  appartient  ,  quand 
il  eft  dit  que  la  mere-grand  &  la  mère  de  Ti 
mothee  ont  efté  prifees  deuant  Dieu,  &  qu'el 
les  ont  céfte  dignité  d'eftreici  nommées  ,  Se 
.  que  les  hommes  font  là  laifTez  ,  comme  indi- 
gnes qu'on  en  face  iamais  mention  ,  &  meri- 
tans  d'eftre  reiettez ,  &  comme  plongez  aut 

V.iii. 


34* 


SERMON      II. 


abyfmes.  Et  pourquoy?  Car  ils  ne  font  point 
hommage  au  Dieu  viuant .    Mais  les  femmes 
font  ici  comme  canonizees ,  Dieu  les  met  en 
fon  regiftre  ,  &  les  met  en  degré  honorable. 
Aurefte  ,  notons  que  la  foy  dont  parle  ici 
fainô  Paul,  aeilé  celle  bonne  affedion  que 
ces  femmes  auoyent  eue  de  feruir  à  Dieu, 
combien  que  TEuangile  ne  leur  fuil  point  en- 
cores  reuelé.Ainfi  donc,  nonobftant  qu'il  n'y 
cuft  pas  vne  pleine  cognoilîànce  de  i'Euan- 
gile,&  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.fi  efV- 
ce  que  ces  femmes-ci  ont  eu  vne  foy  droite, 
&approuueede  Dieu  .  Pdurquoy?  Carelles 
attendoyent  le  Médiateur  qui  eftoit  promis: 
encorcs  qu'il  n'ait  point  efté  reuelé  leur  vie 
durant,il  fuffit  qu'elles  ayent  cheminé  en  ce- 
fte  efperâce,&  qu'elles  ayent  inuoqué  Diew, 
iufques  à  ce  qu'il  euft  accompli  ce  qu'il  auoit 
promis. Et  ce  n'eft  point  vne  petite  louage  q 
cefte-ci:car  du  téps  de  S.Paul  tout  eftoit  tel- 
lemét  profané,que  c'eftoitvn  horreur:  il  n'y 
auoit  pi'  nulle  crainte  de  Dieu  au  cômun  peu 
pie  ,  ie  di  entre  les  luifs  :  &  la  dodrine  eftoit 
tellement  mellee  des  corruptions  inuentees 
des  hommes,  que  c'eftoit  pitié  :  mais  tant  y  a 
que  Dieu  auoit  referué  quelque  petite  femen 
ce.  Voila  pourquoy  i'ay  dit  que  c'eft  vne  gra- 
de louange  que   û'md  Paul  attribue  à  ces 
femmes,  de  ce  qu'elles  ont  cheminé  entre  les 
efpines,&n'en  ont  point  efté  picquees, qu'el- 
les fe  font  toufiours  maintenues  en  iimplici- 
té,&  en  la  crainte  de  Dieu.Comme  aufsi  nous 
voyons  en  l'Euangile  qu'il  ertdit,Cefthom- 
luci      me  attendoit  le  royaume  de  Dieu.   Ce  mot 
jf,     '     n'eft  mis  que  deux  ou  trois  fois:&  pourquoy? 
Car  ce  n'eft  point  vn  titre  qui  foit  commun, 
que  d'attendre  le  Royaume  de  Dieu,  c'eft  à 
dire  ,  que  ceux  qui  ciperoyent  que  Dieu  en- 
uoyeroit  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  pour 
Rédempteur, qu'il  reftaureroit  les  chofes  c5- 
fufes  au  mode, il  eft  dit  que  ceux -la  ont  atten 
du  le  Royaume  de  Dieu. Et  pourtat  ils  ont  e- 
fté  côme  feparez  du  rang  des  autres;  &  corne 
le  nombre  en  eftoit  bien  petit,  la  louange  qui 
leur  eft  attribuée  nous  doit  feruir  d'inftruaiô 
11  eft  vray  qu'auiourd'huy  l'Euagile  refonne, 
nous  entendons  fa  voix  haut  Si  ciair:mais  ce- 
pédant  nous  voyons  qu'il  y  en  a  bien  peu  qui 
adorent  Dieu  puremét.nous  voyons  la  rébel- 
lion &  malice  obftinee  qui  eft  en  la  plus  part, 
tellement  que  ceux  aufquels  l'Euagile  fe  prcf 
che,s'aigriHent  à  l'encontre  de  Dieu,&  fe  ma 
nifeftent  Iny  eftrc  côtiaires  plus  que  ne  font 
point  les  Papiftes:nous  voyôs  cela  à  l'oeil.  Et 
cependît  en  la  Papauté, qu'eft-ce?quelles  con 
fuiions  y  a-ilfNous  auons  donc  mefticr  de  rc 
tenir  ce  qui  eft  ici  dit, que  la  foy  n'a  pas  laifTé 
d'habiter  en  d'aucuns ,  tellement  qu'ils  n'ont 
point  efté  efperdus.-combien  qu'il  y  cuft  defo 
lation  par  tout ,  fi  eft-ce  qu'ils  oAt  cfperé  en 
Dieu  patiemii>ent:&  ce  ne  font  point  les  hô- 
»ies  q  font  ici  louez,  car  il  n'eft  point  ici  par- 
lé des  dofteurs,nuis  des  femmes,  Q_iiaiid  se- 


la  eft  dit,  fortifions-nous.  Si  quand  nous  ver- 
rons tout  le  monde  eftre  tranfporté  côme  de 
vn  déluge,  q  nous  appreniôs  de  nous  recueil- 
lir,&  nous  retirer  de  nos  corruptions, car  fans 
cela  nous  ne  pourrons  auoir  la  foy  à  laqueilc 
il  nous  faut  donner  logis  en  nous,  côme  il  en 
eft  ici  parlé  ,  que  la  foy  a  habité  en  la  mère- 
grand  de  Timothee,&  en  fa  mcre.Ainfi  donc 
donnés  logis  l  noftre  Dieu,&  à  fa  p3role,afin 
que  la  foy  habite  en  nous ,  encorcs  que  nous 
voyons  qu'elle  foit  dechaflee  de  toxit  le  mon 
de,&  corne  bannie.  Et  au  reftc,  pour  conclu- 
fion  ,  notons  que  fi  ces  femmes  du  temps  des 
ténèbres  ,  du  temps  que  tout  eftoit  méfié  en 
ludee  ,  n'ont  pas  laiffc  d'adhérer  à  la  foy  de 
Dieu  ,  &  qu'elles  ayent  eu  vne  afFeûion  tel- 
le que  faincf  Paul  approuue  ici ,  qu'il  y  aura 
vne  horrible  vengence  fur  tous  ceux  qui  per- 
fiftent  en  leur  incrédulité,  combien  que  Dieu 
apparoifle  comme  en  plein  midi  ,  combien 
que  lefus  Chrift  foit  le  foleil  de  iufticc  qui 
nous  efclaire ,  que  nous  en  voyons  encores 
beaucoup  qui  ferment  les  yeux. Et  aTnlî,quel-» 
le  condamnation  y  aura-il  fur  leur  tefte, 
veu  que  ceux  qui  s'aliènent  quand  les  cho- 
fes font  confufes ,  ne  font  point  à  excufer 
pourtant?  Car  félon  que  le  fainâ  Efprit  ap- 
prouue ceux  qui  perliftent  en  la  foy  d'au- 
tant qu'il  les  enflamme  ,  aufsi  il  n'y  a  nulle 
doute  qu'il  ne  condamne  ,  &  qu'il  ne  detefte 
tous  ceux  qui  prenent  occafion  de  s'eflôgner 
de  Dieu  quand  les  chofes  neleurvienét  point 
à  plaifir  comme  ils  voudroycnt.  Or  quand  S. 
Paul  dit  i  Timothee  qu  il  fcait  aufji  h'enq^e 
la  foy  habite  en  /«  v,il  ne  parle  point  de  fa  foy 
prefente,&de  celle  qu'il  auoit  depuis  qu'il  c- 
ftoic  appelé  à  l'Euangile  ,  mais  il  parle  de  la 
foy  qu'il  auoit  eue  dés  fon  enfance. Car  Dieu 
luy  auoit  fait  la  grâce  qu'il  auoit  fuiui  le  bon 
coftc, qu'il  auoit  adhéré  à  fa  mère,  puis  qu'afn 
fi  eft  que  fon  père  eftoit  infidele.ainfi  qu'il  en 
eft  parlé  par  fainft  Lue  aux  Aftes  des  Apo- 
ftres.Ainfidonc,  pourquoy  fain£l  Paul  lera- 
mene-il  à  la  foy  qu'il  a  eue  dés  fon  enfance? 
Afin  qu'il  foit  tant  plus  incité  à  fuiure  la  b5- 
ne  doihine  en  laquelle  il  a  efté  enfcigné  dés 
le  commencement.  Et  par  cela  nous  femmes 
admpneftez,  que  fi  nous  auos  efté  nourris  dés 
noftre  ieunellc  en  la  pure  religion, nous  ferôs 
tât  plus  inexcufablcs  t'il  nous  aduiét  de  nous 
desbaucher.Vn  homme  qui  n'aura  ouy  parler 
de  l'Euangile  finon  trois  iours  auparauant, 
s'il  fe  reuolte  puis  après, fi  faut-il  qu'il  porte 
fa  condamnation  :  mais  quand  Dieu  nous  au- 
ra appelez  dés  noftre  enfance  à  la  pure  doûri 
ne,&  qu'eftas  deuenus  homes  nous  plaquions 
là  tout,&  que  nous  châgions  de  propos, quel 
le  condamnation  y  aura-il  fur  nos  tefte*?  Et 
toutesfois  nous  voyons  comme  il  en  va.  An- 
iourd'huy  on  euft  attendu  des  petits  Anges, 
•  quand  il  y  a  eu  des  enfans  nourris  en  l'Euan 
pile,  qu'ils  deiioyent  auoir  appris  la  religion 
en  testant  la  mamelle  de  leur  nourrice. Btief, 

il  fcmbloic 


s  V  R    LA  II.    A 

îl  fembloît  que  ce  deufvent  eftre  des  perles 
«n  TEglife  de  Dieu .  Et  que  font-ils  deue- 
nus"?  Ils  fe  font  peruertis  comme  des  diables, 
qu'ils  font  beaucoup  pires  que  s'ils  fuflent 
demeurez  en  ces  abominations  horribles  de  la 
Papauté  .  Et  ainfi  nous  auons  bien  à  déplorer 
vn  fi  miferable  fiecle,  quand  nous  voyons  que 
Dieu  efl  ainfidefpité  .  Pourtant  netrouuons 
point  eflrange  fi  Dieu  enuoye  de  fi  horribles 
confufions  comme  nous  les  voyons ,  mais  at- 
tendons-en encores  de  plus  grandes ,  comme 
à  la  vérité  il  faudra  que  nous  foyons  englou- 
tis aux  abyfmes,quand  Dieu  vihcera  en  fa  yen 


T  I  M  O  T  H. 


345 


geance  l'ingratitude  que  nous*  royonî  par 
tout. 

OR  nous-nous  profternerons deuant  1* 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes, -le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir ,  afin  que  par  la  nous  foyons  incitez  à 
mortifier  les  cupiditez  de  noftre  chair  de  plut 
en  plus,  &  que  nous  defirions  le  renouuelle- 
raent  qu'il  promet  de  faire  à  fes  fidèles,  engr« 
uant  Ces  commandemens  en  nos  cceurs,  &  en 
nos  entrailles,  pour  nous  conformer  du  tout  à 
fk  iuftice .  Ainfi  nous  dirons  tous ,  Dieu  tout-* 
puiflantjPere  celefte.&c. 


LE 


TROISIEME      SERMON     SVR 

PREMIERCHAPITRE. 

6  Vour  laquelle  caufe  ic  tddmoneîle  que  tu  fufcitcs  le  don  dé 
Dieu  qui  ejl  en  toypar  fimpofition  de  mes  mains. 

7  Car  Dieu  ne  nous  a  point  donne  cfprit  de  crainte ^  mais  de  vcr- 
tu  Zf  de  dileSlion,  (f  dejôbnctê. 

8  N'aye  donc  honte  du  tefmoignage  de  noîlre  Seigneur ,  ne  de 
moy  qui  fus  fin  prifonnier.  mais  fois  participant  des  affliSlions  de  t  £- 
uangilefelonlapuijfancedeDieu. 


Ous  voyons  couftumiere- 
y\  ment,  quand  les  hommes  fe 
■^  font  portez  vertucufcmét, 
rlalfent  bien  toit,& 
:aufsi  qu'on  les  doit 
•  quittes  :  ainfi  ils  laif- 
fent  venir  les  autres  en  rag, 
'orome  s'ils  auoyent  fait  leur  deuoir:&  cepeii 
dant  Dieu  ne  fera  ferui  que  par  vne  bouffée. 
Au  contraire  fainil:  Paul  déclare  en  cepaflà- 
ge.tant  plus  que  Dieu  nous  a  fait  de  grâces  le 
temps  paffé  ,  que  nous  deuons  élire  fongneux 
de  pourfuyure.&nous  inciter  à  faire  toufiours 
de  bien  en  mieux.Tant  s'en  faut  donc  que  ce- 
luy  qui  aura  befongné  vertueufemét  pour  vn 
tempsdoyue  eftre  lafche,&  !,'anonchalir,que 
aucontrairc,  ilnous  faut  penfei  que  c'eltau- 


II  ne  dit  pas.C'eft  afl"e2,re  t'abfous,ie  t'affran 
chy:mais,Il  faut  parfaire.  D'autât  que  tu  t'es 
porté  vaillament,  cognoy  cobien  tu  es  tenu  à 
Dieu  qui  t'a  fait  vne  telle  grace:caril  ne  veut 
point  eftre  ferui  de  no'  pour  trois  iours,  c'eft 
à  vie  &  à  mort.  Ainfi  doc  côtinue  ne  te  laflànc 
point.au  milieu  du  chemin.  Voila  l'intétion  de 
S.Paul.  Voulôs-nousdonc  corriger  la  froidu 
re&:  parefle  quieftennous?Quandnousfen- 
tons  que  nous  n'auons  point  vn  tel  zèle  &  de- 
uotion  côme  il  feroit  requis, qu'vn  chacun  re- 
garde: Or  ça.ton  Dieu  t'ayantmis  au  monde 
s'eftmanifeftéà  toy,&ily  a  défia  fi  longtéps 
que  tu  l'as  cognu:il  te  fait  ceft  honneur  à  toy 
poure  créature  &  inutile, que  tu  as  efté  fon  in- 
ftrument  pour  exalter  fa  gloire,pour  auancer 
fon  Rovaumertu  l'as  ferui, cela  ne  vient  point 


tant  d  obligation  fur  nous,  fi  Dieu  s'cft  voulu    de  toy.Que  faut-il  donc?Eft-il  queftion  de  te 
feruir  de  noftre  labeur ,  &  qu'il  nous  ait  em-    repoler,ou  de  croupir  maintenât;Nenni:mâis 

ployez  a  magnifier  fon  nom  :  car  de  fait  nous 

ne  fommes  pas  digne<:d'vn  tel  hôneur.  Etain 
fiqu'vnchacun  s'efforce,  fuyuant  l'exhorta- 
tion qui  eft  ici  mife,  quand  il  aura  efté  enfei- 
gnc  dés  fon  enfance  en  la  vérité  de  Dieu  ,  de 


q  tu  fois  incité  tant  plus  à  parfaire  ta  courfe: 
veii  q  Dieu  t'a  mis  au  droit  cheinin,&  <j^u'il  t'a 
auancé, garde  maintenltde  faillir. Voila  côme 
nous  auons  à  prattiquer  celle  doftrine  .  Mais 
-       ^  .   ^         ,  .    -     pour  en  faire  mieux  noftre  profit,regardôs  en 

pourfuyure  lufques  a  la  fin.quand  il  aura  che-  fommc  le  c5tenu.R./««7/<di t-.l)/r  %n  ««/ ,(l 
rame  droitemet.de  toufiours  s'auScer:  car  no'  .n  toy  .  Le  mot  dont  vfe  ici  S.Paul,  ne  fe  peut 
auons  ouy  ce  matin  ce  que  S.  P.nila  mis  en  a-  exprimer  d'vn  feulmot  Friçois,  finon  q  nous 
uant.il^iioit  a  Timothee:  le  me  tiens  alTeuré  prenions  Attifer:car  cela  fîgnifie  proprement 
que  la  foy  qu.  a  efté  en  ta  mere-grad,  &  en  ta  Attifer  le  feu.ce  qu'il  dit  en  fomme.I]  met  ici 
mère,  a  aufM  habite  en  toy  dés  ton  enfance,  vne  fimilitude,  que  fi  vn  feu  où  il  n'y  a  avères 
Uadioultoit  que  Timothcc  auoil  monftré  vne  de  bois,  s'efteint,  on  l'attife,  &  qu'on  ralîem- 
linguliere  affedion  de  bien  viure  .  Il  adioufte  ble  les  tifons ,  qu'on  fouffle  afin  de  le  rallu- 
pour  cefte  caufe.A «/»,/«.  dff4irr  euçerei  mieux,    mer.  Ainfi  fainft  Paul  veut  que  nous  me  ctionî 

V.iiii. 


psi.ic  à  1  elujiller  les  gracev  de  Dieu;  £c  pour 
<juoy  .-  C.ir  chacun  en  rcç  )it  félon  ia  portion, 
que  nous  n'auons  pas  de  cefte  plénitude  com- 
me il  feroit  à  délirer  :  non  pas  que  Dieu  foit 
chiche  enuers  nous,  mais  il  nous  veut  tenir  en 
bride  :&  voyant  que  nous  Tommes  enclins  à 
prefomption,  il  nous  donne  ce  qu'il  cognoift 
nous  eftre  espedient  pour  noftre  falut.Tant  y 
i  que  nous  n''aurons  point  les  grâces  de  Dieu 
à  pleine  mefure  ,  il  y  en  aura  feulement  qiiel- 
<]ue  petite  quantité. Or  maintenant  régardons 
les  moyens  qu'a  Satan  pour  amortir  ce  que 
Dieu  aura  mis  en  nous. Il  y  a  des  tétatiorls  in- 
finies qui  lont  pour  nous  retenir  en  ce  monde: 
&celacftouffe  le  feu.  Quand  quelqu'vn  fera 
occupé  de  folicitudes  pour  les  affaires  dece 
inonde, il  ne  penfe  plus  au  Royaume  de  Dieu. 
Quand  donc  le  feu  aura  eilé  allumé  iaupara- 
uani.&qu'il'y  aura  eu  belles  Hamrt»es^&  quel- 
que chaleur,  fi  efl-ce  que  cefte'vanitéqui  di- 
uertit  l'efprit,  quant  &  quant  eftouffe  la  grâ- 
ce de  Dieu.Autant€neft-ilde''eout  le  refte:  & 
mefmes  fans  que  nous  y  pcnfions.nc  /ans  auoir 
des  répugnances  manifeftes.encores  fommes- 
nous  tout  esbahis.s'il  y  a  eu  en  nous  quelque 
bon  zèle  ,  qu'il  fe  refroidit ,  &  qu'il  s'efcoule 
petit  i  petit. Or.cepédanflesgraces  que  Dieu 
auoit  mifes  en  nous,  s'en  vont  côme  inutiles, 
que  nous  ne  fçauons  plus  que  c'eft  :  ou  Dieu 
nous  auoit  douez  de  fon  fainft  £rprit,no'  fom 
Bies  eflourdSî.  Puis  que  maintenât  nous  voyôs 
que  l'exhortation  de  faintl  Paul  nous  eft  tant 
neceflaire  /  c'eft  afçauoir  d'attifer  le  feu  que 
BOUS  voyons  qni  s'eftouffe  ,  ou  qui  n'a  point 
telle  chaleur  comme  il  feroit  requis, que  nous 
Inettions  peiné  à  faire  valoir  les  grâces  que 
nous  auoris  feceùesj&les  enflamraer,&que  vn 
chacun  «.'incite  à  cela  .  Mefmes  fiTimothee, 
•Loriimefi  çxcellent.conime  il  en  a  le  tefmoi- 
gnâge  de  Dieu  ,  a  eu  befoin  d'eftre  ainfi  pic- 
qHë,htlai  que  fera-ce  de  no'?  Aiifsi  tp'vn  cha 
curi  mefnie  regarde  à  fon  eftat .  Car  celuy  qui 
«ftcôftitué  en  charge  publique  doit  tant  plus 
aiguifer  fon  efprit  pour  refueiller  les  grâces 
de  Dieu.afin  de  les  mettre  en  ceuure  &  à  pro- 
fit, combien  que  cela  appartiene  ^  tous  en  gê- 
nerai: mais  encores  fi  faut-il  q  ceux  «jueDieu 
a'ctihftituez  en  eftat  plus  eminent ,  &  en  degré 
yliJs-hattt,tnaTchent  Jeiiant:  &  qu'ils  monftrét 
*.'téiri5yléhi^ic'àtitres-,&3|'ce'u')i''dni  ne  font  point 
tantàlSànc/^i.  QJoy  (^li''i'f-étl?oit,  notons  qiie 
les  donidu  fainft'Ef^'ritiicWrsdoyuent  enfîam 
meràceque  nouscerchios  la  gloire  de  Dieu, 
&  que  nous  ayons  vn  zélé  de  fuyure  ce  qu'il 
nous  commande ,  que  flous  foyons  rauis  hors 
tlu  monde',  qiie la  chiir  h'^  domine  point  en 
nous,  ni  nos  afFelâioris'viciélirtt'i, mais  que  nous 
■foyons  bruflez  d'e-.cefte  ainôur  ardente  de  ve- 
nir à  nofcre,  Dieu' .'Voila  à  qu'elle  fin  fe  doy- 
«ent  rapporter  les  dons  du  faincl  Efprit. 
Or  maintenant,  pource  que  de  noftre  nature 
nous  femmes  froids ,  &  que  Satan  a  beaucoup 
«iemoyés  fubiils  pour  eftouffer  la âamme  qui 


O  >î  '  I  ^  lî 

deuroit  brufler  en  nous ,  regardons  de  l'allu- 
mer ,  &  qu'vn  chacun  s'efforce  pour  attifer  le 
feu.Et  fi  nous  fcntons  q  les  dons  de  Dieu  s'a- 
mortiflent  en  nous, que  nous  mettiôs  peine  de 
les  refueille,rencores  que  nous  ne  puifsios  fai 
re  cela  du  tout.Voila  pourquoy  Dieu  no'  en- 
ioint  à  profiter  plus  abondamment  en  fa  Loy. 
Voila  pour  vn  item.Or  au  refte,faind  Paul  dit 
que  ce  don  eftoit  en  Timothee  par  rimpaf- 
tion  des  mains.  En  quoy  il  fignifie  qu'eltant  e- 
ftabli  pafteur,  il  auoit  reçeu  grâces  nouuelles 
pouf  mieux  feruir  à  TEglife.  Et  c'eft  encores 
Vri  poinft  bien  notable.  Car  nous  deuons  ob- 
feruerce  qu'il  dit  en  l'autre  paflàge, félon  que 
Dieu  met  les  "homes  en  oeuurc,  qu'il  leur  don- 
ne dequoy  pour  y  fournir.  Exemple,  Qjjand 
des  miniftres  feront  appelez  vrayemétdeluy, 
il  les  conduira  en  forte  qu'on  verra  par  effedl 
qu'ils  n'ont  point  elté  introduits  du  cofté  des 
nommes,  mais  que  Dieu  eftl'autheurde  leur 
vocation  .  Beaucoup  fe  pourront  vanter  d'e- 
ftre  en  ceft  eftat  de  miniftre  :  &  de  fait  ils  oc- 
cupent la  chaire  ,  qui  appartient  à  ceux  que 
Dieu  ordonne:riiais  cependant  on  ne  trouue- 
ra  rien  en  eux  qui  foit  digne  de  vrais  mini- 
ftres de  Dieu, que  ce  feront  ou  des  gaudifleurs 
&  gens  propliaries,  &  de  vie  diflblue ,  ou  gens 
ig"horanrbrief,  ou  il  n'y  aura  ne  fel  ne  faufle. 
C'eft  vn  certain  fîgne  que  Dieu  ne  les  aduoùe 
point,  &  que  iamais  n'ont  efté  introduits  par 
fon  authorité.La  raifon  ?  Corne  i'ay  défia  dé- 
claré ,Dieu  a  dequoy  pour  rendre  les  hommes 
idoines,  quand  il  les  veut  appliquer  à  fon  ou- 
urage.Or  cependant  Tay  dit,  q  s'il  fe  veut  fer 
uir  de  quelqu'vn, 'il  luy  donnera  ce  qui  eft  re- 
quis pour  exécuter  fon  office. Quad  donc  il  y 
aura  des  Pafteurs  qui  n'aurôt  point  eftc  appe- 
lez par  ambition, oU  faneur  môdaine, qu'ils  ne 
ferôt  point  entrez  par  la  feneftre.mais  feront 
deuement  appelez  de  Dieu  ,  on  les  trouuera 
quant  &quat  propres  pour  faire  leur  charge, 
&  ne  ferôt  point  deftituez  des  grâces  du  fainft 
Efprit.  Voila  dôc  ce  qu'il  nous  faut  auoir  pour 
refolu,  c'eft  afçauoir,  que  Dieu  élargit  de  (es 
grâces  à  ceux  qu'il  côftitue  miniftres  de  fa  Pa 
rôle.  Voila  en  fomme  ce  que  fainft  Paul  a  vou 
lu  declarer,difant  que  Timothee  eftant  receii 
en  l'office, auoit  aufsi  receu  les  dons  q  tftoyét 
neceffiires  polir  fe  porter  fidèlement.  Vray 
eft  û  ce  mot,i'irnpolit'ion  des  mains,  n'cft  point 
fupfrflu  :  car  c'eftoit  la  cérémonie  ordinaire 
dont  on  vfoit  pour  co'nftituer  les  miniftres:  & 
les  Apoftres  auoyent  retenu  cela  de  la  façon 
ancienne  de  la  Loy .  Car  on  mettoit  la  main 
/ur  les  facrificcs:&  quad  on  failbitquelque  o- 
raifon  folcnnelle,  on  mettoit  ainfi  les  mains. 
Cela  eftoit  vn  figne  d'oblation  qu'on  otfroit 
à  Dieu  de  ccluy  qui  luy  eftoit  recommandé, 
corne  s'il  luy  euft  cftédcdié.  Et  par  ainfi  ceux 
qui  eftoyent  eftablis  pour  porter  la  parole  de 
Dieu,  eftoyent  admoncftez  qu'ils  n'cftoyent 
pku  à'eux.Sc  qu'ils'  n'eftoyct  phn  comme  per- 
foune*  princes, qu'ils  n'auoyent  plus  de  liber- 
té, 


SVR     LA    IL     A     TIMOTH. 


.'47 


té  ,  mais  qu'ils  eAoyet  du  tout  obligez  à  Dieu    dedi.iflènt  à  fcniir  à  Dieu  &  à  fon  Eglife,  /e- 
&  à  Ion  Egliff.  Or  cepédant  qu'on  taifoit  vne     Ion  l'offerte  qui  ie  fàiToir  de  leurs  pcrfonne^. 
telle  offerte, chacun  prioit  .•comme  c'tftaiifu    Or  voila  le  Pape  qui  veut  faire  des  Prellrcsa- 
vne  finmiliere  benedicliôde  Dieud'auoir  des    uec  onftion  ,  voire  à  là  façon  de  la  Loyde 
Pafteurs  fidèles  qui  anoncent  fa  Parole, &  qui     Moyfe  :  &  cependant  leur  donne  &  attribue 
s'en  acquittent:  car  voila  en  quoy  côliflc  le  fa    l'office  de  reconcilier  les  hommes  aucc  Dieu, 
lut  de  tous  fidèles!.  C'efl-donc  à  tout  le  corps     Voila  donc  vn  facrilege  énorme,  &  vneinuen 
de  l'Exil fe  de  prier  pour  celuy  qui  eft  amfi    tion  que  Satan  a  forgée.  Ayons  donc  vne  tel- 
conlHtué  Pafteur  :  car  chacun  le  tait  pour  l'on    le  preftnfe  en  abomination.comme  elle  en  ell 
profit -Or  Dieu  exauçoitles  prières  qui  e-    digne.  Et  notons  bien  que  ceux  qui  font  of- 
ftoyent  amfi  faites  fur  la  telle  d'vn  home. Car    ferts  à  Dieu  pour  anoncer  fa  Parole.quand  la 
en  premier  lieu  on  faifoit  protelfation  folen-    prière  fc  fera  comme  elle  doit.ne  feront  point 
nelle:  Ceft  hoitime  eft  dedié  à  Dieu,  afin  qu'il    deflituez  de  la  grâce  qui  eft  requife  en  ceil  e- 
s'applique  du  tout  à  l'édification  de  l'Eglile.     ilat. Ec  pourquoy.=  Car  Dieu  prefîdeau  milieu' 
£t  cependant,pource  que  les  hommes  ne  font    de  fon  tglife.&defployerafi  vertu  pour  gui- 
point  idoines  ni  fuffifans  pour  faire  ce  qui  eft    derceux  qui  occupent  fon  lieu  ,  &:defquels  il 
requis  en  ceft  eftat ,  mefmes  pour  s'acquitter    approuue  l'eftat  &  office  .  'Voila  ce  que  nous 
de  la  centième  partie,  il  faut  que  Dieu  befon-    auons  à  retenir  de  ce  paflàge.  Et  cepédant  no   ^ 
gne  ici.Ordonc  le  premier  eft.de  demander  à     tons  auAi  que  Timothee  deuant  qu'eftre  e- 
Dieu.qu'il  luy  plaife  de  donner  grâce  àl'hom    lcu,auoit  défia  des  donsexcellens:  mais  Dieu 
tnc  qui  eftainfichoifî,  défaire  en  forte  que  1'    les  luy  aconfermez  ,  quand  il  a  voulu  qu'il  fe 
Eglife  foi tdeuement  feruie:&puis,  qu'il  y  ait    meiftau  miniftere.  Il  faut  bien  que  ceux  qu'il 
telle  confiance,  qu'il  perfeuere  iufquesenla    choifît,delî^ayent  donné  approbation  de  1* 
fin.Pourceftecauîe  fainàf  Paul  dit  que  Timo-    office  :  on  n'ira  pas  prendre  à.l'auenture  des 
thee  a  reccu  le  don  de  l'Efprit, quand  il  a  efté    poures  idiots ,  des  gens  ignorans,  Se  qui  n'ont 
conftitué  miniftre.Or  ce  don-la  eftoit  experi-     rien  propre  pour  porter  la  parole  de  Dieu  :  il 
mente  aux  prières  c5munes:&  cependant  auf-    faudra  prendredes  gens  efquels  on  cognoift 
fi  la  cérémonie  n'eftoit  pas  fuperflue,  ce  n'e-    délia  quelque  grace.Mais  Dieu  ne  laifle  pas  de 
-  ftoit  pas  vne  forme  qu'on  euft  introduite  à  la    befongncr  en  augmentant  &  confermant  les 
porte;  mais  c'cftoitvn  tcfmoignage  que  Dieu    dons  qu'il  aura  défia  mis  aux  homes,  tellemét 
receuant  ceux  qui  luy  font  offerts,  les  gouucr     qu'on  apperçoit ,  depuis  qu'il  s'en  fera  voulu 
ne,&  leur  donne  dequoy  pour  exécuter  l'offi-     Icruir.que  fon  Efprit  fe  déclarera  en  eux  aucc 
ce  qui  leur  eft  cômis.  Nous  voyons  donc  marn    plus  grande  efficace  .  Et  cela  n'eft  pas  feule- 
tenanf.î  quoy  ceci  tend  .  Et  pleuftàDieu  que    mcntquâtauxminiftresde  la  parole  de  Dieu, 
vne  telle  fimplicité  euft  efté  gardée  en  l'Egli-    mais  aufsi  quant  aux  Magiftrats.il  eft  vray 
ie.  Car  on  n'euft  point  fcea  que  c'eft  de  cefte    qu'vnc  eleéfion  fera  peruerfc  &  confufc  lî  on 
preftrife  infernale  qui  eft  en  la  Papauté,  fi  on     ne  difcerne,  c&qu'on  ne  prenc  ceux  qui  font 
euft  inftitué  feulemét  des  Pafteurs  &•  des  Mi-    propres  ,  félon  qu'on  en  peut  iuger;:  mais  il 
niftres,pour  feruiràDieu  en  portât  fi  Parole:     faut  bien  que  Dieu  befongne  quand  ils  font  e^. 
ce  facrifice  exécrable  de  la  melfe  ne  feroit    leus ,  Se  qu'il  leui  donne  grâce  de  nouucau: 
point  envfage  ,  m.iison  euft  cognu  que  Dieu    autrement  ils  fe  trouueroyent  trop  foibles: 
ne  demande  autre  chofe  des  miniftrcs  delà    car  ce  n'eftpaspcudechofede  reprefenterla 
Parole,  fînon  qu'ils  enfcignent  purement  le    perfonnede  Dieu  en  ce  monde,  &  tenir  fon 
peuple  quileur  eft  commis  en  charge,  &  qu'ils     iîege,afin  de  rendre  droit  à  chacun.  Il  y  aauf- 
adminiftrent  les  Sacremés.  Mais  voila  vnnou    fi  dételles  chofa  rcqiii/ês,qu'il  n'y  aura  crea- 
ucau  badinage  qu'on  a  forgé  en  la  Papauté,     ture  mortelle  qui  y  puiffe  fournir.  Il  faut 
qu'on  leur  graillera  les  doigts,  &  leur  baille-    donc  que  Dieu  v  befongne  de  fa  main  pro- 
ra-on  le  titre  de  Preftre  .  Et  pourquoy  faire.=     pre  .Et  pourtant  apprenons  de  nous  exercer 
Pourappaifer  Dieu  enuers  les  hommes ,  pour    en  ceft  vfage  que  lainft  Paul  note  ici,  c'efta— 
offrir  facrifice,afin  d'obtenir  remifsiondes  pe    fçauoir  quand  on  élit  des  Pafteurs  qui  foyent 
chez. Voila  donc  comme  les  Preftres  qui  font     fpecialement  députez  pour  anoncer  l'Euan- 
graifTez  en  la  Papauté  ,  font  conftituez  auec    gile, qu'on  face  prières  pour  l-'edification  com 
vnblafpheme  diabolique  en  l'office  de  noftre    raune  de  tous.  Q^ndon  élit  des  Magiftrats, 
Seigneur  lefus  Chrift.Car  c'*eft  à  luy  feul  q  ce     qu'on  demande  aufsi  à  Dieu  nu''il  luy  plaife 
titre-la appartiét,  d'eftre Médiateur  de  Dieu     de  les  remplir  tellement  de  l'a  grâce,  qu'ils 
&  des  hommesrmais  Satan  a  ainlî  perucrti  tou     puiircnt  fidèlement  exercer  leur  charge  pour 
te  la  pureté  de  l'Euangile.  Ainfidonc  appre-     en  rendre  conte  quand  ils  viendront  deuant 
rons  de  diftinguer  entre  la  Preltrife  Papale,     le  grand  luge.  Voila  en  fomme  ce  que  nous  a- 
&  celle  que  lefus  Chrift  approuue  ,&  quia  eu     uons  à  retenir  de  ce  paflàgp  .  Oi  après  que 
fon  origine  de  l'Euagile.Les  Preftres  qui  ont     fainft  Paul  a  vfédcce  propos, il  adiouftcQ»*- 
efté  eleus  &conft!tucz  du  temps  des  Apoftres,     h  Seigneur  na  fohit  donné  yn  e[[rit  crarntif  à 
r.'eftoyent  pas  créez  linon  pour  anoacer  l'E-     ceux  qui  doyaent  prrfchtr  rEu^n^itc  ,  m.îiV  t» 
vangile,&  admjniftrer  les  Sacremens,qu'*iis  fe    ffp't  de  ytrtn ,  auec  dileclion  crfi^ricté .  E» 

X.i. 


-%■ 


y^^ 


SERMON    1 1  T. 


Row.S. 


quoy  il  itgnifie  qtic  pourapprouuer  que  nous 
fommes  vrais  feiuiteurs  de  Dieu  ,  il  ne  faut 
point  que  nous  y  aillions  à  main  moite,  (corn 
me  on  dit  )  mais  que  nous  monftrions  que  le 
zèle  de  Dieu  nous  brufle  là  dedans ,  &  qu'il 
nous  poufle,  &  que  nous  auons  vn  el'prit  ,  non 
point  de  timidité, mais  de  vertu  .  En  l'Epiftre 
aux  Romains  iainû  Paul  faifant  comparaifon 
des  Pères  qui  ont  vefcu  fous  la  Loy  ,  aucc  les 
Chreftiens ,  dit  que  fous  la  Loy  il  y  a  eu  vne 
telle  fcruitude  qu'ion  n''ofoit  pas  inuoquer 
Dieu  fi  franchement.  Comme  aui'si  nous  voy- 
ons que  la  Loy  a  rendu  les  hommes  efpouan- 
tcz  ,  qu'Us  ne  fçauoyenc  que  dcuenir  :  &;  non 
fans  caiife.  Car  là  Dieu  n''auo)t  point  encores 
defployé  fa  grâce,  comme  auiourd'huy  elle  fe 
monftre  en  TEuangile  :  mais  depuis  que  lefus 
Çhnft  nous  eft  apparu.  Dieu  nous  a  tellement 
ratifié  fon  adoption  ,  qu''à  f  Icine  bouche  nous 
pouuous  crier.voire  afin  que  l'ayans  pour  Pè- 
re,il  nous  reçoyue  pour  fes  enfans.  Voila  doc 
qui  appartient  à  tous  fidèles  en  gênerai.  Mais 
ici  faind  Paul  ne  parle  que  des  miniftres  de  la 
parole  de  Dieu  .  Car  il  dit  que  s'ils  veulent 
monftrer  qu'ils  foyent  vrayement  appelez  de 
Dieu  ,  il  faut  qu'ils  foyent  robuftes ,  qu'ils 
ayent  vne  conltance  inuincible,  qu'ils  ne  fle- 
chifTent  point  :  quoy  qu'il  en  foie ,  qu'ils  ne 
foyent  point  comme  des  rofeaux  branflans, 
qu'ils  ne  foyent  point  pour  complaire  au  mon 

de, qu'on  ne  les  trouue  point  variables,  &  que  nous  refilions  à  ce  qui  s'i 
ils  n'ayent  point  la  bouche  clofe  quand  il  fau  diii  eft -ce  qui  nou";  djnn 
ira  parler,  mais  qu'ils  ayent  celle  viuacité  en 
eux  pour  fc  monlbrer  hommes  au  befoin  .  Et 
quand  ils  verront  les  mefchans  s'elcuer  con- 
tre Dieu,  qu'ils  leur  refiftent  puiflàmment, 
qu'ils  fe  montrent  bons  gendarmes  :  quand 
ils  verront  que  la  vérité  de  Dieu  fera  adail- 
lie,  que  les  vns  s'eleueront  manifeftement  à  1' 
encontre  de  Dieu  ,  que  les  autres  voudront 
defguifer  les  chofes,  qu'ils  verront  le  bien  e- 
llre  comme  reculé,  qu'ils  ne  diAimulét  point, 
que  là  ils  mettent  en  auant  ce  que  Dieu  leur  a 
ûonné  pour  s'oppoferau  mal:  finalement  que 
ils  monftrent  qu'ils  font  vrais  procureurs  de 
Dieu  .  Voila  en  fomme  ce  que  fainft  Paul  a 
voulu  dire  en  ce  padàge  .  Mais  ,  helas ,  ici  on 
voit  qu'auiourd'huy  il  y  en  a  bien  peu  qui 
ayent  vne  telle  approbation  ,  &  par  confe- 
quent  que  le  titre  de  miniftres  &  de  Pafteurs, 
&  de  Preftres  eft  par  trop  prophané.Car  com 
bien  entrouuera-on  qui  ayent  cefte  magna- 
nimité de  refifter  à  tout  le  monde  ,  &  quoy 
qu'il  aduiene,  qu'ils  ne  laiflent  point  d'aller 
toufiours  leur  train?  Mais  au  contraire  ,  on 
voit  que  nul  ne  veut  auoir  les  males-giaces, 
mais  qu'on  ne  demande  qu'à  complaire  .  Et  à 
qui?  Aux  plus  mefchans  :  tellement  qu'il  y  en 
a  beaucoup  à  qui  on  feroit  prefchcr  aiifsi  toft 
l'Alcoran  Je  Mahommet ,  que  l'Euangilc: 
moyennant  qu'ils  ayent  leur  efcuelle  drelFee, 
&  leur  fouppe  gralle,  ce  leur  eft  tout  vn  .  On 
verra  ceJa.Helas,  faut-il  que  nous  foyons  ain 


fi  blafonnez  à  noftre  grand'Konte?Mais  quoy? 
Que  gagnerons-nous  quand  noftre  turpitu- 
de fera  notoire  iufques  aux  petis  enfans ,  & 
qu'il  n'en  fera  pomt  parlé  en  chaire  ?  Etainfi 
aduifonsànous  .•&  que  ceux  qui  font  confti- 
tuez  miniftres  de  la  parole  de  Dieu  (  commen 
ç.tnt  par  moy)  regardent  qu'ils  auront  beau 
fe  glorifier  du  titre  ;  car  ils  feront  defauouez 
de  Icfus  Chrift,  finon  qu'ils  ayent  cefte  con- 
ftance  en  eux  de  maintenir  la  venté ,  voire  & 
de  faire  que  lefus  Chrift  foit  honoré  &  ferui, 
&:  qu'on  l'adore,  ic  que  toute  hautefle  du  mon 
de  foi:  abbatue  ,  afin  de.luy  faire  hommage  de 
cequ'il  les  aconftituezen  lieu  tant  honora-» 
ble-que  s'ils  ne  le  font,  il  faudra  que  leurcon 
fufion  foit  tant  plus  horrible  ,  s'ils  ne  tendent 
i  ce  but  que  fainû  Paul  nous  propofe.  Il  eft 
viay  que  félon  noftre  infirmité  nous  ne  pour- 
rons pas  faire  ce  qui  feroit  à  fouhaiter  :  mais 
fi  faut-il  que  nous  trauaillions  après  ,  ouau- 
trement  mal-heur  fur  nous.  Voila  quant  à  ceft 
e  fprit  de  vertu, lequel  eft  oppofe  à  Tefpric  de 
timidité.  Car  ce  mot  de  Crainte,  ne  feroit 
point  du  tout  propre ,  pource  qu'il  y  auroit 
quelque  doute  :  caril  y  a  vne  crainte  qui  eft 
boae.Mais  fainil  Paul  parle  ici  de  pufillanimi 
té, comme  fur  tout  le  mot  dont  il  vfe  en  Grec, 
le  porte  .  Or  donc  les  miniftres  de  la  Parole 
feront  conftans ,  quand  ils  craindront  Dieu. 
Car  qui  eft  eau  fe  de  nous  rendre  hardis, &  que 
'eleue  contre  Dieu? 
Q_m  eft-ce  qui  nou";  donne  vne  telle  conftan- 
ce?La  crainte  de  Dieu. Ainfi  donc  cefte  crain- 
te ne  nous  doit  point  retenir,mais  pluftoft  el- 
le nous  donne  courage  de  feruir  Dieu  &  de  1* 
honorer  .  Cefte  crainte  donc  qui  eft  bonne  & 
fainde, nous  doit  citer  l'autre  rc'tft  à  dire  ce- 
fte pufillanimité  qui  eft  aux  hommes  :  tellemét 
que  nous  conceuions  vne  hardielle,  &  con- 
cluons ,  Or  fi  faut-il  qu'en  defp  t  du  monde 
nous  pafsions  outre  en  noftre  vocation.  Que 
on  tcmpefte,qu'on  s'enflamme,Yoire  &  qu'on 
face  des  diables  :  &  bien  ,  Dieu  a  commandé 
qu'on  prefche  l'Euangilernous  fçauons  quel- 
le eft  noftre  règle:  ne  variés  point  quoy  qu'il 
en  foit:  car  il  faut  que  Dieu  foit  pretcré  &  o- 
bei  fur  tout.  Et  quand  nous  verrons  melmcs 
que  Satan  cfmouuera  fes  orages  5:  tempeftes, 
qu'il  Icmblera  que  tout  doyue  abyfmer,  c'eft 
alors  qu'il  faut  que  les  vrais  miniftres  mon- 
rtrent  vneconftance  .  Or  on  en  verra  qui  au- 
ront de  belles  boulfees  quand  ils  ne  Icront 
point  aflaillis,  il  femblera  que  ce  foit  tout  feu 
de  leur  zèle  quand  il  fera  queftion  de  fe  faire 
valoir,voire  fans  coups  ruer:  mais  ils  retirent 
leurs  ailes  quand  il  faut  bien  faire  .  S'il  faloit 
les  employer  en  quelque  bonne  ocnure  ,  on 
trouueroit  bien  que  ce  n'eft  rien  de  toute  ce- 
fte belle  monftre  qu'ils  ont  eue.  On  en  verra 
qui  feront  aufsi  vaillans  eftans  loin  des  coups: 
mais  quand  ce  vient  à  ioindre(comme  on  dit) 
on  voit  bien  qu'ils  n'ont  point  vne  feule  goût 
te  de  ceft  cfprit  de  vertu  &•  de  conftancc  dont 

parle 


SVRLA'    II.    A    TIMOTH. 


347 


parle  Yâinâ  Paul. Or  cependant  maintenant  il 
adioufte,/otr/>li-  &  JHeàton-.^ovr  fignifier  que 
il  ne  nous  faut  point  auoir  vn  zc-it  eltouidi, 
ni  enragé:  comme  il  y  en  a  qui  n'auront  nulle 
affeûion  du  monde.  Il  eft  vray  qu'on  verra  en 
eux  vn  zèle  qui  n'eftque  par  trop  cxcefsif. 
Cependant  il  y  aura  quelque  ombre  de  vertu: 
il  femble,  Voila  des  gens  qui  l'ont  fi  enflam- 
mez que  merueilie  ,  il  femble  qu'ils  doyuent 
reformer  tout  le  monde.ils  ne  peuuent  porter 
nul  vice:  cependant  on  les  verra  chagrins, que 
ils  ne  peuuent  rien  fo\ifFrir,  qu'ils  ont  en  de(- 
dain  tout  le  monde  :  ils'  n'ont  ni  folicitude 
de  leurs  freres.ni  compaTion  poiir  les  rédui- 
re à  bien  auec  douceur  .  On  verra  auAi  qu'ils 
n'ont  nulle  attrempance,  mais  il  y  a  vne  ri- 
gueur extrême  &  par  trop  excefsiue  .  Voila 
donc  qu'il  nous  faut  bien  noter  ,  que  fainft 
Paul  di/ânt  qu'il  faut  que  les  miniftres  de  la 
Parole  foyent  conftans  &  fermes,  &  qu'ils  o- 
ftent  toute  crainte  qui  les  rédra  pufillanimes, 
monftre  néantmoins  qu'ils  doyuent  auoir  a- 
jnour  à  leurs'prochains,&  auoir  aufsi  vne  at- 
trempance &  ("obrieté  pour  modérer  leur  2e- 
Je,t(llement  qu'ils-neiettent  point  leurs  bouf 
£ees  fans  propo<^. Comme  dcfîa  noirs  aiions  dit 
qu'il  y  en  a  qui  s'efcarmoircheirt ,  &  ne  fçait- 
on  pourquoy  :  ikfe  courroucent  contre  leur 
cmbre  f>uuent,&  ^ànd  ce  viendra  au  befoin, 
les  voila  tout  efperdu- ,  qu'ils  feront  vaincus 
fouuét  fans  auoir  rue  vn  f  ul  coup.  Or  ce  n'eft 
pas  ainlî  qu'il  nous  en  faut  faire:mais(comme 
i'ay.'Sdit)appromions  noftre  zehe .voire  pour  le 
mohftrer  au  befoin,  &■  pour  déclarer  l'amour 
Se  l'afFeftion  que  nous  auons  de  leruir  à  Dieu, 
que  nous  fçachions  nous  eltiertuer  ,  encores 
que  nous  voyons  que  nollre  doftrine  ne  plai- 
ie  point  'au  monde, qu'on  murmure  à  l'eccon- 
tre,bue  nous  paf  iés  outfe'quoy  qu'il  en  (bit, 
£t  melmes  s'il  faut  venir  à  des  combats  plus 
grans,qu'il  faille  hurtcr,&  chocquer  àbon  ef 
cient,  que  nous  ayôs  cefte  fermeté  en  nous  de 
ne  point  reculer.mais  que  nous  pourfuyuions 
toufiours  en  defpitd-e  tous  ceux  qui  s'cleuent 
contre  noftre  Seigneur  lefus  Chrill  :  voire 
quand  ce  viendra  aux  menaces  &auT  4angers, 
que  là  nous  monftrions  ceile  vertu  dont  ri  eft 
ici  <^i  eftion.Et  cependant  q  nous  ne  laifsions 
point  de  taftherfeiitant  qii'eh  nous  fefa)d'a- 
jnenerà  lefiis  Chrift  par  douceur  &  humanité 
fous-ceux  qui  fer'endr<>i«  dociles,  que  nous 
ayons  piiié  &  compdl(iôn  d'eux.  Car  il  faut 
bien  que  nous  ayôsdifcretion  entre  ceux  qui 
font  reucfches,  &  ceux  qui  auront  vn  efprit 
Jeboimaire  .  le  verray  vn  homme  qui  ne  de- 
mande lînon  d''eftre  ènfeigné,'&  icvjendray 
yftr  d'aigteur  à  Tenirontre::  quel  propos?Et 
pui?,ic  verray  vn  homme  qui  fera  reuefche,  & 
i'vferay  d'vne   pareille  mefure.  Or  notons 
quâd  il  eft  parlé  de  l'ofKce  dés  miniftres,  qu'il 
cft  dit  qu'ils  doyuent  guarir  ce  qui  eft  malade, 
«ju'its  doyuét  eonfermer  ce  qui  eft  debiîe,  que 
ils  doyuent  fupporter'lesfoibles.&kur  tédre 


lamain:&quadily  a  des  loups  quî  veulent  ap 
procher  du  troupeau, qu'ils  les  doyuét  rcpouf 
fer  .nuec  grande  rigntur:qu'ils  doyuent  confo 
1er  ceux  qui  font  en  angoifle&  en  fafcherie, 
qu'ils  doyuent  par  menaces  &  reprehenfions 
aigres  réduire  fo'  le  ioug  de  Icfus  Chriftceux 
qui  veulent  faire  des  beftes  fauuages  :  quand 
donc  vne  telle  difcretion  fera  obfcruee  ,  nous 
auros  cefte  fobrieté  dont  parle  ici  fainft  Paul. 
Or  pour  conclufion  il  exhorte  Timothee  Je 
n^auoir point  Imite  Je  /'E»j»?-//f  Je  hfusChri/h, 
ne  Jeluycjui tflfon  prifinnier.Côme  s'ildifoit, 
il  faut  qu'auiourd'huy  nous  monftrions  noftrc 
conftanceipuis  q  le  nom  de  Dieu  eft  blafphe- 
mé, qu'on  fc  mocque  de  l'£uangile,qu'il  eft  rc 
ietté  communémet  du  monde  ,  q  nous  foyonr 
armez  devertu,afin  de  ne  point  ftechir,  voire 
&  de  n'eftre  point  desbauchez  pour  cela. Et  c' 
eft  vne  exhortatiô  bien  neceflaire.Car  fi  nous 
voulons  marcher  toufiours  pour  faire  noftre 
office  ,  il  eft  certain  qu'il  nous  faut  auoir  les 
yeux  fermez  à  tous  les  changemens  &  reuolii 
tions  qui  pourront  venir  au  monde  .  Et  pour- 
quoy? Les  homes  ont  les  aureilles  chatouilleu 
fes,  on  voit  que  beaucoup  appetétnonueauté, 
on  voit  qu'il  eft  difficile  aufsi  de  continuer, 
mefmes  les  Bons  quelque  fois  feront  esbran- 
lez.voyans  les  chofes  ainfi  côfufes:bTief,il  eft- 
bien  difficile  de  feruir  à  Dieu  fans  de  grandes 
tentations. Car  on  voit  que  beaucoup  de'gens 
font  prophanes,&  voudroycnt  que  l'Euangile 
fuft  anéanti  :  les  autres  voudroyent  qu'on  le 
prefchail  feulement  par  tferemonie ,  &  que  ce 
fuft  vne  dodrine  morte  :  mais  ils  ne  peuuent 
porter  nulle  correftion  que  ce  foit.Les  autres 
voudroyent  qu'il  n'y  euft  nulle  authorité  en 
la  predication,&:  que  ce  fuft  toutvn  quand  on 
aura  préfché,  comme  qui  auroit  ouy  vne  har- 
pe,ou  vne  flufte  fonner:&  bien.on  aura  les  am- 
reilles  batues ,  &  puis  c'eft  tout .  On  voit  que 
■les  autres  ne  demandent  qu'à  defçuifer  les 
chofes, mefmes  qu'ils  fe  piocquent  côme  gens 
eifrontez  de  toute  bonne  doûrine,  &  comme 
chiens  maftinsneceflentd'abbayér  contre  la 
vérité  de  Dieu.  Voila  côme  auiourd'huy  l'E- 
uangile eft  en  opprobre  &  en  mocquerie  plus 
grande,icdi  mefmes  où  il  eft  prelché.qu'ilne 
feroit  point  au  miJieu  de  la  Papauté  ,  &  de  ce 
gouffre  d'enfer.Or  quand  les  chofes  font  tel- 
les, qii'eft-il  de  faire  finoii  que  nous  fermions 
les  yeux  pour  n'auo-ir  point  honte  du  tefmoi- 
gnagede  lefus  Chrift:C'cftàdire,puis  que  no 
ftre  Seigneur  lefusapprouuc  fon  Eu5^ile,que 
c'eft  vn  threfor  précieux  deuantluy, combien 
qu'il  f;)it  reietté  des  hommcs.que  noas  le  ma 
gnifions,  faifansce  qui  nous  eft  là  commandé 
de  Dieu,  &  ne  regardés  point  à  ce  que  le  mon 
de  fait .  Et  notamment  fainft  Paul  aufsi  parle 
de  fa  perfonnc:pource  qu'alors  il  eftoit  déte- 
nu prifonnrcr.prochain  de  fa  moit.&qu'ô  pou 
uoit  reprocher  à  Timothee,  Et  tu  as  vn  beau 
maiftre.il  eft  1.1  prifonnier.on  le  mènera  quel- 
que iour  au  gibet:&  en  la  fin,  qu'eft-ce  eue  fâ 

X-ii. 


Acl, 


348  SERMON      I,ÎÎ,L; 

doctrine  ?. Voila  quels  font  les  iugemens  hu-  coname  Sente  &  ordure,  &  que  nouf  lesayions 
mains-,  Or  fainû  Paul  monftre  qu'il  ne  ùut  coinrac  deteftables  quand  ils  s'eleueat  contre, 
point  que  Timothee  s'amuleàce  que  les  hom  celuy  auquel  appartient  toutegloire  &  toutt 
mes  debagoulent:  car  ils  ne  demandent  linon     niajeilé  à  lamais.  , 

quelque  couuerture  de  fe  mocquer  de  Dieu,  Se         OR  nous-nous  profternerons  deuantla  fa- 
detrafter  de  fa  doûrine.Q^and  donc  ils  voy-    ce  de  nollre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de  nos 
eut  quelque  changement ,  alors  ils  prenent     fautes, le  pnans  que  de  plus  en  plus  il  nous  les 
plailir  à  tout  euibrouiUcr.  Pour  celle  caufe     face  fentir,iufques  àc,e  qu'il  nous  ait  amenez  à 
Sauid  Paul  dit, qu'il  ne  faut  point  auou;  bon-     vne  yraye  repentance ,  &  que  renonçans  à  ce 
te  des  perfecutions  qu'endurent  les  fcruiteurs     qui  ell  du  noftre  ,  nous  ne  cherchions  finoo  à 
de  Dieu.nede  tous  lesblafphemes  qui  fe  pro     nous  conformer  du  tput  àlàfainûe  volontéi 
noncent  contre  l'Euangile.  Car  il  nous  faut     comme  il  nous  l'a  declaree.Et  puis  q|u'il  nous 
rcarder  .1  ce  tefraoïgnage  que  nousauonsdu     faut  rctirerdumondequiçftmalin&.perueri', 
ciel.  VoiLi  ie  Fils  de  Dieu  qui  aduoue  fon  E-     qu'il  nous  f^ce  la  grâce  que:  nous  ne  foyons 
uanoile  ,  combien  qu'il  ibit  en  mefpris  &  op-    plus  tranfportezneçànelâ  par  les  vents  que 
probre.N'ayons  donc  point  hôte  de  l'aduouer    nous  verrous  fouffier  ,  mais  que  nous  demcu-. 
auec  luy.   Et  au  refte  ,  quand  il  nous  fait  ceft     rions  fermes  à  fa  vérité  ,  &i  qu'il  rende  noih» 
honneur  que  nous  foyons  tefmoins  aueç  luy,.    foy  vidorieufe  contre  toutes  le^  (eiwat-ions, 
de  quel  courage  nous  deuons  nous  employer?  •  par  lefqucUes  il  nous  iaudrapj^flerrjique  nous 
Car  voila  à  quelle  fin  il  a  conilituez  des  Pa- 
fteurs  en  fon  Eglife  ,  Vous  ferez  (dit-i!)  tef- 
I.4-  moins  auec  moy.  Puis  qu'ainli  eft,  apprenons 
derecognoiftre  l'honeux  que  nous  fait  le  Fils 
de  Dieu  quand  il  fe  veut  feruirde  nous  en  vne 
charge  fi  digne  &  llnoble:c'eft  que  nous  foy- 
ons ttlmouis  de  fa  verité,&  que  nous  n'ayons 


defpitions  tous  les  melchans  qui,  drell'çht  les 
cornes  furieufement  à  l'encpntr-e  d«  nQftrc 
Di£u  ,  qiie  nous  ne  loyons  p.ç^iiDtdwbaéchea 
parles  fcandales  qui  procéderont  d'eux,  maisc 
que  toulîoursnous  demeurions  feimes  eivno-" 
lire  Dieu  ,  pour  batailler  ^onllammcnt  fous 
l'enfeignc  de  noftre  Seigneur  IefHsCluift,iuf- 


point  hoate  de  communique"r  à  ce  qui  luy  eft  ques  à  ce  qu'il  nous  ait  rqçueiili^  .en  fpn  jer. 

tant  précieux  jc'ell  afçauoir  fon  Euangile,  pos  éternel.  Q^enoij  feulftnen^ij  nous  (aco 

coriibien  qu'il  foit  reietté  de  la  plus  part  du  cefte  grâce,  mais  à  tous  petipleï&nations.dfl 

jnonde.Garilfaut  que  les  hommes  nous  foy  et  la  terre,  &c. 


•  ft!    llp  ,  . 

■3  lu  in; 


Qjy  ATRIEME 


i!,"!  j-lcuot 
■M'    :::^..-y-::i  -r.O.  ■:  ]  Î^KR'r^ 

P  R  E  M  I  E  R     C  H  A  P 


iT.RJEir 


"■"W 


8  N^aye  donc  honte  du tefroignage de nofiré  Seigneur ^W '^if 
moy  qui  fuis  fon  prifonnier.  mais  fois  participant  des  affliSiions  del'E 
uangde  félon  la  puijjance  de  Dieu,  -,  >..  .,.t,v  >  .1 .  :  M.^'ii--.  ■■"  i 

9  Qiu  nous  afauuez  &  ap pelez  par  fa  faintl'è  \>oCdèiio,hdn'point 
à  caufède  nos  œuure  s, mais  félon  fon  propos  ^  ^yace,  là^ueUenpifS.^eJî 
donnée  par  le  fus  Chrijî  deuant  les  temps  eternelsi^"'  ■"!'^^  '"^-""•'  ^*  ^"  = ''' 

•t  •'  j.ij  ::.  ..t,îiirt.'-r3     itsil  l'îcaiin'Jv 'jim  znonii.iom  H-oncl  îi^J» 

....  ■  ■    '-:.,',•  '\    ?;,';■  "'  :  ;   ..  aùr.o'i  >T.hi^,T>-.  ûf  "<■  '"'  >  '^  •'• 

çequi  nous  eft  môftré  en  cepajiage,  c'cft  qu^ 


Ombien  qu'en  l'Euangile 
Dieu  monftre  fa  gloire  & 
niaiefté  pour  ,  eftre  adoré 
de  tout  le  monde,  C  cft-ce 
que  l'ingratitude  des  hom 
mes  eft  tdie  que  nous  auôs 
befoin  d'eftre  exhortez  de 
n'auoir  point  honte  de  l'Euangile.  Etpourr 
quoy?  Car  combien  que  Dieu  appelle  toute^ 
créatures  à  foy  pour  luy  faire  hommage  ,  la 
plus-part  luy  font  rebelles ,  le  iiiefprilent,  & 
nicfmcs  defpitent  la  dodrine  par  Laquelle  il 
vouloit  eftre  cognu& adoré.  Or  côbicn  que 
les  hommes  foyent  lî  peruers  que  de  s'elcuer 


nous  ne  deuos  point  auofr  l>ontede  l'EuâgÎT 
le. Et  pourquoy?  Cj^.ç'^le  tefmoignagedç 
noftre  Diçu  :  c'eft  quNen  ce  que n pus  tenons 
de  luy, il  l'oit  prefchc,<]U(;>le  tout  fe  rapporte 
àceftefin  ,  qu'il  fou  cognu  S:  glorifié  ainli 
qu'il  le  mente.  Or li l'Euagile ne  fepi-efche» 
voila  Icftis  CJirift.quieft  .cpranje  cnf^ut-Ji,;  il 
faut  donc  qu'il  y  ait-  bon  tefmoig,nagf ';  $c,t{ 
nous  l'a  ici  rendu. Et  ppurtat  failpi^'^'Ui^icpll: 
hoi\a,eur,  quand  nous  verrous  tout  le  ni(i)t)dt 
an^lîi  dc.sl^ordé(côme,i)qi,tv  auoiis  fiit-i)  Jpii-M^uï, 
tcnir-ljoulîouisàcdfe.fiine,doâKiiic,Et.niel-, 
mef  fai^jà  Paul  nou^  mçt  ici   fa  pcf  fonnp  eu 


contre  leur  Cfcateiu  ,  retenons  ucantaimus    auât.  npnpa..  qu'il  luy  chaluft  beaucoup  d  e- 


SV^R   LA  IL    A   TI  M  OTH. 


5'r*» 


fireapprouué.mais  pource  que  fi  toft  qu''on  le 
fepare  des  feruiteurs  de  Dieu,  on  eft  tout  eC- 
bahique  le  Maiftre  eft  aufsilbien  laiffé  &  a- 
bandôné.De  prime  irace,  quand  il  y  aura  quel- 
que miniftre  de  la  parole  de  Dieu  qui  fera 
toormeuté&fafciié,  &  endurera  perfecution, 
fi  on  le  laifleau  beioin  ,  on  nepenfcra  faillir 
qu'à  vn  homme  mortel  :  mais  Dieu  ie  fent  of- 
tenfé,  d'autant  que  celt  homme  qui  endure, 
porte  la  marque  de  l'Eiungile  ,  &  c'eft  autant 
comme  fi  la  caufe  de  Dieu  eiloit  trahie. Saintl 
Paul  donc  voyant  cela  ,  notamment  dit  a  Ti- 
mothee,  N'aye  point  honte  dfmoy.  Et  de  faiâ: 
(comme  défia  nousauons  touché)  on  pouuoit 
le  mocquer  de  Timothee,&  le  renuoyer  à  fon 
maiftre  ;  comme  les  mefchans  fçauront  bien 
faire  leur  profit ,  quand  Dieu  humilie  [es  fer- 
uiteurs ,  &  permet  qu'ils  foyent  iniultement 
:»ffligez  ,  qu'on  s'eleue  contre  tous  ceux  qui 
ont  adhéré  à  leur  doc'irine  ;  Ho,  tu  vois  com- 
me il  en  eit.  Tiinothee  pouuoit  tùve  comme 
esbwnlc.,  Pourîcefbe  caufe  fainû  Paul  luy  dit, 
Eiicores  queiefoye  en  opprobre  au  inond€> 
une  les  vns  femocquentdc  moy.les  autres  me 
tienent  comme  deteftable  ,  fi  eft-ce  qu'il  ne 
te  faut  poinc  eftre  eiineu  de  tout  cela  :  car  ie 
fuis  prifonnier.de  lefus  Chrift:  comme  s'ildi 
foit.Que  le  monde  me  face  tous  les  vitupères 
qu'il  luy  fera  pofsible.cen'eft  point  pour  mes 
ofteniîBS,  Dieu  aduouema  cn'.Me  :  3c  auAi  de 
faift  elle  eft-  fiene ,  ie  n'endure  point  pour 
nies  maléfices  ,  i'ay  toufiours  fa  vérité  de  ma 
part.  D'autant  donc  que  la  caufe  de  mes  pcr- 
iccutions  n'eftfinon  que  i'av  maintenu  la  pa- 
role de  Dieu,  &  la  maintien  ,  il  ne  faut  point 
qu«  tu  t'arreftés  à  ce  que  le  monde  iuge  ,  car 
les  hommes  font  menez  d'aifertions  peruer- 
fes!  qu'il  te  fuffife  donc  que  ie  fuis  comme  en 
oftage  pour  le  Fils  de  Dieu  ,  &  qu'il  magnifie 
ma  prifon,  en  forte  que  lî  elle  eft  en  opprobre 
quant  aumonde  ,  elle  ne  lailFe  pas  d'eftre  en 
honneur  &  en  dignité  deuant  Dieu,  &:  deuant 
fes  Anges.  Apprenons  donc  de  ne  point  frau- 
der lefus  Chrift  du  tefmoignage  que  nous  luy 
deuQnsvayans' la  bouche  clole  quand  il  i'eia 
befoin  de  maintenir  fon  honneur  ScTauthori- 
téde  fon  Euangile:mais  aul'si  quand  nous  ver- 
rons nosfrtces  eftre  en  affliftion  pour  le  nom 
deDieu, que  nous  foyons  côioints  auec  eux,& 
que  nous  batailliôs  entât  qu'en  nous  fera  pour 
ceftc  querelle, que  nous  ne  fayôs  point  e^bran 
lez  voyans  toutes  les  tempe ftes  quis'efmeu- 
uent ,  mais  que  nous  tenions  bon  ,  nonobftant 
que  le  diable  ait  la  bride  auallee,  &  q  les  cho- 
fes  foyent  confules  tact  &  plus, que  nous  de- 
meurions toufiouxs  côftans  en  noftre  propos, 
quand  ilfaut  eftre  tefmoinsdu  Filsdc  Dieu, 
puis  qu'iiLnous  fait  cefte  grâce  de  fe  feruir  de 
nou^cn  vûechofe  fidigne.  Et  cependat  regar 
dons  bien  il  les  hommes  enduicnt  pour  leurs 
péchez, ou  pour  lavencé  de  Dieu:gardôs  qu.ïd 
nous  voyons  qiielqu'vn  eftre  opprimé,  de  le 
mefpriferpour  cela,  car  il  ne  nouï  faut  point 


eftre  téméraires  en  teft  endroit,  antrcmët  l'in 
iure  s'addrefTera  à  Dieu. Il  faut  donc  que  nous 
enquerions  diligemment  pour  quelle  caufe  les 
hommes  fouffrent.Si  nous  voyons  qu'ils  ayét 
cheminé  en  bonne  confcience,&  qu'on  les  ac- 
coulpe,&  qu'on  les  tourmente ,  voue  pour  a- 
uoir  ierui  à  Dieu,que  tout  cela  foit  pour  effa- 
cer les  opprobres  du  monde.  Et  voila  poui- 
quoy  fainft  Paul  adioufte,  Sois  parti ci]:>a!tt  des 
affligions  de  liiiangile.  Car  il  n'y  a  ccluy  qiji 
ne  s'efpargnaft  volontiers, nous  auons  cela  de 
nature:&  combien  que  nous  confefsions, voi- 
re i'ans  feintife,quc  c'eft  vne  grâce  fingulicre 
que  Dieu  fait  quand  il  fe  fertdes  homes  pour 
maintenir  fa  caufe,  il  n'y  a  celuy  neantmoins 
qui  nefevouluft  exéptcrde  perfecutiô.  Nous 
louerons  bien  ceux  qui  fe  prefentent  vaillam- 
ment aux  combats(conmie  les  Martyrs  de  no- 
ftre Seigneur  lefiis  Chnft  l'ont  dignes  d'eftre 
pnfez&honorez)mais  cependant  il  n'va  ce- 
luy qui  ne  foit  content  d'eftre  loin  des  coups. 
Et  pourquoy?  Car  nous  ne  regardons  point  à 
cefte  admonition  de  faintt  Paul.c'eft  que  l'E- 
uangile  emporte  \is  afflictions.  lefus  Chnft 
ayant  elté  vne  fois  crucifié  en  fa  perfonue,au- 
iourd'huy  veut  encoresauoir  fa doétrinecon- 
iointe  àbeaucoup  de  pouretez.  Ilfcroitbien 
(quand  bon  luy  icinbleroit)que  l'Euangile  fe 
roit  receu  fans  contredit.  Mais  qiioy  ?  Il  faut 
quel'Efcriturefainftes'accÔplifle,  Qu.'ildo-  f/^-iit 
minera  au  milieu  de  fes  ennemis.  Il  faut  au  Ai 
que  les  hommes  vienent  à  luy  à  ceftc  conditiô 
d'auoir  beaucoup  de  combats, d'autant  que  les 
melchans  s'eleuent  à  i'encontre  dcDicu  quîd 
il  les  appelle  à  foy.Il  eft  donc  impofsibie  que 
nous  ayons  l'Euangile  fans  affliétion:non  pas 
que  les  feux  foyét  toufiours  allumez:  mais  tant 
y  a  que  foit  en  vne  iorte  ou  en  l'autre,  il  nous 
faudra  eftre  exercez, il  faudra(di-ic)que  nous 
côbations  ious  noftre  Seigneur  lefus  Chrift. 
Or  maintenant  celuy  qui  le  voudroit  eflon- 
gner  de  lacroix  de  lefiu  Chrift,  ne  renôce-il 
pas  à  fonfalutîOù  eftl'efperance  de  viefinoii 
en  ce  que  nous  femmes  rachcte*parcefacn- 
ficedu  Fils  de  Dieu?  Or  eft-ilainfi  qu'il  veut 
eftre  côforme  en  nous,&.-  q  nous  foyons  tranf- 
figurezàfon  image. Puis qu'ainfi  eft.apprenôs 
de  nous  ranger  à  cefte  condition-la  ,  puis  que 
nous  y  fommes  appelez,  corne  nous  auons  veu 
par  Cl  deuat  que  telle  eft  la  volonté  de  Dieu: 
il  faut  donc  fans  réplique  que  nous  baifsions 
les  efpaules.  Ormaitenant  adiouft:onscequc 
dit  ici  S.Paul:car  pardegrez  ilnous  amcine  1.1, 
qu'il  ne  nous  faut  point  auoir  hôte  de  nos  fie 
ies:quandnous  les  voyons  maudits &:  reprou- 
ucz  du  monde,  que  nous  fi>yons  toufiours  vnis 
aucc  eux.  Etcomment cela  ?  Il  monftre  en 
premier  lieu  ,  que  l'Euangile  ne  peut  eftre 
lansatflii:l:ion<^,(c6me  nous  auonydit)  il  plaill 
à  Dieu  que  les  homes  foyent  ainfidiu  il  z  Non 
point  qu'il  n'appelle  tous  àl'vnionde  la  foy, 
&ladoâ:rine  de  l'Euangile  eft  le  meilàgede 
reconciliation:  mais  cependant  voici  les  fide- 
■  X.iii. 


î^o 


SERMON      III  r. 


les  qui  fot  attirez  par  la  vertu  de  fon  S.Efprit, 
(comme  il  en  fera  traitté  tantoftplus  à  plein) 
les  incrédules  demeurent  en  leur  dureté:voila 
le  feu  qui  s'allume:comme  quand  les  tônerres 
s'engendrent  en  Tair.il  faut  qu'il  y  ait  de  gras 
troubles  :  ainlî  en  eft-il  quand  Tfiuangile  fe 
prefche.  Or  maintenant  ,  Il  PEuangiie  em- 
porte des  af-âiâionç,&  que  lefiis  Chrift  vueil- 
îe  que  ce  qu'il  a  enduré  en  fa  perfonne  ,  s'ac- 
complifle  en  fes  membres,&  que  iournellemét 
il  foit  corne  crucifié, nous  eil-il  licite  de  nous 
retirer  de  celle  condition-ia  ?  Puis  qu'ainfi  eft 
donc  qu'en  l'Euangile  confifte  toute  fcfperan 
ce  de  falut,  &  que  nous  deuons  eftre  appuyez 
là  deflus,  contemplons  ce  que  famû  Paul  dit, 
qu'il  nous  faut  preller  laraamà  nos  frères, 
quâd  nous  voyons  qu'ils  font  outragez, &  que 
on  les  foulle  au  pied, qu'on  leur  crache  au  vi- 
fage,qu'on  les  defpite.que  nous  aimios mieux 
élire  leurs  compagnons  pour  fouftVir  les  op- 
probres &  les  vilenies  du  monde  ,  que  d'eftre 
honorez.d'ellre  en  bonne  reputatiô  &  en  cre- 
dit,&  cependant  que  nous  foyons  aliénez  de 
ceux  qui  endurent  pour  lacaufe  que  nousauôs 
commune  auec  eux.  Voila  donc  ce  que  nous 
auons  à  retenir  de  ce  partage.  Or  pource  que 
Je  noftre  collé  nous  fommesdebiles,&  ferable 
que  nous  deuions  élire  engloutis  des  perfecu- 
tions ,  fi  tort  que  nous  fommes  aflàiUis  d'vne 
telle  inipetuouté  de  nos  ennemis,  que  nous 
voyons  que  le  monde  a  tant  de  pouuoir,fain£l 
Paul  adijulle  que  nous  ne  ferons  point  defti- 
luez  de  l'aide  &  fccours  de  nollre  Dieu  :  & 
quâd  il  nouscnuoyeau  combat, ce  n'elt  point 
pour  efprouuer  nos  forces, mais  il  nous  arme 
quant  &  quant,  il  nous  donne  vertu  inuincible 
pour  fiibfiller.  Voila  pourquoy  fainil  Paul  ad- 
ioulle,Sf/o»  la  Mfrtit  de  nie»:  pour  ofter  toute 
excufede  lafcheté.Or  fuyuant  ce  que  nous  a- 
uons  dit,  chacun  feroit  bien  aife  d'auoir cou- 
leur &  couuerture  de  fe  retirer  des  perfecu- 
tions:Ho,voil.i,ie  voudroye  bien, fi  mon  Dieu 
me  faifoit  la  grace,de  foufFrir  pour  fon  nom, 
ie  cognoy  que  c'ell  le  plus  grand  bien  qui  me 
puille  aduenir.  Chacun  confeflera  cela  :  mais 
on  adiouAera  que  nous  fommes  débiles  ,  que 
nous  ferions  tantoflabbatus,quelestourmens 
font  pour  nous  efpouuanter,  on  voit  la  cruau- 
té &  rage  des  ennemis.  Voila  comme  chacun, 
après  auoir  confeffé  que  c'ell  vne  chofe  excel 
lente  deloufFrir  pour  le  no  de  Dieu,voudroit 
en  eftre  quitte. Mais  {.\mù  Paul  nous  ofte  ce- 
fle  cxcufe-la  ,  en  diiant  que  Dieu  fera  pour 
nous  fortifier  ,  qu'il  ne  nous  faut  point  con- 
templer ce  qui  eft  en  nous.  Car  il  eft  certain 
que  fans  que  nos  ennemis  chocquent  contre 
nous, il  ne  faudra  que  noftre  ombre  pour  nous 
effrayer;  l'apprehenlîon  feule  fera  pour  nous 
l'aire  fuir.Mais  après  auoir  cognu  ccfte  infir- 
mité-la ,  venons  au  remède.  U  nous  faut  bien 
regarder  quelle  foIblclTe  il  y  a  en  nous,  &  les 
^ifficultez  que  nous  aurions  de  tenir  bon  con 
trc  nos  enncmisanaii  c'eftafin  qugaous  loy- 


ons  folicitez  de  prier  Dieu  auec  toute  tumî- 
lité  qu'il  nous  a  Aifte  ,  après  auoir  cognu  que 
nous  ne  pouuons  rien, que  nous  venions  à  nout 
abbaifler  deuant  Dieu  ,  &  que  nous  le  prion» 
qu'il  nous  tende  la  main,&  quand  ce  viendra  à 
l'extrémité  ,  qu'il  ne  nous  défaille  point.  Ec 
ainiî  eftans  en  repos ,  que  nous  cognoifsions 
que  nous  fommes  plus  que  foibles ,  afin  que 
noftre  Dieu  nous  prépare  ,  quoy  qu'il  en  foit, 
&  que  nous  foyôs  armez  quand  il  voudra  nous 
amener  à  l'efpreuue&  à  l'examen. Voila  quel- 
le ell  la  droite  confideraciôde  nolhe  foiblef 
fe,c'eft  (di-ie)afin  qu'en  cognoifl'ant  noftre 
mal  nous  venions  à  Dieu ,  à  ce  qu'il  remédie  à 
noftre  fragilité  ,  fclon  qu'il  cognoiftra  qu'il 
nous  eft  propre.  Voila  donc  à  quoy  il  nous  faut 
regarder.  Et  fi  ccfte  doârine  eftpit  bien  im- 
primée en  nos  cœurs, fans  lègue  difpute,nous 
ferions  beaucoup  mieux  d.lpofez  à  fouffrir 
que  nous  ne  fommes  pas.  Mais  quayi"!!  y  en  « 
blé  peu  qui  recordent  cefte  leçon:  qui  plus  eft, 
il  femble  que  nous  bouchons  noi  aureilles^ 
que  nous  fermons  les  yeux  quand  on  nous  en 
parle.  Nous  ferons  bien  feniblant  de  fouhait- 
ter  que  Dieu  nous  fortifie:  mais  quoy  qu'il  en 
foit, nous  ne  pouuons  amener  noftre  veue  iuf- 
ques  à  cefte  puilTance  dont  parle  fainû  Paul, 
il  nous  femble  toiifiours  que  noirs  n'auôs  rieiï 
de  commun  auec  elle.Oreft-ilainfi  que  noftre 
Seigneur  nous  «irclare  que  (a  puiflance  fer» 
touïîours  en  nous, que  nous  en  ferons  faifis.Eiî 
ainfi  que  noftre  infirmité  ne  foit  point  caufe 
denousfaire  recirer  de  la  croix  ,&  des  per- 
fecutions,voyans  que  Dieu  nous  a  receus  en  (à 
main  pour  fupplccr  à  nos  defaut'i,&  qu'il  pro- 
met aufsi  de  le  faire.  Or  faintl  Paul  n'a  point 
ici  prins  la  puilTànce  de  Dieu  pours'en  iouer, 
mais  il  a  déclaré  à  tous  fidèles  qu'elle  nous  fe- 
ra prefte  &  appareillée  quand  nous  la  requer- 
rons, voue  fi  de  noftre  cofté  nous  demandons 
d'eftre  munis  d'icelle,&  armez  pour  batailler, 
quand  le  Fils  de  Dieu  nous  appelle  au  com- 
bat. Au  refte,  pource  que  les  hommes  ont  be- 
foin  d'eftre  picquezde  touscoftcz.ûinû  Paul 
adioufte  ici  vne  remonftrâce  qai  «ft  pour  nous 
faire  grand' yergongne,fi  nous  ne  fommes  en- 
flammez pour  vouloir  glorifier  lefui  Chrift,» 
voire  endurant  perfccution,qiiandil  luy  plaira 
ainfi.Il  dit,  Q^e  DiV»  nous  a /mtex,  Cf  mus  a 
appeUx.d  yiieTiie.ttiofaiofhe.Oi  puis  queDieU' 
nous  a  ainfi  preucnus  par  fa  bonté  infinie,re- 
gardons  fi  noftre  ingratitude  tft  a  excufer 
quand  de  noftre  part  nous  ne  luy  refpoiidons 
point.VoiLi  noftre  Dieu  qui  nous  a  retirez  du 
gouffre  d'enfer,  nous  eftiôs  perdus  &<iamncr. 
Or  il  nous  a  apporté  le  falut  :&  puis,  il  nous  x 
appelez  afin  que  nous  en  fufsions  participans. 
QVind  donc  Dieu  s'eftmonftré  ainfi,  libéral, 
fi  de  noftre  coilé  nous  luy  tournons  le  dos  ,  & 
quenous  delllaignionsd'acceptcr  le  falut  que 
ilnousprefinte,nevo:la  pouuvnc  malice  tiop 
énorme; Notons  bien  donc,  quand  faiiid  Paul 
accule  ici  ceux  qui  n'ont  point  ei\é  con- 
fia n  s. 


SVR   LA    IL    A  TIMÔTH. 


3î' 


Rins,Sc  ne  prenent  point  courage  pour  fou- 
ftcnir  to'  les  aflfauts  qui  leur  font  faits  &  dref 
fez  à  caufede  PEuangile.qu'il  n'y  a  nulle  dou 
te  qu''il  n'ait  aufsi  voulu  confermer  les  fidè- 
les en  vne  bonne  efperance  pour  l'aduenir, 
leur  remonftrant  ce  que  Dieu  auoit  défia  fait 
pour  eux.  Car  quand  Dieu  nous  a  donné  quel 
quefignede  fa  bonté,  c'eft  afin  que  nous  elpe 
rionsde  luy  le  fcmblable  ,  &  que  nous  atten- 
dions qu'il  parface  ce  qu'il  a  commencé.  Si 
donc  Dieu  nous  a  fauuez  ,  &  nous  a  appelez 
d'vne  vocation  fainde,péfons-no'  qu'il  nous 
vueille  laifler  au  milieu  du  chemin? Quand  il 
nousamonftré  noftre  falut,  qu'il  nous  a  don 
né  les  iambes  pourmarcher.qu'il  nous  a  don 
né  fon  Euangile  par  lequel  il  nous  conuie  à 
fon  R  oyaume, qu'il  nous  ouure  la  porte.quâd 
donc  il  a  ainfi  befongné ,  penfons-nous  qu'il 
nous  vueille  placquerlâ,&fe  moquer  de  nous, 
&  faire  que  fa  grâce  foit  perdue  &  inutile?  Né 
ni,  non  :  efperons  qu'il  amènera  fonoeuureà 
perfeÛion.  Ainfi  donc  marchons  vertueufe- 
ment ,  &  puis  que  Dieu  a  défia  defployé  vne 
partie  de  fa  puifance  cnuers  nous, ne  doutons 
point  qu'il  ne  continue  pour  l'aduenir,  &  que 
nous  n'ayons  la  viiîoire  parfaite  contre  Sa- 
tan Se  nos  ennemis ,  voire  quand  nous  atten- 
drons que  lefus  Chrift  eftîc  noftre  chef  &  ca 
pitaine.monfti'e  que  toute  vertu  luy  cil  don- 
née de  Dieu  fon  Pere.afinde  nous  la  commu 
niquer.  Nous  voyons  donc  ma.ntcnSt  l'inten 
tion  de  fainfl-  Paul.  £t  ainfi  après  auoir  côceu 
la  puiflàncc  de  Dieu  ,  de  laquelle  il  a  efté  fait 
n'agueres  mention  ,  que  nous  venions  adiou- 
fter  quant  &  quant  celle  renionftr.îce  qui  nous 
eu  faite.Oi  ça, Dieu  nous  a  par  effed  &  expe 
ricnce  teilifie  qu'il  ne  nous  defaudra  iamais 
aobefoin.  Etpourqnoy?  Car  ilnousadcfia 
fiuuez.  Q_iiând  iln  jun  a  appelez  à  TEuaiigi- 
le ,  qu'eft-ce  finon  vne  rédemption  que  Dieu 
a  faite  de  nous  quieftiôs  peri^?  Or  Dieu  nous 
a-il  ainfi  fauuez?  Attendons  de  luy,  puis  que 
nous  fomnies  cncores  au  chemin  ,  qu'il  nous 
amènera  au  falut.  Il  no'  a  appelez  d'vne  voca 
tion  fainfte,c'eft  àdire.il  nous  a  choifisàfoy, 
il  nous  a  recueillis  en  cefte  confufion  vniuer 
felle du  genre  humain.Q^d  donc  noftre  Sei 
gneur  nous  a  ainfi  retirez,  ne  nous  tiendra -il 
point  fous  fa  main  ,  &;en  fa  conduite iufques 
en  la  fin?  Voila  donc  vne  confirmation  certai 
ne  de  la  puifïànce  de  Dieu,  q  nous  le  trouue- 
rons  toufiours  prcftà  nous  iecourir,  moyen- 
nant que  nous  y  mettions  noftre  £lce  ,  Si  que 
nous  reduifions  en  mémoire  cônie  défia  nous 
l'auôs  fentie.Mais  pour  bien  faire  noftre  pro 
fit  de  cefte  dortrine  ,  cognoiflons  en  premier 


iours,&pourfuiure  noftre  train,  earnous  fe- 
rons fous  (a  proteûion.  Et  puis  qu'il  eft  fort 
pour  furmonter  tous  nos  ennemis,  noftre  fa- 
lut eft  en  bonne  garde.    Ne  craignons  point 
donc  que  voyans  noftre  infirmité  nous  atten 
dions  que  Dieu  y  pouruoyera,  puis  qu'il  pro- 
met de  nous  aAifter.  Or  ceci  a  befoin  d'eftre 
médité  :  appliquons-y  donc  noftre  eftude,  5c 
aduifons  dereceuoir  cequinous  y  eft  dit. Car 
il  ne  faudra  point  puis  après  longue  rhétori- 
que pour  nous  fortifier  contre  les  tentations, 
quand  nous  aurons  ceci  tout  conclud,  que  no 
ftre  Seigneur  parfera  noftre  falut  cômc  il  l'a 
commencé,voire  nous  afsiftant  au  milieu  des 
perfecutions ,  en  forte  que  nous  aurons  con- 
ftance  pour  les  furmonter  ,  &  qu'il  nous  fe- 
ra triompher  contre  tout  nos  ennemis,  com- 
bien que  félon  le  monde  nous  foyons  comme 
fouliez  au  pied,  voire abyfmez du  tout.  Mais 
il  nous  faut  venir  à  cefte  déclaration  que 
fainft  Paul  adioufte  touchant  le  falut  dont 
nous  auons  parlé,&  de  la  vocation  famûe.  Il 
dit  que  cela  n'eft  point/*/ n»oia'/»«»c«  ,>nais 
feltn  le  prof  os  de  D  ieu,  ù"  f"  gf^'-  Par  ceci  il 
nous  veut  mieux  admonefter ,  monftrant  que 
noftre  ingratitude  fera  tant  plus  à  condaner, 
de  ce  que  Dieu  a  ouuert  les  threfors  incftima 
blés  de  fa  bonté  enuers  nous.Car  il  n'a  point 
tuefgardà  nosœuures,  ni  à  noftre  dignité, 
quand  il  nous  a  appelez  à  falut  :  il  a  fait  cela 
de  fa  pure  grâce,  voila  pourquoy  il  nous  a  at 
tirez  à  foy.  Et  tant  moins  d'excufe  aurons- 
nous  quand  nous  luy  fauflèrons  la  foy  ,  veu 
que  non  feulement  nous  auons  efté  acquis  par 
le  fang  de  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift  fon 
Fils  vnique  ,  mais  qu'il  a  eu  le  foin  de  noftre 
falut  deuant  la  création  du  monde.    Notons 
bien  donc  que  faind  Paul  condamne  ici  no- 
ftre ingratitude ,  fi  nous  fommes  defloyaujt  à 
noftre  Dieu,  &  que  nous  ne  teniôs  point  bon. 
pour  rédre  tefmoignage  à  fon  Euangile,qu.id 
il  nous  a  appelez  à  cela.  Pourquoy.'Nowjn^yôn» 
mei  point JauiteKfiloit  nns  oeuvres  (dit-il )maù 
film  le  propoi  de  D  ieu..  Or  pour  mieux  expri- 
mer ce  propos  gratuit,  fainû  Paul  adioufte 
que  cela  nous  a  efté  donné  Jenant  tous  temps, 
deuant  que  le  monde  ait  eu  fon  cours ,  &  fort 
origine:mais  maintenant  il  nous  a  efté  reuelé 
(dit-il  )  à  la  venue  de  noftre  Seigneur  I-efus 
Chrift:quand  ce  grand  Sauueur  eft  apparu  ,  la 
grâce  qui  eftoit  cachée  au  parauant,voire  in- 
comprehenfible  du  tout  au  fens  humain, a  tfté 
comme  mife  en  clarté.  Et  pourquoy?  Car  le 
Fils  de  Dieu  ayant  anéanti  la  mort  (dit-il)  a 
aufvi  apporté  vie  immortelle.  Et  ne  faut  poît 
que  nous  facions  longscircuits  pour  le  trou- 

1T..'_;l .T o 


lieu, que  quand  Dieu  nous  a  donné  la  cognoif    ucr,car  l'Eiugile  nous  y  mené,  &  nous  y  con 


fance  de  là  vérité,  c'eft  autant  comme  fi  défia 
il  nous  auoit  déclaré  que  nous  appartenons  à 
fon  héritage  celefte, qu'il  nous  veut  auoir  des 
fiens,&de  fon  troupeau.  Qiiand  nous  aurons 
cela  bien  pcrfuadé  &  refolu  en  nous,  alors 
nous  ne  douterons  point  de  cheminer  touf- 


duit.  Et  quand  Dieu  nous  enuoye  ce  mellàge 
de  fhlut ,  il  ne  faut  finon  que  nous  receuions 
l'héritage  qu'il  nous  a  promis, il  ne  faut  point 
que  nous  trottions  bien  loin  ,  mais  Dieu  nous 
vient  chercher:feulemtnt  ouuronsla  bouche 
afin  qu'il  la  répliire,ouurons  le  ca:ur,&:  don- 

x.iiii. 


55Z  S  ER  M 

nons  entrée  à  ce  terraoignage  de  l'Eiiangile, 
&  l'immortalité  du  royaume  celé  fie  habitera 
eu  nous:côbien  que  nous  foyons  poures  vaif- 
feaiix  fragiles ,  voire  qu'il  n'y  ait  que  corru- 
ption &  pourriture  en  nou^,fi  eft-ce  que  déf- 
ia nous  appréhendons  ccfte  immortalité,&  en 
auons  vn  tefmoignage  tout  certain  ,  quand 
nous  pouuons  accepter  cefte  grâce  qui  nous 
cft  offerte  en  l'Eiiangilc.  Voila  toute  la  dedu 
ftion  que  fait  ici  faind  Paul.  Or  cependant, 
pour  mieux  entendre  ce  qui  elt  ici  contenu, 
notons  que  ce  mot  de  Propos ,  {igmRe  décret 
éternel  de  Dieu  ,  voire  qui  n'a  point  fes  cau- 
fes  ne  çà  ne  là.  Car  quand  nous  parlés  du'con 
feil  de  Dieu,  il  ne  faut  point  touiiours  difpu- 
ler  qui  l'a  induit ,  tellement  que  nous  imagi- 
nions des  raifons  pour  dire,  Voila  pourquoy 
Dieu  l'a ainfî  déterminé,  voila  pourquoy  il 
l'a  ainiî  voulu.  Car  au  contraire  ,  Dieu  nous 
veut  tenir  en  cefte  fobrieté,  que  fa  fimple  vo- 
lonté nous  fuffile  pour  toute  raifon.  Qjjand 
il  eft  dit, Dieu  l'a  ainlî  ordonné:  encores  que 
nous  foyôs  esblouis,&  que  )a  chofe  nous  (em 
ble  eftrange,&  que  nous  n'y  voyons  pointde 
apparence  de  raifon  ,  tant  y  a  qu'il  nous  faut 
conclure  que  ù  feule  volonté  eftiuftc&ir- 
reprehenfible. Voila(di-ie)comme  toute  no- 
ftre  fagefle  eft  ,  de  trouuer  bon  tout  ce  que 
Dieu  ordonne  &  fait ,  fans  que  nous  difîons 
pourquoy.  Ord'autant  que  îeshommesont 
touiiours  leurs  efprits  chatouilleux  ,  &  qu'ils 
Jalchent  la  bride  à  leur  curiofîté  ,  fainft  Paul 
pourabbatrevne  telle  audace  ,  nous  ramené 
au  propos  de  Dieu,&  nous  dit  qu'il  nous  faut 
côtempler  que  Dieu  a  fon  propos,là  oii  nous 
ne  pouuons  entrer  fi  profond, que  de  fçauoir 
qui  l'a  efineu.Mais  aufsi  voila  vnecaufe  fou- 
ueraine.c'eil  que  fa  volonté  eft  iufte,  voire  & 
la  règle  de  toute  iuftice.  Par  cela  donc  nous 
fommes  admoneftez  que  noftre  falut  ne  dc- 
péd  point  d'aucun  regard  de  nos  mérites, que 
Dieu  ne  s'eft  point  enquis  quels  nous  eftiôs, 
■ne  de  quoy  nous  eftions  dignes,quand  il  nous 
a  eleus  à  foy  :  mais  il  a  eu  ion  propos,  c'eft  à 
dire,  il  n'a  point  cherché  ^ors  de  foy  la  cau- 
fe  de  noftre  falut.  Q_ii'ainfi  foit  que  ce  mot 
de  Vropos  (îgnifiece  décret ,  l'intention  de  S. 
Paul  eft  toute  claire:mais  pource  que  les  ho- 
mes félon  leurarrogancc  ne  fe  peuuent  te- 
nir d'imaginer  toufiours  quelque  dignité  qui 
leur  foit  propre  ,  qu'il  leur  femble  qu'ils  ont 
bien  defferui  que  Dieu  les  cherchait,  notam- 
ment fainû  Paul,  pour  mieux  exclure  tout  ce 
que  les  hommes  fe  peuuent  attribuer,  dit  Pro- 
fos  &  grâce.  Or  cela  emporte  autant  comme 
s'il  difoit  propos  gratuit.  C'eft  donques  pour 
abbatre  toutes  nos  ocuures  ,  afin  que  nous  ne 
foyons  plus  fi  fols  ni  obftinez,  de  penfer  que 
Dieu  no' ait  choifis  pource  qu'il  y  auoit  quel 
que  chofe  en  nous  digne  de  cela:  rien.  Mais 
coonoiflons  que  Dieu  n'cft  point  forti  dc'foy 
mefme  quand  il  nous  a  eleus  .1  (alut  .  Car  il 
voyoït  qu'il  n'y  a  qiK  perdition  en  nous  :  il 


O  N    I  I  I  T. 

s'eftdonc  contenté  de  ù  pare  grâce ,  &  de  fa 
mifericorde  infinie,  que  contemplant  nos  mi 
i^eres  ,  il  nous  a  voulu  fecourir  ,  encores  que 
nous  n'en  fufsions  pas  dignes.  Et  pour  plus 
grande  confirmation  de  cela  ,  faindî  Paul  dit 
que  cefte  grâce  nous  a  efté  dônee  deuant  tous 
temps.Et  en  ceci  voyons-nous  côme  les  hom 
mes  font  defpourueusde  fens,qu3d  ilsfeveu 
lent  faire  valoir,  &  qu'ils  fe  font  à  croire  que 
ils  font  caufe  de  leur  falut,  &  qu'ils  ont  anti- 
cipé la  bonté  de  Dieu  ,  ou  qu'ils  font  venus 
au  deuant  de  luy.  Dont  eft -ce  que  dépend  no 
ftre  falut?  NTeft-ce  point  de  l'eleélion  eter- 
nellc?Dieu  nous  a  eleus  deuant  que  nous  fuf- 
fions.Et  que  pouuions-nous  faire  alors?Nous 
eftions  bien  habiles,  nous  eftions  biendifpo— 
fez  pour  venir  à  Dieu.  Nous  voyons  melînes 
que  noftre  falut  ne  commence  point  depuis 
que  nous  auons  cognoiflance  &  dii'cretion, 
depuis  que  nous  pouuons  auoir  quelque  bon 
defir:  noftre  falut(di-ie)ne  commence  point 
là,  mais  il  eft  fondé  en  l'eleftion  éternelle  de 
Dieu, qui  eftoit  deuant  que  tout  lemôdefull 
creé.Qiie  pouuios-nous  alors?  Auions-nous 
le  moyen  de  nousauancei?  Pouuions-nous 
donner  occafîon  à  Dieu  qu'il  nous  appellaft  à 
foy,&  qu'il  nous  feparaftdu  refte  du  monde? 
Ne  faut-il  pas  donques  qu'il  y  ait  vnemer- 
ueilleufe  yurongncrie  en  nous ,  quand  nous 
cuidons  auoir  quelque  dignité  ,  que  nous  cui- 
dons  exalter  nos  mérites  pour  obfcurcir  la 
grâce  de  Dieu  ,  &  quenous  voulons  aufsi  e- 
ftre  préparez  pour  auoir  accès  à  luy  par  nos 
mentes?  Retenons  bien  donques  à  quel  pro- 
pos fiinft  Paul  a  ici  mis  l'elcdion  de  Dieu, 
difant  ,  <]ite  U  grâce  nous  a  eflé  donnée  deuant 
tous  temps  .  Mais  par  cela  nous  auons  vn 
bon  aduertiffement  :  c'eft  afçauoir  que  ceux 
qui  cuident  abolir  la  doftrine  de  l'eledion  de 
Dieu,aneantifl"ent  entant  qu'en  eux  eft  le  fa- 
lut du  monde, en  forte  que  le  diable  n'a  point 
de  ilippofts  plus  propres  pour  effacer  la  ver-.' 
tu  du  lang  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrilf, 
pourmettre  tout  en  confufîon  ,  pour  ruiner 
l'Euâgile,.?,:  mefines  pour  exterminer  la  bon- 
té de  Dieu  de  la  mémoire  des  hommesiledia 
ble  n'a  point  de  plus  propres  fuppofts  que 
ceux  qui  combatent  cotre  la  predeftirtation, 
&  qui  ne  peuuent  fouffrir  en  leur  rage  diabo- 
lique qu'il  en  foit  parlé,  &  que  ce  meflage-ci 
foit  publié  comme  il  appartient.  Si  nousde- 
teftons  les  Papiftcs  ,  comme  ils  font  exécra- 
bles ,  pource  qu'ils  ont  prophané  toute  l'E- 
fcriture  fainfte,  qu'ils  ont  peruerti  &  corrom 
pu  la  vérité  de  l'Euangile,  &  le  feruice  de 
Dieu  ,  en  ce  qu'ils  ont  infcfté  tout  le  monde 
de  fuperftitions  &  idolâtries ,  ceux -la  font 
plus  dcteftablcs  qui  veulent  anéantir  l'ele- 
dion de  Dicu,&  qui  tafchent  par  voyes  obli- 
ques &  indircftes ,  de  faire  qu'on  n'en  parle 
point  haut  &:  clair  ,  &  que  cefte  doîlrine-ci 
foit  anonccc  comme  elle  en  eft  digne.  Car  en 
quoy  coniîlte  le  falut  dgs  fidelçs  finon  en  l'e- 

Icûion 


s  V  R     LA    IL    A    T  I  M  O  T  H. 


leftion gratuite  Je  Dieu?  Ne  voulons-nous 

point  cjii'on  prcfclieque  Dicaachoifîles  liés 

pr.r  fa  bonté  gratuite  ûnsauoir*fgard  àrien 

qui  loit?  Ne  voulôs-nous  point  que  ce  myrte 

re  û  haut,  comme  il  eft  ,  &incompreheni!ble 

nous  foit  déclaré ,  entant  que  Dieu  nous  l'a 

voulu  reuelerfll  eft  certain  que  nous  confpi- 

ronsauec  Satan,àce  que  lelus  Chriftait  Ibuf 

fer:  en  vain  ,  &  que  la  paûion  qu'il  a  endurée 

ne  profite  rien  au  monde, &  que  tout  s'en  ail 

ie  en  perdition, &  en  enfer.  Voila  donques  le 

,  premier  article  que  nous  auôs  ici  à  obferuer, 

c'eft  afçauoir  que  TEuangile  ne  fe  peut  pref 

cher  ,  c'elVvn  Euargile  baftard  &  profane, 

c'eft  vne  doûrine  de  M.ihommet ,  il  n'y  aura 

plus  d'Eglife.ne  de  Chreftiété, quand  on  vou 

dra  anéantir  l'tleftion  de  Dieu.  Que  fera-ce 

doncJQji'on  defméte  le  fainft  Efprit  qui  par 

Je  ici, quand  on  ne  voudra  acct  pter  celle  do- 

ûrine.Et  pourtant  de  noftre  cofbé.auifons  de 

batailler  conftammét,  car  c'eft  le  fondement 

de  no/tre  falut. Comment  pourrons-nous  edi 

fier,&  entretenir  l'tdifice, quand  le  fondcmét 

fera  ruiné?  Sain^  Paul  nouv  appelle  ici.quîd 

il  veut  monllrer  en  quelle  vertu  nous  auons  à 

batailler,  &c5nniitnous  paruiendrons  àceft 

héritage  qui  nous  a  efté  acquis  li  chèrement, 

comment  nous  entrerons  en  poflef  ion  de  la 

gloire  de  Dieu, comment  nous  parferons  ceit 

cdifice:&  dit,  Mes  anus,  1  nous  faut  eltre  fon 

dez  fur cefte  grâce  quinous  a  cftédônee,non 

point  d'auiourd'huy  ou  d'hyer.mais  deii.îc  la 

création  du  monde.  Vray  eft  qu'auiourd'huy 

nous  femmes  bien  appelez  de  Dieu  ,  mais  fi 

eft-ceque  l'eleftion  précède,  voire  ,  &quc 

Dieu  nous  a  eleus  fans  qu'il  y  ait   efté  m- 

cité  par  nos  mérites,  ou  que  nous  luy  ayons 

peu  mettre  en  auant  quelque  chofe,finon  que 

nous  luy  denons  tout  ,  &  qu'il  nous  a  retirez 

des  abyfmes  de  perdition  où  nous  cftionscô 

me  poures  créatures  defefperees.  C'eftdonc 

bien  raifon  que  nous-nous  foumcttions  du 

tout  à  luy,  pour  nous  oblieer  pleinement  à 

fa  bonté ,  &  que  nous  foyons  du  tout  rauis  en 

icelle.  Voila  comme  S.Paul  parle. Et  ain(i,que 

nous  retenions  ce  fondement  (côme  l'ay  dit) 

fi  nous  ne  voulons  que  noftre  falut  s'en  aille 

en  ruine  &  confiilîon.  Au  refte  ,  notons  aufsi 

pour  la  fin  ,  que  cefte  doctrine  nous  eft  plus  • 

qu'vtile.quad  nous  la  pourrôs  bien  appliquer 

à  noftre  vfage.Ceux  qui  voudroyét  qu'on  ne 

parlaft  point  de  l'eleftion  de  Dieu,  diront, 

Ho,comment?cela  n'eft  pas  neccflàire.Or  tel 

les  gens  n'ont  iaraais  goufté  que  c'eftoit  ne 

de  la  bote  de  Dieu,  ne  de  Pefperace  que  nous 

deuons  auoir:ils  ne  fçauent  gueres  q  c'eft  non 

plus ,  d'aller  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift. 

Car  fi  nous  ne  fçauonsque  nous  fommes  fau 

uez  d'autant  qu'il  a  pieu  à  Dieu  de  nous  ehre 

deuant  la  création  du  monde  ,  comment  fçau 

rés-nous  ce  que  fainfl:  Paul  nous  récite,  c'cft 

afçauoir  que  nous  foyons  dedica  à  Dieu  pour 

cilre  difpofez  à  viure  &  à  mourir  à  fon  fcrui- 


.  3^^ 

ce?  Comment  pourrons-nous  m.ignifîer  Ion 
Nom?  Comment  pourrôs-nous  coutelier  que 
noftre  falut  procède  de  luy  (eul ,  &  qu'il  ea 
eft  le  c5mencement,&  que  nous  ne  luy  auons 
point  aidé  en  cela?  Nous  le  pourrôs  bien  dire 
de  bouche,  mais  ce  ne  fera  qu'hypocrifie  ,  fi- 
non  que  nous  foyôs  bien  refolus  de  cefte  do- 
ftrine, comme  elle  eft  ici  cxpofee.Apprenons 
dôc  que  cefte  doftrine  de  l'ekâion  de  Dieu, 
&  par  laquelle  nous  fommes  enfeignez  qu'il 
nous  a  predeftinez  deuât  la  création  du  mon 
de, que  cefte  doûrine-la,  (di-ie)fe  doit  prel- 
cher  haut  &  clair  en  defpit  de  tout  le  monde 
qui  y  voudra  refiftcr  :  &  non  léulement  cela, 
mais  cognoiflons  que  c'eft  vn  article  qui  nous 
eft  plus  qu'vtile,d'autant  que  nous  nepouuôs 
pas  appréhender  à  bon  cfcient  la  bonté  infi- 
nie de  noftre  Dieu,iiifqucs  à  ce  que  nous  foy- 
ons paruenuslà.  Car  on  defguifera  touCours 
la  mifericorde  de  Dieu,finon  que  nous  ayons 
ce  poind  vuidé  ,  qu'il  nous  a  choifis  dcianc 
que  nous  fufsions  nais,  &  deunnt  que  nous  le 
peufsions  preuenir.Et  pourquoy?Car  on  dira 
bien  que  nous  auons  efté  rachetez  par  le  fang 
de  noftre  Seigneur  lefire  Chrift ,  &  que  nous 
n'eftions  pas  dignes  que  Dieu  nous  monftrafl: 
vne  fi  grande  mifericorde  :  mais  cependant 
aufsi  on  dira  ,  Et  quieft-ce  qui  a  part  &  por- 
tion à  vne  telle  rédemption  que  Dieu  a  faite 
en  la  perfonne  de  fon  Fils?  Ce  font  ceux  qui 
le  veulent,  ce  font  ceux  qui  cherchent  Dieu, 
ceux  qui  s'y  afluiettiflent  :  ce  font  ctux  qui  ■ 
ont  quclquebon  irSiuuemét.qui  ne  font  point 
trop  rudes, qui  fontd'vn  bon  naturel,qui  onc 
quelque  bonne  deuotion.  Or  quand  on  fera 
vn  tel  meflinge,&  que  les  hommes  penfèront- 
eftre  appelez  à  Dieu  &  à  fa  grâce, pour  quel- 
que chofe  qui  foit  en  eux, qu'ils  apporteront 
quelque  loppin  pour  faire  partage  auec  Dieu 
delcur  falut ,  voila  la  grâce  de  Dieu  qui  eit 
obfcurcie  d'autant  ,  voire  comme  defchiree 
par  pièces.  Or  voila  vn  facrilege  infupporta- 
ble.  Pour  cefte  caufe  i'ay  dit  que  la  bonté  de 
Dieu  iamais  ne  fera  cognue  en  fon  entier  co- 
me  il  appartient ,  iufques  à  ce  que  l'eleftion 
nous  foit  mife  en  auant,  &  qu'on  nous  môftre 
que  nous  fommes  auiourd'huy  appelez,  d'au- 
tant que  noftre  Seigneur  a  touIu  eftendre  fa 
mifericorde  fur  nous ,  voire  deuant  que  nous 
fufsions  nais.  Voila  en  fommece  que  nous  a— 
oons  à  retenir. Il  eft  vray  qu'il  faut  que  cefte 
doftrine  foit  pourfiiiuie  plus  outre, mais  nou« 
ne  pourrions  pas  maintenant ,  ce  fera  dong 
pour  l'aprefdinee. 

OR  nous-nous  proftcrncrom  deaant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes, Te  prians  qu'il  nous  l'es  face  mieux 
fentir,  afin  que  nous  foyons  attirez  à  vne 
vraye  repentance,voire  pour  anéantir  toute» 
nos  mefchantes  affeftions  ,  &  nous  recueillir 
tellement  à  foy  ,  que  comme  il  nous  a  choifîi 
du  monde  ,  qu'aufsi  nous  demeurions  fous  {» 
taa.ia,3iioùi  fon  gouuernciaent,nous  rctirarnt 


3,î4  ^  S  E  R  M  O  N    V. 

detoutet  les  ordures  &  loferions  de  ce  mon     àfonferuice.  Ainfi  nOHS  dirons  tous  >  Dieu 
ile,pour  nous  dcdter  du  tout  à  Ton  honneur&    touc-puifTaaCiPere  cekûe,&c. 


GINQJ/IEME    SERMON    SVR    LE 

PREMIER    CHAPITRE. 

Mais  Jois  participant  des  affliciiom  de  l'Euangile  félon  la  puijjànce  de 
Dieu, 

5  Qui  nous  a  fauuc:^ ,  (f  appelé  ^  par  fa  fainSîe  vocation  :  non 
point  félon  nos  œuures  >  mais  félon  fan  propos  ^  gJ^ace ,  laquelle  nous 
efî  donnée  par  le  fus  Qhrifl  deuant  les  temps  éternels, 

10  Et  maintenant  efl  mamfcfîee  par  f  apparition  de  noflre  Sei- 
gneur le  fis  Chrifî ,  tjui  a  deflruit  la  mort ,  Q"  a  produit  en  lumière  \ie 
^  immortalité  parVEuangile. 


;  o  V  s  auons  déclaré  ce  ma- 
itin.fuiuant  le  texte  de  (aintl 
jPâul,  que  pour  biencognoi- 
Jftre  la  bonté  gratuite  de  no- 
j  ftre  Dieu,  en  ce  qu'il  nous  a 
/ùuuez  ,  il  nous  faut  venir  â 
>fon  confeil  éternel ,  par  le- 
quel il  nous  a  eleusdeuatla  création  du  mon 
de. Car  là  nous  contéplons  qu'il  n'a  eu  nul  re 
gard  à  nos  perfonnes  ,  ni  à  dignité  qui  fuft  en 
nous ,  ni  à  aucuns  mérites  que  nous  puifsions 
apporter.Poiirquoy?Deuant  que  nous  fufsios 
nais,  délia  nous  eftions  enrôliez  en  fon  regi- 
ftre ,  il  nous  auoit  défia  adoptez  pour  fes  en- 
fans. Ainfi  donc  apprenôs  d'attribuer  le  tout 
à  fa  mifericorde  ,  cognoilïans  que  de  noftre 
part  nous  ne  pouuons  nous  glorifier  fans  luy 
defrobber  l'Kôneur  qui  luy  appartient.  Vray 
eft  (comme  les  hommes  iont  malins  )  qu'en- 
cores  on  a  bien  vouhiici  inuenter  des  cauilla 
tiaas  pour  obfcurcir  la  grâce  de  Dieu. Car  on 
a  dit, Combien  que  Dieu  ait  eleu  les  hommes 
deuât  que  le  monde  fuft  ciec,  que  c'a  efté  fé- 
lon qu'il  a  prcueucômervn  feroit  différent 
d'auec  rautre.L'EfcrituremonItreafrcz  coin 
ment  Dieu  n'attéd  point  que  les  homes  mon 
ftrct  s'ils  font  dignes  ou  non.quâdilleschoi 
iit:mais  il  a  femblé  aux  Sophiftes, qu'ils  pour 
royent  obfcurcir  la  grâce  de  Dieu, en  difant, 
Côbien  qu'il  n'ait  point  regardé  les  mérites 
pafTez.toutesfois  qu'il  a  noté  les  mérites  à  vc 
nir.  Car(Jif(.nt-iK)combien  que  lacob  &  fon 
frère  Efau,  ii'eulTent  f.iit  ne  bien  ne  mal ,  que 
Dieu  a  eleu  l'vn,  &  a  reprouuérautre,toutef 
fois  il  a  preucu  (côme  toutes  chofes  luy  font 
prefentes)  qu'Efau  deuoit  eftre  vn  home  pro 
fane,  vn  contempteur  de  tout  bien,  &  que  la- 
cob deuoit  clhe  tel  qu'il  s'eft  déclaré  auec  le 
téps.Voila  couime  telles  gés  baftilTcnt.Mais 
ce  font  fpeculations  fnuoles.  Car  c'eil  plei- 
nement defmentir  fainif  Paul,  lequel  veut 


prouuer  que  Dieu  n'a  point  rendu  falaire  à 
nos  œuures  quand  il  nous  a  eleus,  d'aut-ît  que 
cela  s'eft  fait  deuant  la  création  du  monde. 
Mâts  encores  que  l'authorité  de  l'ainft  Paul 
n'y  fulV  point,  lî  eft-ce  que  la  ckofe  eft  toute 
patente  ,  tellement  que  ceux  qui  veulent  ef- 
chapper  par  vn  tel  fubterfuge.femonftrét  be 
ftes,i:  gens  trop  mai  exercez,  ie  ne  di  pas  feu 
lemét  en  l'El'cnture  fainde,  mais  en  toute  rai 
fon.Car  fi  on  efpluche  ce  qui  eit  aux  hommes, 
qu'eft-ce  qu'au  y  trouuera ,  ie  vous  prie? 
Tout  le  genre  humain  n'eft-il  pas  maudit? 
Et  qu'apportons-nous  du  ventre  de  la  mère 
finon  toute  iniquité?  Nous  ne  diiferons  donc 
de  rien  l'vn  de  l'autre  ,  iinon  d'autant  qu'il 
plaift  à  Dieu  de  recueillir  à  foy  ceux  qu'il 
veut.  Et  voila pourquoyaufsi  fainif  Paul  vfe 
de  ce  mot  en  vn  autre  palTage ,  quand  il  dit 
que  les  hommes  n'ont  dequoy  fe  glorifier,  '■  '-''''•4« 
pource  que  nul  ne  fe  trouuera  point  excellét  ^" 
par  delTus  fes  prochains.linon  entât  que  nous 
fommes  difcernez  de  Dieu.  Puis  qu'ainfi  efl 
donc  quec'eit  l'office  de  Dieu  de  nousdif- 
cerner  d'auec  ceux  qui  demeuréten  leurcon 
damnation ,  cognoili'ons  que  tous  fcroycnt 
perdus  iînon  que  le  remède  vcinft  d'ailleurs. 
Ainfi  donques, quand  nous  aurons  côleffé  que 
Dieu  nous  aura  eleus  deuant  que  le  mode  luit 
c  reé,il  s'enfuit  de  là  qw'il  nous  a  donc  prépa- 
rez pour  receuoir  (a  grâce, qu'il  a  mis  le  bien 
en  nous  qui  n'y  eftoit  point  aupaïauant  ,  que 
non  feulement  il  nous  a  choifis  pour  héri- 
tiers de  fon  Royaume,  mais  qu'il  nous  a  quat 
&  quant  marquez  afin  de  nos  iuftifier  ,  afin 
de  nous  gouuerner  par  fon  ïîinSt  Efprit.  Ec 
celle  dodrine-ci  doit  eftre  tellement  alTeu- 
ree  &  refolue  entre  les  Chreftiens  ,que  fi  on 
la  mefprife,  comme  hous  eu  voyons  beau- 
coup d'erfiontez  qui  auiourd'huy  veudroy- 
ent  auoir  efteint  la  venté  de  Dicu,il  faut  que 
nous  coguoifsions  ceux-là  eftre  répugnas  au 

fa  in  A 


s  V  R   LA   I  I.   A  T  I  M  O  T  H. 


-5« 


fîiniflErpnt, voire  corne  des  taureaux,  &  des 
beftes  furiciifes  qui  veiilentaneatirtoute  i'E 
fcnture  faîae.Car  de  taid.il  y  a  plus  d'hôna 
ftetéauxPapiftes.qu'iln'ya  pas  en  eux.  car 
la  dodrinedes  Papiftes  eil  beaucoup  mtiU 
leure  &  plus  fainûe ,  &  plus  conforme  à  TE- 
fcnture  fain£te  ,  que  n'efV  celle  de  ces  mel- 
ehans  vileinsqui  auiourd'huy  renuerfcnt  la 
fainfte  eleftion  de  Dieu,  ces  chiens  quiab- 
bayent  à  l'encontre  ,  ces  pourceaux  qui  vie- 
nent  confondre  tout  de  leur  groin,  comme 
nous  voyons  auiourd^huy  que  ce/te  impiété 
"  fe  déclare  par  trop. Or  quey  qu'il  en  foit.re- 
tenoils  ce  qui  nous  eft  ici  monftré  ,  que  d'au- 
tant que  Dieu  nous  a  choifis  deuant  que  le 
monde  cuft  fonceurs, que  nous  dcuons  attri- 
buer à  fa  bonté  gratuite  la  caufe  de'noftre  fa- 
lut,  nous  deuonç  confclTèr  que  nous  ne  tom- 
mes point  adoptez  de  luy  félon  nos  «lerites. 
Car  nous  n'auion^  rien,  &  ne  luy  pouuions  ap 
porter  rien  qui  foit  du  noftre.  Il  faut  donc 
que  nous  mettions  la  caufe  &  la  fource  de  no 
ftre  falut  en  luy  feul,  &  que  nous  foyons  fon 
dez  là  deflus  ,  ou  autrement  il  n'y  aura  que 
confiifîon  en  toutce  que  nous  pourrons  ba- 
ftir.  Mais  cependant  nous  deuons  bien  aufsi 
obferuerce  quefainft  Paul  conioint  ici. Pre- 
mièrement, la  grâce  delefus  Chrid  aucc  le 
confeil  éternel  ^  Dieu  fon  Pere:5:  puis  qu'il 
nous  ramené  à  noftre  vocation,  afin  que  nous 
foyons  afleurez  de  la  bonté  de  Dieu,  &:  de  fa 
volôté  qui  nous  eftoit  cacliee.finon  que  nous 
en  euf  ions  tefmoignage.En  premier  lieu  doc 
fainft  Paul  dit  que  la  grâce  qui  depéddu  feul 
propos  de  Dieu  ,  &  y  eftcomprife  ,  nous  eft 
donnée  en  noftre  Seigneur  lefus  :  comme  s'il 
diibit.  D'autant  que  nous  méritions  d'eftre 
reiettcz  &hays  comme  ennemis  mortels  de 
Dieu,  il  a  falu  que  nous  ayons  efté  comme 
entez  en  lefus  Chrift,  afin  que  Dieu  nous  rc- 
cognuft  &  auouaft  pour  fes  enfans.Cependat 
que  Dieu  a  le  regard  fur  nous  ,  il  faut  qu'il 
nous  detefte  ,  pource  qu'il  n'y  a  que  pourtté 
en  nous,&;  que  nous  fommes  pleins  de  péché, 
&  comme  farcis  de  toute  iniqm'té.  Dieu  qui 
eft  la  indice  fout^raine  ne  peut  auoir  nulle 
conuenance  ni  accord  auec  nou<:,  cependant 
qu'il  contejnple  noftre nartire.  Q_nand  donc 
il  nous  a  voulu  adopter  deuant  la  création  du 
hnonde,  il  a  falu  que  lefus  Chr'ft  fuft  là  com- 
me entfc-deux,  &  que  nous  fuAions  eleus  en 
'  (à  perfonne.car  c'eft  le  Fih  bié-aimér&  qu.îd 
"Dieu  nous  conioint  à  luy, il  fait  que  non .  tuy 
foyons  agréables.  Apprenôs  donc  pour  bien 
cftre  certifiez  de  Peledion  de  Dieu,&  en  fai- 
r»noftrc  profit.de  venir  droit  à  lefus  Chrift, 
<ar  c'eftle  vray  miroir  on  il  nous  faut  re- 
garder noftre  elcftion.  Si  lefus  Chrift  nous 
cft  ofté,  voila  Dieu  qui  eft  iuge  pour  les  pé- 
cheurs.Nous  ne  pouuons  donc  ef(>erer  de  luy 
aucun  bien  ni  faueor.maispluftoft  il  nous  tant 
attéJre  toute  venge.ice:  fa  maiefté  aufsi  nous 
lera  tcmlîours  efpouuaxabiefans  lefus  Chrift: 


fi  on  nous  parle  de  fon  propos  éternel,  il  fait 
dra  que  nous  foyons  eiFrayez.comme  fi  défia 
il  eftoit  apprefté  pour  nous  abyfmer.  Mais 
quand  nous  cognoiflons  qu'en  Icfus  Chrift 
relîde  toute  grâce  ,  alors  nous  pouuons  nouj 
certifier  que  Dieu  nous  a  aimez, combien  qu« 
nous  n'en  fufsions  pas  dignes.  Voila  pour  vn 
item  de  ce  que  fainft  Pau]  met  ici.  Or  en  fé- 
cond lieu, il  nous  faut  obferuer  qu'il  ne  parle 
pas  fimpleraent  de  l'eleûion  de  Dieu:car  ce- 
la ne  feroit  pas  pour  nous  bien  refoudre, pluf 
toft  il  nous  faudroit  demeurer  en  perplexité 
&angoifre.M3is  S.Paul  adioufte  la  vocation, 
par  laquelle  Dieu  nous  a  manifefté  fon  con- 
feil,qui  auparauant  nous  eftoit  incognu,&  an 
quel  nous  ne  pouuiôs  paruenir.  Cornent  don 
quesfçaurons-nous  que  nous  fcroni  eleus  de 
Dieu  pour  nous  refiouir  en  luy,  &  pour  nous 
glorifier  delà  bonté  qu'il  nous  a  monftree? 
Ceux  qui  parlent  de  l'eleftion  de  Dieu  .î  l'e- 
ftourdie  ,  laiffent  làl'Euangile  ,  ils  laiffènc 
tout  ce  que  Dieu  nous  met  enauSt  pour  noue 
amener  à  foy  ,  tous  les  moyens  qu'il  nous  a 
ordônez,  &  qu'il  cognoift  nous  eftre  propres 
Se  vtiles  à  noftre  vfage.Cen'eftpasainfi  que 
il  nous  y  faut  procéder  ;  mais  conioignons,, 
fuiuant  la  règle  de  /âinû  Paul ,  àl'eleftion  e- 
terne]le,la  vocation.  Or  ce  mot  de  Voeatiotty 
fignifie  autant  qu'Appel  :  il  eft  vray  qu*il  eft 
tiré  du  Latin,  mais  il  faut  que  ceux  qui  ne 
font  point  letrez  ,  cognoiftent  ce  qu'il  em- 
pone.Or  donc  il  eft  dit  que  nous  fommes  ap  - 
pelez  :  aufsi  il  y  a  le  mot  fécond,  qui  fignifie 
l'Appel.  Dieu  donc  nous  appelle:&  cornent? 
C'eft  quand  il  luy  plaiftnouî  certifier  de  no- 
ftre cleâion  ,  laqueileautrement  nous  feroic 
mcomprehenfible.  Car  qui  eft-ce  qui  entrera 
au  confeil  de  Dieu?  (  comme  dit  le  Prophète  ifu.  ^o.' 
Ifaie ,  &  comme  aufsi  fainft  Paul  en  parle)  13. 
Mais  quand  il  plaiftà  Dieu  de  fe  communi-  V^m  .  11^ 
querpnueement  à  nous ,  alors  nous  aoons  ce  34. 
qui  fiirmôte  tous  fens  humains:car  nous  auôs 
vn  bon  tc/moin  &  fidèle  ,  c'eft  afçauoir  le  S. 
Efprit  qui  nous  eleue  pardeîTîis  le  monde,  & 
nous  introduit  iufques  aux  ftcrets  admira- 
bles de  Dieu.  Maintenant  donc  nous  voyons- 
qu'il  ne  nous  faut  p.a-^  cruemcnt  parler  de  l'e— 
îeftion  de  Dieu,poi'rdirc,Nous  fommes  pre— 
d'eftinezTiTiais'H  faut  pour  eftre  bien  afleurer.' 
de  noftre  falut ,  que  nous  n'enquerions  point 
en  l'air  ni  j  la  volée,-  afçauoir  fi  Dieu  nous- 
tient  du  nôbredes  fi'dns  oonon.  C^ue  fant-iD 
donci'  Regardons  rEtiagile  qui  nous  eft  pro- 
pofé:I.i  Dieu  riôus  môftre  qu"'il  nous  eft  Père, 
&•  qu'il  noirsa  marquezafin  de  nous  amener  à 
l'héritage  de  vie:&  cefte  cognoiilànce-la  no*" 
eft  vue  fig nature  dn  S.El'priren  nos  cœurs, & 
vn  tefmoignage  certain  de  noftre  fahtt,  voi- 
re quad  nous  le  receuons  par  ioy.Car  PEuaii 
gilefeprefcheà  beaucoup,  ^  neatrKroins  fonr 
leprouuez  :  &mefmes  Dièu  dcfcouure  3c  dé- 
clare qu'il  les  a  maudits, qu'ils  n'ont  point  de 
paît  ni  portion  en  fon  Royaume,  pource  que 

Y  li. 


3Î<^. 


SERMON    v; 


lis  lefiftcnt  à.  rEuangilc,  &  qu'ils  repoulTent 

lagtace  qui  leur  clt  oiferte.  Mais  quand  nous 

rcceuorts  en  obciflance  de  foy  la  doftnne  de 

Dicu,&que  nous  fommes  appuyez  fur  les  pro 

melfes  ,  que  nous  acceptons  ccft  offre  qu'il 

nous  tait  de  nous  tenir  pour  Tes  enfans,  voila 

(di-ie)vne  vraye  certitude  de  noilre  eledion. 

Or  cependant  il  nous  Faut  noter  que  quand 

nousauons  cognoiffmce  de  noftre  falut ,  par 

ce  que  no°  fommes  appelez,  &  que  Dieu  nous 

lUumuie  en  la  foy  de  fon  Euangile  ,  cela  n'eft 

point  pouraneantir  la  predeftination  éternel 

ie  qui  va  deuant .  Or  on  en  verra  auiourd'liuy 

beaucoup  qui  dirôt.Et  qui  font  ceux  que  Dieu 

a  cleus  iuionlcs  fideles?Ieleconfeire:mais  ils 

font  vne  mauuail'e  conlequence  (  comme  des 

bcites  qui  lont)  ced  afçauoir ,  Q^e  la  foy 

donc  eÛ  la  caufc  de  noilre  falut,voire  la  cau- 

fe  première  .  S'ils  Tappelloyét  caufemoyen- 

ne.ccla  eftvray  en  foyicarl'Efcrituredit  que 

nous  fommes  fauuez  par  foy.Mais  il  faut  mô- 

Epfjî.i.S  ter  plus  haut.  Car  cependant  ,  s'ils  attribuent 

la  foy  au  franc  arbitre  des  homes,  ils  blafphe 

ment  mefchamment  contre  Dieu,&  font  vrais 

fâcrileges, 'pires  que  les  Papilles,  comme  i'ay 

dclia  dit.  Or  il  nous  faut  venir  à  l'oppolîte  à 


ce  n'efl  pas  qu'il  n'y  âîf  Tne  caufe  pluî  Iiauteil 
c'cft  afçauoir  l'eleÛion  éternelle  :  &  quicon- 
que ne  peut  venir  là,  derogueàDieu  ,&àfon 
honneur,  quand  il  difcerne  entre  les  hommes 
félon  leurs  raeritesA'  félon  qu'vn  chacun  s'eft 
difpofé.  Voila  donc  comme  il  nous  faut  rete- 
nir Tvnion  que  {âin£l  Paul  a  mife  en  ce  palFa- 
ge, laquelle  aufsi  fe  trouue  par  toute  l'Efcntu 
re  fainfte.Or  maintenat  pour  taire  vne  bricfue 
conclulion  ,  auifous  quelle  procédure  il  nous 
faut  ici  tenir.   Quand  nous.enqueronsde  no- 
ftre  ialut,  il  ne  faut  point  que  nous  commen- 
cions par  ce  bout ,  pour  dire  ,  Sommes-nous  ' 
eleusou  non?  Ncnni;car  iainaisnousne  pour- 
rons monter  li  haut  ,  &nous  ferions  confus 
cent  mille  fois  &  esblouis  en  nos  fens,  deuant 
que  pouuoir  approcher  duconi'eil  tftroitde 
Dieu.  Comment  donc  y  faut-il  aller  ?    Que 
nous  efcoutions  ce  qui  nous  eftdit  enl'Euan» 
gile:&:  quand  Dieu  nous  a  fait  la  grâce  de  re- 
ceuoir  la  promeflc  qu'il  nous  offie  ,  fçachons 
que  c'ert  autant  côme  s'il  nous  auoit  dcfployé 
(on  cœur  ,  &  qu'il  euftenregillré  en  nos  con- 
fciences  noftreckttion.  Voila  donc  comme  il 
nous  faut  eftre  ccrtiiiez.que  Dieu  nous  a  ado- 
ptez pour  fes  enfans, &  q  l'héritage  du  Royau 
me  des  cieux  nous  eft  infallible,  d'autint  (di- 


ceque  l'Efcriture  nous  monflre.c'eft  afçauoir 

quand  Dieu  nous  donne  la  foy  ,  que  ce  n'eft  ic)que  nous  fommes  appelez  en  lefus  Chrift. 
point  à  nouide  receuoir  l'Euangile  .fînond'  Comment  pourrons-nous  cogno  lire  cela.? 
autant  qu'il  nous  a  difpofez  par  fon  fainct  E-  Comment  ferons-nous  arreftez  à  ladoftrine 
fprit.Caril  ne  fuftît  point  que  nous  ayons  les  que  Dieu  nous  met  deuant  les  yeux  ?  Il  taut 
aurcillesbatues  de  la  voixd'vnhômc,  cefera  quant  &  quant  pour  bien  magmfiei  la  grâce 
vu  fon  qui  s'efuanouira  en  l'air, lînô  que  Dieu 
bcfongnc  là  dedans,  &  qu'il  parle  à  nous  d'v- 
ne  façon  fecrette  par  fon  faïutt  El'prit.  Voila 


de  Dieu,  cognoiflre  que  nous  n'y  pouuons 
rien  apporter  de  noftre  codé,  &  que  nous  de- 
uons  eftre  du  tout  anéantis  ,  afin  de  ne  point 


qu'a  l'autre  ?  iaina  LUC  nous  le  monitre,  pele 
iiifant,  Que  ceux  qui  eftoyent  ordonnez  à  fa-  nous  auoit  eleus  deuant  la  création  du  monde, 
lut.ont  crcu  au  fermon  de  S.Paul. Voila  beau-  Or  il  eft  vray  que  ce  font  letres  clofes  que  ce- 
coup  d'auditeurs  ,&  il  n'yenaqu'vne  partie  ftc  élection  de  Dieu,voireànous,d'autânt  que 
qui  reçoyue  la  promeflc  de  falut.Et  quelle  eft  elle  confifte  en  foy  Se  en  ù  nature  :  mais  nous 
ccfte  partie-la  î  Ceux  qui  eftoyent  ordonnez  y  pouuons  lire,  pource  que  Dieu  nous, en  rend 
à  fakit,  dit  faina  Luc  .  Faut-il  plus  difputer  là  tefmoignage  quand  il  nous  appelle  à  foy  par 


delPus  ?  Et  puis  S.Paul  au  piemier  des  Ephe 
fîens  en  traitte  (i  à  plein, qu'il  faut  bié  que  les 
ennemis  de  la  prcdeltinationde  Dieu  foyent 
du  tout  hebetez,&  que  le  diable  leur  ait  creué 
les  yeux,  &  qu'ils  foyent  comme  defpourueus 
de  raifon, voire  enforcclez  du  tout ,  quand  ils 
ne  voyent  goutte  à  vne  chofe  fi  euidente.  Car 
S.Pauliiit  q  Dieu  nous  a  appelez,&  qu'il  nous 
a  fait  participansdesgrans  threfors  >3crichef- 


la  cognoiflànce  de  l'Euangile  ,&  parla  toy: 
alors  nous  en  auons  côme  vn  double.Car  tout 
aiufi  que  l'original, ou  le  prothocole  ne  dero- 
gue  point  à  la  Ictrcou  à  rin,flrument  qui  fer.t 
leué,mais  pluftoft  c'en  eft  vne  approbation,  & 
mefmes  on  ne  s'en  ira  point  enquérir  du  pro- 
thocole quand  oh  aura  l'inftrumcnt  authcnti- 
qiie:ainlî  faut-il  que  nous  foyons  afleurezde 
noftre  elcdion.  Car  quand  Dieu  nous  certifie 


fes  infinies  qu'il  nous  a  apportées  par  noitre    par  l'Euagile  qu'il  nous  tient  pour  [es  enfant. 


Seigneur  Icfus  Chrift.Et  comment?  SelonCdit 
il)qu'il  nous  auoit  elcus  deuant  la  création  du 
monde. SainQ  Paul  traittant  delà  foy, nous  ra 
mené  à  ce  principe  qui  eft  plus  haut ,  à  cefte 
caufc  première, &  à  lavraye  fourcede  noftre 
Ialut, c'cft  cefte  bonté  gratuite  dôt  dcfia  nous 
auons  allez  traitté.  Quand  donc  nous  dilons 
que  nous  fommes  appelez  à  Ialut,  &afleurcz 
«i'iceluy.d'autât  que  Dieu  nous  a  dôné  la  foy, 


voila  des  letres  allez  authentiques  qui  iont 
(îgnees  du  faiig  de  noftre  Seigneur  Icius 
Chrift,&  feellecs  par  fon  faind  Efprit.Qnand 
nous  auons  cela,  n'auons-nous  point  de  quoy 
nous  contenter  ?  Or  maintenant  (comme  l'ay 
dilatant  s'en  faut  qucl'clettionde  Dieu  con- 
tieuieneà  cela.qu'elle  ratifie  beaucoup  mieux 
le  tcûnoignage  que  nousauons  en  l'Euangile. 
Non  point  qiul  nouifj.iUc  aller  feuilleter  le 

pjoth  oc 


s  vu  LA, II.    A   TIMOTH. 


protlioeole  &  le  regiftre  de  Dieu  ,  conyne  s'il 
yanoit  quelque  doute  :  nous  auons  l'inftru- 
ment  qui  eft  infallible:que  voulôs-nous  plus? 
Ne  fera-ce  point  \a.  témérité  &  arrogance 
de  dire  plus.  Qui  eil-ce  qui  montera  par  def- 
fus  les  nues ,  quand  nous  auons  la  parole  en 
noftre  boucte  &  en  «oflre  coeur?  (  comme  dit 
Veu.xo,  Moyfe)  Vray  eft  que  iî  on  penfoit  qu'vn  in- 
,i,  '  '  ûriimentne  fuft  pat  tiré  du  vray  regiftre  de 
fon  original,  alors  on  le  reuoqueroit  en  dou- 
termais  quand  la  chofe  eft  toute  certaine.que 
faut-il  plus  ?  Autant  en  eft-il  qu'il  ne  nous 
faut  point  douter  que  Dieu  ne  nous  ait  cnre- 
giftrez  deuant  la  création  du  monde  au  rang 
de  fes  eleus  &  de  fes  enfans  :  mais  il  s'eft  re- 
ferué  cela  par  deoers  foy.  Cependant  nous  a- 
uons  letreg  patentes  de  noftre  falut ,  nous  en 
auons  vn  inftrumentaflczcertain.commc  fay 
defiadeclaré.  Il  y  a  encore;  plus.c'eft  de  touf 
iours  venir  à  noftre  Seigneur  lefiis  Chrift, 
quand  il  eftqueftion  de  noftre  elcdion  :  car 
fans  luy(commenousauonTmonftré)nous  ne 
pourrons  approcher  de  Dieu.  Et  aulsi  quand 
on  parlera  de  fon  décret ,  nous  ferons  efton- 
nez  comme  coulpables  de  mort  :  mais  ayans 
Itfus  Chrift  pour  conduite,  notis  pourrons 
nous  efiouir  hardiment ,  fçachins  qu'il  a  aflcz 
de  dignité  en  foy  pour  rendre  tous  fes  mem- 
bres agréables  à  Dieu  fon  Père, qu'il  fuffit  que 
nous  foyons  entez  en  fon  corps ,  que  nous 
foyons  vnis  à  luy.  Voila  donc  comme  nous  a- 
uonsà  méditer  ce  ftedoftnne,  fi  nous  en  vou- 
lons bien  faire  noftre  profit ,  fuyuant  ce  qui 
nous  eft  ici  monftré  par  lama:  Paul .  Il  dit  que 
cefte  grâce  de  fahic  nous  a  efté  donnée. Et 
comment? Deuant  nul  ffm()j,dit-il.Il  nous  faut 
paffer  par  defllis  tout  ordre  de  nature  ,  quand 
il  eft  queftion  de  fç.iuoir  comme  nous  fommes 
fauuez,&  de  quelle  caufe.S:  dot  cela  procède. 
Au  refte,  cognoiflons  q  Dieu  ne  nous  a  point 
voulu  laifTer  en  fufpens  ,  &  qu'il  ne  nous  a 
point  caché  fon  confeil  pour  ne  fçauoir  com- 
me il  va  de  noftre  falut, mais  il  nous  a  appelez 
à  foy,non  feulement  quand  l'Euangile  nous  a 
efté  prefché,car  cela  ne  fiifhroit  pas,  mais  il  a 
fcellé  en  nos  cœurs  le  tcfm  jignage  de  fa  bon 
té  &  de  fon  amour  paternelle  .  A'nfi  donc, 
quand  nous  auons  vne  telle  certitude  ,  qu'en 
premier  lieu  nous  glorifions  Dieu  de  ce  qu'il 
nous  ^  appelé?  par  fa  milericorde  gratuite  :  & 
au  rcfte.quenous  foyons  appuyez  fur  noftre 
Seigneur  lefus. Chrift,  &  que  nous  fçachions 
qu'il  ne  pousa  point  fruftrez  quand  ilnous  a 
fait  prononcer  qu'il  s'eftoit  donné  à  nous,  & 
niefmes  que  cela  nous  a  efté  teftifié  par  le 
fainû  Efprit.Car  la  foy  nous  eft(comme  i'ay 
défia  dit)vne marque  infalbble  que  Dieu  no' 
tient  pour  fes  enfans  :  &  de  là  nous  fommes 
aufsi  conduits  à  l'eleftion  éternelle .  Et  pour- 
quoyJDieu  nous  a  appelez  (  dit  fainftPaul  au 
premier  chapitre  des  Ephcfi^ns  )  ftlon  qu'il 
npus  aiioit  eleus  auparanant .  Il  ne  dit  pas  que 
î^içunpuS-auoit  eleus,pource  que  nous  auons 


5f7 

ouy  l'Euangile  :  mais  aucontraire  il  attribue 
la  toy  qui  nous  eft  donnée  à  cefte  caufe  fou- 
ueraine.c'eft  que  Dieu  nous  auoit  défia  refer-< 
uez  pour  nous  fauuer.voyant  que  nouseftions 
perdus  &ruincz  en  Adam. Au  rtfte, notons  que 
fainift  Paul  ne  parle  ici  que  des  fidèles.  Car  il 
y  a  des  badins  qui  pour  esblouir  les  yeux  des 
ignorans  &  de  leurs  femblables ,  voudroycnt 
ici  cauiller,  que  la  grâce  de  falut  nous  a  elle 
donnée  ,  pource  que  Dieu  a  ordonné  que  fon 
Fils  foit  Rédempteur  du  genre  humain  ,  mais 
que  cela  eft  commun  à  tous,&  indiffèrent.  Or 
fainû  Paul  a  parlé  d'vne  telle  façon,  qu'on  ne 
peut  pas  par  telles  glofes  &li  puériles  corrora 
pre  la  dodrine  .Car  notamment  il  auoit  dit 
auparauant ,  que  Dieu  nous  a  fauuez.  Cela  fc 
rapporte-il  en  gênerai  à  tous,  &  fans  exce- 
ption? Nenniiil  n'eft  queftion  qiiedes  fidèles. 
Apres,  fainû  Paul  auoit-il  a^>pe!é  tout  le  mon 
de  ?  Les  vns  eftoycnt  appelez  par  la  prédica- 
tion: mais  cependant  ils  s'eftoyent  rendus  in- 
dignes de  ce  falut  qui  leur  eftoit  offert .  Lei 
voila  donc  reprouuez.  Les  autres,  Dieu  les  a- 
uoit  laiflèz  en  leur  incrédulité  ,  que  iamais  !!*■ 
auoyent  cuy  anoncer  motde  l'Euangile.Ain- 
fi  donc  fainû  Paul  notamment&  parefpecial 
s'addrefle  à  ceux  que  Dieu  auoit  choifis&  re- 
feruez  àfoy  .  Et  ainfî,  retenons  que  iamais  la 
bonté  de  Dieu  n'aura  fon  vray  luftre  pour  e- 
ftre  honorée  comme  elle  mérite,  fînonquc 
nous  cognoifsions  que  Dieu  n'a  point  voulu 
que  nous  foyons  demeurez  en  la  perdition 
commune  du  genre  humain  ,en  laquelle  il  a 
laifle  ceux  qui  eftoyent  femblables  à  nous,  Se 
aufquels  nous  ne  différions  en  rien,  comme  n' 
eftans  point  meilleurs  qu'eux  :  mais  il  luy  a 
femblé  bon  ainfi.  Il  faut  donc  que  toute  bou- 
che foitici  clofe,que  les  hommes  ne  prcfn- 
ment  point  de  fe  rien  attribuer  :  &  cependant 
que  nous  ayons  les  bouches  ouuertes  pour 
louer  Dieu  ,  en  confeflànt  que  nous  luyde- 
uons  tout  ce  qui  eft  de  noftre  falut .  Voila  en 
fomme  ce  que  nous  auons  à  retenir.  Orcepea 
dant  notons  bien  les  autres  mots  dont  fainft 
Paul  vfe  ici.  Il  eft  vray  qu'en  fomme  il  entend 
ce  que  dclra  nous  auons  déclaré  ,  d'autant  que 
l'eleûiondeDieunenous  feroit  point  profi- 
table ,&  qu'elle  ne  paruiendroit  point  iuf- 
ques  à  nous,fiuon  qu'elle  nous  fuft  cognue,  & 
que  nous  ladeuôs  cognoiftre  parle  moyen  de 
l'Euangilerpour  celle  caufe  Dieu  nous  a  vou- 
lu manifefter  ce  qu'il  tenoit  Comme  fccretcn 
foy  de  tout  temps .  Mais  il  entrelace'  aufsi 
pour  mieux  exprimer  fonintention,  que  cefte 
grâce  nous  a  efté  maintenant  reuelee.Et  com 
ment  î  f-n  rapparition  de  mflre  Seigneur  leftti. 
Quand  il  dit  que  cefte  grâce  nous  eft  reuelce 
en  l'apparition  de  lefus  Chrift,  il  monltre 
(  comme  défia  nous  auons  touche  )  que  nous 
ferions  par  trop  ingrats  fi  nous  ne  pouuions 
auoir  contentement  iJ.:  repos  quand  le  Fils  de 
Dieu  fe  donne  à  nous.  Et  que  demandons- 
iious  plus?Quand  nous  pourrions  monter  par 

y.iii. 


5îS 


SERMON    V. 


defliis  les  nues ,  &  que  nous  pourrions  fonder 
les  fecrets-  de  Dieu  les  plus  profonds  ,1a  fin 
quelle  fera-elle?  IsPeft-ce  pointde  cognoiftre 
que  nous  rommesfes  enfans  &  héritiers?  Or 
cela  no»s  eft  allez  cognu  &manifcfteen  le- 
fus  Chnft.Car  il  eft  dit  que  tous  ceux  qui  croi 
ront  en  luy,  louiront  de  ce  priuilege ,  d'eftre 
Iraifl.lt  f^its  cnfans  de  Dieu. Il  ne  faut  point  donc  dé- 
cliner tant  peu  que  ce  foit  de  lefus  Chrift,  lî 
nous  voulons  eftre  bien  certifiez  de  noftre  e- 
Jedion  .  Or  il  eft  vray  que  délia  fainct  Paul 
'  nous  auoit  monflré  comme  nous  n'auionsia- 

mais  elle  aimez  de  Dieu, ni  eleus,  qu'en  la  per 
fonnede  fon  Fils  vnique:  mais  il  en  fait  main- 
tenant vne  cxprefsionplusample,quand  ildit 
que  Icfus  Chrift  nous  eftant  apparu  nous  a  re- 
nde la  vie  ,  qui  autrement  nous  teroit  inco- 
gnue,  il  nous  a  prefcnté  la  grâce  de  Dieu  ,  de 
laquelle  autrement  nous  eftions  eflôgnez  ,  que 
il  nous  a  tellement  appriuoifez  à  Dieu  ,  que 
nous  fçauons  quel  efl  fon  conleil  eterncl.voi- 
re  fans  nous  enquérir  outre  mefure  de  ce  qui 
ne  nous  efl  point  licite.  Car  quand  Dieu  nous 
énfcigne  de  fa  propre  bouche,  il  ne  faut  point 
que  nous  prefumions  d'ailer  trop  auant.com- 
meceux  qui  ne  cheminent  point  en  obeiflan- 
ce:c'eft  vne  prefimption  fi  les  hommes  atten 
tentde  plus  fçaiioir  qie  Dieu  ne  leur  permet. 
Mais  quand  noi:^  chemipcrôs  en  toute  fobrie- 
té  Se   reuerence  fous  Pobeiffance  de  noftre 
Dieu,cfcoutans  &  rcceuans  ce  qu'il  prononce 
en  rEfcriturefainfte,  (  comme  l'ay  défia  dit) 
le  chemin  nous  fera  tout  drefle  .  Voici  donc 
fainfl:  Paul  qui  nous  dit  maintenant  que  le  Fils 
de  Dieu  cft.mt  apparu  au  mode, nous  a  ouuert 
les  yeux  ,  que  nous  cognoiflons  que  la  grâce 
nous  a  elle  faite  deuant  la  création  du  monde, 
d'eftre  reccHS  pniir  enfans  de  Dieu ,  &  luy  e- 
ftre  agréables, d'elhe  reputez  iuftes.tellement 
qu'il  ne  nous  faut  point  douter  que  l'héritage 
ne  nous  foit  appreftc  au  Royaume  celefte,non 
point  q  nous  ayons  cela  par  nos  mérites ,  mais 
d'autant  que  léfus  Chrifî  en  a  le  droia,&  qu'il 
neus  l'a  cômuniqué  .  Or  quand  il  eft  ici  parlé 
de  l'apparitiô  de  lefus  Cbrift.il  nous  faut  rap- 
porter cela  à  i'Euangile,  pource  que  fainâ 
Paul  conclud  finalement ,  qu'il  a  mis  la  vie  & 
l'immortalité  en  lumière  pat  I'Euangile .  Car 
comment  eft-ce  que  lefus  Chrift  nous  eft  ap- 
paru?Comme  il  apparoift  tous  les  iours.  Mais 
cependant  iî  eft-ce  que  l'aintl  Paul  n'a  pas  vou 
lu  obfcurcir  les  chofesque  l'Efcriture  nous 
met  au  deuant  pour  nous  certifier  que  nous  a- 
uons  falut  en  lefus  Chrift.Iln'eft  pas  dit  feu- 
lement en  vn  mot,  que  lefus  Chrift  eft  noftre 
Sauueur, qu'il  a  ifté  enuoyé  comme  lieutenant 
de  Dieu  fon  Pere.Quoy  donc?Il  eft  dit,  qu'il 
oous  eft  enuoyé  comme  Moyenrcm- ,  lequel 
nous  a  réconciliez  par  le  ficrificède  fa  mort: 
îl  nous  eft  enuoyé  comme  l'.tgneau  fmsni.T- 
cule  pour  nous  purger,  &•  pour  faire  fatisfa^ 
ïlion  de  toutes  nos  dettes:  il  cftnoftiç  pleige 
-afin  de  nous  deliurcrde  la  condamnation  dfc 


mort  en  laquelle  nous  eftions:  il  eft  noftre  iu« 
ftice.  noftre  Aduocat  qui  iiucraedeen  noftre 
nom,&  qui  fera  que  nos  prières  foyent  exau- 
cée-, de  Dieu,qu'il  eft  le  lien  de  concorde  en.» 
tre  Dieu  &  nous, comme  celuy  qui  nous  a  ac- 
quis ce  qui  ne  nous  appartient  point  de  natu- 
re. Il  fautdonques  attribuer  toutes  ces  quali- 
tC2-la  à  lefus  Chrift,fi  nous  voulons  bien  l'ça- 
uoir  comme  ilcftapparu. Carde  prendre  fim- 
plement  ce  mot  d'Euangile  ,  &  ne  regarder 
point  la  fubftance  qui  eft  là  contenue  ,  ce  fe- 
roit  tout  peruertir.Et  de  faift,nous  ferons  le-' 
fus  Chrift  comme  vn  phatofme,  fi  nous  difons 
qu'il  cftapparu  pour  nous  eftre  Sauueur,&que 
on  ne  face  nulle  mention  ne  mémoire  de  ce 
qu'il  a  enduré  pour  noftre  falut  ,  3^  qu'on  ne 
parle  point  comme  nous  auons  efté  réconci- 
liez à  Dieu  fon  Père  par  fon  moyen  ,  comme 
nous  auôs  efté  purgez  de  toutes  nos  macules, 
que  nous  auons  efté  rachetez  de  l'obligation 
de  mort  éternelle.  Si  cela  ne  nous  eft  dit,  que 
fera-cerSi  nous  ne  fç.îuôs  que  lefu    Chrift  tft 
noftre  Aduocat, &:  qu'il  porte  la  parole  quand 
nous  auons  à  prier  Dieu.afin  q  nous  ne  foyôs 
point  repouflez,que  de«iendions-nout?Q_uel 
le  fiance  y  aura-il  plus  d'inuoquer  le  nom  de 
Dieu, qui  eft  la  forterefle  de  falut, comme  l'E- 
fcriture en  parle?  Notons  bien  dorques,quad 
laisft  Paul  dit  que  lefus  Chrift  eft  apparu, que 
il  entend  en  premier  lieu, qu'il  a  accompli  tou 
tes  les  chofes  qui  cftoyent  requifes  à  la  rcdem 
ption  du  genre  humain. Mais  ccpédant  il  nous 
a  notifié  la  vertu  de  cefte  clarté  qni  nous  eft 
apparue  en  fa  refurreftion,  afin  q  nonsfoyons 
participans  d'vn  tel  bénéfice.  t<  q  nous  en  puif 
fions  ioiiir.Or  fi  l'Euâgile  eftoit  oitc.que  no' 
profiteroit-il  que  le  Fils  de  Dieu  euft  enduré 
vne  mort  fi  amere  ,  &  qu'il  fuft  reflufcité  au 
troifîeme  iour  ?  Tout  cela  nous  feroit  inutile. 
L'Euangiledonques  nous  met  en  peflcfsion 
des  biens  que  lefus  Chrift  nous  a  apportez ,  & 
qu'il  nous  a  acquis.  Et  pourtat,fiauioBrd^hiiy 
il  nous  eft  abfcnt  de  corps ,  qu'il  ne  con\ierfe 
point  ici  basauec  nous, ne  penfons  point  qna 
ftre  condition  en  foit  pircrce  nVft  pas  qu'il  fe 
foit  retiré  côme  s'il  nous  le  faloit  cercher,  & 
qne  nous  ne  le  puifsions  trouner.  Car  le  folcil 
qui  nous  Iiiit.n'cfclaire  pas  pins  le  monde,  que' 
lefus  Chrift  fc  môftre  cnidemment  à  ceux  qui' 
ont  les  ycnx  de  fa  foy  pour  le  regaider, quand' 
l'Euâè'Ie  fe  prcfche.  Et  voila  pourquoy  fainû- 
Paul  oirtrc  le  motd'Apparitioh  ,  dit  que  lefiiS' 
Chrift  i  mis  ih  (t^.rté  l.Tyie^voire  h  viefeitriot' 
tellelMaisafin  que  nous  tffouuiôsaux  propres^ 
mots  de  fainô  Paul  tout  ce  que?ay  dit.not^s' 
bien  ?;fiiynons  le  côtcnode  ce  paflàge.'lldir 
q  le  Fils  de  Dit ii  a  dt  ftruit  la  mort.Etcômenr 
l'a-il  dcftrili.te  ?  S'il  n'auoit  offert  le  ficrificé 
éternel  ponrappaiftfl*iiedeDi("u, s'il  n'cftoit 
entré  iufqKcs  aux  abyfmes  .ifin  de  nous  en  re-.i 
tirer,. s'il  n'auoit  pi-in<f noftre mafcditTi'('in  fur 
f^v.afin  de  no'il'rcri  defcîiarger,  3?  qu'il  n'euff 
ofté  k  farde^nfbus kqud nous  cftioïisconVi 

JBC 


SVR  LA  II.   A   TIMOTH 


3f5 


We  accablez ,  qne  feroit-ce  ?  La  mort  Teroit- 
elle  deftruitef  Or  le  péché  domineroit  du  tout 
en  nous ,  la  mort  y  auroit  fon  règne  quant  & 
quant.  Et  de  faift.qiiVn  chacun  entre  enfoy, 
rous  trouuerons  que  nous  femmes  efclaucs 
de  Satan, qui  eft  le  prince  de  mort.  Nous  voila 
donques  enclos  en  cefte  milerable  leruitude, 
finon  que  le  diable, le  péché  Se  la  mort  foyent 
deftruits  de  Dieu.  Et  cela  fe  fait ,  mais  com- 
ment.'D'autant  que  par  le  ûng  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrilt  il  a  etfacé  toutes  nos  ma- 
cules.Combien  donques  que  nous  foyons  po- 
ures  pécheurs,  &  que  par  ce  moyen  nous  foy- 
ons redeuables  au  lugenient  de  Dieu,  tant  y  a 
que  le  péché  ne  nous  peut  nuire ,que  l'aiguillô 
où  eft  le  venin, eft  tellement  rebouché, qu'il  ne 
rous  peut  picquer  , d'autant  que  lefus  Chrift 
ena  eu  la  viftoire.  Car  il  n'a  pas  fou/Fert  en 
vain.l'effufion  defonlâng  n'eft  point  tombée 
à  terre,  ni  à  l'auentare ,  mais  c'a  efté  vn  laue- 
ment  duquel  nous  auons  efté  arroufez  par  le 

-  r/^r.l.  'aintl  Efprit,  comme  fainû  Pierre  le  monlHe. 
Amfi  dôques  nous  voyons  bien  que  fainft  Paul 

''■■'  traittant  de  l'Euangile  auquel  lefus  Chrill 

nous  efl  apparu  ,  &  nous  apparoift  iournelle- 
ment  ,  ne  met  pas  en  oubli  fa  mort  &  palsion, 
&  toutes  les  chofes  qui  appartienent  aa  falut 
du  genre  humain.  Il  nous  faut  donques  noter 
-ces  deux  chofes:c'eft  qu'en  la  perfonne  de  no 
ftre  Seigneur  Icl'us  Chrift  nous  auons  tout  ce 
que  nous  deuons  defîrcr,  nous  auons  pleine  Se 
parfaite  fiance  de  la  bonté  de  Dieu  ,  &  de  fon 
amour  qu'il  nous  porte. Pourquoy  ?  Voyons- 
nous  que  nos  péchez  nous  feparent  d'auec 
Dieu  ,  &qu"ils  foyent  caufe  de  guerre  &  d'i- 
nimitié mortellerNous  auons  l'appointement 
en  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Pourquoyfll 
a  efpandu  fon  fang  afin  de  nous  lauer  de  tou- 
tes nos  macules ,  il  a  offert  vn  facritîce  par  le- 
quel Dieu  eft  réconcilié  auec  nous,  il  a  faitle 
■payement  de  toutes  nos  dettes:brief,il  a  ané- 
anti la  malediûion  afin  qu'auiouid'huy  nous 
foyons  bénis  de  Dieu.  Et  puis  il  a  vaincu  la 
mort.&a  triomphé  fur  icelie  afin  de  nous  de- 
liurer  de  fa  tyrannie,  quieftoitpour  nous  ac- 
cabler du  tout:  il  a  eu  vne  vertu  pour  tout  fur- 
monter.Ainli  donques  nous  voyons  toutes  les 
chofes  qui  appartienent  à  noftre  falut.aùoif 
efté  accomplies  en  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.  Là  deflus  pour  entrer  en  poflefsion  de 
tous  les  biens, notonsque  tous  les  iours  il  nous 
apparoift  par  fon  Euangile.  Il  e(t  vray  qu'il 
habite  en  fa  gloire  celefte.nous  ne  le  verrons 
point  ici  d'vne  façon  vifible,&  en  cefte  vie  ter 
Tienne:  mais  tant  y  a  qu'il  ne  s'eft  point  voulu 
eftongncr  de  nous ,  &:  ne  faut  point  que  nous 
facions  de  longs  circuits  pour  le  chercher.ou- 
Hrons  les  yeux  de  la  foy  ,&  nous  verrons  com- 
me il  fe  manifcfte  à  nous.  Et  ainiî  maintenant 
nous  auons  au  texte  de  fainft  Paul  tout  ce  que 
i'ay  touché.  Et  pourtant  apprenons  de  ne 
point  feparer  ce  que  le  fatott  Efprit  a  con- 
joint. Aurefte.nocons  que  fainèt  Paul  a  ici 


par  comparaifon  voulu  amplifier  la  grâce  que 
Dieu  4  monftree  au  monde  depuis  la  venue 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  :  comme  s'il 
diloitque  les  Pères  anciens  n'ont  point  eu 
ceftauantage  ,  que  lefus  Chrift  leur  foit  ap- 
paru comme  à  nous.  Vray  eft  qu'ils  ont  eu 
vne  mefme  foy  :  &  aufsi  l'héritage  des  cieuK 
leur  eft  commun,d'autant  queDieuleura  re- 
celé fa  grâce  comme  à  nous  ,  mais  non  pas  en 
telle  mefure.  Car  ils  ont  regardé  lefus  Chrift 
de  loin,  &en  ombrage,  (ainfi  que  dit  fainft 
Paul  en  la  féconde  aux  Corinthiens  troifîcme 
chapitre  ,  verfet  14.  )  fous  les  figures  de  la 
Loy:il  y  tuoit  le  voile  du  temple  qui  cftoitcn- 
cores  tendu  ,  tellement  que  les  luifs  ne  pou- 
uoyent  approcher  du  fanâuaire ,  voire  mate» 
riel.  Mais  auiourd'huy  que  le  voile  du  temple 
eft  rompu  ,  nous  approchons  de  la  maieftédc 
noftre  Dieu  ,  nous  venons  iufques  au  ciel  â<jec 
pleine  priuauté:  &puis  quant  &  quant  nbus 
auons  l'image  viue de  Dieu  en  laquelle  habite 
toute  perfedionde  gloire  :  brief,  nous  auons 
Je  corps,  au  lieu  que  les  Pères  ont  eu  l'ombre 
tant  feulement ,  comme  fainft  Paid  en  parle 
aux  Colofsiens  fécond  chapitrcverfet  17.  Oir 
par  cela  nous  fonimcs  admonefttz  que  fi  les 
Pères  anciens  ont  eu  cefte  fermeté  &  cezelc 
inuincible,  de  perfifter  aux  affligions  du  Filj 
de  Dieu  ,  combien  qu'encore*  il  ne  fuft  pumt 
reuelé  au  monde ,  qii'auiourd'huy  il  faut  que 
nous  foyons  enflambez  d'vne  plus  grande  ai - 
deur,ou  noftre  lafcheté  fera  trop  vileine. Voi- 
la donques  les  Pères  anciens  qui  fe  font  plei- 
nement rangez  à  porter  les  affîidions  de  le- 
fus Chrift:  (comme  il  en  eft  parlé  en  l'onziè- 
me de  l'Epiftre  auxHebrieux)car  il  n'eft  point 
dit  que  Moyie  ait  porté  l'opprobre  de  fon  pc 
re  Abraham,  mais  de  lefus  Chrift.  Voila  don- 
que^comnTe  les  Pères  anciens,combicn  qu'ils 
ayent  vefcu  fous  les  ombres  obfcurcs.de  la 
Loy  ,  a  eft-ce  neantmoins  qu'ils  fe  font  pre- 
fentez  à  Dieu  en  facrifice  pour  porter  en  tou- 
te patience  les  affligions  de  Chrift.  Or  main, 
tcnat  que  lefusChrift  eft  reffufcité  des  morts, 
&  qu'il  nous  a  mis  la  vie  en  clarté, que  deuons 
nous  faire  ?  Si  nous  fommes  tant  ddicats  que 
nous  ne  puifsions  porter  les  affliélions  de  l'E- 
,uâgile,nefommes-ncJus  pas  dignes  d'cftre  ra- 
clez du  papife'r  de  Dieu,&  qu'il  nous  dela- 
uoue?  Et  ainfi  notons  bien  que  nou';  dcuotis 
eftre  tant  plus  encouragez  auec  vne  confian- 
ce de  foy, pour  endurer  au  nom  de  lefusChrift 
ce  que  Dieu  voudra,voire  d'autant  que  la  vie 
nous  eft  mifc  deuant  les  yeux  ,  que,  nous  en 
auôs  vne  cognoifïànc^  plus  prochaine  S:  plus 
familière  que  n'ont  pas  eu  les  Peies  anciens. 
Ôr  làdelTus  regardons  ce  qui  eft  dit  par  l'A- 
poftreen  l'Epiftre  auxHcbrieux.  Si  nous  li-  jj,J-  .jï 
fons  comme  les  Pères  anciens  n'ont  iamais  ,,  '  " 
fléchi  ,&  qu'ils  ont  eu  vne  vertu  admirable, 
nous  ferons  contraints  d'eftre  rauis  enefton- 
nement .  Nous  fçauons  comme  ils  ont  efté 
tourmentez  des  tyrans  &  ennemis  de  la  ve-« 

Y.iiii. 


3«fo 


SERMON    VI. 


Tité ,  Se  comme  ils  ont  tous  conftamment  en- 
duré: k  condition  de  TEglife  n'eft  pas  âuiour- 
d'hiiy  plus  dure  ne  plus  facheufe  à  porter  que 
elle  eftoit  adonc.Puis  qu'ainfî  eit,terons-nous 
difficulté  de  marcher  après  lefus  Chrift  ,  qui 
nous  a  monftré  le  cheraiD?Mais  afin  que  nous 
ne  foyons  point  lafches  ne  trop  froids,  no- 
tons bien  qu'il  dit  que  lefus  Chrift  nous  a  mis 
la  vie&  Timmortalité  en  lumière  par  TEuan- 
giletque  toutes  fois  &quates  qu'on  nous  pref 
«hedela  grâce  deDieu.c'eft  autant  comme  fi 
leRoyaumedes  cieiixnous  eftoit  ouucrt ,  lî 
Dieu  nous  tendoit  la  main  ,  &  qu'il  nous  cer- 
«ifiaft  que  la  vie  nous  eft  prochaine  ,  &  qu'il 
BOUS  veut  faire  participans  de  fon  héritage 
celefte.Et  cela  nous  eft  diî,pource  que  iufques 
à  ce  que  nous  ayons  veu  lefus  Chrift, nous  ele 
uanten  haut  auec  luy  pour  nous  mener  àvne 
vie  certaine,  nous-nous  arrefterons  toufiours 
à  cefte  vie  prefente,  nous  voudrons  demeurer 
au  monde ,  &  ce  fera  par  force  quand  on  nous 
en  tirera.  Mais  quand  nous  regarderons  à  ce- 
flevie  qui  nous  a  efté  acquife  par  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrill,  il  ne  nous  couftera  riendc 
quitter  tout  ce  qui  nous  peut  retenir  ici  bas, 
yourafpirer  là  haut  au  ciel.  Etainfidonquoi 
que  nousne  foyons  point  aueugles  volontai- 
res quand  lefus  Chrift  loiirnellement  nous 
propofe  la  vie  &  l'immortalité  dont  il  eft  ici 
parlé.  Et  notons  bien  quand  faind  Paul  parle 
de  la  vie  ,  &  qu'il  adioufte  l'immortalité  ,  que 
c'eft  autant  comme  s'il  difoit  que  nous  en- 
trons défia  au  Royaume  de  Dieu  parfoy.'com 
bien  que  nou^  foyons  comme  eftrangers  ici 
bas  ,&  qu'il  fembiw'  qu'il  n'y  ait  que  mort& 
malediiiion  en  nous ,  que  toutesfois  la  vie  & 
&  la  grâce  qui  nous  eft  communiquée  par  no- 


ftre Seigneur  lefuïChrift.apportera  fon  fruift 
en  temps  opportun, c'eft  afçauoirquand.il  fera 
enuoyé  derechef  de  Dieu  fon  Père  pour  nous 
monftrer  l'efFeft  des  chofes  qui  nous  font 
iournellement  prefchees,&  qui  ont  efté  accom 
plies  en  fa  perfonne  ,  cependant  qu'ilaveftu 
noltrc  nature  humaine. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  lu 
race  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoillànce  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  faire 
tellement  fentir  nos  pourctez  ,  que  nousne 
foyons  plus  fi  prefomptueux  de  nous  attri- 
buer nulle  gloire,  mais  cognoiflàns  que  nous 
femmes  puans  Si  deteftables  deuant  luy  en'no 
ftre  nature,  que  nous  venions  chercher  toute 
la  caufe  de  noftre  falut  en  fon  propos,&  en  ce 
conftil  lequel  nous  a  efté  reuelé  par  la  co- 
gnoillànce qu'il  nous  a  faite  de  fa  grace,quâd 
il  nous  a  appelez  àfonEuangile:  &  qu'il  nous 
face  aufsi  ce  bien  que  nous  puifsions  nous  ad- 
drefler  a  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  &  nous 
repoferdu  tout  fur  luy ,  nous  appuyer  fur  la 
rédemption  qu'il  nous  a  acquife,  afin d'eftre 
auouez  pour  enfans  de  Dieu,  pour  eftre  parti- 
cipans de  l'héritage  de  vie  quand  nous  aurons 
bataillé  en  ce  monde.  Et  d'autant  qu''il  luy 
plaift  que  nous  foyons  alTaillis  de  Satan,  5:  de 
tant  d'ennemis ,  tant  domeftiques  qu'eftran- 
gers,  qu'il  nous  donne  vertu  pour  Ibuftenir 
leurs  combats,&  que  iamais  il  ne  nous  aduienc 
de  nous  lafler  ,  iufques  à  ce  que  nous  ayons  a- 
cheué  noftre  courfe,  &  que  nous  foyons  parue 
nus  en  ce  repos  auquel  nous  fommes  iournel- 
lement conuiez.  Ôue  non  feulement  il  nous 
face  cefte  grace,mais  àtous  peuples  Si  nations 
de  la  terre,  &c. 


SIXIEME     SERMON     SVR 

MIER      CHAPITRE. 


LE    P  R  Ë- 


13  Aye  U  pro^e forme  de  s  faine  s  paroles ,  ïejqueîîes  tu  as  ouyes 
âe  moy  enfoy  ç^r  charité  qui  ejî  en  lefus  Chrijl. 

14  Gardekbondepofi^uit'eft  commis  parle  fainSiEfpritciui 

habite  en  nous.  '  "'  ^ 


Ource  que  Satan  fçait  bien 
I  que  la  vie  de  nos  âmes  côn- 
lifte  en  la  pure  doftrine  de 
Dieu.voila  pourquoy  il  s'ef- 
force tant  de  nous  en  priu»r: 
&  quand  ri  ne  peut  conuertir 
la  nourriture  en  poifon,il  taf 
the  de  la  corrompre  en  la  defguil'ànt  en  forte 
qu'on  n'en  eft  pasdroitement  repeu  comme  il 
feroit  requis.  Vray  eftquetoufiourslediablc 
fc  raonftre  père  de  menfonge  ,  corrompant  la 


vérité  de  Dieu  tant  qu'il  luy  eft  pofviblermaip 
il  ha  diuers  moyens  pour  ce  taire. Car  fi  Dieu 
luy  lafche  la  bride, ilperuertit  tout,&  fallîfie: 
c5me  nous  voyôi  qu'il  en  eft  aduenu  en  la  Pa- 
pauté,que  les  chofes  font  là  fi  lourdes  &  fi  ex- 
orbitantes ,  qu'on  voit  bien  que  Satan  a  eu  la 
bride  auallee,&  que  c'a  efté  vue  horrible  vén- 
gence  de  Dieu,  de  ce  qu'il  a  permis  que  le  mô 
de  fuft  ainfi  aueuglé  du  tout,  &  defpounieu  de 
fens  &de  raifon:  car  la  façon  qu'on  tient  fous 
le  Papcjcft  fi  brutale  ,  que  les  pctis  enfans  en 

jiour 


SVRLAIL    ATIMOTH. 

pourroyent  eftrc  iuges.   Orcant  y  a  <jue  les 


plus  lages  y  fontabiife2:inais  (cômei'ay 
touchOc'eft  que  Dieudonnclicenceà  S 


delîa 
Sacan, 


àcaulcdes  pecliezdu  inonde, quand  on  eltain 
fi  abruti.  Or  fi  le  diable  voit  qu'il  ne  puifle  du 
tout  anéantir  la  bonne  doftrine,  &  la  conuer- 
lir  en  meiifonge ,  il  la  defguifera  par  quelque 
artifice  ,  tellement  qu'on  ne  lacognoillplus, 
cen'eft  pas  la  vraye  pafture,  pure  &  naifue: 
comme  lî  on  alloit  mcfler  quelques  Taupic- 
quetsfur  des  viandes  qui  en  feiflènt  peidre 
Je  gouft,  que  cela  reflemblaftplus  eftre  terre, 
qu'auoir  quelqiïe  faueurrainfi  le  diable  en  vfe- 
ilde  la  pure  dofbrine:quand  il  ne  la  peut  anean 
tir  du  tout(comnie  délia  l'ay  touché)il  la  de- 
ftourne  à  fa  guife.Pour  cefte  caufe  fainft  Paul 
dit  ici  à  Tiniothce ,  Q»''/  gar,{e  la  propre  for- 
me &•  la  facond'tnfeigntr  ijit'il  anoit  ouye  de 
liiy  Le  mot  qui  eftici  couché,  emporte  autant 
conmie  vn  pourtraift  tiré  au  vif.  Sainû  Paul 
donques  ne  fe  côtente  pas  feulement  que  Ti- 
motnee  garde  la  fubftance  de  ce  qu'il  auoit 
apprins.mais  il  veut  qu'il  fuyue  les  traifts.qUe 
il  y  ait  vn  certain  ftyle  pour  dire,  Voila  com- 
me l'Euangile  a  eflé  prefché  en  fa  pureté,  il 
n'y  a  nul  changement, nous  fuyuons  toufîours 
vn  fil  continuel,  oncognoift^uec'eftcé  qui  a 
toufiours  eftéouy.  Mais  voyons  maintenant 
qu'emporte  cefte  fentencede  fainû  Paul.c'elt 
afçàuoii'  que  Timothee  fuyue  toufiours  le 
ilyle  &  façon  d'enleigner,  fan';  aucune  varie- 
té  ,  comme  du  premier  coup  il  auoit  entendu 
de  faind  Paul.  Voila  pour  vn  item.  Orcepcn- 
dant  ("cachons  que  ceci  n'a  point  feulement 
efté  dit  pour  vn  temps ,  mais  que  le  fainft  E- 
fprit  a  voulu  monftrer  comme  nous  auonsà 
nous  maintenir  en  i'efperance  de  falut ,  c'cft 
afçauûir<juând  la  doftrinede  Dieu  fera  bien 
conferuee  en  fa  pureté  naifue, qu'on  ne  la  fal- 
(îfiera  point  en  façon  que  ce  (oit,  qu'elle  ne 
fera  point  desfiguree  par  inuention'.  eltran- 
ges,  mais  qu'on  cognoiltra  ,  Voila  l'Euangile 
tel  qu'il  a  efté  publié  par  les  Apoftres.  Mais 
afin  que  nous  retenions  mieux  cefte  admoni- 
tion ,  penfons  à  ce  que  l'ay  dit  :  car  il  y  en  a 
bien  peu  qui  cognoiflcn:  que  la  parole  de 
Dieu  foit  la  pafture  de  leurs  âmes  :  non  point 
que  chacun  ne  le  confeflè  de  bouche, mais  ce- 
pendant nous  n'y  penfons  çu'.'res.Et  de  faift, 
nous  aurons  vn  grand  fouci  pour  noftre  boi- 
re &  pour  noftre  manger.  Si  vn  homme  voit 
qu'on  luy  vueille  rauir  fondifner,il  mettra  la 
main  à  l'tfpee  :  &  cependant ,  s'ileft  queftion 
de  la  doftrine  de  vie  ,  que  nous  voyons  mani- 
fcftrcment  que  le  diable  la  voudroit  empcifon 
ûer,  ou  bien  qu'il  nous  priuc  de  ce  qui  eftoit 
pour  nous  entretenir  au  royaume  de  Dieu  ,  il 
ne  nous  en  chaut:hous  fouffrirons  les  faux- 
prophetes  &fedufteurs,mefmes  ils  feront  les 
bien  venus  entre  nous, 8:  nous  l'auons  veu.N'a 
nons-nous  point  ici  apperceu  que  ces  met'- 
chans  hérétiques  ont  trouué  des  amis, comme 
i'ils  eufTcnt  efté  leurs  coufins  germains, qu'on 


leura  applaudi?£t  qui?Ceux  q«f  font  femôlant 
d'eftre  àFEiungile.  Or  tant  y  a  quclachofe 
eft  toute  notoire  que  fe  diable  les  fufcitoit  a- 
finde  nous  faire  pis  que  s'il  uous  coupoit  les 
gorges.  Ainlînous  voyons  qu'il  v  en  a  bien 
peu  qui  fçachent  garder  ce  que  dit  ici  fainci 
Pauhcar  iJsne  cognoiffent  point  aufsilanc- 
cefsite  qu'ils  ont  de  cefte  admoj^ition.    (>u« 
faut-il  dorques?  En  premierlieu  cognoiJibns 
que  les  poures  âmes  n'ont  nulle  vie  fînon  d'au 
tant  qu'elles  la  reçoiuent  par  la  parole  de 
Dieu  :  &  comme  noftre  Seigneur  nous  retiie 
delà  mort  par  ce  moyen-la,aufsi  il  nous  con- 
ferue  en  I'efperance  de  falut,  &  nous  y  forti- 
fie iourncllement.  Brief ,  comme  nousauons 
befoin  d'eltre  fubftantez  quant  au  corps ,  de 
pain  &de  viande ,  aufsi  faut-il  que  nos  âmes 
foyent  entretenues  par  la  parole  de  Dieu  ,  & 
par  la  pure  doftrine  de  l'Efcriture  fainfte. 
Puis  qu'ainfi  eft  que  nous  fommes   eftonnez 
quand  nous-nous  trouuons  priuezdu  boire  Se 
du  manger,  que  nous  penfions  à  ce  qui  nous 
doit  eftre  beaucoup  plus  excellent  :  car  noî 
âmes  font  plusprecieufes  que  nos  corps. Et  là 
deflus  cognoiflons  les  aftuces  dé  Satan, (com- 
me l'ay  dcfîa  dit)  qu'il  ne  cefle  (  comme  c'eft 
fon  office, &  fon  propre  naturel)  de  tout  de- 
prauer,  &  conuertir  la  clarté  en  ténèbres,  que 
s'il  luy  eft  pofsible,il  nous  abbruuera  de  fes 
menfonges,  que  tout  fera  rempli  d^rreurs,  & 
cefontautant  de  poifons  mortelles.  Puis  que- 
ainfi  eft  que  .Satan  veille  ainfi  ftir  nous,  &  que 
il  fiifcite  toufiours  quelque  picque  pournou» 
deftournerdela  pure  vérité  de  Dieu, que  nous 
foyons  de  noftre  cofté  vigilans ,  que  nous  fa— 
cions  bon  guet.  Orce  n'eft  point  encores  af^ 
fez  :  mais  que  nous  foyons  prudens  ,  afin  que 
fi  on  nous  veut  introduire  quelque  doftrine 
fauuage  ,  encores  qu'elle  ne  tuft  pas  du  tout 
mauuaife,&  qu'on  n'appereeuft  pas  qu'elle 
fuft  direâement  contraire  à  l'Efcriture  (àin- 
<Se  ,  toutesfois  fi  nous  voyons  qu'il  y  ait  vne 
efpecede  defguifement,  que  ce  foit  comme  v- 
ne  façon  baftarde,  que  nous  repoul'sions  cela, 
fçachans  que  la  vérité  de  Dieu  doit  eftre  te- 
nue en  fon  naturel ,  ftns  qu'on  y  change  rien 
qui  foit.  Voila  donques  comme  nous  auons  à 
prattiquer  cefte  admonition  que  donne  ici 
fainft  Paul.  La  chofe  fera  encores  mieux  en- 
tendue par  exemple.   Nous  fçauons  comme 
noftre  Seigneur  nous  appelle  à  loy.  Or  fi  on 
nonspropofe  quelque  doftrine  toUtedinerfe 
à  ce  qui  nous  eft  monftré  par  la  Loy  &  PE  - 
uangile  ,  il  rions  faut  reictter  cela  comme  pe- 
fte mortelle ,  fçachans  bien  que  c'eft  le  diable 
qui  veut  meurtrir  nos  âmes  :  mais    encore* 
quand  on  y  viendra  comme  par  delTous  terre, 
&  er.  cachettcpar  moyens  fubtiU  Si  obliques, 
neperucrtifîànt  point  du  tout  l'Enargilcmais 
en  mettant  quelque  chof  ■  moyenne  pour  na- 
ger entre  deux  eaux  ,  il  faut  auAi  qu'en  ceft 
endroit  nous  ayons  difcretion  de  nous  gar- 
der,Pourquoy  f  Nous  ferons  tout  csbahis  que 

Z.i. 


3^2 


SER  M  ON:  IV .-IJ    ;' 


la  bonne  /emence  fera  eftoitffee.la bonne  viau 
de  fera  comme  fade  -,  &  aura  perdu  ion  goii  11, 
tellement  que  nous  n'en  ferons  point  repeus. 
Eî  nous  auons.veu  tous  les.  Jl'ux  de  noftre 
j.CoMi.  tcmps:&  plçurtà  Dieu  que  ce  t'uil  lafîn.Mais 
J*.  quoy  ?  Dieu  veut  efprouuernoftre  foy  parce 

moyen  ,  comme  iamd  Paul  dit  qiril  faut  que 

■  il  y  ait  des  fcdes,afin  que  ceux  qui  ont  cliemi- 
,né  droitement,  foyeut  cognu'i  i3l  approiiucz 

■  quand  ils  auront  tenu  bon,&  qu'ils  auront  pei- 
iiltc  conftammenc  fans  flécha'.  Mais  on  verra 
auiourd''iuiy  ecsc.iphars,  qui  tafchent  de  met- 
tre Ibus  le  pied  toute  bonne  dodrine:&  ccux- 
Ja  y  vont  à  bride  auallee, qu'ils  combatent  fu- 
ritulcmeiu  contre  toute  la  parole  de  Dieu. On 
en  verra  de  li  volages ,  que  ti  auiourd'huy  ils 
ont  receù  l''Euangiie,demain  ils  en  feront  de- 
ft^iurnez.Et  pourqiioy?  Car  ils  n'ont  point  eu 
de  racine.  De  noftre  part, il  nous  faut  cognoi- 
itte  reflicace  de  Satan, &  que  la  vérité  deDieu 
ne- nous  férue  pâï  feulement  de  nourriture, 
mais  que  nous  enloyons  armez  pourpouuoir 
relîfter  à  ce  qie  Satan  machinera  pour  nous 
en  dinertir.  Voila  vn  item.  Or  on  verra  d'au- 
tres gens  quint  feront  pas  protelsion  mani- 
1-cite  de  maintenir  la  Papauté  ,  mais  ilv  iront 
entre  deux  :  comme  nous  auons  veu  ceft  Inté- 
rim diabolique  de  nofbre  temps ,  qui  a  eflé  mis 
caauaut.  Et  pourquoy?  Pour  donner  couleur 
&  couuerture  aux  abominations  qui  ne  font 
rullement  toler-ibles.  Et  puis ,  il  y  en  a  d'au- 
tres qui  font  plus  fubtils  ,  qu'ils  youdroyent 
tjufiours  contenter  le  monde. Les  autres  font 
menez  d'ambition  ,  qui  pour  fe  faire  valoir 
chercheront  quelque  haut  ilyle  ,  quelque  bra- 
uade,&  ie  ne  fçay  quoy.tcUement  que  cepen- 
dant l'Euangileefl  comme  transfiguré  ,  qu'on 
n'y  cognoift  plus  rien.  Qu_and  nous  voyons 
telles  choies, qu'.-iuons-nous  .à  faire?B.etenons 
bien  ce  qui  eft  ici  déclaré  par  faincl  Paul ,  que 
nous  foyons  comme  imbus  &  habituez  à  ce 
langage  nait  de  l'Efcriture  fiinûe,  que  nous 
foyons  tout  accouftumez  aulang.lgedu  fainil 
Efprit,  &  qu'il  y  ait  vn  exercice  tel,  que  (i  on 
n.nn  mjt  en  auanc  autre  façon  qui  ne  foit 
poun  couuenable  à  ce  que  nous  aurons  ap- 
prins  de  l'Efcriture  fainrte  ,  nous  reiettionç 
cela,fçachans  que  c'eft  pour  nous  faire  décli- 
ner petit  à  petit:  encorcs  que  nousinefacions 
pas- vn  faut  pour  nous  rompre  le  col  du  prcr 
miercoup,liefl--ceque  Satan  nousefgareJ^ins 
quenous  y  penllons  :  preuenons  donquesvn 
tej  danger.  Mais  quoy  ?  Il  y  en  a  bien  peu  qui 
punirent  oblenierccflcdodrmc:  iedi  mefnes 
de  ceux  qui  dcuroyent  monflrcr  le  chemin 
aux  autres.  Lcsmin:ftres  de  la  pa,role  ,  com- 
bien en  verra-on  qui  ont  feulement  regardé 
par  dtffu;,  &  qui  font  (î  peu  (tylu  en  l'Efcri- 
ture faincte  que  c'eJt  pitié  ?  Tellement  qu'il 
ne  faut  que  tourner  la  main.les  \  oila  changez. 
Et  pourqu  oy?  Car  laniais  n'unt  prins  vncei- 
ta.ii  ply  pour  fc  former  du  tciitau   langage 


du  fainft  El"prit,voirc  comme bons'efcholierî. 
Si  vn  efcnolief  cil  homme d'efprit,&:  que  fon 
nui/lre  aulsi  ait  dextérité  d'eiifeigner,  il  eft 
certain  que  non  feulement  il  retiendra  les 
.  l'ciences,  nuis  il  retiendra  aufsi  quelque  traiû 
de  fon  maiftre,  qu'on  dira,  Celuy-la  a  efté  en 
telle  efchole  :  qu'il  y  aura  des  marques  telles, 
qu'on  pourra  luger  mefmes  endeuinant  fans 
eftre  trompé.  Or  maintenant  voulons-nous 
auoir  nieiliturniaiilrequcle  fainclEfpnt?  Et 
■jurcfle,  nous  voyons  come  Dieu  a  voulu  fepa 
1er  la  doftnne de  l'Efcriture  fainde  de  tou- 
tes, fcienccs  prophanes.  Car  vn  homme  q«i 
aura  kudiligvniinent  l'Efcriture  fainûe,  qu'il 
(oit  aueugle  puis  après,  qu'on  luydife,  VoiU 
le  Prophète  Ifaie  :  &  qu'on  liie  les  plus  bel- 
les lentences  qu'on  pourra  chercher  en  tous 
les  Philoloplies  du  monde, &  puis  qu'on  ameâ- 
•ne  quelque  fentence  de  l'Efcriture  fainde, 
celuy-la  l'çaura  bien  dire.  Voila  le  langage  du 
lu  net  Efprit,  Voila  donques  ce  que  nous  ai»- 
rions  à  faire.  Mais  (  comme  l'ay  délia  dit)  on 
en  verra, mefmes  de  ceux  qui  lont  niinirtresde 
la  parole  ,  aufquels  il  ne  chaut  gueres  de  fe 
former  ainlî,&de  prendre  vn  tel  ply. Et  voila 
pourquoy  ladoûnne  fera  du  tout  peruertie: 
mais  mal-heur  fur  eux.  Cependant,  que  ceux 
quiont  quelque  zèle  à  Dieu  ,  &  qui  cognoif- 
fent  la  charge  qui  leur  eft  commife  ,  penfent 
bien  a  cefte  admonition.  Que  pour  édifier 
PEglife  de  Dieu  &  le  troupeau  qui  leur  eft 
cjmmi>,ce  n'eft  point  alTez  qu'ils  s'abftienent 
de  mettre  en  auant  doftrine  faulTe  &  erronée, 
mais  il  faut  qu'ils  afleurcnt  le  peuple  ,  telle- 
ment qu'il  puilïè  recognoUhe  qui  c'eftqui 
parle  :  Se  qu'ils  l'accouftiiment  à  cela  :  &que 
ceux  qui  efcoutent.puilFent  conceuoir  vne  cer 
taineperfuafion,pour  dire,  Nous  fçauons  que 
ceci  n'eft  p  nnt  des  hommes, mortels ,  cène 
font  point  fables  qu'on  nous  conte, mais  nous 
voyons  là  vne  inaiefté  de  Dieu,  nous  voyons 
vne  droitç  &  pure  limplicité  de  l'Efcriture 
fainde.  Qj^  donques  nous  ayons  cela  pour 
recommandé,  que  les  auditeurs  aufquels  nous 
prefchons  l'Euangile  puiffcnt  auoir  cela  coin 
meenregiftré&  fcellé  en  leurs  caurs  ,  qu'ils 
font  enfeignez,  non  point  de  nos  inuentions 
&  phantalîes,mais  de  ce  que  Dieu  nous  à  mon- 
lhc,&  de  ce  que  nous  auons  receude  luy.  Au 
refte ,  comme  ici  les  miniltrts  de  la  parole  dç 
Dieu  doyuent  monllrer  le  chemin,  aufsi  faut-, 
il  qu'vn  chacun  Chreftien  en  fon  ordre  facç 
le  femblable,  &, que  nous  tafchions  d'cftre  tej 
lement  enfeignez  ,  que  nous  puifsions  protCr 
fter  que  noui  ne  tenons  rien  des  créatures, 
mais  que  nous  auons  la  purçijtiimple  vérité 
de  noftre  Dieu.  O'  linous  regardons  à  nofti;ç 
temps, on  verr.1  que  ceci  eft  plw  que  neccllai|- 
re.Cai'  auiourd'huy  il  y  a  tant  d'tfpiitj  vola^ 
ges  quec'ert  pitie.Et  puis  nt^us  en.  verroijs 
beaucoup  quj  ne  dcuiandcnt  quc,de  fe  mcttrç  . 
ei.  credit:voire,&  cependant  il  y  a  vn  mefpriî 

(le 


s  V  R     L  A     I  I.     A     T  I  M  O  T  H. 


3<f5 


dfcDieu.&Vnc  impieté  fi  vile oie.que  beaucoup 
ne  font  nul  Tcriipule  de  faliîfier  toute  Jado- 
ûiine de  l"alut:& le  monde aufsi  eft  digne  d'a- 
uoir  de  tels  docteurs.  Cir  combien  y  tna-il 
qui  défirent  d'cftre  conduits  droitcment  à 
Dieu?Nous  voyons  que  tous  quafi  ont  les  au- 
rcilles  chatouillcufes  ,  qui  font  menez  de  va  - 
ne  cupidité  ,  qui  ne  demandent  iînon  ie  ne 
j'çay  quoy  de  noiiutau.  Or  noftre  Seigneur 
permet  que  telles  gens  foyent  remplis  de  vent 
&defumee.  Et  voila  pourquoy  on  en  verra 
tant  auiûurd'huy  qui  ne  Font  que  deprauer 
r£fcriturel"aincte  ,  5;  latalfifier,  la  defguifans 
s'ils  ne  peuuent  du  toutiatailler  à  l'encontre^ 
Et  ainii  prattiquons  cefte  admonition, voyans 
qu'on  ne  tafche  linon  de  defguifer  le  langage 
dufainft  Efprit,  que  nous  retenions  ce  pour- 
traidqui  eft  tiré  au  vif.dont  parle  faintiPaul: 
que  nous  foyons  tout  accouftumez  à  ce  que 
noflre  Seigneur  nous  a  enfeigné  en  TEfcriture 
fainde,  tellement  que  fi  toit  qu'on  nous  appor 
tera  quelque  doûrine  de  iiouuéau  ,  nous  la 
puifsions  apperceuoir,  oiiy  de  loin, pour  nous 
en  garder.  Et  afin  que  ceci  ne  non»,  foit  point 
difficile, fainâ  Pauladioufte,  En  lafoy  &  ih.t- 
rité  qiti  eflenfeful  Chrift.  Ilauoit  dit  aupa- 
rauant,  Lefquelles  tu  as  ouyes  de  moy .  Car  il 
cfl  befoin  de  difcerner  quand  il  y  a  beaucoup 
de  cens  qui  prétendent  le  titre  de  miniftres  & 
Dodeurs:voire,&s''eleuentaLiecv ne  telle  ou- 
trecuidance ,  qu'il  femble  que  tout  le  monde 
fe  doyue  taire, &  auoir  la  bouche  clofe  quand 
iJs  parlent.  Mais  cependant  il  Faut  regarder 
s'ils  font  enuoyezde  Dieu  ou  non.  Et  com- 
ment? Il  nous  faut  venir  à  ccfte  touche  de 
l'Efcriture  fainûe.qui  eft  pour  examiner  tou- 
te doftrine.  Qi^and  nous  voyons  qu'vn  hom- 
me en  fa  façon  de  parler  ha  la  maicfté  de  l'E- 
fprit  deDieu,&que  nous  fommes  édifiez  com- 
me il  appartient,  que  nous  cognoifsions  là 
qu'il  n'y  a  point  vne  rhétorique  friuoîe',  que 
ce  n'eft  point  vn  langage  afferté  ,  qu'il  n'y  a 
point  des  fpeculations  extrauaganteSjmais  v- 
ne  purefimplicité,comme  nous  la  voyons  aux 
Prophètes.  Voila  ceux  aufquels  il  nous  faut 
conformer. Mais  encores  c^eft  vne  grande  ai- 
de quand  fainft  Paul  adioufte  ,  F»  la  fay  cr 
charité  qui  eft  en  lefu-s  clirift.  Comme  s'ildi- 
foit,  Sinous  voulons  efprouuer  lesdoftrines 
pour  retenir  vne  certaine  forme  Si  figure  oii 
l'image  de  Dieu  apparoifleSc  reluife  «vetiçns 
à  la  toy  &  à  la  charité.  Caj  à  quoy  eft-ce,que 
Dieu  prétend  quand  il  nous  cnuoyé  fa  parole? 
Il  ne  nous  met  point  là  envnegrande  compa- 
gnie,pour  aller  à  refgaree,  mais  il  nous  baille 
vn  certain  but  afin  que  nous. ne  puifsions  fail- 
lir. Ainfi  donques  il  nous  faut  appuyf  r  fur  la 
foy,&  fur  la  chanté  ,  à  ce  que  nous  auancions 
iournelkment,  &  que  la  foy  profite, &  qu'elle 
s'augmente  :  &  pareillement  que  nous  foyons 
confermez  en  charité.  Quand  nous  en  ferons 
aiiill ,  voila  comme  la  parole  de  Dieu  aura 


fon  droit  vfage  enuers  nous  :  mais  fi  ces  deux 
chofes-la  n'y  font ,  nous  pourrions  eftre  les 
plus  aigus  du  monde,  nous  pourrions  difpu- 
tcrmerueilles  des  fecrcts  de  Dieu  ,  il  n'y  au- 
ra que  vanité  en  nous, ce  ne  fera  qu'vn  ombra- 
ge ,  il  n'y  aura  point  de  fermeté  ne  de  con- 
fiance. Notons  bien  donques  que  fainft  Paul 
n'a  pas  adioufte  ces  mots  fans  caufe  :  car  c'eft 
afin  que  d'vn  cofté  les  rudes  &  infirmes  puif- 
fent  eftre  guidez,  &  qu'ils  ne  fe  tourmentent 
pas  beaucoup  pour  s'enquérir  ,  Et  comment 
fçauray-ie  que  c'eft  le  vray  langage  du  lâinû 
£fprit,quec~dlla  pure  forme,&  le  pourtrai£l 
naif  que  Dieu  veut  qu'on  obferue  ?  comment 
cognoiftray-ie  cela  ?  Or  il  y  a  vn  moyen  qui 
eft  facile  ,  dit  fainti  Paul.  Car  nous  fçauonï 
à  quoy  c'eft  que  Dieu  nous  appelle,  nous  fça- 
uons  le  but  qui  nous  eft  propofé,c'ert  afçauoir 
que  nous  croifsions  iournellement  en  la  foy 
de  l'Euangile  ,  que  nous  profitions  en  bonne 
vie  &  faipfle  ,  que  nous  y  foyons  confermez. 
Or  quandnoiis  trouuerons  cela  en  vne  doctri- 
ne, voila  le  tefmoignage  de  Dieu  qui  y  tft 
comme  engraué  au  vif,  il  n'en  faut  plus  dou- 
ter. Mais  cependant  nous  auons  à  noter  en 
bricf ,  qu'emporte  ce  mot  de  Voy:  car  il  y  en  a 
beaucoup  qui  en  parlent,  qui  ne  fçauent  cepen 
dant  qu'il fignifîe.  Or  la  foy  c'eft,qu'en  pre- 
mier lieu  nous  cognoifsions  quel  eft  le  vray 
Dieu,  pourne  point  nous diftraire  ne  çà  lie  là 
après  nos  folles  imaginations ,  pour  n'eftre 
point  rirez  aux  idolâtries.!!  faut  que  nourco- 
gnoifsions  le  Dieu  viuant  :  &  puis  que  nous  le 
cognoifsions  noftre  Père  ,afin  que  nous  puif- 
fions  nous  repoferdu  tout  en  liry,  &■  y  mettre 
noftre  fiance,  que  nous  attendiôs  remifs.ion  de 
nos  péchez  de  lHy,&  que  fur  cela  nous  l'inuo- 
quionsen  pleine  hardiefle.,  ne  doutans  point 
que  nous  ne  foyons  exaucez  en  toutes  nosre- 
queftes.  Voila  donques  qu'emporte  la  foy, 
c'eft  que  non  feulement  nous  cognoifsions 
quel  eft  le  vray  Di€u,mais  que  nous  le  tenions 
pour  Père  &Sauueur,eftansafleurez  de  la  grâ- 
ce &  de  fon  amour,  tellement  qu'en  droite 
fiance  nous  le  puifsions  inuoquer.  Et  pour- 
quoy eft-ce  que  fainô  Paul  a  mis  lâchante 
quant  &  qu.itrCar  il  femble  qu'il  y  ait  d'autres 
chofes  requifes,c5me  aufsi  y  a-il. Sobriété, at- 
trempancccharteté,  patience  ,  ne  font-ce  pas 
vertus  que  nous 'apprenons  en  l'sfchole  de 
PieufMais  pource.queceluy  qui  aime  Ces  pro 
fhainsaura  le  refte.voila  pourquoy  l'Efciitu- 
:re  fairfte  ,  quand  elle  veut  parler  f'ommaire- 
inent,vfedecemotdecWi>f,&  côprend  tout 
le  refte  dcffous.Et  de  faift,  ce  n'eft  point  fans 
jcaufe  que  fainft  Paul  dit ,  (^ue  c'eft  le  lien  de 
perfection. Et  puis,  que  fi  nous  auons  la  chari- 
té (cy>mni'e  il  le  met  au  premier  chapitre  des 
Ephefiens^nous  ferons  purs  &  irrcprchéfibles 
deu.it  Dieu.D'autat  donques  que  nous  ne  pou 
uons  aimer  nos  prochains  félon  q  Dieu  le  com 
mande, que  nous  n'ayons  toutes  nos  affections 

Z.  ii. 


3^4 


SERMON    VI. 


foniwes  à  luy  obéir  t  voila  pourquoy  fous  ce 
mot  de  Chitrité  ,  fainiîl  Paul  a  comprins  toute 
la  vie  (les  fidèles  quand  elle  fera  réglée  Iclon 
la  parole  de  Dieu.En  lomme.il  veut  dire  que 
quand  nous  ferons  du  tout  arreftez  à  Dieu 
pour  appuyer  noilre  fiance  en  luy, pour  l'in- 
uoquer  ,  ne  doutans  point  qu'il  ne  fenionftre 
Pere&Sauueur  enuers  nous  ,  &  quand  aufii 
nous  ferons  addonnez  à  fainûeté  de  vie  ,  que 
nous  renoncerons  à  nous-mefmes  pour  fer- 
uir  à  nos  prochains ,  c'ellvn  figue  que  nous 
auons  bien  profité  en  Pefcole  de  Dieu,&  que 
ladotlnne  qui  nous  a  conduit  là.eft  la  pure  & 
vraye  venté  que  Dieu  commande  qu'on  a- 
nonre.  V  pila  donques  ce  que  nous  auons  à  ob 
feruer.fî  nous  ne  voulons  eftre  trôpci  de  Sa- 
tan. Or  notamment  fainû  Pauladioufte,  que 
c'eft  en  hfus  CJrr  fl,  afin  que  nous  ayôs  le  Sei 
gneur  lelus  pour  noftre  conduite, fi  nous  vou 
Ions  eftre  édifiez  tit  en  charité  qu'en  la  foy: 
&  il  eftimpofsibleque  nous  ayôs  foy,  deuat 
qu'auoir  cognu  lefus  Chrift.  Or  i'ay  dit  q  la 
ioy  emporte  que  nous  foyons  afleurez  du  tef 
nioignage  de  l'amourde  Dieu.  £t  comment 
fe  pourra-il  faire?  Sommes-nous  dignes  que 
Dieu  nous  accepte  pour  fes  enfans?En  quel- 
le audace  viendrons-nous deuant  luy;  Auons 
nous  dignité  ni  excellence  qui  nous  rende  a- 

freables  deuât  fa  maiefté?Helas,il  nV  a  rien 
e  tout  cela  :  mais  au  contraire  ,  il  faut  que 
Dieu  foit  noftre  luge,  iufqucs  à  tant  que  no- 
ftre Seigneur  lefus  ait  fatisfait  pour  nous,  & 
3u'il  nous  ait  lauez  de  nos  ordures.  Et  ainfi 
éques  tant  s'en  faut  que  nous  puifsions  met 
tre  noftre  fiance  en  Dieu,  deuant  qu'auoir  co 
gn.u  lefus  Chrift,  que  nous  l'aurons  toufiours 
en  horreurttqutes  fois  &  quantes  qu'on  nous 
parlera  de  Dieu  nous  ferons  efpouuantezde 
ù,  maieftéique  nous  voudrions  qu'elle  fufta- 
peantie  du  tout ,  ou  que  nous  fufsions  aux  a- 
by  fmes,&  au  profond  d'enfer. Voila  ce  qui  fe 
Ta  toufiours  aux  hommes,iufquesàceque  le- 
fus Çhr'ift  fe  foit  inanifeftéàeux.  Çaralors 
nous  apprenons  de  fentir  que  Dieu  nous  eft 
fauorable :  &;  combien  que  nous  foyons  mife- 
rables  créatures,  neaniinoins  il  nous  reçoit  â 
merci:  car  iln'a  point  d'efgard  à  nous,  il  foit 
valoir  la  mort  &  pafsion  que  fon  Fils  a  endu- 
rée.Voila  donques  comme  il  nous  faut  com- 
mencer par  Icfus  Chnft,  fi  nous  voulôs  auoir 
.entrée  à  la  foy.  Autant  en  cft-ild'inuoquer 
Dieu.  Car  fi  nous  n'auons  lefus  Chrift  pour 
Aduocat,&  qu'il  intercède  pour  nous,  &  qu'il 
nous  foce  obtenir  faueur  afin  que  nous  impe- 
trions  de.  Dieu  ce  que  nous  luy  demai'dons, 
que  fera-cc?Il  eft  certain  que  nous  ferôs  touf 
iours  repouflez.  Mais  quâd  lefus  Chrift  nous 
ouure  la  porte, qu'il  nous  monftre  le  chemin, 
mefmes  qu'il  fait  office  d'Aduocat,  alors  no' 
pouuons  prier  Dieu  hardiment,  &  fans  aucun 
fcrupule.  Autant  en  eft-il  de  la  charité.  Car 
comment  fommcs-nous  amenez  à  celle  vnion 
irifcmellc  que  ncus  dciions  auciraiiec  tout 


hommes  lifinon  d'autant  que  lefus  Chrift  eft 
le  lien  de  noftre  paix,  &  que  nous  fommes 
tous  conioints  en  luy, que  nous  fommes  mem- 
bres de  fon  corps ,  &  que  luy  eftant  noftre 
Chef  veut  que  nous  viuions  en  concorde  :  & 
puis  d'auantage  ,  que  nous  foyons  gouuerner 
par  fon  fainû  Efprit  ?  Voila  (di-iejcomme  U 
charité  ne  fe  pourra  iamais  apprendre,fi  ce  n' 
eft  qu'on  ait  cognu  lefus  Chnft.  Car  fans  luy. 
nous  fommes  en  difsipation  :  &  ne   fe  fauc 
point  Gsbahir  fi  nous  fommes  comme  chiens 
&  chats,  fi  tout  eft  plein  de  haine  .  Car  luf- 
ques  à  tant  que  nous  ayons  apprins  de  no;*t 
aimer ,  nous  ne  pourrons  pas  eftre  enfans  db 
Dieu, nous  ne  pourrons  auoir  ne  part  ne  por- 
tion en  noftre  Seigneur  lefus  Chrift .  Voila 
pourquoy  fiinftPauladit  que  la  foy  &  lâcha 
rite  font  en  Iclus  Chrift.  Or  maintenant  nous 
voyons  que  tous  ceux  qui  font  deftourner  de 
la  pure  doftnne  de  (aliit ,  n'ont  nulle  excule.. 
Car  ils  font  aduertis  fuffifamment  :  &  le  dia- 
ble les  poflede,  d'autant  qu'ils  s'addonnent  à 
luy  de  leur  bon  gré.  Auiourd'huy  on  en  verra 
beaucoup  qui  fe  voudroyent  excufer  quand 
ils  font  tranfportez  en  erreurs  &  en  fauflct 
doftrines:  Ho, voila,  ienefiiis  point  sflcz  fa- 
ge  pour  me  garder .  Voire,  mais  fi  nous  dref- 
fions  les  auieilles  pour  obéir  à  ce  qui  nou».  elt 
ici  monftré  ,  il  n'y  a  fi  rude  ne  fi  idiot  entre 
nous  qui  n'euftaflezde  prudence  :  comme  dé 
fait  Dieu  ne  veut  point  que  nous  l'oyons  com- 
me rofeaux  branflans  à  tous  vents ,  que  nous 
foyons  côme  petis  enfans  qu'on  mené  à  la  pi 
pcc:(ainfi  que  fainit  Paul  en  parle  au  quatriè- 
me chapitre  des  Epheficns  )  il  veut  que  nous 
foyons  afleurez  fur  fa  venté.  Et  fi  on  nous 
dit.  Cela  eft  trop  long  .  Et  il  n'y  a  que  tro'is 
mots  que  faintl  Paul  met  ici  :  il  dit  que  nous 
retenions  la  foy  &  charité  qui  eft  en  lefus 
Chrift,&  alors  nous  aurons  le  vray  vfagepoiir 
profiter  en  la  doârine  .  Voila  troi*.  mots  feu- 
lement. Si  on  dit, Ho,  ils  font  trop  obfcurs.  Il 
n'y  a  rien  plus  clair.Et  cependant  nous  voyôs 
que  ces  pouresgens  felaiHent  mener  comme 
bcftes  à  leur  perdition  .  Et  qui  en  eft  caufeï 
Peuucnt-ils  due  que  Dieu  ne  leur  ait  point 
monftré  le  chemin,  qu'ils  n'ont  point  cognu 
ce  qui  eftoitbonîNennirtous  fubterfuges  font 
ici  oftt'z.  Et  ainfi  aduifons,  fi  nous  ne  voulons 
eftre  inexcufablesauderniei  iour.de  bien  no- 
ter ce  qui  eft  ici  dit. Et  afin  que  iournellement 
nous  ne  foyons  pas  esbrankz  de  noftre  foy, 
que  nous  ayons  ces  marques  qui  font  ici  cote- 
nues. Aucoiuraire,  quand  nous  ne  les  aurons, 
il  noiisenaduieiidiaainfi  que  nous  voyons  en 
beaucoup, &  qiufi  à  la  plus  part-  Qui  eft  cau- 
fc  que  ciux  qui  auoyent  goiifié  l'Euangiie  ,  Sc 
quiauoyent  f-.it  femblant  d'cftredes  plus  a- 
iiancez.fccorrompent.&deuienentapoftiats, 
qu'on  les  voit  eftre  cnnimis  tout  ouuerts  ,  ou 
bien  qu'ils  font  ,dtfgnifi.z  en  forte  que  le  dia- 
ble les  tient  là  faifis,  qu'il'^  ftroycnt  content 
que  conte  la  parole  de  Dieu  fuft  comme  cnfe- 

uclic, 


SVR   LA   II   A    TIMOTH. 


uelie.voire anéantie  du  toutMont  vient  cela? 
C'eftqu'ils.ont  blé  retenu  des  choies  qui  ii'e 
ftoyent  pas  de  grande  édification, pour  fe  ("ça 
uoir  gaudirdes  Papiftes  ,  &  pour  brocarder 
les  fuperftitions  du  mondeimais  cependant  il 
n'y  a  nul  profit  ni  eu  foy,  m  en  cbatité.  C'c- 
ftoit  donquesbicn  raifon  que  Dieu  les  ban- 
niftde  fa  Parole, comme  il  les  en  priue.  Crai 
gnons  que  le  femblable  ne  nou?  adiiiene ,  fi 
nous  n'auifons  d'cftre  conferrr.cz  tant  en  cha 
rite  qu'en  foy  ,  fi  bien  que  le  diable  n'ait  nul 
accès  â  nous,  &  qu'il  no'piiiffe  faire  brefche, 
que  nous  foyons  munis  de  tons  collez.  Voila 
en  fomme  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce 
paflage.  Or  S.  Pauladioufteqiiant  &  quant. 
Car  Je  le  depcft  txcellent  farl  Efprit'jiii  habi- 
teen  nous.  Ici  ilconferme  l'eïliortatioii  qu'il 
auoitmilercomnies'ildifoir.Ie  t'ay  en  feigne 
de  retenir  la  forme  telle  que  tu  l'as  apprinfe 
de  moy,  qu'il  n'v  ait  rien  de  changé  ,  que  ce 
foit  comme  vn  pourtraift  tiré  3!i  viic  :  &  c'eft 
afin  que  tu  ayes  tant  plus  de  foin  de  cela  ,  & 
notes  que  toutes  les  grâces  que  Dieu  t'a  com 
mifes,  comme  de  ce  que  tu  es  ordonné  mini- 
ihede  (a  parole  ,  Paftcur  de  fon  Eglife  ,  que 
tu  as  les  dons  <[ui  font  requis  pour  t'acquit- 
ter  de  ton  deuoir,  que  tout  cela  eft  vn  depoft 
excellent  :  il  le  faut  donques  garder.  Or  fous 
ce  mot  de  Dfpi/f.lainft  Paul  fignihe  que  ceux 
qui  ont  receu  quelque  grâce  font  d'aut.ît  plus 
obligez  à  Dieu, S;  cnargez. Comme  ii  vn  hom 
me  auoit  donné  en  garde  à  fon  ami  tout  ion 
bien, qu'il  luy  euft  baillé  la  clef  de  foncolïre 
où  fuft  fon  thrcfor, qu'il  hiy  ciift  mis  tous  fes 
inftru.mens  entre  mains.voila  vn.  depoft. Aiufi 
Dieu  nous  commet  ce  qu'il  a, S:  ce  qui  appar- 
tient à  luy  feuhil  nous  le  commet:  non  point 
que  nous  en  foyons  propriétaires.  Il  eft  vriy 
que  les  grâces  q  nous  auons  rcccues  de  Dieu, 
font  noftres  ,  &  les  pouunn'  ainlî  appeller; 
mais  ce  n'eft  pas  qu'il  nouS  aie  quitté  fon 
droift,qu'il  n'en  doiué  toulî ->urs  eftre  glori- 
fié, &  que  le  toiit  ne  fe  doiue  rapp.irter  à  luy. 
N  JUS  Yoyonsdonques  que  iaincl  PauLulmo- 
ncfte  ici  ceux  qui  ont  receu  les  grâces,  qui 
ont  quelque  charge  c*";  commifsi.in,  qu'il  fau- 
dra qu'ils  en  rendent  conte  à  Dieu.  Qu'ils 
nepenfent  point  douques  les  appliquera  tel 
vfage  que  bon  leur  femblera  ,  iînon  qu'il'  les 
faceiit  feruir  à  leurs  prochains ,  que  Dieu  en 
fou  honoié,  &  que  lefus  Chriftait  touficurs 
fa  prééminence.  Que  s'ils  ne  tendent  là  ,  ils 
font  fâcrilcges,^  faudra  que  Dieu  plaide  cô- 
tr'eux.Car  fi  vn  homme  auoit  fraude  fon  ami 
quand  il  luy  aura  baillé  fon  bien  entre  mains, 
fe  fiant  en  fa  foy, que  celuy-la  f  j^tvn  larron, 
qu'il  retiene  le  dépoli,  ou  bien  qu'il  ait  difi- 
pécequi  luyeiloit  commis  entre  mains  ,  ne 
faudia-il  point  que  nous  foyons  coulpablcs 
deuant  Dieu  qu.and  nous  aurons  abufé  de  fes 
glaces?  Voila  p-iur  vn  item.  Mais  pource  que 
on  ne  tient  pas  iigrâd  conte  d'vn  depoft  com 
«un  côme  des  ctofcs  qui  font  precitufes.no- 


5") 

tammét  fainft  Paul  parle  de  ce  depoft  qui  ell 
plus  à  eftiiner  &  prifer  que  toutes  les  chofes 
duaionde.Si  on  baille  en  garde  vn  pot  ou  vn 
plat, ou  ie  ne  fçay  quoy,  &  bien, voila  vn  de- 
poft:mais  on  le  mettra  là,&  ne  s'en  foucicra- 
on  gueres .  Si  on  baille  quelques  loyaux  qui 
foyét  de  grand  prix.alors  on  les  ferre  ,  on  ca 
gnoift  bien  ,  Voici  qui  eft  d'importance.  Ou 
Lien  fi  on  regarde,  Voici  tous  les  documens 
d'vne  mai£on:cômeut?vn  homme  iéroic  ruiné 
s'il  auoit  ptidu  ceci.Nous  fommes  donc  plus 
longiieux  de  garder  les  depofls  qui  font  de 
prix.  Sainti  Paul  fumant  cela  dit  que  ceux  qui 
ont  receu  les  grâces  du  S.  Efprit ,  n'ont  pas 
feulement  vn  depoft  vulgaire,  mais  que  Dieu 
leur  a  commis  vn  threfor  ineftimable,  &  qu'j| 
faut  bien  qu'ils  auifeutde  le  garder. £n  quel-' 
le  forte.'Ce  ne  fera  point  en  le  fupprimât,ncn 
ni:inais  la  façon  de  garder  ce  threfor  qui  no* 
eftcômis.c'eilque  nous  le  facions  valoir  (c5 
me  il  nous  eft  monftré  en  toute  l'ff^riture 
fainâe)  que  nous  en  foyons  fidèles  difpenfa- 
teurs.  Car  Dieu  ne  veut  point  que  fes  grâces 
foyét  enfermées  en  vn  coffre, mais  il  veut  que 
on  les  publie,  &  qu'vn  chacun  en  foit  fait  par 
ticipant.  Voila  donc  corne  nous  auons  à  gar- 
der ce  depoil.c'eft  que  ceux  qui  font  miniftrcs 
de  la  parole  de  Dieu,  &  qui  doiuent  eftrc  c5  - 
mêles  port'en feignes  ,  que  ceux-là adiufent 
de  difpéferce  qu'ils  ont  en  garde,  ,3;  de  le-dif 
penfer  en  forte  qu'ils  procurent  &'auancent 
entant  qu'en  eux  fera  le  falut  de  l'Egiife.  Et 
puis  qu'vn  chacun  Chreftien  aufù  s'emplovc- 
ielon  fon  degré  &  mefurc  ,  &  que  nous-co- 
gnoii'sions  que  fi  nous  prifons  les  threfors  du 
monde, il  faut  bien  que  nous  pri'.îons  d'auan- 
tage  les  richelTes  fpirituelles ,  voire  qui  ten- 
dent àce  q  Dieu  foit  honoré, que  fon  Royau 
mefoitdrelFé  &cftabli  entre  nous,  que  lefus 
Chrift  nous  gouuerne,&  que  gr.îs  &■  petis  luy 
facent  hômage,&  que  le  tout  reuiene  .i  noftre 
fil  ut.  Quand  nous  voyons  cela,  n'eft-ce  pas 
vne  fhofe  precieule.&qui  nous  doit  enflam- 
mer d'vne  telle  ardeur,que  nous  abandônions 
tout  le  reftcqui  nous  pourroit  empelcher  en 
ccft  endroit  de  nous  acquitter  de  noilre  offi- 
ce? Voila  en  fomme  ce  que  nous  auôs  3.  noter. 
Mais  pource  que  nous  ne  pourrions  pas  gar- 
der les  biens  que  Dieu  nous  a  cômis  en  char- 
ge,linon  qu'il  nous  dônall  la  vertuA'  que  ce- 
la ne  fe  peut  faire  par  noftre  induftrie,faincl 
Paul  adioufte,Pjr  le  fJ^it  Ey/^i'cvoire,!/»/  h* 
hite  en  nous.  Comme  s'il  difoit,  Quand  Dieu 
nous  a  élargi  de  fes  grâces,  ^q^r^ilPa  tait 
pour  le  bien  &  profit  de  tcms  fidèles ,  il  voit 
que  nous  fommes  fragiles, &  q  le  diable  nous 
pourroit  rauir  à  chacune  minute  do  tf  mps,  & 
arracher  des  mains  ce  que  nous  auons  receu: 
mais  Dieu  en  eft  le  fauuerain  gardien.  IXffi 
vray  qu'en  degré  infeneur  par  deflous  fov  il 
veut  bien  que  noHS  foyôs  gaidiésde  fcstnfe 
fors,  il  nous  veut  employer  à  ceft  office  tant 
honorable  :  mjis.ceper.î'ant  il  fe  fertde  no» 

Z.iii. 


3S6 


SERMON    VU. 


perfonnes  pour  déclarer  les  dons  qu'il  a  mis 
en  noiis:&  de  faid.la  veitu  du  S.Efprit  fe dé- 
clare en  ccll  endroit.  Sainô  Paul  donc  n.nrî 
moiiftic  Q  pour  bien  v  fer  des  grâces  de  Dieu, 
&  les  employer  fidèlement  côme  nousdcuôs, 
afin  que  nous  en  ayons  la  poflcfsion  A  tout  ia 
mais ,  qu'il  ne  nous  faut  point  fier  en  noftre 
vertu, côme  iî  nous  eltion?  alTcz  habiles  gens: 
mais  demandons  à  Dieu, côme  premièrement 
il  luy  a  pieu  de  nous  douer  de  fes  dons  gra- 
tuits, qu'aulsi  il  côtinue  à  nous  lescôfermer, 
que  nous  ne  les  perdions  point ,  &  que  nous 
n'en  i'oyons  point  defpouille2:&  que  pour  ce 
faire  il  nous  nuinifle  de  plus  en  plus  de  la  ver 
tu  qui  y  cft  requife.Et  d'autre  cofté, que  nous 
foyons  tout  perfuadez  de  cela, Içachans  bien 
que  Dieu  nefemonftre  pas  de  loin  à  nous, 
mais  qu'il  fe  fait  fentir  à  nos  âmes. Et  qu'ain- 
iî  foit.qu'vn  chacun  entre  en  foy,Lebien  que 
Dieu  a  mis  en  nous ,  n'eft-ce  pas  vn  certain 
termo*ignage  qu'il  y  a  habité  par  fon  fainA 
Efpritî  Q^^and  donc  ffous  voyons  que  Dieu 
a  prins  logis  en  nous ,  &  qu'il  veut  que  nous 
foyons  fes  temples ,  &  qu'il  y  habite  par  fon 
faind  Efprit ,  craignons-nous  qu'il  ne  nous 
donne  la  vertu  pour  perlîfteriufques  à  la  fin, 
qu'il  ne  nous  main tiene  en  poflefsion  certai- 
ne des  biens  que  nous  aués  receus  de  ù  main.? 
Il  eft  vray  que  le  diable  s'efforcera  de  nous 
en  dcfpouiller  :  mais  comme  nos  âmes  ne  luy 
ferôt  point  en  proye,pource  que  lefus  Chrift 
les  a  receues  en  fa  proteftion  ,  comme  elles 
'  Jiiy  ont  efté  commifes  de  Dieu  fon  Pere:aui- 
ii  tout  le  refte  que  Dieu  a  ordonné  pourno- 


ftre  falut,ne  fera  point  en  proyei  Satan.  Et 
ponrquoy?  Car  nous  auons  l'Efprit  qui  nous 
défendra  àl'encontre  de  tous  fes  efforts.  Et, 
où  eft  ceft  Efprit?  Il  ne  nous  le  faut  point  al- 
ler chercher  par  deflus  les  nues.  Il  eft  vray 
qu'il  remplit  toute  la  terre ,  &  que  fa  maietté 
habite  par  deflus  les  cieux  :  mai^  fi  nous  fen- 
tons  qu'il  habite  en  nous, puis  qu'il  luy  a  pku 
d'efpâdre  fa  vertu  fur  fi  poures  créatures  que 
nous  fommes,  fçachons  quecefte  vertu  fuffi- 
ra  pour  nous  défendre  à  l'encôtre  de  tous  les 
allants  de  Satan ,  voire  moyennant  que  nous 
ne  foyons  point  lafches  de  noitre  cofté.  Car 
il  ne  nous  faut  point  flatter  en  nos  vices  pour 
eftre  nonchalâs.mais  il  nous  faut  prier  Dieu, 
nous  remettans  du  tout  à  luy,  en  attendant 
qu'il  nous  côferme  toufiours  de  plus  en  plijs. 
Et  d'autant  qu'il  a  cômencéde  nous  faire  mi- 
niftres  de  fa  grâce  ,  que  nous  fçachions  qu'il 
continuera  ,  &  continuera  en  telle  forte  qtie 
noftrc  falut  ,  &  celuy  de  nos  prochains  fera 
toufiours  de  plus  en  plus  auancé  en  fa  gloire. 
O  R  nous-nous  profterncrons  deuant  la 
facedenoftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les 
faire  mieux  fentir,afin  que  nous  mettions  pei 
ne  de  reformer  noftrevieà  fes  iainûs  com- 
mandemens ,  &  que  de  plus  en  plus  nous  ba- 
taillions contre  toutes  les  cupiditez  de  noftre 
chair.  Et  que  cependant  il  luy  plaife  de  nous 
fupporter  ennosinfirmitcz.iulquesàce  qu'il 
nous  ait  pleinement  reformez  à  fon  image. 
Ainfi  nous  dirons  tous.  Dieu  tout-puiffanc, 
Pete  celefte,&c. 


"s  EPTIEME     SERMON     SVR    LE 

P  RE  M  I  E  R  -C  HA  P  IT  RE. 

1 5  Tujçdh  que  tous  ceux  qui  font  en  Ajie  .fejont  diuertis  de  moy^ 
dejquels  ejl  Vhygele  (f  Hermogcne, 

16  Lf  Seigneur  doint  mifericorde  a  la  mai  fon  d'O  nefphorc:  car 
fuucntesfois  il  m'afulage,^  7ia  point  eu  honte  de  ma  chaîne: 

1 7  Mais  quand  d  a  efé  à.  Rowe,  //  nia  cherché  diligemment  y  (f 
m'a  trouue. 

i8  Le  Seigneur  luy  doint  trouuer  mifericorde  y>ersle  Seigyieur 
en  cefle  iournce-  la:  (j' tout  ce  en  quoy  il  maferui  en  Ephejè ,  tu  le  co-] 
gnois  trcs-hien. 


Ous  auons  veu  ce  m.itin  l'ex- 
hortation que  S.  Paul  faifoit.i 
Timothec  ,  de  garder  ce  di.-- 
poft  exccllét  qui  luy  cftoit  c5 
mis. Qr  maintenant  il  adioulte 
vn  aduerti'lîcmct  pourmonftrcr<j  Timothce 


auoit  befoin  de  fe  tenir  fur  fes  gardes ,  &  de 
veiller, afin  q  ce  threforneluy  fuftpoït  ofté. 
U  luy  dit,  Qnte  ceux  d' A.fie,a^  fe  nômoyent  au 
parauSt  Chreftiés&  fidèles, s'fyîojyint  deflonr 
w.-Ji  (te  luy:  5:  notamment  il  en  marque  deux 
côme  les  plus  cognus,P/;i^f/f  0-  lUrmog^tr. 

Voila 


s  V  R   LA    1 1.    A    T  I  M  O  T  H. 


î<7 


I  Ytoila  vn  fcadale  qui  pouuoit  troubler  les  plus 
conltans.Car  ii  on  voit  vn  homme  fe  reuolter 
.  de  r£uâgile,cliacuu  penfera  àfoy.&nous  fem 
-  ble  que  ie  femblable  nous  doyue aduenir .  Or 
■  il  nVftpoint  ici  qucftion  de  deux  ou  trois  feu 
•  lemét.maisfaind  Paul  dit  que  tous  ceuxd'A- 
lierauoyét  quitté.  Voila  vne  région  fort  am- 
ple qui  a  elle  acquifeà  noftre  Seigneur  lefus 
Cliriftpaile  labeur  de  ûinCl  Paul, il  fenible  q 
l'Euangile  doyue  là  trit>nipher  par  tout, il  y  a 
des  villes  grolFes  &  opulentes  ,  il  y  a  gens  de 
renom  .  Or  tout  y  ell  abbatu  :  combien  qu'ils 
facent  femblant  de  perlîlter  en  la  foy,  fi  eft- 
ce  qu'en  reiettant  t'aïuct  Paul  ils  reiettent  le- 
fus Clirift.  Voila  donc  vne  horrible  defola- 
tion.Quel  fcandale  pouuoit-il  aducnir  à  ceux 
qui  n'tftoyencpas  trop  fermes  >  Or  tant  y  a 
que  fainft  Paul  recite  ceci.môflrant  que  pour 
cela  il  n'ert  point  defcouragé, mais  qu'il  pour 
fuit  fon  train  ,  d'autant  qutla  toy  ne  depen- 
doit  point  des  hommes ,  mais  qu'il  tftoit  fon- 
dé en  Dieu.  Et  recite  notainmét  ctci.afîn  que 
-  Timotliee  fe  confcrme  en  vne  telle  conftan- 
.  ce  &  fermeté.  Combien  qu'il  n'a  point  tant  d' 
efgard  à  l'homme  auquel  il  efcrit.qu'à  toute!' 
Eglife,  comme  il  a  eiïé  dit  par  ci  deuant .  En 
fomme,nous  voyons  l'intétionde  fainft  Paul: 
c'eft  qu'il  veut  munir  les  fidèles,  afin  qu'ils  ne 
foyentabbatus  outre  mefure,  quand  ils  oyent 
parler  que  ce  qui  tftoit  d'Euangile  au  pays  d' 
Afie.eft  comme  anéanti  :  mais  qu'ils  cognoif- 
fent,  quand  tout  le  monde  feroit  dcftourné, 
qu'il  no'  faut  perliftcr  en  la  dottnnc  de  Dieu, 
&ne  point  vauer  .  Or  ceile  admonition  nous 
doit  bienâuiourd'huy  feniir  .  l'ay  défia  tou- 
ché combien  nous  fommcs  délicats .  Q_uand  il 
y  aura  vn  feul  homme  qui  aura  tourné  bride, 
il  femble  que  nous  cerchions  telles  occafions 
pour  nous  dcsbauehcr:  &  nous  les  cnibralFons 
par  trop  à  la  vérité. Car  on  voit  que  fi  tofl  que 
elles  fe  prefentent,  chacun  en  f^ait  faire  fon 
profit:  comme  li  nous  auions  beaucoup  gagné 
de  nous  liurcr  aux  mains  de  Satan  ,  pour  dire, 
Puis  que  tu  es  venu  à  bout  de  celluy-la,il  faut 
que  tu  me  poiredes  aufsi  bien  .  Mais  ceû  vfa^c 
efl  par  tropconimun;&pleuftàDieu  que  nous 
n'en  eufsions  pas  les  exemples.  Mais  aiiiour- 
d'huy  quand  on  parle  de  r£uangile,il  ne  fau- 
dra linon  auoir  cefte  couleur  pour  dire,  Ho, 
volavntel  qui  eftoit  comme  vn  des  piliers 
-  de  la  Chreftienté,  qui  s'eft  dcftourné  <  Pour  le 
moins  on  eftalfoibli.  En  alléguant  cela ,il  fem 
ble  qu'on  doyue  prendre  quelque  honiiefte 
couuerture  pour  quitter  Dieu,c?c  pour  fairedi 
uorce  auec  luy  :  on  verra  cela  en  beaucoup  de 
gens. Or  cependant  lediaWe  auiourd'huy  ala 
,  vogue,  que  plufieurs  fe  defrournent  de  l'Euan 
gile,  &  ne  s'en  faut  point  csbahir,  comme  il,a 
cfté  dit  ce  matin  .  Car  ou  eft  la  racine  viue  de 
toy  &  de  chanté  pour  nous  m.iïntenir  en  la 
puredoûrine  ;  Q\ipy  qu'il  en  foit,iourneilç- 
ment  on  en  voit  des  rebelles, que  ceux  qui  ont 
filé  en  grand  crédit ,  Se  dcfquels  on  crperoit 


inertieilles,s'cn  vont  quittçrl'Euangile,  mef- 
mes  deuiendront  ennemis  manifeftes, ou  pour 
le  moins  ils  feront  gens  prophanes,&  où  il  n' 
y  a  ne  fcl  ne  faueur  .  Qu^eft-il  donc  queftion 
de  faire  ,  finon  que  nous  foyons  armez  de  ce 
que  fainft  Paul  nous  monftre  ,  c'ell  afcaiioir, 
quand  nous  venions  tout  le  monde  tourner, 
que  nous  perfiftions  en  ce  qui  eft  perpétuel  & 
immuable?  Car  Dieu  ne  pourra  elhe  esbranlé 
félon  que  les  hommes  changeront  de  propos, 
mais  demeurera  toufiours  en  (on  entier.Or  eft 
il  ainii  qu'il  luy  a  pieu  de  nous  édifier  en  fa 
fainûe  Parole, laquelle  eft  du  tout  immuable. 
Perfiftons  donc  en  la  foy,  quand  nous  verriôs 
tout  le  monde  changé.  Cela  fe  peut  aflcz  en- 
tendre en  peu  de  mots,  mais  la  prattique  n'en 
eft  pas  aifee  :  &  d'autant  plus  nous  faut-il  re— 
corder  cefte  leçon  .  Si  donc  auiourd'huy  nous 
en  voyons  qui  flechiffent,  les  autres  qui  plac- 
quent  làl'Euangile  ,  cognoiflons  ou'encores 
n'auons-noits  point  telle  occafion  d'cftre  con 
fus  &  efperdus  côme  auoit  fainft  Paul,  &:  tous 
ceux  de  fon  temps  ,  quand  ils  ont  vcu  le  pays 
d'Afie  fe  reuolter. Voila  pour  vn  item.  Au  rc- 
fte.fi  les  ennemis  de  l'Euangile  nous  alleguét 
cela,  comme  pour  nous  faire  honte,  que  nous 
foyons  confermez  en  ceft  endroit  .  Il  eft  vray 
que  Satan  machinera  de  mettre  l'Euangile  en 
opprobre,  &  de  rcnuerfcr  aufsi  la  foy  de  ceux 
qui  iamais  n'ont  prins  bonne  racine  .  Mais 
quov  qu'il  en  foit,  fine  faut-il  point  que  le- 
fus Chrift  perde  fon  droift  pour  la  dignité  des 
hommes .  Demeurons  donc  fermes  quand  on 
nous  viendra  alléguer  ,  Ho,  voila  vn  tel  qui  a 
monltré  grande  côftance  &  grand  zele,il  fem- 
bloit  que  ce  fuft  merueilles,  i&  nous  voyôs  au- 
iourd'huy quec'eft.Et  bien,il  eft  Jiomme:mais 
cependant  la  vérité  demeure  à  iamais,  comme 
ditTe  Prophète  Ifaictcar  c'eft  àce  proposque '/•'•40-^ 
il  parle:  il  fait  comparaifon  de  noftre  fragili- 
té, que  nous  ne  fimimes  que  fleur  &  verdure 
pour  eftre  incontinent  flcftris  :  mais  la  vérité 
de  Dieu  eft  permanente ,  dit-iI .  Voila  où  il 
nous  faut  reuenir  pour  lepoufler  toutes   les 
obieftionsde  ceux  qui  ne  demandent  finon  à 
diffamer  l'Euangile.  Et  cependant  apprenons  . 
de  condamner  les  hommes  en  iuftifiant  Dieu. 
Car  autrement  que  fera-ce?Or  l'appelle  iufti- 
fier  Dieu, comme  l'Efcritureen  parle, c'eft  de 
luy  attribuer  la  louange  qu'il  merite:que  nous 
coçnoifsions,  qu'encores  que  le<:  hommes  cor 
rompent  la  dotlrine, qu'elle  n'eft  point  pour- 
tant pire,  &  que  ce  n'eft  point  pour  luy^moin 
-drir  fonaiithorité:  car  il  ne  faut  point  qu'elle, 
emprunte  rien  d'ailleurs,  elle  confifte  çn  foj',. 
Donnons  donc  gloire  à  Dieu  quand  nous  ver 
rons  que  tout  le  monde  fe  trouble  :  comme  il, 
eft  dit  au  huitième  chapitre  d'Ifaic  ,  fi  noni; 
voyons  que  las  incrédules  fe  mutinent ,  &  fe 
troublent,  fi  nous  voyons  que  les  méfchans  s' 
cleuent  contre  Dieu, que  nous  ne  foyos  point 
efpouuintez  pour  cela,  mais  iiftifions  le  Sei- 
gneur des  armées, c'eftà  dirc/i-iénous  luy  re- 

Li^.iiii. 


3«8 


SERMON     VII. 


feruions  ce  qui  luy  eft  deu.cognoiflàns  que  to' 
ceux  qui  i'eleueronl  contre  luy, demeureront 
en  la  Hn  confus  ,  &  ne  pourront  luy  apporter 
aucun  preiudice .  Or  cela  fe  doit  cJUndre  en- 
cores  plus  loin. Car  nous  ne  pouuons  pas  fan- 
ftifier  Dieu  qu'en  approuuant  la  dottrine  qui 
cft  venue  de  luy. Comme  il  a  falu  que  les  fidè- 
les reteinlïènt  toufiours  celle  ferme  perfua- 
fion  ,  que  faindl  Paul  ertoit  Apoftre  de  lefus 
Chrift  ,  combien  qu'ils  le  veillent  eftreauifi 
condamné:autant  nous  en  taut-il  faire.  Voy- 
ons-nous des  contempteurs  qui  fe  desbau- 
chent,lcs  vus  par  dcfpit,  les  autres  qui  fe  faf- 
chent  d'auoir  les  auieilles  trop  rompues  du 
nom  de  lelus  Chrift;  les  voyons-nous  (di-ie) 
eltre  apoftats  ?  Ne  laiflons  point  de  toufiours 
honorer  la  doôrine  que  nous  auons  cognue 
eftre  bonne  &  fainde ,  Se  d'honorer  ceux  qui 
la  portent,  combien  qu'ils  foyent  ainfi  deipri 
feZjCombien  que  tout  le  monde  les  reiette .  C 
cft  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paflage. 
Au  relie,  notons  bien  que  ce  n'ell  point  fans 
caufe  que  fainft  Paul  a  ici  nommé  VhygeU  iy 
Hermogtn:.  Il  n'y  a  nulle  doute  que  ces  deux- 
ci  n'ayent  efté  de  grand  renom,&  qu'on  ne  les 
reputaft  cflre  côme  des  piliers  de  la  foy,  mais 
cepédant  lainû  Paul  les  dégrade,  &notament 
il  les  marque  au  doigt ,  afin  qu'on  n'en  foit 
point  fcandalizé  .  Et  en  cela  il  monftre  qu'il 
n'y  a  nulle  grandeur  humaine  qui  doyue  ob- 


voila  vn  Royaume  où  on  ne  voit  que  defola- 
tion. Quand  telles  gens  auront  tout  allegué,fi 
eft-ceque  Dieu  ne  perdra  point  facaufe.Maiï 
le  tout  tll  que  de  nollre  part  nous  apprenions 
de  pcifiller  conftamment  au  milieu  ie  toutes 
les  ruines  que  le  diable  tafche  de  faireiquacd 
nous  verrons  tout  le  monde  confus ,  que  les 
prouinccs  &  régions  viendront  à  tourner  bri- 
de, que  nous  ne  laif  ions  point  de  pourAiyure 
no/lie  train. Et  pourquoyrCar  Dif  u  ne  chan- 
ge point. Mais  au  lelle,  notons  bien  ce  qui  eft 
dit  de  la  grandeur  des  hommes.  Et  c'eftmer- 
ueilles  qu'auiouid'hiiy  Dieu  foit  fi  peu  prifé. 
Car  il  n'ell  point  quellion  d'auoir  gens  de 
grande  eAoffe  ni  qualité  pour  amoindrir  l'au 
thorité  de  l'Euangile  :  on  prendra  des  mar- 
maille-, qui  ne  font  rien, il  ne  faudra  que  quel- 
que belillre  feulement  qui  s'eleue,  vn  homme 
fans  propos  ne  raifon,  Ho  ,  voila  vn  tel  qui 
commence  à  décliner. Et  qui  eft-il  ?  Vne  pure 
belle  :  comme  nous  en  voyons  par  trop  les  e- 
xcniples.  Or  quand  ce  feroyent  des  Anges  de 
paradis,  nous  fjauons  qu'il  nous  les  faudroic 
niaudire.s'il  leur  aduenoit  de  fe  reuolter  con- 
tre l'Euangile  :  non  pas  «Jii'il  fe  puifle  faire: 
mais  fainô  Paul  ne  peut  allez  magnifier  lave-  G4/,  1.8, 
rite  de  Dieu,  s'il  n'vfe  decefte  fimilitude-la: 
c'eftafçauoir  que  tant  s'en  faut  que  par  l'air- 
thoritédes  hommes  nous  dénions  eftre  diuer 
tis  du  bien,  que  files  Anges  venoycnt  às'ele- 


fcurcir  lamaieftéde  Dieu,ne  la  reuerenceque     uer, nous  les  pouuons  tenir  pour  des  diables 
— ,r  j„.,s,  \  (,  .^-.,-.^l„   n\„-.„^A — ^„„,,,„x._     Orc'eft bien  ariicre  qUenousauthorifions  la 

doclrine  laquelle  nous  doit  eftre  certaine  & 
infallible,  defpitans  cous  les  ennemis d'icclle, 
qu'il  ne  faut  que  l'ombi'e  de  quelque  beliftre 
lequel  incontinent  nous  feruira  d'vn  idole 
pourledrclTeràl'enciMitre  de  Dieu:  Ho, voi- 
la vn  tel. Et  qui  eltce  tel?  Et  qui  font-ils  tous: 
ceux  dont  on  parlera  ?  Or  quoy  qu'il  en  foit, 
retenons  bien  ce  qui  nous  eft  ici  monftié  par 
làiiift  Paul  :  c'eft  que  s'il  y  en  a  de  crédit  &  de 
réputation  qui  fe  desbauchent,  &  nous  don- 
nent mauuais  exemple,  que  pour  cela  nepluï 
ne  moins:niais  qu'il  nous  faut  pourfuyurc  no- 
ftre  bon  chemin  ,  auquel  Dieu  nous  a  intro- 
duits. Car  ce  n'cft  point  fans  caufe  qu'il  nom- 
me ici  ces  deux,  Phygele  &  Hennogene  .  Ce- 
pcndani  aufsi  laii-ft  Paul  .nous  monftre  que 
nous  ne  deuons  point  tfpargncr  les  hommes, 
qu'ils  ne  foyent  dégradez  quand  nous  voyons 
qu'ils  tal'chcntde  nuire  .il'-Euangile,  deimet 
tve  quelque  difsipation  ou  quelque  trouble. 
On  dira  qu'il  ne_  faut  point  blafmer  perfon- 
ne  :il  cft  vray  .  Mais  on  verra  des  pcftes  qui 
veulent  empoifonner  l'Eglife  de  Dieu  ,  on 
verra  des  loups  rauiflans  qui  ne  demandent 
qu'à  mettre  dilTcnfion  au  troupeau,  on  verra 
des  brii^ans&  des  larrons  qui  voudront  def- 
rober  à  Iclus  Chrift  ce  qui  luy  appartit-nt,  on 
verra  de  ficrilegcs  qui  ne  dcmarident  qu'à 


nous  deuôs  à  Ù  parole.  Q_nand  donc  nous  ver 
rons  tout  vn  pays  fe  reuoltcr,difons.  Dieu  cft 
fuffifant  luy  fcul  pour  maintenir  fa   vérité. 
Qj2?r"^  nous  verrons  des  pcrfonnages  d'efti- 
nie  &  de  renô  défaillir  ,  cognoiflbns  qu'il  faut 
que  t  lute  hautelTe  des  hommes  foit  abbaillèe, 
&  que  Dieu  feul  foit  exalté,  &  qu'on  l'adore, 
&que  Satan  en  dcfpit  qu'il  en  ait,  ployefege 
nouil  deuant  luy  auec  tous  fes  fuppofts. Voila 
comme  il  nous  en  faut  faire.  Or  maintenant 
nous  voyons  quelle  eft  l'ingratitude  du  mon- 
de .  Car  (  comme  l'ay  défia  touché  )  il  y  en  a 
beaucoup  qui  penfent  auoir  honnefte  couuer- 
ture  de  renoncer  lefus  Chrift  &  fon  Eu.îgile, 
quand  ils  auront  des  exemples  de  ceux  qui  ont 
lait  le  femblable,&mcimes  ils  cerchcnt  telles 
occafîons  .  Comme  nous  en  verrons  qui  font 
au  guet:  s'ils  voyent  que  l'Euangile  fe  recule, 
qu'il  y  ait  quelque  trouble,  Ho,voila,on  voy- 
oit  bien  que  ceci  ne  fcroit  point  de  tenue.  C5 
aie  quand  il  y  a  quelque  ville  qui  s'cft  rtuol- 
lee,  ou  bien  que  par  tyrannie  &  par  violence 
l'Euangile  aura  efté  opprimé,  on  voit  q  beau- 
coup en  font  bien  aifes,lefqucls  auparaiiant  a- 
uoyent  fait  l'embl.int  de  croire  àl'£iungile,& 
leur  a  fcmblé  qu'ils  pouiioycnt  quitter  lefus 
Chrift. Et  tout  ccl.-i  fe  raileinble,q  telles  gens 
ont  bonne  memoire:'Ona  vcu  qud'Euanjjiic 
eftoit  aduancc,  il  y  a  eu  telle  apparence  qu'on 


penfoit  que  tout  deuftflorir,&  voila  vne  ville  corrompre  la  doôriiiedefalut  :  de  cependant 
quicft  maintenant  toute  changée,  voila  vn  tel  on  les  apportera  pour  couurir  leur  turpitu-- 
peuple  ,  voila. vn  Prince  qui  s' eft  dciijurnc,    dc:&  où  (.ft-ce  alkrf  Voila  vne  terrible  hon- 

ncftcté, 


SVR    LA    IL    A    TIMOTH. 


nefteté,quand  nous  foulFrironii  que  les  pourcs 

aines  qui  ont  cftéii  cliereiiient  acquises, sVn 

aillent  en  perdition  :  que  nous  fouffrionsque 

le  nom  de  Dieu  ioitblaipliemé,  que  tant  or-, 

dre.  foitanc.inti.iSc  que  cependant  on  le  taile,  .       ,  .     _.        .      _ 

&  qu'on  endure  que  ceux  qui  takhcnt  d'abyf    Q^iand  Dieu  nous  propofe  vn  bon  exemple, 

meç  tout,  &  d'arracher  Dieude  fon  lîege,  s'il     c'cft  autant  comme  s'il  nous  enuoyoit  v  ne  gui 

leur  eftoit  pol'sibJe,  que  ceux-là  facent  tout 


3,^9 

nous  voyons  vn  homme  qui  nousdesbaucht, 
il  nous  fuffit:  fi  nous  en  voyons  cent  qui  nouj 
conduifent  bien ,  nous  femmes  fi  Oupides  que 
nous  ne  pouuons  marcher  après  eux. Et  ne 
faiir-il  pas  mie  nous  foyons  pliis  que  peruers? 


ce  qu'ils  voudront,  &  que  cependant  on  n'en 
fonne  mot:  ne  feriôs-nous  pas  traiilres  &  dcf 
loyaux  à  Dieu  &  au't  hommes .  Apprenons 
donc  à  rcxempledcfainft  Paul,  de  marquer 
telles  gens  au  doigt  ,•&  quarid  nous  cognoi- 
llrens  des  mefchans  qui  ne  demandent  qu'à 
galler  tout,  &  fur  tout  quand  ils  s'attachent  à 
la  doftrine  ,  &  qu'ils  ne  demandent  finon  de 
renuerfer  l'édifice  quiaeftc  fait  au  nom  de 
Dieu,quc  ceux-là  ibyét  diffamez,  que  chacun 
lésait  en  deteftation,  qu'ils  i'oyent  cognusa- 
fin  ou'on  les  fuye  de  loin  iSr-mcfines  quand 
on  en  orra  parler  ,  qu'on  bouche  les  aureillcs, 
pour  dire.  Que  nous  n'ayons  rien  de  commun 
auec  ces  diables-ci  :  quand  ils  fe  font  déclarez 
ennemis  ouuerts  de  lefus  Chrift ,  que  nous  n' 
ayons  nulle  accomtâce  pour  communiquer  a- 
uec  eux  en  façon  que  ce  foit,  mais  qu'ils  nous 
foyentdeteflabjes  comme  ennemis  de  noftre 
falut .  Voila  ce  que  nous  auons  à  noter.  Il  eft 
vray  q  quelque  fois  il  nous  faudra  laifll-rceux 
qui  ne  demandent  qu'à  fe  faire  cognoiftre  en 
piflànt  au  benoifliev  (  comme  on  dit)  car  il  y 
en  a  beaucoup  qui  voudroyent  acquérir  bruit 
&  renom  par  leurs  mefchancetez  .  Or  ceux-là 
ne  font  que  canailles  ,  &  ne  font  pas  dignes  d' 
eAremb  entre  les  vachiers:tant  y  a  qu'ils  v ou 
dront  eftre  tenus  pour  Paiteiirs  d'Eglife  :  & 
encorcs  ne  fe  contentent  ppint  de  cela,  ils  ne 
demandent  qu'à  renuerfer  tout  ce  qui  fera  de 
bien. Or  telles  gens  feroycnt  bien  aifes  qu'on 
les  nommaft,&  ne  fuft-çe  qu€  pour  leur  honte 
&  leur  vilerue.Or  il  faut  laifler  telles  ordures, 
&  ne  point  remuer  leur  puantife  :  mais  quoy 
qu'il  en  foit,  quand  nous  verrons  qu'ils  pour- 
royent  apporter  dommage  par  faute  d'eitre 
<:ognus,qu'on  les  inarque  au  doigt  ,&  que  nous 
n'oyons  pointées  beaux  propos ,  Ho,  voire: 
mais  faut-il  mettre  vn  homme  en  defefpoir? 
Et  pourquoy  eft-ce   qu'il  fe  précipite  ainfi 
pour  faire  guerre  ouuerte  à  lefus  Chrift,  & 
pour  ruiner  tout  ce  qui  auraefté  fait.en  fon 
nom?  Et  pourtant  ne  foyocs  point  plus  iâges 
que  le  lâmû  Efprit.C'cft  encores.ce  que  nous 
auons  à  retenir  jde  celle  fentejice  de  fainÛ 
PauLOr  cependant  il  met  ici  vn  home  à  l'op- 
pofite':quand  il  a  parlé  de  tous  ceux  d'Afie  ,  & 
que  notamment  il  en  a  marqué  deux  qui  e- 
iioyent  les  plus  renommez  apoflats.il  dit,  O- 
iiefiphore.i  bien  tenu  vn  autre  cî»cmia,&Dieu 
Iny  doint  de  troiiuer  mifericorde,3c  lv*y.&  tou 
te  fa  m3ifon:voire  qu'il  luv  donne  mifcricor- 
dc  enuers  le  Seigneur  en  celle  ioarnee-la.Yci 
fainft  Paul  nous  mon ftre  quelle  comparaifon 
nous  deuons  faire  entre  les  hommes  .  Car  fi 


de  pour  dire, le  ne  veux  point  que  vp' erriez: 
le  monde  cli- plein  de  ténèbres ,  il  y  a  beau- 
coup de  chemins  tortus  :  afin  donc  que  vous 
luyuiez  droitcment  où  vous  elles  appelez,  ie 
vous  conduiray.  Et  cela  fe  fait  quand  nous  a- 
uons  vn  homme  qui  taichedenous  mènera 
Dieu  .  Cela  ne  nous  doit-il  pas  profiter  plus 
que  s'il  y  en  auoit  cent  qui  nous  attiraflcnt  en 
toute  mefchanceté  ?  Or  fi  aucontraire.il  nous 
eft  dit  qu'il  n'y  en  a  qu'vn  feul  qui  va  mal,  & 
que  nous  tafchions  de  rçfltmbler  à  luy,  dclaif 
fans  tout  vn  peuple  qui  nous  monftrera  bon 
exemple, Kous  ferons  plus  qu'inexcufables, at- 
tendu ce  quinpusell  ici  dit  &  propofé  par 
fainû  Paul.Car  d'vncoftéilamis  tout  le  pays 
d'Alîie:voila  vne  reuolteefpouantable:  car  ce 
n'ell.point  feulement  d'vne  poignée  de  gens, 
nuis  de  beaucoup  de  peuples  :  il  y  auoit  des 
villes  notables  &:  fort  renommées,  il  y  auoit 
des  gens  beaucoup,  l'Euangile  eftoit  là  plan- 
té ,  S:  neantmoins  tous  fe  feparent  de  faind: 
Paul.  Sur  cela  il  dit.  Ne  vous  cftonnez  point, 
mes  amis,  quand  vous  verrez  vne  fi  grofle  ar- 
mée de  gens  :  car  Dieu  cependant  demeurera 
ferme,  vous  verrez  mei'mes  ceux  qui  ontefté 
comme  capitaines  pour  conduire  les  fidèles, 
que  çeux-la  fereuolteront.Etbien,perfiftezi 
voftie  Dieu.Qjiand  il  a  dit  cela,&  bien, à  l'op 
pofite  il  met  vn  feul  homme. CarCcommc  i'ay 
dcfia  Qit)il  nous  admonefte,  quand  Dieu  nou? 
monftrera   quelqu'vn  qui  nous  doit  donner 
bon'  courage  ,  &  qu'il  y  en  aura  plufieurs  qui 
leront  pour  nous  diuertir.que  fi  nous  fiiyuons 
le  nial,&  quittons  le  bien,  il  n'y  aura  nulle  ex 
cufe  pour  nous. Et  cela  eft  bien  ànoter.  Car  il 
eft  vray  qu'auiourd'huy  on  enverra  qui  pour 
crainte  de  la  mort,&  par  infirmité  tomberont 
&  renonceront  lefus  Chrift  .  En  voit-on  de 
tels.'Mais  on  verra  des  Martyrs  qui  vont  con- 
ftamment  à  la  mort ,  qui  ne  font  nullement  e- 
ftonnez,  qui  mf  fines  fe  refiouilTent  qu.id  il  elt 
queftion  de  feellejf  l'Euangile  par  Itur  pro- 
pre lang  ,  Si  nous  voyons  vn  feul  Martyr,  fa 
confiance  ne  doit-elle  pas  nous  fortifier  beau 
coup  plus,  que  la  légèreté  de  ceux  qui  défail- 
lent,&  qui  ne  regardent  point  à  quoy  ils  font 
appelez, ne  nous  doit  çftonncr?  Apres, nous  en 
verrons  qui  par  ambition, par  auarice,  &  pour 
d'autres  regars  du  monde  fe  deprauent  &cor 
rôpent:  mais  nous  en  verrôs  d'autres  qui  font 
comme  des  rochers, qui  ne  font  nullement  cfr- 
meus  quelques  tétations  que  le  diable  leur  fii- 
fcitcils  furfnontent  tou  t.  Quand  nous  voyôs 
vn  feul  home  qui  eft  ainfi  cfprouut  comme  vn 
vaillant  champion,  que  Dieu  monftrera  com- 
me au  doigt-que  l'a  vertu  habite  là,nc  dtuons 

Aa.i. 


^^0 


SERM 

n  jiw  point  faireccAlionneuràDieu,  de  nous 
conformer  à  luy ,  pluftoft  qu''à  noftre  efcient 
nous  peruertir,  voire  Içichls  bicnquele  touc 
ne  fera  qu''à  noftre  perdition?  Or  tant  y  a  que 
auiourd'huy  nous  voyons  ceci  bien  mal  prat- 
tic|ué.Car  tant  s'en  faut  qu'vn  homme  de  bien 
vaille  plus,  &  ait  plus  d'importance  enuers 
nous  pour  nous  ed:fier,que  n'auront  vne  cen- 
teinede  mefchans:que  li  nousanions  les  yeux 
crcuezde  bons  exemples  ,  il  ne  taudra  linon 
que  le  diable  nous  mette  cnauarttvn  fcanda- 
ie,  tout  le  relie  fera  perdu  Se  mis  en  oubli.  Si 
ell-cc  que  Dieu  en  la  rinmorflrerr.  qu'il  prife 
ce  qu'il  nous  donne  pour  nous  cdilier  d'auaa- 
tage.  Et  d'autant  plus  nous  faut-il  recorder 
celle  leçon  qui  nous  efticimonlhce  parfainft 
raul:c'elt  que  toutes  fois  &  qnanres  que  nous 
vcrrôi  des  brouillons  qui  tallifiét  la  vérité  de 
Dieu, que  nous  verrons  des  enncr-is  domciti- 
ques  qui  talchcnt  de  ruiner  tout  entre  nous, 
que  nous  verror^devapnflats  qui  retournent 
à  la  Papauté, que  nous  en  verrons  d\iutrcs  qui 
defgiiirent  la  parole  de  Dieu, que  pour  n'eftre 
point  troublez  nous  regardions  à  Tentour ,  & 
que  fi  noftre  Soigneur  nous  propofe  des  gens 
qui  notis  piiilTcnt  inciter  à  confiance,  qui  mon 
lîrentque  quoy  qu'il  en  l'oit  ils  vont  toufîours 
leur  cours, &  que  la  vérité  de  Dieu  a  vne  telle 
vertu  en  eux,  qu'ils  ferment  les  yeux  à  tout  le 
monde, qu'ils  font  inuiucibles  contre  toits  af- 
faucs:fi  nous  voyôs  cela,  prenons  à  noftre  pro 
fit  ce  qui  nous  eftainfi  prefentéde  Dieu.  Car 
il  cft  bien  certain  que  combien  qu'auiour- 
d'iniy  les  choies  foyent  corrompues ,  &  que 
nous  ioyons  en  vn  lîecle  comme  perdu  &  de- 
fcfpcré  ,  toutesfois  encores  Dieu  ne  permet 
point  que  nous  foyonsdeftituezdcbons  exeni 
pies. Il  eft  vray  que  nous  en  verrons  beaucoup 
qui  s'abbarftaidiirent:nous  en  verrôs  d'autres 
qui  mettent  fous  le  pied  tout  ce  qu'ils  auoyét 
entendu  ,  nous  en  veirons  qui  bataillent  con- 
tre Dieu  à  leur  efcient, nous  verrons  tout  cela: 
mais  cependant  nous  verrons  que  noftre  Sei- 
gneur gouuerne  ceux  qui  tellcmét  auront  en- 
duré pour  le  tclmoignage  de  fon  nom,  qu'ils 
rendront  confus  tous  leurs  ennemis.quoy  que 
il  en  foit.  Il  eft  vray  qu'on  les  bruflcra,  qu'ils 
feront  tourmentez  iufques  au  bout:  mais  ils  ne 
laillèront  point  de  fane  leurs  triomphes  en 
delpit  du  monde  &  de  Satan.  Nous  verrons  de 
tels  miroirs  que  Dieu  nous  donne;  &  ne  de- 
uons-nous  pas  les  faire  valoir?  Apres, nous  en 
verrons  d'autres  qui  ayans  contcplé  que  c'eft 
de  l'cftat  du  monde, fçauent  bien  qu'ils  pour- 
royent  retourner  en  la  Papauté, ils  pourroyét 
quitter  lefus  Chriftpourviureàleuraifc:mais 
ils  aimeroycnt  mieux  mourir  cent  mille  fois. 
Q_nand  nous  voyons  qu'ils  cheminent  en  tou 
te  luimilité  &  obeiflancc,que  leur  vie  parle,& 
combien  qu'ils  cuifcnt  dcquoy  taire  orand' 
monftrc  &  parade, que  tou:csfûis  ils  s'abbaif- 
fent  lufquevau  bout,  fçâchons  que  Dieu  nous 
les  Hict  liomsie  ùirvn  cfdialfaur ,  afin  que 


S' 


ON    VII. 

nous  cognoifsionsque  puis  qu'ils  nous  peu- 
uent  ediher,nous  ferons  bien  vileins  &ingrats 
quand  nous  ne  pourrons  fuyure  tels  exeples. 
Voila  donc  en  fomme  ce  que  fainft  Paul  a  vou 
lu  ici  dire  en  premier  lieu,quand  il  parle  d'O- 
nefiphorc.  Or  cepédant  nous  auons  aufsi  bien 
à  pefer  las  mots  dont  il  vfe  ,  Q«'  /<•  Srigneur 
(dit-il)  lionne  mifcricmîe  à  la  mnifin  {TOntJi- 
phnrc^c.ir  ilmit  donné  -vigueur  fhfieursfois  ,  iy 
mefmes  eflant  à  R.WIC1I  m  a  CtrcUé  jongntitfe- 
ment,C~  m'iitrr:tiué,&  »  "1  point  eu  honte  que  f 
efroye  (■n/tirt.que  l'eftoye  attaché  aux  fers:- 
combien  que  ie  fulTe  ainfi  vilipendé  du  mon-' 
de,  il  m'eft  venucercher  pour  faire  comme  of 
fice  d'enfant  enuers  fon  père.  Or  quand  (iin£k 
Paul  demande  que  Dieu  face  miiericorde  à 
Oneiîphore  àcaufequ'ii  s'eftoit  porté  fi  fidè- 
lement entiers  luy  :  par  cela  nous  fouîmes  ;n- 
icigncz  que  fi  Dieu  reconipenfe  le  bien  que 
nousaurons  fait  parla  vertu  de  fon  fain-^t  £- 
fprit,cen'eft  point  vn  payement' qu'il  nous 
fait  de  nos  l'eruices,  comme  fi  nous  auiôs  rieii' 
mérité.  Et  pourquoy  ?  Voici  Onefiphore  qui- 
aiioit  fait  des  aâes  vertueux  tant  &  pii:s  :  or 
faind  Paul  parle- il  de  nierite?dit-ilque  Dieu- 
foit  oblige  enuers  luy ?Maisaucontiaire, qu'il 
luy  fait  mifericorde.Et  que  preûippofcmife- 
ricorde,finon  que  Dieu  ait  pitié  de  luy,  Se  que 
il  luy  pardonne  fes  fautes  ?  Ainli  donc  nous 
voyons  que  tous  les  falaires  que  les  fidèles 
doyuent  attendre  de  Dieu, ne  font  point  com 
me  des  payemeiis  aufqucls  il  foit  obligé,  qu'il 
faille  mettre  en  balance  Ce  qu'ilv  ont  mérité'.' 
maisq  le  c'tft d'autant  que  Dieufe  monftre  li 
bcral  enuers  eux,&  qu'il  leur  fait  merd:com- 
me  il  dit  aux  poures  pécheurs, quelques  fautes 
qu'ils  ayent  com^ifes,  qu'ils  doyuent  touf- 
iours  auoir  leur  refuge  à  ceRe  bonté  gratuite 
de  Dieu, fur  laquelle  leur  falut  eft  fondé. Voi- 
la pour  vn  item. Et  fi  ceci  eftoit  bien  obfcrué, 
nous  n'aurions  point  tant  de  côbats  ni  de  con 
tentions  auec  les  Papilles  touchant  cefte  re- 
compenfedesœuiires.  Car  ils  (maginent  que 
nos  œiuires  font  méritoires, qu'ils  ont  vne  di- 
gnité pour  obliger  Dieu.  Or  corne  nous  voy- 
ons que  quand  nous  aurons  tout  rapporté  ce 
qui  cft  en  nous,  à  ce  que  Dieu  y  a  mis  par  fa 
grâce,  encores  ne  pouuons-nous  pas  fommer 
Dieu  qu'il  nous  rende  ce  que  nous  aurons  def 
ferui,&  qu'il  nous  fatisface  :  mais  il  nous  faut 
venir  à  ce  poinCl.qu'il  luy  plaife  de  nous  par- 
donner nos  péchez,  «5i  que  s'il  nous  a  fait  ce 
bié  d'auoir  efté  humains  enuers  ceux  aufquels 
il  a  fccouru,  que  maintenant  il  vfe  de  mifcri- 
corde  enuers  nous.  Voila  donc  vnitem.Or  ce- 
pendant notons  que  iaincl  Paul  monftre  ici 
que  ce  que  nous  auons  fait  enuers  lesenfans 
de  Dieu, ne  fera  point  perdu, encores  qu'ils  n' 
aycnt  point  le  moyen  de  nous  rendre  la  pa- 
reille.Et  de  faïA.quand  Dieu  nous  commande 
d'aider  à  i\oi  prochains, &  leur  fiibuenir,  ce  n' 
cft  pas  en  nous  propofant  quelque  loyev,com 
mêles  Papiftcs  ont  iiiugint.  C.u  to"  ceux  qui 

n  ;;.ir- 


SVR     LA   II.     A    TIMOTFf. 


".■^i 


regardent  cela,  il  ne  faat  point  qu'ils  attcn- 
'  dent  loyer  au  cid.Si  ie  fay  feruicc  &  plaifîr  à 
quelqu'vn.d'autâut  qu'il  le  me  peut  rendre,  ie 
r'ay  point  égard  à  Dicu.ie  procure  mon  pro- 
fit charnel  tantqueic  pyis,  &  pourtant  Dieu 
defauoue  telle  cliofe:mais  quand  nous  tailons 
bien  àcc-UT  qui  ont  nccefsité  de  noftie  aide,  Se 
que  nous  n'3uon<;  point  égard  s'ils  ont  faculté 
de  nous  rendre  la  pareille  ou  non,  voila  Dieu 
qui  met  le  tout  en  les  contes,  c'eft  à  luy  que  s' 
addreflent  ces  ittras-la,&  les  alloue  en  Tes  re- 
giftres.  Et  c'eft  ce  que  fainil  Paul  nous  mon- 
ftre  ici. Car  combien  qu'il  parle  d'afFc£tion,dc 
prières,  fi  cft-ce  que  cela  vaut  autant  qii'vne 
promefTe:  comme  fi  le  fainft  Efprit  par  la  bou 
che  de  fainft  Paul.difoit,  Que  nous  ne  crai- 
gnions point  en  bien  faifant  aux  pourcs  indi- 
gens, quand  nous  les  verrons  deftitucz  de  tout 
fccours,  qu'ils  ne  nous  puiflent  faire  ne  cliaut 
nefroid,quenousne  pcnfions  point  auoirper 
du  la  fiibftance  que  nous  aurons  mife  pour  les 
aider  ,  &  pour  les  feconrir  ;  car  nous  auons  vn 
bon detteur, c'eft  afçauoir  Dieurnon  pas  qu'il 
y  foit  tenu,  mais  il  nous  eftdetteur  volôtaire, 
caril  luy  plaiftde  remettre  au  lieude  ceux  q 
demeureroyent  autrement  courts.  S:  qui  font 
là  côme  rciettez  de  tout  le  môde.Voyans  cc- 
laapprenons  denepoint  cercher  les  reconi- 
penfes  de  ce  monde  quand  nous  ferons  du 
bien,  iedimcfmes  ûene  pofntappetcrd'eftre 
louez  &  prifcz  de  par  les  hommes  :  conten- 
tons-nons  que  Dieu  cognoifle  &  nous  foit  tef 
moin  que  nons  auons  tafché  de  nous  monftrer 
fes  cnfans  :  d'aurant  que  nous  voyons  que  fa 
bonté  s'cfpand  fur  toutes  créatures  ,  que  nous 
aduifions  de  luy  rcfîembler  ,& nous  confor- 
mer à  fon  image.  Qnad  cela  fera,fuffife  nous, 
encores  que  le  monde  fc  mocqne,  8r  que  nous 
n€  voyons  qu'ingratitude  ,  &  que  cela  nous 
peut  deftourner  ,  pafloiis  outre  .  Or  tant  y  a 
que  fâindl  Paul  par  fon  exemple monftre  ici  à 
''  tons  fideles,que  '.'ils  ne  pcuucnt  recognoifire 
le  bien  qui  leur  eft  fait,  pour  le  moins  emiers 
Dieu  ils  le  mettent  toufiours  en  auant,  &  que 
ilsl'ayent  en  mémoire. Vray  eft  que  fi  nous  a- 
iions  faculté  de  nous  employer  potir  ceux  def 
quels  nous  aurons  recru  quelques  bénéfices, 
nature  nous  enfeigne  à  quoy  vous  fomme s  te- 
ni,is:encores  qu'il  n'y  euft  ne  I.oy.m  Prophè- 
tes,ni  Enangilc,  fi  cft-ce  qur  les  Payens  nous 
condamnent  quand  nous  feron'  in£;rats.^îaiç 
fi  nous  fommes  poures  gens,  &■  quand  on  nous 
aura  fait  quelque  plaifir  ,  que  rcgardans  par 
tout  nous  ne  puifsions  faire  rien  qui  foit  pour 
cruxaufqucls  nons  fommes  tenus ,  que  nous 
rcfte-il?  Que  nous  prions  Dieu  pour  eux  ,  & 
que  cela  demeure  imprimé  en  noftre  cœur,' 
comme  i'ay  dit  .Car  quand  nous  en  ferons  en 
telle  forte,  cela  fera  pour  donner  courage  à 
ceux  aufquels  Dieu  a  ciargi  plus  amplement 
de  fes  biens  :  comme  nous  voyons  que  cela  a 
efté  obferué  de  tout  temps,que  IcsPayéns  put 
penfë  que  û  va  Erorame  cftoic  ingrat ,  il  cftoi  t 


abominable,  &  reiettc  de  tous  ,  &  ont  cHhr.é 
quec'eftoit  vne  vertu  louable  que  libtialité: 
mais  cependant  ils  n'ont  point  eu  égard  à 
Dieu  Comme  ils  deuoyent .  j^u  contraire  ,  fi 
nous  prions  Dieu  pour  ceux  qui  nous  ont  fait 
du  bien,  ils  feront  incitcxd'auantage  à  pour- 
fijyure.  Mais  notamment  il  nous  faut  obfcr- 
uer  ce  mot,  quand  (àinft  Paul  dit,  Que  U  Sei- 
gneur luy  doinl  trouuer  mifericcrde  en  ce  ioiir— 
la.  Quand  fainft  Paul  parle  ainfi,  ilmonftre 
qu'il  nous  faut  fcmerrcomme  il  en  perle  au  fsi- 
aux  Corinthiens,  que  quand  nous  faifons  pisr 
fir  à  qutKju'vn  ,  que  nous  luy  fubuenons  à  fa 
necefsite.il  faut  que  nous  attendions  le  temps 
patiemment ,  que  noftre  Seigneur  nous  mon- 
ftre  que  cela  n'eft  point  perdu. Sainft  Paul  \  fe 
de  cefte  fimilitude:  Vn  laboureur  de  terre  at- 
tendra la  faifon  qu'il  doit  recueillir,  il  laifle- 
ra  pafler  l'hyuer.il  femblera  qne  tout  foit  per 
du:la  neige  vient, la  grcfle.la  rcpcfte:&  quand 
le  temps  de  moiflon  cft  vcnu.le  laboureur  voit 
que  fon  fruift  n'eft  point  perdu  .  Ainfi  donc 
nous  en  fant-il  faire  :iX:  notamment  appre- 
nôs  d'cftendre  noftre  efper.ince  à  la  venue  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift .  Il  eft  vray  que 
Dieu  nous  promet  que  fi  nous  fommes  hu- 
mains enners  les  poures, &  que  nous  tafchions 
de  les  fecounraubefoin.que  la  femblableme 
fiire  nons  fera  rendue,  tellement  que  ii  nous 
tombons  en  necefsité  ,  Dieu  aufsi  nous  fer» 
tronnergrace  enuers  les  hommes.  lia  promis 
que  nous  ferons  bénits,  &  que  fabenediftioa 
futfiia  non  feulement  pour  noftre  vfage,  mais 
aufsi  pour  en  communiquer  à  ceux  qui  en  au- 
ront faute.  Ces  promeffès-la  donc  nous  font 
bien  données  pourla  vie  prefente-mais  fi  nous 
Kiut-il  paiTer  plus  outre,  &  que  nous  afpirions 
au  iourdernier,&  que  nous  attendions  patiemi 
ment  pour  poffeder  la  vie  que  nous  efperons: 
encores  qu'il  femble  que  tout  foit  perdu  pour 
neus,&  qne  nous  n'apperceuions  pas  que  Dieu 
nous  benifle  &  nous  face  profperer,  que  nou^ 
ne  laifions  point  de  toufiours  nourrir  cefte 
efperanee,  qu'au  dernier  iour  quand  les  régi- 
ftres  feront  ouuerts  .alors  on  verra  que  nous 
n'aurons  point  perdu  le  bien  que  nous  aurons 
mis  comme  entre  les  mains  de  Dieu,  fêcou- 
rans  ceux  qui  eftnyétindigés,&  lefqucls  ncuî 
eftoyent  recommandez  dé  luy. Et  ceci  doire- 
ftre  obferué  en  gênerai  en  route  noftre  vie,. 
Car  i\  cefte  efperanee  ne  règne  en  nos  cxxvi';, 
&■  qu'elle  n'ait  là  comme  fa  preeminence.nous 
defaudrons  .i  chacune  minutç  de  temps.Voti- 
Jons-nous  doc  cheminer  egalcmctau  fcrui'ce- 
de  Dieu  ?  VouFons-nous  auoirvneronftance 
qui  ne  flechilTc  point  ?  Deuant  toutes  chofes 
apprenons  de  f  cher  nos  yeux  ,  Si  de  les  arre- 
fteT.îcedernieriour,&.\  cefte  venue  de  no- 
ftre Seigneur  lefus Chrift,qiie nous fçachionr 
que  la  couronne  nous  eft  alors  appreftce:; 
&  qu'il  ne  nous  face  point  mard'eftreen  oran 
des  difficultcz  cependant  ,  d'auoir  beau 
coupd'incpmraoditez.de  mener  vne  viepeni^ 
Aa.ii. 


Î7  * 

ble  &  f^rchnife  ,  que  nous  pafstonî  pir  deJTus 
tout  cela,  voire  regardans  à  ce  dernier  ioiir 
auquel  Dieu  nous  conuic-.&  me  imes  nous  voy- 
oni  comme  fainftPaul  en  p.irle,E»t  ce  iour-Li, 
dic-il.Tou;  Chrétiens  ne  peuuent  lire  ce  p.if- 
Hige, qu'ils  ne  foycnt  touchez  au  vif  .Car  nous 


SERMO  k    VII. 


.ftre  touftours  employé  poul  luy.  Quant  & 
quant  il  eft  monftré,  que  combien  qu'il  n'ai- 
tcndift  rien  de  luy ,  &  qu'il  peuft  eftre  recoin 
penfé  quant  au  monde, toutesfois  ilauoit  ion 
îilaireapprcfté  au  ciel ,  qui  ne  luy  pouuoit 
faillir.  Mais  outre  cela  il  cft  dit,  A /amaZ/iw: 
oyons  que  faind  Pauleftoit  comme  raui.par  que  Dicuàcaufedcluy.&enfaueurde  fa  per 
'"'   "'^'■""'^  o.j~i-  lonne  veut  faire  mifericorde  à  ceux  qui  luv 

font  prochains.  Qmind  nous  voyons  cela, 
que  noftre  Seigneur  non  Iculcmét  recognoift 
ce  que  nous  aurons  fait  de  feruice  à  ceux  qui 
font  liens ,  mais  qu'il  nous  fera  profperer,  cS; 
en  noftre  lignage,&  en  tout  le  relie  ,  &  qu'il 
eftendra  fou  amour  paternelle  fur  ceux  lef- 
quels  nous  aimons,  &  lefquels  font  conioints 
auec  nous:  quand  nous  voyons  cela,  ie  vous 
prie,  faut-ilcraindrc  qu'il  ne  nous  ibit  propi 
ce  quant  à  nous?  Noftre  falaire  ne  nous  eft-il 
pas  plus  que  certainfEn  fomme  notons  qu'ici 
fainrt  Paul  nous  déclare  que  c'eft  vn  feruice 
agrca'sle  à  Dieu  entre  les  autres,  que  nous 
fubuenions  à  ceux  qui  endurent  pour  la  que- 
relle de  l'on  Euangile,  à  ceux  qui  font  outra- 
gez du  monde, qui  l'ont  en  opprobre, qui  l'ont 
perfccutez  :  quand  nous  fccourrons  ceux-là. 
Dieu  accepte  ce  feruice  comme  vne  oblation 
de  bône  odeur  &  fouefue  entre  les  autres.  Et 
de  faiftjquand  nous  aiderons  ainiî  à  ceux  qui 
trauaillent  pourniainu  .iLr  la  vérité  de  Dieu, 
ne  fommes-nous  point  tefmoîs  auec  cux,por 
tans  vne  partie  de  leur  fardeau  entant  qu'en 
nous  eft?  Ainiî  donc  prenons  ce  partage  com 
me  fi  Dieu  declaroit  ,  quand  nous  verrons 
quelqu'vn  qui  fera  tourmenté  iniuflement  du 
monde  pour  maintenir  ladoftrine  ,  qu'on  le 
diffame, ou  qu'on  le  moleltc  en  quelque  fa- 
çon q  ce  foit.quenoHS  foyonscoiointsàluy, 
que  nous  n'ayons  point  de  honte  de  tel  op- 
probre,&  qu'il  ne  nous  fafche  point  de  foufte 
nirvneparcie  des  outrages  &  des  fafcheries- 
q  font  douces  aux  feruiteurs  de  lefuv  Chrift. 
Et  quand  nous  en  ferons  ainfi, Dieu  pronon- 
ce qu'il  nous  regarde  du  ciel. Et  combien  que 
le  monde  nous  tire  la  langue  ,  combien  qu'il 
fenible  que  nous  foyons  comme  befres,  ne  re 
gardas  point  que  nous  cl'mouuons  la  ragedes 
niefchans  à  l'encontre  de  nous  :  combicn(di- 
ie)q  nous  voyôs  toutes  ces  chofes,futhl'e-jio' 
que  Dieu  prononce  du  ciel  qu'il  demanda  de 


lant  de  celle  venue  de  le  fus  Chrift, &  de  la  rc 
furreiflion  dernière. Il  ne  dit  point  que  le  Sei- 
gneur luy  face  trouuer  grâce  à  fa  venue,  au 
iour  de  noftre  rédemption  ,  quand  il  apparoi- 
■  lira  derechef  au  monde  pourle  iuger:  fainii 
Paul  pouuoit  bienvfer  deces  laçons  de  par- 
ler.Xlais  il  dit ,  En  ce  lour-Lv.  co;nmes'il  pre- 
fentoit  le  Seigneur  lefus  vifiblement  auec  les 
Anges.  Ainli  donc  nous  voyons  quelle  a  efté 
fa  foy,  &  qu'il  n'a  point  voltigé  en  l'air  pour 
dire  timplement  que  lefus  Chrift  cft  ordonne 
luge  du  monde:  ^:  puis  qu'il  fe  Ibit  arrefté  ici 
ha;.  Saind  Paul  (di-ie)  n'a  point  parlé  de  ces 
chofes-la  froidement, ni  félon  l'homme,  mais 
il  a  efté  elcué  par  de  (lus  tout  le  inonde  pour 
pouuoir  s'cfcvier.Ce  iour, ce  iour. Et  ou  eft-il; 
Or  il  cft  vray  que  tous  ceux  qui  veulent  eftre 
fàges  en  eux-nicfmes  ,  n'auront  garde  de  le 
trouuer:  car  pluftpftilfaut  que  cela  l'oit  veri- 
Iftt.^^.^  lié.Q^  l'œil  n'a  point  veu, les  aurcilles  n'ont 
point  entendu, &  n'cft  point  entré  au  cœur  de 
l'homme,  ce  que  Dieu  a  préparé  àceux  qui  le 
aiment.  Q£e  les  hommes  appliquât  tous  leurs 
fens  pour  cognoiftre  cela, ce  leur  fera  vne  cho 
fe.obfcure  &  profonde  ,  &  n'en  pourront  ap- 
prochcr:mais  quand  nous  embraflerons  la  pro 
mefTe  qu'il  nous  a  d5nee,&  après  auoir  cognu 
lefus  Chrift  eftant  refful'cité  des  morts 


que 

n'a  point  làdefployé  fa  vertu  pour  foy  ,  mais 
pour  recueillir  tous  fes  membres  ,  &  pour  les 
conioindrc  à  luy, alors  nous  pourrons  bien  di- 
re,Ce  îour-la.Et  pourquoyfCarli  cefte  paro- 
le ne  nous  profite  quand  elle  fera  mife  en  no- 
flre  bouche  &  en  noftre  caur, c'eft  autant  (dit 
(âiniil  Paul  en  l'autre  paflage)  comme  lî  nous 
arrachions  Ici'us  Chrift  du  ciel, comme  fi  nous 
voulions  nier  qu'il  euft  enduré  mort  &pafsion, 
qu'il  fuft  defceudu  aux  enfers.  Ainfi  donciio- 
tons  bien  ce  mot  v  &  de  quelle  importance  il 
eft:&  fçachons  que  fainit  Paul  non  feulement 
nous  a  déclaré  ici  quelle  eft  fa  foy,mais  il  nous 
Veut  teltifier  de  fa  doûrine  ,  nous  moiiftrant 

qu'il  ne  parle  point  du  bout  de.la  langue.mais  tels  l'eruices ,  &  fi  nous  n'en  fommes  reconi- 
qu'il  ha  vne  telle  affeûion  pour  nous  mener  à  penftz  pour  maintenant ,  que  noftre  falairc 
ce  iour  deïefus  Chrift  ,  qu'il  nous  le  monftre 


comme  vi^echofe  prefente,  &  nous  y  conduit 
en  vertu  de  La  proraclle:  &.nipfmes  iiûus>auon^ 
à  noter  aufsi  qu'il  ne  prie  pas  feulement  pQur. 
Onefiphpre,  mais  pour  toute  fa:  jnaifoi»,.Etrcn 
ceLi  deuons-i^ousencores  eftreraieux  enflam- 
mez à  bien  faiçcj  tous  les  membres  de  lefus 
Chrift.&lcurdo^incr  fccours.  Car  Ditu.nous 
déclare  que  non  feulement  il  aura  pitié  de 
nous,  ijiais  aufsi  deceuiç  qqi  nous  attouche«r. 
Voici  Onefiphorequi  eftlané.dJauoir  cherché 
fâfnÛ  Paul  ài^omc,  de  luy  auoir  ferui,  iS;  s'c- 


nous  eft  apprc!ré,qui  ne  nous  peut  faillir  à  la 
venue  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift:  &:  que 
nous  fçachions  que  tout  aiiifi  qu'il  a  fouffert 
mort  &  pafsion  pour  nqus  ,  qu-'aufst>^n'eft;-il 
ppint  ipoBté  en  vain  ^u  ci^l ,  mais  que  c'eft 
pour  nous  recueillir  à  l"oy>,&pour  nous  mè- 
nera çeûc  couronne  4e  gloire  qui  nous  cft 
maintenant.cachepi    .       ~ 

OR  nous-nous  proftcrneroni  devant, la 
face  dcnoftre  bon  Dieu  en  cogooilTànce  de 
nos  fautes,  k  prians  qu'il  nous  les  face  fenfir 

de  plus- 


SVR   LA  II.    A    TIMOT  H 


■37? 


ée  pluj  en  plus  ,  en  forte  que  nous  profitions 
aufsi  en  vne  droite  repen tance, que  nous  met- 
tions pekie  demortifiertous  nos  vices.iiifques 
a  tant  que  nous  foyons  renouuelez  en  hiy.  £t 
d'autant  que  nous  ne  pouuons  cheminer  en 
fa  fainftevocation.que  nous  n'ayons  toufîours 
fon  Royaume deuant  nos  yeux, qu'il  luy  plai- 
fed'eleuer  tellement  nos  fcns  en  haut ,  que 
nous  ne  demandions  finon  d'cftre  attirez  à 
„oilre  Seigneur  Iel"usChrift,&que  nousmef- 


prifions  leschofes  caduques  de  ce  monde  ,& 
que  nout  furmontions  toutes  chofes  qui 
nous  pourroyent  deltourner  du  bon  chentin, 
iufques  à  ce  que  nous  venions  à  nolhe  but, 
&  que  inoftre  Seignct^r  lelus  nous  déclare 
qu'il  nous  a  touiîours  regardez  ,  cependant 
que  nous  trauaillons  à  fon  feruice .  Q_ue 
non  feulement  il  nous  face  ccfle  grâce, 
mais  à  tous  peuples  &  nations  de  la  teu- 
re,&c. 


P  R  'e  M  ï  E  R      SERMON     SVR     LE    S  E^ 

CONDCHAPITRE. 

1  Tqy  donc  mon  fils  ,Jôis  fortifié  en  la  grâce  laquelle  ejl  en  leftis 
Chrijl. 

z  Et  les  chofes  que  tu  as  ouyes  de  moyen  prefence  de  plnficurs 
tefnoins,  enfeigne-les ahommes fideles,qui front fuffifxns  a  enfeigner 
aufsi  le  s  autre  s. 

5  Toj  donc  endure  trauaux  comme  bon  gendarme  de  lefis 
Chrijl.  ■ 


:  'E-Yperience  nous  monftre 
alTcz  que  lioiis  ne  pouuons 
peilifler  au  feruice  de  Dieu, 
que  nous  n'ayons  vne  vertu 
plus  qu'hiiniame.  Car  nous 
pourrions  défaillira  chacun 
pas  que  nous  aurons  à  marcher ,  &  nous  voy- 
ons les  aflaut?que  Satan  ne  cefle  de  nous  fai- 
re,tellement  que  d'y  relïfter  il  ne  feroit  pas  en 
nous ,  fi  nous  n'auions  vne  vertu  pUr.  haute. 
Mais  Dieu  qdt  cognoift  noltre  foiblcfle  ,  ne 
nous  enuoye  point  aux  combats,  qu'il  ne  nous 
donne  de  quoy  Y  fournir  ;  &:noftre  Seigneur 
lefus  a  reccu  toute  vertu  &  puiflance  ,  afin  de 
■ne  point  lailTér  les  fiens  qu'il  ne  les  fortifie. 
Tant  y-a  qu'il  nous  fâutàppreftcrd'auoir  cou 
rage  inuincible.voire  lî  nous  voulons  pourfuy 
lire  noftre  vocatiori:&;  fur  tout  ceux  qui  doy- 
uent  monftrerle  chemin  an  peuple,ont  bcfoin 
de  celle  aidecelefte  :  car  Satan  leur  fera  les 
plus  gransa(ïàuts&  les  plus  rudes.  Voila  pour 
quoy  maintenant  fainA  Paul  exhorte  Timo- 
ihee  ,  J'ejtre  fortifié  en  Uj^race  qui  ejh en  nojire 
Seigneur  h  fus  Chrifl.  Or  par  ces  motsiladmo 
neîte  qu'il  ne  pourra  point  exécuter  la  char- 
ge qui  liiy  eftcommife  fans  prendre  courage, 
&  fe  refondre  .à  batailler  iu(<:]ues  en  la  fin. 
Mais  noton»^  qu'en  la  peffonne  d'vn  homme, 
le  fainft  El'pritnous  a  ici  voulu  donner  vne 
doftrine  générale.  Ne  penfons  point  donc  fer 
uir  àDien  .1  nollre  aifc&.i  repos  :  car  il  veut 
efprouuér  le  coeur  que  nous  auons  de  nous  em 
ployer  pourluy.  Et  voila  pourquoy  il  lafche 


la  bride  aux  mefchans,&  aux  malins,&  permet 
que  nous  foyons  moleltez  par  eux;voila  pour- 
quoy il  nous  drefle  tant  d'exercices.  Mais  le 
remède  nous  eft  en  la  main:  car  faintt  Paul 
nous  dit  que  la  grâce  qui  ell  en  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chriit  nous  fera  commune,  moy- 
eniiant  que  nous  ne  la  reiettions  point  par  ho 
ftre  pareiïè.  Or  ce  mot  emporte  beaucoup, 
quand  il  dit  que  In  grâce  eflfii  ti.ijlre  Seigneur 
lifus  chrifl:  il  iigniHe  qu'elle n'eft  pas  enclofe 
ni  ferrée  tellement  que  nous  puifsions  dise 
que  nous  n'y  pouuons  paruenir.Dieu  nous'ie- 
ftific  que  lefus  Chrift  nous  a  efté  donné  au«c 
vne  telle  vertu  ,  que  par  icelle  il  aouspromct 
que  nous  obtiendrons  vieloire  contre,  tous 
nos  ennemis. Maintenat  nous  voyons  en  fom- 
melecôtenudecefte  fentence  ;  c'eftque  nous 
fommes  àduertis  que  pour  nous  adonner  au 
feruice  de  Dieu ,  ce  n'eft  point  allez  que  nous 
ayons  quelque  atfeition  moyenne  &,  troide. 
Et  pourquoy?  Car  Satan  tafcherade  nous  era 
pefcher  tant  qu'il  luy  ferapofsible,c5me  nous 
le  voyons  pareffed.  Nous  fommes  débiles  de 
noftre  collé  :  il  nousfaut  donc,  cueillir  vc-rtu: 
car  fans  cela  nous  ferions  comme  abbatus^Voi 
la  pour  vn  item.  Or  le  fécond  eft,  que  nous  ne. 
dcuons  point  craindre  ,  car  Dieu  nous  aflTeure 
qu'il  nous  aidera  aube  foin. Et  pourquoy?  Car 
lefus  Chrift  n'eftpoint  defpourueu  de  forcç: 
fi  nous  fommes  débiles  ,  retirons-nous  ver-s 
luy  ,  &  il  aura  de  quoy  pour  nous  fouftcnir.  Il 
eft  vray  que  cefte  dollrne  ha  mcftier  dVftrc 
méditée  plus  que  d'en  faire  k^ngue  declira- 

Aa.iii. 


374 


S  ER  M 


'  tion:inais  tant  y  a  que  nous  poùuôs  bien  veoir 
i  rœil,<jue  ce  n'cft  point  fans  caufe  que  fainft 
Paul  aamll  exhorte  Timothee.  Car  de  ceux 
qm  font  femblant  d'auoir  quelque  zèle  pour 
ieruir  à  Dieu ,  combien  en  voit-on  qui  perfî- 
fient?  La  plus  part  fe  deftourne.Et  pourquoy? 
Car  ils  font  leur  conte  qu'en  fe  iouant  ils 
feruiront  à  Dieu  ,  Si  ne  penfent  point  à  leur 
foiblefle  :  ils  ne  cognoiflent  pas  aufsi  que  les 
filets  font  tendus  par  tout ,  &  les  embufches, 
que  Satan  machine  tout  ce  qu'il  peut.  Ceux 
donc  qui  ne  s'appreftent  point  à  fe  fortifier, 
feronffurprins  tous  les  coups ,  &  ne  s'en  faut 
point  esbahir  ,  car  il  n'y  a  nulle  excufe.  Puis 
que  Dieu  nous  a  déclaré  qu'il  nous  veut  exer- 
cer àbon  efcient ,  3c  que  la  vie  Chreflienne 
n'efipas  vn  esbat,qu'il  ne  faut  point  que  nous 
■foyonsendelices.mais  qu'il  nous  fautbatail- 
ler.puis  que  cela  nous  e 11  dcclaié ,  fi  mainte- 
nant nous  défaillons  par  noftre  nonchalance, 
la  faute  ne  nous  doit-elle  pas  eftre  imputée? 
D'autant  phisnous  faut-il  retenir  cefteadmo 
nition  defainft  Paul.c'eft  que  nous  foyons 
robuftcs,  qu'il  n'cft  point  queilion  d'eftre  dé- 
licats nç  tendres.Et  pourquoy?Car  le  feruice 
de  Dieu  requiert  vnc  fermeté  &  confiance  tel 
le,que  nous  auons  befoin  d'eftre  fecourus  du 
cicl,pourcc  que  toutes  les  forces  des  hommes 
n'y  pourroyeni  fuftire.  Et  cependant  conlo- 
lons-nous  en  ce  qui  eft  adiouilc  ,  qu'il  ne  faut 
point  regarder  noftre  pouuoir  :  fi  nous  fouî- 
mes defiuiez  d'armes ,  fi  nous  n'auons  ne  cou- 
rage ne  ianibes  ,  (tomme  on  dit)  voici  noftre 
.Seigneur  Icfiis  qui  ha  le  remède  en  main  ,  & 
ne  fera  pas  chiche  de  nous  fecourir.  Si  donc  il 
fait  mai  à  quelqu'vn  de  fouftcnir  des  alTauts 
pourcc  qu  ils  liiy  font  trop  rudes  ,  c'eft  d'au- 
tant qu'il  eft  ingrat  à  la  bonté  de  Dieu, &  qu'il 
ne  peut  foutfriv  d'cltre  fouftenu  quand  noftre 
Seigneur  lefus  hiy  tend  la  main.  Car  Dieu  ne 
fe  veut  point  mocquer  de  nous  en  permettant 
à  Satan  de  nous  opprimer  ,  &de  nous  toiiller 
.;aupied.  Ileltvray  qu'il  vont  bien  que  nous 
Tentions  nos  foibiefies.  Pourquoy?  Pour  ge- 
mir,&  pour  nous  humilier,  afin  que  nous  foy- 
ons incitez  de  recourir  à  luy.Car  filanecefsi- 
té  ne  nous  prcflè.nous  voyons  l'ortjueil  &:  pre 
fomption  qui  eft  en  nous. Il  faut  àoc  que  nous 
foyons  conuaincus  de  noftredebilitc,  afin  que 
,  nous  apprenions  par  ce  moyen  d'inuoqucr 
LDieu,&  de  nous  cacher  fous  l'ombre  de  fesai- 
les.  Il  faut  auAi  que  nous  apprenions  de  baif- 
ferla  tcftc,&  cheminer  en  crainte  &  folicitu- 
de.Mais  tant  y  i  que  ceftc  gr3ce&  cefte  con- 
lUnce  que  i'ay  dite  ,  fetrouuera  touûours  en 
noftre  Seigneur  lefus  4hrift  ,  Iclon  qu'il  leur 
fera  prcfenté  par  l'Euaugilc,  ils  feront  quant 
&  quant  munis  de  fa  vertu  pour  eilre  viûo- 
rieiix  contre  Satan,&  contre  tous  leurs  enne- 
mis. Ainfi  nous  voyons  que  Dieu  ne  nous  reiv- 
uoye  point  à  noftre  franc  arbitre  ,  il  ne  nous 
dit  pa'.jEirayezquels  vous  cftc$,i:qucllcs  lont 
.  vos  facultez:  car  il  fjaif  que  nous  uc  pomions 


ON    VIII. 

rien  du  toufmais  il  nou?  appelle  à  foy  ,rl  tihâi 
addreffe  mefmes  fon  Fils  vnique ,  auquel  il  3 
commis  la  charge  de  nom  fortifier.  Et  voila 
pourquoy  aufïi  fainû  Paul  dit  en  vn  autre 
paflàge,   Qu'il  peut  tout  en  celuy  qui  leçon-  pj/.^.j» 
forte  :  quand  il  s'eft  glorifié  de  n'auoir  point 
efté  vaincu  d'vne  tentation,  afin  qu'il  ne  fem- 
ble  qu'il  s'attribue  rien  de  cela  ,  ne  qu*il  fe 
vueille  magnifier  en  fa  perfonne,C'e>ft(dit-iJ} 
en  celuy  qui  me  fortifie  que  ie  peux  tout. Et  ce 
n'eft  pas  feulement  poui  luy  qu'il  met  cela  en 
auant,mais  il  protefte  comme  lefus  Chrift  eft: 
le  Chef  de  tous  fidèles  ,  qu'aufsi  fa  vertu  eft 
efpandue  fur  tout  le  corps  de  FEglifc.  Voila 
donc  en  quoy  il  eft  queftion  de  nous  fier:&  ne 
doutons  point  quanci  nous  aurons  efté  esbran» 
lez, &  que  Dieu  nous  aura  fait  fentir  que  nous 
fommcs  comme  poures  vers  de  terre,que  nous 
ne  fonmies  pas  à  grand'  peine  comme  des 
moufches ,  qu'après  cela  ilfuppleera  à  ce  qui 
nous  défaut.  Voila  quant  au  premier  que  nous 
auons  ici  à  obfcruer.Or  cependant  fainft  Paul 
adioufte  que  Timothee  commette  les  chofes  çne 
il  4  ouyes  de  luy  .i  s""  fdeles  ■  &  dit    que  plu- 
fieuys  en  font  tefmoins.  Puis  il  adioufte^x*  ceux 
la  fourrant  aiifii  biei:  eijfeigner  les  :uires.Or  ici 
nous  voyons  derechef  quel  tlirefor  c'eft  que 
del'Euangile,  &  combien  il  eft  priféde  Disu. 
Vrayeftquc  l'ingratitude  du  monde  eft  telle, 
qu'on  n'en  tiendra   conte  ,  qu'aiiiouid'huy 
beaucoup  font  foulez  delà  do£lrinede  falut, 
les  autres  n'y  ont  iamais  prins  gouft  :  &  com- 
bien qu'ils  l'entendent ,  fi  eft-ce  que  iamais 
n'ont  fenti  nulle  efficace.ni  la  vertu  de  ce  qui 
eft  là  contenu  ,  que  ce  leur  eft  tout  vn  ou  de 
l'Euangile.ou  de  la  Papauté, tant  ils  fontftupi 
des.Lesautres  mefmes  fe  font  endurcis  en  tel- 
le impieté  ,  qu'il  n'y  a  plus  de  raifon  en  eux, 
qu'il  n'y  a  non  plus  de  religion  qu'en  des  chiés 
&  des  beftcs  brutes. Les  autres, qui  pis  eft,forit 
enuenimez,qu'ils  grincent  les-dents ,  &  qu'ils 
voudroyent  auoir anéanti  tonte  mcmoirede 
Dieu:nous  voyons  cela  à  l'ail. Pour  cefte  eau 
fe  retenons  ce  qui  nous  eft  ici  dit ,  c'ïftafça- 
uoir ,  puis  que  Dieu  nous  a  donné  vn  tel  thrc- 
for  &  fi  ineftimable  qu'eft  fa  parole  .qu'il  nous 
faut  entât  qu'en  nous  fera  employer  à  te  qu'il 
foit  conferué  en  fon  entier,&  qu'il  ne  periffe 
point  ;  fiir  tout ,  ceux  qui  font  ordonnez  pour 
prcfcher  r£uangile,doyuent  auoir  ceci  pour 
recomm.mdc  ,  que  la  dotlrine  de  falut  ne  d'e- 
chee  point  ,&  qu'elle  ne  foit  point  efteinre, 
mais  qu'on  la  rcçoyue  ,  &  qu'elle  foit  gardée. 
Tant  y  a  au  Al  q  chacun  en  fon  ordre  .SI  en  fon 
degré  doit  auoir  vne  telle  affê(flion,&  y  apgli 
qucr  fon  eftude.  Voila  à  quoy  f  nd  le  propos 
de  S.Paul  en  ce  partage, quand  il  dit.Ces  chfvs 
que  lu  .isoHfts  (ftmoy  que  tu-Us  cimet tes  à  gfs_ 
qui [■•ycni  fich^.lXck  vray  qu'en  prcuiiei  I:eu 
chacû  doit  auoir  ce  thretor  ferré  en  foncœur, 
&  la  clef  pour  le  garder  eft  b  bône  confcicce: 
comme  nous  auons  vcu  par  cideuant,qiie  ceux 
qui  n'ont  point  de  crainte  de  Dieu,  ont  efté 

en 


SVR    LA   II.  A  TIMOTH. 


m 


itnfondrw,  comme  fi  Satan  les  eufteueipo- 
fez  en  proye.  Car  c'cftbien  raiibn  aufsi  que 
Dieu  fe  vcge  de  ces  gens  profanes  qui  fe  mo- 
quent de  fafainfte  ParoIe.quilapoUuctmel- 
châment.Et  ainfi,voulons-nous  que  ce  thre- 
for  nous  demeuref  Qu^vn  chacun  en  premier 
lieu  le  ticne  comme  ferré  en  fon  cœur.  Mais 
cependant  ce  n'eft  pointaflèz  que  nous  pen- 
lîons  à  noflre  lalut ,  ams  il  faut  qu'en  gênerai 
Ja  cognoiflànce  de  Dieu  rcluife  par  tout  le 
monde  ,  Se  qu^vn  chacun  en  foit  participant, 
que  nous  mettions  peine  d'attirer  au  chemin 
de  falutauec  nous  ,  tous  ceux  qui  font  efga- 
rez  :  &  que  nous  ne  penlîons  pomt  feulement 
en  noftre  vie, mais  après  iioftre  trefpas:  com- 
,  pi  «neaufii  fainft  Pierre  le  propofc  en  la  fecon- 
r  '  '  '  de  Canonique  ,  d'autant  qu'il  voyoit  iâ  mort 
prochaine,  &  qu'il  faloit  qu'il  de/logcaft,  il 
dit  qu'il s'eftudie  àfaire  que  la  nienioire  de 
ce  qu'il  a  enfeigné  l'a  vie  durant  ,  viue  quand 
Dieu  l'aura  retiré  d'ici,  &  qu'il  ne  conuerfera 
plus  entre  les  hommes,  que  neïtnioins  on  ait 
Ibuuenance  de  ce  qu'il  aura  prtfclié.  Et  c'eft 
aufsi  à  quoy  f.iinù  Paul  a  pretenji.i  en  ce  paf- 
fage.Apprciiôsdonc  quand  il  eftqueftion  que 
l'Euangilc  foit  reccu.que  les  fils  des  fils  ayét 
vne  mefme  grâce  ,  &  que  quand  Dieu  fe  fera 
reuele  à  vn  peuple ,  ceux  qui  viendront  après 
cftans  reflufcitez  des  morts ,  fentent  la  vertu 
qui  H'auoit  point  efté  attendue.  Ainfi  donc 
nous  voyons  en  premier  lieu  ,  que  l'Euangile 
cft  comme  vn  déport ,  &.  vue  choie  precieufe 
qui  nous  cft  commilc  :  &  Dieu  nous  faitcelî 
honneur  que  nous  en  femmes  gardiens  :  en 
quoy  nous  deuons  fentir  combien  nous  fom- 
tiics  obligez  à  luy  .  Car  quelle  eft  noflre 
condition,  que  Dieu  nous  mette  entre  les 
mains  ce  qu'il  a  le  plus  précieux  &  le  plus  di 
gne?  Car  fa  gloire  reluit  en  l'Euangile,  c'efl 
le  fceptre  de  fon  Royaume  par  lequel  il  veut 
gouuerner  les  fiens  :  &  toutesfois  il  nous  le 
cômunique. Apprenons  doiicde  n'eilre  point 
nonchalans  pour  letter  à  nos  pieds  vne  chofe 
li  excellente:  mais  ii  le  monde  n'en  tient  con 
te,  que  nous  prilîonscomme  il  appartient  là 
dignité.  Voila  pourvu  item.  Et  au  rcfte,  que 
ceux  qui  ont  la  charge  de  prcicher  l'Euangi- 
le,aduifent  de  laiie  en  forte  qu'ils  prenét  vne 
li  bonne  racine  que  iamais  ils  ne  flccIiiHent, 
combien  que  le  diable  ne  celïè  d'cfraouuoir 
troubles  &  fcandales  pour  tout  peruertir.que 
noushatailliôs  à  l'oppofîte  entât  qu'en  nous 
fera  ,  &  que  nous  ne  procurions  point  feule- 
ment que  l'Euangile  floriiTe  auiourd'huy  & 
profpere  ,  mais  qu'après  naftremoit  ilyait 
toufiours  quelque  peuple  qui  adore  Dieu  ,  ic 
^  que  la  doftrine  ait  &rctiene  fa  vigucur,&  que 

ifi.^O.S  £e  que  J,t  iç  Prophète  Haie  fe  voye  entre  les 
hommes, que  la  vérité  de  Dieu  cft  permanéte, 
Se  qu'elle  ne  défaut  iamais.  Mais  pour  mieux 
comprendre  ceci,  notons  que  fainà  Paul  dif- 
ccrne  la  pu;  été  de  l'Euangile  d'auec  les  do- 
diincs  ballardcs,  quand  si  dit ,  Les  cl>  fei  qiic 


tu  as  ouycs  demoy,  Car'deCâ  noaî  atlons  Vcu 
comme  l'Antechrift  baftifloit  fout  terre  &  eti 
cachette,delîa  il  y  auoit  beaucoup  de  trompe 
ries:&ainli  il  eftoit  befoind'eftre  prudent  & 
attétif  pour  fçauoir  quelle  eftoit  la  pure  iîn» 
plicité  de  la  parole  de  Dieu.  Or  fainil  Paul 
s'eftoit  bien  glorifié ,  &  à  bonnes  enfeignes, 
qu'il  eftoit  meflager  de  lefus  Chrift,&  orga- 
ne du  faindt  Efprit,  tellement  que  ce  qui  a  e- 
i\é  ouy  de  luy  ne  peut  eftrc  reuoqué  en  dou- 
te.Saind  Paul  donc  a  donné  ici  vne  marque  à 
la  bonne  doûrine,afin  qu'il  y  en  ait  vne  cent 
tude  infallible.Et  c'eft  cncores  vn  article  que 
nous  deuons  bien  noter.  Car  nous  voyons  la 
légèreté  qui  eft  aux  hommes,  que  fans  difcre 
tien  ils  rcçoiuent  tout  ce  qui  leur  fera  mis  en 
auant  :  mefmesils  ontvn  appétit  corrompu; 
que  C  on  leur  apporte  quelque  vanité  &  raen 
fonge,  incôtinent  cela  fera  receu  auec  vn  dé- 
fit ardent.d'autant  que  les  hommes  fontaini» 
volages  ,  3c  que  mcfines  il  y  a  vne  folle  con- 
uoitife  &  corne  brutale,  d'auoir  quelque  nou- 
ueauté,  fainél  Paul  notamment  veut  que  nous 
cognoiAions  quelle  eft  ladoûrinc  de  lafoy, 
en  laquelle  nous  auons  cfté  eni'eigncz  ,  que 
nous  foyons  bien  refolus  que  c'eft  la  vérité 
certaine,&  que  nous  ne  la  tenons  point  du  co 
fté  des  hommes,  que  nous  ne  chemines  point 
à  l'auéture.niais  que  Dieu  eft  le  vray  autheur 
de  noftre  foy,  &:  qu'il  en  eft  le  garent.  Voila 
donc  ce  que  fainct  Paul  a  voulu  lignifier. Oril 
ne  fe  met  pas  ici  en  la  place  de  lefus  Chrift 
pour  vfurper  maiftrife  ,  (  comme  nous  auons 
vcuauparauant)car  ilnes'cftrien  referucfi- 
non  qu'il  elloit  feruiteur  de  lefus  Chrift  :  il 
prefuppofe  donc  ce  qu'ila  dit  défia.  EtainA 
il  veut  retenir  Timothee  en  la  droite  obeif- 
lànce  de  l'Euangile:  c6me  s'il  difoit  que  nous 
ne  pouuons  eftre  tranfportez  çà  &lade  va- 
riété dedoftrine  ,  quand  nous  regarderons  â 
ccluy  que  Dieu  nous  a  ordôné  pour  Maiftre. 
Que  donc  noftre  foy  foit  fondée  corne  il  ap 
appartient ,  ainfi  que  fainft  Paul  rend  ici  tef- 
moignage  à  Timothee.  Mais  il  dit  que  cela 
s'eft  fait  deuant  flufieurs  tefmoins, non  point  à 
caufe  ni  au  regard  de  Timothee  :  car  Timo- 
thee fçauoit  allez  que  fainâ  Paul  ne  l'auoit 
point  abbiuuéde  menfonge  :  comme  il  eftoit 
aufsi  perluadé  par  le  ûinft  Efprit,que  la  do- 
drine  qu'il  auoit  ouye  de  fainft  Paul  eftoit 
du  tout  celefte  &:dimne  :  Timothee  a  cela:il 
ne  luy  faut  dôc  point  de  teCiioins  d'ailleurs, 
fa con/cience  luy  en  refpond  afltz.il a  le  feau 
de  l'Ei'prit  de  Dieu  qui  cft  enregiftré  en  fon 
cœur,  &cela  luy  fuffit  tant  &:  plus.  Mais 
fainct  Paul  a  voulu  ici  prcuenir  la  malice 
de  ceux  qui  pouuoyent  obiecter  à  Timot 
thec  ,  qu'il  auoit  forgé  en  fa  tcftc  ce  qu'il 
prelchoit.il  remonftre  donc  qu'il  y.  auoit  af- 
fez  de  bons  tcfmoins,  lefqueh  aideroyent  Ti 
mothcc  à  .maintenir  qu'il  n'a  nen  introduit 
de  nouueau,oii  d'eftrangc'nujs  qu'il difpenle 
loyàumcnt  ce  qu'il  a  reccii,5;ce  qui  li.y  ,uioiî 
A.i.iiii, 


376 


SERMON     VIII. 


eftéanoncé  par  11  bouche  de  faind  Paul  mefi 
me.  Vray  eft  qu'il  faut  que  ces  tefmoins-ci. 
foycnt  choifis;  il  ne  faudra  pas  aller  prendre 
ceux  qui  font  des  borgncitqiiand  ilv  auroyét 
vcu  tuer  vne  douzaine  d'iiomrues.on  ne  fçau- 
roit  arracher  vn  mot  de  leur  gorge.Ilne  faut 
point  aller  chercher  ccj  telinoins  internaux, 
comme  nous  les  voyons  auiourd'huy  :  ceux 
auGi  qui  foutfnront  que  le  nom  de  Dieuloit 
blafphemé  &delchiré  par  pièces, qui  varront 
vnmefpris  tout  manifefte  de  Dieu  &  de  fon 
Euangile.qni  verront  des  diffolutions  fi  vilei 
nos  que  c'eft  pitié  :  &  cependant  rien  de  tout 
cela.-tant  s'en  faut  qu'ils  s'y  oppofent,  que  fi 
on  les  iblicite  de  feruir  à  Dieu  d'vn  feul  mot, 
il  ne  lera  quelHon  que  de  le  frauder.  Mais  S. 
Paul  parledes  tefmoins  qui  auoyent  profité 
en  l'Euâgile  auec  Timothee:  ceux-là  deuoy- 
ent  aufsi  luy  aider  afin  que  la  doârine  demeu 
raft  ferme ,  côbien  qu'elle  fuit  de  tous  collez 
combatue.Et  ainfi  nous  voyons  encores  l'in- 
tention de  fainft  Paul  quand  ce  mot  eitad- 
loufté,  Commets(àiC-il)cefte dofirinf  .^i  gens  fi- 
dèles y  hfqn^Ulafinffent  aiiffi  anoncct  aux  att- 
ires. Qiiand  il  dit,  à  gens  fidèles ,  il  n'entend 
pas  iîmplement  ceux  qui  auront  creu  à  l'E- 
uangile  ,  mais  gens  qui  auront  vne  loyauté  & 
droiture  pour  feruir  àDieu  ,  &  qui  ne  feront 
point  doubles. En  femme  dôc  famft  Paul  par 
le  ici' de  fidélité  &  rôdeur  :  comme  s'il  difoit, 
qu'il  y  en  a  beaucoup  qui  trahiffent  Dieu  & 
fa  parole,  &  qui  defguifentmefmes  les  chofes 
tellement  que  tout  s'en  va  en  confufion.  On 
<n  verra  (dit-il)beaucoup  de  tels ,  mais  il  eft 
queftiondechoifirgensoù  il  y  ait  intégrité 
polir  feruir  à  Dieu, où  il  y  ait  vn  bo  zèle  pour 
tenir  &  conferuer  la  doftrine  en  fa  pureté,  ji- 
fin  qu'elle  ne  s'abbaftardifle  point  en  façon 
que  ce  foit.  Et  notamment  il  eft  dit  qu'enco- 
res  ils  pourront  ertfeigner  lesautres:comme 
s'il  difoit  qu'il  faut  que  celle  ièmence-ci  s'ef 
pande.   Caraiifi^i  quand  nous  auons  prefché, 
ce  n'eft  pas  alTcz  qu'vn  chacun  perife  de  foy, 
mais  il  no' faut  tafcherque  Dieu  foit  cognu 
partout  le  monde  :  &  pour  ce  faire  nous  dé- 
lions attirer  les  vns  les  autres  :  comme  dit  le 
Ip.1.3.    Prophète  Ifaie,  qii'vn  chacun  tendra  la  main 
à' fon  prochain, pour  dire,  Allons  en  la  monta 
gne  du  Seigneur, &  il  nous  enfcignera  lés  vo- 
yes.  Afin  donc  que  nom  ne  foyons  point  ad- 
donnez  à  nous  ,  laincî'  Paul  monftre  qu'il  ne 
nous  faut  point  chbifir- gens  qui  ne  puilTent 
communiquer  aux'pourésignorans  ,&  ceux 
qui  ont  befoind'eftre  enfeignez.ce  qu'ils  au- 
ront rcceu.  Or  fi  le  téps  a  iamais  efté  de  prat 
tfquer  ccfte  doûrine,  nous  le  voyons  auiour- 
d'huy.Car  d'autant  queDielta  derechef  aWu 
mé  vne  clarté  fi  viiie  que  les  chofes  font  Co- 
nnues, &c  côbien  que  le  mondé  cuft  efté  côine 
.ibbruti.iVqu'il  euft  cfte  en  des  ténèbres  fi  ob 
fciires  qu'il  n'y  auoit  qu'àbyfmes  par  tout  ,  fi 
voit-on  corne  auiourd'huy  nous  fommcs  ef- 
clairez  par  l'Euangile  ,  que  Dieu  feuunûre 


priiiément  à  nous  comme  face  à  face.  Or  le 
diable  voyant  que  fi  ceftc  clarté  dure.il  a  per 
du  fon  règne  ,  il  machine  tout  ce  qui  luy  eft 
pofsible  afin  d'obfcurcir  ou  defguifer  cefte  pu 
re  vérité  ,  ou  en  vne  façon  ou  en  l'autre  ;  Se. 
nous  voyons  comme  les  caphars  font  à  loua-* 
ge  en  La  Papauté  pour  s'eleuer  à  l'encôtre  dé 
ladoûrine,  voire  auec  vne  rébellion  diaboli- 
que. Car  ils  fontaflez  conuaincus  qu'ils  n'y 
peuuent  refifter:  mais  fi  eft-ce  qu'ils  lont  ve-« 
nus  à  cefte  impudence  ,  de  defgorger  tout  ce 
qui  leur  eft  pofsible, afin  de  retenir  toufiours 
k  pourefimple  peuple  en  fuperftuion  :  nous 
voyons  cela.  Et  quand  ils  ne  peuuent  du  tout 
renuerfer  la  doftrine  de  Dieu  ,  ils  la  rendent 
odieufe  ou  fulpeifle,ils  la  defguifent  ou  en  v-  ^ 

ne  façon,ou  en  l'autreinousvoyonstoutce- 
la.Et  mefmesau  milieude  nous  Satan  ne  fait 
il  point  de  tels  efforts, que  fi  le  zèle  des  ferui 
teursde  Dieun'cftoit  aiguifé  ,  qu'il  faudroit 
que  tout  ce  que  nous  auons  main  tenant  de  co 
gnoiflance  fiift  tantoft  aboi:?  Car  nous  voy- 
ons les  calomnies  qui  fedrefllnt  contre  la  do 
iflrine  deDicu.  Il  eft  viay  qu'on  s'adreffera 
aux  hommeç,ouonenferale  lemblant  :  mais 
quoy  qu'il  en  foit,on  voit  que  Dieu  eft  dire- 
âement  affailli,  qu'on  ne  pourra  fouffrir  que 
l'Euangile  fe  prelche  comme  il  doit  ,  &  en  (a 
pureté. On  eft  li  venu, de  brider  le  S.  Eiprit, 
qu'auiourd'huy  on  voudroit  que  les  points 
fuflent  oftez  de  l'Efcriture  l'ainûe ,  quand  ils 
nevienent  point  àTappetit^  à  la  guife  de 
ceux  qui  veulent  airoir  plus  de  droit  que  n'a 
point  Dieu  mefnie.Onvoit  toutes  ces  chofes: 
on  voit  des  canailles  qui  ne  ceflentde  ietter 
leur  venin  &  poifon  ,  afin  que  la  doclrine  de 
Dieu  foit  haye  :  on  verra  l'ambition  qui  en 
tranfporte  beaucoup  ,  lefquels  ne  ceflent  de 
remuer  mefnage.Etcébien  y  ena-il  qui  che- 
minent purement,  &r  qui  cherchent  que  Dieu 
foit  honoré  ,  &  que  fa  face  rcluife  ,  à  ce  que 
nous  foyons  transfigurez  en  icelle?  (  comme 
dit  faintf  Paul)Le  nombre  de  ceux  qui  chemi  i.Cor.5. 
nent  ainfi  rondcmét  eft  bien  petit  &  clair  (e-  18. 
mé.  D'autant  plus  donc  nous  fiut-il  efforcer 
pour  garder  ce  déport,  &  ce  thiefor  tant  ex- 
cellent &  facré  que  Dieu  nous  a  commis.  Et 
cependant  adiiifons  bien  que  nous  foyons  re- 
foius  en  nos  confciences,pour  ne  point  chan- 
celer ,  &  pour  n'eftre  point  esbranlez  .îtous 
vents.Car  quiéftcaufe  qu'auiourd  huy  on  en 
voit  fi  peu  qui  perfiftent ,  Srlurtéut  quand  iJ 
y  a  quelque  trouble  cleué,  qu'incontinerit  les 
Voila  duiertis  &  desbauchez  :  qui  eft  caufe  de 
cela.finon  que  iamais  ils  n'ont  efté  édifiez  c5 
me  il  appartenoit,  qu'Us  ont  feulement  flairé 
l'Euangile  côme  en  partant?  Il  eft  vray  qu'ils 
feront  des  gras  fiippofts,  il  n'y  aura  que  poitr  *^ 

euximais  fi  eft-ce  qu'ils  ne  fçauroyét  refpo'n 
dre  d'vn  feul  article  de  foy, moins  que  les  pe 
ti'!  enfans.  Cii'and  on  demandera  à  ceux  qui 
font  des  grans  zélateurs  (  lefquels  ,  lî  on  les 
veut  crone,ont  foit  meiufiiles^&fçaurôt  liien 

prefchcr 


s  V  R    L  A   I  r.  A  T  I  M  O  T  H.  5^7 

pr«fcher  leurs  p'rouefles)<]nî<l,  di-ie,  on  leur  ia  tenions  comme  letresclofes  où  le  mondi- 

demandera  que  c't it  de  Dieu ,  &.  comme  il  le  n'entéde  rien,voire  les  ignoranï,&  les  idiot», 

fautptier.quec'eftdeielus  Chrift,  ils  feront  auec  les  plus  iages  &entcdus.Maisdenoi)re 

là  comme  bcftes:&  il  ne  s'en  faut  point  esba-  cofté ,  encores  que  la  Loy  de  Dieu  nous  foit 

hir ,  car  ils  ont  par  trop  abulé  de  la  cognoif-  côme  des  letres  cachetées  ,  que  nous  ne  foy- 

fance  qui  leur  eftoit  donnée  :  ce  {but  des  y-  ons  pas  pourtant  ignoras  de  ce  qui  cftli  con- 

uronencSjdes  paillars,  &  gens  diflblus  en  tou  tenu.  Car  c'efl  aufsi  ànous  qu"'il  j'addrelîè,& 

tes  fortes,  pleins  de  trahifon,  pleins  d'enuie,  fur  tout,  ceux  qui  ont  la  charge  d'anoncer  la 

&de  rancunes ,  adonnez  à  toute  corruption,  parole  de  Dieu.ayent  cela.qu'ils  puifient  di- 

&  raefmes  qui  ne  ceflent  de  defpiter  Dieu,  re  auec  le  Prophète  Ifaie.Me  voici, Seigneur, 

non  feulement  en  prnté, mais  qui  voudroyent  auec  les  ieruucurs  que  tu  m'as  donnez.  Cat 

auoirofté  toute  difcipline,  &  toute  bonne-  ce n'eit  point aflez  que  nous  approuuions la 

llctédu  milieu  des  hommes  :  ils  prophanent  doftrinedeDieueftrevraye.maisil  aousfaut 


àTceil.  Et  pourtant  foyons  bien  aduifcz  de  appelé,qu'il  dife,  Me  voici, Seigneur.auec  les 
a'auoir  communication  auec  telles  gens.  Et  enfans  que  tu  m'as  donnez.  £t  afin  que  nous 
ainfi,  que  nous  rcfte-ilfinô  qu'il  y  au  debôs  foyons  plus  animez  de  ce  faire  ,  notons  que 
tefmoins  qui  foyent  pour  nous  aider  à  main-  cela  n'a  point  efté  fculemeat  efciit  pour  le 
tenir  la  doârine?  Et  cependant  cognoiflbns  temps  d'Ifaie.  Car  l'Apoftre  en  i'Epiftre  aux 
que  nous  fommes  venus  au  temps  dont  par-  Hebrieui  nous  môftre  qu'il  faut  qu'il  foit  ac  H«Sr  i 
ifa  S  T(f  '*"*  ^^  Prophète  Ifaie;car  il  reçue  que  Dieu  côpli  au  téps  de  noftre  Seigneur  leius  CLriA,  j, 
^'    '      luy  a  commandé  qu'il  cacheté  fa  Loy  entre  &  fous  fon  règne  :  qu'auiourd'huy ,  combien 
{es  difciples.  Ileftvray  que  le  Prophète  a-  que  la  trompette  fonne  par  tout,  &  que  les  au 
uoitefté  enuoyé  pour  prefcher  en  commun  reilles  nous  foyent  affez  batues.fi  eft-ceq«e 
la  doôrine  de  Dieu  à  grans  &  à  petis.Car  tou  lefus  Chrifi  a  bien  peu  d'audience  :  comme 
te  la  lignée  d'Abraham  cftoit  eieue  en  vertu  aufsi  iJeft  dit  en  vn  autre  paflage,Q£i  eft-cei/^  ,a,' 
de  la  promefle.Mais  quoyfQ^andle  Prophe  qui  croira  à  noft*epredication,&àqui  le  bras  jj,  ,^_ 
te  a  beaucoup  trauailJé,  il  voit  que  la  pl«s  de  Dich  fera-il  reuelé?  lefus  Chrift  donc  fe- ,  g  ,.^^^ 
grand'  part  font  rebelles  ,  voire  &  tellement  ra  mefprifé,  il  fera  reieité.on  fe  moquera  me/  ,q  ,g 
endurcis,  qu'il  ne  fait  que  les  empirer  ,  qu'ils  mede  fa  dcârinextaty  a  qu'ilaura  touiîoOr» 
s'aueuglent  de  plus  en  plus,&  femblent  qu'ils  les  £ens,  lefqueh  il  referue  à  Dieu  fon  Père, 
ayent  confpiré  contre  Dieu.  Surcelail  pou-  SoufFront  doncd'eftre  cottiprins  encefieca- 
uoit  perdre  courage, &  quitter  tout:mai$no-  chette  heureufe  que  Dieu  nous  ordônepouT 
ftre  Seigneur  luy  commande  de  cacheter  fa  noftre  falut,&ne  regardons  point  à  la  malice 
Loy  entre  (es  difciples. Nous  fommes(di-ie)  de  ceux  qui  veuléi  périr  à  leur  efcient,  &  qirt 
auiourd'huy  en  ce  temps.Car  ne  voit-on  pas  ne  peuuét  porterie  mefTagedu  Fils  de  Dieu» 
que  le  monde  a  côplotc  contre  Dieu?  Quant  mais  fuiuons  ceux  qui  nous  monftrent  lebon 
aux  Papiftes  nous  voyons  leur  rage, non  feu-  chemin,  &  cogooifîbns  que  comme  la  doân-^ 
lement  leur  obftination.Mais  entre  nous,qar  ne  de  Dieu  eft  auroatd'huy  aâàillie  par  touti 
ferôs  profefsiondel'Euangile.oùeftlacrain  &  qu'il  y  a  vne  telle  confufion  qu'il  femble- 
te  de  Dieu?  on  eft  ccfte  humilité  de  receuoir  que  tout  doiueruineT,nousauo]]s  aufsi  befoin 
fa  parole  doucement ,  &  en  telle  manfuetude  de  recueilLr  nos  efprits  ,  &  de  fuiure  «e  qui 
que  fainft  laques  commandefOn  ne  voit  qu'v  noi»  eft  ici  monftré.   Car  nous  voyons  ceu» 
ne  fierté  délions  en  beaucoup  :  onverraaiii  quifont  profefsion  d'eftreàl'Euangile,  qui 
autres  moins  d'honnefteté  qu'en  àes  pour-  toutesfoisont  autantd'humanité  en  eux  que 
ceaux:brief,on  verra  des  loups, &  des  renars,  des  beftes  (àuuages.' Il  oe  fera  plusqueftion 
&  tant  peude  brebis  que  rien  plus:  qu'on  re-  auiourd'huy  de  p*rlerde  fraternité  Ctreftié 
garde  çà  &  là  ,  &  on  cognoiftra  qu'il  y  a  vne  ne:mais  fi  nous  regardons  à  oous.on  trouueta 
horrible  difsipation  par  tout. Or  Dieu  ne  pre  le  fcmblable  entre  no*,voire&  pis  beaucoup^- 
tend  qu'à  nous  recueillir  quand  il  nous  a  vne  qn'edtrçles  Payens&Jes  Tnrcs.Carilyen» 
fois  enuoyé  fa  parole,  &toutfesfoi$  no»  voy-  qui  font. beaucoup  pires,  &  faut  aùfsi  que  ce» 
ons  côbien  il  ^  en  a  peu  qui  y  adhèrent.  Que  fte  forcenerie  de  laquelle  il  eft  parlé  aux  Pr» 
rcfte-il  donc iinon  que  nous  fuiuions  l'exem  phetet ,  apparoilTe  en  tenis  ceux  qui  fe  font 
pic  du  Prophète  Ifaie?  Car  Dieu  quoy  qu'il  ainii  moquez  de  l'Euâgile.  Nous  verrons  ces 
en  foit ,  aura  tdufiours  fes diftfiples  quand  le'  vilcinsCcomnve  l'ay  délia  tou€hé)quioDt  voi» 
mondé  T^h  ira  ainfi  en  pcrditioiî ,  &  qu'il  ne  Inmcder  pirnYi  leurs  ordures  la  Hacree  doôrè 
demadèili  qli^à  s'aller  mettre  aux  liens  de  Sa  ne  de  falot,  tfoniv-err&ns  qu'ils  ôet  prétendu 
tn.  Dieu  aura  roufiours  quelque  petite  femen  fauflcmertt  le  AomyêO*èii,  qu'^Us  ont  expo- 
ce.  Ileft  vray  qu'elle  ne  fera  pas  fi  grade  que  fé  en  opprobre  {«HbnV  èi  fiôttre  Seigneur  le; 
il  fcrott  i  foiihaiter  :  mais  cohtentbns-nous  ftis  Ckrift.voire  èntre*!es  PapiftesiCar  if  faut- 
de  cela,&  cachetons  la  Loy  de  Dieu,que  nous  bien  qu'ils  foyent  pleineii>ent  forccncz  ,qiie 


lȔ.i.ii. 


378. 


SERMON    VI  It. 


Dieu  lesin««e  en  fens  reprouué',&  qu'an  âp-  Chrift. , nous  auons  vn  accord 3c  vne  raf  lodîc 

"perçoiucque  le  diable  les  polTedie  da  tout,  aueceax:(commer£rcntureDons.le.môftre) 

«^ifiln'y  aplus  riend?huTnain  en  eux -que  la  mais  Cependant  pour  conclufioo  ,  retenons 

fig«re,&  ce  qui  eft  au  dehors,  qu'encorcs  faut  aufsi  ce  <}ue  fainâ  Paul  met  en  la  fin,  Q»'// 

i-1  q  J'on  voye  qije  Dieu  y  a  imprimé  vnemar  fiafs  fiitt  fortetp  fatitmment  les  affliSlionscom- 

quede  Ton  irc  (Scd^fa  vengeance. Et  ainftprô  me  bons  gendarmes  de  Icfuscbrjfi.  Carlànsce 

fitonsenfuiuâs  l'eyhortation  de  fainû  Paul:  la  nous  ne  pourrôsacheuer  noftre  courfe.  Et 

&  que  ceux  qui  font  commis  pouranoncerla  de  fait, voila  pourquoy  il  a  aufsi  exhorté  Ti- 

Parole,gardent-ce  thiefor  ,  &  qu'ils  le  corn-  mothee  de  fe  fortifier.  Car  s'il  n'y  auoitnul- 

iBufticfuét  àceux  qui  foni  propres  &:  fuffifans  le  gnerie>nulles  afflit^ons.il  ne  nous  coufte- 

pbJr  en  départir  atixiautres..&  que  nousayôs  roitrien  (enfomme)  deferuir  àDieu  ,cefte 

pbur  le/moin^  autant  de  courage  à  mainte-  force-la  feroit  fuperflue:  mais  d'autant  qu'il 

ftir  leTegt>ed€  noftre  Seigneut^Iefus  Cfarift;  aous  faut  eftre  affligez  ,.  Si  que  Dieu  par  ce 

comtwe  hrfu&  voyons  ces  miferaWcscreatures  moyen-la  efprouue  noilrezelCi&le  defîr  que 

éienra^ess  s^effoi-cerile  diftiptr  &le  met-  nous  aurons  de  pecfifter  en  iaParoU,  {unSt 

t-rè'enJdofolâîion.Voilia  quant  àlapra.ttique  Paul  notammét  nous  âdiiertit  qu'il  nous  faut 

tliécofte  dodrine.  Maisretenonsaufsi  ce  qui  eftre  gendarmes  de  lefus  Chrift  :  comme  s'il 

aeftcdit  I  qu'il  nous  faut  fçauoirquec'eftde  difoit  que  Dieu  ne  lailfe  point  les  fîens  en  oi- 

Dieu,&qiie  uous  puifsions  nous  glorifier  que  fiuêté.,  mefmes  que  nous  n'auronspas  vne  vie 

o'eit  de  liiy  qae  uoas  tenons  la  f-oy  que  nous  Angélique  en  ce  monde.niais  qu'eltâs  inefler 

auons',&pon  point  des  Komes.  Cai'iufques  à  parmi  les  conteinpteur,sde  l'Euangile,; parmi 

i  tant^'  oelanoQS  l'oit  bien  pcrfu.idé,  no'  v.olti  les  ennemis  mortels  de  Dieu,  parmi  les  hypo 

gèroii*  toU(îouri,&  ne  faudra  rien  pournous  crites,  parmi  les  diables  encharnez  ,  il  faut 

diuertir  :  t^onsine  nous  voyons  auiourd'liiiy  que  nous  bataillions:  &  cependant  Dieu  nous 

qHC  les-pptis  fcandales  font  pour  faire  dëcli-  coafole  quand  il  dit  que  lefus  Chrlleft  no- 

nerlamoitiéde  ceux  qui  âuoyét  quelque  ap-  ftrc  Capitaine.  Voici  dore  deux  poinfts  que 

parence  de  perfifter  iufques  en  la  fin.  Il  ne  nous  auons  à  noter  ,  &A  retenir  en  fomnie. 

faut  point  qu'ils  attendent  les  grans  heurts:  L'yneft,que  pour  feruir  à  noftre  Dieu  il  ne 

<5u'i!  y  ait  feulement  quelque  petite  bouffée  faut  point  faire  noftre  conte  d'auoir  rnc  vie 

;  de  vent  î  les  voila  incontinent  tranfportez.  paifîble.mais  que  nous  ferons  picquez&  mo- 

,  Et  pourquoy?  D'autant  que  iamais  n'oiitefté  ïeftez-:  &  au  refte,  qu'il  nous  faut  vaincre  esj 

bien  ippuyez  fur  la  vérité  de.Dieu.  Que  doc  patience  ,  qu'il  n'eft  point  queftion  de  nous. 

nous  puisions  difccineff  entre  ceux  qui  fer-  exercer  à  mal  faire,  mais  que  nous  ayons  les 

ueDr>loyanment^  Dieu,  &  que  nous  ayons  ce  efpaulcs  pliees  pour  monftrer  noftre  humili- 

fte  touché  de  l'Efcriiurefainâfe,.  pour  faire  té.  Voila  quant  au  premier  lieu.    Pourle/è.- 

cximen  dé k  dodrine  qui  nous  eft  prefchee,  cond,.puis  que  lefus  Chrift  eft  noftre  Capital" 

3c  que  iamais  nous  n'en  foyésesbrâlez  quand  ne,&  que  nous  fommes  fous  luy.ne  craignons, 

nous  cogndiflons  que  cela  eft  de  Dieu.Et  au  point:eombien  que  nos  ennemis  (oyét  pleins 

reftetnctonsiquiniencores  Dieu  a  quelque  d'efpritdemeurtre.qu'ils  foyent  pleins  de  ra, 

petit  nombre  dépens  qui  adhèrent  a  nous,  ge,  de  malice,  fc  de  trahifon,  qu'ils  facent  du 

■&-conuienent  en  vnité  de  laifoy,que  de  nous  pis  qu'il  leur  fera  pofsible,  que  nous  fuiuiofis 

eft  '.autant  d'aide.  Vray  eft  que  fi  vn  Jiomme.  hardiment.Et  pourquoy  ?Nous  ferons  garejir- 

eftoit  feul:«i  monde,  &  qu'iLfe.veiftdeftitué  tis  fous  la  main  de  ceiuy  qui  a  promis  &  pro-.^ 

de(!oiKecompttgnie,tant  y  a  que  Dieuraert-  nonce  que  rien  de  ce  qui  luy  eft  donné  de^ 

te  bien  d'auoir  cefte  maiftrife  qu'on  fe  tiene  Dieu  fon  Pere,ne  périra,  mais  qu'il  en  fera.fi  'f»-.i7' 

à  Itty.&qu'on  renonce  à  tous  hommes.  Mais  bonne  &  feuregarde,qu'il  en  rendra  bon  coà 

encocesquïd  Dieu  nous  fupporteiufques  là,  teau  dernier  lour.  Or  fi  nous  retenons  ces 

'que  nousnefomraeS:poi)itcôme.efgarezcha  deux  points-ci ,  ilnous  feraa,ifé  de  loufFrir. 

c-un  àpart,  mais-qui'iiy-ena  qui-s'accordent  patiementtoutceen  quoy  Djcunous  voudra^ 

auecnous.iSe  nous  voyofis  comme  l'Euai^ile  exercer.que  nous  tiendrons  bon,  encores  que 

fructifie  &  profete  1  bon  çfcient  jiquejayic  nous-voyons  vne  telle  peruerfité  comme  ellç 

laefme  monftrequp  ce^ix  qui  pncfait  profef-  eft  cognuepar  tout  le  monde;,  &  mefine?  en~ 

fion  de^'Euagilei^i'ont-pas  eftéenfelgnez  en  trenotis>i  qu'on  voit  que  le  d,iable  y  règne  à 

vain  :  quanddoncinous  auons  vne  telle  com-  bride  auallee,  autant  que  fi  iamais  on  n'auoic 

tBunion  eritre  nous,  c'eft  potn  confermer  no  ouy  vn  feul  mot  de  l'Euangile.  Quand  donc 

ftrc  conftâce,&  pour  no'  aider  à  Cuiure  Dieu,  iloijs  voyons  vnp  vilenie  fi  grande.qu'il  fenj- 

Et  ainfî.que  nous  faciôs  valoir  çeinoyen  que  Ut.'que  les  fur.ies d'enfer  font  <:oran»e  efpanr! 

Dicunous  sl<?i>ne  jquqijd  il,  y  a  de  bons;  tefr  dtiet»  &  ,que't,out  eft  en  confufion  extrem^: 

moins.  Et^u-reftp,  r,egardoRS,,onçprcs  plus,  qu«r)d  nous  voyons  cela  ,&,bjen,  il  nous  fauif 

haut. Car  le»!Ange^.4ç'pawdt*.font:tefraoins,  fouffrir  baiflàns  les  efpaules.  Mais  nous^uos, 

de  la  doârinè  que  s»ç>u/:auoflis  receuq  :  nous  vo^bon  garent  au  ciel  :  defpiçons  hardiment 

les  auipns  Comme -freret  Se  conipagndijs  :,«£  cen'vqui  dreflèntainfi  les  cornes. Il  leur  fem- 

qnandàplcinc  bQUche  nous  magnifions  Isfv^  blç  bica  qu'Us  ont  tout  gagné  ,  &  qu'ils  doii* 

uent 


is: 


s  V  R    L  A  i  1 1   A.  T  LM  O  T  H.  371;/; 

oenfdefia.fai^Ê  Ifûis'xriompKes  àl'encoilVc  ,  Içuera  à  J'çncon.tredenous,  &quc  nousver-  '• 

deDieu:mais  fôyo-'afleùrezde  la  vicToiie'Sie  forfs'le  diable  auec  tousies  luppofts  q\)i  ne 

noftre  part ,  &qiie  nous  demeuieions  virto-  demandent  qu'atout  ruiner  &confc»n^ii<;,quij 

rieux.quoy  qu'il  en  foit,  puis  que  nous  auons  nous  cognc^ifiionf  là  vne  lulte  vengeance  de 

Dieu  de  nbftie  pirt,&  fa  mai*  ibra  afiti  tôt-  Di«u  ,  Si qae ileiliatk.les  tran f^orte  qoaml 

te  pour  nous  main  teri:r.  Et  p'cnforis-nousauf  ils  fe  moquent  ainfi  de  Dieu  &  de  fa  Parole,, 

il  que  Dieu  foulFre  ces  blafphcmes,&  qu'il  les  &  qu'ils  ofentdefgorger  de  leur  bouche  piiaii". 

Jaifrefmpunis,qua.nd  fous  ombre  de  Ton  nom  ce  telles  vilemes.Qu^ils  font  cela  pour  l'ho» 


■  qu'il  regarde  comme  luge  coût ■    voit  qw'i 
ce  qui  le  fait  au  monde  ,  .vpire  pour  en  pren-    Et  les  petiv  enfens  Ip  eognoiflent ,  &lc  paû'é! 
dre  la  vengeance  quand  on  aura  ainfi  fiufl'o-'    mcfme;&  tes nvwraii lies  en  retejptiflenC:  briçf, 
ment  abufé  de  fon  nom  ,  ponr dire  que c'eft;    u)ucléihondeipperçdit«e«  cKofes.  Q_uand 
pour  l'honneur  de  Dieu  ,  &  pour  maintenir     bous  voyons  cela ,  demindens  -à  Dieu  qu*H  ' 
i'Euangile?  Penfons-nous(di-ie)qu'il  ait  les     y  pouiuoye.  Et  cependant  reterroris  ce  que' 
yeux  bâdez  ou  aueuglez,  qu'il  ne  voye  point     dit  faind  Paul, que  iî  nou<.  fommes  vrais  geni 
j'outrage  qu'on  fait  aux  liens, &  le  ™efp"s  fi  ;   darmes  delel'us  Chrift  ,  il  nous  faut  loufFrir' 
énorme  de  ("a  Parole?Non,non:qu'on  s?atten     iufques .'  ceqii'ildcfplbye'fon  bras  fort  pour  ' 
de  hardiment  q  Dieubefongnera  en  lelle  for     vaincre  tonsnosi  ennemis.   Car  comme  iféft  ' 
le.quenoltrepatience  nous  apportera  viftoi-;  dicqu'ileft  le  Paftieur  des  brebis  ,  &  qu'il.'a  » 
re  quand  nous  bataillerons  ,  voire  chacun  en .  vne  verge  .po»r  nous  conduire  doucementi  ,• 
fon  eftat.  Si  que  nous  cognoilhons  à  quoy  le     &.ppur  nous  recueillir  à  foy  :  aufsi^u  coii*»  •' 
Fils  de  Dieu  nous  a  appelez.  Etd'autant  que     t<-aire  ,  ila  viïdbarredefer(commeil  eftdif* 
nous  fommes  liens  ,  qu'vn  chacun  fe  dédie  a     au  Pfeiume  fécond  )  pour  caflet'  Si  brifer  le».  ' 
luy.&cependantque  nous  prenions  courage.     teiVes  de  tous  cenx'.qui  fe  voudront  eleue^- ' 
Ileft  vray  que  ce  font  de  grandes  tentations     contre  luyi&'norifeultmentces'petitesitiar-' 
quand  nous  v«oyons  que  la  iuftice  eft  comme     maille';, mais  les-Rois&'leS'Princes ,  coramB'* 
enferrée  en  vne  petite,  chambre  ,  .&  que  les!    iidldtrau  I^eiitme  centdixiame.'  Prions-le' 
brigandages  regneot  par  les-  rues  ,  &  p.1r  les.    (di-ie).qu&rious  voyons. éelà  accompli:  Re- 
places publiques,fansofer  forti r: comme lî  vn     nousJe'veiron.s'hioycrinanrque'  nousayonS-' 
hommeeftoit  dedans  fa  maiCjn .,  &  qu'ail  eufl.    là'  patience  d'attendre  ,  &  que  nous  iuy  fi--' 
là  tous  fes  inftr_uraeus,-&  cepédanc  qu£  les  \oi    ciolis  cell  honneur  de  flout'  remettre  du  tout^ 
leurs  Iuy  veinflent  rauir  fort  bien  &  fa  fubilatf     enfaptoteÛion^ 

«e.que  l'vnfauchaft  fes  prez-,  que  l'autre  feift     -  :'•[•;•. 

moiffon  , que l'autrefeift  vendange,  &  qu'il  ,  .O  R-nous-nousproffernerons  detian't  ISW:', 
fuftlàcoramecaptiif,  ayant  fculemcnrfes  in-.  fa<0  de  noftre  bon  Dlèa  en  .cogOoiflànce  «le-^ 
ftrumens.en  main.  Q_!iai)d  nous  voyons  qu'il  nosifauies,  leprians  qu'il  nous  les  face  telle-^ 
a'y  aqu'vne  petite  mai  que  de;iulhce  ,  &  cc4-  mont  feiitir,que  déplus  en  plus'nousmeh*iés'' 
pendant  que  lediable  rf.ohxne-  pàifllunineDr»..  peine  de  nous  defpouiilér  de>tC)Otes-lesic^d'ri^ 
&  q  oes chiens  &  ce*  pouKeau^.oe  dtnwdient,  rHptionïdetDoftraihairy  oEn^de-iK^addoti^  i 
.^'a  tout  rerjuetièi ,. voila.de  gittrideï,  «entar--.  r(e>r, plfeinemô  àfa  6iiettibn,'&qp'if  tMM^cti^ 
tions,&  qui  feroyent-pour  dtibaitçKer  les  in-  uerne  par  fes.&inâs  coihmandemens.ît  cOHif' 
firmes»>lais  reuenons  J  ce  ^wJ;  vft'jcKdit.c'eft  me  noDsattanssfa  vérité  efcrite,  qu'aufsî  il  ire-' 
afçauoir  qse  nous  ne  ferons. .poùt  dïflitue*.  forme  nos  caurs  à  icelle  ,n.aas,fupport3ftouf  ~ 
d'aide.,  moysjeMaiit  <^ue  nous  attendions  ea>  iflws  trinosiirfitmitez,  influes  à  ce  qirttrib»" 
fatieoce^jsie  Dieu r«nHdieat«t  diQieri'diXe^,  ai%ft\elbtmerH):ect£tmd£laipti(sùiODê&ùi^ 
pend«j)tquçxiouftch.i!minion*  d,roiitenientj.eh/  ipfticfiAirifi.-npuï  dir^JftOHS^ieutOttt>pùifr'{ 
»oft<e  ¥OM»pn,^^iqrn4tnl.t«4itisraQndies'e'^  (antkJΫire^ektteAc.:V.'n.'.o:i.; , ..-  \  :J..i  ;■,• 
■jîtiioii!nidioo<j  lO.j'.i.i  l'siijJfiî- 
^ijiinriiKl  ifjoft  !i, -iroii-j')  oflon  y- 


•TixiA-  -uM5i3i3i>ii;'j(iaoti  ft3J..:i.;i.';i'i'U  jr-fir-j 
îiîiiiji     >>i/3iirlis  i'iial  îsjuoj.jîkfao'ij. <•-•'' .'3  lofîws» 


-.M)..3  :  ,71 /j  !3:njt3<V.       "i.Èiin-     •':  i:  :',.; -";i.-'^(r-jri '.fTi  l:T  ;  îîi  .utnTTjjTftaiI 

-  .i4;'  '  ^ulqm^tdîîîe'',n£imp6fcTe.a^^ 


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BhMt-<  ,■  ..U1.1  ■■ 


j^o  s  E  R  M  O  N    I X. 

ç     Etftaupi  aucun  combat f  ilncjlpointcourontiés'ilnacomhattt 
dcucment. 

6     1/  faut  ^uc  le  laboureur  trauaille  premier  que  prendre  des 


O  V  s  auonf  tcu  ce  mitin 
pourqaoy  (âind  Paul  ex- 
horte icî  Timotliee  de  fc 
porter  en  bon  gendirme: 
cVft  afçauoir  d*aucanc  que 
Dieu  noujveuc  exercer  en 
affliâioDS  ,  8c  que  c*eA  là  la 
miroite  efpreuue  pour  montrer  que  nous  de- 
vrons de  iuy  obéir  en  tout  Se  par  (out.renon- 
çans  à  nos  propres  volôcez.Nous  auûs  veuauf 
R  pourquoy  il  mec  notamment  en  auanc  no- 
Are  Seigneur  Icfus  Chrifl,  c'cAa£n  que  nous 
fçacliions  à  quelle  condition  il  nous  taut  gucr 
royer:r.on  pat  en  mal  faifant.côme  font  ceux 
qui  ont  le  diable  pour  capitaine  :  ceux-là  ne 
cercbent  qu'à  nuire  :  mais  il  ru>Mc  faut  en  pa- 
tience pofleder  nos  âmes,  Se.  tafcher  de  rain» 
cre  le  mal  en  bien  Faifant.Au  reHe.quad  nous 
fonimes  fous  Tenfeigne  de  noftre  Seigneur  le 
fus  Cbrill,ne  craignons  pat  que  Tiflue  de  tous 
nos  combats  ne  foit  bonne  ècheureufe  pour 
nous:coinbieu  que  les  merckans  pourront  fai 
re  leurs  triomphes ,  fi  eft-ce  qu'ils  demeure- 
ront confus.  Et  de  noftre  coÂé  nous  fommes 
certains,  Se.  ne  pouuôs  tomber  q  fur  nos  pieds 
(  comme  on  dit  )  flc  ferons  rellaurez  en  la  fin, 
d'autant  que  lefas  Chrift  eftconioint  à  nous, 
&  qu'il  ne  foufFrira  iamais  que  nous  foyons  op 
primez.Toutesfois  d'autant  que  c'eft  vne  cho 
Ce  dure  i  la  chair,fatn£ï  Paul  nous  ramené  à  ce 
fte  comparaifoRique  les  gendarmes  de  ce  mon 
de  laiflcnt  tout  leurme(iiage,&  oublié:  ce  qui 
leur  eAcber.afin  de  s'acquitter  enuers  leur  ca 
[>itainc,.Si  donc  on  fàitceilhâneuràdes  hom 
iBesmoirtels,quedeuôs'^noi!isau  Fiisde  Dieu, 
quand  il  nous  fait  cède  grâce  de  nous  rece- 
voir à  farfoulde ,  8c  qu'il  veut  que  nous  le  fer- 
uions?  Car  il  fe  pourrait  pafler  de  nous ,  &  ce 


de  marchandife  ,  il  faut  qu'ils  s'en  déportent. 
Et  pourquoy  ?  Afin  de  plairc(dit  fainû  Paul)i 
ccluy  qui  les  àchoifis.  Puis  qu'ainfî  efl,appre- 
nons  de  nous  addôner  du  tout  au  Fiisde  Dieu« 
Toire  tellement  que  rien  ne  nous  dedourne 
de  fon  feruice.Or  maintenant  il  nous  faut  ap- 
pliquer celle  fimilitude  au  propos  de  l'Apo-» 
ftre.  Nous  fçauons  que  noftre  Seigneur  lefuy 
Chrift  nous  fupporte  iufques  là.qu'il  nous  per 
met  bien  de  vacquer  à  nos  affaires  :  8c  tant 
moins  fommes-nous  ercufables    II  nous  ne 
pouuons  vferd'irne  telle  condition  ,  &lî dou- 
ce.Il  eft  vray  que  cependant  il  nous  faut  cftTC 
prefts  de  tout  quitter  :  il  nous  faut  toulîours  .,  ^    ,  ■ 
auoir  vn  piedleue.  Car  il  elt  dit  que  celuy  qui 
aimera  ou  fa  femiiie.ou  fon  père, ou  fes  enfant 
plus  que  lefus  Chrift  ,  n'eft  pas  digne  d'tftre 
fon  difciple.Nousdeuons  donc  auoir  cela  tout 
refolu  en  nous,  que  s'il  plaift  à  Dieu  que  nous 
n'efpargnions  point  noftre  vie,  que  nous  foy- 
ons prefts  d'eftre  defpouilleï  de  nos  biens: 
brief,  que  rien  ne  noui  empefche  que  nous  ne 
marchions  quand  noftre  Seigneur  lefus  nous 
appelle:il  faut  fuyure  cefte  vocation. Mais  ce- 
pendant fi  voyons-nous  que  noftie  Seigneur 
lefuV  nous  fupporte ,  &'nous  efparç^necn  no- 
ftre infirmité, qu'il  ne  veut  point  que  nous  quit 
tionscequi  eftde  la  vie  prefente, iufques  ace 
qu'il  nous  y  contraint.Commentdouques  en- 
tendrons-nous ce  que  met  ici  fainâ  Paul,  que 
pour  trauaillcraux  négoces  du  Fiisde  Dieu, 
il  ne  faut  point  que  nous  foyons  enueloppe* 
aux  afFaires du  monde.'C'eft  que deuant  toutes 
chofcsnous  regardions  à  quoy  nous  fommet 
appelez,que  nous  auifions  bien  que  porte  no- 
ftre office,  que  nous  ne  foyons  point  preoccu 
pez  de  rien  qui  foit  ,  que  nous  n'ayons  point 
nos  répliques  comme  nous  auons  accouftumé. 


n'eft  pis  pour  necçfsitcqu'rlait  quand  li  nous  -Carfitoft  qu'on  nous  propofe  vne  fentence 


choiut,.mais  c'eft  pour  noftre  falut .  hTeft-ce 
pas  donqucs  vne  grand' honte  que  les'poures 
ibuldats  qui  combatét.&nefçauét  pourtjuoy, 
feront  neantmoinsceft  honneur  à  des  créatu- 
res mortelles, d'oublier  toutes  leurs  affaires  5c 
négoces,  &  cependïttt  que  nouj/pypn»  fi  dé- 
licats qiic'noufne  pùifsiolis  lieh  porter  pour 
l'honneur  du  Fils  de  Dieu?  V.oiiS  donc  i  quoy 
tend  cefte  comparaifon  que  met  ici  faintt 
Paul.Oril  n'eft  iabcfoin  d'amener  lôgue  ex- 
pofîtion  de  ces  mots  .quand  il  parle  des  affai- 
res de  cefte  rie.Car  nous  fçauons  qu'en  temps 
de  guerre  chacun  laifTe/on  train.Â:  fes  pr.itti- 
qiics  ordinaires  ►&  tout  c^Utqui  marchcn(> 


de  l'Efcriture  fainûe  ,  incontinent  voila  vne 
phantafie  qui  nous  viendra  au  deuant.  Et  voi- 
re.mais  fi  ie  fay  cela,  ie  feray  contraint  icmt 
hazarder  en  telle  chofe.Or  pour  bien  nous  ac 
quitter  de  noftre  deuoir  ,  il  nous  faut  mettre 
•fous  le  pied  toiitte  qui  nous  potifroitidii^rtir 
que  nous  ne  fuyuions  paifîblemêt  &  fans  bruit 
ce  que  noftre  Seigneur  lefus  nous  commande: 
&  quand  nous  ferons  cela  en  vérité,  qu'alors 
novs  facions  àufsi  comparaifon  de  toutes  les 
chofes  qui  font  pour  nous  enipefcher,  Se  pour 
nous  reciilcii&  que  tout  cela  foit  mis  bas.Cot- 
me  quay?  C^uand  le  ï^is  de  Dieu.nous  com- 
mande de  "inaînténir'li-'gJoirc  de  fun  Rbyau- 


qiiittent&  abandonnent  leurs  mefnages:  s'ils  me.vdija  le  pionde  qui,  ha  beaucoup  dochofcs 
font  laboureurs, il  faut  qu'ils  laifTent  leli>f  pouThoÙ*  attirer  tour  au  reboiirs  :  &  fi.noui 
champs,*:  icurspofrcfsions:s'i]s  mènent  train    fommes  affoiblis  pour  ccla,fi  nous  faut -il  lur- 


ifio'iter 


.       SVR   LA    II.    A 

monter  toutes  (lifficulteT,&  pafler  pardeflus. 
Voila  doc  quelle  eft  rintétioii  de  fainû  Paul. 
Oi  maintenant  il  nous  fera  aifédecognoiftre 
côme  nous  âuons  à  piattiquer  ceftc dodrinc. 
En  p  remier  lieu,  cognoiflons  la  grâce  que  no 
ftre  Seigneur  Icfus  nous  fait ,  quand  il  noui 
choilit  pour  batailler  fous  luy  .  Car  qui  fom- 
jnes-nous?Or  cepcdant  iî  cft-ce  qu'il  s'en  veut 
feruir.  Puis  donc  qu'il  nous  fait  cc(t  honneur 
de  nous  élire,  nous  ne  fommes  plus  en  noftre 
liberté,  il  ne  faut  plus  barguigner,  mais  nous 
refoudre.que  d'autât  qu'il  nous  a  cleus,il  nous 
faut  fuyure  noftre  train  .  Et  en  quelle  fortef 
Or  nous  voyons  les  poures  geni  du  mode  qui 
trauaillent  pour  feruir  aux  hommes  mortels, 
voire  ne  fçachans  quelle  recompéfc  ils  en  au- 
ront.car  on  les  voit  fruftrez  tous  les  coups  de 
leur  atcéce:  tant  y  a  que  c'eft  le  Claire  qui  les 
nuit ,  tellement  qu'ils  quittent  &  maifon  ,  & 
mefnage,  ainfî  que  nous  auons  dit.  C'eft  donc 
pour  le  moins  que  nous  ayons  autant  de  zèle 
pour  feruir  au  Fils  de  Dieu  .  Or  S.  Paul  ayant 
ainfî  parlé,  adioufte,  Q^t  p q^elqu'-vit  combat, 
HK»rei  ttefirj-il  point  couronné ,  fnrfi  qu'Hait 
tvmhatiKteuimcitt.  Uvfcicid'vn  mot  qui  figni 
fie,  D'vne  façon  légitime  pour  s'cftre  acquits 
té.  Il  femble  bien  que  ce  foit  encores  vne  au- 
tre fimilitude.  Car  le  temps  pafleil  yauoitdes 
luiâes,dcs  iouftes,&  choies  fembIables:(com 
tne  il  eo  eft  parlé  au  neufieme  de  la  première 
aux  Corinthiens)là  fi  quelqu'vn  auoit  bien  cô 
nicncé,  fi  n'auoit-il  point  la  couronne  finon 
^uM  cuft  paracheué.  Comme  en  vne  coui  fe,  s' 
il  yauoit  àcourirvndemi  quart  de  licue,  il  fa 
loit  que  la  courfe  fuft  acheuee,  ou  autrement 
ccluy  qui  auoit  commencé, s'en  retournoita- 
Uec  fa  honte,on  fc  fuft  mocqué  de  luy  s'il  euft 
retourné  à  mi  chemin.  Autant  en  eftoit-il  des 
luiâeurs.  Ainfi  fain6>  Paul  en  ce  paflàge  dit  q 
fi  quelqu'vn  (c  viét  mettre  pour  courir,&Que 
1  vueille  eftre  d'vn  prix  ,  ce  n'eft  point  allez 
u'il  ait  tiré  Tn  coup, &  qu'ilait  fa  t  vne  leuee 
e  bouclier  quand  on  l'aura  rcgardé:s'il  ^'en- 
fuit.s'il  tourne  bride,  on  fe  niocquera  de  fa  kl' 
cheté  ,  &  vaudroit  mieux  que  iamais  ilnefe 
fuft  ingéré, &  qu'il  n'euft  point  efté  cognu  .  Il 
faut  donc  acheuer  le  combat. Ainfi  en  fjmme, 
faind  Paul  parle  ici  de  la  perfeuerance .  Or 
inaintenât  nous  auons  ici  deux  points  à  obfer 
uer.L'vn  eft.d'autant  que  le  Fils  deDicu  nous 
a  appelez  à  fa  gendarmerie ,  que  c'eft  pour  le 
moins  que  nous  luy  facions  autant  d'honneur 
que  font  les  gendarmes  du  monde  à  leurs  ca- 
pitaines.Et  quoy ?C'eft  que  nous  foyôs  libres 
de  tous  empefchemens ,  que  nous  ne  foyons 
point  enueloppez  auxchofesqui  nous  pour- 
royent  retcnirrmais  que  nous  cheminions  har 
diment  pour  nous  acquiiterdenoftiedeuoir, 
piiisqu'ainfi  eft  que  nous  ne  fommes  plus  en 
noftre  liberté  .  Mais  deuant  toutes  chofcs  il 
nous  faut  auoir  prémédité  ce  que  nous  auons 
»en:c'cftafçauoirque  noftre  condition  eft  tel 
l«,de  b«tsiller,puis  que  nous  fommes  appelez 


T  I  M  O  T  H. 


j8i 


l 


pour  eftre  du  troupeau  de  noftre  Seigneur  le- 
fusChrift.  Etau  rcfte.cognoiflons que  noftre 
gendarmerie  n'eft  point  pourcombatrc  cotre 
la  chair,ne  contre  le  fang, mais  contre  les  puif 
fauces  de  l'airfainfi  que  fainâ  Pau!  le  monftre  f.flic.6. 
en  vn  autre  lieu)  cotre  toutes  les  cupiditez  de  Ji. 
noftre  chair,&  contre  toutes  les  tentations  du 
monde.  Il  faut  donc  que  nous  foyôs  cquippez 
pour  ce  faire.  Et  au  refte,  puis  quM  r.out  faut 
endurer  beaucoup  d'afiliûiont,q  nous  foyofv 
aul'si  prefts  pour  les  foulfrir  :  &  fur  tout  co- 
gnoiflons quel'-iflùe  nous  eft  certaine  &  infaJ 
lible.quc  nous  ne  combacons  point '^  l'auentu 
re, comme  au  fvi  Ciinfl:  Paul  nous  le  monftre  en 
ce  jwflage  que  nous  auons  touchc.quc  nous  ne 
fommes  pas  comme  ceux  qui  fe  tourmentent 
beaucoup  pour  auoir  quelque  couronne  de 
fueilles,mais  fouuent  ils  font  trompez  .  Car 
beaucoup(dit-il)courenten  Tnelice,5cil yen  '"  """'^ 
a  votant  feulement  qui  eft  couronné  :  ccluy-  ^*' 
la  qui  a  gagné  le  prix.endefpouille  to*  les  au 
tres.Etde  noftre  cofté,  nous  auons  vne  autre 
condition  bien  meilleuie  :  car  tant  s'en  faut 
qu'vn  chacun  Je  nous  empefcbc  fon  côpaguô 
pour  le  priuer  du  prix  &:dc  la  couronne  oui 
nous  eft  promifc  ,  que  nou'  aidons  les  vns  (es 
autres  .  Celuy  qui  va  le  p'rcmier.ne  fera  point 
pour  exclure  le  fécond  :  le  fécond  n'eft  point 
pour  reculer  le  troifîeme  ,  mais  nous  fomme»^         ' 
tous  receus  au  prix  3:  à  la  couronne.  Ainfi  dôc 
nous  n'y  allons  point  à  l'aucnrure.  Et  puis  il 
n'eft  point  quelHon  de  quelque  couronne  de 
fueilles  qui  fleftrifle  Si  qui  pafle  tantoft  ;  il  n' 
eft  point  queftiô  de  quelque  petite  gloire  que 
nous  aurons  quant  au  monde:mais  noftre  Sei- 
gneur lefusnous  appelle  en  fa  gloire,  il  veut 
que  nous  régnions  auec  luy  .  Ne  faut-il  pas 
donc  que  nous  foyons  par  trop  làfches,fi  cela 
ne  nous  enflamme  tellemét.que  pour  le  moins 
nous  foyons  femblables  aux  gendarmes  ter- 
riens.'Mais  il  nous  faut  aufii  venir  -à  la  perfe- 
uerance .  Car  nous  en  verrons  beaucoup  qui 
ietterontdejgrandes  boufFees,mais  tantoft  ils' 
fe  refroidillent .  Or  ce  n'eft  point  alTez  que" 
nousayonsainficommencé.Qupy  donc?Aui- 
fons  à  quelle  condition  nous  fommes  appelez, 
lefus  Chrift  ne  fait  pas  fes  monftrcs  pour  vn 
iour:  il  veut  que  tout  le  temps  de  noftre  vie' 
nous  courions  .  Il  eft  vray   qu'il   ne  nous- 
faut  point  trauailler  comme  ces  poures  gens 
qui  couroyent  à  la  lice,lefquelsen  eftoyent 
tous  rompus  te  caflez.Car  Dieu  fçachant  no- 
ftre portee,&  combien  elle  eft  infirme, nous  cf 
pargne:mais  fi  eft-ce  qu'il  nous  faut  courir, &  . 
non  pas  feulement  pour  vn  iour.noiis  auons  à 
continuer  tout  le  temps  de  nolhe  vie.  Et  ainfî 
ne  vc-nons  point  impofer  loy  à  noftre  Mai- 
ftre,ne  barguignes  point  pour  dire,  Ho, ie  fe- 
roye  content  de  trauailler  pour  vn  autre  téps, 
mais  ie  voudroye  auoir  relafehe  quand  il  fe- 
roit  téps  de  me  repofer.Que  nous  n'cntriont 
point  en  telles  difputes.Quoy  donc?Sçachôs 
que  noftre  Seigneur  lefuj  nous  a  propcfé  vn« 

£b.iti. 


^^i 


SERMON      XL 


conrlc.en  laquelle  il  veut  que  nous  perfiftions  quoy  qu'il  en  foit,  ne  fouffronî  point  d'cftre 

iiUqucs  àkmort .  Carfi  vn  homme  u''acom-  retardez    quand  Itfus  Chrift  nous  appelle, 
ba:u  comme  la  Lay  porte  ,  ccliiy-Ia  ne  fera-    que  nou^  ne  mircliions   fclon  qu'il  nous  Je 

point  couronné. Car  voici  lellis  Chrift qui  pre  commande  .  Sainft  Paul  ayant  vie  de  telles 

■  ifide  fur  tous  nos  combats,  &  nous  a  mis  l'or-  Compar.iifons,  adioulie  ,  Q»  -vn  laboureur  tra-^ 

dre  &  la  police  telle  qu'il  a  voulu.  Il  nous  faut  nailU  douant  que  receuutr  hs  fruits  Je  la.  ter--, 

doHcairuiettir  à  fa  volonté,  &n'efl  point  que  '*  .  Or  ici  nous  pouuons  luger   que  noftre 

ftioD  de  nous  retirer  quand  bon  no;is  femble-  rature  eft  (î  tardiue  à  Faire  ce  que  Dieu  de- 

rav^in'î  armons-nous  à  perfeucrace:&  toutes  mande,  qu'il  nous    faut  picquer   &  donner 

fois  &  quantes  que  nous  l'erons  folicitez  à  beaucoup   de  coups  d'efperon  ,  deuant   que 

nous  fafcher,&  à  perdre  courage,  que  ceci  nous   fuyons  incitez  comme  il   appartient.' 

nous  viene  au  deuant. Car  le  faindEfpnt  nous  Et  en  cela  deuons-nous  bien  nous  defpJair- 

reproch&ique  nous  ferons  trop  ingrats  fi  nous  re.  Car  n'eft-ce  pas  vne  grande  pitié  que  no-; 

ne  combatons  aufsi  couftamment  fous  lefus  lire  Seigneur  qui  nous  deuoit  auoir  gagnei; 

Chriftj-comme  font  ceux  qui  fc  iettenc  en  vne  du  premier  cotip  faifant  ligne  du  doigt ,  ne-, 

lice  quand  >1  yaura  vn  prix  qui  fera  crié  .  Si  nous  puiffie  efmouuoir,  quand  il  nous  aura  ex— • 

donc  nous  portons  moins  d'honneur  au  Fils  hortcz  de  venir  à  luy  .qu'il  nous  aura  decla— . 

de  Dieuquenefecont  ceuï-lapour  vnegloi-  ré  quelle  cft  fonaffeclion  enuers  nous ,  ^u'il 

re  mondaine,  ne  fauc-U  pas  que  nous  foyons  n'en  puifle  cheuir:  mais  que  nous  demeu-t 

plus  qu'aueuglez.=Ce  n'eft  point  donc  fans  eau  rions  toufiours  là  endurcis ,  quand  il  aura  en- 

fe  qu'il  tft  dit  que  nous  deuqnscôbatredeuc-  cores  adioufté   vne   féconde    rcmonftrancc: 

ment, il  nous  voulons  obtenir  la  couronne  <]ui  pour  redoubler,  que  cela  ne  profite  point ,  & 

nous  eft  promife  .  Et  cependant  aufsi  notons  qu'il  ne  piiillc  corriger  nollre  pareflèf  Quand, 

ce  que  nous  auons  touché ,  c'eftafçaiioir  que  donc  nous  voyons  qu'il  faut  vfer  do  tant  d*' 

CEUX  qui  combatoyent  anciennement,  auovct  aiguillons  pour  nous  picquer ,  n'aiions-nous. 

vjie  affedion  fi  ardente  de  fe  faire  valoir,  que  point  iufte  raifon  de  nous  defplaire,  &  de  ge-> 

c'elloit  pour  leur  retrancher  leurs  morceaux,  mir,  voyans  noftretardiueté  fi  vikine  ;  11  efc 

pour  fe  donner  du  mauuais  temps  :brief,qu'ils  vray  que  fainû  Paul  n'accufe  pas  ici  ni  Ti^ 

nlofoyent  pas  fe  nourrir.  Car  ils  auoyent  ce-  mothee  ,  ni  les  autres.;  mais  fi  eft^ce  qu'il' 

fte  faconde  faire,  iedi  les  luifteiirs  ,  de man-  monftre  que  les  hommes  de   nature  iajnais» 

ger  feulement  du  bifcuit ,  qu'ils  s'abftenpyent  ne  feront  alltz  efmcus  pour  venir  à  D4eu ,  fi 

de  toutes  délices, qu'il  n^efioit  point  quelbon  on  ne  les  folicite  :  &  non  lèulcinent   pourvn, 

dfe  boire  ne  démanger  à  leur  appetit.Et  pour  coup,  mais  il  faut   touGours  recommencer.-, 

quoy  ?  Pour  auoir  vne  couronne  de  fueilJes.  Etmefine  fi  Timtohee  aeubefomd'eftreain'-. 

Or  maintenant  puis  que  Dieu  nous  permet  d'  fi  incité.que  fera-cede  nous  ?  Car  il  s'en  fauo 

vfer  dis  biens  qu'il  nous  élargit,  (  voire  fînon  beaucoup  que  nous  ayons  vn  te]  zcle&arfe- 

que  nous  fufsions  empefchez  de  recourir  à  ftion  que  luy  .  Il  eilvtayque  fainft  Paul  n'a, 

luy)  qu'il  ne  nous  facepoint  mal  quand  il  fe-  pas  eu  cfgard  feulemtnt  à  fa  perfonne  :  mais 

ra  queftionde  fuyure  noftxe  Seigneur  lefus  fi  eft-ee  qu'il  l'a  compris  au  rang  de  ceuic. 

Chrill,  de  retrancher  tout  ce  qui  nous  feroit  aufquels  il  parle.  Qii'i-ft-il  donc  .queftion  de 

en  obftacle.  Et  ainfi  notons  bien  qu'il  nous  faire  ?  Apres  auoir  chalTé  toute  parefie  ,  que 

faut  abftenir  de  toutes  chofes  qui  nous  pour-  nous  aduifions  de  ibuuent  réduire  en  memoiTi 

royent  débiliter  ,&  qui  pourroyent  retarder  le  its  chofes  qui  font  ici  contenues.  Or  le, 

noftre  courfe.  Et  ceci  fe  rapporte  à  ce  que  i'  fainft  El'prit  n'a  point  vfé  d'vn  langage  fij.1, 

ay  défia  touché:  car  nous  ne  pouuons  pas  de-  perflu  ,  quand  il  a  ainfi  recueilli  des  compa^ 

terminer  tout  ce  qu'il  faut  que  les  feruiteurs  raifons  diiierfes  :  c'eft  fign'e  que  fi  Dieu  nous- 

de  Dieu  quittent,  quand  ils  doyuent  batailler  a  crié  pour  vn  coup  l'alarme,  que  noas,fe- 

fous  l'enfeigne    de    noftre    Seigneur    lefus  rions   incontinent  refroidis    s'il   ne   conti^ 

Chrift.Etpourquoy?Auiourd'Jiuy  nous  pour-  nuoit . Et  pourtant  quîvn  chacun  aduife  des.* 

rons  vfer  d'vn 'chofc, qui  demain. ne  nous  fera  elForcfr,que  quand  le  diable  tafchera  de  nous 

point  licite.Et  pourtant  il  nous  faut  regarder  bander  les  yeux  ,  de  nous  afTopir,  qii-de  nous 

à  la  nccefsité  vrgente  de  laquelle  lainft  Paul  empclchcr  en  quelque  façon  que  ce  £bii,  que 

Ait  métion  au  feprieme  chapitre  de  la  premie  nous  prenions  les  remèdes  qui  noas  font  ici. 

reaui  Corinthiens  :  que  fi  auiourd'huy  Dieu  mis  en  euant  .  'Voila  ce  que  nous  auqnj  àn.o- 

nous  permet  d'eftre  à  repos,  &  de  boire  &  de  ter  en  premier  lieu.  Or  maintenant  venonsà, 

manger  à  noftre  aife,  il  ne  faudra  finoa  tour-  cefte  fcntence  :  \n,,hb<iu.reur  tmiiaille  Jeuiit^t. 

ner  la  main  qu'il  notis  appellera  à  poureté,  à  que  recueillir  les  fitiU  s  defin-chamf,(p'  délit-, 

maladie  &autxesfafcheries&trnuaux  .Ainfi  moiffon.  Ici  fainfl  Paul  nous  redargue  pari', 

«Jonc  on  ne  peut  pas  déterminer  chacune  mi-  vfage  commun  des  hommes  :  «omiae  s'il  di- 

nutede  temps  de  quoy  fed,oyuét  abftenirles  foit ,  qu'en  ces  chofes  terriennes  il  ne  fau- 

feruiteurs  de  Dieu  îiTuisregardQnstpufiours  droit  pas  vfcrde  tant  dercuionftrances  .  Et 

à  noftre  vocatipn,(cqmmei'A}!  de^sdit}^  poui^^uoy  ?  Nature  conduit  les  hommes  tel» 


à 


SVR    LA    II.    A    TIMOTH. 


38-3 


lement  ï  que  de  leur  bon  gré  ils  marchent  & 
fondeur  deuoir.  Faut-il  auoir  beaucoup  de 
«refcKeurs  qui  aillent  de  maifon  en  maifon 
aux  laboureurs  de  terre,  pour  dire,  Or  ça  il 
eft  vray  au'il  vous  taudra  maintenant  mener 
la  charrue  aux  champs  ,  &  vous  ne  fçauez 
pas  quel  fruiâvoiis  en  doit  reuenir  :  &  puis 
il  faudra  ietter  la  femence,  il  vous  faudra  at- 
.tendre  que  le  temps  de  moiflbn  foit  venu. 
Faut-il  puis  après,  quant  aux  prez  ,  quant  aux 
vignes,&  toutes  choies  femblabies ,  aller  ain- 
iî-3ifputer  ?  Nenni  :  chacun  y  ed  tout  accou- 
ftumé  parvfage  :  &  les  hommes  ont  défia  fait 
leur  conte  ,  qu'il  faut  trauailler.  Se  ne  leur  en 
fait  .point  mal ,  ils  se  trouuent  point  cela  C;- 
itrange.Et  pourquoy  ?  Il  eft  queftion  de  cefte 
vie  caduque.  Or  maintenant  fi  nous  auons  à 
iuyure  Dieu,  voire  lequel  nous  appelle  à  la 
yie-celeûe  ,  nousnepouuons  rien  porter  :  le 
moindre  trauail  du  monde  nous  feniblera  vn 
&rdeaiifiperant,que  nous  defaudrons  :  brief, 
nous  ne  pourrons  pas  remuervn  doigt  .  Q_ui 
«il  caufe  de  cela  ?  Ne  faut-il  pas  ici  condam- 
ner noflre  ftupidité  ,  comme  elle  fe  monftre 
par  trop  ?  Et  ce  que  l'ay  dit  du  labeur  des 
champs ,  nous  le  voyons  en  touseftats.  Car 
qnandvn  marchant  leue  vne boutique, ou  quel 
que  tiafhque.ii  penfe  bien  qu'il  faut  aller  par 
pluyes&  par-vents  ,  il  penfe  bien  qu'il  fcfaut 
kaza.der  en  beaucoup  de  chofes.qu'ii  faut  ex 
pofer  fa  fubftance  à  beaucoup  de  dangers ,  & 
ne  faut  pas  en  cela  (  comme  l'ay  dit  )  longue 
prédication.  Et  pourquoy?  On  ferme  les 
yeux  à  tout  ce  quipourroit  desbaucher  :  car 
autrement  chacun  raourroit  de  faim.  On  di- 
i;a.  Et  quoy  ?  Si  ie  veux  délibérer  ,  afçauoir  fi 
iedoy  faire  ceci  ou  cela,  que  fera-ce  quand  ie 
Yoy  que  ie  ne  puis  autrement  viure  ?  Il  faut 
donc  conclure  ,  &  exécuter  quant  Se  quant. 
Voila  comme  nous  parlerons  ,  &  monftrons 
aufsi  par  efFe£t  que  cela  nous  eft  tout  per- 
fuadé,quant  à  ce  qui  concerne  cefte  vie  cor- 
ruptible. Il  faut  donc  dire  que  nous  n'auons 
nulle  apprehenfion  de  la  vie  celefte,  quand 
nous  Ibmmes  ainfi  attachez  à  ce  monde  ,  & 
aux  chofesvifîbles ,  &  que  nous  ne  penfons 
point  que  noftre  héritage  eft  au  ciel .  Car  û 
cela  nous  eftoit  bien  conclu,  il  eft  certain  que 
nous  ferions  prefts  à  batailler  autrement  que 
nousnefommespas.  Ainfi  donc  nous  voyons 
maintenant  l'intention  de  faindt  Paul  :  Vn  la- 
boureur (dit-il)  trauaille  deuant  qu'il  reçoy- 
ue  le  frmddcfon  champ.  Or  noftre  Seigneur 
nous  a  appelez  à  cefte  codition  de  trauailler. 
Pourquoy  donc  nous  plaindrons-nous  fi  nous 
n'apperceuons  pas  encores  le  fruift  qui  nous 
en  doit  reuenirf  Et  neantmoias  on  orra  les  ge- 
miflèmens  tous  lesiours.qu'yn  chacun  fe  cha- 
grine quand  noftre  Seigneur  nous  veut  em- 
ployer àfon  feruice,&  qu'il  noustraitte  plus 
xuden^ept  que  nousnefouhaitterions  :  on  fe 
dcfpite^oiDine  délia  i'ay  dit:J£il-ce pour  touf 


iours  que  ceci  durera?Et  fera-ce  pour  tout  le 
temps  de  noftre  vie?  Aurons-nous  toufîours 
ainlî  des  fal'cheries  &  des  moleftes?  Et  ne  fe- 
rons-nous iamaisàrepos?  Voire,  maisc'eftla 
failbn  de  trauailler.  Vn  laboureur  dira-il ,  Et 
fera-il   toufiours  le  prim-temps  ?  Quand  li 
fçait, Voici  le  prtm-temps  ,  il  faut  que  ie  tra- 
uaille ,  c'eft  le  temps  de  mon  labeur  :  dira-ij, 
Et  comment  ?  Les  années  s'entrefuyuent,  que 
c'eft  toufiours  à  recommencer  :  ie  trauailiay 
l'an  palTé,  &  maintenant  il  faut  r'entrer  au  tra 
iiail  plus  que  iamais,i'en  voudroye  e/lre  quit- 
te. Les  hommes  ne  parleront  iamais  ainfi:  car 
ils  voyent  bien  que  ce  feroit  temps  perdu.  Il 
faut  bien  donc  que  nous  foyons  defpourueus 
de  raifon  ,  quand  nous  murmurons  à  l'encon- 
tre  de  Dieu  ,  &  que  nous  ne  pouuons  pas  at- 
tendre patiemment  le  temps  de  moiflbn  pour 
lecueillir  le  fruiû  quinouseft  apprefté  .  Or 
maintenant  il  nous  'faut   retoarner  à  noftre 
comparaifon:  c'eft  que  ces  poures  gens  ayant 
trauaille  ,  fouuent  feront  ftuftezde  leur  at- 
tente: voila  vne  gelée  qui  vendengera  tout, 
voila  quelque  grefle  ou  teinpefte  qui  gaftera 
les  blez,&  autres  fruiâs  de  la  terre  1  &  néant- 
moins  les   laboureurs  ne  fetafcheront  potn» 
quand  ils  auront  eu  ainfi  vne  mauuaife  rencon 
tre, fi  eft-ce  qu'ils  y  retournent.  Pourquoy;ll 
faut  viure.  Or  de  noftre  cofté  ,  combien  que 
nous  ayons  de  mauuais  heurts  ,  tant  y  a  que 
nous  ne  perdons  rien  ,  d'autant  que  toute  les 
affligions  &  miferes  qu'il  nous  faut  porter,ne 
empirent  point  noftre  condition.  Car  noftre 
vie  eft  referuee  au  ciel  en  fi  bonne  garde  qu'el 
le  n'ert  poît  fuiette  ni  à  orages,ni  à  tourbÛlôs, 
ni  à  grefles ,  ni  à  rien  qui  foit.  Puis  qu'ainfi  eft 
donc  que  nous  ne  trauaillons  point  à  l'auentu- 
re,mais  que  nous  fommes  afleurez  du  fruift,ne 
deuons-nous  point  auoir  plus  de  courage  que 
les  laboureurs  de  la  terre?  II  refte  maintenant 
de  veoir  quel  eft  noftre  labeur.  Car  comme  les 
bonnes  gens  ont  à  traîner  la  charrue,  &  puis  à 
faire  le  refte  qui  eft  requis  à  leur  labourage: 
aufsi  de  noftre  cofté  ,  il  faut  veoir  ce  que  no.- 
ftre  Seigneur  nous  commande  :  car  autrement 
nous  pourrions  trauailler  fans  nul  profit, Com 
me  nous.voyons  que  ceux  qui  veulent  eftre  de 
uotsà  leur  phantafie  ,  fe  tourmentent  fans  fia 
&  fans  cefle.Miisquoy ?Ils  n'auancent  de  nen. 
Vn Papifte  quand  il  bruflera  de  zele,apre*  s'e-i 
ftre  beaucoup  empefché  en  fes  fupetftitionsy' 
qu'aura-il  gagné?R.ien  qui  foit:  car  Di«a  defa 
uoue  tout. Il  faut  donc  fçauoir  le  moyé  de  bié 
trauailler.  Et  de  fai<El,pour  cultiuer  Ja  terre.ii 
vn  home  ignorât  fe  fourre  là.il  gaftera  tt>ut,& 
reculera  le  labeur  d'vn  autre. Et  ainfi  pcfons  à 
quoy  c'eft  q  Dieu  nous  employé.  Or  nous  fça 
aqns  quelle  femence  il  veut  que  nous  iettionsV 
npiis  fçauons  quel  labçur  il  demande  de  nous'y 
nous  fçauons  tout  le  refte ,  voire  moyennant 
que  nous  foyons  attentifs  à  efcouter  fa  doûti- 
QC.  Ainûdonc  pour  nous  accjuitter  de  ce  que 

Pb.iiii. 


j84 


SERMON      IX. 


Bouj  monftre  ici  fainft  Paul,  il  nous  faut  eftre 
enfeigntz  carefcholede  noftrc  Seigneur  le- 
fusChiift.  Car  nous  oyons  ce  que  die  le  pro- 
'^•4'  phete  Icrcmie,  que  nous  auons  à  nous  confor- 
mer à  ce  que  nous  voyons  eftre  obl'erué  au  la- 
beur delà  terre:ildit  qu'il  faut  desfricher  cou 
tes  les  efpines  qui  font  en  nous,  &  les  ronces, 
&  les  mauuaifes  herbes.  Car  (i  on  vouloic  fe- 
mer  fur  vne  terre  deuant  qu'on  Tait  labourée, 
que  fera-ce?Si  on  veut  mettre  la  charrue  par- 
mi les  bois  ,  qvand  vne  terre  n'aura  point  efté 
desfricheede  long  temps,  qu'elle  fera  pleine 
de  ronces  84  d'efpines  ,  que  «e  feront  comme 
des  hayes  ,  que  profitera-on  d'y  ietter  la  fe- 
Bience?  Ilfaut  dcsfricher  premièrement.  Et 
ainfi  nous  voyons  qne  fainft  Paul  nous  rame- 
né, à  ce  qui  cft  tout  accouftumé  entre  les  hom- 
mes ,  nous  monftrant  qu'il  ne  nous  faut  point 
aller  à l'eftourdie,  mais  quenoftre  Seigneur 
nous  a  monAré  la  leçon  à  laquelle  il  nous  faut 
tenir.Et  puis.quand  faintb  Paul  parle  de  feruir 
ii  nos  prochains  ,  il  accompare  les  aumofnes  à 
la  femence ,  &  dit  que  ii  nous  femons  chiche- 
ment ,  nous  recueillerons  aufsi  vne  moiflbn 
bien  maigre :mais  fi  nous  femons  libera4emét, 
voila  le  truiûqui  nous  eftappreflé  aflezabon 
dant ,  qu'il  ne  faut  point  craindre  que  nous 
ayons  rien  pei^du.  Par  cela  nous  Ifommes  ad- 
moneUez  (  comme  l'ay  défia  dit)  de  n'y  aller 
pas  fans  difcretion.mais  de  trauailler  en  forte 
qiie  Dieuauoue  noftre  L>beur,&  qu'ill'approu 
uc:  Si  cela  fe  fera  quand  nous  pourrons  nous 
conformer  à  la  doctrine  qu''il  nous  a  donnée 
par  fa  parole.Tant  y  a  que  durant  cefte  vie  il 
nous  faut  faire  noftre  conte  que  Dieu  nous 
veut  exercer  en  trauail:  car  ce  n'eit  point  en- 
core; la  faifon  de  repos  :  fi  noftre  chair  mur- 
mure,fi  nous  fommes  fafchez  &moleftez,  co- 
gnoiiïbns  que  la  faifon  n'eft  point  encores  ve- 
nue de  nous  repofer.  Etpourquoy  ?  D'autant 
qu'il  ne  plaift  pas  à  Dieu.d'autant  qu'il  nous  a 
limité  toute  noftre  vie  comme  à  vne  courfe,& 
qu'il  veut  efprouuer  nofftre  obeiflance  quand 
il  nous  employera  endeschofes  qui  nous  font 
&  rudes,&  fafcheufes,&  defquelles  nous  vou- 
drions bien  eftre  exemptez.  Voila  en  fomme 
ce  que  nous  auons  à  retenir.  Or  en  la  da.Sc 
pour  conclufion  fainû  Paul  dit,  Enten  les  cho- 
Us  qtr  ie  te  frofofe  ,  tp"  que  D  iV»  te  donne  en- 
tendement en  toutes  chofes.  Or  quad  Clinâ  Paul 
exhorte  ici  Timothee  de  bien  obferuer  ce  que 
il  luy  auoit  dit.ce  n'eft  pas  que  les  chofes  foy 
ent  obfcures.  Il  a  parlé  de  cultiuer  les  terres. 
Et  bien,  cela  eft  artèz  commun  aux  plus  rudes 
&  aux  plus  grofsicrs.  Il  aparl-édes  luiâes  & 
des  courfes  qui  fe  faifoyent  :  cela  ne  requiert 
pas  grande  fcience.  Il  a  parlé  aufsi  de  la  gen- 
darmeric,&des  foukiats  qui  quittée  leurs  mai 
fons  pour  feruir  à  leur  capitaine  :  cela  fe  voit 
aircz:il  ne  faut  point  aller  à  l'efchole  pour  ap 
prendre  des  matières  û  vulgaires  que  celles- 
ci.  Mais  fainft  Paul  fignilicque  nousnepoH- 
uons  appliquer  à  noftre  vfagc  ce  qui  cft  le  plus 


commun  du  monde,voire  s'il  le  faut  appliquer 
droitement  pour  nous  conduire  au  Royaume 
de  Dieu.  Car  s'il  eft  queftionde  noftre  profit 
temporel, nous  ne  ferons  que  trop  aigus  &ât- 
tentifs,&  ne  faut  pas  qu'on  nous  dife  deux  fois 
vne  cho(e  :  mais  quand  nous  deuons  venir  an 
Royaume  de  Dieu  ,  nous  fommes  fi  hebetez 
que  quelque  choie  qu'on  nous  dife  ,  nous  n'y 
entendons  rien,  nous  n'y  pouuons  rien  mor« 
dre.  Voila  donc  pourquoy  fainâ  Paul  a  ici  ex- 
horté Timothee  ,  qu'il  entendift  ces  chofeï. 
Comme  s'^ildifoit.  Regarde  bien  àtoy:  carie 
te  monftre  ici  ce  qui  te  doit  eftre  aflez  cognu, 
en  forte  que  tu  n'as  nulle  eicufe.Or  nous  auôt 
défia  monftré  qu'il  a  plus  regardé  aux  autres 
qu'à  Timothee.Et  cependant  fi  eft-ce  qu'il  l'a 
voulu  mettre  du  nombre  commun  ,  afin  de 
nous  monftrer  que  fi'  Timothee  a  eu  befoia 
qu'on  luy  tiraft  ainfi  l'aureille  ,  par  plus  forte 
raifon  il  faut  que  nous  foyons  picquez,ou  ixt- 
trement  tout  ce  qu'on  nous  pourra  dire,ae 
nous  elinouuera  point,  &  mcfmes  il  s'efcoule- 
ra  dfuant  nos  yeux  deuant  que  nous  y  ayonf 
penfé.Or  là  deflus  notés  que  l'Efpritde  Dieu 
argue  noftre  rudelTe ,  de  ce  que  nous  fommes 
tant  cllourdis  quâd  il  eft  queitié  du  Royaume 
fpi rituel, voire  tellemétqu'encores  qu'il  nous 
tende  la  main  comme  à  des  petis  enfans,&  que 
il  nous  mené  à  petit  pas  ,  nous  ne  pouuons  , 
nous  auancer.  Voila  pourquoy  noftre  Seigneur  ""•3''* 
lefus  difoit,Si  vous  n'auez  point  entendu  les 
chofes  terrcftres  que  ie  vous  ay  monftrees,co 
ment  volerez-vous  iufques  au  ciel?  Ileftvray 
que  lefus  Chriftparloit  toufiours  de  chofe» 
ccleftes,  &  c'eft  fa  fin  &  fon  but:  mais  fi  eft-ce 
qu'il  difoit  les  chofes  félon  la  capacité  de 
ceux  aufquels  il  parloit.  Car  il  voit  Nicodcme 
qui  n'y  comprend  rien  ,  qui  foutesfois  cuide 
eftre  grand  dofteur.Sur  cela  il  luy  inôftre  qu"!! 
n'a  pas  entendu  ce  que  les  petis  enfans  co- 
gnoiflent:comment  donc  fi  i'vfed'vn  haut  fty 
le&  profond  (dit-il)  le  comprendrez -vous.' 
Ainfi  en  eft-il  en  ce  paflàge.  Et  pom-tant  ne 
penfons  point  eftre  fi  habiles  que  nousaYons 
coprins  du  premier  coup  ce  qui  eft  vtile  pour 
noftre  falut.  Car  encores  que  Dieu  nous  maf- 
che  nos  morcc3ux,qu'il  ne  refte  qu'.i  les  aual- 
1er,  fi  eft-ce  qne  nous  fommes  fi  eftourdis  que 
nous  ne  comprenons  point  la  doftrine.Et  qui 
plus  eft,)ainâ:  Paul  adioufte  vne  priere.difànt, 
Qu^e  le  Seigneur  te  donoe  entendement  en  toutes 
ehofis-Comme  s'il  difoit.  Voici, ileftvray  que 
les  chofes  que  i'ay  ici  efcrites,  fontfi  claires 
'  qu'il  ne  6ut  point  eftre  grand  doûeur  pour 
les  entendre  ,  car  les  petis  enfans  voycnt  que 
c'elhmaiv  cependant  fi  eft-ce  que  nous  ne  pou 
00ns  point  tirer  à  Dicii,&  quand  on  nous  par- 
le de  le  feruir ,  quand  on  nous  parle  de  cher- 
cher la  vie  cclcfïc,  nous  fommes  tant  endor- 
mis querié  ne  noms  entre  en  Pcfprit.Puis  que 
ainfi  eft  donc, nous  auôs  befoin  que  Dieu  nous 
donne  intelligence  en  routes  chofes.  Or  pour 
te  que  le  temps  ne  porte  point  que  ceci  foit 

dcduit 


SVR    LA    II.    A    TIMOTH 


5^î 


déduit  plus  au  long  ,  que  nous  recueiJlrons  en 
fomme  vue  bonne  dpcinnex'ert  ar^auoir.touc 
ainfi  que  quand  Dieu  nous  aura  commandé  ce 
que  nous  dtuons  taiic  ,  que  nous  ne  ferons 
pomc  tenus  de  nous  acquitter  cnuers  liiy  uif- 
ques  àce  qu'il  nous  y  conduile  par  fon  làintt 
Eiprit:aufsi  quand  il  nous  enfeigne  à  difcer- 
ner  entre  le  bien  &  le  mal ,  ^e  nous  demeu- 
rerons touiîours  en  noftre  Ignorance  comme 
pouresâueugles.iufques  àce  qu'il  nous  ait  il- 
luminez, &  qu'il  ait  tàit  valoir  la  doitrine  qui 
eft  prelchee  par  la  bouche  des  hommes  Or 
ceci  nous  eft  bien  neceiraue.  Car  q'.iand  nous 
ferons  venus  aufermon,  fi  nous  fomraes  rem- 
plis d''vne  folle  opinion  de  noftre  vertu,  &  de 
noftre  indulhie  ,&  que  nous  cuidions  cftre 
fuFfifans  pour  comprendre  ce  qui  nous  feia 
dit,nollre  Seigneur  fe  raocqucra  d'vn  tel  or- 
gueil,&  permettra  que  nous  retourneras  plus 
ignorans  q  nous  ne  fomn.es  .  enus,&  non  fans 
caufe.Car  nousn'auons  point  efpritpous  rie 
comprendre  decequi  cftdu  Royaume  Spiri- 
tuel deDicu.q  nous  ne  fent.ons  qu'il  faut  que 
il  nous  guidc,&  qu'il  nous  donne  ce  qui  nous 
défaut. Etcepenclant  auAi,  combien  que  nous 
voyons  que  nous  fommes  fi  lourds  que  nous 
ne  pouuôs  pas  appeiceuoir  vn  pitd  loin  (com- 
me on  dit  )  que  pour  cela  nous  ne  ptrdions 
point  courage.  Etpourquoy?  Carnoltre  Sei- 
gneur nous  donnera  entendement  en  toutes 
chofes.que  félon  qu'il  nous  prefente  ù  paro- 
le,ri  nous  ouurua  les  yeux  8<  les  aureilles  ,  & 
non  feulement  nous  donnera.  iiueiligence>  - 


mais  quant  &  quant  formera  tellement  nos 
coeurs,  que  nous  fuyurons  par  tout  où  U  nous 
appellera.    Voila  donc  comme  d'vn  cofté  ii 
nous  faut  eftre  humbles  &•  petis ,  cognoiilàns- 
que  nous  ne  comprenons  rien  linon  d'autant 
que  nous  fommes  illuminez  par  l'Efprit  de 
Dieu.  Mais  derechef  il  faut  que  nous  foyon» 
tout  refolus  q  noftreSeigneur  nous  inftruira,, 
afin  que  nous  ne  doutiôs  point  qu'en  efcoutit 
fa  paioleauec  vneafFûftiondroite,&  ne  cher 
chans  finond'ellre  gouuernez  par  luy,&d'e- 
ftre  (es  difcipies ,  que  nous  ne  foyons  illumi- 
nez en  forte  que  nous  ne  comprenions  fcs  fe- 
crets  ceieftes.qui  autrement  furinonteroyent 
toute  noftre  capacité. 

OR  nous-nous  proftetneronsdeuant  Jt 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoillàncc  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  luy  plaife  les  abolir 
du  tout,&  en  effacer  tcllemét  la  mémoire  par 
le  fang  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrilt  fon 
Fils, que  nous  le  puifsions  trouuer  propice  en 
uers  nous.Et  que  dorefenauantilnous  refor- 
me tellemét,  qu^eftans  retirez  &defpouillez, 
de  tous  les  empefchemens  de  ce  monde, nous 
ne  demandions  finon  d'adhérer  pleinement  à 
luy,&de  fuy  ure  le  chemin  qu'il  nous  propofe» 
&  que  iamais  nous  ne  foyôs  las.mais  que  nous 
continuyons  lufques  en  la  fin  en  l'eiperance 
de  la  vie  celefte,  fçachans  que  nous  ne  ferons 
point  fruftrez  de  noftre  efpoir,  &  de  la  fiance 
que  nous  aurons  appuyée  Si  arreftee  en  luy^ 
Que  non  feulementil  nous  face  ceftegrace» 
nuis  à  tous  peuples  &  nations  de  latecre^u  >■ 


TROISIEME       SERMON      SVR      LE 

SECONDCHAPITRi. 

8  Aye  mémoire  que  lefus  Qhrijl  ejï  rejfufité  da  morts,  quiejî 
de ïafemence  de  Dauidflonman  Euangde, 

^  Auquel  l'endure  traudux  iufqucî  aux  îiem,comme  niMaiteun 
mais  la  parole  de  Dieu  nej}  point  liée: 

10  Vour  cejle  caufc  i  endive  toutes  chojespour  les  eïeus,  afin  que 
ils  obîienentaufsi  lefalut  quiejî  enlefisQhrifi,duec  la  gloire  etermlkl 


Ous  suons  veu  par  ci  dcuat 
i';q«e  le  diable  ne  pouuoit  fai 
4w>re  vne  playe  plus  mortelle  • 
JtI entre  les  hommes,qu'cn  cor 
^rompant  la  pureté  de  l'Euair 
gile:pource  que  c'eft  en  cela 
que  gift  leur  vie.  Tout  ainfi 
que  rh  omme ,  s'il  eft  pnué  de  fon  ame  ,  n'ha 
plus  ne  fens ,  ne  vigueur  :  ainfi  elt-il  de  nous 
quant  à  Dieu.qii'il  faut  que  nous  perifsions  fi 
nouslommes^deftituez  de  la  parole  ,,en  vertu 
de  UquclleDieu  nous  v'iiïifie. Voila  pourquoy 
de  tout  temps  ie  diable  a  machiné  de  peruer- 


tir  la  pure  doftrinerqnand  il  ne  "a  peu  du  totic 
anéantir,  fi  eft-cequ'il  y  a  m..;  des  mrilinges: 
&  corruptions,  afin  de  toutdeYguifer;  s'il  luy 
eftoit  pof;ible,ilvoudroit  bien  que  le  nom  de- 
noftre  Seigneur  lefiis  Chrift,  full  exrerminé 
du  monde  ,&  qu'on  n'en  parlaft  plus.  Mais^ 
quand  il  voit  que  Dieu  ne  permet  point  que- 
le  règne  de  fon  Fils  foitdu  tout  abbatu,  qu.e- 
fait^iUll  y  vient  pai  aftucc;  &  depraue  &  lal^ 
fifie  la  droite  fimplicué  ,  afin  qu'il  y  ait  vni 
ph^niofme  au  licade  lefus  Chrift.  Et  voilât 
cortimeilen  tftaduenu  en  la  Papauté:  carie». 
Papiftes  confeiïèront  bien 'auec  nous  qua  k.- 


58fi 


SERMON      X. 


Fils  lie  Dieu  cft  icicêJH  au  inonde  ponr  eftre  ' 
noftre  Redépteur,&  quVftîs  baptizez  en  l'on 
Nom, il  faut  que  nous  ayons  cjuelcjue  reuereii 
ce  à  luy:&cepcdant  û  eft-cequ'ih  necognoif 
lent  nuUemét  la  vertu ,&  tout  clt  là  peruerti, 
qu'il  n'y  a  pas  vn  feul  poincl  de  dottrine  que 
les  hommes  n'ayent  brouillé  ,  en  telle  forte 
qu'on  ne  cognoill  pas  ce  qui  eft  procedéde 
Dieu. S'il  eit  queftiô  de  Içauoir  corne  les  hoin 
mes  doyuent  eftre  fondez  pour  auoir  fiance 
de  falut.làon  voit  comme  le  diable  a  gagne, & 
qu'il  n'y  a  rien  d'entier:  pource  qu'au  lieu  de 
l'cauoir  que  lefus  Chrifteft  la  pleine  &  parfai 
te  iuftice.ces  pouresaueuglês  font  enyurez  en 
leurs  mérites  :  Se  quand  ils  fc  fcntentcoulpa- 
bles  deuant  Dieu, ils  ont  leurs  fatisfaûions, 
&  le  tout  pour  anéantir  la  vertu  de  la  mort  & 
paûion  de  noAre  Seigneur  lefus  Chrift.Si  on 
veut  feruir  Dieu, cornent  y  procede-onJCha- 


dit  ici  dereiehef  àTimotRee;  Q»'/?  tefoit-tU' 
ne  que  parte  mm  {.uangile.  Et  quelle  en  eft  la 
fubrtancerC'eftque  nous  regardions  à  noftre 
Seigneur  Icfus  Chrift.comme  aufsi  nousfça- 


uons  qu'en  luy  font  enclos  &  cachez  tous  thre 
fors  defage(Ie,que  pour  auoir  vne  droite  per 


Cclo.l.t 


feiiion  ,  c'eft  à  luy  feul  qu'il  nous  faut  tenir. 
Quand  donques  nous  aurons  cognu  le  Sei- 
gneur lefus ,  fçachons  qu'il  n'y  aura  plus  que 
redire. Et  ainfî  pourfuyuons  à  adhérer  à  lefus 
Chrift  nuugré  ceux  qui  ne  fe  côtentent  poinc 
de  luy,  qui  veulent  auoir  leurs  refueries,ou 
bien  ce  que  les  hommes  auront  forgé:  Se  que 
ils  extrauaguent  tant  qu'ils  voudront:cepen- 
dant  que  nous  cfcoutions  noftre  Dieu  ,  que 
nous  foyons  cnfeignez  de  luy,fçachans  que  le 
but  auquel  il  nous  addrelFe, c'eft  que  nous  tea  ^ 
dionsi  lefus  Chrift  ,  d'autant  que  toutes  les 
parties  de  noftre  falut  font  là  comprifes.que^ 


cun  aura  fa  deuotion  particulière.  Et  puis  il  y  '   quand  nous  le  poflederons.il  ne  nous  faut  ne 


a  les  loix  qui  ont  efté  torgees  à  l'appétit  des 
hommes:&  cepédant  Dieu  n'eft  efcouté  qu'à 
demi,&encoresàgrand'peine.Si  on  parle  de 
prier, les  oraifons  font  toutes  poiluesi  Car  au 
lieu  que  l'Efcriturefainfte  nous  déclare  que 
c'eft  le  principal  feruice  que  Dieu  demande 
de  nous  ,  &  le  facrifice  aufsi  par  lequel  nous 
vcnonsàdeclarer  que  nous  auons  noftre  re- 
fuge àluy,&q  l'accès  nous  y  eftdôaé, pource 
que  noftre  .Seigneur  lefus  Chrift  eft  noftre 


fouhaitterd'auantage.  Voila  en  premier  lieu 
ce  que  nous  deuons  ici  noter  fur  l'intention 
de  fainft  P.iul,qu'il  ne  veut  pas  que  les  CBre^ 
ftiens  foyent  volages ,  &  qu'auiourd'huy  ils 
ayent  vne  do6lrine,d:  demain  qu'ils  vueiUenc." 
cnanger:  mais  qu'ils  perlîftentiufquesà  la  fin  • 
en  la  pure  vérité  de  Dieu. Au  refte.il  nous  m»' 
ftre  quec'ell  à  lefusChrift  qu'il  nous  faut  te-r  • 
nir, ou  autrement  il  n'y  aura  que  confulion  en  j 
noftre  foy. Et  d'autant  que  le  diable  s'efForce  - 


Âduocat  &  patrô:tout  au  rebours  en  laPapau    de  nous  desbauchcrde  la  pure  verité.comme 


té  on  réuoyeaux  faintls  &  aux  faindes.Q|uât 
aux  Sacreraensjil  ya  vneconfulîô  fi  horrible 
qu'on  en  fait  des  idoles  :  &  au  lieu  que  ce  de- 
uroyent  eftre  corne  miroirs  pour  contempler 
la  grâce  qui  nous  elt  donnée  en  lélus  Chrift, 
ils  le?  ont  fait  feruir  de  miraclespour  empef- 
cher  que  lefus  Chrift  ne  fuft  nullement  co- 
gnu. Voyans  dôc  vn  tel  artifice  de  Satan, no' 
deuons  tant  plus  eftre  munis  de  ceft  aduerttf 
fenient  que  donne  ici  fainû  Paul  à  Timothee, 
Se  àtousChreftiens  en  general:c'eftque  notts 
foyons  ditigés  à  retenir  la  puredoûrine,telle 
qu'elle  cft  contenue  en  l'Euangile  ,  que  nous 
ne  foutfrions  point  d'en  eftre  diuertis  en  quel 
que  façon  que  ce  foit ,  mais  que  nous  l'ayons 
tellement  imprimée  en  noftre  cœur  Se  en  no- 
ftre mémoire, que  quand  le  diable  aura  brafle 
tout  cequ'ilaura  peu,  que  neantmoins  noftre 
foy  demeure  ferme  Se  confiante, que  nous  co- 
gnoifsiôs  qu'il  n'y  a  qu'vn  Dieu,&  félon  que 
il/eft  dcdaré  ànous.quenousdemeurios  en 
la  pureté  de  fa  parole  :  que  nous  fçachions 
quel  eft  lefus  Chrift,dcquoy  il  nous  doit  fer- 
uir ,  les  biens  qu'il  nous  a  apportez  ,  afin  que 
nous  foyons  autour  appuyez  &  arreftez  en 
luy  feul  ■  que  nous  fç.ichions  en  fomme,  que 
c'eft  d'.-  foy  8;de  repcntance,  pour  inuoquer 
Diea.Q^and  nous  aurons  cel.i,nous  nepour- 
rôspjiut  craindre,  côbienque  tout  foit  méf- 
ié, en  trouble  &  en  obfcuritéique  neantmoins 
la  vérité  de  Dieu -nous  efcUirera  pour  tenir, 
le  droit  chemin.  yjoiUp.otirquoylaJa^raWlj 


■nous  le  voyons  parexperience.que  nous  foy- 
ons armez  à  l'encontre,  que  cette  cognoiilàn 
cède  Dieu  que  nous  aurons  vne  foisreceue 
ne  nous  foit  rouillee,&  qu'elle  ne  fe  puifle  ii-, 
mais  effacer  ,  mais  que  nous  en  ayons  la  mé- 
moire imprimée  en  nos  cœurs,  pour  refifter  à 
tous  les  allâuts  Se  fcandales  qui  pourront  ad- 
uenir  ,  que  nous  pourfuyuions  ou  noftre  Sei- 
gneur nous  appelle  ,  &  que  nous  demeurions 
fermes,combien  que  le  diable  necelTede  touf 
toftez  d'aflàillir  noftre  foy,que  nous  ne  crai- 
gnions point  d'autant  que  nous  auons  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  qui  nous  fortifiera  en 
tout&  par  tout. Or  cependSt  lefus  Chrift  eft 
ici  intitulé  Je  ta  fimence  Je  DauiA  :  Se  puis  la 
raifon  eft  adiouftee  quant  &qu3nt,&  non  fans 
caufe.Car  (î  nous  voulons  auoir  viftoire  con- 
tre toutes  les  tentations  de  Satan,  il  faut  bien 
que  nous  ayons  vne  grande  fermeté  ,  Se  que 
nous  fçachions  que  ce  n'eJl  point  àl'aduentu 
re  que  nous  croyons  en  lefus  Chnft  ,que  ce 
n'eft  point  par  opinion  douteufe  ,  mais  qu'il 
nous  cft  procédé  de  Dieu  pour  noftre  Redem 
pteur.  Et  pour  cette  caufe  fainél  Paul  marque 
ici  qu'il  eft  de  la  lignée  de  Dauid,  8e  de  (a  fe- 
mence.  Car  nous  Içauons  les  promclTes  qui 
font  contenues  en  TEfcriture  lliinûcc'eft  a- 
fçauoir  que  tout  le  monde  dcuoit  eftre  bcnit 
en  la  fcmence  d' Abraham.  Or  Dieu  a  ratifié 
cela  à  Dauid ,  de  monftrer  que  c'eftoit  de  là 
dont  dcuoit  procéder  le  Rédempteur ,  afça*. 
uoirdc  la  lignée  de  lud4,&  raefoiei  de  la  mai-  ■ 

fjn 


SVRLAII.    ATIMOTH. 


f7 


Ton  deDâuid.VoiJa  dôques  poiirqiioy  en  pre- 
mier lieu  fainil  Paul  luy  attribue  ce  titre, c'crt 
afin  que  nous  ne  àoutions  point  qu'ayans  les 
promefles"  que  Dicii  auoit  faites  ladis  aux  pè- 
res, touchant  le  Redcmpteui  qui  nous  a  cité 
donné.nousledeuons  receuoiren  pleine  cer- 
titude ,  &  n'auons  point  occafion  de  dou- 
ter (îc'eftluy,  ou  non.  Pourqiioy?  Ileft  forti 
ie  la  maifon  de  Dauid.Et  combien  qu'alors  il 
n'y  euft  plus  de  dignité  royale  ,  ce  defaut-là 
toutesfois  ne  pouuoit  point  deroguer  à  Lî 
gloiredenoftre  Seigneur  lefus  Clinft  :  mais 
pluûoft  c'eAoit  pour  eftre  mieux  confermcz 
que  c'eftoit  luy  qui  deuoit  e/lre  enuoyé.  Et 
pourquoy.'Ifaie  le  Prophète  n'a  point  dit  que 
il  naiftroit  en  vn  palais,  qu'il  l'eroit  nourri  en 
grand'  ponipe:mais  il  a  dit, qu'il  fortiroit  vn 
}fi'lUl>  petit  furgeon  du  tronc  d'Ilài:  comme  s'il  di- 
foit  que  lefus  Chrift  ,  combien  qu'il  foit  de- 
fcendu  de  la  lignée  royale ,  neantmoins  a  eu 
des  parens  poures.&qui  n'eftoyent  nullemét 
prifez  quant  au  monde  ,  ou  il  n'y  auoit  pas 
grande  apparence  ni  dignité.  Tout  ainfi  que 
feroit  vn  arbre  liée  ,  ou  bien  vn  arbre  coupé, 
duquel  il  ne  demeuraft  que  le  tronc  &  la  tige 
qu'on  fouleroitau  pied:  mais  delà  (dit-il)il 
viendra  vn  petit  furgeon  comme  par  deflous 
■  terre.  Et  auTsi  nous  voyons  que  Itius  Chrift 
eft  nay  de  telle  façon, comme  le  Prophète  l'a 
uoit  teftifié.  Etce  nous  eft  vne  confirmation 
plus  grande  de  noftre  foy  quand  nous  voyons 
«ju'il  eft  ainfi  manifeité  au  monde  afin  que 
flous   foyons  du  tout  arreftez  à  luy.   Voila 
pour  vn  item. Mais  cependant  fainft  Paulauf- 
il  nous  déclare  que  le  Fils  de  Dieu  ayant  pris 
noftre  nature  ,  s'eftant  vcftu  de  noftre  chair 
infirme,eft  relTufcité  en  gloire,  afin  que  nous 
eufsions  toute  noftre  confiance  là,  &  que  ce 
fuft  pour  nous  faire  hardis ,  à  ce  que  nous  ne 
JefaïUions  point  parmi  tousopprobres,  tou- 
tes perfecutions.Â'  toute<  iniures.Brief.quand 
il  femblcra  que  PEglife  de  Dieu  foit  comme 
abyfmee  ,  que  nou^  ayons  les  yeux  elenez  en 
iiaiit  pour  contempler  la  gloire  en  laquelle  le 
Fils  de  Dieu  a  efté  exalté,  A;  afin  que  nous  fça 
chions  que  nous  ferons  participans  de  tous 
fes  biens,  8e.  qu'il  nous  *  conioints  à  foy  :  que 
nnus  Tçachions  aufsi  qu'auparauart  if  s'eft 
a  iiiffé  lu^ques  à  vne  côd  ition  11  poure  &  fi  mi  - 
ierable, qu'il  a  voulu  eftre  fail  Jiôme  mortel  & 
-p^fiiblec&xjuiploseft.ij  s'eft  teJlemét  anéan- 
ti, qu'il  eft  venu  iufques  à  ceft  opprobre  de  la 
croix.  Puis  qu'ainfi  eft  donc  que  noftre  Sei- 
gneur lefuî  Chrift  n'cft  point  afsis  en  fon 
Empire  feulement  quant  à  fa  maiefté  diuinc, 
mais  en  ù  nature  fiagile  qu'il  auoit  prinfc  de 
nous  ,  en  cefte  condition  en  laquelle  il  a  efté 
feruiteur,  que  maintenant  nous  foyons  afleu- 
rez  qu'il  nous  reccura  en  fa  compagnie, &  que 
-le  mefprisque  nous  auons  maintenant  à  fouf- 
fnr   n'empefchera   point  que  nous  ne  pre- 
nions courage  4e  toufiours  courir  en  cefte 
cfpcrance  (jui  nous  eft  donnée  en  luy. En  fom 


me,  qu'il  nous  fouuiene  de  ce  q(ie  dit  k  Pro- 
phète Ifaie,  au  cinquantetroilîeme   chapi- 
tre jveifet  X.  qu'il  a  eité  elcué  d'argoiftPe  &  de 
vitupere,pour  eftre  mis  comme  envn  chariot 
triomphant  quand  Dieu  le  Père  l'a  voulu  ma- 
gnifier :  mais  c'a  efté  de  ctfte  extrémité  fi 
grande  qu'il  fembleroit  qu'il  fuft  du  tout  con 
fus, qu'il  cftoit  comme  desfiguré  ainfi  qu'il  en 
efttraitté  en  ce  pa(Tàge-là,  qu'il  n'y  auoit 
plus  mefmes  nulle  r<  putation  d'homme, qu'il 
cftoit  iniurié&reiettéde  tous:comme  auhiil 
en  eft  parle  au  Pfeaumevingtdeuxieme,  qu'il 
fouftenoit    l'opprobre 'non    feulement  des 
gians.mais  du  commun  populaire. Or  main:e- 
nant  nous  voyons  ce  mie  nous  auoni  à  rete- 
nir plus  outre  de  ce  paflage.c'eft  afçauoir  que 
fil'Eglife  deDieu  en  ce  inonde  eft  mefpri.. 
fee,&  qu'il  femble  qu'elle  foit  du  tout  defti- 
neeà  périr, nous  n'en  foyons  point  pourtant 
dcftournez.Et  pourquoyMl  nous  faut  venir  à 
cefte   refurreftion  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift  ,  que  nous  cognoifsions  quand  le  chef 
-de  ce  corps-ci  qui  trauaille  au  monde, eft  ref- 
•  fiifcité  en  gloire, que  ce  lera  pour  nous  forti- 
fier afin  que  nous  ne  foyons  vaincus  de  nulle 
tentation.  Au  refte  ,  que  nous  ayons  ces  deux 
chofes  ,  c'eft  afçauoir  que  le  Fils  de  Dieu  a 
prins  toutes  nos  infirmitez  ,  qu'il  s'y  eftalTu- 
ietti  de  Ion  bon  gré,  afin  que  nous  ne  doutiôî 
point  que  tout  ainfi  qu'il  a  prins  ce  qui  eftoit 
noftre,  ilnous  veut  faire  aufsi  participansde 
ce  qui  eft  fien  &;  de  ce  qui  luy  eft  propre  à  luy 
feul  comme  au  Fils  vnique  cle  Dieu:  que  nous 
ayons  toufioursce  regard-là  pour  repoufler 
les  tentationsde  Satan.  Et  aufsi  que  nous  le 
cognoif  ions   fans  aucune  doute  le  Rédem- 
pteur qui  auoit  efté  promis, afin  qu'e  luy  nous 
ayons  l'accompliflement  de  tontes  chofes  qui 
.  appartienqnt  à  noftre  falut  :  que  nous  ne  foy- 
,  onspoint  nonchalansà  bien  goufter  cela  pour 
eftre- efmeus  &eftoi7nez;  mais  que  nous  l'ay- 
ons tout  refolu  ,d'aur.int  que  Dieu  eft  fidèle, 
qu'il  a  accompli  ce  qu'il  auoit  dit  aux  Percs 
anciens  ,  quand  il  a  enuoyé  le  falut  au  monde 
par  la  main  de  fon  Fils  vnique. Or  fi  ceUe  do- 
ôrine  fut  lanvais  neceflâire  pour  tous  fide- 
-  les, elle  l'eft  auionrd'huy.Car  combien  que  de 
tout  temps  ce  qui  eft  dit  au  Pfeanme  foit  veu, 
c'eft  afçauoir  que  TEglife  de  Dieu  a  efté  pa-  ^f-^^f-' 
reille  à  vn  champ   qni  eft  labouré,  &  que  la 
charrue  a  toufiours  traîné  fur  fon  dos:  tant  y 
a  qu'auiourd'huy  nous  voyons  les  perfccn- 
tions  fi  cxcefsiues  que  c'eft  vne  horreur.  On 
voit  tous  les  grans de  ce  monde  quiontcon- 
fpiré  de  ruiner  l'Euangile  :  on  voit  en  quelle 
iiirie  ils  y  proc{dent:on  voit  ier^  cruautez  qui 
s'exercent  contre  les  enfans  de  Dieuion  voit 
l'orgueil  qui  eft  en  tous  incrédules,  &  en  tous 
<enx  mefmes  qui  ne  peuuent  faire  hommage 
au  Fils  de  Di en,  qui  neantmoins   fe  renom- 
ment Chrcftiens ,  qu'on  les  verra  er.ircnimez 
àl'encoiitre  de  tout  bien  ,  qu'ils  vondroyent 
peruertir  tout  afin  d'auoir  vn  Euangile  à  leur 

Cf.  i;. 


jSS 


SERMON    X. 


porte:  OQVolt  toutes  ces  diofes-la.  Brief,  là 
où  les  glaiues  ne  feront  point  del'gainez ,  ni 
les  tcui  allumei ,  ou  voit  toutesfois  qu'on  ne 
dumauJc  finon  de  corrompre  PEuangik  ,  & 
faire  que  tout  aille  aa  rebours,  &  en  dil'sipa- 
tioa.Que  rc(le-il  donques  iinon  d'auoir  no- 
ftre  recours  à  ce  que  faiud  Paul  dit  ici ,  que 
nous  apprcniôs  a  nous  conloler.d'autant  que 
le  Fils  de  Dieu  en  detpic  de  tous  fcs  ennemis 
cft  afsispoureftre  lieutenant  de  Dieu  Ion  Pe 
rc.pour  gouucrncr  tout  le  monde,  pour  auoir 
empire  louuerain?  Q_ne  donques  on  s'cnflam 
me  tant  qu'on  voudi>.,liert-ceqn'ildeclaiera 
fa  puillance  ,  maugré  tousceu\  quiluyrelî- 
ftét.Si  nous  ne  fommcscôtermez  parcelle  do 
ilrine.que  pouuôs-nous  faire  linon  eftre  com 
nie  efpcrdus  Se  efuanouis  du  tout?Mais  quand 
nous  aurons  regardé  à  la  relurreftion  de  no- 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  ce  fera  pournous 
faire  defpiter  hardiment  tout  ce  que  le  dia- 
tlc  s'efforce  de  faire. Que  les  troubles  foyéc 
tant  grans  que  rien  plus,  qu'il  femble  que  le 
ciel  &  la  terre  le  doiuent  méfier  ,  nous  tien- 
drons bon  moyeanant  que  nous  puifsionsâ- 
uoir  la  veuc  feulement  drertee  à  ce  que  fairifl 
Paul  nous  propofe  en  ce  paflàge  ,  c'efl  que 
no°  contëplions  noftre  Seigneur  lefus  Chri/t 
en  fa  maiefté.  Mais  cependant  apprenons  auf 
fi  parce  lien  de  foy  de  nous  vnir  à  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift.  Car  fi  nous  ne  cognoif- 
fbns  que  no"  fommes  membres  de  fon  corps, 
&  que  ce  qu'il  a  ,  n'eft  point  feulement  pour 
foy,  mais  afin  qu'il  nous  fou  communiqué  :  fi 
nous  n'auons  cela  ,  nous  pourrons  bien  ado- 
rer lefus  Chrift, mais  eftans  feparez  &  eflon- 
gnez  de  luy,nous  ferions  neantmoins  en  per- 
plexité &  en  fafcherie,mefmes  nous  n'auriôs 
linon  à  déplorer  nos  miferes.Or  cela  donne- 
roit  plus  grand  luftre  à  tant  d'opprobres, &  à 
tant  de  pcrfecutions  que  les  fidèles  endurent, 
fi  no'  Toyions  q  noftre  Seigneur  lefus  Chrift 
en  euftefté  exeinpté,&  que  cependant  il  nous 
y  ait  afllitettis  :  cela  (di-ie)  feroit  pour  nous 
faire  perdre  courage,  n'eftoit  qw'il  nous  fou- 
ueinft  de  ce  que  dit  ici  fain£l  Paul  ,  c'eft  que 
lefus  Chrilt  a  efté  de  la  feméce  humaine,  que 
il  s'eil:  fait  femblable  à  nous  ,■  qu'il  n'a  point 
fait  ceft  honneiiraux  Anges  de  prendre  leur 
nature  (comme  l'Apoftrele  remonftreen  l'E 
Hehr.i,  piftreaux  Hebrieux)  maisafin  d'auoir  allian 
IS.  ce  plus  familière  auec  nous  ,  &  d'cftre  noftre 

frère,  &coinine  noftre  compagnon, ila  receu 
nos  infirmitez,  &  n'a  point  defdaigné  la  fer- 
uitude  où  nous  cftions.Puis  qii'ainfieft  don- 
ques que  le  Fils  de  Dieu  s'ell  ainfi  aflbcié  a- 
uec  nous,  que  hardiment  nous  contemplions 
fâ  gloire  pour  eftrc  alFeurez  que  nous  y  par- 
uiendrons  ,  &  qu'il  n'ell  point  monté  au  ciel 
afin  de  nous  laifler  ici  bas  pourrir  en  nos  lan- 
gueurs ,  mais  que  c'a  efté  afin  de  nous  ouurir 
la  porte,  &  qu'ayant  prins  poffefsion  en  no- 
ftre nom  il  nous  rccueillira  à  foy.  Voila  don 
ques  ce  qu'il  nous  faut  adioufter ,  toutes  fors 


&  quintes  que  nous  voyons  qu'on  nous  dcf- 
pitc  ,  qu'on  nous  crache  au  vifage  ,  que  nous 
fommes  tenus  comme  exécrables .  Car  l'or- 
gueil des  Papiftes  eft  tel, qu'il  leur  femble  que 
nous  ne  fommes  pas  dignes  d'eftremagez  des 
chiens,  comme  on  dit .  DefpitoBS  hardiment 
tout  cela,&  qu'il  nous  futfife  quand  nous  voy- 
ons que  le  Fils  de  Dieu  s'eft  voulu  abbaifTcr 
iufques  là,de  louiïrir  tels  opprobres ,  afin  que 
nous  prenions  courage, fuyuans  le  chemin  que 
il  nous  a  monftrc,  eftans  conformez  à  Ion  ima 
ge:  car  la  volonté  de  Dieu  eft  telle,  comme  il 
en  eft  parlé  au  huitième  des  Romains .  Que 
donques  nous  ayons  ainfi  mémoire  de  la  fer- 
uitude  en  laquelle  noftre  Seigneur  lefus  s'eft 
mis,  pour  nous  alVeurer  qu'eftant  maintenant 
entré  en  fa  gloire,  il  n'a  rien  de  particlIlier^ 
mais  qu'il  a  tout  en  commun  auec  nous.  Or  ce 
pendant  notons  bien  aufsi  qu'il  eft  de  la  fe- 
iTience  de  Dauid.&vpour  ce  taire  que  nous  re- 
cueillions les  promclles  qui  font  données  en 
l'Efcriture  fainc^e  .  Car  ce  n'eft  point  letoDt 
de  dire  que  lefus  Chrift  eft  Rédempteur  du 
monde  :  ce  titre-la  luy  fera  bien  donné  entre 
les  Papiftes  à  la  volce:  mais  que  nous  cognoif 
fions  fa  vertu, que  nous  fçachiés  ce  qu'il  nous 
a  apporté, comme  l'Efcriture  en  parie  .  SainA 
Paul  donques.  fous  le  nom  de  Ufitnencfde  l>a 
»!'(f,veut  que  nousmeditionsbien  toutes  les  ri 
chelTes  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, afin 
que  nous  ne  le  tenions  point  comme  vnc  ido- 
le,ou  vne  chofe  vuide,  mais  que  nous  cognoif 
fions  que  tout  ce  qui  eft  requis  à  noftre  lalut, 
luy  a  efté  donné  ,  &  a  efté  mis  en  fa  perfonne, 
afin  que  nous  puifions  tous  de  fa  plénitude,  & 
grâce  pour  grace.ainfiqu'il  en  eft  parlé  aupre 
mier  chapitre  de  laind  lean. Maintenant  don 
ques  nous  voyons  à  quoy  ce  pallàge  doit  eftte 
appliqué,  fi  nous  en  voulons  faire  noftre  pro- 
fit" comme  le  fainft  Efprit  l'a  entendu.  Or  do 
tamment  fainft  Paul  adioufte,ÇV(f  cela  ejl  fclmt 
fin  Eitangile.  Et  c'tft  pour  mieux  déclarer  le 
propos  que  nous  auons  défia  touché  ,  c'eA  a- 
îçauoir  qu'il  vouloit  que  Timothee  &  tous  fi- 
dèles fuyuillènt  la  pure  fimplicité  de  la  do- 
ûrine  qu'ils  aiioycut  apprinfe de  luy  ,  voire 
iufques  à  bien  noter-lcs  traces,le  ftyle,  qu'il  y 
en  euft  comme  vne  effigie,  ou  vn  pourtraift 
peint  au  vifrcoinrae  il  a  v  le  de  ccfte  limilitiide 
la,c&' non  fans  caufe:  pour  monftrcr  que  fi  toft 
que  nousdeclinons  tant  peu  que  ce  loit  de  la 
pure  fimplicité  de  l'Euangile  ,  le  diable  nous 
mettra  beaucoup  d'empefchemens,  en  forte 
que  nous  ferons  comme  efgarcz,  que  nous  ne 
fçaurôs  plus  veoir  noftre  but.Sainû  Paul  don- 
ques met  ici  fon  Euangilc,  comme  s'il  dilbit. 
Mes  amis, que  ceux  qui  auront  efté  enfeignez 
fidelemét  en  la  parole  de  Dicu,aduifent  de  ne 
CB  eftre  point  deftournez   en  façon  que  ce 
foit, qu'ils  ne  varient,  &  qu'ils  ne  chancellent 
point,  mais  qu'ils  rctienent  toufiours  la  pure 
dodrinc  fur  laquelle  ils  ont  efté  fondez, telle- 
ment qu'ils  tafchciit  d'y  profiter  de  plus  en 

plus. 


s  V  R    LA    II. 

plus.  Or  cefte  admonition  no'  doit  aufsi  bien 
ieruir  ,  afin  que  nous  apprenions  à  difcerner 
entre  les  doctrines .  Ce  nVft  point  le  tout 
qu'on  allegue.l'ây  efté  ainfî  enicigné,mes  pe 
res.mesanceltres  ontainlî  vefcu:  cela  fe  trou 
uera  en  la  plus  part  du  mode.  Vray  eft  que  les 
ignorans  feront  vn  grand  bouclier  décela, 
maisc'eftautat  de  paille.il  ne  Faut  lînonvne 
eftmcellc  pour  tout  coiifumer.  Il  faut  bien 
que  nous  ayons  vne  autre  fermeté  en  noftre 
foy,  c'eft  que  nous  ("cachions  qu'elle  eft  fon- 
dée en  l'authorité  de  Dieu  ,  &  que  ceux  qui 
no'  ont  enfeignez  ,  ont  efté  cnfeigiiez  de  par 
luy.  Car  !ain.ft  Paul  n'entend  pas  d'auoir  for- 
gé vne  dodi  ine  à  fa  phantafie,*:  qu'il  en  fou 
autheur  :  mais  pource  qu'il  eftoit  Apoftre ,  Se 
que  la  prédication  luy  eftoit  commife  ;  &  ce- 
pendât  il  voyou  beaucoup  de  gens  s'ingcrer, 
quieftoyent  ncaotiiioins  fcdutteurs.&quiai- 
moyent  à  defguifer  les  chofes,  tellement  que 
lefus  Ciiriftnp  fuft  plus  cognu  comme  ilde- 
uoit  :  faind  Paul  dôques,afin  que  les  hommes 
nefoyeot  !i  malins  de  l'accufer  qu'il  vouloit 
qu'on  s'adonnaft  à  toutes  chofes  fans  difcre- 
tion  &  prudence  ,  dit  ici  qu'on  doit  regarder 
à  qui  on  croit ,  tellement  que  Dieu  (  comme 
t'ay  dit)roit  par  delTus  nous  afin  de  nous  gou 
uerner.que  lelus  Chriiè  foit  noftre  Ma.ftre  & 
Doûeur.côme  l'oflîce  luy  a  efté  donné. Mais 
cependant,  que  nous  cognoifsions  que  les  ho 
mes  qui  feront  moyen  de  nous  ramener  à  la 
foy,  ont  efté  enfeignez  du  ciel,  que  la  charge 
Jïura  eité  donnée  de  Dieu,  qu'ils  fontaiitho 
riiez  de  par  luy. Si  nous  n'auôs  c-ela.il  n'y  au- 


A   T  IM  O  T  H.  i9.j 

&  rufcs  qu'il  eft  pofsible  pour  bous  esblouir 
les  fens,  que  nous  ne  laifsions  pas  de  nous  te>- 
nir  à  l'Euagile.  £t  mefmes  quand  entre  nou« 
il  s'eleuera  des  brouillons,coiTuiie  nous-voy* 
ons  d'vncofté  les  contempteurs  de  Dieu,  cet 
gés  profanes  qui  font  pires  q  Turcs  ou  Pay-^ 
ens,qui  ne  demandent  îînon  d'ofter  toute  re- 
ligion dumonde:quand  nous  verrons  ces  vi- 
leins  exécrables  qui  voudroyét  auoir  du  tout 
anéanti  i'Euangile  :  quand  nous  verrons  de 
l'autre  cofté  ces  boute-feux  que-  Satan  nous 
fulcite  àl'enuiron  denous  :  quand  toutccla 
fera  pour  alTàillir  noftre  foy:que  neantraoïiit 
elle  ne  foit  point  réueriee,  mais  que  c'en  foit 
pluftoft  vne  approbation  ,  pour  monftrer  que 
la  venté  de  Dieu  eft  allez  puilFante  pour  no* 
maintenir  contre  tous  les  combats  de  Satan. 
VoiJadonquescômenous  auons  à  prattiquer 
ce  pallàge,  quand  faind  Paul  nous  rappelle  à 
l'Euâgile  lequel  il  auoit  prefché.Oral  adiou- 
fteconléquémentlanecefsué  qui  eftoit  pour 
ce  têpsrla.que  les  fidèles  fullcnt  ainlî  armez. 
Car  il  eftoit  détenu  prifonnier  :  &  cependant 
les  mefchans  prenoyent  occafion  de  mefdiro 
ôcdetrader  de  la  dodrine  qu'il  auoit  pref- 
chee.Et  ne  voit-on  pas  que  c'eft?Car  il  eft  de 
tenu  prifonnier,il  lâguit  là,&  non  point  pour 
peu  de  temps  :  car  il  auoit  eité  détenu  en  lu- 
dee  défia  plufieurs  iours,&  de  là  il  eft  trâfpor 
té  à  Rome  toufiours  attaché  ^  vne  chaîne. Ce 
ftoit  donques  pour  ouuru  la  bouche  des  mef- 
châs,alin  qu'ils  detraitaisét  &  de  luy,&  de  la. 
dodrine qu'il  auoit  prefchee.  Parce  moyen 
les  infirmes  pouuoyent  eftre  esbtanlez,qu'vn 


ra  en  nous  que  curder  au  lieu  de  foy,  &  nous    chacun  pouuoit  eftie  côme  côfus,  linon  qu'ils 


ne  ferons  qu'eftre  tr.rfportez  .i  chacun  coup. 
Parquoy,encores  que  pour  vn  téps  nousayôs 
efté  opiniaftres, (comme  nous  voVons  que  les 
Papiltcs  font  endurcis,  &  qu'il  leur  femble 
que  c'eft  allez  d'auoir  ce  mot  de  Foy  au  bout 
de  la  langue,  &  cepédant  eftre  en  doute  &  en 
fufpens ,  &  u'eftre  allèuré  de  rien  finon  d'au- 
taiftqueles  hommes  auront  parlé)  de  noftre 
cofté  apprenons  d'eftre  appuyez  fur  la  pure 
venté  de  Dieu  ,  &  que  nous  puil'sions  dire  Se 
nous  glorifier,que  ce  n'eft  point  des  hommes 
que  nous  tenôs  la  foy  qui  nous  eft  prefchee, 
nuis  qus  c'eft  la  pure  parole  de  Dieu.  Voila 
donques  à  quoy  faind  Paul  a  regardé.  Et  au- 
iourd'huy  nous  auons  befoin  d'approprier  ce 
ftedodrine  àtcl  vlage:carnous  voyôs  beau- 
coup de  brouillés  qui  ne  demâdent  qu'atout 
peruertir.  Que  faut-il  donques.**  Q\i^  nous 
foyons  prudens  pour  fçauoir  luger  quelle  eft 
la  droite  fimplicité  de  I'Euangile.  Les  Papi- 
lles fe  diront  aflèz  Chrcftiens  à  pleine  bou- 
che:mais  cependant  onvoit  comme  ils  anean 
tiflènt  toute  la  vertu  de  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift.entant  qu'en  eux  eft.Orau  contrai 
re,  quand  ils  auront  ioué  toutes  leurs  farces, 
quand  ils  auront  vfé  de  tous  leurs  mafques, 
quand  ils  auront  tafché  à  fe  transfigurer, mie 
le  diable  leur  aura  foufâé  toutes  les  fincnes 


eullent  eu  ce  bouclier  pour  repoulTer  toutes 
tentations  :  c'eft  que  la  prifon  Se  les  liens  de 
faincl  Paul  ne  deuoyent  point  mettre  en  op- 
probre fon  Euangile. C'eft  tout  vn,dit-il:c5- 
bicr  qu'en  ma  perfonne  l'endure  ,  toutesfois 
la  parole  de  Dieu  n'eft  point  lieeauec  elle,el 
le  n'eft  point  prifonniere.  Car  nous  voyons 
maiigré  tous  ceux  qui  s'eleuent  à  l'encontrej 
qu'elle  ne  lailFe  point  d  auoir  fon  cours  ,  que 
Dieu  augmente  fon  Eglife  de  plus  en  plus,  & 
que  la  femencede  vie  elt  efpandue  toufiours 
plus  loin.  Quand  donques  nous  voyons  que 
Dieu  befongne  ainfi  (du  faiéf  Paul)il  ne  faut 
point  qu'on  perde  courage  ,  &  que  fous  om- 
bre q  ie  fuis  prifônier,  que  le  luis  en  vitupéré 
des  grans  ,  qu'on  oublie  que  l'ay  efté  enuoyé 
Miniftre  de  lefus  Chrift,  &  q  le  me  fuis  fidè- 
lement acquitté  de  ma  charge,  que  la  doctri- 
ne que  l'ay  portée  pour  le  falut  du  mon- 
de,cftla  nourriture  des  amas ,  que  c'eft  là  ûii 
eft  toute  l'efperance, toute  la  gloire  Se  la  fé- 
licité de  ceux  qui  demandent  de  régner  au 
Royauinedes  cieux.Maintenât  donques  nous 
Voyons  que  fainèl  Paul  non  fans  caiile  a  ex- 
horté ci  dtflus  Tim'othee,&  auec  luy  tous  fi- 
deies,d'auoir  en  mémoire  que  lefus  Chrift  e- 
ftoit  rcflufcité  des  morts.  Pourquoy?  quand 
les  fidèles  de  ce  temps-i.i  voyoytnt  leur  Pa» 

Cc.iu. 


3ôO 


SERMO 


<kiir',cciuy  parkijuel  ils  auoyentefté  ame- 
nez à  h  foy  Chreftieane,  Comment?  Il  cft  ici 
comme  foulé  au  pied  :  que  les  luifs  le  reiet- 
toyent  :  &  mefmes  il  leur  efloit  en  abomina- 
tion. Quant  aux  Payens.ils  luy  eftoyeiit  en- 
nemis,&  chacun  en  parloic  à  la  volée,  le  voi- 
la comme  vne  vermme  au  milieu  des  prifon- 
niers.  Il  ell  vray  que  ("ainft  Paulauoit  quel- 
que liberté  ,  (comme  faind  Luc  en  parle  aux 
.  rt  ,  o  Âdes)  mais  fi  ne  laiflôit-il  pas  neatmoins  d'e 
,_  Are  toufîours  enchainé,  &cela  elloit  comme 

vne  marque  d'opprobre ,  qu'il  eftoit  là  com- 
me mal-fâiteur,  qu'il'eftoit  côme  les  larrons 
6c  les  meurtriers.  D'autant  donc  que  les  po- 
ures  fidèles  pouuoyent  prédre  vu  grand  fcan- 
ilale  en  la  perlbnne  de  faind  Paul,  il  leur  du, 
Regardez  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  & 
à  la  gloire  en  laquelle  ileft  exalté  :  cela  eft 
pour  abolir  tous  les  opprobres  que  nous  ver- 
rons en  ce  monde.  Et  de  faiû,  ce  n'eft  point 
fen  s  câufe  qu'en  d'autres  paflàges  il  fe  glori- 
1.  T<«o.  £ç  jç  fgj  jjgj^j  ^  jjy»j[  jgj  pnfe  beaucoup  plus 

*■*  que  les  fceptresde  touslesroisdu  m5de,que 

les  couronncs.&tous  les  ornemens  des  Ducs, 
des  Rois ,  &  des  Princes  ;  car  ce  font  comme 

Gid^.iy  l^s  arnioiries  q  noftre  Seigneur  lefus  Chrift 
luy  auoit  données.  Il  eft  vray  qu'il  les  appel- 
le bien  des  fleftrilTeures  ,  comme  on  fleftrira 
vn  mal-faiteur:mais  ces  fleftrifleures-la  font 
plus  precieufes  déliant  les  Anges  du  cicl.que 
ne  font  pas  toutes  les  armoiries  des  Princes 
de  ce  môde.auec  toutes  leurs  brauetee.Main- 
tenant  dôques  il  refte  aufsi  bien  de  noftre  co 
fté  d'approprier  ceci  à  noftre  vfage.  Et  en 
premier  lieu  notons  qu'il  nous  faut  prudem- 
Kiétdilhnguerdela  caufedes  Martyrs  de  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift ,  d'auec  celle  des 
mal-faiteurs.  Car  quant  à  l'opprobre  ,  quant 
aux  tourmens,  quant  aux  prifons ,  &  chofes 
femblables  ,  nous  ne  pouuons  pas  diftinguer 
entre  les  Martyrs  de  lefus  Chrift.&les  nieur 
triers,  les  brigâs  &  les  larronstcar  nous  voy- 
ons raefnies  qu'on  tafche  de  rendre  la  mort 
des  Chreftiens  plus  infâme  que  ne  fera  point 
la  mort  des  brigans.  Voila  donques  leur  con- 
dition qui  eft  commune  quît  à  la  peine  qu'ils 
rndurcnt.-mats  cependant  l*c3ufe  eft  bien  di- 
uerfe.Gar  les  larrons  endurent  côme  ils  l'ont 
inerité,aufsi  font  les  œeartriers,&  lés  brigas: 
&  pourtant  ils  pjrtent  leur  opprobre:&'  quad 
ils  feroyent  elcuez  le  plus  haut  du  monde  ,  & 
mefmes  par  dcflus  les  nues,fi  eft-ce  qu'ils  por 
tét  la  marque  d'ignominie;&  de  fâià,ils  font 
punis  de  leur  raauuaife  confcience:  comme  S. 
Paul  dit  qu'ils  ont  vn  cautère  qui  eft  imprimé 
iiifques  aux  os,  St  qui  les  vient  brufler  iufques 
au  profond  des  cœurs.  Qjjedôques  les  mef- 
chans  &  contempteurj  de  Uieu.ceux  qui  che- 
minent s'adonna  ns  5  toutf  iniquité,  a  y  ent  le« 
plus  beaux  p.irtrocnsiju'icleft  pofsible,  qu'ik 
aycnt  de  beaux  titres  pour  fedefguifer,!!  elf- 
ce  toutesfois  qu'en  la  fin  on  les  verra  eftre 
çleJQs  d'opprobre  ,  &  qu'on  togaoiftra  bien 


N    X. 

qu'ils  ont  toultours  cfté  exécrables,^  i  Dieu 
&àfesAnges.  Mais  fi  les  feruiteurs  de  Dieu 
cndurent,&  bien.ils  feront  en  opprobre,  voi- 
re quant  à  leur  condition  exterieurecmais  les 
mefchâs  retienent  cefte  fignature-la,que  leur 
punition  doit  eftre  deteftable,&  tout  ce  qu'ils 
auront  enduré  d'opprobre  &d'ignominie.Et 
voila  comme  il  nous  faut  difcerner  de  la  eau- 
fe:3utrement  nous  fommes  par  trop  brutaux, 
&  noftre  aueuglemet  n'eft  point  fupporuble. 
Car  c'eft  comme  fermer  les  yeux  afin  de  ne 
point  veoir  la  clarté:c'eft  comme  effacer  l'i- 
mage de  Dieu  qu'il  a  imprimée  en  tous  let 
fiens ,  pour  ne  le  point  honorer  :  bnef ,  c'eft 
pour  mettre  vne  côfufion  entre  lefus  Chrift 
Se  Satan.  Et  ainfi  notons  bien ,  quand  fain£^ 
Paul  dit  qu'il  eft  comme  les  mal-faireurs,  que 
il  réfute  toutes  ces  fantafies  qui  nous  pour» 
royent  venir  en  la  tefte.  Que  c'eft  merueille 
comme  Dieu  foutfre  &  permet  que  les  fiens 
foyent  ainfi  aflligei ,  qu  ih  foyent  mis  fi  bas 
iufques  aux  aby  fines.  Or  n'en  foyons  point 
eftonnez.Et  pourquoy  ?  Car  cependant  Dieu 
ne  laifferapoint  de  teftifier  fa  vérité  ,  lefus 
Chriil maintiendra  (i  querelle,  &  nous  auons 
vn  garent  fidèle  au  ciel,&  tous  ceux  quiendu 
rent  pourfon  Nom  fentiront  toufiours  fa  fa 
ueur  &  fon  aide ,  quelque  affliftion  qu'ils  puif 
fent  porter.  Et  voila  pourquoy  fatnû  Pierre 
dit, Mes  amis.que  vous  n'enduriez  point  com  '•  P"w 
me  paillarsa;  adulteres,c5melarrens,&gent  4-iî. 
mefchans  &  diirolus.que  vous  nefaciez  point 
cefte iniure  à  voftre  Maiftre,  d'eftre  expofez 
en  opprobre ,  de  fouffrir  pour  vos  maléfices: 
mais  quand  vous  fouffrirez  côme  Chrcftien», 
glorifiez-vous  en  cela. Maintenant  donc  ap- 
prenons en  fomme  ,  que  les  mondains  &  tous 
ceux  qui  ne  fçauét  que  c'eft  de  feruir  à  Dieu, 
auront  l'Euagile  en  deteilation  Si  en  mcfpri?, 
qu'ils  voudront  perfeciittr  les  feruiteutt  de 
Dieu  en  vne  façon  ou  en  l'autre  ,  apprenons 
(di-ie  )  de  n'eilre  point  fcai)daliï.ez  de  cela, 
comme  fi  c'eftoit  vne  chofe  nomiellt  :car^ét 
le  commencement  il  eneft  ainfi  aduenu.  Pour 
fuiuôs  toufiours  noftre  courfc,&  regardés  à  la 
refurreftion  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
&  fçachons  que  ceux  qui  amourd'huy  perfe- 
cutent  fi  cruellement  les  poures  fidelei,&  qui 
font  pluv  cruels  enuers  eux  que  bcftes  fauua- 
ges ,  qu'il  faudra  qiieceiix-la  vienentdcuwt 
le  fiege  iudicialdu  Fils  de  Dieu  ^  ils  fe  àit{~ 
fent  auiourd'huy  furiçufement  contre  luy,  it 
contre  ceux  qui  mamtienent  fadcftrine.mais 
en  la  fin  il  fera  afsis  pour  les  condamner ,  & 
faudra  que  là  ils  rendent  conte  de  leur  impie 
t«  &  de  leur  audace,d€  leur  tyrannie  &  cruaa 
té,&de  leur  obftination.quâd  ils  n'ont  pjint 
voulu  rendre  obcilTaiiceàrEuangile  ,  qu'ils 
«e  fe  font  point  voiiiluhumijier  fous  fa  Para 
le.  Voil.1  comme  nous  auons  à  prattiquer  ce 
partage,  que  nous  foyôs  liaidis  pour  defpiter 
tout  îe  monde, &  gians  &  pctis  ,  quand  nous 
voyons  qu'Us  font  fiobllmczdefe  vouloir 

attacher 


SVR    LA  II.     A    tIMOTH. 


^sr^ 


attaclier  au  FiUde  Dieu  ,  que  des  poures  vers 
de  terre  qui  ne  font  que  pourriture,que  ceui- 
\x  ofent  batailler  cotre  eeluyqui  a  toute  puif 
lance  en  fa  main.Et  que  nous  ne'foyons  point 
fafche»  outre  mefure  des  opprobres  qu'il  no» 
faut  endurer, puis  qu'ainfi  eft  quedeuant  Dieu 
&  fes  Anges  ils  font  tenus  beaucoup  plus  ho- 
norables que  toutes  les  dignitez  de  ce  monde. 
Ormaintcnant,  pourcc  que  letcmps  ne  porte 
pas  que  nous  deduifions  tout  ce  propoj.en  at- 
tendant qu'après  difner  le  relie  foit  déclaré, 
aduifons  où  c'eft  que  fainâ  Taul  nous  ramené: 
c'eft  afçauoirà  la  focieté  &  liai/bn  que  nous 
auonsauec  le  Fils  de  Dieu,  pour  leceuoirplei 
ne  &  entière  côfolation.tantde  ce  qu'jl  a  ïbuf 
fert  pour  nous.quedecequ'il  efl  rcfllifcitéen 
gloiie.Or  ie  di  ceci, d'autant  que  dimache  pro 
chain  nous  auôs  à  receuoir  la  faindle  Cène  de 
noftre  Seigneur  lefus  Clirift:&  maintenant 
ceci  vient  â  propos,  quand  lefus  Chrifl  fe  con 
ioint  à  tout  le  corps  de  l'Eglife.  Car  fans  cela 
(comme  i'ay  dit)d'?quoy  nous  feruirott-il  que 
il  a  efté  glorifié  ,  que  l'empire  luy  a  efté  don- 
né, afin  que  tout  genouil  fe  ployé deuant  luy, 
que  les  diables  mefmes  tremblent  deuant  fa 
maiefté  Diuine  :  dequoy  nous  feruira  cela,  fi- 
non  que  nous  cognoifsiôs  qu'il  n'a  rien  de  fe- 
paré  auec  nous:£t  pourquoy  ?  Car  non  feule- 
ment il  s'eft  fait  homme  mortel  feniblable  à 
nous  «afin  d'auoir  vnevraye  fraternité  auec 
tous  ceux  qui  fe  rendent  à  luy  par  foy.mais  il 
nous  nourrit  de  fa  fiibftance ,  il  veut  cftre  no- 
rtre  Chef,  &  faut  que  nous  tirions  vie  de  luy, 
&  que  cela  fe  face  par  la  vertu  de  fon  faind 
Efprit.  Mais  cependanfil  nous  l'a  teftifié  en 
fa  fainAe  Cf^ne.qui  nous  en  eft  vn  gage.  Tou- 
tes fois  &  quantes  que  nous  venôs  à  cefte  fain 
cte  table.^ous  deuons  eftre  confermei  que  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift  eft  vni  en  nous ,  & 
que  nous  ne  pouuons  iamais  eftrefeparez  de 
luy  :  que  s'il  eft  riche  ,  nous  ne  deuons  point 
craindre  noftre  poureté:s'il  eft  puiflani,  nous 
ne  deuôs  point  craindre  nos  foiblefles:  s'il  eft 
la  iuftice  de  Dieu,  nous  ne  deuons  point  crain 
dre  nos  pechez:i'il  eft  la  fagefTe  de  Dieu,  no' 
deuons  approcher  hardimét  de  Iny  pour  eftre 
renouuelez. Voila  donquesce  que  nousauons 
àobferuer  ,  quand  cefte  fainfte  table  nous  eft 
raife  au  deuant .  Aufsi  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift  nous  teftifié  qu'il  nous  reçoit  à  foy,  & 
qu'il  veut  que  nous  foyons  nourris  de  fa  pro- 
pre fubftancc.  Mais  aduifons  de  n'approcher 
point  de  cefte  fainfte  table  de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift, que  nous  n'ayons  cefte  mémoire 
dont  parle  fainft  Paul .  Car  en  premier  lieu  il 
eft  requis  que  nous  foyons  enfeignez  en  la  do 
urine. £t  ce  n'eft  point  aflez  que  nous  y  ayons 
efté  enfeignez  ,  mais  il  faut  qu'elle  ait  (i  vi- 
gueur en  nous  ,  &  que  nous  fçachions  quand 
nous  y  viendrons  iournellement.que  c'cft  vnc 
eftude  pour  nous  exercer  tout  le  temps  de  no 
ftire  vie.Mais.quoy?Nous  en  voyons  beaucoup 
qui  font  bien  loin  de  fepauuoir  fouuenir  que 


lefus  Chrift  eft  reffufcité  :  car  iamais  n'ont 
goufté  que  c'eftoit  des  principes  de  la  foy,  ils 
font  demeurez  toufiours  en  leur  bcftife.  Nous 
voyons  les  autres  qui  ont  prefté  l'aureille  dif 
commencement,&  ont  faitfemblaat  de  croire 
à  l'£uangiie:mais  ils  fe  font  deftournez  en  for 
te.'queliont  fait  comparaifon  d'eux  auec  lef 
Papiftes.il  eft  certain  qu'ils  font  diablcs,&  les 
Papiftes  font  Anges  au  prix:  &  il  faut  bien'auf 
fi  que  Dieu  fe  venge  de  leuringratitude.d'au- 
tant  qu'ils  fefontainfiroocqucz  de  luy  ,&  de 
ce  threfor  lî  excellent  de  l'Euangile  qu'ils  ont 
fi  malheureiifement  proptané  comme  on  le 
voit:mais  iknélaiflent  point  defemefter  par 
mi  les  enfansde  Dieuà  leur  condamnation. 
Quand  nous  voyons  cela ,  nous  deuons  getnjr 
de  noftre  cofté.Non  point  que  nous  ne  dtuiéî 
procurer,  entant  qu'en  nous  eft ,  que  ce  fainâ 
Sacrement  ;ne  foit  point  ainfi  corrompu  par 
telles  pollutions  &  fi  vilciries,  &  quand  nous- 
nous  ferons  efforcez  d'y  mettre  ordre, q  nous 
prions  Dieu  qu'il  purge  fon  Eglife  de  tellev 
ordures  k  fcandales .  Et  de  noftre  part  adui- 
fons à  nous,  que  nul  ne  fe  preferite  pour  rece- . 
uoirla  Cène  de  noftre  Seigneur  lefus  Chriit, 
qu'il  n'ait  ceci  deuant  les  yeux  :  c'tftde  con- 
templer le  Fils  de  Dieu  qui  a  efté  du  tout  a- 
neanti  pour  nous,  qui  a  efté  mis  en  eitrensité- 
d'opprobre,  &eftdefcendu  iufquesauxabyf- 
mes  d'enfer,&  que  de  là  il  a  efté  exalté  en  gloi 
re,  afin  que  nous  foyons  en  la -fin  receusauec 
liiy_,  comme  fainft  Paul  le  touchera  ci  après. 
Q_tiand  nous  verrons  les  hommes  fedrelTer 
ainfi  contre  fa  maiefté,que  nous  apperccuions 
leur  ruine  prochaine,  que  nous  ne  laîfsiôs  pa; 
d'aller  toufiours  noftre  train,&  q  nous  foyons 
inuincibles  pour  furraonter  tous  les  combats 
que  Satan  nous  fufcitera.&qu'auec  toute  hu- 
milité &  crainte  .nous  afpirions  à  cefte  con- 
ftance de foy,de  no'eleuerlàhautaux  cieur, 
&  de  contempler  lefus  Chrift  qui  a  le  règne 
en  fa  main,  auquel  toutes  créatures  font  fuiet 
tes ,  &  que  nous  tendions  toufiours  à  cefte  vie 
celefte,  paflans  tellement  parce  monde,  que 
nous  y  foyons  eftrangers,  n'ayans  point  de  re 
pos  affeuréjfinon  en  cefte  héritage  celefte  qui 
nous  eft  apprcfté  ,  &  où  nous  attendous  cefte 
couronne  de  gloire  qui  nous  a  efté  acquife  par 
le  Fils  de  Dieu. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes, le  prias  qu'il  luy  plaife  de  nous  en 
purger  de  plus  en  pluSifif  de  nous  renouueller 
en  droite  repentance  ,  afin  que  nous  ne  cer- 
chions  finon  de  nous  addonner  du  tout  à  luy. 
Et  cependant  qu'il  luy  plaife  d'abolir  toutes 
les  fautes  que  nous  auons  commifcs ,  afin  que 
nous  luy  foyos  agreables:'non  point  que  nous 
en  foyoBsdigncs,mais  par  fa  pure  bonté  5: 1* 
amour  qu'il  nousamonftree  tn  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.  Ainfi  nous  dirons  tous. 
Dieu  toiit-piiiflànt,Pere  celefte, &'c. 
Cc.iiii. 


53?^  s  E  R  M  O  N    X  I. 

OJATRIEME      SERMON     SVR     LE 

SECONDCHAPITRE. 

-     8      hye  mémoire  que  le  fus  Chrijl  efl  rejfufcité  des  morts ,  qui  eji 
de  Ufcmencc  de  D au  id,  félon  mon  Euanaile, 

9  Auquel  i endure  trduaux  iufques  aux  liens,  comme  malfaiteun 
mais  U parole  de  Dieu  nefl  point  liée. 

10  Vour  ceîle  caufe  î endure  toutes  chcjcs  pour  les  elcus,  afin  que 
ils  okienent  au  fit  lefalut  qui  efl  en  lefusOyrifl.duecla  gloire  éternelle. 

1 1  CHefl  \>ne  parole  certaine ,  que  fi  nous  fommes  morts  auec  luy, 
mus  viurons  aufii  auec  luy: 

1 1      Si  nousfoujfrons,nous  régnerons  aufii  auec  luy  :  fi  nous  le  rr- 
nions^d  nous  reniera  aufii. 

13     Sinous  fimmt  s  mcredules,il  demeure  fidcle^il  ne  fie  peut  renier 
fày-mefine. 


MaSt  Paul  ayant  parlé  des 
.  affl  d.ôi  (jLi'il  enduroit  pour 

rEuangilc,  fe  coiifjle  ,  &  le 

relîouit,  d'autan:  que  la  pa- 
£■  rôle  de  Dieu  ii'cit  point  iiee 
u  auecluy  ,  &■  fc  co:uente  que 

lefus  Chrift  foi-t  cependant 
glorifié,  que PEuangile  ait  fon  cours,  &  que  i' 
Ëglife  s'augmente,  que  beaucoup  foyent  xc- 
cndllis  en  robeiflâiice  de  t'oy  .  £tainli  nous 
voyons  qu'il  n'a  point  eu  efgard  à  fa  perfon- 
jie.pourcercherce  qui  luy  eftoit  vtile  enfon 
priué,mais  que  fur  tout  il  s'eft  addonné  à  tai- 
re q  lefus  Cjïrill  fufl  ferui  &  honoré  par  tout 
le  monde ,  que  Dieu  fuflcognu  pour  Perc& 
Sauueur  ,  que  les  poures  âmes  qui  eftoyent  en 
train  de.perditionjfulTent  retirées  au  chemin 
Je  falut.  Voila  q  fainti  Paul  a  deiîré.Et  pour- 
tant tous  ceux  qui  ont  charge  d'anoncer  la  pa 
rôle  de  Dieu, font  ici  aduercis  de  l'affetliô  que 
ils  doyuent  porter  à  toute  l'Eglife'c'eftafça- 
uoir  qu'ils  s'oublient  eux-mefnies  quand  U  ell 
qucftion  du  falut  commun  de  tous  fidèles .  Et 
au  reile,nous  auons  aufii  vn  aduertiflemét  gê- 
nerai,que  fi  quelque  feruiteur  de  Dieu  eft  affli 
gé  ,  nous  ne  deuous  point,  eftre  abbatus  pour- 
tât,  côme  i\  laparolt  de  Dkun'auoit  plus  fon 
regncniiaisplultoil  fouuenons-nous  de  ce  qui 
efl  ICI  dit,qu'tUeerien  liberié,combienqu'vn 
hônie  fou  prifonnier.Car  Dieu  peimettia  b  é 
que  quelqu'vn  des  fiens  fouffie.mais  ccpcndît 
il  ouurira  neantmoins  la  porte  à  fon  Euangile 
en  dcfpit  des  ennemis.il  ciï  viay  que  l'inten- 
tion de  Satan  Se  de  fes  fuppofts  qui  luy  feruét, 
ferait  bien  d  empeûher  que  la  parole  de  Dieu 
ne  couruft  plus  ,  niais  qu'elle  ruil  cm-pcfcJiee 
de  tou';  coftei,  mefines  qu'elle  lufl  mifL-fous 
le  pied;  mais  Dreu  fera  que  fa  venté  demeure. 


inuincible,  mefmes  qu'elle  s'auance  quand  o« 

tafchera  de  l'oppiimei  ainli,  &  qu'elle  s'aug- 
mente en  delpit  des  hommes.Comme  de  faiét 
la  prifon  de  lainû  Paul  a  cité  caufe  de  faire  q, 
la  parole  de  Dieu  tuft  publiée  auec  plus  grade 
authonte.  Cai  (comme  il  en  pai  le  au  premier 
des  Philippiens)  la  prifon  a  elle  comme  ano- 
blie tât  au  palais  de  l'£mpereur,que  par  tout, 
quâd  le  nom  de  lefus  Ci»nft,qui  n'auoit  point 
eflé  ouy  auparauant ,  a  elle  leclamé  entre  les 
incredules:&  mefmes  auand  les  mefchans  onc 
amené  leurs  calomnies  pour  diffamer  tout  ce 
que  fainft  Paulauoit  enfeigné:  celaa  cfte  eau 
fe  que  beaucoup  ont  ouuert  les  aureilles,&que 
ils  fe  font  enquis  de  ce  qui  auparauant  leur  e> 
ftoit  incognu  &  caché. Voila  donc  corne  Dieu 
a  multiplie  fon  Eglife  par  la  prédication  de 
fainél  Pau],  &  cependant,  quand  il  eftattachâ 
en  fa  perfonne,  la  doûrine  a  eu  tant  plus  de  li. 
berté .  C'tft  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce 
paflàge.  Et  amfi  nous  voyons  que  non  feule-  - 
ment  (àinil  Paul  par  fon  exemple  monftre  à 
tous  ceux  qui  ont  la  charge  d'anoncer  l'Euan 
gile, qu'ils  doyutnt  procurer  fur  tout  l'edifica; 
tion  de  TEgliie,  fans  auoir  trop  grand  foin  d'' 
eux:  mais  il  monftre  que  nous  ne  deuons  point 
perdre  courage  quand  nous  verrons  quelques 
atldidions  fur  les  fer,.iteurs  de  Dieu.Êt  pour- 
quoy?Elperons  neantmoins  queTEuangiie  i- 
ra  plus  outre, &  que  Dieu  furmontera  tous  les 
empifchcmens  &  difhcultcz  qui  nous  tfton- 
nent.  Mais  tant  s'en  faut  que  ceci  foitappli-  , 
que  comme  il  doit  ,  que  beaucoup  de  gens  fe 
forgent  à  leur  fantalie  des  tentations  pour  re 
patiller  la  parole  de  Dieu:&  eneores  qu'il  n'y 
au  point  (itquoy,  tant  y  a  qu'ils  imaginent'OU 
ceci  ou  cela, qui  fciapourdeftouriici  (ce  fein- 
ble^queTEuangilene  s'augratmc  .  Puis  que 

«elk 


s  V  R    LA    II.    A    T  I  M  O  T  H. 


>05 


tefte  ingrititude-Ja  fe  monftie  ,  cognoilTon?  lailfcrOn  voit  qu'il  pourrit  U  en  prifoii:  &  lî 
que  nou'î  fouîmes  bien  loin  de  ctfte  vertu  &:  fa  caufe  eftoit  bonne  ,  Dieu  Je  delaiireroit-il 
conftanct  que  S.Paul  monftreici,&  à  laquelle  aubefoin  ?  Quand  donc  vous  oyez  ces  mcu- 
il  exhorte  tous  fidèles. Et  ainfi  lailTons  courir  longes  qui  volent ,  vous  pourriez  eftrc  cfton- 
l'Euangile ,  c'eft  à  dire  que  nous  'permettions     nez  félon  la  chair  :  mais  cognoiflez  que  Ten- 

qu'il  aitfon  cours:&c5bien  queles  mefchans  durepour  voftre  profit,  àce  que  vousfoytz 
s'efforcent  de  diminuer  l'honneur  àPautho-     tant  mieux  fortifiez,  &  que  ma  prifon  vous  ûr 

rite  qu'il  mérite ,  fçachons  neantmoins  que  uc  d'vn  bon  tefmoignage  ,  que  comme  ie  vous 

quoy  qu'il  en  aduicne  ,  noftre  Seigneur  main-  ay  anoncé  la  parole  de  Dieu  en  toute  liberté 

tiendra  toulîours  fa  vérité,  &i:cramefmes  que  &  hardicfle  ,qu'aufsi  ie  n'efpargne  point  ma 

ce  qu'auront  enduré  les  mifi;ftres  de  fa  Paro-  vicS:  que  i'ay  les  yeux  fermez  à  tout  ce  qui 

Je,feruira  de  tefmoignage  &  de  fignatuve,afin  tftdema  perfonne,  que  ie  neraefafcKepoinc 

que  l'Euangile  fou  toufîours  tant  p!u<  prifé,  d'tftre  en  prifon,  ce  m'ell  tout  vn  moyennant 

comme  de  tàiftc'eftbieniaifon.Q^iand  nous  que  cela  vous  profite  .  Ainfi  donc  ne  foyci 

•voyons  vn  homme  quin'a  ne  pouuoirnecrc-  point  ingrats  àDieu,  veu  qu'il  vous  veut  con- 

dit,  qui  refifte  neantmoins  à  ceux  qui  font  en  fermer  la  dotlrine  que  vous  auitz  receue  au- 

puiirancc,&  qui  fouftient  tous  alïàuts  fans  parauant,  pource  que  vous  cognoiflez  qu'elle 

fkchir,  que  nous  voyons,  di-ie,  que  les  ferui-  ne  vous  a  pas  efté  prefchee  en  vain  ,  ne  par 

teursde  Dieu  perfiiient  conftamment ,  &que  quelque  kgercîé:  mais  quand  vous  voyez  que 

ils  ne  font  point  eftonnez  quoy  qu'on  leur  ta-  ie  pcrJîftc  iufques.^  la  mort,  cognoifltz  que  i* 

ce,voudrions-nous  meilleure  approbation  ne  ayfenii  à  Dieu  loyaument ,  &  que  vcflrc  foy 

plus  ferme  pour  ratifi.er  ce  que  défia  Dieu  no*  foit  tant  mieux  allcuree  par  cela.  Nous  voyôs 

amis  en  auant touchant  fa verité.'Etainfi  ap-  donc  maintenant  pouiquoy  fainft  Paul  parle 

prenons  quand  lesmefchans  auront  confpiié  ici  pluftoftdes  enfansdeDieuqueduRoyau- 

tout  ce  qu'il  leur  fera  pofsible, qu'ils  ne  pour-  me  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift .  Car  foa 

ront  pas  neantmoins  attacher  la  parole  de  intentioneftoitd'eihorter  lesfideles,afin  que 

Dieu.quetoufiours  elle  ne  marche  plus  aiunt,  ils  cognuflent  que  c'eftoit  pour  leur  bien  & 

&  que  Dieu  n'augmente  le  nombre  &  la  com-  pour  leur  falut  qu'il  cnduroit  .Mais  ercores 

pagniedes  fiens,&  qu'il  ne  face  piofiter  fa  fe-  on  pourroit  ici  répliquer  qu'il  femble  que  ce- 

itience  par  tout  le  monde.  Or  faind  Paul  ad-  la  fufl  fuperflu,  que  fainâ  Paul  enduraft  pour 

ioufte  icefropos,Qu^i!  fndure  ces  ch:fei  kcau  les  eleus.Cir  Dieu  ne  peut-il  pas  fauuer  ceux' 

ftdt-seUus  :  comme  s'il  difoit  qu'il  n'a  pas  vn  qu'il  a  eleus  &  adoptez  deuant  la  crcationdj 

tel  foin  de  fa  perfjnne  ,  qu'il  nepenfepluf-  monde  ,  fans  que  les  hommes  luy  foyent  en 

tort  à  tous  enfans  de  Dieu,  voire  afin  (dit-il)  aide?Lc  confeil  immuable  de  Dieu  a-il  befoin 

ijit'ilsoUienent  le  ftliit  <jHt  tfl  en  Ufits  chrifi  de  fecours  humain  ,  ou  des  créatures  ?  Pour- 

comme  moy,  Se  qu'ils  obt.eiient  quant  &  quat  quoy  donc  eft-ce  que  fainft  Paul  dit  qu'il  fouf 

la  gloire  éternelle.  Sainft  Paul  oppofe  ici  le  fre  acaufe  des  ehus  ?  Orileft  vray  que  Diei; 

falut  aux  affligions  qu'il  endure  :  la  gloire,  à  amènera  bien  les  fiens  à  ceft  héritage  qui  leur 

tant  d'opprobres  &  d'ignominies  qui  luy  e-  tftapprelléimais  cependant  il  luy  plaift  de  fai 

tloyent  faites  .Comme  s'il  difoit ,  I'ay  vne  re  valoir  le  labeur  des  hommes  :  non  pas  qu'il 

bonne  recompenfe,  il  me  fuffit  quand  l'endu-  ait  mellier  de  rien  emprunter  de  nouî.mais  il 

re  affliftion  ,  &  que  ie  voy  la  mort  qui  in'cft  nous  fait  ceft  honneur  par  fa  bonté  gratuitt , 

prochaine  :  que  cependant  le  falut  des  enfans  &  veut  que  nous, foyons  in  ftrumens  de  fa  ver 

de  Dieu  eft|auancé  par  ce  moyen:  cela  me  tu.  Samél  Pau!  donc  ne  fe  vante  pas  ici  que  ic^ 

doit  bien  fuKire  .  Et  puis ,  fi  ie  fuis  vilipendé  falut  des  enfans  de  Dieu  dépende  de  /â  con- 

du  monde,  que  les  incrédules  me  reiettent  de  ftance.ou  des  affliflions  qu'il  auoit  à  fouf— 

leur  compagnie.  Dieu  fait  valoir  cela  à  lagloi  frir  ,  mais  feulement  il  lignifie  que  Dieu  veut 

re  de  tous  fidèles .  Ainfi  il  n'y  a  ni  aftliâion,  conduire  les  fiens  par  le  moyen  de  /a  parole, 

ni  opprobre  qui  medoyue  fafcier  ,  quand  le  &  qu'il  applique  les  hommes  qu'il  a  cfioifis  i 

voy  que  Dieu  en  fait  fortir  vn  tel  bien  &  vn  cela  comme  à  fon  œuurc,&  les  fait  inlhumens 

tel  profit  pour  tous  les  fiens ,  Voila  en  fomme  de  la  vertu  de  fon  fainft  Efprit.  Ainfi  donc  no 

l'intention  de  faind  Paul.  Or  ICI  on  pourroit  tons  que  Dieu  luy  ftul  commcil  a  commen- 

dcmander  s'il  n'a  point  eu  cfgard  fur  toutà  ce  noftre  fahit,  qii'aufsi  il  le  parfait  :  maisce— 

la  gloire  de  Dieu,  laquelle  doit  bien  cftre  pre  pendant  il  ne  laifîc  pas  d'vfer  des  moyens  quç- 

ferte  au  lalut  des  hommes  .Mais  la  refponte  il  a  ordonnez  comme  bon  luy  femble  ,  non 

clt  tacilc  àcela  :  afçauoir  que  fainâ  Paul  taf-  point  par  ncccfité,  mar   pource   qu'il  luy 

che  à  exhorter  les  enfans  de  Dieu,&;àlcur  plaiftninfî.  Et  en  cela  cognoiiTons  tant  mieux 

donner  courage.  Pour  cefte  caufe  il  ne  fait  fi  bonté,  quand  il  nous  applique  àvnfcruice 

mention  que  d'eux,  &  de  leur  profit  ;  comme  fi  honorable  ,  qu'il  nous  donne  la  charge  de- 

s'il  difoit.  Mes  amis,  il  eft  vray  que  félon  la  procurer  le  ialu:  de  fes  enfans, &d'en  auoir 

chair  vous  pourriez  eftre  esbranlez  ,  quand  le  foin.  Il  eft  vray  que  cela  not.imment  cftdic 

vous  oyez  de  mcfchans  rapports  de  moy  :  Et  des  miniftres  de  l'Euangilt:  mais  tant  y  a  que 

Ci^mcfchant,  aevoic-onpas  i^ue  Dieu  l'a  de-  il  s'eûer.dàtous£deks,&àgrans,&àpcu.s: 

Dd-i. 


594 

qu'il  n^y  à  ilonc  celuy  qui  ne  doyue  entant 
qu'en iuy  eftauancerlefalutde  fesprocliaini: 
non  pas  que  nous  y.  puif^ions  rien  de  nous 
(  comme  dit  aefté)  mâisc'tft  Dieucjui  noU'. . 
coriftitue  en  tel  honneur  &  dignité ,  que  nous 
qui  fommes  perdus  &:  damnez  de  nature,puil- 
lions  eArcminiflresdufalutde  ceux  qui  p  jur 
rayent  périr.  Cela.nous  doit  donner  tant  plus 
de  courage  ,  quand  nous  voyons  que  ù  nous 
enduroui  pour  TEujgile  ,  non  feulement  c'tfl: 
vn  ftruice  agréable  à  Dieu  ,  non  feulement  il 
cfl  honoré  en  cela  par  nous  ,  niais  aufsi  que  c' 
elt  vn  feruice  profitaWe  à  toute  TEglife,  que 
le  fahit  des  fidèles  en  eft  conternic  .  Q_uand 
nous  voyons  cela, ne  deuons-nous  point  eftre 
beaucoup  plus  incitez  à  taire  ncftre  office, 
quand  nou!,  fommes  appelez  à  cela  par  la  bon 
te  dé  noftre  Dieu?  Et  notamment  fainft  Paul 
di:,  \  fn  qii'iccux  aupi  ol'tiemnt  le  pilm  qui 
efl  en  Ufiis  chrift  .  Quand  ildit ,  Eux  aufsi  :  il 
monllrc  que  nou.s  nedeuons  point  cflrc  ad- 
'donnez  chacun  à  loy  ,  mais  que-.nous  dcuons 
attirer  autant  de  compagnie  que  nonv  poiii^. 
rons  auëc  nous  .  Si  donc  Djeua  tait  ccfl  hon- 
neur à  <:jii,clqu''vn  de  le  faire  marcher  dcuant, 
il  ne  doit  pas  mefprifer  ceux  qu'il  pourra  ga-- 
gner,mai,s  ildoitalTemblei;  tant  grande  corn-: 
pagnicqu''il  pourra.  Car  il  ne  nous  faut  point 
craindre  que nollre bien  fcdinunuc.Côme  11 
nous  auons  yn  héritage  en  ce  monde,  quand  il 
fera  diuifé  en  beaucoup  de  portions,  il  n'en  re 
Itéra  giiérçs  pour  chacun:  mais  quant  àl'heri- 
■t.îgecelefte  ,  nous  fomincs  tout  affcurczque 
rien  n'eft  perdu  pour  nouç,on  amoindri:quand 
nous  aurôs  attiré  beaucoup  de  nos  prochains, 
Voire  en  mi.Uitude  infinie ,  c'eft  noftre  gloire 
que  celle -la  ,  &:  noflre  félicité  .  Ciuand  Dieu 
nousappcllc  à  foy.il  n'y  va  point  par  portion, 
fclon  que  les  ehofes  croillt-nt  ou  diminuent 
en  ce  mondc:'mais  il  y  en  aura  tant  quefcom-, 
me  i'ay  défia  dit  )  noftre  fahit  fera  tant  plus 
augsientc.iSi  noflre  gloire  pareillement,  qo.id 
nous  aurons  gagne  quelque  multitude  à  no- 
■  ftre  Dieu.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  ob 
ferucf.  Et  cepcndantaufsi  notons  que  fainft 
Eàul  ne  met  point  ici  vu  Xalut  qu'il  ait  acqids 
par  fon  in'duftrie  ,  mais  il  dit  qije  ce  fahit  cft 
en  Icfns  Chnft.  En  quoy  il  nous  aduertit  que 
tout  ce  que  nous  taifons,  n'eil  p.is  pour  r<cn 
derçgucr  à  la  grâce  qui  nous  a  elle  apportée 
par  le  Fils  de'Dicu,  mats  pluftoft  pour  la  fai- 
re valoir  ,  afin  qu'elle  ait  tant  plus  grand  lu- 
ltre&  Vertu  enuers  nous  .  Ayant  parlé  ainii,  il 
adioufte  ,  Qwf  c'eft  yne  partie  certaine,  que  fi 
mus  [imtnes,  morts  jiiu  li[ns  Chrifl  ,  que  nous 
■v'mrons  Huec  Iuy  •  p  nous  e!:i{itroiis  eu  et  monde, 
que  nous  curns  l  lierit.i^e  i'e  fm  R."yaiime  ecle- 
fie  ;  pour  raor.ftrer  qut  nous  nedeuons  point 
eftic  troublez;  voyans  les  pcrficutions  que  \c 
di.ible  fiifciteen  ce  monde,  voyans  les  incré- 
dules-enragez, mefmes  les  loups  qui  viendront- 
pour  Jif.iper  tout  le  troupeau  ,  qu'il  ne  faut 
p-Juit  (juçnous  foyons  vaiiicuv  Je.tcUc;  tcu- 


SERMON     XI. 


talions.  Car  au  contraire,  il  nous  faut  mourif, 
il  nous  voulons  paviicnir  à  la  vie  de  lefus 
Chrift;&  fi  nous  voulons  entrer  en  fon  règne, 
jlnouS  faiit  cheminer  parles  afflictions  que 
nous  auons  à  endurer  ,  afin  que  nous  foyons 
Configurez  à  Iuy  &  à  fon  image .  Or  pource 
■que  Ccfte  doftrinc  fcmble  cftrange  de  prime 
face,  &  qu'elle  tft  difficile  à  digérer  au  fen« 
humain,  fainét  Taul  v  fe  de  cède  prciac#,  C'efi 
(dit-  l)vn*  parole  tout  iij]euree.  il  met  ce  mot- 
ci  quand  il  traître  de  quelque  chofequi  ne  fe 
peut  perfuader  qu'à  grand' peine  aux  hom- 
mes ,  ou  ben  qui  cil  de  telle  importance  que 
elle  mente  bien  d'cftre  notee^,  iS\:  qu'on  la  pe- 
fe.Oi  (comme  l'ay  dit)celaHC  ptut  entrer aur 
coeurs  des  hommes  .qu'il  faille  mourir  pour 
viurc  .qu'il  faille  par  opprobre  païuenir  âla 
gloire  de  Dieu  :  car  ce  font  chofes  contre  na- 
ture. Or  tant  y  a  que  c'eft  la  condition  de  L* 
Eglife.  Mais  afin  que  nous  bataillions  contre 
tous  nos  fcns  ,  &  que  nous  rcccuions  ce  que 
Dieu  a  ddibei'é.  voire  en  renon  çant  à  tout  ce 
que  nous  auons  de  raifon:  afin  donc  que  nous 
facions  ceft  liunneur  à  Dieu  de  rcccuoir  pai-. 
iiblement  fon  décret,  faind  Paul  met  ici,  Pa- 
rolc certaine:  comme  s'il  difoit,  Mes  amis, ii  eft 
vrayque  fi  nous  iugeons  fclpn  noftre  fantâ- 
fie  ,  il  nousfcmblera  que  c'eft  viie  chofe  im- 
pofsible  quand  nous  ferons  morts  d'cftre  vi- 
uifiez.&quccelbit  là  le  moyen  .&•  puis  qu'il 
faille  que  nous  foyons  defpitez  du  monde, 
qu'on  nous  craclie  au  vifage.  que  nous  foyons  . 
en  opprobre  exticme  pour  régner  aucc  lefus 
Chrift  :  tout  rela  nous  fcmblera  comme  fon- 
ge.Mais  abbatons  toutes  difputes, ne  nousar- 
rcftons  point  à  noftre  cuidcr  ni  feniblant, 
puisque  DieXi  l'a  ainfi  ordonné  .acquiefçons 
à  fon  confeil,&;  fjuflProns  d'eftre  conduits  par 
luy.Nous  voyons  donc  maintenant  pourquoy 
fainét  Paul  notamment  a  mis  ce  mot.  Mais  re- 
uenons  à  cefte  (entcnce  ,  Qu'il  fuit  quf  nous 
fiyons  morts  ,mec  \efus  Chrift  .  ieuânt  que  vi- 
ure  auec  Iuy.  Yci  par  ce  mot  de  morf,  faindl 
Paul  n'entend  pas  feulement  le  trcfpas  des 
hommes,  quand  Dieu  les  retire  de  la  terre: 
mais  ce  qu'il  exprime  tant  au  quatrième  cha- 
pitre de  la  féconde  auv  Cniintiiiens  ,  qu'au 
troifiemedcs  Colofsiens  :  c\ft  afçàuoir.qu'il 
nous  faut  porter  la  mortification  de  Ufus 
Ghiift  en  noftre  chair,  afin  que  fa  vieapparoif 
fe.en  nous.  Qujnd  fiinft  Paul  parle  aiufî,  .il 
entend  ce  qu'il  dit  au  fécond  pafiage  que  re 
vien  de.  toucher  ,que  cependant  que  nous  vi- 
uons  en  ce  monde, noihcvie  eft  cachée:  tout 
ainfi  qu'en  hyuer  lavie  des  arbics  eft  cachée. 
Voila  les  arbres  qui  f  jnt  fecs,on  n'y  voit  nul-, 
le  vigueur,  il  fenible  que  ce  foit  du  bcis  mort: 
mais  tant  y  a  que  la  vigueur  fe  monftre  au 
pnm-temp.s.Ainh  eneft-il  des  fidcJe.v:  c.ir  ce--- 
pendant  qu'ils  font  en  ce  monde,  ils  ont  le^i'r 
vie  encloit  en  etpcrauce-  O.  ce  que  nous  efpe 
rons  (comme  faincf  Paul  dit  au  huitième  des 
îloraainsjeft  inuiiible,  on  ne  le  comprend. pat 

à  Taii. 


s  V  R    LA    IL    A    T  I  M  O  T  H. 


■35r- 


à  l'oeil.  Il  s'enAift  Jonc  qu'en  vinant  il  nous 
faut  mourir:non  point  feulementd'viie  efpc- 
ce  de  mort, mais  que  lournelkm.ent  nous  /oy- 
ons morts.quc  nous  allions  tri  decaJt  nce,  ic- 
lon  qu'il  dit  quant  àPhomme  exterit  ur  ,  que 
les  maladies,  les  pourettz,  les  igncuiinies  ,  & 
toutes  choies  femblablcs  nous  lerucnt  de  re- 
noncer au  inonde  ,  Si  l'cntir  que  noftrevie  n' 
eft  qu'vn  ombrage,  que  ce  n'eft  rien  :  nx  fines 
que  nous  rcceuons  aucat  de  meffigc.  de  mort 
quand  les  cliofes  nenous  vienent  point  à  gré. 
Notons  bien  donc  que  fainft  Paul  n'a  point  i- 
£1  entendu  fimplement  qu'il  nous  faille  mou- 
rir jJour  vn  coup  afin  de  viurennais  cependant 
que  nous  viucns  ,  que  nous  foyons  toulîours 
comme  enfeuelis:  que  nous  voyons  comme  la 
mort  prefente,  que  nous  foyons  comme  mou- 
tons qui  ont  le  couteau  fur  la  gorge,  ainfi 
qu'il  en  traitte  en  ce  huitième  chapitre  des 
Romains .  Car  ce  n'eft  point  aflez  de  mourir 
ainfî.mais  il  faut  que  nous  fuyuions  l'enlcigne 
du  EilsdeDieu  pour  regardera  fa  refuirc- 
ftion  ,  laquelle  eft  fufhfante  poumons  adou- 
cir la  rigueur  de  la  mort.  Au  contraire,  il  laut 
que  les  mefchans   en  defpit  qu'ils  en  ayent, 
voyent  la  mort  qui  les  menace, 5:  les  adiourne 
à  chacune  minute  de  temps.  Car  combien  que 
il  femblc  qu'ils  foyent  à  leur  aife ,fi  efl-cc  que 
ils  endurent  beaucoup  d'afflitlions,&  plus  que 
ne  font  pas  les  enfans  de  Dieu. Car  il',  ont  vn 
ver  qui  les  ronge  au  cœur  ,  &  les  tourmente. 
Et  combien  que  tout  le  monde  les  laiffe  en 
paix, il  faut-il  que  le  iugement  deDicu  les  pçr 
fecuçe,&  qu'ils  fente't  là  delîa  de  tels  remords, 
qu'ils  ne  puifTét  iamai'  cftre  à  repos,S:  que  ce 
I/rf.i/.ii  que  dit  le  Prophète  Ifaie,  foit  accompli  en 
eux,  <jue  leurs  péchez  font  comme  vagues  qui 
fe  frappent  les  vnes  les  autres. Il  eft  vxay  que 
tant<ju'ils  peuuent.ils  endorment  leurs  con- 
fcience^  :  mais  tant  v  a  qu'eu  defpit  de  Iturs 
dents  Dieu  les  refueillo  .  Voila  donc  comme 
les  mefchans  font  affligez  :  mai',  ils  n'ont  ne 
p.irt  ne  portion  auec  Icfus  Chr  ft  .  Et  pour- 
quoy  .'  Car  ils  endurent  la  nialcdiflion  qui  eft 
prononcée  fur  tous  les  mefchans.  Car  quelles 
font  leurs  afiîi(flions,&rous  les  ch.iflimens  que 
ils  foulfrcnt  ?,C'eft  TentrcT.- d'enfer  poureur: 
carilnefaut  point  qu'ils  attendent  ilTiie  heu- 
rcufe,  quand  ils  n'ont  que  le  péché  qui  les  me 
ne  à  perdition  .  Il  faut  donc  qu'en  mourant  & 
en  fouffrant  nous  foyons  compagnons  de  le- 
fus  Chrift.  Et  comment  celâ?C'ell  afçauoir 
que  nous  aduifionsd'.^dhcrer  à  nollre  Dieu, 
que  nous  cheminions  félon  fon  feruice,  &  que 
pouî  mettions  peine  de  viure  tellement ,  que 
quand  les  hommes  nous  feront  quelque  faf- 
cherie  ou  moIefte,ce  ne  foit  pas  pour  fautes  q 
nous  ayons  commifes  contr'cu.x ,  mais  que  ce 
foit  d'autant  que  nous  feruons  ànoftrc  Dieu. 
Q.uanddûnc  nous  aurons  le  monde  ennemi  & 
contrairepourauoirmarchédroitement ,  voi 
Ja  commc'nous  fouffrirons  auec  lefus  Chrift. 
Car  nous  aoaibatons  fous  fou  enfcigne,  nous 


deitiandôns  qu'il  foit  gloiilîc  ,  &  les  hommes 
qui  nous  moleftent&touvmctent, n'ont  point 
cfté  prouoquez  parnous  ils  ne  pcuucnt  pas  di 
rc  mefmes  que  (elon  la  chair  ils  ayent  occi- 
lion  de  vengeance.  Voila  donc  en  fonime  ce  " 
que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paflàge.c'cft  a- 
fcaiioir  que  pour  eftre  pai  ticipaus  de  la  vie  (ît 
duregnede  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift ,  il 
faut  que  ncus  foyons  conlormcS  à  luy  en  teu 
tes  nos  afflrtions  ,  c'ert  que  noi-s  ayons  bcui 
tcfnioigrage  que  nous  auons  voulu  feruir  à 
Dieu.  Or  onpourroit  ici  faire  ntâtmoinsvne    . 
cbieâicn.Car  les  fidèles  endurent  fouuentes- 
fois  pour  leurs  péchez',  combien  qu'ils  ayent 
ferui  à  Dieu:toufcsfois  fi  cft-ce  qu'ils  oiitcô 
mis  beaucoup  de  fautes  qui  méritent  chafti- 
ment:&  Dieu  aufsi  leur  donc  des  coups  de  ver 
ges  afin  de  les  humilier, &  les  amener  à  conte.' 
Il  eft  vray:  mais  fainft  Paul  parle  ici  des  affli- 
ftions  qu'cRdurent  ceuxaufquels  Dieu  fait  la 
grâce  d'cftre  tourmétcz  pour  fon  ncm,&pour 
le  tefmoignage  de  fa  Venté  .  Si  noiis  fommes 
punis  pour  nos  pcche2,&  bien, il  nous  faut  baif 
1er  le  col,&  receuoir  paifiblcment  la  coriecliô 
que  Dieu-  neus  cnuoye,  &  fentir  que  nous  ne 
fommes  pas  dignes  de  fouifrir  pour  fon  nom, 
mais  il  ne  fairt-ii  pas  laifler  de  nous  confoler 
qu.ul  nous  voyôs  que  Dieu  a  le  foin  de  noiire 
falut,  d'autant  ou'il  ne  nous  veut  point  laifler 
là  comme  bcfles  efgarees,  mais  qu'il  nous  reti 
re  n  foy;Voila  comme  eftâs  chafticz  pour  nos 
péchez  ,  nous  re  laiflons  pas  d'auoir  de  quoy 
nous  confoler. Mais  quand  il  eft  qucftiond'e-^ 
ftre  peifecutez  des  hommes,  aduifons  bien.à 
quel  titi'CiS:  pourqiioy  nous  ferôs  perfecutez, 
fiiyuant  ladoilnneS:  exhoitationde  S.Pier-  i.  Vier.^f 
re  :  c'tft  afçauoir  que  nous  fouffiions  comme  It. 
Chreftiens,  afin  de  glorifier  noftre  Dieu,  que 
nous  ne  foiiifiions  point  comme  malfaiteurs: 
iaçoit  que  le  monde  nous  accule  Se  nous  con- 
danine,&  que  fouuét  il  fcmble  que  nous  foyos 
plus  dégradez  que  les  plus  mefchans  du  mon- 
de, qu'il  nous  fufffc  que  Dieu  nous  approuue. 
Et  au  refte.quand  il  nous  fait  ceft  hôntur  qi)e 
.  nous  tnduriôi  pour  fon  nom,  cognoiflons  que 
il  nous  pourroit  iuftcment  affl'çer  pour  nos 
ofFenfîscmais  il  no'  tfpargne  en  ceft  endroit; 
&  cependant  voila  vne  caufe  honorable  pour 
laquelle  il  nous  fait  foufftir. Comme  les  hlar- 
tyrsqui  ont  enduré  pour  le  tefmoignage  de 
Dieu-,  ils  pouuoyent  bien  eftre  punis  pour 
leurs  fautes:car  iamais  il  n'v  a  eu  home  fi  par 
fait ,  que  Dieu  ne  le  peuft  cent  fois  latJer  du 
■  riicde.Mais  tant  y  a^qu'il  difsimule  enuer'  les 
fiens.S:  cependant  il  les  honore  iufques  là, que 
ils  foufFrent  pour  ]uy,&  pour  fa  querele.com- 
me  s'ils  cftoyent'  fes  procureurs  .  Airfi  donc 
apprenons  de  louer  Dieu  t[uai"dil  nepeiin«t 
point  quenotis  fjyôs  punis  peur  nos  offénfes 
propres ,  majs  pluftoft'qué  ce  fou  pourauoir 
maintenu  {:i  caufe,  &  pour  auoir  efte  tefinoins 
de  f  m  Euant;ile.  Voila  en  fonirrie  ce  que  nous 
auôs  à  retenir,  quand  faindt  Paul  dit  que  poi*r 
'      Dd.ii. 


39 


r, 


SERMON      XI. 


M<ttIo 


eftre  paiticipins  de  la  vie  cle  lefus  Chrift  ,  il 
faut  que  nou5  foyons  morts  aiiparauant  auec 
luy.Or  quant  &  quEt  iladioufle  quefinouîle 
rcnions.il  nous  reniera. Apres  qu'ilnous  a  in- 
citei  par  douceur, il  adiouftelamcnace:com- 
mc  nous  fcauons  que  Dieu  ha  cefte  couftume 
de  nous picqucr, quand  il  voit  que  nous  ayant 
attîiei  par  douceur  nous  lomines  tardit-. ,  & 
qu''il  ne  nous  gagne  pas  tantoftà  foy.il  adiou 
ftc  aufst  la  iigucur.Ec  fainft  Paul  vfc  mainte- 
nant de  cède  ta  jon,  en  dil'ant,  Toutainfi  que 
la  vie  nous  cft  certaine  fi  nou<  tommes  confî- 
gurci  à  lefu^  Chrift,paflàns  par  ce  mode  co- 
rne ellans  afsiegc-z  d'vne  centaine  de  morts, 
qu'ainliau  contraire  ,  quand  nous  voudrons 
nous  feparer  d'auec  lefus  Chrift ,  il  nous  re- 
nier.''.:commc  aufsi  ill'a  prononcé  de  fa  bou- 
che,Celuy  qui  me  confelFeradeuant  les  hom- 
mes, ie  le  confelTeray  deuant  Dieu  mon  Père 
qui  eft  es  cieux:mais  celuy  qui  me  reniera  de- 
uant les  hommes, l'auray  hontea.ifside  leçon 
fctrer,&  deuant  Dieii,&  deuant  fes  Anges. Ici 
{.\\nSt  Paul  nous  remet  au  deuant  ccfte  fentcn 
ce  horrible  de  noftrc  Seigneur  lefus  Chrift, 
&  qui  nous  doit  bien  faire  drelTer  lescheueur 
en  la  tefle.fi  nous  fomraes  lafches  à  conferter 
fon  nom ,  &  à  maintenir  la  vérité  deuant  les 
kommes, quand  nous  voyons  qu'elle  eft  alTail 
lie  &  combatue.En  fomme,  (ainft  Paul  nous  a 
ici  voulu  monftrer  qu'il  n'efl  point  queftiô  de 
nous  defguifer ,  comme  beaucoup  fe  feront 
à  croire  qu'ils  ne  laiflent  pas  d'eftre  Chre- 
Aicns  ,  encores  qu'ils  trahiflent  lefus  Chriil, 
fncorcJ  qu'ils difsimulent,&  qu'ils  fedeigui- 
fent.il  leur  femble  que  cela  eft  tout  vndeuant 
Dieu.OrfaInftPaulmonftre  ici  que  Dieu  de- 
mande ce  feruice  de  nous ,  que  fa  vérité  foit 
maintenae.iJc  que  s'il  eft  queftiô  de  noftre  vie, 
qu'elle  n'y  foit  point  efpargnee  :  car  elle  ne 
nous  doit  point  eftre  tant  precieufe  comme  la 
vérité  en  laquelle confifte noftre faiut,  &par. 
laquelle  aufii  Dieu  règne  fur  nous.  Nous  voy 
ons  donc  ici  que  toute  excufe  eil  oftee  à  ceux 
qui  voudroyent  bien  chercher  des  fubterfu- 
ges  afin  de  s'exempter  des  afAiéliôs  que  Dieu 
.  veut  que  les  lîens  foufFrent  ,  comme  il  y  en  a 
tant  de  délicats  qui  fe  voudroy ent  donner  pri 
nilcge  de  ne  rien  foulfrir  pour  le  nô  de  Dieu. 
Or  il  n'eft  point  queftiô  de  cda.ditS.Pauhcar 
nous  auons  vn  Maiftre  qui  veut  eftreadoré  & 
confeflede  nout:&quiconquesaura  honte  de 
maintenir  fon  nom  deuant  les  hommes  ,  qu'il 
fçachc  qu'il  eft  aufsi  raclé  du  rcgiftre  de  fa- 
!ut ,  qu'il  ne  penfe  point  que  lefus  Chrift  le 
doyue  tenir  au  nombre  des  fîens.Or  quâd  il  a 
ainli  parlé,iladiouftc,C>»r  /7»)<«yâ»im«  incre 
Utilrs  ,  Difi*  demeure  tnittrsfols  fijele  ,  (y  ne  fe 
fent  renoncer  fiy-mefm*.  En  cefte  côclulîon  S. 
Paul  môftrc  que  quand  tout  le  monde  fe  dcf- 
baiichera.laveritéde  Dieu  demeurera  pourtat 
en  fon  entier,aiîn  q  nous  ne  penlîôs  point  que 
elle  depéde  de  nous,&  qu'elle  foit  fondée  fur 
itoAic  tefmoignage.Et  c'eft  vnc  dotlrine  bien 


Ttile.  Car  en  premier  Keu  ,  S.  Paul  defpite  ici 
tous  ceux  qui  font  doubles, &  qui  voudroyent 
pour  fauucr  leur  vie  trahir  noftre  Seigneur  le 
fus  Chrift ,  &  blafphemer  contre  fa  doûrine 
(ainfi  qu'on  en  voit  beaucoup  auiourd'huy) 
faind  Paul  les  defpite.Et  bien(dit-il)il  vous 
femble  que  le  Fils  de  Dieu  ne  fe  peut  palier 
de  vous:non,non,allez  vous  eii(dit-il)&que 
vous  le  quittiez  tant  que  vous  elles:  il  demeu 
rera  neantmoins  Roy  du  ciel  &  de  la  terre. Et 
puis  fur  tout  il  regarde  aux  infirmes  qui  font 
troublerrquand  ils  voyent  que  quelqu'vn  tre 
bufche ,  &  qu'il  fe  fouruoye  ,  il  leur  femble 
que  tout  eft  perdu.  Et  auiourd'huy  nous  auôs 
befoin  de  cefte  remonftrance  plus  que  n'ont 
eu  ceux  du  temps  de  fainû  Paul. Car  combien 
qu'il  y  ait  eu  alors  de  l'infirmité  bcaucoup.au 
iourd'huy  nousfommcsiî  tendres  que  rien 
plus:il  ne  faut  finon  vne  fueille  branler, qu'il 
nous  Icmble  que  tout  le  monde  s'en  va  en  rui 
ne  :  Se  qui  pis  eft,  nous  fommes  tant  enclins  à 
cela, que  nous  cherchés  les  occalions  de  nous 
troubler. Si  on  oit  dire  qu'il  ibitaduenu  quel 
que  chcute  à  vn  homme, on  en  voit  beaucoup 
qui  ont  ccfte  conuoitife  diabolique,  qu'ils  ne 
demandent  finonde  trouuer  quelque  couuer- 
ture  pour  s'elongner  de  TEuangile.  Et  ledij 
ble  aufsi  a  bien  cefte  rufe  de  s'infinuer  par 
tels  moyens  obliques,  &  comme  en  cachette. 
Mais  quoy  qu'il  en  foit  ,  fi  voy oni-nous  au- 
iourd'huy que  la  plus  part  font  efpcrdus  € 
toftque  quelqu'vn  aura  renoncé  la  vérité,  on 
que  quelqu'vn  qui  eiloit  en  bon  train  fe  four 
,  uoye  ,  &  qu'il  fedesbauche.  Et  qu'eft-ce  que 
ceci  veut  dire?  Il  femble  q  la  parole  de  Dieu 
n'ait  point  de  fermeté.Et  comment?Voila  vn 
poure  pot  fragile  &  caduqueis'il  eft  C3(ré,eft 
ce  à  dire  pourtant  que  la  vérité  de  Dieuqui 
eft  permanente, doiuc  eftre  abolief  Faudra-il 
que  le  Seigneur  lefus  foit  arraché  de  fon  fie- 
.    ge  ,  auquel  il  a  efté  exalté  de  Dieu  fon  Père? 
Faudra-il  que  le  falut  des  hommes,  &  des  An 
ges  aufsi  perifle  en  vnc  créature  tant  foible? 
Ainfi  donc, nous  voyons  maintenât  à  quel  pro 
pos  fjinâ  Paul  a  vfé  de  cefte  fentence,  en  di- 
fant  que  fi  nous  renon  çons  Dieu  ,  il  demeu- 
rera hdele.Ilauoifdit  aiiparauant,quefinous 
renonçons  lefus  Chrift,  il  fe  pourra  bien  paf 
fer  de  nous.  Mais  cela  n'eftoit  point  encores 
aflcr  exprimérmaintcnant  il  met  vne  plus  am 
pledeclaratiop  ,  c'eft  que  Dieu  n'emprunte 
rien  de  nous  comme  s'il  en  auoit  befoin, mait 
que  fa  vérité  luy  fuffit  ,  &  que  quand  tout  le 
monde  le  renoncera,  fâ  condition  n'empire 
point  pourtat,/'/ if>mf»r#  ^Jf/r, dit-il.  Ce  mot 
doit  bien  cftie  obferué.'car  c'eft  aufsi  ce  qu'il 
traitte  aux  Romains,  quand  il  dit,  Q|K)y?  Si  Rip,.?.* 
aucuns  des  luif^  ont  efté  defloyaux,  Dieu  fe- 
ra-il pourtant  menteur?  Ncnni:ia  n'aduiene, 
dit-il  :  car  au  contraire  il  eft  efcrit  que  tout 
homme  eft  menteur ,  &  que  Dieu  clî  vcrita- 
ble:qui  plus  eft, l'incrtdiiïitc  des  homes  don- 
ne jiliisgiand  Juftrcàlabonté  de  Dit».  Car 

quand 


SVR    LA    11.    A    TIMOTH. 


qiunJ  nous  voyons  que  le  monde  luy  faufle 
la  foy  qu'il  luy  a  donnée  ,  &  queneantmoins 
il  pourluit. â:  concinue  touiîour?  ,  en  cela  ne 
voit-on  pas  que  par  Ci  vérité  il  lurmonte  tou- 
tes nos  menteries,&  toute  la  vanité  qui  eft  en 
nous?  Nous  voyons  donc  comme  ces  fenten- 
ces  s'accordent ,  voire  tellement  que  quand 
nous  verrons  tout  le  monde  eftre  comme dif- 
iïpé,ilne  faut  point  quenoftrciroy  foitren- 
uerfee  pourtant  :car  elle  doit  regardera  Dien 
qui  perlîfte  toufîours  en  la  nature,  &  qui  de- 
meurera fidèle  ,  combien  que  les  hommes  va- 
rient,&  changent.  En  ce  partage  que  nou'i  a- 
"Uons  allégué ,  où  fainilit  Paul  traittc  de^  luifs 
lefquels  Dieu  auoit  appelez  pour  eftre  fon 
troupeau,  &  le  peuple  eleu  &:'fanftifié  d''entre 
toutes  les  nations  de  la  terre  ,  il  inonll  re  que 
les  luifss'alienentdel'elperancede  falut,  le 
fcruice  de  Dieu  eft  là  du  tout  peruerti,  la  reli 
gion  eftfîconlu/e  que  c'eft  vne  horreur.Ne- 
ântmoins  voila  lefus  Chrift  qui  apparoift  :  & 
combien  que  les  luifs-  fe  foyent  rendus  plus 
qu'indignes  deccfte  rédemption  qui  Icure- 
ftoit  promife,  tant  y  a  que  Dieu  perlîfte  en  fa 
vérité.  Voila  donc  le  Sauueur  du  mande  qui 
fc  prefente  aux  luifs,  voire  lefquels  eftoyent 
Hat.  If.  comme  brebis  perdues  (ain'.î  qu'il  en  parle) 
14.  car  tout  eftoit  alors  tellement  mené  ,  qu'on 

nefçauoit  plusquec'eftoit  ni  delà  Loy  ,  ni 
des  promeflès.nide  rien  qui  foit.  lefus  Chrift 
s'eft-il  ainfi  prefente  ?  Tant  s'en  faut  que  les 
luifs  fentans  leurs  niifercs  cherchent  le  reine 
de  ,  comme  il  leur  auoit  efté  promis  de  tout 
temps, qu'ils  prouoquct  l'ire  &la  vengence  de 
Dieu  fur  eux  ,  en  renonçant  au  falut  qui  leur 
eft  offert.  Et  ne  fe  côtentent  pas  d'auoir  mcf 
prifé  lefusChrift.mais  après  Tauoir  faitmou- 
ïir  ignominieufement  en  la  croix,ils  perfccu- 
tent  fon  Eiungile  de  plus  en  plus. Nous  voy- 
ons donc  ce  peuple-la  que  Dieu  auoit  elcu, 
qui  eft  defloyal  iufques  au  bout. Et  c'eftoit  vn 
horrible  fcandale  pour  les  fidèles  de  ce  tépv- 
la:mais  frinû  Paul  dit  combien  qu'ils  foyent 
ainlî  defloyaux  &  infidèles, lî  ne  taut-il  pnint 
que  la  foy  de  Dieu  ,  c'eft  à  dire  ù  vérité, foit 
eftimec  par  là,  car  elle  demeurera  toufiours 
«n  fon  entier:qui  plus  eftCdit-il)c'cftvnc ap- 
probation plus  grande  comme  Dieu  rcferue 
quelque  femeiice  de  ce  peuple-là  ,  qui  eftoit 
ainfi  adonné  à  f»  perdition, voire&  qui  la  cher 
.  choit  à  fon  efcient.Dieu  donc  cognoiflant  ce 
qu'il  auoit  déclaré, c'eft  qu'il  faloitque  la  vil 
le  delerufalem  hift  comme  Sodome  Se  Go- 
tnorre,excepté  qu'il  y  auroit  qlque  petit  nom 
brefauué,il  le  garde  d'vne  façon  niiraculcufe. 
Dieu  donc  accomplit  ce  qu'il  auoit  aufsi  pro- 
•ji.  1.^.  nonce  en  l'autre  palTage  du  Prophète  Ifaic, 
Qu^il  y  auroit  quelque  petit  refidu  qu'il  rc- 
cueilleroit  à  fov,&  quedc  cefte  femence-ci  il 
y  auroit  comme  vne  abondance  pourefpan- 
dre  par  deflus  toute  la  terre. Quand  cela  s'cft 
vérifié,  ne  voila  point  Dieu  qui  a  donné  ap- 
probation plus  certaine  à  la  vérité  ?  Quand 


557 


il  a  ainfi  dcfpité  les  menfonges  des  hommes, 
&  qu'il  a  furmonté  la  defloyauté  des  luifi ,  & 
leur  rébellion,  quand  le  falut  qui  auoit  efté 
promis.a  efté  manifefté,il  a  monftré  alors  que 
fes  promefles  ne  depcndoyêt  point  des  hom 
mes  ,  mais  qu'il  trouueioit  vn  moyen  incçyi- 
prehenfible  au monde.afin d'accomplir  fa  pro 
mefle,&  la  faire  valoir  pour  la  mener  à  fa  pcr 
ftftion.  Ainfi  donc  ,  quand  nous  voyons  cet 
chofcs,apprenonsdc  les  appliquer  aufsi  bien 
i  noftre  inftruftion.Car  auiourd'huy  combien 
y  en  a-il  d'incrédules  ,  &:  de  combien  de  for- 
tes?Les  vns  demeurent  obftinez  en  leur  aueu- 
glement  :  comme  les  Papiftes  ,  on  voit  qu'ils 
font  emienimezconjtrerEuangile,&  le  diable 
les  tranfporte  tellement,  que  pour  raifon  que 
on  leur.imene,  encores  qu'ils  en  foyent  plus 
que  conuaincus,neantmoins  ils  ne  veulent  nul 
lementapprocher.mais  font  toufiours  des  be- 
lles fauuages.ils  luent.ils  mordent. Voila  doc 
ladefloyauté  de  ceux  qui  prétendent  le  nom 
de  Chrc-fticns,&  mefmes  qui  ont  réceu  leba- 
ptcfmc.  Nous  voyos  les  luifs  aufquels  les  pro 
mefles  appartienent  ,&  qui  font  comme  les 
fils  aifriez  de  la  maifon  de  Dieu,  que  ceux-là 
perfiftent  en  leur  obftination  diabolique,  que 
ils  ne  fe  contentent  pas  de  fe  fermer  la  porte, 
&  de  fe  priuer  du  Royaume  de  Dieu,  mais  ils 
blafphcment  contre  l'Euangile  en  toutes  for 
tes,  &  voit-on  qu'ils  fedefpouillent  de  toute 
humaine  aftei^ion  pour  faire  la  guerre  àDicu, 
Nous  voyons  les  Turcs  qui  fe  font  retran- 
chez, d'autant  qu'ils  ont  fuyui  les  tromperies 
deMahommet,voire  qui  font  de  telles  tables, 
que  finon  qu'ils  fuflent  dut  tout  abbrutis.il  eft 
certain  qu'ils  pourroyent  incontinentappcr- 
ceuoir  la  beftifc  qui  eft  là  côtenue.Maisquoy? 
Dieu  a  là  defployé  fa  vengeance  ,  qu'il  les  a 
mis  en  fens  reprouué, voire  à  caufe  de  leur  in- 
gratitudercar  ils  eftoyent  Chreftiens  baftards 
comme  les  Papiftes. Or  mainten.ît  entre  nous 
combien  en  voit-on  qui  fe  deftournent  du 
droit  chemin  dé  l'EuangilcfCôbien  y  en  a-il 
qui  veulent  iiager  entre  deux  eaux,&qui  font 
mefme  des  moyennears.qui  voudroyétauoir 
vn  Euangilebigarré?N'auons  nous  point  vcu 
de  noftre  téps,&  ne  voit-on  pas  encores,  que 
ceux  qui  ontbafti  cefte  corruption  d'Intérim 
ont  voulu  raefter  Dieu  euec  le  diablerNe  voit 
on  pas  que  ceux-là  fe  font  alors  diuertis  du 
bon  chemin  ?  Voila  donc  beaucoup  d'efpeces 
d'incrédulité. Mais  quoy?  Quand  tout  fera  en 
confufîon,&  que  tout  le  monde  fera  incrédu- 
le,Dieu  demeurera  fidèle:  ne  mefurons  point 
Dieuàla  mefuredes  hommes  ,&:  àleurtefte: 
carceferoit  luy  faire  frpp  peu  d'honneur, 
quand  on  dira  que  félon  que  le  monde  fera  fi- 
dèle,Dieu  le  feraaiifi.Ne  voila  point  comme 
anéantir  la  vérité  de  Dieu  ,  quand  on  la  vou-~ 
dra  ainfi  mefurer  felô  la  fidélité  des  hommes? 
Car  on  fçait  bien  qu'il  n'y  a  en  eux  que  vani- 
té &  menfonge:&auc5traire  Dieu  eft  vcrita- 
ble,voire  il  eft  la  vérité  luy-mefme.Ainfi  doc 

Dd.iti. 


398  S  £  R  M  O  N     X  I  r 

que  How;  méditions  bien  c^fle  Jotlrine,&  qu 


nous-  rappliquions  i  tel  vfage  que  le  ûiiUt 
Efprit  r<i  cn:eniiu:t'eil quand  nous  verrions 
cent  mille  confufionf:  crïce  monde, touteifois 
nous  demeurions  fermesi  cftans  tondez  en  la 
vérité  de  Dieu  j  qui  rie  varie  point  félon  fin- 
conriânce&  la  légèreté  des  hommes. Et  pour 
quoy?ll  ne  fepeut  renoncer  foy-mefme.Def 
pitons  donc  toiii  ccuv  qui  auiourd^Iiuy  le  de- 
itournent  de  la  vérité  ,  Si  leur  femble  qu'ils 
mèneront  auec  cun  ert  ruine  beaucoup  de  lîm 
pies  gés:  defpitons-les,car  s'ils  font  traiïîres 
&  defloyaux,  ils  ne  pcuuent  point  deroguer  à 
Dieu  en  façô  que  ce  foit-ît  au  relie ,  ne  pen- 
fons  point  que  fainû  Paul  ait  ici  parié  de  l'ef 
fence  de  Dieu ,  comme  s'iJ  difoit  :  Efperons 
que  Dieu  demeurera  fidèle  là  haut  :  mais  il 
veut  que  cefle  fidélité  foit^n  nouî.c'eft  à  di- 
re,que  d'autant  que  la-pàrole  de  Dieu  eft  vne 
femence  incorruptible  ,  qu'elle  fruftifie  :  & 
quand  le  diable  tafchera  de  l'arracher  ou 
amortir, qu'il  ne  puifle  rien  Contre  nous,d'au 
tant  que  nous  auons  là  vi.floire  par  laquelle  le 
monde  eft  vaincu:fi  le  diable  nous  fufcite  auf- 
fi  des  troubles, que  noUs  les  furmontions.Voi 
la  donc  comme  Dieu  iion  feulement  en  foy 
demeure  fidele,maisaufsi  d'autant  qu'il  a  im- 
primé en  nos  coeurs  le  tefmoignage  de  fa  vé- 
rité par  fon  fain£l  Efprit ,  il  fait  défia  que  ia 
parole  eft  permanente, &  que  nons  allons  touf 
iours  noftrc  train, quand  nous  verrons  que  les 
mcfchans  ne  demandent  (îiion  de  nous  def- 
baucher  auec  eux.  fuis  qu'ainfi  eft  donc  que 
Dieu  ne  fc  peut  renoncer  foy-mefme  ,  adui- 
fins  quel  il  eft:&  pour  ce  faire  arreft5s->nous 
à  ù  parole. Car  fi  lious  voul5s  penfer  de  Dieu 
ce  qu  -■  bôn-nôus  feiublera,  nous  imaginerons 
tous  les  coups  des  phantofmes,  &  des  idoles. 
Il  faut  donc  que  nous  cognoifsions  quec'eft 
de  Dreu  félon  qif  il  s'eft  déclaré  à  nous  par  la 
parole;  L'auons-nous  cognu  tel  ?  Sçachons 
qu'iLnefe  peut  renoncer, &  qu'il  ne  changera 
iamais  de  propos  ne  dénature.  Etainfînqus 
voyons  que  nous  ferons  aflez  fortifiez  contre 

...  ,".     .      ..1,    ,. 


tous  les  troubles  du  monde.contre  toutes  les 
mutations  &  changemens  qui  pourront  adue- 
mr,  moyennant  que  nous  retenions  toufiours 
cefte  foy  ,  &  cefte  cognoiflance-là ,  de  dire. 
Dieu  s'clt  manifcfté  à  nous ,  tellement  que 
nous  le  pouiion\cognoiftrc.Etcomment?Par 
fa  Liiy.pai  les  Prophctes.&par  fon  Euâgile. 
Q_ueles  hommes  i'cfgarenc  çà&  là  tant  que 
ils  voudront ,  fi  cft.-ce  que  Dieu  ne  laiflera 
point  de  demeurer  fidele:car  il  n'y  aura  poinc 
de  variété  en  luy.Et  quand  nous  ferons  làar- 
reitez,  voila  comme  nous  pourrons  auoir  vi- 
ftoire  contre  tous  les  alTauts  de  Satan  ,  telle- 
ment que  nous  bataillerons  conftammcnt, 
iufques  à  ce  quenous  foyoïxs  recueillis  en  cç 
repos  éternel  qui  noos  eft  apprefté  au  çie.l. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftrebon  Dieu  en  cognoilîànce  de 
nos  fautes  ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  de  nous 
faire  la  grâce  qii'in  chacun  de  nous  le  puilPe 
examiner.  Et  voyans  que  nous  fommes  rem- 
plis de  tant  de  vices ,  que  nous  apprenions  dé 
nous  defplairc  ,  &  de  gémir  ,  iufques  à  ce  que 
nous  ayons  trouué  la  médecine  en  luy  :'quc 
nous  foyoris  purgez  par  fon  fainfb  Efprit, non 
feulement  de  tous  les  péchez  qui  ont  régné 
par  ci  deuant  en  nous ,  mais  de  la  racine  de 
tout  mal,  qui  tft  celle  incrédulité  &  cefte  ré- 
bellion,à  laquelle  nous  fommes  trop  enclins. 
Q_u,'il  nous  inftruifcdonc  tcllemi.nt  en  /â pa- 
role,que  nous  ne  demandions  finon  de  fuyure 
ce  qu'il  nous  enfeigne, non  feulement  pour  re 
fifter  aux  tentations  qui  nous  aflaillent ,  mais 
aufsi  contre  tous  les  fcandales  que  le  diable 
nous  fufcite. Et  combien  que  nous  voyos  toac 
le  monde  rcnuerfer,  que  noftre  foy  dcineure 
deboutj  fçachans  que  Dieu  demeurera  touf- 
iours en  fôn  entrer  ,  &  qu'il  demeurera  tou/^ 
iours  fidèle, niaugré  tous  les  incrédules  &  tous 
les  mefchans ,  &  tous  lesapoftats  qni  font  aii' 
monde. Q^  non  feulement  il  nous  face  cefte 
grâce  ,  mais  à  tous  peuples  &  nations  de  la 
terre,  &c. 


CINQVIEME      SERMON      SVR     L 


SECPND      CHAPITRE. 


14  Admonejle  de  ces  chofes ,  protcJîdMt  deuctnt  le  Seigneur  que 
iU  n  ayent  point  début  de  paroles ,  qui  72e  vient  à  nulle  utilité ,  mais  aû. 
deflourhier  de  ceux  qui  l'oyent. 

iç  Foy  diligence  de  te prefenter  approuué  à  Dieu  ouuriernon 
(onfus,dijinhuant  droitcmcnt  U parole  de  vérité. 


Nouî' 


SVR   LA  IL 

Ous  auôs  defla  veu  par  ci  de- 
uant  c5i»e  faiiid  Paul  fur  tout 
exhortoit  Timothee  d'auoit 
ce  regard  d'édifier  TEglife. 
Carli  nous  appliquons  à  au- 
tre vl'age  la  do£trine  que  nous 
portonsjc'eftlaprofaner.&peiuertirrvfagc 
<jue  Dieu  aiioit  inftittié  :  car  il  neveut  point 
c[ue  nous  ayôs  les  aureiHss  batues  en  vain  de 
la  Parole  ,  il  veut  qu'cile  nous  profite  à  falut. 
Sidôcceluy  qui  parle, veut  plaire,  s'il  le  veut 
monftrer  ,  s'il  a  quelque  folle  affection  qui  le 
tranfporte  ,  tellement  qu'il  ne  regarde  point 
au  falut  des  auditeurs, il  eft  facrilege:  d'autat 
que  mefcliaiiiiîicnt  il  deftourne  la  parole  de 
Dieu  àautrevlage  qu'il  ne  doit. Or  ileft  vray 
"  que  volontiers  les  hommes  ont  les  aureilles 
chatouilleufesrcar  nous  voyons  côme  le  mon 
de  eft  mené  de  curiolîté,nous  appctons  touf- 
■  ioiirs  ie  ne  fçay  quoy  de  noiiui'au  ,  tellement 
que  voila  qui  c-ft  caille  que  beaucoup  qui  ont 
la  charge  d'enleigncr,  pour  fe  faire  valoir, & 
â  ce  qu'on  leur  applaiidilTe, cherchée  des  que 
fiions  friaolcsnioyennant  qu'il  y  ait  quelque 
apparence  de  iubtilité.il  leur  ûitht, ils  nepen 
fent  point  à  ce  qui  édifie.  Or  fainél  Paul  no- 
tamment dit  ici  à  Timothee  ,  que  Ccluy  qui  fe 
voudra  môftrcr  fidèle  dotleùr,  doit  touliours 
appliquer  Ion  e/hide  à  côfermcr  les  hommes 
çnla  fiance  de  Dieu,&  en  lacrainte:5cficefte 
dtoftrine ialchc(commc  beaucoup  voudrovét 
qu'on  leurapportafl  quelques  fpcculations) 
U  ne  fautpoiut  que  ceux  qui  ont  la  charge  de 
enleigner,l"edcftournét  pour  cela  du  bon  che 
min,  mais  qu'ils  continuent.  Or  cependant 
uous;  fommes  ici  exhortez  tous  de  receuoir 
volontiers  ce  qui  nous  eft  vtile  pour  noftre 
lâluc.  Car  côbien  que  faiud  Paul  adrtfle  fou 
propos  à  Timothee  ,  &  qu'en  (i  petfonne  il 
moniîre  quel  ell  l'office  des  bôs  dodeurs, ce- 
pendant toutesfoisil  retianche  tous  nos  fols 
appetis.Quand donc  chacun  viendra  au  fer- 
inon,quece  ne  I oit  pas  pour  ouïr  quelque  ciio 
fe  plaifante,&  qu'on  luy  chatouille  les  aurcil 
les,&  dont  il  puiffecaufer  à  plàifir  :  mais  que 
ce  loit  pours'auahcer  en  la  craintede  Dieu, 
&  en  humilité.  Si  pour  s'inciter  à  l'inuoquer, 
&  polir  fe  confermer  en  patience.  Et  cepen- 
dant ,  fi  nous  auons  ouy  vne  exhortation  au- 
iourd'huy,&  que  demain  elle  nous  foit  réité- 
rée ,  ne  penfons  point  que  cela  nous  foit  fu- 
perfiu,  n'en  foyons  point  f.ifchez  :  car  quand 
chacun  fera  bon  examé,  il  trouuera  qu'il  s'en 
faut  beaucoup  qu'il  n'ait  recordé  la  leçô  que 
il  auoit  apprifc  pour  la  bien  prattiqucr.  Si 
donc  Dieu  nous  en  refrcfchit  la  mémoire, 
e'elV  vn  grand  bien  qu'il  nous  fait.  Voila  ce 
que  nous  auons  à  noter  en  ce  palTàge  ,  quand 
S.  Paul  du,  Admet),  fie  J.-  ces  chofes.  Cir  il  Cil 
certain  qu'il  a  voulu  preucnirce  qu'on  voit 
communémcnt,qu'ondira,Et  nous  auùns  ouy 
ce  propos:n'eft-ee  pas  vne  choie  afllz  vulgai 
r<?  qui  ci>  le  petit  enfant  qui  ncleco^noifl? 


A  T  1  M  O  T  H. 


3yy 


Voila  qu'alleguét  ceux  qui  voudroyent  eflrc 
repeusde  queftions  inutiles.   Mais  voici  coiii 
me  le  fainft  Efprit  veut  que  iournellementce 
qui  nous  eft  vtile, nous  foit  ramené  au  deuant, 
d'autant  que  nous  ne  l'anoris  point  aflcz  en- 
téduiil  nous  le  faut  mettre  en  piattique.com. 
me  on  dit.  Car  ce  n'eft  rien  qu'vne  chofe  no* 
yole  au  cerueau,  mais  il  faut  que  la  racine  en 
foit  aucaur,&  que  les  fruits  en  apparoifllnt 
en  toute  noftre  vie.Or  cependant  (àinû  Paul 
adioufte  vn  mot  qui  emportebeaucoup,  Vrcte 
fie  Jeuant  P;>»,commefî  tu  les  adiournoiS,& 
que  tu  prinfles  vn  tefmoignage  folénel,^»  lY* 
ne  s'adoiieitt  paint  à  content  ici:  i  de  paroles.  En 
ceci  nous  voyons  plus  clairement  ce  que  i'ay 
touché:c'eft  que  faind  Paul  a  voulu  remédier 
à  l'ambition  des  hommes,  qui  pour  eftre  pri^ 
lez  &:  auoir  bruit  s'adonnent  à  beaucoup  de  , 
contentions.  Car  ils  voudroyét  efplucher  les 
chofes  çà  Si  là,  où  il  n'y  ait  que  rcdirc:&;  s'ils 
trouuent  quelque  pctitraot ,  c'eftcomme  vn 
fcftu auquel  ils  s'achopent,  &  là  ils  font  gian 
de  inilancc  ,  il  fcrable  que  le  ciel  Se  la  terre  fe 
doiueiit  mefler:&  s'ils  voyent  quelque  fenten 
ce  qui  leur  vigne  à  propos,  il  Icurfemble  que 
ils  ayent  tout  gagrté, combien  qu'on  voit  que 
ce  n'eft  que  fumec  de  tout  ce  qu'ils  attentent 
&  entreprpnent.   Et  voila  pourquôy  aufsila 
plus  part  de  ceux  qui  ont  quelque  efprit  S:  fça 
uoir,  tafchent  pluftoftd'eftre  en  réputation 
quant  au  inonde, que  feruir  àDieu.Et  pource 
eft-il  tant  difficile  de  les  reprimer.  Cen'cft 
point  donc  en  vain  qucfainiâ:  Paul  met  ici  ,fi 
on  voit  qu'il  y  ail  gens  qiri  s'adonnent  ainiî  à 
folles  curiofirez  ,  qu'on  lis  adiourne  douant 
Dieu, qu'on  leur  face  vne  proteftation  foien- 
nelle  qu'ils  auront  à  rendre  conte  de  ce  qu'ils 
deftournént  ainfi  la  parole  de  Dieu  à  contèii 
tions  &  débats  ,  d'autant  que  ce  n'eft  point  à 
ceflé  fin  qu'elle  nous  eft  donnée.  Et  au  refte, 
fainft  Paul  dit ,  Qb'o»  i:efe  dchate point  de p.t~ 
rohs.En  ce  mot  il  coprend  toutes  les  conten- 
tions qui  n'ont  point  de  fondemene  ni  de  fub 
ilance,  comme  on  dit.  Cars'ileft  queftionde 
riiaintenir  l'hôneurde  Dieu,  &  ce  qui  eft  des, 
premiers  fondemens  de  la  foy  ,  là  il  faut  que 
nous  trauaillions  ,  &  qu'vn  chacun  s'y  porte 
vertueufement.  Carde  fouffrir  que  la  venté 
de  Dieu  foit  conuertie  en  menfonge.qu'on  la 
defguife,qu'on  maintiene  des  erreurs  &  fauf- 
fes  fuperliitions,  quelle  condamnation  fera- 
ce?  Dieu  donc  veut  que  nous  foyons  vaillans 
champions, quand  il  eft  queftion  de  maintenir 
Ca  vérité  .  Et  ainfi  il  n'eft  point  queftion  de 
nous  efpargner,il  ne  faut  point  que  nous  y  al 
lions  àdemi  bouche:  &  mefu-.es  quand  tout  le 
monde  deuroit  périr ,  U  vaut  beaucoup  mieux 
en  défendant  la  vérité  de  Dieu  mettre  vne 
horrible  confuiîon  par  tout;  que  dcdifsimu-. 
lér,&  laiflèr  aller  les  chofes  mauuaifes.Etde 
fait.nous  voyons  comme  il  eft  aduenU, quand 
aucuns  ont  nagé  entre  deux  taux  (comme  on 
dic3'&ont  VQuIu  inoyeaner,  que  noftre  Scii 

D.iiii. 


490 


SERMON     XI  T. 


gneur  s'eft  moqué  d'tux  ,  &  à  la  fin  ils  n'ont 
eu  que  turpitude  &  hontede  leur  folle  outre- 
cuidance. Que  faut-il  donc?Q_ue  nous  obfer 
nions  rondement  ce  que  Dieu  nous  acôman 
dé  :  &  fi  nous  voyons  que  le  diable  prattique 
pournous  cmpefchercefte  libertc-la  ,  pour 
nous  venir  delguifcr  la  pureté  de  la  doûrinc, 
&  pour  mettre  en  auît  des  erreurs  pour  fedui 
re  les  poures  âmes ,  &  les  mener  à  perdition, 
que  nous  entrions  hardiment  aucôbat,  &  que 
nous  nefaciôs  point  diftîculté:voirc,&quoy 
qu'on  nous  alleguc.que  nous  ne  laifsiôs  point 
de  pafler  outre ,  &  que  nous  ferinios  les  yeux 
à  tout  ce  qui  nous  pourra  aduenir ,  fçaclians 
que  l'ilTue  en  fera  bonne, moyéuant  que  nous 
ne  pafsions  point  nos  limites ,  &  que  chacun 
de  nous  félon  fon  eftat  aduife  d'appliquer  ici 
toute  fon  eftude.Ceci  elt  bié  à  noter;car  quel 
que  fois  on  verra  fléchir  de  bo>  feruiteurv  de 
Dieu  quand  on  les  vient  fafcher.&quandily 
a  de  grans  troubles:ils  déclinent  de  leuroffi 
ce  quand  ils  fe  voyent  prellèz.  Et  pourtat-.t 
nous  faut-il  bien  aduifer  deux  fois  à  ce  que 
nous  auons  à  faire  ,  que  quelques  diftîcultez 
qu'il  y  ait ,  nous  ne  fiiiuions  toufiours  la  pure 
lîmplicité  de  l'Eiîangile,  &  que  nous  ne  con- 
tinuyons  conftamment  en  cela.  Et  au  refte, 
quand  nous  voyons  que  la  vérité  de  Dieu  eft 
làuue,&  que  le  peuple  çi\  bien  édifié,  que  no' 
allions  cJinouuoir  des  difputes  fans  fçauoir 
pourquoy,  leulement  auec  vne  folle  vanteric 
pour  cftre  renommez,&  qu'on  dife  .Voila  vn 
homme  aigu.voila  vn  homme  de  fçauoirimal 
heur  fur  ceux  qui  deiguifentainfi  la  doûrine 
de  falut,  &  qui  demandent  d'eflre  prifez.  Et 
voila  qui  fufcite  tant  de  contentions  :  car  les 
home;  de  leur  nature  font  adonnez  à  ceft  or- 
gueil diabolique.de  toufiours  demader qu'on 
les  prife  &  cftime.Mais  d'autat  plus  nous  faut 
il  pefer  ce  mot  de  faintl  Paul.c'tft  que  fi  nous 
voyons  de  ces  glorieux  qui  feveujét  ainfi  fâi 
rc  valoir ,  quand  nous  ne  pouuons  par  Cmple 
admonition  S<  remonltrance  les  attirer  &  ga- 
gner, que  nous  leur  ficions  comme  vne  adiu- 
ration  deuant  Dieu, qu'ils  auront  à  rcdre  con 
te.d'autantqu'auiourd'huy  ils  troublentainfi 
l'Eglife,  &  qu'ils  efmeuucnt  des  queilions  fri 
«oies  8c  fans  propos, tclleraét  qu'ils  font  com 
me  effrontez  pour  vouloir  ofter  le  foleil ,  & 
i'obfcurcir.  Que  donc  nous  renuoyons  tel- 
les gensdeuât  Dieu, leur  afsignantcefte  lour 
née  en  laquelle  ils  feront  iugez.  Voila  ce  que 
nous  auons  à  retenii .  Or  comme  nous  deuons 
auoir  en  deteftation  ces  brouillons  qui  cfineu 
uent  quelques  débats  en  TEglifc,  aul'si  appre 
notisdenofbrccoftéd'ciire  paifibles  ,  de  ne 
donner  point  ouuerturcA  nulles  curiofîtcz, 
mais  que  nou,  foyons  fobrcs,  &  que  nou.v  de- 
mandions fiulçment  d'eftrc  enteignez  i  no- 
Rte  filnt,telltm.rnï  que  Dieu  f>it  honoré  en 
ttf'nous.que  nous  foyons  toutac,coHnun>cai 
ce  uire.q  nous  fjyon.  confcraiez  en  fj  crain 
te  Si.  ea  foa  amo.ur,&  que  nous  foyoiu  Lunii- 


liez  fous  fon  ioug  ,  pour  porter  ce  qu'il  luy 
plaira.  Voila  donc  où  il  nous  faut  appliquer 
toute  noftre  cflude,  fi  nous  ne  voulons  point 
donner  occafion  que  l'Efcriture  faincle  Se  la 
parole  de  Dieu  foyent  prophanees  ,  &  que 
nous  ayons  des  combats  friuoles  qui  font  de 
nul  profit, &  à  la  ruine  des  auditeurs,  dit  faîâ 
Paul.Or  nous  auons  à  noter  aufii  les  deux  rai 
fons  per  lefquelles  il  rc proiiue  les  débats  & 
contentions,&  les  difputes  friuoles.  Enpre- 
mier  lieu  il  allègue  ijuelUs  font  Jt  nul  frffti 
Si  en  (ecôdyiju'tlltJ  ferHcrtijJ'int  les  audittnrt. 
Par  la  première  raifon  ,  il  fignifie  ce  que  l'a- 
uoye  défia  touché,  c'eft  que  ce  qui  ell  conte- 
nu en  la  parole  de  Dieu  ,  nous  doit  feruir  de 
qudquechofc  :  car  (dit-il)  toute  l'Efcriture  *•  Tiw», 
eft  vtile  :  comme  de  fait  l'expérience  nous  le  J*'^' 
nionftre  ,  au  moins  il  ne  tient  qu'a  nous.  Car 
qui  eftcaufc  qu'on  lira  l'Efcriture  fainâe ,  Se 
qu'on  ne  fçait  en  la  fin  fi  on  a  perdu  fon  tépî, 
ou  fi  on  l'a  bien  appliqué. C'elt  pource  qu'on 
y  vient  à  Teftourdie ,  &  qu'on  ne  fe  prefcntc 
poît  à  Dieu  pour  receuoir  de  luy  ce  qui  pour 
roitprofiter.il  eft  bien  dit  que  Dicuenfeigne  r^.ir.ji 
ra  les  humbles  &  les  petis  :  mais  outre  cela  il 
nous  le  faut  cognoiftre  vn  bon  Maiftre&  fi- 
dèle.Or  cel.i  emporte  que  nous  attendions  de 
luy  quelque  bonne  doûrine  ,  quelque  inftru- 
ftion  qui  nous  férue, &•  qui  nous  foit  vtile.  Si 
donc  nous  venons  mettre  le  nez  pour  lire  l'E 
fcriture  fainftc  ,  &  que  nous  ne  tranchions 
droit, mais  que  nous  y  cherchions  ie  ne  fçay 
quoy  qui  contente  noftre  fantafie  ,  il  ne  faut 
point  trouuer  eftrâge  fi  nous  fomines  repeus 
de  vent,  Si  que  Dieu  nous  laifle  retourner  c5 
me  nous  eltions  venus. Mais  fi  nous  auons  ce- 
fteaffcélion  &  defir  d'eftie  enfeignez  pour 
noftre  falut,  il  eft  certain  que  nous  ne  trouue 
rôs  rien  en  l'Efcriture  fainûcqui  ne  foit  bon, 
&  dont  nous  ne  puissions  recueillir  quelque 
chofe  qui  foit  pour  anancer  noftre  foy  ,  pour 
nous  incitera  craindre  Dieu  ,  &  à  luy  obéir, 
pour  nous  inftiuireà  l'inuoquer,  pournous 
confermer  en  patience, comme  l'ay  défia  ditr 
foit  aux  hiftoiies, foit  aux  Prophètes, par  tout 
il  y  aurade  Pvtilité.Ecainfi  qu.id  famft  PauJ 
côdamnc  les  chofes  qui  ne  profitent  de  rien, 
c'eftautânt  comme  s'il  difoit  que  tous  ceux- 
qiiine  cherchent  point  le  falut  des  auditeurs» 
prophanent  la  parole  de  Dieu. Et  au  rcfte  ,ili 
nous  faut  toufiours  venir  sufsi  bien  à  nousr 
car  fi  nous  fommes  contentez  quand  nous  a* 
rôs  ouy  quelque  chofe  qu'on  nous  dile,&'  que 
cependant  nous  ne  f^achions  à  quel  TfagC' 
nous  deuôs  appliquer  ce  qui  nous  a  efté  mon 
Are, nous  foninies  lacrilcgcs.En  fomme.qu'viv 
chacun  apprcnc  à  fc  foI'Citer,&  que  nou.  ay-.. 
ons  nos  cfprifs  attentifs ,  afin  de  n'appctee 
tien  finon  ce  que  nous  cognoiflons  cftre  pra 
prc  pour  nous  foitificr  en  foy,  en  crainte  de. 
Dieu,  &cn  chûfes  fcinblabks.  Mai^  pour  la. 
féconde  raifon, fairft  Pniil  veut  encoics  plus 
agg  1  auêr  le  uul  «jui  elt.en  tous  combats  fu- 

pcifius 


SVR    LA   II   A    TIMOTH. 

perflus;c*éft  qu'ils  peruertiiTent  les  auditeurs. 

£t  pourquoy?  Nous  voyons  combien  chacun 
.  ^fL  A,t.:i^  r^.,r.  „..';!  r-;»  orl^ri;iù,I'^;i 


401 


de  nous  eft  débile  fans  qu'il  foit  esbrâléd'aiJ 
lcurs:fans  qu'il  viene  ne  tourbillon,  ni  tempe 
ile  ,  encores  ne  faifons-nous  que  chanceler: 
que  s'il  nous  vient  quelque  trouble ,  par  plus 
■  forte  raifon  nous  venons  incontinent  à  dou- 
ter,&  nortre  e<prit,coinme  il  eft  volage, fc  rc 
jnuetoufiours,  &  Satan  rient  là  mettre  beau- 
coup d'obiecls.  Bricf.cncores  que  nul  ne  vic- 
«e  i  efmouuoir  queftion  ne  débat, li  eft-ce  que 
nous  fommes  par  trop  débiles,  &  ne  pouuons 
point  nous  refoudre  pour  cheminer  comme 
il  appartient,  &  ne  pouuons  aufi  prendre  vne 
telle  certitude  en  la  vérité  de  Dieu,  que  no- 
ftre  cœur  foit  paifible  &  rafsis.  Q;ie  fcra-ce 
donc  quand  il  y  aura  des  foufflets  peur  allu- 
mer le  feu  encores  plus?  Délia  (comme  i'ay 
dit)nousauonsen  nous  vne  fcmenced'infide 
lité.  Or  voici  des  moqueurs  qui  voudront  fai 
re  feruir  la  parole  de  Dieu  à  leur  ambition  & 
vaine  gloire, qui  efmcuucnt  des  qutftions.De 
quoy  fcruira  cela?  Chacun  commence  à  s'e- 
ftonntr,  Et  comment?  le  penfoye  élire  bien 
rcfolu  décela  :  Se  ie  ne  fçay  maintenant  où 
l'en  fuis.  Pour  le  fécond  ,  fi  l'ay  douté  de  ce 
poinft,&  que  fera-ce  du  refte?Te!lcmcnt  que 
c'eft  le  moyen  le  plus  aifé  &  le  plus  propre 
qu'ait  Satan  pour  nous  ruiner  du  tout ,  que  de 
nous  faire  ainfi  adonner  à  difputes  curitufcs 
•&  friuoles.Qjje  faut-il  donc?Tcnons  la  fim- 
plicité  de  i'Eiiangile,  arrertons-nous  là  du 
tout.  Et  quâd  nous  aurons  cflé  enfeignez  que 
nous  auons  vn  Dieu  qui  s'cft  déclare  Père  & 
Sauueur  enuers  nous  ,  que  nous  cognoifsions 
le  moyen  par  lequel  nous  pourrons  trouuer 
grâce  deuanthiy,  c'tft  au  nom  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.  Pui<  après,  que  nous  co- 
gnoifsions fa  volonté,  que  nous  fçacl^ions  cô 
ment  &  en  quelle  fiance  nous  le  deuons  inno 
qucr  ,  que  nous  cognoifsions  comment  c'eft 
qu'il  nous  attire  à  foy,  que  fiousmeditiôs  fei 
promt  ires,&  que  nous  céioignions  les  Sacre- 
mens  qui  nous  doiuent  feiuir'de  fignature  fe 
conde.Et  au  refte.que  nou'  cognoifsions  que 
tout  cela  nous  procède  de  la  bonté  gratuite 
de  noftre  Dieu  ,  &  de  ce  qu'il  luy  a  pieu  nous 
conioindre  à  foy,  efperans  qu'il  nous  condui 
ra  iufqiTcs  à  la  fin.  Voila  ce  que  nous  iuons  à 
méditer.  Et  c'eft  vne  fentence  fi  entière,  que 
moyennant  que  nous  l'ayons  apprinfe  ,  il  ne 
nous  faut  point  porter  enuie  aux  plus  fubtils 
du  monde,  de  ce  qu'ils  auront  imaginé.  Car 
nous  auons  ccftc  perfeftion-la  ,  que  depuis  la 
création  du  monde,  voire  dcuant,de  toute  c- 
tcrnité,  nous  voyons  noftre  falut  fondé  fiir  la 
bonté  de  Dieu,&  en  fon  confcil  immuable. Et 
puis  nous  voyons  côme  il  nous  a  appelez  pri- 
uement  a  foy  :  nous  voyons  qu'en  la  perfon- 
ne  de  noftre  Seigneur  Icfus  Chiift  il  s'eft  re- 
concilie i  nous, là  nous  auons  ta  rcmifsion  de 
nos  pcche7.,là  nous  auons  la  plénitude  de  tou 
te  graceCcotnme  il  en  açfté  parlé  ce  matin)il 


nous  élargit  les  dons  de  fon  (ainft  Efprit.  Et 
puis  nous  cognoillbns  comme  noftre  vie  doit 
eftre  réglée,  &  quels  font  les  facrificcs  que 
Dieu  demâde, c'eft  afçauoir  de  reformer  nos 
affeftions  charnelles, de  pafler  par  ce  monde 
en  afpirant  à  Dieu  ,  &  contemplant  la  gloire 
immortelle  qu'il  nous  a  promife.  Et  puis  no' 
voyons  comme  nous  auons  accès  à  luy  pour 
le  prier, nous  fçauons  quel  eft  l'vfage  des  Sa- 
crcnicnç,&  quel  en  eft  le  profit. C^ue  deman- 
dons-nous plus?Nous  voudrôs  paiTcr  par  dcJ 
fus  les  nues  :  allons-nous  rompre  cent  mille 
fois  le  col,  noHS  ne  pouuons  auacer  d'vn  iëul 
doigt,  que  Dieu  ne  nous  conduife.Ainfi  donc 
tenons-nous  à  la  fimplicité  de  l'Euangile  ,  iî 
nous  ne  voulons  point  eftre  reprins  de  cher- 
cher occafion  de  ruine.  Car  puis  q  nousauôs 
ici  vn  aduertiflement  par  l'Efprit  de  Dieu, 
(i  nousallôs  au  contraire,  nous  ferons  incicu 
fables  du  tout.  Et  fi  ceci  eftoit  bien  obferué, 
on  traitteroit  en  plus  grade  reueréce  la  paro 
le  de  Dieu  qu'on  ne  fait  pas.  Mais  quoy?  on 
voit  l'audace  du  monde  ,  &  les  plus  ignorans 
font  les  plus  hardis,  félon  le  proucrbe.  Mais 
tant  y  a  que  nous  deuons  bien  noter ,  Se  fça- 
uoir  ,  &  méditer  ce  palTagc  :  c'eft  que  quand 
nous  verrons  comme  nous  aurôs  elle  bien  edi 
fiez  en  Dieu,  nous  cherchions  de  profiter  fé- 
lon que  Icbcfoin  en  eft.  Et  au  refte,  gardons 
bien  de  nous  eleuer  en  folle  outrecuidance, 
&.'de  n'appeter  ce  qui  ne  peut  feruir  qu'à  no- 
ftre perdition. Or  faintl  Paul  ayant  ainfi  par- 
lé adioufiCCi^f  Timotbee  s'ejlitait  à  fe  prtfritj. 
ter  à  Diru  ynfHiiri'r  apfrou^c  ,  &  n»n  tonfus, 
Ir.vich.tin  cH  coufant  droitemevt  la  fartile  de  ft 
rite.  Q^and  en  premier  lieu  fainft  Paul  ex- 
horte Tiniothee  à  fe  prcfentcr  à  Dieu.ilmô- 
ftrc  le  remède  que  i'auoye  touché.  Car  i'ay 
prins  vn  fommaire  de  la  doftrine  qui  eft  ici 
contenue  .-mais  il  la  faut  main  tenant  déduire 
par  le  menu.  Cornent  donc  ceux  qui  ont  l'of- 
fice d'enfeigner  le  peuple  de  Dieu  fe  garde- 
ront-ils de  queftions  vaines  ^-  inutiles?&  co- 
ment  pourrortt-ils  refîfter  à  ceux  qui  brouil- 
lent l'Euangile'Afçauoir  s'ils  fe  prefentent  3 
Dieu,  &■ -qu'ils  s'eftudiént à  ce  faire.  Car  ce- 
pendant que  nous  regardons  au  monde.il  eft 
fmpofsible  que  nous  ne  foyons  desbauchez, 
&  que  nous  n'ayon'squelque  vanité  qui  nous 
e{gare,  &  qui  nous  face  décliner  ou  ç.i  oulà. 
Celuy  (di-ie)  qui  viendra  fenltment  monter" 
en  f  hnit;e  deuant  vn  peuple  pour  fe  faire  va- 
loir, il  eft  impofsible  qu'il  ne  prophanela  pa 
rolc  de  Dicu.cS;  qu'il  ne  la  dcfguife.Et  ainfi  Ie_ 
premier  que  nous  auons  à  faire  approchas  dç, 
la  chaire  (ie  di  nous  qui  auons  la  charge  d'a-- 
nonccr  la  parole  de  Dieu  )  c'eft  de  nous  ad- 
iourner  ,  &  deuant  toutes  chofcs  de  fçauoir. 
que  quand  nous  fommes  ici  ,  puis  que  Dieu 
nous  a  Ciinftitucz  en  ceft  ofÈce,  que  nous  au- 
rons aufsi  à  rendre  conte  deuant  luy  ,  &  que 
d'autant  que  nous  reprefcntons  fa  pçrfonne, 
fî  nous  n'auons  parlé  en  toute  irtcgrité.conie 

Et.i. 


40i 


SERMON      XII. 


ayansfamaiefté  deuantnosyeux  ,  voila  tous  belle  parade  :  comme  fi  vn  komme  voftioit 
les  Anges  lie  Paradis  qui  foDcalllmblcz  pour  bcfongner  à  ic  nel'çay  cjuoy  ,  &  cependant 
cftie  nos  telmoins  ànoftre  cond.inacion  plus  qu'il  ne  teift  mil  profit,  qu'il  ne  meift  point  la 
grade  5c  plus  horrible.Voilaponrquoy  faind  main  à  la  charrue.Voilavnchâp  qui  fera  bien 
Paul  maintenant  rameui-'  Timothce  à  la  pre-  parc  quand  feulement  on  aura  vn  peu  gratté 
fence  de  Dieu,  Que  tu  te  mettes  là(dit-il)&  la  terre  pardeflùs  :  maiscependanrles  mau- 
que  tu  comparoillès  deuant  D:cu.  £t  pource  uaifes  herbes  ne  laifleront  pas  d'y  croiftre 
que  nous  louimes  de  nature  eucluis  aux  clio-  quad  il  n'aura  pas  efté  labouré  alTez  profond, 
fes  terreftrcs,  ùinâ  Paul  veut  que  Timothee  Q_iiand  donc  vn  homme  mettra  la  main  à  la 
s'efforce  à  cela:  comme  s'il  diloit  que  ce  n'clï  befongneàbon  cfcient,ileft  vray  qu'on  n'ap 
point  afll-z  d'aiioir  vn  feul  regard  iia  volée,  perçoit  point  du  premiercoup  que  Ion  labeur 
^depciiier  pour  vn  coup  qu'il  nous  faut  fer  ait  beaucoup  profité.c'eft  vne  cnol'egrofsie- 
uir  à  Dieu, mais  qu'il  nous  tant  trauaiUer  lour  re,c6me  il  fembleiS:  ceux  qui  feront  des  me- 
nellement  en  cela.  Car  nous  ierionsinconti-  nus  fatras  feulement  pour  fe  faire  valoir  ,  ils 
nent  ramenez  aux  hommes, &  nous  mettrions  ne  remueront  point  le  bout  d'vn  ongle  qu'il 
Dieu  en  oubli,  &  ce  Icroitpour  nous  faire  in  ne  femble  quece  foie  pour  créer  vn  monde 
continent  décliner  de  !a  pure  iiinplicitcdc  la  nouueau.  Voila  donc  comme  il  enert  de  ces 
parole  de  Dieu.Voulons-nousdonc(enfom-  petis  glorieux  qui  par  leur  rhétorique, ou  par 
me)nous  abitenir  de  toutes  qucftions  fuper-  leur  beau  langage  ,&  leurs  queftions  fubtiles 
fine:  &  inutiles?  Qjre  nous  cofeignionscom-  voudront  plaire:il  faudra  quand  on  aura  bien 
me  fi  Dieu  eftoitici  prefcnt,  comme  fi  vn  le-  examiné  cequicften  eux, qu'on  trouue  qu'ils 
çretaire  pailoic  deiiant  vn  Prince,  ou  deuant  n'ont  point  trauaillé.  Q^'eft-il  donc  de  fai- 
ceux  qui  ont  la  iuftice  en  mainicar  il  efl:  orga  rcf  Q_ne  nous  fumions  la  limplicité  de  la  do- 
nc de  ccluy  quia  la  fupcriorité  fouueraine.  clrine  qui  eft  contenue  eu  l'Éfcnture  fainde, 
Ainfi  faut-il  que  nous  parlions ,  cognoillàns  &  cognoillans  qu'il  n'y  a  nulle  fermeté  ne  cô 
quelle  perfonnc  nous  eft  donnée,  fi  nousvou  fiance  en  ceux  qui  contrefont  les  prefcheurs 
Ions  fidèlement  anoncer  la  parole  de  Dieu,  de  l'Euangile,  &  cependant  ne  font  que  tout 
Et  d'autant  que  le  diable  eft  fubtilà  merueil  brouiller  parleurs  queftiôs  inutiles.que  nous 
les, &  qu'il  ne  faut  rien  pour  no'  desbaucher,  ayons  telles  gens  en  deteftation.Voilapouf-. 
quenousy  appliquions  toute  noftreeftude,  qiioy  faincl  Paul  notamment  dit, A  quoy  foni 
que  ce  ne  foit  point  aflez  d'auoir  parlé  pour  nies-nous  appelez  ,  nous  qui  auons  la  charge 
t;i  coup^mais  que  nous  n'approchions  iamais  d'aqoncer  l'Êuangilc;  Elt-ce  pour  farder  no 
3e  la  chaire  que  nous  n'ayons  tait  comme  vn  ftre  langage. Eft-cc  pour  plaire  afin  que  noue 
adiournement  folennel,  pourdire,.Ie  fuisici  foyons  en  eilime  quand  on  nous  aura  ouysf 
Comme  deuant  Dieu ,  mefmes  ie  fuis  comme  Nenni:mais  pour  nous  faire  tra'uaiUer  au  Sei- 
fa  bouché:&ainfi  il  faut  que  ie  foycreformé,  gneur.Noas  fommes  appelez  à  fa  vigne,  foy- 
qu«.toiit  ce  qui  eft  de  l'homme,  foit  mis  bas,  ons  bons  laboureurs  ,  edil^ons  le  peuple  qui 
lellemeflt  queie  puifle  protfcfter  en  vérité,  nous  eft  commis  ,  qu'on  voye  que  noftredo- 
que  tout  ce  que  ie  prononce,  eft  de  Dieu  ,  &  drinè  a  fenii  de  quelque  chofe.pour  le  moins 
que  ie  l'ay  puiféde  lny.  Or  cependant  nous  qu'il  n'a  point  tenu  à  nous  qiie  nous  n'ayons 
fommes  aufsi  admoneftezea  général  ,  quand  entant  qu'en  rwuseftoi^,  tafché.  d'attirer  le 
nous  venons  pour  eftre  enfcigncr  en  la  paro-  peuple  à  la  crainte  de  Dieu,  &  de  donner  tou 
le  de  Dieu.de  nous  prefenter  deuant  luy.Q_ue'  te  authorité  à  Ces  commandement.  Et  puis  de 
donc  nous  n'ayons  point  décachettes:  com-  môftrer  quel  eft  le  vray  feruice  que  Dicude- 
me  nous  voyons  eaux  qui  viendront  au  fer-  mandede  nous  ,.&  demonftreren  quoy  no- 
mon:il  eft  vray  qu'ils  feront  quelque  conte-  ftre  falut  eft  fondé  ,  &  le  moyen  par  lequel 
nancc,mai5  ce  n'eft  que  ceremonie.Et  en  ce-  nous  deuôs  paruenir  à  la  vie  éternelle.  Quad 
la  ils  fc  moquct  de  Dieu:çar  les  vns  fo«t  en-  nous  ferons  cela ,  alors  nous  ferons  nommez 
dormis,&  nôchalans, les  autres  ont  leur  cœur  bons  duuriers  :  car  nous  aurons  trauaillé  à 
enferré, qu'ils  ne  peuuent  receuoiraùainç  ad'  bon  efcient  en  l'Eglife  de  Dieu.  Mais  fi  nous 
Hipnition.ils  font  â  endurcis  q  c'eft  pitié, que  ne  voulons  trouuer  en  la  dotlrine  que  des  fin 
le  diable  a  tellenicnt  préoccupé  leurs  cœurs,  freluches,des  fanfare*, &ie  ne  Içay  quoy.no' 
qu'ils  ne  peuuent  prendre  gouft  à  ce  qui  leur  ne  ferôs  point  ouuriers,  il  n'y  aura  autre  cho 
eitpropofc.  Gardons-nous  donc  d'vne  telle  fequ'vn  badinage  que  nous  aurons  fait,&  vne 


lonchalance  :  mais  qu'v'ii  chacun  cognoilTc 
qtic  ceci  luy  eft  dit, qu'il  le  faut  prefenter  de 
uant  Dieu,&:  nous  fjliciteràcela,  d'autat  que 
nous  voyôs  qu'il  y  a  vne  telle  parefle  &  froi 
dure  en  nous.  Or  notamment  faincl  Paul  dit,  ' 
Ouftrier  4l>[>raitU{.  Et  pourquoy?D'autant  qite' 


farce  que  nolis  aurons  iouee.  Or  côme  fainùl 
Paul  parle  ici  à  Timothee ,  notons  que  tout 
fidèles,  en  Icur-endroit  font  admoneftez  que 
lors  qu'ilï  font  cnfcigncz  fidèlement  en  la  pa 
rôle  de  Dieu:  leurs  âmes  font  bien  cultiuccs. 
Venons-nous  doaic  ici  pour  cftrc  vrais  difci- 


ces  doftcurs  cotemplatifs  dopt  il  a  parlé  qui  pics  de  Dieu?  Souffrons  que  la  charrue  de  fil 
veulent  plaire, ne  trauaillent  point  pour  dire,  parole  palTc  par  deflus  nous.fouffrons  que  les 
l'ay  fait  autantimais  c'eft. aflez  d'auoir  eu  vne     ronces  &  les  cfpincs,  &  les  mauuaifes  herbes. 

foyent 


SVR    LA     II.    A    TIMOTH. 


4C5 


foyent  arrachées  de  nous.    £t  ce  n'eft  point 
ltr.4.^.  fans  caufetjiie  le  Prophète  leremie  v/e  d'vne 
telle  fimilitude,  qu'il  nous  faut  desfiichcr  ce 
me  vn  lieu  lâuuage.  Car  vn  lieu  quiaura  tfté 
laifle  en  friche,&  en  landes, il  faut  qu'on  pur 
getoiitce'la  ,  il  faut  qu'on  houe  iufques  àce 
que  les  mauuaifei  racines  foyent  ofteefi.Ainfi 
faut-il  donc  que  Dieu  nous  fonde  iufques  .lu 
profond  du  cœur.qu'il  purge  toutesnos  tnef- 
chantes  affedtions, toutes  nos  penfees:  &  puis 
que  la  charrue  de  fa  parole  palTe  par  defiîis 
nous.  Et  au  refte,  que  mefmes  nous  cognoil- 
fiôs<]uer£uîgile  eft  vn  glaiuequi  nous  doit 
mortifier  .comme  fainft  Paul  eil  parle.  Car 
aufsi  nous  ne  pouuons  eftre  offerts  ne  dcdiee 
à  Dieu  en  facrifice ,  fin  on  que  nous  ayons  re 
nonce  à  nous-mcfmes ,  &'à  noftre  rébellion.' 
Puisqu'ainfi  e/t,  que  nous  vcniôs  ici  receuoir 
la  doârine  telle  que  Dieu  commande  qu'elle 
foit  propofee:c'efV  que  nous  foyons  delpouil 
lez  de  tout  ce  qui  eft  de  noftre  nature.  Et  au 
refte, quand  on  nous  remonftrenos  vices, que 
6n  nous  en  fait  honte  ,  qu'on  nous  redargue, 
qu'on  nous  menace  du  iugement  de  Dieu, que 
nous  n'en  foyons  point  fafchez,  mais  plulloft 
<}ue  nous  foyons  abatus  du  tout.  Voila  com- 
me iious  ferons  bons  elcoliers  de  Dieu  :  au- 
trement nous  ferons  en  defert,&:  tout  ce  que 
on  fera  après  nous  neferuiraderien.Et  voi- 
la pourquoy  il  y  en  a  tant  peu  qui  loutfient 
d'eftre  cultiuez  côme  il  appartient-  nous  vou- 
drionsauoir  des  laboureurs  qui  ne  fciflcnt 
<]ue  nous  endormir,  ainii  qu'il  nous  en  tltpar 
lé  au  Prophète  Ezechiel.   Voici  donc  l'ad- 
monition qu'il  faut  que  tous  fidèles  recueil- 
lent ici,&grans  &  petis  :  c'eftque  s'ils  vienét 
en  l'elcole  de  Dieu  pour  ouïr  i'a  Parole  ,  que 
ilscognoiflcnt  qu'il  faut  qu'on  befongne  en 
eux  à  bonel"cient,que  puis  qu'ils  font  v ne  vi-. 
gne.il  faut  qu'on  les  fouiffe,  qu'on  les  taille, 
qu^onleseffueille,  qu'on  leur  ofte  beaucoup 
de  fupetfluitez  ,  mefmes  qu'on  les  vendange, 
ou  autrement  iamais  n'apporteront  ffuift  à 
leur  maiftre.  Mais  encore?  fainû  Paul  adiou- 
fte  vn  mot  pour  bien  confermer  celle  doctri- 
ne,afçauoir, «a»  confits. En  quoy  il  nous  reti- 
re de  ces  folles  yergongnes  de  ceux  qui  par 
trop  (ont  efmeus  de  çefte  réputation  du  mon 
Je.  Il  eft  vray  qu'ils  ne  font  pas  niefchâs,fin5 
qu'ils  font  trop  tendres  &  délicats  :  &  quand 
ils  voyent  qu'on  fe  fafche  de  la  fnnplicité  de 
l'Euangile,  les  voila  tcmeïdedifsimuler  par 
trop, ôrca'llent  la  voile  ,  comme  on  dit.  Pour 
ceft<  caufe  fainé)  Paul  dit  qu'il  ne  nous  faut 
point  eftte confus  ,  qu'il  nous  fautauoirvne 
conftice  telle, que  lî  les  vns  fe  moqivcnt  de  la 
doârinepourceou'elle  n'eit  point  ahez bien 
paree,&  qu'elle  n  a  point  vne  telle  apparence 
corne  ils  lefouhaiteroyét:  fi  les  autres  la  mef 
prifent,fi  les  autres  la  defguifent,  que  les  au- 
tres mefmes  fe  defpitent  j  l'encontre,  q  nous 
«liions  toufiourt  nollre  train  ,  que  le  monde 
°^t  fes  appetis  côme  il  voudra,  nuis  que  nous 


fuiuions  toufiours  ce  que  Dieu  a  commandé. 
Car  de  fait, ce  que  dit  lainft  Paul.s'eft  manife 
Ûé  en  ceft  endroit,  que  tous  ceui  qui  veulent 
gratifier  aux  hommes, ne  peuuent  feruirà  Ic- 
fus  Chnft:&  nous  voyons  comme  il  en  prend 
aux  médecins.  Si  vn  médecin  eft  près  vn  mal» 
de ,  voila  le  malade  qui  aura,  fon  appétit  :  Se 
puis  tous  ceux  qui  lont  là  à  l'entour,  ne  demâ 
dent  Cnon  à  complaire  chacun  au  inalade.  Or 
fi  vn  médecin  fe  laifle  tranfporter  pour  com 
plaue&  au  malade ,  &  à  ceux  qui  font  àl'en- 
tour  de  luy,au  lieu  de  fane  fondeuoirenuers 
le  poure  malade,  ne  fera-il  point  fon  bcsur-v 
reau  ?  i'Vufant  en  eft-ilde  ceux  qui  font  con- 
ftitutz  en  l'office  d'enftigner  la  parole  de 
JDieu.Car  ceux  qui  font  redarguez,fcch»gri- 
gnent,&fe  defpitent, &  voudroyent  qu'onv., 
ûft  d'vne  façon  toute  diuerfe^t  puis  chacun 
encores  qu'il  ne  foit  point  raaliriftruit,nelaif 
fera  pas  de  côtrouuer  à  fa  phantafie  ce  q  bon 
luy  féblcra,pour  dire,Ho,ie  voudroye  mieux 
ainfi.Maisde  noftre  cofté  fi  nous  acquiefcons 
à  toutes  ces  folles  cntreprinfes ,  que  fera-ce.? 
Il  eft  vray  que  nous  aurÔs  vne  honte  qui  km 
blera  modcfte:maii  tat  y  a  que  nous  quittons 
le  fcruicedeDieupar  ce  moyen.  Etaîfipour 
ne  point  offcnfer  le  Maiftre  auquel  nous  auôs 
à  leruir,  ne  foyons  point  confus ,  c'eft  à  dire, 
que  nous  ne  foyôs  point  falchez.fi  nous  voy- 
ons que  nous  ne  foyons  point  prifez,&  qu'on 
ne  nous  cherche  pas,&  mefmes  qu'on  no'  re- 
iette.ou  qu'on  dii"e,Ho,il  n'y  a  point  là  ce  qui 
i'eroit  pour  contenter  m  peuple:ho,  voila  vn 
homme  qui  ne  me  contente  pomt  de  faire  ain 
fi  :  ie  voudroye  bien  l'efcouter  :  mais  quoy? 
quâdie  viendray  là,ie  n'y  trouueray  point  ce 
qui  rcfpond  à  mon  naturel.   Si  nous  voulons 
ainfîde  noiis-melmes  nous  rédre  confus,no' 
tomberons  en  horrible  confufion  ,  c'eft  que 
Dieu-  nou^  defauouera.  Il  eftvray  que  nous 
pourrôs  cftre  prifcz  du  mode:  mais  ceftc  hon 
te-la  nous  couftera  bien  cher.  En  la  fin  fainft    : 
vauldit.  Que  limothee  coupe ilroinmcnt  la  pit 
rôle  ih  ■vtrité.  Gr  ici  en  premier  lieu  ,  il  nous 
monltre  pourquoy  c'eft  que  Dieu  veut  qu'on 
prcfche  en  fon  Eglife  ,  &  qu'il  y  ait  vn  cer- 
tain ordre  d'enfeigner  ,  &  que  les  vns  foyent 
appelez  àcela.&queles  autres  efcoutét.c'eft 
à  dire  que  la  Parole  de  vente  foir  bien  diftri 
buee^  Or  ceci  eft  bien  notable.  Car  nous  en 
verrons  des  phantaftiques  qui  penfent  qu'ils 
ayétperdu  leurs  pas  de  venir  au  temple  pour 
cftre  enfeignez.  Quoy?  Toute  la  doftrine  de 
Dieu  n'eft-elle  pas  côprifcenia  EiblefQu'clI: 
ce  qu'on  pourra  dire  d'auâtagtr  Quand  ils  au 
ront  la  Bible  ,  illeurlcmblc  que  les  voila  e- 
xépts,&  ne  voudrôt  plus  eftrc  luicts  à  nul  or- 
drcC'eltàfaireaux  petis  enfa;(dii6t-ils)de 
venir  ici  pour  cftre  cnfcignez:  mais  lesgrans 
s'en  pemient  palTcr.  Nous  verrons (di-ie)des 
phantaftiques  qui  tiédronttels  propos,  voire; 
&:ne  diront  point  cela  par  ignorance  &  befti 
fc,niais  ils  fôt  enuenimcz  cotre  Dieu,&  vou- 

Ee.ii. 


404 


SERMON    X  1  L 


droyentbien  auoir Anéanti  toute  police  ;  Et 
cjuoy?Faut-il  t«nt  prelcKerîEt  il  n'y  a  q  deux 
poinds  enrEfcriture',  afçjuoir  qu'il  faut  ai- 
mer Dieu  Se  fon  prochain  .  Nous  n'auans  pas 
ou'y  ces  choies  feulement  de  ceux  qui  font  ve 
nus  les  rapporter:mais  les  plus  grans  fuppofts 
de  ceux  qui  ont  defgorgé  ces  blafphemes ,  les 
ont  déclarées  e.ui-mefmes:  &ie  Içay  leiour  q 
cela  a  efté  dit,  Se  les  maifoiis,  &  Theure  ,  aufsi 
bien  que  ceux  qui  y  cftoyent  prefens,&  côme 
ces  mcfchâs  ont  ictté  leur  venin  &leur  poifon 
à  l'encontre  de  Dieu, pour  renuerfer  &  anean 
tir  toute  religion  s'il  leur  cftoit  pofsible:ccia 
cil  par  trop  uotoire.  Or  au  contraire,  faini.1 
Paul  nous  monllreici.que  linousauons  feule- 
ment l'Efcriture  faincle.ce  n'eft  pas  allez  que 
nous  la  liliôs  chacun  en  Ion  priué.mais  il  faut 
que  nous  ayons  les  aureilles  batues  de  la  dor 
Ôrine  qui  cil  tirée  de  là, &  qu'ion  no'  prefche, 
afin  q  nous  foyôv  inftruits.Et  pourquoy?S'il  y 
a  vn  pain,&que  le  nuiftre  de  la  niaifoii  ait  des 
petis  enfans  qui  ne  puiflent  foufleuer  ce  pain, 
qui  fera  grand  ic  entier,  fi  les  petis  enfans  en 
veulent  manger,pourront-ils  inordreauecles 
dents  en  ce  grand  painîlls  trouueront  lacrou 
fie  trop durc.Ainlî donc, ils nepourront  man- 
ger beaucoup, S:  demeurcrôt  affamez. Ou  bien 
lî  vn  feruiteur  taille  la  fouppe  de  fon  niaiflre, 
cela  fait.s'il  difoit,  Voila  le  pain.qu'il  en  man 
ge  s'il  veut:&:  qu'il  laiflall  tout  en  confus, fans 
mettre  la  table  en  ordic,feroit-il  fon  deuoir? 
Mais  quand  le  feruiteur  taille  du  pain, qu'il  ap 
porte  la  chair  fur  table,  qu'il  met  tout  par  or- 
dre,n'eft-ce  pas  vn  feruice  qu'il  fait  à  îbn  mai 
ftre  ?  Voici  noftre  Seigneur  qui  condefcend 
iufques  là  à  noftre  intîrmité,que  quand  il  nous 
adonnélavraye  pallurede  nosames  en  fa  Pa 
rôle  ,  &  que  là  eft  comprins  tout  ce  qui  cfl  re- 
oHis  à  noftre  falut,  il  veut  encores  de  fupera- 
bondant,pour  fe  monftrcr  plus  libéral  enuers 
nous,&  déclarer  le  foin  qu'il  a  de  noftre  fahit, 
comme  vn  bon  père, que  le  pain  nous  foit  tail- 
lé, que  les  morceaux  nous  foyét  mis  en  la  bou 
che,â(  qu'on  nouv  les  mafche.Or  quand  nous 
voyôs  vne  telle  amour  de  noftre  Dieu  enuers 
nousfaut-il  que  nous  aillions  gronder  quand 
il  nous  fait  vr  tel  auantage  ?  Faut-il  que  nous 
aillions  abbayer  côme  des  chiens?Mais  quoyî 
L'ingratitude  du  monde  tftant  telle  ,  il  nous 
faut  retenir  &  bien  réduire  en  mémoire  ce  qui 
cil  ici  dit  par  S.Paul.c'eftafçauoir  que  l'office 
Jeceux  qui  ont  la  charge  de  porter  la  parole 
de  DieUfSi  enfeigner  l'Eglife,  n'eft  pas  de  for 
ger  rien  en  leur  cerueau,mais  c'eft  de  bien  fça 
uoirdillribuer  &  prudemment  la  parolede  ve 
rité.Q^nd  faind  Paul  dit,  VaroU  dt  ycrité,  il 
requiert  là  vn  poinil,  c'eft  q  nous  n'auancions 
pas  ce  que  nous  aurons  imaginé.  Car  nous  ne 
pouuô'.pbint  cftre  prefcheurspour  forger  & 
baftir  ce  que  bon  nous  ftmbleraj  6i  pour  abru 
lier  Icpeuple  de  nos  fantalics  :  maijJa  Parble 
de  veiité  noire  tient  obligea, 'Scekiy  qui  par- 
lc-,&ctlny  qui  cfcotitc.Car  Dieu  vcutdoinincf 


fur  nous.Iefus  Chrill  luy  feul  veut  auoir  tSii- 
te  inaiftrifc:  mais  fi  eft-ce  que  quand  nous  a- 
uons  la  parole  de  vérité  ,  il  ne  faut  point  que 
nous  en  déclinions  en  quelque  façon  que  ce 
loit ,  que  nous  ne  foyonS  point  volages  pour 
eftre  tranlportex  çà  &  là,inais  que  nous  la  fça 
chiont  bien  diftribucr,  &  droitement  ,c'eftà 
dire,  en  telle  laçon  que  le  peuple  en  foit  re- 
peu.  Car  (cumme  l'ay  défia  dit)  beaucoup  de 
gens  pourroyent  trouuer grande  obfcuritccn 
l'Efcriture  faintle:  &  quand  ils  en  auront  ouy 
vne  expofîtion  fidclc,iU  verront  que  la  clarté 
leur  Icra  allumée  là  où  auparauant  ils  ne  voy- 
oytnt  goutte:  &  ceux  qui  font  leur  deuoir  de 
lirel'Elcnturefaintle  deuant  que  venir  au  fer 
mon, cojnoiflent  ceci  par  expérience. Quand 
vn  home  lira  le  paflage  qui  ell  eicpofc  au  fer- 
mon,  &  que  ccluy  qui  prefche,s'acquitte  de 
fondcuoir,il  mafchera  les  morceaux,  ou  bien 
il  fera  tel  otfice  que  le  monde  fera  incxcufa- 
ble,iînon  que  les  pqures  amcs  foyent  rcpcues 
de  la  dottrine.Crief,quand  vn  home  qui  fçn\~ 
ra  lire, fera  leàuredu  paflage,  deuant  qu'il  re 
tourne  en  la  niaifon,  il  verra  que  Dieu  luy  a 
donné  la  cognoilTànce  qui  auparauant  luy  e- 
ftoit  comme  obfcurc.  Et  c'eft  aufsi  l'office  tel 
qu'il  eft  monftré  en  l'Efcriture  fainàe  ,  que 
quand  nous  viendrons  en  toute  humilité  pour 
cftre  enfeignez  de  Dieu,  nous  neretournetôs 
point  vuides  de  fon  efchole:  mais  quand  nous 
voudrons ainfi  eftre arrogans,ce  ferapropba- 
ner  le  pain  que  Dieu  no*is  donne. Il  ne  fe  faut 
point  esbahir  fi  en  ce  faifant  nous  ne  rappor- 
tons nulle  fubrtance  delà  parole  de  Dieu, 
mais  que  nous  demeurions  touCours  affamez: 
car  no/lre  ingratitude  eft  bien  digne  d'vn  tel 
falaire.Et  pourtant,  ceux  qui  fontconftitucï. 
miniftres  de  l'EitangiIe  doyiicnt  bien  noter 
que  veut  dire  cemot  ,  detiancherou  couper 
droitement  la  parolede  Dieu. Cemot  tiroite- 
ment.fe  rapporte  comme  fi  fainft  Paul  difoit, 
Regardons ,  nous  à  qui  Dieu  a  fait  ceft  hon- 
neur de  nous  conlhtucr  {es  mcflàgers,  regar- 
dons, di-ie, le  peuple  que  nous  deuons  édifier, 
que  nous  fçachions   ordonner  la  parole  de 
Dieu,  que  nous  monftrions  &  à  hommes  ,  &à 
femmes  ,  &  à  grans  &  à  petis  ,  que  c'eft  à  eux 
que  Dieu  parle, pourquoy  c'eft  qu'il  leur  par- 
le, quels  propos  il  leur  tient.  Voila  doncqae 
c'elt  de  droitement  diftribuer  la  parole  de 
D  icu  :  c'eft  quand  nous  fài  fon  s  vneadmonitiô 
qui  eft  conforme  à  la  portée  des  aiiditeurs,& 
qu'vn  chacun  prend  &  retient  fa  portion  & 
mefiire:  comme  les  entans  qui  fcrôf  appafte- 
lez  de  leur  pcrc, quand  il  leur  donneà  chacun 
leur  portion, ils  la  reçoyuent:voila,di-ic,com 
ment  Dieu  nous.traitt*;,  &cou«nc  les  mini- 
lires  de  la  parole  font  ici  admoiicftcz  de  leur 
deuoir. Adulions  auisid'cn  Kiircvn.chicuntla 
nous  fon  profit ,  Si  que  nous  demandions  que 
la  parole  de  Dieii  nous  foit  iatilec,.aiio  que 
plus  facilement  nous  la  puifsiôs  digérer  pour 
en  ef:tc  rcpcus  droitcment,&  que  nous  venjfts 

ici 


SVR    LA  TT.     A    T  I  M  O  T  H.  4^^ 

«et  comme  à  vne  table,  ainlî  qu'au  matin  nous  OR  nous-nous  preH-erneronç  Jcuant  Ta.' 

auéî  eu  la  Cene,qui  nous  conduit  iccla. 11  eft  face  de  noJtre  bou  Dieu  en  cognoiflance  de' 

vray  que  nous  n'auroBs  pas  toufîours  la  table  nos  làutet,  le  prians  quM  nous  lei  face  ciico- 

mife  pour  communiquer  au  Sacrement  de  la  res  mieux  fcntir  ,  &  que  nous  y  defplailânï 

Ceiicmuis  il  eft-ce  que  la  parole  de  Dieu  nous  demandions  de  tout  noihc  cœur,  qu'il 

nous  eft  toujours  viande  .  Qjund  donc  nous  nous  en  purge  Se  nous  en  retire  ,  &  ntrij  non* 

venons  ici ,  que  ce  loit  pour  reccuoir  noftre  illumine  en  telle  forte  que  nous  monrtrions 

nourriture  de  Dieu ,  ainlî  qu'il  nous  la  diftri-  que  nous  auons  profité  fous  loy  ,  S:  qu'il  n'a 

bue  par  fesferuiteurs  .Et  ainlî,  que  nous  de-  point  perdu  fa  peine  en  nous  inftiuifant ,  mais 

mandions  qu'on  nous  diftribue  Ja  parole  de  que  nous  fommes  vrayement  fcs  tcmnles.a— 

»erîté,&que  nous  ayons  tcîuiîours  cela.de  ne  fin  que  fon  (ainclErprit  y  liabitc  ,  Aqn'il  (oit  ' 

rien  tenir  des  hommes  :  mais  cependant  que  glorifié  de  nous  comme  il  appartient ,  S:  de  ' 

les  hommes  nous  ferm  nt ,  &  quj'iK  nous  di-  corp';  &d'an)e .  Que  n  m  feulement  i!  noni 

ftr:bucnt  la  pafture.que  nous  en  fçachions  fai  tace  celle  ?race  ,  mais  à  tout  peoplcs  &  na-" 
KAolhe  profit ,  comme  fa  nft  Paul  nou'^  en     lions  de  la  terre,&c.  '■- 

adjnoncfte  en  la  première  dti  Cûruuhiens. 


SIXIEME     SERMON      S  V  R      LE 

s  E  C  o  N  D    ,  Ç  H  À  p.  Il  R  E. 

15      Aujsifuy  vanité  propha^ic  de  hal'd  :  car  elle  duancçra  à  plus 
grande  m:fch.ir7cete. 

1 7  Et  leur  parole  comme  chanc  re  s'cfpandra:  defijuehjont  Hyfne 
vee  çy  Vhylt'tc, 

18  Qui  fefont  depioyr;^  de  la  -vérité ,  difans  que  la  rcfurrcUion 
cjl  de  fia  faite,  O'fibuertifjent  lafoy  d'aucuns. 


Ous  auons  déclaré  par  ci 
dcuant.quc  S. Paul  non^fans 
caufe  a  longiieufcnicnt  c.v- 
hortc  Timothce  à  iiiyure  la 
pure  fimpl'.cité  de  la  parole 
de  Dieu.faiK  y  rien  dcfgui- 
fer.Cir  le  diable  voyatque 
c'eft  b  paihiredenos  âmes,  que  ladoftrine 
qu'on  nous  propofe  au  nom  de  Dicu.s'elForce 
tant  qu'il  Juy  eil  pofsible  de  la  corromprc:& 
quand  il  ne  peut  la  peruertir  du  tout.il  y  nieflc 
des  cK,^fes  pour  nous  endefgoufter  ,  &  pour 
faire  qiS^nous  necognoif.ious  pas  la  volonté 
&  l'intention  de  Dieu  comme  nous  deurions, 
&  li  manifeftement  comme  il  feroit  lequis.- 
Et  nous  en  royons  l'expérience.  Car  auiour- 
d'buy  combien  yen  a-i!  qui  s'auancent  pouf 
enfeigner  limplement  fans  aucun  fard?  Et  oui 
eit  caufc  de  cela  ?  Il  eft  vray  que  l'ambition 
«raivfporte  ceux  qui  defguifcnt  ainfi  la  venté 
éfi  Die^rmais  cependant  il  nous  faut  regarder 
plus  loin.c'eftaïçauair  que  Satan  machine  de 
jious  priuerdc  la  vie  fpirituellc:S:  il  n'en  peut 
venir  à  bout,  finon  que  là  doârrine  de  Ditu 
ioit  c.brrompuecn  quelque  façon  que  ce  f(Mt; 
A»n{ifainét  Paul  ne  te  contente  poinrd'aiioir 
djt.poui;  vp.cdup  <]ii'on  doit  fuir  tonebabilin-i 
utile,&;qi!'Qn  fedoit  arreiler  à«ncfimple  fa 
•çon'd'ea'Vigner.qin  foit  feinte,  &  qui  empor-> 
te  bonne  fubftanceritiats  tlxtiterecefte  exhor 
^•«Hs>.R.-^a  s  Et,nott$.faiitcoter.que  fainft'P.iul 

•■1  v>» 


ne  condamne  pas  ici  feulement  les  erreurs  m» 
nifeftcs.les  fuperftitions.lcs  menfonges  :  mair' 
il  condamne  cedefguifement  de  la  parole  de 
Dieu, quand  les  hommes  veulent  plaire.A:  que 
iUinuentent  des  fubtilitez  qui  font  feulemét 
pour  chatouiller  lesaureilles,  &  qui  n'appor- 
tent point  vne  vraye  nourriture  aux  âmes,  qui 
n\dilient  point  les  auditeurs  en  la  foy  &  en 
la  cramtede  Dieu.Or  qnand  fainft  Pjul  parle" 
de  la  vanité  de  babil,  il  entend  ce  qui  cbnten-' 
te  les  hommes  curieux,  con-uie  nous  voyons' 
que  beaucoup  prenent  plaifîrà  des  queftions 
friuoles ,  qui  les  font  (âuter  en  l'air ,  qui  leur 
apportent  lene  fçay  quoydenouueau:Icçvb! 
la  tout  raiiis,&  s'y  baignent.Il  n'eft  point  que 
ftion  d'cftreouuertcment  contredifant  rtrai-; 
tant  y  a  qu'ils  mefprifent  là  deflus  la  veriV#de 
Dieu  coriimevne  chofe  trop  communes: baf 
fe.que  c'eft  pouries  petis  &-^our  les  idiots,^:' 
qu'ils  veulent  fçauoir  quelque  chofe  plus  hau' 
te  &  plus  profonde.  Et  puis  ils  fe  dcrgoiiftent" 
de'ce  qui  eil  vtile  .  Et  poUrquoy  î  Car  il;  font" 
addôncz  à  cefte  folle  cupidité  de  fçauoir,fans' 
difccrneriicela  profite  ou  non. Ainfi  donc  pc 
fonsbiencesmiatsdefainélPjul.qiiançlïlriictf 
U-v.ii>itf  Je'bahUiiofAtne  s'il  difoit,bU(i  s'il  ri* 
y  â'qrtè  {Jompe,&  Vnébeîlt  rheroriqift  '/Sicë- 
pciidant  des  mots esL-durs  pour  faire  valoirce- 
luy  qiKparle,  &  pout  mbnftrei'lqulil'cfthonl'-; 
ftte'bieh  fçaiiî;t-,t<Sùt  ecl.i  (cHt-ifjïrc'doit  poini 
cftre  fétfu-eT!  l'Egilife,  ofi  ft  dditthànnir  :'^ 

Ix.v.u 


pourquoy?  Car-  Dieu  veut  qui;  (on  peuple  foit 
eJilïé ,  &. a  oidonné  fa  Pavoise i  ceft  vfage  .Si 
donc  nous  ne  tafchonï  au  falut  du  peuple  ,  & 
qu'iJ  reçoyue  bonne  Aibftance  de  ladoûrine 
qu'on  luy  propofe,  c'eil  vn  facnlcge,  car  on 
peruertitlf  pur  vfage  de  la  parole  de  Dieu.Et 
notamment  cncores  faind  Paul  adioufte ,  pro- 
fhane.Ot  ce  mot  J>fi)/'/;.iBr,s'oppoi"e  a  ce  qui  eft 
facré  ou  dédié  à  Dieu.  Ainfi  donc  tout  ce  qui 
appartient  à  magnifier  Dieu, afin  qu'ayans  co 
gnu  fa'mai.eAé,  nous  radorions,,nous  foumct- 
tansdutout  àluy  :  tout  ce  qui  nous  attire  au 
Royaume  celefle  >  tout  ce  qui  nous  deftourne 
du  monde,  &  qui  nous  conduit  à  lefus  Chrift, 
afin  que  nous  foyons  bien  incorporez  en  luy, 
cela  eft  nommé  facré.  Au  cotraire, quand  nous 
ne  fentons  point  la  gloire  de  Dieu  pour  nous 
y  afTuiettir ,  que  nous  ne  recognoiflons  point 
les  richefles  de  fon  Royaume  des  çieux  ,  que 
nous  ne  fommes  point  attirez  à  fon  feruice 
pour  viure  en  pureté  de  confcience  ,  que  nous 
ne  fçâuons  que  c'eft  du  falut  qui  nous  a  efté 
acquis  en  noftre  Seigneur  lefus  Chrirt ,  nous  . 
demeurons  en  ce  monde, &  par  ce  moyen  fom 
mes  prophanes  ■  &' vne  doftrine  qui  eltpour 
nou«desbaucIier  de  telles  chofes, s'appelle  auf 
fî'propliane.  Or  maintenat  donc  nous  voyons 
l'intention  de  (ainft  Paul  :  c'eft  afçauoir  que 
qiiand  on  s'aflèmble  au  nom  de  Dieu,  ce  n'eft 
point  pour  ouir  des  chanfons  plaifantcs,  & 
pour  le  paiftrede  vent.c'ert  àdirede  vaine  eu 
riofîté  5:  inutile, mais  c'eft  pour  auoir  vne  bon 
ne  nourriture  :  coninie  de  faift  Dieu  ne  veut 
point  que  rien  foit  anoncé  en  fon  nom  qu'il 
ne  profite,  qu'il  n'édifie  les  auditeurs.  Se  qu'il 
necontiene  ca  foy  bonneilibffance.  Or  ileft 
vray  que  de  nature  nous  prendrons  plaifîr  à 
ces  nouueautez  ,  &  à  ces  fpcculations  qui  icm- 
bleut  eftre  fubtiIes,tout  cela  nous  efi  fort  con 
uenabIe:maisgardons-nous-en,fçacliansbien 
que  c'eft  proplianer  la'parole  de  Dieu:&  cer- 
chpns  ce  qui  édifie,  &  ne  nous  abufons  point  à 
ce  qui  n'a  nulle  fubftance  ni  fermeté  en  foy. 
'  Et  ^'autât  qu'il  eft  difficile  de  retirer  les  hom 
mes  d'vne  telle  vanité, à  caufe  qu'ils  y  font  en 
(lins  fans  qu'on  les  y  poufle,  fainft  Paulmon- 
ftre  qu'il  n'y  a  rien  plus  miferable  qu'vne  tel- 
le curio<îté:Mr  ceux(dh-ili']Hi  t\y  addonntnt, 
■  C^tfunctnt  À  fli^s grande  imfieté  teitfioHrs.Cova 
me  s'ildifoit.Mes  amis, il  eft  vray  que  de  pri- 
me face  vous  necognoiflez  pas  le  mai  qui  eft 
en  cei  fedufteuisqui  fe  veulent  mettre  en  cré- 
dit, l<  pour  eftre  prifez  vous  amènent  de  bel- 
les plai{ânteries    pour  vous    refiouir  :  mais 
«roy ez  que  ce  font  fuppofts  de  Satan,'&  ne  fer 
uent  nullement  à  Dieu,mais  i'auancent  àplus 
frande  (mpietc:  c'eft  à  dire,que  fi  unies  laifle 
faire ,  ils  corrompront  toute  la, Chreftienté, 
^u'il  n'y  demeurera  rien  de  pur  ne  d'entier. 
Qji'on  les  fuye  donc  coii^me  des  peftcs,enco- 
les  que  du  premier  coup  on  n'appi;rf  oyu-e  pas 
)cs  poifons  qu'ils  apportent.Or.rci  nousauons 
jifioterfo  premier  lieu,  qn'rn  cba^^uide  nous 


5ERMON    XIII. 


doit  eftre  fufpeftà  foy-mefme,  quand  il  eft 
qucftion  deiuger  delà  dortrine.  PourquoyJ 
Car  (  comme  i'ay  défia  touché)  nous  fommes 
tout  débiles ,  ou  bien  nous  auons  nos  efprits 
fretillans,  &  auons  ce  fol  appétit  qui  nous  at- 
tire à  chofes  qui  ne  profitent  de  rien.  Si  nous 
fuyuoils  cela,  nous  fommes  comme  phreneti-  ' 
qucs.nous  voila  comme  ellourdis.eneores  qu* 
pourvn  temps  nous  eufsions  efté  bien  enfêi- 
gnez  en  la  parole  de  Dieu  ,  nous  voila  deiii 
tout  aliénez.  £t  ainfî  gardons  de  vouloir  fàtif  ' 
faire  à  nos  delîrs:mais  fçachons.cncores  qu'v- 
ne doftrine  ne  femble  pas  du  pmier  coup  maii 
uaife  :  fi  toutesfois  elle  n'eft  point  pour  nout 
amener  à  Dieu,&  poUr  nous  fortifier  à  fon  fer 
uice,pour  nous  eonfermer  en  la  foy,  &  en  l'e- 
fperance  qui  nous  eft  donnée  de  la  vie  celefte, 
cognoiflons  qu'vne  telle  doftrine  nous  trom- 
pera en  la  En,  &  que  c'eft  vn  meflinge  qui  eft 
pour  nous  ofter  mefmes  le  bien  quand  nous  1* 
aurions  receu  auparauât. Voila  ce  que  nous  a- 
uons  à  retenir  de  l'admonition  de  iÀinù.  Paul. 
Brief,  tout  ceux  qui  n'ont  point  ce  but  d'atti- 
rer le  mode  à  Dieu,  &  d'edifierie  règne  de  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  afin  qu'il  domine 
au  milieu  de  nous ,  qu'ils  cognoiflent  qUe  c'eft 
pour  tout  per.uertir  :  &  qu'ils  ne  tafcficnt  fi- 
nonàs'auanceren  impieté,  Scii  on  leur  donne 
la  vogue  ,  qu'on  ouure  la  porte  à  Satan  pour 
faire  vne  horrible  dif;ipation  ,  S:  que  tout  ce 
qui  eft  de  Dieu,  foit  comme  anéanti:  combien 
que  cela  ne  fe  face  point  du  premier  iour,fi  eft 
ce  qu'il  fe  voit  finalement. Et  pour  mieui  ex- 
primer ceci,  fainft  PauLadioirfte  que  leur  pro- 
pos prend  pafturc,  Cr  cju'il  s'efleni  cemmevne 
^angrtne.  Or  ce  mot-ci  ne  fcroit  pas  entendu 
communément ,  car  c'eft  ce  que  les  Chyrur- 
giens  nomment  Eftiomene  ,  &  ce  qu'on  ap- 
pelle aiifsi  le  feu  laini>  Antoine  :  c'eft  à  dire 
quand  il  y  a  vne  li  grande  inflammation  en 
quelque  membre  du  corps,  que  ce  nul-la  paf- 
fe  toufiours  outre,  &  qu'il  ne  mange  point  feu 
lement  la  chair  &  les  'nerfs ,  mais  les  os  ,  & 
que  celte  irflammatioii-la  croift  de  plus  en 
plus  :  en  fomme,  que  c'eft  vn  feu  qui  cpnfu- 
metout,  que  la  main  fera  caufe  de  faire,  per- 
drsle  bras,  &  le  pied  toute  la  iambe,finon, 
qu'au  commencement  on  coupe  ce  qui  fera 
infe6lc:que  voila  vn  homme  qui  fera  en  dan-» 
ger  de  demeurer  perclus  de  tous  fes'mcmbreî', 
quandce  mal-la  aura  gagné  en  quelque  pari, 
tiède  fon  corps  ,finon  qu'ily 'ait  les  remède» 
conuenables,&  qu'on  n'y  efpargnéricn  i  mail 
qu'on  coupe  le  niai  qui  aura  deua  gagné  ,  que 
tout  cela  foit  rafé.afin  qu'il  ne  foit  point  cau- 
fe de  la  perdition  dU  refte .  Or  nous  voyons 
ici  vne  telle  limilitude.  Car  fainft  Paul  non* 
monftre,  encoret  que  nous  eufsi'ons  efté  bit* 
inftruits  en  la  faine  doftrine  de  Dieu, que  Xô\xt 
fera  peiuerti  fi  on  donne  lieu  àces  queftion< 
inutiles, Si!  qu'on  fei'ouede  la  doârine.afin  de 
gratifier  aux  auditeursj  *;  de  nourrir  leur  fol 
appcuttqu'on  n'appcrccura point  dujprcmler 

coup 


SVR    LA  IL    ATI  M  OT  H. 


407 


<OUp'IemaI,inaisfî  eft-ce  qu'il  fera  bien  poOr     il  y  aura  de  telles  peftei  qui  s'aduaiiceDt,qubl 


tout  confumer  ,  qu'il  n'y  demeurera  point 
▼ne feule  goutté  dévie.  Maintenant  puis  que 
nous  entendons  ce  que  ûind  Paul  a  voulu  di- 
rc.aduifonsde  practiquer  cefte  exhortation: 
c'eft  fi  tofl  que  nous  venons  des  gens  qui  ne 
demandent  qu'à  nous  desbaucher  de  la  bonne 
dodrine.que  nous  les  fuyons, &  que  nous  leur 
fermions  U  porte.  Car  lî  nous  les   endurons, 
OU  difsimBlons,qu'aduiendra-ilïQu_'il  ne  fera 
.  plus  temps  d'y  remédier  quand  nousvoudrôs, 
non  plus  qu'à  vne  maladie  qui  td  incurable, 
.£aon  qu'on  fc  loit  aduancé  du  premier  coup 
.pour  tout  couper.  Ne  toyons  point  donc  en- 
dormis en  ceft  endroit  :  car  ce  n'eft  point  peu 


le  peine  met-on  à  les  rembarrer. Mais  pluftoft 
nevoit-dn  pas  que  ceux  qui  dcuroyent  eftre 
armez  à  rencontre  pour  repouflèr  tels  loups 
rauinans,les  nourrillènt,&  les  tienent  comme 
en  leur  giron,*:  déclarent  que  c'eft  leurfaiâ 
propre  ?  Et  ainfi  d'autant  plus  deuons-noHs 
tafcher  de  feruirà  Dieu,  &  dcperfeuerer  co« 
fiamment  en  la  pureté  de  fon  Euangile  :  Se  fi 
nous  délirons  d'obéir  à  nollre  Dieu  comme  il 
appartient, que  nous  prattiquions  ce  qui  nous 
eft  ici  commandé :c'eft  afçauoirde  fuir  telles 
pfftes,&  de  n'attendre  point  qu'ils  ayentcor 
rompu  l'Egliie  de  Dieu,  mais  que  nous  prcue 
nions  entant  qu'en  nous  eft,  fçachant  que  cè- 


de cliofe  que  faindt  Paul  nous  dénonce  ici  que  fie  maladie  fera  incurable  fi  on  attend  par 
cefte  maladie  eft  mortelle,  lion  n'y  pouruoic  trop:  &qiJenous  deteftions  ceurquiles  en- 
iflcôtinent.  Si  cefte  exhortation  euft  eftc  ob-  tretienent,&  qui  roudroyent  quece  mal  cro- 
feruee.leschofes  feporteroyent  auiourd'huy  "pift  ici  ,  &  qu  on  nournft  vne  telle  ordure. 
beaucoup  mieux  en  laChreitienté;mais  par  la  Quand  donc  nous  en  verrons  qui  cherchent 
corruption  qui  eft  aduenue  ,  on  voit  que  non  de  telles  peftes.que  nous  les  deteftions,  &  que 
fans  caufe  le  lainttEfpntavoulu  aducrtir  les  nous  prions  Dieu  qu'il  en  purge  fon  Eglife: 
fidèles  deuant  la  main  (  comme  on  dit  )& de  carcefont  fuppofts  dudiabie  ,  quelque  belte 
long  temps.Car  tout  ce  badinage  de  la  Papau  mine  qu'ils  facent.  Or  il  eft  rray  que  ceci  fe 
té,  n'eft  iînon  cefte  vanité  prophane  dont  par  pourroit  appliquer  à  toutes  les  corruptioirs 
le  fa  inû  Paul.Ceux  qui  veulent  cftre  reputez  &  fcandales  que  le  diable  nous  fufciteimais  il 
là  les  plus  erans  dodeurs ,  qui  par  l'cfpacede  eft  ici  prononcé  de  la  doûrine  ,  pource  que 
douze  ans  ieront  leurs  cours  ,&mefines  tbu-  c'eft  paricelleq  nousfommes  viuificz.Ccora- 
teleur  rie,  nepcnferont  lînonà  eftudiervn  me  nous  auons  dit)  c'elt la  vraye  nourriture 
largoQ  qui  fera  comme  pour  trani'porfer  les  de  nos  âmes.  Venons  à  ce  que  fainft  Paul  ad- 
hommes, &  ne  fçait-on  que  c'eft  qu'ils  veiilét  ioufte.  Il  dit  que  ilymenee  &  VhiUte  font  du 
dire;il  y  a  autant  de  gouft  pour  attirer  les  nombre  de  ceux-là  defqucls  il  a  pailé  , /</- 
hommes  à  Dieu,commcen  fiente,  ou  ordure:  qHtUfe font  depoumeK  de  la  feritéi_iiii-û)ii- 
maisplulloft  il  femble  queJe  diable  d'vnar-  faiii  que  Urifunedionefi  defiafaitf,Cr  fuhuer- 
tifi'ce  exquis  ait  forgé  ce  langage-la  ,  afin  de  tifJentUfoy  d'aucuns. En  nommant  ici  Hymc 
confondre  tout  ,&  mettre  toute  doârine  en  née  &  Philete  ,  il  monftre  qu'il  ne  faut  point 
vne  canfufion  horrible.  Btief.il  femble  qu'ils  cfpargner  ceux  qui  pourroycnt  infefler  le 
ayent  confpiré  manifeftement  défaire  tout  troupeau  comme  brebis  rongneufes,  mais  que 
au  rebours  de  ce  que  fainct  Paul  auoit  ici  de-  piuiîoft  il  faut  auertir  chacun,  afin  qu'on  s'en 
fendu  au  nom  de  Dieu. Par  cela  voyons-nous  garde.Etdefait>,nc  fommes-nous  point  trai- 
que  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  le  fainû  E-  itres  à  nos  prochains, quand  nous  voyons  que 


fprit  a  prononcé  ceci  par  la  bouche  de  faind 
Paul:  car  de  tant  plus  feront  rendus  inexcufa- 
bles  tous  ceux  qui  auront  ainlî  conuerti  la  pa- 
role de  Dieu  en  vn  langage  prophane  de  mots 
incognus  &  barbares. Or  tputcsfois  nous  voy 
ons  que  ce  vice  dure  toufiours.Car  combien  y 
en  a-il  qui  voudroyent  qu'on  leur  apportaft 


ils  font  en  danger  d'cftre  aliénez  de  Dieu,  Si 
que  nous  ne  faifons  ferablant  de  rien  ?  Vn 
Iioinme  malin  qui  tafchera  de  femer  vnedo- 
drine  peruerfe ,  ou  de  mettre  fcandale  ea 
l'Eglife,  qu'eft-il  linon  vn  empoifonneur?  Itf 
difsimule  en  le  voyant,n'eft-cc  pas  comme  fi- 
le  voy.oye  mon  prochain  en  danger  de  mal,& 


ie  ne  fçay  quoy  de  plaifant?Ils  veulent  que  la     que  ie  iieiuy  fonnafle  mot  pour  s'en  garder» 


parole  de  Dieu  leur  férue  de  pàlTe-temps ,  ^ 
d'esbat  :  voila  ce  que  cherchent  beaucoup  de 
gens.Et  pourtant  il  ne  le  faut  point  esbahir  iî 
noltre  Seigneur  permet  que  la  fimplicitc  de 
fa  parole  foit  corrôpue  pour  piinirla  perucr- 
ie  cupidité  de  ceux  qui  ne  peuué.  fouffrir  d'c- 
ftre purement  enfeignez  par  luy.  Etmefmes 
combien  y  en  a-il  qui  çljerchent  ienedipas 
quelque  façon  inutile  &fritiole  d'enfcigncr,, 
mais  des  erreurs  manifeftcs  ,dçs  contentions 
&  débats  pour.trooblcrrEglife,  pour  mettre 
en  (foûte  lafby  que  nous  tenons  ,  pour  enue- 
lopper  la  patole  de  Diett.j  en  fprte  qu'on  ne 


Ne  .voila  point  vne  trahi  fon  rtleine  ?  Or  fi  la 
vie  des  corps  nous,  doit  cftre  tant  precieufè,- 
que  nous  tafchions  de. la  maintenir  entant 
qu'en  nous  fera  .que  fera-ce  de  la  vie  des  a- 
mes  ?  Nous  fcaurons  bien  dire  enprouerbe 
corammi.qu'il  ne  faut  qu'viiebrcbis  rongneu- 
fe  pour  gailertoutie  troupeau:  cependant 
nous  ne  le  pouuons  prattiqiier  pour  garder 
l'  Eglife  de  Dieu  çii  fa  pureté. Mais  iJ  y  a  en-: 
cores  pisicas  ccs.mefchansqui  ne  demandient'' 
qu'à  tout  renuerfer  ,  viendront  femcj  leurs 
faufles  doftrines  pour  attirer  le  peuple  à  rn 
nitfpris  de  Dieu,  Gomme  nous  voyons  ces 


cognoiffe  point  ne  blanc  ne  noir?  Quaiiddôc     chiens  qui  abbaycnt,  qui  voudroyent  qu'on 

E  e  ' 


408 


SERMD-N  ^X;I  1  I. 


nieift  en  oubli  toute  religion,ceux.-b  font-ils 
brebiv  roiignculVs  i  Ncnni  ;  ce  font- boucs  in- 
fct^,&  puants.ce  font  inefmeç des  loups  rauif 
fani.cjui  vieiient  pour  tout  difsiper.Et  cepen- 
dant on  les  endurera.  Il  eil  vray  qu'ô  allcgue 
vne  belle  couleur  ,  Et  comment  Faut-ilainlî 
desfier  les  hommes?  Les  faur-il  reietter  pour 
les  mettre  en  dtfefpoir;  Voila  ce  que  préten- 
dent ceux  qui  font  femblant  qu'on  doit  vfcr 
id'liiimanité, quand  il  eft  qutftion  que  l'Eglife 
.de  Dieu  foit  corrompue  pas  raefcKantes  do- 
ârincs,&  par  fcândales.  Voire  ,  mais  ie  vous 
prie, quelle  mifericorde  fera -ce,  qu'on  efpar- 
gne  vn  feul  homme  ,  Se  cependant  que  mille 
.poures  âmes  s'en  aillent  en  perdition  par  fau 
te  de  les  admonefter  ?  Nous  oyons  ce  que  dit 
J'Apoftrc,  qu'il  ne  faut  point  laifler  croiftre 
les  mauuaifes  herbes  au  milieu  de  nous  ,  car 
elles  auront  incontinent  gagné  ,&  quelque 
bonne  femencequ'ily  air,  elle  fera  eftouttee, 
ou  elle  iera  du  tout  perdue.   Nous  voyons 
;nQn  feulement  des  mauuaifes    herbes,  mais 
des   poifons  de  Satan  qui  font  comme  des 
pertes  pour  tout  gafter  :  on  voit  le  troufceau 
de  Dieu  eftre  troublé  &  tourmenté   par  des 
,boncs  qui  viendront  hnrter  des  cornes,  qui 
tiendr5tinfe(îlertout:on  voit,brief,les  loups 
rauiflansqui  deuorent ,  qui  ruinent  tant  qu'il 
leur  eft  pofsible.  Eaut-illàeflre  efmeudemi- 
fericord- entiers  vn  loup,  &:  cependant  qu'on 
laifTe  les  poures  brebis,  &  les  agneaux  que  no 
ftre  Seigneur  ha  en  vn  foin  fingulier  ,  qu'on 
les  lai{rt(Ji-ie)  làpcrirrNotôs  bien  donc  que 
quand  nous  verrons  quelque  malin  qui  trou- 
blera PEglife,  ou  bien  par  les  fcândales  qu'il 
fait,  ou  bitn  par  faufle<.  dodrincs  ,  qu'entant 
■qu'en  nous  eft  nous  dcuons  empefcher  qu'il 
n'ait  plus  la  vogue,  nous  deuons  aduertirlcs 
fimples  afin  qu'ils  ne  foyét  point  deftourne^. 
Voila(di-ie)ce  que  nous  auons  àfaire.Q_ue  (i 
on  murmure  à  l'encontre  ,  Se  que  ceux  qui  ne 
peuuent  foufFrir  que  perlonne  foit  nommé, fc 
JÉafchent  &  fc  tempcfient.que  nous  ne  foyous 
point  plus  fagcs  que  le  fainft  Efprit  nous  a 
faits:  voici  noftre  leçon  qui  noustft  donnée 
par  faindl  Paul:  que  les  pourceaux  &  les  chiés 
grondent  tant  qu'ils  voudront ,  maiv  il  nous 
{ûŒt  que  Dieu  approiiUe  que  les  riitfchans 
foyent  déclarez, qu'on  lcsdi(crrne,&:  que  kur 
irtftiuie  foit  notoire  à  toUV.afili  qu'on  s'en  gar 
de.  Nous  auons  veu  ci  dciiant  que  faiiid  Paul 
parlant  des  gcs  desbauchez,voirc,&:  nô  point 
ni  en  paillardifes,ni  en  larrecins.nien  blafphe 
mes,maisdes  fai-ncas  qui  ne  gagnoyét  point 
leur  vie,&  ne  fe  tenoyét  jioini  paifîbles,  mais 
cftoyent  gens  frctillans,&  pleins  de  curiofité, 
&  oififs  î  ceux-là  ,  combien  qu'ils  n'cuflent 
point  de  crimes  raanifcftes,  toiitesfois  fainct 
Paulrouloit  qu'il?  fulTent  marquez  afin.qti'on 
les  eiii[aft:&'qHefera-cc  donc  dé  ccu*!  qiii  ont- 
le  glanic  au  poing,  qui  font  cndiablez,  qui  ne 
fe  peuuent  millcnicnt  contenir  en  p-.iix  &:con 
corde,  mais  que  le  diiblc  les  pouuc  à  ruiner 


tout  ?  quand  on  les  voit  ainli,  ievotis  pric.fc 
faut-il  taire?  Et  ainfi  apprenons  de  difcerner 
ceux  qui  troublent  l'Eglife  de  Dieu, de  les  re- 
poufler  ,  Se  faire  tant  que  la  broche  leur  foit 
coupée,  afin  qu'ils  nepuiflent  nuire.  En  cela 
voit-on  combien  il  y  en  a  peu  qui  portent  nul 
zele  à  l'Eglife  de  Dieu. Car  on  cognoift  aflcz 
ceux  qui  auiourd'huy  tafchent  de  tout  pcruer 
tirrie  ne  parle  poît  feulcmét  des  ennemis  m» 
nifeftes:car  quant  aux  Papiftes,nou'^  confef- 
fons  qu'il  nous  les  fant  noter,  afin  que  nous  ne 
foyons  point  enueloppez  en  leurs  erreurs  & 
fuperftitiôs.Mais  nous  voyons  ceux  qui  nçde 
mandent  qu'à  nousdesbaucher  de  la  fimplici- 
tc  de  l'Euangile  ,  qui  voudroyent  auoir  pef- 
uerti  tout  oidre  &  toute  police  ,  qui  fement 
des  zizanies  afin  que  la  doèlrine  foit  rendue 
odieufe, qu'on  s'en  fafche, qu'on  s'en  defpite: 
nous  voyons  cela. Nous  voyons  aufsi  ceux  qiiî 
voudroyét  auoir  vne  licence  desbordee  h  tout 
mal  qui  tafchent  petit  .i  petit  de  rompre  le 
ioug  de  noftre  Seigneur  Ufus  Chnrt.  Nous 
voyons  ceux  qui  ne  demandent  linon  de  rem- 
plir tout  d'impiété,  quidefgorgent  leurs  blaf 
phemes,&  leurs  vilenies,  afin  que  toute  reue- 
rcnce  de  Dieu  l'oit  mife  fous  le  pied.  NouJ 
voyons  ces  gros  yurongnes,  &  pouacrcs,  qui 
ne  demandent  finon  à  mettre  vne  telle  confir- 
fion  ,  qu'on  ne  fe  foucic  plus  de  rien  qui  foit, 
que  la  religion  férue  feulement  d'vn  ombra-:» 
ge,&  que  ce  foit  tout:on  voit  cela. Or  cepen-i 
dant  qui  cft-ce  qui  s'y  oppofe  ,  &  quife  con- 
ftitue  partie formellcfQui  eft-ce  quidit,Gar 
dons-nous,S:faifons  bon  guet?  Mais  au  con- 
traire,ceux  quideuroyent  pournoirviuement 
à  tout  le  mal, non  feulement  ils  y  difiimulenf 
&  le  laiflent  efcoulcr,mais  ils  y  fauorifent.il 
n'eft  point  qutftion  d'amener  Icschofcsen 
clarté, car  elles  fort  toutes  cognues  &mani- 
fcftes  :  8c  cependant  on  n'en  tient  conte.  On 
cognciftra,  Voila  vne  vilenie  trop  grandc:cC- 
luy-la  tft  ennemi  de  Dieu  nianihfte  ,  qui  ne 
tafche  qu'à  tout  ruiner'&  cependant  on  l'en- 
durera.Tu  vois  le  mal  auAi  qui  s'tfpand  pour 
tout  corrompre  &  peruertir,il  tft  queftion  ici 
de  ton  falut  &  de  celiiv  de  toute  l'Eglife  de' 
Dieu:&' cependant  tu  d'.fM'niules,  tu  fais  fim- 
blànt  de  rien.  Et  quelle  lafcheté  eft-ce  là  ?  Er 
rteantmoiiis  c'tft  vne  chofe  par  trop  commu- 
ne.Vantons-nousd'cftre  Chrerticns  tant  què 
nous  voudrons, fi  cft-cc  qu'il  v  a  plus  de  dia- 
bles entre  nous  que  de  Chrcfticns  ,  en  faifant 
âinfi.Et  pourtant  regardons  àladoflrincqui 
nous  tft  ici  donncc;c'tft  afc3noir,fi  nou<.  voy 
onsdcs  gens  peruers  qui  tafthcnt  d'inteiflcr 
l'Eglife  deDicu,  d'obfcurcir  la  bonne  do£lri 
ne,ou  i'abbaftardir.qu'rl  faut  qu'il:  foyent  cf- 
chaffàudcz, qu'on  les  cognoilTc,  &  qu'vn  cha- 
cun s''en  donc  gardc.Si  On  voit  anfsigens  qui 
fcnient  zizanies  &  {caudales, que  le  feinbLible 
doit  eftre  prattiqué  :  &  tous  ceux  qui  ne  s'en 
acquittent, chacun  en  Ton  endroit,  qu'ils  font 
traiftrcs  à  Diaij&  qu'ily  n'ont  mil  lelede  fon 

honneur, 


SVR     LA     II.     A     TIMOTH.  409 

honneur,  ni  du  falut  de  fon  Eglife.  Ils  auront    eut  eu  grand  renom, voire  par  toutes  les  EgJi 
beau  fe  vSter  auiourd'huy  d'eitre  fideles:mais     fcs,  iufques  outre  mer  :  &  cependant  les  voila 
il  faudra  que  Dieu  deuant  fes  Anges&  deuat     tombez  eii  tel  aueuglemcnt, qu'il  ment  la  re- 
toutes créatures  tes  reprouue, comme  ceuxqui    furreftion  des  morts :c'cft  à  dire.ils  renoncent 
n'ont  tenu,  conte  de  maintenir  fa  querele    le  principal  article  de  noftrefoy, ils  fe  piiuëc 
quand  il  leur  faifoit  ceft  hôneur  de  les  appel-    &  defpouillen  t  de  toute  efperanct  de  faiut.Ec 
lerà.vnferuicé  tant  honorable.   Voila  don-    où  eft-cealler?Coinment  cela  eft-il  pof  ible? 
ques  comme  nous  deoons  eftre  ennemis  for-    II  femble  que  ce  foit  comme  vn  monflre  con- 
melsdu  mal ,  fi  nous  voulons  feruiràDieu,    tre  nature,  de  voir  gens  qui  ont  efté  pour  cn- 
quece  n'eft  point  affez  que  nous  n'en  foyons    feigner  les  autres.que  c<;ux-la  peufl'ent  venir 
point  autheurs.mais  il  le  faut  condamner  en-    àvne  telle  ignoiance,&  fi  brutale.  Voire.mais 
cat  qu'en  nous  eft.afin  qu'il  ne  domine,  &  que    voila  comme  Dieu  fe  venge  des  mocqueurs 
il  ne  gagne  point  fur  nous.Or  après  que  fainil    qui  deftournent  fa  p3role,il  faut  qu'il  les  met 
Paul  a  nommé  ces  deux,il  adiouile,Q»'/7j  se-    te  en  fens  reprouue,  qu'ils  ne  difcernent  plus, 
Jioyent  deflaurntxde  U  foy ,  iufjitej  a3ire  que    en  forte  qu'ils  n'ayent  plus  metaes  nulle  lai- 
la  refurreSlioneflolt  faite.  Or  ici  nous  voyons    fon  humaine  en  eux.  Voila  ce  que  nous  anons 
que  leur  cheuteeftoit  horrible:  tant  y  a  que    à  noter  furcepaflage.  Et  pourtant  fi  auiour- 
cen'eftoyent  point  gens  incognus.Car  quand    d'huy  nous  en  voyons  qui  foyentdu  toutab- 
fainÛ  Paul  les  nomme ,  voire  de  fi  loin, quand    brutis  après  auoir  cognu  la  vérité  de  Dieu,  & 
Timothee  cftoit  en  Ephefe,  qu'il  veut  que  là    qu'ils  deuienent  comme  chiens  fans  raifon, 
ôncognoilTe  ceux-ci, il  faut  dire  quec'eftoy-    cognoiflbns  que  Dieu  par  cela  veut  magnifier 
ent  gens  renommez  :  brief ,  ils  auoyent  efté    fa  parole ,  &  nous  veut  faire  fentir  quelle  en 
pour  vn  temps  en  réputation  d'eftre  comme    eft  la  maiefté.  Et  pourquoy  ?  Car  il  punit  le 
des  piliers  de  l'Eglife  ,  &des  principaux.  Or    mefpris  d'icelle.quand  il  donne  au  diable  tej- 
nous  voyons  où  ils  font  trebufchez,de  rtnon    les  gens,&  qu'il  luy  permet  toute  licence, que 
cer  le falut  éternel  qui  nousaefté  acquis  par    illuy  lafchela  bride,  qu'il  les  poflède  ,&  \cs 
noftre  Seigneur  lefusChrift.  Car  fi  nous  n'at    tranfporte  tellement  qu'il  ne  leur  demenre 
tendons  la  refurreftion,  dequoy  nous  profite    plus  figure  humaine,  tant  font  abbrntis. Tant 
d'eftre  auiourd'huy  enfeignez  qu'il  y  a  vn     s'en  faut  donc  que  nous  deiuiôs  eftrt  Tcanda- 
Redempteurqui  nous  a  retirez  de  la  feiuitu-    lizezvoyans  ceux  qui  ont  goufté  rEuangile 
de  de  mort?  De  quoy  feruira  la  mort  &  paf-    fe  reuolter  del'obeiflance  de  Dieu.quc  pliif- 
fionde  nofVre  Seigneur  lefusChrift.finon  que     tort  c'efl:  vne  côfirmation  de  nortrefoy.  Car 
nous  en  attendions  le  fruid  qui  nous  en  eft    Dieu  monftre  qu'il  prife  &  ertinie  tant  fa  pa- 
promis  au  dernier  iour ,  &  à  fa  venue  ?  Ainfi     rôle, qu'il  ne  peut  fouffrir  en  aucune  manieie 
donc  notons  bien  que  ceux-ci  eftoyent  tre-    que  les  hommes  en  abufent  ,  &:qu'ils  la  pre- 
bufchez  comme  au  profond  gouffre  d'cnfer:&    nentainfîen  vain,  &  qu'ils  la  d(.ô;uifent&  la 
tant  y  a  qu'ils  auoyéterté  pour  vn  teps  au  mi     prophanen  t. Voila  pour  vn  item  Mais  cepen- 
lieu  dcsfideles,qu'il  fébloit  qu'ils  fuflent  pour    dant  que  nou5  foyons  aufsi  aduertis  de  cherai 
guider  les  autres.  Ainfi  Dieu  a  voulu  déclarer    ner  en  craint   &en  folicitmie:  qu'vn  chacun 
en  ces  deux  hommes ,  quelle  eft  fa  vengence    de  nous  penfcHelasIpuis  que  Dieu  nous  met 
fur  ceux  qui  abufent  de  fjn  Euangile.De  pri-    de  tels  miroirs  deuant  les  yeux,  que  ceux  qui 
mefaceilleur  fembloit  que  ce  n'eftoit  point     ont  fait  femblac  d'eftre  fidèles  iufqu'au bout, 
grad  mal  démettre  en  auant  leurs  fnbtilitez,     que  nous  les  voyons  ainfi  peruettis,  qu'ils 
&  comme  ils  eftoyent  enyurei  d'vne  folle  am     n'ont  qu'outrages  en  leurs  bouches ,  qu'ils  v- 
bition  , qu'ils  ne  demandoyent   finon  qu'on     frnt  de  propos  exécrables  ,  qu'ils  dcfpitent 
leurapplâudift  :  ilsdefguifoyentla  fimplicité    Dieumanifeftemcnt.qu'iln'y  a  que  turpitnde 
de  la  parole  de  Dieu,  ils  vouloycnt  monftrer    cnitoute  leur  vie, qu'on  voit  qu'ils  font  difTo- 
qu'ils  eftoyét  plus  grans  clercs  que  les  autres,     lus  ,&  qu'il  n'y  a  nulle  reuerence  de  Dieu: 
Or  en  cela  ils  fe  flattent  ,  &  ne  penfent  point    quand  donc  Dieu  nous  propofe  de  tels  exem- 
que  Dieu  les  doyuelaifler  ainfi  tomber.  Voi-    pies ,  n'eft-cepas  pour  nous  .iduertir  afin  que 
re,mais  voici  Dieu  qui  monftre  defoncofté     vn  chacun  de  nous  fe  refueille  ,  &  que  nous 


me  demi  Anges,deuienent  du  tout  diables ,  &  Il  eft  vray  que  ceux-ci  auoyent  vne  refurre- 
quMs  font  fi  auttiglez  qu'ils  ne  rctiencnt  plus  ftion  phantaft  que,  comme  il  y  en  a  eu  de  no- 
ies principe'  de  la  foy, ni  les  rudiinens,  qu'ils  ftre  temps  des  gens  forcenez  qui  ont  vcufo 
ne  penfent  point  eftre  à  l'a  b  c  ,  &  veulent  c-  faire  à  croire  qu'on  rcflïifcite  quand  on  eft 
ftre  trop  grans  doâcurs.  Voila  donc  ce  que  Chreftien.  Au  lieu  que  l'Efcrtiiue  nous  appel 
nous  auons  à  noter  fur  la  qualité  des  perfon-  le  à  la  venue  de  noftre  Seigneur.  lefus  Chrift, 
nés  dont  parle  fainft  Paul,  qu'ils  n'tft.-.yent  &  qu'elle  nou':  dit  qu'il  nous  faut  tonfîonrs 
point  gens  vulgaires^ni  idiots,  mais  ils  auoy-  eftre  prefts  &  appareillez:  mais  cependant 

Ff.i, 


4'0 


-SERMON      XIII. 


^u";!  faut  que  lefus  Chrift  foit  manitcfté  ,  Se 
d.ji-  ;if.^iiei  la  noftre  vie  foit  cachée  ,quc  nous 
foyons  comme  fous  ombre  Je  mortiCainfî  que 
fainû  Paul  en  parle  au  troifieme  chapitre  des 
Colofsicn5)au  lieu  donc  que  l'Efcriturenous 
appelle  à  noftre  Seigneui  Itfus ,  ces  phanta- 
ft.ques  diront  qu'il  ne  taut  point  imaginer 
d'autre  refurredion  que  celle  qui  fe  fait  quad 


anôs  dit^c'eft  vne  chofc  fi  trutale  qu'on  ddît 
d«  premier  coup  la  rcietter  ,  Que  la  refurre» 
ftion  foit  ir'aitc.  Et  comment?  On  voit  que  les 
enfans  de  Dieu  font  mifcrables  en  ce  monde, 
&quec'eft  pitié  que  de  leur  condition. Que  à 
on  les  accomparc  auec  les  incredules,ou  troa 
uera  qu'ils  font  comme  languiflans  ici  bas,  & 
que  les  contempteurs  de  Dieu  ont  leurs  ai  fes 


Dieu  no'  illumine  en  fonEuagile. Voire, mais     &  leurs  delicestbrief.quMs  font  leurs  triom-  ^•^«'^'^ 


i.f  ler.y 
M. 


pluftoft  au  contraire  ,  il  nous  faut  eftre  enfe 
oclit  en  ce  monde  ,  &  cognoiftre  que  lefas 
Chrift  n'tft  point  noftre  refurreftion,iufques 
à  tant  que  nous  ayons  cfté  comme  transtor- 
niez  en  luy.Il  faut(di-ie)que  noftre  vieil  ho- 
me loit  crucifié  auparauant ,  ii  nous  voulons 
élire  participans  de  la  gloire  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift,  5c  reflufciter  auec  luy.  Et 
c'ertce  qu'auparauant  faind  Paul  auoit  decla 
ré, que  c'i-lî:  vne  parole  certaine ,  &  vne  con- 
cluiion  qifil  nous  faut  tenir  ,  que  pour  élire 
du  règne  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, il 
nous  faut  maintenant  cômuniquefà  fes  croix, 
qu'il  faut  que  nous  cheminions  en  la  mort.de 
uant  que  de  paruenir  à  la  vie.  Et  cefte  mort- 
ci  combien  durera-elle?  Cependant  que  nous 
fommes  au  monde.  Et  voila  pourquoy  fainft 
Pierre  dit  que  le  Baptefme  eft  comme  vne  fi- 
gure de  l'arche  de  Noé.Car  ilnous  faut  eftre 
enclos  comme  en  vn  fepulchre.eftans  comme 
du  tout  trefpaflei  au  monde ,  fi  nous  voulons 
eftre  viuifiez  par  la  marque  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.  Or  maintenant  ceux  qui 
voudroyent  auoir  vne  refurreftion  au  milieu 
du  chemin, que  font-ils  linon  qu'ils  peruertif- 
ient  la  naturedu  Baptefmc.&parconfequent 
tout  l'ordre  queDicuaconftitué  entre  nous? 
Ainfi  donc, apprenons  que  iufques  à  tant  que 
Dieu  nous  ait  retirez  de  ce  monde  ,  il  nous 
faut  eftre  toufiours  pèlerins, &  côme  en  pays 
eftr.lgc,5:  que  noftre  falut  ne  nous  fera  point 


phes,  au  lieu  que  les  autres  font  comme  l'or-  *^' 
dure  du  monde,ainfi  que  fainéi  Paul  en  parle. 
Et  comment  donc  pourroit-on  conceuoir  v- 
ne  telle  herelîe,  que  la  refurrcélion  foit  delît 
faite  ?  Et  neantmoins  on  voit  que  cela  a  efté 
receu  d'aucuns, voire  en  l'Eglife  primitiue.du 
temps  des  Apoftres  :  quand  ceux  que  lefus 
Chrift  auoit  choiiîs  pour  anôcer  fa  vérité  par 
tout  le  monde  viuoyent  encores  ici  bas,  voila 
des  gens  qui  fe  font  deftournez.  Et  en  quoy? 
En  vn  erreur  (comme  l'ay  dit)  diabolique.en 
vne  refuerie  brutale.  Quand  nous  voyons  vn 
tel  exemple,  ne  deuons-nous  pas  eftre  cfton- 
nez, voire  pour  cheminer  en  crainte?  Non  pas 
qu'il  nous  faille  douter  q  Dieu  ne  nous  aide, 
&  qu'il  ne  nous  guide:  mais  tant  y  a  qu'il  nous 
faut  armer. Et  comment?De  prières,  &  médi- 
ter les  promeiîes  de  noftre  Dieu, comme  il  fe- 
ra adioufté  ci  après.  Voila  donc  l'enormité 
d'vn  tel  erreur  qui  nous  doit  faire  drefler  les 
cheueuxen  la  tefte,quand  nous  oyons  parler 
que  Dieua  permis  que  la  toy  d'aucuns  fuit 
défia  peruertie,  pour  fe  deftourner  iufques  là, 
en  vne  chofe  fi  vileine  &  fi  exécrable. Et  puis, 
il  y  a  la  malice  auec. Que  fi  les  Apoftres, quîi 
ih  ont  defployé  la  vertu  qui  leur  eftoit  don- 
née d'éhaut  pour  maintenir  la  vérité  de  Dieu, 
n'ont  toutesfoispeu  empefcher  qu'aucuns  ne  " 
fuflcnt  peruertis.que  fera-ceauiourd'huy?  Et 
ainfi  donc  craignons  doublement ,  non  pas 
pour  eftre  eftonnez ,  (comme  il  fera  déclaré 


déclaré  iufques  à  la  venue  de  noftre  Seigneur    après  difner  ,  au  plaifir  de  Dieu)  mais  pour 


T.C» 

a,o. 

Oel.  I.lS 
jljx)r.l.5 


Tefiis  Chrift.  Et  pour  cefte  caufe  il  eft  appelé 
les  prémices  de  ceux  qui  reflufcitent.  Car  il 
faut  bien  que  leChef  lille  deuant  les  mem- 
bres. Si  qu'il  commence  l'ordre  &  le  rang.  Il 
eft  vray  que  lefus  Chrift  eft  reffufcité:mais  il 
faut  qu'il  nous  apparoifle,  &quefa  vie  &  fa 


nous  foliciter  à  prières  ,&  pour  auoir  no- 
ftre refuge  à  Dieu,  afin  qu'il  nous  preferue 
par  fon  fainft  Efprit ,  &  que  nul  ne  foit  enflé 
de  prefomption  ,  que  nous  cognoifsionsque 
nous  ne  fommes  rien  ,  &  que  nous  ferions 
bien  toft  abbatus  ,  n'eftoit  que  Dieu  nous 


gloire  nous  foit  déclarée  deuant  que  nous  par     foufteint .  Ainfi  donques  retenons  que  ces 
uenions  à  luy.  Et  voila  pourquoy  aufsi  fainû    admonitions  ne  font  point  faites  fans  cau- 

'         fe.    Et' combien  qu'auiourd'huy  Philetc  & 


lean  dit  que  notis  fçauons  bien  que  nous  fom 
mes  enfans  de  Dieu, mais  cela  n'eft  pas  enco- 
res déclaré. Nous  le  verrons  (dit-il)tel  qu'il 
eft  quand  nous  ferons  faits  femblables  aîuy. 
Maintenant  ilefl  vray  que  Dieu  nous  eftre- 
uelé  quand  il  nous  reforme  à  fon  ima^e  ,  mais 
ce  que  nous  conceuons  par  foy  ,  ne  fe  vo.ic 
point  encores  ,  il  nous  le  faut  cfpcrerà  la  ve- 
nue de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift. Or  quel- 
que abfurdité  qu'il  y  euft  en  ceft  erreur-ci, 
fainrt  Paul  dit  que  ca  deux  dont  il  parle, orit 
renuerfé  la  foy  d'aucuns. Voici  vne  cliofequi 
nous  doit  faire  trembler, voire  pour  deux  rai 
fons.Car  en  premier  lieu, (comme  dcfia  nous 


Hymenee  ne  viuent  plus  ,  fçachons  qu'en 
leurs  perfonnes  le  fainfl  Efprit  nous  a  voulu 
ici  dégrader  cous  les  mefchans  qui  tafchcnt 
depcruertir  noftre  foy, afin  que  nausncfoy- 
ons  point  fafchez  pour  rien  qui  aduiene,voirc 
pour  eftre  deftournez  du  bon  chemin  ,  mais 
que  nous  foyons  munis  contre  tous  lcand.iles: 
&•  cependant  que  nous  ne  foyons  point  enflez 
d'vne  telle  outrecuidance  ,  qu'vn  chacun  de 
nous  s'cfgare  après  fes  folles  imaginations, 
mais  que  nous  aduifions  de  nous  retenir  eu 
vne  droite  obciflance  de  la  parole  de  Dicu:& 
alors  ne  doutons  piaint  que  qous  n'y.foyonf 

toufiours 


SVR   LA   II    A    TIM07  H  411 

toufîours  confermez  de  plus  en  plus,  iu/gues  à  foit  contorme  à  fe$  fai»£ls  commandtmeiis. 
ce  que  ce  bon  Dieu  nous  retire  à  ce  repos  Etencoresque  noftrevie  foit  fi  maligne  que 
éternel  auquel  il  nous  appelle.  nous  méritons  bien  d'cftre  reiettez  de  luy, 
OR  nous-noHS  profternerons  deu.int  la  toatesfois  quepar  familericordeil  nous  Aip- 
face  denoftrebonDieu  en  cognoiflànce  de  porte  iufqiies  à  ce  qu''il  nous  ait  retirez  de  ce- 
nos  fautes ,  le  prians  qu'il  nous  attire  à  vne  ûe  vie  mortelle  pour  nous  transfigurer  à  ii 
vrayc  repentance,  &  que  de  iour  en  iour  nous  gloire  celefte.  Ainfi  nous  dirons  tousi  Diai 
tafchions  d'y  profiter.en  forte  que  noftre  vie  tout-puiffant  Père  celeftej&c. 

SEPTIEME     SERMON     SVR     LE 

SECOND      CHAPITRE. 

19  Toutesfois  le  fondement  de  Dieu  demeure  ferme,quî  ha  ce 
feauy  Le  Seigneur  cognoijl  ceux  qui  font fiens:  (f  quiconque  inuoque  le 
nom  deChrijlyqtidfe  retire  d'iniquité. 

fe  peut  fairetcar  Dieu  eft  gardiéde  noftre  ùi- 
iutjcomme  il  l'a  prononcé:&mefmes  ceft  of- 
fice eft  donné  ànoftie  Seigneur  lefus  Chrift, 
de  maintenir  tout  ce  qui  a  efté  eleu  de  Dien 
fon  Père. Et  c'eftce  que  maintenât  fainiJ  Paul 
entend  par  ces  mots,  l.e  fondement  demeuT* 
ferme  (dit-il)  uy.iAt  ce  cachet ,  &  ce  Jean  ,  <jH« 
Dieu  cegnoift^ui  font  les  fcns.SAÏnEt  Paul  met 
ici  deux  articles  que  nous  deuons  bien  noter. 
L'vn  c'eft.quand  nous  voyons  de  telles  reuo- 
lutions ,  que  ceux  qui  fembloyent  eftre  défia 
les  plus  aduancez  en  la  foy, reculent  de  nous, 
afin  qu'ih  s'aliènent  du  tout  du  Royaume  de 
Dieu, qu'ils  deuiènent  incrédules, que  nous  ne 
penfions  point  quePEglifepourtant  dcchee. 
Il  eft  vray  que  le  nombre  de  ceux  que  nous  a- 
iiions  eftinié  eftte  fidèles  fe  diminuera  par  ce 
moyen:inais  quoy  qu'il  en  foit,  il  y  a  vn  fon- 
dement ferme, c'eft  àdirc  que  touiîours  Die» 
gardera  fon  Eglife,&  qu'il  y  demeurera  quel- 
que nôbre  de  gens  pour  rinuoquer&  l'ado- 
rer;qu'il  nous  fuffife  de  cela. Car  aufsi  il  a  iu- 
ré, cependant  qu'il  y  aura  (oleil  &  liineluifans 
au  citl.quici  bas  il  y  aura  quelque  peuple  qui 
adorera  le  Souuerain.Voy6s-no.us  doc  que  le 
diable  dif^ipe  le  troupeau  de  ooftrt  Seigneur 
Icfu".  Ctn,ft?  Voy5s~nous  que  ceux  qui  auoy- 
ént  donné  quelque bône  appaiéce  fedeftour- 
nent,  §ceniafin  foyêntdu  tout  retranchez? 
,  Tat  y  a  qu'et^cores  il  y  decyeure  édifice, voire 
combien  qu'il  foit  caché  fous  terre  :  car  la 
foiircedemeure  côme  nousl'auô  veuparex- 
perience,quâdpar  toutle  monde  à  grand'  pei 
nepounoit-ôn  irouuer  vn  ftul  hôtne  fidèle. 
Qûjcftoit-ce  deuantque  Dieu  nous  rendift 
la  clarté  de  fonEuangile,  ily  a  quarante  ans? 
ne  fembloit-il  p^î  que  toute  la  Chreftienté 
fultabolie  au  monde  ;  Tellement  qu'il  n'y  a- 
uoit  point  d'édifice  qui  feraonftraft,  &  qu'on 
peuft  ippciccuoirdt  loin.  Mai'  cependant  il 
,  y  iuoit  vn  tondemenft  caché,c'fftàdire,Dieu 
a  referué  d'vue  façon  adiiiirablt  &  incom- 
pielienfible,ceux  qu'il  a  voulu,  combien  qu'il 

Ff.  li. 


Ous  auons  v«u  en  partie  ce 
matin  quand  fainû  Paul  par 
iloit  de  ceux  qui  s'eftoyent 
diuertis  ,  que  c'eftoit  pour 
admonefter  les  fidèles ,  afin 
qu  ils  n'en  fuflènt  point 
troublez  par  trop. Mais  en- 
cores  il  remédie  plus  amplement  ici  a  vn  tel 
fcandale,  dilànt  quefinousvoyos  trebufcher 
ceuï  qui  fembloyent  quafi  fouftenirl'Eglife, 
que  pour  cela  il  ne  faut  point  que  nous  foyôs 
esbranlez  .  Car  fi  les  hommes  font  fragiles, 
s'ils  fe  de.bauchent  du  bon  chemin  ,  s'ils  font 
peruers,  ce  n'eft  riendenouueau,  leur  nature 
le  porte, &  ne  fe  faut  poïtesbahir  s'ils  fe  tour 
nent  à  mal  ploftoft  qu'à  bien.  Mais  noftre  fa- 
lut  cependant  eft  appuyé  fur  la  grâce  de  no- 
ftre Dieu  ,  voire  entant  qu'il  luy  a  pieu  nous 
ehoifirdeuant  la  création  du  monde,  &  nous 
ma-rquer  pour  eftre  du  rang  de  fes  eleus,  &  de 
tésenfans.  Or  nous  fomraes  fafchez.de  veoir 
flue  ceux  qui  auoyent  monftré  quelque  bon 
figne  tournent  tout  au  rebours ,  cela  eft  bon: 
car  nous  deuons  auoir  zèle  que  l'Eglifede 
Dieu  s'augmente,  &  qu'elle  croilTc  phiftoft  q 
de  diminuer.  Nous  deuons  aufsi  auou-  foin  de 
nos  freresSc  eftre  contriftez  les  voyans  périr: 
'.car  ce  n'eft  pas  pcudechofe.que  les  ame.  qui 
■  ont  efté  rachetées  par  le  fang  de  lefus^  Chnil 
periflent.  Mais  tant  y  a  qu'xl  nous  faut  touf- 
iours  confoler  en  cefte  d  jûrine,  q  Dieu  majn 
tiendia  fonEglife.combic  que  le  nombre  foit 
petit:&  non  pas  tel  que  nous  fouhaittenons, 
neantmoins  qu'il  fe  faut  contenter  que  Dieu 
gardera  bien  tout  ce  qu'il  a  choili  à  foy  .Qu.Ht 
à  ceux  qui  fedeftournent,&  àcesapollat  qui 
renonceiu  lekis  Chrift,  combien  qu'ils  ayent 
efté  meflez  parmi  nous ,  il  nous  laut  conclure 
qu'ils  n'tftoyçnt  point  de-s  noftre.'>,(côme  dit 
l.leain..  fatnft  Iean)puis  qu'il:  en  font  fortis.Car  ceux 
l>.  q  Dieu  à  vrayement  retenus  à  foy:  illaudrcut 

que  le  monde  ful^ieu'ré  plyftoft  mille  fois, 
auant  qu  vn  des  elcus  de  Iheu  perift  :  cela  ne 


P/f.7a.I 


14. 


/ira- 

n'y  en  cuft  f  non  va  petit  nombre.  Voila  doc 
q-.iant  à  IVndes  .irticles  que  touche  ici  iainit 
Vâul,c''ert  que  le  fondement  de  Dieuderacu- 
le  ferme.  Et  iinfî  apprenons  quand  il  y  aura. 
de  gras  troubles ,  que  mcfmes  nous  cuideroKS 
que  tout  doîue  eftre  perdu,  de  contempler  ce 
fondement inuiiTble, voire  par  foy:car  quand 
nous  Fi'aurôs  point  cela, il  fe  pourra  faire  que 
nous  ne  verrons  goutte  pour  difcerner  TE- 
glife  de  Dieu, elle  nous  fera  corne  abolie.  Et 
nous  voyons  mcfmes  ce  qui  eneft  aduenu  à 
Elicle  Prophète,  il  péfoit  eftre  demeuré  fcul 
au  monde  ,  &  lors  il  n'y  àuoit  qu'vn  coin  de 
pays  là  où  Dieu  fuft  adoré  :  S:  cependant  le 
Prophète  ne  pouuoit  pas  vesjr  troi$-ou  qua- 
tre hommes  qui  fuflent  côioints  à  luy  en  foy. 
Or  Dieu  le  redargucSi  luy  dit  qu'il  en  a  en- 
cotes  fcpt  mille  qui  font  fous  ù  main  ,  Se  fa 
proteûion.Ainiîdonc  enaduiédra-il  tous  les 
coups,  quand  il  nous  femble  que  l'Eglife  foit 
du  tout  etfacee  du  monde ,  iî  cft-ce  que  Dieu 
tiendra  (on  fondement  fou;  terre.  Or  il  y  a 
Ja  fimilitude  du  cachet,  que  nous  auons  à  no- 
ter en  fécond  lieu.Saiiift  Paul  dit,  Q»f  !f  f^n- 
demoit  de  Vieu,  dimeitre  to» froitrs  :  mais  c'cft 
com:Tievne  lettre clofe  &cnchetee,dit-il.Et 
pourquoyî  Die»  c^imifl  l' i  f'.ns  '.  que  quand 
nons  ne  pouuons  pa'i  les  choifir  ,  que  nous  ne 
pouuons  pas  concluie,  Celhiy-ci  en  eft:Dicu 
rous  veut  humilier  en  t:e(t  endroit,  que  nous 
ïbyons  corne  aueugles,  ou  bien  que  nous  ay- 
ons les  yeux  esblouis.Mais  tat  y  a  qu'il  nous 
faut  contenter  que  Dieu  cependant  a  fon  e- 
leclion  touteafleuree  :  combien  qu'elle  nous 
'  foitfecretc,  combien  qu'il  ne  vueille  pas  la 
publier  du  premier  coup,  fi  cft-ce  que  cela  de 
meure  en  fon  confeil  cftroit.  Si  donc  Dieu  co 
gnoift  les  liens, ne  trouuons  point  eftrange  fi 
nous  fommes  fouuentesfois  abufer  quand  les 
homes  fe  reuoltent.  Pourquoy?  Nous  ne  les 
auons  pascognus.  Mais  cependant  Dieu  ne 
fera  point  trompé.qu'il  n'accomplifle  par  cf- 
fe£l  ce  qu'il  a  déterminé  en  fon  confeil.  Voi- 
la pour  le  fécond.   Or  cependant  fainiî  Paul 
nous  exhorte  qu'il  ne  nous  faut  point  eftre 
ronchalans,  quani  nous  verrons  cegx  qui  e- 
ftoy  et  défia  quafi  afsis  au  rang  des  Anges, qui 
'  delaiflent  la  bonne  voye  ,  que  nous  auifions 
de  cheminer  en  crainte  &  folicitude  ,  &  ne 
point  abufer  du  nom  de  Dieu.faifans  vne  fauf 
fe  couuertùre  du  nom  de  Chre(hété,ainfî  que 
font  les  hypocrites  qui  prenent  le  nom  de 
Dieu  eu  leur  bouche  ,  mais  cependant  mon- 
trent qu'ils  fe  moquent  de  luy, &  qu'ils  falfi- 
fient  ce  fiini>  nom  qui  leur  eftoitdôné.  Qije 
donc  nous  prattiquions  ce  qui  eftici  adiou- 
fté  ,  c'eft  afçauoirque  fi  nous  reclamons  le 
nom  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  fi  nous 
faifons  profefsion  que  nous  fommes  des  fiés, 
il  nousfaut  départir  de  toute  iniquité.  Car 
no'  ne  fommes  pas  de  l'Eglife  de  Dieu  finon 
eftans  feparezd'auec  le  monde,  &  fesaftuccs. 
Cognoiflbns  djnc  à  quelle  fin  nous  fommes 


SERMON     Xlîll. 


appelez, quelle  eft  noftre  f5dition:&  lideffus 
que  nous  ne  foyôs  point  defloyaux.Car  Dieu 
nous  pourra  bien  retracherdefonEglifequâd 
il  nous  aura  monftré  de  tels  exemples,  &  que 
nous  n'en  aurons  point  fait  nofti*  profit .  Or 
maintenant  pour  mieux  appliquer  ce  partage  à 
noftre  inftruftion  ,  traitions  en  premier  lieu, 
fuyuant  ce  q  nous  auons  défia  dit, quand  fain6t: 
Paul  nous  ramené  ici  au  confeil  éternel  de 
Dieu, furquoy  noftre  eleiCtion  eft  fondée rtrait 
t5s(di-ie)ce  poin£l-la, c'eft  afçauoir  fur  quoy 
noftre  falut  eft  vrayement  appuyé.  Il  eft  viay 
(comme  l'Efcnture  dit)que  nous  forames  fau 
uez  par  foy.  Car  nous  ne  cognoiflTons  pas  que  E^of.l* 
Dieu  nous  foit  Père,  nous  ne  cognoiflons  pas 
que  nous  ayons  efté  recôciliez  aucc  luy,  finon 
par  foy,  en  appréhendant  les  promeflès  de  i' 
Euïngile  :  voila   Dieu  qui  nous   déclare  que 
nous  luy  fommes  agréables  au  nom  de  noftre 
Scigncut  lefus  Chnrt.  Il  faut  donc  que  nous 
acceptions  vn  tel  bien  ,  ou  il  nous  fera  inco- 
gnu  .  Nous  eftions  donc  en  poffefsion  de  no- 
ftre falut  par  foy;cela  eft  vray:  mais  ccpcdaiic 
qui  eft-cc  qui  nous  donne  la  foy  finon  Dieu» 
Et  pourquoy  eft-ce  qu'il  nous  la  donne,finon 
d'autant  qu'il  luy  a  pieu  nous  choifir  deuant 
que  nous  fufsiohs  créez,  voire  deuant  la  créa- 
tion du  monde  raefmes  ?  ainfi  que  fainft  Paul 
en  traitte.fur  tout  au  premier  chapitre  des  E- 
phefiens.  Il  ell  vray  qu'il  nous  propofecequi 
nous  eft  le  plus  familier,  &  ce  que  nous  co- 
gnoiflons, c'eft  afçauoir  que  Dieu  nous  a  fait 
participans  des  biens  celeftes  en  lefus  Chrift, 
qu'après  nous  auoir  pardonné  nos  péchez  ,  il 
nous  a  monflré  q  nous  luy  fommes  agréables, 
&  qu'il  nous  a  acloptez.Nous  auons  donc  tout 
cela  qui  nous  eft  manifeftépar  l'Euangile. 
Mais  fainft  Paul  nous  eleuc  plus  haut,  difant, 
que  tout  cela  nous  a  cfté  dôné  félon  que  Dieu 
nous  auoit  choifis  deuant  que  le  monde  fuit 
créé, d'autant  qu'il  nous  a  aimez  en  noftre  Set 
gneur  lefus  Chrift.deuant  que  nous  peufsions 
faire  ne  bien  ne  mal.Voiladonquesoù  il  nous 
faut  reuenir,  c'eft  combien  que  Dieu  nous  at- 
tire à  foy  par  rEuangile,&  que  par  la  foj 
nous  rcceiiions  la  iuftice  de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift,  qui  eft  câufe  de  noftre  falut,  ne- 
antmoins  qu'il  y  a  eu  vne  amour  fecrctte  de 
Dieu  qui  a  précédé, voirecombien  qu'elle  no" 
fuft  cachée ,  &  que  Dieu  ne  fe  hafte  pas  fou- 
dain  de  nous  attirera  foy  ,  mais  c'eft  d'autant 
qu'il  nous  a  choifis  .  Voila  donques  où  tend 
cefte  fentence  de  fainft  Paul  qui  eft  ici  cou- 
chée, Qiiily  il  fil  fmif '.ment  (fe  l^ieu  (  dit-il  ) 
(jui  elh  ferme  .Or  t\  oppofece  fjndement  de 
Dieu  à  tout  ce  qui  Ce  pouf.a  trouuer  de  vertu 
aux  homes, ou  de  ce  qui  fera  eftimé  fcnibl.ible 
à  vn  édifice.  Il  oppofe  cefte  fermeté  dont  il 
parle  à  noftre  eftatcaduqii*.  P-Miiccque  nous 
fommes  inconftans,  q'enoiisdcclieoni  incon 
tinent,  que  nous  ne  faifon^  que  couler  comme 
eau, pour  cefte  caiife  hinÙ  P.iiil  dit  qu'il  nous 
faut  prendre  noftre  fermeté  en  Dieu.puis  que 

nous 


SVR    LAIT.   A  TIMOTH. 


4'5 


nous  ne  la  voySs  pas  en  nous,  ni  en  noftre  na 
ture.  Or  ceci  nous  doit  feruir  à  double  vfage. 
Cai  quand  nous  voyons  des  rebelles ,  qu'il  y 
a  des  apoftats  qui  le  dcftournent  de  l'Eglile 
de  Dieu, il  nous  pourroit  venir  vne  tentation 
en  fantafie.Et  qaoy?  Tous  homes  ne  font-ils 
point  infirmes? Autant  donc  en  fera-il  de  tout 
le  reftc  comme  de  moy .  Et  de  fait, chacun  de 
nous  experunente  et  la,que  iî  nous  Toyôs  que 
l'EuSgile  ne  fe  prefcKe  plus  en  vn  pays,  qu'il 
y  ait  quelque  difsipation  ,  tout  efi  perdu ,  ce 
nous  femble.  Quand  nous  voyons  quelques 
troubles ,  quelques  changemens,  nous  regar- 
<lons,£t  pourquoy  les  chofes  ne  demeurent- 
elles  fermes  ca  vn  lieu  aufsi  bien  qu'en  l'au- 
tre.'Mais  iliious  faut  repoufler  cefte  tétation 
par  ce  bouclier  que  fainft  Paul  dôneici ,  c'eft 
afçauoirquel'Eglifeeft  fondée  en  Dieu  ,  & 
■on  point  en  nulle  codicion  humaine.Si  donc 
nous  ne  crouuons  rien  de  certain  ici  bas,  ce- 
gnoiflbns  que  Dieu  a  fondé  noftre  ûlut ,  8c 


1.  Uh.l 
i9. 


compagnie:mais  cependant  il  let  a  cognus  e- 
ftre  reprouuei:  &  combien  qu'ils  feiflent  fera 
blant  d'eftre  brebis  ,  il  eft-ce  qu'en  la  fia  iU 
n'ont  point  eu  de  peau  pour  cacher  leur  ma- 
lice. Et  mefmesnoftre  Seigneur  le^cavfc 
de  cefte  mefme  rai fon, pour  monftrer  que  les 
fidèles  ne  doiuét  point  eftre  troublez  par  l'ia 
gratitude  àes  hommes ,  quand  ils  font  rebel- 
les à  l'Euangile  ,  veu  qu'fls  fe  fafchent  de  la 
bonne  doûrine,  ou  qu'ils  prcnét  occafion  de 
dcfpitcr  Dieu  fous  quelque  ombrt  qu'ils  ont 
cherchée,  ou  quelque  phantaiîe  qu'ils  auront 
conceueenleur  cerueau  :  lefus  Chriftditlà 
deflus.Tout  arbre  que  Dieu  mon  Père  n'aura 
point  planté  fera  arraché. Il  accôpare  ceux  <j  m<^,  [j, 
femblent  eftre  du  nombre  de  fidèles  à  des  jj. 
aibres  qui  font  platez  en  vn  champ  ,  &  en  vn 
iardin.  Car  ceux  qui  font  du  tout  ennemis  de 
Dieu, ils  n'ont  nulle  fimilitude  d'arbres:  mais 
lt%  hypocrites  qui  font  bône  mine,&:  qui  vou 
droyent  eftre  rep utez  pour  enfans  de  Dieu, 


qu'il  le  tient  en  forte  que  iamais  ne  pourra  ef    femblent  bien  que  ce  foyent  arbres  plitez  au 


uanouir. Voila  vne  confideration  qui  eft  bien 
vtile  .  Mais  l'autre  eft  quand  nous  venons  à 
nous.laqucUe  eft  beaucoup  plus  grande.  Car 
fi  ie  voy  vn  home  qui  fe  deibauche,  que  peux 
ie  dire  quant  a  moy?  le  fuis  femblable  àluy. 
Mais  il  faut  que  ie  reuiene  là.combien  que  ie 
foye  debile,Dieu  a  en  foy  aflez  de  fermeté.Il 
faut  donc  que  ie  me  remette  du  tout  en  fa 
inain.Etvoila  aufsi pourquoy  noftre  Seigneur 
,lefus  Chriftau  lo.  chapitre  de  S.  lehan,  nous 
dit  que  ce  que  le  Père  luy  a  dôné.ne  périra  ia 
mais.  Etpourquoy?Dieumon  Pere(dit-il)eft 
plus  fort.&  puiflànt  que  tous  ceux  qui  veulct 
l'empefcher  de  parfaire  <a  volonté.  Par  ces 
mots  il  nous  admonefte  que  fi  nous  confidc- 
.  ros  noftre  eftat,il  eft  vray  que  nous  pourras 
tftrc  efperdus:  &  de  faiû  ,  à  chacune  minute 
-de  temps  nous  pourrions  périr  ,  n'eftoit  que 
nous  tufsiôs  maintenus  d'vne  vertu  plus  gran 
de  que  la  noftre.  Mais  comme  la  puinânce  de 
Dieu  eft  inuinctble.aufsi  noftre  falutcftafleu 
ré,car  Dieu  en  eft  le  gardien. Et  mefme'fcom 
me  nous  auôs dit)  lefus  Chrift  a  prinslachar 
e  de  nos  ames:il  ne  foutfnra  point  que  nous 
'oyons  rauis  de  fa  main:  quoy  que  le  diable 
lïiachine.quoy  qu'il  ait  beaucoup  de  moyens, 
qu'il  femble  que  nous  deuionscent  mille  fois 
eftre  arrachez  des  mains  de  noitre  Seigneur 
lefus  Chrift,  fi  eft-ce  que  nous  demeurerons 
loufiours  là. Pourquoy?  Noftre  falut(comme 
i'ay  dit)  eft  appuyé  en  l'eledion  de  Dieu  ,  & 
en  fon  côfcil  immuable.  Voila  ou  il  nous  faut 
venir.  Et  quant  au  fcîdale  que  nous  pouriiôs 
prendre  de  ceux  qui  fedeftournent  del'Euan 
gile, venons  à  cefte  remonftrance  dont  famft 
I<  han  vfc  ,  &  laquelle  n  jus  auon  défia  t  'U- 
chee.Il  eft  vray(dit-il)  qu'ils  fon  t  f  irtis  d'a- 
nec  nous ,  mais  ils  n'f  ft  jypnt  piint  de:  ni- 
ftres.car  iamais  ils  ne  s'en  fulTent  f  parr z.Co 
gno'iTons  que  Dieu  pour  vn  tenp'  a  permr 
que  hs  hypocrites  fulTent  mefliz  ca  noftre 


I 


champ,&en  lamaifonde  Dieu.mais  ils  n'ont 
pas  prins  racine,  d'autant  q  ce  n'eft  pas  Dieu 
qui  les  a  plâtez,c'cft  à  dire,  ils  ne  font  pas  e- 
leus  de  luy.Il  eft  vray  qu'il  fouffre^pour  nous 
efprouuer,  qu'ils  prétendent  fauflement  fon 
Nom  :  mais  tant  y  a  que  iamais  ne  les  a  rete- 
nus pour  fiens,  ils  nefontpointchoifisàrhc 
ritagede  vie.lJfaut  donc  qu'ils  foyent  arra- 
chez. Les  difciplesauoyent  allégué  à  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  ce  que  nous  voyës  fo«- 
uét.  Car  fi  quelqu'vn  eft  defgoufté del'Euan 
gile, on  nous  viédra  dire,  Ho,  voila  vn  tel  qui 
a  tout  reietté.  S'il  aduient  quelque  fcandale, 
ie  ne  di  point  de  ceux  qui  le  monûrent  du 
tout  ennemis  de  Dieu,  &  cqntempreurs  mani 
feftes  de  fa  Parole. mais  s'il  y  a  quelques  ou- 
trecuidez  qui  ne  puiflent  porter  la  bonne  do 
ârine  ,  combien  que  pourvn  temps  ils  ayenc 
fait  femblant  de  la  receuoir, s'ils  s'endefgou 
ftent  et  s'en  fafchent ,  voila  vn  fcandale.  Et 
pourtant  les  diiciples  allegoyent  à  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift ,  â  quel  propos  les  Scribes 
&  PhariCenseftoyent  fi  mal  édifiez.  Laiflez, 
laiflez-les(dit-il)ce  font  aueugles:  mais  gar-  Là  tnef- 
dez-vous  d'aller  en  ruine  aviec  eux.Cepédaiit  ^, 
toutesfois  cognoiffez  que  tous  nefont  point 
cleus  ni  choifis  de  Dieu  mon  Père, Il  eft  vray 
qu'on  dira  qu'il  n'y  a  que  famftcté  en  eux: 
mais  ce  n'eft  qu'vn  mafque  :  &  cependant  on 
voit  maintenant  que  iamais  n'ont  eu  crainte 
de  Dieu, puis  qu'ils  ncpeuueiic  receuoir  fa  ve 
rite,  ce  font  nypocrites.  Ne  vous  eftonnez 
point  donc  fi  vous  voyez  de  la  rebrliion  aux 
homes  ,  car  tous  ne  font  point  planttz  de  la 
main  de  Dieu.  Maintenant  hous  voyons  corn 
me  il  nous  faut  faire  noftre  profit  de  cefte 
dot^iine  :  c'eft  qu'en  prcmirr  lieu  nousco- 
pnoif  ions  que  la  foy  nous  eft  donnée  d'cn- 
haiir ,  d'autant  que  Dieu  nous  a  illumipcz  par 
f 'n  (.\'rli  Efprit,  que  nciii  auoiîs  rcceu  l'E- 
uâçile,  &  non  pas  de  noi.rcindi  ftrie&  vertu 

Ff.ui . 


4'4 


SERMON    Xri  IL 


propif .  Voila  powr  vn  item.  Or  quand  Dieu 
nous  fait  cefte  grâce,  d'autât  qu'il  nous  auoit 
choiiis  pour  fes  enfans  ,  qu''il  nous  auoit  ado- 
ptez deuant  la  création  du  monde,  &  qu'il  n'a 
point  fait  cela  à  tous,  voila  vn  priuilcge  fin- 
gulier&  inellimable  qu'il  nousfait.Car  ileft 
en  fa  liberté  de  choifir  ceux  que  bon  luy  fcm 
ble  ,  &  voila  comme  il  a  voulu  nous  tenir  des 
■fiens.Ainfi  doc  cognoiflons  que  nous  fommes 
tant  plus  obligez  à  luy,  puis  qu'il  nous  a  reti- 
rez de  la  perdition  générale  du  gère  humain. 
Et  ayâs  cognu  cefte  eleftiô  gratuite  de  Dieu, 
laquelle  cft  pour  difcerner  entre  les  enfans  de 
Dieu  &  les  reprouuez  ,  cognoiflons  que  cela 
nous  eft  bien  vtile.  £t  po«rquoy?  Car  toutes 
fois  &  quantes  que  nous  voyons  des  fcandales 
&  des  troubles  en  l'Eglife  ,  que  nous  voyons 
que  ceux  qui  auoyent  biencômencé  ne  pour- 
fuiuent  pas, mais  que  pluftoft  ils  tournent  bri 
de, il  nous  faut  reuenir  là.  Et  bien,  il  eft  vray 
que  les  hommes  font  fragiles  ,  mais  fi  eft-ce 
que  nous  trouuerons  aflcz  de  fermeté  en  no- 
ihe  Dieu  ,  puis  qu'il  luy  plaift  nous  faire  ce- 
fte grâce  de  nous  adopter  pour  fîens ,  il  nous 
gardera:  &:  fur  tout,  puis  qu'il  a  commis  àle- 
fus  Chrift  ceft  office  de  nous  maintenir,  fça- 
chons  qu'il  s'y  employera  fidèlement ,  com- 
me il  l'a  promis.  Reuenons  donc  à  cefte  ele- 
ôion  de  Dieu, toutes  fois  &  quantes  que  nous 
pourrions  eftre  eftonnez  de  quelque  cheute 
d'vn  homme  que  itous  aurions  eftimé  aupara- 
uant.Et  puis  s'il  nous  femble  que  toute  l'Egli 
fe  s'en  aille  en  perdition:non,  Dieu  a  fon  fon 
demét.c'eft  à  dire,  l'Eglife  n'eft  point  fondée 
fur  la  volonté  de»  hommes:  car  comme  ils  ne 
fe  font  point  créez,  aufsi  ne  fe  font-ils  point 
reformez,  cela  procède  de  la  pure  bonté  & 
mifericorde  de  Dieu. Et  combien  que  l'édifi- 
ce pardefTus  foit  comme  rafé  ,  que  tout  foit 
(ce  fcmble)fans  piliers ,  qu'il  n'y  ait  plus  de 
forme  ne  de  figure, fi  eft-ce  que  Dieo  encores 
gardera  fon  fondement  lequel  ne  s'esbranle 
iamais.  Or  delà  on  voit  fi  la  doctrine  que  no' 
publions  de  l'cleftion  de  Dieu,  eft  fuperflue. 
il  eft  vray  que  nous  ne  pre fumons  pasd'en- 
irer  au  confcil  eftroit  de  Dieu, pour  cognoi- 
llre  iufques  au  bout  fes  fecrets  admirables: 
■lais  fi  cela  nous  eft  caché ,  de  fçauoir  que 
Dieu  nous  a  eleus  deuant  la  création  du  mon 
de,n'eft-ce  pas  nous  priuer  d'vne  confolation 
OUI  nous  eft  non  feulement  vtile  ,  mais  plus 
<)ue  neceflairt?  Le  diable  ne  pourroit  mieux 
machiner  de  ruiner  noftre  foy  ,  que  de  nous 
cacher  ceft  article.  Et  pourqu  jy?  Car  où  en 
feiions-nous ,  ie  vous  prie?Et  fur  tout  auioiir 
d'huy  qu'il  y  en  a  tant  de  rebelles,  qu'il  y  en 
a.  tant  d'hypocrites  ,  voire  Se  d'fqiicls  on  a- 
woii  atltcndu  nieiueilks  ,  ne  pcn ferions-nous 
pas  qu'autant  noxis  en  poinroit-il.iduenir?Et 
là  delTus  comment  ferions-nous  conftansde 
ncvus  repofer  en  Dieu  ,&  de  nous  remettre  à 
luy  d'vn  couiage  rafis.ne  doutas  point  qu'il 
.  aura  le  foin  de  uoui  iufqucs  àla  fiu,coaunsAC 


pourrions-nous  faire  cela  fînon  en  nous  re« 
mettant  à  cefte  elertion  comme  h  noftre  re- 
fuge vnique?  Car  il  nous  femblera  que  Diea 
faulTe  fa  promeflè  qu'il  nous  donne  quant  à 
fon  Euangile  ,  8c  que  lefus  Chrift  doiue  eftre 
dechaflc  du  monde.  Voila  donques  la  caufe 
principale,  &  le  meilleur  moyen  que  Satan 
pourra  tronuer  pour  nous  defgoufter  de  la  do 
ftrinede  l'Euangile.Retenôs  donques  en  de- 
fpitde  Satan ,&  de  tous  fes  fuppofts.ces  armes 
defquelles  nous  deuons  eftre  munis:  ie  di  qne 
nous  foyons  conformez  tn  l'eleôioD  de  no- 
ftre Dieu,&  que  nous  la  fâcions  valoir,*:  que 
ceci  ne  nous  foit  point  ofté  ,  fi  nous  auons  le 
làlut  de  nos  âmes  cher  ^  précieux  :  mais  efti- 
tnôi  pour  nos  ennemis  mortels  tous  ceux  qui 
nous  voudront  cacher  vr>e  telle  doftrine,fça- 
chans  que  le  diable  les  fufcite  pour  nous  pri- 
uer d'vne  confolation  ,  fans  laquellc(comme 
i'ay  dit  )  nous  ne  pouuons  pas  nous  afleurcr 
de  noftre  falut:ce  que  toutesfois  nous  deuons 
dcfirer  pardefliis  tout.  Voila  comme  nous  a- 
uôs  à  piattiqucr  ce  partage  qu<  met  ici  fainâ 
Paul.  Or  cependant  il  nous  faut  aufsi  retenir 
cefte  exhortation  qu'il  adioufte  ,  Qut  ceux 
5«i  reclamtnt  le  nom  du  Segneur  lefus  ,fe  dot- 
u.ntfefav'r  de  toute  iwtjuité.  Car  toutainiî 
que  l'elcdion  de  Dieu  eft  pour  bous  ionner 
vne  confiance  ferme  ,  pour  nous  refiouiraa 
milieu  de  tous  les  troubles  qui  nous  poùrro- 
yent  aucunement  inquiéter,  aufsi  ne  faut-il 
pas  que  nous  cefsionsd'inuoquer  Dieu,de  re 
courir  à  luy  ,  &  de  cheminer  fongneufement 
en  la  vocation  en  laquelle  il  nous  appelle. 
Car  il  y  a  grande  diuerfité  entre  l'aflVurance 
qu'ont  les  fidèles  pour  eftre  bien  perfiiade* 
de  leur  falut  &:  eftre  tn  repos,  &  vne  noncha- 
lance qu'auront  ceux  qui  ne  regardent  à  rien, 
mais  ayans  ietté  la  plume  au  vent  (  comme 
on  dit  )  penfent  que  nul  mal  ne  leur  peut  ad- 
uenir:comme  les  homes  ne  font  que  par  trop 
nonchaIans:mais  ils  font  ftupides  cependant, 
qu'ils  ne  cognoiflent  point  les  dangers  def- 
quels  ils  font  enuirénez.pour  inuoquer  Dieu, 
&  pour  fe  retirer  fous  fes  ailes  comme  en  ca- 
chette:&:  puis  qu'il  ne  leur  chaut  de  toute  do- 
ôrine  quand  ils  auront  cftéenfeignez  pour  vn 
coup.Or  cependant  les  fidèles  pe  laiucnt  pas 
de  craindre  ,  combien  qu'ils  s'alTeurent  fur  la 
bonté  de  Dieu  ,  combien  qu'ils  i'oyent  refo- 
lus  que  quelque  tcpeftc  ou  tourbillon  qui  ad- 
uiene  ,  lamais  ne  pourront  eftre  tranfporteï, 
toutesfois  fine  laifTent-ils  pas  de  veiller  touf 
iours  fur  les  efforts  que  leur  fait  Sata.Etpuis 
d'autre  part  ils  cognoiflent  Icgr  fragilité  :  & 
cela  les  fjlicitede  recourir  à  Dieu  ,  &  de  le 
prier  qu'il  ne  les  laiffe  pas  au  bcfoin.mais  que 
-  il  ait  fa  main  citendue  pour  les  preferuer  :  ils 
regardent  à  quoy  ils  font  appelfz  ,  ils  fe  fo- 
Icitcnt  eux-mefmes  à  repentance  ,  ils  inuo- 
q\ient  Dieu  à  ce  qu'il  augmente  en  eux  les 
grâces  de  (in  fainft  Efpnt,  qu'il  le-  defpouil 
le  des  affections  de  leur  chair  .    Voila  don- 

(^ues 


SVR    LAÎI.     A    TIMOTH: 


^ueî  comme  les  fidèles  eftans  ifleurei  ne  kif- 
fenc  poiBC  de  craindre  :  comme  au  contraire 
les  incrédules  ne  craignent  point, n'eftans  pas 
toutestois  afleurez  .  Car  lî  vne  fueille  tombe, 
ou  s'ils  voyent  quelque  petite  ombre,  les  voi- 
la elperdus  .  Et  pourquoy  ?  Car  ils  ne  font 
poinifondez  en  Dieu  ,  ils  font  comme  endor- 
mis ainfi  que  les  yurongnes  :  c'eft  donc  bien 
raifonque  Dieu  le  mocque  d'vne  telle  ftupi- 
(dité.Mais  les  fidèles  craindront  touiiours.  Et 
voila  pourquoy  aufsi  fainâ  Paul  dit,  quand  il 
a  parlé  de  la  cheute  Se  ruine  des  luits ,  que 
ceux  qui  font  debout, doyucnt  bien  regarder 
àeuT  qu'ils  ne  tombent .  Non  pas  que  faindl 
t.Cor.IO  Paul  nous  vueille  mettre  en  doute  ouendifFe- 
ji.  rent ,  que  nous  l'oyons  là  en  fufpens ,  ne  fça- 

chans  que  nous  deuôs  deuenir,&fî  Dieu  nous 
Conduira  iufques  à  la  fin  :  car  il  faut  que  nous 
ayons  cela  tout  conclu, que  Dieu  n'a  pointcô 
mencé  qu'il  ne  vueille  parfaire  :  comme  il  en 
traitte  tant  au  premier  chapitre  des  Pliilip- 
piens, qu'en  d'autres  paflàges  aflez.Mais  cepc 
danc  fi  nous  faut-il  touiiours  foliciter  à  priè- 
res &  oraifons:&  puis  il  ne  nous  faut  point  a- 
bufer  de  la  grâce  de  Dieu  :  nuis  d'autant  que 
nous  foraraes  dédiez  à  luy, chemines  en  crain- 
te &  folicitude,&  adulions  den'eftre  point 
enueloppez  parmi  la  condamnation  des  mef- 
chans.Car  s'ils  font  poures  aueugles,il  ne  no* 
faut  point  esbahir  s'ils  s'efgarent:mais  puis  q 
Dieu  nous  efclaire,ne  faut-il  J>âs  q  nous  che- 
minions droit?Et  puis.d'autant  qu'il  nous  a  a- 
doptez  pour  Ces  enfans,ne  faut-il  pas  que  no' 
le  feruions  Se  honorions  comme  noftre  Pereî 
Voila  donques  de  quoy  nous  doit  fciuir  celle 
exhortation  que  famd  PaulaJioiifte.quandil 
à^UtQHJ conque  in»oque,ourecUme  le  nàm  de  le- 
fi*s  Clnifi^cpt'ilfe  départe  de  faute  iniquité.CîT 
inuoquer  le  nom  de  Chnft,  c'eft  le  reclamei- 
éltre  des  ûens .  Il  eft  vray  que  quelque  fois 
quand  nous  parlons  d'inuoquer  Dieu  ,  c'eft:  à 
dire  de  le  prier,  &  de  recourir  à  luy  :  mais  ce' 
mot  eft  plus  gênerai  en  TEfcriture  par  fois. 
Nous  inuoquons  donques  le  nom  de  Dieu, 
quand  nous  faifons  profeAiond'eftrede  fon 
peuple,  &  de  fon  Eglife.  Celuy  qui  le  nomme 
Chreftien,  il  reclame  lefus  Chrift.  Comme  fi 
quelqu'vn  difoit,  Vn  tel  eft  monmaiftre,  il  fe 
renomme  deluy.Nous  ne  pouuons  donc  nous 
reclamer  du  nom  de  Chreftien,  nous  ne  pou- 
uons faire  proteftation  que  nous  foyons  de  la 
compagnie  du  Fils  de  Dieu, que  nous  ("ommes 
de  fon  Eglife  &  de  fa  maifon  :  nous  ne  pouuôs 
(brief)eftremeflez  parmi  Icfus  Chiift.finous 
ne  fômes  deliurez  de  toutes  nos  ordures .  Car 
autremét  ne  luy  failbns-nous  point  vn  deshô 
neur  infupportablerSi  quelqu'vn  fe  vante  d'e- 
ftre  à  vn  prince, &  qu'il  foit  vn  brigand,  il  fera 
puni  au  double,  d'autant  ou'il  a  abufé  du  nom 
qui  ne  luy  appartenoit  point .  Voici  le  Fils  de 
Dieu  qui  eft  la  fontaine  de  toute  faindeté  & 
iuihce ,  Se  nous  viendrons  nous  cacher  de  fon 
.ombre^  &  nous  couuiiions  fous  iccluy  coûtes 


4'y 

nosordures, quelques  puaates  qu'elles  foyent. 
Ne  voila  point  vn  facrilege  qui  mente  vne  hor 
rible  punition  ?  Nous  voyons  donques  à  quoy 
tend  ce  que  dit  ici  fainft  Paul.  Il  eft  Ti.iy  que 
quelque  peine  que  nous  mettions  de  feruir  pu 
rement  à  Dieu,  nous  ne  laiflons  pas  d'eftre  pa 
ures  pecheurs,d'eftre  fouillez  de  beaucoup  de 
macules,  d'auoir  beaucoup  d'imperfeftions  vi 
cieufes  en  nous:mais  quand  nous  tendons  à  ce 
but, de  defirer  de  bien  faire,  &  que  nous  hayf- 
fons  le  mal ,  combien  que  nous  allions  en  cla- 
chant,toutesfois  puis  que  nous  auons  vr.e  bon 
ne  fin,  &  que  nous-nous  efforçons  de  nousad- 
uâcer  en  la  crainte  de  Dieu  &  en  (on  obeiflaa 
ce,voila  vneafFeâion  droite  ,  &  lefus  Chrift 
nous  accepte  comme  fi  nous  eftions  iuftes  ,  & 
nous  abfout  de  toutes  nos  fautes, d'autant  que 
elles  ne  nous  font  point  imputées .  Ainfi  donc 
les  fidelesjcombien  qu'ils  «e  Ibyent  point  par 
faits  du  tout.mais  qu'ils  ayent  beaucoup  de  vi 
ces, qu'il  y  ait  àredireeneux,ne  lailTenc  point 
d'eftre  acceptez  poar  enfans  de  Dieu,&  lefus 
Chrift  ne  prend  point  i  deshonneur  qu'ils  fe 
reclament  de  luy  :  car  il  fait  par  lit  giace  que 
ce  qui  eft  de  bien  en  eux  ,  eft  agréable  à  Dieu. 
Mais  fi  nous  abufons  fauflement  du  nom  de 
lefus  Chrift,&  que  nous  en  vueillions  faire  r- 
ne  couuerture  de  nos  iniquitez.cela  ne  mérite 
il  point(comme  l'ay  défia  dit)que  lefusChrift 
fe  leue  comme  noftre  partie  ïduerfe,  d'autant 
que  nous  aiirons  violé  fa  maiefté.d'autantque 
nous  aurons  falfifié  fon  nom  &  ;  fes  armes» 
Ainfi  donc  notons  bien  qu'emporte  ce  mot  de 
Chreftienté  ,  c'eft  que  nous  foyons  membres 
du  Fils  de  Dien:puis  qu'il  luy  a  pieu  nous  acce 
pter  poureftre  de  fon  corps,  il  faut  que  nous 
adhérions  à  loy  en  toute  luftice, comme  il  a  re 
ceu  toute  plénitude  de  grâce,  afin  de  nous  ea 
communiquer  .  Il  eft  vray  que  ce  n'eft  que  par 
niefure  &  portion, voire  bien  petiteimais  tant 
y  a  qu'il  faut  que  l'Efprit  de  Dieu  règne  en 
nous ,  fi  nous  voulons  eftre  tenus  pour  fes  en-  " 
fans,  &  pour  membres  de  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift.  Et  pourtant  nous  voyons  que  tous 
ceux  qui  s'adonnent  à  mal.  Se  qui  ne  s'eftudiét 
point  de  fe  ranger  à  la  volonté  de  ,Dieu  pour 
mortifier  leurs  mefchantes  cupiditez.que  tous 
ceux-là  font  fauflàires ,  quand  ils  prétendent 
auiourd'huy  lenomde  Ohreftiens .  Voila  en 
fommece  que  nous  auôsànoter  dece  pallàge 
pour  en  faire  noftre  profit.  Qrand  nous  voy- 
ons que  beaucoup  de  gens  le  fcparentdel'E- 
glife  de  Dieu,  que  ceux  qui  auoyent  bien  com 
mencé  ne  continuent  pas,cognoiirons  que  s'il 
y  a  de  l'infirmité  aux  hommes,  Dieu  ne  laif- 
fe  pas  d'auoir  fon  fondement  ferme.  Et  com- 
mentîCar  Dieu  fçait  ceux  qu'il  a  choilîs  pour 
fiens,&  il  les  maintiendra. Et  là  dclTus  ne  dou- 
tons point  que  nous  ne  foyons  du  nombre: 
puis  que  noliie  Seigneur  no'  a  appelez  à  loy, 
voila  vn  tefmoignage  qu'il  nous  auoit  mar- 
quez deuant  que  nous  fuliifs  naisrcontemons 
nous  de  fa  fain£te  vocation. Et  cependant  que 

Ff.iiii. 


4"^ 


SERMON    xriri. 


nous  efperions  que  quand  nous  ferons  ainiî 
preferuez  Tous  la  garde  dt  noltre  Dieu,  &que 
nous  aurons  quelque  £çlife,que  Dieu  ne  louf 
frira  point  que  :out  fou  peuple  periiFe,  enco- 
re? que  le  monde  tafchcde  le  diminuer  .  Ne 
foyons  donc  point  troublez  de  tous  les  fcanda 
les  qui  pourront  aduenir  .  Et  cependant  eftu- 
dions-nous  à  cheminer  en  ciainte  ,  n'abufans 
point  de  la  bonté  de  nofbie  Dieu, mais  cognoif 
fons  puis  qu'il  nous  a  fepareï  d'auec  la  refte 
du  monde,  qu'il  nous  faut  viure  comme  eftans 
en  fa  maifon  ,  8c  que  nous  foyons  liens  ,  tout 
ainlî  qu'il  nous  a  donné  la  marque  extérieure 
du  Baptefme.qu'aufsi  nous  ayons  la  fignature 
iphe.i,  <ic  foi  'âinft  lËfprit  :  carc'eft  l'arre  (  comme 
i^.  ,  fainft  Paul  l'appelle)  de  noftrecleôion.c'eft 
le  gage  que  nous  auons.que  nous  femmes  ap- 
pelez à  l'héritage  celefte.Priôsdonques  Dieu 
qu'il  ligne  &  qu'il  feelle  en  nos  cœurs  fon  ele- 
ûion  gratuite  par  fon  fainft  Efprit  :  8c  cepen- 
dant aafsi  qu'il  nous  tiene  comme  cachetez,& 
comme  ferrez  fous  l'ombre  de  fes  ailes:&  fi  les 
poures  rcprouuez  s'efgaient,  &  qu'ils  s'efua- 
nouiffent  ,&que  le  diable  les  tr3nfporte,& 
qu'ils  ne.foyét  point  redreffez  quand  ils  tom- 
bent,mais  qu'eux-mefmes  fe  precipitêt  en  rui 
ne,  pnons-lede  noftrecofté  qu'il  nous  tiene 
fous  fa  proteftion  ,  (j  nous  fjachions  que  c'efl 


deinous  ranger  à  fa  vol5té,&  que  nous  foyons 
maintenus  de  iuy:  encores  que  le  monde  i'ef- 
force  de  nous  esbranler,  que  nous  foyons  ap- 
puyez fur  cefondemtft,  iijue  Dieu  cognoiil  qui 
font  les  fienstS:  que  nous  ne  foyons  lamais  di 
uertis  de  cela  ,  mais  que  nous  y  perliftions  3c 
profitions  de  plus  en  plus,  iufques  i  ce  que 
Dieu  nous  retire  en  fop  Royaume  qui  n'eft 
point  fuiet  à  mutation. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noltre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes, le  prians  que  nous  les  fentions  tel- 
lement,que  de  plus  en  plus  nous  apprenions  à 
nous  ydefplaire  .  Et  que  cognoiflans  noûre 
fragilité,  &  que  nous  ferions  incontinent  ab'« 
ba:us,fi  nous  n'eltiôs  fouftenus  d'ailleurs,  que 
ce  bon  Dieu  nous  fortifie  en  telle  forte  que 
nous  foyons  conformez  de  iour  en  icur  pour 
fuyure  la  faiiifte  vocation  .  Et  puis  qu'il  nous  " 
a  conioints  à  fon  Fils  bien-aiiné  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift,&  que  nous  auons  de  quoy 
nous  contenter  eftans  alïeurez  de  noftre  falut 
qui  nous  a  efté  vne  fois  acquis  par  Iuy,  q  nous 
croifsions  de  plus  en  plus  en  vnc  telle  certita 
de,  comme  nous  y  fommes  lournelicment  con 
fermez  par  la  prédication  de  l'Euangile.Que 
non  feulement  il  nous  face  cefte  grâce ,  mzit 
9  cous  peuples  Se  nations  de  la  cerre,&c. 


HVITIEME     SERMON      SVR     LE 

SECOND      CHAPITRE. 

to  Or  en  ^ne  grande  maifonil  n'y  a  point  feulement  des  Wif- 
jèattx  d'or  CT*  d' argent^mais  aujli  de  hais  çy  de  terre. 

^l  Si  aucun  donquesfe  nettoyé Joy-  mefme  de  ceîle  efpece,  iîfera 
\aiffeaufanBifié à  honneur,  duifant auSeigneur,  (^  appareillé  à  toute 
honneœuure. 

I  nous  voyons  des  contem-  par  vne  fimilitude  bien  conuenable.Et  en  pre 

pteurs  de  Dieu, des  gens  per  mier  lieu,  afin  que  nous  ne  péfions  point  eftre 

uers  qui  nous  donnent  mau-  excufez  de  mal-faire,  fi  nous  enfuyuons  ceux 

uais  exemple,  nous  prenons  qui  mciprifent  Dieu,&  le  deftourncntde  Iuy, 

occalîon  de  nous  deftourner  fainft  Paul  dit  qu'en  vne  grade  raaifon  il  y  au- 

du  bon  chemin,  &  nous  fem-  ra  des  vaiilcauz  diuersrque  fi  vn  buffet, ou  vne 

bleu  nous  auons  vne  excufe  table  font  parez  de  vaiflelle  d'or  ou  d'argent, 

toutepropre,  voire'pour  eftre  abfous  deuant  en  la  cuifine  il  y  aura  aufsi  des  vaifièaux  de 

Dieu:  &  ne  péfons  point  que  ce  nous  font  au-  bois  pour  ietter  les  trippaillcs,&  les  ordures. 


tant  de  moyens  pour  nous  exercer,afin  que  no 
ftrc  foy  foit  mieux  efprouuce,&  qu'alors  Dieu 
veut  que  nous  entrioss  en  combat .  Et  voila 
pourquoy  fainft  Paul  ici  non  feulement  nous 
exhorte  à  nous  feparer  de  toute  iniquité, afin 
que  nous  ne  rclfemblions  pas  aux  contem- 
pteurs de  Dieu, mais  il  adioufte  aufsi  bien  que 


pour  ietter  ce  qui  fera  baillé  de  la  maifon  m1  y 
aura  aufsi  des  vaifleaux  de  terre  .  Et  quand  on 
voit  vne  telle  diuerfité,  cela  ne  fe  trouue  poïc 
eftrangc.Car  fi  vn  homme  alloit  ietter  fon  or 
&  fon  argent  parmi  les  raclures  de  fa  maifon, 
que  feroit-ceJNe  diroit-on  pas  qu'il  feioit  in 
fenfé?  Si  dôc  on  ne  dit  point  qu'il  y  ait  difcor 


il  ne  nous  faut  pas  eftre  fcandalizez  ,  quand  de  en  vne  grande  maifon, s'il  y  a  des  vaifleaux 
nous  verrons  des  gens  ainfîde  mauuaifecon-  deftintzà  vfjgc  qui  n'eft  pas  fort  honnefteoi 
dition,  il  ne  faut  point  que  cela  nous  trouble  honorable  ,  pourqnoy  en  la  maifon  de  Dieu 
ou  nous  defwoye.  Vrayeftq  défia  il  aiioit  tou  cela  ne  fcra-il  aufsi  bien  enduré  ?  Permettra 
ché  cepropes,mai$mainumancille  coufcrme    on  plus  depriuilege  aux  hommes  mortels ,  & 

aux 


SVR    LA    II.    A    TIMOTH. 


4'7 


•iiif  créatures,  qu^on  ne  fera  au  Dieu  viuant? 
Or  cependant  lainft  Paul  exhorte  tou';  en  fans 
de  Dieu,c6bien  quMs  foyent  aiiifî  méfiez  par- 
mi les  mefcliansqu'il  ne  faut  pas  qu'ils  fc  don 
nent  congé  de  fe  corrompre  parmi  euv,  ne  de 
s'infefter  de  leurs  ordures  :  mais  pluftoft  que 
cela  les  doit  inciter  à  folicitude,  afin  quMseui 
tent  leurs'mâLiuais  exemples, qu'ils  fe  feparent 
deleurcompagnie:brief,qu'ils  fe  dédient  tant 
plus  fongneuferaent  à  Dieu.  Voila  en  fomme 
ce  qui  eft  contenu  en  ce  paflàge  .  Or  quant  au 
premier.nous  auons  défia  monilré  que  c'eft  v- 
jie  admonition  bien  vtile  que  celle  que  nous 
fait  ici  faind  Paul  :  c'efl  afçauoir,  s'il  y  a  des 
mefchâs&  des  hypocrites  enTEglifede  Dieu, 
qui  pour  vn  temps  foyent  là,  voire  &  fe  vueil- 
lent  plus  elUmer  que  les  autres  ,  que  cela  ne 
no' doit  point  troubler.Et  pourquoy?  La  mai 
fon  deDieu  eft  grande. Vray  eft  qu'aucuns  en- 
tendentparce  mo  t,  tout  le  mode,  &  cela  pour 
roit  allez  conuenir,&  nous  en  traitterons  plus 
à  plein  tantoft:mais  il  nous  faut  ici  noter  l'ar- 
gument que  fainct  Paul  traitte. D'autant  qu'il 
auoit  fait  mention  CI  deflus  des  apoftats  qui 
feieuoltent.&apresauoir  quelque  temps  fait 
profefsion  de  l'Êuangile  s'aliènent, &  fe  ban- 
niflent:ce  propos  nous  amené  Vne  grande  con 
folation.  Car  c'eft  comn>e  s'il  difoit,  Puis  que 
l'Eglife  de  Dieu  eft  eftendue  par  tout  le  mon- 
de,&  qu'il  y  a  pluiieurs  gens  qui  font  appelez 
à  l'Euâgile,  prenons  le  cas  que  ce  foit  de  ceux 
qui  font  aiiifî  a(remblez,&  côme  fi  en  vne  mai 
fon  il  y  auoit  des  vaifTeaux  d'or  &  d'argent  qui 
fuflent  pour  parer  vn  bufFet  ou  vne  table  :  Se 
puis  qu'il  y  en  euft  des  autres  de  terre,  qu'il  y 
cuftaufîi  des  vaifleauïdebois  quineferoyent 
que  pour  traincr  parmi  la  maifon  ,  &  quand  ils 
ont  ferui  quelque  temps,  qu'on  les  brufle,  on 
les  lette  là, on  n'en  fait  pas  grand  conte.  Ainfî 
donques, combien  qif'il  feroit  àfouhaiter  que 
tout  fuft  pur  en  l'Eglife  de  Dieu  ,  &  qu'il  n'y 
euft  que  redire, fi  faut-il  neantmoins  reuenir  à 
cela.que  nous  verrons  des  fcandales,qu'il  fem 
blera  q  tout  foit  confus. Pourquoy?  Car  Dieu 
aflemble  pluficurs  vaifleaux,  &  de  diuerfes  for 
yiat.i^.    tf'-  Comme  en  d'autres  partages  il  eft  dit  que 
^7.  l'Eglife  de  Dieu  eft  femblable  à  des  retz  qui 

font  lettees  en  l'eau  ,  où  toutes  fortes  cSi  efpe- 
ces  de  poiflons  s'aflemblent:  il  y  en  a  &  des 
bons,&  des  mauuais:aufsi  il  eii  impofsible  que 
l'Euangile  feprefche,  queplufieurs  ne  s'yac- 
cordent:voire,&que  pour  vn  temps  ils  ne  fa- 
eent  femblant  d'cftre  du  rang  des  fidelestmais 
Mat.i  II  P"'^  apres,les  poiflons  font  feparez.  L'Eglife 
j^j  1  '  de  Dieu  eft  auAi  bien  accôparee  à  vne  aire, où 
'  '  le  blé  eftant  batu  fe  méfie  parmi  la  paille  ,  & 
mefme  il  eft  là  caché,  qu'on  ne  pourra  pas  di- 
fcerner  le  bon  grain  d'auec  la  paille,  qui  doit 
cftre  après  iettee  fur  le  fumier. En  fomme  tout 
cela  eft  pour  nous  monftrer  que  durant  cefte 
vie  prefente  l'Eglife  de  Dieu  ne  fera  point 
fans  meflinge, qu'il  y  aura  toulîours  des  hypo 
«rites  «jui  s'accorderôt  à  la  doftrine  de  la  foy, 


ou  pour  le  moins'voudrontauoir  lieii&  répu- 
tation de  Çhreftiens:mais  tant  y  a  qu'en  la  fin 
ils  fe  troiiueront  eftre  comme  enfans  baftars, 
&•  feront  déshéritez:  ainfî  que  nous  en  auos  la 
figure  en  Ifmael.  Car  celuv-ia  pour  vn  temps  ^,_  . . 
a  bien  efté  par  dellus  Ifaac  comme  premier- 
nay  de  la  maifon:  mais  il  eftdechafle  ,  &  faut 
qu'Abraham  le  retr.iche.  Ainfi  donques  en  eft 
il.  Voila  en  fomme  l'intention  de  fainft  Paul. 
Mais  deuant  que  pafler  outre,  il  nous  faut  fou 
dre  vne  difficulté  qu'on  pourroit  ici  faire  .  Il 
eft  dit  au  Pfeaume  quinzième,  &au  vingtqua- 
triemc,  que  ceux  qui  doyuent  venir  en  la  mon 
tagne  de  Dieu,&  auoir  lieu  en  fon  téple,  pour 
y  habiter, doyuent  eftre  impollus,  qu'ils  doy- 
uent cheminer  en  toute  intégrité.  Or  puis  que 
ainfi  eft,il  femble  que  ceci  foit  contraire,  qu'il 
y  ait  des  vaifleaux  en  opprobreicar  tous  doy- 
uent eftre  choifis  pour  feruir  à  Dieu  ,  &  touj 
aufsi  fe  doyuent  fanâifieren  fon  obeillànce. 
A  quel  propos  Dieu  nous  appclle-il ,  finon  J 
toute  fainfteté?  (comme  l'Efcriture  le  porte)  , 
Ne  fommes-nous  pas  vaifleaux  de  fon  téple?  t"^'^-^ 
Ne  fommes-nous  pas  mefmes  chacun  de  nous 
partie  de  fon  fanftuaire  ?  Puis  qu'ainfi  eft,  ne 
deuons-nous  pas  eftre  confacrez  à  luy  ,&  ne  de 
uons-nous  pas  eftre  purifiez  de  toutes  macu- 
les &  pollutiôs?Mais  en  ces  partages  que  nous 
venons  d'al]eguer,iJ  eft  monftré  quels  doyuét 
eftre  ceux  que  Dieu  appelle  à  foy  :  cependarrt 
il  n'crt  pas  dit  que  tous  foyent  tels  de  faid. 
Car  il  y  en  a  beaucoup  qui  ne  refpordent  pas 
à  la  volonté  de  Dieu  ,  combien  qu'il  leur  foit 
commandé  de  fe  dédier  à  toute  pureté  ,  qu'ils 
ne  laiflent  pas  d'eftre  poilus.  Et  mefmes  quad  P/f  .14.4 
il  eft  dit  que  ceuT  qui  font  nets  &  purs  de 
cœur,  &  qui  auoy  ent  laué  leurs  mains  de  tou- 
tes feuillures  ,que  ccnx-la  habiteront  en  la 
fainftemontagnedeDieu  ,  il  eft  déclaré  que 
combien  que  pluCenrs  fe  vantent  d'cftre  en- 
fans  de  Dieu,  &:  qu'ils  fe  glorifient  du  nom  de 
fidèles, toutesfois  qu'à  la  vérité  ils  ce  font  pas 
dignes  que  Dieu  les  aduoue  de  fa  maifon  ,  Se 
qu'en  la  fin  ils  feront  reiettez  quand  ils  aurôt 
occupé  place  fous  ce  faux  titre  ,  &  qu'ils  au- 
ront abufé  ainfi  mefchament  du  nom  deDieo, 
qu'il  faudra  qu'il  les  bannifle,  comme  nous  a- 
uons  défia  parlé  d'Ifinael .  Voila  donques  ce 
qui  eft  entendu  en  ce^  deux  Pfcaumes  que  no' 
auous  alléguez  :  c'eft  afçauoir  que  pour  Tn 
temps  il  fe  pourra  faire(c5me  nous  le  voyons 
tous  les  iours)  que  ceux  qui  habiter  au  temple 
de  Dieu,&  qui  font  des  domeftiquesdc  la  foy, 
feront  malins  &  peruers,  que  quant  à  Dieu  on 
verra  qu'ils  le  mefprifent,  &■  quant  à  leurs  pro 
chains,il  n'y  aura  que  fraude  &  malice,  ou  vio 
lenccs,rapines,&  cruautcz:on  verra  cela.  Ce- 
pendant ils  ne  laiflent  pas  de  s'auancer  comc 
ceux  qui  feroyent  les  plus  prochains  de  Dieu: 
mais  cela  ne  peut  durer  toufinurs,  qu'en  La  fin 
il  faudra  que  Dieu  fepare  les  boucs  d'auec  les 
agneaux,  &  qu'il  monftre  ceux  qui  font  fiens  À 
Ja  vérité. Et  ccfte  doûrinc  s'accorde  aflez  à  ce 

Gg.i. 


4iS 


SERMON    XV. 


queditici  Tainâ:  Paul.  Oren'fecondlieunons 
▼  oyoni  qu'il  nous  exlionc  de  nons  purger  de 
toiues  ordures  des  malinsafin  que  no'  nek-or 
refleniblini'".  pomt.E:  pourquoy  ?  Car  fi  nous 
fomme^  uiefle?.  en  leurs  pollntions,Dieu  nous 
Jettera  en  oppr  :;bre  .  Si  nous  voulons  donc  e- 
ftrc  honorible.v  en  Con  Eglil'e,  il  faut  que  no' 
«'ayons  point  feulement  le  titre  exterieurde- 
lunt  les  homme!-, mais  il  faut  que  nous  rcfpon 
dions  en  cffett  à  noftre  vocation, que  nous  mô 
ftrions  que  ce  n'eft  pav  en  vain  que  Dieu  nous 
a'choilis  à  l'oy.  Oi"  cependant  retenons  ce  qui 
eil  icidit.Q^  s'il  y  a  des  melcha>  méfiez  par 
ini  les  bons,  qu'il  ne  faut  point  que  cela  nous 
trouble  outre  melureicorame  nous  en  voyons 
qui  font  tant  délicats,  que  s'ils  peuuent  noter 
qu'il  y  ait  des  vices  en  l'Eghfe.&r  que  la  refor 
nation  ne  foxt  pas  telle,  ne  iî  parfaite  comme 
il  feioit  à  l'ouhaiter.Et  c5ment?Eft-ce  ci  l'E- 
glikde  Dieu  ?  Et  s'en  veulent  fcparer, &  leur 
fenible  qu'ils  fe  poUueroyent  s'ils  fe  tenoyét 
en  la  compagnie  de  ceux  qui  ne  peuuent  du 
tout  corriger  les  vices  qui  font  entr'eux.  Or 
ii  eft  vray  que  nous  deuons  auoir  vn  zcle  ar- 
dent à  dechafler  les  fcandales  du  milieu  de 
nous  tant  qu'il  eftp ofsible.chacun  fedoit  ef- 
-  forcer  à  cela:que  fi  nous  voyons  quelque  mal, 
qu'il foit  purgé  ,  qu'on  le  retranche,  &  qu'on 
aille  au  deuant  bien  vide  ,  &  qu'on  ne  fouffre 
point  qu'il  croiffe  par  trop.  Nous  deuons  dôc 
cftre  tous  zélateurs  à  ce  que  le  temple  deDieu 
demeure  en  fa  pureté  ;  mais  cependant  il  nous 
faut  foufFrir  beaucoup  de  chofes  q«c  nous  ne 
pouuons  oftei:&  quand  nous  n'y  pourrons  do 
ner  remède  ,  gemiflons .  Qupy  qu'il  en  foit, 
nous  n'auons  point  occalîon  de  nous  aliéner 
de  l'Eglifede  Dieu  ,  fous  ombre  que  tous  ne 
cheminent  pas  comme  ils-  doyuent .  Et  pour- 
quoy? En  vue  grande  inaifon,  fi  on  entre  ei> la 
cuiùne  ,  on  ne  fe  fafchera  point  iîon  voit  là 
des  vaiffeaux  à  l'abandon  qui  ne  foyét  gueres 
honneftes?Et  pourquoy'Car  cen'efl  pas  corn 
me  fi  on  les  vouloit  mettre  l"ur  vn  buffet ,  ou 
furvne  table  pour  parement:  ils  ibnt  làdefti- 
nez  feulement  pour  y  ietter  les  ordures  &leî 
puantifes,  cela  fert  mefmes  à  l'hônefteté  de  la 
maifon  .  Et  fi  vn  homme  eftoit  R  chagrin,  que 
pour  cela  il  vouluft  tout  quitter,  pour  dire,  le 
n'entreray  iamais  en  celle  maifon-la.d'autant 
que  l'y  voy  là  des  vailleaux  qui  ne  lèruét  qu'à 
recueillir  les  ordures:vn  homme  (di-ie)fera- 
il  lî  infcnfc  de  fe  defpiter  pour  cela  ?  Mais  au 
contraire,  il  verra  qu'on  prend  peine  à  ce  que 
il  foit  mieux  traitté.Q^nd  donques  nous  ver 
rons  qu'en  l'Eglige  de  Uieu  il  y  a  de  tels  vaif 
féaux, que  nous  ne  foyons  point  fafchez  pour 
nous  en  eflongner,  mais  continuons  noftre 
train.  Or  cependant  faincl  Paul  notamment  a 
ici  voulu  exprimer  que  les  mtfchans, combien 
qu'ils  tafchcnt  à  faire  que  le  nom  de  Dieu  foit 
en  opprobre  &  deshonneur  ,  ne  laiircnt  point 
de  feruir  à  fa  gloire  en  dcl'pit  qu'ils  en  ayent. 
Et  pourquoy?Dieucôaertitleurraal  en  bien. 


Voila  donc  des  mefcliâns.G  on  les  regarde.on 
dira  de  prime  face  qu'ils  font  faits  pourdef- 
honorer  Dieu,  pour  anéantir  fa  maiefté,  poar 
abolir  fa  iufiicc,  pour  renuerfcr  tout  ordre,  à 
ce  qu'il  ne  foit  plus  cognu  au  inonde  ,  il  elt 
vray  qu'Us  tendent  à  cclic  fin-la  ,  &  le  diable 
les  y  pouflermais.cependant  ils  ne  laiffent  pas 
d'eftte  vaiflcaux:c'eit  à  dire, Dieu  trouuera  le 
moyen  de  s'en  feruir,  en  forte  qu'il  en  fera 
glorifié. Non  pas  que  cela  les  excufe,  ne  qu'ils 
le  puilTcnt  aufsicouurir  d'vn  tel  fubterfuge, 
&  ils  ne  l'ont  point  fcrui  :  car  leur  intentioa 
n'cltoit  pas  telle:mais  quoy  qu'il  en  foit, fi  eft 
ce  que  Dieu  s'en  feruira.  Etde  noftre  codé, (î 
nou>  ne  pouuons  nous  conformer  à  la  proui- 
dence  de  Dieu  ,  ne  penfons  point  eftre  excu- 
fcz  en  nos  chagrins.fi  nous  alléguons, Et  voi- 
re,le  voy  ici  tout  cftre  confus.  Attendons  que 
noftre  Seigneur  reforme  ce  qui  eft  mainte- 
nant desbauché  .  Mais  quoy  qu'il  en  foit,  que 
nous  foyons  refolus  qu'en  dcfpit  de  Satan, 
Dieu  ne  laiflera  pa,  d'eftre  glorifié  .  Au  refte, 
apprenons  de  prattiquer  celte  dotlrine  ,  c'tii 
quand  noHs  voyons  qu'au  milieu  de  nous  il  y  a 
beaucoup  de  pouretez  ,  &  que  les  fcandales  ne 
font  pas  réprimez  comme  ils  deuroycnt,"qu'iI 
n'y  ait  pas  vne  telle  honnefteté  qu'il  feroit 
requis,  mais  qu"  les  diflolutions  foyent  per- 
niiies ,  qu'on  ferme  les  yeux  pour  ne  veoir 
goutte  ,  ou  bien  qu'on  difimule  beaucoup  de 
choies,qu'il  n'y  aitpas  telle  rigueur  &feueri- 
té  pour  tenirles  gens  en  bride  comme  il  fe- 
roit à  ibiih.i  ter  :  quand  ("di-ie  )  nous  voyons 
cela, il  nousfiut  gémir, &  s'il  eiloit  en  nous, il 
f.uit  mettre  peine  d'y  remédier.  Mais  cepen- 
dant fi  ne  faut-il  pas  que  nous  cuidions  que  le 
règne  de  Dieu  pourtant  foit  ruiné, que  noftre 
Seigneur  lefu'.  Chrilt  n'ait  plusde  vertu,  que 
fou  Eglife  perifle,  &  qu'elle  s'en  aille  du  tout 
dil'sipee  :  il  ne  faut  pas  que  nous  tombions  en 
telles  fantafies,  mais  pluitoft  fçachons ,  com- 
bien que  les  mefchans  desfigurent  Ja  beauté 
de  l'Eglife  de  Dieu,&  qu'ils  la  ibuillent  &'pol 
luent  entant  qu'en  eux  eft,  fi  eft-ce  toutesfois 
qu'en  la  fin  Dieu  ne  lailîcra  pas  d'eftre  glori- 
fié,qu'il  faudra  qu'il  les  amené  à  leur  fin,  quad 
ils  auront  eu  la  vogue  ,  qu'ils  auront  fait  de 
grans  troubles.  Dieu  (e  mouftrera  leur  iuge, 
&  nous  ferons  confcrmez  d'autant  plus .  Mais 
cependant  ayons  patience, &:  cognoiflbns  que 
Dieu  eft  vn  ouuricr  admirable  ,  &  qui  a  des 
moyens  exquis  par  lefqucis  il  fçait  bien  eftre 
glorifié, tant  par  le  diable  que  par  les  mefch  ïs. 
Il  eft  vray  que  le  diable  ent.ît  qu'en  luy  eft  l'a 
monftrera  toufiours  ennemi  mortel  de  la  gloi 
rede  Dieu.&tafcheradela  mettre  f  l'Ie  pied. 
Mais  a-il  tout  fait  ?  Dieu  conuertit  le  mal  en 
bien  .  Ainfi  en  eft-il  de  tous  les  mefchans  qui 
machinent  &prattiquent  pour  mettre  tout  en 
confufion  ,  pour  faire  qu'il  n'y  ait  plus  de 
Dieu  qui  règne  fur  nous ,  que  la  mémoire  de 
fin  Nom  mcfines  foit  comme  raclée  :  rtiais 
quand  ils  ont  fait  du  pis  qu'ils  ont  peu,  fiefl^ 

c  e 


SVR   LA     II.    A    TIMOTH. 


4'9 


*e  qu'ih  ne  la'ffcnt  point  d'cftre  vaifleauv.  Ec 
de  ùid.laiiid  Paul  au  ncufienie  des  Romains, 
combien  quM  Jeduile  vn  propos  plus  gênerai 
qu'il  ne  tait  ici  .monilrê  bien  que  les  reprou- 
«ez  ,  non  feulement  ceux  qui  Font  profefsion 
dVitre  Chreftiens,rBais  ceux  qui  ibnt  ennemis 
nianife/les  de  l'Euangile  ,  qu'encores  ceux-là 
font  vaiflcaiix  &inftrumensde  Dieu,aufquels 
il  fait  reluire  fa  gloire, combien  que  leur  inten 
«ion  ne  fort  pas  telle,  mais  qu'ils  tendent  tout 
«11  rebours, &  qu'ils  y  font  traînez. Sainét  Paul 
parle  là  en  commun  tant  de  ceux  qui  iamais 
n'ont  côttlTéde  Dieu,&  n'ont  point  l'ait  fcm- 
blant  d'cftre  de  fes  domeftiques ,  que  des  hy- 
pocrites qui  auoyent  quelque  apparence  de 
bien  pour  vn  temps, iulques  à  ce  que  Dieu  les 
defcouure  :  car  il  dit  que  tous  font  fes  inftrii- 
mens. Voila  vn  mefchant  qui  ne  demande  qu'à 
mefler  le  ciel  &  la  terre  :  touttsfois  il  eu  en  la 
mam  de  Dieu,  &  faudra  quand  Satan  l'aura 
tien  tracafle  de  cofté  &:  d'autre,  &  qu'il  aura 
femblé  qu'il  doyue  faire  mons  &  merueilles, 
que  Dieu  monftre  qu'il  l'a  tenu  en  bride  &  fu- 
iettion,  &  qu'il  luy  a  ferui  d'inltrument.  Il  eft 
vray  que  les  mefchans  ne  font  pas  conduits 
par  l'Èfprit  de  Dieu  à  mal-faire  ,  &  ce  feroit 
vn  blafpheme  de  parler  ainfi  :  car  l'Efprit  de 
Dieu  nous  côduira  à  toute  iuftice  &  droiture: 
mais  quoyquele  diable  pouffe  ainfi  les  mef- 
chans,toute^fois  Dieu  domine  par  delïïis,  voi 
red'vne  façon  qui  nous  eil  mcomprthenlible: 
mais  tant  y  a  qu'il  fçait  vfer  des  mefchans ,  & 
les  appliquer  à  fon  feriMce,  en  telle  forte  que 
fa  gloire  fe  monftre  aufsi  bien  en  ccft  endroit. 
Puis  qu'ainfi  eft  donques,  apprenons  quand  il 
y  aura  desfcandalescn  l'Egliied'eftrcpatiés, 
non  pas  pour  nourrir  le  mal:  car(comme  l'ay 
défia  déclaré)  il  faut  qu'vn  chacun  en  fon  en- 
droit.^ felonfacôdition  mette  peine  quel'E- 
glife  foit  purgée  de  toute  ordure.  hUw  quand 
il  n'eft  pas  en  nous  de  mieux  faire  ,  après  que 
nous  aurons  foufpiréS:  gémi, que  nous  atten- 
dions en  patience  que  Dieu  vfe  du  mal,&  qu'il 
le  tourne  à  bonne  fin.  Et  cependant  retenons 
ce  qui  en  eft  ici  prononcé,  c'eft  afçauoir  que 
les  mefchans  font  vaifleaux,  c'eft  à  dire,  qu'il 
fautqu'iK  foyent  contraints  deferuir  à  Dieu: 
il  n'y  a  nerfs  en  eux  qui  y  tendent ,  mais  Dieu 
les  fçait  bien  corne  tiainer  par  force,  &  en  dif 
pofe  par  fon  confeil  qui  furmonte  tous  nos 
iens  :  tant  y  a  qu'ils  valent  en  la  maifon ,  non 
point  à  hôneur,  mais  en  telle  forte, que  cepen 
dant  le  mairtre  demeure  toufiours  en  fon  en- 
tier, que  le  nom  de  Dieu  ne  laifle  pas  d'cftre 
toufiours  glorifie,  q  ce  n'cft  point  pour  amoin 
drir  fi  iufticc, fa  fageffe,  fa  vertu  &  bonté.  Voi 
la  donques  Dieu  qui  demeurera  toufiours  en 
fon  entier  ,  combien  que  les  mefchans  foyent 
méfiez  parmi  les  bons.  Voila  (di-ie  )  comme 
nous  auon^  à  piattiquer  cefte  doctrine. Or  ce- 
perdant  fainct  Paul  adioufte  ,  Que  f  cjuelqn'yH 
fe  nettoyé  de  telle  tfpece.  ejn'il  fer.t  t»  ra-'ffeau 
hoaorabk.V oiçi la  fecôde  parue i*  ce  que  nou» 


auons  touché .  Car  il  a  efté  dit  que  fainct  Paul 
en  piemier  lieu  veut  obuieraux  fcandales  qui 
nous  tempeftent  &  nous  tourmentent  beau- 
coup :  quand  nous  ne  voyons  pas  l'Eglifede 
Dieu  fi  bien  reformée  comme  nous  defire- 
rions ,  nous  eftmrons  tout  eftre  perdu  ,  &  que 
Dieu  ne  règne  plus  au  monde.  Non,  dit  famâ: 
Paul ,  il  ne  faut  pas  qu'on  fe  defconforte  par 
trop,  mais  qu'on  attende  en  patiéce  que  Dieu 
face  feru'.rà  fa  gloire  la  malice  des  hommes: 
car  l'ilTue  fera  toufiours  bonne  ,  moyennant 
que  nous  foyons  conftans  pour  n'eftre  point 
esbranlez  qu.H  tout  fera  confus  en  ce  monde. 
Or  cependant  fi  ne  faut-il  pas  que  conuerfans 
parmi  les  mefchans  nous  foyons  conformes* 
eux, que  nous  loyons  de  leur  ligue, mais  il  nous 
en  faut  cftre  leparez.  Et  notamment  il  eft  dit. 
Si qnehjii^yn  fi  nettoyé  de  cefte  efpece,  Sainft 
Paul  ne  dit  pas  iîmplemét.  Si  quelqu'vn  fe  pur 
ge, qu'il  fe  dédie  à  Dieu:  mais  il  dit  qu'il  nous 
faur  purger  de  ceux  defquels  il  a  fait  mention. 
Et  c'eft  vne  chofe  difficile  de  cheminer  par 
la  boue  &  par  la  fange  qu'on  ne  fe  crotte ,  & 
quand  on  ira  en  vn  lieu  inleft,  fi  on  n'en  tire 
nulle  tache  ,  ce  fera  beaucoup.  D'autant  plus 
donques  faut-il  iious  foliciter,  que  quâd  nous 
conuerferons  parmi  les  contéptcurs  de  Dieu, 
parmi  les  gens  dilTolus  &les  hypocrites,  qire 
nous  aduifions  d'eftrepurs  &nets:  car  il  n'eft 
rien  plus  aifé  que  de  nous  enuelopper  en  ces 
pollutions  cômunes,&  en  eftre  infeûcz.SoyoS 
donques  lur  nos  gardes, dit  faind  Paul. Or  ce- 
ci n'a  pa<  efté  pour  vn  temps,  il  nous  doit  fer- 
uir  iufques  en  la  fin  du  monde. Apprenons  don 
quts,  combien  qu'il  y  doyue  auoir  quelque  po 
lice  en  l'Eglifc-  pour  chaftier  les  fautes,  pour 
tenir  le  peuple  en  la  crainte  de  Dieu.cSf  en  vie 
honneile  :  toutesfois  que  nous  ne  lailTerons 
pas  de  vcoir  beaucoup  de  chofes  qui  nous  fe~ 
royentnuifiblcs  ,&•  qui  nous  pourroyent  de— 
ftourncr  du  bon  chemin  ,  fi  nous  n'eftions  vi- 
gilans  poumons  en  preferuer. Combien  don- 
ques qu'ilnous  faille  eftre conioints  autc  les 
mefchans  &' pcrucrs  qu:int  à  la  vie  prefente, 
iufques  à  ce  que  nous  foyons  fortis  du  mon- 
de, toutesfois  mettons  peine  à  nous  purger  de 
leurs  ordures  ;  &  combien  que  Satan  ne  de- 
mande lînon  à  mefler  tout,  que  de  nçftre  co- 
fté  nous  prions  Dieu  qu'ilnous  retire,  &  qu'il 
nous  garde  par  fon  fainft  Efprit  en  toute  pu- 
reté, à  ce  que  i"a  uiftice  reluife  S<  règne  touf- 
iours en  nous.  Voila  donques  ponrquoy  fatn<3: 
Paul  a  ici  exprimé  qu'il  nous  faut  nett^^yer 
de  ceux  defquels  il  a  efté  ràit  mention  :  com- 
me s'il  difoit, qu'il  n'y  aura  nulle  excufe,  coiQ 
bien  que  nous  ayons  àcôucrfcr  auec  eeux  qui 
nous  vondroyent  mener  en  leur  compagnie, 
que  nous  cuAions  vne  communauté  auec  eux 
quant  au  ir.al  :  toutesfois  fi  ne  faut-il  pas  que 
nolis  foyons  conformes  à  eux  :  car  Dieu  ne 
nous  a  point  farflifez  en  vain,  quand  il  luy  a 
pieu  nous  dioifir  à  foy.  Or  maintenant  f.iin£t 
Paul  dit  qu'il  nous  faut  nettoyé»  :  non  pas  qus 

Cg.ii. 


4£0 


SERMON    XV. 


Bxe.jg. 


cefte  vertu  foit  ei»  nouc,taais  d'autan:  q  Dieu 
veut  que  chacun  trauaille  pour  s'adéucr  à  l'on 
feruicc. Aucuns  fous  ombre  de  ce  mot, ont  vou 
lu  conclure  qu'il  eftoit  ea  nous  de  taire  que 
TOUS  foyôs  eleus  Se  predeftiiiez  de  Dieu:  mais 
c'eft  renuerfer  tous  les  fondemens  denoftre 
foy  :  &  celte  beftifc  eft  trop  lourde  ,  de  dire, 
Il  nous  faut  fcparer  d'auec  les  mefchans  ,  ff 
nous  voulons  que  Dieu  nous  elife  .  Car  c'eft 
autant  comme  qui  diroit  que  deuant  que  nous 
fiilsions  Hais.deuît  que  le  monde  ait  elle  créé, 
il  nous  a  talu  préparer  à  ce  q  nous  fufsiôs  di- 
gnes de  Padoptiô  de  Dieu.  Dieu  donques  qui 
nous  a  eleus  deuant  que  le  monde  fuft  tonde, 
n'a  pas  regardé  à  aucuns  mentes.  C'eft  don- 
ques vne  beftile  trop  fotte,&  qui  n'eft  pas  di- 
gne qu'on  en  parle  beaucoup. Les  autres  aufsi 
ont  voulu  eftablirlet  franc  arbitre.difans  que 
il  nous  eft  ici  commandé  de  nous  nettoyer;  il 
f*ut  dôquetque  cela  foit  en  noftre  induftrie. 
M«iis  telles  gens  monftrent  aflez  qu'ils  font 
par  trop  grofsiers  &  ignorans, qu'ils  font  par 
trop  mal  exercez  en  l'Efcriture  fainde.  Car 
uL'înd  Dieu  nous  monftre  quel  eft  nollre  offî 
ce  &  noftre  deaoïr  ,  il  ne  dit  point  que  cela 
foit  en  noftre  faculté, ne  que  nous  le  puifsiôs: 
mais  il  nous  exhorte  àfaire  ce  qui  eftbon.Or 
cependant  il  ne  laifle  pas  de  befongner  en 
nous, voire  d'autant  qu'il  voit  que  nous  defail 
ions,  Si  que  nous  n'auons  point  le  moyen  de 
nous  acquitter  enuers  luy.  Apprenons  don- 
ques en  ce  partage, qu'il  nous  taut  purger  afin 
que  nons  ne  foyons  femblablesaux  mcfchâs. 
Voire,  mais  Dieu  dit  par  Ezechiel    qu'il  en- 
uoyerades  eaux  nettes&  pures ,  &  que  nous 
en  ferons  lauez:  c'eft  à  dire  fon  fainâEfprit. 
Il  nous  eft  donques  commandé  de  noui  net- 
toyer.Mais  Dicumonftre  que  cela  eft  en  luy, 
&  qu'il  procède  de  la  pure  grâce  de  fonfaintl 
Efprit.Èt  pourquoy  donques  eft-ce  que  fain£t 
Pauls  vfédecelangageïCombien  quepoftre 
Seigneur  face  tout  le  bien  qui  eft  en  nous ,  ôc 
qu'il  n'y  ait  riendenoftremouuement  natu- 
rel,toutesfoisd'autat  qu'il  ne  befongnc  point 
comme  endcs  troncs  de  bois,  mais  qu'il  nous 
donne  la  volonté, qu'il  nous  donne  auf>i  l'af- 
feftion  &  la  force,  à  ce  que  nous  combations 
contre  tous  empefchemens, voila  pourquoy 
il  nous  attribue  ce  qui  eft  fien.  Car  il  le  fait 
tellement  en  nous  ,  qu'il  femble  que  nous  le 
facions.  L'homme  fidèle  donques  trauaillera, 
Voire  auec  grand'  peine  &  difficulté  à  fe  pur-    des  Romains)cela  eft  cjuafî  cotre  nature:c'fft 


perflues.  Voila  donquM  qiiïBt  i  ce  mot ,  où 
iainit  Paul  dit  qu'il  nous  faut  nettoyer.    Or 
ccpédant  il  dit  ,  Afin  que  nous  foyms  y^iffeaux 
en  l>cHiuur,frofres  i  [vfage  du  maij}rf,tir  adon- 
nera bonnes  ccuures.  Quand  il  parle  des  vaif- 
feaux  d'honneur,  c'eft  pour  monftrer  qu'il  ne 
fuffit  point  que  nous  ayons  place  en  l'Eglifc 
de  Dieu,  &  portions  le  nom  de  Chrefticns, 
finon  que  nous  foyons  comme  feparez.  Il  eft 
vray  que  tous  ceux  qui  font  baptilez,  tout 
ceux  qui  participer  à  la  Cène  de  lefus  Chrift, 
S:  qui  fe  méfient  parmi  les  fidèles ,  fontdelu 
feparez  d'auec  les  incrédules  :  on  ne  dira  pas 
, qu'ils  ioyent  Turcs  ne  Payens:  mais  tant  y  a 
qu'il  nous  taut  cncores  tftre  mieux  fanîtifiez, 
&  d'vn  degré  fecond  &plus  haut  :  c'eft  que 
non  feulemét  nous  ayons  la  marque  exterieu 
re.non  feulement  que  nous  mettions  en  auâc 
noftre  Bapteime,  &  que  nous  facions  quelque 
profefsion  de  vouloir  feruir  à  Dieu.mais  que 
noftre  vie  approuuc  que  vrayeraent  nous  font 
mes  enfans  de  Dieu,  que  quand  nous  fommes 
gouuernez  par  fon  fainft  Éfprit,que  cela  auf-, 
iîno'  tefraoigne  &  certifie  noftre  adoption. 
Voila  donc  l'intention  de  fainû  Paul ,  quand 
il  dit  qu'il  nous  faut  eftre  vaiflèaux  en  hon- 
neur.Et  pourquoy?  Car  il  fe  pourra  bien  fai.. 
requ'eftâsen  l'Eglife  de  Dieu,voire  des  plus 
auancez,  enlafin  nous  ferons  iettezlà  com- 
me vn  pot  cafle,que  nous  ferons  delaillez  cô 
me  vn  vailTe.iu  de  bois ,  qui  ne  feruira  plus  ^ 
rien  qu'à  eftre  du  tout  inutile.  Voila  dôcrif- 
fue  des  hypocrites  qui  fe  vantent  d'tftre  du 
rang  ^compagnie  des  enfans  de  Dieu:  com- 
bien qu'ils  foyent  vaiflcaux  à  la  verité,&  que 
Dieu  s'en  férue  ,  fi  ne  liillcnt-ils  point  d'e- 
ftre  en  opprobre  ,  &  Dieu  les  amènera  à  leur 
côfufion.  Ainfî  donc  auifons  bien  d'eftre  vaif 
féaux  honorables,  non  point  feulement  pour 
auoir  la  marque  extérieure  &  temporelle  ,  i 
ce  qu'on  nous  repute  enfans  de  Dieu  ,  mais 
que  nous  foyons  choifis, que  nous  foyons  re- 
tenus pour  fon  héritage  perpétuel,*  que  par 
ce  moyen  nous  approchions  de  noftre  Dieu. 
Et  voila  aufsi  comme  non  feulement  nous  fe- 
rons raiffeaux  d'vne  maifon,  mais  nous  ferôs 
railTeauxdu  temple  pour  feruir  à  faire  les  fa- 
crifices&oblations  fainâes  ,  tellement  que 
Dieu  feraferuiiSc  honoré  par  nous.  Car  qiisd 
Dieu  eft  glorifié  par  les  mefchans  (ainiî  qu'il 
eft  parlé  de  Pharao  ,  tant  en  Exode,  qu'au  s. 


P/«.: 


ger  des  ordures  du  m5de,afin  de  n'eftre  point 
infcûé  delà  Oorruption des  mefchans  :  nous 
mettrons  donques  peine  à  cela  auec  grand 
c5bat:mais  c'eft  Dieu  qui  nous  y  poulTc, c'eft 
îiiy  qui  nous  donne  la  vertu:biiet,il  nous  don 
ne  le  vouloir  ,&l'execution  ,  (comme  fainft 
•'3  Paulen  parle)&le  tout  par  fa  bôté  gratuite. 
Mais  d'autant  que  nous  ne  de«5s  point  eftre 
oi(ifs,ce  n'eft  point  fans  caufe<juc  nous  fom- 
mes exhortez  crmie  nous  le  voyons  en  ce  paf 
fagc:  &  telles  exhortations  ne  font  point  fu- 


comine  qui  tireroit  le  feu  de  l'eau.Et  de  tait, 
il  faut  que  Dieu(côme  défia  nons  aii5sdit)fa 
ce  miracle, quâd  il  fait  feruir  à  fa  gloire  la  ma 
lice  des  homes  :  car  elle  tire  tout  au  rebours, 
il  eft  certain. Voila  dôc  vn  ouwrage  q  eft  d'vn 
artifice  trop  grâd  Si  trop  haut  pour  le  côpren 
dre:&  ainfi  nous  ne  pouuons  pas  dire  (i  par- 
ler proprement  )  que  les  mefchans  glorifient 
Dicu:itiais  nous  leglorifions  qii.id  nous  fonv- 
mcs  dédiez  à  luy,  que  nous  ne  demandons  iî- 
non  que  fon  nom  foit  honoré. Or  cela  fe  fait 

quand 


SVRLAlî.   ATIMOTH. 


I/4.fl 


h 


3nin<i  nous  lny  fommcs  t  rais  enfant-,  que  & 
e  corps  &d'ame  nous  tafchons  de  nous  ap- 
pliquera fonvfage.Or  maintenant  regardons 
fi  Dieu  ne  nous  a  point  appelez  à  cela.  Mais 
qui  plus  eft,  il  ne  du  pas  feulement  que  nous 
fommes  vatflèaurde  Ion  tcple,  mais  que  nous 
forames  Sacrificateurs  qui  les  portons.  Voila 
donc  Dieu  qui  nous  fait  celt  honneur  de  fe 
vouloir  feruir  de  nous  comme  de  vaifleaux 
honorables,  dédiant  nos  corps  &  nos  âmes  à 
fon  leruice  :  mefmes  il  veut  que  nous  foyons 
vaifleaux  de  fon  temple, pour  élire  appliquez 
atout  ce  qui  peut  (eruirà  famftetc  ,  afin  qu'il 
règne  au  milieu  de  nous.Q^iand  nous  voyons 
cela,  d'autât  plus  nous  faut-il  efforcer  à  nous 
fanûifier,  comme  il  en  eft  parlé  au  Prophète 
U  Ifaie, Nettoyez-vous  qui  portez  les  vaiffeaux 
du  Seigneur.Et  puis  nous  fçauons  corne  Dieu 
a  commandé  eftroitement  que  les  vailTeaux 
fuflent  bien  purs&nets,&  défendu  qu'on  n'y 
meslaft  nulle  pollution.  D''autant  donc  que 
nous  fommes  les  vaifleaux  du  temple ,  nous 
fommes  les  porteurs  d'iceux,  &  les  gardiens, 
aduifons  de  nous  dédier  àPvfage  de  noilre 
Dieu,  voire  à  vn  vfage  honorable.  Puis  aufsi 
que  nous  forames  les  temples  de  Dieu  chacun 
denou'î,&tousenferableen  c5mun,  que  nous 
aduifîonsde  nous  maintenir  en  toute  pureté. 
Voila  donc  comme  nous  auôs  à  prattiquer  ce 
qui  eft  ici  touché  par  fainû  Paul  del'vfage 
honorable.  Et  afin  que  nous  fçachionsquece 
que  i'ay  allégué  du  Prophète  Ifaie,  nous  ap- 
partient &s'addrelTe  à  nous.appliquons  àno- 
itre  vfige  ce  que  fainâ:  Paul  nous  remonftre 
au  fixieme  de  la  l'econde  aux  Corinthiens.  Là 
ilamonilré  quec'ellà  nous  que  le  Prophète 
Ifaie  a  regardé  aufsi  bié  qu'aux  Sacrificateurs 
anciens. Et  pourquoyfCar  nous  auons  les  pro 
méfies,  dit  fainft  Paul.  Puis  qu'ainiieft  donc 
que  Dieu  nous  fait  cert  honneur  de  nous  rece 
uoir  pour  vaifleaux  de  fon  téple, mefmes  qu'il 
nous  dédie  à  fon  vfage  ,  qu'il  veut  habiter  en 
nous  par  fonfainÔ  Efprit ,  ne  faiit-il  pas  que 
nous  foyon'^  purgez  de  toute  orduie?Ce  n'eft 
pas  raii'on  que  Dieu  habite  en  vn  lieu  infeft  & 
poilu, il  faut  q  fon  domicile  foit  pur  ic  fainft, 
que  tout  ce  qui  luy  attouche  &  approchede 
luy ,  foit  fanftifié.ou  autrtinent  il  n'approche 
ra  point  de  nous.  Voila  donc  quanta  ce  que 
fainâ  Paul  nous  exhorte  de  nous  l'anttifier,  à 
ce  que  nous  foyons  en  vfage  propre  à  Dieu: 
non  pas  que  Dieu  neface  feruir  à  fon  vlage  ce 
que  les  mefchans  auront  fait  tout  au  rebours, 
mais(comme  i'ay  dit)cela  eft  par  contrainte. 
De  noftre  cofté,nous  ne  pourrons  point  eftre 
propres  pour  feruir  à  noftre  Dieu  (qui  eft  le 
Maiftrede  la  maifon)  finon  que  nous  foyons 
vaifleaux  d'hôneur,  c'eft  àdire(commeil  ad- 
ioufte  pour  déclaration)  tiAdoneX.  à  toutes  bon 
nei  auures.  Voila  donc  comme  nous  ferons 
propres  pour  eftre  vaifleaux  honorables.  Car 
(comme  i'ay  défia  dit)  tous  ces  desbauchez 
Jont  inftrumens  defquels  Dieu  fe  feruira;ie  di 


4it 

les  plus  mefchans ,  les  plus  desbordez  ,  qu'il 
faut  que  ceui-la  en  la  fin  glorifient  Dieu  ,  ou 
bien  qu'il  (oit  glorifié  en  eux  :  mais  tant  y  a, 
pource  qu'ils  ne  font  pomt  addoniitz  à  bien, 
mais  tirent  pluftoft  à  mal, qu'ils  ne  demandent 
qu'à  violer  laïuftice  de  Dieu, à  rcnueifcr  toa 
te  loy:  brief.àmettrevneconfufionhornblc 
en  ce  inonde,  il  faut  que  Dieu  les  tiene  en  bri 
de,&  alors  il  s'en  fort  à  ce  que  bô  luy  fcmble. 
Mais  de  noftre  cofté  ,  iî  nous  voulons  eltie 
propres  pour  feruir  en  bô  vfage  à  noftre  Dieu, 
aduifons  d'eftre  addonnez  abonnes  amures, 
c'eft  à  dire ,  que  nous  ne  cherchions  linon  de 
luy  obéir ,  &  de  refpondre  à  fa  fainûc  voca- 
tion :  &  alors  nous  ferons  non  feulement  in- 
ftrumens en  la  main  de  noftre  Dieu, mais  nous 
luy  ferons  vaifleaux  d'honneur. Et  pourquoyJ 
Eftans  gouuernez  par  fon  fainû  Efpiitnous 
ferons  propres  à  fon  feruice  ,  c'eft  à  dire ,  de 
noftre  bon  gré  nous  tirerons  à  ce  qu'il  foit 
exalté, &  ne  tiendra  pas  à  nous  qu'en  premier 
lieu  il  ne  foit  ferui  de  nos  corps  &  de  bos 
amcs.puis  qu'il  nous  a  appelez  à  ceft  office,& 
qu'il  nous  fait  ceft  hôneur  de  tious  appliquer 
à  bon  vfage  pour  eftre  glorifié  en  nous.  Voila 
donques  en  fommc  ce  que  nous  auons  à  rcte- 
nirde  ce  paflàge.  Et  pourtant  afin  de  faire  v- 
ne  briefue  conclufion  ,  apprenons  de  ne  nous 
point  desbaucher,combien  que  le  diable  nous 
mette  beaucoup  de  troubles  en  aiiant  i,&  que 
nous  voyôs  des  vagues  &  tempeftes,q;ie  nouï 
voyons  qu'il  n'y  a  pas  tel  oïdie  &  police  coin 
me  il  (eroit  requis, toutesfois  que  nous  pour- 
fuyuions  noltre  train, &  que  nous  ne  penfions 
pas  que  cela  derogue  à  la  maicfté  de  Dieu, 
mais  prenons  le  cas  que  ce  loycnt  vailTeaur 
d'ordure  en  vne  grande  maifon  ,  car  il  faut 
qu'il  y  en  ait. Et  cependant  toutesfois  ne  pen 
fons  pas  eftre  excufez  nous  mtflans  parmi  tel 
les  pollutions, mais  foyons  tant  plus  vigilans: 
puis  qu'ainfî  eft  que  Dieu  veut  tfprouuer  Taf 
feftion  que  sous  luy  portons  ,  qu'vn  chacun 
face  bon  guet  fur  foy:  &:  quand  nous  voyons 
les  mefchans  qui  s''cfgayent,&  ne  demandant 
qu'atout  desbaucher, que  nous  tirions  tout  au 
rebours:  quand  nous  voyoui  que  les  vices  ré- 
gnent ,  &  qu'ils  ont  la  vogue,  &qu'vn  chacun 
ne  demande  finon  de  traîner  <on  compa- 
gnon en  ruine  auec  luy  ,  recourons  à  noilre 
Dieu.S:  le  prions  de  nous  tenir  fous  la  condui 
te  de  fon  Efprit ,  &  que  nous  mettions  peine 
de  nous  conformer  à  cefte  pureté  de  laquelle 
fainâ:  Paul  parlejci.  Et  voyans  que  nous  ne 
fommes  pas  fuffifansàcela, mais  outre  noftre 
débilité  qu'il  n'y  a  que  corruption  en  nous, 
prions  Dieu  qu'il  nous  enuoye  les  eaux  pures,  g 
dont  il  a  parlé  par  fon  Prophète  Ezechiel  >  &  , .  • 
cognoiflons  qu'alors  nous  ferons  propres  au  '  '' 
feruice  de  Dieu, quand  nous  ne  demanderons 
finon  de  nous  addonner  à  fon  obciflance, voi- 
re d'vne  franche  volonté  ,  &  non  point  par 
contrainte  &par  force  :  comme  quand  il  eft 
glorifié  aux  mefchans,  airfi  qu'il  dit  qu'il  les 

Cg.iii. 


4ii 


S  E  RM  O  N      X  V  r. 


a  referiicz  pour  (â  gloire,  que  nous  cognoif- 
fîons  que  cela  ne  vient  point  d'eux,  mais  que 
c'eftd'vne  prouidence  admirable  laquelle  il 
nous  faut  adorer,d''autant  que  Dieubclongne 
li  ben,qu'il  l'çait  tirer  le  bien  du  mal,  tout  ain 
fi  qu'il  a  conuerti  les  ténèbres  en  clarté, quâd 
le  monde  a  efté  creé.ainfi  que  fainrt  Paul  auf- 
fi  vfedecefte  fimilitude-la  en  la  féconde  des 
Corinthiens. 

OR  nous-nous  proflernerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  encognoiflanccde 
nos  fautes,  le  pnans  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir, voire  &  afin  que  nous  n'abufîons  point 
de  fi.  bonté, puis  qu'il  a  voulu  que  nous  foyôs 
domeftiques  de  ù  maifon  ,  qu'il  nous  face  la 
grâce  de  le  feruir  en  telle  forte  que  nous  foy- 
ons  feparez  de  toutes  les  ordures  &  les  cor- 


ruptions de  ce  monde.  Et  combien  que  nous 
nepu;fsion>  pas  euinidu  tout  ce  meflinge 
d'iniqu'te  qui  ha  la  v  )gue  par  tout, qu'il  nous 
conferue  te.lemcnt  que  nou,  ne  ioyons  point 
paiticipans  de  la  niaice  des  iniques, mais  que 
pluftoft  nous  aduifions  d'en  élire  purgez  ,  & 
quel'Eglife  de  Dieu  mefines  s'en  purge  ,  at- 
tendant que  lefus  Chrift  apparoifle  pour  re- 
ftaurerce  qui  eft  maintenant  confus  ,&  pour 
amener  les  chofes  à  leur  perfedi5,&  qu'alors 
il  nous  recognoifle  vaifleaux  honorables  por 
tans  la  marque  de  fon  faindETprit  ,afin  que 
par  ce  moyen  nous  foyons  viuans  à  iamais 
auec  luy  en  la  gloire  qu'il  nous  a  acquife  ,  IZ 
qu'il  nous  a  appreftee  au  ciel.  Qjje  non  feule- 
ment il  nous  tace  celle  grace,raais  à  tous  peu- 
ples Si.  nations  de  la  terre,&:c. 


NEVFIEME      SERMON      SVR     LE 

SECOND      CHAPITRE. 

z  i  ¥uy  aufsi  les  dejirs  de  ieHnejfe.mais  pLJîoJ}  enfuy  iujlkeyfoyy 
charité  (f  P^^^  '^^^^  ^^'^^  j^^  inuoquent  de  cœur  pur  le  Seigneur. 

zi  Ef  rciette  les  queflions  qui  font  folles  i^Xfins  inJîruSlion  .fâ- 
chant quelles  engendrent  débats. 

i4  Or  ne  faut  il  point  que  leferuiteur  du  Seigneur  dehatcmais 
au  il  fait  bénin  enuers  tous,  propre  a,  enfigner, portant  patiemment  les 
mauuais, 

25  'Enfignant  auec  douceur  ceux  qui  refijlent ,  pour  effayer 
fi  quelque  fois  Dieu  leur  donnera  repentance  pour  cognoijlre  la 
yerité, 

z6  Et  qu'ils  reuienent  hors  des  Uqs  du  diable ,  ejîansprins  de  luy 
afa  yolonte. 


I  nous  coguoifsions  bien  nos 
I  vices  &  imperfeftions  ,  nous 
aurions  en  tout  aage  occafiô 
\  de  nous  humilier  deuât  Dieu, 
I  &  noHs  defplaire,  &  cftre  fur 
'  nos  gardes,  veu  qu'il  ne  faut 
'  rien  pour  nous  faire  trebuf- 
«her.  Car  quand  nous  aurons  Ytfcu  en  ce 
inonde  lulques  .r  l'aage  de  trente  ans,  encorcs 
que  Dieu  nous  ait  fait  la  grâce  d'auoir  fa  pa- 
role,qiie  nous  ayons  eu  moyen";  propres  pour 
BOUS  inllrtnrc,  &  aufsi  que  nous  ayons  eu  bon 
ne  arîection  pour  y  tendre  ,  encorcs  ne  fom- 
mes-nous  poiat  toimez  ni  polis.  Or  auons- 
nous  palle  ctllaage-la?  Nous  commençons  à 
décliner ,  il  y  a  d'autres  vices  contraires  qui 
fucctdcnt.  Si  donc  on  prend  vn  homme  en  û 
ieuneffe,  il  ne  fera  pas  encores  du  tout  façon- 


né:lî  toft  qu'il  a  pafle  ce  temps-là  ,  il  com- 
mence à  entrer  en  d'autres  vices.  Briet,  U  n'y 
a  ne  leunes  ne  vieux  qui  nedoyuent  tlhead- 
moncllez  de  s'humilier  pour  cognoiftre  Jès 
vices, &  cependant  mettre  peine  de  cheminer 
en  forte  ,que  s'ih  y  a  du  mal  en  eux  ,pour  1« 
moins  qu'il  n'y  domine  point. Et  en  cela  nous 
en  auôs  vn  exemple  bien  notable  en  celle  ex- 
hortatio  de  S. Paul. Si  iamais  U  y  a  eu  home  ex 
cellent,Timothcea  elle  du  nôbiedeceiix-laà 
qui  Dieu  aiuiit  tendu  la  main  pour  les  mettre 
en  fon  Eglitc  comme  miroirs  de  toute  vertu: 
nous  fçauôs  le  tcfmoignage  qm  luy  eft  doné. 
Or  cepédant  nous  voyôs  ce  qui  luy  eft  ici  ie«» 
mollit  par  S.Paul.Qw  ilfoyf  /' J  cocupjfc.irces 
deieiintfj'e.Ct  n'eft  pa^qu'ilfoit  cômcv  nicune 
garç5devingtans:cardciia  ilauoitellé  cxeice 
à  pfchcr  la  parole deDieu.il  cftoit  Docleur  no 

ûulc 


SVR    LA    IL    A  TIMOTH. 


feulement  d\ne  Eglife,  mais  de  la  région  cir 
eonuoifine  :  comme  nous  fçauons  que  faina 
Piul  l'auoit  ordôné  non  feulemét  pour  prel- 
chev  en  vnlieu,  maisauf-ii  pourauoirefgard 
de  loin,  afin  d'admonefter  les  Euefques ,  & 
tous  ceux  qui  eftoyenten  charge  pareille  à 
luy .  Voila  doc  vn  hamme  qui  a  défia  du  téps, 
&  eft  aflez  meuri:  d'autre  part  Dieu  Ta  choi- 
fi  d'entre  les  autres  ,  comme  nous  auons  veu 
par  ci  deuant  :  &  mel'mes  il  auoit  receu  des 
dons  finguliers  :  non  feulement  il  yauoitla 
doâxine  en  luy  &  prophétie,  mais  aufsi  la  vie 
refpondoit ,  il  auoit  vn  ijrandzele  d'auancer 
l'honneur  de  Dieu-.bnet,il  eftoit  en  exemple 
à  tous.  Si  eft-ce  qu'il  a  beloin  encores  d'e/lre 
reprimé,  &que  laindlPaul  l'aduertiffe qu'il 
veille  bien  ,  afin  qu'il  ne  fe  laifle  point  aller 
hors  des  gons  quclqiie  fois  ,  &  qu'il  y  ait  des 
bouillons  de  ieunelfc.  En  quelaagefllfaloit 
qu'il  euft  plus  de  tréte  ans.  Maiï(comme  l'ay 
dit)  l'Efprit  de  Dieu  par  la  bouche  de  fainft 
Paul  nous  a  ici  voulu  raonllreren  la  pcrfonne 
d'vn  homme  ,  quand  nous  aurons  profité  en 
l'efcole  de  D:eu  ,  que  nous  ferons  gouuer- 
nez  par  Cin  fainft  Efprit.que  nous  aurons  mis 
peme  par  longue  efpace  de  temps ,.  ce  faire, 
qu'encores  ne  ferons-nou'  point  du  rout  for 
mez  ni  polis.  Et  mefines  quand  nous  venons 
iufques  à  l'aage  de  quarante  ans ,  montrons 
nous  que  nous  loyôs  deuenus  hommes?N.ius 
ferons  prefts  à  refilter  à  tout  ce  qui  nous  fe- 
ra monftré  ,  &  fur  tout  quand  ;1  iera  queftion 
du  feruice  de  Dieu, il  y  aura  toi.:fiours  dei  fu- 
mées &•  des  bouilljns.  Par  cela  (comme  l'ay 
dit  )  iufques  à  tant  que  nous  ayons  commen- 
cé à  décimer  ,  toufiours  nous  ferons  rude  & 
mal  polis:il  faut  que  Dieu  rabote  toufiour<:, 
&  qu'il  nous  dône  quelque  coup  de  marteau, 
ou  bien  qu'il  trauaillc  à  nous  polir,  ou  autre- 
ment il  y  aura  toufiours  beaucoup  à  redire. 
Or  cependant  nous  venons  à  décliner  deiiant 
que  Dieu  nous  ait  mis  comme  en  eilat  paifait 
de  le  feruir  ,  le  di  entant  que  peut  porter  en- 
cores  Pinfirmité  des  hommes  :  mais  dcHant 
que  nous  foyons  venus  en  ceft  eftat  moyen, 
nous  fommes  défia  comme  à  demi  calTfz.  Et 
ainfi  apprenôs  de  ne  point  prefumer  de  nous, 
&de  n'eftre  point  envurcz  de  fierté  ne  vaine 
gloire, voyans  qu'il  y  a  toufiours  à  redire.De 
ce  qu'il  eft  ici  notamment  parlé  des  ieunes 
gens,  qn'vnchacun  regarde  à  fov,  combien  il 
s'en  faut  qu'il  ait  vne  telle  lainâeté  &  perfe- 
ftion  que  Timothee.  Si  donc  les  icunes  gens 
font  de  bon  efprit  &alaigrc,ils  peuuent  auoir 
vne  ardeur  qui  les  efchaulfe  à  beaucoup  de 
folies  :  ils  n'ont  point  encore?  l'v  fage  &  l'ex 
perience  pour  auoir  acquis  prudence  :  il'  ne 
preuoyent  point  le*  ch  fesde  loin  ,  que  rien 
ne  leur  courte  ,  ils  f_,n;hardis  &  téméraires: 
après,  il  y  aencorcs  d'autres  vices  beaucoup. 
Il  eft  vray  que,  fainû  Paul  ne  parle  pas  ici  de? 
concup-fcences  qu'ont  les  ieunesgers  qrand 
ils  font  addonnez  à  diffolutions  >  qu'ils  font 


desbauchez  en  leur  vie  ,  les  vns  paillars  ,  ïex 
r.utres  loueurs, les  autres  yurongnes  :  cela  e- 
Itoitbiin  fuperflu  en  la  pcrfonne  de  Timo- 
thee ,  qui  elloit  pour  inftruire  &  endocflri- 
ner  les  vieux  (comme  nous  auôs  veu)&  Dieu 
l'auoit  côftitué  là,  qu'il  vouloit  qu'il  fuftprin 
cipalement  pour  endoûriner  ceux  qui  pcu- 
uoyent  eftre  fes  pères  quant  à  l'aage  .  Voi- 
la donc  vn  homme  qui  n'a  nul  befoin  qu'on 
le  retire  des  folies  de  ieuneffe  :  mais  ii  eft-ce 
qu'il  n'eft  pas  qu'il  ne  tiene  encores  de  l'aa- 
ge, comme  noftre  Seigneur  lefus  pour  humi- 
lier les  fiés  ne  les  parfait  pas  du  premier  lour, 
mais  les  lailTe  là  trainer  vne  ïambe, ou  vnt  ai- 
le,afin  qu'ils  apprenêt  degemir&  s'humilier, 
qu'il  ne  leur  fcmble  pas  qu'ils  puiflcnt  fe  glo 
rifier,qu'iln'y  ait  pour  leur  faire  honte. D'au 
tant  doc  que  noftre  Scgncur  laifle  toufiours 
quelques  imperftftions  à  ceux  aufqucls  il  a 
fait  grand'  grâce,  voila  pou.-quoy  Timothee 
eft  ic!  admonefté  de  fuir  les  cupiditez  de  ieu- 
nefle.Que  fera-ce  donc  de  ceux  qui  l'enfui- 
uent  de  loinrEncores(coinHie  nous  auons  tou 
ché)que  Dieu  mette  vne  telle  mefnre  en  eux, 
lî  eft-ce  qu'il  y  peut  auoir  des  bouillôs  touf- 
iours ,  &  faut  qu'ils  cognoiflent  qu'ils  n'ont 
point  encores  l'vlage  pour  eftre  piudéscom 
me  il  ieroit  requis,  qu'ils  n'ont  point  de  gra- 
■iiité  ,  qu'il  leur  coule  beaucoup  de  choies  de-^ 
uantles  yeux  qu'ils  n'apperçoiuent  pas. qu'ils 
ont  vne  feiueur  qui  les  trarfporte  par  trop: 
ils  ont  auf'i  vne  audace  qui  eft  exceisine,  que 
ils  fe  fiét  trop  d'eux-mefmes,rien  ne  leur  cou 
fte.  Q_i?e  les  leunes  gés donc  cognoiflent  que 
ils  font  exhortez  en  la  pcrfonne  de  Timo- 
thee àfe  dciiiettre,&:  qu'ils  clumirét  en  tou 
re  modeftie:  carc'eft  la  propre  vertu  des  en- 
fans  &  des  ieunes  gens  ,  de  fe  laifler  gouuer- 
ner,  cognoiflans  qu'il'  ne  lonr  point  encores 
capables  de  iuger  de  tout  ce  q  feroit  belbin, 
&  qu'ils  n'ont  point  côfideration  des  chofes 
qui  leur  feroyét  propres.  Si  cela  n'eft  aux  ieu 
nés  gens, toutes  les  vertus  qu'ils  pourront  a- 
uoir, feront  conuerties  en  vices,  voire  qu'el- 
les feront  detcftables  ,  qu'il  ne  faut  que  ccfte 
leule  tache  &  macule  pour  corrompre  tout  le 
bien  qui  fera  en  vn  ieune  homme  ,  c'eft  afça- 
uoir  quand  il  fera  fi  prcfomptueux  qu'il  ne  fe 
voudra  point  rager  pour  efcouter  &  receuoir 
paifiblement  ce  qu'on  luy  dira.  Puis  qu'ainlî 
eft  dore, que  les  icunes  gens  ayent  celK  mo- 
deftie en  recômandation  fur  tout.  Car  il  ceux 
qui  cheminent  hôneftement.qui  ne  font  point 
desbauchez  en  leur  vie, ni  d'IT) lus,  ont  belbin 
d'auoir  telle  admonition, que  fera-ce  de  ceux 
qui  font  des  veaux  desbridez?  On  ne  voit  que 
toute  intempérance  en  eux  :  de;,  frians  ,  des 
yurongnes ,  des.coutempteurs  de  DieuX:  de 
toute  religion, des  petis  paillaf.Ccux-la  dôc 
n'ont  pas  (fulement  befoin  d'tftre  irprimez 
d'vne  telle  exhortation  comme  fainfl  Paul  la 
donne  ici  .\  Timothee,  mais  il  faudroit  quali 
qu'ils  fudeet  enchaînez, p.'r  manière  de  diie. 
Gg.iiii. 


4^4 


SERMOM    XV  r. 


Toute^foison  roît  auiourd'huy  vne  corru- 
ption fi  énorme  au  monde, qu'on  pourra  eftre 
trompé  en  vne  grande  partie  des  leunes  gens. 
Car  ou  eft  l'humilité  ,  qu'ils  lé  laillènt  con- 
duire, &qued'eux-mefines  il^ayét  ceftaduis 
de  fe  réprimer  ?  Q_ue  lî  Dieu  y  a  mis  quelque 
petite  vertu, les  voila  tant  outrecuidez  qu'on 
ne  leur  peut  iamais  porter  vn  feul  mot  de  cô 
feil  qu'ils  veulent  receuoir,  &  qu'ils  i'urmon- 
teront  en  fagefle  les  plus  anciens, ce  leur  fem 
ble. Quant  aux  autres, ils  font  tellement  def- 
bordez  en  leurs  folies  &  diflolutiôs  que  c'eft 
pitié, on  ne  peut  aborder  à  eux, ils  font  pleins 
de  fierté  :  que  fi  on  leur  apporte  vn  feul  mot 
de  remonftrance  ,  incontinent  â  grincer  les 
d(nts,àdefgorger  leur  venin, ou  àdrefler  in- 
iures  &  outrages  non  feulement  fur  ceux  qui 
pour  l'aagedeuroyét  eftre  prifez  d'eux,  mais 
il  n'y  aura  ne  père  ne  mère  qui  foyentefcou- 
tez:les  Pafteurs  n'auront  nulle  reuerencequi 
fou. Nous  voyons  donc  vne  ieunelTe  fi  perdue 
que  les  cheueux  nous  deuroycnt  drelFcr  en  la 
lefte.Or  le  di  en  vne  grande  partie:niaii>  tant 
y  a  qu'ici  tous  ceux  qui  ne  font  eiicores  allez 
meuris  cS^:  façonnez  ,  doiuent  cognoiflre  q^le 
Dieu  leiirdonne  vn  bon  remède, quand  il  con 
damne  les  bouillons  de  leunefle.les  conuoiti- 
fes  exorbitantes. Et  pour  celle  caufe.que  tous 
cognoiflent  que  c'ef}  à  eux  que  ceci  s'adref- 
fe.  Car  ils  ferôt  bien  enragez  s'ils  s'accompa 
rent  à  Timothee:  &  encores  qu'ils  fuflentcn 
pareil  degré, toutesfois  le  laiiA  Efprit  ne  laif- 
fe  pas  de  monftrer  qu'il  y  a  encores  à  redire 
en  eux.  Or  ik  font  beaucoup  plus  imparfaits. 
Qji^ils  penfent  donc  que  tant  plus  k-  doiuét 
ils  efForctr  à  mettre  peine  de  reprimer  ces 
excès  de  ieuneffciSc  celle  ferueur  dont  ils  fe- 
loyent  tranfportcz:qu'iIs  mettét  de  l'eau  par 
jni  le  feu  de  leuraage  ,  tellement  qu'on  voye 
,que  confeil,  raifon,&  prudence,  dominent  en 
tux.  yoilace  que  nousauons  à  retenir  de  ce 
paflage.  Et  au  re/le  ,  fi  ceci  eftdit  aux  leunes 
gés,  par  plus  forte  raifon  ceux  qui  font  défia 
vieux  doiuent  auoir  honte  quand  ils  feront 
encores  trop  ardens,&  qu'il  y  aura  des  excès 
en  eux ,  qu'il  n'y  aura  nulle  granité  ni  modé- 
ration. Si  l'aage  qui  efl  fuiet  à  ce  vice  de  trop 
grande  colère  ,  n'excufe  point  les  hommes, 
»jue  fera-ce  quand  on  eft  vieil ,  &  qu'on  doit 
défia  auoir  pafle  tous  ces  efcarmouches-la, 
fi  touflours  on  demeure  tel.&r  qu'on  ne  fe  cor 
rige  point?  Ne  voila  point  vne  chofe  deshon 
nefte  ,  &  quafi  contre  nature?  Il  eft  vray  que 
fur  tout  il  eft  dit  que  les  ieunesgeas  ont  be- 
foin  de  la  parole  de  Dieu  pour  dreflèr  leurs 
»oyes:  non  pas  que  les  vieux  ne  foyent  com- 
prins  en  ce  nombre-la:car  ce  n'eft  point  fans 
«aufe  que  Dieu  veut  que  nous  profitions  tout 
le  cours  de  noftre  vie  en  la  dodrinc  qu'il  no' 
propofe.  Les  vieux  donc  doiuent  bieneftre 
efcoliers:mais  pource  qu'ils  ne  doiuent  point 
cltre  nouices,  il  faut  qu'iK-  tnonftrent  par  ef- 
ictl  qu'ils  ont  tellement  profité  ,  que  ce  n'eft 


point  d'aiiiourd'huy  qu'ils  eommencent  à  le 
m  jdcrer  &  à  fe  tenir  en  telle  grauué,que  le» 
bouillons  de  leunellc-  ne  régnent  plus  en  eux. 
Cepédant  il  nous  faut  aufsi  reuenir  à  ce  que 
nousauons  touché:  que  les  hommes  en  quel> 
que  aage  qu'ils  viuent ,  cognoiflent  qu'il  y  a 
touliours  à  redire  en  eux.  Car  fi  la  vieillellc 
ne  tend  point  à  colère,  qu'il  n'y  ait  point  de 
chaleur  trop  grade,  qu'il  n'y  ait  point  de  pre 
fomption,  qu'elle  foitplus  attrempee.elleap 
porte  d'autres  incommodités  grandes,  telle- 
ment que  les  vieilles  gens  peuuent  bien  dire. 
Quand  nous  auons  eiîé  en  fleur d'aage,  nous 
pouuions  faire  beaucoup  de  bonnes  chofes, 
mais  nous-nous  fommes  trefmal  acquittez,  & 
auôsmal  employé  noftre  tcmps.Auiourd'huy 
non;  fommes  à  demi  morts, encores  que  nous 
allions  &  que  nous  fubfiftions  par  la  grâce  de 
Dieu  pour  vaquer  à  ce  que  nous  auons  à  fai- 
re,nous  fommes  à  demi  caliez  &  rôpus.Brief, 
nous  voyons  toufiours  le  proiieibe  commun 
véritable  ,  Uunefle  ne  fçait ,  &  vieillcfle  ne 
peut:  que  ceux  qui  cuideront  eftre  les  plus  la 
ges, feront  pleins  de  prefomption  ,  &ne  fça- 
uent  quel  chemin  ils  ont  à  tenir. Ils  font  com 
me  des  chcuaux  qui  ont  eftc  à  demi  formez, 
ils  fautiilent.i  L  courent  ci  &  là, pource  qu'ils 
n'ont  point  apprins  de  fe  laiffer  gouuerner. 
Voila  que  c'eft  deç  ieunes  gens.  Et  au  refte, 
quâd  ils  commencent  à  bien  goufter  que  c'eft 
de  vertu  &  d'honncftcté , alors  ils  ne  peuuent, 
c'eft  à  dire,  la  faculté  &  vertu  décline.  Voila 
comme  nous  auons  toufiours  à  nousdefplaire 
Se  nous  humilier  deuant  Dieu:&  qu'vn  chacun 
prene  garde  de  près  à  fes  vices,  afin  de  les  c5 
damner,&  en  les  con,danant  que  nous  auifions 
bien  d'y  reiîfter  tant  qu'il  fera  pofsible  parla 
grâce  de  Dieu.  Or  cependant  fainft  Paul  met 
ici  les  remèdes  couenables  pour  corriger  ce- 
fte  ardeur  qui  fe  voit  trop  grade  quafi  en  tous 
ieunes  gen^.Sny(dit-il):nfi:cf,itHec  foy,charl— 
té,  (y  faix  aitec  tous  ceit ï  tjui  imtoijuet  Je  cœur 
pur  le  Seigneur.  Quand  faind  Paul  parle  à  Ti 
motheedefuiure  iuftice,foy,&  charité:  en  ce 
la  il  nionftre  que  quand  les  hommes  font  def 
bauchez,ou  qu'ils  font  trop  ferucns.qu'il  y  a 
quelque  intempérance  &  exces,que  c'eft  ligne 
qu'ils  n'ont  point  prins  aflez  de  racine  en  la 
foy  Se  en  la  crainte  de  Dieu, qu'ils  ne  regar- 
dent point  aflez  à  leur  deuoir.  Car  ceux  qui 
monftrent  quelque  fuperftitlon  ,  ou  bien  qui 
ont  zèle  inconfideré  ,  il  eft  certain  que  c'eft 
d'autant  qu'ils  nefe  recognoiflent  point,  & 
qu'ils  n'examinent  pas  bien  ce  qui  eft  en  eux: 
les  voila  doc  comme  elgarez.Et  ainfi  ce  n'eft 
vointfms  caufe  que  fainA  Paul  nietcereme 
de  à  l'oppofite  de  ce  que  défia  il  aiioit  dit.  Er 
pourt.itfi  nous  voulons corrigerles  vices  qui 
nous  empefchcnt ,  venons  à  ce  moyen  que  S. 
Pau!  môftre, c'eft  afçauoir  que  nou<-  cognoif- 
fions  que  s'il  y  a  de  mauuaifes  colères  for- 
mées en  nous,  voirc  pource  que  nous  n'auons 
pointaflez  profité  à  cheminer  fongneufemét 

en  foy 


s  V  R     LA    II.    A    T  I  M  O  T  H. 


4^5 


en  foy  &  en  charité  ,  que  now:  fortion?  hors 
des  gons,(p.ir  manière  de  <iire)que  c'crt  d'au 
tant  que  iioftre  confciéce  n'eft  point  bien  at 
finee.  Brief.côcluons  quand  les  hommes  font 
ainfî  excefiih  ,  qu'il  y  a  de  la  vanité  en  eux: 
c'eft  à  dire,qu'ils  /ont  mal  formez  au  dedans, 
qu'ils  fontvuides,&  par  cemoycn  s'efgarent 
&  le  laiflent  tranfporter  à  leurs  afFecbons. 
Voila  comme  vn  vice  nous  doit  aducrtirde 
l'astre  :  &  quand  nous  aurons  cognu  tout  le 
mal ,  que  nous  venions  au  remède  ,  ainfi  qu'il 
nous  ei\  ici  déclaré.  Voila  en  fomme  où  fainft 
Paul  a  prétendu,  &  le-proiît  que  nous  deuons 
recueillir  de  ce  paflage.  Viay  cfl  que  Timo- 
thee  n'auoit  point  befoin  d'eftre  exhorte  à 
fuiure  fjy  &  charité  ,  il  n'eftoit  pas  nouueau 
encela(cômme  nous auons déclaré)  Se  le  tcf- 
moignage  luy  en  eft  rédu  par  le  faind  Efprit, 
qu'il  n'eft  pas  Iculcment  loué  des  hommes, 
mais  voici  Dieu  qui  le  prononce  eftre  excel- 
lent entre  les  autres  :  il  eft-ce  toutesfois  que 
çncores  fainft  Paul  le  folicite  à  future  droitu 
re,  charité,  &  foy.  Puis  qu'ainlî  eft,  cognoif- 
i'ons  que  les  plus  auancez  ne  font  pas  encores 
paruenus  à  leur  but  ,  ils  font  encores  au  che- 
min pluftoft:&  ainlî  ils  ont  meftier  d'eftre  in- 
citez. Et  c'eft  vn  article  bien  à  obfcruer.  Car 
quand  nous  aurons  fenti  quelque  auancemét, 
&  que;  nous  ne  lerons  pas  tels  que  nous  efliôs 
par  le  palTé,  il  nous  feinblc  que  deiîa  nous  fur 
montions  qualî  les  Anges  de  paradis  :  &  (i  li 
deflus  on  nous  remôftre.c'cfl  peine  fuperflue 
&  inutile.  Et  qui  en  eit  caufe?  D'autant  que 
nous  n'apperceuons  pas  que  viu.ns  en  ce  mon 
de  il  nous  faut  toulîours  cheramcr  ,  &  mefme 
que  nous  n'examinons  point  afïez  combien 
BOUS  fomraes  débiles,  &  combien  il  y  a  à  dire 
que  nous  n'ayons  vne  iulbce  parfaite.vne  in- 
tégrité de  foy  &  de  chanté  aîii  que  Dieu  l'or 
danne;nous  ue  penfons  point  i  cela, nous  ne 
le  mettons  point  en  vfage.  Et  cependant  nul 
ne  s'adiourne  deuant  Dieu  pour  cognoiflre 
que  s'il  a  aucunement  profité, ce  n'eft  qu'à  de 
mi.  Et  c'eft  ce  qui  eftdit  par  Salomon,  Ilelt 
vray  que  les  hommes  (  ?tit-il  )  fe  plaifent  en 
leurs  voYes,&  s'y  prifent  affez:mais  Dieu  pri 
fe  cependant  les  cœurs.   Quand  les  hommes 
fe  feront  abufez  ,  qu'ils  fefacent.i  croire 
qu'il  n'y  a  que  redire  en  eus:  &  bicn.fc  font- 
ifs  ainfi  flattez!  Il  faut  venir  deuantle  iuge,le 
quel  aura  vne  autre  bahice.U  fondera  les  pcn 
fces  les  plus  fccretes ,  &  là  il  mettra  en  auant 
iioflre  vanité.  Dontcft-ce  donc  que  procè- 
dent tousces  bouillons, ces  excès, ces  fumées, 
ces  intéperances  qui  font  en  nous?  Celï  d'au 
tant  que  nous  ne  fommes  point  aflez  bien  mu 
nis,  &  que  la  crainte  de  Dieu  n'a  point  prins 
yne  racine  viiie, qu'elle  n'eft  point  enferrée  là. 
dedans, comme  il  feroit  befoin. Par  cela  donc 
que  nous  apprenions  de  ne  clorre  point  les 
yeux  à  nos  vices  ,  mais  ir  nous  ne  les  fentons 
pas,  prions  Dieu  qu'il  nous  efclaire  ,  afin  que 
nous  foyôs  induits  à  gémir  3c  à  nous  condam 


ncr  ,  &  que  nous  retournions  toujours  a  luy. 
Au  rcfte,  il  nous  faut  retenir  ceftc  comparai- 
fon  que  i'ay  touchée  entre  Timothee  ôc  no'. 
Voila  Timothee  qui  eft  pour  vn  miroir  de 
fainûcté  &  iuftice  ,  c'eft  vn  vray  patron  de 
charité  &  de  foy.  &:  neantmoins  il  luy  eftdit 
qu'il  s'y  adône  mieux  qu'il  n'a  point  fait.He 
las  .'  que  fera-ce  de  nous  au  prix?   Et  ainfi  ne 
foyons  point  du  nombre  de  beaucoup  d'ef- 
ceruelez,  qui  cuident  qu'ils  fçauent  aflez  com 
me  ils  doiuér  viure.Et  fi  on  leur  parle  de  che 
miner  bien  &  iuftement,  &  félon  Dieu,  Se  d'e- 
ftre confcrmez  en  foy  ,    Et  qui  eft-ce  qui  ne 
cognoift  cela  ?  Et   font-ce  choies  nouuel- 
les?  Gardons-nous, di-ie,  d'eftre  préoccupez 
d'vne  telle  folie,  mais  pluftoft  pourluiuons  ce 
fte  leçon  qui  nous  eftmonftree  iournellemét 
de  Dieu.  Et  quand  il  nous  eft  parlé  de  iuftice, 
au  lieu  que  ces  coquars  penfent  que  cela  leur 
elt  trop  coçnu  ,  apprenons  de  nous  exami- 
ner :  car  voila  comme  il  en  eft  ici  parlé.  Et 
qu'ainfi  foit, quand  nous  aurons  regardé  fon- 
gneufement  à  ce  qui  eft  en  nous, quelle  fagef- 
fe  Se  prudence  y  a-il?  Il  nous  faut  venir  à  ce 
vice  ordinaire,  c'eft  que  nous  fommes  côuain 
eus  d'eftre  ignorans:  &  cependant  nous  fora- 
Bies  réplis  d'outrecuidance, penfins  tout  fça- 
uoir.Vcnons  à  ce  mot  de  foy.  Chacun  penfe 
eftre  fidèle  ,  il  femble  que  c'eft  vne  doftrine 
vulgaire,  c'eft  comme  T  a  b  c  des  Chrefticns, 
de  parler  de  la  foy.    Cependant  il  ne  faudra 
qu'viie  fncille  tomber  d'vn  arbre, &  vne  peti- 
te ombre  s'cfcouler.iJ:  nous  voila  efpeidus:& 
encores  qu'iln'yeuft  point  de  péril  apparêt, 
fi  ne  lai/Tons-notis  pas  d'imaginer  beaucoup 
de  chofcs  cil  noftrefantafie  ,  qui  nous  attiiêt 
àdtsfiance.   Q^and  donc  nous  n'inuoquoni 
point  Dieu  en  fermeté  de  coeur,que  nous  fom 
mes  e-^branltz  ayans  eu  quelque  tentation,  & 
me  (rue  que  toute  vertu  nous  défaut,  fçachonsr 
que  la  foy  eft  encores  bien  petite  &  bien  mai 
green  no'. Et  aiiifi  cefte admonition  qui  ncus 
eft  donnée  n'eft  point  fupei  fluc.  Voila  donc 
ce  que  nous  auon.s  à  retenir  de  ce  paflage.  Et 
notamment  fainû  Paul  exhorte  Timothee, 
a'cnfuiure  paix  .luec  tous  ceux  qui  iiiKoquent 
d  m  cœur  tar  le  Seigneur. Oi  cecieft.pour  ré- 
primer ceûe  grande  véhémence  laquelle  a  e- 
tté  condamnée  ci  deflus.  Car  quand  nous  y  al 
Ions  ainfi  à  l'eftourdie,  c'eft  pour  rompre  tou 
te  amitié  ,  &  efmouuoir  guerre  :  car  vne  trop 
grande  ferueur  en  vn  Jiomme  feruira  comme 
de  trompette  ou  de  tabourin  pour  efmouuoir 
vne  alarme. Et  ainfi  la  paix  fur  tout  nousdoit 
eftre  reconimâdecjafin  que  Dieu  habite  &  re 
gne  au  milieu  de  nous.  Et  poiirtâc  fa  met  Paul 
a  regardé  au  vice  qu'il  reprcn.nic  eu  ce  p.iflà- 
ge.quand  not.îmcnt  il  exhorte  &  foJxite  Ti- 
motheede  garder  paixiouyautcjo' ceux  qui- 
iiiuoquéc  de  cœur  pur  le  Seigneur.  Et  de  fait, 
qu.id  nousaurôs  cela,  il  ne  nous  taudra  point 
de  meiUcnre  bride  pour  nous  modeierienco- 
res  que  les  occafîons  fc  prclcntcnc,  <le  nou* 

I]!;.;. 


4-ts 


SERMON      XVI. 


crch.iiiffer ,  c^u'il  y  aura  pour  nous  retenir, 
raoyéiian:  que  nous  délirions  à  nourrir  paix. 
Au  refte  ,  il  cft  du  que  cela  fe  doit  faire  ,i»trc 
tous  ir.tis  fidèles.  Non  pas  que  le' enùns  de 
Dieu  ne  doiucnt  mettre  peine  d'eftre  paifî- 
bles.entanr  qu'en  eux  eft,aucc  tout  le  monde 
(côtne  fainft  Paul  en  parle  au  quinzième  des 
Romains)  mais  cependant  il  adioufte  aufsice 
ftc  e\ccption-la  ,  int .ait  qu'en  tus  efl  .  Et 
pourqiioy?Car  combie-n||ue  nous  ne  donniôs 
point  occatîor\  au\mclchans&  ennemis  de 
Dieud'auoirnul  côbat, qu'ils  ne  Ibyent  point 
irritez  pariniure  qu'on  leurtace,  li  ùut-il 
que  nous  ayons  la  guerre  aacc  eux,  ccpcdant 
que  Satan  fera  ennemi  de  noftre  Seigneur  le- 
lus  CIirift:car  ils  font  menez  de  Ton  cfprit.il 
les  poulie  à  tout  mal.  Et  ainlî, comment  pour 
rons-nous  accorder  auec  eux,  iînon  en  com- 
muniquant à  toute  iniquité?Brief,quiconqucs 
fe  voudra  ranger  .1  la  compagniedes  mefchâs 
pour  leur  couiplaire,  il  l:aut  qu'il  renonce  à 
Dieu  ,&  qu'il  le  feparede  fa  uiftice.  Et  on  le 
voit  :  car  s'ij  y  a  des  gen?  corrompus  &  per- 
uers.li  toft  qu'on  s'accouple  auec  eux,  il  faut 
qu'on  appiene  de  les  fupporter  en  leurs  vi- 
ces :  &  puis  qu'on  demeure  leur  complice,  & 
qu'on  s'enueloppe  auec  eui  en  tout  mefpris 
de  Dieu.  Et  pleuft  à  Dieu  que  les  exemples 
n'en  fuffent  pas  fi  communs  qu'on  les  voit.  Il 
cft  vray  que  telles  gens  fe  plaignent  qu'on 
ne  leur  clt  point  ami.  Mais  ils  voudroyent 
qu'on  s'armaft  à  l'encontrede  Dieu  en  fa- 
ueur  d'eux. voila  ce  qu'ils  défirent.  Or  il  nous 
eft  impofsiblc.  Ainfidonc  nous  deuons  bien 
procurer  paix  &  vnion  auec  tout  le  monde 
tant  qu'il  nous  eft  pofsible,  mais  fi  faut-il  fai 
re  noftre  conte  que  les  mefchans  ne  s'accor 
deront  lamais  auec  nous  ,  3c  qu'il  nous  leur 
taut  taire  la  guerre,  fi  nous  voulons  batail- 
ler fous  l'cnfeigne  de  noftre  Seigneur  lefjs 
Ch ri  ft. Voila  vn  item  qui  nous  doit  eftre  tout 
refolu.  Qjie  refte-ildonc?  Q.ue  nous  ayons 
paix  auec  ceux  qui  reclament  Dieu. Voila  doc 
oii  il  nous  faut  auoir  concorde  &:  fraternité. 
Car  fi  nous  fo*nmes  en  difsipation  8c  en  noi- 
fcs  auec  les  vrais  fideles,àqui  faifons-nous  la 
guerre?  U  eft  vray  que  nous  cuidons  auoir 
qucftion  auec  les  nommes  mortels, mais  fi  eft 
ce  que  nous  moleftons  Dieu  ,  &c'cft  autant 
côrwe  a  nous  venions  à  noftre  clcicnt  le  pro- 
uoquer.  Briïf,  nous  ne  pouuons  pas  nsus  fe- 
parer  d'auec  les  fidèles ,  ni  entrer  en  conten- 
tion auec  eux,  que  Dieu  ne  fe  monftre  noftre 
partie  aduerfc.  Tant  plus  donc  nous  faut-il 
tafcherd'auoir  paix  auec  tomceux  qiiiinuo 
qucnt  Dieu.  Et  ainfi  cognoiflons  qu'iln'y  a 
ne  foy  oe  charité  en  nous,finon  que  nous  fo- 
yons  mis  iufques  Id.d'auoir  cette  communion 
fraternelle  qui  nous  conioigne  ,  tellement 
qu'vn  cliacun  prefte  la  mainifes  prochains, 
êc  que  nous  tafchios  d'induire  les  vns  les  au- 
tres pour  feruir  à  Dieu:qu'vn  chacun  s'effor- 
ce de  tant  fon  pouHoir  de  feruir  ,i  ceux  q«i 


ont  befoinde  fonaide  ,  &qoe  far  totit  nous 
craigHiôj  que  le  diable  n'allume  quelque  feu 
de  difcorde  entre  nous. Car  c'eft  autant  cônie 
fi  nous  voulions  dechaffer  Dieu  de  noftre  c3 
pagnie,  d'autant  qu'il  n'a  point  promis  d'ha- 
biter finon  auec  ceux  qui  viuronten  paix.  Et 
pourtant,  fi  nous  voulons  eftre  approuuez  £- 
glife  de  Dieu,  Se  troupeau  de  noftre  Seigneur 
Icfus  Chrift  ,  que  ccfte  fraternité  fe  monftre, 
&.'  qu'elle  fe  cognoirte.  Cepédant  pource  que 
bc.uicoup  réclament  le  nom  de  Dieu,  qui  toU 
tcsfois  monftrent  trefmal  qu'ils  foyent  des 
ficns.faind  Paul  met  ici,  D'yn  cccur  pur.  11  cft 
cft  vray  que  ce  mot  Inuoquer,  fe  peut  prendre 
en  deux  iortcs;mais  le  tout  renient  àvne  do- 
ctrine. Quelque  fois  l'Efcriture  fauiûe  dw-a 
iiiuoquerle  nom  de  Dieu(comme  nousauons 
veu  par  ci  deuât  que  S.Paul  difoit,Tous  ceux 
qui  inuoquct  le  nomdu  Seigneur.qu'ils  fe  dé- 
partent d'iniquité)  c'eft  à  dire,  Réclamer  le 
nom  de  le  fus  Chrift  ,  eftre  intitulez  de  luy. 
Comme  quand  on  nous  appelle  Chreftiens, 
alors  il  elîdit  que  nous  reclamons  le  nom  de 
Dieu, que  nous  portons  la  marque  du  Fils  de 
Dieu. Et  en  ce  pall.ige  il  fe  peut  bien  prendre 
ainfi.  Mais  l'intention  de  S.  Paul  eft  de  mar- 
quer ici  la  première:  quand  il  parle  d'inuo- 
quer  Dieu,  c'eft  de  recourir  à  luy  ,&le  fup- 
plier  quand  nous  fommes  en  quelque  necclsi- 
té.Et  pource  que  l'oraifon  eft  le  principal  fer 
uice  ,  &  corne  le  facrifice  fouuerain  que  Dieu 
dcmâde(ainlî  qu'il  en  eft  parlé  au  Pfeau.jo.) 
quelque  fois  fous  vne  efpece  le  tout  eft  com- 
prins  en  l'Efcriture  faint>e:c&  quâd  on  parle- 
ra de  ceux  qui  inuoquent  Dieu  ,  c'eft  .à  dire, 
qui  l'aiment, qui  le  Icruent.qui  luy  font  hôma 
ge,qui  l'adorent  côme  il  appartiét.  Car  Dieu 
ne  s'adore  point  £n  cérémonies  :  quand  nous 
ferôs  beaucoup  de  mines,  ne  péfons  pas  nous 
eftre  acquittez  par  cela  du  feruice  de  Dieuile 
principal  qu'il  demâde  de  nous,  c'eft  quÈ  par 
prières  &  oraifons  nous  proteftions  que  nous 
fommes  dcfnuez  de  tout  bien  ,  qu'il  n'y  a  en 
nous  que  toute  mifere,  &  que  c'eft  à  luy  qu'il 
nous  faut  auoir  noitre  refuge, &  que  nous  luy 
facions  hommage  de  tous  (es  bénéfices.  D'an 
tant  dôc  que  le  rray  foruice  que  Dieu  demaa 
de, c'eft  l'oraifon  ,  voila  pourquoy  inuoquer 
le  nom  du  Seigneur,  fe  prend  pour  l'honorer 
Se  feruir.  Et  voila  pourquoy  il  eft  dit  que  no* 
blafphemons  fon  nom,  quand  nous-nousde- 
ftournons  de  fon  feruice.S. Paul  parle  bien  ici 
de  ceux  qui  inuoquent  le  nom  du  Seigneur, 
mais  cependant  iladioufte, D^rorwrfarrpour- 
cc  qu'il  y  a  toufiouri  beaucoup  d'hypocrites 
méfiez  parmi  le  troupeau,lefquelsfe  moquent 
du  nom  de  Dieu, combien  qu'ils  en  facét  leur 
couuerture.Orauecceux-la  eft-il  pof.ible  d'à 
uo;r  paix.'Mais  ils  nous  font  plusgrans  enne- 
mis que  ne  l'ont  pas  ceux  qui  reiettét  du  tout 
l'Euangile.  IJ  cft  vray  que  les  Prophètes  ont 
eu  de  grans  combats  contre  les  idolâtres  :  Se 
autant  en  a-il  efté  des  Apofttes  &  des  Mar- 
tyrs 


SVRLA   II    A    TIMOTH. 


42-7 


tyrs  :  mais  cependant  ils  ont  eu  plus  de  dif- 
ficulté beaucoup  pour  les  ennemis  intérieurs 
&daiiicftnjues  ,  pour  ceux  <|ui  à  pleine  bou- 
che le  vântoycntd''tfhe  du  peuple  de  Dieu, 
ficneantmoios  cftovent  malins  &  peruers.  Il 
t'en  faut  donc  beauconp  cjue  nous  puifiions 
iuoir  paixauec  telles  gens:  combien  qu'ils 
facentde  grandes  Icuecs  de  bouclier,  qu'il 
femblera  qu'il  n'y  en  ait  que  pour  eux,  qu'ils 
foyent  les  plus  grans  fuppofts  de  la  Clirc- 
ftienté  ,  fi  fàut-il  qu'ils  foyent  nos  ennemis, 
que  nous  bataillions  vaillamment  contr'tux: 
car  ce  font  ceux  qui  troublét  plus  l'Eglife  de 
Dicu,&  qui  nuifcnt  d'auantage  :  car  ils  ont  le 
moyen. Vne  apoftume  quand  elle  fera  dedans 
le  corps  ,  eu  beaucoup  plus  dangereufe  que 
ne  feront  pas  beaucoup  d'autres  qui  apparoi- 
ftront  ,  car  on  y  pourra  donner  remède  plus 
facilement  :  &  celle  qui  eu  dedans  le  corps 
pourrira  tout.Ainlîen  eft-il  de  ceux  qui  font 
nieflez  parmi  les  fidèles, &  cependant  fc  mo- 
quent de  Dieu.lcmefprifent,  &s'eleuent  con 
trefaparole.il  lautdôc  que  nous  ayons  touf 
iours  des  combats:&:  notamment  nous  en  fom 
mes  aduertis  en  ce  paflàge,afin  qu'vn  tel  l'câ- 
dale  ne  trouble  point  les  infirmes.    Qj^and 
nous  voyons  qu'il  faut  que  les  ftruiteurs  de 
Dieu,&  fur  tout  ceux  qui  ont  charge  d'anon- 
cer  fa  parole  ,  que  ccux-la  ayent  des  picques 
quâd  il  y  a  gens  qui  leur  rcilftcnt, qu'il  fe  tail- 
le drefler  côtr'eux,ne  nous  esbahilTons  point 
de  cela  ,  mais  ayons  pour  tout  refolu  qu'il 
faut  qu'ainlî  foit ,  &  que  Dieu  nous  veut  ainfi 
exercer.  Cependant  que  nous  auifions  quand 
vn  homme  inuoque  Dieu  en  pureté  de  cœur, 
de  l'entretenir,  &:  ne  kiy  donner  point  occa- 
fion,  non  feulement  de  fe  desbaucher  ,  mais 
d'eftre  contriilé  par  nollre  violence:  pluftoft 
que  nous  demandions  de  nourrir  paix  &  v- 
jiion  auec  luy.  Voila  donc  ce  que  nous  auons 
a  noter  en  ce  paflage.  £t  cependant  nou;-  a- 
uonsaufsià  rtcutillir  vnedoûrine  en  gc.ie- 
ral.d'inuoqlier  le  nom  de  Dieu,no(i  ftuTeméc 
de  la  bouche  ,  afin  que  celte  reproche  qui  tlt 
au  Prophète  Ifaie  ne  s'adrtllê  pointànoiis, 
I/j.ip.iî  Ce  peuple  m'honoredes  leures,  mais  le  coeur 
cft  bien  loin  de  moy  :  gardons-nous  (  di-ic) 
que  Dieu  ne  nous  accufcd'-vne  telle  feintifet 
&  pourtant  fi  nous  reclamons  fon  nom  ,   que 
nous  apprenions(fuiuSt  ce  qui  fut  traitté  n'a- 
gHeres)de  nous  depai tir  de  toute  injquité:en 
coresque  nousen  loyons  aAiegezde  toutes 
parts ,  &  que  Je  diable  nous  fufcitc  beaucoup 
d'infeiftioBs  au  milieu  denouspour  tout  cor- 
rompre ,  que  nous  foyons  feparez  des  mef- 
thans  :  encores  qu'il  nous  faille  cftre  en  leur 
compagnie  pour  vn  tfps,c'eâ  àdirCiConuer- 
fer  auec  eux  quant  au  monde ,  qu'il  nous  faut 
fuir  toute  priuauté, en  forte  que  nous  ne  foy- 
ons point  accoujJlez  corne  fous  vn  ioug  auec 
«ux.  Et  cependant  notons  bien  que  ce  n'cft 
point  aflez  de  cheminer  honneftcment  deuSt 
es  hommes, mais  le  piincipal  cil  de  ccfte  pu- 


E 


reté  de  cirur  ,  car  Dieu  ne  s'arrcfte  point  à 
l'apparence,  (comme  il  en  efl  parlé  ,  &  cômc 
il  tut  dit  à  Samuel  )  mais  il  regarde  le  cccur.  r-  S-tmit. 
Ainfi  donc  que  nous  apprenions  fur  tout  de  1S.7. 
nous  purçer  de  toute  fiction  &inalice  quand 
il  eft  queltion  de  réclamer  le  nom  de  Dieu, 
car  lors  nous  pourrôs  dire  en  vérité  que  nous 
fommes  Chreiliens.que  Dieu  nous  aduoue  de 
fon  peuple,  quand  nous  ne  ferons  point  dou- 
bler,q  nous  ne  ferons  point  fardez  pour  nous 
contrefaire  deuant  les  hommes ,  &  pourac- 
querir  bonne  réputation,  mais  que  nous  che- 
minerons droitement  en  toute  honnefteté  de 
vie,que  nous  inuoquerons  purement  Dieu, en 
cores  que  nous  n'eufsions  d'autres  tefinoins 
que  luy  ,  quand  il  nous  auouera  ,  nous  ferons 
purgez  de  toute  traude  &:  malice.  Et  cepen- 
dant ,  pource  qu'aulsi  les  queftions  vicncnt  à 
riotes  ,  &  que  ce  font  autant  de  côbats,  fainft 
Paul  veut  que  Timothee  s'adonne  a  édifier, 
qu'il  rej:ardc  ce  qui  fera  vtilc  au  peuple  de 
Dieu,  côme  nous  l'auons  veu  deiîa  par  ci  de- 
uant.Il  ne  luy  cômande  rien  denouueau-.mais 
en  cela  pouuons-nous  iuger  que  c'eft  le  prin- 
cipal qu'ont  à  faire  les  Hiiniflres  de  la  paro- 
le de  Dieu,  c'tfl  afçauoir  de  n'eftre  point  me 
nez  d'ambition  pour  fe  faire  valoir  ,  ne  pour 
appeter  chofes  qui  ayent  belle  niôftre  &  para 
de  quant  aux  hommes,  mais  qu'ils  fe  conten- 
tent de  fcruir  à  Dieu,  &  à  Iturs  prochains,  & 
à  dôner  inftruftion  propre  à  ceux  aufquels  ils 
lont  cômis. Voila  doiiç  où  S.  Paul  ramené  de 
redief  Timothee, fuiuant  ce  qu'il  auoit  dit  ci 
deffus.    Ileft  vray  que  ce  paflage  ne  fe  peut 
pas  du  tout  defpefcher  maintenant,  il  faudra 
qu'ilfoit  rcferué  pour  l'aprefdineeimaisquoy 
q'.i'il  en  foit,apprenons  (iedi  nous  qui  auons 
la  charge  d'anoncer  la  parole  de  Dieu)  d'eui 
ter  toutes  que/lions  triuoles, que  nous  ne  taf- 
chions  de  mettre  en  auaiit  que  toute  bonne 
doi5trinc,qui  (oit  poui  toufiours  confermerle 
peuple  en  la  crainte  de  Dieu  Se  en  foy,  pour 
l'inciter  à  prières  &:  ora^fons.pour  luy  mon- 
ftrer  q  tout  fon  falut  procède  d'eiihaut ,  afin 
que  toute  gloire  humaine  foit  abhatue.  Voila 
(di-ie)far  quoy  il  nous  faut  infilier  Se  trauail 
1er  fans  fin  &  fans  celTe.Or  comme  nous  auôs 
ici  noitre  leçon, auAi  toute  la  compagnie  des 
fidèles  e/laduertie  de  n'appeter  autre  Uoctri 
ne  fînon  celle  qui  luy  profitera  â  l'cdifier  en 
foy, en  repentance  &  en  crainte  de  Dieu.  Voi 
la  donc  à  quelle  intention  il  nous  faut   venir 
au  temple:  que  nous  n'y  venions  point  eftans 
menez  de  quelque  appct't  volage  :  car  nous 
prophanons  la  parole  de  Dieu  ,  ?c  ne  fommes 
pas  dignes  de  reccuoir  nulle  mfiruclion  qtri 
nous  foit  bône  pour  ncftrc  falut,  qu.îd  nous  y 
venc5s  ainfi.  Voulcs-nous  donc  cftre  difpofez 
pour  cftrc  viais  dcolierj  de  Dieu  &;  de  noftre 
Seigneur  Icùis  ChiifL'  Q_ue  no'avôsceftc  af 
feifion-lad'ouirvne  doilrinequi  no'  foit  eu 
édification.  Et  cepédant, combien  que  noftre 
chair  nout  pouflcS:  nous  folicited'appeter 

Hh.ii. 


4iS 


SERMON    XVII. 


Ate  qneftions  Taines,  que  nous  refiftions  à  ce- 
la, comme  àvnechofe  pernicieufe  .Scdamna- 
ble,  &  que  nous  facions  le  femblablc  fi  nous  li 
fens  en  noftre  piiué.Car  fi  toft  que  nous  pre- 
nons la  parole  de  Dieu  en  vain  ,  ou  que  nous 
dtuifoni  de  luy ,  il  fauc  que  cela  nous  viene  au 
dcuant,  que  le  nota  de  Dieu  apporte  auec  f'oy 
vne  telle- maiefté  ,  que  c'eft  bien  railon  que 
tout  genouil  fe  ployé  deuant  luy  ,  non  feule- 
ment par  dehors ,  mais  en  nos  âmes  ;  que  de 
toutes  nos  penfees  &  affeftions  nous  ne  de- 
mandions finon  de  nous  affliiettir  à  luy,&  que 
nousauof.s  apprins  de  le  feruir  &c  honorer: 
■  q  nous  (oyons  toufiours  tant  mieux  alFcrtion- 
nezdele  prier  que  Ion  Royaume  florifle  & 
profpere  iufques  à  ce  qu'il  viene  à  fa  perfe- 
âion. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 


facedenollrebon  Dieu  en  «ognoiflance  de 
nos  fautes ,  le  prians  qu'il  luy  piaifi  nous  les 
faire  fentir.voire  tellement  qu'auec  vraye  rc- 
pentSce  nous  foyons  induits  à  recourir  à  luy, 
rcnonçansàtousnosdefîrs&affedions  pour 
nous  conformer  à  fa  iuftice.  Et  nonobflSt  que 
quelque  chofe  que  nous  tafchions  de  le  feruir 
en  ce  monde,  il  y  ait  toufiours  beaucoup  de  vi 
ces,  qu'il  luy  plaife  nous  fjpporter  ,  iufques  à 
ce  qu'il  nous  ait  attirez  à  foy,&  q  nous  foyons 
non  feulement  exemptez  de  ce  que  nous  a- 
uons  à  faire  par  la  Loy  ,  mais  que  nous  rece- 
uions  la  doéinne  de  foy  &de  repentance  pour 
cheminer  en  telle  pureté  de  vie,  tellement  que 
nous  monftrions  que  fa  gloire  reluit  en  nous, 
8c  que  fon  image  y  eft  réparée  par  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift  .  Ainfi  nous  dirons  tous. 
Dieu  tout-puiflànt,Pereceltfte,&c. 


DIXIEME      SERMON     SVR     LE 

SECOND     CHAPITRE. 

i3  lÊ.treiettclcs  queHions  qui  font  folles  (^  fans  inîlruSlïon, 
[cachant  quelles  engendrent  débats. 

14  Or  ne  faut-  il  point  que  le  jcruitcur  du  Seigneur  dehate,  mais 
au  il  fait  henin  enuers  tous, propre  a  enseigner,  portant  patiemment  les 
mauuaisy 

X 5  Enfeignant  auec  douceur  ceux  qui  refiflet  pour  cjjayerfi  quel- 
quefois Dieu  leur  donnera  repentance  pour  cognoijïre  la  "venté, 

z6  Et  qu'ils  reuienent  hors  des  laqs  du  diahle,ejlans  prins  de  luy 
a  fa  yolonte. 


Ous  âuons  commécé  ce  ma- 
j  tin  à  expofer  cefte  fentence 
I  de  faind  Paul, en  laquelle  il 
i  défend  les  queftions  qui  ne 
font  pas  vtiles  pour  noftre 
fallu.  Or  afin  qu'on  ne  s'y 
plaife  point ,  ii  les  appelle 
folles  :  non  pas  que  la  plus  part  du  moncie  les 
iuge  telles  :  car  il  ftmbleiaqu'vn  homme  foit 
bien  fubtil  &  aigu  quand  il  pourra  mettre  en 
auant  quelques  ditficultez  qui  ne  feruiront  fi- 
non à  noyer  les  efpiits  quand  on  s'y  tourmen 
tera  beaucoup  ,  voire  pour  n'y  trouuer  nulle 
jflue  :  &  cependant  on  ne  i'çait  à  quel  propos 
,on  a  difputé  &  combatu.  QjK'y  qu'il  en  foit, 
,vpila  qiie  beaucoup  de  gens  ont  en  grade  efti- 
pie  ,  c'eft  qu'on  amené  des  queftions  friuoles. 
Mais  tant  y  a  que  la  vraye  fagelFe  des  enfans 
de  Dieu  eft,de  cheminer  en  fa  crainteuout  ce 
tliiine  peut  de  rien  feruir  à  cela  ,  cft  condam- 
ne par  le  fainttEfprit  comme  friuoJe. Et  c'eft 
vn  beau  partage.  Si  on  nous  dit  (comme  aufw 
toute  rEfcriture  parle)que  I-l  fageflcdes  hé- 
lucs  cft  de  craindre  Dieu,  chacun  le  confcflë- 


ra:mais  cependant  nous  n'entendons  pas  que 
cela  vcutdire:car  au  lieu  de  nous  occuper  à  ce 
qui  nous  peut  faire  craindre  Dieu, nous  eïtiâ 
uagons  en  chofes  vaines  Se  fiiuoles .  Et  voila 
où  chacun  employé  quafi  toute  fa  yie,  &  no- 
ftre efprit  y  cft  enclin  de  nature:car  nous  n'ai 
mons  que  vanité. Et  ainfi  beaucoup  le  repaif- 
fent  de  vent:qui  plus  cft, les  plus  gians  cfprits 
qui  pourroyent  feruir  en  l'Eglife  de  Dieu,  ie 
lafchcnt  la  bride  pour  s'cnquenr  de  chofes 
inutiles  &  fupcrflues ,  &  cependant  dclaiflcnt 
ce,  qui  eftoit  propre  pour  auoir  bonne  doftrr- 
ne.  Et  pourtant  retenons  bien  ce  que  fainft 
Paul  rcmouftre  en  ce  palTage, c'eft  que  quand 
vne  doflrine  n'eft  point  profitable  ,  combien 

3u'on  la  puiiTe  prifer  comme  haute  &  profon 
e,toutc^fois  qu'il  n'y  a  que  folie. La  raifon? 
,C'tft  celle  que  l'ay  défia  amenée  :  c'eirafçà- 
iioirque  nous  n'ayons  aiitçe  pcnlec  finon  t(e 
craindre  Dieu.  Or  notamuieiu  ciuand  iainït 
Paul  parle  d'inftiuiflion  .ilfigiufic,  non  pas 
que  nous  foyôs  reputcz  fçauas  &gr.is  clercs, 
mais  que  nous  {oyons  cnfcignez  .\  pi ofit, (co- 
rne on  dit)  que  nous  fçachions  outre  noftre 

fcience, 


SVR     LA   II.     A     TIMOTH. 


419 


fcience,  8c  ce  qne  nous  aurons  entendu  ,  qu'il 
faut  quMy  ait  effcftqui  sVnfuyue.  Mainte- 
nant nous  voyons  comme  le  poure  monde  n'a 
pas  eflé  aueuglé  fans  caule  :  car noftre appétit 
tretille  toufîours,que  les  hommes  veulent  fça 
uoir  plus  qu'il  nclcurelT:  licite  ,&  ne s'amu- 
fent  linon  àdes  menus  tacras .  Il  eft  vray  que 
ils  diront  bien  que  ce  (ont  grans  fccrets:  mais 
tant  y  a  qu'il  n'y  a  nulle  vtilité  .  Dieu  donc  a 
iuftement  puni  vue  telle  ambitiou  pource  que 
les  hommes  ont  par  trop  delîréd'ouir  chofcs 
fiiuoles,  Se  n'ont  point  regardé  ce  qui  les  pou 
uoit  édifier  en  la  crainte  de  Dieu, il  a  falu  que 
Dieu  lafchaft  la  bride  à  Satan  pour  les  fedui- 
re.  Et  ainiîcognoiflons  que  c'a  efté  vne  iufte 
vengeance  de  Dieu  fur  l'ingratitude  des  hom 
mes,  quand  il  y  a  régné  tant  de  folies  &  de  fu- 


aufsi  de  les  repoufler  loin,&:  les  banr.irdu  mi- 
lieu de  nousrcarc'efb  nousempoifonner  à  no- 
flrcefcient, quand  nous  leur  donnons  accès  & 
ouuerture.  Voila  donc  pourqiioy  fainû  Paul  a 
mis  netamment  que  les  queftions  inutiles  ne 
font  qu'efmouuoir  dcbats.voire  pourconfer- 
mer  l'exhortation  qu'il  auoit  faite  de  les  re- 
ietter.Carli  nous  n'appcrccuons  que  telles 
queftions  nous  portent  dommage  ,  iamais 
nous  ne  les  pourrons  fuir.  Et  pouiquoy  ?  Car 
noftre  nature  nous  y  folicite  (  comme  dc/ii 
nous  auons  dit  )  ccfte  maudite  cupidité  a  fa 
racine  fi  profonde  en  nous  ,  que  iamais  nous 
ne  pourrons  hayr  ccfte  vanité,  que  nous  ne 
ayons  appeiceu  qu'il  nous  en  faut  garder 
comme  de  quelque  poifon,&  d'vne  chofe  mor 
telle  .  Mais  après  que  famft  Paul  a  parlé  des 


perftitions,  q  toute  laventéa  eftéconuertie  noifes&debats.iladioufte.QK'/YKf/^îwt  (>jr»t 

en  menfonge  .  Or  quand  nous  venons  à  l'e-  tju'vn  fnnit.urJe  Dieu  dchatt  ,mais  au'il  foit 

fchole  de  Dieu  ,  il  nous  faut  préparera  re-  dehcvnaire,t^u'il  fait  fatitnt,  O'  ffofre  À  cnfei- 

ceuoir  doûrine  qui  nous  férue,  &  que  nous  ^f«r.Yciil  veut  conclure  que  tous  ceux  qui 

foyons  addonnez  à  cheminer  comme  il âppar  s'addonnent  à  queftions  friuoles  ,  moiifticnt 

tient  en  toute  fainfteté  de  vie.  Si  cela  n'cft,  bien  qu'ils  n'ont  nuldefir  ne  ïdedeferuir  à 

nousflbufons  de  la  parolede  Dieu  ,  &  la  pro-  Dieu  .  Car  quand  vn  homme  fera  le  plus  fça- 

phanôs  entant  qu'en  nous  eft:  aufsi  Dieu  nous  uant  qu'on  pourra  dire,  fi  nous  le  faut-il  cfti- 


rend  vn  fal.iire  tel  qMc  nous  l'auons  mérité, 
que  nous  fommes  abbruuez  de  mêfon^es,d'au 
tant  que  nous  n'auons  point  cerché  d'cftre  e- 
dificz  en  luy  comme  il  appai  tenoit.  Or  voyas 
que  Dieua  exercé  vn  fi  horrible  lugcmcnt  fur 
la  terre  ,  c'eft  qu'il  n'y  a  eu  nulle  inftruûion, 
mais  au  contraire  il  n'y  a  eu  que  munfonge;  & 
refueries.â:  q  ceux  qui  ont  cfte  reputcz  Tiieo- 
logiens,&  q  11  auoycnt  toute  lalagelTedu  niS 
de.ont  toutabbruué  de  leurs  menfonges,yoy- 
'ans  cela, tant  plus  deuon  -nous  obfeiuer  celte 
admonition  de  fainâ  Paul.afin  de  nous  ranger 
à  ce  qui  nous  peut  feruir,5c  eft  vtile  pour  nous 
amener  à  la  crainte  de  D.eu  Se  en  foa  obcif- 
(ance.  Et  combien  que  le  monde  applaudilJe  à 
ces  queftions  friuoles,que  nous  fçachions  que 
il  n'y  que  tolie  &  vanité, fclon  que  le  faintt  E- 
fprit  en  prononce  en  ce  lieu  ,  puis  qu'il  n'y  a 
point  d'édification  ne  profit .  Au  rcfte,  fainû 
Paul  voyant  qu'il  eft  bien  difficile  de  retenir 
les  hommes  qu'ils  ne  s'occupent  par  trop  aux 


mer  comme  vn  diable  du  tout  deft  fperé, quand 
nous  verrons  qu'il  n'a  point  ccfte  alfcûion- 
la  de  feruir  à  Dieu ,  quand  il  n'aura  point  ce- 
fte  fin,  &  ce  but-la  que  Dieu  foit  honoré  .  £c 
de  faift,  ce  n'tft  pas  fans  caufe  qu'il  a  efté  dit 
en  prouerbe  ancien,  que  le  fçauoir  en  vn  hom 
me  qui  ne  fe  range  pas  àdroiture,  eft  comme 
vne  efpec  en  la  main  d'vn  furieux  ,  ou  d'vn 
phrenctiquc.  Voila  dore  l'intention  de  fainû 
Paul,  c'eft  de  marquer  tous  ceux  qui  font  ad- 
dorncz  à  content  ion, à  ce  qu'on  lesdetefte,  & 
qu'on  les  ait  en  exécration  ,  comme  gens  qui 
ne  demandent  nullement  àfciuirà  Dieu  .  Et 
pourquay  ?  Car  cefont  chofes  incompatibles 
comme  le  feu  &  l'eau.de  feruir  à  Dieu,&  d'ap 
peter  combaiSiS;  difputes  quin'engédrent  fi- 
non  noifes  &  riotes.  Or  nous  pouuons  recueil 
lir  d'ici  côbien  il  y  en  a  peu  qui  méritent  d'e- 
ftre  rcputez  vrais  ftruiteurs  de  Dieu.  Car  cô- 
bien en  voit-on  qui  fans  propos  ne  demardét 
que  d'eimouuoir  quelques  difputes  pour  ticu 


chofes  triuoles, pour  nous  faire  dctcftercequi    Mer  l'Eglife?  Combien  y  a-il  auiourd'huy  de 


n'eft  point  propre  pour  nous  ed:fier,iladiGU- 
fte.Quf  cela  ne  fait  cjii  engcndr'r  com/Mfi.Nous 
voyons  donc  que  les  hommes  ont  ce  fol  appc 
tit  qui  les  mené  de  fe  faire  valoir  en  queftions 
aigites  &  fubtilcs,&  q  le  monde  aufsi  y  court. 
Se  qu'il  fe  tourmente  après  cela.  Voyans  donc 


boutcf,  ux  ,  combien  qu'ils  foyent  gens  igno- 
rans,&  qi'afidu  tout  beftcs,qui  ncantnioins  ne 
laiflent  pasde  fe  vouloir  monftrer  en  tfmou- 
uant  des  troubles  ?  hilais  d'autant  plus  nous 
fant-il  bien  noter  ce  pairage,afin  que  ceux  qui 
ont  charge  d'anoncer  la  parole  de  Dieu  ,  co- 


que nous  femmes  ainfi  deftourncz  ,  retenons  gnoiftent  qu'ils  ne  fe  pourront  iamais  acquit 
bien  ce  qui  nous  eft  ici  dit,  c'eft  afçauoir  que  ttrfidckment  deleur  office, qu'il' ne  fe  foyét 
quand  nous  aurons  perdu  noftre  temps,  il  y  rangez  à  ce  que  fainfl  Paul  monftre  ici,  c'fft 
auiavnphis  grand  mal  ,&- plus  morte!, c'eft  de  fuir  tous  combats  &:  noifes. Et  ccpcndant'il 
que  nous  ferons  infedez  decontétions  &■  noi-  y  a  atif;i  inftruflion  cômune  à  tout  le  peuple, 
fes,  au  lieu  que  nous  deuons  eftre  paifibles  a-  Car  il  no'eft  necefiairede  bien  difccrneren- 
uec  tous  fidèles.  Car  (  comme  il  a  efté  tiaitté  tteles  feruiteuis  de  Dieu  ,  d;  les  hypocrites 
ce  matin)  fi  c'eft  grand  pitié  de  veoir  en  l'E-  qiiiabulentdefon  nom  .  Or  voici  vne  marque 
glife  de  Dieu  des  combats, apprenons  non  fcu  infallib'le, c'eft  que  quand  nous  verrons  vh  hô 
Jenient  de  fuir  toutes  queftions  friuoles,  mais  me  riotcux,  qui  ne  demandera  finon  à  trouucr 

i;h.iii. 


45<? 


SERMON     XVII. 


cinq  pieds  en  vn  mouton  (  comme  on  dit  )  il 
nous  le  iaiit  reiettcr  comme  vue  perte  mortel 
le.lçachans  bien  que  quelqnc  cliole  qu'il  pro- 
tcftcil  ne  veut  finon  feruir  à  Satan,  &  qu'il  ne 
tend  nullement  â  édifier  l'Eglife  de  Dieu. 
Voila  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paf- 
lage  de  famû  Paul ,  où  il  el\  dit  que  le  ferui- 
teurde  Dieu  ne  doit  point  eftreaddonnéàcô 
bats. Or  cependant  il  expofe  comment  cela  fe 
peut  faire:c'eft  alçauoir,Q^.i»(f»o«j yi-ronx  be- 
nins  entttrj  touSy  proprrs  à  tnfcigner,  Çy  fatiens 
«»  mal .  En  difant  qu'il  nous  faut  eftre  bénins 
cnuers  tous,  il  entend  que  nous  deuons  eftre 
faciles  Jcaifez  pour  receuoir  tous  ceux  qui 
viendront  pour  élire  enfeigncz  en  l'Euangi- 
le.Car  lî  nous  ne  leur  dônons  accès,  c'eft  com 
me  leur  fermer  la  porte, que  lamais  ils  ne  pour 
ront  approcher  de  Dieu.  11  faut  doc  que  nous 
ayons  ccfte  humanité  &  douceur  en  nous.d'e- 
llre  prefts  à  receuoir  tous  ceux  qui  demandent 
à  eltre  enfeignez.  Et  voila  pourquoy  il  adiou- 
ile  ,  Q«  ''  nous  faut  ejlre  piopris  à  eiifiigmr: 
comme  s'il  difoit,quc  ce  font  cliofes  conioin- 
les.la  douceur, &  la  dextcrité(qu'on  appelle) 
d'enfeigner  .  La  raifon,  c'eil  que  fi  vn  homme 
eftfauuage  &inacccfsible,iamais  on  ne  pour- 
ra receuoir  doânne  de  luy.  Il  faut  donc  que 
celuy  qui  veut  eftre  bon  docteur  ,  foit  débon- 
naire ,  &  qu'il  ait  quelque  moyen  d'attirer 
ceux  qui  vienent  .î  luy,  afinde  les  gagner  :  & 
cela  ne  fe  peut  faire,  qu'il  n'y  ait  ceite  man- 
fuetude  dont  parle  ici  ûinft  Paul.  Nous  voy- 
ons donc  maintenant  comment  il  a  voulu  con 
fermer  ce  qu'il  a  touché  ,  c'eftafçauoirqu'vn 
homme  noifeux,&:  addonné  à  difputes  Se  con- 
tentions,n'eft  nullement  feruitcur  de  Dieu.Et 
pourquoy?  Car  feruaiit  à  Dieu  ,  ne  faut-il  pas 
que  nous  tafchions  de  gagner  les  poures  igno 
rans.'Et  cela  ne  fe  peut  faire  que  nous  ne  foy- 
ons  paifîbles ,  que  nous  n'efcoutions  patiem- 
ment ce  qu'ils  apportent,que  nous  ne  fuppor- 
lions  leur  infirmité.iufques  à  ce  que  petit  à  pe 
lit  ils  foyent  édifiez. Si  nous  n'auons  cela,c'eft 
comme  les  reietter .  Or  eft-il  ainli  que  ceux 
^ui  ne  demandent  que  difputes  troublent  les 
efprits .  Ils  n'ont  garde  donc  de  les  faire  ap- 
procher de  Dieu, mais  pluftoft  ils  les  cfFarou- 
thent.Et  pouttant  c'eft  vnechofe  toute  prou 
iiee&  conclue,  que  quand  vn  homme  eft  ad- 
donné .àcuriofite&:  contention,  il  ne  deman- 
de finon  à  ruiner,au  lieu  d'édifier, que  Dieu  ne 
a  là  nul  honneur  ne  reuerence  ,  qu'on  ne  cer- 
che  point  qu'il  foit  ferui,  mais  tout  le  contrai 
re.  Voila  donc  en  fomrae  là  où  fainft  Paul  a 
prétendu.  Or  de  ceci  nous  pouuons  recueillir 
qu'à  tous  ceux  qui  ne  font  point  propres  à 
enfeigner.on  ne  doit  point  attribuer  le  nom, 
le  titre,  l'honneur, &  la  dignité  de  Prélats,  de 
Euv.fqucs,  de  Miniftres  ,  &  de  Paflcurs  .  Car 
fainft  Paulcontlud  que  tous  ceux  qui  ne  font 
point  propres  à  enieigner.doyucnt  eftre  ra- 
clez du  nombre  &  du  rang  des  feruiteurs  de 
Dicu.  Noos  voyoas  donc  que  le  Pape  &  tou- 


te celle  ordure  de  fon  Clergé  (  qu'iJ appelle) 
font  par  trop  eiTiontez,  quand  ils  fe  vantent 
de  leur  Hiérarchie  celefte,  qu'ils  font  l'Eglife 
de  Dieu,  qu'Us  font  Pafteurs  &  Prélats.  Nous 
ne  leur  porterions  point  enuic  de  cela, moyen 
nant  qu'ils  monllraflent  dequoyimais s'ils  vea 
lent  qu'on  les  croye,  qu'ils  monftrcnt  ceftc 
enfeigne  q  fainft  Paul  a  mife  ici:  c'eft  le  vray 
niarreau,  afin  qu'on  fçache  qu'ils  font  ferui- 
teurs de  Dieu.Or  eft-il  ainiî  qu'ils  font  chiés 
muets  :  ils  fçauront  bien  mordre  &  ronger: 
(  comme  on  voit  qu'ils  difsipent  le  troupeau 
de  Dieu)&  s'ils  nefaifoyent  que  gourmander 
le  bien  &  la  fubftancc  des  poures.ce  feroit  def 
ia  vn  trop  grand  mahmais  ce  font  gouffres  de 
enfer  pour  aby  fmer  les  poures  âmes. Au  reftc, 
qu'il  forte  de  leur  bouche  vn  feul  mot  de  do- 
ctrine, on  voit  qu'il  n'y  a  nul  d'entr'eux  qui  y 
penfc  :  pluftoft  ce  feroit  deroguer  à  la  dignité 
epifcopale  :  car  ils  font  empefchez  à  d'autres 
chofcs  qu'à  porter  la  parole  de  Dieu. Puis  que 
auifi  cil  donc  que  ceux  qui  fe  nomment  Pré- 
lats &  Euefques  en  l'Eglife  Papale  n'ont  nul- 
le doftrine  en  eux,  &  tant  moins  il  leur  chaut 
d'édifier  le  peuple, on  peut  veoir  que  le  fainû 
Efprit  les  condamne  ici ,  &  déclare  qu'ils  ne 
doy  ucnt  élire  nullement  tenus  pour  tels  qu'ils 
ié  vantent.  Et  pourquoy  ?  Car  ce  font  chofes 
coniointes&  infeparables  d' élire  pafteurs  de 
Eglife,  &  d'eftre  prefcheurs ,  comme  fainft 
Paul  le  monfti e  ici .  Au  refte ,  fi  nous  voulons 
enfeigner  comme  Dieu  le  commande,  notons 
que  cela  le  doit  faire  aucc  afFeftion  de  gagner 
ceux  qui  nous  efcoutent.Car  s'il  nous  fuffitde 
auoir  bien  parlé  ,  &  que  nous  ne  tafchions 
point  de  redune  au  chemin  de  falut  ceux  qui 
en  font  cfgarez,  &  que  fera-ce  ?  Fy  de  tout  le 
titre  &  dignité  d'Eucfque  ,  quand  on  ne  met 
point  peine  de  gagner  à  Dieu  ceux  qui  en  font 
eflongnez.  Aiiiiiddnc,  qu'il  ne  forte  point  vn 
mot  de  noftre  bouche  quand  il  eft  queftionde 
prefcher  la  parole  de  Dieu,  que  r.ous  n'ayons 
ce  regard  quant  &  quant  d'inftruire  ceux  auf- 
qucls  nous  parlons ,  &  de  leur  apporter  quel- 
que profit.  Et  de  là  nous  voyons  que  ce  n'eft 
point  lanscaufe  qu'auiourd'huy  le  monde  eft 
ainfi  mal  édifié.  Car  où  fe  trouucrôt  ceux  qui 
demandent  de  profiter  quand  ils  portét  la  pa- 
role de  Dieu'Il  £uit  bien  qu'il  y  en  ait,niais  le 
nombre  en  eft  petit  Si  clair  femé, corne  on  dit. 
Voila  pourquoy  toute  do(^rinc  s'efcoule  ,  Si 
n'apporte gueres  d'édification  .Et  ainfi  rete- 
nons bien  ce  que  dit  S.Paul,  que  les  viais  do- 
eteurs,  ce  font  ceux  qui  s'addonncnt  tant  qu'il 
leur  eft  pofsible  de  gagner  à  Dieu  les  poures 
ignoram.pour  ramener  au  drait  chemin  ceux 
qui  ont  tailli,&:  font  cfcartez  &  fouriioytz.Or 
cela  ne  le  peut  faire(c'(  û  à  dire, nous  ne  pou- 
uons auoir  vue  telle  affetlion)fi  nous  ne  fouî- 
mes patiés.Car  on  verra  beaucoup  de  gens  a- 
racncr  des  fottil'es:quâd  on  lalchi  ra  de  les  a- 
meiicr  à  qlquc  inftruSion.ils  fauteront  du  coq 
à  rafncjilsaurot  des  chofcs  ii  lattes  &:  fi  badi- 
nes 


SVR   LA   II.    A    TIMOTH 


4ît 


lies  que  c'eft  pitié.  Les  autres  eitrauaguent: 
combien  qu'ils  vouiliont  tairedes  fagcs.où  ia 
mais  n'ont  leuvn  l'eul  mot  en  l'Elcnture  fam 
ôe.ils  Youdront  babiller  ,  8c  tenir  bon  i  tou- 
tes dil'putes,&  les  plus  ignorant  font  les  pluj 
hardis.  Ainfi  il  eft  inipolsible  d'auoir  ce  zèle 
que  (aiiiwl  Paul  nous  commande  ,  que  noiJj  ne 
(oyons  patiens  au  mal ,  que  nous  ne  fuppor- 
tions  beaucoup  de  folies  en  ceux  qui  n'ont 
point  encores  gouftc  la  venté  de  Dieu,  ou 
Sien  qui  en  ont  eu  quelque  gouft  à  la  volee,& 
n'ont  pas  encores  »n  vit  fentimeiit  pour  por- 
ter reuerence  telle  qu'ils  dovuent  à  ce  que  no 
ftrc  Seigneur  nous  a  déclaré  .  Ceux  donc  qui 
fbntvolagesdoyuent  eftre  fuppottez  ,  ceux 
qui  font  rudes,  &  lourds ,  ceux  qui  font  efga- 
tez  par  Faute  qu'ils  ne  fçaucnt  encores  que 
e'cft  d'eftre  mattez  en  l'obciflànce  de  Dieu, il 
faut  (di-ie^  que  nous  Toyons  patienl  enuers 
tous  ceux-la:car  autrement  il  Icra  impofsible 
que  nous  les  attirions  à  Dieu. Voila  en  Tomme 
ce  que  faiiift  Paul  a  entendu  en  ce  pallàge. 
Mais  pource  que  beaucoup  de  malins ,  voire 
des  contempteurs  de  Dieu  voudroycnt  élire 
fupporter  ,  &  içauront  bien  alléguer  ce  mot 
de  patience  ,  afin  qu'on  leur  pardonne  quand 
ils  Icmocq'ierot  de  toute  l'Efctiture  ùmSte, 
fifqu'ils  Ce  gaudiront  de  toutes  admonitions, 
voire  de  toutes  les  menaces  de  Dieu  ,  fainft 
Paul  notamment  adioufte  rne  déclaration  de 
ce  qu'il  auoit  dit, c'eftafçauoir  qu'il  faut  bien 
que  nous  Ibyons  patiens  au  mal,  mais  ce  n'eft 
pas  pour  le  nourrir  en  vaine  flatterie.  Q_iipy 
donc?Afîn(dit-il)  (i''inflruiri,0'  arguer  enbe- 
ttiT'tité  ceux  qui  contrediffitt.Oï  voici  vi)  bon 
moyen,  &  qu'il  nous  faut  fongneulement  no- 
ter:car  ily  a  deux  vices  extrêmes  qui  font  à 
condamner. L'vn  eft,iî  nous  fommes  trop  fa- 
ciles ,  tellement  que  quand  nous  verrons  des 
mocqueursde  Dieu,  nous  fermions  les  yeux, 
nous  tacios  femblant  de  rien,  &:  que  nous  leur 
foulFrions  de  brocarder  tout  ce  qui  leur  fera 
propofé  au  nom  de  Dieu:  celle  facilité-la  eft 
niauuaife.Or  il  y  a  vn  autre  vice  à  l'oppoiîte: 
c'eft  que  quand  vn  homme  aura  dit  rn  mot  de 
trauers,fi  on  le  rccîargue  du  premier  coup  en 
telle  rigueur  qu'il  foit  cfpouanté  ,  le  voila  du 
tout  exclus,  qu'on  ne  luy  dône  plus  nul  naoyé 
d'approcher  de  Dieu.  Il  fe  faut  donc  garder 
de  ces  deux  vices:&  fainft  Paul  monftre  le  te- 
inede,en  difant ,  Qjfdfitut  biin  inflruire  aitec 
hotignité.  Il  eftvray  :  mais  cependant  il  faut 
aufsi  itiftruire  pour  corriger.  Car  le  mot  dont 
ilvfeici  ,  ne  lignifie  point  iîmple  doftrine, 
mais  vne  inftruâion  qui  foit  pour  reformer, 
quatid  on  inftruit  ceux  qui  ont  failli ,  &  qu'on 
lesameine  à  quelijue  bonne  difciplme  pour 
porter  le  ioHg,&  qu'ils  cognoiflent  qu'il  ne  fe 
laut  point  iouer  à  Dieu.  Voila  donc  l'inflru- 
aion  dont  parle  fainû  Paul.  Et  ainfi  notons 
bien  que  fou  intention  n'a  pas  efté  de  lafcher 
M  bride  àcesgaudiffeurs  qui  voudront  auoir 
ticeaccdefe  bauer  quand  on  leur  parle  des 


myfteresdc  Dieu  :  fainS  Paul  ne  veut  point 
que  cela  foit  foutfcrt  ne  difsimulé.  Or  tant  y 
a  qu'auieurd'hay  on  voit  le  monde  eftre  plein 
de  telles  mocquerics  .Combien  y  en  a-il  quâd 
ils  s'enquierétde  la  volonté  de  Dieu, qui  ay- 
ent  quelque  humilité  en  eux  pour  penfer  que 
Dieu  doit  e/tre  adoré  en  fa  parole,&  que  c'eit 
pour  le  moins  qu'ils  fe  rangent  quand  on  leur 
propofecequi  feravenudc  Dieu  :  combien, 
di-ie,y  en  a-il  qui  penfent  à  celaîMâis  au  con 
traire  on  voit  que  ï'Efcrirure  (ainûe  eft  expo 
(ce  en  opprobre, 3c  que  ceux  qui  en  parlent.ea 
tienent  autant  de  conte  comme  lî  on  recitoit 
quelque  fable.Voila  donc  le  nom  de  Dieu  qui 
fera  ù  vileinemét  prophané  que  c'eft  vne  hor 
reur:  &  ces  palans  voudront  bien  qu'on  prat- 
tique  enuers  eux  ce  mot  de  Douceur:  mais  de 
tenir  le  moyen, il  n'en  eft  point  dcqueftion:!! 
on  fe  fafclie  quand  on  verra  le  nom  de  Dieu 
eftre  ainlî  foullé  au  pied,  &  qu'on  porte  fi  peu 
d'honneur  à  la  parole, Ho,  où  eft  cefte  patien 
ce  dont  fainft  Paul  a  parlé  ?  Voire  ,  comme  fi 
nous  dcuions  humer  les  opprobres  qui  font 
faits  ainfi  à  Dien  iàns  nous  en  contrifter. 
Quand  chacun  de  nous  voit  que  fon  pcre  eft 
vilipendé, cela  le  touche  au  caur.  Nous  ver- 
rons que  Dieu  eft  comme  arraché  de  fon  liè- 
ge par  ces  canailles  qui  fe  gâudiflent  ainfi  de 
toute  ladoôrine  de  lalut  ,  &  nous  difsimule- 
rons  celaîOù  feroit  noftre  zelerNe  nionftre- 
rions-nous  point  alors  que  nous  ferions  par 
trop  lafches  ;  Et  ainfi  que  nous  foyons  adui- 
fez,  quand  ces  ruftres  qui  ne  demandent  qu'à 
fe  mocquer  de  Dieu  voudront  eftre  fiippor- 
tet  en  leurs  blafphemes ,  que  faind  Paul  n'a 
point  voulu  que  nous  foyons  patiens  iufques 
aies  nourrir  en  yne  telle  enormité;niais  feule 
ment  que  nous  ne  fermions  point  la  porte  aux 
ignorans ,  que  nous  ne  les  repoufbions  pas  en 
trop  grande  rigueur,iufques  a  ce  que  nous  ay- 
ons clTayé  s'ils  feront  corrigibles  aucunemét. 
Voila  donc  l'intention  de  fainû  Paul. Et  ainfi 
toutesfois&  quantes  qu'il  nous  eft  parlé  de 
patience, de  fupporter  le  mal.d'eftre  humains 
&:  de  fuyure  mâfuetude  ,  notons  que  celte  ex- 
ception doit  eftre  adiouftce.que  nous  ne  foy- 
ons point  empefchez  pour  cela  d'inftruire  vi- 
uement  ceux  qui  reliftent  à  Dieu ,  &  de  leur 
faire  fentir  quelle  mifere  ce^doit  eftre  pour 
eux  ,  quand  leiougde  Dieu  eft  mis  fur  leurs 
efpaulei ,  &  qu'ils  le  repoulTent  :  S(.  ceux  qui 
Youdront  eftre  reuefches, qu'on  leurapprenc 
de  fe  ranger.  Car  il  faut  que  toute  hautclTè  hu 
maine  qui  s'eleue  contre  lefus  Chrift,  foit  mi 
fe  bas, (comme  fainû  Paul  en  parle)autremét  (-  •  ■ 
l'Euangile  ne  fe  prefchcra  pas  en  ta  maicfté.  '  , 
En  lomme  ,  nous  voyons  que  le  lainit  tlprit 
nous  a  ici  déclaré  le  moyen  que  doyuent  te- 
nir les  miniftres  de  la  parole  de  Dieu  ,  quand 
ils  feront  patiens  pour  fouftrir  ceux  qui  Ju 
premier  coup  ne  pourront  pas  eftre  amenez 
en  l'obeiflànce  de  i'Eiiangile:c'eft  que  cepen- 
dant ils  De  laiflent  pas  de  les  corriger,  &  leur 

Hk.iui. 


452 


SERMON      XVII. 


remonftrerleiir  faute, &  leur  faire  fentir  qu'il 
y  A  ynedilcipiine  à  laquelle  toutes  créatures 
dayucnt  eftre  fuiettes. Voila  pour  vn  item. Et 
cependant  nous  fommes  admoneftez  tou;  en 
gênerai, de  ne  point  appeter  qu'on  nous  flat- 
te, comme  nous  voyons  que  le  monde  y  cil 
par  trop  adonné.  Ainii  que  delîa  l'ay  dit, cha- 
cun prendra  ceci  à  fonau.intage,  quand  il  eil 
déclaré  que  les  minières  doyuent  corriger 
auccm.inruetude:mais  cependant  ils  oublient 
ce  mot  de  Corriger  ,&  mettent  en  auant  la 
manfuetude  :  voire  afin  qu'on  ne  fonne  mot, 
ou  bien  quand  on  parlera,  que  ce  foit  pour  les 
amadouer,  &  qu'on  ne  leur  gratte  point  leurs 
rongnes.Miis  celle  patience  dont  ÛMaU  Paul 
paile  ,&;  laquelle  il  approuue ,  cil  coniointe 

,  _.  ,  aueccorredion.  Et  voila  pourquov  il  dit  en 
1  autre  pall.ige,qu  il  raut  bien  que  le  feruiteur 
de  Dieu  foit  debônairc.Mais  pourquoy?  Eil- 
ce  pour  clorre  les  yeux  quand  il  verra  des  of- 
fenfes  qui  fe  commettront  ?  £ft-cc  pour  en 
parler  tellement  qu'il  n'y  ait  que  paroles  CiÀC 
crées?  Nenni:  mais  il  tant  qu'il  corrige  quant 
&  quant.  Voila  en  foniine  ce  que  nous  auons 
à  retenir  de  ce  pailage.Mais  il  nous  faut  aufsi 
noter  ce  que  ûintl  Paul  adioufte  ,  Afcauoir 
(dit-ll)//  Diei*  leur  donnera  quelque  f^ijrepen- 
tancs.  En  parlant  ainlî  il  monftre  qu'il  ne  faut 
pas  du  premier  coup  nous  dclcourager,  enco- 
res  que  nous  voyjns  grande  dureté  aux  honi 
mes ,  &  qu'il  ne  femble  pas  qu'il  foit  aifé  de 
les  ramener  au  bon  chemin  ,  qu'encores  de- 
uons-nous  mettre  peine  de  les  vaincre  par 
douceur  ,  entant  qu'en  nous  fera.    Il  ell  vray 

Vint  6  7  S"'''  "°"'  ^^  défendu  de  femer  les  perles  de- 
uant  Ici  chiens,  &  deuant  les  pourceaux. Mais 
comment  fçaurons-nous  qii'vn  homme  foit 
•yn  chien  ou  vn  pourceau  ,  deuant  que  Tauoir 
expérimenté. S;  ic  voy  vn  homme  ignorant, le 
jaediray  pas  qu'il  f^it  vn  chien. Car  qui  ellce- 
luy  de  nous  qui  n'ait  eflé  vn  poure  aueugie, 
enfeuelien  rincrcdulité  de  la  Papauté?  Etlî 
Dieu  ne  nous  euft  Icmé  nulle  parole,  qu'e- 
iloit-ce  ?  Mais  il  nous  a  cherchez  cependant 
que  nous  citions  comme  belles  iauuages.C'eft 
ionc  bien  raifon  que  nous  lacions  le  fcmbia- 

_,  bleenuers  ceux  qui  font  encores  détenus  en 

telles  ténèbres, &  qui  font  fous  la  tyrannie  du 
Papcen  laquelle  nous  auons  yefcu  en  bruta- 
lité &  ignorance.  Mais  tout  ainli  qu'il  nous 
faut  gagner,  s'il  eilpofsiblc  ,  ceux  que  nous 
n'auons  point  encores  cognuscftre  chiens  ne 
pourceaux  :  aiif^i  quand  nous  aurons  expcri- 
nicntc  qu'vn  homme  eft  du  tout  rebelle  ,  & 
qu'il  porte  les  marques  d'yn  reprouué,&  que 
ilieiette  toute  nictiecine  ,  qu'il  conuertitle 
bien  en  mahquand  donc  nous  veriôs  vn  hom- 
me eftre  amll  endurci,  que  pouuons-nous  fai- 
re finon  le  laifTer  la  ,  a'autant  qu'il  n'eii  plus 
digne  que  lado6iiine  de  falui  luy  foit  mile  au 
d'.'iiant'' Voila  comme  doit  eftreentend-.ie  ce- 
ftedcf  nfcde  noftre  Seigneur  tcfus  Chri/t; 
il  du  qu'il  ne  nous  faut  point  feincr  les  pier- 


res precieufcs  deuant  les  chiens  &rpourceaux: 
mais  quain  A  ceux  qui  n'ont  point  encores  ma 
lire  vue  telle  obitination  ,  &  qui  faillent  par 
faute  d'auoir  bien  entendu  ce  qui  en  efticeux 
la  (di-ie)  nous  ne  pouuons  pas  les  repoufler 
iufques  àce  que  Dieu  les  ait  leduits:  &  enco- 
res qu'ils  fembiét  eftre  durs  à  l'efperô,fi  faut- 
il  côtinuer  iufques  en  la  fin. Car  que  fçauon$.t 
nous  fi  Dieu  efîendra  fa  mifericoide  iufques  à 
ceux  qui  nous  femblent  elf  re  damnez?£t  c'eft 
vnpointlque  nous  auons  bien  à  noter.  Car  Vfe.^S.% 
quand  il  eft  dit  que  lamifencorde  de  Dieu  fur 
monte  les  nues, qu'elle  va  iufques  au  plus  pro- 
fond des  abyfmes, c'eft  afin  que  nous  ne  la  re- 
ftraignions  point  à  noftre  pofteicar  nous  fom 
mes  ù  malins  de  nature  que  fi  vn  homme  nous 
dclplaift  ,  nous  voudrions  que  Dieu  quant  & 
quant  foudroyait  fur  luy  :  ainfi  il  nous  mon- 
ftre qu'il  n'eft  point  femblable  à  nous  ,  difant  ■/•  ^ 
par  fon  Prophète  Ifaie,Aufsi longue  diftance 
qu'il  y  a  du  ciel  à  la  terre  ,  auisi  mes  penfces 
font  tflognees  des  voftres.Et  pourquoyr'Car 
ie  fuis  bénin  &  pitoyable  ,  le  fuis  débonnaire 
(dit-il)&  vous  ne  comprenez  point  quelle  eft 
ma  inilericorde.  Ainiidoncgaidons-nous  de 
vouloir  enclorre  en  noftre  mefnrc  la  mifcri- 
cordede  Dieu  ,  mais  pluftoft  quand  il  nous 
femblera  que  c'eft  fait  de  quelqu'vn  ,  &:  qu'il 
n'y  a  nul  moyen  de  le  gagner  ,  atrendons  en 
patience  fi  Dieuvoudia  bel"ongner:&  fi  l'hcu 
re  ne  vient  pas  fi  toft  que  nous  voudrions  ,  il 
nous  f  ndoit  faire  mai,&  dcuons  gtmir  là  del" 
fus, mais  cependant,quoy  qu'il  en  foit, ne  lail- 
fons  pas  de  toufiours  mettre  peine, félon  que 
Dieu  nous  l'ordonne, de  gagner  les  hommes  à 
foy.Et  voila  pourquoy  faintt  Paul  notanimét 
àil, AfcAHoir-mon  fi  quelejiie  foii  Dieu  Iciiy  don- 
nera repentance.Comme  s'il  difoit, Mes  amij, 
c'eft  vne  chofe  bien  fafchcufc  &  difficile  ,  de 
fuppjrter  ceux  qui  refiftent  à  Dieu,  qui  s'op- 
pofent  à  fagrace,  &  qui  ne  peuuent  ouir  du 
premier  coup  la  bonne  doftrine  qui  eft  pour 
leurfalution  ledefpite  contre  eux, tellement  - 
qu'on  les  reiette.  Mais  quoy  ?  Si  faut-il  que 
nous  foyons  bénins  en  ceft  endroit  :  &  enco- 
res que  nous  vovons les  hommes  desbauchez 
pour  vn  temps ,  linon  qu'il  y  ait  vne  certaine 
nialice,qu'il  y  ait  vne  rébellion  délibérée  co- 
tre Dieu  ,  tellement  qn'orv  les  puifleiuger  in- 
corrigibles,que  nous  tafchionsdc  les  amortir 
&  les  douter  :  car  Us  font  (dit-il)  en  la  maio 
de  Dieu.D'vn  coftéildit,Sj  rjuelijue  foù'.moit 
ftrant  que  fi  la  conuerfion  des  mcrtdulesnc 
vient  fi  toft  qu'il  feroit  à  fouhaiter  ,  qu'il  ne 
faut  pas  pouitint  les  placqiicrlà.car  Dieu  le» 
ha  en  fa  main.  Et  puis  il  adioufte  ,  quandvi» 
homme  au  1  OUI  d'Juiy  ieraobiliné, que  nous  ait 
t'çauons  point  quel  il  fera  demain.  Et  pouF'^ 
quoy?Car  la  conuerfion  des  hommes  ne  vient 
point  d'eux.ni  de  leur  vertu  ,  ni  de  Icurmou- 
uemcnt  proprc-.c'eft  Dieu  qui  les  rcf -rme.qui 
en  fait  des  nouuellcs  créature-;. Et  f  mpeiche- 
roiis-nous  Dieu  qu'il  nebefoiigued'vne  façô 

luiraca 


s  V  Tv    L  A    I  I     A 

niiraciiîeiife,  &  qui  ûirmontc  tous  nos  icns? 
Aiiili  donc  attendes  de  la  grâce  de  Dieu  pins 
que  nous  ne  pouuon?  conceuoir.Nous  voyons 
donc  maintenant  en  fomme  où  tend  ce  pro- 
pos de  (ainft  Paul.  Il  eft  vray  qu'il  ne  ft  peut 
pas  tout  delpefclier  auiourd'huy:mais  iî  nous 
taut-il  noter  pour  conclulîon.que  nous  ne  de 
uons  pas  reietter  comme  chiens  &  pourceaux 
ceut  qui  font  ignorans-&:  combien  qu'ils  s'op 
pofent  à  Dieu,  &  qu'Us  luy  coiitrcdifent,  iuf- 
ques  à  ce  qu'on  les  ait  expérimentez  du  tout 
incorrigibles ,  &  qu'ils  s'opiniallrent  par  vne 
malice  délibérée,  lufques-la  il  ne  Faut  point 
les  reietter  de  l'efperancede  falut  :  il  ne  faut 
pas  aul"s'i  leur  elorre  la  porte, mais  pluftoll  que 
on  tafche  de  les  gagner.  Voila  donc  le  moyé 
que  nous  auons  à  tenir,  c'eft  que  nous  dilccr- 
nions  prudemment  entre  ceux  qui  relîftcnt  à 
Dieu  par  incrédulité. &  ignorance  ,  &:  entre 
ceux  qui  font  affez  conuamcus  que  c'eft  Dieu 
quiparle.mais  qu'ils  l'ont  enuenimez  pour  re- 
ietter toute  bonne  doClrine  ,  qu'ils  ne  i'e  veu- 
lent point  amender  ,  puis  qu'vne  fois  ils  ont 
commencé  de  relifter  au  bien  :  ceux  qui  font 
ainlî  delel'perez.il  les  faut  lailTcr  là  comme  ils 
en  font  dignes,  qu'on  ne  leur  propofe  plus  la 
doctrine  de  vie ,  car  ce  fcroit  h  prophaner. 
Mais  quand  il  y  aura  des  ignoians  ,  qu'on  les 
fupporte,&  que  toufiours  on  les  attire, iufques 
à  ce  qu'on  ait  cogiiu  s'il  plaira  à  Dieu  les  re- 
tirer à  foy.Or  l'argumét  dont  vfe  fiinft  Paul, 


T  I  M  O  T  H.  4.^3 

c'eft  que  la  coucrlîon  des  hommes  n'(  ft  point 
en  eux,  ni  en  leur  vertu  :  &  pourtant  quand  il 
Icmblera  qu'ils  foyent  incorrigibles ,  mclaics 
que  tous  les  tours  ils  empirent,  Dieu  y  pour- 
ra mettre  la  main, qu'on  fera  tout  csbahi  qu'il 
aura  fait  miracle.  Puis  qu'ainfî  eft  donc  que 
Dieu  fe  referue  ainlî  la  conuerfion  des  hom- 
mes, d'autant  qu'il  fait  ce  qu'il  luy  plaift,  ap- 
prenons de  luy  remettre  tout  entre  les  mains: 
&cepeHdant  aduifons  de  nous  acquitter  de 
noftrc  office,  c'eft  d'attirer  tout  le  monde  à  ■ 
falut, entant  qu'en  nous  fera. 

OR  nous-noiis  proftcrnerons  deuant  la 
facede  noftre  bon  Dieu  encognoiflaiice de 
nos  fautes,  le  prian:  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir  que  nou^  n'auons  point  fait ,  tellement 
que  iiuus  foyons  abbatu^  en  nous-mefines  ,  5: 
que  non  feulemét  nous  conférions  auoirfail 
11, mais  que  nous  haifsions  nos  péchez, &:  tou- 
te la  peiuerfité  qui  eft  en  nous  ,  afin  de  nous 
addoniicr  à  fuyure  la  volonté  de  noftre  Dieu, 
&  nous  y  aduancer  iournellement, iufques  à  ce 
qu'eftans  delpouillez  de  toutes  iiiauuaifcs  af- 
fcrtions  &  rebelles  ,  nous  foyons  contermez 
en  obeirtànce  de  û  iuftice.Et  cependant  qu'il 
luy  plaile  nous  fupporter  en  nos  infirmitez, 
iuques  à  ce  que  nous  ayant  dcliurez  de  toutes 
les  corruptions  de  ce  monde, nous  foyons  re- 
cueillis finalement  en  fon  Royaume  celefte. 
Q_uenon  feulement  il  nous  face  cefte  grâce, 
mais  à  tous  peuples  &  nations  de  la  terre,  &c- 


ONZIEME       SERMON       SVR      LE 

SECOND      CHAPITRE. 

zy  il  faut  que  le  fcruiteur  du  Seigneur  cnfcigne  patiemment 
ceux  quirejiflcntyafcauoir  monficn  quelque  temps  Dieu  leur  donnera, 
repentance pour  cognoiflrc  la  yeritê, 

7.6  Ef  quïls  rcuieyient  hors  des  Ltqs  du  diuhîe,  eflansprins  de  luy 
afa^oîonté.  '■ 

Ous  auonsveu  par  ci  deuant  main  de  Dieu  :  comtien  qu'il  fcmble  que  Ju 

enuers  quelles  gens  S.  Paul  tout  il  n'y  ait  plus  d'efpcrance  ,  fieit-ceque 

veut  qu'on  fe  monftre  bcuin  Dieu  y  pourra  befongnerd'vne  forte  qui  nous 

I&:  amiable  :  c'eft   afçauoir  eft  auiourd'huy  mcognuc. Apprenons  donc  de 

j  ceux  qui  par  ignorance  con  ne  point  mcfurer  la  puillànce  de  Dieu  à  no- 
trcdiléi  à  ia  parole  de  Dieu. 
Car  nous  en  deuons  auoir 
pitié,  veu  qu'ils  font  pouics  aueugles,  &  mef- 
mes  qu'ils  fout  menez  de  quelque^ folle  dcuo- 
ti'on,  &  penicnt  bien  faS»  :  combien  que  cela 

ne  les  cxcul'e  point  deuant  Dieu,  ii  eft-ce  que  Or  que  famft  Paul  pai'lc  dételles  gens.il  mô- 
nous  deuons  eltre  efmeus  à  quelque  pitic,taf-  ftre  cela  quand  il  dit  qiie  Dieu  leur  pourra  fai 
chans  de  les  ramener  au  chemin  de  falut. Mais  re  cognoiltre  fa  vcrict- .Nou-.  voyôi  donc  que 
pource  que  c'eft  vne  choie  difficile  d'endurer  il  n'tft  point  ici  qncftion  de  ceux  qui  par  ma- 
ceux  qui  fe  rcbecquent  aiufi  contre  la.  vérité  liçeVç-leuent  pour  troubler  PEglile  de  Dieu, 
de  Dieu,  &  q^u'il  ftmblc  qu'on  y  perde  ïi  pci^  ceux  q'iii  font  rebelles  au  bien  qui  leur  eft  cô- 
ne ,  (comme  deiîa  nous  auons  touché  )  faind  guu,ou  dcsai  oftats  quiapresauoirgoufté  I'E 
Paul  reinonftre  que  leur  changement  eft  en  la  uangile  ,  s'aiment  pour  faite  la  guerre  &à 

-     11.  i. 


ftre  fens  :  auand  nous  verrons  des  poures  in- 
crédules eftre  fort  durs  &  obftinez, attendons 
veoir  fi  Dieu  leur  fera  mifericorde. Et  cepen- 
dant aduiioiis  de  taire  nollre  office  enuers 
eux, c'eft  A  dire  de  les  gaj^ncr  s'il  eft  pofsiblc. 


4H 


SERMON      XVIII. 


Dieu.S:  i  tout  ce  qui  cft  contenu  en  û  parole, 
&ii  fon  Eglifc:ûtnct  Paiil(di-ie)n'a  point  re 
ij.ifdé  à  telles  gens  ,  comme  iU  n'en  l'ont  pas 
dignes  :  mais  il  veut  Ljifon  ûipporte  pour  ?n 
téps  ceii\  qui  n'ont  iamais  cognu  c|uc  c'clloïc 
de  la  vcnté,&;  qu'on  attende  paticment  veoir 
ii  Dieu  leur  tendra  la  mam  pour  les  amener  à 
fon  truupeiu.  Or  cependant  il  noui  faut  bien 
noter  cjiie  l'ainrt  Paul  commence  par  la  péni- 
tence, quand  il  parle  de  cognoiftre  la  venté. 
Et  en  cela  il  lîgnitie  que  ce  n'eft  point  vnc 
chofc  petite  ne  vulgaire,decognoiftre  la  véri- 
té de  Dieii.Ec  de  taid,  on  ne  dira  point  qu'vn 
homme  cognoilTe  Dieu  ,  quand  ilauiacom- 
prins  en  fon  ceiucau  qu'il  elt.iSc  qu'on  luy  pro 
pofe  fon  nom  :  mais  il  tant  que  la  racine  ibit 
iniques  au  coeur.  Q_M2e!t-cc  donc  que  laco- 
gnuillàncede  la  pirolede  Dieu  ?  C'eA  qu'en 
premier  lieu  nous  apprenions  d'adorer  Dieu 
&  nous  affuiettirà  luy,  Se  à  tout  ce  qu'il  nous 
dira. Et  au  refte,  apies  nous  elUe  enquis  de  ce 
qu'il  nou^a  voulu  enfeigner,  que  nous  y  ten- 
dions fans  contredit  en  tout  &  partout.  Or 
c'eft  vne  choie  fi  grande  ,  qu'elle  furmonte 
t  jutes  les  tjcultcx  du  monde.  Il  ne  le  taut 
point  donc  esbahirlî  îimÙ.  Paul  dit  qu'on  ne 
peut  cognjiftre  la  vérité  tans  repentancc.  Et 
pourquoy?  Car  en  premier  lieu,  félon  que  les 
hommes  font  malins  &  peruers, il,  nedeman- 
dent  que  de  s'exempter  du  ioug  &  de  la  luie- 
tion  de  Dieu,  &  repoulTer  toute  dodnne  :  ils 
voiidroyent  que  Dieu  ne  leur  demandafl:  rie, 
&  qu'il  ieurlalchaft  la  bride  fur  le  col.  11  faut 
donc  que  bous  foyons  dontez  en  cefi  orgueil 
naturel  ,  ou  iamais  nous  n'approcherons  de 
Dieu  pour  luy  eflrc  bos  efcholiers.  Car  il  ne" 
faut  comencer  par  humilité  pour  receuoirpai 
fiblement  ce  que  Dieu  nous dira:&:  au  contrai 
re  nous  voulons  élire  comme  beftes  fauuages, 
nous  fonimes  pleins  de  prcfoniptiô  Se  d'outre 
cuîdance. C'eft  bien  loin  doc  de  nous  ranger  à 
la  parole  de  Dieu, en  laquelle  il  veutelprou- 
uerfi  nous  voulons  eftre  côduits  par  luy. D'au 
tre  part, voici  Dieu  qui  abbat  toute  raifon  hu 
marne, toutes  arfediôi  de  la  chair:  Se  de  faitl, 
Zphef.S.  ^oii'i  oyons  que  l'Euangilec/l  appelé  vn  glai 
17.  ue  par  lequel  nous  famines  facrificz  à  Dieu. 

Hebr.  4.  Oi'sn  cotraire  nous  voulons  demeurer  en  no- 
li,  ftre  entier:  &  Dieu  nous  veut  anéantir.  Q^el 

accord  donc  y  aura- il ,  mfqucs  à  ce  que  nous 
-  foyons  diminuez?  Car  ccpcndît  que  nousde- 
meurerôs  en  nos  affctf  lôs  Se  penices.il  cft  iin- 
pofsiblc  que  Dieu  gagne  rie  fur  nous:car  no' 
ferôs  touliours  aueugles,nous  aurôs  desccrars 
de  pierres,  endurcis  cxobftinez:  Se  Dieu  veut 
que  nous  luy  foyons  cônie  brebis  &  agneaux 
pour  cfcoutcr  fa  voix,  &  pour  fuyure  ce  qu'il 
nous  commande  &  ordonne. Notons  bien  doc 
qu'il  faut  que  les  hônes  foyent  dontez  dcu.it 
que  fçauoir  que  c'elldc  la  vérité  de  Dieu.  Et 
en  cela  nous  fommes  adnionellez  de  ne  point 
trouuer  eftrange  qu'vnc  gr.îde  partie  du  mon- 
de rclille  k  l'F.uangiJc.S:  ne  peuuent  cflre  at- 


tirez par  quelque  moyen  que  ce  foit.  Car  ce- 
pendant que  les  hommes  iront  leur  tram  coin 
nuin,il  taut  qu'ils  s'eflongnent  toujours  tant 
plus  de  Dieu  (comme  no  us  auons  dit)  &  d'en 
appiocher  il  n'en  tftpoint  qutftiô.  K'e  foyôs 
pointdonc  fcandalizez  ,  quand  nous  verrons 
vne  grande  partie  eftre  côtraire  à  la  vérité  de 
Dieu. Et  pourquoyf  Cclacft  dénature.  Mais 
quand  nous  voyons  vn  petit  nôbredc  fidèles 
qui  louiFrcnt  d'élire  gouuernez  fuus  la  main 
de  Dicu.cognvilTons  que  ce  font  aut.ît  de  mi- 
racles.Car  voila  des  créatures  nouuelles:voi- 
la  vne  coucrlîon  que  Dieu  a  faite,  laquelle  on 
n'euft  iamais  attendue.  Et  quâdnous  voudrôï 
ainli  magnifier  la  bôtéde  Dieu, qu'vn  chacun 
commence  à  loy:  que  nous  fçachions  premic- 
reinét  eftre  refolus.q  fi  Dieu  nous  auoit  laifTc 
cheminer  félon  noftte  phantalic,  nous  luy  fe- 
rions ennemis  mortels, iamais  nous  n'cufsions 
gouftc  que  c'eftoit  de  ù  parole.  La  foy  donc 
que  nous  auons  eft  vn  don  lingulicr  de  fon  E- 
fpritjil  nous  a  illaininez:autrî.ment  nous  fiif- 
fions  demeurez  aueugles.fans  cela  nous  n'euf- 
lions  point  les  cœurs  touchez  au  vif:car  il  n'y 
a  aulsi  que  pure  rebclhô.  Ain(i  que  chacun  ne 
fe  glorifie  point  côme  11  la  foy  e.lo.t  fon  pro 
pre  creu:  mais  rendons  à  Dieu  l'honneur  qui 
luy  appartient  ,  de  ce  qu'il  nous  a  attirez  à  fa 
cognoilTance  du  téps  que  nous  eftions  du  tout 
elgarezdeluy  Iclon  noftre  nature.  Ainfi  en 
fomme.nous  voyos  parce  pailàge  que  la  foy 
nepeut  eftre  fans  pénitence.  Voila  pour  va 
item. Pour  le  fécond, nous  voyons  que  tant  la 
foy  que  la  pénitence  nous  font  données  de 
Dieu, &:  que  ce  n'eft  point  à  nous  de  reformer 
&:  nos  efprits,&  nos  atFechons.mais  qu'il  faut 
que  Dieu  y  befongne  ,  voire  d'vne  façon  ca- 
chée,&  qui  furmonte  tout  cequipourroit  pro 
céder  des  homes. Nous  difons  en  premier  lieu 
que  la  foy  ne  peut  eftre  f.ms  pénitence.  Viay 
eft  que  beaucoup  de  gens  volages ,  efcoutans 
ce  qu'on  leur  propofe,  femblent  bien  auoir  la 
foy;&:  neantinoins  ils  demeurent  toufiours  en 
leur  malice. Us  accorderont  allez  que  la  pjiro 
le  de  Dieu  eft  veiitable  ,  mais  ils  n'y  veulent 
point  adhérer. Or  ceu.\-la combien  qu'ils  s'in 
tituiêt  fidèles, font  toutestois  incrédules. Car 
(comme  défia  nous  auons  (lit)la  foy  lia  fi  ra- 
cine au  cœur  de  l'home, d'autant  qu'il  fe  fiib- 
met  à  Dieu,&  qu'il  cogaoift  qu'il  eft  gouuer- 
né  par  luy. Et  au  refte.ce  malque,  ou  pluftill 
cefte  feintife  de  foy  qu'aurôt  les  hypocrites, 
fi  faut-il  encorei  qu'on  les  rccognoifle  de 
Dicu,cntant  que  nous  ne  pouuons  point  par- 
uenirfi  haut  que  d'auoir  le  moindre  gouftdu 
monde  de  ce  qui  eft  contenu  cnl'Efcriture 
fainfte:mais  tellei  gens  ne  font  pas  renouue- 
Icz  comme  il  feroit  requis  ,ils  n'ont  point  le-  , 
ceu  l'Efpritd'adopriô  pour  cftic  du  rang  des 
enfans  de  Dieu.  Voila  que  c'ift  de  la  foy  que^ 
ont  les  hypocrites ,  comme  il  en  eft  parlé  en  „  . 
l'Epiftreau.x  Hebrieux.  Ca.  la  cognoiflànce 
qu'auront  ceux  qui  fe  rcuoltent,  d  qui  fe  dcf- 

baucK« 


s  V  R     L  A     I  I.     A     T  I  M  O  T  H.  4^^- 

fcaucKcnt,  eft  bien  appelée  don  ccle/lc  :  maiî  drions.Mais  cependant  il  prononce  que  nous 

cepédaiit  ciux-lj  n''ont  jamais  elle  toucluz  à  ne  poiiuonspas  nous  coniiertirdenoftrc  ver-  , 

bon  cfcieiu.Èc  voila  pomtjuoy  l'ay  dit  tnco-  tu  ,  que  nou.  n'y  fomnies  point  enclins  ,  ci:c 

res  que  nous  ayons  quelque  lentinitnt  voLige  nous  n'y  tendons  pas  linon  que  Dieu  nous 

de  la  vente  de  Dieu  ,  que  dclîa  il  a  befongné  gagne  ,  &  qu'il  nous  attire  à  foy.que  nous  ne 

en  nous.  Mais  quand  il  c(t  queltiô  de  la  viaye  pouuons  pas  nous  ouiinr  les  ycujr  del'entcn- 

foy.par  laquelle  en  croyant  à  l'Eu.igilc  nous  dément  pour  comprendre  les  fecrets  qui  font 

fommes  participans  de  ItrusChiill,&  de  tous  contenus  en  l'Euangilc  ,  mais  qu'il  faut  qne 

(es  biens, il  faut  que  celle  foy-la  l'oit  côiointe  nolhe  Seigneur  nous  tende  la  main  ,  il  faut 

auec  penitéce.Et  pourquoy^Car  nous  ne  pou  qu'il  nouschange.brief  il  faut  qu'il  nous  face 

lions  pas  nous  ranger  à  Dieu  deuant  qu'auoir  nouuclles  creatureSi   VoiJa  donc  l'honneur 

renoncé  à  nous-inelhics, à  toute  nollre  laifon  que  nous  dcuonsà  Dieu.  Et  c'ell  ce  que  l'ay 

Se  prudence,  à  toutes  nos  cupiditez.  Et  ainli  délia  touché  ,  que  chacun  de  nous  quand  il  fc 

cognoiflons  que  ceux  qui  n'ont  encores  nul  compare  aux  poures  ignorans  &  incrédules, 

changement ,  combien  qu'ils  vueillent  eilre  doit  pcnfer  ,  Helas  i  voici  vn  miroir  où  Dieu 

leputez  enfans  deDRU,&:  fideles.font  du  tout  me  donne  à  côtempler  quel  f  eufle  elle  &fuire 

incrédules,  Si  abufent  du  nom  de  Dieu  quand  demcuié  ,  lînon  qu'il  m'cull  reformé  par  fon 

ilsprenent  cetitredcChrelhés.Etpourquoy?  faintl  Elpnt.  Car  dénature  ic  n'eftoyc  point 

D'autant    qu'il  nous  faut  auoir  repentance  meilleur  que  ceux  que  levoy  ici  tHre  du  tout 

pour  cognoiltrclaverité.ainli  que  nousâuons  contraires  à  Dieun'cftoye  plufloll  fon  e«ne- 

dit.    Aduifons  donc  de  retrancher  tout  ce  qui  mi  mortel, ie  n'auoye  nerf  en  moy  oui  tendill 

tilde  nolhe  nature  pour  elhefacnticz  àDieu,  .1  fon  obeiflance, mais  l'clloye  plein  de  fierté, 

&  pour  luy  taire  offrande  &  de  nos  âmes  ,  &  plein  de  malice, plein  d'outrecuidance  &:d'v- 

denos  corps,afin  qu'il  prelide  &  qu'il  domine  ne  obftinatio  diabolique  pour  refi/ler  .îDieu, 

fur  nous. Voila  pour  vn  item. Et  inelmes  ùiv.d  &■  pour  ni'aby  fmer  en  la  mort  eternelle:voiia 

Paul  commence  par  la  repentance, pour  nous  quec'cufl  cflé  de  moy  ,  linon  que  mon  Dieu 

amènera  la  cognoilFance  de  vérité  &  àlafoy.  m'eullreceu  à  pitié  ,  linon  qu'il  eulldcfployc 

I.Cor.J.  ^«"'  noas  fçauons  ce  qui  cil  dit  en  l'autre  paf  les  threfors  infinis  de  (.1  miiéricoide  cnv.cvs 

18.           fage.que  nous  ne  pouuons  pas  venir  à  celle  fa  moy.  Apprenons  donc  de  faire  compaïailon 

gelFe  de  Dieu  h  nous  ne  foinmes  fols  en  nous  de  nous  auec  les  incrédules ,  que  quand  nous 

nicfmes  :  c'tll  à  dite  ,  fi  nous  ne  cognoilTons  verrons  ceux  qui  font  ainfî  eflôt^niz  de  Dieu, 

q<i'il  n'y  a  que  vanité  &  menfonge  en  nos  e-  que  nous  ayons  horreur  de   veoir  que  Ils 

fpriis  .Or  quant  au  lecond  poinci,  notons  que  créatures  s'eleuent  contre  celuy  qui  les  a  for- 

&la  pénitence  ,&  la  foy  font  dons  de  Dieu,  mees  :  &  cependant  que  nous  cognoifions 

Car  s'il  n'ell  point  à  l'homme  mortel  de  fe  que  nous  ferion.  du  tout  femblabies ,  finon 

créer  pour  viure  en  ce  monde, comment  aura-  que  nollre  Seigneur  eiifl:  eu  pitié  de  nous.  Or 

il  celte  vertu  de  le  reformer  pour  cflre  corn-  pour  mieux  exprimer  cela,  nous  auoHs  aufsi  à 

pagnon  des  Anges  du  ciel?  Voila  qu'emporte  poifer  ce  que  lâintl  Paul  adiouftc  ,  Q«''/-  /<? 

îafoy  &  la  pénitence,  c'cH  qu'tllans  dehurez  retiTent  ties lianÇoada  filets)  de  Satmi  ,  c/,/- 

4e  lamaledittionque  nous  auons  tireedeno-  qucU  i'.sfnt  tnms  c^ptifj  fckn  fiyolontè.   Ce 

ftre  père  Adam  ,  nous  foyons  adoptez  pour  mot  exprime  beaucoup  mieux, &  conferme  ie 

eftre  héritiers  delà  vie  ceicllc  ,  poui  ellie  en  propos  que  levien  de  mener.  Car  fi  nous  cui- 

l'onime  paiticipans  de  laglouede  Dieu.  Si  dons  pouuoir  venir  à  la  cognoiflance  deve- 

cela  eftoïc  en  nous,&  qu'vn  chacun  fe  dontiall  rite  &  à  la  foy  ,  fan'  que  Dieu  nous  chance,  il 

\n  tel  bien  &  fi  noble, que  feroit-cefNous  au-  faut  doiiC  que  nous  foyons  afiez  forts  peur 

lions  bien  occafion  de  nous  enorgueillir  ,  &  nous  racheer  des  liens  de  Satan.  Car  îulqLics 

nous  n'y  fommes  que  par  trop  adonnez.   Et  à  ce  que  Dieu  nous  ait  retirez  des  filets  du 

ainfi  apprenons  que  lamais  nous  ne  pourrons  diable, lamais  nous  n'approcherons  de  luy  :  & 

approcher  de  Dieu  en  façon  quece  foit,  nous  mcfiues  il  faut  que  nous  foyons  efclaues  de 

ne  pourrons  auoir  vne  feule  bonne  pcnfee,  ni  péché  ,  que  nous  ayons  la  mort  pour  noltre 

vn  feul  bon  mouuement.finon  qu'il  nous  vie-  héritage. Q_ui  eft  celuy  donc  maintenant  fi  ha 

ned'en-haut ,  &  que  Dieu  befongné  par  fon  bile  ,  qu'il  fe  puifle  deliurer  ,  &  élire  fon  Re- 

fain«5tEl"prit.Car  ce  n'ell  point  fans  caufcque  drmpteur?  Otcions-nous  bien  vfiirper  ce  que 

il  eft  dit,  Bitu  l'ofibU  léiir  ({c>in:rarej<ti!ta>ne  Dieu  s'attribue  r  N'ell-cc  point  vn  facnuge 

pour  -vn  rà  la  reri  te.Siinâ  Paul  pouuoit  bien  que  Dieu  dételle  ,&  à  bondroiclrSi  on  deman 

dire,  Et  que  Içait-on  s'ils  fe  pourront  chan-  de  à  chacunde  nou- ,Pourrois-tu  cflie  ton  re- 

ger  ?  Si  auiourd'huy  on  les  ellime  incorrigi-  deinpteur.'ll  dira.Ncnnucar  l'v.fiii  pcroye  par 

blcs,  on  y  trouuera  demain  quelque  amende-  ce  moyen  l'office  du  Fils  de  Dieu. Or  mainte- 

ment.  Saintt  Paul  pouuoit  bien  ainfi  parler:  cant  fi  quclqu'vn  cuidc  auoir  la  foy  de  fa  pro 

mais  ilnous  raincineàDieu.  Ileflvray  qu'il  pre  vertu,fi  quelqu'vn  fe  péfe  côuertir, celuy 

regarde  à  ce  que  nous  auôs  touché:  celt  pour  ladcfpoHille  lefusChri/lde  l'olficedc  Rcdé- 

iious  exhorter  à  patience  quand  les  hommes  ptcur,&  fe  côllituccn  faplace.  Et  pourquoy? 
aeie  rendrout  pas  ûdociks  comme  nous  vou    fainû  Paul  dicnotamment  que  nous  ne  ferons 

li.  li. 


45  <? 


SERMON     XVIII. 


I.  €cri. 
13.11. 


point  illuminez  en  U  foy,qae  nous  ne  ferons 
point  conucftis.iufques  à  ce  que  nou's  foyons 
dcliurez  des  liens  du  diable. Ôr  doc  que  nous 
l'oyos  tant  mieux  rclolus  de  ce  que  deha  i''ay 
déclaré  ,  c'eft  afçauoir  de  magnifier  noftre 
Dieu  de  la  grâce  qu''il  nous  a  tlaigie  ,  quand 
illuy  a  pieu  nous  taire  participans  de  la  foy 
de  l'on  Euagile  ,  qu'il  luy  a  pleude  nous  y  cô 
fermer.  Et  par  cela  que  nous  detcftions  tant 
plus  Toutrecuidâcc  qui  eft  en  ceux  qui  fc  con 
lient  en  leur  franc  arbitre, qui  le  veulent  tai- 
re valoir,  Ci  s'aucuglent  en  quelque  toile  iiua 
ginition  de  leurs  mérites  :  que  tout  cela  l'oit 
mis  tous  le  pied  quat  à  nous.  Et  au  refte,tout 
ainfi  qne  nous  deuons  taire  Iiomiiiage  à  DicH 
de  ce  qiie  délia  il  nous  a  doaétau  Ai  pour  Pad 
ueuir  nous  deuôs  auoir  noftre  recours  à  ta  pu 
remifericorde  ,  afin  qu'il  nous  augmente  la 
foy,  afin  qu'il  nous  auance,  &  nous  tace  pro- 
fiter de  mieux  en  mieux  à  pénitence.  Cariî 
nous  auons  toy  ,  ce  n'eft  pas  à  direque  la 
foy  toit  parfaite  en  nous:  nous  verrons  quel- 
que petite  eftincclle  de  clarté,  mais  ce  n'eft 
qu'en  partie, côme  dit  ûind'  Paul.  Ainddonc 
nous  auons  3  prier  Dieu  qu'il  nous  augmente 
la  foy  :  &  ne  cuidons  poiKt  par  noftre  indu- 
ftrie  ou  habilité  y  paruenir,  il  faut  que  com- 
me Dieua  cominécé.aufsi  qu'il  parfice.  Tou 
chant  de  la  penîre;;CC,  combien  que  nous  ay - 
ons-quelque  bon  defir  Se  zcle  d'approcher  de 
Dieu.toutesfois  nous  tramons  nos  cordeaux, 
&  venons  en  clochant ,  &  il  y  a  tant  u',nipa- 
tience  encores  en  noftre  chair  que  c'eft  pitié. 
Ainlî  nou>  auons  befoin  de  prier  Dieu  que  de 
jour  en  iour  il  nous  fortifie,  iufques  à  ce  qu'il 
nous  ait  retirez  de  ce  monde  :  ëc  ne  cuidons 
point  par  noftre  mouuemct  Se  par  noftre  vej 
tu  gagner  fur  nos  atfeftions  vicieufes,  il  faut 
que  Dieu  nous  donne  cefteviftoire-la.  Voila 
(di-ie)  comme  nous  l'ommesaduertis  de  non 
leulemét  glorifier  Dieu  touchât  le  bien  qu'il 
nous  a  délia  fait.inaisaufsitlerecourir  à  luy, 
afin  qu'il  fuppleei  nos  défauts ,  iniques  à  ce 
qu'il  nous  ait  amenez  à  la  droite  perfeftion, 
de  laquelle  nous  iomines  encores  bien  loin. 
Or  cepédant  ce  paflage  nous  doit  bien  indui 
Tc  à  humilité, quand  il  eft  dit  que  le»  incrédu- 
les font  tenu;  captif,  aux  liens  de  Sat.^n.  Car 
qu'aiions-nouî  cfté.S:  que  ferions-nous  enco 
rcs  finolcrc  Seigneur  ne  le  fuft  monftré  pi- 
toyablccnuers  nous  ?  Wauons-nous  pas  efté 
nourris  en  ceft  aueuglement  oii  nous  voyons 
encores  les  pourcs  ignorans?  N'yfufsion;- 
nous  pas  demeurez  linon  que  Dicii  nous  en 
euft  affranchis?  Quand  donc  nous  appetons 
de  nous  faire  valoir  ,  que  ceci  noasvieneau 
deuant,  Il  eft  vray  qie  de  nature  tu  es  vn  ef- 
claucdc  Satan  :  vn  clieual  ou  vn  bœuf,  ou  vn 
ai'ne  n'eft  pas  plus  à  fonmaiftrcque  tu  cftois 
à  Satan.  Va-t'en  maintenant  prifer  de  ta  ver- 
tu,tu  cuides  cftremcrueilles  :  voici  Dieuqui 
blalbnne  tev  armes, &:  dit  en  femme  que  tu  es 
vn  pourechien  que  Satan  tient  lié  à  £oy,&en 


feruitude: voila  où  tn  en  es,&t'y  faudra  demen 
rcr.iul'ques  à  ce  que  ton  Dieu  ait  rôpu  les  cor- 
deaux dot  tu  eftois  détenu.  Q_uand  donc  nous 
oyons  que  les  incrédules  font  retenus  en  cefte 
maudite  captuiitc  fous  Satan  ,  ne  faut-il  pas 
que  nous  foyons  plus  que  forccnez  lî  encores 
nous  Guidons  valoir  ie  ne  l'çay  quoy,û  nous  e- 
leuons  Tn  franc  arbitre,  fi  nous  prclchons  nos 
vertus  &  nos  mentes  .=  Or  le  lainft  Elprit  ne 
pouuoit  mieux  foudroyer  pour  nous  deipiter, 
&  nous  mettre  en  tout  opprobre,  que  quand  il 
a  dit  que  Satan  nous  polïcde,que  nous  fouîmes 
fous  la  tyranie,  qu'il  domine  à  Ion  vouloir  fur 
nous, iufques  à  tant  que  Dieu  nous  detiure.Ec 
au  rcfte,que  nous  apprenions  aufsid'apprehen 
d;r  cefte  horrible  maledidion  de  Dieu  furie 
genre  humain,  quand  il  eft  dit  que  Satan  domi 
ne  fur  tous  hommes,  5:  grans  &  petis  fans  ex- 
ception.Or  nous  foinmes  formez  à  l'image  de 
noftre  Dieu, le  mode  eft  créé  à  caufe  de  nous: 
&■  quand  il  a  imprimé  ù  marque  en  nous,  c'tft 
afin  que  nous  luy  fuûions  comme  l'es  tnfans. 
Et  voila  pourquoy  auf  1  il  nous  adonné  mai- 
ftril'c  fur  toutes  créatures  .  Cependant,  que  le 

•  diable  nous  tienc  en  (e^  cordeaux  &  filets,  ne 
voila  point  vue  chol'e  horrible,  &■  qui  nous 
doit  faire  dreller  les  cheueui  en  latefteï'Si 
nous  côlîderons  noftre  première  origine.voi- 
la  Dieu  qui  nous  a  créez  comme  fes  cnfans,  il 
a  voulu  q  le  ù  gloire  reluift  en  nous,  &  nous  a 
c.iiiftituez  en  ce  monde, afin  que  nous  ful'.ions 
comme  fes  images  viues.  Il  faut  donc  drre  que 
II' péché  emporte  vne  hoirible  ruine,  que  le 

•  diable  prene  polîèf  ion  de  nous,  qu'vne  natu- 
re fi  noble, fi  digne, &  fi  excellente  comme  eft 
celle  de  l'homme, fjit  abyl'inee  iufques  Ij.que 
le  d  able  le  tiene  en  fes  cordeaux.  Orceci  eft 
pour  nous  faire  detefter  tant  mieux  le  péché: 
Comment?  Dieu  nous  auoit  créez  à  foa  image 
p  lur  eftre  compagnons  des  Anges,  &  cepen- 
dant nous  fomincs  abyfmez  iufques  au  pro- 
fond d'enter, &  du  ventre  de  noftre  mère  nous 
attirons  tous  cefte  inalcdiftion-la  ?  Et  où  eft- 
ce  aller  ?  Or  qui  en  eft  caufe  finon  Te  péché? 
Nous  deuons  bien  donc  aiwirle  péché  en  dc- 
teftation, quand  nous  cognoiflons  qii'il  nous  a 
telle-.iét  ruinez, qu'il  faut  que  noui  foyons  en 
la  feruitude  de  Satan. Cependant  nousdcuons 
aufsi  eftre  amenez  à  la  crainte  de  Dieu  ,&de 
f,)n  iugeme't.N  uis  voyons  quelle  nonchalan- 
ce il  y  a  aux  homes, 5:  comme  ils  font  enyurez 
en  vne  vaine  outrecuidance  ,  tellement  qu'ils 
ne  l'çauent  que  c'eft  de  venir  à  conte  deuant 
Dieu  :  &  combien  qu'ils  oycnt  tous  les  iours 
que  Dieu  les  ticntfes  ennemis  niortelv.&qu'il 
eft  armé,  qu'il  a  fa  vengeai^ce  toute  appareil- 
lée fur  eux,  il  ne  leur  en  chaut  :  S:  ce  n'eft  pas 
feulement  vue  yurongnerie  que  cela  ,  mais  il 
fuit  qu'ils  foyent  du  tout  en forcelez  ,  qu'ils 
foyent  empunaifis  en  leurs  o.-dures  ,  pour  ne 
fentir  rien  de  cefte  ire  de  Dieu  qui  leur  eft  tou 
tc  appflce.&rdô;  PEfcritiiie  les  nierace.  D'au 
tant  que  nous  fouîmes  ainii  tflourdis.tant  plus 

fonentu- 


SVR   LA  IL   A  TIMOT  H. 


437 


l 


fongneurcnientdeuons-nous  noter  les  pafla-  fur  tous  mci-eidules',(c5raeûin£i  Paul  le  trait 
ges  ,  là  ou  nous  voyons  que  c'eft  de  nous^ce-  te  en  Pâutre  pa(Iàge.)Car  en  pariant  aux  fide  Et^.i.» 
pendant  que  nou5  demeurons  en  nos  péchez:  les,  il  leur  dit  ,  Gardez-vous,  mes  amis  ;  caf 
c'eftafçau.oir  que  Dieu  nousdefauoue,  &  que  Dieu  vous  a  prins  afin  que  loyez  l'on  hérita- 
il  ne  nous  tient  phisau  nombre:ie  nedi  point'  ge:&  ne  vous  adonnez  point  à  Sa  tan,  lequel  a  ^ 
de  Tes  enfans ,  mais  de  l'es  ocuures.  Car  puis  l'on  ethcace  &  fa  vertu  fur  les  incrédules. Ce- 
u'il  nous  remet  lous  la  fuietion  de  Satan  ,  il  la  donc  cft  bien  vray  en  gênerai .  Mais  co- 
aut  bien  qu'il  nous  defpite.il  faut  bien  qu'il  gnoiffons  que  lï  les  poures  Payens  ,  &  ceux 
nous  ait  du  tout  retranchez  de  fon  royaume,  '  qui  ont  toulîours  el(:éaueugles,qiamais  n''ont 
&  qu'il  ne  vucille  rien  auoirde  commun  aiiec  efté  approchez  de  Dieu, font  fous  la  tyrannie 
nons.  Or  puis  qu'ainlî  c(t,  voila  qui  nousdo't  de  Sata.par  plus  forte  raifon  il  faut  que  ceux 
foliciter  à  la  crainte  de  Dieu, quad  nous  voy-  qui  fedeflournent  de  Dieu  ,  &quideuiencnt 
ons  la  condamnation  qui  elf  mile  fur  tout  le  ainfi  apoftats  apies  qu'il  les  auoit  attirez  à 
genre  humain. Mais  cepéd.nt  nous  allons  dé'  foy,  loyent  des  monftres  horribles  ,  que  nous 
tant  plus  à  magnifier  la  bonté  de  Dieu,  quâd  apperceuions  vnc  telle  furie  en  eux, qu'on  co 
il  nous  retire  d'vrr tel  gouffre  où  nous  eftions  gnoiffe  qu'ils  font  corne  diables  encharnez, 
captifs  de  Satan,  que  non  feulemét  il  nous  ait  que  ce  font  des  diables   pofTcdez  du  diable, 
affranchis,  mais  qu'il  vueillc  eftre  noflre  gou  Or  que  nbftre  Seigneur  defploye  vne  telle  ri 
ucrneur ,  &  que  par  fon  fainft  Efprit  il  nous  gueur  fur  tels  mal-hcureu\-,on  le  voit.  Car  ie 
guide,  &  qu'après  nous  auoir  illuniuiez  il  châ  vous  prie,  trouuera-on  aux  Papiftes  l'impie- 
ge  aufsi  nos  cœurs  &  nos  atfcJlions.   Q_uand  té  pour  defpiter  Dieu  ,  telle  cemme  ont  ce? 
donc  nous  voyons  que  noftre  Seigneur  befon  apoftats  quiontcognu  l'Euangile  ,  &  en  la 
gneainfi,  n'auons-noHs  pas  vn  plus  grand  lu-  lin  s'en  font  desbauchczf  Trouuera-oii  aux 
ftre  beaucoup  de  fa  mifericorde,afin  que  no'  Turcs, 5:  aux  Payés  telle  cruauté  comme  aux 
luy  rendionsla  louange  qu'elle  merite?Voi-  Papiftes  ?  Nous  voyons  comme  de  degré  en 
la  ce  que  nous  auons  înoter  en  fommede  ce  degré,  feloii  que  IcOiommes  fc  font  appro- 
palIàge.Maisil  y  a  encores  plus: car  lî  le  dia-  chez  de  Dieu, &  qu'Us  ont  voulu  faire  de;  be- 
ble  poflede  les  ponres  ignorans  qui  n'ont  ia-  ftes  enragées  ,  qu'ils  ont  prophané  ce  don  fi 
mais  rien  coguu  de  l'Euangile, que  fera-cc  de  cvcelknt  de  la  cognoifTàncc  dé  vérité,  &  que 
ceux  qui  s'adonnent  à  luy  ,  &  qui  reiettcnt  la  ils  en  ont  abufé  lî  vilcinemét,  il  fautaufsi  que 
cognoiflancequi  leur  auoit  efte  donnée,  com  Dieu  femonftre  leur  iuge  ,  &  qu'il  dcfployC 
me  s'ils  vouloyent  prouoquer  à  leur  efcient  vne  vengeance  double  fur  eux.  Ne  faut-il  pas 
&  de  propos  délibéré  l'ire  de  Dieu  côtr'eux?  que  cela  nous  foit  comme  vnmonihe  pour 
Saind  Paul  parle  ici  des  poures  Payens  qui  ia  nous  rendre  touseftonncz?  Et  ainli  retenons 
mais  n'auoycnt  ouy  vn  fcul  mot  de  la  Loy,ni  de  ce  que  dit  ici  faird  Paul-iufque^  à  tât  que        «> 
àa  Prophètes, ni-de  rEuang:Ie. Voila  le^  po-  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift  au  fait  office  de 
ures  gens  qui  font  nais  en  fiiperiHtion,  on  les  Rédempteur  enuers  nous, que  nous  ferons  de 
y  a  nourris ,  ils  cuidét  bien  faire  quand  ils  s'a  tenus  aux  liens  de  Satan  :  coliilnc  au  Ai  noftre 
donnent  à  leurs  folies  :  &  s'ils  fçauoyent  que  Seigneur  Icfus  déclare  au  huitième  de  fainft 
c'eft  de  Dieu, ils  s'y  voudroyent  bien  ranger,  Ichan.que  c'cft  l'on  propre  office  de  nous  de- 
ce  fenible  :  car  ladfuocion  q  l'ils  ont  enuers  liuicr.  Or  puis  qu'ainlî  cft  que  nous  aùos  efté 
leurs  idoles, mon  ftre  quelque  ligne  qu'ils  delî  fous  la  feruitude  du  diable, iufqres  .\  c-equele 
rent  de  craindre  Dieu.  Or  tant  y  a  que  faind  fus  Chnft  nous  ait  afFr.ichis.auifonsde  chcuii 
Paul  déclare  pource  qu'ils  font  ignorans, que  ner  en  toute  humilité  &' crainte, en  toute  foll 
ils  font  fous  la  tyrannie  du  diable,  qu'il  les  citudc.it  no' voulôs  demeurer  enpofT.  fion 
tient  captifs,  qu'il  les  traine,  qu'il  les  pouffe  &  ioiriffance  ferme  de  ceftc  liberté  qui  nous 
félon  fa  volonté. Si  des  poures  ipcredules  qui  a  efté  acquife  par  le  fang  du  Fils'de  Dieu, 
n'ont  ianiais  rien  cognu  font  en  vne  condi-  qui  nous  eft  donnée  par  le  fainft  El'piit.Qj.ie 
tion  tantmifcrable,Teii6s  mainteilant  àceux  donc  pourdcmeurer  en  poflehion  d'vn  tel 
aufquels  Dieu  auoit  tendu  la  uiain.aufquelsil  bien, nous  foy ons  fur  nos  gardes,  S:  que  nous 
auoit  ouuert  la  porte  de  fonEglife  .pcurdi-  aiiifîonsdéné  nous  poiut  iettcr  aux  filets  & 
re,  Entrez:  &aufquels  il  auoit  donné  fa  inar-  aux  laqs'd'è  Satan  à  noftre  efcient.  Q^ant  à 
que,  c'eft  afçauoir  le  Baptcllne  :  que  ceux-là  ce  qu'il  dit,  que  ^atan  !es  titiit  c-iptifs  ti  fi  -vo- 
fe  reuoltent  quand  ils  ont  cugiui  que  c'eft  de  hntc:  cela  nous  doit  eftre  encores  v;i  aduertif 
l'Euangile,  qu'ils  reiettcnt  la  cognoiflance  fcment  pour  nous  cfueiller  quand  nous  fe- 
qu'ilsont  rcceue, qu'ils  enfeuelilTent  les  dons  riôs  plus  ou'endormis,que  le  diable  nous  trai 
de  Dieu,  qu'ils  prophanent  le  fang  de  Icfus  re,&  nous  poufle  à  fon  plailîr,  qu'il  fifede 
Chnft  ,  brief,  qu'ils  lettcnt  à  leurs  pieds  tout  nons  tout  ce  que  bon  luy  féùiblf.    Or  quand 
ce  qui  leur  auoit  efté  d5né:ne  faut-il  pas  que  cela  tl]  dit  des  Payens,  que  fera-cc  donc  de 
Satan  en  prene  double  polTcfïionfNc  faut-il  ceux  qui  -int  mérité  vne  double  vengeance, 
pas  qu'il  domine  beaucoup  plus  fur  eux"  eue  &  beaucoup  pNs'griffuefM^îs  tant  y  a  que  (î 
furies  poures  ignorans?  Il  «ftbien  certairrll  le  diable  traine  air.f?  les  incrédules,  ce  n'eft 
cft  vray  qu'en  gênerai  le  diable  a  l'tmpiie  pas  qu'ils  foyent  ex'ciiûz  pourtant, comme  il 

Il.iii. 


438 


SERMON    XVIII. 


y  adesgaudifleurs  qui  voudroyent  bien  par 
vn  tel  fubterfuge  efcnapper  la  jnaiii  de  Dieu, 
Et  uuoy?Si  nous  fommes  pouffez  de  Satan,  le 
pecné  nous  doit-il  eftre  imputé?  Les  autres 
blafphement  contre  l'Efcriture  fainfte:car  il 
leur  femblc  que  Dieu  doit  louftenir  toute  la 
couipe  de  nos  péchez,  s'il  nouslaiire  en  telle 
leruitude.  Mai?  notons  que  les  incrédules  ne 
font  point  abfoiis ,  combien  que  le  diable  les 
iiydnile, qu'il  les  traîne  en  telle  rage  qu'on  ap 
perçoiuc  qu'il  domine  uir  eux.£t  pourquoy? 
Q^iand  nous  verrons  des  aftes  énormes ,  no- 
ftre  Seigneur  nous  monftre  que  c'tlt  Satan 
qui  domine.  QM,elques  fois  des  hommes  cui- 
deiont  eltre  aigus  Scfubtils  ,  &  bien  aduifez: 
or  ils  (e  tromperont  ,  &  feront  des  choies  fi 
lourdes  que  les  petis  enfin  4  fc  moqueront  de 
leur  beftifc, qu'on  voit.  Et  cela  comment  eft- 
:1  peu  aduenir  ainfi?  Ils  feront  des  aiies  li  vi- 
leins  qu'on  les  a  en  exécration,  qu'ils  font  en 
horreur  à  tout  le  i)i5de,il  femble  qu'ils  ayent 
confpiré  de  fe  mettre  en  infamie  &  opprobre 
â  grans  Si.  à  petis. On  verra  donc  de  telles  cho 
fes  fî  énormes  qu'on  fera  contraint  de  pen- 
fer  ,  Voila  le  diable  qui  domine.  Or  cepen- 
dant (î  on  examine  afçauoir  fi  le  mal  defplaill 
à  telles  gens ,  on  trouueia  qu'ils  ont  vn  cœur 
félon  &  rebelle  contre  Dieu, on  trouuera  que 
ils  font  pleins  de  peruerfitc.on  trouuera  que 
ils  ne  dem.ldent  que  d'appliquer  &  leurs  fens, 
&  leurs  efprits,&  leurs  atfetliôs,  &  tous  leurs 
membres  à  oifenfer  Dieu ,  Se  à  nuire  à  leurs 
prochains.  Or  quand  les  hommes  font  telle- 
ment tenus  captifs  de  Satan  ,  que  de  leur  bon 
gré  ils  font  nul,  que  ce  n'cft  point  par  force, 
mais  qu'ils  s'y  adonnent  de  tous  leurs  mou- 
uemeiH  ,  y  a-il  nulle  excufeen  cela?  Nenni. 
Notons  donc  en  fomme,  que  celle  captiuitc 
doiit  parle  ici  fainft  Paul.ellvolontaire  qu.it 
aux  hommes,  c'cfl  afçauoir  qu'ils  n'y  font 
point  forcez:  mais  tant  y  a  que  Satan  ne  laillc 
point  de  les  tranfporter  en  forte  qu'on  ap- 
perçoit  la  vengeance  de  Dieu  que  i'aydite. 
Ceci  pourroit  eltre  entédu  en  vn  mot, fi  nou« 
eftions  touchez  des  iugcmens  de  Dieu  com- 
me il  appartient.  Mais  quoy?  Ce  que  nous  ne 
cognoilfons  point  que  Dieu  aueugle  les  hom 
mes, qu'il  les  met  en  fens  rcprouué  par  fa  iu- 
fte  vengeance, ceb  eftcaufe  que  nousne  pou- 
uons  apperceuoir  comme  les  hommes  font  te 
nus  captifs  du  diable,  &  toutesfois  qu'Us  font 
Jamnables  deuant  Dieu.  Mais  fi  faut-il  néant 
jBoins  que  nous  avons  ces  deux  chofes  toutes 
Ttfolues.L'vnc  cli,  ^uc  quad  nous  verrons  des 
hommes  le  ietter  à  l'abandon, qu'ils  procéde- 
ront d'vne  telle  fureur  qu'il  femblc  qu'ils  fo- 
yentpriuezde  r^ifon  &  d'honneltcte  ,  qu'ils 
foyer  abiniiti':  du. tout,  cognoiflons  que  c'eft 
le  Ji.ible  qui  domine.  Voila  des  hon^niïs  qui 
defpitcnt  D.ieu  mauitcflemét,  ilfcmbic  qu'ds 
tafchctd'c.mpyifouuer  tout  lc;nÔdtde  leurs 
corrnptions.ilï  s'eleuei':  %ontrc  toute  bonne 
«loftri8c,fi  on  tafclic  de  les  gagner  par  dou- 


ceur,ils  fegaudiflention  n'y  voit  que  moqiif- 
rie:fi  on  les  menaci.&  qu'on  les  redargue.ils 
murmurent,  les  voila  comme  endiablca, qu'il 
n'eft  quellion  que  de  machiner  tout  ce  qu'il 
efl  polsible:nous  voyons  telles  gens  faite  cô 
plot  auec  le  diable  qui  les  tient  laifis  Si.  en  fa 
poflefsion.ll  taut  donc  qu'ici  nous  appreniôs 
de  nous  adonner  &  nous  ranger  à  Dieu  ,  le 
prians  qu'il  ne  permette  point  q  nous  le  pto- 
uoquiôs  en  forte  qu'il  nous  quitte  &  nous  a- 
bandonne  à  Satan, &  que  nous  luy  ioyons  co- 
rne en  proye. Voila  pour  vn  item.  Or  d'autre 
cofté,  cognoiflons  que  quand  les  homes  font 
ainfi  tranfportez  ,  combien  que  Satan  exerce 
fon  empire  fur  eux, qu'il  les  rue,  qu'il  les  agi- 
te ,  qu'il  s'en  fert  à  ceci  &  à  cela ,  toutesfois 
qu'Us  ne  ferét  point  excufez  en  leurs  pécher. 
Et  pourquoy?Car  ce  n'elt  point  par  côtrain- 
te  qu'Us  font  mal, Us  y  vont  toufiours  de  leur 
voleté.  Il  cfl  vray  qu'Us  fontdefpourucus  de 
fens  &  de  lailon:  mais  fi  eft-ce  qu'on  trouue- 
ra toufiours  la  racine  de  malice  en  eux  ,  on 
trouuera  qu'Us  ont  côfpirc  &  comploté  auec 
Satan:  côbien  qu'il  exerce  cefte  maiftrife  que 
nous  auons  dite  pour  les  tenir  en  feruitude,fi 
eft-ce  qu'Us  ne  demandent  que  de  luy  com- 
plaire, &  le  prefentei  àkiycommefts  fup- 
polh,  quand  il  ell  qucilion  de  fane  ia  guerre 
à  Dieu,de  fe  desborder  contre  tout  bien,  con 
tre  toute  honntiteté  :  on  voit  que  les  mef- 
chans  font  adonnez  à  cela.  Quelle  excufe  cft 
ce  donc  qu'Us  auront?  Et  ceux  qui  tafchent 
d'accufer  Dieu  afin  de  trouuer  quelque  fub- 
teifugc  ,  nt  faudia-il  pas  qu'Us  fentent  vne 
horrible  vengcancejd'auoir  ainfi  dtfguifé  les 
chofes, &  qu  ce  que  dit  le  Prophète  Ifaie.foit 
accompli  fur  eux  ,  Mai-heur  fur  vous  qui  di-  jJâ.t.lO 
(es  le  mal  cllrc  bien?  Or  quand  nous  aurons 
cognu  ces  deux  chofes, appienô^  de  glorifier 
Dieu,&  de  condamner  les  hommes  :  car  c'cft 
aufsi  la  finpiincipale  où  ci.ftedoihine  tend: 
ie  di  que  voyant  que  le  diable  trâfporte  ainfi 
les  hommes,côbien  que  ce  nous  fou  vne  cho- 
fe  efpouuantable,  que  nous  deuons  confeiref 
que  Dieu  eft  lulle  iuge  ,  &  que  ce  n'ell  point 
fans  caufe  qu'il  met  les  créatures  en  telle  c5 
fufion. Pourquoy ?Comme  dit  S.Paul.Qj^^and  Kanut.j. 
nous  ne  voulons  point  nous  alTuiettu  àceluy  xS, 
qui  nous  a  formez, n'eft-cc  pas  raifon  q  le  dia 
ble  nous  polfede?  Et  encores  que  Dieu  n'ait 
point  donné  cogno. (Tance  de  fa  parole  aux 
Payens ,  tant  y  a  qu'Us  font  inexcufables  fi 
toU  qu'il  lésa  nus  en  ce  mode. Car  nous  voy- 
ons que  tous  de  leur  bon  gié  s'adôncnt  à  mal 
pluftoil  qu'.i  b'en.  Voila  donc  Dieu  qui  doit 
eftre  gloiifiéd'vii  coftc,  en  ce  qu'il  ft  môftre 
iuge  équitable  quad  il  met  ainfi  les  homes  en 
fens  rcprouiie,&  en  elpritde  forcencrie(cô- 
mc  il  en  paric)quand  il  cnuoye  ceft  aueugle-  Rtma,  u 
ment  fui  les  hommes,  qu'Us  font  enragez  du  y». 
tout,  ou  bien  qu'Us  deuiencnt  ftupides  &  bru 
taux:  coijnoillons  qu'en  cela  il  le  monfire  iu- 
ge tel  qu'ildoit  eftic.£taurefte,qu'a  l'oppo-^ 

fite  nous 


SVR  lA    II.    A   TIMOTH. 


43!» 


ttt  nouic  apprenions  d^auoir  en  horreur  le  pe 
«hé.d'eftre  fur  nos  gardes,  Se  d'eilre  vigilans. 
Or  puis  qu'ainfi  cfV  (comme  dcfia  nous  aiious 
dit  )  que  ceux  qui  l'ont  tranfportez  de  Satan, 
font  autant  de  miroirs,  liclas ,  que  ûra-cc  de 
nous;Carnûus  ferions  femblables  àcui.lînon 
que  Dieu  nous  eufl  prcferucz,&  qu'il  cuft  touf 
iours  fa  main  eflenduc  pour  nons  tenir  en  ù 
protedion.  Et  ii  les  poures  infidèles  &  igno- 
lansqniiamais  n'ont  rien  cognii  de  Dieu, font 
ainli  tranfportez,hclas,que  fcia-ceîSi  nous  ne 
lomnies  humbles  pour  cfieminer  tn  modeftie, 
en  fobrieté,en  crainte  de  Dieu, que  meritons- 
noui?Car  nous  oyons  la  menace  qu'il  fait  con 
trc  ceux-  qui  auoycnt  cognu  fa  Parole  plus  fa- 
milièrement.Il  eft  vray  que  les  Prophètes  di- 
ront bien  comme  hérauts  d'armes ,  que  Dieu 
aueuglera  le  monde  ,  &  que  le  diable  régnera 
par  tout  :  mais  cependant  quand  ils  vienent  à 
ceur  qui  ont  efté  priuément  eiifeigncz,&  auf- 
quels  Dieu  s'eftoitmanifefté.que  leurdilcnt- 
ils?Que  leur  iniquité  furmonte  toutes  les  au- 
tres .  C'eft  donc  à  ceux  que  Dic.i  auoit  appe- 
lez à  foy,qu'ell  referuee  la  vengcace  tant  plus 
horrible  ,  qu'ils  foyent  du  tout  reiettez  de 
Dieu:&  non  fculeméc  ci.la,mais  que  Dieu  don 
ne  plus  grande  licence  à  Satan, qu'il  les  tranf- 
porte  en  telle  rage, qu'on  apperçoit  (comme 
i[  a  efté  dit)que  quad  Dieu  cnuoye  ce  threfor 
de  fa  Parole, Il  on  ne  le  reçoit  en  telle  reueré 
ce  qu'il  appartient,  qu'il  fe  vége  du  raefp  ris  & 


de  l'ingratitude  qui  eft  aux  hômes. Voila  donc 
ce  que  nous  auôs  à  retcnir,tQUtesfois  Si  quan 
tes  que  nous  voyôs  que  le  diable  poulTe  &pre 
cipite  ainfî  ceux  qu'il  veut  abyfmer,  qnc  nous 
apprenions  de  nous  recueillir  fotis  la  garde  de 
noftre  Dieu,  &  que  nous  le  prions  de  nous  te- 
nir en  bnde  courte,  &  de  iamais  ne  permettre 
qu'il  nousaduiene  de  nous  efgarer,  aiîn  que 
quoy  que  le  diable  machine ,  toutesfois  nous 
ne  foyons  point  fuiets  à  Û  volonté  ,  que  nous 
ne  luy  dônions  point  accès  ni  entrée  en  nous, 
tellement  qu'il  ne  gagne  rien  fur  nous  ,  quoy 
qu'il  face .  Ce  qui  fera,  moyennant  que  nous 
demeurions  fous  la  garde  &  fous  la  conduite 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  lequel  fe  mon 
ftrera  fidèle  pour  exécuter  la  charge  qui  luy 
eft  comaiifede  Dieu  fon  Père,  c'eièafçauoiv 
de  faire  que  de  tout  ce  qui  eft  venu  à  luy, rien 
ce  pcrifle,  mais  qu'il  foit  gardé  iufques  au  der 
nieriour. 

OR  nous-nous  profterncrons  deuantia 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir  que  nous  n'auons  point  fait.en  telle  foi 
te  que  nous  foyons  amenez  iufques  à  vnedro< 
te  repentance  ,  Se  que  nous  y  profitions  de 
plus  en  plus, nous  fupportant  toufiours  en  nos 
infirraitez  ,  iufques  à  ce  qu'il  uous  en  ait  cor- 
rigez ,  voire  defpouillcz  du  tout .  Ainli  noue 
dirons  tous,  Dieu  touc-puiflaat,  Père  ccJcftc, 
&c. 


PIlEMlER     SERMON      SVR 

TROISIEME     CHAPITRE. 


L  E 


I      Orfcdchc  qu'es  derniers  iours  les  temps  feront  périlleux. 

2.  Car  les  hommes  feront  s'aimans  eux-  mefmes,  auaricieux,  "van" 
tcurs  yorgueilleux.dijfdmdtcurs  Mfohetjfans  a  père  (f  à  nter  e, ingrat  s  ^ 
contempteurs  de  Dieu, 

5  Sans  ajfcBion  naturelle, fan  s  loyauté  >  impofeurs  de  crimes  fans 
attrempance, cruels  hayjfans  le  hicn, 

4  Traiîires,  infolens,  enflez  >  ^wctrewr  j  de  y  oluptez  pl^^  <{tie  de 
Dieu. 

5  Ayans  la  forme  de  preud  hommie,  mais  renians  la  force  d  ic  el- 
le. De?lournc-toy  aufi  diceux. 

l  nous  voyons  des   corru-  forgent  à  leur  fantalîe  quand  ils  n'cfl  tronuét 

ptions  àl'entour  denoiis,  il  point.  Carnioyennant  qu'ils  ayent  des  com- 

nous   femble   qu'elles  août  pagnonsàmal,  celeur  eft  toutvn,  il  leur  fem- 

doyuét  feruit  d'excufe  pour  ble  que  c'eft  vn  bouclier  pour  fe  couurir:  inef- 

nousdesbauchcr  awec  le  re-  mes  ceux  qui  ne  font  point  mal  affectionnez, 

fte  :  comme  beaucoup  font  encores  fe  troublent-il>  quand  ils  voyent  les 

leur  profit  des  fcâdalcs  qu.îd  chofes  aller  mal,  &  ne  fçai.ent  qu'ils  doyuent 

lis  aduiencnt,  &  mefmes  ils  les  cerchent,  &  en  plus  faire .  Or  tant  y  a'  que  o'icu  de  fa  part 

li.iiii. 


440  :     S  E  R  M  O 

notis  a  aflcz  miiaiç ,  afin  que  nous  ne  foyons 
point  deitouriiez  du  bon  cliemm, combien  que 
nous  voyons  des  chofes  contul'cs  tain  &:  plus: 
mais  nous  n'efcoucons  point  les  aduertiflemés 
qui  nous  lont  donnez  du  ciel. Voila  pourquoy 
le  diable  nous  esbraiile  ii  airément .  Si  ell-ce 
que  Dieu  ne  lailFe  pas  de  nous  monlher.com- 
bien  que  tout  le  monde  le  perueitifle ,  qu''il 
nous  faut  tenir  à  luy:li  nous  ne  le  failons,  mal 
heur  fur  nous:  car  il  nous  faut  eflre  inexcufa- 
blcs,  d'autant  que  nous  n'auons  point  efcouté 
celuy  qui  nous  euft  bien  armez,  quand  nous 
culiions  tait  noftre  profit  des  admonitions 
qu'il  nous  dônoit.  Comme  en  ce  paflàge  nous 
oyons  ce  qu'il  dit  par  lainft  Paul ,  c'ell  afça- 
uoir  que  uifques  à  la  fin  du  monde  on  ne  doit 
point  penler  que  les  choTesdoyuent  eflre  fi 
bien  réglées  en  l'Eglile  de  Dieu  ,  qu'iln'yait 
que  redire,  qu'on  voye  comme  des  pctis  An- 
ges qui  ayent  bon  zèle  de  feruir  à  Dieu  :  mais 
tout  à  l'oppofite  on  verra  des  gës  gloricux.on 
verra  des  gens  defloyaux,  traiftres  ,  pleins  de 
cruauté  &  malice, inhumains  comme  befles  fau 
liages:  on  verra  des  côtemprcurs  de  Dieu,  on 
verra  des  gens  addonncE  à  toute  intemperan- 
ce>de  viedilTolue,  vileinec&bruta;le  :  &  ceux- 
là  le  nommeront  Chre/liens  .Brief(dit  fain£t 
Paul)combien  qu'ils  lemblcnt  eftre  enfansde 
Dieu,  (ieit-ce  qu'on  ne  trouuera  point  vne 
l.eule  goutte  Je  vertu  en  eux.  Car  quand  le 
faintt  Elpnt  a  prononcé  vne  telle  lentcnce, 
cft-ce  pour  nous  donner  congé  de  mal-fairc, 
&  qii'vn  chacun  dile  qu'il  pourra  vrler  entre 
les  loups?Nenni:mais  c'eft  afin  que  nous  Coy~ 
0ns  tant  plus  fur  nos  gardes, que  nous  ne  pen- 
fions  punit  eftre  ici  comme  en  paradis  pour 
nous  repofer  :  mais  d'autant  que  nous  auons 
les  combats  appreftez, que  Satan  tatche.de 
nousdiuertir,il  nous  faut  eflre  tant  mieux  for 
tihez-.Vojk  à  qu^liç  intention  nous  fonimes 
admoneftez  .  Mais  quoy  ?  Nous  faifons  l'au- 
leillê  fourde>:  A:-  voila  pckirqiioy  Dieu  parle 
ainfi,  Q_ue  beaucoup  de  gens  le  deflourncronc 
encores  qu'ils  euircnc  l'apparence  de  chemi- 
ner comme  Chreitiens,  on  les  verra  changer 
en  moins  de  rien. Et  pourquoyrCar  ils  ne  dai- 
gnent pas  efcouter  ce  que  Dieu  déclare  par 
la  bouche  de  fon  /ipoftre  :  ils  méritent,  donc 
»j  le  diable  ait  facile  accésà  eux,6i  qii'il'Ies  ga- 
gne &  attrappe  du  premier  coup. Ainfi  d'autît 
plus  noys  taut-il  dire  attentifs  .1  ce  qui  nous 
fit  déclaré  ei^rcp.^fÇige.  Gar.ijinft  Paul  n'a 
point  ieulement  parlé  pour  fon  temps:  il  dit 
qu'aux  derniers  iours  cela  feia  .  Et  qu'cll-cc 
que  cela  comprend?  Tout  l'cflarde  l'Eglife 
Chreftienne.  Car  quand  l'Efcnture  parle  des 
derniers  ioufs.elle  fait  compataifon  einrrc  les 
ombres  de  la  Loy  ,  &  cefle  pi/rfeitioii.  qui  a- 
uoit  eiié  eipcrce  à  la  venue  du  Rédempteur. 
Caries  Pères  lufqucs  à  l'Euangiio  ont  efté'cô 
me  en  fufpens:  d  faloît  que  le  mande  full  c-oim 
me  cliangc  quand  leliis  Chrifl  cil  apparu  jvour 
Icfilutdes  hoiuaics.  Or  pour  celle  caufé'dc- 


N     XIX. 

uant  que  noftre  Seigneur  fuflmanifcflé, les  fi- 
dèles ont  toufiours  attendu  ce  qui  auoit  cflc 
promis  fous  la  Loy  :  c'eil  que  Dieu deuoit  a- 
menervne  perfttlion  autre  qu'on  ne  voit-pas 
maintenant:  depuis  que  noflre  Seigneur  lefus 
a  tout  accompli  ce  qui  eiloit  requis  pour  le  (a 
lut  du  mode,  nous  fommes  aux  derniers  tours. 
Voilà  pourquoy  l'Apollredit  au  premier  cha 
pitre  de  l'Epiftre  aux  Hebrieux,que  Dieu  a 
ladis  parlé  en  diuerfes  fortes  ,  &  par  plufieurs 
fois  à  nos  Peres:mais  en  ce  temps  dernier  il  a 
tait  vne  conclufîon  parfaite  ,  quand  il  nous  a 
reuelé  fon  Euangile  par  noflre  Seigneur  le- 
fus Chfift .  Voila  pourquoy  faindl  Paul  aufsi 
dit  que  nous  fommeï  paruenus  à  la  fin  des 
temps, &  que  les  fins  des  temps  aufsi  font  com 
me  elcheues  fur  nous ,  qu'il  faut  que  mainte- 
nant nous  courions  vifle  pour  acheuer  ce  qui 
nous  refte  à  viure  en  ce  monde  ,  que  nous  ne 
foyons  plus  ici  en  doute  pour  fçauoir  ce  qui 
aduiédra:car  lel'us  Chrifl  nous  a  apporté  tout 
ce  qui  auoit  elle  promis  à  nos  Pères  :  il  ne  re- 
lie donc  finon  qu'vn  chacun  de  nous  chemitie 
uifqu'àceque  Dieu  le  retire  de  ce  pèlerinage 
terrien. Et  cependant  que  nous  apprenions 
toufiours  de  regarder  à  cefle  dernière  mani- 
fellation, quand  lefus  Chrifl  viendra  pour  re- 
cueillir les  liens,  &:pourconfopdre  fes  enne- 
mis.Voila  donc  comme  les  derniers  iours  ont 
commencé  depuis  le  temps  des  Apoflres,  ils 
continuent  à  prefent,  &  dureront  iufques  à  la 
fin  du  monde  .  Or  pourquoy  efl-ce  que  l'aindl 
Paul  tant  ici  qu'ailleurs  parle  des  derniers 
iours, qu.îd  il  aduertit  les-fideles  qu'il  faut  que 
ils  fe  difpofent  &'appreflent  à  beaucoup  de 
troubles  &  de  tafchcries  ?  C'eft  d'autant  qu'il 
y  auoit  celle  tantafic  quafi  commune,  que  les 
chofes  iroyent  beaucoup  mieux  qu'elles  n'e- 
lloyent:  pnurce  qu'aiiparauant  les  Prophètes 
parlans  duRoyaume  de  Icfii;  Chrifl, difèyent 
que  tout  feroit  h  bien  reforme  que  merueilles, 
que  le  monde  fe  rangcroit  à'Dicu,  que  fa  ma- 
ieflé  fcroit  adorée  &  de  grans  &  de  petis ,  que 
toute  bouche  luy  chanteroit  louange  ,  &  que 
tout  genouil  fe  ploycroit  deuant  luy  :brief, 
qu.îd  on  oit  de  telles  promefTes,  il  femble  que 
•  nous  dou-rions  eftre  en  vne  faniCteté  Angéli- 
que, depuis  que  lefus  Chrift  eft.ipparu  .  Et  la 
raifon?C'cft(comme  l'ay  dit)quc  beaucoup  a- 
uoyent  conclu  cela  en  leur  fantafie  ,  qiji  les 
trompoit.qiii;  depuis  Li  venue  du  Rédempteur 
on  ne,ver'roit  phisque  tome  honnellctc  5(  mo 
deftie,  que'  les  chufcs  fcroycnt  tant  bien  reduil 
tes  qiiM  n'y  abroit  plus  de  vices  au  mondcOr' 
maintenant  l'Apoftredit  à  roppofite,quecqm. 
bien  que  cela  doyUe  commencer,  que  \a  per- 
fcfbion  ne  s'en  verra  pas  du  premier  lour.Tât' 
s'en  faut(dit-il)queceuxq(ii  s'appellét  Cliré-; 
ftiens,,  fi^ycnt  tels  commcils  en  font  prot'el~ 
ficmde  bouche  .qu'ion  les  verra  pleins  d'or-:, 
gueil, pleins  de  mali'ce,  pleins  dpdcCoyamc  Set 
de  ti.ilul'on, pleins  d'auarice.pk-ms  de  inclpris 
de  Dieu  &  de  toute  iniquité,  qu'ils  lucncronc 

vne 


s  V  R    LA    II.    A    T  I  M  O  T  H. 


44^ 


Tne  vie  difTolue  &  mefciiaiue ,  que.Ies  vçis  fe- 
ront jjâill.irs,  Icsaucres  yuronguCs,  les  autres 
niefdilaiis,&  fetôt  toulîoars  à  racointer. Voila 
(dit-il)  la  Chreftiétc  qui  fera  en  beaucoup  de 
gens. Nous  voyons  maintenant  pourquoy  no- 
tammét  famâ  Paul  a  parlé  des  dernieis  lours: 
x.fltr.1.  comme  quand  fainû  Pierre  en  fa  féconde  Ca- 
I.  noniquedit  qu''il  y  aurades  feduûeurj  entre 

nous.corae  il  y  a  eu  au  peuple  des  luifs,  &  des 
faux-prophetes:par  cela  il  Cnôftre  que  fi  Dieu 
a  Toulu  exercer  les  fidèles  f'ms  la  Loy, permet 
tant  qu'il  y  veinft  des  mefclians  qui  tafchoy  et 
deperuertir  la  pure  vérité  ,  qu'il  y  aura  aufsi 
bien  maintenant  de  telles  canailles  qui  tafche 
ront  defalfifier  TEuangilè,  &  mettre  tout  en 
corruption,  d'obfcurcir  la  clarté  de  Dieu  ,  & 
coniiertir  fa  vérité  en  menfonge.Brief.ilnour 
cft  monftré  par  ces  mots,  combien  que  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  fe  foit  déclaré  le  Sau- 
ûeur  du  monde,  comb  en  qu'en  fa  pcrfonne  il 
ait  accompli  tout  ce  qui  eft  requis  à  noftre  Ci- 
lut,  neantmoins  cependant  que  nous  auons  à 
cheminer  ici  bas ,  que  nous  ne  fommes  point 
encores  enctfte  perfcftion  ,  mais  qu^il  nous 
faut  batailler,  qu'il  nous  faut  cheminer  parmi 
les  efpines,  qued'vn  cofté  nous  ferons  tour- 
mentez par  la  malice  des  hommes  quand  les 
vices  régneront:  &  pourtant  que  nous  foyons 
fur  nos  gardes, que  nous  ne  foyons  point  def- 
bauchez  par  le«  troubles  que  nous  verrons: 
quand  il  y  aura  des  zizanies  &  faulTcs  doftri- 
nes-&que  Satan  machinera  de  tout  rcnuerfer, 
&  faire  que  l'Eglife  foit  difsipce  ,  &  que  tout 
l'édifice  de  Dieu  s'en  aille  bas,  que  nous  priés 
noftre  Dieu  qu'il  nous  face  furmonter  tout 
cela. Nous  voyons  donc  que  ce  n'eft  point  af- 
fez  que  les  Chreftiens  foyent  en  bon  train  ,  & 
qu'vn  chacun  deCre pour  foy  d'obéir  à  Dieu, 
mais  il  nous  faut  aufsi  refifter  à  toutes  tenta- 
tions: combien  que  nous  foyons  enuirônez  de 
ieaucoup  de  fcandales,  que  nous  deuons  eltre 
jnunis  à  l'encontre.&qu'ilne  faut  pas  qnous 
foyons  comme  rofeaaxbranlans  à  tous  vents. 
Il  eft  vray  qu'vne  eau  fans  tourbillon  ni  tem- 
pefte  pourra  bien  eftre  paifîbie  :  mais  de  quoy 
fert  cela  quand  il  ne  faudra  qu'vne  bouffée  de 
yent.que  la  voila  toute  côfufc?  Er  fi  nous  fom 
mes  ainlî  qu'eau, qu'il  n'y  ait  fermeté  en  nous 
ne  conftance,&  li  toft  que  Satan  eiinouucra  vn 
tourbillon  ,  que  nous  ferons  agitez  ,  que  nous 
ne  fçâchions  quel  chemin  il  nous  faut  tenir, 
levons  prie,  ne  voila  point  noftre  foy  qui  eft 
vaincue?  Ainfi  apprenons  qu'il  ne  fuffit  pas 
que  ceux  qui  veulent  eftre  reputez  enfans  de 
Dieu, foy ent  bien  difpofez  quant  à  eux  pour 
s'acquitter  de  leur  deuoir.mais  encores  qu'ils 
foyent  aflàillis  de  beaucoup  de  troubles ,  & 
^u'il  femble  qu'ils  doyuent  eftre  esbranlez  çà 
écli,  moyennant  qu'ils  ayent  prins  vne  con- 
clufion  ferme  &  confiante  de  toufiours  aller 
plus  outre,&  ne  point  changer  propos,  il  faut 
qu'en  defpitde  Satan  3i  de  tous  fes  iiippoftsils 
profitent  de  plus  ci  plus,  qu'ils  demeurent  eu 


leur  intégrité ,  encores  qu'il  n'y  ait  par  tout 
que  faufletez  &abus,&:  que  tout  le  monde  foit 
plein  d'infc£tion&ordure,il  faut(di-it)qu';l!  , 
fe  mainticnent  .d'autant  que  Dieu  lésa  vne 
fois  fanftifiez,&  qu'ils  perfiftent  en  cela. Voi- 
la en  fomme  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce 
paflage.Mais  notons  bien  que  fainft  Paul  non 
fans  caufe dit,  Sfrtffef.  Il  eft  vray  qu'il  parle  à 
Timothee  :  mais  en  la  perfonned'vn  homme 
fcul  il  aduertit  &  les  Pafteurs  qui  auoyenr 
charge  de  gouuerner  l'Eglife, &  par  confe- 
quent  tous  fidèles,  qu'il  faut  que  nous  foyons 
tous  informez  de  ceci,  comme  ce  nous  eft  vne 
doflrine  bien  vtile.Et  voila  pourquoy  l'ay  dit 
que  nous  ferons  aifeementdesbauchez fi  nous 
ne  fommes  munis  deuant  le  coup  :  que  fi  nous 
fommes  nonchalans  ,  le  diable  aurai  trouiié 
bien  toft  accès  à  nous  pour  y  faire  vnebrel- 
che.  Ainf  donqucs  non  fans  caufe  fainft  Paul 
vfe  de  cefte  préface  ,  qu'il  nous  faut  fçauoir 
ceci. Et  au  refte,  quels  Chreftiens  font-ce  qui 
prenent  occafion  de  quitter  TEuangile,  ou  de 
blafphemer  à  rencontre, quand  ils  voyentque 
les  chofes  ne  fe  gouuement  pas  à  fouhait? 
Voila  les  propos  qu'on  orra  quafi  par  tout, 
Ho,i'eu(îèpenfe  que  les  hommes  qui  fontpro 
fefiion  de  l'Euangile,  euflent  efté  fans  aucune 
tache  ne  vice,&  ie  voy  qu'ih  font  les  pire^:  va 
homme  parlera  de  Dieu  à  pleine  bouche  ,  Se 
cependant  on  le  verra  eftre  malin  &  peruers: 
l'autre  fera  paillard,  l'autre  fera  vn  auan- 
cieux, l'autre  fera  addonné  à  fraudes  Se  à  trom 
pcries, l'autre  à  cruauté  •  quand  ie  voy  ces  cho 
fes-la,que  puis-ie  faire  ?  Il  vaut  mieux  ne  s'ad 
donner  à  rien  qui  foit.  On  orra(di-ie3ces  pro 
pos-la  .  Et  dont  vient  vne  telle  beftife ,  finoa 
qu'on  n'a  point  youhi  recorder  cefte  leçon 
qui  nous  cft  icimonftree?  Il  faut  fçauoir  ce 
poinft.dit  lainft  P.iul,&  nous  le  roulons  igiia 
rer:&  encores  qu--  l'expérience,  qui  eft  la  mai 
ftrelTe  des  fols  (  comme  on  dit  en  prouerbe) 
nous  tiene  làconuaincus,  fi  eft-ce  que  nous  y 
fermons  les  yeux  ,  &  n'en  voulons  rien  fça- 
uoir.Orfi  ceux  qui  veulent  ainfi  périr,  periC- 
fent.de  noftre  cofté  que  nous  ouurionsnose- 
fprits  quand  noftie  Seigneurnous  déclare  que 
iJ  nous  faut  bien  retenir  ce  qu'il  nous  mon- 
ftre.afin  den'eftrepoint  feduits.Au  reile.poi- 
fons  aufsi  ce  que  fainft  Paul  adioufte,I/a/»  «» 
<fM(dit-il)</fJ  ttnips,  ou  dangereux,  outerri- 
bles.ou  fafchcux:  car  lemot  dontii  vfe,figni- 
fie  toutes  ces  chofes  .difficile  ,  terrible  ,  faf- 
chcux,peruers  .dangereux.  Il  dit  donc  que  les 
enfans  de  Dieu  s'appreftent  àcecKcomme  s'il 
difoit ,  Mes  amis ,  il  eft  vray  que  Dieu  nous 
pourroit  bien  recueillir  en  quelque  coin  là  oi 
nous  fufsionsvn  peuple  arrcfréd'vn  commun- 
accord,*  où  il  feroit  honoié  &  ferui  de  tous, 
&  ce  feroit  vne  vie  defirable   que  cefte-la: 
Dieu  donc  nous  pourroit  bien  donner  vne  tel 
le  condition-mais  quoy?  il  nous  veut  exercer:, 
il  veut  q:ie  nous  fovons  mefez  comme  le 
rrain  parmi  la  paille, que  nous  fnvon'  me  fines 

Kh.i. 


44i  SERMO 

entre  les  efpines  qui  nous  plcquent  &  pei- 
gnent ,  que  nous  ayons  des  combats  tous  les 
iouis,  quequanilnous  ferons  el'chappez  d'vn 
mal, que  l'autre  fiiruiene,&  quenortre  vie  foit 
comme  vne  gendarmerie  iulquet  en  la  fin.que 
nous  foyons  alFaillis  de  tout  coftez,  aue  le  dia 
bie  machine  ,  &  qu'il  ait  fes  prattiques  tontes 
propies  pour^ious  peruertir;  Dieu  veut  que 
cela  l'oit, afin  d'examiner  il  nous  le  feruons  en 
vérité  ou  non  ,  afin  que  les  hypocrites  fayent 
Cognus  âc  defcouuerts .  Ainli  donc  receuons 
ceft  aduertiflement ,  que  fi  Dieu  nous  donne 
quelque  relafche  ,  que  nous  foyons  paiSbIes 
pour  vn  temps  ,  que  nous  ne  laïf  ions  pas  de 
toufiours  noter  que  nous  ne  fommes  pas  loin 
des  temps  périlleux,  des  temps  terribles ,  des 
temps  fafcheuï.  Et  pourquoy  ?  Car  il  eft  ainfî 
prononcé  parle  fainil  Efprit .  C'cfl  donc  en 
vain  que  les  hommes  fe  promettent  le  con- 
traire. Q_ue  gagnerons-nous  àefperer  tout  ce 
qui  nous  viendra  en  fantalîe  ,  &  que  nous  ne 
ayons  point  la  promefle  de  Dieu  qui  nous  ad- 
drcllc  ;  Il  ell  viay  que  nous  ne  pouuons  eftre 
evcelsif'.  en  nous  appuyant  fur  les  promefles 
de  Dieu:mais  il  faut  que  les  hommes  fe  trom- 
pent quand  Us  balHilL-nt  en  leur  cerueau  ce 
que  Dieu  ne  leur  a  point  dit .  Puis  qu'ainfi  eft 
donc  que  Dieu  nous  apprefle  des  temps  terri- 
bles &  fafcheux.que  nous  n'imaginions  point 
vn  repos, pour  dire.Nous  ferons  à  noftreaife, 
il  ne  fera  plus  qneftion  que  de  chanter,  com- 
me fi  nous  eftiôs  défia  au  Royaume  des  cieux: 
mais  voici  le  temps  de  nos  combats ,  il  faut 
que  nous  foyons  appareillez,  il  nous  faut  ar- 
mer.il  faut  auoir  l'efpee  au  poing, il  nous  faut 
prëdre  3c  bouclier,&  heaume:brief,il  no'  faut 
eftre  equippez  de  pied  en  cap  ,  comme  fainA 
Paul  aufsi  en  parle  au  fixicme  des  Ephefiens. 
NJais  notons  bien  aufsi  quand  il  dit  que  les 
temps  feront  dangereux  &  terribles  ,  pource 
que  les  hommes  s'aimeront  eut-mefmes  ,  que 
ils  feront  auaricieux  ,  qu'ils  feront  malins  8c 
defloyàux,& comme  il  s'enfuyura.Q_uâd  nous 
parlons  des  temps  fafcheux,&  terribles, &af- 
pres  ,  c'eft  feulement  à  caufe  ou  de  la  famine, 
ou  des  guerres,  ou  des  pertes ,  Se  autres  mala  - 
dies, quand  les  choies  ne  nous  viencnt  point  à 
propos,  mais  que  nous  fommes  affligez. Voila 
les  temps  qui  nous  font  afpres  &  rudes. Helas, 
que  voici(dira-on)vn  ma^uais  temps, Et  pour 
quay?Iln'y  aneblé  ncvin.Apres,Noiis  fom- 
mes en  mauuais  temps.  Et  pourquoy?Car  voi 
Cl  la  guerre  qui  eft  venue.  Nous  fômes  en  màu 
liais  temps  :  car  nous  auons  la  pefte.noftre  vie 
eft  pendante  comme  en  vn  filet ,  il  fcmble  que 
nous  feulons  eftre  raclez  chacun  lour  .  Voila 
donc  (  ce  nous  femb'e  )  les  temps  rudes  ,  faf- 
cheux&  terribles.  Or  fainft  Paul  n'allègue 
rien  de  tout  cela,  mais  il  dit  que  les  teinpslfe- 
ront  talcheui,à  caufe  des  corruptions, que  les 
vices  auront  la  vogue,  qu'il  y  aura  comme  vn 
déluge  de  toute  iniquité  Retenons  bien  donc 
que  quand  nous  aurons  abondance  de  blé& 


N    XIX. 

de  via,  qu'vn  chacun  pourra  vîure  à  fonaife,' 
que  nous  aurons  paix, qu'il  n'y  aura  point  ap- 
parence de  grandes  maladies  ;  quand  donc 
Dieu  nt  usefpârgneraainfi,il  ne  nous  faut  en- 
dormir en  telle  profperité  .  Car  le  principal 
eft ,  de  bien  regarder  fi  nous  fommes  règles 
comme  il  appartient ,  qu'il  y  ait  vne  mélodie 
pour  honorer  Dieu,  qu'vn  chacun  s'accorde  à 
cela,  qu'on  ne  voye  point  les  blalphemes  re- 
gner.les  yurongneries.les  paillardifes,  les  ra- 
pines, les  cruautez  ,  les  fraudes ,  les  pariuresi 
qu'on  efcoutela  parole  de  Dieu,&  qu'on  l'ho 
none-  Quanddonc  nous  voudrôs  fçauoirquel 
eft  le  temps  aiféjiJ  ne  faut  point  que  nous  en- 
querions  fi  les  vignes  font  belles, s'il  y  a  bon- 
ne nioiflbn.fileschofes  fontdifpofees  com- 
me nous  defirons:  il  ne  faut  point  nousarre- 
fter  là,  car  ce  font  autant  d'amufe-fols .  Il  eft 
vray  que  fi  Dieu  nous  donne  de  quoy  eftre 
nourris,  ceftebencdiûion-la  nous  eftvn  tef- 
moignage  de  ("on  amour  paternelle  ,  que  nous 
deuons  eftre  tant  plus  incitez  de  venir  à  luy. 
Mais  ce  n'eft  point  lànoftre  dernier  but ,  il 
faut  regarder  plus  haut,  c'eft  afçauoir  fi  nous 
voyons  les  chofes  eftre  bien  &  deuement  re- 
formées. Vorladoncceque  nous  auons  àrete 
nir  de  ce  paflàge.  Mais  quoy?  ?  Nous  fommee 
fi  charnels  que  ce  nous  eft  tout  vn.moyennane 
que  nous  ne  fentions  point  le  .mal  qui  nous 
preflè  ,  ou  d'incommodité  félon  le  monde. 
Q_iiand  chacun  viura  paifiblemcnt  en  fon  mçf 
nage,  &  que  nous  n'aurons  ne  molcfte  ne  faf- 
cherie,  nul  n'apperçoit  que  les  temps  foyent 
mauuais  :  &  neantmoins  on  ne  laifiera  pas  de 
blafphemer  Dieu, il  y  aura  des  enormitez  gra 
des.il  y  aura  des  fraiides.deslairecins.des  lan 
cunes,il  y  aura  les  chofes  dont  parle  ici  ùiinOt 
Paul.Et  cependant  nous  n'en  parlerons  point 
finon  que  le  mal  nous  attouche  :  car  nous  ne 
fommes  que  par  trop  délicats  fi  on  nous  gre- 
ue.  Qu^on  nous  face  quelque  tort,  que  nous 
ayons  dommage  feulement  d'vn  denier,  nous 
fçaurons  bien  dire,  Et  qu'eft-ce  que  de  la  per 
uerfité  qui  eftauiourd'huy  ?  Nous  en  feros  de 
grandes  plaintes  &qiieriraonies .  Mais  tant  y 
a  que  fi  nous  auons  ce  qui  eft  à  fouhaiter.lans 
qu'on  nous  fafche, fans  qu'on  nous  trouble,il 
nous  femble  que  tout  va  bien.  Et  tant  y  a  que 
l'honneur  de  Dieu  fera  foulléau  pied,  toute 
honnefteté  iéra  difsipee  ,  il  n'y  aura  ni  ordre 
ni  police,les  hommes  feront  côme  beftes  bru- 
tes:ce  nous  eft  toutvn(c5me  l'ay  di:)moyen- 
nant  que  nous  n'en  i'entions  ne  perte  ne  dom- 
mage. Or  tant  y  a  que  fi  nous  fommes  enfans 
de  Dieu,  il  nous  faut  goufter  ce  qu'il  a  ici  dé- 
claré par  fon  faiiifl:  Efprit ,  Qu^cncores  que 
tout  aille  félon  noftre  phantafie.voire  quant  à 
nos  commoditczdu  monde.nous  nedeiiôs  pas 
laifler  pourtant  de  foufpirer  &cftre  enangoif 
fe.finon  que  Dieu  foit  icrui, qu'il  y  ait  vne  rè- 
gle commune, que  le  bit  n  ait  fun  cours, &  que 
le  mal  foit  réprimé  comme  il  doit.  Si  cela  eft,- 
chacun tafchera  de faitéfon dcuoir.Car  ceux 

qui 


SVR     LA   IL     A     TIMOTH. 


443 


qui  font  en  eAat  public awreront.C'eft  peu  de 
Chofe  q  nul  n'ait  efté  f  oiilJé.qu'on  n'hait  point 
laui  le  bien  en  quelque  maifon  ,  ou  que  nous 
ayons  maintenu  iî  bien  les  perfonnes  qu'il  n'y 
a  eu  aucun  excès  commis  :  ceux(cli-ie)qui  ont 
leglaïueenlamain.qui  font afsis  pour  gouuer 
ner  la  iuftice.ne  penferôt  point  s'ellre  acquit- 
tez, quand  ils  auront  tenu  quelque  moyen  en- 
tre les  hommes,  tellement  que  nul  ne  fe  plain 
dr^:  mais  ils  regarderont  plus  loin  ,  qu'il  faut 
y  loyauté,droiture,la  religion  fur  tout, &  puis 
les  vertus  qui  font  requifes  pour  bien  viure, 
que  tout  cela  florille,&  qu'il  foit  maintenu.  Il 
faudra  aufsi  que  les  minières  de  la  parole  de 
Dieu,les  prefcheurs  de  l'Euâgile  cognoifTent, 
encores  qu'il  n'y  ait  point  de  troubles  mani- 
fertes,que  cela  eft  peu  de  chofe,finon  qu'on  vi 
ue  h5neftcment,&  que  Dieu  foit  honoré,  que 
les  chofes  aillent  bien, pour  le  moins  qu'ils  s'y 
efforcent.  Mcfmes  ceux  qui  n'auront  point  de 
charge  publique  péferont  à  eux:  que  quand  vn 
homme  veira  qu'il  a  des  enfans  mal  inrtruits, 
qu'il  aura^ou  feruiteurs,  ou  chambrières  qui  fe 
desbauchcnt.il  ne  fera  point  à  fon  aife:enco- 
res  que  cela  ne  luy  porte  nul  dommage  ,  il  fe 
fafchera,  &  tourmentera, voyant  que  Dieu  ne 
cft  point  ferui  en  fa  maifon  .  Ceux  qui  auront 
tafchéde  bien  ^ouuerner  leur  mefnage,  quad 
ils  fortiront  par  les  rues, s'ils  voyét  qu'il  y  ait 
des  vilenies,  des  enoimitez,  &  que  les  chofes 
ne  feconduifentpas  c:,mme  il  appartient,  ils 
ne  laiilèront  pas  de  gemir.ll  eftdit  notainent 
de  Lot,  qu'il  a  angoifle  fon  cœur  ,  qu'il  ciloit 
cndtflrefle  cependant  qu'il  viuoit  en  Sodo- 
me.Il  eft  vray  quede  ce  temps-la, (comme  E- 
zechiel  en  parle)il  y  auoit  telle  abondance  de 
tout  bien, qu'on  fe  pouuoit  creuer:  &  nous  fça 
uons  que  les  habitans  de  ce  pays-la,  non  feu- 
lement t'eftoyent  lafché  la  bride  à  toute  in- 
temperance.maisils  efboyent  venus  àvn  tel  or 
gueil,  qu'il  n'y  auoit  plus  ne  pitié  ne  compaf- 
lion  en  eux  ,  non  plus  qu'en  des  bcftes  fauiia- 
ges.  Lot  ne  pouuoit-il  pas  faire  grand'  chère 
auec  le  refte  de  ce  peuple-la'  Ony  bien  :  mais 
quand  il  voit  que  Dieu  eft  ofFenfé  ,  qu'il  voit. 
les  chofes  aller  fi  mal, il  fe  tourméte,il  Ce  tient 
comme  à  la  torture.  Voila  comme  nous  en  de- 
uons  faire.  Si  nous  voulons  donner  v  raye  ap- 
probation que  nous  fonimc<;  enfans  de  Dieu, 
que  nous  fcntiôs  les  temps  afpres  &  fafcheux, 
combien  que  les  chofes  nou-  foycnt  profpe- 
res ,  côbien  que  nul  ne  nous  outrage, qu'on  ne 
nous  face  point  de  tort  félon  la  chair,tant  y  a 
que  iî  Dieu  n'tft  point  honoré,  que  les  chofes 
foyent  malcopduii«s ,  nous  dcuor'  fcmir  ce- 
tte affliftion  de  laquelle  fainft  Paul  parle  ici. 
Or  au  contraire  ,  qiiand  il  dit  que  les  hommes 
s'aimeront  eux-mefmes,  qu'ils  feront  orgueil 
leiix, qu'ils  ferontauancieux, qu'ils  ferôt  mef- 
difans  &  menteurs, qu'il;  feiont  rebelles  à  pe-. 
re  &  à  more, qu'ils  feront  ingrats,  fens-raiibn, 
fans  humanité,  qu'ils  feront  dtfloyaux:quand 
(di-ie)fainû  PaulamafTe  ici  tant  ae_vices,que 


il  femble  que  ce  foit  comme  vn  gouffre  d'en- 
fer ,  ou  comme  vue  groffe  montagne  qui  ob- 
fcurcifle  toute  la  terre, cément  fe  peut-il  fai- 
re que  ceux  dont  il  parle,ayent  encores  quel- 
que apparence d'cltre  fidèles,  ouqu'iL  enpor 
tent  le  titre?  En  la  fin  fainft  Paulconclud  que 
ceux-là  auront  quelque  marque  de  fimplicité. 
Il  appelle  Tarme,  apparence  extérieure  .  Or  il 
femble  qu'il  y  ait  contrariété.  Car  fi  vn  hom- 
me fe  desborde  iufques  à  mefprifer  Dieu,  que 
l'vnfoit  mefdifant,  l'autre  plein  de  rapines, 
l'autre  plein  de  cruauté  ,  ne  dira-on  pas  que 
telles  gens  font  abandonnez  à  tout  mal?  Mais 
ce  n'tft  point  fins  caufe  que  faimâ  Paul  a  par 
lé  ainli  :  &  de  fai£i,  nous  le  voyons  .  Car  nous 
verrons  fur  tout  l'impudence  des  hommes  e- 
ftre  telle  ,  qu'ils  fe  vanteront  d'eftre  fidèles: 
combien  qu'il  y  ait  en  eux  tant  de  vices  ,  &  fi 
exorbitans  ,  qu'on  les  verra  eftre  comme  des 
diables,  encores  ne  lailîèrpnt-ils  point  d'abu- 
fcr  du  nom  de  Dieu,  tant  font  elFrontez  .  Que 
nous  n'aillions  point  cercherles  Papiftcs  :  il 
eft  vray  que  là  on  verra  bien  ce  que  iainft 
Paul  dit  ici,  que  le  plus  grand  bigot  delà  Pa, 
pauté  fera  le  plus  cauteleux  ,  &  le  plus  mef- 
chant  :  &ceux  quibarbottcnt  depuis  le  mati.a 
iufques  au  foir,  qui  trottent  par  les  marinou- 
fets,  &'  par  les  chapelles,  qui  font  chanter  des 
mclTès, quand  ils  auront  bien  fait  tous  leurs  a- 
gios  ,  fi  on  s'enquiert  d'eux  Se  de  leur  vie,  on 
trouuera  que  ceux-là  qui  feront  tant  de  céré- 
monies, font  les  plus  grans  vfuriers  ,  les  pius 
cruels, les  plus  vileins  ch  toute  defloyauté,  les 
plus  tiaifties  &  les  plus  grans  contemptturs 
de  Dieu  :  on  verra  bien  cela  ,  c'tlt  vne  chofe 
pai  trop  notoire  .  Mais  combien  que  nous  ne 
ayons  point  tous  ces  dtfguifemcn5-Ia,&  tou- 
tes ces  cérémonies  ,  que  nous  n'ayos  point  ces 
alpergcs  d'eau  bénite,  toutes   ces  fanfares, 
tous  ces  menus  fatras  qu'ont  les  Papilles  pour 
faire  à  croire  à  Dieu. qu'il  leur  eft  rtdtuable, 
quand  ils  l'autont  ainfi  ferui  par  leurs  abomi- 
nations :t;ôbren(di-ie)que  nous  n'ayonspoint 
et  ]a,irvoyori<-nous  encores  comment  tout  va- 
entre  nous.  On  vetra  ceux  qui  ne  demandent 
que  c'abolir  la  parole  de  Dieu  ,  ou  bien  d'a- 
uoir  l'Euagilci  leur  porte  pour  j'en  mocquer,, 
qu'ils  baftillcntvn  Euangle  tel  qu'ils  auront 
conceu  en  leur  tefte,  qui  cependant  fe  desbor 
dent  en  toute  vilenie. On  voit  ceux  qui  fe  dref 
fent  contre  toute  polxe,  qui  ne  pcuuent  por- 
ter aucun  ioug,'qui  ne  et  flirt  dedrcfler  trou- 
bles en  l'£glife,&  de  faire  des  fcandales  fi  c- 
noinies  que  c'eft  pitié:brief,ils  voudroyent  a— 
u^^ir  ruiiié  le  rempk  de  Dieu.Ceux-la  toutef- 
fûis  ne  la'fleront  pa-.  tncores  t'e  fe  glorifier  à 
pleine  bouche  qu'ils  font  bons  Chreftiés.cVft 
mcrueille  que  de  leur  zèle. Mais  qiioyrils  font 
cognus  eiii  e  côtemptcurs.dc  D'^i-lcur  vie  eft 
fi  vilenie  &•  difToUie  que  les  pctis  enfans  en  i— 
tbntà  la  mouftarde.QHiand  do¥ic  nous  voyôs 
le  mode  eftre  ainfi  enclin  i  piophaiiCT.lesg'ja. 
ces  de  Dieu,  &  que  ceux  qu!  ri'ont  point  vite 


444 

<eul»  goutte  de  Tobrieté  en  leur  vie, ne  UifTent 
point  de  fe  renommer  bons  Chrcftient  ,  no- 
tons que  ce  n'eft  point  fans  cîufe  que  faind 
Paul  iit  que  les  plus  brutaux, les  côtempteurs 
de  Dieu  ,  les  malins  ,  gens  pleins  de  rapines, 
genjdifroluf,piillârs,merdifans,&  toutes  tel 
les  canailles(commc  il  en  fait  ici  vn  rolle)que 
toai  ceui-la  ne  lailTerôt  pas  d'auoir  quelque 
lîiafque  pour  fe  defguifer  ,  qu'ils  porteront 
quelque  enfeigne  pour  dire  qu'ils  font  du  rSg 
des  fideles.dii  troupeau  de  Dieu, &  de  l'Egli- 
fe  Chreftienne  :  $c  nous  en  voyons  la  pratti- 
que.Mais  quand  nous  aurons  bien  contemplé 
ce  que  Dieu  nous  monftre.quc  nous  venions  à 
ceft  aducrtiflement  qui  nous  cft  ici  déclaré, 
Qjie  ceux  qui  ont  ainfi  faux  vifage  pour  eftre 
Bi.-ifquez, renonceront  la  yertu  &:  la  nature  de 
la  droite  pureté.Et  pourquoyîqu'emporte  ce 
fte  protcftation  ,  Qu^e  nous   foyont  à  Dieu? 
Ceft  que  lefus  Chrift  foit  noftre  Chef ,  que 
cous  foyons  conioints  &  vnis  en  luy  du  tout. 
Et  s'il  Y  a  vne  liaifon  facree  par  laquelle  nous 
adhérons  au  Fils  de  Dieu  ,  il  faut  en  pre- 
mier Keu  que  nous  reflemblions  à  Dieu  fon 
Père, qui  ei\  la  fontaine  de  toute  iuftice:&  ce- 
la ne  le  peut  faire  que  nous  ne  luy  foyons  de 
diez  comme  en  (acrifice  pour  cheminer  en 
toute  pureté  de  vie  ,  &  auoir  noftre  recours  à 
luy.  Voila  donques  comme  il  nous  faut  eftre 
conioints  &vni!  à  Icfus  Chrift  quieft  noftre 
Chef ,  afin  qu'il  nous  vniffeaufsi  à  Dieu  fon 
Pcre.  Et  puis  il  eft  queftion  que  nous  foyons 
conioints  erifemble.Et  comment?En  droiture 
*:  équité  ,  en  bonne  dileftion  ,  viuans  comme 
frères,  &  qu'vn  chacun  penfe  au  profit  de  (es 
prochains:  que  nous  ne  foyons  pas  comme 
beftes  fauuages ,  mais  cognoifTons  qu'en  con- 
uerfant  auec  ceux  qui  font  enfant  de  Dieu 
comme  nous ,  &  qui  font  membres  du  corps 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  il  faut  que 
BOUS  tafchions  de  nous  employer  pour  eux. 
Voila  qu'emporte  ccfte  forme  de  pieté. Nous 
'■   lie  pouuons  donques  aUoir  nulle  religion,que 
'    efi  premier  lieu  quand  Dieu  nous  donne  fon 
Euangile,é<:  qu'il  cft  prefché  entre  nous, nous 
ne  le  receuions,non  point  par  femblant  Jf  ce- 
rémonies,niais  en  pureté  dévie, que  Dieu  n'ait 
fon  droift>&  qu'il  ne  foit  adoré  comme  il  ap- 


SERMON     XX. 


partient:  &  pui5,que  non»  ne  foyons  coioîtit» 
anec  nos  prochains ,  pour  fecourir  ceux  qui 
auront  befoin.&pour  nous  employer  pour 
eux.  Il  faut  donc  que  tous  ceux  qui  ne  fe  mon 
ftrent  pas  eftre  ainfi  addôner  î  Dieu  &  i  leurs 
prochains, foyét  déclarer  infideles&  apoftats, 
qui  ont  renoncé  de  faid  la  droite  religion, 
combien  qu'ils  vfurpent  encores  le  mot  au 
bout  de  la  langue  ,  que  Dieu  les  condamne, 
qu'il  les  reiette  ,& déclare  qu'ils  fontbannii 
de  Ion  Royaume, &  les  tient  comme  excom- 
muniez. Voila  donc  ce  que  nous  auons  1  no- 
ter pour  eftre  munis  contre  les  fcandales  qui 
nous  vienent  de  tous  coftei.  Mais  afin  que 
vn  chacun  de  nous  au fsi  penfe  à  foy  ,auifons 
de  réduire  fouuent  cefte  doftrine  en  raemoio 
re  :  &  combien  que  nous  voyons  le  noai  de 
Dieu  eftre  blafphemé  par  les  raefchans ,  que 
nous  ne  laifsions  pas  neantmoins  de  luy  por- 
ter vne  telle  reuereiice  ,  que  noftre  vie  rende 
tefmoignage  que  c'eft  à  bon  droit  que  nous 
l'appelions  noftre  Père:  &  que  nous  raciôs  ce 
la  non  feulement  pour  Thonorer  ,  mais  aufsi 
pour  feruir  les  vnsaux  autres,  afin  que  l'ado- 
ption qu'il  a  faite  de  nous  foit  tant  mieux  ap 
prouuee , quand  nous  aurons  vraye  fraternité 
enfemble. 

OR  nous-nous  profterncrons  dcuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes  ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les 
faire  mieux  fentir,  afin  qu'en  premier  lieuVH 
chacun  de  nous  appiene  de  fe  condamner  & 
&  fe  dcfplaire  en  fes  péchez  &  en  fes  vices:& 
làdefliis  que  nous  ne  demandions  finondele 
feruir  en  toute  puretédevie:encores  que  no* 
voyons  beaucoup  defcandalcs  &■  de  dcsbau- 
chemens  ,  que  toutesfois  cela  ne  foit  point 
pour  nous  corrompre  &  peruei  tir  .mais  que 
nous  foyons  fortifiez  par  la  grâce  de  noftre 
Dieu,afîn  que  nous  pourfiiiuions  fa  fainfte  vo 
cation. Combien  que  le  diable  tafche  de  nous 
diuertir&  faire' tourner  btide  ,  que  nous  ne 
laifsions  pas  de  marcher  toufiours  ,  iufques  i 
ceq  nous  foyôs  paruenusoù  Dieunousappel 
le:  c'eft  qu'eftans  defpouillcz  de  tous  nos  vi- 
ces ,  nous  foyons  reformez  à  fa  iuftice.  Que 
non  feulement  il  nous  face  cefte  grâce,  raait 
à  tous  peuples  &  nations  delà  terre,&:c. 


SECOND     SERMON     SVR     LE 

TR  OISIEME    CHAPITRE. 

6  Car  ihfofit  de  ceux-là  quife  lancent  es  ntdif>ns,0'  tienentca- 
ptiues  les  femmelettes  chargées  dépêche^ ,  le  [quelle  s  font  menées  par 
diuers  defirs, 

' ,!.  '  J7     Toufiours  apprenans^O'  iama^s  nepouuas  \cnir  a  la  cognoif- 

fancc  de  \>erité. 

C'eft 


SVR   LA  I!.    A'TIMOTH 


44î 


l 'Eft  vne  chofe  qni  nous  doit 
faire  trembler  ,  quand  nouf 
voyons  que  ceux  qui  fem- 
blent  eftre  fiJeles,&  le  van- 
tent defuyurela  parole  de 
Dieu, font  toutesfoiî  fi  def- 
bauchez.que  les  vns  fe  trou 
ueront  pleins  d'auarice,  le:>  autres  adonnez  à 
rapines  Se  fraudes,  les  autres  dilFolus  en  toute 
vilenie,  touscontempteursde  Dieu.  Orque 
Je  nom  de  Dieu  foit  ainli  prophané.c'cftvne 
ehofe  horrible  Se  contre  nature. Et  c'eft  raer- 
ueiUesd'vne  telle  impudence, qu'vn  home  qui 
proteftera  d'eftre  des  enfansde  Dieu, le  defpi 
te  en  telle  forte, &  mené  vne  vie  mefchan  te  & 
diabolique. £t  combien  que  telles  gens  foyent 
conuaincus  de  n'ellre  nullement  du  troupeau 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.tQUtesfois  ils 
s'y  fourrent.  Mais  quand  cela  fe  voit  aux  Pa- 
fleurs, &  en  ceux  qni  ont  charge  de  garder  les 
autres,&  mon  tirer  le  bon  chemin,  cVfteiîco- 
rctvneenotmité  plusgrande.Or  tant  y  a  que 
faind  Paul  déclare  ici ,  que  nua  feulement  du 
commun  peuple  il  y  en  aura  de  fi  malins  8c 
perueri.maib  deceux  qui  font  femblantd'e- 
ftre  doreurs ,  qui  auront  crédit  Se  authori  té. 
Qjjand  nous  oyons  que  le  fainû  Efprit  nous 
a  aduertis  de  cela,apprenons  d'auoir  les  yeux 
ouuerts  pour  bic  difcerner.Et  ainfi  nous  voy 
ons  en  quelle  prudence  nous  auons  achemi- 
ner. Se  comme  il  nous  faut  eftre  vigilans.  Car 
encores  que  nous  foyons  en  quelque  Eglife 
ou  la  parole  de  Dieu  fe  prefchera  ,  où  il  fem- 
blera  qu'il  y  ait  quelque  bon  ordre  Se  police, 
fi  faut-il  que  nous  foyons  meflcz  parmi  gens 
qui  ne  vaudront  rien  du  tout ,  que  nous  ver- 
rons beaucoup  de  fcanda  les  pour  nous  desbâu 
cher.iinon  que  nous  fufdons  confermez  en  la 
vertu  de  TÉfprit  de'  Dieu  :  Se  non  feulement 
parmi  le  troupeau  il  y  aura  des  boucs  qui  ne 
feront  que  pour  infefter  les  brebis ,  mais  il  y 
aura  mel'mes  de  ceux  qui  occupent  la  placé  de 
Pafteurs  Se  Mmiftres,  lefquels  non  feulement 
fe  porteront  mal,  mais  feront  pour  tout  cor- 
rompre &  peruertir.  C.u  ce  qui  a  eité  prédit, 
il  faut  qu'il  aduiene.  Soyons  donques  fur  nos 
gardes.  Et  combien  que  cela  fuit  pour  nous 
eflonner.ncantmoins  palTons  outre.&prenôs 
courage, puis  qu'âinfî  eft  que  Dieu  nous  a  ad- 
uertii:moyennant  que  nous  efcoutions  les  re- 
môftrances  qu'il  nous  tait, nous  ne  ferôs  point 
deftituet  de  fon  aide  qu'il  nenous  tende  la 
main,  qu'il  ne  nous  donne  force  pour  furmon 
ter  tous- ces  troubics-la  ,  tellement  que  nous 
ne  ferons  point  confus  :  mais  pourfuyuons  le 
chemin  de  falut.iufques  i  ce  que  nous  fsyons 
paruenus  au  but.  Voila  donc  comme  il  nous 
faut  auoir  les  yeux  ouuerts  comme  prudens: 
quand  nous  verrons  que  des  canailles  le  vou- 
dront infinuer&  entrer  en  crédit  fous  ombre 
denousanoncer  la  parole  de  D-eu',  oue  nous 
penlîons  à  non, *"  que  nous  difcernions  qutls 
Us  font  à  laveiùé.Car  ce  n'elt  point  aflez  que 


le  titre  foit  prétendu  ,  il  faot  venir  i  l'effeft, 
que  les  hommes  qui  fe  difent  feruitewrt  de 
Dicu,fe  déclarent  tels  par-  expérience,  qu'on 
les  cognoiflè  quand  on  les  aura  eiamincï  i  Ja 
yraye  touche. Or  notamment  fainft  Paul  par- 
le des  faux  doâeurs  ,  lefquels  penuent  plus 
nuire  que  les  perfonnes  priuees.  Car  ibn  in- 
tention n'a  pas  cfté  Amplement  de  picqiier 
ceux  qui  en  eltoyent  digneî.mais  il  a  rcgaidé 
au  profit  du  peuple  de  Dieu.  Si  les  mefchant 
n'apportoyent  nulle  nuifancc  quâd  ils  chemi- 
nent raal,&  bien,  on  les  pourroit  laifler  ponr 
tels  qu'ils  font.  Se  pourriroycnt  en  leurs  or- 
dures fans  qu'on  leur  fonnaft  mot.  Il  eft  vray 
qu'encores  Dieu  veut  qu'ils  foyét  rendus  in- 
cxcnfables,&  qu'on  leur  déclare  leur  turpitu- 
de,qu'on  leur  anonce  la  condânatioBqui  leur 
eft  appreftee.Mais  encores  fi  cela  n'apportait 
nulle  corruption  au  refte  de  la  compagnie,o« 
pourroit  difsimuler  fans  grand  danger.  Mais 
quand  on  voit  que  c'eft  comme  vn  feu  allumé 
qui  feroit  pour  confumer  tout  fi  on  n'ydon- 
noit  remède,  quand  on  voit  que  c'eft  comme 
vne  poifon  qui  s'elpand  fi  on  laiffe  couler  cet 
iniquitez:  alors  il  faut  qu'vn  chacun  s'y  oppo 
fe,ou  nous  n'auons  nul  zcle  à  Dieu,&  ne  nous 
chautde  noftre  falut:nous  fommes  aufii  trai-. 
ftres  à  l'Eglife  de  Dieu,&  à  to'nos  prochains 
Notons  bien  donc  que  faird  Paul  n'a  point 
ici  marqué  ces  gens  dont  il  a  parlé, finô  voy.ît 
qu'ils'  pourroyent  apporter  beaucoup  de  dom 
mage  A  on  ne  les  empefchoit,  &  qu'ils  ne  fuf- 
fent  comme  bridez  :  amlî  qu'il  dit  en  l'autre 
partage  .qu'il  faut  monftrer  au  doigt  telles 
gés.qui  font  pour  peruertir  TEglifede  Dieu, 
qu'il  ne  les  faut  point  efpargncr.Carc'eJlvne 
trop  grande  cruauté, fi  on  voit  les  ponres  brc 
bis  expofees  en  proye,&  qu'ô  ferme  les  yeux, 
qu'on  ait  la  bouche  clofe.  Et  fur  tout  il  faut 
qu'vn  bon  Pafteur  crie  àhautevoix  ,  quand  il 
voit  le  troupcaueftre  aflailli.Si  vn  berger  laïf 
fe  fon  troupeau  paiftrc,  quîd  il  verra  le  foup, 
ou  les  larrons ,  qu'il  fe  tâife,  &;  qu'il  s'en  aille 
cacher, qu'il  face  femblant  de  rien, qu'il  tour- 
ne le  dos,  que  ftra-ce?  Ainfi  donques  li  pons 
voulons  fidèlement  nous  acquitter  dcnolire 
office  ,  il  faut  qu'en  voyant  les  corriiptions 
qui  font  en  l'Eglife  de  Dieu  ,  nous  crions  ar- 
demment pour  y  remédier, &  pour  les  re pouf- 
fer. Car  (félon  que  défia  nous  auons  touché) 
fainft  Paul  voyant  que  ceux  qui  ont  charge 
publique,qiiifont  en  eftat  de  conduire  les  au- 
tres, pouiioyent  faire  beaucoup  de  mal ,  pou- 
uoyent  difsipcr  le  troupeau  ,  voila  pourquoy 
notamment  il  met  ici  comme  fur  vn  cfchalFaut 
les  prefcJieurs ,  qui  fous  ombre  du  nô  de  Dica 
&de  fi  parole  trompent  les  fimples,&  cepen- 
dant defgui  fent  la  verité,&  la  fal/itîent,^  met 
tcnt  la  parole  de  Dieu  en  vente  pour  Icurpfo 
fit  &  pour  leur  gain. Sainft  Paul  donc  les  man- 
que ICI,*:  les  ditfamcafin  qu'vn  chacun  les  de 
tcfte,  qu'on  les  fuye  corn,;  c  poifon  ,&que 
nous  ne  foyons  pas  fi  fols  d'appcter  m  tel 

Klz.iii. 


44<? 


SERMON    XX. 


domnuge.  Or  par  là  nous  fommes  inftruits,  deuoit  auoir  pitié  de  ces  poiiresfémellettes^ 
que  fi  nous  aimons  le  falut  de  nos  prochains,  <]ui  en  iimplicité  font  ainlîabufees  de  ce  titre 
quand  nous  verrons  des  ruftres  qui  font  pour  .  dedeuotion.  Et  Dieu  ne  deuroit-il  point  ad- 
gaftcr  tout,  &:  pour  elpandre  leur  infection,  drelPer  gens  qui  tiilTent  pour  les  conduire  fî- 
qu'il  ne  les  faut  point  cacher.mais  au  contrai  delement  ?  Comment  foufFre-il qu'elles  loy- 
re  nousdeuons  procurer  ,  entant  qu'en  nous  ent  ainiî  efgareesduchemm  de  falutJll  fem- 
fera  ,  que  tout  le  monde  s'en  recule  ,afin  que  bleroit  donc  que  Dieu  n'v  fait  point  demife- 
par  ce  moyen  ils  ayent  honte, s'il  y  a  efperan  ricorde  enuers  ces  poures  femmes  quand  elles 
ce  qu'ils  ne  foyent  point  du  tout  incorrigi-  font  aiidt  feduites.Voire.mais  faind  Paul  dit, 
blés,  &  qu'ils  retournent  au  bon  chemin  :  ou  qu'elles  font  chargées  de  pechex. ,  c'eft  à  dire, 
bien  s'ils  font  defefperez  du  tout,  &  endurcis  qu'il  y  a  de  l'hypocrifie,  &  qu'elles  le  veulent 
en  leur  mal ,  que  pour  le  moins  on  lesfepare:  nourrir  en  leurs  vices,&cependant  voudroy- 
&  quand  ils  ferôt  cognus, qu'on  ne  puifle  plus  ent  eftre  réputées  faindes,&  qu'on  creuft  que 
eftre  trompé,  que  ceux  qui  fe  conioindront  à  elles  font  du  tout  confites  en  religion.  Elles 
eux  ne  periflent  iinon  àleur  efcient,&de  leur  ont  doriques  cefte  malice-la  ,  de  fe  vouloir 
bon  gré.  Voila  comment  nous  en  deuons  fai-  monftrer  ,  &:  cependant  elles  ne  valent  rieo, 
re.Ec  comblé  qu'on  murmure  (ainlî  que  nous  quoy  qu'il  en  foit.Or  voila  vne  iiifte  punition 
voyons  qu'il  y  en  a  qui  vogdroyent  bien  que  de  Duu  ,  quand  elles  ont  gens  qui  les  fedui- 
tOLifiours  leurs  ordures  fuflcnt  nourries  par  fent,&  les  tienent  en  teilccaptiiiité  :  car  elles 
Clencé)  combien  qu'on  trouue  cela  mauuais,  ne  veulent  point  eftre  conduites  de  Dieu  par 
que  nous  dcfcouunons  les  malins  afin  qu'on  fa  pure  [  arolc.Et  puis  iladioufte,Q«f  fo<>/?o«w 
s'en  garde,  (i  fauç-il  que  nous   pourfuyuions:  elles  apprenent,  <S»  iamaisne  peuueitt  -venir  à  la 
car  c'cft  à  Dieu  q  nous  feruons,ce  n'cit  point  cngno'ff.mce  de  -reritc.  Elles  feront  bien  fem- 
3UX  hommes  moueJs  de  contreroller  FElprit  blant  de  vouloir  eftre  prochaines  de  Dieu: 
de  Dieu,  ne  de  changer  la  règle  qui  nous  eft  elles  auront  leurs  finfreluches ,  elles  feront 
donnée  en  l'Elcrituie  fainde.  Voila  pourvn  tant  d'agios,  &  de  ceci  ,&  de  cela  ,  pour  dire 
item.  Or  pour  le  fécond,  nous  auons  à  noter  qu'elles  font  plus  dénotes  que  les  autresimais 
qu'il  faut  touliours   auoir  l'oeil  fur  ceux  qui  cependant  iamais  ne  vienent,&ne  peuuent 
ont  l'office  d'anoncer  la  parole  de  Dieu, pour  venir  à  la  cognoiflance  deverit,é:caraufsi  el- 
veoir  comme  ils  fe  gouuerneront.   Car  tout  les  ne  vont  que  par  circuits,  &  rie  tienent 
ainfi  que  c'eft  le  bien  le  plus  (îngulier  q  Dieu  point  le  droit  chemin. Or  en  ce  pafTage  fainft 
nous  lace  en  ce  monde,que  nous  ayons  la  pu-  Paul  a  parlé  des  femmes   pluftoft  que   des 
redodrinc  delà  parole  de  Dieu  qui  nous  hommes,  à  caufe  qu'elles  font  plus  fuiettesà 
foit  prefchee  ,  &  qu'il  y  ait  gens  qui  tafchent  cefte  efpece  de  tromperie  qu'il  met  ici.  Il  eft 
d'en  faire  leur  deuoir:aufsi  au  contraire  ,  il  vray  que  c'eft  vn  payement  commun  &  aux 
n'y  a  peftc  plus  mortelle  que  d'auoirgens  qui  hommes ,  &aux  femmes ,  que  d'eftre  abufeat 
occupent  la  chaire  de  venté, c&  cependant  que  quand  ils  ne  cherchent  point  de  fe  rangera 
ils  deprauent  tout  :  &  qu'ils  foyent  adonnez  Dieu,&  qu'ils  n'y  tendent  pas  rondement:  il 
ou  à  leur  profit, fans  auoir  le  foin  du  troupeau,  faut  que  Dieu  lafche  la  bride  à  Satan  ,  qu'il 
ou  qu'ils  n'ayent  point  cefte  afte£tion  pure  luy  donne  la  puifïànce  d'attirer  en   erreur 
de  feruirà  Dieu. Voila  donc  ce  que  nous  auôs  ceux  qui  y  vont  ainfi  par  circuits ,  &  à  trauers 
à  obferuer  en  ce  palTige.  Et  au  refte  ,  notons  champsmiais  tant  y  a, fi  on  fait  comparaifon, 
que  fainft  Paul  a  ici  touché  vne   efpece  de  on  trouuera  les  femmes  plus  fuicttes  à  ces 
ceux-là  ,  afin  que  par  vn  exemple  on  puifle  folles  dénotions  ,  que  non  point  les  hommes, 
comprendre  quelles  gens  il  a  voulu  noter.  Il  Voila  pourquoy  fainft  Paul  en  a  parlé  no- 
dit  qu'il  y  en  a  de  ceux  qui  font  ainfi  contem-  tamment.  Etcesgalans  quiabufent  dunom 
pteurs  de  Dieu  ,& qui  s'aimeront  eux-mef-  de  Dieu,  voycnt  bien  que  c'eft  leur  droite 
naes,gens  arrogans,  &  qui  mefpriferont  tout,  proyc  ,  que  de  s'addrefler  ainfi  aux  femmes 
moyennant  qu'ils  viuent  à  leuraife  :  i/jif»  4  quiveulent  eftre  tenues  dénotes.  Or  notons 
(dit-il)  de  ceux-là  (jm  fe  lancent  par  les  mai-  que  fainft  Paul  parle  ici  des  femmes  qui  font 
fcm,  (ou  s'infinuent)  c'eft  à  dire,  qu'ils  trou-  chargées  de  péchez.  Il  eft  vray  que  &  hom- 
iient  moyen  fubtil,  comme  en  gliflant ,  d'en-  mes  &  femmes  font  tous  pécheurs  &  peche- 
trer  en  vue  maifon,&  fç  fourrent  l.i  plus  suât  rcflcs,&  me f mes  pour  venir  à  Dieu,  voila  pa.r 
qu'on  ne  voudroit:&:ayans  prins  cefte  audace  quel  bout  il  nous  faut  commencer  ,  c'ift  de 
de  s'auiicer  ainfi  ,  ils  tienent  captiues  les  fétu-  feiitir  nos  maax,&  nos  psurctci,  afin  de  nous 
mtllettes.  Or  notamment  il  vfe  de  ce  mot:  il  y  defplaire  ,  que  iamais  nous  ne  profilerons 
ne  dit  pas  les  femmes, mais  il  dit  les  témcllct-  en  l'Euangile  ,  que  nous  ne   foyons  touchez 
tes'comme  s'il  diloit,  Ces  petites  bigotes  qui  d'vndioii  ftntimcnt  de  nos  victv,&  que  nous 
veulent  manger  le  crucifix  (comme  on  dit)&  ne  foyons  conhis  en  nous-melines  :  &  c'eft 
qui  font  fcmblant  d'auoit  grande  deuotion,  pourcefte  caufe  que   noftre  Seigneur  lefus 
cclles-lj^4'f"'0'<->ut  menées  captiues  par  tels  Chiift  dit..  Venez  à  moy  vou»  tous  qui  ell^s  Malt.ii, 
caphars  ,&  par  gens  qui  abufeiu  de  la  parole  chargez, &  qui  tiau3iiltz,&  levi/  foul.igeiay,  ig. 
Je  pieu.Et  pourquoyîCarilfcmble  que  Dieu  &  vous  trouuerez  repos  àvoi  amcs.ilfautdpc 


A  T  I M  O  T  h;  447 

dent  d'eftre  corrigées  franchement  quand  el 
les  auront  failli ,  qu'elles  ne  s'y  endorment 
point.qu' elles  ne  demandent  point  en  fommc 
d'eftre  flattees.Car  toutes  celles  qui  pourront 
fouffrircorreâion  de  leurs  fautes ,  Dieu  ne 
permettra  iamais  qu'elles  foyent.iinfi  fedui- 
tes.  Mais  voici  le  falaire  de  ces  hypocrites 
qui  voudrôt  qu'on  ferme  les  yeux  à  leurs  fau 
tes.qui  fe  voudront  louer  auec  Dieu,  comme 
s'il  y  auoit  moyeu  de  le  tromper:c'eft  qu'el- 
les feront  tellemét  feduites,  que  le  diable  les 
tiendra  en  fes  liens, &  encaptiuité  miferable. 
Voila  donques  ruiftruûion  que  doiuent  ici 
retenir  les  temmes ,  fi  elles  ne  veulent  point 
tomber  en  cefte  malediûionde  laquelle  par- 
le ici  fainft  Paul. Et  ceci  fedoit  aufsi  bien  ap- 
pliquer aux  hommes  en  gênerai.  Car  qui  eft 
câufe  que  le  poure  monde  eft  ainfi  aueuglé? 
Veu  que  Dieu  nous  donne  fa  Parole, que  no- 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift  eft  le  Soleil  de  iu- 


SVR   LA    II. 

que  pour  venir  au  Fils  de  Dieu,  &  pour  trou* 
«er  repos  e.i  liiy ,  &  en  fa  grâce  ,  nous  foy  ons 
charger  de  péchez.  Il  eft  vray  i  mais  il  y  en  a 

2ui  font  chargez,  &  cependant  foufpirent ,  & 
emâdent  allegement.'les  autres  veulent  crou 
piren  leurs  ordures.  Sainâ  Paul  donc  parle 
ici  des  femmes  qui  fe  veulent  entretenir  en 
leurs  vices  &  en  leurs  peche2,&  font  bien  ai- 
fes  qu'on  les  flatte, &  qu'on  couure  le  mal  qui 
eft  en  elles.  Or  de  celles-là,  il  faut  bien  que 
Dieu  leur  enuoye  des  trompeurs  ,  comme  el-' 
les  le  méritent ,  d'autant  qu'elles  ne  deman- 
dent pas  qt'e  lefus  Chrift  prene  leur  fardeau, 
&  qu'il  les  affranchifle  des  hens  de  Satan.  Il 
faut  donc  qu'elles  foyét  tenues  captiues.puis 
qu'elles  ne  veulét  point  venir  à  celuy  qui  no' 
donne  liberté.  Quand  le  diable  nous  a  tenu  le 
pied  fur  li  gorge,  que  nous  auons  efté  en  ce- 
fte miferable  feruitude  de  peché.fi  nous  ne  de 
mandons  que  noftre  Seigneur  lefus  nous  en 

retire, ne  faut-il  pas  que  cefte  captmité-la  re    fticequi  nous  cfclaire,  veu  que  nous  auons  le 
double?  C'eft  donc  vne  iufte  vengeance  de    chemin  aflez  manilefte  quadl'Euangile  nous 

eft  prefché.pourquoy  le  monde  s'abufe-il  ain 


ngeance 
Dieu.  Orafinque  cefte  docbrme  foit  mieux 
en  tendue,  regardon  s  à  ces  bigotes  qui  fe  glo- 
rifictd'vne  faindeté  particulière, corne  nous 
en  voyons  les  exemples  en  la  Papauté.  Ca^ 
les  vnes  feront  pleines  d'orgueil  &  d'ambi- 
tion,on  verra  qu'elles  ont  vn  œil  aigu,  &  veu 
lent  eftre  toulîours  les  premières  les  plus  a- 
uancees  :  que  s'il  y  a  quelque  pompe,  s'il  y  a 
(brief  )  rien  de  mondanité ,  il  faut  qu'elles  y 
foyen t  les  premières. Et  côbien  qu'elles  foy- 
ent  grades  bigotes,  (î  eft-ce  qu'elles  fjnt  plei 
nés  de  tous  vices,  elles  en  font  maiftielTes.tel 
lemeat  qu'elles  pourroyent  tenir  efcole  & 
d'orgueil,  &  de  toute  vanité,  &de  mefprisde 
leurs  procIiains.Les  autres  feront  pleines  d'à 
uarice,on  les  verra  cruelles,  elles  n'aurôt  nul 
le  humanité, ni  en  leur  famille, ni  entre  leurs 
voiiîns.  Les  autres  niefmes  feront  des  paillar 
des  vileines,&  moyennant  qu'elles  barboter, 
pour  trotterd'autel  en  autel,  qu'elles  prenét 
beaucoup  d'eau  bénite,  qu'elles  facent  beau- 
coup d'agios,les  voila  faiidiiîees,  ce  leur  fcm 
ble.  Brief,  qu'on  regarde  toutes  ces  bigotes 
de  la  Papauté  ,  on  n'en  verra  pas  vne  qui  ne 
foit  chargée  de  péchez  (  côme  lainét  Paul  en 
parle  )  &  qui  ne  fe  veulent  nourrir  en  rébel- 
lion de  Dieu,en  malice,en  hypocrifie.  Il  faut 
donc  que  le  diable  les  tiene  bridées  ,  &  qu'il 
les  tiene  pour  les  tranfporter  çà  &  là, puis  que 
elles  ne  veulét  point  porter  le  loug  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chr:ft,  lequel  eft  tant  doux  & 
gracieu.f.il  faut  que  les  fuppofts  de  Satan  les 
mènent  captiues  à  leur  volonté.  Voila  le  fens 
naturel  de  fainft  Paul. Or  nous  auôs  à  recueil 
lir  maintenant  vne  bonne  inftruÛion  pour  no 
ftre  vfage.Et  en  premier  lieu, puis  qu'il  eft  ici 
notamment  parlé  des  femmes, que  Ici  femmes 
Chreltienncv  regardent ,  fi  elles  ne  veulent 
point  eftrc  entortillées  aux  liiets  de  Satan,  Si 
eftre  menées  captiues  à  leurefcient ,  de  vl  le 
nourrir  point  en  leurs  vicesjqu'elles  denian- 


fi.'Car  fi  on  demande  a  chacun  s'il  ne  prétend 
point  d'aller  àlalut.ildiraqu'ouy.Et  cepen- 
dant tous  courét  ea  perditisn.Mais  c'eft  d'au- 
tant que  les  hommes  &  les  femmes  ne  font- 
pas  dignes  que  Dieu  leur  donne  prudence  ne 
difcretion  pour  fuir  le  uialicar  ils  l'appetent 
naturellement. Combien  y  en  a-il  qui  fe  pre- 
fentent  à  Dieu  pour  eftre  retirez  de  leurs  vi-  • 
ces. Mais  au  contraire,chacun  voudrait  auoir 
efteït  la  clarté,afin  qu'on  ne  veift  goutte. Voi 
la  donc  pourquoy  tant  peu  font  enfeignez  de 
Dieu,  &  que  la  plus  grande  multitude  s'en  va 
en  ruine  ,  c'eftàcaule  que  nous  ne  pouuons 
fouffrir  que  Dieu  nous  enfeignç:  nous  deman 
dons  les  tenebres,&  nous  les  trouuons:  com- 
me noftre  Seigneur  lefus  en  parle,  difant  que 
il  ne  fe  faut  point  esbahir  fi  l'Euangile  eft  fi  jj^  ^g- 
mal  receu  dij  mode,  Car(dir-il)ceux  qui  font 
mal, cherchent  toufiours  les  cachettes. Or  eft 
il  ainiî  que  les  hommes  font  addonnez  à  mal: 
ils  tédent  donc  à  fe  cacher  tant  qu'il  leur  eft 
polsible  :&  ainfi  ils  refufcntd'auoir  la  pure 
cioûrine  que  Dieu  leur  offroit.   Apprenons 
donc  pour  eftre  fidèlement  enfeignez  ,  pour 
iouir  de  la  grâce  de  Dieu  quîd  fa  parole  no* 
eft  prefchee  purement ,  que  nous  ne  deman- 
dions point  de  porter  ce  fardeau  maudit  de 
peché,maisque  nous  veniôs  A  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift, qui  eft  celuy  qui  nous  en  dcliure: 
&  alors  il  eft  certain  que  tous  les  liens  de  Sa- 
tan feront  rompus. Mais  cependant  que  nous 
voudrons  eftre  flattez  ,  &  que  nous  ne  pour- 
rons fouifrir  qu'on  nous  redargue  vititment, 
&:  qu'on  gratte  nos  rongnes  ,  il  eft  vray  que 
ijous  pourries  bien  auoir  nos  ailes  pour  quel 
que  temps, mais  cela  nouscouftera  bien  cher; 
car  nous  fentirons  en  la  fin  ces  liens  eftre  fi 
ferrez  ,  qu'il  ne  lera  pofsible  d'en  fortir.  Et 
qui  en  crt  caufefinon  que  nous  n'auons  point 
voulu  eftre  affranchis  par  la  grâce  du  Fils  de 
Klz.iiii. 


448 


)t   i 


ÎSERM  ON  :  XX.       n\'  ? 


Dieu  ,  laquelle  il  prefente  i  tous  ceux  qui  ne 
Teulent  point  fe  nourrir  en  leurs  ordures  & 
iniquitez?  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  no 
ter  quant  à  ce  paflàge.  Or  quand  famû  Paul 
adioufte  ijitt  telles  ftmmes  apfventnt  tcufiours, 
Cj*  qite  iam.îis  ne  patuent  -venir  i  la  cofnoif- 
fance  de  vérité  :  il  femble  bien  de  prime  face 
que  ceci  foit  eftrange.  Car  Dieu  protefte  par 

■'''•45 .    fon  Prophète  Ifaie, qu'il  n'a  point  parléen  fe 

'*'  cret.que  fa  voix  elt  toute  patctc.  Quâd  donc 

nous  appliquons  toute  noftre  eftude  poar  fça 
uoir ,  il  femble  que  nous  deuions  bien  parue- 
nir  à  la  cognoilTance  de  venté  ,  ou  bien  que 
Dieu  fe  ;-etire  &  s'elôgne  de  nous  quand  nous 
voulons  approcher  de  luy  :  &  cela  elt  contre 

lilat.7-7  fa  natureril  dit,  Cherchez,  &  vous  trounerer. 
Comment  fe  peut-il  faire  donc  qu'vn  hom- 
me ou  vne  femme  s'eftudient  de  fçauoir,&  ce 
pendant  qu'ils  demeurent  toulîours  poures 
iguorans  &  aueugles?  Il  lemble  qu'il  ne  tient 
finon  que  Dieu  ne  leur  veut  pômr  donner  ou 
uerture,combi^n' qu'ils  y  tendent.  Or  nous  a- 
uons  à  noter  que  cefte  apprétilTage  dont  par 
le  faincè  Paul,  n'eft  pasd'vn  vray  defir  qui 
qui  foit  ni  aux  femmes, ni  aux  homes  de  pro- 
fiter en  l'cfcole  de  Dieu, mais  c'ell:  vne  curio 
fité  pluftoib  de  fçauoir  afin  de  fe  môrtrer.  On 
verra  de  ces  bigotes-la  qui  feront  des  que- 
ftions.  Et  quellé-î?  Elle'  ne  demandent  point 
que  c'eft  de  vrayepenitéce.  Car  il  feroitque 
ftion  alors  d'approcher  de  Dieu  en  droiture 
&  en  rôdeur,  il  feroit  qucHion  de  fçiuoir  que 
c'eft  de  noftre  nature  ;  &  alors  il  leur  feroit 
monftré  qu'il  n'y  a  que  malediftion  &  corru- 
,  ption  en  nous ,  que  nous  fommes  du  tout  re- 
belles à  Dieu  ,  que  noftre  raifon  cftaueugle, 
«u'il  ne  nous  faut  point  fier  en  noftre  fens 
propre,  mais  qu'il  nous  taut-xhercher  toute 
noftre  prudécc  en  la  parole  de  Dieu. On  leur 
•  monftreroit  puis  après,  que  toutes  nos  péfees 

luim.'S.c  Si  atfeilions  font  autant  d'inimitiei  contre 
Dieu,  qu'il  faut  que  les  homes  &  les  femmes 
renoncent  à  cux-mefraes  pour  venir  à  DHeu, 
qu'ils  fe  condamnent  en  leurs  vices  ,  8c  qu'il» 
fentent  leurs  fautes, pour  dire,Helas.'c6ment 
ferons-nous  afleurees  de  noitre  falut.veu  que 
nous  fomraet  fi  pleines  dé  toute  mifere?  Car 
nous  naeritons  bien  que  Dieu  nous  reiette,  & 
qu'il  nous  ait  en  exécration.  Or  fi  nous  taut- 
il  reconcilier  à  noftre  Dieu  ,  afin  que  nous  le 
puif  ions  inuoqucr.Et  cornent  ftra-cefCom- 
jncnt  pourrons-nous  eftre  fi  hardies  de  venir 
à  luy,  &  d'.ittendre  qu'il  nous  foit  propice,  Si 
faire  que  nous  pourrons  cheminer  par  les  ten 
tations  de  ce  monde  ,  nèdoutans  point  qu'il 
ne  nous  conduifc  infques  à  ce  que  nous  (oy- 
ons partieniies  à  l'héritage  de  nbftie  falut? 
Comment  pourîons-nou'  auôir  vne  telle  fian 
ce  en  nous?  Ov  ces  bigotes  dont  parle  faind 
Paul  n'ont  garde  devenir  là, mais  flirs  aurôt 
des  queflions  ie  ne  f^ay  quelles, pour  duc, Or 
ça, noftre  M3iftre,ou  beau-perccommét  eû- 
ce  que  ie  doy  faire  quand  il  eft  la  veille  d'va 


tel  Saincl.''Il  eft  vray  queîe  iufnë:mais  enco- 
res.ie  vous  prit, lequel  feroit  meilleur  de  dif-- 
ncr,ou  de  louppei*'  £i  puis  après,  Qi^ant  aux 
autres  lufnes  ,  comment  m'y  doy-iegouucr- 
ner?Et  puis, Comment  faut-il obferuervn  tel 
pèlerinage.?  Et  puis,  Q^e  fa  ut -il  faire  quand 
ie  vien  pour  adorer  vne  telle  SainÛe  ,  &  vne 
telle? Apres,  A  qui  eft-ce  que  ie  doy  plus  grî 
de  deuotion,  ou  à  ce  Saind-la,  ou  i  vn  autre? 
Comment  elt-ceque  ie  doy  difcernerlavier 
ge  Marie  d'auec  fainde  Agathe, ou  {aiile  Gel 
tiude?Et  comment  eft-ce  qne  ieme  porteray 
quand  l'iray  à  confefle?  Car  ie  ne  fçay  pas 
quels  font  les  péchez  mortels,  ie  ne  fçay  que 
ie  doy  dire  de  ceci  Se  de  cela.  Voila  les  que- 
ftions  que  feront  ces  bigotes.  Et  puis  après, 
Cômentfe  gouuerne-onen  paradis?Et quand 
l'y  feray,  me  mettra-on  au  râg  des  Martyrs, 
oti  des  Confefleurs<'Etdemoy,  doy-iepluC 
toft  adorer  vn  tel  Sainft ,  ou  vne  telle  SainÛe 
qu'vneautre?Etpuis,A  quel  Sain4>  faut-il  re 
courir  pour  auoir  remède  d'vn  tel  mal?  Voi- 
la donc  comme  ces  bigotes ,  en  faifânt  fera- 
blant  de  vouloir  apprédre,  ne  leur  chaut  gue 
res  de  profiter  en  la  vérité ,  mais  pluftoft  el- 
les la  fuyent, voire  &  la  perfecutent.  Et  pour 
tant  ne  trouuons  point  eltrange  fi  iamais  el- 
les n'y  peuucnt  paruenir  :  comme  faicftPaul 
ne  dit  pas  feulement  qu'elles  n'y  vienentia- 
mais,  mais  il  eft  inipof  ible,  dit-il.  Et  pour- 
quoy.^Car  elles  n'y  tédcnt  pas, mais  vont  tout 
au  rebours.On  verra  de  ces  bigots  &  bigotes, 
quand  ils  auront  dei^iorgé  en  l'aureilie  d'vn 
moine ,  ou  d'vn  prcfti  e  ce  qu'ils  aurorit  vou- 
lu,encores  ne  les  pourra-on  arracher  de  là. 
Mais  qu'y  font-iK  cependant.'  Car  prenons 
le  cas  que  la  coRftfsion  papale  tult  bonne  :  il 
eftvrayque  c'eft  vne  inuention  diabolique, 
d'autant  que  les  hommes  ontvfurpé  ceci. fur 
les  poures  âmes  ,  d'attacher  la  remifiioh  de» 
péchez  à  cefte  forcelerie  Se  malediftion  dont 
le  Pape  a  lié  les  poures  confciences  ,  comme 
pour  deipiter  la  vertu  &  l'efficace  de  la  mort 
&  pafsion  du  Fils  de  Dieu.  Mais  encores  que 
le  fondemét  de  la  confefsion  papale  fuft  bon, 
ici  on  voit  encores  leur  hypocrilîe,  qu'au  mi 
lieu  des'tencbres  du  Pape  encores  voit-on  la 
malice  Sch  trahifon  de  ces  bigots&  bigotes, 
lefquels  ne  demandent  finon  à  fe  iouerauec 
Dieu.CarCcommt  défia  nous  auons  dit)voila 
vn  homme  ou  vne  femme  qui  voudront  fe  fan- 
ftifîcr  par  feintife  ,ils  viendront  à  confefle  .S- 
fouaent  y  retourneront, qu'ils  n'auront  point 
defcliqué  en  trois  heures  ia  moitiéde  ce  que 
ils  voudrôt  dire.  Et  bien  qucdifent^ils  cepen 
dant?  Des  menus  fatras:Voila,  l'ay  fiiit  telle 
chofe  Se  telle.  Et  qu;n'?  Rien  du  tout.  Mais 
s'ils  rencontrant  d'auenturevn  côfelTciir  qui 
ne  les  flatte  point  ,  mais  qui  les  examine  aiï 
vif,  Venez  ça, ie  vous  ay  ici  ouy  en  patience, 
vous  m'auez  battu  les  .luiciUes  de  ie  ne  fçay 
quels  fatras  :  mais  cependant  vous  ne  parlez 
point  (le  ceci  ne  décela  .    S'il  vient  dore  les 


SVR    LA   IL    A    TIMOTH. 


ïbndei- ,  &  qu'il  prene  vue  lancette  pour  les 
picqiier  iLifqueçau  vif,  brief,  s'il  vient  à  cief- 
couurir  leur  ver^ongnedu  tout,  ho,  ils  n'au- 
ront Icrs  garde  d'y  retourner  fi  louuent  :  au 
lieu  qu'ils  le  confclToycnt  vne  fois  la  fepmai 
ne, ils  n'y  retournerôt  d'vn  an,d'autant  qu'on 
ne  les  traître  pas  comme  ils  voudroyét  .Nous 
voyons  donc  comme  telles  gens  ne  deman- 
dent point  d'approcher  de  Dieu.  Ainfi  il  re 
fe  faut  point  esbahir  fi  Dieu  les  lailTe  en  tel 
opprobre  ,  que  Satan  les  traine  &  les  pouffe, 
&  qu'il  les  tiene  captifs  en  fes  liens ,  c'efl  vn 
iui'te  falaire  de  leur  hypocrifie.  Ainfi  appre- 
nons ,  quand  il  eft  queftion  de  venir  à  la  co- 
gnoiflance  de  vérité,  que  nous  tenions  le  che 
tnin  qu'il  appartient  :  c't:&  qu'en  premier  lieu 
nous  demandions  que  Dieu  foit  noftre  mai- 
ftre  ,  &  que  nousluy  foyons  vrais  difciples: 
c'eft  à  dire,  qu'il  y  ait  vne  docilité  en  nous 
pour  nous  afluiettir  pleinement  à  fa  parole, 
que  nous  n'apportiôs  point  vn  bec  afiilé  pour 
nous  rebecquer  quand  la  dodtrine  de  Dieu  ne 
nous  plaira  point,  que  nous  n'ayons  point  ce 
fte  outrecuidance  de  dire ,  Ho  ,  ie  ne  trouue 
point  celabon.Nenni:mais  que  Dieu  ait  tou- 
te authorité  par  dcfïîis  nous,  &  que  nous  fouf 
frionsd'eftrepaifiblement  en  feignez  de  luy, 
comme  nous  voyons  que  les  brebis  fuiuent  le 
If/). 10.3  Pafteur  à  fa  voix, ainfi  que  Icfus  Chrift  en  par 
le.  Voila  poùrvn  item.  Et  puis  en  fecôd  lieu, 
que  nous  n'ayôs  point  vne  folle  cunofîté  qui 
nous  face  voltiger  par  ci  &  par  là,  pour  dire, 
le  voudroye  bien  entendre  vne  telle  chofc: 
voire,  où  il  n'y  aura  nulle  vtilité.  Or  tout  ce 
qui  ne  nous  peut  édifier  ni  en  foy  ni  en  crain- 
te de  Dieu,  il  faut  que  nous  le  reiettions  corn 
me  vne  chofc  pernicieufe  :  car  le  diable  aufsi 
a  celle  aftuce ,  de  nous  faire  ainfi  tourner  de 
cofté&  d'autre  pour  nousdiuertir  du  bon  che 
min. Si  quelqu'vn  a  vne  iournee  à  faire, &  ce- 
pendant qu'il  s'en  aille  veaiitrer  en  vn  pré,  & 
qu'il  s'amufe  à  cueillir  des  fleurs,  quand  il  fe- 
ra i  vn  bout ,  qu'il  retourne  à  l'autre  :  voila 
fa  iournee  perdue  ,  qu'il  n'aura  point  fait  vn 
traift  d'arc  de  chemin.  Et  pourquoyf  Pource 
qu'il  n'a  point  fuiui  fa  iournee. Ainfi  dôc.que 
nous  n'ayons  point  toutes' ces  diftraftions-la 
quâd  il  eft  queftion  de  venir  à  Dieu,  inais  ten 
dons  droit  au  but  auquel  il  nr>us  appelle. AdHjf 
fons  doc  de  chercher  les  chofés  qui  no'  font 
profitables  àJfaiut:comrrie'd'eftre  coiidamnez 
entiospechezpoUr  eftre  a:rrirez  à  vraye  re- 
pentance,  d'oùir  les  menaces  qiron  nous  fait 
afin  de  cheminer  en  la  crainte  de  Dieu.d'ouir 
les  exhortations  pour  nous  picquer  à  bien  fai 
re.de  nous  employer  là  du  tout.d'efcouter  ce 
que  Dieu  nou;  monftre,  afin  que  nous  chcmi 
niés  prudemment  &  comme  il  faut,  que  nous 
fçachions  que  c'elï  de  portèr'paticment  les 
affllîlions  quand  il  plaira  à  Dfeu  de  nous  en- 
enuoyer,que  non  feulemét  nous  fçachjos  que' 
c'êft  à  caufe  de  nos  péchez, mais  q  nous  foy- 
otos  dociles ,  Kaiflans  la  tefte&  1&  efpàulès. 


449 

pour  en  receuoir  tant  qu'il  /uy  en  plaira  met 
tredciTus  :  que  nous  apprenions  que  c'eftde 
cheminer  tellement  par  celle  vie  terreftre  Si- 
caduque, que  nous  tédions  à  la  vie  cekfre.que 
nous  foyons  pèlerins  en  ce  monde  ,  que  nous 
mortifions  les  concupifcéces  de  nollre  chair, 
que  nous  fçachiôs  que  c'eft  d'inuoquer  Dieu 
en  vraye  fiance, q  nous  içichions  quec'eftde 
nous  appuyer  en  la  mort  &  palsionde  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift;Cognoiflàns  que  c't.  ft  là 
que  nous  auons  toute  noitre  iuftice,  que  c'eft 
parcemoyen  que  nous  fommes  agréables  à 
Dieu  le  Père,  afin  qu'il  nous  re  çoiue  à  merci. 
Q_uanddonc  nous  appliquerons  làtouteno- 
ilre  tftude,  nous  viendrons  à  la  cognoiflance 
de  vérité, nous  fentirons  que  ce  n'eft  point  en 
vain  que  Dieu  nous  a  promis  qu'en  cherchât 
nous  trouuerons:mais  il  faut  chercher,  côme 
dit  Moyfe, Voici  la  voye,fuiuez-la.Ciue  nous 
n'allions  point  donc  nous  efgarer  de  noftre 
bon  gré.  Voila  en  fomme  ce  que  nous  auons 
à  retenir  de  ce  palTage.  Et  en  gênerai  notons 
que  quand  Dieu  cnuoye  des  faux-prophetes 
(côme  il  le  déclare  par  Moyfe  au  I4.du  Deu- 
ter.)  c'eft  pour  efprouuer  fi  nous  l'aimons  ou 
non.  Car  quand  nous  preftons  l'aureiUeaux 
feduileurs  ,  &  que  nous  fommes  abufez  de  ce 
qu'ils  nous  flagornent.il  eft  certain  que  voila 
Dieu  qui  defcouure  qu'il  n'y  a  en  nous  qu'hy 
pocrifie  :  car  fi  nous  auons  eu  quelque  deuo- 
tion  en  apparente;  cen'elloit  rien  finon  leia 
tife.  Dieu  donc  ne  foufFrira  iamais  que  nous 
foyons  abuf.z  par  les  fedu£leurs,  quand  nous 
le  chercherons  en  pure  vérité.  Et  cependant 
notons  que  fi  nous  venons  à  l'cfcole  de  Dieu 
pour  eftre  enfeignez,  &  que  nous  luy  foyons 
dociles,  que  nous  foyôs  bien  aifes  à  receuoir 
û  parole,  que  nous  paruiendrons  du  premier 
coup  à  la  cognoiflance  de  verité:non  pas  que 
nous  y  foyôs  parfaits, mais  fi  eft-ce  que  Dieu 
ne  fc  cachera  point  de  nous  que  nous  ne  le 
cognoifsions  entant  qu'il  fera  expediét  pour 
nollre  falut ,  qu'il  ne  s'appriuoife  de  plus  en 
plus  ,  &  que  nous  ne  foyons  confermez  en  la 
bonnedoftrine,iufques  à  ce  que  nous  foyons 
deliurez  de  toutes  ténèbres  d'ignorance.Voi 
la  donc  comme  il  nous  faut  ellrcafleurez  que 
Dieu;ie  permettra  point  -que  nous  crrios,  fi- 
lion  que  nous  le  faciows  de  noftre  bon  gré. Et 
au  rt  fte,  il  ne  fe  faiit  poît  esbahir  fi  beaucoup 
font  fru flrez  quand  ik  ont  quelque  defir  d'ap 
prendre, &  toutesfois  qu'ils  demeurent  touf- 
iours  poures  aueuglês,&  que  le  diable  melme 
lés  enueloppe  en  beaucoup  d'erreurs  :carauf- 
fi  ils  n'ont  point  cherché  Dieu.  Or  il  a  falu 
qu'ih  cufientle  falaire  tel  qu'ils  auoyét  mé- 
rité. Nousdcuons  bien  .iniourd'huy  confide- 
rérccla,  véu  que  les  C^irnlptions  de  Satan  ré- 
gnent ainfi  ainponde.tjue  ceux  qui  cuidcnt  e- 
ftve  bien  fagcs:&  bien  ûibtils ,  mefmcs  ceux 
qui  cnident  monter  par  deflus  les  nues, côme 
les  plus'éxcéllfsjqu'ilfemble  que  toute  la  fa- 
gefle-di/niôdefoit  enlfur  tefte.on  voit  ceiix> 

Li.i. 


4P 


SERMON    XX. 


19. 


14. 

19-P. 
Ifr.I3.i3 


laeftredutout  sbbrutiç.  Et  pourquoyf  Cir     /"ont  bigots, &  quibarbotent,*: qui  rufnent,* 
(comme  délia  nous  auos  déclaré)  il  n'y  a  ce-     font  ceci  &  cela, (ineantmoins  Dieu  les  rend 
liiy  qui  ne  fe  donne  liberté  de  fe  iouer  auec     elclaues  de  Satan  quand  ils  n'ont  point  vne 
Dieu,  &  tous  le  voudroyent  payer  en  EiulTe     confciéce  pure  &  droite,  que  fcr«-ce  des  con 
niônoye.  Il  faut  donc  qu'il  les  amené  en  fens     tempteurs  manifeftes, comme  auiourd'huy  on 
reprouuc  ,  &  qu'il  leur  enuoye  vn  efprit  d'y-     les  voit  ?  le  vous  prie  quand  on  ouurira  les 
urongnerie,  (comme  il  en  parle  par  (es  Pro-    yeux.ne  verra-on  pas  que  le  monde  veut  def- 
phetes):ellement  qu'ils  n'ayentplus  nulle  di     piter  Dieu  auiourd'huy  nunifcftemét,ie  di  & 
Icretion.  Voila  ce  que  nous  auons  à  retenir    grans  &  petis,&  riches  &  poiires?  Quantaux 
de  ce  palTage.  Or  il  y  a  encores  vn  petit  mot     grans, ce  font  des  geans  qui  voudroyent  hur- 
quant  à  ce  que  (ainiîl  Paul  parle  de  la  vérité,     ter  contre  Dieu. Et  ceux  qui  ont  quelque  ver 
Car  ilmôitre  quecen'efl  pas  le  tout  de  beau     tu  ou  efprit,  à  quoy  l'appliquét-ilslinon  à  fe 
coup  fçauoir.mais  qu'il  fiut  auoir  vne  doc^ri-     moquer  de  toute  religion?  £t  fans  aller  plus 
ne  folideS:  ferme. La  vérité  doncqu'empor-     loin  ,  qu'on  regarde  ici  au  milieu  de  nous  là 
te-elle?  C'cft  où  giftla  l'ubllancede  noftre  fa     oùl'Euâgile  fe  preiche,&  non  feulement  aux 
lut ,  &  que  nous  i  cachions  comme  Dieu  doit     villes  .nuis  aufsi  aui  villages,  qu'on  regarde 
eftre  glorifié.  Nous  pourrons  donc  fçauoir     comme  chacun  va  fon  train,  ie  ne  parle  point 
beaucoup  de  Iciences,  nous  pourrons  conce-    de  deux  ou  de  trois ,  mais  qu'on  regarde  le 
uoir  beaucoup  de  fpeculatiôs ,  nous  pourrons     train  gênerai,  ne  voit-on  pas  qu'il  y  a  vne  re 
auoir  la  lague  habile  pour  en  iazer.S:  mefines     bellion  toute  manifefte?  Auiourd'huy  &  hom 
il  femblera  q  nous  fçachions  nicrueilles.mais     mes  &  femmes  non  leulemét  ferôt  malins  en- 
le  tout  ne  !^ra  rien  que  vanité(ainfi  qu'ila  e-     tr'eux.mais  ils  voudroyét  auoir  arraché  Dieu 
fté  traittéci  delTus  )  quand  nous  n'aurons  pas     du  ciel.  Il  ert  vray  qu'ils  voudront  bien  auoir 
ce  vray  fondement  ,  c'eit  afçauoir  que  Dieu     quelque  réputation  ,  côbien  q  par  feintife  ils 
foit  glorifié  par  nous  ,  &  que  nous  fçachions     voudroyent  fe  couurir  &  efchapper  la  inaia 
que  c'ell  de  le  feruir  ,  que  nous  fçachions  où     du  iuge:mais  tant  y  a  qu'ils  n'ont  nulle  rcue- 
noftre  efperace  doit  eftre  appuyée,  afin  qu'e-     rcnce  à  la  parole  de  Dieu.  Et  dont  vient  ce- 
ftansalTeurez  de  noftre  falut  nous  attendions     la?Il  eft;  vray  que  la  fource  eft,  qu'vn  chacun 
que  ce  qui  nous  eft  auiourd'huy  promis, nous     veut  auoir  la  bride  auallee.comme  on  dit. Les 
foit  reuelé  par  efFeû.  Voila  donc  cefte  vérité     yuron»nes  voudront  qu'on  les  laifle  gour- 
dont  parle  fâinû  Paul ,  comme  il  lemonftre     mander  auec  toute  intempérance  comme  des 
aufsi  en  d'autres  paffages.  Et  au  refte,iî  Dieu     pourceaux  :  les  paillars  voudroyent  auoir  li- 
aueugle  atnfî  ceux  qui  par  hypocrifie  ne  le    cence  de  fe  veautrer  en  leurs  ordures*:  infe- 
chcrchét  point,  mais  ont  des  folles  deuotiôs,     dions  :  les  auaricicux  voudront  attrapper  le 
que  fera-ce  de  ceux  qui  auec  vne  rage  fe  dref    bien  d'autruy  de  collé  &  d'autr€:les  blafphe 
fent  cotre  luy,&  font  des  taureaux  pour  hur-    mateurs  voudrôt  auoir  la  gorge  oiiuerte  fans 
ter  des  cornes,monftransvn  mefprisde  tou-    qu'on  leur  remÔftre  leur  oifenfe:on  voit  que 
tereligion=Ceux-la  ne  meritét-ils  point  d'e-     ''nV  a  nul  qui  fevueilleafluicttir  à  Dieu.Li 
ftre  encores  plus  abruuez  deméfongc,  S:  que    deflus  fe  faut-il  esbahir  lî  nollre  Seigneur 
Satan  les  aueugle  tellement  qu'ils  n'ayent     permet  qu'il  y  viene  beaucoup  de  troubles, i5£ 
plusnegouftne  ûueur  en  eux  non  plus  que     queles  Miniftrcsmefraes&lesprefcheurs  ne 
aurét  les  afnes  &  les  chiens?  Voici  fainfl  Paul     facét  point  leur  deuoir?  C'cft  merueilles  pl|if 
qui  dit  que  s'ilya  des  poures  femmelettes     toft,  voiremefmesc'eft  vnmiracle, que  Dieu 
quiayentdel'hypocrifie  en  leur  cœur,  quand     laide  quelque  femcnce  de  ii  parole  ,  quand  il 
elles  feront  femblant  d'apprendre  ,  combien     y  a  vne  telle  ingratitude  au  monde. Car  pluf- 
qu'ilfemble  qu'elles  ayent  quelque  defir  de     toft  s'il  vouloit  vfer  de  rigueur  enuers  nous, 
feruir  i  Dieu,  que  toutesfois  le  diable  en  a  la     &  qu'il  nous  traittaft  félon  que  nous  en  fom- 
pofTefsion.  Et  c'eft  vn  iufte  falaire  qu'elles     mes  dignes, il  faudroit  que  les  diables  môtaf- 
remportent,  quelque  excufe  qu'on  puifle  aile     fent  en  chaire,&  qu'ils  fulTent  encharnez  afin 
guer.  Voila  Dieu  qui  eft  iufte  iuge.quâd  il  les    defeduireceux  qfontainfi  malins  &  peruers, 
permet  ainll  aux  liens  de  Satin  &  des  fedu-     &  qui  ne  demandent  (inon  de  faire  la  guerre 
ûeurs.  Sivne  tellerigueureftiufte  contre  les     manifeftcment  à  Dieuen  toute  leur  vie.  Et 
femmes,vdire  contre  les  poures  femmelettes     atnlî.quand  nous  verrons  des  troubles  Si  fcan 
qui  femblentles  plus  fîmples, que  fera-ce  des     dales,  que  nous  Tcrrôs  des  ca^iailles  qui  nede 
hommes?  Il  y  aura  beaucoup  moins  d'excufe.     mandent  qu'à  femer  leur  poifon  pour  tout  in 
L'homme  eft  le  chef  de  la  femme,  celuy-la     fedfer,&  pour  peruertir  la  vérité,  cognoifsôs 
doit  auoir  plus  d'auis&  de  prudence.  Quand     quec'eftvn  iufte  falaire  contre  ceux  qui  fe 
donc  les  hommes  voudrôt  ainfi  fe  moquer  de     veulent  ainiîdeftourner  à  leurcfcient  du  bon 
Dieu ,  qu'ils  voudront  demeurer  entortillez     chemin:mais  cependant  que  nous  remercions 
en  leurs  vices, ne  font-ilpas  dignesd'eftre  de    ce  bon  Dieu,  dece  qu'il  nous  a  aduertis ,  afin 
tenus  en  telle  captiuitê.q  iamais  ils  n'efchap-     quç  nous  ne  foyons  point  trompez,  mais  que_ 
pept  des  liens  de  SatanfU  eft  bien  certain. ()r     nous  cognoifsions  qu'au  milieu  de  tels  com- 
é  les  hommes  qui  ont  queUjue  deuotion  ,  qui     bats  nous  pourrons  toufiours  fuiure  le  droit^ 

chemin. 


SVR   LA   II.   A  TIMOTH. 


cliemin.moyénant  que  lefus  Clirift  nou';  con 
<luife,&4"c  nous  nehry  foyoni  point  rebel- 
Jes.  Et  puis  quid  nous  voyons  que  Dieu  enco 
res  nous  Jaifle  fa  parole;  &  quel<]ue  ingratitu 
de  qu'il  y  ait  en  nous, que  toucesFois  nous  ne 
fommes  point  piiuez  de  la  dotkrine  de  VEul 
gile  ,  fouffroDS  dVftie  enfeignez  fidèlement 
deluy.&d'eftreconfermezdeplusenplus  en 
Ja  dodrine  que  nous  auôs  defïa  apprinfe,  que 
nousdemâdionsde  côtinuer  l'tftude  où  Dieu 
nous  veut  employer  tout  le  temps  de  noftre 
vie, &■  que  nous  reccuions  fa  doûnne  en  telle 
humilité,  que  nous  puifsions  quant &.quant 
monftrer  que  noUs  auons  contemplé  la  face 
Àe  noftre  Dieu  pour  eftre  trasfigurez  eniceJ 


le  de  gloire  en  gloire. 


4Tr 

O  R  nous-nous  prollernerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoilîance  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fcntir  que  nous  n'auons  point  fait.  Et  puis 
qu'il  no'a  fait  cefte  grâce  &  ce  priuilege  fpe 
cial ,  que  nous  ayons  la  pure  doftrine  de  fon 
Euangile, qu'il  ne  permette  point  qu'elle  ibit 
lamais  efteintepar  noltre  ingratitude,  mais 
que  nous  y  profitions  tellement ,  que  quand 
nous  ferons  confermezen  icelle,  qu'elle  pre- 
ne  toulîours  racine  plus  profôde,&  ûlon  que 
elle  frudifiera, qu'elle  s'ei'pâdc  toufiours  plus 
loin  ,  &  que  ion  nom  en  foit  glorifié  ,  &  le 
Royaume  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  fon 
Fils  augmenté.  Ainlî  nous  dirons  tous,  Dieu 
tout-puiflant,PereceIefte,&c. 


txod.7. 
II. 


TROISIEME     SERMON     S  V  R    L  E 

TROISIEME     CHAPITRE. 

■■îl'.qV'îli' 

8  Ef  en  tdle  manière  que  Idfines  (^  Unthres  ont  rcfiflé  a  Moyfc, 
pareillement  aufii  iccux  refijleyit  a  la  'venté  :  hommes  corrompus  d' en- 
tendement,reprouuez  quanta  lafoy. 

9  Mais  ils  ne  profiteront  plus  :  car  leur  folie  fera  manifejlee  à 
ious,comme  aufi  a  ejïê  celle  de  ceux  la. 


^Y^^^^^  Ource  que  c'eft  vne  chofe 
-  ^-^-^  ^*^  ■-•  dure  Se  fafcheufe  q  d'auoir 
contrariété  quand  nousvou 
Ions  feruirà  Dieu,&aduan- 
cer  ia  parole  ,  ceux  qui  font 
exercez  en  ces  combats  ont 
befoin  de  confolation,ou  au 
trement  ils  poilrroyeiit  tout  quitter,  penfans 
■que  c'eft  vne  chofé  infupportable  que  les 
Créatures  bataillent  ainfi  contre  Diéif,  que 
Ja  vérité  foitainfi  difsipee  ,  qu'on  la  defgui- 
fe  tellement ,  qu'on  tafcbe  de  l'anéantir  ,  & 
qu'on  luy  face  tout  effort.  Voila  pourquoy 
fainâ:  Paul  ayant  parlé  de  la  condition  qui 
eft  appareillée  à  tous  prefcheursde  l'Euarigi 
le,adioufte  qu'il?  n'endurêt  rieri  de  houùeaui 
car  autant  en  eit-i^adue^u  ,  &  i  Mc/yfe ,  &  à 
tous  les  Prophète?  r  mais  il' fecorrtéte  dé  friet 
tré  en  auant  réieinplc  dé  Moyfe.Cépendaflt 
toutesfois  Timotheeatioit  occafion  de  redui 
re  en  fomme  ce  qui  auoit  efté  fait  depuis.  Car 
il  a  falu  que  les  Prophètes  fe  foyent  confor- 
mez en  cela, que  toulîours  ils  ont  eu  des  repu 
granccs:  &  iamais  n'crtit  ferui  paifiblcment  à 
Dieu,  que  Satan  n'aitmachiné  tant  qu'il  pou 
uoit  d'empefcher  lé  cours  de  leur  dodlrine'. 
faiiicl  Paul doric  dit ,  iiiious  voyons  gensqiti 
batâillentcontre  lareritéde  Diei*,'que  c'eft 
comme  il  en  a  efté  fait  de  tout  temps.  Car  il 
y  a  eu  les  enchanteurs  de  Pharao  qui  ont  auf 
lï  refifté  à  Moyfe:&  alors  Dieu  a  eftablt  com 


me  vn  patron  pour  nous  nionftrer  ce  qu'au- 
ront .1  faire  tous  ceux  qui  voudront  auâcer  la 
bonne  &  puredoûrine  :  c'tftafçauoir  ,  qu'ils 
foyent  armez  pour  combatre, d'autant  que  Sa 
tan  leur  fera  la  guerre,&  prattiquera mainte- 
nant d'vn  cofté,  maintenant  d'autre,  de  faire 
que  la  vérité  n'.iit  point  fon  cours.  Voila  le 
premier  qiie  fainû  Paul  amené  pour  confoler 
Tiniotkee:&  en  la  peifonne  d'vn  home  il  do- 
ue aufsi  courage  à  tous  feruiteurs  de  Dieu,  SC 
Miniftres  de  fa  parole. Il  adiouite  vn  fecôd  ar 
gument,  c'eft  que  Dieu  pouruoira  à  ce  quel* 
vérité  ne  foit  point  touliouis  opprimée:  com 
bien  que  pour  vntémps  elle  foit  cômeobfcur 
cie, toutesfois  en  la  fin  Dieu  la  rendra  vifto- 
rieufe-iiX:  faudra  que  Satan  &  tous  fcs  fuppofts 
demeurent  côfus,  après  auoir  attenté  tout  ce 
Qu'ils  auront  peu.Am<î  nousToyooS'cn  i'om- 
mê  qiie  le  S.  Efprit  par  ^a  boucl>c  de  S.  Paul 
nous  propofe  ici  deux  rai  fons  pour  nous  for 
tifiefi  Quad-nous  voyons  qlic  Satan  a  des  co 
trarietez,&  que  la  vérité  de  Dieij  n'eft  point 
receuede'tous ,  mais  qu'il  y  a  des  malins  oui 
tafchent  de-tout  perùcrtir,&:  qui  la  calônienc 
&•  depiàfuent,  voici  en  quoy  il  nous  faut  con- 
foler :  c'éft^h  premier  jieW-,  que  noftre  Sei- 
gneur riodsïWUtt-comBîedetout  temps-  il- * 
fait  fon  Eg'ife  ,  qiie  ceux  qui  ont  vefcu  de 
uant  nous  n'ont  point  eu  meilleur  marché  en 
ceft  endroit: -car  Dieu  les  a  exercez  enuoyat 
des  faux-p^fteurs,  ou  bien  lafchant  la  bride  à 

Ll.  ii. 


4îi 


SERMON     XXL 


Sitan  qui  les  fufcitaft.Qu.'ainfi  foit,  cognoif-  n'eftoyent  pasennemiî  domeftiques ,  comme 

(oM  ce  qui  eli  aduenu  depuis  que  h  Loy  fut  ceux  qui  prendront  couuerture  de  rÉuaneilc 

publiée. Voila  Moyfe  qui  eftoit  douant  le*  au-  pour  ùllîficr  la  pureté  de  toute  bonne  doûri 

très  Prophètes .  Or  dciia  la  guerre  iuy  a  efté  ne:mais  d'autant  que  défia  Moyfe  a  (ouftenu 

dreflceiS:  iamais  ce  mal  n'ictire.Ainlî.qu'au-  dcscombats,&que  les  Prophètes  l'ont  enfuy 

iourd'liuy  nous  portions  en  patience, s'il  nous  ui,  appreftons-^nous  :  &  quand  ce  viendra  à  la 

faut  endurer  le  femblable:  car  ce  n'eit  pas  rai  pr.ittique,  ne  trouuons  rien  de  nouucau ,  que 

fon  que  noftrecôdition  fou  meilleure  ou  plus  nous  ayons  prémédité  cela  de  longue  main, 

aifee  que  celle  de  Moyfe ,  5:  de  tous  ceux  qui  voire  pour  le  foufFru  doucement, &  fans  nous 

l'ont  fuyui.  Voila  pour  vn  item.  Or  le  Iccond  esbranler  en  taçon  que  ce  foit. Si  on  demande 

cft.que  l'illue  fera  toulîours  bonne  &  heuiçu-  d'où  faindt  Paul  a  prins  ces  deux  noms  qui  ne 

fe:côbien  qu'il  nous  fafche  de  côbatre,&  qu'il  font  point  exprimez  en  Exode  ,  la  refponfc 

fembleque  la  veritéde  Dieu  doyue  élire  abo-  fera, Que  les  Pères  anciens, outre  ce  qu'ils  aw 

lie  du  tout,  attendons  que  Dieu  y  pouruoye..  uoyent  par  efcrit  ,  ont  retenu  fidèlement  les 

Car  il  fera  tellement  que  les  mefchans  ne  rem  chofes  qui  auoycnt  efté  faites  auparauant,tel 

porteront  que  toute  vergongne  :  après  qu'ils  lement  que  le   peuple  des  luifs  a  eu  comme 

auront  triomphe, lî  faudra-il  que  Dieu  dcfcou  par  héritage  plus  de  cognoiflance  de  Fhiftoi- 

iire  leur  turpitude,ScHaus  verrons  corne  Dieu  re  anciéne  que  nous  n'auonspas  auiourd'huy. 

aie  foin  de  maintenir  fa  caufe  ,  combien  que  Saind  Paula  peuauoir  deceft  vûge-laceque 

cela  n'apparoiflc  point  pour  vn  temps .  Or  il  il  récite  en  ce  p.i(rige:c'elt  afçaUoir  que  les 

refte  d'appliquer  celle  dodrine  à  nollre  vfa-  enchâteurs  de  Pharao  clloycnt  nommez  ainii 

ge. Ce  nous  eflvne  grande  confolation  quand  qu'il  les  appelle  ici.Qu.'il  y  en  ait  deux,  ileli 

nous  nofommes  point  l'eparei  de  lacôpagnie  viay-fembiable,à  caufe  deMoyfe  &d'Aaron.  ■ 
des  enfans  de  Dieu,  mais  plufloft  que  Dieu     Voila  deux  Prophètes  que  Dfeùenuoye.Voi- 

nous  fait  liiyure  leur  tram  ,  &  qu'il  nous  mené  la  Pharao  pouflc  par  l'elpiitdudi.ibie,qui  eu 

tellement  à  eux, qu'il  n'y  a  qu'vnrang.  Q^âd  oppofe  deux  autres  ,  l'vnà  Moyfe',  l'autre  à 

nous  voyons  cela, nous  auons  bien  occalion  de  Aaron, pour  monftrer  qu'il  n'eft  en  rien  infc- 
eftre  fortilîez.Si  maintenant  les  chofes  e-     rieur.  Àinlî  donc  ,  combien  que  Moyfe  n'ait 

ltoyentconfufes,&  que  quand  nous  viendrons  point  déclaré  qui  eiloyent  ces  enchanteurs, 

à  regarder  coiiie  Dieu  a  traitté  fes  fidèles  par  m  en  quel  nombre. tant  y  a  que  faintt  Paul  l'a 

cideiiant,&  que  nous  trouuerions  leur  condi-  cud'vne  telle  certitude  qu'il  ne  faut  point  que 

tion  toute  diuerfe,  ce  feroitpour  nous  faire  cela  viene  auiourd'huy  cndifpute  .£tau  re- 

esbahir:mais  quandnous  voyôs  que  nous  fom  fte,  la  chofc  n'eft  point  cftrange  ni  douteufe, 

mes  fcmblables  à  ceux  qui  ont  ferui  à  Dieu,  q  que  les  Pères  n'ayent  gardé  cela  fongneufe- 

nous  fommes  exercez  corne  en  vne  mcfme  li-  ment, q  ce  qui  n'eftoit  pas  couché  par  efcrit, 

çe,&  qu'ils  ont  fouftcnu  les  difiîcultez  pareil  fuft  toutesfois  cognu  ,  &  ces  chofes  ont  efté 

les,  quand  nous  voyons  cela  ,  ne  deuons-nous  entretenues  tellement, que  iutques  àl'aage  de 

pas  nous  confûler,pour  dire, Et  bien, faut-il  q  famft  Paul  les  noms  des  enchanteurs  ont  efté 

nous  réfutions  d'eftre  conformez  à  Moyfe  ,  à  en  mémoire.  Or  cependantnotons  de  ce  paf- 

tous  les  Prophètes  de  Dieu  ,&  aux  Apoftres?  fage  comme  le  diable  pour  guerroyer  contre 

Et  ainlî  apprcnôs  de  toulîours  contéplcr  l'c-  Dieu, contrefait  touiiours  le  Ijien:  brief,on le 
ftat  de  l'Eglife  anciéneiquand  nous  ferons  faf    peut  à  bon  droift  nômcr  côme  lînge  de  Dieu». 

chez  des  aÎBifliôs  que  Dieu  nous  enuoye.  Car  11  eft  vray  qu'il  fe  gardera  bien  d'approcher 

nous  fçauons  que  cela  eft  efcrit  pour  noftrc  delà  verité:maisfi  cft-ce  qu'il dffgijifçra  tel 

doftrine,  que  l'Eglife  eft  femblable  à  vn  chîp,  lement  les  œuuresdc  Dieu, qu'il  fe  transfigur 

fur  lequel  lacharruea  trainé,qu'il  faut  que  de  rera:3cluy  eftant  prince  de  ténèbres  donnera 

vn  bout  «niques  à  l'autre  toulîours  elleénduf<f  quelque  efpece  de  clarté  pour  trôper  les  igno 

afflLi^ipn.  Et  lî  cela  eft  aduenu  à  nos  per.es, .il  rans:aoi|is  le  voyons  en  ce  qucfamft.  Paul  re- 

faut  quen.ous,  fuccedions  en  leur  lieu  ,  A;.fifr  f  ite  ici.Vçila  Dieu  qui  enuoye  Moyfe  &  Aa- 

tout  qiund  nous  voyoïjs  que  les.ciujeruls'.de  joB.Or  au confraiie  voici  Pharao  qui  eft  pouf 

venté  oax,  la  vogue,&  qu'on  leur.fauorift,que  fé  dcl'efprit .du diable, qui flict  dçux.cn^hanr 

ils  s'cfi^ayét,  Se  qu'ils  dreflent  les  creltes  com  teurs  à  l'oppolîte.  Il  ne  leur  peut  pas  donner 

me  s'ils  auoyent  tout  gagné:& cependant  que  cfprit  de  Propketie:  fon  intention  aufsi  n'eft 
pnmiirmure,qu'onblaYpheme,&qironneco-    pas  de  maintenir  la  vérité  ,  mais  de  la  ruiner 

gnoiflc  point  de  Dieu.  Si  dôc  nous  Ibmtnes  en  s'il  peut .  &  cependant  d'opprimer  l'Eglife  de 
angoilfe  pour  cela,  il  nous  faiit,rcuenir  à'  ccft     Dieujd'aboliri'alliançede  faliit,  &  toutes  les 

exéplc  que  fainft  Paul  nourpropole,ç'cft  que  promeirc?  qui  eftoyent^lonnccs  aux  Pères  an 

dés  le  temps  de  Moyfe  il  en  eft,  4i{rfî  aduenu,  cicns.Vpiladonç  Pharao  qui  demande  .\  don- 

qufiles  PropheiesoiitexpefiinétCîle  lémbla-  ner couleur, à  fes  tromperies,  t«llcnient  qu'on 

blell  faurdono,^  i»»w»s,kî*fsions  la  tefte  pour  lie  fçaitdeg.uelcofté  fe  tpurnçr  quâd  oi)..^ojt 

eftredeleur  ranig^rpuis  que  Dieu  veut  que  Ja  Je$  cnc.ha(>ttiirs  qui  contretont  les  lig.ii-£s^ 

côditioadefonÉglifefoit  telle,  Vray  eft  que  miracles ,' vSj;  fcinble  qualiquecr  foit  tc.utp.»- 

ccsdeux  enchanteurs  dQiBtpaïieiâ|nft  Paul^  teil,  Orilcit  vray  que  Satan  ha  beaucoup 


s  VR  1  A    II.    A   TIMOTH. 


47Î 


4en»oyens  ,  &  qu'il  prend  diuerfes  mafqucs:  que  cela  ait  el\é  inuentc  Ctfii  raifon  ni  propos: 

mais  tant  y  a  que  touiiours  il  tafchera  de  faire  mais  ils  nous  amènent  à  la  mort  &  pafiion  de 

vn  tel  raeflinge,  qu'on  ne  puifTe  difcerner  en-  noftre  Seigneur  lefus,  pour  dire  que  la  Ccne 

tre  la  vérité  de  P.ieu  &  les  menfonges  qu'il  el\  le  vray  memori»!  qui  cft  pour  nourrir  no- 

introduit .  Et  c'eft  vne  doûrine  qui  eft  bien  à  ftre  foy  en  l'efpcrance  de  falut,  come  nous  e» 

noter.  Car  fi  nous  ne  cognoiflbns  fes  rufes,  cô  auons  le  tefmoignage  par  le  Fils  de  Dieu  mef 


ment  nous  en  pourrons-nous  garder?  Et  voila 
où  fainû  Paul  nous  ramené,  quand  il  veut  que 
nous  pélîons  à  nous  de  près:  Mes  amis(dit-il) 
nous  fçauons  les  fineflcs  &cautelles  de  nolhe 
ennemi.&ainfi  quand  nous  verrons  que  Icsfe- 
dudVeurs  prendront  couucrture  du  nom  de 
Dieu.quand ils  auront  des  façon?  pour  dcigui 
fer  leurs  propos,  tellement  qu'il  y  aura  quel- 
que couleur.ne  foyons  point  trop  cftonnez  de 
cela.  Et  pourquoy  ?  C'eft  la  rufe  ancienne  de 
Satan.  En  premier  lieu,  d'autant  que  le  diable 
cognoift  qu'il  ne  nous  peut  pas  aliéner  pleiue- 


me.La  Cenedonc  viendra  en  auant,&  dira-on 
que  la  Mefle  en  a  efté  tirée,  que  c'ell  de  ccfte 
origine  qu'elle  eft  venue  ,  &alleguerâ-on  de: 
belles  couleurs.  Voila  côme  le  diable  ce  relie- 
ra de  îe  couurir  Tous  quelque  goult  du  raaieau 
de  Dieu:  mais  c'eft  autant  comme  s'il  eu  def- 
chirpitrn  pan;&au  relte.cji  ne  verra  quînfe- 
âion  &  ordure,  que  nous  ferons  tout  esbahis 
que  le  diable  nous  aura  trompez  de  prime  fa- 
ce.que  nous  n'aurons  point  apperceu  (â  mali- 
ce.Si  nous  examinons  plus  auant.nous  trouue- 
rons  que  tout  ce  qu'ils  font  fous  le  ntre  du 


ment  de  toute  religion  ,  il  ne  viendra  pas  du    nom  deDieu.n'a  riendecon.munauec  ceque 


premier  coup  dire  qu'il  n'y  a  nul  Dieu,  que  ce 
eft  toute  mocquerie  que  de  le  feiuir  :mais  en 
prenant  ce  mot  de  Religion,  il  en  fera  vn  bon 
clier.&  cependant  ce  fera  vn  glaiue  mortel  cô 
tre  tous  ceux  qui  ne  font  point  munis  &  aimez, 
comme  il  appartient .  Et  voila  coni:ne  de  tout 
téps  fous  ce  nom  &ce  faux  titre  de  Religion, 
beaucoup  de  gens  ont  efté  abutei .  Il  cft  vray 
(comme  nous  auôs  traitté  ce  matin)  que  ceux 
qui  cerchent  Dieu  en  pureté  de  cœur,  lamais 
ne  feront  feduits.Car  Dieu  les  preteiucr.ipar 
la  conduite  de  fon  £fprit:combien  que  le  dia- 
ble vfe  de  beaucoup  de  tables  ,  il  ne  gagncia 
rien  contr'eux  :  car  c'eft  fa  prattique  urdin.ii- 
re,  c'eft afçauoir  que  l'ous  ic  lure  de  religion 
il  feduira  les  ignorans  s'il  peut.  Et  au  reftc,  li 
toft  qu'on  tafchera  dedreffer  le  fcruice  de 
Dieu,  voila  Satan  qui  ne  ceflcrad'enuelopper 
des  corruptions  parmi, tellement  que  le  bon 


il  a  ordonné  ,  combien  qu'ils  fe  vantent  que 
rien  n'eft  fait  par  eux  qu'à  rexeraple  &  de  le- 
fus Chrift,  &des  Apoltres.  Comme  voila  leur 
eau  bénite,  qui  eft  comme  vn  renoncement  du 
Baptefme:toutes  fois  ils  la  fçiuront  biendcf- 
guifer,  endifant,  Ho  .l'eau  bénite  n'eft  point 
pour  abolir  le  Bapteimc  auquel  nous  auons  la 
rc:ndsion  de  nos  pechez:mais  pource  que  no' 
ne  pcnfons  point  à  noitrc  Eaptcftne  comme  il 
faut  ,  Se  que  lî  nous  auons  failli,  nous  ne  pou- 
uons  pas  nous  ccrci£er  que  Dieu  nous  pardon 
ne,  il  eft  bon  de  nous  retraifchir  la  mémoire, 
&  que  nous  ayon- quelque  tefmaigiiage  fé- 
cond,&  côme  lubalterneitouliours  IcJBaptef- 
me  demeurera  en  fon  entier  &  en  fa  vertu, 
mais  l'eau  bénite  fera  commt  vn  accelToire.a- 
fiiique  nous  foyons  tant  mieux  certifiez  que 
nos  péchez  nous  font  pardonnez.  Voila  l'eau 
bénite  qui  abolit  le  Baptcfiiie,  &  toutesfois  le 


grain  ne  demeurera  iamais  pur  li  on  le  veut    diable  s'insinuera  tellement  qu'on  penfera  que 
croire. D'autant  plus  donc  deuons-nous  eftre    ce  foit  vne  chofe  conforme  à  l'inftitutiondc- 


attentifs  à  faire  quela  doûrine  de  Dieu  de- 
meure en  fa  pureté, &:  que  celle  des  faux-pro- 
phetes  Si  trompeurs  foit  reiettee.que  nous  ne 
leur  donnions  nul  accès, mais  que  nous  les  re- 
poufsions  viuement  ,  &  que  nous  demeurions 
touiîours  enclos  au  parc  que  Dieu  nous  a  fait 
par  fi  parole.  Caf  lî  nous  efcoutons  celuy  qui 
nous  a  prins  en  fa  garde.iamajs  nous  ne  pour- 
rons faillir  :  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ne 


Dieu. l'allègue  ces  chofes  pour  les  plus  fami- 
1  ères  :  mais  qu'on  face  vndifcoucs  de  toutes 
les  abominatiôs  de  la  Papauté, &  de  toutes  les 
corruptiôs  que  Satan  a  introduites,  &  on  trou 
liera  qu'il  a  eu  touiîours  cefte  rufe,  ic  fe  méf- 
ier tellement,  &  fe  fourrer  parmi  l'ordic  e  ue 
Dieuauoit  eftabli  en  fa  Parok-, qu'on  trouue-: 
ra  que  tout  s'accorde  tresbién.Mais  c'eft  autât 
côme  des  enchanteurs  de  Pharao,ccux-la  onç 


fouffrira  point  que  iamais  nous  foyons  efgaj-'    bien  fait  les  lîgnes  iemblabics  que  Moyfe  & 
rez,  combien  que  S.itan  nous  folicite  ,  &  qu'il    Aaron,mais  on  aveu  qu'ils  batailloyentcon-. 


nous  flagorne  aux  aureiUes.Mais  tant  y  a  qu'il 
nous  faut  eftre  vigilans  :  &  ne  pcnlons  point 
que  le  diable  dorme.  Se  que  Dieu  ne  luy  per- 
mette d'exercer  noftre  foy  ,  comme  il  en  eft 
aduenude  tout  temps:&fur  tout  notons  cela, 
qu'il  y  aura  vne  conformité  pour  nous  ef- 
blouir  les  yeux  entre  les  chofes  que  Dieu  au- 
ra ordonnées,  Si  ce  que  Satan  aura  entielacé. 
Comme  quoy  î  Q_ii_and  auiourd'huy  les  Papi- 
ites  voudront  approuuer  cefte  abomination 
diabolique  de  leur  Mefle, ils  ne  diront  pas  que 
.elle  ait  efté  forgée  à  l'appe  cit  des  hommes,oii 


tre  Dieu  nianifeftemét.que  leur  fin  cftoit  mau 
dite  &mal-heurcufe, qu'ils  ont  eu  la  vogue  iuf 
quesàceque  Dieu  euft  exercé  fon  peuple  ,& 
qu'il  euft  ratifié  que  c'eftoit  de  fa  main  &  de 
fonbras  robufte  qu'il  faifoit  cefte  redemptiô;. 
alors  il  a  rendu  confus  ceux  qui  auoyent  pour 
vn  temps  efté  ainfî  malins  à  l'oppoiitede 
Moyfe  &■  d'Aaron.Ainii  donc, que  nous  apprè 
nions  de  bien  examiner  les  chofes:&  quand  le 
diablç  viendra  ainlî  uiefler  fes  zizan,es  &:  cor- 
luptics  parmi  la  pure  vérité  de  Dieu, que  nous 
prions  celuy  qiùa  i'Efprit  de  prudcce,de  nous 

Ll.iii. 


4î4 


SERMON     XXI. 


gouuerner  tcllemét  que  nous  ne  foyons  point 
feduits.Et  au  refte.que  nousvcniôsàcefte  tou 
che  de  la  parole  de  Dieu,  qui  ne  permenra 
point  que  nous  faillions  .  Voila  donc  ce  que 
nous  auonî  à  retenir  de  ce  paflàgc, quand  il  tft 
ici  parlé  du  combat  qu'a  eu  Moyfe  cotre  lan- 
nes  &  lambres.  Or  i'ay  dclia  touché  ,  &nous 
faut  bien  retenir.quâd  faind  Paul  allègue  Te- 
lemple  de  Moyfe, que  c'eft  afin  que  nous  fqi- 
chions  que  les  Prophètes  onr  fuyui  vn  mefme 


lement  que  noirs' considérions  ce  qui  eft  ad- 
uenu  pour  lort,  mais  il  dit,  quand  nous  expé- 
rimenterons lefemblable,  que  nous  ncdefàu- 
drons  point  quand  nous  aurons  celte  fermé- 
té  en  nous  de  toufiours  feruir  à  Dicu.&  quand 
nous  verrons  tout  le  monde  esbranlé  ,  qu'il 
fembleramefmes  qu'il  y  ait  des  orages  &  tour 
billons  lî  grans  que  nous  deuions  eitre  effa- 
rouchez, fi  nous  tenons  bon,  &  que  nous  de- 
meurions en  la  doûrine  que  nous  cognoiflbns 


train,&qu'ilafalu  qu'ils  fuflent  en  combat  af  eftrede  Dieu, après  les  ténèbres  la  clarté  vien 

fiduel .  Puis  qu'ainfi  eft  donc  ,  eftimons-nous  dra  .  11  eft  vray  que  ce  ne  fera  pas  fi  toft  que, 

heureux  quâdDieu  nous  mettra  d'vn  tel  rang,  nous  defirerions  :  mais  remettons  le  tout  À 

Et  fi  auiourd'huy  nous  auons  à  refifter  à  ceux  Dieu.  Cependant  noftre  office  eft  de  nous  te- 

qui  falfifient  la  venté  de  Dieu,  &  la  conucrtif  nir  quois ,  &  en  patience ,  &  ne  point  fléchir 

fent  en  menfonge  ,  prions  celuy  qui  a  vertu  &  quoy  qu'il  nous  aduiene,  mais  que  nous  puif- 


conftance  en  foy.de  nous  maintenir, &  batail- 
lons fous  fon  enfeigne,  comme  a  fait  Moyfe, 
&  nous  ne  ferons  point  confus  en  la  fin.  Et  no 
tons  bien  que  celle  tentations  eftégriefieà 
Moyfe,  quand  lannes  Se  lambres  ont  eu  la  ver 
tu  de  faire  miracles  :  car  il  fembloit  que  Dieu 
fuft  contraire  à  foy,  ou  bien  que  le  diable  fuft 
quafi  en  puiiTance  égale  .  Voila  Dieu  qui  en- 
uoye  vn  figne  fur  Egypte, de  couertir  les  eaux 
en  fang,il  couertit  la  clarté  en  ténèbres,  il  fait 
venir  ia  vcrmme  pour  gafter  les  chaps,&  tout 
le  pays.  Les  chofts  femblables  fe  font  par  les 
magiciens  &  enchanteurs  de  Pharao.  Si  Dieu' 
befongne  des  deux  coftez,  ne  femble-il  point 
qu'il  fe  contredife.A:  qu'il  combate  quafi  con- 
tre fov-mefine?Ou  fi  c'eft  le  diable  qui  befon 
gne  ainfi  parla  main  des  enchanteurs, ne  dira 
on  pas  que  Dieu  eft  là  comme  en  difficulté  de 
furnionter  Satan  ?  Voila  donc  vne  tentation 
horrible, non  feulement  pour  lefisiple  popu- 
laire,mais  pour  Moyfe  &  Aaron,  tcllemét  que 
c'eftoit  pour  les  accabler,  &  leur  faire  perdre 
courage,  &  les  taire  desfier  de  leur  vocation. 
Et  ainfi,  quand  auiourd'nuy  nous  verrons  que 
les  melchâns  auront  tel  artifice,  qu'il  fenible- 
raque  Dieukur  dônedequoy  pour  oppugner 
la  vérité,  làoii  au  parauant  ils  eftoyenc  gens 
indoûes,  gens  fans  nulle  dextérité  ,  qu'on  les- 
verra  habiles  à  mal-faire,que  nous  perfiftions 
neantmoins,  fçachans  que  Moyfe  a  vaincu  vn 
tel  fcandale  ,  afin  que  nous  n'en  l'oyont  point 
eftonnez  auiourd'huy. Voila  pour  vn  item.  Et 
quand  nous  verrons  que  le  monde  pri fera  plus 
les  menlonges  &  tromperies, que  ceux  qui  ba- 
taillent contre  Dieu  &■  fa  vérité  auront  la  vo- 
gue ,  qu'on  leur  portera  faucur  ,  qu'ils  feront 
les  bien  venus ,  Si  que  nous  ne  pourrons  auoir 
ni  équité  m  raifon  pour  maintenir  noftre  eau 
fc.qucnouv  trouucrons  des  aureilles  fourdes 
quand  il  lera  qucftion  de  dcmaixler  aide  pour 
rcpoulTer  le  mal  :  quand,  di-ie,  nous  verrons 
cela,  que  nous  pourfuyiuons  neantmoins  no- 
ftre cours,  f'^achans  qu'il  a  falu  que  Moyie 
fuft  en  ces  pcrplexitez-la  pour  vn  temps: 
mais  attendons  l'iiTue  telle  que  Dieu  l'a  touf 
iours  donnée  aux  fions  ,  &  comme  elle  eft  ici 
promife  par  faini^  Paul .  Car  il  ne  dit  pas  fcu- 


fions  dcfpiter  le  diable  &tousfes  fiippofts, 
pour  toufiours  fuyure  la  bône  querele.  Qu^d 
nous  en  ferons  ainfi,  nous  aurons  la  viftoire, 
comme  a  eu  Moyfe  contre  lannes  &  lambres. 
Or  cela  n'cft  point  aducnu  pour  vn  coup,  mail 
Dieu  a  teftifié  alors  comme  fa  vérité  fera  touf 
iours  viûorieufe,  &  que  ceux  qui  lamaintie- 
nent,  pourrôt  faireleurs  triomphes:conibien 
que  pour  vn  temps  il  femblé  que  les  ennemis 
ayét  tout  gagné, fi  nous  fommes  fafchez  pour 
cela,  reuenons  à  ceft  exemple  qui  nous  eft  ici 
propofé, c'eft  de  nous  tenir  à  la  promené,  que 
l'ifllie  de  nos  combats  fera  toufiours  heureur 
fe,  moyennant  que  nous  ne  défaillions  point.' 
Au  rcfte,  fainft  Paul  dit ,  Que  ce  font  gens  cor- 
rr'tn^us  d^enteiidemtnt ,  C  reprouutx.  quant  à  lu 
foy.  Ce  n'cft  point  fans  eau  le  q  fainft  Paul  dit 
que  leurs  entendemens  font  corrompus  .  Car 
que  dira-on,  qu'vn  homme  mortel  s'ofe  ainfi 
enuenimer  contre  Dieu,  qu'il  ofe  faire  la  guer 
re  à  la  veritérC'eft  autant  comme  fi  quelqu'vn 
par  furie  vouloir  combatte  le  ciel .  Car  nous' 
pourries  pluftoftariàcher  le  foleil  de  fon  lieu, 
q  nous  ne  pourrions  abolir  la  vérité  de  Dieu: 
il  fnit  que  tout  le  monde  paflc ,  &•  qu'elle  foit 
permanente  .  Comment  donc  fe  peut-il  faire 
que  des  créatures  vienent  iufques  à  vne  telle 
audace, &  fi  enragée?  Or  c'eft(dit  fainft  Paul) 
vn  aucuglemcnt  qui  procède  de  corruption, 
qu'il  faut  que  telles  gens  foyent  infcnftz.  Par 
cela  il  nous  déclare  en  premier  lieu,  que  ceux 
qui  font  ainfi  la  guerre  à  Dieu, font  dcfia  aucu 
glez  par  Satan, qu'il  leur  a  ofté  toute  raifort  & 
toute  modeftie  ,  qu'ils  font  comme  torcenéz. 
Voila  pour  vn  itcni.Et  par  cclail  nous  ofte  le 
fcandale  que  nous  pourrions  conceuoir  en 
nous  enquerant  comment  il  eft  pofsible  que 
les  hommes  vueillent  ainfi  f.-.ire  la  guerre  à 
Dieu.  Et  notamment  il  vfe  auf.r  de  ce  mot,a- 
fin  que  nous  ayons  en  tant  plus  grande  deté- 
ftation  les  ennemis  de  la  vérité  ,  ceux'  qui' taf- 
chent  à  la  peruertir  en  façon  que  ce  foit ,  que 
nous  les  fuvons  comme  peftes.Car  les  cmpoi- 
fonneurs  ne  pcuucnt  faire  tant  de  maux  cômc 
cesinelchans  qui  nous  apportcrlcurv  ordures 
qui  font  pour  oftcr  la  vie  ,  feulement  du  flair 
ou  de  l'odeur.  Si  de  loin  vne  poifon  a  fi  grSde 


SVR    LA     II.     A    TIMOTH. 


Ml 


vigueur  qu'elle  puifle  meurtrir  les  hommes, il 
eft  certain  que  les  menlbnges  de  Satan  ont 
encorcs  plus  de  vertu:  car  ils  corrompent  en 
forte  qu'on  eftesbahi  que  tout  eft  incontmét 
corrompu.Sainft  Paul  donc  nous  a  ici  voulu 
aduifer  que  nous  fuyons ,  voire  auec  exécra- 
tion, ceui  qui  nous  brouillent  ainii  ,  &  qui  ne 
demandent  qu'à  femer  leurs  faufles  zizanies 
parmi  la  bonne  leraence  &  pure  de  la  parole 
île  Diea.llàitHiùi.qt' ils /«ntreproHM ex. qu,int 
À  U  foy.  Ce  mot  dont  il  vicie  peut  prendre 
en  deux  fortes  :  c'eltafçauoir  gens  fans  ingé- 
nient ,  gens  deftituez  de  difcrction  ,  ou  bien 
gens  reprouuez.c'eft  àdire  vileins  &detefta- 
bles  quant  à  la  foy  .Or  tant  y  a  que  ie  ne  dou- 
te point  que  fainû  Paul  n'ait  voulu  dire  que 
ils  font  apoftats, qu'Us  font  du  toutabbaibr- 
dis  ,  Si.  combien  que  pour  vn  temps  ils  ayent 
eu  quelque  apparence  de  foy, que  le^  voila  du 
tout  reprouuez  ,  les  voila  comme  membres 
pourris  &  retranchez  du  Royaume  de  Dieu, 
&de  fon  Eglil'c.  C'cftdonc  pour  plus  ample 
approbation  de  ce  que  nous  auons  dit.c'eft  a- 
fçaiioir  que  nous  ne  pouuons  auoir  trop  en 
haine  les  ennemis  de  la  vérité  de  Dieu,  voire 
pour  les  fuir,&  nous  en  donner  garde, (cachas 
que  quand  nous  aurons  approché  d'eux,incon 
ttneiu  nous  ferons  infeclcz  deleur  poifonS: 
ordure.Or  cependant  adiiifons  aiif.i  de  noftre 
part  d'appliquer  celle  dodrine  à  nous,  pour 
vn  aduertilTement  qui  nous  fera  bien  vtile. 
Carl'mtegrité  dcaosamcs&de  nos  cfprits 
gill  en  ce  ,  que  nous  ayons  la  pure  parole  de 
Dieu.    Voila  pourquoy  aufn  lAinû  Pauldit 
que  c'eft  la  droite  chalieté,  par  laquelle  nous 
fommes  vnis  au  Fils  de  Dieu, comme  vne  fem- 
me eft  à  fon  mari.Voila(Ji-i(;)lc  vray  lien  du 
mariage  fpirituelque  Icfu»^  Chrilla  contraité 
auec  nou'i ,  que  nous  adhérions  purement  à  la 
parole  de  Dieu  &  à  la  doârine  de  l'Euangilc: 
voila  l'mtegrité  de  nos  âmes.  Car  (îtoftque 
nous  ouurons  vn  petit  pertuis  à  Satan  ,  qu'il 
nous  vient  diftiller  ,  voire  iufqucs  à  vne  feuk 
goutte  de  faulTe  doûrine  ,nou'i  fomuies  cor- 
rompus,voila  vne  maladie  fecrctte,  mai  s  d'au- 
tant cft-ellepire.  Nous  fommes  comme  vne 
femme  qui  aura  prefté  l'aureille  à  vn  ruffîen, 
ou  à  vn  macquereau  pour  élire  feduite  :  elle 
monftre  qu'elle  n'eft  point  trop  pudique  ,  & 
qu'elle  elt  prefte  de  s'ab.'.ndpnner.  Ainli  donc 
en  eft-ilde  nous,  fi  Dieu  ne  nous  fait  la  grâce 
qu'auiourd'huy  nous  foyons  entiers  en  fa  pu- 
re do£lnne,&  qu'il  nous  y  tiene  conftamment 
pour  repoufler  tout  ce  qui  n'accorde  point  à 
l'Euangilc  .auquel  nous  auons  efté  inftitucz 
&  enfeignez.  Et  mefmes  quand  il  eft  parlé  de 
ceux  qui  font  reprouuez  quant  à  la  foy, adul- 
ions bien  de  ne  trcbufcher  point  en  telle  rui- 
ne &:  confufion.Etcomment  fera-ce?Chemi- 
nons  enbonne  confcience:  comme  par  ci  de- 
uat  nous  auons  ouy  ce  quedifoit  fanift  Paul, 
que  ceux  qui  ont  laifle  la  bonne  confcience, 
ont  efté  comme  enfondrc-z,ainfi  qu'vne  naui- 


re  dedans  la  mer.  Si  donc  nous  abufons  de  la 
parole  de  Dieu.ou  que  nous  n'en  tenions  con 
te  ,  il  el^  certain  qu'vn  tel  thrcfor  nous  fera 
raui,&  faudra  que  Dieu  nous  reiette,  voire  8c 
•qu'il  nons  enfondre  comme  au  profond  d'rne 
mer.  Et  pourtant  apprenons  de  cheminer  en 
crainte, en  priant  Dieu  qu'il  nous  con  férue  en 
la  foy  que  nous  auons  receue  de  fon  Eiiangi- 
le.Et  fi  nous  voyons  des  cheutcs  en  beaucoup 
de  gens, que  ce  nous  foyent  autant  de  miroirs, 
que  nous  en  facions  noftic  profit ,  que  nous  ^ 
l'çachions  que  fi  Dieu  punit  ainfi  leur  hypo- 
crifie.ilne  faut  pas  que  nous  foyons  fembla-^ 
blés  à  eux.  Quand  donc  nous  en  ferons  ainfi, 
toutes  les  punitions  que  Dieu  enuoyera  fia 
ceux  qui  en  font  dignes,  nous  feruiront  pour 
nous  confermer  en  fa  crainte. Il  y  .1  d'auanta 
ge  quant  à  ce  poinft  qui  eft  pour  nous  aileu- 
rer  de  l'iflue  qui  fera  bonne  &  défirable  pour 
nous  ,  il  dit  que  les  mefchaits  ne  s^au^iticeront 
plus ,  d'autant  que  leur  folie  Jer«  cognue  à  tout 
comme  Je  ceux-ci.ll  fait  mention  des  deux  en- 
chanteurs de  Phatao,Iannes&  lambres.Ordc 
prime  face  on  penferoit  que  ceci  fuft  contrai 
re  à  ce  que  faincl  Paul  auoit  défia  déclaré  par 
ci  deuant,&  ce  qu'il  adiouftera  dercchef:c'ell 
alcauoirque  les  mefchans  s'auanceront  de 
pluscnplusiildit  qu'ils  ne  s'auanceront  point 
plus  outre.  Il  y  a  auf^i  l'expérience  qui  hous 
monftre  que  c'eft  lans  fin  &  fans  melure  que 
les  ennemis  de  la  vérité  s'ingerent  toufiours, 
i?v'  qu'ils  cueillent  force,  &  qu'il  femble  qu'ilt 
doyuenttout  gagner.  Q^e  dirons-nous  à  ce- 
la?Or  quand  faiuil  Paul  dit  que  tous  ceux  qui 
tafcheront  de  faUifier  la  vérité  de  Dieu ,  ne 
s'auanccrôt  plus, il  entend, combien  que  Dieu 
permette  que  l'Eglife  ait  toufiours  des  com- 
bats nouueaux,  fi  eft-ce  que  les  fidèles  auront 
toufiours  lavi(floire,  que  Dieu  leur  fera  luire 
fa  ciarté,&  mefmes  ceux  qui  le  feruiront  pure 
ment  auront  de  quoy  s'efiouir,  voyans  leur  la 
beur  n'eftre  point  inutile. Comme  quoyfVoi- 
la  des  troubles  qui  s'eleuent  par  l'aftuce  de  Si 
tan,&  ce  font  gens  orgueilleux  qui  le  veulent 
faire  valoir  en  peruertillânt  toutbié.la  vraye 
doârine  fera  combatue  ,  &  tafchera-on  de  la 
dénigrer  par  beaucoup  de  calomnies. Les  fer- 
uitcurs  de  Dieu  cependant  trauaillcront  de 
tout  leur  pouuoir  :  &  tant  y  a  qu'on  mefdira 
d'eux, qu'il  faudra  qu'ils  foyent  delchircz  par 
pièces:  comme  nous  voyons  que  beaucoup  fc 
desbauchent  ,  que  félon  que  le  monde  eft  le-  ,.i\'i 
ger  &  volage,  beaucoup  preftét  l'aureille  aux 
feduûeursqui  font  pour  introduire  lesfauflès 
doûrines.pourperuertir  la  foy. Les  vrais  fer- 
uiteurs  de  Dieu  ont  à  gcmir  fur  cela  ,  voyant 
que  le  mal  croiftde  plus  en  plus,tellemét  qu'il 
femble  que  tout  l'édifice  doyue  eftre  ruiné, 
&  qu'il  n'y  ait  plus  rien  de  refidu  de  ce  qui 
auoit  efté  édifié, &  quieftoit  défia aduancé, en 
forte  que  cela  eft  pour  faire  perdre  le  coura- 
ge à  ceux  qui  s'eftoyent  employez  à  l'ocuure. 
Or  toutcsfbis  fi  faut-il  que  nous  cfperions 

Ll.iiii. 


4s^  SERMON     XXI. 

que  Dieu  befongnera  en  telle  forte, que  touf-  à  cefte  promefTe  ,  que  Dieu  couppera  les  cor- 
iours  nous  verrons  ceci  accompli ,  c'eft  alça-  deaux  des  melchans ,  qu'il  renuerfera  toutes'" 
noir  que  ces  brouillons  n'auront  plus  le  moyé  leurs  entreprini'es ,  &  Fera  que  ceux  qui  font 
de  corrompre  &peruertir  la  bonne  doûrine  haut  montezitrebulchent  en  plus  grande  rui-. 
comme  ils  ont  eu. Car  on  verra  que  leur  vile-  ne,&  que  ceux  qui  font  reputezgrisdofleurs, 
nie  fera  defcouuerte.  Se  quM  n'y  a  eu  qu'or-  foyent  en  opprobre,qu'on  cognoifle  leur  ma- 
gueil  &  malice  qui  lésait  pouffez  à  cela.  Et  lice,&  qu'on  les  detefte  ,&  qu'on  voye  que  ce 
bien,  d'aucuns  Ce  retienent  :  les  autres  mon-  font  empoifonneurs  des  âmes.  EfperonsdonC 
firent  bien  qu'ils  font  dignes  d'eftre  priuez  de  cefte  ifTue-la ,  &  ne  doutons  point  que  quand 
tout  fens  &  raifon:  car  aufsi  ce  font  des  chiés  nous  aurons  conftamment  ferui  à  Dieu  ,  qu'il 
&  des  pourceaux  qui  defpitenc  Dieu  ôc  toute  monftrera  que  la  victoire  nous  eft  certaine  8c 
religion:  &  pourtant  il'faut  bien  que  leur  infallible .  Et  aufsi  nous  auons  à  noter  ce  qu'il 
ignominie  fou  delcôuuerte.  Cepédant  fi  faut  adioufte,  Qjte  leur  folie  fera  defcouuerte  comme 
il  que  les  feruiteurs  de    Dieu   pourfuyuent  (/fff».v-/d. 11  ne  dit  pas  feulement  que  leur  ma 
toufiours  :  encores  qu'^  femble  que  tout  foit  lice  fera  cognue.mais  leur  folie  defcouuerte. 
perdu  &  defefperé,  li  faut-il  qu'ils  regardent  Et  pourquoyfCar  beaHcoup  fe  laiffent  fedui- 
que  Dieu  pourra  d'vne  façon  miraculeufe  gar  re  à  leur  efcient,&ne  veulent  point  iuger:car 
aer  quelque  refîdu  ,  qu'Us  cognoiftront  que  ils  porteront  faueur  à  vne  doftrine  pcruerfe", 
leur  peine  n'aura  point  efté  inutile.  C'eft: dôc  pource  qu'ils  le  veulét  ainfi.Or  en  la  fin  Dita 
ce  que  faintt  Paul  déclare  ici ,  e'eft  afçauoir  les  contraindra  de  vcoir, qu'on  cognoiflra  que 
que  les  mefchans  pour  vn  tempS-auroitt  telle  il  n'y  a  tu'que  menfongeen  euï,qu'il  n'y  aeii 
vogue, qu'il  lemblera  qu'ik  dôYuent  tout  abo  nul  fondement,  &  feront  cOnfus  en  leur  hon- 
lir,  qu'ils  doyuent  exterminer  la  mémoire  de  te.d'atîoir  adhéré  à  vne  querelle  fi  mefchante. 
Dieu  en  ce  monde, que  fa  parole  doit  eflre  de  Ainfi  donc, combien  que  la  vérité  de  Dieu  foit 
chaffee  pleinement  :  fi  faut-il  que  durant  ces  pour  vn  temps  iugee  folie, qu'elle  foit  en  mcf- 
troubles-la,&  telles  extremitez.nous  tenions  pris, que  les  orgueilleux  de  ce  monde  n'en  tie 
bon,&  que  nous  attendions  patiemment  ce  née  cote, penlans  qu'il  n'y  a  qu'vne  fimplicité 
qui  nous  eft  ici  promis, c'eft  afçauoir  que  no-  louide,ou  bien  qu'ils  ne  veulent  point  fcran- 
ftre  Seigneur  fera  reuenir  le  iour ,  quand  il  y  ger  l.i ,  pourcè  que  les  chofes  leur  font  trop 
aura  eu  des  ténèbres  fi  obfcures  &  efpeffes  dures, qu'Us  ne  les  peuuent  pas  digérer:  cotn- 
qu'on  n'y  voyoït  goutte  ,  que  derechef  il  ra-  bien  donc  que  la  vérité  de  Dieu  foit  fi  maliu- 
menera  fa  venté  au  deirus,&  qu'il  luy  donne-  gee  par  le  monde,  fi  eft -ce  qu'en  lafin  on  cu- 
ratelle viéloire  que  nous  aurons  de  quoy  te-  gnoiftra  que  fous  cefte  ombre  de  folie  qu'oa 
nir  bon  :  noiis  verrons  qu'il  ha  le  foin  de  fon  a  cuidé,il  y  a  eu  vne  doftrine  profonde  &  ex- 
Eglife  ,  &  qu'il  fçait  bien  remédier  aux  maux  cellente,  voire  &  telle  que  les  Anges  dePara- 
qui  nous  femblent  incurables.  Voiladoncce  dis  l'adorent.  Etcombienque  les  peruers  & 
que  iainft  Paul  a  entendu  en  ce  palTàge  ,  en  ennemis  de  Dieu  s'efgayent  en  leurs  menfon- 
difant  que  les  rriefchansne  pourront  pas  s'a-  ges,&qu'ilss"eftiment  bien  fages,fi  eft-ce  que 
uancer  toufiours. Et  c'eft  ce  quieit  dit  au  Pfe-  toute  leur  fagelTe- demeurera  confufe  ,  &que 
aume(combié  que  ce  foit  .A  vn  propos  diuers:  nollre  Seigneur  monftrera  qu'il  n'y  a  eu  que 
car  làileft  parlédesperfecutions)quefi  Dieu  pure  vanité.  Auiourd'huy  quand  on  parlera 
donne  la  vogue  aux  mefchans ,  ils  exerceront  des  abus  de  l'Eglife  papale  ,  il  eft  vray  qu'on 
toute  cruauté  fur  les  bons ,  &  telle  tyrannie,  Verra  bien  que  ce  font  chofes  puériles,  &  tant 
qu'ils  feront  contraints  de  fe  cacher.  Voila  fottes  que  rien  plus,  les  petisenfans  s'en  moc 
des  canailles  qui  auront  la  vogue  pour  vn  quent:  mais  il  y  a  quarante  ans  que  cela  eftoit 
temps ,  la  iuftice  fera  corrompue ,  il  n'y  aura  eftimé  vne  telle  fageffe,  qu'il  fcmbloit  que  ce 
nulle  raifon  ni  équité,  tout  feraexpoféen  tuft  vne  perfedliô  plus  qu'Angeliqueiperlônc 
proye,&le  plus  fort  l'emportera. Or  fi  vn  tel  n'euftofé  prendre  la  hardiefle  de  douter  s'il 
eftat  &  tant  confus  duroit  toufiours,il  eft  cer-  y  auoit  raifon  en  toutes  ces  fingeries  qui  fe 
tain  que  les  enfans  de  Dieu  mefmes  feroyent  font  là  ,  on  eftimoit  que  ce  fuffent  des  hauts 
esbranlez,  &  feroyent  folititez  de  fe  desbau-  my fteres  facrez  ,  qu'vn  chacun  fuft  contraint 
P/r. 1^.4  cher. Et  fo«i' cefte  c.aufe  il  eft  dit  au  Pfeaume,  d'adorer.  Carpuisque  les  grans  dofteursa- 
que  Dieu  coupperalescordeàux  des  mefchâs  uoyent  paflé  par  là,  il  n'eftoi't  pas  licite  de 
quand  ils  auront  trainé  la  charrue  fur  le  dos  rien  retrafter.  Voila  donc  comme  tes  fottifes 
de  fonEgl;fe,&:  qu'il  aura  fouftertquefes  en- 
fans  fuffenc  ainfî  moleftcz  fans  ailoir  fupport: 
il  viendra  (dit -il)  doupper  ces  cordeaux-la.Et 
pourquoy?Afin  que  les  bons  ii'eftendét  point 


de  la  Papauté  auoyent  vne  réputation  telle 
de  doftnne, qu'on  les  adoroit  connue  les  plus 
hauts  ft'crcts  du  ciel.  Or  maintenant  qu'eft- 
cb  qu.id  Us  ont  tfté  defcouucrts?' Auiourd'hiiy 


fcurs  mains  (dit-il)  pour  mal-faire'.  Et  poiir-  nous  ne  poutions  croire,  nous  femmes  qiiafi  à 
tant  quand  nous  fétor^s  fofcitez  de  porter  en  douter ,  fi  nous  auonseftéfi  enchantez  d'y  a- 
uic  au  mefchans ,  ou  bien  de  nous  lafcher  la  uoircreu.  Etd'autaht  plus  deiions-nousma- 
bride  pour  vrler  auec  les  loups  (comme  on  gnificr  la' grâce  de  noftré  Dieu  quand  il  nous 
dit  en  prouerbe  commun)que  nous  reuemoiis     en  a  retirez  ,  veu  que  nous  cftions  htbetez  en 

telle 


SVR    LA    II     A    TIMOTH 


■M7 


telle  forte.Ainfi  donc  ce  n'eA  point  ftns  caii- 
fe  que  fainft  Paul  met  ici ,  que  la  folie  de  tous 
ceux  quicombaroyent  contre  Dieu  a  eftcde- 
fcouuerte  à  tous, Or  quand  il  dit  à  tous, il  n'en 
tend  pas  en  gênerai  à  tout  le  monde,  mais  il 
veut  déclarer  à  grans  &  à  petis ,  comme  nous 
voyons  que  Dieu  a  tellement  illuminé  les  po- 
ures  idiots, qu'ils  peuuent  eftre  iiiges  des  plus 
grans  dofteurs  de  la  Papauté. Nous  ne  f  aifons 
point  ici  nos  triomphes,  mais  ils  font  con- 
traints de  veoir  ce  que  ie  di.que  s'il  y  a  vn  po 
ure  homme  mechanique  qui  foit  détenu  en 
prifon  pour  Ja  doftrine  de  l'Euangile  ,  qu'on 
Jyy  ameine  les  plus  grans  dofteurs  du  monde, 
il  eft  certain  qu'ils  feront  là  confus,  qu'ils  ne 
auront  que  leur  cruauté  pour  leur  rehigc.en- 
uoyansles  feruiteursde  Dieu  au  feu:mais  tat 
y  a  que  leur  vergongne  eftdefcouuerte.Quâd 
donc  nous  auons  vn  tel  tefinoignage  ,  &  vne 
telleapprobation,ne  ferons-nous  pas  trop  in 
grats  fi  nous  ne  conclues  qu'il  nous  faut  adhe 
reràcefte  vérité  certaine, laquelle  eftainlî  vi- 
ôorieufe  contre  tout  le  monde, contre  ces  fa- 
ces qui  cuident  prendre  la  lune  aux  dents(c5- 
ine  on  dit)  qu'on  voit  que  Dieu  les  rend  con- 
fus,&  cependant  qu'il  donne  bouche  &  fagef- 
fe  àfesenfans,  voire  &  aux  plus  rudes,  à  ceux 
qui  n'ont  m  literature,  ni  rien  qui  foit ,  qu'il 
leur  donne  ,  di-ie  ,  la  force  Se  la  fagefle  pour 
rembarrer  tous  leurs  ennemis  ?  Voyans  donc 
vne  telle  chofe,ne  deuons-nous  pas  tant  plus 
donner  louange  à  la  bonté  de  Dieu, pour  nous 
alTuiettir  à  favolontéfEt  cependant  que  nous 
foyons  munis  de  la  vérité  de  Dieu  en  telle  for 
»e,qae  quand  tout  le  mjnde  s'cleuera  i  ren- 
contre, que  nous  verrons  des  troubles ,  &  des 
fcandales  beaucoup, que  nous  ne  lai  fsions  pas 
d'y  perfifter.' £c  c'eit  vn  poinô  quenou;  auôs 
bien  à  noter.  Il  eft  vray  que  ceci  ne  fc  peut 
pas  déduire  du  tout  pour  maintenant ,  mais  fi 
nous  en  faut-il  toucher  vn  mot,c'eft  que  quâd 
nous  pourrions  eftre  esbranlez  en  tentation, 
il  nous  faut  eftre  fouftenus  de  la  vérité, qu'elle 
nous  férue  d'vn  bon  fondenié::  comme  fainft 
Paul  adioufte  que  Timothee  auoit  fuyui  fa 
patience,{à  doûrine,fafoy,fa  char!té,fesœu- 
ures,  fes  pcrfecutioas.  Il  faut  donc  que  nous 
apprenions  de  nous  conficrer  tellement  au 
feruice  de  nortre  Dieu, pour  e/lre  inftruits  en 
fon  efchoie.que  ce  pointl  nous  (oit  tout  refo- 


lu,  que  Dieu  tft  noflre  Maiftre  :  &  ^uand  on 
nous  apportera  quelque  doélrine  de  nouiicau, 
qu«  nous  tenions  bon.fçachans  que  nous  auôs 
efté  fidèlement  inftruits.  Et  voila  qui  ert  cau- 
fe  que  tant  peu  de  gens  fjauent  faire  leur 
profit  de  la  bonne  doôrine  :  quand  la  parole 
de  Dieu  leur  eft  prefchee,ce  leur  eft  tout  vn: 
c'eft  affez  s'ils  peuuent  dire ,  Nous  auons  les 
fermons, nous  auons  l'Euangile.  Mais  ils  font 
nouices,  &  il  y  en  a  beaucoup  entre  nous  qui 
font  de  ces  apprenâns ,  defquels  fainii  Paul 
parloit  ce  matin, qui  iamais  nevieneiitàlaco- 
gnoiflancede  verité,d'autant  qu'ils  font  touf 
iours  trop  empefchez  aux  négoces  de  ce  mon 
de  :  ou  bien  qu'il  leur  fcmbic  qu'ils  auront 
toufiours  le  moyen  de  recouurer  ce  qu'ilj 
ont  perdu:Et  bien  (diront-ils)  fi  ie  n'ay  ouy 
vn  fermon,  laifleray-ieà  eftreChrefticn  pour 
cela  ?  11  eft  vray  que  nous  ne  perdrons  point 
noftreChreftienté  pour  vn  fermon:mais  qu.îd 
nous  mefprifons  ainfi  la  parole  de  Dieu,  il  fe 
pourra  bié  aufsi  retirer  de  nous:&  quad  nous 
ferons  defgouftcz  petit  à  petit  de  fuyure  la 
parole  de  Dieu,  nous  ferons  tout  esbahis  que 
le  diable  nous  en  aura  eftongnez  de  fi  loin, que 
nous  n'aurons  plus  moyen  d'en  approcher. 
Ainfi  donc  aduifons  cependant  que  Dieu  ap- 
proche de  nous, cependant  qu'il  nous  prefente 
fa  doàtrine,d'y  eftre  tellement  fondez  &  con 
fermez,  que  de  plus  en  plus  nous  puifsions 
conftamment  barailler  contre  toutes  les  ca- 
lomnies,&  contre  tous  les  troubles  &  fcanda- 
les que  Satan  fufcitera  autc  tous  fes  fuppofts. 
OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  telle- 
ment fentir,  que  nous  venions  au  droit  remè- 
de pour  guérir  toutes  nos  maladies, c'eftafça- 
uoir  d'eftre  confermez  en  fa  parole,  &  d'y 
prendre  vn  tel  goirft,  qu'elle  nous  foit  vne 
vraye  nournciire.Et  ccpendant,que  nous  foy 
ons  purgez  de  toutes  les  corruptions  de  no- 
ftre chair, &  de  toutes  les  chofes  g  nous  pour- 
royent  deftourner  de  fuyure  le  chemin  qu'il 
nous  monftre  ,  tellement  que  nous  aduifions 
d'adhérer  toufiours  d'auantage  à  luy ,  iufques. 
à  ce  que  nous  foyons  paruenus  à  la  perfeârion 
où  il  nous  appelle. Que  non  feulcmét  il  nous 
face  cefte  grâce, mais  à  tous  peuples  &  natios 
de  la  terre,  &:c. 


QJ/'ATRIEME      SERMON     SVR     LE 

TROISIEME     CHAPITRE. 

lo  MazV  toy,tu  ds  affcz  appcrceu  ma  doSïrineJnjîitutio,  propos, 
foy, patience  ^quelles  chojcs  ni  ont  cJîéfaiSics  en  Antioche,  çy  home,  ^ 
en  LyFlrc: 

Quelles  perfècHtïons  (f  affliSlions  l'ay  endurées,  C'  àe  ton- 


II 


Mm.  i. 


4?8  S  E  R  M  O  N     X  X  I  I. 

tes  le  Seigneur  ma.  deliurê. 

1 1  Et  tou  f  ceux  dufsi  qui  veulent  \iurc fidelemct  en  le  fus  Chrifl, 
foHJf riront  perjècutiofi. 

1^  Mais  les  miuuctis  hommes  ^y  àcccueurs  profiteront  en  fis, 
ahufans  i(f  cjlxns  abufèz- 


rTcendii  la  fragilité  qui  e/l 
\:n  nous, quand  nous  auons  à 
jfouftcmr  de  grans  combats 
)&  dif"ficile5,il  elt  bien  requis 
ique  nous  foyons  armez  ,  Se 
q  de  longue  irjain  nou->  foy- 
ons- tellement  pourueiis,qiie 
les  chofcî  ne  nous  eftjnnent  poirtt  comme 
aduemus  foudainement.Et  voila  pourquoy  il 
feroit  plus  que  ncccflàire  qu'vn  chacun  (e  di- 
fpofaft  toute  fa  vie  ,  afin  que  nous  ne  tufîions 
point  ùirprs'  mais  fi  Dieu  nous  dône  quelque 
loilir.nous  demeurons  nonchalans,  &  ne  fça- 
uons  qne  c'eft  de  batailler,  &.  ne  voulos  point 
mefmes  qu'on  nous  fafche.ne  qu'on  nous  rom 
pe  les  aureilles  en  nous  exhortant  que  nouf 
penlîôsànoftrecas.Et  voila  qui  eft  caufe  que 
tant  de  gens  font  vaincus  par  des  tentations 
bien  petites. Et  pourtant  aduifons  de  profiter 
en  cefte  doftrine  qui  elt  ici  contenue.  Car 
fainftPaul  ayant  parlé  des  troubles  qui  de- 
uoycntaduenir  eu  l'Eglife, ayant  exhorté  Ti 
ihotheeàeftrc  confiant  pour  ne  point  fléchir, 
iladiouftc  que  defia  de  long  temps  il  deuoit 
eftre  préparé  à  tout  cela.pource  qu'il  auoit  e- 
fté  cnfeigné  en  bonne  efchole:  T»  ai  (dit-il) 
cegnu  frluémcnt  :  comme  celuy  qui  euft  fuyui 
pas  à  pas:  caraufsi  lemotdôt  vfe  fainâ  Paul, 
«mportecela  :  T»4j  (dit-il)  .i/Jf^  tognitcjitel 
train  i'ay  mené.  Or  il  met  la  doftnne  en  pre- 
mier lieu ,  mais  il  ne  fc  contente  point  de  ce- 
la,il  adioufte.Latonififtt*,/»  propos:  &  puis, L'A» 
man!té,foy,patitnee,dileSiion,ic  choies  fcmbla 
bles.Et  en  la  fin  il  dit,  qn'il  Va  cogn»  inin'nci- 
hlt  en  fet  perfecutions  ,  Itfquelles  il  l»y  a  falu 
fmftenir.  Nous  voyons  donc  Tintentionde  S. 
Paul,  c'cft  de  monftrer  à  Timothee  que  defia 
il  deuoit  eflre  du  tout  duit  &  aguerri(comme 
on  parle)  &  qu'il  ne  fe  deuoit  point  trouuer 
nouiceiquand  le  diable  fufcitera  des  troubles 
en  l'Eglife,  qu'il  ne  faut  point  pourtant  qu'il 
fe  fouruoye  ,  ne  qu'il  donne  aucun  ligne  qu'il 
fe  trouue  effarouché.  Pourquoyî  Car  (dit-il) 
tu  vois  comme  i'ay  cheminé  ,  tu  ne  l'as  point 
cognu  feulement  pour  vn  iour.inais  félon  que 
tu  m'as  peu  cogmirtrc,  tuas  eftéaflez infor- 
mé (dit-il)  de  tout  mon  tr.iin.  Or  ici  en  pre- 
nixrlieu  ,  nous  auons  à  noter  que  iainais  nul 
ce  fera  bondoâeurnj  propre,  qui  ne  puifle 
qiiant  5:  quant  propnfer  exemple  en  ù  per- 
fonne  àc  tout  ce  qu'il  dit. Car  lî  no'  prcfchôs 
de  bnuclic.Sf  que  iiollrc  vie  ne  rcfpôde  point, 
ilcftvray  que  l.i  vérité  de  Dieu  n'en  vaut  pat 
ni-siiis  pourtant,!.^' fou  authoritc  n'en  Arti:  pit 


eftre  amoindrie:mais  quoy  qu'il  en  fait,cnclt 
qu'en  nous  eft  nous  l'expofons  en  vitupère  Se 
en  opprobre.  Si  ie  prefchoyedcconftaucc,a£ 
qu'il  faut  élire  ferme,  3c.  cependant  qu'on  mt 
cognoifTe  couart,&  qu'en  toutes  chofes  là  où 
il  k  faut  monftrer  vertueux, le  me  retire  loin 
des  coups.tout  ce  que  ie  pourray  dire,aura-il 
qlque  vigueur  pour  cfmouuoir  les  auditeurs} 
Si  ie  prelchoyede  fobricté,  &  qu'on  me  co- 
gnuft  vn  yuronene:fi  le  prcfchoye  de  chafte- 
té,&  que  ie  fulle  vn  paillard ,  bnef  que  la  vie 
ne  refpondift  point,  de  quoy  feruiroit  tout  ce 
que  i'auroye  prcfché  ,  linon  pour  mettre  en 
opprobre  la  doàtrine  que  ie  porteroye  ?  Pour 
le  inoins  le  monde  n'en  feroit  gueres  cdilîé, 
Ainii, voulons-nous  donner  authorité  à  la  d» 
ftrine ,  &  qu'on  la  reçoyue,  qu'on  en  foit  ef- 
meuviuement?  Aduilbns  que  noftre vie  fait 
conforme  à  noftre  bouche  ,  &  que  nous  puif- 
iîonsprorcfter  que  c'eft  kbon  cfciétqucnottt 
parlons, &  que  nous  ne  voulons  point  enuoyer 
les  autres  fans  leur  tenir  compagnie,pour  di- 
re,Cheminez,  portez-vous  vaillaramét:*:  que 
nous  allions  tout  au  rebours  en  elcreuiccs. 
Gaidont-nous  donc  de  cela  ,  mais  lafchons 
d'approuuer  que  nous  parlons  de  cœur.Et  ce 
pendant  aufsi  notons  que  ii  vn  homme  qui  ha 
la  charge  de  nous  enfeigner.nous  monftre  que 
il  n'y  v.i  point  en  feinttfe,ni,ais  d'vn  vray  zelc, 
&  qu'il  deiîrede  monllrer  le  bon  chemin, que 
cela  eft  pour  nous  redarguer  tant  plus.fî  nous 
ne  mettons  peine  d'obéir  à  ce  qu'il  nous  mon- 
ftre :  &  û  la  doiVrinc  n'ha  point  de  vertu  de 
nous  foliciter  à  bien, noftre  ingratitude  eft  tït 
moins  cxcufable.  Ainfi  adulions  de  faire  no- 
ftre profit  des  exemples  que  Dieu  nous  met- 
tra déliant  lesyeux.Q^andil  y  aura  gens  qui 
non  feulement  nous  déclarent  de  bouche  ce 
qui  eft  requis ,  mais  noHs  monftrent  quant  & 
quant  par  effeCi  comme  nous  auons  à  chemi- 
ner,que  nous  foyons  prefts, qu'il  y  ait  vne  tel 
le  promptitude  en  nous ,  que  nous  ne  foyons 
point  ingrats  à  Dieu  quand  il  nous  prclente 
tels  moycns,iS:  de  (î  bôiies  aides  &  fî  propres. 
Au  refte,  notons  que  f.iiuft  Paul  n'a  point  feu 
lemét  parlé  au  regnrd  de  Timothee,  mais  que 
il  a  fait  vnepro:cft.uion  qui  auiourd'huy  doit 
auoir  fa  vigueur  enucrs  nous.  Car  combien 
qu'il  neconuerfe  point  mainten.u  au  mondi.', 
que  nous  n'ayons.poiot  appcrctu  la  façon  de 
vuue  comme  TimothL-e,  ce  tclmuignagc  nous' 
doit  bien  luffîre,quc  faind  Paul  iion  fcukmét' 
nousacftéfidelemcflàgerde  Dieu  .mais  que 
fa  vie  a  ratiSécequi  t  ft  contcoucn  fadoftri- 

ne. 


SVR    LA    IL    A    TIMOTH. 


M  9 


nc.Ainfi  apprenôs  Je  nous  inticf r  tant  mieuT, 
veu  que  Dieu  a  donné  vne  fignature  à  ce  qui 
nous  eft  ici  déclaré,  afin  que  nous  n'oyons 
point  feulement  la  voix  dont  nos  auieilles 
lovent  battues, mais  que  nous  regardions  à  la 
Tertu  qui  s'cft  demonftree  en  la  perfonne  de 
ftinù  Paul,  que  l'Efpritde  Dieu  l'a  conduit 
Se  gouucrné  en  forte, que  nous  auons  vn  pa- 
iron  &  vn  exemple  de  ce  qu'il  nous  a  enfei- 
gné.  Venons  maintenant  à  ce  qu'il  dit,  T»  as 
tagnu  (dit-il)  ma  di£lr<ne,m.i  aniJuiieyO"""»* 
fropos.lci  nous  auôs  i  noter  que  ce  n'eft  point 
Ans  caufe  que  fainâ  Paul  commence  par  la 
<ioârine,&  qu'il  luy  attribue  le  principal  de- 

fré.  Car  combien  que  la  preudhommie  d'vn 
omme,&  les  vertus  nous  doyuét  efmouuoir, 
fî  eft-ce  que  la  doftrine  va  toufiours  deuant, 
&  non  {ans  caufc.Car  tout'ce  que  nous  pour- 
rons veoir  en  rne  créature  mortclle,n'lia  pas 
*ne  telle  vertu  comme  quand  Dieu  parle. que 
nous  fçauons  que  c'ellluyqui  nous  appelle, 
que  c'eftluy  qui  nous  met  en  befont;ne  ••  Et 
ainfi  apprenons  de  tellement  confiderer  les 
vertus  qui  font  aux  hommes ,  que  la  doftrine 
ne  foit  point  oubliée  ni  mife  en  arrière.  Et 
c'cft  vn  poinft  bien  à  noter.  Car  il  nous  ad- 
uiendra  de  mettre  la  charrue  deuât  les  bœufs, 
auand  nous  penferons  qu'vn  homme  loit  ex- 
cellent,&que  làdeflîis  nous  voudronsnous 
conformer  àluyen  tout  &:  par  tout  fansdi- 
fcerncr.Voila  Comme  de  tout  temps  beaucoup 
de  fimples  gens  ont  eùé  abufez  quand  ils  ont 
voulu  enfuyure  tout  ce  qu'ils  voyent,fans  au- 
cune prudcnce.Carilfaut  q  la  parole  de  Dieu 
nous  efclaire  ,  &  que  nous  foyons  conduits 
par  icelle  pour  iuger  ce  qui  cft  bon  ou  mau- 
uais,afin  que  nous  n'aillions  point  à  l'cftour- 
die,que  nous  n'alléguions  point,  Vn  tel  a  ain- 
fi tait:mais  que  nous  f cachions  que  nous  fuy- 
uons  Dieu  ,  &  celuy  qui  aura  fuy ui  fa  parole. 
Voila  donc  de  quoy  nous  doit  feruiv  ce  que 
feinft  Paul  a  mis  en  ce  paffage,&  l'ordre  qu''î  1 
y  tient ,  quand  it  préfère  la  doftrine  à  toutes 
vertus  qui  eftoyent  dignes  de  louange  rniais 
tant  y  a  qu'il  faut  qu'elles  fuyaent ,  &  que 
Dieu  ait  cefte  authoritc  de  monftrer  ce  qui 
eft  bon,  &  ce  qui  luy  eft  agréable.  Etcepert- 
dànt  noiK  voyons  aufsi  qu'il  ne  fuffira  point 
qu'vn  Pafteur  qfiî  a  charge  de  gouucrner  PE- 
^life  de.Dicu,ait  de  grandes  vernis, qu'il  viue 
fainftcmént,maii.  il  faut  qu'il  parlrtcar  s'tléft 
luuet,  toutes  fes  vertus  ne  font  rien ,  il  moh- 
ftre  qu'il  n'eft  pas  digne  d'cftre  réputé  fet- 
niteur  de  Dieu.  Ainfï  il  faut  que  tous  ceux  qui 
'  fe  diront  eftre  Pafleurs  en  PEglife  ',  ayent  la 
doftrihe  ,  &  flue  non  feulement  ils  viuent  en 
forte  qu'pâ  foit  édifié  de  leursTértus  ,rtiais 
que  la  vérité  de  Dièii  refonot"  th.  Ibur  boiJch'e, 
&  qu'ils  mettent  peine  d'infti^rire  ceux  qiii 
lèiy  font  commis  en  charge.  Vbila  pour  vn 
item.  Mai<  au  re/te  ,'  fi'inff  P.iW  adioufte  àla 
dodlrine,  ta<fnistiit,'C;>  ?r' frôfo/.'En  ce  mot 
de  CoDduitc.il  £gniiîe  vn  fîl,<;iu  vn  triain  egil: 


&  puis  en  Propos.il  fignifie  côft.Tnce.En  fem- 
me il  a  voulu  monftier  que  cen\ll  point  le 
ftiiftd'vnCcruiteur  de  Dieu,  de  babiller,  (Sidé 
auoir  vn  beau langage,mais  qu'il  faut  quant  & 
quant  qu'il  y  ait  propot,  c'rft  à  dire  qu'on 
voye ,  Voila  vn  homme  rtfoJu  ,  il  n'ha  point 
feulement  des  bouffées. Qjiand  il  fera  en  chai 
re,il  pourroit  parler  comme  vn  Ange:&:  quâJ 
il  eft  deicenduce  fera  vn  ial'cur,vn  galebon- 
tcnips:&  puis  ilfemblera  que  ce  foitmerueil- 
le  que  de  luy  ,  &  quand  ce  vient  au  befoin  il 
n'y  anulle  vertu:on  cognoift  en  cela  qu'il  n'y 
a  eu  qu'hypocride,  &  non  point  cefte  condui 
te  &  cefte  conftance  qui  doit  eftre  en  vn  fer- 
uiteur  de  Dieu.  Voila  en  fomme  ce  que  nous 
auonsànoterdecepafTage.  Or  fi  nousauions 
les  yeux  pour  bien  confiderer  ce  que  Dieu 
nous  monftre,il  eft  certain  que  nous  ne  feriôs 
pas  fi  toft  desbauchez  que  nous  fommes  quâd 
iladuierit  quelque  trouble  ou  fcandale.  C.u- 
nous  aurions  prémédité  à  loifir,  quand  Dieu 
nous  auroit  donné  quelque  bon  exemple,  Voi 
la  comme  il  nous  faut  gouuerner:  &  cela  nous 
fcroit  tout  refolu:  nous  l'aurions  imprimé  en 
noftre  mémoire.  Mais  c'eft  tout  l'oppofîte ,  il 
femble  que  nous  voulions  fermer  les  yeux  :  fi 
nous  auons  quelque  exemple  pour  nous  bien 
confermer:&  quand  Dieu  nous  tend  la  main 
pour  nous  aider,il  femble  que  nous  reiettions 
tout  cela. Au  contraire,  nous  ne  cherchons  fi- 
non  quelque  couuerture  pour  excufer  nos  vi- 
ces: quand  nous  voulons  mal-faire  ,  moyen- 
nant que  nous  puifsions  alléguer  que  nous  ne 
fommes  pas  les  premiers,*:  que  beaucoup  font 
femblables.nous  voila(ce  nous  femble)inno- 
cens  Si  abfous.  Mais  noos  ne  faifons  qu'em- 
pirer noftre  marché, d'autant  que  par  ce  moy 
en  nous  defpitons  Dieu.  Car  nous  fomme» 
défia  aflèz  enclins  à  tous  vices  de  noftre  na- 
ture:*: de  nous  obftiner  ainfi, n'eft-ce  pas  com 
me  fi  nous  complottions  auec  Satan  pour 
nous  endurcir  à  Fencont re  de  Dicu.'Mais  cela 
ne  laiffe  pas  d'eftre  tout  commun  :&dcfaiû 
voila  pourquoy  Dieu  permet  que  nous  ayons 
tan:  de  gens  qui  nous  deftourncnt  du  bon  che 
min  ,  &•  qu'il  s'en  trouuefi  petit  nombre  de 
ceux  qui  puifTent  proteftcrauec-fainft  Paul, 
qu'en  fnyuant  leur  conduite  &  leur  train  on 
iradroitement.  On  voit  ceux  qui  on  la  char- 
gé d'anofitér  la  parole  de  Dieu  ,  qui  font  laf- 
thçs&  froids  :  il  s'en  trouuera  mefmebeao- 
cpup  qui  hitnent  vne  vie  desbordee ,  Si  voit- 
on  que  ce  font  des  galans  &  mocqueurs  de 
Dieu.  Et  pleuft  à  Dieu  que  les  exemples  n'en 
fuflent  point  fi  frequens  :niâis  imputons  cela 
à  noftre  malice.quand  noftre  Seigneur  lafche 
la  bride  à  Satan.&qu'il  y  Vient  de  telles  con- 
tradiftibns ,  car  nous  eh  fommes  bifn  dignes. 
Sinous  regirdoiis  que  cheréhe  la  plus  parc 
dumonde  ,  on  voudraauoir  des  prtfcheursà 
fa'  pharitafié  ,  oh  voddta  auoir  gens  addon- 
nez  i  tout  mal  &  à  toute  vilenie  ,'*:  que  la 
parole  de  Die^  fou  en  vitupéré:  voila((îi-ie) 

Mm.ii. 


4^0 


.SERMON 


ce  que  le  monde  cKcrche  auiouid'huy  •  Ainfî 
apprenons  de  mieux  faire  nortre  profit  des 
exemples  que  Dieu  nous  donne  quïd  ils  nous 
peuuenc  feiuir  pour  nous  bien  régler  :  &  non 
feulement  cela, mais  aufsi  que  nous  foyons  ar 
mci  cotre  toutes  tcntatious  qui  pourront  ad 
uenirrit  le  diable  fufcite  des  troubles ,  q  nous 
foyons  tout  difpofez  pour  les  fouftenir  ,  que 
nous  ne  foyos  point  effarouchez,  ni  vaincus. 
Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  noter  de  ce 
paflage, quand  ûniiQ:  Paul  parle  &  de  fa  doûri 
ne,&  de  ù  conduite,  &  de  Ion  propos.  Tou- 
chant des  autres  vertus  qu''il  allègue  ,  deiîa 
nous  auons  touché  en  vn  mot  à  quelle  fin  fe 
^oit  tout  rapporter:  c'eft  afçauoir.que  celuy 
qui  a  la  charge  d'anoncer  la  parole  de  Dieu, 
aduife  bien  de  fe  gouuerner  en  forte  qu'A 
puiflc,quand  il  voudra  exhorter  ceux  qm  luy 
font  commis,  alléguer  ce  que  faintt  Paul  met 
en  ce  pâfljge,c''eft  que  s'il  a  en  feigne  la  foy, 
qu'il  la  monltre  :  s'il  a  enfeigné  charité, qu'il 
en  donne  le  miroir  en  fivieri'ila  enfeignépa 
ticiicc, qu'on  cognoilTe  qu'il  demande  d'eftre 
patient.  Voila  donc  comnie(en  fomme)il  faut 
que  ceux  qui  doiuct  porter  en  leur  bouche  la 
parole  Je  Dieu,  s'eltudient  à  donner  approba 
tiô  d'icelle  en  toute  leur  vie:  &  que  le  peuple 
aufide  foncofté  aduife  de  ne  point  perdre 
les  moyens  que  Dieu  donne, mais  que  nous  le 
gardions,  Cela  nous  peut-il  feruir  pour  nous 
aider  à  cheminer  comme  il  appartient?  Voyas 
eue  nous  fommes  tant  débiles  &  tant  froids, 
que  nous  prenios  cela  pour  nous  aduacer.  Et 
au  reftc,  quand  fainû  Paul  parle  des  perfecu- 
tions  qu'il  auoit  fouftenucs,  A:  fur  tout  celles 
qui  eftoyent  cognuesà  Timothee.c'cllcom- 
me  s'il  difoit  que  non  leulement  il  a  chemi- 
né en  la  crainte  de  Dieu  quand  il  l'a  laifTé  en 
paix,&  qu'il  n'a  point  guerroyé  contre  fes  en 
nemis ,  mais  quand  c'eft  venu  aux  grans  com- 
bat$,ileft  toufiours  trouué  pareil,  il  n'a  point 
varié  ne  chancelé  .  Et  c'elt  vne  efpreuue  qui 
mérite  bien  d'eftre  notee.Car  il  pourri  adue- 
nir  qu'vn  homme  eftant  en  repos  fe  gouuer- 
nera  modeftement  ,  &  femblera  qu'il  ne  de- 
mande qu'à  feruir  à  Dieu:raaiiquïd  on  n'au- 
ra point  apperccu  nulle  foiblefle,  s'il  adulent 
quelque  trouble,  1«  voila  efperdu,  on  ne  ver- 
ra plus  celuy  qu'on  auoit  réputé  auparauant, 
il  fera  tout  changé,  £t  ainfî  non  fans  ciufe 
.  fainû  Paul  déclare  qu'outre  ce  qu'ij  a  efté  fi- 
dèle à  porter  la  parole  de  Dien  où  elle  eftoit 
receuc,  que  s'il  y  a  eu  des  perfecutions, on  ne 
l'a  point  veu  varier,  tellement  qu'il  n'a  point 
efpargnc  fa  vie:c5me  il  a  rffifté  au  mal  quand 
il  acftcqueftion  de  maintenir  la  dodrine.juf 
fî  que  s'ila  faluqu'il  la  fignaft  par  fon  ù.os 
propre ,  on  a  yeu  qu'il  n'eitpjt  point  lafche  a 
cela>,  en  fomme  qu'il  eftoit  bon  gendarmç  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift.    Voila  dont  ce 
que  nous  auons  i  retenir.   Et  en  enûiiuantJe 
propos  quia  deiîa  efté  touché  ,  noton?  que 
non  fculemét  nous  deuons  cftrc  cnfeignez  de 


XXII. 

viure  en  la  crainte  de  Dieu  Si  en  tonte  fiin&e 
té,qu3d  nous  fommes  en  lieu  paifiblè,mais  que 
il  nous  fautdifpofers'ilplaift  i  Dieu  de  nous 
appeller  plus  loin, c'eft  quand  il  faudra  expo- 
fer  noftre  vie  pour  le  tefmoignage  de  l'Euan- 
gile,que  nous  foyons  prefts  i  ce  faire:s'il  ad- 
uient  des  troubles  &  fafcheries ,  que  nous  les 
fouftenions  conftamment,que  nous  ne  foyons 
pas  feulement  prefts  à  aller  quand  le  chemin 
fera  tout  plain,  mais  que  nous  puifsions  fauter 
par  deflus  les  foflez ,  que  nous  puifsions  nous 
.iduancer  parmi  les  efpines  &  les  ronces  :  car 
telle  eft  la  condition  des  fideles,&  de  tous  en- 
fans  de  Dieu  .  Or  d'autant  que  cela  eft  rude  à 
la  chair,  fainft  Paul  adioufte  vne  coni'olation 
pour  l'adoucir.difant,  qu*  Dieu  Pa  toujicurs  Je 
li'trè.  Comme  s'il  difoit.  Tu  as  veu  comme  ie 
me  fuis  porté  conftamment.raais  cependant  tu 
as  aufsi  cognu  comme  Dieu  ne  m'a  point  de- 
failli  ,  toufiours  i'ay  efté  fecouru  par  fa  grâce. 
Efpere  donc  que  quand  tu  chemineras  comme 
il  faut,  que  Dieu  fera  toufiours  auec  toy,  que 
tu  fentiras  fon  aide  prochaine,  que  quâd  tu  la 
inuoqueras,  il  fera  toufiours  prtftde  fe  mofi- 
ftrer  Sauueur  enuers  toy.  Voila  ce  que  fâinift 
Paul  a  entendu  (en  fomme)  en  ce  pailàge.  Or 
maintenant  nous  auons  à  recueillir  pour  le  pre 
mier, d'autant  que  nous  fommes  fi  débiles, que 
fi  noftre  Seigneur  nous  monftre  des  exemples 
de  vertu  &  de  force,  nous  en  deuons  faire  no- 
ftre profit.  Comme  auiourd'huy  nous  voyons 
combien  de  gens  foufFrent  pour  la  parole  de 
Dieu:  il  eft  vray  q  nous  ne  verrons  point  touf 
ioursles  feux  allumez  deuant  nos  yeux,  mais 
les  aureilles  nous  en  doyuent  corner:car  nous 
oyons  allez  fouuent  comme  noftre  Seigneur 
appelle  à  la  mort  ceux  qui  nous  font  cognus. 
Or  fi  nous  ne  voulons  eftre  condamnez  d'vtic 
ingratitude  vilcine,  il  nous  faut  receuoir  cefte 
aide  que  Dieu  nous  donne,<5{  l'appliquer  ànt> 
ftre  vfage:Cônjent?Ien'en\oy  pas  feulement 
vn,  mais  fi  grande  multitude  qui  ont  fouifert 
pour  le  nom  de  Dieu:il  n'y  a  ne  prifbn,ai  tour 
•  ment  plus  cruel  q  la  mort,  qui  les  ait  deftour- 
nez.  Et  mon  Dieu  ne  m'a-il  point  déclaré  par 
cela  q  ceux  qui  l'inuoquent,ne  font  point  de- 
laiffcz  de  luy  au  befoin  ,  mais  qu'il  les  fortifie 
teUcinét  qu'ils  font  vitlorieux  par  delt*  tout? 
Et  fi  nous  alléguons  noftre  foibleflV,  ce  n'eft 
,  jiçn:car  ccuxTla  fon  t-ilsde  fer  ni  d'acier  rton 
pVs  que  nous.'Et  ainfi  d'autât  que  nous  voyôs 
qu'ils  ont  perfifté  àçaufequé  l'Efprit  deDjeu 
lésa  conduits  &  fouftenus,  que  nous  faciôs  le 
fcniblable,.'&  ne  nous  flattons  plus  en  nos  ex- 
cufesftitiolçs,alleguansque  nous  fommes  hô 
nies :carpi<is,  que  ccux-;la  fopt  fragiles  comme 
npus.&.que  Piei^Jçf  fortifie  ^ij  t^forn.ne  dbu 
tes  pas, qu'i|nefac/t;  le ifemblabié enuers  nqiis, 
mo.ycnrvant'«lue  nopsle  requerions.ayans  tou 
tf  noftfe^:,ô&»n<^  &  noftre  refyge^luy.Mais 
j.xjiundnçMS.  aurôs  3.jif(,(çduit  en  mémoire  les 
•  içxemplef  ,qui_nouf  font  propofcz,  notôs,aufsi 
que  Dieu  conduit  tcllcmerfes  fidèles,  que  la- 

mais 


V 


SVR    LA   II.   A   TIMOTH. 


tnaîsnneleurdefairt.Ileftvray  q  fainft  Paul 
allègue  ici  qu'il  au'ÎTit  cfté  deliuré  ,  pource 
que  Dieu  fe  vouloir  encores  feruirde  liiy  en 
ce  nionde.  Mais  Dieu  adiucrfes  façons  de 
fauuerles  (îens.  Qiielque  fois  il  Icsdeliure, 
d'autant  qu'il  leur  prolonge  la  vie, il  les  reti- 
re delà  maindes  mefchans  en  defpit  qu'ils 
en  ayent  :  mais  quelque  fois  Dieu  deliure  les 
Cens  par  la  mort.  Il  eft  vray  que  cefte  deli- 
urance  ne  fera  gueres  prifee  des  enfans  de  ce 
monde  &  des  incrédules  :  car  ils  font  du  tout 
"arreltez  ici  bas  ,  ils  font  attachez  à  celle  vie 
corporelle. Ils  ne  cognoiflcnt  point  donc  que 
cela  vaut ,  d'eftre  deliuré  de  la  main  de  Dieu 
en  mourant.Mais  de  noi^re  cofté, quand  nous 
voy5?  que  les  enfans  de  Dieu  ne  font  nulle- 
ment eftonnez  de  la  mort,&  que  Dieu  cft  glo 
rifié  en  eux  ,  8c  fait  fes  triomphes  :  combien 
iju'ik  foyent  en  opprobre  au  monde,  tant  yâ 
que  les  ennemis  demeurent  là  confus:&ceujt 
qui  ne  fembloyent  eftre  rien  ,  monftrelit  que 
Dieu  les  a  reueftus  d'vne  grâce  admirable, 
qu'il  y  a  en  eux  ce  que  iamais  on  n'eiift  atten 
du.&  (en  fomme)que  non  fculemét  il  y  a  vne 
vittoircpourfurmonter  toutes  les  tentatiôs, 
mais  que  Dieu  fait  là  reluire  vne  fageffe  qui 
n'eft  point  accouftumee,&  vne  vertu  plus  que 
humaine. Oitand  donc  nous  voyons  tout  cela, 
n'auons-nous  point  occafîon  d'eftre  confer- 
mez?  hTeft-ce  pas  belle  matière  deconfola- 
tion.telle  que  (linà  Paul  l'a  ici  baillée?  No- 
tons bien  donc  que  quâd  nous  aurons  fait  no 
ftre  profit  de  la  confiance  qui  eft  airx  fcrui- 
teurs  de  Dieu,&  de  leur  bonne  conuerfation, 
&  de  leur  lâinfteté  de  vie  laquelle  nous  au- 
rons apperccHe  en  eux, qu'il  faut  aufsi  q  bous 
renions  à  regarderies  grâces  que  Dieu  leur 
a  faites,  côme  toufîours  il  leur  a  tenu  la  main 
forte  ,  Si  que  iamais  ne  leur  a  défailli  au  be- 
foin, qu'il  les  a  retirez  du  gouffre  de  la  mort, 
qu'en  tout  &  par  tout  il  s'cft  monftré  Père  pi 
toyable  enuers  eux.  Voila  le  principal  que 
nous  auons  à  obferuer ,  fi  nous  voulons  nous 
refoudre  tellement  que  toutes  les  tentations 
que  le  diable  nous  pourra  mettre  au  deuant 
ne  puiflent  rien  contre  nous.  Voila  comme 
nous  auons  a  practiquer  ce  partage  ,  quand 
faiiîâ  Paul  déclare  ici,  Se  fe  glorifie  que  Dieu 
Ta  deliuré  de  tant  de  perfecutions.derquclles 
il  fembloit  bien  qu'il  deuft  eftre  englouti  cô- 
me en  vn  gouffre  de  mort.  Or  fi  nous  ne  dai- 
gnons noter  les  bons  exemples  qui  foyent 
pour  nous  édifier ,  nous  défaillons  auûi  bien 
en  ceft  endroit.  Car  nous  deurions  par  manie 
re  de  dire,  auoir  les  yeux  «freucz  de  tant  de 
tefmoignages  que  Dieu  nous  donne  de  fa  ver 
tu  &  de  fo.n  aicfe  ,  &  nous  n'y  penfons  point. 
Et  puis  nousalleguons,  Mo,  voila,  ie  ne  fçay 
|)as  qu'il  fera  fait  de  ceci.ie  ne  fçay  que  ie  de 
^uiendroyéenceft  endroit. Et  pourquay^Pour 
■;Ce  qlie  le  diable  noUs  a  tenu  les  yeux  bandez, 
'  &  noifs  auons  elle  contens  qu'il  nous  teinft 
.  en  tenel>res;&iious  auôs  veu  ce  qui  en  eftoit, 


4-61 


Se  comme  Dieu  nous  l'a  eKpofc  detiant  nos 
yeux.Etainfi  apprenons  de  marquer  comme 
nous  deuons  les  grâces  qae  Dieu  élargit  à 
tous  les  fiens ,  afin  que  ce  nous  foit  autant  de 
confirmations,  &  que  nous  prenions  courage, 
&  que  non  feulement  nous  ayons  zèle  &  ae- 
lîr  de  cheminer  droitement ,  mais  que  quand 
il  fcmblera  que  le  ciel&la  terredoiuent  c- 
ftre  comme  réuerfez,  nous  pourfuiuions  to<if 
iours  noftre  train. Et  pourquoy?Car  nous  fça 
uons  que  Dieu  eil  immuable  ,  &  cororee  il  a 
commencé,  il  parfera.  Oreft-ilainfi  qu'il» 
deliuré  les  fiens  de  tout  temps.  Ne  craignons 
point  donc  qu'il  nous  laifle  à  la  neccf.ité, 
que  nous  ne  foyôs  i'ecourusdeluyaufsi  bien. 
Et  afin  que  nous  fçachions  tous  que  famâ 
Paul  ne  parle  point  feulement  de  fa  pcrfon- 
ne.il  adioufte  vne  fentcnce  générale, Qw^  it** 
ceuxqm  ytinfront  yture funifemtnt  en  h/«< 
Chrifl,/cri>nt  perfecuteK.  Quai:id  11  dit  cela,  il 
monftre  que  la  doârine  qu'il  auoit  mife  au 
parauant ,  n'eft  pas  pour  deux  ce  pour  trois, 
mais  qu'il  faut  qlesmébresde  lefus  Chrift, 
tous  ceux  qui  voudront  eftre  de  fon  troupeau 
s'appreftent  à  ceft  vfage,&  qu'il  n'a  point  ain 
fi  parlé  d'vn  exemple  fîngulier ,  mais  qu'ii 
nous  a  rais  en  auant  ce  qui  nous  eft  propre  & 
vtUe  à  tous.  Vray  eft  qu'il  n'y  aura  point  me 
mefure  égale,  que  tous  foyét  perfccutcz  d'v- 
ne façon.  Car  nous  voyons  comme  Dieu  ef- 
pargnc  beaucoup  de  fes  fidèles  :  que  s'il  y  en 
avn  bruf.é,  vne  ccntiiiie  mourront  en  leur 
lift  ,  &•  d'âuantage.  Dieu  donc  n'a  point  or- 
donné vne  loy  certaine  8c  égale  que  tous 
foyent  pcrfccutez  d'vne  façon  :  mais  tant  y» 
que  nous  ne  pouuons  feruir  à  Ditu  finon  e- 
fiâns  gendarmes.  Et  pourquoy?Caril  eft  im- 
pofiiblequelc  monde  necontrcdifeànoftrc- 
Seigseur lefus  Chrift,  &  à  toirs  fes  membres. 
Car  nous  fçauoni  que  le  nionde  eft  pouffé 
par  l'efprit  de  Satân:il  faut  donc  que  la  crua» 
té  foit  auec  la  haine  de  laquelle  l'ay  fait  men 
tion.Puis  qu'ainfi  eft, iamais  les  fidcles  ne  fe- 
ront à  repos  ,  qu'ils  ne  fe  trouuent  moleftez 
&  picqnez  en  quelque  façon  que  ce  foit.  Or 
ccftedoflrinenous  doit  feruir  à  double  v  Ta- 
ge:c'cft  qu'vn  chacun  la  face  valoir  à  l'on  re- 
gard;&  puis  quand  nous  voyons  les  fcrititcurs 
de  Dieu  eftre  tourmentez  p.iv  les  mefch.uis  5: 
par  les  incrédules, que  nous  ne  doutios  point 
■paurtatdeleur  boûiie  réputation. Ceci  feroit 
obfcur  s'il  n'eftoit  déclaré  plus  à  plein.  l'ay 
dit  (en  premier  lieu)  quand  (ainift  Paul  pro- 
nonce que  tous  ceux  qui  veulent  viure  fidè- 
lement en  lefus  ChrifîjfoufFriront  perfccu- 
tion  ,  qu'il  faut  qu'vn  chacun  s'apprgfte  à  ce- 
la .  Or  nous'  allons  deiîa  dit  que  le  diable  eft 
noftre  ennemi  mortel ,  8c  qu'il  a  des  fuppofts 
infinis  en  ce  monde.  La  guerre  donc  nous  eft 
ouuérte,  voire  fi. nous  voulons  eftre  de  lab'àn 
de  de  lefus  Chrift,&  adhérer  à  luy. Qu'vn  fi- 
dèle ne  face  point  foi  conte  (  s'il  ne  veut  e- 
ftre  trompé)  de  viure  à  repos  ,8c  quand  il  ne . 
Mni.iii. 


4«fk 


donner»  occifîon  i  perfonnc  de  fe  plaindre 
de  luy, qu'il  ne  pcnfe  point  cju'vn  chacun  doi 
ue  faire  le  femblable  :  car  Dieu  ne  permettra 
point  que  nous  yiuions  en  tel  repos.  Nous 
voyôs  mefmcs  qu'vn  homme  qui  n'aura  point 
d'autres  ennemis ,  fera  inquiété  en  foy  :  mais 
tant  y  a  que  Dieu  nous  donnera  toufiours  des 
aiguillons  pour  nous  poindre,  &  ne  fuft  finon 
pournous  refueiller.il  faut  aufsi  qu'il  efprou 
«e  nolhe  patience  :  il  faut  d'autre  cofté  que 
nous  apprenions  d'afpirer  au  repos  celeftc, 
afin  de  ne  nous  point  endormir  en  ce  mon- 
de.Aufsi  en  foinme.voici  l'heure  des  combats 
pour  nous.  Or  quand  nous  aurons  prins  cefte 
refolution  de  refirter  à  tous  les  alTauts  de  Sa- 
tan ,  &  s'il  nous  faut  eftre  perfecutei.de  por- 
ter cela  en  toute  patience  ,  &  ne  point  nous 
desbaucher  ,  il  nous  faut  Tenir  au  fécond 
poind  ,  que  quand  on  affligera  iniuftement 
quelque  fcruiteur.de  Dieu  ,  nous  ne  l'ayons 
pas  en  moindre  eftime.  Et  ceci  eft  bien  nota- 
ble. Car  nous  enterrons  beaucoup  qui  tour- 
nent à  tous  vents(commeondit)quand  ils  au 
ront  applaudi  à  vn  homme  cependant  qn'il 
cftoit  prifé  &  honoré  ,  s'ils  voyent  qu'il  y  ait 
vn  vent  contraire ,  ils  regardent,  Comment? 
Qu'eil-ce  que  i'ay  penft?  En  forte  que  du 
premier  coup  ils  condamneront  vn  fideîe.voi 
le  comme  des  aiieugles  fans  regarder  s'il  eft 
perfecuté  à  tort  ou  non.  Et  en  cela  fi  on  ne 
faifoit  tort  qu'aux  perfonnes ,  ce  feroit  deiia 
trop;  mais  on  ne  fait  nulle  difficulté  de  con- 
damner la  doftrine  de  Dieu  quand  on  la  per- 
fecuté. Ileftvray  qu'il  s'en  trouuera  qui  fe- 
ront femblant  de  receuoir  l'Euangile  cepen- 
dant qu'on  le  prefche  fans  contredittmais  s'il 
y  vient  quelque  trouble,  ils  monftrent  bien 
que  iainais  n'ont  eu  nulle  racine  viue  ,  Se  ce 
qu'ils  ont  donné  d'approbation  d'eftre  fidè- 
les ,  c'eft  comme  vn  afnc  qui  baiffera  les  au- 
reilles,  que  mefsies  ilsn'attédront  pas  qu'on 
les  afflige  vinemét  pour  plaquer  là  tout,  mais 
s'il  y  a  la  moindre  occafion  au  monde,  qu'on 
Yienecontefter  contre  la  vérité  de  Dieu  ,  & 
^u'on  la  dégrade,  combien  en  voit-on  qui  fui 
tirent  incontinent  les  corruptions,&  fe  reuol 
teront?£t  puis, fi  vn  feruiteiir  de  Dieu  eft  in- 
iiiftemtnt  perfecuté,  on  luy  crachera  auvifa- 
ge.Et  dont  procède  cela, finon  que  nous  n'a- 
iions  point  médité  cefte  doûrine  dont  parle 
fainô  Paul?  c'eft  que  les  iffliclions  qui  aduie- 
»ent  aux  bons, font  plus  honorables  (  &  doi- 
«ent  eftre  iwgees  tellcs)qHe  tous  les  triôphes 
de  la  tcrrcrautremét  nousnedifccrnôs  point 
«ntre  les  vertus  &  ^-s  maléfices.  Voila  vn  fer 
niteurde  Dieu  qui  fera  perfecuté.  Et  pour- 
HHoy?  Pource  qu'il  s'cft  loyàument  acquitté 
de  fondcuoir.  Voila  aufsi  vn  malfaiteur  qui 
fera  puni  de  fcs  crimeyrtous  les  deux  font  per 
iccutei. Voire,maij  l'vn  mérite  d'heure  en  de- 
Itftation.jc  l'autre  d'eftre  prifé. C^uand  nous 


SERMON     XXII. 

font  perfecutez  pour  vérité,  &que  nonsaui- 
fions  fur  tout  de  ne  point  ietter  condination 
fur  eux  à  la  volée ,  comme  nous  fommes  trop 
enclins  à  ce  faire.  Ainiî  donc  ,  ce  n'eft  point 
fans  caufe  que  fainà  Paul  a  mis  cefte  fenten- 
ce,  c'tft  afçauoir  que  tous  ceux  qui  voudront 
viure  làinfttrarnt  en  lefus  Chrift ,  feront  per 
fecutez.  Que  faut-ildonc?  En  premier  lieu, 
qu'vn  chacun  regarde  à  foy  de  près.  Etd'au> 
tant  que  Dieu  nous  afsigne  ,  le  nous  enrolle 
ici  pour  eftre  comme  fes  foldats ,  apprenons 
de  nous  aguerrir:  encorcs  que  pourvn  tcmpt 
Dieu  nous  fupporte ,  &  que  nous  foyons  en 
paix  ,  «e  laillons  pas  pourtant  d'auoir  les  ar- 
mes toutes  appareillées.  Se  de  pi  iei  celuy  qui 
nous  doit  donner  vertu, qu'il  ne  nous  defail- 
le  pointau  bcfoin.Et  s'il  adulent  que  nous  ne 
foyons  point  perfecutez  à  glaiuesdefgainez, 
que  les  feux  ne  s'allument  point  pour  nouç, 
cognoiflons  que  Dieu  nous  fupporte,  &  le  re 
mercions  en  cela.  Mais  foit  que  nous  foyons 
en  danger, foit  que  nous  foyons  à  repos.pour 
ce  que  nous  ne  fçauons  pas  ce  que  Dieu  nous 
referue.que  toufiours  rrous  ayons  cela  refolu, 
que  quand  il  luy  plaira  que  nous  foyons  per 
fecutez  ,  &  bien,  que  nous  foyons  tous  prefts 
de  nous  offrir  à  luy  en  faciince.  Et  puis,  que 
vn  chacun  regarde  à  fa  vacation  :  il  ne  faut 
pas  que  nous  alléguions.  Et  commentfCeluy 
la  n'eft  pas  tant  preflc  que  moy.  Carc'eftà 
Dieu  de  nous  bailler  à  chacun  fa  portion  :  il 
fçait  en  Quoy  il  fe  veut  feruir  de  nous.  Ainfi 
donc, laiflons-nous  conduire  par  luy. Et  quâd 
nous  verrons  que  d'autres  font  plus  perfecu- 
tez que  nous ,  cognoiflons  la  grâce  que  Dieu 
nous  fait.<inâd  nous  en  verrons  d'autres  qui 
font  à  leur  aife,  qu'on  ne  fe  trouble  pas ,  que 
nous  ne  foyons  point  efmeus  d'enuie,  que 
nous  ne  venions  point  à  murmurer  contre 
Dieu  comme  s'il  nous  prefli»it  par  trop,mais 


qu'vn  chacun  portefonfardcau:&puis  qu'ain 
fi  cft  plions  les  cfpaules ,  Si  que  nous  deman- 
dions à  Dieu  qu'il  nous  fortifie.  Voila  ce  que 
nousauôs  à  faire. Et  puis  notons  qu'il  yadi- 
uerfes  efpcces  de  perfecutions.que  nous  ne  fe 
rons  pas  toufiours  traincz  du  premier  coup  à 
la  mort,  mais  nous  aurons  des  picques  de  no* 
Toifins,  nous  ferons  iniuftement  affligea, on 
nous  menacera, il  y  enauia  d'auties  qui  ferôt 
outragez  par  les  moyens  que  Satan  fiifcitera: 
brief.fçachons  qu'il  faut  que  toutes  les  tenta 
tiôs  de/quelles  nous  ferôs  aflàillis  ep  ce  mon 
de  foyent  mifes  en  ce  rang  ,  &  que  cefte  fen- 
teflce  s'accomplit ,  toutes  fois  Se  quantes  que 
nous  ne  fommes  point  à  noftre  aife  en  ce  mô 
de, mais  que  nous  auons  à  guerroyer. Cepen- 
dant pefons  aul'si  ce  mot  quad  il  dit.T^w^  cetx 
qui  yfitUnt  fainfiemtnt  tiure  en  lefus  Çlirijfi 
car  il  eft  certain  que  les  mefchansqui  fui- 
ront la  croix,  »e  laiflerontpas  d'eftre  beau- 
coup tourmentez  ,  comme  on  le  Toiç.,^Çar 


voyôs  cela, que  l'ingratitude  du  monde  n'era  '  les  ennemi»  de  Dieu,  les  gens  adonnè^ii  mal, 
pefche  poiot  que  nous  ne  priûons  ceux  qui    portent  leur  bourrcau.-encores  que  pcrfonne 

ne  leur 


SVR   LA  II.    A   TIMOTH. 


ke  leur  demande  rien,  fi  eft-ce  que  toutetfoiî 
kurt  crimes  les  agitent  tou(îoBrs,en  forte  que 
ils  ont  m  feu  allumé  là  dedans,  ils  font  com- 
«ae  vne  mer  en  tourmente  quand  les  vagues  fe 
«ntrebatent.  Ainiî  en  eft-ilde  l'inquiétude  de 
tous  mefchant.  Et  puis  on  ne  les  peut  porter 
■e  fouffrir  ,  d'autant  qu'ils  font  pleins  d'or- 
guciljde  cruauté,&  de  rapines:&  d'autant  que 
il  n'y  a  ne  foy  ne  loyauté  en  eux ,  il  faut  que 
tous  leur  foyent  ennemis. Nous  royons  mef- 
mes  comme  ceux  qui  font-addonncz  à  anibi- 
tioo,ouàauarice,ouàcliofes  femblables,  font 
comme  chiens  &  chats  qui  s'entremangent,  & 
s'efpient  pour  fe  donner  toulîours  quelque 
troulïe;on  voit  leschofes  ainfidiuifeesaumô 
de.  Et  pourtant  il  faudra  bien  que  ceux  qui  fe 
addonnent  à  mal  foyent  perfecutez.Mais  no- 
tamméc  fiiaù  Paul  nous  appelle  à  foulFrir  let 
combats  qui  nous  font  fufcicezde  Satan  pour 
viure  fainftement  en  lefus  Chnft-comRieauf- 
I.P/fl',4.fifainft  Pierre  nous  exhorte  que  nous  nefouf 
If.  frions  point  comme  larrons, corne  meurtriers, 

comme  paillars,  corne  rauilTêurs:  mais  que  les 
alfliûions  que  nous  auons  à  endurer  foyent 
pour  le  tcfmoignagede  l'Eu.îgile.&que  Dieu 
foit  glorifié.  Puis  qu'ainfi  elïdonc,  aduifons 
que  nous  ne  foyons  point  tourmctez  pour  nos 
maléfices.  Mais  cependant  notons  aufsi.com- 
bien  que  nous  foyons  diffamez  à  tort,  qu'il  ne 
faut  point  que  nous  foyons  defcouragezpour 
cela.  Car  par  ci  deuant  fain£b  Paul  nous  auoit 
aduertis  que  non  feulement  onvfera  de  vio- 
lence contre  nous,mais  que  nous  ferons  en  op 
probre  quant  au  monde, que  par  faullcs  calom 
nies  &  detraûions  nousfcrôi  denigrez-il  faut 
que  nous  portions  cela  patiemment. Mais  tant 
y  a  que  nous  deuôs  mettic  peine  de  cheminer 
tellement  deuant  Ditu,&côucrfer  en  telk  fo- 
brieté  auec  nos  prochains ,  que  nous  puif>ions 
protefter  de  noftre  innocence,  &  la  monftrer 
par  eiFect:&  que  touflours  ceci  foit  cogna, que 
no' fommes  perfecutezpourauoir  vefcu  fam 
ûeraent .  Et  luefmes  fainft  Paul  adioufte  le 
mot  de  Icfnr  chrifi.  Il  eft  vray  qu'il  fcmble  de 
prime  face  eftre  fuperflu  ,  mais  ce  n'eft  point 
10.  J3„j  cjyfe  (jy',l  l'j  expr]mé:car  c'eft  pourmô 
^^'  ftrer  que  noflre  Seigneur  lefus  Chrifi  accom- 
plit la  fentence  qu'il  a  prononcée  de  fa  bou- 
che, C^u'il  n'eft  point  venu  apporter  la  paix 
en  ce  monde  ,  mais  qu'il  a  allumé  vn  feu  qui 
bruflera  .qu'ila  efmeu  vne  guerre  qui  ne  fe 
pourra  appaifer,  iufqiies  à  ce  que  le  diable  foit 
du  tout  vaincu  auec  les  fiens.  Et  qu'aiafi  foit, 
le  diable  ne  ceflera  de  s'efforcer  tant  qu'il  luy 
ft-ra  pofsible  d'empcfcher  le  cours  de  l'Euan 
gile:  les  mefchans  font  du  tout  enragez  après 
cela  .  Et  comment  donc  fe  pourroit-il  faire 
qu'en  fuyuant  Icfus  Chriftnousfufsionsà  re- 
pos? Et  ainfî  notons  bien  que  lefus  Chrift  a 
ion  en  feigne  d  refile  pour  dire  qu'il  nous  faut 
entrer  en  combat:il  crie  à  l'arme:  &  pourtant 
fuyMons-le  fî  nous  voulons  eftre  fei  difciples. 
Car  nous  pourrons  bien  veoir  quelquefois  des 


4^3 


gens  qui  ont  apparéce  de  grande  rertii  Se  fai» 
fteté,  qui  ne  feront  point  poortît  tourmentez 
du  monde. Et  pourqaoy.C«ril  eft  facile  enc» 
rei  de  s'accorder  auec  les  incrédules  qiiîd  oa 
ne  fuit  point  lefus  Chrift.Mais  quand  î'Eiian- 
gile  vient  en  auant.que  hous  auons  la  religion 
pour  dire, Il  faut  adorer  le  Dieu  riuant,il  faut 
qu'il  foit  ferui  en  cefte  forte:  alors  il  eft  que- 
ftionde  delailTer  boutes  les  fuperftitions  qui 
régnent  entre  les  incredules;4r  les  voila  incoa 
tiiient  comme  enragez.voila  vne  furie  qwi  s'ef 
meut  &  s'enflâbe.  Voila  donc  pourquoy  fain^ 
Paul  a  ici  notamment  déclaré  que  û  nous  adhe 
rons  à  noftrc  Seigneur  lefus  Chriit,il  faut  que 
nous  foyons  aflàillis&  tourmentez.  Car  il  eft 
venu  au  monde  pour  mettre  diuifion,  en  forte 
que  pour  nous  côformer  à  la  doflnne  de  l'E- 
uangtle,il  faut  que  nous  ne  facions  point  dif- 
ficulté de  nous  déclarer  ennemis  mortels  de 
ceux  qui  feroyent  contens  de  nous  fupporter, 
moyennant  que  nous  ne  fuf  ions  point  Chre- 
ftiens.  Côbien  en  y  a-il  qui  feroyent  bien  ai- 
fes  de  viure  auec  nous  quand  nous  voudrions 
nager  entre  deux  eaux  ?  Il  ne  faudroit  point 
fuir  bien  loin, moyennant  que  nous  voulufsiôe 
nous  dcfguifer  :  mais  d'autant  que  nous  auons 
la  parole  de  Dieu  en  noftrc  bouciie  ,  d'auunt 
qu'il  faut  aufii  qu'en  noftre  vie  nous  nion^ 
ftrions  quec'eft  àbonefcient  quenouj  faifons 
proteftation  de  l'auoir  pour  noftre  Maiftre  & 
Doôeur:d'autant  donc  qu'il  nous  faut  rendre 
confefsion  de  noftre  foy,  voila  les  efclats  qui 
volent  ,  voila  vn  tonnerre  qni  eft  efmeu  auec 
tous  ceux  qui  feroyent  bien  aifes  d'cftre  pai- 
lîbles  auec  nous,finon  que  lefus  Ctrift  y  meift 
vne  guerre.  Ainfi  donc  apprenons  que  ce  n'eft 
point  aflex  de  viure  en  Philofophe  (  comme 
ondit)telleraent  qu'iln'y  ait  point  de  repro- 
che en  nous ,  qu'on  ne  puifle  pas  nous  mettre 
vne  Ignominie  de  larrecin,de  paillardife.d'y- 
urongnerie.ou  de  quelque  autre  vice:  ce  n'cfl 
point  allez  de  tout  cela  ,  mais  il  faut  que  nour 
fuyuions  noftre  capitaine  le  Fils  de  Dieu  .  Et 
puis  qu'il  cleue  fon  enfeignc  pour  crier  â  l'ar- 
me,&  qu'il  veut  que  nous  entrions  en  combat 
contre  tous  ceux  qui  ne  le  pcuuct  endurer, qui 
refîftent  furieufement  à  fon  Royaume,  il  faut 
qu'vn  chacun  de  nous  fe  fubmctte  à  telle  con- 
dition. Voila  en  fomme  ce  que  nous  auôs  à  no 
ter  de  ce  paflàge.Orcefte  doûrine  eftaflèz  fi 
niiliereiil  refte  devenir  à  la  prattique,&le  téps 
nous  y  appelle, voire  &  nous  y  contraint .  Car 
le  monde  eft  auiourd'huy  fi  peruers  qu'il  n'eft 
point  poisible  que  nous  cheminions  droitc- 
ment  fans  auoir  beaucoup  d'ennemis .  Pour- 
quoy ?  Nous  fommes  méfiez  parmi  beaucoup 
aecontemptcursdeDieu.il  eft  vray  que  nous 
aurons  bien  la  prédication  de  l'Euangile, nous 
aurons  bien  quelque  police:  mais  tout  cela  ne 
fera  iamais  qu'il  n'y  ait  beaucoup  de  corru- 
ptions :  &  nous  voyons  l'audace  S:  malice  qui 
eft  en  tous  ceux  qui  bataillent  contre  Dicu.U 
faut  donc  que  nous  ayr;ns  des  combats  par 
Alm.iiii. 


> 


454 


S  E  k  M  O  N    XXII. 


tout:  &:  mefnies  nous  voyons  comme  PEuangi 
le  eft  propluné,  &  que  les  poures  erifans  de 
Dieu  ne  Içauent  où  marcher,  que  la  terre  ne 
les  peut  fouffrir,nous  voyons  tout  cela  .  Ainfî 
donc,  fi  nous  ne  fommes  du  tout  defpourueus 
de  fens,aduifons  de  faire  noftre  profit  de  cefte 
dotlrine,  Se  n'attendons  pas  que  nous  foyons 
allàillis  viuement.mais  que  nous  foyons  com- 
me en  vn  exercice  continuel ,  que  nous  médi- 
tions (di-ie)  tout  le  temps  de  noftre  vie  cefte 
admonition  de  famû  Paul  :  &  d'autant  que  ce 
nous  eft  vne  chofe  aigre  &  difficile  félon  la 
chair, de  fouftenir  pcrfecution ,  laquelle  nous 
fuyons  de  nature, qu'il  ne  nous  face  point  mal 
d'cllre  membres  de  le  fus  Chriftàcefte  con- 
dition-la, &i  que  nous  rcduifions  en  mémoire 
ce  que  nous  auons  déclaré  par  ci  deuant,que  fi 
nous  mourôs  auiourd'huy  auec  hiy.la  vie  nous 
eft  appreftee  au  ciel.  Puis  qu'ainii  eft  doc  que 
li  vidoire  nous  eft  toute  certaine,  &  mcfmes 
que  pour  tous  les  combats  que  nous  auons  à 
fouftenir  pour  trois  lours,  nous  au5s  vn  fruiû 
au  ciel  qui  nous  eft  permanent, &  qui  ne  périra 
jamais ,  que  nous  prenions  courage  là  deflus. 
£t  combien  que  ce  mot  de  Perfecution,de  pri 
me  face  fuft  pour  nous  retirer,  que  nous  fur- 
montions  cela,&  que  nous  fuyuions  tellement 
lïoftre  Seigneur  Icfus  Chrift,  qu'encores  que 
nous  voyons  qu'auec  opprobres  il  nous  faille 
eftre  chaflez du  monde,  nous  ne  laifsions  pas 
d'adhérer  à  luy,  iufques  à  ce  qu'il  nous  intro- 
duire en  la  gloire  celefte  qu'il  nous  a  promi- 
se,&laqueile  mefraes  il  nous  a  acquife  par  fon 
fang .  Et  au  refte,  afin  que  nous  fçachions  que 
les perfecutions dont  parle  fainciPaulne  font 
pas  feulement  de  glaiue  &  de  feux, mais  qu'il  y 
en  a  beaucoup  d'efpcces.notâment  il  dit.  Que 
Us  hommes  maHstais s' iiitanctnnt  de  flus'en plus, 
tf^ans  trompiK,&'  tromfans  les  autres.Or  il  met 
ici  vne  efpece  notable  de  perfecution,q  quand 
en  aura  beaucoup  tourmenté  les  feruiteurs 
de  Dieu,  quand  ils  verront  que  Satan  aura  la 
Togue  auec  (es  menfonges,  que  beaucoup  fe- 
ïont  enragez  contre  la  doftrine.que  les  autres 
peruertiront  &  corrompront  tout  :  &  cepen- 
dant que  les  mefchans  ne  laifleront  pas  de  fe 
aiwncer  toufioursenmal:quand(di-ie)  les  fer 
oiteurs  de  Dieu  verrôt  cela, ne  feroit-ce  point 
pour  eftre  desbauchcz  ,  finon  que  de  longue 
main  ils  fuiTent  munis  à  l'encontrePPour  cefte 
caiife  fainft  Paul  dit  qu'il  ne  nous  faut  pas  e- 
ilre  tellemét  efpcrdiis,fi  nous  voyons  la  mort 
appreftee,  les  prifons,  les  tourmcns,  &  tontes 
thofes  lemblablc;:  quelcsmefchans  grincent 
les  dents  contre  nous,  fi  faut-il  pourtant  que 
en  cela  nous  monftrions  vne  conftance  inuin- 
cible.Mais  quand  nous  voyons  les  ennemis  do 
meftiques  qui  profitent  au  dommage  de  l'E- 
glifc,  que  nous  voyons  qu'on  reçoit  mieux  les 
coriupcions  &  les  abus  que  la  b<inncdo£lrinc, 
que  nous  voyons  que  le»  mcfcKans  font  leurs 
triôphes,  &  qu'ils  ont  la  bou'-he  ouuerte  pour 
mefdire  &  blalphemer,& cependant  que  la  do 


ôrine  de  Dieu  foit  reculée,  que  toutesfoif 
nous  perfiftioiis  au  milieu  de  tels  fcandales. 
Voila  à  quoy  fainft  Paul  nous  a  voulu  exhor- 
ter en  ce  paflage.  Or  d'autant  que  pour  cefte 
heure  le  tout  ne  fe  peut  pas  déduire,  conten- 
tons-nous qu'en  toutes  fortes  il  nous  faut  e- 
ftre  armez  pour  batailler ,  autrement  laraais 
nous  ne  ferons  capables  pour  feruir  à  Dieu  & 
à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  3c  pour  rcfifter 
à  fon  ennemi  mortel  Satan .  Car  lamais  ne  ce{ 
fera:  &  puis  il  a  fes  fuppofts  au  monde  en  nom 
bre  infini:  nous  fçasons  qu'il  eft  pcre  de  men- 
fonge,  nous  fçauons  qu'il  tft  addonné  à  toute 
cruauté.qu'il  a  vn  efprit  de  meurtre.  Puis  que 
ainfi  eft  donc  ,  fçachons  qu'il  nous  fauttouf- 
iours  eftre  fuiets  à  beaucoup  de  fafcheries  & 
d'affliftions  pour  viure  Chreftiennement .  Et 
ce  n'eft  point  à  chacunde  nous  d'en  prédre  fa 
portion  ,nuisc'eftàDieude  nous  en  donner 
tant  qu'il  luy  plaira.  Et  pourtant  remettons- 
nous  à  fa  bonne  volonté,  car  c'eft à  Juy  de  dif 
pofer  de  nous, &  deUa  vie,&de  la  mortiquand 
il  luy  plaira  de  nous  appeller  de  ce  mode, que 
nous  foyons  prcftsde  fuyure  .  Et  cependant 
confolons-nous  qiund  Dieu  ne  permet  point 
que  nous  foyons  affligez  pour  nos  maleficcî, 
combien  qu'il  nous  pourroit  abyfmer,&àbon 
droit.  Car  qui  eft  celuy  de  nous,  tant  iufte  foit 
il,  qui  ne  meritaftcent  mille  morts  ?  Or  puis 
qu'ainfî  eft  que  Dieu  laifle  nos  vices  cachez, & 
qu'il  ne  nous  punit  point  pour  iceux,mais  que 
il  veut  que  nous  fouffrions  pour  le  tefmoigna 
ge  de  fa  vérité,  pour  vne  chofe  tant  honora- 
ble &  tant  precieufe,  ne  deuons-nous  point 
ptédre  courage  làdeirus,&  luy  rendre  grâces 
du  bien&  de  l'honneur  qu'il  nous  fait,  quand 
en  nous  exemptant  de  l'ignominie  que  nous 
auons  méritée  ,  il  veut  que  nous  portions  fes 
marques  Si  fev  armoiries  ,  Se  que  nous  foyons 
comme  (es  hérauts?  Brief.que  nous  fouffrions 
comme  en  fa  propre  perfonne,  que  la  querele 
que  nous  portos ,  foit  fîene,&  qu'il  déclare  que 
il  tft  ennemi  de  nos  eiinemisrqu.id  nous  voyôs 
cela,n'auons-nous  point  bien  matière  de  non» 
confoler  ?  Et  puis  nous  fçauons  qu'en  toute» 
nos  fafcheries ,  nous  auons  m  bon  garant  au 
ciehcar  nous  fçauons  que  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift  eft  celuy  auquel  toute  vertu  eft  don 
née  de  Dieu  le  Père.  Et  pourtant,  quand  nous 
ferons  fortifiez  de  fonElprit.ne  doutôs  point 
que  nous  nepuifsions  furmontcr  tous  trou- 
bles S:  fcandales ,  toutes  tentations  qui  noiu 
pourront  aduenir,  que  nonqbftant  toutes  nos 
infirmitez.nous  obtiendrons  ta  vifloire, telle- 
ment que  rien  n'enipefchera  que  nous  ne  par- 
uenions  à  ce  triomphe  qui  nous  eft  apprcftc 
au  ciel. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  denoilre  bon  Dieu  en  cvgnoiflance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  tacf  micut 
fcntir  que  nous  n'auons  point  ^ait,  qu'il  nous 
auufc  les  yeux  ,  afin  que  nous  detcfnons  tou- 
tes nos  corruptions  &  nos  vices  pour  nous  y 

defplaire, 


SVR     LA    II.    A     TIMOTH. 


46î 


defplaire,&  pour  cercher  le  remède.  Et  d'au- 
tant que  nous  auoiis  à  cheminer  en  ce  monde 
parmi  tant  de  corruptions  &  de  contradidiôs, 
qu'il  nous  donjie  quant  &  quant  &  la  vertu  & 
la  force  de  confiammcnt  batailler  à  rtr.ton- 
tre  de  tous  empefclieméstelicmcnt  que  nous 
De  foyons  point  retardez,  &  tant  moin";  def- 
bauchez  pour  tout  ce  que  le  diable  machine- 
ra :  mais  que  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  rè- 


gne tellement  en  nous,  que  ce  qui  eft  dit  de  (a 
pcrfonne, l'oit  accompli  tn  nous  auAi  bien,  ce 
cil  ai'çauoirque  nous  demeurions  victorieux 
par  dtlTus  tous  emumisiufques  à  ce  quM  les 
ait  mis  le  fcabeaude  (es  pieds,  &  qu'il  nous  ait 
retirez  de  ce  monde  à  la  vie  celefte  ,  laquelle 
nous  attend  au  ciel.  Q^ie  non  feulement  il 
nous  face  celle  grâce  ,  mais  à  tous  peuples  3t 
nations  de  la  terre,&c. 


.   C  I N  QJ/  lEME     SERMON      SVR      LE 

TROISIEME     CHAPITRE. 

14  Or  toy  demeure  es  chofes  que  tu  as  dpprinfes ,  ^  qui  te  font 
commifesycognoiffant  de  qui  tu  les  as  apprinjès, 

1 5  Et  que  tu  as  cognu  dés  ton  enfdyice  lesJàinSîcs  îettresjejquel- 
les  tepeuuent  rendre ftge  àjalut,pdr  lafoy  qui  ejl  en  lefus  Chrifl. 


A  foit  que  la  tentation  foit 
grande  quand  nous  voyons 
le  monde  eftre  fi  peruers  de 
adhérer  plulloft  aux  corru- 
ptions de  Satan  qu'à  la  véri- 
té de  Dieu,  fi  nous  faut-il  a- 
uoir  celle  conllance,  mcfiiie 
ouand  vne  fois  Dieu  nous  a  déclaré  fa  volon- 
té,de  nous  tenir  là  fermes  fans  iamais  en  eflre 
csbranlez.Car  ce  que  les  menfonges  font  phif 
Joli  rcceus  que  la  vérité, cela  ne  vient  finon  de 
noltre  malice, que  nous  fommes  corrompus, & 
que  nous  fuyuon^  ce  qui  nou;  eft  propre,  &  ce 
qui  fc  rapporte  3  noUre  nature. Car  nous  fça- 
iions  qu'il  n'y  a  que  vanité  en  nous .  Q_iiand 
donc  Satan  nous  vient  mettre  fes  tromperies 
en  auant  pour  nous  brouiller,  nous  acceptons 
cela,&  y  courons,  il  ne  faut  point  qu'on  nous 
y  picque  .  Mais  il  faut  que  Dieu  befongne  en 
nous  par  la  vertu  de  fon  fainftEfprit ,  quand 
il  nous  veut  attirer  à  foy ,  qu'il  nous  reforme, 
voire  qu'il  nous  change  du  tout .  Et  ainfi  fur- 
montons  celle  tentation  :  quand  le  monde  fe 
dcsbauchera  à  mal, regardons  que  cela  procè- 
de de  la  malice  &  corruption  des  hommes. 
Mais  pour  mieux  cognoillre  côme  nous  pour 
rons  batailler  iufques  à  la  viéloire,  notés  bien 
ce  qui  ell  ici  dit  par  fainft  Piul,?erfj}e(dk-'d) 
es  chofes  que  tu  as  apfrinps  ,  0-  tjui  le  font  com- 
mises, f cachant  de tjui tu  les  tiens,  <y  que  tu  al 
cognu  les  f.iinfles  lettres  dés  topenfance.En  pre 
niier  lieu  il  monllre  que  nous  ferions  inconti- 
nent tranfporttz.fi  nous  n'eftions  munis  &  ar- 
mez de  la  vérité  de  Dieu.  Car  quelle  fagefle  y 
a-il  en  nous  de  tenir  le  bien,&  fuir  k  mal?Au- 
rons-nous  vne  telledifcretion  de  nature  ,que 
nous  foyons  addonnez  pluftoft  à  la  venté  que 
auxmenfongesPC'cll  tout  le  contraire.  Com- 
me i'ay  défia  dit,il  ne  faut  point  que  nous  aiU 
iions  a  l'cfcliolepourapprendre  menfonçes, 
illufions, tromperies:  chacun  fcra  fon  mai'ftre 


&  fon  doûeur  en  ceft  endroit. Or  quand  le  dia 
ble  de  fuperabondant  machine  tout  ce  qu'il 
peut.qu'rla  fes  fuppolls  pour  nous  diuertir  & 
desbaucher,pour  no'  esblouir  les  yeux  &  pour 
tout  rcnuerfer,  voila  le  mal  qui  redouble  .  Et 
ainfi  il  faut  bien  que  nous  ayons  dequoy  pour 
repouirer  le  mal .  Et  c'eft  ce  que  fainét  Paul 
monllre  en  ce  paflage.que  quand  nous  aurons 
bien  profité  en  i'cfchole  de  Dieu,  que  nous  au 
rons  prins  bonne  racine  en  fa  Parole, alors  cô 
bien  que  Satan  vfede  (es  prattiques&alluces> 
côbien  qu'il  vueille  tout  difsiper,&  qu'il  fem- 
ble  que  la  vérité  de  Dieu  foit  comme  anéan- 
tie, fi  cll-cc  que  nous  pourrons  perfi/ler&  te-- 
nir  bon  .  Car  la  venté  de  Dieu  a  la  vertu  de 
nous  rendre  inuinciblcs  contre  tous  menfon- 
ges, moyennant  qu'elle  foit  rcctue  de  nous,& 
que  nous  kiy  facions  l'honneur  qui  luyappar 
tient.  Voila  dont  quant  au  premier  article  qui 
ell  ICI  touché  par  fainél  Paulril  nedit  paslim- 
plement  i  Timothee  qu'il  foit  homme  ver., 
tueux  pour  ne  point  croiie  les  abus  &les  illu- 
fions aufquellcs  le  monde  s'addonnc  :  mais  il 
dit.Verfiffe  en  ce  que  tu  as  apprins  .  Comme  s'il 
difoit.S  tu  cftois  vn  homme  ignorant,  qui  lâ- 
mais"n'euftgoullé  la  vérité  de  Dieu, en  vain  ie 
t'exhorteroye  à  élire  ferme:  mais  maintenant 
puis  qu'ainfi  ell  que  Dieu  t'a  fait  celle  grâce 
de  te  recirer  à  foy , puis  qu'ainfi  eft  que  tu  as  la 
Parole, il  faut  que  tu  entres  hardimét  en  con» 
bat .  Nous  voyons  donc  ici  en  premier  lieu, 
quelle  grâce  Dieu  nous  fait  quand  il  luy  plaift 
de  nous  illuminer  en  fa  vérité  :  ce  n'eft  pas  feu 
lement  à  ce  que  nous  cognoifsions  le  bien, 
mais  que  nous  fçachions  aufsi  difcerner  le 
mal  pour  eftre  fur  nos  gardes  ,  que  nous  ne 
foyons  point  empoifonnez  de.',  nienfongesde 
Satan,  que  nous  ayons  celle  prudence  de  nous 
retirer  de  toutes  centatioH<:quand  il  nous  au- 
ra tendu  quelques  empefchemcns  ,  qu'il  nous 
les  aura  m:s  au  dcuant ,  que  toutesfois  nous  itt 

Nn.i. 


466 


SERMON     XXÎIT. 


foyorn-i.imaiç  furprin» .  Et  là  deffiis  nous  de- 
Hons  eftre  tant  plus  incitez*  faire  valoir  la 
parole  de  Dieu.Combien  que  nous  voyons  de 
grandci  contufions  &  troubles  en  ce  monde, 
^ue  nous  voyons  les  fedufteurs  gagner  beau- 
coup, &  (  comme  les  aurciUct  du  monde  font 
frctillantes)  qu'ils  acquièrent  plulîeurs  dil'ci- 
ples ,  que  nous  ne  l'oyons  point  empefcliez 
pour  cela.C'eft  ce  que  nous  auons  à  retenir  de 
ce  partage. Mais  il  y  a  encores  vn  autre  poind 
que  faind  Paul  adioufle  ,  c'cft  al'çauoir  que 
non  feulement  Tiniothec  auoit  edé  inftruit 
en  la  pure  dodrine  de  TEuangilc.dc  la  Loy  & 
des  Prophètes,  mais  aufvi  qu'il  (n  eHoiccoii- 
ûitué  gardien  ,  pourJa  difpcnfcr  aux  ajitres. 
Orilcflvray  qu'vn  chacun  de  nous  félon  la 
mefureeft  obligé  d'cnfeigner  fes  prochains: 
mais  il  y  a  ici  vne  circonftance  fpeciale  en  Ti- 
mothee  à  caufc  de  Tofficeic'eft.puis  que  Dieu 
l'auoit  ordonné  miniflrc  de  ù  Parole,  qu'il  c- 
lloit  comme  threforier&  dilpenfateur de  la 
dortrine  de  falut  ,  que  cela  le  doit  tant  plus 
enflamber  à  cefte  folicitude  &'  diligence  de  la- 
quelle fainft  Paul  a  parlé  ci  dertus.  Et  ainfi  no 
tons  bien  que  les  fidèles  doyuent  cftre  con- 
Itans,  quand  ils  verront  le  monde  s'aliéner  de 
Dieu,  qu'il  y  en  aura  des  rebelles  Se  des  obfti- 
tcz,  que  toutesfois  leur  foy  demeurera  vido- 
rieufe:maisles  mimftresde  la  parole  de  Dieu, 
ceux  qui  ont  quelque  charge  publique  d'enfei 
gnt-r.doyuent  monftrer  le  chemin,  Scy  z  plus 
griffue  condamnation  fur  eux  quand  ils  fe- 
ront volages ,  quand  ils  feront  efmeus  ou  e- 
ftonnez  voyans  quelque  confufîon  adiienir. 
Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir  en  ce 
paflàge, quand  fainû  Paul  après  auoir  parlé  de 
l'inftruûion  de  Timothee ,  adioufte  que  Dieu 
l'a  conftitué  gardien  de  la  doftrine,  afin  qu'il 
la  difpcnfaftaux  autres  :  comme  auAi  en  rn 
autre  lieu  il  dit ,  Ce  threfor-ci  nous  cft  com- 
mis. Il  adioulte  quant  &  quant ,  Q»f  Timothee 
ici  fi»  enfance  .lUni't  itp^TÎn!  les  fjiaites  lettres. 
Or  en  cela  il  lignihe  que  Timothee  auoit  rn 
plus  grand  aduantage  beaucoup  que  s'il  eurt 
elle  nouicc,  que  li  depuis  peu  de  temps  Dieu 
l'euft  attiré  à  la  foy,  &  qu'il  euft  efté  conuerti 
4'entre  les  Payens.  Il  crt  vray  que  fon  père  e- 
ftoit  homme  Paycn  :  mais  Dieu  luy  auoit  fait 
b  grâce  de  fuyurc  la  foy  de  fa  mère,  &  de  fa 
grand' mcre,  comaie  nous  auons  vcu  par  ci 
déliant. Ainlî  donc  il  auoit  efté  fidèlement  en- 
i'eigné,  &  quafi  auoit  cité  imbu  de  la  doflrinc 
de  Dieu  àdela  vraye  religion  auec  le  laift. 
Or  cela  fcroit  bien  requis  en  tous  minières 
delà  parole  de  Dieu:&  de  faift, quand  les  cJio 
fes  ont  efté  bien  ordonnées  en  l'Eglifc  ,  ceux 
où  il  Y  auoit  quelque  c  fpcrance  cltoyent  cn~ 
feignez  auec  vne  telle  diligence  ,  qu'ils  n'e- 
ftoycnt  pas  feulement  pour  apprendre  les  let- 
tres humaine':, mais  on  les  accouftumoitil'E- 
fcriturff  faincte:  Si  quand  ils  venoyent  en  l'aa- 
ge  de  vingt  ans,  ils  faifoycnt  mefraes  la  levu- 
re ««  l'Egljfe,  tfia  qu'ils prinlTwit  couragc  de 


*/lrc  tant  mieux  confcrmei.  Toot  cela  i  efté 
abbaftardi  quand  le*diable  a  gagné  ,!c  que  ce- 
fte horrible  dissipation  de  la  Papauté  eft  ve- 
nue. Mais  quoy  qu'il  en  foit,  cela  deuroit  e- 
ftrc  obferué  entre  les  Chreftiés,  que  pour  gar 
dcrbonnefcmencecn  l'Eglife,  ceux  qui  fera- 
blcroycnt  eftre  propres  pourcnfeigncr ,  que 
on  les  accoulttimaft  en  l'Efcnturelàinde  ,  & 
<^u'ils  y  tuflent  exercez  dés  Itur  première  en- 
fance.Mai>.  cependant  notons  que  fainft  Paul 
s'eft  addrefle  à  tous  ceux  qui  ont  eu  ce  priui- 
legc  d'juoir  dés  le  commencement  efté  in- 
ftruits  en  la  pure  doftrine  de  Dicu.Etc'eft 
encores  vn  poinû  bien  digne  d'eftre  obferué. 
Car  fi  vn  home  àl'aagede  foixaoteans,eftanc 
défia  vieil  &  caduque  a  cognoiflànce  de  l'Euan 
gile,il  faut  qu'il  s'efforce, puis  qu'il  a  erré  tou 
te  fa  vie,de  recôpenfer  ce  qu'il  a  perdu.  Maiï 
ceux  qui  ont  receu  la  vraye  &•  pure  doûrine 
de  tout  temps, que  doyuent-ils  faire?Ne  font- 
ils  pas  beaucoup  plus  obligez  à  Dieu  ?  Il  eft 
bien  certain. Voila  vncnfant  qui  aura  eftéba- 
ptizé  au  nom  de  noftrc  Seigneur  lefus  Chrift, 
il  ne  fçauraque  c'eftdes  ordures  &  abomina- 
tions de  la  Papauté,  il  aura  ouy  l'Euangile,  il 
en  aura  Icsaureilles  batues,deuantmefmeauc 
il  viene  en  aage  de  difcretion  on  l'aura  conti- 
nué en  cela  :  ne  faut-il  pas  qu'il  foitbien  in- 
grat Se  vilein,  finon  qu'il  rcl'ponde  à  vne  telle 
grâce  que  Dieu  luy  fiit,&  qu'il  ne  foit  plus  di 
ligent  a  reccuoir  ce  qu'il cogi'oift  eftre  de  U 
verité?Notons  bicndonc  qu'ici  S.Paul  repro- 
cher tous  ceux  qui  dés  leur  enfance  auront  c- 
ftédeuement  enfeignez,  fi  leur  aduient  dcfe 
desbauchcr  ,  qu'ils  auront  tant  moins  d'excu- 
fe  ,  &  méritent  d'eftrc  condamnez  au  double, 
puis  qu'âinfi  eft  qu'ils  fe  dcftournent  de  la  do- 
ûrine  laquelle  les  auoit  enfcigncE  de  fi  long 
temps,  &  en  laquelle  ils  deuoycnt  cftre  fi  bien 
confermez.  Et  ceci  cft  notamment  dit  pour  la 
ieuncfle  qui  a  cité  inftruite  en  l'Euangile. 
Beaucoup  ont  erré  longuement  :  or  il  ne  fauc 
pas  pourtant  qu'ils  foycnt  lafches  fi  Dieu  les 
appelle  quand  ils  font  défia  paruenus  en  aage 
d'homme  ,  ou  qu'ils  ont  parte  la  plus  grand 
part  de  leur  vie:  mais  (  comme  i'ay  délia  dit^ 
ils  fe  doyuent  loliciter  à  cheminer  tant  mieux 
pour  rccompcnicr  le  temps  parte  qui  a  efté 
perdu,  &:  qui  a  efté  inutile.  Mais  quoy  qu'il  ea 
îbit,  les  ieunes  gens  qui  n'ont  iamais  cftéab- 
bruucz  de  faufle  dodtrine  ,  qui  iamais  n'anc 
prins  vn  mauuais  pli, mais  qu'ils  ont  efté  pre- 
ucnus  de  la  grâce  de  Dieu  pour  cftre  duits,  Si 
pour  s'accouftumcr  dés  le  commencement  i 
tenir  le  chemin  de  falut,  ceux-là  quand  ils  fe 
dcftournent  de  la  vérité  ,  Se  que  le  diable  les  n 
bien  l'ceu  gagner  ,  ne  faut-il  pas  dire  qu'ils 
fontplus  que  mal-heureux  ,  &  qu'ils  ont  per- 
du vn  bénéfice  plus  qu'ineftimable?  Et  neant- 
moins  on  voit  ce  qui  en  eft  .  Car  ceux  qui  ia- 
mais n'ont  cognu  que  c'eft  des  fupeiftition» 
de  la  Papauté  ,  deuroyent  eftre  des  pctis  Afi* 
gcs  :  &:  on  voit  qu'ils  n'ont  quafi  nulle  reli- 
gion. 


SVR   LA     II.    A    TIMOTH. 


4(î7 


gion,  qu'il  y  a  vn  mcTprij  de  Dieu  ,  &■  vne  im- 
pieté il  grande, qu'il  fitnble  qo'  lamais  n'ayct 
entendu  vn  friil  mot  de  J'£iiangiie, qu'ils  vueil 
lent  defpiter  Dieu  .comnie  il  lainais  iln'tiift 
approché  <i'eux:&  d'autant  plus  qu'il  s'ell  ren 
du  familier,  il  femble  qu'ils  prenent  plailîr  à 
fe  dtlpiter  à  l'encontre  de  luy  comme  des  dia 
blés  enragez.  Car  qu'efî-ce  de  la  lenncffc  tel- 
le qu'on  la  voit  ?  A-on  iamaisouy  parler  d'v- 
pe  impieté  lî  diabolique  comme  elle  eu  au- 
icurd'liuy?  £t  on  le  voit.  Ainfi  donc  il  y  a  vue 
horrible  condamnation  apprcftce    fur    tous 
ceux  qui  dés  leur  enfance  auront   elle  enfei- 
gnez  purement  en  la  doûrine  de  lalut ,  &  ne 
refpondent  point  à  cela  ,  monftrans  vnc  plus 
grande  vertu  &  fermeté  pour  reiîfter  à  tous 
menfonges  Si  faulîés  doftrines,  que  ceux  qui 
font  encores  nouices,&  qui  n'ont  pas  de  long 
temps  cognu  que  c'eftoit  de  la  venté  de  Dieu. 
Voila  ce  que  nous  auons  à  obi'eruer  en  ccfte 
circonllance.Or  faiad  Paul  adioul>e,Sf«/M«f 
tiufti  lie  cjH'  tu.  Pus  apfriBS.  £n  quoy  il  monftie 
que  nous  ne  pourrons  point  eiirc  arreftcz  en 
▼  ne  dodrine,  qu'il  n'y  ait  bonne  certitude. 
Car  lî  nous  voulons  tenir  bon, &:  ne  point  flé- 
chir,&  cependant  que  nous  nefoyons  point  af 
feurei.que  fommcs-nous  finon  opiniaftres? 
Ce  n'ell  point  vertu  que  cela  .  Amlî  donc  de- 
uant  que  nous  refoudre  d'eftie  conftansen  v- 
ne  choie,  il  faut  en  premier  lieu  qu'elle  nous 
{bit  bien  iîgnce  ,  &  que  nous  en  ayons  pleine 
certitude,  pour  dire.  Ceci  eft  authentique,  il 
n'en  faut  plus  douter,  ce  n'eft  pas  vne  chnfc 
de  laquelle  i'aye  feulement  opinion,  pourdi- 
re,Ielecuideainfi,ilmcle  fcmblc:mais  la  cho 
fe  cft  telle.c'ell  la  rente  infallible.  Si  nous  ne 
auons  cela  ,  nous  ne  ferons  que  nous  opinia- 
flrer  quand  nous  voudrons  tenir  bon  .  Voila 
donc  pourquoy  notamment  fan  ft  Paul  expri- 
me que  Timothee  fçauoit  de  qui  il  auoit  ap- 
prins.Or  ici  nous  voyons  quand  iioftre  foy  fe 
la  deuement  réglée,  icdi  celle  que  Dieu  ap- 
prouue  :  caries  Papi/lcs  fe  vantent  d'aiioir  la 
foy  ,  autant  en  font  les  Turcs  Se  les  Payens: 
mais  quoy?Ce  n'eft  qu'vn  cuider,  vne  opinion 
qu'ils  ont  conceue .  Voire,  mais  on  les  y  voit 
du  tout  arreftez.  Er  bien, ils  font  opinia/îres, 
ce  n'efl  pa^  louange  :  car  on  ne  doit  pas  te- 
nir pour  doftiine  ,  vnc  chofe  de  laquelle  ils 
n'ont  nulle  approbation  .  Il  faut  donc  que 
nous  apprenions  à  difcerner,  fi  nous  voulons 
auoir  vne  foy  bien  réglée  ,  c'tft  aiçauoir  que 
nous  fçachions  quelle  cfl  la  vérité  ,  que  nous 
difcerntons  entre  la  clarté  &  les   ténèbres. 
Voila  donc  quant  à  vn  item  .  Cependant  nous 
fommcï  aiif.i  admoncflcz  de   n'ellre   point 
trop  haftif^  poumons  précipiter,  &  pourrcce 
uoit  vne  doftrinc  qui  nous  tA  incognuc:fî  toft 
^u'on  aura  parlé,  ii  nous  embraflbns  ce  qu'on 
BOUS  aura  dit,  cela  tflvne  légèreté  friuolc'.  Il 
cft  vray  qu'il  nous  faut  rendre  docile»  à  Dieu, 
nous  deuons  auoir  vne  telle  promptitude,  que 
&  cofl  qu'il  aun  ouueit  fa  bouche,  nont  foy  5« 


attentifs  pour  efireobeiflàns,  voire  fans  ré- 
pliquer: mais  il  faut  auoir  cognu  deuant  ,  ii  ce 
eA  Dieu  qui  parle.  Sur  cela  donc  que  noui  sii- 
fcernions  .  Et  ainfi  gardons-nous  d'vne  fol- 
le légèreté  ,  pour  receuoir  indifféremment 
&•  fans  difcrction  tout  ce  qu'on  nous  dir». 
Car  ceux  qui  font  ainfi  légers  à  croire, ils 
font  faciles  à  eftre  cfgarez  ,&  en  peu  d'heu- 
re :  on  ne  fçait  quand  on  les  a  perdus  ou  ga- 
gniz.  Voici  donc  vne  admonition  bicnvtile, 
QucMous  (cachions  élire  auecdifcietion  ,  Se. 
pour  ce  taire,  que  nous  ayons  cognu  aupara- 
uant  (i  c'eft  la  vérité  ou  non.  Or  à  l'oppoiîte 
nous  deuons  tftreaduertis  de  ne  point  com- 
b.ître  auec  obftination ,  quand  nous  ne  ferons 
pas  du  tout  bien  afleurezrcar  c'tft  comme  fer- 
mer la  porte  à  Dieu  ,  lî  nous  voulons  mainte- 
nir vnc  opinion  doutcufe.  Comme  nous  voy- 
ons beaucoup  d'ignorans ,  qui  ont  honte  d'e- 
ftre  inlfiiiits  :  Ho,  iefçay  que  c'eit  de  viure, 
i'ay  trop  long  temps  tflé  au  monde,  ie  ne  fuis 
pas  vn  petit  enfant.  Voila  que  diront  des  fols 
tflourdis.qui  iamais  n'ont  rien  ccrché  en  tou- 
te leur  vie:  toutesfois  voila  vne  audace  dig. 
bolique, quand  les  hommes  font  ainfi  rebelles 
&  obftincz  .Car  ils  rcpouiTent  Dieu  fiirieu- 
fement  :  entant  qu'en  eux  tft, ils  empefchent 
que  fa  grâce  ne  puille  paruenir  i  eux  .  Ainfi 
gardons-nous  d'obftination  en  choies  dou- 
teufes  :  &■  fiiyuant  la  règle  qui  nous  cft  don- 
née de  fainft  Paul ,  que  nous  ne  foyons  point 
conftans  finon  là  où  nous  cognoiftrons  que 
c'cft  Dieu  qui  a  parlé  à  nous  ,  &  que  nous  a- 
uons  (i  venté  infallible  .  En  fomme  ,  quand 
nous  aurons  erré  en  ignorance,  apprenons  â 
tourner  bride  :  &  fi  Dieu  noMs  fait  la  grate  de 
nous  tendre  la  main  ,  de  nous  aduertir  que 
nous  ayons  mal  fait,  ayons  honte  de  la  faute 
que  nous  auons  c<  mmifc:mais  cependant  que 
nous  foyons  prefts  &  appareillez  d'eftre  re- 
dreflez  comme  il  cftbefoin,&  que  nous  ayons 
cefte  docilité  en  nous ,  d'eftre  amiables  ,  de 
nous-  rendre  obeiflans  à  ce  que  nous  cognoi- 
•ftrons  élire  bon  ,  puis  que  du  preinier  coup 
nous  n'aurons  point  efté  fi  bien  aduiftz  qua 
de  tenir  le  droit  chemin  de  lîilut .  Or  mainte- 
nant il  reftc  de  fçauoir  dont  viendra  vnc  tel- 
le certitude  .  I'ay  dit  qu'il  faut  que  nous  fça- 
chions que  c'eft  de  la  vérité  que  nous  auons 
receue.  Voire,mais  cefte  fcicnce-la  dontpro- 
cede-elle?II  femble  que  fainft  Pa  1  fe  conten- 
te ici  que  nous  ayons  vn  homme  de  bien  &•  ap 
prouué,  qui  nous  ait  cnfeignez  .  Car  c'eft  luy 
quicftdo£leurdeTimotheci(Scildit,SMf/>^nt 
ie  <jui  tH  l'as  affrins  .  Si  eft-ce  que  noftre  foy 
feroit  par  trop  débile,  &  mal  fondée,  fi  elle  fe 
addrcffoitau  regard  d'vn  homme  mortel;ilne 
y  a  que  Dieu  fcul  qui  puiflccftre  autheur  de 
noftre  foy.  Comment  donc  eft-ce  que /âiuft 
Paul  r'appelle  ici  Timothee  au  regard  de  fa 
perfonne-Or  notons  que  fainft  Paul  n'a'poirït 
ici  voulu  magnifier  m  fagclTe  qui  fuft  en  luy. 
ni  preud'hommie,ni  chofc  fcœblablcpour  di- 

Nu.ir. 


\ 


4^S 


SERMON 


rc  que  ecla  fuft  fut'fiûnttmais  le  principal  a  e- 
ftc,  qu'il  cftoit  coiiftrtué  Apoftre  ,  qu'il  auoit 
vnc  vocation  celefte  ,  qu'il  elToit  eiiuoyédc 
Dieu.  Voiladonc  lur  qiioy  il  veut  q'ie  Timo- 
ihecs'appiiye.Ilcft  Tray  qu'il  monftroit  bien 
paretFect  que  ce  n'eftoit  point  en  vain  que 
Dieu  l'euft  appelé  :  car  nous  içauons  comme 
il  s'eftoit  acquitté  loyaument  de  Ion  dcuoir, 
quelle  intégrité  il  y  a  eu  en  luy, quelle  fainfte 
té  de  vie.  Il  pouuoit  donc  eftre  vn  miroirde 
toute  pcrfeftion.  Mais  lî  faloit-il  q  ceci  pré- 
cédai!,c'eft  afçauoir  qu'on  cognuft  que  Dieu 
l'auoit  eltablià  l'on  feruice.&quela  doftrine 
qu'il  porte, n'eft  point  terreftre,  mais  la  pure 
vérité  de  nortre  Seigneur  lefus  Chrift.  Ainiî 
-en  fomme  ,  nous  royons  que  pour  bien  eftre 
afleurez,  &  auoir  vne  foy  refolue  &  caftante, 
•1  nous  faut  eftre  perfuadez  que  Dieu  a  parlé 
à  nous  ,  &  que  c'cft  luy  qui  nous  a  enfeigiiez, 
côbien  que  ce  foit  efté  par  le  moyen  des  hom 
mes. Et  il  rîous  difons.l'ay  vn  fage  dotleurrce 
luy  qui  m'a  inftruit  eft  vn  home  bien  expert, 
&  de  fainfte  vie  :  tout  cela  ne  fera  qu'aide  in- 
férieure.Il  faut  donc  qae  nous  puifsions  pro- 
tefter  que  nous  auons  Dieu  qui  nous  efclaire 
par  fa  parole, &  que  ceux  qui  nous  ont  epfei- 
gnez  font  fes  ihiniftres  ,  &  qu'ils  nou5  ont  in- 
ftruits  purement ,  &  fans  aucun  meflinge  ne 
corruption ,  qu'ils  nous  ont  apporté  ce  qu'ils 
ont  receu  de  luy  ,  &  de  fa  propre  bouche.  Or 
on  demandera  comment  nous  pourrons  auoir 
vne  telle  certitude.il  eft  certain  que  ce  ne  fe- 
ra point  de  noftre  induftrie  ni  prudence, miis 
il  nous  faut  prier  Dieu  qu'il  feelle  en  nos 
cœurs  par  fon  S.Efprit  la  vérité, afin  que  nous 
ayons  vnc  arre  pour  n'eftre  point  empefchcz 
que  fadodVrinene  foit  toute  refolue  en  nous, 
comme  vn  marché  qui  aura  efté  contraûé  Et 
voila  pourquoy  ce  titre  eft  attribué  à  l'Efprit 
filom.S.Tî  de  Dieu, qu'il  eft  l'arredenoftreadoptiô.  &  q 
i.Cori.i.  c'eftle  feaupar  lequclDieu  ratifie  fa  parole,& 
11-  qui  la  rend  authentique  en  nos  cœurs.  Voila 

Ife.  II. 1*  pourquoy  aufsi  il  eft  nomé  Efprit  de  pruden- 
ce &de  difcretiô. Notons  bien  doc  qu'il  nous 
faut  eftre  afleurez  de  Dieu  pour  auoir  vn  tel 
fondement  de  foy  ,  que  le  diable  ne  la  puifle 
iamais  ruiner  quoyqu'ilbrafle.quoy  qu'il  prat 
tique, mais  que  nous  pourfuyuios  toufîours  le 
droit  chemin,  iufqu'à  tant  que  nous  ayôs  vain 
en  tous  les  combats  aufquels  Dieu  nous  vou- 
dra exercer  en  cefte  vie  tranfitoire.Or  mainte 
nant  fi  on  demande  aux  Papiftesà  quelles  en 
feignes  ils  font  fi  opiniaftrcs.que  pourrôt-ils 
alléguer  pour  leur  defenfe?  Ileft  vray  qu'ils 
diront ,  Nous  voulons  cnfuyure  nos  pcres  Se 
nos  anceftres:ils  mettront  en  auant  leur  mère 
fainfceeglife;  mais  quand  tout  cela  fera  confi 
Heré,  leurs  percs  quels  font-ils,  &  leurs  ancc- 
ftres,{^nôn  de  pon:es  bc'fteseriantev'Et  quant 
â  Icui  eglifj(qu'lls  appellent  leur  mere)c'fft 
vne  fynago[;ui.'  de  Satan,  laquelle  a  dcchalFé 
&  banni  Icfus  Chrift  de  fiy.  Ainfi  donc 
nous  voyons ,  coniblen  qu'ils  foycnt  comme 


X  X  II  I. 

furieui  pour  reietter  toute  bonne  ioàrine, Se 
que  le  diable  les  ait  enforcelez  pour  fmurc 
les  illufions  dont  ils  ont  efté  cnyurcz  de  tout 
temps,  que  toutesfois  ils  n'ont  nulle  fermeté 
en  eux  :  que  s'ils  auoyent  entré  en  leur  con- 
fciencc  pour  examiner  à  bon  efcient  s'ils  ont 
vne  bonne  certitude,  ils  le  trouueroyent  là 
co4nme  efperdus.  Or  il  ne  fe  faut  point  esba-« 
hirdes  Papiftes  :  car  ils  n'ont  qu'vn  abyfme 
confus, &  leur  fondement  eft  le  gouffre  d'en- 
fer: mais  c'eft  pitié  qu'entre  nous  où  l'Euan- 
gile  fe  prefche  ,  où  nous  auons  l'intelligence 
tat  claire  que  rien  plus,  5c  combien  que  Dieu 
nous  appelle  à  loy.que  nous  oyons  la  voix  de 
ce  grand  Pafteur  Icfus  Chrift, que  neâtmoins 
il  y  en  ait  qui  foyent  R  volages  ,  qu'il  n'y  ait 
nulle  fermeté  en  eux,  qu'ils  ne  fçachent  fi 
c'eft  Dieu  qui  parle  ou  non.  Car  côbien  y  en 
a-il  qui  croyent  à  l'Euangile?  tellement  que 
s'ils  voyent  des  troubles  &  des  confufions, 
ils  ne  s'en  foucient  gueres  .Et  pourquoyfCar 
ils  n'ont  iamais  prins  nulle  racine.  Il  eft  vray 
qu'il  leur  femble  que  ce  qu'on  leur  dit, eft  bô, 
■  Se  l'approuuent  :  mais  tant  y  a  qu'il  s'en  faut 
beaucoup  qu'ils  ayent  prins  cefte  concliifîon 
en  euX;de  tenir  bon  iufqu'à  la  fin,&  pour  dire 
que  c'eft  à  Dieu  auquel  ils  ont  creu  ,  &  qu'ils 
n'ont  point  efté  incitez  à  la  volée  pour  eftre 
adonnez  à  fuiure  le  confeildes  hommes,  mais 
que  Dieu  les  a  afleurez  qu'ils  ne.fçauroyét  er 
rer  en  obeiflant  à  fa  Paroleril  y  en  a  bien  peu 
qui  tendent  à  ce  but.  Et  voila  pourquoy  aufsi 
Dieu  les  laifle  en  inquiétude,  qu'ils  font  com 
me  pendans  à  m  filet,  &  leur  foy  n'a  nulle  te 
nure.  Or  tant  y  a  q  le  ceci  n'eft  point  dit  en 
vain,  qu'il  faut  fçauoir  de  qui  nous  auons  ap- 
prins  la  doftrine.Or  quand  fiinft  Paul  a  par- 
lé ainlî.il  adioufte,  Q^ff  T'maihee  pcunoit  eflre 
reniu Çnge  pur  les  fjin fies  lcttrts,voirc  finitan  t 
la  foy  cjul  efl  en  lefiis  Chrifl-.  Voici  vn  beau  ti- 
tre &  excellent  que  fain  Paul  attribue  i  l'E 
fcriture  faincïe,  que  là  nous  auons  vne  droite 
fagefle&  pleine.  Mais  cependant  il  nousad- 
uertit  que  (î  nous  cuidons  eftre  fages  en  no- 
ftre ccrueau  ,  iamais  nous  ne  profiterons  en 
l'efcole  de  Dieu,  8c  qu'il  faudra  que  nous  de- 
meurions confus  en  noftre  arrogance.  Com- 
me ceux  qui  veulét  iiiger  à  leur  fantafie,ceux 
qui  ne  daignent  pas  interroguer  la  bouche  de 
Dieu, mais  cuident  eftre  aflcz  habiles  po^irdi 
fcerner  entre  le  bien  &le  mal: Dieu  fe  moque 
ra  d'vne  telle  prefomption,Et  bien, vous  vou 
Icz  eftre  gians  doftcurs  fans  auoir  efté  enfei 
gnez:  allcz,alle2,pour  vous  côfondre  8c  vous 
abyf  ner  du  tout. Voila  donc  côme  Dieu  trait 
tcia  ceux  qui  fe  côhiMitainfi  en  leurs  fens  pro 
pres.Et  pour  cefte  caufe  fiirtl  Paul  d:fant  en 
ce  palFageque  noftic  fageflc  eft  en  l'Efcritu- 
re  /ainftc,incftrc  que  de  ncos  il  ne  f.i\n  point 
que  nous  penfi  ins  auoir  vne  telle  perfefliort 
que  de  cogrtoiftrc  ce  qui  fera  bon  Se  droit; 
mais  pliift'^ft  que  nous  I  yons  vuidcs  dérou- 
tes tciici  folies  :  c'cft  que  nous  ne  cii'dioh*' 

point 


s  V  R    L  A    II.     A    r  I  M  O  T  H. 


46- !> 


Sw. 


^oint  eftre  fages.Qiiei  fera  donc  le  commen- 
cement de  nortrefageffe?  Que  nous  foyons 
fol";, comme  ûinQ.  Paul  en  parle  en  la  prcmie 
re  Epiftredes  Corinthien?. Il  eitvray  que  cé- 
da de  prime  face  femble  eftre  rude  ,  que  nous 
foyons  fols  pour  eftre  fages.Mais  cependant 
que  l'homme  aura  vne  feule  goutted'opinion 
de  foy, qu'il  penfera  aiioir  quelque  bon  efprit 
pour  fegouuerner.Dieu  IcdefJaigne.&ledef 
auoue  pour  fon  difciple.  Ainlî  donc  il  ne  re- 
ftc  (înon  que  nous  proteftions  que  nous  fom- 
mes  fols, que  nous  ne  fçauons  que  c'eft  de  vi- 
wre  ,  iufques  à  ce  que  Dieu  non  s  ait  tendu  la 
niam, qu'il  nous  ait  percé  l'aureille  (comme  il 
en  eft  parlé  au  Pfcaume  quarantième)  afin  de 
nous  inftruire.  Voila  donc  ce  que  faintt  Paul 
i  ici  entendu, en  difant  que  rEfcriture  fainfte 
BOUS  peut  rendre  lages.Or  cependant  faifons 
ceft  honneur  à  la  parole  de  Dieu, de  nous  hu 
milier  fous  icelle,  &  de  nous  arrcller  à  ce  qui 
eft  là  contenu  ,  fçachans  quand  nous  l'aurons 
apprins, qu'il  ne  nous  faut  rien  plus, qu'il  n'eft 
point  queftion  d'y  rien  adioiifter.nous  ferons 
alTez  ùges  quïdnousferôsdifciplesde  Dieu: 
mais  lî  nous  voulons  paffer  outre,  il  faudra 
que  le  diable  foit  noftre  doûeur.Car  de  nous 
niefmesfcommei'ay  dit)que  comprendrons- 
nous?  Or  voici  Dieu  qui  sous  fait  cefciende 
nous  enfeigner,  il  s'accommode  à  noftre  ru- 
defle  tant  priuément  que  rien  plu;:  mais  tant 
y  a  qu'il  protefte  qu'il  n'y  aura  que  redire, 
que  nous  ferons  parfaitement  inftiuits  quand 
nous  l'aurons  efcouté.Et  fi  nous  fommes  tant 
fretillans  de  ne  point  acquiefcer  à  la  pure  & 
fimple  parole  de  Dieu,  en  voulant  auoir  le  ne 
fçay  quoy  d'auantage, n'eft  -ce  pas  raifon  que 
Satan  nous  poflede.S:  qu'il  nous  dcftourne  du 
droit  chemin,  afin  que  nous  vaguions  comme 
beftes  efgareesfEt  ainlî  (comme  i'ay  dit)fAi- 
fons  ceft  honeur  à  la  parole  de  Dieu,  de  nous 
tenir  en  l'obeiflance  d'icelle.  Se  luy  attribuer 
toute  perfeûion  de  fageffe.  Et  au  refte,not55 
bienaufsi  que  lainft  Paul  n'a  point  adioufté 
fans  caufe  ,(^u-e  nous  foyons  ainfi  nifsrigneKpar 
laFoy  qi-fefl  '"■  Iffus  Cfcr/'/î-.Car  ce  n'c-ft  point 
aflez  d'auoir  la  letlure  fimple  de  l'Efcriture 
fainftcraais  il  faut  que  nous  croyôs  en  Dieu, 
que  noiîs  foyonsa-fleurez  de  fa  vérité  pour  ne 
point  vaguer.  Voila  les  luifs  qui  ont  la  Loy 
&  les  Prophètes  toulîours  en  main  ,  ils  les  li- 
fent  en  leurs  fynagogues  ,  mais  cependant  ils 
demeurent  toufîoursaueugles.  Et  pourquoy? 
Car  ils  ne  tienent  point  le  droit  chemin,  ils 
ne  fçauent  que  c'tft  d'appliquer  l'Efcriture 
fainftcàbon  vfage.  Autant  en  cît-il  de  ceux 
qui  par  curiolîté  liront  l'Efcriture  fainfte.  Il 
y  en  a  d'aucuns  qui  veulent  fçauoir  beaucoup 
pour  en  dcuifer:  &  bien,  ils  fueillettent.  Mais 
quoy  ?  Au  bout  de  leur  vie  ce  fe^a  comme  du 
premier  iour  ,  d'autant  qu'ils  n'ont  point  eu 
vn  efprit  arrcfté  ,  qu'ils  n'ont  tenu  nullle  rè- 
gle.Les  autres  font  menez  d'.imbition, les  au- 
tres tafclicnt  de  perueitir  rEftriture  faincle, 


qu'ils  ont  vne  malice  certaine  ,  comme, nous 
en  voyons  beaucoup  qui  ont  vn  efprit  enucni 
mé,&quine  demandent  finon  qu'l  infeAer 
tout ,  ils  font  tortus  comme  ferpens  :  il  faut 
donc  qu'Us  peruerttflent  toute  fimplicité.Tel 
les  gens  ont-ils  iamais  profité  en  l'Efcriture 
faindefNô:  toutesfois  elle  ne  perd  point  ceft 
office  que  faind  Paul  luy  attribue,  c'eft  de 
nous  inïtruireen  toute  perfcilionde  fagcirc. 
Ouy  bien:  mais  (comme  l'ay  Jcfiadit)  il  mec 
not,iment,L.f  fôji  en  Ufas  Chri(l.Et  pourqiioy.' 
Car  il  eft  dit  au  troiiîeme  delà  tecondc  auK 
Corinthiens  ,  que  lefus  Chrift  eft  l'aine  de  la 
Loy, en  lorte  que  la  Loy  eft  accomparce  à  vu 
corps  mort  qui  n'ha  point  de  vigueur  ,  ne  de 
vertu, ne  de  vie  ,  quand  Icfus  Chrift  en  eft  fe- 
paré.Qiie  faut-il  donc?  Si  nous  voulonspro- 
fiter  en  l'Efcriture  fainde,  apprenôsde  nû)us 
addrefler  à  noftre  Seigneur  lefus  Chnft.  Et 
comme  fainft  PauU'appellecn  ce  paflàge-la 
l'ame  de  la  Loy,ou  l'cfprit:  auf,!  envn  autre 
partage  il  dit  que  c'en  eft  la  fia.  Ne  voulons-  Kont.is. 
nous  point  donc  tracaffer  en  forte  que  ce  foit  4. 
peine  perdue  &  inutile  de  nous  eftre  exercer 
en  l'Efcriture  fainûePAuifons  de  no*  addref- 
fer  droit  à  lefus  Chrift:  car  c'eft  auf  i  en  luy  Colof.l.} 
que  font  enclos  les  threfors  de  lagefle  S:  in- 
telligence.L'Efcriture  fiinde  quelle  eft-clle 
lînoH  vn  miroir  pour  nous  faire  contempler 
noftre  Dieu?  N-ius  fçauonsque  noftre  fouiie- 
rain  bien  ,  noftre  félicité  &  gloire  ,  c'eft  que 
Dieu  fe  reuele  à  nous.  Or  eft-ilainfi  que  le- 
fus Chnft  eft  l'image  viue  eu  laquelle  Dieu  fe 
reprefente, comme  fa'nft  Paulen  parle  au  cha 
pitre  fuyuaiitdecefte  féconde  epiftreaux  Co 
rinthiens.  Puis  qu'ainfi  eft  donc ,  nous  ne  fe- 
rons que  vaguer  en  toute  noftre  vie,  &  errer, 
encores  que  nous  lifions  rEfcriture  fainfle.fî 
ce  n'eft  que  nous  (uyuiôs  la  doftrinc  qui  nous 
eft  ici  déclarée  :  c'eft  que  nous  cognoifsions 
Icfus  Chrift,  les  biens  qui  no«s  font  enuoyez 
par  luy,  &:  lefquels  il  nous  elaigit ,  comme  il 
ha  les  threfors  infinisde  toute  fagclTe.&de 
toute  iuftice.dc  toute  fain(!^eté,de  vie  en  fom 
me,&de  falut.  Ainlî  nous  voyons  quj  ce.inot 
n'eft  pas  faperflu  ,  quand  faind  Paul  dit  que 
nous  pourrons  eftre  rendus  figes  par  l'Efcri- 
ture fainite,  voire  iî  nous  l'appliqu  jus  à  fça- 
uoir que  c'eft  de  lefus  Chriit  ,  pour  mettre 
toute  noftre  foy  en  luy.  Or  d'autant  que  le 
monde  n'a  point  fiiyui  ceftc  règle,  voila  pour 
quoy  on  a  fi  mal  profité  en  l'Efcriture  iain- 
fte.II  eft  vray  que  la  plus  part  n'a  tenu  conte 
de  fçauoir  quelle  eftoit  la  venté  de  Dieu  ,  on 
aptnfé  que  c'cftoit  pour  les  grans  doftcurs 
que  l'Efcriture  famflea  cfté  donnée, tcllemét 
que  les  gens  rBariez,&:  nobles,  &  marchans.S: 
laboureurs, &  gens  demcftier.ont  quicté  cela: 
Nous  fommes  laics(ont-il .  dit)aou;  fommes 
feculiers:tellcmcnt  qu'ils  fe  font  piiuczdu  te 
ftament  de  leur  Père  celefte:  &  par  ce  moyen 
fe  font  forclos  de  fon  héritage  ,  entant  qu'en 
eux  eftoit. Voila  donc  vue  ingratitude  horri- 

Nn.iri. 


470 


SERMON     XXIII. 


hic  qui  a  régné  au  monde,  c'cft  que  ce  threfor 
^ui  nous  cftoic  donné  en  PElcriture  fainfte, 
n'a  point  eftc  receu,  que  nul  n'y  a  voulu  elhe 
attentrf.Maii  il  y  a  eu  vnplusgr.ind  mal.c'eft 
^ueceux  qui  penfoyent  ellrc  les  plus  liabiles, 
iicqui  ont  elle  intituler  doûeur»,  n'ont  pas 
daigné  regarder  l'Elcriture  fainûe.  Et  qu'ain 
il  foit.il  y  a  trente  ans  qu'il  n'eftoit  point  que 
ilionde  lire  la  Bible  pour  enregraaddoâcur: 
que  fi  en  toute  l'Italie, Frice,&  toui  les  pays 
^u  monde  on  euft  demandé  &  enquis  de  la  »e- 
litéà  ces  grani  clercs, s'ils  auoyent  leu  toute 
la  Bible  ,  ils  euflent  confefle  que  non.  Car  ils 
eftoyent  occupez  àdeschofes  plus  grandes, âc 
leur  lenibloit  que  la  Bible  n'eftoit  rien  au  prix 
de  ce  qu'ils  auoyent  leurs  déterminations  des 
fainfts  Conciles:ils  auoyent  leurs  Bobulaires, 
cii  ils  s'appliquoyent ,  &  eftimoyent  la  Bible 
quali  comme  la  th-eologie  des  fimples ,  &  des 
petis  clergeons.  Voila  donc  corne  vn  tel  thre- 
for de  fagelle  a  efié  melprifé,  &  que  ceux  qui 
auoyent  la  charge  de  conduire  les  autres  ont 
efté  poures  aueugles:&:  quand  ils  ont  leu  l'£- 
fcriture  faincte,  il  eft  vray  qu'ils  l'ont  approu 
uee ,  mais  il  n'a  point  efté  queftion  de  cher- 
cher là  Icfus  Chrift ,  &  les  grâces  infinies  que 
Dieu  nous  a  données  en  la  pcrfonne  d'iceluy: 
mais  il  a  falu  chercher  mille  contrariété!  fri- 
«ioles,&:  l'Efcriture  fa;nde  a  efté  tirée  par  les 
cheueux  ,  en  forte  qu'il  y  a  eu  vne  horrible 
contuiion  &  facrilcge, quand  vne  chofe  li  fain 
fte  a  eftéconuertie  à  l'appetit  des  hommes:& 
Biefmes  ils  n'ont  point  eu  honte  de  l'apptller 
vnnez  de  cire  ,  voire  pour  la  prophanerdu 
tout.  Et  on  voit  bien  par  cela  qu'ils  fe  font 
mocquez  pleinement  de  Dieu  ,  Et  l'Efcriture 
fcintic  n'eft  qu'vn  nez  de  cire. Et  auiourd'huy 
quand  ils  difputent  contre  nous  ,  voila  leurs 
belles  allegatiôs, qu'ils  difent  qu'il  n'y  a  point 
d'arreft  en  l'Efcriture  fainûe  ,  qu'on  ne  f^ait 
«omme  on  la  doit  prédrc  ni  eipofcr.mais  que 
il  fe  faut  arrcfter  aux  faindls  Conciles,  &  à  ce 
quia  efté  làdcterminé.  Car  (difent-ils) puis 
^ue  l'Efcriture  fainfteeft  vn  nez  decire.on  la 
pcHt  tourner  çà  &  là  comme  on  veut.  Nous 
voyons  donc  côme  le  diable  a  dominé  du  tout 
à  bride  aualke  «n  ccfte  maudite  âc  exécrable 
■papauté.  Or  d'autant  plus  deuons-nous  bien 
ucttr  ce  paflagc.voyant  que  le  fainû  Efprit  a 
voulu  remédier  à  vne  telle  confuiîon,  &  fi  in- 
fernale,qiu»d  il  dit, Mes  arnis,  il  eft  vray  que 
Touii  aurez  le  threfor  de  toute  fageffe  quand 
TOUS  aurez  la  Loy  Se  le»  Prophètes  :  niait  ce- 
pendant fi  faut-il  que  tous  foyez  addrelFez. 
Car  fi  voui-vous  gouuerncz  à  voftre  phanta- 
fie,qiie  TOUS  vouliez  fuyure  vos  appctis.noftre 
Seigneur  permettra  que  vous  ne  tiendrez  nul 
ckcinio,  ii  que  lanuis  ruas  ne  patuicndrcz  au 


but:comme  nous  auons  reii  par  ci  deiunt,  ^ue 
il  y  a  des  apprentis  qui  jamais  ne  s'auancent, 
mais  pluftollrecult-n t. Que  faut-il  donc; Qu_e 
vous  cherchiez  IefusChnft,&  quand  vous  l'a» 
rez  trouué,  que  vous  preniez  tout  voftre  con- 
tentement en  luy  ,  que  vous  fçachiez  que  d'à» 
uoirla  foy  en  fon  Euangile,c'eft  toute  voftre 
petfeftion.  Voila  donques  ce  que  nousauont 
à  noter  de  ce  paflàge.  Et  retenons  aufsi  com- 
me il  faut  poifer  ce  mot  de  Tay  :  car  ce  n'eft 
point  aflez  d'auoir  cognu  lefus  Chrift  d'vne 
telle  forte  qiie  font  les  incrédules, mais  il  faut 
que  noftre  foy  foit  fondée  en  luy,&  que  nous 
le  receuions  comme  celuy  qui  nous  eft  confti» 
tué  Maiftre  de  Dieu  fon  Père, voire  adhérant 
àlafimplicitéde  fadoftrine.Et  puisque  nous 
cognoifsions  que  nous  auons  en  luy  toute  iu 
ftice,  que  c'eft  par  luy  que  nous  fommes  re- 
conciliez à  Dieu  ayans  obtenu  la  remifsioa 
de  nos  péchez, que  c'eft  par  luy  que  nous  fom 
mes  fanûifiez  afin  de  cheminer  en  pureté  de 
vie:  que  nous  foyons  là  du  tout  arrtftez,  co- 
gnoiflans  qu'il  eft  noftre  Médiateur  &  Aduo- 
cat  qui  intercède  pour  nous ,  que  nous  inuo- 
quions  Dieu  en  fon  Nom  ,  &  que  nous  ayons 
tout  noftre  refuge  à  luy  ,  que  nous  ne  cher- 
chions point  vne  feule  goutte  debienfinon 
en  luy  feul,  car  il  en  eft  la  fource  &  la  fontai- 
ne,&  que  c'eft  de  11  plénitude  qu'il  nous  fauÇ 
tous  puifer  ,  comme  il  tft  dit  au  premier  cha- 
pitre de  faiiift  lehan.  Voila  donc  pourquoy 
fiinft  Paul  vfe  dece  mot  de  foy  en  lefus 
Chrift:car  alors  nous  pourrons  tellement  con 
templer  Dieu,  que  nous  ferons  transfigure» 
en  fa  gloire  ,  mifme  en  ce  monde,  &  en  cefte 
vie  caduque  délia  Dieu  fera  reluire  fon  image 
en  nous.iufqu'à  ce  qu'il  nous  ait  recueillis  en 
fon  Royaume  éternel,  &  qu'il  nous  ait  deli- 
urez  de  toutes  les  poureiez  &  miferes  de  ce 
monde. 

O  R  nous-nous  profternerons  Jeuant  la 
face  denoftve  bon  Dieu  en  cognoiflàncede 
nos  fautes, le  pnans  que  nous  en  foyons  tou- 
chez tellement ,  qu'aucc  vraye  defplaifance 
nous  retournions  du  tout  à  luy,&  que  nous  ne 
demandions  finon  qu'il  nous  prene  en  fa  con- 
JHite,&  qu'ayans  renoncé  du  tout  à  nos  pen- 
fees  &  afFcélionç,nous  foufFrions  d'iftre  en- 
fcigncz  tellemët  par  fa  parole  qu'elle  ait  tou- 
te authorité  pour  nous  corriger ,  pour  nous 
exhorter  Si  reprendre  ,afin  que  co^noiflàns 
combien  le  Fils  de  Dieu  nous  a  profité ,  non» 
venions  à  luy  pour  eftre  membres  de  fon 
corps,  &  qu'.ldheiant  ainfi  .i  luy  nous  foyon» 
recueillit  en  la  vie  celcftc,& au  Royaume  que 
Dieu  fon  Pcre  nous  à  promis.  Atnfi  nous  di- 
ront tous.Dicu  tout-puiflànt,Pcrc  celrftc,&e. 

SIXI£ 


SVR.    LA    II.    A  TIMOTH.  471 

SIXIEME     SERMON     SVR     LE 

TROISIEME    CHAPITRE. 

i€  Toute  l'Efcriture  efl  diu'mement  inffircc,  o*  yt'dcpour  do- 
Brinc ,  pQur  reprehenfion  ,pour  correSlion,  pour  'tnJlruBion  qui  cH  en 
iuîiicci 

17  hfn  fic  l'homme  de  Dieu  [oit  entier,dppareillé  à  toute  hon- 
neœuure. 


'Autant  q  là  parole  de  Dieu 
cft  nômec  noftre  glaïue  fpi 
rituel,  nous  auons  bcfoin 
d'en  eftre  armez  ,  attendu 


eftrintention  de  ûinft  ?aul  en  ce  paflàge. 
Car  en  parlant  de  l'Elcriture  fainâe  il  n'en- 
tend pas  ce  que  nous  auons  de  luy  ,ne  des  au- 
nes Aportres  &  £uagelifte$:il  n'y  auoit  pour 

qu'en  ce  monde  le  diable  ne  lors  rien  efcritque  l'ancien  Teflament.  Ainfl 

ceffede  batailler  cotre  no*,  nous  voyôs  qu'il  a  voulu  qu'en  l'Eglife  Chrc 

afin  de  nous  feduire  &  de  Aienne  la  Loy  hill  tonlîours  prcfchee  ,  &let 

nous  attirer  en  fcs  mcnfonges.  Or  fainû  Paul  Prophètes, comme  c'eft  vne  doctrine  qui  doit 

pour  nous  mieux  eThorter  i  ce  faire  ,  dit  ici  demeurer  à  iamais.   Et  en  cela  Toit-on  que 

qu'en  premier  lieu  la  parole  de  Dieu  mérite  ceux  qui  voudroyent  que  la  Loy  fiift  auiour- 

vne  tvile  reuercnce ,  qu'vn  chacun  s'y  range,  d'huy  reiettee,&  qu'on  n'en  parlaft  plus, font 

qu'on  l'cfcoscf  pailiblemét  &  fans  contredit,  comme  chiens  &  pourceaux  :  comme  aucuns 

Et  pais  il  adioiifte  le  profit  qui  nous  en  rc-  rileins  pouacres ,  qui  depuis  n'agueres  def- 

uient, qui  nous  doit  aufsi  inciter  à  la  receuoir  gorgeoyent  leur  Confummatum  tft  ,  &  cela 

en  toute  reucrence  &obeiflànce.  Or  notam-  par  toutes  les  tauernes:dôt  il  a  falu  que  moy 

ment  il  parle  de  l'Efcriture  faimae  .    Car  de  mefme  leur  aye  rcliilé  en  mes  prcdicationt 

tout  temps  il  y  a  eu  des  fantaftiques  qui  ont  auec  grande  veheraenceitellcmentqueccs  vi 

voulu  remettre  en  doute  ce  qui  eftoit  conte-  leins  raifoyent  m  prouerbe  cômun  en  toutes 

nu  en  l'Efcriture  fainde,  combien  qu'ils  euf-  leurs  fynago^iies  &  en  leurs  tauernes.pourdi 

fent  honte  de  nier  que  la  parole  de  Dieu  ne  re.Il  ne  nous  faut  plus  ne  Loy, ne  Prophètes, 

meritaftd'eftrercceue  fans  aucune  réplique:  Etcelaacfté  aufsi  commun  qu'il  feroit  entre 

&  de  tout  temps  il  s'eft  trouué  des  efprits  ma  les  Turcs.  Or  au  contraire,  nous  voyons  que 

lins  qui  ont  bien  confefle  de  prime  face  que  fainft  Paul  retient  ici  les  Chreftiens  en  bride, 

la  parole  de  Dieu  a  vne  telle  niaiefté  en  foy,  &  monftre  que  fi  nous  voulons  approuuer  no 

qu'il  faut  que  tout  le  monde  s'humilie  fous  ftre  foy  &  obeiflànce  enuers  Dieu, que  la  Loy 

icelle:&  cependant  ils  n'ont  pas  lailTé  de  blaf  &  les  Prophètes  doiuent  régner  par  defluî 

phemer  contre  l'Efcriture  fainfte.  Or  où  le-  nous,  qu'il  nous  faut  la  régler  ,  qu'il  faut  que 


irouuera  la  parole  de  Dieu  ,  iînon  qu'on  la 
cherche  en  la  Loy,&  es  Prophctes,&  en  VE- 
uangilef  Car  c'eft  là  où  Dieu  nous  a  déclaré 
fa  volonté.  Afin  donc  qu'il  n'y  cuft  point  de 
réplique  en  ceû  endroit ,  &  qu'on  ne  s'excu- 


nous  cognoifbions  que  c'eft  vne  vérité  perra» 
nente  &  immortelle  ,  &  non  point  caduque, 
qu'elle  n'eft  point  variable  ,  que  Dieu  n'a 
point  baillé  vue  doûrine  téporelle  afin  que 
on  s'en  feruift  quelque  temps, mais  il  a  voulu 


fall  point  pour  dire  qu'on  peut  bien  croire  à  qu'elle  eult  fa  vigueur  auiourd'huy ,  &  que 
la  parole  de  Dieu  fans  accepter  l'Efcriture  pluftoftle  monde  perifle  ,  &:  que  ciel  &  terre 
fainde,notamment  ûincl  Paul  nousaici  de-  foyent  ruinei ,  que  Pauthorité  de  la  Loy  ni 
«laré  que  (î  nous  voulons  faire  hommage  à  des  Prophètes  foit  anéantie. Voila  donc  Pin- 
Dieu, &  luy  eftre  fuiets,  qu'il  nous  faut  rece-  tention  de  faind  Paul  ,  c'tft  que  nous  deuons 
uoirccquieft  côtcnuen  la  Loy  &:  es  Prophe  du  tout  nous  laiflergouucrncr  par  PEfcritu- 
tes.Or  afin  qu'vn  chacun  ne  fe  donnaft  point  rc  fainde  ,  &  qu'il  nous  faut  rapporter  là  ,  & 
licence  de  choifîr  ce  qu'il  voudroit ,  &aiifsi  qu'il  ne  faut  point  que  nous  cherchions  nul- 
d'obeir  à  Dieu  en  partie, il  dit  que  toute  PE-  le  fagefle  ailleurs. Et  cependant  notons(com 
fcriture  aceftemaiefté  dont  il  parle, Scqu'el-  me  il  a  efté  dit)  qu'il  ne  nous  donne  ici  nulle 
leeftvtile.  Eu  fomme,  fainft  Paul  prononce  liberté  de  choifir  ce  qu'il  nous  plaira,  mais 
ici  qu'il  ne  faut  point  que  les  homes  prencnt  qu'en  tout  &  par  tout  il  veut  que  nous  foyons 
par  loppins  &  par  morceaux  ce  qu'ils  auront  obcilîànj  à  Dieu  ,  trouuas  bon  tout  ce  qui  cft 
approuiié,  &  ce  qui  leur  viendra  à  gré  de  l'E-  contenu  en  PEfcriture  iàinâe.  Or  rcuenons 
fcriture  fâinfte  :  mais  que  fans  exception  ils  aux  deux  poinfti  qui  font  ici  coucher.  Il  dit 
concluent,  puis  que  Dieu  a  parlé  en  fa  Loy,  (en  premier  lieu  )  Que  fEfcrtture  faincle  eft 
&  en  fes  Prophètes  ,  qu'il  fe  faut  là  tenir  du  /Fiy))iKf  <//<»f»fm*»t:puKil;.dioufte,  Qa'f/Zf  e/f 
tout.  N<ftis  voyons  dont  ««intenant  quelle  ytiU,  Voila  donc  deux  louar.gcs  que  famft 

Nn.  iiii. 


47  i 


SERMON  xxirrr. 


Paul  attribue  à  l'Elcriture  faïéVe.afiade  n-ous 
la  rendre  amiable,  Se  puis  digne  d'eltre  acce- 
ptée auec  toute  humiiicc.  Quad  il  dit  qu'elle 
a  elle  infpiree  de  Dreu.c'eft  afin  que  nulliom 
me  mortel  n'entreprcne  de  fe  rebecquer  à 
rencontre  de  Dieu. Car  qu'eft-ce  il  nous  luy 
refi/lons?Or  eft-il  ainlî  que  les  créatures  en- 
treprenent  la  guerre  contre  Dieu, s'ils  ne  veu 
lent  point  accepter  l'Elcriture  (ainfte.Pour- 
quoy?  Elle  n'cil  point  forgée  des  h5mes(dit 
faintl  Paul)il  n'y  rien  ici  de  terrelhe.  C^ni- 
conqucs  donc  ne  voudra  fe  mjnftrerdu  tout 
rtbcUe  contre  Dieu,  &  le  defpiter.il  faut  que 
il  foit  fuiet  à  l'Efcriture  fainde.  Voila  quant 
àl'authorité.Or  (anc^  Pauladioufte  en  lecôd 
lieu,  qu'outre  la  reuerence  que  nousdeuons  à 
Dieu,  luy  irail'ans  hômage,  qu'il  faut  aulsi  que 
nous  cojnoilsions  qu'il  a  procuré  noftre  pro 
fît  Se  noftre  falut ,  quand  il  1  ly  a  pieu  de  nous 
enfeignerpar  l'Efcriture  fiiude.  Car  il  ne 
nous  veut  pointamufer  àdes  chofes  inutiles. 
Quand  donc  nous  ferons  diligens  à  lire  l'E- 
fcriture lainfte  ,  nous  fçaurons  que  Dieu  n'a 
rien  là  couché  qui  ne  no*  foit  bon  Se  propre, 
&  dont  nous  ne  recueillions  quelque  vfage. 
Puis  qu'ainfi  cfl, qu'elle  ingratitude  fcra-ce  ii 
nous  n'acceptons  le  profit  qwi  nous  cil  offe  rt 
lî  liberalcniét  du  collé  de  Dicu^Ainfi  en  f(>in 
ine,fain(ft  Paul  après  auoir  magnifié  l'Efcritu 
re  faincle.niôftrant  que  l»  maicftéde  Dieuap 
paroifl  li.nous  en  veut  auf  i  dôncr  çou/l,  que 
nous  y  venions  auec  vnc  affcûion  Se  defir  d'y 
profiter  ,  fçachans  que  c'aft  à  celle  fin-la  que 
Dieu  a  prétendu. Or  touchant  le  premier  ar- 
ticle, notons  bien  que  iamais  l'Efcriture  iain 
fte  ne  nous  feruira  comme  elle  doit  ,  li  nous 
ne  fommes  pcrfuadez  q  Dieu  en  ell  l'autheur. 
Car  (i  nous  venons  lire  Moyfe.ou  quelqu'vn 
des  Prophètes  comme  vne  hifloire  d'vn  hom 
Hie  mortel, fentirons-nous  vne  viuacité  de  VE 
fprit  de  Dieu  qui  nous  enflamme?  Il  s'en  fau- 
dra beaucoup.  Ainlî  l'Efcriture  fainûe  fera 
c6me  vne  chofe  morte  &  fans  vigueur  enuers 
nous  ,  iniques  a  ce  que  nous  ayons  cognu  que 
c'cft  Dieu  qui  parle  li  ,  Se  qui  nous  y  déclare 
<a  volonté.  C'ell  donc  par  là  qu'il  nous  faut 
commencer,  quad  fainâ  Paul  afferme  que  l'E 
fcriture  fainflea  eilé  infpiree  diuinement.Or 
il  eft  vray  que  le  Pape  fe  vantera  que  tout  ce 
qu'il  a  mis  en  auant  cil  de  Dicu.ficmefme  voi- 
la côme  le  poure  monde  a  elle  feduit  de  tout 
temps, c'ell  afçauoir  fous  celle  couuerture  du 
nom  de  Dieu. Car  iamais  il  n'y  a  eu  poifon  de 
favflcdoftiine  qui  n'ait  elle  mis  en  ce  calice 
d'or.e'ellàdircqui  n'ait  elle  caché  fousce  ti 
tre  honorable  ,  que  Dieu  parloir  aur  homes. 
Mais  (comme  nous  auons  touché  ce  matin) 
moyénant  qu'vn  chacun  de  nous  fe  laille  çou 
uerner  à  Dieu,  i!  aura  vne  bonne  (îgnature  de 
fa^oy  ,  tellement  qu'il  coonoiftra  que  ce  ne 
font  point  illufioUs  de  S-^tan  ,  que  ce  ne  f'out 
point  tables  coiitrou'JCes  des  hommes,  ce  qui 
cil  cor.teau  CJI  rEi'ciiturc  fainctc ,  ni2is  que 


Dieu.a  parlé, fc-en  ell  l'antheur.Nous  aurons 
donc  cela  aflez  ratifié:  mais  cependant  fi  les 
incrédules  n'en  cognoifftnt  nen,  &  qu'ils  vie 
nent  heurter  des  cornes  à  l'cncontre  de  l'au- 
thorité  de  l'Efcriture  faindle,  cognoiflons  la 
bonté  infinie  de  nollre  Dieu, en  ce  qu'il  luy  a 
pieu  nous  feeller  laverité,&  nous  faire  fentir 
la  vertu  d'icelle  :  que  nous  cognoifsions  que 
c'eft  de  luy  que  nous  tenons  noftrê  fby  ,  que 
nous  puifsions  dire  qu'il  a  parlé, comme  nous 
voyons  que  ces  proteftations  font  fi  commu- 
nes à  tous  les  Prophètes.  Voila  donc  comme 
nous  auons  à  prattiquer  ce  paflagé.Or  cepea 
dant  nous  pouuons  auf\i  recueillir  de  ce  que 
dit  fainft  Paul, qu'il  n'y  a  nulle  authorité  fer 
me  finon  celle  de  Dicu:ie  di  en  l'Eglife.  Vou 
lons-nous  donc  bien  approuuer  vne  doftrine? 
Il  ne  faut  point  qu'elle  emprunte  fon  autho- 
rité de  la  f'agelle  des  hommes,  mais  que  nous 
cognoiflons  qu'elle  ell  venue  de  Dieu  :  fans 
cela  tout  le  rc-lle  ne  fera  rien. Et  c'ell  vn  arti 
cle  blé  notable.  Car  voila  en  quoy  Dieu  veut 
f  fprouuer  fi  nous  fommes  fon  peuple  ou  non, 
c'cfl  que  nous  monllrions  qu'il  ell  vrayemét 
noftre  Roy  ,  d'autant  que  nous  ne  tenons  ne 
loix  m  ordonnances  que  de  luy.que  nos  âmes 
ne  font  point  conduites  à  la  volée,  mais  qu'il 
domine  par  dcflus  ,  &  que  nous  fommes  du 
tout  fuiets  à  fon  long.  Sicelan'eil,  nous  ne 
monftrons  point  que  Dieu  nous  gouuerne:c5 
bien  que  nous  prétendions  fon  Nom, ce  ne  fe 
ra  qu'à  faulTes  enfeignes.  Ainfi  retenons  bien 
que  fainft  Paul  en  cepaffage,  pour  monllrer 
que  nous  deuons  tenir  l'Efcriture  fainûe  in- 
dubitable,ne  dit  pas,  Moyfe  a  efté  vn  homme 
excellent  :  il  ne  dit  pas ,  Ifaieauoit  vne  élo- 
quence admirable:  il  n'allègue  rien  des  hom- 
mes pour  les  faire  valoir  en  leurs  perfonne s: 
mais  il  dit  qu'ils  ont  eflé  organes  del'Efprit 
de  Dieu  ,  que  leurs  langues  ont  elle  condui-  \ 
tes  en  forte  qu'ils  n'ont  rien  aduancé  de  leut 
propre  ,  mais  que  c'ell  Dieu  qui  a  parlé  par 
leur  bouche  ,  qu'il  ne  faut  point  que  nous  les 
eflimions  comme  créatures  mortelles  ,  mais 
que  nous  fçachions  que  le  Dieu  viu.ît  s'en  eft 
ferui ,  &  que  nous  ayons  cela  pour  tout  con- 
clu ,  qu'ils  ont  elle  fidèles  difpenfateurs  du 
threfor  qui  leur  elloit  commis. Or  fi  cela  eull 
elle  bien  obfcrué.on  ne  fufl  pas  venu  en  tel- 
le &  fi  horrible  confufion  côme  cncores  font 
tous  lés  poures  Papiftes.Car  fur  quoy  ell  fon 
dee  leur foy, finon  fur  les  hommesfOn  ne  fuft 
point  donc  venu  en  celle  horrible  confufion 
où  on  voit  les  poures  ignoras.  Car  il  n'ell  pas 
quellion  de  dire  en  la  Papauté,  Voici  Dieu 
qui  parle  :  voire,  donnant  approbation  de  fa 
maieflé  :  il  n'y  aura  que  fcintif'e  en  tout  leur 
cas.  Il  ell  vray  qu'ils  allégueront  bien  le  nom 
de  Dieu:mais  cependant  ils  mettront  en  auac 
leurs  fonges  Se  refuerics,&  puis  c'eft  tout. Or 
au  contraire  ,  voici  fainft  Paul  qui  nous  dit 
qu'il  nous  faut  tenir  à  TEfciiturc  faindle.Voi 
la  pour  vti  ité.  Et  à  quelles  cufcignesfPourcc 

que 


s  V  R    LA   II. 

que  Dieu  parle  là  ,  &"hon  point  !ei  hommcî. 
Nous  voyons  donc  comme  il  cxcliid  toute  au 
thorité  humaine,  qu'il  fnut  cjue  Dieu  ait  fa 
prééminence  par  delFus  toutes  fes  crcaturev, 
&  que  grans  &  petis  s'afliMettilTent  à  luy  ,  & 
que  nul  ne  prefume  de  s'ingérer  pourdiie.Ie 
parleray  :  comme  aul'si  fainû  Pierre  veut  que 
nous  ayons  celle  certitude, qu'en  montant  en 
chaire  nous  monftrions  que  c'eft  Dieu  qui 
nous  enuoye,  &  que  nous  portons  le  meflàge 
i.Vie.^.  qy'jj  nous  a  conimis.Ciue  celuy  qui  parie(dit 
?'•  ii)qu'il  parle  comme  parole  de  Dieu:  c'ell  à 

dire, qu'il  môftre  par  effeâ  qu'il  ne  s'eft  point 
ingéré  à  la  volée,  &  qu'il  ne  nielle  rien  de  l'es 
fonges,  mais  qu'il  a  &  tient  la  pure  vérité  de 
Dieu  :  qu'il  face  donc  valoir  la  doûrine  qu'il 
prononce  ,  afin  que  Dieu  foit  honoré.    Puis 
que  toute  doftrine  humaine  eft  ici  abatue, 
«jue  l'accez  donc  luy  foit  fermé,  mefmes  que 
elle  foit  bannie  de  l'Eglife  Chreftienne.  Et 
pourtât  auifons  de  nous  tenir  à  cefte  pure  fim 
plicité-la,  d'autant  que  noftre  Seigneur  nous 
a  fait  cefte  grâce  de  nous  déclarer  fa  volonté 
parla  Loy  &par  les  Prophetes.que  nous  de- 
meurions là  fermes,  &  que  les  hôincs  ne  foy- 
ent  point  eleuez  en  vn  degré  fi  haut  que  d'e- 
ftre  par  deflus  nos  confciences ,  &  de  baltir  à 
leur  pofle  des  articles  de  foy.Or  venôs  main 
ten.ït  à  l'vtilité  que  fainft  Paul  adioufte.U  dit 
^fi£fcritureeft  -vt/'/f.Nous  auons  défia  mon 
tiré  à  quelle  fin  ceci  fc  rapporte  ,  c'eft  afça- 
uoir  ,  que  l'Efciiture  fainfte  nous  foit  amia- 
ble ,  Se  que  nous  foyons  enflambeïd'vn  defir 
&  zèle  d'y  profiter,veu  qu'elle  nous  eft  don- 
née non  point  feulement  pour  nous  monltrer 
quelle  elî  la  raaiefté  de  Dieu  ,  mais  pour  nous 
édifier  à  noftre  /alut.  Si  donc  l'Efcriture  fain 
fie  eft  vtile,  nous  fommes par  trop  ingrats  en 
n'appliquant  point  noftre  cftude  à  icelle.  Or 
^ui  eft  celuy  qui  de  nature  n'appetera  fon' 
bien  &  fon  falut?  Et  où  le  pourrôs-nous  trou- 
uer  finon  en  TEfcriture  fainôe  ,  par  laquelle 
il  nous  eft  communiqué?  Mal-heur  donc  fur 
nous  quand  noDS  n'efcouterons  point  Dieu' 
parler,  veu  qu'il  ne  demande  finon  noftre  vti 
lité.Ii  ne  cherche  pas  fon  profit:car  quel  be- 
foin  en  a-il?  Au  refte ,  cependant  nous  fom- 
niesàduertis  de  ne  point  lire  l'Efcriture  fain 
ôe  pourlafaireferuirà  nosfantafies,onpour 
«n  puiferde  vaines  queftions.  Poiirquoy?Car 
«lie  eft  vtile  à  iàhit ,  dit  fainô  Paul.  Qiiand 
donc  l'eipofe  l'Efcriture  fainfte,  il  faut  que 
ie  me  règle  toufiours  là.c'eft  que  ceux  quinie 
oyent,  reçoiuent  profil)  de  ladoftrine  que  ie 
propofe, qu'ils  en  foyent  édifiez  à  falut.  Si  ie 
B'ay  ecfte  afFcclion  là ,  &  que  le  ne  procure 
l'édification  de  ceux  qui  m'oyent ,  iefulsvn 
facrilege  ,  prophanant  li  parole  de  Dieu.  Et 
aufsiceux  qui  lifent  l'Efcriture  fainâc  ,  ou 
qui  vicnét  au  fermon  pour  efcouter, s'ils  cher 
chent  quelque  folle  l'peculation,  s'ils  vienent  ' 
ici  pour  prendre  leurs  esbats ,  ils  fontcouU' 
pablesd'âuoir  propliané  vne  chofefifainûe. 


A   T  I  M  O  T  H.  475 

Quand  nous  voudrons  tirer  l'Efcriture'  l.iin 
(fte  à  nos  appetis ,  que  nous  voudrons  clicr- 
cher  quelques  queftions,  &  cependant  nous 
DC  re»;ardons  point  à  rvtilitc,  c'eft  vne  poilu 
tion  que  cela.  Qrand  donc  fainft  Paul  nous  a 
monlhéque  nous  deuons  venir  à  l'efcole  de 
Dicu.iucc  vn  defiraiJét.attédu  qu'ilne  cher 
che  finon  noftre  bien  &  falut,  il  nous  monftre 
qu'il  ne  faut  point  aufsi  que  nous  polluôs  l'E 
fcriture  fainôc  ,  en  la  voulant  faire  ferisirà 
nos  faïua^îes ,  mais  fçachas  que  Dieu  a  voulu 
qu'elle  nous  fuft  profitable ,  que  nous  veniôs 
làpoureftre  en  feignez, voire  enfeigncz  de  ce 
qui  eft  proprepour  noftre  falut. Voila  en  fom 
me  ce  que  nous  auons  à  recueillir  de  ce  mot. 
Or  il  refte  de  voir  par  efpccial  Se  parle  menu 
quelle  eft  cefte  vtilité.Car  fi  faind  Paul  euft 
coupé  broche  ayant  prononcé  ce  mot, le  fens 
de  ce  paflage  feroit  obfcur  :  mais  il  adioiifte 
vne  telle  déclaration, qu'il  ne  faut  point  cher 
cher  de  glofe  ailleurs. Car  ildic  5'»^ /E/ir/f»- 
re  efl  -vt île  four  docir  ne ,  four  rtdargHt ion,  f  sur 
correStion,  pm-r  inflrudion  <»  iuflice  ,  tellement 
•jue  l'homme  de  Dieu  foit  rendu  entier  (  dit-il) 
formé  .  ou  appareillé  à  toute  bonne  auure.    Or 
en  premier  lieu  nous  auôs  ici  à  obferuerquff 
faiuâ  Paul  ne  met  point  vnvfage  fimpledc" 
l'Efcriture  fainfte  ,  mais  ayant  parlé  de  do- 
ftrine.il  adioufte  redar^Htion,corre{lloii,inflnt 
(lion.  Etpourquoy?  Ce  n'eft  point  aflez  que 
Dieu  nous  monftre  ce  qui  eft  bon,  d'autant 
que  nous  fommcs  tant  froids  qwe  c'eft  pifié. 
Il  faut  donc  qu'il  nous  picque  ,  &  qu'il  y  air 
véhémence  ,  afin  que  nous  cognoifsions  que" 
c'eft  à  bon  efcient  qu'il  parle, &  qu'ilne  nour 
faut  point  ioueranec  luy.  Vbilâ  donc  pour- 
quoy  il  n'y  a  point  yne  do£lrinenué&  morte 
en  l'Efcriture  fainûe, mais  afin  que  nous  iby- 
ons  pouflez  viuement  pour  venir  à  Dieu  ,  il  y 
a  les  redargutions  &  les  correâions. Voila  vn 
article.  Cependant  nous  voyons  aufsi  l'ordre 
que  iainft  Paul  a  ici  tenu.  Car  il  dit  tju''rUeeH 
vtile  four  dofirme:  &  puis  il  aiiouRe  red.i>-^u  - 
tion  ,  Cr  correâ-im.    Etpourquoy  eft -ce  qu'il 
cômencepar  le  mot  de  Doif/r/nr?D'autat  que 
c'eft  levray  ordre  naturel.Car  fi  nous  ne  fom 
mes  enfeignez  pour  dire  ,  C'eft  la  vérité  :  on 
aorabeau  nous  exhorter:  mais  il  faut  en  pre- 
mier lieu,  que  nous  cognoifsiôs  que  ce  qu'on 
nous  monftre, eft  bon,&  vray,&  droit. Et  ain- 
fi  le  mot  de  DtClrine  ,  emporte  que  nous  foy- 
ons enfeignez  de  la  vérité  pour  en  eftrcbien 
refolus  ,  pour  y  eftre  tellement  édifiez  que 
nousnedoutions  plus  afçauoir  ce  qui  en  eft 
ou  non.  Or  maintenant  nous  auons-a  réduire  ' 
en  mémoire  ce  quia  elté  traitté  ci  deflus, quel 
le  eft  la  doflrine  fainftc  comme  fainft  Paul 
en  a  parlé  :  mefincs  ce  matin  nous  auons  veu 
que  le  but  eft  de  cngnoiftrc  lefus  Chrift  ,  afin 
que  mettans  du  tout  noftre  fijcc  en  luy,  nous 
fovôs  faces  félon  Dieu.  Et  puis  il  a  eftc  trait, 
té  aufsi  par  ci  deuat  es  prierez  &  oraifons,  de 
mettre  noftre  elpcrarrc*  en  Dicu,de  regaider 

Oo.i. 


474  SERMON 

à  la  vie  éternelle,!  laquelle  il  nous  conuie.de 
mortifier  tout  ce  ^ui  ettde  nos  affcciiont,  de 
BOUS  reformer  à  ù  iuftice. Voila  donc  en  fom 
me  la  doârinc  de  rEfcnturc  fainile ,  c'tft 
tjuc  nsus  cognoil'.i'jBs  qur  Diou  a  voulu  que 
nous  inettioii;  plcisienuHt  noftre  fiance  en 
Itiy.cjiie  nous  y  ayons  noftie  retuge  ;  &  puis, 
que  nous  cognoiGions  comment  ,  &■  par  quel 
moyen  il  le  deciaic  noflre  Père  &  Sauueiir: 
c'eil  en  la  pcrlonne  de  noflrc  Seigncnr  Icfus 
Chrift  l'on  F<Ai ,  lequel  il  a  expol'é  à  ia  mort 
pournouî.  Car  voila  comme  nous-  fomraes  re 
conciliez  1  luy  ,  voila  comme  nous  forames 
nettoyez  de  toutes  nos  macules  &  pollutiôs, 
yoila  comme  nous  tommes  reputex  iuftes  :  Se 
dtl.i  procède  la  (ianceque  noas  auons  d'in- 
Ooqi'.cr  Da-u  ,  fçackans  qt^il  tic  nous  reiette 
point  quand  nous  venon'i  à  luy  au  norade  ce- 
luy  qu'il  nous  a  conftitué  Aduocat.  Au  refte, 
cognoifTans  qu'il  n'y'a  en  nous  que  pcché  5C 
inalcdidion.quc  nous  apprenions  de  nousdef 
plaire:  cognoilTans  que  Dieu  mérite  bien  d'e 
flre  fcruiit  honoré  de  nous: que  nous  cognoif 
fions  ce  qu'il  demande  âr  ce  qu'il  approuue, 
pour  nous  en  acquitter.  Voiia  la  dodrine  qui 
eft  contenue  en  l'Efcriture  fainifte.Oi  (com- 
me delJa  nous  auons  touché)  combien  que  de 
la  doûrine  procède  tout  le  refte,(î  eft-ce  que 
elle  ne  profite  point  par  foy  ,  icaufede  no- 
ftre pareflc  &  froidure.   Il  faut  donc  qu'il  y 
ait  des  aiguillons  pour  nous  picquer.  £t  Toi- 
la  pourquoy  fainà  Paul  met  en  fécond  lieu, 
l^sdarrution-iy  eft  viay  que  ce  mot  n'efl  point 
fort  vlité  en  François  ,  &  aufsi  l'ay  mis  Re- 
prehenlîon,  aiin  d'cftre  niieuï  entendu  :  tos- 
tesfois  fi  eft-ce  qu'il  nous  faut  noter  q  faind 
Paul  a  voulu  ici  exprimer  que  nous  deuons 
eftre  conuainciis  pour  eftre  bien  enfeignez 
en  l'efcole  de  Dieu, qu'il  faut  que  nous  foyôs 
poinûs  là  dedans,  que  nous  foyons  redar- 
guez&  conuaincus.Et  c'eftce  quieftdit  en  la 
première  de.  Corinthiens, chapitre  quatorzic 
me, car  il  vCc  du  verbe  qui  rcfpond  à  tx  raot- 
eiic'eftafçauoir  que  quand  la  parole  de  Dieu 
eftdeueracnt  expofce  ,  la  prophétie  a  fa  vi- 
gueur &  fon  règne,  que  non  feulemét  les  fide 
fcs  en  font  édifiez ,  mais  fi  vn  incrédule  entre 
en  rEglife,&  qu'il  oye  ladoftrinede  Dieu, il 
fera  rcdargué&  iugé.dir  fainû  Paul.  Quand 
il  dit,  Redargué,&  luge,  cela  emporte  que  U 
■  où  au  auparauant  vn  incrédule  tftoit  enuclop 
pé  comme  en  ténèbres ,  Se  qu'il  fe  plaiioit'en 
fon  ignorace,  Se  :)uc  ne  cognoillànt  point  que 
c'cft  de  Dieu  ,  U  eftoit  eflourdi  :  quand  Dieu 
l'efclaire  en  telle  forte, qu'il  cognoift  la  po- 
Breté  en  laquelle  il  a  vefcu,  il  voit  qu'il  a  eflé 
mefchant  Se  mal-heiircuv,&  toutesfois  il  voit 
comme  les  cieuï  ouuerts.s'il  veut  prcflcr  l'au 
reille  à  la  vérité  da  Dieu  :  il  cognoift  que  les 
hoiumesne  font  point  créez  pourpafict  feu- 
lement par  ce  monde,mai$  ilinôte  plus  haut. 
Voila  donc  comme  les  incrédules  font  con- 
uaincus.  £c  de  fait,  faiiiA  Paul  pour  le  mieux 


X  X  I  1 1 1. 

dire,  adioufte  que  les  fecrett  in  eotur  font  »• 
lors  manifeitez.Car  Doos  fçauons,  cependant 
que  la  parole  de  Dieu  eft  cnfeuelie.que  nul  ne 
regarde  à  foy.que  nous  auons  nos  coeurs  eem 
me  entortillez.  Q^if  faut-il  donc?  Q^ç  noo» 
appliquions  la  parole  de  Dieu  à  noitre  vfagc, 
c'eltque  nous  foyons  refuciller  au  lieu  que 
nous  auons  efté  par  trop  endormis ,  que  nous 
cômencions  de  mieux  penfer  à  nous.que  nous 
ne  mettions  plus  en  oubli  ni  Dieu  ,  m  le  faluc 
dc-nos  âmes ,  mais  que  nous  y  foyons  atten- 
tits.    Et  puis  que  nous  foyons  fondez  là  de- 
dans pour  faire  vn  bon  examen  de  toute  no- 
ftrevie,  tellement  que  nous  ayons  honte  de 
noftre  turpitude  ,  que  nous  foyons  nos  iuges, 
afin  de  preuenir  la  condamnation  qui  nous  fe 
roit  autrement  apprefteedeuât  Dieu.  Main- 
tenant nous  eiiteadonsce  que  fainft  Paul  a 
foulu  dire  par  ce  mot  deRcprehéfion,  ouRe 
dargutionic'eft  afçauoir  que  ce  n'eft  point  af 
fez  «Ju'on  nous  propofe  le  bien  pour  dire. 
Voila  quelle  eft  la  volonté  de  Dieuimais  que 
nous  foyons  efueillcz  pour  y  penfer  à  bon  ef 
cient ,  que  nous  foyons  contraints  de  regar- 
der de  près  il  nous  ,  que  niefmcs  nous  appro- 
chions de  Dieu  comme  s'il  nous  aHoit  adiour 
nez  deuat  fon  ficge  iudicial:&  que  tout  vienc 
en  la  clarté, afin  que  nous  foyôs  confus,  voy- 
ans  les  pouretez  oii  nour  eftions  plongea  au 
parauant.&aufquelles  nous  eitiôs  quan  pour- 
ris:&  puis,  que  nous  afpirions  à  la  vie  celefte, 
&  que  nous  n'en  foyons  point  deftournet.Or 
encores  ne  fufhra-il  point  que  nous  ayons  e- 
fté  ainfi  redargucz  ,  mais  il  faut  que  la  corre- 
ôion  viene  auec  :  c'eft  que  nous  ayons  com- 
me des  chaftimens  par  la  parole  de  Dieu,afin 
de  nous  reformer:que  nous  foyons  retirez  de 
nos  vices, &  fi  nous  y  auons  efté  enyurez,  que 
on  nous  face  force  8c  violéce,  afin  de  les  def- 
raciner  de  nous ,  8c  que  nous  en  foyons  dcf- 
pouillez.  Voila  donc  comme  après  auoir  efté 
refueillez  pour  penfer  à  Dieu ,  il  faut  que  n» 
ftre  procez  nous  foit  fait ,  que  nous  foyont 
condamnez, que  nos  vices  nous  foyentrais  au 
deuant,  tellement  que  nous  ne  fçachions  que 
faire  finan  palTer  condamnation.  Et  puis  là 
deflus,  que  nous  foyons  côme  attirez  par  for  • 
ce:Ci  nous  auons  efté  enyurez  en  nos  déliées, 
que  nous  ayons  eu  des  vaines  folies  qui  nous 
ayent  par  trop  deceiis ,  que  les  correftiont 
foyent  viues,  vertucufes&afpres ,  tellement 
que  nous  rendions  .\  Dieu  l'hannewr  qui  luy 
appartient,  fouffrôsqu'il  nous  reforme, qu'iK 
no'  reduife  à  i'oy .Côme  quâd  vn  père  voit  fee 
enfansdcsbaiichez,il  nefecôtente  pas  de  leur 
dire,Et  que  faites-vous, mes  enfan\;cela  n'cft  ■ 
pas  ne  beau  ne  bonimais  ildira,Mal-hcureu- 
fescreatures ,  vous  ay-ic  nourris ,  vous  ay-ie 
entretenus  iufques  ici ,  pour  me  rendre  vn  tel 
payementî'Faut-il  que  maintenant  vous  me  fa 
ciez  vn  tel  dcihoiineur  après  vous  auoir  trait 
tezfidoucemétîAllez,mal-heureux,vousme- 
riteid'cftrc entre  les  mains  d'vn  bourreau, 

puis 


s  V  R    LA    II.    A   T  IM  OTH. 


47T 


fuis  que  vo'  ne  voulez  rien  valûir:faut  -il  cjtie 
ie  Byiirriffe  telles  ordures  en  ma  mailon.'Ain 
fi  en  eft-il  quanti  Dieu  voit  qu'il  nous  a  beau 
Coup  kippostez,  &  que  cependant  nous  luy 
fommes  beaucoup  plus  rebelles  que  nt  font 
pas  les  enfans  defobeiflans  à  leurs  pères  ter- 
riens. Ne  faut-il  pas  qu'il  s'efchauffe  enuers 
nous  ,  &  que  nous  foyons  touchez  viucnienr, 
^uandnous  fentirons  qu'il  entre  comme  en 
colère  à  l'encùtrc  de  nous  ?  Non  pas  qu'il  ait 
uulle  pafsion:mais  il  prend  cefte  vehimence 
la,  afin  qu'il  nous  matte  ,  que  nous  ne  facions 
plus  des  chenaux  efchapptz  ,  quand  nous  au- 
ras eftéefgarez  de  luy, qu'il  nous  retiene  par 
force,  &  que  nous  apprenions  quec'cftd'o- 
beir.  Voila  donc  pourqiioy  faind  Paul  a  mis 
ces  degrei  que  nousvoyôs  en  ce  paflage.  Or 
de  là  nous  pouuons  luger  lî  c'tft  alTez  qu'on 
deuife  comme  d'vne  hiftoire  ,  quand  on  vou- 
dra expoièr  l'Efcriture  iainde.  Car  fï ainfi  e- 
Aoit,cc  que  fainft  Paul  attribue  ici  àrEfcri- 
ture  fainde,feroit  inutile:ce  feroit  aflez  que 
il  euftdit,que  pour  prefcher  l'Euangilc  il  ne 
faut  finon  déclarer,  Voila  comme  Dieu  a  par 
létraais  il  dit,  qu'il  faut  que  les  coups  d'clpe- 
rons  Y  foyent  poui  nous  picqucr.  Puis  qu'ain 
Jî  eft  que  l'office  d'vn  bon&èJele  Pafteur  ne 
fera  pas  d'expofer  l'Efcriture  fîmplement, 
pour  dire.  Voila  ce  qui  en  eft ,  mais  qu'il  fau- 
dra qu'il  vfe  de  véhémence  quant  &  quant.  Se 
flu'il  y  ait  viuacité  pour  donner  vigueur  &  ver 
tu  à  la  parole  de  Dieu,  voiJa  pourqiioy  faircl 
Paul  eu  l'autre  paffage  met  que  les  Payeurs 
de  l'Eglife.perfirtét,  voiie  iufques  àimportu 
nité(dit-il)  &  non  feulemét  qu'ils  monftrent 
ce  qui  fera  bon,  mais  qu'ils  rcprenent ,  qu'ils 
ledarguent.  Il  eft  vray  qu'il  dit  bien  que  cela 
fe  doit  faire  en  douceur  &c  man/lictude,  &  a- 
uec  patience:mais  quoy  qu'il  en  foit.lî  faut-il 
que  les  correftions  ayét  leurs  cours, &  qu'on 
ne  vienepoïtdire,  Ho, cela  eit  trop  dur  àpor 
ter  .cen'eftpas  ainli  qu'on  y  doit  procéder. 
Ceux  qui  ne  peuuent  fouffrir  d'eftre  redar- 
guez,  qu'ils  s'en  aillét  chercher  vn  autre  mai 
Ihe  que  Dieu  ,  car  ils  ne  font  pa'.  dignes  de 
ouir  vn  feulmot  de  fa  bouche. 11  eft  vray  que 
le  môdevoudroit  bien  cftie  cfpargné,&  nous 
auons  les  aureilles  clia:ouilltuies:côme  nous 
en  verres  beaucoup  qui  fcnt  enuciiimcz  quad 
on  vfera  de  corrections  &  de  nupaces  ,  Et 
qaoy?  Eft-ce  la  façon  d'enfeignci?  Ho, nous 
veuions  cftre  gagnez  par  douceur.  Vous  vou 
lezfAllezdonc  apprcdre  à  Dieu  fa  kçon.Voi 
la  nos  délicats  qui  ne  peuuét  fouffrir  vne  feu 
le  repreheniion  quand  elle  leur  tlt  prop  :  fee. 
Et  pourquoy?  Ho,  nous  voulons  eftre  enfei- 
gnezd'vn  autre  ftyle?  Allez-vous  en  à  l'efco 
k  du  diable,  car  il  vou,  flattera  afilz  à  voftre 
perdition.  Or  quant  aux  hdtlcs ,  apics  auoir 
recca  fimpltuKiit  la  doûrine.il  laut  qu'ils  fe 
tumilient  eftans  picflrs  ù'cllit  iedjrguez,  d'e 
ôte  exhortez  quandil;.  aurôt  ta:lli,  que  leurs 
ycïhez  &  .jffcnfcs  foy  et  dtfcouucries  .qu'on 


prcne  la  lancette  pour  creuer  l'»poflnnne  ,  .1- 
Hu  que  l'ordure  qui  eft  cachée  au  dedans  for- 
te,, &  que  par  ce  raoyen-la  ils  foyent  purgez 
pour  venir  adroite  guerifon.  Voila(di-ie)cà 
I  il  nous  faut  venir  pour  cftre  deuement  enfei- 
gnez  en  l'etcolede  Dieu.   Or  en  la  fin  faiiiil 
Paul  adwufte.QK*-  CEfcriturt  efl  utiU  pmr  iii- 
firucHon  m  luflice,  afn  que  l'homme  de  Dieit 
foit  entitr  ,  (y  appareillé  à  toute  bonne  ccHure. 
.Qu_andildit  que  nous  auons  en  l'Efcriture 
fainfte  vne  inftruftion  parfaite  à  iuftice ,  il 
exelud  tout  ce  que  les  hommes  peuuent  ad- 
iouder  :  monftraut  que  nous  ne  ferons  point 
plus  luftes  d'auoir  obl'erué  ceci  ou  cela,  quad 
il  aura  eRé  introduit  par  ies  créatures.  Et  en 
cela  voyons-nous  comme  les  poures  Papi- 
lles fe  tourmentent  en  vain:  car  ils  neceflent 
d'obferuerce  qui  leurfera  cnioint.  Mais  ce- 
pendant quelle  eft  leur  iuftice?  Sur  quov  eft* 
elle  fondee.'Ho.l'Eglife  l'a  commandé  ainiî. 
Mais  fainft  Paul  ne  monftre  point  qu'il  v  ait 
religion(en  fomme)  ni  doftrine  ,  finon  celle 
qui  eft  contenue  en  l'Efcriture  fainûe  ,  qu'il 
yaitmefme  autre  iuftice  que  celle-là.   Sui- 
uent-ilsdoncce  que  Dieu  leur  a  commandé? 
Mais  tout  le  contraire.  Et  pourtant  fi  nous 
voulons  que  noftre  vie  foi  t  bien  réglée,  que 
nous  ne  foyons  point  fondez  fur  ce  que  les 
hommes  auront  introduit  à  leur  pofte  ,  mais 
fuiuons  ce  que  Dieu  approuue.    Au  refte  ,  fi 
nous  tendons  à l'inftruftion  qui  eftconteiuvc 
en  l'Efcriture  fainfte.là  nous  pourrons  trcu- 
i:er  noftre  iuftice:mais  Dieu  exclud  tout  le  re 
fte.  Si  déclare  que  cen'eft  rien  que  folie,  que 
ce  n'eft  que  fumée.  Ainii  donc  retenons  que 
ce  n'eft  point  fans  caiife  que  fur.ft  Paul  a 
mu,  ïnJfritfUcn  en  tufl-.ce.  Mais  au  refte,  no- 
tamment il  a  voulu  exprimer  que  pour  eftre 
bons  th'.ologiens ,  il  nous , faut  mener  vne' 
fainftt  vie  ,  que  laparclede  Dieu  n'eft  point 
pour  nous  apprendre  à  babiller ,  qu'elle  n'eft' 
point  pour  nou?  rendre  tloquens  &  fubtils, 
&  ie  ne  fçay  quoy  :  mais  c'fft  pour  reformer 
noftre  vie, qu'on  cognoifle  que  nous  defirons- 
de  feruir  à  Dieu  ,  de  nous  adonnerdu  tout  h 
luy  ,&  nous  conformer  à  (a  bonne  volonté. 
Q_uKnd  donc  nous  voudrons  cognoiftie  fi  va 
homme  a  bien  prcfiic  en  i'Eu.rgile  ou  non,re 
gardôs  à  fa  vie. Il  eft  vray  que  plufîeurs  pour- 
ront ûuteraflcz  haut:  &-puis  il-  auront  la  lan> 
gue  à  deliure.  mais  cependant  fi  nou<  ne  tr-oti< 
uons  point  en  leur  vie  vne  telle  côfoi  ni  té  à 
la  ii'ftjce  de  Dieu  comme  /ainft  Pau!  h  de- 
mande, fçachons  qu'ils  poili;ent  tout  le  refte 
de  kHrvie,d'autant  qu'elle  n'tft  point  T?glee- 
à  la  parole  de  Dieu  comme  il  appa:  t:ent.No- 
t.immét  donc  fainû  Paul  a  voulu  ici  ^cciarer 
tiu'iliious  fautfniic  valoir  &  fcrujrla  parole 
de  Dieu  à  ctft  vfage  ,  que  noftre  vie  /oit  Te-> 
formée, que  nous  chrniiniors  droitenvent.Or 
pour  côcluficnil  dit  ,  Qwf //)or7.-f  (/f  Dr'tK  fnip 
iitlitr,  (y  tju'ilfoitp^mé.t  toute  hajine rriinre. 
C'ellcncorcs  pour  mieux  approprier  ce  pro- 

Oo.il. 


47^ 


SERMON 


pus  il''lBftruâion  à  iuftice,  5:  quît  5:  qii.it  pour 
mieux  exclure  tout  ce  que  les  hommes  pour- 
ront muenier,  comme  nous  voyons  qu'vn  cha 
<an  toti^roit  feruir  Dieu  à  fi  fantalie  :  mai» 
parccBiOven  ilferoitûiict  à  nous:&puisnous 
imajinerioas  de  bonnes  œimres  ainli  que  bon 
nousi  le't>lcroit:yoire,  mas  Dieu  ne  les  aduone 
ra  point.Ainfi  S.Paul  royant  qu'il  y  a  vne  tel- 
le audace  aux  homes, que  toutiours  ils  veulent 
prifer  leurs  Œuures,&  quMs  ne  le  peuuct  tenir 
e«tre  1«  limites  Se  les  bornes  que  Dieu  leur  a 
doDBces  ,  a  ici  comme  touché  la  nsaladie,  afin 
qu'elle  fuft  plus  facile  à  guerir,&  dit  q  moyen 
nant  q  nous  ayons  li  parole  de  Dieu,  nnus  au- 
f>ns  -tnt  inttorititn  miHi  :  car  rien  n'y  defau- 
dva  ;  &  puis,  que  hsus  jercns  affaritHeK  a  toute 
hl>l»^*al^ure.Q_^^3.\■^ôi  il  parle  d'mtegrité.il  figni 
fie  que  BOUS  lerons  bien  proportionnez  &  ap- 
propriez :  comme  quand  vn  corps  a  toutes  {es 
parties, que  rien  n'y  défaut. Ce  mot  dont  il  v- 
fc,emporte  cela,  afijauoir  qu'il  n'y  ait  rien  à 
redire  .  Ainfi  donc  notons  comme  de  nature 
BOUS  fomraes  du  tout  peruers ,  aufii  que  Dieu 
répare  fon  image  en  nous  par  le  moyen  de  fa 
Parole,  tellement  que  nous  venons  à  celle  in- 
icgritc  dont  parle  laind  Paul. Et  puis  iladiou 
Ite,  Quf  noHs  fommes  alors  formex.  à  tou-ti  bonne 
tcuure.  Q_iie  les  hommes  donc  fe  vantent  tant 
qu'ils  voudront  de  bien  viurc  &  laind^etnent, 
o  leurs  cEuures  font  vertueufes,quand  ce  vien- 
lira  dcuSt  le  luge  celefte,tout  cela  ne  fera  que 
yent .  Et  aufsi  ce  n'eft  point  fans  caufe  que 
fainft  Paul  met  ici,  toute  bonne  acuure,  qu'il  ne 
fe  contente  point  de  dire,  que  nous  foyons  ap 
pareilltz  à  bonnes  œuuies  :  car  encores  eiift- 
©n  peu  cauiller  qu'il  ne  faut  pas  condamner 
tout  ce  qu'oB  pourra  adioafterdemieui:mais 
il  dit,.j  toBiftïnntfarKMrftfîgnifiant  quenousne 
faifoBS  que  brouiller  tout  Si  peruertir,  quand 
nous  méfions   nos  inuentions  parmi  ce  que 
Dieu  nous  a  commandé.  Et  ainii  en  gênerai 
il  nous  faut  recueillir  de  ce  paflage,  que  tout 
ce  qui  auia  eftc  furgé  par  les  hommes ,  font 
autant  de  corruptions  .  On  appelle  bonnes 
oeuures  en  la  Papauté  ,  de  iufner  la  veille  d'v- 
ne  telle  ferte,  de  ne  manger  chair  en  vendre- 
di,  d'obferuer   le    Carcfme,  de  feruir  aux 
Sainds&aux  Saiiidcs,  de  trotter  par  les  au- 
tels Si  chapellcs:d'ouir  mefle,  d'en  faire  chan 


X  X  1  II  I. 

prend  vne  balance"  pour  poifer  les  traditioiif 


humaines  auec  la  parole  de  Dieu  ,  il  n' J  aura 
point  la  centième  partie  de  la  parole  de  Dieu 
au  prix  de  tant  de  traditions  qui  font  là.  Et 
Bicfmes  quand  on  (lira, Dieu  l'a  commandé:^: 
bien  on  ne  peut  pas  nier  que  Dieu  ne  doyue 
eftreferui:  mais  cependant  fi  prifera-onbcati 
coup  plus  les  traditions  humaines.  Et  où  eft- 
ce  aller  cela.'Etainlî  ne  nous  trompons  plus  à 
noftre  efcient,voyans  que  nous  aurons  le  com 
ble  de  noftre  pcrfedion  ,  &  de  toutes  bonnes 
oeuures  en  TEfcriture  fainae,&  que  Dieu  ex- 
clud  tout  ce  qu'on  y  pourra  adiourtcr,&  qu'il 
déclare  que  cela  ne  viendra  point  en  conte, 
ni  en  mi(e,ni  en  recepte  deuât  luy,&  que  c'eft 
en  vain  que  les  hommes  en  feront  leurs  items: 
car  cela  lera  pour  doubler  leur  condamnatiô. 
On  pourroit  demander  ,  Puis  qu'ainfi  cft  que 
en  la  Loy  &  es  Prophètes  il  y  a  vne  telle  in- 
tégrité,de  quoy  nous  feruira  donc  l'Eiiângile? 
Car  il  femble  q  la  doftrine  mcfmes  de  fainft 
Paul  nous  fou  fuperflue.La  rcfponfe  eft  faci- 
le à  cela,  que  l'Euangile  n'a  point  eftc  donné 
aux  homes  pour  rien  adioufter  ni  à  la  Loy,-'fii 
aux  Prophètes. Lifons.fMeillettons  tout  ce  qui 
fera  contenu  au  nouueau  Tcftament ,  nous  ne 
trouucrons  point  vne  fyllabe  qui  foit  adiou.. 
ftee  à  la  Loy  &  aux  Prophètes  ic'cft  feuleniét 
vne  déclaration  de  ce  qui  eft.iitdelîa  là  en  fei- 
gne.Il  eft  vray  que  Dieu  nous  a  fait  cefte  grâ- 
ce plus  qu'aux  Pères  qui  ont  vefcudeuant  la 
venue  de  nollre  Seigneur  lefus  Chrift,que  les 
chofes  nous  fi»nt  maintenant  cfclaircies  beau 
coup  plus  :  mais  tant  y  a  qu'il  n'y  a  rien  d'a- 
ioufté.  Ainiî, quand  fainû  Paul  piononce  que 
nous  trouuero!  intégrité  de  luftice  en  la  Loy 
&és  Prophètes, cela  ncderoguerien  i  l'Euan 
gile  ,  mais  il  y  a  bonne  conformité  en  toute 
l'Efcriture  famûe  du  vieil  &  du  nouueau  Te- 
ftament.  Puis  qu'ainfi  eft, nous  voyons  qu'au- 
iourd'huy  nous  auons  moins  d'txcufe  que  ne 
ont  eu  les  fidcles  de  l'ancien  Ttftament  :  car 
outre  la  dodrine  qui  eftoit  contenue  en  la 
Loy, voici  les  Apoftres  qui  après  lefus  Chrift 
nous  ont  expofé  les  chofes  iï  priuément,  que 
Dieu  nous  attire  à  (oy  en  telle  fa  ç5  que  nous 
ne  pouuons  dire  qu'il  nous  faille  faire  ne  ce- 
ci, ne  ceia,finon  ce  quia  efté  commandé  de 
tOKt  tcmpr.  Mais  fi  cft-ce  cntanf  que  Dieu 
ter,d'aller  en  pèlerinage  :  c'cft  vn  l.ibyrinthe    nous  ajelclairci  les  chofes, qu'il  nous  a  propo' 


de  tout  cebadinage-la.iln'y  ane  tond  ne  ri- 
tie  en  tant  de  loix  &  ftatuts  que  le  diable  a  là 
forgt-Z.Mais  quoy  .=  Il  faudra  venir  vne  fois 
ieuant  le  In^e,  là  nous  aurons  à  rendre  con- 
te,^' défia  il  l'a  prononcé, il  ne  faut  point  que 
nous  penfions  que  cefte  dodrine  ne  nous  ait 
efté  donnée  pourvn  arrcft  irreuocable  .  Or 
ici  il  e.'t  dit  que  nous  ferons  formez  à  toute 
bonne  a;tiure,moyennant  que  nous  ayons  pro 
fité  en  l'Efcriture  fainde  .  Que  fcra-ce  donc 
des  traditions  qu'on  a  miles  ii.n,Si  qu'on  a  in- 
nenié  tant  de  chofes  que  la  parole  de  Dieu 
tu  eft  comme  enfeuelie  en  la  Papauté  ?  Si  on 


l'é  tant  de  raifons.il  faut  bien  que  nous  l'oyons 
vaincus  d'vne  telle  priuauté,ii  nous  ne  voulus 
eftre  comme  des  môftres,  que  nous  vueiUions 
de fpiter  toute  nature.  Voila  donc  en  fomme 
comme  nous  auons  à  prattiquer  ce  partage, 
c'eftq  pour  bien  profiter  en  l'Efcriture  fain- 
de,  nous  appliquiens  noftre  eftude  .i  faindeté 
de  vie,  &  que  nous  cognoifsions  que  Dieu  ne 
veut  point  eftre  fcrui  félon  nos  phantafies, 
mais  qu'il  nous  a  donné  vne  rcfje  certaine, 
voire  laquelle  il  nou?  faut  tenir  pour  par- 
faire ,&  à  l*<iuel'e  il  n'y  a  que  redire.  Ilfaub 
donc  que  nouïappliquiôs  toncc-snos  pcnfee*,: 

nos 


SVR   LA  II.    A   TIM  OTH. 


■OJ  iffeûions,  5:  nos  cruures  à  ce  qui  eft  con- 
tenu en  l'Efcriture  fainûc  ,  Si  alors  nous  fe- 
rons approuuex  du  luge  celertc:&  que  nous  le 
facions  d'autant  plus  <^ue  nous  voyont  que  no 
ftiebon  Dieu  sVftainli  approché  de  nous, que 
il  nous  a  tellement  manitefté  l'a  volonté,  qu'il 
n'y aplusd'excufe  pournous  ,  qu'il  ne  nous 
faille  adhérer  pleinement  à  luy. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noitre  bon  Dieu  en  conteûion  de  nos 
fautes,  le  priant  qu'il  nous  les  ùce  toulîours 
lentir  de  plus-  en  plut .  Et  d'autant  qu'il  nous 
prefle&  nousexkorce  de  venir  à  luy  ,&  qu'il 
a.  comme  leibnti  eftendut  pour  nous  y  appel- 


4"? 

1er, que  noutnefoyons  point  fi  malins  de  nous 
en  reculer.niais  qu'il  no"  incite  par  l'on  ûir.d 
Erprit,  *  qu'vB  chacun  de  nous  s'ciïorce  à'id 
herer  toulîours  à  luy  d'v  ne  afFetlion  plus  ar- 
dente .Et  pour  ce  faire,  que  nocî  apprenions 
de  nous  régler  &  conformer  du  to-iit  à  fa  fain- 
£tc  voloBté:&  qu'en  nous  déportant  de  toutes 
nos  inuentions,  fagefle,  &  prudence  cliarncl- 
le,  nous  demandions  de  nous  rendre  dociles 
pleinement  à  fa  fairfte  Parole ,  &  d'y  proticcr 
en  forte  qu'elle  nous  foit  rendue  de  lour  en 
iour  plus  amiable.  Q^  non  feulement  il  nous 
face  celle  grace.mais  à  tous  peuples  jic  nations 
de  la  terre. 


PREMIER      SERMON     SVR     LE 

djy  ATRIEME     CHAPITRE. 

I  le  tadiure  donc  dcuant  Dieu,  ^  le  Seigneur  le  fus  Clmjl,  qui 
iugerd  les  \ifs  ç^  les  morts  dfon  apparition,  ^[on  Koyaume: 

z  Vrejche  la  Pdrole,perfeuere  à  heure  cr'  hors  heure,  argue,  me- 
noce  iddmoneîle  auec  toute  patience  (^  doSlrine. 


E  qui  BOUS  fut  dit  au  der- 
nier fer:iion,  eftoit  pour  in- 
citer chacun  de  nous'. à" lue 
l'Efcriture  fainâe,  veu  que 
elle  nous  eft  tant  vtile,&que 
Dieu  a  corapnns  en  icelle 
tout  ce  qui  eft  requis  à  no- 
ftre  falut.Mais  Dieu  encores  ne  s^cft  pas  con- 
tenté de  mettre  l'Efcriture  fainftecn  auant, 
afin  qu'vn  chacun  yeftudie,mais  il  a  par  fa 
bonté  infinie  aduifé  d'vn  fécond  moyen  pour 
nous  inftruire  ;  c'eft  que  la  dodrine  qui  ift  là 
contenue  fe  prefche.ii  qu'on  nous  l'expcfetSc 
àcefte  fin  il  a  ordonné  les  PaOcurs  en  fon  E- 
glifc,qui  ayent  l'office  &  la  charge  d'enfei- 
gner.  Voila  vnc  aide  que  Dieu  a  voulu  adiou- 
Uer  i  caufede  noftre  rudefle  .  C'eftoit  deii.i 
bien  affez  qu'il  nous  euftpropofé  la  Parole, 
qu'elle  fuftefcrite,  *:  qu'vn  chacun  la  leuft,  & 
peuft  apprendre;  voila  Dieu  gui  s'eftoit  deiia 
raonftré  plus  que  libéral  en<;cft  endroit:  mais 
quand  nous  voyons  qu'il  nous  traitte  filon 
noftre  infirmité, &qiie  les  morceaux  nous  font 
mafchez.afin  que  nous  les  puif.ions  mieux  di- 
gérer :  bnef,  qu'il  nous  appafttUe  comme  des 
petis  entans,  en  cela  nous  voyons  qu'il  n'y  a 
plus  nulle  excufe.lîuon  que  nous  profitions  eri 
fon  efchole.  Nous  pourriôs  alléguer  que  l'E- 
fcriture lainde  nous  eft  difficile  ,  finon  qu'on 
nous  l'expofaft  :  mais  quand  D:eu  a  n^i.  tous 
les  deux  moyens,  c'eft  afçauoir  qu'on  life  ,& 
«ju'on  efcoute  ,  qu'vn  chacun  cerche  &  ^'tn- 
quierede  la  venté  félon  qu'elle  eft  contenue 
en  la  Loy,  es  Prophètes,  &  en  l'Eiiangilc  :  & 
puis  que  nous  ayôs  encores  des  meflà^f  rs  qui 
sous  vieacnt  dcclarer  les  cKofes  plus  à  plein, 


&  que  Dieu  fe  rende  ainfî  familier  i  nou';,ceJa 
ne  nous  doit-il  pas  rompre  le  caur?Ne  ferioï 
nous  point  bien  lafches  fi  nous  ne  mett-ions 
peine  à  receuoir  ce  qui  nous  tft  ainli  propofé 
au  nom  de  noftre  Dieu?  Et  voila  pourquoy 
maintenant  S.Paul  adioufte  ,  Qu'il  aiiiurt  donc 
T'moil'ce  de  frffcher.  Ilauoitditau  parauant, 
L'Efcriture  elt  vtile.  Et  bien, c'eftoïc  corne  s'il 
euit  renuoyé  chacun  de  nous  à  lire  :  &  cela  eft 
bien  vray  :  mais  il  monftre  quant  &  quant  que 
Dieu  veut  q  les  homes  foyent  inciteï,&  pouri 
ce  qu'ils  font  rudes  &  grofsiers  ,  qu'ils  ayent 
qui  leur  monftre  le  chemin, qui  le;  conduil'c,& 
qui  leur  tende  la  main,  &  qui  leur  porte  le  mcf 
fagede  l'Euangile,  pour  leur  monftrer  quelle 
eft  la  volontéde  Dieu.Car  quand  nous  aurons 
leu  l'Efcriture  fainete.S:  que  nous  y  aiuôs  pro 
fité,  fi  eft-ce  que  Dieu  veut  encores  que  rous 
en  ayons  vne  intelligence  plus  facile.ayan  ce 
fecôd  moyen  qu'il  ab^en  voulu  adioufter.Voi 
la  donc  ce  que  nous  auons  à  obfcruer  en  ce 
pafTage,  qu'vn  chacun  de  nous  doit  bien  eftie 
tfmeuà  lire  &  s'enquérir  de  ce  qui  eft  conte- 
nu en  l'Efcriture  fainfte  :  &  ncii  f  ulemejit 
chacun  doit  taire  cela  en  fon  priué,  mais  nous 
deuons  tous  enfemble  tftre  diliocns  à  rece- 
uoir la  dodrine  qu'on  nous  prcfche,S;  gaidcr 
ccft  ordre  que  Dieu  a  eftabli  entre  nous  .  Et 
ceux  qui  ont  la  charge  d'tnleigncr  .doyucnt 
eftre  aufsi  fongueux  de  s'en  acquitter  ,  &:  de 
taire  ce  qui  leur  eft  commandé  par  la  bouche 
de  faintt  Paul.Mcfmes  nous  deuons  bien  poi- 
fer  les  mots  qui  l'ont  ici  couchez  .  Nous  auons 
délia  veu  par  ci  dcuant,  que  Timothee  eftoit 
homme  excellent,  il  eftoit  homme  diiiger:t  à 
édifier  l'Eglife  de  Dieu,&  qui  nes'efpargnoit 
Oo.iii. 


478 


SERMON    XXIII  I. 


en  rien. Il  fcmble  donc  qa'il  de'Joit  bien  fuf- 
fire  àfau'.ft  Paulde  l'aduertir.  Car  puisqu'il 
auoit  vn  te)  zèle,  il  ne  faloit  point  le  picquer 
d'auantage  :  &  neantmoins  voici  ùmâ  Paul 
qui  vfe  d'vnc  grande  véhémence,  en  i'or^e  que 
il  n'enfeigne  pas  feulement  Tiraotliee  de  Ion 
deuoir  ,  mais  il  l'adiourne  comme  s'il  auoit  là 
deuant  le  luge  celefte  :  let'adiure  (dit-il)  de- 
vant Dictt  :  Si  puis  ,  deuant  le  Seigneur  hfus 
Chrifl,  qui  iugern  les  y  ifs  Cr  les  morts  .  Voila 
donc  Tunothee  qui  eft  côme  adiourné  en  per 
fonne,  pour  comp3roiflre&  rendre  conte,  s'il 
ne  s'eft  deueiuent  acquitté  ,  &en  toute  fideli- 
té,de  la  charge  qui  luy  eftoitcommife.En  ce- 
la il  a  niôlhé  que  ce  n'eft  point  vne  chofe  pe- 
tite &  légère  que  la  parole  de  Dieu  foit  pref- 
chee:&de  faid,c'eft  le  thrcfor  de  vie&defa- 
lut.Toutainfi  qii'vne  fois  Dieu  nous  a  retirez 
des  abylmes  de  mort ,  quand  il-n'a  pas  efpar- 
gné  fou  Fils  vnique-  aufsi  il  nous  fait  partici- 
pans  de  ce  bien  ineftimable.de  ce  bien  qui  no' 
a  efté  acquis,  qtiand  l'Euangile  fe  prefche  .  Et 
P  voila  pourquoy  fainâ  Paul  dit  oue  c'eft  la  ver 

^""'  ■     tu  queDieudefploye  en  falutà  touscroyans. 
Si  donc  Dieu  nous  veut  attirer  àfoy&  à  fon 
hcritage.il  vfcde  fon  Euangile.Et  ainfî  celuy 
doit  bien  cflre  vne  chofe  piecieufe  ,  puis  que 
voila  comme  lamoit&pafsion  de  noflre  Sei- 
gneur lefus  Chrift  nous  eftappliquec.afin  que 
nous  en  receuions  le  fruicl ,  Se  qu'elle  ne  loit 
point  inutile  enuers  nous, ni  oifiue.  Voila  com 
me  nous  paruenonS  à  falut,  voila  comme  nous 
fommes  réduits  à  nolhe  entier ,  tellement  que 
nous  fommcs  faits  compagnons  des  Anges  de 
Paradis:voila  comme  Dieu  rcgneau  milieu  de 
nous,  &  nous  gouucrne  .  Aufsi  ce  n'ell  point 
lins  ciufe  que  fainû  Paul  exhorte  Timothee 
auec  vne  telle  façon  de  parler,  quand  il  Tad- 
journe  là  à  rendre  conte  deuant  le  lugeccle- 
fte.tînon  qu'il  ".'employé  de  tout  fon  pouuoir 
•&  faculté  à  prefcher  la  parole  de  Dieu. Et  mef 
mes  il  adiouftcQ^f  cil.^  fc  face,(^en  temps,  O" 
hors  teynps.Comme  s'il  difûit,Ie  ne  veux  point 
que  tu  choilifles  feulement  des  heures  à  l'ap- 
pétit de  ceux  dont  tu  asJa  charge, mais  que  tu 
leur  foii  importun. Il  eft  vray  que  celle  impor 
tunité-ci  feruble  tftre  mal  à  propos  :  car  puis 
que  les  hommes  font  trop  délicats  de  leur  na- 
ture, ils  fc  fafchent  quand  on  les  prefle  par 
trop. Si  donc  on  ne  ceire,il  femble  que  cela  ne 
férue  qu'à  les  defgoufter,  qu'ils  j'ennuyent  de 
la  parole  de  Dieu.  M.iis  que  fera-ce  quand  on 
kur  voudra  complaire  ?  Et  fi  on  s'arrcfte  lors 
qu'ils  dirôtiC'clîaflezique  fera-ceflls  ne  cer 
«herôt  pas  Dieu  aucc  trop  griîd  defir.Et  pour 
tant  la  prédication  de  la  parole  de  Dieu  ft-roit 
bien  mil  rcccue  ,  &  bien  troic^cmcnt ,  li  on  fe 
■fouloit  accorder  à  tous  les  fouh.ms  dumôde. 
Voila  pourquoy  noIlrcScigreiir  veut  que  ceux 
«jui  ont  l'oflice  de  prefcher  foytit  importuns: 
  fi  ceux  qui  doyuent  efcoutcr  fe  cliagrinciu, 
&  qu'ils  en  fovcnt  comme  foulez, qu'on  ne  les 
lailTc  point  là  croupir  en  ceAe  pareâe,  ij[uaiid 


on  voit  qu'ils  fe  veulent  fi  tort  deflourner  de 
la  parole  de  Dieu.  Il  les  faut  donc  picflcr,  en- 
corcs  qu'ils  ne  le  vacillent  pas  .  Et  puis  fainct 
Paul  remôflre  que  ce  n'tlt  point  aflcï  de  prel 
cher,  comme  lî  on  cnfeignoit  en  l'efchole,  & 
la  Loy  de  Dieu,  &  les  promefles  ,  &  ce  qui  eft 
côtenudedoÔnneen  l'Efcriture  fainéleimais 
il  faut  arguer,menactr,&  exhorter  :  comme  s'il 
difoit,  que  11  on  lailTe  cela  au  chois  des  hom- 
mes, de  fuyure  ce  qui  leur  i&  raonlhé,  iaroais 
ils  ne  remueront  vn  pied.  La  doftrinc  donc  de 
foy  ne  peut  profitei  de  rien.finon  qu'on  la  ra- 
tine par  exhortations, par  menaces,  qu'il  y  ait 
les  aiguillons  pour  picquer  les  hommes  :  car 
des  befte.  qui  font  tant  rcuefches,quâd  on  les 
laiflera  là  croupir  en  leur  parefle,  il  fera  bien 
difficile  en  la  fin  de  les  faire  aduancer  au  che 
min  de  falut.  ToutesfoisaSn  qu'ily  aitmefu- 
rc,fair.ft  Paul  adioufte  quant  &:  quant  que  cela 
fedoit  faire  aucc  dèélnne  :  comme  s'il  difoit, 
qu'en  exhortant  il  nous  fautelhc  fondez  en, 
bonne  raifon  :  car  fans  cela  nous  baHirons  en 
l'air.  Voila  donc  la  doârine  qui  eft  comme  le 
fùEdement,&  puis  les  menaces,  les  reprehen- 
fions ,  Se  tout  le  refte  cfl  pour  pourfuyure  l'é- 
difice. Et  aufsi  il  veut  qu'il  y  ait  douceur  méf- 
iée,afin  que  l'aigreur  trop  gr.îdene  foit  point 
pour  dtfgoufter  les  auditeurs  .d'autant  que 
cela  fouuentesfois  eft  caufe  qu'ils  fe  defpi- 
tent,  &  ne  font  que  s'enucniraer  contre  Dieu. 
Il  faut  donc  qu'on  leur  remonfhe  tant  qu'il 
fera  pofsible ,  qu'on  ne  demande  finon  de  les 
attirer  à  Dieu. Et  c'i  ft  cefle  doucetir  dont  par 
le  fainél  Paul,  laquelle  il  veut  cftre  coniointe 
aiiec  les  leprehenfions  &  menaces .  Or  puis 
que  nousauons  en  bricf  l'intention  de  l'Apo- 
l>re,ou  pluftofl  du  faind  Efprit  qui  a  parlé  par 
fa  bouche  ,aduifons  de  profiter  en  ce  petit 
fommaire.Et  quant  au  premier,  notons  que 
c'cft  vne  chofe  que  Dieu  a  en  recommanda- 
tion finguliere,  que  les  fidèles  foyent  deue- 
ment  enfeignezen  fa  Parole  .  Car  il  eft  cer- 
tain que  le  lainû  Efprit  a  gouucrné  la  langue 
de  fainft  Paul ,  qu'il  ne  luy  a  point  efchappé 
vn  mot  fuperflu  :  &  nous  voyons  comme  il  y 
procède.  Cognoiflons  donc  que  ceci  eft  (coia 
me  défia  nous  auons  touché  )  plus  que  pic- 
cicux  à  Dieu,  c'cft  afçauoir ,  quand  la  doftri- 
iie  qui  eft  contenue  en  l'Efcriture  fainâe  Ce 
prefche,  &  que  le  monde  en  eft  inftruit  com- 
me il  appartient .  Et  de  faift,  Dieu  a  déclaré 
par  vn  bon  gage,  combien  ilaiîoit  cher  noftrc 
falut,  quand  il  n'a  point  efpargné  fon  Fils  v- 
niquc.  Et  niefnus  quand  (unit  Paul.ippelle  i- 
ci  Timothee  deuant  le  fiegeiudicial  de  noftrc 
.^ieigneur  lefus  Chrift  .cognoiflons  quec'ift 
en  luy  rtduifant  en  mémoire  ce  qui  elt  dit  par 
le  Prophète  Eïfcbicl ,  Que  ceux  que  DitiiaE^fcft.  3 
ordonnez  pour  anoncer  ià  Parole,  font  com- 17. c 
nie  des  guets  ,  &  que  s'ils  ne  veulent  point 33.7. 
crier  quand  il.s  voyent  quelque  m.ii  ou  danger 
prochain  ,  le  amcs  feront  reqirfcs  de  leurs 
luains.  Si  doue  les  hÔD>e«  periii'cr.t  par  noft;e 

11  on  c  ha 


SVR   LA   II.    A   TIMOTH. 


4'^î» 


iionclialanee  qiund  Dieu  nous  a  côftituez  Tes 
mefiàgtrs  pour  anoncer  fa  parole,  il  faudra 
que  le  fang  foit  requis  de  nos  mains,  nous  fe- 
roniiugfideuant  Dieucommecoulpablesde 
la  perdition  de  tous  ceux  qui  n'auront  point 
erté  tnfeigaex  par  nous.  Voila  donc  Tadiour- 
nement  que  faina  Paul  fait,  qui  eft  pour  rati- 
fier ce  que  delta  aaoït  cfté  dit  par  Ezechicl, 
pour  monrtrer  que  ceux  qui  ont  l'office  d'en- 
icigner  ont  vne  obligation  plus  eftroite  ,  Se 
qu'il  faudra  qu'ils  foycnt  tenu;  coulpables  de 
morttnôpointdes corps,  mais  des  amcs.quad 
ils  n'auront  point  fait  leur  deuoirde  retirer 
les  poures  pecheur.edu  chemin  de  perdition. 
£c  ainfî  nous  auons  à  prendre  courage.voyis 
<^e  Dieu  procure  il  bien  noftrefalut  :  &nout 
ferons  par  trop  ingrats ,  fi  nouj-nous  desfiôs 
maintenant  de  la  bonté  de  noftrc  Dieu  ,  »eu 
qu'il  pcnlede  nous  maintenir  à  foy  ;  encores 
que  nous  y  fjyons  ncgligens,*:  que  nous  foy 
ons  comme  endormis, li  eft-ce  que  Dieu  veil- 
le pour  noftre  bien  ,  Si.  ne  demande  fin»n  que 
nous  foyons  fauuez  en  l'héritage  celefte.  Ne 
voila  point  pour  nous  donner  vnc  grande  con 
firmation?Mais  à  roppolite,  il  y  aura  vne  hor 
rjble  condamnation  fur  nos  telles  ,  fi  nous  ne 
fommes  vigilans  pour  cheminer  en  f  jiicitu- 
de,Sc  que  nous  ne  refpondions  à  Dieu  de  no- 
ilre  coIté ,  Se  que  nous  ne  tafchions  de  profi- 
ter en  fon  efchole  quand  il  nous  tend  la  main, 
&  qu'il  fe  rend  fi  familier  à  nouv.  Au  refte.cn 
gênerai  notons  qse  c'eft  le  vray  moyen  de 
nous  efue<ller,  quand  on  nous  appelle  au  iuge 
meut  de  D:eu:&  fi  Timothce  qui  tftoit  com- 
me vn  Ange  en  ce  monde ,  a  eu  befoin  «l'cftre 
ainfi  folicité.que  fera -ce  de  noui  qui  (bmmes 
tant  charnels,  qui  auôs  nos  fens  Se  nos  efprits 
diitraits  çà  de.  là.  mefmes  qui  font  comme  ef- 
uanouis  parmi  ce  monde corruptibk.'Ne  faut 
il  pas  par  plus  forte  raifon ,  que  fouuent  on 
BOUS  propofe  le  iugement  de  noftre  Dieu? 
Ainfi  donc  qu'vn  chacun  de  noui  recorde  b:c 
çefte  leçon:c'eft  quandlemôic  nous  retient, 
que  nous  fommes  ici  comme  attacher,  que 
uous  ne  fentons  point  vne  affeâion  vue  qui 
nous  attire  à  Dieu,  que  nous  reduifions  en  me 
moire  qu'ayans  paue  parce  pèlerinage  ter- 
rien,il  nous  faut  comparoiftrc  deuant  le  luge 
celefte:il  faudra  alors  q  tout  foie  mis  en  clar- 
té. Vo  la  le  vray  moyen  de  nous  incirer, quïd 
le  monde  nous  tient  comme  liei  à  foy.  Et  au 
reile,  notons  que  moyennant  que  nous  puif- 
fion  taire  nollre  profit  de  la  venue  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift ,  que  ce  i;e  fera  point 
poHr  nous  cfpouuanter  ,  encores  que  nous  en 
foyons  de  prime  face  comme  eftonnez.  Il  ert 
vray  que  lainais  on  ne  nous  en  pourra  retirer 
cômc  il  eft  requis ,  fi  nous  ne  fommes  picgiiei 
de  quelque  crainte:  car  cependât  que  les  hom 
jnes  font  aifeurei,  ils  fe  flattent,  &  ft  plaifcnt 
touùours  enkursdclices.Ilfautdonc  qu'il   y 
ait  de  la  crainte  en  no',ou  iamais  no'  ne  fercj 
4iligcot  à  venir  i  Dieu.Mais  il  y  a  deux  ('fp«- 


ces  de  craiflte:rrne,c'eft  pow  noue  efpoHan- 
ter  en  forte  que  nous  fuyons  Dieti,&  que  nous 
ne  puifsions  nullement  approcher  de  luy:ra.a 
tre  eft  feulement  pour  nous  donner  occafion 
de  penfer  à  nous,  au  lien  que  nous  eftionc  en- 
dormis &nonchalans^,  que  nos  fens  eftoyetic 
efgarer  &  vagabons  ,  que  nous  apprenions  de 
les  recueillir  pour  n'eftre  plus  enyuretde  noï 
▼aines  phantafies.  Votla  pourquoy  il  eft  die 
qu'il  nous  faut  comparoiftrc  deuant  le  iuge- 
ment de  Dieu.   Q^iaml  ce  iugement  de  Dieu 
nous  eft  ainfi  propofe,  ce  n'eft  pas  pour  nous 
efFaraucher,afin  que  nou/demeurionsi^xoo- 
fus,  3c  que  nous  perdions  courage  :  mais  tout 
au  rebours,c'eftafin  que  nous  ayôs  vne  crain- 
te modérée, laquelle  feulement  nous  efueille: 
&  puis  que  nous  concluyons  qu'il  nous  faut 
tellement  cheminer  en  ce  monde  ,  que  nous 
puifsions  Comparoiftrc  deuat  le  luge  qui  nous 
a  cfté  ordonné.  Et  qui  eft-ilr  le  Fils  de  Dieu, 
noftre  Redempteur,voire  noftre  Aduocat.  Et 
voila  pourquoy  notamment  fainû  Paul  dit, 
rjH'il  tdiure  Timathee  Jeuant  le  Seigneur  lefitt 
qui  iugirn  U)  yiuanj  &  les  mortt.  Oyans  par- 
ler du  Fils  de  Dieu  qui  intercède  pour  notJ!;, 
craindrons-nous  de  venir  deuant  fon  fiege  iu- 
dicia!?Ncnni:  mais  nous  en  pouuôs  approcher 
hardiment  en  pleine  confiance,  car  il  ne  fouf- 
frira  point  que  fa  mort  &  pafuon  foit  inutile, 
qu'il  ne  la  face  valoir  enuers  nous:&  puis  que 
il  a  prins  ce  titre  d' Aduocat  &  Interceffeur.il 
fera  tellement  noftre  luge  ,  que  cependant  il 
maintiendra  noftre  falut.&en  fera  le  garent. 
Et  ainfi  retenons  que  le  iugement  de  Dieu  ne 
nous  eft  point  propofe  comme  efpouantable 
enTEfcriture  fainûe.mais  que  c'eft pour  eftre 
amenez  à  noftre  Seigneur  Itfus  Chrift,  afin  q 
nous  fçachions  que  Dieu  ne  nous  veut  point 
iiigeràla  rigueur:(car  queferoit-ccfnous  fe- 
rions tous  aby fmez)  mais  qu'il  nous  vent  tel- 
lement tenir  en  bride, que  cependant  nous  ne 
doutions  point  qu'il  nous  receura  à  merci 
quand  nous  aurons  tafché  de  nous  fubmettre 
à  fon  feruice  pour  l'honorer  &  l'adorer  com- 
me il  appartient,  &  de  nous  acquicttr  de  la 
charge  qui  nous  eft  cômife. Voila  ce  que  rous 
auons  à  retenir.   Il  eft  vray  d'vn  co  fié,  que 
fainû  Paul  parle  ici  notamment  de  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift  ,  d'autant  qu'il  eft  le  luge 
demonde.-parcela  il  veut  remonftreri  Tim» 
thee,que  ceux  qui  aurôt  laifle  le  troupeau  de- 
folé,&qui  ne  l'auront  point  gardé  des  loups, 
qui  auront  laifle  les  poures  brebis  affamées 
fans  leur  dôner  la  paftiire  de  vie.qu'iK  ne  doy 
uent  efpererfinon  toute  vengence  de  noftre 
Sf  igneur  lefus  Chrift. Et  pourquoy?  Car  il  fe 
referue  l'office  de  iuger  le  monde, c'eft  dciiat 
luy  qu'il  nous  faut  comparoiftre.Or  mainte- 
nant il  nous  fait  ceft  honneur  ,  que  nous  foy- 
ons ici  comme  e»  fa  perfonne:ccluy  qui  entre 
en  chaire  pour  prefcher,il  eft  là  en  Pauthori- 
té  &  au  nom  du  Fils  de  Dieu  :  comme  ûinc^ 
Pauldit  qi»erambanàdefiou5  eft  commis, afin 

Oo.iiii. 


48o 


f,   ^SE  R  MO  N     XXV. 


que  nous  exhortions  TEglife  en  fon  nom.quo 
nous  publions  TEuangile  en  fon  authonté. 
Quand  donc  il  nous  fait  cell  honneur  à  nous 
poures  vers  de  terre ,  que  nous  le  lepreferj- 
tions,que  nous  parliôs  comme  par  fa  bouche, 
que  la  doitniie  que  nous  portons.ait  telle  au- 
thorité  comme  s'il  eftoic  ici  viliblcment ,  & 
qu'elle  ait  vnc  authorité  plu5  grande  ,  que  fi 
les  Anges  de  Paradis  nous  apportoyent  rien 
de  leur  propre  :  quand  donc  noftre  Seigneur 
lefus  nous  honore  iufques  là  ,  fi  nous  défail- 
lons de  noftre  part  >  &  que  nous  ne  tafchions 
de  nous  CMployer  fidèlement  en  ce  qu'il  or- 
donne,quelle  pitié  aura-il  de  nous?Noftre  de! 
loyauté  ne  merite-elle  pas  qu'il  exerce  vne 
horrible  vengeiice  fur  noftre  ingratitude? 
D'autre  cofté, regardons  le  rhrefor  qu'il  nous 
a  commis:  c'eft,  que  Dieu  fon  Père  règne  fur 
nous  par  la  vertu  de  fon  fainû  Efprit  :  car  fa 
parole  eft  organe  de  cela  Se  inftrumét.Et  puis 
il  eft  queftion  aufsi  de  nous  faire  participans 
du  falut  immortel  quinousaefté  acquis  par 
fa  mort  &  paf.ion.Si  donc  il  n'y  a  predicatio, 
la  mort  &  pafsion  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift  fera  ane.itie.on  ne  lecognoiftra  point 
Rédempteur  du  monde,  il  ne  profitera  rien 
«u'ilfefoit  ainfi  expofé  pour  nous.  Qnani 
tout  cela  fera  c5me  aboli  par  noftre  defloyau- 
t^, y  aura-il  nulle  excufeîQiiandnouçcûinpa 
roiftrons  deuant  luy.ne  faudra-il  pas  qu'il  s'e 
Jeueà  rencontre  de  nous  pour  nous  confon- 
•dre?  Ainfi  donc  voila  fainft  Paul  qui  donne  ici 
de  terribles  aiguillons  à  Timothee,  afin  qu'il 
penJe  de  s'acquitter  deuement  de  fon  office. 
Mais  au  refte, notons  combien  que  Tmochee 
euft  cite  ainfi  exhorté,  que  cependant  ilauoit 
occafi  in  de  fe  refoudre,que  s'il  auoit  cheminé 
en  bonne  confcience  touchant  d'édifier  l'E- 
glife,&  de  bié  gouuerner  le  troupeau  qui  luy 
eftoit  commis  en  charge  ,  qu'il  pouuoit  venir 
franchement  deuant  le  luge  celefte.  Et  pour- 
quoy?Carc'eft  celuy  qui  nous  fupporte  quad 
il  voit  noftre  foiblcflè.il  fupplee  à  noftre  dé- 
faut.Ne  pcfons  pas  donc  qu'il  vucille  exercer 
toute  rigueur  enuers  no'.mais  il  couurira  nos 
fautes, &  fa  iuftice  refpondra  pour  nous  dcuat 
Dieu  fon  Père  ,  fa  mort  &  pafsion  feront  vn 
pavement  pour  nous  exempter  de  toutes  nos 
dettes:  car  il  fera  toufiours  office d'Aduocat, 
encores  qu'il  foit  noftre  luge. Or  notons  bien 
que  ceci  eft  gênerai  à  tous, côbien  que  S.Paul 
parle  à  Timothee,  que  toutes  fois  Se  quantes 
qu'on  nous  appelle  ou  adiourncdtuHt  le  thro 
ne  ou  le  fiege  iudicial  du  Fils  de  Dieu  ,  q  d'vn 
cofté  nous  deuons  penfer  que  quand  nous  ije 
aurôs  daigné  receuoir  ce  bien  ineftimable  qui 
nous  eftoit  offert, c'eftafçauoir.q  nousiouif- 
fionsdecefte  rédemption  qu'il  nousaacquife, 
qu'il  ne  foiitfrira  point  que  cela  foit  ainfi  mcf 
prifé.Et  puis  c'cftvne  chofe  tfop  fainftc  q  l'E 
uangile,po(ir  dire  qu''6n  h'çn  ti(?ne  conte, c^eft 
vn  facrilege  quand  nous  polUiqns -cfte  chofe 
que  Dieu  auoit  dediee  à  noftre  falat.  Et  ainfi 


cdgnoiflônsCombiê  que  la  feijle  mémoire  du 
iugemcnt  qui  eft  donne  à  noftre  Seigneur  le-» 
fus  Chrift  ,  nous  doyue  bien  faire  trcmbler.fi 
nous  ne  fotiiïions  qu'il  pai  le  à  nous,&  q  nom 
ne  receuions  paifiblemcnt  ce  qu'il  nousdira^ 
quand  auiourd'huy  nous  ne  le  voudras  point 
accepter  pour  noftre  Pafteur.il  faudra  q  nouf 
l'ayons  pour  luge  en  defpit  de  nos  dents.  Et- 
de  quelle  façon  eft-ce  qu'vfe  le  Fils  de  Dieu 
pour  nous  gagner  à  foyî  II  nous  prie  ,  comme 
fainft  Paul  le  dit  en  vn  aure  paflage. Ainfi  pen 
fons, Commet?  Celuy  qui  eft  chef  des  Anges, 
Dieu  éternel, auquel  habite  toute  plénitude 
de  diuinité,  deuat  lequel  tout  genouil  doit  e- 
ftre  ployé, voire  des  diables  d'enfer,que  tou- 
tes créatures  luy  font  hommage, que  celliy-la 
daigne  parler  fi  douceirient,&  qu'il  foit  côme 
pair  à  compagnon  ,  &  que  cependant  nous  nf 
daignions  i'efcouter?  Où  ferâ-ce  aller  ?  Ainfî' 
donc,  nedeuons-nous  point  eftre côme  rauis 
en-eftonnement,voyans  vne  douceur  fi  inefti- 
mable.que  le  Fils  de  Dieu  s'abaifle  iufques  là, 
de  nous  prier,nous  pouies  charognes  qui  fom 
mes  pleins  d'iniquité.pleins  d'ordure, qui  de- 
urions  eftre  reiettez  de  luy  comme  des  ladres 
iufefts  ,  voire  qu'il  nous  abyfmaft  au  gouffre 
d'enfer  ,  &  neantmoins  qu'en  la  fin  il  vfe  de 
prieres,pournous  gagnera  noftre  falut?Mais 
notons  bien(comme  i'ay  dit)que  cela  nous  fe 
ra  bien  cher-vendu ,  quand  auiourd'huy  nolis 
aurons  bouché  les  aureillesàux  admonition* 
du  Fils  de  Dieu  ,  qu'il  faudra  que  nous  oyons 
ccfte  trompette  horrible, qui  nous  confondra' 
aux  aby  fmes  d'enfer  ,  que  nous  oyons  la  fen- 
tente  de  condamnation  fur  nos  teftes  ,  quand 
nous  n'aurons  point  voulu  ouir  la  voix  douce 
&■  amiable,par  laquelle  nous  fommes  auiour- 
d'huy conuiez  de  pârticiptr  au  falut  qui  nous 
a  efté  acquis.  Voila  donc  comme  d'vn  cofté 
toatcifois&  quantes  que  nous  oyons  parler 
du  iugement  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
nous  deuons  eftre  efmeus  d'viie  telle  crainte, 
que  tous  nos  fens  s'effrayent. Et  commet?  Ce 
n'eft  pas  que  nous  foyons  eftonnez  dutout, 
afki  de  fuir  fa  prefence  :  mais  que  nous  foy  os 
efueillcz.il  refte  que  nous  aduifions  que  fi  au- 
iourd'huy nous  obeifTons  à  la  voix  de  noftre 
Pafteur.quoy  qu'il  y  ait  beaucoup  de  vices  en 
nous, que  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  n'ou- 
bliera point  qu'il  eit  toufiours  noftre  Aduo- 
cat,  &que  nous  ferons  reccusdc  luy  ,  4; qu'il 
couurira  toutes  les  fautes  que  nous  auons  c5- 
mifes,  tellement  que  nous  pourrons  toufioùrs 
regarder  à  fi  venue  (comme  fainû  Paul  en  a 
parlé  ci  delTu'  )nous  attendans  &  nous  efiouif 
fans  en  icelle.Car  faincf  Paul  enTepiftre  pre- 
mière idit  que  les  fidèles doyuentîuoir  ccfte 
marque-la,  de  s'cfiouir  en  attendant  la  venue 
de  noftre  Seigneur  lefusChrift. Voila  dont  ce 
q  nousauoixs  àretenirdc  ce  pafTàge.  Or  qn.y 
il  parle  de  iuger  les  viuans  &.  les  morts ,  c'cfï 
pource  que  ceux  qui  feront  trouucz  en  ccfte 
vie  preunte  à  la  venue  de  noftre  Seigneur 

le  fut 


SVR     LA     II.     ATI  MOT  H. 


481' 


le/us  Clirift,  ne  mourront  pas  comme  noiiî,    auoirmal  employé  fa  peine  en  feniaw  à  Dieu 
mais  feulement  ils  feront  cJi.mgezeH  vue  mi-    comme  fi  la  mort  cftoit  pour  abolir  tout, mais 
mite  de  temps ,  ainiî  cjne  nous  l\uions  vcu  aux    qu'ri  mefpnfc  ce  (|u'il  ha  deuant  fer:  pitdv ,  & 
,  ft,  f  1  Tlieflaloniciens,  &  qu'il  en  eft  parié  au  rf .  de     que  fon  cfperance  foit  là  à  la  venue  qui  nous 
j.        '  la  première  aux  Corintli. Nous  ferons  auiour    eit  promifede  noilreRedempteur.Vsila  doc 
d'huydefpouillez  de  noftre  chair, elle  s'en  ira    comme  il  nous  faut  faire  pour  prendre  cour». 
en pourriture,  nous  ferons  la confumez  com-    ge,&eftre  fermes  &  conflans  pourferuirà 
me  iî  ce  n'eitoit  rien  de  nous  :  cependant  fî     Dieu,&  batailler  là  où  il  nous  employé:  c'eft 
elt-ce  que  nos  âmes  feront  recueillies  en  bon    afçauoir.que  le  Fils  de  Dieu  à  fa  venue  iugera 
ne  garde  Se  feure  ,  iufques  à  ce  iour  de  pleine    les  morts  aufsi  bien  q  les  viuâs.Ainli  ceit  artî 
reftauration. Mais  ceux  qui  viurontà  la  venue    cle  defoy  doit  tftre  approprié  à  la  circonflan 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.combien  que    ce  de  ce  paiTàge,d'autant  que  S.  Paul  a  voulu 
lis  foyent  changez, &  que  ce  qui  eft  de  mortel    déclarer  que  quand  nous  faifons  ce  qui  nous 
en  eux  foit  anéanti ,  toutesfois  fi  eft-cc  qu''ils  '  eft  commandé, il  nousprend  en  fa  proteftion, 
ne  pafleront  point  par  vue  mort  naturelle  cô-    &  qu'il  ne  faut  pas  que  nous  craignions  d'au- 
meauiourd'huy  on  voit  qu'il  fe  fait.   Voila    tant  que  lefus  Chrift  ne  nous  apparoift  pas  du 
pourquoy  il  eft  dit  en  noitrecreace,  que  no-    premier  coup,  car  nous  nefçauons  pas  quand 
ftreSeigneur  lefus  viédra  pour  iuger  les  viuas    le  tempsopportun  fera  de  favenue,mais  quoy 
&  lesmorts:&  fainfl:  Paul  le  ratifie  en  ce  paf-    qu'il  en  foit.  il  pourra  efttc  auiourd'huy  aufsi 
fage.Or  par  cela  il  nous  fignifie  qu'il  ne  nous    toft  que  demain.  Appreftons-nous  donc ,  afin 
faut  point  promettre  ne  lour,  ne  long  temps,     que  nous  ne  foyons  point  furprins.Et  au  refte, 
mais  qu'il  nous  faut  toufiours  auoir  comme    encores  que  nous  ne  fçachios  point  que  la  ve- 
vn  pied  leué  pour  venir  àcefte  heurcufe  ren-    nue  foit  fi  prochaine,&  que  nous  n'en  voyons 
contre  du  Fils  de  Dieu  quand  la  trompette     nul  figne,&  cependant  que  nous  foyons  fur  le 
fonnera.Si  donc  nous  viuons  mainten.ît,noiis     bord  de  noftre  foffe,  &  qu'il  femble  que  nous 
nefçauons  pasfilefus  Chrift  viendra,  car  fi     deuions  eftre  cent  foispourris  en  terredeuât 
venue  fe  fera  en  vn  moment, cependant  qu'on    qu--  lefus  Chrift  viene  pour  nous  reilaurer  en 
pourroit  feulement  filler  l'œil ,  comme  fainû    tierement,que  nous  ne  penfîons  point  que  no 
l.Corm.  Paulenparle:ilvfedeceftefimiliiude-la  quJd    ftre  condition  foit  pire  pour  cela  :  ca'r'Iefus 
it.fi       il  parle  de  cefte  venue  qui  fe  fera  quand  nous    Chrift  n'eft  point  ordonné  loge  feulemét  des 
ne  l'aurons  point  attendu. Q_ue  donc  nous  fa-    viuâs.mais  de  ceux  qui  font  trefpàirez,&  qu'il 
cions  bon  guet ,  &  que  nous  foyons  fur  nos     fera  fortir  la  poudre  des  fepulchres.Et  quand 
gaides ,  que  nous  ne  foyons  point  endormis    la  refurreftion  nous  femblera  vulgaire,  que  ce 
comme  les  incredules:car  (ainfi  qu'il  nous  eft     fte  voix  dernière  refonnera.rout  ainliquele- 
1. 1"/!,,/;  rerruauftré  par  fainiï  Paul  aux  Theflaloni-     fus  Chrift  nous  relTufcite  quant  à  nos  âmes 
j.j,  crens)  nous  ne  fommes  point  en  la  r.uift,  puis    lors  quel'Euagile  nous  eft-  prefché, aufsi  nous 

que  noftre  Seigneur  lefus  nous  efclaire  par  aurons  vne  refurrcftion  parfaiâe  &accoin- 
fon  Euangile:il  eft  le  Soleil  de  iuftice  ,  c'eft  plie  quand  il  viendra  en  perfonne  pour  remet 
bien  raifonque  nous  foyons  vigilans.Si  les  en  t  re  les  chofes  en  leur  integ  rite, &  en  leur  plein 
fans  de  ce  inôJe  dormét.il  ne  s'en  faut  point  eftat. Cependant  fainft  Pauladioufte  que  ce- 
esbahir:car  Dieu  ne  leur  a  point  fait  cefte  gra  la  fe  fen  en  finregneinon  pasqu'auiourd'huy 
'^'  ce  de  les  attirer  à  la  clartérmais  cheminons  &  lefus  Chrift  ne  foit  Roy, corne  il  eft  dit  au  1. 
T/wff  courons  vifte,&  que  nous  ne  foyons  point  fur  des  Ph;lippiens,que  Dieu  luy  adôné  vn  Nom 
'  prins:car  la  venue  du  Seigneur  nous  fera  com  fonuerain, deuant  lequel  toutes  créatures  doy 
me  vn  lanon  :  mais  fi  nous  taifons  bon  guet  uent  ployer  le  çenouil.&côfefler  qu'il  eft  en 
(commeilaefté  dit  )  nous  ferons  toufiours  la  gloire  de  Dieu  fon  Père.  Voila  donc  lefus 
prefts  à  refpondre  quand  noftre  Seigneur  le-  Chrift  qui  defiaaprins  polTel'siôde  fonRoy- 
fus  nous  appellera. Et  pourquoy?  D'autat  que  aume  quand  il  eft  reflufcité  des  morts  ,  &  et» 
nous  Taurons  attendu  ,  ainfi  que  nous  auons  ce  qu'il  eft  monté  au  ciel.  Carquantàceftar- 
alleguéde  l'autre  pafTage.  Voiladéc  pour  vn  ticle  de  noftre  foy  que  nous  conRffîns  qu'il 
item.  Et  cependant  nous  fommes  aufiadmo-  eftafsis  àladextrcde  Dieu  foii  Père,  ceh  ne 
neftez  d'autre  part,  qu'encores  q  nous  mou-  fe  rapporte  point  à  vn  lieu  certain:  mais  c'eft  ' 
^  rionsice  n'eft  pas  à  dire  q'ie  nous  ayons  per-    vne  fimilitude  prinfe  des  Rois, qui  ferotfeoir 

^^         du  noftre  temps  en  feruant  à  Dieu.  Il  eftvray    leurs  lieutenans  à  leur  cofté. Voila  donc  Dieu 
^H         que  nous  retournons  en  poudre  ,  mais  atten-    qui  veut  gouuerner  lemonde  par  le  moyen  & 
^V         dons  ce  iour-la  :  combien  que  noftre  vie  foit    la  main  de  fon  Fils.  En  lomme  ,  noftre  Sci- 
cachee,&  qu'il  n'y  ait  qu'apparence  de  mort    gneur  lefus  Chnft  ha  auiourd'huy  dominatiS 
deuant  nos  yeux.fçachô;  quenoftre  Seigneur    furies  creJture>,mais  d'autant  que  cela  n'ap- 
lefus  Chnrt  n'eft  pas  relTufcité  en  vain, car  ce    paroiftpoint,  voila  pourquoy  faind  Paul  dit 
n'a  pas  efte  leulcment  pour  fa  perfonne  ,  c'a    qu'il  viendra  en  fon  regne:commeluy  mefiue 
erté  afin  de  nous  recueillir  à  foy.côme  mem-    l'auoit  prononcé, Le  Fils  de  l'homme  viendra  j,i^ff,iy 
bre  s  de  fon  corps. Et  ainfl,qu'vn  home  quand    en  la  m'aiefté  de  Dieu  fon  Pei-e.II  eft  vray  que  ^  j, 
Ifc  verra  vieil  &  caduque,  ne  penfepoinç    û  toft  que  l'Euangile  a  commencé  d'eftrc 

Ppj. 


Waf. 

44 
I 

3 

l.P;rr.3. 
10. 


48i 


SERMON     XXV. 


prefLhé»iinionde,voiIa  le Royaiinje  de  Dieu 
qui  s'tft  eftabli  :  mais  tant  y  a  que  -nous  n''en 
voyons  point  la  pcrfe£l:5  pour  en  ioiiir:main 
tenant  noftre  lalut  gift  en  efperance,  &:cc 
que  nous  efpcrons,il  faut  qu'il  nous  l'oit  ca- 
ché ,  comme  dit  faiiiû  Paul  au  huitième  des 

Cfl.},}.^  Romains.  Et  voila  pourquoy  aux  Colofsicns 
notamment  il  dit  que  noftre  vie  ef:  cachée  c^ 
lefus  Chnft  ,  &  que  la  reOauration  n'en  fera 
point  lufques  à  ce  que  lefus  Chrift.qui  eft  no 
ftre  vie  mefme.apparoifle.  Notons  bien  donc 
qu'anioiud'huy  Dieu  domine  fur  nous  en  la 
jperlonede  Ton  Fils',&q  noflre  Seigreur  lefus 
Chrifta  deiîa  prins  polkfsion  de  ceft  empire 
i«iiuerain  qui  liiy  aeflédonué:&  notons  cela 
aiîn  de  nous  fier  en  luy  ,  cognoilfany  qu'il  ha 
toute  vertu  en  fa  mam.  Car  pourquoy  nous 
teroit-il  rellufciter,  (înon  d'autant  que  nous 
fommes  en  fa  protcÛion  &  fauuegar<ie,''Si  ce- 
la n'eftoit ,  quelle  mifere  fcroit-ce  ?  Ne  fau- 
droit-il  pas  qu'à  chacune  minute  nous  fuf- 
llons  expofezen  proyeàSatanfOùferoitno- 
ûre  foy  Se  certitude,  Se  le  repos  de  nos  con- 
fciences?  Mats  quand  nous  fçauons  que  telle 
puiiîance  qui  eft  en  noftre  Dieu,eft  en  la  per- 
fonnede  noflre  Seigneur  lefus  Chnft  ,  afin 
qu'il  nous  preferue  ,  qu'il  nous  garentilTe  de 
tout  mal.qu'il  refifte  à  nos  ennemis,  tellemét 
que  nous  foyonj  à  feureté  fous  fon  ombre, 
voila  comme  au  milieu  de  tous  combats  nous 
appréhendons  délia  la  victoire ,  au  milieu  des 
tempeftes  &  tourbillons  nous  ferons  au  port 
«le  falut.nous  pourrons  hardiment  nous  repo- 
fer  Se  fans  aucune  doute.  Voila  de  quoy  il  no' 
fert  que  nous  fçachions  que  noftre  Seigneur 
lefus  Chriftefldelïa  entré  en  fon  Royaume. 
Mais  cependant  ,  pource  que  nous  attendons 
fa  venue, &  qu'elle  nous  eft  cachée  ,  fçachons 
que  ce  Royaume  nous  eft  encorcs  incognu,  & 
que  nous  n'en  iouiflbns  finon  par  foy  Se  par 
cfperancc,  que  nous  en  auons  bien  les  prémi- 
ces .maisqu'ilnous  faut  eftendre  nos  efprits 
plus  loin,&  nous  tenir  là  ,  que  les  chofes  que 
nous  ne  voyons  point  auiourd'huy  nous  fe- 
ront cognues  en  temps  opportun,  &  que  nous 
nelaifsions  point  de  les  embrafler  en  telle 
certitude,comme  fi  dcfîa  nous  les  touchions  à 
la  main,&  fî  nous  en  auions  certaine  experien 
ce.Voilaceque  nous  auons  à  noter  fur  ce  mot 
deRegne.que  ùinCt  Paul  a  ici  mis. Or  cepen- 
dant venons  à  ccfte  exhortation  qu'il  fait: 
Q»f  Temothee  prefchc-  la  paTole,foire  &  à  heure, 
&  hors  heure,iy  comme  fjr  importumté.En  ce- 
la il  monftre  que  nous  ne  pouuons  eftre  trop 
diligens  à  enfeigner, d'autant  que  les  hommes 
de  leur  nature  font  aflêz  froids  quand  il  eft 
queftion  de  chercher  le  Royaume  de  Dieu. Il 

Mat  4  Ȕ  ^^  bien  dit ,  Cherchez  le  Royaume  de  Dieu 

■"  en  premier  lieu,&  le  reftevous  feraadioulté. 

Quand  nous  voudras  chercher  premièrement 

ce  qui  concerne  la  vie  prefente  ,  c'eft  mettre 

la  charrue  deuant  les  bqrufs  :  carcen'eftque 

vil  accefTotrcEt  qiii  eft-cç  ncantraoins  qiji  ne 


le  fait'On  voit  comme  nous  fommes  enaelop 
pez  en  ces  chofes  caduques ,  voire  tellement 
qu'on  ne  nous  en  peut  arracher:il  faut  vfer  de 
force  &  de  violence  lî  on  nous  veut  appto- 
clitr  de  Dieu.Si  donc  on  attend  q*ie  les  hom- 
mes demandent  la  pallure  fpirituelle,  que/e- 
ra-ce  ?  Et  bien  ,  l'vn  s'en  contentera  de  huit 
iours  vne  fois,  l'autre  moins:&  quand  on  aura 
ouy  vnmot,c'tftaflez,fi  nous  ne  fommes  pref 
fcz.Ainfi  donc  ce  n'eft  point  fans  caufc(com- 
me  dcfîa  nous  auons  dit)  que  fainft  Paulmet 
ccfte  importunitc.E:  au  refte, notons  que  com 
bien  qu'il  s'addreflèà  Timothee,  neâtmoinj 
ceci  appartient  en  gênerai  à  tous  fidèles.  Et 
tout ainiî que  lesminiftres  delà  parole  ledoy 
ucnt  eux-niefmcs  prattiquer,  c'eft:  à  dire,  que 
ils  doyuente/lre  importuns  pour  s'acquitter, 
&  pour  bien  faire  leur  deuoir-ainfi  faut-il  que 
vnchacun  les  enfuyueen  ceft endroit,& qu'oit 
s'y  conforme. Car  non  feulcmét  les  auditeurs 
feront  lafches  à  ouïr  la  parole  de  Dieu  ,  mais 
celuy  qui  doit  prefcher  iamais  ne  fera  C  bon 
zélateur  qu'il  doit, lînon  qu'il  fe  parforce  ,  fi- 
non qu'il  fecontraigne.pourdire.Enquel  lieu 
fuis-ie  ?  Q_uelle  charge  m'eft  conimife?  Car  & 
elle  elt  honorable  d'vn  cofté.il  faut  que  ie  co- 
gn  jilTe  qu'elle  me  fera  vendue  bien  cher  fi  ie 
ne  m'en  acquitte,  (iganddonc  vn  homme  ne 
pcnfera  point  àfaire  fon  deuoir,iS;  mcfmes  qui 
ne  s'efforcera  point, il  eft  certain  qu'il  ne  fera 
jien  que  comme  par  acquit, comme  s'il  faifoii 
coruee  ,ainfiqn'on  dit.  Ord'autant  qu'il  faut 
que  leminiftrcde  la  parole  foit  importun  ea 
le  contraignant, c'eft  bien  raifon  aufti  qu'il  le 
foit  à  ceux  lefquels  il  voit  eftre  trop  tardifs, & 
qui  volontiers  reculent  pluftoft  que  de  s'auan 
cer.Ainfi,  quand  le  monde  fera  trop  délicat, & 
qu'il  fe  fafchera  incontinent  de  la  bonne  do- 
iVrine  ,  ne  laiHons  pas  pourtant  de  prefcher. 
Et  notons  que  cefte  importunité  ne  s'adrefle 
pas  feulement  à  ceux  qui  ne  tienent  conte  de 
Dieu,&  qui  rciettciit  fa  parole,  mais  aux  fidè- 
les mefmes.  Et  fur  tout  que  nous  poifions  bié 
ce  que  fainft  Paul  adioiifte  des  reprchenfîons, 
&  des  menaces. Pourquoy?  Qiyndnous  aurôs 
quelque  doQrine,&  bien, nous  ferons  encorcs 
retenus ,  moyennant  que  cela  ne  nousf.ifche 
pas  tant, mais  fî  on  gratte  nos  rongnes,  qu'on 
infifteànous  redarguer  ,  qu'on  nous  difeque 
ce  n'eft  rien  de  ce  que  nous  auons  fait ,  mais 
qu'il  faut  cncores  mieux  fiire ,  voila  ce  qui 
nous  ennuyé ,  Si  eh  quoy  on  nous  eft  impor- 
tun :  Si  on  voit  les  meilleurs  quelque  fois  qui 
diront ,  Et  ic  fay  du  mieux  que  ie  puis:poiir- 
quoy  cft-ce  qu'on  me  prelle  tant  ?  Les  mini- 
ftres  voudroyent  qu'on  feift  toufîours  plus. 
Et  c'eft  d'autant  qu'ils  font  procureurs  de 
Dieu,&qu'ils  regardent  au  Maiftre  auquel  ili 
fcruent ,  Si  veulent  qu'on  fe  range  à  ù  maie- 
fté.  Si  les  bons  quelque  fois  voudroyét  qu'on 
lesefpargnaftA'qii'on  leur  gratifaft.potir di- 
re que  c'eft  allez  quand  ils  auront  tait  leur  de 
uciir  à  ilcmi  &  eu  partie  ,  iS:  que  pnur  cela  il 

ItUf 


SVRLAII     ATIMOTH 


Jcur  faloit  eflre  importim.que  fcra-ce  df  ceux 
qui  d'ciiv-melmes  l'ont  cÔccmpteurs  de  Dieu, 
&  qui  voiidroyent  aiioir  rcittcc  tout  long?  Il 
faut  bien  importiiner  ceiix-h  d'auantage  que 
leî  bons, qui  font  (eulcmeftt  fragiles,  comme 
Tlous  auons  dit.  Maintenant  nous  voyons  en 
fomme  comme  nous  deiions  faire  noftre  pro- 
fit de  ce  paflage  de  lain£t  Paul. Il  eft  vray  que 
il  ne  fe  peut  pas  démener  tout  au  long  pour 
le  prefentimais  tant  y  a  qu'il  nous  en  taut  re- 
cueillir ce  que  nous  auons  touché:c'eftqueles 
miniftresdelaparolede  Dieud'vn  coUéadui 
fentde  fe  picquer  quand  ils  verront  qu'ils 
n'ont  point  vn  tel  zèle  ne  lï  ardent  comme  il 
feroit  requis,  3c  qu'ils  s'importunent  les  pre- 
miers. Voila  rn  iteai.Et  puU  au  refte,  quand 
ils  verront  que  les  auditeurs  fe  fafchent  &  fe 
defpitent  de  la  doârine,&  qu'ils  voudroyenc 
qu'on  ne  leur  en  dili  point  la  centième  par- 
tie,qu'ils  ne  lailïcnt  pas  de  pourfuyute,&  que 
ils  continuent  toufîours.  S'ils  voycnt  les  mcf 
chans  grincer  les  dents  .encores  qu'ih  deuf- 
fent  creuer,qu'ils  aillent  toufîours  leur  train, 
&  qu'ils  cognoiflent  qu'ils  ne  peuuent  feruir 
à  Dieu  fans  cefle  importunité  >  de  laquelle  le 
fainftEfprit  parle  ici.  Mefmes  quelquefois 
les  bons  voudroyent  qu'on  les  mignardaft  vn 
peu  ,  &  qu'on  y  procédait  plus  doucement, 
qu'on  ne  les  redarguaft  point  de  leurs  vices: 
qucleminiilre  neantmoms  continue  à  ce  fai- 
re ,  i'çachant  qu'il  faut  mefmes  que  les  bons 
foyen:  ainû  importuner  :  car  ceci  n'efl  point 
dit  d'vne  partie  tant  feulement ,  mais  de  tous 
ùm  exception. Et  de  fairt,  l'expérience  nous 
monftre comme  il  eft  neceflàire  que  ceux  qui 
ont  quelque  bonne  affeiftioii  devenir  à  Dieu 
y  foyent  conuiez.Et  pourquoy?  Car  il  y  aura 
toufîours  de  la  nonchalance  en  nous  :  &  puis, 
nous  voudrions  nous  repofer  àciiacunpas, 


4  :> 

côraeccux  qui  ont  à  faire  voyage,  Se  qui  traî- 
nent les  iambcs  &.  les  ailes,  quclînô  qii'^-n  les 
)iafte,&  qu'on  leur  difc,Maic)ions,m.iiclioiis, 
ils  voudroyent  à  chacun  lieu  qu'ils  rencon- 
trent fe  ictter  là,&  fe  veautrer  dclTus  l'herbe, 
ou  en  l'ombrage.  Ainfi  en  fcmnies-nous  ,  que 
encores  que  nous  ayons  quelque  bon  mouue- 
mentjlî  eit-ce  qu'il  n'eft  pas  de  lorgue  durée, 
S:  que  nous  fommes  laffez  pour  vue  minute, 
&  puis  tantoft  refroidis:  &puis,  combien  que 
nous  pourrons  endurer  quelques  bouffées, 
nous  fommes  tantoft  fafchf  z  ,  tellement  que 
nous  demeurons-là  ,  fînon  qu'on  nouspicque 
&  qu'on  nous  poufFe.L'experience  donc  nous 
monflre  afTez  combien  ceftc  importunité 
nous  eft  neceflàire. Et  ainfî  ne  trouuons  point 
eftrange  qu'on  nous  refueiIle,qu'on  nous  pic- 
que  pour  nous  faire  marcher  auant  :  car  (i  on 
nous  laifTe  là  croupir,  ce  l'craànoftrc  perdi- 
tion ,  ce  fera  vn  dormir  mortel.  Et  pourtant^ 
que  nous  fouffriontd'eftre  tellement  incitez, 
que  nous  courions  toufîours  ,  iufqu'à  ce  que 
nous  foyons  paruenus  à  noftre  but. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  £)ieu  en  cognoillànce  de 
nus  fautes ,  le  prians  qu'il  luy  plaife  nous  les 
pardonner:  &  cependant  qu'il  les  corrige  en 
telle  lorte  ,  que  de  plus  en  plus  nous  renon- 
cions à  tous  nos  vices,  &  à  tous  les  alleche- 
mens  qui  dominent  en  noftre  nature  par  trop, 
&  qui  nous  deftournent  de  fon  Royaume.  Et 
cependant ,  quand  il  nous  aura  tendu  la  main, 
qu'il  luy  plaife  fupporterla  foiblefTe  qui  efl 
en  nous,  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  amenez  à 
la  perfeiiion, laquelle  nous  ne  pouuons  obte- 
nir iniques  à  ce  qu'il  nous  ait  recueillis  en  l'o» 
Royaume  éternel .  Ainfî  nous  dirons  tous, 
Dieu  tout-pui{Iànt,Pete  celeAe,&c. 


D  E  V  X  I  E  M  Ë     iS#  RM  ON     S  V  R    L  g 

CLY  ATRIEME      CHAPITRE.  ''' 

1  Vr€fchelaparoleyp£rfeuereahcureO'^orsheurCtdrgue,mc-' 
nace,admoncfle  auec  toute  patience  (f  doShrinc. 

3  Car  v«  temps  -viendra  quih  ne  receueront  point  faine  doShi- 
ne,mais  ayans  les  aurciUes  chatouillcujcsjls  s'ajfemhkrotdes  àotieurs 
Jclon  leurs  dcjirs: 

4  lc.njide?iournerontîouycdcUyerité,çyfeconuertirontd 
fables. 

5  Mais  toy,')/eille  en  toutes  choJês,trauaille,fay  tœuure  d'Euath- 
geliflc^rentonadminifirationapprouucc. 

Pp.ii. 


SERMON      XXVI. 

,  Oas  auons  vcu  ce  matin  que    trancliTu  pour  Bons  Cicrificr  à  Dieu,&.que  ia- 
\  ce  ii^eft  point  iiTcz  q  la  pa-    mais  nous  n'y  auiôs  bien  profité, lufques  à  tant 
I  ;ole  de  Dieu  nous  t  jit  prtf    que  nous  foyons  abbatus  du  tout,&  que  ce  qui 
icliee  quand  nous  y   ferons    eitdc  nollre  nature  loit  mortifié  ,  tellement 
unciini,";  que  cela  uo'  vicn    que  Dieu  louiffede  nous  paihblement.Orce- 
'  dra  à  propos  de  h  rcceuoir:     la  ne  le  peut  faire  qu'il  n'y  au  grande  vehe- 
'  mais  d'autant  que  nous  y    mence,&  que  Dieu  ne  tonne,&  quali  foudroyé 
fommes  trop  tardifs, il  faut  qu'vn  chacun  s'un    fur  nous.  Et  ainlî,ceux  qui  ne  pcuuent  foufFrir 
portune  ,  &  que  nous  foutïiions  auf-.id'cftre    nulle  menace  ne  correction  ,  monltrent  allez 
folicitez  comme  Dieu  le  cômande.Il  y  a  d'à-    que  iamais  n'ont  gouftéque  c'tftoitdelaparo 
uantage.qu'il  ne  fuffit  point  que  nous  ibyons    k- de  Dieu,  &  qu'il  n'y  a  eu  qu'hypocrifie  en 
enfeigncz  de  la  volonté  de  Dieu, mais  il  nous     eux.quMs  le  font  raocquez  en  faifant  femblât 
faut  eftreaulsi  redarguezen  nos  vices,  &  de-    d'adhérer  à  la  religion:  &ncantmoins  c'cft  v- 
uons  fouffrir  patiemment  les  corrcdions  qui    necomplamte  par  trop  commune.  Cependant 
nous  font  ami;nees:car  ce  font  médecines  qui    apprcnôs  de  pratdqucr  ce  qui  nous  cft  ici  en- 
nou»  font  propres.  Si  nous  tlHons  bien  fains,    ioiutde  Dieu  ,  &  que  tous  les  murmures  que 
qu'il  n'y  euft  nul  vice  en  nous  ,  Dieu  leçon-    nous  orrons,  n'empcfchent  point  que  nous  ne 
tentcroit  de  nous  donner  vne  pafture  amia-    luy  feruions  franchement  félon  la  règle  qu'il 
ble,  tellement  que  nous  ne  trouuerions  en  fa    nousadônee.Siquelqu'vn  cftenuoyéde  quel- 
parole  qu'vn  bô  gouft  de  toute  douceur:mais     que  gros  fcigneur,  il  fera  aflcz  hardi  de  par- 
à'autant  que  nous  ne  fommes  point  capables     1er,  combien  que  fa  commifsion  loitodieufc: 
de  profiter  en  la  dodfrine.finon  que  Dieu  pur    car  il  dira,  le  ne  parle  point  par  cœur.ie  feray 
ge  le  mal  qui  eften  nous, il  faut  que  cela  fefa     toulîoursaduoué,  le  porte  mon  cas  par  efcrit. 
ce.Etc'eft  àceftc  fin  que  feruent  les  menaces     Si  on  attribue  cela  à  des  créatures  mortelles, 
^  correâions  qui  lont  contenues  en  l'Efcri-    que  deuons-nous  à  Dieu, quand  il  nous  met  en 
ture  fain£te,  laquelle  il  no'  faut  tous  les  iours    la  bouche  les  correclions  &  menaces ,  Se  qu'il 
propofer  au  peuple, pour  nous  bien  acquitter    veut  quel'vfageen  foit  tous  les  iours  en  fon 
de  nollre  deuoir.  Et  notons  bien  que  ce  que     Eglife  î  Nous  faut-il  efpargner,  encores  que 
dit  ici  faintt  Paul, cft  conforme  &  le  rapporte    les  hommes  ne  s'en  contentent  pas  ?  Voila 
àcequ'ilauoit  délia  traittédel'Efcriturefain    donc  ce  que  nousauons  à  retenir  de  ce  pafla- 
âe.Caraufsi  defait,cen'eftpasànousde  far    ge.c'eft  en  premier  lieu  que  nous  ne  prenions 
ger  vne  façon  telle  que  bon  nous  femblera     point   la  parole  de  Dieu  comme  par  esbat, 
quand  nous  voudrons  feruir  à  Dieu  &  à  fon     quand  nous  aurons  loifîr  que  nous  donnions 
Êglife  :  mais  il  nous  faut  toufiours  efcouter    quelqueaudienceà  Dieu:carc'eftbien  loinde 
fe  qui  nous  eft  enioint  de  Dieu.  Il  n'y  a  nulle    luy  rendre  l'obeiflance  qu'il  mérite:  mais  que 
maiftrii'c  que  celle  qu'il  a  donnée  à  fon  Fils    >n  chacun  s'efforce  de  profiter .  Et  toutainfi 
PO  ftre  Seigneur  lefus  Chrift.Il  faut  donc  que     que  Dieu  protefte  que  loir  &  matin  il  aies 
celuy  qui  voudra  eltre  bon  &  fidèle  dofteur,     bras  eftendus  non  feulement  pour  nous  rece- 
côforme  du  tout  fa  façon  d'enfeigner  i  la  re    uoir.mais  pour  nous  appellerde  loin,&  ne  de- 
gle  qui  luy  eft  donnée  de  Dieu.  Au  refte.puis    mande  lînon  que  nous  foyons  comme  fous  fes 
qu'en  l'Efcriture  fainûe  il  n'y  a  point  vne  lim    ailes.  Se  qu'il  nous  gouuerne  ,  &  qu'il  cheuilTe 
pie  déclaration  de  la  Loy  de  Dieu.mais  qu'il     paifiblemcnt  de  nous:que  de  noftre  cofté  auf- 
y  a  cefte  véhémence  de  reprendre  ,  d'exhor-    îlnous  mettions  peine  d'accourir  à  luy  quand 
ter ,  de  menacer  ,  notons  qu'en  vn  fermon  ce    il  nous  y  conuie ,  &  que  mefmes  nous  retran- 
n'eft  point  aflez  qu'on  dife,  Voila  ce  q  Dieu     chionstous  les  empefchemens  qui  nous  de- 
nous  a  monftré:  mais  il  faut  qu'il  y  ait  les  ai-     ftournent  :  comme  nous  voyons  qu'vn  chacun 
guillons  quant  &  quant.  Et  par  cela  voyons-    cuidera  eftre  exempté  s'il  a  quelque  affaire 
nous  que  ceux  qui  fe  fafchent  quand  on  leur     où  il  s'occupe  :  Voila,  ileftvray  que  l'iroye 
remonftre  leurs  vices,  ne  fçauent  que  c'eftde    volontiers  au  fermon,maisienepuis,ray  d'an 
Chreftienté.Que  ne  prefche-on  l'Euangile?    très  affaires,  il  faut  m'appliquer  à  ^eci  &;  à  ce- 
(diront-iIs.)Voire,niait  regardons  ce  qui  eft    la. Ne  penfons  point  que  Dieu  prene  en  paye- 
la  c5tenu.Il  n'eft  pas  fitnplemct  dit  que  Dieu    ment  des  fubterfuges  h  fruioles.  Cela  nous  cft 
eft  noftre  Père,  qu'il  s'eftmôftré  noftre  San-    monftré  par  noftre    Seigneur   Icfus  Chrift, 
ucur  en  lefus  Chrift, que  nous  le  deuons  inuo     quand  il  fe  mocque  de  ceux  qui  allèguent  que 
qtier,  en  efperït  qu'il  nous  fera  toufiours  pro     l'vn  fe  marie,  que  l'autre  a  acheté  vne  nictai- 
pice,  ennous  appuyant  fur  fa  bonté  gratuite,     rie.que  l'autre  veutallercn  fa  vigne  ou  en  fon 
attendans  de  luy  falut  &  remifsion  de  nos  pe    champ.  Cela  eft  allez  cémun  en  la  bouche  des 
chez,  quand  nous  le  feruirôs  félon  qu'il  le  c5     hommes  :  mais  le  Fik  de  Dieu  ,  qui  eft  noftre 
niamde  :  cela  n'eft  point  fimplement  contenu     luge,  déclare  que  cela  ne  vient  ni  en  mife,  ni 
en  l'Euagile.  Mais  Dieu  nous  redargue,  quiid     en  receptedcuant  luy .  Or  donc  quand  nous 
il  nous  a  admoneftez,il  nous  adiourne  deuant    voyons  les  filets  tédus.Si:  que  le  diable  ne  pou 
luy  ,  il  nous  menace  :  brief ,  ce  n'eft  pas  fans     uant  nous  retirer  pleinement  de  Dieu, nous  re 
caufe  qu'il  eft  dit  que  l'Eiuingile  cft  rn  glaiue    taide,ou  machine  de  nous  mettre  des  obicûs, 

afin 


s  V  R   L  A  IL   A   TIMOTH. 


■4SÏ 


\ 


afin  que  nous  ne  courions  point  fi  vifte  com-  donc  qu'vn  homme  mortel  s'attribue  tant  de 

me  il  feroit  befoin ,  que  nous  apprenions(di-  maiefté.que  de  reictter  tout  ce  qui  ne  luy  vié 

ie)de  rompre  tous  ces  filcts-la,&  de  pouriui-  drapomtàgré,  mais  il  faut  que  nous  ayons 

ure,  voire  lufque?  à  nous  importuner,  comme  la  doârine  de  Dieu  qui  approuue  noftre  dire, 

nous  voyons  que  le  famâ  Ei'prit  nous  y  ex-  &  que  nous  foyons  refoltis  que  nous  ne  me- 


horte.  Ôr  s'il  tauc  que  les  fidèles  fe  contrai- 
gnent ainfi,  &  qu'ils  rcnôcent  pliiftoit  à  leurs 
cupiditez  &  alfcilions  ,  que  de  s'aliéner  de  la 
parole  de  Dieu ,  que  fera-ce  quand  il  ne  fera 
queltion  que  de  nos  esbats  &d'aniuremens  de 
fols?Péfons-nous  que  Dieu  le  contente  quad 
on  préférera  toutes  ces  chofes  friuolcs  à  fa 
parole?  Ainfi  donc.d'autant  plus  deuôs-nous 
bien  noter  cequieft  ici  dit  par  fainèl  Paul.Et 
au  refte,  quand  nous  venons  cuir  la  parole  de 
Dieu  ,  que  nous  fçachions  que  ce  n'eft  point 
feulement  pour  apprendre  ce  qui  nous  eftoit 
incognu  aupacauant ,  &  que  nous  rapportions 
ie  ne  fçay  quoy  de  nouueau  en  noftic  maifon, 
mais  encores  que  la  volonté  de  Dieu  nous 
euft  efté  raauifefiie  auparauant ,  que  nous  ve- 
nions eftans  difpofez  à  receuoir  la  médecine 
qui  nous  eft  appareillée  :  voyans  que  nous 
fommes  tardifs ,  que  nous  l'outfrions  d'cftre 
incitez, &  que  Dieu  nous  picque  à  gras  coups 
d'elperon:  &  que  non  feulement  nous  foyons 
patiens  en  cela, mais  que  nous  en  facions  no- 
ftre profit  ;  ne  foyons  pas  comme  d'aucuns 
qui  ne  fe  contentent  point  quand  011  leur  re- 
monftre  leurs  fautes.  Mais  quoy?  Ils  ont  des 
aureilles  d'afne, cependant  ils  ne  s'en  efmeu- 
uent  nullement.  Or  ce  n'eft  point  afTcz  que 
nous  nereiiftions  pointa  Dieu  auec  vne ai- 
greur Se  obftination  manifcfte  ,  mais  il  nous 
faut  faire  profiter  les  admonitions  qu'il  nous 
enuoye  ;  Se  quand  nous  aurons  efté  endormis 
pour  vn  temps, voire  endurcis  en  nos  péchez, 
que  nous  aurons abufé  de  la  bonté  de  Dieu, 
que  nous  n'aurons  point  cheminé  en  fa  crain 
te  comme  il  appartenoit.que  nous  foyons  na 
urer  viuement;&  que  nous  foyons  amenez  'à, 
decognoiftre  que  noftre  vie  eft  briefue  ,  & 
qu'il  faudra  rendre  conte  quand  nous  n'au- 
rons point  receu  les  chaftimens  de  la  main  de 
Dieu  :  4:quemefmes  nous  cognoifsions qu'il 
nous  fait  vne  grand'  grâce,  quand  il  nous  cor 
fige  de  paroles  ,  &  qu'il  nous  menace  deuant 
que  mettre  la  main  fur  nous.  Voila  donc  com 
me  il  nous  faut  eftredifpofez,(i  nous  délirons 
de  profiter  en  l'efcole  de  noftre  Dieu  :  c'eft 
que  non  feuleract  nous  apprenions  quelle  eft 
fa  volonté  ,  mais  aufsi  que  nous  foyons  pic- 
quez  par  correûions  &  par  menaces  ,  félon 
que  nous  voyons  que  les  maladies  requièrent 
de  tels  remèdes.  Or  cependant  (comme  nous 
auoHS touché)  faintl  Pauladioufte,  <'.oclrine 
er  putitHce.  Quant  à  ce  mot  de  Doûrine, 
c'eft  afin  que  ceux  qui  ont  à  rcprédre  <5c  crier 
contre  les  vices  ,  foyent  bien  tondez  en  rai- 
fon.  Carlî  nous  eftions  fi  chagrins  de  con- 
damner tout  ce  qui  nous  defplairoit  ,  que  fe- 
roit-cefChacû  voudroit  eftre  iuge,&  l'autho 
rite  de  Dieu  leroit  mife  bas.  Il  ne  faut  poinr 


naçons  point  en  vain.  Car  il  y  a  vn  Leg;(la-  i,g,4.(i, 
teur  (  comme  il  eft  dit  )  &  celuy-la  a  luy  feui 
l'authoritéde  nous  fauuer  &denous  perdre. 
Quand  donc  vn  prefchcur  voudroit  crier  i 
fa  fantafic,  il  eft  certain  qu'il  vfurperoit  l'au- 
thoritéde Dieu. Et  ainfi  notons  que  la  doftri 
ne  doit  toufiours  aller  deuant ,  fi  nous  voulos 
baftir  lurvn  bon  fondement  &  ferme.  Oi  par 
ce  mot  de  doflrine,  faintl  Paul  fignifie  que  le 
premier  degré  pour  bien  commencer  &  tenir 
bonne  procédure, c'eft  que  nousdcclarions  la 
grâce  de  Dieu  qtti  nous  a  efté  monftreecn  na 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift.que  les  homme:  co 
gnoilTent  où  gift  la  fiance  de  leur  falut,  qu'ils 
fçachent  comme  ils  pourront  inuoqucr  Dieu 
fans  aucune  doute:  Se.  puis,  qu'ils  cognoilTcnt 
la  règle  de  bien  viure,  Se  le  tout  félon  l'Efcri 
ture  fainfle.  Quand  nous  aurons  cognu  cela, 
fi  nous  femmes  endormis  au  monde  &  en  fct 
délices  ,  il  faut  qu'on  nous  picque  ,  &  qu'on 
nous  face  fentir  que  ce  n'eft  rien  qu'vn  om- 
brage Se  vne  funiec  que  de  ce  qui  nous  retiét 
ici  bas  enterre  :  fi  noftre  chair  fe  rebecquei 
l'encontre  de  Dieu  ,  il  faut  que  nous  foyons 
mattez  auec  menaces,  que  Dieu  fe  propofe  là 
comm*  luge  ,  quand  nous  ce  le  voulons  pat 
auoir  comme  noftre  Pere,&  que  nous  abufons 
de  fa  douceur  fi  amiable,  àc  laquelle  il  vfe  en 
uers  nouî ,  Se  laquelle  il  nous  prefente  en  la 
perfonne  de  fon  Fris:  quand  nous  ferons  en- 
flez de  prefomption,  qu'il  nous  rabate  noftre 
outrecuidance,  &  qu'il  nous  mette  noftre  tur 
pitudeaii  deuat, que  nous  ayons  honte  de  nos 
péchez, que  le  monde  nous  defplaife,&:  qu'on 
nousapprene  que  nous  fommes  ici  corne  ex- 
pofez  en  proye  ,  fi  ce  n'eft  que  Dieu  nous  ait 
en  fa  garde.  Et  en  la  fin  que  nous  foyons  inci 
tcz  à  prier  Dieu, &auoirnoftre  lecoursàiuy, 
Voiladonccome  la  doftrine  doit  eftre  kfon 
dément  de  toutes  exhortations  &  menaces, 
c'eft  àdire, qu'on  ne  nousmetterienen  auant 
que  Dieu  n'ait  parlé  ,  c'eft  à  dire  ,  que  nous 
n'ayons  tefraoignage  &  approbation  de  !'£_ 
fcriture  fainde  ,  que  ce  que  nous  enfeignons 
procède  de  luy  ,  &  qu'il  en  eftrauthcur.  Là 
deflus  on  pourra  bié  exhorter.on  pourra  bien 
reprendre, &  faut  qu'on  le  faceimais  tenôs  ce 
pendît  l'ordre  qui  tft  ici  déclaré  par  S.  Paul: 
car  c'eft  vne  règle  en  laquelle  il  n'eft  point  li 
cite  de  rien  changer. Q^uant  au  mot  de  p.uien 
ff,ou  doHCiur,  notés  que  fainft  Paul  n'a  point 
ici  parlé  d'amieller  les  hommes  quand  on  les 
redargue  :  comme  il  y  en  a  qui  voudroyent 
que  tout  ce  qu'on  leur  propofe  ,  fuft  fucre  Si 
miel:mais  il  a  parle  de  cefte  douceur  qui  doit 
eftre  en  ceux  qui  ont  Poffice  de  porter  &•  a- 
nôcer  la  parole  de  Dieu:  c'eft  âfçauoir  qu'ils 
defirét  le  falut  de  ccku  qu'ils  enfeignct, voire 
Pp.iii. 


4^5 


SERMON     XXV  r. 


combien  que  fouuent  à  caufe  de  leur  ingrati- 
tude ils  auroyét  lufle  raifon  de  fe  colerer  c5 
tr'cux,&  les  quitter  là  comme  genj  perdus  & 
defefpertz.Et  de  fait  ce  n''tft  point  fans  cau- 
fe que  faillît  Paul  a  ici  adioiifré  ce  mot.  Car 
nous  voyons  <jue  les  Proplietes.côbien  qu'ils 
fuirent  remplis  del'Efprit  de  Dieu,  fe  font 
tellement  fafchei&  aigris  ,  voyans  la  malice 
&  obftination  du  peuple,  qu'ils  eftoyét  prefts 
de  renoncera  tout ,  que  quelque  fois  ils  ont 
mefmcdefpité  leur  ne,  qu'il  y  a  eu  quafi  des 
efpeces  de  blafpherae  ,  Et  pourquoy  eft-ce 
«jue  Dieu  m'a  ici  mis?  Faloit-il  que  iefulTe 
côtraint  à  telle  cliarge?£t  l'aimcroye  mieux 
cent  fois  la  mort  que  de  trauailler  auec  telle 
difficulté. D'autant.qu'ils  voyoyent  qu'il  n'y 
auoit  point  d'amendement,&:  que  leur  labeur 
ncprofitoit  guercs,ils  fe  font  ainfi  efchauf- 
fez.  Puis  que  les  fiinds  Prophètes  ont  elle 
tentez  iufques  là,  notons  que  nous  auons  be- 
foind'eftre  retenus  en  patience,afîn  de  pour 
fuiure  quand  nous  voyons  les  hommes  non 
feulemét  cftre  tardifs, mais  reuefches  à  Dieu, 
que  nous  les  voyons  pleins  de  venin  ,  &  les 
autres  pleins  d'airogance,  les  autres  du  tout 
abbrutis  ,  les  autres  eftre  volages ,  qu'on  ne 
fçait  comme  on  les  doit  gagner  :&  encores 
qu'on  les  ait  vne  fois  attirez  à  Dieu,  qu'ils'le 
quittent  là,&  s''en  reuoltent:  quâddonc  nous 
Voyons  tout  cela  ,  fi  faut-il  que  nous  foyons 
armez  depatience  :  car  à  chacun  iour  il  fau- 
droit  renoncer  à  l'office  qui  nous  eft  dôné  en 
charge.  Voila  pourquoy  fainâ  Paul  a  mis  ce 
mot  de  fatience.  Or  cependant  ce  n'eit  pas  à 
dire  qu'il  n'y  ait  de  l'aigreur  en  toutes  le  re- 
prehenfioDS  qu'il  bous  faille  fafre ,  que  ceux 
qui  les  orront  quelques  fois, en  ferôt  fafchez. 
Et  de  fait,  nousvoyôî  comme  les  Prophètes 
&  Apoftres  s'y  font  gouuernez,&  fur  tout  l'e 
jeniple  de  leremie  nous  donne  vne  bonne  de 
claratioa  de  ce  paflàge.Car  leremie  eft  aufsi 
afpre  q  nul  des  Prophètes  :il  ne  celle  de  par- 
ler du  uigement  de  Dieu  &  de  fa  vengeance, 
iJ  tonne  tellement  que  les  reprehenfions  ef- 
tlattét  :  &  puis  il  vfe  de  telles  reproches  qu'il 
femble  qu'il  vucille  abyfmer  le  peuple  ,  &  le 
rendre  le  plus  infâme  &  le  plus  puât  qu'il  eft 
pofsible.  leremie  donc,  quand  on  regardera 
fon  ftyle.eft  plein  d'aigreur,ou  pour  le  moins 
il  y  a  vne  telle  véhémence  qu'on  tréblera.Or 
cepédantfi  eft-ct-  que  cefte  douceur  dot  par- 
le S.  Paul, a  efté  en  luy.  Car  ce  mot  emporte 
propremét.que  le  courage  de  l'hômc  foit  re- 
I  v-  3»  "^""  tellement  qu'il  ne  fc  chagrine  point  ou- 
t.u  tre  mefute.  Ezechiel  aufsi  môftre  du  premier 

coup  qu'il  a  eu  cefte  vertu  ,  quand  il  dit  que 
Dieu  luy  a  fait  aualler  le  liure,  voire  où  il  de 
uoit  menacer  la  ville  de  lerufalem  ,  &  tout  le 
pays  de  ludce.  Voila  Dieu  qui  fait  le  proccj 
tnmincl  aux  Iuif£,il  oxdône  Ezechiel  pour  le 
publier,  &  pour  en  eftre  corne  la  trôpette,  ou 
pour  reciter  là  le  diéion.  Et  bien,il  faut  qu'E 
sechiei  deiiaot  tuut«s  chofcs  aualle  ce  liurc- 


la.c'cft  à  dire, qu'il  foit  impn'mé  en  fon  cocor, 
&  qu'il  ne  l'ait  point  feulemét  au  bout  de  la 
ligue, mais  qu'il  ait  zèle  &  afFcûiô  pour  por- 
ter vn  telmcfiage.il  dit  que  fes  entrailles  luy 
en  ont  fait  fi  grand  tourmcnt,qu'il  n'en  pou- 
uoit  pluiiiSf  neiitmoin;  fi  voit-on  qu'il  ne  s'e- 
fpargiic  pas.  Nou<:  voyons  donc  qu'il  y  a  eu 
to'  les  deux,c'eft  afçauoir  qu'il  reuargue.que 
il  repréd:  &  poiirfuit  la  cômifsion  qui  luy  eft 
dônee,  &  al'efprit  ficonftant,  qu'il  ne  fléchit 
en  façon  que  ce  foit  pour  le  regard  des  hora 
mes.  Si  eft-ce  que  cependant  il  n'eft  pas  fins 
pitié,  ne  fans  humanité.  Nousvoyôs  mefme» 
que  leremie  voudroit  eftre  fondu  en  larmes,  Itte.a,^ 
que  fes  deux  yeux  fuiTent  deux  fontaines  en 
fon  cerueau  ,  que  tout  cela  fuft  conuerti  en 
pleur.d'autiît  qu'il  a  compafsion  de  ce  poure 
peuple  qui  pcrit.  Ainfi  donc,  voila  pourquoy 
S.Paul  a  notament  adiouftc,A«*f  fjtience  S" 
douceur.  Il  faut  redarguei&  reprendre:com- 
bien  que  nous  aurôs  occafion  de  nous  fafcher 
Se  defpiter,voyans  que  nous  ne  gagnons  qua- 
fi rien, encores  qu'il  femble  que  le  monde  em 
pire  fous  ombre  de  noftre  dodrine ,  que  les 
mefchans  qui  auront  defpitéDieu  auparauât, 
continuent  de  fe  mocquer  de  luy  ,  en  reiet- 
tant  fa  parole,&  en  la  foulant  au  pied:côbiea 
(di-ie  )  que  pour  cela  nous  aurions  occafion 
de  quitter  tout ,  que  nous  foyons  retenus  de 
cefte  bride, Or  fi  eft-ce  que  Dieu  veut  q  nous 
pourfuiuions,  non  point  maugré  nous,  c'eft  à 
dire,qu'iln'yait  point  vne  contrainte  forcée 
pour  obéir  à  cçluy  auquel  nous  fommes,  mai» 
que  nous  ayons  cefte  patience-ia  d'attendre 
que  Dieu  touche  les  cœurs  de  ceux  qui  fe  m5 
ftrent  eftre  comme  incorrigibles ,  Se  qu'en  la 
fin  il  les  conuertiflè,&  qu'il  les  donte,&  qu'il 
les  ramené  au  chemin  de  falut:  ou  bien  que  ce 
fte  dodrine  férue  de  condamnation  aux  hom 
mes, quand  ils  voudrôt  du  tout  defpitcr  Dieu, 
qu'ils  feront  rendus  inexcufàblcs,&  qu'il  fa* 
dra  que  Dieu  defploye  fon  ire  finale  ,  après 
qu'il  les  aura  long  temps  attendus.  Or  fainû 
Paul  adioufte  pour  mieux  confermer  ceftad- 
uertifleracnt,  que  les  hommes  aimeront  beau 
coup  mieux  fedeftourner  aux  vanitez  8e  men 
fonges ,  que  de  receuoirla  bonne  doârine, 
&  qui  leur  i'eroit  profitable.  Le  temps  -viendra 
(dit-il)^«f /#  mande  tiura  le}  aureillei  chalouil 
leufei,^  qu'il  fera  fn  grand  am.is  de  dafteurs, 
tellement  tju.' iU  fe  rempliront  les  tiureillei  de  f» 
blet:  c'eft  à  dire.dechofssfriuoles  &  inutiles: 
ils  ne  pourront  porter  la  -urité  de  Dit»  .  Qiff 
dcnc  f»  ir.iHailles  d'autant  flus.Ot  c'eft  com- 
me fi  on  difoit  à  vn  médecin, quand  il  aura  vn 
malade  impatient,  Haftcz-vouç.car  ceft  hom 
mené  fe  peutgouuerncr:i3tde  fait  ,dcfia  dés 
long  temps  il  a  dit  ceci  ou  cela:  &  fi  le  remè- 
de n'eft  foudain, l'excès  fera  par  trop  violet, 
&  le  remède  ne  fera  point  opportun.  Voila 
donc  qu'on  dira  à  vn  médecin  qu.îd  il  aura  vn 
malade  qui  fera  difficile  à gouuerner. Et  ainfi 
S.  Paul  dit  à  Timochec ,  qu'il  faut  qu'il  foie 

iaftif 


SVRIA    II.   A 

kaftifat  ardent  à  foliciter  les  hommes  ,  voi- 
re par  imporcunité  ,  comme  nous  auons  deiîa 
TCU.Etpourqiioy  ?  Car(dit-il)Satanbraflrev- 
nc  telle  corruption  ,  que  la  plus  part  en  font 
deiîa  cn)poironnez:&  qui  pis  cft,ils  s'amaflent 
(dit-il)des  doûeurs  quafî  par  monceaui.maii 
ce  font  des  prefcheuri.  de  Fables ,  des  caphars 
qui  ne  demandent  qu'à  les  fcduire.Nous  voy- 
ons l'intétion  de  faind  Paul. Mais  il  nous  faut 
obferuer  ce  qui  eft  ici  dit  par  le  menu.  Quand 
il  parle  de  la  ruine  &  de  la  corruption  qui  de- 
uoit  aduenir ,  notamment  il  accufe  les  hom- 
mes.qu'ils  ont  les  aureilles  ckatouilleufes.Or 
ce  chatouillement  dont  il  parle,  vient  tan  c  de 
folle  curiolîtc  Se  vaine  ,  comme  de  ce  que  les 
hommes  font  délicats ,  &  qu'ils  veulent  eftre 
mignaidez,  qu'on  les  flatte,&  qu'on  les  entre 
tiene  doucement  &  à  plailîr:commc  nous  voy- 
ons que  de  tout  temps  ce  vice  a  regné.qu'on  a 
eu  cefte  conuoitife  d'ouir  ie  ne  fçay  quoy  de 
nouueau  &:de  plaifant, comme  auf  i  lainâ  Paul 
enaparlécideflus  .Quand  donc  les  hommes 
rculent  appliquer  leur  eftude  à  quelque  cho- 
fe,  toufiours  ils  fe  tourneront  à  des  folies ,  & 
laifleront  ce  qui  leur  eft  propre  pour  leur  fa- 
lut.C'eft  gtand'chofe  que  les  hommes  quittét 
ainll  leprincipal  bien  que  Dieu  leura  donné, 
Se  quemefmes  ils  le  peruertiflent  &  le  tour- 
nent tout  à  rtbours.  Car  quel  eft  le  fouuerain 
threfor  que  nous  ayons?N'eft-ce  pas  la  raifon 
&  intelligence, par  laquelle  nou';  fommes  dif- 
ferens  d'auec  les  beftes  brutes  ?  Voila  l'image 
de  Dieu  qui  efl  imprimée  en  nous.d'autat  que 
il  nous  a  donné  raifon  &  intelligence.  Or  que 
faifons-nous  î  Au  heu  d'appliquer  vn  don  fi 
précieux  &  fi  noble  à  fon  vfage  légitime,  nous 
Talions  peruertir ,  que  nous  voltigerons  en 
l'air,  &  ne  ferons  que  tourmenter  nos  efprits. 
En  quoy?. En  chofcs  de  néant ,  en  des  badina- 
ges,  tellement  que  G  les  bcftes  auoyent  quel- 
que goutte  de  difcretiô,  elles  nous  pourroyét 
condaner.Et  cornent, poures  enragezrQj^iand 
Dieu  vous  a  créez  à  fon  image, qu'il  vous  a  dô 
néfagefle&intelligence.que  vous  alliez  vous 
amufer  à  des  menus  bagages  qui  font  de  nul 
profit,  &  cependant  q  vous  n'appliquiez  point 
Toftie  elhide  à  regarder  queDieu  vous  a  créez 
en  l'efperance  d'vne  meilleure  vie?  qu'il  vous 
a  nommez  fes  enfans ,  afin  de  vous  faire  par- 
uenir  en  fon  héritage  ?  que  vous  ne  compre- 
niez point  ce  que  Dieu  a  imprimé  fon  image 
en  vous,  afin  que  vous  lepuifsiez  contempler 
en  famaiefté&en  fa  gloire?  Voila(di-ie)com 
me  il  ne  taudroit  point  d'autres  iuges  que  les 
bœufs  &i  les  afnes  pour  nous  condamner.qiiad 
ils  pourroyent  apperceuoir  laperuerfité  qui 
eft  en  nous. Or  d'autant  que  nous  y  fomme',  fi 
enclins,voiie  fi  addonnez,  tant  plus  nous  faut 
il  retenir  cefte  admonition  de  fainft  Paul, 
quand  il  dit  que  Je  monde  fe  deftournera  de 
Dieu,&  que  ceux  qui  auparauant  auoyent  bien 
commencé  deuiendront  apoftats,  &  que  le  dia 
ble  les  aliénera  du  tout  du  troupeai::&.  dit  que 


T  I  M  O  T  H. 


4S7 


cela  aduiendra,  d'autant  qu'ils  auront  les  au- 
reilles chatouiUeufes.  Gardons-nous  donc  de 
cefte  folle  curiofité  comme  d'vne  peftemor- 
telle,veu  qu'elle  nous  priue  du  principal  bien 
que  Dieu  nous  a  donné,  qu'elle  nous  dtftour- 
ne  de  la  vérité  en  laquelle  gift  noftre  faliit,  dr 
y  eft  du  toutenclos.Oril  y  a  aufsi  l'autre  vice, 
c'eft  quand  nous  voulons  qu'on  nous  traitte  à 
noftre  guife,&  qu'on  nous  complaife;  comme 
il  eft  dit  au  Prophète  Michee,  que  les  luifs  de  u;^/ .V 
ce  temps-la  euflent  bien  voulu  auoir  des  pref-  . 
chcurs  de  bonne  vendange, &  de  bonne  moif- 
fon,  car  ceux-là  ne  leur  apportoyent  que  nou 
uelles  plailântes .  Côme  auiourd'huy  ceux  qui 
veulent  qu'on  prefche  à  leur  appétit, que  vou- 
droyent-ils  ouir  parleurs  prefcheurs?£t  fai- 
fons  grand'  chère,  mes  amis.  Dieu  n'eft  point 
C  rigoureux  ne  fi  cruel  qu'on  dit  :  &  de  dire 
qu'il  n'y  ait  plus  de  mifericoide  en  Dieu,c'tft 
pour  nous  defefperer  iufques  au  bout.  11  eft 
vray  qu'il  nous  faut  bien  cognoJftre  nos  vices, 
mais  cependant  nous  pouuons  bien  nous  don- 
ner du  bon  temps:il  fcmble  à  ouirparler  ceux 
qui  s'cfcarmouchcnt  ainfi,  &  qui  prononcent 
le  iugtment  de  Dieu ,  qu'il  nous  foit  ennemi 
mortel,  Se  qu'il  nous  vueille  foudroyer  à  cha- 
cun coup. Et  eft-il  fi  cruel?  Ne  veut-il  pas  que 
Ces  enfansayent  quelque  repos  ?  Voila  donc 
quels  font  les  prefcheursde  bonne  vendange 
Se  de  bonne  moilîon,  qui  feduifent  leurs  audi- 
teurs en  leur  promettant  que  Dieu  leur  en- 
uoyera  dequoy  cftie  nourris  8e  repeus  .  Or  fi 
cft-cequ'Ezechiel  dit,  Malheur  fur  ceux  qui  £>U(<^. 
mortifient  les  âmes  qui  doyuent  viure  ,8e  qui  ij.t?. 
vinifient  les  âmes  qui  doyHent  mourir.  Union 
ftre  bien  que  les  Aduâeurs  ne  ceflent  mfquec 
à  tant  qu'ils  ayent  meurtri  ceux  qui  font  bien 
fains,  fi:  qui  auoyent  deCa  quelque  bonne  en- 
trée en  la  cognoiflànce  de  Dieu  :  &  que  ce- 
pendant ils  laidènt  là  ceux  quideuoyent  e- 
ftre  réduits  au  bon  chemin  ,8e  ne  leurenfont 
nulle  mention  ,  &  aufsi  ils  n'en  vculent'poiDC  , 
ouïr  nouuelles .  Retenons  donc  que  quand 
nous  aurons  les  aureilles  chatouilleufcs,  c'eft 
àdire  que  nous  appeterons  qu'on  mette  dei 
cmplaftres  fur  le  mal  qui  eft  en  nous,  &:  qii'o« 
le  couure,que  nous  appeterons  d'eftre  nourris 
en  flatterie  ,Tque  Dieu  nous  enuoyeia  ce  que 
nous  voulons,&  ce  que  nous  auons  dcfirtniais 
ce  ne  fera  point  pour  noftre  profit. En  fomme 
quand  fainû  Paul  déclare  que  le  monde  fcia 
peruerti,  que  la  vérité  de  l'Euangile  fera  cor- 
rompue,qu'il  n'y  aura  plus  de  pureté  de  doftri 
ne,  il  déclare  que  cela  viendra  pource  que  les 
hommes  auront  lés  aureilles  chatouilleufcs. 
Et  ainfi,  qu'auons-nous  à  faire  ?  En  premier 
lieu,cognoifronj  que  ce  n'eft  point  fans  caufe 
que  telle  difsipation  &  fi  horrible  eft  aduenuc 
comme  on  la  voit  auiourd'huy.  Et  pourquoy» 
Car  on  alléguera  que  les  fimples  gens  ne  peu- 
uent  mais  s'ils  font  mal  gouuernez  ,  &  qu'on 
les  trompe  .  Mais  cependant  on  ne  vient 
point  iufques  à  la  foBrccîc'cft  queiamaisilne 
Pp.iiii. 


ixech. 
13.10. 


488  S:ERM  O  N     X  X  Vr. 

fuft  adiienii  vue  relie  côfiilîon.que  Dieu  n'euft  Paul  en  parle.Etde  fiiâ  on  Ta  vea,&  le  voit- 

lenduaux  homes  lefalaireqifilsauoyent  me-  onencores  en  la  Papauté.  le  vous  prie,  quel- 

nté, quand  ils  ont  eu  les  aureilleschatouilleu  le  vermine  y  a-il  de  moines,  de  prefties.A:  de 

fes,&:  quand  ils  appçtent  tes  menronges,&' que  tout  ce  Clergé  ?  Or  celte  puantife-la  a  telle- 

ils  ont  mieux  aimé  qu'on  les  deftournaft  en  ment  rempli  le  monde,  que  c'eft  pour  luycre- 

perdition,que  d'eltre  conduits  d  Dieu.Et  voi-  uer  les  yeux  .  Tant  y  a  qu'on  elt  bien  aile  de 

Ja  pourquoy  fainû  Paul  en  la  fecôde  des  Thef  les  auoir .  Et  s'il  faloit  nourrir  en  vne  ville  U 

faloniciens ,  dit  que  quand  les  erreurs  domi-  vingtième  partie  de  bons  &  fidèles  Pafteurs, 

«ent.c'eftpourceque  les  hommes  n'ont  point  qu'il  y  a  de  celle  canaille  depreftres&demoi 

obeiàccluy  qui  les  a  formez  kcreez,Sc  qu'ils  ncs,quei'eroit-ce?  Car  il  ne  faut  point  qu'il  y 

n'ont  point  voulu  accepter  la  vérité  de  Ion  E-  ait  deux  prcfcheurs  ,  qu'incontinent  on  n'en 

uangile,  qu'il  faudra  qu'ils  foyentdeftournez  foit  ennuyé.  Voila  donc  ceft  amas  dont  ileft 

en  toutes  luperftitions.  Et  puis,  qiiâd  nous  au-  ici  parlé, qui  eft  tout  commun.  Et  quand  il  n'y 

rons  cognu  que  l'Euangile  a  efté  corrompu  &  auroit  que  ceft  aduertiffement  de  fainâ  Paul, 

peruerti ,  à  caule  que  les  hommes  ne  fe  font  cela  ne  nous  deuroit-il  point  fuffire?Mais  en* 


point  rendus  dociles  à  Dieu,mais  qu'ils  ont  eu 
des  appetis  extrauagans ,  qu'vn  chacun  entre 
en  foy,  &  quenous  aduilîons  bien  de  ne  point 
lafcher  la  bride  à  nos  folles  curiolîtez  ,  que 
nous  ne  venions  point  faire  desdifcours  infi- 
nis pour  nous  enquérir  de  ceci&  de  cela, mais 


cores  quand  nousauons  l'expérience,  &  que 
noftre  Seigneur  nous  monftre  que  ce  qu'il  a- 
uoit  prédit  par  fon  Apoftre,  a  cfté  accompli, 
qu'auons-nous  à  faire  finondenous  retenir 
en  la  (implicite  de  l'Euangile, prians  Dieu  que 
il  nous  donne  toufiours  elpritdemanfuetude. 


■quç  nous  foiitFrions  que  Dieu  nous  monftre  ce     que  nous  luy  foyons  dociles,  efcoutans  pa 


qu'il  cognoift  nous  eftre  propre  pour  noftre 
falut.Et  puis, que  nous  n'y  venions  point  auec 
nos  délices,  que  nous  necerchions  point  d'e- 
fti e  mignardez.ne  pouuans  fouffrir  nulle  cor- 
rcûion,  mais  au  lieu  que  les  aureilles  déman- 
gent à  ceux  qui  veulent  pourrir  en  leurs  ordu- 
res, quç  nous  Tentions  nos  vices  qui  nous  pic- 
■quent,  que  nous  foyons  naurez  d'vne  crainte 


ticniment  ce  qu'il  nous  dira  ,  &  que  nous  ne 
foyons  point  agitez  de  nos  appetis  vagabons, 
pour  faire  vn  amas  nouueau  ?  Voila  donc  de 
quoy  nous  femmes  ici  admoneftez  par  fainft 
Paul. Or  cependant  il  nous  faut  encoresredui 
re  en  mémoire  ce  que  nous  auons  dit ,  c'eft  a- 
fçauoir,  qu'il  exhorte  Timothee  d'eftrc  tant 
plus  vigilant,  quand  il  voit  que  le  mode  fedef 


-de  Dieu  :  que  nous  ayons  toufiours  frayeur  &  borde  ainfi.Et  pourquoy?  C'eft  pour  le  moins 

honte  de  nous-mefmes,iufquesàce  que  noftre  que  nous  n'ayons  pas  vn  cœur  filafchede  dif- 

Dieu  ait  mis  fa  main  fur  nous  pour  nous  gue-  fimuler  &  de  nous  taire, quand  nous  voyons  la 

rir,  S;  qu'il  ait  fait  office  de  médecin  parle  venté  de  Dieu  eftre  ainfiafîàillie,que  nous 

moyen  de  fa  Parole.  Voila  donc  en  fomme  ce  foyôs  aufti  diligens  à  la  maintenir ,  comme  les 

que  noui  auôs  à  retenir.  Or  ce  n'cft  point  fans  fuppofts  de  Satan  font  à  la  renuerfcr.  Or  il  eft 

caufe  que  fainft  Paul  dit,  ç»';7j  s'amaffent  des  vray  que  c'eft  vne  chofe  pénible  &  fafcheufe, 

ifocfFfwrî.Il  ne  fe  contente  point  dédire,  qu'ils  qu'vn  homme  s'oppofe  à  vne  grande  multitu- 


cerchent  des  doifleurs  à  leur  pofte,&  rciettcnt 
ceux /qui  Wur  eftoyent  cnuoyez  de  Dieurmais 
ilpaile  ici  d'vn  am.is.&d'vne  grande  multitu- 
de.Et  pourquoy?  Car  les  hommes  font  infatia 
blés  quand  il  eft  queftion  d'ellre  trompez.  Et 
voila  pourquoy  aufsi  les  Prophètes  accompa- 


e.  Mais  quoy  ?  11  ne  nous  faut  point  esbahir 
de  cel.i  :  car  Satan  trouuera  toufiours  allez  de 
fuppofts  qui  font  propres  pour  obfcurcir  la  ve 
rité,  pour  dénigrer  la  pure  doftrine  ,  &  pour 
l'abbaftarJir  :  brief,',pour  introduire  les  men- 
fonges  &  corruptions,  pour  mener  les  âmes  à 


rent  cefte  ferueur  diabolique  qu'ont  les  mef-     perdition. Satan  donc  trouuera  toufiours  allez 


chans,  quand  il*  veulent  feruir  à  Dieu  en  hy- 
pocrifie,  àvnc  rage  de  cheuaux  quand  ils  font 
efchaufFez  après  des  iumens,  ou  à  quelque  au- 
tre beftial,  qu'il  femWe  qu'ils  foyent  du  tout 
tranfportez,  qu'il  n'y  a  plu";  ne  railin  ne  di- 
fcrction  en  eux.  N  nis  trouucrons  cftrange  de 
prime  face  vne  telle  façon  de  parler ,  mais  ce 
eft  d'autant  que  les  hommes  fe  font  deftour- 
nez  de  Dieu,  que  voila  le  diable  qui  les  agite, 
qui  les  poulTc  tellement  qu'on  ne  les  peut  raf- 
felier.  Ils  aiment  lei  menfonges,  ils  les  appe- 
tfnt.S:  ne  leur  ch.iiu  q\iandils  en  feront  trom 
pczr  car  ils  en  vomlroyct  auoir  cent  fois  plus. 
Voila  oui  eftcauff-qie  les  hypocrites  nevic- 
ncnr  point  cercher  Dieu  droitcmét.mais  font 


de  femence  .  Et  puis  nous  voyons  ce  que  i^ay 
défia  dit, que  s'il  eft  queltiond'abufcr.chacua- 
y  eft  maiftte  fans  auoir  efté  àl'cfchole.  Or  ce 
pendant  il  y  aura  vn  petit  nombre  ,  &  comme 
vne  poignée  de  gens,de  ceux  qui  maintienent 
la  vérité  de  Dieu,  ou  qui  tafchent  de  gouuer- 
ner  l'Eglifc  en  fimplicité.CXuand  donc  les  fer 
uitcurs  de  Dieu  fe  voyent  ainfi  deux  ou  troiî 
contre  vne  centaine,  cela  les  pourroit  eftôner 
de  prime  face  :  mais  il  faut  qu'il  foyentarmea 
de  la  vertu  d'enhaut  pour  bataillei  conftam- 
mentC.irla  vcntéde  Dieu  en  la  findemeure- 
ra  vitloricufctcncorcs  qu'elle  ne  troiiuc  point 
en  ce  monde  beaucoup  de  procureurs ,  &  que 
inefmes'clle  foitdcehaflce  delà  plu^  part  iut^ 


fcmblant  de  venir  à  luy  parcircuits:&' cepen-  qu'à  l'obfcHicir,&  l'aiieancir  pleinement,  tou 
dant  s'en  cflongnent,  teilempnt  que  ceuv-la  tesfois  elle  viendra  toiifioiir';  .ludclTus.  Etain 
feront  vw  grand  amas  de  do£Vears,côme  fainft     fi  que  nous  prenions  courage  de  nouç  confer- 


mcr 


s  V  R   l  R  ■  11-    A  :  Tl  M  O  TH.  ^85, 

tttët  auandïidiis.vbyôfls  c)iie  fle'diaWe.fui'cite  vigilans,  quand  ils  voyent  que  les  hommes  fe 
des  gens  qui  ne  dcma-ndent  qu'à  renuerfcr  abbrutiflen:  ainfi  en  leurs  vilenies, qu'ils  vou- 
rEfcritUre,  qtie  nous  ayons  cefte  conchifîon  droyent  que  tout  leur  fuft  permis:  quand 
prinfe,  quMn'eft  point  queftion  de  fléchir  ni  nous  voyons  vne  telle  ftupidité,  que  celanous 
"uir  le  combat,  mais  que  nous  foyons  vail-  incite  d'auantage  à  crier,  &  eftre  plus  afpres, 
iiifques  au  bout.  Au  rcfte  ,  fi  en  mena(^ant  &  corrigean:  ceux  qui  le  veu- 
n  aeité  neccffi^re  du 'temps    lient'  ainfi  elcuer  contre.Dieu  ,  S:  tafcherit^à 

tout  corrompre  &  peruertir.  Voila  pour  vn  i- 
tert  .  Et  au'refle,  qu'vn  chacun  face  aufsi  fon 
profit  de  cefte  admonition  :  &  cependa^nt  que 
Dieu  nous  laifle  l'opportunité  ,  que  nous  en 
vfions  :  car  il  eft  certain  que  fi  les  chofes  con- 
tinuent ,  il  faudra  que  Dieu  enuoyedes  con- 
fufions  plus  énormes  qu'elles  n'ont  point  e- 
ùé  en  la  Papauté  .  Car  ces  poures  aueugles-la 
n'ont  point  otFenfiè  Dieu  en  telle  extrémité 


de  fui 

lans  cendarmes 
cefte:  exh<irtation 

de  Timothee,  elle  l'eftauiQwrjd'^iuy  autant  ou 
plus .  Car  quant  autaureilles  chatouilleufes, 
ne  les  voit-on- pas?  L'£uangilefa(che  à  beau- 
coup de  gens ,  8c  voudroyent  auoir  ie  ne  fçay 
quelle  philofophie  prophane  :  &  fi  ce  qu'on 
Jeur  apporte, ne  leur  vient  à  gré, ils  voudroyét 
que  cela  fuft  reietté  &  elfacé  du  regilhe  de 
Dieu. Autant  en  a-il  elté  de  la  doélrine  de  no- 
ftre  Seigneur  lefus:  car  n'a-elle  pas  eftc  reiet 

teede  ceux  qui  eftoyent  par  trop  arrogans,  &  comme  nous  auiourd'huy  :  c'eft  comme  fi  on 
qui  fe  fioyent  en  leur  fens  propre  !  N'ont -ils  venoit  heurter  contre  luy  à  ion  efcient,&  que 
pas  dit,  Ce  propos-la  eft  dur  ;  Mais  il  fau-     on  vouluft  du  tout  anéantir  fa  maiefté.  Et 


droit  que  nous  cufsions  les  coeurs  ployables, 
&  alors  rien  ne  nous  feroit  dur  ni  eftrange  en 
la  parole  de  Dieu  .  Il  eftvray  qu'on  en  verra 
auiourd'huy  qui  voudroyent  auoir  vn  Euan 


pourtant  apprenons  (  comme  i'ay  dû  )  tous 
enfembledenous  efueiller,&  de  cheminer  en 
crainte.voyas  qu'il  en  y  a  tant  peu  qui  fe  con- 
tentent de  la  fimplicité  de  l'Euangile ,  que 


elle  defguifé.  Et  pourquoy  ?  Cefte  rondeur  &     nous  mettions  barre  à  tous  nos  fens  &  nos  e- 


limplicité  qui  eiè  rcquife  ne  leur  plaift  point 
Et  puis  il  y  a  cefte  curiofité,  que  beaucoup  ne 
demandent  qu'à  fçauoir  babiller ,  &  remuent 
des  queftions  ie  ne  fçay  quelles  .  Voila  Dieu 
qui  nous  veut  tenir  en  bride,  &ne  veut  point 
que  nous  vaguions  ainfi  à  nos  phantafies.iiiais 
que  nous  fuyuions  fimplemént  ce  qu'il  a  co- 
gnu  nous  eltre  expédient  &vtile  pour  noftre 


fprits  ,  pour  ne  point  appeter  de  fçauoir  plus 
que  Dieu  ne  permet,  &:  qu'il  nous  communi- 
que par  ù  Parole  ,  quand  nous  voyons  que 
ceux-là  s'addonnentdu  tout  à  mal ,  que  nous 
cheminions  tant  plus  eftroitemét  fous  la  crain 
te  de  noftre  Dieu.  Il  cft  vray  que  Ion  loug 
nous  fera  doux  &  gracieux  quand  nous  l'au- 
rons accouftumé:  mais  cependant  fi  ne  faut-il 


falut.Ornous  auons  lesefprits  bouillans  :  il  point  que  les  aureilles  nous  frétillent  pour 

faut  que  nous  foyons  enfcignez  à  noftre  gui-  ouïr  des  flatteries  .  Car  ceux  qui  veulent  eftre 

fe.  Et  d'autre  cofté  nous  voyons  que  la  plus  fliciez, il  faut  qu'ils  Oen  aillent  au  diable,  &  il 

part  ne  peuuent  plus  fouifrir,  ni  correûions,  les  flattera  allez  :  car  li  ne  demande  que  d'a- 

ni  menaces,  non  point  uiefmes  la  fimpîe  do-  madouerceuv  qu'il  veut  attirer  en  perdition 

ôrine.  Quand  on  déclarera  les  vices, encores  aucc  luy  ,  il  leur  complaift  ,  il  les  mignarde; 

qu'on  n'vfe  point  de  grande  véhémence  ,  il  brief,il  les  fcrt  félon  leur  appétit:  mais  il  leur 

femble  que  tout  foit  perdu.  Voila  donc  le  mon  fait  payer  l'efcot  bien  cher  en  la  fin. Or  de  no 

de  qui eft  aufsi  peruers  queiamais  il  a  efté  ,  &  ftre  partn'appetonspoint  toutcela  ,  car  c'eft 

femble  que  ceux  qui  ont  fau  profefsion  de  poifon  mcrtclle  (  comme  l'ay  défia  dit  )  ma-s 

l'Euangile,  tafchent  tant  qu'ils  peuuent  d'.i-  n  pluftoft  nous  remercions  noftreDieu  quand 

neantir  la  grâce  de  Dieu  .  Car  il  n'eft  point  il  nous  enuoye  des  médecines  qui  font  peur 

queftjon  feulement  des  Papiftes,qni  bataillent  nous  purger  de  nos  cupiditezmauuaifes,  que 

fiiiieufement  contre  nous ,  mais  de  ceux  qui  nous  fçachions  par.cela  qu'il  a  le  foin  de  nous, 

proteftentd'auoir  la  reformation  de  FEuan-  Et  pourtant  que  nous  foyons  tant  plus  fon- 

gile  :  on  voit  qu'ils  voudroyent  eftre  comme  gneux&  attentifs  de  recenoir  vn  tel  bien  en 

des  veaux  desbridtz,  il  n'eft  point  qiieftion  ni  toute  reuerence,de  nous  fubmettre  &  afliiiet— 

de  ioug,nidepohce,nide  rien  qui  foit  :  qu'on  tir  à  fa  bonne  volonté, &  que  par  cf  moyen  ia. 

laifle  faire  ce  qu'ils  voudront,  que  toutesdif-  -  Parole  &  la  doftrjne  de  falut  continue  entre 

folutions  foyent  perrmifes.que  les  blafphemes  hou';,  comme  c''eftaiif«i  le  leul  moyen  comme 

ayent  la  vogue  ,  que  les  paiilardifes  régnent,  nôus  en  poutrorfs  itFtur  à^erpctuité»'-    ''    ;• 
les  yurongneries,&  toutes  chofes  femblables,  >      -  '     ■■■■''    ■'    •  .    ri-i  ;i.'>.i  .ii:ç 

ic'cft  tout  vn:  moyénant  qu'on  .lit  qiielqiie  for  O  R  nous-nous  pfofterfieroTis  deu»0t  la 

me  de  cérémonie,  &  qu'on  de^pitc  le  Pàpe<3c  niaiel^é  de  nollid  boii  D:cu  en  c-oCr^oiflànce 

les  idolâtres.  Voila  donc  comme  beaucoup  de  de  nos  fautes, le  pnans  qu'il  nous  les  face  tel- 


ceux  qui  font  femblant  à'eftre  à  l'Euangile, 
voudroyét  eftre  gouuernez:  mais  c'eft  à  caufe 
q  les  aureilles  leur  chatouillent. Or  craignons 
cependant  que  noftre  Seigneurne  retire  la 
grâce  qu'il  a  mile  entre  nous  :  &  que  eeux  qui 
onc  la  charge  d'enfeigner- foyent  tant  plus 


lementfentir,  que  nous  foyons  contciiAiez  ëa 
vne  droite  repentance,&  que  nous  tltans^ei- 
pleus&  condamnez  en  tant  de  î'ebeiliofi%<J«i 
font  en  nous,&  eh  tant  depouretcZt^tie  nous 
le  prions  de  nous  conduire  par  fon  tainêl  E- 
fpritj&qu'il  domine  pleinement  en  nous  pour 


490  .':SERMON    XXVII. 

noiiî  faire  renoncer  à  ce  monde ,  nous  fup-     i  la  pcrfedion  de  iuAice  ,  à  laquelle  nou» 


—  ... , ...^  _  ._  j,. ,..„.„.. —  ,  _  — j — .. 

forçant  couhours  en  nos  toibleues ,  iufques  tendons  maintenant .  Qiie  non  feuleme 

à  tint  qu'il  nous  ait  reformez  pleinement  à  nous  face  cefte  grâce  ,  mais  à  touf  peup! 

fon  image  glorieufe,  &  qu'il  nous  ait  amenez  nations  de  la  terre,&c. 


nt  il 
peuples  ôi 


TROISIEME      SERMON     SVR     LE 

Q_V  ATRIEMECHAPITRE. 

5  Mais  toy  •veille  en  toutes  chofc s, endure  les  affliSiions,fdy  Ïœu 
urc  d'Eudngeliïle'.ren  ton  adminiHration  approuuee. 

6  Car  ie  doy  maintenant  eîire  facrijié ,  0*  le  temps  de  mon  de- 
partement  ejl  prochain. 


Onibicn  qu'en  voyant  les 
autres  desbauchez.nous  fe- 
rons en  danger  d'eltre  ef- 
bralcz  de  nollre  part,faincl 
Paul  prend  vn  argument  de 
cela,(ï  les  fidèles  l'edoyuenc 
tant  plus  confermer.quand 
Us  voyent  que  ceux  qui  n'ont  point  eité  fer- 
mes ne  conftans  s'alicnent  de  Dieu  ,  &:  fc  de- 
llouvncnt  ainii  du  bon  chemin  ,  que  cela  les 
doit  tant  plus  inciter  à  fuyure  la  fainde  voca- 
tion de  Dieu. Voila  pourquoy  après  auoirde- 
claré  que  le  monde  cft  ii  peruers  qu'il  ne  pour 
ra  porter  la  bonne  dotlrine,  mais  qu'il  ne  fera 
queftion  que  d'appeter  des  tromperies ,  il  dit, 
Tojf  vrille  en  toutes  cl/ojc-s  .  Nous  voyons  donc 
que  Dieu  nous  incite  àcftretant  plus  vigi- 
lans  quand  les  chofes  font  confufes  en  ce  mon 
de  .  lleft  vray  que  fain£l  Paul  exhorte  ici  Ti. 
mothee  qu'il  doit  porter  la  lampe  pourefclai 
rer  toute  l'Eglife  :  mais  tant  y  a  qu'vn  chacun 
de  nous  en  fon  endroit  doit  prattiquer  cefte 
doftrine  :  commeauAi  il  nous  faut  bien  gar- 
der de  nous  endormir  quand  nous  voyons  les 
dangers  eftrc  prochains .  Et  de  faid,quant  au 
monde  &  à  la  vie  prcfentc  nous  fommes  aflez 
aduifcz  de  cela  :  &  pour  le  talut  de  nos  âmes 
aurons-nous  moins  de  foin?  Voila  donc  ce  que 
il  nous  faut  conclure ,  Qjx-  fi  Satan  trauaille 
l'Eglife  de  Dieu, qu'il  mette  en  auant  des  fcan 
dales.que  le  monde  s'efgarc.que  tout  foit  dif 
lîpé.quc  tout  aille  à  rebours, qu'il  nous  faute- 
lire  tant  plus  vigilans  ,  afin  que  nous  ne  foy- 
ons  point  furpnns.Or  pour  ce  iaireileftbc- 
foin  que  nous  foyons  armez  de  patience  :  car 
quand  tout  fera  ainfi  desbordé  à  mal,  il  ne  fe 
peut  faire  que  les  cnfansde  Dieu  ne  foycnt 
'picquei  Si  tourmentez  ,  qu'on  ne  fe  mocque 
d'eux  ,  qu'on  ne  leur  face  beaucoup  d'iniures 
&  opprobres .  Et  quand  on  ne  s'addreflèroit 
point  à  leurs  pcrfonnes ,  ce  leur  cft  défia  vne 
angoiflcbien  grande,  &  tafcheufe  à  porter, 
^qjiandiJs  voyent  que  le  nom  de  Dicueftbla- 
. /phemé,  quefon  fcruicc cft  mis  fous  le  pied, 
^ue  la  religion  cft  vilipendée,  que  tout  bien 
cJl  comme  mocuuc  &  mis  bas .  Q^anJ   ils 


voyent  cela  ,  encores  qu'en  particulier  on  ne 
leur  fcift  nul  molcftt,  ii  doyuent-ils  fentir  en 
cuxvnedeftreflc  fi  grande  qu'ils  n'ayent  nul 
repos ,  mais  qu'ils  gemiflent  Se.  nuid  &  iour. 
C^uaiiddonc  le  diable  aura  fon  enfeignedref 
fec,  &  que  les  fcandales  &  les  troubles  auront 
la  vogue,  nous  ne  pourrons  pas  eftre  attentifs 
pour  nous  garder,  finou  que  nous  foyons  for- 
tifiez en  patience, Que  nous  ne  perdions  point 
courage  pour  les  maux  qu'il  nous  faudra  fouf 
frir.  Or  fi  cefte  admonition  aiamaisefté  vti- 
le,la  necefsité  nous  monftrc  qu'auiourd'huy 
nous  en  auons  grand  befoin.  Car  le  monde  ne 
eft-il  point  venu  au  comble  d'iniquité .'  On 
voit  que  la  plus  part  rcictte  furieufement  l'E- 
uangile.  Les  autres  qui  font  fcmblant  de  l'ac- 
cepter.en  quelle  obeilFance  la  reçoyuent-ils? 
Il  y  a  vn  tel  mefpris  &vn  tel  orgueil ,  que  il 
toft  qu'on  reprendra  les  vices ,  ou  qu'on  fera 
trop  aigre  à  l'appétit  de  ceux  qui  voudroycnt 
auoir  toute  licence  de  mal  fairc,&ne  tafclient 
qu'à  tout  ruiner,  c'cft  àfe  defpitcr  .  Combien 
que  les  Papiftes  foufFriront  de  leurs  caphars 
qu'ils  crient  &  qu'ils  tempeftent  àrencontre 
d'eux.  Se.  neantmoins  ne  font  que  les  abbruuer 
de  menfonges  d  leur  perdition  ,  ceux  qui  di- 
ront à  pleine  bouche  qu'ils  veulent  la  refor- 
niation  del'Euangile,  nepeuuent  porter  que 
on  les  corrige  quad  ils  auront  fulli,maisgrin 
cent  les  dents  à  l'encontrede  Dieu,  &accom- 
pliflcnt  ce  que  dit  faind  Paul  aux  Corinchiés, 
que  s'il  y  auoitdcs  trompeurs  qui  les  veinf- 
ftntabufer.ils  endureront  toute  tyrannic.que 
on  les  pourroit  foufflctcr, qu'ils  fe  ticndroyét 
quois:mais  fi  on  les  enfeigne  pureméc  au  nom 
de  Dieu,  Se  pour  leur  falut,  ils  font  fi  délicats 
qu'vn  feul  mot  les  fera  entrer  incontinent  en 
rebeUion:&  fi  on  continue  à  faire  aucunement 
fon  deuoir,  la  guerre  fora  incontinent  décla- 
rée. Et  pieuft  à  Dieu  que  les  chofes  ne  tuflènt 
point  fi  patentes  qu'on  les  voit  .Or  puis  que 
ainfi  eft,  que  refte-il ,  finon  que  fuyuant  l'ad- 
monition de  faind  Paui  nous  foyons  fur  nos 
gardes?  Et  d'autant  qu'il  nous  faut  louftrir.  Si 
des  murmures  ,  &dcs  contentions ,  &  que  les 
nicfchajissytoat  Ii  vogue,  q  Til  faut.oii  qu'ils 

nou; 


s  VR 

nous  «rachent  an  vifage  ,  ou  qu'obliquement 
ils  nous  tourmentent ,  que  nous  foyons  com- 
me endurcis  en  patience  ,  &.  que  rien  ne  nous 
dcftournc.que  nous  pour fuyuions  toufiours  le 
chemin  auquel  le  Seigneur  nous  a  appelez. 
Voila  donc  le  moyen  de  perfiller  quand  les 
chofes  feront  toutes  confufes  :  c'clt  que  le 
mal  nous  contrifte  :mais  cependant  qu'il  ne 
nous  faut  point  perdre  courage.  Sainft  Paul 
adioufte  ,  qitf  Timotber  face  oHuruge  d'Euan- 
gel'flt ,  O'  </»'''  accomfhffr  ,  o«  <j»';7  rAtific  ^ 
ttpfrouue  fleinemttit  fo»  minijïere .  Yci  (ainft 
Paul  pour  inciter  Timothee  ,luy  monftre  à 
quoy  il  cfl appelé  :  c'e(l  que  Dituluya  fait 
vne  grâce  excellente, de;  le  conftitueren  tel 
degré  d'honneur  en  fon  Eglife:  car  nous  fça- 
uons(felon  qu'il  eft  contenu  au  quatrième  des 
Epheitens)  que  les  Euangeltftes  ont  cfté  pro- 
chains des  Aportres>  ils  font  nommez  deuant 
les  Pafteurs  &  Dofteurs .  Car  pource  que  ce 
nombre  de  douze  ne  fufHfoit  point  pour  por- 
ter l'Euangile  par  tout  le  monde,  Dieu  auoit 
ordonné  des  aides .  OrTimothee  eftoit  en  ce 
degré  :  car  nous  auons  veu  par  ci  deuant,  que 
iaind  Paul  l'auoit  ordonné,  afin  d'auoir  ef- 

fardfurles  Pafteurs,  de  mettre  police  &;  or- 
re  par  toutes  les  Eglil'es.Puis  donc  que  Dieu 
Pauoit  tant  honoré,  c'eft  bien  raifon  qu'il  fe 
eiforce  défaire  tant  mieux.  Carquelle  ingra- 
titude fera-ce,  fi  nous  ne  nous  employons  de 
tout  noftrcpouuoir,  quand  Dieu  non  feule- 
ment nous  adopte  au  rang  de  les  enfans,  mais 
qu'il  veut  que  nous  ayons  régime  &  fuper- 
intendence  en  fa  maifon  ?  Comme  il  a  elle  dit 
ci  deflus  ,  que  fi  l'ofiîce  de  prefcher  nous  eft 
commis ,  Dieu  nous  conftitue  difpenfateurs 
des  fecrets  admirables  qui, font  pour  eleiier 
fon  Royaume  en  ce  monde.  Et  mefmes  quand 
nous  penfons  à  ce  que  Dieu  nous  eftmanife- 
fté  eu  chair ,  &  que  la  gloiie  celefte  nous  eil 
apparue',  &  que  celny  qui  a  vellu  noftre  natu- 
re,eft adoré  des  Anges ,  que  toutes  créatures 
luy  font  hommage,  qu'il  eft  conftitué  en  ceA 
empire  fouuerain  du  ciel  &  de  la  terre  ,  &  le 
tout  pour  noftre  falut:  quând(di-ic)nous  pen 
fons  à  cela,  nedeuons-nous  pas  eftre  rauis  en 
eftonnement?  Car  nous  femmes  des  v3;f[cnuT 
fragiles,  voire  des  pots  calFcz  de  nulle  valeur: 
&  cependant  Dieu  veut  que  ce  threfor  foit 
porté  par  nous .  Ainfi  donc  c'eft  bien  raifon 
que  nous  mettions  peine  de  nous  acquitter  R  - 
delement  de  noftre  dcuoir  ,  &:  que  ceux  qii''l 
a  conftituez  miniftresde  fa  Parole  auront  vn 
plus  grand  conte  à  rendre,  que  s'ils  cftoyent 
feulement  du  rang  des  fidèles .  Voila  donc 
pourquoy  notamment  laiiiû  Paul  dit  à  Ti- 
mothee, ÇjKii  fjce  OHurage  d  Eu.m^elifle  ,  (rf 
qu'il  af^ouue  :  (  ou  qu'il  accomphlPe  )  faa 
mlnifter:  :  comftie  s'il  difoit ,  Ce  n'eft  pas  le 
tout  que  tu  ayes  le  titre,  mais  il  f.uit  que  tu 
entendes  que  ccluy  qui  t'aappelé.vcur  que  tu 
demeures  fon  feruuear  iufques  au  bout .  Et  au 
refte,  adujfons  de  tirer  vne  règle  geoer^le  de 


L'A    II.    A     TIMOTH. 


.451 


ces  mots  de  fainft  Paul:c'eft  qu'vn  chacun  re^ 
garde  à  foy  ,  &  qu'il  fçache  quel  eft  lon  eftat 
&  fafaçonde  viure  où  Dieu  Ta  appelé.  Q_ue 
vn  homme  cognoifle,  s'il  eft  marié  ,  à  quelle 
condition  c'eft:afçauoir,qiril  ait  la  charge  de 
fon  mefnage,  qu'il  viue  p.-iiCbkmcnt  auec  fa 
femme, &:  qu'il  iuy  fou  chef  pour  la  bien  con- 
duire, qu'il  la  fupporte,  qu'il  tafche  d'inlhui- 
re  Cei  enfans  en  la  crainte  de  Dieu,  qu'il  tra- 
uaille  ,&  qu'il  porte  patiemment  les  fafchc- 
riesdomcftiques ,  par  lefguclles  Dieu  exerce 
vn  chacun.  Apres,  fi  vn  home  a  des  feruiccurs, 
qu'il  cognoifle  qu'il  faut  que  Dieu  domine 
par  defllis,&  cependant  qu'il  les  employé  tel- 
lement ,  que  Iuy  foit  pour  leur  monftrcr  bon 
exemple. Que  celuy  qui  eft  en  eftat  public  re- 
garde bien  .1  foy,qu'il  n'eft  point  là  feulement 
du  coftédes  hommes,mais  qu'il  faut  qu'il  com 
pare  vne  fois  deuant  Dieu, qui  s'cft  rcferué  la 
fuperiorité  par  deflîrs  tous  eftats .  Voila  donc 
comme  chacun  doit  faire  cefte  conclufion.que 
en  quelque  eftat  qu'il  viue.  Dieu  le  veut  auoir 
à  fon  feruice,&  qu'il  nous  but  employer  fidè- 
lement en  ce  que  noftre  office  porte  ,  fi  nçuî 
ne  voulons  eftre  coulpablesdeuant  Dieu.  Car 
combien  que  nous  loyons  tenus  S:  obligez  au 
monde  ,  toutesfois  Dieu  eft  noftre  principale 
partie  :  &  c'eft  là  qu'il  nous  faut  regarder.  Ce 
n'eft  point  aflez  d'auoir  pour  vn  temps  mon- 
ftré  vn  figne  que  nous  ne  dcmâdons  qu'à  nouï 
employer  au  bien,  mais  il  faut  continuer  iuf- 
ques au  bout ,  &•  faut  approuuer  noftre  mini- 
ftere, c'eft  à  dire, noftre, feruice,  que  nous  mon 
ftrionî  que  nous  n'auons  point  ce  titre  à  fauf- 
fes  enfeignes, comme  ceux  qui  fe  glorifient  de 
vn  eftat,  &  cependant  ne  font  que  polluer  le 
lieu  où  ils  font ,  &  y  dcfpiter  Dieu  .  Helas,  il 
vaudroit  beaucoup  mieux  qu'ils  baifTaflent  la 
tefte,&  qu'ils  n'euflenc  occafîon  finon  de  fe 
cacher  deuant  les  hommes  ,  &  d'auoir  toute 
vcrgongnc.  Car  l'honneur    qu'ils  vfurpent 
leur  fera  bien  cher  vendu,  qrand  ils  n'auront 
point  fait  leur  profit  pour  feri:ir  à  Dieu  en 
l'eftat  auquel  il  les  a  occupez  .  Et  fur  tour, 
quand  il  nousaconftitutz  en  charge  honora- 
ble, que  cela  nous  êniîambe  tant  plus  .Noui 
fçauons  qu'en  la  maifon  d'vn   Roy  &  d'va 
Prince  ,  il  n'y  a  nul  eftat  petit  ne  contempti- 
ble  .  Or  fi  noftre  Seigneur  nous  appelle  pour 
le  feruir  en  ia  maifon,  ne  deuons-nous  point 
prendre  cela  à  plu*  grard  honneur  cent  mille 
tois,que  fi  nous  eftions  à  vn  Prince  terrien, qui 
n't  ft  rien  au  prix  r  Mais  encores  quand  cha- 
cun regardera ,  Or  ça,  me  voici  vne  créature 
inutile  ,&  neai-tmoins  Dieu  me  veut  encore» 
employer  .\  fon  Icriiice  :  &:  combien  que  le  ne 
vaille  rien  ,  fi  eft-ce  qu'il  veut  tirer  de  nioy 
feruice  agréable. Et  comment-  lime  fait  cefte 
grâce  ,  combien  que  ie  ne  puiflc  iien  appor- 
ter de  mon  propre  ,que  par  fon  fair.ft  Efprir 
il  veut  eftre  glorifie- en  moY.Q_raiid  il  n'y  au- 
roit  «jue  cela ,  ne  icuons-nous  pas  eftre  bien 
inciiet  3  ratifier  nefire  miniftere,  c'eft  à  dire, 

Q_q.li. 


45>i 


SERMON     XXVII. 


i  môftrer  que  ce  n'cfl  point  en  vain  que  Dieu 
nous  a  choilis  ,&  qu'il  nous  a  voulu  donner 
lieu  en  la  inaifon.afin  de  non?  employer  pour 
iuyîC'eftce  que  nous  aaons  à  retenir  fur  ces 
mots  de  lâinct  Paul. Mais  notons  biencequ''il 
adiouftc,  De  moy(Au~il)  iem'cn  fay  e^râ fi- 
ctif i  ,  c  h  temfi  de  mm  département  {ou,  de 
-ma  refolution)  ejl  procluin.  Qjand  ilpirle 
ainii,  c'eft  polir  monftrerà  Tnnothee  ôit'iI 
faut  qu'il  te  fortifie  d'orefenauat.potirce  qif  il 
n'aura  pas  vue  telle  aide,  &  vn  tel  baft on  que 
.ilauoit  eu. Car  ce  u'eiT:  p.is  fans  caufe  q  fimrt 
Paul  l'appelle  Ion  vray  fils  &  naif:comi;ie  s'il 
diloit, mon  fils  naturel  :  non  point  qu'il  l'euft 
engendre  félon  la  chair.mais  il  veut  nionftrer 
que  c'eftoit  vn  entant  qui  ne  dcmandoit  qu'à 
fe  contonnL-r  du  tout  à  fou  père.  Voila  donc 
quelcftoit  Timotlieede  fon  cofté.  Orfaiiicl 
Paul  ne  luy  a  point  défailli,  qu'il  ne  fe  foit 
monflré  père  enuers  luy  aufsi  bien.Timotliee 
donc  du  viuantde  fainft  Paulauoit  vne  bonne 
aide  &  propre:que  s'il  eftoit  débile, il  pouuoit 
cdre  exhorté:  s'il  auoitbefoin  de  confeil ,  S. 
Paul  le  redreffoit  :  fi  on  luy  faifoit  la  guerre, 
il  fe  venbit  mettre  pour  bouclier  ,  ill'armoit 
de  fon  authoriié  ,  comme  nousauons  vcupar 
ci  deuant.Or  faind  Paul  déclare  que  tout  cela 
ne  fera  plus:  Dieu  me  veut  retirer  de  ce  mode 
(dit-il)&  pourtant  apprefte-toy,car  tu  auras 
des  combats  plus  rudes  que  tu  n'as  point  eu 
iufques  ici:de  moy,ie  ne  feray  plus  au  monde 
pourt'aider,ie  ne  viendray  plus  prëdre  la  eau 
fe  comme  i'ay  accouftumé  par  ci  deuant.tu  ne 
auras  perfonnequi  te  fupporte,  mais  il  faudra 
que  tu  fois  capitaine  pour  les  autres ,  que  tu 
conduife?  tout.Ainfi  donc  aduife  de  te  prépa- 
rer pour  inuoquer  Dieu  ,  &encefte  fiance-la 
de  pourfuyure  côftamment:  car  ces  afiauts-la 
te  feront  bien  difficiles  à  fouftenir.  Nous  voy 


valoir  telsmoyens  qu'il  nous  donne  .entant 
qu'en  nous  fera.Mais  tant  y  a, quand  nous  fe- 
rons defpourueus  d'aides  quant  au  monde ,  8c 
que  les  mefchans  fe  viendront  ruer  contre 
Jious.que  les  fcandales  ferôt  gransjqu'il  fem- 
blera  qu'il  n'y  ait  que  déluge  par  tout,  &  que 
tout  doiue  élire  difsipé,  que  nous  regardions 
neantmoins  au  ciel-,  que' nous  requérions  à 
Dieu  que  par  la  vertu  lecrete  de  fon  faind 
Elpritil  nous  rende  inuincibles  contre  tout 
ce  que  le  diable  aura  machiné.  Voila  donc  ce 
que  nous  auons  à  faire  en  fomme  ,  c'eft  d'ap- 
pliquer à  noftre  vfage  les  aides  prefentcs  ,  & 
quand  il  nous  les  oftera  ,  que  nous  ne  laifsiôs 
point  d'eitre  côr!ftas,&  de  marcher  toufiours 
plus  outre.  Et  pourquoy?  Dieu  fuppleera  au 
défaut  de  ce  que  nousn'auôs  pais  ici  à  la  vcuë 
des  hommes.  Voila  dohcce  que  nous  auons  à 
retenir  dece  palTàge.  Et  cependant  notons 
aufii  queûinâ  Paul  a  voulu  donner  plus  de 
vigueur  à  fon  exhortation  ,  comme  fi  c'eftoit 
vne  déclaration  de  la  dernière  volonté,  &  vn 
teftamét  que  feroit  vn  per-e  qui  parlera  à  fon 
enfant,  Cependant  que  l'ay  vefcu  au  monde, 
i'ay  tafché- de  toufiours  te  monftrerle  che- 
min,afin  que  nous  ferUifsiôs  à  Dieu  tous  deux 
d'vn  accord  :  iufques  ici  tu  as  cheinmé  ainfi 
qu'il  eftoit  à  fouhaiter.'  Or  il  reftc  que  quand 
ie  feray  départi  du  monde  ,  que  tu  ne  lailFes 
point  de  continuer  :  &  maintenant  le  t'anon- 
ce  ma  mort  :  mais  retien  ce  dernier  mot-ci, 
comme  fi  ie  faifoye  vn  teftamen't  lolennel  & 
authentique,  c'eft  le  meilleur  héritage  que  ie 
te  puiflelàilTer ,  afçauoir  que  tu  férues  touf-; 
iours  à  Dieu.  Or  il  refte  maintenant  de  noter' 
les.  façons  de  parler  dont  ûv.nà  Paul  vfe  cn^ 
cepalTage.  Um'tHiray  eflre facrif((dn-il)U 
temps  de  mtn  departimeut  eft  frochatn.Q_uand 
il  dit  qu'il  s'en  va  eftre  facrifié,  il  exprime  l'e 


ons  donc  maintenant  quelle  elH'intention  de     fpece  de  fa  mort  laquelle  luy  eftoit  appre- 
fainrt  Paul. Or  par  cela  nous  foinmesadmone    ftee:&mefmeslemot  dont  il  vfe.s'appliquoit 

aux  facrifices  qu'on  auoit  accouftuméde  fai 


ftez  qu'il  ne  faut  point  que  noftre  foy  défail- 
le quand  toutes  aides  nous  feront  oftees,i'en- 
ten  les  moyés  inférieurs  qui  nous  font  vtiles, 
quand  il  plaift  àDieudenous  les  donner.lleft 
▼ray  que  quand  nous  aurôs  des  bons  Pafteurs 
pour  nous  conduire  ,  fi  nous  ne  fommes  plus 
reruens,  cela  nous  fera  imputé  àdoublecon- 
damnatiô.Mais  encores  que  nous  n'ayons  pas 
les  fupports  à  fouhait,  &  que  les  chofes  bran- 
lent ,  &  quand  le  diable  aura  quelque  entrée 
vers  nous, qu'il  ne  foit  point  repoufle  fi  virile 
ment  qu'il  feroit  requis ,  fi  ne  faut -il  point 
que  nous  foyons  efperdus  pourtanf.car  Dieu 
nous  afsifterad'enhaut,&  aura  fon  bras  eften- 
du  pour  nous  fecourir  quand  nous  regarderas 
à  luy.  Que  faut-il  donc  ?  Si  Dieu  nous  donne 
des  gens  qui  nous  monftrent  bon  exemple, 
&  qui  foyent  zélateurs  de  fa  gloire,  qui' ne 
demandent  finon  à  nous  fecourir  au  befèin, 
faifons-en  noftre   profit, 'que  nous  remer-i 
crons  Dieu  de  ce  qu'il  haïinfi  pitié  de  nous, 
qu'il  •  fupporte    noftre    infirmité   :   faifôns 


re  aux  alliacés. Car  A  des  peuples  ou  des  Prin 
CCS  contraftoyent  alliancc,il  fe  faifoit  vn  fa- 
crifice  pour  la  ratifier.  Et  là  il  fe  faifoit  pro- 
teftation  que  celuy  qui  faudroit,fiift  defchiré 
en  pièces, que  Dieu  lecôfondift.  Q^âd  fainft 
Paul  parle  de  fa  doftrine.il  l'appelle  le  mellà  i.Co;-.f. 
ge  de  reconciliation:c'eft  à  dire, que  Dieu  l'a  '?• 
enuoyépour  faire  l'appointemét  de  luyaiiec 
les  hommes.  Ainfi  quand  l'Euangile  fepref- 
che.c'ert  autant  comme  fi  Dieu  s'allioit  auec 
nous  ,  déclarant  qu'il  nous  e(t  Père ,  &  qu'il 
nous  tiendra  pour  fesentans.  Et  pour  ce  fai- 
re,qu'il  ne  no^  veut  plus  imputer  nos  péchez: 
combien  que  nous  foyôs  créatures  maudites, 
qui  n'aiionsmerité  que  toute  confufion,  tou- 
tesfois  qu'il  nous  veut  laner  &  netf.iyer  par 
lefingdc  fou  Fils  ,  accepter  l.rniort  «S:  paf-- 
fion  qu'il  a  endurée  ,  pour  la  iuftice  qui  nous- 
défaut;  Voila  qu'emporte  1,1  dortrinc  de  l'E- 
uangile quand  elle  eft  publiée  au  monde.  Or  '• 
fainft  Palilditqtj'il  eïï'ftérifié)  pour'Canfcr-' 

nier 


s  V  R   LA   1 1.    A 

Serdereclief l'alliance  que  Dieuaifaite  auec 
les  hommes  :  d'autant  que  fa  mort  feellera  ce 
qu'il  aprefché.&queladoftrine  qu'il  a  anon 
cee  de  bouche  ,  ait  tant  plus  d'authorité  en- 
tiers les  fidiles.quand  ils  verront  qu'il  ne  s'eft 
point  efpargné  ,  que  ù  vie  ne  luy  a  pas  efté  iî 
precieufe, qu'il  ne  Tait  voulu  eipofer  pour  de 
clarer  la  vérité  infallible  de  la  doftnne  la- 
quelle il  auoit  en/eignee.Et  voila  comme  il  en 
parle  au  fécond  chapitre  des  Philippiens ,  Si 
ie  fuis  facrifié  (dit-il)  pour  le  facrifice  de  vo- 
ftre  foy.ie  mViiouy  en  cela,&  m'y  eiiouiray, 
fçachant  que  tout  reuiendra  à  voftre  falut.Ét 
Uditapres,  qu'enbriçf  il  fera  facrifié.  Or  de 
ce  motnousauôsà  recueillir  en  premier  lieu, 
lînoftre  Dieu  nous  fait  la  grâce  que  noitre 
fanglbit  efpandu  pour  le  tefmoignagede  fa 
vetité  ,  que  ce  luy  eft  vn  facrifice  de  bonne 
odeur  ,  &  pourtant  que  nous  deuons  prendre 
la  mort  en  gré,&  funnôter  toutes  tentations. 
Car  combien  que  noftre  chair  foit  débile, tou 
tesfois  fi  nous  pouuons  bien  goufter  ce  mot- 
la,  que  noftre  Seigneur  nous  vueiUe  prendre 
pour  facrifice,  afin  de  fceller  la  venté  de  fon 
Euangile.ce  fera  pour  nous  faire  venir  à  bou  t 
de  furmonter  tous  les  regrets.que  nous  pour- 
rions auoir.  £t  ainfi  donc  prions  Dieu  qu'il 
imprime  en  nos  âmes  que  vaut  ce  mot  de  fa- 
crifice ,  que  s'il  aduient  qu'il  nous  choihffe  & 
appelle  pour  rendre  telmoignagt  de  r£ti,tn- 
gile.qu'vn  chacun  s'y  prelence  en  fon  endroit 
d"vn  courage  tranc  ij;  libre  i  &  que  nous  pri- 
ions ceft  honneur  que  Dieu  nous  tait, quand 
nous  fommesdignes  de  fouffrir  pour  fon  nom, 
comme  il  en  eit  parle  au  cinquième  des  Aites. 
Or  il  y  a  d'auantage.que  tout.iiniî  qu\n  cha- 
cun fidèle  doit  s'inciter  às'olFiir  à  Dieu.aufsi 
que  nous  appliquions  à  la  confirmation  de  no 
ftte  foy  la  mort  de  ceuï  qui  demeurent  con- 
ftans  à  maintenir  la  querelle  de  PEuangile, 
nonobftant  la  cruauté  des  mefchans.  Qjiand 
nous  voyons  les  Martyrs  que  Dieu  .ippçlje 
pour  ratifier  fon  Euangile,&  que  les  mei'chîs 
fcroyent  contens  de  leur  fauuer  la  vie, moyen 
liant  qu'ils  flechiflent  ,&  neautmoins  qu'il? 
perfîllent  làconftamment  >  &  ne  déclinent  en 
façon  que  ce  foit,  ne  voila  point  vne  appro- 
bation de  la  vérité  de  Dicu?Faifons  donc  va- 
loir la  mort  de  ceux  quimonftrentque  c'eilà 
bonefcient  qu'ils  ont  creu  ,&qui  ont  eu  vne 
foy  commune  auec  nous:car  voila  le  triiit  qui 
nous  en  eft  commun.  Il  eil  vray  que  les  enne- 
mis de  Dieu  tafchent  (entant  qu'en  eux  eft) 
d'abolir  rEuangile.&voudroyentauoir  abo- 
li toute  mémoire  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.Voila  pourquoy  ils  font  enflamm'ez  en 
vne  telle  r.age, voila  pourquoy  ils  allument  les 
feux,  qu'ils  voudroyentauoir  conûimé  toute 
1.1  doftrine  de  noftre  fahit  :  mais  cependant  il 
fait  profiter  la  niort  des  <iensà  vnautre  vfage, 
tellement  que  ce  luy  eft  vne  femence  pour 
toufiours  multiplier  le  nombre  de  fon  peuple. 
Il  veut  que  nous  fdyons  arroufez  comme  vne 


T'IMOTH. 


4$>5 


terre  qui  feroit  àdemi  fecfe.  Quand  il  voit 
qu'il  y  a  vne  telle  fechcrefle  &  fterilitéen 
nous.que  nous  ne  porterions  point  fruiûaflci 
aboqdant,il  nous  arroufe  du  fang  desMartyrs. 
Et  aufsic'eft  bien  raifon quand  nous  voyons 
V rie  telle  conftance  &fidiuineaux  hommes 
mortels ,  que  nous  glorifions  noftre  Dieu,  6c 
en  le  glorifiant  que  nows  fçachioiis  au  il  veut 
feeller  noftre  foy  ,  qu'il  veut  que  le  tefmoi- 
gnage  que  nous  auôs  défia  receude  fon  fain6b 
£fprit,foitengraué  en  nous. Ceft  donc  en  le- 
cond  lieu  ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paf  . 
fage.II  eft  vray  que  noftre  foy  ne  doit  point 
eftre  fondée  lur  les  hommes.  Car  quand  tous 
fe  feroyent  reuoltez  ,  &  que  la  crainte  auroit 
dominé  tellement  en  eux  qu'ils  auroyenc 
quitté  &  renoncé  PEuangile  pour  fauuer  leur 
vie.celane  nous  doit  point  esbraiiler. Et  pour 
quoyr La  vérité  de  Dieu  eft  permanente:  com 
bien  que  les  hommes  foyent  fragiles  &  varia- 
bles,toutesfois  la  vérité  de  Dieu  demeure  en 
fon  eftat.Ainfi.il  n'eft  point  queftion  que  no- 
ftre foy  s'appuye  lur  la  conftanc  e  ou  fur  la  fra. 
gilité  que  nous  verrons  aux  hommes  ;  mais 
quoy  qu'il  en  foit ,  telles  aides  ne  font  pa>  à 
melprifer:  comme  nous  fomnies  admoncftez 
en  l'Efcriture  fainde,&:  fur  tout  quand  l'Apo  II.4r.tt 
rtre  dit  que  nous  auôs  vne  grofle  nuecde  tef- 
moins,  que  nous  voyons  que  les  vns  ont  eiié 
ftiizpar  le  milieu, les  auti es  lapidez, les  autres 
ont  cfté  eftendus  comme  des  tabourins.les  au 
très  ont  efté  efcorchez  ,  les  autres  en  ont  re- 
Ipondu  en  autre  forte  ,  tant  de  tourmens,  &  n 
horribles.  Et  quand  nous  voyons  que  la  vertu 
de  Dieu  a  efte  vidorieufe  par  dcllus  toutes 
ces  cruautez-la,&  q  ceux  qui  ont  creu  à  Dieu, 
ont  rapporté  la  couronne  &  le  tiiomphede 
tous  leurs  ennemis  :quand(di-ie)iious  voyons 
ccla.tels  exemples  ne  nous  doyueot-ils  point 
comme  creuer  les  yeux  ?  Et  n'eft-ce  point 
grand'  honte  ànous  fi  nous  défaillons?  Ainlî. 
donc  ce  n'eft  point  fanscaufe  que  fainû  Paul 
parle  ici  du  facrifice  de  fa  mort;afin  qu'auiour. 
d'huy  mefme  fadoélrme  foit  tant  mieux ap- 
prouuee,&:  que  fon  lang  nous  vicned.-iiant  les 
yeux:quand  nous  oyons  qu'il  parle,  que  nous 
fçachions  quecen'eftpoint  vn  homme  qui  ait 
deuifé  à  repos, mais  qu'il  eftoit  là  voyant  déf- 
ia le  bourreau  prochain  de  luy  ,  n'attendant 
finon  l'heure  qu'il  fcroit  traîné  au  fupphce, 
pour  y  eftre  meurtri  hontculement  :  &  quand- 
il  parloit  de  la  bouche,  qu'il  n'y  auoit  goutte 
de  £àng  en  fon  corps ,  qui  ne  refpondi/i  pour 
feeller  le  tefmoignage  de  PEuangile.  Q^iiand 
nous  voyons  cela  ,  ne  deuons-nous  pas  eftre 
rauis  pour  dire  ,  Ce  n'eft  point  d'vn  homme 
mortel  qu'il  no'  faut  tenir  tout  ceci,maisc'eft 
l'Efprit  de  Dieu  qui  s'eft  déclaré  en  ces  petis 
vaifteaiix  &  fragiles,  &  y  a  fait  reluire  ù  ver- 
tu admirable.  Et  amli  que  nous  foyons  forti- 
fiez d'autant,  &  que  non  feulement  nous  pre- 
nions la  mort  de  farndt  Paul  pour  l'appliquer 
À  tel  vl"age,mâis  aufsi  de  tous  ceux  qui  mefme» 

Q^l.iii. 


llfh.  10 

a- 


fftit.US 
15- 


Jja.is.S. 
Ci;- 21.  4. 


494  i'TOgËRMON    XXVÏI.  ' 

de  noftre  tempt  nous  aidehr  àafuoir  vu6  plus     de  nous  en  retirer  ,  que  nous  ne  regîmtîon» 
grande  certitude  de  cefte  doctrine, côme  nous     point  àl'encôtrcdeluy.mais  que  paiiîblemcc 
voyons  que  Dieu  en  ceft  endroit  nous  en  pre    nous  venions  nous  offrir,  Seigneur,tu  nous  as 
fente, qui  nous  doyuent  bien  confermer.  Il  eft    creez.tunousas  nourris  &  entretenus  iufqu'à 
vray  qu'il  nous  doit  faire  mal  quâd  nous  voy-     maintenant  :  il  faut  donc  que  tu  difpofes  d« 
ons  lipspoures  frères  loufFrir,&  que  s'ils  font    nous  à  ta  volonté  ,&  que  nous  n'y  refiftion» 
pnfonniers  (comme  nous  fommesadmonefter    point  en  façon  que  ce  foi  t.  Voila  donc  corn-, 
en  PEpiftre  aux  Hebrieux)q  nos  coeurs  doy-     me  nous  dcuons  prendre  courage  :  combien 
lient  eftre  captifs  auec  euï  par  vne  augoiue    que  nous  ne  fouffrions  point  pour  l'Euangi- 
commune.Mais  cependant  l\  faut-il  bien  que    le,  voyans  que  Dieu  accepte  &  noftre  vie.  Si- 
nous  glorifions  Dieu  quand  nous  voyons  que    noftre  mort  comme  vne  oblation  facree,  que 
il  les  fait  ainfi  batailler  ,  &  qu'ils  triomphent    Rous  foyons  prefts  de  luy  rendre  obeiilànce 
par  defllis  tous  leurs  ennemis  :  c'eft  bien  rai-    en  tout  &  par  tout.  Et  c'eft  aufsi  fuyuant  ce 
ion  quâd  le  profit  de  leurs  côbats  nous  eft  c5-    qui  eft  eft  dit  au  quatorzième  des  Romains, 
mun,  que  nous  rendions  louange  à  celuy  qui     que  nous  viuions  &  mourions  auec  luy.e'elt  à 
les  tortifîe. Car  Dieu  les  à  tellement  voulu  ar    dire  ,  que  nous  ne  foyons  point  addonnez  à 
merdcconftancepour  fe  feruir  d'euxenmain    nous-mcfmes  pour  viureà  noftre  phantalîe 
tenant  la  querelle  de  fa  vérité,  que  cependat     pu  appétit, que  nous  ne  vueiUions  point  aufsi 
il  veut  que  nous  en  foyons  édifiez. Voila  donc    4"âncer  noftre  mort,  ni  l'abbreger ,  mais  que 
comme  la  mort  des  Martyrs  (  c'eft  à  dire  des     nous  remettions  tout  cela  en  la  main  de  no- 
tefnioinsde  Dieu)eft  vn  facrifice.Mais  quoy?     ftre  Dieu, que  nous  viuions  en  mourant,  pour 
Tant  s'en  faut  que  nous  foyons  difpofezde    captiuer  tous  nos  fens  .toutes  nos  affeftions 
prendre  ceci  à  noftre  profit, que  nous  laiflons    cliarnelles,  &  que  nous  mourions  en  viuant, 
couler  tout.   Or  il  eft  dit  que  les  larmes  des    eft.îs  prefts  &  appareillez  de  partir  quâd  Dieu 
fidèles  font  precieufes  deuant  Dieu  ,  comme    nous  appellera. Et  cependant  que  nous  appre 
s'il  lestcnoiten  vnephiolecôme  vn  onguét.    nions(comme  i'ay  dit)  de  nous  remettre  en- 
Et  que  fera-cede  leur  fangquad  nous  lelaif-    trefes  mains, tellement  que  nous  puifsiôs  pro     . 
ferons  couler,  que  nous  n'en  ferons  pointar-    teftcrauec  Dauid,  Q_ueli  noftre  efprit  eft  en    J^'3'* 
roufez  pour  glorifier  noftre  Dieu?  Et  tat  s'en     fa  main, qu'il  fera  en  bonne  &feure  garde.  Et 
faut  que  cela  fe  face  ,  que  ceux  qui  fe  diront    pourtant  que  nous  luy  commettions ,  &  l'en 
eftre  grans  fuppolts  derEuangile,on  voit  que    faifons  du  tout  mai(he,afin  qu'il  ne  luy  puifl'e 
le  nom  de  Martyrs  leur  eft  puant, qu'ils  ne  le     point  eftre  ofté.  Or  pour  nous  confermer  en 
peuiient  porter.  IK  monftrent  bien  par  cela    cefte  doftrine-ia  ,  il  nous   faut  noter  ce  mot 
qu'Us  font  des  chiens  niaftins  ,  qu'il  n'y  a  de    que  fainft  Paul  Adiouûe,Le  temjis  de  mare  fo- 
Chreftienté  en  eux  non  plus  qu'eu  des  pour-     /«t(o;i(dit-il)  eft  prochain.  11  veut  ici  iîgnifier 
ccaux  ,  quand  ils  ne  fçauent  pas  les  mots  les     vn  département  quant  à  ces  chofes   terre-» 
plus  communs  de  l'Efcritttte  fainftc.   Or  re-     ftres.  Car  comment  eft-ce  que  nous  fommes 
tenons  de  noilre  cofté.que  cen'eft  point  fans     fcparez  en  iainort?Il  eft  vray  que  nous  ferons 
caule  que  fainft  Paul  a  parlé  ainlî,  que  ce  n'a     bien  retirez  de  la  c^mpagnie  des  viuans:mais 
pointcfté  vne  ambition  qui  l'a  incité  à  cela,     chacun  de  nous  foutfre  vne  feparation  en  foy, 
mais  qu'il  vouloit  que  fa  mort  fuftvtile:&  non     entant  que  l'ame  eftdepartied'anec  le  corps, 
iciilement  pour  vn  temps, mais  iufques  à  la  fin     Et  par  là  nous  voyons  que  l'homme  fidèle 
du  monde, il  a  fait  que  la  mémoire  eneltper-    n'eft  point  anéanti  en  la  mort, mais  feulement 
petuelle. Cependant, côbien  que  nous  ne  foy-     qu'il  fe  fait  vne  feparation.  Combien  donc 
ons  pas  tous  appelez  .i  ccl.i,que  Dieu  nous  t'a    que  le  corps  s'en  aille  pourrir  en  terre, &:  que 
ce  ceft  honneur  de  paflcr  par  le  glaiue,oupar    il  femble  eftre  comme  anéanti, toutcsfois  l'a- 
ie feu,afin  de  rendre  tefmoignagc  à  fon  Euan     me  demeure  en  fon  entier:d'autant  qu'elle  eft 
gile,  fi  faut-il  qu'en  la  vie  &  en  la  mort  nous     créée  à  l'image  de  Dieu  ,  il  faut  qu'elle  garde 
luy  foyons  ficnfices  ,  qu'en  noftre  vie  nous     fon  immortalité. Puis  qu'ainlî  eft, nous  ne  de- 
tnfuyuions  ce  que  dit  fainûPaul  au  douzième     uons  point  élire  tant  fafchei  &  troublez  en 
chapitre  des  Romains, Qje  nous  foyons  ho-    la  mort, comme  on  a  accouftuniéd'eftre.Q_iii 
fties  viuantes  3  noftre  Dieu. Et  pour  ce  faire,     eft  caufc  que  la  mort  nous  cfpouantc  ainii? 
que  tout  ce  qui  eft  de  noftre  nature, meure,  &    C'eft  noftre  infidélité  ,  qu'il  nous  femble  que 
loit  abbatu:voirc,&  le  meilleur  que  nous  cui-     tout  eft  mort  pour  nous  &  beaucoup  fe  nour- 
dons  auoir, c'eft  noftre  raifon, qu'elle  foit  tel-    rilfent  en  cela,  qu'ils  s'eftinunt  autant  qnc 
lement  amortie  en  nous,que  TEfprit  de  Dieu    des  beftcs  brutes.  Il  eft  vray  que  nous  aurons 
nous  gouuerne  ,  afin  que  nous  luy  foyons  des    bien  noftre  vie  conmiunc  auec  les  belles  bru- 
lacrificcsviuans. Voila  donc  comme  lesChrc-     tes  :  mais  cependant  nou^  auonsles  marques 

de  la  vie  immortelle, quand  Dieu  nous  a  don- 
né fens  &  raifon,  qu'il  nous  a  donné  cognoif- 
f.ince,  pour  dire  qu'il  eft  noftre  Créateur. 
Combien    que    nous    foyons    embrouillez  . 


ftiens  doyuent  appliquerlcur  cftude  à  s'offrir 
àDicu,pour  luy  titre  dédiez  en  toute  leur  vie. 
Et  en  la  mort  comment  luy  ferons-nous  facri 
fices?  Q_u.ind  nous  ferons  prefts  de  fortirdu 


jnonde,toutesfois&quates  qu'il  plaira  àDieu    en  tant  d'ignorancet  &  d'erreurs  que  rien 

plus, 


SVR   LA  II.  A  TIMOT  H. 


49Î 


ï'-y.4 


f  lus.toutesfois  il  no'  demeure  toulîours  quel 
que  re(îdu  pour  nous  faire  fencir  que  nous  i- 
uonseftécreez.non  point  pour  cefte  vie  pre- 
fente  8c  trâlîtoire,mais  que  Dieu  nous  appel- 
le plus  haut.  Et  pource  que  nous  r.c  cognoif- 
l'ons  point  affezque  Dieu  nous  appelle  à  ce- 
fte  côdition,  voila  qui  eft  caufe  que  nous  fuy- 
ons la  mort  tant  qu''il  nous  el\  pofsible  ,  & 
quid  on  nous  en  parle,  nous  Tommes  furprins 
de  frayeur,  qu'il  femble  que  tout  foit  perdu. 
Et  ainlî  pour  prédre  la  mort  tout  quoyeniét, 
&pour  y  allerauec  vne  telle  conAance  que 
nous  ne  l'oyons  point  retardez  de  nous  offrir 
à  Dieu  quand  il  nous  appelle  ,  notons  ce  mot 
de  faind  Paul,  Qujeft-ce  que  mort?  Refolu- 
lion  ;  c'eilà  dire,  que  s'il  y  a  vn  changement 
en  nos  corps  ,  cen'eftpasque  nous  péri  Ciôs, 
ne  que  nous  (Toyons  aneatis  du  tout,  car  nous 
demeurons  toulîours  en  noUre  entier.  Il  eiï 
vray  que  les  corps  s'en  vont  en  pourriture: 
mais  nous  auons  la  rcfurreftion  qui  nous  eft 
promife  au  dernier  iour.Confions-nous  donc 
en  cela.  Il  eft  vray  qu'encores  n'eft-ce  point 
alTèz:  car  nous  ferions  toulîours  en  fcrupiile, 
ainfi  que  les  infidèles, lefquels  ne  fçauét  qu'ils 
deviendront  :  combien  qu'ils  fçachent  que 
leurs  âmes  foyent  immortelles  ,  Et  que  fça- 
uons-nou'ï(difent-ils)qu'il  en  fera  faitfMais 
quand  nous  auons  la  promefle  de  falut ,  que 
nous  cognoiflons  que  noftre  Dieu  veut  eftre 
gardien  de  nos  âmes  ,  il  faut  couper  broche  à 
tonte  doute  &  desfîance  ,  &  pour  ce  faire  il 
faut  reuenir  àce  que  nous  auons  allégué  de 
Dauid,  Scigneur,Ie  te  remets  mon  ame  en  ta 
main.  Il  difoitcela  durant  l'a  vie  .  il  voyoit 
qu'il  eftoit  en  des  hazars  continuels,  Et  bien, 
Scigneur,tu  me  garderas:  côbien  que  ie  foye 
afsiegé  d'vne  centeine  de  morts,  fi  tft-ce  que 
ie  feray  en  feureté  en  ta  main.    Il  nous  fjut 
donc  enfuiure  cefte  regle-la  ,  eftaiis  afleurez 
que  Dieu  ne  nous  laiflèra  point  à  l'abandon, 
qu'il  ne  nous  recueille  à  foy,&  fiir  tout  d'au- 
tant que  nous  fomraes  mébrcs  de  noftre  Sei- 


gneur Icfus  Chrift,  en  la  garde  duquel  il  nous 
a  commis.  Car  le  Père  celefte  ne  s'cft  point 
contété  ie  déclarer  qu'il  eftoit  le  protefteur 
denosames,maisil  abailléàlefus  Chrift  ceft 
office-la  ,  d'eftre  noftre  proteftion  &  fauue- 
garde.  Et  pourtant  quand  nous  feront  en  fa 
main  ,  que  nous  ne  doutions  point  que  par  fa 
vertu  infinie  il  ne  nous  cÔferue  ,  combien  que 
nous  foyons  ici  au  milieu  de  beaucoup  de  faf 
chéries.  Il  dit,  Le  Père  qui  vous  a  donnez  en 
ma  main.eft  plus  fort  que  tous.  Par  cela  il  li- 
gnifie que  fi  nous  fommes  eftonnez  par  ieï 
grans  orages  &  tempeftesqui  nous  pourront 
allàillir,qu'il  nous  faut  contempler  cefte  ver- 
tu de  Dieu  qui  furmonte  tout ,  fçachans  que 
paricelle  nous  viendrons  au  deffusde  tout 
ce  qui  maintenât  nous  pourroit  effaroucher. 
Or  il  eft  vray  que  cela  ne  fe  peut  defpefcher 
pour  maintenant.Car  ce  qui  fera  traitté  apree 
difner,eftl'expofition  de  ctite  doûrine.d'aii 
tâtque  fainft  Pauladiouftera  que  la  courône 
de  iuftice  luy  eft  appreftee.  Il  faut  donc  que 
nous  cognoifsiôs  pourquoy  nous  fomraes  ap 
pelez  à rheritagedu  Royaume  des  cieui.Car 
combien  que  Dieu  nous  retire  de  ce  monde, 
ce  n'eft  nnon  pour  nous  amènera  la  çloire 
celefte  qui  nous  eft  maintenant  cachée,  com- 
me aufsi  eft  noftre  falut,  &  toute  la  plénitude 
des  biens  que  nous  efperons. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir  que  nous'n'auons  point  fait  :  que  nous 
en  foyons  touchez  au  vif,  pour  cllrc  amenez 
à  droite  repentance,&  que  nous  foyons  inci- 
tez de  venir  tellement  à  luy ,  que  nous  effor- 
çans  nous  tendions  de  plus  en  plus  au  chemin 
de  falut:  &  qu'il  nous  fuppoite  cependant  en 
nos  foiblefles.iufques  à  ce  que  nous  en  foyôs 
defpouillcz  du  tout,  voire  pour  iouir  delà 
perfeftion  de  fa  iuftice.Ainfinous  dirôs  tous, 
Dieu  tout-puiflant,Pere  celefte,&c. 


Q_y  ATRIEME    SERMON    SVR    LE 

CLV  ATRIEME     CHAPITRE. 

7  Vay  bataillé  vne  home  bataille ,  lay  acheué  ma  courje ,  i'ay 
gardé  la  foy. 

8  Quant  au  rejîe,  la  couronne  de  mfïice  niejl  préparée,  laqu  elle 
tue  redra  le  Seigneur  iujle  luge, en  cejle  iournee-  la  :  ^  non  feulement 
à  moy,mais  a  tous  ceux  qui  aiment  fa  -venue. 


Vand  quelqu'vn  nous  monftre 
bon  exemple ,  Si  que  nous  co- 
«|W^*|J8|J^  gnoiflbns  qu'il  y  a  des  vertus 
rVV^^^TJj  en  luy  qu'on  ne  peut  mefpri- 
^^S>^S5î  fer ,  la  feule  vcue  nous  profite 
beaucoup. Et  pn  le  voit,qu'en  vnc  ville, ou  en 


vn  pays ,  la  prefence  d'vn  homme  feruira  tat, 
que  les  choies  fe  conduifent  droitement ,  & 
Dieu  fera  profiter  la  grâce  de  fon  S.  Efprit, 
quand  il  la  diftribue  ainfi  à  quelques  vns.  Et 
voila  pourquoy  S.  Paul  en  ce  palFage, voyant 
que  fon  abl'cce  pouuoii  nuire  à  quelques  vus, 
Q^jT.iiii. 


49^ 


•H  IS^ÈÏiM  O'N    X  X\^  II  t'- 


déclare  que  s'il  a  acheué  fa  courfe  ,  il  ne  faut 
point  que  les  autres  défaillent  à  mi  chemin, 
mais  plulloft  qu'ils  pourfuiuent,  &  qu'ils  fça- 
chent  qu'ils  n'auront  rien  fait ,  finon  qu'ils 
pourfiiiueiit  iufqu'au  bout  comme  luy.  Voila 
donc  S.  Paul  qui  auoit  mis  peine  toute  fa  vie 
d'édifier  l'Eglife  de  Dieu,&  fon  exéple  auoit 
retenu  beaucoup  de  gens  :  quand  il  veut  for- 
tir  du  monde, il  voit  qu'aucuns  fepourroyent 
desbaucher.  Il  preuient  donc  ce  danger-la, & 
dit  que  comme  on  l'a  veu  pourfuiure  fa  cour 
fe,  &  q  iamais  il  ne  s'eft  laflc  iufqu'à  ce  qu'il 
ait  acheué,  qu'il  faut  aufsi  qu'on  race  le  fébla 
ble  ,  &:  que  nul  ne  perde  courage  ,  iufqu'à  ce 
'  qu'il  foit  paruenu  où  Dieu  l'appelle.  Mais  a- 
fin  que  nous  comprenions  mieux  la  doftrine 
quieftici  contenue, notons  qu'il  met  lalîmi- 
litude  des  combats  qui  fefaifoyent  alors,  ou 
delà  luitte,ou  autrement. Car  comme  main- 
tenant on  tirera  au  prix  à  la  hacquebutte,  ou 
à  l'arc  ,  aufsi  alors  on  combatoit  :  &  puis  il  y 
auoit  les  courfes  &  à  pied  ,  &  à  cheual ,  &  en 
chariots  fur  tout.  Or  notamment  fainfl:  Paul 
en  premier  lieu  dit  ,  Q»''V  «  cmhatit  yn  bon 
combat  :  c'eft  àdire,  quand  il  s'eft  venu  offrir 
pour  monflrer  l'affeftion  qu'il  auoit  de  fer- 
uir  à  Dieu,  qu'il  s'y  eft  employé  du  tout.  Et 
au  rcfte,  qu'il  n'a  pas  efté  fruftré  de  fon  entre 
prinfc ,  puis  que  1  iflue  de  fon  combat  a  efté 
heureufe.Mais  cependant.afin  qu'on  entende 
que  ce  n'a  pas  efté  vne  fimple  bouffée  ,  il  ad- 
ioufte  la  féconde  fimilitude  de  la  courfercom 
me  s'ildifoit ,  le  n'ay  point  fait  vneleueede 
bouclier  feulement  pour  efprouuer  ma  force, 
mais  i'ay  tenu  bon,  &ay  perlîfté  conftammét 
en  la  courfe  qui  m'eftoit  ordonnée. Or  il  y  a- 
tioit  certaine  mefure  pour  courir,  comme  on 
fera  les  lices:il  y  aura  tant  de  long  &  de  lar- 
ge:ain(î  il  y  auoit  pour  les  gés  de  pied  à  cou- 
rir d'vne  traitte  tant  de  pas, &  quid  ilsauoy- 
ent  acheué  leur  ftade,le  premier  s'eftoit  mô- 
ftré  &  approuué  le  plus  vaillant. Autant  en  e- 
ftoit-ildes  chariots.  Ce n'eft  point  fanscau- 
fe  que  fainû  Paul  nous  amené  telles  compa- 
•laifons  .  Il  eft  vray  quec'eftoyent  desesbats 
pleins  de  vanitez  &  friuoles:  mais  cependant 
c'eft  pour  nous  faire  plus  grand'  honte  quand 
nous  ferons  lafches  à  courir  Si  à  côbatre  lors 
que  Dieu  nous  appelle  ,  &  qu'il  prelîde  pour 
nous  regarder,  Se  qu'il  nous  a  promis  vn  falai 
reineftimable.  Si  donc  il  y  a  alors  de  la  paref 
fe  en  nous  ,  ou  bien  qu'il  nous  fafche  de  per- 
fifter,  ou  que  nous  défaillions  à  mi  chemin,  y 
■aura-il  nulle  cxcufe?  Car  voila  aufsi  comme 
il  en  eft  parlé  aux  Corinthiens ,  En  ces  com- 
i.^  er.fi.  ^^^^  ^  dit-il  )  où  les  hommes  fe  tourmentent 
iufnu'au  bout,  quVft-ce  qu'ils  efpcrent?  Vne 
couronne  de  fueilles  pour  tout  potage  :  car 
c'cftoitvn  grand  prix  d'auoir  vne  couronne 
de  fueillcs.  Or  voici  bien  vn  autre  loyer  :  car 
noftre  Seigneur  nous  appelle  à  l'héritage  du 
Royaume  Aes  cieux  ,  il  nous  veut  faire  parti- 
el pans  de  fon  immortalité  Si  de  fa  gloire  :  & 


it 


cepédant  nous  ne  daignés  pas  leiier  vn  pied, 
ne  remuer  vn  bras  qu'auec  grande  difficulté: 
nemonftrons-nous  pas  que  nous  ne  donnons 
gueres  d'honneur  à  Dieu  ,  qtie  nous  n'adhé- 
rons point  dé  fait  à  fes  proraefles  ,  brief^  qtie 
nous  fommes  incrédules  du  tout.  Car  en  ce 
temps-la  ceux  qui  le  delrberoyent  à  comba- 
tre,  ne  mangeoyent  que  du  bifcuit  :  voire,  & 
n'oloyent  pas  encores  mager  à  moitié  de  leur 
foui. Voila  doc  ces  poures  fols(dit  S.Pauhcar 
notamment  il  remonftre  cela)  pour  eftre  pri- 
fez  &  qu'on  dife.  Voila  vn  homme  agile, voi- 
la vn  tel  qui  luit  te  bien,  pour  auoir  feulemét 
ce  petit  mot  de  louage,ils  iufnoyent,  ils  expo 
foyent  là  leur  vie. Car  ils  ne  faifoyét  que  laa 
guir  en  viuant ,  ils  n'ofoyentpas  manger  du 
pain  bis ,  ils  n'ofoyentpas  boire  de  l'eau  leur 
foui, Us  s'abftenoycnt  de  toutes  viandes  déli- 
cates,ils  faifoyent  là  vne  diète  extrême,  côra 
me  s'il  euft  efté  queftion  d'vne  double  vie  :  8c 
feulement  c'eftoit  pour  auoir  quelque applau 
diflement ,  &  qu'on  frappaft  des  mains  pour 
dire.  Ho  ,  voila  vn  vaillant  homme,  il  a  bien 
mcritéd'auoir  vne  douzaine  de  fueilles ,  il  a 
bien  combatu ,  il  faut  qu'il  foit  couronné.  Et 
voici  noftre  Dieu  qui  nous  appelle,non  point 
pour  auoir  quelque  mot  de  louange  en  ceftc 
vie  prefente,  mais  nousayanschoifîs  àfoy,  il 
nous  déclare  que  noftre  filaire  eft  tout  appre 
fté,  la  couronne  de  gloire  ne  nous  pourra  fail 
lir,que  nous  fçauons  que  tous  les  Anges  de  pa 
radis  nous  applaudilîent.que  nous  ferons  fina 
Icment  au  dernier  iour  receus  des  fainfts  Pa- 
triarches, des  fainfts  Prophètes,  Apoftres,  Si 
Martyrsicela  ne  nous  doit-il  pas  donner  cou 
rage  de  cheminer  loyauiTicnt,&  combaire  en 
bonne  conftance  iufques  à  la  fin?  Voila  donc 
pourquoy  fainft  Paul  vfc  ici  de  telles  fimili- 
tudes, quand  il  dit  qu'ila  côbatu  vn  bon  com- 
bat :  comme  s'il  dii'oit,  Q_ue  ceux  qui  auront 
trauaillé  félon  le  monde  pour  leur  ambition, 
ou  pour  leur  auarice,ou  pour  quelque  regard, 
qu'ils  fe  plaifent  &  fe  glorifiét  tant  qu'ils  vou 
dront  en  leurs  combats:mais  qu.ît  àmoy  i'ay 
biendequoy  me  contenter  quand  i'ay  ferui 
à  mon  Dieu  ,  que  ie  n'ay  point  perdu  vn  pas 
qui  ne  foit  venu  en  conte  deuant  luy  ,  que  les 
Anges  de  paradis  m'applaudiftent  de  ce  que 
i'ay  efté  vn  inftrument  pour  exécuter  au  nom 
de  mon  Dieu  ce  qu'il  lu'auoit  commis  pour 
auaiicer  le  règne  de  fon  Fils:i'ay  dequoy  me 
efiouir  en  cela,diî-il. Et  puis  quant  àlafecoh 
de  comparaifon  ,  notons  bien  que  fainfl  Paul 
ne  dit  pis  fans  caule  qu'il  aathcué  fa  cour,fc: 
car  nous  en  verrous  beaucoup  qui  voudroy  et 
eftre  quittes  quand  ils  aurôt.  fait  quelquç  bon 
3de:&  pour  cela  il  leurfemble  que  Dieu  leur 
deuroit  donner  congé, &  qu'ils  fe  pourroyent 
repofcr  tout  le  temps  de  leur  vie.  Sainft  Paul 
monlîre  que  ce  n'eit  rien  fait, fi  nous  n'auorrs 
perfifté  iufques  en  la'fin.  Or  cepédant  il  nous 
fiutnoterics  circonftances  qui  cftoyenten 
la  perfonnedelàihftPaul.  Il  eft  en  prifon,  il 

atCLud 


SVR    LA    II.    A    TIMOTH. 


4!^7 


attend  la  main  du  bourreau  ,  Se  fa  mort  doit 
eltreignominieulc  quant aiimondc:  lesincre 
dules  auoyent  la  bouche  ouiicrte  pour  bl.if- 
phemer,  on  luy  icttoit  lub  tout  opprobre, les 
îuifs  le  tenoyét  pour  vn  apoftat,  &  beaucoup 
de  faux  chrefliens  Paiioyent  diffamé  parles 
Eglii'es,  tout  le  monde  luy  eftoit  ennemi  mor 
tel.  On  pouuoit  donc  iuger  qu'il  auoit  bien 
mal  employé  Ion  temps  d'auoirainiî  comba- 
tu  ,  car  il  pouuoit  eftremonfîeur  ledodeura- 
uec  grand  hôneur.il  pouuoit  eftre  aAis  au  pre 
niier  rang,  lu^er  les  autres,  S;  auoir  la  vogue 
&  renom:quât  &  quant  il  pouuoit  auoir  bruit 
defainâ  homme  en  lerui'alem  ,  car  il  n'y  en 
auoit  point  qui  lefurmontaften  toute  honne 
lleté  de  vie:  il  pouuoit  eftre  riche  &  bien  ve- 
nu par  tout.  Q^uielt-cequin'euft  dit  qu'il a- 
iioiteftébiendcfpourueude  fens,&  biéaueu- 
^le,  de  s'aller  expofer  en  toute  ignominie, 
de  perdre  toute  eftime.d'efmouuoir  &  enfl.i- 
merla  ragede  tout  le  mondecontre  luy, tant 
de  fa  .nation  que  de  tous  peuples  ,  aufqucls 
mefmes  il  auoit  elté  cognu  ,  &  puis  fe  veoir 
mourir  hôteufement  en  la  fin?  Qj^i  eft-ce  qui 
n'eull  dit  qu'il  eiift  mieux  valu  qu'il  fe  fuft  re 
pofé?  Mais  fainft  Paul  a  defpité&  mcfprifé 
tous  les  iugeinens  du  mode. Et  pourquoyîCar 
il  a  fon  luge  au  ciel ,  il  luy  fuffit  d'eftre  «infi 
abfous, combien  que  tout  lemondelecondam 
ne.  Car  les  punitions  &  la  mort  font  commu- 
nes tant  aux  mal-faiteurs  qu'aux  Martyrs ,  il 
n'y  a  que  la  caufe  qui  les  difcerne.Qiiâd  dôc 
nous  voyons  vn  Martyr  eftre  brullé  ,  &  nous 
verrons  aufsi  bien  vn  brigand, quant  à  l'efpe 
ce  de  mort  tout  y  ef^  confus. Mais  qu'on  vie- 
ne  examiner  la  caufe:  voila  vn  brigand  qui 
fouffre  pour  fes  maléfices,  &  pour  fes  crimes  : 
vn  Martyr  a  ce  tefmoignage  en  foy,&  puis  il 
le  peutaufsi  monftrcr  par  effeftdeuant  tout 
le  monde, qu'il  a  cheminé  en  intégrité,  &  qile 
il  fouffre  pour  le  nom  de  Dieu.  Voici  donc 
pourquoy  S. Paul  defpite  ici  tous  les  iagemés 
des  incrédules, &  ne  luy  chaut  d'eftrevilipen 
dé  quant  au  monde  ,  moyennant  que  le  luge 
celefte  l'approuue.  Mais  iiotôs  bien  qu'il  no° 
faut  auoirces  deux  cho fes  que  i'ay  touchées 
cnbrief,  pour  nous  glorifier  à  l'exemple  de 
ûinft  Paul.  Car  les  plus  mefchans  quelques 
fois  feront  les  plws  effrôtez:&  on  le  voit, que 
mefmeceux  qui  ont  mérité  vne  centeinede 
cordeaux,  defgorgeront  toute  vilenie  contre 
leurs  iuges:on  voit  cela.  Mais  il  faut  venir  au 
poincl,c'eftafçauoirqii'vn  home  puifle  touf- 
lours  protefterdeuât  Dieu  &  fes  Anges,  qu'il 
a  cheminé  droiteinent,&  puis  qu'il  l'approu- 
ue aufsi  par  effedi  ,  que  quand  ou  iugera  de  fa 
vie  ,  qu'on  cognoiffe  vne  telle  intégrité  ,  que 
tous  ceux  qui  aurôt  les  yeux  ouuerts, luy  ren- 
dent tefmoignage  que  c'eft  à  tort  qu'il  fouf- 
fre.Or  ces  deux  chofes  ont  efté  enlaîft  Paul, 
comme  en  tous  Prophètes  ,  en  tous  ceux  qui 
ont  iamais  enduré  pour  le  tefmoignage  de 
l'Euangile.  Voila  pourquoy  il  a  peu  dire  à 


bonnes  enfeignes, qu'il  auoit  combatu  vn  bon 
combat.  Ainfî  Jonc  fuiuant  l'admonition  que 
no'  fait  fainft  Paul,aduifons  de  ne  point  fouf 
frir  pour  nos  crimes ,  ne  pour  meurtres  ,  ne 
pour  paillardifes, ne  pourlarcins,ne  pour  tra 
hifons  ,  ne  pour  mutineries ,  ne  pour  aucune 
mefchanceté  :  mais  quand  ileftqueftion  de 
refpondre  pour  la  vérité  de  Dieu  ,  voila  vne 
condition  plus  honorable  ,  quand  il  daigne 
bien  nous  faire  fes  procuieurs ,  qu'il  fait  fes 
monftres  de  nous  pour  triompher  ,  declaiant 
vne  vertu  inuincible  de  fon  fain£l  Efprit  en 
ceux  qui  fuiuent  &adherét  à  fa  parole. QjiSd 
donc  Dieu  nous  employera,  voire  pour  le  tef 
moignage  de  fon  nom  ,  &  qu'il  voudra  eftre 
glorifié  en  nous,  fuiuons  hardiment, &  n'efti- 
mons  point  que  ce  foit  vne  peine  inutile;com 
bien  que  le  monde  fe  moque  de  noftre  fimpli 
cité, combien  mefmes  que  les  incrédules  nous 
crachent  au  vifage,&  qu'ils  nous  ayét  en  de- 
teftation,  que  nous  eftimions  tant  d'cftre  ap- 
prouuez  de  noftre  Dieu  ,  que  nous  furmon- 
tions,  &  que  nous  defpitions  auec  fainft  Paul 
tout  ce  qui  nous  fera  fait  &  dit  en  fbuffrane 
pour  la  vérité.  Mefmes  nous  voyons  comme  .  . 

il  defpite  les  Corinthiens ,  combien  qu'ils  fe  "'"'• 
nômaffent  fideles,&  qu'ils  fe  prifaffent  beau-  ^ 
coup,  il  fe  moque  de  leur  fol  iugement  quand 
il  les  voit  pleins  de  gloire ,  Si  enyurez  d'or- 
gueil, &  qu'ils  cuidoyent  eftre  faces  pour  iu- 
ger pardeffus  l'£uangile:Et  bien(dit-il)i'en 
appelle  ,  car  vous  ipgez  maintenant  en  tene- 
bresrmais  le  iourdu  Seigneur(dit-il)apparoi 
ftra,&  alors  les  chofes  ferôtdefcouuertes.  Si 
l'Apoftre  a  ainfi  deffié  ceux  qui  par  hypocri- 
fie  fe  vantoyent  du  nom  de  lefus  Chrift  ,  que 
deuons-nous  taire  enuers  les  ennemis  mor- 
tels de  noftre  falut,  ceux  qui  fe  dreflènt  auec 
vne  rage  brutale  cotre  le  Fils  de  Dieu,  &qui 
manifeftement  contredifent  à  la  religion  que 
nous  tenons?  Faut-il  que  nous  foyons  esbrar> 
lez  quand  il  nous  faudra  endurer  entre  les 
mains  de  ces  tyrans?  Apprenons  donc  à  l'e- 
xemple de  (ainâ  Paul  d'auoir  les  yeux  leuez 
en  haut,  afin  que  nous  puifsions  pafTer  outre: 
quand  le  monde  nous  reiettera,  que  nous  fouf 
frions  beaucoup  de  moIeftes,que  nous  ferons 
en  ignominie  &  opprobre  pour  auoir  bié  fait, 
que  nous  apprenions  d'eleuer  nos  yeux  en 
haut,  car  fans  cela  nous  ferions  comme  des 
rofeaux  branlans  à  tousvents:mais  fi  vne  fois 
nous  poupiôs  arreftcr  noftre  veuc à  Dieu,  no' 
ferons  endurcis ,  comme  l'Apoftre  vfe  de  ce 
mot-la,  parlant  de  Moyfe:Il  a  efté(dit-il)en  Heb.  u, 
durci  contre  tout  n-ial  après  auoir  contemplé  17. 
Dieu.  Il  veut  lignifier  que  Moyfc  s'cft  nion- 
ftré  côme  vn  rocher  contre  des  vagues. Quel 
les  tentations  y  auoit-il  quand  il  cft  nourri  ea 
la  Cour  royale  ,  qu'il  pouuoit  eftre  tftimé  de 
la  couronne  comme  eftant  adopté  de  la  fille 
du  Roy?  Et  toutc^fois  il  a  mieux  aimé  l'op- 
probre de  lefus  Chrift,  &  n'a  pssefté  uns  va 
côbat  bien  dur  &  difficile .  il  endure  par  loa- 

Rr.i. 


498 


SERMON     XXVni. 


gue  efpace  Je  temps  en  pays  eftr.inge  ,  qu'il 
«ftlj  jlwmiaii:  pour  •.iguer  l'a  vie.  Ecpuuà 
la  tin  il  f.iii:  cju'il  fe  vicnc  dicirer  Cvîiure   le 
Roy  ,  qu'il  oye  tant  de  menacer  ,  qu'il  voye 
tant  d'opprobres  &  coutu.iiciies .    Il  falait 
bien  donc  qu'il  fuit  endurci  .    Ainfî  nous  en 
faut-il  faire.  Or  le  moyen  nous  citmouftré 
parl'Apoftre;  c'cft que  li  nous  pouuonsvne 
fois  contempler  Dieu,  nous  aurons  vue  con- 
ftance  inuincible  :  combien  que  le  diable  ma- 
chine tout  ce  qui  fera  pobible  pour  ruiner 
Boftre  foy.que  lamais  il  n'en  viendra  à  bout, 
tellemét  que  nous  ne  cTognoifsions  que  nous 
ferons  heureux  en  combatant  fous  l'enfeigne 
de  noftre  Seigneur  Icfus  Clniil:  combien  que 
cela  ne  le  tace  point  ûm  que  nous  foyons 
moquez  &  leprouuez  du  monde  quand  nous 
tendrons  à  Dieu  plcinemét:  mais  il  nous  faut 
eftre  armez  àperfeuerance.  Car  il  nou';  fai- 
fons  feulement  vne  belle  leuee  de  bouclier, 
que  lera-ce?  Et  ainfî  que  nous  pourfmuions, 
fçachans  bien  que  Dieu  ne  nous  a  point  prins 
à  fon  feruicepour  quelque  terme,  mais  que 
c'eft  à  vie  &  à  mort.  Celuy  donc  qui  ne  t'eft 
difpofé&  refolude  viure&  mourir  en  glori- 
fiant fon  Dieu  ,  celuy-la  ne  l'çait  que  c'eft  de 
batailler.  Il  lautdonc  en  premier  lieu  faire 
noilre  conte  ,  que  quand  Dieu  nous  appelle, 
c'eft  alîn  que  nous  luy  foyons  facrifices ,  non 
feulement  pour  nous  employer  ,  &  luy  faire 
offerte  d'vn  iour.mais  pour  continuer  tout  le 
temps  de  noftre  vie:  combien  qu'il  nous  fail- 
le languir.combien  qu'il  femble  que  nous  de- 
uons  périr  en  nos  raiferet ,  que  nous  periî- 
ftions  ce  neantmoini .  Et  puis  quand  ce  vien- 
dra à  la  mort,  que  nous  fçachions  que  c'eft  a- 
lors  qu'il  nousfaut  prendre  plus  décourage, 
afin  de  nous  aduancer:comme  les  nautonniers 
quand  ils  approchent  du  nuage,  combien  que 
ilsfuflent  laflcz  auparauant  ,  lieft-ce qu'ils 
fe  refiouiflènt  au  fcul  regard  du  port ,  qu'ils 
ont  cefte  opinion  :  Or  fus  ,ded«ns  deux  ou 
trois  heures  nous  auons  à  nous  repofer  tout 
à  noftre  aiie.    Quand  donc  nous  voyons  que 
ces  poures  gens  qui  n'en  peuucnt  délia  plus, 
qui  font  tous  rompus  &  calTcz  ,  neantmoins 
pour  le  regard  du  port.pienent  vne  telle  ver 
tu  oouuclle  :  que  deuôs-nous  faire  quâd  nous 
approchons  de  noftre  but ,  &  que  nous  voyôs 
que  nous  auons  couru ,  que  noftre  Dieu  nous 
a  tenu  la  main  forte ,  &  encores  que  nous  ay- 
ons fait  beaucoup  de  faux  pas,  que  mefmes 
nous  foyons  tombez  quelquiss  fois  ,  que  no- 
ftre Dieu  nous  a  redrcffez  &  releuez  dcuant 
uenous  foyons  paruenus  a  noftre  fin?    Ne 
àut-il  pas  que  nous  mettions  peine  de  venir 
à  noftre  Dieu  ,  &d'en  approcher  tant  plus? 
C'eft  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir  fous 
ce  mot  ,  quand  faindl  Paul  dit  qu'il  a  acheué 
fi  courfc.Ec  mefmes  il  expofe  puis  après, com 
incnt  nous  combatrôs  hcurcufement,  c'eft  a- 
fçauoir  en  gard.mt  la  foy  .  Il  cft  vray  que  ce 
mcjê  de  Foy  ,  le  peut  prendre  pour  tîdclitc: 


l 


comme  s'il  difoit  qu'il  a  efté  loyal  à  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift,&  qu'il  n'a  iamais  fouï 
che,que  toufiours  il  n'ait  accompli  ce  qui  c- 
ftoit  de  fon  oflice.   Mais  aufsi  nous  pouaons 
prendre  ce  mat  de  foy,  en  fon  fens  le  plus  co 
mun  :  c'eft  afçauoir  que  faincf  Paul  ne  s'ert 
point  deftourné  de  la  pure  limplicité  de  l'E- 
uangile  ,  &  mefmes  qu'il  t'eft  appuyé  ûr  les 
promeflcs  de  falut  qui  luy  eftoyent'donnces, 
&  qu'ayant  prefché  aux  autres ,  il  a  monftré 
que  c'ertoit  à  bon  efcient  qu'il  parloit.  Car 
de  fait,  toute  la  loyauté  que  Dieu  dcm.ide  de 
nous  procède  de  là  ,  c'eft  que  nous  foyons  fi- 
chez du  tout  en  fa  parole,que  nous  y  foyons 
tellement  fondez  ,  que  nous  ne  foyons  point 
efmeus  pour  nul  orage  ni  tourbillon  qui  vie- 
ne.  Retenons  donc  quand  nous  aurons  bien 
bataillé.quepourauoiriirue  hcureufede  tous 
nos  combats  il  nousfaut  garder  la  foy.  Or 
nous  auons  veu  par  ci  deuant ,  que  la  bonne 
confcienceen  eft  comme  l'eftuy.   Car  ceur 
qui  s'adonnent  à  mal  ,  ces  moqueurs  de  Dieu 
qui  ne  portent  nulle  reucrenceà  l'Euangile, 
non  plus  qu'à  ie  ne  f  çay  quoy,  méritent  bien 
que  Dieu  les  faceabyfmer,&  que  leurs  cheu- 
tes  foyeiu  non  feulement  mortelles,  mais  ef- 
pouuantables.  Voila  pourquoy  aufsi  li  dit  que 
ils  font  abyfmez  comme  au  profond  de  la 
mer  ,  ainli  que  quelque  nef  qui  s'enfondre,  & 
périt.  Ceux-là  donc  qui  ne  retienent  point  la 
foy  en  bonne  confcience  font  ainlî  enfon- 
drez  ,  &  Dieu  vent  qu'ils  periflent  mal-heu- 
reufement,  pour  monftrer  combien  il  prifela 
doûrinc  de  fon  Euangile.Car  quand  il  en  fait 
vne  telle  vengeance ,  c'eft  ligne  qu'il  ne  veut 
point  qu'on  fe  moque  de  la  doârine  de  falut. 
Ainlî  notons  bien  qu'il  nous  faut  auoir  cefte 
intégrité  Se  bonne  confcience  ,  &  que  noue 
cheminions  en  la  crainte  de  Dieu  ,  que  nous 
retenions  les  promelfes  de  fa  bonté  &  de  là 
grâce, ou  lamais  nous  ne  ferons  difpofez  pour 
pourfuiure  noftre  coiirfe  iufques  à  la  fin.   Et 
pourtant  retenons  cefte  bonne  confcience 
pour  garder  noftre  toy  :  &  encores  qu'aucu- 
nement nous  foyons  retardez  parla  foiblef- 
le  qui  cft  en  nous  ,  combien  que  nous  foyons 
eftônez  des  rudes  allàurs  &  alarmes  qu'il  nous 
faudra  fentir,  combien  que  nous  foyons  em- 
pefchez  de  pafler  outre,  lî  eft-ce  que  nous  en 
viendrons  à  bout.voirepiiis  queDieu  ne  nous 
abandonne  point.  Car  il  nous  doit  fouucnir 
de  ce  que  nous  auons  dcfia  dit  du  paflage  que 
nous  auons  allégué  cncc  neufîemcde  la  pre- 
mière aux  Corinthiens ,  que  fiinft  Pau!  pour 
faire  plus  grande  reproche  i  ceux  qui  ne  cou 
rentpasd'vne  telle  arfedion  qu'il  fcroit  re- 
quis,leur  dit,  Comment?  Ceux  qui  fe  mettent 
en  vn  ieu  dcprix(cir  le  pren  ccquicft  Icphir 
commun  auiourd'huy  )  ceux  qui  vicnem  là 
luitter,cncores  ne  font-ils  point  aiTeartz  que 
ils  emportent  nul  falaire.Car  de  ce  tcmps-Ja 
on  cuft  veu  deux  au  trois  cens  perfonues  cou 
rir.ils  vcnoyéc  là  en  grand  cquippaj^c  de  icnc 

lieiic-i. 


s  V  R    L  A   I  I.    A    T  I  M  O  T  H.  499 

ne  JoyaJ?  Car  il  tll  certain  que  tons  ceux  qui 
s'arrcftcnt  à  ce  que  Dieu  dit  ,  il  faudra  qu''ilï 
fui  mon  cent  tou".  les  cnipefchemens  du  mon- 
de. £t  ainfi  concluons  que  tous  ceux  qui  ie 
latitn tau  milieu  du  chemin,  ou  mefmes  qui 
ne  peuuent  remuer  ne  bras  ne  ïambes,  que 
ceuï-la  font  incredules,&  qu'ils  veulent  dc(- 
mentir  Dieu  ,  entant  qu'en  eux  eft  :  combien 
qu'ils  ne  prononcent  point  ce  blafpheme  de 
luy  qui  elloit  trouué  le  plus  vaillant:  le  rtlle     bouche  ,  fi  cil-ce  que  leur  vie  monllre  qu'ils 
t'en  retournoit  auec  (à  honte  ,  &  mefmes  a-    n'adiouftcnt  nulle  foy  à  Dieu  ,  qu'ils  ne  luy 
uccmoquerie,qu'ondifoit,  Ho,  ceftuy-la  y  a    font  point  ceft  honneur-la  de  fe  repofer  en 


lieiies.&dedeux  cents  lieues. Et  bien, c'efloit 
feulement  pour  auoirvne  couronne  de  fueil- 
les.Ils  necraignoyentpoint  de  fairedegrans 
defpcns  ,  &  de  prendre  beaucoup  de  peine 
poiir  vnc  chofe  de  rien  :  &  encores  quand  ils 
auoyent  tout  tait ,  il  n'y  en  auoit  qu'vn  qui 
f\i{i  couronné,  quand  il  auoit  elle  trouué  a - 
gile.Oubien  G  on  failoit  deux  prix, ou  trois, 
ou  quatre,  la  couronne  n'eftoit  que  pour  ce- 


pretendu  ,  mais  il  ne  l'a  pas  gagné  pourtant 
après  il  y  auoit  en  ces  luittes ,  d'autres  com- 
batans ,  qui  quelques  foit  fe  heurtoyent  en 
forte  ,  que  c'elloit  pour  s'efcacher  de  grans 
coups  :  ils  tenoyent  des  plombeaux  en  leurs 
mains  pour  fe  frapper  &  fe  cafler  ,  tellement 
qu'ils  s'en  retournoyent  toutdefrompus.  Et 
bien, quand  ceux-là  auront  beaucoup  comba- 
tu  ,  il  elt  vray  qu'ils  pourront  emporter  le 
prix  ,  mais  non  pas  tous  ,  il  y  en  aura  vn  ,  ou 
deux,  ou  trois  entre  toute  la  multitude.  Or 
^uand  Dieu  nous  appelle  pour  courir  ,  ell-ce 
feulement  pour  donner  le  prix  à  vn  feul  ,  Si 
pour  reietter  les  autres  qui  fuiuét  apres?Nen 
ni:mais  nous  aidons  les  vns  les  autres  en  cô- 
mun  :  tellement  que  ie  foye  le  centicme.voi- 
re  qu'il  viene après  vn  million,  moyennant 

feront  d 


que  le  tende  à  Dieu  ,  ceux  qui  feront  défia 
parucnus  me  tendront  les  bras  pour  me  re- 

ceuoir  en  la  compagnie  des  i'ainfts  Martyrs    deuons  faire,  c'eftafçauoir  que  roftrc  foy  ne 
précédez,  &  des  fainûs  Prophe    s'eflendc  pas  feulement  iufques  à  la  veue  des 


luy,  côme  en  celuy  qui  ne  nous  peut  fruflrer. 
Ainfi  donc  apprenons  que  nous  ne  pouuons 
pas  nous  glorifier  auec  fairô  Paul  d'aueir  c5 
batu  vaillamment, &:  d'auoir  riflîieheureufc, 
finon  que  nous  foyons  tout  perfuadez  que  no 
ftre  Dieu  ne  nous  a  point  appelez  en  vain.  Il 
faut  aufsi  que  nous  ayons  les  promeflespar 
ItfqucUes  il  nous  a  mis  en  chemin  pour  efpe- 
rer  le  falut  immortel  qui  nous  eft  referué  au 
ciel:  il  faut  que  nous  ayons  toufiours  ces  pr» 
mcflcs-ladeuant  ros  yeux  ,  &  en  nollreme- 
moire.Et  notamment  il  dit,  Quant  au  refie:c6 
fne  s'il  difoit.Il  eft  vray  queie  me  voy  iciea 
terribles  angoiires,&  ie  cognoy  q  ie  fuis  créa 
ture  fragile  ;  mais  tant  y  a  que  mon  Dieu  qui 
iufques  ici  m'a  fecouru,ne  me  defaudra  point, 
&  aufsi  ie  me  fie  en  luy,  pour  l'aduenir,  com- 
me l'ay  expérimenté  fa  grâce  le  temps  pafle, 
&  en  toute  ma  vie.  Et  c'tft  ainfi  que  nous  ea. 


l.Cor.p. 
3-6. 


qui  nous  ont  pr 

tes  qui  nous  ont  encores  attendu  plus  long 
temps.  Quand  Dieu  nous  appelle  à  vn  tel 
combat ,  &à  vne  telle  condition  ,  ne  faut-il 
pas  que  nous  foyons  trop  vikins  fi  nous  ne 
prenons  courage  ,  que  nous  ne  foyons  affe- 
Aïonnez  de  marcher  &  courir  pour  nous  ef- 
forcer félon  que  noftre  Seigneur  nous  com- 
mande? Voila  donc  quant  à  ce  mot  de  garder 
la  foy.  Suiuant  cela  faincl  Paul  adioiifle,Q»f 
^uatit  au  rejfe,  la  cournnne  dt  iujliee  luy  efh  ap- 
frejlee  ,  qui hy  fera  renduf  far  le  Seioncuriu- 
fie  iitge  en  ce  iour-'a  :  Cr  ucn  f.ulemint  à  mny 
{dit-ii)  mais  'a  teus  ceux  qui  défirent  f.t  venue 
&  fn  affuriticn.  Ici  fainft  Paul  conferme 
leproposque  i'ay  défia  touchérc'cftafçauoir 
qu'il  n'a  point  couru  en  vain  ,  comme  aufsi  il 
le  dit  en  vn  autre  paflage.  Car  comme  nous 
difons  en  prouerbe  cômun,  Batre  l'eau, fainft 
Paul  dit, Batre  l'air  :  pour  monftrer  qu'il  n'a 
point  combatu  en  vain.  Car  il  fçauoit  (côme 


chofes  prefcntes ,  mais  qu'elle  furmonte  le 
mode. Et  de  fait  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  Hï6.  u. 
l'Apoftre  dit  que  c'eftvne  vifion  des  chofes  *•!• 
inuifibles,&vn  fondement  des  chofes  abfen- 
tes.Il  tft  vray  que  cela  nous  femble  eftrange. 
Comment?  de  voir  les  chofes  inuifibles.?  cela 
n'eft  point  pofsiblc.  Il  tft  vray:  mais  Dieu 
nou<  donne  des  yeux  qui  font,non  point  pour 
apperceuoirce  qui  eft  apparét  félon  le  mon- 
de, mais  les  yeux  de  la  foy  percent  les  cieux. 
Combien  donc  que  félon  le  fens  humain  ,  & 
noftre  raifon  ,  l'tlperance  que  Dieu  nous 
donne  foit  cachée  ,  fi  ne  Uiflons-nous  pas 
d'en  eftre  affeurcz  quand  nous  auons  le  mi- 
roir de  fa  parole  ,  &  que  noftre  foy  s'adrelTe 
à  luy.  Voila  où  nous  lettons  noftre  ancre, 
non  point  feulement  à  vne  centeine,  ou  de 
pas, ou  de  coudées  ,  mais  nous  la  lettons  iuf- 
ques au  ciel  ,  côme  il  en  eft  parlé  en  FEpiftre 
aux  Hebrieux.Et  ainfi  notons  que  pour  che-  "*''''• 


1  l'exprime  en  ce  paflage)  que  la  courônene    miner  corftammenc,&  pour  ne  point  tourner  '' 


luypouuoit  faillir,  d'autant  qu'elle  luy  eft 
promifede  celuy  qui  eft  la  venté  certaine  & 
infallible.  Quand  donc  nous  auons  la  pro- 
meflè  de  noftre  Dieu, quand  par  fa  bonté  in- 
finie il  s'oblige  à  no', faut-il  craindrerSi  nous 
ne  prenons  courage  là  deflus ,  quelle  excufe 
y  aura-il!  N'eft-ce  pas  figne  que  nous  ne  por 


bride  quand  nous  ferons  au  bon  chemin, mais 
pluftoft  pour  bien  aduanccr,il  nous  faut'  eftre 
afleurez  que  iamais  Dieu  ne  nous  defaudra, 
&  combien  que  nous  foyons  cmptfchcz  par 
les  fafcheries  que  nous  endurerons,  de  venir 
à  luy  pour  nous  cacher  fous  l'ombre  de  fes 
ailes ,  &  pour  l'iuuoquer  comme  noftre  Père, 


tons  nul  hôneur  à  Dieu,  mais  pluiloft  q  nous    toutesfois  fi  nous  faut-il  auoir  ceftc  refo 
luy  faifons  iaiure ,  oc  Teftimans  point  âdele    luti»n-la,  que  la  courooae  de  iufticc  nous  eft 

Rr.ii. 


^ 


çoo 


SERMON    XXVII  î. 


sppreilee  ?  Et  pourquoy  ?  Car  quand  il  noii';  a 
mis  enccuiire,  ce  n'a  pas  efté  pour  nous  plac- 
qiier  là,&  pour  veoir  ce  que  nous  tcrions.'mais 
il  a  promis  de  nous  donner  vertu  &:  confian- 
ce. Etainli  attendons  la  victoire  de  luy,  &ne 
craignons  pas  qu'elle  ne  nous  foit  délia  toute 
apprcftee, comme  li  nous  la  teniôs  en  la  main: 
mais  il  veut  que  nous  luy  facions  ceft  hon- 
«  neur,  d'efperer  ce  que  nous  ne  voyons  point, 

&  ce  qui  nous  ell  mel'mes  incomprehenfîble. 
Voila  qu'emporte  ce  mot,  Quant aitreflt.  Et 
ainli  adulions  de  recueillir  tellement  les  grâ- 
ces de  Dieu  que  nous  auons  receues  par  ci  de- 
>    uant,  que  noftre  conclulîon  finale  loit  de  di- 
re ,  Dieu  qui  a  commencé  parfera  :  ainfi  que 
faintl  Paul  le  déclare  au  premier  des  Philip- 
piens .  Et  aulsi  quand  il  dit  aux  Corinthiens, 
•.Cor.i.î  qiJe  Dieu  qui  a  efpandu  fes  largelTes  lur  eux 
ne  leur  detaudra  en  rien  qui  foit  pour  leur  fa- 
lut,  iufques  à  la  venue  de  noftre  Seigneur  le- 
fus  Chriil  :  par  cela  il  nous  monftre  celte  do- 
ftrine,  c'eit  aii'il  ne  faut  point  que  nous  le  re- 
mercions feulement  de  ce  que  nous auons def 
ia  fenti  de  fa  bonté  ,  mais  que  nous  pafslons 
pardelTusle  inonde,  &  que  nous  ne  doutions 
point  que  puis  qu'il  nous  a  adoptez, qu'il  nous 
,        conduira  iufques  à  ceft  héritage  immortel  du 
Royaume  des  cieux.Combien  que  nous  ayons 
beaucoup  de  mauuaifes  rencontres ,  que  nous 
pourries  eftre  defcouragez,  que  mefmes  nous 
voyons  les  gouffres  ouuerts  de  toutes  parts, 
que  nous  ayons  toulîours  comme  vn  pied  en 
la  fofle.que  nous  foyons  affligez  de  beaucoup 
de  hazars,  que  le  diable  mefmes  ait  la  princi- 
pauté en  l'air,  neantmoius  efperons  en  noftre 
Dieu,  &  ne  doutons  point  qu'il  ne  face  valoir 
noftre  adoption,  iufques  à  tant  que  nous  pof- 
fedions  les  chofes  que  nous  efperons  mainte- 
nant, d'autant  qu'elles  ne  nous  font  point  en- 
core? prefentes .  Mais'  il]  femble  bien  de  pri- 
me face  que  fainct  Paul  s'attribue  ici  quel- 
ques mérites,  quand  il  dit  que  la  couronne  de 
iuftice  luy  eft  appreftee  .  Et  de  faift,  les  Papi- 
ftes  quand  ils  veulent  approuuer  leur  Franc- 
arbitre,&  leurs  œuures  méritoires,  allèguent 
ce  partage.  Comment  ?  Voila  fainft  Paul  qui 
dit  que  la  couronne  de  iuftice  luy  eft  appa- 
reillée .  Il  faut  'donc  qu'il  ait  efté  iufte  en  fes 
CEUures .  Ainlî  on  voit  que  nous  ne  fommes 
point  fauuez  par  la  feule  foy,(difent-ils)niais 
quand  nous  auons  deflerui,  Dieu  nous  recom- 
penfe,  comme  ceu^  qui  auront  bien  trauail- 
ié  .  Or  en  premier  lieu  ,  il  nous  faudroit  r^3~ 
uoir  dont  nous  vienent  toutes  nos  vaillan- 
ces. Ya-il|homme  qui  s'ofe  vanter  d'auoir 
nulle  fuffilance  en  foy  pour  fouftenir  vn  feul 
combat  ?  Q_uand  fiind  Paul  parle  de  ceux  qui 
Q  font  de  fon  e/lat,  c'eft  à  dire  qui  ont  la  char- 

'•''  ge  d'anoncer  l'Euangile,  Nous  ne  fommes 
point  fuffîfans,  dit-il.  Et  de  quoy  faire  ?  Il  ne 
dit  point  de  perlifter,  il  ne  dit  point  de  nous 
porter  vertueufcmeht  en  quelque  perfccu- 
tion,  ilne  dit  point  d'édifier  vise  Eglife,  iinc 


dit  point  de  reCfter  au  mal  pour  tri  coup,  il 
ne  dit  point  de  nous  cxpofer  à  la  mort,&  d'e- 
ftre  prefts  de  quitter  noftre  vie, &  tout  ce  qu'il 
y  a  :  mais  feulement  (dit-il)d'auoir  vne  (eule 
bonne  penfee:  nous  ne  fommes  point  idoines 
àcela(dit-il)(înon  que  la  fuflifancenous  vie- 
nca'enhaut.Qu,e  les  hommesaillent  mainte- 
nant s'exalter,&  qu'ils  facét  les  braues, qu'ils 
mettent  en  auant  leur  Franc-arbitre:  car  puis 
qu'ils  ne  peuuentauoir  vne  feule  bonne  pen- 
Ice.comment  auront-ils  l'exécution?  commet 
auront-ils  la  conftance  de  perfifter  en  la  véri- 
té de  Dieu,  &defurmonter  tout  ce  que  le  dia 
ble  machinera  au  contraire  ?  Et  s'ils  ne  peu- 
uent  auoir  vne  penfee  d'vne  minute  de  temps, 
comment  cotinueront-ils  toute  leur  vie?Ain(î 
donques  notons  bien  quand  faintl  Paul  dit 
ici  que  la  couronne  de  iuftice  luy  eft  appre- 
ftee:!! n'allègue  point  les  prouefles  qu'il  ait 
faites ,  comme  s'ilauoit  cela  de  fon  propre: 
mais  la  iuftice  de  laquelle  il  parle  ,  eftoit  ce 
qu'il  auoit  receu  de  la  ijrace  de  Dieu.  Et  c'eft  .  /-. 
iuyuant  ce  qu  a  dit  en  vn  autre  pallage,  Q_ue 
as-tu(dit-il)que  tu  n'ayes  receuPSi  tu  l'as  re- 
ceu.tu  le  dois:&:  puis  que  tu  le  dois, pourquoy 
t'en  glorifies-tu?  Voila  fainfi:  Paul  qui  en  vn 
mot  abbat  bien  toute  lahautefTcdes  hommes 
quand  ils  fe  voudront  rien  attribuer.  Tu  n'as 
rien  (dit-il)lînoncequi  t'eftdonné:tu  es  doc 
facrilege  quand  tu  te  veux  faire  valoir:  car  tu 
vfurpes  ce  que  Dieu  te  donne  ,  voire  c«  qu'il 
te  donne  à  telle  condition  ,  qu'il  demeure 
toulîours  en  fon  entier, c'eft  à  dire, qu'il  ait  la 
louange  qui  luy  appartient.  Car  autrement 
que  fera -ce  ,  finon  que  tu  es  vn  brigand  ,  & 
que  l'honneur  de  ton  Deiu  eft  en  proyeîVoi-/  , 
la  pour  vnitem.  Et  au  refte,  les  Papi ftes  mef- 
mes doyuent  bien  noter  ce  qu'a  dit  l'vn  de 
ceux  qu'Us  appellent  leurs  Doûeurs  :  Com- 
ment Dieu  rendroit-il  la  couronne  comme 
iufte  iuge,  s'il  n'euft  premier  donné  ja  grâce 
comme  Père  mifericordieux?  Etcomment  y 
auroit-il  iuftice  en.  nous,  fînonque  la  grâce 
euft  procédé,  laquelle  nous  iuftifie  ?  Et  com- 
ment celle  couronne  feroit-elle  rendue  com- 
me deue,  lînon  que  tout  ce  que  nous  auons, 
nous  euft  elté  donné  fans  cftre  deu  ?  Voila  les 
mots  de  faintl  Auguftin.Et  quand  les  Papiftes 
ne  l"e  veulent  tenir  à  l'Efcriturc  fainfte  ,  c'eft 
pour  le  moins  qu'ils  ne  fufîènt  pas  il  vileins 
de  renoncer  à  ce  qu'ils  font  femblant  de  te- 
nir.Mais  encores  n'eft-ce  pas  tout  que  cela:il 
eft  vray  que  c'eft  vne  doftrine  qui  mérite  bien 
d'c.ftre  receue,  que  Dieu  ne  peut  eftre  iufte 
luge  pour  nous  fauuer  ,  qu'il  ne  fe  foit  décla- 
ré Père  mifericordieux  auparauant  &  en  pre- 
mier degré  ,  qu'il  n'y  aura  nulle  iuftice  en 
nous,  fînon  celle  qu'il  y  aura  mife:  &  qu'il  ne 
nous  peut    recoinpenfer  lînon    en  couron- 
nant fes  dons.  Mais  il  y  aaufsi  bien,'qu'cnco- 
rcs  que  Dieu  nous  ait  fait  grâce  de  Icfcruir, 
que  nous  ayons  mis  peine, &  nous  f  lyonsem- 
ployez  de  faire  félon  noftre  mcfure  tout  ce 

qni 


SVR  lA    IL    A    TIMOTH. 


tp\  nous  fera  pofsible  ,  qu'encores  n'âurons- 
rous  point  fi  bien  fait ,  qu'en  tout  &  par  tout 
Dieu  nous  accepte  :  raefmes  il  tronuera  bien  à 
redire  en  toutes  les  meilleures  œuures  que 
nous  aurons  faites  ,  que  la  plus  grande  vertu 
qu'on  fçauroit  choifir  en  nous,  fera  vicieufe. 
Car  quand  nous  penferons  eftre  bien  difpo- 
fez  pour  feruir  à  Dieu,  il  y  aura  toufiours  ie 
ne  fçay  quoy  qui  nous  retardera,  nous  regar- 
derons au  monde,  nous  aurons  quelque  tenta- 
tion qui  nous  volera  au  trauers  des  yeux,  nous 
n'inuoquerons  pas  Dieu  comme  il  appar- 
tient ,  nous  ne  ferons  pas  affedionnez  &  en- 
flambez  d'vn  tel  defir  Si  amour  qa'il  feroit  re 
quis.nous  ne  regarderons  point  de  feruir  à 
nos  prochains  comme  nous  y  fommes  tenus, 
plxiftoft  nous  trauaillerons  pour  nous  ,&,re- 
garderonsànoftre  profit.  D'autant  donc  que 
il  y  aura  toufiours  de  telles  taches  en  nos  œu- 
ures,&  qu'elles  pourroyent  eftre  toutes  à  con 
damner,  n'eftoit  que  noftrc  Dieu  eult pitié  de 
nous,&  qu'il  nous  fupportaftCcorame  il  dit  par 
fon  Prophète,  qu'il  accepte  nos  feruicescom 
me  vn  perc  fait  ce  que  fon  enfant  tafchede 
luy  apporter  pour  luy  complaire  ,  combien 
que  cela  ne  foit  point  parfait, mefmes  qu'il  ne 
vaille  rien, fi  eft-ce  que  le  père  s'en  contente, 
non  pas  que  l'ocuure  le  vaille, comme  l'ay  dit, 
mais  c'cït  d'autant  qu'il  aime  l'on  enfant) 
Dieu  déclare  qu'il  vfe  de  fa  pure  bonté, quand 
il  accepte  nos  œuures,-non  pas  qu'il  regarde 
quelque  dignité  ou  mérite,  mais  d'autant  que 
il  nous  aime, il  les  reçoit  :  voire  &:  les  aduojue 
comme  iulles,  &  comme  s'il  n'y  auoitque  re- 
dire, encores  qu'il  y  ait  de  l'imperfeftion 
beaucoup  .  Ainli  tant  s'en  faut  que  ce  pallàge 
foit  pour  aider  en  rien  aux  Papiftes,pour  mon 
ftrer  que  les  œuures  méritent  quelque  chofe 
enuers  Dieu,&  que  la  leule  foy  ne  nous  faune 
pas, que  c'eft  pluftoft  pour  les  conf(jndre.Car 
quand  on  aura  bien  regardé  les  mots  de  fainft 
Paul ,  ce  paflage-ci  conclud  neceflairement 
qu'il  faut  que  nous  foyons  fauuez  par  la  feule 
fby, d'autant  (  comme  nous  auons  dit)  que 
Dieu  ne  peut  couronner  en  nous  nulles  œu- 
ures,fînon  celles  que  nous  aurons  faites  par  fa 
pure  grace.Et  qu'ainfi  foit,  quand  les  Papiftes 
parlent  de  leurs  œuures  méritoires  ,  en  pre- 
mier lieu  ils  fe  font  compagnons  de  Dieu,  & 
cuident  coopérer  auec  luy  (  comme  ils  vfent 
de  ce  mot)  c'eft  à  dire  qu'ils  apportent  quel- 
que bon  mouuement.qu'ils  ont  bon  vouIoir:& 
bien,Dieu  leur  aide  quand  ils  font  bien  difpo- 
fez.il  y  met  la  main  en  partie. Or  eftans  enflez 
d'vn  tel  orgueil, on  fe  fait  à  croire  qu'il  eft  en 
l'homme  de  bien  faire  .  Et  voila  qui  eft  caufe 
de  les  faire  enyurer  en  leur  nonchalance,  d'au 
tant  qu'il  leur  femble  qu'ils  auront  toufiours 
la  faculté  de  bien  faire  quand  il  leur  plaira:  vît 
làdcflus  ils  s'abandonnent  à  tout  mal,  en  for- 
te qu'ils  font  pleins  de  toute  immondicité  Jj 
dedans, qu'ils  foQt  iranfportez  d'affedioni^- 
xecrables,méfmes  ils  fontlàenforcelez,  &co 


me  aueuglez  ,  ils  ferment  les  yeux  i  tout .  Et 
puis  ils  font  enflez  de  leur  Franc-arbitre,  de 
leurs  vertus,&  de  leurs  mérites.  Et  puis.d'au- 
tant  qu'ils  n'ofent  pas  mer  qu'ils  ne  foycnt  pe 
cheurs  ,  &  redeuables  à  Dieu  ,  ils  adiouftent 
leurs  fatisfadions ,  pour  dire,  Si  ie  ne  me  fuis 
acquitté  en  vn  tel  endroit ,  voila  qui  fupplee- 
ra  au  défaut .  Voila  (di-ie)oùen  font  ces  po- 
ures  miferables.  Mais  encores  quad  ils  auront 
tout  fait,  quel  repos  ont-ils  en  leurs  contcien 
ces?Il  eft  impofjible  qu'ils  ne  foyent  toufiours 
en  trouble  &  en  inquiétude,  d'autant  qu'ils  ne 
ont  nulle  certitude  de  leur  falut .  Et  de  faift, 
c'eft  vn  des  principaux  articles  de  leur  foy,de 
dire  que  c'eft  vne  prefomption  aux  hommes 
d'ellre  aflèurez  de  leur  falut.  Et  c'eft  vn  iufte 
iugementde  Dieu, d'autant  qu'ils  fe  font  cle- 
uez  à  rencontre  de  luy  comme  beftes  fauua- 
ges  .  Voila  donques  ces  poures  mal-heureux 
qui  demeurent  en  fufpens,  c'eft  àdire,  qu'ils 
font  incrédules, d'autant  qu'ils  n'ont  nulle  e- 
fperance  de  falut. Mais  de  noftre  cofté,  quand 
nous  fçauons  que  nous  fouîmes  appelez  de 
Dieu  par  fa  bonté  gratuite,  qu'il  nous  aduoue 
pour  les  enfans  au  nom  de  noftre  Seigneur  le- 
fus  Chrift,  &  non  pas  que  nous  l'ayons  delTer 
ui,nous  cognoiuons  aufsi  bien  que  nos  œuures 
luy  font  agréables. Et  pourquoy?  Eft-ce  pour 
leurdi§nité;Nenni:  mais  pourcc  qu'il  ne  nous 
impute  point  les  fautes  qui  y  font  :  combien 
qu'ily?it  à  redire,  toutesfois  il  nous  accepte, 
comme  fi  nous  l'auions  ferui  en  tout  &  par 
tout. Cependant  nous  auons  noftre  refuge  à  la 
remifsiondc  nos  péchez, nous  l'inuoquons.Et 
bien,Séigneur,puis  qu'il  tcplaiftnous  fuppor 
ter,  &  nous  faire  vne  telle  mifericorde,  nous 
fommes  d'autanfplos  tenus  &  obligez  à  toy: 
Se  quand  il  te  plaift  d'accepter  nos  œuures  qui 
font  vicieufes  &  imparfaites,  c'eft  par  ta  pure 
bonté  &  gratuite. Voila(di-ie)comme  vne  tel 
le  confideration  nous  abbaille  &  nous  humi- 
lie.Mais  les  Papiftes, encores  qu'ils  criét  bieit 
haut  pour  magnifier  leurs  œuures  &leur.s  mé- 
rites, fi  faut-il  qu'ils  ayent  la  boucheclofe: 
car  Dieu  les  rend  confus  en  leur  orgueil, quad 
ils  luy  veulent  ainfî  faire  la  guerre  .  Q_i*;ind 
doc  il  n'y  auroit  que  ce  partage  en  toute  l'E- 
fcriture  fainâ:e,il..fuffit  pour  môftrcr  que  nous 
ne  fommes  fàuuez  que  par  la  feule  foy,  d'au- 
tant que  nous  mettons  noftre  fiance  en  la  pu- 
re bonté  &  gratuite  de  noftre  Dieu, non  poiwt 
feulement  pource  qu'il  nous  reçoit  à  merci, 
mais  aui'si  qu'il  accepte  nos  œuures,  combien 
qu'elles  en  foyét  indignes,&  que  mefmes  pluf 
toft  elles  luy  deuroyent  eftre  puantes,  à  caufe 
des  imperfeûions  qui  y  font ,  togtesfois  qu'il 
les  accepte, d'autat  qu'il  luy  plaift  les  aduouer 
comme  s'il  n'y  auoit  que  toutç  perfection  & 
pureté  ,  &  les  reçoit  au  nom  de  noftre  ^çi-< 
gneur  lefus  Chriû.  ,;,_     .    j.j.';   ,,i,, 

■  ;  ■•>  '  ,  '.  ;.'nvi  .'  i  >!  s!  î 
•'  ,  OR  nouspnous.proftetç^{u;gns  déliant  lu 
race  de  noftre  bon  Dieu  encognoiffance  de 

■  K.Mll. 


çci  SERMO 

nos  fautes,  le  prians  qu'il  nouç  les  face  mieux 
fcntir.Et  d'autant  qu'il  luy  plaill  de  nous  exer 
ter  en  ce  monde,  que  nous  ne  foyons  point  ii 
délicats  qu'vn  chacun  ne  s'efforce  de  batail- 
ler vertutufement ,  à  ce  que  nous  rciiftions  à 
Satan  ,  &  à  tous  fes  fuppofts .  Et  combien  que 
nous  voyons  de  tous  coflez  que  nous  fommes 
affàillis ,  &  qu'il  y  a  tant  d'ennemis  de  Dieu, 
que  tout  le  monde  en  eft  plein  ,  &  que  niefmes 
h  poure  Eglife  eft  fur  tout  affligée  des  enne- 
mis domeltiques.que  nous  ayons  vn  bon  cou- 
rage pour  pourfuyure  conftamment  iufques  à 
ce  que  nous  foyons  paruenus  à  noftre  viftoi- 
rc:&  non  feulement  cela,mais  iufqu'à  ce  qu'il 
nous  face  triompher  pleincment,&:  qu'il  nout 


N     XXIX. 

ait  amenez  au  but  aaqucl  nous  tendons.Et  ce- 
pendant qu'il  nous  face  la  grâce  aufsi  de  noUS 
humilier dcuant  luy,  tellement  que  nous  ne 
prefumions  point  ni  de  nous ,  ni  de  nos  ver- 
tus ,  mais  que  nous  dépendions  du  tout  de  fa 
pure  bonté  :  que  nous  fçachions  que  c'eft  de 
luy  que  nous  tenons  tout  noftre  b;en,&  ce  quj 
nous  eft  ueccflàire  en  ce  mondt,&  que  c'eft  de 
luyqu'il  nous  faut  attendre  tout  lerefte:&fur 
tout  que  nous  rcccuions  pardon  de  nos  fau» 
tes  &de  nospechtz  par  la  faindeté  parfaite 
&  la  iuftice  accomplie  qui  a  efté  en  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift.  Que  non  feulemctil  nous 
face  ctfte'gracciouu  à  tous  peuples  &  naciés 
de  la  terre,&c. 


CINQJ/IEME     SERMON      SVR     LE 

CLV  ATRIEMECHAPITRE. 

8  Quant  au  reîle ,  ta  couronne  de  iuHice  mcj}  gardée ,  laquelle 
me  rendra  le  Seigneur  iuBe  iuge  en  ceîle  tournée-  la  :  (^  non  feulement 
à  moy,mah  aujli  à  tous  ceux  qui  auront  aimé  fa  yenue, 

^     Fay  diligence  de  -venir  bien  tofl  à  moy. 

10  Qar  Demas  m'a  laijfe,  ayant  aimé  ce  prefcnt  monde ,  (^  s* en 
efï  allé  à  TheffaloniqueyCrcfccns  en  Galatie,  Tite  en  Dalmatie. 

11  Luc  eflfcul  auec  moy.  Vren  lAarc,  CT  l'amené  auec  toy  :  car  il 
mefiytileauferutce. 

IL      Vay  aufii  enuoyê Thy chique  en  "Ephcfè. 

13  Quand  tu  "viendras, apporte  auec  toy  la  manteline  que  tay  laïf- 
fee  en  Troas  chez  Carpe,  Qt  les  Hures,  ç^  principalement  les  parche- 
mins. 


Ous  auons  veu  par  ci  deuât, 

jque  pour  auoir  bon  courage 
1  ds  feruir  à  Dieu,toufiours  la 
:  venue    de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift  nous  doit  eftre 
en  mémoire:  car  fans  cela  il 
nous  faudroit  défaillir  à  cha 
cune  minute  de  temps. Nous  fommes  fragiles, 
il  faut  peu  de  chofe  pour  nous  desbaucher,  & 
ks  tentations  que  Satan  nous  met  deuant  les 
yeux  font  grandes.  Il  n'y  a  donc  autre  moyen 
de  nous  confermcr  à  ce  que  nous  periiftions 
conftament  a  fuyure  le  bon  chemin, finon  que 
nous  fçachions  q  noftre  Seigneui  lefus  Chrift 
riëdra  pour  rcftaurer  les  chofes  qui  font  main 
tenant  confufes.Il  femble  que  nous  trauaillôt 
en  vain  quand  le  monde  femocquede  nous, 
queraefrues  nous  fommes  blafmez  après  auoir 
bien  fait  :  mais  nous  f^auons  que  lefus  Chrift 
à  fa  venue  rcnucrfera  toutes  les  faulTes  opi- 
Dioos  du  VM&âli,6c  mds^ifiii  que' ce  n'cA 


point  peine  perdue  de  s^employer  à  fon  fer- 
uice  .  Or  cependant  il  nous  doit  fouuenir  que 
nous  ne  pouuons  pas  efpcrerque  Itfus  Chrift 
à  fa  venue  nous  rende  la  couronne  de  iuftice, 
fmon  d'autant  que  Dieu  par  fa  pitié  accepte 
ce  que  nous  failons  :  non  point  que  nous  ap- 
portions rien  du  noftre  qui  vaille,  ou  qui  mé- 
rite d'eftre  ainfi  renomme  :  mais  d'autant  que 
il  nous  a  receus  vne  fois  à  merci ,  &  qu'il  nous 
aime  comme  k^  enfans .  Voila  aulsi  pour- 
quoy  nos  CEUures  luy  font  agréables .  il  nous 
faut  donc  eftre  fondez  fur  la  pure  venté  de 
noftre  Dieu  ,  fi  nous  voulons  rien  attendre  de 
luy.  Or  maintenant  il  rcfte  ce  iour  dont  par- 
le fain£b  Paul .  Il  dit ,  C*  iour-la  .  Il  pouuoit 
bien  déclarer  plus  à  plein  la  venue  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  .  Mais  ceftc  façon  dç 
parler  dont  ilvfeaplus  grande  véhémence, 
ic.  nous  doit  mieux  toucher.  Car  il  déclare 
ceftc  certitude  de  foy  qui  cftoit  en  luy  :  il 
marque  ce  lourde  la.reAue  im  lefus  Chnil 
'■  ■'■•   •     ■■  comme 


SVR   LA   II.    A    TIMOTH 


«amme  vne  cKofc  qui  luy  eftoit  dcfia  prefen- 
te.Il  eft  vray  que  felô  le  fcns  de  la  chair  nous 
ne  comprenons  point  que  noftre  Seigneur  ic- 
fus  Chrill  foit  prochain  de  renir  :  car  aufsi  il 
e  o  faut  quenoftrefalut  foit  enclos  en  efperance. 
'  ■  Or  cequenous  cfperons  (dit  fainâ  Paul)  eft 
caché.Mais  cependant, puis  que  nous  fçauons 
que  le  Fils  de  Dieu  eft  delccndu  à  cefte  con- 
dition de  nous  retirerde  toutes  les  miferes  de 
ce  monde ,  &  nous  acquérir  le  Royaume  dcj 
cieux  ,  ne  doutons  point  qu'il  ne  nous  al'sifte 
pour  faire  valoir  la  mort  &  pafsion  qu'il  a  en 
durée  pour  noftre  falut ,  Se  pour  nous  mettre 
en  pollefsion  de  tous  les  biens  qu'il  nous  a  ac- 
quis, pour  nous  faire  fentir  le  truifl  &  l'efFed 
de  fa  première  venue.Ainfi,quand  fainâ  Paul 
en  parlant  du  iour  du  iugement.le  marque  cô 
me  au  doigt ,  notons  que  par  cela  il  nous  veut 
certifier  en  U  vertu  du  fainû  Efprit ,  que  ce 
n'cft  point  vne  cliofe  douteufe  que  cefte  fé- 
conde apparition  du  Fils  de  Dieu. Mais  com- 
bien qu'elle  nous  foit  incomprehenfible  félon 
Ja  chair,  toutesfois  nous  la  deuons  côtcmpler 
des  yeux  de  la  foy  :  c"eft  à  dire  ,  d'autant  que 
nous  au5s  fes  promelTes  qui  nous  en  (ont  don 
nées,  comme  vn miroir  ,  qu'il  nous  faut  là  du 
tout  arrefternos  fens.  Mais  il  s'en  faut  beau- 
coup que  ceux  qui  fc  nomment  Chreftiens 
ayent  prattiqué  cette  dodlrine  comme  il  le- 
roit  requis.Carnous  ne  pouuons  pas  regarder 
trois  doigts  loin  de  nous.  £t  lî  tollque  Dieu 
diffère  fon  aide  quand  nous  fommcs  en  necef- 
fité,  nous  voila  efperdus,  nous  ne  fçauons  que 
deuenir.  Comment  donc  pourrons-nous  mon 
ter  li  haut  que  de  veoir  le  Fils  de  Dieu  afsis 
au  fiege  de  fa  maicfté,&àfa  gloire  celcfte, 
combien  qu'il  foit  caché  félon  noftre  fens 
humain?Or  tant  y  a  que  ceci  n'eft  point  cfcrit 
fans  caufe.Et  quand  lefus  Chrift  nous  appel- 
le à  foy,  &qu'il  veut  que  cefte  trompette  re- 
fonne  à  nos  aureillet ,  comme  fi  dclîa  nous 
l'oyons,  Ciu'il  nous  faut  trouuer  tous  deuant 
fon  fiege  iudicial:cela  nous  doit  bien  refueil- 
ler.Et  ce  n'eft  pas  feulement  ici  qu'il  vie  d'vn 
l.Tim  I  tel  langage  ôcftyle,  mais  quand  il  a  ditcidef- 
jl^  '  *  fus  qu'il  auoit  efté  iecouru  par  Onefiphore,  il 
dit  que  le  Seigneur  luy  rende  en  ce  iour-la. 
Et  notons  que  l'ainû  Paul  fe  voyoït  défia  pro 
chain  de  la  mort  quand  il  parloit  de  cefte  cou 
ronne  de  iuftice.  U  ne  faut  point  donc  que 
nous  foyons  eftonnez  quand  il  femblcra  que 
nous  foyôt  du  tout  péris  &  perdus,  mais  c'cft 
alors  que  nous  devions  eftre  tant  plus  incitei 
a  eleuer  nos  telbes  en  haut, puis  que  noftre  ré- 
demption eft  prochaine  ,&nousaircuret  que 
nous  ne  ferons  point  fruftrez,  ayaiis  ainiî  ap- 
puyé noftre  fiance  fur  le  Fils  de  Dieu  qui  ell 
la  vérité  immuable  ,  &  par  lequel  Dieu  fe  dé- 
clare à  nous,  Se  cognoifloni  fon  c«n  feil  éter- 
nel. Voila(di-ic)ce  que  nousauons  inoterde 
cepaflàge  ,  quand  faind  Paul  marque  ainfi  la 
venue  de  noftre  Seigneur  le  fus  Chrift. Or  afin 
qu'on  ne  penfe  point  c^ue  ce  qu'il  i  du  fuft 


feulement  pour  fa  perfonne  ,  il  adioufte ,  Q«* 
c'fjl  yne  rtfouiffance  commun»  à  tons  enfant  as 
DieH.  Mais  cependant  il  attribue  aux  fidèles 
ce  titre,  qu'il»  aiment  cefte  apparition  de  no- 
ftre Seigneur  lefu!  Chrift  .  Voulons-nous 
donc  eftre  participâus  de  ce  bien  ineftimable 
dont  fainft  Paul  a  parlé,  c'efiafçauoir  qu'en 
toute  noftre  vie  nous  fçachions  que  Dieu 
nous  reçoit  par  fa  pure  bonté,  &  que  ce  que 
nous  luy  offrons  n'eft  point  perdu,mais  qu'il 
luy  eft  comme  vn  facrifice  de  bonne  odeur? 
Voulons-nous  au  milieu  de  la  mort  contem- 
pler la  vie  ?  Q^nd  nous  ferons  diffamez  de 
opprobres  entre  les  hommes ,  voulons-nous 
fupporter  cela  patiemment  ,  Se  mefmes  eftre 
afleurezde  \î  couronne  de  gloire!  Q_ue  nous 
aimions  cefte  venue  du  Fils  de  Dieu.  Or  ce- 
fte amour-ci  ne  peut  eftre  fins  cognoiJIancc, 
comme  on  dit  en  prouerbe  commun,  Qji^il 
faut  auoir  cognu  deuant  qu'aimer.  Si  donc 
nous  ne  femmes  bien  certifiez  par  1»  parole 
de  Dieu  que  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift  eft 
conftitué  luge  du  monde,  &  qu'il  le  monstre» 
ra  quand  nous  ferons  recueillis  auec  luy  en  la 
compagniedes  Angesifi  nous  n'auos  cela  bie* 
enraciné  en  nos  cccurs  ,  ileft  impofsible  que 
nous  aimions  fa  venue:  car  nous  n'y  pren- 
drons nul  gouft.Ec  defaiâ  nous  voyons  coin 
me  les  vanitez  de  ce  monde  nous  tranfpor- 
tent ,  &  que  nous  en  fommes  tant  enyurez 
que  nous  ne  penfons  point  à  ce  Royaume 
fpirituel  auquel  Dieu  iournellement  nous 
conuic.  Il  eit  vray  que  toutes  fois&quantes 
que  nous  viendrons  au  fcrinoo  ,  nous  aurons 
les  aureilles  battues  de  cefte  doflrine.noiis  ne 
fçaurions  ouurir  l'Efcriture  fainâe  que  nous 
ne  trouuionslà  quelque  mot  pour  nous  in- 
citer :  mais  nous  fommes  tellement  defgou- 
ftez  ,  àcaufe  que  les  vanitez  &  les  fols  appe- 
tisdc  ce  monde  ont  préoccupé  tous  nos  feni, 
que  nous  ne  fçauons  que  c'eft  de  cefte  amour 
de  la  venue  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift. 
Et  ainfi  donc  deuons  noftre  foy  ,  efueillons- 
la, qu'elle  ne  foit  plus  ainfi  eftouffee  parles 
plaifirs  du  monde  ,  par  les  appetis  de  noftre  V 
chair  qui  font  du  tout  corrompus  ,  mais  que 
nous  arrachions  les  mauuaifes  herbes.afin  que 
rien  n'cmpefche  que  la  bonne  fcmence  de 
foy  ne  fruûifie,&  que  quand  nous  aurons  em- 
braflc  les  chofes  quiappartienentà  la  venue 
du  Fils  de  Dieu  pour  noftre  rédemption  & 
falut  ,  qu'elles  nous  incitent  à  cefte  amour 
dont  parle  fainû  Paul.  Or  donc  nous  voyons 
quecen'eft  point  fans  caille  qu'il  eft  ici  dé- 
claré que  ceux  qui  veulent  iouir  de  la  cûuroi\ 
ne  de  iuftice,  y  doyaent  afpirer ,  voire d'vne 
telle  affcdion  &  fi  ardente,  &  que  rien  ne  les 
retiene  ici  bas ,  mais  qu'ils  prattiquent  cefte 
fentence  de  lefusChrift.que  leur  ccrur  fera  là  ' 

où  ils  côftituent  leur  threfor. Que  donc  nous  *''" 
ne  mettions  point  noftre  félicité  en  ces  cho- 
fes corruptibles ,  fçachans  que  nous  y  ferons 
trompez  ;  mais  que   nous   cognoïKions  qi;c 

"Ri.  i:ii. 


50+ 


SERMON     XXIX. 


noftrc  fouiierain  bien,  &  auquel  il  nous  faut 
afpirer  du  coiic,c'cfl:  la  vit  celefte  qui  nous  cft 
appreftee:^:  laquelle  le  Fils  de  Dieu  nous  ma- 
nifefteraà  favenue.-cS:  que  noflre  cœur  s'adon 
ne  là,  c&  qu'il  y  foit  du  tout  attaché.  Mais  ici 
on  pourra  demander,  cônient  nous  pourrons 
aimer  lavenuede  noftre  Seigneur  lefusChrift, 
atteudu.que  nous  fojnm.es  poures  pécheurs, & 
que  nous  ne  pouuons  finon  élire  confus  en 
comparoifTant  deuant  ia  maiefté.  Car  quand 
nous  ferons  côparaifon  entre  le  Fis  de  Dieu, 
&  lespouretez  qui  font  en  nous,  n''eft-ce  pas 
pour  nous  abyfmer  du  tout  en  defelpoir  ?  Or 
n'eft-il  point  pofsible  que  nous  aimions  fa  ve 
nue,  finon  que  nous  foyons  bien  perfuadez  & 
rcfolus  que  c'eft  pour  noftre  falut  qu'il  doit 
venir. Il  eft  vray  quand  Dieu  parle  aux  mef- 
chans,àceux  qui  font  rebelles  à  la  parole,aux 
cétcmpteurs  de  fa  iuftice,  aux  hypocrites  qui 
■abufent  defon  nom  ,  &en  prenent  vnefauffe 
■couuerturejil  dit  bien, Mal-heur  lurvousauec 
toute  Pefperance  que  vous  cuidcz  auoir  à  la 
hfli-i-  Tenue  du  Seigneur.  Car  quand  Dieu  viendra, 
ine  fera-ce  point  en  ténèbres  &  en  obfcuritc, 
en  tempelle  &en  tourbillon?ne  fera-ce  point 
pour  vous  apporter  angoifle  &  tourment?  Il 
ne  vous  faut  point  donc  attendre  à  cefte  ve- 
nue. Il  eft  vray  que  les  Prophètes  ne  parlent 
point  là  de  cefte  dernière  apparition  de  no- 
ftre Seigneur  lefus  Chrift  ,  mais  ils  appellent 
la  venue  du  Seigneur  ,  toutes  fois&quantes 
qu'il  fedemonftre.  Or  les  hypocrites  faifans 
femblant  de  fe  fier  en  Dieu  en  obeiflance  5: 
Jjumilité,  cependant  reiettent  fa  parole, &Iuy 
font  du  tout  contraires.  Pour  cefte  caufe  les 
Prophètes  leur  difcnt.  Vous  demandez  de 
veoir  le  iourdu  Seigneur,&  laites  femblât  de 
l'appeter  fur  tout:  or  quand  il  viendra  en  fon 
fiege.n'eftimez  point  que  ce  foit  finon  à  voftre 
confufion.  Mais  de  noftre  cofté  nous  fçauons 
oue  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ne  viendra 
point  pour  con  fumer  en  rigueur  les  membres 
de  fon  corps,  mais  phiftoftce  fera  pour  mon- 
ftrer  le  fruift  de  cefte  rédemption  qu'il  leur  a 
acquife.Etainfi  donc, combien  que  nous  foy- 
ons poures  &  mifcrables  pécheurs  ,  combien 
qu'en  nous  il  n'y  ait  que  toute  malediûion, fi 
eft-ce  que  nous  pouuons  hardiment  nous  ef- 
iouir  à  la  venue  du  Fils  de  Dieu.d'autant  qu'il 
eft  noftre  Aduocat,^:  n'a  point  oublié  ceft  of- 
fice-la,&  eft  tellement  luge  duTnonde,qiie  ce 
pendant  il  nous  couuriraJe-cefte  obeilunce 
qu'il  a  rendirc  à  Dieu  fon  Père,  afin  qu'elle 
nous  foit  allouée  en  conte, côine  fi  nous-mef- 
mes  l'auions  .iccomplie.Puis  qu'ainfi  eft  donc 
que  noftre  Seigneur  lefus  ne  viendra  point 
auec  vne  maiefté  terrible  &cfpouantabIe  ,  & 
qu'il  ne  nous  traittera  point  fcion  nos  déme- 
ntes,mais  qu'il  fera  quenov  fautes  nous  ferôt 
pardonnees,&  que  nous  fentirons  le  fniiil  dff 
cequi  nous  eft  iournellemenc  prefciié  ,  c'eft 
afçauoir  que  Dieu  fe  réconcilie  gratuitement 
à  nous  par  ili  pure  bouté:  puis,  di-ie,  qu'ainfi 


eft  ,  nous  pouuons  bien  aimer  la  venue.  Mars 
nous  voyons  maintenant  combien  il  y  en  a 
peu  qui  puiffent  dire  auec  fainû  Paul ,  que  la 
couronne  de  iuftice  leur  eft  appreftee.  Chacû 
fe  vantera  aflez  d'eftre  Chreftien,mais  cepen 
dant  allons-nous  à  la  mort  comme  eftans  af- 
feurez  que  Dieu  eft  gardien  de  nos  âmes  ,  8i 
qu'il  les  aura  aufsi  en  fa  proteftion  ,  que  nous 
ferons  en  repos  iufqu'à  la  dernière  venue  de 
noftre  Rédempteur?  Qui  eft-ce  qui  vit  telle- 
ment qu'il  ne  foit  point  efpouâté  delà  mort, 
&  qu'il  cognoifle  qu'en  remettant  fon  ame 
entre  les  mains  de  Dieu,il  la  met  en  vn  lieu  iî 
afleuré  qu'il  ne  faut  point  qu'ilen  doute?Mais 
au  contraire,  quand  nous  aurons  à  pleine  bou 
che  protefté  que  nous  fommes  Chreftiens  ,  iî 
on  nous  parle  de  la  mort,  nous  voila  tant  ef- 
frayez que  c'eft  pitié,  il  femble  q  iamais  nous 
n'auonsouy  vn  feul  motde  l'Euangilcque  le 
Fils  de  Dieu  foit  defcendu aux  abyfmes  d'en- 
fer pour  nous  en  retirer  ,  qu'il  foit  monté  au 
ciel  afin  de  nous  ouurir  la  porte:nous  ne  gou- 
ftons  rien  de  tout  cela.  Ainfi  nous  monftrons 
noftre  infidelit é. Et  c'eft  vne  honte  trop  vilei- 
nc  de  nous  glorifier  en  ce  mot  de  Chreihété, 
quand  nous  n'en  auos  goutte  qui  loit.Et  pour 
tant,quc  ce  paflage  nous  aduertifle  que  nous 
ne  pouuons  eftre  recognus  pour  enfans  de 
Dieu, finon  que  nous  viuions  tellement  en  ce 
monde,que  d'autant  plus  que  nous  approchôs 
de  la  mort, nous  prenions  matière  de  nousef- 
iouir,fçachans  que  fi  ceft  homme  extérieur  eft 
anéanti, c'eft  pour  eftre  reftaurez  pleinement 
par  la  vertu  de  celuy  qui  peut  tout. Que  donc 
nous  ayons  les  promefles  de  Dieu  tellement 
imprimées  en  nos  coeurs,  qu'il  y  en  ait  vne  tel 
le  fignature  par  le  fainft  Efprit ,  que  nous  ne 
doutions  point  de  ce  qui  eft  contenu  en  fa  pa 
rôle. Et  au  refte  que  nous  ayons  toufiours  les 
yeux  ouuerts  pour  côtépler  ce  qui  no'  eft  dit, 
c'eft  afçauoir  que  quand  FEuangile  nous  eft 
prefché, c'eft  autant  comme  fi  lelus  Chrift  e- 
ftoit  crucifié  deuant  nous. Puis  qu'ainfi  eft,nc 
doutons  point  que  fa  mort  &  pafsion  n'ait  (a 
vertu  &  fon  eiFeft  ,  comme  faintt  Paul  dit  que 
fi  nous  doutons  de  paruenir  à  fa  gloire  ,  c'eft: 
autant  comme  fi  nous  l'arrachions  de  fon  fie- 
ge.Et  nous  confelTons  qu'il  eft  afsis  àiadex- 
tredeDieu,  qu'il  gouuerne  en  pu!flance& 
empire  fcuuerain.  Qupnd  donc  nous  doutons 
fi  nolrre  héritage  nous  eft  referué  aux  cieux, 
c'eft  autant  comme  fi  nous  renoncions  à  ceft 
article-la  de  noftre  foy, que  nous  fommes  ra- 
chetez de  la  mort:  c'eft  autant  comme  fi  nous 
renoncions  la  mort  &  pafsion  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift,  dit  fainft  Paul.  Que  ces 
cbofes-la  nous  vienent  en  mémoire,  afin  que 
nous  corrigions  ccftemaudite  incrédulité  qui 
règne  par  trop  en  noftre  chair,&:  que  nous  ap 
prenions  que  c'eft  d'aimer  la  venue  ciu  FiU  de 
Dieu. Or  fimrt  Pauladioiifte,<T/(f  Timoihet  fe 
bafle  de  -venir  k  luy.  Il  eft  vray  que  Timothce 
eftoit  aflez  occupé  au  lieu  ou  il  fcruoit  en  la 

ville 


s  V  R    L  A    II.    A    T  I  M  O  T  H. 


ville  d'EpIiefc.que  laily  auoit.degrans  afFai- 
res:  mais  il  ne  taut  point  douter  que  ùmù 
Paul  regarde  que  fa  preience  luy  eftoit  plus 
vtile  beaucoup  pour  le  profit  commun  de  tou 
te  l'Eglife.  Cependant  U  n'oublie  point  PE- 
ghled'Ephefe,car  il  y  enuoye  Tychique,afin 
qu'il  fuppleeau  défaut  de  Timothee.  11  adiou 
fte  la  railbn  pourquoy,!.- /<«(■>/««/  (dit-il)  «r 
Demas  m  a  U']]é  ,  ayant  aimé  ce  prefent  monde, 
g^  s'en  efhallc  a  Thc-jfaloniqHe.  Crvfcens  s'en  ejl 
allé  en  Gal.itie  ,Tite  en  Dalmatie.  lln'y  a  fie 
Luc  auec  mty  -En  ceci  fainû  Paul  monftre  que 
il  auoit  beloindela  prefence  de  Timothee 
pour  luy  aider  en  la  defenfe  de  l'Euangile. 
Or  il  ertoit  alors  détenu  prifonnier ,  &  n'at- 
tendoit  que  l'heure  de  la  mort  :  ilpreuoyoic 
de  gras  troubles, pource  que  les  infirmes  font 
fcandalifez  tantoft  ,  finon  qu'ils  euflent  occa- 
lîon  de  Ce  confcrmer  en  la  foy  .  Sainft  Paul 
doncpreuoit  cela,  &  pourtant  il  deiîre  que 
Timothee  foit  près  de  luy   à  l'heure  de  fon 
trefpas.ou  bien  pour  quelque  autre  chofene- 
ceiraire  que  Dieu  luy  cômandoit,où  il  ne  pou 
uoit  pas  Fournir  luy  feul. Voila  donc  en  fom- 
jne  ce  qu'il  dit  ence  paflage.Maisafin  q  nous 
ne  penfions  point  que  ce  loyent  propos  fami- 
liers,&  qui  ne  feruct  de  rien  à  l'Eglife, &  que 
le  S.Efprit  nous  ait  ici  couché  des  choses  iu- 
perflues  parmiladoftrinede  noftre  falut,no- 
tons  quand  faind  Paul  exhorte  &  prie  Tin»o- 
thee  de  venir  bien  toft  ,  par  cela  il  nous  mon- 
ftre que  ce  n'efl  point  peu  de  chofe  q  pour  l'e 
dificatiô  cômunede  toute  l'Eglife  on  prenie- 
ne  les  troubles  &  les  fcandales  q  le  diable  fu- 
fcite  quad  il  y  a  quelque  changement  &  muta- 
tion.Et  ceci  eft  bien  vtile.  Car  nous  voyons 
tous  les  iours  que  les  feruiteurs  de  Dieu  font 
moleftez,  il  femblera  que  l'édifice  s'en  doyue 
aller  en  ruine  quand  les  meichans  auront  la 
vogue,  que  les  ennemis  de  venté  exerceront 
leur  cruauté  contre  lescnfansde  Dieu:il  y  au 
ra  des  changemés. Cela  doc  feroitpour  esbrâ 
1er  la  foy  des  fidèles.  Pourtant  il  faut  q  nous 
en  foyonsiaduertis,afin  de  n'eftre  point  /âitîs 
d'vne  frayeur  foudaine  ,  mais  que  de  longue 
main  nous  ayôs  prémédité  cela, afin  que  quoy 
qu'il  aduiene  nous  demeurions  toufiours  fer- 
mes,que  nous  ne  flechifsiÔs  point  ne  çà  ne  là, 
mais  plufloft  que  noftre  foy  ait  vne  conftâce 
inuincible,  pour  furmôter  tous  les  afiâuts  que 
le  diable  nous  drefle.  Voila  pour  vn  item.  Et 
mefmes  quand  nous  oyons  que  fainft  Paul  at- 
tireTimothee  d'outre  raerpour  eftreauec  luy 
pour  la  defenfe  de  l'Euangile,  cognoiflons  q 
c'eft  vne  chofe  precieufe  q  la  parole  de  Dieu 
foit  maintenue.  Q^âd  queiqu'vn  fera  perfecu 
té.ilfaut  bé\]u'il  cogn  nflè.  Vo'ci  vne  charge 
difficile  que  le  f  niftien  fur  mes  efpaiiles,mais 
elle  efthonorablc  &  c'eft  le  plu^gr.ld  facrifî- 
ceque  ie  puifle  offrir  à  Dv.u  que  de  maintenir 
h  querelle  de  fon  Euang:lc  ,  S:  de  rendre  les 
mcfchansconfîis.  Qjantàmoy  ie  f-mitien  le 
nom  de  taon  Ditu,&  faut  <^  ie  pcrfirftc  en  cela 


iufques  à  la  fin.Ainfî  noHS  voyofis,côbien  que 
fainci  Paul  parle  à  Timothee  ,  qu'il  ne  laiïïe 
point  de  nous  donner  vne  dûftrine  qui  eftpro 
fitable  à  tous, moyennant  que  nous  la  fçachiôt 
prudemment  appliquer  à  noftre  vfage  &  pro- 
fit.Mais  fur  tout  il  nous  faut  bien  noter  quand 
fainft  Paul  parle  de  Dénias,  qu'il  du  qu'ill'a 
la'[[é,ayaiit  aiméle  monde  :  il  n'entend  pas  que 
ceft  homme  duquel  il  parle,ait  du  tout  renon 
ce  l'Euangile,  qu'il  foit  deuenu  vnapoftat  & 
ennemi  deDieu,  qu'il  fe  foit  retranché  de  l'E- 
glife comme  vn  membre  pourri, il  n'entend 
point  cela:mais  feulement  que  pour  fon  pro- 
fit,ou  pour  quelque  commodité  plus  grande, 
ou  bien  fuyant  la  croix  &  les  fafchenes  qu'il 
luy  faloit  endurer  en  la  compagnie  de  fainâ 
Paul, il  s'eftretiré.Or  cependant  fi  eft-ce  que 
fainft  Paul  le  dégrade ,  car  c'eft  plus  que  fi  va 
homme  eftoit  fleftri  par  ignominie  ,  quand  il 
dit. Il  a  aimé  le  monde,  &  pourtant  il  m'a  laif- 
fc.c'eft  autant  comme  s'il  diioit  qu'il  a  prefe 
ré  le  monde  à  Dieu. Et  c'^eftvn  efchangebien 
mal  propre  que  ceftuy- ci, mais  c'eft  pour  no- 
ftre m  ftruftion  que  fainft  Paul  a  prononcé  v-  ... 
ne  fentence  fi  dure  contre  Demas.Nous  voy-  ^™-4J4 
ons  comme  en  d'autres  paflagesilleloue  :  il  ^'•'•5* 
l'appelle  fon  compagnon  à  maintenir  l'Euan- 
gile,qu'il  luy  a  aidé.  Et  ici  il  luy  met  vne  no- 
te pour  le  diffamer  à  iamais.  Car  iufques  à  la 
fin  du  monde,  cependant  que  le  nom  de  lefus 
Chrift  fera  prefché.il  faut  que  Demas  foit  ici 
comme  efchafliudé  ,  &  qu'il  ait  vne  fentence 
de  condanation  fur  fa  tefte, d'autant  qu'il  s'elt 
voulu  exéptcr  de  la  peine  qu'il  endurcit  auec 
fainft  Paul,  &  qu'il  a  efté  trop  délicat ,  qu'il  a 
trop  aimé  fes  aifes.Retenons  donc  que  quand 
nous  aurons  fait  beaucoupCce  nous  femblera) 
ce  n'eft  rien  fi  nous  ne  perfeuerés  iufques  au 
bout.  Car  (comme  défia  nous  auons  déclaré) 
Demat  auoit  efté  en  grande  réputation,  ayât 
ce  tefmoignage  fi  excellent  de  la  bouche  de 
fainft  Panl.Eft-ce  peu  de  chofe  qu'il  foit  nom 
mé  compagnon  d'vn  tel  Apoftre.auquel  Dieit 
a  defployé  (es  grâces  ,  que  fon  nom'  en  a  efté 
magnifié,&  qu'il  l'ait  appelé  inftrument  eleu 
pour  porter  le  nom  de  noftre  Seigneur  lefur 
Chrift  par  tout  le  monde?Et  voici  Demas  qiir 
eft  appelé  auec  luy. Le  voila  donc  céme  exal- 
té par  defTus  les  nues,&  non  point  que  les  ho- 
mes luy  applaudifltnt,  mais  c'eft  comme  fi  le 
fainft  Efprit  l'auoit  ainfi  honoré  ,  qu'il  l'euft 
eteué  comme  vne  lampe  ardente  au  milieu  de 
fonEglifc.Orapre-.  qu';la  eftéainfi  conftitué 
en  vn  degré  fi  hautd'{ionneur,voici  vne  igno- 
minie perpétuelle:  c'eft  afçauoir  quand  fiinft 
Paul  déclare  qu'il  a  mieuv  aireé  le  monde. Ec 
pourt.înt ,  i\  Dieu  nous  a  fait  la  grâce  de  l'a- 
uoir  ferui,  &  de  nous  eftre  employez  pour  le 
tefmoipnage  de  fon  Euangile,  que  nous  ayôs 
efté  en  bon  exemple  Si-en  réputation  en  for». 
Eglife,  que  nous  ayons  conduit  les  autres  tel 
lement  q^e  nous  puifsions  eftre  mis  cômeaii' 
pvcmier  rang,aduifi;ns  de  cht miner  tottfio\ir.s 

S.f.i. 


J0< 


SERMON    XXIX. 


tnfolicItoJe  ,Sne  peii(oB«  point  que  Dieu 
tioas  ait  prins  àloage  fenlcmét  pour  cjuelquc 
temps,  Si  qu'il  nous  donne  congé  au  bout  du 
tcrme.miis  fçachons  qu'il  n'y  a  qu'vne  l'eule 
condition  &  fimplc  en  Icruant  à  Dieu.c'crt  a- 
/çauoir  que  nous  luy  dédions  noftre  vie  &  no 
ftre  mort.  Que  tous  ceux  qui  ont  fidèlement 
tiauaillé  en  édifiât  TEglifc  deDieu.enaduan 
çât  l'Euâgile  de  noftre  Seigneur  lefusChrift, 
le  mirent  en  La  perfonne  de  Demas,  auquel  il 
cft  reproché  qu'il  a  mieux  aiiné  le  monde  :  & 
qu'ils  cognoillent  finalement  que  s'ils  ne  per 
feucrent,  encores  que  tous  les  homes  du  mon 
de  leurpardônalTent  vne  telle  faute, qu'il  fau 
«Ira  qu'elle  viene  en  conte  dcuant  Dieu.  Car 
nous  ferons  iugez  en  vnemefmemefuredeuat 
«eluy  qui  n'accepte  point  les  perfonnes.mais 
<jui  prononce  en  venté. Cognoiflons  donc, en 
coies  que  le  monde  nous  f.iuorifalt ,  &  qu'vn 
tel  vice  nefuft  point  apperceu  en  nous, ou  que 
ilnefufl  point  cognu  ,  que  nous  n'y  aurons 
rien  gagné, pource  qu'en  la  fin  il  nous  faudra 
paiTer  par  celle  condamnation  de  Demas ,  lî 
nous  neperfillonsiufquesau  bouta  cheminer 
fclon  que  Dieu  nous  appelle  ,  &  pour  retran- 
cher toutes  les  cupiditei  que  Satan  nous  prc- 
fente  pour  nous  faire  aimer  le  monde.  Il  cft 
vray  que  nous  pourrons  bien  auoir  foin  de  no 
flre  vie,&  procurer  les  chofes  qui  nous  y  font 
neceffiiiresimais  c'eâ  auec  tel  lî^  que  nous  ne 
foyons  point  cependât  reculez, ni  deftournez 
de  noftre  vocation. Il  faut  qu'vn  chacun  re^ar 
de  à  quoy  Dieu  l'ordonne,  &  qu'il    ait  fa 
charge. Si  noftre  Seigneur  nous  donne  repos, 
&  que  nous  luy  puifsions  feruir  fans  grans 
combats  ,  remercions-le  de  ce  qu'il  fupporte 
noftre  foiblefle:  &  cependant  toutesfois  gar- 
dons-nous bien  de  nous  endormir  en  nos  ai- 
fes&  délices,  que  nous  ne  laifsions  point  de 
marcherpliis  outre, encores  que  nous  ne  foy- 
ons point  prelTezd'affliftions,&  q  Dieu  voy- 
ant noftre  foiblefle,  ne  vueille  point  lafcher 
la  bride  à  Satan, &  lay  permettre  de  nous  per 
fecuter  lufques  au  bout. Mais  cepédant  fi  Dieu 
veut  que  nous  foyons  affligez,  que  nous  ne  fa 
cions  point  tout  ce  q  nous  délirerions, q  nous 
méprenions  point  d'excufe  pour  dire,  le  ne 
voudroye  point  renoncer  iamais  à  ce  que  i'ay 
cognu  de  l'£uagile,ie  ne  voudroye  point  me 
retirer  de  mô  deuoirmiais  quoyfil  y  a  tant  de 
difficultez  que  lien  plus:  &il  me  femble  que 
ie  ne  laifleray  poït  de  feruir  à  Ditu,&  d'auoir 
mescommoditez.  Voire, mais  voici  Dieu  qui 
nous  appelle  d'vn  cofté,&  nous  tirons  tout  au 
rebours ,  Scnous  femble  qu'il  nous  fera  licite 
de  tourner  bride  ,  &  de  laifler  le  train  lequel 
il  nous  aura  monftré.Ainfi  donc  qu'vn  chacun 
regarde  de  près  à  foy,&  que  nous  cognoifsiôs 
que  veut  dire  cefle  amour  du  monde  dont  par 
le  fainft  Paul.Q^cft-ce  donc  que  l'amour  du 
inondcJC'eft  quand  nous  fommes  retenus  aux 
chofes  prefentes,  tellement  que  cela  nous  re- 
froidit ,  que  nous  ne  pouuons  pas  afpirerau 


Royaume  celcfte.S;  à  cefte  vie  à  JaquejIeDieu 
noui  conuie&  exhorte.   Et  voila  pourquoy 
famû  Paul  i\i,le  monde  qui  tfl  muinttnat.CîT 
parce  mot  il  veut  taxer  ceux  qui  font  telle- 
ment esblouis  en  ces  chofes  caduques ,  qu'ils 
nepenlent  point  que  le  monde  doyue  eftre 
reftauré.Qj^nd  nous  parlons  du  mode,  nous 
ne  Içauons  pas  me  fines  ce  que  nous  difons. 
Carl'cftât  prel'ent  du  monde  eft  iemblableà 
vne  femme  qui  ei\  en  trauail.côme  famd  Paul 
en  parle  au  S.des  Romains.  Car  les  créatures 
ne  font  pas  en  leur  perfcdion  :  à  caufe  du  pé- 
ché d'Adam  tout  eft  aflîuetti  à  miferes:  il  n'y 
a  nefoIeil,nelune,  qui  n'ait  quelque  tache  de 
corruption.  Haut  Si  bas, donc  quand  nous  re- 
gardons au  monde,  nous  voyons  qu'il  eft  ca- 
duque,&  qu'il  n'y  a  rien  decertain:caril  faut 
que  les  marques  de  nos  péchez  nous  foyenc 
mifes  dsuant  les  yeux,afin  de  nous  fane  touf- 
ioursgcmir.En  fomme  (dit  faintl  Paul)  tou- 
tes lescreatures, encores  qu'elles  n'ayét  point 
de  fentiinent,font  comme  des  femmes  qui  tra- 
uaillent.  C'eft  donc  pour  le  moins  que  nous 
qui  fommes  enfans  de  Dieu  ,  qui  auoiis  receu 
les  prémices  de  fonEfpnt  pour  afpirer  à  vne 
perfection,  tenions  compagnieaux  créatures 
infenfibles,qnous  trauaillions  auec  ces  créa- 
tures mortes.  Pour  le  moins  (di-ie)que  nous 
ne  foyons  point  fi  abbrutis  ,qiie  nous  neco- 
gnoifsions  que  maintenant  le  monde  n'eft  pas 
en  fon  eftat,  &  en  fon  intégrité.  Voila  donc  ^ 

pourquoy  notammét  iainft  Paul  a  mis,Umoii- 
i{e  qui  tji  èi  prefeiu.  Côme  s'il  lai  foi  t  vnecora 
paraifon  de  ce  monde  tel  qu'il  eft  maintenant 
auec  ccfte  perfection  que  nous  y  verrons  à  la 
venue  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.  Puis 
qu'ainfi  eft  donc  que  nousapprenions  de  tel- 
lement aimer  ,&  noftre  Dieu.&celuy  qu'il 
nous  a  cnuoyé  pour  Rédempteur, que  ce  mon 
denenous  empefche  point  que  nous  n'afpi- 
rions  toufîours  aux  biens  fpirituels.  Et  c'eft '-P/^.I.S 
ce  q  fainft  Pierre  dit  en  fa  première  Canoni- 
que,que  les  fidèles, cobien  qu'ils  n'ayét  point 
veu  lefus  Chrift,  l'aiment ,  &  font  tellement 
rauis  de  fon  amour.qu'ils  treffaillent  de  ioye. 
Qu.and  vous  oyez  (dit-il  )  que  lefus  Chrift, 
après  vous  auoir  rachetez  de  mort,  vous  a  re- 
cueillis en  la  gloire  des  cicux ,  vous  l'aimez, 
voyâsqu'ils'cft  ainfîexpofepourvoftre  falut, 
voyans  qu'au  facrifice  de  la  mort  &  pafsion 
vous  auezefté  réconciliez  à  Dieu  fon  Père:  là 
vous  cherchez  tout  voftrebien,  &  cela  n'eft 
point  d'vne  affeftion  froidc(dit-il)mais  vous 
treflaillcz  de  ioye.  Si  nous  n'auons  cela,  c'eft 
figne  qu'il  n'y  a  gueres  de  foy  en  nous. Et  aiii 
fi  notôs  bien  que  quâd  l'amour  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrift,  &  fa  venue  fera  engrauee 
en  nos  coeurs, nous  ne  ferons  point  fi  ciuielop 
pez  aux  chofes  du  monde, que  nous  ne  pafsiôs 
toufiours  outre,  &  qu'vn  chacun  ne  regarde  à 
la  charge  qui  luy  c/t  cômife  pour  s'en  acquit- 
ter,&au  chemin  qui  luy  eft  propofé  ,  afin  de 
s'y  auancer,  ayans  toufiours  les  ycuxdrcffc/. 

àccfte 


SVR    LA     II.     A    TIMOTH. 


fcv 


à  cefte  venue  de  noftre  Seigneur  lefus  Clirift 
fluc  nous  attendons, &:  qui  nous  eil  maintenât 
cognue  par  foy.  Voila  doc  ce  que  nous  auons 
à  retenir  quand  l'exemple  de  Demas  nous  eft 
propofé.  £t  en  gênerai  notons  (comme  Tay 
defîa  touché)  que  tous  ceux  qui  font  retenus 
descupiditez  de  ce  monde, pour  h5neurs,pour 
licheuès  ou  pour  plaifirs,  que  ceux-là  feront 
mis  au  rang  de  ce  mal-heureux  qui  ellici  de- 
gradé. Et  ne  faut  pas  qu'ils  alléguée  pour  leur 
réplique  &  excufc, qu'ils  n'ont  point  abandon 
né  lefus  ChnihCar  (comme  défia  nous  auons 
declaré(faindiPaul  n'accufc  point  Demas  de 
auoir  efté  ennemi  de  r£uangile,de  s'ellre  du 
tout  retranché  de  l'F.glifermais  il  l'accufe  de 
s'eftre  retiré  en  lieupaifîble,  d'auoirtuy  les 
coups,  de  n'auoir  point  fouftenu  les  combats 
qui  luy  eftoyent  appareillez. Qnand  donc  vn 
home  fe  voudra  feparer  du  troupeau, ou  pour 
fonaife,  oupourfescommoditez  ,  &  quand  il 
verra  qu'il  y  aura  des  perfecutions  appreftecs 
àl'Eglife,qu'il  fe  retire, il  eft  du  rang  deccux 
qui  ont  aimé  le  monde. Car  fi  nousfçauos  que 
c'eft  d'aimer  lefusChnft ,  il  eft  certain  que 
nous  ferons  tout  difpofez  à  receuoir  les  affli- 
ûions  communes  quand  nous  y  ferons  appe- 
lez.Or  cependant  nou?  auonsànoterq  faind: 
Paul.quclque  necefsité  qu'il  euft  de  la  preftn- 
cede  Timothee,  n'auoit  pas  neantmoins  tel 
regarda  foy  ,  que  cependant  il  ne  pouruoye 
les  Eglifes, félon  qu'il  en  eftoit  befoin.Com- 
nie  nous  voyons  qu'il  enuoye  Tite,  quieftoit 
auec  luy  ,  en  vn  pays  lointain  ,  afçauoir  en 
Dalmatie:il  enuoye  l'autre  en  Afie. Voila  doc 
côme  il  fait  pafler  la  mer  à  ceux  qui  luy  pou- 
uoyenteftre  fidèles  compagnons  ,  &  qui  luy 
pouuoyent  aufsi  bien  feruir  :  toutesfois  il  fe 
veut  bien  priuer  de  toutes  ces  aides-la, voyât 
la  necefsité  vrgente  de  l'Eglife.  Voila  pour- 
quoy  Tay  dit  qu'il  n'a  point  appelé  Timo- 
thee voulant  deftituer  la  ville  d'Ephefe  d'vn 
bon  Pafteur ,  mais  pource  que  les  chofes  y  c- 
ftoyent  plus  paifibles,  que  Timothee  pouuoit 
venir  à  Rome,  fans  qu'il  y  eiiftlà  nul  trouble 
pour  fon  abfence  :  ioint  aufsi  qu'il  enuoye 
Tychique  en  fon  lieu. Voila  pourquoy  il  le  de 
£re  auprès  de  foy.  Mais  cependant ,  combien 
«ju'il  foit  à  l'extrémité  ,  fi  ell- ce  qu'il  ne  met 
point  en  oubli   les  chofes  qui  eftoyent  bien 
loin  de  luy.  Car  il  ha  toufiours  la  folicitude 
paternelle  de  toute  l'Eglife  de  Dieu.que  fi  en 
quelque  angletdu  monde  ily  auoit  quelque 
thofe  à  redire,  il  ne  demandoit  finon  d"y  en- 
uoyer  quant  &  quant  le   remède  lelon  fon 
pouuoir.  Quand  donc  nous  voyons  cela, ap- 
prenons que  nous  ne  deuons  point  eike  telle- 
ment adônez  à  nous, que  nousnepenfion   en 
gênerai  de  toute  l'Eglife.  Et  c'eft  vue  Icçô  q 
nous  auons  bon  meftier  de  recorder,  attendu 
noftre  lafcheté  telle  qu'on  la  voit. Car  fi  nous 
fomme  bien  ,  nous  ne  penfons  gueres  à  nos 
frères, lefquels  font  tourmentez. Les  feur  fe- 
ront alluaicz  par  tout ,  noui  orrons  ce  qu'on 


machine  contre  les  enfans  de  Dieu  ,  nous 
verrons  les  troubles  &  fcandales.nous  en  or- 
rons parler:&  ne  faut  pas  que  ce  foie  de  trois 
cents  lieues  loin,  mais  quaii  à  nos  portes.  En 
fommcs-nous  touchez  ?  Or  quand  il  n'y  a  au- 
tre humanité  en  nous,penfons-nous  que  Dieu 
nousaduoue  pour  fes enfans,  veu  que  nous 
deurions  auoir  compafsion  de  toute  l'Eglife, 
Se  que  nous  deurions  eftre  participans  du  bien 
&  du  mal.=  Qu_'vn  chacun  donc  apprene,  à  l'e- 
xemple de  fainû  Paul,  de  n'auoir  point  vn 
tel  regard  à  ia  perfonne  ,  qu'il  n'eftende  ù 
folicitude  à  toute  l'Eglife  ,  &  qu'il  ne  talche 
de  pouruoir&  remédier  à  tout  le  mal  qu'il  y 
voit  eftre.chacun  félon  fon  degré  &  fa  mefu- 
re.  Il  eftvray  que  nous  n'aurons  pas  tous  le 
moyen  qui  eftoit  donné  à  fainft  Paul  :  mais 
fi  faut-il  qu'vn  chacun  s'efforce  félon  fa  fa- 
culté,de  fubuenir  à  toute  l'Eglife  de  Dieu:  & 
fi  nous  ne  pouuons  mieux,  que  pour  le  moins 
Dieu  foit  tefmoins  de  noftre  affeftion  ,  que 
nous  le  requérons  pour  nos  poures  frères  qui 
font  tourmentez  ;  quand  il  nous  donne  loifir 
&  repos ,  que  cela  nous  incite  à  regardera 
ceux  qui  font  plus  preflez  que  nous.   Finale- 
ment iiinft  Paul  dit  à  Timothee, QwV/jfpor- 
te  en  Tenant,  ou  U  mnuteline  ,  ou  l  ejiny  des  li~ 
ures ,  nuec  Us  Hures ,  &•  fur  tout  Us  fanhtmtns 
qu'il  auoit  UijJ'eKtn  la  yilU  de  Troade.    Or  ici 
nous  voyons ,  combien  que  fairft  Paul  fuft 
prochain  de  la  mort  .qu'il  nelaiffepas  neant- 
moins de  toufiours  eftre  efcholier ,  afin  qu'il 
foit   mieux  difpofé  à  enfeigner  les  autres. 
Quant  au  mot  de  Kanteline  ,  aucuns  le  pre- 
neur pour  vne  efpece  de  robe  qui  eftoit  pour 
la  pluye.  Or  fi  on  le  prend  ainfi,  ce  fera  bien 
vn  figne  que  fainû  Paul  n'auoit  pas  toutes  les 
comraoditez  du  monde,  demandant  de  fi  loin 
vn  manteau  pour  fecouurir  en  prifon.  Mais 
pource  qu'il  adioufte  les  Iiures,&  les  parche- 
mins ,  il  eft  vray-femblable  que  ceci  fe  prend 
comme  pour  vn  buffet ,  ou  quelque  layette  à 
ferrer  les  liuies.  Tant  y  a  que  nous  voyons 
(comme  i'ay  defîa  touché)que  fainft  Paul  de- 
fire  toufiours  de  profiter  ,  cneores  qu'il  fe 
voyevn  piedquafi  au  fepulchre.   Or  notons 
que  c'eft  celuy  qui  auoit  efté  raui  iufques  au 
troifieme  ciel ,  qui  auoit  veu  les  fecrets  in- 
comprehenfibles  aux    hommes ,  &  lefquels 
mefmcs  il  n'ofe  pas  exprimer .   Quand  nous 
voyons  que  fainft  Paul  qui  a  eu  de  telles  re- 
uelations  ,  voire  par  defliis  tous  les  Apoftres» 
que  nous  voyons  qu'encores   il  eftudic  ,  qu'il 
demande  les  liures  pour  fon  vfage,  &  qu'il  le 
fait  eftant  en  prifon  ,  ayant  comme  dcfpouil- 
lé  ce  corps-ci  ,  &  fe  voyant  prochain  de-la 
mort,  qu'il  eftoit  défia  comme  à  demi  fortir 
de  ce  monde,  que  fon  ame  tftoit  plus  rauie  en 
haut  qu'elle  n'habitoit    en  fon  corps,  que 
nous  voyons  qu'encores  il  ha  le  ioin  d'eftu- 
dier  :  Helas  Ique  deuons-nous  faire?  Ainfi 
mal-heur  fur  noftre  lafcheté  ,  quand  ceux 
qui  font  ignorans, n'ont  point  aucun vo»- 

Sf.iw 


^o? 


SERMON    XXX. 


loir  de  profiter  ea  fEoingile  ,  comme  on  le 
voit. Car  ceux  qui  font  ii  beftes  que  rien  plus, 
qui  ne  feauroyent  dircvn  mot  pour  rendre 
raifonde  leur  foy, s'ils  font  exhorter  de  s'a- 
donner i  lire  ,  &  à  cuir ,  Ho  ,  ie  ne  fuis  point 
clerc,  (  diront-ils  )  ce  n'eft  pas  mon  office. 
Voila  comme  les  vns  fous  ombre  de  leur  igno 
rance  cuident  eftre  cfchappez  :  les  autres  (î 
toft  qu'ils  auront^  quelque  cognoiflance  de 
Dieu ,  &  qu'ils  pourront  difputer  de  l'Efcri- 
tiire  fâiniîie.les  voila  enflez  d'vne  vaine  gloi- 
re ,  tellement  qu'il  leur  femble  qu'ils  en  fça- 
«ent  trop,  il  n'efb  plus  queftiond'cftudier;  & 
«icfmes  cela  feroit  diminuer  de  leur  réputa- 
tion, qu'il  faut  qu'ils  facent  femblantde  tout 
fçauoir  :  Se  principalement  s'ils  ont  quelque 
ellime  qu'on  les  repute  grans  dofteurs.il  faut 
flue  les  liares  foyét  fermez, ils  n'ont  plus  d'v 
fage,ils  ne  font  plus  de  faifon  :  mais  tant  y  a 
que  nous  voyons  ici  que  famû  Paul  (  duquel 
nous  n'approcherons  iamais  tout  le  temps  de 
noftre  vie)  eftant  paruenu  à  fa  dernière  per- 
fection,ne  laiflc  pas  encores  de  s'appliquer  à 
Peilude  :  &  ne  le  fait  point  par  hypocriiie,ce 
n'eft  point  vne  humilité  feinte,  mais  il  le  fait 
fçachant  que  iamais  il  ne  fera  trop  idoine 
pour  enfeignerFEglifede  Dieu.  Etpourtac, 
quand  nous  voudrons  eftre  bons  maiflres  & 
bons  doaeurs,il  nous  faut  commencer  par  ce 
bout ,  d'eftre  efcoliers ,  &  que  ce  ne  foit  pas 
pour  le  commencement,  mais  il  nous  y  Eiut 
(employer  tout  le  temps  de  noftre  vie. Quand 
donc  fainft  Paul  nous  monflre  vn  tel  exem- 
ple, quelle  honte  fera-ce  à  nous  quand  nous 
en  penferons  fçauoir  aflcz,  quand  nous  auros 
comme  en  paflant  regardé  de  loin  ce  qui  eft 
contenu  en  l'Efcriture  fainûe?  Notons  bien 
donc  qu'ici  nousibmmes  exhortez  en  gêne- 
rai de  nous  confermer  tout  le  temps  de  no- 
ftre vie  en  la  dodirine  de  falut.Et  pour  ce  fai- 
re que  nous  (cachions  qu'il  ne  faut  point  que 
nous  demeuriôs  le  bec  ouuert,  mais  que  nous 
aduifions  d'vfer  des  moyens  que  Dieu  nous 
donne.  Que  nous  fréquentions  les  fermons, 
^ue  nous  ayôs  la  leélure  de  la  parole  de  Dieu 


pour  recommandée  ,  .^ue  nous  devrions  d'e- 
ftre édifiez  par  bons  propos  &  fainfts ,  que 
nous  ne  cefsions  ne  foir  ne  matin  d'appren- 
dre quelque  bonne  fentence,  qui  fou  pour 
nous  rafrefchir  la  mémoire  de  ce  que  nous 
pourrions  auoir  oublié, &  de  ce  qui  nous  pour 
roit  aduanceren  la  cognoiflance  que  Dieu 
nf)us  a  donnée  de  fa  venté.   Et  fur  tout  que 
ceuxqui-ont  la  charge  d'en feigner  les  autres 
regardent  bien  à  eux  :  car  quelques  habiles 
qu'ils  foyent.il  s'en  faut  beaucoup  qu'ils  ap- 
prochét  de  fainft  Paul. Puis  qu'ainlî  eft  donc, 
qu'ils  auifent  de  fe  recommander  à  D!eu,afia 
qu'il  leur  face  la  grâce  de  touiîours  auoir 
plus  ample  cognoiflance  de  fa  volonté,  pour 
diftribuer  aux  autres  ce  qu'ils  ont  receu.    Ec 
quand  ils  auront  fidèlement  enfeigné  tout  le 
temps  de  leur  vie,  quand  fe  viendra  à  la  mort 
mefme,  qu'ils  défirent  encores  de  profiter, 
pour  communiquer  à  leurs  prochains  ce  que 
ils  ont  cognu  ,  &  que  grans  &  petis,&  les  do- 
fteurs  ,  &  le  commun  peuple  qui  doit  ouir ,  Se 
les  fages,  &  les  idiots,  &:  les  riches,  &  les  po- 
ures,&  les  vieux, &  les  ieiines:  que  tous, par  ce 
qui  nous  eft  ici  monftré,  foyent  exhortez  de 
tellement  profiter  tout  le  temps  de  leurvie, 
qu'ils  ne  fe  laflent  iamais ,  iufques  à  ce  qu'ils 
ne  voyent  plus  en  partie  ni  en  vn  miroir,mais 
qu'ils  contemplent  la  gloire  de  Dieu  face  à 
face. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  nôllre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  luy  plaifene  nous 
les  point  imputer.  Et  cepédant  qu'il  nous  re- 
forme tellemement  à  foy  ,  que  nous  ne  defî- 
rions  finon  de  luy  complaire  pour  confacrer 
toute  noilre  vie  à  fa  fainfte  Loy.Et  puis  qu'il 
ne  fe  peut  faire  que  nous  ne  foyons  touiîours 
empefchez  de  beaucoup  d'infirmiter  ,  qu'il 
nous  fupporteiufquesàcequenous  en  foyons 
defpouiliez  pleinement ,  &  qu'il  nous  reuefte 
de  cefte  perfeftion  à  laquelle  nous  afpirons 
maintenant.Ainfi  nous  dirons  tous,Dieu  tout 
puiflànt,  Père  celefte,&c. 


SIXIEME     SERMON     SVR     LE 

Q_y  ATRIEME      CHAPITRE. 

14  Alexandre forgeur  m  a  fait  beaucoup  de  maux  :  nofire  Se/- 
gneur  luy  rendefelonfes  œuures. 

iç  (Duquel garde  toyaufi)  car  il d grandement  reJîFlé à  m^pa 
rôles. 

16  Nul  ne  m'a  afi^é  en  ma  première  dcfcnjê,mais  tous  m'ont  de* 
laijjc.iepriequ  il  ne  leur  foit  point  imputé. 

17  Mais  le  Seigneur  m'a  ajiiîié,  O'  ni  a  fortifié,  afin  que  la  pré- 

dication 


SVR    tA    II.    A  TIMOTFÎ.  5-05 

iîcdtionfujl  accomplie  pdr  moy ,  ç^r  que  tous  les  Gentils  touiffent.  Et 
ty  ej\c  delmré  de  la  gueule  du  lion: 

18     Et  leSeigneurme  deliurera  de  toute  mauuaife  œuure ,  ^  me 
fduueYden  fonroyalUmc  celejle.  Mquelfoit  gloire  a  toufiours-mais. 

Amen, 

1^     Salue  Vrifce  o*  A^«i/e,  o*  la  famille  d!OneJiphor\ 

lo  Erajîe  ejl  demeuré  à  Corinthe ,  0*  ay  laijfé  Trophïmc  mala- 
de à  Milet. 

z  i  Diligente  -  toy  de  yenir  deuant  fhyuer.  Eubulc ,  O*  ^tidcns, 
(j"  LimSiO'  Claudia,  (f  tous  les  frères  te faluent 

z  2.  Le  Seigneur  le  fus  Chrijlfiit  aucc  ton  efprit.  Grâce  foit  auec 
'^oustkmen. 


L  femblebien  de  prime  fa- 
ce que  faîâ:  Paul  ait  efté  ici 
tranlporté  d'affeilion  trop 
véhémente,  quand  il  deman 
de  à  Dieu  qu'il  fe  vége  d'A 
lexandre  le  forgeron  :  car  à 
Toppoiite  ,  tant  s'en  faut 
qu'il  fe  foit  ainlî  efmeu  contre  ceux  qui  n'ont 
point  fait  leur  deiioir  pour  luy  aider  ,  que 
pluftoft  il  prie  Dieu  qu'il  leur  pardonne.  On 
diroit  qu'ily  a  ici  deux  prières  qui  ne  font 
point  conuenables. Voici  fainû  Paul  qui  par- 
le d'vn  homme  lequel  luy  auoit  refîfté:il  par 
Je  de  pluiîeurs  autres  qui  s'eftoyent  raonftrez 
lafches  &  froids  à  maintenir  la  querelle  de 
l'Euangile.Oi  du  premier  ildit.Qaf  Di'fH  hy 
rendefelonft  s  démérites  ,  que  Dieu  le  punifle 
àla  rigueur. Et  c'ell  autant  comme  s'il  dif  )it, 
que  iamais  Dieu  ne  luy  foit  propice, &  ne  luy 
face  merci ,  mais  qu'il  l'abyfmeaux  enfers. 
Des  féconds  il  dit  que  Dieu  en  ait  pitié:  com 
bien  qu'ils  ayent  vfcd'vne  telle  trahifon  & 
defloyauté,  toutesfois  encores  que  Dieu  leur 
pardonne  vne  telle  offenfe.  Mais  quand  nous 
aurons  bien  tout  confideré ,  nous  trouuerons 
que  fain£l  Paul  a  elté  efmeu  d'vn  zèle  pur  & 
droit  contre  Alexandre  forgeron:  &  que  ce- 
pendant Dieu  Ta  aufsi  gouuerné,  afin  qu'il  fe 
moderaft  cnuers  les  autres  ,  encores  qu'ils 
n'en  fuffent  point  dignes.  Mais  pour  mieux 
comprendre  le  tout  ,  notons  en  premier  lieu 
que  ceft  Alexandre  forgeron  (  ou  vn  fondeur 
de  cuiure)dont  il  parle,  auoit  du  commence- 
ment monftré  grand  ligne  de  Chrcftienré,  en 
forte  qu'on  l'eftimoit  des  plus  aiianccz.  Or  il 
ne  fecôtente  pointdc  tourner  fa  robbe(com 
me  on  dit)mais  il  fe  déclare  ennemi  manife- 
ôe  de  l'Euangile  ,  &  combat  contre  la  ven- 
té de  Dieu  tant  qu'il  peut ,  &•  eft  mené  d'vne 
telle  rage,  qu'il  c/lla  partie  aduerfede  fainft 
Paul  pour  batailler  contre  luy .    Car  il  n'eft 
point  queûiofl  icid'infirmité:comme  nous  en 


verrons  qui  par  crainte  flechiff'ent,&  ne  moa 
firent  pas  vne  telle  conftice  qu'il  feroitàde- 
firer.Ceux  donc  qui  calent  la  voile  eftïs  vais 
eus  de  toiblefle, encores  font-ils  dignes  de  pi 
tié.  Mais  vn  homme  qui  fe  desborde  iufques 
là, de  refifter  à  Dieu ,  &  de  fouller  au  pied  fa, 
parole  ,  &  blafphemer  contre  la  doftrine  de 
falut,de  mettre  peine  qu'elle  foit  anéantie, il 
faut  bien  qu'vn  tel  homme  foit  du  tout  polie 
dé  de  Satan  ,  &  qu'il  porte  comme  la  marque 
de  réprobation.  Voila  donc  pourquoy  S. Paul 
vfe  d'vne  telle  véhémence  cotre  ce  forgeroa 
ci, d'autant  qu'il  n'y  auait  point  en  luy  quel- 
que fragilité,ainfi  qu'il  aduiendraaux  enfans 
de  Dieu ,  mais  pluftoft  vne  rage  diabolique. 
Car  il  faloitbié  qu'il  fuft  defefperé  du  tout, 
quad  il  fe  manifefte  ainfiaduerfaire  de  l'E- 
uâgile.  Nous  voyons  donc  maintenant  côme 
S.  Paul  en  tout  &  par  tout  a  tenu  mefure.  Car 
quand  il  a  veu  les  poures  débiles  qui  ne  s'e- 
ftoyét  point  acquittez, il  en  a  eu  compafsion, 
voyant  qu'ils  eftoyent  comme  poures  brebis 
efgarees,&  a  demâdé  à  Dieu  qu'il  ne  leur  fuft 
point  imputé. Voila  donc  vne  charité  où  le  S. 
Efprit  domine.  Mais  cependant  il  n'a  pas  ef- 
pargné  vn  homme  du  tout  reprouué:quand  il 
a  veu  qu'il  n'y  auoit  pl'de  remède, mais  qu'il 
eftoitdu  tout  incorrigible,il  a  alors  defployc 
fon  zèle  iufques  au  bout ,  demandant  à  Dieu 
qu'il  l'abyfmaft  fans  aucune  remifsion  .  Or 
pour  appliquer  cefte  dotirine  à  noftre  vfage, 
notons  en  premier  lieu, que  Dieu  a  voulu  hu- 
milier fainû  Paul  quand  il  luy  a  fiifcité  vn  tel 
homme  en  cobat.Si  en  fait  comparaifon,  voi 
la  vn  homme  raechaniqiie,  on  ne  dira  point 
qu'il  foit  lettré, ne  de  grand  efprit  :  &le  plus 
grand  titre  que  fain£l  Paul  luy  donc,  c'eft  de 
î'appeller  ou  forgerô,  ou  fondeur  de  cuiure: 
&  toutesfois  il  faut  que  S.  Paul  entre  en  di- 
fpiite  auec  luy.    Si  c'euft  efté  vn  homme  fort 
fubtil  &  fçauant ,  encores  euft-on  dij  qu'il  y 
auoit  partie  égale.  Mais  il  a  pieu  à  Dieu  d'e- 

Sf.iii. 


510  S  E  R  M  O 

otcrcerainfî  fain£t  Panl.Et  par  cela  nous  voy- 
yons  que  quelques  fois  il  nous  faudra  bien 
fouflenirdes  combats  contre  des  gens  de  nul 
le  valeur  ,  qui  ne  méritent  point  qu'on  ouure 
la  bouche  pour  répliquer  contre  leur  babil: 
ce  lont  des  chiens  qui  abbayent  pour  tout  po 
tage  :  fi  faudra-il  que  les  leruiteurs  de  Dieu 
vienent  ici  en  qombat.Or  s'ils  penfent  que  ce 
la  derogue  à  leur  réputation  ,  il  faut  venir  à 
ce  poinrt.c'eft  que  quâd  nous  feruons  à  Dieu, 
combien  qu'il  femble  que  noftre  labeur  foit 
fnuole  &  inutile  ,  qu'il  nous  doit  bien  luffire 
que  Dieu  nous  approuue.  Qjiand  donc  nous 
aurons  affaire  à  gens  de  null'çauoir  &  de  nul 
efprit.tî  fâut-il  neautmoins  que  nous  tenions 
bon  en  combatant  pour  la  vérité  ,  &  qu'il  ne 
nous  chaille  de  ce  que  le  monde pen fera,  ou 
<3e  ce  qu'on  pourra  dire:  car  il  nous  faut  pluf- 
toft  regarder  à  Dieu  qui  nous  veut  exercer 
•  par  tel  moyen.  Et  de  iait.nous  voyôs  qu'il  a 
Exe.  13.  bien  falu  que  le  Prophète  Ezechiel  côbattft 
1^.  contre  des  femmes, des  forcieres  qui  contre- 
faifoyent  des  prophetefles  de  fon  temps, il  a 
falu  qu'il  s'adrelTall  .1  telles  perfonnes.  Il  eft 
vray  que  cela  n'eft  point  conuenable  félon 
le  fens  commun  à  la  dignité  d'vn  Prophète: 
mais  il  a  conclu  qu'il  faloit ,  puis  que  le  dia- 
ble regnoit  en  ces  femmes-la  ,  qu'il  prinft  la 
Querelle  de  la  vérité  de  Dieu,  contre  les  men 
fonges  &  les  abus  de  Satan.  Ainlî  donc  nous 
en  faut-il  faire.  Car  ce  n'efl  point  à  nous  de 
choifîr  les  parties  afin  de  nous  monftrcr  & 
d'auoir  plus  grand  luftre  quand  nous  aurons 
abbatu  quelque  homme  de  grand  crédit  &  re 
iiom:cc  n'eftpas  ànous  de  choiiîr  cela. Con- 
tentons-nous que  noftre  Seigneur  nous  met- 
te en  la  lice  ,  &  que  là  il  nous  cfprouue  :  Se 
^ue  quand  nous  aurons  tafché  de  le  feruir, 
que  nous  fçachions  que  ce  que  nous  aurons 
fait  luy  eft  agréable  ,  combien  que  le  monde 
«n  juge  àJ'oppoftte.  Voila  pourvn  item,  que 
nous  ne deuons point  auoir  honte,  H  quel- 
ques fois  il  nous  faut  batailler  contre  des  gés 
maloftrus.qu'on  appelle.  Cependant  nous  a- 
uons  aufsi  à  noter  qu'il  n'y  a  audace  qu'aux 
plus  ignorans.  Car  vn  homme  d'efprit  Si  de 
Içauoir,  encores  qu'il  foit  malin,  aura  en  foy 
plusdemodeftie  queceluy  qui  n'aura  iamais 
lien  cogiui:car  là  il  n'y  a  nulle  honte.  Ce  for 
geron  donc  dont  il  eft  ici  parlé,  nous  eft  com 
me  vn  miroir  d'impudence  telle  qu'on  la  voit 
en  ces  yileins  qui  ne  fçauent  que  c'eft  de  nul- 
le honnefteté  ,  ils  ne  feront  nul  fcrupule  de 
s'eleuer  contre  Dieu  &  les  hommes,  ce  leur 
eft  tout  vn  ,  on  ne  gagne  rien  à  leur  amener 
nulle  raiibn  ,  car  ils  font  des  fûwrds,&  ne  les 
pourra-on  faire  rougir  en  façon  que  ce  foit. 
Que  ceux  donc  qui  s'elcuenc  contre  les  fer- 
uiteurs  de  Dieu  ne  fe  prifent  pas  pour  dire 
qu'ils  les  ont  fafchez&molellcz  :  car  il  les 
faut  renuoyer  au  rang  &  à  la  côpagnie  de  ce- 
Juy  dont  parle  ici  fainft  Paul.  Comme  nous 
Terroaiauiourd'huy  beaucoup  de  canailles, 


N     XXX. 

ces  yur5gnes,ces  fuppofts  de  tauerne,^'  gens 
femblables,  quidefgorgerot  làleur  vilenie, ft 
leur  femble  qu'ils  gagnent  beaucoup  quand 
il  auront  dénigré  les  leruiteurs  de  Dieu.  Or 
s'ils  fe  glorifient  en  cela, quel  honneur  eft-ce 
qu'a  Alexandre  forgeron  d'eftre  ici  enregi- 
firé  en  la  parole  de  Dieu.finon  que  noftre  Sei 
gneur, comme  l'ay  défia  dit, a  voulu  monftrer 
vn  patron  de  celle  audace  effrontée  qui  eft 
en  tous  ignorans ,  lefquels  font  la  guerre  à 
Dieu  fans  lugement  ne  fans  raifon  ,  mais  y 
vont  d'vne  pleine  furie.?  Quand  donc  nous 
voyons  tels  exemples  de  noftre  temps, ne  les 
trouuons  point  nouueaux ,  cognoiflans  que 
Dieu  dés  le  commencement  a  voulu  que  tel- 
les efpreunes  fuflent  en  fon  Eglife.afin  qu'au 
iourd'huy  nous  y  foyôs  tous  mieux  endurcis. 
Au  refte  ,  notons  quand  Dieu  lafche  la  bride 
à  Satan, qu'il  s'aidera  de  tous  inftrumés,  &  les 
appliquera  tellement  en  ouurage,  qu'on  fera 
esbahi  comme  il  eft  pofsible  que  ceux  qui  n'a 
uoyent  au  parauant  ni  efprit ,  ni  habilité  (ce 
femble)feront  comme  grans  clercs  à  mal  fai- 
re. Mais  en  cela  cognoiflons  quand  il  plaift  à 
Dieu  de  donner  licence  à  Satan, qu'il  trouue- 
ratoufiours  des  fuppofts  qui  luy  font  pro- 
pres ,  &  que  nous  foyons  admoneftez  de  re- 
cognoiftrc  la  grâce  que  Dieu  nous  fait  quand 
il  tient  les  mcfchans  bridez. Car  quant  à  bien 
faire ,  nous  y  fommes  tant  tardifs  que  c'eft 
pitié  :  mais  au  mal ,  chacun  ne  fera  que  trop 
agile  &  trop  prompt.  Quand  donc  nous  ver- 
rons le  monde  eftre  rempli  de  gens  malins, 
&  contempteurs  de  Dieu  ,  &  qui  nedcman- 
deroyent  qu'.î  mettre  tout  en  confufion  ,  co- 
gnoiflons que  Dieu  nous  fait  vne  fînguliere 
grâce  de  ce  qu'il  ne  leur  lafche  point  la  bri- 
de ,  &  qu'ils  font  là  retenus  :  car  autrement 
il  y  auroit  beaucoup  de  forgerons  au  mon- 
de ,  lefquels  s'oppoferoyent  à  la  vérité  .  Or 
cependant  nous  auons  aufsi  à  obferuer ,  que 
ceux  qui  ont  vne  fois  gouftc  r£uangile,font 
pires  ennemis,  &  plus  enuenimez  cet  fois  que 
les  poures  aiieugles  q  n'ont  iamais  cognu  que 
c'eiloitde  pirredoftrine:  ceux-la(di-ie)font 
plus  rufez  à  mal  faire  beaucoup:comme  on  le 
voit.  Car  ces  apoftus  qui  ont  elle  méfiez  par 
mi  nous ,  &  qui  ont  mefmes  efté  enfeignez, 
quand  ceux-là  fe  reuoltent,&:  qu'ils  viencntà 
defpiter  Dieu  ,  il  eft  certain  qu'ils  font  beau- 
coup plus  propres  à  renuerfer  la  vérité, à  lal- 
fifier  tout ,  que  ne  font  pas  les  poures  Papi- 
lles, etKores  qu'on  les  eftime  grans  dodeurs. 
Et  pourtît  ne  trouuons  point  auiourd'huy  e- 
ftrange,fi  ceux  qui  ont  efté  comme  du  trou- 
peau de  lefusCluill,  &  qui  ont  ellédome- 
fliqiies  de  l'Eglife  ,  après  s'eftre  de^b3uchez, 
font  corne  demi  diables  poui  delguifcr  la  ve 
rite.  Et  nous  voyons  ce  qui  en  eft  aducnu  du 
téps  de  S.PauI.Toutesfois  nous  auons  à  nous 
confolcr,  q  Dieu  en  lafchât  amfi  la  bridt  à  Sa 
tan,  donne  toufiours  viftoire  à  fi  venté  en  la 
fin:&  non  feulement  contre  ces  ignorans  qui 

p'onr 


SVR   LA  lî.    A   TIMOTH. 


f" 


n'ont  qu'vne  audace  elFrôtee,  mais  contre  lej 
plus  fubcils  doûeurs  q  foyent  an  mode. Ayons 
dcnc  la  vérité  de  noftre  part.inuoquons  Dieu, 
&  cheminons  en  fimplicité,&  ne  doutés  point 
que  nous  ne  demeurions  toulîours  viûorieux 
contre  nos  ennemis.  Il  eft  vray  que  ce  ne  fera 
pas  fans  eftre  fafchez  &  tourmentez  :  car  ce 
n'eft  point  fans  caufe  que  fainft  Paul  dit  que 
ceft  Alexandre  forgeron  luyamonftré  beau- 
coup de  mal.carvoilalemot  dont  il  vfermais 
c'eft  à  la  façon  cômune  de  parler  de  fon  langa 
ge,  qui  vautautât  comme  s'il  difoit,Il  m'a  fait 
beaucoup  de  mal .  S.  Paul  donc  combien  qu'il 
fuft  foufbenu  de  la  vertu  du  fainftEfpritjCom 
bien  qu'en  vn  mot  il  peuft  rembarrer  tous  les 
fnefcnansqui  refiftoyent  àla  vérité  ,  n'a  pas 
laifTé  toutesfois  d'eftre  fort  empefchéen  ce 
combat. Et  pourquoy ?Dieu  l'a  voulu  ainiî  hu- 
milier. Ainii  donc,  combien  que  les  mefchans 
ayent  quelques  fois  la  vogue, &:  qu'on  leur  ap 
plaudifle ,  &  qu'il  femble  que  nous  deuions  c- 
îlre  opprimez,  ne  nous  eftonnons  point  pour 
cela,i^âchans  hien  que  i'iinft  Paul  ne  fe  plaind 
pas  fans  caufe  ,  qu'il  a  fouilenu  beaucoup  de 
mal  par  vn  forgeron  .Comme  auiourd'huy, 
quand  il  y  aura  quelque  rurtre  qui  s'eleuera 
contre  la  pure  do6irinedc  l'Euangile,  il  aura 
vne  longue  queue  apres,(S:  grande  fequellf  .Et 
pourquoy-  Car  combien  que  tous  faccntpro- 
fcfsionde  l'Euangilc, tarit  y  a  qu'àgrand'pei- 
ne  en  trouucra-on  de  dix  Pvn,  qui  ne  deman- 
de fînon  que  les  chofes  foyent  confufes, qu'on 
ne  fceuft  qui  l'a  gagné  ou  perdu  .  Et  pour- 
quoy?Caril  leur  femble  qu'alors  ils  auroyent 
licence  de  mener  vne  vie  diflolue  &  de  fe  moc 
quer  pleinement  de  Dieu  .  D'autant  donc  que 
la  religion  elt  comme  vne  bride  pour  retenir 
les  hommes,paurce  qu'ils  feroyent  comme  be 
ftes  fauuages,  voila  comme  beaucoup  de  gens 
aiment  les  combats, &  les  difputes,&:toufiours 
les  plus  mefchans  l'emportent .  Mais  quand 
nous  voyons  cela(comme  i'ay  dit)portous-le 
patiemment  ,&  ne  doutons  pas  que  Dieu  ne 
donne  telle  ifTue  comme  faintt  Paul  l'a  expé- 
rimentée .  Car  en  fa  perfonne  nous  auons  vn 
tefmoignage  comme  Dieugouuerne  toulîours 
les  liens,  &  qu'il  leur  donne  la  viftoire,  com- 
bien que  pour  vn  temps  il  les  trauaille.Or  il  y 
a  cependant  à  noter  q  fainû  Paul  ne  fe  plaind 
point  qu'Alexâdre  forgeron  luy  ait  fait  beau- 
coup de  mal  en  faperfonne.qu'ilait  pourchaf 
fé  fa  mort, qu'il  luy  aitditdesiniures  :mais  il 
dit  qu'ilarefiftéàfadodrine.Notonsdoncfi 
nous  fommes  enfans  de  Dieu  ,  que  ceci  nous 
doit  plus  naurer  le  cœur,&  nous  apporter  plus 
grande  trilteire,quand  nous  voyos  qu'on  bla- 
fphcme contre  Dieu, qu'on  defguife  &  qu'on 
falfifie  fa  vérité, que  fi  on  nous  faifoit  tous  les 
outrages,  &  toutes  les  violences  qu'il  ell  pof- 
Tft.g?,    fîbic  ()e  penfer.Et  de  faid,  R  la  vérité  de  Dieu 
lo,  lean  ^e  nous  cft  precicufe  lufques  là, où  fera  noihe 
l.i8,ro>n  zeleJCequicftefcritau  Pfeaume,  côbien  qu'il 
'î'3-  -     ai(  eRé  accompli  en  Ja  perfonne  de  noftre  Sei 


gneur  lefus  Cbrift.fainft  Paul  l'ipptique  à  to* 
Hdcles:c'eft  que  quand  ils  oyent  que  rhôneur 
de  Dieu  ell  vilipendé,  qu'ils  doyuent  prendre 
cela  à  eux,  &  qu'ils  doyuentauoir  vnzele  «ti» 
leur  ronge  le  cœur,  &  qui  les  deuore  du  tout, 
qu'ils  n'ayent  nul  repos  en  eux  .  Si  nous  n'a- 
uons  cela ,  nous  monftrons  que  nous  n'auons 
nul  zèle  ni  amour  à  noftre  Dieu  :  &  pourtant 
que  nous  ne  fommes  pas  dignes  d'eftre  rcpu- 
tez  les  enfans.  Car  qui  ell  celuy  qui  foufFrira 
qu'on  fe  mocque  de  fon  père?  &  toutesfois  ce 
eft  vne  créature  terrienne ,  &  de  nulle  valeur. 
C^uj  ofera  donc  fe  vanter  d'eftre  enfant  dc- 
Dieu  ,  Se  cependant  il  ne  luy  chaudra  que  le 
nom  de  Dieu  loit  en  mocquerie,  que  fa  vérité 
foit  là  expofce  à  tous  blafphemes  >  Voila  ce 
que  nous  auons  à  retenir:que  fi  on  s'eleue  con 
tre  Dieu,&  contre  la  pure  doftrine  de  l'Euan 
gile,  que  nous  deuôs  eftre  plus  fafchez  &  tour 
mentez  Je  cela,  que  fi  on  nous  faifoit  tous  lej 
opprobres&  outrages  qu'il  eftpofsible  à  nos 
perfonnes.Et  voila  pourquoy aufsi  fainctPaul  Gal-^-t» 
dit  qu'Ifaac  a  efté  perfccuté  par  Ifmael .  Il  ne 
eft  point  queftiô  gu'Ifmael  ait  batu  ni  frappé 
fon  frère  Ifaac  ,  ne  qu'il  l'ait  deiheritéde  fon 
héritage,  qu'il  l'ait  dechafle  par  force  de  11 
maifon:  mais  qu'il  s'eft  mocqué.  Voila  feule- 
ment vn  petit  mot  de  rifce,&-  fainft  Paul  l'ap- 
pelle  perfecution.Et  pourquoy?  Or  c'eft  là  oii_ 
il  nous  faut  eftre  enflammez  .  Quand  nouï 
voyons  que  la  maieftc  de  Dieu  eft  vilipendée 
par  les  hommes  ,  quand  nous  voyons  des  ver- 
mines, des  charongnes  qui  prenent  cefte  aud* 
ce  de  s'eleuer  contre  leur  Créateur ,  quand 
nous  voyôs  que  la  dotlrine  qui  doit  eftre  com 
me  le  fccptre  royal  par  lequel  Dieu  exerce 
fon  Empire  fur  tout  le  monde  ,  5:aufsi  en  la- 
quelle confifte  noftre  lalut,  eft  conuertie  ainfî 
en  l'opprobre  des  hommes, faut-il  que  nous  le 
fouffrions  fans  monftrer  aucune  trifteffe  &  an 
goifle  en  nous?C'cft  ce  que  nous  auons  à  rete- 
nir en  bnef  de  ce  paflàge  ,  quand  fainft  Paul 
pour  toute  complainte  des  maïux  qu'il  a  endu- 
rez de  ce  forgeron  ,  dit ,  Il  a  refiflè  à  mes  pro- 
pos. Il  n'allègue  pas  ic:  qu'il  aitenduic  au- 
cune peine  pour  foy  ,  mais  pource  qu'il  a 
veu  qu'il  bataillait  contre  la  venté.  Or  ve- 
nons maintenant  àlaprieie  que  faind  Paul 
fait  contre  luy.  Q»'r7  luy  foit  re!}du{àit-û)  fé- 
lon qu'il  ta  defferui.  Nous  auons  défia  déclaré 
que  làincl  Paul  n'a  point  efté  efmeu  de  choic- 
re,  (Scd'vne  impetuofiié  contre  ce  forgeron: 
mais  q  ce  zele-ci  a  efté  gouuerné  par  le  faintl 
Efprit, tellement  qu'il  nous  faut  prendre  cefte 
requefte  de  fainft  Paul  comme  vne  fentence 
authentique  contre  cefte  malheureui'e  creatu 
re  qui  s'eft  ainfîofédcfpiter  contre  l'Euangi- 
le.  Or  de  là  nous  pouuons  recueillir  combien 
Dieu  tient  fa  vérité  piecieufc.  Car  des  fautes 
qui  font  commifes  contre  luy,  nous  voyons 
comme  il  les  fupporte,  &  comme  il  vie  de  pa- 
tience pour  attirer  lez  hommes  à  repentancc, 
voire  ceux  qui  fe  font  desbauchez  contre  luy. 

Sl'.iin. 


îli 


SERMON    XXX 


i(re.y:.  Nous  voyons  mefmes  ce  qu'il  dit  parfon  Pro 
phete.  Si  vne  femme  a  paillarde,  &  qu'elle  ait 
abandonné  fon  mari ,  où  fera  l'homme  qui  la 
Tueille  receuoir  ?  Or  quand  vous  m'aurez  efté 
defloyaux  (dit-il)  &que  vous  m'aurez  tant  of 
fenfé  que  rien  plus,  encores  fuis-ie  prert  de 
me  reconcilier  à  vous .  Là  noflre  Seigneur  te- 
ilifie  que  non  feolement  il  nous  pardonnera 
les  fautes  légères  que  nous  commettons  par 
ignorance, ou  par  quelque  infirmité.ôc  que  fou 
dain  nous  venons  à  retourner  au  bon  chemin, 
mais  encores  que  nous  ayons  efté  long  temps 
comme  gens  perdus  &defefperez, que  noiîre 
vie  ait  efté  vileine  &  énorme  ,  qu'il  ne  laifle 
pas  d'auoir  pitié  de  nous.  Mais  quand  nous  ve 
nons  àblafphemer  contre  fa  vérité  ,  voila  vn 
péché  irremifsible, voire  fi  nous  le  faifons  par 
vne  certaine  malice, comme  il  tft  aduenu  àceft 
home  qui  eft  ainfi  maudit, &  fur  lequel  le  faind 
£fprit  prononce  vne  fi  horrible  condamna- 
tion.Notés  biendonc  que  fi  tous  péchez  font 
«xecrables  deuant  Dieu  ,  ceftuy-ci  furmonte, 
c'eftal'çauoir  quand  on  mefdit&  qu'on  detra 
ûe  de  la  doctrine  &dela  vraye  religion:iln'y 
a  ne  meurtre,ni  cruauté,  ni  empoifonnement, 
ne  rien  qui  foit  que  Dieu  accompare  à  ceci, 
quand  on  fe  reuolte  contre  luy  .  Et  defaift,  fi 
nous  regardons  bien,  la  vie  d'vn  homme  nous 
doit-elle  eftre  tant  precieufe  que  la  vérité  de 
Dieu  ?  Car  la  vie  d'vn  homme  eft  temporelle. 
Or  ici  il  eft  queftion  du  falut  de  nos  âmes,  voi 
le  de  tout  le  monde:  il  eft  queftion  du  royau- 
me de  Dieu  ,  comment  il  fera  ferui  &  glorifié 
entre  nous. Si  donc  on  fe  vient  ainfi  eleuer  cô 
tre  la  maiefté  de  Dieu  ,  qu'on  vueille  abolir  le 
legne  &  l'empire  qui  eft  donné  à  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chriit.qu'on  vueille  ruiner  les  po 
ures  âmes  &  les  mener  à  perdition  ,  que  pou- 
îions-nousdire  fînon  qu'il  faut  que  cela  nous 
fcit  plus  exécrable  beaucoup  que  tou?  les  au- 
tres crimes  ?  Et  ainfi  ne  nous  esbahirtons  pas 
-^uc  fainft  Paul  vfe  encores  d'vne  telle  véhé- 
mence contre  ce  mal-heureux  fuppoft  du  dia- 
lile  ,  lequel  après  auoir  cognu  la  vérité ,  après 
auoir  efté  enfeigné  en  l'£uangile  ,  &  en  auoir 
fait  vne  telle  profefsion,  fc  vient  armerd'vne 
furie  infernale  poUr  anéantir  la  maiefté  de  no 
lire  Seigneur  lefus  Chrift,  pour  renuerfer  tou 
te  vérité, pour  abyfmer  les  poures  âmes,  &  les 
priucrde  leur  falut,  pour  clorre  le  royaume 
de  Paradis  ,  &  faire  que  les  hommes  n'ayent 
plus  rien  de  commun  aucc  Dieu  ,  &  auec  leur 
Créateur.  Qtnnd  donc  vn  homme  fedesbor- 
^e  iufques  H  ,  nefatrt-il  pasbien  que  Dieu  fe 
leBe,&  qu'il  monftrevne  rigueur  extrême  à 
Pencontre  de  luy  '  Or  apprenons  donc  en  pre 
mier  lieu  ,  d'honorer  la  vérité  de  l'Euangile, 
kquclle  nous  voyons  eftre  tant  precieufe  5:  fi 
honorable  deu.ît  Dieu. Et  puis  qu'amfî  eft  que 
Dieu  eftimeplusTa  fainfte  Parole, qu'il  ne  fait 
point  ce  qui  fcmble  eftre  excellert  au  mon- 
de, qu'en  todre  humilité  &■  reucrencc  nous  la 
ïeteuions- ,  qu'vn  chacun  s'y  affiiiettifle  :  &  fi 


nous  voulons  faire  hommage  â  noftre  Dieu, 
que  nous  le  môftrions  en  ceft  endroit,  c'eft  de 
nous  ranger  en  l'obeiflànce  de  fa  Parole,  co- 
gnoiflàns  que  c'eft  làoù  il  nous  faut  addonner 
du  tout ,  comme  aufsi  c'eft  là  qu'il  fait  reluire 
la  gloire  enuers  nous.  Voila  pour  vn  item.  Et 
H  deflus  gardons  d'eftre  tranfportez  iufques 
là, de  nous  eleuer  contre  la  fainde  doftrine  & 
contre  la  pure  religion:car  c'eft  manifeftemét 
defpiter  Dieu  ,  voila  vne  guerre  ouuerte  con« 
tre  luy  :  encores  que  nous  ne  le  prononcions 
point  de  bouche, la  chofe  le  môftre.Et  fi  nous 
voulos  nous  garderd'vn  tel  mal,aduifons  bien 
de  ne  nous  point  iouer  auec  Dieu:  comme  il  y 
a  des  ruftres  qui  ne  font  que  plaifanter  quand 
il  eft  queftion  delà  parole  de  Dieu,ils en  tien 
dront  leurs  propos  en  rifee.  Or  quand  ils  font 
accouftumezà  vn  tel  mefpris.il  faut  que  Dieu 
les  delaiire,&  là  deflîis  le  diable  en  prend  pof- 
fefsion,  tellement  qu'ils  s'enucniment  &  s'en- 
flamment pour  blafphemer  contre  le  fainft  E- 
fprit.  Voulons-nous  donc  que  Dieu  nous  tie- 
ne  en  bride,  tellement  que  nous  ne  tombions 
point  en  ceft  horrible  abyfme  de  blafphemer 
contre  luy.â:  de  faire  la  guerre  à  fa  verité?Ad- 
uifonsde  receuoir  ladoftrine  qu'on  nous  pref 
che  &  que  nous  lifons,  tellement  que  ce  nous 
foit  vne  chofe  facree.que  ce  nous  foit  vn  thre 
for  incftimable.  Et  au  rcfte,quand  nous  voyôs 
de  ces  miferables  qui  fe  desbauchent  ainfi  iuf 
ques  à  defpiter  Dieu,  cognoiflbns  que  ce  font 
les  fruifts  de  leur  hypocrifie.quand  ils  fe  font 
voulu  louer  à  vn  fi  grand  maiftre  comme  eft 
Dieu,  qu'il  faut  en  la  fin  qu'ils  trebufchent  de 
vne  telle  cheHte&  fi  mortelle  comme  nous  le 
voyons.  Et  pleuft  à  Dieu  que  les  exemples  ne 
en  fuflentpas~fi  notoires  comme  ils  font.nnais 
quand  Dieu  nous  les  môftre.il  nous  en  faut  fai 
re  noftre  profit,  afin  de  le  craindre  Se  l'hono- 
rer en  patience  .  Et  qu.îdnous  voyons  de  tels 
miroirs, 'q  nous  en  ayons  horreur:&  ccpendiît 
dctertons  telles  gens,  comme  fainft  Paul  dit, 
G^rje-toy  Àe  \uy\\\  en  feigne  Timothee  de  fuir 
ceft  Alexandre  comme  vne  pefte  mortelle. 
Ainfi  donc  quand  nous  voyons  ces  malheureu 
fcs  créatures  qui  fe  dreflèrt  ainfi  contre  Die» 
&  contre  fa  Parole,  feparôs-nous  d'auec  eux, 
craignans  d'eftre  enueloppez  en  vne  mefme 
vengeance  de  Dieu.  Il  y  en  a  qui  fe  plaignent 
qu'on  les  fuit:&  combien  qu'ils  foyent  les  pi- 
res ennemis  de  Dieu, encores  voudront-ils  fâi 
re  à  croire  qu'on  leur  fait  grand  tort  &  iniure 
fi  on  les  marque  au  doigt,  &  qu'on  admonefte 
les  fimples  qu'ils  les  fuyent,&:  qu'on  leur  mon; 
flrc  en  quel  abyfme  ils  fe  mettent  de  les  han- 
ter.Là  defîus  ils  murmurent,  EtcômcntrPour 
quoy  cft-ce  qu'on  nous  blafm-  ainfi?  Et  pour 
quoy  vous  diffamez -vous  ?  Carceluyqui  s'e- 
leue  contre  fon  Créateur, ne  porte-il  point  la 
marque  de  Satan  ?  ne  fait-il  po'rt  la  guerre 
ouuerte  à  Dieu  ?  Voila  le  diable  oui  eft  nnftre 
ennemi:&  quand  nou- verrons  fes  fiippofts,(î 
nous  fommes  leurs  alliiz,  ne  ccplotons-rous 

point 


s  V  R     L  A   1 1.    A     T  I  M  O  T  H. 


l'y 


Point  ancc  eux  à  l'cncontre  de  Dieu?  N'eft-ce  deuant  que  dcmanJcr  à  Dieu  qu'il  confonde 
point  iiuniteftenient  le  dclpiter ,  encorcs  que  les  iniques. Or  ceci  cTt  rare.c'eft  à  dire  qu'il  ne 
nous  n'ayons  point  du  premier  coup  vnc  telle  nous  en  faut  point  faire  vneïegle  commune. 
malice  que  de  vouloirnous  armer  contre  l'E-  Apprenons  donc  de  nous  retenir,  &  de  n'eftrc 
uangileJTanty  a  que  nous  tentons  Dieu  qu.îd  point  trop  bouillans  à  faire  telle  requefte, que 
cous  auons  quelque  priuautéauec  telles  gens.  Dieu  perde,  qu'il  difsipe  &  abyfme  ceuï  qui 
Nous  fonunes  par  trop  fragiles  ,&  cependant  nous  font  contraires. Car  nous  fçauons  ce  que 
nou»  venons  là  nous  ietter  en  yne  telle  corru-  noftre  Seigneur  Icfus  dit  à  fesdifciple.s,Vousi«c?.îf,. 
ption.Et  ainfi  notons  bien,  quand  nous  yerrôs  ne  fçaueï  de  quel  cfprit  vous  eftes  menez  .  Et 
des  ennemis  de  la  vérité  de  Dieu  ,  qu'il  nous  toutesfois  ils  alleguoye't  l'exemple  d'Elictcar 
les  faut  tenir  tellement  exécrables,  qu'vncha  Us  vouloyent  que  le  feudtfcédiftduciel  pour 
cunfe  fepare  de  leur  compagnie,  que  nous  ne  engloutir  les  ennemis  de  r£«angile  .  Voire, 
ayons  nulle  accointance  auec  eux  ,  fi  nous  ne  mais  ils  n'clloyent  pas  menez  del'tfprit  d'E- 
voulons  eftre  empoifonnez  .  Car  ils  polluent  lie,  il  y  a  de  l'excès  par  trop  .  Ainfi  gardors»- 
tout  le  refte  quant  &  quant, tellement  qu'il  eft  nous  de  cela.Et  pourtant(c6mei''ay  dcliaditj 
ïrapofsible  qu'on  les  fréquente ,  ne  qu'on  ap-  fjachons  qu'il  ne  nous  faut  point  tirer  en  re- 
proche aucunement  d'eux,  qu'on  n'en  foit  du  gle  commune  ce  que  fainft  Paul  die  d'vue  per 


fonne-  mais  fondons  les  chofes,  aduifons  bien 
fi  ceux  qui  blafpKemeDt  contre  la  vérité,  y 
vont  d'vr.e  certaine  malice,  s'ils  font  apofiais 
quiayent  tellement  abandonné  Icfus  Clirift^ 
qu'ils  luy  vueillent  faire  la  guerre  pour  abolir 
(oi 


tout  infeâé .  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à 
noter  en  celle  admonition  de  fainft  Paul.  Au 
refte,  retenons  bien  quand  fainft  Paulaainlî 
requis  à  Dieu  qu'il  rendift  à  ce  forgeron  félon 
(es  démentes ,  qu'il  ne  l'a  point  requis  ayant 

efgardà  fa  perfonne,  comme  défia  nous  auons  fon  règne  &  fa  maiefté,  pour  extcrminir  de  ce 
declaré.Et  ilno'fautbienaduifer  Jcnepoint  monde  la  mémoire  de  fon  Nom.  C^uândnous 
prendre  vne  faufle  couuerturede  l'exemple  voyons  des  gens  eftre  ainfi  aliénez  de  toute  re 
de  faind  Paul ,  comme  beaucoup  de  gens  qui  ligion  ,  voila  le  diable  qui  les  poflede,&  Dieu 
femblent  eftre  grans  zélateurs  ,  &  voudront  alors  les  punit, en  forte  qu'il  nous  môftre  que 
aufsiauoir  telle  eftime,  mais  ce  fera  pour  leur  ils  font  du  tout  reprouuez  ,  &  qu'il  n'y  a  plus 
querelle  priuee  qu'ils  s'efchaufferont .  Or  ici  d'efperanceie  falut  en  eux.  Or  combien  qu'il 
fiinà  Paul  n'a  point  efgard  à  foy  ,mais  il  s'eft  ne  nous  faille  point  faire  vne  règle  commune 
corne  oublié  du  tout, il  ne  penfefinondemain  décela,  toutesfois  fi  e(l-ce  que  Dieu  en  don- 
tenir  la  veritéde  Dieu. Voila  pour  vn  item.  Si  nera  bien  quelques  figues  &  quelques  roar- 
donc  nous  voulons  prier  Dieu  qu'il  purge  le  ques:autrementcc  qui  elt  iciefcritd'Alcxan- 
monde  ,  &  for  tout  fa  poure  Eglife ,  extermi-  dre  forgeron,&  ce  qui  cftdit  en  fainaiean,fe- 
nant  les  contempteurs  de  fa  maiefté,  qui  ren-  roit  fuperflu  ,  afçauoir  qu'il  y  a  vn  péché  qui  .  . 
iierfent  la  pure  religion, qui  corrornpent  &  fal  eft  à  mort .  Si  donc  nous  n'auions  quelquefois  .g  - 
fifient  fa  Parole,  q  nous  ayonsce  but-la,  c''eft  cbgnoiflance  que  Dieu  a  reprouué  des  hom- 
que  nous  ne  foyons  point  menez  d'aucune  affe  mes,&  qu'il  leur  a  fermé  la  porte  de  falut,que 
ftion  charnelle, mais  que  nous  cerchions  fc u-  il  les  mÔftre  du  tout  incorrigibles,&  défia  pof 
lement  que  Dieu  foit  glorifié  .  Et  mefmes  en-  fedcz  de  Satan  ,  à  quel  propos  fainft  lean.di- 
cores  que  nous  ayons  vn  tel  but.fi  nous  faut-il  roit-il  qu'il  y  â  vn  péché  a  mort ,  lequel  ne 
garder  en  fécond  lieu,  de  rien  méfier  de  nos  peut  eftre  pardonné?  Et  TOilâ  poutquoy  il 
pafsioi'.Carilyaura  incontinent  de  l'excès:  nous  faut  reucnk  à  ce  que  nous  auons  défia 
*  ce  n'elt  point  aflez  que  noftre  zèle  foit  bô,  touché  :  c'cft  que  quand  nous  verrons  des  po- 
il faut  quant  &  quant  qu'il  foit  modéré  d'vne  ures  gens  eftre  viincus  de  leur  foiblefTe ,  qui 
lelle  prudence ,  que  l'Êfprit  de  Dieu  domine  flechifïènt  contre  l'Ëuangile  ,  qui  ne  rendent 


par  deflus.  Et  puis  notonsbien  qu'il  nous  faut    point  téfmoignage  pour  faire  confefs 
aiioir  pitié  de  tous  ceux  que  nous  ne  ccgnoif-    leur  foy  comme  il  feroit  requis,  que  n 


iqu  iJ  en  ait  p 
tie,&  qu'il  defpioye  fur  eux  fa  mifericorde 


que 


laifsions  point  d'en  auoir  pitié, qiienous  pro- 
Or  eft-il  ainfi  que  nous  deuons  toufiours  mfa.  curions  entant  qii'en  nous  fera  de  lés  ramener 
#fperer,infques  à  tant  que  Dieu  déclare  qu'il  a  au  bon  chemin,  que  nous  priôs  Dieu  qu""!]  ieur 
retranché  ceux  qui  s'elcuent  ainfi  contre  luy,  tende  la  main, qu'il  les  reduife  par  la  grâce  de 
qir'il  les  a  retranchez,di-ie,de  fon  Eglife, coin  fon  faircl  Efprit.Mais  quand  nous  eu  verrons 
me  des  membres  pourris.  Et  il  n'y  a  nulle  qui  defpite'nt  ainfi  Dit  u  hiàiiiftfttinet.r ,  qui 
doute  que  fainû  Paul  n'ait  eu  vne  telle  certi-  s'elcuent  contre  Ta  p4rolt,quireuletita*,--rirui 
mdequant  à  ce  forgeron  dont  il  parle.  Car  il  re  là  religion  entant,  qu'en  eux  cft.voiJa  vsje 
îteVeft  point  précipité  à  la  volée  pour  afsi-  marque  que  Dieii  noi/s  donne  qu'il  les  a  ré- 
gner vne  fentence  deuant  le  temps  :  mais  il  a  prouuez  :&  pourrai) t  qu'il  ne  veut  plus  que 
cognu  que  ceft  homme  eftoit  du  tout  reproij-  nous  ayons  rien  de  commun  auec  eiur. Et  potir 
ué.  Q^  donc  notu  ayons  tel  tclmoignage  quoy: Ce  îi'cft  point  fans  caiife  que  fainû  Paul 

Tc.i. 


r'4 


SERMON    XXX. 


TiiAib  déclare  que  ceux  qui  relaient  ainlî,voirc 
^  leur  ef<:ietu,  Sf  A^\nc  uulice  Jelibcrce  con- 
tre la  vérité  Je  Dieu  qu'ils  !)nt  cos^i-.uc.S;  d\i- 
«eant-ir  ielcriucede  Dicu.Q'clU-indvc  Ucl.ir- 
tc  de  IJ  Parole,  que  ceuv-l.i  doyuent  eltrc  dii 
tout  condamnez  uns  aucune  rnileticorde,-que 
il  n'eft  plu?  queftion  ici  de  L;ardercharitc.Cïr 
Dieu  nous  lepare  d'auec  telles  gcns,&  ne  veut 
plus  que  nous  les  eftiinions  lionunes,niais  que 
nous  les  tcniiins  dtlia  du  rang  du  diable  .  £t 
puis  que  Dieu  en  a  ainfi  prononcé  ,  aulsi  faut- 
il  que  nous  le  prions  que  ceux  qui  fontainli 
incorrigiblesfoyent  abylmez, qu'il  les  deftriii 
fe.pour  môftrer  combien  fa  vérité  luy  eft  pre- 
cicufc,&cn  quelle  recomm.indacion  il  a  le  rè- 
gne qu'il  a  cftabli  en  laperlonncdc  Ion  Fils. 
Apprenons  donc  d'auoir  c  irjipaûion  &  pitié 
lie  tous  poures  pécheurs  ,  &  mclares  de  ceux 
>  <jui  ne  reudent  point  teùno  gnaçe  à  la  vérité, 

de  ceux  qui  calent  la  voile  quad  il  eft  queftiri» 
tle  maintenir  vnc  bonne  querelle:  qui  font  fur 
prins  de  crainte,  qui  font  des  morts  :  encores 
que  nous  ne  voyons  pas  là  vne  vertu  telle  que 
il  feroit  à  délirer, que  toutcsfois  nous  en  ayôs 
pitié  à  l'exéple  de  S. Paul, lequel  pouuoit  élire 
aucunement  indigné  qiiand  il  çft  delaifle  û  vi- 
Icinement.  Et  par  qui; Par  les  frètes,  par  ceux 
qiji  fjifoyent  lembl.u  d'auoir  vne  caufe  cornu 
ne  auec  luy, comme  elle  eftoit  auùià  la  venté: 
&  ccux-la  le  retirent  tellement  qu'il  eft  defti- 
-tué  de  tout  fecours. Combien  donc  qu'ils  ayét 
vféd'vne  telle  lalchetêenuers  luy  ,  iî  eft-ce 
qu'il  leur  pardonne,  &  prie  Dieu  pour  eux. 
Voila  côme  il  nous  en  faut  faire. Et  de  faid,<î 
chacun  de  nous  fe  cognoilToit  bien  ,  nous  ne 
(crions  point  ii  hardis  d'afleoir  iugement  fur 
nos  prochains,nous  fériés  plus  modcftes  pour 
Aipporter  les  vns  les  autres  en  toutes  les  fau- 
tes qui  le  commettent .  Garde  bien  que  tu  ne 
I.C»!".!©  f^jij  tcnté,dit  fainct  Paul. Quand  donc  tu  voit 
*^-^3-  queïes  procliains  auront  failli,  que  te  rtfte-iJ 
lînon  de  prier  pour  eux,  attendu  que  tu  as  be- 
loin  qu'on  face  le  femblable  pour  toy  ?  Voila 
donc  ce  que  nous  auons  ànoter.  Cependant 
nous  voyons  ^ue  c'eft  vnc  vertu  admirable  de 
Dieu,  de  perfiflerconft.îment  quand  il  eft  que 
rtiondc  maintenir  la  dortrine  de  PEuangilc. 
Sainft  Paul  parle  de  ceux  qui  cfloyent  comme 
lespremicesen  TEglifcdc  Dieu  ,  c''eftoyent 
comme  la  fleur  des  eleusivoila  Dieu  qui  a  com  _ 
niencé  d'appeller  ceux  dont  il  parle, &:  mefines 
ilies  conflitue  comme  miniltrcs.  Ils  n'eftoyét 
pas  feulement  trois  ou  quatre  fidèles  à  Ro- 
l»e:il  cfl  vray  que  rEglilc  n'cfïoit  qu'vne  pe- 
tite poignée  de  gens, en  comparaifon  de  ccftc 
grande  multitude  qui  cfcoit  en  celle  grande 
Ville:  car  elle  tlloit  peuplée  alors  comme  vn 
pays  :  mais  lî  cR-cc  qu'encores  la  compagnie 
des  fidèles  eftoit  allé?  grande  ,  &  toutcsfois  il 
ncs'en  trou'.ic  pas  vn  quiâfsifte  à  fainû  Paul. 
11  a  Luc  auec  f  jy ,  ,S.' toat  le  refte  luy  défaut. 
Q_iund  donc  nous  voyons  cela,  baifTiiis  la,tç  ' 
lie,  l^aciiank  bien  qu;- iî  Dieu  ne.nous  donne 


l'econrsdcla  vertu  d'cnhaut,  que  nous  luy  fe- 
rons traiitres  au  bcfoin:  5:  fur  tout  quand  il  le 
ra  gucftion  de  maintenir  fa  vérité  .chacun  le 
delaiircra, chacun  s'en  voudra  exempter. Or  ii 
eft  vray  que  c'ert  m  péché  grand  &  énorme 
qae  ccRuy-ci:mais  quoy  qu'il  en  foit.fi  eft-ce 
qu'il  faut  que  ks  hommes  fe  cognoJllcnt  ini- 
ques là ,  de  lé  desfier  d'eox-mefmcs ,  vayans 
qu'il  n'eft  point  en  eux  de  fe  pouuoir  foufte- 
nir .  Q_iie  lera-cc  donc  fi  Dieu  ne  nous  main- 
tient: Car  nous  oyons  cefte  horrible  fentence 
que  prononce  nollre  Seigneur  lelus  Chritt, 
Que;  quiconqucs  l'aura  niédcuant  les  hom-.  M4f .  lo. 
mes, il  le  niera  deuant  Dieu  Ion  Père  qui  elles  33.. 
cieux.  Et  fi  Dieu  n'euft  fait  vne  finguliere  mi- 
fericorde  à  ceux-ci,  ils  eftoyent  tous  perdus: 
entant  qu'en  eux  elloit ,  Us  s'eftoyent  bannis 
du  royaume  de  Dieu,  il  auoyent  renoncé  le  fi 
lut  qui  leur  fcftoit  vne  fois  prefenté  par  l'E- 
uangile.  Ainfi  donc  nous  auons  bitnoccafion 
d'auoir  la  bouche  clofe.S.:  de  foufpirer,  vovas 
la  poureté  qui  eft  en  nous ,  Se  que  fi  Dieu  ne 
nous  tortifioit,  à  chacune  minute  de  tcpsnoas 
poumons  nous  abyfmer.nous  tenons  ep  train 
de  faire  vn  faux  pas  pour  nous  rompre  le  col, 
voila  donc  de  quoy  ncnudeiions  élire  cnfei- 
gnez  en  ce  pallàge  .  Cependant  nous  voyons 
quelle  venllmilitude  il  y  a  en  ce  que  les  Papi- 
lles allèguent,  que  fainft  Pierre  a  elle  le  pre- 
mier Euefquede  Rome .  Car  fi  on  veut  croire 
à  leurs  chroniques-,  luy  &.  laincl  Paul  eftoyenc 
d'vn  mefme  temps .  Làdellus  ils  difcnt  qu'ils 
font  morts  en  vn  mefme  iour  :  c'cft  à  dire  l'.ia 
reuolu  ,  mais  que  iour  pour  iour  ils  ont  elle 
meurtris.  Or  faind  Paul  parle  ici  de  fa  premie 
re  defenfe  :  il  faloit  qu'alors  l'.\\nSt  Pierre  fyfl; 
à  Rome. Car  les  Papilles  ellendent  fon  ponti- 
ficat iniques  à  fept  ans.  11  s'enfuit  donc  que  S. 
Pierre  ait  quitté  la  religion  de  noflreSeigneur 
lefus  Chrilljqu'il  ait  renoncé  à  l'héritage, Si  à- 
l'elperance  de  falut  qui  luy  elloit  donnée  en 
l'EuangUe  ,&  qu'il  fe  foit  lepare  dii  nombre 
des  Aportres,  pour  n'auoir  plus  de  communi-, 
cation  auec  eux  .  Voila  donc  comme  on-pcup, 
airtz  veoir  que  ce  n'ell  que  fable  &menfoil- 
ge  de  tout  ce  que  les  Papille»  allèguent  pour 
mettre  lefiegcde  faintl  Pierre  à  Rome. Niais 
quant  au  relie  de  toute  la  compagnie  dont 
parle  faincl  Paul  ,cognoiirons  qu'ils  lont.içii 
couchez.afin  que  nousappreiuôs  de  nous.hu-.. 
miiicr,&  de  cheminer  en  telle  folicitude.,  qgc  .■ 
no.us  demandions  à  Dieu  qu'il  ne   permette 
point  que  iamais   nous  Juy   fayons   lafcliess 
quandiljio.us  appelle  pour  rendre  telinoigna, 
ge  à  h  vérité.  Or  en  la  fin  fainct  Paul  eonclud 
ijitf  Vicu  ne  luy  <t  point  iltf.rlti  :  &i  .par  cela  il 
nous  monllrc  que  fi  les  hommes  .s'eflongncuc 
de  nous  ,&:  que  nous  foy.en .  ploip.emcnt  aban- 
donnez,nou;nedcuoni  pas  pouitant  iftreçl- 
perdus  :  car  quand  nous  ferons  aiufi  dclailTez, 
Dieu  eft  alTcZ  puiŒint  pour  nous  fccou  nr.  Et 
c'çft.vnp  bonne  efprcuuc&.ya  bon  v-v.imqn  de 
n"i?fli  é  foy.ll  elt  vray  t^jUe  nous  pourrons  cftrc 

tftjiii'cz 


SVR   LA     II.    A    TIMOTH. 


î'î 


eftonncz  quand  nous  n\ippercfturonj  milfc-  fefuez  de  liiy  ,  &;  que  noffre  Seigneur  Iclus 

cours  ICI  bas.  Maif  que  nous  apprenions  de  rc  Chrift  nous  ticne  en  ia  gard^  ,  tellement  que 

courir  i  nolhe  Dieu  ,  &  nous  repofer  en  luy  nous  foyons  conduits, non  pas  feulement  du- 

l'eul  :  car  iniques  à  ce  qwc  nous  ay  oni  apprins  rarit  ceftc  vie  caduque  &  tranlitoire.mais  iuf- 

<le  luy  faire  ceft  honneur  de  nous  contenter  qucs  à  lamort,&:  par  defTus  mefmes.tellemenc 

de  luy  ieuJ ,  &de  l'on  aide,  il  cft  certain  que  que  nous  ne  demandions  finon  de  glorifier  no 

nous  ne  luy  talions  nulauantagepar  defllis  les  ftre  Dieu.iufqu'àce  qu'il  nous  ait  t'ait  partiel - 

hommes. Car  quand  nous  voyons  que  les  hom  pans  de  fon  inimoitali'té  gforieufe. 
mes  l'ont  puifl'ans  pour  nous  iccourir, nous  fça  OR  nous-nous  proiterneron%  deuant  la 

Hons  bien  nous  fier  en  eux:&  Il  Dieu  nous  de-  fice  de  naître  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 

clare  qu'il  cft  puillànt ,  &■  qu'il  ne  nous  mon-  nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  touf- 

rtre  point  du  premier  coup  dequoy,nous  voi-  iours  fentir  déplus  en  plus.nouj  amenant  à  v- 

li  eltonnez,voirc  tranfportez  de  desfiance.Et  ne  vraye  rcpentance  ;  puis  qu'il  luy  a  pieu  de 

n'eft-ce  pas  le  mettre  au  rang  des  creatures,&  nous  nianifcrter  la  vérité  ,  que  nous  la  rece- 

mefincs  luy  attribuer  moins  qu'aux  hommes  uions  en  toute  reuercnce  ,  que  nous  y  l'oyons 

mortels?  Voila  donc  ce  que  nous  auons  .à  retc  tant  mieux  confermez.  Et  li  nous  voyons  les 

nir  de  ceftedodrine:c'eltarçauoir,que  quand  fiippoftsde  Satan  s'eleuer  à  l'encontre  ,  que 

nous  ferons  deilituez  de  tout  fecours  humain,  nous  ne  l'oyons  point  troublez  pour  cela,  fça- 

que  nous  ne  laifsions  pas  de  nous  appuyer  en  chans  que  c'eft  vue  chofe  commune,  &  qu'il  a 

Dieu,  fçachans  que  luy  feuleftalTez  puiflant  faluquela  foy  denos  Pères  ait  efté  approu^ 

pour  nous  deliurer,&  quand  nous  aurons  Icn-  uee  par  ce  moyen-la  :  mais  que  nous  prions 

Il  Ion  aide,  que  nous  concluons  auec  fain£l  Dieu  qu'il  nous  confermc  de  plus  en  plus,  &: 

Paul,  qu'il  nous  deliurera  de  toute  œuure  mau  que  ce  nous  foit  vnc  occalion  de  batailler  cou 

uaile.Car  fainCt  Paul  ne  dit  pas  ici  que  Dieu  le  fîamment  &:  d'vne  telle  vertu  pour  fa  gloire, 

deliure  de  la  mort  (  combien  que  delîa  il  euft  que  nous  foyons  toulîours  certifiez  de"  la  vi- 

fait  fon  conte  qu'il  faloit  qu'il  fuft  prefenté  ftoire,&  que  le  triomphe  nous  eû  appreflé,'& 

en  facrifice  )  mais  il  fe  contente  que  Dieu  le  que  ce  bon  Dieu  nous  afiflera  .  Et  cependant 

fortifie  de  fon  faind  El'prit  ,  tellement  qu'il  qu'il  ne  permette  point  que  les  mefchans  ga- 

piulfe  mourijpour  le  tefmoignagede  l'on  £-  gnent,  mais  que  s'eftansaduancez  ,  ce  foit  i 

uangile  .  Il  ne  luy  chaut  de  fa  perfecution  ne  leur  ruine  &  confulion  .  Et  au  refte ,  que  nous 

de  tous  les  tourmens  qu'il  faut  qu'il  endure,  foyons  difpofcz  à  viurc  &  à  mourir  en  l'obeif 

moyennant  qu'il  obetiTe  à  Dieu, &  qu'il  obtie-  fmcc  denoftreDieu  ,  &:quenous  ne  deman- 

ne  la  viftoire  par  deilus  toutes  les  tentations  dions  finon  qu'il  habite  en  nous  par  fon  fainA 

&airiuts  qu'il  luy  faudra  louHenir.Ainfi  nous  Efprit  -Se  que  nous  foyons  preferuezde  tou- 

en  taut-il  taue.Et  au  refte, retenons  la  prière  tcsmauuaifcsœuures ,  &  de  toutes  lestenta- 

qu'il  hiit  ici  en  la  fin,  Ouf  le  Sû'^ntur  Ufus  foit  fions  de  Satan. Et  encores  qu'il  nous  faille^paf 

,ittecl")ifpn't  de  Timoiha-.U  cltvray  que  finous  fer  par  beaucoup  deiniferes  &  de  fal'chefies, 

fommes  en  la  proteftion  de  noftre  Dieu,  nos  que  toutesfois  nous  foyons  tellement  confer- 

corps  feront  preferucz  de  luy  aufii  bien,&  en  uez  par  luy,  que  nous  feiitions  que  nous  fom- 

tout  &  par  tout  il  nous  fubuiendra  félon  qu'il  mes  en  fa  proteâion  ,  &  que  pous  puifsions 

nous  elï  vtile  .  Mais  cependant  que  nous  ne  nous  glorifier  qu'il  nous  a  toufioùts  fecourti  A: 

ayons  point  tant  nos  corps  pour  recomraan-  aftiftc,  tellement  quenous  nt  fojnmej  rauia'is 

dez.que  l'ame  n'ait  le  degré  fouuerain  .  Ainfi  tombez  en  nulle  mauiiaifc  ceuûre.lQ_uc'ndn  feu 

jp'U  nous  fufhfe  moyennant  que  noftreDieu  lement  il  nous  face  ccftr  grâce  ,  mais  à  tous 

oie  auec  uoftrcefpritj&que  nous  foyorrspre-  peuples  &  nations  de  la  terre,&C.  .., 


K 


LOVE      S-  O'  I  ^  '"D  ï  E  •*.. 


•P 


;d"e    m.    I  e  h  a  n 


FIN     PES 

■■     €  A  l  V.  IN     SVR    -L  E  S    D  E  V  X      E  P  I  S  T  R  E  S     D  £     s. 

"î*aiil  Apoftre  à  Timothee,feloh  qu'ils  ont  efté  llmplemcnt  recueillis  par 

rEicriujim  ordinaire,  fansquc  l'autheur  les  sitireueus  ne  changez  en  aucu* 


.JJl  '.IJl'I. 


iiSi  >  'tL 


Sermons  de  lehan  Caluin  fur  l'E- 

PISTRE      DE     SAINCT     PAVL 

A*     T   I  T   E. 

L'EPISTRE     DE     SAINCT    PAVL 

Apoftreà  Tite. 


C  H  A   P. 


I. 


\  Aidjcruiteiir  de  Dieu,  ^  Apojîre  de  lefui  Chrifl,Jè''. 
I  Ion  îafoy  des  eleus  de  Dieu,  (f  la.  cognoijfance  de  yc- 
\  rite,  qui  ejl  félon  U  crainte  de  Die Uy 
En  l'efperance  de  \ie  éternelle,  laquelle  Dieu,  qui  ne 
tnentpoint,apromijè  deuant  les  temps  éternels, 

3  Et  a  manifejlé  en  fin  temps ,  afçauoir  Ja  parole  par  prédica- 
tion ,  laquelle  m'ejî  commife  fclon  la  commijlion  de  Dieu  noîirc 
Sduueur: 

4  A  Tite  mon  vray fils  félon  Iafoy  commune  entre  nous ,  Gra  - 
ce,  mifericorde,  ^paix  de  par  Dieu  le  ?ere ,  ^  de  par  lefus  Chrijl 
nojhre  Sauueur. 


E  n'eft  pas  d'iuiourd'hiiy 
q  beaucoup  de  malins  fous 
ombre  d'cftre  de  lacompa 
gnie  des  Chreftiens ,  taf- 
chent  &  machinée  tant  que 
lU  peuuent  à  troubler  l'or- 
dre de  l'Eghfe ,  &  crapef- 
cher^iie  leschoTes  bonnes  &  faindet  n'ay- 
ent  leur  cours  ,  &  peruertiflent  tout ,  entant 
qu'en  eux  eft.  Nous  i'çauons  qu'vne  Eglil'e 
nepeuteftie  maintenue  en  Ion  eftat,  linon 
qu'il  y  ait  de  bons  Pafteurt  &  fidèles.  Dieu 
adoqné  vne  bonne  reigle&  certaine  ,  pour 
les  élire  &  conlHtucr.  Mais  cependant  beau- 
coup ont  tafckéde,  s'auancer  par  ambition, 
pat  mefchâtesprattiquestvoire  du  temps  des 
Apoftres,quaiid  l'Euagile  florilToit  en  fa  droi 
te  pureté.defîa  ce  vice-la  regnôit,  comme  on 
le  voit.  D'autre  part,  fi  nous  voulons  chemi- 
ner en  l'oheiflànce  de  Dieu ,  il  faut  bien  que 
la  doftrine  qui  fe  porte  ,  ait  authorité  enucrs 
iious,&  que  ceux  qui  font  commis  i  cela.foy- 
eat  efcoutez  3ue<  reuerencc.  Car  li  onmcf- 
pr:fc  les  Palteurs ,  par  confeqiientla  Parole 
fera  mefprifee,  &  mife  fous  le  pied.  Or  nous 
voyons  comme  délia  du  temp?  de  ùiixû.  Paul 
H  y  aiiûit  beaucoup  de  reb(.-iJioi;.  *:de  mui- 


mures,  on  fçauoit  bié  porter  les  fedufteurs.S: 
touliours  ils  eftoyent  les  bien  vcnus.cncores 
qu'ils  impofalTent  des  charges  &  fardeaux 
bien  difficiles.  Mais  quand  ceux  qui  vouloy- 
CBt  feruir  loyaunient  à  Dieu  s'acquittoyent 
de  leurdeuoir  ,  incontinent  il  y  auoit  feftes 
dreflees  ,  il  y  auoit  des  bandes  faites  ,  &  des 
combats  tout  preftt  pour  les  fafcher  ê<  mole 
fter.Et  c'clt  à  quoy  fainft  Paul  a  prétendu  fftr 
celle  Epiftce,c'cftafijauoir  de  corriger  ceux 
qui  voiiloyent  pcrucrtir  l'ordre  &  la  police 
de  l'£glile,&  qui  ne  fe  vouloyent  point  ailu- 
iettirauioug  ,  eftansdociies  &  dcbo^ipaires.. 
pour  receuoir  la  dortrind  qu'on  leul-preif- 
choit.D'autreparCpourjcoque  iBbil^îôlirs  il  y 
a  eu  des  gensvolages,  qii»'Ont  demandé  pluf- 
ll:oft  de  luiure  leur  cijriomé,  que  (TeHre  edi- 
fiw-  par4>onne  doftrinc ,  fttnfJ-Piul  coupe 
broche  à  toutes  quefliôstViuoletv'Sequi  n'eni 
portent  nul  fruid,&  monftre  que  iî  nous  voti 
Ions  eftre  enfeigncz  llion  Dieu,  il  nous  faut 
auoir  ce  but  de  mettre  noflre  fiance  en  luy, 
pourcftre  confermtzà  rinuoqucren  droite 
fiancc:&  puis.que  noilre  vie  foit  rciglce  corn 
nie  il  appartient,  que  nous  moiiftrions  par  ef- 
fcA  que  iioilre  jicritageeftau  ciel,  &  qu'il 
nous  faut  palTcr  jiarcc  inôdelaiis  nuus  y  ar- 

fiih  r. 


SVK  f  E  PTS  t. 

■f eft?r.  Voili  (îooc  Pintentroh  dé  fainft-paul 
en  cefte  Epiftrè.  Or  regardons  fi  de  noftrc 
tépt  telles  remôftrances  Hedoynët  pas  auoir 
lieu,&  fi  elles  ne  nous  font  pas  plus  qn>tilcs. 
Car  qui  voudroit  croire  hcaucoiip  de  gcnt, 
quelsprefcheursyauroit-ii  autourd'hayfCar' 
Toici  Taftaced*  Satin ,  d'introduire  ge'at  qui 
ne  valent  rien,3fin  que  la  parole  de  Diea  foit 
en  mefpris  &  opprobre. Et  il  y  en  a  beaucoup' 
oiri  ne  demandent  finon  d'ananccr  pour  f  a- 
fteurs  &  miniftres  de  la' parole,  gCus  ou  dévie 
dilToluejOa  qui  n'ont  nul  zèle,  ou  des  liauars, 
&  mefmes  des  contempteKrs  de  Dieu,  qui  fe- 
ront pluftoft  fuppofts  de  tauerne  4u''autrc- 
nient.  Et  pourquoy?  Cjr  ils  voyent  bien  que 
tels  prefchcurs  font  côme  bridez,&que  guîd 
lis  parlent  on  ne  s'en  fait  que  mocquer,&  que 
mefmeï  ils  auront  la  bouche  clofe, qu'on  leur' 
fera  honte  du  premier  coup:&  qui  plus  cft,  oiS 
les  fera  pafler  comme  des  linges  par  deflus  le 
baftonicaronleur  reprochera  incontinentiEt 
qui  es-tu?  On  te  fait  vnc  grand' grâce  de  te 
laiiTer  au  lieu  où  tu  es  :  car  tu  n'es  pas  digne 
d'eltrevn  porchier  ou  vn  '»achier,&tu  es  au 
lieu  de  Pafteiir.  Voila  donc  comme  beaucoup 
de  malins  voudroyent  auoir  des  prefchcurs  à 
leur  pofte:on  levoit,  Se  on  l'a  veu:  &pleufl  i 
Dieu  que  les  «temples  n'en  fuflent  pas  û  coin 
muns.Et  d'autant  plus  auarts-rious  befoin  d'e- 
fcouter  ce  qui  nous  cft  ici  remoftré  par  fàinfl 
Pauliafin  que  sousayonsgeus  qui  foyentpro 
près  pour  enfeigner,  &  qui  s'acquittent  fidcle 
ment  de  leur  deuoir:&  qiiand  ils  aui-ont  prèf- 
ché  comme  il  appartient, que  leur  vie  rcfp'on- 
de,&  qu'elle  foitpoui'  ratifier  laddftrihe  que 
ils  portent,  Si  luy  donner  approbation.  Et  de 
autre  eofté.d'aatant  que  nous  voyons  aûioiir- 
d'huy  les  aiireilles  de  beaucoup  de  geiis  li  de- 
licates,que  fitoft  qu'on  gratte  leurs  rongn'es, 
c'eftifc  tempefter,&  voudroyent  aucir  chan- 
gé tous  les  coups  quand  on  ne  prefche  point  à 
Içurappetit,  qu'à  grand'  peine  decentl'vn 
voudra-il  du  tout  fe  ranger  paiiîblcmeh't  à  la 
bonne  do'iSrine,&ceux  qui  pr'otefterôt  à  plei- 
ne bouché  d'eftré  grans  fidèles, quand  on  vou 
dra  les  inftruiré  ,&  qu'on  ^e  leur  foufFrira 
plaint  de  continuer  eri  leurs  vices,ils  fedeclâ-' 
reront  ennemis,  ou  bien  ils  fe  peruertifont, 
eh  forte  qu'ils  perdront  goiift&  faucurdc  la 
dpârine  de  pieu:&  les  autres  fe  mettront'cn 
leur  rage  pour  defpiter  tout,  &;  ne  deniande- 
rpîif  fînon  que  toiitaille  e'i?  cÔnifîqn.aE'n  à^i- 
upir  la  v.ogue  çoufibiirs  auec  leurs  cnornjrtéz; 
^uanddonc  pqus  voyons  ceIii,notôs  bicnqjje 
nç.n  fans  caufe  le  iain^l  Efprit  a  pourucu  à  t<?l 
les  ^aladies,!  i^t"""^  V  a  donne  remède',  afin 

3"i)'vn  t;.haçun  pour  foy  àppt-enc  à  s'affliiettir 
oucement  &  en  touteliumilité  à  la  parole  de 
E|ieii  j^' quand  nous  verrons  ces  rebelles  & 
èaudiueàrs  qui  î'éleuent ,  quin^jd^andcnt 
uopn.^  MUS  piçquer,  ti  à  nous  tourmenter, 
«Ùe'nous-les;deteftions  comme  pefte5,qi\e  ce- 
U-/ôit  reprimé  :'ècfî  nous  voulons  que  Dieu 


A    -T  fT  E.  -^iff 

nons  tiené  en  poflVfsioit  diitfrtcfor  <tc  foo 
Euangilé  ,  que  de  noftre  eol^c  nous  ne  nous 
méfiions  point  auec  ceur  qui  demandent  q'je 
tout  foit  difdpé  .  que  lé  troupeau  de  nc/tre- 
Seigneur  lefus  Chrift  foit  efgarc ,  5: que  l'c- 
difice  de  EHcn  foit  ruiné  efttrc  nous.  Finalc- 
ment.'puis  qu'iuiourd'huy  lé  mondé  cftaclon- 
né  i  folles  cufiofîtez  autant  qu'ii  fut  laniais, 
que  nous  retenions  tant  mieux  ce  qui  nous  eil 
ic'idecl'aié'par'faina  Paul  ,c'e(f  afçauoii^qtic 
quàrid  nous  Kfons  la  parole  dé  Dieu,  quand 
nous'venons  au  fefmon,  que  ce  ne  foie  à  autre 
fîii,fînon  pour  eftrc  inftruits  en  bonne  doftri 
ne,c'eft  a  dire  qui  foit  vtile  pour  noftre  fahit: 
qWe  nous  profiîions  de  plus  en  plùi  en  la  foy^ 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, pour  cftrc  af- 
feliroi"  du  falut  qu'il  nous  a  acquis  ,  Se  nous 
appuyer  fur  la  gracé  qu'il  nous  a  appoicer, 
que'uouspuifsioasinuoquer  Dieu  pijremeac 
&:  fans  feintife.quéaouS  regardions  roufiourç 
à  l'héritage  celefte,que  nous  fçachions  quelle 
eft  la  volonté  de  noftre  Dieu,  afu  de  n'eftre 
point  toufîours  en  branle  &  en  doute,  mais 
que  nous  allions  touiîours  lU'the  chemin, 
puiï  qu'ainfi  cft  que  Dîeh  nous  apprcuue, 
que"  nous  adJieriohs  purement  à  fa  parole. 
Quçdoncnbus  fçachions  que  ce'fté  Epiftre 
nous  cft  auiouid'huy  a'iitârit  ncceTîairc  qu'cl-. 
le  fut  iaraais  Or  venons  iiiàintfeiian:  à  ce  qui 
cft  ici  contenu.  En  premier  lieu  fainft  Pauhc 
nomme  Sentiteurdf  Dieu,  Cr  ^f^fireaeiefus 
C/jn'yî.  Or  ce  raotdc  Seniiteur  en  ce  paflàge 
ne  comprend  pas  feulement  yne  fuiettion' 
(comme  il  faut  bien'dué  noui.  lovons  tous  au 
feriiicedc  rioftréD'icu,puis  q'u'ifluy  pl.tift  de 
nous  accepter  )  mais  falpcî;  Paul  note  ici  &, 
marque  rofKce  fpecial  qui  luy  eftoit'çommisV 
il  y  a  donc  différence  entre  Suict  &  Scrui- 
teur.  Car  tout  vn  peuple  fera  fuiet  au  Piince, 
ou  à  la  feîg'neiirie'fous  laquelle  ij  viç,r  maii  ce 
font'  les  officiers  qui  onf  charge  publique. 
Ainfidbnc  fa'inft  Paul  outre  ce  qu'il  eftoit  de 
la  compagnie  des  Chreftiçm  pgur  feruir  à 
Diéu,éftoit'doQ:ciif,5:  aupk  charge  ,&:cftgt  en . 
rE'glife;  Qr.ll,  fpecifie  qiiej  cftoit;ce|l,ofi^'ce-«, 
rà,'di'^ji<  qij^il eft  ApOjftré  de  ItUivÇlûilt  ;  &, 
no"us  içàuon.s  que  Dieu. a  e.nupyq  iph  Filj  à 
telle  con^itiojti  que  luy  fcul  duiuine  pardef-, 
fus  nous.  Or  il  ne  conuerfc  pas  ici  en  perfon-. 
ne ,  niaisil  a  choifi  ceux  qui  luy  a  pieu,  afiti^ 
dâiionccf  fji' parole, ,  &;  de.  j;cpi;çfenter  fa. 
perfonne&,  foalieu.Et^'éjO:  ce  ^^uj  eft  tyaitq 
plus  amplement  au,  quatrième  desÉphe/iins;,, 
que  lellis  Chrift  çftant  .mgnté  au  ciel ,.  3, o,r-iv 
donri'é  en  fori,Eglife  des  Apofttçs  ,.iiçsJÇHaiv-! 
geliftes.des  pâfteui:s,^dps  Çoftciirs, qu'il  n'a; 
point  laiiTé  les  ficns  dei'pourueus  ;  mais  jla 
eftabli  vne  fi  bonne  police,  qu'il  ne  lailTc  pas. 
de  nous  gouuerner  ,  combien  qu'il  loi:  ablcnt, 
de  corps. liions  voyons  4oncmaint«;iiant  quei> 
le  cft  l'intention  de  ûinft  Paul  :  &  de  là  a,Çifsi; 
noMspouuoos  recueillir  qu'il  ji'apoinf  cfcrJft 
fculemeiit  à  vh  liômincmais  que  celte  dodri- 

Tt.in. 


Ç.8. 


SERMON    ils 


31;' 


necftpoui-  t.out  le  peuple.  Car  il  y  eniuoit 
beaucoup  de  malins(commc  dclîa  nous  aiions 
touché)  qui  nele  laiflovciit  point  gouuerner 
par  Tite.Pour  ceftc  cauû  ùiiict  Paul  û;  vient 
ici  mettre  comme  bouclier ,  &  contermede 
fon  autliorité  cehiy  qui  e/loit  ainli  alIàilli.Ce 
n'eit  point  donc  au  regard  de  Tue  qu'il  s'at- 
tribueces  titres  lionorable5:car  cela  cufl  elle 
liiperflu  :  Tite  le  cocno'.lloit  comme  Ion  pè- 
re :  car  ce  n'eft  pa^  lans  caufe  qu'il  l'appelle 
ici  Ion  vray  fils  :  S:  il  fçauoit  bien  aulsi  de  qui 
il  éftoit  enuoyé.Saind  Paul  donc  n'auoit  nui 
bel'oin  de  fe  magnifier  enucrs  ceft  homme 
^ui  défia  luy  portoit  honneur  tel  qu'il  eftoit 
j-equis  :  mais  pouTce  que  le  peuple  de  CtetSi 
où  Tite  cftoitpourlors,ne  felailloit  pasgou 
«erner  ,  lainû  Paul  ne  vient  point  là  eu  loi» 
nom  priué,  mais  il  fc déclare  élire  enuoyé  de 
Dieu,&  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.Mais 
cncores  pour  mieux  approuuer  ce  qu'il  dit,  il 
adioufte  ^ue  c'eji  felott  la  fuj»  communt  des 
tleus.  Et  puis  il  déclare  quelle  eil  ctftc  toy: 
c'cll  afçauoir  /.«  co^ntifffjhce  de  ■virité  :  Se  non 
point  iimplemcnt,  mais  ijui  ejl  félon  la  ernfute 
di  Dieu,  -foire  en  Tefferance  delà  fit  éternelle. 
Orici  nous  voyons  qn'einporte  l'Apûrtolar 
de  lainct  Paulrce  n'eit  pas  vne  dignité  oifiue, 
ce  n'eftpas  aiifsi  vn  titre  volant  en  l'air,  mais 
c'eft  vne  charge  qui  eÛ  d'anoncer  la  parole 
de  Dieu,  voire  tellement  que  le  monde  foit 
édifié  à  bien.&quelefalut  qui  nous  cft  pro- 
mis,ibit  public  ,  &que  tous  fidèles  en  foyent 
participas.  Voila  donc  en  fomme  ce  que  nous 
auons  à  retenir  de  ce  paflàge.  Mais  encores 
il  fera  mieux  entendu  quand  nous  l'applique- 
rons à  noltre  mftruction.  Il  y  a  eu  de  tout 
jemps  deux  extr«raitez,  quant  eftde  receuoir 
«eux  qui  anohcent  la  parole  de  Dieu  ,  ou  de 
les  reictter.Car  beaucoup  ont  efté  menez  par 
Ignorance  ,  ou  pluftoft  bejtife  ,  qu'ils  n'ont 
point  difcerné  entre  le  bien  &le  mal ,  &  le 
font  contentez  d'oayr  feulement  vn  titre  vo- 
kge.  Et  voila  qui  a  efté  câule  d'abbrutirle 
poure  monde',  comme  auiourd'huy  on  le  voit 
en  la  Papauté. Car  ceux  qui  font  du  tout  apo 


ne  par  toute;  erreurs  &  fupcrftitions.  Voila 
donc  vne  extrémité  bien  uiauuaife.quand  fous 
ombre  du  nom  de  Dieu, les  hommes  font  ain- 
û  tranfportez  à  mal.  Mais  il  y  a  vn  autre  vice 
encores  pire  &  plus  luefchant  :  c'eft  afjauoir, 
que  beaucoup  reiettcnt  toute  doftrine,&  tout 
ioug,&  ne  leur  chaut  iî  on  leur  parle  au  nom 
de  Dieu.ou  comment  que  ce  foit.  Nous  auons 
monftré  comme  les  poures  Papilles  s'en  vont 
à  perdition,  pource  qu'ils  font  ainlï  aueuglcz 
de  receuoir  tout  ce  qui  leur  eu  apporté  par 
les  hommes, qu'ils  ne  cognoiflent  nullemenc 
ce  qui  eftde  Dieu. Or  entre  nous  que  trouue- 
ra-on?Beaucoiip  diront  aflez  en  vn  motqu'ilt 
veulent  fiiyurc  l'Euangil^  :  mais  cependant 
ii  ne  leur  chaut  gucre.s  de  rjulle  doôrine,  que 
ils  ne  feront  nulle  difficulté  de  fe  mocquer 
de  Dieu  ,  &  de  regimber  ,à  l'encontre  de  la 
raaiefté  ,  &  de  babiller  contre  fa  parole ,  5c 
contre  tous  c€ut  qui  la  portent.  (Xue  vaut 
donc  entre  beaucoup  de  gens  «uiouid'huy  ce 
mot  de  Seruiteur^  de  Dieu  ,  encores  qu'il 
foit  bien  approuué?  Rien  qui  foit.  Et  là  on 
cognoift  vne  impudence  trop  vileine,  que 
ceux  qui  veulent  eftrc  rcputez  Chreftiens 
(voire  de  hpnte  qu'ils  ont  d'eftre  Turcs ,  ou 
jnfideles)fcdefpitent  tout  notoirement  con- 
tre Dieu  8:  la  parole,  &  ne  Iciir  chaut  de  rien 
qu'on  puiflè  dire.  Or  iu  contraire  ,  aduifons 
à  nous  :  Si  en  premier  lieu  notons  que  pour  e- 
ftre  eognus  Chreftiens, il  faut  que  nous  ayons 
cefte  humilité  d'obéir  à  la  do&rine  qui  nous, 
eftanoncee,  A:de  neus  y  ranger  fans  contre- 
dit: &  quand  nous  oyons  ce  titre  de  Seruiteur 
de  Dieu,  que  nous  apprenions  que  ce  n'eft 
pas  vn  ellat  à  mefprifcrtconime.  fainél  Panl  l'a 
déclaré  cidefliis  ,  que  fi  Dieu  conftitue  eii  fi 
maifon  ceux  qui  l.i  doyuent  gouuerner ,  il  ne 
faut  point  les  rcictter,quenousne  foyons  rc- 
iettez  quant  &  quant  de  noftce  Ditu.Eft-ct  la 
raifon  qu'il  nous  aduoue  pour  fcs  enfans,  & 
nous  le  defpiterons,&  luy  cracherons  au  vifa 
ce  entant  qu'en  nous  fera?  Si  nous  difoBS  que 
noftre  intention  n'eft  point  telle:  il  a  déclaré, 
qu'il  veut  eftre  cognu  par  f.i  parole  ,  voiie  &" 


ftats  de  i'Ejlife  ,  cpux  qui  reiettçiit  furieufe-    qu'ô  rcçoyueceux  qu'il  a  eftablis  pôiirlapor 
ment  la  parole  de  Dieu,  diront  toUtésfçsis  que     tér,&  les  appelle  difpenlateilrs  dé  les  fecreti,  ' 

"       " "      "       goiiuerneurs  de  fa  raaifoh:  &  cependant  nous 

n'en  tiendrons  contci'Et  où  eft  l'honneur  que 
nous  portons  à  noftre  Dieu  ?  Car  il  ne  veut 
point  eftre  transfiguré  p.ir  les  mcfchans.  Il  îl 
donc  voulu  que  nous  luv  faciont  hommage 
en  receuaiit  fa  parole rcointîie  il  lé  dit  par  foa 
Prophète  Ifaic,  qu'il  a  mis  faparole*  afin  que 
elle  foit  receue,ruire  par  là  bouche  deshom» 
mes,dè.  liiâin  en  nvain  iufques  à  la  fin  du  m  on- 
de. En  îbmrae  apprenons  d'eftre  atcentifs  à 
cfcoutcrla  doûrirte  qu'on  nous  prefenteau 
nom  de  Dieu  ,  &  Je  Fefcouter  autc  telle  hu- 
milité, q;ie  qu'and  nous  fçaufons'que  c'eft' 
Dieu  qui  parle  à  iious,  encores  q^u'il  vie  dlf 
moyen  des  hoiiiiiles ,  &dc  gens  contempti-» 


ils  veulent  ertre  fuict*.  à  leur  mère  fàinûc 
i-glifc,  8c  fous  ombre  d'humilité  ils  feront  la 
juerre  8f  àDieu.&à  faparole,  comme  beftei 
«nragees:&  neâtmoins  en  i'honneur  de  Dieu 
ih  s'aflliiettiront  à  la  tyrannie  dés  hdmmes. 
£t  qui  eft  caùfe  de  celâf  II  n'y  a  nulle  pruden- 
ce ne  difcretion,  il  leur  femble  que  c'eft  alTcz 
d'auoir  ouy  bien  refonncr  ce  mot  d'Eglife. 
Gr  ii  faloit  enquérir  que  c''eftoit  :  &  quandlc 
Pape  s'appelle  vicaire  de  lefus  Chrift.fucccf- 
fcurde  fainft  Pierre  ,  il  faloit  fjauoir  liainlt 
eft  ou  non:3i:  quand  il  aura  approuué  ce  qu'il 
dit ,  alors  receuoir  la  doilrinc.  Mais  qiioy? 
(Du  voit  comme  vne  grande  multitude  i'e 
iailTcrdcccuoir:  S,:  ces  poures  gens  font  con- 
«Lnsd'auoirles  yeux  baiide3,A:<^u'oi\lcs  tr.ii- 


blcs  fclo'n  la  chair',  que  aaus  ac  laifvious  V^î 


'àt 


s  V  R    L'  Ë  P  I  S 

2e  plier  le  coI,3c  de  monftrcr  «jue  rrayemcnt 
jioas  luy  fommes  brebis  ,  puis  ip'il  iuy  plaift 
«le  nous  eftre  Pafteur ,  quM  n'y  ait  point  Je 
£ercé  en  nous,  que  nous  ne  loyons  point  dif- 
ficiles à  gouaenier,  niait  que  nous  ayons  ccft 
efprit  de mafuctude  duquel  lainû-Ia<|uei  par 
Ii^J.I.il  2ç^  quand  il  nous  monftre  la  façon  de  bien  rc 
ccuoir  la  parole  de  Dicu.Voila  pour  vn  item. 
Mais  cependant  notons  aufsi  qu'il  nous  faut 
eftre  certifiez  que  ceux  qui  parlent, ne  s'mge 
leiit  point  d'cuï-mclaies  ,  qu'ils  ne  nous  ap- 
portent point  leurs  fonges  Se  refuerics ,  mais 
que  c'eft  Dieu  qui  nous  lescnuoye.  Et  com- 
ment cognoiftrons-noub'  cela?  Il  ne  tieijdra 
qu'à  nous:  feulement  que  nous  ouunoos  les 
yeux  &  les  ayreilles  .  Mais  qrioy?  Il  y  en  a 
beaucoup  qui  ne  demandent, finon  des'aueu- 
glcnConvnelçs  Papi fies, quand  on  leur  dira 
<ju'il  feroic  bon  de  s'enquérir  de  la  doftrinc 
^u'on  leur  porte  :  non, ils  ne  le  veulent  point 
faire.  Etpourquoy?  Car  ils  fe  ioueutauec 
JDicii  :  ^  syins  leurs  agips.kurs  fglles  cere- 
inpnics  I  &  tOMt  ce  njenu  bagage,  il  leur  fem- 
Me  que  les  voii?  bien  acquittez, ■&  le  forgent 
vne idole  à  lea?  plaillr  :  tellement  que  iainais 
le  moniie  n'elt  crompé,fiBon  d'autant  qu'il  le 
cherclic&  le  délire.  Auiiidecesgaudifleurs 
qui  ne  demandent  lînon  d'auoir  toute  licen- 
ce ,  ils  ne  voudront  point  s'tnqueru  li  on  les 
enfeigne  au  nom  de  Dieu,ou  non.  Ils  auront 
bien  celle  réplique  toHlIours  en  la  bouche, 
Ho.de  moy,  le  ne  veux  pojnt  refiftcr  à  Dieu: 
;iiais  que  fçay-ie  li  ceiuy-Ja  ra'anonce  la  pa- 
role de  Dieu;  Voire.iTiaisenquier-toy.  Et  ie 
n'en  feray  rien, ie  ne  daigneroye.Nous  voy- 
ons donc  maintenant  que  tous  c^ux  qui  ne 
fouffrent  point  d'eflre  recueillis  à  Dieu,  &  en 
fon  troupeau, ne  s'efgareut  qu'à  leur  cfcient, 
&nep.eriirentfinon.parleur  faute,  tellement 
qu'ils  ierôt  touliours  coulpablcs  de  leur  mal. 
Il  eft  yt-ay  qu'ils  ne  iailTeront  point  de  faire 
cpuleur  de  leur  ignorance:mais  ils  ne  fe  ioue- 
r,ôt  point  à  Dicu,que  Icurinalipencioit  touf 
ipurs  cognue.Brief.iamais  les  Kpmesne  fajl- 
Içnt  que  ce  ne  Ibit  de  leur  bon  Erc.Car(com 
me  l'ay  dit)ily  aura  toujours  de  l'hypocri- 
fieauec  ignorance,  ou  de  la  nonclialance,  ou 
delà  rébellion  manifefte.  Lesvns  voudront 
del^iiter  Dieu  :  les  autres  feront  hypocri- 
ces ,  &  fe  contenteront  d'auoir  des  menus  a- 
gjos  ,  &  chofes  friiiûlcs  pour  s'aquitter  en- 
uersD4eu  :  ils  auront  kurs  belles  dénotions. 
Le»  autres  feront  cnyurcz  aux  vanitcz  de  ce 
wonde.ils  auront  leurs  négoces  &  folicitudes 
qui  les  empefchéc  ce  regarder  à  Dieu,  telle- 
ment qu'ils  feront  r.onchaians  :  on  aura  beau 
parler  à  eux, ce  leur  M.ra  tout  vn.cc  qui  entre 
par  vue  aurcilJcefciappc  par  l'autre.Et.pour 
^uoy?  Ils  fout  tle^:".  prcocciipet,ile,cIiefcs,c& 
i^airçs.  D'aman [  plus  donc  n.ous  faut-il  bicp 
«otercep.ill.i£;c;c'eflafçauoirquandonnous 
parle  de  la  p.irole  de  Dieu,&  que  ceux  qui  la 
prcfchét,  proteftétque  ce  n'eft  point  de  leur 


T:'ATlfE.  îT^ 

ftntafic  ,  mais  que  lefss  Chrift  qui  en  a  toute 
maiftrifc&  authorité,  leur  en  a  eftabli  ccft  or 
ire  ,  qui  deit  eilre  facré  &  inuiolable  iufque» 
à  la  fin  du  monde  :  que  nous  foyonsattentift 
à  cela,qu'vn  chacun  clcoatc,  &  que  nous-  en- 
quêtions fongneufement  li  c'ell  le  Fils  Je 
Diea  qui  parle  ainlt  à  nous, afin  de  luy  rendre 
l'homroage  qa'il  mérite  :  comme  nou';  oyons 
qu'il  dit.Bailez  le  Fils.  Que  donc  il  foit  fcrui 
Si  honoré  de  nous,  autrement  voila  Dieu  qui 
cfl  outragé  ,  nous  tafclions  d'abslir  fa  maie- 
llc  Je  fa  gloire,  entant  qw'il  nous  eft  pohiblc> 
&  fomwes  coulpables  cryn  tel  facrilcge,  quel 
que  belle  proxeftation  que  nous  fpcliiôs  fai 
re.  Ot  ici  fiinit  Paulmonftre  que  tous  ceujç 
qui  anonc  ent  la  dodrine  dé  Iefu6  Chrift,  font 
vrais  feruiteurs  de  Dieu.Et  pourquoyfD'au- 
tant  que  le  Père  Se.  le  Fils  font  vn:  non  feuler 
ment  pouxce  que  le  Fils  eft  de  l'elTence  du 
Pere,mait  il  y  a  m  accord  liir  tout ,  quand  le 
Père  fe  reprcfente  i  nous  en  la  pcrfunne  de 
fon  Fils,comme  Icfus  Chrift  mefme  protclte, 
Qu.i  croit  enmoy,  il  ne  croit  point  en  aïoy, 
mais  enceluy  qui  m'a  eouoyé. Comme  s'il  di- 
foitiqu'il  n'a  rien  de  fon  propre  entant  qu'il 
eft  homme  fuoTtel;inais  comme  il  eft  defcen- 
du  du  ciel,  &.qu'tniluv  habité-toute  plénitu- 
de de  diuinité,  fi  nous  croyons  en  luy , nous  fe 
rons  conduits  à  la  gloire  immortelle  de  no- 
ftie  Dieu:  car  c'eft  luy  par  lequel  nous  fom- 
mes créez  Si  formez,  &  par  lequel  nous  fom- 
mes côferuc;z  iSc  maintenus.  Voila  donc  ce  que 
nous  auons  à  obferucr  ,  quand  liinû  Paul  le 
déclare feruiteur de  Dieu,  eftant  Aportrede 
lefus  Chrift.  £t  cependant  cognoilFons  que 
pour  eftre receus  &:  aduDuez  de  Dieu  ,  il  faut 
en  premier  lieu  que  nous  obeif,i5s  à  fon  Fils, 
auquel  il  a  donné  toute  puilîance  &  feigneu- 
rie  fur  nous. Car  les  Turcs  proteftcront  allez 
d'adorer  Dieu,  niais  cependant  ils  fe  forgent 
vne  idole,  d'autant  qu'ils  fe  feparentde  lefuj 
Chrift.Oi  qui  n'a  point  le  Filv,il  n'a. point  la 
pcre,  cûme  dit  faind  Iehan.en  fa  C/lnonique, 
Autant  en  eft-il  des.Iuifs,&  tpu^  Paycns.  Eç 
les  Papilles ,  combien  qu'ils  fe  vantent  alTea 
de  croire  en  Dieu,lî  eft-ce  que  leur  jncreduli 
té  femonftre.pource  qu'ils  refiftent^à  l'Euan 
gile,  &•  qu'ils  ne  peuuent  pas  adorer  le  Fils  de 
pieu,  voire  fe  foumettaus  du  toat  jl  fadoûri 
nepour,luy.ol»cir:d'autant  qu'il^n'ont  point 
cela, nous  lespouuons  .ippeller  increduleiiEf 
penlons-nous  donc  que  Dieu  nous  reçoiije 
au  nombre  des  liens, iinon  que  nous  rendions 
toute  fuietion  i  noftre  Seigneur  Ufus  Chrift? 
C^uand  il  nous  enuoye  Ces  Apoftres.que  nout 
fçachions  qu'il  nous  eft  conftituéRov,  afin 
que  nous  foyons.fon  peuple  :  que  le  fceptrc 
par  lequel  il  nous  doit  gouuerner.c'eft  fon  1;- 
uangilc,  &  que  les  hommes  qu'ilnoijs  confti- 
tuCjtcpijefcntent  faperfonnc.  Si  nous  n'auos 
cela,  ne  pçnfont  point  que  Dieu  nous  reçoiT 
ue,  &mermes  ilnouscoiiftera  bien  cher  Je 
nous  eftre  glorifiez  du  nom  dç  Chrcilient^» 

Tc.ilii. 


Tfe.t.il„ 


44.; 


jtç 


SERMON     I. 


finon  que  nous  »yons  te  qui  nous  eft  ici  dc- 
claré  par  fainâ,  Paul ,  c'eif  d'efcouter  le  Fils 
<de  Dieu  quad  il  parle  àiious,  voire  par  la  bou 
che  des  liommet  mortels-  Car  (  comme  i'ay 
die  )  il  ne  faut  pis  que  nous  attendions  qu'il 
defcendedu  ciel:  c'eft  aflez  qu'il  nous  fufciie 
gens  qui  nous  portent  iidelcinent  ù.  parole, 
qui  foyent  comme  inftrumés  de  fon  iâinél  E- 
fprit.qui  re^oiuent  deluy.aiîn  de  nous  le  di' 
fpenfer  fans  mettre  rien  de  leurs  fonges  ni 
fantaiîes.  Quand  donc  nollre  Seigneur  lefus 
Chrift  nous  fait  ceiVe  grâce,  c'eft  bien  raifon 
que  nous  Toyou  obeiflkns  &  paifibles  pour 
receuoircequinout  eft  apporté  en  Ton  nom. 
Voila  donc  ce  que  nous  2u6ns  à  retenir.  Or 
faintl  Paul  adioufie  «ncorei  vh  mot  qui  eft 
bien  digne  d'eftre  obferué  :  aiçauoir  qu'ileft 
Apofire  ftlon  lafoy  communt  (dit-il)  des  eleus 
Je  Ditu.En  parlât  ainfî,il  s'adioint  auec  tous 
les  Patriarches  &  fainôs  Wrerqui  auoyent 
vefcu  dés  le  commencement  du  monde,  &  a- 
uec  tous  les  fidèles  qui  eftoyent  de  ce  temps 
la. Et  par  con/equent  il  môftre  que  tous  ceux 
qui  ne  voudront  point  receuoir  fa  doûri.ie, 
fe  retranchent  &  le  bannilTent  de  l'Eglifê-de 
Dieu,&  qu'ils  fôt  reprouuez.  Car  s'ils  eftoy- 
entdela  compagnie  des  eleus ,  ils  s'adioin- 
droyent  à  luy  ,  d'autant  que  fon  Apoftolat 
jj'a  rien  de  feparéd'auecla  foy  de  tous  eleus. 
Or  ûinâPaul  exprime  ici  ce  que  nous  auôî 
défia  touché  en  brief:  c'eft  afçauoir  que  ce 
n'eft  pas  vne  dignité  oifiue  que  l'office  d'A- 
poftre ,  mais  que  c'eft  vne  charge  qui  luy  eft 
commife  de  Dieu,  voire  pour  anonc'er  pure- 
ment fa  vérité.  Et  en  cela  voyons-nous  file 
Pape  doit  eftre  recéu  pour  le  chef  de  l'Egii- 
fe,&  que  c'eft  que  vaut  enfomme  toute  certe 
Hiérarchie  dont  il  fe  vante,c'eft  à  dire  toute 
cefte  vermine  de  Clergé  plein  d'ambition. 
Car  il  dira  bien  <]ue  luy  &  fes  Euefques  cor- 
nus font  fucccfleurs  des  Apoftres  :  mais  nous 
»e  pouudris  point  ici  eftre  trompez  ,  lî  nous 
voulons  faire  ciamenà  ce  que  Dieu  nous  cô- 
inanée.  Voici  vne  doftrine  certain*  &  mfalli 
ble  pour  fçanoir  quels  font  les  vrais  fucce'f- 
f«urs  des  Apoftres  :  afçauoir  ceux  qui  nous 
prefchent  l'Euangile,  qui  s'accordétà  lafoy 
4e  tous  les  eleus  de  Dieu. Quand  nous  trouue 
Tons  que  le  Papeprefthera  ladoârine  laquel 
lekï  Patrrarcl>cs  S;  1er  Prophètes  ont  tc- 
iftué  ,  &  laquelle  auf;i  les  A^ofttei  ont  fuiuie, 
alors  il  nt  faudra  pla?  rïpTiqtier  que  vraye- 
mcnt  il  ne  foit  du  nombre  âc^  Paftf  ars  :  niais 
eependant  qu'il  fcradtPidole,  qu'il  aura  vne 
tyrannie  barbare  ,  qu'on  rfe  fçaurott  ouir  vn 
feiil  mot  de  doôrine  de  fa  bouch*  (  car  aufii 
ce  la  derogueroit  3  &  digmtc)  il  D.utqueno' 
deteftions  ce mafque  innoduii  par  Sa'tati.d'.iu 
tant  que  ce  n'eftiinon  vne  corniptiou-dîaibo- 
lique  qui  s'eftcleuee  Cotte  l'authorité^f  Fils 
•le  Diéu,3<  c5tre  l'ordre  q\)f  il  auoittftabii-cn 
.fon  Eglifc.  Car  là  trouuera-on  la fby  des  e- 
•leusdctit  parle  ûinft  Paidf  Qui  plus  eft,  on 


voit  que  le  Pape  pour  maintehir  ceâe  puiâàn 
ce  tyrannique  qu'il  a  vfurpee ,  ne  veut  point 
qu'on  s'enquiere  en  façon  que  ce  foit  de  la 
verité'deDieu  :  il  voudroit  que  l'Efcriturè 
fainâ*  fuft  enleuelie,&  fe  voudroit  tellement 
magnifier  par  dellùs  toutes  creatures,que  le« 
Prophètes  &les  Apoftres  ne  fuflent  nen  en 
comparaifon.QuSnddonc  nous  voyons  qu'a 
uecvntel  facrilege  il  dtfpouille  Dieu  de  fa 
maiefté  ,  &  ne  fouffrant point  cequi  doite- 
ftre  ^ourapprobatiôdefon  office,  qu'il  veut 
eftre  cognu(quel  qu'i  lfoit)pour  Apoftre,  ne 
doutons  point  que  ce  ne  foit  vne  baftardife 
que  le  diable  a  mife  en  auant,afîn  que  toute  la 
police  que  noftre  Seigneur  lefus  Ckrift  nous 
commande  ,  fuft  difsipee.  Voila  en  premier 
lieu  ce  que  bous  aiions  â  retenir.  Et  au  refte, 
notons  que  pour  eftre  afleurez  fi  on  nous  par 
le  au  nom  de  Dieu  ..  il  faut  que  nous  venions 
i  ce  but.c'eft  afçauoirde  nous  enquérir  quel- 
le  eft  la  foy  des  fainfts  Pères  qui  ont  vefcu  tl 
deuant  la  Loy,  &du  temps  des  Prophètes,  de 
confequemment  aufsi  quelle  eft  là  foy  des  A- 
poftresîquenous  ayons  cela,&  nous  ne  pour- 
rons faillir.  El  ce  nous  eft  vnîe  confolatiotl 
ineftimable^  quâtid  nous  fçauôn*  que  Dieu 
nous  abfouf  ,encoîes  que  le  monde  nous  con- 
d<imne:qu'il  nous  reçoit  pour  fes  enfans,com 
bien  que  le  monde  eftime  que  nous  foyonî 
plus  que  reprouuez.  Et  pourquoy?  Ceci  ne 
nous  peut  faillir  ,  c'eft  que  lefus  Chrift  nous 
gouoerne.qu'il  nous  accepte  pour  eftre  mem- 
bres de  fon  corps,  tellement  que  nous  accor- 
dons auec  les  fainâs  pères ,  &  auoris  vne  foy 
commune  aucc  eux.  Et  pourquoy?  Carnous 
fommes  conioints  à  luy  d'vn  lien  indiffolu- 
ble.  Cognoiffons  donc  que  nous  fommes  vnis 
en  leurs  corps, moyennant  que  nous  ayons  la 
foy  qu'ils  ont  fuiuie.  Voila  donc  comme  au- 
iourd'huy  nous  pouuôs  defpitrr  les  Papiftet, 
&  Its  desfier.quelque  orgueil  qu'ils  ayent:cô 
bien  qu'ils  fe  vantent  d'cftré  les  vrais  tatho- 
liques(côme  ils  parlent)totJtesfoi$  nous  fon» 
mes  afleurez  que  Dieu  nous  aduone  ,  &  qu'il 
les  condamne.Et  pourquoy?  d'autant  que  ce 
régime  fpirituel  que  le  Fils  de  Dieu  nous  a 
commandé.cft  entre  nous:  c'eft  que  nous  oy- 
ons fa  parole, tellement  qu'il  v  a  vn  accord  8c 
vne  mélodie  entre  la  foy  des  frères  anciens, 
celle  de  tous  les  eleus  de  Dieu,  &  la  noftre. 
Q_nand  cela  y  eft,  nous  fommes  alTeurezîque 
k  mond'eiugc  tant  qu'il  voudTa,msis  flous  le 
condamnerons  en  toute  liberté.  Car  fi  nous 
pouuons  dcfpiterles  Anges  du  ciel  quand  iU 
fe  drcfTcroycnt  contre  l'Euangile  de  lefus 
Chrift,  que  fera -ce  de  ceftc  ordure  puante  du 
Pape,&dc  tous  les  fiens ,  quïd  ils  s'attribue- 
ront vnt  telle  puiflance  ,  que  Icfus  Chriftne 
foit  pi'  rien;que  la  foy  foit  mife  fous  le  pied; 
&  qu'ils  fe  forgét  vne  telle  doftrinc  quefeoii 
leur  fcmblera?  Voila  dôc  comme  nous auôs  i 
prattiquerce  paffàgc  de  S.  Paul.  Or  ceci  doit 
eftrcTB  moyen  pour  afleiirer  ceux  que  Dieu 

enuoye 


SVRL'EPiSTiATITE  ^xi 

enuoyepouranoncerfa  parole,  Qweq^"'^  viendront  coniger.S:  Dieu,  &  fon  S.  Eipric. 

ils  Centiron:  ou'.h  ne  peuuenc  iufhre  pour  Or  iainû  Paul  au  contraire  (corne  ai.fsilefus 

porter  ladoannederEuangile  ,  que  néant-  Clirift  en  cepaffagcque  nousauons allègue J 

moins  ih  aventcequedit.c.rainftPaul.c'eft  monftre  bien  que  la  toy  ne  commence  pomc 

afçauoir  que  noftre  do^rine  foit  conforme  à  de  noftrc  cofte  :  ma;s  c  cft  d  autant  que  Dieu 

la  fov  de  tous  les  eleus  de  Dieu  ,&  que  cela  nousauoit  choifis  ,  &acaulede  fon  eUaion 

foit  pour  repoiiffer  ceux  qui  s'eleuent  contre  immuable.à  carife  de  fa  bonté  gratuite  par  la- 

nous  &  que  nous  ne  faciôs  nulle  difficulté  de  quelle  il  nous  a  adoptez  pour  fes  entans  ,  il 

.     direâuecS.Paul,  Quenousauonsleglaïue  nous  donne  â 'lelus  Gknll  ,&  nous  venons  a 

t.Cerm.  ^^  j^  ^^.^  .  ^^„        y„    jaiye  matériel ,  mais  luy .Et  pourquoy  ;  Pource  que  nous  luy  fom- 

^°-'^-      pour  prononcer  fentencede  condamnation,  mes  enuoyezde  Dieu  Ion  Perc:  c  eftamar- 

'        &  pour  déclarer  que  la  vengeSce  de  Dieu  eft  queparlaquelle  il  nous  monftre  qu  ilnous  a 

appareillée  contre  tous  ceux  qui  ne  voudiôt  en  pofTef  ion  &  héritage.  Et  amli  apprenons 

receuoir  noftre  doarine.  Il  eft  vtay  que  nous  que  li  l'Euangile  nVlt  point  auiourd  huy^ac- 

deuons  tendre  touliours  à  ce  but,  d'amener  le  cepté  ians  réplique,  &  fans  contention,  s  il  y 

inonde  à  robeilTance  de  noftre  Seigneurie-  a  beaucoup  d'ennemis,&  maniieftes,&  dome- 

fu>  Chrift.  Mais  quoy  qu'il  en  foit,  que  nous  ftiques  ,  meimes  cefte  vermme  qui  eft  meflee 


auons  dit.à  lefus  Chrift.quMs  font  excommu  point  pour  vn  tel  fcandale.Et  pourquoyPCar 
niez  de  l'Eglifcqu'ib  font  bannis  du  royau-  il  lA  il  point  donné  à  tous  de  fe  ranger  ainfi  a 
me  de  Dieu,  &  qu'il  ne  leur  refte  finon  de  rc-  noft;  t  Seigneur  lefus  Chrift  :  mais  qu'il  nous 
ceuoirla  vengeance  korribleqm  leur  eftap-  fnfhfe  d'.ft.c  enrôliez  auec  les  eleus  de  Dieu: 
preftee.  Voila  pour  vn  item.  Mais  aufsi  notés  car  c'eft  fon  plailir:  &  puis  qu'il  s'en  conten- 
q  tous  Chrtlhés  ont  ici  vn  bon  appuy,  quand  te  ,  c'eft  bien  raifon  aiifsi  que  nous  paAion» 
ils  feront  agitez  de  beaucoup  de  centations,  tous  par  là.  En  fomme, toutes  fois  &  quantes 
qu'il  leur  fuffifede  s'eftre  ragez  au  troupeau  que  nous  voyons  l'orgueil  de  ces  vileins  qui 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chnft  ,  &  d'auoir  blafphement  contre  Dieu  ,  que  nous  voyons 
vne  foy  conforme  à  celle  des  Pères  anciens,  des  diffolutiôs  &  des  vices  qui  font  plus  enor 
&de  tous  ceux  que  Dieu  a  eleus;  quand  ils  au  mes  entre  no' qu'entre  les  Papiftes,  que  nous 
rôt  cela.qu'ilsfecontécent.Mais  pour  mieux  voyons  ceux  qui  fe  defpitent  contre  toute 
veoir  le  profil  que  nouy  apporte  ce  palfage,  bonne  doûrine  ,  n'en  receuans  finon  ce  que 
notons  en  premier  lieu  ,  que  fainû  Paul  a  ici  bon  leur  femble  ,  &  quand  ils  fe  feront  raoc- 
voulu  armer,&  Tite,&  tout  le  peuple,  contre  quez  de  toutes  remonftrances^,  qu'ils  feront 
le  fcandale  qui  trouble  beaucoup  d'infirmes:  knicquet,  voire  mefmes  qu'ils  dreuent  les 
c'eft  quand  il«  voyent  qu'il  y  a  des  repugnan  cornes  côme  de  taureaux  pour  heurter  cotre 
ces  &  côtradidions,  mefmes  que  ceux  qui  por  Dieu,&  ceux  qui  les  enfeignent,  que  nous  ne 
tent  le  titre  de  Chteftiens  veulent  faire  des  foyons  point  fcandalizez  pour  cela.mais  que 
reuefches&  beftes  fauuages  :  voila  qui  trou-  nous  foyons  armez  de  ce  qui  eft  ici  dit.  Et 
ble  beaucoup  de  (impies. Or  il  nous  eft  ici  de-  bien, tant  y  a  qu'ils  ne  reculeront  point  les  c- 
claré  qu'il  nous  peut  bien  fuffire  que  nous  leus  de  Dieu:  car  il  cogno  ft  Se.  fçait  qm  font 
foyons  conioints  &  vnis  auec  les  eleus  de  les /ïens.c'tft  fon  propre  héritage, il  les  mai» 
Dieu. Or  fainiS  Paul  en  parlant  ainfi,  monftre  tiendra  donc. Cependant  que  nous  ayos  tous 
qu'il  ne  nous  faut  point  esbahir  s'il  y  a  des  tels  fuppofts  du  diable  en  dettftation  ,  i  cn- 
mutin:en  l'Eglife,  qui  tafchent  de  renucrfer  tenctux  qui  inau  ftftemcnt  fe  drelK'nt  ainfi 
tout  ordre,  'il  y  a  des  hypocrites  qui  iement  contre  Dieu  &  fa  doftrine  ,  nous  eflongnan» 
leur  zizanie  pour  diuertir  les  ignorans  de  la  d'eux  tant  qu'il  nous  fera  pofible.Ainn  dôCi 
pureté  de  l'Euangile,  s'il  y  a  des  mtfchans  &  que  nous  ayons  cefte  conftance  inuircible  de 
dilTolus  qui  regimbent  à  i'encontre  de  Dieu,  dcfpiter  tous  ce-  mcfchans  qui  le  rtbecquenc 
&  bataillent  contre  le  royaume  de  noftrc  Sei  ainfi  à  I'encontre  de  Dieu,  &  que  nous  chemi 
gneur  Ufus  Chrift.Et  pourquoy?Car  tou  ne  nions  toutîours  en  la  lîmplicité  de  l'Euâgile, 
fontp*int  eleus.  Cognoiir.ms  que  c'eir  vn  quoy  qu'il  en  foit.  Voila  donc  pouiquoy  no- 
don  Ipccial,  qu'il  faut  que  nous  foyons  du  tammtiit  fainft  Paula  ici  parié  des  eleus  de 
troupeau  de  le  fus  Chnft  pourauoir  la  foy,  Si  Dicu.O.  il  adioufte  pour  déclaration  plus  an» 
I«6.tf.ffj  pour  obéir  à  fon  Euangile.Or  il  dit  qie  ceux  pk,  que  cefte  foy-ci  de  laquelle  il  a  fait  men 
qui  croyent  en  luy  ,  luy  eftoyenc  donnez  du  tion,  c(i  U  en^noffai'ce  ie  -verhé  </<tr  efl  fthn  la 
Père  pour  héritage.  Par  cela  ilm.-inft' e  que  craintf  de  Ifi»  ,tnl  effer..nce  de  l.i -ne  éternel- 
ce  n'cft  point  ànous  de  commencer  noftrei'a  /r.Or  en  appellaut  la  foy.cognoifuiiccde  ve- 
lut.  Et  ce,  babouins,  ou  pliiit  jft  ces  ûipp'ifts  rite,  ilm-onftre  en  premier  lieu, qu'il  ne  nous 
de  Satan  voudront  remit,  fer  le  premier  fin  faut  point  auoir  feulcnientvne  opinion  feule 
dément  de  noftre  foY,c'ut  afçaunir  de  1',  1^  -  -j  nir  noftrc  foy, mais  qu'il  taut  que  r.ou<  co- 
ûion  &  predtftmation  cternelk  dt  Dau ,  &  ^uoiLions  que  c'eû  de  noftre  Dteu  ,  &  de  fa 

Vv.i. 


S^i                                        s  E  R  M  O  N    I. 

.  volonté.  Car  les  Papiftes  ont  forgé  en  leur  que  ce  nVft  point  à  fauffcs  cnfeiçne»  5  Died 

boutique  vne  toy  qu  ils  appellent  Enuelot)-  veut  que  nous  foyons  fi  bien  perfuadez  de  fa 

pee  ,  &  dilent  que  c  cllafllz  que  les  idiots  &  parole.  £t  pourquoy?  Car  ce  n'efl  point  vne 

les  gens  la.cs  croy  et  ce  que  PEglife  croit.Or  doftrine  luiette  à  menfongercognoifTons  qui 

cependant  il  n  y  a  nullecognoillance.Q^el-  en  eftl'authtur.  Voila  Dieu  quîeft  la  fourc 

le  donc  eit  cefte creance-la?  D'eftre  pures  be     -> --^    -'  •       ^ 

ftes.pour  dire,  le  ne  fcay  quec'eftde  Dieu,ie 


!    j n.       ^' ^ -..^^.v,i^>..-     1.11  cit  j  aucncur.   vonauieuqui 

le  donc  eft  cefte  ereance-la?  D'eftre  pures  be     de  vérité.  Nous  pourra-il  enuoyer  donc  quel 

ftes.pour  dire,  lene  Içay  quec'eftde  Dieu.ie     auedoarineanMrPi.rp?  A.nC^^;,,    „,.;,  ^ 

n'ay  pas  vne  feule  goutte  d'intelligence  de  fa 

parole  :  mais  ie  m'en  rapporte  à  la  mère  ialn- 

£te  Eglife:lî  cela  cft  bon.ie  n'y  veux  point  c5 

tredire.Q^nd  on  leur  dira  qu'il  y  a  vne  cen 

teine  de  dieux:Et  bien, fi  la  mère  faincte  egli 

fe  le  croit, l'en  fuis  content, ie  le  côfefle  auec 

elle, ce  lu'eft  tout  vn,  ie  m'en  rapporte  touf- 

ioursànoftremere  fainâe  Eglife.  Voila(di- 

ie)la  foy  qu'ont  les  Papiftes"  Et  ainfi  c'eft  à 

bon  droit  que  nous  les  pouuons  nommerin- 

credules ,  combien  que  ce  leur  eft  vne  perfe- 

ftiô  d'auoir  vne  telle  toy  enueloppcc,5:  qu'il 

fuffità  vnlîmple  Chreftien  de  croire  ainlîà 

crédit.  Or  ici  fainft  Paul  nous  monftre  bien 

tout  l'oppofite.-car  il  déclare  que  la  foy  n'cft 


hh.t.u. 


que  doctrine  douteufe?  Ainfi  donc  ,  puis  que 
noftre  Seigneur  veut  que  nous  foyons  fondez 
en  luy,  c'eft  bien  raifon  que  nous  ayons  cefte 
certitude  de  laquelle  parle  ici  faind  Paul, que 
nous  en  foyons  refolus  ,  5:  que  nous  n'ayons 
point  vncuider  pour  plier  corne  des  rofeaux 
branflans  i  tous  vents  :  &  mefmes  notons  que 
nous  ne  pouuons  eftre  reputez  fidèles ,  finon 
en  nous  tenas  du  tout  à  Dieu.  Car  fainfl:  Paul 
a  voulu  exclure  tout  ce  qui  eft  procédé  des 
hommes, quand  il  dit  que  la  foy  emporte  co- 
gnoiiTance  de  la  vérité. Car  qu'eft-ce  que  les 
hommes  nous  pourront  mettre  en  auant  de 
leur  propre?  Il  cft  dit  qu'il  n'y  a  que  vanité  ^fi' 
en  eux.  Et  ainfi  ils  nous  tromperont  tous  les 
coups ,  finon  qu'ils  puiflent  protefter  que  ce 


Î9.tf. 


pas  vne  telle  beftife:  mais  il  l'appelle  cognoif  qu'Us  nous  enfeiçnent ,  ils  l'ont  receu  d'en 

fance.voire  cognoifsâce  de  la  vérité  de  Dieu,  haut  ,  &  qu'ils  dlfpeufent  de  main  en  main 

pour  fçauoir  quelle  eft  l'cfperance  de  la  vie  la  pure  verité.qui  eft  vne  chofe  fi  fainfte  que 

eterndle.  Apprenons  donc  pour  eftre  reco-  il  n'eft  point  licite  d'y  taire  aucun  meflinge. 


gnus  Chreftiens.d'ouurir  les  yeux  ,  &  de  ve- 
nir à  l'efcole  pour  eftre  difciplesdeceluy  qui 
fc  nomme  Maiftre  &  Docleur  eft.abli  de  Dieu 
fon  Père. Car  fi  lefus  Chrift  no'a  enfeignez, 
notons 


Il  faut  donc  que  la  vérité  de  Dieu  fe  pref- 
che  en  telle  forte  que  rien  n'y  foit  adioiifté, 
mais  qu'elle  demeure  pure  comme  elle  cft. 
Voila  àquoy  fainft  Paul  nous  a  voulu  anie- 


que  nous  pourrons  bien  protefter  d'e  ner  ,&  fur  tout  quand  il  dit  que  cefte  verité- 

ftredes  iiens.voire  quâd de  noftre  cofté  nous  ci  cft  félon  la  crainte  de  Dieu  ,  auec  l'efpe- 

receuronscequinoiiseftmoftréen  fon  nom,  rance  de  la  vie  éternelle.    Il  taut  que  nous 

&cequieftprocedédeluy.Carce  n'eft  point  foyons  édifiez  en  "bien,  &:  que  nous  appre- 

aflez  d'en  auoir  quelque  opinion,  corne  nous  nions  d'eftre  vn  peuple  fanftifié  à  Dieu  :  Si 

Toyons  que  beaucoup  deceux  qui  s'appellét  pour  ce  faire  que  nous  cherchions  quelle  eft 

:nouî  ne  foyons 
.1res  beftes,que 

:  pour  en  nous  ne  cherchions  point  iculemcnt  d'eftre 

eftre  bien  perfuadez  &  refolus,  il  s'en  troiiue  nourris  &  veftus  pour  nous  arrefter  à  cefte 

bien  peu.    Et  neantmoins  fainû  Paul  a  voulu  vie  caduque,  mais  que  nous  foyons  eleuezen 
ici  notamment  difcerner  la  foy  d'auec  toute         -•      ■  •  ■      ■ 

incertitude,  que  nous  n'ayôs  point  vn  cuider 
Volage,pourdire,Iepenfequ'ainfi  foit  :  mais 
que  nous  foyôs  affcurez:  comme  fainrt  Ichan 
dit  que  nous  fçauons  que  nous  fommes  en  fans 
de  Dieu. Ce  croire  donc  qui  fe  rapporte  à  i'E 

uangile.n'eft  pas  tel  comme  nous  le  prenons  nous  foit  apprellc  ,  comme  il  nous  a  efté  ac 
en  langage  commun  :  comme  quand  nous  di-  quis  fi  chèrement  par  noftre  Seigneur  lefus 
roDS,  Et  le  le  croy:car  ie  n'en  fçay  rien,&  ic  Chrift. Et  afin  d'y  paruenir,  que  nous  chemi- 
ne m'en  veux  point  enquérir:  mais  celle  per-  nions  en  la  crainte  de  noftre  Dieu  en  toute 
fiufion  conftante  &  ferme  que  nous  conce-  pureté,  comme  fainfl  Paul  en  parle  ici.  Et  fi 
uons(comme  fainft  lehan  dit  en  l'autre  pafla  nous  voyons  que  Dieu  n'a  rien  cherché  que 
ge)&  rcceuons  tout  ce  qui  nous  eft  prononcé  noftre  falut,qU3d  il  nous  a  enuoyé  fon  Euan- 
au  nom  de  Dieu:  comme  fi  nous  eftions  tef-  gile,  quieftia  foiiuerainc  félicité  &•  la  pcrfe- 
moins  de  quelque  inftiumét,&  que  nous  mif-  ftion  de  tous  biens,  que  ccl.l- nous  incite  i 
fions  là  noftre  fignature.  Voiiace  que  Dieu  nous  y  affuiettir  d'vn  tant  meilleur  courage, 
demande  de  nous,&  comme  aufsi  nous  le  de-  &  de  non-:  ranger  au  troupeau  de  noftre  Sei- 
uons  honorer,  pour  confefler  qu'il  eft  fidèle  gncur  lekis  Chrift  ,  afin  qu'il  foit  noftre  Pa- 
on toute  fa  dodrine  ,  &•  qu'il  a  vne  vérité  in-  ftcur,&  qu'il  nous  gouiirrnc. 
fallible.qui  iamais  ne  nous  peut  fruftrer.Voi-  ORnous-nous  proftcrnerons  deuant  la 
1.1  donc  c:fte  cognoiflancc.  Et  aufsi  quand  face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiftance  de 
faillit  Paul  parledc  ia  vérité,  il  nous  monftre  nos  fautes ,   le  prtans  qu'il  nous  les  face  tel- 

Icincnc 


ceft  héritage  immortel  qui  nous  eft  promis. 
Voila  donc  à  quoy  Dieu  a  prétendu  quand 
il  nous  enuoye  fon  Eoangile  ,  c'eft  de  nous 
retirer  de  ce  monde  ,  afin  que  nous  tendions 
à  luy  ,  Toire  tellement  que  nous  ne  doutions 
point  que  l'héritage  de  la  vie  immortelle  ne 


i 


SVR   L' EPIS  T.    A   TITE. 


î^3 


Icment  fentir,  que  nous  foyons  abbatus  en 
nous-mcfmes  pour  nous  cieuer  en  luy  ,  &  en 
fa  bonté,  &:noiis  eleucr  en  telle  forte  que 
nous  l'oyons  retirez  de  toutes  les  ordures  de 
ce  monde  ,  de  toutes  les  mefchantes  cupidi- 
tc2  &  vices  qui  régnent  en  nous ,  &  que  nous 


foyonsconfermezde  plus  en  plus  à  (a  iufti- 
cc  ,  &  à  fa  fainde  parole.  £t  qu'il  luy  plaife 
nou<:  iupporter  en  toutes  nos.foibltflts  ,  iuf- 
ques  à  ce  qu'il  nous  en  ait  du  tout  dcipouil- 
Icz.  Ainfî  nous  dirons  tous ,  Dieu  tout-puif- 
fant,  Père  celelte,&c. 


DEVXIEME     SERMON     SVRLE 

PREMIERCHAPITRE. 

1  Vaulferuitcur  de  Dieu,  (f  Apojîre  de  le  fus  Chrîflfelon  lafoy 
des  cleus  de  Dieu,  ^  h  cognoijjunce  de  yerité  j  qui  ejl félon  la  craints 
de  Dieu, 

i  Ew  f'e/perance  de  Vie  éternelle, laquelle  Dieu,qui  ne  met  pointa 
a  promifc  deuant  les  temps  éternels, 

3  Et  a  manifcjlé  en  [on  temps ,  afçauoir  fa  Varoleparpredica- 
tion,laqueUe  ni  ejl  comifeflon  la  comniifion  de  Dieu  nojîre  Sauueur: 

4  A  Tite  mon  y>ray  fils  félon  lafoy  commune  entre  nous ,  Gra-^ 
ce,mifericorde,  ç^  paix  de  par  Dieu  le  Vcre,  CJ"  de  par  le  Seigneur  le- 
fis  Chrijî  noJlre  Sauueur. 


O  V  s  auons  veu  ce  matin, 
que  S.  Paul  a  déclaré  quel- 
le eft  la  vraye  foy)en  difant 
qu'elle  emporte  cognoilTàn 
ce  delà  vérité  :  &  làdeflus 
nousauôseftéaduertis  qu'il 
nous  faut  profiter  en  l'tfco 
le  de  Dieu,fi  nous  voulons  cflre  reputcz  pour 
Chrelliens  deuant  luy.  Or  cependant  notons 
aufsi  que  ce  titre  qui  eft  attribué  à  la  parole 
de  Dieu, nous  apporte  vne  fînguliere  confo- 
lation.Car  nous  fommes  deliurez  de  doute  & 
de  fcrupule,  quad  nous  cognoifTons  que  c'eit 
Dieu  qui  a  parlé  à  nous  :  car  en  luy  il  n'y  a 
que  veiité  certaine  5:  inlallible:  comme  auf- 
fi  derechef  S.  Paul  adioufte  que  c'eft  luy  qui 
'ne peut  mentir  ;  monllrant  qu'il  ne  nôiis  faut 
2  point  aller  félon  les  hommes.  Car  nous  pour 
.  ïions  toufiours  nous  desfier  de  ce  qui  feroit 
dit:  mais  ce  qui  eft  procédé  de  la  bouche  de 
Dieu.eft  certain, &  en  doit-on  eftreplenemét 
refolu. Comme  aufsi  fouuent  il  nous  ell  decla 
^    ré  que  la  parole  de  Dieu  eft  purgée,  qu'il  n'y 
?/<■<«.  II.  3^  efcume,ne  fuperflnité,ne  rien  qui  foit.  Et 
7.  C^f^-  pour  cefte  caiife  elle  eft  acconiparce  à  l'or  & 
à  l'argét  qui  a  paffé,  &  aura  efté  bien  irefondu 
au  feu. Cela  eft  pour  nous  certifier  tellement, 
que  nous  pouuons  dire  que  nous  ne  tenons 
point  des  hommes  noftre  foy.mais  que  Dieu 
en  eftl'autheur  :  que  nous  fommes  afleurez 
contre  tous  combats  que  Satan  nous  pourra 
drefler.Et  au  refte,il  nous  eft  aufsi  bien  fieni 
Je  que  (juand  nous  auiionî  tout  le  fjauoir  du 


II 


môiîe,  a  nous  ne  cognoiflons  Dieu  Se  fa  par» 
le,qu'il  n'y  a  rien  que  fumée  en  nous. Ce  n'efl 
pas  ici  feulement  que  le  S.  Efpritparled'vn 
tel  ftyle:  c'eft  afçauoir  que  la  parole  de  Dieir 
eft  la  verité.vne  vérité  fans  queuefcomme  on  r  t  j  il 
dit  )  mais  quand  fainft  Paul  aux  Colofsiens  "  ' 
veut  magnifier  l'Euangile.Vous  aue2(dit-il) 
cognu  la  vérité  :  c'eft  àdire  la  parole  de  vie 
qtiivousa  elle  prefchee.L'Efprit  vous  mène- 
ra en  toute  vérité  ,  dit  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.  Et  puis  s'addreilant  à  Dieu  fon  Père,  '^' 

Père  celefte,taparole  eft  vérité.  Apprenons  ^^>^^7r 
donc  que  Dieu  en  toutes  fortes  nous  a  voulu  '''"' 
arreftcràluy;non  feulemétafin  que  nous  luy 
portions  l'honneur  qu'il  mérite  ,  &  que  nous 
luy  attribuy ôs  l'authorité  qu'il  dem3de,mais 
quenoiis  foyonsbién  fondez  &  refolus  ,  que 
nous  n'ayons  point  vne  opinion  volage,  mais 
que  nous  puifions  dire  comme  difoit  ce  peu 
pie  mefme  à  la  Saniaritaine.Nous  l'auôs  ouy.  Iffi.4.41 
Voila  ce  qui  doit  eftre  retenu  en  ce  paflage. 
Or  cependant  il  nous  monftre  à  quoy  cefte 
vérité  prétend:  car  il  la  difce'rne  d'auec  tou- 
tes autres  doûrines  qui  appartîenent  à  ce- 
fte Vie  tranfîtoireA-  de  tout  ce  qui  eft  du  mo- 
derpource  qu'il  ditgxf  eeftf  ^•frîtè  efi  f,!on  U 
trainte  de  Dieu:  comme  s'il  difoit  que  c'eft 
pour  édifier  les  homes  en  telle  fainJ^eté  que 
'  Dieu  en  fort  glorifié.  Car  nous  aurôs  beau  tra 
uailler  en  toutes  les  Iciences  humaines  de» 
■  ^lant  qu'elles  nous  côduifent  à  Dieu  .  EtainS 
]' notons  que  faincl  Paul  difc'erne  ici  la  foydee 
'Chreftiés, d'auec  tout  ce  â  nous  orfonsd'ail- 
•  '       ■  Vv.ii. 


r-A- 


SERMON     II. 


lcurs:car  il  n'y  a  point" (Vautre  règle  Je  vriye 
religion  que  celle  qui  eft  contenue  en  la  paro 
le  de  Dieu,  &  laquelle  nous  tenons  de  Kiy.  Or 
cependant  iladioufteauAi,  Selon  tcffer.:nce  Ae 
la  -»iV.«f»rf»t//f  :ou,lacaiife  de  l'efperance  .  En 
«uoy  'l  monftre  que  lama  s  les  hommes  ne  fc 
pourront  bien  dedierau  feruice  de  Dieu,  s'ils 
ne.pcnfent  plus  à  Dieu, qu'à  tout  lereite.Car 
encores  que  nous  foyons  comme  retenus,  en- 
cores  que  nous  ayôs  quelque  affeftion  à  Dieu, 
ce  n'eft  rien,celas'elcoule.Brief,iln''y  a  point 
yne  racine  viue,  nidefoy,  ni  de  religion,  iuf- 
ques  à  tant  que  nous  foyontamencz  au  ciel: 
c'eft  à  dire,  que  nous  cognoifsiôs  que  Dieu  ne 
nous  a  point  créez  pour  nou?  tenir  ici  en  vne 
vie  terrtftre  auec  les  belles  brutes ,  mais  qu'il 
nous  a  adoptez  en  fon  héritage  ,  &  qu'il  nous 
tient  pour  fes  cntans .  Si  donc  nous  ne  regar- 
dons au  ciel ,  il  eft  impofsible  que  nous  ayons 
vne  vrayedeuotiô  pour  nous  addôncrà  Dieu, 
<ju'il  y  ait  ne  toy,  ne  Chreftienté  en  nous .  Et 
voila  pourquoy  auiouid'huy  de  tous  ceux  qui 
Ce  renomment  Chrefliens,  &  fe  reclamét  pour 
tels,  on  en  trouuera  bien  peu  qui  ayent  cefre 
vraye  inarque.telle  que  faintt  Paul  l'a  donnée 
aux  cntans  de  Dicu:cartous  font  occupez  en 
ceftevie  prefente,&y  font  tellement  atta- 
chez ,  qu'ils  ne  peuuent  afpirer  là  haut  .  Or 
voyant  cevice  tant  ordinaire  .d'autant  plus 
nous  faut-il  prcferuer,  &  nous  defpouiller  des 
chofes  qui  nous  retienent  ici  bas,  &  rompre 
mefme  par  force  ce  que  nous  ne  pouuons  pas 
du  tout  deftâchcr,iufques  à  tat  que  nous  adhe 
rions  à  Dieu:ce  qui  fe  fera, quand  nous  aurons 
conccu  àbon  efcient&  en  vérité  l'efperance 
de  la  vie  éternelle, comme  fainâ  Paul  en  parle 
ici .  Et  notamment  aufsi  cli  emporte  inftru- 
ûion,  pour  nous  monftrei  que  fi  noftre  vie 
nous  eft  encores  cachée  ,  ilnefaut  point  pour 
cela  que  nous  en  foyons  defgoufttz.  Car  les 
hommes  fe  tienent  toufiours  à  leur  fens  natu- 
rel :  &  voila  pourquoy  ils  ne  peuuent  enibiaf- 
fer  la  promelTe  de  falut  qui  leur  eft  tous  les 
ïours  offerte.  Car  ils  ne  voyant  point  ce  que 
Dieu  promet  :  &  cependant  ils  ne  peuuent  e- 
ftendre  leur  phantalie  plus  loin,  qu'à  ce  qu'ils 
voyent  &  qu'ils  conçoyuent  en  leur  imagi- 
nation .  Or  fi  faut-il  quoy  qu'il  en  foit ,  que 
nous  foyons  tout  afleurcz  de  ce  qui  nous  eft 
caché,  quand  nous  oyons  que  Dieu  parle, 
encores  que  nous  ne  le  conceuions  point  de 
noftre  fens  naturel.  Et  ainfi  recourons  à  ce- 
fte  cfpcrance  dont  parle  ici  faincl  Paul .  £t 
combien  que  nous  n'ayons  point  vcu  l'héri- 
tage qui  nous  attend,  que  nous  ne  laifsions 
pas  de  l'aimer ,  voire  d'vne  affeftion  ardente, 
que  nous  foyons  là  rauis ,  que  les  chofes  de 
ce  monde  nous  foyent  comme  menus  fatras, 
fçachans  que  non  feulement  elles  nous  dc- 
flourncnt  de  marcher  ^u  falut  que  Dieu  nous 
preftntc,  &  que  ce  font  des  appafts  pour  nous 
allécher,  (5i  nous  letenir  ici  bas  ,  mais  que  ce 
eilaufsi  pour  nous  perdre  &r  ruiner  du  tout 


quand  nous  fommes  ainfî  enueloppez  an  mon 
de,&  pour  nous  infeder  d'vne  poifon  mortel- 
le. Voila  donc  comme  nous  auons  à  prattiquer 
ce  mot,  quâd  fainft  Paul  dit  qu'il  eft  ftruiteur 
de  Dieu,voire  félon  l'efperance  dé  la  vie  eter 
nelle.Comme  aufsi  il  loue  les  Colofsiens.voi-  ^'^•'•'♦' 
re  pour  leur  chance  &  aftettion  qu'ils  ont  en- 
uers  Dieu,  à  caufe  de  l'efperance  qui  leur  eft 
appreftee  au  ciel,&  môftre  que  les  tidtles  pre 
nent  courage  de  feruir  à  Dieu,  de  trauailler  à 
bonnes  œuures,&de batailler  contre  toutes 
dithcultez,quand  ilsfe  propofentceft  hérita- 
ge qui  leur  eft  apprcfté  au  ciel,  &  qu'ils  y  re- 
gardent ,  &  qu'ils  fe  tienent  là.  C'eft  ce  qu'il 
veut  aufii  dire  en  ce  partage.  Or  d'autant  que 
les  hommes  cherchent  toufiours  ce  qui  leur 
eft  le  plus  prochain,*:  s'ils  ne  cognoiilent  vrie 
chofe.iJs  ne  peuuent  eleuer  leurs  efprits  pour 
la  contempler  ,  fainû  Paul  pour  corriger  vn 
tel  vice,  nous  rameine  à  la  promefle  de  Dieu: 
comme  s'il  difojt ,  Mes  amis  ,  il  eft  vtay  que 
quand  on  nous  parle  du  royaume  celefte, c'eft 
vnechofequi  furmonte  tous  nos  fens, cela  eft 
trop  haut  &  trop  profond  :  mais  fi  ne  faut-il 
pas  que  nous  laifiions  pourtant  d'y  afpirer. 
Et  pourquoy.'  Car  nous  auons  vn  bon  garent: 
voici  Dieu  (dit-il)qui  nous  l'a  promis  ,  voire 
Dieu  qui  ne  peutméntir.  Nous  voyons  com- 
me ces  chofes  s'entrctienent,&que  nou.  fom 
mes  ici  retirez  de  toutes  créatures, pource  que 
noftre  foy  ne  feroit  pas  ferme  fi  elles'adref- 
foit  aux  hommes.ouà  rien  qui  foit  au  monde. 
Il  faut  qu'vn  tel  renouucllement  nous  foit 
certain,  &  que  nous  demeurions  là  fermeit ,  Se 
que  nous  y  foyons  du  tout  retenus. Et  cepen- 
dant fiifons  à  Dieu  l'honneur  qu'il  mérite: 
c'eft  que  nous  le  feparioiis  du  rang  des  hora- 
mes:commemefmes  nous  voyons  que  ce  faux 
prophète  Balaam  ,  qui  s'eftoit  loué  &  vendu  ""-^J^ 
pour  mentir,  iî  eft-ce  qu'encores  eft-ilcon-  - 
traint  dédire  vérité,  comme  vn  mal-faiteur  1 
la  tçrtiire:  Dieu,  dit-il,  n'eft  point  femblable 
aux  homes. Et  qui  eft-ce  qui  parle  ainfi?  C'eft 
vn  trôpeur.vn  mefchant  qui  nedemanJe  qu'l 
peruertir  l'honneur  de  Dicu.iS:  le  falut  de  l'E 
glifc.  Etcependant  Dieu  le  contraintcomme 
vn  brigand  forcé.de rendre  tefmoignagei  la 
Tcnté.Puis  que  Balaanra  parlcainn,  quede- 
uons-nous  faire?  Viendrons-nous  à  reuoquer 
en  doute  ce  que  nous  deuons  tenir  des  pro- 
mcffesdeDieu  ,  fi  elles  nous  font  infallibles, 
ou  fi  nous  n'en  ferons  point  fruftrez  ?  Ainfi 
donc  notons  bien  ce  qui  eft  dit  ici,  pour  l'ap- 
pliquer à  noftre  inftruflion,&  fçauoirqucl  eft 
le  fondement  de  noftre  toy  :c'eftde  rccognoi 
rtre  que  Dieu  n'eft  point  femblable  aux  hom- 
mes. Et  pourquoy  ?  Car  le  mcnfonge  ne  lliy 
peut  nullement  competcr,  à  liiy,  qui  eft  la  vé- 
rité infallible  &  permanence.  C'eft  donc  ce 
que  nous  auons  à  retenir  de  ce  pafljgc,  afça- 
uoir  quand  nous  fcrÔs  tentez  de  quelque  dëf- 
fianceàcaufc  que  nous  n'apperctuons  point 
la  gloire  qui  nous  eftproiuifc,  que  nous  ve- 
rt io/i$ 


SVR    L'EPISTRE    A    TiTE. 


nions  làiEt  bien, il  eft  vray  que  ce  font  chofes 
q  lurmôtenc  nollre  capacué.mais  il  fcjbut  fier 
«n  Dieu  ,&  nous  trouuerons  qii'ainli  elt .  Et 
pourtant ,  que  nous  luy  remettions  entre  fes 
mains  noftre  depoft  ,  &  il  en  fera  bône  garde: 
l.TIms,  comme  fainft  Paul  en  parle  en  la  féconde  à  Ti 
II.  niothee.cjuc  puis  qu'il  eft  lîdele  gardien  de  no 

ftre  depoll(c'eft  à  dire  de  noftre  falut)  q  nous 
pouuons  hardiment  nous  mettre  &  recomman 
der  entre  (es  mains.  Au  refte.fainâ  Paul  parle 
ICI  de  la  promeflc  de  Dieu  qui  a  efté  faite  dé- 
liant tout  temps,  &  de  ce  qu'il  nous  eft  démon 
ftré  en  faifon  opportune.  Quant  à  la  promef- 
fe,  aucuns  le  prenent  pour  l'elcûion  qu'il  a 
faite  de  tous  fidèles  :  comme  nous  auons  veu 
«ju'ildifoit  à  Timothee,  quel*  vie  leur  a  efté 
donnée  deuSt  toute  éternité:  mais  pource  que 
ce  mot  de  Promefle  eft  vne  correfpondancc 
aux  hommes  aufquels  Dieu  parle,  ie  ne  doute 
point  que  iaiuft  Paul  ne  vueille  ici  par  lés 
temps  eternelt,{ign\(ici  longue  polTefsion.Car 
nous  fçauons  que  dés  le  commeacement  du 
monde  Dieu  a  teftifiéaux  hommes  qu'il  vou- 
loit  eftre  leur  Sauutur ,  voire  &  quant  8c  quant 
iiabailléle  gage,  le  Rédempteur  qu'il  leur 
Commeitoit:ila  côtinué  en  cela  toufiours.  Ce 
n'eft  point  donc  fanscauft  que  fainâ  Paul  dit 
ici, que  Dieu  deuant  les  ;emp  éternels  a  pro- 
mis le  falut  qui  nous  a  efté  manif^fté  en  VE- 
uangile  Et  c'eftaiiCsi  la  promefle  qui  a  efté  dô 
née  aux  Pères  anciens .  Car  quand  Dieu  les  a 
adoptez, &  qu'il  s'eft  déclaré  Pcreenuers  eux, 
ce  n'a  pas  efté  qu'en  les  tenant  toufiours  en 
fufpês  iufqii'àla  venue  de  noftre  Seigneur  le- 
fus  Chrift.Et  de  fiid,lcs  Prophètes  ont  touf- 
iours regardé!  ce  but-la  :  caril.eftdit  que  ce 
RflW.lO.  eft  la  fin  delà  Loy.  Voila  donc  des  promeffes 
^,  qui  eftoyent  comme  fiifpenducs  iufques  à  la 

venue  du  Redempteur.Or  maintenant  nous  en 
auons  vne  déclaration  plus  ample,  quad  lefus 
Chrift  nousa  efté  enuoyé.  Vray  eft  que  de  pri 
me  face  il  fembleroit  qu'il  y  euft  ici  quelque 
contrariété, quîd  lainft  Paul  a  rais  le  mot  D'e 
fperance  :  8c  puis  il  met,  Q_ue  les  chofes  nous 
font  maintenant  monltrees,  &  que  Dieu  les  a 
mifci  corne  deuant  nos  yeux. Or  cela  s'accor- 
4le  aifément,  d'autant  qu'il  y  a  trois  devrez  i 
Confiderer.Le  premier.c'eftla  côdition  en  la- 
quelle les  Pères  ont  vefcu  fous  la  Loy. Car  ils 
ont  bien  eu  te&noignage  de  la  mifericorde  de 
Dieu,  8c  qu'il  leur  vouloit  eftre  pitoyable  ,  & 
ont  aufsi  attendu  le  falut  qui  leur  eftoit  pro- 
mis :  mais  cependant  ils  ont  efté  en  ombraçe, 
■  ils  ont  regardé  les  chofes  de  loin  (  comeTE- 
'  fcriture  en  parle)  car  aufsi  ils  auoyét  le  voile 
deuant  leurs  yeux, qui  lesempefchoit  de  veoir 
ce  qu'auiourd'huy  Dieu  nausa-raanifefté, voi- 
re en  vertu  de  la  promefle  dont  parle  fair.ft 
Paul.  Etainfî  il  nous  eft  rcmonftré  qu'il  nous 
faut  toufiours  en  patience  i émettre  noftre  fa- 
lut entre  les  main'-  de  Dieii;comine  auAi  nous 
en  fomme';atlmoneftez  parl'Apolhe.Hebr.ri 
Vous  ne  pouucî  auoir  la  foy  lînon  en  vous  ap 


î*î 


puyant  fur  les  promeflcs  de  lavié  k  venir.Car 
en  ce  monde  nous  n'auons  point  noftre  repos. 
Car  qu'eft-ce  de  celle  vie  iînon  m  pèlerinage 
qui  côtinue  iufques  en  la  finîNous  auoHS  donc 
les  promefles,&  par  confequent  nous  ne  voy- 
ons encores  que  par  vn  miroir, &en  obfcurité. 
Voila  comme  faind  Paul  en  parieaur  Gala- 
tiens .  Mais  fi  eft-ce  qu'au  prix  des  Pères  qui 
ont  vefcu  fous  la  Loy,  nous  auons  la  fubftancc 
&:  la  venté, qu'elle  nous  eft  toute  patente:  car 
en  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  noos  auons  la 
perfeftion  iM'accompliflement  de  toutes  les 
chofes  qui  eftoyét  requifes  à  noftre  falut. Sont 
mes-nous  efpouantez,d'au:ant  que  nous  fom- 
mes  pécheurs  ?  Nous  trouuerons  la  iufticeau 
Fils  de  Dieu. Noftre  ignorance  nous  trouble- 
elle.'  Il  eft  donné  pour  (àgefle  à  tout  le  mode. 
Sommes-nous  captifi  &  efclaues  de  Satan» 
Nous  auons  noftre  rançon  tn  luy  .  Sommes- 
nous  poilus  &  fouillez.»  1.  nous  fàndtifie.  Som- 
mes-nou- débiles?  Il  eft  la  veitude  Dieu  pour 
nous  fortifier.Ne  voyons-nous  en  nous  qu'or 
dure.'Ileft  la  fontaincde  pureté  .  Apres,  n'a- 
uons-nous  que  mort?  Il  eft  la  vie:&  mefmes  il 
en  a  la  maiftrife,car  il  a  vaincu  la  mort.  Voila 
donc  les  chofes  que  les  Pères  ont  efperees  8c 
attendues  ,qui  nous  font  auiourd'huy  donnée» 
en  la  perfône  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
Or  il  eft  vray  que  nous  n'en  auons  point  en.- 
cores  le  fruiù  m  la  iouiflànce  en  nous:  mais  fl 
nous  faifons  comparaifon  de  ce  que  les  Pcres 
ont  eu.nousauonsbeaucoup  plus  qu'eux. Ain- 
fi  donc  ce  n'eft  poinft  fans  caufe  que  fainâ; 
Paul  dit  que  Dieu  nous  a  reuelé  auiourd'liuj 
ce  que  les  Pères  ont  attendu,  à  caufe  de  la  pro 
mefle  qui  les  tenoit  là  comme  en  fufpens'.  Or 
le  troifieme  degré  eft  la  perfcAion  qui  fera  au 
dernier  iour,  quand  nous  ferons  recueillis  a- 
uec  les  Pères  anciens  :&  alors  il  n'y  aura  plus 
de  foy  .  Car  la  foy  eft  comme  vne  vifion  des 
chofes  inuifibles,(ainfi  que  l'Apoftre  l'appel- 
le)&  vnecognoiflance  des  chofes  qui  font  ab- 
feates.  Puisqu'ainfi  eft  que  nous  poflederons 
ce  que  Dieu  nous  offre  auiourd'huy  en  l'Euan 
gile,  la  foy  n'aura  plus  de  lieu  .  Voila  ce  que 
nous  auôs  à  retenir  en  fomme.de  ce  que  fainft 
Paul  met,  que  Dieuauoit  bien  promis  de  tout 
temps  ce  qu'auiourd'huy  nous  eft  reuelé, mais 
nous  en  auons  la  pleine  déclaration  ,  voire  en 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  combien  qu'elle 
n'apparoine  point  encores  en  nous  qui  fem- 
mes fes  mébres, mais  que  cela  foitdiferé  iuf- 
ques au  dernier  iour. Et  notâment  S.Paul  mec 
ici  les  fiifons propres  &■  oppcirtnnes,3finde  nous 
faire  glorifier  Dieu  en  fon  confeil ,  &  que 
nous  foulfrions  qu'il  difpofe  de  tout  comme 
il  luy  plaift,&que  nous  ne  foyons  point  fi 
outrccuidez  de  répliquer  contre  luy,  quand  il 
ne  fera  pointles  chofes  à  noftre  appétit ,  que 
nous  n'entriôs  point  en  queftion  ni  procès  a- 
uec  luy,côme  nos  auons  de  couftume.  Et  voila 
pourquoy  il  dit  aufsi  bien  aux  Galat.  Quand 
la  plénitude  des  temps  eft  venue ,  Dieu  a  en- 

Vv.iii, 


îl^ 


SERMON     II. 


uoyc  Ton  Fils. Et  qu'emporte  ce  mot-Ja  î  Les 
hommes  lelon  leur  curiofîté  demandent ,  £t 
pourquoy  cft-cé  que  lefus  Chrift  n'cft  appa- 
ru pluftoll?  Voila  Adam  qui  auoit  ruine  toute 
fa  race  auec  foy  :  le  genre  humain  eft  de- 
meuré en  celle  confiriion-la  ii  longuement, 
qu'il  elllà  comme  pourri  en  la  milere  :  &fa- 
loit-il  que  Dieu  teinft  là  les  Pères  le  bec  en 
l'eau  (  comme  on  dit  )  &  que  le  Rédempteur 
ne  fuftenuoyé  pluftoft?  Puis  que  le  mal  e- 
ftoit  défia  aduenu ,  pourquoy  eft-ce  que  Dieu 
n'y  a  pourueu  de  meilleure  heure  ,  &  qu'il  n'y 
adonné  remède  ?  Voila  comme  les  hommes 
difputent:  mais  quand  ils  fe  donnent  vnc  tel- 
le licence, ils  pourroyentaufsi  bien  deman- 
der,pourquoy  le  monde  a  efté  créé  leulement 
depuis  fix  mille  ans  ,&  que  Dieu  ne  s'en  eft 
pluftoit  aduifé.Mais  quoy.'Que  font  les  hom 
mes  s'ils  s'embroutUent  ainlî  ?  Or  c'eft  pour 
t'abyfmèr  &  pour  fe  ruiner  du  tout .  Appre- 
nons donc  d'eftre  fobres  ,  &  de  ne  nous  point 
enquérir  outre  noftre  mefure  ,  &  cognoiftrc, 
tout  ainfi  que  Dieu  a  fceu  la  faiibn  opportune 
en  laquelle  ildcuoit  créer  le  monde,  qu'aufsi 
il  a  cognu  la  faifon  opportune  d'enuoyer  l'E- 
iiangile  .  Et  voila  comme  il  coupe  broche  à 
toutes  les  queftions  friuoles  aufsi  bien  auder 
nier  chapitre  des  Romains  ,&  en  la  féconde 
Epiftre  à  Timothce,&aux  Corinthiens, &aux 
Ephefiens:  ences  pafiàges-lail  monftrc  qu'il 
ne  faut  pas  que  les  hommes  foycnt  ici  iuges; 
car  ce  feroit    trop   vfurpcr  ,  quand  ils  vou- 
droyent  déterminer  d'vne  chofe  fi   haute, 
comme  du  confeil  de  Dieu. Mais  contentons- 
nous  que  Dieu  l'a  ainfi  difpofé  ,  &  qu'il  a  co- 
gnu les  faifons  propres  &  opportunes  pour 
faire  fesœuures.  Et  ainfi  donc  ,  quand  nous 
oyons  que  l'Euangile  nous  a  efté  prefché  ,  & 
qu'vne  telle  grâce  n'a  pas  efté  faite  aux  Pères 
anciens,&  aux  Prophètes,  magnifions  Dieu  de 
ce  qu'il  luy  a  peu  nous  aduancer  en  vn  degré 
plus  haut  :  non  pas  que  nous  en  fufsions  di- 
gnes,neque  nous  l'euGions  mérité,  mais  il  l'a 
ïait  par  fa  bonté  infinie.  Et  cependant  n'eii- 
querons  point  outre  noftre  mefure  :  car  nous 
demeurerons  confus,  quand  nous  voudrons 
nous  lafcher  la  bnde:nous  ne  ferons  que  nous 
efgarer  ,  &  ne  trouuerons  ne  fons  ne  riue: 
mais  ayons  cefte  fimplicité-la  de  dire.  Dieu  a 
befongné  comme  il  a  cognu  eftre  bon,&  fa  vo 
lontc  nous  doit  fuffire  pour  toute  figefle.  Et 
fi  nous  en  voulons  cercher  d'auantage ,  c'eft 
tn  orgueil  diabolique  ,  quand  nous  ne  ferons 
point  ceft  honneur  à  Dieu.de  dire  qu'il  a  tout 
fait  par vne  f3gefle&  iuftice  admirable  .  Ap- 
prenons dôc  d'eftre  fobres  &  modeftes.Qjûd 
fainû  Paul  nous  met  ici  les  temps  opportuns, 
aufquels  l'Euangile  nous  a  efté  reuclé  ,  Se  que 
les  chofe»  qui  auoyent  efté  attendues  aupa- 
lauant  nous  ont  efté  raanifcftees,  iladioufte, 
I4  pt:roleenla  prédication  tj:ti  m'cfl  commife. 
Yci  il  fera  bien  conuen-ible  que  nous  cntcn- 
«lions  par  la  ?anU,  noftre  Seigneur  kfus 


Chrift  :  comme  nous  voyons  que  fainft  lehan 
en  parle  en  fa  Canonique  ,que  dés,  le  com- 
mencement (  dit-il  )  c'eft  ce  que  nous  auons 
ouy  de  la  Parole  de  vie  ,  quand  la  vie  nous  a 
efté  manifeftee,  &  nous  l'auons  touchée  à  nos 
mains,  dit-il.  Làfainft  lehan  déclare  qu'en  la 
perfoune  du  Fils  de  Dieu  ,  la  vie  nous  a  efté 
oiferte  ,  tellement  que  nous  en  auons  certai- 
ne poflefsion,  combien  que  le  fruift  n'en  foit 
pas  encore  cognu.  Et  ici  ûinû  Paul,  après  a- 
uoir  parlé  des  promefles  de  Dieu,  Se  de  ce  qui 
nous  a  efté  reuelé  en  temps  propre  &  op-. 
portun,  il  adioufte,  Afçauoir,  la  Vnrole .  Or  il; 
eft  vray  que  Dieu  nous  a  donné  fa  Parole, 
comme  le  tefmoignage  de  noftre  vie  ,  &  qu'il 
nous  faut  arrefter  à  icelle  :  mais  cependant 
où  eft-ce  que  la  parole  de  Dieu  nous  mené 
finon  à  lefus  Chrift  ?  Car  c'en  eft  la  fubftance: 
comme  fainft  Paul  dit  en  vn  autre  paflage, 
qu'en  luy  toutes  les  promefles  de  Dieu  font 
Ouy  &  Amen:qu'iln'y  a  point  de  fermeté  li- 
non que  nous  foyons  appuyez  fur  noftre  Sei» 
gneur  lefus  Chrift  :  non  pas  que  Dieu  foit  va- 
riable en  foy,  car  nous  ne  difpucons  point  i- 
ci  de  ce  que  Dieu  peut  faire  ,  mais  nous  dif^ 
putons  de  l'ordre  qu'il  a  eftabli.  Or  eft-il  ain- 
fi qu'il  ne  nous  faut  point  cercher,  noftre  vie 
ailleurs  que  là  où  il  nous  la  donne ,  &  veut 
que  nous   puifîons  de  là  toute   l'aflcurance 
que  nous  auons  en  fa  promefle .  Ainfi  non 
fans  caufe  faincl  Paul  nous    propofe  ici  la 
perfonnc  de  noftre  Seigneur  lefus    Chrift, 
comme'aufsi  c'eft  en  cela  principalement  que 
nous   différons   d'auec    les    Pères   anciens, 
quand  nous   auons  le   Rédempteur   auquel 
nous  contemplons  clairement  les  chofesqui 
eftoyent  requifes  à  noftre  falut.  Les  Pères 
anciens  ont  eu  les  facrifices  .  Mais  quoy  ?  Le 
fang  d'vii  taureau  ou  d'vn  agneau  les  pou- 
uoit-il  fanflifier  ni  réconcilier  auec  Dieu  ?  Il 
eft  bien  certain  que  non  .  lîs  ont  en  les  laue- 
roens:  mais  telles  cérémonies  leur  pouuoyent 
elles  apporter  vne  droite  iuftice'  11  s'en  faloit 
beaucoup  .  Ils  ont  eu  vn  médiateur ,  mais  c'e- 
ftoit  vn  homme  mortel,  l'uiet  à  toutes  infirmi- 
tcz  comme  eux  ,5f  qui  auoit  befoin  de  prier 
Dieu  pour  fes  fautes.  Us  ont  eu  vn  fanQuaire 
vifible,mais  tout  cela  n'eftoit  point  pour  les 
amènera  perfeftion.  Maintenant  nous  auons  Co/.i.ij» 
le  Fils  de  Dieu.auquel  tonte  plénitude  de  bien  O*  ^-S' 
eft  encloferil  eft  noftre  Médiateur,  &  n'a 
point  befoin  que  fes  fautes  luy  foyent  par- 
donnees,  d'autant  qu'il  eft  pur  &  innocent,  8t 
qu'il  a  oblerué  toute  iuftice.  E:  d'autre  cofté, 
il  n'eft  point  incognu  à  Dieu  ,  d'autant  qu'il 
eft  venu  de  Iuy,&  non  point  feulement  quand 
il  a  cflc  conftitué  noftre  Rédempteur^ jamais 
qu'il  eft  d'vne  mefir.e  cflencc,  qu'il  eft  noftre 
Dieu  immortel.  Voila  donc  comme  en  la  per- 
fonne  de  noftre  Seigneur  lefus  Clnift  nous 
fo^mmes  aduancez  par  deflus  les  Pères,  an- 
ciens. Car  fa  mort  &  pal'sion  a  efté  le  facrifïce 
éternel ,  par  lequeluous  fouîmes  acquittez  de 

toutes 


5VR    U  EPIS  T.   A    TITE, 


Ti? 


tOUtes"no5  offenfes.que  l'ire  &  la  malediflion 
de  Dieun'eft  plus  fur  nous, d'autant  qu'il  s'eft 
contenté  d'vn  tel  payement:  nousauonsfon 
fang  qui  a  efté  efpandu  pour  nous  purger. 
Qjjand  donc  nous  auons  toutes  ces  cikoies, 
nous  voyons  comme  en  la  perlonnede  noftre 
■Seigneur  lefus  Chrift.ce  qui  auoit  efté  ancien 
nement  promis, nous  cftauiourd'huy  priiiee— 
ment  reuelé.Mais  cependant  fiinft  Paul  nous 
met  fa  prédication  :  comme  il  ne  nous  faut 
point  aufsi  feparer  l'vn  de  l'autre.  Car  il  y  a 
vnlien  infeparable  entre  IefuvClirift&  l'E- 
uangile  :  que  fi  nous  prenons  lefus  Chrift 
tout  nud,  le  defpouillant  de  fa  doûrine  ,  c'eft 
comme  l'aneancirrainfi  q  les  Papiftes  en  font 
vne  idole. Car  ils  diront  aflez,IefusChrift  Fils 
de  Dieu  noftre  Rédempteur  :  mais  cependant 
ils  ne  penfentpointà  fjn  office,  &nefçauent 
pourquoy  il  eft  VEnu,5:  ne  le  veulét  point  fça 
Hoir  qui  plus  eft.  Car  ils  s'enucloppent  en  ie 
ne  fçay  quelles  vaines  imaginationsqu'ils  di- 
ront bien  ,  lefas  Chrift  njus  a  efté  enuoyé: 
maisfcôme  i'ay  dit)  ils  ne  fçauent  pourquoy, 
d'autant  que  ù  vertu  ne  fe  cognoift  point  ii- 
ron  par  fon  Euangile, lequel  ils  mefprifent  & 
reiettent.Nous  voyons  donc  pourquoy  fainft 
Paul  derechef  nous  réduit  en  mémoire  q  fans 
la  prédication  lefus  Chrift  ne  nous  profitera 
de  rien. Mais  auf>i  d'autre  cofté  notons  que  fi 
nousnefommes  vnisàlefus  Chrift  par  l'E- 
uangilcnous  effaçons  entant  qu'en  nous  eft  le 
Confeil  de  Dieu,5:  renuerfons  fon  intention. 
Il  eftvray  qu'il  nous  faut  eftre  du  tout  cer- 
tains par  la  parole  que  Dieu  nous  dône:  mais 
G  faut-il  venir  à  cefte  cognoilTance,  où  Dieu 
nous  a  monftré  que  nous  ne  ferons  point  fru- 
ftrezde  nous  tenir  à  ce  qu'il  nous  dit  ,  &que 
lefus  Chrift  nous  en  eft  vn  bon  gage.  Etainfî 
retenons  ces  deux  chofes  ainfi  côiointes  com 
fne  nous  les  voyons  ici  en  fainft  Paul ,  &  que 
ce  lien  nous  foit  facré  :  c'eft  afçauoir  quand 
nous  oyons  prefcher  la  parole  de  Dieu  ,  que 
nous  tendions  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
comme  c'eft  le  but  auquel  nous  deuons  eftre 
addreflez  :&  que  nous  (cachions  que  là  nous 
«uons  tout  ce  qui  appartient  àl'efperancc  de 
noftre  falut.Et  au  refte,  quad  on  nous  parlera 
de  lefus  Chrill,  que  nous  n'imaginions  point 
ienefçay  quelphantcfme,  côme  font:les  Pa- 
piftes,mais  que  nous  venions  à  l'Euigile,  afin 
que  là  il  nous  foit  cognu,qiie  nous  fçachionj  à 
quelle  fin  il  nous'.eftdoncde  Dieu  fon  Père, 
le<;  biens  qu'il  nous  a  apportez, &  quel  eft  fon 
office  emiers  nous. Quand  toutes  ces  chofes- 
Ja  nous  font  môftrees  par  l'EuangiIe.cognoif 
fons  que  ce  nous  eft  vn  vray  miroir  où  nous 
pouuons  contempler  noftre  Dieu  en  l'image 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift:comme  fainâ 

l.C»f.4.  Paul  en  parle  en  la  féconde  des  Corinthiens. 

4,  Voila  donc  pourqwoy  il  dit  que  Dieu  a  rcue- 

lé  en  temps  opportun  le  falut  promis  ,  c'eft 
afçauoir  la  parole  en  fa  prédication.  Oril 
adioufie,  Qw  çejif  ^redUation  Uy  ejl  c^mmife; 


•ifîn  qu'il  foit  receu  en  telle  quilité  comme  il 
doit.Car  il  prétend  de  parler  auec  authorité: 
&  fans  cela  qu'euft-il  gagné  d'efcrire  ?  Il  veut 
donc  qu'on  reçoyue  ce  qu'il  propofe  comme 
venant  de  Dieu,&  non  pointd'vn  homme  mor 
tel.  Pour  cefte  caufe  il  allègue  qu'il  ne  s'efl 
point  ingéré  ,  mais  que  la  prédication  luy  eft 
commile.  Et  de  faiéi,cen'eft  pasauftiànous  Hffc.f.4 
d'vfurper  nul  eftat  en  TEglife  de  Dieu.  Car 
nul  ne  fc  mettra  en  l'honneur  ,  dit  l'Apoftre. 
Voiia  lefus  Chrift  qui  ne  s'eft  point  auancé 
de  foy-mefme  ,  combien  qu'il  fuft  eycellent, 
&  que  toute  authorité  luy  apparteinftril  n'eft 
point  venu  à  la  volée  pour  prendre  fon  offi- 
ce, mais  il  a  efté  conftitué  Sacrificateur  de  Vfe.11%^ 
Dieu  fon  Père  ,  voire  auec  ferment  folennel,  ^., 
conimeil  eft  dit  au  Pfeaumc,  I'ay  iurc  ,&ne 
m'en  repentiray  point,tu  es  facrifîcateureter 
nellement  félon  l'ordre  de  Melchifedec.  Voi 
ladoncnortre  Seigneur  Icfus  Chrift  qui  dé- 
clare que  le  Père  celeftel'a  authorifé.  Si  le 
Wâiftre  de  la  maifon  parle  ainfi  ,  le  Chef  des 
Anges,  aujjuel  toutes  créatures  doyuent  hom 
magc,&  ployét  le  genouil  deuant  luy, que  fe- 
ra-ce  de  nous  poures  vaiflcanx  de  terre  &  fra 
giles ,  de  nous  qui  ne  femmes  rien  ?  Oferons- 
nous  venir  prétendre  le  nom  de  Dieu,  finon 
que  nous  foyons  deuement  appelez  ?  Notons 
bien  donc  que  fainft  Paul  n'allègue  point  ici  . 
fon  authorité  pour  eftre  prifé  :  il  ne  fe  vante 
point  d'auoir  e^Cié  en  crédit  quant  au  monde, 
mais  il  dit  qu'il  eft  appelcde  Dieu.  Orilert 
vray  que  fa  vocation  3  efté  fpeciale  comme 
d'vn  Âpoftre;  mais  maintenant  Dieu  a  eftabli 
vn  ordre  qu'il  veut  qu'on  obferue  en  fon  Egli 
fe.  Ceux  donc  qui  font  choifis  lelon  Dieu,  Si 
qui  demandent  de  feruir  à  Dieu.peuuent  dire 
auec  fainift  Paul ,  La  prédication  m'e'ft  com- 
mife. Et  quand  ikfont  reiettez, cefte  iniute-la 
i'addrefle  à  Dieu,&  non  point  à  leurs  perfoii 
nés. Mais  il  faut  que  ceci  fe  face  en  authorité. 
Car  Icsfcdudeurs  pourront  bien  prétendre 
la  coQuerture  du  nom  de  Dicu.comme  ils  ont 
fait  de  tout  temps:  mais  fainil  Paul  qui  a  dé- 
claré que  la  prédication  luy  elloit  commife,  a 
eu  de  bons  tefmoignages  &infallibles.  lia 
donc  falu  que  fa  doflrine  fuft  authentique. 
Or  notons  qu'il  n'a  point  feulement  parlé 
pour  vn  temps, mais  comme  la  vérité  de  Dieu 
eft  permanente  ,  qu'auiourd'huy  il  nous  faut 
applicquerces  titres  à  noftre  vfage,  &  quand 
nous  oyôs  ce  qui  eft  amené  de  fainft  Paul, que 
nous  ne  le  prenions  point  comme  quelque  do 
ftrine  qui  auracreu  au  cerueaud'vn  homme, 
mais  que  nous  fçachions  qu'il  eft  inftrument 
de  l'Efprit  de  Dieu. Pourquoy?  Car  la  prédi- 
cation luy  eft  conimife,  &  il  s'en  eft  acquit  té 
fidèlement:  il  a  ferui  à  Dieu  ,  difpenfant  le 
threforde  l'Euangile,auquel  nous  auons  cer- 
titude de  noftre  falut.  Puis  qu'ainiî  eft  donc, 
tenons-nous  à  ce  quieftefcrit  ,  fçachans  que 
noilre  foy  alors  ne  fera  point  appuyée  l'ur 
les  hommes  .    Et  pour   conclufion  il  met 

Vv.iiii. 


jz8 


SERMON     II. 


^ue  cel.t  eji félon  l'ordonanee  <{e  D/f».Ici  Ûind 
Pjulneveut  point  qu'on  regarde  à  l'a  digni- 
té.Il  tft  vray  qu'il  auoit  de  quoy  fe  glorifier, 
quand  il  euft  voulu, ainfî  qu'il  le  monllre  quâd 
il  en  a  efté  contraint  :  que  s'il  y  a  eudcs  glo- 
rieux q  vouloyét  faire  trop  des  braues,il  dir, 
a. Cor.  Il  Si  iem'accompare  à  eux  ,  le  ne  fuis  point  en 
J.  rien  inférieur. S'ils  difcnt,  le  luis  de  la  lignée 

d'Abraham:&  moy.n'en  fuis-ie  pas  aufsi.'S'ils 
dilent  qu'ils  font  cleics  :  &  moy  ,  ne  fuis-ie 
point  dodieur  en  la  Loy  ?  S'ils  fe  vantent  de 
leur  preud'hommie&deleurcôuerfation,  on 
fçait  que  l'ay  efté  irreprehenfible  en  toute  ma 
vie  :  onm'auoit  eftimé  vn  faindkomme  dé- 
liant que  ic  fufll-  Chreilien  :  le  puis  alléguer 
tout  cela, dit-il:Mais  quoyfToutes  ces  chofes 
lame  fjnt  fiente  &  ordure  .depuis  que  Icfus 
Chrifl  m'a  efté  donné.  Car  Tay  cognu  que  i'e 
ftoye  plongé  au  profond  d'enfer  auec  toute 
ma  fagelle  &  fainàt  té, que  l'ay  eftimé  tmt  ce 
la  perte  &dôinage,afiti  de  gagner  ItfuiChr  ft. 
Bricf,faind  Paulaeilé  en  c  fi  cndi  oit  comme 
vn  homme  qui  fera  en  danger,  qui  quitte  tout 
ce  qu'il  auoit  pnfe  auparauant ,  afin  de  fauuer 
fa  vie,  qu'il  dit  qu'il  n'a  paî  peu  tftre  faune, iî 
non  en  fe  dclpouiUaiit  de  tout  ce  qu'il  auoit 
eucliL-id:  piecitux.afin  d'tftie  '  nr  cb  des 
grâce  de  noftre  Seigneur  lefus  Chuft.  Vola 
donc  comme  faind  Paul  fe  pouLio;t  hardm  et 
glonfier:maii  il  fc  dep  ntcde  tout  cela, pour 
nous  monlher  qu'il  ne  faut  point  que  nous  ap 
portion',  rien  du  noftre  quand  nous  voudrons 
eftre  cfcoutez:  mais  que  nous  monftrions  ce 
que  nous  auons  de  Dieu.Et  vne  telle  proccdu 
ï.Cor.4.  ^^  ^^  '''^"  pour  nous  humilier  :  comme  il  dit 
^\  ■  '  en  l'autre  paflage  ,  Qu,'eft-ce  que  tu  as  finon 
ce  qui  t'eft  donné?  Car  il  y  en  a  beaucoup  qui 
parieront  des  grâces  de  Dieu, mais  ils  ne  laif- 
fent  pas  d'eftre  pleins  d'orgueil:comme  nous 
i»riS.ii  voyons  ce  Pharilîcn  qui  eft  au  temple  ,  enflé 
d'orgueil  Se  de  prcfomptiô:  il  Juy  fcmble  que 
les  autres  ne  font  pas  dignes  d'approcher  de 
luy :&  toutesfois  il  dit, S;  igneur.ic  te  ren  grâ- 
ces.On  diroit  qu'il  eft  defpouillé  de  toute  ar- 
rogance :  mais  cependant  il  ne  laiflepasde 
monftrer  ù  fierté  ,  car  il  veut  eftre  exaucé 
pour  fts  bien-faits  Si  fes  mentes:  &  cepend.u 
il  necignoit  point  les  giaces  de  Dieu  en  pu- 
reté de  coeur.  £t  pourtant  il  faut  qu'il  foit  là 
laifle  maudit,&  que  ccluy  lequel  il  ne  daignoit 
regarder, l'cftimSt  vn  mal-hcurcux,  foit  exau 
ce  de  Dieu:c5ne  noftie  Seigneur  IcfusChnft 
le  rcmonltrc.  Et  c'tft  ainfi  que  fainû  Paul  en 
a  vfé.Et  voilapoiivqioy  en  ce  palfage ,  com- 
me aufi  par  tout, quand  il  parle  de  la  dignité 
Euangclique,il  dit, C'a  efté  ftlon  l'ordonnan- 
ce de  Dieu:  protcftant  par  cela  ,  que  Dieu  ne 
Tauoit  point  choifi  comme  le  plus  idomc  &  l« 
plus  futûfant, mais  d'autant  que  fon  b m  plai- 
Hr  eftoit  tel.  Or  puis  qu'ainfi  eft  .apprenons 
maintenant  de  nous  alTuiettii  du  tout  î  U  vo- 
lonté de  Dicu,&  mieux  q  nous  ne  fail'ons  pas: 
il  quand  aoi  alFcûioBS  ne  t'y  voudront  point 


ranger,que  cefte  bride-ci  nous  retiene. Voire," 
mais  fi  faut-il  que  Dieu  nous  gouuerne,& 
qu'il  foit  mailhe  par  dclRis  nous.  Etmefmes 
quand  U  y  aura  quelque  choie  qui  nous  l'em- 
bkra  fafcheufe ,  &  dont  nous  voudrions  eftre 
exemptez, que  nous  cognoif  ions,  Voire.mais 
lî  eft-ce  que  ceci  n'eft  point  licite,  le  yoy  que 
il  defplaift  à  mon  Dieu.  C^ne  cela  donc  foit 
pour  repouffer  toutes  les  tentations  de  noftre 
chair  qui  nous  folicitent  à  m<il  faire;&  cepea 
dant  quand  nous  auôs  l'ordre  de  l'Eglife  qui- 
aura  efté  inftitué  de  Dieu.que  nous  n'y  veniôs 
nen  méfier  qui  foit  de  noftre  cerueau.pour  di 
re  ,  Ho,  il  me  femblc  que  cela  feia  bon,  &:  ic 
voudroye  que  cela  allait  ainfi.  £t  qui  eft-ce 
qui  parle?  Les  petis  vermiceaux  fe  voudront 
eieuer:les  crapaui  voudrôt  fauter.Il  tl\  vray 
qu'ih  auront  bien  les  eftomachs  enflez  :  mais 
cependant, qu'eft-ce  qu'il  y  a?  Toute  vermine 
&  pourriture.  Et  cèpe,  dant  ils  voudrontap. 
piouuer  ou  reietter  l'Euangile  àKurpofte,& 
en  voudi  ont  eftre  iugcs  à  leur  phantalie.  Or 
de  nefire  colté.aduifonsce  qui  lit  déclare  par 
fainct  Paul:car  il  .1  y  a  doute  qu'il  n'ait  voulu 
dt  Ipittr  les  plu-  gi.m-  de  ce  monde, quand  ils 
ne  le  voudront  point  langer  à  la  dottnne  de 
lef  s  Chrll ,  &  à  roidoiinaiice  de  Dieu  ion 
Pert    ^lai'.  encore,  afin  de  nous  rompre  le 
cctur  ,  il  attribue  à  D.eu  le  titre  dt  Sauueur: 
comme  i'il  d!foit,Q__aiid  il  a  fait  celte  ordon 
nance  de  pn  A  hci  fon  Eiiangilc.  quand  il  a  in 
ftitue  gens  qui  feruiiTent  en  ceft  cftat.à  quelle 
fin  eft-ce  qu'il  a  preteiiduîA  noftre  falut.Mal 
heur  donc  fur  nous  quand  nous  ferôs  ici  com 
me  des  beftes  venimeufes.que  nous  viendrons 
ici  leuer  les  cornes  contre  Dieu, pour  dire,  le 
ne  veux  point  rcceuoir  le  bien  qui  m'cft  pre- 
fenté.Et  qu'y  gagneras -tu  mal-ntuieule  créa 
ture?  Ainfi  donc  fainÛ  Paul  n'alltgue  pas  icj 
iîmplemét  la  inaiefté  de  Dieu  à  laquelle  nous 
nous  dcuons  rendre  fuiets,  mais  encores  il  ad 
ioufte  ce  mot  amiable,  que  Dieu  s'tft  déclaré 
noftre  .Sauueiir,quandila  commandé  que  fon 
Euangilc  fiii\  prefché:  comme  aufsi  il  dit  no- 
tamment au  pumier  chapitre  dc^  Romains, 
que  Dieu  a  voulu  qu'on  receuftfadoftnneca 
obtilîàncc.  £t  puis  il  adioufte  tantoft  après, 
que  c'eft  ù  puilïànce  en  falut  à  touscroyans. 
Quand  donc  il  a  remonftré  que  Dieu  à  en-, 
uoyé  du  commencement  fe   Apofttes,&  qu'ai» 
iourd'huy  il  eftablit  les  Paiteurs  m  Ion  Êgll- 
{c  ,  que  par  ce  moyen  il  procure  noltre  lalur, 
cognoilTans  que  li  nous  kiy  fommes  ingtatsv 
&  que  nous  ne  puiAions  nous  aflu.ett  r  plei- 
nement à  luy  ,  que  ce  fera  vne  double  confu- 
fion  pour  nous, d'autant  que  nou-  aul'n^  retu- 
fé  le  bien  qui  nous  eftoit  offert.  Et  ainli  co- 
gnoiflons  que  pour  auo  rDicH  noftie  Sau- 
ueur,il  faut  que  nous  venions  en  fon  efchole, 
que  nous  f  )yons  enfcigni  z  par  l'Eii.'igiie.  qui 
eft  Icfus  Clin  ft.Et  quand  et  bien  nous  tft  ap- 
porté, que  nous  ly.ichious   que  c'eit  vn  thre- 
for  qui  furmonte  tout  ce  que  nous  pourrions 

aujir 


SVRL'EPIST.     A     TITE 


Ci» 


iuoir  en  ce  monde. Les  Papiftei  parleront  bié 
ce  langage, Dieu  cftnortreSauiieiir  :  mais  ce- 
pendant <ju'eft-ce  enuers  eux  de  la  vertu  de  la 
predication;Sçauent-ils  de  quoy  leur  doit  ler 
uir  la  venue  de  noftreSeigncur  leûis  Chrift? 
Sentent-ils  que  FEuangilc  leur  foit  la  puiflàn 
ce  de  Dieu  pour  leur  falut?Mais  ils  grondent 
à  rencontre  comme  des  belles  fauuages, voire 
&leperfecutent  furieufement.VoirefEt  pen- 
fent-ilsque  lefus  Chrift  ait  plus  nulle  reue- 
rence  entr'eux, quand  ils  quittent  &  reiettent 
ainfi  fa  dodlrine?  Ainfîdonc  notons  bien  que 
fî  nous  voulons  que  Dieu  nous  aduoue  ,  il  ne 
faut  point  nous  eflongnerde  fa  parole  ,  mais 
il  nous  faut  receuoirle  falut  qui  uons  eftpre- 
fenté  en  l'Euangile  ■  car  quand  nous  aurons 
cela, nous  auons  vne  confoïation  ineftimable, 
que  nous  ne  douterons  point  que  Dieu  ne  par 
face  noftre  fàkit ,  combien  que  nous  foyons 
ici  fragiles ,  que  nous  foyons.  fuiets  à  tant  de 
miferes ,  fi  eft-ce  que  noftre  f^lut  nous  eft  af- 
feuré.Et  pourquoy;  Si  nous  auons  la  prédica- 
tion del'Euaiigile  ,  c'e/lpour  nousmonftrer 
queDieu  veut  eftre  noftre  Sauiicur,  qu'il  do- 
mine au  milieu  de  nous,  &  qu'il  y  ha  fon  liege 
drelFé.  Voila  donc  en  fomme  ce  que  nous  a- 
uons  à  retenir,c'eft  afçauoir  que  nous  ne  foy- 
ons plus  addonnez  à  nos  -phantafies  vaines  & 
friuoles,  pour  nous  en  laifler  tromper  &  cir- 
Conuenir,mais  que  nous  venions  à  la  vérité  de 
Dieu  pour  eftre  appuyez  fur  icells.fans  en  de 
clineriamais:&  que  nous  rcgardios  plus  haut 
qu'en  ce  monde  &  àceftevie  terrcftre,  que 
nous  venions  à -noftre  Seigneur  lefut  Chrift, 
le  prians  qu'il  defploye  les  grâces  fur  nous, 
qu'ilnousen  communique, &  que  nous  obte- 
nions par  fon  moyen  vne  telle  afleurancedc 


la  bote  de  Dieu  enuers  nous,  que  nous  ne  dou 
tiens  point  que  nous  ne  paruenionsau  fruid 
&à  la  iouifiance  des  chofes  qu'il  nous  pro- 
met auiourd'huy,&  que  nous  efperons.Et  ce- 
pendant,  que  nous  glorifions  noilreDieucn 
ce  qu'il  nous  a  fait  plus  de  bien  qu'aux  pères 
fous  la  Loy  :  puis  qu'il  nous  a  préférez  1  eux, 
en  ce  qu'il  nous  a  donné  plus  ample  déclara- 
tion de  fa  volonté  &des  promeflès  de  noftre 
falut,  que  nous  venions  à  luy  d'vn  tant  meil- 
leur courage  ,  &  que  nous  y  adhérions  d'vne 
afftftion  plus  ardente, iufqu'a  ce  qu'il  nous  re 
tire  en  fon  Royaume celeftc, où  nous  verrons 
en  pleine  perfedion  les  chofes  que  nous  co«f 
tcmplons  maintenant  par  foy. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflàncedc 
nos  fautes,  le  fupplians  qu'il  luy  plaife  nous 
les  faire  tellement  fentir,que  nous  foyons  de 
plus  en  plus  côfus  en  nous-mefmes  pour  nous 
defplaire  en  nos  péchez, &  pour  en  auoir  vne 
vraye  repentance.iufquesà  tant  que  nous  foy 
ons  du  tout  purgez  de  nos  imperreâions.  Ec 
entant  que  nous  fommesdutout  corrompus. 
Se  qu'il  y  a  tant  de  vices  en  noftre  nature  que 
nous  ne  pouuons  finon  l'ofFenfer ,  qu'il  luy 
plaife  nous  fupporter,&ietterroeiJ  de  fami- 
fericorde  fur  nous ,  afin  qu'eftans  gouuernez 
par  fon  lainft  Efprit ,  nous  ne  puifsions  plus 
prouoquer  fon  ire  en  telle  licence  que  nous 
auons  fait  par  ci  deuant ,  mais  qu'il  nous  par- 
donne par  fa  bonté  paternelle ,  afinque  nous 
luy  foyons  agréables  au  nom  &  par  le  moyen 
de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift.Que  non  feu- 
lement il  nous  face  cefte  grâce,  mais  aufsi à 
tous  peuples  Si  nations  de  la  terre,&c. 


TROISIEME    SERMON    SVR    LE 

PREMIER       CHAPITRE. 

1  Vauljeruiteur  de  Dieu,  er  Apoflre  de  lefus  Chrijl  félon  la  foy 
des  eleus  de  Dieu,  O'  la  cognoi[fance  de  yerité ,  qui  ejl  félon  la  crainte 
de  Dieu, 

^  En  l'efperace  de  v/e  éternelle  ^laquelle  Dieu,  qui  ne  mentpoinpy 
a  pontife  deuant  les  temps  éternels  y 

3  Et  a  manifeflé  en  fin  temps ,  afçauoir  fi  parole  par  prédicat 
tion ,  laquelle  mefl  commife  fclon  la  commifion  de  Dieu  noîlre 
Sauueur: 

4  A  Tite  mon  vray  fils  filon  la  foy  commune  entre  nous,  Gra  -" 
ce,  mifericorde,  O'paix  de  par  Dieu  le  Vere ,  CT  de  par  lefus  Cbrifi 
nofirc  Sauueur. 

■  5     La  caufe  pourquoy  ie  tay  laiffe  en  Crète ,  c'eft  afin  que  tu 


Xx.i. 


^ih.li. 


t.  PiVr.i 
?3- 


î50  S  E  R  M  O  N       1  I  I. 

ncheuei  de  corriger  kichofs  qui  défaillent  y  (f  que  tu  conjlitucsdes 
Vrefirespar  les  villes yCOiwne  ic  te  lauoye  oràonné. 

L  n'ya  plus  de  cette  (ûnti-    gn  r  ea  telle  forte.que  c'eft  Iny  qui  commence 
non    de  ûind  Paul  autf:     &  4111  pirfiit  le  tout.la  gloire  ne  luy  en  doit- 
chofe  \  eipofcr,  finon  qu'il     clL'  point  eitre  rendue?  Côme  quand  il  eft  dit 
appelle  Ti te  fou  vray  fils     que  les  ininiftres  de  la  parole  pardonnent  les 
félon  la  foy  côaiune:&  puis     pecher.qu'ils  deflient  lésâmes,  ce  n'eft  pas  â 
il  demande  à  Dieu  qu'il  liiy     Dieu  leur  ait  refîgné  fon  office  ,  &  qu'il  s'en 
face  grâce  &  niifericorde,&     foit  dcfueftu  :  mais  quand  il  leur  â  commis  fa 
liiy  donne 'paix.  Orilcft  vray  qu'il  nous  cft     parole,  il  leur  a  aufsi  déclaré  àquelle  fin  elle 
défendu  d'auoir  nul  père  en  ce  monde  :  mais     doit  eftreprefcliee,&  quel  cft  ceft  office:  car 
cela  s'entend  que  nous  ne  deuonspoint  nous     ceux  qui  reçoyuent  les  promefles  que  nous 
ârrefter  à  la  créature  pour  defpouiller  Dieu     offrons  au  nom  de  Dieu,  doyueat  eftre  certi- 
defonhonncur-.cat  il  faut  que  tout  parenta-     fiez  que  tout  ce  que  nous  auons  prefchéert 
gelé  rapporte  là,  comme  aulsiilen  procède,     aduoué  au  royaumedescieuxrcar  nous  \^s  a- 
Melme  cela  n'efc  pas  feulemét  lelon  l'elprit,     uons  renuoyez  à  Dieu  qui  nous  a  commis  à  ce 
mais  en  tout  &  par  tout  il  faut  que  Dieu  foit     la.Ainfi  donc  ceux  qui  ont  charge  d'anoncer 
recognu  &  honoré  pour  Père  vnique.  Ileft    l'Euangilcdeflient  les  âmes, ils  reraettest  les 
vray  que  l'Apoftre  en  l'Epiftre  aux  Hebrieux     péchez  au  nom  de  Dieu:  mais  cependSt  touf- 
declare  qu'il  ejt  Père  de  noi  ames,&:  fait  com     iours  ce  qui  nous  eft  dit  parle  Prophète  IfaieIA.4J.if 
paraifon  de  luy  auec  les  pères  charnels:  mais     demeure  vray&:  en  fon  entier.C'ell  ceftuy-ci 
tai;t  y  a  que  félon  nos  corps  il  faut  bien  aufsi     qui  pardonne  tes  fautes,Ifiael,&  qui  les  tfFa- 
que  Dieu  foit  noftre  Père.  Car  combien  que     ce  :  tellement  que  Dieu  ne  veut  point  qu'on 
nous  foyons  engendrez  par  nos  pères  ternes    luy  mefle  nuliecreature  .monftrantque  c'eft 
félon  nature, fi  eft-ce  que  Dieu  nous  a  formez     (ow  office  propre  d'effacer  les  péchez  :  voire 
&  créez.  Et  c'eft  vn  miracle  qui  mérité  bien    mais  cependant  le  moyen, &côint  fon  inftru- 
d'eftre  renommé  que  celuy-k  ,  quand  Dieu    ment  pour  ce  faire,  eft  fa  parole,  laquelle  il  a 
crée  vne  telle  créature  qu'eif  l'homme,  de  ce    commife  aux  hommes  mortels.  Nous  voyons 
qu'il  luy  donne  vne  telle  forme. Là  doncDieu     donc  maintenât  que  S.Paul  ne  s'tft  point  exal 
defploye  vne  belle  iageffe ,  voire  &  telle  que     té  outre  fa  inefure ,  mais  feulement  il  a  voulu 
nos  corps  font  des  miroirs  aufquels  nous  de-    monftrerqueleft  l'officede  ladoftrinede  l'E 
uons  contempler  fon  ouurage.Et  ainfi  (com-     uangile, c'eft  que  par  icclle  nous  foyons  Faits 
me  i'ay  défia  touché  )  Dieu  fera   Père  des     nouuelles  créatures  Et  pourquoy  ?  Car  c'eft 
corps  aufsi  bié  comme  des  âmes,  mais  fur  tout    vne  femence  incorruptible.  Comme  nous  font 
il  veut  eftre  noihe  Père  fpirituel.Au  refte.ce-     mes  engendrez  en  ccfte  vie  prefcnte  &  cadu-. 
\i  n'empefthc  point  que  ceux  qui  nousengen    que  parla  femence  corruptible,  aufbi  la  paro- 
drent  parla  parole  de  Dieu  ,  ne  foyentaïf;!     le  deDieu  nous  viuifie  afin  que  nous  paruenioï 
eftimez  pères  fous  luy  en  degré  inferieur.Voi    à  ceft  héritage  immortel  qui  nous  eftapprc- 
h.  doc  Dieu  qdemeurc  toufîours  en  (x  princi-    fté.  De  là  nous  fommes  admoneftcz,  quand  il 
pauté  fouucraine.&n'ha  point  de  compagne:    plaift  à  Dieude  nousenuoyerfa  parole,  de  la 
car  il  n'y  a  homme  mortel  qui  fe  puiflè  cga-    receuoir  auec  vne  telle  alFcéfiô  coinme  fi  elle 
1er  à  Juy  :  mais  d'autant  qu'illuy  plaift  vfer    nous apportoit  la  vieicaraufsi  fait-elle. Nous 
des  hommes  mortels  ,&  les  faire  inflrumens    ne  le  fentôs  pa;, 8;  ne  l'appréhendés  point  fe- 
pour  nous  engendrer  en  la  vie  celeftc ,  voire    Ion  noftre  phantafie.mais  la  chofe  cft  telle.Et 
de  cefte  femence  incorruptiblefcomme  fainél    ainfi  cognoiflons  le  bien  qui  nous  eft  côrouni- 
Pierre  la  nomme)  c'eft  afçauoir  la  doftrine    que  quâd  Dieu  nous  enuoye  fa  parole.Et  voi- 
de  l'Euangile  ,  ceux  qui  font  conftituez  paur    la  pourquoyauûi  l'F.glife  eft  appelée  noftre 
prefcher  fa  parole, font  nos  pères. Saincl  Paul    mere:commeS.Paiil  ledit.quelagardeluy  eft 
donc  n'a  point  ici  vfurpé  ce  qui  eftoit  propre    commife  de  la  venté  de  Dieu.  D'autant  donc  Gai  4.1  à 
à  Dieu, mais  il  s'eft  nommé  père  de  Tite,d'au    que  Dieu  nous  fait  d'fpenfcr  fi  parole  par  le  i.T/m.i. 
tant  qu'il  l'auoit  engendré  en  la  foy  Chre-    moyen  des  hommes,  &  qu'il  a   eftabli  ceftor-lj. 
ftienne.Or  tant  s'en  faut  que  cela  obfcurcifle    dre  en  l'Eglife.il  faut  que  tout  ainfi  que  Dieu 
l'honneur  &  la  dignité  de  Dieu  ,  que  pluftoft    eftnoftre  Père,  que  l'Eglife  aufsi  foit  noftre 
c'en  eft  vne  approbation.   Car  fi  les  hommes    mère, que  nous  foyons  conceus  par  icclle, que 
qui  nous  apportent  la  dodrine  de  falut  pour    nous  f  )yons  allaittez  &  nourris.  Tout  ainiî 
nos  âmes  ,  f  >pt  nos  pères  ,qHe  fcra-ce  de  ce-    qu'vn  homme  s'accorde  auec  fa  fcinmc  pour 
luy  q  nou;  réii'ye,&  qui  cft  le  vray  authcur,     nourrir  leurs  entans ,  S:  que  la  femme  en  doit 
&  qui  fait  feruir  le  labeur  des  hommes  comme     auoir  le  foin  de  ù  part  :  iiuf  1  Dieu  a  commis' 
bon  luy  femble?  Q_^nd  il  donne  la  faculté  Se     ccfte  chargea  (">n  Eglifc, qu'il  veut  que  parle 
le  moyë.qu'il  dôiie  la  vertuàla  d-iftr'neafin      laiff  d'iceilp  nou    fjyon^  fubft.inrez  iufqu'i' 
qu'elle  nous  protite,quand(di-ie)Dicu  befon     ce  que  nous  foyons  parucnus  tn  aagc  d'hôme: 

Cumme 


s  V  R    L'  E  P  I  S  T. 


A    T  I  T 


5^1 


E^S.4.l3comeiIcn  eft  parlé  aux-  Ephefiens. Voila  doc 
qui  cflcaufc  q!;c  S.P.iiil  appelle  Tite, Ton  vray 
hU:3<  not.imaieiit  il  l'appelle  vray  &  naturel, 
pour  ledifcernercrauec  les  hypocrites, qui  fc 
ronthien  engédrcz  en  la  niaifon  de  Dieu  felô 
l'appaiéee  extttinire(côme  aiifsi  il  en  tiaitte 
Ga7.4.2.i  jyj;  Galat:éj)niaiscepend.uil  faut  qu'éla  fin 
*^  30-  il?  foyét  retranchez  corne  baltars  qni  ne  font 
point  vrai';  fils,  ainlî  que  l'exemple  en  eft  là 
amené  d'Ilmacl. Car  la  niaifon  d'Abraha  a  efié 
vne  vraye  image  on  figure  de  l'Eglife.  Voila 
Ifmael  qui  eft  fils  d'Abraha  felô  la  chair,  mais 
fa  mère  en  eft  exclue.  Or  Ifmael  femble  bien 
auoir  le  droift  de  primooeniture.tellemct  que 


lut ,  tellement  qu'ils  reçoynent  la  «race  de 
Dicu,&  la  fontvaloir,&  ne  fe  çôtentcnt  point 
feulement  du  titre, mais  aufsi  ont  la  fiibftance 
&  la  vérité.  Or  et  pendant  fainfl:  Paul  adiou- 
11e  ,  Q"f  t(Li  eftftlon  l^'f^y  eummune  qu'ils  eut 
enfcmhU.'El  ceîi  comme  pour  comprendre  ce 
que  nou«  auôsveu  qu'il  s'appelloit  perc,  afin 
qu'on  cognull  qu'il  ne  s'elcuoit  point  pour 
obfcurcir  la  gloire  de  Dieu,  ni  pour  amoin- 
drir la  dignité  de  noftve  Seigneur  lefusChi  ift. 
Voila  donc  ce  qu'il  dit,  que  combié  qu'il  foil 
pcre,  il  ne  laifle  pas  dVftre  du  nombre  des  en 
fans. Et  ainfî.celuy  qui  eft  Père  en  l'Eglife  de 
D'eu,  d'auunt  qu'il  porte  la  femence  de  vie, 


il  fe  mocque  d'Ifaac  foi'  frerc,&  veut  ane.itir    d'autant  que  les  âmes  font  reformées  par  fon 


la  promcffe  qui  eft  dônee,  que  Dieu  fufcitcra 
bcnediâion  par  le  moyen  d'Ifaac:il  s'en  moc- 
que: car  il  luy  femble  qcefoitafllz  qu'il  foit 
le  premier-nay.  Or  il  faut  qu'auec  tout  cela 
il  foit  banni  de  la  raaifon,  non  point  feulemét 
de  fon  pcre  Abrahamaispluftofl  de  Dieu,  & 
ou'il  foit  réuoyc  c5me  pnphane.  Et  voila  vn 
mébre  pourriiJc  tout  ce  qu'il  a  eu  auparauant 
efl:  venu  à  rien,  dit  S.Paul.  Oril  applique  cela 
à  noftre  inftruftion  c5mune,difant  que  quand 
la  parole  de  Dieu  fe  prcfche.beaucoup  l'aurôt 
qui  n'en  pourront  pas  faire  leur  profit,  pour- 
ce  qu'ils  ne  font  point  engendriz  en  liberté, 
qu'ils  ne  font  point  illuminez  par  l'Efpritde 
Dieu, qu'ils  nereçayuent  point  les  promelTes 
gratuites  de  leur  falut ,  qu'il  n'y  a  point  vne 
vraye  foy  &  viuc  ,  qui  prene  racine  en  leurs 
cœurs. Ceux-ta  donc  ferot  b'é  rcputez  enfans 
de  Dieu:  mais  il  n'y  a  nulle  femence  légitime 
en  eux, il  n'y  a  qu'vne  apparéce  vifiblf ,  il  n'y 
a  que  corne  vne  chofe  formée  fans  fnbftance. 
Et  s'ils  s'en  glorifient  pour  vn  téps,il  ne  s'en 
fautpoît  esbahir:carcela  s'eft  fait  en  Ifmael, 
mais  ila  falu  en  la  fin  qu'il  ait  efté  dechaflé. 
Ainfi  fera-il  de  tous  ceux  qui  à  faux  titre  fe  re 
nôment  du  peuple  de  Dieu.S;  q  ceux  qui  ont 
eftévrayement  engédrez  foyét  retenus, &•  que 
ils  iouifletit  de  l'héritage  de  falut.  Ainfi  donc 
apprenôs  de  n'auoir  point  feulement  le  titre 


moyen  &  par  fon  labeur  à  l'image  de  Dieu, 
celuy-Ia  ne  laifle  point  d'ellre  du  rang  com- 
mun.PourquoyfC'cft  la  toy  qui  nous  apporte 
vn  tel  priuilege,  que  nous  foyons  eftimez  en- 
fans  deDicu:comme  ileftdit  au  premier  chs 
pitre  de  fainftlehan  ,  Q_uiconques  croira  au 
Fils  v  nique, l'au  thon  té  &la  grâce  luy  eft  don- 
née d'eftre  des  enfans  de  Dieu.  Puis  qu'ainfî 
ert  donc  que  nous  obtenons  vn  tel  bien  parla 
foy,s'il  eft  dit  que  la  foy  eu  cômune  en  ceux 
qutenfeignent,&  en  ceux  qui  font  enfeignez, 
nous  fommes  tous  en  vne  compagnie,  &  en  vn 
ordr.e  ,  &  faut  que  Dieu  ait  la  prééminence 
luy  fcul,  qu'il  domine  par  deflus  ,  &  qu'il  foie 
exalté  luv  feul  comme   Père.  Et  ainfi  nous 
voyons  que  fainft  Paul  fous  ce  mot  de  faycom 
mK»f,s'eft  voulu  paîfiblement  ranger, afin  que 
on  n'eflinuft  point  qu'il  vouluft  plus  s'attri- 
buer qu'il  ne  luy  appartenoif,  ou  bien  qu'il  ne 
luy  chaliift  point  d'v  furper  l'hônenr  deDieuà 
foy.  Il  a  déclaré  qu'il  ne  laifloit  point  d'fftre 
frère  de  Tite  ,  puis  qu'ils  eftoycnt  tous  deur 
engerdrez  par  la  parole  de  Dieu.  11  eft  vray 
que  fairâ  Paul  auoit  efté  dcuant ,  mais  quoy 
<3u'il  en  foit ,  fi  eft-ce  (comme  défia  non^  a- 
uons  dit)  que  d'autant  que  nous  fommes  ré- 
générez par  l'Efprit  d'adoption  tousenfëm- 
ble ,  il  faut  que  Dieu  foit  n<'ftre  Père  ,  S:  que 
nous  foyons  humiliez  four:  Kiy  ,  &  qu'vn  clia- 


d'enfans ,  mais  que  nous  foyons  reputez  pour    cun  s'y  a{luiettifie,&  que  nulne  vueilledomi- 


vrais  enfans  &  légitimes. Et  cela  fe  feia  qu3d 
nous  ferôs  tclleniét  noftre  profit  de  la  doftri 
ne  de  TEuangile, qu'elle  aura  vne  droite  raci- 
ne en  nous,  &:  qu'elle  produira  fes  fruits,  que 
nous  prendrons  gardeàn'eftre  point  baftars. 
Quand  donc  nous  irons  en  telle  forte  ,  Dieu 
nous  rcticdra  toufiours  du  nôbre  &'  de  la  corn 
pagniedes  Cés.Sinô.aduif  ns  à  nous:car  U'nis 
aurons  beau  nous  glorifier  de  ce  titre  de  fidè- 
les ou  Chreftiés, telle  couuerture  ne  nous  fer- 
uira  T'en, ni  telle  vanterieicar  ce  qui  a  cfté  ac 


ner  fous  ombre  de  la  foy  de  l'Euargile,  com- 
me s'il  auoit  authorité  de  foy-mefme:  mais 
que  Dieu  demeure  en  fon  entier  ,&■  que  rien 
ne  luy  foit  diminué,  &  que  cependant  les 
hommes  le  ferucnt  cfiacun  en  fon  eitat  & 
en  fa  vocation.  Or  en  la  fin  il  dit,  Grare,wife~ 
riccrJ.'  ^r  p^iiv  de  frr  I  rcK  le  Vcre  ,  (y  Je  par- 
\efiis  Chrrfl  iioftre  $.d««r.  Communément 
famftPaulen  fatuant  les  frênes ,  fc  conten- 
te dt  ce^  deux  mots.  Grâce  Se  Paix  :  figni- 
fiant  (comme  nous  auons  déclaré  en  d'autres 


couipli  en  Ifinel  nousaduiédra  Etairfi  r.ous  paiTisres  )  que  tout  noftre  bien  &   félicité 

voyôs  que  S  Panl  n'a  point  parié  feiilrmér  en  gift  en  cela  ,  que  nous  foyons  réconciliez  à 

laperfoned'vr.  hrin-  mais  en  ge-cral  il  .i  don  Dfo. qu'il  nous  ticre  en  (à  fai'eur&  en  foit 

né  ic  vnr  inftruûiôvtileà  toute  l'E-'if,  ..-fin  amour.  Voila  donc  la  fou-ccde  tout  ce  que 

que  fou^  Pev'mplf  de  Tire  nous  fnvons  via's  rou'  dru-^n»  defîrrr  ,  c'eft   que  Dieu  nous 

enfan  .f<  -i-'e  n.nis  p  ir'.  ô   la  ma- qi'e  Je  c  ux  a-m^'  ,  A    -u'il  noKs  foit    propice:  car  ce- 

^ui  oi.t  tfté cngcrduz  jai  ladoiflfint  dt  fa-  fe:ida;-:  que  nous  l'aurons  contraire  ,  mal- 

Xx.ii. 


13* 


SERMON     ITT.' 


heur  far  nooi.encores  que  tout  le  montlc  ciift  mes  incontinent  deflituez  de  la  grâce  qu'ail 

^onfpircde  nous  aider:  mais  fi  Dieu  noiKac-  nous  a  faite.  Prenons  le  cas  <)ue  Dieu  prefen- 

^cepteà  foy,encores  quenous  foyonsmilera-  te  à  vn  homme  pour  vn  coup  fa  merci,  &  que 

blés  fclon  le  fcB5  humain  ,  tant  y  a  que  tout  quand  il  Taiira  tait  participant  des  piomef- 

fcous  fera  conucrtiàbicn&  àfalut.  Ce  n'eft  fesde  fon  Èuangile,  il  le  laifle  en  fon  eftat: 

pas  donc  peu  de  choie  que  cc-fte  grâce  dont  quand  cell  homme-la  fcroit  le  plus  parfait  da 

parle  faindTaul.- mais  notamment  il  Pappel-  monde,cncoresa-il  bcfoin  que  Dieu  pourfuy- 

îe  grâce, pluftoft  q  dileition  ou  amour, pour-  ue  &  continue  à  le  maintenir,  ou  autrement  il 

ee  que  c'eft  vne  amour  gratuite  ,  c'efl  à  dire  fera  tantoft  priué  de  cefte  dignité  qu'il  auoit 

que  Dieu  ne  nous  peut  pas  receuoir  en  fa  fa-  reccuc,&:  de  ce  grand  prmilege  d'cftre  des  en- 

neur.lînon  qu'il  aitpiticde  nous. Car  en  fom  fans .  Et  ainfi  il  eil  requis  que  Dieu  continue 

mes-nous  dignesflln'y  a  en  nous  que  pcché.  à  nous  Elire  mifericorde, ou  autrement  la  gra- 

U  faut  donc  que  Dieu  nous  haiffc  félon  la  ri  ce  qui  nous  auoit  cfté  donnée  pour  vn  iour,ne 

gueur  de  droit,  que  nous  luy  foyons  detefta-  feroit  point  fuffifante  ,  A:  n'auioit  point  en 

bles,&  qu'il  nous  defauoue  d'entre  fes  creatu  nous  d'efFcft,  finon  que  Dieu  diftiliaft  touf- 

res  :  nuis  quand  il  luy  plailt  d'auoir  compaf-  iours  de  nouucaii  au  dedans .  C'eft  en  fomme 

fionde  noftrc  mifere,alors  ilcômcnceà  nous  ceque  faim!:'!:  Paul  nous  »  voulu  enfeigner  en 

aimer,  voire  d'vne  bonté  gratuite.  Mais  ici  ce  partage. Et  ainfi  retenons  bien, quand  il  prie 

S.  Pauladioufte  le  mot  de  mifericorde  quant  Dieu  qu'il  face  grâce  à  Tite, que  ceci  n'cil 

&^uât,  qui  cft  encores  pour  mieux  exprimer  point  fuperflu,  quand  il  adioufte  la  mifericor- 

cefte  bonté  dont  nous  parlés. Car  il  faut  que  de. Car  de  là  vient  la  paix  (  comme  défia  nous 

Dieu  nous  reçoiueà  merci,  voyat  qu'il  n'y  a  auons  touche)  &  toute  noftre  profpcrité,  tel- 

cn  nous  que  tout  mal  &perdition:s'iln'eftoit  lement  que  c'eft  corne  fi  Dieu  nous  enuoyoit 

cfmeu  de  cefte  côpafsion-la,  iamais  ne  fcroit  la  pluye  du  ciel  pour  arroufer  la  terrc:&  quâd 

induit  à  nous  aimer. Il  eft  vray  que  cefte  mife  la  terre  fera  arroufee,  qu'elle  prene  fubftance 

ricorde(à  parler  proprement)precede  la  gra  &  vigueur. Mais  dont  procède  la  pluye  ?  C'eft 

ce.  Car  Dieu  regardant  au  genre  humain  n'y  du  ciel.  Etainfî  tous  les  biens  que  nous  pou- 

trouue  que  confufion,d'autant  que  nous  fom-  uons  fouhaiter  nousvienent  de  cefte  amour 

mes  tous  maudits  en  Adam. Or  il  eft  vray  que  gratuitede  noftre  Dieu.Etau  refte  ,  quand 

il  n'a  point  pitié  de  tous  (  comme  nous  auons  nous  auons  à  foutfrir  beaucoup  de  pouretez, 

déclaré  cidefrus)il  y  a  fon  eleâion:  &cùin-  que  Dieu  nous  exercera  maintenant  en  rnala-» 

_            me  dit  Moyfe,  il  fait  mifericorde  à  qui  il  la  dies.maintcnant  en  opprobres,  maintenant  en 

*■*»•  JJ- Yf,]t  fajrç;  pour  couper  broche  à  toutes  di-  dommages  terriens ,  il  faut  que  nous  appre- 

■**          fputes,  afin  qu'on  ne  demande  point  la  raifon  nions  de  recourir  toufiours  à  cefte  grâce, à:  de 

pourquoy  c'eft  que  Dieu  en  vfe  ainfi  ,  C'eft  eftre  en  repos  ,  d'auoir  contentement  de  ce 

(dit-il)pource  qu'il  le  veut.  Or  tant  y  a  que  que  Dieu  nous  aime  :  que  nous  apprenions  de 

ceux  que  Dieu  veut  élire  à  {àlut ,  il  les  regar-  addoucir  toutes  nos  tnftefles  par  cefte  con- 

de  auec  vne  affedion  pitoyable:  &  là  deilus  il  foktion  que  fainft  Paul  nous  amené  au  huitie 

~les  reçoit  enfaueur  par  ù  bôté  gratuite.  Voi  me  des  Romains ,  qu'à  ceux  qui  aiment  Dieu, 

la  donc  la  mifericorde  qui  vadeuant  en  pre-  toutes  chofes  viendront  en   aide  &  à  bien, 

«lier  lieu,  &  puis  la  grâce  eft  côiointe  auec, &  Quand  il  parle  deces  chofes  ,  notamment  il 

procède  de  cefte  fource  Se  fontaine-la.  Mais  parle  des  affligions,  des  opprobres ,  &  autres 

ici  fainfl:  Paul  l'a  mife  après  la  grâce  ,  voire  miferes  par  Itfquelles  nous  palTons  parmi  ce- 

pour  mieux  exprimer  commet  c'eft  que  Dieu  ft^  i"e  terreftre  .  Or  ce  n'tft  point  i'ins  caufe 

nous  eft  propice,  c'eft  afçauoir  après  qu'il  auAi  que  faincl  Paul  met  ici  noftre  Seigneur 

nousa  recensa  mifericorde, ou  bien  pourmô  lefui  Chriftauec  Dieu  fon  Père. Car  combien 

flrer.encorej  que  Dieu  nous  aime,&  que  nous  q  D'eu  foit  autheurde  tout  bien.fi  eft-ce  que 

foyons  repatez  fes  enfans  ,  comme  il  nous  a  il  nous  faut  addrefl'er  h  Icfus  Chrift ,  d'autant 

adoptez:  encores  qu'il  defployc  fa  bonté  fur  que  fans  cela  il  y  auroit  trop  longue  diftance 

nous,  qui  eft  vn  certain  tefmoignage  de  fon  entre  Dieu  &  nous, que  nous  ne  pourrions  nul 

amour  ,  fi  faut-il  maintenant  qu'il  pouritiiue  lement  approcher  de  luy  pour  goufter  fa  gra- 

&  qu'il  continue  fa  mifericorde  iufques  en  la  ce  afin  d'en  eftre  particip.ïs.  Voila  donc  Dieu 

fin. Et  pourquoy?Il  eft  vray  que  quîd  il  nous  le  Père  qui  nous  enuoye  tont  bien,  mais  tant 

appelle,  quand  il  nous  tient  de  fon  troupeau,  y  a  qu'il  faut  que  kûi'.  Chrift  s'approche  de 

qu'il  nous  gouuerne  par  fon  fainft  Efprit ,  il  nous.  Car  la  msicfté  de  Dieu  feroit  trop  hau- 

ne  permet  point  que  nous  foyons  toufiours  te  :  mais  noftre  Jeigncur  U  fus  s'eft  fait  petit, 

desbaiichez  &  efgarez  :  mais  il  nous  reforme  voire  il  s'cll  ane.iti  afin  de  nous  mener  à  Dieu 

à  fon  image  ,  combien  que  nous  demeurions  fon  Pere.Et  afin  que  nous  ne  foyôs  point  cm- 

toufiours  infirmes,  &  qu'il  y  ait  toufiours  des  pcfchcz  àlccercher  foit  Join  ,  il  cft  noftre 

vices  Se  macules  tn  nous.  Et  ainfi  il  faut  que  Dieu  manifcftéen  cha'r.  Voila  dôc  pourquoy 

Dieu  iourncllcmét  nous  face  pardon, &  qu'il  fiinû  Paul  nous  rcnuoye  à  noftre  Seigneur 

nous  reçoiue  à  merci,&  qu'il  efface  nos  traf-  lefus  Chrift,  afin  que  par  fon  moyen  nous  ve- 

grefsions&offienfes,  on  fans  cela  nous  fom-  nions  à  cefte  perfcûion  de  gloire,  &  à  fa  ma - 

icilé 


SVR   L'ÎP  IS  T.   A  TI  T  E. 


tefté  dîuîné.'Cf  pédant  notons  atifsi  qu'il  bail 
le  le  titre  de  Sauucur  à  Dieu  le  Pere,&  à  no- 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift,mais  c'eft  pour  di- 
eerfes  raifons.Car  Dieu  le  Père  cil  noftre  Sau 
ueur  ,  d'autant  qu'il  «ous  a  enuoyé  falut  par 
foa  Fils  vnique  :  lefus  Chrift  eft  noftre  Sau- 
ueur,  d'autant  qu'il  a  accompli  les  chofes  qui 
eftoyent  requifes  à  noftre  falut.  Il  eft  dit  que 
Dieu  a  tant  aimé  le  mode  qu'il  n'a  point  efpar 
ita.^.lS-  gnéfon  Fils  vnique  ,  mais  l'aliure  à  la  mort 
pour  nous.  De  là  il  nous  faut  conclure  que  la 
caufe  principale  de  noftre  falut  eft  ccfte  bon- 
ne volonté  que  Dieu  nous  a  portée,  quand  il 
luy  a  pieu  de  nous  retirer  de  la  perdition  en 
laquelle  nous  eftions.  Voila  donc  côme  Dieu 
le  Père  eft  noftre  Sauueur,  mais  cependant  i  1 
s'eft  déclaré  en  la  perfonne  de  fon  Fils.  Car 
noftre  Seigneur  lefus  eftant  venu  nous  a  ra- 
chetez de  la  feruitude  de  mort ,  il  a  fatisfaic 
pour  toutes  nos  dettes,  il  a  offert  vn  facrifice 
de  fon  corps  Si  de  fon  fang  à  Dieu  fon  fere, 
»oire  de  fon  ame  ,  afin  que  nous  hifsions  ab- 
fous  deuant  Dieu.   Puis  qu'ainfi  eft  donc  que 
nous  fommes  iuftificz  par  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift,  3c  qu'il  a  apporté  les  chofes  qui  e- 
rtoyent  requifes  à  noftre  falut ,  ce  n'eft  point 
fans  caufe  qu'il  eft  intitulé  ici  noftre  Sauueur. 
Voila  donc  ce  que  n  lUS  auons  à  retenir,  c'eft 
quand  il  eft  qoeftion  de  noftre  falut, que  nous 
cognoifsions  qu'il  eft  londé  en  la  mifericor- 
de  de  Dieu  le  Père  ,  &  qu'il  a  efté  accompli 
par  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  que  nous  a- 
uons  là  corne  vn  patron  &  miroir  en  fa  mort 
&pafsion,voire  la  vérité  &  la  fubftance  du  fa 
crifîce  qu'il  a  offert  pour  nous,  &  de  la  ré- 
demption par  laquelle  nous   fommes  iufti- 
fiez.  Or  faind  Paul  ayant  ainlî  parlé,  déclare 
pourquoy  il  a  lailTé  Tite  en  l'Ifle  de  Crète, 
c'elt  ifçauoir  afin  qu'il  corrigeaft  auec  toute 
fagcfle  les  chofes  qui  rcftoyent  encore?  ,  & 
qu'il  eftablift  par  toutes  les  villes, des  Anciés, 
ou  des  Preftres.En  parlant  ainlî  il  ne  veut  pas 
inftruire  Tite  de  fon  deuoir  ,  mais  il  luy  veut 
donner  authorité  ,  afin  que  nul  ne  s'oppofe 
quand  il  fera  ce  qui  luy  eft  commis  en  char- 
gc:comme  s'il  difoit,  le  ne  veux  point  que  tu 
fois  empefché  quand  tu  ordonneras  en  l'Ifte 
de  Crète,  Se  que  tu  y  difpoferas  les  chofes  c5 
tne  il  appartient, afin  de  maintenir  PEghfe  en 
fon  eftat&  en  bonne  police,  que  tu  ne  fois 
point  deftourné  de  ce  que  ie  t'ay  commis  en 
charge.  Nous  voyons  donc  maintenant  l'in- 
tention de  l'Apoftre.  Or  cependant  il  nous 
faut  anfsifloter  que  fiinft  Paul  ii'4uoit  point 
plus  donné  i  Tite  qu'il  ne  luy  en  cftoit  com- 
mis àluy.Carce  n'eftoit  pas  comme  vn  empi 
re  ou  vne  puiflànce  royale  qu'il  euft,  mais  feu 
lemét  qu'il  fift  office  de  Miniftre.  Car  S.Paul 
auoit  la  charge  d'édifier  l'Eglife  de  Dieu  ,  & 
d'auancer  l'édifice ,  iuftjucs  a  ce  qu'il  fiift  ve- 
nu à  fa  perfcftion.Maintenât  regardons  pour 
quoy  fainft  Paul  auoit  là  laifle  Tite. Or  la  rai 
fon  eft  toute  patente:  car  il  n'eftoit  point  dit 


533 


aux  Apoftres,  Vous  prefcfierf?  ici  eiù  Ià:il  e- 
ftoit  dit, Vous  prefcherer  l'Euagile  partout 
le  inonde,  à  toutes  créatures. 'Il  faloit  donc 
que  fainû  Paul  eiecutaft  fa  commifsion  taac 
que  luy  eftoit  pofsible  ,  qu'il  allaft  de  lieu  i 
autre  pour  mettre  l'Euangile  par  tout. Main- 
tenant venôs  à  fçauoir  s'il  fuffit  d'auoir  prcf 
ché  ou  vn  demi  an, ou  trois  mois  eu  vn  lieu, ou 
vn  an.Nenni:il  faut  que  cela  continue, ou  J'c- 
difice  tomberoit  tantoft,que  tout  ce  qu'on  ai 
roitcommécé  ,  ne  feruiroitde  rien.finon  que 
on  y  coDtinwaft  ,  encores  que  le  fondcrnenc 
fuft  fait, il  faut  baftirdelTus,  ou  tout  ne  vau- 
dra rien  qui  foit.  Si  on  a  bafti  vn  pan  de  mu- 
raille ,  de  quoy  feruira-il  finon  que  toute  la 
maifon  s'acheuefAinfi  en  eftoit-il  de  l'Euan-. 
gile,  qu'il  ne  laloit  point  prelcher  pour  quel 
que  efpace  de  temps,  mais  il  faloit  que  les  A- 
poftres  comifTent  en  leur  lieu  des  Euefques, 
comme  faind  Paul  vfe  de  ce  nom-la  en  l'au- 
tre paflàge  ,  quand  il  parle  de  l'ordre  conti- 
nuel de  l'Eglife.    Et  là  defTus  il  faloit  aufsi  ^'^■'^9' 
qu'il  y  euft  des  Pafteurs  eftablis ,  comme  il  en  ^'' 
parle  ici.   Car  voila  en  quoy  diffère  l'office 
d'Apoftre  &  de  Pafteur.  Vn  Pafteur  fera  corn  . 
mis  en  vn  lieu  certain  ,  Si.  il  faut  qu'il  fe  tiene 
là  comme  lié.  Vn  Apoftreaura  la  charge  d'ai 
1er  par  tout  le  morde:  &  l'office  d'Apoftre 
n'a  efté  que  temporel, iufqu'à  ce  que  l'Euan- 
gile fuft  publié  par  tout  le  monde.    Alors  ila 
fala  qu'il  y  euft  des  Apoftres:mais  cela  celle, 
il  n'y  a  plus  que  l'ordinaire, c'eft  afçauoir  des 
Pafteurs. Les  Apoftres  ont  efté  comme  lieute 
nans  pour  mettre  lefus  Chrift  en  poffefsion 
de  fon  royaume  :  comme  fainfl  Paul  dit  que 
par  ce  moyen  a  efté  accompli  ce  qui  eft  con- 
tenu au  Prophète  Ifaïc  ,  l'ay  efté  cognu  de  'A-*>''I« 
ceux  qui  ne  s'eftoycnt  point  enquis  demoy: 
là  où  mon  Nom  n'auoit  point  efté  ouy.ie  me 
fuis  manifefté.  Voila(di-ie)  à  quoy  a  efté  or- 
donné faind  Paul  &  fes  femblables ,  qu'il  fa- 
loit qu'ils  anonçalfent  la  parole  de  Dieu  là 
où  elle  n'auoit  point  efté  cognueauparauât, 
qu'ils  auâçafTent  le  règne  de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift  ,  qu'ils  retiraflcnt  les  peu^es  qui 
auoyent  efté  eflongnez  auparauant, qu'ils  re- 
cueillilîent  au  troupeau  ceux  qui  auoyent  c- 
fté  comme  beftes  fauuages,  &  qu'ils  les  redui 
fïlTent  fous  l'obeiHànce  du  grand  Pafteur  Se 
fouuerain  qui  leur  a  efté  donné  de  Dieu  le  Pc 
re.Mais  quant  aux  Pafteurs, ils  ont  eu  vn  offi- 
ce tout  autre:  c'eft  qii'vn  chacun  auoit  vn  lieu 
certain  &  afsignc,  où  il  faloit  qu'ils  fe  teinf- 
fent.  Or  maintenant  les  Pafteurs  font  eleus. 
Et  comment?Non  pas  comme  ont  efté  les  A- 
poftres,qu''il  leur  faloit  aller  par  tout  le  mon 
de  fans  s'arrefter  :  mais  il  faut  qu'vn  <ha- 
cun  Pafteur  cognoifle  la  charge  qui  luy  eft 
commife  ,  &  quand  il  eft  conftitué  en  vn  lieu, 
qu'il  trauaillefidclemét.&qu'il  s'y  employé. 
C'eft  donc  ce  que  fainft  Paul  a  voulu  mon- 
ftreren  ce  pafrage,quand  ildit,I<'  t'aylaifféeti 
Crète  ,ajin  que  tu  efiahlijfes  des  V.zlteuTS,o»  des 

Xx.iii. 


r!i 


SERMON    HT. 


Trefires  fur  ch.Tcnne  Ville.  Car  Cf  mot  de  Pre-  aiioit  ordonné, mais  qu'il  y  adioiirtaft,  &  que 
ftrei,qirilmet,lignifieaiitat qu'Ancien^. Non  l'oeiuire  fiifc  amenée  à  Ta  peittciion  par  ce 
pas  que  tous  ceux  qui  eftoyeit  appelez  à  ccft  moyen -la.  Oi  quand  iaintt  Paul  au  f.i  arme  Ti 
office  ,  fuflcnt  vieilles  gensd'aage  :  car  nous  te  d'authorité  ,  de  li  nous  r.-^mme-:  aduertis 
auons  veu  que  Timothee,  qui  tiloit  du  nom-  que  chacun  entât  qu'en  luy  e(>,  doit  aider  aux 
bre, voire  des  plus  excelles,  eltoit  icune  hom  feruiteurs  de  Dieu  ,  afin  qu'iK  facent  pleine- 
me  :  &  quand  lainft  Paul  Ta  ordonné  ,  il  n'a  ment  leur  otfice,  &  que  fi  quelqu'vn  s'y  oppo 
point  neantmoins  peruerti  l'ordre  de  Dieu,  foit  pour  les  retarder,que  cekiy-la  foit  rem- 
mais  c'eftvn  langage  tout  accouftumé  en  TE  barré. Voulons-nous  donner  vraycapproba- 
fcriture  fainfte  ,  que  les  gouuerneurs  mefmes  tion  que  nous  femmes  Chreftien>?Tenons  la 
eftoyent  appelez  Anciens,  combien  qu'ils  ne  main  forte  à  ceux  qui  doiuent  anôcer  la  paro 
fuflent  point  d'Eglife.roais  pource  qu'ils  des  le  de  Dieu  ,  afin  qu'ils  puiflcnt  cyecutet  leur 
uoyent  auoir  prudence ,  &  grauité  ,  &  qu'ils  charge  &  office:que  fi  on  les  empefche,nous 
deuoyent  mefmes  eftre  tellement  raf.is  ,  que  leur  aidions  entant  qu'en  nous  fera ,  &  qu'va 
ils  t'uffènt  comme  s'ils  ertoyent  défia  vieux,  chacun  le  face  félon  fon  ordre  &  fon  degré. 
Voila  pourquoy  ce  titre  leur  a  allé  attribué  Qiie  les  perfonnes  priuees  aduifent  d'aider  à 
de  tout  temps.  Ov  maintenant  celle  canaille  ceux  qui  fjnt  en  traicil.ceux  qui  ferucnt  fide 
<ie  Preflrifc.qn'on  a  appelé  en  la  Papauté, eft  lementà  Dieu,&  de  les  maintenir  en  leurau- 
ridicule, voire infame:mais  fi  ne  faut-il  point  thorité:&  s^ily  a  des  brouillons  &des  canail 


c'eftvn  nom  facréde  foy  que  Preftreitoutef-     rôs  vrais  Chreftiés.Qi.eceu>-  qui  ont  la  puif- 
fois  il  vaudroit  mieux  elhe  pendu  au  gibet,     fance  du  glaiue,s'y  employét,  5.' que  fur  tout 
que  d'eihe  preftre  papal.  Car  c'e  11  vue  exe-     ils  facét  que  le  mini  Itère  de  l'Euigilefoit  ea 
fiiation  fi  vileine  ,  qu':l  les  faut  tenir  comme     fcn  entier, c'cft  à  dire,q  les  Pafteurs  ne  foyét 
bourreaux  de  lefu'  Chrift.car  ils  le  crucifié:     poin.  empcfchez  qu'ils  n'vfent  de  la  liberté  q 
tous  les  iours.enranr  qu'en  eux  eft.  Mai'  d'e-     Dieu  l'-ur  a  do  mee  :  c'eft  qu'ils  maintienent 
flre  Preftro  Chreftié.c'eit  autre  chof?.  N  m;     l'orde  &  ladifcipline  côme  il  appartient.  Et 
-voyons  donc  maintenant  à  quoy  fainft  Paul     mef  nés  que  les  Pafteurs  aduifent  de  faire  le 
.a  prétendu  en  ce  palTage  :  nous  voyons  aufsi     femblab'e  l'vn  à  l'autre  :  q  celuy  qui  aura  re- 
^uecc  n'eft  point  alTez  que  l'Eiûgle  fe  pref    ceu  plus  de  grâce,  nedonne  point  du  coude  à 
che  en  vn  lieu  pour  quelque  peu  de  tcpMnais     fcscôpagnons  pours'auacer  par  deflus  eux,& 
ô  ladoârinedjit  continuer  iufques  en  la  fin.     pour  les  mettre  en  arrière:  mais  pluftoft  qu'il 
Et  pourqnoy?Car  nous  ne  ferons  pas  amenez     leur  tédela  main,  qu'il  leur  aide  &  les  auâce. 
àlaperfeûion  incontinent:  &  puis  il  faut  que     Ceux  qui  font  inférieurs ,  &  qui  n'ont  point 
ce  qui  a  efté  vnc  fais  drellc  foit  entretenu  iuf    telle  authonté  ,  qu'ils  regardent  d'enfuiure 
flues  au  bout.  Et  ainfi  nous  auons  befoin  que     tellement  les  autres,  qu'ils  fe  conioignent  en 
par  tout  il  y  ait  des  Pafteurs,  ou  des  Preftres     bonne  concorde  auec  eux  :  Si  quoy  qu'il  en 
(lui  fuccedent  l'vn  à  l'autre, &  que  ceux-là  c5     foit  que  l'édifice  fe  parface,&  qu'ils  feruent  à 
ferment  toufiours  les  fidèles ,  &  qu'ils  les  fa-    Dieu  fans  enuie.fans  émulation, fans  deftrui- 
cent  profiter  en  l'efcole  de  noftre  Seigneur     re  l'ordre  que  Dieu  a  inftitué ,  &  que  ce  foit 
lefus  Chrift,  &  qu'ils  feruent  aux  grans  Se  aux     vn  vray  tefmoignage  comme  ils  font  de  fes 
petis,&  aux  vieux  &  aux  ieuncs,  &  qu'ils  tra-    enfans.   A  l'oppofite  on  voit  quels  font  ceux 
«aillent  tant  qu'il  leur  fera  pofsible,   que  la     qui  ne  demandent  qu'à  renuerfer  fauthorité 
vérité  de  Dieu  demeure,  Se  qu'elle  continue,     des  prefchenrs.  Il  eft  vray  que  fi  les  homme» 
&  que  de  miin  en  main  ils  la  facent  venir  iuf    fous  ombre  d'eftre  Pafteurs  de  l'Egl'fè  ,  four 
«ues  à  ceux  q  li  doiiiétviure  après  nous. Main     ombre  d'aiioir  la  charge  de  difpenfcr  la  do- 
lenant  puis  que  nous  auons  cela,  regardons  à     rtrinede  falut.fe  vouloycnt  eleuer,  qu'il  faut 
ce  mot  que  fainft  Paul  met  ici:If  t'aylaifféa-    bien  relifter  à  vne  telle  tyrannie:  mais  quand 
fnt^tt  t»  corritres  &  par.ichenei  ht  chops  rf't     il  y  en  a  qui  ne  demâdf  ntque  de  faire  vilipert 
dtfailUnt  &  reflent  à  accomplr  incores.  Ce     der  ceux  qui  anoncent  la  parole  de  D'eu  ,  3- 
«lot  dont  vfcfainft  Paul ,  fignifie  propremét    fin  que  ladodrine  ne  foit  rcceué  qu'à  dcmiv 
Correftion,mais  ilfignifie  aufsi  Acheuer.  Or    qu'on  s'en  moque  tant  q^i'on  voudia.  quand, 
il  n'entédpas  que  Titc  deult  corriger  en  cha    di-ie,  cela  aduicnt ,  tenons  pour  fijppoftîd* 
séant  toutes  les  chofcs  que  fainft  Paul  auoit     Satan  tous  ceux  qui  t'effoi  cent  de  mettre  au» 
jaifci  dés  le  commencement ,  &  qui  eftoyent    C  les  Pafteurs  de  l'Eglife  en  opprobre  Si  en 
bonnes  &fainftes,  &  n'y  auoit  que  redire:    diffame.  Comme  nous  auons  veu  les  combats 
«lais  d'autant  qu'il  auoit  coiiimencé  l'édifice,     qui  ont  efté  ainfi  contre  ce  mal-heureux  hc- 
il  le  faloit  pourfuiurc  &  auanccr.  Ainlî  donc    retrquc  ,  oui  ne  demandoit  qu'à  toMt  reniier- 
'ila  faluquc  Titecorrigeaft  ce  qui  defaillo  t     fer  &  mettre  me  confufion  horrible  c^tre 
«ncoies,  mais  fans  aucun  changement,  c'eft  à     nous.  Et  ceux  qui  ont  efté  mtfcz  paimi  vne 
iire,qu'ilBereflucrfaftpasce  «jucfainûPaul    telle  vermine,  en  dcuroyentrougir  tout  le 

temps 


SVR    L'EPIST.   ATITÉ. 


?îî 


tempî  ie  leur  vie  :  car  ils  ont  eombatu  contre 
Dieu  entant  qu'en  eux  eftoif.  ils  fc  font  mon- 
ftrez  ennemis  de  l'Eglife,  quand  ils  ont  fauo- 
life  à  ce  malheureux  qui  a  tafché  d'alluinei  i- 
ci  vn  feu  internai,  qu'il  n'euil  pas  efté  facile  à 
cileindrc.Oril  ne  no'  faut  point  auoir  efgard 
icesgens-lairnai";  plulloft  fuyuons l'exemple 
de  fainû  Paul,  c'eft  alçanoir ,  qu'entant  qu'en 
nous  fera  ,  nous  talcliions  que  la  parole  de 
Dieu  foit  receue  en  toute  reuerence.que  nous 
preftions  faueur  à  ceux  qui  l'anoncent  fide- 
lement>que  nous  aduilîons  qu'en  toute  liber- 
té ils  puilTent  faire  leur  deuoir ,  &  qu'ils 
foyent  armez  non  point  du  glaïue  matériel, 
mais  de  ce  glaiue  de  la  parole  de  Dieu  ,  afin 
que  quand  ils  parleront  au  nom  de  Dieu ,  on 
les  efcoute  ,  &  qu'il  n'y  ait  point  de  rébel- 
lion ,  &  que  Icv  chofes  ne  foyent  point  trou- 
blees:inais  qu'il  yait  vn  tel  ordre ,  que  la  bri- 
de ne  f^it  point  lettee  fur  le  col ,  pour  dire 
qu'vn  chacun  fera  à  fa  fantalîe ,  mais  que  nous 
eltans  .rangez  au  ioug  de  Dieu  ,  nous-nous 
gardions  de  toute  confuûon  .  Et  voila  pour- 
quoy  il  faut  prattiquer  ce  palTage.quad  fainft 
Paul  déclare  cjit'ila  Utfj'é  Titeen  Vide  de  Crè- 
te.Et  nous  voyons  que  ce  faind  Apoftre  ,  com 
bien  qu'il  fuft  excellent  par  deflus  les  autres, 
n'a  pas  toutesfois  porté  enuie  à  Tite  ,  qui  e- 
ftoit  beaucoup  inférieur  :  &  toutesfois  nous 
voyons  qu'il  luy  dit,  \dnife  de  corriger  ce  qui 
refle  encores.Ctux  qui  font  menez  d'ambition 
Toudroyenc  tftre  reputez  habiles  gens  du  pie 
mier  lour.ils  voudroyent  efti  e  en  telle  reputa 
tion  qu'on  penfallqu'ilt  fefuflènt  acquittez  lî 
fidèlement,  qu'il  n'y  euft  plus  que  redire.  Or 
au  contraire, quand  nous  auon^  mis  peire  tout 
le' temps  de  noflre  vie  d'édifier  l'Eglife  de 
Dieu,  encores  n'en  ferons-nous  point  venus 
à  bout  du  tout.Ccgnoiffons  donc  qu'il  ne  nous 
faut  point  tellement  pri.  fumer  de  nollre  indu 
ftrie,  ni  de  nos  vertus,  que  ccluy  qui  eft  doué 
déplus  amples  grâces  puifle  incontinent  a- 
uoir  édifié  l'Eglife  de  Dieu  en  perfcdion: 
mais  il  faut  que  nous  aidions  l'vn  à  l'autre, 
que  celuy  qui  eft  le  plus  auancé  cognoifleqiic 
il  ne  peut  pas  tout,&:  qu'il  plie  les  efpaules  ,& 
qu'il  demande  fecours  de  ceux  que  Dieu  aura 
ordonnez,  &  qu'il  foit  bienaife  que  les  autres 
s'auancent ,  moyennant  que  tous  tendent  de 
feruir  à  Dieu,  &  d'auancer  le  règne  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift .  Or  fi  nous  penfons 
bien  à  nous,  il  y  aura  toufiours  occafion  de 
gémir, d'autant  que  nous  forames  bien  loin 
de  nous  acquitter  de  noftre  deuoir .  Et  ceux 
qui  fefont  à  croire  ceci  ou  cela,  pour  dire. 
Voici  vne  Eglife  tant  bien  reformée  qu'il  ne 
s'en  faut  rien,  s'abufcnt  :  car  s'ils  fçaioyent 
ue  c'ell  de  refcimiation,  ils  n'auioyent  gar- 
e  Je  penfc-r  qu'il  n'y  eufcque  redire.Carquel 
que  peine  nu'on  puifle  mettre  à  régler  &  or- 
donner les  chofes,  c'eft  beaucoup  quand  ona 
feulement  ommencé ,  qu'on  fuit  quelque 
train  coounun  :  nais  de  païuenir  à  la  perfe- 


l 


ôion  qui  feroit  rcqnifc ,  notJî  eti  (ommes  biea 
loin  .  Etaufsi  il  nous  doit  fouuenirde  ce  que 
dit  ûina  Paul  en  l'autre  partage,  quand  il  du  jy^;^; 
qu'il  s'efforce  de  paruenir  à  fon  but,  combien  ,. 
qu'il  euft  fait  quatre  ou  cinq  cottrfes ,  voire  4c 
qu'il  fe  ftift  efuertuéiufquesaubout,(î  cft-ce 
qu'cncores  n'eft-il  point  paruenu  :  te  m'e- 
ften  (*dit-il  )  au  long  &  au  large,  mais  enco- 
res  n'eft-ce  rien  de  tout  ce  que  i'ay  fait,  itif- 
quesà  q  ce  Dieu  aittnis  fin  àmon  labeur.c'ertr 
à  dire,  qu'il  m'ait  retiré  de  ce  monde .  Car  de 
faift,  il  ne  faut  point  faire  noftre  conte  de  vi- 
ure  ici  à  noftre-aife,quând  nous  aurons  trauail 
lé  pour  vn  temps, mais  il  faut  que  nous  foyons 
feiuiteurs  de  Dieu  à  celle  condition  d'y  viure 
&  mourir  pour  édifier  fon  Eglife  .Or  pourcc 
que  le  temps  me  porte  point  que  ceci  fe  de- 
duife  plus  à  plein  ,  adulions  d'appliquer  ceci 
à  noftre  doûrinerc'eftquc  comme  fainft  Paul 
en  parlant  ici  de  l'Eglife  de  Dieu  ,  dit  que  fou 
labeur  eft  imparfait ,  qu'il  monftre  qu'vn  feul 
homme  ne  peut  pas  fuffire  à  vne  telle  œuure», 
mais  qu'il  faut  qu'il  foit  aidé  non  feulement 
par  deux  ou  par  trois,  mais  qu'il  y  ait  vne  cou 
tinuation  de  tous  ceux  qui  feront  appelez» 
ccfte  charge  ,  &  que  de  main  en  main  l'ouura- 
ge  s'auance  &  s'augmenteinue  quand  nous  au- 
rons procuré  tout  le  temps  de  noftre  vie  que 
l'Eglife  foit  édifiée  ,&  que  Dieu  nous  aura 
fait  la  grâce  que  noftre  labeur  ait  profité,  que 
noBs  tafchions  aufsi  'qu'après  noftre  tréfpas 
la  befjpgnene  foit  point  delailTee,  mais  qu'il 
y  ait  toulîours  gens  qui  l'auancent,  &  qui  taf- 
chentde  l'amènera  fa  perfeâion:  &"  que  pour 
ce  faire  nous  ne  mefprifions  point  les  moyens 
ôc  aides  qu'il  nous  a  inftituees.  Car  comme  il 
cognoift  bien  noftre  fragilité  &  rudefle,  aufsè 
fçait-il  bien  y  remédier  .  Il  ne  faut  point 
donc  que  nous  perdions  coiiiage  quand  nous 
voyons  que  du  premier  coup  nous  ne  venons 
pasàtelleperfeilion  qu'il  feroit  requis  :  que 
nous  re  laifsions  pas  toutesfois  d'y  tendre  de 
vnealFetlionalaigre,  voyans  que  noftre  Dieu 
nous  fupporte,&  qu'il  nous  aide  en  toutes 
fortes  pour  nous  attirer  à  foy  .  Et  iedi  ceci 
pource  que  nous  auons  à  receuoir  la  fainfte 
Cène  Dimanche  prochain  .  Or  il  n'eft  point 
qucftion  de  venir  à  cefte  fainûe  table  à  la  vo- 
lée, &  de  nous  ingérer  là  comme  vn  pourceau 
viendra  ietter  le^roin  en  fon  auge  :  vn  tel  fa- 
crilege  ne  demeureroit  point  impuni  .Mais 
toutes'fois  «cquaiiies  que  la  fainût  Cène  nous 
cH  jppreftee,  eognoiflons  que  nous  femmes 
admoneftez  de  nos  foiblefles  ,  &  que  Dieu 
veut  fubuenir  à  neftrc  infirm:té.ll  eft  vray  que 
cela  fe  fait  quand  l'Euangile  nous  eft  prefché 
tous  les  iours  :  par  prières  &  oraifons  nous 
faifons  le  mefmc  :  quand  nous  liforts  en  no- 
ftre maifon,  ou  que  nous  oyons  quelque  pro- 
pos à  iioftre  falut.  Dieu  toufiours  nous  mon- 
ftre en  cela  qu'il  nous  fupporte  :  mais  cepen- 
dant la  Cène  encores  nous  eft  vn  tefmoi- 
gnage  /fccial  ^ue  bous  fomiaes  aidez  de  no- 

Xx.iiii. 


53^ 


SERMON     un. 


lire  Dieu ,  quand  nous  fouîmes  comme  au  mi- 
lieu du  chemin,  que  c'eft  pour  nous  fiire  paf- 
fer  outre, pour  tendre  touiîours  à  noftre  Dieu. 
Notons  aufsi  que  la  Cène  eft  pour  corriger  & 
pouracheucr  les  chofes  qui  défaillent  enco- 
res  .  Car  ce  ne  feroit  rien  de  commencer  en 
nous  ,  linon  que  Dieu  cencinuafl  à  nous  l'aire 
fentir  fa  grâce  :  &nous  enauons  vne  bonne 
certitude  en  la  Cène  .  Malheur  donc  fur  nous 
quand  nous  viendrons  polluer  ceftc  lâinfte^ta- 
ble  qui  nouj'eft  donnée  pour  aide  de  noftre  fa 
lut  .  £t  ainii  aduifons  d'eftre  bien  fondez  en 
foy,&  en  repcnt3ce,&  en  chanté,  pour  y  com 
muniquer.'Et  puis  que  nous  fommes  affez  con 
uaincus  de  noftre  débilité  &  foibleflè  ,  &  que 
nous  n'auons  point  tout  ce  qui  feroit  requis, 
que  nous  demandions  à  Dieu  qu'il  nous  forti- 
fie .qu'il  nous  aduance,  &  qu'il  nous  augmente 
la  foy  ,  &  Tefperance  que  nous  auons  i  la  vie 
celefte,  &  que  nous  y  tendions  de  tont  noftre 
pouuoir,  qu'vn  chacun  s'efForce  &  s'efuettue: 
non  pas  que  nous  le  puifsions  faire  de  nouf- 
iiiefmes,mais  demandons  à  Dieu  la  vertu,  &  il 
ne  nous  defaudra  point. Voila  doc  ce  que  nous 


auons  à  retenir  en  ccpalIàge.Et  quenousad- 
uilîons  d'eftre  tellement  edifiez,qu'vn  chacun 
procure  l'aduancement  de  Ces  prochains, & 
que  fans  porter  enuie  l'vn  à  l'autre,  nous  taf- 
chions  tous  d'eftreaduancez  félon  Dieu  &  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift,  eftans  conioints  de 
ce  lien  facré  Se  infeparable  qu'il  a  dedié  entre 
nous,quand  il  nous  a  appelez  pour  eftre  mem- 
bres de  fon  corps,afin  qu'il  fou  ferui  &  hono- 
ré de  nous,  &  qu'en  la  fin  nous  foyons  héri- 
tiers de  fa  gloire  celefte  auec  luy. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  nolère  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir,&  que  ce  foit  toufîours  pour  nous  ame- 
ner à  vn  vray  defplaifir  de  nosoiFenfes,  & 
pour  nous  faire  aimer  là  iulhce,&  pour  y  afpi 
rer,  iufqu'à  ce  qu'elle  règne  pleinemeilt  ea 
nous ,  &  que  nous  foyons  reformez  à  icelle, 
qui  fera  quand  nous  ferons  defpouillez  de  nos 
imperfcaions,pournous  reueftit  de  fa  gloire. 
Ainfî  nous  dirons  tous,  Dieu  tout-puillànt, 
Père  celefte,&c. 


Qj/ATRIEME     SERMON      SVR     LE 

PREMIER    CHAPITRE. 

5  La  cdufe  pourquoy  ie  tay  laijfé  en  Crète, c'efi  afin  que  tu  ache- 
ues  de  corriger  les  chojcs  qui  défaillent ,  ^  que  tu  conSlitues  des  Pre- 
jlrespar  les  y>dles,commc  iete  Fauqye  ordonné. 

6  Si  aucun  ejl  fans  crimcy  mari  d\ne feule  femme ,  ayant  enfant 
fidèles, non  accufez  de  dif[olution,ou  incorrigihles,qudfoit  eleu. 

fi  que  c'eft  l'édifice  commun  de  toute  l'Eglifi?,' 
&  qu'vn  chacun  s'y  doit  employer-car  entant 
qu'en  nous  eft,  nous  deuons  amener  les  cho- 
fes plus  outre.  Et  ceux  qui  fe  plaifent  à  l'eftat 
prefent,s'abufent  par  trop.c'e ft  figne  qu'ils  ne 
ont  pas  encores  regardé  à  quoy  Dieu  les  ap- 
pelle, &  qu'ils  n'ont  pas  bien  examiné  ce  qui 
eft  en  eux  :  car  nous  fommes  bien  loin  du  but 
il  nous  faut  afpirer  .  Et  ainiî  tendons-y  tant 
qu'il  nous  fera  pofsible  ,  &  penfons  bien  à  ce 
qui  nous  défaut. Quand  Dieu  nous  aura  fait  la 
grâce  que  fa  Parole  nous  fera  purement  a- 
noncee  ,  qu'il  y  aura  quelque  ordre  paflàble 
entre  nous,aduifons  s'il  n'y  a  pas  encores  à  rc 
dire:  nous  trouuerons  que  ce  n'eft  ianiais  fait. 
Or  cela  ne  nous  doit  point  amoindrir  le  cou- 
rage,mais  pliiftoft  il  nous  doit  picquer  &  foli- 
citer  à  faire  ce  que  nous  dit  ici  fainâ:  Paul,  de 
venir  à  cefte  addreflc.  Mais  quoy?  Nous  /oy- 
ons fi  toft  que  Dieu  aura  commencé  de  baftir 
fon  Eglifc  au  milieu  de  nous,  que  les  hommes 
ne  demandent  qu'à  tout  ruiner. Q^ioy  qu'il  en 
foit.qui  eft-ce  qui  penfe  à  ce  qui  nous  défaut?' 
Mais  au  contraire,  nous  ne  ^ouuons  pas  fouf- 

fiir 


Ous  auons  commencé  i  mô 
ftrer  ce  matin  ,  quec'eft  vn 
ouurage  bien  difficile  d'edi 
fierl'Eglifede  Dieu,  &  que 
on  n'en  pourroit   venir  à 
bout  en  vn  iour,ni  en  peu  de 
temps  .  Amfi  il  faut  pour- 
ftiyure:*  la  vie  d'vn  homme  ne  fuffiroit  point 
à  cela.  Vray  eft  que  Dieu  pourroit  amener  les 
liens  à  perfeftion  quand  bon  luy  fembleroit: 
mais  il  nous  veut  mener  par  degrez  &  com- 
jas,&  le  tout  afin  de  nous  humilier,  &  que  no* 
cognoiûions  iournelleii>ci  nos  pourete^  pour 
gcmii  fous  icelles,  &  qu'en  cheminant  pai  et 
inonde  nous  ayons  toufiours  recours  àluy,fça 
chans  que  ce  qu'il  a  commencé  en  nous  n'eft 
ïicn  ,  iufques  à  ce  qu'il  y  mette  la  dernière 
main, comme  on  dit.Etmefmes  d'autant  qu'vn 
chacun  de  nous  doit  eÛre  temple  du  faintl  E- 
fprit,  trauaillons  en  ccft  édifice  .  Car  comme 
Dieu  a  mis  ceux  qu'il  a  appelez  pour  prefchcr 
fa  Parole,  comme  leJ  maçous  pour  édifier  fon 
temple  :  aufsi  il  veut  qu'vn  chacun  y  mette  la 
■Min  ca  foo  cndToii.£(  ce^ andanc  notons  awf 


s  VR    L'EP  I  S  T.    A    TI  T  E. 


S37 


l 


frir  l'eftat  tel  qu'il  fera,  c'cft  à  dire  bien  débi- 
le,que  chacun  fe  plaindra  que  le  ioug  de  lefus 
Chnftluy  eft  troppefant,&  fi  nous  auôs  quel 
que  police  f  combien  que  ce  ne  foie  rien)fi  e/l 
ce  qu'on-ne  la  peut  porter  :  Ho,  voila,  fi  telle 
rigueur  dure,  que  fera -ce  ?  Si  on  fait  ftmblant 
de  reprimer  les  blafphemes,Ho,il  fe  faut  gar- 
der de  trop  grande  rigueur  :  car  à  qui  eft-ce 
u'il  n'aduiendra  ?  Si  on  parle  des  autres  dif- 
"olu  tiens,  Et  comment? Il  ne  fera  plus  donc  li- 
cite de  fe  refiouir.  Quand  les  danfcs  &  autres 
ordures  feront  corrigées,  chacun  en  murmu- 
re. S'il  y  a  des  lois  aufsi  bien  pour  tenir  bri- 
de, i  ce  qu'vn  chacun  ne  fe  desborde  point  à 
fonappetit,  cela  nous  fembleeftre  trop  dur. 
£tpourquoy  ?  Par  faute  d'auoir  confideré  ce 
que  fainci  Paul  dit  ici. Combien  qu'il  eult  tra- 
uaillé  en  Crete,&  qu'il  eult  ordonné  vne  for- 
me d'Eglifc,  félon  la  règle  de  nollre  Seigneur 
lefus  Chrift,  encorcs  n'auoit-il  peu  amener  le 
règne  du  Fils  de  Dieu  à  fa  perfeftion.il  faloit 
dôc  que  cela  fe  feift  par  fuccefsion  de  temps. 
£t  aujourd'huy  comment  pourrions-nous  fur 
monter  fainft  Paul  ?  Si  nous  cuidons  eftre 
mieux  difpofezireceuoir  vne  police  parfaite 
&  entiere.que  n'ont  efté  ceux  de  ce  temps-la, 
c'eft  vn  abus.  Etainfi  apprenons  de  nous  def- 
plaire  ,  &  que  cela  nous  picque  pour  cercher 
toufîours  1  aduancement  du  règne  de  noftr'e 
Seigneur  lefus  Chrift  :  Se  voyans  que  l'ediEce 
n'eil  point  parfait ,  que  nous  mettions  peine, 
entant  qu'en  nous  fera,  de  toufîours  l'accom- 
plir .  Si  nous  auons  quelque  maifon,  quand  la 
pluye  donneradedans,  on  craindra  que  tout 
ne  fe  pourriffe  ,  on  la  recouurira  :  s'il  y  a  vne 
muraille  qui  menace  ruine,  on  penfera  delà 
réparer.  Or  y  a-il  maifon  en  ce  monde  fi  pre- 
cieufe  ,  que  le  Temple  facré  de  Dieu  ?  E:  il 
nous  fait  ceft  honneur  qu'il  veut  habiter  en 
chacun  de  nous  parfonfainft  Efprit:  &  puis  il 
veut  que  nous  eftansconioints  enfemble  Coy~ 
«ns  pierres  viues ,  pour  feruir  à  ce  baitiment 
fpirituel ,  afin  que  nous  luy  offrions  facrifices 
au  milieu  de  nous,  &  qu'il  foit  là  adoré ,  &  que 
ion  Nom  y  foit  inuoqué .  Nous  verrons  la 
pluye  qui  découlera  dedans.nous  verrons  les 
creuafles,  nous  verrons  les  ruines  tontes  ma- 
nifeftes ,  &  nous  ne  penferons  point  à  entre- 
tenir vne  chofe  de  C  grand  prix  &  dignité? 
Qjjand  les  pourceaux  entreroyct  en  la  cham 
bre  d'vn  feigncur,  n'y  mettroit-on  pas  incan 
tinent  ordre, qu'vne  chofe  fi  vileine  ne  conti- 
ruaft  ^lus  ?  Et  nous  verrons  les  chien'  &  1rs 
pourceaux  fouiller  l'Eglife  de  Dieu  ,  &  y  ap- 
porter leurs  infeâions ,  nous  verrons  vne  li- 
cence desbordee  par  laquelle  le  nom  de  Dieu 
fera  en  opprobre,  fon  Egtife  fera  vilipendée, 
Anuln'y  penfra?  Mefmes  on  voudra  qu'vne 
telle  confiifîon  foit  difiimulcc.  &  vne  telle  e- 
normité  .Brief ,  on  voit  que  la  plus  grand* 
part  s'efforce  .î mettre  en  ruine  &confufîon 
tout  ce  qui  aura  eltéaduancé.Q.ua'^1 :1  y  aura 
vn  feiuJieur  de  Dieu  qui  preichera  fidèle- 


ment la  Parole,  qui  aura  zele  de  bien  guider  le 
peuple  ,  &  qu'il  y  aura  quelque  petit  nombre 
de  gens  femblables  à  luy,  qui'  tafchent  de  luy 
aider,  la  plus  grande  multitude  s'efforcera  de 
ruiner  tout  :  qne  quand  aiiec  grand'  peine  & 
difficulté  ceux-là  apporteront  vne  pierre,  les 
autres  en  arracheront  trois  ,Sc  empefcheront 
que  l'édifice  ne  fe  pourfuyue  .  Voila  ce  qu'on 
voit  auiourd'huy  au  monde.  Et  d'autant  plus 
nous  faut-il  employer  hardiment  à  ce  bafti- 
ment  fpirituel  du  temple  de  Dieu, &  que  la 
difficulté  n'empefche  pasque  nousneconti- 
nuyonsen  vn  tel  labeur  :  car  Dieu  nous  fera 
la  grâce  d'en  venir  à  bout ,  moyennant  que 
nous  ne  foyons  point  oififs  ne  nonchalans, 
mais  c'cfl  bien  raifon  que  nous-nous  y  effor- 
cions, comme  l'exemple  nous  en  ell  ici  donné 
par  fainâ  Paul.Et  notons  fur  tout  quand  il  dit 
cf  5»<  rf/îf.qu'vn  chacun  regarde  à  foy,  &  que 
il  efpluchc  ce  qui  luy  défaut ,  &  nous  trouue- 
rons  qu'cncores  nous  fommes  occupez  en 
beaucoup  de  vices,  tellement  que  nous  défail- 
lons du  toutànoftredeuoir.  Et  puis  il  y  a  vne 
telle  parcfle.que  nous  ne  trauaillons  pas  de  la. 
centième  partie  comme  il  feroit  requis  :  au 
lieu  que  nous  deurions  méditer  la  vie  cclefte, 
&  palier  par  ce  monde  ,  captiuans  toutes  nos 
mcfchantesaffeûions  ,fansy  eftre  plus  rete- 
nus.a  grand'  peine  pouuons-nous  auoir  quel- 
que penfeeau  ciel  qui  ne  pafre&  s'efcouletan 
toft.Biicfnous  voyons  vne  froidure  telle  que 
glace,  quand  il  eft  queftion  de  tendre  à  Dieu, 
&  de  cercher  la  vie  à  laquelle  il  nous  appel- 
le. Or  cependant  nous  auons  nos  affeftions  Si. 
cupiditfz  bouillantes  qui  nous  tranfportent. 
Et  pourtant ,  quand  nous  aurons  apperceu  en 
ce  monde  que  tant  de  chofes  nous  défaillent, 
que  nous  foyons  tant  plus  affeûionnczà  nous 
corriger  .  Et  quand  nous  aurons  fait  cela ,  e- 
ftendons  noftre  veue  pins  loin  ,  regardons  à 
l'ellat  public,  &  alors  nous  verrons  les  blaf— 
phemes  d'vn  cofté,  les  paillardifes  de  l'autre, 
les  diflolutions  &  intéperances,  &  autres  fcan 
dales  &  infeâions  :  ceIa(di-ie)nous  doit  bien 
refueiller.afin  que  nous  ne  foyons  point  fi  ou— 
trecuidez  d'imaginer  qu'il  y  ait  vne  perfe- 
ftion  telle  en  nous, qu'il  n'y  raille  plus  mettre 
la  main  :  mais  aucontraire  que  cela  nous  foli— 
cite,  afin  que  nous  procurions  que  le  bien  s'a— 
uance,&  qu'il  y  ait  meilleure  police  que  nous 
ne  la  voyons  pas  auiourd'huy  ,  &que  déplus 
en  plus  nous  approchions  de  Dieu,  &  de  la  rè- 
gle &  pureté  entière  ,  laquelle  il  nous  com- 
mande par  fa  P.irole.  Voila  donc  ce  que  nous 
auon-,  à  retenir  .  Or  cependant  notons  aufsi 
que  l'Euangile  ne  fe  peut  maintenir  fans  le 
moyen  que  fainft  Paul  adioufle  ,  QjjIiI  y  aie 
des  Paftcurs  eflablis  en  chacun  lieu.  Car  le 
moyen  de  maintenir  l'Eghfc  ,  c'efila  prédi- 
cation, comme  nous  auons  monftré  ce  matin 
oue  c'eft  la  femcnce  incorruptible  par  la- 
cuellenous  fommes  engerdrez  à  Dieu  ,  c'eû 
le  hiàdes  petis  €nfans,c'eft  la  pafture  de* 

Yy^. 


Çî« 


SER  M  O 


grins  :  8:  ainfi  il  faut  que  TEglife  perifle  ,  & 
qiiVlles'en  aille  en  ruine,  liuon  qu'elle  Toit 
tnsintenue  par  la  prédication  de  la  parole  de 
Dieu.  Voila  pourquoy  fainft  Paul  veut  qu'on 
eftablifle  des  Anciens,  ou  de?  Preftros,  qtii 
aycnt  la  charge  detoufiours  mener  le  peuple 
à  Dieu ,  Se  le  tenir  Ibu»  fon  obeiflance  .  Non 
pas  d«s  Preftres  tels  qu'ona  imaginé  en  la  Pa 
pauté  :  carceftcpreftrife-la  eftvne  infedion 
pleine  de  facrilege,  qu'il  n'eft  queftion  là  que 
de  renuerfcr  tout  oidre:miis  ce  font  des  Prc- 
fties  Chreftiens ,  qui  ont  la  charge  d'anoncer 
l'Euangile  ,&  non  point  pour  iacrificr  lefus 
Chrift ,  comme  ces  diables  vfurpent  cefte  au- 
thorité-Ia  .difans  qu''ils  peuuent  ofFrir  lefus 
Chrift  a  Dieu  ion  Père  .  Or  cela  n'a  rien  de 
commun  auec  la  Preftrife  qui  nous  eft  ici  mi- 
fe  en  auant  :  car  faind  Paul  montrera  puis  a- 
pres,  que  les  Preftres  dont  il  parle,  font  les 
Miniftres,  Se  les  Pafteurs  d'Eglife  .  Mais  cela 
fera  traitté  encores  plus  amplement  en  Ton 
lieu  :  il  fuflît  pour  le  prefent  de  noter  que  fi 
Bons  délirons  quePEglifedeDieu  foiten  fon 
entier,  qu'il  nous  faut  auoir  gens  qoi  nous  a- 
jionccnt  fa  Parole,  &  non  pas  ceux  qui  vou- 
droyct  abolir  tout  ordre  pour  leurambition, 
qu'ils  voudroyent  auoir  coupé  la  gorge  à  vn 
homme  :  car  il  n'y  a  nulle  autre  vie  deuant 
Dieu,  fînon  celle  que  nous  auonspar  la  foy, 
ainlî  que  nous  auons  declaréce  matin. Et  pour 
tant  inlîftons  là  defîus ,  &  demandons  quand 
Dieu  nous  enuoye  fn  Parole,  qu'il  nous  fufci- 
te  quant  &  quant  des  hommes  lefqucls  nous 
en  foyent  vrais  miniftres  .  Or  maintenant 
fainâ  Paul  adioufte  ,  tefq^els  il  faut  choifîr: 
comme  ilvfede  ccfte  préface  à  Timothee, 
Que  eeliiyqui  defire  d'eftre  Eucfque,  prend 
vne  charçe  excellente, que  cela  n'eft  point  viil 
gaire, qu'il  n'eft  point  ici  queftionde  fe  iouer: 
comme  il  dit  en  vn  autre  lieu  ,  (^ue  celuy  qui 
9{te  1.3.  eft  Pafteur  en  l'Eglife.eft  comme maiftre  d'ho 
ftel  en  lamaifon  de  Dieu,qu'ila  legounerne- 
ment  des  âmes.  Et  ainfi  il  ne  faut  point  qu'on 
y  aille  à  la  volée, &  que  le  premier  qui  viendra 
loit  aduancé  ,  mai»  qu'on  difcerne  &  qu'on 
thoififfe  tellement,  que  nul  n'occupe  la  place 
Hnon  qu'il  foit  propre  pour  édifier  l'Eglife 
ie  Dieu, S:  pour  fatisfaire  à  vn  tel  office. Suy- 
oant  cela  il  eft  dit,  qttt  aux  qu'on  élira  doyufiit 
tfhe  ftns  crime.Or  parce  mot  (ainli  qu'il  a  e- 
fté  déclaré  en  l'Epiftre  première  àTimothee) 
il  n'entend  pas  que  les  Pafteurs  foyent  du 
tout  fans  vices  ,  car  il  feroit  impofsible  d'en 
trouuer  .  Les  Sacrificateurs  du  temps  de  la 
Loy,  eftoyent  figure  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift,  entrans  au  fauftuaire  pour  raoyenner 
entre  Dieu  &  les  hommes,  ils  faifoyent  la  rc- 
«onciliatioH  Si  appointement  :  &  toutesfois  (î 
eft-ce  qu'en  premier  lieu  il  faloit  qu'ils  fe  c5 
fedalTent  poures  pechcurs,&  l'eftoyét  à  la  vé- 
rité.Ainfi  l'Eglife  feroit  pleinement  defpouil 
1  -ede  dotlcur$,s'il  faloit  en  cercher  qui  n'euf 
fentaucunc  tache  ne  macule  .  Mais  il  y  a  des 


N    I  1 1  I. 

vice»  d'infirmité, il  y  a  des  tIcc»  de  crime  »UT 
hommes.On  pourra  bien  trouuer  gens  qui  fer 
uiront  à  Dieu,  &  n'auront  point  de  tache  en 
leur  V  ic,qa'on  leur  puifle  reprocher,Tu  es  vn 
larron,  ou  vn  paillard,  ou  vn  yurongne,  ou  vn 
blafphemateur  ,  ou  chofes  femblables,.  Il  y 
pourra  donc  auoir  des  infirraitez,  comme  il  Ce 
en  trouuera  en  tous  hommes.  Mais  cependant 
il  n'y  a  point  de  tache  qui  cmpefche  q  celuy 
qui  fera  appelé  àceftcftat,  ne  férue  loyaumét 
à  Dieu,  qu'il  n'ait  authoritéde  reprendre  & 
rcdarguer  les  vices.  Voila  ce  que  fainft  Paul  a 
entendu  en  ce  partage.  Or  ce  n'eft  point  fans 
caufe  qu'il  veut  qu'il  n'y  ait  point  détache 
fur  ceux  qui  prefchent  la  parole  de  Dieu.  Car 
que  fera-ce  quand  vn  homme  fera  entaché  de 
quelque  vice  notable  pour  le  rendre  infâme? 
Pourra-il  ouurir  la  bouche  pour  redarguer 
les  delinqiians  ?  Il  n'y  aura  nulle  liberté .  Car 
(■  comme  dit  fainci  Paul  en  l'autre  paflàge  )  il  i.Tim.i. 
faut  que  nous  foyons  de  bonne  confcience  Se  i9,0'}.p 
purepouranoncerla  vérité,  &  enfeigiier  libre 
ment  &  fans  contradiûion  .  C'eft  donc  la  fin 
où  il  no'  faut  rapporter  ce  que  dit  fainû  Paul, 
afçauoir  que  la  parole  de  Dieu  ne  foit  point 
amoindrie  par  la  faute  de  celuy  qui  la  porte, 
&  qu'on  ne  dife  pas, Et  qui  eft  ceftuy-la.'Il  eit 
vray  qu'il  parle  bien  quand  il  eft  en  chaire: 
mais  vn  meneftrieren  fera  bien  autant,  &  ce- 
luy quiioue  vne  farce  pourra  bien  refpondre 
à  fon  perfonnagc:mais  ce  n'eft  que  badiner  ce 
pendant .  Voila  comme  la  parole  de  Dieu  fe- 
roit en  mefpris.Qwnd  vn  home  ne  monftre- 
ra  point  en  fa  vie  que  c'eft  à  bon  efcicnt  qu'il 
parle  ,  afin  d'euiter  vn  tel  iacrilege  ,  afçauoir 
que  lajparolede  Dieu  fou  foulleeau  pied  en- 
tre nous ,  que  celuy  qui  eft  miniftre  pour  l'a- 
noncer,  foit  pur  de  tout  crime.dit  faind  Paul. 
Or  il  eft  vray  que  les  feruiteurs  de  Dieu  ne  fe  a.Cjf.tf» 
ront  iamais  fans  blafme:conime  il  dit  mefmes  S* 
qu'il  a  falu  qu'il  ait  cheminé  par  infamie  & 
opprobre.  Il  eft  vray  que  fainft  Paul  en  toute 
fa  vie  s'eltoit  porté  fi  vertueufement  qu'il  n'y 
auoit  que  redire  en  luy ,  voire  deuant  que  ve- 
nir à  la  foy  de  lefus  Chrift:  tellement  qu'il  vt 
uoic  fans  reproche, qu'il  eftoit  vn  miroir  &  v- 
ne  perle  de  toute  faindeté  .  Vray  eft  qu'il  ne 
fçauoit  qu'il  faifoit,  car  il  n'eftoit  point  cnco 
resgouuerné  par  l'El'prit  de  Dieu  :  mais  ila- 
uoit  vne  vie  fi  honefte,  qu'on  ne  luy  euft  fceu 
rien  reprocher.  Et  cependant  il  dit  qu'il  a  é- 
fté  monftré  audoigt,  qu'on  s'eft  mocqué  de 
luy, qu'il  a  efté  en  opprobre,  voire  mefmes  il 
a  efté  accufé  entre  les  fidèles,  qu'il  y  a  eu  vre 
telle  ingratitude, qu'en  fonabfence  on  l'a  blaf 
mé,  on  l'a  charge  de  beaucoup  de  calomnies. 
Ainfi  eneft-il  des  feruiteurs  de  Dieu.  Mais 
quand  fain£l  Paul  requiert  qu'ils  foyent  fans 
crime, il  veut  qu'on  s'cnquicre,  i:  qu'on  rogar 
de  bien  fi  la  vie  d'vn  homme  fora  pure,  &  fans 
blafme,&  qu'il  continue  à  fe  porter  ainfi. Com 
bien  donc  que  nous  ne  puifsions  pas  clorre  la 
bouche  à  tous  mefJiûns,  qu'ils  ne  detradent 

de 


SVRL'EPIST.     ATITE. 


î39 


it  BOUS,  toiitesfois  fi  faut-il  que  nous  foyons 
fans  crime:  cl''autant  qu'il  cft  dit  qu'on  detra- 
ftera  de  nous  comme  de  maltaiLlcurs ,  inais 
nous  ferons  purs  &  innocens.Et  en  quelle  for 
te  ?.  DeuantDieu  nous  aurons  ce  tefmoigna- 
"*  ge,  qu'il  nous  approuue ,  &  que  tout  ce  qu'on 
caquette  de  nous,n'eft  que  nienfonge.  Et  puis 
quand  nous  ferons  admis  &  rcceus,  que  nous 
pourrons  mamtenir  noftre  intégrité.  Si  vn 
homme  s'efForce  toufiours  à  maintenir  fa  bon 
ne  caufe  ,  &  qu''il  fou  prefV  de  rendre  conte 
toutes  fois  &  quantes  qu'on  l'appelle  ,  voila 
comme  ij  fe  montrera  fans  crime  ,  &  qu'il  y 
viendra  franchement ,  ayant  fon,'  gaiant  au 
ciel: comme  aufsi  le  Prophète  Ifaie  nous  rcn- 
uoye  la  ,  quand  les  hommes  font  fi  malins  de 
detraéler  de  nous  fans  raifon  ni  propos. Nous 
voyons  maintenant  à  quoy  fainft  Paul  a  pré- 
tendu ,  quand  il  a  déclaré  qu'il  faloit  choifir 
des  Pafteurs  fans  crime:c'cftafin  que  la  paro- 
le de  Dieu  foit  honorée  comme  elle  le  méri- 
te,&  que  les  vices  des  hommes  ne  foyent 
'  point  caufe  de  la  mettre  en  mefpris&  envi- 

tiiperervoire,  &  afin  que  ceux  qui  ont  la  char- 
ge de  redarguer  les  delinquans,  puiflent  faire 
leur  office  en  toute  liberté  ,  qu'ils  ne  foyent 
point  empefchez  quâd  on  auracefte  réplique 
en  la  bouche,  Et  qui  es-tu  ?  Ne  fçait-on  pas 
bien  comme  tu  as  vefcu?  Ne  fçait-on  pas  bien 
comme  tu  te  gouuernes  ?  Afin  donc  que  les 
niiniftres  de  la  parole  qui  ont  la  charçe  de  cô 
duiie  les  autres ,  ne  foyent  point  empefchez 
de  faire  leur  office ,  fainft  Paul  veut  qu'ils 
foyent  fans  blafme.Il  adioufte  quant  &  quant, 
(luili  foyent  maris  i' yne ftult  ftmme  .  Ce  paf- 
làge  a  elle  mal  entendu  ,  pource  qu'on  ne  re- 
gardoit  point  à  la  necefsité  q  a  efmeu  fainft 
Paul  à  parlerainfi  .  Car  entre  \t!i  luifsilya- 
uoit  vne  telle  corruption  ,  qu'il  leur  fembloit 
qu'il  leur  fuft  licite  d'auoirplufieurs  femmes 
à  l'exemple  des  Patriarches ,  lefqucls  ils  en- 
fiiyuoyent  tropfottenicnt  .  Caries  hommes 
ayans  la  moindre  occafion  qu'on  fçauroit  di- 
re pour  fe  desbaucher,  feront  toufiours  d'vne 
mauuaifecouftumevneloy  .  Et  fi  ce  vice-la  a 
efté  aux  Patriarches ,  en  d'aucuns  tant  fcule- 

M4f  T»     '"^"f  •  Dieu  n'a  pas  voulu  pourtant  qu'il  fuit 
tiré  en  règle, &  en  confequéce. Car  noftre  Sei- 

■    *  gneur  lefus  nous  ramené  à  la  première  inllitu 

tion  du  mariage,  difant,  Aduifez  quelle  a  efté 
la  condition  que  Dieu  a  mife  quand  il  a  con- 
ioint  l'homme  auecla  femme.  Il  n'a  pas  dit 
que  trois  ou  quatre  feront  en  vne  chair ,  mais 
deux.  Les  luifi  Jonc  auoyent  fauffement  taf- 
cfaéd'obferucr  l'exemple  des  fainfts  Patriar- 
ches. Mais  tant  y  a  que  ce  vice  eftoit  trop  re- 
f  eu  entr'eux.  Or  du  côniencement  de  la  Chre 
fhenté,  c'euft  erte  vne  chofe  rude  &  afpre,  de 
contraindre  les  hommes  à  delaifler  les  fem- 
mes qu'ils  auoyétprinfes .  Cela  donc  leur  euft 
efté  trop  rude  de  les  reietter.  Mais  ce  qui  eft 
aucunement  ftipportable  au  peuple  ,  ce  n'eft 
pas  à  dite  qu'il  le  faille  endurer  ea  celuy  qui 


doit  eftre  le  miroir,  &  qui  doit  mop.ftier  le 
chemin  aux  autres. Si  on  me  reproche  quelque 
vice,&:  que  l'allegue.Mon  voifin  vn  tel  en  fait 
bien  autant  .Voire,  mais  mon  voifin  n'a  pas 
cefte  charge  d'enfeigner  les  autres,  &  les  re- 
darguer. Ainfî  donc  il  ne  faut  pas  que  les  nii- 
niftres  de  la  parole  de  Dieu  fe  permettent  v- 
ne  telle  licence, que  ce  qui  fera  enduré  aux  au- 
tres, ils  le  facent  :  mais  qu'ils  cognoiflent  ce 
qui  leur  eft  licite  .  Car  c'eft  bien  raifon  qu'ils 
ayent  vne  bride  plus  eftroite  :  ou  fi  les  aiMres 
ont  vne  bride  ,  qu'elle  foit  double  en   eux. 
Sainft  Paul  donc  voyant  qu'il  y  auoit  vn  mal 
entre  les  Juifs  qui  ne  fe  pouuoit  pas  fi  tofl  cor 
riçer,afçauoir  la  multitude  de  femmes  ,  (c'eft 
qu'vn  homme  fe  donnoit  cefte  licence d'auoir 
deux,  ou  plufieurs  femmes ,  combien  que  cela 
fuft  contre  la  parole  de  Dieu  ,  tellement  que 
l'ayant  vfurpé  par  vne  longue  couftume,ils  en 
faifoyent  vne  loy,qui  ne  fe  pouuoit  pas  ofter 
du  premier  iour,  comme  il  en  aduient  des  vi- 
ces enracinez':)  notamment  il  ne  veut  point 
que  les  Pafteurs,  &:  ceux  qui  ont  la  charge  de 
enfeignêr,  foyent  enueloppez  en  vntelblaf- 
me.qu'ils  ayent  plufieurs  femmes  :  car  cela  ne 
pourroit  eftre  que  d'intempérance .  Et  puis 
quand  vn  home  qui  aura  peruerti  ce  qui  doit 
eftre  le  plus  fainft  de  tous  lescontrafts,&mef 
mes  qui  aura  renuerfc  l'ordre  de  nature, com- 
ment pourra-il  eftre  exempté  de  tout  blaf- 
me  ?  Nous  fçauons  que  le  mariage  cft  comme 
vn  lien  facré.  Et  nature  nous  enfeigneque  la 
multitude  des  femmes  eft  vne  chofe  vileine 
&deteft.ible  .  Celuy  donc  qui  aura  renuerfc 
les  fondemens  de  nature,  s'il  monte  en  chai- 
re,&  qu'il  dife.  Mes  amis  ,il  nous  fautmon- 
Jlrer  en  toute  noftre  vie  que  nous  demandons 
de  feruir  à  Dieu  en  crainte  &obei(ranee,  & 
en  toute  honnefteté  jilne  faut  pas  que  noui 
foyons  comme  les  Payens  qui  n'ont  nulle  rè- 
gle de  la  parole  de  Dieu,  &  comment  ofera-il- 
ainfi  parler,  quand  on  luy  dira  ,  Et  vilein,  ta 
viens  ici  crier  que  c'eft  vne  corruption  con- 
tre le  lien  de  mariage  que  d'auoir  deux  fem- 
mes,&  tu  lésas?  Ainfi  donc  fainft  Paul  a  voulu 
qu'vne  telle  corruption   fuft  retranchée  en 
tous  Pafteurs  ,afin  que  par  ce  moyen  les  au- 
tres cognuflènt.Ceci  defplaift  à  Dieu,  c'eft  vn 
de  Tordre  qui  n'eft  point  àfouffirir,  &  combien 
qu'il  ne  fe  corrige  pas  au  commun  peuple  fi" 
toft  qu'il  feroit  requis,  fi  faut-il  que  nous  ap- 
prenions de  nous  réduire.  Voila  donc  par 
quel  bout  fainft  Paul  a  voulu  commencer  r  Si 
nous  auons  maintenant  fon  intention. Cepen- 
dant il  nous  faut  noter  que  fainft  Paul  n'a  pas 
cerché  quelque  ftir,fteté(côme  le  Pape)qui5d! 
lesminiftres  de  la  parole  de  Dieu  s'abftien- 
droycnt  du  tout  du  mariage.  Quand  fainft 
Paul  dit  qu'vn  miniftrcde  la  parole  ait  fon: 
mefnaçebien  ordonné,  qu'il  viue  paifiblemér 
auec  fa  femme,  qu'il  gouuerne  fes  enfans  en 
telle  modeftie  qu'iU  foyent  en  exemple  aux 
autres  ,  ne  parle-il  point  par  l'authorité  de 

Yy.ii. 


Î4<» 


SERMON    un. 


«loftreSelgoeflf  lefns  Cl»  rift  .'Voila  donc  I» 
feinûeté  que  Dieu  requiert  en  Ces  feruiteurs, 
ic  en  cens  qu'il*  conftituer  pouranoncer  fa 
parole, c'eft  qu'ils  fe  maintiencnt  ckaftcment 
inee  leurs  femmes,  qu'ils  viucnt  en  mefnage. 
Voici  le  Pape  qui  dit ,  fl  vn  Prcftre  eft  marié, 
qu'il  eft  poUa,  qu'il  eft  des  enfans  de  ce  mon- 
de, qu'il  n'eft  pas  digne  de  ceft  cftat  Angéli- 
que,qu'il  faut  renocerau  mariage  pour  auoir 
eftat  en  l'Eglife.Si  le  Pape  prétend  de  parler 
en  l'authoricé  de  Dieu, qu'il  monftre  dequoy. 
Car  voici  vne  contradiftion  nianifefte  :  qui 
plus  eft,  nous  voyons  que  notamméc  le  fainft 
Elprit  a  prononcé  que  le  mariage  eftoit  légi- 
time en  tous  Pafteurs  d'Eglife,  Si  qui  ont  of- 
fice ,  afin  qu'on  n'en  face  point  de  fcrupule: 

fi«5  j,  .comme  en  l'autre  pafTage  ileft  dit,Qu.e  lema 
riage  eft  honorable  en  tous.  Puis  qu'ainfi  eft 
que  l'Apollre  en  Tepiftre  aux  Hebrieuxad- 
ioufte  ce  mot ,  que  Dieu  fera  vengence  des 
paillars  &  adultères  ,  mais  que  le  mariage  eft 
prifc  deuant  iiiy, voire  nonfeulcment  en  ceut 
qui  font  laies  (comme  ccfte  canaille &vermi- 
nedc  Clergé  Papalont  controuué  cesmots) 
mais  honorable  en  tous, ne  faut-il  pointdonc 
que  le  diable  ait  parlé  par  la  bouche  du  Pape 
&  de  tous  fes  fuppofts,  quand  ils  ont  ainfi  re- 
jette le  mariage  de  ceux  qu  doyuent  anoncer 
la  parole  de  Dieu  ?  Et  ne  fe  font  point  enco- 
res  contentez  d'vne  telle  tyrannie  ,  Se  d'ofter 
la  liberté  que  Dieu  donne:  mais  ils  ont  vfé  de 
fi  horribles  blafphemes,  qu'ils  n'ont  point  eu 
honte  de  dire,que  ceux  qui  font  en  la  chair  ne 
peunenc  plaire  âDieu.  Etqu'eft-ce  làfinon 
eorrôpre&falfifier  l'Efcriture  fainde?Sainct 

%«m.2.î-  Paul  parle  11  des  adultères  &  paillars,  il  parle 
des  rauiflTeurs, des  blafphemateurs.des  trom- 
peurs, detraôans  parméfonges  de  leurs  pro- 
chains, de  ceux  qui  font  adonnez  à  toute  ini- 
quité :  il  dit  que  ceux-là  ne  peuuent  plaire  i 
Dieu. Et  voila  ce  diable  de  Rome  qui  defgor- 
ge  vn  blafphcme  infernal ,  diûnt  que  ceux 
qui  font  au  mariage  ne  peuuent  plaire  à  Dieu. 
Sçauroit-ont  plus  vileinement  polluer  le 
faincl  mariage ,  &  blafphemer  i  l'encontre? 
Car  qui  eft  l'autheur  du  mariage?Et  1  qui  ce- 
lle iniure-Ia  s'addreffe-elle  ?  Noui  voyons 
donc  que  Dieu  a  permit  que  Satan  regnaft  en 
«e  fiege  d'apofta(ie,tellement  que  ceux  qui  ne 
cognoiflent  point  que  c'eft  vn  gouffre  d'en- 
fer, ils  font  aueugies  à  leur  efcient,&  meritét 
d'aller  en  perdition.On  ne  pourroit  point  al- 
léguer ignorance ,  pour  dire  ,  Et  ces  poures 
gens-la  fuyuent  comme  ils  font  conduits  par 
leurs  Prélats. Mais  ils  demandent  d'cftre  ainfi 
Tleceus  &  trompez, &  d'aller  enconfufîon.Or 
il  a  falu  cependant  que  Dieu  fe  vengcaftde 
«efte  confufion  infernale.  Car  comment  s'eft 
ïl  fait  que  le  monde  ait  eilc  priué  de  bons  P.i- 
fteurs  ?  Onaexclud  tous  ceux  qui  vouloyeiit 
"Viiire (ainiftcment  &  fan';  pollution, ceiiv  qui 
cherchoyent  de  feruir  à  Dieu,  &  ne  s'addon- 
ncrà  paillardifes  ,ni  autres  vilenies:  ceux- 


là  n'ont  point  efté  capables  d'eftre  ni  Eue^ 
ques,  ni  Preftrcs,  ni  rien  qui  foit.  Pourqucy? 
Ho,ce  font  gés  mariez.  Mais  ceux  qui  fe  font 
donné  licence  de  paillarder ,  les  voila  bons  & 
prapres  pour  eftre  fuppofts  du  Pape.Et  ainfi, 
qu'ils  foyent  Euefques  cornus ,  qu'ils  foyent 
preftres  graiflèz ,  c'eft  tout  vn  ,  car  ils  y  font 
propres:  &  il  a  falu  en  la  fin  que  le  monde  ait 
efté  rempli  d'vne  telle  infeûion.  Car  voi- 
la d'où  font  venues  les  paillardifes,  que  les 
mariages  ont  efté  corrompus ,  qu'on  a  eu  la 
plus  grand' peine  du  monde  à  tenir  les  mai- 
fons  nettes,  d'autant  queceftepuantifea  ré- 
gné tellement.que  par  tout  ils  ontietté  leur 
venin, &  a  efté  vne  maladie  fi  contagieufe,que 
quafî  nul  ne  s'en  pouuoit  garder.  Et  puis 
Dieu  les  a  aueuglez,  &  les  a  mis  en  telle  turpi 
tude  ,  qu'ils  n'ont  peu  difcerner  entre  le  bien 
!c  le  mal ,  ie  ne  di  pas  cémebeftes  brutes(car 
la  brutalité  de  tous  ceux  qui  veulent  mainte- 
nir la  ty rânie  du  Pape.Ti'eft  pas  telle  que  cel- 
le des  beftes  brutes  )  mai-;  beaucoup  pire  ,  Se 
plus  abominable.  Voila  doc  le  ûlaire  q  Dieu 
leuraenuoyé  par  fon  ire  ,  &  parfon  iufte  iu- 
gement ,  d'autant  qu'ils  ont  reietté  le  fainft 
mariage ,  qui  eft  vn  eftat  fi  noble  &  fi  excel- 
lent. Et  pourtant ,  fi  nous  voulons  auoir  vne 
droite  fermeté  ,  n'imaginons  lien  de  noftre 
tefte ,  mais  regardons  ce  que  Dieu  approiiue. 
Se  contentons-nous  de  cela.  Et  puis  quand  il 
eft  dit  que  les  feruiteurs  de  Dieu  foyent  ma- 
ris d'vne  feule  femme, que  nous  ne  rcqueriôs 
point  plus  en  eux  que  cela.  Car  quand  fainft 
Paul  dit  qu'vn  Pafteur  foit  mari  d'vne  feule 
femme  ,  il  n'entend  pas  d'impofer  loy  qu'vn 
homme  foit  marié,  non  plus  qu'il  n'eft  pas  li- 
cite d'empefcher  le  mariage  A  ceux  qui  font 
conftituez  Miniftres  pour  anoncer  la  parole 
de  Dieu;fain£t  Paul  n'y  met  point  ici  de  con- 
trainte :  mais  il  monftre  ceft  ordre  commun, 
qu'vn  chacun  regarde  à  foy ,  8c  que  celuy  qui 
n'eftpoint  marié  vfe  tellement  de  fonabfti- 
nence.que  ce  foit  à  l'honneur  de  Dieu,&  qne 
il  ne  regarde  finon  d'employer  tout  ce  qu'ila 
à  fon  feruicc.  Sainft  Paul  parlant  ainfi  s'abfte 
noit  de  femme.comme  il  le  protefte  en  la  prc 
miere  Epiftre  aux  Corinthiens,  fepticme  cha 
pitre:&  euft  bien  voulu  qu'vn  chacun  luy  euft: 
reflemblé:  voire,inais  il  ne  laifle  pas  de  pro- 
tefter  qu'il  ne  veut  pas  toutesfois  mettre  vn 
iougfurlcs  âmes,  mais  qu'il  faut  que  tous 
foyent  en  pure  liberté, &  que  celuy  ccpédanc 
qni  eft  marié ,  qu'il  paffe  par  ce  monde  com- 
me s'il  ne  l'eftoit  point ,  que  celuy  qui  n'eft 
point  marié  ne  mefprife  point  les  autres.  Car 
il  vaudroit  mieux  qu'vn  homme  fuft  paillard, 
que  de  blafmer  le  mariage  fou»;  ombre  qu'il 
n'a  point  de  femme  :  il  vaudroit  mieux  qu'il 
s'en  alla  ft  fourrer  en  vn  plein  bourdcau  ,  que 
de  mefprifer  le  mariage  en  s'en  abftcn.int,  & 
de  reirttervn  tel  eftat  que  Dieu  a  firftifié. 
Et  ainfi  que  nous  cognoifiiofqiie  fainft  Paul 
n'a  pas  voulu  iinpofcr  Joy  qu'on  fuft  marié, 

mais 


s  V  R    r  E  P  I  s  T.   A  T  ï  T  E. 


H* 


tuatt' Amplement  il»  voulu  dire  ouecat)c<iui 
font  côftituez  miniftres  de  li  parole  de  Dieu, 
ne  doyuent  point  eftre  gens  intemperans  ,  ni 
addonnelàdiflolutionrc&ciue  s'il  y  a  quelque 
vice  en  ceft  endroit  qui  peut  eftre  fiipporté  au 
commun  peuple  ,  que  cela  foit  retranché  en, 
ceux  qui  font  Pafteurs  de  rEglife,&  qui  doy- 
uent eftre  comme  miroirs:  qu'on  regarde  bié 
de  ne  le  point  foufFrir  fous  ombre  qu'on  le 
foufFrira  en  quelque  homme  rulgaire  ,  5c  en 
ceux  qui  font  moini;prifez:mais  quant  aux  mi 
aiftres  qui  ont  vne  difcipline  plus  eftroite  qtie 
les  perfonnes  priuees  ,  qu'ils  foyent  tenus  de 
plus  près  ,&  qu'ils  ne  felafchentla  bride  en 
façon  que  ce  (oit.  Uadioufte  quant  &  quant, 
Q»f  frj  mfansfoyent  fideles,&  non  point  acci*- 
fex.dt  di0ohtioit,Cr  no»  point  rebclUs.Ceci  me 
rite  bien  d'eftre  noté:carraefmes  en  l'Epiftre 
i  Timothee  nous  voyons  que  fainft  Paul  ne 
fe  contente  point  de  la  perfonne  des  raini- 
ftres ,  mais  il  veut  que  leurs  femmes  foyenr 
bien  réglées, en  forte  que  fi  vn  homme  vmoit 
Jionefteraent  Se  fans  reproche,  Se  ^u'il  ait  vne 
femme  diflolue.ce  vice-la  reuient  fur  luy:c5- 
bien  qu'on  puiflè  redarguer  la  femme, lî  eft-ce 
qu'on  dira  toufiours, Ho, voila  la  femme  d'vn 
Prefcheurquieftdesbordee,  &  on  voit  beau- 
coupde  vanitez&  diflolutions  aufquelles.Ie 
mari  deuroit  bien  obuier:  il  ell  donccoulpa- 
ble  de  tout  le  mal.  Car  s'il  ne  fçait  gouuerner 
fa  maifon(dit  fainft  Paul)comment  gouuerne 
ra-il  lamaifondeDieurComment  gouuerne- 
ra-il  tout  vn  peuple.  Se  hommes, &  femmes, & 
grans  &  petis,  quand  il  ne  fçait  gouuerner  fa. 
Femme  f  Ain(î  donc  notons  que  quand  en  ce 
paflàge  il  eft  parlé  des  enfans.c'eft  afin  qu'on 
aduiie  fi  vn  homme  eft  propre  pour  conduire 
le  peuple  de  Dieu,&  pour  bié  régir  fi  maiibn 
&  fon  Eglife  ,  qu'il  ait  déclaré  cela  par  efFeft 
en  fon  raefnage.  Si  donc  vn  homme  non  feule 
ment  monftre  qu'il  chemine  en  la  crainte  de 
Dieu.&s'abftientde  tout  mal.maisaufsi  qu'il 
face  q  Dieu  foit  ferui  &  honoré  de  ceux  qu'il 
ha  en  charge, qu'il  ne  fouffre  point  que  fà  mai 
fon  foit  ni  vnbourdeau ,  ni  vn  brelan  ,  ni  vne 
tauerfie  pour  yurongijer.ni  chofe  femblables: 
qu'il  ne  permette  point  ni  à  feruiteurs  ,  ni  à 
femme;, ni  à  en  fans  d'eftre,de';bordez  ne  diflo 
lus  en  façon  que  ce  foit.qu'il  n'y  ait  ne  pom- 
pes,ni  vanitei  aucunes. Q_iiand  donc  vn  hom- 
me gouuerne  ainfi  fon  mefnage,  alors  on  co- 
gnoift  qu'il  eft  vigilat,&  qu'il  ha  zèle  deDieu, 
&  qu'il  ha  prudence  Se  granité  en  foy.  Cela 
donc  eft  vne  approbation  pour  monftrer  qu'il 
eft  idoine  pour  régir  l'Eglife  de  Dieu.  Voila 
pourquoy  faind  Paul  norammentdit,Q»f  les 
eafaas  fiyent  f  ides, &  fins  trime  de  diffolutlon. 
^)nonrehelles.\\  met  ici  notammenrtroisquâ 
litez.La  première,  c'eft  que  les  enfans  foyent 
fideles:car  fi  on  choiiît  vn  homme  pour  anon- 
cer  la  parole  de  Dieu.qui  n'ait  point  enfcigné 
{a  famillcqui  ait  des  enfans, aufquels  fi  on  de- 
mande raifou  de  leur  foy, qu'ils  n'en  f  cachent 


dire  feulement  vn  mot.cSraentcera^-Ia  aine- 
ner*-il  les  eftrangerc  à  la  foy ,  quand  il  y'n  * 
point  aivencfiçs  liens  propres'C'eftdoac  par 
ce  bout  qi^iL&utcommencer.Si «OUI  voyons 
qu'il  ait  inftmit  fes  domeftiquct ,  qu'il fcfoic 
bien  porté  ea  fa  maifon.on  doit  eftimer  qu*it 
fera  encores  mieux  fon  deuoir  ^uand  il  fera 
eleué  plus  haut ,  Se  qu'il  s'employei-*  ï  l'edifi» 
cation  commune  de  tout  le  peuple.  Lt  foy 
donc  va  ici  en  premier  lieu.  Or  il  y  a  quant  3c 
quant, qu'ils  ne  foyent  point  aecufee  de  dilTo  - 
lution.  Quand  (aina  Paul  met  ce  mot-ci,  iJ' 
entend  qu'on  ne  les  voye  point  diflolus.  Car 
il  n'eft  point  quefl^on  ici  qu'on  forme  VH  pro 
ces  deuantvn  iuge.qu'ily  ait  partie  qui  ajipet 
le  pour  accuferrinais  il  entend  qu'on  n'apper- 
çoyue  point  d'intemperar.cc,  ne  quelques  vi- 
ces notables  aux  entansdesPrefcheurt.Car  (î 
vn  homme  allègue,  Ho.comment?  Etquicfty 
ce  qui  viendra  reprendre  mes  enfans?Si  quel  - 
qu'vn  fe  veut  ingérer  à  leur  faire  iniure  ,  i'e». 
auray  la  raifon.  Si  quclqu'vn  (di-ie)fait  fem- 
blantd'eftie  grand  zélateur  de  fon  honneur 
&de  celuy  de  fcs  enfans,  &  cependant  il  leur 
lafchera  la  bride  à  tout  mal ,  tellement  qu'on 
fe  mocqueradeluy,  afçauoir  fi  vn  tel  homme 
eftàexcufer.  ToutC'ïfois  on  en  voit  beaucoup- 
qui  cuident  valoir  tant  Se  plus ,  quand  on  leur 
parlera  des  vilenies  qui  fe  commettent  er» 
leurs  maifons  ,  la  réplique  fera  ,  Ho,  fi  quel- 
qu'vn  s'attache  à  moy  ,  il  faudra  qu'il  en  re- 
fponde  ,  ho  Tenauray"  la  raifon  ,  ieluy  mon- 
ftreray  à  qui  il  ha  affaire.  Mais  cependant  on 
fe  mocquera  de  luy  ,  &  de  tout  fon  train  ,  oïl 
fe  mocquerade  fa  femme ,  il  voit  &  fçait  que 
elle  ne  vaut  rien,  &  encores  voudra-il  foufte- 
nir  le  contraire  :  Se  ne  merite-il  point  d'ertre 
cocu.'Vn  homme  ne  voudra  point  qu'on  parle 
mal  de  fet  enfans ,  &  cependant  il  permettra 
qu'ils  fe  desbordent, ils  femocquerontde  tou 
tes  admonitions  qu'on  leur  fera,  ils  s'en  iront 
defpiter  Dieu, il  n'y  aura  que  toute  mefcban- 
ceté  eneux:&cependant  ils  ne  veulent  point 
qu'on  lesaduertifledu  d.inger  auquel  ils  font. 
Ilsapperçoyuent  bien  qu'ils  tienent  leche-^ 
min  &  letrain  de  perditi5,ih  ne  peuuét  fouf- 
frir  qu'on  les  en  retire.  Mais  puis  qu'ils  font 
des  malades  qui  ne  veulent  point  eftie  guaris, 
&  qu'ils  répondent  tous  les  remèdes  qu'on 
leur  propofe,  qu'ils  periflent  côme  poures  & 
miferables,  créatures  qu'ih  font.  Ainfi  donc 
notons  bien  quand  fainft  Paul  dit  qu'il  ne  fauc 
point  que  les  enfans  des  miniftres  de  la  paro- 
le foyent  accufcz  d'intempérance  ,  que  par 
cela  il  entend  qu'on  n'apperçoyue  point  en 
eux  vne  vie  diflolue  &  mefchante,  mais  qu'ils 
fe  gouuernent  honneftement,  Se  qu'ils  ne 
foyent  point  en  fcandale ,  qu'ils  ne  donnent 
point  occafion  qu'on  dctrafte  ne  qu'on  mur- 
mure d'eux.  Voila  pour  le  fécond.  Il  y  a  tier- 
cemcnt,  qu'ils  ne  foyent  point  rebelles:  c'eft 
à  dire,  que  ce  luy  qui  eft  conftitucpouranon- 
cer  la  parole  ,&  pour  gouuerner  &  inftruirc 

Yy.iii. 


Î41 


SERMON   iiir; 


rJEglifede  Dicu,a(luifc  bien  que  Ces  enfansne 
foyent.  point    reuelches  ,  qu'ils  ne  foyent 
ppint  c online  befte s  fauuage?  ,kltiirs',  &  faf- 
cheux  à  gouuewier.  Car  s'il  ne  pàiit 'faire  cela 
de  fçs  enïans ,  que  fera-il  enuers  deux  qui  ne 
luy  appartienent  de  rien  ?  S'il  ne  peut  repri- 
roervn  petit  enlTant  en  fon  infolence  ,  que 
pourra-il faire  enuers  toutvn  peuple?  Voila 
donc  Tintentionde  faindPaul.  Mais  cepen- 
dant notons  qu'il  parle  tellement  à  ceux  qui 
doyuent  ertre  elcus  Pafleurs,que  cefte  doûri- 
ne  elt  générale  à  tous.  Ici  il  ne  remonftre 
point  aux  Pafteurs  quels  ils  doyuent  eftre, 
comme  s'il  leur  addreflbit  fon  propos  :  mais 
il  déclare  quelles  gens  on  doit  choifîr  en  ceft 
office  &  en  ceft  cftat:Qu]on  fe  garde(dit-il) 
s'il  y  a  vn  homme  tant  mal-aduiféiqu'il  ne 
puilîe  gouuerner  fa  maifon ,  qu'on  fe  garde 
de  luy  mettre  rne  charge  beaucoup  plus  pe- 
fante&  difficile.  Et  puis  quand  on  parle  de 
l'eleftiondes  miniftres,  que  cela  pafle  enco-, 
res  plus  outre.Car  fi  vu  homme  cft  eleu  pour 
anoncer  la  parole  de  Dieu,  Se  qu'il  fegou- 
uerne  mal ,  &  luy  &  fa  maifon  ,  il  n'cft  pas  en 
héritage  ,  il  faut  que  cela  foit  retranché  ,  & 
■qu'vn  tel  fcandale  ne  foit  point  enduré  :  mais 
tout  ainfi  qu'il  faut  qu'vn  chacun  regardeà 
foy.iedi  nous  qui  fomraes  conftituez  enchar 
ge  publique,  &  que  nous  aduifions  àcc  que 
fainâ  Paul  ordonne,  pour  fçauoir  quelles 
gens  on  y  doit  choifîr  ,  qu'vn  chacun  aufsi 
mette  peine  de  fe  conformer  à  la  reigle  qui 
€lt  ici  contenue  ,  Se  que  nous  prions  Dieu 
qu'il  nous  face  la  grâce  de  cheminer  en  forte 
que  fa  parole  ne  foit  point  fuictte  à  mocque- 
rie  à  caufe  de  nous ,  &  que  nos  vices  ne  don- 
nent point  occafion  auxmefchansdeblaphe- 
mer  contre  le  nom  de  Dieu  ,  pour  dire ,  Ce- 
ftuy-la  eft  vn  blafphemateur  ,  c'eft  vn  mef- 
chant, voila  donc  vn  bel  Euefque:que  ce  mot- 
la  ne  puifle  efchapper  delà  bouche  des  mef- 
chans, qu'ils  ne  foyent  rerobarrej;,  &  qu'ils  ne 
foyent  malins  quand  ils  parleront  ainfi.  Et 
aiifsi  il  monftre  quels  doyuent  eftre  les  Chre 
ftiens.  Il  cft'vray  que  les  Miniftres  de  la  pa- 
role de  Dieu  vont  deuant  :  mais  tant  y  a  que 
les  autres  fe  doyuent  aufsi  bien  ranger  à  ce- 
ci,chacun  félon  fon  eftat.  Et  quand  Dieu  aur 
ta  fait  cefte  grâce  à  vn  homme  d'eftre  marié, 
qu'il  dcfired' eftre  tellement  vni&  conioint 
auec  fa  femme,  qu'il  ne  foit  point  .préoccupé 
de  paillardife,  q  fon  cœur  ne  tende  point  ail- 
leurs, mais  qu'il  fuyue  fon  train  ',  cognoiflant 
que  c'eftau  nom  de  Dieu  qu'il  eft  marié  ,  & 
qu'il  faut  qu'il  tienefoy  à  fa  partie  ,  puis,  que 
«lie luy  cftafsignee  de  Dieu.Voiladonc  com 
me  tous  Chreftiens, combien  qu'ils  foyent  en 
eftat  priué  ,  doyuent  tellement  cheminer  en 
Peftatde  mar)age(s'ils  y  font  appelez)qu'vn 
chacun  fe  contente  de  fa  partie  ,  qu'il  viue 
honneftement ,  &  fans  aucune  diflcnfion.  Et 
puis  ceuxaufquels  Dieu  à  fait  ceft  honneur 
de  leur  donner  des  enfans,  qu'ils  aduifent  que 


ils  font  d'autahtpluî  oblige?  à  mettre  peine 
que  leurs  enfans  foyent  inftniits  deuement. 
Or  s'ils  veulent  auoir  vne  bonne  inftruftion, 
il  faut  toufiours  commencer  parla  foy.  Car- 
ies enfans  pourront  auoiren  apparence  tou- 
tes les  vertus  du  monde  ,  mais  ce  ne  fera  rien 
finon  que  Dieu  foit  craint  &  honoré  d'eux; 
Comme    nous    en   verrons   qui    prendront 
grand'  peine  à  ce  que  leurs  enfans  foyent 
endoétrinezaux  affaires  du  monde:  il  eft  vray 
qu'ils  donneront  bien  des  maiftres  à  leurs  en- 
fans, mais  ce  fera  pour  apprendre  quelque  bel 
le  parade,  qu'ils  ayent  quelques  trois  mots  de 
Latin  pour  fe  faire  valoir  à  table,  qu'ils  fca- 
chentdeuifer,  &  tenir  de  belles  contenances 
félon  le  monde  :  mais  de  cognoiftre  Dieu  ,  il 
n'en  eft  point  queftion  ou  nouuelle.  Cen'eft 
pas  ainfi  qu'il  y  faut  proceder,c'eft  bien  met- 
tre la  charrue  deuant  les  boeufs.  Apprenons 
donc  à  l'exemple  dclainâ  Paul,  de  commen- 
cer par  ce  bout  pour  inftrnire  les  enfans.  Car 
quand  ils  auront  cognu  Dieu,c'cft  vn  bon  fon 
dément  fur  lequel  nous  pourrons  baftir:  mais 
fans  cela  ,  il  n'y  a  que  ruine  &  confufion  :  car 
quand  nous  aurons  trausillé  pour  inûruire 
nos  enfans  en  la  foy,&  en  la  droite  &  pure  co- 
gnoiiraiicedeDieu&  de  fa  vérité,  il  faut  que 
leur  vie  refponde  ,  c'eftà  dire  qu'ils  foyent 
honneftes,  qu'il  n'y  ait  point  de  diffolution, 
d'intempérance,  qu'il  y  ait  vne  telle  bride 
qu'ils  ne  s'adonnent  pointa  friandifes,  nia 
ynrongneries ,  ni  à  ieux  diflolus ,  ni  à  chofes 
femblables ,  qu'il  n'y  ait  point  de  chatterie, 
comme  on  appelle.  Voila  donc  le  fécond  qne 
fainû  Paul  nous  cÔmande  en  ce  paflage.  Mais 
pource  que  c'eft  vn  beftail  difficile  â  gouuer- 
ner que  les  ieunes  gés.fainû  Paul  efcrit  qu'il 
faut  qu'ils  foyent  humbles  Se  dociles  :  car  s'il 
n'y  a  modeltie  aux  petis  enfans ,  on  prendra 
beaucoup  de  peine  à  les  inftruire  ,  mais  ils  re- 
gimberôt  côme  les  cheuaux  qui  ne  font  point 
façonnez,  qui  mordent  &  ruent  contre  leur 
raaiftre.  Ainfi' donc  notamment  fainft  Paul  a 
mis  cefte  humilité-ci  pour  la  vertu  la  plus  re- 
quife.aux  ieunes  gens:mais  comme  elle  eft  re- 
quife,aufsi  elt-elle  bien  rare.  Q_u,'on  regarde 
quelle  eft  laieunefle.  Auiourd'huy  comment 
les  enfans  fe  laiflent-ils  gouuerner?Il  eft  vray 
que  les  pères  font  bien  dignes  fouucntesfois 
que  leurs  enfans  leur  creuent  les  yeux  :  car  il 
ne  leur  chaut  de  les  inftruire  en  la  crainte  de 
Dieu: n'eft-ce  pas  rai  fon  qu'ils  ay et  vn  falaire' 
demeimes?  Mais  c'cft  vne  choleà  dcplorer 
quand  on  voitles  enfanseftre  rebelles, qu'on- 
ne  les  peut   donter  en  façon  que  ce  foir,- 
quand  ils  feront  péris ,  qu'on  ne  leur  peut' 
faire  gouftcr  que  cVft  du  bien.   Erpuis  font- 
ils  venus  en  aage  ?  ie  ne  di  point  d'hommes, 
pour  dire  qu'ils  foyent  hommes  faits ,  mais 
qu'ils  ne   foyent   plus   pétis  enfans  ,  qu'ils 
foyent  ieunes  compagnons ,  qu'on  appelle: 
ho  ,  fi  voudront-ils  neantmoins  eftre  appe- 
lez hommes,  &  leur  femble  qu'on  leur  fait 

grand 


SVR   rSPiST.   A  TITE 


Î4î 


grand  tort  fi  on  les  nomme  autrement.  Ils 
deuroyent  encores  auoir  des  verges  d'ici 
idix  ans  à  Tefcole  ,&  ils  voudront  cepen- 
dant eftre  reputcz  pour  grans  perfonnages. 
£t  ic  leur  ay  dit  trop  de  fois, Allez  babouins, 
que  vous  foyei  hommes  î  vous  deuricz  eftre 
encores  fous  la  verge, le  eftre  là  tenus  en  bri- 
de. Et  fi  on  euft  voulu  receuoir  pailiblement 
ces  admonitions, il  ne  faudroit  point  mainte^ 
nant  pleurer,  il  ne  faudroit  point  vfer  de  ru- 
deUe  telle  qu'on  la  voit ,  il  ne  faudroit  point 
qu'ils  fulTent  châftiez  ainfi  honteuferaéc,  s'il 
y  euft  eu  quelque  prudence  &  difcretion  en 
eux.D'autant  plus  donc  nous  faut-il  bien  no- 
ter ce  qui  eft  ici  dit  par  faindl  Paul,  &  que  le» 
pères  aduifent  de  tenir  la  bride  roide  a  leurs 
eofans,&  s'ils  veulent  faire  des  homes  quand 
ils  doiuent  eftre  encores  fous  la  verge,  qu'ils 
ne  les  efpargnent  point. Il  eft  vray  que  les  pc 
res  nedoiuêt  point  raoleftcr  leurs  enfans,  ne 
leur  donner  occafion  de  fc  desbaucher  par  vn 
traittement  trop  rude:mais  tant  y  a  qu'il  leur 
faut  craindre  que  leurs  enfans  eftans  ainfi  dif 
ficiles  à  gouuerner.ne  fe  Ufchét  la  bride  pour 
s'adonner  à  tout  mal,&:  fe  desbaucher  en  for- 
té  qu'on  ne  peuil  pas  les  ramener  au  bon  che 
min:&  quant  &  quant  que  les  ieunes  gens  re- 


cognoiflent  aufsi.que  «'ils  n*oiitcefte  inode- 
ftie  en  eux,  Sccefte  grâce  de  felaiffcr  gouuer 
ner  paifiblement  par  leurs  fuperieurs  ,  qu'iC 
fant  dire  fy  de  toutes  leurs  rertuc  :  comme 
aùfsi  ce  ne  fera  rien,  il  n'y  aura  qu'orgueil  *: 
puaHtife  ,  Si  Dieu  aufsi  les  mettra  en  cenfi*- 
lion.  Qu]|_vn  chacun  donc  apprene  cefte  le-— 
çon,  comme  elle  eft  ici  raoaftrec  à  tous  en  c« 
pafTâge  de  fainft  Paul. 

O  .R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
facedenoftre  bon  Dieu  en  cognoiflànce  d» 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  tellcr. 
ment  fentir,  que  depuis  le  plus  grand  iufquet 
aa  plus  petit  nous  foyôs  tous  abatus  en  nous 
inefmes.&que.nous  n'ayôs  autre  refuge  qu'à' 
fa  mifericorde.  Et  que  cependant  nouscher- 
chiôs  de  nous  red>iH¥  à  luy,que  nous  demaa- 
dions  a  eftre  de  plus  en  plas  auancez  en  fa 
crainte  &  en  fou  obeiflance ,  &  que  par  ce 
moyen  fon  Nom  foie  inuoqué  au  milieu  de 
nous ,  &  que  fon  temple  foit  purgé  de  toiitc 
pollution,&  que  l'ordre  commun  foit  entre- 
tenu ,  qu'vn  chacun  foit  aidé  pour  tendre  à 
fon  falut  ,  &que  tous  enfeinblenous  y  ten- 
dions d'vn  commun  accord.  Que  pour  ce  fai 
re  il  luy  plaife  fufciter  vrais  Se  fidèles  MiHi-> 
rtres,&c. 


cinqvieme   sermon    svrle 

PREMIERCHAPITRE. 

7  Car  il  faut  que  l'Eue fque foit  feus  crime ,  comme  dijpenfteur 
de  Dieii)no7i  point fer,ne  colerem  addomé  au  Vm,nc  batteur,  ne  con- 
uoiteuxdegaindeshomefle: 

8  Maiî  faifant  recueil  "volontiers  aux  eîlrdgers,amateur  de  hon 
tê,prudentiiujleifiinSl,attrempéy 

$  Embrajftnt  la  Varole  fidèle ,  qui  efl  félon  domine  :  afin  qu'il 
foit  puiffant  d' admone fier  par  faine  doUrine  j  (f  reprendre  ceux  qui 
contredifent. 


o  V  R  bien  faire  «oftre  pro 
fit  de  ce  paflagCjnousauons 
à  retenir  que  ceux  qui  font 
appelezpour  anoucer  la  pa 
rôle  de  Dieu,  doiuent  ici  re 
cognoiftre  quel  eft  leur  of- 
fice &deuoir,  afin  de  s'ac- 
quitter fidèlement  enuers  Dieu  &  fon  Egli- 
ie.Et  puis  tous  Chreftiens  en  gênerai  ont  à 
regarder  ce  qui  eft  requis  en  vn  bon  Pafte«r, 
afin  qu'on  n'en  choiiîfle  point  à  la  volée,  & 
qu'vn  chacun  ne  le  gouuernc  point  icipar  fa 
ueurou  par  ambition  ,  ou  félon  fon  appétit: 
mais  qu'il  regarde  le  bien  &  le  falut  commun 
de  to'  les  cnfaus  dç  Dieu,&  que  cela  s'obfer- 


ue  en  ceux  qui  font  défia  en  office  ,  qu'ils  n'y 
fovent  point  maintenus  finon  qu'ils  s'y  gou- 
uernent  ainli  que  le  faiuû  Efprit  a  comman- 
dé.Et  puis, d'autant  que  les  vertus  dont  par- 
le ICI  fainû  Paul ,  font  requifes  en  tous  Mini- 
ftres  de  la  parole  de  Dieu  ,  comme  ceux  qui 
doiuent  monftrerlecheminauxautres  ,ilya 
aufsi  vne  leçon  commune. Car  fi  vn  Pafteurfe 
gouuerne  bien  &  félon  Dieu,  &  que  le  peuple 
foit  adonné  à  tout  mal  &  diflblution  ,  que  fe- 
ra-ce?  Mais  tout  ainfi  que  le  Pafteur  doit  mo 
ftrer  le  chemin,  &  donnes  bon  exemple:auf*i 
faut-il  que  tout  le  corps  de  l'Eglife  fe  con- 
forme à  ce  qui  eft  ici  côtenu.Or  afin  de  pour- 
fuiurc  ce  que  dit  faintt  Paul  par  ordre ,  nout 

Yy.iiii. 


•H4 


ï  iTS'ER  MiOH    V. 


auonsj  recueillir  que cenx  qu'il  auoitaupara 
tant  nommez  Preilres,  illesnôme  fiiel'ques, 
iquiiîgnifie  l'urueillâs  oufuperintencians,(c5- 
me  on  dit)&:  attribue  ce  nom  à  tous  ceux  qui 
doiuent  anoncer  la  parole  de  Dieu.  Et  ainfi 
c'a  eflévne  corruptions:  abus  en  la  Papauté, 
voire  en  l'fglife  ancienne, qu'vn  leul  ait  efté 
intitulé  Euefque:  car  c'a  efté  changer  le  lan- 
gage du  fainûEfprit:&  il  nous  taut  parler  fe 
Ion  l'Efcriture-Or  nous  voyons  que  Satan  ne 
tafchefinon  denous  diuertirde  la  pure  (im- 
plicite de  la  parole  de  Dieu.  Et  puis  c'eft  fai 
re  tort  &  inigre  à  Dieu  ,  quand  on  fe  veut  fe- 
parerde  Tordre  qu'il  auoit  eftabli  par  fon  an 
thorité  inuiolable. Ainfi  donc,notÔs  que  tous 
ceux  que  Dieu  appelle  pour  anoncer  fa  paro- 
Je,&  qui  font  ordonnez  en  ceft  office, doiuent 
premièrement  cftre  meurs  &  pofez  côme  An 
«iens.Et  puis  ils  doiuent  eftre  furueillans:c6- 
Ewc.  3.  nie  3ufsi  le  Prophète  Ez^chiel  en  parle,quad 
^,  il  les  accompare  à  ceux  qui  font  le  guet  fur 

vne  tour.  Car  il  n'eft  point  ici  queftiond'vn 
titre  de  dignité  ni  de  pompe  :  c'cft  vne  char- 
ge, voire  bien  difficile  &  pefante  ,  cependant 
•que  les  autres  dorment ,  de  veiller  &  d'auoir 
le  foinde  tout  le  troupeau. Voila  donc  ce  que 
nous  auons  à  retenir  en  premier  lieu.  Et  ainfi 
le  nom  &  titre  que  le  famfl  Efprit  attribue  â 
tous  Pailcurs  ,  monftre  défia  h  quoy  c'eft  que 
JDieu  les  appelle,&  ce  qu'ils  doiuent  ^  fon  £- 
;glife  ,  afin  que  les  hommes  ne  cuident  point 


qu'il  y  ait  fon  repos. Or  cela  ne  fe  péue faire 
que  nous  ne  liiy  foyons  prochains,  &  qu'il 
n'ait  toulîours  l'œil'fur  nous,  qu'il  rt'aitquat 
&  quant  le  foiri  de  nous  gouuerner  &nourrir'. 
Voila  décqui  nous  doit  bien efmouuoirquad 
nous  entendons  que  nous  ne  forames  point 
feparez  de  noftre  Dieu ,  &  que  nous  ne  croy- 
ons point  à  crédit  (comme  on  dit)  que  nous 
n'allons  point  à  l'efgaree,mais  qu'il  nous  re- 
cueille en  fon  troupeau ,  voire  à  telle  condi- 
tion qu'il  eft  auec  nous ,  &  fera  iufqucs  en  Ix 
fin  du  monde. Or  cela  nous  doit  quant  &  quât 
incitera l'âimerd'vn  courage  tant  plus  ar- 
dent ,  &  à  le  feruir.  Car  puis  qu'ainlî  eft  que 
Dieu  nous  a  fous  fa  garde, qu'il  nous  fait  ha- 
biter en  fa  famille,&  qu'il  nous  eft  pour  Père 
&  Maiftre,  &  qu'il  conftitue  des  procureurs 
afin  que  tout  aille  comme  il  appartient ,  qu'il 
y  ait  ordre,  que  rien  ne  foit  difsipé  entre 
nous:  quand  nous  voyons  que  Dieu  fe  décla- 
re d'y  ne  façon  tant  priuee ,  ne  fommes-nous 
point  trop  ingrats  fi  nous  ne  femmes  du  tout 
adonnez  à  l'aimer  &  à  le  feruir?  Notons  bien 
donc  quand  l'Eglife  eft  appelée  la  maifon  de 
Dieu,  que  c'eft  afin  que  nous  magnifions  la 
bonté  ineftimahle  qu'il  nous  monftre ,  quand 
il  luy  plailt  approcher  de  nous,&  faire  fà  rc- 
fidence  au  corps  qu'il  a  aflemblé  de  fes  fidè- 
les ,  Se  qu'il  veut  que  nou'.  foyons  conioints  à 
luy, 5:  cependant  qu'il  prend  la  charge  de  no- 
ftre falut ,  qu'il  nous  veut  gouuerner  Se  nour- 


pouuoir  eftre  eftimez  Prelats,&  cependant  fe     rir  comme  noftre  Maiftre  &  comme  feul  fu 


repofer  &  dormir,&  faire  grand'  chère.  Car 
Dieu  ne  choifit  point  ceux  qu'il  conftitue  Pa 
fteurs  en  fon  Eglife  ,  pour  leurs  beaux  yeux 
(comme  on  dit  )  mais  c'eft  en  les  obligeant  à 
tout  le  peuple  :  car  autrement  nous  ne  pou- 
Bons  feruir  à  Dieu,  finon  en  nous  employant 
au  feruice  de  tout  fon  troupeau  :  &  le  plus 
^rand  honneur  que  puiflent  auoir  les  Mini- 
ères de  la  Parole  ,  c'eft  de  bien  feruir  à  tous 
2es  fidèles.  Or  venons  maintenant  â  ce  que 
&ia(\  Paul-adioufte.  Il  dit  que  c'eft  bien  rai- 
ibn  que  les  furueillans  foyet  fans  crime,  puis 
qu'ils  font  gouuerneurs  en  la  maifon  de  Dien. 
Comme  aufsi  nous  auons  yeu  qu'il  difoit  à  Ti 
^mothce.Aduife  bien  comme  tu  te  dois  porter 
en  l'Eglife  :  car  c'eft  la  maifon  de  Dieu  ,  il  y 
prefide,ily  fait  fa  demeurarce  :  pu!sqn'ainfi 
«(Vqu'il  t'a  côftituélà  en  fon  lieu,  il  faut  bien 
•«)ue  tu  chemines  droitcmenti  Eft-ce  peu  dé 
«hofe  d'eftreprocu/eùrdèDieo  ,  &  auoir  la 
place  pour  gcHuerner  fa  maiAiri^  Et  ainfi  en 
«e  paflàge  fainûPàiil  n'oUs  monftre  en  quel- 
le folicitude  doiuent  cheminer  ccu*r  auii]uels 
Dieu  a  fait  ceft  honneur  de  porter  fa  Parole, 
&  del'anoncer:car  en  ce  faifantil  veut  qu'ils 
goùuerncnt  fa  famille' Màis'3'autre  cofté, 
nous  auons  à  recueillir  de  ce  paflaî^ç  vne  do- 
ftrine  de  grande  côfolation  &rfinguliere. Car  t,       ■   i 

Dieu  nous  honoretantùt  plus  quand  il  nous  lieu  auquel  il  eft  ,  qu'il  corrompra  toate  l'E- 
«laigneappetlerènra  nfaifon,  que  nous  foy'ôs  glife.Voila  dôc  les  crimes  dont  il  auoit  parlé 
iesdonïcftiques.qu'ilhabiteau  milieu  de  no',    tidefllis,  difant  «juel'Euefque  doit  cftre  Tans 

ciime. 


perintendant, voire  rapportât  cela  non  point 
à  fon  profit ,  mais  à  noftre  falut.  Et  au  refte, 
puis  qu'ainfi  eft.aduifons  que  nous  ne  pouuÔJ 
pas  fuir  les  yeux  de  noftre  Dieu:car  nous  luy 
Ibmmes  prochains:  que  dose  chacun  fe  ticne 
en  bride.  £t  d'autant  qu'il  nous  a  alTembleï 
au  nombre  &  en  la  compagnie  des  fidèles, que 
cela  nous  enflamme  tant  plus  pour  nous  pre- 
fenter  à  Dieu, afin  qu'il  nous  conduife,  &  que 
nous  ne  facions  point  des  beftes  farouches, 
puis  qu'il  nous  a  tant  magnifiez  que  de  nous 
recueillir  en  fa  maifon  ,  il  veut  que  nous  luy 
foycns  comme  agneaux  ,  d'autant  qu'il  veut 
faire  office  de  Pafteur  enuers  nous.  Et  ainfi 
nous  voyons  que  ce  paflàge  ri'eft  point  feule- 
ment pour  les  Miniftres  de  l.i  Parole  ,  niais 
qu'en  gênerai  il  doit  piofiter  à  tons  fidèles, 
quand  ils  le  fçaurôt  bien  appliquer  à  leur  in- 
ftruftion.  Cependant  fainû  Pauladioufte  les 
vertus  qui  (ont  requifès  en  vn  bon  Pafteur, 
c'cft'àf^auoir  qu'il  ne  foit  point  fier  ,  ou  opr- 
riiaftre,  adôné  à  fon  fens  propre, qu'il  ne  foie 
point  ni  rolcre,ni  a'donhc  au  vin,  nr  conuoi- 
teux  de  gain  deshonnefte.  Or  ùwçt  Paul  met 
ici  les  vertus  par  leur  contraire  :  comme  s'il 
difoit  qu'vn  homme  qui  fera  adonne  au  vin,, 
qui  fera  opiniaftre,  qui  fera  noffeux  ,  qui  fera 
adonné  au  gain  ,  qu'il  ne  fait  qu'infidler  le 


SVR    L*  EPIS  T.    A    TITE. 


crim«.  Or  ces  vices  qne  fainft  Paul  note  ici, 
font  par  trop  enormes:&  aufsi  iU  emportent 
komme  vne  pollution  pour  peruertir  toute  la 
police  de  l'Egliie  ,  qu  vn  homme  qui  en  fera 
entachéaucunement,  ne  peut  nullement  fer- 
uirà  Dieu. Il  faut  donc  que  ceci  foi  t  purgé  de 
Bant.  Et  voila  les  premières  vertus  que  fainft 
Paul  demande,  c'eft  que  celuy  qui  doit  anon- 
cer  la  parole  de  Dieu ,  s'abftienede  ces  vices 
qui  font  ici  condamnez ,  &  qu'il  mette  peine 
de  les  corriger  ,  afin  que  rien  ne  Pempefclie 
de  faire  fon  oflîce.  Et  de  fait,ccfte  opiniaftre 
té  dont  parle  faintt  Paul,  rend  les  hommes  in' 
fupportables.  Quand  vn  homme  eft  adonné  à 
fon  fens  pour  s'y  fier.il  faut  qu'il  face  comme 
vn  monde  à  part  :  ainfi  que  les  Payens  l'ont 
bië  fceudire.  Or  tour  ainfi  qu'vn  Miniftrede 
la  parole  de  Dieu  doit  attirer  ceux  qui  font 
comme  efcartez,  il  doit  aufsi  retenir  en  bône 
vnion&  paix  ceux  qui  font  défia  en  l'Eglife. 
Et  s'il  elt  ainfi  arrefté  en  fon  opiniaftreté  ,  il 
faut  qu'il  effarouche  le  troupeau  de  Dieu  ,  & 
il  s'enfuyura  vne  horrible  difsipattô.  Et  pour 
tant  il  faut  qu'vn  homme  fe  déporte  de  fon 
fens,  afin  qu'il  puiflê  feruir  à  Dicu,& mainte- 
nir l'Eglife  en  bonne  concorde  .  Etcelagift 
en  deux  chofes  principalementic'eft  que  nous 
fouffriôs d'eftre  enfeignez, quand  nous  enfci- 
gnons  lesautres.Car  fi  nous  n'auôs  cela.d'ap 
prendre  volontiers,  &deprofiter,afin  que  les 
autres  profiter  auec  nous.iamais  nous  ne  pour 
rons  nous  acquitter  de  noftre  deuoir.  Celuy 
donc  que  Dieu  a  conftitué  pour  maiftre  &do- 
ôeur  en  fa  maifon.il  faut  qu'il  foit  le  premier 
difciple  ,  qu'il  fe  rende  tant  plus  docile  pour 
rcceuoir  dofbrine  &  admonition  .  Voila  le 
premier  poinft.  Le  fécond, c'cftqu'aufsi  nous 
fouffrions  qu'on  nous  donne  confeii ,  qu'on 
nous  remonftre,  &que  nous  receuionsce  qui 
fera  le  meilleur.  Voila  dôc  ceqUefainft  Paul 
a  voulu  ici  en  fomm«  :  c'eflafçauoir  que  ceux 
qui  font  appelez  pour  anoncer  la  parole  de 
Dieu,  regardent  bien  de  n'auoir  pas  vne  tefte 
dure  ,  mais  qu'ils  foyent  dociles,  qu'ils  ayent 
▼nefpritbenin  Se  paifible,  qu'ils  nedemandét 
finon  à  édifier ,  qu'ils  ne  foyent  point  eleuez 
en  teile  prefomption  de  cuider  tout  fçauoir, 
mais  au  contraire,  quêtons  les  iours  ils  de- 
mandent d'apprendre,&  qu'ils  fonffrentaufsi 
d'eftre  enfeignez:&  auAi  qu'ils  foyét  traitta- 
bles  en  kurs  mœurs. Et  de  faift.nous  voyotaS 
que  tous  ceux  qui  font  ainfi  addôncz  à  fierté, 
deuiédront  tous  les  coups  fcliifmatiques.-c'eft 
àdire  qu'ils  feront  des  feues  en  l'Eglife  de 
Dieu  A  troubleront  tout.  Ainfi  donc  ce  n'eft 
point  fans  caufe  que  fainO:  Paul  a  voulu  cor- 
riger vne  telle  hauteflè.diiânt  que  c'eft  vn  cri 
me, comme  l'experiencelemonftre.Il Idioff- 
ftequant&  quant  ,  C*»'»/  ne  f^lt  point  colerr. 
^ui  eftvn  vice  prochain.  Car  fi  vn  homd  Ià(- 
^he  la  bride  à  fts  pafsions ,  il  eft  certain  que 
cela  l'empefchera  par  rrop-de  féruir  à  Dievr. 
£t  d'autant  que  l'yurongnerie  eftj>oi»t  au- 


Î4î 

^menter  encores  la  fierté  de  ceux  oui  delîa 
y  font  trop  enclins, &  que  cela  eft  comme  vne 
efpece  de  rage  ,  fainft  Paul  notamment  dic 
qu'il  faut  que  les  Miniftres  delà  parole  de 
Dieu  foyeftt  fobres,  &  non  point  adonnez  a» 
vin.  Car  fi  l'yurongnerie  règne  en  vn  hom- 
me ,  il  n'y  aura  nulle  raifon  ,  nulle  équité  ne 
modeftie.  Voilà  donc  autant  de  peftes  mortel 
les  que  fainft  Paul  nomme  de  vices,  defquels 
les  Miniftres  delà  Parole  fe  doiuent  garder. 
Il  adioufte  quat  &  quant,  Qu'ils  uefaytt  point 
hattiHTi  ne  no'/eux  :  qu'ils  ne  foyent  point 
comme  gendarmes ,  &  gens  tonCours  prefts  à 
defgainer.ayans  la  tefteàl'efcarmouche.com 
me  s'il  faloit  toufiours  auoir  l'efpee  au  poîg. 
Il  faut  bien  aufsi  que  ce  vice  foit  corrigé.  Fi- 
nalement il  met  l'auarice.  Or  il  ei\  certaitr 
qu'vn  homme  qui  tafchera  de  s'enrichir  ,  e- 
ftant  en  ceft  eftat.il  fera  comme  vn  raacqui- 
gnon  pour  farder  &  corrompre  la  parole  de 
Dieu  :  il  vowdra  complaire  à  Tvn  ,  il  voudra 
contenter  l'autre:brief,il  ne  fera  que  defgui- 
fer  &  falCfier  toutrou  bien  il  defguifera  les 
chofes  en  telle  forte  ,  qu'il  ne  demandera  ff- 
non  de  caller  la  voile  :  il  regardera  en  quoy 
il  pourra  profiter  ,  afin  d'attirer  la  farine  avt 
moulin, comme  on  dit.  Et  pourtat  fi  l'atiarice 
règne  aux  Miniftres  de  la  Parole,  il  eft  cer- 
tain qu'ils  feront  fauflàires ,  &  ne  feront  que 
peruertir  la  bonne  doftrine ,  Se  conuertir  ta 
vérité  en  menfonge.  Voila  donc  ce  que  nous 
auons  à  retenir  en  premier  hau  ,  quand  faind» 
Paul  ne  nome  pointles  vertus,  finon  encom— 
men  çant  par  ce  bout ,  que  ceux  qui  voudront  ' 
loyaument  s'acquitter  de  leur  deuoir,  édi- 
fiant l'Eglife  de  Dieu  ,  qu'il  faut  qu'ils  s'ab- 
ftienent  de  tous  crimes  &•  de  tous  vices  qui 
font  énormes, &  qui  font  dutoutinfupporta— 
blés  en  ceû  eftat  &  office.  Or  quant  &  qtlfcit 
il  adioufte  les  vertus ,  que  celuy  qui  eft  pour 
anoncer  la  parole  de  Dieu  ,  foit  amiable  en- 
uers  les  eftr3ngers,&  qu'il  les  reçoiue  humai- 
nement.Ceci  doit  eftre  obferué  en  tout  tépsr 
mais  (comme  nousauonsdeclaré  ci  deflùs  eir 
TEpiftre  à  Tiraothee  )  il  y  atioit  vne  raifoir 
fpeciale  lors  ,  d'autant  que  les  poures  fidèles 
eftoyent  comme  oifeaux  fur  la  branche,  qu'il 
faloir  que  par  volées  ils  allaflent  d'vn  lieu  à' 
autre,  ielon  que  les  perfeeutiôs  s'eleuoyent^ 
Se  que  les  feux  eftoyent  allumez, vne  bande  le 
leuoit.&s'en  alloit  èfi'vne  autre  ville, &  là  oii 
ils  pouuoyent  rqoiemefmes  ilreftt)yent  con- 
trâititsde  s'expofer  le  plus  fôuiiét  à  lamorr. 
Il  y  auoit  donc  là  grande  compahion.  AiaS 
ce  n'eft  point  fans  cxufe  que  fainl}  Paul  re- 
quiert que  l'Eucfque  qui  deuoit  eftre  comme 
père  de  l'Eglife, fuft  vn  home  libéral  Si  amia- 
ble aux  eftrangers,  pour  les  receuoir  bénigne 
rrtent.  C^eft  en  premier  lieu  ce  que  nous  auos 
Sobleruer.'  Pour  t  (ccond,  il  adiouftequ'ils- 
ayent  bonté.Et  cefte  vertu  eft  coiointe  à  cel- 
le que  n#rs  venons  de  dire.  Car  combien  que 
inirtCt  Paul  met  ici  vn  mot,  tant  v  a  qu'il  eoi- 

Zi.i. 


5:4^ 


SERMON    V. 


porte  Pamoar  d'humanité  ,  &  la  bonne  affe- 
ction qu'on  a  de  bien  faire  à  ceux  qui  lonc  en 
ncceûité  ,  &  d'y  appliquer  fon  eftiide,  Celiiy 
donc  qui  cllinliumain,qoi  n'a  nulle  pitié,  qui 
fe  tiendra  à  fou  aife  ,  ne  regardant  point  aux 
autres, il  eft  impofsiWe  qu'il  ait  la  vertu  de  re 
ceuoir  humainement  ceux  qui  l'ont  perfecu- 
tez&  affligez. Voila  pourquoy  S.Paul  a  con- 
ioint  ces  deux  vertus.  U  met  quant  &  quant, 
fohre,mfit,ftiincl,ittrem^é.  La  fobtieté  fe  rap- 
porte au  viure.  U  y  à  puis  après  la  lufticc,  qui 
eft  droiture,  quand  vn  homme  regarde  de 
rendre  à  chacun  fou  droiâ  ,  qui  ne  voudroit 
point  pour  mourir  auoir  fait  aucun  tort  ,  ni 
violence.niiniure  à  perfonne.  C'eltceque  S. 
Paul.a  entendu  parce  mot  de  lujiice.  Or  il  y  a 
la  faindteté  qui  fe  rapporte  principalement  à 
Dieu,c'eft  alçauoir  quâd  non  feulement  nous 
conuerfons  auec  no<  prochains  fans  mal  f.ii- 
re  ,  mais  aufsi  que  nous  fommes  chattes  ,  que 
nous  lomines  adonnez  à  feruit  à  Dieu,  q  nous 
auons  tout  ce  qui  eft  de  la  première  table  de 
la  Loy  pour  recommandé  :  c'eft  afçauoir,  les 
prières  &  les  oraifoBs,  l'hôraage  que  nous  fai 
Ions  à  Dieu.  Et  puis  que  noui  apprenions  de 
nous  retirer  de  ce  monde ,  n'eftans  point  ad- 
donnez  à  pompes  &  à  vanitez  Se  diflolutions, 
mais  pluftoft  fouffrans  en  toute  humilité  d'c- 
(Ire  recueillis  en  l'obeillance  de  Dieu.  Voila 
ce  qu'emporte  la  fainûeté.  Aufsi  la  iuftice  a 
fon  regard  aux  hommes  :  pource  que  c'eft  la 
vertu  par  laquelle  la  droiture  Se  équité  eft  ob 
feruee  enuers  vn  chacun.  U  y  a  Hnalement 
laltrtmf.tnce.  Or  ce  mot  eft  pour  compren- 
dre ce  qui  pouuoit  eftre  entendu  fous  le  mot 
de  fobneté.    Car  ce  n'eft  point  alTez  qu'au 
boire  &  au  manger  nous  foyons  fobres,  mais 
il  faut  aufsi  qu'il  y  ait  attrempance  &  hon- 
neftetcen  toutle  refte  denoftrevie,  &  que 
les  mains,  les  yeux.les  aiircilles  ,  &  la  bouche 
foycnt  comme  tenus  en  bride.   C'eft  à  quoy 
fainû  Paul  a  prétendu  par  l'attrempance,  qui 
lignifie  autant  comme  s'ildifoit  que  nous  de- 
uons  eftre  pofez  &  mqderez  ,  qu'il  n'y  doit 
auoii  nulles  dilTolutions ,  ni  geftes  impudi- 
ques en  nous, nulle  vanité  dont  on  apperçoi- 
ue  que  nous  foyons  diflblut  &  vileins  :  mais 
que  nous  deuons  eftre  retenus  tellement  fous 
l'obeilTancede  Dieu  ,  qu'on  appcrçoiue  que 
nous  auons  renôcé  au  monde. C'eft  en  fomme 
ce  qu'il  met  ici. Or  en  la  fin  il  adioufte,Q»'i7i 
foyent  frcfts  d' emhr.i/Jcr  la  faroU  fiJcle,  qui  eft 
félon  do£irine,Et  c'eft  le  principal  qui  cftxe- 
quis  aux  Mmiftres  de  la  Parole,  afçauoir  que 
non  feulement  ih  foyent  inftruits  pour  enlci 
gnerlcs  autres,  mais  qu'ils  foyent  forts  Si 
conftants  pour  tenir  bon  &  pour  batailler, 
quand  il  fera  queftion  de  maintenir  la  doctri- 
ne de  vérité,  à  ce  qu'elle  demeure  en  fon  en- 
tier. Et  voila  pourquoy  faiodt  Paul  vfc  d'vp 
mot  qui  fignifie  proprement  tenir  &  embraf 
fer.  11  faut  donc  que  nous  retcnionsja  «lortri 
lie  de  vérité:  car  il  nous  l'ciuon:  apprthcndee 


fort  &  ferme.iamais  elle  ne  nous  efchappera, 
combien  que  le  diable  machine  tout  ce  qui  fe 
ra  pohible  pour  nous  la  faire  efcourre  ,  que, 
neantmoins  lamais  nous  n'en  ferons  diuercit. 
Il  met  quant  &  quant  l'vfage  ,  à  ce  que  nous 
puifsions  exhorter  par  faine doûrine  ,Sc  rc- 
darguerles  contredifans  :  c'eft  afçauoir  que 
nous  ayons  la  faculté  &  moyen  d'enfeigner 
ceux  qui  font  prefts  d'obéir  à  Dieu  ,  &  qui  fe 
rendent  pailibles:  mais  que  nous  ayons  quant 
Se  quant  la  vertu  de  batailler  contre  les  con- 
tredilans,  contre  les  ennemis  de  la  parole  de 
Dieu,contre  les  rebelles,  contre  les  contem- 
pteurs,Cotre  gens  qui  tafchent  de  mettre  con 
tufion  en  l'Eglilc  ,  que  nous  ayons  vertu  & 
authorité  de  les  reprouuer  ,  en  forte  qu'ils 
demeurent  confus  au  combat.  Voila  en  fom-^ 
me  ce  qui  eft  ici  dit.  Or  deûa  nous  auoni  de»; 
claré,  quand  ùmû  Paul  veut  que  les  Paftcurs 
monftrent  le  chemin, qu'il  a  cftendu  ceci  conv 
munt-cment  i  tous  £deles. Car  pourquoy  eft- 
ce  que  les  Mmiftres  de  la  parole  de  Dieu  doi 
uent  eftre  attrempez,  luftes  Se  fainûs?  Pour- 
q.ioy  doiuent-ils  eftre  fobres,  non  point  ad- 
donnezau  vin.ni  à  noife.ni  à  batterie?  Pour- 
quoy doiuent-ils  eftre  ainfi  modérez.'  C'eft 
afin  que  la  parole  de  Dieu  ne  toit  point  en  op 
probre  quand  on  verra  des  vices  il  notables 
en  eux.  Et  puis  c'eft  afin  qu'ils  approuuent 
leur  dodrine  par  bonne  vie.qii'ils  la  ratifient 
tellemait  qu'elle  foit  roietsx  reccue.  Et  puis 
c'eft  afin  que  le  peuple  les  enfuiuer  &  qu'il  fc 
côforme  à  toutes  les  vertus  qu'il  verra  en  (ei 
Pafteurs.Apprenonsdonc  que  faind  Paul  n'a 
point  voulu  ici  aftraindre  feulement  les  Mt- 
niftres  de  la  Parole  à  fe  garder  de  toute  in- 
tempérance &  diffolution  ,  à  fuir  l'auarice  Se 
rorgueil,&  à  eftre  humains,  iiiftes, fobres, cha 
ftes;  mais  qu'à  leur  exemple  il  a  exhorté  tous 
fidèles  de  fc  régler  tellemenr ,  que  la  fobric- 
té  foit  vne  vertu  générale,  la  iuftice  ,  la  fain- 
ûeté,  l'attrempance,  &  toutes  chofes  dont  il 
eft  ici  fait  mention. Voulons-nous  donc  eftre 
approuuez  enfans  de  Dieu.''  Aduifons  de  cor- 
riger les  vices  qui  font  ici  condamnez  par 
fainil  Paul:  .iduifonsde  fuiure  les  vertus  lef- 
quelles  il  nous  propofc.  Et  de  fait, fi  vn  Mini 
ftre  eft  gouuerncur  en  la  raaifon  de  Dieu  ,  ce 
n'eft  pas  à  dire  que  nous  n'ayons  chacun  de 
nou' (c'eft  afçauoir  les  perfonncs  priuees)auf 
fi  bien  cefteftat  pour  feruirdem.;iftre.Q_uâd 
Dieu  appelle  certains  perfonnages  pour  anô- 
cer  fa  parole ,  ce  n'eft  pas  qu'il  quitte  les  au- 
tres ,  ne  qu'il  ne  fe  yueille  point  leruir  d'eux: 
mais  au  contraire, c'eft  afin  qu'il  foit  ferui  de 
toUN  fans  exception.  Voila  Jonc  à  quelle  con 
dition&  à  quelle  fin  Dieu  nous  a  ordonnez 
PiOUBaiioncer  d  parpje,  c'eft  que  toui  foyent 
adonnez  à  fon  fcruice.  Car  quand  Dit  u  nous 
fait  ceft  honneur  de  nous  rcccuoir.de  1^3  mai- 
fon  ,  -&de  nous  adopter  pour  fes  cntans ,  ce 
n'eft  pas  que  nous  foyons  oififs  ,.  ou  bien  il 
ne  nouî,met  pas  l.i  bride  fur  le  col  pourdirc 

^;l'^■« 


SVR    L*  EPIS  T.   A  TITE. 


f4T 


quVn  chacun  s'ingefe  à  fan  appecit  :  mais  il 
BOUS  yeut  tenir  fous  fon  ioug  ,  &  veutqu'vn 
chacun  s'employe  à  Je,  glorifier.  Car  (comme 
nous  auons  veu  par  ci  Jeiiant)  puis  cjue  Dieu 
nous  fait  ccfl  honneur  de  nous  employer  à 
,  fon  feruice  ,  il  ne  faut  psint  que  nous  foyons 
inutiles.  Carce  ii'ell  point  en  vain  tjuc  Dieu 
nous  a  appelez  en  tel  cftat  ,  &  en  vne  dignité 
fi  hante  ,  non  feulement  d\lhe  fes  doincfti- 
i^ues.mais  d'eftre  de  la  compagnie  Se  du  rang 
de  fes  enfans.  £t  pourtant,  cjiic  les  Miniftres 
de  la  Parole  regardent  bien  à  eux  de  près  :  & 
que  cependant  aufsi  tous  Chrcft.cs  cognoif- 
fent  qu'ici  ils  ont  vne  rcglc  qui  les  atcoiiche 
&  les  comprend  tous,  depuis  le  plus  grâd  iui- 
ques  au  plus  petit.  Et  ainfi  regardons  d'tftre 
menez  de  ceft  efprit  d'atcremparce  ,  de  ceft 
efprit  de  fobrieté  ,&de  iullice,&'de  fainfte- 
té.dont  fairû  Paul  parle  ici:  &  regardes  auf- 
fi  d'eftre  tellement  bridez, que  les  vices  donc 
il  parle  ne  régnent  point  en  nous.  Comme 
»oiJa  l'yurongnene  qui  eft  vne  chofeaiifii 
contraire  à  tous  fidèles  qu'il  en  y  .tic  point. 
Carfi  les  hommes  font  tous  formez  à  l'ima- 
ge de  Dieu,& qu'vn  yuôrgne  s'abbrutifle  tel- 
lement, qu'il  eft  comme  vne  befle  lans  raifon 
ni  entédement,ne  deuons-nous  pas  eftre  tant 
plus  fongneux  de  nous  retenir?  Car  quand 
les  hommes  s'abbniciffent  ainfî  ,  quand  ils 
i'enyurent,  non  feulement  ils  effacée  l'image 
de  Dieii,voire  laquelle  a  eilé  rcpareeen  nous 
par  noftre  Seigneur  lefiis  Chuft ,  mais  toute 
liôneftetéde  vie,  qu'ils  font  là  comme  chiens 
&  pourceaux.  Si  donc  nous  voulons  eftre  re- 
putez  enfans  de  Dieu,  nefaur-ilpas  que  ce 
vice  foit  cflongné  de  non?  Et  voila  pour- 
quoy  fainû  Paul  excommunie  tous  yuron- 
cncs  ,  qu'il  ne  veut  p  Jint  mefmc  qu'on  com- 
munique auec  eux  ,  ne  qu'on  les  hantç  ,  afin 
qu'ils  foycnt  vaincuv  de  vcrgongne  pour  fe 
corriger,  tant  s'en  fau  qu'ils  doiucnt  eftre 
admis  à  la  fau.fte  table  de  noftre  Seigneur  le 
fus  Chnlt.Êt  puis  l'orgueil  &  la  fieite  n'eft- 
elle  pas  du  tout  contraire  à  l'cfprit  de  nian- 
fuetude  ,  qui  eft  la  vraye  marquede'  enfans 
de  Dieu?  En  quoy  cogiio:ftra-on  que  nou^  a- 
uons  profilé  en  l'cfcole  de  noftre  Seigneur 
lefu^  Chnft?  Si  nous  fomme  humbles  &  pe- 
tis  &  débonnaires.  Et  amfi  c'cft  ligne  qi:ai:d 
la  fierté  dominera  en  vn  homme,  qu'il  fera  a- 
donné  à  fon  fens  &  à  fon  cerutau, qu'il  n'a  la 
mais  gouftc  que  c'citoit  de  profiter  en  l'e- 
fcole  de  Dieu  ,  ni  de  noftre  Seigocur  Icfu? 
Chnft.  Nous  voyons  donc  que  les  venus  dôc 
parle  fainft  Paul ,  ne  font  pas  feulement  pour 
les  Minilties  de  la  parole  de  Dieu  ,  r.iais  que 
elles  font  communes  à  tout  le  troupeau  &  à  . 
tout  le  peuple.  Autant  en  eft-ilderauancc. 
car  nous  voyons  qu'en  penfant  trop  de  ce  mô 
de, nous  oublions  les  biens  fpirituels,  &  l'hé- 
ritage auquel  Dieu  nous  conuie.  Puis  qu'ainfi 
eft  donc  ,  que  fera-ce  quand  l'auarice  regnc- 
la,  ^iiouc  en  feiom  teJlcraét  empefchez.que 


nous  ferons  tellement  enueloppex  aux  folici 
tudes  des  biens  de  ce  mode,  qu'il  ne  nous  foa 
uiendra  plus  de  la  vie  cclefte?  Et  encores  que 
nous  en  ayons  les  aureilles  battues  ,  &   que 
iournellcment  ce  vice  nous  foit  reproché  ,  fi 
eft-ccque  nous  nelaiffeiés  pas  d'eftre  touf- 
iours  préoccupez  de  ces  folicitudes  terrien- 
nes,&;  ferons  tellement  attachez  à  ce  monde, 
que  nous  ne  pourrons  eleuer  nos  efprits  en 
haut  pour  con(épler  la  vi«  cdefte:  tellement 
que  ce  qui  eft  dit  fe  trouuera  toufiours  véri- 
table en  nous ,  que  là  où  eft  noftre  threfor,  là 
fera  noftre  cœur.  Et  ceux  qui  font  adonnei 
aux  biens  de  ce  monde, ils  y  mettent  tellcmét 
leurs  peufces  &  leurs  alfcftions ,  qu'il  eft  im- 
pof.ible  qu'ils  afpirent  à  ceft  héritage  où 
Dieu  nous  conuie.   Et  ainfi  nous  voyons  que 
l'auarice  eft  vne  pefte  mortelle  qui  aueugle 
les  hommes ,  &  les  defpouille  de  ce  que  Dieu 
leur  promet.  Se  mefmes  ce  n'cft  pas  fans  cau- 
fe  que  S.  Paul  l'appelle  racine  de  tous  maux:  '•  ''""• 
car  elle  emporte  de  faift  les  fraudes  &  mef-  ^-lo* 
chantes  praitiques,  les  trahifons,  Icsdelloy- 
ïiitez  &  cruautez.Brief.il  n'y  a  nul  mal  qui  ne 
procède  d'auaricc.  Car  fi  vn  homme  tafchc 
d'en  auoir  ,  il  oubliera  toute  droiture  ,  corn- 
mefi  tout  luy  cftoit  licite;  il  prendra  licence 
derauir,  de  piller,  d'arracher  tout  ce  qui  luy 
fera  polsible.  Puis  après,  il  fc  moquera  de 
Dieu  pleinement ,  Se  n'en  aura  nulle  crain- 
te ,   qu'il  ne  fera  queftion  que  d'vfer  d'ou- 
trages &  de  violences:  comme  nous  voyons 
que  l'aiiaiice  amener.!  les  hommes  iufques  là, 
de  s'entretuer  ,  de  s'empoifonner  ,  Se  de  fai- 
re toutes  mcfchancetez.   Brief ,  c'cft  vne  ra- 
ge qui  poffcdc  les  hommes  ,  tellement  que 
ils  font  comme  endiablez  quand  ils  font  ain- 
ii  adonnez  à  l'auarice  .    Voila  donc  vnecho- 
fc  que  doiucnt  bien  fuir  les  Miniftres  de  la 
parole  de  Dieu  :  &  aufsi  chacun  des  fidèles 
s'en  doit  garder  en  fon  endroit.  Et  puis  il  eft 
dit  que  les  enfans  de  Dieu  doiuent  eftre  non 
feulement  paifibics,  mais  frncur.ms  î*  p.iix. 
C'eft  vne  marque  par  laquelle  noftre  Sei- 
gneur Icfus  Chnft  vtut  qu'ils  foyét  cognus. 
Bicn-hcureux  font  ceux  qui  procurét  la  pair, 
car  ils  feront  appelez  enfans  de  Dieu.    Or     "'■•î-î- 
maintenant  fi  nous  fonimes  vindicatifs  Si  noi 
feux, aimas  le?  querelles, n'eft-ce  point  pour 
monftrer  que  la  paix  de  Dieu  ne  rtgne  point 
en  nous,&:  que  nous  ne  tenons  rien  de  luy?  Et 
nous  fjauons  que  tout  parentage  &  conion- 
ftion  procède  de  Dicu,&  en  fommes  admone 
ftez  afin  que  nous  «y  ons  fraternité  enfemble. 
Si  cefte  v  mon  facree,  pour  t  ftre  comme  mem 
bres  d'vn  corps. Ceux  donc  qui  font  ainfî  noi 
feux  5:  pk  ins  de  quercle,  côineiu  fera-il  pof- 
fible  qu'ils  ft  nomment  eufan.s  de  Dieu?  Fina 
lement  aduifons  d'eftre  aulW  humains  cnuers 
ks  eftrangers ,  qnand  nous  les  verrons  defti- 
tuez  d'aide  Si  de  fecours.  Car  c'eft  vnebarba 
rie  trop  vileine  quand  on  n'aura  nulle  pitié 
&  côpafsiosdeceux  qui  font  defnucz  :  S^cc- 

Z.  ii> 


Î48 


SERMON    V. 


bi  fft-é  pirtrop  noté,*efme  entre  lei  Payés, 
ou'iJt  ontdtffamé  ceux  qui  n'auoyét  point  ce- 
tte raWbn  &doâ:rineen  eux.de  recueillir  ceux 
qui  efloyentainfi  dcflogez.  Doncpar  plus  for 
te  ration, quand  nous  voyons  l'Eglife  de  Dieu 
«lire  tourmentée  parles  tyrans  &  ennemis  de 
vérité,  que  les  poures  fidèles  font  deflogez,  fi 
nous  ne  les  recueillons  humainement, nVft-ce 
pa»  figue  q  nous  renôçons  à  Dieu?  Voila  Dieu 
oui  veut  que  nous  foyons  eftrangers  en  ce  mô 
«c,&nous  fommes  aul'si  fes  enfans  à  telle  con 
dition(commerAportrcen  parle  en  TEpirtre 
„  «  aux  Hebrieux.)  Dieucftauciel,&  cepédant  il 

*  defcend  ici  à  nous,&  nous  veut  gouuerner:  ne 
nous  raonftre-il  pas  donc  par  fon  exéple  com 
me  nous  dcuons  auoir  pitié  de  ceux  qui  le  reti 
lent  à  nous,&  qui  demandent  refuge, quand  ils 
font  comme  poiires  moutons  efcartez  par  les 
loups  rauiflàns?  Et  ainfî  ce  n'a  point  efté  feu- 
lement aux  miniftres  de  la  parole  de  Dieu  que 
faind  Paul  a  parlé, mais  en  leurs  perfonnes  il  a 
donné  côraevn  miroir  auquel  il  nous  faut  tous 
cftre  côformes, comme  en  ce  qui  s'enfuit,  que 
nous  foyons  addonncz  à  bien  faire  &  à  bonté. 
Car  fi  nous  auons  cefte  rigueur  en  nous, de  ne 
nous  foucier  point  defecourirà  ceux  qui  ont 
faute  &  indigence,  que  nous  ne  foyons  point 
cfmeus  de  compaAion ,  voyans  que  nos  pro- 
chains endurent,  il  eft  certain  que  nous  ne  te- 
nons rien  de  Dieu  .  Et  qu'ainfi  foit,  voila  en 
quoy  Dieu  veut  que  nous  foyons  configurez  à 
fon  image, c'eft  en  bien  faifant:  comme  noftre 
Hat.s.  Seiggeur  lefus  aufsi  nous  môflre  que  tel  eft  !e 
4Î>  Père  celefte, qui  fait  luire  fon  foleil,  non  feule 

met  fur  les  bons,  mais  fur  ceux  qui  en  font  in- 
dignes.Qiiedeuons-nous  donc  faire  fînondc 
regarder  ce  que  Dieu  nous  a  mis  entre  mains, 
tognoilTans  que  c'eft  afin  que  nous  communi- 
Buiont  enfemblc  ,  &  qu'vn  chacun  férue  à  Ces 
prochains?  Carautremétileuft  falu  que  Dieu 
curtbafti  autant  de  modes  qu'il  va  d'hommes 
Se  de  femmes,  s'il  faloit  qu'vn  chacun  fuftad- 
donné  à  foy.s'il  faloit(di-ie)que  nous  fufsiôs 
chacun  reclus  envnanglet.  Mais  d'autant  que 
Dieu  nous  a  aflociez  enfemble,&  qu'il  ya  vne 
vie  cômune.il  faut  qu'vn  chacun  conclue  qu'il 
n'eft  point  nay  pour  foy  ,&  qu'il  ne  vit  point 
en  ce  monde  pour  fon  profit,  mais  pour  comu 
niquer  &  pour  feniir  à  fcs  prochains.  Et  mal- 
heur fur  nous  fi  nous  n'auons  cefte  confidera- 
tion-Ia.Aduifons  Jonc  que  nous  ayons  bonté, 
e'eftà  dire  tant  qu'il  nous  fera  pofsible,&que 
le  moyen  Se  la  faculté  nous  fera  donnée,  que 
BOUS  aduifions(di-ie)de  bien  faire  h  tous,&  de 
fccourir  ceux  qui  ont  faute  de  noftre  aid  e  ,  5: 
les  foiilager,&  communiquer  auec  eux  en  tel- 
le forte,  que  ce  que  nous  auons  ne  foit  point 
feulement  à  nous,  mais  que  l'vtilité  en  rfuie- 
ne  à  chacun  ,  félon  que  noftre  faculté  le  por- 
tera. Il  eft  vray  qu'ici  on  ne  peut  pas  impofcr 
loy  certaine  :  comme  aufsi  fainft  Paul  fecon 
tente  de  nous  exhorter  que  nous 'y  aillions 
d'vnc  afFcftion  franche  &  liberalc:mais  fi  cft- 


ce  que  nous  mooAroBf  bien  que  bous  ne  fom 
mes  nullement  enfans  de  Dieu.fi  nous  n'auon» 
cefte  amour  &  bonté  en  nous  pour  bien  faire 
à  ceux  qui  en  ont  faute. Et  mefmei  quad  norf» 
défaillons  en  ccft  endroit,  nousdeprauonsce 
qui  nous  deuroit  eftre cognu mefmes  déna- 
ture, encores  que  nous  n'eufsions  ne  foy  ,  ne 
religion, ne  cognoiflance  de  la  Loy  ni  de  l'E- 
uangile.Il  y  a  puis  après  la  fobrieté  &  attrem- 
pance,qui  eft  pour  nous  monftrer  que  fi  nous 
fommes  Chreftiens,  ce  n'eft  pas  aflez  de  nous 
abftenird'iniures,d'extorfions,de  violences, 
de  cruautez  ,  d'vfurcs,  de  pillages,  &  de  rapi- 
nes: mais  qu'il  faut  aufsi  que  nous  ayons  vne 
telle  moftedie.que  nous  ne  foyons  point  mon 
dains.ni  adonnez  À  toute  vanité,  comme  font 
ceux  qui  ne  demandent  que  de  fe  monftret 
par  grandes  parades,&d'eftrepri fez  ,  d'eftre 
braues,&  regardez  de  loin.  Ceux  qui  auront 
tous  cei  menus  fatras  en  la  tefte  ,  monftrent 
bien  que  le  monde  domine  encore  en  eux  par 
trop, &  qu'ils  font  gens  diffolusqui  ne  deman 
dent  qu'à  gourmander  &  à  remplir  leur  ven- 
tre,tant  s'en  faut  qu'ils  ayent  profité  en  l'el- 
chole  de  Dieu  ,  qu'ils  ne  font  pas  dignes  d'e- 
ftre recognus  du  nombre  d&s  homes.  Car  s'il 
y  auoit  quelque  honntftcté.ils  rctiendroyent 
cela.  Car  font-ils ainfi  intcmperans  au  boire 
&  au  manger  ?  ils  font  aufil  diflolus  en  toute 
leur  vie.  Et  puis  les  yurongnes  fonttellemét 
tranfportezde  leur  fens, qu'ils  fe  tuent  d'eux- 
mefines, comme  s'ils  fe  vouloyent  coupper  la 
gorge:quand  ils  vienent  à  table, ils  s'y  mettét 
comme  chiens,&  s'en  leucnt  côme  pourceaux. 
Car  ils  font  intemperans  en  leur  boire  &  en 
leur  manger,en  forte  qu'ils  fe  rendétdutout 
inutiles.  Quand  donc  il  n'y  a  nulle  raifon  auit 
homes  au  boire  &  au  manger,  diront-ils  qu'ils 
ay  et  appris  d'eftre  nourris  de  la  main  deDieu? 
Caries  Payens  doyuent  auoir  plus  d'honne- 
ftctéen  eux  (côme  défia  nous  auons  déclaré) 
que  nature  les  conduit  à  cela.  Or  nous  auont 
vne  inftruftion  plus  parfaite ,  &  qui  doit  bien 
réprimer  nos  appetis  beaucoup  mieux:  c'eft  â 
nous  demadons  à  Dieu  noftre  pain  ordinaire, 
que  nous  deuons  toufiours  penfer  qu'au  boire 
&  au  manger  nous  rcccuons  tout  de  fa  main. 
Et  fi  nous  en  abufons  en  gouimandife  &:  y- 
urongnerie,n'eft-ce  point  comme  effacer  fon 
image  en  nous?Et  puis  ne  môftrons-nous  pa» 
que  nous  fommes  tellement  attachez  aux  cho 
{es  caduques  de  ce  monde, que  nous  en  oubliés 
le  ciel?  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  rete- 
nir de  ce  pafïàge.  Et  puis  finalement,  quand 
faind  P4ul  met  que  les  Euefques  foyentiiiftes 
&  fiinfts  ,  cognoilTons  qu'en  gênerai  il  faut  q 
nous  ayons  ceftcdroiture  &  equité,de  rendre 
à  chacun  ce  qui  hiy  appartient  :  ce  qui  ne  fe 
peut  faire  qu'en  fe  gardant  de  toutes  haiides 
&  malices.   Que  donc  nous  ne  foyons  point 
fins  pour  noftre  profit, mais  que  nous  aduiflôs 
ce  qui  eft  deu  à  chacun,  afin  de  nûu<;  acquitter 
de  noftre  dcuoir.Or  aiions-uouy ainfi  (;ôucrfé 

entre 


s  V  R  L*  Ë  P  r  s  T.    A   T  I  T  E.  ^^ 

tntreleïî>5mêj  fans  aucun  maléfice  nenuifan  infeparable.Orpui?  quel'Enângile  te«dicc- 

ce?Aduifons  aufsi  de  noui  gotiuerner  tcllemét  fte  fin,  il  s'enfuit  au/si  que  nous  fommes  coi»- 

deuant  Pieu.quc  nous  raonftrionsqu'il  y  a  7-  fermez  en  ceftemefinc  doftrihe  par  la  fnaâe 

■e  vraye  fainâeté  en  nous:c5mede  faift  il  n'y  Cène, qui  nous  eft  mife  au  deuant  pour  la  jccc 

a  rien  plijscômun  en  toute  rEfcriturefainfte,  uoir.  Venoas-nousdonc  icefte  fainfte  table.» 

fiion  que  Dieu  pour  nous  feparer  de  toutes  Coguoiflons  que  noftre  Seigneur  lefus  CJirirt 

les  pollutions  de  ce  monde.môftrc  que  la  fain  fe  prefente  ici  à  nous.afin  que  nous  foyôs  con 

ûeté  emporte  cela,  q  nous  foyons  coiue  nour  fermez  en  l'vnion  que  nous  auôs  défia  receue 

ris  en  fa  maifon,que  nous  foyons  côme  fes  do  par  la  foy  de  l'Euangile,  8c  que  nous  fommct 


mcfhques,  tellement  q  fon  fainft  Efprit  règne 
en  nous.  Voila  donc  en  fomme  ce  que  nous  a- 
uons  à  obferuer.Et  pourtant  regardés  de  plus 
près  à  nous  que  nous  n'auôs  point  fait.  Q^ac 
"'à  ce  que  S.  Paul  requiert  delà  doârine,  nous 
en  traitterons  après  difner,au  plaiiir  de  Dieu. 


tellement  entez  en  fon  corps,  qu'il  habite  eo 
nous.&nous  enluy.Il  faut  d5c  que  nous  met- 
tions peine  de  profiter  en  cefte  vnion  fîmàe 
de  plus  en  plus  ,  Se  que  nous  adhérions  mieux 
que  nous  n'auons  point  fait  au  Filsdé'Dieo. 
Et  Toila  pourquoy  l'vfage  de  la  fainûe  Ccne 


'Mais  pour  le  prefent  qu'il  nouî  fuffife  de  re-    nous  eft  tant  requis  :  voila  pourquoy  aufii  *l 
.•„;_«„':^;  r,;„A  d»,.i  n«,,r  t„«mI,,  k^iiior  „_     nous  eft  réitéré, d'autant  que  nous  fommes  ter 

reftres  &  charnels  cepéJant  que  nous  conue*^- 
fons  en  ce  monde,  il  faut  que  ce  qui  nous  a  e— 
fté  môftré  pour  vn  coup,  nous  foit  réduit  fos 
uent  en  mémoire,  afin  que  nous  en  receuions 
le  fruia  qui  nous  y  eft  propofé.  Et  pour  ce  fai 
re,  que  nous  aduifios  bien  de  ne  point  propha 
ner  la  grâce  qu'il  nous  fait,quandil  nous  rend 
tefmoignage  par  vn  tel  figne  que  nous  coramu 
iiic]uons  vrayement  à  fon  Fils  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift,  que  nous  le  pries  qu'il  nous  gou 
uerne  tellemét  par  fon  fainft  Efprit,  que  nous 
ne  venions  point  à  polluer  cefte  fainSc  table, 
mais  qu'ayans  cognu'que  nous  fommes  po- 
urcs  &  miferables  créatures, nous  veniôs  à  no- 
iftre  Seigneur  lefus  Chrift,afin  qu'il  nous  pur- 
ge de  toutes  nos  macules,  comme  il  eft  la  fon 
taine  de  toute  pureté,  qu'il  nous  nettoyé  tel- 


tenir  qu'ici  fainft  Paul  nous  a  voulu  bailler  v 
ne  règle  qui  côcerne  tous  fidèles,  afin  que  per 
fonne  nes'encuide  excpter.  Or  il  refte  main- 
tenant de  fçauoir  comme  nous  pourrons  par- 
uenir  à  ces  vertus,  &  come  nous  pourrons  don 
ter  &  abolir  en  nous  les  vices  qui  font  ici  con 
danez.Helas,ce  ne  fera  point  de  noftre  franc- 
arbitre,  ne  de  noftre  habilité  ,  mais  il  faut  que 
Dieu  y  befongne.Etcôment?Qiie  nous  foyôs 
des  membres  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift. 
Tl  eft  dit  que  nous  deuons  eftre  iuftes,  fainft?, 
febres,attrempez.Et  commet  cela?  QMnd  le 
fainft  Efprit  dominera  en  nous, alors  nous  au- 
rons des  vertus.Ueftdit  que  nousdeuons fuir 
yurongnerie,intemperance;noife,debats,  fier 
té. Et  comment  î  Ayans  l'efprit  de  manfiietu- 
de,  l'efprit  d'humilité  ,  l'efprit  de  crainte  de 
Dieu, l'efprit  de  prudence  &dedifcretion.Or 
tout  ceiaa  efté  donné  à  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift,  afin  qu'il  le  communique  à  fet  fidèles. 
D'autant  donc  que  de  nature  nous  fommes  in- 
temperans,  que  nous  fommes  pleins  de  vanité 
&  de  menfonge  ,  pleins  d'ambition  Se  d'or- 
gueil .addonnez  à  iniuftice,  à  fraudes,  à  rapi- 
nes: d'autant  que  nous  lafchons  la  bride  à  nos 
appetisdefordônez,  venons  noui  ranger  fous 
le  chef  qui  a  efté  eftabli,cognoi(ror.s  qu'il  n'y 
a  autre  moyen  d'eftre  preferuez  en  l'obeiflàn- 
ce  de  Dieu,&  de  viiire  fclon  fa  volonté,  fiiion 
que  nous  foyons  vnis  au  corps  de  noftre  Sei- 
gneur Icfu';  Chrift.Car  alors  fon  ûindl  Elprit 
eft  efpandu  fur  nous, qui  eft  pour  nous  confer 
mer  tant  mieux, d'autant  que  c'eftia  fourcede 
toute  fainfteté,de  toute  iuftice,&de  toute  per 
feftion  en  foinme.  Voila  donc  le  moyen  que 
nous  auons  à  tenir  ,  Se  par  lequel  il  nous  faut 
paruenir  àce  que  faintî  Paul  nou's  côinandeen 
ce  paflage  .  Et  c'eft  la  caufe  pourquoy  il  nous 
eft  monftré  iournellcmét  que  nous  fommes  ap 
pelez  à  la  communion  de  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift.  Car  quand  fainft  Paul  veut  définir 
en  brief  la  fin  de  r£uangile,&  l'on  vray  vfage, 
il  dit  que  nous  fommes  appeliez  pour  cômuni 
quer  à  noftre  Seigneur  lefus ,  pour  eftre  vnis 
tellement  auec  luy,  que  nous  y  foyons  incor- 
porez,&  qu'il  habite  quant  &  quât  en  nous,  &• 
que  nous  foyons  conigints  enfemble  d'vn  lien 


lement  que  nous  defpouillions  tous  nos  vices, 
afin  qu'ils  ne  régnent  point  en  nous,  combien 
qu'ils  y  habitent  :  mais  que  foii  fainft  Efprit 
domine  tellement  fur  nous, qu'on  apperçoyue 
que  vrayement  nous  fommes  vnis  à  luy  ,  que 
nous  fommes  retirez  de  ce  monde  pour  cer- 
cher  les  chofes  fpirituelles:&:  que  nous  batail- 
lions tellement  contre  les  vanitez  de  noftre 
chair,&  toutes  nos  atfcftions  corrompues, que 
nous  nedemandions  finon  de  nous  conformer 
de  plus  en  plus  à  fon  image, pour  eftre  vraye- 
ment recognus  &aduouez  pour  fes  cnfans,  & 
que  le  Père  celefte  nous  veut  tenir  &  aduouer 
pour  fes  héritiers. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoifTance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir  que  nous  n'auons  point  fait, afin  de  nous 
y  defplaire,&  en  nous  y  defplaifantde  recou- 
rir à  luy,  Se  nous  prefenter  en  facrifice  ,  afin 
que  nous  ayant  mortifiez  ,  il  luy  plaife  nous 
renouuclleren  forte  que  fon  nom  foit  touf- 
iours  glorifié  par  nous. Et  que  cependant  il  fe 
monftre  toufiours  Père  enuers  nous ,  en  nous 
fupportant  en  nos  imperfertions ,  iufques  à'ce 
qu'il  nous  en  ait  defpoiiillez  du  tout.  Ainfî 
nous  dirons  tous,Dieu  tout-puiflànt,Pere  ce- 
lefte,*c. 

Zz.iii. 


jj^o  s  E  R  M  O  N     V  I. 

SIXIEME     SERMON     SVR     LF 

PREMIERCHAPITRE. 

"7  Car  il  faut  que  rEuefqueJoitJàns  crime  y  comme  difpenfateur 
deDicu.non point fier,ne cholcre,7ji addonné au  \in,neb3tcur,  necort' 
uoiteuxdegaindeshoneîle: 

8  Mais  fanant  recueil  'volontiers  aux  eîlrangers,  amateur  de  hon 
té,prudentju^e,fainci,attrempé, 

5  Emhrajfant  la  Parole  fidèle,  qui  e  fi  félon  doBrinc-  afin  qùilfoit 
puiffant  d' admoneSler  par  faine  doSlrine ,  ^  reprendre  ceux  qui  con- 
tredifent. 


PRES  que  faina  Paul  a 
déclaré  quelle  doit  élire  la 
vie  de  ceux  qui  anoncent  la 
parole  de  Dieu  :  afin  qu'ils 
puifTent  tant  mi(.ux  édifier, 
quand  enverra  que  c'eftà 
bon  efcient  qu'ils  parlent. 
&envraye  crainte  de  Dieu,  iladioufte  ce  qui 
tft  le  principal  :  c'eftafçauoir  qu'ils  periîftcnt 
«enflamment  en  bonne  doftnne  &  pure  .  Or 
ceci  prefuppofe  que  delîa  ils  y  foyent  enfei- 
gneï .  Et  telle  conllance  ne  peut  elhe  qu'il  ne 
y  ait  bon  fondement  en  premier  lieu .  Voila 
,  cnquoy  nousdifcernons  les  opiniaftres  d'a- 
«ec  ceux  qui  font  conftans. Quand  vn  homme 
cftant  eltourdi  prédra  quelque  folle  phantafie 
fans  inftiudion,làdelTus  il  fera  tellement  ob- 
ftiné,  qu'il  ne  receura  rien  qu'on  luy  dife  .  Or 
cela  ne  doit  point  eftre  réputé  à  vertu,  quand 
vu  homme  ne  change  point  propos,  qu'on  ne 
luy  puifle  point  oder  vne  folle  opinion  de  fa 
tcflc:  mais  la  conltâce  doit  toufiours  cftre  fon 
dce  en  raifon,&  en  vérité.  Sainû  Pauldoncdi 
fantqueles  Palleurs  doyuent  tenir  la  doctri- 
ne comme  s'ils  l'aucyent  embrafTee  pour  ja- 
mais ne  lalaifler  eichapper,il  entend  qu'ils 
foyent deueraent  informez  quec'eft  la  venté 
de  Dieu  qu'ils  fuyuent ,  &  qu'ils  ayent  ccfte 
coiiclufiun  bien  prinfe  en  eux,  &  vne  telle  ccr 
tiîude, qu'ils  puiUent  rendre  tefmoignage  que 
ils  fçauent  bien  de  qui  ils  la  tiencnt.afin  qu'on 
ne  les  puifîè  esbranler  ne  çà  nelà.Ainfien 
fommc,  fainû  Paul  déclare  encepaflàgcque 
nul  n'cft  propre  pour  gouuerner  l'Eglife  de 
Dieu, finon  qu'il  fol  t  fuffifant  pour  en  feigne  r. 
Mais  il  adioultcla  fermeté  que  nous  auons  di 
te,qu'vn  homme  ne  fou  point  vatia!»le:&  cora 
bien  que  les  vents  &  tourbillonb  felcuentde 
tous  coftcz  ,  qu'il  pcrfifte  eu  ce  qu'il  cognoift 
cftie  de  Dieu  .  Or  cependant  fairtt  Paul  veut 
nue  la  doftnue  s'applique  à  l'inftruftion  du 
BeHple,!ldlt,Pjri)/f  (dtle,qu!  eji  f,rl/ti  daCIrhie, 
c'clt  à  due ,  qui  fou  propre  pour  édifier.  Car 
Dieu  ne  veut  point  paiûre  nos  aurcilles  quand 


il  cômande  que  fa  Parole  nous  foit  prefchee," 
comme  il  y  en  a  beaucoup  qui  n'apportét  que 
vne  folle  curiolîté  quand  ils  vienent  au  fer- 
mon  .  Or  Dieu  regarde  vn  autre  fin  ,  c'eft  que 
nous  foyons  édifiez  à  profit,  comme  on  du  .  Il 
y  a  donc  ce  poinû-la.D'autrepart  iaind  Paul 
adioufte  que  ce  n'eft  point  alFez  que  les  Pa- 
lleursconduifent  ceux  qui  fe  rendent  dociles 
&  fuiets  de  leur  bon  gré  ,  mais  qu'ils  doyuent 
eflre  armez  pour  refiiter  à  tous  contredilàns: 
que  s'il  y  en  a  qui  s'eleuét  contre  la  parole  de 
Dieu  ,  que  ctluy  qui  eft  ordonné  Pafteur  foit 
puiflànt(dit-il)pour  les  redarguer.  Nous  voy 
ons  donc  maintenant  ce  qui  eft  ici  contenu. Et 
ce  n'eft  point  fans  caufe  que  S.  Paul  requière 
telle  doftrine  en  ceux  que  Dieu  conllitue  en 
fa  maifon.Car  fi  vn  homme  ordonne  vn  proeu 
reur  en  là  famille, il  luy  baillera  quant  Se.  quac 
(a  charge. Or  quelle  eft  la  charge  qui  nous  elt 
cômife  de  Dieu, finon  de  diihibuei  à  fon  peu- 
ple la  pafturcdc  vie,  c'eft  à  dire  fa  Parole  ?  Si 
donc  nous  n'auô»  cela,  ii'cft-ce  point  vn  titre 
volage  d'eftre  nommez  Paftcurs?  Si  qiiclqu'vn 
feditoit  berger  d'vn  troupeau  de  moutons, ou 
de  bœufs ,&  qu'il  laiflàft  les  poure».  btftesmou 
rir  de  faim,  ne  meriteroit-il  point  d'eftre  lapi 
dé.'  Or  nous  fommes  bergers, non  point  de  be 
ftes'  brutes, mais  des  enfans  de  Dieu  :  &  puis  il 
eftqueftionde  nourrir  , non  pas  les  corps  de 
viande  corruptible  ,  mais  les  âmes  du  pain  ce- 
Icftiel .  Q_uand  donc  nous  n'aurions  de  qiioy 
pour  fournir  à  noftre  office ,  n'eft-ce  pas  fe 
mocquer  de  Dieu  par  trop,  en  vfurpant  ce  ti- 
tre tant  honorable, &  que  la  chofe  ne  refpon- 
de  point?  Ainfi  donc  notons  que  ce  font  cho- 
fes  infeparables  d'eftre  Paftcurs  ,  Suiueillaoj, 
ou  Miniftres,  Preftrej  &  gouuerneurs  d'Egli- 
fc^d'auoir  doctrine  pour  édifier  le  pcuplede 
Dieu.  Et  en  cela  voit-on  quelle  Egliic  il  y  a 
en  la  Papauté. Us  fe  glorifieront  à  pleine  bou- 
che de  leur  principauté  facree:&  c'eft  leur  ar- 
gument principal  qu'ils  pienf  nt  pour  rcietter 
mefmes  toute  la  parole  de  Dieu  ,  afin  qu'elle 
n'ait  poiatd'authoricé.  Quandnous  allcguôs 

l'Efcti 


SVR    L'EPIS 

rEfcrîture  fâinôe  ,  &  que  le  Pape  &  tout  fon 
puant  clergé  fe  trouuent  conuaincus.ils  n'ont 
autre  refuge  lïnon  de  dire  ,  Et  comment?  Ne 
fommcs-nous  pas  TEglife?  Or  il  eft  queftion 
de  raonftrer  fi  ainfi  eft  ou  non. Ils  difent  qu'ils 
reprefentent  l'Eglife,  d'autant  qu'ils  en  lont 
Prélats.  Voire,  mais  à  qui  c/t-ce  qu'il  appar- 
tiendra de  déterminer  s'ils  font  Prélats  ou 
non?  Il  faut  que  Dieu  en  parle, &  qu'il  en  pro- 
nonce. Car  il  eflrluy  feul  lugecompetent.Or 
il  monftre  en  ce  palfage  qu'il  n'aduoue  pour 
Prélats  ni  Euefqucs,finon  ceux  qui  font  fuffi- 
fans  &  propres  pour  enfeignerÀ  qui  exercét 
vn  tel  office.  Nous  voyons  donc  qu'il  y  a  vne 
fynagogue  diabolique  que  Satan  a  forgée  en 
toute  la  Papauté  ,  veu  q  ce  font  des  Euefques 
qui  nefjauent  c&ue  peuuent  rien  finond'cllre 
la  chiens  muets:moyennant  qu'ils  s'acquittét 
bien  de  leursagios  ,  &  de  tous  leurs  menus  fa 
tras, qu'ils  facent  bonne  mine,&  qu'ils  foyent 
comme  des  idoles,  ce  leur  e(t  aflez.Car  la  di- 
gnité epifcopale  n'cft  point  pour  prefcherla 
parole  de  Dieu:&  encores  que  cela  fe  face, ce 
fera  auee  grand' pompe  &  cérémonie  ,  qu'on 
dira  quec'eftvnextraordinaire:il  fcinble  que 
vnhômefoit  tombé  des  nues  quand  il  porte- 
ra la  mitre  cornue  fur  la  telle  ,  &  que  cepen- 
dant il  ouuriia  la  bouche  pour  parler  de  Dieu. 
Voila  dôc  pour  môftrcr  qu'on  ne  fedoit  poît 
ellonner  de  toute  la  van tenedôt  les  Papilles 
vfent,&  qu'ils  prétendent  pour  monflrer  que 
ils  ont  l'Êghfede  leur  coîié  :  car  il  faloit  en 
premier  lieu  q  leurs  Prélats  &  Euefques  (que 
ils  appellét)  tuflcnt  miniftres  de  la  parole  de 
Dieu. Voila  pour  vn  itc.  Or  notâment  S.Paul 
dit,ParoUfiiieU.  Car  fi  nous  n'auons  difcretio 
entre  ce  qui  eft  de  Dieu,&  ce  qui  aura  eflc  for 
gé  des  hommes, il  n'y  aura  qu'opiniaftreté  en 
nous.  Il  faut  donc  que  nous  cognoif^ions  que 
la  doûrine  pour  laquelle  nous  combatons  eft 
de  Dieu,car  autrement  il  n'y  aura  nulle  certi- 
tude.Nous  Içauons  que  les  homes  de  leur  na- 
ture font  adônez  à  vanité  &  menfonge:il  faut 
donc  que  nous  foyons  fondez  en  Dieu  ,  pour 
eftre  certains  de  noftrefoy.  Et  ainfi  retenons 
que  la  religion  feroit  nulle  &friuole,finô  que 
la  doftrine  qui  eft  prefchee  entre  nous  face 
fruit1:c'eft  à  dire,quç  nous  n'ayons  nulle  dou 
te  qu'elle  ne  foit  deDieu,afin  d'y  eftre  du  tout 
afleurez.Et  en  ceci  voit-ondercchef  qu'en  la 
Papauté  il  n'y  a  que  confufion  horrible. Car  iî 
on  demande  là  d'eftre  cnfeignc  par  la  parole 
de  Dieu, il  n'en  eft  point  de  qiieftion:  car  il  fe 
faut  contenter  de  ce  qu'il  aura  pieu  aux  hom- 
mes de  forgeraleurappetif.il  n'y  a  nulle  di- 
fcretion:mefnies  ih  voudroyent  que  les  hom- 
mes s'abbrutiflent  du  tout:car  on  ne  peut  croi 
teàleur  guife,  fiijon  qu'on  foitdefpouillé  de 
tout  fens  &  raifon.  Il  eÛ  vtay  que  l'entrée  de 
la  foy  eft  de  rendre  obeilïàiice  à  Dieu, q  nous 
foyons  comme  fols.c'eft  à  dire  vuides  de  no- 
ftre  fens  propie  :  mais  cependant  fi  eft-ce 
qu'il  nous  faut  auoir  ccftc  prudence  d'efeou- 


T.    A   T  I  T  E.  îfi 

ter  Dieu,  &  que  nous  fçicKioBt  qee  c'eft  luy 
qui  parle,tellcmcnt  que  nous  ayons  ceci  pour 
tout  refolu ,  que  ladoûrine  que  nous  tenont 
eft  fidèle. Mais  notons  bien  encores  que  fainft 
Paul  veutquon  efprouue  toute  doéirine  pour 
en  ratifier  l'authorité.afin  qu'elle  profite.Car 
ce  n'eft  point  allez  qu'vn  homme  puifle  allé- 
guer qu'il  n'a  mis  nul  erreur  en  auant ,  qu'oa 
ne  le  peut  redarguer  de  fauffeté  :  c'eft  bie« 
défia  quelque  chofe  ,  mais  ce  n'eft  pas  le  tout. 
Car  fi  ie  vouloye  difputerde  raines  fpecula- 
lions,&  qu'on  ne  rapportaft  de  ce  que  l'auray 
dit  finon  ie  ne  fçay  quoy  qui  ne  feruift  de  rien 
pour  édifier  en  la  crainte  tîe  Dieu,&  en  la  fîaa 
ce  de  h  bonté,  qui  fuft  pour  nous  certifier  de 
noftre  falut,  qui  fuft  pour  nous  inciter  à  priè- 
res &  oraifons,&  pour  nous  exercer  à  patiea» 
ce.que  tout  cela  n'y  fuft  point,mais  feulement 
que  i'eufle  mis  en  auant  quelque  fubtilité  qui 
fuft  plaifante.afçauoir  s'il  fuffiroit  q  ie  n'euf- 
fe  amené  nulle  faufleté  en  auant.  Nenni  :  car 
cela  eft  prophaner  la  parole  de  Dieu  ,  quand 
onprefchera  fans  fçauoir  à  quelle£n,ni  a  quel 
vûge. Notâment  donc  faind  Paul.apres  auoir 
mis  qu'il  faut  que  la  parole  de  Dieu  foit  fidè- 
le 8c  droite,il  adioufte  qu'elle  doit  aufsi  feruir 
au  falut  des  ames,que  ceux  qui  efcoutent.n'ay 
cnt  point  perdu  leur  temps  ,&  que  celuyqui 
parle.nc  bâte  point  l'air  d'vne  voix  inutile  8c 
fans  fruiû ,  mais  qu'on  apperçoyue  que  c'eft 
pour  le  bien  &  pour  le  falut  de  tous  que  la  pa 
rolede  Dieu  fe  prefche.  Et  voila  pourquoy 
aufsi  au  douzième  chapi«e  des  Romains  il  dit, 
Celuy  qui  enfeigne,  qu'il  le  face  auec  do dri« 
ne. Là  fainft  Paul  monftre  qu'il  nous  faut  em- 
ployer quand  nous  fommes  appelez  en  char- 
ge publique, tellement  que  le  tout  fe  rapporte 
à  l'édification  de  l'Eglife  ,  Se  à  tout  le  corps: 
que  ceux  qui  doyuent  enfeigner,ne  cherchent 
point  leur  gloire  pour  fe  faire  valoir,  &  pour 
fe  môftrer:  mal-heur  fur  eux  quand  ils  l"eront 
menez  d'vnc  telle ambition:mais  qu'ils  fe  con 
tentent  d'auoir  proiîté  &  ienii  à  l'Eglife  de 
Dieu.  Pour  cefte  caufe  (dit  faind  Paul)  celuy- 
qui enfeigne,qu'il  lefaceauec  enleignement, 
à  ce  que  le  dodeur  s'applique  à  dodrine.Nous 
voyons  donc  maintenant  que  c'eft  d'auoir 
parole  fidele,&  de  l'auoir  félon  doftrineic'cft: 
que  la  vérité  foit  purement  anoncee  fans  y 
méfier  nulle  inuention  humaine  ,  que  les  fide^ 
les  foyent  affeurez  de  leur  foy  ,&  qu'ils  en 
ayent  vne  refolution  telle,  qu'ils  fçachent  de 
qui  ils  la  tienent.Et  au  rcfte,  qu'ils  ne  l'oyenc 
poiut  repeus  de  vaines  curiofitez  ,  mais  que 
nous  ayons  vne  pafture  ferme  qui  foit  pour 
apporter  bône  fubftance  à  nos  amcs.Car  quSd 
on  nous  prefcberadesi'iibtilitez  qui  nous  plai 
ront,&  que  nous  n'en  rcceurous  aucun  fruift, 
c'eft  autant  comme  fi  on  nous  auoit  foufflé 
force  vent ,  le  ventre  nous  en  creuera  ,  nous 
aurons  les  boyaux  aflez  pleins  &  farcis  :  maisi 
quoy  ?  où  eft  la  nourriture?  Or  noftre  Sei- 
gneur veut  que  fa  parole  nous  foit  viande, 

Z7.iiii. 


îî^ 


SERMON      VI. 


comme  il  en  eft  parlé  lu  fixieme  chapitre  de 
fainû  lehan.Il  faut  donc  que  nous  en  rcceuiôs 
inftruftion,ou  autrement  iTn'y  aura  qu'ordu- 
»e,il  n'y  aura  que  vanité  en  tout  ce  qu'ô  nous 
apportera.  Combien  qu''on  ne  puilTe  dire,  Voi 
la  vn  erreur,  voila  vne  herefîe ,  ce  n'eft  point 
afTezrmais  il  faut  que  quant  Se  quant  nous  di- 
fions.Nous  auons  profité, Dieu  nous  a  fait  ce- 
ûe  grâce,  d'autant  que  nous  auons  ouy  fa  pa« 
rôle.  Et  pourquoy?  Car  nous  voyons  qu'elle 
nous  eft  anonceeafin  que  nous  puifsions  con 
ceuoir  vne  telle  certitude  que  nous  ne  vaguiôs 
point  comme  les  poures  ignorans,&  que  nous 
l'çachions  comme  nous  auons  appréhendé  fa 
grâce  &  mi fericorde, voire  pour  eftre  du  tout 
appuyez  fur  icelle  :  que  nous  venions  à  lefus 
Clirift  pour  eftre  afleurez  de  noftre  falut.fça- 
chans  quel  eft  fon  office, ât  les  biens  ineftima- 
bles  qu'il  nousaapporter:que  nous  fçachions 
•que  c'eftd'inuoquer  Dieu  fans  aucune  doute, 
&d'auoir  noftre  recours  à  luy  :  que  nous  fça- 
chions  que  c'eftde  patience  en  affliftion  & 
en  aduerfite2,que  c'eft  de  nous  refîonir  au  mi- 
lieu des  mifercs  de  la  vie  prefente  :  que  nous 
fçachions  que  c'eft  de  la  vie  celefte,&  comme 
il  nous  faut  pafler  parce  monde.  Voila  donc 
les  deux  chofes  qui  font  requifes  notamment. 
Or  fainft  Paul  adioufte  la  confiance,  Q^e  le 
Pafteur  (dit-il)  embraffe  tellement  la  doftri- 
ne  pure,  8c  qu'il  la  tiene  fi  bien  ferrée  ,  que  ia- 
raais  on  ne  luy  puifle  elcourre  d'être  les  bras 
€e  qu'il  aura  vne  fois  receu  de  Dieir.Voila  en- 
cores  vne  vertu  bien  neceflàire.Car  fi  les  fidè- 
le», iufques  aux  plus  rudes  &  idiots ,  doyuent 
eftre  ferm  es  en  la  foy,  &  ne  point  eftre  cème 
rofeaux  branlans  à  tous  vents,  que  fera-ce  de 
ceux  qui  doyuent  monftrer  l'exemple  à  tout 
le  refte?  Sainft  Paul  au  4.  chapitre  des  Ephe- 
£ens,dit  que  fi  nous  fommes  enfeignez  en  l'E 
uangile,nous  ne  ferons  point  comme  petis  en 
fans  ,  tellement  qu'on  nous  face  accroire  que 
Yefsies  font  nuees:mais  que  nous  receuions  la 
vérité  de  Dieu  pour  eftre  refolus  en  nous, 
pour  demeurer  là  fermes,  qu'on  ne  nons  roei- 
ne  point  à  la  pipee  (comme  il  vfe  de  ce  mot- 
îi)  mais  que  nous  pnifsions  refifter  à  toutes 
tentations  &aftuces  de  Satan  ,  Se  de  tous  fes 
fiippofts.  Là  il  n'tft  point  queftion  feulement 
des  Pafteurs  ,  mais  de  tous  fidèles  en  gênerai, 
depuis  le  plus  grand  iufques  aux  plus  petis. Et 
^Ue  fera-ce  donc  de  ceux  qui  doyuent  eftre 
comme  les  piliers  pour  fouftenir  tout  le  refte 

:i.lth.f..A  ^^  peuple'Sainû  lehan  dit  que  la  foy  doit  e- 
ftre  noftre  viftoire  pardefHjs  le  monde  :  &  il 
parle  des  plus  i^norans.  Car  ileftditde  tous 

J/<.î-4.i3  Chreftiens  par  le  Prophète  Ifaie.qu'ils  feront 
tous  enfeignez  de  Dieu.Et  ceft  enfeigncment 
k  n'cmporre-îl  pas  que  nous  lyôs  la  foy  tou- 
te concUic&arreftee  ,  &qiicnous  n'en  pnif- 
fîorrs  point  eftre  diuerris  ni  esbranlez?Or  fi  la 
foyd'vne  perfonne  priuee  doit  eftre  vifto- 
licufepir  delTus  tout  le  monde, non  (eulemét 
pardclTis  vnalîàut.oii  roc  douzaine, mais  ^ue 


le  diable  machinera  tout  ce  qui  luy  eft  pofsi'" 
ble  pour  renuerfer  noftre  foy,  &  que  néant-- 
moins  elle  demeure  inuincible, qu'elle  ait  vnc 
conftance  ferme,  &  non  variable,  que  fera-ce 
de  ceux  qui  doyuent  côdiiire  les  autres,  &  qui 
font  corne  fuppofts  de  laChreftientéîEt  ainfî 
ce  n'eft  point  fans  caufe  que  S.Paurne  fe  coa 
tente  pas  que  nous  foyons  bien  fondez  en  la 
vérité  de  Dieu  ,  &  que  nous  l'appliquions  à 
l'vfage  &  profit  de  tout  le  peuple,mais  il  veut  ^ 
que  nous  demeurions  là  fans  fléchir:  &  com- 
bien que  les  vents,  les  tourbillons, les  tempe- 
ftes  s'efmeuuent ,  que  nous  ne  chancellion; 
point,  mais  que  nous  tenions  toufiours  la  do» 
ftrine  ferme  ,  &  qu'on  ne  nous  la  puilTe  arra- 
cher ,  encore  qu'on  vfe  de  violence  ,  &  qu'on 
nous  aflaille  de  tous  coftez,que  iamais  ce  thrc 
for-ci  ne  nous  foit  oilé  que  nous  ne  demeu- 
rions toufiours  pofleflèursde  la  doftrine  que 
il  nousa  commife.  Or  combien  que  ceci  loit 
tant  neceflàire  ,  fi  voit-on  qu'il  eft  tres-raal 
prattiqué.  Car  combien  en  trouuera-on  au- 
iourd'huY  quiayent  vne  telle  conftance  pour 
retenir  ferme  &  de  près  la  vérité  de  Dieu 
quand  elle  aura  efté  cognueîOn  a  veu  l'expé- 
rience quand  ce  ft  Intérim  diabolique  eft  venu, 
que  beaucoup  fe  font  reuoltcz  ,  &  ont  mieux 
aimé  nager  entredeux  eaux,  que  d'acquérir  la 
haine  du  monde.Or  c'eftoit  par  faute  d'auoir 
médité  cefte  exhortation  de  fainû  Paul,  d'a- 
uoir cognu  que  nul  n'eft  propre  pourenfei-- 
gnfr,finon  qu'il  fe  foit  refolude  tenir  bon 
fansflechir.Et  pleuftà  Dieu  que  les  exéples 
en  fuflènt  bien  loin. Mais  quoy?  Il  fe  trouue- 
ra  beaucoup  de  prefcheurs  qui  feroyent  anfsi 
preits  de  mettre  enauant  l'Alchorande  Ma- 
hommet.ou  vnbreuiairedu  Pape, que  l'Euan- 
gile:moyennant  qu'ils  facent  leur  profit,&  fe 
maintienent,  moyennât  qu'ils  ayent  toufiours 
Icurfouppe,  &  leur  efcuelle  toute  prefte  ,  ce 
leur  eft  tout  vn. Ils  diront  affez  qu'ils  tienent 
la  refonnationderEuâgilc,maisils  fontche 
uaux  de  loage  ,  &  ne  font  pas  dignes  encorej 
d'eftre  accomparez  aux  beftes  b rutes,  mais  ce 
font  des  macquereaux  qui  fe  transfigurent 
en  toutes  fortes  ,  Se  ne  leur  chaut  de  tout  ce 
qu'on  leur  dit:  moyennant  qu'ils  retienent  la 
^racedes  hommes,  ce  leur  eft  allez.  Or  mal- 
ïieur  fur  telles  gens,&  double  mal -heur, car  il 
faudra  qu'ils  fentent  qu'en  defpit  de  leur» 
dents  ils  nepeuuent  fuir  le  fiege  iudicial  de 
celuy  qui  a  défia  prononcé  cefte  horrible  fen 
tence  de  cond<Tmnation  fur  leurs  teftes.Ainff, 
quoy  qu'il  en  foit,  de  noftre  cofté  aduifons 
bien , puis  qne  noftre  Seigneur  nous  a  commis 
pour  maintenir  (i  venté, &  I.1  défendre  cotre 
tons  aflaurs.cncores  qnt  te  mode  dcbate  con- 
tre nous  ,que  nous  nelaifsions  point  d«  paf- 
fer  outre-comme  nous  voyons  que  le  P'''^P''^i^,,i,iv 
te  lercmie  eft  enuoyé  à  cefte  condition-la, Ils 
coinbatront  contre  toy  mais  ils  ne  gagneront 
rien. Et  pourquoy?Q2ie  tuaycs  vn  front  d'ar- 
r  ain  poui  hurter  contre  tous  ceux  qui  te  vou 

droyent 


s  VR     L'E  PIS  T.    A    TITE.  çî3 

dToyent  refîfter.  Il  eft  vray  q  cela  eft  notam-     Car  il  y  en  a  bien  peu  aursi  quj  adniCeat  de 

ment  du  à  leremie.mais  en  là  pei  fonne  Dieu     s'armer  :  quafi  tous  le  font  à  croire  que  c'eft 

nousa  voulu  bailler  vncreigledece  que  nous     afllz  d'auoir  gouliccommeenpaflant  la  paio 

auons  i  faire.  Or  Venons  maintcnarît  à  ce  {[(îe    le  de  Dieu. Or  le  diable  les  trouue  tous  vuides 

fainft  Paul  adioufte,  touchant  de  faire  valoir    d'autant  qu'il  n'y  a  eu  que  quelque  apparence, 

la  doârme:c'efl  pour  exhorter  ceux  qui  felaif   il  n'y  a  point  eu  de  fermeté.  £t  tant  s'en  faut 

fent  conduire  paiiiblement,&  pour  redarguer     qu'ils  foyent  munis  pour  relîlter  à  toutes  ten 

I  fi  10  4.1escontredifans.Nous  fçauonsqu'vnbon  Pa-    tatiôs.qu'encores  qu'iln'y  euft  nuls  combats 

•     *         fteur  aura  vne  voix  douce  &  amiable  pour  ap-    à  fouftenir.fi  eft-ce  qu'ils  flcchiront.d'autaRt 

pcller  &  aflcmbler  fon  troupeau.  Et  fur  cela    qu'ils  n'ont  point  prins  iamais  vne  racine  vi- 

il  eft  dit  de  lefus  Chrift,  q  les  fidèles  oyent  fa    ue,qu'ils  n'ont  point  tiré  vnedroitelubftance 

voix,&  la  fçauét  bien  dtfcerner  d'auec  la  voix    de  la  parole  de  Dieu  pour  nourrir  leurs  âmes. 

d'vn  eftrangcr,pourlafuyure,&pour  fcran-    Mais  tant  y  a  que  toulî  ours  noftre  Seigneur  a 

ger  fous  fa  houlette.  Mais  ce  n'elt  point  aflez    donné  cefte  vertu  à  fa  parole,  &  nous  pourra 

tju'vnpafteur  attire  fon  troupeau,  qu'il  le  re-     reprocher  au  dernier  iourque  nousen  auons 

cueiUe.qu'il  le  tiene  là  amaflermais  il  fautque     mal  fait  noftre  profit  ,  quand  nous  n'en  fom- 

il  ait  quant  &  quant  vne  voix  pour  efpouan-    mes  point  enfeignezdeuementcomme  il  faut, 

ter  les  loups  &  les  larrons,  qu'il  crie  quand  il    quenous  n'en  fommes  point  armez  pour  te- 

voit  le  troupeau  eftre  aflailli ,  que  les  chiens     nir  bon  à  l'encontre  de  toutes  les  tromperies, 

abbayent,  pour  chaflcr  ceux  qui  voudroyent     les  erreurs  &  corruptions  que  Satan  nous  fu- 

difsiper  le  troupeau.  Ainfi  faut-il  pour  nous     fcitera  pour  nous  diuertirduchemin  de  falut. 

acquitter  de  noftre  charge,  que  nous  fuyuions     Or  de  là  nous  pouuon:  recueillir  qu'il  ne  tien 

cefte  voix  gracieufe  de  lefus  Chrift  pour  atti     dra  qu'à  nous  quand  nous  ne    ferons  point 

rer  les  brebis  àfoy  ,  &  pour  les  maintenir.il    deuemcnt  afleurczdeceque  nous  deuonsfai- 

fautaufsi  que  nous  ayons  vne  voix  effrayante     re,&que  nous  corromprons  la  doftrine  de 

pour  dechafler  les  loups  &  les  larrons  qui  ne     Dieu.  Et  en  cela  voit-on  aufii  q  c'eft  vn  bla- 

demandent  4  la  ruine  du  troupeau. Voila  donc    fpheme  exécrable  quand  les  Papiftes  accon{- 

le  double  vfage  qui  eft  en  la  parole  de  Dieu,     parent  l'Efcriture  fainfte  à  vn  nez  decire,& 

Or  il  eft  vray  que  ceci  appartient  à  tous  en  ge    qu'ô  ne  peut  cueillir  là  nulle  certitude  de  foy. 

neral.  Car  quand  fainô  Paul  arme  les  fidèles,     Car  fi  la  parole  de  Dieu  n'auclt  cefte  proprie 

l.T()/.5.8  il  jjt  que  la  parolede  Dieu  eft  leur^laiue,  q     té  &  vertu  de  nousaflèurer  de  tout  ce  quieft 

?f"'^-i7  la  foy  eft  leur  bouclier  ,  l'efperance  eft  leur    bon  pour  noftre  falut, fainft  Paul  ne  parleroit 

heaume. Parlant  ainfi  il  monftieque  la  paro-    pas  ainfi.  Souffrons  donc  d'cftre  gouuernez 

le  de  Dieu  non  feulement  feruira  quand  nous     par  la  bouche  de  noftre  Dieu:  &  alors  foyons 

aurons  bien  profité  en  icelle,de  ranger  noftre    alTeurez  cfe  ne  point  faillir,  ni  errer.  Voila  va 

vieenrobeiflancede  Dieu,maisci  nous  pour-    item.Orappreftons-nous  mieux  que  nous  n'a 

rons  rembarrer  le  diable  Se  tous  (es  fuppofts:     uôt'f  oint  fait  pour  refil^er  à  tous  aflàuttjpuis 

s'ils  nous  veulent  desbaucher  ,  &  qu'ils  nous     qu'âinfi  eft  que  la  parole  de  Dieu  elf  noftre 

vueillent  aliéner  de  lamaifonde  Dicu.ônous    glaiucfpirituel.Quandnous  verrons  quel'E- 

pourrons  refifterà  l'encontre. S'il  dit  cela  de     uangileferaafsiegé  de  tous  cofiez  ,  que  nous 

tous  fidèles,  que  fera-ce  de  ceux  ^ui  doyuent     prions  Dieu  qu'il  nous  fortifie,  &  que  cepen- 

eftre  côme  les  capitaines, &  qui  doyuent  fou-    dant  chacun  de  nous  fe  munifle  des  armes  que 

ftenir  les  premiers  coups,&  qui  doyuent  eftre     Dieu  nous  donne,  afin  que  nous  ne  foyons 

mieux  armez  que  tout  le  refte  du  peuple  ?  Ce    point  furprins  à  defcouuert,&  cognoiflons 

n'eft  point  doc  fans  caufe  que  S.  Paul  met  ici     qu'il  ne  tiendra  qu'à  nous  quand  nous  ferons 

ces  deux  vfigesde  la  paroledeDieu. Ainfi  ap-    defpouiUcz  de  nos  armHres:  car  Dieu  nous  a 

prenons  que  touffeurs  nous  pourrôs  bien  pro     donné  dequoy.fi  nous  ne  fommes  nonchalans 

fiter  en  la  Loy  8c  en  rEuagile,&  en  toute  l'f     de  noftre  cofté.  Mais  fur  tout,  ceux  qui  font 

fcriture  fainûe,  quand  nous  ferons  enfeignez    commis  en  ceil  office  d'anoiicer  la  parele  de 

de  la  volonté  de  noftre  Dieu, que  nous  ferons     Dieu, qu'ils  regardentd'enfeigner  &  exhorter 

affeurezde  noftre  profit,&  exhortez  pour  no     par  bonne  doftii   e.  Car  faiuft  Paul  ne  fe  con 

itre  bien, mais  quenous  aurons  aufsidequoy     tente  pasdn  mot  d'cnfeigner,  mais  il  vfed'v- 

poUr  batailler:quand  noftre  foy  fera  aflaillie,     ne  véhémence  plus  grande  ,  fignifiant  qu'en- 

que  Satan  viendra  machiner  noftre  ruine,que    coresque  les  hommes  foyent  dociles, &  qu'ils 

nous  ne  foyons  point  confus ,  mais  que  nous    fe  laifTcnt  gouuerner,&  qu'ils  reçoyuent  d'vn 

foyonsbonsgendarmes,  puis  quenous  auons    efprit  humble  &  modefte  le  ioug  de  Dieu,  fî 

l'enfeigne  drelTee,&  puis  q  rtous  cognoiflons    ne  f  ifht-il  point  de  leur  dire  feulement,  Voi- 

quelcfu,  Chiift  nous  veut  auoir  cômecham-    latj'ii  eft  bon:mai;  il  les  faut  picquer.Car  le» 

piôs  qui  côbatent  fous  fa  vérité.  Voila  ce  que    meilleurs ,  &  les  plus  deilots  (comme  on  par- 

nous  auons  à  retenir  en  premier  lieu.  Mais    le)  auront encores  befoin  d'cftre  aiguillon- 

quoy?Combieu  en  trouuera-on  qui  perfiftent    nez:il  v  aura  toufîoiîrs  de  la  parcfTe  en  eux,  il 

<juand  il  y  aura  feulement  quelque  petitvent    y  aura  de  l'infirmité  beaucoup.  Et  ainfi  ilne 

<îui  foutflef  Les  voila  abbacus.  JÈtpourquoy.?    luffii  pas  que  nous  receuions  ce  qifon  nouj 

AAa.i. 


fî4 


SERMON    VI. 


?a 


2,Corîn. 
ie.4. 


dit ,  mais  il  faut  que  nous  foyons  picqnei ,  & 
oiic  la  parole  de  Dieu  ait  vne  veheméce  pour 
nouspoulTer  comme  par  force.  Voila  ce  que 
nous  auons  à  noter. Et  faiuft  Paul  en  ce  pauà- 
ge  ne  traitte  point  de  ceux  qui  font  reuefches 
&  malins,  ou  hypocrites, &  difficiles  à  gouuer 
ner:il  parle  des  vrais  aigneaux  qui  demandét 
d'obéir  à  leur  Pafteur  ,  qui  (e  laiflent  manier 
en  vn  mat.  Mais  encorcs  il  cognoift  qu'il  y  a 
vnc  telle  infirmité  en  tous  hommes  ,  qu'a- 
près qu'ils  luront  elle  enfeigncz,  fi  les  faut-il 
eihorter,  qu'il  faut  que  celle  aide  foitadiou- 
ftee,  c'eftafçauoir  qu'on  l,es  picque,  &  qu'on 
leurmonftrece  qui  eltde  faire.  Combien  que 
ce  mot  emporte  Confoler  quelque  fois:  mais 
fainil  Paul  a  voulu  dire  qu'il  ne  iuffit  pas  que 
nous  entendions  ce  qui  eft  bon  ,  mais  il  faut 
q<ie  nous  y  foyons  incitez.  Orparceja  nous 
fommes  aduertis  quand  nous  venons  au  fer- 
mon.que  nous  ne  deuons  point  trouuer  eftran 
ge  fi  on  nous  folicitede  venir  à  Dieu. Car  il  y 
e«  a  d'aucuns  qui  voudroyent  qu'on  feiftdes 
leçons  froides,  &  quafi  toutes  mortes ,  &que 
feulement  on  leuil  ce  qui  ell  contenu  en  l'E- 
fcriture  fainde.M.w>  quoy?  Dieu  fçait  mieux 
|ue  nous  ce  qui  nous  eftexpediét  pour  noftre 
alut.Et  ainfi  venons  ouy  r  la  parole  de  Dieu, 
Bon  feulement  poureftre  inltruits  de  ce  qui 
eft  bô  mais  aufsi  pour  y  eftre  pouffez,  comme 
il  eneft  befoin,&  que  noftre  parefre&  noftre 
infirmité  le  requiert.  Or  cependant  aduifons 
d'eftre  de  ce  nombre  dont  parle  faindl  Paul, fi 
nous  voulons  que  la  parole  de  Dieu  nous  fér- 
ue d'inftruâion.  Car  autrement  nous  ferme- 
rons la  porte  à  Dieu ,  tellement  qu'il  ne  nous 
pourra  cftre  doâeur,ni  faire  ion  office  cnuers 
nous  quand  nous  luy  ferons  rebelles, que  npus 
ferons  fauuages,  que  nous  ne  pourrons  recc- 
•oir  fon  ioug  en  toute  obei{race.Voila(di-ie) 
comme  il  nous  en  faut  faire  pour  auoir  Dieu 
noftre  dofteur.Et  ainfi, voulons-nous  élire  ca 
pables  de  bonne  do£lrine,&:  qui  profite?  Que 
nous  foyons  de  ce  rang  des  agneaux  Se  brebis 
qui efcoutent  volontiers  leur  Pafteur,  &  que 
BOUS  ne  foyons  point  trop  difficiles  à  manier, 
Scmefmes  à  fuyure  tout  doucemét  les  exhorta 
tions  qui  nous  feront  faites  quand  on  nous 
picquera.  Mais  notons  aufsi  qu'il  faut  rcdar- 
guer  les  cotredifans.Car  celuy  qui  ha  la  char 
ged'enfeignerrEglife  ,  doit  auoir  cefte  pru- 
dence, de  regarder  i  tous  ceux  qui  fe  laiflent 
gouueruer  fans  contredit  ,&  que  noftre  Sei- 
gneur Icfuv  règne  fans  aucune  rébellion:  mais 
s'il  y  a  quelque  contredit.il  faut  venir  à  ce  re 
mededontvfe  S. Paul. Si  vn  homme  qui  anon- 
ce  l'Euangile  n'ha  ce  regard, il  eft  certain  que 
il  ne  profitera  gueres.  Et  ainfi  retenons  bien 
q«e  quand  leminiftre  monte  en  chaire.ildoit 
toufiours  en  premier  lieu  tédreà  ce  but,d'at- 
tirer  tout  le  monde  en  l'obeiflàncede  Dieu: 
comme  aufsi  S.Paul  en  traittc  ailleurs  :  quand 
il  parle  du  glaiue  fpintucl  qui  eft  pour  reiet- 
tïfjcout  fenc  kumjiia  ,  &pour  abbatre  toute 


hiutcffe  qui  s'eleue  «ontre  IefusChriô,&  q%e 
la  vengence  eft  appareillée  contre  tous  con- 
tredifans.il  dit, Voire  quand  noftre  obeiflan- 
ce  fera  accomplie  :  car  c'eft  la  principale  fia 
que  nous  deuons  auoir  quand  nous  prefchons 
l'Euaiigile, d'attirer  en  l'Eglife  tous  ceux  qui 
fe  laiflent  doucement  gouuerner.  Voila  pour 
vn  ite.-n. Mais  cependant  n'oublions  pas  la  fé- 
conde partie  :  c'eft  que  s'il  y  a  des  contredi- 
fins,  ils  foyent  viuement  rembarrez:  comme 
nous  en  voyons  beaucoup  de  dincrfes  efpc- 
ces.  Car  les  vns  viendront  femer  leurs  here- 
fies  pour  infefter  la  pure  doftrine  de  Dieu,  ils 
viendront  femer  leurs  menl'onges,(S:  leurs  ref— 
ueries.  Il  faut  donc  refifter  en  premier  lieu  â 
ceux-la.Les  autres  auront  vne  corruption  qui 
ne  fera  pas  fi  grande,  ne  tant  excefsiue,  mais 
elle  ne  laifle  point  d'eftre  mauuaife  ponrtat. 
Car  nous  enverrons  qui  font  chatouilleux,  Se 
des  gens  qui  appccentdes  menus  fatras,  &  des 
chofes  vaines  &  friuoles,  où  il  n'y  a  nulle  edi 
ficition.  Or  il  faut  aufii  que  ceux-là  foyent 
rembarrez.  Il  y  ades  contempteurs  de  Dieu 
qui  ne  fe  couuriront  point  de  faufles  doctri- 
nes ,  mais  on  voit  qu'ils  ne  demandent  finoa 
que  toute  police  fuft  rafce,quc  toute  religioa 
hift  ane,uie.U  faut  donc  qu'ici  le  Pafteur  foie 
armé.  Qujind  il  y  auradesgés  diflolus,&  qui 
feront  adonnez  du  tout  ànul.li  nous  ne  vou- 
lons foutfrir  nulle  corruption, &û  nous  n'ac- 
cordons auec  eux  ,  ils  feront  leurs  bandes,  & 
leurs  complots  diaboliques, pour  abbatre  tou- 
te difcipline  ,  Se  tout  ordre.  Il  faut  aufsi  bien 
leuer  les  cornes  contre  ceux-là.  En  fomme, 
tousceuxquinc  fe  laiflent  point  conduire  par 
la  parole  de  Dieu,  font  comprins  fous  ce  mot 
de  Contredifans.Or  maintenant  nous  voyons 
qu'on  ne  doit  point  trouuer  eftrange  quand 
les  Pafteurs  parleront  rudement  en  chaire,  & 
qu'il  femblera  qu'ils  vfcntde  grande  rigueur 
&  feuerité.  Car  cognoiflbns  quel  eft  noftre 
eftat  auiourd'huy .  .Sommes-nous  beaucoup 
meilleurs  &  pins  parfaits  qu'on  n'eftoit  du 
temps  de  faind  PaulfMais  on  fçait  que  le  mo- 
de eft  venu  iufques  au  comble  de  toute  iniqui 
te,  que  c'en  eft  vn  déluge.  Puis  qu'ainfi  cft|  . 
comment  fera-il  pofsible  que  nous  fermons  i 
l'Eglife  de  Dieu  fans  faire  la  guerre  aux  con- 
tredifans  ,  veu  qu'il  y  ena  vn  nombre  infini, 
veu  qu'ils  s'eleuent  auec  vne  audace  &  furie 
plus  énorme  que  iamaisils  n'ont  fait,  &  que 
le  diable  ioue  maintenant  à  la  defefperee,com  • 
me  on  dit?  Qjund  nous  fommes  yepus  îuP-. 
ques  là.il  faut  bien  q  les  miniftresde  la  parole, 
de  Dieu  s'appliquent  ici  ,&  s'y  employent  vi- 
uement.Et  encorps  s'en  faut-il  beaucoup  que. 
ils  ne  facent  leur  deuoir ,  combien  que  beau- 
coup de  mignarscSc:. de  délicats  y  erouuentde 
l'exces.HelasIquand  ce  viendra  a  rendre  con^ 
te  déliant  Dieu, il  ne  faudra  finon  pafler  con- 
damnation   que  nous  n'auons  point  fait  la 
moitié  de  noftre  deuoir,  non  pas  la  dixième^ 
pa.rtie.,Mais  tant  y  a  ijn'iJ  mous  ùiit  toufiours 

afj>irer 


SVRL'EPIST.     A     TITE. 


5ÎÎ 


éfpirerâeequitionsefticimonftré,  &:  à  la  rei 
gle  qui  tft  contenue  en  ce  paflàgt- -c'cft  que  fi 
nous  voyons  des  contrcdifans  ,  nons  foyons 
armez  à  l'encontre ,  que  la  trompette  fonne, 
&  que  nous  kurdenoncions  la  guerre  ouuer- 
te,ou autrement  nous  fommes  lafches  Se  trai- 
§res  à  Icfus  Chnft,  qui  nous  a  appelez  à  cefte 
condition  que  nous  combations  fous  fon  en- 
feigné  contre  tous  ceux  qui  fc  voudront  ele- 
uer  pour  vilipender  &  mettre  en  mefpris  fa 
parole,  &  pour  la  falCfier:  il  faut  qu'elle  foit 
receuc  en  telle  reuerence  qu'elle  mérite.  Ain 
fi  donc  ceux  qui  ne  voudront  point  élire  ru- 
dement traittez  par  la  parole  de  Dieu  ,  qu'ils 
aduifcnt  de  ne  fe  point  rebecquer  ,&  qu'en 
premier  lieu  ilsreçoyuent  la  doftrine  de  vé- 
rité,&  qu'il;  nourriflent  paix  &  côcorde  auec 
le  troupeau.  Voila  pour  vn  item.  Pour  le  fé- 
cond ,  qu'ils  ne  tafchent  point  de  remplir  le 
monde  de  leur  zizanie  infernale ,  qu'ils  ne 
mefprifent  point  Dieu,  fc  iouans  de  fa  paro- 
]e,mais  qu'ils  fe  tienent  ious  la  crainte  d'icel- 
le, voire  iufques  à  y  trembler:comme  le  Pro- 
tfa  k6  1   pJi"ts  l'aie  en  parle,  que  l'Efprit  de  Dieu  re- 
'  '  pofera  i'ur  ceux  qui  tremblent  à  fa  parole. 
Que  ceux  qui  ne  voudront  point  eftre  rude- 
ment traittez  ,  aduilént  s'ils  ont  eftc  diflolus 
pour  vn  temps ,  de  fe  ranger  ,  &:  de  reformer 
leur  v ie, tellement  qu'ils  ccgnoiflent qu'on  eft 
contraint  de  leur  faire  la  s^uerre  s'ils  ne  s'a- 
mendent &fe  changent.  Si  vn  paillard,  ou  vn 
yurongne,  ou  vn  blafphemateur  fe  baigne  en 
fon  ordure, fe  faut-il  esbahir  lî  les  feruiteurs 
de  Dieu  luy  font  la  guerre?Si  on  auoit  mis  vn 
homme  en  quelque  mai  fon  de  village,&  qu'on 
l'euft  là  conftitué  métayer  pour  garderies 
champs  &  les  vignes,  s'il  voit  que  les  larrons 
entrent  pour  tout  rauir,&  cependant  qu'il  fa- 
jce  femblantde  rien  ,&  qu'il  s'enferme  .qu'il 
face  du  borgne  ,  n'eft-il  point  complice  de 
tous  les  larrons?  &nieûnes  n'eft-il  point  pire 
^ueceux  qui  ont  fait  le  mal  ,  d'autant  qu'on 
s'cll attendu  à  luy,&  qu'on  fedesfioit  des  au- 
tres ?  Ainfi  quand  nous  verrons  que  les  mf  f- 
«hans  peruertiflent  toute  crainte  de  Dieu  ,  & 
toute  honnefteté, qu'ils  ne  demâdent  q  d'em- 
puantir tout  par  leurs  pollutions, li  nous  dif\i- 
inHlons,&  que  nous  ne  refiftions  point  à  telles 
gens,  nous  fommes  caufede  tout  lemal.ll  ne 
faut  point  donc  qu'ils  fe  plaignent  quand  ils 
feront  aigrement  reprins.  Car  s'ils  fe  veulent 
donner  vne  telle  licence, il  faut  en  premier 
lieu  qu'ils  aneantiflent  l'ordre  que  nollrc  Sci 
gneur  lefus  Chrift  ainftitué.  Ainfî  cogndif- 
fons  toutes  fois  Arquantes  qu'il  y  a  des  con- 
tredifans  ,  c'cft  à  dire  que  la  parole  de  Dieu 
r'eft  point  receue  en  telle  reuerence  comme 
elle  doit  ,  qu'il  faut  que  nous  ayons  lagncr- 
rt.Et  fi  ceux-là  difent,  Ho.coroment  on  crie, 
comment  on  tempefte?  Ce  fontceirx  qui  font 
le  btuit  :  d'autant  qu'il  n'y  a  nulle  foy,  nulle 
religion ,  nulle  crainte  pour  cheminer  en  l'o- 
iciuance  de  Dieu ,  c^u'ih  se  ccflccc  de  tron- 


bler  tous.il  faut  bien  que  nous  leur  relîAion*, 
quand  ils  tafchent  d'arracher  le  Fils  de  Dieu 
de  fon  fiege  ,  qu'ils  veulent  penieitir  fon  rè- 
gne en  ce  monde,  omettre  tout  en  confu- 
fîon.  Or  il  eft  vray  que  fainft  Paul  parle  ici 
aux  miniftres  de  la  parole  de  D:eu  ,  motam- 
ment:mais  cependant  il  nous  faut  prendre  v- 
ne  reigle  générale  pour  tous  Cfirt-ftiens,  c'cû 
que  nous  deuons  faire  la  guerre  à  tous  les  en- 
nemis de  Dieu.Q^  fi  nous  voyons  qu'il  y  ait 
des  mefchans  contempteurs  qui  veulent  met- 
tre tout  en  trouble  Se  en  confu£on,que  Satan 
ait  des  ledufteurs  qui  falfifient  la  pure  vérité, 
qu'il  y  ait  gens  diflolus  qui  prenent  l'eftan- 
dart  pour  desborder  tout  ,&.'pour  faire  que 
Dieu  ne  foit  point  honoré  ne  ferui  ,  £  nous 
ne  renonçons  à  la  promefle  que  nous  auons 
donnée  a  lefus  Chrift,  il  faut  que  nous  foyons 
ennemis  de  telles  gens ,  &  que  la  parole  de 
Dieu  nous  arme  contr'eux ,  &  nous  leur  faut  i^^^\  jj.' 
refifter.  Il  eft  vray  que  nous  deuons  procurer  , • 
la  paix  auec  tous,  entant  qu'en  nous  elhcom- 
mc  aufsi  fainft  Paul  met  cefte  exception-la, 
d'autant  qu'il  voyoit  bien  que  nous  ne  pou- 
uons  point  conuerfer,£ii  ce  monde  qu'il  ne 
nous  faille  defpiter  les  mefchans  ,& qu'il  ne 
nous  faille eftre  leurs  ennemis  ,  quoy  qu'il  ea 
foit.  Car  mal-heur  fur  nous  fi  nous  auôs  paix 
aucceeux  qui  font  notoirement  la  guerre  à 
Dieu:  n'eft-ce  pas  comploter  d'vne  tiahifon 
trop  vileineanec  les  ennemis  de  ncftreRoyf 
Et  voila  petirquoy  il  tft  dit  au  Pfeaume  quin- 
zième,que  Dieu  retient  peur  citoyens  de  foi» 
Eglife.ceuY  qui  hayront  les  mefchans,  & 
aimeront,  Sauront  en  bon  eftinieles gensde 
bien. Car  fi  la  vérité  n'eft  prifee  entre  nous,* 
fi  le  mal  n'eft  hay  aufsi  demefmes,  que  fcra- 
ce?Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir  de 
cepaflàge.Que  nous  deuons  tafcher  d'inftrui 
re  en  toute  douceur  ceux  qui  fe  laiflent  gou- 
uerner  à  Dieu,  &  mefmes  encores  qu'ils  foy- 
ent  infirmes, nous  les  deuons  fupporter:  mais 
s'ils vienent  à  eitre  rebelles,  à  rudcafne  rude 
afnier  :  qu'alors  nous  prattiquions  ce  qui  eft 
ditau  Pfeaume  dixhiiitifme.  Il  eft  vray  que 
noftreDieu  ne  demande  qu'à  nous  faire  fen- 
rir  fa  bonté  :  mais  cependant  il  eft  dit  qu^il 
fera  reuefche  à  ceux  qui  le  font ,  &:  qu'il  fera 
ruded:  afpr'é  à  ceux  quis''eléuent  en  audace,  & 
qui  veulent  eftre  comme  de;  arbres  endurcis, 
qu'il  faudra  que  cela  foit  raft  Se  abbaïu.Prat- 
tiqûons(di-ie)cefte  dcftrine-la,  &  refiftons  à 
toAis  malins ,  &  demandons  à  £)ieu  qu'il  nous 
retiéne  do  nombre  de  for  peuple.  Et  afin  que 
nous  cngnoif'ions  combien  cefte  dcftrine 
nous  cftaoiourd'huy-neceflaire,  poifonsbien 
laraifonque  fainft  Paul ad^orifte,  difar.t  qne 
il  y  en  a  plnfietirs  reue  fches,  qui  ne  fe  laif- 
fent  point  afluiettir  ,  qui  ne  fc  reule Pt  point 
ranger  ,gen$  (dit-il)  d'tn  certain  babil,  gens 
abufans  le.  poure  monde  .  Mefmes  d'entre 
les  luifs  qui  ft  vantoyent  d'eftre  le  pei>- 
ple  de  Diea,  Toicc  comme  les<ils  aifncidc 

AAa.u. 


f.Cet'u 
S.«. 


ÎS^  S  E  R  M  O 

i'Eglife.iyii  fe  mettoyent  là  en  degré  fomic- 
rain,  fain£l  Piul  dit  que  de  ceux-là  il  y  en  a 
beaucoup  qui  né  valent  rien  ,  &qui  (eroyent 
pour  tout  "ruiner  ,  finon  qu'on  leur  refîftaft. 
Puis  qu'ainfi  eft.raind  Paul  mettant  en  auant 
lâ  necefsitc  rrgentc  qui  eftoit  de  fon  aage, 
veut  fant  mieux  inciter  Tite  &  les  autres  Pa- 
ftcurs.  Il  faut  aufsi  regarder  Buiourd'huy  à 
nousjcomme  i'ay  défia  dit.  Car  fi  les  choies 
ont  efté  iamais  corrompues  ,  &  que  le  monde 
ait  efté  dcsboTdé  ,  nous  en  lorames  là  venus. 
Car  fi  on  s'arrefte  à  Teftat  prefenc  du  mode, 
nous  deuons  eftre  du  tout  confus  d'eftonne- 
ment.Puis  qu'ainfi  eft.ne  faut-d  pas  que  nous 
foyons  auiourd'huy  armez  plus  que  umais? 
Ne  faut-il  pas  q  nous  ayons  ce  zcle  en  nous, 
de  refifter  à  tous  contredtfans?Veu  que  le  mô 
de  en  eft  rempli  ,  &  que  grans  &  petis  font  la 
guerre  à  Dieu  ,  ne  faut-il  pas  monfirer  à  qui 
nous  ibmmes?  Metmes  noftre  Seigneur  lelus 
Chriit  ne  nous  a-il  point  appelez  afin  de 
maintenir  la  gloire  de  Ion  royaume  ici  bas? 
Et  puis  qu'il  nous  fait  cefte  grâce  que  nous 
foyons  procureurs  de  fa  vérité  ,  n'eft-ce  pas 
là  qu'il  nous  faut  employer?  Car  il  eft  bien 
certain  qu'il  ne  nous  trouue  point  capables 
de  ce  faire  ,  mais  tant  y  a  qu'il  nous  fait  ceft 
honneur  de  nous  employer.  Ceft  donc  pour 
le  moins  qu'vn  chacun  de  nous  fe  prefcnte  à 
luy  pour  dire  ,  Seigneur ,  que  tu  te  férues  de 
moy  ,  &  que  le  ne  m'accorde  nullement  auec 
ceux  qui  s'eleuent  contre  ta  parole,  &  que  ie 
n'aye  nulle  accointanceauec  eux,mais  queie 
foye  recognu  du  nombre  de  ton  peuple.  No- 
tammét  l'Apoftre  dit  que  Moyfe  ne  pouuoit 
eftre  conioint  au  peuple  de  Dieu  ,  finon  qu'il 
mjittaft  les  richefies  d'Egypte.  Et  qu'eft-ce 
«non  en  quittant  la  compagnie  de  ceux  qui 
■fe  leuoyent  contre  Dieu?  Car  s'il  y  en  a  qui 
cuident  eftre  fi  conftans  qu'ils  pourront  bien 
fe  maintenir  auec  les  mefchans  ,  &  faire  leur 
deuoir  cnuers  Dieu, ils  fe  trompent. Car  il  eft 
certain  que  toufiours  cefte  doiLirine  fe  trou- 
uera  véritable, qu'il  ne  faudra  qu'vn  peu  de  le 
'uain  pour  aigrir  toute  la  pafte.Etainfi  appre 
nous  de  nous  eftranger  le  plus  qu'il  nous  fera 
pofsible  ,  de  tous  ceux  qui  ne  peuuent  finon 
nous  desborder,  &nous  deftourner  de  l'o- 
beiflànce  de  Dieu  ,  &  engendrer  des  corru- 
ptions entre  nous.  Mais  au  refte,  notons  que 
rous  ne  pouuons  cfchapper  cefte  necefsité 
de  faire  la  guerre  à  ceux  qui  s'eleuent  contre 
Dieu ,  ou  autrement  lefus  Chrift  nous  defa- 


N    VIL 

ooue.Il  eft  conftitué  chef  de  fon  Eglifé,  «naît 
c'cft  à  cefte  condition  que  nous  foyon»  faits 
conformes  à  luy.    Or  il  dit  que  le  zèle  de  la  ''/'•*•*  S' 
maifonde  Dieul'arôgé.&queles  opprobres  "'• 
qui  ont  efté  dits  «'Dieu, font  retôbez  lur  luy.  "''■-■''* 
Il  faut  donc  que  nous  prenions  la  querelle  de  ""'■''•î 
Dieu  fur  nous  ,  que  nous  ne  fouffrions  point 
que  la  parole  de  Dieu  foit  nullement  vilipeà 
dee  en  façon  que  ce  foit,  &  que  nous  facions 
la  guerre  non  feulemét  à  ceux  qui  font  enne- 
mis déclarez, comme  les  Papiftes ,  mais  à  ceuic 
qui  font  méfiez  parmi  nous, comme  fainft  Paul 
parle  ici  des  Iuifs:mais  il  veut  qu'on  s'addref- 
fe  à  ceux  principalement  qui  ont  le  moyen  de 
plus  nuire  ,  quand  ils  font  ainfi  meflcz  parmi 
les  Clirefticns  .Voila  donc  comment  il  nous 
faut  refilter,  non  feulement  aux  Turcs,  &aux 
Papiftes, &  autres  incrédules  ,  mais  à  ceux  qui 
conuerfent  au  milieu  de  nous ,  &  tafchent  de 
renuerfer  l'obeiflance  de  Dieu  .  Qjujy  qu'il 
en  foit,  fi  faut-il  que  nous  leur  foyons  enne- 
mis,ou  bien  qu'ils  s'amendent, ou  qu'ils  fe  raa 
gent,&  qu'ils  monftrent  qu'ils  veulent  confen 
tir  auec  nous,&  nous  donner  la  main, que  tous 
enfemble  d'vn  cœur  &  d'vne  bouche  nous  fer 
nions  &  adorions  ceiuy  auquel  tout  empire 
eft  donné  au  ciel  &  en  la  terre  ,  5:  dciiant  le- 
quel tout  genouil  doit  flecliir,'confeflàns  que 
il  eftafsis  à  la  dextredeDieu  fon  Père. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  lia 
facedenoftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  priaus  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentirque  nous  n'auons  point  fait:  &  que  ce- 
pendant nous  fouffrions  d'eftre  nourris  &  lub 
ftantez  par  cefte  viande  de  fa  Parole. Et  d'au-  , 
tant  que  nous  auons  befoin  d'eftre  fortifiez, 
qu'vn  chacun  s'employc  à  receuoir  la  grâce 
qu'il  nous  prefente.afin  que  nouspuifsions  re 
fifter  à  tous  les  ailâuts  des  contredifans[qui  fe 
eleuent  iournelJement  contre  fa  doftrine,  & 
que  cependant  nous  bataillions  contre  nouf- 
niefmes,  d'autant  que  de  nature  nous  ne  pou- 
uons finon  nous  eleuer  à  l'encontre  de  Dieu, 
&  de  fon  feruice,&?dela  droiture  qui  eft  con- 
tenue en  fa  Loy.Et  que  nous  foyôs  fi  vaillans 
gendarmes,  qu'ayans  obtenu  la  viftoire  con- 
tre tous  Içs  côbats  de  cefte  vie  mortelle,  nous 
paruenions  en  la  gloire  celefte  qu'il  nous  a  ap 
preftee,  &  laquelle  il  nous  a  acquife  fi  chère- 
ment ,  &  que  là  nous  iouifsions  du  fruift  de 
tous  nos  combats.  Que  non  feulement  il  nous 
face  cefte  grace.mais  à  tous  peuples  &  natio:^*  ^ 

de  la  terre,&c. 


SEPTIEME     SERMON      SVR     LE 

PREMIER     CHAPITRE. 

lo      Car  il  y  en  ap  lufieurs  incorrigibles,  parlans  yamtcz  >  O'J^r 
duBeurSfp  rincipdemcntceux  qui  font  de  la  circoncifion: 

II     Auf 


tVA    U  E  P  I  s  T.    A   T  1  T  E.  j^7 

11      Aujqueb  faut  clone  U  bouc1?€ ,  qHtJubucrtijfcnt  toutes  f li- 

mille  s, en feigndns  pour  gain  deshontieilc  ce  qui  nappartiènt  point. 
12.     Quclquvn  â! entr  euxlcur  propre  Vrophcte  a  dit,  Ler  Crc- 

tdins  font  toufiours  menteurs,  mauuaifes  befles, ventre  s  parejfeux. 
13     Ce  tcfmoïgndge  ejl  way. 


Ons  auons  déclaré  par  ci  Je- 
I  uant  à  quelle  intétion  laind 
j  Paul  dit  ici  qu'en  la  ville  3c 
}au  pays  de  Crète  il  y  auoic 
I  beaucoup  de  gens  incorrigi- 
1  blés  :  c'ert  afin  que  Tite  qui 
eftûit  en  cefte  Ifle-la  fuft  pi» 
vigilant  à  ordonner  gens  qui  fullênc  pour  re 
prouuer  ceux  qui  s'eleuoyent  contre  la  vérité 
de  Dieu,  qui  troubloyent  TEglife ,  &  qui  fai- 
foyent  quelque  fcandale.  Car  nous  fçauons 
qu'on  regarde  à  pouruoir  de  vemede  lelon  les 
dangers  &  les  necei'sitez.  Qu.and  donc  nous 
voyons  qu'il  y  a  des  malins  qui  ne  demandent 
finon  mettre  confufion  en  l'Eglife  ,  d'autant 
deuons-nousauoirplus  de  foin  &  plus  de  zè- 
le de  reprimer  le  tout, comme  fainil  Paul  a  re 
gardé  làiCn  dilant  que  plulleurs  efloyent  nief 
lez  parmi  les  fidèles, non  point  du  cômun  po- 
pulaire.mais  qui  fe  mefloyent  d'enreigner,gcs 
rebelles(dit-il)  adonnez  à  vain  ba'jil  Se  à  gain 
deshonnerte  ,  enfeignans  ce  qui  n'cftoit  point 
propre  pour  edificr.Notons  donc  quand  nous 
voyons  l'Eglile  de  Dieu  eftre  aiiiiî  troublée 
par  des  raefclias,quc  les  Pafteurs  doiuent  s'et 
forcer  tant  mieux  de  tenirles  chofes  en  bon 
eftatj&doiuentcitre  armez  non  point  du  glai 
ue  materiel,mais  de  la  parole  de  Dieu.de  pru- 
dence &  de  vertu  pour  refifter  à  telles  gens. 
Et  quand  nous  voyons  qu'il  y  en  a  qui  machi- 
nent quelque  nouueauté.aduifons  entât  qu'en 
nous  fera,  que  l'Eglife  de  Dieu  foit  pourueue 
de  bos  gouuerneurs,&  qui  ayent  dequoy  pour 
einpefcher  que  nul  fcandale  ne  foiteleué  par 
Satan.C'eft  donc  ce  que  nous  auons  à  recueil- 
lir en  fomme  de  ce  paflage.  Au  refte  ,  faind 
Paul  ne  fe  contente  point  de  dire  qu'aucuns 
cftoyent  tels  :  mais  il  marque  les  Juifs  princi- 
palement :  toutesfois  c'eftoit  la  fleur  de  l'E- 
glife.c'eftoyét  les  premiers-nais  en  la  maifon 
'de  Dieu.Carnous  fçauons  que  les  Payens  ont 
eftc  comme  des  fauuageons  que  Dieu  a  voulu 
enter  par  fa  grâce  au  tronc  de  la  lignée  d'A- 
braham. Et  ainfi  les  luifs  eftoyent  de  tonte 
ancienneté  les  propres  héritiers  de  falut,l']ie 
ritage  de  vie  leur  appartenoit:  &  cependant 
fainft  Paul  ne  laifle  pas  de  leur  mettre  cefte 
ignominie  ,  c'eftafçauoir  qu'ils  font  les  plus 
granstroubleurs  de  l'Eglife.  Or  nous  auons  à 
,  recueillir  qu'il  n'eft  point  queftion  d'efpar- 
gnerceux  qui  peuuent  nuire  &  apporter  quel- 
que dominage,mais  qu'il  les  faut  dégrader,  a- 
nn  qu'vn  chacun  s'en  garde, quand  nous  voy- 
ons que  nous  ne  pouuons  pas  autrement  les 


erapefcher.  IlefV  vray  qu'ils  voudroyent  qirc 
ianiais  on  n'efpluchaft  leurs  vices ,  encorct 
que  lesperfonnes  fuifent  cognues  :  mais  ce- 
pendant regardons  ii  nous  deuons  prtferer 
les  fuppofts  de  Satani  tout  le  corps  de  l'Egli 
fe  de  Dieu,  &  à  fon  peuple.  S'il  y  x  des  hom- 
mes mefchans  qui  fenient  quelques  zizanies, 
foit  de  faufles  doâ:rir>es,ou  de  mefchans  pro- 
pos ,  pour  diucrtir  les  fidèles  du  bon  chemin, 
fi  on  difsimule,&  qu'on  face  ferablant  de  rien, 
voila  le  poure  peuple  qui  fera  infefté  :  on  ne 
s'en  donne  point  garde  ,  &  beaucoup  de  fim- 
ples  feront  ieduits.  Voila  donc  vne  pelle  qui 
régnera  par  tout.Or  û  on  marque  telles  gens. 
Se  qu'on  les  monftre  comme  au  doigt,  chacun 
les  fuira  :  &  ainfi  ils  feront  empefchez  de  mal 
faire.  Etc'eftce  que  fainftPaul  a  regardé. 
Et  à  fon  exemple, quand  nous  voyons  des  gé« 
qui  ne  peuuent  finon  ruiner  8c  machiner  quel- 
que trouble  en  l'Eglife ,  Se  que  nous  les  ver- 
rons adonnez  à  mal, il  eft  vray  que  fi  nous  les 
pouuons  réduire  au  bon  chemin  paifiblemeat, 
nous  y  deuons  tafcher  :  mais  quand  ils  periî- 
ftent ,  que  nous  les  voyons  obftinez  en  leur 
malice  ,  il  ne  faut  point  que  nous  foyons  plus 
figes  que  le  faindi  Efprit  :  qu'ils  foyent  co- 
giius ,  qu'on  les defcouure  ,  &que  leur  tur- 
pitude loit  diffamée ,  afin  qu'on  les  detefte  ,  8c 
qu'on  fe  fepare  d'eux  ,  comme  délia  nous  a- 
uôs  veu  en  d'autres  paflàges.  Et  ceux  qui  mur 
murent  quand  on  vfe  de  telle  liberté  ,  mon- 
ftrent  bien  qu'ils  ne  demandent  finon  confu- 
fion en  l'Eglife.  Il  eft  vray  qu'ils  feront  fem- 
blant  d'auoir  quelque  regard  d'humanité, Voi 
re?  Et  faut-il  ainfi  dégrader  les  gens,  &  les 
mettre  en  opprobre  comme  fi  onlesvouloit 
là  rendre  confus?Mais  cependant  faut-il  laif- 
fer  la  poure  Eglife  de  Dieu  comme  entre  les 
loups  &  les  larrôs,&:  que  tout  le  troupeau  foit 
comme  difMpé,quelefang  de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift  foit  foulé  au  pied,&  que  les  âmes 
qu'il  a  fi  chèrement  rachetées  s'en  aillent  en 
perdition,que  toutordre  fou  aboli, &  que  ce- 
pédant  on  fe  taife,&  qu'on  ferme  les  ycux?Ec 
quelle  lafcheté  cft-ce  U  ?  Ainii  notons  bien 
qu'entant  qu'en  nous  fera  il  nous  faut  réduire 
ceux  qui  ne  font  point  du  tout  incorrigibles 
fans  les  difFamer,&  fur  tout  fi  leurs  vices  font 
fccrets:mais  quSdils  fedc^bordent  iufques  l.i 
de  mettre  cofufion  en  l'Eglife,  il  y  faut  pour- 
uoir d'vn  remède  plus  grâd:  c'eft  qu'on  decla 
re  quels  ils  font, qu'ils  foyét  cognus,  &  qu'on 
s'en  garde,&  qu'ils  ne  foyét  point  efpargnez, 
d'autant  qu'il  eft  ici  queftion  du  falut  commun 
AAa  .iii. 


Îî8 


SER.M 


de  tout  le  peaple  de  Dieu.Voila  pour  vn  item. 
£t  au  refte.quad  fainâ  Paul  parle  des  Iuifj,no 
tons  qu'il  ne  faut  point  ici  eftre  eimeus  par 
faueur  de  perfonne  pour  dire  ,  Et  ceftuy-ci 
doit  cftre  priré:&  fi  faut-il  encores  fupporter 
ceftuy-la.Il  eft  vray  qu'entant  qu'il  fe  pourra 
faire(camrae  nous  auons  dit)  on  doit  bien  ra 
Biener  au  bon  chemin  ceux  qui  ont  failli. -mais 
fi  nous  voyons  que  le  mal  s'efpande  plus  loin, 
il  faut  couper  broche  à  Satan  ,  &liiy  mettre 
barre. Ne  regardons  point  donc  tellement  les 
perfonnes  qui  ferablent  eftre  auiourd'huy  ho 
norables,&  qui  femblent  eftre  priuilegiez.que 
nous  ne  regardions  aufii  à  ce  qui  eft  de  noftre 
deuoir&  office.il  eft  vray  qu'il  y  en  a  qui  font 
wnt  facrez.que  (î  on  les  touche,il  leur  femblc 
que  tout  eft  perdu  ,  &  fe  feront  valoir  en  leur 
parefle,  encores  qu'il  n'y  ait  qu'ordure.  Mais 
encores  prenons  le  cas  qu'ils  fuflcnt  gens  ex 
celles, que  pourrôt-ils  alléguer d'auâtage  que 
les  Iuifs?Pourront-ils  retenir  quelque  dignité 
pardeffus  les  autres?  Nous  auôs  deiîa  déclaré 
^uel'Euagile  eftoit  venu  d'eux,  qu'ils  cftoyét 
côme  la  racine  {ainûe,vn  peuple  eleu  &  facré, 
l'Eglifc  de  Dieii.Q_uand  donc  les  luifs  auoy- 
ent  telles  prerogatuies,  ne  pouuoyent-ils  pas 
alléguer  qu'il  ne  faloit  poït  s'attacher  à  leurs 
perfonnes,?  &  encores  que  tout  le  monde  fuit 
diffamé, qu'on  leur  deuoit  referuer  quelque  ti 
tre.Mais  quoyf  Sainft  Paul  regarde  qu'ils  au- 
ront tant  plus  d'entrée  à  mal-faire. Car  pour- 
ce  ql'Euangile  eftoit  venu  deludec.&dela  ra 
ce  d'Abraha,il  fembloit  qu'ils  fuflent  des  An- 
ges,  &  auoyent  plus  d'occafîon  de  nuire.  Car 
il  ne  faloit  feulement  qu'ils  vfaiTent  de  ces 
beaux  titres, pour  dire, Nous  fommes  les  pre- 
lUuB,  II.  miers-nais  de  la  maifon  de  Dieu  (côme  faindl 
jtf.  Paul  les  nomme  aii!lî)&  la  porte  eftoit  ouuer 

te  pour  eux. ils  pouuoycnt  dire, Nous  fommes 
le  peuple  que  Dieu  a  elcu  à  foy,  nous  fommes 
la  lignée  d'Abraham  quia  eu  de  touttéps  l'a 
doption  ,  c'eft  à  nous  que  Dieu  s'eft  reuelé, 
TOUS  n'auez  auiourd'huy  ladoftrinede  filut 
que  par  noftre  moyen.  Quand  donc  les  Iiiifs 
auoyent  vne  telle  préface  ,  n'eftoit-ce  point 
poureltonner  les  fimples.'  Notons  bien  donc 
cuand  des  gens  feront  conftituez  enqiwlque 
Jegré  d'honneur, oH  que  dés  long  téps  ils  au- 
lôt  acquis  crédit,  lï  par  ce  moyen  ils  fe  veulét 
faire  valoir  pour  nuire, ou  pour  femer  deszi- 
ïanies,  &  pour  ruiner  l'édifice  de  Dieu,  qu'on 
.leur  doit  refifter  tant  plus  vertucufcment,  voi 
Te  comme  à  ceux  qui  font  les  fias  dangereux, 
ti  contre  lefquels  il  faut  heurter  fur  tout:  car 
ils  abufent  plus  du  nom  de  Dieu  pour  luy  fai- 
jc  laguerre.Et  puiïvn  fimple  homme  qui  n'au 
la  point  efté  cognu,qui  n'aura  pas  grand  mo- 
yen de  peruertir  tout ,  celuy-la  encores  qu'il 
îbit  malin,  fi  eft-ce  qu'il  fera  commcattaché, 
lellemét  qu'il  ne  pourra  efp.îdre  fon  venin  au 
loin.Mais  celuy  qui  a  quelque  preeminéce,  ce 
luy  qui  eft  cleué  de  loin  ,  Se  qui  alléguera  fou 
«redit,  c'eft  (di-ic)  côme  tq  kôme enragé  qui 


ON     V  II. 

fera  armé. Et  fi  on  lelaifTeainfî.quepourra-IJ 
faire?Retenons  bien  donc  quand  les  hommes 
feront  honorables, foit  pouri'eftat  auquel  il» 
font  conftituez ,  (oit  pour  la  réputation  qu'il» 
ont  eue  de  long  téps,foit  qu'ils  ayent  monftré 
quelque  bon  fignede  Chrelliente,  que  s'ils  fe 
corropent  &  fe  bandent  à l'cncontre  de  Dieu, 
Se  côplotent  mefchament  pour  difsiper  la  do» 
rtrine  de  l'Euâgile,  il  faut  q  les  Pafteurs  fans 
auoir  aucun  efgard  à  leurs  perfonnes,  leur  fa- 
cent  principalemét  la  guerre:côme  nous  voy- 
ons q  S.Paul  vfe  d'vn  tel  fty !c,  &  nous  en  bail 
le  la  reglc(c5me  il  en  parle  ici)  en  forte  qu'e 
ftat  gouuernc  par  l'Efprit  de  Dieu, il  nous  mô 
ftre  la  conftâce  i  laquelle  il  nous  faut  confol 
mer.  Au  refte,quand  S.Paul  parle  ici  de  telles 
gens,  notons  qu'il  ne  les  appelle  point  herett 
ques  (  comme  en  d'autres  paflagesilparlede 
ceux  qui  peruertilTcnt  pleinemét  la  vérité  de 
l'Euangile,  qui  mettent  en  auant  des  erreurs 
&  faufles  doélrincs  )  mais  il  les  appelle  babil- 
lars,  il  les  appelle  gens  reucfches,  adonnez  i 
leur  propre  volonté ,  qui  ne  fe  veulent  point 
lailTer  gagner  à  rai  fon  &  à  vérité.  Et  ainfî  no 
tons  bien, combien  que  la  doftrine  de  Dieu  ne 
foit  point  aflaLllie  ouiiertement ,  que  nous  ne 
deuons  pas  laiflcr  pourtant  de  regarder  s'il  y 
en  a  qui  parvoyes  obliqi)cs,&  comme  par  def 
fous  tene  vientnt  pour  rtnuerfcr  tout.  Or  il 
faut  que  nous  les  tmpefchions  de  pafler  plus 
outre  :  n'attendons  point(di-if)qu'vn  hom- 
me fe  diclare  erntmi  mcitel  de  l'Euangile, 
mais  û  en  cachette  il  tafche  de  troubler,  il  eft 
affez  ennemi  :  mefmes  il  n'y  a  point  de  plus 
mortels  ennemis,  que  les  traiftres,  &  ceux  qui 
fous  ombre  du  nom  de  Dieu  vienct  mettre  di 
uiGon  en  l'EgJife  ,  qui  tafcheni  de  reculer  ce 
que  Dieu  auoit  auancé,  de  brouiller  la  purc- 
tf.'de  la  doftrinc  ,  combien  qu'ils  n'apportent 
pointues  herelîcs  manifefles  .  Exemple  de 
cela:  Nous  en  verrons  d'aucuns  qui  ne  dirons 
point  la  doârinc  qu'on  prefche,  cftre  fauflc: 
car  ils  auroyét  honte  de  parler  ainfi,  quelques 
cffrontez  qu'ils  foyét:  &aufsi  ils  voyent  biea 
qu'ils  ne  pourroyent  rien  gagner.  Et  voila 
pourquoy  tels  diables  ne  monftrent  point  les 
cornesdu  premiercoup  ,  mais  ils  tafchentde 
defgoufter  le  peuple,comme  nous  en  aués  par 
trop  veu  les  eiéples.Et  pkuft  àDieu  que  no* 
fufsiôsbien  purgez  de  telle  infeQion  Se  ordn 
re.  Apres,  ils  voudront  gouuerner  toutà leur 
phâtafîe, faire  quelq  ch.îgcment  Si  nouueauté: 
afîn  qu'ils  ayent  accès  plus  facile  pour  mettie 
vnecôfufion  générale  par  tout.  Vray  eft  q  ce- 
la ne  fe  fera  point  du  premier  coup.  Et  telle» 
gens  aufii  re  dirôl  pi'  q  la  doclrinc  foit  fauf^ 
fe  en  Iby,  mais  ils  ne  lailfcrôt  point  pourtant 
d'(  ftre  ennemis. Or  fi  on  les  laifle,qu'ô  face  {% 
blat  ne  ricn.où  en  viédra-on  en  la  fin.'Le  dia- 
ble ir'aura-i  1  pas  tout  gagné?Et  ne  fctôs-no*' 
point  coulpables  q  le  troupeau  foit  cxpofé.  Si 
q  ce  qui  auoit  efté  édifié  au  nom  de  Dieu, fera 
luijiéî'  £c  'iofi  noiÂi  bien  ^ue  nous  auôs  à  ba- 

t*Ule< 


SVR   L' EPIS  T.     A    TITE. 


rlf 


taïller,nen  feulement  contre  les  Papiftes,  ou 
contre  lej  Turcs ,  qui  reiettcnc  pleinement  la 
doârine  que  nous  portons  .mais  contre  les 
ennemis  domeftiques ,  qui  tafchent  par  mali- 
ce &  partrahifon  d'anéantir  les  chofcs  qui 
font  bien  inftituees,  de  faire  que  lefus  Chrift 
ne  règne  point  en  fa  pleine  vigueur,  que  tout 
ï'efcoulc  petit  à  petit,qu'il  y  ait  quelque  cor- 
ruption ,  qui  en  la  fin  infetfte  toute  la  pureté 
de  religion  .  Il  faut  que  nous  refiftions  con- 
Aamment  k  telles  gens.  Et  au  rcftc.ii  nou^  de- 
Hons  fouftenir  tels  combats,  par  plus  forte 
taifoB  quand  les  hérétiques  voudront  enuahir 
fe  troupeau  des  fidèles,  qu'ils  voudront  con- 
uertir  û  vérité  de  Dieu  en  menfonge,  à  por- 
ter des doÛrines  mefchantes,  alors  il  n'eft 
plus  quelHon  dedifsimuler,  mais  il  faut  qu'on 
fe  garde  tant  plus  fongncufemcnt  ,&  qu'on 
leur  rcfifle.  C'eft  ce  q  nous  tuons  à  retenir  de 
ec  paflàge  de  S.Paul.Or  tant  s'en  fatit  qu'on  y 
prene  garde, qu'il  fembte  qu'vn  chacun  nede- 
mâde  qu'eftre  empoifonné  àfon  efciét.Si  nous 
auions  doute  de  quelque  viande  ,  nous  fçau- 
cions  bien  nous  en  abftenir  :  car  l'amour  &  le 
foin  de  cefte  vie  caduque  nous  mènera  là: 
mais  quand  Dieu  nous  aduertit  que  ce  font 
poifons  quand  on  fe  deftourne  de  fa  Parole, 
&dela  reuerence  que  nous  luy  deuons  por- 
tcr,&  du  zèle  dont  nous  deuons  eflre  enflam- 
mer pour  profiter  en  iceile ,  nous  n'en  tenons 
conte .  Les  vns  ne  demandent  que  quelques 
folles  curiofîtez  pour  paiftre  les  aureiiles  :  les 
autres  fe  baignent  quand  ils  voyent  qu'on 
trouble  le  cours  de  la  doôrine  :  car  ils  ne  de- 
mandent finon  que  les  feruiteurs  de  Dieu 
foyent  molefter  ,&  font  leurs  triomphes  de 
«ela.  Pour  cefte  caufe  ils  preftent  la  main  aux 
hérétiques  :commenousen  auont  veu  les  c- 
xemplesici  par  trop,  fans  aller  plus  loin. Mais 
tant  y  a  que  les  fidèles  doyuent  eftre  aduertit 
de  ce  que  Dieu  leur  monftre, c'eft  que  s'ils  veu 
lent  demeurer  fains  Se  faufs  quant  à  leurs  a- 
tnes  ,  ils  doyuent  eftre  vigilans  à  fuir  toute 
mefchante  doûnne.Et  mefmes  quand  ils  fen- 
tiront  que  Satan  comme  en  cachette  les  veut 
defgoufter  de  la  parole  de  Dieu  qui  leur  eft 
prefchec.ils  doyuent  penfer  àcela,&y  pour- 
uoir  ,&  y  remédier,  &  chacun  s'y  doit  em- 
ployer de  fon  cofté:  car  fainft  Paul  n'a  point 
lèulement  parlé  à  Tite  ,  mais  à  tout  le  peuple 
en  gênerai,  comme  nous  auons  défia  déclaré. 
Au  refte,  notons  auûi  ce  qu'il  adioufte,  Qu'ili 
f»hHeniffinths  maifons  totalts.  Si  vne.perfon- 
ne  feulement  cftoit  desbauchce,  c'eft  défia 
trop  :  car  les  âmes  nous  doyuent  eftre  pre- 
cieufes,  puis  que  noftre  Seigneur  lefus  les  a  e- 
ftimees  iufques  là, de  ne  point  efpargner  fa 
propre  vie  pour  noftre  rédemption  &  falut. 
Or  quand  on  verra  toutes  les  maifons  desbau 
cheet,  c'eft  à  dire  les  maifons  totales  &  en- 
tieres.voila  vne  chofe  qui  nous  doit  eftre  plus 
deteftable  .  Et  ainlî  nous  voyons  que  fi  toft 
qu'on  mefle  ^elquc  peu  de  Jeuain  parmi  la 


bonne  pafte.que  tont  eft  incontinent  cofrrom- 
pu.Or  défia  nous  auons  veu  q\ic  fainâ  Paul  e« 
parlant  ici  des  crimes  griefs  &  énormes  qui 
crtoyentiux  fedutleurs,  parloit  duvain  babil 
&  folles  imaginations  :  il  parloit  de  quelques 
traditions  qucletluifs  apportoycnt  de  leur 
LoY,mal  &  fauflement  cntendue.Or  il  dit  que 
cela  eft  pour  tromper  plus  aifeement.  Ne  de- 
oons-nous  point  maintenant  eftre  alTeiad- 
moneftez  de  nous  donner  garde?  Et  fi  on 
nous  abufc,  â  qui  en  deuons-nous  imputer  la 
faute  i  Si  noftre  Seigneur  permet  que  Sataa 
nous  deçoyue,&  que  nous  foyons  du  tout  ab- 
brutis,que  nous  ferons  mis  finalement  en  fene 
leprouué ,  bous  en  fommes  dignes  quand 
nous  aurons  eftc  ainfi  nonchalans  ,  voire  ftu- 
pides,  comme  en  defpit  de  Dieu,  quand  nous 
n'aurons  point  voulu  vfer  du  remède  qu'il 
nous  prefetrtoit.  Et  ainfi  prt uenons  tels  dan- 
gers, puis  que  le  Ciinft  Efprit  prononce  qu'il 
ne  faut  quafî  rien  pour  empoifonner  les  famil 
les  totales.Et  pourtant  anticipons.Car  quand 
fainâ  Paul  a  parlé  ainfi  ,  il  adioufte  la  raci-. 
ne.c'eft,  frurgain  deshotmefle  .  Et  ainfi  notonc 
que  fi  toft  que  nous  ferons  mener  d'auarice, 
quand  nous  appeterons  (  brief  )  les  biens  de 
ce  monde  ,  qu'il  eft  impofsibleque  nouspref- 
chiens  purement  :  il  faudra  farder  la  doûri- 
ne,  comme  R  nous  eftions  des  macquignons, 
pour  falfifier  tout .  Et  faind:  Paul  non  fans 
caufe  vfe  de  cefte  fimilitude-la,  quand  il  pro-  ^'Cit.i, 
tefte  d'auoir  purement  anoncé  î'Euangile,  ij'^' 
dît  qu'il  n'a  point  fait  comme  les  macqui- 
gnons pour  rien  farder  ,  mais  qu'il  a  retenu 
la  pure  {implicite  .  Et  pourtant  que  tous  ceur 
qui  ont  la  charge  d'en  feigner  en  l'Eglife  re- 
gardent à  eux  :  qu'ils  fjachent  que  pour  fer- 
uir  Amplement  à  Dieu  ,  il  faut  qu*tl  fe  con- 
tentent de  ce  que  Dieu  leur  donnera  ,  &  que 
ils  feretirent&  defpouillent  de  toutes  cupi- 
ditezde  richefles,&  qu'ils  facent  leur  con- 
te qu'ils  font  aflez  riches  quand  ils  auront 
édifié  l'Eglife  de  Dieu  ,  &  qu'ils  verront  de- 
uant  leurs  yeux  que  noftre  Seigneur  aura 
fait  profiter  leur  labeur,  qu'il  n'y  ait  point  eu 
cefte  auarice&:  cefte  concupifcence  de  s^enri- 
chir,  mais  qu'ils  fe  contentent  que  leur  peine 
n'eft  point  inutile,  que  Dieu  la  fait  profiter: 
qu'ils  ayent  toufiours  l'œil  là  deflus.  Car  lî 
les  hommes  appctent  d'attirer  à  eux  &  dee 
prefens  ,&  des  corruptions ,  &  que  l'vn  de- 
mande que  l'autre  prene  de  tous  coftez  ,  lî 
toft  que  cela  y  fera,  que  nous  fçachions  que 
c'eft  vne  entrée  mortelle  ,  que  c'tft  vn  venin 
pourperuertir  toute  la  vérité  de  Dieu.  Voi- 
la donc  ce  que  fainQ  Paul  nous  a  voulu  mon- 
ftrer  en  ce  paflàge .  Or  ici  il  augmente  enco- 
res.endifant  que  toute  cefte  nation  en  laquel 
le  cft'oit  Tite.auoit  efté  dés  long  temps  diÎTo- 
lue  8c  peruertie .  Ceft  Tlfle  de  Crète  ,  qu'on 
appelle  auiourd'huy  Câdie.Et  c'eft  vne  gran- 
de Ifle  :  car  autresfois  il  y  a  eu  cent  villes ,  ou 
bourgs  en  cefte  Ifle-la  .  Or  cependant  fainft 
A  /a.iiii« 


5^0 


SERMON     Vil. 


Paul  dit  qu''ils  fonnliiFame2,&  qu'on  les  a  co- 
gniis  vn  peuple  pcruers  Se  malin ,  qu'il  faut 
bien  que  Tite  d'autant  plus  foit  arme  de  ver- 
tu &conftance  pouramollirla  dureté  de  tel- 
les bcftes  &  fi  mefchactes .  Et  mefmes  il  allè- 
gue vn  Poète  de  leurnacion:Etpourtant(dit- 
il  )  quelqu'vn  d'entrVux ,  voire  leur  propre 
Prophète  quiaefté  renomnié.ccluy-laabien 
déclaré  ce  qui  en  efloit.c'eftafçauoir,  5»? /^j 
Crfteins  ejloytnt  toitjîours  menteurs,  -ventres  fa- 
relJeux,mauuatfes  heftes.  Voici  de  grans  oppro 
bres  quand  il  les  appelle  des  fay-neans ,  des 
gourmans,des  ventres  parefleux,des  méteurs: 
&  puis  après  qu'il  leur  ofte  toute  réputation. 
11  femble  que  fainft  Paul  fe  vueille  ici  décla- 
rer ennemi.  Car  il  n'efcrit  point  à  Tite  en  fe- 
cret.ilveut  quecefte  Epifire  foit  leue  &  pu- 
bliée, &  que  les  Creteins  oyent  ce  qui  eii  dit 
d'eux:il  femble  par  cela  qu'il  les  vucille  quit- 
ter du  tout.  Cependant  fi  eftoit-il  leur  Pa- 
fteur:  combien  que  fon  office  s''eftendift  plus 
loin,  fi  faloit-il. qu'il  euft  folicitude  de  celle 
Eglife.Et  ainfi  apprenôs.encores  qu'vn  home 
defire  le  falut  d'vn  peuple ,  &  qu'il  luy  porte 
vnc  finguliere  amour,  fi  ne  iaiflera-il  pas  pour 
tant  de  luy  remonftrer  les  vices  aufquels  ilelt 
addonné  .  Et  de  faiô,  nousne  pouuonsmon- 
ftrer  que  nous  aimions  ceux  aufquels  Dieu 
nous  a  commis ,  finon  en  tafchant  de  corriger 
les  vices  &  maladies  dont  ils  font  entachez. 
Car  en  nous  taifant,  entant  qu'en  nous  cft 
Tiou!  endormons  les  hommes, qu'ils  ne  regar- 
dent point  à  s'amender  :  &  cela  eft  nourrir 
comme  vne  perte  entr'eux  .  Voila  donc  pour- 
q\ioy  i'aydit^u'vubon  P.ifteur,eiicores  qu'il 
crie  aigrement  contre  vn  peuple,  qu'il  le  doit 
ncintmoins  aimer— plus  que  fa  propre  vie. 
Mais  tout  ainfi  que  l'office  de  ceux  qui  font 
conftituez  pour  anoncer  la  parole  de  Dieu  eft 
tel,  d'v  fer  d'vne  liberté  félon  que  fainft  Paul 
Aous  la  monftre:  ainfi  faut-il  que  les  fidèles 
ji'.iyent  point  les  aureilles  fi  chatouilleufes 
d'ctlre  fafchez  par  trop  quand  on  leurremon 
-^re  leurs  vices. Mais  nous  en  femmes  auiour- 
d'huy  là  venus,  qu'on  ne  pourra  rien  foufFrir; 
il  faut  qu'on  foit  flaté.ou  autrement  ce  ne  fe- 
ra point  prefcher  TEuangile  â  la  règle  de 
beaucoup  degens,c'eftà  dire,  qu'ils  ne  reco- 
gnoiflent  point  qu'on  prefche  la  parole  de 
Dieu,  finon  qu'on  counre  toutes  leurs  ordu- 
res, qu'on  leur  complaife  ,  &  qu'on  les  flate. 
Or  ici  nous  voyons  bien  vneautre  théologie, 
en  laquelle  il  n'eft  point  licite  de  rien  chan. 
ger. Ainfi  en  ce  paflage.tant  les  Miniftres  com 
me  tout  le  corps  des  fidèles  ont  leur  leçon, ce 
•ft  afçauoix  que  les  Miniftres  de  leur  cofté, 
<|uand  ils  Yoyentqu'ily  a  des  chofes  mauuai- 
ies  entre  ceux  qui  leur  font  commis,  qu'ils  ne 
âoyuent  point  couuer  telles  infeâions, mais 
«ju'ils  lesdoyucnt  mettre  en  auant:  car  il  vaut 
mieux  que  nous  f.icions  honte  à  ceux  qui  ont 
«fié  par  trop 'endormis,  que  de  leur  mettre 
àet  bandeaux  pour  leur  cfioupper  les  yeux 


d'auantage.Ilfaut,di-ie,que  plulloftils  foyét 
refueillez  :  comme  nous  voyons  que  làinft 
Paul ,  quand  il  dit  que  les  Corinthiens  n'a- 
uoyent  point  vn  autre  père  que  luy,  Encores 
que  vous  ayez  des  maiftres  qui  vous  ayent  en- 
feignez,  dit-il ,  fi  eft -ce  que  vous  n'en  auez 
point  vn  fécond  :  car  ic  vous  fuis  feul  père.  Et 
fi  eft-ce  qu'après  il  dit, le  vous  veux  faire  hon 
te  pour  vous  diffamer.  Non  point  que  fon  in- 
tention foit  de  les  rendre  infâmes  deuant  le 
monde  :  mais  entr'eux  il  leur  veut  faire  hon- 
te, d'autant  qu'ils  ne  fe  cognoifloyent  point 
auparauant  .  Ils  auoyent  par  trop  abufé  de 
leur  vaine  réputation  :  &  ils  s'eftoyent  mef- 
mes glorifiez  en  leur  mal .  Or  il  s'addrefle  là, 
il  les  fonde, &  y  niet  la  lancette:mefmes  il  fait 
comme  vn  chirurgien  qui  aura  vne  playe  â 
guarir,  qui  coupera  toute  la  chair  pourrie,  ou 
bien  s'il  y  a  quelque  apoftume,il  faut  qlechi- 
rurçien  purge  iufquesau  vif,  afin  d'ofter  tout 
ce  qui  eftoitinfeLlé&corrôpu.  Ainfi  en  eft-il 
de  ceux  qui  fe  veulent  acquitter  &  enuers 
Dieu,&  enuers  le  peuple  auquel  ils  font  com- 
mis.Voila  pourvu  item.  Or  cependant  il  faut 
auf\ique  les  fidèles  portent  patiemment  tel- 
les correâions,  combien  qu'elles  leur  foyent 
afpres  &  dures  :  il  faut  qu'ils  cognoiflcnt  que 
ils  ont  befoin  d'eftre  ainfi  traittez.  Et  fur 
tout  quand  ils  fe  bandent  les  yeux  par  non- 
chalance, quand  ils  ne  regardent  pointa  fe  re 
duire  ,  &  que  leur  malice  croiftra ,  qu'on  les 
trouuera  endurcis ,  que  leurs  vices  feront  tel- 
lement enracinez  qu'on  n'en  pourra  venir  à 
bout ,  qu'alors  les  fidèles  cognoiflent  qu'il 
fautvferde  cautères,  &  autres  remèdes  plus 
afpres, comme  en  maladies  extrêmes. Et  la  def 
fus  qu'ils  ne  grondent  point, &  ne  murmurent 
point  contre  ceux  qui  procurent  leur  falut. 
Car  que  gaçnerons-nous  quand  nous  ferons 
honorables  deuant  le  monde,  &  cependant 
que  nous  ferons  en  exécration- &  à  Dieu  &  à 
{es  Anges, &  qu'il  faudra  qu'au  grand  iour ,  en 
cefte  pleine  clarté,  quand  les  liures  feront  oa 
uerts ,  qu'alors  noftre  vilenie',foit  cognue ,  8e 
que  toutes  créatures  demandent  vengeance 
contre  nous  ?  Et  toutesfois  voila  où  en  vic- 
nent  ceux  qui  demandent  qu'on  difsimulc 
leurs  vices,  &  qu'on  les  enfeuelifle  :  ils  vou- 
dront félon  le  monde  eftre  en  bonne  répu- 
tation ,  mais  cependant  ils  ne  font  que  touf- 
iours  augmenter  l'ire  de  Dieu  contr'eux,&:  fe 
rendent  tant  plus  exécrables  aux  Anges  de 
Paradis,  aux  Prophètes  &  Apoftres,&3  toH- 
tes  créatures,  d'autant  qu'ils  defpitent  Dieu 
pour  leur  obftination  dcfefperee.  Et  quel  pro 
fit  y  a-il  en  cela?  Mais  encores  c'eft  vne  folie 
d'eftre  défia  mocqué  des  petis  enfans ,  S:  que 
les  hommes  ne  peuuent  foufFrir  qu'on  leur 
monftre  leurs  vices  à  la  vérité. Car  fi  celuy  qui 
a  la  charge  de  les  enfcigner  parle,  &  qu'il  dé- 
clare. Voila  vn  tel  mal  qui  règne  entre  nous: 
c'eft  par  trop, ils  fe  defpiteront:  lesvns  grin- 
ceront les  dents,les  autres  aduiferont  de  me- 
ner 


SVRL'EPIST.     ATITE. 


S^i 


nerprattiqires  poiirempercher  tcJle  liberté, 
les  aatrei  s'tii  mocqiient  par  les  tauerncs.  Or 
cependaut  il  n'y  a  celiiy  qui  ne  cognoifle  kiu 
turpitude  :  on  voit  les  coruiptions  de  lulticc, 
on  voit  les  faueurs,  on  voit  qu'il  n'y  a  nulle 
mefure  ni  équité,  on  voit  les  diflolutions  tou- 
tes manifelles ,  delquelles   raefnies  les  petis 
cnfans  peuuent  auoir  honte.  Et  qui  eft-ce  qui 
ofe  fonner  mot  de  cela  ?  Par  les  maifons,  par 
les  boutiques,  par  les  rues  &  carrefours  on  en 
fçaura  parler:mais  û  en  la  chaire  de  vérité  on 
en  touche  vn  mot, alors  on  s'enflamme,  il  faut 
quant  &  quant  eflre  efchauffez  en  cholere, 
comme  fi  tout  eftoit  perdu.  Et  cependant  aux 
maifons  &  aux  rues  publiques  on  fera  le  pro- 
cès de  ceux  qui  font  fi  délicats .  Ils  le  fçauent 
bien,  &  cependant  ils  ne  s'en  foucient,  ce  leur 
cft  tout  vn  .  Mais  quand  leurs  vices  font  def- 
chiffrez  par  la  parole  de  Dieu  ,  voila  qui  les 
met  en  cholere  .  C'eft  merueilles  que  nous 
voyons  clair, &  que  Dieu  ne  voye  goutte:  que 
les  hommes  puillent  parler ,  &  que  Ditu  foit 
muet:  que  les  hommes  oyent.  Se  que  Dieu  loit 
fourd.  Or  fi  eft-cc  que  voila  où  nous  en  fem- 
mes venus,  Et  comment  ?  ces  prefcheurs  fça- 
uent tout.  Voire,  mais  faut-il  que  nous  igno- 
rions ce  qui  eftraanifefte  iufques  aux  cham- 
brières &;  aux  petis  enfans  i  II  n'y  aura  celuy, 
quel  qu'il  foit,qui  n'ait  liberté  de  dite,  Vn  tel 
vice  règne  ,  on  a  commis  vn  tel  a£lc  .  Brief,  il 
n'y  aura  celuy  qui  ne  foit  iuge  des  vices  &  e- 
normitez  qui  régnent  auiourd'huy  :  &  cepen- 
dant ceux  qui  fontconftituez  pour  veiller,  ne 
oieront  ouurir  la  bouche   pour  en  dire  vn 
mot.Or  tant  y  a  que  leur  office  port«  bien  au- 
trement. Car  il  eït  dit  que  la  parole  de  Dieu 
qu'ils  anoncent ,  elt  pour  entrer  iufques  aux 
penfees  les  plus  fecrettes ,  que  c'eflvn  glaïue 
tranchant  des  deux  collez, qu'il  n'y  a  ne  moel- 
le,ni  os,  que  tout  ne  foit  tranfpercé  ,  qu'il  y  a 
là  comme  vne  anatomie  pour  efplucher  ce 
qui  eftoit  caché  en  nous:&  comme  fainft  Paul 
dit  aux  Corinthiens,  c'tll  pour  defcouurir  les 
penfees  fecrettes  qui  efloycnt  cachecsaupa- 
rauant.  Brief,  il  cft  dit  en  l'Epiftrc  aux  He- 
brieux(comme  défia  le  paflàge  a  elle  allégué) 
que  Dieu  luy  attribue  ceft  office  ,  de  fonder 
iufques  au  profond  des  cœurs.  Or  fi  la  parole 
de  Dieu  a  celle  vertu-la  ,penfons-nous  que 
ceux  qui  en  font  miniftres  n'ayent  point  ce- 
lle-prudencc-la,  qu'il  faut  qu'ils  regardent  de 
loin, qu'ils  veillent,  &  qu'ils  fon dent  les  cho- 
fes,  afin  de  preuenir  les  dangers,  &  de  donner 
remède  tel  qu'ils  cognoifTent  efti  e  txpt  dientî 
Mais  quoy?on  voudroit(comme  l'ay  dit)  que 
il  n'y  euft  que  les  Pafteurs  &  fourd» ,  &  auêu- 
^lcs,&  muets.  On  donnera  bien  Lcence  &  aux 
femmes,  &aux  petis  cofan-  d'ouir,  de  parler, 
&  de  veoir .  Et  fi  les  chofes  font  trop  vifibles 
&  pateute;,  finou^  ne  la  pjuuons  veoir ,  que 
fera-ce  ï  Ainfi  d  nie  apprenons ,  quand  nous 
voudrons  clhe  leputez  Chrcftiens  ,  que  nous 
dcuons  auoir  vn  efprit  paifîblc  &  débonnai- 


re, pour  fouffrir  que  nos  vices  foyent  redar- 
guez  :  &  quand  nous  auons  quelque  apoi'iumc 
cachée  ,  que  nous  fouffrioni  qu'on  iapc:ce, 
que  nous  n'appetions  point   qu'on  y  mette 
des  emplaftres-  &  quand  le  mal  nous  cuit, que 
nous  ne  laifsions  pas  pourtant  d'aimer  la  mé- 
decine ,fçachans  que  c'elt  pour  noftre  bien: 
que  nous  ne  venions  point  à  nous  regimber 
contre  le  médecin,  quand  nous  voyons  qu'il 
ne  defire  que  noftre  falut.  Voila  en  fomme  ce 
que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paflage:&  mef 
mes  notons  comme  fainft  Paul  y  procède.  Il 
pouuoit  icieftant  conftitué  iuge  ,  en  vertu  de 
la  parole  de  Dieu,  remonflrer  les  vices  qui  e- 
lloyent  en  ces  pays-la  :  il  pouuoit  dire  ce  qui 
nous  eft  apporté  pour  vne  inftruftion  fpiri- 
tuelle  par  la  bouche  de  noflre  Seigneur  lefus 
Chrift:  car  il  a  condamné  le  monde  de  péché, 
de  iullice,&deiugement .  levien  ici  à  vous  l^'tn  lï» 
pour  veoir  comme  vous  elles  difpofez  à  vous  8. 
maintenir  en  l'Eglife  de  Dieu  ;  le  voy  qu'il  y 
a  des  infeûions  qui  font  pour  vous  abbrutir 
du  tout  :&  tant  s'en  faut  que  vous  foycz  bre- 
bis, que  vous  elles  pires  que  les  loups  rauif- 
fans .  Il  pouuoit  ainfi  parler  en  fa  perfonne, 
voire  fuyuant  fauthorité  qui  luy  efloit  com- 
mife  .  Or  que   fait-il  ?  Il  allègue  vn   Poète 
payen&  prophane  :  il  ne  veut  point  vfer  de 
ce  qui  luy  eft  comrnis  de  Dieu,  mais  il  dit» 
Vous  ferez  redarguez  par  vn  aueugle,  par  vr»' 
infidc-le  .  Dieu  vous  a  fait  la  grâce  que  vous 
foyez  efclairez  de  fon  Euangiie,que  noftre- 
Seigneur  lefus  Chrift,  qui  eft  le  Soleil  de  iu- 
llice,regneau  milieu  de  vous  :  mais  il  faut  que- 
vn  ignorant  &  vn  aueugle   monte  en  fiege 
pour  vous  condamner  .  Q£and  nous  voyons 
que  fainft  Paul  parle  ainfi  ,  notons  que  c'eft 
pour  rendre  ceux  de  Crète  plus  confus  .Et 
auf.i  recueilles  de  noftre  cofté,  que  fi  nous  ne 
voulons  plier  le  col  pour  receuoir  le  loug  de 
Dieu.c'tftàdire  pour  nous  condamner  par  (a 
parole,  &  que  nous  fouffrion  s  qu'il  exerce  fa 
lurifdiction  fpirituelle  ,  par  le  moyen  de  ceur 
qui  nous  font  conftituez  pour  anoncerfa  Pa- 
role, qu'il  faudra  que  nous  foyons  condam- 
nez &  par  les  incrédules ,  A:  par  les  diables 
d'enfer  finalement .  Et  voila  pourquoy  au- 
iourd'huy les  Papiftes  detraftent  de  nous .  Il 
eft  vray  que  nous  ne  fçaurions  cheminer  en 
telle  intégrité  qu'il  ne  faille  qu'on  nous  dif- 
fame.C'eft  àceftecondition  aufsique  fainft 
Paul  en  parle,  Qu^il  nous  faut  cheminer  par  2.  Cw.aU 
infamie:  encores  que  nous  ayons  bonne  con-  8. 
fcicncedeuant  Dieu,  fi  faut-il  que  nous  foy- 
ons en  opprobre  :  &  Dieu  nous  veut  exercer 
en  ce  combat,  afin  i|ue  nous  apprenions  de 
regardera  luy  .  11  faudra  biertdor>e  que  les 
boiv   foyent    diffamez  :  mais  tant  y  a  que 
nons  en  foinmes  caulc  iouuent ,  pource  que 
nous  ne  voulons  pas  que  Dieu  foit  noftre  iu- 
ge. Et  voila  pourquoy  les  Papiftes  auiour- 
d'huy defgorgent  tant  de  vilenies  à  l'encon— 
lie  de  nous,  &  à  bon  droiû  :  tellement  qu'il 

SBb.i, 


Ç(>i 


SERMON     VIL 


faut  qne  neus  Laifsions  lés  aitreilles.one  nouS 
ayons  II  bouche  clofe  :  car  nous  voyons  bien 
que  nous  fominei  coulpables  .  Et  qm  tfl  caule 
de  celaîCeft  qu'en  nous  glorifiant  de  l'Euan- 
gile,  nous  voudrions  auoir  quelque  Euangile 
baftard  &derguiré,qui  s'efuanouift  en  l'air  ,  & 
que  nul  ne  nous  fafchall, qu'on  ne  veinft  point 
nous  gratter  nos  rongnes ,  que  nous  n'euf- 
ilons  nulle  honte  d'cftre  punis  :  nous  vou- 
drions cela .  Et  noftre  Seigneur  le  m3C<j'.ic  au 
double  ,  &  nous  rend  tant  plus  confus  :  car  il 
faudra  que  les. meugles  vienent,  &:  qu'ils  nous 
condamnent  fans  y  veoir ,  en  tallant  feule- 
ment :  il  faudra  que  ceux  qui  eftoyent  comme 
muets ,  parlent .  Et  ainlî  retenons ,  fi  nous  ne 
voulons  point  eftre  condamnez  par  les  infi- 
dèles, qu'il  faut  que  nous  ayons  celte  douceur 
&  patience  en  nous  ,de  nous  rendre  dociles 
quand  noftre  Seigneur  nous  condamnera  par 
fa  Parole  .  Cependant ,  quoy  qu'il  en  foit ,  fi 
faut-il  que  nos  vices  nous  foyent  amenez  au 
deuant,  que  nous  pal'sions  condamnation  ,  Se 
que  uous  confefsions  la  dette,  comme  on  dit. 
Et  par  cela  nous  voyons  quelle  Chrcftienté 
il  y  a  en  ceux  qui  dilent.Ho.ilne  t'appartient 
point  à  me  corriger.  Voila  de  nouueaui  théo- 
logiens qui  feront  des  fages ,  qye  fi  on  vient  à 
1-cur  remonllrer  vue  chofe  mauuaife,  Ho,il  ne 
t'appartient  point .  Or  faind  Paul  donc  n'a 
pas  fuyui  vne  bonne  mefure, quand  il  a  reprins 
ii  viuement  ceux  de  Crète  .  Tant  y  a  que  c'eft 
la  règle  que  le  fainû  Efprit  nous  donne  par 
toute  l'Elcriture  fainfte  .  Mais  c'eft  auioar- 
d'huy  la  prattique  commune,  qu'on  voudra 
repoufler  toute  corredion,  qu'on  voudra  que 
les  vices  ayent  toute  licence,  &  qu'il  n'y  ait 
nulle  bride  .  Or  ce  n'eft  pas  ainfiqiie  ceux  qui 
veulent  eftre  reputez  Chreftiens,  fe  doyuent 
conduire  .  Car  nous  oyons  les  exhortations 
qui  nous  font  faites .  Admoneftee  les  vns  les 
l.TheJf.  autres. Et  puis  apres.Redarguez  le  mal.  A  qui 
T-'3-  eft-ce  que  le  fainft  Efprit  parle  en  ces  deux 
Ephe.f.  partages  ?  C'eft  à  tous  fidèles  fans  exception. 
?!•  Car  combien  que  Dieu  en  ait  choifi  quelques 

vns  aufquels  il  a  donné  la  charge  fpeciale  de 
-admonefter,  d'exhorter,  de  reprendre  ,  Si  de 
redarguer  ceux  qui  faillent ,  fi  eft-ce  qu'il  or- 
donne aufsi  à  toutes  perfonnes  priueesde  fe 
oppofcr  au  mal,  félon  le  moyen  qu'ils  en  au- 
ront, flc  que  l'occafion  leurenfera  offerte  .Si 
cela  cft  permis  à  ceux  qui  ne  font  point  en 
charge  publique.que  fera-ce  des  miniftres  auf 
quels  Dieu  a  donné  commifsion  expreflede 
«e  faire  î  Et  toutesfois  c'eft  vn  ftyle  commun 
auiourd'huy  à  Geneue,  de  ne  tenir  conte  de 
telles  correûions,  qu'il  y  aura  des  Chreftiens 
b.iftars  qui  ne  fçauent  que  c'eit  ni  de  Dieu,  ni 
de  fa  Parole,  moins  que  ceux  qui  habitent  aux 
Ifles  ncufues, comme  on  dit.  Que  s'il  eft  que- 
ftion  d'ouurir  la  bouche  pour  mettre  en  a- 
^  uant  quelque  correftion.  Ho,  voila  (diront- 

Jisjf  ay  mon  iuge  ordinaire  :  ie  n'ay  que  faire 
ie  rcfpondre  par  deuant  vaus.C'eft  h  rcfgon 


le  commune  de 'tous  ces  coBtemptéurs  de 
Dieu,  qui  ne  veulent  fouffrir  nulle  correflion. 
Il  cft  vray  qu'ils  cerchent  tant  qu'il  leur  cft 
pofsible  des  elchappatoires,  afin  de  ne  point 
eftre  amenez  à  raifon  :  mais  ils  ne  peuuent  a- 
mener  couleur  qui  leur  foit  propre.  Et  ainfi 
notons  quand  faindf  Paula  ledargué  les  Cre- 
teins.difant  qu'ils  doyuent  penferau  tefmoi- 
gnage  de  leur  prophète,  qu'il  a  monftré  que  & 
Dieu  dclcouurc  nos  vices,  Se  qu'il  en  face  vne 
efprcuue(  par  manière  de  dire)  qu'il  procure 
par  cela  noftre  falut,  que'nous  deuons  en  teu- 
te  humilité  recognoiftre  noftre  mal,  pour 
nous  y  defplaire  &  pour  en  gémir  .  Car  nous 
ne  gagnerons  rien  quand  nous  ferons  obfti- 
ncz  ,  nous  aurons  beau  faire  des  beftes  fauua- 
ges.des  endurcis,  mefmes  des  enragez,  û  fau- 
dra-il en  la  fin  tomber  bas  :  &  quand  nous  ne 
pourrons  point  plicr.il  faudra  que  Dieunoui 
rompe  du  tout.  Voila  ce  que  nous  deuons  re- 
tenir de  ce  paffaoe.  Or  pource  que  le  tout  ne 
fepourroit  pas  defpefcher  maintenant ,  no- 
tons pour  concluiïon,  que  c'a  efté  vn  miracle 
de  Dieu,  que  TEuangile  parueint  iufques  en 
Crète,  vcu  que  ce  peuple  eftoit  fi  malin  com- 
me il  nous  eft  ici  monftré  :&  toutesfois  no- 
ftre Seigneur  le  vifitc  par  fa  bonté.  Et  ainfi  ce 
eft  autant  comme  fi  la  grâce  de  Dieu  eftoic 
entrée  iufques  aux  enfers,  quand  ce  qui  eftoir 
ainfi  depraué,  a  efté  attiré  à  la  cognoiflance 
de  Dieu. Et  ainfi  retenons  que  noftre  Sei- 
gneur n'a  point  efgardà  noftre  dignité  quand 
il  nous  appelle  pour  eftre  les  premiers  en  fon 
Eglife  :  mais  quelque  fois  qu'il  veut  donner 
tant  plus  grand  iuftre  à  fa  mifericorde:quand 
nous  aurons  efté  gens  perdus,  s'il  nous  retire 
Se  nous  tend  la  main  ,  qu'il  mérite  d'eftre  tant 
plus  magnifie .  Car  voyans  que  nous  n'auons- 
rien  delîerui  enuers  luy.if  faut  que  toute  bou- 
che foit  clofe,  &  que  les  hommes  ne  prefu- 
ment  rien  d'eux  .  Et  ainfi  apprenons  que  fi 
nous  auons  l'Euangilc ,  ce  n'eft  point  que 
nous  l'ayons  gagné  par  nos  vertus ,  mais  que 
Dieu  a  voulu  eftendre  fa  bonté  iufqu'à  nous, 
pourmonftrer  qu'il  ne  peut  eftre  efmeu  d'au- 
tre caufe  que  de  fa  mifcriccrde  gratuite, 
quand  il  appelle  les  hommes  à  foy  pour  leur 
faire  cognoiftre  fa  volonté .  Apprenons  donc 
«n  toute  humilité  de  glorifier  noftre  Dieu  :  & 
ccpe!;idant  de  ne  nous  point  plaire  par  trop. 
Et  fi  noftre  Seigneur  nous  a  choifis,  laiflànt 
les  autres,  cognoiflons  que  pour  demeurer  en 
poflefsion  d'vn  tel  bien  ,  il  nous  faut  tous  le» 
iours  examiner  noftre  vie,  &  qu'en  cognoif- 
fant  qu'il  n'y  a  en  nous  que  toute  roaledi- 
£lion,&  qne  de  nature  nous  ne  pouuons  finon 
irriter  noftre  Dieu  contre  nous,  qu'en  nous 
condamnant  noijs  preuenions  fon  ire.  Car 
quand  chacun  fe  iugera  ,  alors  nous  ferons 
abfous  deuant  Dieu  ,  alors  non  feulement  il 
nous  purgera  de  toutes  nos  pouretez.mais  il 
fera  tcltv^-e.  de  plus  en  plus  la  gloire  furnous, 
tcUeaient  que  nous  aurons  occafion  de  l'in- 

uôquer 


SVR    L' EPIS  T.    A    TITE. 


Î<î3 


Moquer  comme  nollre  Père, &  deuant  le  mon- 
de protefter  aufsi  qu'il  nous  a  acquis  par  le 
moyen  de  fon  Fils,  afin  que  nous  foyons  fon 
kericage. 

OR  nous-nous  profternerons deuant la 
maiefté  de  noftré  bôDicu  en  cognoiflance de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir,5fque  fans  orgueil  ni  ambition jious 
venions  nous  ranger  pleinement  à  ladifcipli- 
nedenoftre  Seigneur  lefns  Chrift,  pour  re- 
ceuoir  non  feulement  la  dotirine  qu'il  nous 


offre,  mais  anfsi  les  correftioBS  qu'il  nous 
fait ,  tellement  que  nul  ne  Ce  nourrilFe  en  fon 
mal,  mais  pluftoil  que  nous  trichions  &  adui- 
fions  de  bous  en  retirer .  Et  que  cependant 
rouspafsions  tellement  par  ce  monde  ,  que 
nous  tendions  toufiours  au  Royaume  des 
cieux  ,  iufqu'à  ce  qu'il  nous  y  recueille  pour 
nous  reueliir  de  fa  iuftice,  &  nous  faire  parti- 
cipans  de  la  gloire  qu'il  nous  y  a  préparée. 
Et  ainfî  nous  dirons  tous.  Dieu  tout-puiflànt, 
Père  celefte,&:c. 


HVITIEME     SERMON      SVR     LE 

PREMIER    CHAPITRE. 

12.  Queî(^uyn  d'entreux  leur  propre  Vrophete  a  dit  >  Les 
Creteins  font  toufiours  menteurs ,  mauuaifes  belles ,  ventres  pdref- 
feux. 

13  Ce  tejmoîgndge  ejî  yray .  Vour ceîic caufe  reprcn-lcs  \iue-- 
merit,afin  quilsjôyentjains  en  Ufoy, 

14  Ne  s'amufans  point  aux  fables  îudaiques ,  ^  aux  comman- 
démens  des  hommes ^qui Je  deslournent  de  la  vérité. 

1 5  Toutes  chofès  certes  font  nettes  à  ceux  qui  font  nets:  mais  aux 
fuillez  O'dux  infidèles  rien  nejî  net,  mais  leur  entendement  ç^con- 
fciencc font  fouillez. 


OVS  auonsveu  ce  matin, 
quand  les  hommes  neveu- 
lent  point  eftre  leurs  iuges, 
qu'ils  ne  font  que  redou- 
bler leur  condamnation.  Si 
ils  penfent  le  gagner  en- 
uers  Dieu  par  hautelïe  & 
par  dureté  ,  ils  s'abufent  :  car  il  fera  périr 
en  plus  grande  rigueur  quand  il  les  verra  ain- 
fi  obftinez  .  Car  luy  il  prattiqueralcprouer- 
le  commun, A  rude  afne, rude  afnier.  Carno- 
■ftre  Seigneur  encores  ne  fait  point  toufiours 
ceft  honneur  à  ceux  qui  veulent  eftre  flattez 
en  leurs  vices,de  les  iiiger  par  fa  Parole,  mais 
il  leur  fufcitera  des  aueugles  qui  les  condam- 
neront ,  comme  nous  en  auons  ici  l'exemple 
notable.  Car  fainft  Paul  pouuoit  bien  remon- 
trer à  ceux  de  Crète,  en  vertu  de  TEfprit  de 
Dieu,  le  mal  qui  eftoit  en  eux .  Mais  il  ne  dai- 
gne pas  les  iuger:il  appelle  ici  vn  poure  aucu- 
gle  ,  vn  incrédule,  vn  Payen  qui  iamais  n'a- 
uoit  eu  vne  goutte  de  clarté  ni  de  la  Loy  ,  ni 
de  l'Euangile  :  il  l'appelle  pour  prononcer  la 
fentence  contr'eux  ,  pour  'leur    faire   plus 
grand'  honte  .  Or  en  premier  lieu ,  ici  ils  font 
nommez  menteurs ,  qui  emporte  toute  def- 
ioyauté  :  comme  s'il  eftoit  dit  qu'il  n'y  a  ne 
Tondeur  ni  intégrité  en  ce  peuple,  mais  qu'ils 
/oatda  tout  addonnez  à  petiurct  &  àtiosi'* 


peries.à  faufletez  &à  tri^ifons.'S.t^uhilzâ.'^ 
\ouHe,qiiilsfoatmatiuaifis  hefles.  Comme  pour 
les  retrancher  du  rang  des  hommes  .  Car  il 
fcmble  bien  que  ce  foit  le  fens  de  ce  mot, 
quand  on  dira  ,  Ce  ne  font  plus  créatures  hu- 
maines,mais  ils  font  conuertis  en  beftes ,  voi- 
re mauuaifes  :  5c  puis,  goumians  &  difToIus, 
&  fay-neans.  Si  nous  ne  pouuons  fouffrir  que 
Dieu  nous  redargue,  voire  doucement ,  pour 
nous  amener  à  quelque  correétion  ,  voici  ce 
qui  nous  reftera  ,  c'eft  que    nous  ne  ferons 
point  admonneftez  d'vne  façon   humaine, 
mais  que  les  incrédules  defcouuriront  telle- 
ment noftre  vilenie  ,que  nous  ferons  infâmes 
entre  toutes  créatures .  Et  ainfi  apprenons 
de  nous  humilier,  &  d'auoir  vn  efprit   mo- 
dcfte ,  pour  receuoir  les  correQions  que  Dieu 
nous  enuoye ,  &  baiflbns  le  col  à  fon  ioug: 
&  mefines  apprenons  de  nous  condamner, 
afin  que  nous  foyons  abfouts    deuant   luy. 
cognoilTons  aufsi  nos  vices,afin  qu'ils  foyent 
îouuerts  &  cachez,  quand  on  nous  appellera 
à  conte  :  ayons  honte  d'auoir  failli,  afin  que 
noftre  turpitude   ne   vicne   point  en  itige- 
roent,  ne  deuant  les  Anges ,  ne  deuant  les  hom 
mes  mortels.  Voila  quant  à  ce  poincl.Or  ve- 
nons à  ce  que   fainft  Paul  adioufte,Il  dit, 
Vour  ceflt  cttufe  refren-les  finement  ,a(in  qa* 
ili  foyitft  filins  tu   U  foy  .  11   fembk  <jtte 

BBb.ii. 


5«4 


SERMON     VIII. 


ccftedoAiia*  oacefteaimonition  n'ki  point 
befoin  de  rigueur  ,  qiuiid  on  doit  attirer  les 
komincs  à  la  faute  de  foy  dont  il  parle  :  il  n'y 
faut  point  aller  par  rudefle.  Car  en  nous  mon 
ftiâtu  que  nous  fommes  bien  loin  de  fuyure 
la  pureté  de  l'Euangilej&quM  nous  faut  retc 
nircn  l'obciflànce  de  noitre  Seigneur  lefus 
Chrid,  eft-il  befom  de  commander  auec  fi 
grande  rigueur?Faut-iI  mefmes  vferde  repre 
Kenfion?!!  ne  femble  point  donc  que  cefte  dj 
ftrine  foitvtile.Maii  quand  nous  aurons  bien 
regardé  à  Tingratitude  de  beaucoup  de  gens, 
ce  n'eft  pas  fans  caufe  que  iaïud  Paul  veiitque 
ceux  de  Candie  foyentainfî  traitiez. II  y  eu  a 
beaucoup  qui  ne  pcuiicnt  l'oulîrir  qu'on  les 
gagne  par  douceur:comme  ceux  qui  foindef 
gouftez  ,fi  on  les  appelle  pour  venir  diluer, 
ils  fe  fafchent ,  ils  le  defpitent  à  Pencontre, 
tellement  qu'il  les  faut  quali  poulFer  parles 
efpaules.  Il  £^udra  importuner  les  malades 
pour  leur  faire  prendre  quelque  chore:ils  re- 
culent tant  qu'il  leur  eft  pofsible.  Ainlî  en 
eft-il  de  beaucoup. Si  on  leur  dit  que  tout  leur 
bien  gift  à  fuyure  l'F.uangile  ,  5:  que  d'autant 
que  Dieu  cognoift  que  nous  fommes  en  la 
mort  ,  qu'il  nous  reflufcue  par  la  grâce  qui 
nous  eft  là  offerte, qu'il  guarit  toutes  nos  ma- 
ladies ,  qu'il  fait  office  de  médecin:  fi  (di-ie) 
on  nous  déclare  cela  doucement,  on  voit  la 
plulpart  eftrc  tellement  addonnez  à  ce  mon- 
de,qu'ils  mefprifentlesbiensfpirituels,  &nc 
font  que  s'en  mocquertles  autres  encrares  re- 
chignent à  rencontre, &  fe  defpitent  il  on  les 
veutamener  àDieu:car  ilsne  demandent  que 
d'e/lre  toufîours  efgarez.  Il  y  en  a  que  le  dia- 
ble tranfportc  en  telle  furie,  qu'ils  voudroy- 
entauoir  arraché  Dieu  de  fon  fîege,  afin  que 
jamais  il  n'en  fuft  mémoire  :  on  voit  cela.  Et 
ainlî  fainft  Paul  dit  qu'il  faut  contraindre 
beaucoup  de  gens  pour  leur  profit ,  d'autant 
qu'ils  n'y  vienent  point  de  leur  bon  gré: 
Que  tu  les  redargues  (dif-il)  afprement ,  a- 
fin  qu'ils  reçoyuent  guarifon.  Car  fi  on  voit 
vn  malade  qui  ne  Ce  contregarde  point,  qui 
ne  fe  vueille  afluiettir  à  nul  confeil  ni  rai- 
fon,  il  le  faudra  manier  en  telle  forte  qu'on 
k  face  ioindre,encores  qu'il  ne  vueille  point. 
Si  m  homme  fe  range.  Se  qu'il  foufFred'eftre 
gonuerné  paifiblemcnt  ,  il  n'ha  nul  befoin 
de  rigueur .  Ainfi  voyons-nous  que  Dieu 
vent  que  fa  parole  foit  appropriée  à  nous,  fé- 
lon que  nous  fommes  dociles  :  il  veut  qu'on 
nous  appelle  humainement ,  félon  que  nous 
Tommes  brebis  ,  que  le  Pafteur  vfe  d'vne  voix 
gracieufe:  mais  fi  nous  voulons  faire  des  be- 
ftet  reuefches  ,  alors  il  faut  que  nous  foy- 
onsdontez  quafi  par  violence,  &  que  la  paro- 
le de  Dieu  ne  nous  foit  point  prefchee  fim- 
■plement  pour  enfeigner  ce  que  nous  dé- 
lions faire,  mais  qu'elle  foit  prefchee  auec 
corrcftion  ,  auec  rigueur  :  que  celle  hauteflc 
qui  eft  en  nous  foit  mattee  en  defpit  que 
nous  en  ayons.  Voila  ce  que  noire  auons  à  re- 


tenir de  et  paflàge.  Notons  bien  donc  quVii 
chacun  doit  examiner  fa  complexion,  &  quïd 
nous  voyons  que  nous  fommes  lifchcs  de  ve- 
nir à  Dieu  ,  finoji  qu'on  nous  picque  èc  qu'on 
nous  aiguillonne,  fçachons  que  ce  u'eft  point 
fans  caufe  qu'on  nous  rudoyé  ,  &  qu'on  nouf 
tire  raureille,&  qu'on  vfe  de  reprehéfions  ai- 
gres &'  fafcheufes:car  autrement  Dieuneche 
uiroit  iamais  de  nous.  Cognoiflans  cela,  pre- 
nons gouft  à  toutes  les  correûions  qui  nous 
font  ainfi  vtiles.S:  ne  faifons  point  côme  ceux 
qui  ne  peuuent  eftre  attirez,  côbien  que  Dieu 
fe  conforme  quafi  en  tous  moyés  pour  les  ga 
gner  à  foy  pailibkment.  Ceux  qui  ont  befoin 
d'eftre  plusalprement  corrigez,  ne  peuuent 
■fouffrir  qu'on  vfe  d'vne  ieule  rude  parole. 
Mefmes  les  bons  &  ceux  qui  défirent  de  ve- 
nir à  Dieu.encores  y  feroyent-ils  enclins,  fi- 
non  qu'ils  bataillaflent  corure  vne  telle  ten- 
tation :  toutesfois  fi  on  les  admonefte ,  qu'on 
les  poulie,  qu'on  les  refiieille  ,  Si  qu'on  vfe  de 
véhémence, ils  prendront  cela  d'vn  efprit  pai- 
iîble.  Car  ils  fçauent,  encores  qu'ils  n'apper- 
çoiuét  point  leurs  maladies ,  &  qu'elles  foyét 
fecretes,  que  toutesfois  Dieu  les  cognoift  :  & 
ainfi  ils  ne  font  point  des  rebelles ,  quand  on 
les  reprend  de  leurs  vices.  Mais  ceux  qui  ont 
vne  dure  tcfte  ,  qui  ont  vn  col  d'airin  pour  ne 
pouuoirplier ,  qui  fe  moquent  de  Dieu  Se  de 
toute  la  do(flrine  de  falut ,  qui  font  abbruuez, 
ou  pluftoft  enforcelez  des  vanitez  de  ce  mon- 
de, tellement  qu'ils  ne  prcnent  nul  gouft  â 
toutes  les  proniefles  de  Dieu:ceux-4a,fi  on  r- 
fe  de  quelque  mot  vn  peu  afpre,  fe  fafchent  Se 
fe  tourmentent ,  &  voudroyent  placquer  VE- 
uangilc  â  tous  coups:  on  le  voit  ainfi.  Il  n'y  a 
que  les  beftes  fauuages  quifoyent  rebelles: 
ceux  qui  font  ti"aittables,&  qui  fe  laiflent  ma- 
nier,  &  qui  plient  fous  l'obeiflàncede  Dieu, 
encores  qu'on  les  redargue,  ils  ne  laillèntpas 
d'aller  toufiours  leur  train:  ils  prendront  dou 
cément  tout  ce  qu'on  leur  dira  ,  fans  s'elcuer 
ne  s'enuenimer  contre  la  doftrine  ,  ne  contre 
ceux  qui  leur  font  ainfi  afpres  &  vehemens. 
D'autant  plus  donc  nous  faut-il  bien  noter  ce 
pairagc:que  ceux  qui  ont  la  charge  d'anoncer 
la  parole  de  Dieu  ,  cognoiflent  la  portée  de 
ceux  aufqiiels  ils  font  commis.  Quand  nous 
verrons  que  les  hommes  ne  fe  veulent  point 
réduire  de  leur  bon  gré,  vfons  du  remède  que 
Dieu  nous  commande  ici ,  afçauoir  que  nous 
les  reprenions  viuemcnt ,  que  nous  y  allions 
d'vne  façon  precîfe,  comme  le  mot  dont  vfe 
fainft  Paul,  emportecela,  qu'on  coupe  court, 
qu'onn'vfe  pointde  gr.idc  rhétorique, qu'on 
n'amadoue  poît  ceux  qui  font  ainfi  reueiches, 
mais  qu'on  les  fomme  en  vn  mot ,  Venez-çi, 
miferables  creatures.à  qui  eft-ce  que  vous  pen 
fez  vous  iouèr?  Ne  voyez-vous  pas  que  vous 
bataillez  contre  Dieu?  Quelle  maiftrifc  a-il? 
Penfez-vous  qu'il  vous  endure  toufiourî?  S'il 
v  fe  maintenant  de  douceur  enucrs  vo»'i,S;  que 
il  vouj  conuie  de  vemràluy  en  la  pcrfonnc 

d'vn 


s  V  R    r  E  P  I  s  T.    A   T  I  T  E. 


tfrn  liomme  mortel, penfer-voui  cjue  ceci  du- 
re?Ne  faudra-ils  pas  en  la  fin  qu'il  toudroyeî 
Vouleï-Tous  eftre  des  diables  au  lieo  de  créa 
turet  qu'il  a  formées  à  fon  image?  Ne  penfeï- 
Tous  pas  quel  mal-heur  c'eft  à  vous.de  mettre 
en  oubli  le  prix  de  voftrc  rédemption,  quand 
rousmefprifez  ainfi  la  grâce  de  l'Euangile? 
Quand  donc  les  miniftrcs  de  la  parole  de 
Dieu  cognoiflentquelc  monde  ert:  tant  diffi- 
cile àgouuerner,  il  faut  venir  à  vn  tel  ftylc& 
langage  ainfi  rude.  Voila  pour  vn  item. Et  voi 
la  pourquoy  aufsi  il  eft  dit  que  le  Palleur 
eftantcoramis  fur  vn  troupeau, ne  doit  pas  feu 
lement  propoferla  pafture.mais  qu'il  doit 
auoir  pitié  des  poures  brebis  qui  font  débi- 
les,afin  de  les  conforter:qu'ildoit  amener  les 
malades  à  guan  ifon,8:  qu'auec  le  temps  quâd 
il  voit  qu'il  y  en  a  de  reuefches, qu'il  les  don- 
te.  Et  âinfî  apprenons  que  la  parole  de  Dieu 
fcdoit  appliquer  félon  la  nature  &comple- 
3tion  des  hommes  aufquels  elle  s'addrefle. 
Cependant  ceci  appartient  à  tous  fidèles  en 
gênerai.  Car  fi  nous  fomme»  ainfi  corrigez 
afprement.que  gagnons-nous  de  nous  defpi- 
ter  contre  Dieu  ?  Comme  nous  en  verrons 
beaucoup, quand  on  ne  les  chatouillera  point 
ainfi  qu'ils  appetent, ils  fc  chagrinent,  &  grin 
cent  les  dents  contre  la  parole.  Or  c'eft  ainfi 
qu'vn  homme  qui  fe  defpite  contre  fon  ven- 
tre, &  qui  ne  daigne  manger  :  en  la  fin  il  faut 
qu'il  porte  le  dommage  fur  luy.  Ainfi  en  eft- 
iîdcceux  qui  fepriuent-dela  pafbure  fpiritnel 
le  de  leurs  âmes  :  en  la  fin  ils  demeurent  affa- 
mez,finon  que  Dieu  ait  pitié  d'eux, &  qu'il  les 
refueille.Et  ainfi, que  tous  apprenent  de  ne  fe 
point  fafcher  quand  on  vfera  de  rudeffe  en- 
uers  eux.mais  qu'ils  cognoiflent  qu'ils  en  ont 
fcefoin  :  i:  fans  qu'on  nouî  picque  ,  5;  qu'on 
nous  folicite  ,  nous  demeurerions  là  ftupides 
&  hebetez.  Sçachans  donc  que  Dieu  ne  nous 
traitte  point  ainiî  fans  caufe  ,  Se  qu'il  apper- 
çoit  des  maladies  fecretes  en  nous ,  qui  ont 
befoin  qu'on  les  purge, fouffronsd'eftrcgou.. 
uernez  félon  que  bon  luy  femble.  Et  cepen- 
dant ne  foyons  point  addonnez  par  trop  à 
nos  appetis  :  fur  tout  d'autant  que  le  monde 
eft  auiourd'huy  fi  corrompu  ,  qu'on  voit  que 
tout  eft  depraué,fçachons  que  fi  on  crie,&  que 
onvfe  de  véhémence  Se  d'afpreté ,  ce  n'eft 
point  fans  caufe.  Si  nous  faifons  comparaifon 
denortretemps  auecceluy  de  fainâ;  Paul ,  le 
inondé  a  beaucoap  empiré  depuis:  nousfom- 
mes  venus  comme  au  comble  de  toute  malice. 
Eft-ildonc  queftion  que  Dieu  auiourd'huy 
nous  flatte,&  qu'il  nous  mignarde?NouE  fom- 
mes  quafi  pourris  en  nos  afFeûions,  &  cepen- 
dant on  nous  viendra  graiflcr  d'huile,  &n'y 
mettra-on  nul  remède  conuenable  aux  mala- 
dies qui  font  venues  à  telle  extrémité.  Appre 
nous  (di-ie)  de  fcntir  que  nous  auins  befoin 
d'eftre  afprement  efucillez  ,  &ne  reiettons 
'point  les  corrcftions  que  Dieu  nons  eniioye, 
veu  que  nous  voyons  que  ce  font  médecines, 


if^î 


voire  vtile^.  Et  ft  nous  «ilegiions  q«e  itwis  ne 
fommes  point femblables  àceftc  nation  dont 
parle  faind  Paul ,  il  eft  certain  que  s'il  y  a  eu 
là  des  vices  bien  mauuais,  il  y  en  a  de  fembla- 
bles  auiourd'huy  entre  nous^  ou  de  piics.Baif 
fons  donc  la  tefte  ,  &  ne  nous  trompons  point 
par  vaines  flatteries.mais  foiilfronsqueceliiy 
qui  a  eftc  leur  iugc  ,  auiourd'huy  nous  traittc 
â  fa  façon, fçachans  bien  que  nous  ne  cognoif- 
fons  pas  ce  qui  nous  eft  propre  &vtile.  Il  ert- 
vray  que  quand  vn  prefcheur  fuyura  ie  ftylc 
qui  luy  eft  ici  commandé ,  ce  ne  fera  poiat 
-pour  réduire  tout  le  monde  à  Dieu  ,  il  elhm- 
pofsible.  Etdc  ùiù,  ileftbien vray-fembla- 
blc  que  ceci  a  efté  en  fcandale  à  beaucoup  de 
ce  peuple.  Car  ils  fe  font  fafchei  de  veoir 
leur  nation  ainfi  dégradée  par  tout  le  inonde, 
quand  (tinâ  Paul  leur  reprochoit  qu'ils  eftoy 
ent  menteurs,defloyaur,mauuaifesbeftes,fay- 
neant,  gourmans:  cela  n'a  point  efté  receu  de 
eux  ,  ie  di  de  tous ,  mais  il  y  a  eu  beaucoup  de 
murmures.  Or  tant  y  a  qu'il  afaluqueùind 
Paul  parlaft  ainfi,&  il  eftoit  approuné  de  fou 
Maiftre  :  &  ceux  qui  fe  font  fafchez  à  l'en- 
contre,  ont  redoublé  leur  condamnation.  Or 
cependant  ils  n'ont  eu  nulle  excufe  :  Dieu  les 
a  aducrtis  que  s'ils  ne  pouuoyent  fouffrir 
condamnation  deluy,queles  Payens&  in- 
crédules les  auoyent  dcfia  condamnez  :  cel« 
(di-ie)  les  a  rendus  plus  que  coulpables.Mais 
il  y  en  a  eu  de  bons  quL-fe  font  paifiblement 
accordez  à  ceci ,  voyans  que  ce  n'eftoit  point 
fiiis  caufe  que  leur  nation  eftoit  ainfi  déni- 
grée. Auiourd'huy  quand  nous  verrons  que 
tousne  reçoyuent  point  paifiblenient  les  rc- 
monftrances  qui  s'addreffent  à  eux  ,  &  qu'il 
feur  femble  qu'il  y  a  trop  grande  rigueur,  que 
nous  nelaifsions  point  d'en  faire  noftre  pro- 
fit: car  cela  leurferuira  de  tefmoignage  pour 
leurofter  toute  excufe  deuant  Dieu.  Quoy 
qu'il  en  foit,  les  bons ,  &  qui  font  vrayement 
brebis  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  pren- 
dront en  patience  les  reprehcnfîons,  Se  ne  fe- 
ront point  defpitez  à  l'encontre  de  l'Euan- 
gile,ni  aliénez  de  leurs  Paftcur<r,quandils  fen 
liront  que  c'eft  pour  leur  profit  &  falut  quand 
on  eft  contraint  de  les  picquer  ainfi:S:  fi  nouï 
ne  cognoillbns  cela  ,nouî  fommes  pires  que 
beftes.  Et  ainiî  que  nous  ne  foyons  point  faf- 
chez quâd  on  vfera  d'vn  tel  fty  le  enuers  nous. 
Car  voila  en  quoy  nous  approuuerons  que 
nous  fommes  enfans  deDieu, c'eft  quand  nous 
ne  nous  desbaucherons  point  de  l'obeiflance 
de  l'£uançile,nc  du  train  de  noftre  foy .quand 
nous  ferons  ainfi  afprement  traittcr.  Cepen- 
dant nous  auons  à  noter  qu'ici  en  vn  mot 
fainrt  Paul  nous  déclare  par  quel  moyen  les 
hommes  fe  pourront  maintenir  &preferuer: 
c'eft  afcauoir  quand  ils  garderont  la  pureté 
de  foy.  Si  donc  nous  ne  déclinons  point  de 
la  fimple  doctrine  de  l'Euangile  , mais  que 
nous  demandions  d'eftre  gouuerncz  félon  la 
volonté  de  Dieu,  &  que  nous  ne  foyons  point 

BBb.iii. 


^66 


SERMON     VIII. 


tranfporteï  par  nos  affeôions  volages ,  que 
nous  ne  cheminions  point  félon  nos  appctis 
fiiuoles,brief<jue  bous  foyonsbonç  efcoliers 
de  noftre  Dieu,&tju^il  nous  fiiffire  d'auoir 
receu  la  doftrine  guM  nous  propof'e  :  ficela 
ell,  nous  ferons  afleurez  contre  tout  mal.  Il 
eft  vray  que  le  diable  femera  toufiours  fes  in- 
fections, &qu''il  ne  demande  que  d'empoi- 
fonner  tout  le  mode  de  fon  venin,  qu'il  efpan 
dra  fon  ordure  par  tout, tellement  que  le  mon 
défera  plein  de  tant  de  corruptions  que  tout 
en  fera  infeûé  :  mais  quoy  qu'il  en  foit,  fi  ne 
faut-il  point  que  nous  déclinions  de  lafim- 
plicité  de  noftre  foy ,  que  toufiours  nous  ne 
demandions  d'eftre  enfeignez  fimplement  de 
no ftre Dieu.  Quand  nous  y  procéderons  ain- 
fi,  quoy  que  le  diable  machine  tout  ce  qu'il 
luy  fera  pofsible,nous  ferons  garétis  de  tout 
Rial.  Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  noter, 
quâdfainft  Paul  àil,qn' ils  foyent  fains.'En  quel 
le  forte?  E»  foy,  dit-il  :  comme  s'ildifoit  que 
les  hommes  vont  chercher  leur  mal  à  leur 
efcient  ■,  quand  ils  fe  deftournent  de  la  pureté 
de  PEuangile.  Car  s'ils  fe  laifToyent  gouuer- 
ner  à  Dieu,&  qu'ils  ne  demandaflent  que  d'a- 
uoir  {i  doftrine  fans  fléchir  ne  çà  ne  la  ,  il  eft 
certain  qu'ils  feroycnt  vnis  comme  ileftbe- 
foinrmaisd'autant  qu'ils  font  variables,qu'ils 
courent  de  coftc  &  d'aiitre,qu'il  n'y  a  que  lé- 
gèreté en  eux,  voila  qui  eft  caufe  de  les  trôper 
&  les  feduire.  Et  ainfi  retenons  la  foy  en  la- 
quelle Dieu  nous  vnit.Or  fainft  Paul  adiouAe 
quant  &  quant  pour  déclaration  plus  ample, 
Q»'»7j  ne  pre fient  point  Tiwreille  aux  fables  I»- 
tlaimes,C  aux  commani emens des  hommes  qui 
fe  aefiournent  delayerSté.  Ilellvray  que  ce 
mot  àefoy,  eftoitvn  fommairedeceque  nous 
auons  dit:  mais  d'autant  que  le  s  hommes  font 
trop  rudes  à  entendre  ce  qui  eft  de  leur  pro- 
fit fpiritueliil  a  falu  que  fainû  Paul  fe  decla- 
raft  plus  à  plein.  Voici  donc  la  fimplicité  de  la 
foy  ,  c'eft  que  nous  reiettions  toutes  inuen- 
tions  humaines ,  que  nous  adhérions  a  ce  que 
Dieu  nous  monftre ,  &  ce  qui  eft  contenu  en 
fa  parole  fans  y  rien  adioufter:  car  le  meflin- 
ge  qui  s'y  fera  ,  ne  fe  trouuerâ  en  la  fin  que 
«orreption.  Voulons-nous  donc  retenir  cefte 
fimplicité?  Reiettons  tout  ce  que  les  hommes 
apporteront  de  leur  propre  pour  méfier  par- 
mi la  parole  de  Dieu.  Voila  en  femme  ce  que 
lainÛ  Paul  a  voulu  dire.  Or  il  appelle  ici/d- 
hles  iudaiques,  chofes  friuoles ,  ou  inuentions 
lie  BuUe  valeur  &  profit.  Car  il  s'expofe  en 
■  ifant  commanderaens  d'horhmes.  Et  pourcmoy 
les  appelle-il  ludaiques  ?  C'eft  fuyuan't  ce 
que  nous  auons  traitté  ce  matin  ,  que  fur  tout 
les  luifs  faifoycnt  beaucoup  de  mal  en  l'E- 
giife  primitiue ,  fous  ombre  qu'ils  auoyent  e- 
Aé  de  toute  ancienneté  le  peuple  de  Dieu, 
qu'ils  eftoyent  nourris  en  la  Loy  dés  leur  en- 
f.ince,  mefmes  qu'ils  l'auoyent  d'Lentsge: 
pour  ce  fte  caufe  on  les  efcoutoit.  Or  cepen- 
,<taDt  ils  cafiVnt  voolu  faire  vu  Rieflipge  ac  la 


Loy  Se  derEuangile.il  eft  vray  que  qoand  le 
tout  fera  bien  entendu  ,  il  s'accorde  tresbien. 
Car  Dieu  n'a  point  changé  propos  :  &  quand 
il  a  eniioyé  foc  Eiiangile,ce  n'a  pas  efté  pour 
aboLrla  Loy  ,  mais  pluftoftpour  ratifier  cç 
qui  eftoit  c 'ntenu  en  îcelle.  Voire,  mais  la 
vrayt  confirmation  de  la  Loy  g'ft  s"  £C  que 
les  cérémonies  foyent  mifes  bas.  Car  elles 
n'ont  pas  tfté  en  vfagefinon  pour  feruirde 
ombres  en  l'abfence  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift. Depuis,  fclon  que  la  vérité  &  fubftan- 
ce  de  toutes  ces  figures  ancicnes  eft  apparue, 
il  faut  que  cela  cefle.Mais  ce  n'eft  point  pour 
faire  tort  Se  iniure  aux  cérémonies  :  ce  n'eft 
point  aufsi  pour  condamner  cefte  police  qui 
a  efté  ordonnée  aux  luifs  quand  onlescalTe 
&qu'onlesabolit  :  mais  c'eft  pour  monftrer 
que  toute  la  force  &  vertu  d'icelles  s'eft  dé- 
clarée quand  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  eft 
apparu.Et  iî  cela  n'eftoit,  quand  on  regarde» 
ra  fîmplemét  les  cérémonies  de  laiLoy,  qu'eft 
ce  qu'on  trouuerâ  fînon  toutes  chofes  puéri- 
les ?  Mais  quand  on  regarde  la  vérité ,  &  à  ce 
patron  celefte  que  Moyfe  auoit  veu  en  ia 
montagne  (comme  il  en  parle  au  vingtroifie- 
me  chapitre  de  fon  troifieme  liure)  alors  on 
verra  qu'il  n'y  a  rien  inftitué  de  fuperflu.  Voi 
la  donc  l'accord  qui  eft  entre  la  Loy  &  l'E- 
uangile  :  mais  les  luifs  eftoyent  eipofitears 
peruers  ,  &  nepouuoycnt  fouffrirque  lesfi-i 
gures  anciennes  fiiflent  aboliesiilss'amufoy-» 
ent  toufiours  là,c'eft  à  dire  à  des  menus  fatra?» 
voire  ^ui  auoyent  efté  bonnes  ordonnances 
&  vtiles,  iufqu'à  ce  que  le  Rédempteur  fuft 
apparu  au  monde  :  mais  elles  ne  faifoyenC 
pour  lors  qu'obfcurcir  noftre  .Seigneur  lefus 
Chrift,  &  mefmes  apportoyent  vne  feruitude 
infupportable.  Voila  pourquoy  notamment 
fainft  Paul  redargue  les  luifs,  difant  qu'ils  a- 
uoyent  meflé  leurs  fables  pour  obfcurcir  l'E- 
uangile  ,  &  qu'il  fe  faut  contenter  de  ce  que 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift  a  enfeigné:  que 
la  Loy  demeure  toufiours  quant  à  la  doûrine, 
mais  quant  à  l'vfage  des  cérémonies,  que  cela 
cftpaflc,  &  qu'il  ne  faut  plus  que  les  Chre- 
ftiens  s'y  amufent.  Nous  voyons  maintenant 
l'intention  defainft  Paul.  Or  de  ce  partage 
nous  auons  à  recueillir  en  premier  litu  ,  que 
les  commandcmens  des  hommes  font  reprou- 
ucz.Car  faindl  Paul  n'vfe  point  d'autre  argu- 
ment ni  raifon  pour  ofter  ce  qui  eft  des  hom- 
mes,fi^non  endifant,  Q^oy?  qui  font-iIv?Ap- 
prenons  donc  que  Dieu  veut  auoir  telle  mai- 
flrife  furnouj  ,  que  les  hommes  n^entreprc- 
nent  point  de  nous  impofcr  des  loix.Or  i'en- 
ten  loÎT  fpirituelles  fur  nos  âmes.  Car  ceci 
n'atiouche  point  à  la  police  :  il  y  a  l'ordre 
extérieur  :  &  noftre  Seigneur  veut  qu'il  y 
ait  des  loix  en  ce  monde  :  &  notamment  il  eft 
dit  que  par  fa  fageflèil  prefîde  fur  les  Prin- 
ces ,  Se  fur  les  Magiftrats ,  afin  qu'ils  facenl 
loixSc  edits.  Mais  il  eft  ici  queftion  du  régi- 
me  fpirituel  <ie  uos  -aiacs ,  de  f^auoix  comioe 

nous 


SVR   U  EPIS  T.   A  TITE. 


SC'7 


noac  deùons  ferulr  à  Dieu ,  quelle  cft  la  Traye 
religion.  Or  il  ne  faut  point  que  les  hommes 
s'anacent  ici  pour  impofer  loy ,  on  pour  faire 
quelques  edits,  pour  dire,  Voila  côrôe  il  nous 
fautferoirà  Dieu.  11  s'eft refcrué  cclaàluy 
feul.  Etainfi  nous  voyons  que  ce  qu"'ona  ap- 
pelé feruice  de  Dieu  en  la  Papautc,n'eft  finon 
pour  fubuertir  1*  vraye  obeiirance  que  nout 
deuons  à  Dieu.  Il  ne  faut  point  vfcr  de  longs 
«ircnits:  car  celle  Tentence  nous  doit  fuflîre 
quand  S.Paul  en  vertu  du  S.Elprit  déclare  que 
les  commandemens  d'iiômc!  doiuêt  eftremiî 
bas,& qu'il  faut  que  tout  cela  foit  raclé, &:  que 
nous  tenions  l'ordre  que  Dieu  approuue  en- 
tre nous.  Voila  pour  vn  item.  Or  notons  que 
tous  commandemens  d'iiommes  font  appelez 
fables  ou  refueries,  voire  qBelque apparence 
de  fagefTe  qu'il  y  ait  :  côme  il  cft  bien  certain 
que  tout  ce  qui  aura  efté  introduit  à  la  phanta 
fie  des  hommes,  fera  toufîours  trouué  meil- 
leur que  ce  que  Dieu  cômande.Et  pourquoy? 
Car  nous  recognoiffons  là  ce  quj  ell  de  noftre 
nature.  Et  cela  eft  caufe  que  quand  les  homes 
auront  forgé  des  loix,  qu'on  y  prendra  touf- 
iourç  plus  de  goull ,  Se  que  cela  plaira  mieux 
quedefuiure  la  fimplicitédel'Efcriture  fain- 
âe:Ho,ceci  n'eit-il  pas  beau?Q^nd  en  la  Pa 
pautéon  cftime  les  loix  qu'on  y  a  forgées, 
N'eft-ce  pas  (difent-ils)  chofc  bien  vtile  que 
on  s'ab  ftiene  de  manger  chair  en  vend  redi?  & 
puis  qu'on  face  le  Quarefme?  Cela  eft  en  pre 
mier  lieu, pour  donter  lachair:&puis  c'eft  en 
rhôneurde  lamortS:  pifsion  de  Ufus  Chri/l 
qu'on  obferue  ces  iours-la.  Et  puis  que  les 
preftres  s'abftrenent  du  mariage  :  car  ils  doi- 
oent  eftre  pleins  de  toute  fainfteté.  Et  ainfi, 
de  fc  prophaner  comme  gens  laies,  &:decc 
monde, il  n'y  auroit  point  de  propos.  Ils  doi- 
ucnt  adminÙlrer  les  fainÛs  Sacremens.&  s'ils 
eftoyent du  rang  commun  des  hommes,  cela 
feroit  deroguer  à  la  dignité  des  chofes  faiu- 
ftes.  Et  puis  après  quant  à  la  confelTc ,  y  a-il 
rien  meilleur  que  de  venir  fe  profterner  en 
humilité  pour  confefler  tous  fes  pcchez  àvn 
homme  ?  Brief,  toutes  telle  innentions,  com- 
bien que  ce  ne  foit  que  fottifes ,  ne  lailTeront 
point  d'auoir  apparence  de  fagefle.  Et  pour- 
quoy? D'autantCcommei'ay  dit)que  nous  ai- 
mons ce  qui  s'accorde  à  noftre  phantafie  :  Se 
tout  ce  qui  a  efté  ainfi  inuété  des  hommes,  eft 
conforme  à  noftre  nature:  &  ainfi  nous  aimôs 
ce  qui  nous  eft  femblable.  Mais  Dieu  ne  re- 
garde pointée  quenousappetons ,  ni  àquoy 
nous  fommes  enclins:fa  volonté  nous  doit  e- 
ftre  pour  règle  ,  &  nous  faut  tenir  là  ,  quoy 
qu'il  en  foit.  Et  ainfi  notons  bien  quand  les 
inuentions  humaines  nous  plairont  ,  &  que 
nous  y  prendrons  gouft ,  que  Dieu  a  déclaré 
vne  fois  pour  toutes  que  ce  ne  font  que  me- 
nus fatras ,  ce  ne  font  qu'ordures  ,  ce  ne  font 
que  fables  &  chofes  de  néant.  Il  eft  vray  que 
Tainfi:  Paul  dit  bien  en  l'autre  partage, c'eft  a- 
Cwj,.î3  f  jauoir  aux  Colofsicns ,  que  les  loix  qui  font 


proccdees  des  horames.ontqHelqne  belle  ap- 
parence de  fagefle,  &mefmes.qu'il  y  aThiinn 
lité  parmi, qu'il  ("emble  qu'on  s'humilie  quand 
on  obferue  ce  qui  cftainfî  cômandé  des  hom- 
mes :  mais  après  il  adioufte ,  Puis  que  ce  font 
commandemens  d'homes, ce  n'cft  rien  qui  vail 
le. Voila  donc  en  fommc-,c6me  ce  qui  fera  eili 
mé  haut  Se  eicellét  par  nous,n'cft  iinon  puaa 
life  &  toute  abomination  quant  à  Dieu  ,  ainfi 
qu'il  a  efté  prononcé  par  la  boHche  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  en  faind  Luc.  C'eft  ce  ^'  ^^^ 
que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paflage.Vcnôs  '^' 
maintenant  à  ce  qui  eft  adioufte.  Sainû  P»ul 
fpecifîe  quelles  fontlcs  pollutions  dont  il  par 
lc,difant,  \raycfl  qu'à  craie  ^»i  font  purs  gr 
nets,tout  Uureji  pur:  mais  à  cfux  qui  font  poUut, 
iln'y  aricnqniltHrpuiffceflrentt.  La  râifon? 
Ils  corrompent  tout,  en  touchant  les  bonnes 
créatures ,  ils  les  infeûcnt  par  leur  pollution: 
car  l'incrédulité  eft  comme  vne  pefte  mortel- 
le. Ainfi  doncquand  vn  homme  eft  poilu, tour 
ce  qu'il  attouche  il  le  fouille  auec  foy.  Par  ce 
ci  fainft  Paul  monftre  que  les  luifs  voulans 
contraindre  les  Chreftiens  à  s'abftenir  des 
viandes  qui  eftoyent  défendues  en  la  Loy,  ne 
font  que  peruertirle  feruice  de  Dieu  ,  quel- 
que belle  apparence  qu'ils  ayent.Or  on  trou- 
ueroit  eftrange  quand  ftinft  Paul  parle  en  tel 
le  véhémence  des  chofes  qui  ne  font  point  de 
grand'  importance, comme  on  les  eftime.  Ce- 
la n'cft-il  pas  indiffèrent  qu'on  mange  chair, 
ou  qu'on  n'en  mange  point?  Faloit-il  s'efcar- 
moucher  fi  fort?  Si  les  luifs  auoyent  deuo- 
tion  à  ne  manger  point  de  certaines  viandes, 
&  bien  ,  encores  qu'en  cela  ils  s'abufaflenr, 
&qu'ilyeuftde  la  fuperftition  &  de  l'erreur, 
il  femble  que  fainéi  Paul  deuoit  couler  cela 
fans  en  faire  femblant.  Et  auiourd'huy  les  d" 
ges  du  monde  qui  voudroyenc  nager  entre 
deux  eaux,  en  font  encores  là  :  carilsdifent 
que  nous  fommes  par  trop  importuns ,  quand 
nous  ne  voulons  point  qu'on  s'afTuiettiMeaut 
loix  humaines.  Car  y  a-il  (i  grand  malCdifent 
ils  )  quand  on  ne  mangera  point  de  chair  en 
vendredi?  Mais  il  nous  faut  toufiours  venir  â 
lafouice  :  car  il  n'eft  point  queftion  de  l'ça- 
uoirfi  on  mangera  chair  en  vendredi  ,  quand 
en  ctft  endroit  nous  condamnons  les  Papi- 
ftes  :mais  nous  venons  à  la  fource  du  mal, pour 
fçauoir  s'il  eft  licite  aux  hommes  mortels  de 
vfurper  l'authoritédeDieu  pour  gouuerncr 
les  confciences.pour  faire  des  loix  à  leur  po- 
fte  ,  pour  y  afluiettir  fur  peine  de  péché  mor- 
tel,de  mettre  vne*dîê  ob^gation.q  leurs  fta 
tus  foyét  eleuez  par  delTus  la  parole  de  Dieu. 
Et  où  eft-ce  aller?  Il  eft  dpnc  queilion  de  ce-  ' 
la:il  eft  queftion  de  fçauoir  comme  Dieu  veut 
eftre  ferui  &  honoré.fi  c'eft  en  obeifTanccou 
à  l'appétit  des  hommes;il  eft  queftion  de  fça- 
uoir quel  eft  le  vray  feruice  de  Dieu,  &  la 
vraye  religion.  Or  quand  cela  eft,  faut-il  que 
ceux  qui  ne  pcuuent  créer  vne  moufche ,  nous 
défendent  de  manger  des  viandes  que  Dieu  a 
BBb.iiii. 


585 


SERMON     VIII. 


créées  à  nofhe  vûge?  Etfîl'vn  condamnera 
rautr€  fous  ombre  qii'vne  chofe  aura  efté  in-« 
uenrce  à  Pappetit  des  hommes,  faut-il  cepen- 
dant que  Dieu  foit  priué  de  fon  authonté  ,  & 
qu'iJ  foit  arraché  de  fon  fiegc,  &  quM  ne  do- 
mine plus  fur  nous, mais  que  les  hommes  y  ay- 
ent  toute  puilTance  pour  nous  damner  ou  lau 
uer  àleur  fantalîe?  Voila  donc  où  il  nous  faut 
maintenant  reuenir,pour  cognoiftre  fur  quoy 
eft  fondé  le  débat  que  nous  auôs  auiourd'huy 
auec  les  Papiftes.  Et  voila  qui  a  efté  caufe  que 
faind  Paul  s'eft  ainlî  choleré ,  pour  refiftcr  à 
la  fuperftition  de  ceux  qui  ne  vouloyét  point 
que  les  Chreftiens  euflent  liberté  de  manger 
les  viandes  telles  que  Dieu  les  a  créées  pour 
noftre  vfage.  Vray  eil  que  Dieu  auoit  bien 
mis  quelque  difcretion  des  viandes:  mais  cela 
a  ceflé  (comme  nous  auons  dit)  à  la  venue  de 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift,il  a  falu  que  tout 
fuft  mis  bas.  Caries  enfans  ne  feront  pas  en  tu 
telle  finon  iufqu'à  ce  qu'ils  foyent  venus  en 
aage  d'homme.  Quand  on  ordonne  vn  tuteur 
ou  curateur  à  vn  enfant,  cen'eftpasqu'àl'aa- 
ge  de  trente  ou  quarante  ans  il  foit  toufiours 
comme  il  a  efté  en  fon  enfance.  Ainiî  Dieu  a 
voulu  gouuerner  le  peuple  ancien  à  la  forme 
des  petis  enfans,  comme  fainiîl  Paul  eu  parle: 
maintenant  il  nous  donne  vnc  façon  &  régi- 
me qui  eft  propre  à  la  perfeiiion  à  laquelle  il 
nous  a  amenez.  Si  les  luifs  vouloyét  contrain 
dre  les  fidèles  à  obferuer  leurs  ceremonies,ce 
feroit  faire  vngr.id  outrage  ànoftre  Seigneur 
lefus  Chnft  ,  ce  feroit  deroguerau  bien  qu'il 
nous  a  apporté  :  car  il  veut  qu'en  fon  Eglife 
on  vfe  de  la  liberté  qu'il  nous  a  acquife.  D'a- 
Mantage,ce feroit  obfcurcir  fa  grâce. Car  com 
me  on  pourra  bien  par  vne  ombre  iuger  d'v- 
ne  chofe  abfente  :  aufsi  les  luifs  pouuoyent 
bien  eitre  conduits  &  amenez  anciennement 
à  lefus  Chrift  par  les  ombrages  que  Dieu  leur 
anoit  ordonnez.  Mais  cependant  puis  que  le- 
fus Chrift  eft  apparu.de  s'amufer  encores  aux 
ombres ,  &  de  laifler  là  le  corps  &  la  fubftan- 
ce,  n'eft-ce  pas  fe  moquer  &  le  defpiter  plei- 
nement? Et  ainfi  notons  que  la  clarté  de  l'E- 
iiangile  eftoit  obfcurciepar  cefte  contrainte 
«jue  pretédoyent  mettre  les  luifs  fur  les  Chre 
ftiens.Et  ainft  non  fans  caufe  fainft  Paul  s'eft 
ainfi  adrefle  à  eux  ,  &  auec  telle  véhémence. 
Retenons  donc  en  fomme.quand  les  hommes 
veulent  eftablir  quelque  nouueau  feruice  de 
Dieu,  q  cela  eft  infupportablê.  Et  pourquoy.? 
Car  c'cft  autant  comme  fi  on  vouloit  abbaif- 
fer  Dieu  au  rang  commun,  &  côme  fi  les  créa 
tures  vouloyent  vfurperce  qu'il  s'eft  referué 
à  luy  feul.  C'eft  le  premier  que  nous  auons  â 
retenir  de  ces  traditions  humaines.  Mais  ce- 
pendant notons  aufsi  que  quand  il  y  a  des  me 
rus  fatras  aufquels  on  veut  eftablir  faindctc, 
que  cek  eft  pour  abaftardir  le  vray  feruice  de 
Dieu.  Qjj'tft-ce  que  Dieu  demande  de  nous? 
C'cft  que  nous  mettions  noftre  fiance  en  luy, 
<^u''ca  cognoiIEuu  cosroilercs  nousayôsua- 


ftre  refuge  à  fa  mifericorde,  que  nous  l'inuo» 
quions  en  toutes  nos  nccelsirez,que  nous  por 
tions  patiemment  les  afiîidions  qu'il  nous  en 
uoye.que  nous  ne  laifsions  point  d'efperer  en 
luy ,  combien  que  nous  fovons  tentez,  de  gras 
troubles ,  que  nous  cheminions  en  pureté  de 
confcience  ,  que  nous  ayons  rondeur  &  inté- 
grité auec  nos  prochains.  Voila  quel  eft  le 
vray  feruice  de  Dieu.  Or  cependant  on  nous 
viendra  mettre  en  auant  que  c'eft  vne  belle 
choie  que  de  s'abftenir  de  mâger  chair  vn  tel 
iour:on  nous  deftournera  du  vray  feruice  fpi- 
rituel,&  nous  fera-on  à  croire  que  Dieu  fe  c5 
tente  de  menus  fatras.Car  qu'eft-ce  autre  cho 
fe  finon  des  hochetes  de  petis  enfans,  de  tout 
ce  que  les  hommes  aurôt  ainfi  inftitué;  Et  voi- 
la comme  les  Papiftes  ne  font  que  fe  moquer 
pleinement  de  Dieu.  Et  pourtant, de  s'arre- 
fter  à  leurs  fables.ce  feroit  vne  pollution  fem 
blableà  celle  que  fainft  Paul  a  ici  défendue. 
Parquoy  fi  les  Papiftes  veulent  feruir  Dieu  à 
leur  phantafie,laiirons-les  là,&  gardons-nous 
bien  de  nous  mefler  auec  eux.  Ils  dirôt,Il  faut 
auoir  vne  telle  deuotion:  c'eft  vne  belle  chofe 
quand  on  ne  mangera  point  de  chair  vn  tel 
iour,qu'on  fera  ceci  ou  cela.  Q^iiand  Us  aurôc 
amafle  beaucoup  de  tels  badinages,  qu'eft-ce 
au  prix  de  ce  que  Dieu  nous  a  commandé  par 
fa  parole?  L'inuocation  du  nom  de  Dieu,n'eft 
ce  pas  vn  facvifice  beaucoup  plus  excellét  que 
tout  ce  que  les  Papiftes  auront  forgé  en  leur 
tefte?  Et  c'eft  ce  que  fainil  Paul  a  voulu  ici  ex 
primer,  en  difant  qu'il  faloit  refifter  à  telle 
feruitudeque  les  luifs  pretendoyent  mettre 
fur  les  confciences.   Par  cela  il  nous  monftre 
que  fi  on  veut  ordonner  vne  bonne  règle  en- 
tre nous,  il  faut  intcrroguer  Dieu  pourfça- 
uoir  ce  qu'il  approuue,  &  ce  qui  luy  eft  agréa- 
ble :  &  alors  nous  fçaurons  que  nous  ne  fai— 
fons  rien  à  noftre  tefte,  quM  veut  que  no'  che 
minions  en  pureté  de  confcience,que  fon  fer- 
uice eft  fpirituel.il  ne  demande  point  ne  mul- 
titude de  bœufs  qu'on  luy  offre  en  Sacrifice» 
ne  grandes  pompes  ,  ne  ceci ,  ne  cela  :  mais  il 
veut  que  nous  renôcions  à  nous-mefmcs  pour 
luy  eftre  fuiets:  il  veut  que  nous  recourions  à 
luy,  fçachans  que  c'eft  fon  office  de  pouiuoit 
à  toutes  nos  necefsitez  :  que  nous  luy  attri— 
buyons  pleinement  la  louange  de  tout  bicnî 
quand  il  nous  affl/ge  que  nous  demeurions  la 
quois  ,  que  nous  ne  murmurions  point  quand 
les  chofes  ne  viendront  point  à  noftre  phan- 
tafic:  que  par  ce  mode  nous  cheminions  com 
me  en  vn  ombrage  de  mort ,  &.  que  nous  ne 
laifsions  pasdecontéplei  la  vie  celefte,  com- 
me il  nous  la  propofe  par  l'Euangile.    Voila,, 
di-ie  ,  quel  eltlc  vray  feruice  de  Dieu  .voila, 
quelle  eft  la  pureté  qui  eft  contenue  en  fa  pa- 
role.Mais  quand  les  nommes  fc  veulent  iuAi- 
fier  par  des  badinages  ie  ne  f^ay  quels,  qu'ils 
auront  leurs  dcuotions, pour  dire,  Voila  com- 
me i'appaiferay  Dieu.voila  comme  îc  fausfe- 
ray  pour  mes  tauccs,ie  nicriteray  en  telle  for- 
te & 


SVR    L"  EPIS  T.    A   TITE. 


fffp 


te&en  telle:5c  puis,  ceci  fera  eiicorcs  par  dt l' 
fus,ie  feray  chanter  des  mcfles,  l'auray  teJles 
chofes  <jui  m'ac(^iiefteront  paradis  :   <juand 
doncles  hommes  penfent  s'auancer  parceJa, 
ils  s'abufent  par  trop  :  car  non  feulement  ce 
font  chofes  friuoles  &  puériles  ,  mais  ce  font 
abominatiôs  vileines&  diaboliques  que  Dieu 
ne  peut  fouffrir.  Ainfi  donc  apprenons  que 
toute  l'obeiffànce  que  nous  deuons  à  Dieu, 
c'eft  de  le  feruir  félon  fa  volonté.  Et  il  nous 
monftre  quelafaçon  de  le  bien  feruir  ,  n'cil 
point  par  cérémonies,  ni  chofes  externes: 
mais  que  nous  deuons  commencer  par  l'inté- 
grité intérieure,  que  nous-nous  exercions  en 
prières  &oraifons,  que  nous  apprenions  de 
renoncer  tellement  à  ce  qui  eft  de  noftre  rai- 
fon&  denos  appetis,  que  nous  foyons  vrais 
facrifices,voire  eftans  reformez  en  nous-mef- 
mes,afin  que  l'Efprit  de  Dieu  règne  en  nous. 
Si  nous  retenôs  cela,  alors  nous  verrons  bien 
que  tout  ce  que  les  hommes  auront  inftitué, 
n'eil  que  fumée ,  &  que  cela  s'efcoulera  ai- 
feement  :  puis  au  lien  qu'on  s'y  abufe  tant ,  Se 
qu'on  en  faityn  tel  cas ,  nous  verrons  que  ce 


n'eft  qu'ordure  ,  ou  bien  qu'il  n'y  a  qu'hypo- 
criiîe,&  chofefemblable.  Or  quand  nous  au- 
rons bien  profité  en  cela,  nous  ne  ferons  plus 
en  danger  d'eftre  fcduitsne  trompez  quand 
nous  aurons  cognu  comme  Dieu  veut  eftre 
ferui  &  honoré. Le  reile  fera  referué  pour  vne 
autre  fois. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  li 
maielté  denoftre  bon  Dieu  en  recognoiflàn- 
cc  de  nos  fautes ,  le  prians  qu'il  nous  les  face 
tellement  fentir,que  ce  foit  pour  nous  attirer 
à  vne  vrayerepentance  ,  Se  non  point  feule- 
ment poumons  condamner  en  nous-mefmes, 
mais  aufsi  pour  chercher  le  remède ,  &  pour 
eftre  purgez  de  toutes  nos  pollutions  par  la 
vertu  de  fon  fainft  Efprit.  Et  que  de  iour  en 
iouril  nous  face  celle  grâce  de  nous  confor- 
mer à  laiufticede  fa  Loy  ,  &  qu'il  l'impiiuie 
tellement  en  nos  cœurs,  que  nous  ne  cher- 
chions linon  de  nous  aflùiettir  à  luy  ,  &  à  ce 
qucbon  luy  femble.  Que  non  feulement  il 
nous  face  cefte  grâce  ,  mais  à  tous  peuples  & 
nations  de  la  terre,&c. 


NEVFIEME     SERMON     SVR     LE 

PREMIER     CHAPITRE. 

1 5  Toutes  chofes  certes  font  nettes  a  ceux  qui  font  nets:  mais  aux- 
fouillez  O"  itux  infidèles  rien  nefl  net ,  mais  leur  entendement  ^  con- 
fciences font foudlces. 

i6     lis  confeffent  cognoiflre  Dieu ,  mais  ils  k  nient  far  œuuresy 
(  qu'ils  font  abominables  (^  incrédules ,  O'  reprouuez  a  toute  bon- 


\eu  quiisfc 
ne  œuure. 

'  V  fermon  prochain  ,  fainft 
j  Paul  nous  moftra  qu'il  nous 
I  faut  régler  félon  Ji  parole 
5  de  Dieu.ayans  les  coinman- 
j  démens  des  hommes  pour 
friuoles,  car  ce  n'eft  point 
là  où  giil  la  fair.^eté  &  per 
feitiôn  de  vie.  Maintenant  il  adiouflc  vne  e- 
fpece  de  ces  commandemens  qu'il  auoit  re- 
ièttez  ,  c'eil  afçauoir  quand  on  défendra  cer- 
uines  viandes  ,  &  qu'on  ne  permettra  point 
d'vler  de  la  liberté  qtie  Dieu  donne  à  fes  fi- 
deles.Vray  eft  que  ceux  qui  troubloyent  l'E- 
glifedu  tempsaefaina  Paul,  mettant  en  a- 
aant  telles  traditions,  fe  couiiroyeir»  des  com 
mandemens  de  la  Loy  :  mais  pourcc  que  cela 
n'auoit  elle  eflabli  que  pour  vn  temps ,  non 
fânscaufc  fainft  Paul  dit  que  ce  ne  font  que 
rnuentions  humaines ,  pource  que  le  Temple 
deuoitelhc  aboli  à  l.i  venue  de  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chrill.  Qi.and  donc  en  l'Eglife 
Chrcûieune  ona  voulu  auoir  cefte  fupcifli- 


tion,qBe  certaines  viandes  fuflent  defendueT, 
l'âuthorité  de  Dieu  n'a  point  efté  pour  ceux" 
la  ,  car  ç'aerté  contre  fon  intention  qu'on  s 
voulu  aflùiettir  les  Chreftiens  à  telles  céré- 
monies. En  fomme  ,  fainfl  Paul  déclare  ici, 
qu'auiourd'huy  nous  auons  liberté  de  man- 
ger fans  exception  de  toutes  viandes.  Car  il 
n'eft  pas  qiieÛion  ici  de  la  fanté  du  corps, 
mais  c'eft  d'autant  que  les  hommes  ne  doiuéc 
point  auoir  cefte  maiftrife  de  nous  impofer 
loy  qui  foit  contraire  à  ce  que  Dieirnous  dit 
par  fa  parole.  Puis  qu'ainfi  eft  que  Dieu  ne 
met  point  difFeience  cntie  les  viandev,vfons— 
en,  fans  nous  enquérir  de  ce  qui  plaira  aux 
hommes,  ou  de  ce  qui  feia  approin'.é  d'eux. 
Voila  donc  en  fomme  ,  ce  que  fair.ft  Paul  a 
ici  enfeigné  quant  à  la  p;f niiere  partie.  Or  '.1 
cft  vray  que  nous  deuons  vfer  de  fobrieté& 
tempérance  des  biens  que  Dieu  nour.  donne: 
cncores  que  nous  en  ayons  â  regorger  fconi- 
me  on  dit  )  fi  faut-il  qu'vn  chacun  fe  rctiene,, 
&q;Ue  nous  puifsions  garder  cefte  rcigle  qui 

CCf.h. 


Î70 


SERMON    IX. 


ooa- eft  monflree  ,  c'eft  aTçiuoir  que  Dieu  comme  à  noitî  appartenant  ie  droifl.  Mainte 
Boii'î  a  créé  le^  viîd;s,  mu  point  pour  emplir  nint  voyoïi';  dont  celle  pureté  procède. Nous 
noftrc  ventre  comme  des  pourceaux,  mai;  ne  la  trouiierô;  pomt  en  nous,  mais  elle  nous 
p  lur  en  vUr  pour  lovillenir  nollre  vie.  Cju-  cfl  donnée  par  la  foy.  Saind  Pierre  au  qain- 
técons-nous(di-ie)  de  celle  mcfure  qu?  Dieu  ziemedes  Acies(  combien  que  là  il  traittevn 
nous  m  jnftre  par  fa  parole.   Et  piiis  encores  propos  plus  gênerai)  dit  que  les  cœurs  de 
que  nous  n'ayons  point  nourriture  à  fouhait,  tous  les  Pères  anciens  ont  elle  purifiez  p.ir 
portons  patiemment  la  p  lureté,  &  prattiquôs  ce  m  lyen  ,  c'  ft  quand  Dieu  leur  a  d  jnné  la 
la  dodrinc  de  faind  Paul,  que  nous  f^acKions  foy.  Or  il  efl  vray  qu'il  regarde  là  au  l'alut  e- 
eftre  indigens ,  auf^i  bien  que  d'auoir  quanti-  terne], d'autant  que  nous  auoa^  elle  poilus  du 
té.  Car  iinoltre  Seigneur  nous  donne  outre  tout  iufqucs  à  tant  que  Dieu  nous  ait  recon- 
nollre  lugcment ,  li  nous  l:aut-il  (comme  l'ay  ciliez  à  foy  ,  au  nom  de  noltre  Seigneur  lefus 
deiîa  dit) tenir  en  bride  nosappecis:  â:àl'op-  Chrill,&  que  nous  l'ayant  conllitué  pourRe 
polîte,  quand  il  luy  plaira  nous  retrancher  dempf  ur,  il  nous  ait  apporté  le  prix  &  la  ran 
nos  morceaux,  que  nous  loyons  nourris  mai-  ç^n  de  nos  âmes  :  mais  celledodrine  fe  peut 
grement  ,  Jî  faut-il  le  contenter,  &:  le  prier  &  fe  doit  appliquer  à  ce  qui  concerne  la  vie 
qu'il  non»  donne  patience  quand  nous  n'auôs  prefente.cSf  lufquesàtant  quenous  ayons  co- 
point  ce  que  noftre  chair  fouhaite.  Bricf,  il  gnu  qu'eftans  adoptez  en  lefus  Chnft,  nous 
uous  tant  reueniràcc  qui  eildit  au  trerieme  fomiiiei  enfani  de  Dieu, &  par  conlcquct  que 
des  Romains,  C^ue  nous  n'ayôs  p'oint  foin  de  l'héritage  du  monde  eft  noftre. Nous  ne  pour 
noftre  corps  pour  fatisfaire  à  (es  cupiditei:  rions  pas  toucher  vnc  feule  riande  que  nous 
car  il  n'y  auroit  iamais  fin  li  les  homes  fc  laf-  ne  fufsions  larrons  :  car  nous  fommes  pnuer 
choyent  la  bride:  mais  contentons-nous  d'à-  &  bannis  de  tous  les  biens  que  Dieu  a  crecx.à 
noir  ce  qu'il  nous  faut ,  cSc  ce  que  Dieu  co-  caufe  du  péché  d'Ad.î,iufques  à  tant  que  nous 
gnoiflnouseftre  propre. Voila  comme  toutes  en  ayons  la  pofTcfsion  en  noftre  Seigneur  le- 
chofes  nous  feront  pures ,  quand  nous  ferons  fus  Chrift.Il  faut  doc  que  la  foy  nous  purifie, 
ainlî  purifiez.  Or  il  eft  cray  qu'encores  que  &  alors  toutes  viâdesnous  feront  nettes,c'eft 
les  hommes  fulTcnt  tous  poilus, les  viâdes  que  à  dire  ,  que  nous  en  pourrons  vfer  en  liberté 
Dieu  a  créées  ne  iaifleront  pas  d'cftre  bônes:  fans  aucun  fcrupale.  Et  fi  les  hommes  nous 
maisil  eftqueflion  ici  de  l'vfage.Qiiâdfaind  vienent  impofcr  des  loix  ,  nous  les  pourrons 
Paul  dit, Toutes  chûfes  font  pures,  il  n'entéd  mefpnfer  ,  fçachans  qu'v ne  telle  obeillance 
point  qu'elles  le  font  d'elles-mefmes ,  mais  ne  peut  plaire  à  Dieu, quand  nous  luy  donne- 
quâtà  ceuiqui  les  reçoiucnt:  comme  nousa-  rons  des  compagnons  qui  foyent  pareils  à 
uons  veu  par  ci  deuat,  qu'il  difoit  à  Timothee  luy  en  degré.  Car  il  fe  referue  cela  ,  de  nous 
que  tout  nous  eftfandifiépar  lafoy,  &par  a-  gouuerner.  Le  régime  fpirituel  donc  doit  e- 
dion  de  gr.îces  :  Dieu  (  dit-il)  a  rempli  le  ftre  inuiolable  à  Dieu.  Et  ainlî  quand  nous 
monde  de  telleabondance,  que  nous  dcuons  donnerons  cefte  fuperiorité-la  aux  hommes, 
cftre  esbahis  quand  nous  voyons  qu'il  a  eu  rn  qu'ils  attrapperont  &  enuelopperont  nos  a< 
foin  plus  que  paternel  de  nous.  Car  toutes  les  mes  en  leurs  liens.c'tftautant  aneîtir  lapuif- 
richelTes  qui  font  ici  bas  ,  à  quelle  fin  fe  rap-  fance  &  l'empire  de  Dieu. Et  ainfi  cefte  humi 
portent-elles,  finon  que  Dieu  s'cftraonftré  II  lité  que  nous  aurions  ,  roulans  obferuer  les 
beral  enuers  les  hommes?  Or  maintenant  au  traditions  humaines, feroit  pire  que  toutes  les 
contraire,  quand  nous  ne  cognoiftrons  que  rebellions  du  monde,  d'autant  que  c'eft  de- 
Dieu  no*  elt.ît  Pere,veut  faire  office  de  nour  fpouiller  Dieu  de  fon  honneur, &  le  tranfpor 
ricier  enuers  nous ,  Se  quenous  ne  receuions  ter  comme  vne  defpouille  à  des  hommes  mor 
de  fa  main  ce  qu'il  nous  donne, tellement  que  tels,  &  àdes  créatures  qui  ne  font  rien.  Or  il 
(juand  nous  mangeons,  que  ce  fi#it  eftans  réf.)  eft  rray  que  faintl  Paul  parle  ici  de  la  fupcr- 
Jus  que  c'eft  Dieu  qui  nous  nourrit;  fi  (di-ie)  ftition  qu'auoycnt  aucuns  luifs,  voulîs  qu'oo 
nous  n'auonsccla  ,  Dieu  ne  peut  eftreglori-  obfcruaft  encores  les  ombres  &  figures  de  la 
fié  comme  il  le  mérite:  &  mefmes  nous  ne  Loy  :  maisfieft-ce  que  le  faind  Efprit  ena 
fçaurions  manger  vn  morceau  de  pain  ,  que  prononcé  vne  fentence  qui  doit  eftrcobfer. 
BOUS  ne  foyons  facrilcges ,  Se  nous  en  faudra  uce  iufques  à  la  fin  du  monde  ,  tellement  que 
rendre  conte,  fi  cela  ne  nous  eft  refolufcom-  Dieu  auiourd'huy  ne  nous  a  point  aftrains  i 
me  l'ay  défia  dit)  que  c'eft  Dieu  qui  no*  nour  vn  tel  fardeau  comme  les  Pères  anciens,  mais 
lit  &fiibftante,  &  qu'il  nous  eft  licite  de  iouir  a  retranché  ce  qu'il  auoit  commandé  oude- 
dcs  biens  qu'il  nousdiftribue.  C'eft  la  pureté  iendu  des  viandes, d'au  tant  que  ccn'cftoit  fi- 
dont  parle  ici  faind  Paul ,  difant  que  toutes  non  vne  loy  temporelle.  Puis  que  Dieu  nous 
chofes  nous  font  pures,  voire  quand  nous  au-  aainfi  mi»  en  liberté, maintenant  quelle  auda- 
rons  vne  telle  intégrité  ,  que  nous  nedefpri-  ce  fera-ce  à  des  vers  de  terre,  d'impofcr  de^ 
fions  point  le  bien  d'autruy  ,  mais  que  nous  loix  nouuclles,  comme  fi  Dieu  n'tuft  point 
demandions  à  Dieu  noftre  pain  ordinaire  :  &  H\ù  aflcz  fage?  Quand  on  allègue  ce  lieu-c» 
puis  ,  que  nous  foyons  tout  perùiadez  que  ce  aux  Papiftes,ils  refpondent  que  faind  Paul  a 
qii^BoiM  donne  ,  nous  Icpouuons  rcceuoir  parlé  des  Imfs,  &  des  viandes  qui  cftoyent 

dffcndues 


s  V  R    L*  E  P  I  S  T.    A    T  I  T  E. 


Î7« 


défendues  en  la  Loy.Ie  le  c5feirc,&  eft  vray: 
maib  auifons  '.i  v  ne  telle  réplique  eft  de  mife, 
ne  de  recepte.  C.u  faincV  P.iul  ne  dit  pas  Itu- 
lement  qu'il  foit  licite  d'vlcr  de  cecjuiauoit 
«fté  détendu  :  il'parlc  en  gênerai ,  dilant  que 
toutes  chofej  font  pures.  Et  ainlî  nous  voy- 
ons que  Dieu  â  ici  donné  vue  liberté  quant  à 
l'vfage  des  viandes ,  tellement  qu'il  ne  veut 
plus  que  nous  foyons  en  telle  fuietion  cô.ne 
onteftéles  Pères  anciens. Ormaintcnant  puis 
que  Dieu  luy-metme  a  abrogé  la  !oy  qu'il  a- 
uoit  faite,  qu'il  ne  veut  point  qu'elle  tiene.ne 
qu'elle  foit  en  vigueur,  mais  qu'elle  folt  abo- 
lie,fi  les  homes  vienent  forger  des  traditions 
à  leur  pofte  ,  &  qu'ils  ne  fc  contentent  pas  de 
ce  que  Dieu  leuradeclar6,  mais  qu'ils  vueil- 
lent  eftre  plus  lages  que  luy.où  fcra-ce  aller? 
Ne  voila  point  double  mal;  L'vn  c'eft ,  qu'on 
veut  encores  tenir  l'Eglife  Chrcftienne  en  ce 
fte façon  puérile  quia  efté  fous  l'ancien  Te- 
ftament.  Or  Dieu  nous  veut  gouuerner  com- 
me ceux  qui  font  défia  venus  en  aage  ,  qui 
n'ont  point  befoin  d'vneinftrudion  puérile 
comme  d'vn  a  b  e.  C'eft  donc  rompre  l'ordre 
que  Dieu  a  eftabli.  Voila  pour  vn  item.  Et 
puis ,  en  voulant  eleuer  ce  qui  a  eAé  controu- 
ué  parles  hommes, &  dire  qu'il  le  faut  garder 
fur  peine  de  péché  mortel. Dieu  ne  veut  point 
que  ù  Loy  mefme  foit  auiourd'huy  obferueé 
entre  nous,  voire  quant  aux  ombres  &:  aux  fi- 
gures ,  d'autant  que  tout  cela  a  pris  fin  à  la  ve 
nuedenoltre  Seigneur  lefusChrift.  Sera-il 
donc  plus  licite  d'obferuerce  que  les  hom- 
mes auront  bafti  en  leur  cerueau?Et  s'ils  nous 
y  veulent  contraindre ,  cela  fera-il  fupporta- 
fele?  Nevoid-on  pas  que  c'eft  vne  chofe  qui 
tend  direéiement  contre  Dieu?  Ainfi ,  faintl 
Paul  fe  veut  oppofer  à  tels  fedufteurs ,  lef- 
«juels  vouloyent  obliger  les  Chreltiens  à  s'ab 
ftenirde  certaines  viandes ,  comme  Dieu  l'a- 
uoit  commandé  en  faLoy:s'il  fevient(di-ie) 
oppofer  àeiix  ,  d'vne  taçon  precife  ,  *:auec 
toute  rigueur,  auiourd'huy  quedeuon^-nous 
faire  quand  les  hommes  fe  vienent  ainfi  dref- 
fer  raanifeftement  contre  Dieu,  quand  ils  Par 
rachent  de  fon  fiege,&  qu'ils  veulent  s'attri- 
buer l'authorité  qui  luy  appartient  à  Uiy  fcul, 
qu'ils  rapportent  comme  vne  delpouille  ain- 
fi que  s'ils  l'auoyent  vaincu  ,  &  qu'ils  le  me- 
naffent  en  triompheîCela  ne  doit-il  point  e- 
ftre  réputé  comme  vn  blafpheme  exécrable 
qui  s'adrefle  contre  Dieu?  Or  fi  on  allègue 
que  c'eft  peu  de  chofc  de  s'abftenir  de  man- 
ger chair  le  vendredi  ou  en  Quarcfnieregar- 
dons  fi  c'eft  peu  de  choie  que  le  feruice  de 
Dieu  foit^orrompu  &  abaftardi.Or  eft-il  ain 
ijque  ceux  qui  veulent  mettre  en  auant  ce 
<)uc  bon  leur  femble  pour  donner  lieu  aux  tra 
ditiôs  huniainet,&  les  oppofer  à  ce  que  Dieu 
ordonne  par  fi  Parole,  commettent  vn  facri- 
lege  qui  eft  pour  tout  peruertir.  Puis  qu'ainfi 
cft  (j[ue  Dieu  veut  eftre  fcrui  eu  obeiilànce,  ad 


tifons  de  nous  tenir  entre  le«  bornes  qu'il 
nous  a  mifes,&  ne  fouifios  point  que  les  hoia 
mes  y  adiouilent  rien  de  leur  propre.  Et  puis 
il  y  a  encores  d'autres  vices  ,  pource  qu'on 
penfc  qu'il  y  ait  vn  feruice  mentoircde  s'ab- 
ftenir de  manger  chair  (  ainfi  que  nous  auons 
déclaré  ci  deflus)pour  côlbtucr  là  toute  fain- 
fteté:&  cependant  1-e  leruicede  Dieu  qui  doit 
eftre  fpirituel ,  eft  comme  anéanti  quand  les 
hommes  s'abufent  à  ces  meiui^  l'atrasrili  laif- 
fent  le  principal  pour  l'accefToire,  comme  on 
dit.  D'autant  plus  donc  deuons-nous  infifter 
fin  ccfte  liberté-la  ,  afin  qu'elle  foit  mainte- 
nue aux  fidèles  ,  c'eft  que  nous  cnfuiuions  la 
reigle  que  Dieu  nous  donne  par  fa  parole, que 
nous  ne  foyons  point  moleftez  d'auantage,& 
qu'on  ne  viene  point  fe  forger  des  loix  nou- 
uelles  pour  mettre  les  âmes  en  feruitude.Gar 
c'eft  vne  ty ranie  infernale  qui  derogue  à  l'au 
thorité  de  Dieu..&  qui  enueloppc  la  vérité  de 
l'Euangile  parmi  les  figures  de  la  Loy,  &  qui 
peruertit  Si  corrôpt  le  vray  feruice  de  Dieu, 
qui  doit  cftre  fpirituel.  Voila  quant  au  pre- 
mier ,  où  fainél  Paul  déclare  que  toutes  cho- 
fes  font  pures  à  ceux  qui  font  purs.  Et  ainfi 
adiiifons  que  c'eft  vn  piiuilege  ineftimable 
quand  nous  pouuons  remercier  Dieu  en  re- 
pos de  confcicnce  ,  fçachans  qu'il  veut  que 
nous  iouifsionsde  fes  biens.  Et  pource  faire 
que  nous  ne  foyons  point  enuelopez  parmi 
les  fuperftitions  des  hommes  :  mais  conten- 
tons-nous de  la  pure  fimplicité  qui  eft  con- 
tenue en  fa  parole.  Et  cependant  cognoiflbns 
aufsi  que  nous  ferons  purifiez,  ayans  receu  le 
Seigneur  lefus  Chrift, lequel  nous  nettoyé  de 
nos  pollutions  &  macules,  ayans  cognu  que 
le  gouuerncment  du  monde  vniuerfel  luy  ap- 
partient ,  afin  que  par  fa  grâce  auiourd'huy 
nous  communiquions  aux  bénéfices  de  Dieu, 
&  que  nous  foyons  repatez  pour  fes  enfans, 
encores  qu'il  n'y  ait  en  nous  que  vanité, Dieu 
nelailTe  pas  de  nous  tenir  de  la  maifon  afin 
de  nous  nourrir. Or  il  s'enfuit  quant  &  quant, 
Qji'à  ctux  <jui  font  poilus  &  incret{nles  rien  ne 
fra  net .  En  quoy  fainct  Paul  monftre  que 
ceux  qui  impofent  ainfi  des  loix  nouuelles, 
auront  beau  chercher  tous  les  moyens  qu'il 
eft  pofsible  de  complaire  à  Dieu,  car  ils  fe- 
ront toufiours  dechaflezdeluy  ,  &  mefmes 
tout  ce  qui  fortira  d'eux  ,  fera  plein  d'infc- 
ûion.Et  pourquoyrCar  cependant  qu'ils  font 
incrédules  (  dit-il  )  ils  feront  poilus  &  fouil- 
lez, ayans  vne  telle  fouilleure  en  eux  ,  ils  ne 
pourront  iamais  rien  attoucherqui  ne  foit  in 
fedé  de  leur  vilenie.  Et  ainfi  toutes  les  loix 
&  reigles  qu'ils  pourront  faire  ne  feront  que 
vanité  :  car  Dieu  defauoue  tout ,  &  les  reiet- 
tc  ,  8c  mefmes  tout  cela  luy  eft  exécrable.  Or 
ici  nous  voyons  que  les  hommes  fe  pourront 
beaucoup  tourmctercn  cérémonies  &  chofcs 
externes  :  iufques  à  ce  qu'ils  ayent  intégrité 
iie  caur,  ce  fera  en  vain  qu'ils  trauailkroBt. 
CCc.U. 


Sl^ 


SERMON    rX. 


ils  ne  feront  que  battre  Teau,  comme  on  dit. 
EtpourcjaoyrCïr  le  viay  Tcruiccde  Dieu  cô- 
mcnct  par  tell;.'  rondeur  &  intégrité.  Ccpeii- 
diiit  doiK  que  non';  fomiues  incrédules ,  nous 
fommcs  infcd;  &  puant  .deuant  Dieu, tout  ce 
qui  fortira  de  nous  ne  fera  qu'infeflion  &:  or- 
dure:&Ia  chofe  doit  eftre  alTez  claire  &  faci- 
le, mais  rhypocrific;  efl  tant  enracinée  aux 
hommes,  qu'on  ncleur  peut  apprendre  ce  qui 
n'a  nulle  difriculté  on  foy.Qj^nd  on  dira  que 
nous  ne  pouuons  plaire  A  Dieu  en  noftre  fcrui 
ce,  iufqucs  à  tït  que  noftre  cœur  loit  purgé  de 
toute  malice.chacunconfeflera  qu'il  eft  vray, 
&  touscuideront  que  cela  ne  foit  point  ob- 
fcur  :  iruis  cependant  nous  n'y  penlons  point. 
,  £t  qui  en  eft  caufcr  Noftre  hypocrifie, comme 
l'ay  dit. Et  roila  pourquoy  Dieu  a  combatu  a- 
uec  le  peuple  ancien  touchant  cefte  doctrine, 
côine  nous  le  voyons  fur  tout  au  fécond  cha- 
pitre du  prophète  Aggee, ou  Dieu  demâde  aux 
Sacrificateurs, Si  on  euft  touché  quelque  cho- 
fe  fainile.al'çauoir  fi  on  euft:  efté  fandlifié  pour 
cela  ?  Les  Sacrificateurs  refpondent  que  non. 
j^u  contraire  il  leur  demande, Et  fi  vn  homme 
poilu  attouche  vue  chol'c.alçauoir  fi  elle  fera 
pollue  ?  Ouy,difent-ils?.  La  delTu?  Dieu  con- 
clud:Tel  eft  ce  peuple, &  telles  font  toutes  fes 
œuures.Or  maintenant  rapportons  à  la  vérité 
ce  qui  cftoit  cotenu  es  figures  &  ombrages  de 
la  Loy.Carfi  vnhome  eftant  poilu  euft  manié 
quelque  chofc,tout  eftoit  infedé,il  faloit  que 
^  il  y  euft  la  purgation. Maintenant  noftre  Sei- 
gneur dit,Regardcz  quels  vous  eftes:car  vous 
n'auez  en  vous  que  toute  pollution  &  ordure: 
&  cependant  il  vous  fembleque  par  vos  facrifi 
ces  &  ofFrandes,&  chofes  femblables,vous  me 
deuiez  côtenter.  Non, non, dit-il, cependant  q 
vos  amcs  feront  entortillées  enmefcli.ïtescu 
piditez.que  les  vns  ferôt  paillars  &  adultères, 
que  les  autres  feront  blafphemateurs  &  periu 
res,pleinsde  fraude,  pleins  de  cruauté  &'inali 
ce,  que  voftre  vie  fera  diflolue  ,  qu'eft-ce  que 
vous  m'apporterez?'^Tout  cela  m'eftinfeûion, 
ie  ne  le  puis  foufFrir,  quelque  apparence  qu'il 
y  ait  deuânt  les  homes.Nous  voyons  donc  que 
tous  les  feruices  que  nous  attéterons  de  faire 
à  Dieu.iufques  à  ce  que  nous  foyons  vrayemét 
reformez  en  nos  cœurs, ne  feront  que  moque- 
ries ,  &  que  Dieu  condamne  &  reiette  le  tout. 
Or  qui  eft-ce  qui  fe  perfuade  cela  ?  Il  eft  vray 
que  les  raefchans  qui  fontconfits  en  leursini- 
ouitcz.quâd  ils  auront  quelque  fcrupule.aurôt 
aes  moyens  pour  appointer  auec  Dieu,  &  tra- 
uailleront  en  cérémonies:  &  ce  leur  fera  aflez 
en  fomme,d''auoir  côtenté  les  hommes, &  leur 
femblera  que  Dieu  auf  i  doit  eftre  appaifé 
quant  &  quan  t:'c'eft  vne  façon  ordinaire  qui  a 
régné  de  tout  tcps.Ainfi  nous  voyons  que  d'au 
tant  que  les  hommes  fe  baignent  en  leurfcin- 
tife,  qu'ils  ne irecognoiflent  point  quand  ce 
vient  à  bon  efcient,ce  qui  leur  deuoit  eftre  af- 
ffz  familier  &notoire.Et  non  feulement  en  ce 
palî.igc  du  prophète  Aggee,Dieu  redarguc  \ti 


hommes  de  ce  qu'ils  font  ainfi  doubles, &  que 
ils  penfent  fe  reconcilier  àluy  par  des  menus 
fatras:  mais  c'a  efté  vn  combat  perpétuel  que  ,,. 
ont  eu  tous  les  Prophètes  auec  les  luifs:  Al-  ^'''  ' 
lez, ie  ne  puis  porter  vos  iours  de  ferte,  ni  vos  ° 
facrifices.ce  m'eft  vne  chofe  qui  me  fait  qaafi 
vomir.  Dicuvfede  cefte  fîmilitude-là  ,  pour 
monftrcr  quecequ'ilauoit  mefmes  comman- 
dé quand  on  l'obferuoit  fi  mal ,  &  que  les  hy- 
pocrites en  abufoyent.cela  luy  cftoit  infeét  & 
puant  ,ainfi  qu'il  dit  par  leremie.  Comment  i-"f-7'-\ 
l'entendez-vous.'Q_uandi'ay  retiré  vos  Pères 
delà  terre d'Egypte,lesay-ie voulu amufer à 
des  facrifices  ni  chofes  femblables  ?  Nenni: 
mais  il  m'a  fuffiqueie  fufle  obeydevous:& 
vous  faites  tout  le  contraire.  L.iaufsi  il  leur  I^f'./.U 
reproche  qu'ils  ont  fait  vne  cauernede  bri- 
gans  de  leurs  cérémonies  &:  de  leur  temple. 
Apprenons  donc  quandles  hommes  voudront 
feruir  Dieu  à  leur  guifc,  qu'ik  fe  trompent  & 
abulent.car  tout  cela  ne  viendra  point  en  con 
te:comme  auf".i  il  le  déclare  par  l'autre  parta- 
ge d'Ifaie, Qui  eft-ce  qa  requis  ces  chofes  de 
vos  mains?  En  quoy  il  manlhe  q  fi  nous  vou- 
lons qu'il  approuue  nos  œuures,  il  faut  que 
nous  ayons  approbation  dé  fa  parole,c'eft  par 
ou  il  nous  faut  commencer.  Or  maintenant 
nous  voyons  l'intention  de  faindl  Paul, quand 
il  dit  qu'à  ceux  qui  font  fouillez  ,  il  n'y  a  rien 
de  pur.Et  pourquoy?C>»r/fHr  eiitâiidemeiit(^dit 
il)  (y  l^ifrs  confciences  fmt  ^audlees.  Par  cela 
il  monftrefcomme  i'ay  défia  declaré)que  ini- 
ques à  tant  que  nous  ayons  apprins  de  feruir 
Dieu  en  intégrité  &  rondeur,  nous  ne  pro- 
fiterons rien  en  tous  nos  menus  bagages  que 
nous  priions  beaucoup, &  aufquels  nous  auons 
accouftuméde  nous  flatter  &  endormir.  Main 
tenant  regardons  que  c'eftde  toutes  les  tra- 
ditions de  la  Papauté.  Or  leur  fin  principale 
eft  ,  d'appointer  auec  Dieu  par  leurs  œuures 
qu'ils  appellent  de  fupererogation  ,  c'eft  à 
dire  de  fuperabondant  :  quand  ils  font  plus 
que  Dieu  ne  leur  a  commandé  ,  il  leur  femble 
qu'ils  s'acquittent  enuers  luy,&  qu'ils  le  con- 
tentent d'vn  tel  payement:  ils  font  leur  con- 
te là  dcffus  ,  quand  ils  auront  ieui'né  leurs  vi- 
giles ,  qu'ils  n'auront  point  mangé  chair  en 
vendredi, qu'ils  auront  fait  beaucoup  d'agios, 
qu'ils  auront  ouy  la  mefic  deuotement.qu'ils 
auront  prins  de  l'eau  bénite  ,  il  leur  femble, 
di-ie,  que  Dieu  ne  leur  doit  plus  rien  deman- 
der,qu'il  n'y  a  plus  que  redire'en  eux.  Or  ce- 
pendant ils  ne  laifteront  pas  de  fe  nourrir 
toufiours  en  leurs  vilenies  intérieures, en  leurs 
paillardifes,  en  leurs  pariures  ,  en  leurs  blaf- 
phemes,chacun  feraaddonnéàfes  vices:mais 
cependant  il  leur  femble  que  Dieu  doit  ac- 
cepter pour  rccompenfe  ce  qu'ils  luy  auront 
prcfcnté  ,  c'eft  à  dire  ,  leurs  fatras  :  comme 
quand  ils  auront  prins  de  l'eau  bénite  ,  ado- 
ré les  marmoufets  ,  couru  d'autel  à  autre,  &: 
chofes  fcmblables:en  faifant  des  coniurations 
&  forcclltrics  de  Satan ,  il  leur  femble  que 

ce  leur 


s  V  R  r  E  P I  s  T.     A    T  T  T  E.  ç7? 

ce  leur  fera  autant  de  payement  èc  recompen  ce  qui  proccde  de  rKHiu  e{\:  propIiaiic.Or  ccpé 
Xe  de  leurs  pécher.  Or  fi  eft-ce  que  nous  oyôs  dant  notons  bu'n  que  c'tft  vne  horrible  cou- 
la doftrine  du  lainft  Efprit ,  quant  à  ceux  qui  damnation  furies  Komines,qi)and  il  eft dit  que 
font  fouillez  ,  qu'il  n'y  arien  depurni  de  net  rren  ne  leur  eft  net, que  tout  cil  poilu  &  fouil- 
cn  tout  ce  qu'ils  font.  Car  prenons  le  casque  lé  pour  eux.mfques  à  ce  q  Dieu  lésait  rcnou- 
toutes  CCS  fingenes,  ou  pluftoft  ces  abomina-  nelez.Car  tant  s'en  faut  que  nous  luy  pui(si5s 
tiens  des  Papilles  ne  fa&nt  point  mauuaifes  apporter  chofe  qui  luy  fuit  agréable,  que  no" 
de  leur  nature:  fi  eft-ce  que  fuyuant  cefte  do-  ne  fçauriont  ne  boire  ne  manger,  ni  eftre  ve- 
ûrine  de  fainû  Paul, il  n'y  aura  que  pollution,  ftus,  ni  marcher  vn  feul  pas  qu'il  n'y  ait  vfte 
puis  qu'ils  font  pleins  de  vices  &  de  macules.  corruption:qui  plus  eft,  habitant  en  ce  monde 
Voila  donc  vn  Papille  qui  entrera  au  temple,  nous  infeftons  toutes  créatures. Et  voila  pour 
il  luy  faudroit  vne  trcteinede  lacs, ou  de  mers  quoy  il  faudra  qu'elles  demandent  vengeance 
pour  le  lauer,&  il  prendra  trois  gouttes  d'eau  au  dernier  iour  contre  tous  incrédules  &  re- 
bcnite.il  luy  femble  que  le  voila  bien  nettoyé  prouuez.Nous  auons  donc  bien  raifon  de  nous 
deuant  Dieu.Et  puis  il  luy  faudroit  bien  du  lu  defplaire.&d'eftre  côfus.voyans  qu'elles  ont 
mmaire  pourrefclairer:car  toute  la  clarté  du  nuifanceà  caufe  de  nous,  &  qtie  noHsfommes 
monde  ne  luy  fert  de  rien.d'autant  qu'il  eft  vn  tellement  poilus  d'auoir  infefté  ce  que  Dieu 
poure  ignorant  &aueugle,eftant  làabbruti  en  auoit  dédié  à  noftre  vfage,&mefmes  qu'il  n'y 
fon  ignorance. Et  cependant  il  s'amufera  à  ce  a  que  toute  corruption  en  nous, que  Dieu  mau 
beauluminaire,&nepourraveoir  goutte  en  la  dit  &defauoue.Or  quand  nous  ferons  ainfihu 
vérité  de  Dieu. Ils  feront  aflezdili^ésde  trot  miliez.cognoiflbnsd'autrecofté  le  bien  nefti 
ter  çà  &  là  pour  ouir  melTe.  Mais  quoy?  Que  mable que  Dieu  nous  fait  quad  il  nous  recueil 
auront-ils  gagné  en  tous  ces  badinages?  Il  eft  le  à  foy,  &  après  nous  auoir  purgez,  qu'il  fait 
vray  qu'ils  aurôt  beaucoup  trauaillé,&  cuidét  que  nous  vfiôs  de  tous  Ces  biens  &  largefles  en 
bien  que  Dieu  daigne  prendre  à  gré  la  peine  pureté  de  cœur,&  q  nous  foyons  alTeurez  que 
qu'ils  auront  mife  pour  le  feruir  en  telle  for-  il  nous  eft  licite  de  boire  &  de  manger  quand 
te  :  mais  quoy  qu'il  en  foit ,  ils  n'ont  de  rien  nous  le  ferons  en  toute  fobrieté.&auecmefu- 
changé  ,  car  ils  croupiflent  toufiours  en  leurs  re  raifonnable.Et  an  refte.non  fei.lemét  Dieu 
ordures ,  &  en  leur  incrédulité, en  forte  qu'ils  nousfasftifie,  afin  que  nous  ne  foyons  point 
ne  retournét  point  à  Dieu. Il  eft  vray  qu'il  ne  coulpables  d'auoir  pollué  Ces  bonnes  creatu- 
faudra  point  que  les  hommes  s'occupent  là,&  rcs.mais  il  accepte  de  nous  ce  que  nous  luy  ap 
qu'ils  péfent  y  trouuer  quelque  moyen  de  s'y  portons, côbien  que  nos  bonnes  œuuresfoyét 
purger  dcleurs  macules:  car  le  diable  y  a  tel-  toufiours  entachées  de  quelque  macule:  corne 
lement  misde  toutes  fes  drogues  quec'eft  vne  il  eft  impofsible  que  nous  foyons  iamaisfî  par 
infeûio  plus  qu'infernale. Mais i'ay  prins  ceft  faits  que  nous  feruions  à  Dieu  en  intégrité. 
Ciéple  pour  monftrer  en  fens  contraire  ce  que  Mais  quoy  qu'il  en  foit,  fi  ne  laifle-il  pas  de 
du  S. Paul, que  cepédant  que  les  hommes  font  receuoir  ce  que  nous  ferôs  par  fa  Parole, d'au 
incrédules,  les  voila  poilus  &  fouillez  ,  telle-  tant  qu'il  nous  a  purifiez  par  fa  bonté  gratui- 
tnent  que  tout  ce  qu'ils  attouchent  eft  infetlé  te,  au  nom  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
par  eux.^Or  nous  fommes  encoresmieuxcon-  mais  c'cft  à  celle  condition  que  nous  n'atten- 
fermez  en  la  doûrine  quenousauons  ouye:ce  tiôs  point  d'amoindrir  riende  fon  authorité, 
cftde  nous  côdamner,  &  cognoiflans  qu'il  n'y  en  vfurpant  ce  quiappartient  à  luy  feul,  côme 
a  rien  en  nous  que  corruption,  que  nous  priôs  défia  nous  auons  monftré.  Voila  donc  ce  que 
Dieu  qu'il  luy  plaife  par  fon  fainft  Efprit  de  nous  auons  i  noter  de  ce  palFage,  que  nous  co 
nous  purger,&denousfaireparticipansdeno  gnoifsions  le  bien  ineftimablc  que  Dieu  nous 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift,  qui  tft  la  fontaine  a  fait, quand  il  nous  a  retirez  de  la  maudire  c5 
de  toute  iuftice  Se  fainfteté .  Or  par  foy  nous  fufîon  en  laquelle  nous  eftiôs  plongez  du  téps 
cômuniquons  à  luy,  afin  que  nous  puifsions  e-  que  nous  eftions  Papiftes,&  qu'il  a  monftré  c6 
ftre  eftimez  purs  &  irreprehenfibles  deuant  le  me  nous  le  pouuons  feruir  d'vne  confcience 
Seigneur.encores  qu'il  y  ait  beaucoup  de  pol-  paifible,que  nous  pouuons  aller  avenir, &  fai 
lutiôs  en  nous,  toutesfois  que  nous  luy  foyôs  re  ce  qui  eft  de  noftre  vocation,  fçachant  que 
agréables,  &  qu'il  accepte  ce  qu'il  nous  aura  cela  plaira  à  Dieu  ,  à  caufe  de  la  liberté  qu'il 
donné  de  bonne  afFeÛion,pour  le  feruir  en  o-  nous  donne.que  nous  ne  fommes  point  agitez 
beiflance,&  non  point  félon  nos  fantafies.  Au  d'inquiétudes  continuelles ,  comme  fi  nous  e- 
refte,  notons  bien  que  iamais  nous  ne  paruien  ftions  en  doute  que  nous  n'eufsions  point  de 
drons  à  vne  telle  pureté.finon  en  mettant  fous  règle  certaine  ,  que  nous  ne  fceufsions  point 
le  pied  toutes  les  imaginatiôs  que  nousaurôs  quelle  elHa  liberté  qu'il  nous  a  acquifeparno 
conceues  ,  &•  tout  ce  que  nous  pourrôs  eftimer  ftre  Seigneur  lefus  Chrift  :  mais  que  nous  Fa- 
bon  félon  noftre  fens  charnel. Et  pourquoyril  cions  valoir  tout  cela  ,  afin  que  nous  ne  fouf- 
n'y  a  qu'vne  feule  règle  que  Dieu  approuue,ce  frions  point  que  les  hommes  nous  vienent  fur 
eft  que  nous  oyons  fimpîement  ce  qu'il  nous  prendre  derechef  par  leurs  aftuccs  pour  nous 
commande,  &  que  nous  apprenions  de  nous  y  mettre  en  feruitude  :  comme  en  la  fin  lainft 
ranger  fans  y  rien  adioufter,d'autant  que  tout  Paul  adigufte,2»f  ttllei  gés  <ji't  ïmfoftnt  heau- 

CCc.iii. 


Î74 


SERMON    XL 


rouf  Jf  îo! X ,  feront  fctnhlant  deCDgntiiJire  Dit», 
piuls  i'.i  te rtniiicent  de  f.iict.Car  ili  font  mutins 
^  rthelles,  (jr  repmnHK  à  toutes  bonnes  «u- 
ures .  Yci  il  Jelcouure  ces  perfonnages  ,  aSii 
qu'ils  nedeçoyuent  plus  fous  leur  beau  lem- 
blant.Car  ceux  qui  inuentent  beaucoup  de  lla- 
tuts  &d'ordonnâccs  touchant  les  cérémonies, 
ils  diront  que  c'eft  poiarleruir  à  Dieu, ils  pren 
dront  cefte  couuerture:mais  cependant  qu'on 
regarde  leur  vie,  &  on  trouuera  qu'ils  font  c5 
terapteurs  de  Dieu,&  qu'ils  fe  niocquent  plei- 
oemét  de  faraaiefté.  Voiladonc  ce  que  fainû 
Paul  touche  ici  notamment.  Mais  il  nous  faut 
regarder  de  près  corne  il  parle. Car  il  du  qu'il 
«ftvray  que  ceux-ci  de  prime  face  auront  ce- 
fte ombre  de  religion  ,  qu'il  femblera  qu'ilj 
foyentfort  deuots ,  &  zélateurs  de  l'honneur 
de  Dieu  .  Mais  en  quoy  ?  Il  faut  là  venir  :  car 
Dieu  veut  que  nous  fasions  examen  par  la  Pa- 
role,(i  nous  .luôs  fâ  crainte  ou  non.Q_uand  on 
voudra  efprouucr  de  l'alloy,  on  prcdra  la  tou 
che,  ou  on  le  mettra  en  la  fournaifc .  Or  nous 
n'auôs  autre  chofe  pour  examiner  noftre  vie, 
&  pour  fonder  quel  eft  noftre  cœur,  lînon  que 
nous  venions  aut  coramandemens  de  Dieu  :  & 
ceux-ci  raettct  toute  leur  faincieté  en  des  me- 
nus bagages  ,  qu'il  leur  fuffira  qu'on  ait  ferui 
Dieu  en  ce  qu'il  ne  requiert  point,&  en  ce  que 
il  a  laifle  ennoftré  liberté:&cepédant  ils  laif 
fcnt  ce  que  Dieu  commande  par  (i  Loy.Or  de 
tout  temps  ileneft  ain{îaduenu,c'eft  que  les 
hommes  ont  mefprifé  la  Loyde  Dieu  pour 
j-  ,  leurs  tiaditiôs.ainli  que  noftre  Seigneur  Icius 
lereprochoit  aux  Pharifîens  :  nuis  cela  aufsi 
IfaAS.ïi  eftoitdeiîadu  temps  des  Prophètes. Car  ce  ne 
eft  point  fans  caufe  qu'Ifaie  cnefîafprement 
contre  ceux  qui  s'abufoyent  aux  traditions 
des  hommes. Et  pourquoy  ;  Cependant  qu'on 
s'occupoit  à  cela, on  pafloïc  légèrement  ce  que 
Dieu  auoit  commâdé:  comme  nous  en  voyons 
l'exemple  trop  familier  entre  les  Papiftes. 
Qu^appellent-ils  feruicede  Dieu?Cefte  mul- 
titude de  fottifes  &  badinages  qu'ils  ont  con- 
trouuei  pour  plaire  à  Dieu.  Quand  ils  auront 
ouy  vnc  mefle,il  faut  retourner  à  la  fecôde:  il 
faut  aufsi  faire  tant  de  cérémonies  que  rien 
plus,&  puis  ceci,&  puis  cela,  Se  telle  offrande, 
&  puis  telle  deuotion  à  vn  tel  lainû,&  puis  al- 
ler en  vn  tel  pèlerinage,  à  vn  tel  iour  de  fefte, 
&  puis  quelque  autre  chofe;brief,on  n'y  trou- 
uera ne  fin  ne  mefurc,  comme  c'eft  vn  abyfine 
quand  les  hommes  fe  donnent  congé  de  taire 
ce  que  bon  leur  (cmblcra,  &  cequi  leur  vient 
tnla  tefteàleit  certain  qu'ils  entrét  en  vn  la- 
byrinthe fi  confus, qu'il  furmôte  tous  les  abyf 
mes  du  monde. Car  quand  vn  homme  ne  feroit 
autre  chofc  finon  s'ainufer  à  cela,  il  fera  bien 
empefché.  Comme  nousvoyôs  que  ces  bigots 
&  bigotcs.dc  la  Papauté,  quand  ils  auront  em- 
ployé toute  la  matinée, encores  kur  tfchappe 
il  des  fanfares  beaucoup  :  car  il  faudra  faire 
tant  de  Mea  culpa, prendre  tantd'afpergesde 
«au  bsaitc,  que  cec'cAiamais  fait.  £t  puis  cb 


Hat 


leur  Conftflc.ils  n'en  auront  Jamais  aflei  def-. 
gorgé,  c'eft  toufiours  à  recommencer.  Brief, 
quand  les  hommes  s'occupét  ainlî  après  leurs 
traditions, il  ne  leur  reftera  point  vne  feule  mi 
uutede  temps  pour  penfer  au  vray  feruicede 
Dieu:  car  aufsi  iL  le  laiflcnt  là  derrière,  pour 
s'ainufer  à  leurs  folles  inuentions. Voila  ou  en 
feront  les  hommes  quand  ils  fe  voudront  gou 
uerner  à  leur  appétit, &:  félon  leur  cerueau.Et 
c'eft  pourquoy  le  Prophète  Ifaiea  crié  con- 
tre ceux  qui  mettoy ent  en  auant  les  traditions 
humaines ,  voire  drclarant  que  Dieu  fait  vnc 
menace  horrible  ,  qu'il  aueuglera  les  plus  fi- 
ges, àl'jLUUnc  qu'ils  le  font  ainlî  deftournez de 
la  pure  règle  de  la  parole  de  Dieu,  pour  fuy- 
ure  leurs  folles  inuentions.C'eft  où  fainô  Paul 
nous  ramené  en  ce  paflàge.difant  que  ceux-ci 
inonftrent  qu'ils  n'ont  nulle  crainte  de  Dieu, 
&  qu'ils  le  renoncent  de  fait .  Et' commenta 
Car  qu'on  regarde  leur  vie  (dit-il)ils  font  vi» 
leins:comme  s'il  difoit,  Il  eft  vray  qu'ils  lauc- 
ront  leurs  mains  quatre  fois  pour  eftre  fanûi 
fiez:  comme  on  prendra  l'eau  bénite  en  la  Pa« 
pauté  ,ainfi  ccux-laauoyent  leurs  afperfion» 
accouftumees  :  après,  tant  de  cérémonies  que 
rien  plus.  Mais  où  eft  le  principal  cependant? 
Car  nous  fçauons  que  Dieuderaâde  qu'on  che 
mine  en  chafteté,qu'5  s'abltiene  de  toute.vio- 
lcce,de  rapines,de  cruautcz,de  malice,  de  frau 
de  :  que  tout  cela  n'apparoifîè  point  en  noftre 
vie:il  veut  qu'on  foit  fobre,&  téperant,  il  veut 
qu'on  foit  modefte  ,  &  non  point  difToiu  .  Or 
ceux-ci  font  vilcins  f  dit-il)  qu'on  voit  qu'ils 
font  desbordez,  &  qu'il  n'y  a  que  fouillure  en 
toute  leur  vie,  il  n'y  nulle  crainte  de  Dieu.  Et 
ou  fe  trouuera  ce  zèle  dont  ils  fc  vantent  pour 
plaire  à  Dieu  auec  toute  leur  deuotion  ?  Ainfî 
d5c(dit-il)qu'on  les  cognoifle,  afin  de  n'cftrc 
point  trompez  de  ccfte  vaine  couuerture  que 
ils  prétendent  du  feruicede  Dieu.  Or  par  cela 
nous  fommes  adraoneftez  que  ce  n'eft  rien  de 
eftre  prifez  des  hommes,  quand  on  nous  aura 
applaudi:fi  nous  fommes  dcfauouez  du  luge  ce 
lefte,qu'auons-nous  gagné?  Et  toutesfois  on 
ne  cerche  que  d'cftre  approuué  ici  bas,&  quad 
chacun  s'cft  flatté  en  fa  phantafie,  il  luy  fem- 
ble  qu'il  a  bien  payé  Dieu  par  là.  Or  ne  nous 
abufons  plus,  car  Dieu  ne  retracera  point  ce 
qu'il  a  ordonné  en  fa  Loy  .':Voulons-nous 
donc  fçauoir  quand  noftre  vie  fera  bien  ré- 
glée ?  Venons  au  contenu  de  ce  que  Dieu  com 
mande. Or  là  (comme  délia  nous  awons  dit)  il 
n'eft  point  queftion  de  nous  fanâificr  par  ces 
bagages, &  ces  fanfares,  &  ces  pompes  exter- 
nes qui  lont  beaucoup  prifees  des  hommes: 
mais  il  tautf  ômcncer  par  l'intégrité  du  ca-ur, 
que  nous  inuoquions  Ûieu,mettans  noftre  fian 
ce  en  luy  ,  qu'eftans  dcfpouilUzde  tout  or- 
gueil &  prcfomption,  nous  venions  à  luy  en 
droite  huuùlité.quc  nous  ne  foyons  point  ad- 
donncz  à  nos  affluions  charnelles, qu'vii  cha- 
cun s'tffbiceà  fe  tenir  captif  fous  la  iuiet- 
xioB  de  iioArc  Dieu ,  (jue  nous  foyons  loin  de 

goutraaa 


SVR   L' EPIS  T.     A     T  IT  E. 


57ï 


gOHrman<îire,.de  paillardife,  d'intempérance, 
ae  larrecinsde  5Ufphemc5,&;  aucie^  diflolu- 
Cions. Voila  donc  où  Uica  nous  ramcine  pour 
("çauou  (î  noilre  vie  (eia  i-icn  regice.   Âinft 
ceux  qui  roudronc  iultifier  le  h om.nes  en  des 
choies  externes, c'cltaiitant  co  iime  s^ils  cou- 
uroyent  des  ordures  puantes  de  quelque  lin- 
ge.oD  quelque  iinnteau:ni  lis  l'ordure  dcincu- 
re  cependant.  Ainfîoftonsla  puant. fequi-eft 
cachée  dedans  nos  caurs  ,  que  le  mal  (di-ie) 
foitdechalFe  de  nous,&  alois  noftre  Seigneur 
approuuera  noftre  ric.Or  ici  nouj  voyons  ce- 
pendant quelle  eft  la  droite  cogno  lîàuce  de 
Dieu:cen'eft  point  que  nouvfpcculions  en 
l'air.mais  que  n  jus  foyons  vrayemcnt  refor- 
Biezca  fon  obcflànce.  Or  ilclt  impol'sible 
«jueaous  cognoifsions  Dieu, que  noui  ne  foy 
ons  transfiguiei  en  fon  image. Il  cft  vray  que 
nous  aurons  bien  me  cognoiilànce  de  Dieu 
confufe  ,  comme  ont  les  Payens  :  mais  ce  ne 
fera  fînon  pour  nous  rendre  tant  plus  inexcu- 
iablcs.Car  Dieu  nefoufFre  point  que  les  hom 
nies  foyent  fi  abbrutis  qu'ils  n'ayent  quelque 
fentiraent  qu'il  yavn  Dieu  qui  les  a  créez, 
«nais  cela  eu  à  leur  condamnation  ,  car  en  co- 
gnoifiTant  ib  ne  cognoilFent  rien  ,  pourcc  que 
ils  fout  e^blouis, que  Satan  leur  a  bandé  les 
yeox.comme  fainft  Paul  en  parle:  &  encores 
tjue  TEuangile  leur  foit  prefchc ,  ils  n'y  voy- 
cnt  goutte,  comme  nous  en  auôs  auiourd'huy 
l'exemple.  Combien  en  y  a-ilau  monde  qui 
oncefté  enfeigner  enladoftrine  del'Euan- 
gile,  qui  toutesfoisdemeurét  abbrutis  en  leur 
ignorance,  &  fonttoufiours  befteb  comme  ils 
auoyent  eftérC'eft  pource  que  Satan  les  a  pre 
occupez  tellement  par  mauuaifcs  afFcdions, 
<juc  combien  que  le  foleil  luife,  ils  font  toiil'- 
iours  fi  aueugkz  qu'ils  n'y  voyét  goutte.  Ap- 
prenoils  donc  que  lavraye  eognoillance  de 
Dieueft  viuc.quece  n' cft  point  vnechofemor 
te,nuis  qu'elle  fc  monltrc  ,  &  qu'elle  fruûifie 
en  toute  noftre  vie.  Etainfipour  cognoiftre 
Dieu(comme  fainft  Paul  en  parle  en  la  fécon- 
de des  Corinthiens)  il  faut  que  nous  foyons 
transiigurezen  fon  image.Car  (i  nous  preten 
dons  de  l'auoir  cognu,  Se  cependant  que  no- 
ftre rie  foit  diHolue  &  mefchante  ,  il  ne  faut, 
point  de  tefmoins  pour  nous  démentir, noftre 
Yiercndaflez  tefmoignage  que  nous  fommes 
l&ocqueurs&  fauHàires  ,  en  abufant  ainfidu 
fcom  de  Dieu.  Et  voila  pourquoy  lainû  Paul 
«ufsi  en  l'autre  pallàge  dit, Si  vous  auez  cognu 
lefusChrift  .ilveusfaut  defpouiller  le  vieil 
faorame:comme  s'il  difoit  que  nous  ne  pouuôs 
pas  auoir  cognu  lefus  Chrift.finon  pour  le  te- 
nir comme  nollrechef:  comme  aufs»  il  faut 
^u'il  nous  contoigne  à  foy  comme  fes  mem- 
bres :  ce  qui  ne  fe  peut  faire  iufques  à  ce  que 
mous  ayons  renoncé  à  noftre  vieille  peau  ,  & 
ye  nouj  foyenj  faitt  nouucJlcs  créatures. 


Mais  H'adioufte  quant  Equant,  Voire,  fî  vous 
l'aucz  cognu  comme  il  appartient.  Et  cela  cft 
notamniét  adioufté, pource  que  de  tout  temps 
k- monde  a  mcfchamment  abuié  du  nom  de 
Dieu, comme  auiourd'huy  on  le  voit  encores. 
Et  ainli  regardons  à  la  cognoilîànce  vraye3c 
légitime  dont  paile  ici  fainû  Paul. Et  au  re- 
ftc  ,  pour  conclufion  ,  &  pour  la  fin  de  tont, 
quand  il  parle  des  bonnes  ocuarcs  ,  que  nous 
n'apportions  point  ici  noftre  poids  Se  noftre 
balance,  pour  dire,  Celaeft  bon  ,  car  il  me  le 
femble  ,  le  le  cuide:  mais  cognoiflons  que  les 
bonnes  œuures  font  celles  que  Dieu  nous  4 
comciiandees  en  fa  Loy,  que  tout  ce  que  nont 
pourrons  faire  au  refte  ne  iera  rien,  mais  que 
nous  apprenions  de  nous  conformera  ce  que 
Dieu  nous  commande.d'auoir  noftre  fiance  ea 
Juy  ,  de  l'inuoquer ,  deluy  rcndie  aûion  de 
grâces, de  porter  patiemment  ce  qu'il  luy 
plaira  nous  enuoyer.de  cheminer  en  droiture 
auec  nos  prochains,  de  nous  contenir  en  tou- 
te honnefteté  &  modeftie  :  voila  les  bonnes 
oeuuresque  Dieu  requiert  de  nous.  Et  quand 
nous  ne  ferions  d'vne  nature  fi  peruerfe  que 
nous  fommes ,  il  n'y  auroit  celuy  qui  n'en  iu- 
geaft:voire,&les  petis  enfans  mefmes  fçau- 
ront  bien  dire, voila  les  bônes  ocuures,  8c  tout 
le  refte  n'cftque  folie, ce  ne  font  mefmes  que 
abominations  par  Icfquelles  le  pur  feruicede 
Dieueft  peruerti.  Voila  (di-ie) comme  nous 
cognoiftrons  quelles  font  les  bonnes  Œuures 
dont  parle  ici  famd  Paulrc'eftafçauoiff  quâd 
nous  les  difcernerons  d'auec  tout  ce  que  les 
hommes  auront  initenté,&quc  nous  fuyurons 
fimplement  ce  qu'il  a  vne  fois  déclaré  par  ia 
parole,  que  nousn'auons  autre  règle  que  cel- 
le qu'il  nous  a  donnée  ,  Se  qui  fera  aufii  ap- 
prouuee  de  luy  ,  quand  il  nous  faudra  rendre 
conte  au  dernier  lour ,  Si  qu'il  n'y  aura  qu'y» 
fcul  luge. 

OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoifl'ance  de 
nos  fautes, le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fcntir,&:  qu'au  nom  de  noftre  Seigneur  lefuf 
Chrift  cependant  il  nous  donne  vne  telle  f  aa 
ce,  que  nous  ne  doutions  point  de  venir  à  luy,, 
&  que  nous  foyons  afieurez  de  la  remifsioa 
de  nos  péchez  ,  &  qu'il  nous  fera  participans 
de  la  fanté  de  foy  par  laquelle  toutes  nos 
fouilleures  feront  nettoyées  ,  tellement  que 
nous  n'infeitions  point  le  monde  où  nous  ha. 
bitons,  mais  qu'cflans  purifiez  par  la  foy  qu'il 
nous  a  donnée  en  fon  Euangile  ,  nos  oc-uures 
luy  foyent  agréables,  d'autant  qu'il  n'impute 
point  les  fautes  &  iniperfr ftions  qui  y  font,& 
les  vices  pour  lefquels  elles  font  toufiourtà 
condamner.  Que  non  feulement  il  nous  face 
ceftc  grâce,  mais  ï  tous  peuples  &  nations  de 
la  tetTe,tic. 

CCc.iiiii 


Î7ff 


PREMIER 


SERMON    X. 
SERMON 


S  V  R     LE 


SECOND       CHAPITRE. 

1      Mais  toy^ânonce  les  chofes  qui  conuienent  afàine  doBrine. 
a     Que  les  hommes  anciens  foyent  foires,  graues  en  mœurs, ^th^ 
dens,fains enfoy,en  charitéfO'enpatience. 

3  J^areillement  que  les  femmes  anciennes  Joyent  en  contenance 
ftinSle  oy  conuenable ,  non  mefdfantes ,  72on  adonnées  a.  beaucoup  de 
Vin,  enfeignantcs  ce  qui  ejl  bon:  ^ 

4  Afin  quelles  injlruifcnt  en  prudence  lesieune  s  femmes  à  aimer 
leurs  miris^a  aimer  leurs  enfans, 

5  A  efrc  prudentes,  chafes,  gardantes  la  maifon,  bonnes,fàet'^ 
tes  a  leurs  maris,  afn  que  la  parole  de  Dieu  ne  fait  blafnee. 


•  Oiis  auons  veuparcideuat, 
) comment  faindî  Paul  con- 
jdamnoit  ceux  qui  parambi- 
I  tion  corronipoyent  la  paro 
1  le  de  Dieu  ,  ne  l'appliquans 
point  à  fou  droit  vfage,  afin 
'  tjue  le  peuple  en  full  édifié. 
Car  Dieu  ne  nous  a  pojntdoné  fa  parole  afin 
tjuc  nos  aurcilles  en  loyét  batues,&  que  nous 
laifsions  el'coulcr  en  l'air  tout  ce  qu'ilnous  di 
ra:mais  il  veut  que  ce  nous  foit  vne  pafture,& 
que  noftre  vie  y  foitreielee,&  en  fonime,que 
nous  monftrions  par  effeft  que  nous  n'auons 
point  perdu  noftre  temps  quand  nous  auons 
«fté  enfeignez  en  fon  efcole.Or  pource  que  le 
inonde  appete  toujours  des  nouuéaute2,& 
que  la  plus  part  font  bien  ai fes  qu'on  leur 
traitte  des  queftions  curieufes  ,  cela  pourreit 
induire  ceux  qui  ont  la  charge  d'enfeigner, 
de  fc  defguiferpour  plaire  &  gratifier  au  peu- 
ple, &  par  ce  moyen  il  n'y  auroit  point  vne 
àoârine  bonne  &  vtile  ;  A  fur  tout  quand  il  y 
en  a  qui  fe  veulent  faire  valoir  par  leurs  bel- 
les monftres ,  on  feroi't  tenté  de  faire  le  fem- 
biable,  finon  qu'on  fuft  retenu  de  la  cfainte 
de  Dieu,&  qu'on  regardait, Comment?  le  luis 
icicôftitué  en  ceft  office  tant  honorable,  l'ay 
à  rendre  conte  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
lequel  m'a  commandé  de  parler  en  fon  nom, 
-li  çnfon  authorité  :  le  falut  des  aines  m'eft 
«ommis.c'eft  vn  threfor  que  Dieu  prife  telle- 
ment ,  qu'il  n'a  point  cfpargné  fon  Fils  vni- 
que.U  ne  faut  point  donc  que  ie  prophane  ce- 
lte doftrine  de  faim, que  ie  la'comiertilTe-à  ce^ 
que  bon  hiè  femblef  ,1,  &  à  ce  qbe  ie  verraîy  e- 
Jtre'p  la  liant  au  monde:  car  ceféfoic  tout  def- 
giiifl.'r,ce  ferblt  vné  eifjitcè  de  faùlTeté  quand 
le  fcroye  coulpabled'vn  te!  crime  deuaut  fno 
Dieu. Si  ceux  qui  ont  la  charged'anonccr  l'E- 
tiangilt  ne  penfent  bien  à  cela  ,  il  eft  certain 
qu'a  tous  coups  ils  feront  comms  tranfpor- 


tez,  &  que  pour  complaire  à  ceux  quiontlej 
aureilles  chatouilleufes,ils  traitterôt  des  que- 
ftions  friuoles  :  comme  nous  voyons  qu'il  en 
eft  aduenu  de  tout  téps ,  &  que  beaucoup  font 
bien  aifes  quand  on  leur  applaudit ,  &  quand 
ils  font  rire:illeur  femble  qu'ils  ont  bien  em- 
ployé le  temps, &  n'eft  point  queftion  d'edi- 
ficr,ne  que  le  profit  de  leur  dottrine  (é  mon- 
ftre ,  &  que  les  amts  en  foyent  repeues.  Car 
comme  nous  fouîmes  fouftenus  quâtau  corps 
du  pain  &  des  viandes, aufsi  faut-il  que  nos  a-« 
mes  foyent  repeues  de  la  doftrine  de  falut. 
Voila  pourquoy  maintenant  fainft  Paul  dit  à 
Titc,Côbien  que  tu  voyes  que  les  raocqueurs 
de  Dieu  foyent  prifez,  que  le  monde  les  flat— 
te,&  qu'il  femble  qu'ils  foyent  les  plus  grans 
dodcurs,  à  caufe  qu'ils  traitcent  des  fpecula- 
tions  vn  peu  fubtiles  ,  quand  tu  verras  que  Je 
monde  les  fuyura,  que  tu  ne  fois  point  pour-' 
tant  diuerti  de  ton  but ,  continue  ,  &  pourfuy 
la  iimplicité  de  bonne  doôrine  ,  que  tu  regar- 
des feulement  que  l'Eglife  reçoyuefruiftde 
ton  labeur,  contente-toy  que  tu  as  ferui  à 
Dieu,  &  que  tuas  procuré  le  falut  des  âmes; 
voila  toute  ta  louange  ,  voila  ce  que  tu  doit 
regarder.  Ainfî  donc  ne  t'abufe  point  après 
les  exemples  que  tu  verrai  pour  les  enfuyure, 
ou  pour  t'y  conformer.  Voila  pourquoy  no- 
tamment famft  Pauldit ,  Huis  toy.  Car  il  a  ci 
dcflus  parlé  deceux  qui  eftoyent  recueillis  en^ 
grand  honneur  ,  à  cauf«  qu'ils  auoyent  belles 
parades ,  &  qu'ils  prelchoyent  aiicc  grand' 
pompe  pour  le  faire  valoir.  Combien  que'tu  » 
voves  que  la  fauetir  du  monde  fpit  de  leur  i;o-'^ 
ftc'pardè-toy(dit  lainft  Paul)(fc  fléchir, mais* 
pbuii'uy  toulio'urs  ce  que  tu  as 'commencé: 
c'eft  .1  dire ,  ^ne  la  doftrine  qui  proccdeia  de'"' 
ta  bouche,^^!  faine.Cïmotâmmcnt'ir  vfe  de' 
ce  mot  ,  à  caufe  que  c'ell  le  moyen  pour  nous 
tenir  en  vraye  intégrité ,  q  la  parole  de  Dieu 
oui  nous  eft  prefchee  fou  noftre  palturc  fpiri 

tucllc. 


SVR     L"  EPIS  T.    A    TITE. 


Î77 


tuelle.Il  cft  viay  qiron  ne  rappcrcc-iira  pa'i  du 
prcinitr  coup, mais  la  chofe  elt  tcJle.Et  pour- 
quoy  nerjppeiceuoii>i-iious  poinc?  C'ijfKqi'.e 
nous  fjmineb  trop  fen fuels  Se  terreftres.  Car 
quand  la  paftare  défaut  pour  nos  corps,  nous 
fommes  incontinent  effrayez, nous  craignons 
nous  n'auons  point  vne  minute  de  repos ,  car 
cela  r^ous  touche  de  près  :  nous  fommes  deli- 
cats.quant  à  ce  qui  eft  de  la  vie  caduque,  mais 
nous  fommes  quafi  infenfibles  en  ce  qui  attou 
chenos  âmes  ,  il  y  a  vne  fhipidité  fî  brutale 
que  nous  ne  cognoiflons  point  noftre  défaut, 
encores  qu'il  nousprefle.  Toutesfois  notons 
qu'il  n'y  a  que  langueur  en  nous  ,  fi  nous  ne 
fommes  lepeus  de  la  doctrine  de  Dieu. Et  voi- 
la pourquoy  cjle  eft  nommée  faine:  car  c'eft 
en  quoy  confifte  l'intégrité  de  nos  ames.Com 
me  nos  corps  font  maintenus  en  leur  eftat  par 
nourriture  bien  rciglee  :  ainlî  nos  âmes  s'en- 
tretienent  par  cefte  doftrine  ,  laquelle  non 
feulement  fert  de  nourri  ture.mais  auAidcme 
decine.  Car  nous  fommes  pleins  de  vices  qui 
font  pires  que  maladies ,  il  faut  que  cela  foit 
purgé, &:  que  nous  en  foyons  guairis.Le  moyé 
eft,  que  nous  profitions  en  la  parole  de  Dieu. 
Etainfî  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  fainft 
Paul  luy  attribue  ce  titre, qu'elle  eftjlaine. Car 
il  môftre  l'office  qu'elle  ha  enuers  nous  c'eft 
de  nous  reftaurer  quand  nous  fommes  mal.i- 
des,  &  puis  de  nous  maintenir  en  noftre  en- 
tier,en  forte  que  nous  ayos  vne  vigueur  pour 
nous  employer  au  feruice  de  Dieu  ,  que  rien 
ne  nous  empefche  que  nous  ne  foyons  net- 
toyai de  vice, &:  delà  corruption  qui  nous  de 
ftourne  du  bon  chemin.  Notons  bien  donc 
que  la  parole  de  Dieu  fe  doit  appliquer  à  Tin 
ftruftion  des  hommes  ,  tellement  qu'ils  foy- 
ent  difpofez  pour  feruir  àDieu.Et  c'eft  ce  que 
l'Efcriture  entend  parce  mot  d'edifierrcar  il 
faut  que  nous  foyons  cftablis ,  veu  que  de  na- 
ture nous  fommes  tant  defpourueus  que  rien 
plus.  Nous  ne  pouuons  pas  remuer  vn  doigt 
pourtirer  au  bien  ,  nous  n'auons  pas  me fm es 
vne  feuJe  bonne  penfee.  Et  ainfi  il  faut  que 
Dieu  befongne  par  le  moyen  de  fa  parole  en 
eeft  endroit,afin  de  nous  gagner  à  foy.Sc  puis 
quand  iJ  nons  a  mis  au  chemin, qu'il  nous  con- 
auife,&  qu'il  nous  auance  de  plus  en  plus.  Or 
après  que  fainft  Paul  a  parlé  en  général, il  ad- 
ioufte,C^«#  leshomes  tndtnsfiy  nt fthrtnt,qut 
ilsfoytnt  graues  fy-  modefles ,  faim  en  foy  ,  en 
rh.trité  &■  en  patience. Siinâ  Paul  pouuoit  bié 
parlerde  la  Loy,  pourdire  q  Tite  enfeignaft 
le  peuple  afin  que  chacun  fegouuernaft  félon 
Dieu  i  mais  il  traittedu  deuoir  particulier 
d'vn  chacunrce  qui  eft  bien  à  noter. Car  il  ad- 
niendra  que  fi  feulement  on  prefchc  en  com- 
mun,la  doiflrine  fera  bien  froide  ,  qu'on  n'en 
fera  point  touché. Et  pourquoyî  Car  nous  re- 
culons tant  qu'il  nous  eft  pofsible  quâd  Dieu 
nous  appelle  à  foy.  Ainfi  il  eft  befoin  qu'il 
s'addrefle  à  chacun  ,  &  que  nous  l'oyons  tou- 
chez de  plus  près.  Dieu  donc  fait  fes  appro- 


che* quai:dil  monftre  à  tous  c/î.its  à  quoy 
chacun  ill  tenu  .qu'il  parle  rotJinmciTt  aux 
vieilles  gens ,  &  puis  aux  itnnes  :  Se  puis  qu'il 
parle  à  ceux  qui  l'ont  mariez,  tant  aux  hom- 
mes qu'aux  femmes,  qu'il  parle  aux  feruiteurs 
&aux  maiftres  ,  qu'il  parle  aux   riches  &  aux 
pouresqu'irparle  à  ceux  qui  l'en:  en  authoi'i- 
té,q  font  au  fiege  de  iufticc,  qu'il  parle  à  ceuic 
qui  ont  la  charge  d'anoncer  fa  parole,  qu'il 
p.irle  à  ceux  qui  ont  mefnage  à  gouiiei  ner ,  & 
à  ceux  qui  n'en  ont  point.   Quand  donc  cha- 
cun eft  amfi  appelé  à  Ion  tour  &  en  fon  rang, 
alors  la  parole  de  Dieu  nous  folicited'auan- 
tage,  que  nous  fommes  contraints  depenfer  à 
nous,au  lieu  que  tout  nous  fuft  efchappé,  que 
nous  l'eufsions  efcoulc  en  l'air ,  comme  on  le 
voit  par  expérience.  Notons  bien  donc  que 
fainft  Paul  ne  s'eft  point  contenté  de  dire  en 
gênerai  qu'on  doit  enfeigner  le  peuple  afin 
qu'on  férue  à  Dieu,  contormant  fa  vie  à  Ij 
Loy  qu'il  nousadonneennais  il  dit  qu'vn  cha 
cun  doit  cftre  admonefté  de  l'on  office,qu'on 
doit  parler  aux  maiftres  &aux  feruiteursauT 
ieune\5(:auxvieux,àhommes&  à  femmes, que 
nul  ne  foit  oublié. Voila  donc  pour  vn  itemce 
que  nous  auons  à  noter. Or  il  eft  vray  que  ces 
choies  feinblent  aflèz  communes  ,  &  qu'il  ne 
feroit  point  befoin  mefmes  quenous  en  euf- 
fions  les  aureilles  fort  battues. Car  qui  eft  cc- 
luy  qui  ne  cognoift  que  les  Vieilles  gens  doy- 
uentauoir  quelque  grauitc  &  attrempance  en 
leurs  mœurs ,  qu'ifs  doyuent  monftrerexem- 
pled'honneiteté  aux  autres,  qu'ils  doyuent 
eftre  patiens  à  caufe  que  Dieu  les  a  exercer 
de  plus  long  temps, qu'ilsdoyuent  brief,mon- 
ftrer  que  ce  n'eft  pas  en  vain  qu'ils  on  vefctj 
au  mondefCcla  nous  fera  cognu  de  nature.  Il 
nefemble  point  donc  qu'il  fuft  fi  grand  be- 
foin de  venir  au  fermon  pour  ce  faire  ,  c'eft  à 
dire  pour  eftre  inftruit  de  chofes  qui  font  fi 
patentes.  Autant  en  eft-il  de  ce  qu'il  adicufte 
quant  aux  femmes:car  cela  fepeut  apprendie 
en  la  maifon  ,  Se  chacun  en  pourroit  quafi  te- 
nir efcole, ce  femble.  Neantmoins  fainft  Paul 
n'exhorte  pas  Tite  qu'il  en  prefche  feulemet 
vn  coup  ou  deux,  mais  il  veut  qu'il  perflfte  en 
cela. Il  femble  de  prime  face  que  ce  foit  vn  la- 
beur fuperflu,  Se  mefmes  fclon  que  nous  fom- 
mes chatouillezdevainéconuoitife,DOUSvon- 
drions  qu'on  nous  apportaft  chacun  iour  ie 
ne  fçay  quoy  de  nouueau  ,  4:  il  nous  fafche 
quand  on  nous  parle  de  ces  chofes  commu- 
nes,Et  comment  ?  l'apprendray  ceci  en  mon 
mefnage, que  ie  foye  en  ma  rnaifon,  que  i'aye 
là  ma  femme  &  mes  enfans  à  gouuerner:faut- 
il  que  Dieu  me  reuele  fa  parole  du  ciel  pour 
des  chofes  qui   font  fi  vulgaires  Se  fi  petites* 
Sous  ombre  (di-ie)  qu'il  fenible  que  nous  ne 
profitons  point  beaucoup  quand  on  nous  ré- 
cite ces  chofes  ,  nous  voudrions  que  pluftoft 
on  nous  traittaft  quelque  ncuucauté  qui  notJS 
feift  voltiger  en  l'air  :  comme  i'ay  défia  dit 
que  le  moridc  eft  eudin  à  cela  ,  d'auoir  qutl- 

DDd.J, 


S78 


SERMON     X. 


que?  qu("ftion?curieute>;  qui  rcfponJent  à  no- 
ftrc  t'i>l  &  delordaniié  appétit.   Or  tant  y  a 
que  l'Elprit  de  Dieu  eu  plus  ùe,e  que  nous, il 
fcait  ce  qui  nous  cft  propre  :  &  auifi  tenon<- 
n:)us  en  bride.  Et  combien  que  nous  pourries 
nous  ennuyer  iî  on  nous  remonftre  les  cbofes 
«ui  font  ici  contenues, coirime  lî  on  ne  taifoit 
que  battre  l'eau  ,  rçathous  que  ce  n'cft  point 
(ans  c.iufe  que  Dieu  veut  &  commande  que  la 
mémoire  nous  en  fait  rcIr'refchie.Etdc  taid,!! 
nous  regardons  à  nous,  il  fera  facile  de  iuger 
que  iamals  nous  ne  profiterons  en  toute  no- 
rtre  vif  (tant  qu'il  feroit  befoin)  en  cet  cho- 
ies que  nous  eftimôs  plus  que  viilgaircs,&'  qui 
font  quafî  cognues  aux  petii  enfans.  Comme 
quand  il  eft  parlé  des  vieilles  gens  ,  il  e(\  dit 
en  premier  lieu, (j«'r7^  ayent  grjuité  &  atlrem- 
pance  en  leurs  mitun.    Orque  cela    fedife,  & 
qu'on  en  parle  foiiuentesfois.comment  profi- 
te-on?On  verra  les  vieilles  gens  qui  font  en- 
durcis au  mal, que  fî  on  veut  auoir  des  moulles 
de  vilenies  (comme  on  dit)  il  les  faudra  aller 
là  clicrcber.  Les  vus  feront  des  vieux  renars 
qui  n'apprendront  que   fraude  &  malice,  & 
quand  on  fe  voudra  conformer  à  leur  exem- 
ple,il  n'y  aura  ne  loyauté, ne  droiture  qui  foit 
Apres,  on  enverra  d'autres  qui  feront  diflo- 
lus&  desbordez  en  toute  leur  vie.  Les  autres, 
i'ils  ont  efté  addonncz  à  blafphemes  en  leur 
ieune  aage.ils  ne  s'en  corrigeront   non  plus 
envieilleue.  On  verra  mefmes  les  vieux  co- 
quars  qui  feront  confits  en  leurs  paillardifes, 
voire  tellement  que  ce  fera  pour  tout  inte- 
ûer, qu'ails  tiendront  des  propos  tant  infâmes, 
quelesieunes  gens  auront  honte  de  leur  ouir 
defgorger  telles  vilenies  &  fi  puantes.  Apres, 
ils  ne  demanderont  finon  que  de  fe  detbor- 
der  en  toutes  diflolutions.  Car  encores  qu'ils 
ne  puiflent  remuer  les  iambes.s'ils  voyentdes 
tlanfes ,  &  autres  chofes  vileines  &diffolues, 
ils  s'y  baignent.  Voila  ce  qu'on  voit  aux  vieil- 
les gens. Et  ainfi,  quand  nous  aurons  regardé 
àces  chofes  ,cognoiirons  que  Dieu  ne  nous 
amufe  point  en  vain  à  telles  exhortations.  Il 
cft  vray  que  nous  cuiderons  eflre  alTez  habi- 
les, &  que  ce  fcroit  afTezdc  nous  en  auoir  dit 
vn  mot  en  partant:  mais  qu'on  necefle,&  »ju'a 
près  nous  en  auoir  parlé  auiourd'huy, que  de- 
main on  continue.nous  y  ferons  toufîours  no- 
«ices ,  au  bout  de  l'an  nous  monftrerons  que 
nous  auions  befoin  d'eftre  touchezau  double, 
voire  cent  fois  plus.  Ainfi  apprenons  que  ia- 
mais  on  ne  fe  doit  fafcher  d'eltre  exhortez  à 
bien  faire  ,  iufques  à  tant  qu'on  aura  vue  telle 
perfection  qu'il  n'y  ait  plus  que  redire.  Or 
qu'on  la  cherche  en  vn  autre  monde:car  il  n'y 
a  celuy  de  nous  qui  ne  cognoifle  fes  vices  & 
iea  infirmitcz.ou  nous  fommes  par  trop  aueu- 
gles.  Et  ainfi  remettons-nous  à  Dieu,&  fouf- 
frons  qu'il  nous  folicite&  nous  redargue.  Et 
d'autant  que  nous  auons  eu  l'aureille  fourde, 
&  que  nous  auons  eftc  par  trop  froids  &  tar- 
dif», s'il  nous  donne  des  coups  d'cfpeion  par 


chacun  iour,que  nous  foyons  patiens  pour  lei 
receuoir,lçaclians  que  cela  nous  cft  plus  qu'y 
tiie.  Voila  doue  comme  nous  ne  ferons  point 
fi  délicats  pour  nous  ennuyerde  labonnedo- 
ftrine,fçachansque  fi  on  ne  nous  larenouucl- 
le  toute  noftre  vie, nous  l'aurons  tantoft  mife 
en  oubli, d'autant  que  mefmes  nous  ne  l'aurôi 
iamaisalFez  apprinfe  comme  il  feroitàfou- 
haitter.  Or  cependant  notés  aufu  ce  que  i'ay 
touché, c'eft  afçauoir  que  Dieu  pour  s'appro- 
cher de  nous  plus  priucement  après  qu'il  nous 
a  attirez  à  foy  ,  nous  traitte  en  particulierdu 
deuoir  de  chacun.  Q^nand  nous  auons  la  Loy, 
il  eil  vray  que  c'eft  vne  règle  fi  fuffifante  que 
il  nous  doit  bien  fuffire:&  Dieu  aufsi  n'y  ad- 
ioufte  rien.  Quand  il  parle  des  maris,des  fem 
mes,dcs  percs,des  enfan<:,desmaiAre$,dts  fer 
ui:eHrs,des  magiftrats  &  des  fuiets,&  det 
vieux  &:des  ieunes ,  Dieu  par  cela  n'adioufte 
rien  .î  ce  qui  eft  contenu  en  fa  Lov,roais  il  Tex 
pofeafin  que  nous  en  foyos  mieux  enfeigner, 
&  qu'vn  chacun  regarde  à  foy  pour  examiner 
fa  vie  mieux  que  nous  ne  faifons  pas.  Voila 
pourquoy  il  nous  eft  vtile  de  bien  regarder 
quand  nous  lifons  l'Efcriture  fainôe  ,  quand 
nous  venons  au  fermon,  ce  qui  fe  peut  appro- 
prier à  noftre  vfage.  Mais  quoy?noLis  faifons 
tout  à  l'oppofite:car  chacun  efcoute  fi  on  par 
lera  cotre  fon  voifin.Et  c'efl  bien  fi;  mocquer 
de  Dieuinous  rendons  par  ce  moyen  la  paro- 
le inutile, &  quafî  luy  fermés  la  porté. Et  ainfi 
donc  retenons  qu'vn  chacun  doit  eftre  atten- 
tif à  noter  fi  ce  qu'on  dira  l'attouche  ,&  qyi'il 
luy  foit  propre, VoiciDieu  qui  neparle  point 
feulement  en  gênerai  à  toute  la  compagnie, 
mais  ie  voy  &  fen  que  ceci  m'appartient  ,  & 
que  Dieu  entre  quafi  en  mon  cœur  afin  de  me 
foliciter  à  bien  faire.  Voila  comme  nous  de- 
uons  eftre  aigus  àappliquer  ànoftre  inftru- 
ftioncequi  nous  eft  prefenté  de  laparolede     Xfjy^t 
Dieu.  Et  voila  pourquoy  aufsi  fain£t  lehan   '     . 
dit, le  parle  à  vous, vieilles  gen5:car  celuy  qui 
a  efté  dés  le  commencemét  vous  prcfente  fon 
Euangile,&  veut  que  vous  veniez  à  luy. le  par 
le  à  vous ,  ieunes  gens:  car  vousauez  vn  Père 
au  ciel ,  pource  qu'il  vous  a  adoptez  pour  fes 
enfans.  D'autant  que  les  vieilles  gens  ne  font 
gueres  dociles,  &  qu'il  leur  fembîe  puis  qu'ils 
ontvefcu  au  monde  qu'on  ne  leur  doit  plus 
rien  apprendre:&  là defllis  qu'ils  s'enorgueil- 
lifTent  &  font  quafi  rebelles  à  Dieu,  fainft 
lehan  leur  dit, Comment  nedaignez  vous  pas 
cfcouter  celuy  qui  eil  de  toute  éternité  ?  Si 
vous  auez  vefcu  quatre  vingts  ou  cent  ans  au 
m5de,qu'eft-ceau  prixde  celuy  qui  n'a  iamais 
commencé  d'eftre, mais  à  toufioursefté?VoiJa 
noftre  Dieu  qui  vousappelle, voire  pour  eltre 
participans  de  cefte  figcflè  infinie  qui  a  efté 
de  tout  temps  cachée  en  luy  :  &  vous  ferez  fî 
fiers  &  fi  arrogans,  qu'il  vous  femblera  qu'on 
ne  vous  doyue  rien  monftrerde  nouueau?Voi 
la  comme  S. lehan  s'addrefTe  aux  vieilles  gens 
pour  les  mieux  picquer.  Et  puis  quant  à  vous 

(dit-il^ 


SVR     L' EPIS  T.    A   TITE. 


r? 


(•Jit-il)ieunes  gen^.il  vous  femble  <jue  vous  y 
viendrez  ton:  à  ttmps.  Car  les  ieiines  gen';  le 
promettent  de  viure  cent  ans  après  leur  mort; 
&Iàdeflus  ils  s'adonnent  aux  vanitez  de  ce 
monde,  &leur  femble  (jifil  ne  faut  point  que 
ils  fe  melancholient.mais  pluftoft  qu'ils  peu- 
U€nt  faire  grand' ctiere  &  (e  donner  du  bon 
temps. Voila  qui  fait  que  tant  peu  gouftent  la 
parole'de  Dieu  pour  s'y  addonner.Comment? 
(dit-il)  Voici  voftre  Dieu  qui  vous  a  défia  ado 
ptez  pour  (es  enfans,il  veut  eftre  voftre  Pcre, 
&  cependant  vous  ne  regarderez  point  à  luy? 
Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir  en  ce 
paflage, quand  nous  voyons  que  Dieu  non  feu 
lement  nous  appelle  d'vne  voix  cômune.mais 
qu'après  il  nous  prend  chacun  en  fon  rang,  & 
dit,Or  ça, il  faut  maintenant  q  vous  cognoif- 
fiezquec'eftàvousque  ie  m'adrefle,que  vous 
fçachiez  ce  quieft  de  voftre  office: regardez  à 
quoy  vous  eltes  tenus. Quand  nous  voyôs  que 
Dieu  ha  vne  telle  folicitude  pour  nous  gagner 
àfoy.ne  faut-il  pas  que  nous  foyons  plus  que 
peruers,  fi  pour  le  moins  nous  ne  venons  à  luy 
quand  il  s'accommode  ainfî  à  noftre  rudell'e? 
Voila  en  fomme  comme  nous  deuons  pratti- 
cjuerceftedoftrinede  faind  Paul,  quâd  il  dit, 
t.nfeigne  Us  yleilhs gen)  .  Or  cependant  no- 
tons que  les  vieilles  gens, combien  qu'ils  foy- 
ent  expérimentez  ,  ne  doyuent  pas  pourtant 
eftre  reucfches, comme  nous  en  voyons  beau- 
coup'il  leur  femblera  que  ce  qu'ils  ont  veu  les 
fait  aflez  fages.  Mais  quoy?Nous  voyôs  coin 
me  Dieu  les  appelle  à  fon  efchole,&  qu'il  veut 
encores  qu'ils  fuflent  fur  le  bord  de  leurs  fof 
fes,&  qu'ils  eulTent  vefcu  long  temps, que  tou 
tesfois  ils  demeurent  toufiours  fous  la  doiiri- 
Be,&  qu'il»  efcoutét,&  qu'ils  foutfrent  d'eftre 
gouueruez  :  car  s'ils  veulent  eftre  trop  fages, 
Dieulescôfondraen  leurprefomptiô.  Et  ain 
finotô^bien  queladoûrinedtf  PEuagile  n'tft 
pas  vn  a  b  cpour  nous  inftruire  quand  nous  fe 
rons  encores  rudes  &  nouueaux.mais  que  c'eft 
vne  perfeûion  de  toute  fagefle,  à  Liquelle  il 
nous  faut  airuiettir  &  ieunes  &  vieux.  Tou- 
chant ce  qu'il  dit  ,  Qji'ils  f-ymt  fubtes  ,  cyUs 
mytnt grnuité,C  ciii'ls  ayent  .ittretnfance:  cela 
ef  'înt  pour  corriger  les  vi  ces  qui  font  en  la 
▼il       (TeiComme  aiifsi  pour  monftrer  les  ver- 
ttis  q,    "int  propres  à  ccft  aage-la.  Car  quel- 
que fou     n  verra  les  vieilles  gens  addonnez 
àboire:&  u  au..:nt  que  cela  eft  par  trop  com- 
mun,il  leur  femble  que  c'eft  vne  excufc.Mais 
a»  contraire,c'eft  vne  choi'e  honteule,&  con- 
tre naturcque  ceux  qui  ont  ainfi  long  temps 
vefcu  au  inonde  ,  ne  puiffent  encores  vfer  de 
ces  créatures  de  Dieu  ,  qu'ils  ne  cognoiflent 
pourquoy  &  à  quelle  fin  le  boire  &  le  manger 
nous  font  dônez-Sainft  Paul  donc  notammét 
a  voulu  corriger  ce  vice:&  cependant  il  mon- 
ftre  que  les  vieilles  gens  doyuent  auoir  &•  gra- 
uité  &  attrempance.  Il  eft  vray  que  fi  les  icu- 
nesgens  fontdiiïblus.ii  les  faut  reprimer.s'ils 
fgctvolaget,  t'iU  font  des  veaux  desbndez, 


qu'il  faut  les  ramener  au  iowg  :  mais  tant  y  a 
que  fi  on  fait  côparaifon,  les  vieilles  gés  fout 
beaucoup  plus  vileins  &  deteftables  du  tcut, 
quand  il  fuyuét  encores  après  leurs  cupiditer 
volages:car  ilsdoyuét  eftie  mattez:&nefuft- 
ce  que  l'aage,natureenftigneceJa  Mais  quâd 
nous  auons  la  dodrine  de  î'Euangile  qui  nouj 
monftre  à  quoy  nous  doit  feruir  d'auoirlong 
temps  vefcu  au  monde  ,  nous  deuons  appren- 
dre ce  que  Dieu  nous  y  monftre,  en  taichant 
de  profiter  tellement  que  nous  foyons  plus  at 
trempez,  félon  que  nous  cheminerons  plus 
auant  en  cefte  vie, que  nous  foyôs  fobres,  que 
il  y  ait  grauitc.  Et  mefities  on  verra  que  c'eil 
comme  vn  monftre  de  nature  qu'vn  vieil  hom 
me  qui  s'efgaye  encores  comme  vn  ieuûe  fol. 
Si  qu'il  ha  ks  bouillosde  ieunefle.Car  qu'vii 
vieil  homme  s'efforce  tant  qu'il  voudra  ,  il  ne 
pourra  pas  traîner  les  iambes,  ne  remuer  les 
bras:  la  dcbilitédefon  corps  l'aduertitalTcz 
décela.  Car  quand  il  eft  ainfi  cafle  &  rompu 
qiiat  au  corps.fi  l'ame  eft  ainfi  reuefche.qu'el 
le  fjit  volage,qu'elleait  fes  bouillons,  ou  fe» 
ra-ccaller?Il  femble  que  ce  foitdefpi ter  tou- 
te humanité  que  cela. Nous  voyons  doc pour- 
quoy lair.ft  Paul  a  ici  notamment  parlé  de  la 
robricté,&:  delà  grauité.&del'attrempance. 
Or  il  3.àioMlic,QH'ils  foyentfahis  enfoy^en  cha- 
rités en  pati<ncf.   C'eft  autant  côrae  s'ildi- 
foit,  que  fi  les  vieilles  gens  font  caduques  & 
rompus, qu'ils  nourriflcnt  beaucoup  de  mala- 
dies, qu'ih  n'ayent  plus  telle  vigueur  comme 
ils  auoyét:  pour  le  moins  que  cela  foit  rccom 
penie  quant  à  l'intégrité  des  amcs.  Il  eft  vray 
quefaindt  Paul  n'exprime  pas  cela  de  mot  à 
mot  ,mais  fia-il   regardé  à  cefte  fimilitude. 
Pour  mieux  comprédre  ceci,prenonsce  qu'il 
traitte  en  la  i.des  Corinth.  c'eft  afçauoir  que  i.Cor.t  i 
felô  q  no/lre  loge  (qu'il  appelle  de  ce  corps) 
s'en  va  en  décadence,  il  faut  que  nous  foyont 
reftablis  félon  l'homme  intérieur.  Il  accompa 
re  nos  corps ,  voire  &  tout  ce  qui  concerne  la 
vie  prtfente,ill'acconipare,  di-ie,à  vne  loge. 
On  fera  vne  petite  loge  de  paille  &defiKil- 
les:  fi  la  pluye  continue  ,  S:  que  le  vent  donne 
dedas,ccla  fe  corrompt  &  pourrit, il  n'tftpas 
de  longue  durée. Nous  voyôs  comme  les  gros 
baftimcns  &  bien  mafsifs  ne  laiflent  pas  toii- 
tesfois  de  vieillir  &  deuenir  caduques  :  que 
fcra-ce  d'vne  fueillee  qui  eftfouftenue  fur  des 
fourches? Cela  s'en  va  bié  toft,dit  fainft  Paul, 
Ainfi  en  eft-il  de  noftre  vie.  Car  après  q  nous 
aurons  fleuri  pour  vn  temps,  voila  noftre  vi- 
gueur qui  s'efcouie  petit  à  petit.   Et  encores 
que  nous  n'appcrccuions  pomt  à  l'ccil  comme 
Dieu  nous  retire  de  ce  morde,  &  que  nous  al- 
lions toufiours  nolhe   ti  Jin  ,  fi  ift-ce  que  le 
corps  dcuiendra  courbu  ,  'a  veue  s'accourcit, 
les  nerfs  le  débilitent  &  fe  retire nt:brief,i'h5 
medeuiendra  oefant  en  toutes  chofes.Q.uand 
donc  nous  voyons  cela  (Jit  fainû  Paul)..Tous 
fommes  admoneftcz  de  chercher  vne  meil^ 
leuie  vie.  Car  autfemcnc ,  Dieu  ne  nous  au- 

DDd.ii. 


î?o 


SERMON     X. 


roit-il  pômt  creei  de  pire  condition  que  les 
beûcs  brutet?  Car  les  belles  brutes  aurôt  plus 
de  vigueur  en  touî  le  cours  de  leur  vie  ,  que 
n''auront  point  les  hommes.Toutc  la  rigueur 
que  noBs  auons ,  combien  dure-tlle?  Ce  n'eft 
rien  :  il  ne  faut  que  tourner  la  main  ,  Si  nous 
voila  palTez.  Or  voila  aucunes  belles  quivi- 
uent  plus  long  temps,  &  les  autres  en  leur  rie 
fe  continuent  en  leur  eftat.Qi^  fera-cedouc 
de  nous?£t  pourtant  apprenons  d'elhc  renou 
£ff,.t,ig  uelcz.dit  fainft  Paul.  EtcômentfQne  l'hom- 
me intérieur  fou  reftabli,  Se  que  par  foy  &  e- 
fperance  nous  foyons  rob'.iftes .  combien  que 
nos  corps  défaillent, que  neantmoins  Je  Roy- 
aume de  Dieu  nous  entretienc  toufiours  de 
plus  en  plus  en  vertu,  &  qu'elle  s'augméte  en 
nous.fi-lon  qu'il  nous  faut  quitterle  inonde,& 
que  le  monde  auTsi  nous  renonce.  Car  quand 
les  hommes  déclinent  ainfi,  c'cft  comme  li  le 
inonde  le  retiroit  d'eux  ,  pour  dire ,  le  ne  te 
veux  pastouiîours  entretenir.  Il  faut  que  tu 
coçnoiflî's  que  ic  ne  puis  pas  l'uffire  à  te  fou- 
ftenir  touiîours  en  vn  melme  eftat.   Quand 
donc  le  monde  nous  quitte, il  nous  le  faut  auf 
fi  quitter, 5;  cepend.int  regardera  la  vie  cele- 
ftc,àl.iqiielleDieu  nous  conuie.  Voila  pour- 
auoy  notamment  fainrt  Paulditici,Qj*#  T'f'/ 
lesgens  f'iy  ntfains  tn  foy,cH  charité,  Cr  en  pa- 
tience. Si  feulement  ils  cognoiflent  leurfoi- 
blelTe  pour  dire,  Helas, que  fay-ie  plusauraô 
de?  fi(di-ic  )  il  n'y  auoit  autre  chofefînon  de 
penfer, Helas.'  ie  ne  me  fçauroye  plus  exercer 
en  ces  chofes  prefentes  :  &  bien  ,  il  vaudroit 
beaucoup  mieux  qu'ils  fulTcnt  retirez  du  pre- 
mier coup:mais  quad  ils  font  fains,  voire  d'v 
ne  intégrité  fpirituellc  ,  il  ne  fant  point  que 
cela  les  fafche  ,  qu'ils  foycntabbatus  quant  à 
leurs  corps.  Qu'ils  tafchent  donc  de  recora- 
pcfer  ce  qsi  leur  défaut. Vray  eft  que  les  vieil 
les  gens  doiuent  bien  eftre  prifez:  8c  aufsi  no- 
ftre  Seigneur  le  commande ,  8c  nature  nous  le 
monftre:  mais  cependant  fi  faut-il  aufsi  qu'ils 
aduifcnt  d'auoir  de  quoy.  Car  ils  fe  rendent 
cpntcroptibles  fouuent.  Us  fe  plaindront ,  (î 
on  (è  moque  d'eux  qu'on  les  defdaigne, ils  di- 
ront qu'on  leur  fait  grande  iniure  ,  &  en  de- 
manderont vengeance  à  Dieu:  mais  le  plus 
fouuent  ils  en  fontcaufe.  Et  pourquoy?  Car 
ils  n'ont  nulle  vertu  en  eux  pour  eftre  hono- 
rez :  qui  plus  eft,  ils  cherchent  d'eftre  en  op- 
probre à  leur  efcient  (  comme  i'ay  défia  dit) 
que  la  plufpart  des  vieilles  gens  ne  feront  que 
pour  corrompre  la  ieunefle',  ils  feront  com- 
me des  patrons  de  toute  ordure ,  &  de  toute 
dilToIution.  Ne  font-ils  pas  donc  bien  dignes 
<ju'on  leur  crache  au  vifage?  Il  eft  vray  que  (î 
les  ieunes  gens  fe  desbauchent ,  ils  ne  feront 
point  excufez,  pourtant  qu'ils  ne doiuét  eftre 
diffamez:  mais  les  vieilles  gens  feront  coulpa 
blcs  au  double  de  la  honte  qu'on  leur  fait,  lî- 
non  qu'ils  foyent  honorables  en  vertus. Ainfi 
donc  quand  les  vieilles  gens  voudront  eftre 
prifc2,qu'ils  aduifent  de  iccompenftr  l'infir- 


mité de  lcurcorpjpar|cefte  fanté  fpirîtuelle 
dont  parle  ici  faiuft  Paul.  Il  eft  vray  que  l'ara 
bition  ne  doit  point  mener  les  feruiteurs  de 
Dieu:mâis  ie  ne  parle  poit  aufsi  pourquoy  les 
vieilles  gens  fedoyuét  efuertuer  d'eftre  ainlî 
entiers  en  foy, en  charité, Se  en  patience. Mais 
voila  pourquoy  fainft  Paul  notamment  parle 
ici  de  la  fanté.Car  ce  font  céme  demies  pour- 
ritures que  les  vieilles  gens:ils  ne  fçauent  plus 
s'appliquer  en  vfageà  quelque  chofe,  ils  fen- 
tent  le  fcpulchre.ils  ont  le  vifage  bailTé  en  ter 
re,il  fenible  que  le  monde  les  iette  dcfia  com- 
me vne  fuperfluité.  Puis  qu'ainfi  eft,  qu'ils  re- 
courent au  remède  qui  nous  eft  ici  enfeignc 
quant  à  ce  poinft.  Or  notamment  S.Paul  par- 
le de  foy , de  charité,de  patiéce.qui  eft  la  droi- 
te perfeûiô  8c  pleine  de  noftre  vie. Il  eft  vray 
que  l'Efcriture  fouuent  ne|parlera  q  de  foy  8C 
de  charitc:S:ces  deux  chofes-la  aufsi  fuffifent 
bien  pour  nous  monftrer  quelle  eft  la  règle  de 
feruir  à  Dieu:inais  la  patience  eft  ici  adiouftee 
pour  plus ampledecla ration,  &  non  fanseau- 
fe.  Il  y  a  donc  la  foy  en  premier  lieu  ,c'ettdc 
nous  remettre  du  tout  à  Dieu,  de  nous  fier  en 
fa  bonté,  d'cmbrafler  la  remif'ion  de  nos  pé- 
chez qu'il  nous  a  promife  au  nom  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift,d'cftrca(reurez  du  falut 
qu'il  nous  offre  par  fon  Euangile:&puis  là  def 
fus,  que  nous  ayons  noftre  recours  àluy,  que 
nous  luy  demandions  qu'il  nous  reçoyue  en  (a 
garde,qu'il  ait  pitié  de  nous,  qu'il  nous  forti- 
fie contre  toutes  tentations.  Quand  donc 
nous  aurons  cela  ,  nous  aurons  la  fanté  de  foy 
dont  parle  fainû  Paul .  Et  ainfi  nous  ne  pour- 
rons pas  eftre  entiers  en  la  foy  ,  que  nous  ne 
ayons  l'affeurâcedespromeflesde  Dieu  pour 
nous  fier  en  fa  bonté,  pour  accepter  la  remif- 
fion  des  péchez  qu'il  nous  offre  par  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift  ,  pour  receuoir  aufsi  le  fa- 
lut qui  nous  a  eftr  acquis ,  &  qui  nous  eft  aufsi 
referué  au  ciel .  Et  là  delTus  que  nous  inuo- 
quions  noftre  bon  Dieu,  ayans  tout  noftre  re- 
fuge à  luy ,  comme  à  ccluy  qui  eft  la  fontaine 
de  tout  bien.  Voila  quant  à  la  foy  .  Or  auons- 
nous  ainfi  honoré  Dieu  ?  l'auons-nous  reco- 
gnu  pour  noftre  Sauueur&  Père  ?  Nous  fom- 
mes-nous  du  tout  appuyez  fur  la  mort  &  paf- 
fion  de  noftre  Seigneur  IcfusChiift.'auôs-nous 
apprehédé  la  vie  celefte  qu'il  nous  a  promiftî 
11  eftqueftion  que  nous^conuerfions  auccnos 
prochains  en  toute  droiture&  équité  :  ce  que 
nous  ne  pouuons  faire  que  nous  n'aimions  no 
ftre  prochain  comme  nous-mefines.  Commet 
m'abfticdray-ie  de  frauder  l'vn,  de  piller  l'au 
ire.de  circonuenir  quelqu'vn,  de  faire  nuifan- 
ce  à  l'autre,  de  machiner  quelque  mefchantc 
prattique,  d'v  fer  de  trahifon  &  de  vengeance: 
côment(di-ie)  ni'abftiendray-iede  tout  cela, 
finon  que  i'aime  mes  prochains?  Mefines  corn 
ment  me  pourray-ie  appliquer  à  procurer  le 
bien  d'autruy,  finon  en  cômuniquât  auec  ceux 
que  Dieu  aconioints  à  moy?  Il  faut  que  la  cha 
nté  foit  le  lien  de  toute  droiture ,  &  que  nous 

fo  yons 


SVR   L' EPIS  T.   A   TITE. 


foyoi»  gouûernet  &  reftraints  p»r  icelle  ,  ou 
autrement  nous  ferons  côme  chiens  &  chats, 
nous  ferons  pires  que  les  loups  &  beftes  fauua 
gcs:car  chacun  creuera  les  yeux  de  fon  pro- 
chain. Ainiî donc  il  nous  faut  pour  auoir  inte 
gricéde  vie,  tenirceftecôduite  de  charité  mu 
tuelle  entre  nous.  Il  y  a  puis  après  la  patien- 
ce.Ilellvray  qu'elle  dépend  de  la  foy  :  mais 
(comme  i'ay  défia  touché)ce  n'eft  point  fans 
eaufe  que  dinSt  Paul  en  parle  ,  â  caufe  de  no- 
ftre  rudefle.Si  nous  auons  foy.nous  ferons  pa 
tiens  en  toutes  nos  aduerficez.  Et  pourquoy? 
Car  la  foy  nous  doit  rauir  Uh3ut,&  nous  doit 
faire  oublier  le  môde.pour  le  moins  que  nous 
ne  facions  qu'y  palTer.Car  û  nous  ne  fommes 
eftrangers  ici  bas,pouuons-oous  dire  que  no- 
ftre  héritage  foit  au  royaume  des  deux?  Et 
pourtant  que  nous  pafsions  tellement  parce 
monde, ,que  nous  n'y  foyons  nullement  rete- 
nus :  8c  s'il  nous  y  faut  fouffiir  beaucoup  de 
miferes&d'affliâions, nous  les  pourrons  por 
ter  paciemment.inoyennant  que  nous  cédions 
toujours  au  ciel ,  là  où  Dieu  nous  appelle. 
Mais  pource  que  les  homes  ne  portent  point 
tant  doucement  les  affligions  que  Dieu  leur 
enuoye  comme  il  feroit  requis, 5c  melines  que 
ce  prouerbe  qui  eit  entre  nous,  (lue  patience 
pafle  fciéce,  déclare  que  c'efl  vue  chofe  iî  dif 
ficile  que  Th  jmme  fe  range ,  qu'il  plie  les  ef- 
paules  quand  Dieu  luy  enuoyera  quelque  af- 
fliâion  a  p  irter,  &  que  fi  nous  rcceuôs  les  ad 
uerfîtez  de  la  main  de  Dieu,  que  c'eft  comme 
par  fotce:d'autant(dt-ie) qu'il  nous  faut  tra- 
uailler  àceli  ,  &  que  nous  n'en  pouuons  pas 
venir  à  bout  linon  auec  grande  difficulté  ,& 
auec  grand  eiforcvoila  pourquoy  fainft  Paul 
adioufle  ici  la  patience  ,  pour  monftrer  com- 
ment nous  ferons  fains&  entiers  :  c'eft  afça- 
uoir  quand  nous  pourrons  embrafler  la  bonté 
que  Dieu  nous  offre  en  noftre  Seigneur  Icfus 
Chrift,  quand  nous  aurôs  noftre  refuge  à  luy, 
6c  que  nous  pourrons  conuerfer  auec  nos  pro 
chains  en  toute  loyauté  &  droiture  ,  aimans 
ceux  que  Dieu  a  conioints  auec  nous ,  voire 
iufques  à  nos  ennemis ,  que  nous  foyonspa- 
tiens,que  fi  Dieu  nous  traitte  non  poiut  k  no 
ftreguife  ,  mais  tout  au  rebours  de  ce  que  no* 
Appetons ,  que  les  vns  foyent  tourmentez  de 
poureté.les  autres  de  maladies,  les  autres  lan 
guiuentie  ne  fçay  comment,  les  autres  foyct 
en  opprobre  &  en  mefpris,  que  chacun  ait  fes 
ennuis  &  fafcheries,  que  l'vn  foit  tourmenté, 
mefmes  en  fon  mefnage,  la  femme  par  le  ma- 
ri,le  mari  par  la  femme,  le  père  par  les  enfâs, 
que  nous  venions  li:  Et  bien,  c'eft  à  Dieu  de 
nous  gouuerner.il  ne  faut  point  que  nous  ay- 
ons le  chois  pour  luy  impofer  loy.Car  que  fe 
roit-ce  s'il  tftoit  fuiet  à  nos  appetis?  Ainfî 
donc  fouffrons  d'eftre  tellemét  gouucrnez  de 
Ù  main.que  quand  il  nous  tirera  tout  au  con- 
traire de  nos  appetis,  nous  ne  murmurions 
point ,  mais  que  nous  foyons  comme  des  a- 
gncaux,qu  c  nous  ayons  la  bouche  clofe,  nief- 


fSf 


mes  que  nous  luy  rendions  adion  Je  gracet 
ouâd  il  nous  aura  ainfî  afflige2,qu'il  nous  fuf- 
hfe  de  ce  qu'il  ne  permet  point  que  nous  <Jcj- 
faiilions  du  tout.  Voila(d/-ie)la  vraye  inté- 
grité qui  compcte  aux  vieilles  gensrcar  fçlon 
que  nous  auons  vcfcu  plus  long  temps  en  ce 
monde,  nous  auons  befotn  de  patience.  Il  cft 
vray  que  quand  Dieu  nous  a  recordé  tJnt  de 
fois  cefte  Ieçon,nous  y  deurions  eftre  du  tout 
exercez,  &  fçauoir  par  cœurque  c'eft  de  fouf 
frir.  Mais  quoy?  cependant  nousyfonimes 
toufiourt  nouueaux  :  Se  melmes  nous  voyons 
que  les  vieilles  gens  font  plus  chagrins  qqe 
ne  feront  point  les  ieunes  :  car  il  ne  coufter» 
point  tant  àvn  ieune  homme  defouffrir  quel 
que  malril  pafle  cela,5c  préd  le  frein  aux  déts; 
mais  les  vieilles  gés  font  tant  difficiles, qu'eu 
cores  qu'on  leur  face  tout  ce  qu'ils  deman- 
dent,fi  eft-ce  qu'ils  prendront  occafîon  de  fe 
fafcher,&de  fe  picquer,& auront  vneamertu 
me  qu'ils  nourriflent  en  eux.  Et  ainfi  ce  n'eft 
point  fans  caufe  que  fiinGt  Paul  notâment  les 
inftruit  ici  à  patiencc:niefmcs  il  y  a  de  i'ingra 
titude  vileine,  pource  qu'au  lieu  d'auoir  pro- 
fité quand  Dieu  lésa  exercez  en  beaucoup 
d'afflidions, ils  feront  vn  recueil  pour  s'aigui 
fer  d'auantage.  Voila  qu'vn  vieil  homme  de- 
uroit  pcnfer  quand  il  endure  quelque  mal  :  Et 
bien ,  ceci  ne  me  doit  pas  eftre  nouueau  :  car 
l'ay  tant  veu  d'exéples  de  ceux  qui  ont  efté  ar 
fligez  de  1.1  main  de  Dieu:  &  fi  ie  fuis  du  rang, 
le  doy-ie  trouuer  eftrageî  Et  mefmes  fi  Dieu 
m'a  affligé  par  ci  deuant ,  &  que  neantmoins 
ien'aye  point  plié  fous  fa  main  pour  porter 
fon  ioug  ,  maintenant  il  faut  que  ie  me  range 
à  luy.  Or  au  contraire.ils  feront  vn  recueil  & 
vn  grand  regiftre.Et  quoyPDieu  ne  fe  conten 
tera-il  iamais  de  m'affligsr?  Depuis  mon  ieu- 
ne aage  i'ay  eu  ceci  5f  cela,  i'ay  enduré  vn  tel 
mal.Q^at  eft  des  bénéfices  de  Dieu, il  ne  leur 
en  fouuient  point ,  tellement  que  Dieu  a  tout 
perdu ,  d'autant  qu'il  l'a  mal  employé  enuers 
telles  gens.  Mais  ils  Içauront  bien  augmenter 
les  fafcheries  qu'ils  ont  eues  :  Et  voire  (  di- 
ront-il^i'ay  eu  vne  telle affliélion  :  &  quand 
ie  n'aurjye  iam.'is  eu  d'autre  aflaut.que  Dieu 
nem'auroit  point  chaftié  de  fes  verges  que  ce 
coup-la, ce  feroit  aflcz  :  mais  c'eft  tcufiours  à 
recommencer.  Voila  comme  les  vieilles  gens 
font  leurs  plaintes,  &  intentent  qualî  procès 
contre  Dieu.  Acaufed'vne  telle  ingratitude, 
il  eft  befoin  qu'ils  foyent  femblablement  ex- 
hortez à  patience,  comme  fainft  Paul  en  par- 
le ici.  Or  non  feulement  (comme  nous  auons 
dit);!  s'adreflcaux  hommes,  ni.iis  les  femmes 
quant  &:  quant  ont  leur  rolle  &  leur  inftru- 
ftion,  quand  il  dit  qu'elles  doiuçnt  aufsi  bien 
auoir  ce  regard  d'eftre  fobres.  En  premier 
lieu,il  parle  des  accouftremés,&  vfed'vn  mot 
compofé,comme  s'il  difoit,  hônefteté  (acree: 
il  y  a  ainfi  de  mot  à  mot.  Et  pourquoy?  On 
voit  la  curiofité  qui  eft  aux  femmes  de  fe  pa- 
ier:&  quand  elles  viendront  en  aage.combiea 
DDd.iii. 


îSi 


SERMON    X. 


<j;ie  nanire.Sc  <jn«lque  honte  les  contraigwent 
de  prendre  accouftreinent  plus  inodefte:tant 
y  aquetoiilîours  tant  qu'il  leur  fera  pol'sible, 
elles  s'appliquent  à  curiolùé.  Pour  ceftecau- 
fçfainéi  Paul  veut  qu'il  y  ait  vne  façon  hon- 
nefte  &  mode  (le, qu'on  n'y  voye  point  de  bra 
ueté  ne  de  pompe  :  car  cela  ne  conuient  nul- 
lement à  femmes  Chreftiennes,  qu'elles  fe  pa 
rét ,  &  qu'elles  reluifent  comme  des  poupées: 
l'y  fy .car  il  faudroit  que  cela  s'en  allaft  trot- 
ter les  champs ,  Se  c'tft  vne  chofe  quieftdu 
tout  infupportable  entre  les  Chrefticns,  corn 
bien  qu'on  y  foit  trop  accouftumé .  Or  fi  les 
yicilles  femmes  ont  quelque  modeftie ,  c'eft  à 
dire  qu'elles  ne  s'amufent  plusàs'attifFer,&à 
eftre  après  leurs  parures  atîn  qu'on  les  regar- 
de.elles  tomberont  en  vn  autre  vice,  ou  extre 
mité  mauuaife,  c'eft  qu'il  y  aura  quelque  mar 
quedefuperftition:commenous  voyons  qu'il 
y  en  a  qui  voud  ront  eftre  côme  des  nonnains, 
&  auoir  ie  ne  fçay  quoy  qui  les  face  regarder 
de  loin.  Or  fi  eft-ce  qu'il  y  a  ces  eïtremitez 
•qu'elles  doiuent  euiter  ,  c  cftà  dire  qu'elles 
ne  cherchent  point  à  fe  parer,  en  forte  qu'on 
cognoifle  qu'il  n'y  a  point  de  curiofité  pour 
iemôftrer.  Et  puis, qu'elles  n'ayent  point  auf 
fi  ce  regard  de  prendre  vn  habit  qui  ne  con- 
uieneà  femme  fainfte  &  Chreftiéne.Or  il  fem 
ble  bié  de  prime  face  que  ceci  n'emporte  pas 
l>eaucoup  :  car  on  dira  quelesaccouftremens 
font  chofes  indifFerétes,  que  Dieu  laiflê  en  la 
liberté  des  hommes  &  des  femmes.  Et  pour- 
ouoy  donc  S.  Paul  inlîfte-il  là  defllis,  comme 
n  c'eftoyct  des  chofes  de  grande  importâcc? 
Voire, mais  regardons  dont  procède  cefte  fol 
le  ambition  qui  eftaux  femmes.  Il  ell  certain 
<jne  fi  elles  penfoyent  à  la  vie  celefte, elles  re 
ftraindroyent  tous  ces  excès,  &  ces  fuperflui- 
tez-la.Ceux  qui  n'ont  iamais  ouy  vn  feul  mot 
de  la  parole  de  Dieu  ,  mais,  ont  efté  poures 
Payens  &  aueugles ,  ont  bien  fceu  dire  ,  C^iie 
ccluy  qui  fe  pare  trop  en  fon  corps, laifle  fon 
Avne  fouillée.  Et  on  le  voit  aufsi  par  experien 
ce,qu'il  eft  impofsible  que  ceux  qui  font  ainfi 
Adonnez  à  ces  pompes  mondaines, &  qui  veu- 
lent eftre  regardez, &  qui  voudra.".!  eftre  pri- 
fez  en  leurs  accouftremsiis.il  eft  impofsible,di 
ie.qu'ils  penfent  .î  leurs  âmes.  Mais  il  y  a  en- 
cores  pis, que  félon  que  les  hommes  &  les  fem 
mes  feiôt  ainfi  adonnez  à  fe  plaire  en  accou- 
flremens  ,  il  eft  certain  que  leurs  âmes  feront 
fouillées  de  macules  devant  Dieu.  Et  ainfi  no 
tôsbien  que  ce  n'eft  point  fans  caufe  que  S. 
Paul  a  roulu  reformer  les  veftemens  des  fem- 
nies,&  leur  façon  de  s'accouftrer ,  &  fur  tout 
pource  qu'elles  y  ont  vn  appétit  beaucoup 
plus  CTcefsif  que  n'auront  point  les  homes. Il 
eft  vray  que  les  homes  ne  feront  que  par  trop 
desbordez  enceftendroit:maisfion  fait  com 
paraifon  d'eux  auec  les  femmes ,  on  trouuera 
que  l'excès  furmonte  de  beaucoup  aux  fi  m- 
mestque  ce  n'eft  iamais  fait  quad  elles  s'adon 
•cnt  a  feparer,à  fe  mirer,3<  à  t'atcificr,il  faut 


que  ce  foit  pour  toute  leur  vie.  Et  ainfi  no« 
fanscâufe  lainft  Paul,  quand  il  monftre  com- 
me leur  vie  doit  eftre  reiglee,corrige  notam- 
ment ce  vice.  Car  en  premier  lieu, il  deftour- 
ne  le  coeur  de  Dieu:&  puis  après,  c'eft  la  cor- 
ruption des  âmes  ,  que  cela  les  retient  telle- 
mei-.t  en  bc.aucoup  d'allechcmens  du  monde, 
qu'il  eft  impofsible  qu'elles  penfènt  au  royau 
nie  de  Dieu.  Et  toutes  ces  parures ,  &  toutes 
ces  brauetez  ,  ne  font-ce  pas  autant  demac- 
Querelages?  Il  eft  bien  certain.  Et  quand  vnc 
femme  appctera  par  trop  d'eftre  regardée, 
c'eft  vn  certain  figne  qu'elle  n'eft  pas  trop 
chafte ,  ou  bien  qu'il  y  a  vn  orgueil  fi  puanc 
que  c'eft  pitié,  ou  bien  qu'il  y  a  vn  autre  vice 
plusvilein.  Combien  que  ce  foit  leur  excufe 
commune,  qu'elles  veulent  plaire  à  leurs  ma- 
ris,fy  fy,on  cognoift  bien  où  elles  tédent.  Et 
ainfi  notons,  quand  fainft  Paul  a  parlé  de  ceft 
accouftrement  d'vne  honnefteté  iàinfte  &  fa- 
cree,  qu'il  a  corrigé(en  fomme)  deux  chofes: 
c'eft  quand  il  y  ad'vn  cofté  l'orgueil ,  &  puis 
la  diflolution. L'orgueil  fera,quâd  les  femmes 
voudront  charger  vn  eftat,  pour  dire  qu'elles 
feront  prifees  par  deflus  les  autres  .11  eft  vray 
qu'il  n'y  aura  point  de  façon  diflolue  :  mais 
cefte  hautefle  ne  laifle  pas  d'eftre  par  trop  3 
condamner.  Voila  donc  ce  quenous  auonsà 
obfcruer  pour  vn  item,  c'eil  afçauoir  qu'il 
nous  a  voulu  mener  à  la  fobrieté.Et  puis  il  y  a 
la  diflolution:  qu'on  verra  vne  braueté, quand 
les  femmes  voudront  eftre  veues ,  qu'il  y  au- 
ra tant  de  defguifemens  que  ce  fera  pour  fai- 
re honte  à  ceux  qui  voudroyent  que  les  cho- 
fes fuflent  bien  reiglees.  Quand  donc  lainft 
Paul  veut  ici  qu'elles  foyent  accouftrees  en 
telle  honnefteté, qu'elles  fe  môftrent  femmes 
faîdes  en  toute  leur  parure,'d'vn  cofté  il  veut 
que  les  accouftremcns  feruent  pluftoft  à  l'vfa 
ge  qu'.i  pompes ,  8c  qu'on  ne  regarde  point  de 
fe  faire  valoir, ou  d'eftre  eftimees:comme  il  y 
en  a  beaucoup  qui  auront  cela  ,  &  on  le  voit, 
que  les  femmes  aimeront  quelque  fois  mieux 
mourir  de  faim  ,  que  de  diminuer  leur  eftat: 
elles  voudront  mcfmes  en  defpit  de  Dieu  8e 
de  nature,  eftre  braues,  afin  qu'on  penfe,  Ho, 
voila  vne  bone  bourgeoife,elle  a  bié  dcquoy: 
&  cependant  les  poures  femmes  n'auront  pas 
de  quoy  fe  difner.  Brief,encores  que  Dieu  fa 
cèdes  reformations  à  grans  coups  quand  fa 
parole  n'y  profite  rie,  fi  voit-on  qu'il  ne  peut 
abbatre  l'orgueil  de  ceux  qui  font  deiîa  com- 
me abyfmez  de  poureté  &  mifere,  qu'on  voit 
qu'il  permet  que  les  poux  mangent  ceux  qui 
voudrôt  encores  s'cieuer  en  orgueil  Se  en  fier 
té  ,  Se  aufquels  il  y  a  vnediflolution  defefpe- 
ree  contre  Dieu  &  contre  nature:on  verra  ce 
la.  Et  ainfi,d'aut.ît  que  le  fainft  Efprit  a  pour 
ueu  à  cet  chofes,  comme  il  cognoift  nosra^la- 
dies,  fçachôs  que  iufques  à  tant  qu'vn  chacun 
puifle  fouffrir  d'eftre  medecinc.voirc  félon  le 
bcfoin  qu'il  en  a,  &  l'ordônance  qui  en  eft  ici 
donnée ,  c'eft  vn  figne  qu'il  y  a  de  l'orgueil 

4c  de 


i 


SVR   L' EPIS  T.    A   TITE. 


S?' 3 


tcie  lï  prefomptton  en  luy.Touiesfois  fî  nous 
refîftons  à  Dieu, il  faudra  <|u'il  heiine  fi  dure- 
ment contre  nous,  qu'en  la  fin  il  faudra  que 
nous  plions  maugré  nosdents.Etainii  notons 
que  noftre  Seigneur  nous  veut  ici  purger  corn 
me  d'vne  fieure.  Quand  on  ne  voudra  point 
traitter  vn  malade  rudement,  on  luy  baillera 
fa  règle ,  afin  qu'il  s'abftiene  de  ce  qui  luy  ert 
inauuais:ainli  fainft  Paul  nionftre  que  les  fem- 
mes Chrelliennes  doyuent  eftre  modelles  (cô 
me  aufsiilen  traitteàTimothee  )  &  qu'elles 
doyuent  auoir  vne  telle  règle  ,  qu'elles  ne  fe 
dcsbordcnt  point  en  accouftremens,ni  en  quel 
que  «hofe  que  ce  foit .  Il  faut  aufsi  que  nous 
tous  en  gênerai  fouffrions  d'eftre  tellement 
gouuernez,  qu'vn  chacun  en  fon  endroit  pen- 
fe  de  fe  remettre  à  Dieu,&  que  quand  nous  au- 
f  ons  cfcouté  comment  c''eit  qu'vn  chacun  fe 


doit  conduire, que  nous  ne  foyons  point  reuef 
ches,  mais  que  nous  plrons  le  col  fous  le  ioug 
de  Dieu,afin  que  nous  le  portiôs  quand  il  nous 
fera  impofé  pour  noftre  bien  8c  falut. 

O  R  nous-nous  profternerons  deiiant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieuic 
fentir  que  nousn'auons  point  fait  parcide- 
uant ,  voire  tellement  qu'eftans  confus  ea 
nous,  Se  nous  defplaifans  en  nos  vices  ,  nous  te 
prions  qu'il  luy  plaife  de  reformer  tellement 
noftre  vie,  que  nous  ne  demandions  finon  de 
luy  complaire  en  tout  &  par  tout,  fuyure  fes 
fainâs  cômandemens,&  nous  exercer  aux  ex- 
hortations qui  nous  font  faites ,  afin  de  nous 
picquer&  aiguillonner  d'auantage.Ainfi  nous 
dironj  tout,  Dieu  tout-puiflant,  Père  cel(ile. 
Sec. 


SECOND     SERMON      SVR     LE     SE- 

COND    CHAPITRE. 

3  Pareillement  que  les  femmes  anciennes  foyenten  contenance 
JàinSle  (^  conucnahle ,  non  mcfdifantcs ,  nonadomtecs  à  beaucoup  de 
yiniCnJcignantes  ce  qui  ejl  bon: 

4  Afin  quelles  injlruifent  en  prudence  les  ieune  s  femmes  a  aimer 
leurs  maris yà  aimer  leurs  enfans, 

ç  A  ejlre prudentes,  chafies,  gardantes  la  mdifon,  bonnes,  fuiet- 
tes  à  leurs  maris,  afin  que  la  parole  de  Dieu  ne  foit  blafnee. 


o  V  s  auons  veu  ce  matin 
[  pourquoy  fainift  Paul  com- 
mande aux  femmes  aagees 
de  s'accouftrer  honnefte- 
raent  auec  toute  fainfteté, 
afin  qu'il  n'y  ait  nulle  pre- 
^  fomption.ne  rien  d'afFtÛé: 

mais  qu  elles  aycnt  vn  maintien  qui  puifle  edi 
fier,&  donner  bon  exéple  à  tout  le  monde. Or 
après  auoir  dit  cela,  il  adioufte  quant  &  quant, 
Çlu  elles  ne Çoyent  f oint  mefdifantes  .Ciï  nous 
auôs  défia  dit  que  fainû  Paul  a  regardé  de  cor 
riger  les  vices  aufquels  &  les  homes  &  les  fem 
mes  font  cncTins ,  &  qu'il  a  aduerti  chacun  en 
fon  endroit  de  fe  donner  garde  :  comme  nouj 
fçauons  qu'vn  médecin  doit  auoircognu  la  cô 
pleiion  d'vn  malade.s'il  le  veut  guarir,&  l'ad 
uertir  des  chofej  qui  luy  font  vtiles .  Mainte- 
nant regardons  s'il  n'eltoit  pas  expédient  de 
exhorter  le  vefues  à  tenir  leurs  langues  en  bri 
^e,&  les  femmes  aagees.  Car  nous  fçauons  c5 
•  jne  elles  font  addonnees  à  caqueter  beaucoup: 
ce  leur  eft  vn  vice  tant  commun  que  rien  plus; 
fcpleuft  â  Dieu  qu'on  s'en  peuft  taire  .Mais 
d'autant  que  la  maladie  a  Tn  tel  cours  .voila 
pourquoy  fainft  Paul  notamment  dit  que  les 
teraojcj.&fur  tout  cellcj  ^ui  font  délia  en  aa- 


ge,  &  qui  doyuent  auoir  plus  de  prudence ,  fe 
doyuent  garder  d'eftre  langagières,  ni  mcfdi- 
{àntes.  Car  on  fçait(5:rexpeiiécele  môftre) 
que  ce  font  comme  des  fllbeaux  pour  mettre 
le  feu  par  tout  que  les  mauuaifes  ]âgues:&  fiir 
tout  vne  fcmme,c5me  elle  aura  accès  plus  fa- 
milier, pourra  beaucoup  plus  nuire.  Ainfi  puis 
que  le  faintl  Efprit  a  voulu  ici  approprier  la 
doûrine  félon  qu'il  cognoifloit  eftrevtile.que 
les  femmes  péfent  de  fe  retenir,  &  fur  tout  de 
s'abftenirde  mefdifance:car  ce  feroit  corne  rc 
fifter  à  l'Efprit  de  Dieu,  fi  elles  fe  donnent  li- 
céce  de  parler,  &  fur  tout  d'v  fer  de  murmures 
&  detraftions,  tellement  que  les  noifes  s'allu- 
ment par  leur  malice. Il  y  a  d'auâtage,(T»'»/fcf 
ne  foytnt  point  addonnees  a»  yin  .  Car  c'cft  vne 
chofe  trop  vileinc,  fi  vne  femme  ellyurôgnef 
fe.Il  eft  vray  que  fi  les  hommes  font  entachez 
d'vn  tel  vice,ils  méritent  bien  d'eftre  dettfta- 
bles.Carqu'eft-ce  q  l'yurongnerie, finon  vne 
brutalité  q  eft  pour  effacer  toute  raifon  ôi  in- 
telligence en  ceux  qui  font  créez  à  l'image  de 
DieufCarnous  fçauons  qu'en  vn  home  yure  il 
n'y  a  plus  ni  hôneftcté.ni  difcretion.non  plus 
qu'en  vn  afoe  ou  en  vn  cheual,&  encorcs  il  eft 
beaucoup  pire.  Car  les  beftes  retienét  cncores 
leur  naturehmais  vr  home  eft  tout  desfiguré, 
DDd.iiii. 


5H 


s  E  R  M  O  N    X. 


c'eft  vnmoiiflre  .  Et  ainlî  l'ytirongnerie  tant 
aux  Lonimes  qu'aux  feHimes  eft  vue  chofe  vi- 
leine.que  nouî  deuonsdeteiler:mais  que  fera- 
ced'vne  femme  yurongnefle  ?  Et  neantuioias 
encores  c'efl  vn  mal  trop  commun, comme  on 
le  voit  en  beaucoup. D'autant  plus  donc  faut- 
il  que  celle  leçon  loit  notée .  Et  (i  les  Payens 
ont  cognu  que  c'eftoit  vne  chofe  infupporta- 
ble  que  les  femmes  fiiffcnt  addonnees  au  vin, 
&  leur  ont  défendu  cela  corne  vne  chofe  con- 
tre nature, que  l'era-ce  li  nous  auons  la  parole 
de  Dieu  qui  nous  guide  ,  &  qui  nous  cfclaire? 
Ne  deuons-nqus  pomtauoir  plus  de  fobrieté 
que  n'ont  point  eu  ces  poures  aueugles-la.qui 
neantmoins  ont  bien  apperceu  que  ii  les  fem- 
mes eftoyent  enclines  à  yurongnerie, qu'il  fa- 
loit  que  tout  full  desbordé  ,  Se  qu'il  n'y  eiift 
plus  ne  vergongne, ne  modeftie aucune?  Voila 
donc  quant  au  tccond.Or  fainft  Paul  adioulle, 
Qj£elUs  foyent  mai jirejj'es  a»biin:côme  s'ildi- 
foit  que  les  femmes  volontiers  défirent  d'e- 
ftre  cfcoutees.  Et  de  faid,  on  verra  d'aucunes 
femmes  qui  appctent  plus  qu'on  les  efcoute,& 
qu'on  les  ait  en  réputation ,  que  les  hommes. 
Orpourceque  laùiperiorité  ert  donnée  aux 
homes, ils  fe  tienent  en  leur  degré:mais  pour- 
ce  que  les  femmes  ne  peuuét  paruenir  là, quel- 
que fois  il  y  a  plus  d'ambition  &:de  hautcfle 
qu'il  n'y  a  point  aux  homes. Or  ie  ne  di  point 
que  cela  fe  trouue  par  tout,  aufsi  ce  feroit  pi- 
tié:mais  quand  nous  regarderons  de  près,  on 
verra  bien  qu'il  y  a  des  femmes  beaucoup  plus 
hautaines  que  les  hommes,  &  qui  font  plus  frc 
tillantes'  pour  auoir  quelque  principauté  & 
niaiftrife,&  qu'on  les  ellime  bien  fages,  qu'on 
prife  ce  qu'elles  diront, qu'elles  foyentadmi- 
fcs  en  côieil  pour  délibérer  &dire  leuraduis. 
Voila  donc  vn  vice  qui  eft  maouais  .Or  fainft 
Paul  les  ramené  à  vne  vertu  oppofite  :  c'eft 
qu'elles  s'appliquent  à  enfeigner  ce  qui  eft 
bon.  Au  lieu  donc  qus  les  femmes  appetet  ain- 
£  de  fe  faire  valoir,  qu'elles  regardent  quand 
elles  feront  auec  les  ieunes  de  kur  chanter 
leurleçon,  de  les  exhorter  àbien  faire.  Voila 
(dit  fainû  P3ul)la  vrayemaiftrifedôt  les  fem 
»es  fe  doyuent  contéter.Or  ce  n'eft  pas  pour 
nourrir  cefte  hautefTe  ,  &  ce  fol  appétit  de  fe 
monftter,  n»ais  c'eft  comme  s'il  difoit,  Voici, 
TOUS  demandez  d'auoir  bruit  &  réputation:  or 
il  faut  que  tout  cela  fcit  abbatu  .  Mais  cepen- 
dant fi  le  Seigneur  vous  a  fait  grâce  d'auoir 
plus  cognu  que  les  ieunes  pour  i'aage  que  vo' 
aue2vefcu,aduifezde  vous  employer  àmon- 
ftrer  le  chemin  de  falutà  celles  qui  ne  font 
point  cncorcs  fi  bien  duites  comme  vous ,  & 
qu'elles  foycnt  apprinfes  par  voftre  exemple. 
Or  notamment  il  dit,  A  fniju,' elles  attirent  lei 
ieunes  à  aitrempamt .  Ce  n'ell  point  pour  les 
faire^des  babillardcs,  pour  les  faire  des  affet- 
tees.ikpour  apprendre  des  contenances  ie  ne 
fçay  quelles, ou  bien  qu'elles  puiflent  plaifan- 
tcr.brocarder  l'vn, larder  l'autre. Car  voila  les 
lejoas  communes  qu'on appréJia  aux  ieunes 


filles,  qu'elles  fçachent  bien  rcrpondre  à  tous 
venans.qu'ellesloycntl.icôme  fi  on  leurbaii- 
loitla  lance  au  poing.X;  qu'on  les  meiftenla 
lice.  Voila  comme  le  monde  fe  gouuerne  au- 
iourd'huy  .Or au  contraire, faintl  Paul  veut 
que  les  teinmes  enfeignent  les  ieunes  à  mode- 
llie.Voila(dit-il)toutela  fagefle  que  vous  ap- 
prendrez, ce  fera  que  vous  les  teniez  quoyes, 
qu'il  n'y  ait  point  de  fard  pour  fe  defguifer  en 
vne  forte  &  en  l'autre,  qu'il  n'y  ait  point  de 
trop  grande  fubtilité  pour  fçauoir  bien  babil-. 
ler,mais  qu'elles  cheminent^finiplemét,  &  que 
elles  femaintienent  en  telle  forte  qu'on  co- 
gnoifle  qu'elles  n'ont  point  efté  en  vne  efcho 
le  de  finefleS: de  malice.  Or  ici  nous  "voyons 
quelle  eft  la  vray  e  prudence  des  femmes  fidè- 
les,&  des  filles:ce  n'eft  pas  d'eftre  des  courti- 
fannes  &  des  alfettees,tellemét  qu'on  s'en  ef- 
bahillè  quand  on  les  verra  ainfi  promptes  à 
caufer,  &  à  babiller,  &  auoir  vn  bec  affilé,  les 
veoir  efticmigardes  ,&iene  fçay  comment: 
mais  c'eft  quand  elles  fçauront  cneminer  ea 
attrempâce,gouuerner  leur  mefnage  paifible- 
ment, nourrir  leurs  enfans,  &  eftre  fuiettes  & 
obeiflàntesà  leurs  maris.  Voila  les  femmes 
qui  feront  cftimees  bien  fages  félon  Dieu,  le 
fainftEfprit  en  prononce  la  fentence. Cepen- 
dant celles  qui  défirent  qu'on  les  ait  en  admt 
ration,qu'ôdife,  Voila  vne  femme  qui  eft  bien 
fage:  &  cependant  il  n'y  aura  qu'vne  belle  m» 
ftre.iln'y  aura  que  vanité  •  que  celles-là, di- 
ie,  s'en  aillent  cercherieur  los  ailleurs,  carie 
fainft  Efprit  les  condamne ,  quand  il  monftre 
que  nulle  doûrine  ne  fera  propre  aux  femmes 
linon  pour  les  attremper  ,  &  les  tenir  quoyc» 
&paifibles ,  afin  qu'on  n'en  parle  point  par 
malice. Or  fainû  Paniquant  &  quant  pourfuit 
les  vertus  qui  doyuent  eftre  aux  femmes  défia 
m^eei-.c'ch  i(aiuo\r ,ÇU^tUts  aiment  leurs  ma-' 
ris  ijit'elUs  aimtnt  leurs  en  fans, &  qu'elles  Joyst 
gardiennes  de  leur  mai fon,  C  (pt'Ues  foyent  faf 
fihlesauec  leurs  maris.Q^nà  il  dit  qu'elles  ai- 
ment leurs  maris  &  leurs  enfans.il  femble  bien 
qu'il  parle  ici  d'vne  chofe  qui  ne  conuient  pas 
à  la  doûrine  de  Dieu.Car  les  femmes  n'aimêt 
elles  point  leurs  maris?Mais  notons  que  faindt 
Paula  parlé  d'vne  amour  réglée  félon  DieuâC 
&  fa  Parole.  Car  combien  que  ce  foit  vne  cho 
fe  louable  que  les  femmes  aiment  leurs  maris, 
&  les  maris  leurs  femmes,  tant  y  a. qu'ici  nous 
ajperceucrons  la  corruption  de  noftre  natu- 
re, autant  qu'en  nulle  autre  chofe  .  Car  fi  les 
maris  aiment  leurs  femmes,  ce  fera  d\ne  fol- 
le amour  &  excefsiue,&  n'y  aura  point  cepen- 
dant de  règle, ne  de  modcftie.  Si  les  femmes  at 
ment  leurs  maris,  ce  fera  d'vne  affcûion  def- 
bordee  :  &  puis  fouuent  la  ialoufie  fe  méfiera 
parmi. Cependant  qu'il  y  ait  vne  reuerence  tel 
le,  que  les  femmes  fe  tienent  en  bonne  amitié 
auec  leurs  maris ,  cela  eft  bien  rare  :  voire  ,  ft 
encores  qu'il  y  ait  du  vice  ,  qu'elles  les  fça- 
chent fupporter,  d'autant  qu'il  y  a  vn  lien  fa- 
.cré  &  inuiplable,puis  que  Dieu  les  a  c5ioint% 

qu'il 


s  V  R    L"  E  PIST.     A    T  ITE 


î^f 


qti'iJ  fatit  Qu'v'n  cîiaciiii  s'acqcittc  fideJcnient     brieté  en  toute  leur  vie  .  Ceci  dont  ne  fe  rap- 
de  Ton  dcuoir.-qu'on  aic,cli-ie,  ce  regard-ia,  il     porte  point  feulement  au  vin  ni  auinangcrr 
s'en  faut  beaucoup  :  pour  Jemoins  c\ft  vne     mais  il  le  rapporte  à  vneattrempnnce  ,  qui  fe 
chofe  qui  fc'voitbien  peu  ibuuent.côme  jious     nommera>auAi  fobrieté,  quand  les  fiMiihies  ne 
auons  dit .  Ainfi  notons  que  faintt  Paul  n'a     lafchernnt  point  la  bride  à  leurs  folles  &mef 
point  ici  voiiluexhorter  les  femmes  d'aimer    chantes  cupiditez.  £t  ci  delTus  en  parlant  des 
leurs  maris  ie  nef  çay  comment  ielonlemon     hommes, il  en  Jifoit  autant:il  réitérera  cnco- 
de.iSr  félon  la  chair  :  mars  il  a  voulu  monllrer     res  ci  après  cela  mefme  en  parlant  des  ieunes 
qu'il  y  doit  auoir  vne  aifeftion  ûin<fle,  telle-    gens.  Mais  la  vertu  principale  qu'il  demande 
ment  que  les  femmes  fe  Aibmettent  iimplemét    aux  femmes,  c'eft  d'eftre  chartes.  Côbien  que 
à  leurs  maris .  Carfi  vne  femme  mefpnfe  fon     ce  mot  s'eftend  plus  loin:  carilfignifie  toute 
mari, où  eft  l'amour  ?  Mefmes  entre  les  petis     pureté  .  Et  de  fait  ce  n'eft  point  alTetz  qu'vne 
où  il  n'y  a  nulle  fuperlorité  ,  encores  faut-il    femme  ne  s'abandonne  point  .mais  il'faut  que 
on'vne  vraye  amour  porte  aucc  foy  vne  reue-     elle  foit  pure  &  honnefte.  Car  fi  elle  fe  farde, 
rence&vnecointe  .  lenc  pourray  pas  aimer     &  qu'elle  attire  les  gens  après  fa  queue, cnco- 
iînon  que  i'honoreccluy  quei'aime.  Que  fe-    res  qu'il  n'y  ait  point  de  paillardife,  fi  eft-ee 
ra-ce  donc  d'vne  femme  quand  Dieu  l'a  aflu-     que  défia  voila  vne  fouillure  qui  eft  pour  dif- 
iettie  à  fon  mari  ?  Car  on  voit  que  les  femmes     famer  vne  femme. Notes  bien  donc  que  fainft 
qui  font  folles  de  leurs  maris, leur  defobeilTét     Paul  ne  veut  pas  feulement  que  les  femmes 
à  tous  propos,qu'ellesleur  tirentla  l.îgue,que     foyent  chartes,  gardas  la  foy  &  loyauté  qu'cl 
ils  ne  font  non  plus  obéis  en  leur  maifon,  que     les  ont  promife  à  leurs  maris.-  mais  il  veut  que 
ie  plus'  eftrange  ou  incognu .  Et  puis  elles  le    elles  fc  tienent  en  fobrieté,&  qu'elles  chemi- 
courroucent  lifonuentque  c'eft  pitié,  on  ne    nent  en  telle  hônefteté,  qu'elles  monftrent  en 
pourra  arracher  nul  feruice  d'elles  :  car  elles     toutes  leurs  fa çôs  de  viure,en  toutes  leurs  pa 
trottent  decofté  5;  d'autre, &  laiflerôt  1.^  leurs     rôles  &  contenances ,  qu'elles  font  chartes  Se 
enfans  &  leur  mcfnage  :  au  lieu  qu'elles  de-     modeftes.Si  cela  eftoit,  nous  aurions  bien  à 
uroyéteftre  retenuesauec  leurs  maris  enbon     louer  Dieu. Mais  côbien  s'en  faut-il  que  cel- 
nevnion.elles  vagueront  &cxtrauagueront  le     les  qui  fe  renomment  eftre  femmes  Chrcftica 
nefçay  comment. Nous  voyons  donc  mainte-     nes.ayent  vne  vieainfi  réglée,  comme  S.Paul 
nantquece  n'eft  point  fans  caule  que  fainft    monftre  qu'elles  doyuétaiioir  ?  D'autant  plus 
Paulaainfi  parléde  l'amour  des  femmes  en-    donc  nous  faut-il  gemir>voy3s  les  vices  &  cor' 
uers- leurs  maris .  Et  puis  iladioufte  quant  &     ruptions  qui  font  en  nous.Etcepédantquclcs 
quanft  leurs  enfans. Car  fi  les  femmes  auoyent    femmes  regardent  de  mieux  profiter  en  l'E- 
appliqué  leur  courage  &  leur  affeftion  à  delà,     uangilc  qu'elles  n'ont  point  fait:  &  que  celles 
il  eft  certain  qu'elles  (eroyét  retenues  de  beau    à  qui  Dieu  aura  fait  la  grâce  de  prattiquer  ce- 
coup  de  vices .  Qm  elt  c.uile  que  les  femmes     fte  doctrine, mettet  peine  d'attirer  les  autresj 
ne  fe  peuuent  tenirpaifibles  en  leurmefnage,    afin  qu'elles  foyent  bonnes maiftreflès:  &  que 
qu'elles  ne  pcuuét  feruir  leurs  maris,  qu'elles    les  leunes  à  leur  exemple  s'efforcent  de  profî- 
ne  fe  peuuent  addonner  à  bien  ,  qu'elles  font    ter  tant  mieux. Voila  ce  que  nous  auons  à  rete 
pleines  de  vanité,  &  puis  qu'elles  courent  çà    nh.OrilAdioaûcQit'eUesfiyint^Hfsigartdrtr 
Se  là,&  qu'elles  font  fi  légères  à  rcceuoir  tout     nés  de  leur  maifm,tjH\lUs  foyentdthomiaires^u'- 
ce  qui  leur  eft  mis  en  auac:  qui  eftcaiife  de  ce-     fuj-rttes  a  leHrymorls  .  Quand  il  dit  qu'elle? 
la,  finon  qu'elles  ne  regardent  point  àquoy-  foyent  gardiennes  de  leur  maifon, on  voit  que- 
Dieu  les  appelle, &  quand  il  les  a  mifcs  m  ma-     cVft  vne  vertu  qui  dairoit  eftre  affez  rtcom- 
riage, que  c'eft  côme  leur  donnant  vnonibra-     mandée  aux  femmes, fans  qu'on  les  en  exhor— 
ge.pourdire  qu'elles  fe  reticnent  là  :&  puis     taft.Car  nature  le m5ftre:&  mefmes  les  Payés 
quand  elles  ont  des  enfans,  qu'elles  ay  ent  le     ont  bien  fceu  déclarer  cela,  iufques  à  en  faire- 
foin  de  lès  nourrir  &'  garder, &  les  iiiftruirè  en     vne  leçon  grofsiere  en  peinture, (c5me  on  fê- 
ta crainte  de  Dirn  quand  ils  font  venus  en  aa-     roitle  Kalendrier  des  bergers)  qu'ils  ontac- 
ge?  Si  l'e^  femmes  pouuoyerit  penfer  à  cela  ,  il    coparé  vne  femme  à  vne  tortue  qui  porte  touf 
eft  certain-' qti'bévèfroit  bienvne  autre  ê6cor    iouri  fa  coquille  auee  foy.  Ainfi  les  femmes  ne 
de  er>feiiii.fcbiip'de  mefn*ges  qu'on 'he  fait    dwyuehépointappeter  de  trotter  çà&  là.  Et 
point  :£'tâiiîH  n'cftimbns  pasq\i«?fa-inftP.i'iil"    pourquoyîQuand  elles  auront  affeftion  de  fe 
ait  ici^rlé.d'vne  choie  fupeifluc, quand  il  c5     employer  côme  Dieu  le  comma'.ide.'il  eft  cer- 
ixu.de  aux  felhmcs  d'aimer  leurs  maris, &  leurs'    tain  qu'elles  trouueront  toufioUrs  à  quoy  s'oc 
enfans. Et  puis  fur  celailrrtet  Vne  vertu  qiiieft    cuper.Car  quand  elles  auront  vn  petit  niefna- 
affeï  coniomte,  &  cCtnrae'^n'fcpàrStrlK  c''eft'à    g-é-'  à  goimerner, encores  troiuierôt-cllcs  aflez 
fçanoir,  cjWeltéi  foytnt  jehret'-.Tk^'tiytJHWle*    de TjeVorgrie.movc^inint  qu'elles  ne  vucillent 
firent  chaprs:  car  iPaiioit  aliparafcarièdit,qu'él-    poifr'teftre  oifiù^v.Q^âd  elles  alrfont  vn  grai 
lès  ne  foyem-potiit  a(ld<*nnées-ati  Wn.Par  là  il    mfeTnage,  tant  pliis«ran'd'  peine  faut-il  qu'el- 
cbndamnoitl'yurongneriè  Se  l'ihtrttipéiance:    les  y'mettentifi  elle,  veulent  faire  leur  deuoif 
mais  il  requiert  ici  encbpés  plus  jffrft  queles    comme  il  appartient.Maisc'tft  pitié  que  ceci, 
feminas  foyent  attrempees, qu'il  y  ait  Viffe  fo-    eft  fi  mai^obferuéauiourd'huy.Carr.-uiibition' 

Eut.i. 


^86 


-S  E  R  MON     XI. 


&laciiriolîté, &4ehc  fçiiyi|uelvaintabil,  cft 
c.iufc  lie  ch.iirL'c  les  t'cmmes  hors  de  leur  ni.ii- 
roii,&  l:s  t.ure  cracaiTer  ci  Se  là;  &  cependant 
on  voit  mille  maux  qui  procèdent  de  cefte  in- 
(^uietude.Nousauons  veu  par  ci  deuanr, quand 
I  Tim.f.  ft'"^  P-*"'  patloit  des  h.miiie'; ,  qu'il  enlei- 
lî.  gnoit  q  fi  elles  eftoyent  oifiucs, elles  feroyent 

cariçules,&  puis  qu?elles  s'adonneroyeiu  à  e- 
Are  babillardesjà  s'enquérir  de  ceci  &  de  cela 
pour  le  rapporter:  &  par  cela  il  monftroit  que 
iî  les  femmes  ne  mettoyent  la  main  àlapalte 
(cônieon  dit)  quel'oiliuetéles  inciteroit  àe- 
^trecurieules,  qu'elles  le  voudroyent  méfier 
de  tout:&  puis'qu'ayâs  les  aurcillcs  batuesde 
toutes  nouuelles, elles  en  parleroyent.  Car  ce 
cil  vn  tonneau  qui  cft  percé  de  tous  coftez  •  &: 
quand  il  y  a  du  vent  beaucoup  ,  il  faut  qu'il  le 
delcharge:  que  fi  les  femmes  l"^auent  vn  mot, 
elles  en  diront  quatre:  que  (era-ce  donc  quad 
elles  auront  cueilli  toutes  les  nouuelles  d'vne 
ville  ?  Sera-il  polsible  qu'elles  le  puilTent  te- 
uir  d'en  caquetter  ;  Nenni;  elles  creueroyent 
plulèoft.  Et  puis  quâd  elles  fe desbordent  ainfi 
à  babiller,  il  n'y  a  nulle  mefure  ,  Voila  pour- 
quoy  elles  deuroyct  eftre  tant  plus  attentiues 
à  ceitedoLlrine.Car  on  verra  (corne  i'ay  défia 
touché)qu'vn  tel  babil  allume  des  feuï  infinis, 
&  des  difcors  qui  feront  par  les  maifons ,  tant 
d'enuies.tant  de  rancunes:&  puis  cela  s'elpa  nd 
iufquesaux  voifîns,  tellement  que  voila  qui  eft 
caufe  de  beaucoup  de  noifes  &  débats,  qui  ti- 
rent après  eux  vne  mauuaifequeue.Puisau'ain 
fi  eft,  qifvne  femme  croyc  qu'elle  aura  beau- 
coup profité  en  l'Euangile, quand  elle  fe  pour 
ra  occuper  paifiblemét  en  fon  mefnage,  &  que 
elle  gardera  fongneufement  fa  maifon.Or  ce- 
ci n'eft  pas  pour  exempter  les  femmes  qu'el- 
les ne  ferucnt  i  leurs  voifins,  &  à  ceux  qui  ont 
necefsitéde  leur  fecours  .Carfï  vnefémedit, 
I'ay  aflez  à  faire  en  ma  maifon,ie  n'ay  que  fai 
vedeme  méfier  des  autres  :  où  feralacnanté 
que  nous  deuonsauoir  à  nos  prochains?  Mais 
quand  fainû  Paul,  dit  que  les  femmes  doyuent 
eftre  gardiennes  de  leur  mailbn,  c'eft  pour  les 
tenir  comme  enferrées, qu'elles  n'ayent  point 
vn  pied  leué  à  tous  propos  pour  fçauoir  des 
nouuelles,  pour  trotter  çà  &  là ,  &  pour  met- 
tie  les  gens  en  noife  &  en  difcord .  Afin  donc 
de  reprimer  toutes  ces  curiofitez  qui  ne  font; 
que  par  trop  communes ,  il  veut  que  les  fem-, 
mes  s'occupent  àgarder  leurs  maifons.Au  rc-t 
fte,  il  commande  aulsi ,  Qjt'elles  foyent  ^  d*r, 
bmnarres,  Cr  fitiettes  ^  Uurs  maris  .  Or  notam- 
ment il  dit  qu'elles  foyent  débonnaires .  Car 
autrement  où  fera  l'amour  qu'elles  doyuent  à 
leurs  maris  ?  comment  les  pouna-on  tenir  en 
fuiettion  Bc  obeilTancc  ?  Si  vne  femmecft  re- 
ueûhe,  &  qu'elle  ait  vne  tefte  enragée,  çotn,^, 
ment  fon  mari  en  pourrariicheuir?  Ainfi.dÔc^ 
fi  vne  femme  fe  veut  alTuiettir  à  ce  que  l'ordre, 
de  nature  monftre  qui  fe  doit  faire,  &  àçe  quq 
Dieu  aufsi  commande,  il  faut  qu'en  prenjier 
lieu  elle  vicncà  celte  raifon,  de  dontcr;  fes 


mefchantes  cupiditez  ..qu'elles  n'apportent 
point  vne  dure  tefte  pour  s'opiniartrer  à  l'en  - 
contre  de  ce  que  Dieu  ordonne  :  il  faut  que 
tout  cela  toit  mis  bas,  qu'iln'y  ait. nulle  fier-i 
té,  nulle  arrogance  qui  l'empefche  de  faire  le. 
deuoir  qu'elle  a  à  Dieu,&  à  fon  mari:c'eft  cefb 
elprit  débonnaire  dont  parle  ici  faincl  Paul. 
Et  puis  il  y  a  la  fuiettion  qui  viendra  après.  II. 
auoit  parlé  de  l'amour  que  doyuent  les  fem-» 
mes  à  leurs  maris:  maintenant  il  adioufte  aufst- 
la  fuiettion  :carcombien  que  les  femmes  ne 
puilient  aimer  leurs  maris ,  finon  en  leur  pox* 
tant  rcuereucc.encoresy  a-il  plus,  c'eft  qu'il 
faut  qu'elles  ne  foyent  point  trop  fagespdqr 
vouloir  dominer ,  mais  qu'elles, cognoiHcnt 
que  leurs  maris  ont  efté  loftituez  pour  leur 
chef,  &  qu'il  ne  faut  point;qu'eUes  gouucr- 
nent.Si  les  hommes  s'eftoyent  ingérez  d'eui- 
mefmes  pour  vfurpervne  telle  authorjtéioa' 
diroit  qu'Usauroyent  procuré  leuraduanta- 
gc:  mais  quand  Dieu  l' ordonne,  &  que  nature 
mefme  le  monftre.que  faut-il  batailler  là  dcf- 
fus  ?  Or  cependant  c'eft  vne  choie  difhcilei 
comme  on  le  voit ,  &  fur  tout  la  prattique  le: 
monftre  .  Ainfi ,  que  les  femmes  ne  tourmen-i 
tent  point  leurs  maris  en  vain,  mais  qu'elles 
monftrent  qu'elles  ont  profité  en  l'Euangile 
en  ceft  endroit:c'eft  à  dire, en  fe  rendant  pai- 
fîbles,  &  amiables,  &  eftans  fuiettes  comme  le 
Seigneur  l'a  commandé.  Car  fi  vne  femn^eeft 
reuerche,&  qu'elleait  mauuaife  tefte,&  ccpeit 
dant   qu'elle  vueille   auoir   l'empire  deuers 
foy  ,&.  qu'on  ne  la  puifTc  gouuerner  paifibte- 
njent,niais  qu'elle  vueille  toufiours  marcher 
deuant ,  toutes  fes  vertus  feront  tournées  en 
vice.  Car  noftre  Seigneur  condamne  cela  com 
me  piiantife.Queles  femmes  donc  apprenent 
qu'elles  nepourront  plaire  à  Dieu, &  que  tou- 
te'leurviene  luy  fera  point  agréable  ,  finon 
qu'elles  fe  foyent  rangées  premièrement  à  ce 
fte  fuiettion  dont  parle  ici  faind  Paul .  Or  il 
eft  vray  qu'en  ce  paflage  il  ne  traitte  point  de. 
l'office  des  maris  :  mais   quand  nous  aurons 
cognu  fon  intention, ce  n'cft  pas  qu'il  ait  vou- 
lu exempter  les  hommes  pour  ne  rendre  nul 
deuoir  à  leurs  femmes ,  comme  s'ils  auoyent; 
vne  domination  fans  bride  ,  ne  fans  mefure:. 
fainél  Paul  ne  l'a  pas  ainfi  entendu,  comme  onj 
le  voit  par  les  autres  paflàges .  Mais,  ppurce 
qu'il  n'eftpit  point  qucftio»  de  faife  vn  de-, 
nombtementde  tous  offices  parçiçuhejf,  il  fe, 
eft  coptenté  démettre  en  ananf^c^  e?«rapJcs. 
qui  font  ici  contenus.  Or  de  l.\  clif^cuçi  peut  re- 
cueillir  quel  eft  fon  deuoir .  Carjipxesjiju'il  a 
commandé  aux  femmes  d'iftre  paifibles  ,  il 
fautqu(;.lesmfiispenfcnt,  Or  ça, Dieu  nous  a. 
honorez  çjB.p.^lS:icqn(l}tiiant  chefs  fur  pos, 
£èmine«.Mâis  .quijv  ?  Eft.-c^ppur  exercer  ty- 
rannie îeft-ce  pouj  lcur,tcnyle  ficd  fur^ 
gorge?  ((;p.m|>>ç  oa<iit)î^"î"^iV|Car  Allcs-foiif 
cependant  ,noç.co»iipagne_SvUn'e|l.p3vditj<)uç 
\qt  icmHiefoi^.Tn  çfclaiie,  miii,i.^l  cft  dit  ii^.t 
taminent  qu'elle  eft  compagne, 4e  la  vie.du 

mari. 


s  V  R  l'.BPl  ST.    A    T  IT  E. 


5S7 


^^ri,  itf/l<lil  quelle  e/t  comtjievnc  portfon 
defoncorps,&  ^e/a  perfonne.  £t  pmsvd'au- 
tanc  quç  jpieuaaiiilî  honoré  les  maris  ,  c'eft 
double  ingratitude  pour  eux,finon  qu'ils  fça- 
chcnt  fc^uuerneihuBiaiiumcnt  auec  leurs 
femmes,  teUeinentquMs  les  hipportent  comb- 
ine vailTeaux  fragiles,  ainfî  que  fainft  Pierre 
'  en  parle.  £t  puis  qu'il  y  aie  vne  arnitic  i'ainfte 
qui  les  conioigne,  comine  en  d'autres  paflà- 

■  ges  no^is  l'auons  veu,  à  Tiinothee,  aux  Ephe- 
'  ficus ,  &  ailleurs  :  tellement  que  hwtl  Paul 

■  monilre  que  finon  que  les  maris  s'entretie- 
nent  en  bonne  concorde  auec  leurs  femmes, 
ils  deshonorent  Ic-fus  Chri/J.  C^r  nous  iuons 
Tn  miroir  (  dit-il 3  de  l'vnion  qui  doit  eftre 
entre  le  mari  &  la  femme,  quand  lefus  Chrift 
s'eft  comme  c/poule  auec  nous .  Car  c'eft  vn 
mariage  fpiritueJ  que  l'vnion  facree  que  nous 
auons  auec  luy  ,  quand  nous  femmes  paitici- 
pans  de  fon  corps ,  que  nous  femmes  chair  de 
fa  chair,  &  os  de  fes  os  .  Car  ce  qui  a  elle  dit 
d'Adam  &  Eue  ,  a  efté  accompli  en  noftre 
Seigneur  lel'us  Chrift .  Si  donc  vn  homme  n'a 
ceft  efgard-la, d'aimer  fa  femme,  il  moiiftre 
qu'il  n'a  iamais  goufté  que  c'eftoit  ne  de  la 
grâce  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  ne  de 
fon  Euangile .  Et  ainli  notons  que  fainft  Paul 
enaddreflànt  fon  propos  &fon  exhortation 
aux  femmes ,  n'a  point  vouJu  mettre  h  bride 
furlecolaux  hommes  ,  pour  leur  donner  li- 
berté de  faire  ce  que  bon  leur  feniblera  :  car 
ils  ont  aufsi  bien  leurregle  .  Et  ainlî  voila  où 
il  nous  faut  rapporter  le  tout .  Quand  nous 
cognoiftrons  que  ceci  nous  eft  necellàire,  ia- 
mais nous  ne  ferons  fafchez  d'en  auoir  les 
aureilles  battues ,  &  que  la  mémoire  de  cefte 
doûiine  nous  foit  refrefchie  .  Et  au  refte,  a- 
£a  que  ceci  fuft  mieux  receu  ,  fâin.f^  Paulad- 
iotifte,  Qne  la  parole  Je  D<«»  ne  fait  foint  hUf~ 
mee.  Or  ceci  doit  eftre  prins  en  gênerai,  pour, 
rappliquera  ce  qu'il  auoit  traitté  ci  dclTus. 
Car  U  lignifîe  (en  £bnnae  )  que  li  ceux  qui  fe 
renomment  de  lefus  Chrift,  &  qui.  font  ba-, 
ptiiez  en  fon  nom,  ne  fegeuucrnentfainfie- 
ment,  &  eu  toute  intcgjité,  A"  qu'ils  ne  don- 
Bent  bon  exemple  ,  que  cela  retoi^rnexa  à  dif- 
famer rE»angile  ,  &  qu'on  ft  mocqué'ra,  4e  la 
leligion  que  nous  tepons,  pour. dire  ,Çoim« 
ment .' &cef.  gens  fe  vantent  d'auoir  la  do- 
ôrine  de  Dieu ,  d'auçir  la  Loyrquj  ^ft  la  re-f 
jje, «le.toute:  pçrfeàicfl ,  &  cep^nd^^t-  o/i^es 
vqitdesfco;dei  en^put-nial,  .ppiy^if  qu'il  ^'y 
aquèfcandale  ençUx^S;  deiiiaucivemcns  :,Sç 
v'cfila  vne  belle  ]^oy,  voila  vne  be^lÇjrefçinj^jj 
tiort:&qûi  eft-Cjequilesgoiiuerneainfi?  Vpi-r 
là  cçmnjp.  Jes  ni^lios  am^cj^it  la  gptg^ouuer,^ 
tç  pour  Blalp h enifr.  E) le Uj»;  ïâ,  jP wplj; ^  'ssf. çipAMÇ 
lon}œts.,^aVife  ,(|e^sela  <^u?nd,jnoUs  ne^vi^ons 
pji^^  cqmroc  il. appartient, .Aii^î'jiotans  que 
up'ûj-ç  y'if^bpnpcft^e  &  fainÔe  eit'  çpnvne,  vj^ 
ornciifèDt  (■  àiplî  qu'aille  dit  en  l'autre  pallà- 
ge,&  <jué  Dp^s  l'aupos  veu*)  vn  ornetnent  (cîi- 
i£^  de  i'Euangile.  Ne  voila  point  vn  honneur 


admirable  que  Dieu  nous  fait, quand  il  veut 
qu%fa  Parole  foit  ornée  &  parée  par  nos  bon- 
nes maurs,&  par  noftre  vie  fainctc&bien  ré- 
glée ;  Car  qu'eft-ce  qu'il  trouucia  en  nous? 
qu'tft-ce  que  fa  Parole  ?  C'eft  fon  image  où 
fa  gloire  reluit,  l.î  fe  ccgnoift  ia  niaiefié,  c'eft 
le  fceptre  par  lequel  il  veut  gouuerner  ce 
raonde:brief,la  fagefle,  la  puiflànce,  la  vertu, 
laiuftice,  la  bonté  qui  eft  en  Dieu  fe  déclare 
en  (a  Parole  .Et  comment  donc  la  pouuons- 
nous  orner  ?  Nous  qui  fommes  comme  poures 
grenouilles,habitans  ici  en  la  fange  &  en  l'or- 
dure: nous  qui  fommes  infcûez  de  tant  de  pé- 
chez &;  macules  ,  que  nous  puifsions  encores 
faire  hôneur  à  la  parole  de  Dieu  ?Mai<;  quoy? 
Dieu  daigne  bien  nous  appeller  à  telle  digni- 
té, c'eft  que  quand  nous  viurons  fainftement, 
fa  Parole  en  reçoyue  honneur,  &  qu'elle  en 
foit  prifee.  Si  nousauions  vne  feule  goutte  de 
humanité  en  nous  ,  cela  ne  nous  deuroic-il 
point  amollir  le  cœur  ?  Et  puis  ceci  ne  nous 
doit-il  point  enflammer  en  vne  affcâion  &  ze 
le,  voire  nous  rauir  du  tout  pour  nous  addon- 
neràbicn?  Et  pourtant  apprenons  quand  il  eft 
dit  que  Dieu  eft  blafphe mé  par  nos  vices,  que 
fa  Parole  eft  fuiette  à  l'opprobre  &  mocque- 
ric  des  incrédules,  que  nous  fommes  plus  que 
coulpables,&  qu'il  n'y  a  nulle  excufe  que  nous 
ne  deuions  eftre  condamnez.  Car  que  refpon- 
drons-nous  deuant  les  Anges  de  Paradis, 
quand  l'image  de  Dieu  aura  efte  ainfi  fouillée 
àcaulede  nous,  &  qu'on  aura  craché  àl'en- 
contre.'Siondit  à  quelqu'vn,  Aduife  bien  âte 
gouuerner  honneftement:  car  lî  tu  pourfuis  le 
train  que  tu  as  commencé.tu  feras  deshonneur 
à  tes  parens:ce  fera  pour  deshonorer  tout  ton 
lignage:quand,di-ie,  vn  homme  entendra  ce- 
la, tncores  qu'il  foit  bien  desbauché,  fi  aura- 
il  vergongne,  pour  dire,  le  ne  veux  point  fai- 
re deshôneur  à  mon  père  ni  à  ma  maifon  .  Or 
qui  fommes-nous  de  noftre  cofté?  Mais  qnard 
Dieu  a  imprimé  fa  marque  en  nous ,  &  que 
ijous  cognoiflons  que  fa  gloire  reluit  en  fa 
Parole, que  c'eft  la  doftrine  de  falut,  fi  cepen- 
dant nous  fommes  caufe  qu'on  tire  la  lan- 
gue contre, qu'elle  foit  blafmee.qu'pn  la  bro- 
carde,, qu'on  dife,  Et  voila  vne  religion 
phantaftique,  yoiM  vne  reformation  d'afnes 
&  de  cheuaux  :  ,quand>di-ie,inous  ferons  coul- 
pablesd'vn  tel  opprobre  qui  fera  fait  àDieu, 
&qij'^ftaura  amfi  vilipendé  fon  image  ,  que 
^irpnVTnous'Et  ainfi  apprenons,  puis  que  no- 
ftre Seigneur,  veut  qu'il  y  ait  vne  mélodie 
entre  la  doârine  qu'en  nous  propofc,  &  no- 
ftrej.yie,  qu'vn  chacun  s'employelà  ,que  ce 
foU.lt)ute  noftre  çftudç  .  &  que  nous  y  tra- 
uaiJlyç^BS  pourrons  ycopfermer:  comme  il 
eft  ti..çfojriauAi  que  (lous.baia allions  en  la  Ter 
tu  de  l^Éfpritde  Dieu.  &  non  point  en  noftre 
fotce.y.r^^y.  cft,enco,rcf  que  la  parole  de  Dieu 
Df  iipus  tuft  point  prifihce,  que  nous  nedc- 
uons  pas  pourtant  nous  addonher  à  nial.Mais 
(ainû  Paul  veut  ici  f^irç  honte  à  ceux  qoifc 
EEc.il, 


^ss 


SERMON     XI. 


4esbor(lcnt ,  ne  pcnfais  point  que  leur  pecKé 
Ici  a  double  quand  ils  leroiu  caule  de  l'oppro* 
brc  qu'on  ferai  Dieu, &  du  vitupère  de  lapa- 
role.Si  elle  eft  en mefpns  par  noftre  faute, en 
COI  es  qu'il  n'y  ait  point  de  tel'moin  qui  nous 
rcdargue,  fi  eil-ce  qu''ll  nous  doit  bien  lufrire 
que  nen  n'eft  caché  à  Dieu.  Ainlîdonc.enco- 
)cs  que  la  parole  de  Dieu  ne  fuft  point  blaf- 
mce  à  caule  de  nous ,  il  faut-il  quo  nous  l'oy- 
ons rçienuspar  nos  coniciences  pour  chemi- 
ner en  droiture  &:en  pureté  deuant  noftre 
Dieu. Et  puis  ilyaauûi  qu'il  nous  fautcom- 
paroiftre  deuant  les  Anges  de  Paradis, &:  que 
ce  qui  eft  auiourd'huy  caché  nous  fera  mis  en 
cbirté  ,  qu'il  faudra  que  noftre  turpitude  foit 
defcouuerte  deuant  le  ciclS.:  la  terre.  Puis 
.qu'ainiî  eit  donc  que  nous  ne  pouuons  cfchap 
perla  cognoiflanccde  tant  deiuges.helasine 
.deuons-nous  point  eftre  aflez  retenus  pour 
ne  point  faire  aul  fcandale  contre  l'Euaiigi- 
le?Mais  li  outre  cela  que  nous  feront  conuain 
«us  deuant  Dieu,&  que  nos  confcicnces  ferôt 
nos  iuges  pour  nous  condamner ,  Ci  encores 
les  mefchans  ont  la  bouche  ouuerte,  &:  qu'ils 
■prenent  occalîondefe  mocquerde  Dieu  ,  où 
fera-ce  aller  ?  Or  ii  nous  penfions  bien  a  ceft 
aduertiflement ,  nous  ferions  mieux  retenus 
eue  nous  ncfommes  pas.  Car  auiourd'huy 
nous  voyons  comme  les  ennemis  de  la  vérité 
nous  aguettent,&  nous  efpient.  Car  fi  les  Pa- 
çiftes  trouuent  quelques  vices  en  nous, incon- 
tinent  ils  remuent  toutes  nos  ordures.  Et 
ponrquoy  ?  Afind'auoir  quelque  couleur  ap- 
parente de  mefdire  de  Dieu,&delavraye  re- 
ligion.Nous  fçauons  bien  cela, Dieu  nous  met 
ici  comme  fur  vn  efchaifaut,  il  veut  que  nous 
foyôs  efclairez  afin  qu'on  nous  voye  de  loin: 
ie.  toutesfois  cependant  nous  ne  laiflon.s  pas 
de  nous  desborder  à  tout  mal, qu'il  femble  que 
nous  vueiliions  defpiter  Dieu  &  le  monde: 
combien  qu'il  nous  remonftre,que  iournelle- 
ment  il  ne  ceflc  de  crier  ,  &  qu'il  nous  ordon- 
ne des  tefmoins  de  fa  dodrine  afin  qu'elle  ait 
approbation,non  feulement  nous  n'en  tenons 
conte,  mais  en  toute  noftre  vie  nous  l'allons' 
diffamer ,  &  la  dénigrons  tant  qu'il  eft  pofsi- 
ble.  Ne  voila  point  vn  facrilege  deteftable, 
quindàcaufe  de  nous  l'Euangile  eft  aiiiour- 
d'huy  ainfi  en  opprobreîEt  non  feulement  les 
Papiftej  cherchent  à  mefdire  de  nous,  mais 
ceux  qui  fe  vantent  d'auoir  l'Euangile",  entfo- 
res  font-ils  bien  aifesde  chercher  octafion 
pour  noos  brocarder  ,  &  de  fe  moCqlier  de 
Dou'.combienqHece  foit  à  tort. Quand  donc 
nous  voyons  que  nous  fommesainiiaguéttez, 
tant  plus  deuons-nous  eftre  fages  &  modérez. 
Maitquoy  ?  Il  n'y  a  ri«n  qhi  nous  piiîfïè'  rë- 
tenir.Toire  tant  nous  fommeyenyufer'èn  nos 
affeiiions  charnelles.  Or  nous  voycÀis  Wen 
qu'on  ne  cherche qtfà  nous  taxer  :J!c Scores 
qu'il  n'y  ait  point  d'occafion',  fl^ell-ie  qu'oir 
ne  laifle  point  de  mal  parler  de  nous.   Q^aiid 
irous  auons  à  noftre  cfcient  donné  matière 


aur  mefdifansde  detraôer  de  ftMis  ,  h'eft-ce^ 
pas  eomiiie  fi  nous  auiotis  fait  complot  auee' 
Satan, pour  faire  qu'on  s'eleue contre  Dieu,&- 
qu'il  fufcite  fcsminiftres.  pour  dire  que  l'E-' 
uangilefùit-vilipendéi'Oin'Voit  celatoutcoih' 
munément:  &  pleuft  à  Dieu  qu'il  ne  fuft  pas  <î 
cognu.  D'autant  plus  donc  nous- faut-il  bien 
noter  ce  paffage.où  fainft  Paul  rembnftre  que 
il  ne  faut  point  que  par  noftre  faute  ladottri- 
nc  de  Dieu  foit  blalmee:  côme  iladioufte  tan  "' 
toft  après  ;  5:nous  conioindrons  cela,  entan-t  \ 
qu'il  le  rapporte  à  la  doftrine,  combien  qu'it 
mette  &  entrelace  d'autres  propos:  mais  le' 
meilleur  eftdeconioindreces  deuy.  Ildit,A^ 
fin  que  l'adutr/aire  foit  confus  ,  ne  irouujntnut 
mal  à  dire  fur  mus.  Quant  au  mot  d'Aduerfai 
re.il  entend  celuy  qui  eft  à  l'oppofite.Lemôc 
dont  il  rfe,  fignific  celuy  qui  eft  là  fe  dreflànt 
contre  nous, ou  eltant  au  rebours  :  quecekiy.i' 
la  foie  côfus, dit-il.  Or  faifift  Paul  par  ce  mot: 
déclare  qu'il  nous  eft  vtile  d'eftre  fur  nosgar 
des.  Et  pourquoy?  Car  les  ennemis  de  venté 
nous  prefrent,&  toufiours  font  vigilas  afin  de 
nous  furprendre:  &:trouuer  à  redire  fur  noui. 
Cclaaeftéde  tout  temps,  &  Dieu  a  voulu  ai- 
guifer  les  fiens  p.tr  ce  moyen-la. Car  les  Pay- 
ens  &  incrédules  ont  bien  fceu  dire  que  nos 
ennemis  nous  font  plus  de  profit' fouuentef- 
fois  que  nos  amis. Et  pourquoyf  Car  nos  amis 
nous  flattent ,  ils  font  des  borgnes  en  nos  vi- 
ces ,  &  font  femblant  de  n'y  rien  veoir  :  qui 
plus  eft  ,  ils  nous  y  maintienent ,  &  font  touf- 
iours de  noftre  cofté,  combien  que  nous  ayôs 
mauuaife  caufe:  S:  voila  qui  nous  a  mené  à  per 
dition.  Cependant  nos  ennemis  fçaucnt  bien 
examiner  tous  nos  vices  ,  &  s'en  enquérir ,  ils 
nous  font  noftre  procès  :&  cela  eft  pour  nous 
aduertir.finousauôseu  quelque  vice  en  nous,' 
qu'il  le  faut  corriger.Si  nous  fominesadinone" 
ftez  de  prendre  garde  i  nous ,  &  que  les  Pay- 
ens  nous  inftruifent  à  cela,  quelle  excufe  fera' 
ce  à  nous  fi  nous  ne  pouuons  prattiquer  ce  quf 
nous  eft  monftré  par  tous  les  Apoftres?  Or 
donc,  quand  fainit  Paul  p.irle  que  nous  ren- 
drons les  ennemis  confus  quand  ils  ne  trou- 
uerontque  redire  fut  nous,ilmonftre  qu'il  ne 
fe  peiit  faire,  qunnd  nous  voudrons  feruirii' 
Dieu, que  nous  ne  foyons  obferuez  ,  &  qu'on 
ne  nous  efpie  afin  de  mefdire  de  nous:&  Dietj 
nous  veut  aiguifer  par  ce  moyeti-la  ,  comme" 
i'ay  dit.Au  refte,il  eft  vray  que  qupy  queriotlfr 
faciôns  ,  iarnais  nous  ne  pourrons  garder  le'^ 
mefchantes  langues  de  mefdire.  Carnonsfça^' 
uons  que  le  diable,  qui  eft  perc  de  menfonge,' 
toufiours  fufciterales  Cens  iuftjues  àcefte  ra' 


ioj, 


dës-Hàii         .  ,  ... 

fti0n  î  taht  iSc'ploiî  S  l'on  notiitfccSij^'^'ai-e  âueé* 
faioft  î'àirf ,  Se  inVffliés  aue'e ;Ii?«  'Pi-p^îic^èr^ 
A'p'o"ftrés,Wias.'nod5  fommés  tjirn  loiird'é  ce'-;' 
ftë  i\itegrité laquelle  on  a'féfifî  cVi  éux.Çar if^ 
ontcft-c'cn  ce  nKindt  comme de^'An^es:* 

toutes 


SVR   L'  EPIS  T.     A     T  I  T  E. 


toUteifois  on  n'a  pi';  lïilTé  dVn  detrafter, tel- 
lement qu'ils  ont  cfté  en  diffame  &  en  oppro- 
bre.Et  les  Apoftres  quels  eltoyent-ils?  voire 
fur  tout  fiinft  Paul  qui  a  efté  Irreprehcnlible, 
mefraes  deuant  qit'clVrc  côuern  à  Icûi^Chrift, 
il  auoit  mené  vne  vie  telle  qu'il  fembloit  que 
il  ne  fuft  plus  du  rang  des  hommes  :  &  quand 
leYus  Chrift  l'a  appelé  à  Ion  Euâgile,  on  voit 
qu'il  renorrce  tellement  à  foy-mefine  ,  qu'il 
eft  comme  raui  de  la  terre, qu'il  nç  ceffè  touf- 
iours  de  trauaiUer  pour  TEglffe;  on  vdit  (^u'il 
a'ha  nul  elgard  à  foy  ,  mais  qu'il  s'oublie  ,  Se 
toutes  fes  commotiitei:  briel,  ilnépenlelino 
d'auancer  le  royaume  de  Dieu  ,  &  magnifier 
lefus  Chrift:&cepcdant,  eft-il  fans  reproche 
Se  fans  detradionfMais  il  faloit  qu'il  fuftbla- 
i.C«r.4.  fonné  par  tout. Car  (comme  il  dit)nonfeule- 
ij.  ment  lia  porté  des  iniures  ,&  enduré  qu'on 

detraftaftde  luy  comme  d'vn  iTiefchantimaiî 
que  luy  Se  Ces  femblables  ont  efté  comme  la 
fiente  du  monde ,  comme  des  tripailles  qu'on 
iette  là,  &  toute  l'inteftion,  aptes  qu'on  a  tué 
des  beftes-Sainfl  Paul  vie  de  telles  limilitudes 
poifr  monftrer  comme  Dieu  l'humilioit.  Et 
ainiî  il  eft  certain, quoy  que  nous  facions,  que 
nous  ne  pourrons  point  clorre  les  mcfchan- 
les  bouches, que  nous  ne  l'oyons  fuiets  à  beau- 
coup d'iniures  &  opprobres.  Mais  cependant 
viuons  tellement  que  nous  puilsionsappellcr 
&dcuant  Dieu,&  deuant  les  Anges, pour  fou- 
flenir  noftre  integrité:&  puis  deuant  le  mon- 
de que  nous  foyons  preftsde  rendre  conte  de 
ce  qu'on  nous  reprochera, que  nous  ne  dcman 
dions  linon  de  déclarer  noftre  innocence,  & 
qu'il  n'y  a  nul  fcandale  en  noftre  vie.  Qn/ind 
nous  en  ferons  ainfi  ,  nous  fuyurons  les  Apo- 
ftres  &  Prophètes ,  &  ferons  bien  accompa- 
gnez.Et  cependant.combien  que  nos  ennemis 
necefleut  demefdire  ,  (î  ne  lailTeront-ils  pas 
d'eftre  confus.Et  pourquoy?  Noftre  confcien 
ce  nous  refportd  de  noftre  intégrité ,  &en  la 
fin  ils  feront  conuaincus  qu'ils  ne  trouuent 
nul  mal  fur  nous.  Il  eft  vray  qu'ils  delgorge- 
ront  des  vilenies  tant  &  plus.  Et  bien.cela  paf 
fe  &  s'efcoule,  c'eft  vn  bruit  qu'on  aura  fcmc, 
il'faut  qu'il  ait  la  vogue  pour  vn  temps  :  mais 
en  la  fin  on  voit  que  ce  n'eftqu'vn  ombrage 
qui  palTè  &  s'efcoule, &:  qu'on  s'eftott  mocqiié 
aùfarauant.  Il  eft  vray  que  beaucoup  nedt- 
maiident  finon  que  les  Chreftiens  foyent  drf- 
fariiez,  &encoresqu'ikne  fçachent  poirttce 
qrt'oh  dit  d'eus.ils.femérortt  lé  bruit  par  tout 
de 'Ce  que  raefmes  ils  ne  fçaUent  p.is ,  X:  dctra- 
CTcTonc  par  vne  cértainr  malice  des  enfans  de 
Dieu. Mais  quand  nous  voyons  cela,  recoures 
ihbftre garent  qui  eft  au  ciel ,  &fur  tout  que 
noftre  Vie  refponde  ,&  qu'elle  loitj>onr  ren- 
dre cqnhis /es  mefchans  qui  dctrActént  aiiiii  ' 
(ans aucune  vérgongne:&  quand  ils'âiir'oj\lou 
M&r't  latôiiçlie  pour  mefairèdehous,que  no-^ 
Ifrefioiine'vié&  conuerïatlori  ■foit  poUrlettr' 
fermer  tellement  la  bouche, qu  on  appefcoy'-  ' 
ueleirir  turpitudi.A'duifons  ddnfque'qiiand  le 


îSy 


diable  fufcitcr.i  ainlî  fes  fiippofts  pour  detia- 
fter  de  nous, 8:  nous  mettre  en  opprobre,  que 
nous  ayons  de  quoy  les  rembarrer  :  &  quand 
les  malins  auront  fcmc  des  mauuats  bruits ,  Se 
des  fcandales,  que  toUlîoursCela  leur  retour- 
ne fur  leurtefte  ,  &  qu'on  cognoilTe  que  nous 
fommes  innocens. Voila  Cdi-ic)  ce  qu'il  nous 
fautfaire,  visire  ,  8e  lefa;ieen  telle  forte  que 
nous  ne  foyons  point  deftournci  ,  coinb'en 
qu'il  y  ait  vne  telle  ingratitude  au  monde, que 
pour  âuoir  bien  fait  nous  foyons  dénigrez.  Il 
eft  vray  que  cela  nous  fjfchera,  que  qu.ind  vn 
homme  aura  mis  peine  de  l'eiupToyer  i-bien 
faire, qu'il  eu  ait  vne  fipourerecompenfequc 
on  mefdifede  luv,cela  lepicquc.  Màisreiie- 
nons  toufiours  à  cela ,  que  iî  les  hommes  font 
fi  peruers  de  niefdire  de  nous  en  bien  faifant, 
qu'il  nous  doit  bien  fuffired'auoir  noftre  ga- 
rent Ju  ciel,  auquel  nous  pouuons  appeller. 
Les  Prophètes  ont  aufsi  bien  fouftenu  de  tels 
combats,  Vous  m'appelez  fedufleur(dit  1ère-  ''^•'■<'-7 
mie)c'eft  donc  Dieu  qui  m'a  feduitiallez  vous 
en  parler  à  luy:carfî  le  fuis  trompeur  &fcdu- 
fteur  ,Dieu  l'eft  deuant  moy.  Apres  ,  quand  l/u.fo.f 
Ifaie  parle  aufs'i  des  diffames  qu'on  defgor- 
geoit  contre  luy.  Et  bien  (dit-il )il  faut  q,uc  ie 
baille  ici  mes  ioues&que  ie  foye  loiir'fletcdc 
toutes  parts:  comme  s'il  difoit ,  Il  faut  qu'on 
me  face  tous  les  reproches  du  monde,  que  ie 
foye  defcbiré  par  pièces,  que  ie  foye  brocar- 
dé par  tous  les  banquets ,  3e  qu'vn  chacun  fc 
mefle d'eftre  mon  iuge  ,  âcdeme  condamner. 
Et  bien  ,  quand  les  hommes  auront  ainfidcf- 
gorgé  toute  leur  malice  ,  fiay-iemon  garent 
auciel,5;celuy-la  me  fauiiera(dit-il)de  toute 
leur  mefdifance. Voila  comme  il  nous  en  faut 
faire  :  que  li  nous  voyons  les  mefchans  de- 
traifler  de  nous, que  toufiours  noftre  confcien 
ce  refponde  deuant  Dieu  quand  elle  fera  pure 
&  nette  de  tous  les  blafmes  qu'on  nous  met- 
tra fus,&  qu'il  ne  nouschaille  quand  le  mon- 
de nous  rendra  vn  fi  maigre  falaire ,  que  pour 
auoir  bien  fait  nous  foyont  blafmez:  conten- 
tons-nous que  Dieu  nous  approuue  ,  &  que 
nous  ne  foyons  iamais  dcÂourntz  de  luy, 
quoy  qu'il  en  foit, que  toufiours  nous  ne  pour 
fuyuions  noftre  vocation  à  la  gloire  de  Dieu. 
Et  quand  chacun  aura  profité  en  fou  endroit 
en  çefte  ttoftrine.que  nous  tafchions  d'y  atti- 
rer les  autrcs,&  àla  coguoiflânce  del'fuan- 
gile'qiie' f^ieu  nous'a  donnée  ;^S:  què-cept^.^ 
daiit  toilS  ceux  qui  voudront  mefdire  de  nou<,, 
demeurent  là  confus, &  que  leurs  Voiiches  foy 
cnt  aiffsiclofes  endcfpitde  Icufs  dents.' 
O'R  nous-nous  proftcrnérons  dcuii^t  la 


■  que  noui  n'awons  point  rait ,  ann  que 
cfep^liife  en  plii^  nous  Éiataillio'ftS  contre  îioif' 
niéfthântcs  affcftfon^';  &  ôu'e  liSuVtpyùhs'sc-i* 


co 
n'oip 


EEe.iii. 


^i)0 


tczàe  luy.sfin  qutpar  fon  ûinû  F.fprit  il 
nous  gouiierne,  &  que  nous  renoncions  à  nos 
appetis,  louffrons  qu'ils  foycnt  menez  com- 
me captifs ,  Se  qu'Us  ne  dominent  point  par 
deSits  nous,&  tant  moins  qu'ils  s'eleuent  coa 


SERMON     XII. 

tre  robeiilàiice  que  nons  deuons  i  noftre  Sei- 
gneur lefus  Chiiil:  .deuant  lequel  toutge- 
nouil  fe  doit  ployer.  CXilS  non  feulement  il 
nous  face  cefte  grâce  ,  ra.ùi  à  tous  peuple;  Se. 
nations  de  la  terie,&c. 


TROISIEME     SERMON    SVR    LE 

SECOND      CHAPITRE,  '\ 

<?     SemhUblement  exhorte  les  imms  hommes  au  ils  fâycHtÉtV 

■■■  .■  '       ".I        i  .ri    l'if..  •  .3  y    «^      ■■'■■',■  .Jj 

trempez»  '■  ' 

7  Te  donnant  toy  me f ne  en  toutes  chojès  exemple  de  bonnes. 
auures,fuyuant  la  dotlnnc  en  integrité,en granité  deptœurs,  ,  ;' 

8  Sain  en  parole  y  fans  reprchenfion  :  afin  que  celuy  qui  repugnCt  ■ 
jcitconfiuSin  ayant  rien  de  mal  qu  il puijje  dire  de  nous.  à  ^  v.i 

9  Exhorte  lesferuiteurs  quilsfoyentfuiets  a  leurs  maijîres,  leur,' 
complaifans  en  toutes  choJês,non  contrcdifans, 

10  Nepillars,mais  monflrans  toute  bonne  loyauté  >  afin  quils  or-i 
sent  en  toutes  chofcs  la  doSirine  de  Dieu  nojlrc  Sauueur. 

1 1  Car  la  grâce  de  Dieu,Jalutaire  à  tous  hommes  efi  apparue, 

17.  Nousenfeignant  quen  renonçant  a  toute  infidélité  CT*  defirs 
mondains ,  nous  \iuions  en  ce prefent  monde fohrement ,  iufiementy  ^ 
religieufement:  ^ 

13  Attendans  la  bien-  heureufe  efperance ,  c^fy  î apparition  de  la 
gloire  du  grand  Dieu,(^  de  nojîre  Sauueur  lefus  Chrijl, 

14  Lequel  s  efi  donné  foy-mefne  pour  nous ,  afin  quil  nousréi4^ 
chetafl  de  toute  iniquité.  \ 


Imanche  dernier  nousmon- 
I  (Irafraes  quel  honneur  Dieu 
nous  fait  cu.ind  il  veut  que 
.  ladoûrine  de  fon  Euangile 
I  foit  approuuee  pa,r  noftre 
'  bône  vie&  fainfte.  Car  no^us 
fpuons  qfie  la  gloire  de 
Dieu  reluit  «n  fa  doftrine  ;  &qui  fommes- 
nous  q  nous  la  puifsions  honorerr|  Mais.il  luy 
piaift  ie  feruir  de  ces  niiferables  créatures  en 
vne  chofelî  digne  &  fi  precieuf<s.Et,cç}anoi.ls. 
doit  tant  plus  inciter,tellemen:,qu'vn  chacun 
s'effûrcc'à  en  faire  fondcuoirl  lleftditque 
teirx  qui  anonsent  la,p<irole  de  Dieu  doyuent 
ejl're  comme'mir^irs^  afin  au' on,  pùjflF  eïtre^ 
édifié  parlçur  ^oriftevip  &  exemple,  li  ^pur 
«ft  tc'monftre  que  le  nom. de  Dieu  fçri  bj?f- 
£l»çil«;..p.»r.Um  iivvt  (s'JiJe  ilÇibof  d^nf.  Car  | 


les  Papiflcs&  incrédules  prendront  occâfîon 
de  fe  luocquer  de  noilre  foy  &  Chreftienté 
que  nous  auons  ,  fi  noihe  vie  a'eft  conforme 
&  femblable.Mais  faïaÛ  Paul  viét  iufques  aux 
fcrfs,qui  n'efloyent  pas  tomme  auiourd'huy.  ^ 
on  aura  dciferuiteursà  loage:  mais  ils  eiloy^^^ 
ent  efclaues,&  leur  condition  cftoit  quafî  <;on».^ 
me  des  boeufs  ou  des  autres  bcftesjoue  le  njai-'j, 
ftiepouuoit  tuer  fon  feruiteur  aiifsi  bien  com 
me  fon  chien.  Or  tant  y  a'quc  fainÔ  Paul  dit', 
quç.la  religion  fera  ornée  par'eujç,moye.npane 
qu'ils  Je  gouuernent  en  tc|lè  fof  te  ;  que  lés.. 
mefc.haas,'foyent  contraints  de  Ççn'tir  que  la.' 
doftrin'e  de  Dieu  cft  pour  rcfoi-nVer  les  hpm-», 
mes,  &  ppi^r  les  ^mener  à  fâinîiete  de  Vie." 
Ci\iad  nous  v'oyos  cela'.ne  fomipes^nous  poït. 
bien  lafches  fi  nous  ne  tàftho'nVent^'nt  qu'en, 
■RS^^  eA.d^cle.rrçla  boucitcà  toutnièfdifant?^ 


SVR     LEPIS 

Toire  nefme  les  contraindre  a  honorer  Dieu 
&  à  le  glorifier?  Et  ainfi.que  ceux  qui  font  de 
bafle  condition ,  &  <jui  font  raelprilez  de  tout 
le  inonde,fe  contentent, d'autant  que  Dieu  les" 
a  tant  honorez  ,  que  non  feulement  il  les  re- 
çoit en  la  compagnie  de  fes  enfans  ,  mais  il 
veut  que  fa  gloire  reluife  en  eux  ,  &  que  non 
feulement  ils  portent  fes  armoiries ,  mais  que 
leur  bonneviefoit  côme  vne  parure  &vn  or- 
nement de  l'Euangile.  Or  cepédant,que  ceux 
qui  font  eleuez  en  degré  d'honneur  &  en  di- 
gnité regardent  à  leurs  perfonnes.Gar  iï  Dieu 
veut  que  les  plus  pelts  dcfquels  on  ne  tiët  con 
te.lefquclsmefmeson  reiette,&  qu'on  nedai 
gn«  pas  regarder  entre  deux  yeux.iî  Dieu,di- 
ie ,  veut  que  fa  doftrine  foit  ornée  par  ceux- 
là,  quand  on  fera  conftituédes  hommes  en  vn 
degré  pi*  haut,&  en  precminéce,  n'eft-ce  pas 

7T.1J  •  raifon  que  ceux-là  fegouuernent  en  telle  for 
■-•te  qu'ils  ne  foyent  point  pour  diilamerlabon 
oe  doârine,  &  qu'on  ne  prene  point  occafion 
ew  leur  mauuaiib  vie  de  fe  moquer  de  Dieu? 
Car  Voila  les  MagiArats  qui  font  comme  ima 
gesde  Dieu  au  mode:  quand  les  vns  ferôtcon 
lempteurs  de  Dieu,  les  autres  adônez  i  corru 
ptiou  &  auaiice  ,  les  autres  feront  pleins  de 
cruauté  ,  les  autres  voudront  que  tout  ordre 
foit  viole  Se  corrompu ,  ne  fera-ce  point  pour 
fe  desborder  en  tels  fcâdales.que  tout  le  mo- 
de mcfdira  de  la  doûrine  qui  feprefche?  Et 
ainfi.qu'vn  chacun  regarde  â  foy  fclon  fon  e- 
ftat,  &  que  grans  &  petis  regardent  que  Dieu 
ne  reiette  nul ,  mais  qu'il  veut  que  fon  Roy- 
aume foit  drefle  entre  nous  ,  afin  que  chacun 
en  fon  endroit  l'adore  &  le  glorifie  :  que  tous 
('di-ie)s'employent  à  cela  ,  Se  que  nous  puif- 
fions  empefcher  que  les  calomnies  des  mef- 
chans  n'aycnt  point  la  vogue  :  non  pas  qu'ils 
fe  taifent  du  tout, comme  nous  voyons  qu'il  y 
aivne  impudence  defefpcree  aux  contépteurj 
de  Dieu  :  Si  quand  nous  ferions  aufsi  parfaits 
que  les  Anges ,  ils  ne  laifferoyent  pas  toutcf- 
foit  de  defgorger  leurs  detraûiôs  contre  no': 
luais  fi  faut-il  qu'ils  demeurent  confus,  quand 
on  aura  cognu  la  chofe  en  vérité  ,  que  noftre 
vie  refponde,&  que  non  feulement  nousayôs 
bon  tefmoignagcdeuât  Dieii  en  intégrité  de 
iiosconfciences,Tnais  qu'aul'si  deuant  lés  hom 
mes  noiis  puifsions  monilrcr  qucc'eft  â  tort' 
qu'on  mefdit  de  nous.  Voila  donc  ce  que  noue - 
auôs  a  retenir  .en  fomrae.  Or  fainft  Paol  par- 
lant des  ieunes  gens,  veut  qu'on  les  exhorte 

7.^-  d'eftre  attrempez  ,  qui  cft  vne  vertu  bien  re- 
qiiife  àceftaage-la,  d'aucâc  que  nous  voyons 
qu'il  y  a  grand'ardeur,  voire  qu'il  n'eit  rien 
plus  diflicile  que  de  tenir  en  bride  lesieunes 
genti  G'eft  comme  vn  pot  qui  commence  a' 
bouillir  I  car  alors  il  iette  toute  fon  efcume: 
ainfieft-ildeceftange,ciril  lœfepeiit  repri- 
mer qu'auec  grîd  effort.Or  tapt  y  a  que  fain£t 
Paul  ne  laifle  pas  de  dire  quMs  doiuent  eilré 
attrempez.  Et  pourquoyfCar  ce  n'eft  pas  ex- 
cufe  quand  on  appcrceura  des  vices  en  nous; 


T.    A   T  I  T  E. 


Î9» 


&  qu'il  y  aura  legeretérçe  n'eft  p»s  à  dire  que 
il  ne  nous  faille  point  réprimer,  mais  pluftoft 
que  voyant  les  maladies  ,  il  y  faut  quant  & 
quant  appliquer  les  remèdes.  Si  vn  homme  a- 
uoit  mal, il  ne  croupiroit  pornt  là,raais  il  adui 
feroit  tous  les  moyens  qu'il  eft  pofsible  ,  & 
ne  demandcroit  que  d'eftre  fecouru.  Quand 
donc  les  ieunes  gens  cognoiffent  qu'ils  font 
pleins  de  mauuaifes  cupiditez  qui  les  pouf- 
fent &  incitent  i  mal, qu'ils  ne  fe  pcuuent  ran 
gerfinon  par  force:  que  les  vns  fe  desbordent 
en  paillardifes,les  autres  aurôt  tant  de  toUer 
phantafies  que  c'eft  pitié:  il  y  aura  l'audace.ii 
y  aura  les  pompes.ily  aura  les  gourmandifes, 
il  y  aura  les  ieux  :  quand  donc  les  ieunes  gess 
voyent  que  leur  nature  les  pouffe  ainfi,  fc  doi 
uent-ils  flatter?  doiuent-ils  faire  bouclierde 
ce  que  ceft  aage-la  eft  ainfl  enclin  à  beaucoup 
de  vices?  Nenni  :  mais  qu'ils  efcoutent  ce  qui 
leur  eft  ici  remonftré,  c'eft  afçauoir  que  tart 
plus  doiuent-ils  batailler  contre  leurs  mefeha 
tes  affeâions,  iufqu'â  ce  qu'ils  fe  foyent  repri 
mez,  &  que  Dieu  ait  gagné  fur  eux  telle  mai- 
ftrife  ,  qu'ils  nefe  desbordent  plus.  Or  com-- 
bien  que  cefte  exhortation  foit  plus  que  ne- 
ceiraire,no«s  voyôs  combien  elle  eft  mal  prat 
tiquee.  Car  outre  ce  que  les  ieunes  gens  font 
mal  aduifez,  &  qu'il  n'y  a  ne  fobrieté.ni  attrc 
panée  en  eux,qucllemodeftiey  voit-on?Pour 
le  moins  s'ils  font  fols  ,  &qu'ils  ayentvn  e- 
fprit  volage ,  ils  deuroyenteftre  humbles ,  Se 
croire  bon  confeil  pour  y  obéir  :  mais  on  y 
voit  plus  de  prefomption  &  d'audace  beau-- 
coup  que  s'ils  auoy ent  &  prudence  ,  Se  v  fage,  ■ 
&  tout  ce  qui  feroit  lequis ,  qu'ils  ne  daignée 
pas  efcouter  vn  feul  mot, qu'il  leur  femble  que 
ils  font  trop  liges.  Or  quand  les  ieunes  gens 
font  ainfi  adonnez  à  prefomption ,  c'eft  vne 
chofe  incorrigible  &defefperee,  &  n'en  at- 
tend-on rien  qui  vaille.  Car  quand  toutes  les 
vertus  du  monde  feroye  t  en  vn  jeune  homme,- 
s'il  cft  prefomptueux,&  qu'il  n'yait  pointde 
humilité  &  modeftie  ,  il  cft  certain  que  tout 
s'en  va  en  fumee.C'eft  comme  vne  herbe  inu 
tile:elle  verdoyera  affez.mais  on  n'y  cognoi- 
ftra  point  bon  fruict  en  la  fin.   Q.apy  qu'il  eii 
foit,  fieft-cequele  fainftEfprit  ne  veut  pas 
que  cefte  admonition  foit  perdue ,   puis  qu'il 
Ta  vne  fois  donnée  par  la  bouche  de  S.  Paul; 
Et  pourtant ,  que  les  ieunes  gens  aduifent  d<! 
fe  ranget  en  telle  forte,  qu'on  cognoiffe  que 
ils  ne  demandent  point  d'auoir  licence  de  fe 
desbaucher  à  leur  appétit  ,  mais  qu'ils  fe  re- 
ftraigncnt  encorcs  qu'on  ne  les  pouflè  point 
d'ailleurs.  Cependant  fi  on  voit  qti'ils  foycnt 
de«bordez,que'ceuxqui  Ont  la  charge  fureur' 
s'employent  à  leur  remonftrer  leurs  folies,&' 
à  les  tembarrer.Que  les  Miniftres  de  la  -Pafo» 
lefçachét  qu'ils  auront  à  rendre  conte  à  DieiT 
s'ils  ferment  les  yeux ,  &<ju'ils  pardonnent  a< 
c3es  çonuoitifes  de  ieunefle  :  qnand  ils  voyenf 
les  ieunes  gens  eftre  ainfi  desbaucher  ,  s'ils 
n'en  font  nul  femblant,qu'il«  ne  s'y  oppofcnt 
EEc.iiii. 


59^ 


SERMON     X  II. 


point ,  il  cft  certain  qu'ils  aurontà  en  rendre 
conte  dciiant  Dieu.  £t  s'il  y  a  del'ingratitu- 
dc,&;cjue  les  ieunesgens  foyent  fiaueuglez  & 
{i  tranlportez  qu'on  ne  fçache  de  quel  cofté 
ksaborder,  li  faut-il  neantmoins  que  cefle 
dodrine  ait  fon  cours.  Que  les  pères  aulsi  v- 
fent  de  l'authorité  que  Dieu  leur  donne  en 
ceft  endroit, &  qu'ils  tafchent  d'amener  à  bon 
ne  attrempance  ce  qu'ils  voyent  élire  ainii 
desbordé.  Or  cependant  fainil  Paul  dit  à  Ti- 
te,  g»'</  doit  ejlre  miroir  ou  patron  de  tonte  ytr- 
tufclm  ladodrine.  Côme  s'ildifoit  quel'hom 
me  qui  a  la  charge  &  office  d'anoncer  la  pa- 
role de  Dieu ,  doit  en  toute  fa  vie  prefcher, 
puis  que  Dieu  l'a  eleu  &  choifi  en  vn  tel  eftat ; 
quand  on  regardera  comme  il  le  gouuerne, 
<ju'on  trouue  vne  approbation  de  la  doctrine 
qu'il  porte,&  qu'il  profite  &  édifie  non  feule- 
ment de  bouche,  monllrant  ce  qui  fe  doit  fai- 
re,mais  aufsi  par  fon  exéple.quand  on  cognoi 
ftia  que  c'eft  a  bon  efcient  qu'il  parle  ,  &  non 
point  en  fcintife,  qu'on  en  puiffe  élire  édifié. 
£t  pleufl  à  Dieu  que  ceci  fuft  bien  oblerué: 
car  la  vérité  de  Dieu  feroit  receue  auec  plus 
grande  reuerence  qu'elle  n'cft  pas. Mais  quoy 
qu'il  en  foit,  lî  ne  ferons-nous  point  excufez 
puis  que  Dieu  fe  veut  feruif  de  nous  pour  ré- 
gler les  autres ,  iînon  que  nous  cheminions 
droit  pour  nous  régler  nous-melraes,&com- 
pafler  tellement  noftre  vie,  que  quâd  on  nous 
fuiurad'vn  commun  accord,  nous  tafchions 
d'honorer  Dieu,&  que  nous  ne  dônions  point 
occafîon  demefprifer  fa  Parole  facree  ,  puis 
que  Dieu  nous  a  faits  inftrumcns,&  qu'il  veut 
que  fa  doûrine  fou  receue  de  nouS;  comme  fi- 
luy-mefme  parloiten  perfonne.  Notamment 
fain£t  Paul  dit  que  nous  deuons  porter  cefte 
doOnne  engraititè,  en  attremp.xnee,0-  enfalnt 
parole.  En  quoy  il  monftre  que  nous  deuons 
auoirce  regard,  de  nous  tenir  en  bride  plus 
courte  <]ue  les  autres.  Car  on  enverra  beau- 
coup qui  fontafTeï  choleres  quand  il  eftque- 
iiion  de  reprendre  lc<:  vices  ,  tellement  qu'ils 
i>e  peuuent  rien  foutfrir  ,  tout  leurdefplaira: 
mais  fainft  Paul  parlant  de  ceft  aduertiflemét, 
dit, Aucuns  font  qui  fe  plaifeqt  en  leurs  vices, 
Scep^ndant  ils  font  fort  afpres  à  redarguer 
les  autres.  Or  c'elf  mal  pTQçe<ier,&toutau  re 
boiirs,  quand  nous  Voudrons  que  les  autres  fc 
rangent  à  la  volôtédeDi^Uj&quenpus-npus 
en  deftournon!  les  prem/ers.lln'ç^iît  yas  qtie- 
ôion  de  dire,  Marckez.  :  mais  il  faut^llcr  de- 
uant.  Il  fera  beau  veoir  vn  prefcheur  qui  vou- 
dra ici  exhorter  le  peuple  .îmodellic,&  ille- 
ravn  paillard,  il  fc  desbordexa  en  propos. vi- 
itiiis  &deshonncftes:  &i  on  von  qu'tife  con- 
damne de  fa  propre  bouche.  Aortes  il  louera 
iobrietc  &  attrempafice,&  c'ôffcqtmlque  gros 
^iirohgne.iSi  quelque  gourmand, Aprèsiil  cou 
damnera  l'auance,  &  ilpedemahde  qu'à  rajit 
iter <ie  tous  coftez.Il  dira  qwe poas.  deuôs  quit 
ter  le  monde  pour  afpirer  à  Dieu, S;  on  verra 
qu'il  efl  plonge  au  plus  profond  de  b  terre. 


&  qu'il  ne  luy  chaut  de  la  vie  celefte  non  plus 
qu'à  vne  belle.  Il  fera  beau  veoir(di-ie)qiJ'vu 
homme  incite  ainfi  les  autres.qu'il  dife, Mar- 
chez deuant  :  &  qu'il  ne  les  fuiue  pas  :  mais  il 
el\  qiïeftiou  de  conduire,  &  de  môflrcr  le  bon 
chemin.  Ainll  donc  non  feulement  lainâ  Paul 
veut  que  nous  foyons  attrempez  ,  &  que  nous 
réglions  tellement  noftre  vie,  qu'on  ne  puiffe 
prendre  occaûon  de  fe  iouer  à  Dieu ,  &  mef- 
prifer  fa  Parole  :  mais  que  pluftoll  on  voye 
que  comme  nous  parlons,  nous  tafchons  aufsi 
d'approuuer&  ratifier  la  doârine:  &  quadoa 
verra  cela,qu'on  foit  incité  à  bien  faire:  mais 
il  adioufte  quant  &  qa»nt,tn fiiine paraUimon 
ftrant  qu'il  ne  veut  point  raefmes  qu'en  nos 
propos  il  y  ait  aucune  vanité  qui  foit  pour  in 
citer  à  fegaudir. Car  nous  fçauôs  quedesmef 
châs  propos  &  paroles  procède  la  corruption 
des  bonnes  moeurs  ,  comme  faind  Paul  le  dit  i.Cor.if. 
en  l'autre  paflàge:  &  mefmes  c'a  elté  vn  pro-  33- 
ucrbe  commun  entre  les  Payens  :  car  il  allè- 
gue là  vn  tefmoignage  d'vn  Poète  prophane,  ■ 
pour  faire  plus  grand'  honte  aux  fidèles,  fi  ea 
leurs  paroles  &  deuis  ils  font  desbordez  ,  & 
qu'ilks'infe(;lent  de  corruption  ,quec'iitvn 
ligne  decontemnementde  Dieu  ,  &  qu'ils  ne 
demandent  que  de  donner  la  vogue  à  tous  vi- 
ces. Voila  donc  en  fomme  ce  que  nous  auons 
à  retenir.  Or  quand  il  parle  des  ferfs  &  efcla- 
ucs,ildit,  Qjt'ilsobeijjentà  leurs  mai ftres,tji*' ils 
leur  pUifint  en  tout ,  qii'ih  ne  rechignent  foint, 
tp'ilsnefoytnt  point  fiUars, mais qit  ils  monjlrêt 
-rne  bonne  loyauté  en  toutes  cbofes. Ici  nous  voy- 
ons bien  comme  faindi  Paul  a  regardé  notam 
ment  à  ceux  defquels  il  parloit.  Car  les  ferfs 
de  ce  temps-la  eiloyent  adonnez  à  pillages: 
&  puis  ils  eftoyentcontredifans,  voire  s'ils.ne 
enflent  craint  les  coups  dont  ils  eftoyent  cha 
liiez  :  mais  on  les  voit  quelque  tois  endurcis,  ' 
d'autant  qu'on  ne  les  nourrifloit  point  humai 
nement ,  mais  qu'on  les  traittoit  comme  des 
belles  brutes, on  les  frappoit,on  les  tôurmen 
toit, on  les  mettoit  à  la  géhenne, que  bien  fou 
u.ct  leurdifner  efloitd'ellre battus  tous  nuds, 
tellement  que  le  fang  en  fortoit  de  tous  co- 
llez.D'autant  donc  qu'ils  eftoyent  ainfi  endoi-- 
cisau  mal,  il  ne  fefaut  pointesbahirs'ilya-' 
Hoit  Celle  corruption  de  fe  reuenger  contre 
leurs  niaiftics  quand  ils  en  auoyent  quelque 
iBoyeow  Orniaiotcnant  fainft  Paul  ne  laifle 
poiu|  de.  les  exhorter  de  côplaire  à  leurs  mai 
lli-es, . voire  ien  tout  bien  ,  comme  il  met  ceft* 
exception  en  d'autres  palTages.  Et  pHis,9«'/7i  ïf'".<'.T 
fiytnl  pati(ns,C  qii'ih  ne  repli<]uent  riin.Et  au 
rcfte,  qu^ih  m:mp.rent  bon  exemple  ,  encores  epu 
Unrs  ne.il flres  foyent  ivgrals.  Or  combien  que^ 
entre  nous  il  n'yait  point  vne  telle  feruitlide: 
comme  elle  a  clVé  anciennement,  fi  eft-ce  que- 
celle  dotirineauiourd'luiy  ne  nous  ell  pas.  in», 
tjle.)  C;ir  ceux  qui  font  en  fuietion  moyenne,; 
doiuenc  s'acquitter  de.leiur.deuoir  tar»  plûSi 
alaigrcmcnt.Car  voici  iacôpaiaifon  quenoBS 
deuous  faire: Si  ceux  qui  eftoyent  efckues,.8C' 

qu'on 


s  V  R   L*  E  P  I  s  T.   A    T  /  T  E.  S9i 

tfo'on  traictoit  en  telle  criiauté,&  lefquelç  n'e  que  leurs  niai/lre<;  auront  le  dos  tomné.ih  fa 
lioyent  fupportez  nullemét,  R  ceux-là  eiloy-  cent  du  pis  qu'il  leur  fera  pofsible  :  comme  il 
ent  tenus  l'elon  Dieu  d'obeir  à  leurs  maiftres,  y  en  a  qui  fçaiiront  faire  lî  bonne  mine  ,  que 
*oire  qui  exei-çoyent  vne  telle  tyrannie  fur  les  mailtres  y  feront  troroptz.  Or  faind  Paul 
eux,  que  fera-ce  de  ceux  qui  font  à  louage,  veut  qu'il  y  ait  vneafFeiftion  franche,qu'enc&- 
qui  ne  font  point  ainfi  tourmentez  ,  s'ils  ne  res  qu'ils  ne  fuflent  point  regardez  de  leurs 
s'acquittent  de  leur  deuoir?  ne  font-ils  point  maiftres ,  qu'ils  ne  craigniflent  point  d'en  e- 
doublement  coulpables  deuant  Dieu  ?  Il  cft  ftre  lamais  blafniez  ni  reprins.&tâtmoinspu 
bien  certain.  Car  feion  que  noftre  condition  nis ,  que  toutesfoisils  ne  laiflèntpasdeleur 
eft  douce  &  fupportable ,  tant  moins  aurons-  eftre  loyaux  comme  deuant  Dieu.  Orcepen- 
nous  d'excufe,  finon  que  nous  adwifiôs  de  no»  daut  il  y  a  l'exception,  que  les  feruitcurs  plai 
ranger.£t  pourtant, que  ceux  qui  font  en  fer-  fentaux  maiftresen  tout  bien.Carfivn  ferui- 
uicc  cognoiflcntque  celle  doftrine  s'adreffe  teur  pour  gratifier  àfon  maiftre  veut  eftre 
auiourd'huy  àeux,&  que  faincl  Paul  leur  com  fon  macquereau,qu'il  batte  l'vn,  qu'il  frappe 
mâde  d'cftre  tellement  i'uiets  à  leurs  maiftres,  l'autre,  qu'il  pille,  qu'il  defrobbe  ,  qu'il  bla  A 
qu'ils  ne  leur  répliquent  point,  qu'ils  ne  foy-  pheme  Dieu  :  on  voit  que  tout  ordre  feroir 
ent  point  pillars,  qu'ils  tafchentdelcurcora-  peruerti  en  cela.  Notons  bien  donc  quand  il 
plaire  entant  qu'il  leur  fera  pofsible.   Voila  eft  parlé  des  degrez,  que  Dieu  fereferuetouf 
pour  vn  item.Êt  mefmes  nous  pouuôs  recueil  iours  fon  authorité,  &  qu'il  ne  quitte  pas  fon 
lir  vne  admonition  générale  de  ceci.  Car  il  office.  Si  donc  les  feruiteursdoiuent  obéira 
nous  femble  que  iî  chacun  ne  fait  fon  deuoir  leurs  maiftres ,  ce  n'eft  pas  finon  en  bien.  Et 
enuersnous ,  que  nous  fommes  quittes  quand  qu'ainfi  (bit ,  quand  vn  maiftre  aura  voulu  in- 
nous  ferons  du  pis  que  nous  pourrôs.  Et  com  duire  fes  enfans  ou  fes  feruiteurs  à  mal  faire, 
ment?dequoy  liiis-ie  tenuàceftuy-laî   Voi-  àce  qu'ils  foyentlarrôs  ou  meurtricrs:qu'vn, 
re, comme  fi  ie  ne  l'eftoye  point  à  Dieu. Mais  à  l'appétit  de  Ion  maiftre,  aura  attété  de  tuer 
ileftditque  la  charité  nous  doit  rendre   fu-  quelqu'autre,Queleferuiteur  aura  cmpoifon- 
iets  les  vns  aux  autres,  &  nous  y  oblige.  Ainfi  né,  qu'il  aura  fait  quelque  trouble  ,  qu'il  aûîa 
donc,  qu'il  y  aitceftecomparaifon  ,  Helas.'&  voulu  faire  quelque  trahifon,le  feruiteur  fera 
quand  nul  ne  nous  pourra  demander  par  ty-  il  abfous,pour  dire, Mon  maiftre  me  l'a  com- 
rannie  plus  qu'il  ne  Juy  appartient ,  tant  plut  mandé.?  Commenr ,  ton  maiftre?  Il  faut  qu'il 
^•..         fuis-ie  malin  G  ie  ne  péfedem'acquitter,puis  fbitfuiet  aufsi  bien  à  la  police  :  par  plus  forte 
!            que  Dieu  nous  fupporteainfi.  Aduifons  donc  raifon  il  faut  que  tu  le  fois.  Orfilaiuftice 
quand  nous  ne  ferons  point  rudement  trait-  ne  laifle  point  d'auoir  fon  cours.combien  que 
tez  ,  que  nous  deuons  auoirvn  courage  tant  les  maiftres  foyent  obéis  chacun  en  fa  mai- 
plus  franc  &  mieux  difpofé  de  feruir  à  nos  fon,  penfons-nous  que  Dieu  vueillc  refigner 
prochains,&  de  faire  ce  qu'il  nous  fera  pofsi-  fon  office,  &  qu'il  (è  déboute  de  (on  droift, 
ble,  pour  monftrer  que  nous  ne  deuons  point  fous  ombre  que  les  maiftres,  &  Magiftrats, 
frauder  ceux  aufquels  Dieu  nous  a  obligez.  &  autres  feront  en  degré  plus  haut,  &  que  les 
Voila  comme  celte  dotîrine  non  feulement  feniiteurs  &  le  peuple  foyent  inferienrs?Re— 
eft  pour  les  feruiteurs  &  chambrières,  mais  tenons  donc  que  fi  nous  voulons  eftre  fuicts 
aufsi  en  gênerai  &  fans  exception  pour  tous  aux  hommes ,  ce  n'eft  pas  à  dire  que  le  droift 
fidèles.  Mais  notamment  quand  il  eft  dit  que  de  Dieu  foit  diminué  Se  empefché  pour  cela: 
les  feruiteursdoiuent  eftre  agréables  à  leurs  mais  au  contraire,  nous  deuons  eftre  tanc  ' 
maiftres,  par  cela  il  nous  eftmonftré  qu'ils  plus  incitez  à  feruir  Dieu.    Car  il  eft  dit  que 
ne  les  doiuent  point  feruir  d'vne  contrainte  les  poures  ferfs, combien  qu'on  les  tounnen- 
fculement,  mais  qu'ils  cognoirtent  quence  te,  combien  qu'on  les  traittc  fi  durement  que 
faifant  ils  feruent  â  Dieu.  Ileftvray  (comme  c'eft  vnc  horieDr,dùiuent  toutesfois  tafcner 
fainô  Paul  dît  au  feptieme  de  la  première  aux  de  complaire  à  leurs  maiftres.  Et  voici  noftre 
Corinthiens  }  que  fi  vn  homme  pouuoit  eftre  Dieu ,  qu'eft-il  au  prix  des  hommes.'   Car  il 
librede  ce  temps-la, il  neledeuoitmefprifer,  n'exerce  pas  vne  tyrannie  fur  nous, il  ne  nous 
ainseftoit  à  fouhaiterrmais  quoy  qu'il  en  foit,  preflc  point  comme  feroyent  les  homes  mor 
fi  veut-il  que  chacun  fe  ticne  en  fon  ordre ,  Se  tels ,  il  ne  veut  point  arracher  noftre  fang  8i 
qu'il  cognoi(re,Dieu  m'a  voulu humilier,il  ne  noftre  fueur  pour  fon  profit  ou  aduantage. 
m'a  point  conftitué  en  dignité  ,  mais  a  voulu  Qjjeft-ce  qu'il  demâde  finon  ce  qui  eft  pour 
que  iefoye  fuiet:&  ainfi  il  faut  que  ieme  tie-  nollrebienèc  falut?  Qjianddonc  Dieu  fede- 
jie  au  lieu  où  il  m'a  mis.  Apprenons  donc  que  clare  ainfi  libéral  enuers  nous ,  mal-heur  8c 
fi  quelqu'vn  eften  feruitude,  il  ne  faut  point  •  donble  mal-heur  fi  nous  ne  fommes  difpofei 
qu'il  foit  froid  à  bien  fàire,mais  qu'il  s'efFor-  tellement  que  nous  foyons  afftôionnczà  le 
ce  foy-mefme ,  iufqu'àtant  qu'irait  vn  cœur  fennr,&  à  nous  offrir  à  luy  du  tout  en  facrifi- 
*?"»•*•  alaigre.vne  afFeftion  franche  &  libre  de  s'em  ce  volontaire.Et  ainfi  retenons  bien, quand  il 
*•*•         ployerrcomme  aufsi  fainft  Paul  dit  eti  l'autre  eff  parlé  de 'la  fuiettion  que  nous  deuons  aux 
4oL^.ti,  j)3flage ,  qu'il  ne  faut  point  que  les  lêruiteurs  hommes,  que  par  cela  Dieu  nous  monftre  que 
complaifeiuàlcHriiiiaiftftsiraihqàefîtuft  tant  plus  nous  femmes  tenus  à  luy, voire  lans 

rFf.i. 


594 


SERMON     XH. 


compariifon  :  &  nous  fçauôs  aufsi  que  fa  ma- 
icfté  fiirmonte  tout  ce  qui  fera  de  fiiperiorité 
entre  les  créatures  humaines.  Mais  d'autant 
que  de  fon  cofté  il  ne  demande  que  de  nous 
gouuerner  dVnc  façon  paternelle,  &  qu'il 
1er  il  $  nous  fiipporte comme  fes  enfans,  (  ainlî  qu'il 
le  déclare  par  fon  Prophete)tant  plus  le  de- 
uons-nous  feruir  d'vne  affection  franche  ic 
volontaire.  Or  fâm£t  Paul  après  auoir  traitté 
de  cela, il  adiouite,  Cl^e  h^r.xce  de  Dieu  cft  af 
tiarue,yoire  f.iltuaire  à  tous  hommes ^ni^us in flriti 
fant  q<ie  nou-s  délions  rcnccer  à  toute  impiété,  & 
à.nos apl'etism'^ndains  ,  pour  yiiirc-  fainctemcnt, 
iujicmi-nt  O"  fobrcmrnt  en  ce  monde  ,  'ufijues  à 
ce  qiiele gr.xiid^  Se'gneut  &  Rédempteur  lefus 
Chriflappaniffe.  Or(comnie  delîa  nous  auons 
touché  ci  delFus)  fainû  Paul  ne  traitte  point 
par  le  menu  ,  &  ne  fait  point  vne  déclaration 
entière  de  tous  les  deuoirs  particuliers  qui 
font  en  tous  efiats,  mais  il  fe  contente  d'ame- 
ner ici  quelques  exemples  :  comme  s'il  diloit 
que  fi  nous  voulons  bien  édifier  l'Eglile  de 
Dieu,  nous  qui  auons  la  charge  d'anoncer  l'E 
uangile  ,  nous  ne  dcuons  pas  nousarrefter  à 
desqueftions  curieufes,&  qui  n'apportent  nul 
profit,  mais  que  nous  deuons  foliciter  chacun 
à  faire  fon  deuoir:  &  non  feulement  en  gêne- 
rai nous  deuons  monftrer  quelle  efl  la  règle 
de  bien  &  fainftement  viure  ,  mais  nous  de- 
uons aufsi  déclarer  aux  pères  comme  ils  ont 
à  gouuerner  leurs  enfans:aux  enfans, comme 
ils  ont  à  s'humilier  fous  leurs  pères  &  mères: 
que  nous  deuons  reraonftreraux  maris  com- 
me ils  doiuent  viure  paifiblement  auec  leurs 
femrnes,que  nous  deuons  remonftrer  aux  fem 
mes  d'eftre  paifibles  auec  leurs  maris ,  que 
nous  deuons  monftrer  aux  feruiteurs  comme 
ilsdoiuent  eftre  loyaux  enuers  leurs  maillres: 
&  aufsi  que  nous  deuons  retenir  les  maiftres, 
à  ce  qu'ils  ne  penfent  point  que  tout  leur  foie 
licite, &  qu'ils  n'abufent  poiiiîde  leurautho- 
ritc  pour  eftre  cruels ,  mais  qu'ils  fe  conten- 
tent d'auoir  ceft  honneur-la  ,  de  dominer  fur 
des  créatures  raifonnables.  Voila  donc  com- 
me fainiîl  Paiil  en  brief  a  voulu  toucher  que 
la  doftrine  4e  Dieu  n'eft  pas  poijr  nous  cha- 
touiller les  aureilles ,  mais  qu'elle  eft  pour 
nous  édifiera  tout  bien.  Voira(di-ie)enfom- 
rae  cequp  nous  auons  à  retenir.  Or  rriainte- 
nant  il  e.ft  queflion  de  confermer  ceftedoftri 
ne.  Et  comment  la  conferme-il?  Ôrnousa- 
uons  veu  en  l'autre  paflage,  que  iouinelle- 
niét  ondoitprcfchercefte  grâce  de  Dieu  qui 
s'eft  déclarée  à  la  venue  de  noftre  Seigneur 
lefus  Chrift.  Voila  vu  fccret  admiiable  .que 
Dieu  foit  manifcfté  en  chair,  &  que  cepédanc 
il  nous  ait  monftré  fa  gloire  cclelle,,afînique 
niius   foypns  vnis  à  icclle.  Voila  donc  pu  il 
faut  que  tous  les  Payeurs  s'occupent.   Car 
quand  ils  ne  ccfleront  de  rciuonftrer  quelle, 
acftéla  (agciïcque  Dieu,n.ous,a  declareçen 
la  perfonnc  de  fon  Fils  ,  il  eft  certain  que  ce 
ne  fera  point  temps  pcrdu.Ec  voila  pourquoy 


aufsi  en  l'autre  paffagc  «ux  Ephelîcns  ,fain£i 
Paul  dit  que  c'eft  la  hautelle  &  la  profon-  iph-i-it 
dcur,le  long,  le  large,  &  l'efpais  de  toute  co- 
gnoilTance  ;  quand  nous  aurons  bien  eftendu 
nos  fens  pour  fpeculer  le  plus  haut  qu'il  fera 
pofbible,  que  nous  voudrons  entrer  aux  abyf 
mes  pour  nous  enquérir  de  ce  qui  nous  eftca 
ché  iulques  au  bout ,  que  nous  voudrons  paf- 
fer  la  mer  &  de  long  Se  de  large,  fi  eft-ce  que 
nous  auons  vne  lagclTe  ,  dit-il ,  afllz  haute  & 
aflez  profonde  ,  alTcz  longue  &  aflez  large, 
quand  nous  cognoidrons  ladiledion  inRpic 
que  Dieu  nous  a  monftree  en  la  pcrfonne  de 
fon  Fils  vnique.  Or  maintenant  regardons  i 
quel  propos  c'eft  qu'on  nous  doit  iournelle- 
ment  déclarer  ce  haut  myftere  &  ineftimable, 
que  Dieu  eftmanifefté  en  chair.  Sainft  Paul 
dit  que  fur  tout  c'eft  vne  règle  pour  viure  fairt 
dément.  Et  c'eft  ce  que  funù  lehan  remon-  l.leh.^.S 
itre,  que  lefus  Chrift  n'eft  point  apparu  pour 
édifier  le  règne  de  Satan, mais  pour  le  ruiner, 
afin  que  le  péché  n'ait  plus  la  vogue. Puis  que 
ainfi  eft  donc.cognoirtbns  que  quand  on  nous 
parle  de  noftre  rédemption  ,  laquelle  nous  a 
elle  acquife  à  la  mort  Se  pafsion  de  noftre  Sei 
gneur  lefus  Chrift,  que  c'eft  afin  que  nous 
foyons  retirez  hors  de  ce  monde  ,  que  nous 
puifsions  renoncer  à  nos  mefchantes  cupidi- 
tez  ,  &  nous  dédier  du  tout  à  Dieu  :  comme 
aufsi  il  eft  déclaré  par  ùinCt  Pierre  ,  &  puis 
aux  Ephefiensaufsi.que  noftre  Seigneur  nous  Efr/>.i.i+ 
a  rachetez  à  foy  ,  afin  que  nous  récitions  fes  j.p/f.^.i 
louanges  iournellement,  puis  qu'il  nous  a  re- 
tirez de  ce  monde  Se  de  toutes  les  pollutions 
qui  y  régnent.  Pourquoy  donc  eft-ce  que  le- 
fus Chrift  a  efpandu  fon  fang  ,  finonafinde 
nous  nettoyer?Et  fi  nous  fommes  ainfi  lauez, 
faut-il  que  nous  veniôs  encores  derechef  no*-: 
polluer  ,  comme  des  pourceaux  qui  fe  vien- 
drôtveautrer  en  l'ordure  &en  latange,  quâtl 
on  les  aura  fait  pâfler  par  l'eau  ?  Voila  donc 
à  quoy  faintt  Paul  a  regardé.  Or  maintenant 
il  refte  que  nous  dediiifion-  le.  points  5:  arti 
clés  qui  font  ici  contenus. Il  a  bien  talu  noter 
l'intention  principalcquand  il  déclare  que  la 
grâce  de  lefus  Chrift  eft  apparue,  à  ce  qu'e-,< 
ftans  retirez  du  monde ,  nous  foyoos  vn-peu^l 
pie  facré,'S:  que  Dieu  nous  gouuerne..  Il  fautj 
donc  que  nous  foyons  exhortez  tous  Icsiourf  ' 
à  noftredeuoir.  ^lais  faitiâ  Paul  ayant  parlp 
des  ferfs  ,  dit  <]sie  lu  f^race  de  D'eu\ejt-^pl\uritf!_ 
.  fleinenemeta  tous  hommes  :  comme  iPWAiioit  ^ 
que  Dieu  ne  i'cd  point  ccntcré  de  choifir  les 
grans  &:les  nobles, &  ccu*  qui  fout  en  reputa 
tion,nuis  il  a  efpandii  fa  niiftricord^  iulques;., 
aux  plus  ppfis,ccu>-,  qu'on  rejette,  ceux  qu'on,,) 
,  defdaiguc,<ïu,i  font  çn  opprobre.  Dieu  a  vou»^ 
lu  honorer  (;fj^x-la,lçs  mcttaiiqa,iuaTig.& de- T 
gré^l,e  fi;s.^ffrns..Qr  nous  voyons  mamte-^", 
,  n^ç  pqHrquov^!,n4   Paul  paihe  jci  de  tous  ;    ^  .»*^î 
,  hommes:  &  auftjid*!  U  po«s  pouuôsiugcr  quel,.  .V* 

le  fottifc  c'eft  àccsbrouiilqns,  qui  fe  méfient       .     .  .io» 
devouiQtr  eipofer.r£ftriçute  faif.a«  .  Si  ne. 

i'cnten 


s  V  R    L'  E  P  I-  S  T. 

s'entcijdçnt  point^ef)  leurftyle.,  quand  ijs  di- 
ront,£t  Dieu  veut  que  tout  le  mode  foi  i  iiu- 
iiécla  grâce  de  Dieu  eft  apparue  pour  le  lilut 
de  tout  lemôde:il  s'enûut  donc  quMyatrjc 
arbitre,  qu'il  n'y  a  pointd'eleâion  ,  que  nul 
n'eft  predcftiné  â  faliit.Or  il  faudrait, li  Us  be 
lies  parloyent  ,  qu'elles  tufient  vn  peu  plus 


A    TITE. 


S91 


leur  fb.uuient  plus  à  quoy  ils  font  appelez  ,  hi 
à  quoy  Dieu  regarde  quand  il  nous  propofe 
ainliles  tlirefors  de  ibn  amour  paternelle.  A 
l'oppolîte  faîd  Paul  dit  que  la  grâce  de  Dieo 
eft  apparue  pournous  inftruire.  Par  cela  en- 
tendons que  nous  ne  pouuons  pas  feparer  l'vn 
d'auec  l'autre, la  fainde  vie  &  la  foy  que  nous 


d'aduis  que  cela.  Car  fainft  Paul  n'a  voulu  en    auons  pour  nous  repofer  en  noftre  Seigneur 


ilTàge  ,  m  en  ceux  que  nous  auons  e.vpo 
fezà  Timothee, linon  dire  que  lesgjans  font 
.appelez  de  Dieu,  combien  qu'ils  n'en  foyent 
pas  dignes ;les  petis.cÔbicn  qu'on  les  mefpri- 
fe  ,  ne  laifTent  pastoutesfois  d'cftre; adoptez, 
^uç  Dieu  leur  tendia  main  pour  les  r^^ceuoir. 
.  De  ce  tempi-Ja,  pource  que  Jes  Princes  ic  les 
Klagilhats  eftoyety  ennemis  mortels  de  !'£- 
uâgile.il  fembloit  que  Dieu  les  euft  reiettez, 
&que  iamaisilsncdeuflent  paruenirà  falut. 
Saind  Paul  dit  qu'il  ne  faut  point  leur  fermer 
la  porte,  &  que  Dieu  en  la  fin  en  pourra  clioi 
fîr  de  cefte  compagnic-la  ,    encores  qu'ils 
femblent  eftre  defeiperez  du  tout.Ainlî  en  ce 
paflage  .après  qu'il  a  parlé  des  poures  efcla- 
ues  qui  n'eftoycnt  pas  tenus  du  rang  des  hom 
mes ,  il  dit  que  Dieu  n'a  point  laifle  pourtant 
de  fc  monftrer  pitoyable  enuers  eux  ,  &:  qu'il 
veut  que  l'Euangile  foit  prefché  àceuxauf- 
quels  les  hommes  ne  daignent  pasibnner  vn 
mot.  Voila  vn  poure  homme  qui  fera  reiet- 
lé  de  tous ,  à  grand'  peine  luy  dira-on  ,  Dieu 
yous  gard'  :  Se  Dieu  s'adreffe  à  luy  première- 
ment, &  fe  déclare  eftre  fon  Père  ,  &  veut 


lefus  Chrift,&  pour  nous  remettre  enl'obeif 
fance  qu'il  a  rendue  à  Dieu  fon  Père.  Ainfi 
donc ,  nous  declare-on  que  Dieu  nous  a  efté 
propice, &•  qu'il  s'eft  voulu  reconcilier  à  ncui 
en  la  perfône  de  noftre  Seigneur  lefus  Chriû? 
Sçachons  que  c'eft  afin  que  nous  conceuion» 
vne  haine  de  nos  péchez  ,  &.  qu'en  ce  fïifant 
nous  foyons  tant  plus  incitez  à  nous  retirer 
à  noftre  Dieu,  veu  qu'il  ne  veut  point  que 
nous  demeurions  efgarez  ,  &  que  nous  fuiuiôf 
le  train  de  perdition  &  de  mort  où  nous  e- 
flions.  Voila  donc  le  lien  infeparable  de  la 
grâce  de  Dieu  auec  la  doûrine  de  bonne  vie, 
tant  s'en  faut  que  fous  ombre  que  Dieu  nous 
a  fait  mifericorde  ,  il  nous  faille  demeurer  là 
ftupides  ,  fans  difcretionde  bien  &  de  mal, 
que  pluftoft  nous  deuons  cheminer  en  folici- 
tude  pour  nous  retirer  de  toutes  les  pollu- 
tions de  ce  monde.  Voila  pourquoy  aufsi 
fainâ  Paul  ne  trouue  point  exhortation  plus 
viue  &  de  plus  grande  vertu,  que  de  propofer 
la  mifericorde  de  Dieu  quand  il  veut  bien  ex 
horter  :  Mes  amis  (  dit-il  )  cognoiffez  com- 
me Dieu  s'eft  monftré  &  déclaré  enuerj  vouf 


que  ceftuy-ci  l'efcoute.&neluy  ditpas  corne    pitoyable  ,  &:  que  cela  vous  efmeuue  ,  qu'il 


€a/.î.i3 


Yn  mot  en  palFancmais  ils'arrcfte  là  pourdi 
re,  Tu  es  de  mon  troupeau  ,  que  ma  Parole  te 
foit  pour  pafture,  qu'elle  foit  la  vie  fpirituel- 
Jedeton  ame.  Q^iand  donc  Dieu  s'eft  ainfi 
monftré  lî  bénin  enuers  le  genre  humain,  que 
ceux  qui  eftoyent  en  .opprobre  &  tant  vilipen 
dez  ,  qu'on  ne  daignoit  pas  les  regarder  d'vn 
Ijon  œil ,  qu'il  a  prins  ccux-la  comme  en  fon 
giron, qu'il  fe  déclare  Père  enuers  eux  ,  &  les 
adopte  pour  fes  enfans,  ne  taut-il  pas  qu'il  v 
ait  vnejiorrible  dureté  en  nous  ,  fi  nous  ne 
fommes  amollis  quand  vne  telle  bonté  de  no- 
llre  Dieu  s'eft  ainlî  déclarée?  Ainfi  donc  fça- 
chons  que  ce  mot  emporte  beaucoup, quand  il 
elt  dit  que  U  grâce  dt  D.ieu-cft  apparue  plei- 
nement à  tous  hommes.  .Or-cepcndant  no- 
tons ce  mot  qu'iladioufte  ,  ^tie  c<ft  four  nous 
îuJïruiTt,  Ç^r  nous.en  v.errons(beaucoup  qui 
abiifêntviieinenjct  de  la  booié  de  EUeun^uad 
n's|îë.donnentjilcence  de  mal  faire.  Et  voila 
pourquoy  auûi  iainft  Paul  nous  exhorte  que 
nous  ne  tournions  point  la  liberté  qui  nous  a 
eftélî  chèrement  acquife,  en  couuerture  &i 
licence  cfiarneUq.  Nous  verrpnsdotjcbcauy 
C(i^jp  ^f  gens  qui  fe  louent  auec  Dieu  ,  &  leur 
/énîtré  que  tout  leur  eft  permis ,  d'autant  que 
ilsont  efté  rachetea  par  noftre  Seigneur  le- 
fus Chrift.  Or  cela  eft  trop  commun:  mais  on 
en  verra  d'autres  qui  s'anonchaliflent  quand 
on  leur  prefchc  la  nufericordede  Dieu;  il  ne 


vousenfl.ime  en  l'amour  dcvoftre  Dieu.  Car 
(comme  l'ay  dit  )  c'elt  vne  ingratitude  trop 
brutale, fi  no'  ne  fommes  retenus  en  fon  obeif 
fance.  Voila  ce  que  nous  auons  â  noter  en  ce 
mot ,  que  la  grâce  de  Dieu  eft  apparue  pour 
nous  inftruire.  Or  il  faut  bien  que  ceux  qui 
ont  la  charge  d'anonqer  l'Euangile  foyent 
prudens  en  ceft  endroit.  Car  s'ils  difent.Dieu 
s'eft  dççlaré  Père  du  monde  ,  quand  il  a  en- 
uoyé  fon  Fils  pour  nous  racheter  ,  que  nous 
auons  toute  iuftice  en  la  remifsion  de  nos  pé- 
chez :  s'il  n'y  attoit  que  cela  ,  nous  voyonf 
comme  le  monde  eft  enclin  à  mal,  &  qu'il  taf- 
che  de  peruertir  la  grâce  de  Dieu,&  l'elfacer. 
Ce  feroit  donc  pour  lafcher  la  bride  à  tout 
mal.  Mais  il  faut  que  ces  deux  points  demeu- 
rent, c'eftafçauoir  pénitence  &  foy.  Comme 
quand  noftre  Seigneur  Iffus  Chrift  enuoye 
fes  ^ifciples,  il  leur  commande  de  prefcher  ^'"14' 
la.remifstpndes  péchez  :  &  outre  cela  peni-  47. 
tence:  il  ne  veut  point  que  l'vn  foit  feparéde 
l'autre.  Il  eft  dit  du  mariage  ,  que  l'homme     ''"•''• 
ncdoit  poiijt  feparerce  que  Dieu  aconioint.    * 
Par  plus  forte  raifon  ,  cpftevnionqui  appar- 
tient à  la  vie  fpirituellc,  ne  doit  point  eftre 
rompue.  Et  ainfi  qiard  nous  voudrons  bien 
prclcher  la  foy  il  nous  faut  aulM  prefcher  pe 
nitence  :  c'eftà  dire  ,  en  monftrant  que  Dieu 
nous  a  receus  à  merci,  &  que  iournellf  ment 
il  nous  pardonne  nos  fautes  par  fa  botégra- 

FFf.il. 


Ç9<f 


SERMON    XII. 


luite,  &  que  nouç  fotnmes  iuftifiez  d'autît  cjue 
Ielu5  Clirilt  l'a  reconcilié  atiec  nous,  &  qu'il 
nous  tient  pour  iiiftes,c5bien  que  nous  foyons 
pourcs  peclieurs:en  prefchant  cela  il  faut  que 
nous  adiouftions, que  c'eft  àceft.-  condition 
que  nous  retournious  à  Dieu:comme  aufsi  Jef 
ia  lien  eftoit  parlé  par  les  Prophètes  .  Il  eft 
dit  que  Dieu  viendra  pour  fauuerfon  peuple: 
voire  afin  que  les  reliques  de  lacob  fe  retirent 
de  toute  iniquité  ;  c'eft  à  dire,  afin  que  ce  que 
Dieu  aura  referué  par  fa  mifericorde,  l'oit  vn 
peuple  dédié  à  foy  .  Or  puis  qu'ainlî  eft  que 
■Dieu  nous  a  acquis  tant  chèrement ,  ce  n'eft 
pas  raifon  qu'yn  chacun  viue  à  Ion  appétit,  & 
félon  fa  phantaiie:  mais  il  faut  que  noftre  Ré- 
dempteur iouiflede  toute  noftre  vie.  Et  no- 
tamment il  monftre  quec'ffl  afn  que  rtnoncani 
à  toute  impieté,  O"  ^  («ût  def>rsmi>n{a!ns,nouS 
tluions  en  ce  fecle fainîlement ,  iuflement  ù" 
fobretnent ,  attenJattsla  -venue  de  ce  rrand  Sei- 
gneur qujnd  il  fe  monftrera  tn  fa  gloire  .  Ce  n'e- 
ftoit  point  allez  d'auoir  dit  que  la  gloire  de 
■    Dieu,  quand  elle  fera  bien  prefchee,  emporte 
inftruûion  ,  ou  fainfteté  de  vie  ••  mais  il  fa- 
loit  Spécifier  ce  qui  eft  ici  contenu,  qu'en  pre- 
mier lieu  il  nous  faut  renoncer  à  toute  impie- 
té,&  à  tous  defirs  mondains.  En  Comme, fainft 
Paul  a  ici  marqué  quelle  eft  la  corruption  de 
la  nature  humaine  deuat  que  Dieu  befongne: 
il  y  a  l'impieté:&  puis, les  defirs  mondains.Or 
quant  à  l'impiété, fainû  Paul  n'entend  pas  tou 
tes  les  fuperftitions:  comme  nous  voyons  que 
les  hommes  veulent  eftre  fages  à  leur  phanta- 
fie,  &  cependant  ont  beaucoup  de  folies  qu'ils 
conçoyuent  en  leur  tefte  quand  ils  cuident  a- 
uoir  quelque  prudencetils  font  aufsi  fauuages, 
£ers  &  arrogans:&  tout  cela  eft  impieté.Mais 
fainâ  Paul  entend,  deuant  que  Dieu  nous  ait 
illuminez  en  la  vérité  de  fa  Parole,  que  quel- 
ques (nines  que  nous  facions ,  quelque  hypo- 
crifie  qu'il  y  ait ,  toutesfois  iamais  nous  n'a- 
uons  vne  droite  pieté  en  nous  :  comme  il  eft 
'    certain  que  les  infideles,corabien  qu'ils  facent 
beaucoup  de  monftres,  &  qu'en  cérémonies  ils 
monftrent  vne  grande  deuotion ,  &  ardente,  fî 
eft -ce  que  iamais  il  n'y  aura  crainte  de  Dieu 
aux  hommes,  iufques  â  ce  qu'ils  foyent  deue- 
ment  enfeignez.  Et  puis  il  y  a  les  defirs  mon- 
dains qui  régnent  quant  &  quant  en  noftre  na 
ture.Ces  deux  chofes  font  bien  à  poifer.  H  eft 
vray  que  maintenant  nous  ne  pourrions  pas  le 
detlarer  à  plein  :  mais  pour  la  fin  retenofl^  eii 
brief,  que  fainft  Paul  a  voulu  ici  déclarer  quel 
le  Jnftruaiottil  nous  faut  receuoir  en  l'Euan- 
gile:c'eft  de  cognoiftre  le  mal  qui  eft  en  nous: 
&  l'ayans  cognu,  de  nous  y  defplairc  .  Voila 
pour  va  item .'  Let  hommes  donc  ne  com- 

.  i  i.:n;  ,;■ 
iutà  Jiior 
..iiinomnî  ,s"  i»>.ii>'j:,'->-»''j;. 


menceront   iamais  à  Bïcts  faire ,  finon  que 
Dieu  y  ait  befongne,  qu'ils  foyent  reforniei, 
qu'ils  foyent  faits  nouuelles  créatures  .  Car  fî 
nous  voulons  trouuer  quelque  bonne  difpo- 
fition  en  nous  ,  c'eft  vn  abus .  Ainfi  donc  ap- 
prenons, pour  donter  toutes  les  mefchantcs 
afFedions  de  noftre  chair.qu'il  faut  que  Dieu 
defploye  la  vertu  de  fon  (àinft  Efprit,  autre- 
ment nous   demeurerions  là  croupiffàns  en 
nos  vices.Voila  pour  vn  itein.Or  là  delTus  co- 
gnoiflons  que  les  deux  combles  de  vices  &<lc 
tout  mal  font,vn  mefpris  de  Dieu,quand  nous 
n'aUons  point  vne  droite  rcuerence  pour  che- 
miner félon  fa  volonté:  &puis,qiic  nous  fay- 
uons  nos  delîrt  mondaiti^  ,  Se  nos  mefchantc» 
cupiditez,tufqu'à  ce  que  Dieu  nous  ait  attirez 
à  foy.  n  eft  vray  que  les  incrédules  fe  feront 
aflez  à  croire  qu'ils  font  tant  deuots  que  mer 
ueilles,mais  ce  n'eft  qu'abus.  Or  ce  n'eft  point 
fans  caufe  que  le  Prophète  Ifaie  dit  que  l'E- 
fprit  de  la  craintede  Dieu  eft  donné  à  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift.   Par  cela  il  nous  mon- 
ftre que  nous  ne  pouuôs  auoir  vne  vraye  obeif 
fance  de  Dieu,  finon  que  par  foy.  Et  ainfi  les 
pourcs  incrédules  auec  leurs  fuperftitions  ne 
font  que  fe  mocquerde  Dieu.tournans  à  l'en- 
tourdu  pot,  Scn'approchent  point  de  luy.iuf 
ques  à  ce  que  par  foy  ils  y  foyent  attirez.  Or 
cependant  il  y  a  aufsi  les  defirs  mondains  qui 
nous  tranfportent.que  nous  fommes  adonnez 
àmefchantescupiditez.qii'il  n'y  a  ne  loyauté 
ne  droiture.ni  humanité,  ne  douceur,  nechi- 
fteté.ni  attremp.mce  :  le  monde  nous  agitera 
ainfî,tufqu'à  ce  que  Dieu  nous  ait  mis  la  bride 
de  fa  parole  pour  nous  retenir  :  &non  feule- 
ment cela  ,  mais  qwepar  fon  fainft  Efprit  il 
nous  ait  dontez,&  qu'il  nous  aie  monftré  qu'il 
ne  faut  plus  que  nous  prenions  cefte  licence 
de  nous  ietter  ainfi  à  l'abandon.  Voila  donc 
par  quel  bout  il  nous  faut  commencer,  quand 
nous  voudrons  bien  feruir  à  Dfeu  :  ce  qui  n6 
fe  peut  faire  que  les  hommes  ne  foyent  là 
confus  en  eux-mefmes  ,  afin  de  fe  prefenter  à 
Dieu,&  le  prier  qu'il  face  vn  tel  changement 
en  eux  ,  que  tout  ce  qui  y  eftoit  auparauant, 
foit  aboli. 

ORnous-nous  profternerons  deuant  lâ 
maieftéde  noftrebon  Dieu  en  cognoiflàncâ 
de  nos  fautes ,  le  prians  qil'il  nous  les  face 
mieux  fentir.Et  que  cependant  iJ  nous  reçoy- 
ueà  merci ,  iufqu'à  ce  qu'il  nous  conduire  eh 
fon  Royaume,  &  nous  condHifant,que  de  pliif  r 
en  plus  il  mortifié  Toutes  nos  mefcnantescii- 
piditez  ,  iufques  à  ce  qu'il  nous  en  ait  pleine- 
ment defpouillcz. Ainfi  nous  dirôî  tous,Die« 
toHt-pmflant,Perecelefte,&c'.'""   '  ',      '' 

1.   lîoj  jup  jTtniiii 
•  jilas-i  ?il;  iiuzli 

,  lont'j!  liiu)  «ii!/r.'{)  fiii.'^tiî 


■  U.» 


SVR  t'EPIST.    A   TITE.  W 

::;jQf ^À^lÈiE Kl È ,  SERMON    sV^'-yt:^:. 


Miyi 


SECOND    CHAPITRE. 


-  ^  -  ••«  v^  ^Grfr/rf  frtfd-e  de  DieuMutdhréà  tous  hommes, cjt  apparue^ 
- ,   .1»  •  No«J  enfeignant  qu  en  renonçant  a  toute  inpdetite^  dejirs 


tttondatnSinous  ^tuions, encc  ntondefohrcmentjusîement^o'  religieu- 

i'..''\!^^:i;^^  o*  f apparition  deU 

'gloire  au  grdndtiieth^  de  noîire^uueur\ejùsChrij\i 
y..  'M  ri  "^quetste]}  donné  fôy-mepnc  pour  mus,  afin  q      nous  ra* 
thetajl  de  toute  iniquité.  ^ 

religion, iufques  à  ce  que  Dieu  nou?  ait  refor 
niez,&  du  tout  clianeer.Il  eft  vray  que  fi  nous 
regardons  les  incrédules,  il  femble  qu'ils  sad 
doniiét  à  Dieu,&  qu'ils  ayant  quelque  lele  de 
bien  faire:  mais  l'Efcriture  ne  peut  mentir, 
quand  elle  mon/he  que  les  hommes  font  re- 
belles i  Dieu,&  qu'ils  tendent  tout  au  rebours 
de  fa  volonté.âc  qu'il;  voudroycnt  eftre  exem 
ptezde  fon  ioug, s'il  leur  eftoit  pof.ible.Pour 
quoy  eft-ceque  les  hommes  vfent  de  quel- 
ques cérémonies  pour  s'acquitter.finon  d'au- 
tant qu'ils  ne  peuuent  efchapper  la  main  de 
Dieu  ^u'il  ne  foit  leurluge'Mais  s'ils  auoyent 
gagné  ce  poin6V-la,  il  eft  certain  qu'iUdcf'pi- 
teroyent  toute  maiefté  alors,  &  qu'ils  luet- 
troyent  tout  ordre  en  confufion.£t  ainfi.iuf- 
qucs  à  tant  que  Dieu  nous  ait  rechangez  ,  & 
réduits  à  foy,  il  n'y  a  en  nous  qu'vne  telle  im- 
pieté ,  qu'vn  chacun  voudroit  mener vne  vie 
biutale,  que  nous  ne  pcferions  iamaisau  roy- 
aume ^ts  cicux,,que  nous  ne  fçaurions  mefmçs 
qyec'eftaufsid'auoir  efté  créez,  car  chacua 
feroit  comme  abbruti.Or  pource  que  l'impir- 
té  éft  plus  couuerte,&  que  c'efcvn  nul  qui  cou. 
ue  au  dedans,  &  ne  fe  monftre  pas  tant,  fainû: 
Pauladioufte,/« «fc/nmoBiia/ni,  lefquels  ren- 
dent tefmoignage  de  ce  qui  eft  en  nous,  c'eft 
afçauoir  que  nous  femmes  pleinement  desbot 
dez  au  mal ,  &  qu'au  lieu  que  nature  nous  de- 
uroit  guider  à  Dieu,  voire  pour  le  cognoiltre,- 
&  pour  le  çontemplcr,nous  foramcs  pires  que 
les  beftes  brutes .  Car  cpnibien  que  les  beftes 
n'ayét  nulle  difcretion  entre  le  bien  &  le  mal,, 
fieft-ce  q^i'encoreffetienent-elles  en  leurs, 
bornes,^'  eo  leur  niei^ire  :  &  combien  qu'elles 
fuyuentle^r$appetis,pour  le  moins  quand  cl-j 
les  auront  mangç  leur  foui,  elles  fe  repofent: 
quand  elles  auront  prins  leur  rcpos,elles  tra-, 
uaillent  :  quaiid  elles  auront  faim,  elles  pren-. 
^ont  paftûte,  pourle.moiiw^ejlç^  la  cerchc- 
ront,  jUais.de  l'homme,  c'eft  pitié,  :  il  fcmbla 
qu'il  fe  vufiUe  derguifer ,  ii(: fe  i;ontrf  faire, du 
tout .  Nou^  voy[<)fjt  quelle  io>pcwol)té  il  y  ai 
<j^  tçus  not,^ppe.tij,cq."''(  n]f  fti>i>'nf.iq(ieftw>H, 
qu  on  aime  feulemét  fes  aifes  Se  commodittz, 
FFf.iii. 


OVS  auonsexpofécema 
tin,  fi  toft  qu'on  nous  parle; 
de  la  bôté  de  Dieu  qui  nous 
a  efté  inoftree  en  laperfon 
ne  de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift.que  nous  deuôs  ertre 
incitez  à  fainÛeté   de  vie. 
Car  c'eft:  bien  raifon  que  Dieu  ,  qui  nous  a  fi 
chèrement  acquis,nous  poflede.fur  tout  quâd 
il  nous  monftre  la  fin  de  noftre  rédemption, 
atnfi  qu'il  en  a  efté  traitté  défia, 5:  que  Zacha- 
rie  le  déclare  en  brief  en  fon  Câtique.aui.cha 
ptnedé  (ainû  Luc,  (iue  nous  fommes  affran- 
chis, afin  que  tout  le  temps  de  noftre  vie  nous 
feruions  à  noftre  Dieu.  Car(côme  fainft  Paul 
le  déclare  au  (.chapitre  des  Romainj)nous  e- 
fbiôs  fous  les  lieiis  &  feruitude  de  péché:  main 
tenant  nous  fommes  mis  en  liberté,  mais  c'eft 
afin  que  le  péché  ne  domine  plus  fur  nous.Cô 
ment  fe  fera-il?  Quand  nous  ferons  fuiets  à  la 
iiilhce  de  Dieu.  Or  il  n'y  a  point  ici  dt  force, 
ne  contrainte  :  mais  c'eft  vne  fuiettipn  gui  eft 
meilleure  &  plus  defirable  que  tous  l&s  Empi- 
res du  monde  .  Car  fi  Thomme  veut  auoir  fon 
franc-arbitre  pour  feruir  à  fes  appetis ,  c'eft 
autant  comme  s'il  feplongeoi  tau  profond  de 
enfer,&  que  le  diable  le  traîne,  ic  le  pouffe  cô 
ftie  il  voudra. Pourquoy?  Nos  appetis  font  en- 
nemi: de  Dieu,  &  le  péché  domine  fur  nous,& 
y  a  toute  vogue  ,  quand  nous  lafirhons  ainfiU 
Bridé  a  noftre  chairl  II  n'y  a  d'oc  autre  moyen, 
â'éftfç'en  droite  liberté,lirion  qii  eilanj ,  f ete- 
ilusfoiiiî  là  bride  de  Dieu  &de  f»  iuftice..pr 
cependant  nous  auôs  à  pourfùyure  ce  que  def 
U'ilôus  àiibns  entamé ,  q'eft'afçàuo'.r  que  pou^ 
bien  ndusiddonher  à  DieUiilnoiis  faut  renon 
cer  à  toute  impicté,&  à  tous.defirs  mondains. 
Oriiousfçauohs  qu'il  n'y  a  çn  nous  que  tou- 
'ic  malice,  &  qu'il  eft  impofs^ible  que  Dieu  tire 
Milbicnde  nous,iufquesa,cp  qu'il  nojisait  tc- 
forfnei.ou  autrement  nous  jie  fçayronsquece 
Éll  dëferuir  àT)ieu.Car  combien  que  nous  fa- 
çipns'feinblanlt  d'auoir  q^clquf,deuotion,^eft 
ce  qùe'n'oiis  ferp'ns  toufiours  ftupides  &  non» 
c1iarans,iSc  n'y  aiira  véiiié'  qui  têdéà  vne  clroite 


qu  I 


mais  il  femble  que  çul  n^  Te  piiii^p  rcfiouir  ^ 
noa^u'il  ait  tout  péruerti,  quVI.  ait  nreîlc  ftr 
ciel  auec  la  terré  .  £n  fomoïc»  puis  que  ^nous 
fommes  enueloppez  ici  bas,  que'nournepen- 
foDS  niiUcmejy  âuRoyjunje  dfs  cieux,enjte-_ 
la  cognoift-orique  nous  lomnics  du  10111^^^- 
uertis,  &  qu'il  n'y  a  point  vne  feule  goutte  de 
bien  en  nous,  &  que  nous  fommes  aueuglqs  en 
tous  nos  delîrs.  Et  pourquoy  ?  Ils  ne  tendent 
qu'au  monde  :&  nous  fommes  créez  à  vne  fin 
toute  diuerfe. Car  noitre  condition  feroit  bien 
malheureufe,  fi  nous  ne  regardions  pluriqin^ 
qu'à  la  terre,quand  ici  nous  fommes  alTuiettis 
à  tant  de  pouretez,à  tant  de  {qitcitu^s,à  ff^t 
de  fafcheries&d'angpifles.  Les  belles  brutw 
ont  beaucoup  meilleur  tem'ps!:cî6r  elles  néii'ai  - 
gnent  finon  ce  qui  leur  cft  prefent,  elles  ne  fe 
foucient  de  rien ,  elles  ne  font  point  menées 
d'ambition, elles  n'appréhendent  point  le  mal 
^ui  leur  peut  aduenir^ellés  ne  fe  portét  point 
«l'enuLe  cdmmcles  hommes,  elles  n*6rit  point 
de  folicitude  pour  cent,  ans  après  leur  m'tfrt, 
elles  fe  contentent  de  là  pa/lure  qui  leur  eft 
prefeiite.  Mais  voici  les  hotiùn'es  qui  font  en 
tourment  continuel  :  &  neantmoins  quand 
Dieu  nous  laiffe,  où  eft-ce  que  nous  demeu- 
rons? Le  monde  nous  retient,  il  nous  poflede, 
nous  y  fommes  dn  tout  attachez, voire  enter- 
iez, que  nous  fommes  là  Itupides,  que  nous  ne 
penfons  à  rien  finon  à  cefte  vie  caduque.  Puis, 
qu'ainfi  elt  donc  ,  cognoifFons  que  poitf  ap- 
procher de  Dieu,  il  nous  faut  fortir  de  nortre 
rature  laquelle  nous  tenons  d'Adam  ,&  faut- 
que  nous  (oyons  faits  nouuelles  créatures  ,Sc 
en  premier  lieu.  Vùila  pourqOoy  fainft  Paul 
commence  par  ce  bout, qu'il  nous  faut  renon- 
cer à  toute  impieté,  &  à  tous  defirs  mondains. 
Or  il  adioufte  puis  après  que  le  tout  eft  ,  pour 
■viure  en  ce  mande  frefent  Jainftement  ,iufte- 
tnent  (yfobretfifnt.il  ordonne  ici  la  vie  Chre- 
ftienne  en  trois  chofes  r  qu'il  y  ait  fainfteté 
•(ou  reuerencè  dç  Dieu  )  qu'on  luy  obremj)e- 
rt^qu'il  y  ait  iuflice&  droiture  enners  nos  pro 
chain5:&  qu'il  y  ait  honnefteté  &  attrempan- 
ce,  que  nous  ne  foyons  pOint  diirolùs ,  mais 
que  noihe  vie  foit  modeiîe  &  pudique  .  Voila 
donc  la  vraye  perfertioii  que  Dieu  demande, 
&  à  laquelle  il  nous  faut  afpirer  pour' profi- 
ter tout  le  temps  denoftre  vie  .  Or  il  eftvfay 
que  l'Efcricure  fainfte  fomient  (  cdmmèaufsr 
nous  auonsdit  )nétoucheqtiè' deiix  parties 
^uand  elle nOiis  vèur.nitffifher  où  gift  la  fiffti- 
te  parfaite:c'eft(cc(mrtie  là  Loy  au'fii  a'?flre  til 
k  en  deuï  tables)  qù'îrriciifsfàutîe'r'tri'i'  Dieu 
«n  toute  pureté, &  qu'il  nous  faut  di'rinéffer'a- 
uec  nos  prochains  en  toute  intégrité  5:  ron- 
deur.Cela  fiiffiroit  bien:  mais  cette  âtt^empan 
ce,  ou  fobrieté  ,  de  laquelle  parie 'ftinfV  Paul, 
eft  mife  comme  vne 'troilierrte-pSrKé  ,  qui  e(¥ 
«oniointeinïëparablènréntaùet  Pésytfrx.'Car 
comment  eft-*e  qae  nbttr  f«rbn<«W^6s  fpi- 
l^iel  qui  nous  cfté5mindi5,flK6hqué4'attrém-' 
jaocc  domine  en  b6usîCtidJment^allis\'ftrôns' 


S;ERM  Q  N;   X  1  fc 

Ooqs  patiçiis  ep  nosaffWl^irsi  Qr,p»»çi  de- 
l'anf  famèl'Pisl  ad:oift«t  le  Itwiife  de-Dieu, 


uantlamèl'PiSl  ad:otlt«t  le  Itfuiije  ^ei-'ieu, 
,  &la  ol^tifé-qwe  nous  deuons  garder  auec  nos 
prochains, pouf  vii  principe. Mais  maintenant 
U  li\  nii^îf  c(ln«aut:é  eii;ceflii''^l  dit.'K^r  cc- 
ue  àttrempancc  criipoclc  que  l'homme  fe  re- 
^ti-iie,  comme  captif,  &  qu'il  ne  fo.  t  pûiht  ad- 
,d5né  à  fes  délices, mais  qu'il  foit  dont^  ibus  I4 
mainte  Dieu, pdur  eftregouuerné,  non'pomt 
à  fon  appétit ,  mais  comme  Dieu  le  xpi^^t;^. 
Q^and  donc  nous  aurôs  nos  efpiits  ai'nfi  farii 
gez^np^saut^s  W fobrieté d-ôt  fwrle  icifainft 
Paiil.  Et  niàinteriànt  nous  pouuons  aifém^nc 
.Conclure  que  q^nd  iii  i^jç  ces  troïciàôu.ç'i 
efté  ppur  môi^rer.q  Dieji  ne  nous  mené  point 
'par.long«*îîi€iHts,rnaii  que  le  chtmin  nous  cft 
certain  &  infallible ,  moyennant  que  nous, ne 
voulions  point  errer  à  rîoftre  efcieiit  :conimè 
font.ceux  quiinuentent- dçs  fottes  deuotion: 
pour  plaire  à  Dieu,ils  fe  tpyrtniantérpnç  beïn- 
Coup-,  mais  ils  ne  Font  qjué  tracafler. .Teifons 
dôiic  lédroit  chemin^carfainit  Paul  nous  dé- 
clare que  les  hpmmes  né  feront  qii'e  perdre 
temps  quand  ih  fe  fouruoyciont 'aîijfi  apie» 
leurs  imaginations. Et  pourqu6y?  Voici  le  r^ 
pos:  c'eft  à  dire.  Voici  où  nous  pourrons  eftne 
afleurez  que  noflre  vie  fera  agreabje  à  Dieij,^ 
quand  elle  fera  réglée  félon  la  Loy.  Or  quant; 
à  la  luftice,  il  comprend  fous  ce  mot^  toute  la 
droiture  que  nous  deuons  garder  auec  nos 
prochains,  tellement  que  nous  ayons  ceftce- 
qûité  naturelle  dont  parle  npure  Seigneuï 
lefus  Chiift ,  c'eft  de  ne  faire  à  nul ,  finon  ce  Mdf.7, 
que  nous  voulons  qu'on  nous  fjce .  Quand  '*; 
donc  nous  auons  à  trâffiq'uer  aiiec  nos  pro- 
chains, que  nous  n^fions  ne  de  haude,  ne  de 
mahce,ne  de  cruauté,que  nousne  foyos  point 
addonnez  à  rapines ,  que  nul  ne  ceiclie  fon 
profit^que  nous  ne  foyons  point  iiienez  d'am- 
bition pour  fu'ppediter. les  yn  les  autie^  .^pi^ 
pouf' gagner  lé  deflli';  :  tpais  qiié  npus  .cer-^ 
chions  de  cpramuhiqùec  feulement  cnfcmbJe, 
en  forbe  que  nul  n'ait  oçcifion  de  !?_ pjaindrt; 
dç  obus  :  &  mefnVes  que  iiul  né  folt  addonnc  j 
fôn  profit ,  liiàis  que  nous  cerchions  ce  quiefif 
profitable  à  chacun,  c'eft  cefte  iuftice  qu'on  ai 
définie  en  bnéfiDe  rédré  à  chacun/on  droî^ 
Mais  la  déclaration  de  noftre  SeigpÊur,Ie- 
fiis  Chri'ft  eftépcbres  plus  ilicilé,  Défaire,  à 
ihacun'  ce  qi4c  nous  voudrons  qu'on  npu^'fa^ 
ce.'  Oar  nous  ïçauroiis  bien  toufiburs  diipjitei' 
fùi^tifemént  dé  ce  qui  noui'  cft  deu ,  ii  ne  faut 
point  Qu€  nousjluoDs  au  conlcil  pour  ççia, 
Ir  eft  vray  que  fi  ^tieftu  vn  avne  çau(e  auf,T 
duirc  ,  il  s'en  ira  dem.inJer  q'ii'oh'luy  formé 
fon  aÛion,  qu'on  luy  donne  couleur,  afin  dç 
déclarer  tant  mieux  fon  dro:£l:màis  (i  np  troi^ 
ùèrù-on  iatliais  hortime  fi  idibt,ne  défi  ptu  de 
feils  ,  qui  ne'fdlt'  ifléz  fiibtil,  pour'dire ,  Cela 
m'appartient  .11  èftvray  ou  il  ne  pourra,  paj 


SVR    L^E  i?^l5'T. 'A'  1 1  T  E.  V^i 

■Ofrme  faît'tof t  tin  tel  endroit.Or  maintenant     diMnions  ce':  p'oUres  fols  gUÎ, s'amufent  à  hcià , 
quVtftcaufe  qtie  nous  né  voyons  aufsi  clair     coup  de  menus  bagages, pefa'ns  Honorer  Dieu'"^ 
pour  maintenir  le  droiftdVa  ïhacun  .finon     parleurs  fihgeries;tout  cela  n'eft  qu>bus.  Ef 
que  nous  fommes  co'rrotnpi<s?'Et'ainlîileft     pt)urquoy?Caril  veutmifericorde,&  nô  point  ofe.g.j^ 
certain  qu'il  n'y  a  que  nos  âifeftidns  qui  nous     fàdrifice:il  demande  droiture,foy,&  iugement  t*at.s>.Ti 
ttnpefchent  que  nous  n'ayons  celle  droiture    comme  il  le  dit  par  fon  Prophète  ,&  comme  ^  i^.^, 
ehnous.Carlionnouspropolernecaufcge-    aûfsi  noftre  Seigneur  lefus  l'allègue.   Voila  ifa.fs.i. 
iWrale,  où  il  n'y  ait  ne  haine  ne  faneur,  nous     en  quoy  Dieu  approuue  fi  lious  le  craignons^^t^.i^. 
ftiuronsbien  prononcer.  Il  faut  ^frififaire,     ou  no'rt, 'c"eft  (juand  nous  chenlinerons  en  iu-  ^j, 
voîk  quieftiufte.  Orilne  faut  point  qu'on     IHce  ,&!  que  nous  conuefferons  les  vnsauec, 
fibit  grand  clerc,  ne  qu'on  ait  beaucouphanté     lesailtres  fàns'aucune  riuifance.  11  faut  bien,' 
lés  efcholesquind  oti  noùs'propofd  'vfie  chb-'  qàfe  ijp'û's  ayoHs cela.  Mais  cej^endant  fi  faut-i^ 
fe  i  nous  ne  la  trouuerons- point  diftitétifè  ni     iriursiqifé  Dieu  ne  ïoit  oublié ,.  que  nous  rie 
éftueloppee  :  ma'ii  fi  Tôfl-qiie  nous'iuroï'  ié  riè"'  Tèèôdti'oAs  àluy,  que  nous  ne  mettions  toute 
fçay  quoy  qui  nous  duiertit ,  nous  ne  fçauons     noftre  fiance  en  lefiis  Chrift,  que  nous  n'ayôs 
plus  que  c'eftde  celle  droiture.  Appténoris'   ceft' exercice  cô'tinuel,d'inuoquer  en  fon  nom  ' 
donc  pour  plaire  à  Dieu.qu'il  nous  faut  telle-  '   Oieu  fon  Pere.vçu  aue  la  necefsité  nous  y  in-.^ 
mentcheminerauecrtosprpdhains,qùtntilne     dàit ,  &  nous'j^'poufle  à  chacune  minute  de  , 
fe  plaigne  de  nous.  Voila  pour  V^  iteiri.  Or     tetrt^slil  fiut  quié  noî:s  glorifions  Dieu.tenans 
c'eften  vain  quebeaucoupfetrkuiiHên/ppur     tiatbièn  deitiyi&que  nousaçluifîons  de  bien 
piaireàDieiiencereinonresVcàiÀnl'enôusyciy'    prdfiiier  er^c'e  cjui  nous  eft  commandé  épi- 
ons en  la  Papauté  qu'on  fait  beaucoup  d'ê/cho     p'r'emiefe  Tablé  ,  &  que  cela  foit  obferué  fuc^ 
fes.Ec  cotnmen'ti'Pour  contenter  Dieu.  Mais     tôuf:&  puis  gué  nous  venions  au  refte.  Car  la,^ 
cependant  les  vns  font  adoTinei  à  rapines,  les     l'oy  de  Diérfue  fe  peut ,  &  ne  fe  doit  diulfei*.  " 
antres  à  fraudcS&  â  malice, ils  feront  chanter     Ueft  vray  qu'il  y  a  deux  tables  ,8c  faut  bien 
force  melFes  pour  fe  racheter  .  Et  n'éft-ce     le's  drftinguer ,  afin  que  nous  fçachions  que  le 
point  fe  mocquer  pleinement  de  Dieu  ?  Car^  feruicede  Dieu  va  deuant  ,  &  puis  la  charité 
nous  voyons  où  il  nous  appelle:  il  ne  nous  cô-'  aùec  les  hommes  éftadioullêetniais  cependac 
mande  poin  t  tant  de  menus  fatras, mais  il  Veut  '.  Dieu  n'a  point  baîllévhe  partie  de  fa  Loy  aux 
que  nous  apprenions  de  nbusexercer  en^roî-'  luifs, 5;  vne  partie  aux  Payenis,mais  ila  voulu 
ture,que  noftre  eftude  s'applique  là ,  ce  font  '  qliechacun  li  reçoyue:car  il  y  a  fait  vne  telle 
les  vrais  fruits  qu'il  demande  &  approuu'e',que  '  liaifon,' qu'il  n'eft  point  licite  aux  hommes  de 
'  -nous  cheminions  en  touteintegrité,fubuenaris     faire  ici  nulle  feparation.il  eftdit, Maudit  fe-      '"•^Z- 
à  ceux  qui  ont  faute  de  noftre  aide,&  nous  ab-     ra  celuy  qui  ne  s'acquitterade  toutes  ces  cho  *  • 
ftenansde  toute  iniure  &  outrage.  Or  il  y  a     fes.Ileft  vray  qu'on  ne  pourra  pas  accomplir; 
la  fainâeté  qui  eft  adiouftee, voire  &  non  fans     tout  ce  que  Diçu,commande,il  s'en  faut  beau-, 
caufe.Carcen'eftpas  tout  que  les  hommes  te     coup:&  ëncôrés  que  Dieu  nous  conduife  par* 
contentent  de  rious,&  que  nous  n'ayon's'pro-  '  fon  fâinft  Efprit  ,  nous  ferons  toufiours  em- 
cUré  le  dommage  d'autruy  eri  façon  que  ce     pefchezpar  nos  foit)lelIes.   Mais  quoy  qu'il 
foit:  mais  Dieu  mérite  bien'd'alfer  deuant.  Si     en  foit ,  fi  faut-il  Sfpirér  à  ce  but-  la,  de  nous 
les  femmes  (cotnme  nous  allons  veii)doyuent  '  afluiettir  à  Dieu  en  tout  &  par  tout.  Car  ce- 
eftre  fuiéttes  àleursmaris,quefera-ce  déno*     liry  qui  a  defendula'pai]larûife,a  aufsi  defen- 
eiwers  Dieu   au  prii?  Voila  les  femmes  qui     du  le  larrecin  (dit  fainft  laques  )  tellement  l'^î-i-n. 
font  rompagnesde  leurs  maris  ,  Se  touteffois     qu'on  viole  la  maiefté  de  Dieu  en  tout  8<  par 
elles  leur  doyuent  reuerence  ,  comme  à  leur     tout.quand  on  s'abandonne  à  quelquev.ice^ue. 
chef':&  puis  elles  fifà-oyuent  humilier:  Main-  '  ceiq'it.  Et  pourtant  apprenons  démettre  la' 
tenantvbici  noftre  Seigneur  lefus  Chriftoui     fârn(?t'eté  a'ueclaiufticêy'c'ellàdire,  qùenoùs^ 
at^traôé  vri  mnriagé'fpirituelau'ec  noUr,qUi  '  cô'nùcrfio'ns  tellement  auec  les  hommes  fans' 
eft  beadc-dup-'pius.fact'c  que  tous  ley  mar 
damondttqliand  riousifiy  fàufTefons  la 
Wque  les  VhS  S'addonhans  à  fiiperftitfdr 

idolâtries-,  s'«h\rohcWener'du*éatitrér  par-  '  nepcnfiSs'pciirit  eftre  quittes  quand  les  hom-^ 
pli  toutes  les  ordures-'dela  Papauté  ,  ievous     nies  ne  nou's'jCondamnefont.è.oint'cnccft  en- 
prie.q  fera-ce  de'dela'Il  eft  vray  qu'iis'pour-     droit.  CaVnou^Tçauons  ce  qui  eft  prononcé, 
ront dire quils  n'<»nt  ofFenfé perftïhne.Voire     que's'il nou$'id«ierit"de noujs  de (guifcr deuan't^.^ 
iciibas^:  mars  qije  lîirtiaie-ftétiè  Di'tu  fôitàinfl  '  lé<'hdmfflés,&^Qènoùs'ay6ns^'hoDlé'dé  fuy^^ 
vifetee»  On  diî-»,Ié  ntiliï^'poî'nt  lârrcrti,  Eïhii^.  urêït:M't:JhtiK,  ij'ù'îl'r^aHs  3éfaii'dù^ra  auj^i 
csfacrHege«i(>ple:ida!V»'comeaufvîfefTiàT*.iiil''  de\3iV[tlèi'Ahg'ês'3ép3titâis:<^op)o^ 
«>p^rle.Âirt(î'adViif,i!#^'âV6uV,  &  qnaVi'diéëïle''  làVi^'lp^^Àos'<Jû'2pfâ'(rt  qu^'  hps  cVrpvi' nos 
doStnne  non^éih-^fc^ ,' a'ëft=àyrrè '({if^l ;  aitrqîoyefird^die^s i Dieli;.Si'viie'!ernWi>^ï?i'"r^ 
nottî.  faut-cortue-rfcr-  «n^iwlrè  Wtegrité  Jt'Wc''  fLWblintdè'^^ft'èofàë^  Tç'p^^IlàVdVcîeftà'efl,^ 
lei-hMnmiçsne  procwanS^nul  fe>iV  domma*!?,'    fera  ttnuei^our  tiieft'hantejai'Sn  feruiteu'r  rip  ■ 
nwjs  pluAdlt  kur  bien .  qli'îea'èela nous  cdti-''   feulcracirribufffoit  qu'on  rtî'fdift  Je  fon  mai- 
.:;-••.  FFt.iiii. 


CT  T  T    SER  MON-.XIII. 


^ 


ftre.ou  vn  enfant  de  fon  pere,mais  qu'il  [e  çoa 
ioigne  parmi  lés  detradeurs,  &  qu'il  dcclâre 
qu'il  en  eft  comifte  complice  >  qu'emportera 
vnc  telle  deflôyauté  ?  Car  fi  nous  conuerfoQS  . 
'auec  les  mefclians,&  difsimulons  cjn  telle  for- 
te qu'il  leur  femble  que  nousaccordiôs  àleur 
impieté,  il  eft  certain  q  nous  trahiffons  Dieu. 
Et  ainli  ne  nous  flattons  point  quand  les  hom 
mes  nous  auront  applaudi,  ou  bien  qu'ils  cou- 
urirbnt  noftre  orduçe  :  il  faut  venir  en  conte 
deuant  celuy  qui  nous  condamnera  au  double, 
quand  nous  aurons  voulu  ainlîp^r  hypocriHe 
&  couuerture  frjijole  défguifer  fayerité.Voi-» 
la  en  fomme  ce  que  nous  auoQs  à  retenir  fur 
ce  mot.Or  il  yal'attrempaBce,  qui  eft(com- 
me  l'ay  dit)non  point  pour  rien  adioufter  à  la 
Loy  de  Dieu,mais  pour  nous  monftrer  qnellç 
rillafainûetéfl:  droiture  de  laquelle  il  a  fait 
mention.  Car  lî  nous  ne  fommes  attrempez,il 
n'eft  point  pofsibledenous  altuiettir  à  Dieu 
uand  il  nous  enuoyera  des  afflictions,  quand 
il  nous  voudra  matter.  Si  ainfi  eft,&  que  nous 
ae  facions  que  languir  fur  la  ÉeVre' ,  que  nout , 
ayons  beaucoup  de  pouretez.&defalcheriés, 
fera-il  pofsible  d'adorer  noftre  Dieu,  &  de 
louer  fon  Nom,  fi  nous  n'auons  cefte  attrem- 
pance  &  fobrieté  dont  parle  fainû  Paul  ?  Et 
puis, quand  nous  feronscomme  veaux  desbri- 
de2,&  qu'il  y  aura  vne  licence,  &en  danfes,  Se 
en  chanfons  diflc)lues,&  entels  fcandales,quc 
»out  fera  desborde ,ic  vous  prié,c6mment  cha 
cun  fe  contentera-il  de  viurepaifiblemét  auec  ; 
fa  feinme,fàns  attenter  defloyaument  au  ma- 
riage d'autruy?  Or  s'il  y  a  desfcandales.fi  on 
permet  les  diiTolutions  &  intempérances,  s'il 
y  a(di-ie)de  telles  ouuertures,il  faut  quant  Se 
quant  que  les  paillardifes  &  adultères  ayent  la 
TOgue,&  qu'il  n'y  ait  plus  ne  loyauté,  ne  droi 
ture  entre  les  hommes,  que  tout  foit  abandon 
né  pour  fe  desborder  fans  aucun  moyé,  qu'on 
s'adonne  à  cruàutez  À:  à  rapines, qu'on  pille  &  , 
qu'on  faccage  tout  quant  Se  quant. Ainfi  donc 
notons  que  quand  fainâ  Paul  parle  ici  de  fo- 
brieté, ce  n'eft  point  pour  rien  adioufter  à  la 
Loy  de  Dieu  ,  non  plus  qu'auparauant  il  n'a 
pas  voulu  mettre  d'auantagc  que  ce  qui  eft 
contenu  aux  deux  tables  ^  auand  ila  patléde 
patience:  mais  il  a  vbulU  naoflrer  comme  noux 
pourrons  obéir  à  Dieu:ce  ^r^  quand  nous  au- 
rons retranché  toutes  les  fu^tfluiteKdu.mo" 
dè,en  forte  que  Dieu  cheuira  paifiblernent  de 
iious,&  y  aura  fçn  regne.,Or  nqtan^met  (ainû 
Paul  dit  qu'il  nous  faut  viure  ainfi  en  toute 
fobrieté, &  p\}Ternent,attepJa^t  l  bturnt/f  efpe 
ranet,&  1 4tff*r!tio^^ii  ^rapd^  pifi*y&  ^*  '»'- 
Jirt  $aHnr»T  lefits  'Chrift.fii  (pja  il  np.U»  mou- 
ftre  que  Dicq  nous;  tient,  iti  l^ï  e<jmme  en 
qiielque  efprçuue^  qu'il  r^çMij'vëjOir  quçls  nous 
fommes:  &  pôUrçafjt,  q.ue^Mn^ç  vie  f,^  coratue  < 
vn6pmb,àt^fsidMC^,.&  q+iè  JÇjieu  oénous  y  lâif 
/e  point  9ilîfs,,n;i^is  il  noy»,  y  exercie!  afin d'a- 
uoir  certaine  appi^obatioa  de Ja  crainte  Se  de 
rhonneur  <jue  n«v<s  liiy  portons.    Et  cela  eft 


bien  vtile  :  car  nous  voyons  quVtt  cliacan  fe 
plaind,  pourcequc  Dieu  ne  nous  accorde  pas 
nos  appetis,mais  pluftoft  y  eft  contraire,  que 
nous  voudrions  qu'il  nous.conduilîft  ,Se  qu?ii , 
nous  gouuernaft  à  noftre  phanta(ie:brief,qu'il 
perraiftqu'vn  chacun  de  nous  fuftmaiftrede 
fa  perfonne.  Ici  fainft  Paul  declarequec'eft 
bien  raifon  que  durant  le  cours  de  cefte  vie 
tranfitoire  nous  foyons  exercez  au  feruicede 
Dicu,&  qu'il  efprouue  quels  nous  fommes  en- 
uers  luY:niais  à  caufe  aufsi  que  la  longueur  du 
temps  nous  fafche  ,  il  nous  en  feigne  que  c'eft 
en  attendant  l'efperancc  de  la  venue  de  no-.' 
ftre  Seigneur  lel'us  Chiift.  par  cela  il  monftre. 
qu'il  ne  nous  faut  point  amufer  à  l'eftat  pre- 
fent  du  monde  ,  fi  nous  voulons  auoir  ferme 
côftance  de  feruir  à  Dieu,mais  qu'il  nous  faut 
eftre attentifs  à l'efperance  qi)i  nous  eft  don- 
née.que  le'Fils  de  Dieu  viendra  pour  eftre  lu-; 
ge  dumoade.Etainfien  premier  lieu,  notons, 
que  Dieu  veut  examiner  les  fidèles, quand  il 
permet  &  ordonne  que  durant  cefte  vie  terre- 
ftré  iU  fpyentfafchez  &  inolettez',qu'ils-paf- 
fent  parmi  beaucoup  de  troubles  ,&  que  les 
chofes  ne  leur  vienent  point  à  propos,  il  fem- 
ble qu'il  les  ait  abandonnes, mefaies  qu'il  leur 
foit  ennemi.  Mais  cognoiflbns  que  non  fans  ' 
caufe  il  fait  cela.  Se  que  nous  auons  befoin  d'e 
ftre  ainfi  exercez.  Etdefaiâ,  nousyoudroos  : 
bienfçauoir  quand  on  nous  baillera  de  l'or,  - 
ou  de  l'argent,  iî  c'ell  bon  or,  ou  bon  argent:. 
&  quand  nous  en  douterons,  nous  le  ferons  : 
bien  paflèr  par  le  feu.  Et  noftre  foy  (comme  I.P»V.i.7 
dit  fainû  Pierre)n'eft-elle  point  plus  precieu 
fe  que  tous  ces  métaux  corruptibles  qu'on 
efprouue  fifongneufement?  C'eft  donc  bien 
raifon  qu'vn  chofe  fi  digne  comme  eft  noftre 
foy,ait  la  crainte  de  Dieu,qu'eile  foit  approu 
uee  àbon  efcicnt  :  ce  qui  fe  fait ,  quand  Dieu 
nous  enuoye  des  atfliûions ,  &  qu'il  veut  que  : 
nous  ne  foyons  point  addonnez  à  noftre  prp- 
fit.mais  pluftoft  que  nous  feruions  à  ceux-mef 
mes  qui  font  ingrats, &  qui  nous  rendent  mau 
uaisfalairc  de  ce  que  nous  aurons  tafchéde 
leur  bien  faire:  quand  Dieu  prdonne  cela  ,ce  , 
n'eftpoint  fans  caufe.Voilace  que  ngus  aùôï 
à  retenir  eu  premier  lieu.  Mais  cependant  co  , 
gnoiflbns  aufsi  la  briefuetc  de  n<?ftt«  vie,afin  ■ 
que  nous  ne  nous  fafchions  po.mt.  Car  nous 
voyons  cofnme,  nous  fommes  délicats  :  ceux 
mefme^  qui  auront  mpnftié  quelque  bonne,. 
afFtftion  de  fe  dédier  àpiçu.qtiapd  Us  auront 
aduancé  quelques  pas, il  leur  femble  qu'il  leur 
eft  l;citede  demeurer  au  miiieu  duchejnin.  Se 
fcfafchct.Etceci  durera-il coufioursfEt  nous 
nepenfons  point  c^pejidant  à  la  fragilité  de 
npftre  vie. Si  Ip  chemin  d'vn  homme  eft  court» 
il  prend xpuragc:  encores  qu'il  ait  les  umbes- 
fi  r9qapues  qu'il  n'eupuifle  phis,lieft-ce  qu'il 
fenajne  iufques  au  logisi  Scfnefmci  quandyni 
homipeaura  chemipé  dix  ou  douze  iout:nee(^.■' 
félon  qu'il  approchera  de  fon  voyage  .  ii'ie  ■ 
rcfiouit  ,&  prend  courage  d'aller  iyfqiie^aa 

bout. 


SVR  -L'EPIST:' A   TITE. 


^O! 


tout. Or  qoand  tious  voyou»  <jae  noàs  ne  foin 
mes  point  loin  du  but  où  il  nous  faut  paruc- 
nir.là  dell(i';c]ilÈ  ne  prenons-nous  coiiragede 
palFer  toulioiirs  outre,  &  fur  tout  qifarui  iioU5 
Tommes  ainliadmoneftez  parle  fainti  Efprit? 
Orce  h'efl  pas  le  tout  encores  de  penfer  que 
Bortre  vie  eftbricfue&  caduque, que  ncus  au- 
rons bien  tofl  achtué  noftre  courfe  ,  &  pour- 
tant que  nous  ne  défaillions  point:inaisil  nous 
faut  regarder  à  cefte  cfperâce  à  l3t}ufHe-nous 
fommes  appelez.  Et  pourquoy?  Voil.i  q*ti*ft 
caufe  qu'il  ne  nous  chaut  gueres  de  noUs  dé- 
dier à  Dieu.pource  que  nous  ne  voyons  point 
de  profit  deuant  nos  yeux  ,  &  que  nous  ne  le 
pouuoas  poiin  toucher  â  h  main ,  nous  vou- 
drions que  Dieu  nous  applaudift.Or  il  elt  cer- 
tain qu'il  n'attend  pas  cncoresque  nous  l'ay- 
ons ferui  pour  nous  faire  du  bien  :  mais  quoy 
qu'il  en  foit ,  (î  ne  veut-il  pas  nous  tenir  tant 
aifeement  en  ce  monde, que  nous  prertiôs  oc- 
calîon  de  nous  y  endormit  .Câi  nous  oyons  ce 
qu'il  a  prononcé  ,  que  ceux  qui  s'addonnent 
ainfi  aux  chofes  prefentes.ont  défia  receu  leur 
falairc.  Orhoûfe  Seigneur  nous  folicite  de 
regarder  au  ciel. Et  voila  pourquoy  cefte  vie- 
ci  eit  pleine  d'inquiétude  ,  de  tant  de  fafche- 
ries  qui  nous  enuirorifient  de  tous  coftez.  Car 
autant  d'affliftions  que  nous  endurons ,  ce 
font  autant  de  coups  d'efperon  par  lefquels 
Dieu  nous  picque  afin  de  nous  attirer  à  luy  ,& 
que  nous  foyonsaddonnez  de  penfer  auxcho 
fesceleftes  ,  &  par  confequentd'eftre  retirez 
de  ce  monde.    Voila  pourquoy  notamment 
faind  Paulparleici  de  cefte  efperâce:  comme 
s'il difoit qu'il  ne  fe  faut  point  esbahir  files 
homes  font  plus  q  morfondus  quandileft  que 
ftion  deferuiri  Dieu.  Et  pourquoy?  Car  ils 
ont  les  yeux  fichez,  &  s'arreftent  du  tout  aux 
thofes  térreftres.  Orilfaloit  penfer  à  la  ve- 
nue de  noftre  Seigneur  lefus  ChriftiS:  chacnn 
s'en  deftonrne.  Voila  qui  eft  caufe  dont  que  le 
monde  nous  retient  ainfi, &  qu'il  nou$  esblouit 
les  yeux  de  fes  allechem€s,&  que  nous  y  fom 
mes  du  tout  abbrutis.   Apprenons  donc  que 
c'eft  le  vray  moyen  deferuiràDieu.que  nous 
pafsions  viftepar  ici  bas, &  que  nouscognoif- 
fîons  qut  ce  n'eft  point  ai  autre  cnnditiôn  que 
Dieu  nôori  ici  mis,finon  pour  cheminer  com 
meeftrangèrs,qtienous  ne  deudns  {«sirit  faire 
ici  noftre  nid  ,  ôrqu'éncbresque  Dteunous  y 
,      donne  qitelqae'repos, fi  faut-il  paflèi?  outre, 3c 
i^i.i.u  j  qijç  j^gyj  ttndibrts  ài\iy,&  à  celfe  vetfué  de  iio 
•t-î  'i  iftre  Seigneur  ïèfusChrift.  lufqùes  à  tAfit  que 
nous  foyoris  venus  là  ,  il  eft  certain  que  ^viel- 
que  belie'appareilce  que  nous  ayons, il  n'y  au- 
ra que  vahité  eh  n6us.Et'ainfi.c'ert'l^]>rilicii- 
■pgil  de  bien  régler  Ttoftfc  vie  ,  trfllsftéhf  ^re 
'nous  cognèifsions  ^ïié  Dièw  rie  notiS'à  fcolrtt 
"îci  logez  pour  y  habiter  toiTlîoilrsVmatli  tjife 
C^eft  afin  que  nous  tendions  ^  luy,  votre  eÀîs 
afleurczdeja  venue  heureufe  de' noftre" Seî- 
gncur  lefiis  Chvift.  Et  voila  poxiiquoyirad- 
rioufte  après  l'efpcrance,!»  venue.ou  l'appari- 


tion de  la  gloire  du  grand  Dieu  ,  &  de  noftre 
S.iuueiir  leùjs  Chnit.  Sainû  Paul  apariede 
l'cfpcrancc  tant  heureufe  «comme  s'il  diloit, 
Mes  arais  ,  il  ne  faut  point  que  nous  tendions 
au  Royaume  des  cieux  comme  à  l'aucnture, 
cftans  incertains  fi  nous  y  paruiendrons  ou 
nonrcar'nousfçauons  qui  nous  l'a  pronii';.Or 
Dieu  eft  fidele.Contentons-nous  donc  d'cftre 
appuyez  fur  fa  venté.  Voila  pourvn  item.  £t 
au  rcfte,  nousauons  vne  certitude  &  vnbon 
garent  de  cela.  Car  autrement  que  feroit-ce.? 
Voila  noftre  Seigneur  lefus  Chriftquicftve- 
nu  au  monde. Eft-ce  peu  de  chofe  que  le  Dieu 
éternel  fe  foit  tellement  anéanti  en  cefte  na- 
ture humaine  qu'ilauoit  prinfe, qu'il  aitfouf- 
fertvne  mort ,  non  feulement  ignominieufe 
deuant  les  h<bmraes,mais  aufsi  maudite  &  exé- 
crable deuant  Dieu  ?  Voici  le  Fils  de  Dieu,le 
chef  des  Anges, la  fontaine  de  vie, l'image  vi- 
ue  de  Dieu.celuy  auquel appartiét  toute  gloi 
re  &miiiefté,qui  eft  defcenduiufquesà  fe  fai- 
re femblable  à  nous, il  reçoit  toutes  nos  infir- 
mitez  excepté  péché.  Il  eft  vray  qu'il  n'y  a 
nulle  macule  en  luy  ,  mais  tant  y  a  qu'il  s'eft 
allùietti  à  froid  &  à  chaud,  &  àautres  pafsiÔs: 
briefil  a  fouftenu  toutes  infirmitez  humainesj 
en  la  fin  il  a  falu  mefraes  qu'il  fuft  maudit  de 
Dieu,voire  non  point  à  caufe  de  luy, mais  d'au 
tant  qu'il  fouftenoit  le  fardeau  de  tous  nos  pe 
chez,&  que  la  malediûion  de  Dieu  foit  venue 
fur  fa.tefte,  qu'il  s'en  eft  conftitué  detteur 
principal,âfin  de  nous  en  acquitter.Or  main- 
tenant penfons-nous  que  Dieu  ayant  fait  vn 
tel  afte.fcufFre  que  fa  mort  &  pafsion  foit  inu 
tile  ,  quand  nous  croirons  en  luy  après  eftre 
crucifié, qu'il  foit  làenfon  Royaume  celefte, 
&  qu'il  nous  laifle  là  nous  qui  fommes  fes  mé- 
bres.'Il  fera  donc  valoir  fa  mort  &  pafsion. Et 
ainfi, quand  nous  ferons  esbranlezde  quelque 
de^fiance,  pour  dire,  Et  voire,  mais  que  fera- 
ce?  Nous  ne  voyons  point  le  Fils  de  Dieu  ,  il 
n6u<eftcaché.  Que  nous  cognoifsionsrou- 
tesfois  qu'il  eft  noftre  SaUueur.Or  cela  feroit 
inutile  fînon  qu'il  apparuft  maintenant  en  ù 
gloire  :  fa  mort  &  paAion  feroit  comme  vne 
farce  qu'il  auroit  iouéeiil  n'y  auroit  nul  pro- 
fit qtie  DWu  air  ainfi  changé  tout  ordre  de  na 
tiire,  qù'if  foit  defcendn  ici  ba^  pour-  prendre 
Itt  fimilitudé  d'vn  pecheur'.combien  qu'il  ne  le 
fuft' point  .tju'il  ait  tfté  ftianifcftéen  chair, & 
tbutièsfoiSiqu'iltienous  cognoifle  plus ,  que 
àelà'fé  paflé  &s''efcfaule.af  que  nous  n'en  re- 
ceuions  nul  profit  pour  nos  perfonnes.  Em- 
braffons  donclcfalut  qui  nous  a  eftc  acquis, 
a-fin  que  par  ce  moyen  nous  foyons  certifiez 
que  noftre  Seigneur  lefus  Chriftapparoiftra, 
cômbfeniqUe 'maintenant  nous  ne  l'apperce- 
Hions  point.  Et  ainfi  nous  deuons  bien  noter 
cè(ijuédftfiiinvt  Paul  aux  Colofueris  :  c'eft  a-  Coh.y^. 
fçiuoii' que  nous  ne  deuons  point  eftre  eftôn- 
nCz  il  '  autoUrd'huy  nous  lanjuillôns  au  mon- 
9e  ,  &  qu'il  femble  que  nous  ne  gagnons  rien 
de  feruir  à  Dieu.  Car  les  fidèles  là  dtffusfe 

GGç.  u 


(TOI  S  E  R  M  O 

faTchent  <]iiand  ils  voyent  que  les  mefchans 
»nc  ta  vogue, &  qu'eux  font  opprimez  ,£t  où 
,    cft  Dieu?  Il  ne  pcnfe  point  de  nous.  Or  i'naA 
Paul  p.ou!  decUre  qu'il  nous  faut  porterie 
.    tout  pitiemmeut  .  Et  pourquoy  ?  Oâ  eft  no- 
lire  vie?  (dit-il)elle  n'eil  pas  en  nous,niais  en 
noftrc  Seigneur  Icl'us  CliriiL  Orvoili  leùis 
.  Chriftqui  eft  à  lagloirede  Dieu  ton  Pere.iuf 
.qiics  à  tant  qu'il  nous  l'oit  reucic  au  dernier 
iour.Il  ne  fe  faut  point  donc  esbahir  (dit-il) 
luioftre  vie  ellcacliee  quant  &.quant  ,&que 
nouîfoyons  coinmc  en  l'hyiier.  Q^ndles 
fueillcs  lont  tombées  des  arbres  ,  on  voit  lA 
du  bois  qui  eft  t'cc  &mort:mais  la  vie  ne  lai  1- 
fe  pasd'ellre  au  dedans. Ainfi  receuons  noftre 
Seigneur  lefu':  Ciirift,  &  nous  remettons  du 
tout  à  luy ,  fçachans  que  noftre  vie  eft  là  cnclo 
ft.Et  d'autant  qu'il  n'eft  point  encores  mani- 
fcfté, que  nous  attendions  en  patience, &  qu'il 
nenousface  point  mal  s'il  nous  faut  languir 
au  milieu  de  beaucoup  de  mifercs  &d'affli- 
ftions.  Voih  donc  pourquoy  maintenat  fainft 
Paul,  après  auoir  parlé  du  fiecie  prefent,& 
qu'il  a  monftré  que  ce  n'eftqu'vne  figure  qui 
j.Cor,7.  palTe  (coaime  il  le  dit  es  vn autre  lieu)  nous 
ji,  ramené  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,di- 

(int  qu'il  nous  faut  perlïfter  en  cefte  efpcran- 
ce-la.Ordonc  apprenons  que  la  vraye  con- 
fiance dei  fidèles ,  c'eft  l'cfpcrance  ;  car  c'eft 
celle  qui  nourrit  la  foy.  Qjjelle  différence  y 
a-ilentre  la  foy  3c  l'elperance  ?  Par  foy  nous 
embraffjnsles  promeflesde  Dieu,  Scne  dou- 
tons point  qu'il  ne  les  accompl  flè.  Mais  ce- 
pendant ce  n'eft  point  âlTez  d'auoir  creul 
Dieu  ainlî  pour  vn  coup  :  ma  s  il  nous  y  faut 
perlïfter  conftamment.Orcela  fe  fait.d'autât 
que  nous  efperons.  Ainfl  refperance  n'eft  li- 
non la  conduite  de  la  foy.afin  qu'elle  ne  s'ef- 
uanouille  point, que  ce  foit  vnc  cliole  tempo- 
relle &  caduque, mais  à  ce  qu'elle  perfîfteiuf. 
quesaubout.Or  il  eft  vray  q  cependant  nous 
aurôs  beaucoup  île  combats  àfouftenir.il  nous 
faut(di-ie)  batailler  fi  nous  voulons  efpcrer, 
&  linous  ne  voulôs  point  défaillir  3c  decheoir 
de  noftre  efperance.  Or  cefte  doftrine  feroit 
quelque  fois  pour  nous  faire  perdre  courajc, 
ftnon  que  toujours  nous;  demeurions  rcîoT. 
lus  en  cela:c'eft,  puis  que  le  fus  Chili  ft  qui  eft 
noftre  vie,n'eft  point  ençpres,appary,que  no,f 
fouffri'ons  que  noftre  faflut  foi;  enclos  en  l^iy,^ 
&quandnousne  le  voyons  point,qijenoii«nq 
laifsions  pas  pourtant  d'<?uurir  letjyeux  df  1;^ 
foy  pour  auoir  cefte  certituderc'eit  quç  nous 
fçauons  en  quelle  main  nous  auous  mis  noftre 
depoft.  Sivn  homme  eftoit  en  danger  en  la 
maifon.ou  de  feu, ou  d'ennemis, ou  de  pillage, 
Se  qu'il  ait  vn  lieu  bien  afleuré, qu'il  ait  Yl.ami 
fidele:quand  il  luy  aura  commis  tout  fon  thre 
for  en  garde.il  ne  courra  point  à  chacune  mi- 
nute pour  le  veoir  ,  &  pour  fuetUeter  ce  qu'ij 
aura  là:il  fc  contente. Vn  homme fouftiira  bié 
d'auoir  toute  fi  rubft.îcc  enttielqs  mains  d'vç 
lîenamijil  fçfieàluyj&auboucd'vnanilcô- 


N     XIII. 

,tinue.  Or  maintenant  ,  puis  que  Dieu  fe  fait 
gardien  de  noftre  falut,&  que  s'il  eftoit  entre 
nos  mains  il  feroit  expofé  en  proye,  &  que  le 
diable  l'auroit  bien  toft  raui  ,  mais  que  Dieu 
en  ha  la  folicitude.Sc  qu'il  le  garde,&  qu'il  s'é 
appclledepoli taire ,  ii  nous  n'auons  fiance  en 
luy  qu'il  enfer»  bonne  &  feure  garde,  quel 
honneur  luy  taifons-nous  ;  Si  vn  homme  eft 
gardien  de  quelque  choie  ,  Se  qu'il  ait  vn  dé- 
port cn'trc  fes  mains,  s'il  en  fait  tort,  voila  vn 
lai-recin  le  plus  vilcin  i:  le  pire  qui  pourroit 
eftre.d'autant  qu'on  s'eftoit  fié  en  luy.Etpea- 
fons-nous  que  Dieu  vueille  tftreaccuféd'vne 
telle  deflovauté  ,  attendu mefmcs que  nous  a-> 
uons  tant  de  promefles  qu'il  accomplira  no- 
ftre falut,  puis  qu'il  en  ha  vne  fois  prins  la 
charge?  Etainfi,  toutes  fois  &  quantes  que 
nous  pourrons  eftre  tentez  de  perdre  coura- 
ge,ou  que  nous-nous  fentirons  trop  lafches 
&  trop  tardjifs.qwe  nous  apprenions  de  regar- 
der à  cefte  venue  de  noftre  Seigneur  lefm. 
Chrift ,  &de  nous  appuyer  fur  les  promelVes 
du  falut  quinous  fera  alors  apprefte.Voila  en 
f.)mme  comme  nous  auons  à  prattiquer  cefte 
dotirine  qui  eft  ici.contepue.  Or  quand  faiiitl: 
Paul  parle  du  grad  Dieu,  &  de  noftre  Sauueur 
lefus- Chrift, il  ne  nous  faut  point  diuifer  Dieu 
le  Pcre  d'auec  l'on  Fils  :  mais  lâind  Paul  en- 
tendqncDieu  apparoiftraen,  la  pcrl.snuc^e 
noftre  Seigneur  IcfusCKrift:conime.il  dit  que  '  "'*  **' 
alors  Dieu  fera  tout  en  toutes  chofes.Or  ceci, 
eft  bien  à  noter  cotre  ceux  qui  ont  voulu  niei 
la  Diuinité  de  lefus  Chnft,&  ont  imaginé  que 
il  eftoit  comme  vn  dieu  forgé  de  nouueau: 
ainfi  que  cedetcftable  quiacftépuni  en  cefte 
ville  ,  confefloit  bien  que  lefus  Chiift  eftoit 
Dieu, mais  il  difoit  qu'il  n'auoit  pas  cftt  touf- 
iours,  fculemét  qu'iiauoit  commence  Ion  cf- 
fence  Diuine  à  la  création  du  monde  ,  Si  quç 
Dieu  le  Père  lauoit  fait  palTer  par  vn  alam- 
bic (ainfi  qu'iirappelloit)&,pui$  qu'ilcftap-r 
paru  elbe  Dieu  quand  ileft  nay  au  môde.Yoi-» 
la  vn  dieu  forgé  à  lahafte.  Or  ceux  qui  ont  eu 
vne  mefnic  opinion, comme  les  hérétiques  an- 
ciens^ fe  font  armez  de  ce  p.iff.ige,  Ho  ,  voila 
fainft  Paul  qui  nopimcvn  giaiid  Dieu  :  &puis 
le-fus  Çhfift  :.  il  vVnfuit  donc  que  Iefui,Chrift 
eft  vn  brçu  inférieur  &  sfubaltçfpe  :  cCux-la, 
di-ie,fe  niocquent  hien  de  TEfcritute  fainûe.  , 
Car  fain^rPaifl  monjlre,  qu?il  ne  nous  faut 
poirij  .cftinv^f  aufupe  ,niaif  lié  de;pieu  qu'en 
Ipfus  C|>rift;carlà(commc  ijl  Iç,  dit  en  l'aucrç  Col.x.ip'. 
panage).eftç0clol'e  toute  Diwnitc.  Ilvfclà  O-  i.y. 
d'vn  mi3t  groAier  .  afin  quç-nous  y  compre- 
.niphspiusaifterr^pnt  cefte  tfltnce  infinie  qui 
.eft  en  PifVi&.que  noârCiingratituçle  fou  tan,t 
.piu^dçi(pftahle^Û,nojis,(roaginpsricndePie))i, 
.fin(?n  en  Ip  cQ»fi4ç;^t,e;j  noflr)^Sf.igncur  J^- 
iiiç  Çhf/ft,  yojJadoDcpoufquoy  ilduqM'àljï 
T^uç.de  noftre  Scignciu-  Itfus,  .Çlirift  noys 
veTronK  Diçu  en.fa  pli;ineg,randeU,t.Or  poflt- 
quoy  eft-ce;qu'il:parledcla  grîJturdeDiifU? 
C'eft  pouice  que  maijjttiiant  e)leeft  amoin- 
" ' ""  -  drie 


s  VR    L"  EPIS  T.'   A     T  I  T  E. 


<îC3 


drie  par  noftre  ignorance,  par  noftre  ipfidtli- 
té.iipaice  que  aous  foniracs  tant  cflourdis 
en  ce  monde  <]iie  c'eft  pitié.  11  efl  vray  cjiie 
nous  co>  t'tflcrons  bien  de  bouclic  qtie  Dica 
eft  grand.qii'il  eftineomprelienfible,  qu'il  tft 
ii  haut  que  nous  fommei  confus  en  penfant 
de  luy:chacun  dira  bien  cela  en  vn  mot.  Mais 
cependant  nous  voyons  le  mefpris.nous  voy- 
ons qu'on  ne  fe  peut  fieren  luy  ,  on  voit  qu'il 
ne  peut  arracher  aucune  fuiettiô  de  nous  pour 
-porter  reuerence  à  fa  maieflé.on  voit  que  fon 
Royaume  cclcfteeft  mis  en  oubli ,  que  quand 
il  y  aura  quelque  petit  gain  qui  nous  eft  pro- 
poré.nous  courons  après, nous  dtfpitons  ma- 
nifeftement  Dieu  ,  nous  ne  tenons  conte  des 
promeffes  de  l'Euâgileibrief.lcs  hommes  font 
fi  malins  qu'ils  nedcraandët  que  d'appetilVer 
Dieu,  &  nous  voyons  que  toute  noftre  vie  téd 
Jà.quand  chacun  péfera  bien  à  foy  fans  fç  flat- 
ter. Voila  donc  comme  iufqucs  à  ce  que  Dieu 
nous  retire  à  foy,  noftre  nature  n'cft  linon 
pour  amoindrir  fa  gloire, &  en  la  fin  pour  l'a- 
bolir du  tout  fi  en  nous  eftoit.  Or  fainû  Paul 
nous  monftrant  qu'il  ne  faut  point  s'amufer 
aux  chofes  prcfentes ,  ni  au  regard  du  monde, 
dit  qu'alors  nous  verrons  le  grand  Dieu. Non 
pas  qu'il  foit  augmenté:  car  nous  fçauons  que 
Dieu  ne  croift  ne  diminue  en  foy  :  mais  alors 
nous  aurons  des  autres  yeux  pour  le  contem- 
pler. Oi  aduifons  bien  que  ce  ne  foit  point  à 
noftre  confutîon.  Cardes  mefchans,  ilfaudra 
qu'ils  le  yoyent  en  dcfpit  de  leurs  dents, &  ne 
verront  point  d'Autre  grand  Dieu  que  celuy 
aui  eft  noftre  Rédempteur ,  Icfus  Chrift.  Car 
(comme  nous  auons  allégué  au  palîàgc  de 
fainft  Paul)il  eft  tellemétconioint  aïKc  Dieu 
fon  Père, qu'en  hiy  habite  toute  plénitude  de 
Diiiinité:mais  tant  y  a  que  \es  mefchans  &  re 
.prouuez  verront  ce  grand  Dieu  maugré  leurs 
acnts,  &  en  feront  confus.  Or  de  nolfte  part, 


adtiiions  de  contempler  ici  par  foy  cefîe  gran 
deur  qui  eft  en  Dieu,  &  que  fi  elle  eft  cbfcur- 
cie  par  le  monde  ,  &  quand  nous  voyons  que 
les  mondains  par  kur  orgueil  defpitcnt  Dieu, 
qu'ils  fe  mocquent  de  fon  Eiiangile,  qu'ils  fe- 
ront leurs  tnoniplies,  &  qu'il  fcnible  que  ceux 
qui  chcniiiicnt  en  modtftie  ne  foyent  rien  au 
p.ix  ,  que  nous  verrons  tant  d'hypocrites  qui 
fe  contrefont  ici  ba^,  &  qui  toutesfois  ne  de- 
mandent que  û'obfcurcir  la  gloire  deDieuî 
quand,  di-ie,nous  verrons  tout  cela, que  nous 
nelaifsions  pa'  de  contempler  parles  yeux 
fpintuels  de  la  foy,  cefte  grandeur  qui  eft  en 
Dieu,  en  attendant  que  nous  le  voyons  face  à 
facequandnous  ferons  transfigurez  en  cefte 
gloire  de  laquelle  nous  portons  maintenant 
comme  vne  petite  marque, d'autant  que  Dieu 
règne  en  nous  par  fon  fainft  Efprit.  Voila 
donc  ce  que  nous  auons  à  noter  de  ce  paflage> 
en  attendant  q  le  refte  fe  deduife  plus  à  plein. 
ORnous-nous  profternerons  deuant  1* 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflàncc 
de  nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face 
mieux  fcntir,  &  qu'en  les  fentant  nous  les  de» 
teftions  pour  toufîours  approcher  de  plus  en 
plus  de  luy,  &  pour  eftre  côfermez  en  fa  crain 
te,  &que  nous  apprenions  de  nous  defuelop- 
pcrdecemonde,&dejant  d'empefchemens 
defquelsnous  fomnies  retardez  de  nous  ran- 
ger à  Jiiy,  &  que  nous  ayons  toulîours  noftre 
regard  drefle -à  lefus  Chrift,  fçachans  que 
comme  vne  fois  il  eft  apparu  pour  fe  pre- 
fenttr  en  facrifice,  qii'aufsi  il  viendra  pour 
faire  valoir  fa  mort  &  pafsion  ou'il  a  endurée 
pour  nousattirer  à  foy,  &  ratiiier  le  falut  que 
défia  il  nous  a  monftré  en  fa  gerfonne  ,  afin 
qu'il  foit  aufsi  bien  accompli  en  nous,qui  fom 
mes  fes  membres  .Q^ie  non  fctilenicnt  il  nous 
face  cefte  grâce  ,  mais  à  tous  peuples  &  na- 
tions de  la  terjc,&c. 


C  I  N  Q^V  I  E  M  E     SE  R  MON     SVR    LA 

FIN    DV     SECOND    C  H  A  P  I  T  R  eE»    i  T     LE 


comme  nc'^n>ent  du  troifi'tirtiei''^'"''''' •''=-■ 


,,;•  1*1-'  ^rtoncecc^chofes ,  çy  ddmonrfie y^TCprcnaueC  toute  iiîi^ 

gcnce  de  co  mmander:  quepcrjonne  ne  te  mefprije.  i 

■-'  -    •  ■  i    •    '  '  " 

c  HA  P  I  T  R  E'     TA.  G  I  S  I  E  M  E.  ' 

1      Advionefîc'lci  qiiih  foyent fuict s  aux  VrincipaUtez  0"  ^uif- 
ftncesy  quih  ohcijjerit  aux  Gomicrneurs  >  qu'ils  frymtjrcfiî  a  toute 


..i       S.TtVsB!    j'il'k   xr.:  ,(.;■;  JfîtiDIJot  hH")    ««O'ilS 


bonne  œuurei 

■ni'tt  *  .:    Quils  ne  dieritjnal  de  perfônne  >, (juifs  ne  prerieat  point  de  de^ 
hat,mais foyent  humains, monjlrans  toute  douceur  cnucrs  tous  hommes. 

GGg.ii, 


«04 


S -E  TIMON    XI  111. 


Oat  lootts  ve\i  pourqnoy  le 
Fils  de  Dieu  s'cft  cïpolè  à 
;  lamort  ifindc  nous  rache- 
!  ter ,  c'ed  qu'il  nous  a  acquis 
1  à  ce  que  nous  luy  foyons  vn 
^  peuple  l'cparé  &  târtirié.Car 
puis  qu'il  nous  a  retirez  de 
la  fcruitude  de  Satan  ,  c'eft  bien  rail'on  que 
nous  facions  hommage  à  noftre  Rédempteur, 
voire  obeilFans  à  la  luftice  qu'il  nous  monftre. 
Or  pt)urce  qu'il  Icmble  que cefte  doctrine  l'oit 
CQmmunc,&  que  le  monde  aimeroit  beaucoup 
mieux  ouïr  des  choies  plaifantes,  notamment 
faintt  Paul  dit  que  c'cil  là  qu'il  nous  t'aut  in- 
fiflerrlînous  voulons  fidèlement  feruir  àl'E- 
glifede  Dieu  ,  qu'il  nous  faut  exhorter  ceux 
qui  ont  elté  fi  chèrement  rachetez,  de  s'adon 
ner  à  bien  taire,  ic  quand  nous  les  aurons  en- 
feignez.il  nous  les  faut  inciter  &  admonefter. 
Car  ladortrine  de  foy  ne  fuftîroit  point ,  iî- 
non  qu'il  y  eutt  des  aiguillons  pour  picquer 
ceux  qui  font  tardifs.  Mefmes  il  adioiide  que 
il  faut  redarguer  ceux  qui  faillent ,  &  les  re- 
darguer  viueraent.  Et  pource  que  beaucoup 
meiprifcnt  la  parole  de  Dieu, il  veut  que  ceux 
qui  i'anoncentjla  portent  en  authorité,  mon- 
ftrans  à  quel  maiftre  ils  feruent ,  &  au  nom  de 
qui  c'eft  qu'ils  parlent, &  qu'ils  mettent  peine, 
entant  qu'en  eux  fera,  qu'on  les  efcouteauec 
toute  reuerence  &  humilité.  Voila  donc  en 
fomme  ce  que  fainft  Paul  traitte  ici. Et  puis  il 
parle  d'obeir  aux  Magiftrats,  &  qu'on  fe  gou 
uernepaifiblementrque  ceux  qui  fe  nomment 
fidèles, foyent  modérez, que  non  feulement  ils 
s'abftienent  de  toute  iniure  &  violence  ,  mais 
qu'ils  fouiFrent,&  foyent  patiés,&  qu'ils  taf- 
chent  tant  qu'il  leur  fera  pofsiblede  mainte- 
nir concorde  cSf  ftatcrnité  entr'cux  :  mefines 
qu'ils  n'irritent  point  les  incrédules, mais  que 
pluftoft  ils  tafchent  de  les  gagner  par  dou- 
ceur. Voila  en  fomme  ce  qui  eft  adioufté  pour 
le  fécond  article  principal.  Or  nous  auôs  déf- 
it adioufté  que  ceci  n'elt  point  Tbperflu,  c*e(l 
afçauoir  que  fainû  Paul  veut  que  ce  qu'il  a  de 
claré  auparauant' foitaduancé.  Gar  li  on  ne 
nous  apporte  rien  de  nouueau  ,  ^vus  gommes 
tantoft  ennuyez:  il  nous  femble  que  c'eft  téps 
perdu.lînon, qu'on  nous  chatouille  les  4ia:eil.> 
les,  &  que  nous  oyons  ce  xjué  nous  n*auîous 
point  entendu  auparauant. Et  cependant  ncrtis 
ne  cognoiflons  pas  que  nous  auos'befoin  d'e- 
ftre  fouuent  aduertis  de  noftre  deuoir.  Cap 
nous  ne  monftrons  point  que  nous  ayons  co- 
gnu  la  volôté  de  Dieu.mfques  à  tant  que  nous 
la  mettions  en  cyccution  ,  pour  declircr  fî 
•nous  auQiis  bi^»-grofité  en  l'cfcolp  de  noilre 
Seigneur  Itlh',  Chrift.  Or  on  verra  que  nous 
auross  efté  fouuent  exhortez  d'vne  raefme 
chofe,&  joutesfpis  nous  n'en  tcnonsconte.  Si 
on'notfs  laiffcJlçert  èè\  ieft;ît ,  qu'àuriorts  nous 
sjajjné  d'auoir  oiiy  &  trois  &  (\ix  fois  ce  que 
Dru  nous  a  déclare?  Et  ainfi, pource  qu'il  y  a 
vn  tel  appétit  desborde  aux  hommes,  qui  dé- 


firent qu'on  leur  aduanee  totWîours  ie  ne  f^ây 
quoy  qui  ne  leur  feruiroit  de  rien  ,  fainit  Paul 
les  ramené  à  ce  qui  édifie  ,  &  s'addrcffc  à  tous 
Pâfteurs  qui  ont  la  charge  de  gouuerncr  l'E- 
glife  de  Dieu,  difant.  Il  ne  fe  faut  point  arie- 
fter  àde$  fpeculations  inutiles, mais  Dieu  veut 
que  fa  Parole  ferue,afqu'elle  profite. Et  com- 
ment fcra-ce?  Quand  chacun  (cra  admonefté 
de  fou  deuoir,  qu'après  qu'on  nous  aura  pro- 
pofé  quelle  eft  la  grâce  de  Dieu  enners  nous, 
&les  threfors  de  fa  mil'ericorde  qu'il  a  def- 
ployez  en  noftre  Seigneur  Icfus  Chrift,  qu'vn 
chacun  regarde  à  foy,&  q  noiis  ne  foyôi  point 
lî  ingrats  d'enleuclir  la  mémoire  de  noftre  re 
demption.Et  côment  cela  ?  Q^e  par  bonne  8c 
fainde  vie  nous  monftrions  q  nous  fommes  le 
peuple  de  Dieu,  que  nous  fommes  fes  domcfti 
ques, puis  qu'il  luy  a  pieu  de  no'accepter.Car 
(côme  i'ay  délia  touché)il  ne  fuftit  point  que 
ceux  qui  ont  la  charge  d'enl'eigncrfacétleur 
deuoir:mais  chacun  à  fon  efgard.quâd  il  vien- 
dra au  fermon.doit  eftre  difpofé  à  receuoir  ce 
qui  luy  eft  vtile  pour  fon  falut  :  nous  deuons 
aufsi  taire  le  femblable  quâd  nous  lifons  l'E- 
fcriture  fainâe.Brief,toutesfois  &  quâtes  que 
on  parle  de  Dieu  pour  noftre  falut ,  c'eft  que 
nous  cognoifsôs  fa  bonté  infinie  enuers  nous: 
il  faut  que  de  noftre  part  nous  foyons  incitez 
à  l'honorer  &  à  le  feruir  .  Or  auec  la  doûrine 
il  faut  que  l'exhortation  fuyue.Cemo^d'Ex- 
horter.tinporteque  nous  foyôs  refueillez  de 
noftre  parcrte .  Car  nous  voyons  <jue  fi  on  ne 
fait  qu'expofer  l'Efcriture  faîtlc,  cela  '.'efcau 
ie,&  n'en  fommes  poiht  touchez  au  vif.Si  doc 
la  doûrine  n'eft  aidée  par  exhortations  ,  elle 
eftfroidc,ellenenous  percera  point  le  cœur: 
mais  qu^nd  nous  fommes  exhortez, nous  pen- 
fons  triieux  à  nous.  Toute^foisil  y  a  trois  de- 
■grei:  qu'il  faut  qu'on  redargue  ceux  qui  mef- 
méifortt  fi  nonchalans  ,  qu'enrores  qu'on  les 
incite  ils  ne  marchent  point .  Il  faut  donc  que 
telles  gens  foyent  menacez  du  iugement  de 
0icu,qu'ori  leur  propofe  comme  bicu  punita 
ceux  qui  aurôt  mcfpnfé  fa  Parole.brief.qu'ott 
les  examine  en  telle  forte  ,  qu'ils  foyent  con- 
trants de  feotir  qiiellevertu&authorité  doit 
auoir  la  dodrine  laquelle  ils  ont  mefpril'ceau- 
;  parauant.  Noui  voyons don^^m^intenaiit  que 
s*il  yacraintede  Dicuenno'us, ce  n'eft  point 
'^ffczque  nous  defiriatœd^owtr  &  fçai)Oii"Ce 
qui  eft  côtenu  en  l'Efcriture  fainde, mais  qnc 
nous  foyoïjsdocilçî.&id'vn  cfprit  bénin  pour 
receuoir  les  corrediôv  qu'on  nous  fera,  &  en- 
cores  qu'elles  nous  foyept  dlires  &  fafchcu- 
fcs ,  neant'moins  voyant  qu'autrement  on  ne 
nouy  peut-aitirer  .i  Dieu,  quf  nquî;  ne  foyoqs 
point  reuefchcirlî  oh' nous  picque,qu'on  nous 
traitte  plus  durement  que  hdlis  ne  voudrions, 
quecelanefojt  point  poor<  noijs  dclgoiifter 
de  la  bonttii^'doftrine  ;  lie  tournons  la  faire 
fuir,  mais.que  nous  contlmiyons  ce  que  Dieu 
cognoift  nous  eftre  pioCtable.  Car  l\  nous  al- 
léguons. Et  comméu''nc  fcroit-ce  point  .ilFez 

cnie 


5VR   L' EPIS  T.   A  TITE. 


<îoç 


que  «ion»  fuAîons  en  feignez  ?Car  chicun  re- 
gardera de  le  goduerner  :  mais  qu'on  nous 
picque  ,  qu'on  nous  vueille  ainfi  pouffer  par 
force ,  il  n'y  a  point  de  propos  :  eft-ce  la  fa- 
çon? Si  nous  alléguons  ccla.c'elt  nous  rebec- 
quer  contre  Oieu,&  non  point  contre  les  hô- 
mei.  Et  cependant,  tous  ceiix  qui  parlent  ain- 
fi,  monftrent  que  iamais  ils  n'ont  entre  à  bon 
efcient  en  leurs  conlciences  pour  efprouucr 
ce  qui  y  eft.  Car  celuy  qui  fecognoiftrabien, 
fentiraque  Djeunon  fanscaufca  voulu  que 
nous  fulsions  &  exhortez, &  redarguez  par  fa 
parole.Ie  vous  prie, l'homme  le  cognoiftra-il 
mieux  qu'il  n'eil  cognu  de  Dieu:  Car  nous  ne 
voyons  point  clair, tur  tout  à  nos  perhez(cô- 
medit  faintk  Ichan)&  Dieu  y  voit  beaucoup 
plus  clair:  quand  nous  fendrons  vn  vice, il  en 
cognoiftravne  centine.  Or  maintenant  il  a 
prononcé  ,  quand  nous  aurons  efléadmone- 
ftez  ,  qu'on  nou';  aura  déclaré  les  chofesqui 
font  propres  pour  noftre  laliit.mefmes  quand 
on  nous  aura  mafché  les  choies  ,  qu'on  nous 
en  aura  donné  vne  intelligence  toute  priuee, 
que  ce  n'eft  point  affez  ,  mais  qu'il  faut  auec 
cela  que  nous  foyons  folicittz  par  bonnes 
exhortations  &  véhémentes;  &  pins  ,que  nous 
foyons  redarguez  ,  comme  li  on  fondoit  vne 
playe:  pource  que  nos  maladies  font  fouuent 
fecrettes,  li  faut  que  Dieu  entre  là  dedans  ,  & 
qu'il  viene  iufques  à  la  mouelie  des  os,  (ainiî 
que  l'Apoftre  en  parle  en  l'Epiftre  aux  He- 
iJehr.  4.  brieux)qu'il  n'y  ait  ne  penfees,  ni  atfedions, 
u.  que  tout  cela  ne  fou  bien  fondé  par  la  parole 

de  Dieu.  Puis  qu'ainlî  eft  que  nous  en  auons 
vne  telledeclaration  ,  *u'eft-ce  que  nous  ga- 
gnerons à  nous  rebecquer  plus?  Et  c'eft  ligne 
(comme  i'ay  défia  dit  )  que  iamais  nous  n'a- 
uons  penfé  à  nous ,  mais  que  plulloll  nous  a- 
Bons  fermé  les  yeux  à  nos  vices, &  ne  deman- 
dons linon  qu'on  nous  flattc.comme  cefte  hy 
pocrilîe  nous  creue  les  yeux.  Et  pourtant, re- 
tenons ce  qui  nous  eft  ici  dit  par  fainâ  Paul, 
c'eft  que  la  parole  de  Dieu  nous  eft  donnée 
pour  guider  nos  pas.  Et  au  relte  ,  que  ce  n'cft 
point  affez  que  le  chemin  nous  foit  monftré, 
mais  d'autant  que  nous  fommes  pare{Icux& 
ronchalans ,  &mefmesqu'encores  que  nous 
'  ayons  eu  quelque  bon  defir  ,  il  fera  bien  tan- 
toft  refroidi ,  il  faut  que  nous  foyons  attirez 
par  exhortations,  &s'il  nous  adulent  de  tour 
lier  le  dos  à  Dieu, ou  que  nous  foyons  efgarcz 
çà  &  la,il  y  a  le  remède  fécond  que  nous  auôs 
dit.  Et  puis  il  faut  que  le  troilîeme  foit  adiou 
fté ,  c'eft  quand  Dieu  nous  menace  ,  que  nous 
foyons  enfeignez  à  plier  le  col  fous  fun  obeif 
fance.  Voila  le  vray  vfage  de  la  parole  de 
Dicurvoila  anfsi  comme  il  faut  que  nous  oyôs 
les  fermons, &qHe  nous  lifions  en  l'Efcritiire 
faindle  ,  c'eft  qu'après  que  nous  aurons  cognu 
ce  que  Dieu  nous  mon  lire, nous  foyons  pouf- 
fez à  le  fuiure:&  fi  cela  ne  fiiffir.que  no'  foy- 
ons touchez  au  vifafin  de  no'  defplaire:bricf, 
que  nul  ne  demande  de  s'endormir  :  &  s'il  le 


fait.qu'il  foit  bien  aife  qu'on  le  refueitle  d'au 
tre  cofté.  Voila  en  femme  cequenoittauonc 
à  recueillir  de  cefte  doûrine-Or  quand  fainâ 
Paul  dit  que  cela  fe  doit  faire  auec  totitc  au- 
thorité,  ou  auec  comniandeniét,il  nous  mon- 
ftré qu'il  n'eft  plus  queftionde  fe  iouer  auec 
vn  fi  grâd  maiftre  comme  Dieu.  Et  toutcsfois 
nous  voyons  quelle  eft  auiourd'huy  la  rt  be4- 
lion  de  plufieurs:  ils  fe  diront  affez  Chrc  flics, 
mais  fi  on  leuranonce  la  parole  de  Dieu  ,  ils 
voudroyent  que  Dieu  pLiaft  là  pour  eux  ,  &  i 
leurappetit:mefmes  on  leur  fera  trois  renioa 
ftrances  deuant  qu'ils  fonnent  vn  mot.  Et  qui 
font-ils?Encorev  qu'ils  fuffentplus  que  Prin- 
ces,fi  faut-il  que  toute  grandeur  de  ce  monde 
foit  abbaiffee  lous  la  maicfté  fouucraine  de 
Dieu  :  mais  des  maloftrus  qui  ne  font  rie  n,  ne 
pourront  fouffrir  qu'on  parle  viuement  à  euK 
qwâd  ils  auront  failli:  qu'on  Its  corrige, ils  di 
rôt,Et  ce  n'eft  point  i  voui  de  no"  côiiiander 
Ce  n'eft  point  donc  à  Dieu  :car  Dieu  nous  a 
commis  à  cefte  codition  qu'il  nous  fautanon- 
cer  f*  parole.Et  commet?  Il  eu  vray  quenoa* 
deuons  &  prier,&  adrooncfter,&  vl'er  de  tou- 
te douceur  :  mais  cela  n'empefche  point  que 
touliours  il  n'y  ait  authorité,  que  nous  ne  mu 
ftrions  que  noftre  parole  procède  de  celuy  de 
uat  lequel  toutgenouil  fe  doit  ployer, &  qu'il 
faut  que  toute  créature  foit  comme  abbatue 
po»  fe  ranger  en  toute  fuicttion.  Ceux  donc 
qui  ne  peuuent  foiitfrir  que  If  parole  de  Dieu 
leur  foit  prefchce  auec  authorité  &  comman- 
dement,qu'ils  aillent  foTgc-rvn  Euangile  nou 
ueau. Car  nous  oyons  ce  qui  eft  ici  dit:il  eft  ini 
pofsible  qu'fn  homme  s'acquitte  d'enfeigner 
le  peuple  de  Dieu,  finon  qu'il  conim.îde,  pour 
dire.  Il  faut  qu'ainfi  foit,  il  faut  paffer  par  là. 
Car  nous  auons  vn  Maiftre  lequel  ne  foutfri- 
ra  point  qu'on  le  mefprife  ,  iene  fuis  point  ici 
comme  en  mon  nom,ie  neveux  rien  aduancex 
de  par  moy, ne  rien  apporter  de  mon  propre: 
mais  quand  ie  parle,  c'eft  au  nom  de  Dieu  :  il 
faut  qu'en  defpit  de  tous  contrediians  on  fe 
range  li  ,  que  toute  hautcffe  foit  abbatue  ,  & 
qu'il  n'y  ait  créature  qui  Icne  le  bec  ,  m  les 
yeux  àl'encontre  de  celuy  auquel  il  faut  que 
grans&  petis  s'affuiettiffcnt.  Voila  dôc  pour 
quoy  fainft  Paul  adioufte  ici  ce  mot  de  Com- 
mandeinent,ou  d'Authorité.  Orfî  nous  auiôs 
cefte  dodnne  bien  imprimée  en  nous,  il  eA 
certain  que  nous  profiteriôs  beaucoup  mieur 
en  la  parole  de  Dieu  :  mais  qui  eft  caufe  que 
ayans  oay  beaucoup  de  lermons,  nous  dcmcu 
rons  toufiours  en  noftre  naturel ,  iiiion  d'au- 
tant que  nous  ne  cognoilTons  pas  que  noftre 
Seiîîneur  no'  appelle  à  foy?ouy  afin  que  nous 
luv  ficions  telle  reuercce  qu'il  mcrite,&  non 
feulement  par  cérémonie  ,  mais  eu  toute  no- 
ftre vie,  que  toutes  nos  alfedions  lovent  don 
tees  fous  Uiy.que  toutes  nos  pcnlces  te  retie- 
nent  là  comme  bridées,  qu'il  n'y  ait  plus  ne 
raifon  ,  ni  appétit  qui  ne  foit  là  reftraint  .  Si 
nous  cognoilsions  cela  ,  il  eft  certain  que  ia- 
GGg.iii. 


6cr; 


SERMON    XIII I. 


mais  nous  n'orrions  vnfeul  mot  de  l'Efcritu 
te  fainfte  qui  ne  nous  profitaft.  Mais  quoy? 
Nju!.  y  venons  comme  beAes.&noftre  Sei- 
gncui  nous  renuoye  tels  que  nout  fommes  vc 
nus:  &aufsi  nous  en  fommes  dignes.  Et  ainfi 
apprenons  que  comme  Dieu  veut  que  fa  paro 
le  foit  prefcnee  en  authoritc.il  faut  aufsi  que 
nouî apportions  là  vue  reuerence  pour  nous 
humilier  deuant  luy  ,  pour  receuoir  fans  con- 
tredit tout  ceqii^lnous  Jira,&  que  nous  dé- 
pendions tellement  de  fa  bouche  ,  qu'on  co- 
gnoilTeque  ce  n'ell  point  en  vain  que  nous 
proteftons  de  le  tenir,  Se  pour  noftre  Dieu,  & 
pour  noftre  Père.  Et  l.î  deflus  il  adioufte  enco 
rcs,  Quf  nidntmeflrifc  The.  C'clt  à  luy  qu'il 
s'adrelle,  mais  ceci  appartient  à  toute  l'Egli- 
fe:cjnimes'il  diloit.Aduife  que  la  Parole  que 
tu  portes  ne  foit  point  en  mefpris.  Or  il  eft 
vray  que  cela  ne  fera  point  en  nous:car  on  en 
verra  beaucoup  d'incorrigibles  :  &  d'autant 
plus  qu'on  les  inftruit ,  &  qu'on  obfcri;e  tous 
les  moyens  que  Dieu  monftre  afin  de  les  ré- 
duire ,  ils  ne  feront  que  s'endurcir  &  empirer 
toulîour^.Nous  verrons  donc  ceia:mais  quoy 
qu'il  en  foit.lî  deuons-nous  toiifîours  auec  au 
thoriténnnftrcr  que  BOUS  fommes  enuoyez 
"a.  Cori».  de  Dieu.  Et  c'tft  ce  que  dit  fainft  Paulicar  il 
■^to,A,  -dcfpite  cesorgueilleuï  qui  ne  tienent  conte 
de  toutes  let  menaces-  Et  bien  ,  fi  auons-nous 
(dit-il)  le  gl.iiue  tout  appareillé  pnur  cxscu- 
ter  la  vengeance  contre  tous  ceux  qui  nous 
auront  rciettez  ,  ou  bien  qui  n'auront  point 
obei  \  la  doftrine  que  nous  portons. Or  faintt 
Paul  ne  parle  point  là  d'vn  glaiue  matériel, 
mais  il  dit  que  Dieu  ne  fouffrira  point  que  fa 
parole  ait  efté  ainfi  reiettee.Et  il  dit  que  nous 
auons  ce  g!aiue-la  en  la  main.  Et  pourquoy? 
Car  il  faut  que  nous  foyôs  iugex  par  Is  paro- 
le de  Dieu  ;  fi  auiourd'huy  nous  n'en  tenons 
conte,  fi  cil-ce  qu'au  dernier  iour  nous  fenti- 
lonsla  vertu  qu'elle  aura  tue.Et  ainfi  ce  n'eft 
point  fans  eaufe  que  maintenant  il  eft  dit  à 
Tite,Q»f /««/»*  tt  m :fpr:fe: comme  s'il  difoit, 
Si  les  hommes  font  ici  des  rebelles ,  &  que  tu 
«'en  puifl'es  cheuir,&  combien  que  tu  leur  inô 
ftres  que  tu  parles  au  nom  de  Dieu ,  que  tu  es 
f  nuoyé  de  luy  ,  qu'ils  fe  mocquent  toufiours 
de  toy  ,  Se  qu'ils  aillent  leur  train  ,  que  tu  ne 
laifTes  point  pour  cela  de  toufiours  leur  anon 
eer  quelle  maledicUon  leur  eft  appreftce  pour 
leur  impieté.  Voila  (di-ie)  comme  il  nous  en 
faut  faire.  Et  cependant  notôs  qu'ici  en  gène 
lal,  S.  Paulmonltreà  tous  Chrefticns  comme 
ils  doiuent  profitcren  la  parole  de  Dicu.c'eft 
(comme  i'ay  délia  touché  )  en  apportant  vne 
telle  reuerence  que  tout  ce  qui  leur  fera  dit, 
ils  le  reçoyucnt  tomme  en  tremblant.  Il  eft 
vray  que  la  parole  de  Dieu  nous  doit  citre 
douce  8c  amiable,  mais  fi  faut-il  que  noiiv  ay- 
ons ccfte  crainte  de  laquelle  parle  le  Prophè- 
te îfaie:  car  il  dit  que  l'Efprit  de  Dieu  ne  re- 
tjU.U.ié  pofcraHnon  fur  ceux  qui  tremblent  à  fa  pa- 
rgU.Et  ainfi  gardâs-nous  bien  de  ce  niefpris. 


Car  nous  ne  fçaurions  mieux  monftrer  que 
nous  fommes  créatures  dcfefperees, qu'en  meC, 
prilaiit  ce  qu'on  no'  propofc  au  nom  de  Dieu^ 
ti  mcfines  quand  nous  venons  à  nous  eleuer 
c5tre  ceux  qui  nous  font  ordonnez  Miniftres 
d'icelle.Et  neantmoins  combien  y  en  a-il  qui 
ne  font  que  hocher  la  tefte  quand  ils  oyent 
ce  qui  leur  eft  remonftré  au  fermon?  Et  puis 
quand  les  Miniftres  parleront ,  il  leur  femblc 
que  c'eft  coruee  de  les  ouir,tant  s'en  faut  que 
ils  adiouftent  foy  à  ce  qu'ils  difent  pour  s'y 
ranger  :  on  void  cela  auiourd'huy.  Q^Teft-tl 
donc  queftion  défaire,  finon  que  nous  co- 
gnoifsions  vne  telle  maicfté  en  la  parole  de 
Dieu.que  ceux  qui  la  prefchent.nous  foyent 
en  telle  reuerence,  que  nul  ne  s'i  leue  pour  re 
iettf  r  ce  qu'ils  nous  anoncent.  Car  ceux  qui 
mt  fpriferont  noftre  doûrine  ,  c'eft  àdire  cel 
k  que  nous  portons,au  nom  de  Dieu,fentirôt 
que  ce  n'eft  point  â  nous  qu'ils  font  la  guer- 
re ,  mais  qu'en  la  fin  ils  cognoiftiôt  que  Dieu 
eft  leur  partie  aduerfe ,  d'autant  qu'ils  auront 
a.nfi  bataillé  contre  fa  parole.Or  venôs  mais 
tenant  au  fécond  article  principal  que  fainû 
Paul  traitte  ici. Il  veut  que  les  Chrcftiés  foy- 
ent admoneftczde  s'afluiettir  nuv  Vrincipa»' 
tex.  O-  Vmjfances,iyi''ohi:ir  aux  M.ig:flrati.OT 
nous  auons  à  noter  en  premier  lieu  que  les 
Juifs  eftoyci  alTez  difficiles  à  gouuerner.  Car 
ils  ont  e/té  toufiours  mutins  de  lair  nature:8£ 
cependant  à  caufe  des  promeflcs  ,  que  Dien 
les  auoit  choifis  pour  fon  peuple  ,  Se  pour  fon 
héritage,  il  leur  fembloit  qu'on  leur  fai  foit 
grande  iniure  de  les  tenir  fous  l'obeiflance 
des  Princes  incrédules.  D'autre  cofté  nous 
voyons  la  hautefle  qui  eft  en  tous  homes, qu'il 
n'y  a  rien  qui  les  fafche  plus  que  d'tftre  fu- 
iets:&  cependant  ils  fçauét  bien  faire  couiier- 
ture  de  toutes  les  promeflcs  de  Dieu.  Car 
quand  il  eft  dit  que  nous  fommes  héritiers  du 
monde. que  nous  (oinmes  enfans  de  Dieu.que 
nous  fémesvne  facrificature  royale, pliifieur» 
prédront  cela  à  leur  aduantage,  qui  s'eftoyét 
exemptez  de  toute  fcruitude ,  Coninient?&de 
quoy  nous  profitera-il  que  Dieu  nous  ait  choi 
fis  pour  fes  enfans,  que  nous  luy  foyons  Se  (x 
«rificatcurs,&  rois,  finon  que  nous  ne  foyons 
plus  tenui  en  captiuité  &  en  bride  fi  eftroite? 
Il  a  donc  falu  que  les  fidèles  fuflent  admone- 
ftez  quand  Dieu  les  exalte  en  tel  degré  d'hon 
neur.que  ce  n'eft  point  quant  à  la  vie  prefeo- 
te.mais  qu'ils  fe  doiuent  contenter  du  royau- 
me fpnuuel  de  noftre  Seigneur  Icfuv  Chrift, 
Si.  qu'ils  foyent  deliurez  de  l.i  Icriiittide  de  Sa 
tan, des  lii-nS  de  péché  &'  de  mnrt,  qu'ils  foy- 
ent afFrâchispour  iouu  de  l'héritage  qui  lenr 
eft  apprefté  au  ciel. Et  c'tft  à  quoy  tend  cefte 
exhortation  que  fait  ici  faïj  Paul.  Or  aniour 
d'huy  cjmbif  n  que  nous  n'ayons  pas  vne  oc- 
cafion  telle  que  les  luift  auoycnt ,  pour  nous 
retirer  de  toute  fuiettion,  fi  ift-ce  que  ce  vi- 
ce  eft  tellement  enraciné  en  tous  nos  efprits, 
qu'il  nous  eft  vtile  d'eftre  râgez  &  matiez.  Se 

(comme 


Svll.    L' EPIS  T.    A    TITE. 


CoT 


I/ï.44. 

ir. 

l,&6. 


^  comme  r*y<ic fia  touché  )  (inon  <jiie  noftre 
Seigneur  nous  déclare  que  nollre  condition 
eA  telle, tamais  nous  ne  pourrons  trouucrbon 
que  nul  domine  fur  nous ,  &  l'expérience  le 
monftre  par  trop  .  Voila  aufsi  corne  touiiours 
il  y  a  tant  de  rebellions  qu'on  a  veues  aux 
hommes.Car  on  a  peni'é.Et  taut-il  que  le  foye 
fuiet  à  ccfluy-ci.ou  i  ceihiy-la  ?  Ne  foinraes- 
nous  pas  tous  fils  d'Adam,  &  fortis  de  Tarche 
de  Noé  ?  Voila  des  propos  phantafliques  qui 
font  pour  peraertir  toute  police  au  monde. 
D'autre  coilé  on  a  regardé, Et  ceftuy-ci  cft-il 
déplus  grande  qualité  que  moy  ?  A  quel  pro- 
pos m'airuiettiray-ie  à  luy  ,  quand  pluftoft  il 
ocuroit  eftre  mon  intérieur  î  Y  a-il  raifon  en 
cela  ?  Q^and  on  regarde  ainli  les  perfonnes, 
touiiours  on  prend  couuerture  de  Ce  rebec- 
quer:  mais  quand  nous  aurons  ceft  article  re- 
folu.c'ell  que  toutes  Principautez  n'ont  point 
eiU  eftablies  à  l'appétit  des  hommes.mais  que 
Dieu  en  eft  l'autheur;  &  puis  que  ceux  qui  do- 
minencne  l'ont  point  là  par  cas  fortuit,  mais 
que  c''eft  Dieu  qui  en  difpofe  ainiî:quand  nous 
aurons  cela  bien  conclu,  alors  Cnon  que  nous 
vueillions  taire  la  guerre  contre  Dieu,  il  fera 
qucftion  de  nous  tenir  paiiîblcs  :  comme  aufsi 
fainti  Paul  en  parle  au  trezitme  chapitre  des 
Romains.  Apprenons  donc  par  ce  pairage.quc 
fainû  Paul  a  voulu  déclarer  aux  Chrcfliens 
qu'il  ne  faut  point  fous  ombre  que  Ditu  les  a 
adoptez  pour  Tes  enfan<:  .qu'ils  cuident  faire 
valoir  cela  quant  à  cefte  vie  caduque, &  qu'vn 
chacun  ait  fa  fcigneurie  àpart ,  &  qu'il  n'y  ait 
plus  de  fuiettiop:mais  qu'il  nous  faut  conten- 
ter que  noftre  Dieu  nous  foit  Père,  iS;  que  par 
efperance  nous  attendions  l'Krritagequi  nous 
eftencorescaché,&  que  nous  l'.itttndions  pa- 
tiemment, iufq"iie>  à  ce  qu'il  nous  retire  de  ce 
monde. Mais  cependant, qu'vn  chacun  fe  con- 
tente Je  fa  petittfle  :  que  ceux  qui  font  po- 
ures,qui  font  de  baffe  condition, qui  font  vili- 
pendez Iclon  le  monde, ne  s'clcuent  point  :  & 
que  mefraei  chacun  delon  bon  gré  rcçoyue 
ce  que  Dieu  aura  difpofé  de  luy  :  c'eft  que  les 
feruitcurs  obeifient  à  leurs  maiftres.que  le 
peuple  obeifTe  à  fon  Magiftrat,&:  à  toutes  gés 
de  iijftice  ,&■  que  nous  fçachions  que  c'eft  vn 
'feruicc  agréable  à  Dieu  .  Il  eft  vray  que  ceux 
qui  font  elcucz   tn  honneur  ne  le  doyucnt 
point  enorgueillir  à  l'encontre:  car  ils  auront 
à  rendre  conte  à  Dieu  s'ils  ont  abufé  de  leur 
puifianccAuf^i  celuy  qui  efl  riche,  s'il  fait  du 
tyran  fur  fcs  frères,  &  qu'il  domine  en  toute 
cruauté:fi  les  Magiftrats  auAi  excédent  mefu- 
re  ,&  qu'ils  ne  foycnt  point  vrais  Paitturs  du 
peup!c(commerÉfcriçure  les  nomme)  il  fau- 
'  dra  qii'ils  f<-ntent  en  la  fin  qu'ils  n'cfioyent 
rien  plus  que  les  autres  :  comme  il  f  ft  dit  au 
Pfeàume,  lisent  cftc  lieutenansde  Dieu  pour 
vn  temps:ils  cogrioiflenj  qu'  Is  n'(  ftoyent  que 
vers  de  terre  .  Car  èftan^  dtfpoullcz  de  celle 
hauttfleqiii  leur  cblcuilToit  les  yeux,  ils  vie- 
neni  à  pourriture,telkmtnt  que  Dieu  n'a  peu 


endurer  qu'ils    s'elcoâflênt  ainfi   par  defluï 
leurs  prochains .  K4ait  quoy  qu'il  en  foit,  que 
les  Chreftiens  en  gênerai  foycnt  aduertis  que 
Dieu  ne  les  «point  conftitueî:  rois&facrifi- 
cateurs  pourauoir  louiflànce  de  ce  royaume- 
la, ni  de  cefte  facrificature  en  ce  monde  par  ef 
fet,  mais  qu'il  faut  qu'ils  attendent  par  efpe- 
rance ces  bien»  fpiritucls.Et  au  refte.quant  au 
monde,  qu'ils  foulfrent  que  Dien  les  conduifc 
comme  des  brebis  ,  &  qu'ils  cheminent  en  ce- 
lle Cmplicité-la.Car(comme  i'ay  défia  dit)ce 
pendant  que  nous  regarderons  les  hommes, 
nous  ferons  toQlîours  agitez  de  quelque  in- 
quiétude,comme  nous  voyons  que  nos  efpritc 
font  fretillans,  Se  qu'il  ne  fautguercs  d'occa- 
fion  pour  nous  delpiter.en  forte  que  nous  re- 
ietterons  toute  bride  &  tout  ioug  :  mais  que 
nous  reuenionsàce  qui  nous  eftmonftrépar 
fainft  Paul .  Il  eft  vray  quand  en  ce  paflàge  il 
dit  que  nous  foyonsadraoneftetd'eftrc  fuiets 
aux  Principautez  &■  Puiflànces,  qu'il  ne  parle 
point  de  foy, c'eft  au  nom  de  Dieu:mais  cnca- 
res  il  en  fait  déclaration  pins  expreflè  en  ce 
trezieme  chapitre  des  Romains  q  nous  auons 
allégué  :  car  il  dit  que  toutes  puiflànces-font 
fondées  en  la  vérité  de  Dico  ,  non  feulement 
entant  qu'il  veut  que  le  genre  humain  foit  gou 
uerné  partel  ordre  &  police, mais  que  fi  vn  ho 
me  eft  en  authorité  &  au  fiege  de  iufticc ,  que 
c'eft  autant  que  s'il  luy  auoit  colloque  de  fa 
propre  main. Car  c'eft  fon  office  de  donner  le 
glaiue,&  defceindre  aufsi  le  baudrier,quand  il 
voudra  déprimer  ceux  quiauoyentauparauant 
le  glaïue  de  iufticeiS,:  quad  ils  font  elcucz  bien 
haut, il  les  rabbaifle.Q^ç  donc  nous  cognoif- 
fions  cela  .afinde  ne  nous  plus  abufer  en  nos 
fpeculations, pour  dire, Et  pourquoy  feray-ic 
fuiet  à  celuy-la;  fourquoy  feray-ic  iaferieur 
AcciKiy-ci?  Pourquoy  vn  tel  dominera-il  par 
deffus  moy.'Or  quand  nous  auons  ainfi  plaidé, 
fi  cft-ce  que  Dieu  renucrfera  en  vn  mot  tou- 
tes nos  belles  couleurs  &:fubterfiiges,d'autant 
qu'il  luy  plaiftainfi  :  &:  ce  n'eft  point  à  nous 
d'en  difputer  ,  quand  nous  cognoiflons  qu'il 
nous  veut  ramènera  telle  raifon  .  Vo  Jadonc 
ce  que  nous  auons  à  retenir  de  ce  paflage  .  Et 
fuyuant  cela,  nous  voyons  eue  nciis  fomnies 
tant  mieux  confermez  en  l'efperarce  de  la  vie 
éternelle  ,  quand  leschofes  ne  nous  vienfni 
point  en  ce  monde  félon  nosappetis .  Car  fi 
nous  eftions  tous  comme  ptti<:  Princes,  &:  que 
feroit-ce  î  II  n'y  auroit  point  d'autre  Paradis 
pour  nous,  la  terre  nous  retiédroit  tellement, 
que  le  ciel  ne  nous  feroit  plus  rien  .  Mais 
cuand  noftre  Seigneur  nous,  coçiduit  par  ce 
m  nde  en  telle  forte  que  trous  Icniroesici  con 
ttmptiBJes,que.nous  fommcs  en'fi^iettion, ce- 
la nOjUSadçionefte  &  nous^fpcited'eleuer  léj 
yeux  de  noftre  foy  en  haut,  &  qire  nous  atten 
dioiis  ce  qui  ne  nous  eft  point  ercores  .ippa- 
ri'.Or  s'il  a  efté  commandé  aux  Chreftiens  de 
obéir  &  eftre  fuiets  aux  Principautez  &  Puif- 
fanccs  du  temps  que  ceux  qui  auoyent  leglai- 
GGg.iiii. 


.«. 


«îo8  SERMO  N     XII  M. 

«e<le  iafticc  cftoyent  incrédules  &  ennemis  traigne  par  force  pour  obéir  aux  MagiftratÎF 

de  Dieu  ,  qtiandnouj aurons  ceft  aduantage-  mais  qu'ils  s'y  commettcnc,  cognoiflans  que 

la,  que  ceux  qui  dominenti  font  héritiers  auec  Dieu  veut  efprouiiernoflre  humilité  en  cela, 

nous  de  l'héritage  celcfte  ,  &  qu'ils  ont  vne  quand  il  ne  nous  fafchcra  point  de  nous  tenir 

mefme  foy  ,  il  y  a  encores  plus  de  raifon  de  fuiets  fous  la  puilTance  des  hommes,puis  qu'el 

leureftrefuiets  ,&  moins  d'excufe  quâd  nous  le  eft  ordoneedeluy,  acqu'ila  toufioursTem 

leur  ferons  rebelles .  Si  nous  eftions  fous  des  pire  fouuerain.  Car  quand  nous  obeiflons  aux 

Turcs,foui  des  tyrans, fous  des  ennemis  mor-  hommes  qui  dominent  félon   la  volonté  de 

tels  de  l'Euangile ,  encores  nous  efl-il  com-  Dieu,  nous  obeiflons  à  luy  qui  lésa  côftitucz. 

mandé  de  leur  élire  fuiets.  PourquoyîUplaift  Et  cependant  notons  aufsi  que  quelque  fois 

ainfi  à  Dieu.  Or  s'il  y  a  vne  mefme  toy.n'y  a-  Dieu  fufcitera  des  gês  qui  ne  font  pas  dignej 

il  point  double  mal'li  le  peuple  ne  fe  veut  ran  de  nul  honneur.Et  pourquoy  ?C'eft  pour  nous  . 

ger,&  s'il  ne  demeure  là  paifible  fous  le  ioug  defpiier.Car  iî  nous  luy  eftions  fuiets  comme 

de  Dieu,  quand  il  femonftre  ainfi  amiable?  nous  deuons, il  eft  certain  qu'ildomineroit  tel 

Maisquoy  qu'il  en  foit ,  cefte  règle  demeure  lement  fur  nous, que  nous  pourrions  contem- 

touiiours  générale  ,c'eft  que  nous  refiftonsà  pler  qu'il  nous  gouuerne,  &  qu'il  prefîdc  au 

Dieu  fi  nousne  pouuons  fouffrir  d'eftregou-  milieu  de  nous:  que  ceux  qui  feroyent  en  eftat 

uernez  félon  la  police  qu'il  a  inftituee  &  efta-  de  iuftice  feroyet  comme  de  petis  j^nges,  que 

blieen  ce  monde.  Et  non  feuleniét  fainft  Paul  on  neverroit  point  deRois  nede  Princes  en 

parle  de  la  fuiettion.niait  iladioufteaufsil'o-  ce  monde  dominer  en  tyrannie,  ni  en  fierté, 

beiflance  volontaire.  Car  on  verra  bien  quel-  mais  l'image  de  Dieu  reluiroit  en  eux:  mais 

que  fois  que  les  hommes  ne  fe  rebecqueront  d'autant  û  nous  dechaflons  Dieu  loin  de  nouS, 

point, pource  qu'ils  ne  peuuent ,  ou  ils  regar-  il  faut  qu  il  s'en  recule,&  qu'il  retire  fa  bene- 

dent  qu'ils  n'y  gagneroyent  rien,  ou  ils  crai-  diftion  ,&  qu'il  mette  gens  pour  dominer  fur 

gnent  le  dâgcr:mais  fainft  Paul  paffe  plus  ou-  no'  qui  peruertiflent  tout  droift  &  equité.Ce- 

ire.difant  qu'il  nous  faut  obe!r:&  le  mot  dont  la  donc  eft  vn  figne  que  Dieu  a  retiré  fa  grâce 

il  vfe, emporte  (  comme  i'ay  défia  dit)  vne  o-  loin  de  nous,  d'autant  q  nous  n'auons  peu  por 

;.»  beiflance  volontaire:comme  il  eft  dit  aux  Ro-  ter  qu'il  nous  euft  en  fa  proteftion,  car  noUs 

mains,  que  ce  n'eft  point  aflez  que  nous  crai-  ne  luy  âuô'^  pointvoulueftte  fuiets. Maisquoy 

enions.mais  pour  la  confciéce  qu'il  nous  faut  qu'il  en  foit,tOHfiours  reuenons  là,  que  noftre 

•obéir.  Et  pourquoy  ?  Encores  que  les  Magi-  Seigneur  fçait  bien  ce  qui  no' eft  propre.  Puis 

ftiats  n'euflent  point  dequoy  eftre  honorez  &  qu'ainfi  eft.qu'vn  chacun  regarde  de  ne  pafler 

obéis, d'autant  quelefieg»  auquel  ils  font  con  point  fes  bornes. Celuy  qui  eft  perfône  poure, 

ftitucz  eft  ordonné  de  Dieu ,  fi  on  leur  rcfiftc,  qu'il  ployé  le  col,  &  qu'il  cognoifle  que  Dieu 

ce  n'eft  point  aux  hommes  qu'vne  telle  iniure  l'a  voulu  aflîiiettir,  &  que  par  ce  moyen  nous 

ï'addrcfle.maisà  celuy  quilesa  misen  ceft  e-  monfttions  quevrayement  nous  fommes  fon 

Jtat ,  &  qui  veut  que  fon  image  rcluife  en  eux.  troupeau, que  no'  ne  fommes  point  beftes  fau 

Voila  donc  ce  que  nous  auons  à  retenir,  c'eft  uages,que  nous  ne  fommes  point  fi  difficiles  jt 

oue  non  feulement  il  y  ait  vne  fuicttion  for-  gouucrner,  que  nousne  fuuffrions  qu'il  nous 

cee.mais  que  de  noftre  bon  gré  nousaduifions  conduife  comme  il  luy  plaira  ,  &  qu'il  difpofe 

que  l'ordre  que  Dieu  a  mis  en  ce  monde  foit  de  nous  tellement, que  quelque  petite  que  foitr 

maintenu,  &que  nul  ne  porte  enuie  à  ceux  qui  nofticcôdition.ou  niefprifeedu  monde,  nous 

font  plHS  grans.ou  qui  font  eleucz  en  hôneur.  la  portions  patiemment. Or  fainâ  Paul  cepcn 

Et  pourqiioy  ?  Car  c'eft  refi lier  à  Dieu  quand  dant  adiouftc,Ç)u'/7»wu/j«»  aufsi  ejlrr  admo- 

on  fait  quelque  trouble  ou  quelque  fedition:  nejie%.d^eflre  .rfii'areiltex.  à  toute  benne  «uure, 

il  non  feulement  cela,  mais  aufsi  quand  on  ne  Et  par  cela  U  nionfti  e  que  ceux  qui  ne  pèuuét 

peut  d'vne  affection  corxiiàle  fe  râger  là,ipour  obéir  aux  Magiftrats,  ne  dcmSdcnt  finon  troti 

due,  C'eft  vn  factifice  que  Dieu  demande  que  ble  &  confufion.Et  ceft  argument-ci  eft  prins 

eeftehumilité-la,  que  ie  ne  m'eleue  point  tel-  del'oidreque  Dieuacôftituéaumonde  .  Car 

kinent,9ueie  me  face  à  croire  que  ie  fuis  plus  pourquoy  eft-ce  qu'il  y  adesRoi^,&des  Pria 

diçne  qu'vn  tel,  qui  me  dcuroit  pluftoft  obéir  ces,des  Magiftrats  &  gens  de  iufticc?C'cft  afin 

oue  moy  à  luy:il  faut,di-ic,que  le  me  déporte  que  les  hommes  ne  foycnt  po^nt  come  chiens 

de  toutes  ces  chofes  ,  cognoiffant  que  Dieu  &  chats  pour  s'entrcmanger ,  qu'il  y  ait  iufti- 

yeut  que  ie  ne  foye  rien  en  moy  ,  mai?  que  ie  ce, que  le  plus  fort  ne  l'cmpoitc  pcint.que  les 

»ne  tiene bas, abbaifiànt  tout  orgueil  &  hautef  pouies&  fimples  ne  foyent  point  foulez  & 

fcquî  feroit  pour  me  faire  elcuér.Kifques  àce  gourmandeZ.Voila  donc  pourquoy  Tordre  de  - 

-que  nous  en  foyons  venus  là,  il  eft  certain  que  lUfticc  a  efté  eftabli.Or  il  tft  v  lay  que  que|(^ue 

nous  ne  ferotls  que  nous  tourtnéiitéf :  Si  ehco-  fois  ceux  qui  font  en  ceft  çlïat  ne  j'acq-iut^çj- 
ïes  ônouk  foyons  paifibles  àucurirnicnt  pour  ront  point  fouuent  de'leur  deuôir,"  f^u'ils  ppj 
ne  juivint  reiettcr  loute  laicttion,  fi  c ft-ce  que  primeront  les  bons,  &  ftipporteront  les  mcl- 
cllene  fera  point  volontaire.  Voila  donc  ce  cham  :  mais  encores  fi  cft-ceque  toufioursil 
que  nous  auons  à  retenir,  qu'il  ne  faut  point  nous  eft  vtilcd''aiioir  quelque  rtgimc.Prciionî 
oue  les  Chreftjens  attendent  qu'où  les  con-  k  cas  qu'il  y  aft  de  graudes  con uptiôs,  com- 
me 


s  V  R    L'  E  P  I  S  T.    A    T  I  T  E. 


<îo<» 


ihèon  en  voit  fomienteîfois  :  .^  plcuft  à  Dieu  teniu  par  eefte  confideration .  Carfî  nous  ne 

qu'il  en  fjluftcercher  les  exemples  bien  loin:  fiippoïtons  beaucoup  d'iniurcs  ,  il  eft  certain 

mais  encores  quâd  il  y  auroit  des  tyrans,  gens  qu'à  tous  coups  il  nous  viendra  des  occalîons 

peruerv,  que  ceux  qui  ont  aiithorité  appliquaf  de  nous  troubler,  qu'il  noui  faudra  ietter  aux 

icnt  leur  tfpilit  à  toute  inefclianceté ,  8c  qu'ils  cliâmp$,&  efmouuoir  guerre. Sainâ  Paul  donc 

obfcurciflènt  toute  rel:gion,&  que  cependant  en  fommc  ,  nous  monitre  ici  que  fi  nous  vou- 

ilslafchaflcnt  la  bride  à  leurs  mefcliâteseupi  Ions  eftre  appareillez  à  toute  bonne  œuure,  il 

dicez:tantya  encores  qu'il  vaut  mieuxauoir  faut  qu'au  lieu  quede  nature  nous  rommes  par 

vn  régime  corrompu,  que  n'en  auoir  point  du  trop  addonncz  chacun  à  fon  profit.nous  adui» 

tout.Ca  r  s'il  n'y  en  anbit  point, helas,  que  de-  fions  d'endurer  de  nos  prochains,  voire  en  tel 

uiendrions-nous  ?  il  -vaudroit  m'eiix  que  nous  le  forte  que  nous  réprimions  celle  impetuofi» 

fufsions fondus  en  abyfme.  Ainfi  donc, quand  té,  ou  cefte  violence  qui  eft  en  nos  «fprits, 

nous  ferons  appreftez  à  toute  bonne  ccuure,  il  quand  nous  fommes  ainfi  noifeux"&  quand  on 

cft  certain  que  pous  Vmc^"^  lalpî>licc,&  ^lie  nous  auroit  ofFenfé  ,  que  nous  n'vfions  point 

nous  ne  demanderons  finon  d'ooeir  aux  Ma-  de  rigueur  extrême  pour  auoir  noftre  reuen- 

giftrats.  Mais  encores  ûind  Paul  a  regardé  à  ge.  Car  voila  comme  nous  pourrons  nourrir 

vue  autre  chofe  en  ce  paflàge ,  c'eft  qu'après  paix,  ainfi  qu'il  nous  eil  ici  enfeigné .  Suyuant 

nous-auoiradmoncftezen  particulier  que  no'  cela  il  adioufteauf.i,<^*  wo«jm(!»/?r(o«f  to»te 


dcuons  fuiettion  à  ceux  qui  ont  fuperiorité 
pârdefliR  nous, il  adiouftc  que  non  feulement 
nous  leur  fommes  redeuables ,  mais  aux  plus 
petis,  qu'il  faut  que  nous  cognoifsions  qu'il  y 
a  comme  yn  Hen  naturel  qui  nous  oblige  tel- 
lement, que  ie  ne  puis  alléguer  que  ie  ne  doy 
r^en  àcelîuy-ct.ou  à  ceftuy-lâ  :  car  il  faudroit 


Jouteur  enutrj  tous  hommes  .  Qjiand  il  dit  en- 
uers  tous  hommes",  par  cela  il  monftre  que  les 
fidèles  mefmesdoyuent  mettre  peine  de  ga- 
gner ceux  qui  font  encores  belles  fauuages.  Se 
qui  ne  fe  font  point  rangez  au  troupeau  de  no 
frre  Seigneur  Icfiis  Chrift .  Voila  vn  infidèle: 
leftvray  qu'il  eft  ennemi  dcDieu,feparé  de 


que  ie  me  feparafle  de  la  compagnie  des  hom-  l'Eglife  :  mais  tant  y  a  que  s'il  y  a  moyen  de 
mes .  Et  ainfi  il  faut  qu'vn  chacun  s'applique  rinftruirc ,  il  faut  que  ie  luy  monftre  douce- 
tellemem  à  la  vocation,que  cependant  il  s'em  ment ,  autrement  il  ne  fera  point  pofsible  Je 
ployeen  tout  ce  qu'il  pourra  enuersfes  pro-  le  gagner  que  par  cemoyen-la,  c'eft  afçauoir 
chams.Voila  donc  pourquoy  fainÛ  Paul  nous  que  ie  tafche  de  l'amener  à  Dieu.  Or  fi  noi» 
donne  ici  vne  règle  commune,  qu'il  nous  faut  deuons  vne  telle  douceur  aux  incrédules, 
eftre  appreftez  à  toute  bonne  œuure  .  Et  puis  quand  nous  les  voyons  cftre  fi  lauuages  que 
il  monftre  comment  cela  fe  fera;c'eft^«f  «o»j  rien  plus  ,&que  quelquefois  on  ne  puiflepas 
nr  mtfiiifons  de  ftrjonne ,  <!»(  nous  ne  Joyns  les  donter, que  neantmoins  il  nous  y  faille  pro 
foi»f»o//ei»«  :  mais  que  nous  foyons  equita-  céder  par  ce  moyen-Ia  ,  que  feTa-ce  de  ceux 
blés  &  modérez  :  brief,  que  nous  monftrions  qui  font  défia  enfans  de  Dieurne  fentiront-ils 
que  nous  voulons  viure  droiteinent&  entou-  nulle  douceur  en  nous  ?  Monftront  donc  que 
te  douceur  auec  tous  hommes .  Or  en  premier  nous  auons  efté  en  l'cfchole  de  celuy  qui  ait 
iieu.nousauonsicià  noter(qui  fera  aufsi  pour  qu'il  ne  demande  que  de  nous  traitter  douce- 
la  conc!ufion)que  fi  nous  voulons  eftre appre  ment.Carfinousncreflemblonsinoftre  Sei- 
ftez  à  toute  bonne  œuure.il  nous  faut  auoir  ef  gneur  le  fus  Chrift,  tout  le  refte  pourra  bien 
gardde  nourrir  amitié  auec  ceux  qui  font  con  auoir  quelque  belle  apparence  de  farnfteté  fe 
loints  à  nous  de  ce  lien  facré&inuiolable  que  Ion  le  monde.mais  ce  ne  fera  que  puantife  dé— 
i'ay  dçfia  dit.  Car  fi  vn  homme  veut  qu'on  pri  uant  Dieu  .  Et  ainfi  aduifons  de  nous  confor- 
fe  îes  vertus,  &  cependant  il  ne  tiendra  conte  mer  à  l'image  &  patron  qui  nous  eftdonné  de 
^e  perfonne,  cependant  il  fera  infupportable,  Dieu  le  Pere,c'çil  d'autant  que  la  colombe  eft 
noftre  Seigneur  reiette  tout  cela:mâis  la  pria-  defcendue  fur  noftre  Seigneur  lefus  Chrift, 
cipale  vertu  qu'il  demande,  c'eft  que  nous  ap-  qu'il  nous  a  monftre  par  figure  vifible,  flu'c- 
pliquions  noftre  eftude  à  nourrir  paix  &  con-  ftans  fes  membres,  nous  deuons  eftre  painbles 
corde,  tellemét  que  nous  monftrions  que  nous  fous  luy  .  Et  que  cependant  nous  puifsions  a- 
nedemandons  finon  que  Dieu  foit  ferui  de  uoir  ce  qui  eft  «lit  par  le  Prophète  Ifaie  '  il  eft 
tousd'vn  commun  accord.  Or  comment  les  vray  que  cela  notamment  eft  attribué  à  la  per 
hommes  feront-ils  paifibles  enfcmble?ll  nous  fonne  de  noftre  Seigneur  lefus  Chrift  :  mais  il 
faut  fupportcr  .  Car  il  eft  certain  qu'il  y  aura  nons  faut  eftre  conformes  à  luy  ,  c'eft  que 
toufiours  des  vices  &  imperfeftions  grandes  nous  n'efteignions  point  le  lumignon  ,  quand 
en  nous  :&  quand  nous  voyons  que  défia  Sa-  il  n'aura  pbint  tcJle  clarté  qu'il  feroit  à  fou- 
tan  a  tant  de  rufes  &  de  finefles  pour  nous  met  haiter:mefmes  encores  s'il  fume,que  nous  ad- 
treen  difcord,  &  que  par  ce  moyen  il  tafche  uifions  de  l'allumer  pluftoft  que  de  l'efteirdre, 
de  nous  ruiner  ,  gardons-nous  de  luy  com-  que  nous  ne  rompions  point  du  tout  le  ro- 
piaire  ef  cela,  mais  vfons  de  patience  ,  que  feau.qui  Jera  caiTè ,  que  nous  cognoifsion» 
nous  ne  foyons  point  addonncz  ànous  efcac-  ceux  qui  font  f/aibles  fltfragiles, afin  qu'eftans 
moucher  toutes  fois  &  quantes  que  .nous  fe-  fupportez  de  nous.ils  prencnt  courage, A-  s'ef- 
rons  incitez  à  mai  faire,  que  nous  foyons  re-  ucrcuent,  Si  foyent  tellement  attirez  à  Dieuj 

HHh.i. 


6\o.  S  E  R  M  O 

que  d'vn  commun  accord  nous  foyons  tous 
conioints  à  luy  ,  fc  que  noui  y  adhérions  iuf- 
ques  en  la  fia. 

O  R  nouj-nous  profterneronsdeuantla 
ficcdenoftrc  bon  Dieu  en  cognoiflànce  de 
nos  fautes,  le  priani  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir ,  &  que  de  iour  en  iour  nous  croifiionj 
tellement  en  toutes  les  gra«es  de  fon  faind 
£rprit,d'autant  qu'il  luy  apleudedreflcr  l'on 
règne  au  milieu  de  nous, que  nousmonfttions 


N    X  V. 

aufsi  que  nom  luy  roitimec  vn  peuple  acquis, 
&  que  ce  n'eft  point  en  Tain  qu'il  nous  a  re- 
cueillis à  foy,  mais  que  comme  il  nous  a  atti- 
rez, que  nous  foyons  prcfts  aufsi  de  luy  re- 
fpondre, voire  en  telle  forte  que  noftre  vie 
monllre  qu«  nous  ne  deniHdons  iînon  de  nout 
confacrer  à  fon  feruice,  tenon çans  au  monde, 
&afpiransilaviecelcfte,  où  nous  fommesap 
pelez  iournellement  par  la  prédication  de  foo 
Euangile  .  Ainii  nous  dirons  tous,  Dieu  tout- 
puilTantiPcre  celcfte,&:c. 


SECOND     SERMON     S  V  R     LE 

TROISIEME    CHAPITRE. 


I   ^M 


3  Car  nous  ttujîi  eîliom  iddisfans  entendement,  incrédule  s, ahu^ 
Jèzyferuam  àdiuers  dcfirs  O"  'volupté z^  \iuans  en  malice  O"  c»  enuic^ 
odieux^O'ayam  haine  l\n  contre  l'autre.  .\..',\,..- 

''l  4     Mais  quand  la  bénignité  &  l'amour  que  Dieu  noslre  Sauueur 
a  enuers  les  hommes, ejl  apparue,il  nous  afauue^: 

5  Non  point  par  œuures  de  iuîlice  que  nous  ayons  faites,  mais  je- 
ion  fa  mifericorde  ,par  le  Uuement  de  la  régénération ,  (^  renouuclle- 
ment  dufainclEJpritfO'c, 


Ous  auôs  veu  ce  matin  que 
(àinâ  Paul  commâdoitaux 
fidèles  d'eftre  doux  5c  gra- 
cieux enuers  tous  hommes. 
Or  nous  auons  déclaré  que 
cela  eftoit  pour  les  induire 
i  humanité,  afin  qu'ils  fup> 
portaiTent  les  fautes  de  ceux  qui  n'eftoyent 
point  encores  entrez  au  bon  chemin  de  falut. 
Maintenant  poilrconfermer  celle  dodrine,  il 
adioufteque  deuantque  Dieu  les  euft  appe- 
lez, ils  eftoyent  femblables  à  ceux  qu'il  pou- 
uoit  à  bon  droit' reietter  .Or  de  ce  temps-la 
ilseulTent  bien  voulu  eftre  fupportez .  C'cft 
donc  autant  comme  s'il  difoit,  que  c'efï  bien 
raifon  qu'Us  vfentd'vne  pareille  douceur  en- 
vers les  incrédules .  En  l'autre  paflàge  aux 
Galatiens ,  quand  il  exhorte  à  fupporter  les 
vns  les  autres,  il  dit,  Q_iJ^vn  chacun  regarde 
fon  infirmité  :  car  fi  nous  y  penfons,  il  faudra 
que  nous  foyons  bien  atieugles.fi  cela  ne  nous 
inflruit ,  qu'il  ne  faut  point  que  nous  exer- 
cions vne  rigueur  extrême  enuers  les  defail- 
lans.  Et  pourquoyî  l'ay  befoin  qu'on  me  par- 
donne beaucoup  de  fautes:  fi  iene  veux  rien 
fouffrirde  mes  prochains, que  fera-ce?  le  fuis 
infupportable .  Aduifons  donc  de  regarder  à 
nos  infirmitez  &  vices,  &  cela  nous  tiendra  en 
bride  que  nous  n'vferons  point  de  trop  gran- 
de feueritépourcondamner  ceux  qui  faillent. 
fans  aucun  pardoa  Si  relafche  .  Or  ici  il  pallè 


plus  outre  :  car  non  feulement  il  veut  que  les 
fidèles  regardent  à  leur  eftat  prefcnt,  &  que  Ce 
voyans  fragiles,  ils  vfent  dedouceur  &  huma- 
nité enuers  ceux  qui  leur  rcflembicnt  :  nuis  il 
leur  remonftre  quels  ils  ont  efté.Nous  voyons 
donc  qu'il  les  amené  plus  loin.Et  ainfi  nousa- 
uons  bien  à  noter  celle  doûrine  :  car  il  1cm- 
blera  à  beaucoup  qu'ils  font  iuftifiez  ,  moyen-? 
nant  qu'ils  ayent  griefuement  condamné  let 
autres .  Vray  eft  que  nous  deuons  bien  corri- 
ger le  mal  par  tout  où  nous  le  verrons, &  ne  lo 
faut  point  nourrir  par  flatteries:  mais  cepen- 
dant nous  ne  tenons  pas  l'ordre  qu'il  nous  fa- 
loit  tenir,  c'cft  qu'vn  chacun  commence  far 
foy.  Si  ie  veux  donc  eftre  bon  luge  de  mes'pro 
chains  pouriuger  leurs  vices,  il  faut  que  ie 
cognoiue  quels  font  lesmicni  ,&  que  ié  les 
condamne  en  premier  lieu.  Voila  donc  •vnê 
leglc  que  nous  deurions  fuyure  ,  c'tft  qu'vn 
chacun  fe  feift  fon  procés,&  s'eftant  condam- 
né,puis  après  qu'il  vciiift  à  fcs  prochains. Mais 
nous  oublions  toute<^  nos  iniquitez,&:  ne  vou- 
lons point  nicfmes  qu'on  y  regaidc:qui  pis 
eft.il  nous  feinblc  que  nous  auons  bien  rccom 
penfé  Dieu, quand  nous  auons  elle  afprc;  Ar  ru 
des  enuers  les  dclinquan<r ,  &:  qu'on  nous  doit 
donner  licence  de  mal-faire  ,  moyennant  que 
nous  n'approuuions  point  le  mal  que  nons  au 
rons  veuenquclqn'vndc  nos  ficrcs.Or  à  l'op 
pofite,  ilnouseft  ici  monftié  que  quand  nous 
auont  îrcdarguerccux  qui  faillent,  qu'iffaut 

que 


s  V  R    L'EPIST.     A    T  IT  E.  <tii 

^«e  no»  feul-ement  nons  pcnfions  quels  nous  tomnieergarez,  mais  que  nom  eiif<.ion?peifî- 

foraines  auioui:il'hiiy,&  les  vices  detjuels  nous  fté  en  ce la.iinon  que  Dieu  nous  euÛ  fait  tour- 

fomincs  eotackez,  afin  que  cela  nous  amené  à  iicr  bride.Car  le  changement  qui  eft  aux  tom 

hiuiulite&  aûreinpance,  mais  que  nou^  pcn-  mes  dcmai  en  bicn.neprocccic  pas  de  leur  ver 

fions,  deuancqile  Dieu  nous  euftattrrezà  foy,  lunemouuement  propre,  c'eft  Dieu  qui  y  au- 

que  nous  aoons  efté  desbiucliez,  &  qu'on  pou  ra  befongné  quand  cela  fe  fait .  Cognoiirons 

uoicbienvier  d'vne  telle  rigueur  enuers  nous,  donc  que  iî  nous  auons  efté  poures  créatures 

quecVftoit  pour  nous  rendre  confus, que  nous  &miferable5 ,  que  nous  fuAions  empirer  iuf- 

eufvions  eAé  defnucz  de  toute  efperance  .  Sur  ques  au  comble, linon  que  Dieu  nous  cutt  ten- 

cela  nous  deuons  eftre  plus  iiumains  enuers  du  la  main,&  qu'il  nous  euft  attirez  à  foy. Car 

les  poures  aueugles.iufqu'i  ce  que  Dieu  les  ait  fi  vn  home  dés  fa  naiflance  cA  plein  de  rebel- 

iilumtnez  ,  &c  que  nous  les  ayons  mis  en  bon  lion,  il  eft  certain  que  toufiours  il  augmentera 

tram.Or  deceftedoftrine  nous  auonsà  retc-  demal  en  pis.  £t  pourtant  il  faut  que  Dieu  y 


nir  que  nous  deuons  pluftoft  fupporter  lesi- 
gnorans,  que  «eux  qui  fe  dctbauchent  à  leur 
efcient.apres  auoir  cognu  la  volonté  de  Dieu. 
Comme  quoy  ?  Quand  ceux  qui  tont  prorel- 


mctte  ordre.Ainfi  donc  /âinû  Paul  non  feule- 
ment allègue  ici  que  ceux  qui  font  fideles,de- 
uant  que  Dieu  les  euft  vifitez  par  fa  grâce,  onc 
elle  desbauchcz  ,  mais  il  adioufte  que  s'il  y  a 


fionde  rËuangile.fe  mocqueront  pleinement  du  bien  en  eux,  il  ne  faut  pas  qu'ils  s'en  glori- 
de  toute  vertu,  qu'on  les  verra  mener  vne  vie  £ent,mais  qu'ils  regardent  comment  cela  leur 
dilTolue  &  vileine,  ceux-là  ne  méritent  point  eft  propre  .  Dieu  (dit-il)  nous  a-tl  fauuez  par 
d'eitre  efpatgnez.Et  pourquoyïCar  ilsine  peu  les  œuures  q  nouseufsions  faites, ni  aufsi  pour 
uent  alléguer  nulle  ignorance:  &  ainlî  on  leur  noftre  iuftice?  Mais  c'a  efté  de  fa  pure  miferi- 
doit  tenir  la  bndeplus  roide.Mais  s'il  y  a  des  corde.Puisqu'ainiî  eft  donc,baiflbns  les  yeux, 
poures  aueugies ,  qui  ne  difccrnent  point  le  &  n'vfons  point  de  prcfomptiô.  Or  fi  cela  eft, 
blanc  &  le  noir,qui  n'ayent  :3UU!s  eu  nulle  in-  nous  ferons  quant  &  quant  humains  pour  fup- 
ftrLiûion.ilnous  en  fautauoir  pitié,  &  ne  faut  porteries  foiblcfles  qui  font  cncores  en  ceux 
pas  que  nous  trouuions  ellrange  s'ils  font  du  que  Dieu  n'a  point  amenez  lufqu'à  vn  tel  de- 
commencement  difficiles  à  ranger  .  Et  pour-  gré.  Voila  en  fomme  ce  que  nous  auons  à  rete 
quoy  r  Car  ils  n'ont  point  accouliumé  le  ioug.  nirdecepallàge.  Mais  cependant  il  nous  faut 
Si  on  prend  vnieunecheual,qui  nefçache  que  ici  regarder  .par  le  menu  les  chofes  que  fainft 
c'eftnedebride,ncde  felie.qui  n'ait  laraais  e-  Paul  trait  te.  Il  dit,  Nous  aucins  eflé  qutlcjue  fois 
déferré, on  n'en  pourra  pas  chcuir:  car  natu-  O"  foU,^  Aeptbeilfjni,&-  Tntnex.de  concHpiJce» 
re  ne  Ta  pas  encore  formé  pour  foufFrir  que  ta  lir  -rolirftex.  d'uerfts  .  Q^and  il  dit ,  Nous 
J'homme  le  gouuernenl  faut  qu'oa:)e  luy  ac-  .auons  cfté:c'tftafin  d'addoucir  tant  mieux  ce 
couftumepar  vfage  .  Or  de  nature  nous  ibm-  fte  remonftrance,  laquelle  pouuoit  auoir  quel 
jnes  bien  pires  que  les  bcftes ,  car  il  n'y  a  en  que  poinde,  quand  il  euft  dit  en  féconde  per- 
nous  que  toute  peruerfité&  rébellion:  mais  il  fonne,  Vous  aucz  efté  fols  &  dcfobeiflàns  .•& 
faut  que  Dieu  nous  change  pour  nous  gagner  qu'il  ne  fefuft  point  mis  du  rang  &  de  lacom- 
â  fonferuice,  Ainfi  donc, quand  nous  voyons  pagnie:cela  euft  eftévn  peu  plus  difficile  idi- 
de  poures  incrédules  qui  ne  fçauent  que  c'eft  gérer. Mais  quand  il  dit, Or  ça,  mes  amis,  co- 
de feruir  Dieu,  qui  &  en  paroles  ,  &  en  faits  gnoiffons  quels  nous  eftions  deuant  que  Dieu 
font  diffolus:&  bien, que  nous  en  ayons  pitié,  nous  euft  retirez  desabylmesd'incrcd'ilitéou 
&  que  nous  cogooifsions  quels  nous  auons  e-  nou^  auons  vefcu:n'eftions-nous  pas  &  fols.S: 
fté,&  quels  nous  ferions  encores  finon  q  Di(u  rtbclle^fEt  cependant  il  a  falu  que  Dieu  nous 
nous  euft  receiis  à  merci ,  &  qu'il  nous  euft  re-  ait  fiipportez  .  Nous  auons  aufsi  defiré  que  les 
iformezpar  fa  bonté  gratuite. Voila  donc  ce  q  hommes  vfaiTent  enuers  nous  de  patience  .  Et 
fainâ  Paul  a  ici  vcnlu  en ftigncr, c'eft  que  nous  ainfi  auiourd'huy  rendes  la  pareille  à  ceux  qui 
deuons  fupporter  ceux  qui  n'ont  iamais  cognu  ne  font  point  encores  paruenus  iufques  là,  de 
ne  gouftéla  parole  de  Dieu,  &  que  Hifques  à  fçauoirq  c'tft d'obéir  àDieu. Voila pourquoy 
•tant  que  nous  les  ayonsenfeignez.il  nous  faut  fainft  Paul  s'eft  mis  comme  celuy  qui  a  efté  t- 
,vfer  de  douceur  &  de  patience  enuers  cux.Voi  gnorât  &  rebelle,quiaefté  pouffe  Scmené  par 
■Ja  pourvn  item.Ornou.s  auons  à  noter  la  rai-  diuerfes  concupifcences.  Mais  on  pourroit  de 
/on  qui  eil  amenée  ici,  c'tft  que  nous  auons  e-  mander.fi  laintt  Paul  a  efté  ou  vn  paillard,  oo 
fté  incrédules  aufsi  bien,  &  de  ce  temps-la  fi  vn  yurongne .  Car  quand  il  parle  de  ces  volu- 
-«n  euft  vfé  de  trop  grande  rudefle  &;  afpreté  ptez  diuerfes, il  compréd  en  fomme  toutes  le* 
enuers  nous, nous  ne  l'eufsions  peu  foufFrir:  &  pouretti  aufquelles  nous  voyons  les  hommes 
«elaJ'ouseuft  endurcis  pluftoft  qu'amendez,  eftrefuicts  deuant  que  Dieu  les  ait  réforme» 
•Fuis  qu'ainfi  elt ,  cognoiflbns  que  noftre  Sei-  par  fon  fainft  Efprit.Car  nous  fçauons  qu'il  a 
gneur  nous  monftre  le  moyen  que  nous  de-  efté  irreprehenfible  deuant  qu'il  fuft  attiré  à 
lions  teiîir,  fi  nous  defirons de  réduire  à  falut  l'Euargile,*  qu'il  a  mené  vne  viefi  fainâe& 
kj  poures  créatures  qui  s'en  vont  ,à  Jteidi-    fi  honnefte, qu'il  cftoit  réputé  comme  vn  petit 
tioD.Et  puis  il  y  a  la  féconde  raifon,  c'eft  que    Ange  entre  les  hommes. Si  tft-ce  maintenant 
non  feulement  nous  auoos  pour  to  temps  efté    qu'ilne  confciTe  pomt  ici  par  hypocrifie  qu'il 

HHh.ii. 


6iz 

ait  edé  des&auché.Mait  nous  auôt  à  noter  que 
quand  l'Efcriturf  pirle  del'eftat  dei  iniîde- 
les,  Icftjuels  Dieu  n'a  point  encores  regene- 
itz  par  (on  faindEfprit, elle  mettra  beaucoup 
de  vices  :  non  pas  qii'vn  chacun  en  foit  enue- 
loppé.nc  qu'ils  apparoilTcnt  en  tous  hommes: 
m.us  Tvn  lera  fuiet  à  rn  mal  ,  l'autre  à  l'autre: 
tellement  qu'il  n'y  a  celuy  qui  n'ait  lufterai- 
fondebailfer  La  tefte,  eftant  c.^-.uaincu  qu'il 
•n'a  rien  en  foy  qui  ne  l'oit  poilu.  Exemple: 
Nouv  en  verrons  qui  n'ôntiamiis  fentiq  c'eft 
de  Dieu,  qui  ne  feront  pas  adoniiei  à  tous  vi^ 
ces. Les  vas  ue  fçauront  que  c'eft  d'ambition, 
qui  fe  contenteront  de  (implicite  &  rondeur, 
qui  ne  porteront  point  enuie  aux^rans  de  ce 
monde,  ni  aax  autres  ,  ils  les  lail^ront  là  :  8c 
cependant  l'yn  l'cravn  liboureur  ,  vn  homme 
mecbanique,  ils  mangeront  leur  pain  (anse- 
ftrc  tourmentez  b-'âucoup  de  nulle  côuoitile. 
Les  autres  ne  font  point  pailla rs:les  autres  fe 
ront  fobres  en  leur  vie:  mais  tant  y  a  q  fi  nous 
faifons  examen  de  chacun  ,  nous  trouuerons 
qu'il  n'y  a  point  de  bonnefemence.ne  de  bon 
ne  racine  :  &  encores  qu'ils  ayent  quelques 
belles  vertus  en  apparécc.tout  cela  n'eft  qu'in 
fedlion  deu.î:  Dieu. Et  pourquoy?  Car  le  prin 
cipaleit  pour  bien  reglei  la  vie  des  hommes, 
qu'ils  cheminent  en  intégrité  de  cœur.  Et  G. 
les  infidèles  s'abftienétde  paillardife,ce  n'elt 
pas  qu'ils  craignent  d'otfenfer  Dieu,  8c  qu'ils 
ayent  ce  but-la:mais  Dieu  les  preferuc,ilfçait 
pourquoy.afin  que  tout  n'aille  point  en  confu 
îionau  genre  humain:  mais  ce  n'eft  pas  qu'ils 
méritent  pourtant  d'eftre  reputez  iuftes. 
Quoy  qu'il  en  foit, combien  que  les  incrédu- 
les ne  foyent  point  entachez  de  tous  vices  ,  8c 
que  nous  envoyons  me  fines  beaucoup  d'en- 
ir'eux  qui  ayent  vne  vie  aflez  bien  réglée  ,  Se 
qui  fera  bien  prifee  des  hommes  ,  que  toutes- 
fois  en  leur  coeur  il  y  a  vne  corruption  laquel 
le  Dieu  condamne  tellement,  que  depuis  le 
plus  grand  iufques  au  plus  petit  ils  font  tous 
ignorans,  comme  fainû  Paul  les  appelle  mal- 
aduifez,errans,ac  ne  fçaucntque  c'eft  en  fom- 
mede  feruir  à  Dieu.  Et  pourtant  notons  que 
fainâ  Paul.combien  qu'il  ne  mena  ft  point  vne 
▼iedesbordeedu  temps  qu'il  eftoit  incrédule 
&  ennemi  de  l'Euangile  ,  n'a  pas  laifle  d'eftre 
mené  de  plufieurs  delîrs  mauuais  :  comme  il 
confeflê  au  fcptiemc  chapitre  des  Romains, 
qu'il  s'eft  tellement  prifé ,  qu'il  luy  fembloit 
bien  qu'il  eftoit  iuftej  voire  d'autant  qu'il 
n'auoit  point  cognu  que  cefte  Loy  vouloir 
dire,  en  difant ,  Tu  ne  conuoiteras  point. 
Sainft  Paul  fe  contentoit  d'eftre  en  bonne  ré- 
putation quant  aux  hommes,  t'eftant  abfte- 
nude  tout  crime  ,  &de  toutes  chofes  repre- 
benlîbles  :  mais  cependant  il  n'entroit  point 
en  (i  confcience  pour  fonder  Ces  vices  ca- 
chez ,  il  s'aueuglort  plaftoft  en  hypocrifie: 
cependant  fl  eftoit  enflé, ftenyuré  d'orgueil. 
Et  voila  fur  qiioy  ilfondoit  fa  iuftice.  Mais 
quand  il  a  cognu  que  la  Loy  de  Dieu  n'-çft 


SERMON     V. 


pas  feolement  font  nou»  amener  3  mr  po* 
lice  externe  .afin  que  nous  ne  foyontpoine 
condamnez  dejs  hommes.mait  qu'elle  doit  re- 
former toutes  nous  péfees  Si  alFcâioni ,&  dei 
mande  vne  iuftice  Angélique  Se  parfaite rilori 
faind  Paul  a  cognu  qu'àuparauiat  il  n'y  a  eu 
qu'ordure  en  luy  :  Se  tl  confelTe  qu'il  a  quitte 
mefines  la  iuftice  delà  Loy  qui  luy  fembloit 
eftre  en  luy. Car  il  appelle  la  iuftice  de  la  Loy, 
non  point  celle  qui  eft  monftreeen  la  Loy 
de  Dieu.mais  celle  qu'il auoitcuidéauoir,^ 
de  laquelle  il  eftoit  fauirement  abbruué.  Il  a. 
falu  donc  qu'il  cftimaft  cela  comme  fiente  8c 
ordure  :  car  fans  cefte  humilité  il  ne  pouuoic 
pofleder  la,  grâce  de  noftre  Seigneur  lefuî 
Chrift.  Et  ainii  à  bon  droiÛ  il  protefte  en  ce 
palFage  qu'il  a  efté  comme  les  autres,  du  tépf 
de  fon  incrédulité,  vn  poure  homme  8c  igno^ 
rant  &abufé  ,  voire  8c  mericde  concupiicen» 
ces  diucrfes.  Il  ett  vray  qu'il  n'eftoit  pas  dii 
rang  des  dilTolus,  que  fa  vie  n'eftoit  pas  fcan 
daleufe.qu'on  ne  le  pouuoit  pas  attirer  en  iu- 
ftice pour  l'accuferde  quelque  crii'ne:mais  ce 
pendant  il  ne  laiir>it  pas  de  nourrir  beaucoup 
d'infcdious  cachées.  Et  c'eft  ce  qu'il  reco- 
gnotft  ici.  Or  puis  que  cefte  difficulté  eft  fo- 
lue,renons  i  recueillir  vne  bonne  doftrine  de 
ce  palTageic'eft  qu'ici  nous  auons  comme  vne 
peinture  de  ce  qui  fe  trouuera  aux  homes  de- 
uantque  Dieu  les  ait  illuminez  par  fon  fainft 
Efprit ,  3c  qu'il  les  ait  faits  nouuelles  créatu- 
res, il  eft  vray  que  les  hommes  fe  plairont  af 
ftz:mais  c'eft  par  faute  de  s'eftrecognus.Car 
il  eft  certain  que  nous  prattiquerions  ce  pro- 
uerbe  de  nous  mcfprifer,  fi  nous  n'eftions  ain 
fi  aueuglezde  folle  prefomption  :  mais  cha- 
cun s'aime  tant, que  nous  en  fommes  tous  ef- 
blouis  ,  8c  n'apperceuons  pas  noftre  turpitu- 
de. Mais  quoy  qu'il  en  foit ,  voici  le  fiinti  E- 
fprit  qui  donne  la  fcntence,  non  pas  fur  dcuit 
ou  trois  ,  mais  en  général  fur  tous  les  enfant 
d'Adam. Il  a  défia  ici  monftré  quels  nous  fom 
mes  de  nature  iufques  à  tant  que  Dieu  nous 
ait  changez.  Et  quoy?  Fols ,  en  premier  lieu'. 
Or  il  eft  vray, que  ceci  ne  fe  pourra  point  per 
fuader  du  premier coup:car  nous  voyonscoiH 
mêles  hommes  cuident  eftre  fages. Et  c'eft  le 
plus  grand  enipefchement  qui  nous  deftour- 
ne  de  venir  à  Dieu  que  celuy-la.d'autant  que 
nous  ne  pouuons  pas  nous  ranger  pour  eftre 
goHuernez  felorr  fa  paTole.  Car  nous  auons 
toufîours  nosqucftions  ;  il  nous  femble  qu'il 
y  a  quelque  apparence  de  raifon,  que  Dieu  (fe 
doit  taire  ,  ou  bien  qu'il  nous  doit-quitter  la 
caufe  ,  comme  fi  tout  eftoit  ga^né'de  noftre 
cofté.Les  hommes  donc  auront  roufiours.  ce- 
fte folle  opinion  de  fagcfl'e:  mais  que  gagin». 
rons-nous,  veu  que  le  Ùini\  Efpritnoiisa  iii 
donné  fon  arrefl  irreuocable  ,  c'eft  que  no;jj 
■fommes  tous  fols.iiifqiies  à  t.ît  que  Dieu  nous 
ait  iMi/mincz?  Il  efVvray  que  nous  n'ay>cfeii- 
iioHsf  <>intcela:inais  l'Éfcrituredit  qiit  Dw?u 
a  cognu  toutes  les  peuples  des  (hgcs.Et  qu'en 

dit-ii 


SVR,  L'EMST-^iit  7ITE. 


c.j 


dit-il  «près  fcj)auoir,cogtm«s?Ce^'eft  qyani  - 
té  Se  menfonge.  Et  f*xi&  ngus  auoDs4)ÇM<  cho" 
fe$â  noter  en  ce  paflige.Bn  premier  lieu.co- 
gflotiTons que*'»! y*  vne.ftuUgoUttede bon 
oc  iatelligence  &  droite  en'nous,<}iië  cela  elï 
vfi  doa  Ipecul  du  f^ùù  ^rptit .  &  que  nojt» 
n'en  pouuons  pas  attribuer  ia.louange  à  nous, 
fi  aaus  ne  voulons  eftre  facnleges,  rauJlFans  il, 
Dieiiccqut  luy  appafrtient.  Puis  qu'amll  ^,. 
ou'eft-ccfdafranc-axbitré,  qui  e/lMntraagrti 
6éeat>e.leS;Papifles,f  Car  quandilieft  parlé 
du  frajOCr-arbitrc ,  ils  entendent, la  rai(bnque 
les  hommes  ont  d'eftre  6  prudentipour  ehoi-» 
£r  Iebi«Dw&i  fuirje  mal.  Or  à  ruppolite.voiqË 
Dieu  qui  declare.quciulquetitant  qu'il  nous 
«ic  fait  profiter  en  fon  elcholc ,  nous  Cotimes 
fols,  VDire  ceux  qui  ctudent  eflre  les  plus/a- 
ges.Et  ainli ,  roila  toute  cefte folle  outrecui- 
dance abbi«ue,  qu'il  faut  que  les  homnws  Cor. 
gnoilTent  que  iulques  à  tant  que  Diçu  lésait 
appelez  à  li  yetitCkquMs  fgmt  vuides  deooute 
raifon  Se  prudence. Yoila  pourvn  item.Oric*-. 
pendant  nous  auonsaafsi  à  noter  qu'il  n'y  a; 
autre  moyen  de  cheminer  droit, Iluoa  de  oous! 
defpouiUer  de  toutes  nos  phancalîes.Et  pour 
quoyfNous  cuidcrons  bien  faire:  maiscepen- 
dant  Dieu  prononce  que  nous  fommes  lois. 
Etainfi  ne  nous  abufons  plus  en  nos  deuotiôs 
(qu'on  appelle)  pour  dire,  11  me  femble;que 
cela  eft  lultc.  Car  quand  nous  aurons  fatisfait 
3UZ  hommes,  Dieu  ne  fe  contentera. point 
pourtant. Voila  (di-ie)Ia  féconde  raii'on  qu'il 
nous  faut  recueillir  de  ce  paflage  ,  c]eft  de  ne 
nous  plus  Her  à  nos{>hanta(îes,mais  cheminer 
félon  que  Dieu  l'ordonne,  fçachans  quetout 
ce  que  nous  cuidons  eftre  beau ,  &  qui  ba  ap- 
parence de  fagefle  Se  raifon,  ne  fera  que  folie 
'&  menfangp  deuant  Diea.  Or  lainâ  Paulad- 
ibuAe  q  toux  font  rebelles:  voire.ou  onteftc; 
■omme  quand  li  dit  que  tous  font  fols .  il  dit 
aufs'i  bien  rebellés  :  &  c'eft  pour  dégrader  du 
tout  leshomracs,monftrantqu'iln'y  aeneux 
que  tout  mai.  Ils  défaillent  en  prudence  'Se 
puis  encores  qu'ils  cognuflcnt  le  bien,  Se  que 
ils  eu(Tentdifcretion,lieft-ce  qu'ils  font  per- 
tiers  Se  malins.  Se  qu'ils  cheminent  au  rebours 
decc  à  quoyDieu  les  voudra  conduire.Nous 
ne  fQinmcs  donc  pas  feulement  corrompus  en 
nos  efprSts  pour  eftre  aueugles  ,  mais  en  tous 
nosappetis  nous  auoDs  vne  inclination  maur 
uaife  ,  que  nous  alloiis  tout 'à  l'oppoiitedece 
que  .Dieu  aura  commandé.  Q^e  refte-il  plus? 
Allons  maintenant  pnfernoftre  franc-arbi- 
tre,&  nos  vertus:  mais  nous  voyôs  qu'en  tout 
6e  par  tout  Dieu  nous  reprouue. iniques  à  tant 
qu'il  nous  ait  changez.  Or  ileftvrayquecC'- 
fte  rébellion  n'apparoill  point  toufiours  :  les 
h,ommcs  feroht  la  chatemité:  qui  plusett,  ils 
fecontrefunt,  tellement  qu'ils  pourront  eftre 
prifez  du  monde  :  &-mefmesii  Icur.femblera 
qu'ils  font  bien  deuots-eniiers  Dieu.  Voirc, 
mais  ils  ne  font  que  s'abufer ,  iufques  à  ce  que 
ils  ayent  ce  nouueau  cœur  duquel  patient  les 


PrppJKtfF.Orce  feeott  cbofe  fupçriltiie  que 
Dkai  »o\is  ^onmllvaxceur  noiitieaM,  fi  ie  oa- 
ftrc  «ftait  ditita  bon.  Et  ainfi  cagnettroiis-  q^e■. 
ii/q4K^,»)ce  qii«Dieu  Ijt  change,&  quMlc  rc-; 
nouuellj;  4u,tout ,  qu'auparauant  iliryaeu. 
qui:  malice.  Yoila  donc  comme  noue  deuoat 
eAtieabbatus,  Se  chercher  en  Dieu  le  bien  qui. 
luy  e(lattribué,afinquenos  vicet  ncfe  oour- 
rtdènt  point  parivne  vaine  outrecuidance  & 
prefomptton.Orfaui^  Pauladiouûe.çn  foni- 
meiqu'ils  font .  efgarez  ov  abufex  ,  ç^cR  à  dire 
pouresaueuglec ,  iufques  j  t4ut  que  Dieu  les 
aitmis^ii  chemin  de  faJut.Qr  quand  il  dit  ce- 
livG^e&pour  retranc^her. toutes  cet  vaincs  pMt 
fces'Bc  fagefle  où  lés  hommes  fc  glorifient, 
Ho.comment?  faut-il  que  ie  foyc  «inCcon- 
dacnoé?  ic  ne  trouue  point  la  raifô  pourquoy. 
Sainâ  Paul  dit,£t  bien.s'il  y  en  a  qui  fc  plai- 
feQt.iis  ne  llilTent  point  d'eftre  reprouucz  éc 
Dieu.Et  pourquoy?Ils  s'âbufi.nt.Orc'cft  co-; 
rac  s'iltedoubloit  la  condamnation  qu'il  met 
toit  atiparïMiit ',  quand  il  nous  a  appelez  tous 
fols.  Ns>ftfe  folie  donc  çft  double  quand  elle 
n^f««ognoift  point,&  que  nous  n'en  voulons 
point  eftre  conuaincus  pournous  en  corriger. 
Etainfi  que  ceux  aufquels  Dieu  aura  fait  la 
grâce  de  les  réduire,  entendent  que  s'il  ya  y- 
ne  goutte  de  bien  &  de  vertu  en  eux  ,  ils  ne  le 
ont  point  apporté  du  ventre  de  leur  mère, que 
ce  n'eft  point vn  héritage  qu'ils  ayent  delà 
cliair  ne  du  fang,mais  que  c'eft  vndon  fpecial , 
«le.  Dieu.  Touchant  des  concupifcenccs3(To-, 
liiptez  diuerfes ,  notons  que  fainâ  Paul  n'a 
point  mis  feulement  pluiïeursconcupifceiices 
Se  voluptez,  mais  il  dit  qu'elles  font  diuerfes. 
Et  pouiquoyîD'autant  que  nous  fommes  agi- 
tez de  pafsions  qui  femblent  tllre  comme  in- 
compatiblet.  Exemple  :  Voila  vn  homme  qui, 
fera  &  auaricieux  ,  Se  paillard  ,&yurong.ne.- 
Comment  cela  fe  pourra-il  accorder?  Car  ce 
font  des  vicfcs  qui  bataillent  l'vn  contre  l'au- 
tre. Vn  homme  eftantaddoQné  à,raiiarice,fe 
youdroit  quafî  laiflêr  mourir  de  faim  :  il  luy 
femble  que  ce  qu'il  mige,roit  perdu, il  le  vou- 
droit  retirer  de  fes  boyaux  s'il  eftoit  pofsi- 
ble. Et  cependant  s'il  eft  addonné  à  pailUrdi- 
fe,il  ne  fe  fouciera  de  defpendre  ,  moyeiiraiu 
qu'il  fatisface  à  ù  cupidité  desboràet.Autaiit 
en  eft-il  d'vn  ambitieux  ,  ou  J'vn  yurongnei 
qu'il  feralàenuelippéen  faturpitude,&  n'au- 
ra efgardà  rien,  non  plus  xjii'vne  btfte  brute. 
Voila  donc  des  vices  qui  auront  bien  telle  di- 
uerlîté  ou  répugnance  ,  qu'il  femble  qu'ils  ne 
s'accordent  non  plus  que  le  feu  &  rcau:&  tou 
tesfois  on  en  trouuera  aufquels  touccs  ces 
pafsions  dominent ,  combien  qu'elles  foycnt 
ainli  diuerfes.  Voila  donc  ce  quefanid  Paul  a 
voulu  noter  en  ce  paflàge.difant  que  non  feu- 
lement chacun  de  nous  fera  enueloppé  en 
Quelque  vice,  riiiii.s  que  nous  aurons  des  cupi- 
itez  conti'ariantbs  J'vne.i  l'autre, oui  conibs- 
tront  toutes  contré  Dieav&  ne  la  flerôt  point 
Coutesfuis  defeietter  d'vncofté  &  d'autre: 
HHh.iii. 


$14 


3  71  sFRMOî^-  Xv.r.  ' 


cônj*»*  'qJ^»n3  '^  y  *  cwlelque  tem'prtté  ftt  U 
roeryndUsiftoyiofts  les  âots'^ms'eirttféh^ïtét: 
aiûfi  entft'-tld*  nos  cupiditez.Orléi  iAslVioif- 
foris  quelle  hîifere  c'eft' j'qu^rtOp  ftiAeïWtîi* 
le  diable  ndui  tient  en  fenr^ude  |»oUrtno»H  ' 
tranfpoîtér  i  tour  mal ,  mai^  qu'il  fe-iUie  de» 
nous ,  commefînous  eftions  dés  fîrtg«s, 'qu'il - 
n'y  ait  nulle  a  ttrempance  ne  modeftic,&  qu'il 
nous  face  non  feulement  f  jrtir  hors  de  nous 
pour  nous  mettre  en  vn  combat  /mais  qu'il  y, 
ait  vne  coiîfufiofljioïrible.qùe  nousipbrdons 
ennosahiesA  eh  nos  corps  comme  vn  abyf-: 
me  d'enfer.~Quad  donc  nous  fentos  ee«bouil 
lôhs  ■&  mefchantes  cupidint  qui  «V^uen» 
aiofî  àl'oppofite  l'vne  de  Pautre.cagnioiÛonï 
quelle  eft_noftremifcre,iufques  à  tît  que  Dieu' 
nous  ait  regarder  en  fa  mifericorde  infinie, 
pour  nous  ramènera  foy.  Et  que  cependant 
nous  retenions  ce  q«i  nous  a  eftc  dit,  qu'ici  S. 
Paul  ne  parle  point  d'vn  feul  homme, maii  eh 
gênerai  de  la  nature  humaine.  Or  il  met  en  la 
&n,(^ils  elioynt  tiieuxjehayjfaniiet  vnsies 
mures ,  plein)  i'cnm*  &  de  malice.  Ceci  tie  fe 
verra  point  à  l'oeil  en  tous  ceux  qui  font  en^i 
cores  aliénez  de  Dieu  &  de  faparole:mais  tSt 
y  a  que  la  racine  eft  toufiours  en  nous.iufquet 
a  tant  que  Dieu  nous  en  ait  purgez. Et  qu'ain- 
fi  fou, dont  procède  la  vraye  amour  que  nous 
auons  auec  nos  prochains?  N'cft-ce  pas  de  la 
cognoiflance  que  nous  àiiôs  que  Dieu  nous  ei\ 
Père  ?  &  pourtant  qu'il  faut  que  nous  foyons 
contointi&vnis  les  vn^auec  lesautresfCcux 
donc  qui  aurowt  tourné  ledos  à  Dieu.n'aurôt 
garde  de  s'entr'^aimer.  Et  mefmes  les  Payens 
ont  bien  veu  cela,ccux(di-ie)qui  ont  regardé 
plusaigu.c'eft  afçauoir  qn'vn  chacun  efladon 
né  à  s'aimer.  Voila  (di-ie)  vne  maladie  com- 
mune ,  Si  de  laquelle  tous  font  entachez  ,  iuf- 
ques  à  tant  que  Dieu  les  en  guarifletc'eftque 
vn  chacun  fe  plaift,  chacun  s'aime.  Or  qu'em- 
porte l'amour  de  nous-mefines  ?  haine  d'au- 
truy.Car  fi  ie  m'arme, ie  demâderay  mon  pro 
fit,  &  il  faudra  que  ie  face  tort  à  l'vn  ,  iniure  à 
l'autre.  Et  puis ,  ceux  qui  fe  plaifent  ainfi  en 
♦uT-mefmej  il  faut  qu'ils  foyent  enuenimcz 
d'orgueil  pour  ne  tenir  conte  de  leurs  pro- 
chain»:.Car  ils  eftimét  qu'il  n'y  a  ne  vertu,  ne 
fagelTe.ne  chofe  louable  iînon  en  eux. Et  ainfi 
dotons  bien  que  non  tans  caufe  fainû  Paul  at- 
tribue à  ceux  qui  fe  contentent  ainfi  de  leurs 
perfonnes ,  qu'ils  font  dignes  d'eftre  hays, 
d'autant  qu'ils  font  pleins  de  malice  Std'en-^ 
■ie.  Voulons-nous  donc  auoir  charité  &  ron- 
deur en  nou^,  pour  ne  machiner  nul  mal  a  nos 
prochains  ?  Il  faut  en  premier  lieu,que  nolhe 
Seigneur  nous  reforme  par  fon  fainftEfprit. 
Et  puis, voulons-nous  eftreputsd'cnuie?  Ad- 
uifonsde  regardera  Dieui.  Car.il  faut  qn'il 
Bous  ait  regardez  deuant  toutes  ebofcs:com- 
C#i.4.i>.  me  fainfl  Paul  le  déclare  en  l'autre  paflage, 
Vous  auez  cognu  Dieu, ou  pluftoft(dit-il)vo* 
auez  «rté  cognus  de  luy :  tellement  que  iauiais 
au]  nes'adaancera,&  ne  pourra  approcher  de 


Diel^,<îhéi1l■^l«Dleu1*rpreïM>nedVn^î(^4Bpé'' 
gratuifé.'fit  atnfiretdnbnsiqliand  nousfom-: 
mê«;plelh«'ii?cnoie"&  de  «nal(ce,que  ncms'f«mt  ■ 
mes<a7|nesd'^ftVeJiays,-  3t  qùit  ntjus  hayion»^ 
nos  firochains  i  ittfquts  à  taint'qxie  nqliieSei»  ' 
gfliîUr  tious-aiiattiiéx  à  tuy.  Voila  comme  no»-- 
arme?  font  blafonnees,afih  que  (ous  apprjenét 
de  s'humilltr  ik u.mt  Dieu ,  &  Confeltèr  qu'il, 
faut  bien'qiie  Cieuvft  d'vpe  giaudc,metti,& 
d'vnc  'ihifeiitorde.  intft.mabïe  entiers  noiif(> 
quand  lil Iny  otaift  de  nôuriilunliner.. Garent 
Quelle  Condition  nous  crobue-iltfînbnâmoni 
finîmes  plçinetneiii  contraires  à  luy.fl:  à  toxx 
bien?  C'eft  cf  que  Ainft  P^aul  aicKdeclatéei* 
premier  Ijeu. Or  il  adiûufte  que  quand  il»  bon- 
té deDicuefVapparue,&  fon  amour  enuers  les 
hommej,qu'il  noKs  a  fâuuez,  non  point  feloi» 
les  Œuures  que  nous  eufsions  faites. Car  quel* 
les  font  nos  iufticeSjfinon  celles  que  Dieu  met 
en  noui  par  fon  fainô  Efpruîll  n?y  a  donc  fi» 
non  fa  pure  grâce  qui  reluit  ici  :  Se  il  faut  que 
tout  Ce  que  les  hommes  pourront  amener  de 
leur  cofté  foit  misa  néant.  C'eft  la  raifon  par 
laquelle  fainû  Paul  nous  veut  induire  àeftre 
patiens,  &à  fiipporter  doucement  &  en  toute 
humanité' les  vices  &  les  imperfeÛions  qui 
font  en  nos  prochains, &  fur  tout  en  ceux  que 
Dieu  n'a  point  encores  illuminez  en  la  foy  de 
fon  Euangile.  Or  cependant ,  fi  nous  l^iut-il' 
recueillir  des  mots  de  fainft  Paul  vne  doélri- 
ne  generale:c'eft  que  la  fouice  &  lecommen 
cernent  de  noftre  falutelt  la  pure  bonté  des 
Dieu.  Quand  iedi  la  pure  bonté  ,  c'ell  pour 
exclure  tout  ce  que  les  hommes  imaginent 
auoir  de  bien.  Il  eft  vray  que  les  plus  igno-^ 
rans  confcfleroDt  (  comme  ils  y  font  con- 
traints) fi  Dieu  n'vfoit  cnuers  nousdemife-' 
ricorde,  que  nous  ferions  tous  abyfmeE  Si  per 
dus:roais  cependant  ils  ne  lailTent  pas  toutef» 
fois  de  s'attribuer  quelque  veïtu, en  forte  que 
ils  ne  veulent  point  tjoitterà  Dieu  toute ilou» 
ange.mais  ils  en  rcfaxiieni  quelque  portion  à 
eux.  Voila  vn  erreur  qui  toufiours  a  regné«n 
ce  monde.  Et  auiouid'huy  il  eft  encore  com- 
mun entre  les  Turcs ,  entre  les  luifs  &  les 
Papiftes  :  c'eft  vn  article  de  leur  foy,  c'eft 
al'çauoir  que  les  hommes  ne  pourront  pas  par 
uenir  à  falut.finon  qu'ils  y  foyent  aidez  parla 
mifericorde  de  Dieu:  mais  cependant  fi-.ne 
lailTent  ils  pas  d'auoir  ceftc  fauile  opinion  ,  3c 
diabolique,  qu'il  nous  faut  venir  en  concur- 
rence, c'eft  à  dire  ,  qu'il  nous  faut  befongner 
de  noftre  cofté ,  &  que  nous  femmes  comme 
compagnons  de  Dieu  :  &  fur  cela  ils  imagi- 
nent des  préparations.  Entre  les  Papiftes  on 
dira  que  les  hommes  ne  ptuuent  mériter,  iuf- 
ques  à  tant  que  Dieu  lésait  preuenus  :  voi- 
re mériter  de  dignité  égale.  Et  pourquoyf 
Car  il  faut  bien  que  Dieu  commence ,  di- 
ront-ils :  mais  fi  eft-ce  que  nous  auons  de 
bons  principes  ennous',&  de  bons  mouue- 
mens.  Vn  homme  ne  pourra  vouloir  le  bien, 
d'autant  qu'il  lia  dci'u  fon  coeur  infcAé: 

nuii 


s  VR    L'EPIST.   ATITE. 


<riç 


mtls  (i  pourr»-iJ,?P(>oFter  fon  yottlQiir',pour 
bien  faire:  çncgre;  qu'il  n'ait  point  vjie  affe- 
ûipn  ferm«,fipouiT.-i-ilauoirie  nefçay  cjuoy 
<ic  bon.yoire  de  foy-roefmc,pour  dirc.Ie  voli 
<lrpyeawpi,iivnet5onn«  volonté.  Voila  que  les 
PapilUt imaginent. Aucanceneft-il  des  ljji£f, 
^  de  tout  leurs  feinblables.  Orap  contraire, 
Toici  Dieu  qui  pronohce  qu'il  n'y  a  nulle  œu 
urc qui yipne  en  conte,  quand  il  luy  plâiftd* 
ngusàpp^litr,  &  vferdç  la  purcmùejrtcordfl. 
Sainte  fa^il  ne; dit  point  qUQ  nos  écumes  nous 
e)]0èric  peu  profiter ,  ajqii'il.falott  que  Dk{i 
,iuppk4lè  feulement  à  n«Rre.d«fauc  :  iln'y  jra 
paiainlî  aucc  vHtel.par^agçtearce'feroit  det- 
ifP}\tilef,  Pieu d?M>e  partie dc.fa  louange:  les 
:Komme^j?e  Ce  peutiçut  attribuer  tant  peu  que 
ff  foit  ,que  Die^ine  Toit  amoindri  d'autant. 
Or  lâinâ  Paul  coupe  broche  à  coufcela.,  & 
dit  que  c^n'^ôippint  par  oosiosuures'JEtcom 
flieqt  4<*n«? félon  fa  unifericflrde.-  Etcxû  dfin 
■de  mieHiiaobatre  toutç  preforaptionL'  Udit, 
httcftUUfftt  <}ttt  nous  tttfiÎMti fai tvs.f.itte  mot 
il:t)out.;;a,n>enËsà.penrer  comme  Dieu  tK  nolis 
peut.^fit'ifc  re4^uable,voire  attédu>)u'il:a défia 
prononcé  que  nous  fomincs&iblt:i&, rebel- 
les, &  abufer,  &  pleins  de  mauuaisdeiîrs,  que 
le  diable  nous  poflede  en  telle  forte  qu'il  n'y 
aentiouc  que  feruitude  de  peché'&  de  m^i 
QjJe'pouuons-nous  mériter?  qu'eft-ce  que 
nous  apporton?  là  deflïïsà'DieiSpiîur  l'obli- 
ger enuers  nousfOrcepédant  fainft  Paul  pic- 
^^uejciIa.'foué'^ypocrilÎQde^)^a|^pe$,ren  la 
quelle '  ils  s'esBlouiflent  quanrf  ils  s'attribuéf 
quelque  louange  de  bien.  Orquieft  caufede. 
çela.lînon  qu'ils  ne  fe  regardent  point?Côme 
aufoùrd'hiiv  les  doreurs  de  la  Paj^autéprefi 
xherQntaflèz  l(?ur  franc-^rbitrc,&  leurs-bpn- 
«es\>Vep)ri*ti&As,  &  ieiirs  h»ierite$."Êt;qul  elT 
câufe  de  tout  cela?Ce  font  des  mocqueurs  qui 
jamais  n'onj  entré  en  leur  côfciéce.  Voila  vn. 
"^ilw.puitprjva  yurôgne  confit.eo~touBSs  for 
tes  de  mauT  ,t1  pourra  prefcher  de  toutes  les 
vertus  &  cardinales ,  &  théologales  :  mais  ia- 
rosis  nçs'eftadiçwrnédeuîi  Dieu,  pour  dite, 
QJiî-rtif{-te?4u'èfticè-qUt  de  mbyfAfnriTaih'ft 
Paul  fe  mocque  ici  de  ce  que  les  hommes  s'a- 
ueuglent  àleur  efcient  ,  ou  qu'ils  ferment  les 
yeux  afiryde  ,ne  poiijCj  veoir  leur,  turpjtudç. 
Baais  ceoedant 'nouV'foçTiriét  atlmonéJTèï  que 
quand  cbAcun  aura  regarde  a  fov  .Viouspoa- 
lions  eltrenriïïdges^our  nou$,cqri^amncr  eh 
tout  &jpa>'  tout,',  8ç qu^i'n'cft  plus  quen?ign"4c 
nous  refèrueryt^-|féul  grain  de  louange'.  €i^r 
il  efl  dit  que  ce  n'eft  point  par  nos  propres 
ocuuresque  nous  ëufsions  faitq^.Et  puis  il  ad 
ioi'fte  ,  ï»  iuJUce  :cpmmç  \M  difoit ,  Quand 
les  hommes  fç  glorifient  d'auoir  fait  g^ielque 
bîeii  ,  c'tft  qu'ils  ne"vienent  point  à  là  balanr 
ce  de  Ijieu  :  car  nous  cui^erons  que  vice  foit 
vertu  foiiuentesfois.  Mais' regardons  ceqiie 
pieu  en  prononce.^  car'ifn'y  a  que  ce  lugé- 
la  qui  foit  compétent',  St'à'la  f<;ntencè'duqucl 
il  fe  faut  arrefter.  O*  i^fel^  dît  que  tufticc, 


cJdl  l'obeiflànccqui-  fer»  reaiat  à  fâ  Loy; 
c'efti(di-te)  qu'en  tout>&parjtoBt  nous  coa«.  •■ 
fiormioai  noftrevie  àceique  Dieu  nous  com> 
iniandc.Yoila  quelleeftia  iufti<e  qu'il  apptou 
,àc- lOr  venons  maintenant  à  ce  qui  nous  ell 
dpclaiéx'eft  afçauoir  que  Dieu  ne  veut  point 
que  nous.chpninions  feulement- dcuant  les 
hommes  en. intégrité  pour  eftreirreprehen- 
fibles,roais.qiw  nous,  foyôs  purs  Se  nets  de  tou 

-te,ûiauuaifej»ffcéboni.  jEtflujjJuracela?  Nous 
«byoni 'donc iquciie'jnotsi'cft  point  fiiperflu, 
-dtiaijdl^aâ:Pàt(l:^tlê.des-«c(iiires  qui  font 

'eniiiAicep  comme  t'ildifoittfUe  les  homme» 

s'endormeiit  par  troptquand  ilscuident  auoir 

«rqtielqtwfeciu  poux  obliger  Dieu.afin  qu'il 

Jesairiraftà  fo^- voira  ,: d'autant  que  iamais 

jrforitbieniceuinegouftéquec'eftde  la  vraye 

inAif'ei'  Et  pouitàm  ijl^môftre  que  le  tout  doit 

cûf&atiiibu^i  k  bonté  deDieui&à  l'amour 

qu'il  a-pwrteeaux.  hbipmier."QuialiTdil  met  U 

bonté  CD  :pi  rentre  il  lii^„'«'bft  pèureïprimer 

(jue  nous  ïbmnte^  duicnkis  dcDieu  ,:iufques 

-i  tant  qu'ilv  feîenuers  nbùsjdfe  ûmifericsprde 

.gratuite,  lljdïvtiy  qurnoqsiudns  «(té'  nt- 

chetez  par  le  fang  de  noftre  Seigneur  leftt 

Chrift ,  d'autant  que  Dieu  ne  l'a  point  efpar- 

gné,à  caufe  de  l'amour  qu'il  nous  portoit  :ain 

fi  qu'il  en  eftpàfléau  tîoi(ïemt,ch.ap  4ç  fainft 

lehan,  Dieu  a  tant  aimé  le  monde,  qu'il  a  ei- 

fotéi  la'miort  fon-Çili  vnique  pour  lefalut 

des  poures  pécheurs. Mais  cependant  fi  faut' 

^  ii.)^')e;npiMtfi^gn'pl(i^iiésce{Vî*iJ«Ôur  élite  gra 

''^tuitè.  Car  (  cpmme  délia  il^efté  toucné)  les 
*iidmjfies;«Jbfciirciflént  la  gloire  de  Diéuçïir 
■  leur  ingratitude  tapt  qu'il  leureft  pofsible:* 

■  'qiiândmontconfqflc  qùefans'que  Dieu  le« 
,  eiiflaijneî.iU  c&jyét  p'ec4(is,ils  o'emid^nt  là 
QtUus.Et  pourquoy  tft-ce  qu  il  nq'  a  airaei? 
Pource  qu'il  a  trouué. quelque  blçn  en  pç^: 
ençores^ue  n^us  re,fup.ioiîs"pas  dignei,-!!  eft 
xei]ili?  nbù^W^AiËni^às  reiettez  Ci  fort,  en- 
cores  ^ue  nous  n'eufsions  d.equoy-  eftre  ap- 
pelez àfoy.Or  donc.afin  qlié  lèshôméSloy- 

,  entdefpouilleï^ettHj'te  vaine  preforoption, 
"&J qu'ils  foyent  pleinement  aneantiis  çn  euj, 
non^çulcmept  fainô  Paul  di,tqueçequVnons 
auons  eftc  rachetez,  c'a  efté  pour  iSimour  de 


m 


mbien 
cpra- 


qi^e  nj)i|^iursio;is^  ^ojjt|Pip;fe5ans&  dc_ 
'uez)que.nous  luy.ei^^sjps  fait')34;uerre,&  que 
nous  eiifsions  mérite  qu'âufstïjpfe  monAraft 
ennemi  enuers  novijy  ijf  çnxiemjimortel.  Voila 
cç' que  nous  auons  à  ijetçqir  de.ce  païïàge.p;' 
ce  ^ue  /âinô  Paul  çip/ii^e  nje  fe_  pçi^t  j  plainte 
naiit  déclarer ,  c'^ll'qiJ(^céJt.ç,f^jnour'je  Dieu 
p'^^  M"?  *PP*r"«!'  <^"Jifffi'^i'!^iqH^4  lefqf 


faits  paiticipans  de  ce  bien  inertimable:com't 
■'-■■■■  ■  HHh.'iiii.  ■ 


«15 

jne  auioiird'huy  ix  bonté  A  ratfi'oui'dË  Dieu 
nous  apparoiû',quaDd  il iiijr-^pLiifl  de dous at- 
tirer àlbn  tioupe^u,&;'nous  recueillir  de  cé^ 
lie  horrible  difsipatiiaitxiù  nons/  eition^  yafin 
-^u'efcans  en  fa  mairDiiJ&  endbn  Egiife  ,)ncn>s 
foyons  alTeureZ'de  Piieritage  qui  nbus  ellap- 
prefté  au  ciel.  Voiladonc  ceqtiencmsauops 
encore:  à  retenir, après  auoircognu  labontë 
gratuite  >  ou  l'amour  patectieile  de  noftre 
Diea ,  qui  procède  de  bonté  ^  que  nous  fça»- 
chiôs  qu'il  nous.la manifeûeaDiourdi'bcry.iBt 
pourquoy?  Qwndrfio^gilélrtoutJefbprep- 
ché.ce  nous  eft  comme.v'ne  iatnpe  qui  nbuseT 
claire,afin  que  nous  cogiret^sio;nsoe  quiflols 
tcfioit  caché S>L]paraliaat.^jC4riafques^  ce  que 
nous  ayons  CDgDoiJànce de  labonne-^otlonU 
té  de  Dieu,:nous  fommesfomineleniiedshcan 
teilebres:niais  fi  eft-ce  que.Dteu  nouscâitant 
beain  &  JiâmairfA]ue  là  noiis  cogndclIbBsqa'il 
4pprocliedaiifdus<-^qu'rlnatty.vCTi*<çKib^ar'- 
■iier  canmmrc^  ehi'ain$,iqii'iiL  iratini^  ^t  tellé- 
■imeat<{\iC'iàsàsjaa deucms  poincikxiten  quîil 
-fie  pfbcuieaoilbc  £diit  quand  il  nous  addref- 
»ie  fa'^arole,'&  «pienous  atfouscehuude  de  £i 


T  ÎÏSERM  OK'    X  VR 


i'wetite. 


;2  sifion 


;.r;0 


-'iî'Is:   f  XI.'  >i(p  ir.î->!ie')ï, 

1.1..  >■■  ■:'ji    .'o;-  '■  '■!'■  ■■yonu'.  ih  Ajt. 

-y  isli'i  p.sijaotn ->i  •)■■■;  3'i",3  )i  u-.'i  ,   ■     ■•: 
•Jut'j  ri  JfitL.u  ■;•<•.  '  j,M..  rfijtlj  >:;  ■  j 


€)  il'4ioas-nous;prdf}ér}iefon»  dtfuant'b 
raaieAé'de'  nôftra  bon  pietf  en  'eognoiflaiice 
de  iJosfautes",iôiprias  qu'il  ticjuslés  ïace  tel» 
iement  Tentir,  'qu'v^  tiiâicuri  dtf  noiisappi^éi* 
ntis'y  mieux"  dcfplaire.  EtqWe'oe  r»e  (bit 
point  reulenien't  pour  ^aflfèr  coiidamikatioh 
.de  bouche ,  -niais  qu'en  toute  noftre  vie  nous 
ayons  regrctde  la  malice  qui  eùeti  lioits  :  0c 
i^ue  nous  fentiôs  que  le  bien  que^eu  y  a  mis 
.nfeftpointàcaofd  dé  noftre  iu*(teé;  ne  que 
'.oonrl?a:ycais acquis,  mais  qû'il*ôus  k  donne 
iparfa  pure  libcr'alité-,  afih'que  nous  hiy  en 
ocndibns  graceic.  £i  «jue  de  plus  éA  plus  nous 
nous  addôniont  à  Igy.le.priâtis  qu'il  pôurfui- 
ue  fon  cEuure ,  iufques  àcc  qu'il  l'ait  amentë 
àTa  petfeûion.Et  que  cependant  nouscortuér 
.fions  tellement  les  vns  auec4es  autres  ,  qé'fii 
chacun'tende  la  main  ifpn  prochain ,  &que 
noDsillionstous  àce  bon  Di»i ,  voire  d  vu 
tel  ircord,qiie  nous  ne  ¥agut'ob^  ^lus  cotnnie 
les  pburesincredulç;,mai»  que  declitan^'que 
<nousibHi<ne«.enfatr!râe-clairté;'H,o(n'Je'mo(iw 
ftr ions  aufsi biea 'par  eïFeft.  Qoe  noB'ftùle- 
.mehf  il  aqtis  facecefte  grace,<niait  à  tous  peH 
-pies  &  nations  de  la  terre.         .ipaj-rrMi    j 


.Il 


SERMQN     S  VR     LE, 

C  H;A  P:l'iT;R.£.  ihr  .Tif  jT^qqr.  îuon 


cnuer/hshommcSiejiaf>parue,ilnousaJàuuez'       '^  '  '     '   r 

'Non  point  par  œuùrcs  de  iufliçe  que  nous  ayons  faites,  mais  Je 


lonffmfeiricordty^^iel^f^nt  d^e  Xf^^nemm^.  îCnMçllçnfcpj; 
.nr<^<-'f'i  Lequel -itaeipandu  abondamment  en  nous,  par  lefus  Chrifi 

ItOjtre^aUUeUTr-,  f  -t-i,[.  ■,0.-,-^\  l  i^\:r     -w  Mir.-?  ;  î5li-r>l'.3Hi  *,  ;5li.nil>itt>  iSîm  <  >v 

fperancede  \ieeterndlk^-^-' 

i':Oujiid<5i?^affii'e^^ôl^^ar 
^:  cTa'e\ÎS/;&kirti»  nu/irtl'aûl 
en'Ve  |.Wf^è'àttrib=ûeVô'H(- 
Itéîi/apa'.inoiVrè'ftfàV^à 
la'jivif  ^orttç'  débieu'.àîm 
qvife  {JoHS  3{)prenions  de  re- 
co^?ioiftre  en  toute  huniili 
le  que  cVft  'dejluy''qùè  n'ôus  tenons  tbut ,  & 
que  nol  ne  fe'^loi'mipllis  ien  foy.  Pour  cefté 

èaiife  Ua'é)fcluVbàt«iqU'elcs  hoin/nes  Vma- 

■^■. i'jiui-ciji/iiLa?  j;..?jii-.i  ■      •"-■■• 


!  >'nr.nu^  rii'.ip  iif 


i;iSi"jl-j 


U'p:  <;i  ..l  l:;4'l 


toutes 

cè^'téjiSc  que  noiîs  luy'lp5nmesagfeaMes.  î>ïo 
l'os  bien  donc  que  cidtflus/âinff  Paul  a  mon 
flré  la  foutre  de  noftre  ^lùt.c'cft  ccfte  amour 
-   '  .Car  ii  nous  faut  toùf 


ïginen^  dëinëHt'è'tee\i*,difant  que  nous  Jl'a- 
toqs  Hftrlldfe^'éÉyÀi'^s.poiir  bbligejtiicUiej; 
«ers  noui  ;  iî«is'^afc|^ous  auons  iuftice  quand 
il  luy  .plaift  afaiôi  ac(;epter  pair  fàfnilçricor^e 
|ratiiitç.  C);r(J-iii'ntenant  fainia  Pauladipu'ft.e 
c  moyen:  c'eû  afjauoir  que  Dieu  a  efpandii 


qiie  Dieu  nous  a  portée. Ca 

loujrs  venir  là ,  quand. n'ous.youloris  fjauoir 

dont  twoctde  que  hbus'àyôns  efté  retire!  de 

T..r.r..-Î.  •,.,-,         ':.i.'i'V'5':'.'ir. 


fc 


Ta.^nalediaion'th'laquel'Ie  nous  fomnies  de 
'nâture.Mais  çepeiidant.poiirçe  qu'il  y.a  lon- 
gue Sjlance  entre  tjieu  &  nous,  fi  faut-il  «juje 
le  rn^yèii  nb*  Ipit^.pjiopo'fe.pàr  lequel  il  nous 
foit  plus  facile  d'apprpcher  .  Or  ce  moyen 
e/i  noftre  Scignéut  le  fus  Chïift ,  auec  toute» 

les 


s  V  R     L'  E  P  I  s  T.    A    T  I  T  E.                         ^17 

lesgracesdeffuirâinaEfprit.Etc'cftceque  Dieu  :  car  ileftla  fontaine  de  toafepnret*^ 

maintenant  nous  au5s  à  traitter.  Mais  il  nous  Et  ainfi  donc, puis  qu'en  noïis  il  n'y  i  ^ue  toa 

faut  toufiours  retenir  ccfte  vnion  de  la  caufe  te  ordare.il  faut  bien  que  Dieu  nous  foif  e»- 

principale  auec  ce  qui  eft  ici  adiouAé  ,  c'eft  a-  nemi  :  comment  pourrons-nous  maintenanc 

fçauoir  que  non  fLuiemcnt  il  nous  a  aimez,  acquérir  quelque  grâce  deuant  luy  parnoftre 

mais  aufsi  il  no'  a  déclaré  fon  amour,  &  nous  dignitéPllfaut  donc  conclure  qae  les  hommes 

a  monftré  comment  nous  y  pourrons  parue-  font  plus  qu'infenfez  &  enragez  quand  ils  s'o 

rir,&  comme  nous  pourrons  iouir  du  falut  le  fent  attribuer  lien  qui  foit  en  leur  falut,&  que 

quel  il  nous  prefente.  Or  il  ell  dit  notament,  ils  ne  cognoiffent  point  cefte  pure'grace  &  in 

(iu'iUeffandtifur  mus  le  Uuement  de  ngene-  finie.de  laquelle  fainft  Paul  nous  parle  ici.Or 

ration  er  renouuellement  du  fuinii  Effrif.vohe  après  ce  mot  de  lauement,  il  adioufte  que  c'eft 

&  le  tout  par  nnflre  Seigneur  Ufia  C/jn/î.  Il  eft  (<i  régénérât io„,&rfn~ituellement  du  fainfl  E- 

bien  vray  que  quand  nous  voudrons  trouuer  fprît.ll  n'y  a  nulle  doute  que  faind  Paul  n'ait 

le  m»yen  de  noftre  falut.il  nous  faut  commen  ici  regardé  au  Baptefitie ,  &  qu'il  ne  nous  ait 

cer  par  le  Fils  de  Dieu.  Car  c'eft  celuy  qui  voulu  comme  en  vn  miroir  vifibte  propofer 

BOUS  a  reconciliez  à  Dieu  fon  Père  ,  c'eft  ce-  cefte  doftrinc.  Car  auûi  d'autant  que  noiis 

luy  qui  nous  a  lauez  par  fon  fang,  c'eft  celuy  fommes  nides ,  Dieu  ne  s'eft  point  contenté 

qui  no'  a  acquis  iuftice  par  fon  obeifsace, c'eft  de  nous  teftifier  par  l'Euangile  que  nous  font 

celuy  qui  eft  noftre  Aduocat,  &  par  lequel  au  mes  lauez  &  nettoyez  au  fang  de  noftre  Sei- 

iourd'huy  nous  troouôs  gracex'tft  celuy  qui  gneur  lefus  Chrift  ,  mais  il  nous  a  donné  vne 

nous  a  apporté  le  fainû  Efprit, c'eft  celuy  qui  figure  de  cela  ,  que  quand  nous  auons  efté  ba- 


nous  a  acquis  l'adoption  par  laquelle  nous 
fommes  faits  enfans  &  héritiers  de  Dieu. No- 
tons bien  donc  qu'il  nous  faut  chercher  tou- 
tes les  parties  de  noftre  falut  en  lefus  Chrift: 
car  nous  n'en  tiouuerôs  point  vne  feule  goût 
te  ailleurs.  Mais  fainft  Paul  ne  s'eft  point  ar 


ptifez,  c'a  efté  comme  fi  Dieu  nous  auoit  mon 
ftré  à  l'œil, que  quand  nous  venons  à  luy, nous 
n'apportons  finon  toute  pollution, &  que  fon 
office  eft  de  nous  purger.  Il  nous  monftré 
donc  cela.  Et  pourtant  fainû  Paul  au  lieu  de 
dire  que  nos  péchez  nous  font  pardonnez  ,  & 


refté  à  l'ordre,  comme  fi  ce  lauement  duquel  que  la  vie  nous  eft  offerte,  il  dit  que  Dieu  a 
il  parlCjeftoit  fuperieur  :  mais  ici  il  eft  feule-  efpandu  fur  nous  vn  lauement  .  Et  ainfi  nou» 
ment  queftionde  monftrer  d'vne  façon  pri-  voyons  qu'il  nous  ramena  à  noftre  Baptefme, 
uee  aux  hommes,  comment  c'eft  qu'ils  pour-  à  caufe  qu'il  nous  eft  plus  aifé  de  contempler 
ront  eftre  conioints  à  Dieu  ,  &  eftre  partiel-  là  cefte  grâce  de  laquelle  il  eft  ici  parlé. Or  ce 
pans  du  falut  qui  leur  procède  de  cefte  amour  pendant  il  nous  nlonftreque  ce  laucment-la 
gratuite  de  laquelle  il  eft  parlé. Car  nous  co-  ne  confifte  point  en  l'eau  vifible.  Car  que  fe— 
gnoiflbns  quelle  eft  noftre  rudefle,tellcment  roit-ce  que  nos  âmes  fuflent  purgées  par  vn 
qu'il  faut  que  Dieu  defcende  pour  nous  faire  élément  terrcftre,&  qui  eft  corruptible?L'eaa 
cognoiftre  ce  qui  autrement  nous  feroit  câ-  donc  n'a  point  cefte  vertu.  Mais  cependant  iî 
ché:comme  tout  ce  qui  appartient  à  noftre  fa  noiis  faut-il  àcauféde  noftre  infirmité  ,  com- 
lut  furmonte  noftre  capacité,  &  nous  ne  pour  mencer  par  l'eau  ,  afin  que  nous  foyons  eh" 
rions  pas  monter  fi  haut  pour  le  comprendre,  uez  plus  haut.  Or  ie  di  qu'il  nous  faut  corn— 
Voila  donc  des  fecrets  qui  nous  font  incom-  mencer  par  l'eau ,  mais  non  pas  nous  y  arre- 
prehenfibles,&me('mes  cenouseft  comme  vn  fter:carce  figne  qui  nous  eft  prefente  deuant 
langage  incognu,quâd  on  nous  parledu  roy-  les  yeux  eft  pour  nous  renuoyer  au  fainft  E- 
aume  fpirituel  de  Dieu.  Voila  pourquoy  S.  fprit ,  afin  que  nous  cognoifsiôns  que  c'eft  de 
Paul  ici  quafi  nous  mafche  les  morceaux  ,  afin  là  que  procède  la  vertu  du  Baptefme.  Et  pouf 
qu'il  nous  foit  plus  aifé  de  côprendre  en  fom  cefte  caufe ,  combien  qu'il  vfe  de  la  fimilitude 
me  ce  qu'il  nous  a  enfeigné.   Il  dit  donc  que  telle  que  i'ay  dite  ,  fi  cft-ce  qu'il  monûre  que- 
Dieu  pour  nous  fauuer  a  efpandu  fur  nous  vn  noftre  fiance  ne  doit  point  là  eftre  attachée, 
lauementrcommes'ildifoit  que  (le  noftre  na-  mai";  que  nous  deuons  attribuer  au  fainû  E- 
turenous  fommes  fouillez  &  poilus ,  qu'il  n'y  fprit  toutl'effeft  ,  Se  la  perfeftion  duBaptef- 
a  en  nous  que  toute  ordure  &  puantife',  tel-  me.   Voila  pour  vn  item.  Mais  cependant  iî 
lement  que  nous  fommes  exécrables  deuant  nous  monftré  quelle  grâce  du  fainft  Efprit 
Dieti,&  faudra  qu'il  nous  tciette  &  nous  def-  noiK  eft  acquife  quand  nous  fommes  baptl— 
daigne  ,  mefmes  qu'il  nous  repoufle  fi  loin  7ez,c'eftafçauoir  régénération,  &  renouuel- 
que  nous  foyons  bannisde  toute  efperance.  lement. Or  cematdeRegeneration, emporte 
Voila  donc  le  premier  pbinft  que  fainft  Paul  que  nous  foyons  rais  pour' la  féconde  forsv 
nous  a  ici  déclaré  :c'ellafçauoir  la  pollution  non  point  qu'il  nous  faille  fortirdu  ventre  de 
de  laquelle  nous  fommes  tellement  fouillez,  noftre  mère:  mais  Dieu  nous  fait  nounelles 
qu'il  faut  que  Dieu  nous  ait  comme  abomina  créatures  quand  il  luy  plaift  d'imprimer  for» 
blés.  Or  allons-nous  maintenant  glorifier,  Se  image  en  nous. Car  qu'eft-ce  que  nous  appor- 
qnand  on  nous  parlera  de  noftre  fa  In  t, allons-  tons  eftans  enfans  d'Adam, finon  toute  male- 
le  chercher  en  nos  mérites,  veu  qu'il  faut  que  di£Mon?Oril  faut  que  Dieu  nous  charge.  Et 
tout  ce  qui  eft  infeû  &  fouillé  defplaife  à  ainfi  , afin  que  noas  cognoifsiôns  qu'en  ûo«b 


ffi8 


S  ERM 


il  n'y  â  que  milice ,  que  nous  fommes  du  tout 
peruers  ,  &  que  cC^u'on  appelle  raifon,  n'eft 
que  folie,c«  qu'on  appelle  frânc-arbitre,n'eft 
qu'vne  feruitude  nuudite  de  péché:  afin  donc 
que  nouscognoifsions  cela  pour  nous  côdara 
ncr  du  tout,il  eit  dit  qu'il  faut  que  nous  foy- 
ont  comme  refondus  &  changez.  Voila  qu'em 
porte  ce  mot  de  Régénération.  Saind  Paul 
Ta  expofé  ,  en  difant  qu'il  y  a  vne  nouucauté 
en  nous:  comme  aul'si  l'Efcritureen  parle  •.  & 
c'eft  vn  lâgage  aflez  commun,  qu'il  nous  faut 
eilrenouueaux  hommes.  En  quoy  il  eftiîgni- 
fté  que  iufques  à  tant  que  nous  ayons  renon- 
cé à  ce  qui  eft  de  noftrt  père  Adam ,  qu'il  n'y 
aura  en  nous  que  rébellion  contre  Dieu,  raali 
ce  Se  hypocrilîe,&mefchatescupidite2:brief, 
c'eft  vnabyfme  detout  mal  que  la  nature  des 
liommes,  amlî  qu'elle  eft  corrompue,  iufques 
à  tantque  Dicii  y  ait  mis  la  main  pour  y  re- 
médier. Or  cependant  fiinâ  Paul  adiourte, 
que  tout  cela  fe  £ace  par  noftrc  Seigneur  le- 
fus  Chrift.  Car  (comme  défia  nous  auons  dé- 
claré) comment  nousappartiendroit  l'Efprit 
de  Dieu,  fi  ce  n'eftoit  qu'il  nous  fuft don- 
né par  celuy  qui  en  a  en  foy  toute  plénitude? 
Ainfi  cognoiffons  que  pour  eftre  laiiez:  il  no* 
faut  eftre  nouuelles  créatures:  brief,que  nous 
n'auons  rien  qui  foit  appartenant  à  noftre  fa- 
lut,  qu'il  ne  nous  foit  donné  par  le  moyen  de 
noûre  Seigneur  lefus  Chrift,  &  en  d  perfon- 
ne.  Conclufion ,  quand  il  eft  queftion  de  no- 
ftre falut,il  nous  faut  touûours  auoir  ceci  re- 
folu, que  nous  cftions  péris  &  defefperez  ,  fî- 
non  que  Dieu  euft  eu  pitié  de  nous.  Que  fa 
miferîcordedonc  foit  eftimee  le  principal,  & 
comme  lifource  de  noftre  falut.  Orcepen- 
dint  cela  ne  feruiroit  point  pour  nous  coafer 
mer  en  vnedroite  fiance.  Il  eft  vray  que  c'e/l 
JbienalTez  pour  glorifier  Dieu,  &  pour  faire 
que  les  hommes  s'aneantiflènt ,  quand  il  leur 
eft  monftré  qu'ils  font  perdus  &  ruinez,  finon 
d'autant  que  Dieu  les  reçoit  à  merci. Ne  faut 
il  pas  qu'ils  foyent  du  tout  abbatus,  &  cepen- 
dant qu'ils  foyeut  rauis  pour  fentir  combien 
ils  font  redcuablesi  ce  Père  de  mifericorde? 
Ainfîcefeul  article  fuffiroit  bien  pour  humi- 
lier les  hommes,  &  pour  leur  faire  recognoi- 
ftre  la  bonté  de  Dieu:  mais  cependant  nous 
ae  pourrions  point  nous  appuyer  en  vne  fer- 
me fiance ,  finon  que  Dieu  nous  apparuftd'a- 
uantage ,  de  que  fon  amour  nous  fuft  plus  fa- 
(siliercment  declaree.Apprenonsdoncde  vc 
nir  à  noftre  Seigneur  lefus  Chrift,  lequel  a  ve 
ftu  noftre  nature,afin  que  nous  ayons  familia- 
rité auec  luy  :  il  eft  homme.afin  qu'il  ne  nous 
le  faille  point  aller  chercher  loin.  Ainfi  donc 
«oftre  falut  nous  eft  mis  en  auant  quand  il  eft 
queftion  de  la  certitude  que  nous  en  deuons 
auoir.  Il  eft  vray  qu'ilfaut  bien  que  Dieu  le 
referue  toufiours  en  la  mainrcar  fi  nous  en  e- 
ftions  les  gardiens ,  hcLav.'que  feroit-ce?  mais 
combien  que  Dieu  preferue  nollre  falut ,  & 
qu'il  foit  excjnpté  de  tous  les  dangers  de  ce 


ON     X  V  I. 

monde ,  eftant  au  ciel,  (  comme  fainft  Pierre 
en  parle)fi  eft-ce  neantmoins  que  nous  en  a- 
nons  vn  tefraoignage  fi  familier.qoe  c'eft  au- 
tant comme  fi  Dieu  nous  le  donnoit  toutaf- 
feuré.  Et  comment  cela  ?  d'autant  que  lefu» 
Chrift  fe  conioint  auec  nons ,  !c  nous  appelle 
fes  frères.  Il  nous  faut  donc  là  venir ,  fi  nouî 
voulons  eftre  bien  fondez  en  pleine  certitu- 
de ,  fi  nous  roulons  inuoquer  Dieu  fans  aucu- 
ne doute  :  fi  nous  voulons  eftre  affeurez  de 
noftre  adoption.  Se  de  noftre  héritage  celefte, 
il  faut  que  nous  ayons  noftre  adreflè  à  lefus 
Chrift.Mais  cependant  notons  pour  le  troifie 
me  article  ,  que  ce  n'eft  point  affez  d'auoir  le 
nom  de  lefus  Chrift:mais  il  nous  faut  cognoi 
ftre  fon  office  &  fa  vertu  :  il  nous  faut,  di-ic 
fçauoir  pburquoy  c'eft  que  le  Père  celefte 
nous  l'a  enuoyé  ,  &  ce  qu'il  nous  a  apporté. 
Et  pourceftecaufe  fainft  Paul  traitte  ici  de 
ce  lauement  par  lequel  nous  fommes  renou- 
uelez  ,  Si.  fommes  faits  nouuelles  créatures. 
Notés  bien  donc  que  lefus  Chrift  n'eft  point 
venu  vuide  des  biens  qui  eftoyent  requis  pour 
le  falut  /pirituel  de  nos  araes ,  mais  que  toute 
perfeftion  du  fainû  Efprit  luy  a  elîé  donnée, 
afin  qu'il  nous  en  diftribue  à  chacun  félon  fa 
portion  3c  mefure.  Il  eft  dit  que  l'Efprit  de 
Dieu  a  repofé  fur luy,voire  l'Efprit  de  fagef- 
fe,  l'Efprit  de  pureté,  de  difcretion  8c  de  ver- 
tu :  brief ,  il  n'y  a  rien  que  nous  ne  tiouuions 
en  lefus  Chrift  ,  quand  il  eft  queftion  d'auoir 
toutes  les  parties  de  la  vie  éternelle  :  &  aulsi 
(comme  i'ay  dit,que  nous  ne  pouuons appro- 
cher de  Dieu,  finon  par  le  moyen  de  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift  :  au  refte ,  qu'ayans  vn 
tel  Moyenneur ,  nous  pouuons  eltre  affeurez 
que  Dieu  nous  aime,  &  qu'il  no'  aduoue  pour 
fes  enfans.  Et  fi  nous  voulons  l'çauoir  com- 
ment cela  fe  fait ,  venons  àcefte  doârinede 
fainû  Paul ,  c'eft  que  noftre  Seigneur  lefus 
nous  ayant  lauez  par  fa  mort  &  pafsion ,  ay> 
ant  efpandu  fon  lâng  à  ceft  vfage ,  que  toutes 
nos  macules  foyent  nettoyées ,  afin  qu'elles 
n'apparoiffent  plus  deuant  Dieu  fon  Père, 
ayant  efté  crucifié  afin  d'abolir  le  péché,  S( 
nous  affranchir  de  la  tyrannie  en  laquelle 
nous  eftions  détenus ,  que  maintenant  par  la 
grâce  &  vertu  de  fon  fainû  Efprit,  il  nous 
communique  toutes  ces  chofcs  :  il  faut  que  fa 
mort  &  refurreûion  profitent  en  nous  :  car 
fi  nous  n'auions  le  fiinù.  Efprit ,  ce  feroit  en 
vain  que  lefus  Chrift  auroit  fouffert.  Il  eft 
vray  que  fa  mort  &  pafsion  auroit  bien  cefte 
vertu  de  nous  iauuer  :  mais  cependant  nous 
en  feri5spriuez&  exclus.  Il  faut  donc  que  no 
ftre  Seigneur  lefus  Chrift  ,  pour  faire  valoir 
auiourd'huy  en  nous  le  fruid  de  {a  mort  Se  re 
furrcftion  ,  nous  fice  participas  de  fon  fainit 
E/prit.  Voila  (en  fommc)  ce  que  nous  auons 
à  retenir  de  ce  partage.  Or  ccschofes  méri- 
tent bien  d'ellre  déduites  plus  au  long  :  mais 
quelque  fois  qujnd  on  prolonge  ainfi  les  pro 
pos,  onncfaitquc  les  obfcurcir.  Voila  poiir- 

qiioy 


SVR    L' EPIS  T.    A    TITE. 


tfi9 


quoy  i'ay  tafcbé  de  recueillir  en  brief  fom- 
inaire,afin  que  les  plu?  rudes  puifTent  en  trois 
mots  comprendre  où  c'elt  qu'ils  doiuent  cher 
cher  leur  falut,  Si  les  degrez  qu'ils  doiuent  te 
nir  :  qu'il  faut  (di-ie)  que  nous  cognoifsions 
que  Dieu  le  Père  bous  a  ei\é  pitoyable  :  & 
puis,que  nous  foyons  amenez  à  lefus  Chrii^: 
&  puis,  que  nous  cognoilsions  comment  c'elt 
que  nous  auons  laluten  leAis  Chrift  :  c'elt  a- 
fçauoir,  comme  il  a  accompli  tout  ce  qui  e- 
ftoit  requis  pour  noftre  falut,  que  maintenant 
il  nous  élargit  par  la  vertu  &  la  grâce  de  fon 
fainft  Efprit.  Or  faindt  Paul  adioufte  encores 
yuecr  tai*emtut  a  efié  efpandu  furnoH  s  en  tou- 
tes richeffes.  Comme  s'il  difoit  que  Dieu  n'a 
point  diftillé  goutte  à  goutte,comme  s'il  euft 
cité  chiche  enuers nous,  mais  iJs'cft  monilré 
ii  libéral,  que  nous  auons  bien  raifon  de  nous 
contenter.  Or  ceci  fert  àdouble  vlagc  :  l'vn, 
c'eft  afin  de  nous  inciter  tant  mieux  à  exal- 
tera magnifier  les  richefles  de  noftre  Dieu, 
comme  elles  le  méritent:  car  combien  que  no 
lire  Dieu  pourfuiue  enuerSTious  tant  &plus, 
il  nous  femble  que  ce  n'eft  quafi  rien  ,  nous 
fommes  là  comme  enferrez  ,  qu'au  lieu  que 
Bous  deurions  élargir  tous  nos  fens  ,  toutes 
nos  afFeûions  &  penfees  pourreceuoir  lagra 
cède  Dieu  qui  nous  eft  offerte,  nous  fommes 
(comme  i'ay  dit)enfortrllez  en  incrédulité  & 
en  ingratitude,  tellement  que  Dieu  ne  trouue 
point  ni  accès  en  nous,  ni  vne  telle  ouuerture 
qui  feroit  requife ,  afin  que  (es  grâces  foyent 
feceues  félon  leur  dignité.  Pour  celte  caufe 
iainft  Paul  parle  ici  de  l'abondance  que  nous 
auons  en  noftre  Seigneur  lefus  Chrift:quçû 
nous  comprenôs  bien  jamifericordc  de  Dieu 
félon  qu'elle  s'cft  làdefployce  ,  que  nous  an- 
TODS  &  de  long  ,  &  de  large  ,  pour  nous  rem- 
plir &  raflàlier  du  tout.  Et  en  fécond  lieu  ,  il 
BOUS  veut  aufsi  retirer  de  toutes  les  vaines 
confiances  efquelles  nous  vaguons  par  trop. 
Combien  y  en  a-il  qui  fe  repofent  du  tout  en 
lefus  Chrift?  Il  eft  vray  que  nous  ccnfelTe- 
rons  bien  qu'il  eft  noftre  Sauueur ,  que  c'eft 
par  luy  que  nous  fommes  réconciliez  à  Diea: 
mais  cependant  nous  cherchons  encores  d'au 
très  aides,&  ce  n'eft  iamais  fait ,  d'autant  que 
les  hommes  extrauaguent  ainfi,&  qu'ils  ne  fe 
peuuent  du  tout  arrêter  à  lefus  Chrift  ,  (<^- 
chans  que  toute  la  perfedion  de  leur  falut 
conlîfte  en  luy.  Sainâ  Paul  nous  déclare  ici, 
qu'il  faut  qu'il  y  ait  rne  ingratitude  trop  vi- 
Jeine ,  quand  nous  ne  fommes  point  rafïàlîez 
de  la  bonté  que  Dieu  nous  monftre  en  fon 
Filsvnjque.  Etpourquoy.?  Là  il  y  a  de  telles 
lichefles  qu'il  faut  bien  dire  que  nousfoyons 
jnfatiables  quand  nous  ae  pouuons  pas  nous 
y  tenir.  Voila  les  deux  raifons  pourquoy  S. 
Paul  a  mis  ce  mot  Richement.  Orilauoitdit 
que  Dieu  nous  a  fauuez  :  il  adioufte  puis  a- 
pres  ,  A/»  que  mm  fufsions  faits  héritiers  de 
U  -rie  éternelle  félon  efperance.  Il  nous  faut  ac- 
corder ces  deuit  propos.  Que  Dieu  nous  % 


fauuez:  &  puis  après.  Qu'il  veut  que  nous 
foyons  faits  héritiers  félon  l'efperancc.  Or 
ici  en  premier  lieu  ,  il  nouSa  monftré  que  du 
cofté  de  Dieu  ,  &de  noftre  Seigneur  lefus 
Chrift,  noftre  falut  eft  défia  parfait,  qu'il  n'y 
a  que  redire  :  mais  cependant  que  nous  ne  le 
pofledons  point  linon  par  efperance ,  nous 
n'en  auons  point  encores  l'effeô.  Voila  deux 
points  donc  qu'il  nous  faut  obferuer  :  l'vn 
c'eft,que  quand  nous  croyons  à  lefus  Chrift, 
défia  nous  fommes  palTezde  mort  à  vie  ,  ain- 
lî  qu'il  en  eft  parlé  au  ciaquieme  de  fainô 
lehan.  Et  ne  faut  point  que  nous  imaginions, 
comme  les  Papiftes,  que  lefus  Chrift  nous  ait 
ouuert  la  porte  de  falut ,  &  que  ce  foit  à  nous 
d'y  entrer,fi  nous  voulons:qu'il  a  commencé, 
&  que  c'eft  à  nous  d'accemplir.  Voila  des 
blafphemes  raefchans  &  exécrables  Mais  fça 
chons  quenoftre  falut  nous  eft  du  toutaccom 
pIi,voire  du  cofté  deDl..:.  Cependant  nous 
n'en  icuiflbns  pas  encores  :  car  il  nous  feut 
ici  batailler  en  cefte  vie  mortelle,  nous  fom- 
mes en  troubles  &  en  fafcheries  ,  il  femble 
mefmes  que  nous  foyons  enuironnez  de  mil- 
le morts ,  il  femble  que  nous  foyons  plongez 
au  gouffic  d'enfer.  Noftre  falut  donc  eft  ca- 
ché, (côme  il  eft  dit  au  huitième  chapitre  des 
Romains) mais  cepédïntnousnelaillons  pas 
d'eftre  héritiers  par  efperance  ,  c'eft  à  dire, 
que  nous  fommes  afleureï.combien  que  Dieu 
nous  exerce  ,  combien  que  nous  fentions  nos 
fragilitez  qui  nous  pourroyent  mettre  en  an- 
goilfe  &  en  doute,  fi  fommes-no'  refoins  que 
Dieu  ne  varie  point ,  &  quand  il  nous  a  eleus, 
9i  qu'il  nous  a  rendu  tefmoignage.  de  fon  ado 
ptioniU-oltie  efperance  que  noasanôs  en  liry^ 
nourrit  &cntEetient  cefte  certitude  de  foy:- 
&  en  cefte  attente-ia  deiîa  Pheritage  nous  eft 
apprefté,&  ne  refteraplus  finon  d'en  prendre 
poffefsion  quand  le  jour  fera  venu.  Mainte- 
nant donc  nous  voyons  quelle  eft  la  doclrine 
de  ce  paflàge.Or  il  refté  de  la  bien  prattiquerr 
&  toutes  fois  &  quantes  qu'on  nous  parle  de 
lamifcricordede  Dieu,  que  nous  fçachions 
que  toute  la  fiance.de  nos  mérites  eft  abba- 
tue,  &  par  confequent  toute  gloireaneantie, 
que  nousn'aués  pkis  dequoy  nous  prifer,d'aa 
tant  que  nous  n'apportons  rien  à  Dieu ,  mais 
que  nom  tenons  tout  de  hiy.  Cependant  co- 
gnoiflons  aufsi  que  nous  ne  pourries  pas  con» 
prendre  la  bonté  &  l'araour  de  noftre  Dieu, 
finon  qae  nous  en  eufsions  le  gage  en  noftre 
Seigneur  lefus  Chrift.  Etainfî  n'entrés  point 
en  hautes  fpeculations  &  profondes ,  quand 
nous  voudrons  eftre  affeurezde  noftre  falut. 
Comme  nous  voyons  beaucoup  de  phantafti- 
quesqui  ne  fe  corttéeeront  iamais, finon  qu'ils 
ayent  circui  le  ciel  Se  la  terrermais  adreffons 
nous  à  lefas  Chrift  :  car  Dieu  fupporte  noftre 
foibiefle  en  cela,  quâd  il  veut  que  nous  foyôs- 
du  tout  fonder  en  fon  Fils  vnique,  tellement 
qu'il  ne  faut  point  que  nousvfîons  de  long? 
«tifcours  pour  venir  à  noftre  Seigneur  lefus 

Ili.ii. 


fo. 


M4f.;i. 


<rio  SERM  ON'    XVI 

Chriftieârilefticfcenduicibasànout,  mef-  grâce  de  Ton  {i\n&  EfpritJÀinfî  donc,  que 
mes  ilâefté  mis  au  deflbus  de  tous  les  hora-  nous  prions  ce  bon  Dieu  qu'il  nous  mette 
mes.commeileftdîtau  Pfeaume  31,  qu'ila  e-  enpoflersion  de  ce  quM  nous  a  acquis  parla 
Ré  l'opprobre  du  monde  ,  qu'il  a  cfté  defnué  mart  &:  refurreftion  de  noftre  Seigneur  lelus 
comme  vn  ver  de  terre.  Apres,  il  eft  du  parle  Chriftlon  Fils  ,  que  les  donsdufainû  Efpric 
.  Propketc  Ifaie,  qu'ila  cftédeslîguré  comme  foyentefpandusfur  noos.Et  coment?£n  pre- 
vn  ladre  .  Et  pourquoyî  Afin  que  nous 'puif-  mier  lieu,  que  nous  foyont  illuminez  en  foy, 
fions  embrafler  la  grâce  qu'il  nous  offre  .  Et  pour  auoir  cognoiflànce  que  Dieu  eft  noftre 
comment  a-il  efté  ainli  aneanti?Or  ùind  Paul  Père,  &  pour  nous  certifier  de  ù  bonté.  Puis 
vfe  aufsi  biendeccmotaux  Philippiens.Tous  après ,  que  nous  ayons  l'efprit  de  crainte  de 
lesioorsilneceflèdenousconuier  à  foy.voi-  Dieu, pour  renoncera  nos  mefchantcs  cupidi 
re  tant  priuémenc ,  &  d'vne  telle  douceur  &  tez  8c  afFeâions ,  pour  nous  dédier  au  feruice 
humanité  que  rien  plus.  Car  par  fon  Euangile  de  celuy  qui  doit  dominer  ùirnous  :  que  nous 
ilnenous  commande  point  que  nous  venions,  ayons  efpritde  vertu  &  confiance  pour  batail 
mais  il  nous  exhorte,  &  nous  prie,  comme  1er  contre  tous  les  alTauts  que  Satan  nous  fe- 
faind  Paul  en  parle  en  la  féconde  des  Corin-  ra  ,  &  pour  refifter  à  toutes  tentations  :  que 
thiens.Puis  donc  que  noftre  Seigneur  lefus  nousayonsefpritde  prudence  pour  nous  gar- 
Chriû  nous  eft  tant  amiable  ,  &  que  tous  les  der  des  rufes  &  cauteles  de  noftre  ennemi, 
iourscemeflàge  nous  eftapporté,qu'ilnede-  Voila  donc  oii  il  nousfaut  venir,  afin  que  la 
mande  que  de  nous  tenir  pour  membres  de  fon  mort  &  pafsiô  de  noftre  Seigneur  lefusChrift 
corp5,&quecefte  fentencedoit  refonner  touf  profite  en  nous ,  afin  que  fa  rcfurretliony  aie 
iours  en  nos  aureilles.  Venez  à  moy  vous  tous  fa  vertu  &  fon  effed.  Or  cependant  cognoif- 
qui  trauaillez ,  &  qui  eftes  chargez ,  &  ie  vous  fons  que  cet  chofes  nous  font  teftifiees  au  Ba- 
foulageray,&  vous  trouuerez  repos  à  vos  a-  ptefmc:&ainfi  quand  nous  fentirons  que  nous 
nies  :  puis  qu'ainfi  eft  donc ,  ne  nous  efgarons  fommes  vuides  des  grâces  du  fainâ  Efprit,ne 
point  à  noftre  efcient,  mais  que  lefus  Clirift  doutons  point  qu'elles  ne  nous  foyent  appor- 
foit  noftre  but.car  nous  ne  pourrons  faillir  en  tees  quâd  nous  les  requerrons.  Et  pourquoy? 
venant  a  luy  .  Etaureftc,  quand  nous  aurons  Dieu  ne  nous  a  point  frullrez  quand  il  nous  x 
eognu  que  c'eft  par  fon  moyen  que  nousfam-  ordonné  lefîgneduBaptefme:  car  là  nous  a- 
mes  reconciliez  à  Dieu  le  Père ,  que  nous  a-  uons  comme  vne  arre  qu'il  n'cft  point  chiche 
uons  pleine  iuftice,  que  nous   cognoifsions  enuers  nous, qu'il  n'cfpande  krgement(voire 
aufsi  que  par  fon  fainû  Efprit  il  nous  diftri-  félon  qu'il  cognoiftra  nous  eftre  vtile)de  tou- 
bue  tout  cela. Le  premier  eft,de  nous  conten-  tes  les  gracesqui  nous  défaillent, &  defquelles 
ter  de  lefusChrift,alîn  que  nous  n'adiouftions  nous  fommes  deftituez  .  Sentons-nous  donc 
rien  qui  foit  à  la  grâce  qu'il  nous  a  apportée:  qu  il  y  a  faute  de  vertu  en  nousî'Cognoiflbns-. 
que  nous  ne  facions  point  comme  les  Papifter,  nous  qu'il  y  ait  des  ténèbres  d'ignorance?que 
quand  ils  auront  confefle  que  lefus  Chrift  eft  nous  foyons  cnueloppez  en  ce  monde  telle- 
leur  Moyenncur,ils  iront  chercher  les  fainds  ment  que  nous  ne  puiAions  pas  comprendre 
&  les  fainèles  pour  leur»  patrons  &aduocats,  les  chofes  fpirituelles?  Recourons  à  Dieu  ,8c 
ils  prendront  les  mérites  des  Apoftres  Se  des  que  noftre  Baptefme  nous  y   conduife  :  car 
Martyrs,  &  leur  femble  que  la  fatisfaftion  de  (comme  i'ay  dit  )  noftre  Seigneur  nous  a  là 
noftre  Seigneur  lefus  Chrift  n'eft  rien,  finon  déclaré  qu'il  ne  veut  point  nous  défaillir  en 
qu'ils  y  adiouftent  pièces  Se  morceaux. Et  puis  rien  qui  foit,  moyennant  que  nous  ayons  no- 
il  leur  femble  que  leurs  mérites  aufsi  feront  ftre  refuge  à  luy. Mais  cependant  notons  d'au 
vn  tripotage, ils  ne  fe  contétent  point  de  ccfte  tre  coftc  ,  que  ce  ne  iera  rien  d'auoir  receu  le 
nourriture  parfaite  qui  leur  eft  donnée  pour  Baptefme.  Qu?"'!  "ous  aurons  eu  lefignevifi 
leurs  aines  au  Fils  de  Dieu,  mais  ils  adiouftent  ble,  dequoy  nous  feruira-il  quedeplus  gran- 
leurs  laupicquets  qu'Us  ont  inuentez  à  leur  po  de  'condamnation  ,  fi  ce  n'eft  que  nous  ayons 
tte&àleur  phancafie.Ordenoftrecofté,ad-  aufsi  l'efFefti'  Etcelaaiifsi  nous  fera  imputé: 
uifons  d'eftre  pleinement  raflafiez  de  ces  ri-  fi  nous  y  trouuons  aucune  faute ,  il  nous  faut 
chelTes  de  la  bonté  de  Dieu  qu'il  nous  a  def-  condamner  noftre  incrédulité  mieux  que  nous 


ployees  en  la  perfonnede  fon  Fils. Cependant 
(comme  i'ay  touché)  que  nous  fçachions  que 
lefus  Chrift  ne  nous  communique  point  tts 
grâces,  finon  qu'il  nous  ait  fait  participans  de 
fon  faind  Efprit .  Que  profitcra-il  donc  que 


nefaifons.Et  maintenant  fainû  Paulattribuc 
la  vertu  de  noftre  renouHellement&  régéné- 
ration ,  à  ce  lauement  dortt  il  parle  :  voire  ,  Si 
s'addreffèaux  fidèles ,  lesquels  ne  repouffcnt 

^  point  les  grâces  de  Dieu.maisouurent  la  bou- 

noftre  Seigneur  lelus  Chrift  aitelpandu  (on     cheafin  qu'il  la  remplifle:felonaul"si  que  nous 

fang,  finon  que  nous  en  foyons  arroufez  par    en  fommes  exhortez  au  PIcaume.Et  ainfi  no-  Vfe.Si.u 

le  iaind  Efprit  ?  Car  voila  aufsi  comme  faind     tons  bien  que  les  incrédules  fontcommevn 

i.P«C4.  Pierre  en  parle  en  ù  première  Canonique,     pot  fermé:  Dieu  eipandra  fes  grâces, mais  ils 

I.  Q^e  nous  profite-il  que  lefus  Chrift  ait  abo-    ne  les  reçoyuent  point:  car  lis  font  telle- 

Ji  le  peché,&  la  tyrannie  de  mort ,  eftant  cru-    ment  bouobez, qu'il  n'y  a  nulle  entrée  en  eux: 

cifié,  iînon  que  nous  foyons  recueillis  par  la     ou  bien  Us  font  durs  comme  rochiers  .•  Il 

poHua 


SVR    L*  EPIS  T.   A  TITE. 


pourra  plouuoir  yn  tel  iour ,  mais  vn  rochier 

ne  fera  point  mouillé  dedans ,  car  ilefttrop 

dur  .-.ainli  en  eft-ilde  tous  ceux  qui  refufent 

les  grâces  de  Dieiirmais  li  nous  auons  la  bou- 
che ouuerte  par  foy, nous  ferons  rafTalîez.  Et 

pourtant  ce  n'eft  point  ûnscaufe  que  (ainft 

Paul  adreflànt  fon  propos  aux  fidèles, dit  que 

Dieu  a  efpandu  ("ut  eux  ce  lauement  fpiritue), 

&  qu'ils  en  ibnt  faits  par  ticipans.  Voila  com- 

tneil  nous  faut  prattiqncrla  doftrine  qui  eft 

ici  contenue. Or  venons  maintenant  à  ce  der- 
nier mot ,  où  ileftdit,  Cl»f  mus  fommts  fau' 

ue*.:  voire, mais c'tlld'autantque  nousfom- 

tncs  héritiers  par  efperance.  Saind  Paul  mon 

ftrefur  quoy  noflrelalut  eft  fondé,&en  quoy 

il  confifte  i  c'eft  afçauoir ,  d'autant  que  nous 

fommes  héritiers  de  Dieu.  Car  noftre  falut 

n'eft  pas  no ftre,  à  parler  proprement,  fînon 

en  titre  d'hcritage.Or  nous  ne  fommes  point  déclare  en  ce  partage:  c'éft  afçauoir  que  nous 
héritiers  de  nature,  c'eii  par  adoption,  d'ju-  fommes  faits  héritiers  par  efperance.  Voila 
tant  qu'il  piailla  Dieu  de  nous  receuoirpour  (di-ie)comme  il  nous  faut  nourrir  en  lacer 
fesenfanstcar  nous  naiflons  enfans d'ire, c'eft 
â  dire ,  que  nous  fommes  maudits  ,  &  que  tant 
s'en  faut  que  nous  puifsions  réclamer  Dieu 
pour  noftre  Père  ,  que  nous  fommes  reiettez 
deiuy.Mais  cependant  fi  ne  lailTe-il  point  de 
nous  adopter.  Et  comment?  Sainft  Paul  nous 
renuoye  à  noftre  Seigneur  Iefu«  Chrift  ,  le- 
quel non  fans  caufe  eft  appelé  Fils  vniquede 
Dieu.  Car  i)  citvnique  ,  voire  de  nature  :  ce 
titre-la  luy  appartientdedroid  :  mais  entant 
que  nous  fommes  entei  en  fon  corps, &  fom- 
mes fes  membres,  nous  fommes  adoptez  auf- 
fi.C'eft  dont  nous  procède  l'héritage  du  roy- 
aume des  cieux. Sommes-nous  heritiers.'Nous 
fommes  fauuez  :  mais  notons  que  c'eft  par 


fez  quant  5  nous  ,  &  que  nos. lîFcftioni  ne  do- 
minent plus ,  mais  que  Dieu  foit  le  maiftre. 
Ainfîpuis  que  Dieu  no*  veut  e.xerccr  en  teJJe 
forte  tout  le  courydenoftré  viê.apprenôs  de 
recourir  à  et  qui  eftdit  d'cfperance.Et  pour- 
quoy?  Car  quand  on  nous  dira  que  nous  fom- 
mes fauuez,  cependant  nous  verrons  que  Je 
diable  ne  cefle  de  pourchafler  noftre  ruine,& 
qu'il  en  a  les  moyens  ,  finon  que  nous  foyoni 
prcferuez  par  la  vertu  admirable  de  noftre 
Dit  u.  D'autre  cofté,  nous  voyons  les  miferei 
qui  nou  :  circuiffent ,  que  noftre  vie  eft  fi  po- 
ure.queles  incrédules  en  ont  meilleur  mar- 
ché aue  nous,  que  leur  condition  femble  eftre 
plus  heureule  que  celle  des  enfans  de  Dieu: 
nous  verrons  toutes  ces  chofes.  Etainfî.ce  le 
roit  pour  nous  rendre  confus  .finon  que  nous 
fufsions  aduertis  de  ce  que  fainû  Paul  nous 


titnde  de  noftre  lalut.c'eft  que  fi  en  ce  monde 
nous  fommes  mocquez  des  incrédules ,  qu'ils 
nous  facent  mille  opprobres  &  violences, que 
nous  ne  laifsionspas  touresfois  d'eftre  afièu 
rez  que  nous  fommes  agréables  à  noftre  Dieu 
Et  puis, combien  que  noftre  vie  foit  cachée,  & 
qu'il  femble  que  nous  foyons  appreftez  à  rui- 
ne.que  nous  foyons  comme  des  moutons  qui 
font  amenez  à  laboucherieCfelon  qu'il  en  eft 
parlé  au  hiiifUemedes  Romains)  que  nous 
foyons  comme  foulez  au  pied  ,  que  nous  l'oy- 
ons reiettez  du  monde  ,  qu'on  fe  mocque  de 
nous ,  que  cela  n'empefché  point  que  nous  nfe 
apprrhendions  par  foy  ceft  héritage  qui  nou» 
cftallêuréau  ciel  ,&que  nous  concluyons  là 


efperance.   Et  il  faut  bien  que  nous  foyons    deiru$,combicn  qu'il  femble  que  nous  foyons 


aduertis  de  ceci  :  car  Dieu  ne  veut  point  que 
nous  foyons  oififs  en  ce  monde.  Combien 
qu'en  la  perfonne  de  fon  Fils  liait  accompli 
noftre -falut,  fi  eft-ce  neantmoins  qu'il  nous 
y  veut  conduire  par  l'ordre  qu'il  a  eftabli: 
c'eft  que  quand  nous  aurons  receu  le  ttfmoi- 
gnagede  fa  bonté  .  que  nous  aurpns  accepté 
ce  qu'il  nous  offre  en  Ton  Euangile,  c'eft  que 
nous  foyons  iuftifiez  par  fa  pure  grâce  ,  qu'il 
nous  exerce  en  combat  contre  S.itan  :&que 
cela  ne  foit  point  feulemét  pour  vn  iour, mais 
que  nous  pourfuiuions  tout  le  temps  de  no- 
Krevie  les  combats  aufquels  Dieù  nous  vou- 
dra employer.  Et  puis,  que nour  bataillions 
pour  renoncer  à  toutej  nos  affections,  à  tou- 
tes^nos  cupiditez  &  defits.irtiefmes  à.  toute 


perdus, que  nous  ne  laifTerôs  pas  d'eftre  touf- 
iours  fauuez.  Etpourquoy?  Car  noftre  falut 
eft  en  bonne  main  &  feure.Dieu  en  eft  le  gar- 
dien. Et  voire  ,  mais  nous  fommes  aflàiUis  de 
tous  cofttz.Tant  y  a  que  nous  ne  ft  r5s  point 
en  proye  à  Satan, quand  Dieu  le  Père  defplo- 
yera  fa^vertu  pour  nous  maintenir.  Et  puis> 
que  noftre  Seigneur  lefusChriftexercera  fori ,  t  ,.  ■ 
orhce  ,  d  autant  qu  il  nops  a  prins  en  charge. 
Et  nous  fçauons  qu'il  a  dit  qu'il  ne  laiflcrl 
rien  périr  de  tout  ce  qui  luy  a  efté  donné  -,  & 
que  fclon  que  Dieu  eft  toiu-puiflàiit,qu'aufsi 
iiofti^é  falut  eft  exempte  de  tous  dangers.  Voi 
la  en  quoy  il  nous  faut  côfolerjVpiU-enqttçjy 
nous  pouuons  dcfpiter,  &  Satan,  &  le  monde, 
K  tojites  les  téntattoris  ';dont  <ious  (erons  af- 


noftre  prudence.  Car  c'eft  làprincipalement    faillisibrief,  nous  pouuôsdefîa  nous  glorifier 
'cn  quoy  Dieu  vent  efprouutr  noflréobeiri-    de  la  vie  éternelle,  combien  qu'il  femble  que 


iance  .c'eft  que  nous  mettions  fous  le  pied  ce 
qui  nous  femble  bon,  &que  nous  ne  foyons 
point  fages  ànoftrcpliantafie  :  m^is  àucop- 
traire  ,  que  nous  demandions  de  nous  afluiet- 
tir  pleinement  à  luy:  que  là  où  nos  appetis 


nous  foyons  défia  non  reiilimcnt  fur  le  bord 
de  la  foue.mais  que  nous  fovons  prefts  à  trc- 
bufcliçriA  qu'à  chacune  minfit^de  temps  la 
mort  noils  menace. Or  notons  aufsi  que  fain£l 
Paul  en  parlaôtide  la  ^lie  etérneUei'noùs  veut 


nous  pooflèqt  çà  ic  là  ,  nous  ayons  vnebride     retirer, de  ce  moindeiauqijej  npiis  fommes  par 
pour  hoUVicapti'uer ,  &  qu'en  defpit  dé'- rtoj  ^  l^§^  sd 


«Icou  nous  foyôt  là  comme  morts  &  trefpaf- 


adjorniez-.  -H'ri'y-  i  celuy..qlii  n'.-ippcte  de 
Yiure  &  d'eftre:  mais  nous  ne  fçauons  choifir 

Ili.iii. 


fil  SE  R  M  ON    X  Vil. 

la  vraye  yic.ain'J.nou';  embraffons  l'ombrage,  que  l'efperance  n'tft  point  vne  chore  morte, 

corne  h  on  vouloit  mordre  la  lune  aux  dents,  que  ce  n'elt  point   quelque  phantafie  légère 

a.inlî  qu'on  dit.  Ce  feul  mot  de  viure,  nous  ra-  que  nous  conceuons ,  mais  que  c'eft  vne  telle 

uiia.  après  foy.inais  cependantnous  n'embr.if  atfeâion  du  laipû  Efprit ,  que  combien  que 

fous  que  rombre:car  chacun  s'attache  àcefle  nous  loyons  enuironncz  de  ce  corps  corrvr- 

vie  caduque  ,  &:  ce  monde  nous  tient  enuelop-  ptible ,  combien  que  nous  lentions  vn  tardeau 

pczeufoy  ,&  cependant  nous  merprifons  la  lîpefant  qu'il  ferable  que  nous  dcuons  eftre 

vie  permanente  à  laquelle  Dieu  nous  appelle,  engloutis  aux  abylmes  ,  combien  que  nous 

&.  laquelle  nous  a  elle  acquife  par  noflre  Sei-  ayons  la  veue  fi  courte  ^  fi  oblcure  que c'eft 

gnear  lefus  Chriû.Et  ainli  rttenôs  qu'il  nous  pitié, &  que  toutes  nos  venus  défaillent ,  tou- 

liiit  f alTer  par  ce  monde, &  que  fainft  Paul  tcsfois  que  Dieu  à  l'oppofite  befbngneparJa 

nous  donne  ici  comme  des  coups  d'efperon,  vertu  de  ion  fainct  Elprit.afin  que  nous  foyôs 

afin  d.e  nous  Soliciter  àcerchcr  la  viecelefle,  toufîours  eleuez  en  haut ,  &  que  nous  mar- 

^jious  faire  courir  par  ce  monde  çellement  chions  plus  outre  ,  &:.  tjue  nous  afpirions  à 

oue  nous  neioyons  retenus  pour  rien  qui  l'oit,  cefl  héritage  qui  nous  eft  aj)pfefté,ne  douuns 

Et  d'autaiu  que  nous  femmes  par  trop  dcbi-  point  que  nous  n'y  pariienionsipourcequç  no 

lis,&:  que  nos  fens  ne  peuuent  monter  fi  haut,  ftre  Seigneur  lefus  Chrift  appvoiftra  alors.fc 

que  to'jlîcî'.ss  nous  ayons  noftreaddrefleàno  que  cefte  vie  qui  nous  eitmaiutenact  cachée* 

lire  Seigneur  lefus  Cnr;ft-.&  toutes  fois  &  nous  fera  reuelee.     ..«vi       ■. 

fiumtesque  ijous  cognoiffons  comme IcF'ls         OR  nous-nous  profternerons  deuant  la 

e  Dieu  eil  defcei^lil  ici  bas,&:  puis  après,  que  face  de  nqftre  bon  Pieuen  çognoiflance  de 

ijnousa  receus  eu  fi  gloire,  voire  que  Dieu  a  nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
ordôné  vue  primauté  de  ft^s  Anges  auec  nous,     fentir  ,  &•  que  journellement   \l  corrige  les 

que  nous  fçac  liions  (Combien  que  nous  habi-  raaux§:vices  qui  font  en  nous ,  en  forte  que 
ticms  en  ce  monde  ,  toutesfois  que  nous  n'y  nous  ne  demandions  finon  de  nous  régler  à 
fomniesoue  pèlerins,  &  cependant  <^ue  nous  fes  fainâ$comiuandemens,&  que  nous  y  pro- 
ue laiflons  pas  d'eftre  citoyens  des cieux  ,&  fitionsde  plus  en  plus,iufques  à  tant  qu''il 
que  l'efperance  nous  mené  iufques  là. Et  c'eft  nous  ait  defpouillez  de  tous  nos  vices  &  ira- 
à  .cefte  caufe  qu'en  l'autre  paflagc  il  dit  que  perfeûions ,  pour  nous  reueftir  de  fa  iuflice. 
BOUS  famraes défia afsis  aux  lieux  celcftes.  Et  Ainfi  nous  dirons  tous,  Dieu  touc-puilTant, 
cemment?  Par  efperance.Ainfi, donc  notons    Père  celefte.&c. 


Qjr  A  T  R  I  E  M  E     s  E  R  M  O  N      S  V  R     LE 

T  R  O  I  s  I  E  M  É    C  H  A  P  I  T  R  E. 

8  'C'ej}  psroïe  certaine:  (^  ie  yeux  que  tu  ajfcrmcs  de  ces  chojéî, 
afin  (pie  ceux  qui  ont  crcud  Dieu,ayentfoindeprejidera  bonnet  œu- 
uresices  chofes  font  honnes  ^  \td£S  auxhommes.  •■  : 

9  Maisreictte  les  folles  queîlions ,  CT  généalogies  ,1^'  coWèn- 
tions  O'  débats  de  la  Loy,car  elles  font  inutiles  ^  -vaines. 

10  Rxiettc  ïhomme  hérétique  j  après  la  première  ^  féconde  ad- 
moniùom: 

[[']]'%  ^^-^çachant que  cclujcpùejlteUefl  ruiné,  C'cpi  il  pèche  eslant 
co»dminépar]^y-'mefmé.  "''P"'^^  .■n.M...M/.  ':»b 

-■;  jaa  Quand  hcnmyerayyeritoyJ\rtenuts,ou  lychiquc,duigeti^ 
te-  toy  devenir  vers  moj  a  l!>licopolif:f Mi' ay  dclibcrc  de  faire  îà  mort 
huer.  '        y'IT;   ^^^''-r  -t 

;!  .^j-  GtmuoyefongneHfnki^2.encé)UeurdeîdLoy.,^'ApoUofy 
^uerieniteleurdefamei-',  .-uii.t'i   r.,jq.,K  «.-i  u,  ■.;  m,,.  .  vu-' ..  ifort.'Mi';<jiii 


s  V  R    L'  E  P  I  S  T.    A   T  T  T  E.  ^^3 

»rf  /  potfr  les  ^figcs  nccejfaires,afin  qu'ils  ne  foycnt  point  fins fruicî. 

15.    Tous  ceux  qui  font  auec  ynoytejalucnt.  Salueccux  qui  nous 
.  ainièfit en foy. Grâce  ion duecyoHS  tous.    Amen. 


Oii'i  aiiuns  veii  pîrci  deuain 
)i.i  il(Klrme  eo  laquelle  (iwà. 
iP.uilcoaiin.iiidoit  à  Titede 
fs^jccourtumv-r  .  Il  adioiifte 
ipour  c^kIuIîoh  ,  que  c'eft  à 
^€el4<ju'iUedoit  empefclier, 
,.  .      &  qu'il  hWE  qu'il  laifle  les 

.  diofe»:  ûiperflucs,-&  qui  ne  peuuét  édifier  !'£- 
..glifedeDicu.  Cependaiu  iirexliorteâufsi  de 
..^arler.entelle  aiithoritf  devichofes  qui  font 
'  dtoites,que  Iës  auditeurs  ne  (bycnt  point  laif- 
lez  en  doute,  mais  qu'ih  ayent  vne  pleine  cer 
titude.Orcependantdercchef tl  Taduertit de 
re  fe  point  occuper  à  folles  qucflions ,  &  à 
débats  inutiles,  qui  ne  peuuent  apporter  au- 
cun profit.  Et  d'autant  que  ceux  qui  deman- 
dent à  troubler  PEglifç  .voudroyentauoîr  le 
dernier  mot  ,&  taire  li  delTiis  leurs  triom- 
phes, &que  par  ce  moyen  \U  pourroyent  in- 
.  duire  les  feruiteurs  de  D:ea  à  tenir  pied  à  bon 
le  (comme  ondit  )raind  Paul  déclare  q  l'il 
les  faut  laifler  pour  tels  qu'il--  font.  Que  tel- 
les canaille5(dit-il)n'occupent  point  les  fer- 
uiteurs de  Dieu.  Car  que  profitera-on  quâfid 
on  voit  que  ce  font  gen--  eifrontez  ,  qui  por- 
tent leur  condamnation  en  leurs  ctriirs  ?  On 
ne  les  peut  gagner  ,c'eft  temps  perdu  :  carie 
diable  les  poflede  ,  &  ils  méritent  d'eftre  mis 
en  fensreproiiué  ,  puis  qu'ils  bataillent  ainiî 
contre  Dieu,  &  le  defpitent  par  certaine  ma- 
lice. Là  delTus  il  exhorte  encores  ceux  de 
Crete,de  bienfaire.  Et  en  cela  voyons-nous 
qu'il  y  auoit  grande  nonchalance  ,  puis  que  <î 
gran-,  dodeurs  trauailloyent  après  ,  &  que 
neantmoins  on  ne  voyoit  nul  etfeftenleur 
vie  ,  &  fembloit  que  iamais  n'eufl'ent  ouy  vn 
feul  mot  de  l'Euangile.Pour  ccfte  caufe  fainrt 
Paul  dit  ,  qu'ils  .apprenentde  s'employer  en 
/orte  qu'on  cognoiiîê  qu'ils  ont  profité  en 
.l'efchole  de  Dieu.  Voila  en  fommece  qui  eft 
ici  contenu.  Or  deduifons  maintenant  chacun 
ne  partie  en  fon  ordre. Vo/n"  (i]i-\l)Mne p.irole 
eeri.tine  :  û"  "  "veux  que  tu  affermes  de  ces 
thofes.  Quand  il  dit  que  cefte  parole  eft  cer- 
taine, c'efta.utât  comme  s'il  aducrtifloit  tous 
JS.Jiaiftres  de  l'Euangilcien  la  perfonne  de 
Tite.qu'rl  ne  faut  point;, qu'iK-'propofent  en 
_PEglife  chofes  e)(trai.iagantes,  &  du  il  n'y  an 
jioint  d'appuy:  mais  qu  ilsdoyuçiit  enfeigner 
jci;  qui  eft  bien  approuué  ,;afin  que  lesenfans 
de  Dieu  foyent  édifiez.^  qu'ils  ayent  vne  foy 
infaillible  ,  &  non  point  vnA  opinion  vol.ige. 
Or  çiaintenant  regardons  4e  quoy  il  parle: 
fp  p'eft  .p<:)int-d£,  fpeçiiUtJons  flniji'ayent 
iÇPii^f  fiCra.^ignage,  en  j'iJE/cfjtnEèi:  Uinaevtoiis 
.Ç!e<;e .qui  appartient-  à noftceifeJ'Ui- .'£««?eft 


tons  que  Dieuiie  nous  a  point  porté  enuic-.en 
nous  cachantce  qu'il  n'a  pointdecl.iré  eu  TE 
fcriture  famcVe  :  mais  il  achoi(i  cequinous 
eftoit  bon  &vtile.  Et  en  cela  voyons-nous 
quelle  folie  c'eft  à  be.uicoup  de  gens  qui  fa 
tatchcnt  quand  ils  ne  tAouueiu  point  en  P£- 
{cnture  tout  ce  qui  leur  vient  au  ceriic-au  :  Et 
pourquoy  eft-ce  que  Dieii  n'a  parlé  de  ceci? 
poarquoy  eft-ce  que  cela  n'eft  deciaréf'pour- 
quoy  eft-ce  qu'v ne  telle  queftion  n'eft  rufo- 
lue?  Voire  ,  mats  Dieu  nous  a  déclaré  ce  qu'il 
fçauoitnous  élire  propre  !  contentons-nous 
d'efcouter  ce  qu'il  nous  dit ,  Se  nous  tromie- 
rons  que  rien  ne  nous  defaudra.  M.iis  ci  pen- 
dant.que  Dieu  complaife  à  nos  fols  :ipperis,& 
félon  que  nous  auons  les  aureilles  frétillan- 
tes, qu'il  nousviene  remplir  devent,  &  que 
ferort-ce  ?  Etaufsien  quelle  rewerence  Kipo- 
role  de  Dieu  feroit-elle  tenue,  fi  elle  feruoit 
ainfi  à  nos  folles  cupiditez  ?  M.iis  quand  noo'j 
voyoïvs  que  c'eft  la  dodtnne  de  noftrc  tâlur, 
&  qu'au fsi  nous  voyons  que  c'eft  vne  chufc  li 
facree  &  fi  lainrte  ,  que  nous  apprenions  de  la 
tr.^irtercS:  lareceiioir  en  telle  crainte  5:  hu- 
milité comme  ii  Ijuti  Etainfi  notons  quand 
fainft  Paul  dit  ici ,  parole  certaÎHe  ,  ou'il  nous 
veut  retenir  en  nos  bornes ,  afin  que  nous  ne^ 
vaguions  point  comme  nous  auons  de  couftu- 
me  pour  nous  enquérir  de  ce  que  Die»  ne 
a  point  déclaré ,  mais  tenons-nous  éii  cefte 
certitude. Et  au  rciîc%cependant  il  nous  aduer 
titaufsique  nous  ne  deuons  point  auoir  vne 
audace  de  rien  approuuer  ,  finon  qu'il  nous 
foitcognu.  Or  comment  fera-ce  ?  Il  ne  taut 
point  que  les  hommes  apportent  ici  leurfens 
pour  iuger  comme  bon  leur  feniblera  :  mais 
commençons  parce  bout  ,  d'eftre  cnfeignez 
par  la  bouche  de  noftre  Dieu:  autrement  nor 
itre  témérité  fera  ridiculcen  la  fin.  H  eftvray 
<juepoUr  vn  temps  nous  pourrons  t-ftre  pri- 
fez  :  comme  nous  voyons  que  ces  glorieux 
fçauent  eftendre  leurs  plumes  comme  des 
paons:  mais  en  Ja  fin  Dieu  ie  mocque  de  leur 
prcfomption.  Ainfi  nous  en  aduiendra-il  ,  fi 
nousvoulons  plus  fçauoir  qu'il  ne  Cious  eft  li- 
cite, ou  bien  affermer  Jece  q.ii  nous  eftin- 
cognu:mais.que  notis  ayons  bon  tcfinoignagè 
pourlçauoir  ce  qui  noîis  eft  vtile.  Etcepen- 
d.iùt ,  anons-nous  certitude  de  l'Efcriture 
fainftejQue  no'  n'enqOc'riSs  plus  pourquoy, 
ne  comment:  qu'il  nousfuffife  que  Dieu  a  par 
lé. Car  nous  voyons  où  on  eneftainourd^huyî 
D'aucuns outrecuidez,  pour  faire  des  fnbtils,' 
répliqueront  à  l'encontre  de  Dieu  ,:  livi\h 
chofeJeur  eft  obfciir«  oifdifficile-.  Et  cotri- 
mônt-celi?  ie  wé'l^  pHi<cion>prcn<li'é."Ç^MrTci 

Ui.iiiu 


614 


SERMON    XVII. 


fi  eft-ce  •qu'ils  Ont  pâffc  iiicfure  ,  de  fe  rebec- 

<juer  ainfi  contre  ce  que  Dieu  aura  prononce. 
Mais  nous  verrons  des  beftes  qui  voudront 
cftrc  reputez  clercs  par  vne  telle  rébellion. 
Ho  voila  ,  il  me  femble  que  c'eft  vne  chofc 
trop  dure  i  digercr.que  de  dire  que  Dieu  fau- 
ue  ceux  que  bon  luy  femble, &  qu'il  reprouue 
aufsiceux  qu'il  luy  plaift:  &  puis.qu'ildifpo- 
fede  toutes  choies  en  ce  monde  félon  fa  vo- 
lonté ,  &  que  fa  volonté  en  foitla  reigle  ,& 
que  nous  ne  fçachions  point  la  raifon  quand 
il  veut  le  faire  ainlî.Et  bien, fi  cela  eft  trop  ob 
fcur,apprende  t'humilier,&  apprcnen  paticn 
ce  iufques  à  ce  que  Dieu  t'ait  fait  profiter.Or 
I  Cof»»  *^^  "°''^''^^oft^'*PP''^'>o"s  que  cependant  que 
nous  fommes  en  ce  monde, nou^  voyons  com 
me  en  obfcurité, (ainfi  que  faind  Paul  en  par 
le)  &  en  auons  quelque  petit  goud,  mais  nous 
n'auons  point  vne  pleine  perfedion  niaccom 
plie  ,  iufques  à  ce  que  nous  foyons  transfigu- 
rez en  la  gloire  de  Dieu ,  pour  le  veoir  tel 
qu'il  cft.face  à  face:  cependant  cheminons  fé- 
lon noftre  petite  mcfure.  Mais  ces  beliflres 
ne  fe  contentent  point  de  cela  ,  &  voudront 
(comme  i'ay  dit)faire  des  grans  clercs  en  di- 
fputant  contre  Die u.Or  fainâ  Paul  nous  bri- 
de ,  en  difant  que  quand  nous  auons  tefmoi- 
gnage  de  la  vérité  de  Dieu,  qu'il  nous  la  faut 
fuiure,  &  yâcquiefcerdu  tout.  £t  cependant 
il  veut  auisi  que  les  Miniftres  en  afferment, 
qu'ils  n'en  parlent  point  à  demi  bouche,  mais 
qu'ils  ticnent  bon  ,  quelque  murmure  qu'il  y 
ait  :  combien  que  le  m^nde  s'eleue  à  l'encon- 
tre,  &  qu'il  tafchaft  d'empefcher  que  la  liber 
té  de  l'Euangile  n'eufl  fon  cours.qu'ils  defpi- 
tent  tous  ces  diables  qui  fe  drelleront  ajnfi 
contre  Dieu  ,  quelque  grandeur  ou  bautelTe 
qu'il  y  ait ,  &  que  ceut  qui  ont  la  charge  de 
nous  enfeigner  ,  prononcent  ce  qui  nous  eft 
certain  &  refolu.S:  qu'en  defpitde  tout  le  mô 
de,&de  tous  les  diables.  Dieu  déclare  ce  qui 
eft  vray,(5i:  qu'il  ne  foit  point  empefché.quoy 
qu'il  en  foit,  que  tuufiours  celte  doftrine  iii- 
fallible  ne  fe  monftrc, voire  &  qu'elle  ne  foit 
liquide  iufques  au  bout:&  qu'ils  ne  fe  rangent 
point  à  l'appétit  des  hommes,  quand  ils  vou- 
dront ployer  çà  &  làiqu'ils  nefc  deftournent 
point  pour  cela  de  la  vérité. C'eit  ce  que  nous 
auons  à  retenir  de  ce  paflage.En  fomme.ceut 
quidoyuent  anoncer  la  parole  de  Dieu  ,  font 
ici  en  feignez  de  ne  rien  mettre  en  auant,  que 
ils  ne  puilTent  protefter  que  c'cft  Dieu  qui 
parle.  Et  d'autre  cofté  ,  ils  font  aufsi  retenus 
en  telle  modeftie,  qu'ils  ne  fedoyuent  point 
araufer  à  ce  qui  eft  friuqle.Et  pourquoyï  Car 
Dieu  aufsi  ne  leur  a  point  reuelé  :  il  fçait  ce 
qui  nous  eft  propre  pour  noftre  falut.  Et  en 
gênerai, tous  fidèles  aufsi  doyuent  cftre  aduer 
tis  de  ne  point  appeter  de  fçauoir  ce  que  no' 
ftre  Seigneur  nous  a  caché^car  nous  ne  ferons 
que  nous  embroiiiller ,  quand  noiis  voudrons 
nous  fourrer  trop  auat  en  telle*  imaginatios: 
■mut  cbcrcltoat  ce  ^uifft  icime  &  ffiîiidc>i]ue. 


nous  n'aillions  point  noiw  ietter  en  Peau: 
nous  ne  pouuons  .pas  nager,  à  grand'  peine 
pouuons-nous  marcher  fur  la  terre:  3i  quand 
nous  voudrons  nous  ietter  en  la  mer  ,  que  fe- 
ra-ce  ?  Sommes-nous  aiïèz  habiles  pour  itiiouï 
porter  fur  les  eaux?Ainfi, marchons  où  noftre 
Dieu  nous  a  afFermis,c'eft  à  dire, quand  il  nous 
a  moiirtré  le  chemin  par  fa  parole  ,  conten- 
tons-nous de  nous  tenir  là,  &  ne  nous  aduan- 
çons  point  plus  qu'il  ne  nous  permet ,  c'eft  i 
dire,que  nous  fuyuions  toufioiirs  fa  conduite 
quand  fa  vérité  nous  efclaire,  &  que  nous  de- 
meurions là  court ,  quand  il  ne  nous  a  poinc 
reuelé  ce  qu'il  a  cognu  eftre  inutile.  Or  il  y  a 
aufsi  l'autnorité  que  fainâ  Paul  recommande 
ici:caren  difant  à  Tite,  Q»'»'  afferme  Jit  cet 
chofef.'û  fignific'qu'/l  ne  flechilTe point  quand 
les  hommes  ne  voudront  point  eftre  tant  pref 
fe2,&  qu'ils  diront  qu'on  les  importune.Coin 
bien  donc  que  le  monde  foit  fafché  ,  ne  laille 
point  (dit-il)  d'aller  loufiours  ton  train.  Et 
ainfi  regardons  ce  qui  peut  édifier;  &  fur  tout 
aduifons  ce  que  noftre  Seigneur  nous  com- 
mande, &  dcquoy  il  veut  que  nous  foyons  re- 
folus,  &qi.ie  cela  foit  toufioutsconfermé  par 
nous,  &  que  nous  ayons  vneconftanceinuinci 
ble:& quand  on  tafcheradc  nous  diuertir.afin 
que  nous  n'enfcignions  pas  félon  que  noftre 
Seigneur  nous  l'a  couinûdé,  que  nous  tenions 
bon,  &que  nousanoncions  les  chofesqiii  font 
bennes  &vtilesaux  hommes. Et  par  cela  il  re 
monftreàceux  qui  ne  peuuent  fou/Frir  d'eftre 
bien  édifiez  pour  leur  falut.quelle  ingratitude 
c'eft,  quand  lisrcfufent  le  bien  que  Dieu  leur 
offre.  Car  fi  noftre  Seigneur  ne  parloitfinon 
déchoies  obfcures,  &  là  où  nous  nepeufsions 
mordre, il  y  auroit  occafion  de  fe  plaindre.cô- 
me  s'il  nous  amufoit  à  des  fpeculations  où  il 
nous  faluft  beaucoup  trauailler:&:  en  la  fin  que 
nous  ne  fccufsions  plusdcfquels  nous  ferions, 
&  que  nous  n'y  eufsions  nulle  vtilité:nous 
pourrions  là  nous  fafchcr.  Mais  quand  noftre 
Seigneur  condefcend  à  noilre  rudefle  ,&  qu'il 
nous  inft^uit  priuémcnt  ,  non  feulement  com- 
me vn  père  fcs  petis  cnfans  ,:mais  coinme  vne 
mère  nourrice  qui  begaye.afin  'qu'elle  foit  en- 
tendue par  celuy  qui  n'a  point  encores  bonne 
intelligence:quand,di-ie,Dieu  nous  fait  ccfte 
grâce,  &  puis  qu'ilnousenfeigneen  forte  que 
il  n'y  a  riendefuperflUiCn  fa  Parole;qu'il  n'y 
a  rien  dont  nous  ne  puifsiofts  reciieillir  bon 
fruid  pour  noftre  falut ,  quand  nous'  voyons 
cela,  ne  fijui-il  pas  que  nous  foyons  bien  déf- 
pourueiis-de  fens,A:  que  nous  ayons  vnénatu^ 
rr  par  tropperucrfe  fi  nous  n'en,  fçauons  fai- 
re noftre  profit  ?  Nocons  donc  que  faind  Paul 
d'vn  cofté monftre  aux  Pafteurs  de  l'Eglifc, 
qu'ils  ne  doyuent  ccrcher  ne  pompe,  ne  gloi- 
re quand  ils  font  leur  office,  &  qu'ils  ne  doy- 
uent -poiot  rfgardéree  qiii  ferl  plaifant,  &  ce 
qui  fera  mieuX'rNtu  ,  mais  ce  qui  féva  au  falut 
commun  de  toui.Et  cependant  »ufsi  ^ue  l«^  fi- 
4cle{<}uiTieacBtaafetinon^doytient  poiin 

i:hercher 


SVRfEPIST.     A    TITE. 


«ÎÎÇ 


cKerclier  qu'on  les  repaifle  felô  leur  phanta- 
fie.-caron  neleur  apportera  que  vent  fî  on  les 
teut  contenter  :  mais  qu'ils  regardent ,  Ceci 
m'eft  vtile  ,  il  faut  donc  que  ie  le  reçoyue.  Et 
cependant  aduifons  à  nous  ;  car  le  plus  fou- 
uent  nous  fommes  comme  des  malades  qui 
voudroyent  auoir  à  boire  quand  on  leur  doit 
donner  à  manger  ,  qui  voudroyent  eftre  re- 
muez quand  il  Faut  qu'ils  fe  tienent  tout  quois 
au  lift.  Ainfi  nous  voudrions  qu'on  fe  depor- 
taft  de  reprendre  nos  vices,&  ne  voulôs  point 
eftre  grattez  où  il  ne  nous  démange  point 
(comme  on  dit)fî  on  nous  folicite  à  bien  fai- 
re.nous  voudrions  eftre  efpargnez:fî  on  nous 
redargue,nout-nous  efchautfons  en  cholere: 
fi  on  nous  met  nos  tranfgrcfsions  en  auant, 
nous  grinçons  les  dents  ,&  voudrions  iamais 
n'en  ouir  parler.  Or  qu'vn  chacun  fe  ttene  fu- 
fpeft,&  que  nous  aduifîons  ce  qui  nous  eft  pro 
pre:non  point  à  noftre  fens,car  on  s'y  pourra 
abufer  tous  les  coups  :  mais  que  Dieu  en  foit 
iuge,  comme  c'eft  à  luyaul'si  qu'il  appartient 
d'en  prononcer.  Voila  pourquoy  fainft  Paul 
adioufte,Q»f  f«  chofcs  font  -vtiles  aitxhomi^es. 
Venons  maintenant  à  ce  qu'il  dit  des  que- 
ftions:E»iff  (dit«iI)/M  qutflions  felUs.Sous  ce 
mot  il  comprend  tout  ce  qui  ne  peut  finon  en- 
gendrer difputes  entre  nous.  Il  eH  vray  qu'il 
fe  faut  bien  enquérir  deuant  qu'auoir  vne  do- 
ârine  certaine  :&  on  dit  en  prouerbe  com- 
mun ,  qu'vn  fol  ne  doute  de  rien.  Non  fenle- 
niét  donc  il  nous  fera  licite  d'efmouuoir  que- 
ftion  pour  remédier  à  noftre  ignorance  ,  mais 
cela  eft  requis.  Etpourquoy  donc  eft-ceque 
fainft  Paul  met  ici  ce  mot  ,  comme  vne  chofe 
vicieufe?  Car  il  dit  i  Quefiiens  folles:  &  puis  il 
entend  (comme  i'ay  delîa  touché)  ce  qui  ne 
peut  finon  efmouuoir  débat  entre  nous. Car  fi 
ie  ne  ni'enquier  d'vne  chofe  qui  me  pourra  e- 
ftre  monftree  par  la  parole  de  Dieu,  &  que  ie 
reçoyue  d'va  efprit  docile  &  débonnaire  ce 
que  i'auray  entendu  ,  ce  n'eft  point  queftion 
(à  proprement  parler)que  cela.  Mais  fi  ie  me 
enquier  d'vne  chofe,&  puis  quand  on  m'a  re- 
fpodu.que  ie  réplique,  &  que  ce  ne  foit  iamais 
fait  de  toufîours  debatre  ,  voila  ce  que  fainft 
Paul  a  voulu  condamner  fous  ce  mot.  Comme 
nous  voyons  que  ceux  qui  fe  veulent  faire  va- 
loir ,  trauailleront  beaucoup  à  chercher  des 
chofesqui  ne  fe  peuuent  iamais  refoudre  :  ils 
voudront  prendre  quelque  but,  pour  dire,  Or 
ça, on  pourra  parler  de  ceci,on  en  pourra  trait 
ter  en  telle  forte:&  encores  qu'on  en  determi 
ne,  l'y  trouueray  toufipurs  quelque  réplique. 
Ceux  qui  prenent  plaifir  à  cela, font  d'vne  na- 
ture maligne. le  di ,  quand  il  eft  queftion  de  la 
lagefle  de  Dieu  ,  qu'il  veut  que  nous  foyons 
refolus.Et  puis  le  principal  eft  de  la  foy  &  de 
l'obeiflànce.  Et  nous  fçauons  aufsi  que  noftre 
Seigneur  veut  amener  nos  efprits  à  repos  ,  au 
lieu  que  no'  fommes  en  inquiétude  &  en  tour- 
ment,  iufques  à  ce  qu'il  nous  ait  monftré  le 
chemin  de  falut.  Puis  donc  que  l'intention  de 


Dieu  eft  telle.de  nous  réprimer  afin  que  nous 
n'ayons  plus  nos  efprits  agites  de  trouble, 
quand  de  propos  délibéré  soasamaflêrôs  de* 
qucftions,  ie  vous  prie,  n'eft-ce  point  reietter 
ce  bénéfice  incftimable  que  Dieu  nous  olfroit? 
Et  puis,n'eft-ce  pomt  prophaner  fa  fainûe  p* 
rôle  ,  quand  nous  en  voulons  faire  m  Aiietde 
caufes  &de combats?  Etpourtant  fainft  Paul 
pourmieuK  condamner  toutes  telles  façons,' 
jit  qu'il  n'y  a  que  folie.  Non  pas  que  cela  ap- 
paroifle:car  (comme  naus  auonsdit)ces  que- 
ftionnaires  qui  font  toufiours  fournis  de  pro-c 
pos&  de  quellions  nouuelles,  s'eftiment  biea 
fages.&penfent  auoir  acquis  vnebonne  repu- 
tationi&lenjonde  s'y  abufe, tellement  que  ce 
luy  qui  fçaura  le  mieux  babiller.eft  le  plus  pri- 
fé.Et  pourquoy  eft-ce  que  fainft  Paul  dit  que 
telles  queftions  font  toutes  folles  ?  Oi  il  ne 
prend  point  cefte  folie  félon  que  les  homes  en 
iugent.mais  tout  ce  qui  n'eft  point  vtile.il  l'ap 
pelle  fohe ,  il  l'appelle  friuole  &  fuperffu.  Et 
ainfi  ,  que  ces  dofteurs  fubtils  qui  efmeuuent 
beaucoup  de  difputes  ,  Ce  plaifent  tant  quMs 
voudrôt,&  qu'on  leurapplaudilTè  en  leurs  fpe 
culations  &  fubtilites  ,  Ç\  eft-ce  que  le  faind 
Elprit  pronôce  qu'ils  ne  font  que  fols  :  car  ils 
ne  tafchent  point  à  édifier  le  ptnple  de  Dieu, 
ils  ne  regardent  point  au  falut  de<:  âmes. Et  de 
faift  ,  fainft  Paul  adioufte  vne  efpece  qui  eft 
pour  exprimer  ce  qu'il  vouloitdire  :  Ceux  <jui 
s'amnfent  (dit-il)  aux  généalogies  ,  ne  font  que 
/(i/i.Car  il  yen  a  qui  veulétmoftrer  toute  leur 
fubtilité  à  pouuoir  raconter  combien  ily  a  eti 
d'enfans  en  vne  telle  maifon:&  après, comme 
les  races  ont  efté  departies.il  eft  vray  q  quel- 
que fois  il  fera  bien  requis  de  traitterles  ge» 
nealogies:mais  fi  faut-il  encores  y  garder  fo- 
brieté.  Ce  n'eft  point  fans  caufe  que  fainft 
Matthieu  &  fainft  Luc  nous  ont  recité  côme 
noftre  Seigneur  lefusChrift  eftoit  defcend» 
d'Abraham:mefmes  fainft  Luc  nous  meine  iuf 
ques  àAdï. Pourquoy?  Afin  que  nous  cognoif- 
fions  qu'il  eft  vray  homme:&  puis, la  femence 
fainfte  qui  eftoit  promife  à  Abrahâ:&  puis,  de 
laquelle  Dauid  a  eu  encores  reuelation  plus 
certaine  ,  quand  le  Royaume  a  efté  eftabli  en 
fa  main,  &  qu'il  luy  eft  dit  qu'il  feroit  perpé- 
tuel. Voila  donc  quelque  déclaration  des  gé- 
néalogies qui  eft  neceflaire^mais  nous  voyons 
en  quelle attrempance  y  vont  les  Euageliftes. 
Sainft  Luc  en  traitte  tellement,  que  c'eft  coin 
me  en  courat.afin  qu'6  ne  s'y  amufe  par  trop. 
Et  puis  fainft  Matthieu  met  là  trois  téps:cora 
me  s'il  difoit ,  C'eft  aflez  d'auoir  en  fournie  q 
noftre  Seigneur  lefus ,  qui  eft  nomme  Chrift, 
eftdcfcédudu  lignage  de  Dauid  &d'Abraha: 
en  forte  qu'il  fe  contente  de  fçauoir  que  c'eft 
le  Rédempteur  qui  a  efté  de  tout  temps  pro- 
mis aux  fainfts  Pères.  Nohs  voyons  donc  que 
le  fainft  Efprit  nous  tient  en  bride  ,  afin  que 
noui;  ne  vaguions  point  en  nos  queftions  fu- 
perflues.Ainfi  en  cefte  efpece  fainft  Paul  nous 
monftré  qu'il  nous  faut  tenir  à  ce  que  Dieu 

lli.  V. 


SE  RMON    XV IT. 


6X6 

noui  a  declaré.Et  pourquoyîCar  il  a  bien  co- 
gnuce  qui  nouseftoit  propre.Iladioufteaufsi 
Ittdtbats  (^  conttntions.  Car  il  eftimpol'sible 
<]uand  les  horanies  fe  veulent  monl>rer,qu'ir>- 
continent  le  feu  ne  s'allumetambicion  cmpor- 
K  toufiours  auec  foy  mille  debacs ,  quand  on 
s'adonne  â  difputes  :  comme  fainft  Paul  nous 
admonefte  aux  Philippiens.Et  pourtant  ,que 
nous  ne  foyons  point  adonnez  à  noftre  appé- 
tit,&  à  vne  vaine  gloire  ,  qu'vn  chacun  ne  re- 
garde point  de  furraonter  fon  compagnon: 
mais  que  nous  demandions  à  édifier  les  vns  les 
aucres:queceux  qui  ont  la  charge  d'enfeigncr 
s'y  employent  fidèlement ,  afin  d'auancer  les 
autres:qu'vn  chacun  difpéfe  ce  qui  luy  eft  don 
né  de  Dieu.qu'il  cômunique  ce  qui  luy  eft  de- 
parti, comme  membre  du  corps.  Quand  nous 
ferons  C€ls,il  eft  certain  qu'il  n'y  aura  point 
de  noife  entre  nous. Car  ce  n'cft  pas  aflez  d'o- 
béir à  la  vérité  :  en  demandant  que  Dieufoit 
Je  Maiftre.que  grans  &  petis  profitét  fous  luy: 
mais  quand  nous  auons  les  efprits  volages  ,  il 
faut  que  nous  portions  le  feu  auec  nous  ,  &  le 
diable  n'a  point  de  meilleurs  fuppofts  que 
ceux  qui  fe  veulent  faire  valoir,ce  font  les  pi- 
res pertes  du  monde.  S'il  y  a  vn  homme  glo- 
rieux .  encores  qu'il  ait  toutes  les  vertus  en 
foy  ,  il  vaudroit  mieux  qu'il  fuft  paillard ,  & 
yurongne,  quand  il  eft  queftipn  de  gouuerner 
J'Egliie  de  Dieu.  Car  vn  paillard  aura  ce  vice 
particulier  tn  foy:aut.ït  en  eft-ild'vn  yuron- 
gne. Mais  quand  vn  homme  ha  cefte  maudite 
afFeâion  de  fe  monftrex ,  &  de  fe  faire  valoir, 
il  faut  que  le  diable  règne  ,  il  faut  qu'il  y  ait 
vne  horrible  confufîon  ,  fi  Dieun''y  remédie 
par  fa  grande  bonté.  Voila  pourquoy  fainû 
Paul  ayan;  traitté  ie^  queftions  fuperflues,ad 
io'jfte  qu'il  nous  faut  aufsi  abftenir  de  tous 
débats  :  carce  font  chofes  qui  ne  fe  peuuent 
iamais  feparer.côme  nous  auons  dit. Or  main- 
tenant il  veut  q»e  Titefitycnihemme  hereti- 
me  ,  après  îauoir  admonefte  -vne  fois  oh  deux. 
Ceci  dépend  de  ce  que  nous  auons  défia  trait- 
té.Car  fi  nous  n'auons  ceft  aduertiflèment ,  il 
jious  fera  impofsible  de  prattiqucr  cefte  do- 
Arine  que  nous  auons  ouye.Pourquoy?Enco- 
res  queie  tafche  d'édifier  l'Eglife  r&quei'y 
applique  mon  eftiule  en  toute  fimplicité,  n 
n'eft-il  pas  en  moy  de  retenir  les  curieux  que 
ils  ne  s'efgarenr,&de  retenir  les  mutins  qu'ils 
n'efmeuiient  débats, &  qu'ils  ne  s'eleuent.Ain 
fi,  que  feray-ielà?  Sainéi  Paul  dit  qu'il  faut 
•ouper  broche  ,  s'il  y  en  a  qui  foyent  efmeus 
d'vnefprit  d'ambition  ,  qui  ayent  cefte  con- 
uoitife  dcfe  faire  valoir.  Il  eft  vray  qu'il  n'y 
aura  iamais  fin,(ï  on  les  veut  croire-.qu'encore 
qu'on  leur  ait  fermé  la  bouche  ,  ils  ne  lailTe- 
ront  point  de  répliquer  comme  gens  effron- 
tez:  S;  on  le  voit  par  expérience.  Mais  enco- 
res  n'cft-ce  point  le  remède  qu'on  les  laifle 
Li,?;  qu'on  les  reiette,&  que  nul  ne  leur  tiene 
propos.  N)us  voyons  maintenant  quelle  liai-; 
ion  rl^  y  a.de  cefte  donnas  auec  ce  que  nous 


auons  expo fé. Mais  encores  faut -il  mieux  dé- 
clarer combien  cefte  difcretion  eftoit  neeef- 
faire.  Caries  feruiteurs  de  Dieu  font  tentez 
quand  on  les  attire,maugré  qu'ils  en  ayent,en 
débat:  ilsfont(di-ie)tente2,  àfuyurefes  que- 
ftions.Il  eft  vray  que  fi  c'eftoità  eux  à  choifîr, 
ils  fe  voudroyent  oscuper  à  déclarer  la  vo- 
lonté de  Dieu  ,  à  monftrer  fîmpleraent  ce  qui 
eft  bon  &  V  tile  pour  le  falut  de  tous  :mais  quad 
on  ne  le  foutfrc  point ,  &  qu'on  les  picque,  & 
qu'on  leur  fait  hontc.fînon  qu'ils  refpôdent, 
&bicn,ilya  là  excufe  legitime.quand  ils  font 
ainfi  forcez.  Or  tant  y  a  qu'il  ne  faut  point 
qu'ils  en  foyent  esbranlez  ,  (dit  fainâ  Paul.) 
Notons  bien  donc  que  ce  n'eft  point  fans'cau- 
fe  qu'il  a  aduerti  Tite  de  laifler  vn  homme  he 
retique.  Et  pourquoy'Car  le  diable  eft  touf- 
iours  preft  de  nous  fuficiter  gens  qui  nous  de- 
ftûurnent  de  noftre office,qui  viendront  nous 
picquer,  afin  que  nous  n'ayons  loifird'enfei- 
gner  le  peuple, &  l'édifier  ielon  qu'il  en  ha  be 
foin.  Quand  nous  aurons  l'Efcriturefainfte, 
que  nous  demanderas  de  la  traitter  purcmét, 
&  àl'vtilité  d'vn  chacun  ,  voila  le  diable  qui 
nous  fermera  la  porte,  &  nous  viédra  fufciter 
des  brouillons  qui  nous  deftourneront  de  ce 
qui  eftoit  bon  &  propre.  Or  fi  nous  auons  cela 
ainfi  accouftumédu  tout,que  fera-ce?Tous  les 
iours  répliques  nouuelles,  tous  les  ioursnou- 
ueaux  propos  :  &  ainfi  la  vérité  de  Dieu  fera 
obfcurcie.  Pour  cefte  caufe  aduifons  à  fuyure 
ce  qui  nous  eft  ici  c5mandé,c'eft  de  laifler  les 
hérétiques ,  après  lesauoir  adinoneftezdeujt 
ou  trois  fois.Or  S.Paul  prefuppofe  qu'il  faut 
auoir  cognu  l'herefiqucdeuât  que  le  rcietten 
Car  que  fera-ce  fi  à  tous  propos  nous  voulôs 
condamner  ce  qui  ne  oousviendra  point  à  gré? 
Il  faut  qu'il  y  ait  ici  difcretion.  Et  ainfi  no- 
tons qu'en  parlant  d'vn  homme  hérétique  ,  il 
marque  tous  ceux  qui  ne  fe  peuuent  accorder 
à  la  vérité  de  Dieu,&qui  fefeparentde  rvniô 
de  la  foy,  &  qui  font  trouble  en  l'Eglife.  Car 
nous  oyons  ce  qu'il  dit  aur  Philippiens  ,  q'ue 
les  fidèles  feront  bien  en  débat  de  quelque  ar- 
ticle, &  qu'ils  ne  pourront  point  cofentir  en- 
femble  en  tout  &  par  toutrmais  alors  ils  doy- 
uent  vfer  de  modeftie ,  &  nourrir  paix  &  con- 
corde, iufques  â  ce  que  Dieu  leur  ait  reuelé  ce 
qui  ne  leur  eft  point  eogiiu.Nous  ne  pouuons 
pas  donc  fçauoir  toutes  chofes:rvn  marchera 
beaucoup  plus  auant  que  ne  feront  pas  les  au- 
tres.Et  ccluy  qui  eft  le  plus  adiiancémefprife 
ra-ille  refte.d'autant  qu'il  en  fçaitplus?(5coù 
feroit-ce.iUer?  Mefmesil  aduicdra  que  celuy 
qui  eft  le  mieux  exercé  en  l'Eicnture  fainâe* 
&  auquel  Dieu  a  reuelé  beaucoup  de  fes  fe- 
crets, quant  à  vn  article  fera  ignorant.  Ainfi  il 
nousfaut  fiippnrter  en  cel^  endroit. Tous  ceux 
donc  qui  n'accorderont  point  auec  nous, ne  fe 
roiit  pas  condamnez  pour  hérétiques,  mais  ce 
font  ceux  q  l'e  bandét  cotre  la  venté  de  Dieu, 
&qui  fedcllournent  des  principes  de  noftre 
foy,&  ds  <^^  T*'"  appelle  kfubûâcc  de  noftre 

Chrc 


s  V  R  r  E  P  I  s  T.    A   T  I  T  Ë. 


<if 


Chreftienté  :  &  par  ce  moyen  Teparenc  les 
gens  d^auec  le  corps  de  noftrc  Seigneus  lefus 
Chrift.  Ceux  donc  qui  diftipent  ainfi  l'iEglile, 
&  qui  troublée  l'édifice  de  Dien,  ceux-là  font 
nommez  hérétiques  en  cepaflage  .  Or  quand 
fatnâ  Paul  dit  qu'il  les  faut  admonefler,  il  ne 
parle  point  feulement  des  admonitions  pri- 
uees  qu'on  pourroit  faire  :  mais  il  entend  que 
ils  foyent  redarguez  viuement,&conuaincus. 
Comme  maintenant  fi  vn  homme  a  quelque  er 
reur,  il  ne  fera  point  hérétique  encores  qu'il 
ait  erré  :  iedi  combien  que  la  fauDe  foitbien 
lourde,s'il  y  a  eu  quelque  inaduertence.il  fera 
bien  redargué .  Il  eft  vrayquela  cheuteeft 
lourde ,  &  ne  faut  pas  qu'il  s'y  plaife  :  mais 
quoy  qu'il  en  foit.ce  n'elt  pas  herefie,où  il  ne 
y  a  point  de  rébellion  ,&  là  où  aufsi  vn  hom- 
me ne  fe  fepare  point  de  l'vnion  des  fidèles: 
car  il  faut  qu'il  y  ait  fede, quand  il  eft  queftion 
d'herefie.  Puis  donc  qu'ainfi  eft,  notons  que 
quand  vn  homme  feraadiierti  en  priuc  ,  qu'il 
n'eft  pas  hérétique  en  cela  :  mais  fi  vn  homme 
s'opiniaftre  ,  &  qu'on  ne  puifle  cheuir  de  luy, 
alors  il  faut  venir  en  cognoiiTancepublique  & 
légitime.  Car  voila  que  c'cft  des  admonitions 
dont  faind  Paul  parle  ici.Q_u_and  donc  on  au- 
ra trauailié  pour  gagner  va  homme,  &  qu'on 
TOit  qu'il  s'enuenime  tant  plus,  &  qu'il  defpi- 
ic  Dieu  manifcftement,  &  qu'il  ne  demande 
qu'à  troubler  rEglife.qu'il  y  va  en  malice, co- 
gnoiflbns  que  voila  vn  hérétique  defefperé. 
Pour  ceftecaufe  iladioufte,  V»  tel  homme  efl 
mint.ll  prend  lafimilitude  d'vn  édifice  qui  fe 
ra  du  tout  abbatu.S'il  y  a  quelque  vice  en  vne 
maifon,5c  bien, on  repare  ce  vice-la  :  fi  le  toift 
eft  defcouuert ,  s'il  y  a  quelque  paroy  où  il  y 
ait  des  creuafles,on  y  remédie,  on  le  reftaure, 
&le  remet-on  en  quelque  eftat:  mais  quand 
c'en  eft  fait,que  gagnera-on  ?  fi  on  veut  s'y  a- 
mufer  ,  on  ne  fera  qu'augmenter  les  ruines. 
Sâinft  Paul  dit  qu'vn  homme  qui  n'a  point  de 
crainte  de  Dieu.cft  ruiné. Et  de  faift.fi  m  hoin 
me  erre  en  quelque  chofe,  moyennant  qu'il  re 
tiene  toufiours  quelque  racine  de  la  crainte 
de  Dieu,  on  le  réduira  à  la  longue .  Et  l'expé- 
rience le  monftre  de  ceux  qui  font  efgare»  en 
leurs  phantafies:  tellement  que  cela  fe  trouue- 
ra  toufiours  vray  à  la  prattique.que  fi  vn  hom 
me  eftabbruué  de  quelque  faulTe  opinion,  s'il 
a  quelque  crainte  de  Dieu,  on  le  réduira  en  la 
fin^  car  le  fondement  demeure,  &  le  baftiment 
fe  peut  faire  li  deffus .  Mais  quand  vn  homme 
fait  de  l'enragé  contre  Dieu.que  fon  ambition 
diabolique  le  tranfporte,que  profitera-on  làî 
Il  faut  donc  diligemment  obferuer  &  difcer- 
ner  fi  vn  homme  eft  ruiné, ou  non. Et  cément? 
Quand  âpres  l'auoir  enfeigné  doucement,  on 
l'amené  dcuant  l'Eglife  comme  s'il  elloit  en 
la  prelence  de  Dieu,  &  que  làxin  l'admonefte, 
&  qu'il  eft  corrigé, que  s'il  eft  endurci, &  qu'il 
ait  vn  efprit  d'amertume  (  comme  l'Elcriture 
en  parle  )  pour  ne  rien  receuoir  de  ce  qu'on 
luy  dit,  alors  il  n'y  a  plus  que  ruine ,  on  co- 


gBoift  qu'il  n'y  a  plus  rien  for  quoy  on  puiife 
baftir.Et  pourquoy  ?  Pource  qu'il  n'y  a  point 
de  fondement  de  crainte  de  Dieu, Voila  donc 
en  fomme  ce  que  fain6l  Paul  a  entendu  en  ce 
pailàge.  Or  fi  ceux  qui  ont  la  charge  &  office 
d'anoncer  la  parole  de  Dieu,  font  admoncftez 
de  fuir  les  keretiqnes,  notons  que  ceci  appar- 
tient aufsi  à  tout  le  corps  de  l'Eglife. Car  fi  va 
homme  particulier  s'oppofe  à  vn  hérétique, 
que  fera-il  >  Il  eft  vray  qu'il  doit  tafcher  de  le 
amener  à  Dicu,entant  qu'il  luy  fera  pofsible: 
s'il  y  a  vne  brebis  efgaree,  illa  faut  ramener 
au  troupeau.  Voire,  raai^s'ilyavn  ioupil'a- 
menera-on  au  troupeau  pour  tout  d>fsiper? 
hreft-ce  point  fe  mocquer  de  Dieu  ,  quand 
beaucoup  diront  (comme  on  le  voit  )  Et  c'eft 
vne  poure  brebis  efgaree, il  la  faut  réduire.  Ec 
on  voit  que  c'eft  vn  loup  ,  roire  vn  diable  qui 
ne  demande  finon  à  tout  peruertir  :  &  cepen- 
dant qu'on  face  femblant  de  rien  U  deflîis? 
Voulons-nous  eftre  plus  fages  que  Dieu?Or  fi 
nous  n'y  entendons,  noftre  Seigneur  fe  ven- 
gera de  noftre  nonchalance,  &  ferons eriue- 
loppez  en  vne  mefme  condamnation .  Voila 
que  gagnent  ceux  qui  veulent  palTer  leirs  bor 
nés .  Or  s'il  n'eft  point  licite  de  fe  fourrer 
trop  auant  pour  gagner  les  hérétiques, quand 
on  voit  qu'ils  font  defefperez,  que  fera-ce  de 
les  teceuoir  en  fa  maifon,  de  les  nourrir,  &  de 
leur  monftrer  plus  de  familiarité  que  fi  on  e- 
ftoit  leur  coufin,  ou  leur  frère  ?  que  ceux  qui 
font  en  eftat  de  iuftice  ,  qui  deuroyent  em- 
ployer leur  puiflance  àpunii-  &  repouflerleï 
heretiques,Iesmaintiendront  àcor  Scàcri?  Et 
puis  ils  viendront  ici  impudemmentmonftrer 
qu'ils  defpitent  Dieu  en  tout  &  par  tout. Voi- 
la vn  homme  qui  aura  authorué  en  vne  poli- 
ce :  &  bien,  il  veut  eftre  tenu  bon  fuppoft  de 
l'Euangile,  il  viendra  receuoir  la  Cène  de  no- 
ftre Seigneur  lefus  Chrift.  Voila  vn  ludasrcar 
tu  as  les  hérétiques  qui  ont  pcruerti  la  doftri 
ne  de  Dieu,  tu  les  reçois,  tuleurfauorifes.  Et 
qu'en  aduiendra-il,  finon  que  tout  fera  infe- 
ôé,&  que  tout  viendra  en  defolation?  Voila 
donc  à  quoy  il  nous  faut  appliquer  ce  paflàge 
de  fainft  Paul, quand  il  moniire  qu'vn  héréti- 
que, après  qu'il  aura  efté  ainfi  admonefté  com 
menons  auons  veu  ,  &  qu'auec  proteftations 
folennelles,  &  comme  en  la  prefence  de  Dieu 
on  luy  aura  rcmonftré  ,  s'il  demeure  obftiné, 
qu'il  le  faut  fuir  comme  vne  pefte  mortelle,  & 
qu'il  ne  faut  point  qu'on  dife.  Et  quoy  ?  l'E- 
glife ne  reçoit-elle  pas  les  hommes  à  pitié, 
quand  ils  croyent  &  qu'ils  fe  repentent  ?  Ouy 
bien  :  mais  quand  on  en  voit  aufquels  Dieu  a 
fermé  la  bouche  Se  le  cœur,  qu'ils  ne  font  que 
blafphemer,  pluftoft  que  de  monftrer  quel- 
que figne  de  repentance,faut-il  retirer  ceux- 
là  au  troupeau?Or  nous  fçauons  quel  eft  l'of- 
fice des  vrais  miniftres  de  l'Euangile  :  il  ne 
faut  pas  feulement  qu'ils  ayent  vne  voix  dou- 
ce &  amiable  pour  attirer  au  troupeau  ceux 
qui  fe  rendent  déciles,  &  qui  loufFrenc  d'eftre 


6li 


SERMON  xvri. 


t 


enfeignee  :  maïs  il  faut  qu'ils  dechaflent  les 
loups  &  les  larrons, ils  Joyuent  auoir  vne  voix 
pour  crier  contre  tous  ceux  qui  difsipent  le 
troupeau .  Voila  donc  à  quoy  fe  doyuent  em- 
ployer les  feruiteurs  deDieu,  s'ils  veulent  e- 
xercer  leur  office  .  Or  cependant  lainft  Paul 
dit  pour  conclure  ,  Que  les  uojhes  af gênent  à 
eftre  excellem  en  bonnes  auures-.comfae  il  auoit 
dit  auparauant,  qu'ils  y  appliquent  leur  eftu- 
de.  11  oppofe  ceci  àcefte  folle  outrecuidance 
ui  eftoit  en  beaucoup,  lefquelspenfoyent  e- 
:re  habiles  gens  quand  ils  auoyent  fpeculé  çà 
&là.  Ho.vous  auez,  dit-il,  de  belles  fpecula- 
cions  :  mais  cependant  aduifez  quelle  eft  la 
droite  excellence  des  enfans  de  Dieu:  c'eft  de 
œonllrer  qu'Us  ont  bien  profité  pour  bien  fai 
re,&  que  c'eft  là  où  ils  appliquent  leur  eftude. 
Et  puis  il  dit,  Qk'<Vj  apfrenenf.comme  s'ildi- 
foitjlufqucs  ici  vous  aucz  mal  employé  voftre 
temps.car  il  n'y  a  eu  que  folle  ambition.vous- 
vous  elles  par  trop  arreftez  à  voftre  vaine 
phantafie:il  faut  que  maintenant  vous  fuyuiez 
vn  autre  train  ,  c'eft  que  d'orefenauant  vous 
foyez  excellens  à  bien  faire,&  non  point  à  ba- 
biller :  que  cefte  curiofité  &  ambition  de  vous 
faire  valoir.n'ait  plus  de  lieu  entre  vous,  mais 
qii'vn  chacun  s'employe  à  feruir  à  fes  pro- 
chains. Il  appelle  les  bonnes  œuures ,  tant  les 
aumolnes ,  qu'autre  aides  que  nous  auons  fai- 
tes à  ceux  qui  ont  faute  de  nous .  Or  appre- 
nons de  nous  addonner  là  :  &  fi  iufques  ici 
nous  y  auons  efté  tardifs  &nonchaIans,&mer 
mes  que  nous  ayons  trop  reffcmblé  à  ceux  auf 


qnels  fainft  Paul  parle.que  d'orefenauat  nous 
cognoifsions  que  noftre  Seigneur  nous  tient 
en  fon  efchole  ,  afin  que  quand  il  nous  aura 
monftréla  grace,nousloyons  rauis  après  luy, 
&  y  foyons  rauis  en  telle  forte.que  cependant 
nous  ne  demandions  qu'à  communiquer  auec 
nos  prochains.  Et  qu'vn  chacun  regarde  quel 
le  eft  fa  faculté  :  Se  félon  le  pouuoir  que  Dieu 
nous  donne  ,  que  nous  feruions  tous  les  vos 
aux  autres .  Voila  comme  nous  monftrerons 
que  ce  n'cftpoint  en  vainquenousauons  re- 
ceul'Euangile. 

O  R  nous-nous  profternerons  deuant  la 
face  de  noftre  bon  Dieu  en  cognoiflance  de 
nos  fautes,  le  prians  qu'il  nous  les  face  mieux 
fentir  que  nous  n'auons  point  fait,  &  qu'il  ne 
permette  point  que  nous  abufions  de  fa  fâin-» 
fte  doârine ,  5^  qu'elle  foit  prophanee  par 
nous ,  que  nous  ne  la  prenions  point  tout  au 
rebours  que  fon  intention  n'eft,mais  qae  nous 
en  foyons  édifiez  en  la  foy  de  lefus  ChiLft,a- 
fin  de  nous  arrcftcr  pleinement  à  luy  ,&  de 
nous  exercer  en  prières  &  oraifons.  Et  que  ce 
pendant  aiifsi  toute  noftre  vie  s'addonne  à 
bien  faire  ,  &  aider  à  nos  prochains,  &  que  de 
plus  en  plus  nous  apprenions  de  nous  confer- 
mer  en  la  grâce  de  noftre  adoption,  laquelle 
Dieu  nous  déclare  tous  les  iours  ,  &  qu'eftans 
frères  les  vns  enuers  les  autres  ,  nous  le  fen-i 
lions  noftre  Pere,&  qu'il  nous  recueille  &  ad- 
uoue  pour  fes  enfans .  Q^e  non  feulement  il 
nous  face  cefte  grâce  ,  mais  aufsi  à  tous  peu- 
ples &  nations  de  la  terre>&c. 


LOVE     SOIT    DIEV. 


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